Dr. c. e. daniëls. DOCTEURS ET MALADES. (Avec 22 planches.) JANUS mm iuternationalBS poiir 1'Histoire de la Médecnie et la Géoiranliie Méiicale, Rédacteur en chef: Dr. H. F. A. PEYPERS. Amsterdam, Parkweg REDACTEURS Dr. Aoyama, Prof., Tokyo; Dr. A. Bouwer, Prof., Grenoble; l)r. I). Angel FernandezCaho y Noi vii.as, 'Se'nateur, Directeur du Boletin de medecina naval, Madrid; Dr. A. Cai.mette, Dir. de 1'Iustitut Pasteur, Lille; Dr. Cu. Creïghton, i.oiul 1'fs; Dr. C. E. Daniels, Amsterdam; Prof. Dr. A. Davidson, Edinbourg; Dr. C. Df.neffe, Prof.,Gaud; Dr. 1'. üorveavx.Bibliothéeaire, Paris; Surgeon-General Si r Jos. Fatbeb Bart., Londres; Generalarzt Dr. II. Fhüi.uh, Leipzie; Dr. Mouestino dei, Gaizo, Prof., Naples; Dr. A. johannessen, Prof., Christiania; Prof. Dr. 11. Kirchner, Conseiller au Min. du Culte, Berlin; Prof. Dr. KitasatO, Tokyo; Dr. R. Kobert, Prof., Rostock; Dr. A. Laveran, Paris; Prol' Dr. Patrkk Manson, Londres; Dr. J. E. Monjaras, Saint-Louis-Potosi, Mexique; Dr. J. I/. Pagee, Prof., Berlin; Dr. J. F. Payne, Londres; Dr. Ju.. Petersen, Prof., Copenliague; Dr. L. Rogers, Muktesar, Ind-Angl.; Dr. W. P. Rvyscii, Conseiller, la Have; Sanitiitsrath Dr. B. SdiKi'be, Grein; I'r. Prospero Sonsino, Prof.Pise; Dr. C. Sïl'kou.is, Délégué des Pajs-Bas au Conseil International de Santé, Coustantiiiople; Surgeon-General Dr. Geo. M. Sternberg, Washington; Dr. B. J. Stokvis, Prof., Amsterdam; Dr. J. \\. R. Tl lanvs, Prof. Em., Amsterdam; Dr. G. Trem.le, Tusp. E. H. du Serv. Méd. des Colonies, Viehy; Dr. G. C. Vorderman, Batavia. Tirage a part de JANUS. ClNQl'lÈME ANNÉE. LIVRA1SONS I—III, Janvier—Mars 1900. DOCTEURS ET MALAÜES par le Docteur C. E. DANIËLS, cl'Amsterdam. ('Avec 22 planchet.) Ia Comraission d'Organisation du premier Congres international de Médecine professionelle et de déontologie médicale a distribué sa circulaire générale. Elle est d'avis que beaucoup de médecins s'intéressent aussi bien ïi 1'évolution des sciences médicales qu'a 1'étude des questions de médecine professionelle. Le monde médical s'associera sans doute a cette thèse; plusieurs en eil'et seront disposés a la considérer comnie un axiome. Y a-t-il cependant beaucoup de médecins qui s'occupent de la théorie de la science médicale pour la science seule, sans se préoccuper des applications possibles de leurs recherches ? C'est un nombre trés restreint, une quantité négligeable. La science est cultivée pour les fruits qu'on espère en recueillir; pour les fruits matériels, dont le plupart des médecins ne peuvent se passer, le Dieu l'/utos s'intéressant d'ordinaire plus aux prêtres de Mercure, qu'a ceux d'Esculape. ("est ce qui m'a porté a parler des rapports entre le médecin et les particuliers, plus spécialement les malades, ses clients, dans ce numéro du Janus. Car cette livraison est destinée a présenter aux membres de ce Congres, pour autant que ce pourrait être nécessaire encore, ce jeune periodique, qui, dans les trois années de son existence, s'est déja acquis tant d'amis dans les diverses parties du monde. II voudrait néanmoins s'en faire un nombre plus grand encore, vu la multiplicité des branches de la science médicale dont il s'occupe. »L histoire d'une science c'est la science elle-même" a dit notre éminent demi-collègue E. Littré. 11 est assez ordinaire qu'une indisposition nous mette de méchante humeur, et que 1 on subisse la visite du médecin comme un mal nécessaire. Mais que 1'on tombe malade pour de bon, c'est autre chose; le médecin devient un sauveur. Bien entendu, je ne Parle que des émotions relatives a notre état physique, sans entrer dans le domaine des considérations religieuses. La différence dont je parle, dans les sentiments éprouvés a 1 egard des médecins, est aussi vieille que le monde, ou plutót elle a pu se constater dès qu'il y a eu des gens se mêlant de 1'art de guérir. Auparavant les hommes se traitaient eux-mêmes, comme les animanx le font encore, quand ils ne sont pas soumis d'autorité a une médication savante. Mais dès qu'il se présenta des guérisseurs, se prétendant a tort ou ïi raison en mesure de venir en aide aux malades, les choses ehangèrent de face. Une des premières conséquences de ce changement fut que le nialade tomba sous la dépendance du guérisseur, qui se vit en droit de réclamer pour les services rendus la reconnaissance de son cliënt. Mais ces services ne sont pas tous d'importance égale, et pèsent incontestablement bien moins dans le cas d'une simple indisposition, (pie dans celui d'une maladie dangereuse. II n'est point étonnant que dans le premier cas le malade se sente beaucoup moins obligé a son docteur (ine dans le second. Et, de même, 011 comprend fort bien (jue ceux qui sont atteints gravement voient leur médecin d'un tont autre teil pendant la période menafante de leur mal que plus tard, lorsque, comme nous disons, »le danger est passé . Cependant eet état d'ame que je viens d'esquisser, tont explicable qu'il est, a quelque chose de choquant, je dirais presque quelque cliose de contraire a la nature, que 1'on sent, même si 1'on ne se met pas au point de vue subjectif du médecin, qui, lui, sait fort bien qu'il a apporté le même soin et le même zèle, souvent a eu la même peine, a rendre les services si inégalement appréciés par ceux qui en ont été les objets. On serait tenté