E S S A I SUR LA MARINE, Oü Pon propofe une nouvelle conditutiort; Par M. Ie Chevalier de ***, ancien Officier de la Marine. te Noclfcr dans fon art s'inftruit pendant I'oraprc Et n'y devient expert qu'après plus d'uu naufrage. La Metromanie , aSe V. Pirov. A AMSTERDAM, 1782.   i PRÉFACE DE LÉDÏTEUK. JLj'Ouvrage que je préfente au Public eft digne de fon attention ; il n'ell di£bé par aucun moei F de haine ou de reffentiment. C'eft 1'aveu de 1'homme imparcial; le voeu du patriotimie , & 1'hommage le plus libre , rendu a la vérité. Le Chevalier de * * * , que la mort vienc d'enlever a fes amis, & a une fociété qui le chériffoit, eft 1'Aaceur de eet Eflki. Dix-huit ans d'expérience dans la Marine , oü il s'étoit acquis la réputation d'un bon Officier , 1'ont mis a même de connoitre mieux que perfonne les abus & les préjugés qui rendent fa conftitution vicieufe. II en gémifioit en filencedans la retraite qu'il s'étoit choifie. Parvenu au grade de Lieutenant de Vaiffeau, il quitta le fervice quel- a  ques années après la paix ; il fe retira, paree que la délicatefle de fa fanté , la franchife de fon cara&ere , Sc les dégoücs qui en furent la fuite, lui en firent une néceffité ; mais il ne perdit pas de vue, un feul inftant, la Marine. Les divifions de PAngleterre Sz de fes Colonies nous préfageant une guerre prochaine , on fongea a retnettre la Marine en aftivité. Le bruit de la coignée fit retentir nos chantiers ; on redoubla les préparatifs dans nos arfenaux ; on arma dans tous nos Ports : bientör Pon vit, prefque en même tenips , une efcadre a Toulon, Sc une armée navale a Breft. La première fortit, Sc les Politiques fuivirent fa marchc avec une inquiette curiofité. La feconde , deftinée a défendre nos Cötes, rencontra la Flotte anglaife, Sc accepta le combat qu'elle lui préfentoit. Si cette action ne fut pas décifive, on fe félicita du moins d'avoir tenu tête a des ennemis ac-  coutumés a nous vaincre. De nouveaux fuccès virenc juftifier nos meiures ; la Nacion commenca a prendre quelque confiance dans fes forces maritimes ; on vit avec plaifir notre commerce protégé , & nos Colonies pourvues ; on applaudit aux fages difpofitions du Miniftere, ■& renthoufiafme gagna toutes les têtes. Seul au milieu de cette effervefcence, le Chevaüer de ** * apprit tous ces efforts fans émotion , fans rien perdre de fa tranquillité ordinaire. Ses amis , étonnés , lui reprocherent ces apparences de froideur & d'indifférence ; ce fut alors qu'il leur avoua qu'il voyoit avec peine, malgré nos profpéricés, qu'on ■tabhflbit la Marine fur fes anciens principes ; c'étoit, difoit-il, élever un édifice nouveau fur de mauvais fondements : il ajouta que ceux qui avoient déja fervi deux fois a fonder la Marine étoient dëfe&ueuxjqu'elle avoit fait deux chütes, êc ou'il en prévoyoit une troifieme, dès qu'on a ij  nek rebatiflbit pas fur unebafe plus , fixe & plus folide. Trompe, fedmt | par de brillantes apparences , ie fus un de ceuxqui s'étonnerent de les preflentiments finiftres : je lui en écrivis ; il m'envoya fon Effai avec la réponfe fuivante : » Vous me demandez, mon ami, » ce que je penfe de la fituation acwtuelle de Vétat mantime de la » France ; je vous avoue que ie vois M avec une furprife mêlée d admira» tion les reffources immenfes , les M efforts étonnants que le Miniltre » habile, qui eft aujourd'hui a laJ » tête de ce département, vieiitdd to déployer. Son génie , feconde des » difpofitions favorables du Gouver» nement, a donné k la Marine deS m moyens qu'on auroit eu peine a n foupconner il y a trois ans ( i ) . „ & une confidération que les mali „ heurs de la derniere guerre lu „avoientfaitperdre. Dans 1 meen » die général qui va embraier U (i) En 1775-  v Jj nord & le midi des deux mondes, p je trouve quelaFrance joueréelle» ment le röle que fa puifTance , fon 5? étendue, fa dignité, fa prépondé% rance & fon reffentiment lui pref» crivent. Mais , puifque vous daiv gnez confulter les lumieresqu'une » vieille expérience m'a donnée fur » un élement ou j'ai pafte ma jeuv neffe , je vais , fans prétentions , vous faire part de quelques réfle» xions défmtéreffées que vous ne » trouverez pas fans jufteffe, & donc >? 1'adoption forme depuis dix ans p le plus fincere de tous les voeux h que je fais dans ma retraite pour » le bonheur de ma Patrie. n J'admire fans doute avec vous, ?j mon ami , 1'extenfion qu'on a p donnée aux forces maritimes de 'p la France ; mais je ne me laifTe b poine éblouir par eet éclat mo» mentané , fi j'ofe croire que la p puifTance de la Marine ne fauroit jj être que paffagere ou illufoire , » tant qu'on ne détruira pas les vip ces qui fe font gliffés dans fon ad-  » miniftration , tant qu'on ne eerrijm gera pas les préjugés qui la domi33 nent. Frappé de ces deux vérités, » j'ai long-ttmps réfléchi fur les obf» tacles que ces dcfauts apportent a » fon élévacion, & j'ai penfé qu'il 33 éroit de rouce néceffité d'cn chanw ger la régie & d'en réformer la 33 conftitution. Pour mettre de 1'or33 dre dans mes idéés, Sc rendre rai93 fon de mon opinion , j'ai compow fé le petit ElTai que je vous envoie » cijoint: lifez-le avec atrention , 33 Sc vous me direz enfuite , avec » franchife , fi le plan de réforma93 tion que j'y tracé ne remédié pas 33 a tous les abus dont nous a^ons t3 eu plus d'une fois occafion de rai33 fonner enfemble. Vous reconnoï33 trez aifément, je me flatte , que 33 je n'ai eu en vue que la profpérité 33 permanente de la Marine ; Sc que 33 fi je dis ma penfée fans détour , 33 je n'ai pas non plus, quelques 93 foient mes expreffions , le deffein 33 d'offenfer 1'adminiftration aétuel« le, ni de blamer les opérations du  yif » Miniftere. Te fais qu'il eft plus aifé » de recoucher les reflbrts d'une » machine compliquée a qui on a » donné depuis long-temps une im» pulfion habituelle , que de les » changer totalement: auffi je n'at» cache pas affez d'importance a yy mon projet , pour croire qu'il » puilfe opérer cette grande révoluv tion : je n'ai écrit que pour dé)■> velopper mes idéés & juttifier » mes prelTentiments. Si je pouvois » me perfuader cependant que le ij Gouvernement, fans être choqué » de la hardieffe de mes réflexions , » rendant juftice a la pureté de mes ij vues , put trouver mon travail » digne de fon attention , je m'em» prefferois de le lui offrir. En at» tendant que je Ie donne au Public, « je vous en fais dépofitaire; je vous 5? prierai, comme lui, de 1'accueil» lir avec indulgcnce , &c de ne » pas juger avec trop de févérité le 5) ftyle &c les.expremons d'un vieux n Marin plein de droiture & de fran» chife, que le bonheur de fa Patrie  v'n) yy occupe tout entier. Adieu, mon » ami, je fens que ma fanté s'arFoiyy blit tous les icurs : je crains bien » de n'avoir pas le ten ps de juger » de Fimpn mon qu'aura fait mon yy Ouvrage. Venez me voir, je vous yy expliqutrai mes intentions ; Sc fi yy la mort me furprend dans mes yy projets , vous me fi ppléerez. Je yy fuis , Sec. Sec. yy Efrectivement, le Chevalier de*** furvécut peu a cette letrre. Nous nous vimes plufieurs fois ; il me remit tous fes papiers , en me faifant promettre que je me chargerois de fédition de fon Ouvrage ; il me recommanda furtout de le bien cacher fous le mafque de Panonyme; il ne vouloit pas , difoit-il, que qui que ce fok put infulter a fa mémoire. Des circonftances dont il eft inutile de rendre compteici, en ont retardé 1'impreffion. Je le donne aujourd'hui au Public tel qu'il eft forti de fes mains ; je ne me fuis permis que d'y joindre quelques notes qui m'ont paru néceffaires.  PRÉFACE DE V AU T E V R. T JlL n'appartient qua la liberté de connoitre ia vérite & de la dire. Quiconque eft gêné 3 ou par ce qu'il doit a fes maitres , on par ce qu'il doit a fon corps , eft forcé au filence ; s'il eft fafciné par 1'efprit de parti, il ne devient que 1'organe de Terreur. Ce n'eft en effet que depuis que j'ai gouté la douceur de Tindépendance , (que je me fuis fenti la force de parler librement. Deftiné de honne heure au fervice de mer , j'adoptai toutes les opinions & les préjugés du corps oü j'étois élevé , & dont j'étois loin de foupconner Tinjuftice : ce n'a été que lorfq'ue Tage , Texpérience & les réffexions ont müri mon jugement, que fen ai connu la fauffeté. A mefure que les circonftances aiderent a me défabufer , je piis peu a peu de Téloignement pour un état pénible que ma complexion délicate m'auroit forcé de quitter plutöt fi j'avois pu le faire d'une maniere convenable. La paix de 63 vint m'en fournis  les moyens. Je me retirai dans le fein de ma familie, loin du tumulte des cótes & du vuide affreux de nos départements. C'eft dans.cette douce retraite , qu'entiérement dégagé des illufions menfongeres qui m'avoient trop féduit , j'ai examiné, de fang froid , les fuites funeftes des opinions dominantes du corps que je venois de quitter , les malheurs oü fes fautes nous avoient conduits , 1'incomprehenfible indifférence du Gouvernement , & les conféquences facheufes qu'on en pouvoit tirer pour 1'avenir. Heureufement 1'efprit de vertige &de préfomption , fuite naturelle de celui de conquéte , & compagne inféparable des fuccès éminents , s'empara de notre orgueilleufe rivale 3 tandis que nous étions engourdis fous le poids de notre propre honte. La tyrannie ne connoit que deux moyens, le fer pour enchainer, & l'or pour féduire. Le Gouvernement britannique voulut les employer tour a tour pour tromper fes Colonies , leur impofer de dures loix, & leur faire partager fans les confulter , le fardeau de la dette nationale. Remplies du fentimentdeleurs propres forces, elles s'indignerent des attemtes que Ton portoit a leurs chartres, & prirent la noble réfolution d'ob-  V tenïr par la réfiftance ce que les repréfentations les plus fages n'avoient pu gagn?r. Les premiers bruits de cette grande qnerellt nous retirerent dePallbupiffement oü nous étions piongés. Attentif a faifir les occafions qui s'ofFriroient de réparer fes pertes & de prendre fa revanche , le Miniftere concut enfin 1'efpoir de tirer parti d£ cette méfintelligence : il fentitque la Marine devoit jouer le plus grand töie dans cette occafion ; il s'appliqua a monter la notre fur un pied qui infpira de la confiance aux infurgents Américams ; il fe repentit , mais trop tard , de 1'avoir négligé. Dans le laps de temps qui s'étoit écoulé depuis la fignature du Traité de Verfailles, jufqu'au moment oü 1'on jetta les yeux fur elle , la Marine ne s'étoit occupée quaaffermir fon indépendance, oü a Jutter contre un Miniftre entreprenant qui avoit voulu 1'affervir. Son fuccefleur, en la comblant de graces , lui fit trop appercevoir le befoin qu'on croyoit avoir de la ménager : fon génie qui s'étoit diftingué dans une autre carrière , n'ofa pas entreprendre de parcourir celle-ci fans guides ; il eut Tadrefle de les choifir dans la Marine même, pour avoir l'air de ne fuivre que fon impulfion, & pour fe mé-;  nager une excufe contre les revers qu'il n'eüt pas pu évirer ou prévoir. Un voic aujourd'hui, avec étonnement, 1'état de fplendeur oü il 1'a monté, les moyens qu'il lui a procurés : 1'Europe entiere en eft furprife. La puifTance de la Marine actuelle nous rappelle les beaux jours du fiecle de Louis XIV : mais celle que ce Monarque avoit créée , renfermoit dans fa conftitution des vices qui Panéantirent; celle-ci nourritdes préjugés qui lui préparent le même fort Le plan de réformation que je viens offrir dans eet Bffai peut 1'en préferver: il eft tracé d'après ma propre expérience „ & vingt ans d'obfervrtions. Jc fais qu'il n'eft pas fans difficulté. La première, Pourquoi forcer des individus, dont les penchants & la facon de penfer fontfouventincompatibles'„a vivreéternellement enfemble ? Je réponds qu'avec de la douceur, de 1'honnêteté, & une cducation foignée , on fe procure partout une exiftence fnpportable. D'ailleurs, en y mêlant cbacun un peu du fien, en fe prêtant aux défauts comme aux fantaifies des autres, on obtient la même mdulgence pour les fiens. Enfin. il en eft des fociétés comme des bonnes tables , qui ne font excellentes que quand elles peuvent fatisfaire a tous les goüts ; il faut, tout fervice a part, que la liberté  en loit le fond , que 1'enjoué y délaffè le férieux, que le férieux ne rebute point 1'enjoué , que les égards s'y excitenc les uns les autres , que la complaifance ne foit ni exigée ni tardive , que le devoir de s'y rendre de bons offices ne foit ni lent ni infpiré , que 1'intérêt perfonnel ne foit ni trop dominant dans les uns ni trop facrifié dans les autres ; en un mot, il faut que tout y foit fi bien mefuré, que de 1'attenfion générale il réfulte un tout impénctrable a Phumeur , a la jaloufie , au dégout, a 1'ennui; & alors une telle fociété fera fi unie & fi heureufe 3 que les individus qui la compoferont,, ne craindront rien tant que de s'en voir féparés. C'eft en fe formant fur ce modele , &en perfiftant dans ces difpofitions, que les membres d'un Etat-Major fe montreront d'un commerce facile , s'uniront par des procédés réciproques : c'eft en partant de ces principes qu'il s'établira de lui-même entre eux un efprit de corps qui leur fera particulier , & en mêmetemps le meilleur & le plus avantageux pour la jeunefle qui viendra fe préfenter en foule pour y être admife. Cette école fera bien différente de ce qu'elle eft aujourd'hui : on n'y puifera plus eet efprit d'orgueil & d'infubordination qui rend  Ia Marine fi etrangere a tous les autres corps : on n'y verra plus ces ménagements exceflifs , cette indulgence pernicieufe pour des fautes que la foibleffe cache , Pautorité diffimule , & 1'impunité rend plus graves. Dès qu'un jeune homme ne répondroit pas a 1'opinion qu'on fe feroit formée de fon caractere , aux foins que fa familie s'eft donnés pour lui , a Pefpoir qu'eile en avoit concu en le voyant placé ; dès que 1'Etat-Major qui a bien voulu 1'accueillir, de préférence , s'appercevroit que fes penchants vicieux font plus forts que les moyens qu'on emploie pour le corriger , il feroit renvoyé fur le champ , fans écouter ni refpect humain, ni confidération, ni aucuns de ces petits prétextes quelavanitédeguife. Ce préjugé d'orgueil qu'on a fi mal défini n'eft pas le feul dont on accufe la Marine : on lui reproche, avec bien plus d'aigreur, cette jaloufie envieufe , inquiette, fi attentive a fermer la porte au mérite qui cherche a percer , ou k dégoüter, fans relache , celui quia fu parvenirmalgré elle Et cependant de tous les préjugés' c'ett le plus excufable, puifque le Gouvernement lui-même femble 1'autorifer. En effet, qne  xvij que fïgnifie cette dïfFérence entre le Port & la Marine ? Comment fe fait-il qu'on foit. du même corps fans en être , qu'on participe aux mêmes privileges , qu'on prétende aux mêmes honneurs , fans jouir des mêmes confidérations f A quoi fervent ces grades intermédiaires , qui ne femblent établis que pour rendre ceux qui les occupent aujourd'hui fupérieurs & demain fubordonnés ? Pourquoi ces deux chemins pourparvenir au même but ? Je compare 1'un a un fentier détourné, rocailleux & pénible, bordé de ronces & d'épines , qui mene lentement a confidérer de loin une éminence prefqu'inacceihble, tandis que 1'autre me :>arok une grande route aifée , fleurie , ;n pente , tracéea cötépour y conduire e grand corps a toute bride. Cette biïarrerie de 1'ordonnance n'eft pas unö des moins curieufes de celles que 1'on trouve au cliapitre des contradictions humaines. N'eft-elle pasune nouvelle preuve de la condefcendance du Miniftere pour cette vanité infoutenable qui fe reproduit fans cefTe fous mille formes différentes ? Plus on la careffe , plus on larend chatouilleufe fur ces diftinctions. Pourquoi craindrions-nous de le dire ? Ce ne font pas des titres que le métier. b  xviij de la mer exige: c'eft un coup-d'ceil jufte & exercé de la honne volonté, de 1'application, & une conftitutionfaine & robufte, Onarebutéla roture, ou, pour mieux dire, on lui a fixé une route exclufive, & on ne s'eft pasappercu qu'on s'eft privé par-la de bien des reffources. II n'eft pas commun de trouver réunis dans un même fujet, a un degré éminent , les qualités qui conftituent le grand marin, ni le concours heureux des circonfrances qui les développent. En écartant la concurrence,, on s'interdit la faculté du choix, on ferme la barrière au mérite, & on éteint toute émulation. Quand je ▼ois un homme né dans 1'obfcurité, & qui a parcouru 1'efpace qui fe trouvoit entre fa naiflance & les dignités dontil eft revêtu; qui eft parvenu, malgré les ehemins tortueux qu'il a rencontrés, fans d'autres guides que fon devoir 3 fans autre appui que fon mérite ; quand j'appercois , dis-je , un homme tel que je le dépeins , jene puis m'empêcher de 1'admirer, & de penfer, avec tous les gens fenfés , qu'il peut fe montrer ave confiance ; que tous les yeux voleront a fon paffage; qu'on s'empreffera de 1'aprocher ; qu'il verra tous les égards lui an«oncer fes dignités ; tous les refpecls,  xïx fon élévation; & qu'il n'y aura [que la médiocrité , 1'envie ou la baffe, qui puiffent lui refufer fon fufFrage &fes applaudifTements. Mais il faut être dégagé de tout efprit de corps pour rendre juftice au mérite modefte , & lui pardonner la préférence qui 1'a fait paffer avant nous. C'eft un effbrt de 1'amour-propre qui eft bien rare ! Inventée par lui, 1'ancienneté du tableau eft une borne al'intrigue , un obftacle a la faveur, j'en conviens : on m'accordera aufll que fa lenteur étouffe les talents , rebute le génie , & affoupic 1'émulation. Je circonfcris cette loi d'ancienneté dans un cercle, pour affoiblir fon acHon , ouvrir une carrière plus vafte a Pambition , rendre plus faillant le mérite , &fournir a 1'ceii éclairé du miniftere les moyens de les diftinguer & de le placer plus avantageufement. Si mon proiet tend a ce but, on m'avouera qu'il eft auffilouable que mes intentionsfontpures. Je ne m'arrêterai pas a le prouver, ni a développer fes avantages; c'eft au Lecteur judicieux , qui a plus d'une fois fenti les maux que je cherche a guérir , a prononcer fur 1'efficacité de mes remedes. Peut-étre plus de précifion & de méthode , la magie d'un ftyle brillant les eut fait valoir; mais on fait afiez que la mer n'eft pas le champ de 1'éloquence; ce  XX n'eft pas an milieu de fes écueils qu'ofï acquiert ce gout , cette heureufe facilité de bien exprimer tout ce qu'on veut dire. J'ai même fi peu de prétentions a eet égard, que je ne crains pas de prévenir ici,pour éviter tout reproche férieux, que j'ai fait ufage de tout ce qui a paru me convenir ; que je me fuis approprié le ftyle, & même les expreffions d'autrui, quand j'ai trouvé qu'elles rendoient parfaitement ma penfée; qu'elles lui prêtoient même de la force & de 1'énergie ; en un mot, quand j'ai fenti que je ne 1'aurois pas fi bien énoncé. Que m'importe, en effet, qu'on applaudifle a la puretéde ma diction, pourvu qu'on examine attentivement mon fyftême,qn'on engoüte 1'utilité , & qu'on applaudifle au motif qui m'anime. Ce n'eft pas le defir de mediftinguer qui m'a fait prendre la plume, j'ai votilu rendre un hommage pnblique a la vérité, montrer le chemin qui doit y conduire , faire connoitre enfin 1'abus des préjugés qui nuifent ala profpérité de la Marinej & encoreplus a fagloire. Simon projet n'eft pas approuvé,il rentreradans lafoulede ces productions éphé- meres qu'enfantent le loilir , & qui n'ont pas toujours un but fi fage: je croirai que le moment n'eft' pas encore venu; & s'ildoit venir, je 1'attendrai enfilence,  E S S A I SUR LAJMEARINB» INTRODUCTION. JS.L eft trifte d'imaginer que le premier art qu'aient inventé les hommes , ait e'te celui de fe nuire ; & que , depuis le commencement des fiecles , on ait combine' plus de moyens pour détruire 1'humanite', que pour la rendre heureufe. C'eft cependant une ve'rite' bien prouvée par l'hiftoire. Les paffions naquirent avec le monde; elles enfanterent la guerre : celle-ci produifit le defir de vaincre , & de fe nuire avec plus de fuccès, 1'art militaire enfin. Dabord foible dans fa naiffance, il ne fut d'homme a homme que le talent de tirer parti de fon adrelTe & de fa force. Borne' enfuite entre les families & les hordes fauvages qui s'avoifinoient, il fe contenta de porter la dtfolation chez 1'habitant üe la même contre'e, de la même rive j de lui difputer  (11) des troupeaux éleves dans de plus gras paturages, une fituation plus heureufe , plus abondante en gibiers. Bientöt il s'e'tendit en lübjugant tout ce qui 1'approchoit; combina plus de moyens & plus de forces, & raiïembla une plus grande quantite' d'hommes. Il s'e'leva fur la terre des ambitieux qui fe trouverent trop reflerres dans les limites que la nature leur avoit prefcrites : la mer e'toit une barrière a leur ambition ; ils entreprirent de 1'affranchir : les bateaux, les frêles barques qui n'avoient d'abord fervi qu'a pafTer les rivieres les plus larges , les neuves les plus rapides , les lacs de quelque étendue , devinrent, en leurs mains , les moyens de porter la delïruction fur les rivages les plus e'loigne's de leurs propres foyers. Les premiers qui 1'oferent, furprenant des peuples fans dtfenfe , ne rencontrerent aucune oppofition. Cette te'mérité leur valut les plus prompts fuccès; ils s'en retournerent charge's de butin. Revenus de leur première terreur , les peuples viöimes d'une innocente fe'curité, fentirent qu'il falloit fe tenir fur leurs gardes : ils crurent d'abord qu'il valoit mieux attendre 1'ennemi de pied ferme , que d'aller , au travers des mers , a fa rencontre ; ainfi les Troyens n'oppoferent aucunes flottes a 1'arme'e combine'e des Grecs. Quelques peuplades, fixtes fur les bords de la mer dans une pofition avantageufe , mais fijr un fol ingrat, connurent les premiers  1 J , • les avantages de la navigation & du commerce maritime. L'induftrie , toujours fille de la néceflité leur apprit de bonne heure les profits des e'changes multipliés: ils furent mettre a contribution le luxe des grands peuples , pour fe procurer les fubftance de premier beloin que leur lol aride leur refufoit; & , par un efFort ingénieux, ils trouverent bientöt, dans leurs propres manufaftures , les objets les plus precieux de ces tchanges. Ainfi, la belle pourpre de Tyr ennchit cette Ville induftrieufè: bientöt fon commerce s'e'tendit dans tout le monde connu ; fes vaifl'eaux allerent aborder fur les rivages les plus e'loignés , fur des cótes qu'on croyoit de'fertes , inacceffibles; fes flottes mêmes fervirent 1'ambition des Souverains les plus puiflants fonderent des Colonies lointaines. Mais le luxe & 1'abus des richeffës ramollirent fes habitants , & pre'parerent de loin leur défaite: d'ailleurs, leurs propres Colonies devmrent leurs rivales, difputerent a la Metropole 1'empire de Neptune , en établiflant la concurence; & ce choc d'inte'rêt fur 1'origine des premiers combats fur mer. ^ Les grands Souverains fe lafTerent bientöt d'avoir a leur folde les flottes de ces ipeuples marins; ils volurent en acque'rir la jpropritté ; ils fonderent des établiflements jmantimes, ou fubj'uguerent les peuples qui les avoientfondes. Tous regarderent comme  un avantage la proximite de la mer ; tous ceux qui en jouiffoient fe haterent de conftruire des flottes: on diftinguoit déja les batiments pour la guere, & ceux pour le commerce. Les ifles d'une certaine e'tendue , ne pouvant communiquer avec les auties peuples qu'en fe hafardant fur eet element, fournirent les premiers navigateurs , & eurent un commerce maritime plus ancien & plus confidérable. Leur induftrie fe tourna entie'rement vers la mer. De-la cette rivalite' qui divifa fi long-temps les re'publiques de la Grece & de la Sicile , & alluma la guerre du Péloponefe :. de-la cette haine opiniatre entre Rome & Carthage , qui fé manifefta avec tant d'animofité , & ne finit que par la deftruftion de cette derniere : de-la enfin eet efprit de politique, cette jaloufie , ce defir d'envahir tout le commerce maritime qui fait mouvoir tous les reflorts du Gouvernement anglais. Ses pavillons flottent fur toutes les parties du globe : il pre'tend a la fouverainete' des mers; mais il touche a fa de'cadence , ou du moins il t'puife fes dernieres reflTources ; & la fe'paration de fes Colonies va les diminuer pour 1'avenir. Bien-tót re'duit a fes propres forces , il fera oblige' de re'gler fes efforts fur fes moyens. C'eft cette jufte proportion que la France ne doit jamais perdre de vue. Nous trouvons dans le fiecle paffe' des preuves de ce que j'avance. L'ambition  L'ambition de Louis XIV ayant a Jutter l h ibis contre les deux Puiflances maritimes les plus redoutables , 1'Angleterre & Ja Hollande, il fallut faire des effbrts inouis pour leur tenir tête. Son gt'nie qui ne connoifioit point d'obftacle, & qui favoitanimer Ie courage par les rt'compenfes & les diftinctions, fit des chofes incroyables. U falloit avoir une Marine a leur oppofer; il 1'a cre'a, & bientöt elle e'gala cefle de 'fes ennemis. Il eut des efcadres nombreufes bien arme'es & bien conduites, qui lui don' nerent des fuccès e'phemeres. Ses profptrite's ayant excité la jaloufie, & caufe de Pombrage a toutes les Puiflances de l'£u_ rope, la conft'de'ration devint ge'nc'rale. Attaque' de tous cötc's, il eut a dt'fendre, a la fois, fes frontieres, fes cötes & fes colonies ; il mit tout fon Rovaume fur pied; il epuifa la France dans le temps de fes' viöoires , & la mit, daas fes malheurs k deux doigts de fa perte. Tourville neput, avecquarante vaiFeaux de ligne, faire face aux flottes combine'es d'Angleterre & de Hollande, plus fortes que lui du doublé. Pour n'avoir pas eu un Port ou faire fa retraite , il perdit la plus grande partie de fon armee navale. La defaite de la Hogue fut le coup de erace donne' a la Marine de France. Re'duit a nous dt'fendre, par terre, dans la guerre de la fucceflion , on perdit de vue la Marine. Elle fut abandonnée; Sc, fous le regne iüiyant C  (*) le Miniftre fage & timide qui tenoit le tinton de 1'Etat, traita la France comme un malade convalefcent qui a befoin de recouvrer, par le repos, fes forces abatues. II nt'gligea la Marine ; il ofa même penfer que la France pouvoit s'en pafTer. Ce funefte préjuge' trouva trop de créance, & s'établit contre les principes de la plus faine politique. Les malheurs de la guerre derniere ont fait abjurer cette erreur. Le Gouvernement paroit perfuadé aujourd'hui qu'il nous faut une Marine puiffante ; mais c'eft dans le re'gime de fa conftitution , bien plus que dans le facrifice que 1'Etat eft dilpofé a faire pour elle, qu'il faut lui trouver un folide appui. Il n'eft pas ne'ceffaire de lui donner tout a coup un accroiflementgigantefque; il doit être progreffif, & proportionnt' aux befoins de 1'Etat. Il fufRt qu'il puiffe lui fervir de contre-poids dans'la balance de 1'Europe. Ce n'eft pas qu'il faille entie'rement attribuer au fyftême d'e'quilibre forme' du choc des intéréts des Puiflances europtennes , cette vigilance actuelle de tous les peuples fur les démarches de leurs voiflns, cette correfpondance de toutes les Cours , 1'efpece d'impoffibilité ou lont les Nations de s'étendre & de fe conquérir (i); elle pro- ( i ) Il ne faut pas citer l'envahiflement de la Polognc comme un fait contradictoire a ce que j'avancc  tjent pJutot de ce qu'aucune de ces Nations n'eft fupérieure aux autres par fes niceurs & fa conftitution ; de ce qu'elles fbnt toutes contenues dans leur fphere , par la foibleffe & la reflemblance de leurs Gouvernements. Examinons maintenant fi l'adminiftration de la Marine re'pond a 1'intention du Miniftere, a 1'efpoir du Gouvernement, & aux dépenfes qu'il fait pour elle. Son dtbut prouve a tous les yeux qui font ouverts fur fa conduite, que dans les occafions ou les circonftances ne fe font pas montre'es contraires, elle a fait voir un courage & une audace vraiment héroïque. Les combats de la Belle-Poule , du Triton , de la Surveillante , de VOifeau, de la Concorde & de la Capricieufe ; les avantages remportcs fur Byton , Hyde-Parker & Rodney, font des Faits qui aunoncent ce dont elle eft capable ; mais en admirant, avec toute la France' ces preuves d'une valeur qu'on n'a jamais contefte'e , s'enfuit-il qu'on "doive applaudir aux malheureux pre'juge's qui la gouvernent ? Examinez de pres ce corps puiffaht, & vous verrez 1'intérét particulier pre'valanc fur le bien gtnéral; une balie jaloufie excite'e par des lüccès dont on devroit fe re'iouir • ici. Ce n'eft pas une fculc Nation qui s'aggrandit par fes conquêres , par fes propres forecs ; c'eft la confédération de trois Puiflances qui s'cntendcnt pour ea dépouiller une quatricme. C 2  un préjugé d'orgueil le plus ridicule & le plus mal entendu , étouffant 1'ambition des fous-ordres a qui il ne laiffe aucune perfpedive confolante ; le mépris prodigué , fans diftinaion , a des fujets que le Gouvernement force , fans choix , a venir 1'effuyer; 1'aviliffement offert en partage a ces mêmes hommes , paree qu'ils n'ont que des lumieres fans naiffar.ee , ou paree que 1'Etat a cru avoir befoin de ces lumieres ; le nom même d'Officiers auxiliaires dont il les a honorés, devenu prefqu'une qualification dtshonorante ( i ) ; les claffes épuifées pour n'avoir pas lü ménager par les foins de la propreté (i) , &c d'autres petits détails; la (i ) Ricn de fi bien vu & de fi mal exécuté que l'emploi de ces officiers auxiliaires. Pour n'avoir pas donné aux premiers qui fe font offerts un encouragetnent néceffaire ou un rang diftinguü , fondé fur de ïuftes prétentions desavantages certainspour 1'avenir, des exemotions , des prérogatives , on a manqué le but d'un établiflement dont on pouvoit attendrc les plus Jieur.