^HI\ipGJSCHEiiiBUO ThuiK rcckr;, .aü Prof Ci |. J. SALVEfc JA OE GRaVE. K/&£\»£JCj LTR Pro?. Dr JO.S.'SCyjM7NhN, PréfJ Dr. K. SNtYD^>^ r»f • ' VCC'EL -til. Pip,. D/i-.-A o H SWaEN ■ |i S tjc ret a r i s d e r ;t e d a (ft 1 e Kt R. GALLAS1.: ï «■ K. EL jtl Lp ; _ J ' " " 1§P " " 'ö' -K?"IN ,UE LA |§É| SYNTAXE HISTORIQUE DU FRANQAIS NEOPHILOLOGISCHE BIBLIOTHEEK Onder Redaktie van Prof. Dr. J. J. SALVERDA DE GRAVE, K. R. GALLAS, Prof. Dr. A. G. VAN HAMEL, Prof. Dr. D. C. HESSELING, Prof. J. H. SCHOLTE, Prof. Dr. JOS. SCHRIJNEN, Prof. Dr. K. SNEYDERS DE VOGEL, Prof. Dr. A. E. H. SWAEN Sekretaris der redaktie K. R. GALLAS SYNTAXE HISTORIQUE DU FRANCAIS PAR Dr. K. SNEYDERS DE VOGEL PROFESSEOR A L'UNIVERSITE DE GRONINGUE DEUXIÈME ÉDITION REVUE ET AUGMENTÉE Ing. f7,90 Geb. • 8,90 LIBRAIRIE J.-B. WOLTERS — GRONINGUE, LA HAYE, 1927 BOEKDRUKKERIJ VAN J. B. WOLTERS AVANT-PROPOS Cette syntaxe est destinée en premier lieu a ceux qui étudient le frangais. En la composant, nous avons surtout pensé k nos propres élèves et aux candidats qui veulent se présenter aux examens secondaires de francais, diplome B. Nous espérons pourtant que d'autres aussi, notamment ceux parmi les étudiarits ou professeurs de latin qui voudraient savoir ce que le latin est devenu après 1'époque classique, pourront en tirer quelque profit. En effet, nous avons toujours pris comme point de départ le latin, et nous avons, du moins pour les phénomènes les plus importants, essayé de suivre 1'évolution de la langue a travers le latin postclassique, Tanden francais, 1'époque de la Renaissance et le xvne siècle jusqu'a nos jours. II est bien entendu qu'une grammaire historique a un autre but qu'une grammaire descriptive; il faut distinguer la langue évolutive de la. langue statique, comme dirait de Saussure: la grammaire descriptive veut donner une image de la langue telle qu'elle est a un moment donné, soit au xne, soit au xxe siècle; il s'agit pour elle de bien délimiter la syntaxe vis-a-vis d'autres disciplines, telles que la stylistique, la morphologie, la sémasiologie, 1'étymologie, et c'est la un travail trés délicat et qu'on n'a pas toujours exécuté avec tout le. so%/.et. toute la préparation nécessaires. Pour la syjrtaxejistorique, il n'est f>as possible, et pas même désirable, de laisser de cöté tout ce qui n'appartient pas, au sens strict du mot, a la syntaxe proprement dite. En effet, 1'intérêt de cette étude consiste précisément k constater qu'a chaque iagjgnt les divisions qu'on a établies s'effacent, que ce qui était une possibilité de la langue devient une règle fixe, que ce qui était du domaine de la stylistique passé a celui de la grammaire, qu'une règle rythmique se change en règle syntaxique, que la morphologie et la syntaxe s'éclairent mutuellement — d'ailleurs quand on décline un substantif ou qu'on conjugue un verbe, est-ce qu'on n'énumère pas les formes d'après leur fonction grammaticale? —, enfin, que c'est grace k leur emploi dans la phrase que des conjonctions et des adverbes par exemple prennent tel ou tel sens (pensons au sens négatif de pas, k la fonction prépositionnejle de vu, etc), ce qui prouve que la sémasiologie n'est pas séparée par une cloison étanche de la syntaxe. La grammaire historique se sert des éléments que lui fournit la grammaire descriptive, elle doit montrer comment ces faits s'expliquent par un état antérieur, comment 1'évolution de la langue marche plus vite dans tel cas que dans tel autre et que, dans une expression beaucoup employee, une forme, une tournure, une fonction se maintiennent plus longtemps que la oü les éléments composants sont moins intimement liés. VI AVANT-PROPOS Et ainsi la formation des mots et des groupes de mots entre aussi parfois dans 1'étude de la syntaxe historique. Pourtant, il ne faut pas exagérer. Si les rapports que nous avons cités existent entre la syntaxe et les autres branches linguistiques — nous aurions dü citer aussi la psychologie de la parole et la géographie linguistique —, s'il est instructif de constater combien les divisions grammaticales sont artificielles, on ne saurait s'en passer; notre esprit a besoin de mettre des bornes, il ne saurait embrasser la vaste matière que par fragments. II faut donc avoir soin de ne pas tout mêler et de ne recourir aux autres branches linguistiques qu'en tant qu'elles sont nécessaires pour 1'explication des phénomènes syntaxiques.Voila pourquoi nous n'avons pas consacré un chapitre k part aux interjections bu aux adverbes; comme ces derniers se confondent souvent avëc les prépositions et les conjonctions, il en sera parlé dans le chapitre consacré a ces particules. Les considérations qui précédent expliquent pourquoi il nous a semblé inutile d'essayer d'établir de nouvelles distinctions; nous avons cru, pour la clarté de notre exposé, pouvoir adopter la diyision ordinaire en substantifs, adjectifs, pronoms, etc, chose inadmissible s'il s'agissait d'une grammaire descriptive qui aurait la prétention d'être scientifique. Nous n'avions pas k donner une idéé nette ni de la syntaxe du latin classique ni de oelle du francais moderne; c'est a la grammaire descriptive de le faire. D'ailleurs, il est bien entendu qu'on ne saurait entreprendre 1'étude de la langue francaise sans en savoir le point de départ et le point [d'arrivée; tous ceux qui aborderont la syntaxe historique doivent non seulement avoir étudié la grammaire du francais moderne et oelle du I latin classique, mais posséder en outre une connaissance profonde de ces deux idiomes et de vastes lectures qui, seules, pourront les mettre k même de tirer tout le profit désirable d'une histoire de la syntaxe franchise. Aussi n'avons-nous pas négligé ces deux points importants de 1'évolution; nous sommes même souvent remonté plus haut, quand le latin classique ne nous semblait pas représenter le vrai état de la langue et que le latin de Plaute nous semblait marquer plus nettement la direction dans laquelle évoluait la langue. D'autre part nous n'aurions pu négliger impunément le francais moderne, le point d'aboutissement de 1'évolution et qui est lui-même en pleine évolution, et nous avons notamment prêté une attention toute particuliere k la langue populaire en tant qu'elle intéressait la syntaxe, puisant parfois a l'Attas linguistique, cette mine si riche. k différents points de vue. Enfin, le francais n'étant pas la seule forme sous laquelle le latin se présente aujourd'hui, nous avons dans les notes cité souvent les autres langues romanes. Nous n'avons pas besoin de dire que, dans un travail comme le présent livre, 1'élément personnel doit être bien réduit. Nous avons ajouté en note'a chaque chapitre les principaux livres consacrés au sujet, auxquels celui qui voudrait approfondir telle partie de la syntaxe pourrait recourir. II y a pöurtant quelques livres qui auraient dü, pour ainsi dire, être cités k chaque page. Ce sont, pour le latin, le beau commentaire de AVANT-PROPOS vn Löfstedt1) et 1'étude approfondie de Bonnet2) sur Orégoire de Tours, pour le francais, la syntaxe du xvne siècle de Haase3), les Mélanges de Tobler*), si fins et si suggestifs,' enfin et surtout les cinq beaux volumes de M. Brunot5). Les juges compétents verront combien nous devons a ces savants. Nous ne voulons pas non plus oublier nos étudiants avec qui, depuis plusieurs années, nous avons traité différents points de la syntaxe et a qui nous devons plus d'une observation judicieuse. Les exemples, nous les avons pris un peü partout, tantöt dans nos propres lectures, tantót dans les études spéciales, citées plus haut. Afin de rendre service aux élèves k qui le livre est destiné plus pairticulièrement, nous avons souvent choisi nos exemples dans les textes qu'ils ont entre les mains, surtout la Chanson de -Roland, 1'anthologie de Clédat (citée Clédat)G) et celle de Darmesteter et Hatzfeld (citée Darm.)''). Nous espérons que cela les amènera a contröler les références et k les lire dans leur contexte, paree qu'on ine saurait répéter assez souvent que la syntaxe, historique ou descriptive, n'est pas une série de régies, illustrées par des phrases détachées, mais un ensemble de constatations faites sur la langue vivante et sur les textes, et que, pour bien comprendre une phrase, il faut souvent la mettre en rapport avec ce qui précède ou ce qui suit8). Nous n'avons pas encore avoué toutes nos dettes. Nous nous faisons un plaisir de reconnaftre tout ce que nous devons k M. Emile Boulan, maitre de conférences k TJJniversité de Qroningue, et k M. K- R- Gallas, privaat-docent k 1'Université d'Amsterdam et secrétaire de la rédaction de Neophilologus, qui m'ont été d'un appui inappréciable dans la correction des épreuves. M. Salverda de Orave, professeur k 1'Université de Groningue, a droit k toute notre gratitude, paree que, en lisant et en corrigeant les épreuves, il nous a fait plusieurs judicieuses remarques, dont nous avons pu profiter pour améliorer notre travail. x) Philologischer Kommentar zur Peregrinatio Aetheriae, Uppsala, 1911. 8) Le latin de Grégoire de Tours, these Paris, 1890. s) Syntaxe francaise du XVII' siècle, trad. p. M. Obert, Paris, Picard. *) Vermischte Beitrüge zur franz. Granunatik, 5 séries. Leipzig, Hirzel. Pour la première série nous nous sommes servi de la traduction francaise: Tobler, Mélanges de grammaire francaise, traduits par M. Kuttner, Paris, Picard. ö Histoire de la langue francaise des origines a 1900, Paris, Colin. •) Morceaux choisis des auteurs francais du mogen Age, Paris, Garnier. D est vrai que ce livre ne présente pas des textes irréprochables, mais cela n'entraine pas d'inconvénient pour les études de syntaxe. 7) Morceaux choisis des écrioains du XVIe siècle, Paris, Delagrave. 8) Citons encore P. Horluc et G. Marinet, Bibliographie de la sgntaxe du francais, 1840—1905 (Annales de 1'Université de Lgon, Nouv. série, fase. 20), Lyon, 1908; puis pour le seizième siècle E. Huguet, Etude sur la sgntaxe de Rabelais, thèse Paris, 1894, et pour 1'époque moderne Ph. Plattmer, Ansführliche Grammatik der französischen Sprache, 5 vol., Bielefeld, Freiburg. VIII avant-propos Puisse ce livre rendre quelque service a ceux qui désireraient mieux connaitre 1'histoire de cette belle langue francaise, qu'on ne peut étudier sans 1'aimer toujours davantage. Leiden, décembre 1918. K. S. d. V. PRÉFACE POUR LA SECONDE ÉDITION Ces dernières années les études syntaxiques ont attiré de plus en plus 1'attention des savants: de nombreuses monographies et des travaux d'ensemble ont paru; des points de détail ont été précisés; des questions de principe ont été posées et discutées, souvent avec passion; et un travail comme le nótre, quelque modeste qu'il soit, ne saurait s'en désintéresser impunément. D'autre part, puisqu'il s'agit d'une seconde édition d'un livre qui, malgré ses faiblesses, a prouvé son droit a 1'existence, nous avons tenu k garder 1'économie du plan et a ne pas grossir trop le volume par des discussions intéressantes sans doute, mais étrangères a 1'esprit du livre; nous avons surtout apporté des corrections de détail et complété les indicaüonsbjWiojjapJüa^es; si Ton compare cette édition avec la premiereT^n^cönstatera qu'il y a , relativement peu de pages qui n'aient pas subi quelque changement si ï léger qu'il soit. Telle qu'elle est, nous espérons que cette nouvelle édition" pourra rendre quelque service a ceux qui voudraient s'initier a Tétude de la syntaxe historique du francais et qu'elle les amènera a regarder de plus prés les questions qu'on n'a fait qu'effleurer ici et a prendre connaissance des beaux travaux qui ont paru dans notre pays comme k Tétranger. Nous ne voulons pas terminer cette préface sans exprimer notre profonde reconnaissance envers M. Salverda de Orave, professeur k 1'Université d'Amsterdam, et M. Fehr, professeur au. lycée classique d'Amsterdam, qui en nous envoyant une série d'intéressantes observations, nous ont permis de corriger et d'améliorer plusieurs passages. Nous tendns a remercier aussi notre élève M. van der Weel, professeur k Warffum, de ce qu'il a bfbi voulu nous aider dans la correction des épreuves. Groningen, septembre 1926. K- S. d. V. CHAPITRE I LE SUBSTANTIF Röie du 1. Le röle du substantif dans la phrase est des substantit. pius importants. Ü Par rapport au verbe, il fonctionne comme sujet, complément, direct ou indirect, il indique le m o y e n, 1'instrument, le lieu, et plusieurs autres rapports adverbiaux. II. Par rapport a un autre substantif, il exprime une idéé possessive, partitive, objective ou subjective, il forme une apposition ou bien il exprime une q u a 1 i t é et a donc le röle d'un adjectif. III. II peut se combiner avec plusieurs autres mots: a r t i c 1 e s, noms de nombre, adjectifs, pronoms. IV. II peut dépendre d'un adjectif ou d'un adverbe. V. Enfin, le substantif possède des moyens pour exprimer 1'idée depluralitéetdegenre: — victor — victores — victrix. C'est, au fond, une question de morphologie, mais qui, nous le verrons, a touché aussi a. la syntaxe.!) 2. Une partie de ces rapnprts, le latin les exprime PréposiHons. \ . . ,. . . ,.. par des terminaisons flexionnelles, mais puisqu il n'en a que six, il est incapable de les rendre tous de cette facon; il a donc eu recours a un autre moyen, c.-a-d. aux prépositions. Le latin a notamment employé les prépositions (a cóté de 1'ablatif) pour exprimer deux cas qui, en latin préhistorique, étaient encore exprimés par des terminaisons, c'est-a-dire le locativus et 1'instrumentalis. Cette tendance a remplacer les terminaisons par des prépositions s'est développée de plus en plus, au point i) Cf. §§ 5 et 11. 2 SUBSTANTIF qu'en vieux francais la déclinaison des substantifs n'a que deux cas et que la langue moderne ne connait même plus les terminaisons flexionnelles. Nous aurions donc dü, dans la syntaxe du substantif, consacrer un paragraphe — et un paragfaphe important — a ce phénomène. Nous préférons pourtant le traiter dans un chapitre spécial1). Relevons pourtant que le substantif seul peut encore remplir plusieurs fonctions dans la phrase. II est employé non seulement comme sujet, complément direct, prédicat, apposition ou vocatif, mais encore dans différents rapports adverbiaux dont nous citons: 1) temps: Ce soir, ils s'arrêtèrent d Niort; — 2) durée: ils ont mare hé deux heures; — 3) lieu: Je demeure rue Richelieu; — 4) mesure et prix: le paquet pèse deux kilos; j'ai acheté la maison dix mille florins; — 5) exclamation: Ah! le joli bouquet! On voit donc que, dans plusieurs cas, le contexte seul suffit a nous éclaircir sur la fonction que le substantif remplit dans la phrase et qu'on se passé alors de ces outils grammaticaux nommés prépositions. Place du 3. La différénce entre le sujet et le complément substantif. direct était en latin et en vieux francais désignée par Ia désinence: pater — patrem; murs — mar. L'espagnol a, dans certains cas, maintenu cette distinction de forme, en se servant de la préposition a: Conozco a su padre, „je connais votre père". Après la chute de la déclinaison, le francais, lui, a eu recours a un autre moyen: c'est la place du substantif dans la phrase qui indique si nous avons affaire a un sujet ou a un zomplément direct: l'homme voit la femme n'est pas la même :hose que la femme voit l'homme. Nous parierons de cette question intéressante dans le chapitre de 1'Ordre des mots2). Substantif 4' Ensuite — mais c'est la encore une question déterminê par que nous devons étudier dans le chapitre consacré un autre mot > i„~> ■ . , „. , , ,, ,. a lOrdre des mots3) — la place d'un adjectif, i'un pronom, d'un substantif au génitif, par rapport a un autre ;ubstantif, n'était rien moins que fixe en latin classique, de sorte *) Cf. le chapitre de la préposition, ch. VIII *) Cf. §§ 435 et 439. «) Cf. § 448 et suiv. SUBSTANTIF 3 que 1'adjectif par exemple pouvait être séparé du substantif qu'il qualifie par toute une phrase: Infandum, regina, iubes renovare dolorem, Virg., Aen., II, 3. Substantif 5. Le latin exprimait 1'idée de pluralité par les avec articie. désinences. Le frangais actuel a, a peu prés, perdu cette possibilité: des mots comme ceuf (of) — mufs (Ö), cheval — chevaux forment exception; 1'article, que le latin ne connaït pas, est chargé, en partie du moins, d'indiquer si 1'on a affaire a un ou a plusieurs objets. Car, en face des pertes énumérées ci-dessus, nous devons constater un gain réel, c'est la formation des articles, de 1'article défini d'abord, puis de 1'article indéfini, enfin de 1'article partitif:; Quelle est la valeur de ces petits mots, qui forment un tout avec le substantif, et comment en sont-ils arrivés a prendre leurs fondtions actuelles? Voila ce que nous allons étudier au chapitre suivant. CHAPITRE II L'ARTICLE DÉFINIi) ..... 6. Le latin classique, pas plus que le grec a Latin classique. 1 epoque d'Homère et d'Hésiode, ne connait 1'article: Consul exercitum parat peut signifier: „Le consul, un consul réunit une armee" ou „1'armée" ou même „son armée"; Sus est tnala veut dire: „le cochon mange les pommes" ou „des pommes". D'oü proviennent ces articles? L'article défini, en grec, en latin, comme dans les langues germaniques, est sorti du pronom démonstratif. En latin classique déja, le pronom ille pouvait, a cöté de son sens démonstratif précis, exprimer des rapports plus vagues: dans Hannibal ille le pronom signifie „le célèbre, le connu" dans ille qui nous avons affaire a un pronom déterminatif, plus accentué que is qui: Beatus ille qui procul negotiis, Ut prisca gens mortaliutn, Paterna rara bobus exercet suis, Hor., Epodes, II. Latin $|. 7. En latin postclassique le sens démonstratif postciassique. s'efface de plus en plus. Quand on lit un texte, comme la Peregrinatio Aetheriae ad loca sancta, on est frappé !) Meyer-Lübke, Zur Syntax des Substantius (dans Zeitschrift f. rom. Phü., XIX, p. 305). — H. Fredenhagen, Ueber den Gebrauch des Artikels in der franz. Prosa des XIII Jahrh. {Beih. z. Zeitschr. f. rom. Phil., 3), 1906. — E. Enderlein, Zur Bedeutungsentwicklung des bestimmten Artikels im Franz. mit bes. Berücksichtigung Molières, Diss. Marburg, 1908. — A. Tobler, I, (passim); II, p. 55, Por le tost aller; p. 108, Auffdlliges Wegbleiben der best. Art.; III, p. 28, Best. Artikel in Anruf und in Ausruf. — J. Gilliéron, Pathologie et thêrapeutique verbale, I, Neutralisation de l'article défini. VALEUR DÉMONSTRATIVE .DE L'ARTICLE DÉFINI 5 du nombre des pronoms ille et ipse qui accompagnent le substantif. II est vrai que, la plupart du temps, on peut, avec quelque effort, discerner encore la valeur démonstrative, mais la fréquence même du phénomène témoigne de 1'affaiblissement de ce sens: Cum ergo persubissemus in ipsa summitate et pervenissentus ad hostium ipsius 'ecclesiae, Peregrinatio, 4. — Cito proferte mini stolam illam primam, Rönsch, ltala and Vulgata, 419—420. II semble, d'ailleurs, qu'on a déja en latin archaïque des exemples de ce sens affaibli. Lindsay1) cite: Aequo mendicus atque ille opulentissimus Censetur censu ad Acherontem mortuus, Plaut, Trinummus, 4932). Mais les cas oü ille a certainement le sens de l'article sont rares en latin. Rem. Ipse avec la valeur de l'article s'est maintenu e. a. dans Sèbre (I'Ebre), Roland, 2465 et 2642, (dü a 1'influence du vieil aragonais). Sens ®" ^n franSa*s 'a valeur démonstrative du pronom démonstratif ille est encore sentie dans des expressions comme e 0 *" de la sorte, pour le coup, du coup, dans le temps, du jour et d'autres. Plusieurs voyages en ont été dérangés, le mien est du nombre, Mme de Sévigné. — Les Monte-Christo du_ jour, Th. Gautier3). En vieux francais, il équivaut parfois a celui, pronom déterminatif, quand il est employé substantivement, suivi d'un cas régime fonctionnant comme génitif possessif: Al tens Noé et al tens Abraam Et al David, Alexis, 7. Por la (== épée) Cnarlon dont il odit parler, La soe fist Preciose apeler, Roland, 3145. Je n'i vi cotes brodees ne les le rol ne les autrui (ni celles), Joinv., 25. — S'i s'en aloit la fumee (d'Abel) droit ou ciel. Mes la Kalm son frere n'aloit pas en tel maniere, Queste S. Graal, p. 216, 1. 26. — Cette valeur s'est conservée dans plusieurs noms 1) Syntax of Plaat, 46. 2) Cf. aussi Wolterstoff, Historia pronominis ille exemplis demonstrata, Diss. Marburg, 1907; Löfstedt, p. 64; Bonnet, p. 259; Brunot, I, p. 97. ») Cf. Plattner, III, 1, 166; III, 2, 88. 6 ARTICLE DÉFINI de ville: Villeneuve-la-Guyard (= Villeneuve, celle de Guyard), Foniaine-la-Guyon, Mont-le-V ernois, etc. On peut encore jusqu'a un certain degré reconnaTtre cette même valeur dans des phrases comme: Ensemble od els li cuens Rodlanpt i vint, Et Oliviers li proz et li gentilz, Roland, 176. La promenade est belle, Mol., Ecole des Eemmes, II, 6. — Que Ia plaisanterie est de mauvaise grdce, Mol., Misanthrope, I, 1. (Cp. ce changement m'étonne). Ce sens plus emphatique de l'article explique le fait qu'on trouve souvent Ie pronom démonstratif la oü 1'on s'attendrait plutöt a l'article: Passent cez puls et cez roches plus haltes, Cez vals parfunz, cez destreiz anguisables, Roland, 3125. Mes mout li siet li hiaumes bruns Et cil haubers et cil branz d'acier 'esmoluz, Chrétien de Tr., Erec, 766'. Rem. Le picard emploie de plus en plus le pronom ce comme article; voyez Gilliéron, /. c. 9. Dans les Serments de Strasbourg (842) on ne rencontre pas une seule fois l'article, ce qui nous étonnerait, si nous nesavions pas par ailleurs que ce texte ne représente nullement le Iangage parlé. Par contre, dans la Sainte Eulalie (fin ixe siècle) l'article est déja plus fréquent; on le trouve même dans des cas oü, plus tard, on pouvait encore s'en passer, notamment après une préposition: enz el fou, „dans le feu", post la mort; et depuis on peut dire que l'article défini a de plus en plus étendu son domaine. 10. Avant de suivre cette extension de 1'article,. Place. nous devons envisager quelques autres questions. ' Le pronom ille pouvait en latin précéder ou suivre le substantif: ille homo ou homo ille. Presque toutes les langues romanes ont gardé la première construction, qui est aussi celle du francais; le roumain seul a choisi la dernière: omul ns parcouraient le kilomètre en dlx minutes, je le vois deux fois la semaine, il vient toujours Ie samedi, a cöté de il vient samedi (prochain), on pourrait être enclin a parler d'une valeur généralisante de 1'article. VALEUR O.ÉNÉRALISANTE DE L'ARTICLE DÉFINI 17 Ce serait pourtant une idéé peu juste: dans ces phrases, on a d'abord en vue une seule livre. une seule semaine, ou plutót une seule action du verbe. Cette action se répétant, il est évident que le substantif, précédé de l'article n'indique plus un seul objet, mais ^imjype; c'est donc le substantif qui a changé de sens, sans que l'article y soit pour rien. II n'y a donc pas de différence au fond entre: je le vois deux fois la semaine et la semaine a sept jours, cf. § 13i). Cette construction se trouve aussi en vieux f rangais: on donra por le cheval quatre mars, et por Vome deus, Villehardouin, 21. — d chevauchier dix lieues le jour, Joinville, 472. ARTICLE PARTITIF2) 27. Outre l'article défini, plusieurs langues romanes connaissent encore ce qu'on appelle l'article partitif, et parmi elles le francais s'en sert d'une facon plus régulière que les autres. Cette extension particulière au francais doit s'expliquer, a ce qu'il paraTt, par la chute des terminaisons flexionnelles: l'article partitif est souvent seul k indiquer si 1'on a affaire a un singulier ou k un pluriel: du vin, des vins. Le latin ignore 28. Le latin classique, qui ne connaissait pas l'article partitif. l'article, ignore naturellement notre construction, qui est une combinaison d'une préposition et de l'article défini. Prenons le premier chapitre de César, De bello galllco: minimeque ad eos mercatores saepe commeant...; fere cotidianis proeliis cum Gerntanis contendunt, oü le frangais traduit par „des marchands, des combats quotidiens", ou pour approcher davantage de la i) Tobler, II, 53. *) Schayer, Zur Lehre vom Gebrauch des unbestimmten Artikels und des Teilungsartikels im Altfranz. und im Neufranz., Berlin, 1897. — F. Meinecke. Der sogenannte Teüungsartikel im Franz., these Kiel, 1900. — P. B. Fay, Elliptioal partitiv usage, in affirm. clauses\ in French prose of the XIV, XV and XVI centuries, thèse Paris, 1912. — Archiv für das Stud. der neueren Sprachen und Literaturen, 1915, p. 211—212. — E. Appel, Beitr. zur Geschichte der Teilungsformel im franz., Diss. München, 1915. — H. Neunkirchen, Zur Teilungsformel im Prove'ttzalischèo, I: Die'iKteirrische Grondlage (Zeitschrift f. rom. Philologie, XLII, p. 35—41). — Haas, Französische Sgntax, § 174—175. — E. Richter, Studiën über d. neueste Franz. (Arch. f. d. Studiumd. neueren Sprachen, 1917). Ï8 ARTICLE PARTITIF construction latine par „de quotidiens combats". Nous voyons par ces deux exemples que ce qui importe n'est pas en premier lieu l'article mais plutöt la préposition de; l'article peut faire djéfaut en certains cas, sans que la construction change. Le nom d'article partitif est donc mal choisi. Aussi Matzner parle-t-il d'un génitif partitif1). 29. Le latin postclassique, non plus que le latin archaïque, ne connait notre construction: Sed dum Mi aegrotant, interim mores mali Quasi herba inrigua succrevere uberrime, Plaut, Trinummus, I, 1, 18. Cumque cognovissent se esse nudos, consuerunt folia ficus et fecerunt sibi perizomata, Vulgate, Gen., III, 7. Mais si le latin ignore l'article partitif, plusieurs faits prquvent pourtant que cette construction romane trouve son point de départ dans cette langue. Dés 1'époque préclassique on rencontre deux tournures intéressantes: 1) un génitif partitif. construction qui ne se maintient pas; 2) la préposition de, construction qu'on retrouve dans les langues romanes. Les exemples sont assez rares: 1) Aquae paulatim addito, Caton, De re rustica, 74. — Primum adicies oleum vetus, sequens acetum, deinde salis triti, Mulomed. Chir., p. 269, 18—19. 2) Les cas oü entre un verbe comme „donner" et „prendre" forment en quelque sorte une transition: Abel quoque obtulit de primigenitis gregis sui, Gen., IV, 7, „quelques-uns des premiersnés de son troupeau". — Surge, sede et comede de venatura mea, „léve toi, assieds-toi et mange de mon gibier", Gen., XXVII, 19. Plus intéressantes sont les phrases — rares il est vrai — oü 1'emploi de la préposition rappelle tout a fait la construction romane; le plus ancien exemple se trouve dans Plaute: lbo intro ad llbros et discam de dictis melioribus, „j'apprertdrai quelques bons mots", Sticho, 400. — Utrum iusti essent, qui sacrificarent de ankriatibus, Aug., Confessions, III, 7. 30. Ce qui nous étonne, c'est que les phrases du type manger de pain restent extrêmement rares en vieux francais. Le Roland offre un seul exemple: l) Syntax der neufranz. Sprache, p. 401. ORIGINE DE L'ARTICLE PARTITIF 19 Par nun de oclre i metrai un mien filz Et sin avrez, qo quid, de plus gentilz. Roland, 150. Lai sont assis de Persans et d'Esclers, Chev. Vivien, 1142. Et aucunefois y a de cops donnés, Les quinze Joyes, p. 62. Meinecke cite au xme siècle: D'anis, de fermel, de comin vos desjunes sovent matin, Robin de Blois, mais la préposition de semble avoir ici plutöt un sens instrumental. 11 faut donc admettre, semble-t-il, que la tournure manger de pain n'a réussi a supplanter manger pain qu'a une époque oü l'article défini était déja devenu général, et qu'on a donc bientót franchi cette étape pour en arriver a manger du pain, d'abord avec le sens de „manger du pain connu", puis „manger du pain en général". Or, comme c'est dans YHeptaméron que 1'emploi olèj l'article tij.'d partitif est devenu général, M. Fay suppose que cette évolution de fc«ï ^ j ser>s a dü se produire vers le seizième siècle. |" sa k gXPv*U1 Le substantif ^* D'après 1'exposé qui précède, il est naturel est complément que l'article partitif se soit introduit plus tot devant le complément direct que devant le sujet: Et prlstrent de l'ewe, Quatre Livres des Rois, 213, (xne s.)./ . De l'ewe, bele, me bailliez, £j i L*^ Tristan, 979. Chil kt servolent du vin, Huon, 5581. Et le chief saint Lazare vos ferai aporter Et del sanc saint Estefne, Pèlerinage de Charlemagne, 165. De l'avaine et del fuere si li donerent, Aiol, 780. Pourtant, dans tous ces exemples on peut encore sentir un peu la valeur de l'article défini, mais c'est précisément a cause de cela que ces exemples sont si intéressants. En se basant sur un vers du Roland, M. Haas croit pouvoir prouver que l'article partitif existait dès 1100: S'il vuelt ostages, il en avrat par velr, Roland, 87. Le substantif u aPres 1 exposé qui precede, il est naturel 20 ARTICLE PARTITIF lei en (= d'eux = des ostages) est employé comme complément direct et ne s'expliquerait d'après M. Haas que si la tournure des ostages était déja courant dans la langue. La conclusion ne s'impose pas et le hollandais er prouve que 1'évolution de inde n'est pas nécessairement liée a 1'élaboration d'un article partitif. En moyen francais, notre construction s'est étendue de plus en plus, avec des fluctuations naturel lement: ainsi, dans Rabelais on trouve , un article partitif sur dix cas sans article, dans Montaignè par contre la proportion est déja de six sur dix. Voici un exemple du quinztème siècle, oü l'article partitif a tout a fait le sens moderne: Avoir du poisson bel et gent Et par consequent de l'argent. Greban, Passion, 31734—35. Non-empioi de 32. Quant a 1'emploi de l'article partitif devant l'article partitif. ]es substantifs précédés d'un adjectif, on n'en trouve guère d'exemple avant le xme siècle; ceux qu'on cite du xne sont douteux; citons pourtant: Illes avoit des bons amis, Gautrei d'Avras, Ille, 336. Tant qu'il furent bien rafreski et qu'il eurent acaté des nouvelesl viandes, Robert de Clari, XIII, 10 (xme s.). — Et faisoient souvent sur les Escos des hardies emprises, des belles chevaucies, des meslées, Chron. des quatre premiers Valois (xive s.). Dressent encor ès forests des doux rets, Belleau, Avril, 235, 16. A cóté de ces exemples on trouve la préposition seule: Se tu deis prendre, bels filz, de fals loiers, Cour. Louis, 80. Et y a de bons levriers d longues cueues bóns et hardiz et tost allant, La Chasse de Gaston Phoebus, 105, 3. Mais les phrases sans préposition ni article 1'emportent de beaucoup, comme c'est d'ailleurs le cas des substantifs non accompagnés d'un adjectif (§ 31): Lors veissiez entreservanz Geldes d'Englels et de Normanz, Granz barates et granz meslees, Wace (dans Clédat, p. 250). NON-EMPLOI DE L'ARTICLE PARTITIF 21 33. On comprend aisément qu'après /un substantif ou un ■*"5 adverbe exprimant une quantité, on art mis la préposition de: peu de vin, beaucoup de viande, une foule de gens. La construction sans de se rencontre pourtant pendant tout le moyen age, et même au xvne siècle il y a des cas oü la préposition est absente: En la lande ot assez herberges, Beroul, Tristan, 4080. II n'y a rieh si facile que d'en conclure que la grdce efflcace n'est pas nécessaire, Pascal, Prov., II. Cette construction s'est maintenue avec force, p. ex. force moutans. Ceci est d'autant plus curieux qu'on trouve parfois force de au moyen age: Quant force d'annemis lor keurt sus, J. de Meung, L'art de Chevalerie, p. 35. L'article partitif ne s'est pas introduit ici, et cela prouve que ; L longtemps encore la valeur..parlitive dans du vin, de la viande, 95 des gens était nettement sentie, tandis que dans des combinaisons comme les ceuvres de Du Bartas la langue n'a nullement rejeté la rencontre de du avec de. Si après la plupart on trouve des, c'est qu'on a affaire au génitif \ de l'article défini: la plupart des hommes; bien des fois s'explique / paree que bien exprime au fond 1'intensité, non la quantité. C'est a ce chapitre qu'appartient le non-emploi de l'article après 1 une négation, paree que des mots comme pas et point étaient primitivement des substantifs qui exprimaient la quantité1): J'ai \ des amis, mais: Je n'ai pas &amls, phrase tout a fait parallèle! ) a: J'ai peu d'amis. 34. Au commencement du xvne siècle les exemples de rjmcien usage sont encore assez nombreux, tandis qu'ils deviennent exceptionnels a la fin dj' sièHp, snrtnnt en prose: Ils seroient marris qu'un plaisir qu'ils ont requ portdt profit d celui qui le leur a fait, Jvlalherbe. Qui ne fait ch&teaux en Espagne? La Font., VII, 10, 36. Empiol de 35. Par contre, on rencontre quelquefois le de de partitif. partitif au xvne siède la oü aujourd'hui on 1'omet: i) Cf. §§ 427 et 428. 22 ARTICLE PARTITIF // est de beaucoup de choses qu'il n'y avait pas moyen de donnet d certaines gens sans les donner d tous, Malh., II, 120. —; Les doctes font de différentes supputations pour faire cadrer Ce tentps au juste, Bossuet, Hist. Univ., II, 9. — Rendons-lui du service, Corneille, Veuve, L 1, 34. —avoir du sujet, faire de l'état de, etc. Après une négation on trouve souvent de, tandis que dans la f forme affirmative le substantif rejette l'article partitif, comme I avoir lieu, avoir tort, prendre courage: De la postérité je n'ay plus de souci, Du Bellay, Regrets, VI, 12. Vous ne voulez point savoir de gré des choses que vous êtes si passionnés d posséder, Malherbe, II, 95. — Vous n'avez de tori qu'en ce que vous ne le faites pas toujours, Fénelon, Dial. d. Morts, 18. 'Dans les exemples suivants la préposition de s'explique par le sens négatif de la phrase: Y a-t-il d''esprit équitable qui ne se ■ reconnolsse cette vérlté, Balzac, Disc. chrét., XIV. . Ah! je leur ferai voir si, pour donner la lot, II est dans ma maison d''autre maitre que moi, Mol., Femmes Sav., IV, 5. Sans faire de tort d vos beaux sentiments, Ibidem, III, 2. Cette construction se trouve encore parfois aujourd'hui: La plupart d'entre eux souhaitent que nos universités puissent prendre plus de part d la nomination, M. Barrès, Revue d. deux Mondes, 15 janv. 1920, p. 257. Le substantif Employé comme sujet et comme p r é d i c a t est sujet ou le substantif est dès Ie xine siècle précédé de l'article * d,ca' partitif, mais les exemples de cette époque sont rares: Or dit saint Anciaumes que ce sont des menaces Nostre Seigneur, Joinv., 40. — Et les tindrent apres des hoirs le comte Henri qui tindrent Champaigne, Joinv., 92. — Le plus fort de sa lettre étoit des recommandations d Florinde, Marg. d'Angoul., Heptam., X. Devant un adjectif de et l'article partitif alternent: Et tote lor oz se loja sor le rivage, de granz gens que il avoient a piê et a cheval, Villen., 409. Les esprits btenheureux sont des celestes coses, Montchrestien, Mort de Marc-Antoine, 353, 20. NON-EMPLOI DE L'ARTICLE PARTITIF 23 Peu, même des grands cceurs, tireraient vanité, Corn., Horace, li, 3. La règle actuelle, qui preserit la préposition de devant les substantifs précédés d'un adjectif, a été formulée par Vaugelas (II, 6) et adoptée par 1'Académie. Malgré cette autorité elle n'a jamais été appliquée rigoureusement et la langue populaire Tignore ou peu s'en faut. Le substantif Après une préposition l'article est plus est complément lent a s'introduire. Commines dit: A mesconter les préposit ionnel. ,., . „ ... gens par peuts moyens, mais au meme siècle on trouve aussi: Demanda les perdris avec de Ia moutarde, Cent nouv. nouv.. II, 222, 1. — Au xvie siècle: Par longs effors et par guerres mortelles, Marg. d'Ang. (Darm., p. 194, 1. 5). J'ai couru mille fois après de jeunes veaux, Belleau (Ibidem, p. 239, 1. 19). Si corrompu par or et par presens Tu fais justice au gré des Courtisans, Ne doute point que Dieu ne te le rende, Les Quatrains de Pybrac, 1. Au xvne siècle la construction avec l'article partitif devient plus générale, mais on sait qu'aujourd'hui même l'article est encore souvent absent: sans horreur (ici Tidée négative explique 1'absence de l'article), avec patience, a cöté de avec de la patience (désignant le moyen), par erreur, par monts et par vaux, etc. ARTICLE INDÉFINI1) unus en latin 38' Le ,atin ne connaissait Pas eet article. S'il sentait le besoin d'indiquer une personne indéterminée, il se servait de quidam, „un certauï", ou dë~quis, qui se rapproche de l'article indéfini: homo quis, „quelque homme, un homme." Mail il n'existait pas de véritable article indéfini. Celui-ci s'est !) H. Yvon, Sur 1'emploi du mot „indéfini" en grammaire francaise, IV: L'article indéfini (Revue de philologie franc., 1907, p. 21—36). 24 ARTICLE INDÉFINI formé peu a peu par 1'affaiblissement du nom de nombre u n u s. Ce mot a différents sens: le sens primitif est „un", par opposition a deux, trois. 2) il indique qu'on prend un individu d'un groupe: E pluribus unus, unus e plebe. 3) même sens, mais le groupe n'est pas nommé. 4) quelconque. Le dernier sens, qui se rapproche de celui de l'article indéfini, se trouve déja dans Plaute: Est huic unus servus violentissimus, Truculentus, 243. — Lepida una muiier, Pseudolus, 948. — Sicut unus paterfamilias his de rebus loquor, Cic, de Oratore, I, 1321). Et dans la latinité postérieure: sub unam arborem, Grég., de Tours, Conf., 80, 798, 20, oü Ton peut hésiter entre le sens de „quelconque" et de „un". Mais dans: insurgunt contra eum in una conspiratione, Hist. Franc, II, 1, et des phrases pareilles l'article indéfini s'est déja constitué. L'article indéfini 39- Dans les Serments de Strasbourg, qui sont ca vieux archaïsants, on ne trouve pas d'exemple de 1'article francais. indéfini, mais un peu plus tard on lit: Ad une spede li roveret tolir lo chief, Sainte Eulalie, 22. Ab u magistre sempre-l mist, Saint Léger, Ad. Puis s'en alat en Alsis la cltét Por une imagine dont il odtt parler, Saint Alexis, 87. Desoz un pin, delez un eglantler, Un faldestuel l out, Roland, 114. Pourtant malgré ces exemples, qui vont du ixe au xne siècle, l'article indéfini se répand plus lentement que l'article défini. 40. Ainsi l'article manque: 1) Dans une phrase négative: Soz ciel nen at plus encrisme felun, Roland, 1216. Non-emploi de l'article indéfini. !) Cf. aussi la note de l'édition Piderit. non-emploi de l'article indéfini 25 // me fascheroit fort d'espouser personne qui ne fust de ma religion, Mémoires de Marg. de Valois, 24. — II n'est homme d qui il siese si mal de se mesier de parler de memoires qu'd moy, Montaigne, I, 9. — Cette absence de l'article s'explique par le sens nécessairement vague du substantif. Un reste de cette construction se trouve aujourd'hui dans 1'omission de l'article devant le sujet précédé de la négation jamais: Jamais homme ne fut plus heureux que moi. 2) II est naturel que l'article ne s'introduise que difficilement entre le verbe et son complément, surtout s'ils forment une expression: faire, 'prêter serment, donner response, livrer bataille, rendre service, avoir réponse d tout, etc.; on sait que plusieurs de ces Iocutions se sont maintenues en frangais moderne. 3) II en est de même après une préposition: Elle peut être continuée par seconde élection, Montaigne, III, 10. Dieu a logé l'homme comme en lieu saint, Les Quatrains de Pybrac, VII. Par malheur, par accident, sans fin. 4) Quand le substantif est prédicat, il indique souvent la qualité, est donc plutöt adjectif, et s'est par conséquent toujours passé de l'article indéfini: riches om fut, Alexis, 15. — Vous êtes orfèvre, M. Josse, Molière. — Je ne laissais pas de vous appeler Berger, Sorel, Berger extravagant, I, 53. — Mon >frère est médecin. — II en est de même pour quelques expressions, formées d'un substantif et d'un adjectif: C'est viande céleste, Rabelais. — C'est bonnet blanc et blanc bonnet. — Le curé est brave homme, comme tous les curés, Benjamin, Gaspard, 62. — // est bon enfant, bon mari. R,em. Depuis Vaugelas, I, 353, c'est une chose glorieuse est Ia construction la plus usitée. 5) Comme nous 1'avons vu au § 21, 1'emploi de l'article défini devant 1'apposition est trés libre en vieux frangais. L'article indéfini manque. beaucoup moins souvent: Veient Jerusalem, une citet antive, Pèlerinage, 108. Mais: A ma serur Ven porterez, KI en Norhumbre est mariee Riche dame, pruz e senee, Marie de France, Milun, 68—70. sneyders de vogel, Syntaxe historique. 2me édition. 3 26 ARTICLE INDÉFINI lei nous devons citer les épithètes, composés d'un substantif et d'un adjectif: Raoul Bon-Voisin, Qarnier Gros-Vassal, puis la vierge pucelle, la comtesse suer, et encore aujourd'hui: bourgeois gentilhomme, un artisan poète, etc.1). 6) L'article manque encore souvent aux xvie et xvne siècles devant tel, autre, même, si2): Aüendray-je plustost ^u'autre le lui révèle, Saint-Oelais, III, p. 169. Pourveu que telle manière de parler adjoute quelque grace, Du Bellay, Deffence, II, 9. Ceux que tu vois d'un visage si blesme Couchiés icy ont eu fortune mesme, De mesme ville, issus de mesme port, Ronsard, Franciade. Didon n'a pas besoin de si faible support, Hardy, Didon, 1189. Ici encore l'article va s'introduire au xvne siècle, quoique Malherbe en admette encore 1'omission. Empioi curieux 41- Contrairement a 1'emploi actuel on trouve de i'art indéfini. l'article indéfini dans la vieille langue: * a) parfois devant les noms de matière: un faldestuel t out d'un olifant, Roland, 609. b) le pluriel de un est employé devant les objets formant paire: Et avoit unes grandes joes et un grandisme nes plat ét unes grans narines lees et unes grosses levres plus rouges d'une carbonnee, Aucassin et Nicolette, 24, 17—20. Au xvie siècle se rencontrent encore des expressions comme: ungz yeux, Jean le Maire des Beiges, lllustr. de la Gaule, I, 33. — Palsgrave, Esclaircissement de la langue frangoise, en donne une longue liste: unes balances, besaces, chausses. i) J. Hoefer, Ueber d. Gebrauch der Apposition im Alt franz. Thèse Halle, 1890. - *) H. Jager, Die Sgntax der unbestimmten Fürwörter tel, autre und nul. Thèse Göttingen, 1906. UN DEVANT UN SUBSTANTIF AU PLURIEL 27 La vieille langue mettait l'article aussi devant des collectifs: uns grans dens gaunes et lais, Auc. et Nic, 24, 20. Vindrent message de vers Dovre... Au rol unes noveles dire. Chrétien, Cligés, 1053—55. Palsgrave donne encore unes armes. R e m. En espagnol unos signifie aussi „quelques": tenrjo unos libros mug interesantes. L'article s'y trouve aussi devant des noms de matière, dans des comparaisons: Caifds g go fregoteamos bien, g todo ha quedado como un oro, Pérez Galdos, Gloria, p. 20. CHAPITRE III L'ADJECTIF OBSERVATIONS GÉNÉRALES 42. Le latin est plus riche en adjectifs que le Adjectifs latins r . , , r . , qui ont disparu. tranSais: plusieurs rapports que le frangais rend par le génitif du substantif, le latin les exprime par des adjectifs: proelium cannense, „la bataille de Cannes", equus ligneus, „le cheval de bois", opus Plautinum, „Tceuvre de Plaute", caro ferina, „chair de béte sauvage, venaison", bellum gallicum, „la guerre de Gaule". Le vieux frangais connait pourtant encore un certain nombre de ces adjectifs, que la langue a perdu depuis: fraisnin, „de frêne", chesnin, „de chêne", perr'm, „de pierre", terrin, oré, „d'or". Dans le Roland on trouve p. ex.: de l'orie sele, 1615; hanste fralsnine a cöté de hanste de fralsne; chambre pedrine, Pèlerinage, 644; Malherbe dit encore l'dge ferré. Grace a 1'influence des traductions et du mouvement de la Renaissance un certain nombre d'adjectifs se sont introduits dans la langue, mais leur emploi n'a jamais été populaire. Darmesteter cite: maritime, terrestre, canin, lupin, ovin, nocturne, diurne, virginal, servile. DEORÉS DE COMPARAISON Formation 43. La formation du comparatif et du superlatif analytique du rentre en partie dans le domaine de la syntaxe, comparatif et du superlatif paree que les formes latines synthetiques ont ete francais. remplacées par des formes analytiques. Nous pouvons pourtant être brefs sur cette question, d'abord paree que DEQRÉS DE COMPARAISON 29 nous 1'avons déja touchée quand nous avons parlé de 1'article1), puis paree que tous les manuels de morphologie en parient surabbndamment2). Rappelons donc seulement que d o c t i s s i m u s a été remplacé par doctior en latin vulgaire, puis doctior par magis ou plusdoctus, périphrase que le latin classique connaissait déja. Le superlatif relatif s'est ensuite différencié du comparatif par 1'introduction de l'article: le plus savant en face de plus savant, tandis que le superlatif absolu a été rendu par 1'adjectif précédé d'un adverbe exprimant d'une facon énergique 1'intensité de la qualité. Le latin connaissait, a cöté de 1'adverbe le plus fréquent va_l_de d'autres mots plus expressifs: impense doctus; puis, plus tard, ingens, infinitum, satis: valleminfinitamingens, Peregrinatio, f, 1; satis admirabile, Ibid., II, 7. — Caesar non pote validius quam expavit, Pétrone, 32, 6(51), qui rappelle le frangais: „on ne peut plüs fort". — Non potest esse pretiosior homo, Ibid., 44, 39 (70). Le frangais en a augmenté considérablement le nombre: assfc^_cnii_signifie „beaucoup" dans la vieille langue, mouli, par, prou, trop (égalemenT~avec le sens de „beaucoup") bien, fort; extrèmement, joliment, rudement, bougrement, énorntément, furieusement, etc. Molt est genz li presenz que li reis Charles ofret, Pèlerinage, 112 (Clédat, p. 37). Cist nus sunt pres, mais trop nus est loinz Carles, Roland, 1100. Qu'on se rappelle le langage précieux du xvn* siècle: nous vous serons obligées de la dernière obligation; voild qui est poussé dans le dernier galant; je suis diablement fort sur les impromptus; la brutaüté de la saison a furieusement outragé la délicatesse de ma voix; ils sentent terriblement bon; effroyablement belles; voila quelques expressions qu'on trouve dans Les Précieuse's Ridicules, sc. X. !) Cf. § 24. *) Cf. surtout Nyrop, Gramm. hist. de la langue ff., II, p. 309—330. 30 ADJECTIF ACCORD DE L'ADJECTIF Cas de non- 44. De même que le verbe ayant comme sujet accord en latin. piusjeurs substantifs peut se mettre au singulier, en ne s'accordant qu'avec le substantif le plus proche, de même un adjectif qui se rapporte pour le sens a plusieurs substantifs ne s'accorde quelquefois en latin qu'avec celui dont il est le plus proche: Visae noctarno tempore faces ardorque coeli. L'adjectif prédicat d'un substantif est quelquefois au neutre: Varium et mutabile semper fenüna, „la femme est un être inconstant et variable". 45. Ce dernier cas ne se retrouve naturellement pas Cas de non- . > accord en en frangais, l'adjectif neutre n'y figurant qu avec francais. un pronom sujet neutre. Et dahet ait cui ce est bel, Chrétien, Chev. au Uon, 507 (Clédat, p. 147). Dans: Nule rien qu'il demandent ne lor fut deviét, Pèlerinage, 409. Taccord se fait d'après le sens, nule rien équivalant a rien. Le. premier cas s'est maintenu: Li palais et la sale de pailes portendude, Pèlerinage, 34. Est le pays ou royaulrrte bien heureux, quant il a'roy ou seigneur saige, Commines, VIII, 24. — Afin que sur notre vieillesse nous vivions en bonne amiiié et repos de conscience, Marg. d'Ang., Hept., VIII. — Vaugelas, I, 163, préfère: Ce peuple a le cceur et la bouche ouverte d vos louanges, a: le cceur et la bouche ouverts, et Th. Corneille et 1'Académie sont de son avis; Corneille réclame même les honneurs et les graces qu'on tria faites ont esté fort enviez, Vaug., U, 92. Aujourd'hui encore on trouve des expressions comme des sentiments et des croyances religieuses. — II portait les ornements et le sceptre royal1). Par contre, ou trouve i) D'après la Revue de philologie francaise, 1913, on a discuté la grave question de 1'accord dans le Conseil supérieur et, pour éviter les instituteurs et les institutrices publics ou publiques, on a décidé d'écrire les instituteurs et les institutrices de Tenseignement public. Inutile de dire que pour un adjectif comme public la chose se réduit a une question de graphie. Le cas est pourtant instructif pour les étrangers; on voit que les Francais aiment mieux „tourner autrement" que d'avoir 1'air d'écrire une chose qui ne soit pas correcte. ACCORD ET NON-ACCORD 31 un. exemple curieux d'accord dans la phrase suivante: Les GalloRomains contribuent a développer la civilisation et d constituer la littérature latines, O. Hanotaux, Histoire de la nation francaise, XII, 1, p. 5. D'autres cas *6. On a en vieux frangais encore d'autres cond'accord et de structions d'après le sens, inconnues au latin: non-accord. «\ ■ i 1) apres les verbes pronominaux qui signinent „devenir" ou „paraitre" Taccord se fait avec le sujet et non avec le pronom: Plus se fait fiers que leons ou leuparz, Roland, 1111. 2) On trouve, dès 1'époque la plus ancienne, l'adjectif au singulier avec la 2e personne pluriel de politesse: Par poestét serez pris et Iiez, Roland, 477. Pourtant on trouve aussi l'adjectif au pluriel: Car del rei ne des suens n'estes mie bien cler, Saint Thomas, v. 5193. Voici d'autres exemples de la construction d'après le sens en vieux frangais et en francais moderne: Puis que la justice (= juges) i fust venuz, Saint Thomas, 2533. Soyons prudent, se dit-il. — Quand on est belle, on ne l'ignore pas. 3) Les participes passés conjugués avec 1'auxiliaire avoir manifestent de bonne heure une tendance a rester in variables; cf. § 287 et suiv. 4) Quand un adjectif se trouve placé devant un autre adjectif ou un participe avec fonction adverbiale, il peut s'accorder en vieux frangais x): Toz est mudez, perdude at sa color, Alexis, 4. Vous venrés La sus o les boins eürés (= bienheureux), Amadas et Ydoine, 591. Bon feusse tu en terre nez, Passion du Palatinus, 1450. >) Cf. Tobler, I, p. 100, qui cite toute une série d'adjectifs, et K. Nyrop, Kongmensk i Fransk, p. 72—73. 32 ADJECTIF Même au xvie siècle: une suf Usance pure üvresque, Montaigne, I, 25. — De même bele née, clers luisans, demie morte, durs cuits, fraisches tuées, hautes élevées, menus hachés, etc Quelques-unes de ces expressions se maintiennent jusque dans la langue moderne: fleurs fraïches écloses, fenêtres grandes ouvertes, lis arrivent bons premiers; dans les autres l'adjectif a été remplacé par la forme invariable. Ces cas de non-accord se trouvent dès 1'époque la plus ancienne: C'est oiseaus cler semés en terre, Jean de Meung (Clédat, p. 212),. et aujourd'hui: une fitte nouveau-née a cöté de nouvelles converties, nouvelle mariée, les nouveaux-venus. Dans nombre de cas la vieille construction s'est maintenue; seulement 1'orthographe nous cache le véritable état des choses: tout étonnée de la langue actuelle n'est autre chose que le toute .étonnée de Tanden francais, comme nous allons le voir au paragraphe suivant. 47. L'exemple de la Wie de Saint Alexis cité plus Tout. , 1 , ,, haut prouve quen vieux francais tout determinant un adjectif était toujours variable. En frangais moderne il est invariable, comme on sait, sauf s'il se trouve placé devant un adjedif féminin commencant par une consonne ou une h aspirée: toute hdlée, toutes contentes. L'ancienne construction se trouve jusqu'au xvne siècle: des habits tous neufs, La Bruyère, I, 44, a cöté de deux personnages tout différents, ibidem, II, 103. Comment expliquer ces hésitations et cette règle bizarre, qui en est le résultat? On disait dans la vieille langue (nous négligeons la déclinaison a deux cas): 1. Un homme tout content. 2. Des hommes tous contents. 3. „ „ tout heureux: . 4. „ „ tous heureux. 5. Une femme toute contente. 6. Des femmes toutes contentes. 7. „ „ toute heureuse. 8. „ „ toutes heureuses. On voit que dans deux de ces cas, 1 et 3, tout est invariable et peut donc être interprété par des grammairiens logiciens comme adverbe; dans deux autres cas, 2 et 7, on n'avait qu'a changer la graphie et k décréter Tinvariabilité pour arriver au même résultat; TOUT, DEMI 33 mais dans les quatre autres cas le caractère d'adjectif se manifeste dans la prononciation, et les grammairiens étaient obligés degarder / toute(s) contente(s), en declarant qu'on le disait par „euphonie". | Dans tous heureux et toutes heureuses pourtant, 1'analogie aidant, j Vaugelas et d'autres ont réussi a introduire l'invariabilitéde^oa^ J*. Bien entendu, au xvne siècle on ne s'en tenait pas aux régies. Vaugelas écrit lui-même: Ces murmures alloient d une sédition toute ouverte, Quinte-Curce, IV, 10. Pharnace en ce moment, et ma flamme offensée Ne peuvent pas tous seuls occuper ma pensée, Rac, Mithridate, II, 6. Et Oeorge Sand écrit encore: En attendant qu'on nous la donne (1'histoire) toute expliquée et toute dévoilée. Rem. Vaugelas, II, 179, ne voit pas clair dans 1'évolution de tout: il déclare qu'il faut dire tout estonnez et non tous estonnez, „faute que presque tout le monde fait", et au féminin elles sont toutes estonnees, excepté tout autres, qui au singulier donne pourtant toute autre. En 1704, 1'Académie en faisant la critique de cette remarque de Vaugelas, déclare: „On ne voit pas sur quoy M. de Vaugelas se fonde, lorsqu'il prétend qu'il faut dire au singulier l'estoffe... est toute autre que celle-cy, puisqu'il est impossible que 1'oreille distingue dans cette phrase si on prononce tout autre, adverbe, ou toute autre, nom adjectif". Ménage, d'ailleurs, avait déja établi la règle aotuelle. 47 ls. II y a encore d'autres adjectifs qui ne Demi, nu, , , , J ^ même. s accordent pas toujours avec le substantif qu'ils déterminent: Demi: — Les exemples d'accord se trouvent jusqu'au xvne siècle: E>estre part la citét, demie liue grant, Pèlerinage, 264. Une demie lieue, La Bruyère, II, 261. Vaugelas, II, 56, déclare qu'il faut écrire demi-heure, demi" douzaine, etc, sans doute par confusion avec d'autres composés de mi: enmi, parmi. D'ailleurs, 1'invariabilité se trouve déja au moyen age. Si Tob Ier2) conteste 1'exemple du Roland, v. 432: Demi Espaigne vos vuelt en fieu doner, 1) B. Beyer, Ueber den Gebrauch von tout im Alt- und Neufranzösischen (Rom. Forsch., 1906, p. 641—713); Diss. Berlin, 1905. 2) I, p. 100, note 34 ADJECTIF on trouve pourtant au xme siècle: Ains eussiez allé bien demi liue a pié, Gui de Bourgogne, 3129. i Lorsque \'e féminin est tombé dans la prononciation, 1'accord de demi a été réduit a. une simple question d'orthographe. Nu. — Vaugelas, I, 144, et 1'Académie exigent Tinvariabilité: nu-pieds, nu-jambes; l'adjectif forme donc avec le substantif un mot composé. Pourtant en 1733 Marivaux écrivait encore: Je suis nue tète, Marianne, 3e partie. Actuellement 1'aecord est permis dans 1'écriture; la prononciation ne distingue plus nu de nue. Même. — Le mot mênte est tantöt employé comme adverbe, tantöt comme adjectif, et il n'est pas toujours facile de distinguer les deux emplois. Cela est rendu encore plus difficile par Tusage du moyen age de mettre un s après les adverbes, usage qui se continuait jusque dans le xvme siècle, de sorte que Patru et Vaugelas déclarent tous les deux que Tadverbe se dit sans s ou avec s. Rabelais n'hésite même pas d'écrire en ceste mesmes) heure, I, 34. Corneille corrige: Moi-mesmes d mon tour, dans Tédition de 1660, en: Je ne sais plus moi-mesme, XV, 235. Pour distinguer nettement les deux emplois, Vaugelas, I, 80, propose d'écrire Tadverbe mesmes après un substantif au singulier, et mesme après un substantif au pluriel: La chose mesmes qwe je vous ay dite et Les choses mesme que je vous ay dites. Mais Th. Corneille et TAcadémie déclarent que Tadverbe doit toujours rester invariable, et la dernière ajoute que le plus sur moyen de distinguer Tadverbe de l'adjectif, c'est de le mettre devant le substantif: mesme les choses que je vous ay dltes. 48. Pour Torigine et le développement de eet Quelque' adjectif, nous renvoyons au § 145. Ce mot devenu adjectif s'accorde naturellement avec le substantif qu'il qualifie. Seulement, si ce substantif est précédé d'un autre adjectif, on peut se demander si quelque détermine le substantif ou l'adjectif. On sait que les grammairiens ont décrété que dans le premier cas quelque devait prendre Taccord et rester invariable dans le second cas. Mais les auteurs se sont peu souciés de cette règle: Quelques grands principes qu'on e&t d Port-Royal, Rac, IV, 501. — Et même: quelques méchants que soient les hommes, La Rochef, I, 206. NU, MÊME, QUELQUE 35 II se trouve quelquefois placé devant un nom de nombre: quelque trots cents maisons. Même dans ce cas les auteurs du xvne siècle font parfois 1'accord: quelques soixante ans, Racine, II, 163. 49. Un cas d'accord curieux se trouve dans des phrases comme une goutte de répandue, oü logiquement de répandue, qui exprime une idéé partitive aurait dü être invariable. L'accord s'explique par 1'analogie de une goutte répandue avec cent hommes de tuês, oü le pluriel est régulier1). 50. Pour la place de l'adjectif, voir § 448 suiv. i) Tobler, III, 25. CHAPITRE IV LE NOM DE NOMBRE1) OBSERVATIONS GÉNÉRALES cbute des L'histoire du nom de nombre est pour une distributifs et des bonne partie du domaine de la morphologie et du multiplicatifs. lexique Rappelons seulement que les distributifs singuli, bini, terni, etc. et les multiplicatifs semel, bis, ter, etc. ont dispara: Saint Augustin déclare qu'il aime mieux dire septem per septem que septies septeni, paree que le peuple le comprend mieux alors. De même triplex, quadruplex, etc: simpte, doublé restant seuls comme formes populaires, tandis que les autres triple, quadruple sont savants. Rem. Le vieux francais se tire d'affaire a 1'aide de périphrases, formées d'un nombre cardinal suiri de tant, doble, feis, veie, ore, tor, colp, erre*): Plus bete... Que cele n'est, cent mile tans, Barbazan et Méon, Fabliaux, II, 422, 48. — Jkesus... A cent dobles vous vueille rendre, Miracles N. Dame, XXVI, 1307. — Ces mots se font rares au XVIe siècle quoiqu'on en trouve encore des exemples: a dix tant de gens que ils n'estoient, Chev. de la Tour Landry, 124. — Meigret, • exact observateur pourtant de la langue vivante, propose une longue série de multiplicatifs: sextuple ou sizuple, settuple, octuple ou hugtuple, etc. LE NOM DE NOMBRE CARDINAL 52. Le gallo-roman est caractérisé par 1'introducIp« vingt" don °-e *a numération par vingt, usage inconnu en latin classique et qui est peut-être d'origine celtique3): trots vingts, quatre vingts, cinq vingts, etc. Treis vlnz et 1) Cf. K. Nyrop, Gramm. hist. de la langue fr., II, p. 331 et suiv. 2) Cf. Tobler, I, 225. 3) MUe Rösler 1'attribue a 1'influence des Normands (Das Vigesimalsgstem im Romanischen dans: Zeitschr. f. rom. Phil., Beib. 26). ' VINOT, MIL, MILLE 37 dis, Rois, IV, 23. — Chevaüers ot avec li seize vint, Garin, II, 269. — Vitellius fit mourir plus de six vingts hommes, Sat Ménippée, 156. Cette numération entre en lutte avec le système latin, lutte qui continue au xvie siècle, et qui même au xvne siècle n'est pas encore tout a fait décidée. Octante et huitante, qu'on trouve encore fréquemment au xvie siècle, tendent pourtant a être remplacés par quatre vingts, et Meigret1) considère cette dernière forme comme plus recue que les formes venant du latin. II rejette de même les nombres septante et nonante, qui se trouvent encore en Suisse et en Belgique et dans quelques dialectes; quatre-vingt-dix et soixante-dix ont supplanté les vieilles formes; soixante-dix s'explique par une étape plus ancienne trois-vingt-dix. Les autres combinaisons avec vingt sont devenues rares au xvne siècle: six vingts dix couverts, Loret, La Muse historique ou Recueil des lettres en vers, 9 aoüt 1659, v. 103. — Vaugelas, II, 111, donne pourtant six-vints, et 1'Académie admet toutes les combinaisons avec vingt, sauf 40, 60, 100, 200. 53. Les mots duodeviginti, undeviginti ont été remplacés par decem et octo, decem et novem. Le latin vulgaire a donc mis la conjonction e t entre les dizaines et les unités. On dit de même en vieux frangais vingt et un, vingt et deux, etc. Cet emploi se continue au xvie siècle; il est vrai que Palsgrave, p. 367, donne déja la construction moderne. Au siècle suivant il se produit un changement: Boitel, Le tableau des Merveilles du Monde, 1* partie, 151, écrit: an trots eens dlx-hult, quoique Corneille dise encore a plusieurs reprises la règle des vingt et quatre heures, I, 270, 378, 395- C'est Oudin qui dans sa grammaire a formulé la règle actuelle. 54. Le pluriel du latin mille est m i 11 i a. Ces Mn et mille, formes se sont maintenues en frangais comme mil et mille. Cependant leur sens se confond de bonne heure, puisqu'on trouve dès le xie siècle: Tretté de la gramme re franc., 39 r°. 38 NOM DE NOMBRE Cel jour i out cent mil lairmes ploredes, Alexis, 119, 5. Souvent la différence entre les deux formes se réduit a une question d'orthographe; ainsi mil hommes et mille hommes se prononce de la même fagon. Pourtant mille se généralise aux dépens de mil: Henri Estienne, Deux dialogues du langage frangois iialianizé, % 64, fait remarquer que dans par mil dangers le mot mil a mauvaise grace. Dans les textes il y a toujours une confusion compléte: centz mil grandz philosophes, Marot, 1,113.— Cent mille bien venues, ibidem, II, 101. — Au xvne siècle les grammairiens établirent des différences imaginaires entre les deux formes, preuve irréfutable qu'elles se confondent en réalité: Malherbe écrit indifféremment mil et mille. L'emploi actuel, aboli de nouveau par TArrêté ministériel de 1901, a été fixé par Oudin, Gramm. fr., 92. 55. Les chiffres million, milliard, milliasse étaient Mi"i0mias"eliard' inconnus au moyen age. On se servait de péri- phrases: por cinq cent jois cent mil livres, Rom. de la Rose, IV, 348, v. 22188, qui n'est qu'une traduction du latin quingenties centena millia. Million se rencontre pour la première fois au xve siècle et est peut-être dü a Tinfluence italienne: autant que d'ung million d'or, Franc Archer de Bagnolet, 169; milliard se trouve dans Peletier du Mans avec le sens de „million de millions", et dans Meigret avec celui de „mille millions"; milliace enfin se trouve dès 1505 attesté avec le sens de „mille millards"; actuellement il signifie „grand nombre". 56. Quand un substantif est accompagné d'un nom de nombre terminé par un, le latin tournait la dif- ficulté grace a sa construction plus souple: unus et viginti anni ou anni viginti unus; dans la vieille langue le singulier était de règle: Bien ot vint et un an u plus, Saint Thomas, 231. Mais bientöt une hésitation se produit et Taccord peut se faire jusqu'au xvne siècle avec le dernier mot ou avec le tout. Ainsi on trouve vingt et un cheval et vingt et un chevaux. Vaugelas, I, 246, consacré a cette question une longue remarque, dont il résulte ACCORD DE VINOT ET DE CENT 39 qu'on écrivait au xvue siècle vingt et un an, et vingt et un an accomplis, mais vingt et un chevaux, bizarrerie de l'orthographe confirmée par 1'Académie. II est sur que le sens linguistique voit le substantif comme un pluriel; si on a hésité au xvne siècle, c'est que Toreille ne distinguait pas Ts de la flexion. Aujourd'hui on écrit toujours vingt et un ans. Vingt et cent prenaient en général, dès 1'époque la plus ancienne, la marqué du pluriel: Mil et cent et quatre-vinz et dix sept anz, Villehardouin, 1. — Quatre eens quatre vingtz quarante et quatre, Rabelais, II, 2. — Une armée de trois eens mille hommes, La Bruyère, I, 370. — La règle qui veut que I's se supprime, si le mot est suivi d'un autre nombre (trots cent quatre, qaatre-vingtdeux) ne date que du xvme siècle; Voltaire écrit quatre vingts et un ans a cöté de quatre-vingt deux ans. Elle a été de nouveau abolie par 1'Arrêté ministériel. On trouve d'ailleurs 1'hésitation entre la forme variable et la forme invariable dès le moyen age: onze vint / poissiez choisir, Oarin le Loherain, II, p. 143. Set vint mil armés ont promls, Wace, Brut, II, p. 1361). LE NOM DE NOMBRE ORDINAL ordinaux ^a syntaxe des nombres ordinaux n'offre que rempiacés par peu de chose a relever, des cardinaux. « . , , , . Au xiue siècle nous trouvons la tournure: lui troisième, soi quart, etc: Je me chargeray de moy disiesme de chevaliers, Joinv., 136, c-a-d. de neuf chevaliers, moi étant le dixième. — Plnte qui a la cort venolt soi-quinte, Renart, I, 279. — Monta ses oncles lui septime, Vair Palefroi, 507. Au xvie siècle on constate que le cardinal tend a remplacer 1'ordinal devant les dates, les chapitres d'un livre, les noms de rois, etc. C'est sans doute Timprimerie qui en est cause: le fait qu'on écrivait Jules III a fait que dans la prononciation on a remplacé Jules troisième par Jules trois. Les combinaisons avec premier ont *) K. Nyrop, Gramm. hist. de Ia langue fr., II, p. 337. 40 NOM DE NOMBRE pu se maintenir, grace a leur emploi fréquent; de même: Charles Quint, Slxte Quint, a cöté duquel on rencontre aussi Suite cinqulesme, Sat. Ménippée, p. 141. — Pourtant on trouve encore couramment: Estats convoquez au dixiesme Janvier 1593, Sat. Ménippée, p. 17. — Le ieudi quatriesme octobre, Journal d'un Bourgeois de Paris, 25. — Les quatre et sixiesme livres de Virgile, Pasquier, Les Recherches de la France; ici pourtant on pourrait expliquer quatre comme la forme abrégée du nombre ordinal — Au xvne siècle les exemples sont encore fréquents: On montra au pape Adrlen sixième le Laocoon du jardtn de Belvédère, Balzac, Prince, XII. — Cette folie noce se fera devant le quinzième janvier, Mme de Sévigné, VI, 164. — Vers la fin du siècle 1'usage moderne semble Temporten Si Vaugelas s'y oppose, le Père Bouhours, Ménage, Th. Corneille et TAcadémie Tadoptent; TAcadémie ajoute: „Cela peut estre venu de ce qu'ordinairement on escrit ces mots en chiffre". Cf. Vaugelas, I, 215—217. CHAPITRE V PRONOMS PERSONNELS1) A. OBSERVATIONS GÉNÉRALES v!^fl 58. En latin, les pronoms personnels étaient ëgo, Ijle pronom „ . „ /*- personnei. tu» n 0 * v 0 s- Pour la 3e personne u n existait pas °- de pronom, mais on se servait du déterminatif is, (p toutes les fois qu'on ne pouvait s'en passer. Ce pronom i s se perd complètement dans la latinité postclassique et est supplanté peu a peu par ipse, ille et hic. C'est le pronom ille qui, presque^ partout, a remporté la victoire et qui, du moins en frangais, est devenu le pronom personnel de la 3e personne2). 'B. EMPLOI DU PRONOM SUJET 59. En latin classique le pronom sujet ne s'exprime Pronom sujet s , en latin. Pas> a moins qu on ne veuille le faire ressortir: Dico hominem esse mortalem; Si vos valetis, ego valeo. Si le sujet est accompagné d'une apposition, le latin , n'exprime pas le pronom: Themistocles ad te veni, „Moi, Theimistocies, je suis venu a vous". Ce non-emploi du pronom s'explique par le fait que les dési- 1) M. Behnschnitt, Das franz. Personalpronomen bis zum Anfang des Xll"1 lahrh. Diss. Hcidelberg, 1887. — Tobler, I, 33, Li seneschaus, il et ses frère; III, 8, Dont und en in pronominaler Punktion; III, 18, Vom Reflexivpronomen vous und nous als casus zu on. — G. Rydberg, Ueber die Entui. von illui illei auf franz. Boden und das Eindringen der Form lui als schwachtoniger Dativ (Bausteine zur rom. Phil., p. 369—385). — G. Rydberg, Gesch. des franz. oi, I, p. 619, Die Entw. von lat. ego im franz. — W. Menshausen, Die Verwendung der betonten und unbetonten Formen der Personal- und Possessivpronomina bei Wace, Beneeit und Crestien. Diss. Halle, 1912. — E. Pans, Das neutrale franz. Pronomen le in pradikativer Verwendung. Diss. Göttingen, 1917. 2) Cf. Keil, Grammatici latïni, V, 49, 32. sneyders de vogel, Syntaxe historique. 2me édition. 4 42 PRONOMS PERSONNELS nences verbales a elles seules indiquent avec une clarté suffisamment grande le sujet de la phrase. En latin postclassiquè 1'emploi du pronom ne s'étend que trés lentement; dans: nos ut tristiores ad tarn viles accessimus cibos, Pétrone, 88, 22, le pronom n'est pas atone. Voila donc un fait intéressant a relever. Tandis que les pronoms régimes en latin sont tantót atones, tantót toniques, les pronoms sujets sont_presque toujours accentués. La conséquence de ce fait est que le sujet ne revêt qu'une seule forme en vieux frangais, tandis que les autres cas présentent deux séries de formes (le développement ëgo > gié et jo, jou, je est obscur1); la disparition des formes toniques nos et vos est un fait récent cf. pourtant p. 43, note 2). Rem. C'est aux latinistes de décider si la constatation de M. Sonnenschein est exacte, d'après laquelle le pronom ego atone serait plus fréquent que ego tonique dans les vers dramatiques. Cf. E. A. Sonnenschein, Ego emphatic and. unemphatic in rises and fall of old dramatic verse, 1921. 60. Voyons maintenant les changements qui se Pronom sujet , • , - en francais. Produisent en vieux francais. Par suite de 1'affaiblissement des terminaisons les formes verbales deviennent de plus en plus uniformes: on en' arrivé a dire chat pour quatre ou cinq formes du verbe chanter. Plus donc les désinences s'affaiblissent, plus la langue, pour maintenir la clarté de la phrase, a besoin d'autres moyens pour exprimer les personnes, et plus 1'emploi du pronom personnel devient général. C'est la la marche générale; entrons maintenant dans quelques détails, et prenons comme point de départ les vers suivants: Tote la charte escrist, Com s'en alat et come il s'en revint, Alexis, 57, 4—5. Oncles, fait-il, estes sains et haiiiez, Cour. Louis, 1157. On le voit, le moven age est une époque de transition, il y a pleine liberté de mettre ou de ne pas mettre le pronom. Pourtant, il y a un cas oü Ton emploie toujours le pronom sujet, c'est pour éviter que la phrase ne commence par un auxiliaire, ou par 1) Cf. pourtant G. Rydberg, /. c. EMPLOI ET NON-EMPLOI DU PRONOM SUJET 43 un pror^ni^gime, c.-4-d. par des mots qui sont enclitiques dans la vieïïleTangue et qui doivent s'appuyer par conséquent a des mots précédents. Ainsi dans les phrases suivantes: Jo ai paiiens veduz, Roland, 1039. Jo*/ ai laissiét en une marche estrange, Roland, 839. Criem qu'ele seit perdue, Pèlerinage, 322. Mais tu ies morz, Cour. Louis, 152. Dans les deux derniers exemples les mots que et mais étant [. prochtiques ne peuvent précéder 1'auxiliaire enclitique. Quand 1 accentuation de la phrase francaise se modifie et oue le^mT^ enclitiques disparaissent, on trouve naturellement fréquemmeniJ des infractions a la règle que nous venons de donner i). Forme tonique 8j Le pr°nom su->'et s'introduit donc de plus en et atone. Plus Pour remplacer les terminaisons qui se perdent Par suite de ce fait une nouvelle distinction s'établit, la même qui existe déja pour le pronom régime, celle entrela', forme atone et la forme tonique. Ce phénrW™ , ah ~ pr-dnirr de bonne heure, paree que, sans cela, les pronoms vos et nos I seraient devenus veus et neus2). Or, ces formes ne se trouvent jamais, on a toujours vous et nous, donc a 1'époque oü ou se changeait en eu, c.-a-d. au xii* siècle, 1'emploi atone était deja si frequent qu'on a pu assimiler la forme tonique a la forme atone. Pourtant je, tu} il se maintiennent jusqu'au xvie siècle comme I formes toniques. A cette époque Palsgrave, Meigret, Ramus, H. Estienne, réclament la forme du régime. Si 1'on trouve dès le xn<= siècle des constructions comme: S'irons tornoiier moi et vos, , Chrétien, Yvain, 2501, !) Cf. L'Ordre des mots, § 436 et suiv. *) a moins qu'on admette que ö latin libre accentué donne en francais °" T ^ rf' M' Salvepda de Grave dans Neophilologus, III p. 165; et dans Med. der Kon. Akademie van Wetenschappen, Afd Letterkunde, LUI, A, 3, 1921, Over de beklemtoonde klinker in amour en enkele andere woorden. .1 1 VA \ * IA. 44 PRONOMS PERSONNELS 1'emploi de moi s'explique par une contamination entre s'irons tornoiier je et vos et s'irons tornoiier entre moi et vos; cf. § 390. Je qui jadis chantai Typhon, Scarron, Virgile travesti, l, l, est un archaïsme voulu. Aujourd'hui on ne trouve out Ie soussigné dans le langage du palais, qui affectionne les vieilles tournures. Rem. fc Du Xine jusqu'au xvie siècle on trouve la forme te, plus faible que fu; aujourd'hui dans la langue populaire t' devant une voyelle est peut-être une abréviation de tu: t'es sorti de ta Croiz, J. Rictus, Les soliloques da pauvre, p. 108. Rem. 2. En provencal ieu s'emploie aussi comme régime: Dins ieu sènte courre un bonur que me poun, „je sens courir en moi un bonheur qui me navre", Mistcal, Mireille, IV, p. 144. 'Mt. Rem. 3. Un emploi curieux du pronom est celui qu'on constate dans les textes les plus anciens, dans les locutions affirmatives et négatives: o il, o .fa o tu, non il, nen il, etc, et dans des questions oü le pronom ne sert nullement a mettre en reliëf le sujet et a 1'opposer a une autre personne: Eva, ca sui venuz a toi. — Di moi, '^f Sathan, et tu por quoif Jeu d'Adam, 205. - II semble qu'un emploi analogue se trouve encore dans quelques patois, du moins G. Sand, Mauprat, 35, écrit: Allons, canaille, suis le sentier et laisse-nous tranquilles avec tes sottises. - Non moi, dit l'enfant. (Cf. en hollandais les vieilles tournures Ja ik, Wel neen ik, encore gardées dialectelement). Aux xive et xve siècles Tempioi dü pronom sujet est assez général. Si, au xvie siècle, il semble s'être produit un recul, c'èst 1'étude et 1'imitation des auteurs latins qui 1'explique: la langue parlée a certainement eu en horreur toutes ces suppressions : Ramus, J. Garnier, H. Estienne exigent 1'emploi du pronom sujet, et Vaugelas, II, 143 et 382, donne des régies dans ce sens. I Pourtant, même au xvue siècle le pronom manque souvent dans I les phrases interrogatives: Comment vous appelez? Pierre de Mans, Odes, mais pour le reste, 1'emploi du pronom sujet est a peu prés ce qu'il est aujourd'hui; seuls les auteurs archaïsants, comme La Fontaine et Scarron, 1'omettent encore souvent: Que dirai plus, La Font, Contes, IV, 2, 130. 62. II neutre1) — Jusqu'ici nous n'avons parlé Le neutre il. ^ pronoms maSculins et féminins, nous avons écarté le pronom neutre il, dont le développement est un peu autre. i) Cf Horning, Roman. Studiën, IV, p. 220. - G. Paris, Romania, XXIII, p. 161. - Chabaneau, Romania, VII, p. 329. - H. Piatt, Neuter il in old French, Diss. Strasbourg, 1898. LE PRONOM NEUTRE IL 45 En effet, tandis que pour les autres verbes on a de bonne heure sentT le besoin d'exprimer la personne qui fait Taction, il n'était pas nécessaire de le faire pour les locutions et les verbes impersonnels qui, n'exprimant pas une action personnélle, se passaient tout naturellement d'un pronom sujet; aussi manque-t-il dans les monuments les plus anciens- Si le pronom Ü s'est pourtant introduit même dans ce cas-ci, cela est dü a TajiaJcjjiejieji^utj^ II est donc naturel que le pronom il soit plus lent a pénétrer que les vrais pronoms personnels. D'ailleurs, au xvie et au xvne siècle même, il se resseirtaicoré_dej^ démonstrative, que nous rendrions par „cela" et qui le rend * impropre a fonctionner comme sujet d'un verbe impersonnel: II me couste bon, Rabelais, II, 17. — Et firent ce qu'ils purent pour lui aider, mais il leur fut impossible, Marg. de Navarre, Heptam., II. Je ne sais ce que c'est, mais je sais qu'il me charme, Corn., Psyché, III, 3, 1059. Voulons-nous nous asseoir? — II n'est pas nécessaire, Mol., Misanthrope, III, 4. Le masculin a, lui aussi, gardé longtemps la valeur démonstrative ou plutót déterminative: ' Honis soit il ki en femme se fie, Jj&as*™*'- ><~*J Jeanroy et Langfors, Chansons satiriques, XXXV, 15. II est bien heureux qui peut avoir dix mille écus chez sol, Mol.t Avare, I, 5. Au xvne siècle, oü 1'emploi des autres pronoms sujets est devenu fixe, le pronom neutre, quoique assez général, est encore quelquefois omis; surtout devant les verbes falloir, sembler, y a, d quoi sert, si besoin est, etc, et on a gardé plusieurs traces de cette construction dans la langue actuelle: n'importe, tant y a, grand bien vous fasse, etc. "t 'mA cf-e Rem. 1. Pour la lutte entre il, ce et cela voir le Pronom Démonstratif, § 93 et suiv. R e m. 2. On trouve parfois la forme el, remontant a illud > Mum: Quant el veneit al desevrer, Benoit de Ste-More, Chconique, I, 571. Cf. aussi Meyer—Lübke, Rom. Etym. Wb., s. v. hoe, et Romania, XXIII, 163, oü se trouve la forme liégeoise awe = oei, qui s'est généralisée au détriment de oil. Rem. 3. fa se substitue souvent au pronom il dans le langage familier: Ca pleut bien, ca tonne, ca fait grand vent, ca coule, „le terrain est glisssant"; cf. Plattner, II, 2, 39. 46 PRONOMS PERSONNELS Pleonasme 63. a) Quand le sujet est un substantif, on n'a pas Répétition du besoin d'un pronom. Cependant, quand le sujet est pronom sujet. ur\ peu éloigné du verbe — et même cette condition n'est pas toujours remplie —, un pronom rappelle souvent le sujet qui, par la, ressort davantage: Li rois de France, qui sot qu'ils estoient la, il s'adreca.., joinv., 19. — Les sciences qui règlent les mceurs des hommesj.. elles se meslent de tout, Mont., I, 29. — Au xvne siècle eet emploi est encore fréquent: Quiconque veut vivre en' homme de bien, il doit... (condamné par Vaugelas, II, 4). Aujourd'hui cette répétition n'est plus permise, quoique la langue populaire s'en serve encore couramment et sente le pronom presque comme un préfixe formant corps avec le verbe: C'est pour le coup que les autres lè-bas, ils vont rire, H. Monnier, I, 173. — Dès que les Frangais ils deviennent soldats, ils se conduisent comme des dégoutants, Benjamin, Gaspard, p. 12. — Même dans 1'interrogation: Pasque l'Gouvernement, il paiera-t-il, au moins, tout c'qui s'ra ravagé? ibid., p. 141. Rem. 1. Cf. aussi Gilliéron, et Edmont, Atlas Linguistique, 311 (Les pommiers (ils) commencent a fleurir); 343 (Le ciel est couvert de nuages); 383 (Les cerisiers ont déja commencé a fleurir); 1064 (Les chênes portent des glands). Cf. Zeitschrift für franz. Sprache und Litt.. 1914, p. 136, et Herzog, Neufranz. Dialekttexte, § 598. Rem. 2. La répétition est normale dans la région picarde, qui confond l'article féminin avec l'article masculin et qui réussit ainsi a distinguer quand même le genre on constate a donner a leur la marqué du personnel. " ^ pluriel: veu qu'il leurs avait donné de passe-temps, Rab., I, XX, 17. — Mais cette förme~"n'a pas vécu longtemps. Pronom qui se 72. Le pronom le, qui aujourd'hui reste invariable rapporte a un qUand il se rapporte a un adjectif ou a un subou adjectif stantif indéterminé, est variable dans 1'histoire de indéterminé. . . — rapportent a peu a peu leur emploi et ont fini par exprimer des noms de tous les rapports qu'expriment aussi les prépositions personnes. , , , ,. , ff1 de et ab1). par exemple: inde reddo rationem, Anthimus, Epist. praef.2). Ces deux petits mots renvoient en général a un nom de chose, souvent aussi a un nom de personne, de sorte que dans les vers du Roland, 3725 et 3729: Pitiét en at, sin pioret Ventperedre. Quatre contesses sempres i at mandedes, il est possible que les pronoms en et y se rapportent a. Alde. Ils tiennent même la place des pronoms de la le et de la 2« personne: II n'y a homme au monde qui soit d vous si véritablement que j'y suis, La Rochef., Lettres, III, 138. — Vaugelas, I, 177, dit: „y pour lui est une faute toute commune parmy nos Courtisans". On trouve aujourd'hui dans la langue familière: j'y pense, j'y songe. — Vous comptez sur Madame Lebelly? — J'y compte beaucoup, Capus, Un Ange, I, 4. — Je connais un gargon élevé auprès de sa cousine. 11 passa toute la première partie de sa carrière d n'y pas faire attention. Dans sa 35' année il en tomba subitemênt amoureux, Hervieu, Bagatelle, I, 9. — FaudraU pas aussi que l'curé il s'aviserait de m'dire qu'ga y plait pas, Benjamin, Gaspard, p. 62. - Ah! si je tenais la carne qui me Va faite. Tu parles que j'y casserais la gueule, que j'y défoncerais la bide, que j'y..., Barbusse, Le Feu, p. 12. En pronom s'emploie3): Q) c°mme complément des verbes qui demandent la prépositlon de. i) Cf. Stolz-Schmalz, Lateinische Grammalik, p. 629. - Voir le chamtre des prépositions, § 403 et suiv. «) De même hinc et unde: civitaiem ... „nde (= de qua) scriptam est dixtsse Pharaonem ad Joseph, Peregrinatio, VII 9 - Voir aussi les pronoms relatifs et interrogaüfs dont et on, § 125 et suiv ») Cf. Tobler, III, 38-47. Dont und en in pronominaler Funktion. 60 PRONOMS POSSESSIFS 2) comme génitif possessif. 3) comme génitif partitif. Dans ces trois cas, il peut se rapporter a des noms de personnes jusqu'au xvue siècle. Exemples: 1) Quant d moi, mon père, il faut en juger autrement, Pascal, Provinc, XVII. — Encore aujourd'hui dans la langue familière: C'est une jeune fitte charmante. Je ne veux pas en dire du mal, Capus, Un Ange, I, 15. — Cf. la phrase de Hervieu, citée plus haut: // en tomba subitement amoureux1). — 2) C'est un jeune esclave . . ., Vage en est de selze ans, La Font., L'Eunuque, II, 1, 459. — On préfère aujourd'hui le possessif. — 3) L'emploi du génitif partitif est toujours trés vivant: /'en ai vu plusieurs. — /'en ai mangé. On se sert encore de en d'une fagon un peu vague, dans plusieurs locutions, mais Tusage n'en était pas trés fixe au xvne siècle, de sorte qu'on rencontre: il co&te, il est ainsi. — Puis je mais, Mol., Misanthrope, III, 4. — // est des hommes, comme de ces animaux, Vaugelas, I, 366. — Cette omission du pronom est blamée par le Père Bouhours, Patru, Th. Corneille et 1'Académie. Rem. L'italien présente Tin emploi des plus curieux: les adverbes inde eccehicetibi, qui'donnent ne, ci et vi, y sont devenus les pronoms régimes de la le et de la 2« personne du pluriel: Arivedercl Cf. en hollandais Geef hier („aan mij"). PRONOMS POSSESSIFS2) observations 79. Le latin connait les pronoms possessifs suivants: générales. meus, tuus, suus, noster et vester. Toutes les fois que le rapport entre possesseur-et objet possédé est assez clair, surtout quand le sujet de la phrase et le possesseur sont identiques, le latin ne se sert en général pas du pronom possessif. Pourtant en latin_postclassique la tendance se manifeste de plus en plus a mettre partout le pronom (1 i b r u m a m i s i i) Egalement en italien: Mi dissi che spesso gli parlavi di me, e che ier Valtro glien' hai scritto, Fosoolo, Ultime lettere di J. Ortis. *) W. Kramer, Die Sgntax des Possessivpronomens im Franz., Diss. Göttingen, 1905. — Meyer-Lübke, Grammaire des langues rom., III, § 72—84.— A. F. Höring, Zur Gesch. des Possessivpronomens im Franz., Diss. Heidielberg, 1912. FORMES TONIQUES DU PRONOM POSSESSIF 61 > meum librum amisi), mais aujourd'hui encore il y a des cas oü le rapport possessif n'est pas exprimé (je léve les yeux), ou est exprimé d'un« autre facon (je me Utve les mains). Par suite de cet emplei régulier le pronom est tantöt accentué tantöt inaccentué et on obtient donc en frangais, grace a 1'évolution phonétique des mots, deux séries de formes: les pronoms toniques et les pronoms atones. Les formes ma, ta, sa, qui en vieux frangais s'élidaient régulièrement devant une voyelle, ont été remplacées dans cette position par mon, ton, son; ce phénomène, dont les premiers exemples se rencontrent dans Saint Bernard (f 1153), devient fréquent a partir du xiv siècle; m'amie et faire des mamours sont des traces de Tancienne construction. Rem. On a donné plusieurs expljcations de ce fait: Herzog 1'attribue a 1'analogie de mots comme bon: la prononciation n'aurait pas distingufPSrin ~ami de bonne azn/ëT^Voretzsch admet 1'influenoe des mots art, ombre, enfant, hoir, qui, sont des deux genres-. M. Risop y voit une tendance a se débarrasser des formes faibles m', f, s'; le seul moyen de les écarter était de les changer en mon, ton, son; le fait que nostre, vostre, leur présentent une forme uniquè aux deux g~enrés"a"~~pn hater le mouvement (Zeilschrlft I. ram Phil X"L1, p. 7B-lluj: Formes toniques ' 80. Les formes atones sont de simples adjectifs. et formes atones. qui; en ^ placent tantót devant, tantöt après les substantifs: pater noster ou noster pater, mais qui, en frangais, les précédent toujours, paree que cette langue ne connait plus guère 1'enclise; cf. L'Ordre des mots, § 450. Les formes toniques s'émploient: 11 comme attribut. — 2) comme prédicat, — 3) comme substantif. 1) comme a 11 r i b u t, le pronom possessif se trouve a 1'époque la plus ancienne employé sans article: par soue dementia, Eulalie, 29. — Mais dèsrle douzième siècle, le pronom se construit presque toujours avec_ un autre déterminatjf: Paien escrient: Me nos, Mahum! Li nostre deu, vengez nos de Carlun, Rol. 1906-7. Tant mar i fu Ia seue grant beauté, Prise d'Orenge, 258. Fors por faire chevalerie A claus de Ia vostre maisnie, Tristan Ménestrel, 81—82 (Romania, XXXV). li 62 PRONOMS POSSESSIFS Et n'appréhendez plus X interruption notre, Mol-, Dépit amoureux, II, 6. Cette mienne épée Dans son infame song alloit.être trempée, La Fontaine, Le Florent, sc. 3. Quelque sien voisin, depuis peu de retour, L'avoit vu plein de gloire et fort bien en la cour, Corn., D. Sanche, V, 7. Deux siens voisins se laissèrent leurrer, La Fontaine, Contes, III, 3, 30. Un sien fils écolier, qui se nommoit Horace, Mol., L'Etourdi, IV, 1. Aujourd'hui, on ne place plus le pronom accentué devant le substantif, excepté un mien ami, un sien cousin, employés surtout dans le style familier. Rem. 1. Vaugelas, II, 64, mien, tien, sien: „Ces trois pronoms ne se mettent plus daUsIe beau stile de la facon qu'on avoit accoustumé d'en user; p. ex. on disoit autrefois, comme le disent et 1'escrivent encore aujourd'hui ceux qui n'ont pas soin de la pureté du langage, un mien frere, une tienne sceur, un sien amy. Mais on ne s'en sert plus ainsi, et si 1'on demande, comme il faut dire, on respond que, s'il y a plusieurs freres, il faut dire, un de mes freres, et s'il n'y en a qu'un, mon frere; de mesme une de tes sceurs ou ta sceur, un de tes amis ou ton ami". — Pourtant dans une remarque posthume, Vaugelas, II, 452. admet a la mienne volontê, „dont M. Coëffeteau use souvent". Rem. 2. Cette construction, que 1'ancien espagnol a connue aussi (Por la SU voluntad non seriën alli llegados, Cid. 2349), est restée en italien: Le mie prigioni. 81. 2) Comme prédLcat: // puet bien estre que li eritaiges est vostre, Joinv., 676—777"*— Cette construction est d'un usage constant au moyen age.; au xvi* siècle pourtant les grammairiens Palsgrave et^Garnier exigent que le pronom possessif tonique soit remplacé par le pronom__personnel préeédé de d: Palsgrave, p. 346, traduit atl is ours par tout est d nous. On voit les deux constructions dans la phrase suivante de Rabelais: Voire mais, ce champ n'est pas tien, il est a moy et m'appartient, II, 427. Malgré la protestation des grammairiens, notre construction s'est maintenue longtemps et on en trouve encore aujourd^mi des traces: Je suis tout vötre; Cette idéé me parait juste, je la fais mienne; être, devenir, rester, faire, dire, regarder comme sien (jamais leur). FORMES TONIQUES ET ATONES 63 82. 3) De tout temps, le pronom tonique a été employé comme substantif: J'ai vu les vólreis, y mettre du sien, faire des siennes, etc. Cet emploi substantif du pronom s'est même étendu au détriment de 1'emploi adjectif. En effet, en vieux francais deux possessifst^fa pouvaient précéder un seul substantif, p. ex: le mien et tien père/^to tandis qu'on dit aujourd'hui mon père et le tien, oü le second pronom est substantif. De même que dans cet exemple un seul substantif est accompagné de deux pronoms. on trouve fréquemment fcnypronom déterminant plusieurs substantifs: ses domestiques, carrosses, etc, construction qu'on rencontre d'ailleurs aussi avec l'article: les hommes et femmes de cette ville. Un reste de cet emploi se trouve dans: ses père et mère, ses Mens et revenus, d mes risques et périls, et, au singulier, dans: en mon lieu et place, en mon dme et conscience. Le latin aussi connait la non-répétition du pronom: uti... oppidis suis vicisque^xusiis una dm lis proficiscantur, Caesar, de betto galt., I, 5. Le pronom de 83- La Présence de deux séries de pronoms est un te troisième des traits les plus caractéristiques du frangais, mais personne. ü y a d'autres points sur lesquels le frangais se différencie du latin. En latin le pronom de la 3e personne su.us était un pronom réfléchi comme g)c-a-d. qu'il se rapporte, en général du moins, ausu^d£_kjMse;. dans les autres cas on se servait du génitif 2) amiserunt libros (suos) (leurs livres); 3) amisi librum eius (son livre); 4) amisi libros eorum (leurs livres).'&Ui» Ivwa*,*ü En latin.postclassique on trouve, a cöté d'autres constructions: 1) amisit suum librum; 3) amisi illius librum; 2) amiserunt suos libros; 4) amisi illorum libros. Seulement, cet emploi réfléchi, qui ne vaut que pour la 3« personne et non pour les deux autres, va se perdant de plus en plus: Meritis suis gratias referre volui, Corpus inscriptionum lat., IX, 5417, oü Ie latin classique aurait mis meritis eius. defislAinsi on avait en latin classique: Vf*amisit librum (suum) (son livre); 64 PRONOMS POSSESSIFS Si donc de ce cöté le pronom a étendu son domaine, d'autre part il a perdu du terrain, paree que ülorum remplace peu a peu suos: le besoin de distinguer le pronoin marjg[uarrt un seul possesseur, du pronom marquant plusieurs possesseurs s'acoentueT^êTüi de rJistinguer le pronom réfléchi du pronom ordinaire ne se fait plus sentir. Nous avons constaté la même tendance dans le pronom personnel, mais la le réfléchi a su se maintenir dans une certaine mesure (voir § 77). Nous avons donc obtenu pour la période préromane en France: 1) amisit suum librum; , 2) amiserunt illorum libros; 3) amisi suum librum; 4) amisi illorum libros. Le génitif illorum a donné leur en francais, mais il a perdu son sens primitif et est devenu adjectif possessif comme les autres, au point qu'il prend même Ts du pluriel — mais au xive siècle seulement —, sans en arriver pourtant a prendre également la marqué dü féminin: "leures femmes, comme meilleurs est devenu meiUeures. La vieille langue présente encore quelques exemples oü son se rapporte a un possesseur au pluriel: Li solell e la tune perdlrent ses clartez, Alexandre le Grand, 23. Muit est de malvais hommes qui onkes ne font bien, Altrui tolent le lor et poi donent del sien, Poème moral, 12b1). Rem. 1. Cette construction, que 1'ancien italien et le rhéto-roman connaissent aussi, s'est maintenue en espagnol et en portugais: suyo et su se rendent en francais par son ou par leurs. De même en provencal moderne et en italien populaire: Ansin li bèus enfant Dins l'innoucènci de soun age (= de leur age), Mistral, Mireille, II, p. 60 (éd. Charpentier); si dos amo (= leurs deux ames) soun partido, ibid., p. 72. — Lo scandalo di que' villeggianti col su' figliolo, R. Fucini, Le veglie di Neri, p. 58 (Hoepli). Rem. 2. On n'a pas senUlebesojin_de_dM féminin d'un possesseur"^masculin, ou, si on 1'a senti, on s'est servj^unê périphrase: II suppliail Angélique de combler ses vaeux et ceux de SOlT père ft elle, A. Karr, Cf. §§ 67 et 81. i) Cf. Tobler, II, p. 91 et 92. LE PRONOM DE LA TROISIÈME PERSONNE 65 Pronom 84. Comme il est trés naturel d'exprimer la pos- pron^'pM- session Par la Préposition def la langue alongtemps sonnel au dit de lui, d'elle, correspondent a e i u s- en latin, génitif. et même de mo^ ^e vous< etc L'anme de tei en pareïs seit mise, Roland, 2934. Se la corteisie seüssent Et la grant proesce de lui, Chrétien, Chev. au Lyon, 4022—23. et au xve s.: Mais se la fille s'esjouyssoit de sa portee, la me re d'elle en avoit d cent doublés joyes, Cent Nouv. nouv., XIV, p. 120—21. Cette construction expfknait, a 1'encontre du latin, la même idee que le pronom possessif.. Mais par suite'de cettéTcirconstance, elle n'était pas nécessaire et son emploi s'est donc restreint de plus en plus a des cas oü elle était utile pour éviter une ^quivoque ou pour mettre en évidence le pronom. Au xvii^ siècle, on ne trouve le génitif possessif que dans ce cas-la, ou coordonné avec un substantif au génitif: Je me rends donc sans résistance d la merci d'elle et du sort, Malh., 1,131, 37—38. —lltiral'épéepour la frapper, si les frères d'elle ne Ven eussent empêché, Vaugelas, Quinte Curce, VIII, 3. — C'est d la tragédie d'elle et de moi que je songe, Barbusse, L'Enfer, p. 319. Quelquefois on trouve un emploi périphrastique du pronom possessif, combiné avec la construction du génitif: Elle ot lil filles de III barons dont lor nons vos homerai, Rom., XXXI, p. 262, construction plus fréquente encore en provencal et en catalan, et naturellement en espagnol et en portugais, oü Tambiguïté du sens " de suyo et de su la rend souvent nécessaire: sus cartas de ella = „ses lettres", et non: „leurs lettres" l). Aujourd'hui, si Ton veut appuyer sur le possesseur, on fait précéder le substantif par le pronom possessif et on le fait suivre par le pronom personnel accompagné de la préposition d : mon oplnion d moi, ou on intercale propre: ma propre expérience. Soit hasard, soit volonté, ses petites lèvres a elle rencontrèrent ses lèvres a lui, Maupassant. „La fortune de ton frère et la tienne i) Cf. Tobler, II, p. 89—90. 66 PRONOMS POSSESSIFS indique qu'il s'agit de deux fortunes différentes; La fortune de ton frèr'e et de toi signifie qu'il s'agit d'un seul bien indivis* (Brunot, La pensée et la langue, p. 149). 