de se demander a ce sujet si 1'ingratitude n'est pas une disposition naturelle a 1'homme, lui faisant peu d'honneur, puisqu' elle le ravalerait en dessous du chien. Ce n'est pas ici le lieu de se livrer a 1'analyse psychologique nécessaire pour élucider la question. Pourtant il me sera permis de rappeler la réponse de Molière a Louis Xl\, lorsque le roi lui demanda s'il avait un médecin et ce que celui-ci lui faisait. »Sire, dit—il, nous causons ensemble; il m'ordonne des remèdes; je ne les fais point et je guéris". On sait aussi qn il y a des malades qui, après leur guérison, ne se gênent pas pour dire qu'ils la doivent bien moins au médecin qu'aux remèdes. N'a-t-on pas fredonné: Par sa bonté, par sa substance, Le lait de mon anesse a refait ma santé, Et je dois plus en cette circonstance Aux anes qu'a la faculté. II va sans dire que les médecins se préoccupent des appréciations si diverses que 1'on fait de leurs services et on sait que depuis des siècles ils ont couturae d'en discuter entre eux. Mais ce que la plupart d'entre eux ignorent probablement, c'est qu'a dater du XV1< siècle les sentiments des malades ii leur égard ont inspiré plus d'un artiste néerlandais, qu'ils maniassent le burin ou le pinceau. Je vais donc, en premier lieu, donner quelques détails a ce sujet. Henri Goltzius '), dessinateur, graveur et peintre célèbre, a publié en 1587 une série de quatre estampes, représentant les rapports de médecin a malade aux différentes phases de la nialadie, soit a quatre degrés différents de gravité du mal. C'est pris sur le fait, réaliste et allégorique, surtout vrai; si vrai, qu'après trois siècles écoulés ce 1'est encore; on pourrait croire que cette ceuvre a été confue d'hier; la conception est géniale, 1'exécution trés artistique. On passé en revue eu quatre tableaux la vie du médecin, telle qu'elle était du temps de Goltzius, telle qu'elle est en 1000, et telle qu'elle sera sans doute dans quelques siècles d'ici. C'est ce qu'on pourrait appeler une histoire de la pratique médicale, présentée sous la forme la plus objective. Chacune des quatre estampes2) représente deux appartements, séparés par une grande colonne, qui monte jusqu'au haut de la gravure, et contre laquelle s'appuie un persounage colossal, sur lequel je reviendrai tout a 1'heure. A gauche, ii chaque fois, une même chambre a coucher, le lit, quelques meubles. Le malade est dans le lit sur les deux premières estampes; sur la troisième il est assis dans un fauteuil devant le feu, et sur lu dernière il est habillé pour sortir. Dans la chambre se trouvent toujours sa femme, quelques membres de la familie et le médecin. Le compartiment de droite fait aussi de son cöté voir quatre fois une même chambre; mais, tandis qu'a gauche il s'agissait d'une maladie interne, ici c'est la chirurgie qui est a l'umvre. Sur la première estampe on remet la jambe cassée d'un homme; sur la seconde on panse la tête blessée d'une femme et on place dessus une vessie pleine de glacé; sur la troisième 1'homme a la jambe cassée essaie de marcher avec des béquilles, et sur la quatrième il est guéri, ainsi que sa femme, et ils dansent im pas de deux devant le docteur qui vient les voir. N oublions pas les objets employés dans la médecine et dans la i) Voyez Bartsch, T. III, p. 98, 'JU. 3) Hauteur, avec la marge, 188 mm., saus la marge, 176 mm., largeur, avec la marge, 231 mm., saus la marge, 228 mm. chirurgie, qui sont groupés au premier plan de chaque compartiment. Ils nous donnent une idee des ressources de cette nature en usage a 1'époque du graveur. Passons au gigantesque personnage qui occupe le centre de chaque estampe. Sur la première c'est un Christ, examinant un flacon d'urine qu'il tient de la main droite, et tenant de la gauche deux fers a cautériser, avec un petit rechaud destiné a les faire rougir. On devine ici aisément a 1'attitude anxieuse des personnes présentes, pendant que le médecin, debout prés du lit, tate le pouls du malade, qu'il s'agit de quelque chose de grave. Sous les pieds du Christ on lit O 0EOL et les deux distiques suivants, 1'un a gauche et 1'autre li droite de ces mots: Dum nigris aegrum prope Mors circumuolat alis, Funestamque aciem iam fera iamque parat, Tum me promissis beat et domus omnis adorat Tum vocat immensum me venerata DEUM. Dessous se trouve la traductiou hollandaise. La même disposition a été observée sur les quatre estampes. La figure de la seconde estampe représente un ange, qui, d'une main, tient une coupe,' de 1'autre, une spatule. Dessous II TOT ©EOT XE1P et les vers: Paulum ubi convaluit: paulum de numine nostro Cessit, et in nostris auribus ista sonant: Tu coelo nobis demissus es ANGELUS alto, Praemia quae vestri et quanta laboris erunt. Le personnage allégorique de la troisième estampe est un homnie richement vêtu, avec béret et manteau. De la main droite il tient un livre et de la gauche des ciseaux ouverts, sur 1'une des branches desquels pend un morceau de bandage ou d'eniplatre. Dessous, ce mot d'Homère, par trop flatteur pour les médecins, IATPOX ITO AAI 2.