-ux effets ; ceux dont les connoiflances , les lumieres & 1'éducation formoient autant de titres pour obtcnir ia préférence , fe font rctirés , ou ont été détournés 'de s'offrir , paree qu'unc jufte compenfation des tnépris ridicules qu'on affefle pour eux leur a été refufée. Si un Officier qui auroitbicn fervi toute la guerre dvóit eu la perfpective afiurée de jouir de quelqucs privileges , comme celui de porter 1'uniforme toute fa Vie , ou d'être fouftrait au defpotifme du Commiffaire aux Clafles , ou d'obtenir enfin quclqu'autre tfpece de confidération , 1'Etat auroit trouvé , fans nombre, des fujets diftingués , en place de ceux qu'on a forcés a vcriir dévorer des affrouts iournalicrs. (ï) On a vu un vaifTeau , forti avec 1'cfcadre du Comse ds Guichen, rentrer , après quinze jours de  (9) fanté de ces hommes pre'cieux a 1'Etat, Et cu'on ne confidere point aflez. Tel eft le tableau que pre'fente 1'efprit de Corps, & la re'gie de cette Marine qui Ce montre fi vaine. Fatigue' de tant de maux , e'tonnt' de tant de petitefles , fi 1'homme d't'tat, fi le philofophe trouve a repofer fa vue fur des objets plus confolants , c'eft fur les ve'rites morales & politiques que je viens lui bffrir, qui , filtrant lentement a travers les erreurs & les pre'juge's , fe de'velopperont peu k peu ; parviendront peut-être un jour aux hommes principaux des Nations; s'alTeyeront fur les trónes , & rendront la Marine de la pofte'rite' plus heureufe & plus redoutable. J'ai dit que le vice de la conftitution maritime étoit par-tout le même a-peu-près ; que les Gouvernements qui fe difputent le trident de Neptune , fe reflembloient tous en un point. D'ou vient cela ? C'eft que la corruption , faifant par-tcut a-peu-près les mêmes progrès , les mine tous , & les afFoiblit plus ou moins. mer , avec foixantc hommes fur les cadres , clont il ent avoit jetté dix k douze a la mer ; & cela , par une contasion occafionnée par la mai-proprecé. L'cntrepouc étoit couvert d'un pouce d'ordure ci'oü s'exhaloient des miafmes putrideJ , infeftants , capablcs dc produire la pefte. On lui refit fon équipage : des hommes trèsfains , traufportés a bord de ce vaifleau , y tomboicne maladcs deiix jours après , & étoient remplacés par d'autrcs qui y attendoient le m5me fort. Ce vaifleau auroit du être ncttoyé , parfumé , lavé avec du vinai-« gte touillant.  (10) Que refulte-t-il , en effet, aujourdliui de nosguerres maritimes ? LesÉtats n'ont ni tréfors , ni excédent de population; leurs de'penfes de paix font dt'ja au-deflus de leurs recettes : cependant on fe déclare la guerxe ; on met des efcadres en mer; la cupidité equipe des Corfaires ; les premiers prêts font les plus heureux; on entre en campagne avec des arme'es navales qu'on ne peut ni payer ni recruter. Vainqueur ou vaincu, on s't'puife a-peu-près e'galement; la maffe des dettes nationales s'accroit; le credit baiffe ; 1'argent manque ; les flottes ne trouvent plus ni de matelots, ni de foldats ; les Miniflres, de part & d'autre , fentent qu'il efl temps de négocier , la paix lè fait; quelques Colonies changent de maitre ; la fource des querelles ne tarit jamais ; £c chacun refte aflis fur lés dtbris , occupé des moyens de payer fes dettes & k aiguifer fes armes. Dans cette trifte fituation, quel doit étre le but de la politique des peuples ? Celui de fe fortifier au-dedans , plutót que de chercher k s't'tendre au dehors; de refferrer les reflbrts d'une conftitution maritime , trop foible & mal entendue; de porter au plus haut point de perfcftion toutes les parties de fon adminiftration ; d'augmenter fa vigueur & fa puiffance, en faifant germer dans Ion fein les vertus & 1'tmulation du patriotifme : de reöifier les idees des marins , en leur inlpirant un elprit de corps  (»), . . tout différent de celui qui les amme aujourd'hui. S'il eft une Nation , fur toutes, a laquelle convienne cette fage réformation , & qui doive fe hater de 1'embrafler, c'eft la mienne, qui, heureufement aflife au milieu de ï'Europe , fous la plus belle température, fur leYol leplus généralement fertile , entourée prefque par-tout de limites que la nature femble avoir pofées , peut-être afTez puiflante pour n'avoir rien a redouter de fes voifins : c'eft la mienne , paree que , fi j'ofe le dire, c'eft cèlle dont la conftitution maritime a déchu avec le plus de rapidité. On me dira peut-être , trompé par 1'afpeót impofant de nos flottes , que , bien loin de décheoir les grands moyens qu'elle vient de déployer , annoncent fa vigueur , & que fon augmentation annuelle doit raflurer fur fa décadence. Je conviens que la France vient de faire de puiflants effbrts: on les doit, je le répete, a Phabileté du miniftere de la Marine , aux vues du Gouvernement, qui fe porte , depuis quelques temps, fur cette partie importante a la guerre aétuelle ; mais je ne me laifle point éblouir par eet éclat momentané. La profpérité de la Marine , j'ofe encore le dire , n'eft que paffagere; & ne fera qu'illufoire , tant qu'on ne changera pas la majeure partie de fon régime , tant qu'on ne détruira pas les vices de fon adminiftration, tant qu'on ne corrigera pas les préjugés qui  Ja domment. La Marine eft un Corps trop puiffant qui nourrit dans fon fein , par-toiu ce qui n'eft pas elle, une averfion & un orgueil deftruéteur de toute e'mulation & de tout encouragement (i). Une caufe qui , dans notre Gouvernement , contribue encore a rendre Padmirrif-. tration de Ia Marine fi imparfaite ,-c'eft Ia mobilite' continuelle des Miniftres. Eh ! comment les lumieres pourroient-elles s'y perpt'tuer & s'y e'tendre ? L'intrigue , trop louvent ; le hafard, quelquefbis, placenc & dt'placent les Miniftres. Eleve's a ces (i ) En attaquant, avec tant de force 1'cfprit enVieux & jaloux , lorgucil intolérable de ce grand corps , je rends juftice a plufieurs des individus qui le compofent; il en eft , fans doute , parmi ceux qui onc des connoiflanccs fupérieures , & qui ont donné des preuves des plus grands talents ; il en eft même , mais en tres-petit nombre , qui ne font pas infeftés de ces hontcux préjugés qui aviliflent & déshonorent un corps compofé prefqu'cn entier de cc quïl y a demieux dans le Royaume ; mais ces opinions exclufives regnent avco tant de defpotifme , qu'ils n'ofent montrer puhljquetnent leur facon de penfer ; ils fe contentent de "emir dans le filence de ce ridicule travers , qui prend fa fource , non dans la crainte de fe voir rrop facilcmenc éclipfé , mais de fe trouver trop confondu. On en voit quclqucs-uns rougir.dans le particulier, de cette bafle vanité , & avouer de bonne foi que cette tache fait un tort mfini a la Marine. C'eft fur-tout a Toulon que 1'on trouve de ces Officiers plus juftcs & plus véritablement cenfés , c'eft une juftice qu'on doit en général a ce Departement : ou y rencontre plus dhonnêtcté & de politeflc , plus de cette urhanité qui diflinguc la Narjon francaife. J'cn ai cönnu dont on difoit pour éloge il ne montrc d'efpm de fon corps , que ce qu'il en fius .gom n ine pas dwfté,  .. . (13) poftes, il faut qu'ils s'occupent des moyens de s'y maintenir, avant de fonger a les remplir ; & il ne reile aux mieux intenrionne's , fatigués par les cabales, rebute's par les obftacles, ni le temps , ni la force de corriger les abus qu'ils appercoivent dans lladminiftration. Chaque Miniftre , chaque fyftéme nouveau ; tous, flatte's de la confiance du Ma.tre , veulent y re'pondre , cherchent le bien ; 1'un penfe y arriver par la re'forme , il 1'annonce ; alors les brigues des courtifans, les clameurs d'un corps trop redoute , fans doute , viennent arrêter fes projets ; un ordre furpris au Monarque les ane'antit; ou s'il s'efforce de tenir tete k 1'orage , un revers des e've'nements qui 1'ont maitrife' vient achever fa difgrace : 1'autre croit y atteindre par une voie plus fure ; il entre dans les ide'es du Corps ; prodigue les graces; ne refufe rien de ce qu'on Tui demande ; difpenfe , d'une main libérale , les croix , les dignite's , les penfions , les honneurs , & penfe s'attirer par fes bienfaits la bienveillance & 1'appui d'un corps trop puiffant. Il fe trompe , il n'oblige que des ingrats qui regardent les re'compenfes prémature'es qu'il leur accorde , comme des chofes dues & méritées depuis long-temps. Mais en accordant au Miniftre parvenu a s'afFermir dans cette place orageufe & difficile, les lumieres les plus e'tendues , Ie génie le plus tranfcendant, il eft homme ; & fut-il conlbmmé dans le métier , ce qui  (r4) eft bien rare , il ne peut tout y.oir par lurméme ; il faut qu'il procédé avec ordre dans une machine fi compliquée , qu'il fe forme un plan, des principes; qu'il acquiert des connoiffances que 1'expt'rience feule peut donner , ou qu'il y fupple'e par des confeils, Afbrs , fi nn ne 1'e'gare , on le maitrife ; il eft lubjugé par ceux des lumieres de qui il croit avoir befoin; les graces, les diitinctions, qui font la vraie récompenfe du courage , en découlant de lés mains, ne paffent plus que par celles de ceux quil'ont affervi: alors plus d'efpoir, plus d'avancements, plus o'honneurs pour ceux qui n'ont pas paffe' par les formes prefcrites au tableau; ou fi quelquefois les yeux percants, fes bienfaits vont chercher , malgré des infinuations contraire^.' le mérite obfcur & fans appui, on crie a 1'injuftice , on murmure, & 1'objet de cette diftinótion flatteufe devient celui de la haine & d'un reffentiment t'ternel. De-la ces dégouts que perfonne n'a le courage de furmonter ; un engourdiffement du zele le plus vif; & les humiliations auxquelles doivent s'attendre les intrus (i), ou ceux quiafpirent ( i ) On nornmc ainfi ceux qui , malgré tous les cbftacles & les dégoüts qu'on leur oppofe d'un grade intermédiaire , percent dans le grand corps. Quoiqu'ils foient nombreux , la haine qu'on leur a vouée eft éternelle, & trouve de remps en temps les moyens de fe faire fentir. Uu d eux , parvenu a quarantc-fept ans au grade de Capitaine de vaiffcau , vient de moulir du diagrin des perfécutions qu'on lui a fait foufInr. Le Miniflre avoit coiifié a fon expérience une  (ij) a I être; ces obftacles enfin que rencontrent ceux qu'une noble ambition conduit un peu tard , mais avec des lumieres acquifes, par Texperience, dans la cariere maritime. Commenttant de perlè'cutions neglaceroient-elles pas le defir le plus opiniatre ? Quel remede apporter a un de'couragement figénéral ? Les lieux d'ou il pourroit venir font le foyer du mal. Cependant une circonftance heureufe , un gt'nie que rien n't tonne, peuvent amener une re'volution favorable : c'eft a la politique a en profiter ; a 1'autorite', k la feconder puiflamment. La politique eft , felon mes ide'es , 1'art de gouverner les peuples; & fous ce vafte point de vue, c'eft la fcience la plus intcrelfante qui exifte : elle doit avoir pour objet de rendre frégatc ncuve , conftruite fous fes yeux , & lui avoic accordé mif miffion particuliere , oufon courage-auroit furement fait parler de lui. La Marine 1'a fu ; on a retardé fon départ fous différents prétextes ; on Ta même leurré d'unc miffion honorablc ; & tandis qu'on 1'amufoit de bel'es paroles , on travailloit fous main a le deiTervir auprès du Miniftre , en citant, comme une preuve de fon incapacité , la féparation de deux chétivcs barqnes d'un convoi qu'il efcortoit ; événernent qu'on devoit imputer a la mauvaife manoeuvre des Cabotcurs, & qu'il ne pouvoit empêcher. Dès qu'on fut für que 1'inculpation avoit produit fon cffet, & que la bonne volonté du Miniftre étoit refroidie , on lui êta , fous le prétexte de 1'utilité du fervice , un Equipage inftruit qu'il avoit formé , & on le laifla tout 1 hivcr dans l'inaéh'on , au grand ree;rct de fes Officiers , qui s'étoient volontairement engagés fous fes ordres , paree qu'ils connoifloient font expériencej fa capacité & fon caraftctCt  ( 16 ) Une Nation heureufe au-dedans, & de la faire refpecter au dehors; de-la elle fe divife naturellement enpolitique inférieure &politique extérieure. La première fert de bafe k la feconde. Tout ce qui contribue au bonheur & a la puifance d'un Etat, eft cle fon reffort: loix, mceurs, coutumes, pre'juge's, efprit national, juftice, police, population, agriculture, commerce, marine , revenus de la Nation, dépences du Gouvernement, impöts, application de leur produit. Tous ces objets doivent étre vus par elle avec génie & réflexions; elle doit s'élever au-deftus d'eux pour appercevoirles rapports généraux & Tinfluence qui les lient les uns aux auxtres, s'en rapprocher enfuite pour les obferver, en fuivre les détails , ne s'occuper d'aucuns exclufivement aux autres; paree qu'en politique , ce qui fait fieurir trop ou trop peu une branche, épuife & fait languir le rameau voifin, ou une autre branche éloignée ; il faut, en un mot, qu'elle conduife de front toutes les parties de 1'adminiftration. Mais tandis que la politique intérieure prépare ainfi, 6k perfefticnae tous les moyens dudedans, la politique extérieure examine ce que le rtfiiltat de ces moyens peut lui donner de force & de confidération au dehors & elle détermine fur cela fon fyftême. Pour ne parler que de la branche que nous embraflbns , la conftitution maritime de la France , c'eft k cette politique a mefurer fa puifTance au befoin que 1'Etat peut avoir d'en. impofer k fes voifins, & de donner du poids  a les negociations; c'elt a elle h calculer fes forces maritimes fur les intéréts re'els, les alliances, ou liaifbns utiles que dióte la pofition topographique, ou les avantages des contraóïants. C'eft a la politique intérieure a conftituer fes forces,fa forme &fon organifation, relatativement au génie & aux moyens de le Nation j de la conftituer fur-tout de maniere qu'elle ne foit pas au-deflbus de ces moyens, paree qu'alors elle épüHe 1'Etat & ne luidonnequ'une puifTance factice & ruineufe , une confidération pafTagere , comme on a vu fous le fiecle de Louis XIV (r). ( i ) L'Abbé Raynal étoit fï convaincu de cette vérité , qu'il s'eft attiré cie Voltaire ccttc vivc fortie : » 3c lis dans 1'Hiftoire philofophique & politique » du commerce des Europécns dans les deux Indes , » tom. 4 , pag. 66, qu'on eft foudé a croirc que Louis » XIV n'eut de vaifTeaux que pour fixer fur lui 1'ad•> miration de 1'Europe & pour clütier Géncs & Alger. «> C'eft écrire , c'eft jugcr au hafard ; c'eft contredire » la vérité avec ignorance ; c'eft infulter Louis XIV » fans raifon. Ce Monarque avoit cent vaiifeaux de » ligne & foixantc miile matelots dès 1'an 1678 , Sc s> le bombardement eft de 1684 ». J'cn conclus qu'il y a jufte un fiecle que nous étions V-peu-près auri puiffants , par mer , que nous le fommes auj-ourd'hui ; mais cela n'empêche pas de penfer , avec 1'Abbé Raynal , que les efforts étonnants que ï-.ous avons déployés dans ces temps-la , ne nous parolflcnt aujoHrd'hui n'avoir eu d'autre but que de fe montrer un moment ; que la cliüte fi prompte que fit la Marine de ce temps-la , confirme ce que je dirai toujours , que n'ayant point une bafc fixe & durable , ils 11e pouvoient nous donner qu'unc puifTance momentanéc ; d'oü on eft fondé a croirc que fi 1'on ne chan G^nux , doivem venir fe raccorder, confulter les operauons des forces navalés,& pre„dre j des délibérations réfléchies. Prenüle f C'eft donc un ConfeÜ de Marine que fe propofe comme un moyen für & Jnique . de confoi,der & de conduite a une profÏÏ! |té durable la régie de la Marine) quand" fa conftitution aura été formée fur le plan que ,e vais tracer : mais il faut que ce Confeil foit compofé fous les yeux du Prince I portee du Miniftre qui y puifera des Zl feieresd'hommes inftruits& éonfommés dans le metier de la mer, & parvenus aux p us hauts grades. Les Vices-Amiraux lepréiiaeroient tour a tour ; quatre Lieutenants-Gé- SX;/r d"Pl« anciens | Chefs defcadre retirés du fervice ; deux -iCommiiIaires-Ge-nérauxrompus au travail des larfenaux & des Gaffes; un Infpe6leur- que les fujets bien nés qui fe feront diftingués par quelqu'aclion d'éclat, une conduite ! irréprochable , & des lumieres peu communes , pourront s'en voir honorés fans avoir paffe par celui d'Enfeigne : mais ces exen*, pies feront très-rares. J'y mets enfuite auStant d'Enfeignes que de Lieutenants. Enjfin , pour faire nombre dans 1'Etat-Major, j'admets encore trois ou quatre Garde-Mairines par vaiffeau. Les Etats-Majors des frégates n'auront I folument paflif. C'eft un vice de I'ordonnance , & on Doit > dans tous les cas , lui rendre les mêmes compites. II eft a remarquer que les trois quarts des vaiffeaux., (armés dansce moemenr, n'en ont pas.  point de Lieutenants-Capitaines; elles feront fixées , pour celles qui porteront du dix-huit, a onze Officiers; celles portant du douze, k neuf; & celles portant du huit, a fept. Ces dernieres n'auront point de Major ; le premier des Lieutenants en fera les fonctions. On comprendra , dans la totalité des nombres que je viens de citer , les Officiers que j'e'tablis k la fuite des Etats-Majors. Les vaiffeaux k trois ponts en auront quatre, un Lieutenant, un Adjudant éc deux Enfeignes; les autres vaiffeaux de ligne trois, un Lieutenant, un Adjudant & un Enfeigne. Les frégates de dix-huit en auront aufii trois, un Lieutenant, un Adjudant & un Enfeigne; celle de douze, deux, un Adjudant & un Enfeigne ; & celles de huit, feulement un Enfeigne. Je dirai bientöt les fonctions que je leur attribue. Fixons maintenant les marqués diftinctives de ces grades. Le Capitaine, ayant rang de Colonel , portera les deux t'paulettes. Le Lieutenant-Capitaine, une feule e'paulette de Lieutenant-Colonel, a qui fon grade correfpond. Le Major, les deux t'paulettes que portent acfuellement les Lieutenants de vaiffeaux. Le Lieutenant, une t'paulette a gauche & un trefie a droite , d'ou pendront quatre cordons nattt's femblables k ceux des aiguillettes , mais beaucoup moins longs, & terniine's par des glands,  (39) I/Adjudant, une épaulette d'un cöté & un trefle de 1'autre ; tous deux, le Lieutenant & PAdjudant , auront rang de Capitaine d'Infanterie. L'Enfeigne , n'ayant plus que celui de Lieutenant, en portera Pépaulette lofangée. Je ne change rien a 1'uniforme de GardeMarine , je voudrois feulement lui öter les bas rouges ; il aura rang de fous-Lieutenant lans porter d'épaulette. Les Officiers des frégates auroient les mennes marqués diftinctives , avec cette feule diftérence que Pépaulette de tous les grades , depuis le Capitaine jufqu'a 1'Enfeigne , lera marque'e, dans le fens de fa longueur, d'une barre argent, feroblable a celle des Colonels & des Capitaines en fecond de Plnfanterie. Les Officier a la fuite porteront 1'épaulette de leur grade a droite : ils jouiront des mêmes appointements, honneurs & prérogatives que ceux qui font en pied, les premières places vacantes , foit par mort, maladies, ou avancements, leur feront donne'es, de prtTérence , fuivant leurs grades reïpectifs. Dès qu'ils auront paffe a ces places, ils f eront remplace's. Si un Lieutenant ou Adjudant ou un Enfeigne en pied ; obtient, par des raifons effentielles , un congé de femeftre, ou tombe malade au mement ou fon vaiffeau eft pret a, partir pour une campagne quelconque, ces Officiers le remplaceront. Au retour du vaiffeau , s'ils ont  (4o) refté a terre, 8c que leur fervke n'ait pas été jugé néceffaire ailleurs, ils déchargeront ceux des arivants, qui fe trouveront fatigués ou malades , des foins pénibles 8c munitieux du défarmement. Chaque Etat-Major formant déformais un Corps a part, diftinct, 8c féparé du refte de la Marine, les mouvements ne s'étendront plus au dehors, 8c 1'avancement en fera d'autant plus rapide. Lorfque dans un vaiffeau quelconque la place de Capitaine viendra a. vaquer par mort, retraite ou avancement, le Lieutenant-Capitaine le remplacera fur Ie champ, fans qu'il foit néceffaire que la Cour leur ait envoyé fon agrément; & le Major, par le même droit, montera de fuite a fa place ; en un mot, fucceffeurs défignés 1'un de 1'autre. Pour remplir celle du Major , devenue vacante , on procédera par forme d'élection, c'.eft-a-dire, que TEtat-Major s'affemblera ( les Lieutenants exceptés ,) en obfervant Ie plus grand fecret fur la difpofition des fuffrages; 8c on élira, par voie de fcrutin, celui des Lieutenants qui en aura paru le plusdigne 8c le plus capable. On ne comprend pas, au nombre des Candidats , le Lieutenant a la fuite: ce n'eft pas qu'il ne füt aufli inftruit, c'eft qu'il n'auroit pas affez connu les qualités du vaiffeau dont on 1'auroit pu faire Major, & que 1'on croit cette expérience très-effentielle pour le bien manoeuvrer. Le Capitaine auroit trois voix j  Ie Lieutenant-Capitaine deuxj & ]e reft8 de 1 Etat-Major (les Gardes-Marines ex | eeptes qui ne formeront entr'eux quune j voix,) cfiacun la fienne; ce qui formera , dans un vaiffeau du quatrieme rang , en tout è douze fufïrages. Les autres mouvements Jjulquaux Gardes-Marines excluhVement j ie feront par ancienneté ; c'eft-4-dire que pour remplacer le nouveau Major e'lu .Vla pluralite des voix, le Lieutenant 4 la fuite deviendra Lieutenant en pied; le premier des Adjudants, Lieutenant 4 la fuite - 1'Ad nidant 4 la fuite , le dernier des Adjudants en pied ; le premier des Enfeignes , Adjudant a la fuite ; & fEnfeigue 4 la fuite . ii-nieigne en pied. * Pour rempfacer 1'Enfeigne 4 la fuite , on cnoiura parmi les Gardes-Marine , par la jvoie du fcrutin , le plus capable de remplir (cette place. La nomination faite, on en donInera avis au Confeil de Marine, & le IComite de la difcipline expédiera les Bre feetS \fa. confirmant toujours le choix des ■fet-Majors. Cette maniere de procéder 4 favancement de chaque individu qui les Jcompofe, excitera laplus vive émulation four laugmenter encore, je voudrois quë parmi les Volonaires dont je parlerai bientöt, ceux diftingués par la naiffance , les talents, la conduite, ou qnelqu'autre aétion fclatante, fuffent admis, 4 f4ge compétent , 4 coricourir, avec MM. les Gardes Marine, pour les places d'Enféignes a la  (4a) fuite, devenues vacantes. Enfin , celle du Garde-Marine feroit remplie par^ un fujet tire' des Afpirants qui auroit fubi 1'examen , & qui auroit fait au moins les deux premières années de fes Exercices.