85. Nous avons dit plus haut que le pronom Pronom * ; , , possessif et possessif s'introduit la ou le latin classique ne article. s,en paSj quatKi ie possesseur et le sujet sont identiques. Ainsi on trouve le pronom même dans des phrases comme J'ai mal d ma tête a cöté de la construction avec l'article: Vers terre tint le chief anclin, Chrétien, Chev. au Lyon, 3962. Le francais se sert souvent du datif du pronom personnel pour indiquer la possession: Je me lave les mains. Cette même construction se trouve en latin: Versatur mihi ante oculos, Cic, Catal., iv, ii. sens du pronom 86. Comme en latin le pronom possessif peut avoir possessif. le sens d'un génitrr objectif j dans aller d sa rencontre, d son secours, le pronom indique une personne qui est le complément direct de rencontrer et de secourir. Si nous nous désarmons, le roi nous mesprisera, nostre mespris (= le mépris qu'il aura pour nous) le donnera d nos ennemis . . ., d'Aubigné (Darm., p. 88). N'a suin de mun servise (= me servir), S. Thomas, 750. On trouve également le pronom devant des substantifs qui n'expriment pas une action transitive: Ma promesse, „ce qu'on m'a promis", mon dü, „ce qu'on me doit", mes injures, „les injures qu'on m'a faites". Je ne cherche point d venger mes injures, Rac, Athalie, II, 5. Dans d'autres cas, le pronom exprime toute sorte de rapports: d mon intention, d mon endrolt, en sa mémoire, avoir de ses nouvelles, son pareil, cela sent son rhéteur, etc Un emploi curieux se trouve dans la Passion du Palatinus, 1398, oü Jésus dit: Je te ferai en mon dieu croyre (dans le Dieu que je suis, en ma divinité). La vieille langue était plus libre que la langue actuelle, pourtant on trouve encore aujourd'hui beaucoup d'exemples de cette construc- SENS OBJECTIF DU PRONOM POSSESSIF 67 tion. Qu'on se rappelle; d sa suite, en son honneur, d son égard, d ma vue, sauf votre respect1). Rem. Dans le Canada le vocatif son père et sa mère signitie mon père, ma mère; cf. Hémon, Maria Chapdelaine. De même dans le langage enfantin: Embrassez sa mémèrè; disez bojou a son père, donnez sa papatte a la dame*). PRONOMS DEMONSTRA TIFS 3) OBSERVATIONS GÉNÉRALES Vaieur démon- ®7. Les pronoms démonstratifs désignent en premier strative et lieu une personne ou une chose par un geste: quand détermlnative. ... ,. . . ,. ... , . , on dit: ce livre-ci et ce uvre-la on mdique du doigt le livre voulu. Ce geste pourtant peut manquer souvent: notamment quand on parle de deux substantifs déja nommés, la désignation reste précise sans qu'on les indique du doigt: Mon frère a lutté avec le voleur, celui-ci a pourtant reussi d s'êchapper. Dans nombre de cas ensuite, oü Ton n'oppose pas deux personnes ou deux choses, p. ex. ce livre me plaUr le sens démonstratif s'efface un peu, et le pronom adjectif se rapproche du sens de l'article (le livre me platt), le pronom substantif du pronom personnel il. Une des conséquences de cet effacement du sens démonstratif précis est le besoin qu'on a souvent de le mieux déterminer. Dans celui qui a fait cela le pronom a lui seul n'exprime rien, c'est au fond la phrase relative qui est chargée d'exprimer la pensée. Le frangais a un pronom spécial pour cette valeur déterminative; c'est le pronom celui, celle, ceux, celles, la oü le hollandais se sert souvent des pronoms personnels hij die, zij die (a cöté de degene, !) Tobler, II, 10. — C M. Robert, Gramm. fr. *, p. 181—182. — L. Spitzer, Aufsatze zur rom. Syntax und Stilistik, p. 5 et suiv. 2) H. Bauche, Le langage populaire, Paris 1920, 7. 72. — L. Spitzer, Veber Personenvertauschung in der Ammensprache (Germ.-Rom. Monatschrift. X, p. 247). 3) A. Gieseke, Die Demonstrativa im Altfr. mit Einschluss des XVI Jahrh., Diss. Rostock, 1880. — E. Lemme, Die Syntax des Demonsfrativpron. im Altfranz., Diss. Göttingen, 1906. — Ch. E. Mathews, Cist and Cil, a syntactical studg, Baltimore 1907 (cf. Rom., 1909, p. 176). — Cl. L. Meader, The latin pronouns is, hic, iste, ipse, a semasiological sfudy, N.-York, 1901. 68 PRONOMS DÉMONSTRATIFS wie). Quant au déterminatif adjectif, c'est l'article défini ou indéfini: Vhomme (un homme) qui n'est pas content... Nous verrons que 1'histoire du pronom démonstratif consiste pour une bonne part dans 1'effacement du sens démonstratif, dans le passage du pronom démonstratif au pronom personnel, a l'article, au pronom déterminatif, d'un cöté; et de 1'autre, dans la création de nouvelles formes destinées a remplacer les pronoms dont le sens précis s'affaiblit. Is, idem, ipse -uouteJ OCtvru-f*'** 88. On range en général parmi les pronoms démonstratifs: is, idem, ipse. . Constatons que les deux premiers ont disparu. Dès le latin vulgaire une confusion se produit entre hic, is, is te, ipse, ille, ce qui indique qu'on ne sent plus la valeur précise de ces mots: c'est ille qui en francais va prendre les fonctions de i s, et un composé de ipse celles de idem. En effet ipse, qui sous la forme de es se trouve en vieux frangais dans quelques locutions plus ou moins figées, s'est soudé au mot met, primitivement suffixe (egomet ipsimus deviertt donc ego metipsimus), pour former le mot metipsimus >• même, puis, employé avec l'article (le même), il a la valeur exprimée en latin par idem, passage de sens qu'on retrouve dans plusieurs autres langues et qu'on constate d'ailleurs déja en latin postclassique: Exurgit interea sub ipso tempore Cyrus („vers la même époque"), Commodien, Carmen apol., 823. x Hic, iste, ille 89. Les vrais pronoms démonstratifs sont: hic, is te, ille, qui signifient: „prés de moi, de toi, de lui"; is te qui se rapporte a la personne adressée, prend souvent une nuance dépréciative, pour ille, au contraire, 1'éloignement lui donne parfois un sens laudatif: quand Cicéron lance un iste homo a son adversaire, ce n'est sürement pas pour le flatter; Alexander ille par contre signifie: ce grand, ce célèbre Alexandre. De ces trois pronoms hic disparait de la langue, et iste est chargé de remplir ses fonctions: dans les Gloses de Reichenau, 836, 837, on lit ab his, ab istis; ab oc, ab isto. Dès lors, FORMES SIMPLES DU PRONOM POSSESSIF 69 la division en trois, que le latin classique connaissait, disparait; iste et ille indiquent le rapprochement et réloignement. Enfin pour maintenir la valeur démonstrative qui s'use, on a ajouté en latin vulgaire Tadverbe ecce, voila. R e m.- En espagnol ipse > ese a pris a son tour les fonctions de iste > este: Llego a esos (= vos) pies. — / Cómo a esos pies! Llega a estos (= mes) brazos, al pecho, al alma, Lope de Vega, Amar sin saber a quién, I, 10, 895—8. A. FORMES SIMPLES 90. Le neutre hoe pourtant est resté. Seulement, par suite de Teffacement du sens dont nous avons parlé plus haut, il indique d'une fagon assez vague une chose connue, ou il annonce, comme pronom déterminatif, ce qui va suivre. On le trouve: a) après une préposition, soit sous la forme accentuée, soit sous la forme atone: ab hoe > avuec1); pro hoe > poruec; sine hoe > sinuec; — poro, Ste Eulalie, 18. — In o quid mi alirezi fazet, Serments („a condition qu'il m'en fasse autant") — b) comme complément d'un verbe: Sempre flst bien o que el pod, St. Léger, 40. — Falies o tost, Sponsus, 77. — o je, [o tu], o il, o nos, o vos, o il, locutions dont oïl reste seul comme particule affirmatiVe 2). Mais les cas oü on sent hoe encore avec la valeur pronominale sont extrêmement rares et ne se trouvent que dans les monuments les plus anciens de la langue. Ce sont les formes renforcées go et igo qui Tont supplanté. 91. Des deux autres pronoms iste et ille, le secdnd a complètement perdu son sens primitif; en frangais il ne se rencontre guère que comme pronom personnel ou comme article. Pour les quelques cas oü il a gardé un peu de sa valeur primitieve, cf. § 8 et § 62. Le pronom iste, par contre, est passé en gallo-roman, et il a encore sa valeur démonstrative dans les plus anciens textes !) Cf. Meyer-Lühke, Romanisches Etgmologisch.es Wörterbuch, s.v. !) J. Gordon Andison, The affirmatioe particles in French, Univ. of Toronto Press, 1923. 70 PRONOMS DÉMONSTRATIFS frangais: rf'ist di en avant, „a partir de ce jour-ci, d'aujourd'hui", Serments. S'or me conoissent mi parent rf'este terre, Alexis, 204 (ms. P.). B. FORMES RENFORCÉES AVEC ECCE 92. Comme on le voit, les formes simples sont relativement rares et ne se trouvent qu'a%ne époque trés ancienne, qui ne dépasse pas le xne siècle. De bonne heure il semble qu'on ait senti le besoin d'indiquer plus énergiquement la personne ou la chose dont on parle par Tadverbe ecce, cf. le hollandais: deze hier, die daar. Ainsi Apulée (ne siècle) dit: Quamquam omnis Ma turn foeda^animi mutatio... non ipsi vitio vortenda sit, sed socero eius ecciili Herennio Rufino, De Magia, cap. 74 (= ..son beaupère que voila"). j /H** yi^\T~^-~^£ igo, go, ce 93. Ge pronom a de nouveau, dès 1'époque la plus ancienne, perdu son sens nettement démonstratif. II peut donc avoir a peu prés le sens du pronom personnel neutre el < illud, qui est extrêmement rare et qui a été remplacé par la forme masculine li; il entre en lutte avec ce et c'est Thistoire de cette lutte que nous devons étudier d'abord. Aujourd'hui ce rappelle le sujet: Vous avez raison, c'est évident, ou bien il Tannonce, quand il y a inversion: C'est un beau pays que ta France. On le trouve déja dans VAlexis: Co fut granz duels qued il en demenerent, Alexis, 104. Ce que je vos vol plorer, Me fet grant mal et grant enui, Chrétien, Erec, 2762. Mais Temploi n'en est devenu régulier qu'a partir du xme siècle: Mais ce me fait trop esmaier, Quant nous morrons, qu'Amors sera finee, Thibaut de Champagne (Clédat, p. 347). LES PRONOMS CE ET IL 71 C'est mes solaz et mes confors, Que de mon filz et de ma fitte, Méori, N. Recueil de fabttaux, II, 247, 361. C'est vers la même époque que le pronom il se trouve avec le même sens: Aude penrcd, se il vos vient a gré, Girard de Vienne (Clédat, p. 95). Dex ne fist beste qui tant ait poesté, Se il le trait et il le vient a gré, Que ne le prenge tot a se volenté, t Huon de Bordeaux (ibid., p. 50). Cet emploi démonstratif de il se retrouve aux xvie et xvne siècles (cf. §59): on rencontre souvent il la oü aujourd'hui on se ser-^ virait de ce et inversement: Quolque c'en soit, construction que Vaugelas, I, 438, admet k cöté de quolqu'W en soit plus usité. Aujourd'hui 1'emploi de i 1 est trés restreint, on ne s'en sert que s'il est le sujet du verbe être + adjectif et suivi d'une 'phrase substantive: il est heureux qu'il soit porti et dans quelques expressions comme : il est temps, il est dix heures. Pourtant même dans ces cas la langue parlée remplace souvent il par ce, ou même par cela, ga, cf. § 100. 1 Ce suivi d'un Idem veile atque idem nolle, ea demum vera i prédicat sub- amicitia est, „c'est la la vraie amitié". On voit qu'en stantif. , ,. , , , latin le pronom saccorde avec son predicat. Si on retrouve parfois la même construction en frangais, elle est due sans doute a une influence directe du latin: ciz estoit vrais Fiz Dieu, Joinv. 797 (vere Ftllus Dei erat iste, S. Mathieu, XXVII, 54), De même dans Calvin, II, 2, 13, Ceste donc sera la dlstinction (Sit ergo haec distinctio), phrase qui est remplacée dans 1'édition définitive par il nous faut user d'une dlstinction1). Mais le latin vulgaire a remplacé en bien des cas le pronom décliné par le neutre hoe: hoe est casa cum curie circumcincte, P. Meyer, Recueil d'anc. textes, I, p. 9, et c'est cette construction que le frangais a conservée. Les tournures ce suis je, c'es tu sont devenues par 1'analogie de D'autres exemples dans K. Nyrop, Kongruens i Fransk, p. 34. 72 PRONOMS DÉMONSTRATIFS la troisième personne: c'est moi, c'est toi; d'ailleurs, le changement du verbe c'es en c'est ne regarde que la graphie1). On sait que 1'accentuation suffit au latin, comme au hollandais, si 1'on veut mettre en évidence une partie de la phrase. Le francais aime a se servir dans ce cas du verbe être précédé de ce, construction qu'on trouve dès 1'époque la plus reculée: C'est sa mercit qu'il nos consent l'onor, . i Alexis, 73. Puis ce s'est introduit devant être pour rappeler un sujet un peu éloigné: Ce que /'aime le plus ce sont les cerises. Cet usage constaté par Vaugelas, I, 413\ n'est pourtant pas appliqué rigoureusement par les grands auteurs du siècle: Ce qui plait aux hommes, sont ses lumières, Pascal, Pensées, II, 51. — Ce qui me semble ici bien remarquable est que de toutes choses il n'y en a aucuneDescartes Médit., IV. — Quand le sujet et le prédicat sont des infinitifs, la langue a longtemps hésité: Travailler c'est vivre, Vivre n'est pas manger. Relevons encore la tournure interrogative est-ce que2) qui se rattache au même cas et qui a pris une extension considérable, paree qu'elle laisse a la phrase sa tournure habituelle, cf. § 439. 95. Aujourd'hui ce ne sert de sujet qu'au verbe être et a sembler et paraitre: ce me semble; puis avec les auxiliaires devoir et pouvolr: ce doit être, ce peut être. L'ancienne langue s'en sert régulièrement avec d'autres verbes: Ce poise moi, sire, dist Oliviers, Girard de Vienne, (Clédat, p. 92). et alors le pronom annonce souvent une proposition suJbstanlive: Co peiset mei que ma fin tant demoret, Alexis, 92. Mais, comme cela est naturel, le pronom sujet n'est pas toujours exprimé a cette époque, cf. § 60. Rem. L'adverbe cependant lofmait primitivement une looution absolue dans laquelle ce remplissait la fonction de sujet. De même ce nonobsianl. ï) L. Foulet, Comment on est passé de ce suis je a c'est moi (Romania, XLVI, p. 46—83). .f7 *) cf. Tobler, II, 1 et suiv. LE PRONOM CE 73 Le pronom ce 96. L'emploi de ce régime ést trés étendu dans la comme régime, vieille langue; aujourd'hui il n'est plus vivant. Si on trouve encore parfois dans les auteurs des tournures comme: pour ce faire, ce dlsant, ce dü-il, surje, et ce, ce sont des archaïsmes. Vaugelas condamne déja ce dit-on et PAcadémie approuve ce jugement, Corneille corrige partout ce dit il, sauf dans: L'atnour n'est, ce dit-on, qu'une union d'esprits, D. Sanche, III, 4. Pourtant les phrases avec ce ne manquent pas au xvne siècle: En ce faisant, ils obtiendront pardon général de toutes leurs fautes, Balzac, Prince, XXVII. 'LTSe"' 91' Comme régime, aussi bien que comme sujet, le stibordonnée. pronom ce peut annoncer une phrase qui suit: Quant il co sourent qued il foïz s'en eret, Co fut granz duels qued il en demenerent E granz deplainz par tote la contrede. Co dist li pedre: Chiers filz com t'ai per dut, Alexis, 103—106. Quand ce annonce une phrase commencant par que, il y a une tendance a rapprocher le pronom de la conjonction: Quand li rois PhiUppes vei ce que perdre li convenoit Calais, Froissart. — Cf. aussi la phrase d'Erec citée plus haut § 93. Cette construction est souvent bien commode pour empêcher la rencontre de deux que (§ 251): Mieulx ayme estre despouillez .... Que ce que eusse laissez ma peaul, Passion d'Autun Uourn. des Savants, 1906, p. 489). 98. Souvent la phrase subordonnée est sous ie régime d'une préposition. Dans ce cas il y a deux possibilités: on trouve la préposition immédiatement suivie de que, ou bien séparée de lui par le pronom ce: Ne tl estuet ostel changier, Por qu'oiist auques a mangier (= „pourvu que"), Rom. de Renart (Clédat, p. 166). Sonent mil graisles por ?o que (= „pour que") plus bel seit, Roland, 1004. SNEYDERS DE VOGEL, Syntaxe historique. 2me édition. 6 74 PRONOMS DÉMONSTRATIFS Ainsi on trouve sans ce que, avec ce que, d cause de ce que, de ce que1). Aujourd'hui la langue a fait un choix: d ce que, de ce que, en ce que, paree que, a cöté de: pour que, sans que, oü le pronom manque. 99. Outre ces cas, le pronom ce se trouve comme antécédent d'un pronom relatif: Co nos dirat qu'enz troverat escrit, Alexis, 370. „il nous dira ce qu'il trouvera écrit la-dedans". — J'ai fait ce qu'/7 m'a demandé, j'ai répondu d ce qu'il m'a demandé. L'emploi de ce pronom s'est même introduit la oü primitivement il y avait un pconom interrogatif: Je lui ai demandé ze que c'était pour que c'êtait. 100. Pour distinguer ce qui est proche de ce qui ec ' " est éloigné on a ajouté en moyen frangais les adverbes d et la, qui, a Torigine séparés du pronom, ont fini par s'y souder, en formant avec lui un tout inséparable, et cela est même devenu monosyllabique dans la langue parlée: ga. Mais 1'usure dont nous avons parlé continua a exercer son influence sur le pronom cela: le sens d'éloignement se perd de plus en plus; il a pris le même sens peu précis qu'a le pronom ce. Aussi le supplante-t-il de plus en plus, et aujourd'hui, nous 1'avons vu, le pronom ce ne s'est guère maintenu que comme sujet du verbe être; dans toutes ses autres fonctions, de sujet aussi bien que de régime, cela et ga ont fini par prendre sa place: Cela me ptait,j'ai entendu cela; la langue familière s'en sert même pour le s pronom // devant les verbes impersonnels: Ca pleut bien, ga tonne, ga fait grand vent (cf. en hollandais: Dat regent flink); elle Pemploie même souvent par rapport a des noms de personnes: C'est des femmes qu'qa ne pense qu'd faire le bien, Benjamin, Gaspard, p. 207, (cf. § 12$ et suiv.). L'adverbe peut encore parfois être séparé du pronom: Ce n'est pas la ou ce n'est pas cela que je demandé, et après les prépositions de et par Tadverbe remplace souvent le pronom: c'est par la: qu'il a réussi. i) Cf. § 356. CECl ET CELA, CIST ET CIL 75 Ecce iste et ecce ille Valeur de eist 101. Nous avons vu qu'après la disparition de lii c e de cil. ]e pronom iste a pris sa fonction. En vieux francais eist exprime donc le rapprochement et cil 1'éloignement. De ces deux pronoms, le premier a le sens démonstratif le plus précis, mais quoique plus tard que cil, il le perd pourtant en moyen' frangais; si on veut préciser, on ajoute ci a. eist et la a cil, puis on finit par dire même eist la et cil ci en oublknt complètement le sens primitif des pronoms. A 1'époque oü cil et eist éveillent tout a fait la même idéé, un des deux devient superflu et aurait certainement disparu de la langue, si une autre distinction ne s'était pas établie entre les deux formes. En effet, tandis que, en latin comme en vieux frangais, cil aussi bien que eist s'emploie tantöt comme substantif, tantöt comme adjectif, il se manifeste dès le xii" siècle une tendance a réserver a cil la fonction substantive, a eist la fonction adjective. C'est cette tendance-la qui a sauvé un des pronoms de la mort inévitable. Cette même tendance a eu une autre conséquence: on sait que Tanden frangais connait deux formes pour Ie régime: cestui et eest, celui et cel, la première fortement, Tautre plus faiblement accentuée. Or, la langue a gardé pour l'adjectif la forme faible eest, en rejetant cestui, pour le substantif la forme forte celui, en laissant tomber cel. Emploi substan- 102. Citons quelques exemples qui prouvent que «f et adjectif. dans ja viei,le jangue ^ pronoms s'empioient aussi bien comme substantif que comme adjectif: Cist meon fradre, „mon frère que voici", Serments. - Cotnbien de maux se firent par le pêché de cette-ci, Marg. d'Angoulème, Hept., 1. — La ferveur de tes études requerolt que de longtentps ne te revocasse de cestuy philosophicque repous, Rab., I, 29. Cettui me semble, d le voir, papimane, La Fontaine, Contes, IV, 5, 20. Les moutons de ce pays-ld sont plus mauvais que les loups de cettui-ci, Balzac, Lettres VI, 24. Ad leel mot Vuns a l'altre at clinét, Roland, 2008. 76 PRONOMS DÉMONSTRATIFS La reine primes comance, Qui de rien n'estoit en dotance Qu'il ne s'amassent ambedui, Cil celi et cele celui, Chrétien, Cligès, 2269. Celuy home deit estre mis en la prison dou vesque, Assises de Jérusalem, n°. 134. — Le pauvre homme luy respondit qu'il semoit xelluy champ de touzelle, Rab., II, 427 (Marty-Lav.). Témoin trois procureurs dont icelui Citron A déchiré la robe, Rac, Plaideurs, III, 3. Enfin on reconnait encore celle dans la locution d seule fin. On peut affirmer que 1'emploi de cettui et de celui comme adjectif est archaïque dès le xvne siècle, de même que celui de cette-ci comme substantif; le langage du Palais, archaïque s'il en fut. a encore gardé les vieilles formes icelui et icelle. , , k 103. Les pronoms celui, celle, ceux, celles demanCelui devient r ' , pronom dent encore qu'on les traite a part. déterminatif. xandis que l'adjectif ce garde toujours un peu de sa valeur démonstrative, celui a lui seul ne peut plus indiquer une personne déterminée, il est devenu pronom déterminatif et joue alors a peu prés le même röle que l'article avec un substantif: Celui qui trahit sa patrie = L'homme qui trahit sa patrle. II lui faut les adverbes cl et ld pour ravoir toute sa force démonstrative. Ceci n'était pas le cas dans la vieille langue: le vers de Cligès cité au paragraphe précédent prouve abondamment que celui a lui seul pouvait suffire a indiquer la personne voulue. II a gardé cette force jusqu'au xve siècle; au siècle suivant Meigret rejette celui Va inventé et réclame cettuy-ci Va inventé, Tretté, 551-. _ Avec celuy se festoya le grand empereur Alexis, Le Maire de Beiges, lllustrations, 20. 104. Comme pronom déterminatif on se sert actu- Celui pronom 1 déterminatif en ellement de celui: franjais moderne, j^ devant un génitif possessif pour représenter un substantif connu: La bicyclette de mon frère et celle de son ami sont également solides. Comme le latin ne possédait pas de pronom déterminatif (seul LE PRONOM CELUI 77 is s'en rapproche parfois), il répétait le substantif ou bien il Potnettait: Plauti fabulis plus detector quam Terenti [fabuUs]. La langue a gardé cette liberté jusqu'au xvne siècle! Et mes plez fait isnels cum de cerf, Quatre Livres des Rois» 208. Mon père, trop sensible aux droits de la nature, Quitte tous autres soins, que de sa sépulture. Gom., Médée, Hi, 3. Cette province est un bel exemple pour les autres, et surtout de respecter les gouverneurs et les gouvernantes, Mme de Sév., IV, 207. De bonne heure pourtant on s'est servi du pronom ille, renforcé ou non avec ecce: a) E sewid les males traces sun pere et sa mere et les Jeroboam, Quatre Livres d. Rois, 342—343 (cf. § 8). — b) Se logea entre le flun de Damiette et celui de Rex, Joinv., 191. — Cette dernière construction est la construction actuelle, qui n'est devenue générale qu'au xvme siècle; au siècle précédent Vaugelas, I, 341, n'approuve ni en vostre absence et de Madame vostre mere, ni en vostre absence et en celle de vostre mere; cf. pourtant la remarque posthume, II, 464. 105. 2) devant un génitif marquant la p roven ance, le pronom indique les habitants, les gens de: Et cil de France le cleiment a garant, Roland, 1161. Ces de Moab mespristrent vers ces de Israël après la mort lu rei Acab, Q. Livres d. Rois, IV, 1, 1. — Les corsaires les ont autant redoubtez qu'aucunes de Ut mer après celles („galères") braves de Malte, Brantöme, II, p. 36. Ceux d'aujourd'hui sans qu'on les flatte, Ont soin de s'y rendre savans, La Font, Contes, III, 7, 11. Ceux de Crotone ont perdu contre lui deux batailles, Fénelon, Télém., XI. — Encore aujourd'hui: ceux de Ui ville, ceux de Paris. 106. 3) devant un pronom relatif, le pronom est devenu de plus en plus usité. Si la vieille langue disait couramment: Qui m'aime, me suive, aujourd'hui il faut ajouter, sauf dans des expressions figées, 1'antécédent celui. Comme, dans la vieille langue, ce pronom était plus indépendant qu'actuellement, il y est souvent 78 PRONOMS DÉMONSTRATIFS isérArë du pronom relatif, et cette construction se retrouve même parfois au xvne siècle: Celui vraiment les a perdus, qui les a jestimés perdus, incontinent après les avoir donnés, Malh., II, 6 et 7. Vaugelas exige dans ce cas celui-la: Celui-la est homme de bien qui.... I, 446. — Celui-la est bon qui fait du bien aux autres, La Bruy., I, 169. — En revanche, on rencontre souvent au xvie et au début du xvne siè»le, celui-la et celui-ci placés immédiatementdevant la phrase relative, et avèc une valeur déterminative: Le feu qui brula Gomorrhe, Nv fut jamais si véhément Que celui-Ia qui me dévore, Voit., I, 27. Demandez a qui vous voudrez de ceux-ci qui vivent de brigandage.... s'ils ne seraient pas plus aises que Vargent leur vint d'autre facon, Malh., II, 108 *).' Dans une phrase comparative après comme ou dans une phrase négative, celui qui signifie une personne qui, personne qui et a souvent une valeur causale et équivaut donc au latin ut qui: Itaque, ut quibus libertas Antiocho p'ulso, pax Gallis dominitis, data esset, non gratulatum modo venerant, sed Tite Live, XXXVIII, 37, 4. — Li cuens de la Marche, come cil qui ne le pot amender, Joinv., 207. ■— Ils marchoient en desordre, comme ceux qui (= paree que) cuidoient bien estre hors de tout danger, Mont., I, 45. — Elle vous parle comme celle qui n'est pas savante et elle vous écoute comme celle qui sait beaucoup, La Bruy., II, 92. N'id ad icel qui un sul mot respundet, Roland, 3540. // n'y eut celui qui ne s'intêressdt en leurs maux, Vaugelas, Quinte-Curce, V, 5. Aujourd'hui encore on trouve des expressions comme: // fait celui qui ne comprend pas. — Elle fait celle qui est sourde. Relevons que le pronom peut être séparé du relatif par un génitif partitif: Ceux d'entre vous, parmi vous qui ne veulent pas prendre part d l'expédition, peuvent s'en aller. 1) II est évident qu'on a un lout autre cas dans des phrases comme: C'est cel ui-la qui m'a blessê: arrêtez-le; ici le pronom est nettement démonstratif et ne sert pas d'antéeedent a la phrase relative. LE PRONOM CELUI 79 107. 4) le pronom est suivi de la préposition d introduisant une caractéristique du substantif représenté par le pronom. De quel homme parlez-vous? De celui aux lunettes d'or. La langue populaire admet encore d'autres prépositions. Brunot cite pour le xvne siècle: vous mettrez les pelez, ceux sans peler, et les cornlchons chacun d part dans des pots de gretz. On en met aussi dans le pottage d la chair, dans celui au bceure et d l'huile. 108. 5) Celui suivi d'un participe passé appartient plutöt au style de commerce: Nous avons regu ces marchandises de Londres et de Paris; celles expédiêes de Londres sont arrivêes ce matin seulement. Rem. La langue populaire place souvent l'article devant le pronom: Même les ceuss qui Ven veuVnt le plus, J. Rictus, Soliloques, p. 118, cf. en hollandais: degenen et même d ede zen. Cette tournure se trouve déja em moyen francais: Tous les 'ceux qui contrediront Contre nous, tu mettras a mort, Gringore, Vie S. Louis, p. 149. PRONOMS RELATIFS1) OBSERVATTONS GÉNÉRALES _ 109. L'étude du pronom relatif présente des diffi- Deux courants. , 1 ■■ • " cultés particulières, provenant de sa nature doublé. En effet, il exerce deux fonctions: il remplace un antécédent (fonction de pronom), il introduit une phrase subordonnée (fonction de conjonction). Si Ton remplace la phrase: J'ai vu votre frère qui m'a fait part de votre bonheur par: J'ai vu votre frère et il m'a fait part de votre bonheur, on verra clairement ces deux fonctions du pronom relatif. Or, dans toute Thistoire de ce pronom, on pourra remarquer deux courants, Tun populaire, Tautre l) J. Korte, Die beziehungslosen Relativsatze im Franz., thèse Göttingen, 1910. — K. de Jong, Die Relativ- und Interrogativpronomina qui und qualis ün Altfranz., thèse Marburg, 1900. — K. G. Ullmann, Die Stellung des Relativpronomens zu seinem Beziehungsworte, thèse Greifswald, 1901. — P. Fabriek, La construction relative dans Chrétien de .Troyes, thèse Groningen, 1924. — Tobler, I, 35, Cas de Fantêcédent se réglant sur le cas du pronom relatif. 80 PRONOMS RELAT1FS plus savant, le premier qui tend a réduire le pronom a une seule forme invariable et k la seule fonction copulative, 1'autre au contraire qui veut reconstruire de nouvelles formes, capables d'exprimer toutes les nuances désirables1). La vieille langue, comme le langage familier, évite la succession de plusieurs propositions relatives en se servant d'une phrase indépendante: Lors convint que Ven esgardast Aucun qui les loges gardast, Et qui les fauteors preïst.... Ne nus ne Vosast contredire, Jean de Meung (Clédat, p. 208). // s'en trouve a qui Vhabitude des moindres périls affermit le courage, et les prépare d s'exposer d de plus grands, La Rochef., Maximes, I, 116. — 'Mais n'y a-t-il pas une lecon salutalre.... dans le simple contraste entre le raffinement d'esprit.... et la vulgarlté, la bassesse de Vattentat qu'elle avait contmis, et elle «'en percevait même plus la hideur, Bourget, NémésiS. QUI. Réduction Tout le système de la déclinaison du latin considérabie classique est ébranlé en latin vulgaire. La déclides formes. naison finit par se réduire a quatre formes: qui — nominatif quid — neutre cui — régime indirect q u e m — régime direct II y a même une tendance a ne conserver qu'une seule forme: servo meo quem mini confugio feclt, Form. Andec, p. 22, 1. 312). — Quant au neutre, il semble que dans la langue parlée quod ait été remplacé'peu k peu par Pinterrogatif quid. On trouve déja dans Caton, De re rust., 148: Dominus vino quid volet faciet. Les quatre formes que nous venons de citer donnent en francais cinq formes: qui que, quei cui que 1) Romania, XXVII, p. 175. Cf. §§ 128 et 131. 2) Jeanjacfuet, Recherches sur l'origine de la conjonction „Que" et des formes romanes équivalentes, p. 51. QUI, QUE, CUI, QU'lL 81 Le neutre q u i d a donc donné deux formes, une atone, 1'autre tonique; quëm atone fournit que, la forme tonique aurait été quien, qu'on trouve en espagnol; en francais c'est cui qui 1'a remplacé: avec qui, aimez qui vous voudrez, (également dans Pinterrogation qui cherchez-vous?). Et nous verrons dans la suite que le frangais connatt encore un autre pronom inconnu au latin lequel, puis deux adverbes relatifs dont et oü, enfin les relatifs indéfinis quiconque, quelconque. 111. La même tendance que nous avons constatée que comme , ,. , , . , nominatif. en 'atin vu'gair€ se retrouve en frangais; que semploie fréquemment pour qui: Que c'est la plus bele que soit, Chrétien, Erec. 1824. L'empereor de Rome que païens estoit, Joinville; — chil que dedans estoient, Froiss., IV, 163, 2; — et au xvr3 siècle: C'est une chose que ne dure guayres, Palsgrave, 425. — Au début du xvne siècle Maupas déclare que le relatif que n'est point nominatif. Dans la langue actuelle on trouve que: 1) comme sujet d'un verbe unipersonnel: Voild l'homme qu'il me faut. 2) comme prédicat: Malheureux que je suis. II vaut pourtant mieux expliquer ici que comme un ancien accusatif; cf. § 186. Rem. La langue populaire a continué a se servir du que nominatif: M êtne' l'caporal Sertrand, qu'ft des principes, n'a pas voulu en boire, Barbusse, le Feu, p. 33. confusion entre ^ 'S' L'évolution phonétique amène en outre une cui et qui, confusion entre cui et qui, puis entre qui et qu'il: u e ,u lor mestier quel qui soient, Phil. de Novare, IV tenz d'aage d'ome, 18. — S'il ne font ce qu'il doivent et qu'il apartient au resort, Beaumanoir, Coustumes, I, p. 158. — Vaugelas, II, 46, condamne le voild qu'il vient. — Quant k cui, il fonctionnait dans la vieille langue d'abord comme datif, mais eet emploi est rare; puis comme génitif: Cil cui vos obeissiez... vos tient d tort Villeh., § 146. — Cui seror il avoit d fame, Villen., § 264. — Mais dès les plus anciens monuments on trouve cui comme complément direct: Ne io ne neuls cui eo returnar Int pols, Serments; — enfin comme régime prépositionnel: 82 PRONOMS RELATIFS Et Oliviers en qui tant il se fiet, Roland, 586. On voit par cet exemple que cui et qui se sont déja confondus dès le xne siècle; la graphie cui se maintient pourtant jusqu'au xve siècle. 112. Après avoir examiné le pronom lui-même, il faut parler de 1'antécédent. a) Relatif sans antécédent Relatif sans Comme l'adjectif peut être employé substantivement, antécédent. de même la phrase adjective peut prendre la fonction d'un substantif. C'est le cas, quand il n'y a pas d'antécédent. L'ancien frangais faisait de cette construction un emploi beaucoup plus large que la langue moderne, qui introduit le pronom déterminatif celui. Le sens de ces phrases est toujours trés général. II faut remarquer qu'il y a au point de vue syntaxique une différence notable entre les relatives avec antécédent et celles sans antécédent; car les dernières ne sont pas des phrases attributives, mais des phrases substantives, et comme telles, elles représentent le sujet ou 1'objet (accusatif, datif, génitif ou régime prépositionnel) de la principale: 1) Qui l'out portêt volontiers le nodrit, Alexis, 32. aujourd'hui seulement dans les proverbes: Qui dort dine, Qui trop ernbrasse mal étreint, 'etc. 2) SI li truvez ki tres bien 11 aiut, Roland, 781. emploi encore vivant: Aimez qui vous aime. 3) Richeise dune molt gramment Ki la porie bien chastement, Lapidaire, I, 249. dans la langue moderne on fait précéder le pronom par d. 4) Chi en deu avra ferme foi, Deus est od lui. emploi trés vivant aujourd'hui: pour qui a lu ce poème, il est évident que.... L'accusatif dans les phrases sans antécédent présente la forme tonique qui ou cui, provenant du latin cui: Cui // ataint, il n'a de mort garant, Raoul de Cambrai, 2669. Je nommerai d cette place qui je voudrai. j QÜI! SANS ANTÉCÉDENT 83 ■ Emploi absoiu 113. On ryicontre dans la vieille: langue beaucoup de qui. de phrases oü on pourrait rendre qui par „si 1'on": Chi purreit faire que Rollanz i fust morz, Dunc perdreit Carles le destre braz del cors, Roland, 596—7. Je fusse fa piega martir Voire cent fois mort, sans mentir, Qui en mourust, Liederhs. des Kard. de Rohan, 164, 10—12. On trouve cette construction jusqu'au xviii» siècle, et même de nos jours on en relève des exemples: Qui veut du lait, il est tout chaud, cri qui se lit sur une vieille image. — Qui de trente óte douze, reste dlx-hult, Zola. — Puis dans la locution: Comme qui dirait et dans Tout vient d point qui soit attendre, oü on a introduit a tort la préposition d devant le pronom relatif. Dans tous ces exemples le rapport entre la phrase principale et la proposition subordonnée est tout autre que dans le paragraphe précédent; on peut parler ici de 1'emploi absolu du pronom relatif. L'explication de cette construction se trouve dans une phrase comme celle du Roland, 1181—82: Ki dunc oïst Munfoie demander De vasselage li poüst remembrer; oü la relative se rapporte a un mot de la phrase principale, puis: Ki lui veïst l'un geter mort sur l'altre, Roland, 1341; oü • la principale manque. Qu'on compare aussi 1'anacoluthe espagnole: El que no ama, es que lleva el alma muerta. Cf. aussi § H6, 3. 114. b) Relatif avec antécédent. Relatif avec II y avait en ancien francais une faible tendance a antècident. séparer les relatifs ayant pour antécédent des noms de personnes des relatifs ayant pour antécédent des noms de choses. Pourtant, on emploie fréquemment en vieux francais qui prépositionnel se rapportant a des choses. C'est Vaugelas, t, 125, et avant lui Oudin qui ont donné la règle que qui prépositionnel ne se rapporterait pas aux choses, mais on était embarrassé pour les noms d'animaux et les choses personnifiées. Aussi trouve-t-on 84 PRONOMS RELATIFS de nombreuses infractions a la règle^Jans tous les auteurs du xvne siècle, Vaugelas même y compris: Mais respecte une ville d qui tu dois Romule, Corn., Horace, I, 1. Toute cette pureté d qui lis en veulent tant, Vaugelas, I, 29. Si, de nos jours, on ne trouve plus guère ces constructions, c'est que lequel et surtout quol ont remplacé dans beaucoup de cas le pronom qui, même souvent après un antécédent nom de personne. LE PRONOM RELATIF NEUTRE 1) 115. Quelle que soit 1'origine du pronom neutre (quod, quem ou plutöt quid), on trouve en frangais dès 1'origine deux formes, une forme atone que, une forme tonique quei, plus tard quoi. Nous parierons d'abord de la forme atone. A. Les formes atones. que comme t Le pronom. nominatif. fl) sujet: Co qu'estre en deit ne l'alez demurant, Roland, 3519. b) régime: Li rois ot que ses fiz li prle, Erec, 2732. Dès la période la plus ancienne on rencontre qui dans plusieurs parties de la France, surtout au centre. Ces deux formes entrent en lutte Tune avec 1'autre et sous 1'influence du masculin, que est peu a peu remplacé au nominatif par qui: N'i demorra Or ne argent, ne qui un denier vaille, Cour. Louis, 442. Pendant tout le moyen age pourtant que se maintient et il n'est même pas rare au xvie siècle: Tout ce que leur estoit servy d table, Rabelais. D'ailleurs, dans les dialectes de l'est que s'est maintenu et on le reconnait encore dans quelques locutions figées: advlenne que pourra, arrivé que pourra. 1) G. Rydberg, Zur Gesch. des franz. 9. Upsal 1907, p. 1007 et suiv. — Atlas Linguistique, 29 et 209. LE PRONOM NEUTRE QUE 85 II. L'antécédent. L'ancien relatif neutre latin quod pouvait avoir pour antécédent: 1. un substantif ou un adjectif neutre. 2. une phrase. 3. un pronom neutre. Par la disparition du neutre dans les substantifs et plus tard dans les adjectifs, les cas 2 et 3 restent seuls pour le frangais. Cf. pourtant § 119, 3. Relatif sans 116. a) Relatif sans antécédent (proposition subantécédent. stantive). 1) sujet: advienne que pourra, encore aujourd'hui; que pis est, que plus est, qui se maintiennent jusqu'au xive siècle, remplacés par qui pis est, qui plus est, locutions qui sont a. leur tour devenues archaïques, puisque la langue actuelle réclame le pronom déterminatif ce devant qui, excepté après voici, voild: voild qui est fait. 2) régime: Mais veirs est que // vïlains dit, Roman de Rou, III, 1311. Actuellement, on dit ce que. 3) Dans les phrases: Unkes n'en demanda trleves que l'um oïst, Roman de Rou, II, 2207, que je sache, etc, le rapport entre que et la principale est moins net. II est probable qu'il faut interpréter d ce que je sache, d'après ce que je sache: on sait qu'en latin non plus on ne sent le besoin de donner aux pronoms neutres une forme qui indique la fonction qu'ils occupent: id gaudeo = „je me réjouis de cela"1), cf. aussi § 117 Rem. ce que dans le sens de autant que. Aujourd'hui on trouve a Cöté de que je sache quelquefois d'autres tournures: cette fontaine de Merlin est-elle profonde que Von sache? Feuillet, la Fée. — La vieille langue a encore que je cult, que je pense, etc; voir aussi § 113 et 1'exemple de Chrétien, cité p. 78,? pour 1'emploi absolu du pronom relatif. 4) On trouve parfois que avec un infinitif: Ne trovoient mes que lancier, Eneas, 3737. J) Cf. pourtant Tobler, I, p. 148. 86 PRONOMS RELATIFS Je n'ai que faire de vos dons. — Pen a peu que dans ce cas a été concurrencé par quoi, mais il a pourtant réussi a se maintenir dans une certaine mesure 1). Ou a-t-on affaire ici a un pronom interrogatif ? II serait oiseux de vouloir décider, paree qu'il y a des cas oü la langue n'a jamais distingué nettement entre le pronom interrogatif et le pronom relatif. 5) Faire que sages (agir sagement) est originairement une proposition relative qu'on pourrait expliquer: faire [ce] que [ferait\ un sage: Que fols fist li reis Hugue, quant vos prestat ostel, Pèlerinage, 466. Don li rois fist que fors del san, Chrétien, Yvain, 3708. On lit cette expression encore dans La Fontaine: Disant qu'il f er alt que sage De garder le coin du feu, Fables, V, 2. 6) On trouve la même construction dans: Doulce chose est que mariage, Christine de Pisan, — C'est une chose terrible que l'éloignement, Mme de Sévigné; — et aujourd'hui: C'est un grand trésor que la santé; surtout avec un infinitif: C'est une belle chose que de faire cela. Dans toutes ces phrases que est primitivement le prédicat du verbe être sous-entendu, et se place devant le sujet postposé dans une phrase commengant par c'est. On rencontre cette construction aussi dans la phrase interrogative : Qu'est-ce que la flèvre? et dans: Si f'étais que de vous. Dans les deux derriiers cas — et même, dans une certaine mesure dans 3 et 4 — nous avons affaire a des locutions figées, dans lesquelles la valeur primitive des mots n'est guère, ou pas du tout, sentie. Rem. L'adverbe presque s'explique de la même facon: // est presque mort = II est prés [de ce] que [est] mort *). Relatif avec 117. b) Relatif avec antécédent. 'sSff» antécédent. /f|j L'antécédent est une phrase: J'espère que nous en irons tous ensemble, quy me fera fort grant plaisir, Marguerite, lettres, 97.^ — Elle fut admonestée, qui est *) On sait que 1'infinitif aimat la forme accentuée: non chaloir, soi tromper, quoi faire. Cf. aussi § 69. ») Tobler, I, p. 17, no. 3. LE PRONOM NEUTRE QUE, QUI, QUOÏ 87 une trés légere peine, Sévigné, VI, 366. — Je me sens obligé de découvrir un mystère de votre conduite, que j'ai promis il y a longtemps, Pascal, Prov., XV. L'accusatif est pourtant rare. 2) Avec le déterminatif ce: On trouve dès les textes les plus anciens le pronom ce qui résumé toute une phrase ou qui annonce la proposition relative suivante: Quant ot li pedre 50 que dit at la chartre, Alexis, 78. Hz estoient combles de rlchesses et en grand repoz, ce au'ilz tne furent oncques puls, Commines, I, 2; mais les cas oü ce manquait étaient plus nombreux dans la vieille langue que le contraire. Dans la langue moderne on se sert !toujours de ce: C'est bien ce qui m'empêche de dormir, il faut réfléchir d ce qu'on dit, etc. , \>) L'emploi du relatif neutre se rapportant a un pronom indéfini est .toujours vivant: il y a quelque chose qui cloche; — il n'y a ld rien qui puisse vous étonner. Rem. Quelquefois 1'acc. ce que marqué la mesure: Et Pompée est oengé ce qu'iV peut l'être, Coru, Pomp., V, 4, 1668. Ce qui et ce que se rapportent couramment au xvne siècle a des personnes: C'est peu de voir un père èpouser ce qu'on aime Rac, Mithr., IV, 6, 60. ^ ' ' B. La forme tonique (quoi)1). Quoi sans 118. a) Relatif sans antécédent antécédent. Quoi s'empioie dans cette coristruction presque exclusivement régi par une préposition. On le trouve dèja en ancien frangais: Ancor n'ai je gueires sofert, Por quoi tant demanter me doive, Cligès, 1014—1015. Chevaliers ne borjois.... qui li doinst de quoi il vive un soir, Amis et Amiles, 2368. Cet emploi est resté dans la langue: Voici de quoi il s'agit (a cöté de ce dont tl s'agit), surtout devant les infinitifs. On connait 1'emploi absolu dans la locution figée: il n'y a pas de quoi2). fffgy J) K. Nyrop, Etudes de grammaire francaise, 13. 1921. 2) Cf. Le pronom interrogatif, § 136. 88 PRONOMS RELATIFS On trouve quelquefois qui au lieu de quoi: A qui on a été une fois capable, on n'est plus incupable, Montaigne. Quoi avec '19. b) Relatif avec antécédent antécédent. /jvj Qaoi ayant pour antécédent toute une phrase est toujours trés usité: Vous avez citê Cicéron, en quoi vous vous êtes trompé, de même avec un pronom indéfini, rien, quelque chose: il n'y a rien d quoi je n'aie pensé; voild quelque chose sur quoi je ne comptais pas. 2) Comme devant que et qui neutre, le déterminatif ce s'est introduit aussi devant quoi, mais dans une mesure moins large; on s'en sert surtout si la phrase relative précède: // satt d quoi s'en tenir; mais: Ce d quoi il doit s'en tenir, il le soit trés bien. On ne dira plus: C'est tout ce de quoi j'ai besoin, mais ce dont j'ai besoin. 3) Dès le xne siècle on trouve quoi avec un nom de chose ou de personne comme antécédent. On le rencontre en vieux frangais a cöté de cui: une charue sans rouelles, de quoy il tornent dedens la terre les tourmens, Joinville, 124 c. — Li Sarrasins... de quoy il avoient fait lour chievetain, Joinville, 176 d. — Je suis celluy de quoy parle le poète, Légende du grand S. Anthoine, 15. § 5. ' La vieille langue manifestait déja une tendance nette a restreindre cui aux noms de personnes et quoi 'aux noms de choses, mais Palsgrave, p. 353, donne encore la phrase l'homme en quoy je mettoye toute ma fiance. Vaugelas, I, 207, donne la règle actuelle. Mais malgré cela quoi, se rapportant a un nom de chose, se trouve fréquemment au xvnc siècle et vers la fin du siècle précédent les auteurs ont commencé a s'en servir de nouveau pour éviter lequel, qui semble trop intellectuel et trop peu poétique: Le pain pour quoi les hommes menagaient leurs vies, P. Adam, La Force, ch. 1. LE NOUVEAU PRONOM RELATIF LEQUEL 'Origine de quei 120. Par suite du délabrement flexionnel du pronom et de lequel. q u i( la vieille langue a senti le besoin de créer un nouveau pronom relatif pour arriver au rétablissement d'une déclinaison normale. Nous rappelons qu'a cöté de ce courant, on avait la tendance contraire, qui voulait réduire le pronom a une lequel 89 seule forme que. Le mot q u a 1 i s, qui a 1'origine servait de corrélatif a tal is, a perdu peu a peu sa nature adjective et est devenu tout a fait le synonyme de qui. Une seconde modification importante a été que peu a peu il s'est adjoint l'article, qui est devenu son compagnon inséparable, mais qui k 1'origine appartenait au substantif suivant: le quel homme, ou, plutot, se mettait devant le pronom, employé substantivement, comme les ceux dans la langue populaire (§ 108 Rem.) et les aucuns en moyen francais. La forme sans l'article est restée comme pronom interrogatif; comme pronom relatif elle est plus rare. Pourtant on la trouve encore aux xvi« et xvne siècles: et autres semblables resveries...., quelles choses tant s'en faut qu'elles nourrissent le corps de l'homme, qu'elles le corrompent, N. du Fail, Propos rustiques. — Allez, allez, vous pourrez avoir avec eux quel mal tl vous plaira, Mol., Avare, I, 5. Plus anciens 121. Quant a lequel, on ne le trouve pas dans les exemples. textes jes pjus ancienS) jj ^ ^ ^ y.g ^ Saint Alexis et du Roland, il apparait d'abord dans les livres qui ont un caractère savant et dans des traductions, puis au xin<= siècle dans Villehardouin et Joinville, mais c'est seulement aux xv« et xvi« siècles qu'il prend une extension extraordinaire, extension due en partie a Pinfluence du latin qui, on le sait, fait un trés vaste' emploi du pronom relatif, tandis que le besoin de clarté aussi faisait préférer souvent lequel a qui, paree qu'il marqué mieux que ce mot le cas, le genre et le nombre: Li palefrois s'en va la voie De Ia quele ne se desvoie, Huon le Roi, Le vair palefrol, 1067—8. A 1'artlUerie fut commis le grand escuyer Touquedillon; en laquelle furent comptées neuf eens quatorze grosses plèces de bronze, Rabelais, I, 26. - On s'en servait pour les personnes aussi bien que pour les choses: Et la royne sa femme, laquelle estoit de la maison d'Anfou, Commines, 462. Au xvne siècle, lequel va peu a peu perdre sa vogue. Ce mouvement de reeul parait avoir commencé par lequel employé comme adjectif. SNEYDERS DE VOGEL, Syntaxe historique. 2me édition. 7 90 pronoms relatifs 122. Lequel adjectif. — II est vrai qu'Oudin, lequel adjectif. „ , , Gramm., p. 129, admet encore au commencement d'une période: lesquels ornements furent apportez, mais les exemples se font rares: // demeure un an avec son beau-père, au bout duquel temps il va établir sa familie oü bon lui semble, Regnard, Voyage de Laponle, p. 487. Dans la langue actuelle on renverserait 1'ordre des termes et on dirait dans la dernière phrase: temps au bout duquel; de même la tournure laquelle somme, qu'on trouve encore aujourd*hui, est remplacée en général par somme qui. lequel 123.' Lequel substantif, a) au nominatif et a substantif. 1'accusatif. Au xvie siècle déja 1'emploi de lequel comme substantif était signalé comme peu poétique et peu littéraire : Malherbe s'en sert seulement. en prose. Selon Oudin, Gramm., p. 129: „Les doctes modernes bannissent le nominatif, et 1'accusatif se pourrait retrancher aussi; pour bien parler on ne dit point, voild un homme lequel veut..., mais il faut se servir de qui veut". Vaugelas veut s'en servir pour éviter 1'équivoque, et- aujourd'hui encore les grammairiens 1'admettent dans ce cas, mais en réalité la langue vivante ne s'en sert plus; on ne dit pas: II y a une étude sur ces questions, laquelle, on dira: // y a, sur ces questions, une étude qui.... b) söus le régime d'une préposition. C'est le seul cas oü il soit encore usité aujourd'hui. II a réussi a supplanter quoi (cf. pourtant § 119) et a rérriplacer qui se rapportant a des noms de choses, Mais son emploi s'est restreint même dans cette fonction, quoi s'emploie de plus en plus dans la langue littéraire, dans nombre de cas oil lui préfère dont et oü, et nous rappelons que la langue populaire aime plutot une autre tournure: la femme que je lui ai donné un livre: au lieu de: la femme a qui ou a laquelle. l'ad verbe relatif dont1) dont adverbe 124. «) adverbe de lieu. de lieu. '-' D'après son origine dont < de + unde est adverbe de lieu, la préposition de s'y est ajoutée, paree qu'on s'en servait toujours pour indiquer le lieu de départ. Le simple ont < i) Cf. Tobler, III, p. 38. LEQUEL ET DONT 91 u n d e, qu'on trouve parfois en vieux francais, a même perdu son sens primitif: Je viegn de eest moster, hon (= oü) j'ai ta messe oïe, Parise la Duchesse, 5. En concurrence avec dont dans cette signification locale on trouve dans la langue d'ou, lat. de -f u b i: la tere... dont ele fu amenee en eest pais, Aucassin et Nicolette, 4, 5. — Malherbe est le premier qui pose en règle que dont et d'ou ne prennent jamais la place 1'un de 1'autre. Vaugelas confirme cette règle et établit la différence entre la maison d'ou il sort, au sens propre, et la maison dont il sort, au sens figuré (la maison = la race). Pourtant on trouve encore plusieurs exemples de dont adverbe de lieu au xvne et même au xvuie siècle: Rentre dans le néant dont je t'ai fait sortir, Rac, Bajazet, II, 1. Le rivage dont il me repousse, D'Alembert, Lettre au roi de Prusse de 1765. Rem. En provencal on < u nd e dans le sens de ub i et même de q u o est fréquent: Ni oe ni sap ies on se sia (oü il est) mas lai on lo cauals lo mena, Appel, Provenz. Chrestomathie, 3, 20 et 21. L'italien dove < de -f- ubi et l'espagnol donde < de -f unde ont, èüx^aüssi, fini par signifier „oü": Ld, dove le ombre eran tutte coperte, Dante, Inferno, XXXIV, 11. Donde se cuenta la graciosa manera que tuvo Don Quijote en armarse caballero, Cervantes, Don Quijote, III. De même parfois en francais dans les textes populaires: Qui puis revient assez La dont il esr grevez, Jeanroy et Langfors, Chansons bachiques, XV, 20—21. extension de 125. b) extension de 1'emploi. dont. Par suite d,une evo|ution tres naturelle i), dont arrivé a exprimer la cause et le moyen: Si nous dirons le mesfait dont U marchls haoit l'ehipereeur, Robert de Clari, 33. — Dans ce cas il se rapporte a un antécédent et pourrait être remplacé par un pronom relatif, précédé de- la préposition de. Cette étape se trouve d'ailleurs déja en latin: Ego omnibus unde (= de 1) Cf. aussi 1'évolution de en < i n d e § 78. 92 PRONOMS RELATIFS quibus) petitur hoe consilium dederim, Cicéron, Ad Familiares, VII, 11, 1. — Pervenimus ad civitatem quae appeUatur Arabia... Unde (= de qua) scriptum est dixisse Pharaonem ad Joseph, Peregrinatio Aetheriae, 7, 9. — Qui vult proficere, habet unde, Fünf festpredigten Augustins, herausgegeben von Lietzmann, p. 15. Le mot dont passé ensuite par les mêmes évolutions sémantiques que la préposition de, de sorte qu'il exprime plusieurs rapports: L'inquiétude dont (= avec laquelle) vous m'écrivez, n'est pas une petite marqué de votre amitié, Corn., X, 478. — Les Religleuses lui parloient avec tout le sens froid et la gravité dont (= avec lesquels) un archevêque auroit dü parler, Rac, IV, 579. — Certaines couleurs changeantes, et qui sont diverses selon les divers jours dont (= sous lesquels) on les regarde, La Bruy., I, 298. Une des significations de dont, comme de la préposition de, est celle du génitif possessif. On trouve cette valeur déja dans le Roland : Le blanc osber dunt la maille est menue, Roland, 1329. et depuis il est resté dans la langue; pourtant dans un seul cas, oü il était trés fréquent autrefois, dont n'est plus permis de nos jours, c'est quand il dépend d'un substantif précédé d'une préposition; dans ce cas il faut se servir de de qui ou duquel: par le service et bienfait que vous feystes a deux povres femmes, dont vous donnastes a l'une une cote et a Vautre une chemise, La Tour Landry, 78. L'objet de votre amour, lui, dont & la maison Votre imposture enlève un pulssant héritage! Mol., Dépit amoureux, II, 1. // est des nceuds secrets, il est des sympathies Dont par le doux rapport les dmes assortles S'attachent l'une d l'autre. Corn., Rodogune, I, 5, 360. Le génitif du pronom neutre est actuellement toujours précédé de ce (ce dont). En vieux frangais on le trouve sans ce pronom: Ne vos vl, don moi sovaigne, onques, Chrétien, Erec, 1010. On remarquera que dans le dernier exemple on a affaire au même emploi absolu qu'on trouve dans que je sache. dont et ou 93 Dans des phrases comme: // li enortet, dont lei nonque chielt, Qued elle fulet lo nom chrestiien, Eulalie, 13. Et resütua lesdlctes terres; dont ledict comte son filz fut fort troublé, Commines, I, 1. U se rabat soudain, dont j'eus l'dme ravie, Mol., Les Fdcheux, II, 6, le pronom a comme antécédent toute une phrase; aujourd'hui on se servirait de ce dont ou de de quoi. l'adverbe relatif oü (ubi) on locatif. 126. a) adiei£e_jje_Jieu. Oü est d'abord adverbe de lieu, soit relatif, soit interrogatif V et amène comme tel une phrase adverbiale: Je vais oü vous allez ) ou une phrase substantive (interrogation indirecte): Je ne sais oü' d demeure. II peut perdre sa valeur purement Iocative et introduire une phrase temporelle, ce qui ne nous étonne pas trop: les idéés^ de temps et de lieu se touchent, elles ont 1'idée d'espace en commun: Souvent oü le rlche parle..., c'est aux doctes d se taire, La Bruy., II, 80. - Le sens temporel se change facilement en sens adversatif „tandis que": Celui qui vit a plus besoin de la vie, ld oü celui qui n'est pas se passé de la vie, Malh., II, 85; — enfin, de même que alors peut signifier „dans ce cas", la' phrase amenée par oü peut prendre une nuance conditionnelie! Et oü le déslr meurt, amour ne continue. Rem. Ces différents sens se retrouvent d'ailleurs en latin, comme le prouvent les trois pages qu'y a consacrées Löfstedt dans son beau tommentaire sur la „Peregrinatio Aetheriae", p. 128 et suiv. «rtendon de oü. U1' *) extension de 1'emploi. Oü subit une évolution analogue a celle de dont et fmit par exprimer différents rapports qu'on pourrait rendre par „a, dans, chez, sur" et même „sous". En latin déja on trouve ubi se rapportant a des noms de choses: Navem ubi vectus ful Plaute. — De même en frangais: la maison oü je demeure et le lieu oü U va (dans ce dernier cas le latin aurait dit quo). Vous voyez les chagrins oü cette offre m'expose, Corn., Pulchérle, IV, 4, 1349. 94 pronoms. relatifs J'ai honte des horreurs oü je me vois contraint, Rac, Thébaïde, IV, 3, 1053. Vous avez vu ce fils oü mon espoir se fonde? Mol, VEtourdi, IV, 2, 1395, Ce dernier exemple nous prouve que ou s'est étendu même aux noms de personnes. On trouve d'ailleurs cet emploi déja dans la vieille langue: Cil Damedieux ou j'ai creance, Passion du Palatinus, 1467. Si manda les princes dou roiaume oü elle se fioit plus, Mén. de Reims, 337; — et au xvne siècle les exemples abondent: // peut haïr les hommes en général, oü U y a si peu de vertu, La Bruy., II, 22. Ces sages coquettes Oü peuvent tous venans débiter leurs fleurettes, Corn., Menteur, I, 1, 42. L'emploi de oü s'est encore étendu par la faculté qu'il a de se faire précéder d'une préposition; Vaugelas, II, 50, cite: U se rendit d un tel lieu, vers oü l'armée s'avangolt, facon de parler qui s'était introduite depuis peu et qu'il blame. C'est le coup scêlérat par oü tu m'expédies, Mol., Tartuffe, V, 6, 1865. Aujourd'hui, l'emploi de oü est beaucoup moins étendu qu'au xvne siècle. Si 1'antécédent est une proposition, on trouve par oü et d'ou: d'oü je conclus, par oü on voit, etc. Relevons encore I'expression c'est oü: c'est oü il n'y a point de remède. l'adverbe relatif que Deux 128. Nous avons déja signalé la tendance de la constructions. iangue k chercher une particule indéclinable pour marquer la relation pure et simple. C'est la tendance populaire, a laquelle s'en oppose une autre dont les intellectuels ont été les directeurs, de marquer non seulement le rapport entre antecedent et relatif, 'mais aussi la fonction de ce premier dans la relative, en exprimant par la forme du pronom relatif le genre, le nombre, le cas. Le peuple fait peu de phrases relatives compliquées et cherche toujours un tour simple, analytique, tout a fait adopté a son génie. Brunot, III, 2, p. 508, donne comme modèle: La femme l'adverbe relatif que 99 que je lui ai donné ma parole, oü que , est un type de mot-outil, marquant purement et simplement la relation, tandis que lui exprime la fonction que la personne de I'antécédent occupe dans la phrase1). Les tours comme celui-ci ne sont pas encore les plus négligés; on en arrivé aussi a marquer seulement la relation, sans souci d'exprimer par un pronom personnel le genre, le nombre, le cas. Dans tout le cours de la langue nous trouvons ces deux emplois différents de l'adverbe relatif que. Si nous prenons Comme type du second cas la phrase de Vaugelas: Dans la confusion que d'abord ils se présentent d elle, nous constatons que la fonction de que n'y est pas exprimée, mais 1'auteur aussi bien que'4e lecteur comprend facilement qu'il faut 1'interpréter par „avec laquelle". N'y a-Wl pas une foule de tournures dans la langue qui n'expriment pas d'une facon explicite la nuance, particulière qu'on a dans 1'esprit 2)? 129. Quant a l'origine, elle est probablement la même que celle du neutre que, c.-a-d. quid ou quem. On le trouve déja en latin postclassique dans les deux fonctions que nous venons d'exposer: 1) hominem quem ego beneficium ei feci argento uncias tantas, Form. Andecavenses, 21, 19. — 2) circumcisie rebus, quae non arbitror pertinere ad agriculturam, Varro, De re rustica, I, 1, 11. En vieux frangais et au xvi« siècle nous les trouvons également: 1) L'empereëur Kyrsac de Constantinoble que uns siens freres li avoit tolu Vempire, Robert de Clary, 17, oü que... li signifie „a qui". 11 est bien homme plus est range, Que, si bien tost il ne se change, II nous fera tous enrager, Grévin, 'Les Esbahis, I, 3, Également en italien et en provencal: Penso a quel tristo sogetto, Che tuo padre si oergogna di rendergll il saluto, Amicis, Cuore. Treves, Milano p. 178. - La cabro que degun de mourtau ni Ia pais ni Ia moi»' Mistral, Mireille, II (= ia chèvrc ^ morteI M ^ nj ne a) Qu'on pense par ex. au gérondif qui n'exprime que la simultanéité mais dont on se sert pourtant, quand on a dans 1'esprit une idéé concessive conditionnelle, modale. 96 PRONOMS RELATIFS oü que... // = „qui". Assez fréquente est aussi la combinaison de que avec en et y : un flum que on n'i puet passer se par un pont de pierre non, Villehardouin, 163. — C'a esté le plus beau siege qui fust iamais... fors les assautz, qu'ore n'en livra jamais, Brantöme, Grands Capitaines, V, 104. Ici que... en — „dont". Rem. Nous avons naturellemcnt un phénomène différent dans des phrases comme: plusieurs femmes cui ne leur chaut ou elles s'abandonnent, Sept Sages, 31, oü un régime déja exprimé cm est répété encore une fois par un pronom leur. De même dans Barbusse, Le Feu, p. 32: C'était toute la journée un gaspillage dont i'as pas une idéé d'ssus, le mot dessus forme pleonasme dans la langue populaire Dans la Vulgate: veniet autem fortior me, cuius non sum dignus solvere corrigiam calceamentorum ejus, Luc, III, 16. 2) // les tendroit as us et as costumes que (= auxquels) li empereëur Grieu les avoient tenuz, Villehardouin, 280. — Celui qu* (= a qui) elle donne d mengier, Froissart, III. — Ma continuelle bonne volunté que (= dont) le ne me lasseray iamés, Diane de Poitiers, Lettres, XCVI, p. 168. . Peu a peu la concurrence avec le pronom relatif décliné et avec oü et dont devient plus difficile, a mesure qu'on se piqué davantage de bien écrire. Pourtant que se maintient encore au xvne siècle: Je pourrai vous faire voir mon dme toute nue, et mes pensées en la simplicité qu' (= „en laquelle") elles naissent, Balzac, Lettres, I, 8. Me voyait-il de l'aeil qu' (= dont) il me voit aujourd'hui, Rac, II, 63. Vaugelas et Ménage blament cet emploi de que. C'est surtout dans la périphrase grammaticale que l'adverbe relatif que est supplanté par le pronom précédé d'une préposition: C'est a vous que je parle est remplacé souvent par C'est a vous a qui je parle. Au fond, cette construction est née par contamination avec: C'est vous a qui je parle; p. ex.: C'est votre Majesté, Sire, de qui j'entends parler, tournure qu'on trouve encore de nos jours. — C'estoit a vous a qui Paris devoit adjuger les pommes d'or, Rab., II, 21. — Je commence d croire que ce n'est pas de vous dont vous parlez, La Fayette, La princesse de Clèves, p. 371. Aujourd'hui que se rencontre dans le cas que nous venons de traiter: C'est d vous que je parle, puis, quand il s'agit du temps, après les mots tels que année, jour, heure, moment, mais même QUE ET QUICONQUE 97 dans ce cas l'emploi s'est restreint beaucoup dans la langue écrite. Le peuple pourtant continue a se servir de que: 1) Le nom des villes que j'ai passé es (Cf. Salverda de Orave, Taal en Letteren, 1904, p. 7). — Ce neveu que tu m'as parlé, Lavedan, Le vieux marcheur, p. 40. — 2) Comment que tu trouves la maison que nous y montons la garde, H. Monnier, I, 199; ici que... y = oü. Pronoms relatifs indéfinis 130. Quant aux pronoms relatifs indéfinis q u i s q u i s et q u icumque, qualisqualisetqualiscumque, ils ont disparu, comme d'ailleurs aussi les adverbes ubiubi et ubicumque, utut et utcumque, etc. Ils ont été remplacés par que précédé d'un pronom (adverbe) interrogatif qui que, quel que, quant que (oü que, combien que)1), et par quiconque et quelconque2), qui ne sont probablement pas des formations savantes mais qui proviennent de qui que onques, quel que onques, comme le niontrent les exemples suivants: Or ay-je accomply ma pencée, Tout mon faict qu' onque desiroye, Fournier, Le thédtre fr. avant la Ren., p. 361—362. Cui quVY onkes en attaingnoit Trestut le cors li purfendoit, Brut de Munich, 1411. Quiconque veut mener pure et saintisme vie Fames aint et les croie et dou tout si affie, Evangile aux femmes, 1—2'. Le sens de quiconque et de quelconque peut être généralisant ou concessif: Quelconque accusatlon que vous alléguiez, Palsgrave, p. 366. — Dans un livre- quelconque nous avons affaire a un pronom indéfinix). Dans la vieille langue on trouve souvent quiconque précédé d'un antécédent, construction dont on rencontre encore quelques exemples au xvne siècle: Puissance, quiconque tu sols, Dont la fatale diligence Préside d l'empirê francois, Malherbe, I, 80, 132. 1) Cf. § 365. 2) E. Leren, HM. franz. Syntax, I, p. 185; cf. pourtant L. Fouiet, Romania, XLV, p. 222. 98 PRONOMS RELATIFS L a t i n i s m e s ■131. En frangais le pronom relatif relie une suboruTZTkUm&l donnée a la principale et remplit en même temps moderne met une une fonction grammaticale, en tant que pronom, phrase dans la même subordonnée. En moyen francais coordonnee. J * on commence a former, d'après les modèles latins, des périodes quelquefois trés longues dans lesquelles le pronom relatif relie des propositions plutöt indépendantes. II peut même, comme en latin, relier une subordonnée a la principale tout en remplissant sa fonction pronominale dans une autre subordonnée. Cest surtout au xvie siècle, au siècle de la Renaissance, que les exemples abondent. On se sert de qui, quoi, oü, dontj mais surtout du nouveau relatif lequel. Cet emploi se continue encore au xvne siècle; il s'est perdu de nos jours. On le trouve: I. avec un gérondif ou un participe: Je suis sujet d une infinité d'erreurs, desquelles venant d rechercher la cause (= et, venant a en rechercher la cause), je remarque . . . , Desc, Médit., IV; en latin: errores quorum rationem investigans, observo. Loin de nous cette nuit, dont nos dmes couvertes Dans le chemin du Crime ont erré si longtemps. Rac, Poêsies diverses, IV, p. 120.; Souvent le pronom forme avec le participe la construction, appelée en latin „ablatif absolu", c-a-d. qu'il fonctionne comme sujet de 1'action exprimée par le participe, mais qu'il n'occupe pas de place dans le reste de la phrase: Le corps de Jésus Christ, est vraiment sous les espèces; lesquelles étant en lieu particulier, le corps de J.-C. y est aussi, Pascal, Prov., XVI (quibus loco proprio versantibus Christi corpus ibidem invenitur). — (Ils) demandèrent d'être regus d se justifier: ce qui leur ayant été accordé, les deux partis quittèrent... La Rochef., Mém., II, 160. II. avec un infinitif, sous le. régime d'une préposition (surtout pour): On trouve ce type déja dans Joinville: pour laquel guerre appaisier messirès li roys y envoia monsignour Gervaise d'Escrangnes, Joinv., 458 F. (ad quod bellum pacandum rex misit). ■— Devrions-nous point mourir de honte de sentir en LATINISMES 99 notre cceur la mondanüé, pour laquelle éviter (= tandis que, pour Véviter), une pauvre muletlère n'a point craint une 'si cruelle mort, Marg. d'Angoulême, Heptam., Nouv. II. — Tout cela faute d'avoir assez bien démêlé une équivoque trés grossière, et dont pour être parfaitement éclairci, il ne faut que se ressouvenir d'un principe..., Boileau, Réflexions crit. sur Longin, X. III. Le pronom relatif occupe une fonction dans une subordonnée amenée par n'importe quelle conjonction (on trouve surtout lequel . . . si): Les géans . . . emporterent leur roy . . . Lesquels quand Panurge apperceut, dist d Pantagruel, Rab., II, 29 (gigantes, qui cum Panurgum animadverterunt, dixit). — Mon dessein étoit d'entretenir mon ami . . . devant lequel si je fais des fautes {=- et si devant lui), je suis assuré de l'impunité, Balzac, Lettres, VI, 18. — Elles ont quelques formes penlbles, lesquelles pourveu qu'on oublie (= mais pourvu qu'on les oublie) par discretion, non par erreur, on n'en a pas moins de grace, Montaigne, I, 13. IV. Le pronom se trouve placé devant un autre pronom relatif: J'y trouve aussi des figures, desquelles ceux qui nous défendent l'usage . . . ne sont pas savans en la lecture des anciens, Malh., H, 485 (figurae quarum usum qui vetant ignorant). — Cela fait un cercle d'ou sont bien heureux ceux qui sortent (et ceux qui en sortent sont bien heureux), Pascal, Pensées, II, 150. Rem. Pour la lusion de la proposi tion relative avec une proposiUon objective cf. § 275 et suiv. PRONOMS INTERROG ATI FS1) OBSERVATIONS GÉNÉRALES 132. Le latin classique a les pronoms interrogatifs suivants: quis, quid (quisnam, qui nam; ecquis), employés en général comme substantifs. !) K. de Jong, Die Relativ- und Interrogativpronomina qui und qualis im Altfranz., thèse Marburg, 1910. — O. Richters, Zur hist. Syntax vom inferrogativen quel, thèse Göttingen, 1910. 100 PRONOMS INTERROOATIFS qui, q u a e, q u o d, employés généralement comme adjectifs. quantus; qualis; quot; quotus. u t e r = lequel des deux. Pour 1'histoire de ces pronoms en latin vulgaire, nous renvoyons au chapitre des pronoms relatifs, § 110. 132bis. Jetons un rapide coup d'ceil sur le dévelop- DeVglnéra™e" pement de ces pronoms et voyons quel est Pétat des choses en vieux frangais. Constatons d'abord que uter. a disparu et a été remplacé par qui ou par une. périphrase, si on sent le besoin de distinguer: lequel des deux. Quot s'est également perdu et quant le remplace en vieux frangais. Pour ce qui regarde quantus, il a perdu son sens primitif, et ne garde que celui de quot: Et a quanz ans enfant soit en aage por tere tenir, Beaumanoir, XV, 1. — Le sens primitif de la grandeur a été exprimé par qualis: quanta fortuna = quelle fortune, ou quelquefois par la périphrase combien grand; quotus a disparu également, on le remplace par quantiènte et surtout par quel. Qualis est resté et a même considérablement étendu son domaine. II est devenu le pronom interrogatif adjectif par excellence et a comme tel supplanté qui quae quod. Nous en parierons tout a 1'heure en détail. Par suite de toutes ces pertes — et il faut tenir compte encore de la réduction de la déclinaison, cf. § 110 — le pronom interrogatif s'est reduit a qui, que et quoi, quel et quant en vieux frangais. Donc le frangais dénote, en face de la richesse du latin, une pauvreté de formes remarquable. II est vrai que quelques-unes des fonctions que le latin pouvait exprimer, sont rendues en frangais par comme et surtout par combien, mais il reste quelques nuances qui se sont perdues complètement. Heureusement qu'en face de ces pertes on peut relever quelques gains: dont et oü, qui, d'adverbes qu'ils étaient, en sont,arrivés a exprimer un rapport pronominal; enfin le nouveau pronom lequel qui est de formation frangaise. Nous allons passer en revue ces différents pronoms. Dont, o ü, quant 133. a) dont et oü pronoms s'emploient surtout dont et on. ' comme relatifs (cf. § 124 et.suiv.); comme interro- RÉDUCTIQN DES PRONOMS INTERROOATIFS 101 gatifs, ils représentent un neutre précédé d'une préposition | Dont luy souviendroit-il (= de quoi)? Palsgrave, p. 344. — Caliste, ou pensez-vous (= a quoi)? Malh., I, 137, 9. — Dont ne se trouve plus dans cette fonction au xvne siècle; oü se rencontre encore après. En vieux frangais, on sent encore nettement le sens adverbial dans des phrases comme: SI li demandé: Sire nlés, dont venez? Charroi de Nimes (Clédat, p. 81). Calvin change Dont procédé cela? dans 1'édition de 1560 en D'ou procédé cela? quant. 134, ^ quant avec le sens de q u o t = combien de se trouve pendant tout le moyen age, cf. 1'exemple rité plus haut, § \3Zbis. II n'est pas rare au xvie siècle et Malherbe s'en sert encore: Quantes fois, lorsque sur les ondes Ce nouveau nüracle flottoit, Malh., I, 47, 51—52. Mais c'est un exemple isolé. Tous les grammairiens déclarent qu'il faut employer combien de. Rem. Palsgrave, p. 352: „for „how mauy" I fytade used af ter these substantyves gens, fogs, choses and such lyke, as quantes gens, quantes fogs, quantes choses, etc.". Vaugelas, H, 214, trouve quantesfois „beau et agréable a 1'oreille", mais il ajoute que „pas un de nos Poètes n'en voudroit user aujourd'hui". Qui, que, quoi qui. 13S" Le Pronom (lui a supplanté toutes les formes féminines au singulier et au pluriel, et après 1'absorption du datif cui et de 1'accusatif quem (resté comme pronom relatif1), il resta le pronom substantif par excellence; on le trouve même employé comme pronom neutre: Qui nous a troublez et divisez sinon les opinions de la religion? Lanoue, 53. Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage? La Fontaine, I, 10. Après ce coup, Narcisse, a qui dois-je m'attendre? Rac, Britannicus, II, 6. l) Cf. le pronom relatif, § 110. 102 PRONOMS INTERROOATIFS Dans le second exemple on remplace actuellement qui par 4 quoi, dans le premier en général par qu'est-ce qui. qui... qui et 1'acc. que... que, dans le sens les uns... les autres s'emploient couramment pendant tout le moyen age: nauthonniers, que de celle nef, que de l'autre, Joinville. — Après le moyen age on trouve que... que seulement employé adverbialement: Que bien que mal, elle arrlva, La Fontaine, Fables, IX, 2, 61. Le nominatif qui . . . qui se trouve encore aujourd'hui, quoique son emploi se soit restreint beaucoup. Au xvie siècle: Qui entonne du vin la liqueur éeoulée . . ., qui trépigne dessus; qui . . . fait geindre le pressoir, Baïf, 12 (Darm., p. 245). — Au xvne: lis cherchèrent la source du mal, qui d'un cöté, qui d'un autre, Balz., De la Cour., disc. III. — Aujourd'hui: qui cd, qui ld; qui plus, qui moins. Rem. 1. Vaug., I, 121, déclare que „c'est une facon de parler qui est fort en usage, mais non parmy les excellens Escrivains", Th. CorneUle est de son avis, mais 1'Académie „ne crait point que la répétition de qui pour dire les uns les autres ait cessé d'estre en usage parmi les bons Escrivains". Rem. 2. L'italien emploie quale... quale; ie provencal moderne quonra ... quonra (= qua hora?); quan... quan: cf. Artnand et Morin, Le langage de la vallée de Barcelonnette, p. 322. Rem. 3. II faut reconnaïtre également le pronom iHterrogatif dans . 1'expression &est d qui, c était a qui, qu'on trouve déjè dans Commines: Eux deux estoient a Venmj a qui seroit pape, mais elle est surtout fréquente en francais moderne. Relevons aussi les tournures (a) qui mieux mieux et en vieux francais (a) qui ainz ainz: des nefs sunt ki ainz ainz issuz, Rou, III, 1083; ici pourtant 1'analyse de la pensee voit en qui plutdt le pronom relatif. 136. Ces deux pronoms remontent au latin quid; que et quoi. ,„ . , r \que est la forme atone, quoi la torme tonique. Que s'emploie surtout comme accusatif: Que cherchez-vous; comme nominatif, il a été remplacé, nous 1'avons vu, par qui et par qu'est-ce qui (cf. plus loin § 138). II reste tout de même comme sujet d'un verbe unipersonnel: Que se passe-t-il? et comme prédicat des verbes être et devenir : Que devient-il? qu'êtes-vous? — Comme le pronom neutre latin, que peut marquer plusieurs rapports prépositionnels: „pourquoi, a quoi, combien": Que n'êtes-vous venu? — Que sert la science sans vertuP — que d'eau! LES PRONOMS NEUTRES 103 Quoi, étant la forme accentuée, se trouve après lés prépositions: A quoi pensez-vous? L'ancien francais 1'employait quelquefois comme régime direct: Quoi ferai-je? surtout avec 1'infinitif et le gérondif1). Cet emploi est même resté dans-la langue actuelle, surtout dans les phrases négatives: Les journaux ne savent quoi inventer pour me nuire, A. de Musset. — J'en aurai le cceur net. En quoi faisdni? Richepin. — Et dans les dialectes: Quoi ditesvous donc? Jaubert. — On 1'emploie encore absolument: Qu'y a-t-ll? Quoi? Rem. 1. Quoi sert encore a renforeer dans le langage familier Fidée interrogative dans comme quoi? Celte locütion introduit mêmé une phrase substantive, et équivaUt donc presque a que: Le düc raconte a son frère comme quoi il lui auait menti d'abord en se disant amoureux de Caroline, G. Sand. — Cf. 1c latin vuig. quomodo et qua liter: debet tria testimonia mittere quod . . . inve.nisset, et altera tria qualiter pater... invenisset, Pardessus, Diplom., I, p. 177. — Vaug., II, 12, dit: „comme quoy est un tefme nouveau, qui n'a cours que depuis peu d'années, mais qui est tellement usité qu'on 1'a a tous propos dans la bouche". L'Académie déclaire: „On ne s'en sert plus présentement". Malgré cet arrêt notre locütion est encore tres vivante. H e m. 2. La langue populaire emploie parfois quoi comme prédicat du verbe être: Quoi c'est qu'on bouffe, Benjamin, Gaspaid, p. 23; quöi Cest qu'vous avez enviet ibid., p. 292. interrogation 137. Ces pronoms se rencontrent aussi dans une indirect*. interrogation indirecte: Li cardunal lur unt mainte feiz demandé K'il orent l'apostoile e a els uporté, Saint Thomas, 607—8. et avec qui neutre: Je ne sais qui me retient. Par suite d'une confusion trés compréhensible avec les phrases relatives, les pronoms qui et que ont été supplantés par ce qui, ce que, pronoms déterminatifs -f pronoms relatifs, quand qui se rapporte a une idéé neutre. Cela n'est pas arrivé avec les pronoms masculins et féminins. Qu'on compare Je ne sais pas ce qui s'est passé et Je ne sais pas qui a passé par ici. Pour l'emploi de qui est-ce que dans 1'interrogation indirecte, cf. le paragraphe suivant. l) Cf. le pronom personnel, § 69, soi-disant. 104 PRONOMS INTERROQATIFS 138. Comme qui pouvait marquer tant de fonctions: Périphrase i i ' de qui, que, masculin,' féminin, neutre, singulier et pluriel, noquoi- minatif et accusatif, on comprend qu'on ait inconsciemment cherché des moyens pour mieux exprimer ces différents rapports. On a trouvé: qui est-ce qui qu'est-ce qui (d, de) qui est-ce que qu'est-ce que (d, de) quoi est-ce que Cette tournure existait déja en latin: Quis est qui me vocat? „qui est-ce qui m'appelle?" Seulement, tandis qu'on a, en frangais, affaire a une périphrase dont on ne sent plus les éléments composants, le latin y sent encore bien une phrase principale et une phrase relative; aussi le latin traduit-il qui est-ce qui croit cela par quis est qui hoe credat, oü on se sert du subjonctif, paree que la réalité de la subordonnée est niée. On trouve des exemples dès le xne siècle: que est ce que tu dis, Garin le Loherain. — Et après ce temps notre construction devient extrêmement fréquente, même dans 1'interrogation indirecte: Je vous demandé pour quoy c'est que l'avez bastïe, Myst. du Vieil Testament, 5657. — C'est qu'il ne nous peut pas venir en l'entendement, que c'est qui est bon de faire, Calvin, Instit., chrét., II, 2, 25 (en 1541: que c'est qu'il est). Rem. Dans ces phrases, il faut consWérer le premier pronom comme interrogatif, le second comme adverbe relatif; seulement au premier cas, qui est-ce qui, qu'est-ce qui, le second qui est un pronom relatif sans antécédent, espèce d'apposition de ce i). Quel et lequel 139. Nous avons vu que quel a supplanté le quel' pronom adjectif qui quae quod. Mais en outre la langue ayant perdu pendant son évolution tant de formes, c'est surtout le pronom quel qui a vu peu a peu s'élargir son domaine et qui a pris différentes fonctions qu'on exprimatt d'abord d'une autre facon. Nous passerons en revue ces fonctions si variées, en suivant 1'exposé de M. Richters, f? a) quel = qualis, sens primitif: Ni li chalt guaires de quel mort nus murions, Roland, 227. i) Cf. Tobler, II, 9 note; Foulet dans Romania, 1921, p. 252 et suiv. QUEL ET LEQUEL 105 Ce sens s'est conservé jusqu'a nos jours: Quel homme! b) Une extension de cette fonction est l'emploi devant un adjectif, oü le latin se servirait de quam, adverbe d'intensité: Quel étrange empire est le vótre! En vieux francais on employait en général com: com bel arbre! c) On s'est servi quelquefois de quelles au lieu de qui pour indiquer le féminin: Lors le proudhomme... demanda qui les menera et quelles yront en leur compagnie, Quinze joyes du mariage, p. 22, 1. 11. II. quel = quantus et quot: passage de la qualité a la quantité: Deus! quel dolor que les Francels nel sevent! Roland, 715. Or me dictes, ma belle amye, Quels gens y perdez-vous? — Assez. III. quel = uter: Quel chemin le plus drott d la glotre nous guide, Ou la vaste science, ou la vertu solide, Boileau, I, 164. IV. quel = quid (trés rare): Ha, Piramus, quel la feras (= qu'y feras-tu) ? Pyrame et Thisbé, 160. V. quel = de qui: Quel sang a-t-il versé? Volt., Mérope, II, 1. VI. quel = quotus. Dans la phrase de Furetière, citée par Littré: Je ne sais d la quantlème visite ce fut quil lui répéta, Rom. bourg, III, p. 243, on dirait actuellement: d quelle visite. De même quel jour du mois, au lieu de: quel quantième du mois. uquei ^ nous reste encore a parler de lequel, qui est de formation francaise (cf. le pronom relatif, § 120) et qui, comme le' prouvent les exemples de lequel... que, cités au § 365, existait certainement au xne siècle, quoique Villehardouin ne 1'emploie pas encore. D'abord la langue s'en est servie aussi bien comme substantif que comme adjectif. C'est ainsi que La Fontaine dit encore: L'auteur a voulu éprouver lequel caractère est le plus propre pour rimer des contes, Avertissement de 1'auteur. Peu a peu pourtant on a opté pour quel comme adjectif attri- SNEYDERS DE VOGEL, Syntaxe historique. 2me édition. 8 106 Pronoms interrooatifs butif ou prédicat du verbe être, lequel pour désigner spécialement des personnes ou des choses déterminées par ce qui précède ou ce qui suit: Volei deux livres: lequel désirez-vous? Lequel de ces hommes avez-vous rencontré? Au xvme siècle 1'usage moderne s'est constitué. Nous avons cité tout a 1'heure un exemple de quel comme neutre. Cet emploi se continue, seulement c'est lequel qui le remplace naturellement: Or vous demant-je, flsl-ll, lequel vous ameriés miex, ou que vous fussiés mesiaus ou que vous eussiés fait un pechié mortel? Joinville, 27. — Aujourd'hui encore on trouve des traces de cette construction. Plattner, III, 2, 142, en cite plusieurs exemples: Lequel vaut mieux d'être lei ou d'être ld, Mme A. Tastu. — Couturlère, lingère, nous n'avons pas trop ♦ distingué lequel, Th. Oautier. — On préfère pourtant qu'est-ce qui, ce qui, quoi. Ainsi, lequel n'a pas réussi a prendre toutes les fonctions de quel substantif. Notamment, il ne désigne jamais la qualité, et dans les phrases comme: Vous savez quels ils sont, La Rochef., III, 120; Quelle fut sa réponse! et quel devins-fe, Arcas! Racine, Iphigénie, I, 1. on dirait aujourd'hui: „ce qu'ils sont" et „que devins-je?" PRONOMS INDÉFINIS i) 141. Les pronoms indéfinis forment un groupe peu précis. Pour amener quelque clarté dans notre exposé, nous les subdiviserons en un certain nombre de groupes, division adoptée aussi dans la Grammaire de Meyer-Lübke. I, quis, aliquis, quidam, quispiam, quisquam et u 11 u s; a 1 i u s et alter. a) Des six premiers pronoms quis et quispiam, quisquam et ullus ont disparu. Comme ils font un peu doublé emploi avec aliquis, on a pu s'en passer; quidam a été remplacé par certain; le quidam actuel est un emprunt fait au !) H. Yvon, Sur les pronoms dits indéfinis (Rev. de phil. fr., 1902, p. 129—140). — H. Wagenvoort, Lat. quisquam en ullus (Neophiloloqus, VII p. 126). ALIUS ET ALTER 107 latin et qu'on trouve a partir du xiv* siècle: Un quidam fut qui rapporta, Dictionnaire général. A1 i u s cède devant alter, qui en latin déja fonctionnait comme génitif de alius; seul le neutre el < *alum reste jusqu'au xv« siècle pour être supplanté a son tour par autre chose: EI ne mengai il a trente ans passé, Huon de Bordeaux (Clédat p. 49). alter. UZ' b) Les deux pronoms vraiment vivants sont donc a 11 e r et a 1 i q u i s. Quant au premier, il faut distinguer autre et autrui, cas régime accentué. On trouve autre jusqu'au xvi« siècle dans un emploi vraiment pronominal, donc sans article: Mtendral-fe plutot qu'autre le luy revelle, S. Gelais, III, 169. Ne se sont proposez aultre bul, Du Bellay, Lettres, 53 - II en reste une tracé dans les locutions entre autres et autre chose. Malh, IV, 364, établit la règle actuelle: „On ne peut pas direpourchasser autres, il devoit dire: en pourchasseront d'autres" Un autre pouvait se rapporter au féminin aussi bien qu'au mascuhn: Mals vous devez cesser de vous en tourmenter, Encor que vous voyez un autre s'en vanter, Desportes, Elégie, 9 (blamé par Malherbe). Je me tiendrois heureux entre les bras d'un autre. ,., Corneille, Polyeucte, II, 2 qu il corrige plus tard en une autre. Autrui, forme accentuée, est essentiellement un substantifQui üf'autrui mort atent la richeté (de la mort d'autrui). Charroi de Nïmes (Clédat, p. 83). Le sens de régime s'est maintenu; on le trouve e. a. dans la locütion l'autrui (= le bien d'autrui): Le monstre infdme d'envie A qui rien de /'autrui ne plalt, Malh., I, 111, 92. Vaug., II, 291, déclare que cette fagon de parler n'est plus en usage que dans la lie du peuple. Aujourd'hui autrui est presque toujours régime, il a un sens général, mais est peu usité: Mêdire d autrui est un divertissement bien humain. 108 PRONOMS INDÉFINIS L'un et l'autre, qui rend h*iatin uterque, est aujourd'hui suivi du pluriel, tandis que ni l'un ni l'autre (neuter) et l'un ou l'autre demandent en général le verbe au singulier. Au xvue siècle on trouve aussi bien le singulier que le pluriel: L'un et l'autre vous a obligé et l'un et l'autre vous ont obligé, Vaug, I, 239. Rem. Pour qui ■ ■ ■ qui, l'un . .. l'autre, cf. § 135. I 143. c) Aliquis 'a( sous la forme du neutre Aliquis. a i i q u i cescuns. Une autre tournure juxtö u n~ü m = „un a un", a été considérée en latin postclassique comme 1'équivalent de quisque et a eu une fortune extraordinaire dans les langues romanes. Dans les Serments on trouve p. ex. cadhuna. La combinaison de cescuns et de chaduns semble avoir fourni la forme chascun, qui dans la vieille langue était employée comme adjectif aussi bien que comme substantif: et chascun jour nous esloigna li venz des pais ou nous avïens estei neiy Joinville (Clédat, p. 272). — Picrochole commanda qu''un chascun marchast soubz son enselgne hastivement, Rab., I, 26. On trouve la fonction adjective de cliascun jusqu'au xvne siècle: Deux eens livres de rente par chascun an, Malh, I, 339; — mais Vaug, II, 393, déclare que chascun n'est jamais adjectif. Comme tel, il a été peu k peu remplacé par chasque, qu'on semble avoir tiré de chascun. On trouve des exemples isolés de ce mot dès le xne siècle, il ne devient général qu'au xvie. Ce qui est curieux, c'est que Palsgrave, p. 82 et 362, ne semble même pas soupconner 1'existence de chaque. 149. b) Omnis a disparu en gallo-roman, et tout. ' . 1 ö totus (plus tard aussi entier) 1 a remplacé. On sait qu'en latin déja le singulier omnis est Ie synonyme de totus: le Gallia omnis des Commentaires de César équivaut a Gal/ia tota. Même au pluriel t o t i se dit pour o m n e s, et cela tant en latin postclassique qu'en latin archaïque: quoi bini custodes semper totis horis occubabant, Plaute, Miles gloriosus, 212- 114 PRONOMS INDÉFINIS Apulée en offre plusieurs exemples. Cf. le Commentaire de Löfstedt sur la Peregrinatio, 2, 6: toti Mi montes. On sait que totus est adjectif et varie aussi bien devant les adjectifs que devant les substantifs1): Toz est mudez, perdude at sa color, Alexjs, 3. On se rappelle que tout a le sens concessif devant un gérondif et dans la locütion tout... que, cf. § 364. Employé comme adverbe tout renforce souvent un superlatif et des mots comme tel, ainsi, maintenant: Choisissez, pour ce don, Tout le plus gras du pdturage, La Font, Fables, XI, 1. Tuit issi voit qui felun sert, Thomas, Tristan, 1955. Tout ainsi que les pensées sont les pcrtraits des choses, de même , Mol, Mariage forcé, 4. — Tout ouy, Fournier, p. 363. Relevons encore la tournure tout le monde, devenue un vrai pronom indéfini. 150. c) Pour h ö m o, qui sous la forme de on est devenu pronom, cf. le chapitre dés pronoms personnels, § 64. Rem. Pour les pronoms en -cumque et ceux qui se forment par redoublement: quicumque, quisquis, cf. le chapitre des pronoms relatifs, § 130. Relevons l'emploi de quelconque dans un livre quelconque, oü c'est un pur pronom indéfini. De même quiconque dans les phrases du type: Je pus déja. me rendre compte de Vintérieur charmant que quiconque pourrait se créer au village hollandais avec un rien de goal, IUustration, 29 janv. 1921, p. 84. 1) Pour la question de 1'accord, cf. § 47. \ CHAPITRE VI LE VERBE 151. Comme le verbe peut se trouver en différents rapports avec son sujet ou avec son complément, nous devons traiter les questions suivantes: I. Rapports entre Ie verbe et son sujet: A) Voix active. B) Voix passive. C) Verbes pronominaux. D) Verbes unipersonnels. E) Accord entre le verbe et son sujet II. Rapports entre le verbe et son complément: A) Verbes a complément direct ou Verbes transitifs. B) Verbes a complément indirect ou Verbes intransitifs. C) Verbes sans complément ou Verbes neutres. D) Passage d'une classe a une autre. Enfin, Paction pouvant se présenter sous différents aspects, nous aurons a parler des: III. Modes: A) Indicatif. B) Impératif. C) Subjonctif. D) Conditionnel. IV. Formes nominales du verbe r A) Infinitif. B) Gérondif. C) Participe présent. D) Participe passé. Temps: A) Présent. B) Les temps passés. C) Les temps futurs. 116 LE VERBE t LE VERBE ET SON SUJET A. VOIX ACTIVE 152. Le sujet d'un verbe actif accomplit 1'action exprimée par le verbe, ou se trouve dans 1'état que le verbe indique: il Ut, It souffre. Pour l'emploi, la langue n'a guère changé; les quelques cas dans lesquels le frangais se sert d'une autre tournure que le latin, p. ex. i t u r > on va, nous les traiterons dans un autre chapitre. 153. Quant a la voix passive du verbe, elle est tellement liée a la forme pronominale que nous traiterons ces deux chapitres ensemble. B. ET C. LES VERBES PRONOMINAUX ET LA VOIX PASSIVE1) Sens de la 154. Le latin classique connait une forme en -r, forme en -r. qU, s'emploie: 1) Pour exprimer le passif: amor, laudatur. 2) a. Avec une valeur neutre: Vas rumpitur. b. Même valeur, mais la forme en -r alterne avec la forme pronominale: Pares vetere proverbio cum paribus facillime congregantur, Cic, De Senectute, 7. — Impii cives unum se in locum congregabant, Cic, Philipp., 14, 15, — Nee vestlgio quisquam movebatur, Liv., X, 36. — Ne se ex eo loco moverent, Liv., XXXIV, 20. — Cf. aussi Pétrone, 26 et 27: amicimur ergo diligenter, „nous nous habillons"; nos interim vestiti errare coepimus, „après nous être habillés"; ipse pater famillas qui soleatus pila prasina exercebatur, „s'exergait avec une balie verte, jouait a la paume". 3) Sans valeur: ce sont les dépo n en ts. Le sens primitif semble être que le sujet prend un certain intérêt dans 1'action; i) G. Korting, Das lateinische Passivum und der Passiv-Ausdruck im französischen (Zeitschr. f. franz. Sprachc und Litteralur, XVIII, p. 115). — E. Richter, Zur Entwicklung des reflex. Ausdrucks im Romanischen (Zeitschr! f. rom. Phil., XXXIII, p. 135). — A. Tobler, Verm. Beitrage, II, 65. — K. Sneyders de Vogel, De verbis pronominalibus (Stnemosgnc, 1915, p. L). — Cf. aussi les deux pages judicieuses que Brunot a consacrées a notre sujet dans sa petite Grammaire historique de la langue francaise, p. 446—448, et Littré, Hist. de la langue fr., II, p. 317 et suiv. — Pour la langue actuelle: H. Schulze, Das franz. Passiv und seine Ersatzmittel, Progr. Zittau, 1895. LE PASSIF EN LATIN 117 c'est donc le sens du medium grec; voila pourquoi on parle quelquefois de la voix moyenne. En latin préhistorique tous les verbes doivent avoir eu la faculté de s'employer a la voix moyenne, mais en latin classique le sens primitif s'est effacé; la langue a fait un choix: plusieurs verbes ne peuvent plus se mettre a cette voix moyenne, d'autres au contraire ont perdu 1'actif, ce sont ceux qu'on appelle déponents, „verbes a sens actif et a forme passive", dit la grammaire en mettant ainsi a une dure épreuve la foi des élèves dans le bon sens des Romains. A cette dernière catégorie appartiennent des verbes comme mercari, negotiari, adulari, nasci, paree que, je suppose, le sujet prenait toujours un certain intérêt dans 1'action. Cet état de choses n'a pas duré. La langue a cherché de tout temps des moyens pour rendre ces significations d'une facon plus précise et pour écarter la forme en -r, quand elle n'exprime plus rien. Le passif en 155. l)L'idée passive est exprimée en latin: a)par latin. ja forme en pour je présent, 1'imparfaitet le f utur; *) par une forme périphrastique, composée du verbe es se avec le participe passé, pour les autres temps. Or, quoique la forme synthétique se maintienne encore longtemps, pourtant elle va disparaitre, non seulement avec son sens passif, mais aussi avec toutes ses autres acceptions; il sera remplacé en frangais par esse -f participe passé ou par la forme pronominale, dont nous parierons tout a 1'heure. Les textes du latin postclassique nousfournissentmalheureusement moins de preuves de ce remplacement de la forme synthétique par la construction analytique qu'on pourrait le supposer a voir 1'état des choses en roman. Pourtant, il y en a d'assez probants. Ainsi nous trouvons dans Apulée, de Mundo, XI: Austrorum in nominibus Ma est observata diversitas, oü en latin classique on mettrait plutöt le présent observatur. Dans les textes classiques on trouve d'ailleurs de nombreux exemples qui prouvent que Ie participe sans auxiliaire n'exprime pas le passé: O luce magis dilecta sorori, Virg, Énéide, IV, 31, „O toi que ta sceur aime plus que la lumière"1). Et comme sum n'exprime pas non plus une 1) Cf. pour le sens du participe e. a. J. H. Kern, De met het Part. Praes. omschreven werkwoordsvormen in 't Ned. (Verhandelingen der Koninklijke Akademie der Wetenschappen, Afd. Letterkunde, XII, 2, § 8—10). 118 LE VERBE idéé du passé, on comprend que le participe avec esse, du moins dans certains cas, peut prendre les fonctions de la forme synthétique en -/-. Grégoire de Tours et Frédégaire ne se servent pas de notre tournure, même si elle est admise. Cela semble dü a une réaction savante: on veut se mettre en garde contre une faute souvent cömmise et on exagëre dans un autre sens. De même, Ammianus Marcellinus emploie 1'imparfait amabatur au lieu de amatus est sans doute paree que cette dernière forme est vulgaire1). - ' Le passif en 156. Quoi qu'il en soit, la langue a abandonné francais. complètement la construction synthétique: Ie francais, 1'italien, 1'espagnol, le portugais ont eu recours a 1'auxiliaire esse. Seulement on connait 1'inconvénient que présente ce verbe, qui exprime plutöt 1'état que 1'action et qui, par conséquent, est en général incapable de rendre le passif de verbes comme bötir, frapper, c-a-d. de verbes qui expriment une action momentanée2). Aussi l'emploi de cette tournure est loin d'avoir 1'étendue de 1'auxiliaire worden en hollandais. Le frangais la remplace souvent par la voix active et le pronom on i Er wordt geklopt = on frappe, ou par la forme pronominale du verbe, dont nous parierons plus loin. Dans les Grisons on se sert du verbe venire, et cette tournure est aussi connue en italien et en espagnol: les verbes de mouvement yenire et andare expriment mieux que être le changement qui se produit: La Gerusalemme vien cantata da tutta Italia. — Le buone usanze vanno rispettate. — Todo ird perdido, Cervantes, Nov. Ejemplares, p. 38 (Nelson). Le frangais, lui aussi, a parfois eu recours a oe verbe3): 1) H. F. Muller, The passive voice in vulgar latin (Romanic Review, XV, p. 68—93), croit que la disparition du passif synthétique n'est pas antérieure a la seconde moitié du vme siècle. 2) Excepté nalurellement dans les temps composés ou dans le passé défini: 11 a. ètê frappé, il fut frappé, oü le sens est assez clair. De même dans unie phrase comme: Le cheval est amené, brossé, lavé; ou encore dans Tu seras puni, oü 1'esprit ne distingue pas nettement 1'état de 1'action. 8) Déja a 1'époque d'Auguste on lit dans Properce, II, 4, 12: Saepe roges aliquid, saepe repulsus eas, c.-a-d. „que tu sois souvent repoussé". — K. V. Ettmayer, Das westladinische Passivum (Zeitschr. f. rom. Philol., XLI, p. 42 et suiv.), croit que venire -(- supin est a la base de la construction romane: venitur erepfum puellam > 'venit ereptu(m) puella(m) > puella venit erepta. LE PASSIF EN FRANCAIS 119 La religion Catholique s'en alloit perdue, si... la succession du Royaume venoié au Roy de Navarre, Sat. Ménippée, 136. La conjuration s'en alloit dissipée Vos desseins avortés, votre haine trompée, Corn., H|, 426. Aujourd'hui même on trouve parfois: La messe s'en va dite. i On a essayé d'autres. tournures encore: La chose devient falie1). Ja n'i avra menti d'un mot (= on ne mentira pas), 2) Béroul, Tristan, 398. La ot grant joie demené, Passion des Jongleurs, éd. Pfuhl, 2007 La chose tourne finie. D'autre part, la vieille langue employait la forme périphrastiqué avec Ure, la oü on mettrait aujourd'hui on avec 1'actifVray Dieu, comment il y feut beu et gallé, Rabelais, tandis quon lit Pathelin, 314: II y aura et beu et gallé. II fut dansé, sauté, ballé, La Fontaine, Contes, I, 1, 518. Dame, tu es la nouvelle lumlère qui est veue lutre Miracles de N. Dame, XXVI 180 Alors tous les asslstants furent veus tressaillir de joye' Sat KKe3t' 2L 8 § 178 P°Ur la tournure impersonneüe et ^ 160 et 166 Pour la construction pronominale avec sens passif3). -4_R„e-m'/F'ena"f2' + parL Passé «* *»* '°it a fait parallèle a alter ,t„T C0mbme a m Partiape d'un verbe neutre, aller exprime ZnéïsZr? r 'rain de 56 'aire: ™iurd>hui qulmel l Im't »T UrminéeS' "S°nt 6n tram de se te«'ïïü ^ ~ ^ vi*"e"F *'e" ™ èteinte, „est en train de séteindre , Vaug., Qumte-Curce, IX, 3. - II est donc naturel qu'avec dissipé qui expnme un état passif, comme dans 1'exemple de Corneille cité a la page précédente, aller serve d'auxiliaire a la voix passive. Déponents. 157> 2) Déponents. Nous pouvons être brefs sur cette fonction de la Dixit Esaias: hic homo, qui commovet orbem Et reges totidem, sub quo fiet terra deserta. ,n tv » Commod., Instruct., I, 41. 