\ AiNTAHlOD AAAi'LN (un médecin vaut beaucoup d'hommes), et les vers: Iamque Machaonia magis et magis arte levatus, Cum sedet ante focum, progrediturve tripes, O HOMO non frustra tantos subiisse labores Nosces; quod restat tu modo tolle malum. Enfin la quatrième estampe a au centre un individu presque nu, aux muscles puissants, avec des oreilles d'ane, des cornes, une barbe de bouc, et des ailes. A sa ceinture pend a sa gauche une trousse de chirurgie en cnir, ressemblant quelque peu a la gaine d'un couteau de boucher. Un corbillon, contenant un pot d'onguent, est suspendu au-dessus de sa hanche droite, a un cordon passé en sautoir sur 1'épaule gauche. Ce peu avenant personnage s'avance dans une pose théatrale, étendant ses mains vides. La légende grecque est TIÏI'IX 'l'K K \I n Alini \NTI Xf2ETPI2\ (pour sulaire des coups), et les vers latins: Ast ego si penitus iam sanum praemia poseam, Ille Deus pridera mox CACODAEMON ero. Cautior exemplo tu duin (lolet accijie nostro, Qui Medicae exerces graviter artis opus. Pour rendre plus clairs encore les sages conseils que par sou burin il donnait aux médecins, 1'artiste y a joint en hollandais des vers, qui signifient: »Yous, maitres, et qui que ce soit qui vous appliquez a la noble pratique de 1'art de guérir, tenez-vous avertis par 1'exeiuple que je niets sous vos yeux. C'est pendant que les gens sont en douleur qu'il faut les faire accoucher; ;i »aidez-moi" répondez par »donnez-moi"; que les raisons dont on vous paie soient sonnantes." Voila coniment Goltzius, lui-même maladif, a fait la le^on ii ses contemporains, sur leur ingratitude pour les soins médicaux dont ils étaient 1'objet. Je n'ai pas réussi a découvrir ce qui lui en a donné la pensee: quelque fait déterminé venu ii sa connaissance et qui a excité sa verve satirique, ou bien peut-être des plaintes tombées de la bouehe de son médecin, ou autre chose encore. Je 1'ignore. Muis ce que je sais, c'est que son exemple fut suivi et que le menie thème a été traité par d'autres après lui. En effet, Robert de Baudous, éditeur bien connu d'Amsterdam, a publié en 1609 quatre estampes !), dessinées par Egbert van Paenderen, de Harlem, et gravées par Johannes Geile, qui représentent a peu de chose prés les mèmes scènes. Les vers latins en bas des estampes sont les mèmes que sur celles de Goltzius, niais 011 y a joint, outre la traduction liollandaise, une traduction allemande que voici: 1. Wan sich der krancke Mensch, in grösser schwacheit fint So wurd ich als ein Godt, geehret vnd gebetten Ein ieder stehet vor mich, mit g'blöstem haubt geschwind : Ach Meyster hilf vns doch, vnd kum zu vns eintretten. Spaar doch kein kost an ihn, wir werden wol bezalen, Hilf nur den krancken auf, der sunst doch sterben muss, Preis, lob vnd ehr wurd ihr, vor eüwer ghulff hie holen; Der Mensch ist wol ein Godt, der ihn bald hilft zu fuss. 1) Hauteur, avec la marge, *293 mm., saus la marge, 251 mm.; largeur, avec la marge, 36'J mm., saus la marge, 364 mm. 2. Vnd wan die kranckheit sieh, vnd schmertz zu bessern pflegen, Auch dan furgelit niein lob: Meister sagen sie dann, Gleich einen Engel Godts verdient ihr grossen seghen, Vns gsind durch euwer huif, frolockt fur ijderman, Nachdem ihr hie ins hauss, ghekömmen spijt auss gunst, So nirabt er tagleich zu, in g'suntheit oline sorghen, Vor seine heilung wir, nit raehr vns förchten sunst, Es ist eins Engels werck, z'heilen Kranckheit verborgen. 3. Vnd wan der Patiënt nun auss dein sieckbett kumpt Vnd sitzet bei] dein feuwr, oder im hauss vmbgeht, Dan sagt ma lieber Man, der kranck euch herlich rumbt Kein mensch so wol als ihr, vnd treuwlich ihn beijsthet. Wir werden fragen bald, was wir euch sollen geben Euwr anlcunft war vns lieb, der gang wirt lieber sein, Ihr habt in kurtzer zeijt, sein kranckheit bald vertrieben, Ein Mensch vol ehren weth ist solchen Medicein. 4. Ich aber wurd auss Godt, fiir ein Teuffel geacht, Die weil der Kranck gesunt, und ich sprach vmb raein lohn, Das hauszgsind auf mich murt, vnd werde gantz veracht, Man gibt mir böse wort, vor geit nur spott vnd hohn. Mit schaden wurd ich gwitzt, ihr Artzet vnd Doctoren, Wans folck Ach Ach mir saght, sag Da mir als bald geit, Als schmertz vnd pein ist weg, ist ehr vnd lohn verlohren, So man vmb zalung spricht, ist man ein Teuffel:s' helt. Remarquons que tous les vers des estampes de Johannes Geile out été gravés sur la plaque de cuivre, tandis que ce n'est le cas que pour les vers latins sur celles de Goltzius, oü les vers hollandais ont été imprimés après le tirage de la gravure. Quant aux scènes représentées, elles suivent de prés cell&s de Goltzius, mais présentent néanmoins des diftérences de détail cju'il faut signaler. Par exemple, le premier plan est plus profond, ce qui a permis de mieux disposer les instruments et antres objets qui y sont groupés. Le malade de droite a aussi ailaire au chirurgien; toutefois il ne s'est pas cassé la jambe, mais il a été blessé a la tête. Sur les deux premières estampes rien n'indique la nature de la blessure; mais comme le grand personnage central de la troisième tient une pierre dans sa main gauche, il est clair cpie le malade a eu une de ces »pierres de tête", que notre collaborateur, bien connu par ses travaux iconographiques, le docteur Henry Meige, a si bien décrites et dessinées duns une livraison de la première atinée du Janus. Vient un troisième graveur hollandais, Jan van Vianen, de la fin du XVIIe siècle, peu connu du reste, qui a donné une série semblable de scènes en quatre gravures, que j'ai été assez heureux pour