^ On verra dans la fuite quelles font les ide'es que j'attache a ce mot. On voit, par ces difpofitions que je fupprime , toutes ces diftinétions invente'es par un orgueil injufte & minutieux. La nature , dans la formation des êtres , fuit toujours les mêmes procédés , & & départit a chacun une organifation qui lui eft particuliere. En fortant de fes mains, j 1'homme n'eft qu'ébauché; c'eft 1'éducation qui lacheve. Dans les meilleures inftitutionshumaines, lesvérités morales font plus ou moins entremêlés de préjuge's : il en eft d'utiles qu'un bon légiflateur doit mettre •a profit; mais il doit fe trouver inflexible pour ceux qui ne femblent établis que pour nourrir 1'orgueil des uns, & humilier 1'amour-propre des autres. Le grand art d'une bonne adminiftration eft de favoir placerj les hommes dans leur vraie fituation , dans leur meilleur point de vue. L'émulaiJ tion, entretenue dans tous les grades par les charmes d'une agréable perfpeftive J procurera a la Marine les meilleurs fujets , & aux vaiffeaux les Etats-Majors les plus capables. L'avancement fera rapide : plus, un Officier fupérieur montrera de talent^, plus il donnera d'efpoir a ceux qui le fiii| veat, de percer promptement.  r. ■". (43? ) mdiquerai, aux Chapittres vT-& Vil ! «n moyen de récompenfes & de retraites i honorables pour les Officiers de tous les ! grades qui auront vieilli dans le métier «[ pour qui ces places feront un nouvel eni couragement. , II me relfe a déterminer la marqué difi tinöive qui doit faire reconnoitre les Offi i pe« dun même Etat-Major; car je fuis } lom dintroduire une bigarure de couleurs I 3UI>roit un vrai labyrinthe : j'en pren- drai occafion de parler, en paffiant , du 1 trop grand luxe de limiforme. L'habit que 1'on appelle le grand uniforme eft trop beau & trop cher ; la dépenfcqu'il neceflite répugne a plufieurs Officiers de h < Marine: ,1 y en a beaucoup qui ont vieilli dans le Corps fans jamais favoir fait faire I Cette profufion de galons d'or eft une fuite I oecet eipnt de magnificence que Louis XIV a portee dans toutes fes inffitutions, imi:tees par fon petit-fils. Le lurtout qu'on a i permis a obvie en partie a cette grande dé3penfe : «pendant, en laiffant fubfifter le itond & les couleurs de cet uniforme tron ' nche , je voudrois qu'on en diminuSt de beaucoup le galon : je le réduis donc , pour :iie pas faire trop crier les partifans de ce luxe inutile , a huit ou neuf lignes de lari g, eur feulement pour tous les grades • ]es /jepaulettes en deviennent maintenant les'fèr ' fes marqués diftindives; j'y ajoute des rel «vers ecarlates; en un mot, je rétablis abfb-  (44) . , tont 1'habit que 1'on nommoit le petit uniforme , a quelque chole pres. Pour marqué diftinaive de chaque EtatMajor , cet habit, comme le furtout, auroit: un colet d'une couleur bien tranchante , &c comme les nuances des couleurs ne lauroient fournir une variété affez nombreule un liféré autour de ce collet qui aidat a le faire mieux trancher , ou des lofanges, des étoiles , des fleurs de ys , des hermines , des cróiffants, & mille autres bagatelles rapportées en broderie d'or ou d argent, peuvent faciliter les moyens de lesvarier autant qu'il fera néceffaire. Si ces diöinaions bien etabhes , cette défunion opérée , ces nouvelles tormes adopties cette conftitution enfin coniohdee , il n'en'réfulte pas le bien que j en efpere ; tout eft fini, le mal eft fans remede ,c le prononce fans détour; tout elpoir d avoir jamais une Marine puiffante eft antanti. Ceffons des efforts momentanes qui nous épuifent inutilement; ne difputons plus 1 empire d'un élément fur lequel nous ne pouvons pas dominer ; achetons, par de nouveauxïacrifices ,1e peu de Co omes que nos rivaux nous ont laiffés - brülons nos vaiffeaux de guerre ; détruifons nos arfenaux , & devenons, puifqu'il le faut, mbutaires; par notre luxe , de 1'umvers entier. Mais il s'en faut bien que nous ioyons réduits a ces dures extrémkts : nous avons des milliers de reffources , fi on veut les omn Invf.r*  - «. t457 , , employer. Si le Gouvernement leconde mon projet d'une volonté ferme & conftante S'il ne fe laifie point trop e'tourdir par les eris du pre'juge', ni décourager par les obftacles que la mauvaife foi & le fot entéte-ment femeront fous fes pas ; s'il ne craint pas les dangers imaginaires d'iine utile in-novation, s'il ne fe Iaifle pas trop conieiller" enfin par la timide économie, je réponds de lui procurer dans peu la Marine la plusflorilfante, la mieux compofée , la plus inlV truite & la plus redoutable de toute l'Eu< rope. F  CHAPITRE II. Des Vaiffeaux de ligne & Frégates, de leur nombre, divifion, aménagements , diflribution ; prejugés nuifibles a la force de leurs échan* tillons; moyen d'ajouter a leur folidité, en augmentant la circuladon de Fair extérieur dans leur membrure. E pars donc de cette fuppofition que k Trance eft dt'cide'e a entretenir, en tout temps , quatre-vingt-dix vaiffeaux de ligne & foixante frégates. Nous n'avons que deux Ports affez grands pour contenir des vaiffeaux raffemblés en nombre fuffifant pour compofer une armée aui en impofe a nos ennemis. C'eft donc dans ces deux Ports que j'en fais ma diftribution : j'en place foixante a E-reft ( i ) , & trente a Toulon. (i) On trouvcra le port de Breftbie» étroit pour cc ■ombre de vaiffeaux, fans comptcr les frégates._ Le Gouvcruemcnt n'a qu"a vouloir, & bientèt Ia riviere «l'Hyere lui procurcra dans la même rade un Port auffi fJr & auffi commode que celui de Brcft, fans en avoir les défauts. M. Petit, Lieutenant de vaiffeau , Officier jlein de mérite , & a qui je fuis fort aife de trouver cette «ccafion de rendre juftice, adreffétous les plans des traVqm néceffaires pour foimci»L»ndeViW« un fupeib^r*  (47) Quant aux frégates, je les place indiftinctement dans ces deux Ports, & dans tous les autres ou elles peuvent être recues, conftruites ou réparées. Nos ennemis ont des vaiiTeaux a trois ponts; ils nous prefcrivent la néceffité d'en avoir aufli. En pouffant 1'augmentation progreffive de nos vaiffeaux juiqu'oïi elle doit aller, je dis qu'il nous faut neuf vaiffeaux de la première force , vingt-quatre de la feconde , quarante de la troifieme , & dix-fept de la quatrieme, diflribués en cette maniere: A Breft. A Toulon. Totalité. Ccmons. 6 3 9 no 15 9 2.4 80 28 12 40 74 11 6 17 64 60 30 90 fenal, Stleplus beau Port, commele plus commode de Fancc. Sion rendoitcetteriviere flotablcjufqu'kCarhaix, on pouroit tirer du ccntre de la Prvihce,dcs bois de confrruaion & des chanvres en quantite j oufcparcEOit aiojs les vaifleawc dans ces deux Pgjt»-.  (4§) Tous ces vaiffeaux une fois conftruits-y comme je 1'ai dtja dit, progrefiivement, uh certain nombre tous les ans, il faudra les entretenir en bon e'tat , & les remplacer foigneufement a mefure qu'ils viendront a vieillir ; ils feront tous ame'nage's & diftribue's inte'rieurement de la meme maniere ; il leur fera donné le moins de faillie de voute qu'il fera poffible. Pour ménager le grand affaiffement des ceuvres mortes de la partie de 1 'arriere, les vaiffeaux de foixante-quatre & loixante-quatorze n'auront leur galerie faillante que de la moitié de fa largeur; ils ne leront point, en géntral, lurchargés de fculpture. Les chambres , dans chaque vaiffeau de la meme force , feront toutes de la meme grandeur ; ils n'en auront tous que ffx en avant de la chambre de Confeil, & cinq en avant de la grande chambre , comme je vais 1'expliquer. Sur 1'avant du fecond canon , a- compter de 1'arriere, fera fixe'e lacloifon de la grande chambre forme'e de panneaux couverts de toiie , & placts a crochets ou a couliffe; de h'£,ers panneaux d'affemblage , femblables a csux des p'aravents, affez forts pour foutenir une toile clout'e , cempoferont les cloifons des chambres; les deux fitue's des deux cöte's , le long du bord , s'avanceront julques fur 1'avant du troifieme canon quelles enclörront, ck depuis la muraille du vailfeau , fix pieds en-dedans , melurés a la perpendiculaire de la 1'erre : au sailieu du vai£  leau on en pratiquera deux autres acouplees£ ifolees par deux couroirs qui ferviront d'eni tree 8c de fortie a la grande chambre. Le3 eloifons de celles-ci pourront etre de pan-« neaux de planches embouvetées, paree que , dans un cas prefle , elles doivent refter en place ; elles n'auront d'autre jour que celui de la grande chambre , 8c elles envelopperont le tambour des drofles. Sur 1'avant de eelle de ftribord, il y aura une office qui fenfermera le quatrieme canon ; elle fera' d'une toile lace'e fur quatre montants; les deux du milieu recevront une quarrée avec fa porte aufli en toile. En avant de la chambre de babord il y en aura une autre femblable a elle , 8c qui fera le pendant de 1'office. Toutes ces chambres late'rales e'tant fujettes au branie-bas pour le fervice de 1'artillerie , doivent fe de'monter dans un clin d'ceil, 8c n'être jamais embarrafle'es de' meubles pefants 8c inutiles. Les feuls que 1'on puifle permettre aux Officiers qui les habitent, feront un hamac a 1'anglaife, une petite malle , un petit fecrc'taire , 8c un pliant pour fiege: on peut leur permettre encore d'en tapifler les panneaux de'tache's, I d'un papier , d'une indienne ou toile peinte. t) Les feuls meubles de la grande cham- I ( i ) Une grande économie dans Tadminiftration des" yatrelicrs , feroit, a mon avis d'obliger 1'Officier, dans jpes vaiffeaux ou frégates, en Jui faifant un traitement i & f°uqui doivent fu>e göSmon ^ ?f oas reftant plus IongJ^^J?' c eft que G i p  der peint & velouté , colli fur toile , quelSues baguettes dorées,un couple de petites Saces & de confoles , quelques tableaux, f ravures ou paftels, des fauteuils bourres Lis point de chaifes longues, canappes ou Ttomannes ; ces meubles lont plus propres au boudoir d'une jolie femme , que dans la chambre d'un vaiffeau de guerre On permettroit aufli aux Officiers, dans leurs chambres , quelques tableaux ou gravures , pourvu q A la vue de 1'ennemi ils foient portes, ainfi que les glacés & fanaux, dans un endroit oh les éclats de verre ne puiffentpas rendre mortelle une bleflure peu dange- reufe. -cc Ces détails feront ennuyeux pour ces oififs fuperficiels , qui ne lifent que pour fe difliner • mais que m'importe leurs luftrages , ce n'eft pas pour eux que j'écris. Ils paroitront aufli minutieux au plus grand nombre. II faut avoir navigué , & avoir ete foumis aux caprkes d'un Chef dans tout ce qui eft arbitraire , pour en connoitre toute limportance. On en a vu pétris d'un orgvieil h ridicule , qu'ils regardoient comme des objets «U'disnes de leurs foins & de leurs egards, \es Officiers que le hafard , ou des ordres fuoérieurs ,leur avoient lubordonnes. Dela, fet éeoifme oui diftribue les vaifleaux , &z ffir-tont les frégates , de mamere a procurer aux Capitaines feuls les commodites les plus recherchées fans fe foucier de refferrer les équipages, ni de gêner les Officiers. II  eft , en effet, bien inhumain d'entaffer deux cents foixante hommes dans 1'entrepont d'une fre'gate que 1'on encombre encore de mille eftets qui s'oppofent a la libre circulation de 1'air. Il y a quantite' d'abus a re'former fur cet article , qui feront peut-être 1'objec de mes re'rlexions dans un autre Chapitre. II feroit douc bien elfentiel qu'une Ordonnance profcrivit, fous les peines les plus fe'veres , tout changement a cet égard, dans les formes adopte'es; & fixat une bonne fois des bornes a i'autorité du Chef égoïfte qui empiéte, & a la fermete' du fubordonné qui réclame fes droits. Je voudrois aulfi qu'on fupprimat ces cabanes que 1'on eft dans 1'ufage de conftruire fur les dunettes des vaiffeaux; elles élevent Ie centre de gravite', obligent a placer les barreaux plus prés, & de les faire plus forts , augmentent la bricole & font monter trop haut les ceuvres mortes du chateau d'arriere ? ce qui ne peut que pre'judicier aux qualités d'un vaiffeau. Onze chambres ne font-elles pas fufhTantes taaur loger 1'Etat-Major d'un vaiffeau de foixante-quatre ? Dans ceux ou il eft plus nombreux , les derniers Officiers doivent fe contenter d'un entourage ou toile ; dans tous , les GardeMarines ne doivent avoir que des cadres a\ 1'anglaife dans 1'entre-deux des canons de la lainte-barbe. J'ai promis, dans le de'veloppement de mon pro jet t de prouver, par des de'tails ,  w . . . les abus que j'attaque. On voit que je tiens parole , en les failant remarquer a mefure qu'ils fe prélentent. Le doublage en cuivre, en donnant de la eéle'rite' a la marche des vaiffeaux , qui, fuivant les anciens pre'jugt's, font ie plus péfamment conflruits , femble avoir huit, & fi, on les conftruifoit outre cel* (i ) Ceel s'éerivmt a la fin de la denüere guefrev  'f> pleinsdebois depuis huit pieds au-deffbus ?> de la ligne d'eau , jufqu'a la hauteur du p> fecond pont, comme 1'exigent re'ellement 7> des vaiffeaux qui doivent porter du vingt?) quatre & du trente-fix, & qui font def g> tine's a canonner en ligne. Un vaiffeau conlïruit de cette maniere aura certainement bien de 1'avantage , au canon fur 7> un vaiffeau mince qui fe trouve expofe' a » être perce', de part & d'autre , a toutes 7> les borde'es qu'il recoit, & qui s'entr'ou7> vre en fre'miffant fous les fecouffes redou?> ble'es de fon artillerie vivement fervie» 9> D'ailleurs , ces vaiffeaux , forts d'e'chanp> tillon , pourroient être mieux lies que les 71 autres, patce qu'il feroit aife' de cheviller ?> en fer leurs membres &c leurs eftacades7> les uns fur les autres, en commencant f> les leve'es par un bout, & allant de fuite: 7> cette charpente, fe tenant ainfi d'un bout 7) a 1'autre , ne pourroit gueres travailler 7> dans une partie fans être fbutenue par le 7) refte; fi deux membres tendoient a s't'car7) ter, ils ne pourroient le faire fans rom7> pre fept a huit chevilles, & fans forcer 9> fur les membres voifins. » II eft certain qu'un vaiffeau conftruit fur ce modele, oppoferoit une bien plus grande ïéfiftance a Ia pefanteur, de fon artillerie , aux coups de celle de 1'ennemi, & aux ba3ancements continuels du roulis & du tangage. « La vie des hommes de mer, ajoute ti plus bas M. Bourde' t qu'ou ne fauroit  Xgti . i i> trop ménager, eft un objet qui fe préfente I « encore en faveur de mon idéé; les Ca» nonniers qui ferviront 1'artillerie ne fé| 9> ront pas tant expofés dans les batteries » d'un vaiffeau fort d'échantillon , que dans » celles de nos vaiffeaux modernes ; peu de » boulets y perceront; ils feront donc en >? -pofition de rélifter plus long-temps a des forces fupérdeures , ou de tenir tcte , avec ?) plus d'avantage , a des forces égales. « On ne manquera pas, fans doute , de nous obje&er , a M. Bourdé & a moi, que . les mailles que 1'on laiffe entre les membres des vaiffeaux font pour donner a 1'air extél rieur une libre circulation entre tous les :: membres , & prévenir la pourriture ; mais outre que cette intention n'eft pas remplie , puifque pour entretenir cette circulation il i faudroit ouvrir plus d'un paffage a 1'air extéj rieur. M. Boux propofe un moyen plus t! fimple & plus fur pour parvenir a ce but, | Jk qui n'empéche pas d"ajouter a la folidité des vaiffeaux ceux que nous venons d'indiquer. On va voir qu'il 1'a employé'même avec fuccès , & que fon defir n'étoit pas i feulement Ia confervation du vaiffeau , mais encore celle de fa cargaifon, & de la fanté de fon équipage. Je vais rapporter tout au | long le compte qu'il rend lui-même de fon Ij procédé, & des effets qu'il a produits , dans | tme lettre adreffée au Journal encyclopédij que de Juin 1774; je prendrai la liberté d'yi joindre mes réflexions & mes remarques eai forme de notes.  f» Lettre fur les moyens d'introduirt Vair dans la cale des vaiffeaux, adreffée aux Auteurs du Journal encyclopédique , par M. Boux , Capitaine des Vaiffeaux du Roi. 1 » Les marins ont défire' jufqu'a pre'fent » des moyens fimples & faciles d'introduire » un air continuellement frais & nouveau « dans 1'intérieur de la cale des vaiiTeaux, m afin de de'truire la mauvaife qualité de « celui qui y regne conftamment dans tous ?} ces climats, & particulie'rement dans les « pays chauds; ce qui opere une fermenta?j tion continuelle dans tous les comeltibles » qui, par degre's , s'alterent & Te gatent » julqu'a la putre'faction : celle-ci donne al71 ternativement la vie & la mort a de^ milm liers d'inledes de différentes elpeces ; ce n qui fait de la cale du vaifieau un cimi71 tiere t'ternel, dont les vapeurs infeótes & 71 cadave'reufes font continuellement afpi71 rtes par les hommes qui couclient entre 71 les ponts; & ces malheureux finifient par 71 fe nourrir de ces vivres adtérés ; &c quel71 quefois corrompus,qui font la fource inta7i rifiable des malades putrides & peftilen7i cielles (i ). Les affiigeantes re'flexions (i) M. Ac Morogues, Capirainedcs valrTeaux du Roi, a fait, dit-on, un Traité fur la manierede préferver fles matelots de ces maladics; mais, comme jenel'aj pa3 lu, j'igaore ce qu'il dit de cctte-caufe, &s'iienfar5 mcution,  m n ont point echappé aux gens mftruits , »ona même tente de re'médier a ces in|« conve'nients , en faifant établir des venti|» lateurs dans les vaiffeaux , pour pomper |» 1'air corrompu des cales , & le remplacer ■ par un air frais & nouveau ; mais comme K les ventilateurs font très-incommodes par I» leur volume , qu'ils exigent un certain lp nombre d'hommes pour les mettre en | jeu, que leur effét ceffe avec leur mouP vement, qu'on ne peut le rendre conti\p nuel & permanent fans un e'puifément de m forces, on a renonce' a leur ufage , queln qu'avantageux qu'il put être (i.). » Frappe* de tous ces inconve'nients , & * bh des malheurs qui en re'fultent pour les B gens de mer, je me fuis long-temps ocWi.cupe' a chercher des moyens limples d'y ij^> remédier. Après bien des combinaifons qw & du temps perdu , je luis enfin parvenu |w a faire la re'flexion la'plus fimple, que f> puifque le vaiffeau divifoit 1'air & 1'eau f> avec la même viteffe , ( ce qui eft inconB teftable,) il ne falloit que pratiquer a I (i ) On a encore, 'a 1'imïtatión dés Anglais , pra:iqué, ■uns l'interieur de la cale des vaiffeaux , des rohinetsJjdeftinés a introduirc a volonté, & en telle quantité fjtru'on voudroit, del'cau:demer pour fe mêlera celle qui jpjourne dans le fond des vaiffeaux , & devienr, en ite'y corrompant^une des fources intariffable de cesvatipeurs piitrides & infeftes ; mais fi , en renouvellant ifouvenr cette eau on ne lui donne pas le'temps ie fc tjpourir, on ne remedie pas au danger d'entretenir un» ijïontinuclle bumidité dans les cales.  (64) f) 1'avant du vaiffeau des ouvertures , & y ?i placer des tuyaux qui defcendiffent dans w tous les membres jufqu'au fond de la cale; n que par ce moyen Pair s'y introduiroit w avec la viteffe du vaiffeau; que fi on en I w placoit fur les cöte's, on pourroit efpe'k rer une introduétion d'air prefqu'auffi t) prompte que le vent lorfqu'il feroit a la w perpendiculaire ; que fi 1'on placoit de w pareils tuyaux a Ia poupe, ils recevroient » encore la viteffe du vent, moins celle du » vaiffeau; que dans tous les temps de » cappe , de panne, de roulis, de tantage , n &autresmouvements,ils tourneroientau » profit deI'introducfion de l'air; & qu'enfin » a 1'ancre, & même dans le Port, ils opé?> reroient encore ce bon effet. Perfuade' de w tout ce que je viens d'expofer , ayant \ *> alors un bStimet a conftruire , j'y appliw quai les moyens dont je viens de parler, *> & en même-temps je fis pratiquer des f> paffages faciles a Pair pour s'introduire t> dans 1'inttrieur de toutes les pieces effen» tielles du vaiffeau , dont la deftruction i) ne vient que de 1'humidité & de la cha}■> leur qui caufe I ■ f-'-inentation, & celle-ci m la pourriture. L'eufêmble de ces moyens. r> m'a paru réunir quatre points fort impor» tants pour Ia Marine, io. La conferva-i « tion des gens de mer ; z°. celle de leurs w vivres ; 3C. celle du vaiffeau; 40. celle »; de la cargaifon qu'il contient.» » j'ai donc, en confequence, fait prati-  » quer une canelure de huit a neuf lignes p de diamettre dans chaque piece qui com» pofe les couples ou membres; de maniere p que dans toute leur longueur cela fit 1'ef« fet d'un tuyau (i). J'ai fait dans 1'entrew deux de chaque couple, dans la face ine% térieure du vaiffeau, de petites ouverf) tures de deux lignes de largeur , liir » deux pouces de hauteur qui ont e'té re7) pe'tt'es de trois pieds en trois pieds dans » toute 1'e'tendue des couples, afin que 7) Pair put aiftment s'introduire dans ces » cannelures dont nous venons de parler (i ) Ceci n'eft point 'a mon avis , fufiifanmmcne expUqué. Dans quel fens de chaque piece ces cannelures ont-clles été creufées » Sans doute dans le contact intérieur de la varangue & de 1'allonge, avea les genoux : danslecentre de l'ancmblagc du menbre, du moins c'eft ce qui me paroit plus vraifcmblable. Sï 1'on prenoit leparti de confttruireles vailicaux pleins , comme nous le difons , depuis le carreau jufqu'hhuit pieds au-deflbus de la ligne de flotaifon, il faudroit pratiquer dans chaque face latérale des pieees qui rempliffent la maille , une caimclure de quinze lignes de diamètre , & donner aux petites ouvertures que 1'on pratique dans 1'intéricuer de deux pieds en deux pieds, cinq lignes de largeur, fur trois pouces de hauteur. (2) Ceci n'eft pas plus clair, du moins j'imagine que ces ouvertures de deux lignes ne pcuvent s'entendreque dans la fuppofition que je viens d'établir ; &C je pence que M. Boux enrend par l'emre-deux de chaque couple, laréunion de 1'allongc & du genou, & que cette ouverture de deux lignes doit être pratiquée dans le milieu de 1'épaifleur de ces pieccs, alternativement depuis la face concave de 1'intéticur du vaifieau', jufqu'a la cannclure qui doit strc pratiquée dans ie miüeii  »j La meme opération a e'te' faite aux » bauquieres& ferre-bauquieres, a 1'extré» mite de tous les baux , k tous les rem» pliffages, a 1'e'trave , aux apótres , aux » guirlandes courbes de liailbn, courbes » de pont, lifies de hourdi, barres d'ar» caffe, &c. enfin, k toutes les pieces efien« tielles dans la face de leur contact avec « (fautres pieces , avec 1'attention de ne n point boucher ces conduits par les cher> villes , goujons & gournables. » On a place' quatre (i ) tuyaux ou ven» tillateurs de chaque cöte' du vaiffeau: » favoir : » Le premier , au premier hauban d'arp timon en arriere. » Le fecond, au bordant de la grande » e'coute. » Le troifieme , au bordant de la mifaine. « Et lequatrieme, fous le boffoir (2). » Leur ouverture a été pratiquée lous le >j carreau, afin de les fermer comrnoué» ment ; ces ouvertures ont la forme d'un » chapeau de dix pouces dediamettre, fur « deux pouces de profondeur, qu'on a en» caltré dans 1'épaiffeur des bordages (3 ), de lepaifleurs de ces pieces, de dedans en dchors , afin d'établir entre elles & la cale, par le vuide ou la fépajation des vaigres , une libre circulation de 1'air introduit par les ventoufes, dont on pariera plus bas. (1) Jen voudrois rnetre cinq, au lïcu de quatre. (2) Pourquoi n'en pas mettre un couple a la poupe des deux cfités de 1'étembord, pour 1'introduction du Vent arrieteï (3) Dans une fituation verticale, fans doute.  » & foude a 1'orifice d'un tuyau quia qua|» tre pouces de diamettre, & leulement m trois pouces au petit bout, pour acce'le'|» rer la viteffe "de 1'air. On a pratique' de j» petits trous, de diftance en diltance, dans II» la longueur (i) de ces tuyaux , afin de j ( i ) Pourquoi ne pas fixer , 'a-peu-près, la longueur de ces tuyaux 1 Mais en les fuppofant dcfccndus dc jcinq a f'X pieds dans une maille entre deux couples , Jcomment s'imaginer que 1'air contenu dans ces tuyaux Ipuiffe s'introduire dans les eannelures qui font pratijquées dans le ccntre dc ces couples, fans lui faire un Spaflase? Pour cet effet, je voudrois que la bauquiere lde tous les ponts portat, dans le fcns oü elle s'apIplique contre les inembrcs, non au milieu de fon i'épaifleur, mais les deux tiers en-deflus, une cannelure d'un pouce de diametre, vis-a-vis de laquelle on iicreuferoit , dans 1'allonge & dans le genou , égaleJiment une ouverture ob'ongue de trois lignes dans Ichaque piece, ce qui feroit a 1'air circulant un conduit li de fix lignes de largeur, fur dix-huit lignes de hauIteur, pour feryir de communication dc la cannclure f lou cfpece de galerie creufée dans la bauquiere, 'a celle 'ipratiquée dans 1'intérieur du mcmbrc. Je voudrois iiencore que 1'on fit fur la tête de chaque allonge de I revers immédiatemcnt fous le plat-bord du paflavant , ■Bicanal de quinze a feize lignes de diametre , entaillé Kcllement dans le centre de 1'épaifieur de chaque alfilonge , qu'il pafsat direftemcnt fur 1'ouverture de» :i eannelures creufées dans 1'intérieur dc chaque membres, I a' la même hauteur, en arricte_ & en avant, un trou ^de tarriere, percé dans le milieu des allongcs, ache-«veroit de former le canal de circulation de 1'air, inqtroduit par les ventilateurs dans toutcs_ les eannelures lliétablis dans la longueur des membres : je crois même i') qu'il feroit avantageux d'arêter ce courant d'air dans | le milieu de 1'intervalle, entre deux ventoufes, pour ]\ 1'obliger a fe précipitcr au fond de cale. Le tuyau fixé ■ 1'entrée de ces ouvertures, devroit alers fe divifer iien plufieurs branches, dont une principale deftsaw  ft fournir de Fair dans toute la hauteur des ?j mailles ou intervalles, entre chaque coun ple; ces tuyaux ont été faits en cuivre , & w place's avant de border le vailTeau. >j Ces proce'de's n'ont e'té exécutés que m fur cinq batiments que j'ai conftruits , v favoir : » La corvette VExpérïence , faite au » Havre-de-Grace , en 1'année 1768. » La flüte UAfrica'm,a Breft, en 1768. w Le batiment le Pacifique , au » Havre,en J7^9- ■» LaFre'gate la Confolante, a w 1'Orient, en I77i« m Et Bourgogne , aulTi a w 1'Orient, en 1772. >} La corvette a fait deux campagnes , w 1'une a la traite des Negres & i'aure a » Miquelon; les vivres & les hommes le » font parfaitement confervés, au rapport » des deux Capitaines. » La flüte l'Africain a été a Plfle-de- France , chargée d'un bataillon de trou7) pes; les vivres fe font parfaitement con7> fervés; & , ce qu'il y a de fort extraort} dinaire, c'eft que 1'eau même s'eft con» fervée fans aucun goüt ni mauvaife odeur. ,3 M. Pellegrin , ( Capitaine de brülot) qui droit dans Ia maille, comme le dit M. Boux , & 1'autre montcroit jufqu'au coniuit fupérieur, oü ii fe divifcroit en forme de T. ces tuyaux, ainfi difpofés , auroient un doublé avantage , celui de rafraichir la cale , & d'aircr la carcafle du /aifleau- dans toute» fes oarties, la  » Ia commandoit, oblerve que c'eft la feule r> fois qu'il ait vu que 1'eau ne 1'e foit pas. » corrompue; il n'y a eu abfolument au» cune maladie, quoique le nombre desw hommes fut très-conlide'rable,& que la tra» verfde ait e'té de cent dix-huit jours fans. « aucune relache. Le mémeCapitaine dit que w dans le port de 1'Ifle-de-France, après » que le vaiffeau a étéentiérementdéchargé, » il a oblerve' les bons efféts des ventila-1 « teurs j o« yê/zroi/, dit-il, une fiakkeur .» qui auroit été peut-être nuifible fiony eüc » refté long-temps dans l'inaclion ; au rejie n la cale m'a paru très-feclie par-tout, ê » fans aucune mauvaife odeur. Cet Officier » aencore obfervé que dans fon cabotage » de 1'Ifle-de-France a Madagafcar , ou'il r alloit charger des breufs vivants, ceux » qui étoient placés dans la cale fe fonc » auffi hien portés que ceux qui étoient fur » Ie pont. Ce batiment eft refté a 1'Ifle-de» France. » Le^ Pacifique a fait deux campagnes r> une a Saint-Domingue & 1'autre a la cöte w d'Afrique. Les deux Capitaines rappor» tent que les vivres & la cargaifon n'bnt » fouffert aucune altération , que les gens. » de 1'équipage ont toujours joui de la meil» leure fanté. Le Capitaine qui commandoit n dans la derniere campagne a fait un pro» cès-verbal figné de fes Officiers , dans le» quel il dit que non feulement les vivres » & la cargaifon fe font bien confervés • H  (.7°) « mais qu'ayant vilité & examine Fétat du „ vaiffeau intérieurement , lorlqu'il e'toit 7, vuide, il 1'avoit ttrouvé dansleplus grand 7, état de féchereffe dans toutes fes parties. f> Le dcublage de cuivre (i) , dit-il, que j'ai 7> vifité avec le plus grandJoin , m'a paru en » auffi bon état que lorfqu'bn Va mis en pla„ ce , en Juin 1769 ; on n'y a fait aucune 7, réparation. Signé, le Capitaine Poule & 77 fes Officiers , au Havre le 277a. _ Ce batiment eft encore a le Traite des ») Negres ; auffi tót après fon retour on ren» dra compte de cette campagne (2.). » Les deuxbatimentsconftruitsa 1'Orient 7> n'ont point encore e'te' a la mer (3) ; nous 7, n'avons voulu rendre compte de ces noti77 veaux procédés qu'après quelques expé- (1) Jc ne vois pas ce que peut avoir de eommim le «loublagc en cuivre avec 1'effet des vcntilatcurs : a moins que M. Boux ne veuillc faire obfervcr , en paffant, qu'un vaU^aii marchand, doublé en cuivre rni"Ó9, n'avoit , au bout de tro'x ans , aucun bcfoüi dans des pays chauds. >? On confeille encore deplacer fur le de» vant de chaque matsjmajeur, (i) un de ces»' » ventilateurs pour augmenter la maffe de » 1'air dans la cale, de faire leur diamettre J3 le plus grand poffible de placer' » leurs ouvertures a cinq ou fix pieds au» defius des gaillards, afin de pou-voir les w fermer commode'ment & bien hermétiqu&* » ment;. fi la fraicheur e'toit trop grande ^ » ce qui pourra avoir lieu lorlqu'il y aura » peu d'hommes, on couvrira ces tuyaux; tl d'une jumelle pour empêcher qu'il ne » foient brifés ou applatis. » On croit que, fi ces procédés font » exaótement fuivis , on patviendra, comme » on 1'a de'ja dit, a conferver les hommes » de mer , leurs vivres, les vaiffeaux & la » cargaifon qu'ils contiennent. L'air frais» &circulantempêchera les incendies, affez » fre'quents dans les batiments du com-» merce , fur-tout ceux qui font charges de? (1) J'en voudrois encore établïrun couple de chaque' cfité du bcaupré , par-deflbus fes lieures , & un peu.' en-deflous du mat, qui feryiroient a introduire 1 air? le long du beaupré ; il faudroit que le tuyau fut dou-ble pour le conduire d'une part dans la cale , & de' 1'autre , par un conduit de communication percé dansle millieu de 1'épaiflcur des apêtres & des allonges» d'écubiers, dansles goujures creufées dans Ia réunioni Sc 1'entre-deux- de ces pieces (2) On pourroit y metre le bout d'une petite manche faite en-entonoir. H 2  \7i) w Iaine , de fafranum & de chatbon de « terre ; on pre'fervera de même les bleds 9> & autres grains, des avaries auxquelles 9) ils font fujets, pour peu qu'ils reftent 7} long - temps dans les batiments qui en t) font le tranfport. n M. Boux termine ici cette lettre que fon patriotifme lui a diefde , pour rendre communs, a tous les ports , les effets falutaires d'une pratique ingénieufe. On peut dire qu'il a faifi la feule maniere de conferver autant qu'il efi en nous, ce que nous avons deplus cher, la fante', ce bien fi précieux pour 1'homme de peine & de fatigue. Malneureufement les gens les plus intérelfes a la pratique conftante d'un ufage qui vient d'être de'montre' fi avantageux, ne préfident pas a la conftruótion des vaiffeaux , & la, cupidité 65c 1'égoïfme , qui s'ifolent toujours , ferment les yeux fur les biens qui en. doivent réfulter , pour ne les ouvrir que fur 1'augmentation de dtpenfe que les vaiffeaux couteroint a conflruire. Ces canelurent emploieroient un peu plus de temps dans la facon a la vt'rité; mais cette lenteur un peu difpendieufe, eft rachete'e par des avantages fi pre'cieux & qui retournent même au profit de Pe'cotomie, que je fuis e'tonne' que le Gouvernement ne foit pas venu au fecours du matelot, qui ge'mit fous le joug d'une barbare avarice. L'homme inftruit. charme1 des effets falutaires, dont plufieurs exemples ont prouve' la re'alite', léra bieri  . , r C 73 T plus etonne encore d'apprendre que dati£ les ports cm Roi, on n'ait pas adopte' une; invention utile, propolee par un Capitaine de vaiffeau, qui joignoit les connoiffances; du Conftrucleur a 1'art du Nautonnier; & fon e'tonnement croitra bien davantage quand on lui fera entendre que c'eft apparemment l'efprit du corps qui s'y oppofe.. Ce mot, ce terrible mot, qui a e'touffe'plus d'une fois tout fentiment de patriotifme r cet efprit plus a craindre fouvent que les effbrts de 1'ennemi , s'eft trouvé d'autant plus libre d'agir, que le bien. que 1'ufage propofé indique, n'eft pas a la portee de tous les hommes, que beaucoup ne le voient que dans unrappott fort éloigne', & accompagné de tous les inconvenients re'els ou imaginaires dede'penfe, de lenteur dans 1'exécution de diminution de folidite', ou d'inutilite' dans fes effets , & tant d'autres dont s'arme une ignorante pratique contre toute efpece d'innovation. Difons-le hardiment, a lahonte d'un corps inftruit, les bons effets de cette heureule de'couverte , n'ont pas pre'valu eontre des raifons fpécieufes, & peut-étre dicte'es par la mauvaife foi, paree que fon auteur , M. Boux, eft un intrus (i ) dans Ia Marine, L'injuftice d'un corps eft telle (i)M. Bonx entra dans la Marine par la porte quï ne s'ouvre qu'au mérite, & que 1'crgueil a plus d'une Ibis eflayé de fermer fans retour , je veux dire , qu'il fut employé dans le Port. Ses talents lui frayoient la route au grade de Capitaine de vailTeau ; & 1'cmploi «Luc le Miniftre en a ft» faire , le vengea des mépri*  ötf on a vu des innovatioiis bierwnoms effeflv Kes «cues avec chaleur , paree qu elles iSSoKes par des Officiers qui n'avoienï Pette tache originelle Plaignons le fortos gens de mer iubordonnes a des Chefs qui fe°conduifeat par de pareds principes ! Que 1'indigation, dont il eft impoffible de fe défendre ouvre les yeux du Gouvernement. Inftruifons-nous du moins par 1'exemple des autres NatiOns, qui prati-quent depuislong-temps des ufages que nous rejettons par des motifs fi rtdicules. Un Officier étranger, très-inftruit, a qui on avoit fait lire la lettre de M. Boux obferva qu'on fuivoit chei lui, a-peu-pres les memes procédés dans la conftru&on des batiments deftinés pour les climats chauds, & fur-tout pour la cöte de Guinee. Cet exemp e eft concluant; mais 1'orgueil, la vanité , le fot entêtement, une vieille routine, fe tont Wscontreuneutileinnovation. On vort des entreprifes confidérables manquees,des ; " c fu ent !es feuls titres de M. Boux Cette >recomf rnWation vaut bien 1« .plus vieux parchem.ns ^ ce-^ ?e pr'e ugTs .rörgueil&l'ambition; il efluya des tracaKfdes dégluts & des humtao»to J au moment de fe bien venger , s 4 ^ yra que ce o* lui qui ait donné a M. de Boyne „^««i? Ia Marine. Il ne faut pas chercher d'autreratfons du reflentiment qui s'exhale encore tous les jours , &:^ la haine implacable qu'on lui a VOUee , fcqmiui OIW feit demander fa retrait,-  «niffiers d'hommes plriflènt ponr avoir v& ghge ce petit moyen de les conferver Je me trpmpe, il n'y a pas de petits moyênV, quand il elt queftion de la confervatión dé Ueipece humaine. Quoi qu'il en foit, ceux-ei nont paseté jugés dignes de 1'attention ni des railonnements lüblimes des Chefs de nos departements; le malheureux ou'on opprime, nepeut-il pas s'écrier, homofum V nihil a me ahenum,puto ! I Un ufage bien bon encore k adopter (Pour multiplier les moyens d'introduire 1'air |rais dans les entre-ponts , en outre des: publots, que 1'on perce dans les mantelets »es iabors, & de ceux que nous venons d'inliquer, c'elt de faire, comme M. de Briquenik Fa. etabli a bord du Nortomberlond les ecoutilles k charnieres fur le milieu du 'ont, depuis le grand panneau jufqu'a cinq Bhx pieds des cuifmes. Le bordage du nheu, qu'on peut killer plus épais, & »re en chêne, comme une piece d'hiloires jpporteroit des pentures placées au milieu' ui Jaifieroient la liberté d'ouvrir, autant ue la chaloupe Ie permettroit, les paneaux des ecoutils pratiquées dans Ia lon.ueurque nous venons de déterminer & jercees entre les baux. Au moyen d'une frte lole, aufli de chêne , de quatre k cinq puces d'élevation, clouée & calfate'e hir ts hiloires , 1'eau répandue fur le pont n'y ourroit pas pénétrer. Un prélat, en plupurs doublés, arrêteroit celle de la pfuie.  (7«J CHAPITRE I T 1.1 Du nom & du rang de chaque Va'ip feau ; du nombre d'Officiers dans chaque Etat-Major, 'de leur totalité, comparée avec ce que le Rol en entretient acluellement; de 1'Etat incertain des Auxiliaires, des appointements 6" des femejlres. Ï.L entre encore ne'ceffairement dans Ia difpofition de mon plan , de fixer, par uneloi inviolable, le nom de chaque_ vaiffeau de guerre , & de chaque frégate qui doivent former les forces maritimes de France ,.par> ce que ces noms vont devenir de'formais communs aux vaiffeaux & fre'gates , comme aux Etats-Majors. Les noms pour lefquels je voudrois qu'on préferat toujours des adjeétifs impofants T comme le Formidable , le Terrible, le Foit* druyaiu • ces noms , dis-je , en vieillifiant f «fterniferont la gloire qu'ils fe feront acquife* L'Emulation que fera naitre ce defir degloire, ellen faveur de mon projet, Sim des puiffants motifs qui doivent le faireadopter. Identifie , pour ainfi dire, avec le nonr de  de fon vaiffeau, chaque Etat-Major defirera qu'il foit connu , qu'il foit célebre: chaquefois qu'il entendra dire, tel vaiffeau e. toujours bien fait; il fe glorifiera d'en être, il fera fier de la gloire que ce vaiffeau s'eft acquilè , oü il delirera inte'rieurement qu'on en puiffe dire autant du fien. La réputation de tel ou tel vaiffeau e'tant une fois e'tablie , par une réfiftance opiniatre, en quelque manoeuvre hardie , 1'honneur qui en rejait lira fur fon Etat-Major, fera durable. Qu'on ne me dife pas que ces réputations, Ia gloire, 1'efprit d'émulation qui enréfulte, font des phantömes de mon imagination. Je défie le plus obftiné de mes critiques de me nier la rc'alite' de celle que s'acquit le Tonnant, au fameux combat de M. de l'Etenduere. Si Pé'tabliffement que je propofe aujourd'hui avoir eu lieu dès-lors , 1'Etat-Major de ce vaiffeau, renouvellé, peut-être dix fois depuis, fe croiroit-il moins honoré d'être chargé de foutenir une réputation fi bien acquife. Ainfi, les anciens régiments nommés les Vieilles-Bandes, confervent une réputation méritée , a jufte titre , par tant d'aclions de valeur, &c dont le fbldat, qui en fait nombre aujourd'hui, s'enorgueillit comme s'il y avoit eu part, c'eft qu'il font qn'en entrant dans ce corps , il a contradé 1'obligation de foutenir, dans 1'occafion . par fon courage , 1'ópinion avantageufe que 1'on s'eft formee de fon Régiment. Pour achever d'établir une marche fim-i I  .(78) file , uniforme , immuable dans le fervice de mer , je voudrois que 1'on fixatf, une fois pour toute , le rang de chaque vaiffeau entr'eux , de maniere que 1'ancienneté donnat leule 1'honneur du comrnandement : que d'inimitié , que de haine cette loi d'ancienneté éviteroit! Il fuffiroit, dans une rencontre , de connoitre le nom du vaiffeau a qui 1'on parle, pour favoir fi 1'on a 1'ancienfieté , ou fi 1'on doit la céder. Les vaiffeaux feroient féparés en quatre claffes , déterminées par leur force, comme il fuit; Ceux a trois ponts , de la première. Ceux de quatre-vhigt canons, de la feconde, Ceux de foixante-quatorze, de la troijCeme, Ceux de foixante-quatre, de la quatrieme. Le rang que le Viclorieux ou l'Inflexible, /e Triomphant ou le Sévere , auroit tenu dane la claffe que fa force lui a aflignée , ne feroit jamais changé. En cas de pertes x>u de naufrages, ces événements ne feroient perdre que le vaiffeau , fon nom vivroit aufiï-töt par celui qui le remplaceroit, a moins qu'il n'y eut de la faute de 1'Etat-Major ; alors la moindre punition feroit de mettre le dernier de fa claffe le vaiffeau qu'une manoeuvre inconfidérée & peu réfléchie , ou une réfiftance trop foible 3 des forces égales ou fupérieures, auroit ?%it perdre a la Marine,  La propnete d'un vaiffeau, affurée a u. Etat-Major eft la fource des plus pr &fcg avantages ; elle excitera , de % part , de$ foms plus e'tudiés, plus étendus, plus Cuivis, des precautions intéreffées, pour embelJir, conferver entretenir & perfedionner Ie vaiffeau qu, fui aura été coitifé; cette prof pnete, dis-;e, aura bien une autre force que toutes: les recommandations de 1'ordonuance pour lengager a veiller k la confervation de fon vaiffeau ; chaque Capitaine , chaque Urhcier le regardera comme fon bien, fa maifon fa demeure habituelle. Il s'apoli- ',da,nS Chf.^ "mPagne, a connoitre fes quahrés ou les de'fauts; il dtudiera dans la marche, par le changement de fa voilure le deplacement des poids , ou la difpolition des differentes parties de fon arrimage ou en donnant du jeu a fa mSture , le point de ia plus grande ce'lérité (i); il portera 1'at- _ (i ) Cctteétude eft plus intéreffantc qu'on n- crolt ,e n en citera qu'un trait entre mille, qUe je tien* Jjtémom peu fufpeft , 'a la feeonde rórtic dc M d o Vjlhers en I778. te K0chi, commandé parTc' & M. de Cilard, nc fe trouvant pas affez rit prlt pour fortir avec toute 1'efcadre , partir feul pour W% jpmdre au rendez-vous indiqué. II tomba dans «Rfc cadre anglaife qu, lui appuya une rude doffe. Kcppd détacha apres lui fes meilleurs voiliers • deia iu 1 fiFïïF& ii"'y avoit tlus aucunc éfpfe £ Jalur, lorfqu un Lieutenant qui avoit tou jours naygul fur ce vailleau , dit qu'il avoit vü U Rétfêchi ai-nn-n ter de viteffe lorfqu'on faifoit telle oü tclle difpofitiÓn qun md^uaj & en effet, la remarque étoit ]X on Vit les vaiffeau» chaiTeurs s'écartcr a vue d'oeil/ & I Z  (SoJ tention la plus fcrpuleufe a la propreté de fon vaiffeau ; & dans le Fort, il s'affurera, par des vifnes quotidiennes par lui, ou par les Officiers , fi les gardiens font exads a le garantir , autant qu'il eft en eux , de tout ce qui pourroit i'endommager. Enfin , il fentira qu'il eft de fon intérêt de le tenir toujours dans le meilleur e'tat poffible. Le réfultat de cette vigilance affidue , fera de prolonger le terme ordinaire de la dure'e, rmation des' Etats-Majjrs, f ,us leur nouvelle dénomination. En fuivant le nombre que nous avons jijdiqué plus haut pour en conclure la totalite', un exemple dans chaque rang fuffira. Ii'Etat major d'un Vaiffeau de foixantequatre fera compofé D'un Capitaine-Commandant, D'un Lieutenant-Capitaine, D'un Major, De deux Lieutenants , De deux Adjudants,.  De deux Enfeignes, D'un Lieutenant, *i D'un Adjudant. > a la fuite. D'un Enfeigne, J Emout, quinze Officiers. Zes Vaijfeaax de foixante-quatorqe &J quatre-vingt auront, Un Capitaine , Un Lieutenant-Capitaine, Un Major, Trois Lieutenants , Trois Adjudants, Trois Enieignes, Un Lieutenant, T Un Adjudant,. > a la fuite. Un Enleigne , J Et trois Garde-Marines. En toutdix-huit Officiers.. Enfin; les Vaiffeaux a trois Fonts auront y Uu Capitaine, Un Lieutenant-Capitaine y Un Major, Quatre Lieutenants Quatre Adjudants, Quatre Enieignes , Un Lieutenant, ~> Un Adjudant, > k la fuite. Deux Enieignes, J Quatre Garae-Marines. En tout, vingt-trois Officiers,,  (88) Suppofant donc que le nombre des vaiffeaux de ligne fe monte ou va fe monter a\ ceiui que nous avons fixé, nous aurons quatre-vingt Capitaines , autant de Lieutenants -Capitaines , & autant de Majors • trois cents cinquante-deux Lieutenants, autant d'Adjudants ; trois cents foixante-un Enieignes & deux cents quatre-vingt-dixneuf Garde-Marines , qui forment en totahté feize cent quatorze Officiers. Ce nombre elf , je crois, fuffifant pour armer comme ils doivent 1'être , les quatre-vin a la fuite. Un Enfeigne , J Deux Garde-Marines. En tout, neuf Officiers. Én celles qui ne porteront que du kuit; Un Capitaine , Un Lieutenant, faifant fondion de Major , Un Adjudant , Un Enfeigne , Un idem. a la fuite, "Deux Gardes, En tout, fept Officiers. En additionnant tous ces nombres , ou trouve foixante Capitaines , quarante-huit TYIajors, foixante - leize Lieutenants , cent Luit Adjudants, cent vingt Enieignes , & cent trente-fix Gardes-Marines. En totalite' ,>cinq cents quarante-huit Officiers ; li, a ce nombre, on ajoute celui que nous avons  (9°) ,. " . trouvë pour les vaiffeaux , & foixante-leize Officiers , pour le fervice des Ports , a places fixes, ( je dirai bientöt fur quel pied j'entends les e'tablir ) on formera un total de deux mille deux cents trente-huit Officiers , non compris les Géne'raux , qui, dans mon opinion, ne devroient plus fe regarder comme appartenant au Corps de la Marine ; je les en fepare dans mon plan , & je veux abfjlument que dès que le Capitaine d'un vaiffeau quekonque, a paffe au grade de Chef-d'Efcadre , il ne puifTe plus conferver ie commandement de fon vaiffeau , fes nouvelles fonctions 1'appelknt a commander , diriger , conduire un nombre plus ou moins grand de vaiffeaux re'unis en efcadre féparée , ou en divifion d'une arme'e nombreufe commande'e par un Officier fupe'rieur. Pour marqué exte'rieure de cette fe'paration , je veux que fon uniforme differe de celui des Etats-Majors, je lui öte les parements rouges , je change le galon , & ne lui conferve que les boutons a rancre. Comparons maintenant le nombre que nous venons de trouver , a celui que le Roi en entretient aujourd'hui, ék: voyons ce qu'il en reïultera. Fouvre le tableau de la Marine aftuelle (i), & je trouve cent quatrevingt-douze Capitaines, quatre cents onze Lieutenants de vaiffeaux & de Ports, vingt- (i) Ayant la promotion du mois de Mars 178c,  cinq Capitaines de bJülots , quatre eenre quarante-deux Enieignes de WnTeaux, S xante-iix Lieutenants de frégates hmV r pmmes de Mtcs, & cent q^rante^ix pecte , d Officiers auxiliaires , & „n a„f, g totthté > dix_h ^ ^ on aura Officiers ; ce nombre eft un peu hl\ 1 *"en , ,'en conviens ; mais auflf, J°n fiflï En parlant de Ia fituation ou font le, chofes, on pourroit ailé'ment, par une^ee2 de proportion, trouver a-péu-prS que?£ feroit 1'augmentation d'OfTIciers n£P«V pour, en rempliffant toufes les Sï fa re n " ^ ?1£d 0" i! eft afiuellemïn taire monter le nombre de vwfiW 1 a celui que fai établi dans ma fuöS? | me fois donne' la peine de la caBeT^ uJt Jl. i». tes' «""vertes, cVc. & le Ter Vice des Ports exigent dix-huit cent quatre-"  (9%) 11 vmgt-dix Officiers, il en faudroit deux mille cinq cents pour armer quatre-vingt-dix vailfoaSx de ligne, foixante frégates & fourmr au fervice des Ports. C'eft donc Venttenen de plus de deux cents individus dont j cconomife la dépenfe ; & 1'on verra bientöt que j'ai pourvu a tout ce que le fervice peut exi: oer Vous vous avance-^ beaucoup, va-t-on fe hater de me dire, vous n'aveUas encore parlédes flates ,gabarres, corvettes, lougres. ou cutters, armés &c. Vous ne 1™ «verpas encore atfigné d'Etat Major. Il eft facile de répondre a cette objeflion. On a vu que j'ai placé a la fuite de 1 EtatMajor de chaque vaiffeau, un Lieutenant, ou Adjudant, ou même deux Enieignes, pour obviera ladifficulté des remplacements en cas demorts ou malades, au moment d un départ précipité ; mais tous les vaiffeaux , je ■ me flatte, ne feront pas dans le cas d avoir tout alafoisbefoin de ceremplacement, ceft donc trois cents cinquante-fept Omciers, y compris les Lieutenants, Adjudants & Enfeignes a la fuite des frégates, dans le nombre defquels je trouverai toujours aifement de quoi armer vingt a trente corvettes D'aillenrs on verra , par le developpement demon projet, que le Roi peut trouver, dans la Marine du commerce , de quoi armer , en temps de guerre , les flutes & fes gajerrneS'm'appefantirai pas davantage fur ces détails, cette difculïïon eft trop fechej;  il me fuffit d'avoir de'montré que mon plan n'exigeroit pas un plus grand nombre d'Officiers , & n'entraineroit pas de ce cötc' une augmentation de de'penfe. Mais ces Officiers diitribue's maintenant en petits corps, donc le plus petit n'excede pas fept, &c le plus grand vingt - trois , font-ils fuffifamment payés ? Ont-ils des appointements en proportion de la cherté des vivres, dans les Departements oïi le fervice les oblge a render ? Nous fommes dans la troilieme anne'e d'une guerre dans laquelle, li nous n'avons pas eu de fuccès de'cidc's, nous n'avons, non plus, elfuye' de grandes pertes; les avantages balance's , de part & d'autre, ne nous annoncent pas une paix prochaine ( r). Chaque année la quantité de monde que 1'on raffemble dans Breft, ou dans fes environs, y a porté le prix des denrc'es de première ne'ceflité, a un taux e'norme ; mais la fub . filfance, ni la folde des Officiers n'a pas augmenté en proportion. De'farme', pendant que fon vailfeau eft dans le Port, on donne a chaque Officier les mêmes appointements qu'il avoit en temps de paix , & dans la plus grande abondance , tandis qu'on ne fait pas attention que tout fe vend a un prix exceiïifv C'eft, fur-tout, ces Officiers qu'on nomment Auxiliaires , & que le Commiffaire 7 ( i) Ceci s'écriyoit vers Ja fin de 1780.  qui ne lés clioifit pas toujours dans la clafie la plus opulente , ni ce qui eft encore pis , dans celle des mieux nés (i) ,.force avenir effuyer tous les dégoüts de 1'humiliation , que je trouve bien a plaindre. Ils n'emportent, en partant de chez eux, pour la plus part, qu'une foible conduite proportionnée a la diftance des lieux ; ils fe flattent d'étre employés en arrivant fur les vaiffeaux les premiers prcts , mais la lenteur des armements , en trompant leur efpoir, les force fouvent a languir plufieurs mois de fuite dans une difpendieule oiliveté. Avec 70 liv.. que le Roi leur donne par mois, il faut qu'ils fe logent fe nourriffent & s'entretiennent, encore font-ils obligés d'en faire les avances. Auffi beaucoup de ceux qui ne trouvent pas a s'armer tout de fuite, font-ils réduits a manger du pain fee dans un galetas, faute de crédit ou de moyens, ou pour fe ménager de quoi s'acheter un trouffeau pour la mer. Si encore ces appointements , tous infuffifants qu'ils font, étoient quittes de toutes retenues ( %); s'ils étoient payés ( 1) Pour ojoiltcr encore a 1'humUiation qu'on s'cfForce d'attacher au titre d'Officier auxiliaire, on n'a pas rougl d'en parer un matelot nommé maitre Tacques , connu par fon ineptie , fon ignorancc _& fes fottifes , lorfqu'il commandoit un petit corfaire de Nantes.. ( 2 ) Sans compter celle des quatre deniers pour livre pour.lcs Invalides , la plupart font encore impofés chez eux 'a la capitation. Pour que leur traitement foit convenablc, il fa'idroit leur donner iao liv. par mois, lorfqu iis font défarmés au départcmjwt, & 80 liv. lOifqu'ils font armés.  (91) regulierement a la fin de chaque niois ; fursde ce qu'ils onta dé penfer, ils vivroient, en confequence , du peu que cette fbmme leur procure. Pourquoi ne pas leur donner plus de douceurs ? Qui empêche de les traiter plus favorablement ? C'eft leur faire payer bien cher le mépris dont on les accable.Quels fervices peut-on en attendre ? Mécontents , dégoutés, flétris, pour ainfi dire , fous le jouo d'une autorité mtprifante, ilsjont'deftinés k ramper au dernier ran°fans énergie, fans pouvoir; ils ne peuvent gueresenimpoferaux équipages? De quelle "tilité peut etre a 1'Etat leur expérience . des qu'ils ne font employés qu'en fous-or-.dre, & que le plus jeune & le plus étourdi des Enieignes de vaiffeau, qui les dédaignent, fe garde bien de s'éclairer de leurs: confeils ? Ne craignons donc pas de le répéter, cet établiffement bien vu, eft, on ne peut pas plus , nulexécuté. Daas le fyftême aótuel , po urquoi du titre honorable d'Ofncier Auxiliaire , ne pas leur faire un' état réél? Si le Gouvernement perfide i dimmuer, en temps de paix f la moitiédé les forces nayalês , ces Officiers rendus au commerce , oh ils continueroient d'acqüérir des connoiffances fur mer , devroie.it y rapporter les marqués de leur dévouement; il eft d'amtant plus méritoire, qu'il eft accompagné des plus fréquents dégoüts. Si le choix des Officiers avoit été fait avec plus de difcernement; fi, en cherchant les plus inf-K z  truits on avoit eu lom de nadmettre que* ceux qui , par leurs fentiments , leurnailfance & leur éducation , étoient dignes de frayer avec une Nobleffe ombrageufe & fiere , qui s'eft toujours eftbrcé de les tenir éc'artés, pourquoipar un jnfte retour, le Gouvernement qui les appelle a ion tecours, qui accepte des fervices- offerts par quelques-uns généreufement, ne leur aceorderoit-il pas une diftinftion permanente qur peut feul etre le prix du facrifice de leur amour propre ? Pourquoi leur refuler, avec opiniitret/, la fatisfaftion de rapporter,, chez eux , la feule preuve qu'on puifle leur donner ou'on eft content de leur fervice > Loin de laiffer tomber dans 1'oubli un titre momentané , il falloit, par une loi cqnftante, 1'affurer a 1'Officier qui la merite, qui lra obtenu , le lui conferver toute la vie, lui donner le droit d'en porter par-tout a marqué diftinöive, comme un gage de la reconnoiffance de la patrie, & une aflurance que fes fervices pourroient encore lui etre utiles & agréables, fi la guerre les reclamoit. Une ordonnance qui oftnroit cette perfpeaive feroit fuivie des plus heureur effets. La nomination de ces Officiers, faite avec plus de cboix , 1'honneur feul d'y etre admis , feroit une diftinftion ; mais il faut fë rappeller qu'un e confidération n'a de prix s.u'autant qu'elle eft durable. Les hommes, qui font toujours mus par Pintérêt de leur amour-propre, peuvent-ils aecorder quet-  que faveur a une diftinöion pafTagere qol va rentrer, a la paix, dans le néant, donc on rafaitfortir. Je luis bien perfüadé qu'on ne fe fouviendra , dans la Marine, des Auxiliaires que pour s'amufer du ridicule, dont un orgueil jaloux s'eft effbrcé de les couvrir. On a affecte' de fe plaindre bien haut de 1'ineptie, la grofiiereté, 1'ignorance, ou la baffeffe de quelques-uns; on s'e'crie fans cefle que c'eft proftifuer 1'uniforme de la Marine, que de la faire porter a plufieurs d'entre eux, qui le de'shonorent; on troüve de'lagrc'able d'être obligé d'admetreafa table des hommes fans naiflance & fans éducation; mais a qui doit-on s'en prendre ? Aux Chefs mêmes de la Marine , a plufieurs d'entre ceux qui commandent, qui ne mettent pas affez de difcernement dans leur choix. Je le repete encore, & je ne fauroit me laffer de Ie dire, en affociant tant de gens au ftérile honneur de porter 1'épaulette, il ne faloit pas laiffer entiérement & la difpofition des Commiffaires aux Claffes Ie choix des Sujets dont le Gouvernement vouloit'tout-d'un-coup augmenter fa Marine. Le peut de délicateffe que la plupart y ont apnorté, annonce, de leur part, une partialité didée, fans doute, par des motifs. particuliers (i). Il falloit les chercher dans ^ ( i) II y a fans doute des motifs particuliers qu'il' jr'eft pas bien difficile de diviner, des fujetg de mérite,  (9°y ïa bonne Roture, ou la NoblelTe commercante, & rien pas admettre qui ne fuffent munis d'atteftations des Juges, des Cure's, & des Principaux notables des lienx de leur .que Ieur-naiflaace ou leurs prérogativcs fouftraient a 1'autorité des clafTes , n'auroient pas voulu etre envoyés dans les ports comme les matelots de levee , ni sembarquerfur les vaiiTeaux du Roi,fans êtrepourvus d'un Brevet qui leur afiigna un rang dans la Manne. C'étoit le but de 1'inftitution , & 1'intention du Mimltere : ils devenoient , dès-lors , fufceptibles des rnemes diftinaions & des mêmes privileges que les Officiers de la Marine ; & fous ces droits , ces confiderations , & les formalités qu'ils entrainent , qu on a eu plus a cceur de leur êtcr. En les privant des titres que le Miniftre leur deftinoit , on s'eft ménagé les moyens d'en difpofer d'une maniere plus defpotique , K de leur fermer tout accès dans le '.Corps. Voia un .trait qui prouve la différence réelle qui exifte entre un Officier portcur d'un brevet pour la campagne , & celui qiti n'a qu'un fimple ordre du Commandant du Port : Dans une de nos armécs navales , le Capitaine d'un vaiffeau ayant porté des plaintes au Général contre un Officier auxiliaire de fon bord , qui, dans un moment d indienation , d'emportement, lui avoit remis fon epaulctte d'une maniere peu refpeftueufe , le Général lui ht cette réponfe : fi 1'Officicr dont vous êtes mecontent ,. & qui a manqué 'a la fubordination qu'il vous devoit, n'eft pas muni d'un brevet pour la campagne, s il n eft Officier que de la fa?on des Commandants desTorts, calTer-le fur le champ , & mcttcz-le matelot a douze ftancs. Cet ordre a été exécuté ; il fe trouva, comme mille autres , dans ce cas ; il fubit cette peme , & a ete débarqué au premier Port. Je laiflc 'a penfer au Lecteur l'impreflion défa\-orable que cet cxemple dut faire lur 1'équipage , !e refpeft qu'on porte a un Officier cxpofé 'a ê-re traité de cette maniere. Le fUs d'un Macon, d'un Cordonnicr qu'on a fait fortir de fa fphere, y rentrc , a la bonne-hcure ; mais il faut d'autrcs forma ites pour un fujet bien né , que la Cour a pourvu d un brevet. Ces diftinélions échappent au grand nombre.  naiifance, qui certifialfent la re'gularite' de leurs moeurs , & la puretéde leur origine.. Les CommilTaires n'eulfent dü fervir qu'a prouver leur capacite', par la quantité de leurs voyages au long cours; alors ceux que la bonne volonté , 1'ambition ou la gloire, ont fait entrer dans la carrière maritime , n'auroient pas a rougir de fe voir confondus avec des lils de vils artilans ou de laquais -(i), & de partager fans diftinctions les dédains que la vanité & 1'orgueil leur prodiguent a tous. Enfin , fi 1'e'conomie ou quelques autres raifons font rejetter mon fyftême , fi le Roi ne veut pas entretenir en temps de paix une Marine fi puiffante , un corps d'Officiers fi nombreux, je ne vois rien de plus fimple , que de perpe'tuer, affermir , & perfeöaonner l'établilfedes Officiers Auxiliaires Ce que je vais propofer ici révoltera, j'en fuis fur, la hauteur intolerante de la Marine ; mais, comme je n'ai rien a me'nager , je propofe avec franchife tout ce cfu'il me femble avantageux d'adopter. Difons le donc encore une fois, le parti qu'on a pris d'admettre fur les vaif- ( i ) Un Officier cl unc naifiancé honnêtc & d'une capacite reconnur , que fon patriotifmc ou 1'ennui de Poüïvcté a conduit a Brcft , avec un brevet de Lieutenant de frégatc pour la campagne , a eu le défagrément frrtgulier d'y rrouver un laquaisquil'avoit fervi, levêtu du même habit & du m;mc titre. La Marine ne fe montre aufli peu délicate fur le choix , que pour en pren -'re droit de méprifcr avec unc ombre de juftice , dans la perfonne de quelques particuliers , ceux qite. J'on confond fous les titres d'Auxiliaires.  feaux du Roi des Officiers Auxiliaires, eft bien vu ; mais, fi on veut les conlerver, il ! faut leur öter tous les lignes de réprobationqui les flt'triiTent, en taifant difparoitre les humiliantes diftinöions qui les morti- j fient; il faut abbattre ces barrières que 1 1'orgueil a pofées entre les Officiers du grand Corps & ceux des grades intermédiaires , ane'antir ces derniers, & donner indiftinöement aux Auxiliaires les grades de Lieutenants & d'Enfeignes, lorfque leur expe'rience, leur conduite, leur lumiere , leur nailTaiice , & leur e'ducation les en aura | rendus fufceptibles. Pendant la paix ces Officiers continuellement en activité fur les vaiffeaux du Commerce nourriroient leur expe'rience dans les fonctions pénibles d'un me'tier qui demande un exercice habituel; & loin de perdre , par une fufpenfion néceffaire de leurs privileges, les avantages j refpeóHfs de leurs grades, ils y feroient ava'ncés fuivant leur me'rite , & rouleroient avec le corps de la Marine , fuivant 1'anciennete' de leurs Brevets Cet e'tabliffement que je propofe , en paffant, a fes incoive'nients, je le fais; je ne fais que 1'iadiquer comme un diminutif de mon plan. Au refte, ces re'flexions m'ont entraine' loin de mon fujet, fy reviens. Je plaidois la caufe de Pindigence, & je difbis qu'on ne peut s'empêcher de convenir que 1'Officier fans fortune , attaché au fervice du Roi, eft reellement bien a plaindre, En effet,; trouvera-  (IOIÏ trouvera-t-on que les Officiers, foit-difants du grand Corps, foient beaucoup mieux traite's que ces Auxiliaires? Comment 1'Enfeigne de vaiffeau qui n'a de chez lui qu'une modique penfion pouvoit-il vivre avec huit cents francs d'appointement, lans le crédit qu'il trouve dans les départements ? Je vais exciter les clameurs de la prudente économie mais fans m'en laiffer étourdir, je propofê de les augmenter a 1'Officier comme au Matelot. Je penfe qu'on devroit donner au Capitaine de vaiffeau 3^00 Au Capitaine de frégate 3200" Au Lieutenant-Capitaine 2800 Aux Majors de vaiffeau & frégate. 2400 Aux Lieutenants 1800 Aux Adjudants 1500 Aux Enfeignes , \ lzoo Et aux Garde-Marines 000 J'ai calculé avec foin ce que le nombre d'Officiers , dont 1'augmentation de vaiffeaux que je luppofe étabht la néceffité, couterpit a 1'Etat, & je trouve que la fomme de leurs appointements, réglés fur le tarif fe monte k trois millons cinq eens trentequatre mille trois cents livres. 3,534,300 1. J'ai calculé auffi, avec le plus de jufteffe qu'il m'a été poffible , k combien doit fè monter ceux de la Ma"ne actuelle : j'ai trouvé qu'il forme un total de ^,^9,2^01. L'excédent eft donc de. . . 895,040  Maintenant par une regie de proportion, il eft facile de trouver 1'augmentation des appointements de la Marine actuelle , monte'e au nombre que mon projet exige, ona vu qu'il étoit de deux mille cinq cents Officiers; j'ai encore pris lapeine de chercher cette regie d'approximation , & le réfultat de mon ope'ration prouve que leur entretien , fur le pied aöuel, coüteroit au Roi environ deux millions' neuf cents foixante-dix mille cinq cents trente livres; c'eft a la vérité pres de fix cents mille francs de moins fur la fomme que mon plan demande ; mais qu'on falfe attention que j'augmente les appointements de chaque grade , & que je les mets a un taux plus proportionné aux befoins & | la difficulte' des circonftances. Par quelle fatalité, le Corps auiourd'hui le plus utile, eft-il le plus mal traité ? On a augmenté ceux de 1'Infanterie; il n'y a que ceux de la Marine auxquels on n'a pas touché. Cependant le fervice de 1'un eft bien moins afiujettiffant que que celui de 1'autre, L'Officier de terre eft fur , en paix comme en guerre , a moins qu'il ne foit a 1'Armée , de paffer dans fes foyersdomeftiq ïes feptmoisfur vhvj-quatre, '&'robiigatiou de fournir ou de payer deux hommes de recrue en fon corps, eft une légere rértibution en comparaifon des douceurs qu'il s'y procure, tandis que 1'Officier de mer que la guerre éjoigne fouyent, pour plufieurs années, de fesPcnates3  (io3J eft privé entiérement de ("es appointements Lorfqu'au retour d'une longue ablence if toiücite un congé de ia Cour pour aller vaquer a les affaires, il eft vrai qu'on ne lui fait aucune retenue, s'il n'eft abfent qu'avec la ieule permiffion du Commandant; mais il eft xiijet a être rappellé au premier ordre de Ia fantaiüe, ou du caprice de ce Chef. Ces conüderations m'ont déterminé a étabhr des lemeftres dans la Marine; on verra a la fin de ce projet, par la maniere d'employer les forces navaies en temps de paix qu il eft poffible de donner cette fatisfaction, a des époques réglées. Je voudrois donc qu'on divifat les Officiers de même grade dans les Etats-Majors (les trois Chefs &c les Garde - Marines exceptés ,) fans ttop fe foucierque ces nombres loient ronds, de maniere qu'il y eut toujours au département, fur trois Lieutenants , deux, & ainfi des autres grades ■ obfervant de ne pas occuper a la fois a d'autres fervices tous les Officiers a la fuite d'un méme vaiffeau , fur-tout dans ceux du troi iieme rang & des frégates de dix-huit, ou ils doivent nt'ceffairement completter Je tiercement. MM. les Gatde-Marines nejouiront du femeftre qu'après qu'ils feront jugés fuffifamment inftruits. Ils feront ouverts tous les fix mois après une revue d'Infpecl teur, a commencer au premier d'Qdobre • c'eft-a-dire , que fur dix-huit mois , on en paffera douze au département, & fix chez L z  (Iö4> „ . . foi. Les Majors & Lieutenants-Capitaines feront obligés d'alterner , pour qu'il y en ait toujours un d'eux préfent, tandis que 1'autre eft chez lui, ou il ne pourra refter plus de fix mois, y compris le temps de la route, & le Capitaine , lur un an, fera tenu d'être quatre mois a la rite de fonEtat-Major. Les choles établies fur ce pied, je voudrois foumettre les Officiers de chaque grade , partant pour le femeftre a une ïmpofition proportionnée a leurs appointements , qui feroit verfée dans une caifie particuliere établie a cet effet, dans chaque département des ClalTes, comme il fuit : Le Garde-Marine payeroit. . . 60 1. L'Enfeigne 9° L'Adjudant Le Lieutenant, . . , 15° Le Major I e Lieutenant-Capitaine. . . . 2.10 Le Capitaine de frégate. . . . 240 I Le Capitaine de vaiflean. . . . 270 J'indiquerai bientöt a quel ufage je deftine le produit de cette taxe , en luppofant que le tiers des Officiers feulement, profitat annuellement de la liberté d'aller en femeftre , elle produiroit au moins cent vingt ou cent trente mille livres, &c. Les Officiers qui font réfidence dans les Ports de la Marine, ou dans 1'intérieur du  (ioj) Koyaurrie , verferoient Jeurs impofitiorrs dans une cailTe établie au principal département , pour le produit en etre réparti aux bureaux des ClaJles qui en dépendent, furtout aux plus pauvres & aux moins peuplés , & je la nornme , a caufe de cet ufage, caiflède 'répartition. Je voudrois de même qu'on augmentar la folde de chaque clalfe des hommes claifés; qu'on donnat aux novices ou juvenins, dont je parlerai dans la fuite , quinze francs ; aux matelots proprement dits, dix-huit livres ; aux namilants, nouvelle clalfe de matelots que j'établis, vingt-une livres; & aux gabiers, vingt-quatre. Je demande a préfent s'il eft pofïlble de fe difïïmuler les avantages infinis que 1'Etat retireroit d'une Marine nombreufe bien payée , & remplie d'une louable c'mulation , quelque Ibit le nombre de vaiiTeaux ou on la veuille faire monter ? Il me refte a parler de la difcipline, & de la police a étahlir dans chaque vailTeau , & dans les Ports: c'eft ce que je vais détailier dans le Chapitre fuivant.  (io6) CHAPITRE IV. De la Difcipline ; des différents détails d'un Vaiffeau , confiés a différents Officiers ; de Vaffemblée des Levées, de Pemploi des Volontaires , & de la police intérieurs des Vaiffeaux, JF E définis Ia difcipline , 1'obfervance exacte & prtcife de tout ce que les Ordonnances prefcrivent dans le fervice maritime. Rien de fi arbitraire cependant , rien de fi changeant que le fervice qui fe fait a bord des vaiiTeaux dans les ports , dans les rades , ou a la mer, fuivant le caprice de chaque Capitaine ; il varie , s'approche ou s'éloigne d'avantage de 1'efprit de 1'Ordonnance , & communiqué aux fonctions dont un Officier peut etre chargé , une incertitude préjudiciable a leur prompte exécution ; cette fituation pénible le rend fouvent indécis fur ce qu'il doit prendre fur lui de faire ou de ne pas faire ; dans le doute , s'il encourrera le blame , ou s'il obtiendrn 1'approbation d'un fupérieur qu'il connoit peu , & qu'il appréhende de rencontrer dans un moment de mauvaife humeur. C'eft cette  ( «>7) . mcertitude & cette indécifion que je veux faire ceffer; voici. les moyens que je propofe. Fixer, par une Ordonnance nette Sc précife , le fervice que chaque Officier doit faire , quand Sc comment il peut s'abfenter, le nombre d'Officiers qui doit refter a bord , dans quelles circonftances ils peuvent le quittèr , de'coucher meme , fi leurs affaires 1'exigent. L'Ordonnance du 0.5 Mars 176$ , pour être trop exigeante a cet e'gard ; n'eft prefque jamais fuivie , ce qui ne contribue pas peu a admettre la variété dont je me plains. Je voudrois donc qu'on permit aux Capitaines & aux Officiers d'alier a terre , d'y coucher même , quand il feroit néceffaire j mais je defirerois , en même temps , que 1'Ordonnance fit une diftinöion , qui me paroït effentielle , entre une Rade foraine, expofée aux infultes des ennemis, ou aux événements que la force du vent peut occafionner ; & une rade füre , défendue , bien fermée , comme celles de Breft Sc de Toulon ; il exifte entr'elles une différence bien fènfibles. Un vaiffeau dans les Rades des ports Neutres , ou dans celles de nos Ports f eft encore dans une pofition bien différente. C'eft donc aux Ordonnances a mefurer les précautions fur la probabüité des rifques k courir , & fur la quantité d'Officiers que le fervice exige ; fans ces diftinctions , les regies qu'elles preferivent font fi rigides, qu'il  (io8ï eft impoflible de ne pas les enfreïndre; dela s'enfuit le relachement de la difcipline dans le premier cas , c'eft-a-dire , dans une Rade peu lüre , expoiée aux attaques de 1'ennemi, aux efforts du mauvais temps , de la grofle mer & du grand vent ; j'exigefois , fans doute, que Te Capitaine & le LieutenantCapitaine ne fuffent jamais abfents a la fois, & que li la diftance des lieux le permettoit, ils ne puffent pas de'eoucher ; je ne voudrois pas, non plus , que les deux Lieutenants , les Adjudants , ou les deux Enieignes quittaffent le bord enfemble; je demanderois, enfin , qu'il y eut toujours les deux tiers de 1'Etat-Major a bord. Mais dans nos Rades les plus clofes , & celles de nos Colonies , ou il n'eft prefque jamais arrivé d'événements par le mauvais temps , ou 1'on n'a rien a craindre de 1'ennemi , exiger Ia même régularité, c'eft expofer , a coup für , les loix qui la prefcrivent a être tranfgreflees, ce qui arrivé prefque toujours; & quand on s'écarté une fois des obligations qu'elles impofent, il eft difficile de fixer le point ou 1'on doit s'arrêter; c'eft a 1'Ordonnance elle-même a Pindiquer. Voici, a mon avis , jufqu'oïi elle doit fe fnontrer complaifante. Permettre au Capitaine, au LieutenantCapitaine , & au Major , de s'abfenter aufli fouvent que leurs affaires le demanderont, de coucner même a terre, pourvu qu'il y ait toujours un des trois a bord. Dans les  vaiHeaux de foixante-quatre , prercrire aux Lieutenants , Adjudants & Enfeignes , de faire chacun, a leur tour , une garde de vingt-quatre heures feulement; & aux trois Garde-Marines , de fuivre le fervice de ces Officiers, c'eft-a-dire, que le-premier feroit Ia garde avec les deux Lieutenants , le fecond avec les Adjudants , & le troifieme avec les Enfeignes , de 'maniere qu'il y auroit toujours trois Officiers a bord' ; Ie SS'. 1ui rePrt'fenteroit le Capitaine; 1 Officier de garde & le Garde-Marine deftines a aller prendre 1'ordre a bord du Commandant , ou a faire les corvees de la chaloupe ou du canot, qui demandent la prefence d'un Officier. Si, dans le moment de fon abfence , on appelloit a 1'ordre, je le ferois remplacer par un Ordnnnance tiré des Vjlontaires, dont je propoferai ci-après le nouvel établiffement. L'Officier de garde ne doit pas quitter le bord fous quelque prétexte que ce fbit. Si, enfin , dans un cas extraordinaire, les trois Officiers-Majors étoient obligés de ^„ww u , iiui.-. ie pms ancien des Lieutenants, ou , h fon défaut, celui qui Je luit, feroit tenu de refter a bord , il repréfenteroit !e Capitaine, auroit le commandement ; 8c les fonöions de 1'Officier de garde, foit Adjudant , foit Enfeigne , •feroient de veiller , par lui-méme , au travail qui fe fait; d'être préfent aux arrivées & aux départs des canots & chaloupes du  bord , oü étrangers ; de tenïr le vaifTeail dans la plus grande propreté ; de prendre ou faire prendre note des gens a qui il auroit permis d'aller k terre, & de leur retour ; maintenir la police & le bon ordre k bord ; punir ceux qui le mériteroient; faire 1'infpection de la garde , la faire monter en fa pre'fence , (le Garde-Marine fe mettroit toujours a la tête pour la faire défiler ) ; d'avoir 1'oeil a tout ce qui fe pafTe a bord, & d'en rendre compte a POfficier fupe'rieur , commandant en chef. Les Garde - Marines auroient les mêmes fonctions , fous Pautorite' du Chef de garde. Sur les Vaiffeaux de foixante-quatorze & quatre-vingts canons; comme il y a trois Officiers de plus, les Lieutenants , & les Adjudants feulement, feroient aufli des gardes de vingt-quatre heures, & les Enfeignes & les Garde-Marines les doubleroient. Dans les vaiffeaux a trois ponts , il y auroit trois Officiers de fervice en meme. temps, qui ne monteroient la garde que de vingt-quatre heures feulement; les Lieutenants & les deux premiers Adjudants, feroient toujóUrs Chefs de garde , les autres les doubleroient , fuivant Pancienneté ; &C les Garde-Marines les tripleroient en alternant entr'eux. Les quarts , a la mer , pourroient fe régier ainfi. Dans les vaiffeaux a trois ponts , il y en auroit huit , c'eft-a-dire, que les quatre Lieutenants, & les quatre Adjudants,,  feroient toujours Chefs de quarts ; les Garde-Marines doubleroient ceux-ci , & les Enfeignes les premiers. Dans les vaiffeaux des autres rangs; il n'y auroit ni plus ni moins de fix quarts , dont tous les Chefs pourroient de temps en temps, & dans les beaux parages, fe repofer fur leurs fecoiids, du foin de conduire Sc manosuvrer le vaiffeau , pour leur faire effayer leurs forces f & leur donner de 1't'mulation. Le fervice fixe' de cette maniere , ne laiffe plus aucune incertitude. Dans les vaiffeaux de guerre , c'eft ordinairement le premier des Lieutenants; Sc dans les fre'gates le fecond des Officiers, que 1'on charge du de'tail de tout le batiment ; c'eft lui qui répond de tous les effets qu'il renferme , qui tient compte de la confommation j'ournaliere des vivres, bois , fourages, agrès , me'dicaments , uftenfiles , &c. C'eft fous fes yeux , & par fes mains, que fe font les e'tats de demande , les bil— Iets d'höpitaux , les livraifons des hardes , & géne'ralement tout ce qui concerne la de'penfe , Pentretien , les mouvements du role , &c. j'attribue toutes ces mtmes fonctions aux Majors; mais comme je defaprouve cette manie de tout faire par un feul (i ) , (i) Ie Lieutenant en pied , dans le régime aftuel, eft 1'homme eflentiel , unique , univerfel ; c'eft lui qui fait tout faite , & qui confomme généralemenr tout ce qui fe dépenfe a bord; fon détail eft tel, qu*  (11%) Be rien par les autres; j'en fépare les détails fuivants. L artillerie , que je donne abfolument au premier des Lieutenants, c'eft-a-dire, qu'a l'armement, on remettra a cet Officier & au Maitre Canonnier, un imprimé femblable h 1'inventaire général , article du canonnage. Il examinera affidument li tout ce qui eft marqué fur la feuille , s'eft trouvé dans le magafm du vaifieau , & a été tranlporté a bord ; fi tout eft en état. Sur les demandes, vifées du Major , on remplacera ce qui aura manqué , ou ce qui lera jugé hors de fervice ; il fera préfent a 1'epreuve des canons & des poudres ; il fera mettre , a la fin de chaque mois ,'fur le regiftre du Canonnier , les confommations, qu'il fignera; & fur le fien, les mêmes confommations, fignées du Maitre canonnier. Enfin , il aura une infpection générale fur tout ce qui eft du refiort du canonnage; c'eft a lui que le Maitre Canonnier , le Capitaine d'armes & les Ar- 1 OTïcicr qui le fint n'oferj. pas ctifpofer d'un feul fil caret fins fon aveu ; lét.-nJuc dc fes fonch'ons , 1'immenfiré de fon détail, dans un vaifieau de lifrne eft_ ciFrayante : je 1'augmCHte encore par quelques articlcs d< mon plan ; c'eft ce qui m'a détcrmin- h cn féparer quelques parties. D'ailleurs , l'attcndon partanéc entre tant d'obiets , ne peut que les embralTer foiblement : qu'arrive-t-il, 1'Ofïïcier deftiné a le remplacer, après unc afl'on ou il auroit été tué, eft teut ncuf, & fc trouve accablé d'une befogne qui ne lui cflpas familicre.  ("3) muners feront tenus de rendre leurs comp. tes qu il prefentera enfuite , fignés de lui au Major a vérder & vifer. Cette polï e' s etendra fur tous les Canonriiers, depuis le Maitre. jufquau dernier matelot. Il ailra fur eux 1'autorité & 1'infpeflion qu'un Ca! pnaine a dans 1'Infanterie fur les foldats de fa compagnie. Le fecond des Lieutenants aura, de même, Ia pohce , l'infpe&on & difcipline de la compagnie des Volontaires, & du detachementdes troupes embarqués , a moins tn^Srt01 parunL Ré^s Le premier des Adjudants aura aufli le detail du pilotage, 1'infpeétion fur les oilotes, leurs uffenfiles, & tout ce qui a rat,, port aux fignaux a la timonerie. Le fecond des Adjudants, celui du charpentage , ferrurerie & vitrage Le premier des Enfeignes aura celui de la voilene & du calfatage; & enfin U fecond des Enfeignes aura le détail des bateaux, de la tonnellerie & de la pein ture. Les trois Garde-Marines feront affocies, aux trois principaux détails , de 1'ar tilene , du pilotage & du charpentaee , &c -fous rendronr compte au Capitaine, aü Lieutenant-Capitaine & au Major Ce der nier confervera 1'infpeótion générale fur tous ces détails, fans les géner ; & dans le cas leulement ou il appercevroit de Ia né°-Ii gence ou de la mauvaifè volonté ilbIui  (H4) tefteroit les confommations du Maitre ^ les vivres, les mouvements du róle, le détajl de rhabillement, &c. Par cette nouvelle difpofition, tous les Officiers occupés de quelques détails prendroient 1'habitude de calculer les quantités, d'apprécier Ia qualité des matieres que ces details emploient, leurs durées, & les inconvéments de leurs pertes ou mauvaifes diftributions; ils obiigeroient a une certaine économie ces Maïtres qui font toujours prodigues de ces effets dont on leur paffe trop facilement la confommation ; enfin, il leur leroit aiie de connoitre fuctelfivement, dans la plus julte eftimation , tout ce qui entre dans 1'entretien journalier d'un vaiffeau de ligne ou d'une frégate. Ces connoiffances préliminaires les mettroient plutöt en état de paffer, dès qu'ils en feroient jugés capables , au grade de Major & de Lieutenant - Capitaine, &c. (i). Ces dilbofitions femblent,_au premier coup-d'ceif, minutieufes; mais plus on y réfiechit, plus on en doit fentir les avan- (i) Dans les vaiffeaux du premier , fecond & troifieme ran<^, comme les Etats-Majors foot plus nomtrcux, & le détail plus confidérable, le Major pourra choifir parmi les Officiers que ces difpofitions laiffcnt librcs , un ou deux de différents grades , entre les mains dcfquels il fe déehargeroit dc quelques parties de fon détail, comme 1'habillcmcnt , les confommations du Chirurgien & de 1'Aumênier. Tous les Officiers feroient, au refte, chargés de la police.  