1—2 ') D autres exemples dans Tobler, V, 400 S) Cf' aussi Darmesteter, Cours de gramm. hist., IV, pp. 107, 112, 117. 120 LE VERBE forme en -r, puisque aussi bien son sens n'est plus senti en latin. Dès 1'époque de Plaute il y a hésitation: plusieurs verbes sont tantöt déponents, tantöt non. Priscien x) donne toute une liste de verba communia. Diez 2) cite: fabulare, jocare, luctare, nascere, consolare, dignare, mentire, partire, precare, test are, sequere. La même confusion se trouve dans les inscriptions: funxit = functus est, E. Diehl, Vulgarlat. Inschriften, 1208. — impraeco = imprecor, ib., 1216. — Et 1'inverse: dubiiamur = dubitamus, ibid., 1565; et la tournure fréquente sorores una die obitae sant = obierunt, ibid., 1041 (influence de mortuae sunt?). Dans les langues romanes, il n'y a plus tracé de ces verbes r ils sont tous passés a 1'actif, du moins pour les formes synthétiques; les autres se sont conservées telles quelles, tantöt avec le sens du parfait, si le verbe est neutre: natus sum = „je suis né", tantöt avec le sens passif, si lé verbe exprime une action transitive: Tresqu'a eest jor que ci sui consefiz, Roland, 2372. Ici sum consecutus a pris la valeur de „je suis frappé", a moins qu'on n'admette que la valeur primitive „j'ai atteint" se soit maintenue ici. 158. 3) Maintenant nous arrivons aux sens TsVmov°eVrVeneutre et réfléchi de la forme en -r et de avec sens 1'actif aocompagné de se. C'est la un chapitre trés compliqué. Constatons d'abord que le latin connait les verbes pronominaux, mais qu'il en fait un emploi beaucoup plus restreint que les langues romanes. En latin ce ne sont que les verbes objectifs, les verbes a complément direct ou indirect, qui peuvent s'employer avec les pronoms réfléchis, lavo puerum et me lavo; nocere alicui et sibi nocere; hostes in fugam vertere et se vertere in fugam; persuadere alicui et mihi persuasum habeo. On voit que dans tous ces cas le pronom a une fonction déterminée, mais on comprend en même temps que la valeur du !) Keil, Grammatici latini, II, 1378. ») Grammat ik d. rom. Sprachen, II, 109. LEVO, ME LEVO, LEVOR 121 complément peut s'affaiblir, qu'on peut en arriver a ne pas voir clairement 1'action du verbe exercée par le sujet sur lui-même et que, par la, le verbe peut prendre un sens neutre. Cette évolution a déja. commencé en latin classique; elle sera achevée en latin postclassique. En effet, suivant que le verbe a un sujet plus ou moins actif, ou suivant que le verbe lui-même exprime une action matérielle ou intellectuelle, 1'action qui sort du sujet pour y retourner sera plus ou moins claire: dans puer se lavat la valeur du complément direct se sent mieux que dans mihipersuadeo; dans c 1 a m o r se tollit in auras 1'action est moins visible que dans Caesar se movet. Le verbe pronominal touche donc dans beaucoup de cas a l'emploi neutre, et ainsi il entre en concurrence avec la forme en -r, qui elle aussi peut avoir cette valeur-la. Ainsi dans Cicéron on trouve pour certains verbes tantöt l'une, tantöt l'autre construction : quare eius fugae comitem me adjungerem, Cic, AU., IX, 10,2. — Domitius cum XII suis cohortibus eodem adiungeretur, ib., VIII, 12, 3.— Nous renvoyons aussi aux phrases citées p. 116 (moveri et se movere, congregari et se congregare). Or, le latin archaïque connait, a cöté de ces deux formes, encore une troisième construction pour exprimer 1'idée neutre, c'est 1'actif: male res vortunt, „les choses tournent mal", Plaut, Pers., 453. — foris aperit, „Ia porte s'ouvre", Pers., 300 De ces trois tournures, la forme en -r est la plus usitée en latin classique; il est souvent difficile de relever les trois constructions pour le même verbe. Ainsi du verbe adjungere, dont nous venons de donner deux exemples, la forme active avec sens neutre ne se trouve qu'en latin postclassique: in partibus Italiae quae ad Gaüiae adiungit, Galenus, Alfabetum, 95. — II en est de même pour abdere, tandis que acclngere p. ex. se rencontre de bonne heure sous les trois formes: a) UÜ se praedae accingunt, Verg, Aen., I, 210. — b) accingar dicere pugnas, Verg, Georg., 3, 46. — c) accingunt omnes operi, Terent,' Phorm., 318. — II faudrait traiter chaque verbe a part, paree que chaque verbe a son histoire particulière. l) Lindsay, Syntax of Plautus, p. 52. SNEYDERS DE VOGEL, Syntaxe historique. 2™e édition. 9 122 LE VERBE 159. Dans la latinité postérieure la forme active étend son domaine. Medert1) cite c o n g 1 u t i n a r e, movere, minuere avec les composés imminuere et diminuere, conferre, refrigare, resumere, rumpere; Petschenig, Transitive Verba als reflexlve bel Corippus*): iungere, minuere, miscere, qu'il compare avec les verbes italiens giugnere, minuire, mischiare; M. Niedermann3) et M. Bonnet*) ajoutent d'autres exemples: cicer vero si bene coxerlt, Anthim., 18, 25. Pourtant la forme en -r se maintient pendant toute la période latine: fragor rogantum tollltur, Prudent., Perlsteph., Ï81. — Mais malgré ce fait, 1'accord de toutes les langues romanes prouve que le peuple a abandonné complètement cette forme, que les textes ne nous offrent donc pas une image fidéle de la réalité. Ainsi, dans la langue parlée, ce sont de plus en plus les formes pronominales et les formes actives qui sont chargées d'exprimer l'idée neutre et qui continueront a remplir cette fonction jusqu'a nos jours dans les différentes langues romanes. Voici quelques exemples du latin postclassique, qui prouvent que la forme pronominale a absolument pris le sens neutre: donec cycatrix oculo se confirmet, Mulomed. Chir., 76. — Fac ut oculus cludere se non possit, ibidem, 73. 160. Quand 1'évolution de la forme pronominale en UprowmU est arrivée la, le pronom s'est tellement affaibli complément qu'on ne sent plus sa valeur de complément du s'ertace. verDe. on peut se servir de movere ou se movere, de adiungere ou se adiungere sans différence de signification: le pronom est donc devenu un ornement du verbe neutre, sa valeur grammaticale est devenue nulle. Ce phénomèneentrame commeconséquence trois constructions6): a) on en arrivé a mettre le pronom devant un verbe essentiel- lement intransitif comme tacere, ire; i) Quaestiones criticae et grammaticales ad Gynaecia Mustionis pertinentes, Diss. Giessen, 1911, p. 20. *) Archiv für latein. Lexikographie, III, p. 150 et 284. s) Neue Jahrbb. für das.klass. Altertum, Gesch. und deutsche Litt., 1912, p. 332. *■) Le latin de Grégoire de Tours, p. 630. 5) E. Löfstedt, Philol. Kommentar zur Peregrinatio Aetheriae, p. 140 sqq. LA FORME PRONOMINALE EN LATIN 123 b) on le place devant un verbe qui est déja accompagné d'un autre complément; c) on le met dans une construction passive. Exemples: a) Sed tu vita es animarum, vita vitarum, vivens te ipsa et non mutaris, vita animae meaef August., Conf., III, 6, — se quisque vivit et effert (=enterre), Manilius, IV, 534. — Recipit se episcopus et vadent se unusquisque ad hospitium suum, Peregr. Aeth., 25, 7. — Hic humor sudoris in ventrem se desidet (ms: deridet, Heraeus: deriïet), Mulomed. Chironis, 220. b) Putabam me quia statim illius non concupisceret. — Speravit se quia mortem vel crucem pertimesceret. c) Hic morbus se ad corpora increscens ustione extinguitur, Mulomed. Chir, 188. Form 5!>M" 'S' Enfin la structure pronominale, si intérespronominaie santé a plusieurs points de vue, en est arrivée aussi aVpassifnS a exPrimer Eidée passive. Cette évolution semble être terminée, elle aussi, avant 1'époque romane. II est vrai que plusieurs exemples qu'on pourrait traduire par un passif, pourraient aussi être expliqués comme ayant un sens neutre, mais il se rencontre pourtant quelques phrases oü la valeur passive est claire: Tune menslbus septem se mundabit terra per Ignem Et qui fuit humilis veniens de coelo vldetur, Commod., Carm. Apol., 1041. = „la terre sera purifiée par le feu". x) Korting explique cette nouvelle fonction comme sortant de la construction primitive ego me moveo; le sens passif s'expliquerait par la disparition de la fonction du sujet: on penserait seulement au fait que la personne subit 1'action, la tournure est devenue passive 2). On pourrait opposer a ce raisonnement logique qu'on ne trouve en latin postclassique aucun fait qui prouve cette évolution; certes, nous avons constaté que le sujet peut être un nom de chose, qui !) H. Goelzer, Le latin de Saint Avit, 1909, p. 19. — J. Pirson, Mulom. Chironis: La Syntaxe du verbe (Festschr. zu XII deutschen Neuphilologentage, Erlangen, p. 390—431). 2) Zeitschrift für franz. Sprache und Litteratur, XVIII, p. 119 et suiv. — Cf. aussi Bréal, Essai de sémantique, p. 85 .et suiv. 124 LE VERBE est donc incapable d'agir, mais la tournure n'était pas devenue par cela passive, mais neutre. S'il y a donc un autre moyen d'expliquer cette nouvelle fonction, il faut 1'adopter. Or, entre le sens neutre et le sens passïf le passage est trés facile: en latin plusieurs verbes neutres fonctionnent comme passifs de verbes transitifs: pereo, passif de perdo; veneo de ven do; bene ou male audio, de bene ou male dicere; vapulare de caedere, „battre". Dans le cri léve ou se léve nous avons le sens neutre, c'est bien entendu; mais qui est-ce qui ne sent pas que c'est presque un passif: het geschreeuw wordt aangeheven en hollandais1). II y a un fait qui, semble-t-il, a puissamment contribué a faciliter le passage du neutre au passif. Quand 1 e v a r i et moveri disparaissaient de la langue parlée, les formes analytiques comme motus et levatus sum se maintenaient, avec sens passif et avec sens neutre, comme nous avons vu. Quoi de plus naturel alors qu'on ait donné k levare et a se levare, k movere et a se movere, qui remplacaient 1 evari et moveri au sens neutre, aussi la signification passive, si proche de l'autre sens? Les mêmes Après avoir. discuté la construction des verbes constructions en latin, voyons maintenant 1'état des choses en en ancas. francais. La vieille langue n'est que la continuation du latin. On trouvera donc a) lever et b) se lever, tout comme le latin disait levare et se levare, — c) le pronom se trouve devant des verbes talre et mourir, qui par leur nature même ne souffrent pas de complément, — d) on le place devant un verbe qui est déja accompagné d'un autre complément, — e) se lever exprime le passif. — f) on le met dans une construction passive. Donnons quelques exemples de ces différents cas: 162. a) levare: lever. ' i Lors mut noise et tancons leva, Chrétien, Gulll. d'Angleterre, 1054. *) Cf. aussi 1'espagnol: go me he criado, Valdés, La Hermana San Stripicio, VII (j'ai grandi, j'ai été élevé). LA FORME PRONOMINALE EN FRANCAIS 125 Que acouchier vos covandra, Et de vostre anfant delivrer, Ibidem, 296. Tot erranment li roi laverent, Tristan Ménestrel, 64 (Romania, XXXV, p. 502). Del bien amende /' um et nuls huetn n'en empire, Saint Thomas, 10. 163. b) se levare: se lever. ' S'atornent d'aler a Bristol, Chrétien, Guill. d'Angleterre, 2053. Une matinée s'esmut, „il s'éloigna", Ibidem, 2288. taire et 164. c) se tacere: se tal re. £j cuens se j„t (j a c u j t) desoz un pin> Roland, 2375. L'emperere. se dort ehs ou palais plenier, Fierabras, 6136. Et se font povre et si se vivent Des bons morceaus delicieus, Jean de Meung (Clédat, p. 201). Mais 1'hésitation est grande; les formes sans pronom: vivre, dormir, taire, etc, sont fréquentes: Tes (tais-toi)! fet li rois. Chrétien, Guill. d'Angleterre, 1937. Quand j'en pooie une tenir, O moi Ten estovolt venir, Renart (Clédat, p. 174). Les gens en sont totes alees, Tristan Ménestrel, 40. se penser. 165- ^ La construction se putare aliquid ne semble pas s'être continuée en francais. Si, a cöté de se penser d'une chose, on trouve des phrases comme: Li cuens Rollanz nel se doiist penser, Roland, 355, il est probable qu'il faut ici reconnaitre dans le pronom se un datif éthique. i 126 LE VERBE Rem. Dans les autres langues romanes cette construction est plus fréquente. Ainsi en italien: lo mi godea le delicate membra, Ariosto, Orlando furioso, VI, 47. -> Ma io me lo pensavo, R. Fucini, Ml' aria aperta, 175. — Un libro che non sara mai scritto, ma che è tra i pia dilette'voli ch' io mi conosca, Marzocco, 1913, 11 maggio. - En provencal: Non sap que's fa; Mais no m'en cal; que's vol s'en fassa, Flamenca (Appel, 24, 1). se lever avec 166. e) Quant au sens passif de la voix pronominale, sens passif. jyi. Brunot en a trouvé un seul exemple au xive siècle: par les faulx hoirs se perdent les setgneurtes, Chev. de la Tour Landry, 120. — On pourrait peut-être citer la phrase bien connue Or se cante m on chante {er wordt gezongen en hollandais), dans Aucassin et Nicolette, oeuvre qui semble dater du commencement du xiii* siècle. Quoi qu'il en soit, il est évident qu'on ne peut attribuer 1'introduction de notre construction a 1'influence italienne, comme le prétendent e. a. Bourciez et Haase1). Au siècle suivant les exemples abondent: Par lequel, alnssy c'on disott, se gouvernoit le roy et tout le fait de royaume, J. Chartier, Chronique de Charles VU, l, 54. —: / s'i disoit auiant de messes par jour comme d Rome, Commines, éd. Mandrot, I, 166. On voit que l'emploi de cette tournure est dès 1'origine plus libre qu'actuellement. En effet, aujourd'hui la voix pronominale ne saurait exprimer le passif: 1) si le sujet est un nom de personne, 2) si 1'on n'exprime pas une action habituelle, 3) si 1'agent est exprimé. Voila donc trois restrictions qui excluent des phrases comme: Les voleurs se pendent, dans le sens de: „On pend les voleurs"; d un moment donné le livre se jeta, pour: „fut jeté''; les testaments se dressent par le notoire, au lieu de: „sont dressés". Dans une phrase comme: Les médecins se comptent, les avocats ne se comptent plus, Annales pol. et Irtt, 5 juin, 1910, le verbe se compter se trouve a cheval entre la valeur neutre et passive; de même dans la porie s'ouvre par le vent. La deuxième restriction vaut aussi pour la vieille langue. Mais les deux autres ne sont connues ni a 1'origine ni plus tard au xvne siècle2). En voici des exemples: Le Frangols ne se vainq que par le Frangois mesme, Sat. Ménippée, p. 225. — Le sagesse de Dieu ne se comprend point i) Syntaxe francaise da XVHe siècle, § 72. 3) Brunot, La pensee et la lanque, p. 372, cite quelques exemples modernes, imitations de la syntaxe classique. SENS PASSIF DE LA FORME PRONOMINALE 127 par les plus excellens du monde, Calvin (dans Huguet, Synt. de Rabelais, p. 177). — Mais ne pense pas que cela se dolbve plus observer par les orateurs que par les historiographes, Dolet, La manière de bien traduire, p. 16. — Le prétérit se conjugue par la pluspart de cette sorte, Vaugelas, Rem., I, 196. Sans cesse vous prêchez des maximes de vivre Qui par d'honnêtes gens ne se doivent point suivre, Mol., Tart., I, 1, 38. Rem. L'emploi de la voix pronominale est plus étendu dans les autres langues romanes. En roumain c'est presque la seule facon d'exprimer le passif: ma bat (je me bats) = „on me bat". L'espagnol peut également employer un nom de personne comme sujet de la forme pronominale, avec sens passif: Sale con luz. Rita se sorprende, Moratin, El si de las ninas, II, 5 (= Rita est prise au dépourvu). — En italien et en espagnol notre construction remplace la forme unipersonnelle: si canla = „on chante"; se sabe = „on sait"; elle peut être accompagnée d'un complément: inforcare saldamente gli arcioni del cavallo sa cui lo si invitava a satire, P. Rajna (dans // Marzocco 1916, 2 genn.) (= on 1'invitait); — se le llamaba, „on 1'appelait". Enfin en italien cette forme unipersonnelle peut changer en forme personneue par l'asijonction d'un pronom sujet: Noi non si fa complimenli, „nous ne faisons pas de compliments"; noi si canta = „nous, on chante"; dans la langue francaise populaire: Nous, on im s'batte, nous on va s'tuer, Benjamin, Gaspard, p. 13. — C'est nous qu'on dansera avec les p'tites Allemandes, ibid., p. 18. — Tu vois cé qu'on est, nous .autres, Barbusse, Le Feu, p. 29. i i i * !°7. f) Ce point-ci — il s'agit de la construction jesuislevê. ö jne^sui levez — demandé a être traité a part Nous avons vu que les formes synthétiques en -r ont disparu, mais que les formes analytiques, composées du verbe esse avec le participe passé, se sont maintenues avec la valeur passive aussi bien qu'avec la valeur neutre. Pour le premier cas nous renvoyons aux paragraphes 155 et 156; pour le second cas nous pouvons citer: Cum fuerit autem Nero de inferno levatus (= se sera levé) Hellas veniet prius signare dele dos, Commod, Instrud, I, 41, 7. De même en frangais: Et li quatorze sont en fule tourné. Tost sont levé en estant sor lor pies, Huon de Bordeaux (Clédat, p. 51 et 56). Hebergié sont (= ils se sont logés). Maintenant sont del port meü (= se sont éloignés), Chrétien, Guill, d'Angleterre, 449 et 995. 128 LE VERBE Or delaciez le vert heaume gemmé, Tant que soiiens baisié et acolé, Girard de Vienne (Clédat, p. 95). Quant assés sont deduit, si sont alé coucler, Fierabras, 6135. Dans ces phrases — il n'est pas superflu de le répéter — nöus avons donc la continuation directe de la construction latine motus sum, „je me suis mu", levatus sum, „je me suis levé", oü le participe avec être exprime une idéé neutre, que le francais rend souvent par le réfléchi. Autres 168. Seulement, a cöté de cette construction-la, on constructions. en trouve trois autres, qui expriment absolument la même idéé: 1) 1'auxiliaire avoir avec pronom, — 2) 1'auxiliajre avoir sans pronom, — 3) 1'auxiliaire être avec pronom. Donnons d'abord des exemples de ces trois constructions, avant d'en chercher 1'explication. 1) auxiliaire avoir avec pronom: s'ont aresté et desgandu1), Chrétien, Guill. d'Angleterre, 1795. Parfltement s'at a Deu comandet, Alexis, 288. s'a vestu et chaucié, Amis et Amiles, 2321. 2) auxiliaire avoir sans pronom: Ad icel mot Vuns a l'altre at clinét (= s'est incliné), Roland, 208. Or ont Uwé (= ils se sont lavés), si vont seoir, Chrétien, Guill. d'Angleterre, 2578. 3) auxiliaire être avec pronom: se fu redreciez. Quant li uns d'aus s'est regardez, Si voit venir celui corant, Chrétien, Guill. d'Angleterre, 889 et 1829. Quant s'estoit arestée, moult tenrement ploroit, Quant s'estoit relevée, maint grant souzpir geU)it, Berthe aux grands pieds (Clédat, p. 59). i) a moins qu'on ne doive lfre sont aresté. je (m')AI levé, je (me) SUIS levé 129 j'ai levé et je 169. Ainsi, nous avons constaté que Ie vieux frangais m*ai levé. a qUan-e tournures pour exprimer la même idéé: sui levez, ai levé, m'ai levé, me sui levez. Quelle est 1'origine de ces constructions? La première ne demandé plus d'explication: sui levez est la continuation directe du latin sum levatus. Quant a ai levé et m'ai levé, on sait que dans la latinité postclassique le parfait composé (habeo cognitum = cognovi) se répand de plus en plus. Ainsi le parfait composé de levare et de se levare devient levatum habeo et me levatum habeo, qui ont donné en frangais j'ai levé et je m'ai levé. Mais puisque, a 1'origine du moins, on sentait encore fortement la valeur active de 1'auxiliaire, ces deux formes — surtout la première — avaient beaucoup de peine a pénétrer; levatus sum, en latin, et sul levez, en vieux frangais, restent la construction usuellé pour „je me suis levé"; le type j'ai levé est relativement rare dans la vieille langue; je m'ai levé, quoique plus fréquent, n'a pourtant pas, tant s'en faut, 1'exteftsion de la construction primitive sui levez. 170. Une nouvelle étape dans 1'histoire de notre construction est 1'introduction du pronom dans la tournure: Je sui levez, qui est au fond passive, du moins pour la forme, et neutre pour le sens. Ce phénomène est dü a 1'analogie des autres formes du même verbe. En effet, puisque levare et selevare se trouvent en latin postclassique avec la même valeur, on comprend aisément que peu a peu on ne sente plus se comme le complément du verbe, mais comme simple particule accompagnant le verbe neutre. Au moment oü Pon en est arrivé a dire *me sum levatus, en plagant me devant une forme intransitive, cette évolution a atteint sa dernière étape. Ceci a dü être le cas en latin encore, comme le prouve 1'accord de toutes les langues romanes d'abord, et ensuite le fait qu'en latin postclassique on trouve fréquemment Ie pronom devant d'autres tournures neutres, comme nous Pavons vu plus haut (§ 160). Cette extension du pronom semble avoir été appuyée par une autre construction trés fréquente en latin postclassique, celle du datif éthique: Sedete vobis, Peregrinatio, 36, 5. - Quia sera erat, gustavimus nobis, ibidem, 4, 8. — Tu tibi arbltrarls, Lucifer Calaritensis, p. 251, 6. 130 LE VERBE Quoi qu'il en soit, ce qui est sur, c'est que dans la construction je me suis levé 1'auxiliaire être n'a pas supplanté avoir, mais qu'il y a été employé de tout temps. Le seizlème ttli Si nous quittons maintenant 1'époque du vieux siècle. frangais et que nous passions aux xvie et xvne siècles, nous constatons la même hésitation entre lever et se lever, taire et se taire qui existait auparavant: Toutes ensemble en ung moment se disparurent, Le Maire de Beiges (Darm, p. 176). — Et ld, delibérèrent que ü retourneroit au chdteau, Marg. d'Angoulême, Heptaméron, III. — Je me délibère.... de vous^ montrer qu'il y a des dames qui en leur amitié n'ont cherché nulle fin que l'honnêteté, Ibidem, 3e journée. — Je ne m'estols jamais desjuné de ce mot, Brantöme, II, p. 40. — Je n'en estois pas encore desjeuné, H. Estienne, Deux Dialogues en frang. italianizé, II, p. 281. — Ainsi on trouve penser et se penser, et R. Estienne cite dans son dictionnaire frangais-latin je condescens et je me condescens. Pourtant il semble qu'a partir de cette époque 1'usage moderne commence a se constituer. Relevons surtout les verbes construits avec l'adverbe en: s'en aller, s'enfulr, s'en tourner, s'en retourner, s'en venir. Le dïx-septième 172. Au xvne siècle, 1'usage est encore loin d'être siècle. fixé complètement. Tels verbes qui aujourd'hui sont toujours pronominaux se trouvent parfois sans pronom, tels autres qui aujourd'hui se passent de pronom le prennent au xvne siècle: II faudra voir les endrolts oü les Muses se sont apparues d vous, Balz. Lettr., IV, 17. — II y en a qui peu d peu se sont disparus de devant nous, Malh, II, 246. — Madame s'éclata de rlre, Sév, III, 18. Et personne, Monsieur, qui se veuille bouger, Pour retenlr des gens qui se vont égorger, Mol, Dép. am., V, 7, 1640. Et le contraire: Celui qui les conduisoit, étoit éloigné, La Font., Psyché, I, p. 29. Nous nous amusons trop, il est temps rf'évader, Corn, L'Illuslon comique, IV, 9. Gardez bien de le dire, La Font, Fabl., VIII, 6, 9. HÉSITATION ENTRE LES FORMES AVEC ET SANS PRONOM 131 Epoque 173. Aujourd'hui, la langue s'est fixée, ou a peu moderne. pres; ies verbes ont opté en général pour la construction avec ou sans pronom. Ainsi on trouve toujours se taire, s'en aller, s'éloigner. Seul, 1'infinitif, régime d'un auxiliaire, peut encore se passer du pronom: je l'ai envoyé promener, je l'ai fait taire. Si Daudet se sert encore de s'accoucher, d'autres de s'acquérir ce ne sont pas des constructions courantes; et il en est de même pour se guérir et se fondre, qui se trouvent a cöté de guérir et de fondre. Dans plusieurs cas les deux formes se sont maintenues avec une nuance de sens ou de fonction: attaquer et s'attaquer, baigner et se baigner, approcher et s'approcher, rire et se rire, jouer et se jouer, se fendre et fendre dans: mon cceur se fend et le cceur me fend; lever et se lever: les blés ont levé, le rideau leve ou se léve, mais: se lever de table, se lever d sept heures du matin; casser et se casser: le verre de la lampe a cassé, mais: s'est cassé en mille morceaux; briser et se briser: le navlre se brise sur les écueils, mais: les vagues brisent ou se brisent. Rem. L'infinitif accompagné de faire, a été longtemps réfractaire. C'est au xvie siècle qu'on rencontre quelques rares exemples de l'infinitif accompagné d'un pronom réfléchi, construction qui n'est devenue générale que vers la fin du xvme siècle. j'ai levé ,74- Quant au parfait composé, a mesure que Je m'ai levé 1'usage fait un choix entre lever et se lever, aller et je me'8suu levé s'aller> déjeuner et se déjeuner, Phésitation cesse en francais aussi entre les quatre types je suis levé, j'ai levé, je moderne. , . , , , . mac levé, je me suis levé. La forme avec être est employée pour exprimer un état ou le passif: je suis levé, je suis aimé (cf. § 167), ou encore comme parfait des verbes neutres: je suis allé (cf. § 307); on ne trouve donc plus je suis éloigné pour „je me suis éloigné", il est cassé pour „il s'est cassé". — J'ai levé a gardé son sens de passé indéfini du verbe actif lever, il n'a jamais réussi a se généraliser dans la fonction neutre d'un verbe comme lever (par contre, les verbes essentiellement neutres comme courlr, marcher, aller ont hésité entre avoir et être). — Je me suis levé s'est généralisé de plus en plus dans la fonction de parfait composé de se lever; mais je m'ai levé lui a fait une concurrence de plus en plus acharnée dans la langue populaire. Si la langue 132 LE VERBE des classes élevées s'est décidée en faveur de je me suis levé, le peuple en est arrivé a se servir de avoir comme seul verbe auxiliaire de temps {elle a mouru = „d\e est morte"): Ya Clémentine qui s'a perdue, Benjamin, Gaspard, p. 73. — Je m'ai vu, tout d'un coup, avec une botte pleine dans chaque grapin, Barbusse, lx Feu, p. 16. — Cf. aussi les cartes 500 et 508 de l'Atlas linguistique, Je m'ai assls sous un arbre et Vous vous avez blessé la main. C. VERBES UNIPERSONNELS 175. Nous employons, a 1'exemple de Brunot et de Meyer-Lübke, le terme de verbes unipersonnels pour désigner les verbes qui, en principe, ne se trouvent qu'a la troisième personne du singulier. Cette définition tout extérieure est pourtant le seul lien qui relie les différents groupes de ces verbes,. et voila pourquoi nous préférons ce terme a celui de verbes impersonnels. 176. Aux verbes unipersonnels appartiennent dif- Verbes férents groupes: exprlmant un ö 1 phénomène A. — Ceux qui expriment un phénomene atmos- ataiosphérique hérique. p iu it, grandinat, gelat, tonat, „il en latin. 1 n 1 ' ° pleut, grêle, gèle, tonne". Ces verbes offrent un sens complet, ils n'admettent pas de sujet, paree qu'on regarde le fait en lui-même, sans penser a un agent; on pourrait donc les appeler verbes sans sujet. Ils se distinguent encore des verbes des autres groupes en ce qu'ils se sont maintenus en général pendant tóut le cours de la langue; ils ont subi moins de fluctuations et il en est de même pour toutes les autres langues. Remarquons pourtant que les Romains ont pu changer le verbe unipersonnel en verbe personnel en lui donnant comme sujet un dieu ou un autre mot: Jove tonante cum populo agere non est jas, „quand Jupiter tonne, il est défendu de réunir le peuple". — Pluam super terram, „je ferai pleuvoir sur la terre", Vulgate, Genèse, VII, 4. — Veniunt nubes ab extremo et pluunt, Saint Augustin. Dans Vlnea grandinata est, Saint Augustin, le verbe est au passif avec, comme sujet, 1'objet qui subit les conséquences de la grêle; dans Totum Mud spatium qua pluitur et ninguitur, „oü il pleut et neige", Apulée, Florlda, I, 2, le verbe a pris la forme du neutre (cf. itür, rumpitur). PLUIT, IL PLEUT 133 Si ces verbes perdent leur sens précis, ils peuvent être accompagnés .d'un complément, qui se met a 1'accusatif ou a 1'ablatif: on trouve grandinat, nivit sagittis, „il grèle, il neige des flèches," dans Pacuvius, plulsse sanguinem et sanguine dans Tite-Live, XXIV, 10 et XL, 19. II est naturel qu'avec. le sens figuré la construction personnelle soit encore plus fréquente que si le verbe garde son sens primitif: fundae saXa pluunt, Stace, Theb., VIII, 416. — Tonare verba foro, Properce, IV, I, 134. — Rorantes lade capellae, Virgile, Culex, 75. — Ningunt floribus rosarum, Lucrèce, II, 627. En francais. 177' En francais on trouve les mêmes constructions qu'en latin. Ainsi le verbe prend un sens factitif et est personnel dans: Contrat passé, notre homme Tranche du roi des airs, pleut, vente et fait en somme Un cllmat pour lui seul, La Fontaine, Tables, VI, 4. Dieu fait luire son soleil sur les bons et sur les mauvais, et pleut sur le champ du juste comme sur celui du pécheur, Bossuet, Sermon sur les nécessités de la vie, 1. — Aujourd'hui encore geler et dégeler dans la langue courante: // dégelait l'huile qui était gelée. Ja clnquante et six ans ont neigé sur ma teste, Ronsard (Becq de Fouq, p. 69). Dans: La neige neigeait sa lumière (Chateaubriand, Mémoires, XI) nous avons la même figure grammaticale que dans vivre sa vie. Vfri Le verbe peut encore être accompagné d'un complément: // neige des mouettes. — II pleut des balles. — Puis, et c'est la une construction que le latin ne connait pas, le complément peut devenir sujet du verbe: des balles pleuvent, des mouettes neigent. Le vieux frangais connait encore quelques verbes appartenant a ce groupe et qui n'existaient pas en latin classique: anuitier, avesprer, ajorner : Lors se remue quant il dut anuitier („lorsque la nuit allait tomber"), Chevauchier veut quant il avesprera, Garin le Loherain. 134 LE VERBE Lors comengaa ajorner, „il commenca afaire jour", Villehardouin, 184. — Ces verbes ont disparu de nouveau, ils ont été remplacés par les locutions impersonnelles il fait nuit, soir, jour, dont nous devons parler plus loin. 178. B. — En latin le passif des verbes neutres Passif • • v se trouve assez fréquemment a la troisième personne du singulier: itur, „on va"; ridetur, „on rit". Pour les verbes transitifs, on trouve au contraire la forme personnelle la même oü 1'on ne s'y attendrait pas: dicor hoe fecisse, videris bene dixisse, oü le sujet est un nom de personne. En vieux frangais, et jusqu'au xvne siècle — nous 1'avons vui) _ on trouve souvent le passif des verbes neutres: Tu le savras, gaires /z'iert demoré, Huon de Bordeaux (Clédat, p. 52). (litt.: „il ne sera pas attendu" = sans tarder), II fut dansé, sauté, ballé, Et du nain nullement parlé, La Font., Contes, I, 1, 518—19. II a cru que le schisme pourroit causer de grands maux d la chrétienté, s'il n'y était remédié promptement, Balzac, Diss. chrét., IX. — Aujourd'hui, on préfère on dansa, on remédiait, etc, quoique le passif se rencontre encore dans les meilleurs auteurs: il est procédé au vote, il était dérogé d, il a été mal parlé de lui. Afin qu'il pulsse être délibéré sur la question de savolr sil entend les continuer, Le Temps, 29 juin, 1917. Quant aux verbes transitifs, on peut toujours dire: il a été dit, écrit, il fut convenu, décldé, il se trouve, tl s'entend, etc. Le vrai sujet de ces tournures suit alors sous forme de proposition substantive. Mais on ne trouve plus ces verbes avec un sujet nom de personne: *je suis dit l'avoir fait, comme en latin. pudet, Meet, 179. C. — En troisième lieu le latin connait des constat. verbes unipersonnels qui n'expriment pas comme pluit, itur, un sens complet, mais qui ont besoin d'autres mots pour compléter la pensée. Ce sont des verbes qui expriment un mouvement de 1'ame, une nécessité ou d'autres idéés qu'il est difficile de préciser: a) pudet, piget, paenitet, taedet, i) § 156. LA FORME UNIPERSONNELLE AU PASSIF; PUDET 135 misèret, iuvat: Pudet me hujus facti. — Taedet me hoe fecisse. — b) decet, dedecet, licet, oportet: Non tibi, licet mentiri. — c) accedit, constat, expedit, restat, est, sequitur: Est ut viro vir latius ordinet Arbusta sulcis, Horace, Carm., III, 1, 9. Accedit quod nemo huic credere voluit. Le sujet de ces verbes est, on le voit, souvent un infinitif ou une . proposition subordonnée; il peut être aussi un pronom neutre, au singulier ou au pluriel: Mud me pudet, haec me pudent, et dans ce cas on ne saurait plus parler de verbes unipersonnels. On trouve .même un substantif fonctionnant comme sujet: Alba vestimenta decent Cererem, Ovide; et le latin archaïque aussi bien que le latin postclassique prouvent de reste qu'on a toujours hésité entre l'emploi personnel et unipersonnel de ces verbes: /ta nunc pudeo atque 'da nunc paveo, Plaute, Casina, 877. — Proloqui non paenitebunt liberi ingrato ex loco, Pacuvius, 31. — Et au passif: Non est quod Mum pudeatur, Pétrone (ed. Buecheler), 29, 36 (cf. pluitur et ninguitur, § 176). Apulée et d'autres emploient notamment paenitere comme verbe personnel. Nous constatons donc qu'en latin la langue disposait de trois moyens pour Exprimer 1'idée voulue: a) forme unipersonnelle: pudet me hujus facti; b) forme personnelle avec sens factitif; le sujet est un nom de chose: haec me 'pudent; c) forme personnelle: le sujet est un nom de personne: pudeo, gaudeo, debeo. Quelques verbes, tels pudere et paenitere admettent les trois constructions, sinon en latin classique, du moins en latin vulgaire. Mêmes groupes 180. Or, si nous considérons 1'état des choses en en francais, francais, nous y retrouvons les trois catégories: a) il faut, b) cela me réjouit, c) je me réjouis. Seulement, il y a eu des échanges entre les différents groupes, tel le verbe me paenitet, qui de la première classe est définitivement passé a la troisième: je me repens. II faut relever surtout les hésitations entre le premier et le troisième groupe. C'est au xvi* siècle, semble-t-il, que quelques verbes personnels deviennent unipersonnels; ainsi le verbe douloir 136 LE VERBE qiü ne garde que la forme il me dealt, quoique Meigret, Tretté de la gramm. fr., p. 104, et d'autres grammairiens le conjuguènt encore. De même il affiert, il appert. Au moyen age on trouve a cöté de phrases comme: Enterrer font errant- >, Les cors com il est aferant (= comme il convient). Enfances O gier, 7598, d'autres oü le verbe est personnel: Je seral Od vos tous joiirs, si afferrai (= je vous irai) Ausl bien con la piere en l'or, M$jÊ* Renart le Nouv., 1238. D'autres verbes ont hésité longtemps. Ainsi Oudin déclare au xvii° siècle qu'on trouve la forme personnelle aussi bien que la forme unipersonnelle des verbes déplaire, ennuyer, fdcher, souvenir: II m'ennuya de ne pas te veoir, Segrais, Nouv. fr., 4e nouv, 18. — // lui fascholt de ce que Von partoit d'Avocats escoutans et promenans, Sorel; Polyandre, I, 317. — Comme, au xvne siècle, l'emploi de il avec le sens de cela est assez fréquent, il nous semble que nous avons ici affaire au second groupe des verbes que nous avons cités; et nous pouvons donc constater que l'emploi n'a pas varié, puisqu'on continue a dire: Ca m'ennuie, Ca me réjouit que vous l'ayez dit. — Pourtant, il y a plusieurs phrases oü la valeur unipersonnelle ne fait pas de doute: 11 t'ennute avec moi, Corn, Melite, III, 6, 1029. Vous ennuyait-il? — Jamais je m'ennuie, Mol, L'école des femmes, II, 6. Dans Les Quinze Joies du mariage, p. 20 (éd. Dentu), on lit les deux formules suivantes: Comment elle va, comme tl lui va (a cöté de comment elle le fait). Aujourd'hui on préfère la tournure personnelle: je me réjouis, je me f&che, je m'ennuie, je me souviens, je manque de. Rem. Vaug., I, 265, déclare: je me souviens et i7 me souvient sont tous deux bons, mais je me souviens me semble un peu plus usité a la Cour". Perte de ces 181. Pourtant la plupart des verbes appartenant a verbes. ce groupe se sont perdus, ainsi pudet, decet, iuvat. Le vieux frangais connait encore loist de licet, „il est permis", couste de c o n s t a t, „il m'en coüte": VERBES UNIPERSONNELS EN FRANCAIS 137 Muit 11 costa a sus sachier, Gormond et Isembard, 406. // conste, „il est constant", qui dérive également de c o n s t a t, est un latinisme: Des térnoignages certains par lesquels il conste que cet usage étoit étabïl, Bossuet, Du culte dü. d Dieu. Créatron d'autres 182, Pour remédier a ces pertes, la langue a vertes étendu l'emploi des verbes qui restent, ou bien — unipersonnels. ± » ,. 1 , , r ■ ., ... et eest le cas le plus frequent — elle. a créé de nouveaux verbes unipersonnels. Ainsi convenit, qui en latin signifie e.a. „il est convenable" prend le sens de oportet: Tout nostre vivre et tout nostre mengier, De cel autel le convient repairier, Raoul de Cambrai (Clédat, p. 128), „nous devons vivre de cet autel". // me fait mouü mal que la dame Me convient condampner a mort, Miracles N. Dame, XII, 764—65. Citons comme exemples de nouvelles créations les phrases suivantes: A l'ame li soit il meri, „que son ame en recoive la *-.tf?^ récompense", J. Bodel (Clédat, p. 340). Je vueil que li soit desservi („qu'il soit recompensé de") Ce que de buen cuer m'a servi, Miracles N. Dame, XII, 831. Biaux hostes, par m'a me, il m'en poise. Comment vous est? („comment allez-vous?"), Ibidem, 982 et 590. Puis grieve, chagrlne, pert et apert („il est clair"), chaut: Ne vous en chaille, „que cela ne vous inquiète pas"; peu me chaut et il ne m'en chaut sont archaïques aujourd'hui. Ensuite estuet „il faut", qui semble venir de stupet et non de est opus1). Enfin, citons il faut et tl fait, verbes auxquels Tobler a consacré un article intéressant2). !) Ct Walberg dans Romania, XL, p. 610. G. G. Nicholson, Recherches philologiques romanes, p. 53—56. 2) I, p. 269 faut et fait sans sujet. — Cf. aussi Thielmann, Archiv. f. lat. Lexikographie, III. — G. Rydberg, Le développement de facere dans les langues romanes, 1893. — L'Atlas linguistique, 534, il faut; 531, il fait. SNEYDERS DE VOGEL, Syntaxe historique. 2™e édition. 10 138 LE VERBE 183. Le verbe fallere, qui en latin signifie *" ' „tromper", exprime en vieux frangais 1'idée de „faire défaut", „manquer", puis „avoir besoin", „être indispensable": M'ai doné palefrel et dras, NU faillent nis li esperun („même les éperons ne manquent pas"), S. Thomas, éd. Walberg, p. 210. Car il n'i failloit (manquait) nule rien Ca preudonme doie faillir (dont pourrait avoir besoin) Pour defendre et pour assaillir, ; Escanor, 3655. Nous constatons que le verbe est resté personnel en vieux frangais, et nous avons gardé une tracé de cette fonction dans 1'expression Au bout de l'aune faut le drap. Pourtant, il semble qu'a partir de la fin du xne siècle le verbe puisse être aussi employé sans sujet, et il va se construire avec un infinitif, c.-a-d. il s'approche de la construction moderne: Qui plus fera de maus, plus le faura boulir, Le Bastard de Bouillon, 509, (la personne est tantöt a 1'accusatif, tantöt au datif). II faut a ensuite restreint le domaine de il convient et supplanté estuet. 184. Une autre création de la langue est il fait, qui " ,a' ' combiné aux substantifs jour et nuit, a remplacé les verbes ajorner et anuitier du vieux frangais; il vente s'est maintenu dans la langue familière a cöté de tl fait du vent, tandis que *il fait soir ne se dit pas pour la tournure g avespre, tombée en désuétude. On trouve le verbe faire dès 1'époque du vieux frangais j5our exprimer le temps: Fist tel tans con feire dut, Chrétien, Yvain, 806; et aujourd'hui il fait beau, noir, clalr sont trés fréquents. — Dans des phrases comme: Et cl li fet buen demorer, Chrétien, Yvaln, 1393, II fait cher vivre d Paris, l'adjectif appartient primitivement a l'infinitif, complément de il fait, mais ce rapport devient moins clair, quand il y a inversion: IL FAUT, IL FAIT, IL Y A, IL ARRIVÉ 139 Mauvais fait guerroier son seignor, Gaydon, 177. Enfin le sens de la construction se perd complètement, quand on fait précéder l'infinitif d'une préposition: L'istoire fait bon a conter et a oir et a retraire, Vengeance Raguidel, 3354. Qu'il ne fait pas bien sur, d vous le trancher net, D'épouser une fille en dépit qu'elle en ait, Mol., Femmes Sav., V, 1. ,, 184 1S. L'emploi unipersonnel du verbe habere se rencontre déja en latin vulgaire: Habebat de civitate forsitam mille quingentos passus, Peregrinatio, 23, 2. Le vieux frangais connait différentes constructions: a, il a, l a, enfin tl y a, qui est resté: Quar grant diferenche a, je cuit, De Jenan Duel a Gerart Joie, }. Bodel (Clédat, p. 340 >. En l'orie pont assez i at reliques, Roiand (Clédat, p. 30). II n'a en France si hardi chevalier, Charroi de Nimes (Clédat, p. 86). Au xvie siècle on trouve a, y a, il y a employés l'un a cöté de l'autre dans THeptaméron, et des traces de Pancienne construction se maintiennent jusqu'au xvne siècle: Pensez vous.... Qu'W efit en ce péril de quoi tant m'ébranler? Mol, Princesse d'Elide, I, 3. N'a pas longtemps de Rome revenoit Certain cadet, La Font, Contes, I, 3, 1. Pour il y a, auxiliaire du passif, cf. § 156. ii arrivé des 185. D. — Enfin, tous les verbes neutres, a peu malheurs. preS| p€uvent s'ernployer a la 3 -i r ment un mouvement de 1'ame, s'emploient en latin tantöt comme neutres, tantöt comme transitifs, la cause de 1'action pouvant être considérée aussi bien comme 1'objet: doleo, lugeo, ploro mortem fratris, indignor audaciam, qué*ror fratrem, rideo stultitiam, plango funera, a cöté de ploro de, etc. Le frangais, tout en étant moins libre, connait la même construction: Des pertes qui sont a lamenter, Du Vair (Brunot, II, 438). — Je pleure la mort de mon frère. — C'est ainsi que le verbe plaindre est resté transitif, comme regretter, tandis que se plaindre demandé un complément circonstanciel. De même t ace re, qui en latin s'employait tantöt avec, tantöt sans complément — et ce dernier cas est le plus fréquent—, est aujourd'hui toujours transitif: taire ses petnes, tandis que se taire est un verbe neutre. On sait que taire a en vieux frangais encore la construction primitive: Tes, Olivier, „tais-toi", Roland, 1026. Verbes de 198. d) Ensuite, les verbes de mouvement, mouvement, composés avec un préfixe, peuvent devenir 150 LE VERBE transitifs:. transire flumen, praeterfluere urbem, praecedere aliquem, obire mortem, ingredi iter. En frangais: prévenir quelqu'un, surmonter des difficultés, surpasser quelqu'un, survlvre quelqu'un (aujourd'hui survlvre a quelqu'un), survoler une ville, parcourir les rues. On trouve même cette construction pour des verbes simples qui indiquent un mouvement: monter, grimper l'escalier, descendre la montagne, courlr le cerf: Ceulx qui estoient entrez le clous, Rabelais, I, 28. — Votre livre ne m'est point parti des mains que je ne Vale couru de bout en bout, Malh., II, 426. Verbes coordonnés a complément différent 199. Lorsque plusieurs verbes qui demanderaient se contentëTun le même complément, mais a des cas différents, seui complément, sont coordonnés, la vieille langue se contente souvent d'un seul complément: Quant m'ot salué Et un sotif regart rué, Poire, 2447. Dieu en rent graces et merrie, Floire et Blanchefleur, 1093. On retrouve cette même liberté au xvue siècle: Nous ne nous sommes vus depuis quatre ans ensemble, NI, qui plus est, écrit l'un d l'autre, me semble, Mol., Ecole des femmes, I, 6. Toute cette trlstesse m'a réveillée et re présenté V horreur des séparatlons, Sév, VI, 3.13. — La reine... envoya quérlr les capitaines des gardes, d qui elle défendit d'obéir ni reconnoitre autre que le rol, Malh., III, 190. — La dlgnité de l'homme conslstoit dans son innocence d user et dominer sur les créatures, Pasc, Pensées, I, 297. — De pareilles constructions sorit rares actuellement, cf. pourtant: Le roi Servius Nous a ravi nos blens et mis en esclavage, Ponsard, Lucrèce, IV, I: Jï. !) Tobler, I, p. 141 et suiv.; Haase, § 148. DEUX VERBES DEMANDANT LE MÊME NOM A DES CAS DIFFÉRENTS 151 Rem. 1. Th. Corneille blame: il s'est requis une estime générale et rendu considérable, au lieu de: s'est rendu considérable. Vaugelas, I, 159, admet dans la conversation ayant embrassé et donné la bénédiction a son fils. R e m. 2. Nous trouvons au fond la même liherté dans les phrases dont nous avons parlé au § 3096: notz majeurs qui ... se Sont privez de la gloyre de leurs bien faitz et nous du fruict de l'immitation d'iceux, Du Bellay, Deffence, I, 3 (Darm., p. 201), oü 1'auxiliaire ont manque après un participe conjugué avec êtrei). III. LES MODÈS2) A. OBSERVATIONS GÉNÉRALES 200. Un fait peut être présenté comme réel, irréel ou possible. Dans le premier cas on se sert de 1'Indicatif (video), pour le second cas de 1'Indicatif accompagné d'une négation (non video), le troisième enfin est réservé a PImpératif et surtout au S u b j o n c t i f. Mais la pensée peut offrir tant de nuances que ces seuls modes ne suffisent pas pour les exprimer: des auxiliaires de mode comme vouloir, pouvoir; des adverbes comme peut-être, naiurellement, sans doute, aident a préciser la pensée; en outre, il y a de fréquents passages d'un mode a l'autre. Ainsi qu'il le fasse, il doit le faire, il le fera, d'autres tournures encore, expriment la nécessité, avec des nuances, il est vrai, qui ne sont pas toujours faciles a saisir. Enfin, un fait réel ou irréel peut être exprimé dans certains cas par le subjonctif, si un élément subjectif entre en jeu. B. INDICATIF 201. L'indicatif est essentiellement le .mode de la réalité: L'homme est mortel. — Je partirai dematn. — César a vaincu Pompée. — Si 1'on veut exprimer 1'irréalité, qui, après tout, est aussi réelle que la réalité, on ajoute une négation: L'homme n'est pas ismmortel. — Je ne partirai jamais; — k moins qu'on ne se serve de 1'ironie: Vous êtes admirable, mon cher. !) Tobler, I, p. 137, Haase, § 149. *) H. Soltmann, Syntax der Modi im mod. Franz., Halle 1914. — E. Lerch Die Bedeutung der Modi im franz., 1919. - Lorck, Die Sprachseelenforschung und die franz. Modi (Jahrb. für Philologie, 1925). — M. Regula, Ueber die modale und psychodynamische Bedeutung d. franz. Modi im Nebensatze (Zeitschr. f. rom. Phil., XLV, 1925, 129—198). 152 LE VERBE Le contexte de la phrase peut pourtant affaiblir singulièrement le sens primitif de 1'indicatif: dans la phrase principale ce sont des adverbes ou d'autres locutions ou encore des subordonnées qui amènent ce résultat; dans la subordonnée, le sens du verbe régissant ou de la conjonction détermine en beaucoup de cas la valeur de 1'indicatif: Je pars peut-être; U est parti, je suppose; il partira, si son père le lui permet; si j'ai de Var gent, je vous le donnerai. La langue a eu de tout temps ces procédés a sa disposition; on ne saurait donc parler ici d'évolution, et la grammaire historique n'a rien a relever ici. Nous étudierons plus loin les cas dans lesquels la langue a hésité entre l'emploi de 1'indicatif et du subjonctif et des verbes qui sont devenus des auxiliaires de mode. Cf. § 204 s. Pour l'emploi des temps, cf. § 298 et suiv. Rem. Une différence de conception amène en latin 1'indicatif des • verbes auxiliaires de mode, la oü le francais se sert en général du conditionnel. Possum hic manere; longius est haec omnia exponere; debebat proficisci. Cette construction se retrouve d'ailleurs en frangais: 11 pouvait le dire (= il aurait pu le dire). C IMPÉRATIF 202. On se sert de 1'impératif pour exprimer une ^„„"plur volonté; c'est le ton et le contexte (p. ex. l'emploi exprimer un rje veuillez ou je vous prie) qui indiquent a quelle 0rdfe' nuance de la volonté on a affaire: prière, conseil, ou ordre. Veuillez entrer. — Partez tout de suite. Pour la troisième personne on a recours au subjonctif: Dieu le veuille.— Qu'il parte. Dans une phrase comme Dltes un mot de plus et je vous chasse le sens primitif s'est effacé et on ne veut exprimer que la supposition. * -La langue connait d'autres tournures encore pour commander! a) Le Futur: Vendredi chair ne mangeras. — Vous ■ m'apporterez un bock. — C'est la un emploi qu'on retrouve en latin et'en vieux frangais: assimulabis (= assimula) tuamamicam hujus esse, Térence. Traïtres le rei estes, fait-il, ga en vendrez (= venez ga), S. Thomas, 5515 (Clédat, p. 19). Surtout avec mar: ja mar le mesquerrés, Huon de Bordeaux INDICATIF ET IMPÉRATIF 153 (Clédat, p. 53) = „vous le mécroirez pour votre malheur = croyez-le bien". f, - Ö4ï. Puis sous la forme d'une question: Te lèveras-tu? b) L'Infjnitif. Le vieux francais se servait d'un infinitif accompagné d'une négation pour exprimer une défense adressée a une seule personne, tandis que le latin employait dans ce cas le subjonctif (ne feceris) ou une périphrase (n o 1 i face re): Damnes Deus pedre, n'en laissier honir France, Roland, 2337. Mais une chose nel me celer tu pas, Raoul de Cambrai, 1375. On sait que dans le langage familier on trouve actuellement des phrases qu'on pourrait comparer avec la vieille construction: Pas faire, Charles. — En général pourtant, l'emploi actuel s'écarte du vieux frangais: Voir d la page 5. ,— Prendre tant de grammes. — Comparer tel chapitre, phrases qui contiennent un ordre adressé a une personne indéterminée. Rem. 1. I.'italien a la même construction que le vieux francais: E non indurci in tentazione, ma liberaci dal maligno. — L'espagnol a gardé la tournure du latin: No te dejes enganar, Pérez Galdós, Gloria, II, 72. — On trouve parfois l'infinitif positif. Qaando si senton certe proposizioni, girar la testa e dire .. , Manzoni, Promessi Sposi, 15. — Sentarse seüoresl et 1'infiniüf négatif en espagnol: No gritarl — Le latin postclassique connait l'infinitif négatif aussi bien que positif: Descende et copertum dimitte horis tribus aut quattuor, deinde abicere cum operimentis, Mulom. Chironis, • 43, 7. — Et non derelinquere serventes, Mon. Germ. hist., Leg. V, p. 226. Rem. 2. Dans la locütion du vieux francais Or del bien faire il n'y a pas, semble-t-il, d'impératif pensez sousentendu (G. Paris), mais il s'agit de l'emploi de la préposition de, signalé au § 266. D. SUBJONCTIF1) I. Subjonctif dans la phrase simple Deux groupes 203. ■ Le subjonctif est le mode de 1'éventualité: de subjonctifs. ji exprjme essentiellement le domaine qui se trouve entre la réalité et Pirréalité pure. C'est la un domaine trés vague >) A. Gille, Der Konjunktiu im Franz. (Archiv für das Studium der neueren Sprachen, tome 82 (1889), p. 423—464). — K. Sneyders de Vogel. Quaesliones ad conjunctivi usum in posteriore latinitate pertinentes, thèse Leiden, 1903. — C. de Boer, Essais de sgntaxe francaise, 1922, p. 60—131. sneyders de vogel, Sgntaxe historique. 2me édition. 11 154 LE VERBE qui contient plusieurs idéés. Le frangais emploie pour exprimer ces idéés, outre le subjonctif, aussi I'impératif, mais le domaine de ce mode-la est plus restreint et le subjonctif le remplacé souvent. Le grec connait en outre 1'optatif, qui, lui non plus, ne se distingue nettement du subjonctif. Cette éventualité peut se trouver en dehors de la personnalité humaine ou en contact avec elle. De la découlent deux groupes de subjonctifs: 1) celui oü la volonté humaine entre en jeu; 2) celui oü elle n'entce pas.» A. Au ler groupe appartiennent, en latin classique, les cas suivants: 1°. Conjunctivus hortativus: Eamus. — Bibant si esse nolint, „qu'elles boivent, si elles ne veulent pas manger". Le subjonctif exprime ici un ordre. 2°. Conjunctivus optativus: a) pour exprimer un désir réalisable on se sert du subjonctif présent ou parfait le plus souvent accompagné de u t i n a m, velim, nolim, malim. b) si le désir est irréaljsable on se sert du subjonctif imparfait ou plus-que-parfait avec utinam, veilem, nollem, m a 1 lem. 3°. Conjunctivus concessivus, le plus souvent accompagné de ui ou de licet: Hoe verum sit, tarnen venire debebat. — Esto fecerit, poenas gravtssimas tarnen pependit. B. A l'autre groupe appartiennent: 1°. le Conjunctivus potejitialis, qui exprime une possibilité ou une probabilité: Pro patrio, quis bonus dubitet mortem oppetere? — Crederes, „on aurait cru". 2°. Conjunctivus dubitativus dans les interrogations: Quid faciam? — Utrum taceam an dicam? — aussi dans Pinterrogation indirecte: Nescio quid faciam. 3°. Conjunctivus modestiae qui sert a atténuer: Non ausim, „je n'oserais". — Velim, „je voudrais". — Haud facile dixerim. Rem. Dans la phrase subordonnée le subjonctif aide a exprimer encore d'autres nuances; cf. § 218. LE SUBJONCTIF DANS LA PHRASE PRINCIPALE 155 Autres 204- °" voit £lu'un seuI mode Peut exprimer beaumanières pour coup de nuances. Mais en général il est nécessaire du^ubjoncttf! 0U du moins naturel' qu'on exprime plus clairement la nuance particulière qu'on veut donner a 1'action du verbe. C'est pourquoi la langue a eu de tout temps recours a différents moyens pour se tirer d'affaire. Le latin connait les procédés suivants: a) Auxiliaires: posse, debere, oportere, etc. b) Gerundivum + esse. c) Participe en -urus. d) Adverbes comme forte, fortasse et d'autres. ^ En effet, dans ces quatre cas on exprime que 1'action n'est pas réelle: quid facere debeo? est a peu prés quid faciam? D'ailleurs, en énumérant les différents cas, nous avons constaté que le latin se sert déja fréquemment de petits mots pour indiquer la nuance particulière qu'on veut exprimer: ut, utinam, licet, velim, et d'autres. Tendance 204 ls. En latin vulgaire nous constatons une chose fanÏÏue? fes ^ imPortante- La lanëu* devient de plus en plus auxiliaires analytique: les prépositions remplacent les cas, — "'possee* 1CS auxiliaires habereetesse aident aformer'des temps composés, — les conjonctions, quod, quia et d'autres, supplantent 1' A ecu sa t i v u s cum Infinitivo. Or la notion du subjonctif se détache elle aussi du verbe, et les auxiliaires de mode debere et posse*), surtout le premier, prennent une extension considérable. Puis, par suite d'une contarnination trés compréhensible, ces verbes s'emploient sou vent eux-mêmes au subjonctif. Cette remarque vaut naturellement pour la phrase indépendante aussi bien que pour la subordonnée: Neque ingenuus neque servus... interfici non debeat inauditus, Pardessus, Diplom., I, p. 197. — ut per nostra et vestra auctoriiate privileglo conscriberem vel affirmare debemus, Ibidem, II, p. 409. - Maniionem «pmitem transmisU, ut custodias capere aut interftcere potuissent, Fredeg, 188, 12sq. Pétrone, 49, 7, emploie aussi debere pour exprimer une supposition: Hic debet servus esse nequissimus. i) Rübel, Ueber den Gebrauch von debere und den Ausdruck der Notwendigkeit im Romanischen, Diss. Strasbourg, 1911. 156 LE VERBE 205. L'emploi du subjonctif en francais ne diffère Een fraVals'** PaS DeauC0UP de celui en latin' du moins Pour introduction de le premier groupe. Seulement on constate déja quelques 1'introduction de plus en plus fréquente de particules. 1 i -i quelques particules car, or, si et que. La conjonction que s'est étendue de plus en plus et accompagné maintenant presque toujours le subjonctif en changeant ainsi la principale, du moins pour la forme, en subordonnée. 1°. Conjunctivus hortativus. — La lère personne du pluriel du subjonctif, trés fréquente en latin, p. ex. eamus, a été remplacée en francais par la même personne de 1'indicatif: allons, excepté pour les verbes avoir, être, savoir et pouvoir; ou plutöt, on a retenu les anciennes formes du subjonctif allons, écoutons, vendons. Quant a la 2e pers. (aime, aimez) on se sert toujours de 1'impératif, forme que le frangais a gardée en ajoutant I's caractéristique de cette pers., de sorte que la 2e pers. du pluriel, et parfois celle du singulier, ressemble a celle de 1'indicatif. Respunt Marsilles: Or diet (= qu'il le dise), nus l'orrum, Roland, 424.' Se nus i viaut metre defanse, Li die or androit ce qu'il pense, Erec, 1791. Sire, souvienne vous des Atheniens, Mont, I, 9. Damls a fait son temps, d'autres fassent le leur, La Font, L'Eunuque, V, 4, 1612. A cela ne tienne, Balzac, Diss. Chrét., V (éd. 1665). Dieus, car m'en conseilles (= conseille), Méraugis, 3502. Ceste bataille car la laisses ester (= laisse), Roland, 3902. 2°. Conjunctivus optativus. — Ici la forme sans que s'est maintenue: Palens, mal aies tu. Tel seie, se jol ceil, Roland, 1958 et 3757. Je meure, en vos discours sl je puls rien comprendre, Corn., IV, 167. La peste m'étouffe, Monsieur, si je le sais, Mol, Impromptu, 2. Les dleux daignent surtout prendre soin de vos jours, Rac, Iphigénie, II, 2, 571.. LE SUBJONCTIF DANS LA PHRASE PRINCIPALE 157 De même qu'en latin, le subjonctif présent désigne un souhait réalisable, tandis que 1'imparfait et le plus-que-parfait expriment un souhait irréalisable: Plüt d Dieu qu'il en fut ainsi. Car la tenisse en France, et Bertrans si i fusset, A pis et a marlets sereit aconseüe! Pèlerinage, 327—8. On sait que le subjonctif avec le sens de 1'optatif n'est resté * aujourd'hui que dans deux cas: 1) d'abord dans plusieurs locutions plus ou moins figées a la 3e personne: Périssent les traltres. — Le ciel vous bénisse. — Vlve le rol. — 2) avec 1'auxiliaire pouvoir, devenu de rigueur dans ces espèces de phrases: Puisse-/-// être heureux. La conjonction que z même failli s'introduire devant pouvoir et dans d'autres cas oü la langue actuelle ne s'en sert pas: Que puisses-te, grand solell de nos jours, Faire sans fin le même cours, Malh., I, 196, 33. ~ 3o. Conjunctivus concessivus. — Lui aussi, il s'est restreint, quoique dans la vieille langue, et encore aujourd'hui, on en trouve plusieurs exemples: Voeillent ou non, sil laissent metre en terre Alexis, 579. Regne le Dieu en son haut firmament, Mais pour le moins la terre est toute d moy, Th. de Bèze, Abrah. Sacrif., 198. Mon zèle me nulra: Mais, nuise ou non, Constance vous adore, La Font., Contes, III, 6, 117. Vous refusez, soit. - Actuellement, ce subjonctif est en général précédé d'une conjonction, et se trouve donc dans une phrase subordonnée. Le Subjonctif ^06. Quant au second groupe, il n'en reste qu'un ieTndi«o„P„aéi 86111 exempIe: Je ne sache- Tous les ^tres cas ont disparu devant le nouveau mode, le Conditioneel: je voudrais, je désirerais, pourriez-vous? je vous demanderais, oserais-je? etc. Le subjonctif qui se trouve dans la phrase relative que je sache est d'une autre nature; cf. § 229 e. Le conjunctivus dubitativus a disparu des interro- 158 LE VERBE gations directes, oü il est remplacé par les auxiliaires: Que dois-/e, que puis-/> faire? II s'est maintenu en vieux frangais dans les questions indirectes. Cf. § 222. ti't' •> 206bis. Quant aux autres procédés de la langue, énumérés plus haut (§ 204), le frangais a perdu le gerundivum et le participe en -urus; il a gardé les auxiliaires de mode et les adverbes, et il a, en outre, créé de nouvelles formations, comme f'ai d faire. Le verbe devoir, qui comme auxiliaire de temps a augmenté considérablement son domaine (cf. §§299 et 306), a vu au contraire restreindre son emploi comme auxiliaire de mode. Pourtant en vieux frangais son emploi, du moins dans la phrase subordonnée, est encore trés libre: Je serai tnangie ains qu'il doie esclairier, Berthe aux grands pieds (Clédat, p. 60). // ne volt pas qu'il deie a cel humme parler, Saint Thomas, 4881. Encor ne sai ou grain doie trover, Charroi de Nimes (Clédat, p. 83). La faculté qu'a debere en latin postclassique d'exprimer une supposition se retrouve en frangais: Mout doit estre bele et fante, Chrétien, Erec, 6617. Ce doit être cela. Comme devoir exprime quelque chose qui ne s'est pas encore réalisé, il passé au sens de „être sur le point de'', „faillir": Quant il dut an la roe chaïr, le chief devant, Li molnlers out mulu; mist la closture atant, Saint Thomas, 223—24. S'en dut ma gole estre pendue. Tiecelins saut toz esmaiés, Qui dut (= faillit) estre molt mal paiés, Roman de Renart (Clédat, p. 174 et 171). Le sens de voulolr est également trés affaibli parfois: Ne sumes apresté Que voillum mes encor estre a la mort livrê, Saint Thomas, 5376—7. l'auxiliaire devoir 159 En talant ai que molt vos voeill amer Roland, 521. Cf. en latin: Interdico ne extuüsse extra aedis puerum velis, Térence, Heautontlm., 563. *em' *• Le subjonctif imparfait et plus-que-parfait sont en décadence: Oudin note en passant que les Champenois et les Lorrains usent d'ordinaire du subjonctif présent après un conditionnel présentje voudrois qu'on prenne garde, „ce qui n'est aucunement bon" En réahté, il n'y a pas d'exemple de cette syntaxe au xvue siècle dans les textes (Brunot, La pensée et la langue, p. 517). Rem. 2. En italien l'emploi du subjonctif est plus étendu: fS'ode uno squillo di corno lontano) Che sia? „que serait-ce", Giacosa 11 trwnfo d'amore, II, 2. - Fosse mai li quella sciagurataf S. Pell'ico Le nue prigioni. - En espagnol: acaso sepam, „je sais peut-être". ' Kem. 3. Pour 1'expression Qui oiue, M. Jeanroy croit que c'est une ellipse de [Y a t-il dme] qui vive? Romania, XXXVII, 294 contre M Clédat, qui souüent que la locütion procédé de Viue un telt h ^0maS' Romania> XLIV, p. 100, qui cite un texte intéressant ae 1419: interrogati secundum communem modum loquendi Qui vivat? respondebant: Rex, regina et dux Burgundie. Une autre explicatfon se trouve Neuph. Mitteilungen, 1919, p. 127: 1'expression francaise serait un emprunt de 1'itaiien Chi vi val II. Subjonctif dans Ia phrase subordonnée1) 1. Proposition substantive 207. Nous exclurons de notre exposé les propositions amenées par un pronom relatif, précédé ou non du démonstratif celui ou ce, dont tl sera parlé aux §§ 225 et suiv. Nous n'avons pas non plus besoin de parler des phrases prédicatives ou attributives paree qu'elles ne se distinguent guère des subjectives et des objectives. Comparons: La vérité est que je n'en sais rien (prédicative) et: U est vrai que je n'en sais rien (subjective). — 11 a exprimé U désir que vous alliez le voir (attributive) et: Ü désire que vous altiez le voir (objective). D'ailleurs exprimer le désir et désirer désignent absolument la même chose. Nous traiterons d'abord des phrases objectives et subjectives et nous consacrerons un chapitre spécial aux interrogations indirectes. & ' F°1ken' ^ o°?7 deS 0biektsat™ ™ f™*-, Diss. Göttingen, 1• T E\}UaZ'-D"! ReM°n der toriiacke der Gemütsbewegung imFranzosischen, Diss. Göttingen, 1907. 160 LE VERBE PROPOS1TION OBJECTIVE 208. Nous verrons plus loin, en parlant des conde'constructtons jonctions, que le latin classique connait une en latin variété de constructions a laquelle le frangais classique. n»arrive pas Ainsi on a la proposition infinitive après les verbes déclaratifs; après les verbes affectifs on a le choix entre la même construction et la construction qupd, suivi de 1'indicatif ou du subjonctif: gaudeo te venisse, gaudeo quod veneris ou quod venisti; après d'autres verbes on a quod, ut, ne, quin, quominus, qui tous sont suivis du subjonctif: te accuso quod hoe feóeris; imperat ut frumenta colligant; dubito quin hoe verutn sit. 209. En latin vulgaire la proposition infinitive Econ"onctionsS va être remplacée par la construction avec con- après les verbes jonctions1). Comme, en latin, le subjonctif est déclaratifs. ^ mQde employé dans le discours indirect, il est naturel que dans la phrase substantive, qui remplace la proposition infinitive, on se serve aussi d'abord du subjonctif: Equidem seio iam filius quod amet meus, Plaute, Asinaria, 37. Legati Cateienses renuntiaverunt, quod Pontpeium in potestate haberent, De bello hispaniensi, 36, 1. Mais le subjonctif va changer de signification: en latin vulgaire il n'exprime plus le discours indirect; aussi Pétrone, qui nous donne quatre exemples de la construction analytique, y emploie-t-il 1'indicatif: Sed subolfacio quod nobis epulumdaturusest, Satiricon, 45. — Pourtant le subjonctif se maintient longtemps k cöté de 1'indicatif: Les Sermons de St. Augustin nous fournissent autant d'exemples d'un mode que de l'autre. Quant aux verbes affectifs et de volonté l'usage postclassique est k peu prés le même qu'en latin classique. Après les premiers on trouve tantöt 1'indicatif, tantöt le subjonctif. Remarquons seulement que l'emploi de l'auxiliaire debere est trés fréquent dans les subordonnées: Sacramentis firmaverunt ut Neptreco ... ad regnum Chlodoviae post Dagoberti discessum aspecerit (= aspiceret), i) Cf. §§ 271, 342 et suiv. MODE APRÈS LES VERBES DÉCLARATIFS 161 Aoster vero... ad regnunt Sigyberti deberit (= deberet) aspecere, Fredeg, 159, 10. Mode après ^10. Pour le francais nous distinguerons plusieurs les ver bes cas d'après le verbe de la principale, puisque c'est cara s. juj en generaj qUj indique la nuance particulière qu'on veut exprimer dans la subordonnée. - Après les verbes déclaratifs on se sert en vieux frangais de 1'indjcatif, quand on parle d'un fait certain; du subjonctif, quand il y a doute. De cette conception il résulte qu'on se sert, en règle générale, de 1'indicatif après les verbes qui expriment la p a r o 1 e, employés affirmativement, et du subjonctif après les verbes de la pensée. Mais bientöt une hésitation se manifeste après ces verbes, employés affirmativement, et 1'indicatif s'y introduit peu a peu, comme après l'autre groupe, quoique jusqu'au xvne siècle le subjonctif s'y maintienne encore: Cuidet li reis qu'elle se seit pasmede, Roland, 3273. Même quelquefois après dire: Chascuns kil veil dist qu'il seit morz, Roman du Rou, I, 585. Lors pense qu'il soit perdus ou qu'il ne sait revenlr, Cléomadès, 15544, exemple curieux de l'alternance des deux modes. Ge cuit que bele est cele compaignie, Roman de Ia Rose, 632. Je culde que soye descendu de quelque riche roy, Rab., I, 10. — Je pense qu'ilz soient ennemls, non alliez ensemble, Rab, II, 302. La plus belle des deux, je crois que ce soit l'autre, Corn, Menteur, I, 4. Tous présument qu'il ait un grand sujet d'ennui, Corn, Cinna, IV, 4. Cette lettre, Monsieur, qu'avecque cette botte On prétend qu'ait regue Isabelle de vous, Mol, Ecole des maris, II, 8. Je pensois que M. de Malherbe eüt été le premier qui l'eüt écrit, Vaug, I, 57. 162 LE VERBE 211. En frangais moderne, la construction des verbes de la pensée est, on le sait, identique a celle des verbes de la parole, de sorte qu'on doit dire par exemple: Je crois qu'il n'est pas venu, mais je n'en suis pas sür, ce qui est, au fond, en contradiction avec la conception fondamentale du subjonctif; 1'analogie de la classe plus nombreuse a entrainé le groupe le moins nombreux. Aujourd'hui, l'emploi du mode dépend de la nuance de la pensée, dès que le verbe est employé négatiyement, interrogativement ou qu'il dépend d'une condition: Je ne crois pas qu'il soit capable de le faire. — // ne croit pas que vous partirez. — C'est d peine si Georges se rappelalt qu'il eüt été l'amant de Marle Delaunaye, Rageot, La voix qui s'est tue,\I\\.—L'emploi du subjonctif dans les phrases suivantes s'explique par des raisons spéciales: Une de ses grandes idéés, c'est que je sois soldat, Mirbeau, Séb. Roch, p. 299 (idee de volonté). — // concevalt le suprème espolr que Mme. Demallly passat d cóté de lui sans le remarquer, L. Evrard, La Nuit, p. 125 (désir). II e m. Dans la phrase suivante l'emploi du mode est un véritable latinisme: // confesse et soutient celuy ne pouvoir faire oeuvre excellente en son vulgaire qui soit ignorant de ces deux langues et qui n'entende la laline pour le moins, Du Bellay, Deffence, L 11, phrase qui ne se retrouve pas dans Sperone Speronl. La subordonnée 212. Quand la subordonnée précédé, le frangais précède. ja met au subjonctif. même si le verbe de la principale exprime la certitude: Que pechiez soit ordure, ce temoigne le palen, Joinville. — Aujourd'hui ces phrases sont trés fréquentes: Qu'il «'ait pas fait son devoir, c'est sür. — On rencontre même des phrases comme: Le fait qu'ils aient cette notion délicate prouve son irrésistibiliié, Lavedan, Illustration, 13 févr.; 1915. Dans cette construction curieuse le subjonctif s'explique, paree qu'on se représente 1'action de la subordonnée d'abord comme hypothétique avant de décider ensuite pour l'affirmation ou la négation. Souvent une phrase comme Qu'il n'ait pas fait son devoir, c'est sür est suivie d'une restriction: mais il n'est pas moins vrai que . . ., et dans ce cas c'est 1'idée concessive qui amène le subjonctif. Rem. Pour la locütion Qu'ainsi ne soit „pour preuve qu'il en est ainsi", employee au xvie et au XVIIe siècle, cf. Romania, XLIV (1925), p. 267 et suiv. MODE APRÈS LES VERBES DÉCLARATIFS 163 Style indirect 213. La construction des verbes déclaratifs est ,ibre- souvent assez libre. On ne parle en général que du discours direct et indirect: Je dis: Venez ou je dis qu'il vienne; il a dit : Je viendrai ou il a dit qu'il viendrait. Mais le style un peu négligé a admis de tout temps des constructions mixtes: Vous prie et admoneste que, solt en compaignie, soit d table, gardez-vous de trop habondamment parler, Ménagier de Paris, I, 178. Ne te sal plus que enseignier, Mes dolcement te volt prler Que de tot go riens n'oblier, Troie, 1745. Or te pri et quier et demant Se tu sez, que tu me consoille Ou d'aventure ou de mervoille, Chrétien, Yvain, 364—66 (Clédat, p. 142). . ... li brief \ Que me tramist 11 rlches rois Gaifiers Que de sa terre me don ra un quarlier, Charroi de Nimes (Clédat, p. 84). Ici le discours direct serait: je vous donnerai; le discours; indirect: qu'il me donnerait. Le style indirect libre a pris le temps du discours direct, Ia personne de 1'indirect. Cf. aussi § 345 Rem. 3. u subordonnée 214' Quand après les verbes déclaratifs on veut eXvoCtéUne exPrimer une volonté, le verbe de la subordonnée est au subjonctif: Je suis bien d'opinion que nous ayons quelque plalsant exercice, Marg. d'Angoul., Heptam., Préface, oü au discours direct, on se serait servi dé 1'impératif ayons. - Dites-lui qu'il parte sur-le-champ. — S'il y a plusieurs phrases subordonnées, on peut tantot exprimer un fait, tantöt une volonté, et la forme du verbe 1'indiquera clairement: Elle lui dit qu'il ne se souciSt point et qu'elle trouveroit bien le moyen de Ven faire sailür sans mal ni honte, et qu'il s'habiliat le plus tot qu'il pourroit, Marg. d'Ang., Hept. VI; ce serait au discours direct: Ne vous souciez point, je trouverai habillez-vous. - De même dans: lis crioient qu'on les menSt au combat; qu'ils vouloient venger la mort de leur père... qu'avec lui ils ne craignoient rien, mals qu'ils vengeroient bien 164 LE VERBE sa mort; qu'on les laissat faire, qu'ils étoient furleux et qu'on les menat au combat, Sévigné, IV, 3. „ i 215. Lorsque les verbes de doute ét de négation Verbes de n '" doute et de sont employés négativement, ils equivalent a une négation. affirmation et demanderaient donc logiquement 1'indicatif, et c'est la, en effet, le mode le plus employé en vieux frangais. Mais a cöté de ce mode on a eu de tout temps le subjonctif, fait qui s'explique par 1'analogie de la forme; et ce mode est même le plus fréquent au xvne siècle; depuis, il a perdu de nouveau de son domaine, grace a la langue populaire, dont 1'influence sur la littérature est allée en grandissant au xixe siècle: Personne n'ignore qu'elle ra'ait été la première cause des malheurs, La Rochef., Mém., II, 159. — Je ne doute pas qu'il fera tout ce qu'il pourra, Littré. — // est indubitable que, si le cardinal Mazarin savait les affaires du dehors, il ignorait celles du dedans, Mignet. 216. Verbes de volonté. — Lorsque le verbe de la principale et celui de la subordonnée ont le même sujet, voulolr^ désirer, etc, sont suivis de l'infinitif 'en latin et en frangais moderne. En vieux frangais on trouve parfois dans ce cas la phrase substantive: Or ai talent ke chant (= de chanter) por esbaudir, Chatelain de Coucy (Clédat. p. 337). En mon cuer m'assenti K'a Saint L>enls iroie por priier Lneu merci (= je me décidai a aller). Et arbrissel desirent au'il fussent parflqri, Berthe aux grands pieds (Clédat, p. 57). De même après les verbes prier, contmander, louer, etc, on trouve en ancien frangais souvent la substantive oü le frangais moderne préfère l'infinitif: Comanda lui que tost s'armast, Trist. Ménestrel, 95- (Rom., XXXV, p. 503). A mon seignor Gauvain proié Qu'il priast son oncle le roi Qu'il le laissast aler od sol, Ibidem, 460 et suiv. MODE APRÈS LES VERBES DE DOUTE ET DE VOLONTÉ 165 Mode après les 217' Le mode dans la substantive dépendant des verbes de verbes qui expriment la volonté, a été de tout n ' temps le subjonctif. Pourtant ilyades exceptions: a) Quelquefois le sens de la volonté est tout a fait affajbli: les expressions le ciel permit, le hasard a voulu servent seulement comme périphrase de 1'indication d'un fait: Le ciel permit qu'un saule se trouva, La Font, Fabl. I, 19. Lorsque mon pere m'envoya jeune enfant d Paris... Dieu voulut que je vous rencontray pour mon precepteur, Calvin (Lefranc, Grands Ecrlvalns, p. 346). — Le malheur veut que qui veut faire l'ange fait la béte, Pasc, Pensées, I, 68. Mais le don qu'on veut (= on dit) qu'hier j'en vins faire en [personne Est ce qui fait ici mon cruel embarras, Mol, Amphitryon, HI, 1, 1468. Et aujourd'hui: Le malheur veut qu'il y est tous les jours. b) Après attendre et les verbes de crainte1) 1'ancienne langue et celle du xvne siècle remplacaient quelquefois le subjonctif par le futur ou le futur du passé, rarement par le présent de 1'indicatif. J'attends du moins, j'attends de votre complaisance Que désormais partout vous fuirez ma présence, Rac, Mithridate, II, 6. J'ai peur que cette grande furie ne durera pas, Malh, III, 79. — Je crains bien que tous ces petits sophistes grecs achèveront de corrompre les mceurs romaines, Fén, Dial. des Morts, 37. — Je crains que cette vérlté ne soit point encore entrée dans 1'esprit de_M. G et que, comme il. a toujours été, il ira toujours, Sévigné, VIII, 418. — Le verbe craindre équivaut dans ces sortes de phrases a peu prés a croire et se rapproche donc des verbes déclaratifs. Rem. Dans la construction Timeo ne sit aeger,-je crains qu'il ne soit malade le subjonctif exprimait a 1'origine un optatif. Ne sit aegerl Qu'il ne -soit maladet mais: je crains. La liaison intime de ces deux phrases donne la construction actuelle, qui pourtant dans la langue parlée se passé de la négation ne. ») Cf. I. Solltmann, Die Rektian der Ausdrücke d. Furcht im Franz Diss. Göttingen, 1918. 166 LE VERBE c) Les verbes comme résoudre, décider, arrêter, etc, se trouvent de tout temps suivis tantöt du futur ou futur du passé, tantöt du subjonctif, suivant qu'on insiste sur la décision inébranlable ou la simple volonté; souvent on se demandé pourquoi 1'auteur s'est prononcé en faveur de tel mode plutöt que de l'autre: En mon cuer m'assenti K'a Saint Denis iroie, Berthe aux grands pieds (Clédat, p. 57). Vos amans ont arrêté entre eux que vous fussiez ensemble, Mol, Fourberies de Scapin, III, 1. — Quand sa femme entendit qu'il la mettolt au rang des trépassés, se pensa qu'elle l'y envoieroit le premier, Marg. d'Angoulême, Heptam., I. — Hdtons-nous de décider que cette fonction, désormais temporaire, devient l'apanage des jeunes, M. Barrès (Rev. d. d. Mondes, 15 janv. 1920, p. 255). 218. Après les ver bes affectifs1), on se le rerbL^fftct'fs raPPelle< le laUn mettait quod avec le subjonctif ou avec 1'indicatif. En frangais on se servait d'abord de la même construction, mais peu a peu le subjonctif est devenu plus général dans les textes et aujourd'hui il est seul considéré comme correct, quoique dans le langage populaire l'emploi de 1'indicatif soit trés courant. L'indicatif s'explique, paree que la subordonnée exprime un fait; le subjonctif, a cause de 1'élément subjectif, la douleur, la joie, le' regret, qui prédomine: N'i at icel kt ne demeint trance Qued il ne sont o Rodlant lo cnataigne, Roland, 1845—46. II est ravi que je suis hors d'affaire, Sévigné, III, 531. — Elle fut tout étonnée que les nymphes lui amenèrent ses soeurs, La Font, Psyché, I, p. 36. — Et c'est heureux, poursuit Biquet, qu'ils m'ont réveillé, Barbusse, Le Feu, p. 9. Rem. 1. On sait que la substantive peut être remplacée après les verbes a complément indirect par une causale amenée par de ce que. Comme la cause est réelle, le mode est l'indicatif; pourtant par suite d'une confusion toute naturelle on trouve actuellement souvent le subjonctif: Je suis content de ce que vous êtes (soyez) venu. i) Ed. Simon, Die Rektion der Ausdr. der Gemütsbewegung im Franz. Diss. Göttingen, 1907. MODE DANS LA PROPOSITION SUBJECTIVE 167 Rem. 2. Après les verbes qui expriment 1'étonnemeut, la vieille langue aime a mettre une question indirecte: Mes d'une chose me mervoil, Se vos n'an avez quis consoil A la cort le buen roi Artu, Chrétien, Yvain, 3905—7. Cf. aussi § 224. 219. Les verbes qui expriment 1'approbation ou Ieblame, groupe de verbes qui se trouve a cheval entre les verbes de volonté et les verbes affectifs, sont eux aussi tantöt suivis de l'indicatif, tantót du subjonctif. Pourtant l'indicatif se fait rare au xvne siècle: Je loue Dieu que votre beau jugement a vu au travers de ces nuées, Malh, IV, 138. — Vous ne devriez pas trouver mauvais que j'ai une trop grande passion de vous voir, Voit. I, 123. PROPOSITION SUBJECTIVE Mode dans la 22°- Dans les phrases subjectives il va de soi que phrase • les régies soient les mêmes que celles qui réeissent subjectlve. ,._ , . , , , T , . & 1 emploi du mode dans les objectives. Aussi ne les relèverions-nous pas spécialement, s'il ne se présentait quelques cas particuliers. a) Après les expressions qui expriment la certitude ou la vraisemblance le mode est le même qu'après les verbes déclaratifs; ainsi on trouve souvent le subjonctif après des locutions telles que go est vis tout comme dans 1'objective après croire et cuidier: Co lor est vis que tiegnet Deu medisme, Alexis, 118. Mais: 11 leur sembloit que celles chevauchies estoient parfaictes, Froissart b) Les expressions de nécessité et de possibilité demandent le subjonctif. Pourtant on trouve parfois le conditionnel ou l'indicatif au xvne siècle après il se peul, il est possible, et ce mode est même général après tl se peut faire : 11 peut bien estre que 11 eritaiges est vostre, Joinv., 676—7. Même il se peut qu'en venant d la chose Jamais son cceur n'y voudroit consentir, La Font, Contes, III, 2, 141. II se peut faire que leur ressentiment part de quelque zèle, mals peu éclatré, Pasc, Prov., XI. - // se pourroit faire aussi que nos poètes auroient contribué d ce désordre, Vaug, I, 409. 168 LE VERBE c) Les expressions de vol_onté demandent naturellement toujours le subjonctif. Quelquefois on trouve l'indicatif après il me tarde, il tient: A quoi tenoit que je «'executois mon dessein? Vaug., Quinte-Curce, VI, 10. d) Le mode après les expressions affectives est le même -£ que dans 1'objective: C'est grand dommage. qu'il ra'avoit „le Superbe", comme en allant d Monaco, Sévigné, VIII, 520. C'est bien assez pour moi qu'il m'a désabusé, Mol, L'Etourdt, III, 4. L'indicatif est particulièrement fréquent au xyne siècle après il suffit: 11 sufflt que nous savons ce que nous savons, Mol., Le médecin malgré lui, I, 1. Ne vous suffit-il pas que je l'ai condamné? Qu' Hermione est le prlx d'un tyran opprimê? Que je le hais; enfin, Seigneur, que je /'aimai. Rac, Andromaque, IV, 3. INTERROGATION INDIRECTE 221. On sait qu'en latin le subjonctif est en Mode en latin premier lieu le mode du discours indirect. II n'est iwsteiassique. donc pas étonnant qu'on se serve de ce mode aussi dans les interrogations indirectes: Rogo quid feceris. En latin postclassique on commence a employer l'indicatif dans les cas oü tout doute est exclu. Pour que cette évolution soit possible, il faut que le sens du subjonctif lui-même ait changé, ou plutöt, que 1'application de cette conception se soit modifiée. Tandis que, en latin, 1'élément intellectuel subjectif entraine le subjonctif — cas qui a disparu du francais —, en francais 'moderne, c'est 1'élément affectif qui demandé ce mode: Dico Iquod hoe feceris > Je dis que tu /'as fait, Gaudeo quod venisti > je suis content que tu sois venu. Le latin postclassique peut donc se servir des deux modes, c'est souvent un moyen stylistique que celui d'employer tantöt l'une, tantöt l'autre forme: Attende proximum tuum, quanta faciat, ut Attende et Mum, qui Chrlstum negavlt, quantum malum fecit, S. Augustin, p. 338. — Cum Interim nemo curat quid annona mordet, Pétrone, 44, 1. Cette liberté se trouve d'ailleurs de bonne heure dans les poètes. Ainsi dans Properce, III, 5, 25—46: MODE DANS LA QUESTION INDIRECTE 169 Turn mini naturae tibeat perdiscere mores, Quis deus hanc mundi temperat arte domum, Qua venit exoriens, qua definit, unde coactis Cormbus in plenum menstrua luna redit, Unde salo superant venti, quid flamine captat, etc. II ne faut pas rattacher l'emploi de l'indicatif eri latin postclassique a la syntaxe du latin archaïque. Si Plaute a fréquemment l'indicatif, c'est que chez lui, comme dans le langage familier, on trouve la coordination au lieu de la subordination. Et qu'il n'en soit pas ainsi pour la latjnité postclassique, la preuve en est fournie par 1'introduction de la conjonction si, qui précisément a cette époque va devenir une particule amenant une interrogation indirecte1). En vieux 222* En vieux franSaJs2) nous nous trouvons a francais 1'indi- une étape beaucoup plus avancée. Si dans la latinité TsXSl P°stclassique le subjonctif prédomine, en vieux frangais l'indicatif 1'emporte de plus en plus. On 1'emploie notamment si le doute porte sur le pronom ou l'adverbe qui introduit la phrase et non sur le verbe: Je vous demandé lequel vous préférez. Le subjonctif se maintient surtout dans deux cas: a) Quand la phrase interrogative implique 1'idee d' u n b u t a atteindre, d'un désir. b) Quand elle marqué simplement 1'incertitude et que la phrase principale est négative, interrogative ou qu'elle une c o n d i t i o n. Exemples: u) Sire Alexis, tanz jorz l'ai desldrét E tantes felz por tei en loinz guardét Se revenisses ta spouse conforter, ■> Alexis, 471 et suiv. >) Cf. pour l'emploi de s i dans la langue classique: F. Gaffiot, Ecqui fuerit si particulae in interrogando latine usus, Paris, 1904. *) Schreinecke, Die Entwicklung des Modus im indirekten Fragesatze des Franzósischen, Diss. Göttingen, 1910. - Bieringer, Der mittel- und neufranz. direkte Fragesatz. Diss. Göttingen, 1910. - A. F. Braunlich, The indicatiue indirect question in latin. Cbicago, 1920. SNEYDERS DE VOGEL, Sgntaxe historique. 2me édition. 12 170 LE VERBE Or m'estuet-il dont regarder Comment je puisse a li parler, Jubinal, Jongl. de France, p. 114. b) Deus, dist li cuens, or ne soi jo que face, Roland, 1982. Si ne puis pas penser comment Puisse a li parler tant ne quant, Jubinal, Jongl. de France, p. 115. Les derniers exemples nous montrent que le subjonctif dubitatif s'est maintenu dans la question indirecte, tandis qu'il a disparu de la phrase simple; cf. § 206. C'est que dans la phrase principale on a senti le besoin d'être plus clair, tandis que dans la subordonnée le contexte aide a expliquer le sens du subjonctif. C'est dire qu'il est moins nécessaire, après tout, e^f"voila pourquoi d'autres tournures peuvent le remplaoer. Aussi, même dans les deux cas que nous venons *u*Le8 de citer, le subjonctif va perdre du terrain. constructions. ' J r Les constructions qui lui font concurrence, sont surtout le Futur et le Conditionnel, la périphrase. avec devoir et pouvoir, 1'Infinitif: 1) Porpensa sei que il fera, Rou, III, 1009. Ne sai que plus vo'is conteroie, Le Chevalier au barisel, 613. 2) a) Si ne sai que g'en doie (debeam) dire, Joufrois, 2757. Ne il ne voient ou poïssent Garantir se il s'an foïssent, Cligés, 168*3. b) Et sa vertu si mon coer a II Ure Que je ne sgai que je doi (debeo) faire ou dire, Froissart, 58, 187. Jeo ne sai dunt il pout aueir tel poësté, Rou, II, 1401. 3) Des autres mais ne sai que dire, Thèbes, 1777. Ne se set a cui conseillier, Cligés, 2991. MODE DANS LA QUESTION INDIRECTE 171 223. Au xyje siècle le subjonctif continue son Restes du rab- mouvement de recul, on le trouve pourtant fréauemjonctlf en ... »,,". „ francais ment dans Montaigne et Rabelais: // m'est comme modern*. indifférent en quel des deux formes je le sois (sc. jugé), Montaigne, III, 8. Au xvne siècle le subjonctif est devenu trés rare, on ne le trouve que tout a fait exceptionnellement après un verbe affectif employé négativement, et après n'importe, qu'importe: J'estime si peu le monde que je n'estime pas en quel habit nous fassions le peu de chemin que nous avons d y faire, Malh., IV, 45. — II y a une chose qui m'étonne dans l'astrologie, comment des gens qui savent tous les secrets des dteux... aient besoin de faire leur cour et de demander quelque chose, Mol., Les Amants Magnifiques, I, 2. Aujourd'hui le subjonctif est k peu prés exclu de ces phrases. Voici pourtant quelques exemples oü l'emploi du mode semble être dü a 1'influence des phrases amenées par que, influence qu'il faut aussi admettre pour la phrase de Molière: On ne voit pas comment on puisse exprimer de pareilles Idéés par d'autres tournures si expressives, Robert, Quest. de Gramm., p. 109. — Je ne congois pas comment vous, madame Millerel, qui almez si tellement les enfants, vous n'en ayez jamals eu, Monnier, Scènes pop., it 400. — Surtout après n'importe et qu'importe, oü le sens concessif de la phrase explique le maintien du subjonctif: // n'importe qui je serve, Volt., Rom. et Contes, p. 90 (Londres 1773). 224. On s'attendrait a ce que, avec la disparition graduelle du subjonctif, les autres formes devinssent de plus en plus générales. Or, cela n'est vrai qu'en partie. L' I n fin i t i f, il est vrai, s'est maintenu jusqu'a nos jours: Je ne sais comment vous exprimer mon bonheur, Michelet. — Je ne savais que répondre, Chateaubriand. — Mais le fait qu'on se sert de que et non de ce que prouve que cette locütion a déja quelque chose de figé*). Puis, après les verbes qui expriment un mouvement de I'ame on ne trouve plus guère 1'interrogation indirecte. Si on disait p. ex. au moyen age: !) Cf. § 116. 172 LE VERBE Molt me vient a merveiUe, par Mahom le mien Dé, Dont cis hon est venus ne de quel parenté, Mainet (Clédat, p. 45), aujourd'hui on dit: Je m'étonne que vous ayez fait cela, et la •subordonnée n'affecte plus la forme interrogative. Par contre, 1' I n d i c a t i f est toujours trés vivant dans les ^questions indirectes, avec ou sans l'auxiliaire devoir : II ne savait pas ce qu'il ferait, ce qu'il devait faire. Rem. Relevons ici l'emploi de la question indirecte, amenée par si, dans 1'interrogation directe: Di nous, font il, as tu trovée ceste robe ou se l'as amblée, Ysopet de Lyon, 1701. — Tombé-je dans l'erreur, ou si ƒ'en "ais sortir? Corn., Héracl., IV, 4. / i± \ francais. Qut lui alassent decoller, (== pour le tuer) S. Leger, 221 et suiv. Cet emploi, qui fait penser a la construction latine: Caesar legatos trtisit qui... dicerent, a été trés rare et ne se trouve plus aujourd'hui. Les exemples qu'on cite d'ordinaire avec un antécédent indéterminé expriment une autre idéé, telle la phrase citée par Brunot (III, 573): Et pour qui referez-vous vos affections? peut-estre pour quelqu'autre qui en soit plus digne? ou encore la phrase actuelle: Je feral faire une clef qui mette mon armoire d l'abrl des voleurs. Ces exemples rentrent dans le cas cité au paragraphe suivant ^ Sens causal. — On s'est servi de tout temps de 1' I n d i c a t i f. Charlefnaignes s'en rist, qui en Deu s'en afiet. Pèlerinage, 700. Cet élève, qui a bien travaillé, sera récompensé. c) Sens co nee ss if. — II faut distinguer deux cas: 1) la relative amenée par le pronom ordinaire, r* 2) la relative amenée par un pronom relatif indéfini. Dans le premier cas, 1'idée concessive n'est pas marquée par le mode: Cet élève, qui n'a pas travaillé, n'est pourtant pas punt. Dans le second cas on se sert du subjonctif: Puissance, quiconque tu sois, Dont la fatale diligence Préside d l'empire frangois, Malherbe, I, 80, 132. Pour qui que, quel que voir les adverbiales concessives *). Rem. Dans une.phrase comme: lo ne lerreie pur tut Vor que Deus fist Ne pur l'aveir ki seit en eest pais, Roland, 458 et suiv., 1'idée concessive ne se trouve pas dans la relative, mais est exprimée . par la. préposition pur1). >^^SÊ 1) Cf. § 244 et suiv. 2) Cf. § 366. LA PHRASE RELATIVE EN FRANCAIS 175 229. (3) Toutes les fois qu'on n i e ou qu'on met Ureiatlve en doute l'antécédent tel qu'il est déterforment un tout mjné par la relative, celle-ci n'indiquant pas inséparable. , , ■ ' ± ■ r r, , une reahte, se met au subjoncnt: 11 ny a pas an marmot qui ne connaisse la girouette de M. Bonnard, A. France. — // semble que ce solt un chat qui vienne de prendre. une souris, Molière. — S'il existaü un mortel qui eüt fait cela, tl faudrait Vhonorer comme un dieu. — Montrez-moi un chemin qui conduise au bonheur. — Quelques grammairiens découvrent dans la dernière phrase un sens final; a tort, croyons-nous, paree que le but non exprimé est: pour que je puisse le suivre. En vieux francais on se sert souvent de cette construction la oü nous emploierions une adverbiale: , ^JF^ L'anpererriz sans mal qu'el et (= sans qu'elle ait du mal) Se plaint et malade se fet, .; Chrétien, Cligés, 5699 et suiv. Jamais pour homme que /'eusse veu... mon cceur n'avoit varlé, Hélisenne de Crenne (Reynier, Roman sent. avant l'Astrée, p. 101). Dans 1'ancienne langue ainsi qu'au xvne siècle on se servait quelquefois de l'indicatif: Je vous souhaiterais... une femme de ehantbre qui ne sait pas bien peigner, La Rochef, Lettr., III, 177. Seigneur qu'a donc ce bruit' qui vous doit étonner, Rac, Iphigénle, I, 2, 180. En francais moderne le conditionnel dispute le terrain au subjonctif quand il s'agit d'une sugposition: Un escalier qui « aurait pas de ntarches, ne saurait jamais être un escalier (cf. en espagnol: que amor que easto no sea ni es amor ni puede ser, Lope de Vega, El mefor alcalde el rey, II, 1; „car un amour qui ne serait pas chaste"). Rem. II n'y a qu'un goüt barbare qui ait besoin de ce stimulant, signifie: II n'y a pas de goüt qui ait besoin de ce stimulant qu'un goüt barbare, et le subjo-nctif est donc pleinement justifié. Dans II n'y a que la directrice qui sait le turc, Frapié, Maternelle, rindiciatif s'explique par attraction; on a prjs la directrice comme antécédent de la relative, tandis que le vrai sens est: // n'y a [personne]jjui sache le turc que la directrice. Dans // n'y a que vous qui le sachiez, on a *" une attraction partielle. — Après si c'était, tournure tres fréquente au XYlie siècle, on trouve le subjonctif: si c'était elle qui envoySt -fe* billets, il les faudrait souffrir, Balzac, Lettre d Chapelain, IV, 29. — Quoique la logjque exige 1'indicatif, le subjonctif s'explique pourtant facilement par la tournure hypothétique de la phrase1). i) Tobler, III, 91. 176 LE VERBE (ê) Sens restrictif1). On trouve le subjonctif quelquefois dans les phrases relatives restrictives. Cet emploi, que nous avons relevé en latin: quod sciam, quod meminerim, et qui reste assez fréquent au moyen age, est rare au xvne siècle et tout a fait exceptionnel aujourd'hui: que l'um oïst, ke li membrast, que je sache, ou avec le pronom décliné: Ne vos vi, don moi souvaingne, onques, Erec, 1010. Aujourd'hui on ne trouve que que je sache. Les autres locutions s'expriment par d ce que je crois, d ce qu'on entend, ou par (pour) autant que. On trouve parfois le subjonctif: pour autant que nous sachions, Bédier, Romania, 1912, p. 14. Le subjonctif s'explique par la forme négative de la phrase précédente. Le cas est donc au fond le même que celui que nous avons traité sous d), tandis qu'en latin on trouve le subjonctif même après une principale affirmative: Ex oratoribus Atticis antiquissimi sunt, quorum quidem scripta constent, Perieles et Aristides, Cic, De Oratore, II, 93. \J) En latin, le subjonctif du discours indirect se trouve souvent dans les relatives. Comme le subjonctif a oessé de marquer cette valeur, il n'y en a plus tracé en francais. Le mode après 230. (g) La relative après un superlatif8). On un superlatif. SSLft qU'on ^ sert aujourd'hui en général du subjonctif après un antecedent accompagné d'un superlatif, mais ce mode n'est pas de rigueur, pas plus que dans la vieille langue d'ailleurs. Cette construction était a peu prés inconnue au latin. Le plus beau que j'aie jamais vu se dit en latin: Omnium quos vidi pulcherrimum, ou: Quo nullam vidi pulchriorem. Après unus, solus (et praecipuus dans Tacite) on trouve pourtant le subjonctif dans la relative: NU admirari prope res est una, Numice, Sola que quae possit Jacere et servare beatum, Horace, Epitres, I 6, 1. — (Crispus) igitur, incolumi Maecenate, proximus, mox praecipuus cui secreta imperatorum niterentur, Tac, Ann., III, 30. 1) ToMer, I, p. 148 et suiv. 2) Cf. Tobler, II, 17—24, Un des bons dtners que j'aie faits. — L. Delibes clans Neophilologus, V, p. 97—104. — C. de Boer, Essais de Syntaxe, l, p. 108—121. SUBJONCTIF APRÈS UN SUPERLATIF 177 En vieux francais, et aujourd'hui dans la langue populaire, le subjonctif est relativement rare: Coms fut de Rome, del mielz qui donc i eret, Alexis, 17. Au plus haut prince qui soit de mere nez, Aym. de Narbonne, 2418. Le conditionnel est particulièrement fréquent au xyiie siècle: Je préiends vous avoir donné en cela la plus grande marqué que je vous saurois jamals rendre de mon obéissance, Voit., I, 506. — // n'y a que votre seule société qui recevroit vérltabiement quelque plaisir de cette diffamation, Pascal, Prov., XVIII. II est curiem de constater qu' a cöté du superlatif relatif on trouve fréquemment l'adjectif simple: Vous estes Tenu l'une des saiges testes Qui soit en toute la paroisse, Pathelin, 51—3. Mout fu biaus et uns des bons chevaliers ki fust a sen tamps, Sone de Nansai, p. 552. — C'est une des grandes erreurs qui soient parmi les hommes, Mol., Don Juan, III, 1. — Le fou rire est nêanmoins une des douces choses que je connaisse, Töpffer, Nouveües génevolses, Les deux prisonniers. — // (A. Gide) est un des rares écrivains d'aujourd'hui qui sachent ce que c'est qu'une idéé, Rev. crit. des idéés et des livres, 1913, p. 727. L'adjectif semble avoir ici a peu prés la valeur d'un superlatif absolu, comme le prouve 1'exemple suivant: Ceste satyre.... ne vous demandé rien sinon estre leue de vous comme de l'un des tres bons Francois.... que je cognoisse aujourd'hui, B. Aneau (Petit de Julieville, Répertoire du th. comique, p. 78). M. Delibes croit que le subjonctif après un superlatif relatif est justifié par 1'idée négative de la construction, le plus beau livre que j'aie jamais lu équivalant a je n'ai jamais lu un livre plus beau; toutes ces phrases, viend.raient ainsi se ranger sous la règle générale: On emploie le subjonctif chaque fois qu'on nie ou qu'on met en doute l'antécédent tel qu'il est déterminé par la relative. Et, en effet, cette conception est confirmée par le fait qu'on trouve parfois la négation dans la relative: 178 LE VERBE Lettre mal faicte et mal escripte, Volle de par eest escrlvant Vers la plus noble Marguerlte Qui soit point au monde vivant, Marot (éd. Jannet), I, 140. Vous êtes l'homme le pu almable que j'asse pas connaissu, G. Sand, Jeanne, p. 113. Toutefois, M. de Boer remarque a raison que la nature subjèctiye de l'adjectif est pour beaucoup dans l'emploi du subjonctif dans la relative, ce qui ressort surtout dans les cas oü l'antécédent est accompagné d'un adjectif au positif et, plus encore, dans le dernier exemple cité oü il s'agit clairement d'un superlatif absolu. Constatons enfin, avec M. de Boer, qu'aujourd'hui, l'emploi du subjonctif est souvent purement conventionnel. On trouve au xyne siècle surtout le subjonctif dans une relative se rapportant k un antécédent accompagné de tout: II suf fit de bien juger pour bien faire, et de juger le mieux qu'on puisse pour faire aussi tout son mieux, c'est-d-dire pour acquérir toutes les vertus et ensemble tous les blens qu'on puisse aequérir, Descartes, Méth., III. Je garde aux ardeurs, aux soins qu'il me fait voir Tout le ressentiment qu'une Ame puisse avoir, Mol, Don Qarcie, III, 3, 1031. Ici encore on peut reconnaitre le même élément affectif et exclusif qui explique l'emploi du subjonctif dans le cas précédent. 