trouver, dans une collection f'aisant partie des Archives de Harlem. Gra^e au bienveillant concours deMr. C. J. Gonnet, 1'archiviste de la ville, il m'a été possible non seulement de les décrire, mais aussi d'illustrer mon article de reproductions de ces estampes belles et rares. C'est, comme je viens de le dire une série de quatre feuilles ') qui représentent, environ de la même manière, les mêmes scènes que les estampes de Goltzius et de Geile. Toutefois quelques détails offrent des différences dignes de notre attention. La première, la troisième et la quatrième feuille représentent des chambres luxueusement meublées en plein jour, fenêtres ouvertes, comme on les trouve sur les estampes de Goltzius et de Geile, mais la deuxième feuille nous fait voir un appartement pendant la nuit, avec un lustre au plafond et une branche ii la cheminée, ii bougies allumées. Les décors des appartements et le costume des personnes sont beaucoup plus riches que sur les autres estampes et d'un autre époque (Louis XIV). Le médecin est toujours vétu du nianteau long et avec le grand chapeau flambard du temps. Quant aux personages de grande taille au millieu, entre les deux chambres, la figure du Christ diffère peu de celles sur les autres estampes. L'ange au contraire est vêtue d'un costume phantastique romain, coupe spécial de Van Vianen. L'homme, sur la troisième feuille, porte le beau costume seconde moitié du XVIIe siècle, avec la longue perruque et le béret des docteurs. Le diable enfin est beaucoup plus laid que celui de Goltzius, qui ii son tour est un véritable Méphisto en comparaison avec celui de Geile, dont le visage abonde de bonhomie. La signature nous donne lieu d'observer que la première feuille i) Hauteur, avec la marge, en moyen 307 mm., sans la marge 286 mm.; largeur avec la marge, 38-4 mm., saus la marge 368 mm. Les quatre feuilles otireut des ditlérenees de 3 ü 6 mm. dans les diverses dimensions. porte »Jan viin Vianen fecit.«, au même endroitoiï Geile ii signé ses estampes, en lias de la colonne au millieu. La seconde et la troisième feuille sont signées »Jan van Vianen Inven. et Fecit.« la seconde encore en bas de la colonne, mais la troisième sur 1'avantplan, prés des pieds du docteur. La quatrième feuille nest pas signée. Au dessous de la gravure, gravés sur la plaque de cuivre, se trouvent les mêmes distiques latins, a cóté des mots grecs, que nos avons rencontrés sur les estampes de Goltzius et de Geile. En outre 011 y lit la même traduction allemande que Geile a gravée sur ses estampes et ii droite une traduction hollandaise, toute differente de celle que Goltzius nous a donnée. Afin que 1'on ne restat pas dans 1'incertitude sur 1'auteur ii qui nous devons cette traduction, le poète a signé la quatrième feuille. C'est W. van der Hoeven, qui a vécu a la fin du XVIIe et au commencement du XVII I(' siècle et nous a laissé plusieurs pièces de théatre de médiocre valeur. L'adresse de 1'éditeur, sur la première feuille, est comme suit: »t' Amsterdam bij Joannis Lootz, Kaertverkooper in de Nieuwe brugsteegh met Privilege.» C'est bien remarquable que le même sujet a été traité de manière analogue, pour ne pas dire de la même manière, par trois graveurs différents, dont sans doute Goltzius, 1'ainé, est le plus célèbre. Que les autres 1'ont suivi et 11'ont pas hésité de 1'imiter, sauf quelques détails, prouve a ce que je pense, que le succès n'a pas manqué au premier. Et si Geile, le second, ne s'etait pas réjoui de 1'appréciation de son oeuvre par ses contemporains, Van Vianen ne se serait pas occupé plus que trois quarts de siècle après d'un sujet, qui n'offre aucune analogie quelconque avec les autres fruits de sou burin. Mais ce 11e sont pas les graveurs seuls qui s'en sont occupés. Au commencement du XVII1' siècle, un peintre hollandais de grand talent, sur le nom duquel on n'a pas jusqu'ici acquis de certitude, a traité le même sujet en quatre grands tableaux a 1'lmile, qui rappellent d'une manière frappante les gravures de Goltzius, de Geile et de Van Vianen. lis appartiennent ii un gentilhomme danois, ami des arts, et je n'en aurais eu sans doute aucune connaissance, si un de mes amis n'en avait pas rapporté de Copenhague des reproductions photographiques, qui avaient sollicité son attention par la valeur artistique des tableaux, et plus eneore par le fait, qu'il les trouva instructifs pour 1'histoire de rarmamentarium chirurgicum de 1'époque du peintre. Comme je partage complètement cette opinion, j'ai fait volontiers usage de la permission d'insérer iei ces photographies, quoiqu'elles soient médiocrement réussies. Enfin le peintre flamand J. Horemans a coiuposé en 1752 uue série de quatre tableaux li l'luiile '), qui varient d'une manière fort amusante le thème qui nous occupe. 1. Chambre ii coucher. Dans le lit, un malade. A eóté, un Christ, pieds nus, en manteau rouge, qui lui tate le pouls de la main droite, et tient dans sa gauche un verre plein d'urine. Deux parents lèvent en se lamentant lenrs mains vers le ciel. Dans le coin a gauche, le notaire, assis a une table, écrit le testament sous la direction de la femme du malade, debout ii eóté de lui. 2. Même chambre. A eóté du lit est assis un ange dans un vêtement rose, qui laisse voir sa jambe nue. Sa main droite, calmante, repose sur celle du malade, qui est sur son séant. La femme, assise a droite, cause avec un homilie, probablement quelqu'un qui est venu demander des nouvelles du malade. A gauche est une table sur laquelle une servante range des flacons de médecines, un verre et uue cuiller, et ii eóté se voit une chaise percée ouverte. 