tap. II ne faut pas oublier que les EtatsMajors , hornes aux individus qui les com pofent doivent tirer de leur propre fond outes leurs reffources. Dans ^ aüuel, la fantaifie des Chefs, des idees üantipathie, oude convenance , leur don neut fouvent le defir de le choifir eu"_ meines des feconds, ce qui occafionne une mutation continuelle dans les Etats-Major • le\?1CJT qU1 f' fuC,edent 0M * P^nê ie temps de connoitre les gens de féaai W > e\de effontielle pour en faire ïne lage diftnbut.on. C'eft fur-tout dans la for ïnation des équipages , & dans le choix quon en fait pour leur affigner différents poftes dans le combat, qu'on reconnoït ce difternement exercé de celui qui y a pre-_ I-.ir6 P?" dj Pr,eVo7ance que 1'on met dans 1 affemhlée de levées de matelots, & U formauon des équipages, eft , k mon avis tme des caufesjournalieres qui eontribuent le plus a leur prompte deftruclion. On les raliemble de tous les cótés de la France • on les occupe , dès qu'elles- font arrivées ' aux travaux du Pon , en attendant oue les' vaiffeaux deftinés k les recevoir foient prêts lans sinquiéter fi ces hommes qui ont faf? de longues routes , qui font excédés de ïatigue, n'ont pas befoin de quelques i0ur5 de repos , & s'ils ont pu fè procurer des gites fams & convenables. Us fo mettent en penfion chez la première höteffe qui veui;  ("O les-prendrea crédit. Leurs hardes qu'ils font venir paria melTagerie, quelqu'autre voie plus lente, leur manquent abfolument; ils auroient befoin de quelque délalTement , mais la néceffité de payer leurs dépenfes les force a fe préfenter au travail. Vingt ou trente fous qu'on leur donne par jour fiiffifent k peine a leur faire trouver un mauvais gite, & la plus groffiere nourriture; ils ie logent fouvent, fur-tout a Breft, dans les galetas d'une rue étroite, malpropre, & femblable a un cloaque fangeux ou le foleil n'a jamais pénétré; ils couchent deux ou trois fur un même grabat, ou ils refpirent, éveillés comme endormis, des miafmes putrides qui attaquent bientöt la conftitution la plus robufte. Il arrivé quelque fois qu'on ne leur laiiTe pas le temps de pomper ces émanations funeftes; mais c'eft éviter un mal pour tomber dans un autre : deftinés k remplacer des hommes malades au moment du départ, on les tranfporte, fans pitié, k bord des vaiiTeaux prêts a partir , avec les feules hardes dont ils lont couverts. Si ce ne font pas les circonftanees qui les expofent a cette difette, c'eft louvent le libertinage ou 1'ivrognerie. Les vaiiTeaux appareillent, ces hardes s'ufent & fe pourrilfent fur eux , la mal-propreté qui s'enfuit, engendre la vermine & des makdies contagieufes. Il n'eft cue tron ordinaire de voir 1'homme fain victime de la nécelfité qui le force de partager ie lit de fon  fon fale compagnon, de boire dans la même taffe , & de manger dans le même plat. Telles de'goütantes que foient ces triftes renexions , je m'y fuis livre', paree que les funeftes confe'quences des maux que je viens de de'tailler fe font appercevoir tous les jours. L'humanité , gémÜfant de tant d'horreurs , a beau tendre les bras , tous les coeurs fenfibles de'tournent les yeux , & les cceurs endurcis voient ces malheurs de fang froid, paree qu'ils les croient fans remedes. Il en exifte cependant ; mais la coutume a tant d'empire fur nous , ciu'elle nous fait rejetter avec mépris toute èlpece d'innovation. Nous verrons , dans le Chapitre fuivant, le remede a tous ces maux. Mais il ne fuffit pas de préferver Ia fanté de ces hommes précieux de 1'inclémence des failbns & des influences du mauvais air , il faut encore arracher I'homme vicieux a fes funeftes penchants, mettre un frein a 1'audace entreprenante de celui qui fe fent affez fort pour opprimer le foible , 1'arrêter , 1'intimider par la crainte des cMtiments ; & par une jufte difpenlation des douceurs & des fatigues attachées a leur état , leur faire gouter a tous les avantages d'une exaéle difcipline. II faut encore favoir diftinguer & punir la oareffe , exciter & récompenfèr racHviteA, faire fentir enfin par des réglements fages & précis , l'imporrance d'une fubordmation lans borues , & des égards refiM  C»8) pedifs a étahlir , parmi des gens de-tant de profefftons différentes raffemblées dans. dans un vaiffeau ; de maniere que les prétentions des uns ne foient pas a la charge des autres ; affigner des places fixes , dans Ie moment ou tout le monde doit donner a la manoeuvre , a tous les individus qui compofent ('équipage. Il exifte fur tous ces objets une loule cfabus e'normes que je ne puis qu'indiquer ; mais c'eft a une Ordonnance faite exprès a defcendre "dans tous' ces petits détails , a pofer une ligne de démarcation , qui foit la borne des réclamatïons des uns contre les ufurpations des autres , & qui termine , fans retour , ce conflit d1 autorite' qui fait le fujet ordinaire des querelles qui s'e'levent entre le Maitre & les gens de differents me'tiers. Je me contenterai de dire, en paffant , que c'eft a elle a donner au Maitre Nocher une autorité bien poiitive fur les chefs de métiers , a qui, pour marqué de dépendance, en fixant 1'autorité par le rang , je n'attacherois plus que la qualification de Contre - Maitre. Je voudrois donc qu'un article de 1'Ordonnance fixat d'une maniere bien précife , le rang du Maitre Nocher après le dernier Officier ; qu'elle cbligeat tous les gens de 1'équipage indiftinctement, a reconnoitre; qu'il eut enfin les mêmes droits & prérogatives qu'ont les Adjudants dans 1'Infanterie. Les troupes que 1'on embarque appor-  (li?) fent^ encore avec elles une foule de préjuge's qui font contraires au bien du fervice: comme j'en augmente le nombre , je fens qu'il elf elfentiel que 1'on emploie les lumieres de la raifon , la force de 1'exemple, & 1'autorité des Réglements & des Ordonnances,_a les détruire entiérement. N'eft-il pas ridicule qu'un foldat qui n'a pas honte a terre de nettoyer a fon tour la chambrequ'il occupe dans une calerne , fe croie deshonoré , a bord , de fe voir entre les mams une gratte & un balai; & s'il fait de 1'ordure quelque part, qu'il faille que ee foit un matelot qui la nettoie ? Süivrff cet ufage , n'eff-ce pas perpe'tuer un abus ? La parefle n'eft pas le moindre des dé-fauts qu'ils apportent a bord. Accoutumés a la faméantife des garnifons , le travail' de la manoeuvre les rebute ; il leur paroit au-delfous d'eux. Une corde, dans leur opi-nion, avilit des mains qu'ils ne croient faites que pour manier un fulil; ils penfent que ce n'eft point k eux que le fifflet s'adreffe , & fe choquent trop aifément des exprellions énergiques d'un Maitre. Je conviens que pour faire agir un homme il n& faut pas 1'injurier ; qu'Üs foient dociles k fe laifter conduire , attentifs a ce qu'on leur commande, prompts k agir au premier ordre , & on les trairera avec les égards qu'ils exigent. En général , leurs Chefs ne font pas affez perfuadés qu'après la pro- preté, un travail modéré & continu eft ua M 3,  f.ïao) des meilleürs prélervatifs contre le lcor> but , qui les attaque beaucoup plus vite que les matelots. Il faut encore les_ convaincre que plus ils mettront de célérité dans l'exécution des manoeuvres , moins elles leur feront pénibles. Ne perdons pas de vue notre grand principe , qui eft de faire naitre & d'encourager 1'e'mulation & 1'aöivité par Tappas des re'compenfes. En conll'cmence , dis-je , exciter les clameurs des partifans de 1'économie , je demande que fon augmente en général de deux fous par jour la paie de tout foldat en garnifon fur les vaiffeaux , & en particulier de trois fous celle de ceux qui fe montreroient plus attentifs a connoitre 1'ufage , & a retenir la place des différentes manoeuvres baffes , & qui s'emprefferoient d'y courir lorfqu'ils entendroi.ent parler de les fake agir: je voudrois enfin que 1'on portat k quatre fois cette gratification ouotidienne, pour ceux qui prendroient rhabimde de monter au haut des mats toutes les fois que le befoin le requiert. Si on joint a cet encouragement un vétement convenable & fuffifant, qu'on fache remarquer ck^ punir 1'indolence ou la mauvaife volonté , on pourra accoutumer le foldat le plus pareffeux k une vie a&ive & falutaire. J'ai remarqué depuis long-temps que 1'on prodigue fans néceffité , dans la Marine royale , la claffe des hommes du peüple qu'il eft fi effentiel de ménager ; tandjs  (i*0 que les jeunes gens nés dans la bourgeoifier ou la rotnre, de families honnétes , repoufles des Etats-Majors , ne favent oü fe placer convenablement , paree qu'on n'a point. établis de places mitoyennes , ! entre les équipages & les Etats-Majors , j qui fulTent a leur bienféance. Les Armateurs ont fu en tirer, Ibus le nom de Volontaires , un parti li avantageux ! C'eft 1'ardeur impétueufe de cette bouillante jeunefle , qui ont fait les fuccès ] de nos Corfaires Malouins dans les guerre? palTées; c'eft a cette école , & parmi ces jeunes audacieux , que s'éleva Ie fameux Dugué-Trouin , li digne de nos regtets, & aujourd'hui 1'objet orgueilleux d'un ridicule mépris. J'ai penfe qu'il étoit temps que la Marine royale profitat de 1'exemple que les Armateurs lui ont donné, & j'ai cru qu'on pouvoit, avec un avantage décidé , remplacer les matelots formés , qu'il faut économifer , par un nombre proportionné a la grandeur des vaiffeaux , de jeunes gens bien nés, bien élevés, pleins d'honneur , & dont. de légeres diftincKons , une perfpedive brillante , des privileges , & des récompenfes données a propos , peuvent faire une pépiniere d'excellents fujéts. J'ai toujours obfervé que 11'individu que 1'honneur conduit, que 1'émulation excite , s'accmitte de fon devoir , la bien plus d'emprelfement & de zele que le mercenaire, qui compte que fa peine eft  ( 12.1 } toujours bien au-deffüs du falaire dont or>' Ie paie. Qu'on ne croie pas , non plus , 3u'en peuplant les vaiffeaux d'une jeuneffe iftinguée , mon intention ibit d'augmenter , a bord , le nombre des inutiles, qui n'eft déja que trop grand. Il eft incroyable c'ombien 1'équipage le plus nombreux, quine 1'eft jamais trop au moment d'un combat, le devient peu , qnand il s'agit d& travailler. Les prétentions des gens de métiers , & des canonniers, fur cet article , font étonnantes ; tous refufent a 1'autorité du Maitre , & ne veulent donner lamain que quand il eft queftion d'objets qui les concernent. La néceflité d'un bon régiement eft fentie de tous les Marins expérimentés ; mais perfonne n'a le courage de Pentreprendre avant d'être certain que 1'autorité veuille 1'appuyer.^ Je voudrois , non-feulemeiit, qu'on en fit un avec difcernement & réffexion ; mais même qu'on le commentat dans une efpece de Catéchifme, qu'on diftribueroit gratis aux foldats , matelots & Officiers mariniers qui fayent lire, afin qu'ils connuflent les obligations; de leur état, & les chatimeuts_ promis a ceux qui s'en difpenfent. Ce feroit par une femblable inftruction que je prefcrirois_ & mes Volontaires ( i ) la maniere dont ils (i) En outre du détail de la timonerie , fignaux fondcs, ils feroient chargés feuls de la manoeuvre «Ut mat d'artimon , & ils auroient toujours deux baj-  doivent s occuper , pour ft etre pas d'une inutilité pénible aux autres, & donner, en même temps 1'exemple du travail & de Tactivité a la pareiTe , li emprelTée a choifir, dans les manoeuvres bafTes, la place ou il ne faut employer que pen de force. Je m'occuperai peut-être , un jour d'un modelé pour ces fortes de re'glements. En attenaant , palfons a une autre branche de la police intérieure. On entalfe , fans diftinction , les hommes de 1'équipage le plus ou le moins nombreux dans les entre-ponts des t vaiiTeaux & frégates , fans examiner s'il n'y font pas trop relTerrés , & s'il y circule un air fuffifant, pour renouveller fans celfe, purifier & rarefier celui que tant d'haleines chargent continuellement de vapeurs plus ou moins mal-faines. Les exhalaifons de Ia fueur , celle de 1'ail, du tabac maché, & de Phumidité des hardes mouillées qui s'y mêlent encore , augmentent la condenfité ma'l-faifante. La fumée des fours que 1'on batit actuellement, dans les entre-ponts , fes au cabcftan fur les frégates , & trois fur les vaiffeaux , garnics par eux ; ils do'nneroicnt ainfi rexerar)le a tout le monde d'un travail dont perfonne ne doit etre cxempt;: ce feroit parmi ces jeunes gens, inftruits tü formes, que 1'on choifiroit les Capijafnes de prifes; & dans le cours de la campagne , les plus capablcs pourroient, fur un fimple ordre du Capitaine, être appelles 'a rcmplir les fonclions des Officiers morts da»» une affaire ou autrement.  (12-4) S pu diminuer de beaucoup la malignité de 1'air humide , mais elle le rend bien plus étouffant. On remédiera a tous ces inconvenients, fi 1'on fuit le procédé que nous avons indiqué au Chapitre précédent , & fi 1'on apporte la plus fcrupuleufe attention a ne pas feereen- 1'efpace deftiné a loger les équipages. L'entre-pont & la cale des frégates, le faux-pont des vaifTeaux de lignes, font toujours encombrés de fatras, fi je ne dis pas inutiles , du moins, d'une néceffité bien éloignée. Les balots de foin, les bois du charpentier , les foutes trop grandes & trop multipliées des maitres charges , fur-tout dans les frégates , ne tendent qu'a diminuer 1'efpace, dont le partage eft encore fait avec trop d'inégalité. Pour s'oppofer a cet abus, on devroit fixer, pour toute la campagne , par des numeros plaqués aux barrots , non-feulement la place que le hamac , pour deux hommes , doit occuper, les facs pendus au pied & a la téte , mais encore déterminer 1'efpace du pofte des Chirurgiens , du boulanger & des meftraux; avoir foin fur-tout, de tenir toujours a bas-bord du grand panneau, une place libre & fuffifante pour y mettre les malades les plus affeöés , & dans la cale des frégates , une platte-forme pour les bleffés dans un combat. Un autre abus, qu'il eft encore très-néceffaire de réformer , c'eft cette effroyable quantité de vieux cordage que 1'on eft  dansPulage d'embarquer , & dont onYurcharge les vaiffeaux, & fur-tout les frégates ; fous prétexte qu'on ne fauroit être trop bien fourni de garcettes de ris , de tourm-vires, de badernes & de paillets, bitords , &c. Les Maitres ont grand foin de triplcr, quadrupler même la quantité, que les rt'glements prefcrivent, ce qui fait un poids & un encombrement énorme, cui qui rempliffant les efpaces trop petits deftinés i loger qes objets , otent encore aux équipages les moins nombreux , la place qu'ils devroient occuper, en les refferrant dans les entre-ponts des frégites, gönent la libre circuhtion de 1'air , & deviennent la caufe indirecte d'une quantité de maladies. Je fais que dans un voyage long Sc pénible , oh les frégates , fur-tout, Tbat toujours en aöivité, on fait une étonnante confommation de ces objets ; mais n'y gagneroit-on pas beaucoup d'efpace, de commodité , 65c d'avantage a les embarquer tous faits. Les Marins les moins expérimentés , favent que pour f ure des garcettes, badernes , Sec. avec dn vieux cordage , il n'y en a pas la moitié qui puiffe fervir ; c'elt donc un poids inutile qu'il eit avantageux de fupprimer. M. 3ourde' de la Villuet a de'ja très-judicieufement remarqué, que 1'on avoit pouffé trop loin la précaution de fourrer & garnir les manoeuvres dormantes Sc plufieurs des courantes. J'ajoute, h fa remarqué, qu'au lieu de faire, aux M~iors des - r n  armées , un revenu des peaux de bceufs que 1'on tue fur les vaiiTeaux de ligne & les frégates , on les employat a garnir les vergues , rides & autres endroits expofés k un grand frottement , ce qui procureroit, d'aiileurs , une grande diminution dans les poids fi éleve's au-delfus du centre de gravité. On fe récriera , peut-être , fur faugmentation de de'penfe que 1'embarquement du vieux cordage e'vite par 1'économie de la main-d'oeuvre ; mais on verra, par la fuite, que le nombre des matelots anemblés dans les Ports , étant augmente' par mon fyftéme , on les occuperoit de ce travail néceiTaire , les jours que les mauvais temps dérobe k Jeurs inftruöions , ou k des ouvrages extérieurs. Il ne faut pas oublier d'obferver que les réglements qui déterminent la quantité de douzaines de garcettes, &c. font de beaucoup trop foibles, & que je ne prétends pas , en 1'augmentant , fupprimer entiérejnent 1'embarquement du vieux cordage , je ne veux qu'en diminuer, de beaucoup, la quantité, qui eft abufive , & dont les Infpefieurs fe plaignent généralement : il eft en tffet ridicule de furchargcr un vaiiTeau , qui lert pour une campagne de fix mois, comme le font plufieurs vaiiTeaux que 1'on pourroit citer. Une autre police cui n'eft pas moins utile d'établir, c'eft de marquer , a cliaque plat, Ia place ou il doit manger. Il eft d'ufage dans chaque vaiffeau qu'il n'y ait era?  (ri7) Chirurgiens , les Maitres , & les gens de la fainte - barbe , qui mangent entre les ponts ; 1'Ordonnance même le prefcrit , mais elle n'eft pas plus fuivie a cet t'gard qu'a bien d'autres ; & dans le fait, elle eft impraticable, pour peu qu'un equipage foit nqmbreux. Je voudrois donc qu'ayant examine' la place que chaque plat de fept, huit, ou neuf hommes occupent pour ma'nger , on calculat la furface d'un vaiffeau dont on peut difpofer, fur les gaillards , les paffavants , le pont , & même 1'entre-pont des vaiffeaux de guerre ; qu'on affignat a chaque plat celle qu'il doit occuper au moment du repas; & qu'une demi-heure après , 1'Officier charge' de faire la ronde , ou d'écouter le rapport de celui qui la fait, puftit avec feVerité les hommes du plat qui n'auroient pas ne'toye' avec la plus exacte propreté 1'endroit ou ils ont mange'. Les Anglais font la-deffus d'un exemple a fuivre ; la proprete' de leurs vaiffeaux m'a toujours fait plaifir a voir. Ils ont un bon ufage que nous devrions adopter : c'eft un canal de plomb qui s'adapte aux pompes , huit ou dix pouces audeffus du tillac , & qui va direcfement a bord fbrtir avec un peu de faillie. Ce conduit eft enveloppé de deux jumelles de fapin arrondies , il peut s'óter & fe mettre a volonté ; il empêche de fentir 1'odeur défagréable & mal faine d'une eau fétide qui s'eft corrompue dans le fond de cale , N 2.  (128) & oue nous avons la pernicieufe habitude de laiiTer repandre lür le pont pour s'écouler par les dalots. Tous ces inconve'nients, le'gers en apparence, on louvent les fuites les plus férieufes : je le rc'pete, il n'y a que les foins de la proprete' (i) qui puilfe aider a la lalubrité de 1'air que 1'on relpire a bord. Il eft fur-tout néceffaire , dans un beau temps , de le renouveller fouvent, & d'en introduire dans 1'inttrieur par les manehes , entonnoïrs ou ventoujes. La matiere de ce Chapitre , de'ja trop long & trop ennuyeux peut-être , feroit intpuifable , li je voulois entrer dans tous les details des fbins qu'il convjent de fe donner pour confèrver la fante' des hommes de mer ; 1'importance de 1'objet peut feul faire excufer tout ce qui paroitra dans celui-ci de trop minutieux, ..(l) A7aie ie l'Editeur. Ceci étoit écrit avant qu'on eftt connoiffance du Reglement fur la propreté, publié" dan? le mois dc Janvier 1780 , par ordre dc M. de Sarrinc ; il eft rempli de bonnes chofes , mais il y en a d'impraticables: on voit que celuiaqui on 1'attribue jti'a pas navigué.  {•119) CHAPITRE V. De la nécefjïté de donner un uniforme aux Matelots , avantages qui en réfulteroient dans le fervice \ de leur cafernement dans les Ports ; dijlinclions dans F uniforme, fuivant les différents grades & métiers. I^Endant plus de vingt aas que j'ai navigee^ fous les differents climats de 1'Afie, de 1'Afrique & de 1'Amérique, perfuadé, par tout ce que j'ai vu que la propreté eft un des moyensfes plus lürs de conlèrver la fante' des hommes de mer, je ne ceffe de former des vceux finceres pour que le Gouvernement s'oc-cupe de tout ce qui peut contribuer a rendre habitüelle au matelot cette propreté fi falutaire , & a öter même a 1'homme vicieux la malheurenfe facilité qu'il a de fedt'faite de fes hardes. Après de longues'& de mures réflexions, après avoir cxaminé tous les moyens pof-: fibles, je me fuis arrêté au feul qui m'aic paru convenable : il faut donner une uniforme au matelot ; c'eft 1'unique manierede le tenir bien vêtu , de faciliter le fer-vice ,. de maintenir une difcipline exacte  & o*e faire germer cet efprit d'émulation pour qui rien n'eft impoflible. Plus j'y penfe , & plus j'y rencontre d'avantage. La facilité de diftinguer 1'efpece qui jette dans le fervice une admirable commodité, la promptitude des reverfements & des remplacements , une formation plus ailée , fuivie d'une meilleure inftruétion, enfin , Jnille inftitutions utiles qui toutes viennent concourir au bien du fervice ; plus je les enyifage, & plus je fuis étonné qu'elles ne raient pas plutöt emporte' fur une miféraple routine remplie d'inconvénients, tant il eft vrai qu'une nouveauté' utile a de Ia peine a vaincre les préjuge's qui s'oppofent a fon établiffement. D'aiiieurs on craint la dépenfe , elle eft cependant bien modique ; tout dépend de la maniere de s'y prendre. II faut que le matelot fbit vëtu , cela eft inconteftable ; n'eft-il pas vrai auffi, qu'il lui importe peu que fa vefte, d'un drap grofüer , foit bleue , rouge , ou brune , pourvu qu'il fbit bon : il le paie de fa bourïe; les plus fages en ont jufqu'a deux 8c trois pour changer, a la fin d'un quart pendant lequel ils ont été mouillés. Quel furcroit de dépenfes leur caufera-t-on en les obligeant a 1'avoir bleu ? Qu'on faffe eftimer fous les yeux du matelot, même fa vefte ou palteault ( pour me fervir de fes termes , ) fon gilet & fa culotte : je fuppofe que cet ïiabillement neuf lui ait coüté un louis, mtttons dix écus même ; qu'on en imagine t  fi 1'on veut, un neuf & un autre a demi-* ufe', & qu'on faffe monter leur valeur a 45; liv. li le vêtement que je vais propofer monte au-déla de cette fomme , que le Roi paie ï'excédent, qu'il faffe les avances du tout, & qu'il ne foit fait retenue que de la valeur dont on aura prife les hardes dont je le fuppofe fourni, fans que cette valeur puiffe être moindre ni plus grande que 40 a 45 liv. L'habillement d'un matelot confifte affez ordinairement en un habit ou palteault, une vefte , un gilet & deux culottes : fi le tout lui a coüténeuf, 40 ü 50 liv. il en trouyera, fuivant 1'e'tat ou 1'eront ces hardes, la moitié , le tiers ou le quart du prix qu'elles lui auront coöté. Ceux qui ne voudront pas s'en de'faire pourront les renvoyer chez eux; elles leur ferviront dans les navires des Marchands. Je vais maintenant de'crire un uniforme tel que je penfe qu'il convient de le leur donner. Il faut a chaque matelot, Officier-Marinier , mouffe , ou autre , un habit-vefte de drap bleu affez long pour defcendre jufqu'a la moitie' des cuiffes, clos par derrière , avec un feul pli fur le cóte'; il aura des revers de même couleur pour croifef fur la poitrine , un parement, fendu fur le deffus , de drap rouge, & des boutons jaunes maffifs, marqués d'un ancre ; cet habitvefte fera doublé d'une ferge bleue , le dos & les manches d'une flaneïle blanche pous' Phiver, Sc d'une toile crue pour 1'été.  Som cet habit,' un gilet fans manche, dont les devants croifés feront d'un drap rouge, fans doublure, & le dos de feree eroifee bleue. b Une culotte de drap bleu , doublée d'une torte toile par-deffus. Une ample culotte qui defcendra jufqu'au gras de jambe , d'une toile bleue ferrée iemblable au coutih Pour 1'été , un gilet dont le devant d'une ïeule piece, boutonnant fur le cóte', de durance , calemande ou camelot rouge , le dos « la doublure en toile. Un bonnet fait de retailles de drap , comme ceux de 1'Infanterie. * Enfin , un cliapeau de feütre bien t'pais en ronde , de cöne tronqué, peu éleve' fufnfarmrient creux ,.