231. En résumé on peut dire que dans la proposition relative le subjonctif a disparu: 1) comme mode du discours indirect, 2) pour indiquer un rapport eau sai, 3) pour indiquer un rapport fin al. Dans les autres cas l'emploi du mode est en général resté a peu prés le même qu'en latin. II s'est même étendu dans les relatives dépendant d'un superlatif. Remarquons enfin que dans tous ces cas le subjonctif en frangais moderne s'explique par la nature vague ou subjective de l'antécédent tel qu'il est déterminé par la relative. MODE DANS LA PHRASE TEMPORELLE 179 C ■ 3. Subjonctif dans la phrase adverbiale. PHRASE LOCATIVE 232. Dans les phrases locatives le mode a été de "a'^ocative"8 t°u* temps 1'indicatif: 11 est bien oü il est. II ne faut pas confondre ces phrases avec 1'interrogation indirecte: Je vous demandé, je sais oü il est; ni avec la relative: Je ne trouve pas une place oü je puisse me reposer. PHRASE TEMPORELLE 232bls. Dn peut distinguer: 1. La phrase d'antériorité. 2. La phrase de postériorité. 3. La phrase de simultanéité. La construction des phrases de postériorité n'offre rien de particulier pour l'emploi du mode, mais celles qui expriment 1'antériorité doivent nous arrêter quelques• moments. 233. En latin on se servait en général de l'indicatif Indicatlf et . . r~~~ subjonctif dans apres a n t e q u a m, p r 1 u s q u am,. d u m, donec la phrase et quoad, quand on parlait d'un fait; par contre e" lattn. "e SUDjonctif était de rigueur, quand on voulait marquer un rapport de subjectivité: Caesar priusquam se hostes ex fuga reciperent, in fines Suessionum exercitum duxit, „César a mené son armée dans le pays des Suessions dans l'intention d'empêcher que les ennemis ne se réunissent". — II est pourtant intéressant de relever qu'on trouve même le subjonctif présent, quand il y a seulement un rapport de temps entre les deux phrases: Antequam ad causam redeo (redeam), de me pauCa dicam. Or, en latin postérieur l'emploi du subjonctif se développe de plus en plus. Le plus souvent on peut en expliquer l'emploi par une nuance subjective qui s'ajoute ou par le subjonctif de généralisation, mais cette explication ne s'applique pas toujours et nous constatons donc que peu a peu la construction de nos phrases devient celle du frangais. 234. En vieux frangais on se sert presque toujours en'corê'possiWe ^U su'3j0ilc^^ après ainz que, angois que, primes en francals. que. Pourtant si 1'on veut insister sur la réalité, l'indicatif est encore possible: 180 LE VERBE Ains que li rois s'assist desos le pin Ne qu'il se liet (levet) del perron mar berin,... Cals (= ceux) a donés Carles, li fix Pepin, Chanson d'Aspremont, 126—13L Au vers 192 du même texte, on lit Ie subjonctif: Ainz que li rois soit assis. Après jusque et tresque on rencontre souvent l'indicatif: Ensemble furent jusque a Dieu s'en ralerent, Alexis, 603. Mais le subjonctif domine, s'il s'agit d'une chose qui doit encore arriver. C'est la construction moderne. L'incertitude qui continue pourtant a régner se voit p. ex. dans les vers suivants: Ei voila pourquoy, tant que l'ame Me batte au corps, pour une dame Qui sera d'un fidéle cueur, Je hasarderay mon honneur, Mon corps, mes Hens, volre ma vie, Au fer d'une espée ennemie, Tant qu'en mon cueur j'auray la. force, Grévin, Les Esbahls, IV, 1. et dans les phrases suivantes: De la on peut bien conclure que les honimes^ ne sont iamais assez bien touchez et esmeus du sentiment de leur poureté iusques d ce qu'ils se soient comparez d la maiesté de Dieu, Calvin, lnstitution chrétienne, I, 1, 3. — J'ordonne et veux que Ponocrates soit sur tous ses gouverneurs entendant.... jusques d ce qu'il le congnoistra idoine de povoir par soy regir et regner, Rabelais, I, ch. 50. — II est naturel qu'on trouve aussi le futur du passé: Et institua ld son oncle d estre baux de Haynnau... jusques d tant qu'il seroit revenus, Froissart, Chronlques, III, 111. Mode dans ia L,es conjonctions d u m, do nee et qu_pad, phrase de marquant la simultanéité étaient toujours suivis de simuitan it. l'indicatif en latin classique, tandis que cum, qui, a cóté du sens de temps, exprime encore d'autres nuances, demandé souvent le subjonctif; 1'imparfait et le plus-que-parfait du subjonctif sont notamment trés fréquents après cette conjonction. Cet emploi du subjonctif se développe dans la latinité postérieure, et la conjonction d um, qui remplace souvent cum, et qui, on LA PHRASE TEMPORELLE ET LA PHRASE CAUSALE 181 le sait, en latin classique est suivi de l'indicatif présent, prend alors la même construction: Dum divinae scriptume legerentur, animadverü sentiolam, S. Augustin, Sermons, p. 111. Puis l'emploi de quando et de quomodo s'étend et ces conjonctions en arrivent a supplanter tout a fait cum et d u m, et des auteurs comme Anthimus (vic siècle) nous permettent de conclure que dans le langage parlé l'indicatif est le mode de beaucoup le plus fréquent après ces conjonctions, et cela ne nous étonne pas, paree qu'on indique en général un fait certain. Aussi l'indicatif est le mode u^suel en frangais après portant que, com, quant, endementresque et les autres conjonctions. Si 1'on trouve en moyen frangais et encore au début du xvne siècle le subjonctif après comme, c'est un pur latinisme: Comme les slgnes et prognostlques des hosties ne se monstrassent point pro plees, Amyot (Brunot, II, p. 449). — Comme quelques-uns... le priassent de se retlrer..., il leur répondit, Malh., IV, 208. PHRASE CAUSALE Emploi du 236. En latin classique on se sert en général de mode en latin. l'indicatif après quod, quia, quoniam; après non quod, non quo, oü la cause n'est pas réelle, on emploie le subjonctif, mode qui est aussi de rigueur après cum causal. En latin vulgaire 1'état des choses reste sensibtement le même; seulement après c u m se trouve parfois l'indicatif, preuve que la différence entre la valeur causale et la valeur temporelle de la conjonction tend a s'effacer: Non irrationabiliter acctpl puto se (= si) fellcem beatorum vitam inter miserorum memoremus excidla, cum idem non faciütas scripturis (= scriptoris), sed temporum series praestitit, Grégoire de Tours (Bonnet, p. 681). J 237. En francais, l'emploi du mode ne chanee Emploi du mode . r en francals. guere: StpïSÖTSj Quant n'ai ton fll, ensemble o lei vueil estre, Alexis, 150 (Clédat, p. 10). Non que je le veuille. — Mais ici encore, il faut faire une réserve pour comme qui sous 1'influence de la syntaxe latine se trouve souvent, surtout au xvie siècle, suivi du subjonctif, emploi qui se fait rare au xvne siècle: Comms tel orgueil puist estre prejudi- 182 LE VERBE cUtble, Christ. de Pisan (xve siècle). — Comme tout le monde se trouvast estonné d'un consetl hardy et si avantageux, Amyot, Cimon, 9. — II est surtout fréquent dans la locütion comme ainsi soit: Or, comme ainsi soit qu'Euripide... écrive en l'une de ses tragédies que Vor fut un des maux qui sortii de la botte de Pandore..., Voiture, I, 451. L'emploi du mode dans les phrases suivantes s'explique facilement par le caractère irréel de 1'action: Si nous tenions une maison d lóuage, et qu'il prist fantaisie au propriétaire de l'abatre, pour ce qu'elle fust vieille..., Du Vair, 359, 27, 29. — Quand la brebis fuyt le loup, le fait elle paree que sa couleur luy desplaise? Cello, Circé, 284. Au xvne siècle l'usage moderne s'est constitué. II faut seulement remarquer que pour amener une cause irréelle au subjonctif on se sert parfois de non paree que: La coustume ne doit estre suivie que paree qu'elle est coustume, et non paree qu'elle soit ralsonnable ou fuste, Pascal, Pensées, I, 97. PHRASE CONDITIONNELLE1) 238. Puisque de la réalisation d'une condition dépend 1'action de la principale, on comprend que, dès qu'on insiste moins sur le caractère hypothétique, la phrase conditionnelle amenée par si puisse prendre un sens causal ou concessif, tout en gardant plus of£ moins nettement sa valeur primitive2). D'un autre cöté, une condition qui s'est réalisée fréquemment dans le passé équivaut a peu prés a une temporelle et ce fait explique qu'en frangais si a quelquefois la valeur de quand. En hollandais als et wanneer se sont presque complètement confondus. Voici trois phrases, prises dans la grammaire d'Ayer, oü 1'on peut reconnaitre ces valeurs: Si cet homme est pauvre, est-ce une raison pour le mépriser (cause)? Si l'un est vieux et faible, l'autre est jeune et fort (concession). Si quelque chat faisait du brult, le chat prenait Var gent (répétition). l) G. Kiene, Zur Syntax der Bedingungssatze im Französischen, Diss. Berlin, 1914. *) Le latin siquidem amène presque toujours une cause. Cf. § 363. LA PHRASE CONDmONNELLE EN LATIN 183 Dlvision des En latin classique il faut distinguer trois cas: < J>f,hrasef. 1 i Condition réelle; l'indicatif est de rigueur: conditionnelles et 0 emploi du mode Si hoe dicis, erras. — Si valebis, omnia facilia erunt. en latin. \\ a j_a condition est tout a faif hypothétique, mais elle est réalisable. On se sert du subjonctif présent ou parfait: Quid mini sit boni, si mentiar? — Si insaniens gladium a te postulet, dare peccatum sit. — b. La condition est irréalisable. Le mode dans les deux phrases est le subjonctif de 1'imparfait ou du plus-que-parfait: Facerem, si possem; fecissem, si potuissem. — Non tam facile opes Carthaginis tantae concidissent, nisi Sicilia ciassibus nostris pater et. On trouve parfois 1'imparfait de l'indicatif dans la principale: labebar longius, nisi me retinuisses, „je me serais égaré plus loin, si tu ne m'avais retenu". Cet emploi s'explique par le fait que 1'imparfait indique que 1'action n'est pas achevée, c'est 1'imperfectum conatus. On peut se servir aussi de la conjugaison ditepériphrastique: lapsurus eram, littéralement: „j'allais m'égarer plus loin", mais qui prend le même. sens que lapsus essem, „je me serais égaré". III. Les souhaits conditionnels, amenés par dum, modo, dummodo demandent toujours le subjonctif; Oderint dum metuant, „pourvu qu'ils me craignent". Cet état de choses restant sensiblement le même dans la latinité postérieure — du moins a en juger d'après les textes —, nous pouvons passer au francais. Le subjonctif ^a conjonction s i est une des trés rares i seul exprime conjonctions qui se soient maintenues en francais. la condition. , , . • ■ . Quant de quando a aussi souvent une valeur * conditionnelle. Dum, modo, dummodo sont remplacés par por que, poruec que, por go que, por tant que, qui a leur tour ont disparu devant pourvu que (§ 360); ces conjonctions, qui demandent en général le subjonctif, sont parfois suivies de 1'indicatif du futur: Content suis, pourveu qu'- atendrez Que venu soye, A. de la Vigne (Fournier, p. 159). Enfin, le subjonctif avec ou sans que suffit souvent seul a exprimer la condition: 184 LE VERBE Li reis me prest s'espede al poin d'or adobet, Si (== sic) ferrai sor les helmes ou il ierent plus cler, Pèlerinage, 458 (Clédat, p. 40). Mais quel sacet 11 reis, En trestute sa vie mais ne vus amereit, Pèlerinage, 491—2. Ce sont au fond des optatifs, dont le sens s'est effacé. condition I) Dans la condition simple l'indicatif est toujours simple. de rigueur. Mais le futur est extrêmement rare1); il est remplacé, dès 1'époque la plus ancienne, par le présent, ou périphrasé par les auxiliaires devoir, voloir, pooir, aller, venlr : 11 nem faldrat, s'il veit que jo lui serve, Alexis, 495. Par voz saveirs sem puëz acorder, Jo vus durral or et argent asez, Roland, 74—75. Ha. Le francais ne distingue plus pour la forme uCon?iti«" ce cas-ci du suivant. Ainsi la traduction de la hypothetlque. phrase latine serait en francais: Quel profil auralsje, si je mentals? On se sert donc du conditionnel dans la principale, de 1'imparfait de l'indicatif dans la subordonnée, c.-a-d. des mêmes formes que pour 1'hypothèse irréelle. Ce tour se trouve dès le xne siècle: 5'// vos plaisoit, o vos iroie, Chrestien, Erec, 108. Pourtant, on rencontre encore en vieux frangais quelques traces de la construction latine dans la subordonnée, car pour la principale, on y a toujours le conditionnel ou le futur): S'en ma mercit ne se culzt a mes piez, Et ne guerpisset la lel de chresüens, Jo li toldrai la curune del chief, Roland, 2682—4. Ne trover nel porrunt, s'a Senz ne /'augent querre, Saint Thomas, 2517. Cette construction ce maintient jusqu'au xvie siècle; Palissy, p. 876 et 877, en donne trois exemples: Je ne viendray pas si i) Cf. § 240, 3. MODE DANS LA PHRASE CONDITIONNELLE 185 vostre pere ny soit. — SI on faille du premier coup de i'arracher.., il se viendra si fort reserrer, Palissy, Recepte veritable, p. 134. Rem. L'imparfait du subjonctif se rencontre de bonne heure: Nam si forte quaereretur quae essel ars imperatoris, constituendum putarem principio quis esset imperator, Cic, de Oratore, I, 48, 210; un peu plus loin, 49, 212, on lit: si poeta quaeratur. „ aE 240. \\b. Quand la condition est irréalisable, on Condition irréalisable: trouve: quatre 1) la continuation de la construction latine. Mais constructions. comme l'imparfait du subjonctif a disparu, 1'ancien plus-que-parfait a deux sens, le sens primitif et le sens adopté de l'imparfait: Se Deu ploüst, sire en deüsses estre, Alexis, 420. „S'il avait plu a Dieu, tu aurais du être", en latin: placuisset et d e b u i s s e s. Se /'osasse parler, Ge demandasse de quel terre estes nez, Cor. Looïs, 1565. „Si j'osais parler, je demanderais 2) La forme ploüst, par exemple, ayant pris la valeur d'un imparfait, est peu a peu remplacée dans sa fonction primitive par la construction analytique oüst ploü „eüt plu". Cette forme s'introduit dès le xie siècle dans nos périodes, d'abord dans une des deux phrases, puis dans les deux: Et s'il volsist („eüt voulu"), il l'eüst mis a plé, Cor. Looïs, 1095. Vous fefissiez destruit, se vos eflst pleü, Aye d'Avignon, 3732. La construction de cette dernière phrase s'est continuée jusqu'a nos jours. Le sens primitif de l'imparfait du subjonctif se trouve encore, quoique rarement, dans Malherbeet Corneille: Si je n'eusse empêché leur conjiscation, il y a longtemps qu'elle füt (= „eüt été") donnée, Malh, III, 378. Rem. l'emploi du subjonctif s'est d'ailleurs restreint aujourd'hui a la langue_Jittéraire. Dans Benjamin, Gaspard, p. 140, une voix sneyders de vogel, Syntaxe historique. 2me édition. 13 186 LE VERBE précieuse demandé êl Gaspard: Ou fussiez-vous allé? et celui-ci de répondre: Ou que je fusserais allé? Dans les aréosl Cette forme est délicieuse. IS) On sait que, dans la phrase simple, le conditionnel a supplanté dans beaucoup de cas le subjonctif1). II en est de même pour 1'apodose de la périodé hypothétique2); mais ce qui est remarquable, c'est que le conditionnel a toujours eu de la répulsjon a s'introduire dans la phrase amenée par si (nous verrons plus loin quelques exoeptions). Peut-être 1'idée de nécessité qu'avait longtemps la combinaison infinitif avec h a b e r e 1'a-t-elle empêchée de se sentir a 1'aise dans la phrase hypothétique, qui, de sa nature même, exclut toute idéé de nécessité. La construction moderne apparajt Hès lq xqe siècle: ^ Se li reis voleit cels qu'ils purreit asembler Ne lairreit en ta terre fort ne fieble a tuer, Wace, Rou, t 3733, mais les exemples sont relativement rares; les subjonctifs imparfait et plus-que-parfait se maintiennent en général dans une des deux phrases jusqu'au xvie siècle et même plus tard. Les verbes auxiliaires avoir, être et devoir, qui par leur emploi fréquent subissent moins facilement 1'analogie, se trouvent trés souvent a l'imparfait du subjonctif jusqu'en plein xyne siècle: Si feust condition d laquelle je peusse obvler, je ne me desespererois du tout, Rab., III, ch. 30. Les germes de cette tournure sont latins: Se hoe facere potebat, de hac causa ipsi Mi compascere debirit (= deberet), Formulae Andecavenses, 24. (ï) Si on veut présenter 1'action d'une facon plus vive, on peut se servir, comme en latin, de l'imparfait de l'indicatif avec le même sens que le plus-que-parfait du subjonctif, et cela non seulement dans la subordonnée, mais aussi dans la principale: Destruite esteit (= aurait été) la vlle, se cunrel n'en preneit (s'il n'avait pas pris de mesures), Wace, Rou, II, 413. Et n'eust esté sa merveilleuse hastiveté, il estoit (aurait été) fricassé comme un cochon, Rab., II, 28. — S'il m'avalt dit cela, je le tuais. i) Cf. §§ 206 et 252—254. ï) Oudin, Gramm. franc., 198, défend formellement les phrases: si j'avois des en fans, je leur desirasse, pour: je leur desirerots. MODE DANS LA PÉRIODE HYPOTHÉTIQUE 187 Rem. 1. Les autres langues romanes ont développé le sens modal du plus-que-parfait dellndicatif et emploient donc la construction si habuissem, dederam, que le latin d'ailleurs connaissait déja: Et si fata deum, si mens non laeva fuisset, Impulerat ferro Argolicas foedare latebras, Virg., Aen., II, 54. . . . . chi volesse Salir di notie, fora egli impedilo D'altrai? Dante, Purg., VII, 49. Las cartas una et una tracta Et volgra (voluerat = aurait voulu) las totas baisar, Appel, Provenz. Chrest, 4, 25©, Le francais n'en a q^'un_seul_ exemple, encore se trouve-t-il dans la Passion du ms. de CleraontTqüïn'offre pas un texte purement francais: Melz te fura non fusses naz, Passion, 151. L'espagnol et le portugais ont même introduit cette forme dans la subordonnée: Ella repintiérase si pudiera, „elle se serait repenüe, si elle avait pu", Hanssen, Span. Gramm., p. 110. Pour plus de détails cf. les études de Gammillscheg et de Rohlfs citées §§ 298 et 314. Rem. 2. Pour l'emploi des temps passés je chanterais et je chantais pour exprimer le mode de 1'irréalité, cf. M. L.-J. Corbeau, Voorwaardelgke wijs en Conditionnel (De Drie Talen, 1913, p. 49 et suiv.). 241. Dans quelques cas le conditionnel exprime une nuance du présent: je voudrais, je pourrais désignant d'une fagon adoucie la même chose que je veux, je puis (cf. § 252). Or, il est naturel que cette forme adoucie de l'indicatif se trouve aussi__après si conditjonnel: Que te sert de percer les plus secrets abimes Oü se perd a nos sens l'lmmense trinitê, Si ton intérieur, manquant d'humitité, Ne lui saurait offrir d'agreables victimes! Corn., VIII, 31. Dans Rodogune, si je ne /'oserais pas encore, je suis cependant déjd tenté de me demander avec Beaumarchais: „Et que m'importe d moi le tróne de Syrië?" Rev. bleue, 1891, ft. 678b. Dans 1'exemple suivant ö9f trouve un emploi curieux du conditionnel; mais comme le tout dépend d'un verbe déclaratif, il s'agit plutöt d'un futur du passé: 188 LE VERBE E li privé le rei Torent aseüré, Se le rei en avreit de parole honuré, En veant sun barnage 11 oiist greanté, Ne sereit a nul tens escrit ne recordé, Saint Thomas, 1012—1015. Condition Nous avons dit que le conditionnel n'a guère irréalisable; réussi a s'introduire dans la phrase hypothétique comfittonnei irréelle pour remplacer le subjonctif. Les phrases dans ia qu'on cite ne sont en général que des exceptions subordonnée. , , , . . • apparentes; dans Je meure si je saurais vous dire qui a le moins de jugement, Malh., II, 634, saurais équivaut k sais et nous avons a faire ici k un conditionnel d'atténuation' tout comme dans les phrases que nous avons citées au § précédent. — J'ai d vous dire... que, si vous auriez de la répugnance d me voir votre belle-mère, je rien aurais pas moins sans doute d vous voir mon beau-fils, Mol., L'Avare, III, 7. — Ici le conditionnel dépend de la condition contenue dans d me voir votre belle-mère, et toute cette phrase devient de nouveau la protase d'une nouvelle période hypothétique (avec sens conJ cessif). II faut expliquer de même: Ou si d'un sang trop vil ta main seroit trempêe, Au défaut de ton bras prête-moi ton épée, Rac, Phèdre, II, 5, 709. La condition sous-entendue dont dépend serait trempée est en me tuant. C'est donc encore un exemple de deux périodes hypothétiques entremêlées: Si {d'un sang trop vil ta main serait trempée en me tuant], prête-moi ton épée. — De même dans: Que le diable m'emporte, si je /'aurois deviné (scil. „si vous ne me 1'aviez pas dit vous-même"), Regnard, Lm Sérénade, sc. 23. — Et dans les phrases avec comme si: Comme si je ne me serais pas apergu de la supercherie, oü, eh effet, 1'idée fondamentale est: je me serais apergu de la supercherie [si on avait agi ainsi]. — Citons encore: Ce drame-cl n'est pas même italien; car s'il aurait pu, avec autant de vraisemblance, se dérouler d Venise et d Florence, Nice lui eüt convenu également, Bourget, Cosmopolis, préface, oü la phrase amenée par si marqué d'ailleurs 1 une corjoession. II est donc clajr que le conditionnel aprè§_at Ine sert pas a exprimer une condition, mais dépend _lui-même EMPLOI DU CONDITIONNEL APRÈS SI 189 / d'une rondfflon. Le même mélange se trouve d'ailleurs déja en vieux frangais: Looïs sire, dist GuiUelmes li fiers, Ne me tenissent ml per a losengier, Bien a un an que t'eüsse laissié, Charroi de Nïmes (Clédat, p. 83), vers que M. Clédat traduit par: „si je n'avais craint que mes pairs me tinssent". - Cette traduction rend bien le sens, mais n'explique pas la nature de la construction. II y a la combinaisoti de deux périodes: mi per me tenissent a losengier, se t'eüsse laissié = „mes pairs m'auraient tenu pour un traitre, si je t'avais abandonné" et t'eüsse laissié dans le cas contraire, c-a-d. se ml per ne me tenissent a losengier, t'eüsse laissié, litt. „Je t'aurais abandonné, si [dans ce cas] mes pairs ne m'auraient pas tenu pour un traitre1)." II se présente pourtant quelques cas oü le conditionnel dépend lui-même de la conjonction si: Se tu fa le porroies a ton cuer rachater, Volentlers te lairoie arlere retourner, Fierabras, 623—624. II est vrai qu'il s'agit ici d'une chose encore réalisable, de sorte qu'on pourrait expliquer porroies comme un présent atténué Notre mode se trouve" indiscutablement dans la phrase suivante du xvne siècle: S'ils auroient aimé ces promesses spirituelles et quils les eussent conservées Incorrompues jusqu'au Messie leur témoignage n'eüt pas eu de force, puisqu'ils en eussent été'amls Pasca, Pensées, I, 252. - Puis il semble qu'il est plus général dans la langue populaire et dans les dialectes: Sür si ,'aurais pas eu la veine de tShlber dans une encoignïïre, y aurait pas eu mèche de rester debout, Le Rire, 14 février, 1903 (Salverda de Grave Taal en Letteren, XIV, P. 10). - Si in verro, „si on verrait"! t. Herzog, Neufranz. Dialekttexte, 42, 17. Rem. 1. La carte 511 de VAtlas linguistique: Si c'ètait bien cuit ƒ en mangum bien, prouve que cette construction est surtout connué dans le Nord. uue Rem. 2. L'emplojjesjemp^et des modes est souvent trés libre en v*ux_fi5nca,s: Se il te pueent ne tënTFnTballlier Ne te garroit tot lor de Montpesher, Raoul de Cambrai (Clédat,p. 131), oü le présent est ') CT. Tobler, III, 9, si mit dem Futurum Praeteriti. 190 LE VERBE plus vif que 1'imparfait). — Mais mar i acointa le saut, Si danz Renarz le puet tenir, Rom. de Renard (Clédat p. 170), oü en francais moderne on aurait mis deux plus-que-parfaits. — De même en espagnol: si no se plantan ... en la cocina, no les tocara nada de las judias, „si elles ne s'étaient pas rendues dans la cuisine, elles n'auraient rien eu des haricots", P. Galdos, La Campant del Maestrazqo, VII, p. 61: — et avec le présent dans les deux phrases: Se non llegan los vecinos. la mata, „si les voisins s'étaient pas venus, elle 1'aurait tuée", Valdés, La Hermana San Sulpicio, XI. 243. Si deux conditions se suivent, on peut éviter Deux phrases actueiiement la répétition de si en se servant de que conditionnelles. r ~ suivi du subjonctif (originairement un optant), qui dans ce cas suffit a exprimer 1'idée hypothétique. Or, dans la vieille langue on pouvait supprimer la seconde conjonction et se servir ou bien de l'indicatif ou bien du subjonctif1). Se il se muevent et tl me soit conté, Perdut avrez mon cuer et m'amisté, Gaydon, 668. Car se mil anz avoie a vivre Et chascun jor doblast mes sans, Si perdroie je tot mon tans, Eingois que le voir an deïsse, . Chrétien, Cligés, 2738—42. S'ils voulent, et le vin plaist au goust de la selgneurle de leurs seigneuries, beuvent franchement, Rabelais, III, Prologue. PHRASE CONCESSIVE Subjonctif seul 244. Trois cas se présentent: I. la concession ou conjonctions. porte sur 1'action, qui peut être présentée comme réelle, hypothétique ou irréelle; II. elle porte sur un autre membre de la >hrase; III. elle pose une alternative. Dans le premier cas le latin se sert de quamquam, etsi, tametsi avec l'indicatif, ou de cum avec le subjonctif, pour exprimer une concession réelle; si la concession est hypothétique, on trouve le subjonctif seul: Sit hoe verum, ou les conjonctions licet, ut, également suivies du subjonctif; enfin, pour la concession irréelle on use etsi, tametsi, etiamsi, qui récla- !) Cf. le chapitre des conjonctions, § 359. MODE DANS LA PHRASE CONCESSIVE 191 ment dans ce cas le subjonctif. Dans le second cas on se sert de l'indicatif après les pronoms ou adverbes relatifs indéfinis quisquis, utcumque, etc. (cf. §361c) et du subjonctif après quamvis. Enfin, 1'alternative est exprimée par sive . . . sive, avec le subjonctif. En latin postclassique une confusion se produit entre les conjonctions et entre les modes dont elles étaient suivies: Quamvis molesti sumus utrique generi, ambos tarnen amamus, S. Augustin, Sermons, p. 420. — Quamquam consueverint male audire, Apul., De Magia, 5. — Pour les exemples après quisquis, cf. § 361. A 1'époque préromane toutes ces conjonctions ont disparu de la langue parlée et le subjonctif restait seul a exprimer le rapport concessif. Formation 24^' Le francais a de nouveau réduit le domaine de nouvelle» du subjonctif, qui seul ne suffisait pas a exprimer conjonctions. , . , . r clairement toutes les nuances II ne s'est conservé que dans la concessive hypothétique ou irréelle: Düt-il m'en coüter la vie, je ne lé ferals pas; mais même dans ce cas, on le sait, le conditionnel a réussi a supplanter presque complètement le mode primitif: II m'en coüterait la vie, que je ne le ferais pas2). Le subjonctif s'est conservé jusqu'au xvue siècle dans les alternatives: ssjrwns' Voeillet o nun, tut i laisset sun tens, Roland, 1419. Mais soyez sornettes ou non, Je vals commencer tout de bon, Scarron, Typhon, I. Aujourd'hui la conjonction que est devenue de rigueur. Après les locutions qui... que, ou... que, et d'autres de la même espèce, on s'est toujours, a de rares exceptions prés, servi du subjonctif; voici pourtant un exemple de l'indicatif: Donat as povres o qu'il les pout trover, Alexis, 94, 1) Cf. le chapitre de la conjonction, § 363 et suiv. *) Cf. le chapitre du conditionnel, § 252. 192 LE VERBE oü le latin aurait dit aussi: ubicumque reperire potuit. — Après si... que, pour... que et tout... que le subjonctif est également de rigueur; la dernière conjonction admet pourtant, on le sait, le mode indicatif. Après quoique, bien que, encore que on trouve de tout temps l'indicatif a cöté du subjonctif; et cela est trés naturel, paree qu'on exprime quelque chose de réel; dans la langue cultivée pourtant le subjonctif est seul admis: Quoique j'ai joué fort étourdiment, je ne me suis pourtant pas si fort emporté, Voit., I, 415. — Examinons la chose avec équité, bien qu'en matière de langage il suffit que plusieurs des meilteurs fuges de la langue refettent une fagon de parler, Vaugelas, Rem., I, 431. — Encore qu'ils ne sont pas regus de Dieu... ils le sont des hommes, Pasc, Pens., II, 122. — lis étaient si fiers, bien qu'ils en riaient encore, Zola. — Le verre n'est pas de mon art, bien que f'y entends quelque chose, P. Claudel, L'Annonce falte d Marle, p. 35. — Malgré que le temps était doux, L. Hémon, Maria Chapdelaine, p. 42. Après quand même et dans la proposition sans conjonction, le conditionnel a réussi a supplanter le subjonctif. Celui-ci n'est plus possible qu'au plus-que-parfait, puis dans les phrases comme Aüt-il m'en couter la vie pour les verbes avoir, être et devoir k toutes les personnes et pour les autres verbes seulement k la 3e personne; le sujet est toujours postposé: Eussiez-vous mille fois raison, vous n'auriez pas dü insister. — Cette démarche me coutat-elle la vie, fe n'y renoncerals pas. — Enfin, même si demandé la même construction que si. Cf. § 240 et suiv. PHRASE FINALE Le «ubjonctif; 246. En frangais, comme en latin, le subjonctif est rarement le rje rigueur dans les propositions de but: futur. „.,.,,., , -i. Prtst l olifan, que reproce n en ait, Spnent mil graisle por go que plus bel seit, Roland, 2263 et 1004. Quelquefois — mais c'est trés rare — on trouve l'indicatif, et, puisqu'il s'agit d'un but a atteindre, l'indicatif du futur: Je vous deliverrai roy Ernoul, le baron, Afin que vous metrez tout a execution Le poeple cristien, dont il y a foison, Baudouin de Sebourg, I, 16, 33. MODE DANS LES PHRASES FINALES ET CONSÉCUTIVES 193 Por ce fist ■ il la dame sa terre forjurer, Que jamais en sa vie ni porroit eriter, Parise, 1835. PHRASE CONSÉCUTIVE aai ... 247. On sait que le latin met toujours le subMode en latin. 1 jonctif dans les phrases consécutives amenées par ut ou quin. C'est, semble-t-il, une extension du discours indirect, la conséquence se trouvant déja virtuellement dans la cause contenue dans la principale. Puis on sait que cette acception du mode disparait peu a peu et il est donc probable que la latinitê vulgaire a remplacé souvent le subjonctif par l'indicatif. Les textes, malheureusement, ne nous fournissent pas beaucoup de preuves a 1'appui de cette assertion. Mais la conjonction u t elle-même est remplacée souvent — moins souvent qu'on ne serait enclin a le croire — par la conjonction victorieuse quod et après cette conjonction-la on ne trouve pas seulement le subjonctif, on trouve aussi l'indicatif: Sic impudicitiam summoverat quod impudicos conservaverat, Salvianus gubernator (ve siècle), 7, 22. — Même après ut: Adgregat acervos annonae... ita ut operta ex his domus cernetur omnino, Grég. de Tours (Bonnet p. 680). „•. „ , 248. En vieux francais on se sert de l'indicatif. Mode en francais. , si la conséquence ou le résultat est atteint, et du subjonctif, si le résultat est a atteindre; le subjonctif est donc de rigueur, dans la phrase d'intensité, aussi bien que dans la phrase de manière, toutes les fois que 1'action de la principale nous est présentée comme irréelle, qu'elle soit négative, interrogative ou hypothétique: Facet les (sc. espees) enterrer entres qu'as helz d'or mier, Que les pointes en seient contre mont vers le ciel, Pèleri;hage, 543—4. Et se tant se cuide essaucier Qu'il la (sc. fame) prengne riche forment, A soffrir Va a grant torment, Jean de Meung, Rom. de la Rose (Clédat, p. 211). 194 LE VERBE Mes dites^ moi.... Ques hon est il et de quel jant? Se il est tes, qu'a moi ataingne, Chrétien,. Yvain, 1799—1803. Au xvie siècle on constate une tendance a étendre l'emploi du subjonctif, emploi qui s'explique par 1'influence des études latines: L'ignorance qui est en toy, ö Axiochus, faict que ta conclusion soit mauvaise, Dolet, Second Enfer, 57. — Au xvne siècle on rencontre encore quelquefois sans que avec l'indicatif, dans le sens de si ce n'est que, comme il arrivé fréquemment dans 1'ancienne langue: Je vous le dirois plus souvent, sans que je crains d'être fade, Sévigné, II, 521. Sans que mon bon génie au devant m'a poussé, Défd tout mon bonheur eüt été renversé, Mol., L'Etourdi, I, 11. 249. II arrivé trés souvent dans la vieille langue Autres tournures. , , .. . •. r m que la phrase consecutive manque tout a tart: Qui le cor ot et tentir et souner, S'il est malades, lués revient en santé: Ja n'avera tant grant enfermetet, (sc. qu'il ne puisse revenir en santé), Huon de Bordeaux (Clédat, p. 50). Dans: Al mont vindrent, tant ont erré, la première phrase est, pour 1'idée, la conséquence de la seconde; cp. en frangais moderne: II est hors d'haleine, tant il a couru1). Enfin, une phrase consécutive a 1'indicatif, annoncée par si ou tant, peut, dans la vieille langue, se passer de la conjonction que: Si grant duel at ne puis muder nel plaigne, Roland, 834. PHRASE COMPARATIVE2) e v, a 250. De tout temps le mode de la phrase com- Subjonctif dans 1 r la comparative parative d'égalité a été l'indicatif: Ut sementem «Mnègaiité. fecerjS) fa rnetes. — Tam felices quam iste est a> en lat,n- non sumus. i) Tobler, I, p. 167. *) E. Muller, Die Vergleichungssdtze im franz., Diss. Göttingen, 1900. — A. Wallensköld, La construction du complément des comparatifs et dés expressions comparatives dans les langues romanes (Mém. de la Soc. néophilol., Helsingfors, V, 1910). MODE DANS LA PHRASE COMPARATIVE 105 Dans la phrase d'inégalité on se sert quelquefois du subjonctif: Perpessus est omnia potius quam conscios indicaret. — Ut magis virtute contenderent quam dolo aut insidiis niterentur, César, De bello gall., I, 13, 6. Cette construction, qui s'explique par 1'idée hypothétique de 1'action, se continue dans la latinité postérieure et se retrouve en vieux frangais, comme nous allons le voir. b) en francais. 251' En fran«ais on se sert de l'indicatif, si la phrase contient une réalité: Mielz en valt Vors que ne funt cinc cenz livres, Roland, 1516; du subjonctif, s'il s'agit d'une chose irréelle: Mielz sostendreiet les empedementz Qu'elle perdesse sa virginitét, Eulalie, 17. Mielz voeil murir qu'entre paiens remaignet, Roland, 2336. i) Dieu..., lequel je supplye plus tost par mort me toüir de ceste vie... que par moy ny les mlens en rien soit offensé Rabelais, I, 46. II est important de constater que le subjonctif seul suf fit a exprimer 1'idée vqulue, qu'on n'a donc pas ici affaire a la suppression de la conjonction que. D'ailleurs les phrases citées au paragraphe précédent nous apprennent que le latin, lui aussi, pouvait se passer de la conjonction qui amènerait la phrase subordonnée et qu'il pouvait dire aussi bien pollus quam conscios indicaret, que: potius quam ut conscios indicaret. Cette construction se rencontre encore au xvne siècle: J'aimerais mieux souffrir la pelne la. plus dure Qu'tt eüt regu pour moi la molndre égratlgnure, Mol, Tartuffe, III, 6. Mais on a bientöt senti le besoin d'amener la phrase subordonnée par une conjonction et on a évité la succession des deux que par 1'mtercalation de la négation non pas (cf. §434, 3) ou du pronom déterminatif ce (cf. § 97): J'aime bien mieux qu'elle aille le *) Tobler, I, p. 281—286. 196 LE VERBE chercher que non pas qu'elle Vattende chez mot, Dancourt, Chev. d la mode, 4. Onques n'orent dol grlgnor De cho que nel porent ataindre, Fergus, 5, 19, (ici on a affaire a la construction plus grand de au lieu de plus grand que, § 376 ). Puis en frangais moderne: Vatentifie ne demandait qu'a ce qu'on n'en parl&t pas, G. Chérau, Valentine Pacquault, I, p. 125. Ou bien on a fait une phrase conditionnelle du second terme de la comparaison, ce qui était trés naturel, puisque cette phrase exprimait une supposition, et c'est la une construction trés fréquente: Qu'il ni a el fors que je muere, Béroul, Tristan, 109. Et songez qu'il vaut mieux encore qu'il en mesuse, Que si de Ven frustrer il faut qu'on vous accuse, Mol., Tartuffe, IV, 1. Enfin un dernier moyen dont dispose la langue pour éviter les deux que est d'introduire un infinitif; ainsi on pourrait rendre le vers du Roland en frangais moderne: „J'aime mieux mourir que dé supporter qu'elle reste (que de la laisser) au pouvoir des païens" 1). On trouve pourtant quelquefois en vieux frangais que que: J'aimeroie mieus qu'un Escos venist d'Escoce- et gouvernast le pueple dou roiaume ■.. que aue tu le gouvernasses malapertement, Joinv, 21. Dans une phrase comme: Si 'cet enfant est d elle, quoi de plus simple qu'elle Vait pris, Daudet, Sapho, 207, on sent actuellement la contraction de deux que. Relevons encore qu'après comme sl on trouvait souvent 'e subjonctif de l'imparfait en vieux francais, tout comme après si, ce qui ne nous étonne pas, vu que, au fond, la phrase après comme si est une conditionnelle: A l'igllse se fist porter Cume s'*7 ne peust aler, Wace, Roman de Rou, I, 604 et suiv. c.-a-d. „comme [il aurait fait] s'il n'avait pu marcher". 1) Cf. Littré, aimer, Rem. 4. — Risop dans: Tobler-Festschrift, II. LE CONDITIONNEL 197 Rem. M. Borlé constate qu'après comme si Palissy emploie trois fois le plus-que-parfait du subjonctif contre quinze fois l'indicatif imparf. ou plus-que-parfait, tandis que dans d'autres auteurs du XVle siècle le rapport est de 69 i 51. E. CONDITIONNEL1) Passage du 252. Le conditionnel a toujours gardé une valeur futur du passé modale (§ 316), mais il ne se rapporte plus au au conditionnel. , . passé, mais au present ou meme au futur. Comme tel, on s'en sert: a) quand une action dépend d'une condition hypothétique ou irréalisable: Je serais content, si je pouvais vous être utile; si j'avais eu de l'ar gent, je vous /'aurais donné; b) pour exprimer une hypothèse: Je le reverrais que je ne le reconnaitrais pas. Ce changement de sens s'est déja effectué en latin; le premier exemple se lit dans un sermon anonyme, probablement du ve siècle: sanare te habebat deus, si confitereris, „Dieu te guérirait, si tu avouais"; puis dans Grégoire le Grand (540—604), Epist., V, 5!7: nisi bona vestra nobis quae audivimus suasissent, nulla Mum habuimus ratione suscipere, oü habuimus suscipere a le sens de suscepissemus, „nous aurions recu". Pour expliquer ce passage il faut se rappeler que le latin pouvait mettre dans 1'apodose de la période hypothétique non seulement le subjonctif imparfait ou plus-que-parfait, mais aussi la forme périphrastique du participe futur avec esse, comme dans la phrase citée par Brunot2): Si quid in Croesum crudelius consuluisset, passurus Cyrus grave bellum fuit, „S'il eüt pris a 1'égard de Crésus quelque résolution cruelle, Cyrus eüt eu a supporter une lourde guerre". Or, cette forme périphrastique (amaturus esse, sim, etc.) a été remplacée par l'infinitif + habere, pour exprimer une idéé future. Quoi de plus naturel alors que la nouvelle forme ait fini par s'introduire aussi la oü elle avait a remplir une fonction modale, surtout paree que, comme dans 1'exemple rité, 1'apodose de la période hypothétique exprime souvent na nécessité^ idéé fondamentale précisément de la nouvelle forme analytique. Quant au changement de temps, il est parallèle a celui subi par !) Pour la bibliographie cf. § 314. s) Précis de grammaire historique de la langue fr., p. 505. 198 LE VERBE d'autres formes verbales: voldret < voluerat indique simplement le passé; le futur antérieur cantavero prend souvent le sens du futur simple; le subjonctif plus-que-parfait cantassem remplace l'imparfait cantarem. Nous verrons d'ailleurs que le sens passé du conditionnel ne s'est pas complètement effacé en roman. 253. Dans le chapitre consacré aux phrases con- L* !?"HaI"""°el ditionnelles et concessives (§ 239-241 et 245), dépend d'une vo " condition nous avons vu que le conditionnel a supplanté sousentendue Presclue complètement le subjonctif dans 1'apodose de ces périodes: Mes se tu voloies aler Ci pres jusqu'a une fontainne, N'an revandroies pas sanz painne, Chrétien, Yvaln 370 (Clédat, p. 142). On voit que le conditionnel se rapporte ici au futur, comme d'ailleurs aussi dans la phrase latine, citée plus haut. Le sensi primitif du passé se trouve encore parfois en vieux frangais, comme dans les autres langues romanes: Dont venez-vous? Vos armes vendrïez les vos? (auriez-vous vendu), Claris, 24239. Por la dame que veoie Descendi de mon cheval, Car a nul fuer ne voudroie (aurais voulu) Que je li feïsse mal, Bartsch, Rom. u Past., I, 40, 191). On sait que le conditionnel s'emploie dans la phrase principale aussi pour atténuer une possibilité, une volonté, une question, etc.: Je ne saurais vous le dire, je ne voudrais pas vous incommoder, je vous demanderais..., Oserais-/V vous demander? — Cet emploi est sorti de la construction précédente; 1'analyse de la pensée peut dans toutes ces phrases nous faire reconnaitre une condition sousentendue, qui pourtant n'est plus sentie aujourd'hui. On trouve le même emploi en vieux frangais: i) Tobler, II, 17 B. LE CONDITIONNEL 199 Et que voldroies tu trover? Que tost porroies desvoler, Chrétien, Yvain, 361 et 378 (Clédat, p. 142 et 143). II faut expliquer de la même fagon des phrases du frangais moderne: D'après les journaux le feu aurait fait des dégdts con- sidérables; on exprime ici un jugement dont on ne veut pas prendre la responsabilité; le caractère hypothétique de aurait est amené par cette pensée de celui qui parle: Si les journaux disaient vrai, le feu aurait... Rem. 1. Pour l'indicatif employé au lieu du conditionnel, cf. §201, Rem. Rem. 2. Un auxiliaire comme devoir a gardé longtemps, &. cause de son emploi fréquent, 1'ancienne construction du subjonctif: Mais encore une fois souffrez que je vous die Que cette passion düt être refroidie, Corn., Onna, I, 2, vers qui est corrigé en 1660 en: Qu'une si juste ardeur devroit être attiédie. Cf. aussi § 229. Le conditionnel 254, Enfin, notre forme en est arrivée a exprimer exprime une elle-même une supposition: II me le jurerait qüe supposition. . , . . r—— , . ~— fe ne le croirais pas. — Quand meme il me le jurerait, je ne le croirais pas. — C'est comme qui dirait (= c'est comme si 1'on disait). — II a agi comme un oiseau qui se casserait les alles contre les barreaux de sa cage. — Cf. aussi § 242 avec la Remarque 1. Cet emploi marqué une étape plus avancée dans 1'évolution du conditionnel; quoiqu'il soit sorti, lui aussi, de la construction primitive, dans laquelle le mode dépend d'une condition, ce sens s'est complètement effacé ici et 1'on aurait de la peine a ajouter quelque condition. La vieille langue ignorait 1'ëmploi du conditionnel dans ce cas, elle se servait toujours du subjonctif: Qui dont veïst (= si on avait vu) et plovoir et venter.., Dex ne fist home ne soit espoantés, Huon de Bordeaux (Clédat, p. 51). IV. FORMES NOMINALES DU VERBE OBSERVATIONS GÉNÉRALES c ... ... L'ipfinitif, le participe, le gerundium, Substantifs , . . , r ö ' verbaux. le gerundivum et le supin sont les formes nominales du verbe. Parmi ces formes le participe 200 LE VERBE et le gerundivum sont des adjectifs, les trois autres sont des substantifs. Nous allons parler d'abord des substantifs. Le supinum a deux terminaisons; celle en -urn est un accusatif, celle en -u un datif d'un substantif de la quatrième déclinaison. La première indique après les verbes de mouvement le but: Spectatum veniunt, veniunt, specientur ut ipsae, Ovide, Ars Amatoria, I, 99. „venir (pour) voir", cf. Romam = „a Rome"; la seconde se trouve après des adjectifs comme facilis, dif f ici lis, in fan dus, horribi lis, etc: facile dictu = „facile a dire", et a le sens passif: „facile a être dit". Constatons que le supin est d'un emploi trés rare déja en latin. Le but s'exprime plus souvent par la conjonction ut avec une phrase subordonnée ou par la préposition «tisuivie d'un gerundium: profkiscor ad senatum adeundum, ut senatum adeam; puis par l'infinitif précédé ou non d'une préposition, comme nous le verrons plus loin. A. INFINITIF ET OÉRONDIF1) Observations générales 256. Restent donc deux substantifs verbaux, 1'inDécHnateon de finitif et le gérondif (= gerundium). Au fond, rinflimu jls n,en forment qU'un, puisque le gérondif, c'est la déclinaison de l'infinitif présent: am are a m a n d i amando et amare amandum et amare amando. Rem. Les infinitif s des autres temps amavisse, amaturum esse, amari, amatum esse, amatum iri ont disparu, sauf le passif amatum esse. i) H. Kjellman, La construction de l'infin. dépendant d'une locütion impersonnelle en frang.; des origihes au xve siècle. Uppsala 1913. — Idem, La construction mod. de l'infin. dit sujet logique en fr. 1919. — S. Eringa, La proposition infinitive simple en franc. mod. (Neopbilologus, VII, p. 85). — Idem, La prop. inf. simple et subjective dans la prose fr. depuis Malherbe. Thèse Amsterdam, 1924. FORMES NOMINALES DU VERBE 201 Différente» 256 's- Nous devons donc étudier ce substantif question» a verbal. Ce substantif se distinerue d'autres subétudler. , ,.r . ... stantifs justement paree qu'il est verbal, c.-a-d. qu'il tient toujours de la nature du verbe. Une des questions que nous devons donc étudier est le rapport entre la fonction verbale et la fonction substantive. Nous verrons que tantót une fonction, tantót l'autre prédomine, mais que jamais aucun des deux emplois ne disparait complètement. C'est la une constatation intéressante, paree qu'elle nous montre, mieux qu'aucune autre partie du discours peut-être, combien les divisions grammaticales sont artificielles. 1) La première question a étudier est donc l'infinitif substantivé. 2) Une seconde est la lutte entre le gérondif et l'infinitif ou 1'introduction de l'infinitif après des prépositions. 3) Une troisième est l'infinitif accompagné d'un sujet, c'est la proposition dite infinitive ou 1'accusativus cum infinitivo. 4) Enfin nous devons nous occuper de l'infinitif historique. Rem. F. Bopp, le célèbre fondateur de la „Vergleichende Sprachwissenschaft", a découvert que les formes des infinitifs dans les langues indo-européennes sont des cas affaiblis d'anciens substantifs, Grammatik, III, 849. La fonction primitive de l'infinitif latin semble être celle d'un datif; 1'infiniüvus finalis a gardé ce sens fondamental. Cf. aussi Bréal, Essai de sémantique, p. 80 et suiv. INFINITIF SUBSTANTIVÉ1) Oscillation entre la fonction de substantif et celle de verbe Nature hybride 257. Nous avons vu que l'infinitif tient du verbe et de Hnttatt». du substantif. Tantót il a une fonction nominale, tantót une fonction verbale, on plutót il a presque toujours ces deux fonctions en même temps, mais dosées différemment. Si nous suivons le développement de l'infinitif a travers les siècles, nous constatons que: *) E. Wölfflin, Der substantivierte Infinitiu. (Archiv für lat. Lexikographie, III, p. 70—91). — C. Schaefer, Der substantivirte Infinitiv im franz Diss. Kiel, 1900. SNEYDERS DE VOGEL, Sgntaxe historique. 2me édition. 14 202 LE VERBE a) en latin classique c'est la fonction verbale qui domine; b) en latin postclassique et en vieux frangais la fonction nominale s'étend de plus en plus; c) en frangais moderne c'est de nouveau la fonction verbale qui 1'emporte. L'infinitif, étant une forme verbale, se construit avec un_ adverbe, il est accompagné d^un. sujet .etjd'un complément au même cas que la forme personnelle du verbe. Cette valeur verbale sera attaquée de plus en plus, a mesure que l'infinitif admettra une des constructions suivantes: fl°. L'infiniiif fonctionne comme sujet, prédicat ou complément. 2°. II est précédé d'une préposition. 3°. II est accompagné d'un adjectif ou d'un article. 4°. II est déterminé par un génitif objectif ou subje c t i f. 5°. II prend la flexion casuelle. 6°. II prend la flexion numérale. Si l'infinitif admet ces six constructions, il a perdu sa fonction verbale et est devenu un substantif commun; tant qu'il en rejette quelques-unes, il tiendra toujours plus ou moins du verbe. „ , , 258. Voyons donc les constructions qui sont adEmploi de ' l'infinitif en mises en latin classique. — On emploie couramment latin classique. |>}nfjnitjf dans les fonctions suivantes: 1°. a) celle de sujet, avec esse: Dulce et decorum est pro patria mori; avec des verbes impersonnels: oportet, licet. b) celle de prédicat: Erudito, cui vivere est cogitare. c) celle de complément: après les auxiliaires de mode posse, debere, nolle, veile, etc; après les verbes déclaratifs: Dico te hoe f ecisse (c'est 1'Accusativus cum Infinitiv o, dont nous parierons plus loin). d) pour exprimer le but: Reddere hoe, non perdere erus me misit, Plaute, Pseud., II, 47. — Cette fonction semble être la fonction la plus ancienne de l'infinitif. Puis, on constate en latin classique les germes d'un développement plus grand qui va suivre. Ainsi on trouve l'infinitif encore: 2°. après quelques prépositions, surtout praeter et inter. Le premier exemple se trouve dans un des écrits philosophiques. l'infinitif substantivé en latjn 2.03 de Cicéron: lnter optime valere et gravissime aegrotare nihil interesse, De finibus, II, 13,-43. — C'est qu'ici on n'exprime pas 1'action verbale, mais la conception philosophique du mot. Dans la latinité postclassique cet emploi s'étend: lnter dici et esse, Tertullien, Adv. nat., I, 5. 3°. avec un pronom attributif; déja dans Plaute: lta tuum conferto amare semper, si sapis, Curcul., 28; — puis dans les écrits philosophiques de Cicéron: meum scire, intellegere, sapere, etc; dans Pline: Quid sit illud iners quidem, iucundum tarnen nihil agere, Epitres, VIII, 9, 1. — Meum enim intellegere nulla pecunia vendo, Pétrone, 32, 18 (15). 4°. avec un génitif subjectif. Le premier exemple ne se trouve qu'au premier siècle après J. C. dans Valerius Maximus, qui dit de Fabius Maximus Cunctator: Cuius non dimicare vincere fuit, VII, 3, 7. — Le génitif est ici un pronom, l'emploi d'un substantif comme génitif subjectif ne se trouve qu'au ve siècle. Extension en ^58 1S. En latin postclassique nous voyons que latin vulgaire, l'emploi de l'infinitif s'étend de plus en plus. 1°. D'abord comme complément. Ainsi on rencontre fréquemment l'infinitif complément du verbe habere, combinaison qui va former un nouveau temps, le Futur et le Futur du passé et dont nous devrons parler, quand nous étudierons les temps: amare habeo > aimerai, amare habebam > aimerais. Puis 1'inf initivus fin al is remplace souvent des phrases subordonnées amenées par ui, preuve que c'est une construction bien populaire; de l'autre cöté, les conjonctions- quod et quia font concurrence a. la proposition infinitive. Mais la marche de Ia langue, qui est de substantiver les infinitifs, se marqué surtout dans les derniers cas que j'ai cités. 2°. On trouve l'infinitif peu k peu après d'autres prépositions que praeter et inter (cf. plus loin § 263): Ut ad non esse tendant, St. Augustin, De mor. eccl. cath., 1346 (Migne). — Contra suum veile, Macrobe, Sat., 3; — puis après iuxta, secundurn, ante, per, in, ab. L'emploi en reste pourtant assez restreint et le gérondif 1'emporte de beaucoup; les infinitifs esse, posse, veile, sapere sont les plus fréquents. 3°. avec un adjectif. Le premier exemple, nous 1'avons vu, 204 LE VERBE se trouve dans Pline: iucundum nihil agere. Cette construction s'étend: immaculatum cum Christo vivere, Jeröme, Adv. Pelasg., 3, 12 (996). — Verum esse, prlnceps ac simplex vivere, Maximus Victorinus. 4. avec un génitif subjectif: scire ipsius dei, esse divinitatis, respondere dei; surtout dans Orégoire le Grand. Deux groupes ^59. En vieux frangais on distingue deux classes d'infinitifs en d'infinitifs subsi antivés: 1) ceux qui sont de forvleux francais. mayon ancienne, 2) ceux qui sont de formation récente. Ceux du premier groupe se trouvent déja fréquemment employés comme substantifs en latin, ceux du second groupe développent cette fonction substantive seulement dans la période francaise. Au premier groupe appartiennent des infinitifs comme avoir., être, savoir, manger, lolsir. Ils sont plus anciens que ceux de l'autre classe; on en trouve 19 exemples dansles textes antérieurs au Roland, tandis que l'autre classe n'est représentée que par soveir, faire et edrer: Cel edre li do nat a sun soveir, Jonas, v°, 12. Quant vint al faire, dont le font gentemeni. Drelt a Lalice rejoint li sous edrers, Alexis, 47 et 190. Dans le Roland lui-même il n'y a que six de ces infinitifs. L'ancienneté de la formation du premier groupe est encore prouvée par Ie fait que ces infinitifs prennent plus facilement Ia terminaison flexionnelle et numérale et passent ainsi complètement a 1'état de substantif1) (on a pourtant edrers dans YAlexis); leur sens même s'est écarté de plus en plus du sens purement verbal et, d'abstrait qu'il était, il est devenu concret. Ainsi aveir prend le sens de „biens, possession"; estre celui de „lieu" ou de „fagon d'être, caractère": La vit Renarz un molt bel estre, Renart (Clédat, p. 165). Pantere est une beste De muit precïus estre, Bestiaire, 461. II est naturel qu'on trouve aussi le gérondif employé sub- i) Cf. § 257. l'infinitif substantivé en francais 205 stantivement: A /'ajornant a cöté de pres de /'ajorner, Brut, 996. — De son vivant (= vie), sur son séant sont même restés dans la langue. Mouvement de 260. Au xne siècle les exemples d'infinitifs subreeui. stantivés deviennent de plus en plus fréquents, Chrétien de Troyes surtout semble les aimer beaucoup. Mais dès le xme siècle l'infinitif commence de nouveau a perdre du terrain. Si au xvie siècle il semble vouloir s'étendre un peu, c'est a. 1'influence des études grecques et italiennes qu'il le doit. Du Bellay, Deff., II, 9, p. 284, dit: Usez donques hardiment de l'infinitif pour le nom, comme 1'aller, le chanter, le vivre, le mourir. — Montaigne surtout va loin dans cette voie: Le n'avoir point de mal, Cest le plus avoir de bien que l'homme puisse espérer, Essais, II, 12. Perse et Syrië Pour du regner emplir l'affection Sembloit avoir ses confins trop estroltz, Marg. d'Angoulême (Darm., p. 193). Le ronger des siècles envieux, ■ Du Bellay, Antiquitez de Rome, XIII. Maintenant le voyez en son estre, Tel qu'il estoit, voire devant son naistre, Marg. d'Angoulême (Lefranc, Grands Ecrivains, p. 214). Au xvne siècle l'emploi est presque devenu le même que celui que nous connaissons aujourd'hui, si nous faisons une restriction pour les ceuvres de Malherbe, oü les infinitifs substantivés foisonnent: Le vivre et le vieillir sont choses conjointes, Malh., II, 206. Les exemples du pluriel ne se trouvent que trés rarement; cf. pourtant la phrase de Pascal: La diversité est si ample que tous les tons de voix, tous les marchers, toussers, mouchers, éternuers . . ., Pensees, II, 47. — Cf. aussi Vaugelas, II, 167, qui condamne le vouloir. Aujourd'hui on peut dire que l'emploi s'est fixé, qu'il y a un certain nombre d'infinitifs qui sont devenus de simples substantifs: avenir, diner, sourire, etc.; d'autres qui s'emploient dans des locutions toutes faites, comme au sortir de l'école, mais Ia sortie des feunes filles; on dit couramment le lever du soleil, mais assister d son lever étonnerait. Enfin il y a des infinitifs qu'on évite d'em- 206 LE VERBE ployer comme substantifs: le raisonner, le croire, le dénaturer, le vêtir, etc, dont Plattner, II, 3, 99 et III, 1, 45, cite pourtant quelques exemples. Si on trouve un tel infinitif, il est toujours accompagné de l'article défini. Un adjectif ne 1'accompagne presque jamais, comme dans cette phrase de Lamartine: Au doux tomber du jour. rf Résumé 261. Si nous résumons 1'histoire de l'infinitif employé comme substantif, nous voyons que déja en latin archaïque et classique il y a quelques germes de 1'évolution qui va suivre, que ces germes se sont développés de plus en plus, de sorte qu'en latin postclassique on trouve souvent des infinitifs précédés d'une préposition, ou accompagnés d'un adjectif, d'un pronem attribut ou d'un génitif. II est pourtant curieux de constater que ce sont presque toujours les mêmes infinitifs qui reviennent. En vieux francais la substantification des infinitifs s'étend a d'autres verbes. Ces infinitifs peuvent prendre quelquefois la marqué du pluriel, l'article et la flexion nominale. Mais cette extension n'a pas duré. Abstraction faite d'un petit groupe, la valeur ^verbale de l'infinitif Pemporte de plus en plus; si on admet encore parfois l'article défini devant l'infinitif, on ne trouve que trés rarement le pluriel et il n'est presque jamais accompagné d'un adjectif ou d'un pronom attribut. Raisons de cette 261 ls. Mais comment expliquer cette „rise and oscHiatJon. decline of the Roman Infinitive"? Quelles sont les circonstances qui ont amené ou favorisé 1'extension et la restriction de l'emploi substantif de l'infinitif? 1°. Extension. a) C'est d'abord la nature de l'infinitif qui a un sens nominal a cöté de sa valeur verbale. b) C'est ensuite le fait qu'il remplace de plus en plus le gérondif, forme substantive par excellence et que par conséquent l'emploi de prépositions devient régulier devant l'infinitif; cf. § 262 et suiv. c) La latinité postérieure et le vieux francais n'aiment pas les .phrases compliquées; ils évitent la phrase subordonnée et, en Iaccord avec ce fait, presque toutes les conjonctions du latin périssent. La construction avec l'infinitif, quoique moins précise, semble être plus facile. Ainsi 1'auteur des Quatre Livres des Rois, p. 228, traduit: cum transirem Jordanem par: al passer del flun. l'infinitif substantivé en francais 207 2°. Restriction. Quand plus tard le frangais formera de nouvelles conjonctions et qu'il n'évitera plus les belles périodes aux phrases subordonnées, l'infinitif perdra du terrain. Mais une autre raison s'ajoute. De nouveaux substantifs, les substantifs v e r b a u x, pénètrent dans la langue plus abondamment qu'ils n'y étaient auparavant et supplantent les infinitifs en les réduisant a leur seule fonction de verbe. Et a cet égard il est intéressant de constater que les infinitifs qui aujourd'hui s'emploient encore substantivement n'ont pas de substantifs verbaux k cöté d'eux: le diner, le coucher, le sourire, tandis que les autres verbes forment des dérivés en -atton, -ment, -ance, -age, pour indiquer 1'action: approbaüon, sentiment, endurance, sabotage. Actuellement certains journalistes rendent parfois la phrase trés obscure par 1'accumulation de ces substantifs verbaux: II est inutile de mettre uj**»'1 en reliëf la défectuosité du raisonnement sur la comptabilité de '*jXr**£t la neutralité bulgare avec l'entrée dans son armée d'officiers ap- ^ l*yt"» partenant d des pays qui font la guerre d la Russie, Journal, 11 k^J^ oct. 1915 !). — Ces sortes de phrases sont condamnées par tous xv&"f''* W hnnc a„ta.„rB OV^T* l'infinitif et le gérondif après des prépositions2) * ' „ . , . 262. L'infinitif, nous 1'avons vu, est un substantif Extension et ' recui de 1'iniinirit qui se décline: amare, amandi, amando prépositionnel. amandum (amare), amando. L'ac- cusatif amandum ne se trouve qu'après des prépositions: ad el persuadendum (= k le persuader); comme complément direct 1) E. Richter, Studie über das neueste Französisch (Archiv für das Studium der neueren Sprachen und Litteraturen, 1916, p. 369). 2) J. A. Wulf, De l'emploi de l'infinitif, Lund, 1877. — J. Sörgel, Ueber den Gebrauch des reinen und des praepos. lnfinitivs im Altfranz. Diss. Halle, 1899. — H. Soltmann, Der 'Infinitiu mit der Praep. a im Altfranz. bis zum Ende des 12 lahrh. (Franz. Stud., I). — H. Janicke, Der Infinitiv nach Praep. (ausgenommen de und a) im Franz., Diss. Göttingen, 1913. — K. Haupt, Infinitivsatze im franz. (Marburger Beitr. zur rom. Philologie, Heft 17, 1915). — H. Kjellman, La construction de l'infinitif dépendant d'une locütion impersonnelle en fr., des origines jusqu'au XVe siècle. Thèse TJpsal,. 1913. — Idem, La construction mod. de l'infin. dit sujet logique en fr. Upsal 1919. — S. Eringa, La propos, infin. simple en fr. mod. (Neophilologus VII, p. 85). — Idem, L'infin. pur après un verbe impersonnel (Rev. de philol. fr. XXXIV, p.p. 81—95). — Idem, La prop. inf. simple et subjective dans la prose fr. depuis Malherbe. Thèse Amsterdam, 1924. 208 LE VERBE on se sert de l'infinitif: volo hoe facere; celui-ci s'est encore conservé dans sa fonction prirnitive de dativus finalis: Bibere da usque plenis cantharis, Plaut., Pers., V, 2. Ce substantif verbal a le même développement que les autres substantifs, c.-a-d. qu'il se réduit a deux cas, le nominatif et 1'accusatif1). On a donc en francais amer et amant. Mais tandis que pour Ie substantif ordinaire ces deux cas ont des fonctions bien distinctes, les fonctions de l'infinitif et du gérondif se confondent; c'est qu'en latin déja amare fonctionnait comme nominatif aussi bien que comme datif et comme accusatif. Une seconde différence entre l'infinitif et le substantif commun est que pour ce dernier 1'accusatif réussit k supplanter le nominatif (murus > mars remplacé par murum > mur), mais que (( amare chasse complètement amandum; en effet l'infinitif est plus fort que le gérondif, puisqu'il a la fonction de sujet aussi bien que celle de complément. Voila donc pourquoi. on peut parler en francais d'un infinitif prépositionnel, ce qui n'est guère possible en latin. Malgré quelques extensions, le gérondif perd de plus en plus du terrain a mesure qu'on approche du xvie et du xvne siècle. D'autre part, l'infinitif, lui aussi, subit un reeul paree que son emploi après les prépositions, qui était assez large en vieux frangais, commence a devenir moins libre. II n'y a que deux prépositions qui se répandent de plus en plus: ce sont d et de. Aujourd'hui le gérondif ne se trouve que dans quelques expressions figées: d son corps défendant = a défendre (en défendant) son corps; d argent comptant (plutöt aujourd'hui: argent comptant) = a compter de Pargent; de son vivant, sur son sêant, oü vivant et séant n'ont gardé que la valeur substantive. L'infinitif va 263" Entrons maintenant dans quelques détails, supplanter le L'extension de l'infinitif au détriment du gérondif uneTrfposittol s'est déja Produite en postclassique. On trouve dans 1'Itala carnem dare ad manducare, dans Augustin cum veneris ad bibere, mais ces exemples oü l'infinitif se trouve après une préposition restent rares. *) Nous parierons plus loin de 1'ablatif amando > aimant, qui en prenant les fonctions du participe présent s'est détaché de la déclinaison du substantif verbal. L'INFINITIF ET LË OÉRONDIF APRÈS DES PRÉPOSITIONS 209 En vieux francais par contre nous voyons que l'infinitif a ^gagné du terrain, il y est même plus fréquent que le gérondif; d'un autre cöté on trouve parfois le gérondif sans préposition. II n'y a donc plus aucune différence entre nos deux formes et il est naturel qu'une des deux disparaisse complètement. a) Vous m'en avez fet confort Et en parler et en chantant, Violette, 2425. Servi vos ai par mes armes portant, Raoul de Cambrai, 682; ici par portant = „par porter", „en portant". — Por ainsi que voos ne nous fassiez point pleurer, comme a fait madame Oisilte, par trop louer les femmes de bien, Marg. d'Angoulêmte, Heptaméron, Nouv. VII.. — Saint-Denis pourrait bien ressembler a Paris par être habité, Fontenelle, Mondes, 2e soir. Nel portast une llue por un membre perdant „pour perdre, même s'il devait perdre", Mainet (Clédat, p. 45). b) Unt gaaignié mil mars vaillant (= la valeur), Ducs de Normandie, II, 3551. N'ot pas fui une tieue tenant (= la teneur, la distance), Aliscans, 85. A cöté de l'infinitif seul, une autre construction s'introduit après la préposition, a savoir 1'accusativus cum infinitivo: Por pais aveir E por tote ire remaneir (= pour que toute colère cesse), Rou,. III, 10485—86. Tous les grans seigneurs y estolent sans y faillir ung, Commines, 4, 1. — Et puisque le gérondif a le même sens que l'infinitif, on trouve même 1'accus. -f- gérondif: al, ainz le coc chantant, Brut, 995; Brut de Munich, 721. Et il le firent bien dusqu'a l'aube aparant (= jusqu'a ce que l'aube apparut), Mainet (Clédat, p. 46). C'est grace a sa ressemblance avec un substantif que l'infinitif a pu s'employer après toutes sortes de prépositions. Mais quand plus tard le sens substantif s'efface de nouveau et que l'emploi verbal 1'emporte, comme nous Pavons vu au § 260, on comprend 210 LE VERBE que l'usage des prépositions va se restreignant de plus en plus. Au xvne siècle on trouve encore l'infinitif précédé de depuis, par, quelquefois sur, chez Mme de Maintenon et Mme de Sévigné:1 Depuis vous avoir ^crit tantöt, la fièvre a pris d ma femme La Rochef, Lettre III, 154. — Je rendois mon voyage inutile par être trop court, Sév., IX, 188. — Actuellement pour, sans, par (après quelques verbes), après, puis combinaisons avec de: avant de, afin de, d moins de, ou avec d: de fagon d, de manière d. 264. Cette restriction n'a pas eu lieu pour les dépendant d'un prépositions d et de, dont l'emploi se répand de verbe ou entrant plus en plus. C'est que ces prépositions liées a dans une locütion i». « -,-r z • . ... . , adverbiale. mtimtit torment souvent une expression adverbiale dont on ne peut se passer, et même l'infinitif précédé d'une de ces deux prépositions en arrivé a exprimer tout a fait la même chose que l'infinitif seul, la préposition perd sa valeur propre et ne sert que de compagnon fidéle, mais insignifiant, a l'infinitif. Citons quelques phrases dans lesquelles les prépositions de et d dépendent d'un verbe: a) De cumbattre est apparelüiez, Brut de Mun, 1968; avec l'article: Del bien faire appareillez, Ibid., 724. One n'i ot beste ne s'atort Ou d'oposer ou de respondre, Renard, I, 1202; avec l'article: Del defandre vos atornez, Chrestien, Erec, 2896. Qui s'entremetent de someller, Renart, II, 451; avec l'article: Et del veire s'entremetent, Brut de Mun., 846. Et les exemples abondent avec toute sorte de verbes, comme afier, douter, escondire, feindre, haster, lasser, penser, prier, d'autres encore: Par mi l'estor panse d'esperonner, Jourdain, 4035. LES PRÉPOSITIONS A ET DE DEVANT L'INFINITIF 211 Ces verbes demandant de devant le substantif, 1'exigent également devant l'infinitif substantivé ou non. b) La préposition d s'explique aussi naturellement après conoistre et entendre: Qu'al mordre ne seit coneiie, Miracles N. Dame, II, 79, 37. A Yassaillier Normant entendent, Rou, III, 8099. L'infinitif précédé d'une préposition forme une locütion adverbiale: Al lever, al monter, al anuitier. Souvent avec un sens conditionnel: Que, au justement considerer, il n'y deüst avoir eü point de guerre, Froiss, p. 278; sens instrumental: Muit s'i firent le lor haïr as cols receivre e al ferir, Rou, III, 8607. 265. Ces emplois de la préposition s'expliquent sens propre de donc par la nature substantive de l'infinitif. La ces deux préposition y garde toute sa valeur. Mais cet état de prépositions. ,. , , » choses ne dure pas. Les prépositions de et d, surtout de, vont devenir de plus en plus fréquentes et s'introduisent après des verbes qui primitivement ne demandent pas la préposition: Mars commenga a adherer a la partie des Frangoys, Dolet, Gestes de Fr. de Valois, 32. Ce qui prouve bien que ces prépositions perdent toute valeur propre, c'est qu'on trouve tantöt de, tantöt d après un même verbe, ou bien un infinitif prépositionnel alternant avec un infinitif sans préposition. a) L'un de ces prélats... auroit aussitost appris a croire en Dieu que nous de croire en lui, d'Aubigné (Brunot, II, p. 460). b) 11 auoit esté condamné de par la cour... estre criminel de leze maiesté... dont a cause de ce il fut condamné par la cour d'estre dlgne de mort, Journ. d'un Bourgeois de Paris, (Ibidem). De devant ie 266. Un point intéressant dans 1'histoire de notre „sujet logique". préposition est celui que traite Tobler1) dans ses Vermtschte Beitrage, oü il explique l'emploi de la préposition de devant un „sujet logique". On a en ancien frangais des phrases comme celle-ci: Noble i) I, p. 6 212 LE VERBE ordene est de cevalerie; Moult est male chose d'envie; De povreté est granz mehalnz. O $ uwv l«v~N v j On pourrait consklérer dans quelques cas le substantif précédé de la préposition de comme un génitif explicatif: Noble ordene est {ordene) de cevalerie. Mais cela ne convient pas pour tous les cas, notamment dans le dernier exemple: De povreté est granz mehalnz. C'est pourquoi Tobler propose 1'explication suivante: être de a la valeur de sortlr de. Donc De povreté est granz ~ **<| mehalnz serait De povreté sort granz mehalnz. Cette construction I se serait confondue avec une autre: La povreté, c'est granz mehalnz oü le substantif est prédicat, et cette contamination aurait amené De povreté c'est granz mehalnz. P. ex. C'est deliz de boenz liz, Méon, N. Recueil de fabltaux et de contes, I, 302, 25. C'est un étrange fait du soin que vous prenez, Mol., Ecole des Maris, I, 57. Une autre explication est encore possible, plus simple, nous semble-t-ilx): de en latin et dans la vieille langue signifie souvent d propos de : Des gas qu'erseir desistes grande folie fut, Pèlerinage, 675. que tu me consoille j^sfeji ou d'aventure ou de mervolUe, Chrétien, Chev. au lyon, 365 (Cléd. p. 142). Cil qui fist d'Erec et d'Enlde, Chrétien, Cligés, 1. Filz Alexis, de ta dolente medre! Alexis, 396. Et encore en francais moderne: De ce monstre, de ce monstre, quand même, A. Chamson, Roux le Bandit, p. 27. Qu'on pense aussi a 1'expression, Or, del bien faire! § 202, Rem. 2. Or, dans beaucoup de cas 1'explication de Tobler ne s'applique pas bien, notamment dans la première phrase citée: Noble ordene est de cevalerie, tandis que, si on 1'explique- comme: „Un noble ordre est a propos de la chevalerie", ou „a propos de la chevalerie, c'est un noble ordre", on peut rendre compte de tous les cas, et on n'a pas besoin de recourir pour la construction avec ce a une x) Cf. Meyer-Lübke, Grammaire des langues romanes, III, § 411, et Rübel, Zeitschr. f. rom. Phil, XXXVIII, p. 636. EMPLOI DE LA PRÉPOSITION DE DEVANT L'INFINITIF 213 contamination; elle s'explique par la simple adjonction du sujet neutre ce, que la vieille langue pouvait mettre ou ne pas mettre a volonté. Quoi qu'il en soit, selon l'une aussi bien que selon l'autre explication, de en est arrivé a se placer devant le sujet, paree que de povreté est granz mehainz a le même sens, logiquement parlant, que povreté est granz mehainz. Or, nous avons vu a plusieurs reprises que l'infinitif remplit les mêmes fonctions qu'un substantif. Nous ne sommes donc pas surpris de trouver des phrases, comme les suivantes: ^Honte fust de Pescondire, Chrétien, Chev. au lion, 266. C'est folie del prometre, Eles, 208. ou sans article: Ceo est lur dreiz de mesparler, Marie de Fr., Oulgemar, 18, c'est-a-dire la construction qu'on trouve encore aujourd'hui et oü de a perdu complètement son sens primitif. Cette seconde explication demandé pourtant a être modifiée, elle aussi. M. Kjellman a, en effet, constaté que le type bone chose est d'aprendre est antérieur a bone chose est de pais et qu'il faut donc expliquer d'abord- l'emploi de la préposition devant l'infinitif. II en trouve 1'origine en latin: tempus miserendi > tens est d'aver merci, Ps. d'Oxford, 101, 14. Malgré ce fait, nous croyons pourtant que l'emploi de la préposition signalé plus haut est pour beaucoup dans 1'extension de l'infinitif prépositionnel en frangais1). Quoi qu'il en soit, il est sür que de — comme que — n'a plus dans notre construction une valeur sémantique, mais rythmique: il comble une lacune syntaxique*). Rem. 1. A cöté de la préposition de on trouve aussi que, puis que de: C'est li miex que je voie que la uile asegier, Chevalier au cygne, 224. Noble chose est que de donner, Jubinal, A7. Recueil de Contes, dits, fabliaux, I, 373. Cf. Le pronom relatif, § 116, 6. i) Kjellman, /. c, p. 268 et suiv.; Haas. Abriss d. franz. Syntax, § 272; Eringa, thèse, p. 188 ct suiv. ») Cf. E. Lerch, Hist. franz. Syntax, I, 1925, p. 59 et 214 et suiv. — C. de Boer, l. c, p. 17. 214 LE VERBE Rem. 2. La vieille langue employait parfois une phrase substantive la oü nous nous servirions de l'infinitif, cf. § 216, et inversement elle connait un emploi de l'infinitif prépositionnel trés libre: Devant li vos puis conduire, Sanz rien grever et sanz rien nuire (sans qu'elle vous fasse du mal), Chrétien, Chev. an lion, 1917—181). Rends-le-moi sans te fouiller (sans que je te fouille), Mol., L'Avare, I, 3. — II (l'homme) a besoin de lien pour le contenir... d'élémens pour Ie composer, de chaleur et d'aliment pour se nourrir, Pascal, Pensees, I, 34. — Suis-je un de tes sujets pour me traiter comme eux, Voltaire. — La construction est rare aujourd'hui. Rem. 3. En moyen francais on rencontre une espèce d'infinitif absolu: Estre racontée Phystoire yl dit a Vempereur, Sept Sages, p. 113 (Haase). — Paniagruel, avoir ent'.erement conquesté le pays de Dipsodie, en iceluy transporte une co'onle de Utopiens, Rab., III, 1, 1. — Doncques, Bon Temps, nostre pere et ami, Retournez cy, avoir veu les presents, Picot, Ree. de Sotties, II, p. 287, v. 170. M. Huguet, Synt. de Rab., p. 357, attribue cette construction a ce que l'infin. passé marquant suffisamment 1'idée du passé, après serait superflu. Peut-être vaut-il mieux y voir une analogie du participe: puisqu'on trouve a cöté l'un de l'autre L'entreprise faite et après l'entreprise faite (§ 285), on aura essayé avoir vu a cöté de après avoir vu. 267. Nous avons donc expliqué: Emploi moderne. ö) 1'origine des prépositions d et de devant l'infinitif complément d'un verbe; b) 1'origine de la préposition de devant le sujet logique; c) 1'origine des prépositions d et de devant une expression adverbiale. Dans tous ces cas le sens de la préposition était trés net a 1'origine, puis il s'est plus ou moins effacé. II y a eu des hésitations; nous avons vu des cas oü un verbe admet plusieurs constructions. Au xvne siècle nous trouvons encore souvent 1'omission de Ia préposition: Ce qu'ils promirent faire, Malh. III, 388. — Un catholique feignant se convertir d la religion prétendue, Malh., III, 511. — Ces géans . . . qui tentèrent autrefois chasser de l'Olympe les immortels, Fénelon, Télémaque, XVI. — Ce sont des latinismes. Les grammaires nous renseignent sur l'emploi actuel. On sait qu'il y a des verbes qui exigent d, d'autres de, d'autres encore demandent l'infinitif sans préposition, plusieurs hésitent encore, i) Cf. Tobler, I, XIII, Sujet logique de Finfinitif. LES PRÉPOSITIONS A ET DE DEVANT L'INFINITIF 215 notamment commencer, continuer, avoir honte, c'est d moi, prendre garde, se lasser, manquer, contraindre, fixer, obllger. Ainsi le verbe aimer est suivi tantöt de l'infinitif pur, tantöt de d; même on trouve parfois de: Nous sommes les flls des Gaulois, nous aimons A'entendre bien parler, M. Donnay, Le Temps, 29 juin, 1917. On trouve toujours l'infinitif prépositionnel avec le sens adverbial exprimant une condition, une cause ou un but: A vouloir trop prouver, on ne prouve rien1). — A se taire toujours, a corüenlr son cceur, elle trouvait comme une raison d'être une noblesse, Rageot, La voix qui s'est tue, II, 3. La fonction qu'a la préposition de d'introduire un infinitif, complément on sujet, détaché plus ou moins du reste de la phrase, trouve son origine dans la valeur primitive de de: a propos de, quant a: De m'en deffaire, je ne puis, Mont, III, 9. De faire fléchir un courage inflexible, De porter la douleur dans une dme insensible, D'enchainer un captif de ses fers étonnê, C'est ld ce que je veux, Rac, Phèdre, II, 1. De dire que cela solt faict ad maiorem cautelam...., cela est bon, Sat. Ménippée, p. 91. Cet emploi se rencontre fréquemment dans Bourget et d'autres auteurs modernes: De recourir d Blanche, elle avait trop d'intérêt d dégulser la vérité, Le Sage. — Et de tout savoir ne vous a pas dégoüté d jamais de cette créature? Bourget,. Cosmopolls, p. 328. Cf. De ce que ces jeunes gens chantent l'Internationale, ga ne signtfie pas qu'en cas de guerre ils tirerïï&nt sur leurs généraux, Donnay, La Patrie, I, 1 (Brunot). La phrase populaire C'est pour de rire prouve a quel point de fait corps avec l'infinitif. Rem, Relevons qu'en hollandais et en anglais surtout, la préposition a subi la même usure: (Te) leven is een genot; to be or not to be. II est intéressant de constater qu'il s'agit ici, comme pour le latin archaïque, de 1'effacement du sens fin al. M. de Boer a raison de constater que la „préposition écrasée" de en francais n'a pas encore le même caractère „morphologique" qu'a le to anglais devant l'infinitif, excepté précisément dans Ia tournure c'est pour de rire (o. c, p. 71). i) Cf. Platteer, II, 3, 105, 125. 216 LE VERBE 267 . Le sens primitif de 1 infinitif, celui de but, Infinitif final. ...... qu on trouve dans Plaute et dans la latimte posterieure, on a cru le retrouver en frangais. Si le sens final est trés marqué, le latin se sert de ad, le francais de pour; si 1'on n'appuie pas, on se sert de l'infinitif pur, surtout après les verbes de mouvement aller, venlr, accourir, descendre et d'autres: II est descendu porter une lettre d la poste. II est clair que l'infinitif lui-même n'a pas le sens final, mais que le contexte suggère 1'idée voulue. — Cet emploi s'est même considérablement étendu dans la langue populaire pour le verbe voir, qu'on trouve après toutes sortes de verbes sans qu'il exprime une idéé précise. Ainsi dans R. Benjamin, Oaspard, on trouve: dites voir, attends voir, tiens voir, pensez voir, enfile voir (a cöté de enflle pour voir). On trouve cette construction dès le XVe siècle: Regarde veoir que ce puist estre, Fournier, Th. fr. avant la Ren., p. 160. 268. L'infinitif présent actif peut parfois aider a exprimer une action neutre et même passive. On trouve cet emploi: a) après des adjectifs: Cela est facile d dire, terrible d voir, difficile d dlgérer. II remplace ici le supin latin: facile dlctu. b) comme prédicat: // est d plaindre, c'est d croire, oü il remplace le gerundivum latin. c) dans la proposition infinitive; cf. §§ 270, 273, 274bis. d) dans quelques cas particuliers: Cette dette énorme, qui ne sera finie de payer qu'en 1838, Brunetière, H. de Balzac, p. 45. A-<"— J^l INFINITIF HISTORIQUE L'infinitif 268bls. Un emploi curieux de l'infinitif précédé de historique en la préposition de est l'infinitif dit historique. '» :ik j_e latin connait aussi un infinitif historique, appelé Infinitivus historicus ou descriptivus1). On s'en sert pour rendre la !) G. Ramain, Observations sur l'emploi de l'infinitif historique (Revue de philos., de littérature et d'histoire anciennes, 1914, janvier). — P. Kretschmer, Zur ErMarung des sogenannten Infinitivus historicus (Glotta, II, p. 270— 287). — Ph. Marcou, Der hist. Infinitiv im Franz., Diss. Berlin, 1888. — L. E. Kastner, L'infinitif historique au XVI* siècle (Rev. de philologie fr., 1904, 161—167). — Meyer-Lübke, Gramm. des lang. rom., Hl, 592. — G. Korting, Der hist. Infinitiv (Zeitschr. f. fr. Spr. u. Litt., XVIII, 1896. p. 258). Cf. aussi A. Schulze, Zeitschr. f. rom. Phil., XV, p. 504, et Th. Kalepky, ibidem, XVII, p. 285. l'infinitif historique 217 description, la peinture plus vivante, et il remplace donc l'imparfait: Turn demum Titurius, ut qui nihil ante providisset, trepidare et concursare, cohortesque disponere, César, De bello gall.,M, 33,1. On a proposé plusieurs explications de cette structure, mais cette question appartenant a la syntaxe latine, nous pouvons la laisser de cöté ici. Ce qui est plus intéressant pour nous, c'est qu'il semble que cette construction se perde après 400. II est vrai qu'Aurelius Victor s'en sert a plusieurs reprises, mais c'est un imitateur de Salluste. II est donc sür que la structure francaise n'a rien a voir avec la construction latine et que la comparaison avec le latin ne 1'expüque pas. L'infinitif 268 ls. Les textes frangais nous donnent des exemhistorique en pies de l'infinitif historique seulement au xve siècle : francais. ^ nWy ^g SQ^ couroucer) Qen^ nouvelles, II; et bon prestre d soy retirer, Ibid., LXXVI, oü l'infinitif est précédé de d, construction dont se sert encore Saint-Simon: Aussitót grande rumeur et M. de Coislin a serrer le premier président du derrière de sa chaise, a 1'empêcher de se remuer, Mémoires, X, p. 278. Grenouilles de sauter dans les ondes profondes, & La Fontaine, Fables, II, 14. Et aussitót les variations de commencer sur ce problème du fatum, Bourget, Némésis (Rev. d. d. Mondes, 15 janv. 1918, p. 269), oü l'infinitif est précédé de de. On le trouve dans Rabelais quelquefois sans préposition: Lors Oudart se revestir; mais cela semble être un latinisme. Cet infinitif est employé pour indiquer une action brusque, conséquence de celle qui précédé. II semble qu'on ait choisi l'infinitif, paree qu'on veut seulement insister sur 1'aetion du verbe, abstraction faite de toutes les circonstances; quant a de, il s'explique par le fait que notre construction s'est introduite a une époque oü l'infinitif prépositionnel devenait de plus en plus fréquent. R e m. 1. Le francais se sert donc ici de l'infinitif, paree qu'il n'est pas besoin d'indiquer expressément le mode, le temps, la personne, qui ressortent clairement du contexte. De même dans les phrases interrogatives: Pourquoi /'être éuadé de la Maison? Gide, Le retour de l'enfant prodigue, p. 204. — De quoi vous inquiéter a présent? ibid. SNEYDERS DE VOGEL, Sgntaxe historique. 2m« édition. 15 218 LE VERBE p. 221; et dans les relatives: L'homme a besoin d'un toit sous lequel reposer sa tête, ibid. 205. Rem. 2. -On rencontre fréquemment en francais moderne des phrases comme: J'ai lu hier presque tout un chant de l'Enêide. Dire que j'ai copié cela cent iois en pensuml Ducamp, Souv. littêr., I, 60, — Et dire que les femmes y croient a cet honneur et a. cette discrètion, Bourget, Cosmopolis, 89. — Et songer qu'il s'êta.t cru habile en se prémunissant contre ce qu'il qualifiait d'attitude puérile, ibid., 394. Dans ces phrases ce n'est pas l'infinitif qui exprime la nuance particulière de la pensée, c'est le ton sur lequel on prononoa ces paroles qui indique clairement qu'on rapproche deux faits qui semblent incompatibles l'un avec l'autre et qui suggérent donc 1'étonnement chez 1'interlocuteur. Les phra es avec savoir sont de la ïnéme nature syntaxique: De la chdtierl Savoir si ce sera un chdtiment, en sommei Richepin, Cadet, 277. — Ici le verbe savoir si suggère tout naturellement 1'idée qu'on ne sait pas, au fond. Et on se sert encore de l'infinitif, paree qu'on ne veut exprimer ni temps ni mode ni personne. II ne semble pas qu'il faille rattacher cet emploi a la construction du vieux franjais dans laquelle savoir si, savoir comment, etc. relient ■ une interrogation indirecte a un verbe qui précède: Et que il fust dit et retrait Savoir com il l'aveient fait, Troie, 67061). Rem. 3. L'infinitif avec le sens d'un impératif appartient au même ordre d'idées; cf. § 202, b. L'ACCUSATIVUS CUM INFINITIVO ET CUM OERUNDIO 2) 269. On sait que le latin classique connait une Emploi de construction dite Accusativus cum Infinitivo oü latin' classique. l'infinitif est accompagné de son sujet a 1'accusatif. Cette construction se trouve: I. Comme sujet des verbes impersonnels et du verbe esse accompagné d'un adjectif: Constat (Apertum est) sibi quemque natura esse carum. II. Comme complément, a) des verba sentiendi et declarandi, b) des verba affectuum, c) de quelques verbes de volonté: iubeo et veto, patior et sino, volo, nolo, malo, cupio, a) Credo Deum esse aeternum, b) Gaudeo te venturum esse (quod venies), c) Nollem (hoe) factum (esse). i) cf. Tobler, III, p. 132, qui cite encore les locutions autant dire, révérence parler. *) E. Stünming, Der Ace. c. lnf. im franz., 1915 (Zeitschr. f. rom- Phil., Beiheft 59). — K. Sneyders de Vogel, De overgang van den A.c.I. uit het Latijn in het Frans (Handelingen van het Se Ned. Philologen-Congres, p. 100). la proposition infinitive 219 Hatons-nous d'ajouter que cet état de choses ne répond pas a la réalité. Tout en nous opposant a ceux qui appellent le latin classique une langue artificielle, force nous est pourtant de reconnaitre que pour l'emploi de notre construction l'usage classique s'écarte du langage populaire. Ce dernier, a ce qu'il parait, n'a jamais aimé la proposition infinitive ni comme sujet avec esse, ni comme complément d'un verbe déclaratif, mais s'en est servi la surtout oü le sujet de l'infinitif fonctionne en même temps comme complément du verbe régissant, p. ex. video eum venire. Nous relèverons dans ce qui suit les cas oü le latim postclassique n'est que la continuation de la langue dè Plaute. . . 270. a) Par 1'analogie de iubeo, volo, etc, Extension d* , . . fa. c. L "A. c. I. s'introduit aussi après des verbes comme dans ia langue jmpero et pet o, tandis que d'un autre cöté on populaire. n- trouve aussi iubeo ut, déja dans Plaute d'ailleurs. Parmi ces verbes il faut faire une mention spéciale de face re. C'est, semble-t-il, vers la fin du ne siècle que 1'A. c. I. s'introduit après ce verbe (pourtant déja en Virgile: nati me cernere letum fecisti), et depuis cette époque il s'étend de plus en plus: Fecerunt me hanc lucem velociier verdere, Orégoire de Tours1). — Metuo, „craindre", a quelquefois la même construction que les verba affectuum; non dubium est tantöt suivi de quin, comme le verbe dub.ito, tantöt de 1'A. c. I. comme constat, c-a-d. que la construction suit tantöt la forme, tantöt le sens de 1'expression. b) Après les verbes de sensation, la construction video eum venire (construction populaire qu'on trouve déja dans Plaute) s'étend au détriment de la construction classique video eum venientem. Une nouvelle structure plus récente va lui faire concurrence: video eum qui venit, qui va donner en francais je le vois qui vient. { c) L'infinitif supplantant de plus en plus le gérondif, 1'A. c. I. s'introduit même après des prépositions, mais cela seulement en frangais, ainsi: por la terre estre confondue serait en latin *ad terram confundendam. Puis il est naturel qu'une phrase comme Nolite credere hoe futurum esse se change en: Or ne pensez de !) Thielmann, Archiu für lateinische Lexikographie, III, p. 117 et suiv. — G. Rydberg, Le déoeloppement de facere dans les langues romanes, Paris 1893. 220 LE VERBE ce plus avenir, puisque le verbe penser réclame en vieux francais la préposition de. Enfin l'infinitif prépositionnel remplace des phrases adverbiales tout entières après les prépositions sans, pour, depuis et d'autres: au coq chanter, „quand le coq chante". Restriction de 271. D'un autre cöté 1'A. c. I. a vu restreindre son i'A. c. i. domaine dans plusieurs autres cas: a) L'infinitif seul remplace souvent 1'A. c. I., quand il y a identité des deux sujets: dico (mejhoc fecisse devient dico hoe fecisse, „je déclajre 1'avoir fait". Cette construction se rencontre déja dans Plaute et elle est restée populaire pendant tout le cours de la langue: operam dare promittere pour se operam dare promittere, „promettre de s'appliquer". (h* w^^c.™-»* X q^**^*"*^M ' b) L'emploi de deux accusatifs, l'un complément direct, l'autre prédicat, s'étend de plus en plus au détriment de 1'A. c. I.: Furem eum credo, factum id credo. c) C'est surtout 1'extension considérable des conjonctions q_u cud, quia, quoniam après les verbes déclaratifs qui a amené la perte de 1'A. c. I.: dico quod (quia) hoe fecerit, puis fecisset ou fecit, remplace dico eum hoe fecisse. L'étude de saint Augustin nous apprend a quel point la construction analytique devient populaire: dans ses écrits d'avant sa conversion il emploie 55 fois 1'A. c. I. contre une fois la conjonction, dans ses Confessiones le rapport est de 11 : 1, et dans les Sermones, oü saint Augustin parle au peuple son propre langage, le rapport est de 2 :• 1 '). 272. Pourtant malgré ces restrictions, PA. c. I. Emploi de garde sa vitalité. On en trouve de nombreux exeml'A. c. 1. en , , . ... i ■ vieux francais, pies en ancien frangais, surtout apres laisser, faire et quelques expressions impersonnelles: Tot nostre vivre et tol nostre mengier De cel autel le convient repairier, Raoul de Cambrai (Clédat, p. 128). Dans cette phrase le, reprenant tot nostre vivre et tot nostre mengier, est le sujet de repairier. — Et lour donna rentes pour i) K. Sneyders de Vogel, Quaestiones ad con/unctivi usum in posteriore lalinilale pertinente*, thèse Leiden, 1903, p. 53. LA PROPOSITION INFINITIVE 221 elles vivre, Joinville, 725. — A / esmovoir I'ost te roy rot grant noise de trompes et de cors sarrazinnois, Joinv, 231. A cöté de l'infinitif nous trouvons le gérondif, ce qui est trés naturel, puisque, comme nous 1'avons vu, les fonctions des deux formes s'étaient complètement confondues: tantöt l'infinitif prend la place du gérondif, tantöt — mais c'est beaucoup plus rare — on se sert du gérondif a la place de l'infinitif. Dans notre construction le gérondif n'a jamais été bien fréquent et on ne le trouve que dans 1'ancienne langue. Pour les exemples nous renvoyons au paragraphe 263. Les constructions avec 1'A. c. I. foisonnent au xvie siècle, grace a 1'influence des études classiques: Madame, ceux qui ont lu Ut sainte Escriture confesseront vostre dire estre veriiable, Marg. d'Angoulême, Heptaméroni X. — // lui feut respondu qu'tlz demandoient les cloches Uur estre rendues, Rabelais, I, 68, l. 12 (éd. Lefranc). — Je scay que ne seras si contraire d l'Unmortaüté de ton nom que veuilles Ia grandeur de tes faictz estre supprimée, Dolet, Gestes de Fr. de Valois, 4. Vien donc me presenter Les doux accords de la musique haulte, Pour non avoir en mon cnant quelque faulte, Marg. d'Ang., Les Marg. de la Marg., III, p. 2. Emploi de 273' Au xv"e siècle et en ïranSais moderne nous 1'A. c i. en constatons que 1'A. c. I, tout en étant d'un usage moderne. a?Sez restreint, est pourtant trés vivant. Ón le rencontre notamment: 1) après les verbes de perception: J'ai vu l'enfant courir d sa mère. J'entends gronder Ut foudre. "^^Cet emploi est trés fréquent 2) après les verbes 1 aisse'r, faire: II ne veut pas laisser un autre dire : Mère, le fils que nous pleurions nous est rendu, Gide, Le retour de l'enfant prodigue, p. 201. — II me fait enrager. — Cettê construction est également trés fréquente. 3) :après les verbes déclaratifs quand le sujet est un pronom relatif ou personnel. Pour les exemples nous renvoyons aux paragraphes 275 et 276. Dans une phrase comme: j'entends chanter une chanson le substantif est le sujet du verbe chanter, qui a donc un sens passif, 222 LE VERBE Ce qui le prouve, c'est que, si on ajoute 1'agent, celui-ci est précédé de la préposition par ou d (cf. le paragraphe suivant); J'entends chanter une chanson par ma sceur; c'est ensuite le fait que l'infinitif alterne souvent avec le participe passé passif: Par les traits de Jéhu je vis percer le père, Vous avez vu les fils massacrés par la mère, Racine, Athalie, I, 2. Qu'on compare aussi mangé aux vers a cöté de mangé des vers. Rem. Ainsi on ne trouve plus 1'A. c. I. après une préposition, exception faite pour le langage du Palais: De tout quoi nous avons dressé le présent contrat pour la requérante en faire tel usage que de droit, Courteline, L'article 330. — Dans Au?ier on Ie rencontre aussi: // va le vendre pour le prix en être distribué aux pauvres, L'habit vert, sc, 3; et, chose curieuse, dans le langage populaire: Alors, on m'a laissé la ceinture de sauvetage pour moi le secourir. H. Bauche, Le langage populaire, p. 128. 274. Le sujet du premier et du second groupe est L'agent est au souvent au datif, surtout si l'infinitif est accompagné datlf. 5 , d'un complément; pourtant, meme dans ce cas, on trouve souvent le sujet a 1'accusatif, tandis que, d'autre part, la langue connait aussi le sujet au datif avec un verbe intransitif: a) Ja nes (== ne les) verriez parole ne sermon commencter, Poème moral, 139. Les vrais Juifs et les vrais chrétiens adorent un Messie qui les fait aimer Dieu, Pascal, Pensées, II, 44. — La fièvre des sens le faisalt la reprendre pour la quitter ensuite, Bourget, Crime d'amour, 192. b) A mil en veïssiez plorer, Troie, 26344. Dire l'ai oï a plusors, Rou, III, 341. A tous mes Tyriens faites prendre les armes, Racine, Athalie, II, 6. Des hallucinations de l'ouïe qui lui font écouter par derrière, quand on lui parle en face, Journal des Ooncourt, I, 164. 274bis. Comment expliquer dans ces exemples l'emploi du datif? Tobler1) part d'une phrase oü 1'on a un infinitif intransitif: i) Tobler, 1, p. 254: voir, entendre, laisser, faire avec le datif et Vinfinitif. LA PROPOSITION INFINITIVE 223 je lui vois pleurer, construction qui ne nous étonne pas, étant donné qu'on dit trés bien je lui vois des pleurs, et que l'infinitif était souvent employé comme substantjf en vieux francais. Pourtant M. Mullerx) remarque que les exemples avec un infinitif transitif sont plus anciens, et il propose 1'explication suivante: En latin [classique on se sert souvent du datif pour exprimer 1'agent, surtout avec le gerundivum ou le participe passé: Pugnandum mini est, omnia mihi provisa sunt. Cette construction semble s'être étendue: audiuntur militi, Liv., V, 6, 14. Cum sit invisibilis, facit se vlderi quibusdam, Commodien, Carmen apologetlcum, 122. jPuis avec un infinitif actif, qui prend souvent la place de l'infinitif Ipassif: qui faciat nobis peccata nostra cognoscere, ce qui donne en francais: „qui leur fait reconnaitre leurs fautes". lefverto'dMa- 275' Après leS verbes déclaratifs et quelques mtlb en francais autres, comme craindre et vouloir, 1'A. c. I. est moderne. devenu de plus en plus rare. Au xvne siècle on ne le trouve guère avec un substantif comme sujet: Lorsqu'on Imaglne Pobjet désirê être tel qu'on peut, Descartes, Les passions de V dme, 120. — 11 se trouve assez de vaillans hommes être prêts d toute occasion d'épandre leur sang, Malh., II, 472. — | général le sujet est un pronom relatif ou personnel: // marcha contre les ennemis qu'// sgavoit avoir passé la rivière, tournure que Vaugelas, I, 187, préfère a contre. les ennemis qu'// sgavoit qui avoient passé la rivière. \. II est écrit qu'a nul il ne faut faire Ce qu'on ne veut d soi-même être fait, La Font, Contes, III. 3, 148. 