3. Toujours la même chambre, seulement on en voit une plus grande partie. La familie est réunie paisiblement autour de la table devant la cheminée. Le convalescent, en robe de chambre, est assis Ei droite dans un fauteuil eii jonc; a eóté de lui, le docteur en habit rouge et perruque grise; les autres sont gais et dégnstent un verre de vin accompagné d'un biscuit ii 1'anis, bien hollandais. 4. Le vestibule, et la porte de la rue grande ouverte. Un personuage vêtu de rouge, ii la figure noire, aux yeux ardents et aux oornes de bouc (le diable), présente le conipte a la femme, auprès de laquelle il y en a deux autres, et dont 1'attitude des plus revèches indique la plus compléte iuauvaise volonté de payer; en même teinps, le malade, maintenant rétabli, tire le diable par un pan de son vêtement et de 1'autre main lui montre la porte d'un geste mena9ant. Ces peintures, que le bienveillant possesseur Mr. M. G. Dolleman m'a cédé pour la reproduction, sont remarquables pour le dessin, la composition et le coloris; les personnages y sont vêtus a la mode du milieu du XVIII1' siècle, sauf le Christ et 1'ange, qui ont les vêtements conventionnels leur appartenant. Elles mettent sous nos yeux un intérieur bourgeois hollandais de 1'époque du peintre. Quant a celui-ci on peut hésiter entre J. Horemans père (1(382 —1759) et J. Horeinans fils (1714—1790), qui ont eu le même genre et la même signature 1'un que 1'autre. i) Hauteur 475 mm., largcur 565 mm. toile. Voilii donc, dans un laps de temps de 150 ans, le même sujet traité par ciuq artistes néerlandais. II a existé certainement un motif pour cela, mais je n'ai pas réussi a découvrir lequel. Un moment j'ai cru pouvoir deviner que 1'on se montrait spécialement a Harlem pen empressé a reconnaitre ce que 1'on devait a 1'art médical, puisque c'est dans «la ville des fleurs" qu'ont été publiées les estampes, non seulement de Goltzius, mais aussi de Geile, et que ce n'est pas loin de la, ïi Amsterdam, que les estampes de Van Vianen ont été éditées. Mais je ne pus m'arrêter a cette pensée, en considération des deux peintres qui ont fait usage de leur palette pour faire honte a leurs concitoyens d'une de leurs faiblesses, pour ne pas dire d'un de leurs vices; et je me demandai si je 11e me trouvais pas en présence d'un trait du caractère de mes ancêtres, qui m'était resté inconnu jusqu'ici. Mais alors, me dis-je, poètes et prosateurs ne pourraient pas avoir laissé ce sujet entièrement de eóté; 011 devrait nécessairement y trouver des allusions dans notre riche littérature entre 1587 et 1750. Celle-ci cependant n'en a pas tracé. Je m'en réjouis grandement, car j'y vois la preuve qu'il ne s'agit pas d'une maladie endémique propre a mon pays. Bien plus, les recherches auxquelles je me suis livré m'ont clairement fait voir que les phénomènes moraUx satirisés par nos artistes, se sont fréquemment rencontrés en debors de nos frontières, tout en donnant lieu a des manifestations différentes de celles qui viennent de nous occuper. J'ai me donc a croire que le monde médical n'en voudra pas a un médecin néerlandais, d'avoir tixé 1'attention de ses collègues et de tous ceux qui s'intéressent a 1'iconographie médicale sur ces satires, dont 1'idée, les quatre phases, et la manière d'expression sont probablement spécifiquement hollandaises. En etfet, quant a ce dernier point, je n'ai pu constater qu'un seul cas dans lequel, hors des Pays-Bas, ce sujet ait été mis en image. C'est dans 1'ouvrage intitulé: Die Deutschen Stammbiicher de-s XVI. bis XIX. Jahrhunderts von 1!. und R. Keil. (Berlin 1893), oü, comnie on le sait, se trouve une description de la célèbre collection de Weimar. J'y ai rencontré les détails suivants, fort intéressants a mon point de vue. Les auteurs ont vu dans un album d'Altdorf une page non datée, dessinée par un médecin, avec le titre Aesculapius Trifrons, représentant un médecin tenant un verre d'urine et possédant trois têtes; 1'une est celle d'un homme jeune a longs cheveux, la seconde celle d'un C'hrist, et la troisième celle d'un diable tres luid, qui tire la langue. Sous le dessin 011 lit: Intrantis Medici facies tres esse videntur Aegroto; Hominis, Daemonis atque I )ei; Quam primum accessit medicus dixitque saluteiu, En Deus, aut custos Angelus, aeger ait. Oum morbum medicina fugaverit, ecce Homo, clamat. (Juni poscit medicus praemia, Vade Satan! (Probablement vers 1638.) J'ai cherché en vain d'autres images de ce genre: en personne, avec l'aide bienveillant du zêlé sous-directeur Mr. E. A\ . Moes (a qui je dois plusieurs renseignements sur mon sujet et les photographies danoises) au cabinet national d'estampes a Amsterdam, et dans les collections privées du pays; par correspondance, dans plusieurs cabinets d estampes de 1'étranger. Enfin je me suis adressé au docteur .1. Brettauer ïi Trieste, bien connu comme amateur de 1'iconographie médicale et possesseur d'une collection célèbre d'estampes relatives a la niédecine et aux médecins. Je lui demaudai s'il