& un bord horüontal de trois doigts de large. Cet habillement complet, tel que je viens de Ie dttailler, ne couteroit au Roi, j'ea ruis fur , d'après un calcul que j'ai fait expres , que 50 a 5 5 liv. fuppofons 60 liv. Je voudrois, en outre , qu'on obligeSt chaque matelot a fe pre'fenter au département avec deux chemifes de toile de lin & quatre de cotonnade bleue; fix paires' de bas dont deux au moins de laine, & quatre de hl ou coton ; un bonnet de laine, un couple au moins de gilets fans manches , de bahn, coutil, ou nankin blanc 011 jaune • trois ou quatre calcons cours, d'une toilê lorte & ferree; enfin, trois paires de fou-  Kers. Toutes ces hardes leroient dans un facr de. cuir verd , femblable a ceux des foldats ; & le matelot de leve'e qui feroit mande' au departement, feroit oblige' de faire fa route fans quitter fon havrefac. Pour remé'dier aux maux que leur eaufent ces gites , dont j'ai fait fentir plus haut tout le danger , les fouftraire a 1'avidité de ces höteffes qui les ranconnent, en pareffant leur rendre fervice.; il faudroit leur batir dans les Ports de vaftes corps de caferne ; on en a plus que jamais fenti le befoin au retour de la grande arme'e combine'e. L'utilité en eft même reconnue depuis long-temps , puifqu'on a commence' k en batir une a Recouvrancè, que les cir- • conftances n'ont pas laiffe' le temps d'achever. Ce batiment, connu fous le nom de la Caycnm , n'a que deux ailes, & fa fituation n'a pas permis de 1't'lever affez pour qu'il put fuffire k loger a 1'aife au moins fix mille hommes. Il en faut donc abfolument une autre. Te vois , avec regret, les Capucins occuper un emplacement qui feroit très-avantageux pour affeoir un fecond corps de caferne ; il feroit au centre de tout, pres des conftruéions , des balfins, des forges , de Partillerie, & de tous les autres atteliers, dans le meilleur air. Il eft inoui qu'on ait refpefte' fi long-temps une pareillé proprie'te' (i). (i) Ileft certainquclc Roi peut leur donner aillcurs 'e. tr;ple ou le quadruple du. terrein qu'ils oc;upcnt ^-  (134) Ces levées , arrivées de toutes les cótes de France dans les Ports ou on les affemble, logeroient dans ces cafernes. Une garde nombreufe y maintiendroit le bon ordre ; ils y vivroient par chambrée comme a bord par plat; un Commiffaire, logé auprès, feroit la revue de leurs hardes a 1'inftant, de leur arrivee , & prendroit note de ce qui leur manqueroit pour les obliger a s'en fournir ; il leur feroit diftribuer a chacun un hamac & une couverture , qu'ils iufpendroient dans ces chambres peu élevées d'étage, & toutes difpofées enfuite. On leur laifferoit pour cela , fuivant la longueur de lenrs routes , deux ou trois jours de repos avant de les conduire a 1'ouvrage. A la revue qui fixeroit leur defïination, au lieu de trois ou quatre mois d'avance qu'on eft dans 1'ufage de leur donner, ils n'en recevroient qu'un ou deux feulement, pour fe procurer quelques douceurs (i); & Recouvrancè, & prendre, fans fcrupule, unefituation unique devenue fi précieufe ; d'aiUeuri, Breft peut s'en pafler. (i) Il faut même leur en donner. N'cft-il pas criant , affreux, abom.'nable, que, maisré les vives repréfentations des trois Ports, malgré les cris dc I'humanité & de la jufticc , qui plaidcnt fi haut en leur faveur, on n'ait pas pu leur obtenir le privilege de ne payer le tal ae que fur le taux de 1'Infanterie ? QueUe inconféquence abfurde ! Quoi! on le donne a très-bas prix au foldat, qui peut a toute force s'en paffer, & on le fait payer bien cher au matelot, pour'qui fon ufa lesvoieJ faciles & commodes a employer pour éviter tous les maux qui ne font que trop fouvent la fuite de la mifere & du UbJJZ ou fe plonge le matelot. Qu'on ne vienS pas me dire que je les force a avoir trop granae quantité de hardes; il nV en apas un feul, fage & propre / « au au moins un tiers de plus : 'on n'a pas du croire ,par la même raifon, qu'en fixant cette quantité, j'entendois qu'il ne fiffi pas leur permettre de la paffer. Au contraire , pourvu qu'a cet égard la complaifance ne dégénéré pas en abus , on pourroit laiffer è 1'homme qu'un voya™ heureux une circonftance particuliere ont nnsalaife quelques fantaifies peu cheres. &i un combat les pnvoit de leurs hardes une graüfication répareroit cette perte ' iour leur procurer encore la faculté de remplacer celles qu'une campagne trop on! gue a ufées, & que le peu deIbin ouWel qu evenement imprévu ont fait perdre i! leroit a propos ou'on èmbarqult quelques j ballots de chemifes de lin &c l cotSde ! de bonnets de bas de laine & de fil dé : «kons d'étoffe & de toile, de culottes  (T4° ) ïongues de toile, de coutïl & de rondelettes, quelques pieces de drap bleu & rouge , de lérge bleue , des boutons uuiformes, des pieces de toile de doublure , & des chapeaux. Il faudroit encore comprendre dans les Levc'es quelques garcons tailleurs , & les répartir fur chaque vaiileau, ou ils feroient d'une grande utilité. Une légere retenue fur la folde du matelot ferviroit aux frais du même entretien de fes hardes. Pour avoir cet e'tabliirement, on voit qu'il ne faut que vouloir en faire les avances. Hatons-nous de fortir de ces détails minutieux & néceffaires , pour paffer aux marqués qui vont fervir a diftinguer le matelot du gabier ; celui-ci, du novice ; 1'homme de métier , de l'Officier-Mannier. Ces diftinctions faciles font un des plus précieux avantages que procure 1'uniforme. Le Maitre d'équipage, dont 1'habit-vefte leroit un peu plus long que celui d'un fimple matelot, porteroit pour marqués diftinctives, en forme d'épaulettes, deux bandes de drap jaunes terminées entreffle, & bordées d'un galon d'or de trois lignes. Le fecond Ma;tre n'en auroit qu'une ; ils auroient , en outre , le parement écarlate bordé d'un galon d'or , de huit lignes pour le premier , & de quatre lignes pour le fecond. Sous cet habit, & par-deftbus fa vefte de drap écarlate, depuis les épaules , tomberoit une efpece de camail en pointe de drap jaune , aufti bordê d'un galon d'or de fix  f>4.0' fix lignes. Sur la pointe qui feroit un peu' plus bafie que le creux de 1'elTomac , feroit fixée une plaque ovale de cuivre fur-doré , portant 1'écuffón des'armes de France en" ai-gent, comme il elf fur les haulfe-cols des Officiers , au bas' de laquelle, a un petit' anneau foudé, feroit attachée la chaine de fon fiflet. Le fecond Maitre & les Contre-' Maïtres auroient auffi la même de'coration ,■ avec cette diffc'rence qu'eile feroit, pour le'. premier, bordée d'un galon d'or de trois: lignes ; & pour les leconds , d'un galon de' laine blanche. La plaque de ces derniersfèroit auffi plus petite, & n'auroit qu'une' feule fleur de lys en argent, en place de' I'ecuiTon des premiers. Pour mieux diftinguer les Contre-Maitres, ils auroient auffi 2es e'paulettes de drap jaune, termine^s en ' tteffle fans galon d'or , les premiers en porteroient deux , & les leconds une feule. Les Boffemans porteroient 1'un fur 1'autre deux chevrons jaunes fur la manche , a 1'avant-bras du cöte' droit, en cette forme (fp). Enfin , les Quartier - Maïtres auroient tous deux galons de laine jaune , 1'un fur ' 1'autre , un doigt au-deflus du parement ; Les Maitre -Canonnier s feroient diftin-gue's par deux bandes d'e'carlate en forme; d'e'paulette, fans frauges, termmées par un treffle , & bordées d'un petit galon d'or de trois lignes ; les feconds n'en auroient» qu'une. O- • -  ( *4* ) . Les Aide-Conniers auroient d'abord tme lofange rouge percé de bleu , coufue debout en cette forme /* A~\ uir la manche droite aPavant-bras , \ V J & fur 1'épaule gauche, une languette de drap t'carlate comme Pépaulette des foldats, pour arrêter un baudrier de cuir jaune ou feroit fulpendu le poulevrin. Le matelot-canonnier auroit un galon xouge , deux doigts au-deffus du pafement droit , & une languette de drap bleu , doublée en rouge , fur Pépaule gauche. Pour les gens de me'tier, voici quelles feroient les marqués dinftinétives. Le maitre-calfat porteroit aulfi en forme d'épaulette deux bandes d't'carlate lofangées de bleu; le fecond n'en auroit qu'une leule ; les aide-calfats auroient fur la mandie gauche , a Pavant-bras , une lofange coufue obliauement , de couleur rouge percée de bleu ; enfin , les matelots-calfats auroient un galon , rouge lofange' de bleu y deux doigts au-deffus du parement gauche. Les charpentiers & voiliers feroient dif— tingue's de la même maniere, a cette différence, que la couleur des premiers feroit le jaune loiange' de bleu; & pour les feconds , Ie bleu bordé de jaune & lofange* de rouge : en géne'ral, les gens de métier feroient reconnus par des bandes aux épaules ; pour les maïtres , les aides , une lofange oblique aux avant-bras gauches ; 8c" les matelots, un galon au-deffus au parement  gauche; les armuners auroient un cróïTfajrf écarlate au bras gauche; les boulangers, une t'toile blanche ; les tonneliers, un croiflanc verd; les bouchers , une loiange plein-cramoifi, coufue en travers ; le tailleur, un crohTant renverfe', bleu ciel le frater, une bande oblique blanche a la même place. Les gabiers,üné lofange jaune perce'e de bleu , confue en travers ainfi (O) au-delfus du parement droit ; les nantihnts ( i ) ? un triangle ifocelle même couleur perce de bleu a la même place ; & les matelots , une hermine pleine , de même couleur, & aufli a la même place. Les novices n'auroient aucune marqué diftindive/ Tellè feroit la commodité de ces marqués , tant varie'és qu'elles foient, qu'au premier coup cTceil on diftingueröit un matelot d'un canonnier, celui-ci d'un ouvrier , ce dernier d'un novice. Qu'il me foit permis d'ajouter encore uu mot pour propofer d'e'tablir , par-defllis tous ces lignes particuliers , un lïgnal de ralliement, c'eft-a-dire , un moyen de faire ïeconnoftre tous les hommes d'un même vaiffeau; qui put fuppléer au colet" que je donne aux Officiers; voici celui que j'ima- ffiue. Tous les gens de Te'quipage , les vo-ontaires excepte's, porteroient, au-devant de la forme du chapeau, une plaque courbs de cuivre, fur laquelle feroit foudé, en e'tauv (r) On verra bientöt ce que j'enten Js par ce mot., O a  (i44j fin, le numéro du vaiffeau; c'eft-a-dirr,. que fi le Vaknreux, de foixante-quatorze, par exemple , étoit le feizieme de la Claue , la plaque porteroit ce numéro de cette maniere * 16 * On leurdélivreroit gratis ce médaillon a la revue de leur deftination; & on le leur feroit rendre au défarmement. Pour les frégates, la plaque, feroit d'étain, & Ie numéro en cuivre. II feroit encore aifé de deügner, par fa forme de quelle claffe feroit le vailieau , a peu prés comme il fuit : elle feroit ovale, pour un vaiffeau de foixante-quatre ; lexagone , pour un vaiffeau de foixante - quatorze; en lofange, pour un vailieau de quatre-viugt; & ronde , furmontee dune couronne , pour un vaiffeau a trois ponts: ü en feroit ainfi a peu prés des f«gates- Je voudrois enfin qu'on poufi at lexactrtude jufqu'a diftinguer , a la vue , par Ie moyen d'une maroue mobile la divilion des écuipages pour le quart; cette marqué qu ón prendroit & quitteroita volonté , lerviroit a. démêler, au premier coup d'oul, les gens qu'on nommzBabordais, de ceux qu on appélle Tribordais, & contribueroitencore a faciliter la promptitude du fervice. Enfin , les volontaires auroient pour uniforme un habit bleu , vefte &.culotte ecarlatte, boutons k 1'ancre, le collet comme 1'Etat-Major, & une aiguillette moitie poil. dé.cfcevre, écarlate , Sc moitié enor.  (- r45 ) Ceft ainfi que 1'Unitofftiité introduite Jan?; le yêtement de 1'homme de mer, contribue^ roit ;\ maintenir le bon ordre , & la difcicipline la plus exacte; dans les occaiions ou 1'ivrognerie &c la dé'bauche les poufl'enÊ a faire du tapage., leurs Officiers les difh'iagueroient aife'menr dans la foule, ou leur preTence viendroit en impofer, &c arréter le tumulte-& les fuites dés querelles de rivalite'; enfin , dans toutes les occafions oii il' feroit ne'ceffaire de faire connoitre & rek peóter leur autorite'. On va voir dans le Ghapitre fuivant, les difpofitions pour iV combat , & la formation des e'quipages».  ('40 CHAPITRE VI. De la formation de Véquipage d'un Vaiffeau de foixante-quatre canons , & de la dijlribution des pojles pour le combat. Il eft temps d'expliquer ce que j'entendsV par la formation de 1'équipage d'un vaiffeau : c'eft choilir, dans les différentes Gaffes d'hommes qui doivent le compofer, la quantité' fuftifante a fa grandeur & a fa force; & cette quantité' une fois de'termine'e , em- Sdoyer ces hommes, fuivant leur talent, eur force, leur,intelligence, & leuragilité. Dans tous les vaiffeaux de ligne , les e'quipages font compofés de canonniers , de foldats , de matelots, de mouffes, & i& gens de différents métiers. Tous ces hommes doivent, plus ou moins, s'entendre aux manoeuvres ; la difcipline , par la crainte des chatiments & 1'efpoir des récompenfes r doit les contraindre , ou les engager a s'y adonner : je vais prendre pour exemple un vaiffeau de foixante-quatre , & déterminer, d'après mes lumieres, la quantité d'hommes que je erois néceffaire pour lebien armer. On a vu que je place} fur les vaiflèaux  i 4 \ x47) de cette clafie , douze Officiers , non comw pns ceux a Ia fuite : Le Chirurgien & 1'Aumönier font en tout quatorze perfonnes d'Etat-Major -r ce nombre me paroit fuftiiant: c'eft Ia bonne qualite', & non pas la quantité' qu'il importe de fe procurer. J'admets enfuite trente volontaires. On a •vu au Chapitre quatrieme , d'ou je tire ces volontaires , on verra a celui des Gaffes y a quelle fin je les e'tablis , & 1'emploi quej'en veux faire. ' Un Secrétaire qui fera tour-a-tour les écritures des Officiers chargés de différents détails; & pour qu'il puiffe facilemenc Yf fuffire , ces MM. prendront différentes epoques pour porter dans cbaque mois la eonfommation de leurs détails; il fera tous les róles, &c. Un Pilote-cótier qui poffédera bien la connoiffance de toutes" nos cótes & de leurs dangers : il fera tiré de ces Maitres & Pafrons de barques qui font fans ceffe le cabo— lage. J'y place encore treize Officiers-Mariniers de manoeuvres, comme il fuit.: un Maitre d'équipage , un Second , deux Contre-Maitres , deux Boffemants , & fèpr Quartier-Maitres , parmi lefquels on cnoifira un Patron de chaloupe , deux Patrons de grand & de petit canot. Un Capitaine d'armes , dont la fonétion principale fera d'étre chargé de toutes les armes qu'on embarque ; deux armuriers pour avoir foin de les tenir en état.  . CM* }■ . Quatre Maitres-Canonniers-; deux pre-» miers Sc deux feconds; le plus ancien aura' la' prt'fe'ance , Sc fera chargé. Trente-trois Aide-Canonriiers, Chefs de piece y compris ; un Gardien de fainte-barbe , qu'on choifit ordinairement le plus vieux 8c le plus fage; tous feront réputés pour avoir un courage de lang froid. Auffi tfente-deux Matelots-CanonniersChargeurs, autant qu'il y a de canons d'un feul bord, cè n'eft pas trop; tóus gens vifs, alertes , intrépides , inftruits, 8c en état de" remplacer le Chef. - Douze Officiers-Mariniers de metiers : c'eft-a-dire, un Contre - Maitre Charpentiers, un fecond , 8c deux aides; autant dans les Calfats 8c les Voiliers. Dix-fept Matelots de métiers , dont quatre Charpentiers , quatre Calfats •, quatre Voiliers ; un Tonnelier , deux Boulangers , un Tailleur 8c nn Fratèr. Huit perfonnes au pofte : favoir, deux feconds Chirurgiens, deux Aides, un Apothicaire , 8c trois Infirmiers choifis parmi lés Matelots les plus vieux , les plus lages, & les plus foigneux. Sept perfonnes placées a la depenle , pour "le Münitionnaire : favoir, un Commis, deux Maitre-Valets , un Tonnelier , un Boucher , 8c deux Boulangers. Treize Valets : favoir , un Maitre d'hö-' tfel, deux Cuifiniers, un Marmiton , 8c un Pomeftique pour chaque Officier. Seize  Seize Gabiers; on connoit le parti que 1'on tire de cette efpece d'hommes. En diminuant le nombre des Officiers-Mariniers , mon intention eft qu'on augmente a ces gens-ci la lolde & la confidération, en leur donnant une certaine autorité fur les matelots des Gaffes , & en les chargeant de fermer & d'inlfruire chacun uh Novice qu'on attacheroit a leur fuite, & qui leur ferois fubordonné. Trente-lix Matelots d'élites ou , Nautilans; j'appelle ainfi des Matelots a haute paye, déja inifruits a Ia manoeuvre & au travail du grément, par plufieurs campagnes , Sc dans lefquels on reconnoitroit de 1 aftivité & de la vigilence. Cent cinquante Soldats y compris, fi c'eft un détachement fourni par un régiment d'Infanterie, les Officiers, Bas-Officiers , Tambours , Sec. Deux Gardiens, un de la foffe aux lions , & 1'autre de la foffe aux cables. Ces hommes fontordinairement tirés des Matelots vieillis, fans avoir monté en grades. Cent fix Matelots des claffes, payés en proportion'de leur mérite & des voyages qu'ils ont faits au fervice. Cinquante Novices, recus depuis 1'age de feize ans jufqu'a celui de vingt ; habitués £ ja mer , & d'une conititution faine Sc robufte , pour réfifter a la fatigue. Enfin, trente-quatre Mouffes, tous enfants . depuis dix jufqu'a quinze ans, que P  élevra , en leur montrant la manoeuvre & le gréraent, & en les ex'ercant a monter au haut des mats. Ce qui forme un total de cinq cents quatre-vingt hommes. ■ Si, maintenant, on veut avoir la patience de me fuivre , dans les de'tails de la difpofition pour le combat , on va voir comme je les diftribue aux différents poftes du vaiffeau (i). A la première Batterie de tre'vze canons d& vingt-quatre. Le premier des Adjudants en arriere.") Le premier des Lieutenants au milieu, / 3 Le premier des Enfeignes en avant. J (1) Cc feroit ici le licu de parlcr de la? difpofition d'un röle d'abordage. Cette maniere de combattre , nui met dans tout fon feu la vivacité fianeaife , Sc dont les Tean Bart , les Dugué & les Forbin , ont tïte un fi grand parti , qui a rendu les fhbufhers memes ft redaotables, femble abfolumcnt ignofée dans cette suerre , de prefque toutes nos frégates qui fe font battucs avec une valeur héro'ique; unc feule,la ïtymphe, fa tentée , mais elle étoit déja trop affoiblic par une'moufqueterle trés mcurtriere. Pour abordcr avec avantage , il faut avoir la fupér:orité du feu, il fauc enfuitc y avoir difpofé fon équipage ; il faut avoir jformé des compagnies d'abordage de gens renommés, & dioifis parmi' les plus intrépides , les plus alertes Jfc les plus réfolus , de trente a quarantc hommes chacuue , avec cette dénomination de première , feconde & troifieme compagn'c , &c. & toutes compofées de volontaires , de foldats , de canonniers SC .dc matcors ; nommer des Orders pour les conduite ; jles d;ftinguc~ par des cocardes , afin qu'au premier prdre tous ces ^ensquittent enfcmblc leurs poftes refpefiifsf & fe réuniflent pour fautcr a bord.  De ces trois Officiers , celui du milieu commandera la batterie , il aura cinq pieces fous fon commandement , chacun des deux autres en aura quatre. Le premier des Maitres Ca- T nonniers > z Le premier des feconds . . J Ces deux hommes feront place's dans les' intervalles des Officiers , & ils le porteront ou leur pre'lènce paroitra plus néceflaire dans 1'e'tendue de la batterie. Enfuite, Treize Aides-Canonniers, chefs de piece ( . Autant de Matelots canonniers r chargeurs J Huit hommes par piece , pris "1 dans les gens de me'tiers , les f Novices & les Matelots , les > 104 plus vieux & les plus murs i des claffes 5 Trois Soldats du de'tachement \ par piece > 39 Mouffes, porteurs de gargouffes . 13 Ambulants fur les battcries pour le tranfport des bleffe's .... 4 Total .... 191 h. Seconde Batterie de quatorre canons de douTe. Le fecond des Adjudants en arriere . *ƒ Le fecond des Lieutenants au milieu . ( Le premier des Garde-Marines en ( 3 avant j  ie fecond Maitre Canonnier. . . , 1 % Le fecond idem , furnuméraire. . . ƒ Quatorze Aides-Canouniers , chefs ~> de piece ' ' > 28 Autant de Matelots - Canonniers- r Chargeurs Trois hommes par piece , pris dans j les gens de métiers, les Novices ( & les Matelots des clafles, fai- r iant enfemble. ^ Deux foldats par piece........ 28 Mouffes porteurs de gargouffes . . 14 Ambulants pour les blefles .... 4 > Total. . . . 1T1 hl Caillard d'arriere, Le Capitaine, * ' " \ Le Major f 3 . Le fecond Garde-Marine J Le Maitre déquipage. ...... 1 Le premier pilote au timon .... 1 ^ Le Lcond a veiller aux fignaux . . ƒ Les Aides-Pilotes a les exécuter. . 4 Timoniers a la barre I Z Le Capitaine d'armes a veiller aux pieces  Trois Aide-Canonniers , chefs de y piece. • f Autant de Matelots-Canonniers- r & Chargeurs \ Trois hommes par canons, choifis ^ dans la jeunelfe la plus alerte &c [ la plus agile des matelots pour \ ^ fèrvir , en cas de befoin, a la f manoeuvre & au canon ...... \ Mouffes , porteurs de gargoulfes. . j' Efcouade de Volontaires pour la \ manoeuvre & la moufqueterie. , J Aux bras & aux autres manoeuvres -p un Contre-Maitre, un Bofman , ( g deux Quartiers-Maitres, & qua- r torze Nautjlans J Total . . . 59 b.' Gaillard d'avant. Le. Lieutenant-Capitaine \ ■ Le fecond des Enieignes j Le fecond Maitre , un Contre-Mai- *y tre ƒ Uu Bofman , deux Quartiers-Mai- 1 tres f Deux Gabiers de beaupré, quatorze V Nautilans »3  (154) Deux Aides-Canonniers ,. chefs de -\ piece Deux Matelots-Canonniers-Char- V geurs C Deux Mouffes r porteurs de gar- V gouffes J Trois hommes par piece, choifis n dans les Matelots les plus mf- ( g truits & les plus alertes après f" les Nautilans ^ Total ... 35 h. •Sur Au pavillon , le troifieme GardeMarine ï Pour la manoeuvre , un Quartier- Maitre i Avec huit Nautilans & Matelots. . 8 Soldats pour la moufqueterie . . . 50 _ Total . . . 60 h.. Sur k Pajfavant. Une efcouade de volontaires ... 10 Soldats du dt'tachement 18 Total . . . 28 h.  Aux Hunes. #* Volontaires . i ï ^l De mifaine \ Quartiers-Mai- / & / tres a> X2 grande hune. I Gabiers i°\ C Soldats 8J ,. ƒ Gabiers 4\ 8 Dammon- \ Soldats 4 ƒ , Total . . . ,3° Aux Galeries. r- Le Maitre & le T ^ ie» 3 fecond .... C a Calfats. < Deux. Aides & x f r- Le^^iitre & le T _( . ) fecond .... v, * CharPenüers5 Deux Aides &x f 6 C Matelots; . . ^ Total . . . h.Au pofte du Chirurgien. Le Chirurgien Major, lAutnónier, *\ deux feconds Chirurgiens , deux ( Aides, 1'Apothicaire , les Infir- r miers & deux Mouffes J Aux Poudres* Le Pilote cótier, le Secre'taire, les; <\ Valets, les gens du Munition- / naire , les Gardiens , deux Mai- > tres Voiliers & deux Aides ; en l SOUt. . . ■ r . J  (15*") Récopitulatiort. Première batterie . . 191 Seconde batterie. . . . 121 Gaillard d'arriere 59 Gaillard d'avant 35 Dunette . . , 60 Pafavant. 28 Aux hunes 30 Aux galeries 12. Au pofte du Chirurgien ..... 12 Aux poudres 29 Sentinelles aux e'coutilles ..... 3 , Totalité de 1'e'quipage 5-80-fi. Ceft par un calcul femblable que je démontre qu'il faut feptTents hommes pour bien armer un vaiffeau de foixante-qu.atoïze, & neuf cents hommes pour en armer un de quatre-vingt. Je ne m'appefantirai pas d'avantage fur ces détails , dont je fens que la difcuffion eft trop faftidieufe; je dirai feulement, que fi 1'on trouve Ie nombre des Officiers mariniers de manoeuvres, trop petit, qu'on faffé attention, qu'en le diminuant j'en augmente la confidt'ration. C'eft cette facilite' trop grande k faire, d'un bon Matelot, un mauvais Officier marinier, qui dt'peuple les claffes. Tout homme , indiftinclement, n'eft pas propre k le devenir; il ne fuffit pas feulement cu'il foit inftruit, il faut qu'il ait le ton ferme d'un bon commandement,. & qu'il fache fe faire obéir. Quand le matelot  C ï>7) . Vegafdera le pofte de gabier comme unè récompenfe-& un avancement, il fera plus facile de lui infpirer de 1'émulation ; & en attachant une paie plus forte & une certaine autorité a ce grade, ou lui donnerauneconfidération fumfante. Il fera envié du matelot , comme un titre , que la fcience de fon métier , plutót que 1'ancienneté feule doit procurer. Il exifte auiourd'hui un abus, que je crois très-préjudiciable au bien du fervice. On ne paffe fur les vaiffeaux ou frégates, dans les Ordonnances & Régie— ments , qu'un très-petit nombre de gabiers , dela , la-néceflité de cboifir , pour y ftippléer , dans le refte de 1'équipage, un eertain nombre de matelots les plus inftruits, & les plus intelligents , qui fans en avoir ni la folde , ni les avantages, font dans le fait de vrais gabiers. Je voudrois donc que ceux-ci, dont j'augmente le nombre , euf— fént tous ration & demie, comme lesaidescanonniers ,.& fuffent tous des hommes fürs & fages, les autres bons fujets, matelots moins inftruits , feroient diftingués du refte de. 1'équipage, en les placant dans une claffe inférieure aux premiers , & je les diftingue par le nom de Nautilans. Ainfi , les marins déformais feroient les Départements diftribués en quatre claffes diftinétes, non. compris les mouffes, comme il fuit. Les. novices, les. matelots, les nautilans & les gabiers, proportionnés a la force & a la grandeur des vaiffeaux ,.. comme. on vient de  •158) le voir. Les deux premières ne feroient, % bien dire , que le noviciat des deux dernieres , des dégrés pre'paratoires pour y Ï'arvenir , en s'en moutrant capable. Et ii e Gouvernement perfifte a placer fon Infanterie en garnifon fur les vaiffeaux de guerre , les Brigades d'Artillerie établies dans les trois Ports, & compofées de canonniers bien inftruits , pourront fuffire a fournir les Maitres , aides-canonniers & matelots-canonniers-chargeurs que j'emploie fur les vaiffeaux , comme elles font en poffeffion de fournir , depuis long-temps, les Capitaines d'armes. Ce fera donc , dans 1'exemple que nous avons cité, deux cents vingt hommes a fournir de moins par les Gaffes; & fi vous y joignez les valets, les gens du Munitionnaire , les Armuriers , le Secrétaire , les Chirurgiens , les Volontaires , & les quatorze perfonnes d'Etat-Major. On formera un nombre de foixante & douze hommes a diminuer encore , de maniere que celui qu'elles feroient tenues de completter, pour un vaiffeau du quatrieme rang , fe re'duit a un peu moins de la moitie' de ion équipage; c'eft-a-dire , a deux cents auatre-vingt-nuit hommes. Cette économie , ans 1'efpece la plus précieufe & la plus rare , eft digne de quelque attention. Je m'occuperai , dans le Chapitre fuivant , des moyens qu'on pourroit employer pour multiplier les reffources des Gaffes qui s'épuir' ïent toujours trop vite.  (159) CHAPITRE VIL } Des abus qui fe font gliffés dans les Claffes ; du defpotifme des Commijfaires ; moyens cPy remédier en établiffant des Ojfciers-Commandants ,fous les yeux de qui fe feront les levées, & par de frequentes infpeclions; nouveaux moyensd'augmenter leurs reffources. ÏÏl s'eft introduk, dans 1'adminiftration I des Claffes , une foule d'abus qu'il feroit I trop long de de'tailler : je n'en citerai que a quelques-uns. Le plus confide'rable , a mon avis, c'eft la facilite' que 1'on a d'liever au | grade d'Officiers mariniers , les matelots 1 qui le mentent , ou ceux que la faveur | veut avancer ; paree que cette qualite' eft la 1 feule re'compenfe qu'on ait a leur procurer : il arrivé de-la , que le nombre des Officiers I mariniers fe multiplie bien au-dela des beI ioins re'els, & que, pour en tirer parti, on en •i augmente la quantité'fur lesvaiffeaux: la mulI titude enaffoiblit la confidc'ration; & ce grai de, qui devroit être rt'fervé a la capacite', eft \ prodigué trop fouvent a des fujets quin'ont,.