276. Aujourd'hui l'emploi de 1'A. c. I. est encore plus restreint qu'au xvne siècle, puisque l'infinitif est presque toujours le verbe être: Je viens vous parler d'une personne qu'on m'a dite être connue de vous, Labiche, Premier prix de piano, IX- — Cette légende de la folie de Boleslas Gorka, au'il savalt mieux que personne être si fausse, Bourget, Cosmopolis, p. 373. — Tout cela *) H. F. Muller, Origine et histoire de la préposition a dans les locutions du type de faire faire quelque chose a quelqu'un, Poitiers, 1912. (Cf. Rübel, Zeitschr. f. rom. Phil., XXXVIII, p. 371—3). 224 LE VERBE pour le grand patriote que tous savaient «'avoir jamais existé, Daudet, Tartaria sur les Alpes. — On le croirait être dévoré des feux qui Venvironnent, Ségur. - Des phrases comme Charles ne ceda pas, tant il jugeait cette récréation lui devoir être projitable Flaubert, Mme Bovary, 243, sont extrêmement rares; de même' // n'y a rien eu au sens vulgaire ou 1'on entend y avoir quelque chose, Donnay, L'autre danger, I, 5. - Au fond, 1'A. c. I. après les verbes déclaratifs n'a jamais été une construction vraiment populaire, pas même en latin classique. 277. Comment expliquer que notre construction se soit pourtant mamtenue avec un pronom comme sujet? C'est que de sa nature même une phrase comme homo quem id fecisse credo est si synthétique qu'il est difficile d'introduire la construction analytique en remplacant la proposition infinitive par une subordonnée amenée par que. Ainsi on dit couramment: L'homme dont je crois que vous êtes l'ami (cujus amicum te esse credo). v L'homme a qui je crois que vous avez donné un livre (cui te librum dedisse credo). L'homme que je crois que vous avez vu (quem te vidisse credo). Mais on ne dit pas *L'homme qui je crois qu'a fait cela (quem hoe fecisse credo). II semble que la langue ne supporte pas la success.on de ces deux sujets q,ü et je. Aussi de telles phrases sont-elles trés rares; et on ne les trouve qu'a une époque oü le pronom sujet pouvait encore être omis: // faisoit Totes les choses qui [il] savoit Qu'a la dame deussent plaire, Méon, Ree. de Fabl., I, 174, 9. Ici qui est le sujet de deussent. La langue a donc recours \ d'autres moyens pour rendre la construction synthétique du latin: 1) Elle garde, comme nous 1'avons vu au § 276, la tournure latine. 2) Elle change le pronom sujet en complément dépendant du verbe déclaratif: L'homme dont je crois qu'il a fait cela. 3) Elle se sert d'une phrase intercalée: L'homme qui, je crois a fait cela. LA PROPOSITION INFINITIVE DANS LA PHRASE RELATIVE 225 4) Elle se sert de phrases oü 1'on dirait que les mots que et qui aient changé de place: Les bestes que tu vois qui mostrent felonnie J-fr Rom. d'Alixandre, 507, 3. Ér Vous envoiastes une autre armee en Guyenne: dont faisiez estat et que pensiez qui deust resserrer cu prendre le Roy de Navarre' Sat. Ménippée, p. 148. - Cinq proposlüons qu'on doutoit qui' s'y trouvassent, Racine, IV, 486. - La souffrance des personnages qu'il a fallu qui fussent trés charmants, Beaunier, Rev. d d mondes, 1920, Ier janv, p. 219. II nous semble que cette construction, qui se trouve encore aujourd'hui dans des auteurs comme Faguet et Brunetière, est ^due a 1'analogie des verbes de perception, qui, eux, adme'ttent tro1S constructions dans une principale; une synthétique: Je le i, vois venir, deux analytiques: Je vois qu'il vient et Je le vois qui vient; et qui, dans une relative, en admettent deux: L'homme que je vois venir et L'homme que je vois qui vient; la seconde tournure, qui serait *l'homme qui je vois que vient, y est impossible comme après^ les verbes déclaratifs. Quoi de plus naturel que de supposer que 'L'homme que je crois venir soit devenu par 1'influence de ces sortes de phrases L'homme que je crois qui vient?1) Rem. M. Bourciez admet en latin vulgaire un type «quem credo quod fecit, en se basant sur des phrases comme Pater meus quem vos dicitis quia Deus vester est, St. Jean, VIII, 54, „que vous dites qui est votre Dieu"; ici qui proviendrait de qui(a). Éléments de ling. rom., p. 300 et 395; Rev. critique, 11 juin 1908, p. 445. £5^** B- PARTICIPE PRÉSENT ET GÉRONDIF2) ' Fonction du 278' L'histoire du participe présent et du gérondif gérondif et du est un des chapitres les plus intéressants de Ia ^rten'atta!8ent grammaire historique. Elle en est en même temps un des plus difficiles: aucune grammaire du francais ») Pour toute cette construction et différents essais d'explication voir Tobler, I, p. 136, Fusion de la proposition relative avec une proposition objective. 2) A. Stimming, Verwendung des Gerundiums und des Participiums Praesentis im Altfranz. (Zeitschrift für rom. Phil., X, 526-554). - Klemenz Der syntaktUche Gebr. des Part. Praes. und des Gerundiums, Diss. Erlangen,' 1884. - F. Pfeiffer, Umschreibung des Verbums im Franz. durch aller, venir -f Gerund., être -f- Part. praes., Diss. Göttingen, 1909. - E. Möneh, Die Verwendung des Gerundiums und des Part: praes. im franz., Diss. Göttingen 226 LE VERBE moderne ne nous renseigne suffisamment sur Ia nature de ces deux formes. Le gérondif (gerundium) latin est la déclinaison de l'infinitif: amare, amandi, amando, amandum, amando. C'est 1'ablatif a m a n d o seul qui est entré en lutte avec le participe présent. On s'en sert: 1) Sans préposition comme ablativus instrumenti ou causae: Lycurgi leges laboribus erudiunt iuventutem: venando, currendo, esuriendo, sitiendo, algendo, aestuando. 2) Avec les prépositions ab, de, ex, in, moins souvent pro: Pteraque tempora In venando agere, Salluste, De bello Jugurthinó, VI, 1. Le participe présent se rapporte a un membre de la phrase (participe conjoint) ou il forme avec un sujet nominal propre la construction dite Ablativus absolutus. II indique en premier lieu la simultanéité, mais a cette fonction primitive s>ajoutent tout naturellement d'autres nuances, paree que 1'esprit humain aime a voir un rapport plus intime entre deux actions simultanées. Ainsi le participe présent exprime souvent un rapport de cause, de concession, de condition, il a souvent le même sens qu'une phrase relative. Le gérondif et le participe présent ont donc des formes et des fonctions différentes en latin et on ne voit pas bien d'abord comment ils ont pu se confondre. Le point de départ est le rapport causal. En effet, la phrase: Laborans felicitatem invenies a a peu prés le même sens que Laborando felicitatem invenies et, ajoutons, que In labqrando felicitatem invenies. Or, comme le sens causal passé facilement a celui de condition et de concession, le gérondif peut marquer parfois déja en latin ces fonctions-la: Cavendo salvl erimus et Cavendo non salvi erimus peut se traduire par: „si nous sommes" ou „quoique nous soyons sur nos gardes". /. De cette facon le gérondif étend de plus en plus son domaine au détriment du participe présent. On peut reconnaitre la valeur de temps (simultanéité) dans le vers de Virgile: 1912. — E. Lerch, Das invariable Part. praes. im franz., 1915 (paru d'abord dans Rom. Forsch. XXXIII, 369—488. — L. Bayard, De Gerundii et G'erundivi vi antiquisSima et usu recentiore, thèse Paris, 1902. — B. H. J. Weerenbeck, Le gérondif francais avec sujet sous-entendu (dans Neophilolögus, I, p. 101). PARTICIPE PRÉSENT ET OÉRONDIF 227 Quis tatia fando Temperet a lacrimis? Aen, til 6, Ce sens se trouve d'ailleurs déja dans Plaute: Ha miser cubando in lecto hic expectando obdurui, Truculentus, 916. C'est donc un emploi bien populaire: Ha erumpendo naves, quae ad Baetim flumen fuissent, incendunt, Bell. Hisp., 36, 2. — Dans Tacite et surtout dans les auteurs postérieurs l'emploi du gérondif s'étend de plus en plus; tandis que le latin classique préfère le participe présent, le latin postclassique par contre emploie a. chaque instant le gérondif; il semble tendre a réserver le participe présent au seul sens adjectif: Habens ergo iter ab Ierusolima usque ad Carneas eundo per mansiones qcto.. Peregr. ad loca sancta, 13, 2. Ego simiUier erravi tempore multo Fana prosequendo parentibus insciis ipsis; • Abstuli me tandem inde legendo de lege, Commod., Instruct., I, 1, 4—6. In dando divltias vestras ostendite totas, Ibidem, II, 18, 20. ( 279. Mais si le gérondif est beaucoup plus usité i'empioi du qu'en latin classique, les textes ne nous fournissent gérondif en aucune preuve du gérondif remplacant le participe latin vulgaire. v ° , 1 a- present dans un ablatif absolu ou avec le sens d une phrase relative. Et pourtant Paccord de toutes les langues romanes — nous allons voir tout de suite 1'état des choses en frangais — nous permet de conclure qu'a 1'époque préromane le gérondif a pris toutes les fonctions verbales et adverbiales du participe présent et que celui-ci n'est resté que comme adjectif1). .Rem. Quivi trovarono i giovani giocando, Boccace. — La mia prigione essendo cos! alta, gli uomini luggiü mi parevano janciulli. S. Pellico. — Pour 1'espagnol: Habia cunas de madera con tiernos infantes durmiendo, Valdés, La Hermana S. Sulpicio, XI. — . Impidiendome frecaentemente el mal estado de mi salud... — Même avec en: Et en passan do Rog Blasquez salio Madurra Goncalvez de la celada, Zauner, Altspan. Elementarbach, p. 166. Le roumain est intéressant: lo participe présent a complètement !) Lerch, a.c. et B. H. J. Weerenbeck, thèse Amsterdam, qui paraitra incessaniment, ont une conception différente de 1'évolution de ces formes verbales. 228 LE VERBE disparu et a été remplacé dans sa fonction verbale par le gérondif: vTnzind < vendendo, et dans sa fonction d'adjectif par une nouvelle forme vtnzator. En catalan, oü la voyelle finale est tombée, 1'état dés choses n'est pas elair: Metge (1398) emploie 12 formes invariables et 45 variables. Cf. A. Par, Sintaxi catalana, p. 309. 280. Par la chute de la finale, nos deux formes ne Nouvelle hitte . ■ entre les deux se distinguent plus en francais que par I's flexion- formes en nej. je gérondif est toujours amant, le part, prés. francals. & J —; 1-— 1 qmqnZj amant, amant, amanz. II est donc souvent difficile de dire si dans tel cas nous avons affaire a Un participe ou au gérondif, surtout paree que les manuscrits, postérieurs souvent d'un siècle a 1'original, nous donnent fréquemment des formes avec s oü Pauteur lui-même ne s'en est probablement pas servi. Malgré ces difficultés il est probable qu'en frangais) comme dans les autres langues romanes le gérondif a supplanté le participe présent dans sa fonction verbale. Mais dès le xne siècle une nouvelle lutte s'engage. Pourtant, tandis que l'autre était commune a tout le domaine roman et était vraiment populaire, nous avons affaire ici a une influence savante qui n'agit qu'en frangais surtout et qui, le plus souvent, se réduit a une question d'orthographe; en. effet le s final tombant dès le xme siècle dans la prononciation, le participe présent ne se distingue plus en rien du gérondif. Don nons d'abord quelques exemples: Les femmes... vindrent encuntre le rei Saiil carolantes e juantes e chantantes que Saiil out ocis mil, e David dis milie, Quatre Livres des Rois, 70. — Tout beuveur de bien, tout goutteux de bien, alter és, venans a ce mien tonneau..., Rab, III, Prologue. — Je ne suis pas deliberee d'attendre que la fortune, moy vivante, decide tissue de ceste guerre, Amyot (Darm., p. 148). Le fait qu'on rencontre ces formes d'abord dans les traductions et qu'elles sont rares avant le xive siècle prouve que nous avons affaire a une tendance savante. Grace a 1'influence du latin la forme avec s se répand de plus en plus et est au xvie siècle, le siècle de la Renaissance, presque la seule forme qu'on trouve dans les textes. On a même essayé de lui donner la terminaison féminine, comme dans 1'exemple cité plus haut et en plein xviie siècle: Je vous trouve si ptelne de ré flexion, si stoïcienne, si méprisante PARTICIPE PRÉSENT ET QÉRONDIF 229 les choses de ce monde, Mme de Sévigné, VI, 336, mais cela portait atteinte a la nature de Ia langue, et Vaugelas prescrit des femmes buvans de la limonade. Quant a la forme avec s, Vaugelas établit des distinctions subtiles entre les soldats étans et êtant sur le point, mais comme ces distinctions ne se basent sur rien, 1'Académie décida en 1679 qu'on ne déclinerait plus les participes actifs, et ainsi, sans le savoir, on en est revenu a la seule forme soutenable, c.-a-d. au gérondif. On voit que des trois groupes qu'on distingue aujourd'hui: 1) participe présent adjectif, 2) p ar t i ci pe p r é se n t avec fonction verbale, 3) gérondif précédé ou non de en, il faut supprimer le second. Le participe présent, resté comme adjectif, subit les mêmes changements qu'un adjectif comme viridis; il prend donc la forme féminine: la triomphante armée, Marot, I, 144. Emploi du 281. Quant a l'emploi du gérondif, il est plus libre gérondif. qu'aujourd'hui. Comme en frangais moderne, il se rapporte en général au sujet, mais il peut se rapporter aussi a un autre membre de la phrase: Lo camp li fait guerpir fuiant, w.i Brut de Mun., 552. Molt iert forz li reis Hugue, s'il se met en avant, Ne perdet de la barbe les gernons en bruslant Et les granz pels de martre qu'at al col en tornant, Le peligon d'ermine del dos en reversant, Pèlerinage, 478 et suiv. (Clédat, p. 41). Dieu en courant ne veut estre honoré, Les Quatrains de Pybrac, IV. En languissant et en grefve trlstesse rit mon las cceur, Marot. D'ailleurs de telles structures se trouvent encore dans la langue moderne: Dans Walch et Zeiler, Lectures variées, III, p. 32, un prisonnier dit: En passant l'autre jour dans la rue, je vis votre figure. — Et en quoi f'sant qu'y a du bon? Courteline, Le train de 8h. 47, I, 6. — Cp. aussi: L'appétit vient en mangeant. — En entrant, la salie d manger se trouve d droite. Ces phrases sont, en partie du moins, des restes de Pancienne. langue, dans laquelle le gérondif pouvait avoir la valeur de l'infinitif. 230 LE VERBE Le sujet du gérondif absolu est souvent sous-entendu: // ne faut pas dire „Acilius Strabon" mais „Acilius Strabo", quoiqu'ètant seul on dise Strabon, Vaug., I, 150. Le sujet de étant résulte de ce qui précède. Le gérondif absolu d'un verbe unipersonnel est particulièrement fréquent depuis le xvie siècle: Quelque bien de mon père et le fruit de mes peines Dont avenant que Dieu de ce monde m'ótdt, J'entendois tout de bon que lui seul hérit&t, Mol, L'Etourdi, IV, 1, 1289. Et cette construction se trouve encore aujourd'hui: Pourtant, s'agissant de G. Paris, il ne m'était pas permis de laisser passer Vaccusation sans protester, J. Bédier, Réponse d M. P. Rajna, p. 2. On sait qu'aujourd'hui encore il est difficile parfois de distinguer le participe présent adjectif du gérondif: Une jeune fille a été trouvée errante. Cette hésitation trouve sa raison d'être dans le fait que le participe présent a beau être adjectif, il tient toujours de la nature du verbe. 281bis. Résumons par un seul exemple ce que nous Résumé. , , avons constate dans notre exposé: Lat. class.: Femince amantes liberos suos. Lat. vuig.: 'Femince amando Lberos suos (illarum). Vieux franc.: Femes amant leur enfanz. xiv—xvne s.: (Femes amanz leurs enfans) non populaire. (Femes amantes leurs enfans). xvii—xxe s.: Femmes aimant leurs enfants. Rem. 1. L'ilalien connait aussi l'emploi savant du participe présent avec fonction verbale: Una stanzaccia oscura con finestra avènte \ ■ non velri alle imposte ma carta, S. Pellico, Le mie prigioni, ch. 9. — De même en vieil espagnol: E.itos son. cavalleros todos es padast cinentes, El libro de Alixandre (p.p. Morel-Fatio), 1512. Rem. 2. Le participe présent prend souvent un sens passif ou autre: Mediaetatem de loco noncopante (= nommé) Pladano, P. Meyer, Recueil, 8, 15. — En francais: des couleurs voyantes, une rue passante; cf. Tobler, I, p. 46, et L. Spitzer, Aufsatze, p. 18 et suiv. Rem. 3. Cf. pour la répartition géographique de l'infinitif et du gérondif après en les cartes 503 ,,en tombant" et 367 „en courant" du Petit Atlas. PARTICIPE PRÉSENT ET GÉRONDIF. — PARTICIPE PASSÉ 231 C PARTICIPE PASSÉ 1) Observations générales 282. Le participe passé est une des formes les plus employées de la langue. En effet, il figure: af) Sans auxiliaire. b) Avec auxiliaire. 1) conjugé avec être. 2) „ „ avoir. 3) avec les verbes pronominaux. Nous devons examiner successivement ces différents cas. SANS AUXILIAIRE Employé comme 283. 1) Employé comme attribut, le participe attribut. passé, étant un adjectif, s'accorde en latin comme en frangais, en genre, en nombre et en cas, avec le substantif qu'il détermine: carmina non prius audita; une chanson chantêe d voix basse. II faut pourtant faire exception pour quelques participes, qui, placés devant le substantif, restent invariables, paree qu'ils ont fini par prendre la fonction de prépositions: excepté, attendu, hormis, passé, compris et d'autres. Souvent le participe prend un sens actif: un homme avisé, dissimulé, juré-). Et il est naturel qu'on puisse aussi 1'employer substantivement, comme c'est le cas pour les adjectifs: assiégé, blessé; revenu; allée, entrée, armee, etc. !) A. Mercier, Histoire des participes frangais (Recueil de travaux originaux ou traduits relatifs a la philol. et a Vhist. lilt., fase. X, Paris 1879). — J. Busse, Die Congruenz des Part. Praet. in activer Verbalconstruction im Altfranz. bis zum Anfang des XIII Jahrh., thèse Göttingen, 1882! — H. Wehiitz, Die Con~ruenz des Part. Praet. in act. Verbalconstr. im Franz. vom Anfang des XIII bis zum Ende des XV Jahrh., thèse Greifswald, 1888. — E. Herzog, Das -lo-Particip im altrom. (Zeitschr. f. rom. Phil., Bah. 26), 1910. — E. Lerch, Pradika'.ivc Part. für Verbalsubstantiva im Franz. (Beiheft zur Zeitschr. f. rom. Phil., 42). — L. Clédat, La question de l'accord du part. pas'.è, Paris, 1900. —. J. Bastin, Le verbe et les principaux adverbes dans la langue fr., II, S. Péïersbour?, 1896. — Tobler, I, 23, 30, 34, et II, 8. — Bourciez, Accord du part. passé (dans K. Nyrop, Philologie frang., Paris, 1916 (2e éd.)). — S. J. Eker, Sgntaxe du part. passé en ancien fr. Thèse Toulonse, 1923. 2) Tobler, I, 23, Participes passés a sens actif. 232 LE VERBE Souvent la combinaison substantif + participe nous semble un peu violente; elle est toute naturelle, quand il s'agit d'un verbe transitif: une lettre écrite; elle 1'est moins dans des cas comme: des couleurs pdlles, les livraisons parues, paree que les verbes pdtir et paraitre se conjuguent en général avec avoir. Mais 1'idée est claire et c'est tout ce qu'on a le droit de demander. Employé comme 284. 2) Employé comme pré d i c a t, le participe prédicat. passé peut se rapporter a un nom qui occupe déja une fonction dans le reste de la phrase (Participe conjoint): je l'ai vu s'enfuir honteux, battu, tremblant, ou a un nom qui ne fonctionne que comme sujet du participe; dans ce cas nous avons le participe absolu, correspondant a 1'ablatif absolu latin et qui, en général,. a un sens temporel: His rebus feliciter peractis transeamus ad alia, „ces choses achevées, passons a autre chose".—Vousvenusen Avignon, nuls ne fera fait ne partie contre vous, Froissart (dans Paris et Langlois, Chrestomathie, p. 241). Cela dit, maitre loup s'enfuit et court encore, La Fontaine, Fables, I, 5. Que cent gros canons velllent nult et jour, mèche allumée, sous nos fenêtres, Daudet, Lettres de mon mouliti, La mort du Dauphin, (indique ici la manière). Cp. aussi Mort ou vif, je l'aurai (concession). Rem. Imitile d'ajouter que le prédicat n'est pas nécessairement un participe passé: Jove ton ante: Cicerone consult); Dieu aidant Cyrano, surgissant du parterre, debout sur une chaise, les bras croisés, le feulre en bataille, la moustache hérissée, le nez terrible. Rostand, Cyrano de Bergerac, 23.- Constructions 285. On peut encore préciser le sens temporel par particuiières. 1'adjonction d'une préposition1): ante Christum natum, ab urbe condita = „avant la naissance du Christ, après la fondation de la Ville". Et en ancien francais: ainz quatre jors passés, Girard de Vienne (Clédat, p. 95). Avant ce jour fini, ces moins, ces propres mains, Laveront dans son sang la honte des Romains, Corn-, Horace, III, 6. 1) Tobler, I, 16, Prépositions désignanf un rapport de temps devant des substantifs suivis de part. prédicatifs. LE PARTICIPE PASSÉ SANS AUXILIAIRE 233 D'ailleurs le substantif seul, précédé d'une préposition, peut suffire a indiquer le temps: Qui n'avait pas prononcé un seul mot depuis Finsuite, Maupassant, XXVII, 54 (citè par Lerch). — En voici d'autres exemples: Après le livre fermé, Goncourt, Fille Elisa, 73. — Encore maintenant, malgrê les mauvais temps finis et la fortune si chèrement gagnée, tous deux étaient les prémiers levés d la ferme, Daudet, Lettres de mon moulin, 273. On trouve au fond ce même emploi prédicatif dans des phrases comme: // pensa l'avenir de sa dynastie assuré, ou comme sujet: Le pays délivré d'un si rude enne mi, Mon sceptre dans ma main par la tienne affermi Et les Maures défaits Ne sont point des exploits, Corn., Cid, IV, 3. Mon voyage dépeint Vous sera d'un plaisir extréme, La Fontaine, Fables, IX, 2. L'emploi de cette structure comme sujet semble être né sous 1'influence latine, et on comprend aisément que des soucis de style en aient répandu l'usage; la construction avec une préposition par contre se trouve a toutes les époques de la langue, et semble donc être populaire. Rem. On peut encore préciser le sens temporel. de la construction en ajoutant un adverbe de temps, comme: aussitót, sitól, une fois, a peine; au fond, ces mots fonctionnent alors comme prépositions: Soubdain les lettres de son pere leues, Rab., I, 34, 1. '.t—2. — Aussitót Vévênement connu au chateau, Mme Aubry s'êtait fait transporter dare dare chez son amie, Feuület, Roman d'un jeune homme pauvre, 2161). — 11 prenait des rèsolutions, les abandonnait aussitót prises, en arrêtait des nouvelles, Fabre, Taillement, 135. — L'eau séchait sitöt tombée, Benjamin, Gaspard, p. 9. CONJUOUÉ AVEC ÊTRE Cas de 286. Le participe passé conjugué avec être s'acnon-accord. corde naturellement avec son sujet: ils sont venus, nous avons été battus. Pourtant la vieille langue connait plusieurs cas de non-accord, surtout si le sujet suit: Benoit soit l'eure k'en mes flans fut portee, Aliseans, 2842. *) Tobler, III, aussitót, sitót, une fois. SNEYDERS DE VOGEL, Sgntaxe historique. 2me édition. 16 234 LE VERBE La fut demandé ceste duchié, Commines, I, 81 (Brunot, I, p., 478). C'est au fond le même cas que celui que nous avons traité au chapitre des verbes unipersonnels § 186, oü nous avons vu que le verbe être peut être accompagné d'un substantif a 1'accusatif; dans une phrase comme: La fut demandé ceste duchié, le verbe fut demandé a a peu prés le sens de: on demanda, comme en latin: castra introitum est. En frangais moderne il faut, sans doute, expliquer de la même facon: Etant donné les étranges principes, Bourget, Cosmopolts, p. 449, a cöté de: Etant donnés ses manières et ses gouts, Guy de Maupassant, Yvette. — L'invariabilité du participe dans les tournures unipersonnelles: // est tombé de la pluie, il est arrivé des soldats, est la conséquence directe de la syntaxe du latin vulgaire et du vieux francais. Une autre conception qui tend a amener l'invariabilité du participe est le fait que le p'assé indéfini je suis venu a remplacé je vins et peut donc présenter a 1'esprit un tout indivisible. C'est ainsi qu'on pourrait expliquer des phrases telles que: Les passages, les traiis et les citations rien étoient pas demeuré ld, La Bruyère, II, 224. Cependant, comme dans 1'exemple cité la prononciation ne distingue pas le féminin du masculin du participe demeuré, on a peut-être affaire a une simple négligence. Rem. Vaugelas, II, 281, laisse les participes allé et venu invariables, s'ils sont suivjs d'un infinitif et 1'Académie était de son avis: Ma sceur est allé visiter ma mère. II est vrai que Th. Corneille déclare que son oreille n'est pas contente dans les cas oü l'infinitif commence par une voyelle: Mes frères sont allé apprendre au juge; d'après lui, il faut dire allés apprendre. PARTICIPE CONJUQUÉ AVEC AVOIR Difficuité de 287. Cette partie de la syntaxe a 1'avantage de la question. passionner les grammairiens et de monter la tête aux savants les plus calmes. II est vrai que la bizarrerie des régies qu'on a établies explique jusqu'a un certain' point cet état des esprits. En latin, le participe passé est toujours variable et s'accorde avec le substantif qu'il détermine: Caesar urbem occupatam habet. Dans cette phrase habere n'est pas encore descendu a 1'état LE PARTICIPE PASSÉ CONJUOUÉ AVEC ÊTRE ET AVOIR 235 de verbe auxiliaire. Quand cette évolution se sera produite, la combinaison participe -f- avoir formera un tout que 1'esprit n'analyse plus; j'ai vu ayant pris a peu prés le même sens que je vis, et le rapport entre le participe et le substantif n'étant plus le même qu'aup'aravant, celui-la pourra rester invariable. — Mais les choses ne se sont pas passées si simplement; 1'évolution de la forme et 1'évolution du sens ne sont pas synchroniques; et ainsi 1'accord du participe passé avec un substantif qu'il ne détermine plus se fait toujours, mais d'une facon trés bizarre. Pour bien juger des cas oü l.'accord se fait en francais moderne, il faut commencer par éliminer tous les exemples dans lesquels le participe se termine par une voyelle, puisque pour aimé, vu, fini, etc, la prononciation ne distingue pas le féminin du masculin; seules les formes comme mis, joint, écrit peuvent décider dans la question de 1'accord. Liberté en 288. En règle générale on peut dire qu'en ancien vieux francais, frangais 1'accord pouvait se faire avec le complément, que celui-ci précédat ou non: Toz est mudez, perdude at sa valor, Alexis, 3. Mais les exemples du non-accord sont assez fréquents: En ses granz plaies des pans li at fichiét, Roland, 2173. Busse et Wehlitz ont étudié en détail la question de 1'accord pour la vieille langue. II résulte de leurs constatations que jusqu'au xme siècle 1'accord est toujours la règle, mais que pourtant une tendance se manifeste, de plus en plus prononcée, a Jaisser le participe passé invariable. Si pourtant le complément se trouve placé entre l'auxiliaire et le participe (j'ai la lettre écrite), 1'accord se fait a peu prés constamment. A partir du xme siècle il semble que, sous 1'influence des études latines, on ait senti le besoin de faire varier le participe d'une facon plus régulière; toutefois, si le complément se trouve placé après l'auxiliaire et le participe, la tendance de ne pas faire 1'accord s'accentue de plus en plus. Donnons quelques exemples: 1) De nostre prot m'at plevie sa feit, Roland, 507. 236 LE VERBE Dame, dist ele, jo ai fait si grant perte, Alexis, 148. 2) Li Emperere out sa raison fenie, Roland, 193. 3) Sire Alexis, tanz jorz t'ai desidrét Et tantes lairmes por le ton cors plorét, Alexis, 471. La sajete que Jonathas out traite, Quatre Livres des Rois, I, p. 20. 289. II règne donc dans la vieille langue une grande liberté et les poètes ne se font pas faute d'en profiter; toutes les fois qu'ils ont besoin d'une rime féminine, ils ajoutent un e féminin au participe; quand au contraire la rime est masculine, ils laissent le participe invariable. Dans les cas oü la question se réduit a une simple question d'orthographe, on se demandé souvent pourquoi ils ont plutöt choisi telle forme que telle autre. Qu'on voie p. e. le Miracle de Berthe (xive siècle): Fortune du haut de sa roe M'a bien jetté enmi la boe Et mise en dure adversité, Clédat, p. 424. Ce qui prouve que dès le moyen age on ne sent plus nettement le rapport entre le participe passé et le complément, c'est qu'on trouve même des exemples oü le participe s'accorde avec le sujet! Trestout l'anui qu'ele a eue. — Pur lui mustrer comme out parlee la pulcele, Tobler, Altfranz. Wörterbuch, p. XII. 290. Au xvie siècle la confusion continue: les Opinions des grammairiens grammairiens se contredisent les uns les autres. au xvie siècle. flj palSgrave (1530) déclare, dans ses Esclaircissements de la langue francoise, que le participe passé doit s'accorder dans tous les cas avec son complément, et Sylvius, Isagoge, est de son avis. b) Meigret, celui des grammairiens qui a le mieux observé la langue parlée, dans son Tretté de la grammere frangoeze (1550), p. 88, veut qu'on dise: Les graces que je vous ai fait. II est vrai qu'il nomme fait et aimé, des infinitifs passés. c) Enfin, Marot, d'accord avec Ramus, propose la règle actuelle: LE PARTICIPE PASSÉ CONJUQUÉ AVEC AVOIR 237 Nostre langue a ceste fagon Que le terme qui va devant Voluntiers regist le suyvant. Les vieux exemples je suyvray Pour le mieulx: car a dire vray La chanson fut bien ordonnée Qui dit: M'amour vous ai donnée Et du bateau est estonné Qui dit: M'amour vous ay donné. l/Voila la force que possède j Le féminin, quand il precède. Or prouveray par bons tesmoings Que toüs pluriers n'en font pas moins; II faut dire en termes parfaictz: Dieu en ce monde nous a faictz; Fault dire en parolles parfaictes: Dieu en ce monde les a faictes; Et ne fault point dire en effect: Dieu en ce monde les a falct, m^é Ne nous a falct pareillement, Mais nous a faictz tout rondement. L'italien, dont la faconde Passé les vulgaires du monde, Son langage a ainsi basty En disant: Dio noi a fatti, Marot, III, 32. Mais cette règle est lettre morte pour Rabelais, Montaigne, pour Marot lui-même; contestée au xvnc siècle, pas encore généralement adoptée au xvme, elle est enfin admise au xixe siècle. Mais Ie peuple, même les gens instruits, Iaissent souvent le participe invariable et la confusion que nous avons constatée dans les écrits antérieurs, se continue dans les auteurs du xvie siècle: Mignonne, allons voir si la rose Qui ce matin avoit desclose Sa robe de pour pre au soleil, A point perdu, ceste vesprée, Les plis de sa robe pourprée, Et son teint au vostre parell. 238 LE VERBE Las! voyez comme en peu d'espace, Mignonne, elle a dessus la place Las! Uts! ses beautez Iaissé cheoir. Ronsard, A Cassandre. Puis d tout son baston de croix guaigna la breche qu'avoieni faict les ennemys, Rab., I, 27. - Et Marot lui-même écrit: Grans biens il a faict, Psaumes, 43. opinions des 291 • Au XVIie siècle, on essaye d'appliquer la règle mTSS^SL dC Mar0t' mais dans les détails on hésite et on • discute longuement. Rien n'est plus apte a nous donner une idéé de ces discussions que la longue remarque de Vaugelas (I, 289) avec les critiques de Patru, Th. Corneille 1'Académie et la Grammaire de Port-Royal. Les premières phrases de Vaugelas nous montrent déja 1'état des choses: „En toute Ia grammaire francoise il n'y a rien de plus important ny de plus ignoré. Je dis de plus important a cause du fréquent usage du ^participe dans les preterits, et de plus ignoré, paree qu'une infinité de gens y manquent". L'accord se fait généralement, si le complément direct se place entre l'auxiliaire et le participe passé: La première épée Dont s'est armé Rodrigue a sa irame coupée, Corn., Cid, 798. Dieu dont nul de nos maux n'a les graces bornées, Grammaire de Port-Royal. — Mais c'est au xvne siècle une construction vieillie, et qui ne se trouve qu'en vers. Vaugelas établit plusieurs régies pour le cas oü le participe est suivi d'un autre mot. Voici celles qu'on admet généralement: Le participe reste invariable: 1) Quand le sujet suit: , Mes feux qu'ont redoublé ces propos adorables, Corn., Suiv., 913. Les premiers effets qu'a produit sa valeur, Corn., Cid, IV, 1. Les soins que m'a donne ce procés, Port-Royal. 2) Le participe est suivi d'un complément prépositionnel: Des merveltles qu'il a veu de ses deux yeux, R. Francois, Merv de Nat., 278. ttj LU'^U;Mu. jr .LE PARTICIPE PASSÉ CONJUQUÉ AVEC AVOIR rW«« «- CMsihuJrfiJ fi— J> f*-1*' /<■ »'tq- 239 ó) Le participe est suivi d'un ïnnmtif construit indirectement: C'est une fortification que j'ai appris d faire, Vaugelas, l.c. 4) Le participe est suivi d'un attribut, substantif ou adjectif: Les habitants nous ont rendu maltres de la ville. — Le commerce l'a rendu (la ville) puissante. 5) Le participe est suivi d'un infinitif: Avez vous veu la Roine? Out, je l'ay veue parler ou je l'ai veu parler (Maupas). Cause de ces 292. Toutes ces régies peuvent se réduire a une régies Mzarres. ^u\e. on tend ^ iajsser invariable Ie participe, s'il est suivi d'un autre mot. Mais ce n'est qu'une tendance, puisque ces régies souffrent de nombreuses exceptions. Elles nous apprennent en tout cas qu'une influence phonétique est venue ^nforcer la tendance générale de Ia langue qui détache le participe du complément: on sait que la consonne finale d'un mot, qui s'est maintenue a la pause jusqu'au xvne siècle environ, s'est amuïe de bonne heure devant un autre mot commencant par une consonne. Etat des choses 293. Au xvme siècle Voltaire écrit: Quelle nouvelle au xvme siècle. a.t.H apPris? Enfant prodigue, II, 6, et Regnier Desmarais (1632—1713), secrétaire perpétuel de 1'Académie pendant plus de trente ans, veut distinguer: Ces livres, je les ai rangé moi-même, et: Ces livres je les ai rangés (== je les tiens rangés): „Je sais que l'usage n'entre pas dans ces distinctions, mais elles ne laissent pas d'être fondées". — „II est également vrai que l'usage le plus ordinaire est d'accorder le participe du prétérit en genre et en nombre avec Ie complément direct qui précède le verbe, mais cet usage n'est pas si universel que le contraire n'ait jamais été suivi par de trés bons écrivains et que ce soit pécher contre la Grammaire que de laisser le participe toujours Indéclinable quand tl est conjugué avec avoir". On sait que la grammaire de Desmarais a été écrite par ordre de 1'Académie même. Etat des choses 29*' Aujourd'hui encore, les Francais eux-mêmes en francais se disputent toujours sur 'la variabilité du participe conjugué avec avoir. Si la plupart des linguistes sont d'avis — a bon droit semble-t-il — que le participe reste 240 LE VERBE actuellement toujours invariable, quand on ne se surveille pas, des savants comme Bourciez^con testent cette assertion, et pour un étranger il est difficile de prendre parti dans ces questions. II nous semble pourtant que le point de vue dé Bourciez et d'autres s'explique d'un cöté par 1'influence de 1'école et de la littérature, d'un autre cöté par 1'influence des dialectes qui, a ce qu'il parait, ont gardé encore de nombreuses traces de 1'accord1). Rem. 1. Dans les autres langues romanes, 1'état des choses est plus simple: en italien, on est libre de faire varier ou non le participe, en espagnol le participe conjugué avec haber reste toujours invariable. Rem. 2. Dans les temps surcomposés on fait varier ou non le participe, ad libitum: Aussitót que je les (= les lecons) ni eu,. ou eues finies.j 295. Le participe passé des verbes unipersonnels Le participe i r i « passé des verbes est de tout temps resté invariable, paree qu'on ne unipersonnels. gent pas de rapport entre le complément et le participe: Les fortes tempêtes qu'il a fait l'été passé, Les chaleurs qu'il y a eu sur mer. — Les cas d'accord sont rares: Les plus mauvais chemins qu'il avoit jamais faicts, Marg. d'Angoulême, Hept., Prologue. — Quand quelques faultes y eust eues, Pasquier, Recherches, VI, 15. 296. Dans la proposition infinitive se présentent Le participe r r suivi d'un les cas suivants: infinitif. a^ £fl femme qUe j>ai entendue chanter; v»*' b) La chanson que j'ai entendu chanter; c) La Belgique que César a dit former la troisième portie de la Gaule. Dans le premier exemple le participe varie, paree que que est sujet de chanter et complément d'entendre, dans le second, on a raisonné ainsi: que, étant complément de chanter, ne peut être complément du participe. Nous savons que ce raisonnement n'est pas juste et que la phrase, au fond, ne se distingue pas du premier cas (cf. § 273). Dans le troisième exemple enfin, il est clair que le relatif que n'est pas le complément de dit) le participe doit donc rester invariable. Et, en effet, on trouve p. ex.: Une personne qu'on m'a dit être connue de vous, Labiche et Delacour, i) Cf. l'Atlas linguistique, 847: Elle s'est bien mise. Je l'ai mise. LE PARTICIPE PASSÉ DES VERBES PRONOMINAUX 241 Premier prix de piatio, sc. IX. — La terre qu'ils avaient supposé être le nouveau monde, était une ile. — Pourtant on suit trés souvent 1'exemple de Ménage qui généralisait autant que'possible: Les mesures que nous avons crues devoir réussir, Ayer, Gramm. comparée de la langue frang., p. 526. Le participe fait suivi d'un infinitif reste toujours invariable! actuellement; dans la vieille langue on trouve souvent des dérogations a cette règle: En mi le vis li a faite descendre (sc. l'amure '= la pointe), Roland, 3920. La simpücité des lois les a faites souvent méconnaitre, Montesquieu. PARTICIPE DES VERBES PRONOMINAUX . 297. a) Pronominaux propres: Accord avec le ' 1 r ^, sujet ou avec De tout temps le participe s'est accorde avec le le complement. sujet; s,gst évanouie. Ce fait n'a pas besoin de beaucoup d'explication; en vieux frangais on. disait généralement: Elle est évanouie, sans le pronom se, qui, nous le savons, n'a pas la valeur d'un complément, mais sert seulement a exprimer que 1'action reste renfermée dans le sujet (cf. § 164). b) Pronominaux impropres: Ici, on sent aujourd'hui nettement le pronom comme complément du verbe. On pourrait donc s'attendre a ce que le participe prenne le même accord que celui conjugué avec avoir, comme c'est le cas actuellement. Dans Ia vieille langue pourtant le participe s'accorde toujours avec le sujet, fait qui s'explique par 1'origine de cette construction; en effet, je me suis lavé remonte a sum lavatus1). Voici quelques exemples: La langue me sul brulez, Montaiglon, Contes et Fabl., IV, p. 240. Granz coz (coups) se sont doné, Chans. d. Sax, II, 33. Je me suis pensee que plus beau mariage ne pourroit trouver, Jehan de Paris. — Ils se sont donnez la mort, Montaigne. i) cf. § 162 et suiv. 242 LE VERBE Nous nous sommes rendus tant de preuves d'amour, Corn., Mélite, V, 6, 1738. Nous nous sommes parlês trés franchement, Mme de Maint, Corr. gén., IV, 168. — lis s'étaient coupés la main, Volt., Liberté, Théocratk, XXXVI, p. 257. — Et Chabaneau, Hist. de la conjugalson frang., dit: „En Angoumois, les femmes, même instruites, disent: c'est ce que je me suis dite". Mais quoiqu'on en trouve des exemples jusqu'au xvme siècle, Ménage déj a a combattu cette construction, de même que Corneille, et elle se fait rare a la fin du xvne siècle. I Aujourd'hui, nous analysons la construction, et nous faisons accorder dans 1'orthographe le participe avec le complément direct, s'il précède; c'est donc la même construction qu'avec l'auxiliaire avoir. V. LES TEMPS1) A. OBSERVATIONS GÉNÉRALES Remarques 298. Le schéma qui se trouve aux pages 244 et 245 générales. nous monrre les différents moments du temps que 1'esprit humain se représente et la facon dont la langue les exprime. La grammaire historique n'a pas a s'occuper des éléments qui ne varient pas; c'est la philosophie du langage qui s'en occupe, tandis que la grammaire descriptive ne peut pas non plus les négliger impunément. Or, précisément dans 1'histoire des temps, il y a beaucoup de choses qui ne changent pas, qui restent les mêmes a toutes les époques de la langue, et que nous pouvons donc passer sous silence. Remarquons pourtant dans le schéma le fait que, surtout pour le passé, Ia langue a plusieurs moyens d'exprimer le même moment du temps; c'est que 1'action peut être momentanée ou d'une certaine durée, elle peut se répéter a plusieurs reprises, être isolée ou être considérée dans ses i) K, Foth, Die Verschiebung lat. Tempora in den rom. Sprachen (RomanStudiën, II, 243—536). — Gamillsclieg, Studiën zur Vorgesch. einer roman. Tempuslehre (Sitzungsber. der phil.-hist. KI. d. kais. Akad. d. Wiss., 172). Vienne 1913. — J. M. Buffin, l.c. (cf. § 301, note): LES ASPECTS DU TEMPS 243 conséguences, on peut en voir nettement le commencement et la. fin ou seulemsftè-Tun ou l'autre. Ces différentsyaspectsl la langue ne les rend en général pas par des formes spéciales_^es_yerbes, mais par des circonstanciels, des périphrases, des auxiliaires. Ainsi pour la d u r é e: a) circonstanciels: longtemps, toujours, sans cesse, sans discontinuer, continuellement; — souvent, quelquefois, ordinairement, de nouveau, fréquemmeni; — vlte, lentement, rapidement, incessamment. b) auxiliaires: aller et être, suivis du gérondif et du participe présent; — être en train de, ,être occupé d, avoir l'habitude de. c) l'imparfait, pour le passé. d) quelquefois Ia forme pronominale du verbe: se mourir; le blé se sème. Rem. Le besoin d'exprimer plus clairement 1'état a amené la chute de gésir, ester et seoir, employés avec ou sans pronom réfléchi, et remplacés par être couché, être debout, être assis. La prépajation a une action s'exprime par: je vals, je suis sur^le point de. je m'apprête d. Le d é_b ut: je commenee d, je me mets d, il se prend d; — avoir avec substantif verbal: Elle eut un mouvement. Une action approchant de sa fin: je vois finir de. Une action achevée: Je viens de. Etat. conséquence d'un fait: j'ai dit; j'aurai vu. Relevons ensuite que, pour les réritési_générales, il n'y a pas de temps. On se sert du présent: L'homme est mortel, du passé: IJ homme a toujours été mortel, ou du futur: L'homme sera toujours mortel. Enfin, on remarquera que ni pour le subjonctif ni pour le conditionnel on n'a senti le besoin d'exprimer clairement toutes les nuances du temps. B. AUXILIAIRES DE TEMPS Auxiliaires de 299. Quelques-unes des tournures citées plus haut temps. demandent a être étudiees de plus prés. Les verbes aüer et être, suivis du gérondif et du participe présent sont particulièrement fréquents en vieux francais; dans les laisses en -ant on en trouvera de nombreux exemples: 244 LE VERBE LES TEMPS 245 PASSÉ I PRÉSENT FUTUR II Passé par rapport au I 7 ~ " I Passé par rapport au Futur par raPP°rt I Passé par rapport I | passé' I ™sse simPle | futur du passé au passé || | au futur | Plus-que-parfait Imparfait I Futur antérieur du passé Futur du passé Présent Futur antérieur Futur (j'avais fait) (je faisais) (j'aurais fait) ^e ferais>> Üe fais) (j'aurai fait) (je ferai) Passé antérieur Passé défini Passé indéfini ' Futur Présent ' ^ (j'eus fait) (je fis) U'ai fait) (je ferai) (je fais) • S ) Passé défini Passé indéfini 1 (fefls) (j'ai fait) Infinitif historique (de faire) Présent historique * (je fais) te ( Plus-que-parfait Imparfait Plus-que-parfait Imparfait Présent Passé Présent |j (que j'eusse fait) (que je fisse) (que j'eusse fait) (que je fisse) (que je fasse) (que j'aie fait) (que je fasse) 1" Passé Présent Passé Présent Présent m (que j'aie fait) (que je fasse) (que j'aie fait) (que je fasse) (que je fasse) Conditionnel passé Conditionnel passé Condition. présent Conditionnel passé Condition. présent (j'aurais fait) (j'aurais fait) (je ferais) (j'aurais fait) (je ferais) _ Plus-que-parf. du Subj. Plus-que-parfait du Imparf.duSubjonct. Plus-que-parfait du Imparfait du Subj. | (j'eusse fait) Subjonctif (je fisse) Subjonctif (je fisse) •2 J (j'eusse fait) (j'eusse fait) § Plus-que-parf.de 1'Indic. Imparf.del'indicatif Imparf.del'indicatif Imparf.del'indicatif ° (j'avais fait) 0'e faisais) (je faisais) (je faisais) Inparfait de l'indicatif (je faisais) '"'imwl- • 246 LE VERBE Terre, car uevre, si me va englotant! Dame Guiborc, mar m'irez atendant; Ja en Orenge n'ier je mais repairant, Aliscans (Clédat p. 71). Le second vers est intéressant, paree qu'il montre que le verbe. aller a complètement perdu son sens propre, puisqu'il s'emploie même avec des verbes qui expriment le repos. De même dans: Uvrez, fait saint Thomas quis ala atendant „qui les attendait", S. Thomas de Cantorbéry (Clédat, p. 17). Car chevatchiez! Pur qu'alez arestant? „pourquoi vous arrêtez-vous", Roland, 1783. Ne va disant: ma main a faict cet oeuvre, Les Quatrains de Pybrac, V. Aujourd'hui la périphrase avec être ne se trouve plus guère, et celle avec aller s'est restreinte aux cas oü 1'on sent 1'idée de mouvement au propre ou au figuré: Lm rivière va en serpentant, la somme va en diminuant. La vieille langue connaissait encore le verbe soidoir^_ „avoir 1'habitude de", aujourd'hui tombé en désuétude, et elle s'en servait quelquefois la oü nous nous contenterions du verbe simple: Ja'st (o RolUtnz, qui tant vos soelt amer, Roland, 2001 (Clédat, p. 27). Cf. en espagnol: Solia ser de los buenos e los grandes d'Espanna, Zauner, Span. Elementarbuch, 2, 48, oü solta ser = era. La même idéé est exprimée parfois par vouloir1): La se voldront pelerin adrechler, Par la iront Rochemadoul poier, Moniage Guillaume, 6560. > Or, Mesdames, je vous prie que les hommes, qui nous veulent peindre tant inconstdntes, viennent maintenant ici et me montrent un aussi bon mari comme cette-ci fut bonne femme, Marg. d'Angoulême, Hept., XXI. Pour rendre 1'idée de „être sur le point de", la langue dispose de plusieurs verbes: J'ai failH attendre, il pensa mourir et dans la vieille langue devoir: *) Cf. A. Schwabe, Vouloir -f- inf. als Umschreibung des Verbs und im Sinne von „pflegen", Diss. Göttingen, 1915. AUXILIAIRES DE TEMPS 247 Qui tant me plot et abeli Que je m'an dui por jos tenir, Chrétien, Chev. au lion, 476 (Clédat, p. 146). Si com il dut sur son cheval monter Li cuers li fait, Aliscans (Clédat, p. 78). Tiecelins saut toz esmaiés, Qui dut estre mal paiés, Renard (Clédat, p. 171). Venir de, qui exprime un passé récent, se trouve dès le xne siècle: Bien resemble hom ki venist d'ostoier, Aliscans, 2289- En frangais moderne on emploie aussi sortir de pour rendre la même idee; et ne faire que de, expression qui d'ailleurs se rencontre dés le xvie siècle: Comment ne faites vous que d'arriver? Amyot. Rem. 1. On sait que devoir, suivi de l'infinitif, peut exprimer le futur, cf. § 316, et qu'il est aussi auxiliaire de mode, cf. § 204bis et" 206. Pour les auxiliaires de temps qui expriment le futur, voir § 314 et suiv.; pour ceux qui expriment le passé, § 305 et suiv. Rem. 2. Le hollandais connait aussi le passage de 1'idée de volonté a celle d'habitude: Hij wil wel eens ondeugend zijn. — L'adverbe volontiers exprime quelquefois la même idéé: Volontiers les constans qut n'oni qu'une maistresse, S'ils ont beaucoup de fog, n'ont que fort peu d'adresse, J. de Mairet, Les galanteries du duc d'Ossone, IV, 2. Volontiers on fait cas d'une terre étrangère, Volontiers gens boiteux haïssent le logis, La Font, Fables, X, 3. La phrase des rois Gargantua et Pantagruel est volontiers longue et majestueuse, Villey, Marot et Rabelais, p. 322. C. PRÉSENT Le présent pour ^uu* Notre schéma nous montre qu'on se sert ie passé et le souvent du p r é se n t pour le futur et pour le passé. *" r' . '■/ Le latin aussi bien que le frangais se sert du présent au lieu du passé pour rendre le récit plus vif. En latin et surtout en vieux frangais il régnait une grande liberté, de sorte qu'on mêlait a chaque instant des présents a des passés: 248 LE VERBE Et pluet menuement el gresilie et venta, Berthe aux grands pieds (Clédat, p. 58). Au xvne siècle la liberté devient moins grande, quoique Pascal et Vaugelas en présentent encore de nombreux exemples; on trouve même exceptionnellement le présent après comme si: Comme si cette bassesse est du même ordre, Pascal, Pensees, II, 23. —PëTnploi du présent pour Je futur est rare en latin classique, mais s'étend en latin vulgaire: Tuemini castra, ego reliquas portas circumeo, César, De belt. galt., fïï, 94, 5. — Si fideliter petitis, dominus velociter adest, Grég. de Tours. — Cet usage se continue en frangais: Trencherai li la teste a ma spee forbie; II et li doze per sont livrét a martlrie, Pèlerinage, 698 et suiv. Ce ne sera point vous que je leur sacrifie, Mol, Fem. Sav., V, 5. Aujourd'hui on sait que le présent peut indiquer un futur trés proche: Je pars demain d huit heures. D. TEMPS PASSÉS 1) a) Formes qui remontent au latin classique L'imparfait en 301. L'lmperfectum a en latin le même latin. emploi que l'imparfait frangais: il présente 1'action comme une ligne ou comme une série-de points: Turn cum Sicilia florebat opibus et copiis, magna artificia erant in insula (état)^-—' Ut Romae consules, sic Carthagine quolannis bini reges creabantur (répétition). i) Th. Kalepky, Zur franz. Syntax (Zeitschrift für rom. Phüologie, XVIII, p. 498 et suiv.); Der Unterschied zwischen Imparfait u. Passé défini itnd seine schulmassige Behandlung, Berlin 1904. — W. Mueller, Beitr. zur Gesch. des Imperfektum Indicativ im Altfranz., Diss. Heidelberg, 1904. - P. Schaechtelin, Das Passé défini und Imparfait im Altfranz. (Beih. zur Zeitschr. f. rom. Phil.. 30). — J. Schoen, Perf. historicum und Perf. praesens im Franz. von seinen Anfangen bis 1700 (Beitr. zur Gesch. der roman. Sprachen und Litteraturen, IV) — G. G. Laubscher, Past tenses in French., Diss. 1909. — L. Foulet, La disparition du prétérit, (Romania, 1920, p. 271-313); Petite syntaxe de landen francais, p. 158 et suiv. — J. M Buffin, Remarques sur les expressions de la durée et du temps en fr. Thèse Leiden, 1925. - H. Yvon, L'imparfait de l'indicatif en fr. (Etudes franc., 9e cah., 1926). — Cf. aussi les notes des §§ 311-312. • LE PRÉSENT ET LES TEMPS PASSÉS 249 Riem. L'infinitivus descriptious remplace quelquefois l'imparfait: Nihil Seqtiani respondere sed in eadem tristitia permanere, Caesar, De beflo gallico, 1, 32. , , fc 302. Le Perfectum a en latin classique deux i Le perfectum en latin a sens: deux sens. j ^ perfecturn h i s' t o r i c u m: Veni, vidi, vici (faits successifs). — Magister laudavit diligentiam discipuloram (action isolée). .-^,.>^*?>«fct :^'a_.t^|^'v'.ojniju.Jt^Lj, 2) Perfectum praesens, qui équivaut au perfectum grec et qui est donc, au fond, un temjDS_jDrésejuL puisqu'on n'a dans 1'esprit que les conséquences d'un fait: Deus nunc mundum procreavit ,,a créé, est le créateur de ce monde". — Memini, odi, novi, actum est, perii; fuimus Troes, „nous avons été, c.-a-d. nous ne sommes plus, c'en est fait de nous", Virgile, Enéide, II, 325. La même idee est rendue quelquefois en latin par le participe passé avec habeo: Urbem captam habeo, cognitum habeo, mih,i persuasum habeo, qui sont, je le répète, des temps présents. Rem. On trouve dans toute la latinilédes^pnrases, surtout relatives, oü un plus-que-parfait a le sens,-^Tun parfait: Fugitivos ille, ut dixeram, Auius patri vendidit;~~Pl&\il., Captivi, 17. — Iccius Remus .. . qui turn oppido praefuerat . nuntium ad eum mittit, Caes., De bello gall., II, 6,,jir^- Reingressi ■ sumus via, qua veneramus, inter montes illos, quos superius dixeram, Peregrinatio, 5, 10. — Löfstedt explique "■""cet emploi ainsi: on n'a pas voulu employer pour 1'action secondaire, oontenue dans la subordonnée, le même temps que celui de la principale; on a donc choisi le plus-que-parfait pour la mettre a 1'arrièreplan. Cf. pour le vieux francais § 304, Rem. 2a. 303. En latin postclassique relevons seulement que les auteurs font un emploi trés libre du praesens historieum, surtout Grégoire de Tours, emploi que nous allons retrouver en vieux francais. Puis le parfait composé (captum habeo) s'étend de plus en plus, comme nous Ie verrons plus loin. L'imparfait en 304. Du ixe au xne siècle l'imparfait est assez rare vieux francais. dans 'es textes. On en trouve dans les 500 premiers vers du Roland seulement trois exemples: Chascuns portout une branche d'olive. Meillor vassal n'aveit en la cort nul (a cöté de: Meillor vassal n'ot en la cort de lui). SNEYDERS DE VOGEL, Syntaxe historique. 2me édition. 17 250 LE VERBE Hier main sedeit l'emperere suz l'umbre, Roland, 203, 231, 383. Quand on veut exprimer la simultanéité dans les descriptions on se sert ordinairement du passé défini: Li reis MarsiÜes en fut molt esfreez Un algier tint ki d'or fut empenez, Roland, 438-39. Li cuens Rollanz se jut (= était couché) desuz un pin, Ibid., 2375. A partir du xii» siècle l'imparfait fait des progrès visibles notamment dans Chrétien de Troyes: Devant aus toz chacoit tl rois Sor un chaceor espanois, Erec, 123—124. Depuis, l'imparfait va de plus en plus prendre le röle de temps descriptifdans Ipru^é- En ce point que li roys estoit en Acre^ et jouoit li cuens de Poitiers si courioisement que . Joinville Au xive siècle de pareilles phrases deviennent tout a fait communes et dans certains passages de Froissart (1337—± 1404) lopposihon entre l'imparfait et le parfait est aussi sensible que dans la langue moderne: Si ne peurent gaigner le pont, car il estoit bien garni, et fu bien deffendu. Cependant on frouve encore au xvi* siècle des exemples de ancienne syntaxe, oü le passé défini jouait dans la description le role qui a depuis été réservé exclusivement a l'imparfait: // sembloit d le voir d'un fleuri renouveau, 11 eut la taille belle et le visage beau, Son teint étoit de lis, Desportes (dans Malh., IV, 387). Rem. Quelquefois l'imparfait équivaut presque a un présent: O filz, cui ierent mes granz hereditez, Mes larges terres, dont jo aveie assez? Alexis 400, fait qu'on retrouve dans Molière et dans la langue actuelle et que tais 7L,V ™ argentam /ra&eo- Vellebam cum tms legaüs puerum dmgere, ut melius Constantinopole argentum mercaret, Frédegaire, 96, 17, et pour le francais moderne: Je vouUte vous demander. - Je venais vous prier. De même en espagnol: YcTul esto vos gane, bien merecfa calcas, Cid 190. LES TEMPS PASSÉS 251 Le passé défini 304 's- L'emploi du passé défini est dans la er£SS/idlIe 'angUe Plus étendu qu'en .francais moderne et on s'en sert fréquemment la oü de nos jours on mettrait l'imparfait. Meyer,Lflbke voit dans ce fait un phénomene qui a rapport au sf^pmlot qu'a la syntaxe: l'homme du moyen-age voit des actions oü nous verrions une peinture un j tableau. Si pourtant l'imparfait a regagné bien vite le terrain perdu il semble que la raison s'en trouve dans la nature hybride du rwfait. En effet, ce temps gardait en vieux francais les différentes fonctions qu'il avait en latin; en prenant par-dessus le marché les emplois de l'imparfait, son domaine était devenu trop vaste et son sens trop peu précis, pour qu'il ait pu se défendre contre . 1 athjsue qui lui venait de deux cötés, d'une part de l'imparfait d aulre part du passé indéfini, comme nous allons ÏTvoir tout a f heure (Cf. § 310 eTsuWT). Puis, comme 1'a trés bien vu M £ouIet la forme du passé defini constitue, elle aussi, une faiblesse tn effet, IT^ssé défini a souvent un autre radical que les ' autres temps du verbe, p. ex.: je fis, je vins. Et les terminaisons personnelles s'écartent aussi du type usuel. Si encore on avait ■toujours le même paradigme. Mais il s'en faut de beaucoup1) Je chantai, ils chantèrent; 2) je finis; 3) je voulus. Le peuple a vou u régulariser ces formes en disant: je chanta, ils ehantarent (Monluc), et surtout en généralisant la terminaison -i (j'aimi) mais c'était trop tard, et d'ailleurs les grammairiens, Meigret e a ont combattu de toutes leurs forces cette tentative, sans se douter que par la ils hataient la disparition du temps. ■ R.6m. l. La disparition du parfait grec devant 1'aoriste s'exphaue de la même facon: SeSoóXeoxa a disparu, êSoóX^a est resté. Rem. 2. Relevons encore quelques particularités du vieux francais: a) Le passé dans la toute vieille langue pouvait être marqué par la forme du plus-que-parfait latin: Buona pulcella fut Eulalia, bel avret A^yt^ps -- Voldrent la faire diaule servir, Eulalie. - Nous avons déja reteve cet emploi curieux en latin classique: cf. § 302. b) De même on trouve le passé antérieur ou le plus-que-parfait, francais a la place du passé simple: p ' Quant l'ot li patriarches, si s'en vait conreder; Et out mandét ses clers en albes atirez, Pèlerinage, 142 (Clédat, p. 38). Cele ala a Vescrin, si Z'avoit defermé (1'ouvrit), Orson de Beauvais, 595. 252 LE VERBE Cette conslruction est fréquente dans La Vie de saint Thomas, cf. * 1'édition Walberg, introd., CLXI et suiv. c) Le contraire, le passé simple remplacant le passé antérieur ou le plus-que-parfait, s'est maintenu longtemps dans la langue: Dis Manches mules fist amener Marsilies Que li tramist (= avait envoyées) li reis de Suatilie, Roland, 89—90. b. Nouvelles formations1) 305. La langue a perdu plusieurs temps du passé. Si le perfectum s'est maintenu, toutes les formes qui en dérivent: amaverim, amavisse, amaveram, amavissem (avec son sens primitif), amavero, ne se trouvent plus en francais et ont été remplacées par de nouvelles formations. II en est de même du futur, et le frangais connait même un futur dans le passé, temps qui était inconnu au latin. Nous devons donc traiter: 1) L'originë des formes analytiques du passé: j'ai chanté, j'avais chanté, etc; je suis venu, j'étais venu, etc. 2) L'originë du futur et du futur du passé: je chanterai, je chanterais (Cf. § 314 et suiv.) „„. „„ „.,„„ 306. Comme on le voit, le francais a deux n a D c r c aVcC un participe auxiliaires de temps fiattere et esse. Parions passé- d'abord de habere. 4jm&$ Comme nous 1'avons vu au § 302, le iafin classique connait deja la combinaison habere__+ part. parf. p a s s i v i, mais elle exprimait toujours un état, ce qui est assez naturel, paree que le participe était originairement un adjectif qui n'était pas incorporé dans la conjugaison du verbe et qui n'exprimait pas du tout le passé; habeo avec le participe était donc une des tournures dont le latin se servait pour rendre 1'idée durative. Seulement comme cet état était évidemment la conséquence d'une action 1) Thielmann, Habere mit dem Part. perf. pass. (Archiv für die lat. Lexikographie, II). — Cf. aussi Foth, Die Verschiebung lat. Tempora in den rom. Sprachen (Rom. Studiën, II, 1876). — F. Hofman, Avoir und estre in den umschreibenden Zeiten des altfr. inlransitiven Zeitworls. Thèse Berlin 1890. — P. Horluc, L'emploi de l'auxiliaire être en fr. dans la conjugaison du verbe ou de l'auxiliaire être (Reu. de philol. fr. 1907, 257—276). — E. Herzog, Das -to-Part. im altrom. (Zeitschr. f. rom. Phil. 1910, Beih. 26). LES FORMES PÉRIPHRASTIQUES DU PASSÉ 253 I Précédente, 1'idée de temps s'y est ajoutée peu a peu: et habeo cognitum, habebam cogn'i'tü7n' onT"fini par exprimer ! la même chose que cognovi, cogrrc^^eYam, „j'ai appris, j'avais appris"; 1'idée durative s^efface et 1'action se rapporte a un moment précis du temps. Dans dotnum emptam habeo 1'évolution a eu lieu plus lentement, puisqu'ici le sujet_de h a b e r e et celui de emere ne sont pas néeessairement identiques. De même promissum ha beo ^» Mgnifie: „j'ai la promesse d'un autre". Mais plus le sens propre ^/du verbe habere s'efface. plus le sen|7^^aT~du participe* ~% s^aceentug. et plus la construction se rapproche de la signification du parfait et/domum emptamyïiabeo et promissum habeo passent a: j ai acheté la maison et fat prontis, oü il y a néeessairement un seul et même sujet. D'ailleurs, en latin classique on trouve déja des exemples oü la différence entre le sens primitif et celui du perfectum, entre emptum habeo etemi, ne se sent presque pas: In alas divisum socialem exercitum habebat, Liv., XXXI, 21, 7, „il tenait (avait) réparties sur les flancs les troupes des alliés"; 1'accusatif In alas au lieu de in alis prouve que 1'idée d'action prédomine. Une nouvelle étape trés importante sera franchie, quand 1'auxiliajre habere sera employé avec des verbes jiertresT'cérfe construction ne se trouve pourtant pas en latin: Trop i avem dormit, Sponsus, 35, au xie siècle. esse avec un 307. A cöté de habere, qui s'affaiblit et passé a participe passé. i»état d'auxiliaire de temps. on a esse avec le même sens. En effet, esse exprime lui aussi un étaL- actu m est, „c'est fini", c.-a-d. le résultat d'une action tout comme habere. On 1'employait en latin, non seulement comme passé du passif, mais aussi comme passé des verbes neutres en -r (§ 167): levatus est, „il s'est levé," r'uptum est, „11 s'est cassé.", Relevons surtout les déponents iratus sum, „je suis irrité," natus sum, „je suis né/' mortuus sum, „je suis mort," obitusest, „il est décédé", en latin vulgaire; partitus sum, „je suis parti" (avec changement de sens). II est donc naturel qu'on ait pris l'auxiliaire esse pour rendre le passé de plusieurs • verbes neutres, venutus sum, „je suis venu" (sur le modèle de profectus, egressus, progressus 254 LE VERBE sum), ambulatus sum, „je suis allé", evanutus sum, „je (me) suis évanoui", pour veni, ambulavi, evanui. . II parait que c'est 1'analogie qui a décidé du choix de l'auxiliaire, quoiqu'il soit impossible d'indiquer, dans chaque cas particulier, pourquoi on a préféré telle ou telle construction. La langue, d'ailleurs, a souvent varié et aujourd'hui encore il y a plusieurs ' verbes neutres qui tantöt se conjuguent avec avoir, tan tót avec être. ' "^Sspagnöl et lë roumain sont plus simples: ils se ser vent; aujourd'hui de l'auxiliaire haber et a avea pour former les formes périphrastiques du passé de tous les verbes, neutres aussi bien qu'objectifs: he venido „je suis venu", au lesit, „ils sont sortis". Et il n'en est pas autrement du francais populaire, qui lui aussi - se sert de avoir comme auxiliaire de tous les verbes, a rexception du verbe être, qui, a 1'encontre de la langue générale, se conjugué avec lui-même: J'ai resté dix ans dans la rue d' la Galté, Benjamin, Gaspard, p. 11. — Ou elle a mouru, G. Sand, Jeanne, p. 126. — C'est paree que je l'veux bien que j'y suis pas t'été, Barbusse, Le Feu, p. 10. — Ajoutons que c'est surtout dans 1'Est que. avoir s'est généralisé. ^^Un auxiliaire de mode suivi d'un infinitif peut prendre en italien l'auxiliaire qu'exigerait le verbe principal; cette construction se rencontre aussi en moyen frangais: De vers vous suys voulu venir, Gring-, Vie S. Louis, II, p. 107. Ils le mirent en che mise devant qu'il fust aóhevé de mourir, Palissy, Verltable Recepte, p. 128. Rem. 1. le suis été se trouve au xvie siècle; M. Horluc y voit un bourguignonnisme. — Une construction curieuse se rencontre en ancien pro ven cal: es agut au sens de es estat; on la retrouve dans le Nord de lTtalie et, rarement, en provencal moderne. Cf. Arnaud et Morin, Le langage de la vallée de Barcelonnette, p. XIV, et les cartes 521 et 522 de l'Atlas ling. Cf. Rom., LI, p. 237. On pourrait comparer le passé indéfini de a (= il y a) dans 1'exemple suivant: Daniël en s'esriptnre Dit qu'en ma mesdoenture West aïdeur que toi eü. G. de 'Digulleville, Pèl. de l'dme, 972. Rem. 2. Pour 1'auxiliaire des verbes pronominaux, cf. §§ 167 et suiv. R e m. 3. Le sens primitif de emptum habeo est rendu en espagnol par tengo comprado. II arrivé pourtant, par une évolution analogue -a celle de habere, que le verbe tener passé a 1'état d'auxiliaire: Cuantas noches me tengo levaniada para mirar el cielo, „combien de units me suis-je levée pour regarder le ciel?'! Valdês, La hermana S. Sulpicio, XVI. — Cette nouvelle évolution est achevée en portu^ais. ' LES FORMES PÉRIPHRASTIQUES DU PASSÉ 255 Rem. 4. En catalan, et sporadiquement en provencal, aller suivi dun mfmitif, sert a exprimer le passé: Y me vaig sentir mes fort. ï ta vas ser mes hermosa, „Et je me suis senti plus fort, et toi tu es été plus belle", J. Pons, Paraules d'amor, 8 et 10. Cf aussiEt^combien que je fusse tout estourdi da traoail, je me vay adviser (— je m'avisai) que dans mon esmail il y avoit trop peu de la matière, Palissy, Discours, 210. Enumération 3®&. Ces nouvelles formes périphrastiques prod%onrmese"eS 'du verbe habere ou esse avec un participe vont remplir plusieurs fonctions qui coïncident pour une bonne partie avec celles remplies par des formes synthétiques existantes. Elles entrent en lutte avec ces formes et les^UD^jantent presque toutes, maisji des époques différentes: 1) cantavi et habeo cantatum. Les deux formes ont subsisté longtemps et existent encore k 1'heure qu'il est. Nous devons en étudier 1'histoire. 2) cantaverim remplacé par habeam cantatum dès J'apparition des plus anciens textes francais. 3) can tav is se et habere cantatum. Même observation. 4) cantavero et habere habeo cantatum. Même'observation. 5) cantaveram et habebam cantatum, habui cantiatum. II n'y a que quelques traces du plus-que-parfait synthétique en vieux-fnangais; cf. 304, Rem. 2. hitdAiJr vj^^ant assem et habuitfsem cantatum. Le plus-queLptr^du subjonctif can tas se m a supplanté l'imparfait can^tarfem. Pourtant il garde, dans la vieille langue, son ancienne valeur k cöté de la nouvelle; aujourd'hui la forme analytique lui a complètement enlevé sa fonction primitive. Puis la langue a créé quelques formes"que la langue classique ne rendait pas: * 1) habens cantatum = ayant chanté. 2) habere habebam cantatum = j'aurais chanté. 3) j'ai eu chanté, construcfion qui est de formation francaise. Rem. IDe plus-que-parfait latin a subsisté en provencal, en espagnol, en portugais et dans le sud de 1'Italie avec la valeur d'un conditionnel; en espagnol il garde encore son sens primitif: Mur de Guadalajara un lunes madrugara (s'était levé de bonne heure), Zauner, Altspanisches Elementarbuch, p. 150. 256 LE VERBE Les formes 309. Les formes composées du passé périphrastiques (passé indéfini, plus-que-parfait, passé antérieur, forment une „, ,/.^^ j -j. j-a unité incompiète futur antérieur), formes dont nous avons . etudie en vieux francais. 1'origine et le développement en latin classique et en latin vulgaire, sont constituées en vieux frangais. Le verbe avoir a presque complètement perdu le sens primitif de „posséder" „tenir", de sorte qu'on a pu dire par exemple: Pechiez me Va tolut, Alexis, 22 c1). Pourtant si le sens de possession a disparu, celui de temps se fait toujours sentir dans la vieille langue, j'ai fait gardant d'abord son sens primitif de perfectum praesens. Pour que cette forme j'ai fait soit vraiment une, il faudrait que le sens devienne le même que celui de je fis, puis que la forme aussi devienne invariable, comme je ferai < je faire ai. On n'en est 'pas encore arrivé la; mais on a franchi différentes étapes qui rapprochent de ce but. Parions d'abord de la forme: a) En vieux frangais la place du participe par rapport a l'auxiliaire est beaucoup plus libre qu'actuellement; on trouve: auxiliaire — participe — complément auxiliaire — complément — participe complément — auxiliaire — participe participe — auxiliaire — complément, et d'autres constructions: le sujet ou d'autres membres de la phrase pouvant séparer le participe de l'auxiliaire. Pourtant dès 1'époque la plus reculée la tendance se manifeste a placer le participe a la fin,' et l'auxiliaire, étant atone, tend a se placer devant le participe. A la fin du xvri_siècle nous constatons presque exclusivement la position auxiliaire-participe. Puis, l'auxiliaire et le participe ne sont plus séparés a cette époque que par quelques adverbes, les mêmes qui, dans la langue actuelle aussi, peuvent se mettre entre auxiliaire et participe. L'union est donc devenue plus intime, sans,que pourtant les deux mots en soient arrivés a former un tout inséparable. D'ailleurs, il faut bien remarquer que la séparation de deux formes n'amène pas nécessairement une rupture de 1'unité d'idée,/a preuve la négation ne... pas. i) Déja en Plaute: illa omnia missa habeo quae ante agere occepi,. Pseud., 602. LES FORMES PÉRIPHRASTIQUES DU PASSÉ 257 b) Un autre fait qui nous démontre que le groupe ne constitue pas encore une forme verbale unique, est celui-ci: On n'a pas besoin de répéter l'auxiliaire, même s'il devait se trouver a une autre forme: Ainz que m'amie.... Aiez baisié n'ele vos acolé, Enfances Ogier, 2778. Avoir peut même manquer, quand un participe conjugué avec être précédé: Se sont privez de ta gloire de leurs bien-faictz, et nous du fruict de l'imitation d'iceux, Du Bellay, Deff. (Darm., p. 201). — Pourquoi ainsi soubdainement estoit party de son repos, et envahy les terres, Rab., I, 28, N'y sont-/7s pas montés et fait de mêmes mains Des régies auxUroupeaux et des lois aux humains? Rotrou, Saint Genest, I, 3. Et encore aujourd'hui: lis se fussent êpargné bien des mêcomptes, et, a nous, bien des erreurs, Wilmotte, Le Frangais d la tête épiqué, p. 12. c) Enfin, tant que le participe s'accorde encore avec le complément, l'unité_des .deuxJEormes n'est pas encore compléte. Or, on ne saurait douter que 1'évolution régulière et naturelle de la langue ne soit de laisser le participe invariable dans tous les cas. En effet, on constate dès 1'époque la plus ancienne une tendance a ne pas faire 1'accord: En ses granz plaies les pans li at leiét, Roland, 2173. Fortune du haut de sa roe M'a bien jetté enmi la boe Et mise en dure adversité, Miracle de Berthe (Clédat, p. 424). Mais on rencontre aussi des exemples — et ils sont trés nombreux — oü 1'accord se fait en vieux frangais avec le complément direct qui suit; et aujourd'hui même 1'union entre particjpe et auxiliaire n'est pas encore tout a fait compléte. 11 y a encore des cas oü la grammaire prescrit 1'accord, quoique le peuple — et même des gens instruits — ne la suive pas, heureuse'ment, paree que ces régies vont contre le génie de la langue. Pour 1'accord du participe passé, voir § 287 et suiv. 258 LE VERBE a • a's- i 310. Quant au sens, nous avons vu que le passé Le passé indéfini ' n —>■;■■"» marqué un état, indéfinLindiquait d'abord le résultat d'une action: puis une action. habeo cognitum, „j'ai appris, je sais"., Ce sens, il 1'a gardé a travers les siècles, dans la vieille langue, aussi bien qu'en francais moderne: Co dist li pedre: Chiers filz, cum t'ai perdut! Respont la medre: Lasse qu'est devenuz! Alexis, 106 et suiv. II est évident que le père et la mère pensent plutöt au présent qu'au passé. On retrouve le même sens parfois dans les autres formes composées: Quant il dut en la roe chaïr, le chief devant, Li molniers out mulu; mist la closture atant, Garnier^S. Thomas, 223—4. Le parfait, qui avait la même fonction en latin classique, s'emploie encore quoique plus rarement comme telen vieux frangais: Or, slre, la bonne Laurence, Votre belle ante, mourut-elle? Pathelin, 158. Si, donc, d'un cöté le parfait n'a pas encore perdu complètement le sens du perfectum praesens, d'un autre cöté Ja^forme analytique s'étend au détriment du passé défini en prenant peu a peu aussi le ►sens dn parfait histor-iqua On le voit souvent mêlé a des parfaits et a des présents historiques: Quant ot fait sa proiére, son mantel escourca, A Dieu s'est commandée, aval le bois s'en va, Berthe aux grands pieds (Clédat, p. 59). Et puis en sont au conté revenu Si li crient.... Moniage Guillaume. La présence de l'adverbe puis prouve que le passé indéfini a ici le sens du parfait historique. Pourtant Tanden frangais ne s'en sert pas encore avec toutes les fonctions du passé défini, on peut dire que, même au xvne1 siècle, j'ai fait n'est pas encore complètement l'équivalent de je fis; les auteurs semblent même préférer le passé défini; comparez les beaux vers de Racine: Ariane, ma sceur, de quel amour blessée, Vous mourütes aux bords oü vous fütes Iaissée/ Phèdre, I, 3. passé défini; présent, imparfait et passé indéfini 259 Henri Estienne, dans sa Preceüence du langage frangols (1572) et dans ses Hypomneses (1582), disait qu'on ne pouvait se servir du passé défini que lorsqu'un espace d'une nuit se trouvait entre le moment oü 1'on parlait et le moment oü finit 1'action exprimée. Oudin1) déclarait qu'il fallait dire: J'ay veu aujourd'huy, mais: Hier je vis Monsieur; il est donc plus catégorique qu'Estienne qui admet Pierre est venu d moi hier a cöté de Pierre vint d moi hier. C'est en vertu de cette règle que 1'Académie désapprouva ces vers du Cid, II, 1: Je l'avoue entre nous, quand je lui fis l'affront, J'eus le sang un peu chaud et le bras un peu prompt. Comme il ne s'était point passé une nuit entre les deux temps, il fallait dire d'après 1'Académie: quand je lui ai fait l'affront! Le passé défini 311. Depuis des siècles le passé défini est donc recuie devant €n recul. L'imparfait lui a renris tout le domaine Ie présent, . ■ 1 -. , .« r " ■■ w' l'imparfait et le qui lui appartenait en nropr^ et même par un effet passé indéfini. «je style trés naturel, mais pourtant difficile a saisir pour les étrangers, on peut trouver aujourd'hui l'imparfait la oü 1'on s'attendrait au passé défini. n Si donc "dans le style littéraire^1'imparfait lui fait concurrence, dans la langue parlée on ne s'en sert même plus du tout, du moins a Paris. Les cartes 96, 338, 360, 976, 1154 de l'Atlas linguistique nous prouvent que le passé défini a disparu; au sud, il faut aller jusqu'aux départements de 1'AUier, de la Creuse et de la Vienne pour commencer a en trouver quelqües-uns sur les cartes; a 1'Ouest, la limite est plus proche: le passé défini existe encore en Normandie; de la vient peut-être que Guy de Maupassant a beaucoup employé cette forme grammaticale2). Dans la langue parlée le présent et le passé indéfini rempi'aeent presque toujours le passé défini. Même la oü la forme synthétique subsisté, la forme composée semble faire une concurrence sérieuse au passé simple. M. Meillet, quoique né dans 1'Allier, déclare: „La forme du passé défini m'apparait comme barbare ou pédante et je ne puis 1'entendre dans la conversation ou Ie lire dans une l) Grammaire francoise, Rou en, 1645, p. 188. *) German. Roman. Monatschrift, I, 522. 260 LE VERBE lettre familière sans en être vivement choqué. On ne 1'entend que chez des personnes originaires des parties de la France oü le passé défini subsisté ou chez des personnes qui ont trop subi Tinfluence de la langue écrite". Les frères Rosny, qui écrivent k la fin de leur Daniël Valgraive: II se dissolva dans les ténèbres prouvent pourtant a quelles bévues les écrivains s'exposent]). 312. C'est donc — après le présent — le passé indéfini qui est devenu la forme la plus employée de la langue parlée et qui, même dans la langue écrite, est nécessaire: 1) si les conséquences de 1'action se font encore sentir: J'ai oublié mon parapluie; 2) si on parle d'un temps qui n'est pas encore entièrement écoulé: Je Val vu deux fois cette semaine. C'est que dans ce cas on se place surtout au moment qui suit 1'action. Le passé indéfini transporte 1'esprit du présent au passé, lie intimement entre eux ces deux temps, mais ce qui importe seulement, c'est le moment présent. C'est la peut-être aussi une des raisons pour lesquelles cette forme verbale est devenue si populaire. Ce qui nous intéresse après tout ie plus, c'est le présent, et on ne pense au passé que comme expli'cation du présent: // a appris beaucoup de choses. — J'ai oublié mpn parapluie. — Ce vaurien m'a volé. On comprend donc que dans le langage familier, oü 1'on est le plus naturel et oü 1'on ne fait pas d'effort pour se détacher du présent, on se serve presque exclusivement du passé indéfini. Mais si 1'on fait du style, la succession de ces formes composées pourrait être fatigante et on a volontiers recours au^ passé défini. Somme toute, le développement de nos formes a partir du xvie et du xvne siècle n'est pas important et consiste surtout dans la restriction du passé défini au profit de l'imparfait dans la langue littéraire, au profit du passé indéfini et du présent dans la langue familière. M. Brunot2) dit: „Les temps conservent a peu prés la valeur qu'ils avaient au xvie siècle, les théoriciens démêlent seulement un peu mieux l'emploi de chacun d'eux. Ce n'est pas la langue qui change, c'est surtout la grammaire qui se perfectionne". La disparition pourtant du passé défini (et de Timparfait du 1) Ibidem, p. 522. 2) III, p. 581. PLUS-QUE-PARFAIT ET PASSÉ ANTÉRIEUR 261 subjonctif) semble pourtant prouver que la tendance du verbe va dans la même direction que le substantif, c. a. d. de se décharger du système grammatical et de se réduire a une forme unique, qui aura son sens spécial par Tadjonction d'autres mots. Que, toutefois, la langue atteigne jamais ce degré de simplification, il est permis d'en douter. Cf. Gilliéron, La failüte de l'étymologie phonétique. Hem. 1. H. Estienne avait déja parlé de la dislinctiou du passé défini et indéfini dans son Traictè de la Con/ormité du langage francois avec le grec, mais il avoue „qu'il y avoit un secret cachéj soubs cet amicte, quant a son nayf usage, dont lui-mesme n'estoit point jusqu'a présent bien résolu". Et un savant qui a fait une étude approfondie de nos temps déclare: La materia de' Preteriti è assai difficile ed intrigata1). Rem. 2. Au xvle siècle Palsgrave (1530), Duboig (1531), Meigret (1550) se sont occupés de la définition de notre temps. II est curieus \ que -Palsgrave appelle défini ce que nous appelons indéfini. C'est que j'ai fait cela trouve sa base dans le présent, tandis que je fis cela est indéfini (c.^a-d. indéterminé) et exige une relation de temps, je fis cela l'année dernière. Maupas (1607) et après lui Oud in, ont bien vu la valeur de nos temps, mais Vaugelas, Ménage et le Père Bouhours n'en parient pas *). Plus-que-parfait et Passé antérieur Le passé 313. Les actions qui précédent un moment donné antérieur, au passe exprimées par le plus-que-parfait et frequent en vieux !— , francais recuie le passe antérieur. devant le plus- Les différences qui existent entre ces deux temps, que-parfait et le A parfait sur- sont les memes que celles que nous avons composé. constatées entre l'imparfait et le parfait. En effet, il avait fini son travail, quand j'entrai indique un état. Quand il eut fini son travail, il sortit, est limité par 1'action qui suit. J'eus fini mon travail d midi. Dans la vieille langue, tout comme le parfait s'emploie la oü nous employons aujourd'hui l'imparfait, on mettait le passé antérieur la oü aujourd'hui le plus-que-parfait est de règle: !) J. Vising, Die realen Tempora der Vergangenheit im französischen und in den übrigen romanischen Sprachen. Eine syntaktisch-siilisbische Studie (Franz. Studiën, Bnd. VI (1888), 3 et VII (1889), 2. II cite le grammairien Pergamini. J) Cf. E. Lorck, Passé défini, imparfait, Passé indéfini (Germ. rom. Monatschrift, 1914, p. 43). 262 LE VERBE Pois li commandet les renges de s'espede Et un anel dont ll /'out esposede, Alexis, 72—73. Nous voyons donc que le plus-que-parfait a reconquis le domaine qui lui était propre. D'un autre cöté, le parfait surcomposé fait concurrence au passé antérieur, qui n'est plus employé que dans la langue littéraire: Et quand Dieu m'a eu donné une fitte, je l'ai appelée Noémi, Renan. — Après que l'e du radical atone a eu disparu, Clédat, Manuel de phonétique et de morphologie, p. 222. — J'ai eu fini ma lettre a quatre heures. — Ce temps, rare en vieux frangais, s'étend au xvie siècle dans la langue populaire, et s'introduit peu a peu aussi dans le style littéraire auquel il donne parfois un charme tout particulier, comme dans Pexemple cité de Renan. Contrairement a ce qu'affirme M. Foulet dans Tintéressante étude qu'il consacré aux formes surcomposées1), on rencontre le parfait surcomposé dès le xive siècle: Dit d vostre povre mere se nuttuy vous at esteit visenteir, de pues que vostre fils at esteit neiz, Myst. et Mor., p.p. G. Cohen, p. 35/36, v. 228-9. Quand j'ay eu.... considéré la cause des sources. ■., j'ay conneu directement qu'elles ne procedoyent... sinon des pluies, Palissy, Discours admirables, 31. E. FUTUR ET FUTUR DU PASSÉ 2) Futur et futur L'indicatif du futur se formait en latin clas- du passé en sique en -bo ou en -am: amabo, delebo, atin classique. ven(jam, audiam; les autres formes du futur sont des formes analytiques: amaturus sim, amaturus esse; pour le futur du passé amaturus eram (essem) et amaturus esse: Pollicltus est se venturum esse, „il a promis 1) Rom., 21 (1925), p. 203—252 (Neophilolocjus, XI, p. 283). 2) Cf. Thielmann, Habere mit dem Infinitivus {Archiv f. lat. Lexikographie, II). — E. Lerch, Das roman. Futurum als Ausdruck eines sittlichen Sollens, Leipzig 1919. — P. Taylor, The construction habere with infin. in Alcuin (Rom. Review, XV (1924), p. 123—127). — G. Rohlfs, Das roman. habeo-Futurum und Konditionalis (Archivum rom-, VI, 105—154). LE FUTUR 263 qu'il viendrait". — Labienus, veritus ne hostium impetum sustinere non posset, litteras Caesari remittit, quanto cum periculo legionem ex hibernis educturus esset, „craignant de ne pouvoir soutenir 1'attaque des ennemis, Labienus écrit a César qu'il ne pourrait faire sortir sa légion du camp d'hiver qu'avec grand danger", César, De bello gall., V, 47. Origine de ^n 'a*m vulgaire, ces tournures, affaiblies l'infinitif avec par la disparition du passif et par 1'usure phonéa ere* tique (delebit passant a dele vit p. ex.), sont remplacées peu a peu par une forme analytique, qui a 1'avantage de présenter la même combinaison dans tous les cas: amare h a b e o, habeam, habui, h a b e b a m.( haherem,"! habere. habens, même amari habere, etc, pour amabo, amaturus sim, amaturus fui, eram, esse, amaturus, amatum i r i. La tournure Infinitif avec habere se rencontre dès le premier siècle après J. C. avec le sens de „devoir"^ Venit ad me pater: quid habui dicere? „que devais-je dire?" Sénèque, Controv., I, 1, 19. — Dans Tertullfen (150—230) on voit que 1'idée de nécessité s'est déja affaiblie et que la tournure n'exprime que le simple futur: Tamquam ovis ad victimam adduci habens et tamquam ovis coram tondente sic os non aperturus, ce qui est ia paraphrase d'Esaïe, LUI, 7: sicut ovis ad occisionem ducetur, „semblable a un agneau il sera mené a Ia boucherie". Le. sens modd,s'est pourtant maintenu longtemps, il est même resté jusqu'a nos jours dans le conditionnel. Formes qui 316. En vieux francais les deux éléments constirestent en francals. tutifs de cette forme analytiqUe se sont a l'indicatif de nouveau soudés dès 1'époque la plus ancienne: dans les Serments on trouve: prendrai et salvarai; dans Ie Roland: vuldreie. La conséquence de ce fait est qu'on n'a plus senti le verbe avoir comme auxiliaire du futur et qu'une nouvelle forme analytique a pu supplanter bon nombre des formes citées plus haut (§ 315). Les verbes devojg et aller suivis de l'infinitif ont fait concurrence a la combinaison infTmnTavec habere: amare habens se rend en francais par devant aimer, tournure qu'on emploie d'ailleurs trés peu; de même l'infinitif est devenu devoir aimer, tandis que, si 264 LE VERBE 1'on veut exprimer un futur trés proche, on a recours a aller. Enfin, pour le subjonctif on n'a pas senti le besoin de garder une forme spéciale distincte de celle du présent: Je suis content qu'il ne soit pas malade, en latin: gaudeo quod non sit aeger. — Je suis content qu'il ne vienne pas, en latin: gaudeo quod non venturus sit — Restent donc en frangais: je chanterai, j'aurai chanté, je chanterais, j'aurais chanté. Rem. En italien, en provencal et en espagnol les deux éléments sont encore séparables dans la vieille langue: Mal aja la persona ke o'a far coardial „maudit soit celui qui fera couardise", Giacomino da Verona (Wiese, Altit. Elementarbuch, p. 225). — Dar-VOS-em fromen, „nous vous donnerons du froment", Appel, Provenz. Chrestomathie, 51, 36. — Goncalvo Gustioz, fazerlo e (— je le ferai) esto •ï^w o/ue me dizes, Zauner, Altspan. Elementarbuch, p. 162, 1. 22. Cette construction est courante en portugais moderne: fa-lo-hei, „je le ferai". Futur Fonctions du 317. La fonction principale d'une" forme comme je Futur. chanterai consiste naturellement a exprimer un moment futur par rapport au présent, tandis que je chanterais indique un moment futur dans le passé: // m'a déclaré qu'il ne partirait pas; mais d'autres idees peuvent s'ajouter a ce sens fondamental. Nous avons vu au § 202 qu'on peut se servir du futur pour exprimer un ordre: Tu ne déroberas point. — Vous m'apporterez un bock. ' ([iKfofjblOn 1'emploie aussi parfois, quand on veut exprimer une cony/tr>CTtffiess'on_: Me croira qui voudra, mais il a tori, Rom. Kalbris, p. 27. L'ideè future qui se trouve implicitement renfermée dans un auxiliaire comme vouloir peut une seconde fois être exprimée par la forme du verbe: Mais se Deu platst, ges ferai desnichier, Mon dreit seignor ne voldrai sol latssier, Cour. Louis, 1985 et suiv. Dans les phrases suivantes la langue usuelle remplacerait le futur antérieur par le passé indéfini: Molt larges terres de vus avrai conquises, Roland, 2352. Un des plus beaux falts d'armes de l'offensive du 16 avril aura été la prise de Loivre, Illustration, 19 mai 1917, p. 476 a. — Vous LE FUTUR 265 avez su éviter les deux choses les plus halssables qui soient au monde: vous «'aurez pas ntenti et vous /z'aurez pas élé ridicule, Meilhac et Halévy, Frou-frou, II, 7. Dans tous ces exemples 1'auteur se place a un moment futur pour que la constatation ait plus de valeur: „on dira, on verra 3 / que j'ai conquis, — que la prïse de Loivre a été un beau fait d'armes, — que vous n'avez pas menti". D'un autre cóté, si on juge sur ce qui arrivera, ou sera arrivé, le jugement en devient necessairement moins sür, plus subjectif. De la la construction il sera malade1), il aura été malade pour exprimer une supposition"2). «ƒ/ Rem. 1. Puisque i7 sera malade renferme une supposition par rapport au présent; il serait malade aurait, a priori, pu indiquer une supposition par rapport au passé, c.-a-d. signiïier ,.il aura été malade". Cette fonction se trouve en effet en espagnol et en portugais: Serfa usted una criatarita, „vous auréz été alors une petite fille", Valdés, La hermana San Sulpicio, V. — Pour le sens de il serait malade, cf. § 253. Rem. 2. La même idéé est exprimée en latin comme en francais par l'auxiliaire devoir: Numquid seis ubi ego habitem? — Quidni sciamf hic, inquit, debes habitare. — II doit être arrivé, hier. ... , 318. Le contraire du phénomène traité plus haut Autres formes r v y'"l& qui s'empioient se rencontre aussi; souvent on se sert du présent al?c !* "ns ou du passé indéfini au lieu du futur ou du futur. du futur antérieur, pour rendre le récit plus vif: a) Trencherai li la teste a ma spee forble, II et li doze per sont (== seront) livrét a martirie, Pèlerinage, 699. b) Tot le païs ont (= auront) a dolor torné, Qenttls om, se vos nel secorez, Cour. Louis, 2401 et suiv. Rem. t.- De même en italien le futur antérieur au lieu du futur simple: Tre giorni ancora, e Odoardo sara partito (= partira). II padre di Teresa lo accompagnera sino ai confini, Foscolo, Jacopo Ortis. Rem. 2. Par suite d'une contamination entre le discours direct et le discours indirect on trouve souvent le futur simple au lieu du futur du passé: 1) Également dans Plaute; Quidt deliras. Sic erit, „Ce sera ca". *) Cf. Tobler, I, 37 Futur antérieur au lieu du parfait périphrastique; II. 17 Vom Gebrauche des Futurum Praeteriti. — Clédat, Le futur a la place du présent (Hél. Chabaneau, 311—324). — H. Yvon, Sur l'emploi du futur sneyders de vogel, Sgntaxe historique. 2me édition. 18 266 LE VERBE iTirfes Que de Police me sont venu li brief Que me tramist li riches rois Gaifiers: Que de sa terre me donra un quartier, Charroi de Nimes (Clédat, p. 83 et suiv.). Rem. 3. Le futur est rare dans les phrases conditionnelles; cf. § 240, 3. En voici pourtant un exemple du xve siècle: Dieu me puist son ciel reffuser Si Logs ne me trouvera, Quant il voudra Et par tous lieux oü il faudra, Chasteüain, VII, p. 444. Le Futur du Passé1) 319. Des deux tournures cantare habebam et dansTa subor- cantare habui, le francais a gardé seulement la donnée et dans première: je chanterais, tandis que Titalien a gardé la p n pae. ^ deux: canterebbi (canterei) et canteria. Comme ce temps indique un futur par rapport au passé, ce demier est en général exprimé, et nous constatons donc que notre forme verbale se trouve le plus souvent dans les phrases subordonnées: Je vous disais bien qu'il viendrait. Déja en vieux francais: Qui de go se vantait.... Qu'il la fereit eissir tote de son chenal, Pèlerinage, 765 et suiv. Le futur du passé n'exprime pas nécessairement les pensées du sujet de la principale; 1'auteur lui-même peut se placer au point de vue du passé, et faire des constatations pour 1'avenir; Au jrottement de la richesse, II s'était placé dessus (c.-a-d. sur son cceur) quelque chose qui ne s'effacerait plus, Flaubert, M™6 Bovary, 61. — Souffrait-eüe de son marl sans en rien montrer? L'avenir le dirait, Bourget, Idyll. trag., 306. Comme le prouve la dernière citation, le futur du passé s'emploie aussi dans les phrases principales; il est particulièrement fréquent dans le style indirect libre; le moment du passé est alors indiqué soit par ce qui précède, soit par un verbe déclaratif intercalé, ou enfin c'est au lecteur de comprendre de quel moment du passé il s'agit: Cette pensée le travaillalt encore le solr, quand i) Cf.. Tobler, II, 136—154, Vom Gebrauche des Futurum Praeteriti. — Rally, Le style indirect libre en francais moderne (Germ. Rom. Monatschrift, 1912, p. 549 et 597). — Kalepky, Zum „style indirect libre" („Verschleierte Rede"), ibid., 1913, p. 608—619. — G. Herz, Die uneigentliche direkfe Rede im Franz. Thèse München 1919. LE FUTUR DU PASSÉ 267 il les vit rire et parler de choses indifférentes: ainsi on pourrait être joyeuse après qu'il serait mort? R. Rolland, Jean Christophe, L'aube, 92. — On sait que l'auxiliaire devoir, qui exprime plusieurs formes du futur simple, remplace également souvent le futur du' passé, notamment quand on sent encore un peu 1'idée de nécessité, soit paree qu'il s'agit d'une chose convenue d'avance, soit paree qu'il s'agit d'une chose inévitable: Le lendemain il partit; il ne devait plus revoir sa patrie. — Les Braves devaient passer le canal un peu plus au Nord... A la faveur de cette avancée, les Lions s'empareraient du village; un bataillon /'aborderait par le Nord, tandis qu'au Sud, deux autres fixeraient l'ennemi et tenteraient de franchit le canal droit devant eux, Illustration, 19 mai 1917, p. 476 a. Rem. De même que le futur antérieur remplace en italien parfois le futur simple (§ 318, Rem. 1), de même on trouve p. ex. j'aurais fait pour je ferais: Le parlö delle visite che avrebbe ricevute (= qu'elle recevrait), Manzoni, Promessi Sposi. — Cette construction m'est , d'ailleurs pas inconnue au frangais; dans le Nord on dit généralement: 11 me serrait si fort que je croyais qu'il m'aurait étranglé, Atlas linguistique, 498. CHAPITRE VII LES CONJONCTIONS A. OBSERVATIONS GÉNÉRALES 320. Ici encore on voit clairement que les divisions R6ie des grammaticales, que nous sommes bien forcés conjonctions. = , . d'établir, ne vont pas au fond des choses. On parle souvent de propositions indépendantes. En réalité il n'y a pas de phrases indépendantes: une phrase en amène une autre; il y a toujours un rapport quelconque, adversatif, temporel, causal ou autre, entre deux phrases qui se succèdent. Ce rapport, on peut 1'exprimer ou non: Je ne sors pas; il pleut, ou bien: Je ne sors pas, {paree qu') car il pleut. — Je suis si heureux. Je voudrais vous embrasser, ou: Je suis si heureux que je voudrais vous embrasser. Le Hen entre les deux phrases peut être plus ou moins intime: J'ai d travailler ; je ne sortirai donc pas. J'ai d travailler de sorte que je ne sortirai pas. — J'espère que vous viendrez. Les mots qui servent a exprimer le rapport sont les adverbes, les prépositions et les conjonctions, celles de coordination et celles de subordination. II faut donc essayer: 1°. de distinguer les adverbes des conjonctions, 2". de distinguer les conjonctions des prépositions, 3°. de distinguer la subordination de la coordination1). Adverbe et 321. 1) La différence entre l'adverbe et la conconjonction. jonction est difficile a saisir. Nous verrons dans la suite que dans 1'évolution de la langue plusieurs adverbes sont i) Cf. Bréal, Essai de sémantique, p. 185 et suiv. - MeiUet, Le renouuellement des conjonctions (Annuaire de l'Ecole praüque des H. Etudes, 1915— 1916). CONJONCTION, ADVERBE ET PRÉPOSITION 269 devenus conjonctions. II est intéressant de comparer a ce point de vue le dictionnaire de Littré avec le Dictionnaire général'.. ce qui s'appelle conjonction dans le premier est appelé souvent adverbe dans l'autre. Ainsi pourtant est adverbe dans le Dict. Gén., conjonction dans Littré; cependant adverbe dans le Dictionnaire général, tandis que Littré distingue l'emploi adverbial de l'emploi conjonctionnel; donc est conjonction dans les deux, p. ex. dans: Qu'est-ce donc? Puisqu'un adverbe a dans certains cas la même fonction qu'une conjonction, il vaudrait peut-être mieux ne pas ériger des distinctions subtiles. et inutiles. Remarquons pourtant qu'une conjonction se trouve, en général du moins, en tête de la proposition, tandis que la place de Tadverbe est plus libre. 2) Les conjonctions ne servent pas seulement a relier des propositions, mais aussi des membres de phrase. préposition Dans ce cas, il peut se produire une confusion avec les prépositions, qui ont la fonction d'unir deux substantifs; en effet, pater cum matre ne se distingue souvent ni pour le sens ni pour la forme (quand la déclinaison a disparu) de pater et mater1). 3) Les conjonctions se divisent en conjonctions de subordination et conjonctions de coordination; seulement, cette Subordination et <• • • • , , ,, , , coordination division, toute simple qu elle semble, est moins naturelle qu'elle n'en a Tair. II y a même dès grammairiens qui nient 1'existence des propositions subordonnées2). En effet, si Ton se base sur le sens, les propositions dites subordonnées contiennent souvent 1'idée principale: Je ne sors pas, paree qu'il pleut; ici le contenu de la principale est connu; ce qu'il importe de savoir, c'est pourquoi je ne sors pas. Veut-on se baser sur la forme de la phrase? La construction de la subordonnée ne se distingue en francais en rien de celle de la principale, a Tencontre des langues germaniques, qui mettent le verbe a la fin de la subordonnée. Qu'on compare Je ne sors pas, paree qu'il pleut tout le temps et Je ne sors pas, car tl pleut tout le temps. La seule différence qu'on puisse trouver, c'est que la subordination relie les deux phrases d'une facon plus intime que la 1) Cf. Laubscher, Syntactical oauses of case redact ion. p. 78 note. 2) Cf. Blümel, Einleitung in die Syntax (Indo-germanischeJ}ibliothek,lI,6). 