connaissait des images du genre de celles qui nous occupent ici. Sa réponse me fit voir qu'il connaissait uniquement les gravures de Goltzius et qu il n avait jamais vu les autres produits artistiques que je mentionne dans ces pages, ni quelque chose de semblable. II resulte que la conception de cette satire en images, dont médecins et malades peuvent faire leur profit, appartient probablement a Henri (ioltzius. II y a ici ii se demander si Goltzius, en ce qui concerue le point traité par lui, n'a pas eu de prédécesseurs. Or, coninie je n ai point découvert qui est 1'auteur des vers placés au dessous de ses estampes, il n'est pas absurde de supposer qu'il a eu recours a la plume aussi bien qu'au burin pour exprimer sa pensée, et que les vers en question pourraient être de lui. Je crois devoir examiner la chose de plus prés, et pour cela diviser la question en deux. Je demande en premier lieu s'il existe des estampes analogues antérieures a 1587, et je serais disposé a y répondre affirmativement. Au commencement du seizième siècle, vers 1510, parut un livret anonyme, intitulé: Dit es vander siecten der broosster naturen. en hoe haer ons heere gheneest / Glieprint in die princelijke stadt van Bruessel Inde Zeeridder Bi mi Thomas vander Noot. Dans ce livre, fort rare, se trouvent deux gravures sur bois, qui présentent assez de points de ressemblance avec la première des quatre estampes de Goltzius, que je ne puis me refuser a lu pensee que c'est lïi ee qui lui a inspiré 1 idéé de faire de la gravure son interprête pour ce qu'il avait sur le coeur, au sujet de 1'ingratitude envers les médecins. (Vla ne vent point dire que sa pensee ait été la même que celle de 1'auteur des gravures sur bois. 11 n a emprunté que le procédé d'expression. Pour 1'idée même, elle est fort dittérente. Si pour Goltzius le médecin apparait comme un Christ, au moment ofi le malade se sent le plus mal, 1'anonyme fait du Christ lui-même celui qui guérit. Cette figure du ('hrist est symbolique chez tous les deux, mais sur 1'estampe de 1'anonyme elle a une signitieation purement religieuse, qui a entièrement dispara sur celle de Goltzius. Tous deux ont en commun ce trait, peu conforme a notre sentiment du goüt, qu'ils font tenir un urinal ii leur tigure du Christ. Mais cela s'explique aisément au point de vue de 1'iconographie médicale. Presque tous les médecins du moyen-age juraient par 1'uroscopie, au point que, non seulement ils croyaient pouvoir en tirer la diagnose de toutes les maladies, mais que même il leur arrivait souvent de se dispenser, comme d'une chose superflue, d'examiner et d'interroger les malades. II suffisait d'apporter au médecin une bouteille de 1'urine du patiënt pour rapporter une ordonnance. De lit vient tout naturellement qu'alors on représentait toujours les médecins un urinal a la main. !) En tout cas, les lecteurs du Janus seront bien aises de faire connaissance avec ces deux estampes, vieilles de pres de quatre siècles. .le les place donc ici, surtout paree qu'elles sont un produit du sol néerlandais, de même que les autres que j'ai reproduites. Mais, comme la langue hollandaise n'est pas admise dans nos Archives internationale#, je fais suivre d'une traduction littérale les titres qu'elles portent. 1. Doctor Jhesus die meester principael Staet en siet in den orinael. Le docteur Jésus, ce maitre principal, Regarde debout 1'urinal. 1) Dans son livre excellent, intitulé Ju» pharmareutur/ier Vorze'it. ~Seu? Vohje. Zterite vermehrte Avfar/e (Berliu 1899), Mr. II. Peters Je Nuremberg tr-iite fort en détail ce sujet (lans le chapitre intitulé „Brunnenichanen". Une estanipe amusante itcfnr fiancf tuf sinen nrinacl ©aoaücïtc fcaffi mnslw ts princifiaeL i 2. Doctor Jhs hanct wt sinen orinael Tooghéde datti meester es principael. Le docteur Jésus porte suspendu son unnal, Pour faire voir qu'il est maitre pnncipal. La seconde question qui se présente est celle-ci. La pensee même misê en images par Goltzius, a-t-elle peut-être ete expnmee ava l„iv Ie suis en mesure d'affirmer ceci positivement, Heinrich Solde, 1'homme a l'esprit génial qm na ete connu_qu sous son 4,seudonyme d'Euricius Cordns maitre decole a E furt, médecin de la ville de Brunswick, professeur a Maibouij,, \ ■ • Brème célèbre entre tous comme Wte-médecm ma* sans cesse • r«avt.rsité a été, pour autant que j ai pu m en assurer, domaine ^ la vpnaissance, 1'humanisme et la réforme . ' Oans ses productions poétiques subséquentes l ordusa mnde „rédilection pour 1» forme epigrammatique. 