270 LES CONJONCTIONS coordination. Ainsi dans les deux phrases citées plus haut, paree qu'il pleut indique la cause d'un fait déja connu et fait donc partie intégrante de toute la phrase; dans le second exemple, car il pleut ajoute une explication, qu'on n'avait pas demandée, a la communication Je ne sors pas. Nous parierons d'abord des conjonctions de coordination, puis des conjonctions de subordination. B. CONJONCTIONS DE COORDINATION1) I. Copulatives 322. En latin on avait et, que, ac, atque, etiam, quoque, nee, neque, necmon, cum... turn, tam... quam, et quelques autres combinaisons. Ces conjonctions ont disparu pour la plus grande partie. On n'a conservé que et et nee. Et Emploi de et *) L'emploi de cette particule en frangais en latin et en s'écarte trés peu du latin. Relevons pourtant quelques francais. 'égères divergences: Le latin classique mettait et entre tous les membres d'une énumération, ou il ne le placait nulle part: Patrem et matrem et sororem amat ou Patrem, matrem, sororem amat. Depuis Tacite2) pourtant la construction devient plus libre, et en frangais on trouve et en général devant le dernier mot de 1'énumération: Tant vos donrai aveir, or, argent e deniers, Pèlerinage, 314. Pourtant la répétition n'est pas rare, surtout quand on veut appuyer sur les différents termes: Tantes dolors at per tei enduredes, E tantes faims e tantes seiz passedes, E tantes lairmes por le ton cors ploredes! Alexis, 397—399. !) K. Wehrmann, Beitrdge zur Lehre von den Partikeln der Beiordnung im Französischen, Diss. Strasbourg 1881 (Romanische Studiën, V, 1881, p. 383—444). — G. Dubislav, Ueber Satzbeiordnung für Satzunterordnung im Altfranzösisahen. Diss. HaUe, 1888. !) Draeger, Hist. Syntax, II, p. 13. ET 271. RoUant saisit e son cors e ses armes, Roland, 2280. Dans une phrase comme: Ne poet muder rien plurt e ne suspirt, Roland, 2381, e ne remplace le latin neve; il est vrai que dans la langue classique aussi on trouve, quoique rarement, et dans une phrase négative 1). Souvent le Hen formé par et est trés lache: Suvent regretent Olivier et RoUant, Les duze Pers, qu'il lur seient guarant. Et l'Arcevesque lur dist. .., Roland, 1512—14. Ainsi on trouve et plusieurs fois au commencement d'une laisse, p. ex. Roland, 1269, ou: E dist U patriarches: Bien avez espleitiét, Pèlerinage, 167, et au début d'un chapitre, p. ex. Du Bellay, Deff. et HL, ch. III: Et si nostre langue n'est si copieuse..., emploi que Littré! nomme biblique (Et Jésus se rendit sur la montagne des OUviers), mais qui est plutöt populaire et qu'on retrouve dans Ennius et Caton. „.„., 324. 2) Et sert a relier deux phrases ou deux Différents I 1 rapports existant membres de phrases, sans qu'on indique d'une entre les phrases facon précise le rapport qui existe entre ces deux reliees par et. 1 1 1 1 phrases. a) Or, les deux phrases peuvent exprimer deux actions qui se sui vent: Respont li emperedre: Jo sui de France nez... E dist Hugue U Forz..., i Pèlerinage, 306 et suiv., oü Ton pourrait préciser et par puis, ensuite. Dans les anciennes locutions petit et petit, mot et mot, et a été remplacé par la préposition d. On trouve déja en latin et après un impératif ou un subjonctif: Impinge Uipidem et dlgnum accipies praemium, Draeger, II, p. 24. — En francais: •) Draeger, II. p. 5. 272 LES CONJONCTIONS Dunez m'en, sire, le bastun et le guant ' ' E io irai al Sarazin Es pan, Roland, 268—9. Puis on trouve même et après une conditionnelle: S'en voelt ostages, e vos Ven enveiez, Roland, 40. Mais cet emploi de et est peut-être dü a Tinfluence de si (Cf. plus loin). La coordination de deüx phrases a 1'aide de et est plus vive que l'emploi de conjonctions subordonnées de temps: Brandist son colp e II Sarrarins chiét, Roland, 1552. Rem. De même en provencal: E tantost can foro aplanatz, et el trames III melia cavaliers ben armatz, Appel, 118, 66, b) De 1'idée de temps découle tout naturellement 1'idée de conséquence: Del vin et del clarét tant oilmes be&t E deslmes tel cose que estre ne deüst, Pèlerinage, 666. c) Quelquefois le rapport entre les phrases est causal, mais non nettement senti: Naimes li dus tant par est anguissables E li paiiens de ferir molt le hastet, Roland, 3444—5, et aujourd'hui: Elle est rouillée et grince aigrement au vent, A. France, Le Crime de Sylvestre Bonnard. d) Souvent et sert a préciser ce qui précède et équivaut donc a et cela. Déja en latin on trouve cet emploi: id, et facile, efflcl posse, Nepos, Miltiade, 3, 4. En vieux frangais: Soventes felz lor veil grant dol mener E de lor oilz molt tendrement plorer E tot por lui, onques ment por el, Alexis, 241 et suiv. Encore plus tard, comme le prouve la phrase citée par Littré: // (Dieu) ne s'est point contenté de nous apprendre d dire avec un chalumeau quelque vaudeville, et de mauvaise grace. ET 273 Rem. De même en provenfal: Baron, aquesla cieutat avem e nostre poder, e am gran trabalh que y avem trag, Appel, 118, 74, e) Le rapport entre les deux phrases peut être adversatif: Paiien unt tort, e chrestiien unt dreit, Roland, 1015. /) Une nuance adversative est sentie aussi dans les cas oü et introduit une question: El cors vos est entree mortel rage. E kt ser at devant mei a l'ansgarde? Roland, 747—8. 325. 3) La répétition de et est en vieux frangais Répétition de et. '•«;i , a. plus frequente quen frangais moderne, peut-etre a cause de la versification; c'est, en effet, un moyen commode d'avoir le nombre voulu de syllabes: II en apelet e ses dus et ses cuntes, Roland, 14. Vit del saint home le vis e cler e bel, Alexis, 346. Rem. Quelquefois on renforce la conjonction: E si dient ambure e saueir e folage, Pèlerinage, 656. Ce mot ambure vient probablement de ambutrum, cf. Meyer-Lübke, Romanisches Etymoloyisches Wörterbuch, s.v. Prépositions et 326. 4) Si le roman a perdu plusieurs conjonc- conjonctions tions latines, en revanche il en a formé quelques avec Ie même . sens que et. nouvelles. Ainsi la préposition avec1) a parfois la même signifieation que et, comme le prouve la forme du verbe: Adrastus o l'arcevesque s'en traeient, Thèbes, 2275. Le singe avec le léopard Gagnoient de l'argent d la foire, La Font, Fables, IX, 3. Les mots comme et ainsi que, qui au fond marquent une comparaison, ont souvent une valeur copulative: Bacchus ainsi qu'Hercule, Louis XIV comme Napoléon. — Un fourneau d x) Tobler, III, p. 14, Nous chantions avec lui = nous chantions, moi et lui. — K. Nyrop, Et. de gramm. fr-, p. 13. 274 LES CONJONCTIONS pétrole était ld ainsi que toute une petite batterie de cuisine, Zo\a, Lourdes, 45. Aussi bien que, de même que, joint d, prés de remplissent souvent la même fonction. Rem. 1. En provencal moderne on a le phénomène inverse. La emê < et ma gis a tout a fait le sens de avec: Es an rasin de Crau qiïemé touto sa ramo, Te porge un paisan („c'est un raisin de Crau qu'avec toutes ses feuilles t'offre un paysan"), Mistral, Mirèio, dédicace. Rem. 2. Pour entre placé devant le sujet ou le complément, cf. § 390. Rem. 3. Dans les dialectes on trouve et puis ou puis tout seul avec la valeur copulative: Loin d'ché ville e' pi' d'leu cancan, „loin de la ville et de leur cancan"; aveuc ché gh'vd, 'h's ézieii, avea ché fleur, pi 'h's dbre, „avec les chevaux, les oiseaux, les fleurs et les arbres",-Herzog, Neufranz. Dialekttexte, 38, v. 37 et 40. Sic. Différentes 327. En roumain si sorti de Tadverbe latin sic vaieurs de si. a fjnj par supplanter complètement la conjonction et. En vieux francais, comme en provencal, si est aussi extrêmement fréquent, mais seulement pour relier deux phrases; il n'a jamais réussi k s'introduire entre deux noms (*père si mère); aujourd'hui il a de nouveau complètement disparu. Comment expliquer 1'évolution du sens? a) Le sens primitif de sic est „ainsi" et „tellement": Hoe volo, sic jubeo, sit pro ratio ne voluntas, Juvénal, VI, 223. Souvent dans la combinaison sic... ut. Ce sens s'est conservé en frangais moderne mais seulement devant un adjectif ou un adverbe: il est si fort que personne n'ose lui résister. b) Cette valeur se sent encore d'une fagon affaiblie dans le rapport conclusif, „ainsi, donc": Franceis sunt bon, si ferrunt vassalment, Roland, 1080. Venez i.rets, si/ verrez veirement, Roland, 953. c) II prend encore le sens du hollandais en zo, en toen, et alors, expression populaire d'après Diez: Envers le rei s'est Guenes aprolsmiez Si li at dit: a tort vos curuciez, Roland, .468—69. \f§ SI 275 Déja en latin vulgaire: Nobis... iter sic fuit at per medium transversaremus caput ipsius vallis ei sic plecaremus nos ad mon tem Dei, Peregr., II, 4. d) Dans Texemple suivant si ne signifie que et: Le tertre avale, s\a le halt laissié, Garin Ie Lorrain (Clédat, p. 120). Cet emploi se trouve déja en latin vulgaire: Per duodecim stadia lata, longa, sic alta, Commodien, Instruct., II, 3, 16. e) Puis devenu une simple conjonction copulative, il peut relier deux phrases qui forment opposition Tune avec l'autre: Tant l'ai vedut, si nel poi aviser, Alexis, 792. Ce sens se trouve encore au commencement du xvne siècle: Si faut-ll qu'd la fin f'acquitte ma promesse, Malh., IV, 4. Depuis trente ans c'est elle, et si ce n'est pas elle, Régnier, Sat., X. /) Outre ses fonctions de conjonction, le mot si est resté adverbe, et, comme tel, il a développé plusieurs sens. D'ailleurs dans les deux dernières phrases il adéja un sens nettement adverbial. Rem. Un emploi curieux de si se trouve dans les phrases suivantes: |i Onques ne s'aresla, si vint ü la chapele, Alexandre, IV, 61. Ja mais n'avra repos, s'est aquitée, Aiol, 552. Car quant ele fu enterree Onc ne se vout d'iloc partir S'eüst dormi sor le martir, Rom. de Renard, 456—58, oü la seconde phrase contient la conséquence de la première; 1'action de celle-ci cesse, dès que 1'action de la seconde phrase commence. On pourrait donc traduire par „jusqu'a ce que" ou ,avant que." — Cf. Romania, VIII, 297; Zeitschr. f. rom. Phil., II, 95 et 572; V, 346. Nee Nature des ^i 'a sponde phrase ou le second membre phrases relièes de phrase est négatif, le latin les relie par la par nee et ni. ,. , ., conjonction nee: a) Non possum nee volo. — b) Neque consilium neque auctorem probo. — c) Te odi nee 276 LES CONJONCTIONS amo. — En frangais l'emploi de nee s'est beaucoup restreint; il a été remplacé en général par et, paree que la nature de la phrase est suffisamment indiquée par la négation placée devant le verbe: Je ne peux pas et je ne veux pas. Rem. N e c se presente en vieux francais sous la forme af taiblie de ne. Raynouard, qui, comme on sait, pensait que le provencal représentait une étape ancienne des langues romanes, le croit issu de ni, forme provenfale, donc nee > ni > ne, tandis que 1'évolution est en réalité nee > ne > ni. On trouve ne jusqu'au xvile siècle dans Malherbe: Ne plus ne moins que le pontife *). 328Ws. 1) Quant a son emploi, il peut relier deux phrases négatives: II ne Ut Ut ned il dedenz n'esguardet, Alexis, 374 (Clédat, p. 11). construction qu'on trouve jusqu'au xvne siècle: Ni la chose ne demandait pas un long discours, ni le rol ne Veut su faire, Vaugelas. 2) Une phrase négative a une phrase positive: Mon cheval restralns maintenant N'au monter de more ne fis, Chevalier au lion, 484—5 (Clédat, 146—7). Si voir com ce fu LHex, ne mengonge ril a, Berthe aux grands pieds (ibid., p. 59) (= et qu'il n'y a pas mensonge). Cette construction ne s'est pas maintenue. 3) II relie deux phrases subordonnées dépendant d'une même principale négative ou a sens négatif ou dubitatif: Molt me vient d merveille.... Dont ets hon est venus ne de quel parenté, Mainet (Clédat, 45). Comment n'en quel montere Ui llon assailla, Berthe aux grands pieds (ibid., p. 58). Je m'esmerveiUe comment tu peux danser en habit de femme ni chanter en un festin, Amyot, FUtminius. U) Cf. Rydberg, Zur Geschichte des franz: 9, II, p. 919 et suiv. NI 277 J'aime. Ne pense pas qu'au moment que je t'aime, Innocente d mes yeux, je m'approuve moi-même, Ni que du fol amour qui trouble ma raison Ma Idche complaisance ait nourri le poison, Racine, Phèdre, II, 5. J'ai grande peine d croire ce que vous dites de Mme*** ni qu'elle ait pris votre parti contre moi, Voiture. Aujourd'hui on préfère ou. 4) ni relie deux membres de phrases: Je ne l'ai vu ni eniendu. — Non, je ne veux ni prose ni vers, Mol., Bourgeois Gentilhomme, II, 6. — Le malade ne mange ni ne boit (emploi moderne). 329. Au lieu de ni on trouve dès le moyen &ge Cas particuliers. lemploi de et. Molt m'est mal avenu Que je ne l'ai et prls et retenu, Cour. Louis, 1226. D'un autre cöté on trouve ni quelquefois sans négation devant le verbe: Un moine ne presche ni endoetrine le monde, Rabelais. — Je ne peux ni veux l'éviter, Malherbe. — Aubert (1613) exigeait déja l'emploi de ne. Si ni reliait deux membres de phrases, Malherbe et Vaugelas ont exigé la répétition de ni. Mais on trouve, jusqu'a nos jours, de fréquentes dérogations a cette règle: Ainz nen i sist nuls hoen ne onques puls encore, Pèlerinage, 122 (Clédat, p. 38). Le solell ni la mort ne se peuvent regarder fixement, La Rochefoucauld. — Je ne connais plus tes mceurs ni ton langage. Après sans on peut se servir de et et de ni: Ainsi au xvne siècle. Elle écouta son arrêt sans frayeur ni sans faiblesse. 330. II est naturel qu'entre les deux phrases Différents n rapports existant rehées par ni les memes rapports puissent exister entre les phrases qu'entre celles reliées par et. Seulement, la liaison reliées par nl. etant plus intime, on ne trouve pas p. ex. m au commencement d'une laisse. Sens adversatif: N'est gueres granz ne trop nen est petiz, Roland, 3822. 278 LES CONJONCTIONS Sens consécutif: Vostre olifant ne deignastes suner, Ne de Carlun mie vos nen avez, Roland, 1171—2. Rem. Un composé de nee est neis de nec-i ps e, avec sens négatif et sens affirmatif: „même" ou „même pas": Chascun ot maistre. nes (— même) Challos, Qui n'estoit pas moult biau vallés, Charlot le Juif (dans Barbazan,. Confes et Fabl., VII, 89a). Nes (= même) ft' oisel s'en islront fors, Chev. au lion, 400 (Clédat, p. 143). Voir aussi le chapitre de la négation, § 432. II. Adversatives Divïsion des 331. Nous avons vu que même avec les copulatives propositions pures le rapport entre deux phrases peut être adversa ves. adversatif. Ce rapport peut être exprimé d'une facon plus claire par les conjonctions adversatives. Selon que la seconde s'oppose nettement a la première (Ce n'est pas blanc, mals noir), ou la restreint (// est arrivé tout & l'heure, mais il a dü partir de nouveau), ou que les deux phrases s'excluent, sans qu'on dise laquelle des deux est vraie (Je vaincrai ou je mourraï), on distingue: a) les adversatives pures b) „ „ restrictives c) „ „ exclusives, alternatives ou disjonctives. Les adversatives pures 332. Les conjonctions qui reliaient en latin deux phrases adversatives étaient: sed, vero, verum, at, atqui, enimvero, attamen. Aucune d'elles ne subsisté en frangais, elles ont été remplacées par mag is et *antius. Mais 333. L'évolution de mag is est intéressante. II se Magis en latin. . rapproche en latin souvent du sens de potius: An hic magis possessor audiendus. sit, non petitor? On trouve dès 1'époque classique des exemples oü on se sert de magis pour opposer deux phrases: Neque quisquam parens liberis, ut MAIS 27Q aeterni forent, optavit, magis, uil boni honesiique vitam degerent, Salluste, Bellum Jugurthinum, 85, 49. Quem non lucra, magis Pero formosa coegit, Properce, II, 4, 9. Ici on pourrait déja traduire par „mais". La dernière étape était franchie au moment oü 1'on mettait magis après une phrase affirmative. On ne sait pas si cette évolution appartient encore au latin ou seulement a 1'époque romane. Rem. On trouve en vieux frangais ne . . . mais que, nemais, (ou avec un verbe ne . . . nemais), ne . . . nemais que et ne mais d'abord avec un sens exclusif: Jo ne sai ueirs nul hume Ne mes Rollanz ki uncore en avrat hunte, Roland, 381—2. Ne mals que dous n'en i ad remes vifs, Roland, 1309. Si cume la mere sun filz qui n'ad mais un, Quatre Livres des Rois, 123. (Cf. en provencal: neguna parladura non es naturals ni drecha del nostre lengage mais acella de Franza e de Limozi, Appel, p. 195/6). — Et avec sens adversalif: Vous n'avez pas les Turs mors ne desharités, Ne mais Jhesus de gloire, Chanson d'Antioche, II, 274. Cf. pour ces dif leren tes tournures Tobler, Verm. Beitr., III, 13, ne. . . se. .. non, mais, fors, que. — E. Richter, Zeitschr. f. rom. Phil-, XXXII, 656 et suiv. — O. Hey, Archiv für lat. Lexikographie, XIII, 205. — Clédat, Reu. de philologie franc., 1906, p. 14. — J. Compernass, Vulgaria, 4 dans Glotta, VI, 2, plus et amplius = potius. — J. Meiander, Etude sur magis et les expressions adversatives dans les langues romanes, thèse Upsal, 1916. Cf. aussi § 360. — En espagnol por mas que a pris le sens de „quoique": por mas que digan, „quoiqu'on dise". „ , . , 334. En vieux francais on trouve mais avec le Mais en frangais. sens de „plutöt": Car li larron se douteroient,.... Qu'il nes felst par sa force mener pendre. Par sa force! mes par ses homes, Jean de Meung (Clédat, p. 203 et suiv.) De la on passe facilement a la valeur adversative après une négation: Ne fut mie par force, mais par la Deu vertui, Pèlerinage, 751. En général pourtant sa fonction est restrictive: dans les cent 280 CONJONCTIONS premières pages de la Chrestomathie de Paris et Langlois on trouve quinze mais, dont aucun n'est purement adversatif. Iluec troverent dam Alexis sedant, Mais ne conurent son vis ne son semblant, Alexis (Clédat, p. 9). Quelquefois Topposition se rapproche de la condition: De sun aveir me voelt duner grant masse, Mais il me mandei que en France m'en alge, Roland, 182, 187, surtout, si mais est suivi de 1'impératif ou du subjondtif: A tun plaisir te durrai mon aveir Mais Guenelon fat acorder al rel, Roland, 3894—5. „Gabez, slre Oliviers", dist Rollanz 11 curteis, „Volentlers", dist li coens, „mais Carles le m'otreit", Pèlerinage, 485. Ici on peut déja traduire: „pourvu que Charles me 1'accorde", Cf. § 360. En francais moderne mais s'est conservé dans sa signification adversative et restrictive; même il est devenu la conjonction adversative par excellence après la disparition de ainz, dont nous devons parler maintenant. Rem. En latin postclassique on trouve parfois nisi avec une • valeur adversative: Nee Deus est illis aliquid, nisi saeculi vita. Commod., Carm. Ap., 608. Cet usage se maintient en vieux francais: En lui n'en avoit nule mauvaise, se bone non, Auc. et Nic., 2, 14. Cf. aussi Ebeling, Krlt. lahresbericht, V, 1, 217. Ainz*) 335. Ainz du latin *antius a une évolution de Emploi de ainz. , > .. , sens analogue a celle de magis. Pour l'emploi, on peut comparer les exemples suivants: Ne s'en corrocet giens cil saintlsmes om, Ainz priet Deu qued il le tour pardoinst, Alexis, 273 et suiv. i) Pour 1'évolution morphologique de ainz et a nee is cf. A. Thomas, Romania, XIV, p. 572. — W. Meyer, Zeitschr. für rom. Phil., XI, p. 250. MAIS ET AINZ 281 Issi parlad Samuel, mais li poples nel volt esculter; einz distrent tuit: Rel volum avoir, Quatre Livres des Rois, I, 8, 19. Cette dernière phrase prouve que ainz demandé 1'inversion du sujet et est donc encore plutót adverbe que conjonction; quand mais et ainz se seront confondus pour le sens et pour la construction, un des deux deviendra inutile et ainz disparaitra. Ceci a eu lieu vers le xvn<= siècle: Vaugelas, II, 426, en constate la perte, qu'il regrette. Au seizième on le trouve encore fréquemment: 11 ne peut avoir le coeur si dur que de les attendre en son siège; ains leur alla au devant, Amyot (Darm., p. 147). — Puis dans Scarron, qui aime les archaïsmes: Vieille barbue et qui comptait Cent ans et point ne radotait, Ains était femme bien sensée, Scarron, Virgile travesti, V. Rem. II est curieus qu'on semble se servir parfois aussi de avant comme conjonction adversative a moins que avant ne soit adverbe et qu'il ne se rapporte au verbe tenir: II ne la Ut ned il dedenz reguardet, Avant la tent ad un bon clerc e savie, Alexis, 375 (Clédat, p. 9). On en trouve des exemples plus surs dans Froissart: Mar nuc rite li ainnée n'estoit pas la, avant estoit en Alemagne, II, 195. Les adversatives restrictives1) ■SÜ!S3^.Des_conjonctions latines tarnen, autem, et adverbiaies. n i h i 1 o m i n u s, le frangais connait, au xive siècle, la forme savante néanmolns (dans Chrétien de neant moins, Erec 5235, var.), puis il a formé d'autres conjonctions, que le latin classique ne connaissait pas. Nous avons déja parlé de mais, qui a un sens adversatif et un sens restrictif. Citons encore néanmoins: Et nient moins pour les (= les biens terrestres) amasser Par aventure s'est dampnee, Miracles de N. Dame, XXI, 298. Toutefois se présente en vieux frangais sous la forme de totes veies ou tote veie : >) H. Johannsen, Der Ausdrack des Konzessivverhdltnisses im Altfranz.. Diss. Kiel, 1884. — Brüss, Der Ausdr. d. Konzessivverh. im Mittel- und Neufranz. Diss. Göttingen, 1906. sneyders de vogel, Sgntaxe historique. 2me édition. 19 282 CONJONCTIONS Uns Sarrazins tote veie l'esguardet. Cil se feinst mort, se gist entre les altres, Roland, 2274—75. Pourtant avait en vieux frangais encore le sens causal: : Onques vers II n'oi faus cuer ne volage. Si m'en devroit por tant rhieuz avenir, Clédat, p. 337. Et encore au xvne siècle: Ne recevant point, il n'est point obligé de rendre; et pourtant il est tmpossible qu'il soit ingrat, Malh., II, 149. — Mais comme 1'expression causale se trouve souvent placée dans une phrase négative et que par conséquent la suite de la cause est niée, la phrase devient adversative. C'est donc la même évolution que nous constatons dans une phrase comme Pour être riche, il n'est pas heureux. Peu a peu ce sens adversatif se communiqué a 1'expression causale, qui devient de la sorte conjonction et adverbe adversatifs, même employés dans une phrase affirmative. Ce nouveau sens ne se trouve qu'aux xve et xvie siècles. Rem. 1. Cette évolution était déja achevée en vieux frangais pour le mot pourquant: Quant le vit la pulcele, molt est espoorie, Porquant si fut corteise, genie parole at dite, Pèlerinage, 710. Souvent pourtant c'est grace a la négation seulement que 1'expression devient adversative: Si jos en creit, il me trairont a perte, E neporuec mes pedre me desidret, Alexis, 205—6. Ja li corners ne nos avreit mestier, Mais neporquant si est il assez mielz, Roland, 1742—3. De même en italien: Ma non per questo la questionc.. . aveva cessato di óccupare e preoccupare i buoni maltesi, II Marzocco, 21 febbr., 1915. Cependant. A 1'origine ce mot était un gérondif absolu dont le pronom ce était le sujet et qui marquait simplement la simultanéité : Je m'en vais voir ce qu'elle me dlra: cependant promenezvous ici, Mol., Princesse d'Ellde, til, 2. — Si cependant signifie aujourd'hui en général „pourtant", le sens temporel est encore assez fréquent aujourd'hui1). i) E. Borlé, Cinquante thèmes d'examen, p. 316 et suiv CONJONCTIONS RESTRICTIVES ET EXCLUSIVES 283 Rem. 2. Le même passage du sens de simultanéité au sens adversatif se remarque dans l'emploi du gérondif et de la conjonction tandis que (§ 348). Rem. 3. Signalons, pour être complet, les locutions malgré tout cela, nonobstant cela, tout de même, en tout cas, toujours est-il et d'autres. Les adversatives exclusives aut > ou prend ^n 'a*m classique on avait aut, vel, -ve, ia place des et sive (seu), conj'onctions qui avaient chacune conjonctions. 'eur f°ncnon déterminée. Ainsi aut reliait deux éléments dont l'un excluait l'autre: Pugnanübus puncto temporis mors aut Victoria obtingit. — Pourtant ce sens s'affaiblit souvent dès le latin classique, surtout dans les phrases négatives: Quid est maius aut difficilius quam severitatem cum misericordia coniungere, que 1'on traduirait „Quoi de plus grand et (ou) de plus difficile". On comprend donc que aut ait pris la place des autres conjonctions, qui ont disparu; en frangais et dans presque toutes les autres langues romanes aut est seul resté: Un franc ou vingt sous. La bourse ou la vie! II peut relier une négation a la phrase précédente: Vueillet o non, a terre chiét pasmez, Roland, 2220. La seconde phrase est quelquefois un optatif: J'exécute votre ordre avec zèle, ou je meure, Regnier, Le Distrait, III, 8. On trouve souvent, a toutes les époques de la langue, ou reliant deux phrases interrogatives dont la seconde est indirecte: Dois-je l'intitnider ou si par la douceur tl vaut mieux procéder, Augier, Un homme dc bien, II, 8. Souvent ou est renforcé par bien. Si 1'on veut appuyer sur 1'idée exclusive, on peut se servir aussi de soit.... soit. Le sens de ou peut se rapprocher de celui de et: Por set anz en la terre ester o demorer,- Pèlerinage, 74. Et il peut être remplacé, comme nous 1'avons vu plus haut, par ni dans la vieille langue. !) Tobler, I, p. 22—24. — Meyer-Lübke, III, § 549. 284 CONJONCTIONS III. Les Causales Évolution de 338. Les conjonctions causales étaient en latin quare. nam, enira, namque, etenim. Elles ont toutes disparu et ont été remplacées par quare, conjonction conclusive k 1'origine; „pour laquelle chose", puis „pour cela". En ancien frangais nous trouvons encore quelques traces de la signification primitive: Com bone peine, Deus, e com bon servisie Fist cil sainz om en ceste mortel vide! Quer ore est s'aneme de glorie replenide, Alexis, 611 et suiv. Puis fréquemment avec un impératif ou un subjonctif: E dist al rel : Sire, vostre est li platz; Car comandez que tel nolse rit ait, Roland, 3841—2. Suz ciel n'ad gent ki l'osast querre en champ; Car chevalchlez. Por qu'alez arestant? Roland, 1782—3. Comment ce sens de quare s'est-il changé en celui de car? II faut peut-être partir d'une phrase comme Mlror quare (quia) hoe feceris, oü les deux conjonctions s'expliquent. La même particularité s'observe dans les propositions qui indiquent un motif: Quaerimus quae tanta vitia fuerint in unico fllio quare is patri displiceret, Cic, Rosc. Amer., 14, phrase dans laquelle quare pourrait être remplacé par quod. Löfstedt cite un exemple oü quare équivaut a quod: Expugnemes Gabaon, quare transfugerit ad Josue, Jos., 10, 4. Lucifer de Cagliari présente aussi des exemples oü quia a le sens interrogatif de cur et celui-ci la valeur de quia. Quoi qu'il en soit, 1'évolution de car est achevée dès 1'époque la plus ancienne. On en trouve déja dans YAlexis des exemples: Bons fut 11 siècles al tens ancienor, Quer feit i ert e justise ed amor, Alexis, 1—2. Rem. t Tobler, III, 79, et Wèhrmann, . p. 436, prennent comme point de départ le quare interrogatif: Domi maneo. Quare? — Pluit, hypothese diffidle k admettre, même si 1'on introduit encore un autre quare (Domi maneo. — Quare? — Quare? pluit), prononcé CONJONCTIONS CAUSALES ET CONCLUSIVES 285 par la même personne qui dit pluit. La perte de 1'intonation interrogative s'explique difficüement. Meyer-Lübke donne une autre explication: pluit... quare domi maneo: „11 pleut, pour cela je reste chez moi". Or, pour cela ou pour ceel peut aussi bien rappeler une cause précédente qu'une cause qui va suivre. La phrase serait donc devenue: domi maneo quare... pluit: „je reste chez moi pour ceci: il pleut", puis „paree qu'il pleut". Cette explication est appuyée par le développement de por go, ci. § 356, Rem. 2. Car s'est eonfondu parfois avec que: Li uens leva si forz et si orribles car U nous batoit a force sus Ville de Cipre, Joinv., 630. — L'inverse est beaucoup plus frequent: Or laissomes trestot en pais, Fait elle, que bien sai entendre Ou ceste parole vueut tendre, Chrétien, Le Chev. au lion, 1560. IV. Les Conclusives DisparitJon des 339, Les conjonctions latines ergo, igitur, conjonctions et itaque, e o, ideo, propterea, quare, qua nouvelles formations. de causa/ quamobrem, ont presque toutes disparu. Le francais devait donc chercher d'autres conjonctions pour introduire une conclusion. Elle les a trouvées dans la combinaison de pour et par avec un pronom démonstratif ou relatif: pour cela (poro, poruec), pourtant1), par quoi, portant, et enfin en changeant Ia signification de mots qui exprimaient primitivement d'autres rapports: donc et aussi. La locütion adverbiale pour cela se trouve dès les monuments les plus anciens: Et poro fut presentede Maximilien, Ste Eulalie, 11. De s'amie a fet sa fame, Mais il l'apele amie et dame Ne por ce ne pert elle mie, Chrétien, Cligés, 6751. Rem. 1 II annonce parfois la cause qui suit: Pur CO Vat fait que il voelt veirement, Que Charles diet .... Roland, 2361. Et - avec Ie relatif: Cil me forfist en or et en aveir Pur quei (ms. que) io quis sa mort et s, sun destreit, Roland, 3759. ») Cf. § 336. 286 CONJONCTIONS lnterrogè par son père, Lycophron se taisait; pourquoi Périandre en colère a la fin le chassa de sa maison, P. L. Courier, Trad. d'Hérodote. Par quoi est surtout fréquent au xvi» siècle, chez Amyot, p. ex.: Par quoy fault avoir les yeulx ouverts, Oringoire, Le feu du prince des sots. Rem. 2. En provencal per que = c'est pourquoi est trés fréquent. Le mot donc (donque(s)) est du probablement a une confusion de tune et de dum1) — dunc se trouve sur des inscriptions latines — et indique donc d'abord uniquement le temps, „alors", introduisant souvent une action qui en suivait une autre. Or, 1'esprit humain aime a voir un Hen logique entre deux actions qui se succèdent et ainsi donc a pris le sens de pour cela. Ce développement de seris n'est pourtant achevé qu'au xvi« siècle. Quant veit li pedre que mais riavrat enfant, . i . Donc se porpenset del siècle ad en avant, Alexis, 36, 38. Aussi (du latin a 1 i u d + s i c) est a 1'origine une particule comparative et par affaiblissement particule de copulation. Dans ce dernier cas il ne se trouve jamais en tete de la phrase; s'il s'y trouve, il est conjonction causale. Dans cette fonction on le rencontre'déja au xvj* siècle: C'est moy qui conduis et mesure toutes choses; aussi, quand on veut réprouver un homme de sa despence superflue, on l'admoneste de vivre par compas, Palissy (Darm. p. 160)2). En frangais moderne ces locutions adverbiales se sont conservées. On trouve encore pour cela, Cest pourquoi, par quoi, par ld, pour cette raison. Le frangais n'a donc pas de conjonction conclusive nettement caractérisée, comme c'est le cas pour les copulatives (et), les adversatives (mais) et les causales (car). 1) Nyrop, Gramm. hist., III, § 626. Meyer—Lübke, Rom. Etym. Wb., 2795. 2) Cf. Tobler, IV, 58 et suiv. Tobler, II, p. 166—173. — CONJONCTIONS DE SUBORDINATION 287 CONJONCTIONS DE SUBORDINATION A. OBSERVATIONS GÉNÉRALES La conjonction ^es rapports qui peuvent exister entre une universeiie subordonnée et une principale sont trés nombreux. Or de même qu'entre deux phrases de coordination le rapport n'est pas toujours exprimé par un mot spécial, de même la conjonction entre deux phrases dont l'une est subordonnée peut manquer également: par ex. en latin Cave fatias „Ne fais pas", en francais: Si'st empeiriez, toz biens vait remanant, Alexis, 8. Une chose qui nous frappe d'abord en comparant le latin et le frangais, c'est que de toutes les conjonctions latines ne se sont maintenues que: si, quando, quomodo1), et quia (ou quod). C'est surtout la dernière qui a pris la fonction des conjonctions disparues, et qui, plus tard, quand la langue est devenue plus littéraire, quand on a voulu exprimer nettement les nuances, en sc confondant avec l'adverbe relatif que, s'est combinée' avec plusieurs mots, substantifs, adverbes, prépositions, pour former de nouvelles conjonctions: d fin que, tellement que, pour que. Quant k 1'origine de que, c'est une question controversée, et qui, d'ailleurs, tient plutöt a la morphologie qu'a la syntaxe; 'Jeanjaquet croit qu'il est né de Ia confusion de quod, quem, et quid, Rydberg le dérive de quia2). Ce qui est sür, c'est que dans la latinité postérieure on voit ces conjonctions se répandre de plus en plus, d'abord quod, puis quia, surtout dans les textes écrits dans un style plus populaire. A 1'origine le sens de quod et de quia était causal, mais déja en latin classique quod prend le sens de „quant k": Quod muliitudinem Germanorum in Galliam traducat, id se sui muniendi, non Galtiae impugnandae causa facere, César, De bello gallico, I, 44. *) J. Pirson, Quomodo en latin vulgaire (Féstschrift Vollmötler, p. 62 et suiv.). 2) Jeanjaquet, Recherches sur Torigine de la conjonction „Que" et des formes romanes équivalentes, thèse Zurich, 1894. — Rydberg, Zur Gesch. des französischen o, II, p. 378, 1033 et suiv. 288 CONJONCTIONS II prend quelquefois la place de ut, mais c'est rare, plus rare qu'on ne le penserait en voyant que ut a complètement disparu de la langue; puis, dans Plaute, on trouve quod quelquefois avec le sens conditionnel 341. Nous verrons dans ce qui suit que la conjonction que, seule ou en combinaison avec d'autres mots, relie toutes sortes de phrases entre lesquelles il existe des rapports trés différents. Nous nous bornerons ici a signaler l'emploi de que dans la seconde de deux propositions adverbiales coordonnées. En effet, tandis que le besoin de clarté et de précision a amené la formation de nombreuses .locutions conjonctives, oelles-ci étaient superflues, ou trop lourdes, quand deux propositions de la même espèce se suivaient; dans ce cas, la langue se contentait ou bien de mettre la conjonction une seule fois, ou bien de marquer le rapport par la seule conjonction que. II est évident que ce mot n'est d'abord possible que la oü une conjonction composée avec que précédait; pourtant, il remplace aussi les autres conjonctions quand, Comme, si. Pour 1'explication, cf. § 347bis. Voici quelques exemples du non-emploi de la conjonction: Quant le chevaüer se mestoii en batalle et en faire guerre et yl riestoit pas appareillé... L'Ystoire des Sept Sages (Clédat, p. 221)Puisque mon teint se fane et ma beauté se passe, II est bien fuste aussi que ton amour se lasse, Corn., L'Illusion comique, V, 3. Les Indiens avoient empoisonné leurs épées de sorte que pas un de ceux qui étoient blessés n'échappoit, et les médecins ne pouvoient découvrir la cause de cette maUgnUé, Vaug, Quinte-Curce, IX. B. PHRASE SUBSTANTIVE 342. Si nous demandons quelle est la construction des phrases substantives en latin, nous verrons que cette langue présente de notables différences avec le frangais: elle connait une variété de constructions a laquelle le frangais n'arrive pas. Après les verbes déclaratifs la construction ordinaire est 1'Acc. c. Inf., mais les verba iudicialia accuso, arguo, insimulo sont suivis de i) P. Lejay, Note sar quod conditionnel (Rev. phil. de litt. et d'hist. anc, 1912, p. 259 et suiv.). Cf. p. 267, note. QUE 289 quod -f subjonctif; — non dubito demandé la conjonction quin et également le subjonctif; — les verbes qui expriment la volonté exigent en général ut avec le subjonctif, mais la conjonction fait souvent défaut; — les verbes impediendi et resistendi sont suivis de q u o m i n u s ou de n e, tandis qu'on emploie TAcc. c. Inf. après les verbes de volonté les plus usités: v o 1 o, n o 1 o, m a 1 o, c u p i o, iubeo et veto; — les verbes affectifs admettent deux constructions tout a fait différentes: 1'Acc. c. Inf. ou la conjonction quod suivie de l'indicatif ou du subjonctif; ceux qui expriment la crainte demandent les conjonctions ne ou ut. La même variété règne dans les phrases subjectives de sorte qu'on trouve jusqu'a trois constructions après la même locütion impersonnelle: utile est ut amemus, amare, quod amamus. ■ Cela nous mènerait trop loin d'expliquer les raisons qui ont amené une telle variété de constructions en latin; nous nous contenterons de les avoir énumérées, en grande partie du moins. On comprendra que le peuple, qui aime les phrases simples et qui négligé les nuances, ait simplifié cet état de choses. Par suite d'une série d'analogies trés intéressantes a étudier, 1'Acc. c. Inf. perd, en latin vulgaire, peu a peu du terrain en faveur de la construction analytique quod, quia et d'autres conjonctions ou adverbes comme quoniam et qualiter amenant une phrase substantive1). Que cn francais ^ *ranSa^8 on n'a Pms 9.ue 'a Conjonction que. C'est la conjonction pure, puisqu'elle n'éveille aucune autre idee que celle de la seule subordination; il est intéressant de comparer, a ce point de vue, l'emploi pléonastique du grec 8ti et de que en espagnol (§ 345 Rem. 3). Quelquefois que est remplacé par l'adverbe interrogatif comment, comme déja en latin vulgaire qualiter alterne avec quod. En effet, dans toutes les langues comment- peut perdre son sens de manière: II nous a exposé comment il est parti, comment il a fait naufrage, comment il a été sauvé. Ce qui est curieux, c'est qu'on trouve parfois une phrase amenée par que et une autre amenée par l'adverbe interrogatif reliées ensemble: *) Cf. le chapitre de 1'Acc. c. Inf. § 270 et suiv. 290 CONJONCTIONS Puis li mustra confaitement del rei avra acordement, e que muit li aveit pesé,' Marie de France, Chievrefueil, 97. J'avoye aussy oublié d dyre comme le grant pont de Brantosme... je prétends qu'ils sont d moy, Brantöme, Testament (Revue d'histoire littéraire, 1914, p. 169). Cf. aussi les exemples de § 136, Rem. 1. C'est que le souci de la symétrie qui se fait sentir actuellement n'était pas si grand au. moyen age, comme le prouvent les exemples suivants: Gregories veit son bel service e que molt s'en est entremise, Joinv., 89, oü Ton a deux compléments de nature différente, de même d'ailleurs que dans une phrase comme Dites li qu'il i a une beste en ceste forest et qu'il viegne cacier, Auc. et Nic, 18, 18. — On trouve cette liberté encore aujourd'hui: // m'a dit sa misère et qu'il a froid, Guillon, Poésie inédite. — Dis-lui que je suis empêché et qu'il revienne, Ayer, Gramm. franc., § 288. Que non, que oui, que nenni sont primitivement des phrases substan tives: Demandet se il ont man gé, 11 dlsolent k'oïl assez, S. Gilles, 2412. Rem. Calvin changc a plusieurs reprises comme en comment dans 1'édition définitive de son lnstitution. Que avec un 344, Souvent on trouve un corrélatif dans la prin- corrèiatif dans la , , , , principale. cipale pour annoncer la subordonnée: Q.o sent Rollanz que la mort tl est pres, Roland, 2259 (Clédat, p. 11). Ce que je vif et que je sui, Sui je par vos, Chrétien, Guill. d'Angl., 1562. Cette construction est rare en francais moderne: Je le savais bien qu'il le ferait1). II arrivé souvent qu'on précise le mot qui annonce la subordonnée : i) Cf. §§ 137, 138 et 356. QUE 291 Qui li aportent unes noveles aspres Que Sarrasin li font molt grant damage, Cour. Louis, 329. Or, si le verbe de la principale régit un complément indirect, le pronom est naturellement en (y) ou de co (a go): Deu en mercie que plus ni orent fait, Béroul, Tristan, 383. De 50 se sont esmerveillie Que il mort en tal manière, Thèbes, 4830. Come il l'out puls ploré e plaint De 50 qu'il fu griefment navrez, Troie, 384. Cette dernière construction est restée dans la langue et s'est même étendue, de sorte que de ce que. est devenu une locütion conjonctionnelle qu'on trouve fréquemment après certains verbes affectifs: Je suis heureux de ce que vous êtes venu. Par contre les phrases amenées par ce que se font rares au xvne siècle. En voici pourtant un exemple: Ce que vous avez vu que les pieds... étolent composés en partie de terre et en- partie de fer, cela marqué que cet empire sera divisé, Pascal, Pensées, I, 215. Rem. Tobler, I, 9 (Que unissant une proposition d une expression adverbiale cfassurance, d'adjuration, de supposition, d'affirmation. de négation ou a une interjectiony cite encore plusieurs constructions curieuses: Certes que, Por un petit que, etc. Répétition de 345. On trouve quelquefois la répétition de que iue- après une incise: II lui dit... que, s'il jugeoit qu'ils eussent mérité la mort, du moins qu'il les fist mourir par d'autres mams, Vaugelas, Quinte-Curce, X, 3. — Les grammairiens du xvn° siècle condamnent cette construction négligée; d'ailleurs Calvin 1'avait déja proscrite de la rédaction définitive de son Insütution. Rem. 1. On sait que la conj. que s'est introduite même devant le subjonctif dans les phrases principales, p. ex: Qu'il vienne. Cf. a ce sujet § 205. Rem. 2. Pour la fusion de la phrase relative avec 1'A. c. I., cf § 277. Rem. 3. Les paroles d'un autre sont citées ou directement ou indirectement. Ainsi on parle de discours direct et de discours indirect1): il m'a dit: mon ami viendra me voir demain (discours direct). !) Cf. Tobler, I, 331, 338. 292 CONJONCTIONS II m'a dit que son ami viendrait le voir le lendemain (discours indirect). Mais on trouve quelquefois des constructions négligées dans lesquelles que amène des paroles directes: La letre dist que: Iluec gist Dido ki por s'amor s'ocist, Enéas, 2139; cf. aussi § 213-. Cette construction est trés fréquente en espagnol: Don Quijote preguntó a Sancho que,. qué le habia movido a llamarle el Caballeró de la Triste Figura? Don Quijote, XIX. Rem. 4. Le röle de que est extrêmement important dans le langage populaire et dans les dialectes. II maintient 1'ordre habituel des mots dans les phrases interrogatives et citatives: Mort aux vachesl que je vous ai dit... Pourquoi que vous m'arrêtez pas? France, L'affaire Crainquebille, fin. — Devenu la conjonction de subordination par excellence, il supplante dans les phrases adverbiales la plupart des autres conjonctions, se joint aux adverbes et aux conjonctions qui restent: Ca lui a bouché un coin dvoir comment qu' c'est dit, Benjamin, Gaspard, p. 227. Ces espèces de phrases se trouvent d'ailleurs déja en ancien francais: Mun esciënt que vus amez, Marie de France, Bisclavret, 51. On pourrait y reconnaitre souvent un' adverbe relatif primitif. Cf. Tobler, I, p. 73. — Cf. § 358, oü on trouvera un exemple de si que = „si". — En gascon enfin, grace a Tadjonction de que, toutes les phrases affectent la forme d'une subordonnée. On peut comparer le hollandais: Kan je me zeggen hoe dat hij heet, waar of hij woont; cf. Salverda de Grave, Schrijftaal en Spreektaal (Taal en Letteren, 1914, p. 8). C PHRASES ADVERBIALES 346. Dans les phrases adverbiales, oü que avait remplacé la plupart des conjonctions latines, il a été a son tour supplanté en général par de nouvelles formations, comme lorsque, paree que, afin que, etc. Conjonctions de temps1) Simultanéité Conjonctions En latin classique dum, donec, quamdiu et latines. quoad expriment la simultanéité compléte, dum et cum la simultanéité partielle. A cöté des deux dernières conjonctions apparait dès le latin classique quan do, qui indiquait en général la cause, mais qu'on trouve parfois avec le sens temporel: Turn quando legatos Tyrum misimus, Cicéron, Agr., II, l) E. Hartmann, Die temporalen Konjunktionen im Französischen, Diss. Göttingen, 1903. — J. Vising, Quomodo in den rqmanischen Sprachen (Abhandlungen Tobler, p. 113). — M. Chicco, La congiunzione cum, Torino, 1905. CONJONCTIONS TEMPORELLES 293 16. — En latin postclassique quando devient dé plus en plus général. Puis on voit vers la fin de 1'empire quomodo, „comment", réduit a como, prendre la valeur temporelle: quod quomodo in Austria ambularem, sic ibi me praesentassem, Orég. de Tours, Mart, 4, 29. Tandis que donec, quamdiu et quoad deviennent rares, dum reste, souvent renforcé par l'adverbe interim, déja d'ailleurs en latin archaïque: Dum coquitur interim potabimus, Plaute, Menaechmi, 207. — Interim dum ille omnium textorum dicta inter lusum consumlt,... repositorium allatum est, Pétrone, 33, 3. II semble que cet adverbe, qui appartient d'abord a la phrase principale, se soit soudé plus tard a la conjonction pour donner la conj. 'dum interim, forme qui donnera en frangais dementres et en provengal dementre. Conjonctions 347' °r' en vieux fran?ais on ne rencontre plus latines qui sont cum, dum, donec, quoad, quamdiu1); les 7ransataT seules conjonctions qui aient survécu sont quando et quomodo, en frangais quant et com ou come. Comme a été concurrencé comme adverbe interrogatif par la nouvelle formation comment, mais il garde pourtant jusqu'au xvne siècle le sens primitif de quomodo: Vous-a-t-on point dit comme on le nomme, Mol., Ec. des femmes, I, 4. — Aujourd'hui il exprime 1'intensité: Comme je suis heureuse! mais l'adverbe combien et d'autres tournures tendent a lui enlever aussi cette fonction-la, qui pourtant est encore trés vivante dans la langue actuelle. Comme conjonction le domaine de comme s'est étendu. II garde un peu de sa valeur primitive comme conjonction de comparaison (cf. § 374) et dans les propositions substantives (cf. § 343), il a essayé a s'introduire dans les phrases finales (cf. § 369 Rem.), enfin en supplantant la conjonction latine cum, il a pris une fonction temporelle et causale (cf. § 352, 355 et 357). Ici nous nous contenterons de quelques observations sur comme conjonction de temps. On trouve — nous 1'avons vu — déja en latin vulgaire quomodo avec cette valeur. Pour Tanden frangais citons: Com il fust en sen oratoyre... il avint, S. Brandan, III, 6—7, oü l'emploi du mode est curieux (cf. § 235). !) Quandiu que se trouve dans le Boèce provencal. 294 CONJONCTIONS Sun compaignun, cum il Vat encuntrét, SU fiert amunt sur Vhelme ad or gemét, Roland, 1994 et suiv. Quand, lui aussi, s'est vu chargé d'exprimer plusieurs notions. D'adverbe interrogatif qu'il était et qu'il est encore, il est devenu conjonction de temps et de cause, évolution déja achevée en latin, et il s'introduit même dans les phrases concessives (cf. § 363). II a perdu actuellement le sens causal, trés vivant au moyen age, mais il a toujours gardé le sens temporel; inutile d'en citer beaucoup d'exemples: Quant ot 11 pedre go que dit at Ui chartre, Alexis, 386 (Clédat, p. 12). Et quand le terme passera, On viendra, Pathelin (Clédat, p. 438). L'adverbe 347bis. Outre ces conjonctions la langue a connu de relatif que. tout temps des périphrases indiquant le temps. Ainsi en latin: lis temporibus quibus; en vieux frangais: En teel tens que, al jorn que, d cele ore que, et aujourd'hui au moment oh (que), le jour ou (que), toutes tes fois que, etc. Ce sont des phrases relatives et que ici est l'adverbe relatif. L'emploi de ce que est trés étendu en vieux frangais: A Pentecoste, que natst Ui flors el pre, Raoul de Cambrai, 3768. Ceste besolgne, se vous pUust, m'otreiez, Tresqu'a treis anz que verrons comment iert, Cour. Louis, 105—6. Dans ces exemples la subordonnée précise plus ou moins la détermination de temps qui précède. Or, cette détermination peut être une phrase temporelle amenée par quant: Et quant il se depart, que il fu eslongiés, Aiol, 6675. C'est peut-être la, comme le remarque M. Ritchie1), le point de départ de que remplagant quant dans la seconde de deux propositions coordonnées. i) Graeme Ritchie, p. 81. Cf. aussi § 359. CONJONCTIONS DE SIMULTANÉITÉ 295 On voit le même que dans des phrases comme: 11 y a trois ans que je ne Val vu, construction qu'on retrouve en vieux frangais: Bien at set anz et mielz Qu'en ai dit parler estranges soldeiers, Pèlerinage, 310. En latin on trouve deux constructions différentes: Dixit nobis, quoniam iam aliquot anni essent, a quo non pareret columna Ma, Peregr., XII, 7. — lam diu est quod ventri victum non datls, Plaute, Amph., I, 1, 146. — Terttus dies est quod ,. Plinius, Ep., IV, 27. — Sexaginta jam anni sunt quod...., S. Jéröme, Visio Paul., 10. Cet adverbe relatif que prend en frangais une extension considérable: il ne se rapporte pas seulement a un substantif, mais aussi a des adverbes et forme ainsi de nouvelles combinaisons conjonctionnelles qui peuvent rendre les idees exprimées par les conjonctions latines perdues. Rem. On n'a donc pas ici affaire a Ia conjonction que, qu'on aurait voulu préciser, mais bien a l'adverbe relatif. Nouvelles Ainsi on rencontre en vieux frangais pour iocutions con- exprimer la simultanéité compléte por tant que, jonctionnelles. , , , , tant que, tant com : En ton mostier, por tant que nos vivons, N'avra mais dite ne messe ne legon, Cour. Louis, 1064—65, tandis que si les deux actions ne coïncident pas exactement, on se sert de endementlers que, dementres que (issus de *d u m i n t e r i m avec que), entrementiers que (dü a une contamination avec les locutions suivantes), entrues que = inter hoe + que, entre ces entrefaites que, en ce que, et que que ou quoi que: Et entrementiers que Alexes fist chele chevauchie, firent chil de Constantlnoble leur mur refaire, Rob. de Clari, LVI, 18—20.— Entre ches entrefaites que li marchis ouvra ensi, si ala li empereres a Salenike, ld., CIL Que au'ele se demdnte einsi, Uns chevaliers del bols issi, Chrétien, Erec, 2795*). Quoi que li feste estoit plus plaine, et Aucassins fu apoiiés a une pute tos dolans, Auc. et Nic, 24, 12. !) Cf. Tobler, III, p. 7—10. 296 CONJONCTIONS si com et ainsi com: Par main en l'albe, si cum li jurz esclalret, Guenes le cuens est venuz as herberges, Roland, 667. Ici on voit le passage d'une conjonction de manière k une conjonction temporelle. Enfin nous citons oü que, dont le sens est d'abord local: Ou qu'il voit nos Francels, si s'en va mervillant, Gui de Bourgogne, 3632. C'est de cette facon qu'est né lorsque et alors que x): Pendant le dernier quart du siècle même, alors que de nouvelles attaques contre le cicéronianisme commengaient de plusieurs cótés, la plupart des chefs échouèrent, Revue du seizième siècle, 1914, p. 209. Citons encore tandis que, composé de Tanden adverbe tandis = tamdiu et (com) que. On le trouve dès le moyen age: Tandis come ele fu entor lui, amena costumes mauveses, Queste S. Graal, 169, 19. Et tandis que tl les asamble, Renart ses coroies li emble, f,*.j.v-m Roman du Renart, 16944. Joie entière on ne peut avoir, Tandis que Von est en ce monde, Marot, Hi 110. Mais bientöt pendant que lui fait concurrence: Pendant que leur autorité a besoing de nostre appuy, Montaigne, I, 13. — Vaugelas, I, 142, blame l'emploi fréquent de tandis que, Th. Corneille et 1'Académie (en 1704) constatent que pendant que est pour le moins aussi usité que tandis que, et aujourd'hui, on le sait, cette dernière conjonction est presque uniquement employée quand il s'agit d'une opposition: La pauvre femme travaillé, tandis que son marl gaspille son argent; dans ce cas on trouve également pendant que et alors que. -.^l Rem. L'adverbe tandis se rencontre encore au xvnesiècle: Tandis, ce soir chez moi nous souperons ensemble, Corn., Suite du Menteur, in, 4. I) Cf. G. Paris dans Romania, VIII, 826. — Vaugelas, I, 362. CONJONCTIONS DE SIMULTANÉITÉ'ET d'aNTÉRIORITÉ 297 Antériorité conjonctions 349> En latin on se sert de dum, donec, latines. quoad = „jusqu'a ce que", et de antequam et priusquam = „avant que". Ces conjonctions se retrouvent en latin postclassique; seulement a cöté de antequam nous trouvons antea quod dans les textes mérovingiens-; puis usquedum, quousque, usquequo, quoadusque. Conjonctions 350, En vieux fran?ais antea quod, devenu signifiant *antius quod, donne ainz que, ancois que; enVanïafc? Priusquam est rendu par primes que, premier que, que nous rencontrons jusqu'au xvie siècle: Ainz que RolUmz se seit aperceüz . . , Muit granz damages li est apareüz, Roland, 2036 et 2038. Une nouvelle combinaison donne avant que et devant que, formes qui ne deviennent fréquentes que vers la fin du moyen age, mais qu'on trouve pourtant dès le xne siècle: Mes trop plus crains que la mort ne t'absente Avant que moy, Qreban (Clédat, p. 432). SU pursleu e enchalce devant co que U entre en ciléd, Quatre Livres des Rois, II, 198. Ains que se fait rare au xvie siècle. En voici pourtant un exemple: Le cler sohil, ains qu'estre en Occident, Lairra espandre oscurité sus elle, Rabelais, I, 58. Devant que se rencontre encore souvent au xvne siècle. Vaugelas, I, 435, dit a propos de avant que et devant que: „Tous deux sont bons. M. Coëffeteau a tousjours escrit devant que, mais avant que est plus de la Cour et plus en usage". Thomas Corneille et 1'Académie condamnent devant que. On blame également au xvii" siècle l'emploi de auparavant que, dont Mlle de Scudéry se sert souvent. Avant que est seul resté dans la languePrimes que, premier que sont des conjonctions qui expriment la même idéé, mais qui n'ont pas subsisté; premier que est fréquent en moyen frangais et rare au xvie et au xvne siècle: Premier que SNEYDERS DE VOGEL, Syntaxe historique. 2™e édition. 20 298 CONJONCTIONS vous faittes a vostre fils nul mal, Froissart, III, 13. — Qui vit premier le corps de sa femme morte devant sa maison qu'il rien avolt su la nouvelle, Marg. d'Angoulême, Hept., Nouv. II. II se faut tenter Premier que l'ou se vienne d la cour présenter, Du Bellay, Poète Courtisan (Darm., p. 285). Premier que d'avoir mal, il trouva le remède, Malh., I, 13. 351. Quant aux conjonctions latines signifiant Cos"gn"{ian"8 „jusqu'a ce que", elles ont disparu. Elles ont été jusqu'a ce remplacées par: que' a) (en)fusques, jusques que, du latin *inde -fusque + quod, cf. Prudence, Cath., 2, 73, 6: Jacob, eo usque dum lux surgeret, sudavit impar proelium. Jo vos defent que rit adeist nuls hum Jusques Dieus vueiüe qu'en eest camp revengum, Roland, 2438—39. Ces conjonctions disparaissent au xvie siècle. b) tant que, fréquent au moyen age, est encore trés usité au xvne siècle, dans le sens de „jusqu'a ce que": D'une chambre an autre traverse, Tant que tot cuide avoir veil, Cligés, 5566—67. Versez, versez toujours, tant qu'on vous dise assez, Mol., Bourg. Gent., IV, 1. Pourtant 1'Académie le condamné dans les vers de Corneille, III, 155: Je te le dis encore, et veux, tant que j'expire... Rem. 1. II est curieux de constater que 1'Académie s'est elle-même servie de la tournure blamée. On lit dans les Sentiments sur le Cid. XII, 471, tant qu'il ait prouvé au sens de: jusqu'a ce qu'il ait prouvé. c) Citons encore jusqu'd tant que: II faut la prendre (1'Eucharistie) avec réserve, jusqu'a tant que nous soy ons rendus propres d recevoir tout son effet, Bossuet, Mêd. sur l'Evang., la Cène, 48e jour. d) jusqu'd ce que est déja trés fréquent au xvie siècle et on sait qu'il est resté presque seul dans la langue actuelle: Les autres demeurent en leur pourriture jusques a ce qu'ils soyent CONJONCTIONS D'aNTÉRIORITÉ ET DE POSTÉRITÉ 299 consummez, Calvin, Institution, II, 5, 3 (éd. de 1560; celle de 1541 a jusques apres qu'ilz). Cf. Marmelstein, o.c, p. 106. Rem. 2. Au moyen age on trouve encore de ci que, de ci la que, de ci a tant que, tresque et d'autres locutions: Ne deit garir ne a plain ne a bos De Ci qu'il l'ait o recreant o mort, Cour. Louis, 23-4. Ja nen ierl mais retraiz par nul home charnel, Tresqu'il seit pleine hanste de terre desterrez, Pèlerinage, 463 (Clédat, p. 41). Postériorité Disparition des 352. En latin on a postquam ou posteaquam' conjonctions „après que", et ut, ubi, simulac, ut primum, latines et , . nouvelles ubl primum, cum primum, „des que". En latin formations en vulgaire on trouve parfois postea quod. Puis partie savantes. , , ,. , cum, quando et en latin postclassique quomodo. En francais ces conjonctions ont disparu, sauf postea quod, quando et quomodo. Posteaquam, devenu *postius quod, donne puis que: Car ne doit estre contredite Parole puis que rois Va dite, Chrétien, Erec, 61—2. On le trouve encore au xvie siècle dans ce sens: Je ne vous avois onques puis veu que jouastes a Monspellier la morale comedie de celuy qui avoit espousé une femme mute, Rab. III, ch. 34. On rencontre aussi des puis que, qui va donner depuis que: Servt m'as bien et volentiers Des puis que tu fus chevaliers, Gautier d'Arras, Ille, 277. Puis une combinaison aprés que, formé de la préposition aprés, qui avait remplacé post, et la conjonction que; on la trouve d'abord après un substantif: Grant piece aprés que U revint Un jor seus an la chambre vint, Chrétien, Cligés, 5157—58. Des que équivaut a 1'origine simplement a „après que": 300 CONJONCTIONS Trenta tres anz et alques plus, Des que carn pres, in terra fu, La Passion du Christ, 5 et 6. Dès le xne siècle il a le sens actuel: Car le traïtres le ferma, Des que la traïson soscha, Chrétien, Cügés, 1241—42. Dès ce qu'il cuydoit estre asseur..., il se mettoit d mescontenter les gens, Commines. 353. Les conjonctions 'suivantes sont composées d'un adverbe, indiquant la rapidité et qui appartenait primitivement a la phrase principale, et que: lues que, maintenant que, en es le pas que, si tost (tantost) com {que), manés (manois) que, erramment que, Incontinent que, soudain que, aparmens que, d'abord que, desormais que et lorsque. Cette dernière conjonction apparait pour la première fois dans Chrétien de Troyes et reste rare dans la vieille langue: Cil s'an vont isnelement tuit, Lors que cele l'ot comandé, Cligés, 5486—87. Enfin il faut citer ici ou que, qui, comme nous Tavons vu au § 348, exprime aussi la simultanéité: Ou que veit Olivier, volentiers i parolet, Pèlerinage, 824. Plusieurs de ces conjonctions ont eu une courte existence. C'est qu'elles sont pour une partie des formations savantes; aussi les trouve-t-on surtout dans la littérature scientifique, qui avait besoin de distinctions plus fines que les chansons de geste. Ainsi on ne rencontre plus au xvie siècle manois que et lues que, tandis que soudain que et incontinent que sont alors en train de passer hors d'usage: Soudain qu'elles sont a nous, nous ne sommes plus a elles, Mont, III, 5. — Et pour chastier sa femme, incontinent qu'il fut de retour en sa maison, Amyot (Darm., p. 154). — Et au xvne siècle encore: Soudain qu'elle m'a vu Ces mots ont éclaté..., Corn., Veuve, IV, 1, 1181. CONJONCTIONS DE POSTÉRIORITÉ 301 Incontinent qu'il croira que mes gens Seront couchés et dans leur premier somme, II se rendra devers mon cabinet, La Font., Contes, V, 3. Subit que est une formation savante qu'on trouve assez souvent au xvie siècle: Subit que M. de Quise vic l'artillerie assise, Pavé (Brunot). D'abord que est trés usité au xvne siècle: J'ai vu un jeune homme avec elle qui s'est sauvé d'abord qu'il m'a vu, Mol., Mal. Imag., II, 7. — Aussi d'abord que je vous ai vu, vous ai-je connu comme si je vous avais nourri, Scarron, Roman comique. Désormals que commence a vieillir au xvne siècle, tandis que aussitót que devient une des conjonctions les plus usitées. Vaugelas, I, 361, condamné dès lors que, qui aujourd'hui est archaïque: Mais dès lors que 1'on parle, nous ne pouvons laisser s'étabür d nos dépens la prescription de silence, Le Temps, 17 février 1915. „A même que, pour „en même temps que", n'est point une phrase de la Langue", déclare 1'Académie en 1704; cf. Vaugelas II, 190. Si tost com, fréquent en vieux francais, est resté dans la langue sous forme de sitót que: E si tost cum il ot la dlgnité emprise, Les mals murs a guerpi e secuier servise, Saint Thomas, 551—52. Dame, mes pere me pria Que por rien nule ne leissasse Qu'an Bretaingne ne m'an alasse, Tantost con chevaliers seroie, Cligés, 4313 et suiv. Ainsi comme li rois et li arcevesques de Rains en revenoient, si leur prist maladie granz, Mén. de Reims, 335. Ainsi que la pauvre femme étoit d son premier sommeil, entra ce valet, Marg., Heptaméron, Nouv. II Rem. On trouve quelquefois a ce que avec le sens de „dès que": A che que // le sent lassé, Va molt laidi e reüsé, Tristan Mén.. 299 et suiv. (dans Romania, XXXV, p. 506). — Pour mafs que cf. §360. 302 CONJONCTIONS Conjonctions causales1) Conjonctions 354. En latin classique quod et quia expliquent, latines. quoniam, quandoquidem, siquidem motivent 1'action et signifient donc „puisque"; cum, conjonction temporelle, prend souvent un sens causal et amène en général une subordonnée qui précède la principale; quando, qui lui aussi peut être une conjonction de temps — en général il est adverbe—, s'emploie en latin aussi avec la valeur causale de „puisque". Déja dans Plaute: Quando ita tibi lubet, vale at que salve, Cistellaria, 118. Age, libertate decembri, Quando ita maiores voluerunt, utere; narra, Horace, Sat., II, 5, 5. Rem. 1. Quod causal se rencontre souvent après les verbes affectifs, oü il alterne avec la constritótkm dite „Accusativus cum Infinitivo". Rem. 2. Si on nie une cause, on se sert de non quod, non q u o: quia indique une cause réelle. Pourtant la distinction entre quod et quia s'efface dès le premier siècle. En latin postclassique quod est souvent remplacé par e o quod et pro eo quod, „par cela que", qu'on trouve d'ailleurs déja dans Cicéron: Tibi . . . pa nis non deerit . . . eo quod oboedieris verbis meis, Grég. de Tours. — Mais c'est surtout quia qui étend son domaine aux dépens des autres conjonctions causales, cf. § 340. 355. De toutes les conjonctions causales latines que causal. restent en francais seulement que, quant de quando, com de quomodo. Les exemples oü 1'on trouve que seul comme conjonction causale sont rares, et encore peut-on y traduire que par „car": Sovre les plez ne puot ester Que toz les at il condamnez, S. Léger, 165—6. Pourtant on Ie trouve dans quelques cas spéciaux, p. ex. après des verbes comme bldmer, mercler: 1) O. Rohte, Die Kausahatze im franz., thèse Göttingen, 1901. CONJONCTIONS CAUSALES 303 Jet bldsmoe qu'il me mandat, Béroul, 357. On se sert ici aussi de la locütion de ce que, qui est seule usitée aujourd'hui. On trouve encore que amenant un motif après une proposition interrogative, emploi qui s'est conservé jusqu'a nos jours; dans ces sortes de phrases, dont le caractère affectif est trés prononcé, on comprend qu'on ne choisisse pas une conjonction intellectuelle comme pour ce que, paree que. Avés vos de gent garde, que si estes armé? Aiol, 1737. Toutes les terres d'Europe sont-elles défrécfües et ameublies que tant d'émigrants s'en aillent vers des pays loiniains, Le Soir, 17 juin 1922. Puis, que est fréquent après un verbe comme faire: Que fois fist li reis Hugue, qu'il herberfat tel gent, Pèlerinage, 483, mais on trouve aussi la construction moderne en ce que et de ce que. Enfin, que s'est conservé dans non que, ce n'est pas que, qui nient la réalité de la cause, et dans c'est que. Une extension de que causal est le que exclamatif après une interjedtion: Deus! qu'or nel set li cuens o le vis fier! Cour. Louis, 2084. Lasse, que n'ai un coltel dont m'ocie! Deus! quel dulur que ü Francets nel sevent! Roland, 2723 et 716. Valeur de que 356. En général la phrase amenée par que est précisee. précisée par une préposition causale, suivie ou non d'un pronom déterminatif: por que, por o que, por go que, même por chose que. Vers la fin de la période du vieux francais on trouvera d'autres formations comme vu que, a cause que. Por go que est surtout fréquent après les verbes affectifs: Mais por ice le vous ai demandét Que de mecines cui je savoir assés, . Raoul de Cambrai, 6890. La conjonction que peut même manquer: Por gol vos dl d'un son fil vueil parler, Alexis, 15. 304 CONJONCTIONS On trouve pour que encore au xvie siècle: Pour aucun temps il cheut au Ut malade, Pour que son cceur d'elle estoit séparé, Oct. de S. Gelais, Hist. d'Eurialus et Lucrèce. Por tant que, qui se maintient également jusqu'a la fin du xvie siècle, est fréquent chez Chrétien de Troyes: Si Varna tant, quant il Ul vit, Qu'il an fu morz, si co me an dit, Por tant qu'/V ne Ui pot avoir, Cligés, 2769 et suiv. Puis que et des que, qui indiquent primitivement le temps, prennent eux aussi un sens causal: Sire, nel vos celerai plus, Des au'il vos piest que jet vos die, Chrétien, Chev. au lion, 3648—49. Puis qu'a moultier Ui vix traire, Pren feme de haut parage, Auc. et Nic, 3, 11. On trouve cette conjonction déja dans S. Léger: svSejós ^n un monstier me laisse entrer Pois que nen pois lau voit ester, S. Léger, 95—6. Vu que: Ce ne seroit point par necessUé, veu que, Dieu mercy, nostre langue est tant riche..., H. Estienne, Conformité de la Utngue grecque, Préface (Darm., p. 132). Par (o que est rare en vieux frangais et ne se trouve que dans des textes qui ont un caractère savant: En grant peine nus mist, Par go que li man/at Co qu'Eve li du nat, Phil. de Thaun, Comput, 533. Par ce que et pour ce que, qui primitivement se distinguent, le premier indiquant le 'moyen, le second la cause, se sont de bonne heure confondus; au xvue siècle la lutte n'est pas encore finie, mais Vaugelas, I, 117, trouve par ce que „plus doux", et 1'Académie condamné pour ce que en 1704. Rem. Comp. le chap. des prépositions pour i'histoire de pour et de par. CONJONCTIONS CAUSALES 305 A cause que et considéré que disparaissent également: Et a cause qu'il n'étoit de maison de même qu'elle, il n'osoit découvrir son affection, Marg. d'Angoulême, Heptam., Nouv. IX. — Mais une nouvelle conjonction nait, atlendu que, qui, d'après Vaug, II, 250, „commence a se rendre fort commun dans le beau stile"; elle se trouve déja dans des textes du xvie siècle: Attendu que on vous a par tant de foys admonesté, vous avez tort, Palsgrave, p. 884. D'autant que a aussi le sens causal: Puis après afin que, d'autant que les mesmes cruautez pouvoyent bien tost après estre exercées contre beaucoup de povres personnes, les nations estranges fussent... touChées..., Calvin (A. Lefranc, Grands Ecrivains du XVIe siècle, p. 318 et suiv.). Si Ton veut appuyer, on peut se servir aujourd'hui de par cela même que: Par cela même que je connais les choses, les choses n'existeni pas, Flaubert, Tentation de Saint Antoine, p. 96. confoncöons: 3S1'. Nous avons vu 1u' a remplacé tant d'autres conjonctions, amener une est aussi entré en lutte avec si. Dans des phrases condition. _. , , . , . , . comme Qu« reconnaisse son ton, et /e lui pardon- nerai, il est vrai, c'est toute la phrase qu'il reconnalsse qui exprime la supposition et que n'y équivaut donc pas a si. On le trouve quand deux conditionnelles sont reliées ensemble: Si vous y allez et que vous le voylez, dltes-lui qu'il n'y a plus de danger. Dans ce cas, le latin ne répétait pas en général la conjonction si et mettait le même mode dans les deux phrases. La vieille langue pouvait dans ce cas se servir de deux constructions : Et se nus coniredire m'ose... Et die que li gentil home... Sont de meillor condicion, J. de Meung (Clédat, p. 210). Se sui ocis et vos dire /'orrez, Roland, 359a (éd. Stengel), c.-a-d. que devant la seconde phrase, la conjonction manque et qu'on se sert de l'indicatif ou du subjonctif. C'est au xme siècle que la conjonction que, devenant de plus en plus fréquente, apparait aussi devant le subjonctif. Cette tendance est peut-être renforcée par le fait que la particule que peut remplacer aussi d'autres conjonctions, notamment les conjonctions temporelies comme dans: Quant vient al seir, Que virent Vair teniècle et neir1), Thèbes, 3057. Autres 360. Nous avons vu que nisi a disparu de la conjonctions. langue. Quand la condition est exprimée par un verbe, il est remplacé par si suivi d'une phrase négative: Si vous n'obéissez pas, vous serez puni, ou par d moins que, conjonction qui ne fait que relativement tard son apparition dans la langue. *) II est peu probable que cette construction dérive du latin. II est vrai que dans Plaute on trouve quelques vers oü quod équivaut a si ■ Si hercle tantillum peceassis, quod posterius postules Te ad verum convorti, nugas muiier mat/nas egeris, Rudens, 1148, = „si tu réclames ensuite" = „tu auras beau réclamer"; cf. Lejay, Beu. philol. de Uit. et d'hist. anc., 1912, p. 259. 308 CONJONCTIONS Rem. 1. On la trouve quelquefois construite avec un substantif au XVIIe siècle: A moins que d'une tête un si grand corps chancelle, Corn., Othon, III, 3, 858, et encore aujourd'hui, mais rarement: Les mêdecins disent qu'H moins d'un miracle, il sera mort demain. Peu a peu on a formé d'autres loeutions conjonctionnelles fors que, fors ce que, fors tant' que: Car j'ai tel duel qu'onques le roi Out mal pensé de vous vers moi Qu'il n'i a el fors que je muere, Béroul, Tristan, 109—11. Puis sauf que, loin que, outre que, au lieu que et avec des participes hormis que, pourvu que, posé que, supposé que: Tu les avras Par covant que tu me diras An quel leu li corz fu trovez, Chrétien, Guill. d'Angleterre, 2101—03. Et li rois dit que... Por ce que il s'en ressövaigne Qu'il retornera, Ibidem, 2715. Ne li estuet ostel changier Por qu' (= pourvu que) oiist auques a mangier, Roman de Renart (Clédat, p. 166). Car nus ne la (= virginité) puet avoir..., por qu' (= pour peu que) il ait eu volenié de charnel assembiement, Queste Oraal, p. 213, 1. 31. Dans ne... que, qu'on trouve dès le xne siècle, on a primitivement le que comparatif, oü le comparatif est sous-entendu. L'originë de cette construction se voit trés bien dans une phrase comme: Ne cuide qu'il l ait nulul Que seulement son clerc et lui, Gautier d'Arras, Ille et Galeron, 1819. En parlant des conjonctions adversatives nous avons déja traité mais que (= pourvu que, excepté que); cf. § 334. Citons encore quelques phrases: Ne sai que je vous puisse dire, Mais que Ganor avons perdue, Gautier d'Arras, Ille, 5728. CONJONCTIONS CONDITIONNELLES 309 On le trouve encore quelquefois au xvne siècle, en général avec une valeur temporelle; les exemples suivants montrent comment on a pu passer du sens de pourvu que a celui de quand: II promit qu'il le feroit, mais qu'/te tdchassent aussi de leur cöté d disposer les esprits, Vaugelas, Quinte-Curce, VI, 2. — Vous aurez le Grand Roman des Chevaliers de la Glotre, mais qu'// soit achevé d'imprimer, Malh., III, 263. Hem. 2. Vaug., I, 268, dit: „Mais que pour quand, est un mot dont on use fort eu parlant, mais qui est bas, et qui ne s'escrit point dans le beau stile". Th. Corneille et 1'Académie le bannissent entièrement de la langue. Je vous donne ma voix pour dire la votre, par ainsi que vous ne nous fassiez point pleurer, Marg. d'Angoul., Hept., VII. Rappelons encore l'emploi de sans que, suivi de l'indicatif, avec la signification de „si ce n'est que": // m'a fait faire bien des complimens, et que sans que son équipage étoit bien fatigué, tl serolt venu me voir; et moi, sans que je rien ai point, Sév., IX, 269.1) — Et encore aujourd'hui parfois: Ne dépensez rien, sans que cela soit nécessaire. — Enfin, citons encore les con-, jonctions qui s'emploient en francais moderne: en (au) cas que, d condition que, pour peu que2). Rem. 3. Les conjonctions latines dum, modo, dummodo '..% 238 lil et § 239) sont rempiacées par de nouvelles formations. Outre celles que nous avons déja passées en revue: por que, pourvu que, mais que, citons moyennant que: Je vous promets d'oublier tout, moyennant qu'/7 vienne, La Font., Contes, II, 1, 157; puis portant que: Je sui prest que je face vos volentez, por tant que je voie que ce soit Mens a fere, Queste del Saint Graal, -19,1. 15. Conjonctions concessives3) Les conjonctions 3"i- Pour exprimer une idee concessive, le latin latines pouvait se servir du subjonctif seul, ou de dif- disparaissent. £. ,. , rerentes conjonctions, ou encore de pronoms et adverbes relatifs indéfinis. 1) Cf. § 248. 2) Cf. § 366, Rem. s) H. Johannsen, Der Ausdruck des Concessivverhdltnisses im Altfranzösischen, Diss. Kiel, 1884. — F. Brüss, Der Ausdruck des Konzessivverhdltnisses im Miilel- und Neufranz., Diss. Göttingen, 1906. — Tobler, III, 1, Quoique, malgré que, Men que. — L. Foulet, Quelque (Rom., XLV (1919), p. 220—249). 310 CONJONCTIONS a) Sit hoe verum, proficiscendum tarnen non erat. b) Quamquam, etsi, tametsi, cum, quamvis, licet, e t i a m s i. Les trois premières conjonctions expriment une concession réelle: Nam etsi nullo perlculo legionis delectae cum equiiatu proelium fore videbat, tarnen commiüendum non putabat, César, De bello galllco, I, 46. — Quelquefois ces trois conjonctions étaient employees dans la principale: Quamquam quid loquor? Ut (licet) desint vires, tarnen est laudanda voluntas. Quamvis exprime un degré et il est donc, en latin classique, presque toujours suivi d'un adjectif ou d'un adverbe: Assentatio quamvis perniciosa sit, nocere tarnen nemini potest nisi qui delectatur (= quelque pernicieuse qu'elle soit). Le mot tarnen dans la principale souligne trés souvent 1'idée concessive. c) quisquis ou quicumque, quotquot ou quotcumque, utut ou utcumque, ubiubi et d'autres: Quidquid id est, timeo Danaos et dona ferentes, Verg., Aeneis, II, 49. d) Citons enfin sive... sive, seu... seu, qui amènent une alternative: Veniet tempus mortis, sive retractabis, sive properabis, Cic, Disp. Tuscul., I, 76. En latin postclassique une confusion se produit entre plusieurs de ces conjonctions, ainsi entre licet et quamlibet, quamquam et quamvis. II est vrai que cette confusion se rencontre déja pendant la période classique: Quamvis carebat omnia, Nepos, Miltiades, 2, oü quamvis a le même sens et est suivi du même mode que quamquam. 362. Nous savons déja qu'a 1'époque préromane la perte des conjonctions a dü être considérable. II est vrai que les textes latins ne nous en fournissent pas la preuve, mais 1'état des choses en roman prouve plus que suffisamment la vérité de cette assertion: de toutes les conjonctions concessives du latin le frangais ne garde aucune tracé. II se tire d'affaire: Htl a) en se servant d'une autre tournure; des phrases Idee concessive, ' ' 1 exprimée par comme la suivante sont particulièrement fréquentes une principale. ■ en vieux francais: CONJONCTIONS CONCESSIVES 'ill Qui le cor ot et tantir et souner, S'il est malades, lués revient en santé Ja n'avera tant grant enfermeté, Huon de Bordeaux (Clédat, p. 50). Puis, on rencontre des tournures comme: Tu as beau appiler des escus ensemble, ils n'ont garde de s'esChauffer, ■ Palissy, p. 68; ou: Le croira qui voudra, moi je suis sür de mon affaire, d'autres encore. Le subjonctif b) en se contentant du subjonctif seul: seul- Li reis Hugue li Forz nen at nul bacheler, De tote sa maisniede, tant seit forz et membrez, Ait vestut dous halbers et dous helmes fermez, Si seit sor un destrier corant et sofornét..., Pèlerinage, 454 et suiv. (Clédat, p. 40) De même dans 1'alternative: Qu'il soit bon on mauvais... Dont vient cela, mon amy Pierre, que jamais nul ne se contente de son estat, soit que Fortune le luy ait offert et donné, ou que luy-mesmes l'ayt choisi pour certaine cause et raison, B. Des Périers (Darm., p. 123). Durant mon mal, soit que vinse d me taire, Las de crier, soit que me prinse d braire, Marot, éd. Jannet, p. 106. 363. c) Enfin le francais a créé une foule de conjonctions concessives: si. 1) La conjonction si peut facilement prendre une nuance causale et concessive: Se tu es richês et manani, Ne soies orgueilleus por tant, Méon, Fabl. et Contes, II, 138, 12. Cette fonction, qui est restée en frangais moderne, s'explique par le fait que la conditionnelle aussi bien que la concessive peuvent se rapprocher des causales (§ 238). Le sens concessif est encore plus clair dans les locutions conjonctionnelles: encore si, nets si (= même si), portant si, meisme si, et dans une phrase comme: Or pense de toy liee offrlr A encore un petit souffrir, S'ainsi est qu'il te viengne ennui, Miracle de Berthe (Clédat, p. 428). 312 CONJONCTIONS 2) L'emploi de la conj'onction quand avec sens quand. . .. - ; . . concessif est relativement recent. On exprime cette idéé plus clairement par quand même, quand bien même: Et ne nous messieroit pas, quand la passion nous transporteroit d la faveur de si sainctes formes, Montaigne (Darm. p. 20). — Quand mesme tous les esprits des humains seroient assemblez en un, ils rien sauroyent avoir fait le plus moindre trait, Palissy, p. 134. De quelque amant pour moi que mon père eüt fait choix, Quand d ce grand pouvoir que la valeur vous donne Vous auriez ajouté l'éclat d'une couronne, Quand je vous aurais vu, quand je l'aurais haï; J'en aurais soupiré, mais j'aurais obéi, Corn., Polyeucte, II, 2. R e m. Ores que amène au XVIC siècle quelquefois une phrase concessive: Ores QU'il sceust parler le Grec, si voulut-il haranguer aux Atheniens en Latin, E. Pasquicr (Darm. p. 140). Maupas et Oudin le connaissent encore. Adverbes et 364. 3) Dès 1'époque la plus ancienne on trouve pronoms des adverbes ou des pronoms indiquant indiquant . , i'intensité. 1 intensite: En non Deu, j'ai bel ami, Cointe et jolt, Tant soie je brunette, Clédat, p. 330. Cette tournure se rencontre encore au xvne siècle: Vous d qui la mort même, de tant prés que vous l'ayez vue, n'a jamais pu faire peur, Voit., I, 124; — ou avec inversion: Même ses courroux, tant soient-ils légitimes, Sont des marqués de son amour, Malh., I, 24f>, 23. La construction moderne si grant qu'il seit se trouve déja dans le Chastoiement d'un père d son fils, XXXIII, 120. Je t'aime toutefois tel que tu puisses être, Corn., Cinna, III, 4, 1033, tournure, condamnée par Vaugelas, II, 136, mais qui se rencontre encore parfois de nos jours (Brunot, La pensée et la langue, p. 885). CONJONCTIONS CONCESSIVES 313 Tous soiez joenes, si estes vos tes Que vos devez par droit estre honorés, Enfances Ogier, 7251. Tout ait Diex faites les choses, Au moins ne fist il pas le nom, Roman de la Rose, 7084—^5. Dans le premier exemple tout est suivi d'un adjectif et pourrait encore indiquer 1'intensité, dans le second ce. sens s'efface et tout est devenu synonyme de quoique1). Rem. De même en provencal moderne: Tous que siès lou ftambèu dau coumerce croumpa quatre sous de filousoufia, Germ. Rom. Monatschrift, 1915, p. 218. 365. 4) La concession peut porter, non sur 1'action, mais sur la personne qui fait ou subit 1'action, sur le lieu, sur la facon dont elle se produit. De la Tintroduction de pronoms et d'adverbes interrogatifs: qui . . que, quoi . . que, oü . . que, quel . . que, comment . . que, quant . . que (tombé en désuétude au xvie siècle), enfin combien . . que, qui, perdant son sens primitif, a été trés fréquent dans le sens de „quoique"; et les formations savantes comme quiconque, quelconque suivies ou non de que2). La plupart de ces locutions se trouvent dès le xne siècle: Serai fe vostre, ou que je soie, Guill. d'Angleterre, 1570. Qui que lor discorde compert, II n'i avront ja nul danger, Ge rien met hors rois ne prelas, Ne juges de quelconque guise, Roman de la Rose (Clédat, p. 206). ' ■ Mes il met an son covenant Que la corone li remaingne, Comant que li afeires praingne, Chrétien, Cltgés, 2553 et suiv. Cument que chascuns le felst, Qui que murust, qui que vesquist, Velr est que Guillelmes venqüi, Wace, Rou (Clédat, p. 252). 1) CI. 1'étude de Beyer, cité § 47, note. *) Cf. aussi § 130. SNEYDERS DE VOGEL, Syntaxe historique. 2m pour: l'amour pour Dieu. Dans tous les autres cas le génitif a été remplacé par de suivi de 1'accusatif: la maison de mon père, l'amour de Dieu, plusieurs de ces soldats, l'Art d'aimer, le nom de Pierre. II et III. Après un adjectif et un verbe le génitif a également disparu devant la préposition de: plein de bonté, vide de sens; — accuser de trahison, penser de quelqu'un (aujourd'hui d quelqu'un), se souvenir de; mais oublier quelqu'un. D a t i vu s / Le datif remplacé 379, Le datif aide a exPrimer plusieurs rapports: par des a) Complément indirect: dare alicui aliquid. Hoe prépositions. ^,s#. Patriae solum omnibus carum est. b) Dativus commodi ou incommodi: Non scholae, sed vitae LES CAS LATINS 333 discimus. Hoe mini faciendum est. Souvent le latin doit se servir de pro: Pro patria mori. c) Dativus finalis :_Pairia mihi cordi est. Hoe tibi laudi est. Ici éncore nous constatons que les prépositions ont remplacé la terminaison casuelle: a) Je donne une toupie d Pierre. Rem. Comme la ligne de démarcation entre complément direct et complément indirect est souvent trés peu nette, il y a des verbes intransitifs en latin qui sont devenus transitifs en francais: persuadere alicui, minari, parcere, etc. Cf. § 192 et suiv. b) Pour exprimer 1'intérêt qu'une personne ressent pour une autre, la préposition p r o a remplacé le datif: Vivre pour ta patrie. D'ailleurs, déj a en latin classique pro faisait concurrence. a la terminaison flexionnelle. Avec des adjectifs comme amicus, benevolus on trouve aussi les prépositions er'ga, adversus, in; après u til is,, necessarius on met souvent ad. c) Quand on veut exprimer un but, on se sert en frangais d'une préposition avec un sens final: attribuer d honneur, tenir d cosur, a moins que la langue n'ait pris le substantif comme prédicat : ainsi impedimento esse se traduit par être un obstacle; infamiae esse par être une infamie. Accusativus La flexion de ^8"' L'accusativus s'emploie surtout comme comi'accusathms plément direct. Ici la langue a continué l'emploi ses p ue. ,atjn^ rnaigr^ i'hésitation qui se remarque pour quelques verbes, comme deficere aliquem. Seulement comme les terminaisons se sont perdues, il n'y a que Tordre des mots qui puisse distinguer 1'accusatif du nominatif. Dans les exclamations 1'accusatif s'est maintenu en vieux frangais: Quel pecié, Wace, Brut, 7163. Rem. En espagnol on rend 1'action qui passe sur une personne par la préposition a- Adoraba a su hija, J. Valera, Pepita Jiménez, p, 14. 334 PRÉPOSITIONS Ablativus 381. L'ablatif du latin classique renferme les sens Le latin se sert ... .. . souvent de qu expnmaient onginairement trois cas: prépositions pour j L'ablativus proprement dit pour indiquer le indiquer le point ——- — — de départ. point de depart. II. L'instrumentalis. III. Le locativus^ I. a) Sej) a r a t i v u s: ceder e (ex) pa tria, abstinere iniuria, Roma proficisci, Hercules Jove natas erat. En général, pourtant, le latin ne se contentait plus de la seule terminaison flexionnelle pour exprimer le point de départ, mais ajoutait une préposition: ex, ab urbe proficisci, seiungere aliquid ab aliqua re. Ces deux prépositions ont été supplantées a leur tour par de, cprr~est seul employé actuellement b) L'ablativus limitationis exprime l'idée „de quel cóté": nomine, specie „en apparence", Agesilaus altero pede claudus fuii, „Agésilas boitait d'un pied", meo iudiclo, „d'après mon jugement, a mon avis". Ici encore le latin classique connait l'usage de prépositions: Hoe est ad severitatem lenius et ad communem salutem utilius = „au point de vue de". — In hoe vos admiror = „en ceci". — Erat ex omni parte perfectus = „de tous points". Le francais se sert de d, de, ou, quand il veut exprimer plus clairement Ie rapport, de quant de, quant est de, endroit, endroit de, au regard de, etc. c) Ab latiy_u_s comparationis: melle dulcior, „plus doux que le miel". Rem. Nous avons vu au paragraphe 376b>s comment l'ablatif a été remplacé par a b, puis par d e, et que l'emploi de cette dernière préposition, fréquente en vieux francais, s'est réduit considérablement dans la langue moderne. 382. II. A l'instrumentalis appartiennent L'lnstument al Is, remplacé les cas suivants: peu è peu par fl) instrument: pedibus et unguibus se defendit. des prépositions. ■ - -, . . ,. Dans ce cas la préposition cum, „avec , qui indique Taccompagnement, de ou par^ont remplacé l'ablatif: se défendre avec ses ongles, se défendre par écrit. LES CAS LATINS 335 De son aile, De ses pieds, de son bec, l'oiseau le rompt enfin, La Font, Fables, IX, 2. b) cause: Divina menie (a deó) mandus universus administratuf. Quand la cause est un nom de personne, notamment au passif, le latin se. sert de la préposition a b indiquant le point de départ et remplacée plus tard par d e. Cet emploi s'est généralisé: suivi $un seul hussard, mais la préposition par, qui originairement n'indique que le moyen, lui a fait concurrence et Ta supplanté dans beaucoup de cas: être vaincu par l'ennemi. Cette tendance se manifeste d'ailleurs dès 1'époque classique: Si per populum Romanum stipendium remittatur et dediticii subtrahantur, César, F>e bello gall., I, 44, 5.1) La cause s'exprime souvent en latin classique par des prépositions propter, prae, ob: propter misericordiam, prae ira, laborare ex pedibus (le point d'ou part le mal), laetari re, a cöté de laetari de re. e) L^MjJj^u^s_jn^ji^jirae indique, auprès de compaTatifs, la différence de mesure qui existe entre les deux objets' comparés: multo maior, „de beaucoup plus grand"; dimidio minor, „plus petit de la jnpitié" 2). d) L'aJjTjnLjcu s modi se construit en général avec cum, mais cette préposition peut manquer, si le substantif est accompagné d'un adjectif: Otium cum dignitate. — Flumen Arar (Saöne) in Rhodanum inf luit incredibili lenitate. — Aequo animo, bona mente (d'ou l'adverbe bonnement), casu, iure, silentio, eo modo. Mais aussi per vim, per 1 i tteras, in huncmodum, de improviso. En francais avec courage, par hasard, en silence, de cette fagon, a sa fagon. i. -i- . 383* f - Locativus. Nous avons déja vu que Le latm classique i J n a déja en général le latin exprimait le point de départ par un ablatif. ïocatwufpar'des ®r' comme l'ancien locatif a disparu, ce cas indique préposition». aussi le lieu oü 1'on se trouve, et le temps: Athenis esse, eo tempore, vere, autumno, etc. Mais la pré- x) H. Kaliin, Etude sur 1'expression syntactique du rapport d'agent, 1923. 2) Tobler, I, XXV, de employé devant une expression désignant Ia mesure de différence. 336 PRÉPOSITIOMS position est ici encore de rigueur, quand le repos est exprimé par un substantif qui n'est pas un nom de ville: in urbe esse, in provincia, in vico, etc, et pour le temps, quand le substantif n'est pas accompagné d'un adjectif: In bello, mais: Bello Punico secundo, a 1'exception des substantifs qui expriment déja par eux-mêmes le temps: node, vere, etc Ici encore on voit que la construction francaise est déja propre au latin. Résumé, méthode 383bls. En somme, nous constatons donc que déja è suivre. en iaun ia déclinaison ne suffit pas a exprimer tous les rapports possibles d'un substantif dépendant d'un autre substantif, d'un adjectif ou d'un verbe. II se sert de toute sorte de préposition, et dans beaucoup de cas déja la construction actuelle est la plus fréquente, qui seulement n'a encore pu s'introduire devant des substantifs employés fréquemment dans un sens trés précis comme Romae, „a Rome", vere, „au printemps"; et pourtant la phrase de Suétone, citée- a la page 287, note, prouve qu'ici encore la construction synthétique disparait bien vite de la langue parlée. Nous pourrions reprendre maintenant ce que nous vênons d'esquisser, en étudier les détails, nous demander de quelle fagon la langue a rendu aux diverses époques de son existence les nuances exprimées par les cas. Nous y renongons pourtant, paree que Tapplication rigoureuse de cette méthode nuirait grandement a la clarté. Nous verrions la même proposition revenir a plusieurs reprises avec des fonctions différentes. Or, ces prépositions ellesmêmes ont subi des transformattons intéressantes a étudier, avant qu'elles en soient arrivées a pouvoir rendre les sens du génitif, du datif, de l'ablatif; enfin, la langue a perdu des prépositions, d'autres sont nées; il vaut donc mieux étudier les prépositions dans leur ensemble, sans en hacher 1'histoire en de petits morceaux. 384. En passant en revue les prépositions latines Perte de plusieurs , . ... j prépositions nous constatons que le latin avait beaucoup de latines, nouvelles prépositions qui n'ont pas persisté en frangais: formations. ,1 \ . adversus, circa, circiter, cis, citra, cir- c u m, e r g a, i n t r a, i n f r a, o b, p e n e s, p o n e, post, prépositions qui sont restées 337 praeter, prope, propter, qui étaient suivis de 1'accusatif; absque, a, ab, abs, co ram, clam, cum, ex, e, te nus, prae, qui demandaient l'ablatif; sub et subter, qui régissaient "tantöt 1'accusatif, tantöt l'ablatif; enfin, les postpositions eau sa, gratia, tenus. Celles qui sont restées sont ad, apud, ante (du moins dans les composés), contra, extra, inter, iuxta, per, secund u m, trans, versus, ultra; puis de, sine et pro, enfin super ou supra et in. Les pertes sont donc considérables — remarquons pourtant que ce sont presque toutes des prépositions peu usitées qui sont tombées — mais la langue a trouvé une large compensation dans de nouvelles formations prépositionnelles. Ces nouvelles prépositions, la langue les a formées: 1) en changeant la fonction d'adverbes (p. ex. sous de subtus), d'adjectifs (sauf, long), de participes (pendant, vu), de substantifs (chez). 2) par composition: dans, derrière, malgré, etc, oü le sentiment de la composition s'est perdu; en dehors de, vis-d-vis, etc, oü au contraire ce sentiment est encore trés vif. II. Prépositions latines qui sont restées en francais 384b". De toutes les prépositions latines ce sont surtout ad et d e qui ont eu un succes extraordinaire, puisqu'ils entrent dans toute sorte de combinaisons, qu'ils en sont arrivés a exprimer les nuances les plus variées, voire même a ne plus exprimer rien du tout. Nous essayerons de tracer leur histoire après avoir passé en revue les autres prépositions. apud od Apud1) indique en latin classique un proche voisinage: apud Caesarem „chez César"; apud milites „devant les soldats"; apud ou ad Cannas „prés Cannes". Dans la latinité postclassique son sens s'étend dans deux direc- l) F. G. Mohl, La préposition cum et ses successeurs en gallo-roman (Baast. z. rom. Phil., p. 61 et suiv.). — Löfstedt, p. 252. — Santessou, La particule cum comme préposition dans les langues romanes, 1521. — J. Meiander, Le sor.t des prép. cum et apud dans les langues. rom. (Mél. Vising, 1925, p. 359—387). 338 Prépositions 1 tions. D'un cöté il signifie parfois „dans": apud urbem Nolam V „dans la ville de Nola", sens qu'il a d'ailleurs dès le latin archaïque dans la langue familière: ld adeo argentum ab danista apud Thebas sumpsit faenore, Plaute, Epidicus, 53. D'un autre cöté il remplace cum, qui au ive siècle semble avoir disparu du gallo-roman Cum apud christianos pueros ad stadia litterarum exerceretur, Grég. de Tours. Les sens cum „avec" et de apud „chez" se retrouvent en vieux francais: 1°. Li emperere s'il se cumbat od mei, Roland, 3288 (Clédat, p. 32). 2°. Pur amur lur preez ke od lui hebergassent, S. Thomas, 2240. II se rencontre souvent dans la combinaison ensemble od: Ensemble od els sainz Gabriel i vint, Roland, 2395. Od a disparu de la langüe. II a été remplacé par d dans une phrase comme Li emperere od la barbe fleurie, Roland, 2605, et cela dès une époque trés ancienne: Berte aus gratis piés. De même a cöté de od tot „avec", se trouve a tot, qui est même plus fréquent: Et se partirent de Boulongne o tout leur arroi, Froissart, I, 15, 15. On rencontre encore quelques exemples de o tot au xvie siècle1). Dans la plupart des cas pourtant la fonction de od a été prise par avec ou chez. Rem. Suivi d'un gérondif ou d'un participe présent od a le sens de „& la condition de": El se nuns ne venoit avant por lui apeler, la joutice le devroit laissiet aler o pleges metanz se il les pooit avoir (Godefroy, s. v.). 386. Contra2) a d'abord le sens de ..vis-a-vis": contra, contre ~— . " . insula quae cpntra Brundisium portum est; mais en général il marqué 1'opposition: contendere armis contra aliquem; facere contra legem. 1) S. Graefenberg, Beitr. z. franz. Syntax des xvi Jahrh. Thèse Göttingen, 1884. 2) R. Reyelt, Ueber den Gebraach und die begriffliche Entwtcttung dér franz. Praep. vers, envers, devers, par devers, contre, encontre, a 1'encontre de. Diss. Göttingen, 1911. PRÉPOSITIONS QUI SONT RESTÉES: APUD, CONTRA 339 Le premier sens, qui était déja rare en latin, ne s'est guère conservé en francais: voir le tableau «"-contre. — Quant la royne le vit entrer ■ ■ ., si s'agenoilla contre ü et li chevaliers se ragenoilla contre li aussi, Joinv., 601. Le sens d'oppositionpar contre est toujours trés vivant: se défendre contre ses ennemis. Diez pourtant a déja attiré 1'attention sur parler contre, encontre pris en bonne part; au figuré on trouve: Estre loyal contre ton adversaire, Christ. de Pisan, I, 264. Par suite de la disparition de erga et adversus la préposition contra a étendu son domaine; elle a repoussé in, qui en latin classique lui faisait concurrence: invehi in aüquem, odium in aliquem, même elle a pris souvent la fonction de a d pour indiquer une direction: Cuntre le ciel amant est resortie, ' Roland, 2341 (Clédat, p. 30). Plus tard d et vers ont réussi a restreindre de nouveau son domaine, de sorte que M. Reyelt n'a trouvé chez Racine qu'un seul exemple de contre dans le sens de „vers": S'il part contre llion, c'est pour moi qu'il y vole, Rac, Iphigénie, 622. La proximité immédiate de deux objets est dans 1'ancienne langue également exprimée par contre: nef contre nef, Garnier, Marc-Antoine, 1471. — Nous étions épaule contre épaule, pied contre pied, Fén., Télémaque, 5. II marqué encore une idéé d'échange: Cuntre un des noz en truverat morz quinze, Roland, 1930. Vous entendez dire en Allemagne „c'est impossible" cent fois contre une en France, Mme de Staël. II s'est étendu également pour le temps: L'autrier contre le tenz pascour, Bartsch, Rom. u. Past., I, 50, 1, mais ici la préposition vers a réussi a le supplanter. De contre on tire encontre, qu'on ne trouve aujourd'hui que dans la locütion d l'encontre de, mais qui dans la vieille langue pouvait a lui seul fonctionner comme préposition: Encuntre tere en chieent les esclaces, Roland, 1981. 340 PRÉPOSITIONS On trouve d'ailleurs fréquemment contre terre avec le même sens: Cent milie Franc s'en pasment cuntre tere, Roland, 2932. 38©bls. Extra, qui donne estre en vieux francais, est d'un emploi restreint: Kor quels Deus est, estre le Seignur, Psautier d'Oxford, XVII, 34. 387. I n est une préposition trés usitée en latin. in en latin. Avec le sens 1 o c a 1, il signifie: a) „dans", avec l'ablatif, „a" avec 1'accusatif: esse in urbe, „être dans la ville"; in urbem ire, „aller a la ville". b) „sur", également avec 1'accusatif ou l'ablatif: venire in equis, „venir a cheval"; in rogum imponere, „imposer sur le bücher". Au figuré, il exprime plusieurs idees dont voici les principaies: c) „parmi": esse in clarissimls civibus, „être au nombre des plus illustres citoyens". d) sentiment „envers": comis in uxorem, „bon envers sa femme". e) temps 1) avec l'ablatif: le moment: in hoe tempore, „dans ce moment"; „après": in decem mensibus, „dans dix mois", In septem annis tremebit undique terra, Commod., Instruct., I, 41, 10. 2) avec 1'accusatif: „pour": in proximum annum, „pour 1'année suivante"; in omne aevum, „a jamais". /) manière (découlant du sens de mouvement): vertl in avem, „être changé en oiseau", desinere in piscem, „se terminer en poisson"; mugire in bovem, „mugir comme un bceuf", Apulée1). g) sens distributif: in capita, „tête par tête"; ter in annum, „trois fois 1'an, par an". Extension en 387bls. En vieux frangais, malgré ce qu'en dit francais. jyj Qerdau, l'emploi de la préposition en, tout en s'étendant dans quelques cas, s'est pourtant beaucoup restreint. a) En s'est étendu notamment devant les noms de ville, qui en latin se passaient de la préposition: R o m a e, en Rome, en Avignon; on sait que la préposition d 1'a supplanté dans cet ') Cf. H. Gerdau, Die französische Praposition en. Diss. Göttingen, 1909, p. 88. PRÉPOSITIONS QUI SONT RESTÉES: EXTRA, IN 341 emploi (ê Londres déja dans Saint Thomas, 816), tandis que en restait devant les noms de pays: en France, avec les exceptions connues: au Danemark. Cette distinction n'était pas encore tout a fait établie au xvne siècle: en Clèves, Malh., III, 182, en Alger, Corn., Menteur, V, 6, 1712, mais d'après Ménage on ne mettait en que devant les noms de ville commengant par une voyelle. b) On trouve parfois en latin postclassique i n avec la valeur de „a la facon de": mugire in bovem „mugir comme un bceuf". Cet emploi s'est étendu de plus en plus: Quos ille ma etat os volucribus do nat in escam, Commod,, Carm. apol., 912On le voit, il a même remplacé le substantif employé comme prédicat; de même: Et ero vobis in patrem pour: Et vobis pater ero. — Quodcumque allad in dotem acceperis, potes.... restituere, Apul., De Magia, 92. Cette construction s'est maintenue, mais, ce qui est curieux, on n'en trouve que peu d'exemples avant le xve siècle: // porte les cheveulx en Alle mant, Palsgrave; agir en rol, en grand seigneur. c) Ensuite en peut indiquer le moyen et la matière: payer en pièces de cent sous, un pont en bdis (pas avant 1500; la vieille langue disait uniquement de bois). Rcstridion en ^88. D'un autre cóté l'emploi de en s'est restreint francais. par suite de la concurrence que lui ont faite d'autres prépositions. a) Le sens local est toujours vivant: être, aller en ville. Vint en la chambre pleine de marrement, Alexis, 137 (Clédat, p. 10). Pourtant la nouvelle préposition dans s'est mtroduite peu a peu, et malgré la prédilection que les littérateurs semblent avoir pour en, dans seul est vraiment populaire. Le fait que en s'emploie presque uniquement devant des substantifs sans article (en volture) prouve que nous avons affaire a des expressions plutot archaïques. b) Ceci est encore plus vrai pour la signification „sur". Dans la vieille langue l'emploi de en avec cette acception est trés fréquent: SU fiert en l'helme ki gemmez fut ad or, Roland, 2288. 342 PRÉPOSITIONS Ils ne sont pas encore en terre, mais ils sont deja dans le port, Malh., II, 561. Aujourd'hui il est vieilli: la langue, qui avait un mot spécial pour le sens de „sur", n'a pas voulu garder deux sens locaux différents pour la même préposition; mourir en croix, casque en tête, même en bicyclette (a cöté de d bicyclette) sont des expressions plus ou moins figées. c) On ne trouve plus notre préposition avec le sens de „parmi, au milieu de"; entre, puis parmi ont été chargés de rendre cette idée. d) Si 1'on exprime le sentiment envers quelqu'un, on se sert de d, pour, vers, envers, de, contre. Dans cette acception encore en a disparu. On le rencontre parfois au moyen age: L'amour qu'il avoit en son peuple, Joinv., 20. e) Par contre on 1'emploie toujours pour le temps: en dix jours peut signifier dans la vieille langue „en dix jours" et-„dans dix jours"; on voit qu'ici encore dans a pris en francais moderne une des fonctions de en. On ne saurait plus se servir de notre préposition dans les tournures comme in proximum annum, qui exprime le but, excepté peut-être dans d'aujourd'hui en nuit, expression figée. g) Le sens distributif de en s'est également perdu; ce sont par et pour qui ont pris cette fonction: trois fois par an. Mais même dans les fonctions qui se sont conservées les prépositions a, enz, denz, dedenz ont considérablement réduit le domaine de en. Elles ont fait si bien que d et surtout dans ont presque complètement pris la place de en. Si aujourd'hui nous assistons a une sorte de renaissance de en, elle est toute littéraire et n'a pas pénétré dans les couches populaires. Dans la vieille langue en entre dans de nombreuses tournures, qui se sont perdues depuis. Cause phonétique 389- Ce in urbe Romae. Winkler au contraire voit dans fa ville de Paris un génitif partitif Locutions oü 409. Enfin relevons que de entre dans la composition entre de. de plusieurs prépositions: devant, d'après, delez; — - prés de, auprès de, hors de. Cf. § 412 et 419bis. iii. nouvelles formations A. Observations générales Les cas 41 v- La Perte considérable de prépositions latines rempiacés par a trouvé une large compensation dans de nouvelles des prépositions. ? _ ,, , , formations auxquelles la langue a eu recours dans les différents siècles de son existence, en latin postclassique et en vieux frangais aussi bien que dans la langue moderne. On peut distinguer plusieurs formations: 1) On a pris des mots déja existants, adverbes, substantifs, participes, adjectifs, dont on a changé le sens et la fonction. 2) On a formé des locutions prépositionnelles par la réunion de plusieurs mots. «. m*mx 411. a) Substantifs: foris, casa, latus. Mots déja existants devenus b) Adjectifs: long, proche, présent, sauf, tout. prépositions. c) Participes passés: prés, excepté, osté, hor mis, horspris, vu, attendu, considéré, passé. d) Oérondifs: pendant, durant, obstant, nonobstant, suivant, touchant, concernant, moyennant, joignant, attenant. e) Adverbes: subtus, *postius, "antius. Prépositions 412. a) a Taide de préfixes: 1) deintus composées. > denz> dedenz, de -f retro > derrière, devers, depuis, dehors, devant, deed, deld. 2) avant, après, amont, aval, arrière. 3) parmi, avec, contremont, enmi, encontre, endroit, ensemble, paravant. l) Tobler, 1, 20, A propos de prodome. — Meyer-Lübke dans Germ. Romanische Monatschrift, 1909, p. 68. — Winkler, Ibidem, 1912, p. 411. — Cf. encore Robert, Etudes d'idiome et de syntaxe, 1917, p. 132 et suiv. 360 PRÉPOSITIONS b) autres compositions: d la réservation, au défaut de, au desgu, d l'insu de, aux autours de, droit d droit, d l'encontre de, entour de, faute de (d faute de, par faute de), proche de, prés de, hors de, d l'exception de, auprès de, le long de, en présence de. II est évident que nous ne pouvons songer a traiter én détail toutes ces formations. Cela demanderait une étude trés étendue; d'ailleurs, les études préparatoires manquent encore sur ce terrain. Nous devons donc nous contenter de quelques observations générales. B. Mots déja existants devenus prépositions. forls, casa, 413. a) SUBSTANTIFS: latus employés forjs et casa1), étant des ablatifs de substantifs, \ comme ... .... , .. » . , i préposition. indiqüent primitivement le lieu: toris, „a la I porte", casa, „a la maison"; devenus prépositions, I ils ont remplacé extra et ex; apud et domi: hors la vitte, Mont, I, 7; puis au figuré: Nuls ne se tint od le heir le rei David fors cil de Juda e Benjamin, Li quatre livre des Reis, III, 12, 20. Nul n'aura de l'esprlt hors nous et nos amis, Mol., Femm. Sav., III, 2. II est suivi de 1'accusatif aussi bien que du nominatif (Tobler, I, p. 342; III, p. 87). La préposition de, qui envahit tout, s'est introduite ici de bonne , heure, ce qui n'est que naturel, paree que f o r i s est au fond ( un substantif: hors de sa terre, Froissart, I, p. 101, 21; — hors de l'Egllse point de salut. Composé avec de (dehors), il est aujourd'hui vieilli comme préposition: Lour herberge estoit dehors Vost, Joinville, 512. Dieu n'est ni dedans, ni dehors le monde, Fénelon, Existence de Dieu, II, 5. — Dehors est adverbe ou substantif et comme tel il donne naissance a la locütion prépositionnelle en dehors de: les terralns en dehors des fortifications, et au dehors de. Chez (a la maison de) se trouve pour la première fois au xne siècle: Cf. E. Brall, Lat. forls, foras im gallo-romanischen, Diss. Berlin, 1918.— E. Richter, Franz. chez — Ghèze — cnaise (Zeitschr. f. rom. Phil., XXXI, p. 569—578); cf. Romania, XXXVII, p. 473. nouvelles formations 361 Chiés un oste herbergent, J. Bodel, Saisnes, laisse 22. Le sens s'est un peu étendu, de sorte qu'on dit chez les Anciens, chez lui tout plalt. J'ai lu chez un conteur de fables, é. am'j La Font-> In' 18' mais Vaug., I, 403, désapprouve ce dernier emploi et Th. Corneille et 1'Académie sont de son avis. lez < latus. Cette préposition est morte; on la trouve encore dans les noms de ville: Vieux-Dieu-lez-Anvers, SalntPierredezCalais. Une escheUe que ung couvreur avoit laissée lez son ouvrage, Cent nouv. nouv., I, 253; — delez un eglantler, Roland, 114. Adjectifs 414> £\ Adjectifs: employés comme ' préposition. L o n g: Lunc un alter belement Venterrerent, Roland, 3732 (Clédat, p. 33). au figuré: Lunc la costume del pais, Chrétien, Erec, 1846. Ce mot a été remplacé de bonne heure par le long de, d cöté de prés; et, au figuré, par lelonc (§ 394 et suiv.). Proche: ü habite proche le palais (famil.); en général proche de: II habite proche de chez moi. Présent est employé souvent comme adjectif dans la construction dite ablatif absolu: présents tous les princes. Quelquefois il reste invariable et peut donc être considéré comme préposition: Trop conseiüer appart entre homme et femme, Present plusieurs, peut tourner d dlffame, Christ. de Pisan, III, 52. On le trouve comme tel au xve siècle, mais il a disparu depuis. Sauf est d'abord adjectif: son honneur sauve, Cent Nouv. nouv., I, 130, mais dès le xve sjecie on le trouve aussi invariable: Par ma foy, sauf vostre grace,... se je le sceüsse, je ne le demandasse pas, Ibid., I, 258. Tout prend quelquefois le sens de „le long de": I Et vint i Charlematgries tot un antif sentier, Pèlerinage, 300. sneyders de vogel, Sgntaxe historique. 2">e édiüon. 24 362 prépositions Participes et 415. c, d) Quant aux participes passés et aux gèrondifs oérondifs employés comme préposition, ils n'offrent employés comme xt , , préposition. rien de particulier. Nous ne parierons que de pres. Prés, qui vient du participe latin pressum de premere, signifie primitivement „pressé, serré" et forme origi- nairement avec le nom suivant la construction dite ablativus absolutus; en général pourtant il est employé comme adverbe. En combinaison avec de, il forme la locütion prépositionnelle prés de, qui exprime une idéé de temps et de lieu: prés de chez vous, prés de trois heures; puis au figuré: Et prés de vous, ce sont des sots que tous les hommes, Mol., Tartuffe, I, 6. On le trouve parfois seul; prés la porte saint Jacques, Vaug., II, 72; ambassadeur prés la cour de . . . En combinaison avec ad1), on a formé la préposition après, qui indiquait également la proximité; seulement, elle a perdu ce sens primitif, pour ne garder que celui de suite: longtemps après est au fond une contradictio in terminis. II se rapporte également au lieu et au temps: Aprés igo i est Naimes venuz, Roland, 230. On le trouve jusqu'au xvne siècle au sens de d'après: Car tut après sun voil covendra a aler. E après saint Thomas fu Thomas apelez. Saint Thomas, 2507 et 5859. Le portraict n'est pas fait après la nature, Balzac, Lettres, VIII, 27. Auprès s'emploie aujourdhui rarement avec le sens local: II demeure auprès de l'église. En moyen frangais cet emploi était plus fréquent: Et nous convient passer si auprès de leur ville, Froissart, II, 192. — Lysandre se retlrant soz a remplace des I epoque la plus ancienne la préposition latine sub, au sens local et au sens temporel: sous la table, sous le règne de Louis XIV. !) Archiv fw lat. Lexikalogie, X, 421. NOUVELLES FORMATIONS 363 On a ensuite formé un nouvel adverbe dessous, mais de nouveau une tendance s'est manifestée a 1'employer comme préposition: Li cuens. RoUanz se jut desuz un pin, Roland, 2375 (Clédat, p. 31). Au xvne siècle Vaugelas (II, 338) proscrit cet emploi, sauf dans quelques cas bien déterminés, cf. dedans § 417. Pourtant la langue populaire 1'emploie toujours. Les adverbes classiques postea et a n t e a semblent s'être modelés en latin vulgaire sur le comparatif et être devenus *p o s t i u s et *a n t i u s. Ici encore les adverbes ont remplacé les anciennes prépositions. Si on trouve: Qued auuisset de nos Christ mercit Post la mort, Eulalie, 27, ce semble être un latinisme. Dans les autres cas on trouve puls: One puis Cel jor nes contint lledement, Alexis, 140 (Clédat, p. 10). De puis on a tiré un nouvel adverbe, qui, lui aussi, fut de bonne heure employé comme préposition, et — a 1'encontre de ce que nous voyons arriver pour dessus, dessous, dedans — depuis est resté comme préposition (et comme adverbe), tandis que puis n'a gardé que sa fonction adverbiale. On trouve puis avec sa valeur de préposition encore au xvie siècle: Puis dix ans, Marot, II, 106. — Depuis se rencontre dès le xne siècle: Ne fust si granz depuis la mort Guaijier, Cour. Louis, 2325. II exprime aussi le lieu: depuis la tête jusqu'aux pieds. *A n t i u s > ainz, einz, ains, anceis a en vieux francais, a cöté de son emploi adverbial, aussi la fonction de conjonction (cDf^) et de préposition, et prouve ainsi a quel point ces trois fonctions sont voisines l'une de l'autre: Einz demain noit bele en iert l'amendise, Roland, 517. Teis cuide avoir lou cuer moult sain. Qw'ains lou quart jor tot son avoir Ne prise pais ne son savoir, Clédat, p. 328. 364 PRÉPOSITIONS Cette préposition a disparu devant les nouvelles formations avant et devant. C. Prépositions composées dedans. 4l7« 11 nous reste encore a parler des prépositions composées, d'abord de celles formées a 1'aide de préfixes, puis des autres compositions. Ici, nous pouvons être encore plus bref que dans ce qui précédé. En effet, la clarté de 1'exposé nous a obligé a plusieurs reprises a citer les plus importantes des prépositions qui rentrent dans cette catégorie. Ainsi, a propos de en, nous avons vu que dans < de + intus et dedans sont entrés en concurrence avec la préposition simple et Tont chassée de plusieurs de ses fonctions. Donnons encore quelques remarques supplémentaires. On trouve parfois enz seul, non seulement comme adverbe, mais aussi comme préposition: Et ens la fin, quand je vaurai finer, Aveuques L>eu ert mes sieges posés, Huon de Bordeaux (Clédat, p. 54). Mais dedans est plus usité: Et faisoient leur compte de Vamener dedans trois jours par force ou autrement dedans ceste ville, Sat. Ménippée, p. 148. — Au xvne siècle Vaugelas, I, 218, attaque l'emploi de dedans comme préposition; il déclare que dedans est adverbe comme dessus et dessous, tout en admettant des exceptions; et Corneille change les vers oü il s'en est servi: Va dedans les enfers plaindre ton Curiace, , Corn., Horace, IV, 5. Je lis dedans son dme et vois ce qui le presse, Mol., Dépii amoureux, III, 5. D'ailleurs aujourd'hui encore dedans s'emploie, tout comme dessus, avec la valeur de préposition dans la langue populaire: J'aurais crevé dedans ma coquille, Benjamin, Gaspard, p. 216. L'adverbe dedans, substantivé, peut entrer dans une nouvelle locütion prépositionnelle au-dedans de, qui remplace souvent la préposition simple: Scepüques au-dedans A'eux-mêmes, ils considéralent la religion comme un moyen de gouvernement, A. France, Révolte des Anges, p. 3. NOUVELLES FORMATIONS 365 Rem. L'originë de dans est obscure: Shears n'en trouve que trois exemples au xve siècle; Brunot suppose donc que dans a été tiré de dedans sur le modèle dehors-hors; dessous sous ; dessus-sus et Meyer-Lübke, III, § 434, est porté a voir dans dans une abréviation de d(e)denz. Pourtant Gerdau, p. 21, cite quelques exemples de dansi préposition au moyen age, et de i n t u s adverbe se lit dans Anthimus, 9, 33: ardet caro deforis et deintus devenit cruda. II semble donc bien que dans n'était pas tout a fait inconnu au moyen age, quoique le fait reste que c'est seulement a partir de la seconde) moitié du xvie siècle qu'il devient fréquent dans les textes; le fait que l'emploi de en diminUe y aura été certainement pour quelque chose, cf. §§ 388 et 389. I 418. Entre devant et avant1) la lutte s'est enp-aeée devant et avant., ' Q ö également; ici le résultat est que les deux mots sont restés comme prépositions, le premier avec valeur locale, l'autre avec valeur temporelle: Le vendredi devant Penthecouste, Joinv., 146. Au xvne siècle, la distinction entre les deux prépositions n'est pas encore nette: si avant se rapporte uniquement au temps, devant pouvait s'employer au sens temporel aussi bien qu'au sens local: Seroit-il possible que devant moi tu rieusses jamais vu d'autres exemples de mortallté? Malh., % 359; ci-devant a gardé cette valeur. Rem. 1. Devant un infinitif on employait avant, devant aussi bien que avant que, devant que: Devant boire, Rab., f; 100. — Devant que passer plus outre, Malh., II, 7. Rem. 2. Avant a formé l'adverbe auparavant; devant les locutions prépositionnelles au devant de, par devant. Auparavant se trouvait aussi comme préposition: Auparavant ceste saincte entreprise dunton, je n'estoy pas grand mangeur de crucifix, Sat. Mén., p. 79; condamné par Vaugelas, II, 207. Avec. 418 IS. Avec2), qui semble provenir de la iocution adverbiale ab hoe, se trouve de bonne heure comme préposition avec le sens de cum: Avoec Igo plus de cinquante Care, Roland, 186. II prend aussi la fonction de 1'ablativus instrumentalis et exprime 1'instrument ou la manière: f rapper avec la hache, se battre avec courage. — Comme en latin la préposition 1) K. Schubert, Porm und Gebrauch der vom lat. ante abstammenden franz. Praepositionen. Diss. Gocttingcn, 1913. *) Meyer-Lübke, Ronumisches Etymologiscb.es Wörterbuch, s.v. — Littré, s.v. 366 PRÉPOSITIONS cum, il peut prendre le sens de „contre": Combattre avec Vennemi. — Enfin, il signifie souvent „malgré": lts prodiguent Vargent, et, avec cela, ils ne peuvent voir le bout de leur fortune. Actuellement on emploie souvent avec séparé de son régime: L'armée avec, d la tête, Bonaparte. — On le trouve aussi comme adverbe: // a pris mon manteau, et s'en est allé avec. Rem. Comme adverbe on emploie avec aussi au moyen age: Avoec se mesla jalousie, Jeu de la Feuillée, 159. Pour avec foilctionnant comme conjonction, ct. § 326; pour avec ga Robert, Etudes d'idiome et de sgntaxe, 1917, p. 165. Parmi. 419. Parmi se trouve encore en vieux frangais avec son sens primitif: De quatre espiez par mi le cors feruz, Roland, 2084. Le sens de par se sent également dans une phrase comme Et li cuens de Champaigne vendi au roi, parmi les quarante mille livres les flez ci aprés nommés, Joinv., 87, oü parmi signifie „moyennant". — Si chevauga li rois ensi parmi Bourgongne, Froissart, I, 115, 11; ici parmi a le sens de „a travers de", sens qui se perd au xvie siècle. En entrant en concurrence avec enmi, qui se maintient pourtant jusqu'au xvne siècle (Vaug, II, 437), il prend la valeur de „au milieu de": Parmi ce grand amour que j'avais pour Sévère, Corn., Polyeucte, I, 3. II prend ainsi une partie du domaine de inter, que nous avons traité plus haut. 419bis. Quant aux autres compositions, elles sont Au res oumures. ^. nomj:)reuses qUe nous ne p0uvons songer a les traiter ici; d'ailleurs, une syntaxe n'est pas un dictionnaire. Remarquons seulement que plusieurs de ces locutions ont supplanjé d'autres prépositions plus brèves. Ainsi: d Ventour de remplace entour auprès de „ emprés d Vendroit de „ endroit aux environs de „ environ au-dessus de „ dessus NOUVELLES FORMATIONS 367 La plupart de ces tournures renferment un adverbe substantivé; cf. encore d Vencontre de, d Parrière de, au-dedans de, au-deld de. On pourrait ranger parmi les prépositions sitot dans la phrase suivante: Cette facture est payable sitdt rêception de notre envoi. Röle important' ^20. Ce que nous avons remarqué a propos des des prépositions prépositions nous montre bien que la disparition en ancas. ^ cag n>a pas réellement appauvri la langue; au contraire, la perte des terminaisons flexionnelles est largement compensée par la création d'un grand nombre de prépositions et de locutions prépositionnelles, grace auxquelles le frangais peut exprimer les nuances les plus fines de la pensée. Quelques-unes de ces prépositions, qui primitivement avaient pour seul but de préciser le sens du cas du substantif (cf. ab, ex urbe, oü l'ablatif marqué déja le point de départ), ont fini par être chargées seules de fonctionner comme préfixe casuel, en se vidant de leur sens primitif: ainsi de et d dans les musées de Paris, je pars de Paris; donner a, se rendre a, être a. D'autres prépositions et locutions prépositionnelles, par contre, n'ont pas ou n'ont pas encore subi 1'usure syntaxique, comme sous, en dehors de, et ont gardé un sens net et précis. Un troisième groupe de prépositions participe des deux; ainsi par dans être frappé par la foudre et par la ville. M. de Boer distingue prépositions 1) casuelles, 2) non-casuelles, 3) semi-casuelles1). !) Essai sur la sgntaxe moderne de la préposition en francais el en italien, 1926, p. 41 et suiv. CHAPITRE IX LA NÉGATION1) .a. la .négation en latin Mots negatifs 421. En latin classique non (quelquefois baud) en latin. sert a njer un fait: Non possum; ne a nier un désir ou un ordre: Ne hoe feceris. N o n se place devant le mot qu'il nie: Utebatur valetudine non bona, Caesar, De bello gailico, III, 49. — On emploie n e dans la locütion n e .. q u i d e m, „même pas": Ne patriam quidem amat. Le latin aime a combiner la négation avec d'autres mots, conjonctions, pronoms, adverbes, verbes. 1. conjonctions: neque, n ec: Profectus est neque umquam in patriam rediit. — Ces conjonctions peuvent donc relier une phrase affimative a une phrase négative. Le latin aime les combinaisons neque quisquam, ullus, quicquam, umquam, usquam — „et personne, rien, jamais, nulle part". në est la négation de ut final, nisi celle de si. quin est usité après les verbes qui expriment 1'empêchement. 2. pronoms : n e m o, nullus, nihil. 3. adverbes: numquam, nusquam, quin: Quin retinetis vocem? „Pourquoi ne retenez-vous pas la voix?" 4. verbes: nolo, nescio, neque o. 422. Dans la latinité postclassique 1'état des Changements en latin choses va changer: postclassique. j fiaud, déja rare en latin classique, disparait, quoiqu'on le trouve encore dans les textes. i) E. Leren, Die „halbe Négation" (Neuere Sprachen, XXIX, p. 6—45); cf. Zeitschr. f. rom. Phil., 1922, p. 80. LA NÉGATION EN LATIN 369 2. Ne est remplacé par non; dans un des sermons d'Augustin on lit: Non simus duri adversus verbum Dei, V, p. 219. 3. Sauf nee et n urn quam, les conjonctions, les pronoms, les adverbes et les verbes a forme négative vont disparattre pour être remplacés par des formes analytiques. 4. A cette époque il faut placer aussi L'originë de quelques. nouvelles formations, comme nee -f: ipse, que nous rencontrerons plus tard en francais. 5. Enfin, 1'habitude va s'introduire de répéter la négation sous forme de n o n devant le verbe, fait qui aura les conséquences les plus importantes: Recomponere se non potest nee similari sibi non potest, Mulomedicina Chironis, 24, 24. — Neque ingenuus, neque servus... interfici non debeat inauditus, Pardessus, Diplomata, I, p. 197. —Cette tournure bien populaire se rencontre déja en Pétrone: Neminem nihil boni facere oportet, aeque est enim ac si in puteum conicias, 42. B. LA FORME TONIQUE EN FRANCAIS Non devant 423. En vieux frangais1) la négation pure se un verbe. présente sous la forme accentuée non et sous la forme atone nen ou ne. Nous parierons d'abord de non. Contrairement a l'usage actuel, cette particule pouvait se placer devant un verbe, surtout devant être, avoir, faire: Non ferai, sire, dist Gulllelmes li ber, Charroi de Nimes (Clédat, p. 82). Non ay, par ma foy, mais dictes moy qui est ld dedens, Cent nouv. nouv., XXXI. — On trouve cette construction a 1'état figé au xvme siècle: Non ferai-fe, parbleu, Régnard, Le Légataire, V, 7. — La tournure je dis que non est sans doute sortie de je dis que non ferai. La forme accentuée était surtout fréquente devant l'infinitif, le gérondif, et les participes: Elle fut ad ce contrainte et forcee par non resister, Cent nouv. nouv., I, 31. — Non doubtant de leur feaulté, Rabelais, II, 19. — De la des restes comme nonchaloir, nonchalant, nonobstant dans la langue actuelle; rappelons-nous qu'il en était de même pour le pronom: soi-disant, quoi faire. l) Cp. F. Perle, Die Négation im altfranzósischen (dans Zeitschr. f. rom. Phil, II, 1—24, 407—418). 370 LA NÉGATION Depuis le xvne siècle, on ne trouve plus non placé devant un verbe: Vous partirez? Non. — Du vin et non de la bière. — Non que, non seulement, et, comme préfixe, non-emploi, nonsens, etc. Rem. 1. Au lieu de répondre par non ferai on a pu dire dans la vieille langue je non, il non, etc., ou ne je, ne il (cf. aussi § 61, Rem. 2): Guenes respunt: Ne VUS a ceste feiz, Roland, 567. Rem. 2. Dans les phrases suivantes on se servirait aujourd'hui de non plus, pas non plus: Je ne sais. ... Ni moi aussi, Scarron, Roman comique, ch. XI. — Chantilly n'efface point Liancourt, . . . Liancourt n'efface pas aussi Chantilly, Mme de Sévigné, IX, 225. C. LA FORME ATONE EN FRANCAIS „ ... 424. La négation non atone est devenue en Nen en vieux ö francals devant francais nen, qu'on employait seulement devant une voyei e. une VOyene; el ne> qUj se trouve devant voyelle aussi bien que devant consonne1): Ainc mieudre chevaliers nen ot auberc vesti, Aiol, 32. Jamais rCiert tels com fut as anceisors, Alexis, 5 (Clédat, p. 8). Nen disparait vers la fin du moyen age; il ne s'est maintenu que dans Nenni < non ille, qui aujourd'hui est vieilli et dont la formation est analogue a celle de oui < dit < hoe ille. lert descovert? — Nenil par mol, Jeu d'Adam, 216. Te moques-tu de moi? — Nenni, monsieur, f'en serais bien fdchée, Mol., Bourg. Oentilh., III, 2. Emploi de ne 425. La particule ne, employée seule, est trés non renforce. fréquente au moyen age; nous verrons pourtant plus loin que de bonne heure on a senti le besoin de la renforcer; a 1'époque de Commines (xve siècle^ l'emploi de la négation, du moins dans la principale, est presque celui de nos jours2). Cependant, au xvne siècle encore, on rencontre fréquemment des phrases oü ne suffit seul a exprimer l'idée négative, et il en reste des traces nombreuses dans la langue moderne: 1) Cf. G. Rydberg, Zur Geschichte des franz. o, II, p. 874 et suiv. 2) „Eh 1595, le nouveau texte de Montaigne ajoute des pas la oü ils manquaient dans 1'édition de 1588", Brunot, II, 472. NON, NEN, NE 371 Ne vus ait hum qui pur altre s'en fuiet, Roland, 2309 (Clédat, p. 29). Ne cuit qu'ohques si fort pleilst Que d'eve i passast une gote, Chrétien, Chev. au lion, 416 (Clédat, p. 144). Ma deliberation n'est de provoquer, ains d'apaiser, Rab., I, 29. — C'est grand dommage qu'il n'avoit la Superbe, Mme de Sév., VIII, 520. // ne meurt de cette peine, Voiture, Poésies, I, 89. Restes de 426. Aujourd'hui ne se rencontre encore seul dans . l'aacien usage ies cas suivants1): en francais . . moderne. li Phrase principale: a) quand il y a un autre mot négatif: il ne travaillé ni n'étudie. b) dans quelques locutions optatives et impératives: A Dieu ne plaise! — Qu'a cela ne tienne! c) après que („pourquoi") et après un pronom interrogatif dans les propositions exdamatives: Que n'êtes-vous parti plus tot! d) quand la proposition négative est complétée par une proposition relative: On ne voit dme qui vive. e) avec quelques verbes: avoir cure, avoir garde, et facultativement avec songer, oser, pouvoir, etc. II. Phrase subordonnée: a) après quelques verbes comme: éviter, garder, prendre garde, craindre, il s'en faut de peu que, etc. b) après il y a et depuis, quand le verbe est a un temps composé: il y a deux mois qu'il n'a quitté la maison. c) dans la phrase adjective, quand le sens de la phrase entière est affirmatif: II n'y a pas un livre que je n'aie lu. d) après la conjonction conditionnelle si: Je ne le ferai pas, s'il ne me le demandé. e) dans la phrase comparative d'inégalité employée affirmativement: II est plus rlche que vous ne croyez. !) Cf. Bourcruin et Salverda de Graye, Grammaire francaise, p. 66, 126, 132, 136, 138, 139, 142. — van Duyl, Grammaire francaise, 2e éd., p. 323 et suiv. 372 LA NÉQATION Dans plusieurs de ces cas la négation est superflue; aussi la langue parlée s'en passe-t-elle en général, notamment dans la phrase substantive: je crains qu'il (ne) solt malade; il est plus riche que vous (ne) pensez, etc. D. LA NÉOATION RENFORCÉE PAR D'AUTRES MOTS1) Mots qu'on 427. De tout temps on a senti le besoin de a ajoutts pour renforcer la négation pure a 1'aide d'autres mots": renforcer la .... . , Tiégatioo.' Ne flocci quident facere; assis, pui, ne nauci qutaem facere (ducere); en frangais: ne prisier un festu, un denier, un bouton, un uil, un guant2). Cf. en hollandais: Ik zie geen steek, daar geef ik geen sikkepit, geen zier om. C'est de la que vient l'emploi de giens, mie, goutte, pas, point, guère. Giens de gënus est trés rare en francais; G. Paris3) n'en cite que huit exemples: Ne s'en corrocet giens cil saintismes om, Alexis, 268. Rem. En provencal et en catalan par contre cette particule est tres usitée: Ni ve ni sap ies on se sia, „il ne voit ni ne sait [d'aucune facon] oü il est", Appel, Provenz. Chrestomathie, 3, 20. — No'm sap gens de greu, „ce ne m'est pas du tout désagréable". Goutte n'est guère usité aujourd'hui que dans: Je n'y vois (entends) goutte; en vieux frangais son emploi était plus étendu: Par Dieu, je n'ai goute d'argent, Jeu de la Feuillée, 497. Mie de mica, „miette", est trés fréquent au moyen age, mais dans la suite il a été supplanté par pas et point; aujourd'hui on se sert presque exclusivemènt de pas. Ces mots sont primitivement des substantifs a sens affirmatif, qui, après avoir pris la fonction d'adverbes, finisseht par n'exprimer avec ne qu'une seule idee, l'idée négative. 1) F. Meder, Pas, mie, point im Altfranz., Thèse Marburg, 1891. 2) On trouvera une liste de ces mots dans Tobler, Altfranz. Wörterbuch, p. XVII. s) Mélanges linguistiques, p. 555. QIENS, OOUTTE, MIE, PAS, POINT, OUÈRE 373 Valeur 428. On sent encore la valeur substantive dans les substantive de exemples suivants: guère, mie. Et lf°P i avroit grant domage, Se li uns d'aus l'autre afoloit Et point (la moindre partie) de s'enor li toloit, Chrétien, Chev. au lion, 6186—88. Donnez li du fain (foin) . . . Mon seigneur, tantost en ara, Se point (un peu) en a en ceste vile, Mir. de N. Dame, XIII, v. 167. Mals de s'espee ne volt mie guerpir, Roland, 465. Ni puet mie trover de sun frere Aarun, Saint Thomas, 1235. A la fosse vont erranment, Que il nul point n'i demorerent, Floire et Blancheflor, I, p. 84 (Bekker). Et moy, suis-ie dans un baing? suls-ie pas plus d mon ayse que toy? „suis-je un brin plus a mon aise que toi", dit le roi Montézuma, étendu sur le gril, a un de ses compagnons, Mont., III, 6. — Changeray je pas pour vous cette belle contexture des choses, Mont, I, 19 (Darm., p. 15). De même on sent encore nettement Ie sens affirmatif de guère „beaucoup" au xvie siècle: Et de ceste science l'art est tant prochain, et de si pres frére, que lés prenant un pour autre, on ne seroit de guere abusé, Sebillet, Art poétique, p. 8, 1. 8. — Cet usage se trouve encore quelquefois au xvne siècle: Je ne crois pas que Rodogune en demandé guère davantage, Corn., Troisième Discours. J'enrage. Par ma foi! l'dge ne sert de guère Quand on n'a pas cela, Mol., Ecole des maris, III, 6. C'est a cette construction que se rattache sans point de: Li cuens la prent senz point de l'atargier, Cour. Louis, 143; Vpuis une phrase comme: Je n'ai pas dortni de toute la nuit et Je ne veux pas de cela1). i) Tobler, I, p. 72. 374 Ext! pas renco empl< M ou e datur metiA (Etie: L'e de C X princ pas e Ses-ü xive 56, e et de faut reviei Da phras charc on a du tt du ti au x Exten qui, rendi . Si une LA NÉGATION ension de 429. Quoique pas et point soient nMnstréquents et point. que püg dans la vieille langue, pourtant on les mtre de bonne heure; on trouve même des germes de leur oi en latin: Si ego intra aédes hujus,. ubi habitat, penetravi pedem, Omnium hominum exopto ut fiam miserorum miserrumus, Plautus, Menaechmi, V, 2, 61, ncore mieux dans cette phrase-ci: Promisht Deus ille se urn ter ram Canahan Abrahae, nee tarnen dedit: ergo fuii 'ax. Quod autem dedit nee passum pedis, dicit Stephanus nne dit pourquoi il ne lui en a même pas donné un „pas"). imploi de pas et de point s'étend Hp plus en plus; a 1'époqüe ommines ils sont devenus presqüe réguliers dans la phrase ipale. Le sens négatif s'est ensuite communiqué aux mots :t point, si bien qu'on trouve déja dans le Roman de la Rose: 'i pas? Ces sortes de questions deviennent plus générales au et au xve siècle: Y pensez-vous point venir? Jean de Paris, :t dans La Fontaine, III, 11: Fit-il pas mieux que de se plaindre? i nos jours dans le langage parlé: Tombera, tombera pas; pas y croire; c'est pas vrat. — Est-ce pas aujourd'hui qu'il nt? Gide, Retour de l'enfant prodigue, p. 218. ins point d'argent, point de Suisses et dans les autres ses oü il n'y a pas de verbe, les mots pas en point sont jés d'exprimer seuls la négation. Dans du tout, „pas du tout", même fait un pas de plus: la valeur négative a déteint sur out. Dans gou est du tout en Deu, Mainet (Clédat, p. 43), out a nettement le sens affirmatif, sens qu'il garde encore vie siècle. Rem. Cf. en espagnol: En mi vida he oido tal cosa, „Jamais de la vie je n'ai entendn une telle chose". — En toda la noche he podido dormir, „De toute la nuit je n'ai pu dormir''. 430. Dans ce qui précédé, nous avons vu la ision de ne. , . . , négation renforcee par des mots comme pas, point, une fois qu'ils ont pris une valeur négative, tendent a re superflue la particule négative ne elle-même. de ce cóté-la il y a donc restriction, il y a de l'autre cöté grande extension. L'exemple de la Mulomedlctna Chironis, ■EMPLOI ET NON-EMPLOI DE NE 375 cité § 422, nous a montré que déja en latin vulgaire on se servait d'un non explétif devant le verbe. En frangais c'est la règle dès les textes les plus anciens: Ne fut nuts kom, S. Léger, 31. — Ne aiet muls male voluntatem, Jonas, 28, v°. conséquences 431. A 1'encontre du latin on met ne dans toutes de l'emploi ies. phrases négatives qui renferment un verbe, et regulier de ne , ■ devant le vêrbe. etant atone, il s'appuie toujours sur ce verbe, même si la négation porte sur un autre mot et même si la négation est déja exprimée d'une autre fagon: a) II n'aime pas le vin, mais la bière, b) Je ne le vois nulle part. Ce fait entraine deux conséquences importantes: En latin, nous 1'avons vu, on avait 1'habitude de combiner la négation avec d'autres mots, n e m o, quin, etc, mais du moment que la particule négative devant le verbe est devenue générale, ces mots-la deviennent superflus et peuvent: 1) être remplacés par les mots . af f irmatifs correspondants, ou 2) — ce qui est beaucoup plus rare — prendre eux-mêmes un sens affirmatif ou mi-négatif. nullus et nee 4^2. ^e second cas ne se présente que pour perdant un peu de n u 11 u s et n e c. En effet, en vieux frangais nuls leur sens négatif. « ■ , . , , ,, . équivaut souvent a „quelqu un , mais seulement dans des phrases a sens négatif ou exclusif, et ne h „et" ou a „ou": Se nus de vos laist son fil ostagier, Se il le fait, nel recevra ja lié, Ogier (Clédat, p. 105). En Venise cuidoient trover plus grant plenté de valssaus que a nul autre port, Villeh., p. 14; cf. pourtant § 434. — Se j'ay en foy erré nullement, pardonne le moy, Foumier, Th. fr. avant la Renaissance, p. 368, col. 2. Mals a paines en puet on nus trouver, - Thibaut de Champagne (Clédat, p. 344). // le peut épouser sans nul empèchement, Mol., Tartuffe, II, 3. L'estolre de Bertain, et de Pépin aussi, Comment n'en quel manière le lion assailli, Berthe aux grands pieds (Clédat, p. 58). 376 la négation Tant seit ne fels ne aspres, Cour. Louis, 401. Remarquons que m de nee + ipse a souvent complètement le sens de même: Nes li olsel s'an istront fors, Chrétien, Chev. au lion, 400 (Clédat, p. 143). Rem. L'espagnol a encore d'autres mots dont le sens négatif s'est affaibli: Quin vio numquas tal mal, „qui vit jamais un tel mal", Aaro de los reyes magos, 107. — Et ninguno de mio linage que esto quisiere demandar, nin contrallar, nin menguar en ninguna cosa..., que aya la yra del Rey omnipotent, Zauner, Altspan. Elementarbuch, p. 161, 25. 433. L'autre cas est de beaucoup le plus fréquent: Ltt\T^omZ la conjonction et le pronom négatifs sont remplacés négatifs souvent par le mot affirmatif correspondant, et, fait 'Temets"" curieux que nous avons déja constaté pour pas et afnrmatlts. point, ce mot peut a son tour prendre un sens négatif ou, du moins, exclusif. aLN e m o a été remplacé par dme, nesun, nul, aucun, personne. Césmots ont pris d'abord la place de quisquam et ullus, qui, on le sait, s'emploient généralement dans les phrases négatives; puis, ils ont peu a peu pris eux-mêmes le sens négatif. Cf. Pronom indéfini, § 143 et 146. Le passage de dme au sens négatif se voit trés bien dans les phrases suivantes: Je tieng qu'il a esté bleciez D'aucune ame (= par quelqu'un), Mir. N. Dame, II, 26, 479—80. Concil, par congé il me semble Bon d'attendre s'il venra ame, Chastellain, VI, 9. Mais ne nous envoiez plus ame Ne vous envoieray plus ame, Monmerqué et Michel, Th. fr. au moyen dge, p. 552. — A qui a vous parlé? A ame (a personne), Maupas, Gramm. franc., 179, exemple supprimé en 1638 (Brunot, La pensée et la langue, 118). Le mot ne reste que dans 1'expression figée: dme qui vive. Nihil, après avoir été rendu par le mot négatif neient, est ensuite remplacé par rien (§ 147), quelquefois goutte (§ 427). Les mots chose et mot ne sont pas arrivés au bout de 1'évolution: PRONOMS, ADVERBES, CONJONCTIONS, VERBES NÉGATIFS 377 N'osa mot dire ne Gullleaume respondre, Moniage Guill., II. — // ne disait (soufflait) mot (sans article!). b^. Pour ce qui est des a^h/exb§5* nusquam est tombé, remplacé par nulle part. Numquam, il est vrai, se trouve encore dans la Ste Eiüalie, 13: // li enortet, dont lei nonque chielt, Qued ele fuiet lo nom crestüen. Mais a part cet exemple on trouve toujours la forme analytique ne . . . ftnques, mais, ja, jamais: Ja n'avera tant grant enfermeté, Huon de Bordeaux (Clédat, p. 50)*). cj^Parmi les conjonctions négatives «/est resté, mais en vieux frangais il perd, lui aussi, souvent sa valeur négative. Cf. le chapitre des conjonctions, § 328bis, 3. Nisi est devenu se... non, ou se ne...; cf. § 358. Ne dans ne dlxeris ou tinieo ne veniat a été remplacé par non. ut non, quod non: q u i n a disparu également devant que... ne. Dans les phrases comme Je crains qu'il ne vienne, Evitez qu'il ne vous parle, Peu s'en faut qu'on ne m'ait trompê, le latin se serait donc servi des conjonctions ne ou quin; aujourd'hui, on le sait, la langue parlée supprime en général la particule ne, cf. § 426. Relevons pourtant la naissance de quelques conjonctions négatives en frangais: d moins que et senon que (= nisi, § 358) sans que (§ 360) et pour pas que (Rem. 3). d^. Enfin les verbes nolo, nescio, nequeo, ne se retrouvent plus en frangais, ils sont rendus par ne pas vouloir, savoir, pouvoir. Rem. 1. Ignorer est resté paree qu'on n'a pas senti la composition; c'est d'ailleurs une forme savante. Rem. 2. „personne" est rendu parfois dans la vieille langue par 1'expression plus forte homme né: Anges sembloient empenez, si bealx n'avoit vus homme nez („geen sterveling"), Rom. de la Rose; et même rien née: L'avoit plus aimé que rien nee, Ibidem. On sait que (homo) natus et (res) nata sont restés en espagnol: nadie „personne", et nada „rien". Rem. 3. Une nouvelle synthèse se produit dans plusieurs cas: ne pas: En chantant ainsi me deduis Ne pas por chose que (= paree que) je truis En moi point de solaz ne joie, Jubinal, N. Ree, II, 249. — Je vous prie de ne pas venir. 1) 0n trouve d'ailleurs déja en latin postclassique non aliquando = numquam: Ut non putarem aliquando altiores vidisse, Itin. Hier, 41, 4. SNEYDERS DE VOGEL, Sgntaxe historique. 2me édition. 25 378 LA NÉGATION pas un = nemo: Quel est ce saint obscur que pas une autre chanson de geste ne mentionne, Bédier, Lég. ép., II, 377. pour pas que = n e: Nous sommes allés.. . pour faire rentrer les moutons au clos pour pas que les ours les mangent, L. Hémon, Maria Chapdelaine, p. 190. E. LA NÉGATION DANS LA PHRASE COMPARATIVE 434. L'emploi de la négation dans la phrase comparative d'inégalité demandé a être traité a part. Dans des phrases comme il est plus riche que vous ne croyez, la particule ne s'explique paree que Ton nie 1'égalité entre les deux termes de la comparaison („il n'est pas aussi riche que vous le croyez"). La vieille langue était plus conséquente que la langue actuelle, qui, on le sait, omet en général la négation dans la conversation. Yy Quand le second terme de la comparaison se composé de deux substantifs, la vieille langue les réunit par la conjonction ne: Plus est isnels qu'esperviers ne arunde, Roland, 1535. Au xvie et au xvne siècle on la trouve encore sous forme de ni: Patience et longueur de temps Font plus que force ni que rage, La Font., Fables, II, 11. Vaugelas lui-même écrit: Im fortune plus puissante que la raison ni la bonne conduite, phrase condamnée par Racine, VI, 355. Actuellement on se servirait dans toutes ces phrases de et ou de ou. Ty Quand le second terme de la comparaison est un^nom ou une expression employéé comme substantif, le vieux frangais introduit le verbe être ou faire accompagné de la négation, a moins que le substantif soit accompagné d'un mot négatif: a) Plus est isnels que nen est uns falcuns, Roland, 1572. Femme est plus falble par nature Que nen est oem, Eneas, 9874. Plus curt a plet que ne fait uns chevals, Roland, 890. LA NÉOATION DANS LA PHRASE COMPARATIVE 379 De parole sembles holier Plus que ne faites chevalier, („tu ressembles plus a un fripon qu'a un chevalier") Fergus, 24, 3—4. b) Veez ci venir le sodeant Plus blanc que nule fleur de lis, Passion du Palatinus, 1364—65. La Balade est Pöétne plus grave que nesun dés précédens, Sebillet, p. 131. Cette dernière tournure est moderne avec aucun. Les phrases citées sous 2a se rendent en moyen francais et jusqu'au xvne siècle d'une autre fagon: on introduit les mots pas, non pas, point, non point, et on se passe des verbes être et faire: Pendant qu'il regarde plustost ou est sa queste que non pas lui mesme oü il chemine, S. Frangois de Sales (Darm., p. 11). — J'aurois bien plus de peur de me tromper et de trouver que la religion chrétienne soit vraie que non pas de me tromper en la croyant vraie, Pascal, Pensées, I. — J'aimerois mieux dire ,jl vesquit et mourut chrestiennement" que non pas „il vescut et mourut", Vaug., I, 196. Ainsi on a eu ces trois étapes successives: a) il est plus riche que vous ne l'êtes; — b) il est plus riche que non pas vous; — c) il est plus riche que vous. — La première et la troisième phrases sont encore frangaises, fa deuxième s'est maintenue dans le langage populaire. Rem. 1. La même tendance populaire qui a amené 1'introduction de la négation non d'une facon pléonastique: Non vidi numquam, se manifeste pendant tout le cours de la langue dans les phrases comme: Quand on se fait entendre, on parle toujours bien Et tous vos biaux dictons ne servent pas de rien, Mol., Femm. Sav., II, 6. Et ne va pas rien dire, Claudel. L'annonce faite d Mar ie, II, 4, p. 102. Rem. 2. Pour la locütion plus souvent que, ci. Bulletin de dialectologie rom., 1914, p. 10. — Zeitschr. f. franz. Spr. u. Litt, 1914, p. 28, note 2. — Robert, Etudes d'idiome et de syntaxe, 1917, p. 38. On demandé un homme de bonne volonté. . . . Plus souvent! grognent les hommes sans bouger, Barbusse, Le Feu, p. 212. CHAPITRE X L'ORDRE DES MOTS DANS LA PHRASE*) A. OBSERVATIONS GÉNÉRALES Syntaxe affective, 435. Groeber distingue dans le Grundriss la gramfigée et rythme. maire intellectuelle de la grammaire affective et M. Bally a écrit de belles pages sur le röle trés important que joue 1'élément affectif dans la langue. Quand Témotion est trés vive, on ne saurait parler de syntaxe, puisqu'on ne profère que des exclamations, des ah! et des oh! Dès que l'émotion diminue, on forme des phrases constituées des éléments les plus expressifs et dans lesquelles les mots chargés d'affectivité sont bien mis en évidence! Ah! le scélérat! jamais je ne l'épouserai! Enfin quand l'émotion est calmée ou quand la volonté la dompte, les outils grammaticaux: prépositions, conjonctions, et des mots logiques s'introduisent dans la phrase. Ce qu'il faut noter ici, c'est que des tournures originairement affectives ont perdu parfois leur caractère émotionnel et sont passées dans la syntaxe rationnelle; cf. § 439. II importe encore de constater que la langue garde beaucoup d'expréssions figées, par exemple Grand bien vous fasse! dont la syntaxe appartient a une époque antérieure. II est nécessaire de relever ces cas figés, de leur assigner leur date et de les écarter de la description de la syntaxe vivante. i) Cf. Meyer-Lübke, Einführung in das Studium der roman. Sprachwissenschaft, Syntax, 11 et 12. — Thurneysen, Zeitschr. f. rom. Phil., XVI, 289—307. — E. Richter, Zur entwicklung der rom. Wortstellung aus dem Lateinischen, Diss. Wien, 1903. — M. Bréal, Essai de sémantique, ch. XXIII. — E. Richter, Grundlinien der Wortsteltungslehre (Zeitschrift f. rom. Phil., XL, 1920, p. 9-61; XLII, 1922, p. 704—721). — F. Strohmeyer, Der Stil der franz. Sprache, Berlin 1910. — K. Vossler, Ueber gramm. und psychologische Sprachformen (Logos 1919). — L. Spitzer, Aufsötze z. roman. Syntax und Stglistik. — E. Lerch, Typen der Wortstellung (Vossler—Festschrift, p. 85 et suiv.).— Ch. Bally, Traité de stylistique francaise (Indogerm. Bibliothek, III). l'ordre des mots 381 Enfin, il semble bien que dans 1'évolution de la langue le rythme ait joué un grand röle. Nous aurons 1'occasion de dire quelques mots sur cette question délicate et de montrer comment une règle rythrhique peut changer en règle syntactique; cf. § 440 et suiv. Différence entre 435 ls. En comparant la construction latine avec ia construction ia structure de la phrase francaise nous constatons latine et la construction qu il y a une grande différence entre les deux francaise. langues. En effet, le latin est plus libre que le francais, il exprime les rapports et les fonctions des mots par leur désinence, tandis que le francais les indique le plus souvent par la place qu'occupe le mot dans la phrase. Ainsi les Romains ne pouvaient se tromper dans la fonction grammaticale des mots: qu'on dise Filius patrem amat ou Patrem filius amat, Ta valeur grammaticale des mots reste la même, quoique la valeur stylistique soit différente. Or, pour le frangais il y a une énorme différence entre Le fits aime le père et Le père aime le fits. Rem. L'espagnol, qui distingue dans quelques cas le complément du sujet, est plus libre: El hijo ama al padre, ou al padre ama el hijo. Si donc le manque de terminaisons flexionnelles amène une construction plus rigide, ce fait n'explique pas tout. On se demandé entre autres: pourquoi le frangais n'a-t-il pas gardé la construction latine qui met — en général du moins — le verbe a la fin de la phrase? pourquoi les pronoms personnels se placent-ils devant le verbe, tandis que, en latin, ils en étaient souvent séparés? pourquoi dans la phrase interrogative le sujet suit-il le verbe? b. place du verbe et de son sujet Le verbe a la En Prose latine le verbe se mettait en seconde place de général a la fin de la phrase1); on n'a qu'a lire ' p ra8e' les deux premiers chapitres de César pour s'en l) Des soucis de style changent souvent l'ordre naturel de la phrase; cf. W. Kroll, Anfangsstellung des Verbams im Lateinischen (dans Glotia, IX, 1918, p. 112). — Marouzeau, Place du pronom personnel sujet en latin (Bibl. de TEc. des H. Etudes, 158). — Koopmann, Inversion des Subjekts. Diss. Göttingen, 1910. — C. de Boer, La place du sujet nominal dans la phrase non-interrogative (Essais de syntaxe, I, p. 33—58). 382 l'ordre des mots convaincre. Le verbe esse seul fait exception; c'est un mot enclitique qui a une tendance a se mettre a la place la plus faible de la phrase, et c'est en latin la seconde tandis que le premier mot a, en général, 1'accent le plus fort de la phrase1). En vieux frangais — on n'a qu'a lire quelques pages deVillehardouin — il y a une forte tendance k mettre le verbe a la seconde place de la phrase. C'est peut-être dü a 1'analogie de e s s e et des autres verbes auxiliaires faiblement accentués -comme aler, venir, avoir. Mais une fois que c'est devenu la règle, le principe rythmique latin s'est perdu et s'est changé en règle syntaxique. On avait donc a 1'origine: égo sum, ille habet, puis, par analogie, en détruisant Tancienne règle rythmique, ego curro, ille véndlt, puis même ego simt, ille h&bet! Ainsi on trouve Li message vindrent el mostier. — Molt furent esgardé. — Si vos crient merci. — L'endemain al tiers jor manda li dux, Clédat, p. 257 et 258. Le sujet en tête 437. Mais cette règle est entravée déja dans Villede la phrase. hardouin, et encore plus dans Joinville et les auteurs plus récents, par une autre tendance qui va 1'emporter de plus en plus, celle de mettre le sujet devant le verbe: Quant la messe fu dite. — Maintenant 11 six message s'agenoillent a lor piez, Clédat, p. 258. — Tant que la déclinaison k deux cas se maintient, on garde encore une certaine liberté; la chute de cette déclinaison entrainera forcément une construction plus rigide. La place naturelle du sujet est au commencement de la phrase et comme le verbe prend la seconde place, la. succession sujetverbe devient la construction ordinaire, qui va se généraliser bien vite. Voila pourquoi des phrases telles que Or di je, Joinville (Clédat, p. 269), et Or doient donc tout jone gentil homme... avoir ardant desir d'acquerre le fait et le renommee de proèce, Froissart (Clédat, p. 279), deviennent de plus en plus rares. Pourtant la nouvelle construction ne perce que peu k peu. Dans Commines (Clédat, p. 304) on trouve encore Et tant ose je k cöté de: Incontinent le dit seigneur de Charroloys dist au duc de Bèrry (Ibidem, p. 305). Dès le xne siècle d'ailleurs on en trouve des exemples, surtout en vers: i) Cf. Wackeraagel, Ueber ein Gesetz der indogerm. Wortstellung (dans Indogerm. Forschungeh, I, 333 ff.). PLACE DU VERBE ET DE SON SUJET 383 Cest cop li autre dui conperent, Chrétien, Chev. au llon, 4532. Un altre rei il vüelent coroner, Cour. Louis, 1399. Pur bien ferir Vemperedre nus aimet, Roland, 1092. En sa terre il ne sont mie entré, Villeh., 144. Ce qui est curieux c'est qu'on trouve dans Commines fréquemment des phrases telles que Et cherchoit Von, oü le verbe occupe la seconde place même après un mot atone. II semble donc qu'il y ait eu une lutte entre les deux constructions, l'une qui veut que le sujet suive le verbe, si celui-ci est précédé d'un autre mot — tonique ou atone, cela n'a plus d'importance —, l'autre qui demandé le sujet devant le verbe. Cette lutte a duré longtemps. Au xvne siècle on trouve: Or est-il que ce qui empesche certainement de le savoir, c'est que... Vaug., Rem., I, 247. — Vaugelas condamné la position du sujet après être comme dans: Et fut son avis d'autant mieux regu, II, 27, mais il admet bien est-il vrat, II, 305, expression qui était déja archaïque au xvne siècle et qui fut condamnée par Th. Corneille et 1'Académie. Aujourd'hui il reste encore plusieurs cas oü le sujet se place après le verbe, paree qu'il est précédé d'un autre mot: 1) Dans les incises: Mé voild, dit la jeune fille. 2) Après plusieurs adverbes ainsi, peut-être, encore, d peine, etc.: A deux pas de ld, presque en face, a vécu Poussin, Bourget, Cosmopolis, p. 90. — Ld fut enterré le grand général. 3) Si le prédicat se trouve au commencement de la phrase: Telles furent ses dernlères paroles. 4) Dans plusieurs phrases adverbiales et adjectives, si le verbe n'est pas accompagné d'un complément direct: Quand arriva cette triste nouvelle , — le livre qu'a écrit ce savant , — Quel que fut son projet, il n 'aurait pu réussir. Tous ces cas sont plus ou moins littéraires, évités par la langue parlée qui place le sujet devant le verbe. C'est le rythme qui décide ici; plus le sujet est long, plus il aura de chances de se mettre a la fin de la phrase. 384 l'ordre des mots Phrases 438. II y a encore deux cas oü le verbe précède optatives. son sujet, tout en n'ayant pas luknême un autre mot devant lui, c'est dans les phrases optatives et dans les phrases intefrogatives et exclamatives. Tombent sur mol du ciel les plus grands ch&timents, Mol., D. Gare. de Nav., IV, 9. Nous préservent les cieux d'un si funeste abus, Volt, Brutus, II, 4. On en comprend aisément la raison. C'ej^que dans ces sortes de phrases, prononcées avec émotion, toute la force de 1'accent porte sur le verbe. On le met donc tout naturellement au début de la phrase, et cela non seulement en frangais, mais aussi en latin: Caveant consules ne quid detrimenti respublica capiat. Pourtant si le sujet est un pronom de la le ou de la 2" personne, il se place devant le verbe: Je meure en vos discours si je puis rien comprendre, Corn., Menteur, II, 3. Dans une pareille phrase la nouvelle construction s'est donc introduite, paree que, le pronom sujet étant devenu atone, 1'accent peut porter quand même sur le verbe. Toutefois, on le rencontre aussi placé après le verbe, comme dans: La peste de ta chute, empoisonneur du diable! En eusses-tu fait une d te casser le nez, Mol., Mlsanthrope, I, 2. C'est cette construction qui Ta emporté: Puissé-je être heureux. II faut avouer d'ailleurs que l'usage n'a jamais été bien fixe: La volonté du ciel soit faite en toute chose, Mol., Tartuffe, III, 7. La peste soit avec vous, — Dieu vous bênisse, — a cöté de Vive le rol, — Périssent les traltres. Ces dernières expressions, appartenant a une plus ancienne étape de la langue, sont maintenant figées. II faut expliquer de même la construction des phrases concessives: Dussé-/V voir mon palais en cendre, je ne balance point. Phrases 439. Quant a la phrase interrogative1), ici encore taterrogatlves. la construction francaise s'écarte du latin, qui i) L. Foulet, Comment ont éoolué les formes de l interrogation (Romania, 1921, p. 243—348). PLACE DU VERBE ET DE SON SUJET 385 désigne Tinterrogation par des particules ne, num, nonne: Itane est? — Nonne ego hoe dixi? — Num mentitus sum? En frangais, le verbe se place tout naturellement a la seconde place dans des phrases comme: U est Rollanz li catanies, Roland, 3709. En quelle année fut livrée cette célèbre batailte? — Quelle est donc cette femme? D'autre part, si Ia question porte sur le verbe, il se place en vieux francais en tête de la phrase: Vient Pierre? Sire cumpalnz, faites le vus de gret? Roland, 2000. Et nous aurions donc en frangais la même construction que dans les langues germaniques, si une autre tendance n'avait pas fait tort au développement de cette tournure, a savoir celle de mettre au début de la phrase le mot sur lequel porte l'interrogation: Et disoient: Ce que puet estre? Chrétien, Chev. au lion, 1111. A voiz e serie: Petiz om, tu que q uiers? Cour. Louis, 512. et avec un substantif: L'aveirs Carlun est il appareilliez? Roland, 643. Et mes sire Gauvairis, chaeles, Li frans, li douz, ou iere il donques? Chrétien, Chev. au lion, 3698—99. Dans toutes ces phrases le premier mot n'est donc pas le sujet, mais il est employé absolument, comme dans les phrases affirmatives du type: Mon frère, il est venu (§ 63). Mais du moment qu'on change Votre père, ou est-il allé? en Ou votre père est-il allé? on a oublié complètement le véritable _état des choses et l'interrogation complexe est nee1). M. Foulet cite un exemple du xve siècle oü les deux constructions sont employees l'une k cöté de l'autre: N'est pas ceste robe assez longue, mes cheveuz sont-i\s point longs? Au xvie siècle 1'évolution est achevée: Ia phrase i) Meyer-Lübke, III, § 756; Tobler, I, 53—56. 386 l'ordre des mots de Rabelais est la phrase moderne. II est naturel que des phrases comme Tu que quiers? aient disparu, paree que tu est devenu un pronom atone; la phrase devient donc Que quiers tu? ou, si 1'on veut appuyer sur le sujet, Toi, que quiers tu? ou que quiers tu, toi? On trouve pourtant encore dans Malh., IV, 287: A quel propos le soleil chasse la nuit? L'exemple du Roland et celui de Chrétien nous prouvent que la construction Ton père est-il parti? se trouve dès le xne siècle dans la langue; elle 1'a emporté a partir du xive. Mais une nouvelle construction va lui faire concurrence: qui est-ce qui, qu'est-ce qui, quand est-ce que, oü est-ce que, etc, tournures qui, au xve siècle déja semblent avoir été assez répandues dans la langue populaire et qui, au xvne, ont recu droit de cité; Vaugelas, II, 235, déclare que Quand est-ce qu'il viendra? est une „fagon de parler fort bonne". Le fait qu'il condamné Pourquoy fut-ce que les Romalns firent telle chose? prouve que est-ce que était devenu une forme figée, qui ne s'analysait plus (I, 419). — Enfin, au xvie siècle nait la locütion est-ce que, employee en tête de la phrase et qui ne s'appuie plus sur le mot précédent. Le premier exemple que M. Foulet note se trouve dans TEugène de Jodelle: Est-ce que l'argument De ceste fable encore n'avez sceu? Cette locütion, qui se répand de plus en plus surtout dans la langue familière, a 1'avantage de laisser a la phrase sa forme habituelle et d'insister dès le début sur l'interrogation. Elle est aujourd'hui de rigueur, ou a peu prés, si le sujet est le pronom je: Est-ce que je sais, moi? — Quant a la tournure qui est-ce qui, elle trouve son origine en latin (cf. § 138): Quis est qui mortem non timeat? en vieux frangais: Qui sont cil qui de traison Vos apelent? Chrétien, Chev. au lion, 3645. Et cument est dunc que Adonias regne? Quatre Livres des Rois, III, 1, 13. i) Cf. Tobler, II, p. 7 et suiv. PLACE DU SUJET ET DES PRONOMS PERSONNELS 387 Rem. 1. La place réguliere du pronom après le verbe, Vient-il?,. explique la naissance de la particule interrogative ti dans la langue populaire: Comment elle n'est plas lal... Eh! ben, oü c' t'y qu'elle estf Qui c' t'y qui Va? G. Feydeau, La dame de chez Maxim, I, 6. — Voulez-vous t'y iirer les rideaux, Ibid., I, 12. — T'est'il mort (Tu es ti mort), mon vieux? Tas ton compte, Illustration, 17 févr. 1917 *). — M. Brunot signaie le premier exemple de li dans la grammaire de Ramus (1562). R e m. 2. Le vieux francais se sert parfois d'une particule interrogative enne, ennement, ennevoire: Coment? fait Aucassins. Enne volés vos que je vos venge, Auc. et Nic, p. 35, 12. C PLACE DES PRONOMS PERSONNELS COMPLÉMENTS 440. Mais si Ie développement régulier de la Le verbe se . rapproche des langue explique la place que le verbe occupe pronoms actuellement dans Ia phrase et la position du suj'et compléments. par rapport au verbe, nous ne comprenons pas encore pourquoi les pronoms atones ont pris la place qu'ils occupent aujourd'hui. Voila donc un nouveau problème qu'il faut essayer de résoudre2). En latin les pronoms compléments étaient trés souvent séparés du verbe: Orgetorix sibi legationem ad civitates suscepit, Caesar, I, 3, 3. On a voulu expliquer le changement de construction par la logique: il y aurait un rapport trés intime entre le verbe et son complément, ce qui aurait amené une union plus intime des deux mots3). Mais c'est confondre Ia grammaire avec la logique, et on pourrait demander si cette logique n'est pas la même pour le latin et les langues germaniques, qui ne connaissent pas la construction francaise ? II semble qu'il faut plutót chercher la cause de ce phénomène dans 1'accent de la phrase. Ces petits pronoms atones occupaient tout naturellement la seconde place de la phrase. Or, quand, par suite de 1'évolution que nous avons esquissée, le verbe s'est mis, a son tour, a cette place, il s'est trouvé a cöté des pronoms. Ce rapprochement amena ce fait que, lorsque plus tard le verbe changea de nouveau de position, le pronom le suivit. 1) Cf. Gaston Paris dans Romania, VI, p. 438; Brunot, II, p. 334. *) H. Probst, Die Stellung der obliken Casus der Personalpronomina, Diss. Göttingen, 1908. — L. Foulet, Romania, LUI (1924), p. 54—93. ») E. Richter, l.c. 388 l'ordre des mots 441. Dans la vieille langue le pronom étant en- Le pronom a 1 précède ou suit clitique a une tendance a se mettre a la seconde ie verbe. piace, si le verbe se trouve au commencement de la phrase1): Voit le 11 rois, encontre s'est levez, Le Charroi de Nïmes (Clédat, p. 82). Art i Marsens, qui fu mere Bernier, Raoul de Cambrai (Clédat, p. 133). Mais en général le pronom précède le verbe et, d'enclitique qu'il était, il devient proclitique. L'ancienne construction s'est maintenue dans 1'impératif affirmatif, oü 1'accent a fini par se placer sur le dernier élément: Donnez-le; mais écoutez-me est' devenu écoutez-moi. La Fontaine, IV, 5, 162, change Or le laissons de Tédition de 1674 en Or laissons le dans celle de 1685, ce qui prouve que cette construction s'est soustraite au mouvement rythmique de la phrase. Si 1'impératif est employé négativement, le pronom peut s'appuyer sur la négation et on a donc dès 1'époque la plus ancienne: Ne le donnez pas a cöté de donnez-le. Voici quelques exemples de 1'impératif, tous pris dans le Jeu d'Adam: Manfue le, n'alez dutance. J'en duit. — Lat le! — Ne feras pas. Mais: Or Ie comence, e jo l'orrai. Or te dirrai, et tu triascute! Primes le pren, Adam le done. Jeu d'Adam, 275, 297; 212, 239, 263. De cette règle rythmique du moyen age est née la règle syntaxique du xvie et du xvne siècle qui prescrit que le pronom régime se place devant le second impératif affirmatif, règle qu'on trouvera appliquée dans les exemples suivants: De vostre election faictes-nous voir la bulle, Et nous monstrez de Dieu le seing et la cedulle, Ronsard (Darm., p. 230). Pollssez4e sans cesse et le repolissez, Boileau, Art Poétique, L 173. Ote-toi de mes yeux, vilaine, et me laisse en repos, Mol., i) Tobler, II, 93—107. — A. Stark, Synt. Untersuchungen im Anschluss an die Predigten und Gedichte Olivier Maillards (1430—1502), diss. Berlin, 1903. PLACE DES PRONOMS PERSONNELS 389 Bourg. Gentilh., III, 8. — Enseignez toutes les nations et les baptisez au nom du Père, Boss., Serm., Pdques 1681, 2. Aujourd'hui, la syntaxe s'est simplifiée: elle réclame toujours la postposition du pronom, si 1'impératif est a la forme affirmative. Si on rencontre parfois des exoeptions a cette règle, elles ne sont que des imitations de la syntaxe classique. 442. Signalons encore l'emploi, que nous avons déja relevé au § 69, du pronom tonique devant le verbe, surtout devant les formes nominales du verbe, construction qu'on trouve encore parfois au xvne siècle dans La Fontaine: Tant ne songeoient au service divin Qu'a soi mofttrer, Contes, II, 16, 37. Rem. Bourciez, Éléments de linguistique romane, p. 382, part de la tournure pró me vidére du latin postclassique, dans laquelle le pronom est atone. Or, le francais n'admettait pas de pronom atone après une préposition: in o des Serments et poro de la Sainte Eulalie sont des restes de 1'accentualion latine. Deux possibilités se présentent: 1) on change 1'accent, comme si le pronom ne dépendait pas de l'infinitif suivant: pro mé vidére, et cela donne en francais pour moi veoir; 2) on change l'ordre des mots et met le pronom enclitiquement après le verbe, et cela donne en italien per vedermi et en normand por veeir me. Cf. aussi Tobler, II, 93 et suiv.; Rydberg, II, 3. Le verbe ^* a) Quand deux pronoms accompagnaient le accompagné de verbe, le complément direct, s'il était. exprimé (cf. deux pronoms. g précédait dans ja vieille langue toujours le complément indirect: Mien escientre nel me reproverunt. Respunt Rollanz: Et Deus la nus otreit, Roland, 768 et .1008. C'est que, d'abord, on n'a pas voulu séparer dans sit di, jol di la combinaison sil et jol — combinaison due au fait que le pronom atone se joignait, comme mot enclitique, au mot précédent —, et qu'on a donc intercalé le datif entre les deux mots: sil vos di. Dès le xive siècle je le vous di a été concurrencé par je vous le dl, qui s'est produit, lorsque le, devenu proclitique, s'est appuyé directement sur le verbe: jet di > je te-dis. Pendant la première tmoitié du xvie siècle il y a encore hésitation entre je le te dis et je te le 390 l'ordre des mots dis avec préférence pour la dernière construction. Vers la fin du siècle je le te dis a a peu prés disparu, tandis que je le vous dis 1'emporte encore légèrement sur je vous le dis1). Font encore exception aujourd'hui je le lui dis, je le leur dis, tandis que 1'italien dit glielo dico et Tespagnol selo digo. A 1'impératif la vieille construction s'est maintenue: Dites-lenous comme dites-le-lui, mais ici aussi la lutte s'est engagée; M. Nyrop cite: Donnez-moi-la, Musset, Un Caprice, sc. 8, construction qui s'est imposée pour Tenez-vous-le pour dü. Rem. 1. Au xvile siècle Vaugelas, I, 96, condamné je le vous promets et vous le vous figurez, tout en reconnaissant que „tous les anciens Escrivains et plusieurs modernes" se servent de cette tournure. Th. Corneille et 1'Académie la rejettent absolument. b) Quand en et y se trouvent tous les deux placés devant un verbe, la vieille langue faisait précéder en: 11 en y a. Cette tournure disparait au xvne siècle et est condamnée par Maupas, Oudin2) et Vaugelas, I, 178. On trouve d'ailleurs la construction moderne dans VHeptaméron: Mais, entre les autres, y en avoit un, nommé Amadour, Nouv. X. Quand un de ces mots se rencontrait avec un pronom personnel atone après un impératif, l'usage était indécis. Tandis que Ph. Garriier admet en 1618 Attendez-m'y et attendez-y-moi, Vaugelas, I, 178, dit: „II faut dire menez-y-nwi", mais il admet menez-nous y et menez- les y, tout en préférant menez-nous ld. c) On a imposé des limites a 1'accouplement d'un datif et d'un accusatif pronominal. Si 1'accusatif n'est pas le, la, les, on place le datif après le verbe: // me Va présenté, mais // m'a presenté d lui. Rem. 2. Ce sont la des limites que 1'italien n'établit pas avec cette rigueur: Me gli raccomando, ou mieux: Mi raccomando a lui. L'espagnol par contre a la même construction que le francais. On trouve quelquefois deux datifs, a valeur différente: Es lor vos Galien, Chev. au cygne, 1801. !) Bourciez, Éléments de linguistique romane, p. 383 et 655. — MeyerLübke, III, p. 836. — Bourciez, Revue critique, 1911, juin, p. 499, et juillet, p. 11. 2) Cf. E. Winkler, La doctrine grammaticale francaise d'après Maupas et Oudin (Beih. zur Zeitschr. für rom. Phil., 38), p. 105. PLACE DES PRONOMS PERSONNELS 391 Et aujourd'hui: Je vois te leur apprendre d venir me voler, Revue bleue, 1899, II, 595b. On rencontre aussi parfois deux pronoms régimes directs, cf. Littré, s.v. le, 7: Je ne veux point qu'elle solt malade, encore moins qu'elle se la fasse1). 444. Comme les verbes auxiliaires formaient avec l'infinitif suivant un tout inséparable, les pronoms se placaient devant l'auxiliaire: En ceste terre ne vos sai que doner. A ceste foiz rien quier or plus parler, Charroi de Nimes (Clédat, p. 88). Je le sai preste d'alegier, ' Rom. de la Rose, 6877. II n'y eut personne d'eulx qui luy ozast rien dire, Amyot (Darm., p. 147). — Je ne lui ai su que dire, Marg. d'Angoul., Hept., X. — Je le vous ai voulu dire, Malh., III, 254. N'importe, il me faut obéir, Rac, Mithridate, II, 6. Jamais M. Coëffeteau ne s'en est voulu servir, Vaug., Rem., I, 394. — Je la viens de dépeindre, Voit., I, 243. — Elle cuelllalt les fleurs tous les premiers vendredis de chaque mois pour les alter mettre sur sa tombe, Flaubert, Mme Bovary. — Nul, certes, aux temps classlques, ne s'en eüt osé prévaloir, G. Polti, Les trente-six situations dramatiques, p. 207. On sait qu'on rencontre cette construction encore aujourd'hui avec pouvoir et aller, et qu'elle est même de rigueur avec faire, laisser, sentir, voir, entendre: II me Va fait répéter dix fois. II faut citer ici 1'habitude de mettre le préfixe re- devant l'auxiliaire: Après ceo k'ol enfant, ra la dame songlé, Saint Thomas, 186; c'est a dire „a songé de nouveau". D. PLACE DU PRÉDICAT Place du ^a place du prédicat était trés libre dans prédicat trés la vieille langue; des questions d'accentuation, de style décidaient seules. L'ordre naturel des mots a) Cf. Tabier, I. p. 266. 392 l'ordre des mots est: Sujet, verbe, prédicat: Cet homme est peintre, Pierre est venu, Cette femme est belle, mais quand on veut appuyer, le prédicat peut parfois se mettre en tête de la phrase: Grande fut ma stupéfaction. Cette dernière tournure est particulièrement fréquente en vieux francais: Buona pulcella fut Eulalta, Eulalie, 1. Bels fut li vespres et li solellz fut clers, Roland, 157 (0). Nostre estoit-il d trés bonnes enseignes, Mont, I, 23.— D'autres constructions étaient encore possibles: Ne place Deu ne ses seinz ne ses angles Aprés Rollant que jo vive remaigne, Roland, 3719. Muit est vassals Carles de France dulce, Roland, 3579. E. PLACE du RÉOIME 1) Place du régime. 446. Tandis que le sujet a dès les premiers temps une place relativement fixe, notamment en tête de la phrase, la construction du complément est beaucoup plus libre et dépend en gros des intentions de 1'auteur, est donc d'ordre stylistique. Malgré cette liberté, qui s'explique par la déclinaison a deux cas, on constate que dans un texte comme la Sainte Eulalie l'ordre sujet + verbe -f- régime est déja l'ordre normal; les exemples de la construction régime -fverbe -f sujet vont en diminuant bien vite, puisque le Roland n'en a que 42, le Chevalier au Lion 38, Joinville 11 pour cent2). De bonne heure une autre construction se développe: sujet -frégime -f verbe, d'abord dans les propositions relatives dont le sujet est un pronom relatif. Dans le Roland on la trouve déja, s'il y a une pause après le sujet: E quatre cunte Vestreu li unt tenu, Roland, 2820. i) J. Cada, La déclinaison et la place du complément d'objet direct nominal. Paris 1925. «) Cf. A. Stark, o.c, p. 66; Brunot, III, 681.. PLACE DU PRÉDICAT, DU RÉGIME ET DE L'ADVERBE 393 Qu'il morlr ne poeit, Phil. de Thaon, Comput, 1034. A cui Diex bone merci face! Joinville (Clédat, p. 269); mais dans Commines (Ibid., p. 303): A qui Dieu face pardon. — Au xvie siècle elle est encore fréquente: Puis icelluy basteau tournolt, gouvernoit, menoit hastivement, Rab., I, 23; mais au xvne Corneille changea: Les deux camps muttnés un tel cholx désavouent, en: Ce choix me desespére et tous le désavouent. Horace, IV, 4. La Fontaine est naturellement plus libre: Puis en autant de parts le cerf il dépega, La Font., Fables, I, 6. On trouve encore aujourd'hui le complément placé devant le verbe dans quelques archaïsmes: Chemln falsant, sans coup férir, d son corps défendant, geler d pierre fendre, grand bien vous fasse, et on sait que le futur j'aurai et le conditionnel /'aurais présentent au fond la même construction. Ren». Pour la place du régime entre auxiliaire et participe passé, cf. § 309a. F. PLACE DE L'ADVERBE Place de 447. L' adverbe et les expressions adI'adverbe. verbiales n'occupaient pas non plus de place fixe dans la phrase; on pouvait les mettre un peu partout comme 1'exigeait le mouvement de la pensée; Et mout bien fist garder le chastel, e le bourc asprement fut gardé longuement, Phil. de Novare, Mémoires, CXXXVII. — Le seignor de Baruth et ses trois anfans assaillaient de toutes pars le bourc, Ibidem, CXLIII. — J'ai huy en eest jour livré moy et mes enfans a mort, Ibidem, CXLV. On sait qu'aujourd'hui encore une grande liberté règne sur ce point: le circonstanciel s'introduit même entre le sujet et le verbe et c'est la un des indices qui montrent que le francais devient plus synthétique: Et l'enfant déja pieusement s'acfiemine, Gide, Le retour de l'enfant prodigue, p. 199. — II se place même SNEYDERS DE VOGEL, Sgntaxe historique. 2me édition. 26 394 L'ORDRE DES MOTS entre le préposition et son régime: La Cour de Cassation, aved, a sa tête, le Premier Président1). Les phrases adverbiales, elles non plus, n'ont jamais eu de place bien fixe, comme on le verra au paragraphe 452. G. PLACE DE L'ATTRIBUT2) de 448. Ce chapitre est un des plus difficiles a écrire l'adjectif est trés et a la vérité il appartient plutöt a la stylistique libre en latin et >a j svntaxe de s'en occuper. En effet, 1'attribut en vieux francais. M J , n'a pas de place fixe et ce sont surtout des nuances subjectives qui déterminent sa place. Parions d'abord de T a d j e c t i f. En latin déja la place de l'adjectif n'était rien moins que fixe, quoiqu'il y eüt une tendance a le placer devant le substantif: Infandum, regina, iubes renovare dolorem, Virg., Aen., II, 3. L'adjectif en tête et le reste de la phrase placé entre le substantif et son attribut rendent ce vers trés expressif. En vieux frangais, au xne siècle, la place de l'adjectif était de même trés libre; tantöt il se placait devant, tantöt après le nom qu'il déterminait: dans le Roland on rencontre le jorn cler a cöté de la clere albe, en Vestrange contrede a cöté de une mar che estrange et d'autres exemples cités par M. Jenkins dans son édition du Roland, p. CXXXVI. Si deux adjectifs accompagnaient un substantif, on avait la même liberté, ou bien l'un se placait devant, l'autre après: Tot un viés sentier antif, Auc. et Nic, V, 5. Pourtant on commence a distinguer peu a peu deux groupes d'adjectifs; dont l'un précède, l'autre suit en général le substantif, mais il en reste pourtant beaucoup qui ne rentrent dans aucune de ces deux catégories. Les adjectifs qui sont souvent employés 1) Bréal, Essai de sémantiqae, p. 21, note 1. 2) L. Clédat, La place de l'adjectif en frangais (Reu. de phil. fr., 1901, p. 241—276). — Yvon, ibid, 1902, p. 147 et suiv. — R. Wagner, Die Stellung d. attributiven Adj. in afr. Prosateksten des 13—15 Jahrh., Diss. Greifswald, 1890. — Spitzer, Zur Stellung der franz. attrib. Adj. (Zeitschr. für frani. Sprache und Litt., 1913, 105—7). — Kalepky, Stellung des fr. attributiven Adj. (Zeitschrift für rom. Phil., 1901, p. 322—339). PLACE DE L'ADJECTIF 395 et qui sont en général monosyllabiques peuvent être considérés jusqu'a un certain degré comme faisant corps avec le substantif; aussi précèdent-ils en général: beau, court, long, haut, jeune, gentil, bon, mal, ener, plein, pauvre, cruel, etc, de même que quelques mots de formation savante comme digne, divin, horrlble, et quelques substantifs employés adjectivement: mère et maitre. De la les expressions actuelles: beau-père, belle-fille, la haute mer, gentilfwmme, male mort, maitre-queux, une maitresse femme. Par contre, la place des adjectifs exprimant la couleur ou ta forme n'était rien moins que fixe dans la vieille langue: Dis blanches mules fist amener Marsilies. En sun pulgn destre par i'orie punt la tint, Roland, 89 et 466. L'emperere descent defors le marbre blanc. Chascune est a fin or neielee devant. Les conjogles en sont a or fin reluisant, Pèlerinage, 334, 351 et 284. Les adjectifs de formation savante, ceux-la aussi qui dérivent d'un nom propre, se placent en général après le substantif. Pourtant on trouve la paiiene gent. Tout cela est bien vague, et il ne nous est pas possible de préciser davantage, paree que l'usage reste toujours flottant. Ainsi, au xvie siècle, on voit de nombreux exemples qui s'écartent de l'emploi actuel; on trouve notamment des participes devant le substantif: Cette sacrée amitié, Rab., Ij 31. — A ta furieuse et hostile venue, Ibidem. — Parleray de l'estrange conversion de ma personne propre, Sat. Ménippée, p. 79. — Urgulania, sa mère grand, Montaigne, II, 13. — Beaucoup de simples ames le chérissoient, S. Francois de Sales (Darm., p. 10). — La puritê de nostre maintenant tant bien illustrée langue, Sebillet, 16 et 17. O par mon seul defaut sepulturable Antoine! O dommageable femme! Garnier, Mare-Antoine, 1797 et 1812. De mime au 449. Au xvue siècle l'adjectif occupe en général Ia xvne siècle et même place que dans la langue actuelle. dans Ia langue ° moderne. Pourtant Haase, p. 440, cite plusieurs exceptions: Ce sera une douleur grande, Sév., IV, 68. — La divine bonté, Bossuet, Or. fun., Marie-Thér. d'Autr., reine de 396 l'ordre des mots France. — L'éthiopique gent arrivé, La Font, Psyche, II, p. 205. Le sens ne varie pas toujours a cette époque suivant que l'adjectif est préposé ou postposé au substantif: Mercredi pen atiends de certaines nouvelles, Corn., Gal. du Pal., I, 6, 125. Au xvie et au xvne siècles les grammairiens ont essayé d'établir quelques régies. Ainsi Garnier et H. Etienne exigent que les adjectifs indiquant une couleur suivent les noms qu'ils qualifient; Vaugelas, I, 309, veut qu'on place devant le substantif les adjectifs bon, beau, mauvais, grand, petit et les adjectifs numéraux. On distingue homme grand de grand homme, sage femme de femme sage, pauvre homme de homme pauvre. Mais, sentant bien qu'une règle fixe ne pouvait être donnée, Vaugelas, Ménage, Th. Corneille déclarent que 1'oreille doit souvent décider seule. Et aujourd'hui, il en est encore de même. En laissant de cöté des cas figés: petits enfants, d plat venire, chaise longue, le Saint-Siège, on peut distinguer deux groupes d'adjectifs: 1) ceux qui ont une place fixe; 2) ceux qui n'en ont pas. Le premier est le groupe le moins nombreux: il comprend a) des adjectifs comme tout, feu, qui se placent toujours devant le substantif; b) des adjectifs qui ont une place fixe d'après le sens qu'on veut leur faire exprimer, par exemple: sage femme femme sage pauvre enfant enfant pauvre grand homme homme grand homme petit petit homme. Mais la plupart des adjectifs n'ont pas de place fixe en frangais. M. de Boer (Essais de syntaxe franf., p. 19—20) formule la règle suivante: „Dans la synthèse l'adjectif attributif se place devant le substantif; dans 1'analyse il se place après le substantif, mais peut précéder, lorsqu'il a beaucoup de force affective". En effet, pour atteindre quelque effet, les écrivains ne se font pas scrupule de changer la place ordinaire de l'adjectif; c'est même l'usage dans la réclame moderne qui parle de magnifiques et inappréciables nouveautés, de chatoyantes et éblouissantes couleurs. Place des 450. Ici il faut distinguer les pronoms possessifs 'ossessifs accentués des pronoms possessifs atones. Les accentués. premiers ont en latin une tendance a se placer PLACE DE L'ADJECTIF ET DU PRONOM POSSESSIF 397 devant, les derniers k se placer après le substantif: meus pater s'oppose a tuus pater; dans pater meus le pronom est enclitique. Cet état de choses ne reste pas, il se produit un changement profond dans le rythme de la phrase: la proclise remplacera de plus en plus 1'enclise, Taccent final du groupe de soufflé s'imposera toujours davantage. Certes, la vieille langue connait encore plusieurs cas d'enclise: poro dans la Sainte Eulalie, des constructions comme jol vei; mais le prbnom possessif atone, comme l'article, se place en frangais dès les monuments les plus anciens, toujours devant le substantif: mon père. Quant aux pronoms accentués, la question est plus compliquée. Puisque la position après le substantif est la plus forte, on s'attendrait a ce que le pronom accentué ait occupé cette position en francais. Et, en effet, on trouve cette construction, mais seulement au xvie siècle: Aiant ouï et entendu lecture distincte d'iceulx livres miens, Rab., II, 250 (Huguet). — Vous donnant l'ame mienne, Ronsard, I, 263. — Ce livre mien, Marot, III, 5.— L'interruption notre, Molière, Dé pit amoureux, II, 6. — En général pourtant, le pronom garde la place qu'il avait en latin, mais il est presque toujours accompagné d'un autre déterminatif: article, nom de nombre, pronom démonstratif ou indéfini. Citons, outre les exemples qu'on trouvera au § 80, quelques phrases du xvie siècle: J'ay confiance que de ceste nostre peregrination la fin correspondra au commencement, Rab., II, 2831). — A celle fin que mieux entendiez certains poincts observatifs de la vostre et mienne vacation, Noël du Fail, Propos rustiques, I, 28 1). — Cette construction, qui s'est maintenue en italien (il mio libro), a disparu au xvne siècle: Vaugelas, II, 452, la condamné. On a restreint de plus en plus le pronom possessif tonique a la seule fonction substantive, de sorte que la tentative de se servir de tournures comme ce livre mien n'a pu pénétrer et qu'il ne reste en francais moderne que la construction mon père, c.-a-d. le pronom possessif atone placé toujours devant le substantif qu'il détermine. Place du génitiï 451. Si Pattribut est un substantif, Ie latin le ' uttt' placait en général devant le substantif: exemptl 1) Huguet, Etude sur la sgntaxe de Rabelais, p. 77 et suiv. 398 l'ordre des mots gratia, même entre un autre attribut et le substantif déterminé: meus in te amor; sanctis patriae legibus obsequimur. On reconnait des traces de cette construction dans les plus anciens textes francais: Pro Deo amur dans les Serments, et li Deo inimi dans la Sainte Eulalie, et en général avec Dieu, diable, rol, père: Par la Deu gratie vochiét emperedor, Alexis, 362 (Clédat, p. 11). Gefreiz d'Anjou li rei gunfanuniers, Roland, 106; enfin dans les composés comme lundi, mardi, mercredi, qui viennent de lunae diem, martis diem, mercurii diem; orfèvre de auri faber, et quelques autres. Pourtant, de bonne heure nous constatons une tendance a mettre le génitif après Ie substantif qu'il déterminé; si dans la Vita Wandregiseli, texte du vne siècle, l'adjectif se place encore dans 77 sur 100 cas devant le substantif, ce pourcentage est pour le génitif seulement de 251). Aussi en vieux francais la construction régulière est-elle dès le début celle de la langue actuelle: Li flus Adan (génitif subjectif), Je... fais escrire la vie nostre saint roi Loueïs, Joinv. § 1. L'onnor ton pere por quoi gueroieras, R. de Cambrai (Clédat, p. 129). *) Le jeu de la FeuiUée (gén. objectif). Pourtant, la oü la liaison est plus lache, la langue a permis de tout temps 1'inversion, mais elle n'est plus permise aujourd'hui que dans le style élevé: Contr'els unt les uis clos des moines /i alquant, Saint Thomas, 5476 (Clédat, p. 17). Ne perdet de Ia barbe les gernons en bruslant, Pèlerinage, 470 (Clédat, p. 41). De cheval donné tous jours regardolt en la gueulle, Rab., I, 44 (Huguet, p. 410). i) F. Muller, Die Sprache der alten Vita Wandregiseli, p. 236. *) Tobler, Verm. Beitr., I, XI; Weslholm, Etude historique sur la construction du type Li filz le rei. PLACE DU GÉNITIF ET DE LA PHRASE SUBORDONNÉE 399 Cependant Rome entière, en ce même moment, Fait des vceux pour Titus, et par des sacrifices De son règne naissant célèbre les prémices, Rac, Bérénice, I, 5. Ces inversions ne sont au fond que des restes de la vieille syntaxe, qui sont admissibles dans la poésie, paree qu'elles sont claires. Par contre dans les combinaisons la place Maubert, le quai Henri IV la fonction primitive de Maubert et de Henri IV n'est plus sentie, ces mots sont devenus pour les Francais des appositions comme dans l'empereur Frédéric II; et notre construction s'est ensuite considérablement étendue: Les plumes Saint-Pierre, les lampes Swan, etc.1). La conjonction 4*>2. La P'ace de 'a phrase subordonnée, ou ie relatif est elle aussi, est plus libre dans la vieille langue que ^"mot'auquTui dans la langue actuelle. S'il y a deux phrases suborse rapporte. données, dont l'une dépend de l'autre, Tanden francais aime a placer celle-la devant la conjonction ou le relatif amenant la phrase dont elle dépend: Et trente mile de chaitis prisoniers, S'il n'ont secors, qui tuit perdront les chiés, Cour. Louis, 353. Que j'ai ma dame a ce menee, S'ele parjurer ne se viaut, Que tot aussi come ele siaut, lert vostre dame et vos ses sire, Chrétien, Chev. au lion, 6684 et suiv. Car li larron se douteroient, Se vif eschaper le lessoient, Qu'il nes feïst ou que soit prendre, J. de Meung (Clédat, p. 204). II y a donc beaucoup de phrases dans lesquelles plusieurs mots séparent le pronom relatif de son antécédent: La dame fu el bois, qui durement plora, Berthe aux grands pieds (Clédat, p. 58). Et on en trouve jusqu'aux xvie et xvne siècles. Mais Malherbe, IV, 285 et 400, blame des phrases comme Roland regarde tout *) Bréal, Essai de sêmantique, p. 54 et suiv. 400 l'ordre des mots qui q l'dme saisie, et Vaugelas, II, 440, érige comme principe: il faut éviter les équivoques. Au nom de ce principe il condamné: Ce je ne sgay quoy qui se trouve sur le visage des belles femmes, que Von voit et qu'on ne peut exprimer, mais il admet la phrase de Coëffeteau: C'estoit une chose indigne d luy de souffrir que les soldats s'attribuassent le pouvoir de créer un Empereur, qui n'appartenoit qu'au Sénat et au Peuple Romain, oü il n'y a pas d'équivoque. Cette règle est restée la même dans la langue actuelle, car dans une phrase comme la suivante personne ne saurait hésiter sur l'antécédent du relatif: Semblable d l'dlcyon, que la mer dorme ou gronde, Qui, dans son sein flottant, s'endort en paix sur l'onde, Lamartine, Prem. Méd., 20. Dans Texemple suivant on trouve même la relative placée devant son antécédent: Elle a toujours qui la suivent, six ehormes molosses blancs, Mirbeau, Les vingt et un jours, p. 160. Voici encore quelques exemples de notre construction qui se trouvent dans des auteurs du xvne siècle: On dlrait, quand tu veux, qu'elle te vient chercher, Boil., Satire, II, 7. // n'est nymphe, en Vaimant, qui ne se tint heureuse, Mol., Méllcerte, I, 2. Lui dit... qu'elle avoit envoyé quérir un carrosse pour en sortir, et, paree qu'il seroit longtèns d venir et que le sten pourroit être plutot prêt, qu'elle prioit de l'envoyer, Scarron, Rom. com., I, 9. — Et même au xxe siècle: // re garde qui vient par le sentier sinueux Violaine toute dorée, qui par moments resplendit sous le soleil entre les feuilles, P. Claudel, L'Annonce faite d Marie, II, 3, p. 82. — Es-tu bien süre, s'il avait cru possible d'arriver au résultat espéré, qu'il aurait si vite abandonné la partie, Revue bleue, 1899, II, 19, 453. Nous devons nous expliquer maintenant sur la thèse de Mlle Richter, qui, dans son importante étude citée plus haut 1), nie 1'accent fort du premier mot de la phrase et 1'accent faible du second, et qui 2) cherche le principe dominant de la phrase latine non dans le rythme, mais dans la logique de la phrase. i) Tobler, I, p. 162. LA THÉORIE DE MLLE RICHTER 401 Or, nous avons déja remarqué qu'il ne faut pas confondre la logique avec la grammaire. Cela a été un peu le cöté faible des grammairiens du xvne et même du xixe siècle de vouloir trop appliquer la logique a la langue; rappelons-nous le mot tout, a propos de quoi on a raisonné ainsi: tout définit un adjectif; un mot qui définit un adjectif est adverbe; un adverbe est invariable; donc tout doit rester invariable. Le malheur est qu'on n'a pu changer la langue, qui se moque de la logique et qui dit toujours EUe est toute contente. D'un autre cöté, il ne faut pas exagérer. La langue exprimant plus ou moins parfaitement l'homme tout entier avec ses sentiments et ses désirs comporte naturellement aussi un fort élément logique. Seulement, cette logique est plus large que le rationalisme étroit. Elle est un peu comme la logique des mythes et des légendes qui sè moquent du bon sens de Gros Jean. Nous ne devons donc pas rejeter la logique comme élément dans 1'évolution de la langue, mais lui accorder une place modeste. Après ces considérations générales et nécessairement vagues, examinons 1'argumentation de Mlle Richter, d'abord la partie négative, puis la partie positive. 454. Mlle R. déclare que le premier mot de la phrase, loin d'être fortement accèotué, a en général un accent faible. Concédons lui que dans la phrase latine on peut, a n'importe quelle place, avoir un accent fort, p. ex. dans horum omnium fortissimi sunt Belgae, mais la question n'est pas la. Nous prétendons seulement qu'en règle générale ia première place est une des plus fortes de la phrase. Mllc R. le conteste, paree que, dit-elle, on y trouve précisément le mot connu, l'idée déja exprimée dans ce qui précède. Pourtant dans Quand tout est fini et que nous ne savons plus que faire de notre loisir, alors nous consacrons d quelques pratiques languissantes de religion ces moments de rebut, Littré, s.v. alors. — Les Allemands ont déclaré la guerre d la Belgique; celle-ci a été envahie par l'enneml, les mots alors et celle-ci, pour reprendre une idéé connue, n'en sont pas moins fortement accentués. Qu'on se rappelle aussi que le latin avait 1'habitude de ne pas exprimer le sujet s'il est atone. II faut faire une exception pour la proposition coordonnée ou subordonnée; les conjonctions, en effet, sont en général proclitiques. 402 l'ordre des mots Quant au second mot de la phrase, Mlle R. reconnait elle-même qu'après le premier il y a un repos. Or, ce repos est souyent rempli par une syllabe atone, p. ex. autem, esse, etc. Puis, nous ne pouvons parler en latin que de tendances, de constructions normales. En effet, en latin la construction est beaucoup plus libre que dans les langues modernes, les questions de style s'y mêlent donc aux questions de grammaire, tous les mots peuvent changer de place a un degré bien plus fort qu'en francais. II sera donc facile de trouver en latin des phrases qui ne commencent pas par le sujet, ou qui même ont un mot atone au début. Et enfin, cette tendance vers la construction romane s'est manifestée peu a peu; Mlle R. découvre dès 1'époque classique des constructions dites romanes. II y a donc eu une longue époque pendant laquelle plusieurs tendances s'entrecroisent, s'opposent les unes aux autres, et il est souvent difficile de reconnaitre le principe directeur. Seulement les langues modernes — et le francais plus que les autres — prouvent que la construction Sujet, Verbe, Complément va être la plus forte. 455. Quant au cöté positif de la thèse de Mlle R.: la logique exige l'ordre Sujet, Verbe, Complément, nous pouvons accorder qu'en effet le sujet a naturellement sa place au début de la phrase; puisqu'on met en tête de la phrase le mot déja connu et que le sujet remplit souvent ce röle, sa place est tout indiquée, et en réalité le latin 1'y met en général. Mais pourquoi la logique a-telle permis au latin de mettre le complément devant le verbe et ne 1'a-t-elle pas toléré en.roman? Et cette même logique veut-elle que Ie complément pronom dans une phrase comme por quelt portat ta medre? s'appuie au mot précédent et en frangais moderne au verbe qui suit? Nous persistons a croire que c'est surtout Ie rythme qui a changé l'ordre de la phrase; la logique peut y avoir contribué dans une certaine mesure, elle n'est pas le principe promoteur. Du reste, il faut reconnaitre que toute cette question demandé encore des études plus approfondies et détaillées et qu'on est encore loin d'avoir résolu le problème difficile de la construction romane. i) *) Nous renvoyons le lecteur a l'article que Mlle Richter a écrit dans Zeitschr. f. rom. Phil., XL (1920), pp. 9—62. TABLE ANALYTI QU E (Les chiffres renvoient aux paragraphes) Ablatif 381—383. indiquant la différence de mesure 24 Rem. 2. sens de l'ablatif latin: separativus, instrumentalis, locativus 381—383. précédé de prépositions 377, 381—383. dépendant d'un verbe comme grandinat, pluit 176. remplacé par de 406. par ad, a, od, atout, od tot, par, pour 385, 392 Ut, 393 III, 400 h, 401. par de, de 405, 406. par avec 418bls. Ablativus absolutus. Voir Participe et Gérondif absoius. du participe présent 278, 284 Rem., 414, 415. du participe passé 284. le gérondif absolu 279, 284 Rem. des substantifs, des adjectifs servant de prédicat 284 Rem. le sujet de l'ablatif absolu sous-entendu 281. Ie gérondif absolu d'un verbe unipersonnel 281. Académie (L') préfère le cceur et la bouche ouverte 45. critique Vaugelas écrivant toute autre 47 Rem. exige nu-jambes, nu-pieds 4761». condamné la règle de Vaugelas concernant mesme 47bta. admet différentes combinaisons avec vingt 52. écrit vingt et un an, mais vingt et un chevaux 56. adopte le quatre jamier 57. exige la répétition du pronom sujet 63e. déclare qu'il faut écrire je le suis (sc. malade) 72 Rem. blame l'omission des pronoms a 1'accusatif devant les pronoms au datif 74. exige la répétition du pronom complément devant chaque verbe 75. blame l'omission du pronom dans des tournures comme il (en) est 78. est de 1'avis de Vaugelas, qui condamné ce dit-on 96. admet qui.. qui 135 Rem. 1. condamné comme quoy 136 Rem. 1. régie la variabilité de quelque 145. condamné Je ne vois personne si heureuse 146. croit avec Vaugelas que une infinité de gens régit le pluriel 188. décide qu'on ne déclinera plus les participes actifs 280. critique les régies que Vaugelas donne sur 1'accord du part. passé 291. condamné le vers de Corneille: quand je lui fis l'affront 310. constate que pendant que est aussi fféquent que tandis que 348. condamné devant que 350. rejette a mime que conjonction de temps 353. condamné pour ce que 356. déclare comme ainsi soit que banni du langage 357. condamné mais que — quand 360 Rem. 2. dit que de fapm que et de manlire que se trouvent dans les meilleurs auteurs 373. écrit, avec Vaugelas, Ma sceur est allé visiter ma mère 286 Rem. est de 1'avis de Vaugelas, qui désap- prouve chez un conteur 413. rejette je le vous promets et vous le vous figurez 443 Rem. 1. Accentuation. Voir Rythme. Accord de l'adjectif, voir Adjectif. de l'article 25, 45. du nom de nombre 56. du pronom personnel 72, 77. de leur 83. du pronom démonstratif 94. du pronom relatif 128. de quelque 145. 404 TABLE ANALYTIQUE. entre le verbe unipersonnel et son sujet 186, 286. entre le verbe et son sujet 65,187—191, 286. la phrase relative 187. j'avons „j'ai" 1871"18. le sujet est un collectif 188. le sujet est formé par plusieurs substantifs 189. les substantifs sont reliés a 1'aide de comme, ainsi que 190. ce suis-je et c'est moi 191. du participe présent 280, 281. non-accord du part. passé conjugué avec être 286. le part. passé conjugué avec avoir 463, 287—296, voir Participe passé, le part. passé des verbes pronominaux 297. Accusatif 380. avec des verbes comme pluit 176. • avec il faut 183. avec il y a 184t>is. avec les verbes unipersonnels 186. reste en francais 377, 380. est dans certains cas exprimé par a en espagnol 3, 380 Rem. Actif 152. remplace le passif 156. Adjectif 42—50. emploi de l'article partitif devant un adjectif 32, 36. adjectifs disparus 42. comparatif et superlatif 24 et 43. accord 44—49. bonne amitié et repos 45. durs cuits, grandes ouvertes, nouveaunée 46. tout 47. demi, nu, mime 47bl8. quelque 48. une goutte de répandue 49. determinant un infinitif 258,, 258bls3. suivi d'un génitif ou datif 378, 379. - devenu préposition 384, 4116, 414. renforcé par des adverbes 43. place de l'adjectif difficile a déterminer 448, 449. Adverbe il est difficile de distinguer l'adverbe de la conjonction 321. de quantité 33. tout 47. demi, nu, mime 47Ws. quelque 48. aide a préciser la pensée 200. |nuf£ affaiblit la valeur de l'indicatif 201,204. adverbe relatif que 128, 129. 