11 pnbli» nouve iux livres d'épigramme., en 1525 et en compos. qnatre aotres, ,,„i „'„„t para qu'après sa mort, en 1535 riun» .»x »o»t pmn.en,, sous le titre de Euricii Cordi Epigram,natuniLibn MU. l,c célèbre Gottfried Epbraïm Lessing » si reeonnu U"1 1 noétiane de ces petit, poèmes, qo'il y » M des emprants, .m.t.nt prescinc mot n mot, dans se. SmogeikMe, plusienrs epigrammesiJ (SS - tontct'ois dire 0« il av.it pris ce qnü „ppropnmt " jtn donnerai „n senl eiemple. Dan. son livre VII, V, 07,D« Mcdico Monacho, Cordus dit: Medicum frequentes foeminae monachum petunt, Nil suspicare; aegros domi uiros habent, Et Lessing, Sinngedichie 20, Aut Frau rrix: Frau Trix besucht sehr oft den ,pingen Doktor Klette, Argwohnet niclits. Ihr Mann liegt wirklich krank zu Bette. On Ut dans ce même livre VU, écrit entre 1520 et 1525, sous le titre De Medicis, les vers suivants: Tres medicus facies habet: unam quando rogatur »Angelicain". Mox est cum juvat esse »Deus'. Post, ubi curato poscit sua praemia morbo, Horridus apparet terribilisque «Satan". dont notro collègue 11. Finckenstein a donné (Dichte/■ und Aerzte, Hreslan 1864) cette traduction exacte: Drei Gesichter hat der Arzt, koramt er auf Verlangen, lleisst man einen Engel ihn; liilft er, einen Gott. Will er aber nach der Cur seinen Lolm empfangen,. Sieht er wie der Tenfel aus und empfangt nur Spott. Voici donc le dieu, 1'ange et le diable, auxquels Goltzius n'aura qu'it ajouter rhomme, pour avoir le sujet de ses quatre estanipes. ("est encore le cas pour les vers suivants, qui ont tont 1'air d'être anssi une traduction littérale de ceux de Cordus: Three faces the Phisition hath: first as an Angell he, When he is saugbt: next when he helpes, a God he semes to be. And last of' all, when he hath made the sicke deseased well, And askes his guerdon, then he semes an ongly Fiend of heil. J'ai dit que cela a 1'air d'une traduction littérale de Cordus, mais je n'ai pas dit que c'est le cas. La chose est loin d'être certaine. Voici ce que j'en puis dire. Parmi les livres rares que possèdent le Musée britannique et la bibliothèque Bodleienne a Londres, se trouve un livre publié en original en 1577, sous le titre de Flowers of Epigrammes by Thimothe Kendall, et réimprimé en 1874 par la Spencer-Society. J'ai pu consulter la réimpression dans la bibliothèque royale ii la Haye, et voici ce que j'ai constaté. L'auteur, né a North-Aston, Oxfordshire, devint étudiant a Oxford en 1572, mais quitta l'université sans y avoir pris de degrés. 11 se rendit ïi Londres pour y continuer ses études, et alors ... sa biographie prend tin, car je n'en sais pas plus long, le Dictionary of National Biograph j de Sidney Lee, tout détaillé qu'il est en général, n'en disant pas davantage. La préface de la réimpression nous apprend encore que 1'on ne connait aucun autre ouvrage de Thimothe Kendall, et que celui-ci est "a pleasant and amusing one". ■ Le titre complet du livre est Flowers of Epigram mest, out of sundrie the moste niiigular authours select cd, as treil ancient as late icriters; 1'autenr le dédia au chancelier de 1'université, lord Robert Dudley, comte de Leycester, ce qui, en même temps que la réimpression récente, lui donne un cachet particulier. Kendall y mit en outre une préface, qui se termine en apprenant au lecteur qu'il a composé eet ouvrage »cum (ei) vernarent dubia lanugine malae . Les Flowers, toujours accompagnées du nom de 1'auteur, n'en sont pas le seul contenu, Kendall y ayant joint des vers de sa fa^on, Trifles, dit-il, "devised and written (for the moste part) at sundrie tymes in his yong and tender age". Or il se trouve que le couplet que j'ai cité plus haut fait partie de ces Tri fles. Si Kendall avait connu le De Medicis de Cordus, il me semble qu'il aurait placé ce couplet dans la première p;irtie de son livre et cité le nom de 1'auteur original, puisqu'il mentionne tous les écrivains dont il a admis des poésies dans son anthologie, et de plus il nomme quelques auteurs auxquels il a parfois eniprunté de ses Tri fles. Pourquoi donc ne pas mentionner Cordus, s'il la connu? Est-il impossible que tous deux aient suivi, sans se connaitre, un même fil de pensée, d'autant plus que tous deux avaient des dons analogues de poésie et affectionnaient également la forme épigrammatique V Goltzius, peut donc avoir connu Kendall, aussi bien que Cordus, et avoir trouvé chez eux la suggestion inspiratrice de son oeuvre. Mais il y a encore une source a laquelle Goltzius peut avoir eniprunté son idée. En 1">56 il parut un portrait d'un chirurgien de Nuremberg »Jacob Baumann Wundarzt, Seines alters lm XXX \ I .Tar, « attribué ii Vergil Solis. ') Sur cette estampe excessivement rare, qui rappelle la manière de Lautensach, et qui se trouve dans le Cabinet d'Estampes de la Bibliothèque Nationale :i Paris et dans celui de Berlin, on lit au dessous les vers suivants: Der artzt dem kranncken geordnet ist, Der darff keins artzts dem nichts gebrist, Ein artzt aber drei angesicht hat. Engelisch: so er dem kranncken rhat. So sich bessert des kranncken noth, So sieht der artzt gleich wie ein Gott. Wann nun der artzt umb lohn anspricht, Hat er ein Teitfflisch angesicht. i) Heller, Zusatze :u Ad. Bnrtseh's Le Peintre gravttr. Niirnberg 1851, p. 115, 110. Ilermanu Peters, Der Arzt und die Heilkunst in der deutschen Vergantjenheil. Leipzig 1'JOO, p. 73 Le graveur hollandais peut avoir eu des relations quelconques avee son collègue allemand. Ce n'est pas tont. On a publié en 1800 ii Augsbourg, sous le titre de Frmtula, eu vue de 1'enseignement, un recueil de proverbes latins, réunis par le docteur Sepp. L'épigramme de Cordus s'y trouve, saus que 1'auteur eii indique la provenance, raais, sous le titre de: Alter Rheimspruch, il y joint les vers suivants: Der Doktor ist ein weiser Rat, Derselbe drei Gesiehter bat: Das eines Engels: Patiënt Ersehnt, dass er die Krankheit wend'; Hilft er den Kranken aus der Not, Yerehrt man ihn wie einen Gott; Kommt er um den verdienten Lolin, Hült man ihn fur den Teufel schon. Au premier abord, 011 dirait que c'est traduit de Cordus; mais le contraire