34761». adverbe interrogatif comme, comment et combien 347. adverbe négatif 421, 433*, 427—429. d'intensité 347, 364, 373. per te du sens d'intensité: tout que 364, combien que 365. devenu préposition 384, 411e, 416. dehors, 413, pris 415. dessous, puis, depuis, ainz 416. enz, dedans 417. devant, avant, auparavant 418 et Rem. 2. place de l'adverbe 447. Adversatif (Sens) non exprimé entre deux phrases reliées par et 324e, /. de si 327e. les conjonctions adversatives latines ont disparu 332. de magis et de maïs 333, 334. . de ainz et de avant 335 et Rem. cependant et tandis que: passage du sens de simultanéité au sens adversatif 336 et Rem. 2. Affectif (élément) tournures originairement affectives 435, 439. -age les substantifs en -age remplacent l'infinitif substaiitivé 261bis. Alexis (L') ne connait pas lequel 121. -am 314. Ammianus Marcellinus emploie amabatur pour amatus est 155. Anacoluthe 113, 116, 3. Analyse cas remplacés par des prépositions 2,377. comparatif et superlatif 43. emploi du pronom sujet 59, 60, 62. auxiliaires de temps et de mode 204bls, 205. j'ai ü faire 206. 1'A. c. I. remplacé par des subordonnées amenées par des conjonctions 204bls, 271c, 277, 342. constructions analytiques après les verbes de perception 277. le futur remplacé par rinfinitif + habeo 315. mots négatifs remplacés par des formes. . analytiques 422, 430. 'Once les substantifs en -ance remplacent l'infinitif substantivé 261bls. Antécédent celui et celui-la 106. emploi et non-emploi 112—119. •TABLE ANALYTIQUE 405 un nom de personne suivi de quoi et de oü 119, 127. accord et non-accord du verbe de la proposition relative avec l'antécédent 187. la nature de l'antécédent déterminé l'emploi du mode dans la relative 229—231. Anteriorité. mode dans la phrase d'antériorité 233, 234. conjonctions d'antériorité 349—351. Anthimus 235. Apposition avec ou sans article 14, 21, 40,. avec article en espagnol et en grec 21 Rem. Approbation mode après un verbe qui exprime l'approbation 219. Archaïsmes et expressions figées 435. non-emploi de l'article 22, 39. pronom personnel 61. un mien ami 80. icelui 102. qui dort dine 112. advienne que pourra 115. que je sache 116. que faire, faire que sage 116, 223=. qu'est-ce que 116, 138, 439. de quoi 119. del bien faire 202 Rem. 2. Subjonctif dans la principale 205. qui vive 206 Rem. 3. pour de rire 267. L'appétit vient en mangeant 281. que non, oui 343. a seule fin que 370. négation ne 426. Vive te roi 438. complément devant le verbe: chemin faisan* 446. génitif devant le nom qu'il qualifie: lundi 451. voir Conjonctions et Prépositions. Article défini 6—26. sens démonstratif 8. en picard 8 Rem., 63 Rem. partitif 27—37. indéfini 38—41. article devant le pronom possessif 80. Aspects du verbe 299. •ation les substantifs en -ation remplacent l'infinitif substantivé 261bls. Atlas linguistique emploi du pronom sujet 63a Rem. emploi de l'auxiliaire avoir 174. Attribut 80. attribut d'un infinitif 258,, 258bls. le participe passé employé comme attribut 283. aubert exige il me parle 69. comdamne je ne peux ni veux Vivlter 329. Augustin (Saint) plus il est populaire, moins il emploie d'A. c. I. 271. dit septem per septem 51. aurelius VlCTOR se sert encore de l'infinitif historique 268. Belgique (La) garde septante et nonante 52. Blame mode après un verbe qui exprime le blame 219. -bo faiblesse phonétique de la formation synthétique du futur 314. Bouhours (Le Père) admet le quinze janvier, Henri quatre 57. blame l'omission du pronom dans il (en) est 78. ne parle pas des passés défini et indéfini 312 Rem. 2. Brunetière se sert de la construction L'homme que je crois qui a fait cela 277. But 368—370. exprimé par la relative 225, 228a. par une phrase adverbiale 246, 368—370. par le supin 255, 368. par le gérondif précédé de ad 255. par l'infinitif 258d, 258bls, 267, 267, Rem., 267618. par la préposition ad, pour, a 379, 267bto, 393 III, 399g. par le datif 379. passage du sens de manière a celui de but: com 369 Rem. passage du sens final au sens causal: pour, pour ce que 356, 393 II. passage de l'idée de but au sens temporel: pour 393 IIle. sens final entre deux phrases coordonnées 368. Calvin a changé souvent comme en comment 343 Rem. a biffé des que dans Pédition définitive de l' Institution 345. 406 TABLE ANALYTIQUE a changé parfois par en pour 3931 Rem. substjtue par le pêché a par pêché 17. change dont en d'oü 133. Canada (Le) son père „mon père" 86 Rem. aucun „quelque" 143 Rem. Cas (Les) 377—383. en latin déja les prépositions font concurrence aux terminaisons flexionnelles 2, 377. Chute des cas et ordre des mots 3,435M8, 437, 446. Catalan emploi périphrastique du pronom possessif 84. se sert de aller, suivi d'un infinitif, pour exprimer le passé 307 Rem. 4. ne distingue pas bien le gérondif du part. présent 279 Rem. connait la négation gens 427. Caton aime a placer et au début d'un récit 323. i;-^ Cause exprimée par une relative 225, 2286. par une adverbiale 236, 237, 338. par l'infinitif prépositionnel 267. par l'ablatif, par les prépositions ab, de, ob, propter, prae; par, de et pour 382b, 392 III, 393 III. par le participe présent et le gérondif 278. non-exprimée entre deux phrases reliées ou non par et 320, 324c. une conjonction causale prenant une valeur concessive 357. une conjonction de temps devenant causale: cum, quando, puisque, dès que 352, 354, 356. passage du sens de manière au sens causal: quomodo 355. passage du sens final au sens causal: pour, pour ce que 356, 393 II. passage du sens instrumental au sens causal: par, par ce que 356. perte du sens causal: quand 357. Certitude mode après les expressions de certitude 220a. Chipflet range /suste parmi les conjonctions décriées 391. Chrétien de Troves aime a substantiver l'infinitif 260. fait un emploi fréquent de l'imparfait 304. est le premier a se servir de lorsque 353. COËFFETEAU. Voir VAUGELAS. Collectifs unes levres, uns dens 41. accord du verbe quand le sujet est un collectif 188. se passent de l'article 13. Comparaison. Voir Comparatif. l'article manque 18. suivie d'une adverbiale 250—251, 374—376M8. une conditionnelle figurant comme second membre d'une comparaison 251. la différence de mesure exprimée par un ablatif en latin, par de en francais 382c. Comparatif exprime aussi le superlatif relatif 24. la forme synthétique est remplacée par une forme analytique 24, 43. suivi de que que, que ce que, de ce que, que non pas que 251, 434. suivi de l'indicatif et du subjonctif 250—251. suivi de quam ou de l'ablatif en latin 376. suivi de que ou de la prép. de 376Ws. suivi de prépositions en roumain, italien, espagnol, néo-grec et hébreu 376bls Rem. 1 et 2. Complément emploi de l'article défini devant le complément 19. emploi de l'article indéfini devant le complément 40a. emploi de l'article partitif devant le complément 31. pronom personnel complément 69—76. pronom réfléchi complément 77. pronom en complément 78. pronom possessif complément 82. pronom ce complément 96, 97. cui complément direct lllbto. phrase relative comme complément 112. le verbe et son complément 192—199. différence peu nette entre verbes a complément et verbes sans complément 192. verbes a complément direct et a complément indirect 193, 194, 397 Rem. verbes qui prennent- un complément en devenant factitifs 195. vivre sa vie 196. le complément d'un verbe de mouvement composé avec un préfixe 198. verbes coordonnés a complément différent 199. l'infinitif complément 258, 263—267. la proposition infinitive 269. TABLE ANALYTIQUE 407 accord du part. passé avec le complément 287—296. place du complément par rapport au - part. passé 309a. deux compléments de nature différente 343. ce que et de ce que amenant une phrase substantive 344. complément exprimé par le génitif 378. par le datif 379. par 1'accusatif 380. par des prépositions 377—420. place des pronoms personnels compléments 440—442, 444. deux pronoms compléments devant le verbe 443. place du substantif complément 446. j'aural et j'aurais: complément placé devant le verbe 446. Composition noms dé nombre formés par composition 52. pronoms formés par composition: ce, ceci; celui, celui-ci 92—108. lequel et dont 120—125, 139. quelque 145. ne . . . personne, ne . . rien 146, 147, tout le monde 149. formes verbales formées par composition: le passif 155—156, 178. les modes. Voir Verbes auxiliai- . res de mode. les temps. Voir Verbes auxiliaires de temps. conjonctions formées par composition 336—341, 344—376WB. prépositions formées par composition 384, 417—419. mots négatifs formés par composition 424, 427—434. Concession dans la phrase coordonnée 362a. dans la relative 225, 228c. dans Padverbiale 244—245. exprimée par le gérondif et le participe présent 278. par le participe passé 284. par mais 334. par n'importe 367618. par le subjonctif seul 203(, 205,, 244, 245, 361a, 3626. par des conjonctions: si, quand 363. par des adverbes ou des pronoms d'intensité: tant, si; tout 364. par des adverbes ou des pronoms interrogatifs: oü, comment, quant, combien; qui, quoi, quel; quiconque, quelconque 365, par la préposition pour 366,393 IHg. par les adverbes ja, bien, encore 367. par d'autres tournures 362a, 376Ws Concret (Nom) emploi de l'article 13. Condition la condition est une cause hypothétique 238. condition simple 238a, 239a. condition hypothétique 2386, 2396, 241. condition irréalisable 238c, 240, 242. condition exprimée par le subjonctif 239. par la relative 113. par l'infinitif prépositionnel 264, 267. par le gérondif et le participe présent 278. par mais 334. par un part. prés. précédé de o 385 Rem. passage au sens temporel 238, 360. Conditionnel 252—254. Origine 252. remplace le subjonctif dans la principale 206. dans la relative après un superlatif 230 dans 1'apodose d'une période hypothétique 239, 2403, 253. voudrais, pourrais après si 241, 242. exprime une supposition 245, 254. se trouve après quand même 245. exprime 1'opinion d'un autre 253. Conjonctions 320—376bls. conjonction et adverbe, conjonction et préposition 321. conjonctions de coordination et de subordination 321. Conjonctions de coordination: et marqué la simple coordination 323. différents rapports existant entre deux phrases 324. répétition de et et de et 323, 325. avec, ainsi que, comme, aussi bien que, de même que 326. emé < et magis en provencal 326 Rem. 1. puis, et puis dans les dialectes 326 Rem. 3. sic, primitivement adverbe, prend aussi la fonction d'une conjonction 327. sens adversatif de si 327 e, f. si = jusqu'a ce que 327 Rem. nee en latin 328, 421. ne et ni en francais 328Ms, 329, 330, 433. neis avec sens négatif et affirmatif 330 Rem. les conj. adversatives latines disparaissent 332. 408 TABLE ANALYTICjUE magis passe au sens de plvtdt et de mais 333. mais restrictif et adversatif 334. ainz et avanf 335 et Rem. les restrictives néanmoins, toutefois, pourtant, cependant 336. 1'exclusive ou (ou bien) 337. origine et sens de la causale car 338. les conclusives pour cela, pourtant, par quoi, portant, donc, aussi 339. Conjonctions de subordination: le frangais n'a gardé que bien peu de conjonctions latines 340. la conjonction untverselle que 340. que, ce que, de ce que dans la phrase substantive 97, 343, 344. emploi fréquent de que dans le langage populaire et dans les dialectes 345 Rem. 4. dans les adverbiales que, après avoir remplacé la plupart des conjonctions latines, a été lui-même supplanté par de nouvelles formations 346. chute des conj. de temps: extension de comme et de quand 347. quand 347. phrases relatives exprimant le temps 347bls. nouvelles formations: tant com, dementres que, si com, oü que, lorsque, tandis que, pendant que 348. conjonctions d'antériorité: ainz que, primes que, avant que, devant que 350. jusques, tant que, jusqu' ü ce que 351» conj. de postériorité: puis que, après que, dès que, oü que et d'autres 352, 353. causales: que, quand, comme; — pour ce que, dès que, puis que, paree que et d'autres 354—357. conditionnelles: si, que, a moins que, pour que, pourvu que, mais que, sans que 358—360. concessives: toutes les conjonctions latines tombent 362. si, quand 363. si . . . que, tant. . . que, tel . . . que, tout . . . que 364. qui que, quoi que, quel que, comment que, combien que 365. naissance de quoique, quelque . . . que et le quel que 365. pour ... que 366. ja, jacoit que, bien, si bien, bien que, encore que, 367. finales: que, pour(ce)que, afin que, a ce ce que, -peur que, etc. 368—370. consécutives: que, si . . . que, tant . . . que, de mode que, sans que, etc. 371—373. comparatives: comme a remplacé atque, ut et les corrélatifs, mais est concurrencé par que 374, 374bls. plus ... plus, tant plus... tant plus 375. carior vitS, carior a vita, de vita, plus cher de la vie 376—376bls. Conjugaison périphrastique lapsurus eram = lapsus essem 238c, 252. Conjunctivus. Voir Subjonctif. Conséquence exprimée par la relative 225. non-exprimée entre deux phrases reliées par et 3246. exprimée par une adverbiale 247—249, 371—373. Coordination coordination et subordination 321. la langue populaire préf ère la coordination a la subordination 221, 324,371 Rem. 3. la subordination remplacée par la coordination: phrases qui marquent la grada- tion 375. Corneille (P.) corrige ce dit-il 96. change un en quelqu'un 144. remplace combien que par quoi que 365. Corneille (Th.) approuve Vaugelas écrivant le cceur et la bouche duverte 45. condamné la règle de Vaugelas con- cernant mesme 47bla. adopte le quinze janvier 57. condamné l'omission de le, la, les devant lui et leur 74. blame l'omission du pronom dans des locutions comme il (en) est 78. rejette qui.. .qui 135 Rem. 1. blame il s'est requis une estlme générale et rendu considérable 199 Rem. t: réclame Mes frères sont allés apprendre au juge 286 Rem. critique les régies que Vaugelas formule sur 1'accord du part. passé 291. rejette la construction je me suis dite 297. constate que pendant que est aussi usité que tandis que 348. condamné devant que 350. proscrit mais que = quand 360 Rem. 2. désapprouve, comme Vaugelas, chez Plutarque 413. rejette je le vous promets et vous le vous figurez 443 Rem. 1. déclare que, pour la place de l'adjectif, 1'oreille doit décider seule 449. TABLE ANALYTIQUE 409 Crainte mode après les verbes de crainte 2176. ne et ut 342. selo digo 443a. connait l'emploi périphrastique du pronom possessif 84. dit esfe „mon" et ese „votre" 89 Rem. a la forme accentuée quien< quem 110. connait le relatif absolu 113. donde< de + unde signifie „oü" 124 Rem. n'aime pas la succession de plusieurs relatives 129 Rem. 2. a ser comme auxiliaire du passif a cöté de ir 156. se sabe = on sait; se le Uamaba = on 1'appelait 166 Rem. ha muerto = a tué 195 Rem. 2. se sert du subjonctif ou de l'infinitif pour exprimer une défense 202 Rem. 1, du subjonctif au lieu du conditionnel dans la relative 229. , l'infinitif peut exprimer un ordre 202 Rem. ï. sens modal du plus-que-parfait de l'indicatif 240 Rem. 1. se sert du présent oü 1'on se serait attendu a un conditionnel passé 242 Rem. 2. le gérondif a supplanté Ie participe présent 279 Rem. emploi savant du participe présent 281bls Rem. 1. le participe passé conjugué avec haber est invariable 294 Rem. I. haber a supplanté ser comme auxiliaire de temps 307. il est parfois remplacé, a son tour, par tener 307 Rem. 3. le plus-que-parfait latin se trouve encore avec son sens primitif; en général pourtant, il a la valeur d'un conditionnel 308 Rem. les deux éléments du futur sont séparables dans la vieille langue 316 Rem. serla = aura été 317 Rem. emploi pléonastique de la conjonction que 343, 345 Rem. 3. de après un comparatif 376bls Rem. 1. entre devant des substantifs figurant comme sujet 390 Rem. pro a remplacé par: nouvelle différenciation entre por et para 393 I Rem. en mi vida he oido tal cosa 429 Rem. sens affaibli de nutnquas, ninguno 432 Rem. Estienne (H.) trouve que dans par mil dangers le mot mil a mauvaise grace 54. exige l'emploi du pronom sujet 61. réclame moi,.toi comme sujet tonique 61. SNEYDERS DE VOGEL, Sgntaxe historique. 2me édition. 27 Danois (Le) met l'article défini après le substantif 10. Datif marqué une caractéristique 107. éthique 76c. cui 110, lil»1". du pronom réfléchi 165. avec il faut 183. avec un infinitif 274, 274blB. avec un gerundivum et un participe passé 2Vf>to. exprime un but 379. rendu par a en francais 379c, 402. pronom datif et accusatif devant le verbe 443. deux datifs devant le verbe 443c. Desmarais (Reonier-) déclare qu'on peut laisser indéclinable le part. passé conjugué avec avoir 293. Discours indirect, voir Style indirect.Doute 221. mode après les verbes de doute 215. Durée 2 exprimée par l'imparfait 299, 301. circonstanciels 299. auxiliaires 299. se mourir 299. gésir, ester, seoir 299 Rem. habeo + part. passé 306. e féminin. chute dans toute étonnée 47bls. Enclise du pronom personnel complément 60, 440, 441, 443, 444. de esse, être, aller, avoir, venir 436. le pronom possessif latin enclitique ou proclitique 80. Ennius emploie et au début d'un récit 323. Espagnol (L') eonosco a su padre 3, 435bis Rem. met l'article devant 1'apposition du sujet sous-entendu 21 Rem. omet souvent l'article devant le superlatif 24 Rem. 1. emploie un seul article devant plusieurs substantifs de genre différent 25. Rem. emploie l'article indéfini devant les noms de matière et devant un substantif au pluriel 41 Rem. 410 TABLE ANALYTIQUE admet Pierre est venu hier a cöté de vint hier 310. exige que les adjectifs indiquant une couleur suivent le substantif 449. Éventualité le subjonctif mode de 1'éventualité 203. Faguet (Emile) se sert de la construction L'homme que je crois qui a fait cela 277. Figées (expressions) voir Archaïsmes. Fontaine (la) est archa.sant 61, 143. change Or le laissons en Or laissons-le 441. Frédégaire ne se sert pas du participe passé avec esse, même si cette construction est admise 155. Futur 314—318. peut exprimer un ordre 202, 317. après les verbes de crainte 217». après les verbes qui expriment une dédsion 217c. remplace le subjonctif dubitatif dans je ne sais ce que je ferai 222. se trouve parfois dans la phrase finale 246. formation du futur 258blB, 314, 315. peut exprimer une vérité générale 298. devoir et aller auxiliaires du futur 316. habere peut être séparé de 1'inf. dans d'autres langues romanes 316 Rem. le futur antérieur au lieu du passé indéfini 317. le futur (et le fut. ant.) exprimant une supposition 317. . exprime une concession 317. le futur du passé exprime en espagnol une supposition par rapport au passé 317 Rem. 1. le futur simple au lieu du futur du passé 318 Rem. 2. le futur est rare dans la phrase conditionnelle 240,, 318 Rem. 3. le futur du passé dans les phrases subordonnées et dans le discours indirect libre 319. 1'italien dit souvent j'anrai fait au lieu de je ferai et j'aurais fait pour je ferais 318 Rem. 1, 319 Rem. la dernière construction se trouve aussi dans le Nord de la France 319 Rem. Garnier (Ph.) exige l'emploi du pronom sujet 61. exige a moi pour mien 81. admet attendez-m'y et attendez-y-moi443b; veut que les adjectifs indiquant une couleur suivent le substantif 449. Gascon En gascon toutes les phrases affectent la forme d'une subordonnée 345 Rem. 4. Généralisation le subjonctif sert a généraliser 225. dans la relative après un superlatif et après tout 230. Génitif partitif 29. du pronom personnel 84. précédé de celui 104, 105. cui', génitif lllblB. dépendant d'un infinitif 2584, 258bls4. dépendant d'une préposition 377. dépendant d'un substantif, adjectif ou verbe 378. remplacé par des prépositions 378blg, 404, 408. place du génitif 451. Genre exprimé par la désinence 1. exprimé par l'article 11. I Gérondif précédé d'un pronom tonique 69. dlfférentes nuances exprimées par le gérondif p. 95 note 2. employé substantivement 259. est concurrencé par l'infinitif précédé d'une préposition 262, 263. accompagné de son sujet a 1'accusatif 2636, 272. lutte entre l'ablatif du gérondif et le participe présent 278—281. le gérondif supplanté le part. prés. dans ses fonctions verbales 278, 279. même lutte dans les autres langues romanes 279 Rem. influence savante 280, 281blB Rem. 1. gérondif absolu 281. avec aller il exprime la durée 299. employé comme préposition 384, 41 ld, 415. Gerundivium exprime la nécessité 204. construit avec un datif 274bls. Grec (Le) ne connait pas l'article a 1'époque d'Homère et d'Hésiode 6. met l'article devant 1'apposition du sujet sous-entendu 21 Rem. n'aime pas la succession de plusieurs phrases relatives 129 Rem. 2. a un mode spécial pour 1'optatif 203. a une grande facilité de substantiver l'infinitif 260. TABLE ANALYTIQUE 411 a une forme spéciale pour le perfectum praesens 302. le perfectum a disparu, 1'aoriste est resté 304bls Rem. I, le néo-grec met les prép. dbró. et irapa après un comparatif 376bls Rem. 2. Grégoire de Tours ne se sert pas du participe passé avec esse, même si cette construction est admise 155. fait un emploi trés étendu du praesens historicum 303. Grisons (Les) • sè servent de venire comme auxiliaire du passif 156. Hébreu (L') ne connait pas de comparatif 376bls Rem. 2. hésiode ignore l'article 6. Hollandais (Le) neen ik 51 Rem. 2. > ze zeggen 64. hij die = celui qui 87. Homère ignore l'article 6. Imparfait l'imparfait remplacé par 1 'inf ini ti vus descriptivus 268, 301 Rem. est rare dans la plus ancienne période du vieux francais 304, 304Wa. équivaut presque a un présent: je voulais 304 Hem. trés fréquent dans le style littéraire 311. dans la période hypothétique 238c, 240.. Impératif exprime un ordre ou un souhait 202. remplacé par le futur ou l'infinitif 202. remplacé par le subjonctif 205. place des pronoms compléments 441, 443o. accompagné d'un pronom sujet 63/. ne dans les locutions impérattves 4266. Indicatif exprime la réalité 200, 201. sens affaibli par le contexte 201. remplace le subjonctif: eamus allons 205l. ,' s'introduit dans la phrase substantive 209, 210, 211, 215, 217, 218, 219. après i7 se peut faire 2206. . s'introduit dans l'interrogation indirecte 221, 222, 224. dans la relative 225—231. dans la locative 232. dans Ia temporelle 233—235. dans la causale 236, 237. dans la conditionnelle 238—240, 242 Rem. 2. dans la seconde conditionnelle 243, 358. dans la concessive 244, 245. dans la finale 246. dans la consécutive en latin vulgaire et en frangais 247—248. dans la comparative 250, 251. après sans que 248, 360. Infinitif 256—277. l'infinitif avec sens passif 268, 273. précédé d'un pronom tonique 69. peut exprimer un ordre: différence entre le vieux francais et Ia langue actuelle 202. l'infinitif exprimant un ordre dans les autres langues romanes 202 Rem. 1. remplace le subjonctif dans je ne sais que faire 2058, 222, 224. comme second terme d'une comparaison 251. remplace le supin 255. Ie gérondif est la déclinaison de l'infinitif 256. disparition des infinitifs autres que le présent 256 Rem. l'infinitif est primitivement un datif 256618 Rem., 258 ld, 262, 267bls. oscillation entre la fonction de substantif et celle de verbe 256—261, 69. constructions admises en latin classique 258. extension de l'emploi substantif en latin vulgaire et en vieux francals 258bls, 259. mouvement de recul a partir du xme siècle 260. remplacé par des phrases subordonnées et des substantifs verbaux 261blB. avoir fait = après avoir fait 266 Rem. 3. l'infinitif supplanté le gérondif après des prépositions 262, 263. l'emploi de l'infinitif prépositionnel est moins libre aujourd'hui que dans la vieille langue 263. extension de a et surtout de de 264—267. noble ordene est de cevalerie 266, 407. l'infinitif précédé de que (de) 116c, 266 Rem. 1 l'infinitif prépositionnel au lieu d'une subordonnée 266 Rem. 2. l'infinitif historique en latin 268b,s, 268ter) 301 Rem. en francais: sans préposition, avec a ou de 268bis. 412 TABLE ANALYT1QUE l'infinitif dans les questions, dans les relatives 268blB Rem. 1. dire que; et songer que; savoir 268blB Rem. 2. l'infinitif précédé de pour exprimant la concession 366. l'infinitif accompagné de son sujet. Voir Proposition infinitive. Instrumentalis 2, 382. Intensité exprimée par une phrase consécutive d'intensité 247, 248, 371—373. exprimée par des adverbes 249, 371. perte du sens d'intensité: tout que, combien que, si que 364, 365, 373. Interrogation exprime un ordre 202. si dans l'interrogation directe 224 Rem. origine de la tournure interrogative 439. les particules interrogatives li et enne 439 Rem. 1 en 2. est-ce-que, qui laisse a la phrase sa forme habituelle 439. Interrogation indirecte amenée par que, qui, ce que, ce qui 137. mode 221-224. après les verbes affectifs 224. deux interrogations dont la seconde affecte la forme Indirecte 337. Ironie peut avoir une valeur négative 201. Irréalité la négation exprime 1'irréalité 200, 201. Italien (L') omet souvent 1'article devant le superlatif 24 Rem. 1. ne, ci, vi' pronoms personnels 78 Rem. ne se rapportant a un nom de personne p. 60 note 1. connait l'emploi de suo se rapportant a un possesseur au pluriel 83 Rem. 1. dove < de + ubi signifie „oü" 124 Rem. quale . . . quale „qui .. . qui" 135 Rem. essere, venire, andare auxiliaires du passif 156. datif éthique 165 Rem. si' canta; noi si canta 166 Rem. se sert de l'infinitif pour exprimer une défense 202 Rem. 1. l'infinitif positif exprime parfois un ordre 202 Rem. 1. emploie le subjonctif dans la principale 206 Rem. 2. se sert parfois du plus-que-parfait de l'indicatif avec le sens du conditionnel 240 Rem. 1. 1'italien a une grande facilité de substantiver l'infinitif 260. le gérondif a supplanté le participe présent 279 Rem. emploi savant du participe présent 281bl8 Rem. 1. on est libre de faire varier ou non le part. passé conjugué avec avere 294 Rem. 1. sono voluto venire 307. dans 1'Italie du sud le plus-que-parf. latin a pris le sens d'un conditionnel 308 Rem. les deux éléments du futur sont séparables dans la vieille langue 316 Rem. dit souvent avrb fatto pour fari et avrei fatto pour ,arei 318 Rem. 1, 319 Rem. piü infelice di me 376bls Rem. 1. glielo dico = je le lui dis 443a. peut dire Mi raccomando a lui a cöté de Afe gil raccomando 443 Rem. 2. le pronom enclitique dans per vedermi, proclitique dans pour me voir 442 Rem. non sono potuto venire 3096. Joinville connait le quel 121. Langage familier et populaire ca pleut 62 Rem. 3. emploi pléonastique de il 63a. la (= le) plus saine 24. lis disent 64. nous, on n'est pas des princes p. 43 nofe 4. tu 66. li = lui 70. non-emploi du pronom complément 74. emploi de sien attribut 80. que nominatif 111 Rem. quoi relatif 1193, 1236. la femme que je lui ai donné un livre 1236, 128, 129. dont dans le sens de „oü" 124 Rem. comme quoi 136 Rem. 1. quoi c'est 136 Rem. 2. celui suivi de prépositions 107. „ précédé de l'article 108 Rem. évite les phrases relatives 109. aime l'auxiliaire avoir 174. c'est vous qui va 187s. pas faire, Charles! 202. préfère l'indicatif au subjonctif 215, 218. aime la coordination 221, 371 Rem. 3. préfère le conditionnel au subjonctif: fusserais 240a Rem. l'infinitif exprimant un but 256bl8 Rem., 25gMs. TABLE ANALYTIQUE 413 c'est pour de rire 267. dttes voir 267bls. se sert d'avoir comme auxiliaire de temps 307. je suis été 307. le peuple ne se sert plus du passé défini 311, 312. remplace le passé antérieur par Ie plusque-parf. composé 313. met et au début d'un récit 323. aime les phrases simples et simplifie la construction de la substantive 342. que s'introduit dans les phrases adverbiales et même dans les phrases principales 345 Rem. 4. si que = si 358. tel.. . que m quelque ... que 367Ws. apud „dans" en latin archaïque 385. un fils a papa 402. emploie dedans. et dessous comme préposition 416, 417. , supprime la négation ne 429. il est plus riche que non pas vous 434. ne va pas rien dire 434 Rem. 1. plus souvent 434 Rem. 2. Latin (Le) a des traces d'un locativus et d'un instrumentalis 2. distingue les fonctions par des désinences 3, 377—383. he connait pas l'article 6, 28, 38. ne peut pas comme le francais substantive r toutes les par tics du discours 11. est riche en adjectifs 42. a un comparatif et un superlatif synthétiques 43. non-accord de l'adjectif 44. a des noms de nombre distributifs et multiplicatifs 51. n'exprime pas le pronom sujet 59. n'a pas de pronom spécial pour la 3e pers. 58. n'exprime pas toujours le pronom possessif 79, 83. suus est un pronom réfléchi 83. a trois pronoms démonstratifs hic, iste, ille 89. fait accorder le pronom avec le prédicat 94. ut qui, com cil qui 106. tres aliqui 145. aime les phrases relatives 109, 131. aime la forme verbale en -or 154 et suiv. a des déponents 154, 157. a une forme synthétique pour le passif 154, 155. itur, on va 178. la phrase objective présente une grande variété de formes 208, 342. emploie le subjonctif dans l'interrogation indirecte 221. ne connait pas les relatives dépendant d'un superlatif 230. se sert du subjonctif imparf. ou plusque-parf. dans les phrases hypothétiques 238c. met le subjonctif après ut consécutif 247. ne connait pas de conditionnel 252. connait le supin et le gerundivum 255. ne connait guère l'infinitif prépositionnel 258,,. infinitivus historicus - ou descriptivus 268bIs. a développé la construction dite A.c.I. 269. emploie plus souvent le part. prés. que l'ablatif du gérondif 4, 278. le part. passé est toujours variable 287. les temps passés de 1'actif sont des formes synthétiques 305. l'indicatif du futur est une forme synthétique 314. se sert parfois de per pour indiquer 1'agent 3826. a - des conjonctions, des pronoms, des adverbes, des verbes négatifs 421. a une construction beaucoup plus libre que le frangais 4, 435. Latinisme i'ts = on 64. non-emploi du pronom sujet 61. le pronom démonstratif s'accorde avec le prédicat 94. extension de lequel 121. emploi de la phrase relative la oü ie francais actuel met une proposition coordonnée 131. emploi du subjonctif après comme 235, 237. emploi du subjonctif dans la consécutive 248. emploi de l'infinitif sans préposition 267. fréquence de 1'A.c.I. au xvie siècle 272. variabilité du gérondif 280. variabilité du participe passé 288. Lieu exprimé par une phrase adverbiale 232. passage de oü que au sens de temps 348, 353. exprimé par une relative 347Ws. passage du sens local au sens figuré: versus, adversus 378bls, 398, 398bls. in 378bte, 387. ad 399. ' exprimé par l'ablatif ou par des prépositions 383. 414 TABLE ANALYTIQUÉ in, en 387. vers, devers, envers 398, 398bls. inter, entre 390. per et par 392. pro 393. foris, casa 413. long, proche, présent 414. prés, après, auprès 415. sous, dessous 416. enz. dans, dedans 388, 417. devant, avant 418. parmi 419. entour, envtron 419bls. Locati vus exprimé en latin par des terminaisons ou par des prépositions 2, 383. en et a en frangais 387, 401. Logique . röle de la logique 440, 453, 455, Malherbe - admet l'omission de Part. indéfini 40,. écrit indifféremment mil et mille 54. exige la répétition du sujet après car et mais 63e. ' distingue dont de d'ou 124. condamné pourchasser autres 142. blame un autre pour une autre 142. aime a substantiver l'infinitif 260. exige la répétition de ni 329. blame des phrases comme Roland regarde tout qui a Vdme saisie 452. Manière passage du sens de manière a celui de temps: quomodo 346, ainsi com 348, 353. au sens final: com 369 Rem. au sens causal: quomodo comme 355. exprimée par une subordonnée- 247, 248, 371—373. par un gérondif ou un participe 278. par un ablatif ou par des prépositions 382o\ in 387/. per et por 392 III. ad, a 400/, 401. Marot (Clément) propose la règle actuelle du part. passé ' conjugué avec avoir, mais il ne 1'ap- plique pas lui-même 290. Maupas déclare que le relatif que n'est point nominatif 111. a bien vu la valeur des passés défini et indéfini 312 Rem. 2. condamné il en y a 443». Maupas fils donne milliace 55. Maupassant (Guy de) a beaucoup employé le passé défini 311. Meigret donne une série de multiplicatifs 51 Rem. préfère quatre vingts a huitante 52. donne milliard 55. exige moi, toi comme sujet tonique 61. rejette celui Va inventé 103. conjugué encore douloir 180. veut que le part. passé conjugué avec avoir reste toujours invariable 290. • a essayé de définir l'emploi du passé défini 312 Rem. 2. Ménage établit la règle de 1'accord de tout 47 Rem. adopte le quinze janvier 57. • blame l'emploi de que adverbe relatif 129. . rejette la construction je me suis dite 297. ne parle pas du passé défini 312 Rem. 2. d'après M. on ne mcttait en que devant les noms de ville commengant par une voyelle 387bls. déclare que pour la place de l'adjectif 1'oreille dolt décider seule 449. -ment les substantifs verbaux en -ment remplacent l'infinitif substantivé 261bis. -met de suffixe il devient préfixe dans metipsimus 88. Molière est archalsant 143. Montaigne a six articles partitifs sur dix cas sans article 31. n'applique pas la règle de 1'accord du part. passé 290. ajoute des pas la oü ils manquaient p. 370, note 2. Moyen exprimé par l'ablatif 382a. exprimé par en 387bl8c. per et par 392 III. pour 393 IHd. Nécessité mode après les expressions de nécessité 2206. l'infinitif + habere exprime la nécessité 240,, 252, 315. Négation 421—434. particules, conjonctions, pronoms, adverbes, verbes négatifs en latin 421, 422. non devant des verbes 422,, 430. ne (nen), nenni; ne seule négation 424—426. giens, mie, goutte, pas, point, guère 427—429. TABLE ANALYTIQUE 415 conséquences de l'emploi régulier de ne: chute des mots négatifs 431, 433, affaiblissement du sens de nullus et de nee 432, de nümquas et de ninguno en espagnol 432 Rem. pléonasme 434 Rem. 1. plus souvent 434 Rem. 2. la négation dans le second terme d'une comparaison 251, 434. je n'ai pas d'amts 33. je n'ai plus de souct 35. il n'est homme qui 40, 1. . exprime 1'irréalité 200, 201. verbes qui expriment la négation 215. que non, que nenni phrases substantives 343. négation d'une cause: non quod, non quo 334 Rem. 2. construction d'un impératif négatif 441. Neutre le beau, le mol 11. iV et el neutres 62 et Rem. 2. le neutre 72. en et y 78. o, co, ceel, cela 90, 93—100. qui et que relatifs 115—117. aiio/ relatif 118, 119. . dont et oü relatifs 125, 127. dont et oü interrogatifs 133. . qui, que et quoi interrogatifs 135, 136. quel et lequel, 139 IV, 140. el = autre chose 141. fout 149. .verbes neutres ou sans complément 192. Nombre. Voir Pluriel. Nom de nombre 51—57. chute des distributifs et des. multiplicatifs 51. . numération par vingt 52. duodeviginti remplacé par decem et octo 53. mil et mille 54. . million, milliard, mtlliasse 55. accord de un, vingt et cent 56. ordinaux 57. unus devenu article indéfini 38. un employé comme pronom indéfini 144. Noms propres de personnes 14. géographiques 15, 387018. de ville 15, 377, 383, 387bJs. Normand (Le) emploie le pronom enclitique dans por veeir me. Opposition. Voir Concession. exprimée par contra, adversus, in, contre 386. Optatif exprimé par un mode spécial en grec 203. en latin 203t. en francais 205,. phrase conditionnelle, qui exprime plutót un désir 239, 359. ne dans les phrases optatives 426. place du verbe dans les phrases optatives 438. Ordre des mots 435—455. plus important en francais qu'en latin et dans d'autres langues romanes pour la clarté de la phrase 3, 4, 435. place du verbe: esse, puis les autres verbes a la seconde place de la phrase 436. place du sujet: deux constructions: le sujet se place devant le verbe; il suit le verbe, quand celui-ci est précédé d'un autre mot 437. place du sujet dans les phrases optatives et interrogatives 438, 439. la particule interrogative ti et enne 439 Rem. 1 et 2. le rythme de la phrase a amené la place des pronoms compléments devant Ie verbe 440. la place des pronoms par rapport a rimpératif s'explique aussi par le rythme de la phrase 441. le pronom tonique devant le verbe 69, 442. je le vous promets et je vous le promets 443. place des pronoms devant l'auxiliaire 441. place trés libre du prédicat et de l'adverbe 445, 447. le régime placé devant le verbe 446. l'adjectif attributif n'a pas de place fixe 448, 449. les pronoms possessifs toniques devant ou après le substantif 80, 450. un génitif placé en latin devant, en francais après le nom 451. la place de la subordonnée plus libre dans la vieiile langue qu'actuellement 452. place du participe passé par rapport a l'auxiliaire 309a, 437. thèse de M»« E. Richter 453—455. Orthographe. Voir Phonétique. particularités syntaxiques qui se ré- duisent a une question de graphie p. 30 note 1, 46, 47, 47Ws, 48, 54, 56, 70, 280, 286, 287, 297. Oudin fixe l'emploi de mil et mille 54. déclare que qui prépositionnel ne se rapporte pas aux-choses 114. 416 TABLE ANALYTIQUE admet lequel adjectif 122. préfère un homme qui 123. dit: J'ay veu aujourd'huy, mais: Hier je vis Monsieur 310. a bien vu la valeur des passés défini et indéfini 312 Rem. 2. déclare jouste vieilli 391. condamné il en y a 4430. Palsgrave donne unes balances, besaces, chausses; unes armes 41. remplace vingt et deux par vingt-deux 53. réclame moi, toi comme sujet tonique 61. traduit atl is ours par tout est a nous 81. donne c'est une chose que ne dure guayres 111. dit encore l'homme en quoy je mettoye ma fiance 119. donne quelconque accusation que 130. connait dont luy souviendroit-il? 133. fournit quantes gens, quantes foys, quantes choses 134 Rem. déclare nessim vieilli, 146 Rem. ne connait pas chaque 148. veut que le part. passé s'accorde toujours avec son complément 290. appelle j'ai fait un passé défini 312 Rem. 2. signale 1'absence de de dans la robe mon maistre 408. Parfait surcomposé 313. Participe précédé d'un pronom tonique 69. participe absolu 284. participe conjoint 284. Participe passé 282—297. précédé de celui 108. construit avec un datif 274bIs. employé comme substantif, comme préposition 283, 384, 411c, 415. peut avoir un sens actif 283. participe passé conjoint et absolu 284. emploi prédicatif avec des substantifs, employé comme sujet 285. précédés d'une préposition 285 et Rem. accord et non-accord du part. conjugué avec être 286. 1'accord de aimi se réduit a une question de graphie 287. . accord et non-accord du part. passé conjugué avec avoir en vieux francais 288, 309c, 46,. grande liberté; le part. s'accorde parfois méme avec le sujet 289. opinions des grammairiens au xvr5 siècle 290. règle de Marot 290. régies bizarres établies par les grammairiens du xvne siècle 291, 292. état des choses en francais moderne 293, 294, 309c. le part. des verbes unipersonnels reste invariable 295. le part. suivi d'un infinitif 296. le part. des verbes pronominaux s'accorde en vieux francais toujours avec le sujet 297. avec habeo il équivaut au perfectum grec: urbem captam habeo 302. évolution de habere et esse + part. passé 306, 307, 308, 309. 1'unité n'est pas encore compléte 309. forme avec que des locutions conjonctionnelles: vu que, considérê que, attendu que 356, hormls, pourvu, posé, supposé que 360. Participe présent lutte entre le participe présent et le gérondif 278—281. il est supplanté par le gérondif dans ses fonctions verbales 278, 279. il reste comme adjectif 280. emploi savant du participe présent 280, 281blg Rem. 1. participes a sens dégénéré 281b,B Rem. 2. avec être il exprime la durée 299. employé comme préposition384,411,415. Partitif. Voir Article partitif. l'idée partitlve exprimée par le génitif 378 ld. par la préposition de et de 403, 404, 405d. Passé 301—313. le passé peut exprimer une vérité générale 298. pertes de plusieurs formes du passé 305. nouvelles formations: habere et esse avec part. passé 306—313. Passé antérieur a la place du passé simple 304bls Rem. 2b. la vieille langue le préfère au plus-queparf. 313. la langue populaire le remplace par le plus-que-parf. composé 313. Passé défini remplace dans la vieille langue l'imparfait 304, 304blf>. a été longtemps employé pour le passé antérieur ou le plus-que-parfait 3Ö4P1* Rem. 2c. exprime parfois le résultat de 1'action 310. il recule devant le présent, rimparfait et le passé indéfini 311, 312. le peuple ne le connait plus, il subsisté dans le Sud et dans 1'Ouest 311. TABLE ANALYTIQUE 417 Passé indéfini je suis venu remplace je vins; j'ai vu remplace je vis 286, 287. origine 306, 307. 1'unité entre participe et auxiliaire est incomplète 309» le passé indéfini marqué d'abord un état, puls une action 310. il supplanté peu a peu le passé défini 310, 311, 312. remplacé par le futur antérieur 317. il est employé lui-même au lieu du fut. antérieur 318. Passif en latin 154, 155, l&P^, p. 118 note 3, v p. 119 note 1. en roman: inconvénient du verbe esse 156. autres auxiliaires du passif 156. forme pronominale 160Ws, 161, 166 avec Rem., 167. Ie passif d'un verbe comme pluit 176. le passif d'un verbe neutre 178. l'infinitif a sens passif 273. Patru écrit l'adverbe mime avec ou sans s 47bis. condamné l'omission de le, la, les devant lui et leur 74. blame l'omission du pronom dans les locutions comme il (en) .est 78. veut qu'on dise quelque qu'il soit 145. critique les régies que Vaugelas donne sur 1'accord du part. passé 291. Peletier du Mans donne milliard 55. Perfectum Perf. historicum et perfectum praesens 302. le perf. praesens rendu aussi par le part. passé avec habeo 302. le plus-que-parfait avec le sens d'un parfait 302 Rem., 304blB Rem 2a et b. le parfait remplacant le plus-que-parfait 304bls Rem. 2c. le perfectum grec a disparu, 1'aoriste est resté 304Ms Rem. 1. Périphrase grammaticale. Voir Conjugaison périphrastique. c'est a vous que je parle 129. qu'est-ce qui 135, 136, 439. qui est-ce qui 138, 439. est-ce que 439. Phonétique. Voir Orthographe. influence des changements phonétiques sur la syntaxe 5, 11, p. 30 note 1, 59, 60, 70, 280, 287, 292, 315, 377. Phrase causale. Voir Cause. demandé l'indicatif ou le subjonctif 236, 237. amenée par quand, comme 357. amenée par que seul 355. amenée par por (co) que, vu que, d cause que, etc. 356. confusion entre 1'adverbiale et la relative : par quoi au lieu de par ce que 357 Rem. 2. Phrase comparative. Voir Comparaison. indicatif dans la phrase d'égalité 250. subjonctif parfois dans la phrase d'inégalité 250, 251. amenée en latin par toute sorte de conjonctions, d'adverbes, de pronoms 374. amenée en francais par comme, que et de 374»1", 376bl8. exprimée par une phrase coordonnée: plus . . . plus 375. emploi de la négation 251, 426 Ik, 434. Phrase concessive. Voir Concession. emploi de l'indicatif, du subjonctif, du conditionnel après les conjonctions concessives 244, 245. Phrase conditionnelle. Voir Condition. passe facilement a la causale, a la concessive, a la temporelle 238. mode dans la conditionnelle. Voir Subjonctif. une conditionnelle figurant comme second membre d'une comparaison 251. amenée par si et d'autres conjonctions 358—360. Phrase consécutive. Voir Conséquence. subjonctif en latin classique, puis l'indicatif 247—248. suppression de la phrase consécutive 249. non-emploi de la conjonction 249. amenée par que avec ou sans corrélatif 372, 373. Phrase finale. Voir But. demandé le subjonctif, parfois le futur de l'indicatif 246. exprimée par le subjonctif seul 370. amenée par que, pour(ce)que, afin que, etc. 369, 370. Phrase locale. Voir Lieu. demandé l'indicatif 232. Phrase relative. Voir Pronom relatif. mode dans la relative 225—231. fusion de la relative avec un A.c.I. 275—277. emploi de la négation 426. Phrase substantive annoncée par ce 95. 418 TABLE ANALYTIQUE la phrase relative employée substantivement 112. mode dans la substantive 207—224. plusieurs constructions en latin 342. que et comment en francais 343. ce que et de ce que 344. - emploi de la négation 426 116 et c. Phrase temporelle. Voir Temps. indicatif dans la phrase de postériorité • 23261». indicatif et subjonctif dans la phrase d'antériorité et de simultanéité 233—235, amenée par quand et comme 347. par l'adverbe relatif que 347bls. par des combinaisons dans lesquelles entre que, adverbe ou conjonction 348, 350, 351, 352, 353. Voir Conjonctions.Picard (Le) ne distingue pas l'article masculin du féminin 63 Rem. 2. emploie ce comme article 8 Rem. Plaute a souvent l'indicatif dans l'interrogation indirecte 221. emploie l'infinitif final 258a", 262, 267bls. connait la construction iubeo ut 270. se sert de la construction video eum venire 2706. emploie la construction dico hoe fecisse 271a. Pleonasme du pronom personnel 63, 129, 439. de debere et posse 204bls, 205. . de la négation 422.,, 430, 434 Rem. I. Pluriel. Voir s final. . le pluriel de politesse 46,. marqué par la forme de l'article 5, 11, 13, 27. cent et vingt 56. nous et vous 66. Plus-que-Parfait de l'indicatif avec le sens d'un passé simple en latin 302 Rem. en francais 304bl3 Rem. 2. le passé simple remplacant le plusque-parfait 304bls Rem. 2c. le plus-que-parf. latin a pris la valeur d'un conditionnel en provencal, en epagnol, en portugais et dans 1'Italie . du sud; en espagnol on trouve encore le sens primitif 240 Rem. 1, 308 Rem. il est rare dans la vieille langue qui préfère le passé ant. 313. Port-Royal critique les régies que Vaugelas donne sur 1'accord du part. passé 291. Portugais (Le) connait l'emploi de suus se rapportant a un possesseur au pluriel 83 Rem. 1. emploi périphrastique du pronom possessif 84. se sert de ter comme auxiliaire de temps 307 Rem. 2. a esse comme auxiliaire du passif 156. a développé le sens modal du plus-queparfait de rindicatif 308 Rem., 240 Rem. I. fa-lo-hei je le ferai 316 Rem. place entre devant les substantifs figurant comme sujet 390 Rem. Possession exprimée par la terminaison du génitif et du datif 83, 378, 379. par la préposition de 408. par la préposition a 83 Rem. 2,84,402. par dont 125. par le pronom possessif 79—85. Possibilité mode après les expressions de possibilité 2206. Prédicat emploi de 1'article défini devant le prédicat 21. emploi de l'article partitif devant le prédicat 36. ^ emploi de l'article indéfini devant le prédicat 40.. pronom personnel prédicat 72. pronom possessif prédicat 81. le prédicat est un infinitif 94, 257, 258. le prédicat est un pronom relatif 111,116. le prédicat est un participe passé 284. le prédicat en tête de la phrase 437,,445. place du prédicat 445. Prépositions 377—420. sont en lutte avec les désinences flexionnelles dès 1'époque classique 2, 377, 420. emploi et non-emploi de l'article après la préposition 20, 37, 40,. l'infinitif et le gérondif prépositionncls 258,, 258bla, 262—268. ab urbe condita, avanf ce jour fini 285. prépositions qui se confondent avec des conjonctions 321, ainz 416. devant une phrase subordonnée 98, 344, 348, 350—354, 356, 360, 366, 370, 373, 374bls 376bIa. le génitif et les prépositions in, erga, adversus, contra, de, pour, vers, envers 378, 378bls. le datif et les prépositions in, ad, erga, adversus 379. TABLE ANALYTIQUE 419 l'ablatif et les prépositions ab, ex, ad, in, cum, per, prae, propter, de, en, avec, par, a 381—383. absence de prépositions 2. prépositions latines qui sont restées: apud, od, contra, contre 384bls —386. in, en: remplacé dans beaucoup de cas par sur et dans 387—389. intra, entre, iuxta, jouste 390—391. per, par: sens local, temporel, figuré (instrument, cause, agent, manière), distributif 392, 100. pro, pour, secundum, selon, sine, sans, super (supra), sur, ultra, outre 393—397. versus, vers, devers, envers: sens local, temporel, sentiment; différenciation entre vers et envers 398, 398blB. ad, a remplace 1'ablativus instrument!, modi, loei, temporis, pretii et le datif 399—402, 379; — devant le gérondif et l'infinitif 262—265, 267, 268bls; — 1'agent précédé de a 274. de, de: supplanté ex et ab, 1'ablativus instrumentalis, causae et mensurae, le génitif 403—409, 378bls, 381, 382; voir aussi Article partitif; — après une expression quantitative 33; — devant un adjectif 32, 36; — après une négation 33, 35, 405(1; — suivi de li ou de cela 100; — suivi d'un pronom relatif 125; — devant l'infinitif 264—268bls, 407; — après un comparatif, 376bls, dans les autres langues romanes, en grec, en hébreu 376bls Rem. 1 et 2; — La Bible Guiot, mais Li Romam d'Athis 408 Rem. 1; — le fripon de valet, la coquine de Toimtte, la ville de Paris, 408 Rem. 2; — de entre dans plusieurs combinaisons: conjonctions 344, 373; — adverbes et prépositions 409, 412, 419bls. nouvelles formations 410—419blB. foris, hors, casa, chez; long, proche, présent, sauf; participes et gérondifs; adverbes 411—416. dans, dedans, dessus, dessous, devant et avant, avec, parmi, etc. 417—419«>i«. Présent exprime un moment du présent 300. exprime une vérité générale. 298. s'emploie pour le futur -et le passé 300, 318. le présent historique tres fréquent en latin vulgaire et en vieux francais 300. 303, 310. le passé indéfini est originairement un temps présent 302, 306, 309, 310. le passé défini a parfois le même sens: me mini, j'ai perdu 302, 306, 310. Priscien donne une liste de verba communia 157. Proclise de l'article 6 et suiv. du pronom personnel sujet 61, 62, 63. du pronom possessif .latin et francais 80. le pronom personnel complément, d'enclitique qu'il était souvent, devient toujours proclitique 69, 440, 441, 443. en et y 78. que relatif et interrogatif 115, 128, 136. conjonctions 320—376bls. prépositions 377—420. la négation ne 424. Pronom démonstratif 87—108. valeur démonstrative et détermlnative 87. disparit ion de is, idem, ipse 88. chute de hic 89. traces de hoe, iste et ille 90—91. fonctions de ce 93—100. ce et il 93: — employé comme sujet 93—95; — comme régime 96—98; — por ce que, de ce que, i ce que, jusqu'a ce que, selon ce que 98, 251, 344, 351, 370, 374bls; — ceci et cela 100; — ce employé comme article 8 et Rem. ca sujet d'un verbe impersonnel 62 Rem. 3, 100, 180.. il = cela 62, 93, 180. ca pour des noms de personne 100. ille en latin archaïque, classique, postclassique 6, 7. ille se 'place en rou ma in après le substantif 10. le< Ulo 24 Rem. 2 (por le plus tost aler). ille devenu pronom personnel 58. ille devenu article défini 6—26. le génitif de ille a la valeur d'un pronom possessif 83. la distinction entre eist et cil s'efface; adjonction de ei' et de li 101. ils s'empioient comme substantif et comme adjectif 102. celui employé comme pronom déterminatif 103. emploi de celui en francais moderne 104—108. Pronom déterminatif 87, 90, 104— 108, 344, 351, 356, 360, 370, 374bIs. 420 TABLE ANALYTIQUE Pronom indéfini 141—150. Chute de plusieurs pronoms latins 141, 421,, 433a. autre, autrui 142. auques, aucun 143. un comme pronom 144. quel.. . que et quelque, quelqu'un et quelque chose 145. accord de quelque 48, 145. emploi de nul, aucun, personne, rien 146—147, 433a. emploi de chacun, chaque, tout et on 148—150. on est belle 46, 2. /is = on 64. on ({') p. 48 note 1. on = je, tu, etc. 65. Pronom interrogatif 132—140. disparition de plusieurs pronoms latins 132»1». quant 134. dont et oü 133. qui neutre, qui... qui 135. c'est a qui 135 Rem. 2. emploi de que et de quoi 136. comme quoi 136 Rem. 1. pronom dans l'interrogation indirecte 137. périphrase de qui 138. quel 139, 140. le quel 140. ce que 99. Pronom personnel 58—78. 1. Sujet: pas exprimé en latin 59. il s'introduit de plus en plus dans la langue 60, 61. les formes toniques deviennent atones, les formes du régime les remplacent 61. te forme atone du sujet 61 Rem. 1. locutions affirmatives et négatives 61 Rem. 2. introduction de il neutre 62. sens démonstratif de il 62, 93, 180. emploi de el, 62 Rem. 2, de fa 62 Rem. 3, 100. emploi pléonastique du pronom sujet 63. introduction du pronom atone dans Moi ai fait cela 63d. emploi du pronom sujet devant plusieurs verbes successifs 63e. emploi du pronom sujet devant un impératif 63/. ils avec le sens de on 64. on pour la le et la 2e personne 65. nous et vous pour des singuliers 66. il et ils pour eüe et eWes 67. O périphrases 68. place du pronom sujet 437, 438, 439. 2. Régime: emploi de la forme tonique devant et de la forme atone après le verbe 69. confusion entre //, lui et elle 70. leur avec I's du pluriel 71. accord du pronom 72, 73. non-emploi dans une comparaison et devant le datif 74. un pronom complément de deux verbes 75. pronoms qui annoncent ou rappellent un membre de phrase 76. lutte entre soi et lui 77. en et y tiennent la place des pronoms de la le et de 2e personne 78. fonctions de en 78. emploi du génitif au lieu du pronom possessif 84. précédé de a 83 Rem. 2, 84. place du pronom complément 440—444. Pronom possessif 79—86. le latin ne 1'exprime pas toujours 79. emploi des formes toniques et atones 80—82. emploi du pronom suus et son 83. son = Uur en vieux francais et dans d'autres langues romanes 83 et Rem. le pronom possessif et le génitif du pronom personnel 84. pronom possessif et article 85. sens du pronom possessif 86. place du pronom 80, 450. Pronom réfléchi suus pronom possessif réfléchi 83. lutte entre soi et lui 77. Pronom relatif 109—131. deux fonctions 109, 128, 129, 131. pronoms francais 110. que sujet et prédicat 111, 115. que complément 115. confusion entre cui et qui, qui et qu'il 111M». pronom relatif sans antécédent 112, 113, 116, 118, 125. emploi absolu du relatif 113, 116a, 125. précédé d'un antécédent 114, 117, 119. faire que sages 1165. c'est un grand trésor que la santé 116,. quoi 118—119. lequel 120—123, 131. dont 124—125. oü 126—127. l'adverbe relatif que 128—129, 347"». pronoms relatifs indéfinis 130, 225, 226, 361. ces pronoms expriment la concession ou la généralisation 226. TABLE ANALYTIQUE 421 Proposition infinitive 269—277. en iatin classique 208, 269, 342. extension en latin vulgaire et en frangais 270, 272. restriction en latin vulgaire 209,271,342. concurrencée par le gérondif accompagné de son sujet 272, 2366. emploi en francais moderne 273, 275, 276. remplacée par l'infinitif accompagné d'un datif 274, 274 bls. fusion d'une relative avec une proposition infinitive 277. Provengal (Le) connait l'emploi de soun se rapportant a un possesseur au pluriel 83 Rem. 1. emploi périphrastique du pronom possessif 84. connait on •< unde dans le sens de ubi et de quo 124 Rem. connait quonra... quonra (qua hora?) et quan... quan 135 Rem. 2. datif éthique du pronom personnel 165 Rem. era lous Provencaous, c'etaient les Provengaux 186 Rem. a développé le sens modal du plus-queparfait de l'indicatif 240 Rem. 1, 308 Rem. se sert parfois de aller + infinitif pour exprimer un passé 307 Rem. 4. es agut = a été 307 Rem. 1. les deux éléments du futur sont sépa- rables 316 Rem. se sert de et après une phrase subordonnée 324a Rem. et = et cela 324d Rem. emploie fréquemment si' = et 327. nee > ni 328 Rem. mais = plus que 333 Rem. a gardé des traces de quamdiu 347. perte du sens d'intensité de tout que 364 Rem. per a supplanté pro 393, II Rem. Quantité emploi de 1'art. partitif après un substantif ou un adverbe de quantité 33. Rabelais emploi de l'article partitif 31. R. n'applique pas la règle de 1'accord du part. passé 290. Ramus exige l'emploi du pronom sujet 61. réclame moi, toi comme sujet accentué 61. propose Ia règle actuelle du part. passé conjugué avec avoir 290. Réalité l'indicatif est le mode de la réalité 200, 201. Régime. Voir Complément. Restriction exprimée par la relative 225, 229e. exprimée par mais, nianmoins, toutefois, pourtant 334, 336. Rhéto-roman (Le) connait l'emploi de suus se rapportant a un possesseur au pluriel 83 Rem. 1. RlCHELET déclare combien que = quoique hors d'usage 365. Roland (Le) ne connait pas lequel 121. Roumain (Le) place l'article défini après le substantif 10. a perdu le participe présent 279 Rem. se sert toujours de a avea comme auxiliaire de temps 307. si de sic a supplanté et 327. emploi étendu du réfléchi 77 Rem. 3. la forme pronominale exprime la voix passive 166 Rem. met de cit après un comparatif 376w» Rem. 1. Rythme de la phrase 69, 436, 440, 453—455. règle rythmique changée en règle syntaxique 435, 436, 441. s final chute 11, 27, 47, 47Wa, 56, 280. Saint Augustin. Voir Augustin. Scarron est archaisant, 61, 143. Serments de Strasbourg ne connaissent pas l'article 39. Style indirect 213, 214. le subjonctif mode du discours indirect 209, 221, 229/, 231. après ut consécutif 247. Style indirect libre 213, 345 Rem. 3, 319. Stylistique périphrase s 68 note 1. Subjonctif 203—251. subjonctif dans la phrase simple 203— 206. deux groupes de subjonctifs en latin 203. ' hortativus, dubitativus, optativus; concessivus, potentialis et modestiae 203. d'autres constructions qui ont la méme valeur 204. 422 TABLE ANALYTIQUE périphrase du subjonctif a 1'aide de debere et posse 204b)8. le subjonctif en francais 205. le conditionnel et l'auxiliaire devoir 206, 206bI». Qui vive? 206bl» Rem. 3. subjonctif dans la phrase substantive 207—225. le latin connait une grande variété de constructions 208. la proposition infinitive remplacée par des conjonctions 209, 342. subjonctif 'puis indicatif en latin vulgaire 209. subjonctif après les verbes de la pensée 210. indicatif après les mêmes verbes 211. subjonctif si Ia subordonnée précède 212. style indirect libre 213. mode après les verbes de doute et de négation 215. après les verbes de volonté 214, 216, 217. après les verbes affectifs 218, 219. après les expressions de certitude ou de vraisemblance, de nécessité, de possibilité et de volonté 220. subjonctif dans l'interrogation indirecte en latin 221. indicatif et subjonctif en vieux francais, a cöté d'autres constructions 222. le subjonctif est rare en francais moderne 223. remplacé par l'indicatif et l'infinitif 224. subjonctif dans la phrase relative 225— 231. emploi trés étendu du subjonctif en latin 225. le subjonctif après quicumque 226. sens final et concessif 228. irréalité de l'antécédent tel qu'il est déterminé par la relative 229. que je sache 229e. subjonctif après un superlatif et après tout 230. iï n'y a que Ia directrice qui sait le turc 229 Rem. si c'était elle qui envoyat les billets 229 Rem. subjonctif dans la phrase adverbiale 232—251. il s'introduit de plus en plus dans la phrase d'antériorité 233, 234. subjonctif après comme par 1'influence latine 235, 236. une cause irréelle au subjonctif 236. . emploi du subjonctif dans la phrase conditionnelle 238—240,243,358,359. exprime seul la concession 244, 361, 3626. se trouve après plusieurs conjonctions concessives 245. se trouve dans la phrase finale 245. se trouve dans la phrase consécutive 247. cet emploi se restreint en latin vulgaire et en francais 247, 248. se trouve parfois dans la comparative d'inégalité 250, 251. le subjonctif remplacé par le conditionnel 2396—241, 245, 253, 254. Subordination. Voir Coordination. Substantif 1—4. fonctions 1. les cas latins 2, 377—383. précédé de prépositions 2, 377—420. place 3, 437—439, 446, 451. employé avec un attribut 4; voir Adjectif et Nom de Nombre. avec article 5—41; voir Article. infinitif employé comme substantif 69, 257—261M». substantif indéterminé 73. répétition du substantif 104. plusieurs substantifs comme sujet 189. collectifs; voir Collectifs. les substantifs verbaux remplacent l'infinitif substantivé 261biB. employé comme préposition 384, 411a, 413. pas, point, mie deyiennent des adverbes négatifs 427—429. Substantification possible en francais, grace a l'article 11. de l'infinitif 257—261bl8. Substitution de pronoms; voir Pronom personnel. Suédois (Le) met l'article défini après le substantif 10. Sujet emploi de l'article défini 19. emploi de l'article partitif 36. pronom sujet 59—67, 95. précédé de de ou de entre 266, 390. Suisse (La) garde septante et nonante. Superlatif superlatif relatif remplacé par le comparatif 24. il prend l'article 24. mode dans la relative après le superlatif 230. Supinum remplacé par d'autres constructions 255. TABLE ANALYTIQUE 423 Sylvius veut que le part. passé s'accorde toujours avec son complément 290. a essayé de définir l'emploi du passé indéfini 312 Rem. 2. Temps 298—319. exprimé par une adverbiale 235, 346— 353. par le participe présent et le gérondif 278. par le substantif seul 2. par un ablatif ou par des prépositions 383. par contre et vers 386, 398 II, 398Ws. par per et par 392 II. passage du sens de simultanéité au sens adversatif: cependant et tandis que 336 et Rem., 348. au sens causal: puis que 352, cum et quando 354, dès que 356. du sens de manière a celui de temps: ainsi que 348, 353. de l'idée de but au sens temporel: pour 393 Ille. du sens local au sens temporel: ad, prés, après, sous 3992, 415, 416, avant et devant 418. changement de temps: voluerat = volebat; cantavero = cantabo; cantassem = cantarem; cantare habebam se rapporte au présent 252. Vaugelas blame l'emploi de l'article devant Aristote et Plutarque 14 Rem. veut qu'on place l'article devant les superlatifs 24 Rem. 1. demandé l'article dans c'est une chose glorieuse 40, Rem. écrit te cceur et la bouche ouverte 45. ne voit pas clair dans 1'évolution de tout 47 Rem. écrit demi-heure, nu-jambes, mesme(s) 47t)i8. donne six-vints 52. écrit vingt et un an et vingt et un chevaux 56. veut qu'on dise chapitre ncupiesme, Henry quatriesme 57. donne des régies pour l'emploi du pronom sujet 61. condamné quiconque veut vivre en homme de bien, il doit 63a. demandé la répétition du pronom sujet après car et mais 63e. admet je la suis (scil. malade) 72 Rem. blame l'omission des pronoms compléments 74 et 75. déclare que soy ne se rapporte pas au pluriel 77 Rem. 1. blame l'emploi de y pour lui 78. rejette un mien frere 80 Rem. constate l'emploi de ce devant être 94. condamné ce dit-on 96. n'approuve pas en vostre absence et de Madame vostre mere 104. condamné le voild qu'il vient lil618, déclare que qui prépositionnel ne se rapporte pas aux choses 114. donne la règle actuclle du pronom relatif | quoi 1193. admet lequel pour éviter une équivoque 123a. distingue l'emploi de dont de celui de I d'oü 124. rejette vers oü comme néologisme 127. blame l'emploi de que = dont 129. déclare quantes fois vieilli 134 Rem. n'approuve pas qui . . . qui 135 Rem. 1. dit que comme quoi est trés usité 136 Rem. 1. condamné quel. . . que pour quelque . . . que 145. déclare que quelque = environ est invariable 145. penche pour quelque chose pronom neutre 145. admet je ne vois personne si heureuse 146. donne je me souviens et il me souvlent 180 Rem. prescrit ce n'est pas moy qui l'ay fait 1873 Rem. met le verbe au pluriel après la plupart 188. déclare: une infinité de personnes régit le pluriel 188. déclare que croitre et tarder sont des verbes neutres 195 Rem. 1. admet ayant embrassé et donné la bénédic- tion i son fits 199 Rem. 1. préfère les ennemis qu'il scavoit avoir passé la rivière a qu'il scavoit qui avoient passé 275. prescrit des femmes buvans de la limonade 280. distingue les soldats étant et êtans sur le point 280. écrit ma. sceur est allé vlstter ma mere 286 Rem. donne une longue remarque sur 1'accord du part. passé 291. ne parle pas des passés défini et indéfini 312 Rem. 2. exige la répétition de ni 329. regrette la perte de ainz 335. blame l'emploi fréquent de tandis que 348. 424 TABLE ANALYTIQUE déclare que avant que et devant que sont tous deux bons 350. trouve paree que plus doux que pour ce que 356. • condamné comme ainsi soit que 357. proscrit maïs que ■» quand 360 Rem. 2. trouve si que encore plus barbare que de mode que 373. trouve de facon que et de manière que des conjonctions peu élégantes 373. voudrait s'abstenir d'employer frop . . . pour que 373. déclare: tel veut que après soy, et non pas comme 374618. condamné la piété des enfants vers le père 398W. déclare que devers est vieilli 398bla. désapprouve chez un conteur 413. proscrit l'emploi prépositionnel de dedans et dessous 416, 417. condamné Ia position du sujet dans et fut son avis d'autant mieux recu 437. désapprouve je le vous promets et vous le vous figurez 443 Rem. 1. déclare: il faut dire menez-y moi; il préfère menez-nous ld 443ft. condamné i7 y en a 4436. place devant le substantif les adjectifs bon, beau, mauvais, grand, petit 449. déclare que pour la place de l'adjectif 1'oreille doit décider seule 449. déclare qu'il faut éviter les équivoques 452. Verbes . suivis d'un génitif 378 III. d'un datif 379 Rem. d'un accusatif 380. d'une préposition 194. hésitation entre verbes transitifs et intransitif s 192—194. place du verbe 436—439. Verbes affectifs peuvent prendre un complément direct 197. mode après les verbes affectifs 218,2204. suivis de 1'A. c. I. ou de quod 269, 342, 354 Rem. 1. ne ou ut après les verbes de crainte342. de ce que après les verbes affectifs 344. question indirecte après les verbes comme s'étonner 218 Rem., 224. Verbes auxiliaires se mettent a la seconde place de la phrase 60, 436. le pronom complément se mettait devant l'auxiliaire 440, 444 verbes auxiliaires de mode fonction de ces verbes 200. debere et posse en latin204, 204***, 209, 226. devoir pour le subjonctif dubitatif 205,, 222, 224. pour d'autres subjonctifs 206. pouvoir pour 1'optatif 205,, 227. je suis voulu Venir 307. verbes auxiliaires de temps les verbes habere et esse (tenere en esp. et en port.) forment avec le part. passé les temps composés du passé 306—308. ie suis été, est eu 307 Rem. ti en catalan, et parfois en provencal, aller suivi d'un infinitif sert a exprimer le passé 307 Rem. 4. place de l'auxiliaire par rapport au part. passé 309a, 437. auxiliaire des verbes neutres et pronominaux 167, 168, 169, 170, 174. la langue populaire préfère avoir 174. non-emploi de avoir après un verbe conjugué avec être 199 Rem. 2,3096. le part. passé conjugué avec être 286. le participe passé conjugué avec avoir 287—296. aller et être suivis du gérondif et du part. présent 299. vouloir et souloir exprimant une habitude 299. taillir, penser, devoir dans le sens de „être sur le point de" 299. verbes auxiliaires du passif esse en latin 155. dans les langues romanes 156. venire, andare, s'en aller, devenir, tourner 156, p. 118 note, p. 119 note f. Verbes déclaratifs emploi du mode après les verbes déclaratifs 210. emploi de 1'A. c. I. 269, 273, 275, 276, 277. introduction des conjonctions quod, quia, quoniam 271, 342. que et comment dans la substantive 343. ce que 344. Verbes de doute 215. Verbes de négation mode 215. disparition de nolo, nescio, nequeo 4214, 433d. Verbes de perception construits avec un accusatif et participe ou avec un accusatif et infinitif 270,, 273. influence de ces verbes sur la construction des verbes déclaratifs 277. Verbes déponents sens primitif 154. TABLE ANALYTIQUE 425 disparition 157. Verbes de volonté mode 214, 217. suivis de 1'A. c. L 269, 342. suivis de ut 342. suivis d'une subordonnée au lieu d'un infinitif 216. Verbes factitifs Jupiter pluit 176, 177. plusieurs verbes prennent un sens factitif 195. Verbes neutres exprimés en latin par Ia forme passive 154s, 158, 159. par la forme pronominale 154,, 158, 160, 161, 163, 164, 171—174. par la forme active 158, 159, 160, 160Ws, 162, 164. cons t rui ts avec esse avec participe passé 167. avec avoir ou Hre avec ou sans pronom 168, 170, 307. Verbes pronominaux en latin: avec sens neutre 1543,158, 159. Ie pronom s'introduit devant plusieurs verbes 160. avec sens passif 160Ws. en francais: avec sens passif 160Ws, 166. avec sens neutre 163, 164. accompagnés d'un datif éthique 165. avec les auxiliaires avoir et être 168. origine des constructions du parfait 169. 170. hésitation entre la forme avec et sans pronom 171—174. se faire fiers 4b\. Verbes unipersonnels sans sujet; avec i7, el, ca 62 et Rem. 2 et 3. il pléonastique 63c. verbes exprimant un phénomène atmosphérique 176. avec complément a 1'accusatif ou a l'ablatif 176. employés avec un sujet 176. le passif des verbes neutres 178. pudet, decet, accedit: plusieurs constructions 179. mêmes groupes en francais 180, 181. convient, merir, est, estuet 182. M faut 183. U fait 184. 0 y a 184»1". verbes accompagnés d'un accusatif 186. suivis d'une proposition infinitive 269. le part. passé reste invariable 295. Villehardouin connait lequel relatif 121. n'emploie pas lequel interrogatif 140. Volonté subjonctif et indicatif après les verbes de volonté 217, 220c, 211. Voltaire écrit quatre vingts et un 56. Vraisemblance mode après les expressions de vrai semblance 220o. SNEYDERS DE VOGEL, Syntaxe historique. 2"»e édition. 28 TABLE DES MOTS (Les chiffres renvoient aux paragraphes) a (esp.) 3, 435 Rem. a (il y) 62, 426 IIo, 184W». d 262—265, 267, 268ter, 274, 279, 382d, 385, 386, 388, 400—402. a argent comptant 262. ab (a* abs) 90, 258w«, 278*. 376bls, 381, 3826, 384, 405. abdere 158. ab hoe 90, 418"1». absque 384. ac 322. a cause de 392 Rem. 2. a cause de ce que 98. a cause que 356. accedere 179. accidere 371 Rem. I. accingere 158. accoucher (s') 173. accourir 267Ws. accoutumer 193. accusare 342. a celle fin que 370. ii ce que 98, 353 Rem., 370. a cette fin que 370. Achéron 15. a cheval 20. acoler 167. a condition que 360. a cort 20. a cöté de 391, 414. acquérir (s') 173. ad 255, 258Ms," 267bls, 379, 3816, 384, 384Ws, 399, 400, 401 Rem., 402, 415. adeo 371. adiungere 158, 160. adulari 154. adversus 378bIe, 379, 384, 386. aequo animo 382. a espouron 20. afaire 68. a faute de 4126. afflert 180. *%\rS* afier 264. afin de 263. afin que 340, 346, 370. a folie 20. agere 307. ail (prisier un) 427. aimant (amant) 262. aimé 287, aimer (amer) 251, 262, 267. ainsi 149, 4372. ainsi . . . ainst 375. ainsi com 348, 353, 374bls. ainsi que 190, 326, 353, 375. ainz (ains, einz, anceis), 135 Rem. 2, 335, 416. ainz que 234, 350. airain 18. a/ssi... comme (que) 374blB. ajorner 177, 184. ai (holl.) 367. - a la réservation de 4126.. a la suite de 392 Rem. 2. a la terre 20. a Vencontre (de) 386, 4126. a l'endroit de 419bl8. a l'entour de 419ws. a l'exception de 4126. Alighiert (V) 14. a i'/nsu de 4126. aliquando p. 377 note. aliquis 141, 142, 143, 145. aliter 376. alius, 141, 376. allèe 283. aller (s'en) 69, 156, 164, 171, 173, 174 180, 196, 239, 267Ws, 286 Rem., 299 307 Rem. 4, 316, 435, 444. aller a sauveté 20. alors que 348. alques (auques) 143. TABLE DES MOTS 427 als (holl.) 238. alter, 141, 142. *alum 141. amabo 314, 315. amando 256, 262, 278. amandum 262. amare 256, 262, 278. amare habeo (habeam, habui, habebam, haberem, habere, habens) 315. amari 256 Rem. amari habere 315. amatum esse 256 Rem. amatum iri 256 Rem., 315. amaturus 315. amaturus eram 314, 315. amaturus esse 256 Rem., 314, 315. amaturus essem 314. amaturus fui 315. amaturus sim 314, 315. amaveram 305, 308. amavero 305, 308. amavi 308.. amavisse 256 Rem., 305, 308. amavissem 305, 308. ambulare 307. ambure 325 Rem. ambutrum 325 Rem. óme 433a. a même que 353, 374bte. ame qui vive 426 ld. amender 162. & mesure que 374Ws. amicior 154. amicus 379. d moins de 263, 360 Rem. 1, 376bls. d moins que 360. amont 412a. amour 17. anceis p. 243 note, 416. ancois que 234, 350. andare (ital.) 156. Anjou 15. ante 258blB, 384. antea 416. antea quod 349, 350. antequam 233, 349. •antius 332, 335, 411*, 416. "antius quod 350. anuitier 177, 184. apparmens que 353. d peine 285 Rem., 437,. apercevoir (s') 192. aperire 158. d pied (en pied) 20. d pierre fendre 446. dbró 376bls Rem. 2. apparaitre (s') 172. appeler 21. appert 180, 182. approbation 261bls. approcher (s') 173, 193, 195. après 352, 412a, 415. après que 352. apud 384, 385, 401 Rem., 413. ardoir d feu 20. ar est er (s') 168. argent 18. arguere 342. Aristote 14 Rem. armée 283. armer 196. armes (unes) 41. arrtter 217. arrière 412a. d sa facon 382. d seule fin 102. d seule fin que 370. d son corps défendant 68, 262, 446. aspirer 193. assez 43, 405a". assiégé 283. assis facere 427. assister 194. at 332. atorner (s') 163. a tot 385, 400/.. atque 322, 3746, 376, 376blB. atqui 332. d travers 392. attacher 69. attamen 332. attaquer (s') 173. attenant 41 ld. attendre 217. attendu 283, 411c. attendu que 356. attenter 193. au 389. au cas que 360. aucun 143, 145, 146, 147, 433a. aucunefois 143 Rem. aucunement 143 Rem. au-dedans de 417. au défaut de 4126. au descu de 4126. au-dessus de 396, 419bto. au devant de 418 Rem. 2. audio (bene, male) 160bls. au lieu que 360. au moyen de 392 Rem. 2. auparavant 418 Rem. 2. auparavant que 350. auprès de 409, 4126, 415, 419W». auques, voir alques. auri faber 451. 28* 428 TABLE DES MOTS ausim 2030 aussi 339. aussi bien que 326. aussi . . . comme (que) 3741»1». aussitót 285 Rem. aussitót que 353. aut 337. autant . . ■ autant 375. olifant . . . comme 374bl8. autem 336. autre 142, 40,. autre chose 141, 142. autrui 142. aux autours "de 4126. aux environs de 419bta. aval 412a. avant 335 Rem., 412a, 416, 418. avant de 263. avant que 350, 418 Rem. 1. avea (a) (roum.) 307. avec 190, 326, 382, 385, 401, 412a, 418bls. avec ca 418bl8. avec (ce) que 98. avec courage 20, 382. avenir 260. avesprer 177, 184. avisé 283. avoir 168, 205,., 240,, 245, 259, 282, 283 287—297,307—309,316,423,436,184bi* avoir courage 19. avoir cure 426 Ie. avoir du sujet 35. avoir en garde 20. avoir (la) force 19. avoir garde 426 Ie. avoir guerre 19. avoir horde 267. avoir I'habituele de 299. avoir lieu 35. avoir permission 19. avoir souci 35. avoir temps 19. avoir tort 35. avuec 90, voir avec. baigner (se) 173. baisier 167. balances (unes) 41. 6a«er 156, 178. Bar-sur-Aube 15. PotoiXeó? 16. 6at (m*ï> 166 Rem. oatir 156. 6eau 448, 449. beaucoup 33, 35, 405d. beau-pire 448. 6e/e nee 46,. beüe-jille 448. 6encfte (ital.) 367 Rem. 6ene (ital.) 367 Rem. bene (habet) quod 367 Rem. benevolus 379. besaces (unes) 41. béte comme chou 18. Bible Guiof 408 Rem. 1. 6ien 33, 43, 367. 6ien que 245, 367. bini 51. bis 51. blamer 355. 6Ianc comme neige 18. blessi 283. boins eürès 46,. 6on 448, 449. bona mente 382. bonnement 382. 6ons premiers 46,. bouche bée 13. ftouger (se) 172, 195. bougrement 43. Boulevard Saint Michel 408. bouton (prisier un) 427. Bretagne 15. briser (se) 173. 6ueno que (esp.) 367 Rem. fa 62 Rem. 3, 93, 100, 180. cadhuna 148. caedere 16Ö"18. canin 42. cannensis 42. capite maior 24 Rem. 2. car (quer) 63e, 205, 338, 357 Rem. 1. casa 411a, 413. casser (se) 173. casu 382. causa 384. causer 194 Rem. ce (pronom substantif) 8 et Rem., 62 Rem. 1, 90, 93—100, 117, 119, 125, 191.Ï251, 344. ce (eest) 89, 101, 102. ceci 100. rpl voir celui: cela 62 Rem. 1, 100, 180. celui (celle) 101—108, 112. ce n'est pas que 355. cent 56. cependant 95 Rem., 336. ce que 116a, 117 Rem., 137. ce qui 117 Rem., 137. certain 141. certes que 344, Rem. cescuns 148. c'est a oui 135 Rem. 2. c'est pourquoi 339. TABLE DES MOTS 429 c'est que 355. cestui, voir ce (eest). chacun (chascun) 148. chaduns 148. chagrtner 182. chaloir 182. chanter (se) 166. chaque (chasque) 148. cflar 68. chausser (se) 168}. chaussès (unes) 41. chemin faisant 446. ener 448. chesnin 42. cheval 5. cftez 385, 413. cn/ef 68. cholstr pour 21. ctee 145, 433a. CMst 16. ci 101, 102, 103. cl (ital.) 78 Rem. ct-contre 386. cie/ 16, 25. ci7 8, voir celui. cinquiesme (Sixte) 57. ctnq vingts 52. circa 384. circiter 384. circum 384. cis 384. citra 384. clam 384. fiers luisans 464. c/iner 168,, 193. cludere 159. co, voir ce. cognoveram 306. cognovi 306. colp 51 Rem. commander (se) 168, 216. combien 132»19, 134, 347. combien grand 13261*. combien que 130, 365. com (come, comme) 132, 190, 235, 237, 326, 340, 343, 347, 355, 357, 374»*. comme ainsi soit que 237, 357. commencer 267, 392 Rem. 2. comment 343, 347. comment que 365. comme que 364. comme quoi 136 Rem. 1. comme s/ 251, 374blg. como 346. compagnon (cholstr pour) 21. complies 16. comme plus 375. compris 283. compter (se) 166. concernant 41 ld. condescendre 171. conferre 159. confirmare 159. conglutinare 159. congratuler 194. congregare 154, 158. conoistre 264. consent ir 193. considiré 411c. considéré que 356. consolare 157. constat 179, 181, 270. conste 181. contingere 371 Rem. 1. continuer 267. contra 2581*, 376, 378blf>, 384, 386. contraindre 267. contrariër 194. confre 378bIg, 386, 388d. contremont 412a. contre raison 20. contredire 194. convenit 182. ÜÉÏÜi's. convenir 178, 182, 183. coquere 159. coram 384. corpus 68 Rem. cors de chevalier 68. coucher 261bls. counr 174, 198. court 448. couste 181. craindre 217 et Rem., 275, 426 Ha. cn'em et tremblur 25. cr/er 192, 193, 196. croire 193, 217, 260. croffre 195 et Rem. 2. crue/ 448. cui 110, 135. cui 22, 110, lllbis. cum (conj.) 235, 236, 244, 346, 347, 352, 354, 3616. cum (prép.) 190, 382, 384, 385, 418bIs. cum primum 352. -cumque 150 Rem. cum . . . tum 322. cupio 269, 342. d'abord que 353. dans 388, 412a, 417. danser 156, 178. Dante (le) 14. d'après 409, 415. d'autant que 356. d'autant plus que 375. d'autres 142. 430 TABLE DES MOTS de 29, 124, 278, 37c*1», 3826, 384, 384bls, 403, 404. de 27—37, 100, 251, 262, 263, 264, 265, 266,267, 268ter,376b«», 378*te, 382,388d, 405—409, 4l2—4\9bSa. de (esp.) 376Ws Rem. 1. debere 179, 201 Rem., 204, 204bH, 209, 226, 258, 317 Rem. 2. deed 412a. decem et novem 53. decem et octo 53. de ce que 98, 344, 355, 357 Rem. 2, 406a. decet 179, 181. de cette facon 382. de ci a tant que 351 Rem. 2. décider 178, 217. de ci la que 351 Rem. 2. de ci que 351 Rem. 2. de cit (roum.) 376Ws Rem. 1. déclarer 21. de crainte que 370. dedans 388, 412a, 417. dedecet 179. dedenz voir dedans. SeSouAeuxa 304bl8 Rem. 1. didulre 167. de facon a 263. de facon que 373. dègeler 177. dehors 412a, 413. deintus 412a, 417 et Rem. déjeuner (se) 171, 174. de/a 412a. delez 409. dilibérer (se) 171, 178. délivrer 162. demanderais 206. de manière a 263. de mime que 190, 326. dementre (prov.) 346. dementres 346. dementres que 348. demi 464, 47bls. demi-douzaine 47bls. demi-heure 47bls. de mode gue 373. démordre 193. demorer 178. dénaturer 260. den/er (prisier un) 427. dens (unes) 41. denz, voir dans. de peur oue 370. déplaire 180. depuis 263, 412a, 416, 426 116. depuis (despuis) que 352. de ouoi 357 Rem. 2. *deretro 412a. dernier 43. dèroger 178, 193. derrière 412a. descendre 195, 198, 267»18. desidere 160. dés/rer 206, 216. dès lors que 353. de son Wvanf 259, 262. disormais que 353. dès oue 352, 356. desservtr 182. dessous (desuz) 416, 417. dessus 417, 419W». *deubi 124 et Rem. •deunde 124 et Rem. devant 409, 412a, 416, 418. devant que 350, 418 Rem. 1. devenir 21, 81, 136, 156. devers 378bls, 398, 398bu, 412a. devoir 206, 222, 239, 240,, 245,253 Rem. 2, 299 et Rem. 1, 316, 317 Rem. 2. di (ital.) 376»1» Rem. 1. dia6/e 16, 451. diablement 43. dicere 64, ïeÖ»4". Dieu 16, 451. difficilis 255. dignare 157. digne 448. dimanche 16. diminuere 159. diner 260, 261Ws. dire 81, 178, 268*** Rem. 2. disiesme (moi) 57. disparaitre (se) 171, 172. dissimulé 283. diurne 42. d/v/n 448. dixtesme janvier 57. do6/e 51 Rem. doctior 43. doctissimus 43. dolere 197. domi 413. donc (donques) 339. donde (esp.) 124 Rem. donec 233, 235, 346, 347, 349. doner response 402. dont (relatif) p. 59 note 2, 110, 124—125, 357 Rem. 2. dont (interrogatif) 132, 133. dormir (se) 164, 196. doublé 51. douloir 180. douter 264. dove (ital.) 124 Rem. droit d droit 4126. Du Bartas (les ozuvres de) 33. TABLE DES MOTS 431 dubitare 157, 270, 342. dubium 270. ducere 427. duel 17. dum 233, 235, 238d, 239, 339, 346, 347, 349. ♦duminterim 346, 348. dummodo 238d, 239. duodeviginti 53. durant 392 II, 41 ld. durs cuiis 46,. du tout 429. ea ratione 371. ecce 78 Rem., 89, 92, 93. échapper 193. éclater (s') 172. ecquis 132. écrier (s') 193. icrire 178. écrit 287. èSoóXsiJ/a 304bis Rem. 1. edrer 259. ejfroyablement 43. ego 58, 59. egomet 88. el (pronom indéfini) 141. el (pronom personnel), 62 Rem. 2, 93. élire 21. ilotgner (s') 172, 173. emé (prov.) 326 Rem. emere 306. empereur Alexandre (V) 14, 451. emprés 419blB. en (adv.) 766, 78, 344. en (prép.) 378biï, 387—389bli, 417. en cas que 360. en ce que 98, 355. en ciel 20. encltner 193. encontre 386, 412a. encore 367, 437,. encore que 245, 367. encore st 363. en dehors de 413. endementresque (endementiers que) 235,348. endroit 381», 412a, 419»'8. endurafice 261bls.. en es le pas que 353. en francais 20. enfuir (s') 171. enim 338. enimvero 332. enjusques 351. en lieu saint 4Qt. enml 47Ms, 412a, 419. enne (ennement, ennevoire) 439 Rem. 2. ennuyer 180. énormément 43. en outre 397 Rem. en outre de 397 Rem. en personne 68. en p/ed 20. en prisence de 4129. en ouanf aue 348. enseigner 193. ensemble 412a. ensemble od 385. en stlence 382. en sorte oue 373. en fe//e manière que 373. enfendre li et il 144. ille, voir Pronom démonstratif. imminuere 159. impedire 342. impense doctus 43. imperare 270. importe (n', qu') 62, 223. impraeco = imprecor 157. in 258bis, 278, 37e*1», 379, 3816, 384, 387. 387bl», 396. incommoder 194. incontinent 285 Rem. incontinent que 353. inde 78. inde + usque + quod 351. indignari 197. infandus 255. infinitum 43. inf ra 384. ingens 43. ingredi 198. in hunc modum 382. inspirer 193. insimulare 342. intellegere 258, 3. inter 258,, 384, 390, 419. interim 346. intra 384. iocare 157. ipse 7 et Rem., 58, 88, 89 Rem, ipsimus 88. irasci 307. ire p. 118 note 3, 160a. is 58, 83, 88, 371. isst que 373. Isslr hors de prtson 20. ist 91. iste 88, 89, 91, 92. ita 371, 374. itaque 339. item 374. itur 152, 178. iubere 269, 270, 340. ■ iungere 159. iure 382. iuvat 179, 181. iuxta 258bl», 384, 391. ja 367, 4336. jacoit que 367. jamais 40„ 4336. janvier 16. je 59, 63d. je non 423 Rem. 1. Jeu (le) de la Feuillée 451. jeune 448. Jius (li) Adam 408 Rem., 451. jo (jou) 59. joes (unes) 41. jol 17. jotgnant 41 ld. joint 287, 326. joltment 43. joste 391. jouer (se) 173, 196. jouir 193. jour 16. jouste 391. jovente 68. juré 283. jusqu'a ce que 351d. jusqu'd tant que 351c. jusque 234. jusques (que) 351a. xaTtx 148. lè 100, 103, 106. laisser 272, 273,, 444. lamenter 197. lampes (les) Swan 451. La Rochelle 15. lasser 264, 267. latus 411a, 413. lavare 158. Uwer 162, 168,. le 24 Rem. 2, 766. Le Havre 15. le long de 391, 4126, 414. 434 TABLE DES MOTS lequel 110, 120—123, 131, 13261», 140 lequel que (qui) 365. leüns 18. leur 71, 83. levari 160blB, 167, 169, 170, 307. lever (se) 160»18, 162, 167, 169, 170, 171, 173, 174, 260. levres (unes) 41. lez 413. li 69, 70. licet 179, 181, 203, 204, 244, 258, 361. ligneus 42. Itvrer bataille 40,. loin que 360. Loire 15. loisir 259. loist 181. long (tonc) 391, 4110, 414, 448. longtemps 299. torsoue 346, 348, 353. louer 216. luctare 157. lues que 353. lugere 197. lui 61, 63d, 69, 70, 77. lunae diem 451. lundi 451. lupin 42. luxure 17. ma 79. magis 326 Rem. 1, 332, 333, 335, 3766. magis doctus 43. maintenant 149.' '$£", 139 I. qualiscumque 130. qualisqualis 130. qualiter 136 Rem. 1, 342, 343. quam 376, 376bl9. quamdiu 346, 347. quamlibet 361. quamobrem 339. quamquam 244, 361. quamvis 244, 361. quan . . . quan (próv.) 135 Rem. 2. quand (quant) 235, 239, 340, 347, 347Ms, 355, 357, 363, 367. quand (bien) même 245, 363,, 367. 438 TABLE DES MOTS quandiu que (prov.) p. 293 note. quando 235, 239, 340, 346, 347, 352, 354, 355. quandoquidem 354. quanques .348. quant (interrogatif) 132W, 134 et Rem. quant de 3826. quant es fois 134 Rem. quantiime 132blB, 139 VI. quant que 348. quant . . . que 365. quantus 132, 132W, 139 II. quare 338, 339. quart (soi) 57. quasi 374, 374W. quatre vingts 52. quatre-vingt-dix 52. quatriesme octobre 57. -que 322. que (conj.) 60, 205, 239, 243, 245, 249, 251, 338 Rem., 340, 343, 344, 345, 346, 352, 353, 355, 356, 357, 359, 365, 367, 368, 369, 370, 372, 374bls, 37661». que (conj. esp.) 343, 345 Rem. 3. que (interrogatif) 132618, 135—138, 426 Ic. que (relatif) 110, 111, 115—117, 128—129, 266 Rem. 1, 347»"*, 365. quei, voir quoi. quel (interrogatif) 132bl», 139, 140. quel (relatif) 120. quelconque 110, 130, 150 Rem., 365. quelque 48, 145, 365. quel . . . que 130, 145, 365. quelque chose 143, 145. quelque chose que 364. quelque . . . que 145, 367bls. quelqu'un 143, 144, 145. quem 110, 115, 129, 135, 340. quemadmodum 374. que que 348. que . . . que 135. queri 197. qu'est-ce qui 135, 136. qui (interrogatif), 132, 132»*. qui (interrogatif) 132bls, 135—138. qui (relatif) 110,111, lllbtB, 113,116.., 118. quia 236, 258ble, 271c, 340, 342, 354. quiconque 110, 130, 150 Rem , 365. quicquam 421. quicumque 38, 130, 226, 361c. quid 110, 115, 129, 132, 136, 340. quidam 38, 141. quidam 141. quien (esp.) 110. quiescere 195 Rem. 1. qui est-ce qui 138, 439. quilibet 148. q u i n 208,247,270,342,371,421,431,433c. quinam 132. quingenties 55. quint (Charles, Sixte) 57. quinzième janvier 57. qui que 130, 245, 365. qui . . . qui 135. quis 38, 132, 141. quisnam 132. quispiam 141. quisquam 141, 143, 421, 433a. quisque 148. quisquis 130, 150 Rem., 226, 244, 361c. quivis 148. quo 236, 368, 375. quoad 233, 235, 346, 347, 349. quoadusque 349. quod 110, 115, 208, 218, 236, 247, 258bl», 271c, 340, 342, 343, 354, 368, 371, 433c. quoi (interrogatif) 132»18, 136 avec Rem. — (relatif) 110, 115, 116,, 118, 119. quoique 245, 365, 367 et Rem. quoi que 365, 348. quominus 208, 342. quomodo 136 Rem. 1, 235, 340, 346, 347, 355, 356, 374. ♦quomodo si 374. quoniam 236, 271c, 342, 354. quoque 322. quot 132, 132M», 134, 139 H. quotcumque 361c. quotquot 361c. quotus 132, 132M*, 139 VI. quousque 349. -r 154, 155, 157, 158, 159, 167. raisonner 260. se rappeler de 194 Rem. redrecier (se) 168,. refrigerare 159. regarder (se) 81, 168,, 194. regretter 197. Reine Wilhelmine (la) 14. réjouir 180. relever (se) 168,. remédier 178. rendre (du) service 35, 402. renoncer 193. repentir (se) 180. resistere 342. résoudre 217. .restat 179. rester 21, 81. resumere 159. retourner (s'en) 171. ridere 197. ridetur 178. rien, 145, 147, 433a et Rem. 2. rire (sé) 173. TABLE DES MOTS 439 rol 16, 451. Romae 383bl". Romanz (li) d'Athls 408 Rem. 1. rudement 43. rumpere 159, 195 Rem. 1, 307. sa 79. sabotage 261bls. sac au dos 13. sac et fusil 25. sage femme 449. 5ainf Louis 14. Saint-Pierre-lez-Calais 413. saniore 24. sans 263, 329. sans coup firtr 446. sans doute 200. sans fin 403. sans piiié 20. sans (ce) que 98,248,360,371 Rem. 2,3 sapere 196, 258bls. satis 43. . sauf 4110, 414. sau/ que 360. saaier 156, 178. savoir 205!, 259, 268t r Rem. 2, 433d. savoir gré 35. scelus hominis 408 Rem. 2. se 77, 83. secundum 258bls, 384, 394. secus 376. ËËMpi sed 332. setze vint 52. selon (seon, seron, soron, soronc) 394. selon comme (que) 374blB, sembler 21, 62, 69, 95. se ne 433. se ... non 334 Rem. 358, 433. semel 51. sentiment 261bto. senttr 196, 444. septante 52. septem per septem 51, 392 IV. septies 51. sequere 157. sequitur 179. sert (a quoi) 62. servile 42. servir 193. settuple 51 Rem. sextuple 51 Rem. si< si 238, 239, 243, 340, 358, 359, 360, 363, 367, 426 lid. si< sic 40„ 205, 249, 324a, 327 et Rem. si (pronom ital.) p. 388. si' ainsi est que 363. si bien 367. si bien que 373. sic 327, 371, 374. si ce n'est 358. si com 348. sicut 374. sicuti 374. sien 80, 81, 82. sikkepit (holl.) 427. silentio 382. similis 374, 376bl8. simple 51. si minus 358. simulac 352. sine 90, 371 Rem. 2, 384, 395. sinere 269. singuli 51. sinistra 392. si non 358. si non 358. sinon que 358. sinuec 90. si que (= si) 345 Rem. 4, 358. si . . . que 245, 249, 373, 374»"*. siquidem p. 182 note 2, 354. sitire 196. si tost com (que) 353. sitót 285 Rem., 419blB. sive (seu) 337. sixième (Adrlen) 57. sixiesme livre 57. six vingts 52. sizuple 51 Rem. Sceur Angèlique 14. soi 69, 77. sol-dtsant 69, 423. soi'/ . . . soit 337. soixante-dix 52. soieii 16. solus 230. somniare 196. son 79, 83. songer 69, 268ter Rem. 2, 426. sortie 260. sort/r 195, 260. soudain que 353. soue (seue) 80. souffrir visite 19. sou/oir 299. sourire 260, 261bl». sous 416. sous peine de 20. souvenir 180. soveir 259. soz, voir sous. sper are 1606. stee/c (holl.) 427. stupet 182. Sryx 15. su (portugais) 83 Rem. 1, 84. 440 TABLE DES MOTS sub 384, 416. subit que 353. subter 384. subtus 411e, 416. sufjire 220d. suivant 41 ld. super 384, 396. supposé que 360. supra 384, 396. sur 263, 396, 405A. surmonter 198. surpasser 198. sur son siant 259, 262. survivre 198. survoler 198. suus 79, 83. suyo (espagnol) 83 Rem. 1, 84. ta 79. tacere 160a, 197. taedet 179. taire (se) 161e, 164, 171, 173, 197. talis 120, 371. tam 371. tamdiu . . . quamdiu 348, 374. tarnen 336, 3616. tametsi 244, 3616. tam . . . quam 322, 374. tandis 348 et Rem. tandis come 348. tandis que 336 Rem. 2, 348. tant 249. tant (cent mille tans) 51 Rem. tantopere . . . quantopere 374. tanto . . . quanto 375. tdntost com (que) 353. tant plus . . . tant plus 375. tant que (com) 348, 3516, 374blB. . tant . . . tant 375. tant . . . (que) 364, 367bla, 373. tantus 371. tantus . . . quantus 374, tant y a 62. tarder 195 et Rem. 2. Tasse (le) 14. te (sujet) 61 Rem. 1. te (holl.) 267 Rem. fel 406, 149. tellement que 340, 373. tel . . . que (comme) 36T™*, 374bIs. tel . . . tel 375. fener (esp.) 307 Rem. 3. tenir a droit 20. tenir tête 19. tenus 384. ter 51. terni 51. terre 16. terrestre 42. terriblement 43. terrin 42. testare 157. ti 439 Rem. 1. tien 80, 81, 82. Titien (le) 14. to (angl.) 267 Rem. toi 61, 63d. tollere 158. tomber 195. ton 79. tonat 176. tot 371. totiens . . . quotiens 374. tot . . . quot 374. totus 149. touchant 41 ld. toujours 299. toujours est-il 336. tourner 156, 167, 171. tout 23, 46, 47, 149, 230, 364. tout de même 336 Rem. 3. toutefois (totes veies, tote veie) 336. fout Ie monde 149. fout . . . que 245, 364. tradere 64. trans 384, 396bIa. transire 198. trés 384. tresque 234, 351 Rem. 2. tripte 51. triplex 51. trois = troisième 57. troisième (lui) 57. trois-vingt-dix 52. trois vingts 52. tromper (se) 192. trop 43. trotter 195. trouver (se) 178. tu 58, 61, 63d. tune 339. tuus 79. ubi 352. ubicumque 130, 245. ubi primum 352. ubiubi 130, 361c. ullus 141, 143, 146, 421, 433a. ultra 384, 397. umquam 421. un 39—41, 56, 143, 144, 145. unde p. 59 note 2, 124, 125. undeviginti 53. une fois 285 Rem. l'un et (ou, ni) l'autre 142. um'r 69. TABLE DES MOTS 441 unos (esp.) 41 Rem. unus 38, 143, 144, 148, 230. unusquisque 148. -urus 204. usquam 421. usquedum 349. usque eo 371. usquequo 349. ut 203,204,208,244,247,251,255,258b18, 340, 342, 352, 361», 368, 371, 374, 421^ utcumque 130, 244, 361c. uter 132, 132W, 139 III. uterque 142. utilis 3796. utinam 203, 204. ut non 371 Rem. 2. ut primum 352. ut qui 106. utut 130, 361c. vadere (se) 160c. valde 43. vapulare 160bls. -ve 337. veie 51 Rem. vel 337. velim 203, 204. veile 258!, 258Ms, 269, 270, 342 vellem 203. vendere 160bte. vendre (se) cher 464. venir 69, 164, 171, 239, 267"1», 286 Rem., 436. vënire 160bls. vënire 156, 307, p. 118 note 3. venter 177, 184. vipres 16. vere 383blg. vero 332. vers 378»1», 386, 388d, 398, 398»18, 400. versus 378blB, 384, 398. vertere 158, 378bls, 398: verum 332. vester 79. vestlr (se) 168. vestiri 154. vêtlr 260. vetare 269. vi (ital.) 78 Rem. videre 269, 2706. Vieux-Dieu-lez-Anvers 413. vingt 52, 56. vingt et deux 53. vingt et quatre 53. vingt et un 53. virglnal 42. vivere 196. vivre (se) 164, 196. voir 156, 267b)s, 2706, 444. volontiers 299 Rem. 2. vos 58, 59, 61. vos 59, 61. 'votre 80, 81, 82. vouloir 200, 205i, 206, 216, 217, 239, 275, 299, 433d. vous 61, 64, 65, 66. Vu 287, 411c. vli que 356. wanneer (holl.) 238. willen (holl.) 299 Rem. 2. worden (holl.) 156. y 766, 78, 344. yeux (ungz) 41. zier (holl.) 427. ADDENDA ET CORRIGENDA. p. 184, 1. 2 d'en bas: Palissy; lire: Palsgrave. p. 320, 1. 2 d'en bas; lire: De peur que se trouve déja au xv<= et est fréquent au xvie siècle, p. 321, L 7; biffer: une seule fois. p. 341, 1. 19; ajouter: Oerdau, o. c, p. 88, n'a pas rencontré avant le quinzième siècle d'exemples de en -f- substantif, employé avec sens purement modal. On lit pourtant dans un texte du quatorzième siècle: Sire, veez ci Huitacelin, Que tost est venuz avec mi Pour vous servir en vostre druz, Passion du Palatinus, 567—569. TABLE DES MATIÈRES Avant-Propos p. V—VIII Chapitre ' I. Le Substantif „ 1—3 Ep ,, x II. L'Article ,, 4—27 — > >IH. L'Adjectif . ,-. >.-;,": „ 28—35 — ,, IV. Le Nom de Nombre 36—40 - „ V. Le Pronom ,, 41—114 — r Les pronoms personnels . . 41—60 , Les pronoms possessifs „ 60—67 yLes pronoms démonstratifs ,, 67—79 Les pronoms relatifs , 79—99 Les pronoms interrogatifs „ 99—106 Les pronoms indéfinis, ,, 106—114 „ ^ VI. Le Verbe .' q . . . . „ 115—267 Le verbe et son sujet . ,, 116—145 Le verbe et son complément „ 145—151 . ✓-Les modes , 151—199 " Formes nominales du verbe „ 199—242 rLes temps .............. „ 242—267 „ VII. Les Conjonctions „ 268—329 Conjonctions de coordination „ 270—286 Conjonctions de subordination ..... „ 287—329 « „ VIII. Les Prépositions , 330—367 —' Les terminaisons flexionnelles et les pré- * positions en latin „ 330—337 Prépositions latines qui sont restées en francais ,, 337—359 Nouvelles formations ,, 359—367 ,", IX. La Négation „ 368—379 „ X. L'Ordre des Mots dans la phrase . . „ 380—402 Table analytique (, 403—425 Table des mots /ffe;' 426—441 Addenda et Corrigenda . . .ntj . .......... 442 Table des matières 443 UITGAVE VAN J, B. WOLTERS — GRONINGEN, DEN HAAG. NEOPHILOLOGIESE BIBLIOTHEEK onder redaktie van Prof. Dr. J. J. Salverda de Grave, K. R. Gallas, Prof. Dr. A. G. van Hamel, Prof. Dr. D. C. Hesseling, Prof. Dr. J. H. Scholte, Prof. Dr. Jos. Schrijnen, Prof. Dr. K. Sneyders de Vogel en Prof. Dr. A. E. H. Swaen Sekretaris der redaktie K. R. Gallas No. t, Dr. A. G. van Hamel, INLEIDING TOT DE KELTLESE TAAL- EN LETTERKUNDE .... ^. . ... f 2,40 Voor inteekenaren op Neophilologus - 1.90 No. 2 Dr. K. Sneyders de Vogel, SYNTAXE HISTORIQUE DU FRANCAIS, ingen. f 7,90, gebonden . 2e druk f 8,90 No. 3. Dr. René-F. Guillon, FRANQOIS VILLON, LES BALLADES EN JARGON du manuBcrit de Stockholm, bezorgd door Dr. K. Sneyders de Vogel .. f 1,90 Voor inteekenaren op Neophilologus - L60 No. 4. Dr. P. van Tieghem, OSSIAN ET L'OSSIANISME dans la littérature européenne au XVIHe siècle ..../" 2,40 Voor inteekenaren op Neophilologus ..... - 2,10 No 5 Dr J.-W. Marmelstein, ETUDE COMPARATIVE DES TEXTES LATINS ET FRANQAIS DE L'INSTITÜTION DE LA RELIGION CHRESTIENNE PAR JEAN CALVIN f 4,90 Voor inteekenaren op Neophilologus - 3)90 No. 6. Dr. L. Goemans et Dr. Ant. Grégoire, PETIT TRAITÉ DE PRONONCIATION FRANCAISE . 2e druk f 1,90 Voor inteekenaren op Neophilologus - 1,60 No. 7. Dr. A. Borgeld, VROUWENLIST. Verbreiding en oorsprong van een novelle uit den Decamerone f 2,25 Voor inteekenaren op Neophilologus - 1.90 UITGAVE VAN J. B. WOLTERS - GRONINGEN, DEN HAAG I