peut être vrai. Ce que le docteur Sepp nous donne ici 11'est pas 1'original; il a modernisé, en vue des écoles, une pièce composée en trés vieux allemand, et il est fort possible que Cordus 1'ait connue et qu'il 1'ait imitée dans son épigramme. Je n'ai pas pu m'informer auprès de M. Sepp de la source oü il avait trouvé ces vers, car il est mort il y a quelques années. Dans Grimmelshausen, Simplicmimtis, (environ 1640) j'ai rencontré quelque chose du même genre en ces termes: Weiss aber der HenDoctor nicht dass ein Arzt dreierlei Antlitz bat; das erste eines Engels wann ihn der Kranke ansichtig wird, das andre eines Gott es, wann er hilfft, das dritte eines Teufels, wann man gesund wird und ihn abschafft? Des détails la-dessus me sont restés inconnus. Je ne puis pas non plus indiquer 1'origine des lignes suivantes: Die Doktorens haben drei Angesicht: eines Engels, wenn sie gerufen werden; eines Gottes, wenn sie einen Kranken gesund machen; eines Teufels, wenn sie Zahlung fordern. On les trouve, sans état civil, dans Teutsche nationale Mug ausgesprochene Weisheit, durch J. W. Zinkgref (Frankfort und Leipzig 1002). Ce qui me semble peu vraisemblable, c'est que Cordus ait eu connaissance d'une traduction libre, probablement beaucoup plus jeune, en francais, reproduite par le docteur Edmond Dupouy dans son joli livre, intitulé Médecine et Mwnrs de l'ancienne Rome d'après les j oètes latins (Paris 1891). La voici: Le malade est partout un être bien étrange: S'il appelle 1111 docteur, tout d'abord c'est un ange; S'il guérit, c'est un dien; plus tard, chose incroyable! S'il aper^oit la note a payer, c'est un diable. Toutefois, il faut (lire que je n'ai pas de données certaines sur 1'ancienneté de ce quatrain, M. Dupouy ne se souvenant pas luimême oü il 1'avait pvis. Enfin je noterai que notre poète néerlandais bien connu A. Fokke Simonsz. a traité le même sujet dans son Catechismus van II etenschappen (1795), et qu'il conclut que Goltzius a représenté le sort des médecins selon la vérité; mais il vent que cela nous enseigne a nous préoccuper avant tout de 1'accomplissenient de notre devoir, et que nous ne fassions venir qu'en seconde ligne le salaire que nous en attendons. »Zij leert ons 't loon verachten En deugd en plicht betrachten". (II faut mépriser le salaire Et se contenter de bien faire). Fokke se trouve ainsi en parfaite harmonie avec 1'auteur de 1'article Déontologie dans le Dictionnaire de Médecine de Déchambre, qui terinine ses sCommandements du raédecin" par la recommandationsuivante: Des deux parts qui fonnent le monde, La richesse et la pauvreté, C'est bien souvent dans la seconde Que la fortune t'a jeté; Mais, riche ou pauvre, a 1'indigence De tes soins réserve une part; Et quand de ta noble science On te paira — füt-ce un pen tard Mesure le poids a 1'épaule; Hier bon, sois juste aujourd'hui: Tu trahirais ce doublé róle Si tu permettais que celui Dont le mal a fait la misère, En payant un trop lourd tribut, Retrouvat, par un sort contraire, La misère dans son salut. Lors, en ta vieillesse sereine, Nul trésor ne vaudra le tien, Si ton uom sur la bouche amène Ces simples mots : Homme de bien! Tout dcrnièrement pourtant un sagaee professeur d'anthropologie, il s'agit si je 11e 1110 trompe d'une université de la Corée, s'est demandé s il 11e tallait pas chereher la cause du phénomène en <; Jan van Vianen, + ijco. P*i-1 i u (r>i ronvti niT Mui/K lii m «mm *w>t*m ,« toy (Duvxfip t' « ' 1" N"»" » ■>>:«ivmh > ~ \ \ (. k. I. I S \ 1 to . C» «.»IT ii is vn.M Kl.s ^l KIMIS IJ l'NMiNANT l'K f.MIA (^1 f. VISl KI KT 1^1 4KT4 I.AIIOKM KRI NT. *»'•* * '" " » '*."-■ ■ -« ;.<- ',. *k/.,j'~?Tl." . -7'-''ZjLhJ Vn«l »*«JI' kr.inl li»il luli vn.l fchmrrl i .« l.llrn.^«n VwM.... J«r h.c .■> H««N jkrUmm** ftv««4i jp.*.. jr/»./-» .iV^f^M •f^-'—'."' - •• ''~~ *-'"'/**■*"■ v— J-yA-'l* - | KimK ,A,'i(fy.*„/«y^, . .. ...,/W,- w / ., C'"*1,r r>6M' Co.'.« «rJ^Ml , l.r -r«ilr„ (.•»,,« *.„i I.ra»^ ^.r ml w.rhr4w«t,,Wn fiügfc .-.<.„ ■*, /,/.;• ,. w, y , unJ lfv.»^;«J 4-r^. .«rrr h«lff~U.ki IW Xr I. .h ,.«.»:,c»;t5 ~-«fc Jan van Vianen, + 1700. IAMIV MACHAONIA MAül> F.T MAH> AKTE LK,VATr„s JVI l'()i' II O AA/IN (> H (» W O M»N IK l s T R \ T\M (• S .S I HN .vs » l\n«.RK> ! CtJMSÏDET AVTEFOCirMI'KoOREümrvM TUIPeS AKTA^IOZ AAA-flN". N O SC K.S . « y»fi ■JmV~r >**** jJ.VnJ w» 4»r lVt»«l w «it J.«, fir. I.U» l«j—» U .. wrr J. ..^m... U.l.l «... «,r . ...I, lillr., *hru 1 ly'to Wi» WWiyi »»/«.»>■«»>.■ fA* i/£■**.« naar m-- " *••-♦-*-» M.J..,.i„i„.|c. I- —r^+Jm mml iy —r«i>W»«wy/. ■>• li^Wfigyimi^y fjhlMy 'i/f "-" ■ 1'fUrJUW. 4«- k.w«wl>wiLUil t._li ..,h„L.„ r^fcT .{^rnTj* *wX.Cl ~n XStmÉtT. U>« —«Gfcü —1 JrAr ««4 «rwiwW. A.Wyfifc.1 tm MB >«•« ..lrbr« ül«hrn Alr.l.c 11 Jan van Vtanen, + 1700. jC^fjHHHKSKApflP'lluHM^^ffi|^4llHBB^Kfflf ^^^ffl|[H[|B|R^ jw^j«jy^ B^BSI Aar ECO Jl VMITVj UICSANI'M PKI'MU 1'OM AM YIVI'12 TE K'Al IIAIII II CAVTIOK EHMPr.O Tir HVMH01.FT ACCIVF, SO.*T*0. 1LLE 1IKU5 PHIOF.H Ml V X CAfOIJ^MdN » Ku WTI2 fll Tl' JIN ^iJ Mr.Ui(ü SXKKt'ea CHAVITXR ART 15 0*1 5 jüra>tofly-< — .iUi,tm*i*rJm*Jr-r+ >.rtl,„ /tf,-,/;. 1 Lli »bi »• »rur.l .mJ.i fJ«*iiT \ur rut TttTm <»*rht. Mi|1cIhJdi^*i(tt. IrArlNtW n*jt«r<« 'tt.JT. l: irlJ., . Or.wrJ Jrrk.-M.W^r—l «rfJuL (prrcfc »«k •»«. 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