-  (ïöo) £our eux , que la bonne volonté de ceux qüi les y pouffent ; ce qui nt'cellite un choix qui ne devroit point avoir lieu. Cet abus de'peuple encore cönfidérablemeiit des Claffes ; au lieu qu'en faifant envif'ager , au matelot, les titres fucceffifs de nautilans &T de gabiers comme des grades rénumératifs, on eütretient fon émuiation, & c'eft obvier a 1'inconve'nient que je viens d'indiquer ; on emploie, d'ailleurs, utilement des hommes que 1'expérience & la pratique ont formés , & qui achevent de fe rendre dignes de monter a des grades fupérieurs ; la plus grande cqncurrence ajoute encore un nouveau motif de confidération pour celui qui les a obtenus de préftrence. Toutes ces obfervations ont plus d'importance qu'on ne eroit. Oh autre. grand dt'faut des Claffes , c'eft la regie confiée, dans un département, k un feul homme. II y exerce un delpotifme fouvent auffi injufte qu'intolérable. L'équité ne préfide pas toujours a fes décifions , ni 1'impartialité a fes or-dres, ik 1'objet de fon indifférence , de fon reffentiment ou de fa haine , -eft facrifié aux avantages de ceux qu'il favorffe. Le matelot employé dans des campagnes réitérées au fervice du Roi, qui n'eft pas le plus lucratif, voit, avec envie le fort de fon camarade , qui refte continuellement au fervice du Marchand , qui n'eft jamais plus avantageux qu'en temps de guerre. II en eft même qui fe trouvent réel-  ïement afFeflt's de cette efpece de perfécution que le chagrin qu'ils eu concoivent. les fait tomber malade : de-la , cette fbulé de valetudinaires qui rempliffent nos höpi- ' ►aux. r C'eft bien pis encore , quand un intérêt iordide eft la lource de ces vexations. Le Atgociant, qui fpécule de grands avanta■ges , paie ge'ne'reufement les matelots qu'on lui procure. Ces marcliés honteux ne'fout pas les feule profits qu'un Commiflaire aviae ie permet. Tandis que d'un cöté , il eft ■occupé a les conclure ; de 1'autre, un pere vient racheter , par des fupplications & des facnfices trop au-deffus de fes moyens ia liberté d'un fils , le feul appui de fa fbibieiie , qu'un ordre fatal alloit lui enlever. Ces crimes de la cupidité , ne font que trop communs; mais il eft plus aifé de les denoncer que de les prouver, par la perfide adrefie de leurs Auteurs , a en effacer jufqu'aux moindres traces ; les viöinies mc-mes de ces indignitcs criantes, e'touffent leurs plaintes dans le filence, & cachent iufou'a leurs larmes. A qui s'adrefferojent-ils, contre une autorite' fi defpotique ? Qui reclameroient-ils, contre des ordres fi pre'cis & voilt's fous prétexte fi fpe'cieux ? Le moindre inconvénient, qui re'fulte dc de ces fourdes manoeuvres, c'eft que le fervice du Roi en fbuffre, paree que ce ne font pas toujours les moins bons fujets qu'on en exempte. On voit encore 1'homme pro-  tégë, & connu pour n'avoir que des talents : mediocres, avancer avec une rapidité in«royable ; c'eft un autre abus de la Régie , qui donne le droit, au Commiffaire, de prifer-, fans le bien connoitre, la capacité d'un ji fujet qu'il affeftionne par des rapports indixects. S'il a une jolie parente, douce & cora- I plaifante , le plus inepte trouve bientöt le moyen de percer ; tandis que le matelot for- I mé , n'ayant d'autre appui que lui-même, trop plein quelquefois de ce fentiment de | confiance que nous infpire les talents, s*ex- | pliquant avec une certaine énergie fur les'! injuftices qu'on lui fait effuyer , s'attire un | reflentiraent que fon amour propre a pro- 4 voqué , bien moins que 1'équité qui plaide i tout haut en fa faveur. Tous ces abus , & ceux que 1'intérétj feul peut commettre , prennent leur four- j ce dans le Reglement qui a fixé un traite- \ ment général pour les départements des i Claffes , que les différences locales au-| roient dü feules déterminer Quinze cen-tlg livres ou deux mille francs peuvent fufJ fire dans quelques petits Ports de mer ,| mais non pas dans les autres départements! ou le Commiffaire feul eft fjrcé de tenirr une maifon , & de repréfenter. En gé-: néral , tous les appointements font trop* foibles ; ils expofent a la tentation d'a«| bufer du pouvoir, & de tirer parti dea circonftances. Ils doivent être proportion-l nés aux prix moyen des denrées & autre»;  (i63) tieceflités de la vie dans le lieu du Département ; mais comme rien n'arrête la cupidité de 1'homme, qui ne fe conduit pas par les principes de la plus exacte probité , il eft néceffaire de donner un frein a celui qui oublieroitfes devoirs. Voici celui que je propofe. Un Militaire qui a paffe' trente ans au ïervice de la patrie , ou il a confommé fouvent une partie de fa fortune, trouve, dans une Lieutenance du Roi , une Majorité , une Aide-Majorité , une retraite honora' ble & avantageufe , ou il eft encore utile a 1'Etat. Pourquoi la Marine n'a-t-elle pas les mêmes reffources ? Un Officier que fon age ou les bleffures , ont mis hors d't'tat de iervir plus long-temps fur mer , ne peut-il pas trouver encore les moyens d'être utile a terre ? Je defirerois donc que le Gouvernement voulüt établir des places honorables dans les différents Ports de mer ou Départements , pour être la récompenlè d'un brave Officier , qui auroit bien lervi; &c comme ces places ne feroient pas toutes appointées également , mais en railbn de leurs étendues , elles leroient le partage de ceux qui auroient vieilli dans Jes differents grades. Celles dont il s'agit ici , ne pourroient , pour la plupart, que flater 1'ambition des Lieutenants & des Adjudants (i) , que les raifons indifpenfables (i) Les Ports dc quefque importance, comme DunKerque, lc Havre, Saint-Malo, Morlalx, Port-Louis, le Croific, la Roebelle, Bayonnc, Marfeille & Corfe ,  (i*4) que nous venons de déduire , obligeroient a le retirer. En attachant , a ces places , ■de la confidération, & une autorité irömédiate fur tout ce qui a rapport a la Marine , dans 1'étendue du département, dans un Port de mer que le Commerce fréquente 8c vivifie, en lui donnant 1'infpeftion lur tous les Matelots claffes, & le droit de préféance aux revues, afin d'examiner les raifons qu'ils donnent pour fe dilpenler de marcher, 8c fi Pimpartialité prélide a ces levées , ne remédieroient-ils pas ,_quanci ils auroient pris une parfaite connoiffance du local , aux abus d'une autorité véxative ou intéreffée ? Ces furveillants feroient furveillés eux-memes par des Officiers fupérieurs chargés d'infpecter de temps en temps chaque département ; mille écus aux premiers , fix mille francs aux feconds , pns fur les revenus immenfes de 1'Amirauté, ne coüteroient rien a la Marine & a 1'Etat ; & on établiroit , par ce moyen bien fimple , une équité immuable dans radmmiftration des Claffes. La prc'fence de ces Officiers décorés 8c revêtus d'une autorité importante , donneroit plus de luftre & d'importance aux nouvelles levées que j'ai promis d'établir dans ce Chapitr'e. eroient des retraites hcmnêtes pour des Lieutenants fui n'auroient pu atteindrc 'a la majonte ; 6c les peits Ports, avec cent louis ou deux mille francs dappointements , feroient la récompenfe du fervice des Adjudants. pouï  Pouf donner encore plus d'étendue k' leurs places , je voudrois que les commif-fïons des Officiers & les Capitaines du Commerce fuffent ligne'es d'eux ; que tout ce qu'il y a de Marins, dans un departement,. fut a leurs ordres , fans que cette fuje'tion put gêner en rien le Commerce, fans fe meier abfolument des arrangement d'un Armateur avec fes Matelots & Officiers , quidoit être un contrat civil palTé de gre' a gré entre le matelot qui s'engage , & Ie Ne'gociant ou fon réprélèntant, qui Ifipule avec lui, le prix de cet engagement. Je voudrois feulement que les Capitaines, a leur depart, fulfent tenus de prendre. leurs or-dres, fans qu'il füt permis a ceux-ci de les retenir une feule minute, fous quelque prétexte que ce foit, & qu'il en füt dg même a leur arrive'e ; en un mot, ils rempliroient dans les poftes ou ils feroient de'partis ,. toutes les fondions de 1'adminiftration exécutive; c'eft-a-dire , que la régie & 1'admi-niftration des Claffes ,'feroit & demeureroit divifée en deux parties diftindes , dont 1'une , fous 1'autorité immédiate de cet Officier Commandant, comprendroit tout, ce qui concerne la difpofition , la dire&ion , 1'afferablée , 1'équipement des levées & travaux extraordinaires a exécuter pour le fervice du Roi; & 1'autre , fous 1'autorité du Commiffaire , comprendroit tout ce qui regarde la recette , la dépenfe dk la comptabilité des deniers &des matieres. Ces deus;  (loo) Chefs, entre qui on ne permettroit aucune alliance qui put rendre leurs intéréts communs , ne s'eritendroient. pas, a coup fur,. li facilement pour dévorer la fubliltance du matelot , & faire entr'eux un injufte partage des avantages & des peines attachées a leur état. Ils remédieroient encore. a un abus auffi préjudiciable a la population des Claffes ,■ en ne permettant. pas qu'un matelot forte de fa fpbere, & que par un exces d'avarice du Négociant, le marin , né' dans le plus bas degré , parvienne a commander des batiments ; paree que , trop flatté du rang ou on 1'éleve , il n'exige pas que la peine foit aun aufli haut prix que celui qui,. parvenu a ce polte par fa naiffance & fon application , mérite une jufte confidération , & de plus forts appointements. Je. 1'ai déja dit : c'eft cette facilité a avancer ces protégés fubalternes , qui déplace les fujets, & contribue , autant que tout le refte , a occafienner les vuides dopt on fe. plaint. Le fils d'un cordonnier , qui a com— mencé matelot, devient Officier, fe Mte de faire au fervice les voyages que les Ordonnances lui prefcrivent , fe fait enfuite. recevoir Capitaine , commande des vaiffeaux , s'enrichit, & fes fils font des Meffieurs qui afficKant des prétentions, a force de foupleffe & d'humiliation, accuerrent des protedeurs & fe jettent effrontément dans le chemin des fujets, qui, places, par ie ha-  ïard , de niveau avec ces emplois , pofTeV dants les talents ne'celfaires pour s'y diftinguer, tiennent des fentiments que 1'e'duca i tion leur a infpire', cette noble fierté qui aime mieux fbuffrir dans 1'oblcurite', que d'en fortir par des lachete's & des balTeffes. Les exemples d'inde'cence, que donnent ces parvenus, font journaliers; tout le monde crie au ridicule , le Gouvernement feul ne voit pas qu'il eft de fon inte'rêt de réprimer" cette licence. Je reviens aux Officiers-Commandants que je place dans les Ports fui-vants : Dans la Manche Dunkerque Calais Boulogne Dieppe Le Havre Honfleur Rouen Cherbourg Granville Saint-Malo Saint-Brieux Morlaix. Dans 1'Océan. Le Conquet Benaüdet Port-Louis Belle-Me Le Croilic Painbosuf La Rochelle L'IfledeRhé Oleron Royan Blaye jBordeaux Bayonne Sc Jean de Luz Dans la Méditerranéc. Marfeille Corle Antibei Cette  On volt que nous aunons trente places4 au moins, & dix Infpeöeurs, qui formeroient en tout quarante retraites honorables , fans compter celles dont je parlenu au Chapitre linvant. On proportionneroit a la confidération dont on voudroit les faire jouir , aux reffources du Fays qu'ils habiteroient, a 1'étendue du commerce de leurs départements,les appointements dont on les fait jouir , &c. on leur palferoit un Secretaire & un Garde , dont 1'uniforme leroit différent de celui du Commiffaire ; ils porteroient 1'épaulette du grade qu'ils avoient dans la marine , & un uniforme approchant de ceux des Lieutenants de Roi , ou des Majors de place , avec le bouton a 1'ancre. En temps de guerre, dans le cas ou les cötes de leurs départements feroient infultees ou ménacées.par quelques vaiiTeaux lufpeös , ils fe traiifporteroieut aux battenes les plus a portéé de défendre la delcente, & de repoulfer Wnfidte ,. a la tête de tous les Invalides de la Marine , & des gens clailes qui le trouveroient au département; comme aufli dans les cas ou il feroit urgent de porter a 1'inftant des fecours aux vaiffeaux en péril ; ils en ordonneroient feuls ,- & répondroient perfonnellement de. leur négligence a cet égard. La Marine , conftituée lur le plan que ie tracé, doit être la fource de toutes les 'lumieres de rinftrudion , & la pépmiere ie.tous les marins de la France. En conle-  quence, au lieu de ces deux voyages inU-%tiles', que 1'on oblige tous les Officiers du» commerce a faire avant d'étre recus Capitaines , je voudrois qu'on lui impolat la. nc-ceffité de lervir fur les vailleaux du Roi ; en paix,un temps limite'; en guerre , un temps illimite' , en qualité de volontaires ; & voila la fource intarilfable de ceux dont j'ai parle' dans le cours de cet ElTai. Cette nouvelle claffe- de marins feroit un de'bouche' commode pour ces jeunes gens da families anciennes dans la roture, & mêmedans la nobleffe indigente , qui ne trouvent qu'avec les plus grandes difficulte's , les moyens de s'occuper utilement pour leur fortune. Les admettre dans cette clalfe, feroit d'abord une diftinftion avantageufe , .& enfuite leur procurer, fans frais , les moyens d'acque'rir les connoilfances les plus étendues fur leur me'tier. Les Maïtres d'hydrographie ,- e'tablis ou a e'tablir dans prefque tous les de'partements, leur en donneroient les premiers éle'ments; enfuite,admis dans les Ecoles fondées dans les Ports déhgnés pour cet effet, ils acheveroient dc s'inftruire dans toutes les fciences qui font les meilleurs marins , ils acquerroient fur les vaiffeaux du Roi 1'expe'rience & la pratique qui dilfinguent les bons Officiers.. Calais , le Havre , Cherbourg, Saint-Mal o. & Morlaix , dans la Manche; Benaudet , Paimbceuf, laRochelle, Blaye&cBayonne., fiir 1'Oce'an; Cette & Antibes, dans la Mé-  (■tic) dïtefannée , me paroiffent les Ports les pW propres a e'tablir ces Ecoles maritimes. Des Couvents d'hommes, ou des maifonsde Communaute's religieufes de ces Ports ou des environs, dont Pinutilite' n'eft que trop de'montrée , ferviroient a loger ces Colleges hydographiques & mathématiques. L'Amirautc feroit les frais de tous les Maïtres; & de toutes les Villes circonvoi-fines , la jeuneffe qui fe deftineroit a la mer, viendroit en foule a ces Ecoles gratuites acque'rir les lumieres de la the'orie , en attendant d'être a même d'y joindre celles de Pexpe'rience. Suffifamment inftruits des notions préliminaires , on les embarqueroit fur les vaiffeaux du Roi dans les proportions fuivantes : Vingt fur les fre'gates, trente fur les' vaiffeaux de foixantequatre 8c de foixante-quatorze, quarante fur ceux de cent-dix, 8cc. on leur apprendroit lur ces vaiffeaux , 8c dans les Ports , 1'exercice du canon, celui du fufil 8c du jet des grenades, la manoeuvre 8c les éVolutions ; enfin, on en feroit des hommes inftruits en tous genres, 8c dignes de la confiance du Ne'gociant qui leur confie fa \ fortune , 8c du Gouvernement qui leur confie la vie des hommes» Il faudroit avoir fubi ce noviciat pour obtenir le commandement du plus petit vaiffeau pour le long cours , & même le grand cabotage ; 8c comme on fe rendroit difftcile fur 1'admiffion des fujets qui ne pourroient être re-  S COS dans les Colleges d'hydrographie & de> matht'matiques, que fur les certificats desiCommunautés des Villes, ou des Notables i Juges & Curt's, &c. des lieux de leur naiffance, on n'y admettroit que les fils de la bonne bourgeoifie, ou de J'ancienne roture Jqui exerce des charges honorables. Enfin, tous ces jeunes gens delfinés au commanjdement des batiments du commerce feroient inés dans une condition honnête , & dignes, s'ils annoneoient de grands talents, d'enjtrer dans la Marine royale ; ce feroit parmi des plus diftingués par les connoilfances, les jfentiments ou la nailfance , que 1'on choifipoit les fujets qui devroient concourrir lavec les Garde-Marines pour remplir lesblaces d'Enfeignes de vaineau vacantes, & !méme quelquefois celles des Adjudants ique j'ai compris dans les Etats-Majors des 'rvaifieaux & fre'gates , quand leur expcrien-fee, leur conduite & quelque belle action jles auroient rendus iufceptibles ; ce feroit tencore parmi cette jeunelfe qu'on choiliróit , entre les plus fages tk les plus capaibles , les premiers ck feconds pilotes les' wides pilotes & les timonniers. | Si , a la fuite du bienfait de 1'tducation ffiratuite & rendue nécefTalre , le Minillere liait diftribuer , d'une main moins libe'rale i'qu'e'quitable , des privileges, des dilfincjtions , des prt'rogatives &c des honneurs, ril' va faire d'une jeunefle vive, ardente & jk'gere ; une \ t'piniere de ht'ros. C'eft par  ... OaT Popinion cju'une fage légiflation doit'régrier :c'eft 1'opinion qui gouverne tous les Etats, fon pouvoir influe lur tous les hommes J c'eft 1'opinion qui fait quelquefois le fupplice du fage , en même-temps qu'elle cou-ronne les fuccès de 1'homme entreprenant. Sous le regne de 1'opinion ,-1'eftime deshommes devient non-feulement utile a tous, mais même ne'celfaire au citoyen , qui veut fe foutenir au niveau de tout le monde ; ■ Pambitieux Pulürpe comme un moyen utile a fes vues ; Phomme vain la mendie commeun te'moignage de fon mérite , & 1'honnéte homme 1'exige comme indifpenfable. L'honneur eft une condition que beaucoup d'hommes mettent a leur propre exiftence. Le Gouvernement , qui fait faire agir a propos tous ces relforts du cceur humain, viendra toujours a bout des deffeins les plus hardis, les plus glorieux & les plus difficiles. On a dit tout cela avant moi; mais. il n'eft pas inutile de re'pe'ter des verite's dont on n'a pas affez profite'. Les Corps politiques confervent plus long-temps que les. autres le mouvement qui leur a e'té impri-mé; mais ils en recoivent aulh bien plus.lentement un nouveau. En attribunant aux volontaires , fur les_ vaiffeaux & les frégates , les fonctions de pilotes , d'aides-pilotes & de timonniers , je fais rentrer dans les claffes des matelots une foule de fujets qui en fortent pour ©ccuper ces emplois, & je rendsa la Marine-  rine des hommes precieux , plus néceffaires dans cet état que dans 1'autre. On fe plainc tous les jours que les hommes clafTés s'épuifent trop promptement; j'ai fait voir les tams de propreté qu'il faut prendre pour leur confervation. Je vais maintenant indifcuer un nouveau moyen d'en augmenter 1efpece , qui devient rare même dans les Ports de mer. Les höpitaux des Villes de 1'intérieur du Royaume regorgent d'orphelins & de batards ;pourquoi le Gouvernement ne preneroit-il pas le foin de les élever pour Ia Marine ? Nous ne fommes plus au temps eu le malheur dignorer fes pere & mere étoit un opprobre aux yeux mêmes du peuple Je moins délicat. Mon avis feroit donc qu'on rit tous les ans des levées parmi Ces enfants de 1'Etat; qu'on eut 1'attcntion de les choifir depuis 1'age de douze ans jufqu'a celui de ïeize, d'une bonne conformation , d'une haute flature, & d'une conftitution faine & robufte ; qu'on les fit enfuite conduire dans Je Port de mer Ie plus voifo,, & la, qu'on les embarquat tout de fuite, pour eftayer fi,leur tempéramment peut fe faire a Ia mer. Chaque vaiffeau feroit obligé d'en prendre' un ou deux, fuivant la grandeur : en attendant qu'on put les embarquer , on pourroit les occuper dans les Ports aux plus petits travaux , & dans les Colleges mantimes. Au retour de la première campagne , on les diftribueroit dans les Ports & R  fes Arfenaux de Marine , pour etre inftruits & employés comme nous le dirons bieutót. Tous ces établilTements auroient beaucoup d'avantages fans entrainer aucun inconvenient réel. Malheureufement les inlfitutions les plus limples, les plus faciles & les plus fages , qui n'attendent que le fignal du légiflateur pour répandre dans 1'Etat 1'abondance , la force & le bonheur , & qui mériteroient au Prince la reconnoiffance éternelle de toutes les générations , font ou inconnues ou rejettées ; r,une inquétude minutieufe , la timide prudence du moment, la défiance & 1'averlion pour les nouveautés les plus utiles , s'emparent de 1'efprit de ceux qui pourroient regler & combiner les changements & les moyens que je pro*, ►pofe.  CHAPITïlE VIII. De l'éducation des Garde-Marines nsJïiUs ou'on neut öter & mettre a voJonte, afin Achi}r fc,- • , f j » ' • _ -0„r taire voir Ia forme de chaque piere en —-—, — __>...UI; {qu'on ^av-eroit fur la piece, ) fon affemblagc avec les pieces voifines , & leur rappor de folidite' avec le tout. De meme on lur feroit connoitre ce qu'on nomme les hains , tout ce qui forme 1'affemblage de 1'arcaffe d'un vaiffeaux, en bois, d'un grain fin, comme le buis ou quelqu'autre. On leur montreroit, de meme , la coupe des pieces d'un hou entier ou d'aJTemblage , leur endentement fur la ferre-bauquiere, 1'affemhlage des pieces d'un couple ou de plufieurs;. la maniere dont on cheville Ie; tzvées fur la quitte, fon e'cart avec le brion , la forme particuliere des fourcats ou varangues acculées, des apótres, du genoux & allonges de revers, des barres d'arcajfes &c d'hourdis des précentes; enfin, de toutes les pieces importantes qui entrent dans la conftruction d'un vaiffeau : en un mot, je voudrois qu'on leur parlat aux yeux. Cette maniere de de'montrer, dit Lachapelle, eft la meilleur, a portee de tous les ages & de tous 3es efprits. Quand on leur auroit ainfi pre'fente' les premières notions de la conftruction, on leur apprendroit a dreffer un plan, a for-  <179 1 . % > . mer Un devis; on les obligerott a fuivre efP fuite avec affiduité & par efcouade la conftruftion entiere d'une gabarre , corvette , frégate ou vaiffeau de ligne ; enfin, on s'attachp™ic a leur donner les connoiffances les plus effentielles en cette partie. II en eft trois autres qu'on négligé beaucoup trop , a mon avis; ce font le grément, la manoeuvre & les évolutions navales. Le premier eft abfolument abandonné ; car je n'appelle pas des connoiffances fur le grément, les notions fuperficielles qu'on leut donne fur des' modeles en petit, oïi la main, le doigt d'un feul homme fuffifent pour braffer une vergue ; ce jeu d'enfant ne leur donne aucune idéé des frottements, ni des raifons qui ont déterminé la fituation des bras, des boulines, des balancims f &c. II ne leur apprend rien , ou prefque rien, de la coupe, & des facons a donner au cordage coupé, pour être employé comme haubans, galaubans , ejlrops , écoutes , &c„ Enfin, cet amufement, a mon avis, n'eft bon qu'a les difpofer h une étude plus férieufe , oh ils ne doivent pas dédaigner d'acquérir les connoiffances néceffaires par u» travail manuel. Il faut d'abord leur en donner des notions théoriques. Je ne connois aucun livre qui traite de cet objet; mais , en revanche, il y en a plufieurs Traités manufcrits. Un des meilleurs qui me foient tombés entre les mains, eft celui que M. de Ia Vigne-Buiffon, Commandant au poro  ( ï8°0 «fe KW, avoit fait pour I'inftru&on de fes enfants : il enfeigne d'abord laproportion des mats, verguts, hunes, barre, de tunes, bouts-dehors & ckouquets;']* coupe des manoeuvres proportionnellement aux vergues (i); enfuite le capelage des mui,, des yergues & du beaupré ;la maniere de faire fes Heures, Ia grofleur & les paffes de toutes les manoeuvres dormantes & courantes ,. leur pofition; il apprend, en un mot, la maniere de gréer un vaiffeau, de le mater, & de Pabattre en carenne. C'eft le Traité le plus inflrudif & le plus complet que j'aie jamais connu ; il mériteroit d'étreimprimé, & d'étre admis au rang des livres claffiques dans les falies des GardeMarines. Pour en fuivre le développement, & leur en faire comprendre ï'ütilïté; il faudroit leur en faire exécuter tous les procédés ; & voici mon avis a cet égard : il faudroit, dans une des enceintes de leur hotel , leur faire conftruire, fur un chantier expres , la coupe horifontale d'une corvette de vingt canons, élevée de quatre ou cinq pieds au-deffus du gazon, qui repréfènteroit Ja mer; on y mettroit un beaupré, un mat (O II coupe toutes les mancenvres , pour chaque mar, fur Ia verguc principale de ce mat-, dans fa Iongucur, prife de taquer en taquet. Cerre méthode évite quantité de fraftions qui diargcntlamémoirc;il prend auffi la groffcurfur les rides. Ces deux objets font la Siefurc & le terme de toutes les comparaifons.  (I8IJ da mifaine, un grand mat, & un mat diftingué. Un couple de maïtres des plus inftruits , des plus honnétes & des plus intelligents , leur apprendroient d'abord a couper les manoeuvres fuivant les proportious , en_ longueur Si en grolfeur, que prefcriroient les dimenfions de cette efpece de vaim,~, . enfuure r phabit bas , & revêtu d un gilet at ,„;le de coudl b)eu . bkn bou_ tonne ; Sc en outrt, ^un efpece de tablier qui monteroit jufqu'au col, & dsfcendroit, de la ceinmre 'aux genoux , par-deffus une grande culotte femblable au gilet; ils fourreroient , garniroknt Sc capkroitnt euxmémes les haubans, les ét ais, les marchepieds , &c. On ne leur donneroit que du vieux bordage a employer; on leur rendroit compte avec foin, par des lecons railonnêes, de tous les proce'de's que 1'on fuivroit, dans telle ou telle facon de travailler , k certains jours de la femaine ; on les occuperoit a cet exercice , qu'on leur feroit regarder comme une re'cre'ation , un de'laffement aux contentions de 1'efprit qui s'applique aux calculs de 1'hydrographie Sc des niathêmatiques Quand ils polfc-deroient a fond la coupe des manoeuvres , Sc la maniere de gre'er , on poufTeroit leur inffruction plus loin. Le Roi auroit exprès, dans les ports de Breft & de Landerant, deux corvettes de feize ou dix-huit canons , de quatre ou fix livres de balie. Les jeunes novices dont nous avons propofe' au.Chapii-,  (i8a) tre précédent 1'affemblage dans les Ports , aides de quelques matelots ou nautilans plus forts , feroient employés a tranfporter a bord de cette corvette le grément, les voiles , & le autres objets nécelfaires a fon armement; mais il n'y auroit que MM. les Afpiranrs & Garde-Marines qui, fous 1pc yeux de leurs Officiers & de leufc *"altres > duifent travailler a gréer la ~orJ.ettf > mct.~ tre les voiles en ver^e , dilpofer fon arimage , &c. Ce travail acheve on la conduiroit en rade ; & depuis le premier de Juin jufqu'au derm'er d'Oótobre, tous les jours abfolument ou le temps feroit convenable, les deux corvettes appareilleroient, courroient des bordées, & parcourroient la rade pji tuut lens, exécuteroient , en un mot, toutes les manoeuvres qu'un vailfeau feul , ou deux vaiiTeaux enfemble , peuvent exé"cuter ; ils donneroient des combats fimulés , tenteroient des defcentes , formeroient des attaques de Forts , prendroient & donneroient chafTe tour a tour : enfin , toutes les manoeuvres que les circonftances, 1'efpace , le lieu & le temps permettroient. Après avoir paffe un été au grément , un fecond a la manoeuvre , on leur donneroit, dans le troifieme , quelques notions des évolutions navales. C'eft par cette derniere inftruftion que fe termineroient ces efpeces de caravannes que j'appelle leur rigoureufe. On armeroit trois corvettes dans chacun des Ports du Royaume, comme a Breft r è  f 183) Landevenec, a Rochefort & a la Hougue {ijt ces coi-vettes , rt'unies fous la proteöion de trois vaiffeaux de guerre , accompagrvïes de trois frégates , metteroient en mer au premier d? Mn, pour rentr^out^lak^r- ^J£È2g%t cloiüere entre Finiffere & Oueffant. L'efpace de temps qu'on refteroir en mer a t'voluer feroit d'un mois ou cinq femaines avant de relacher, fous quelque prétexte que ce füt: on pourroit même s'écarter jufqu'a chercher la relache des Canaries , & la plus longue ne pcurroit être que de huit jours au plus. L'e'quipage de chaque corvette feroit entit'rement compofe* d'Afpirants ou Garde-Marines, a la rtferve de quelques Quartiers-Maitres , Gabiers, Matelots & Valets , pour la tenir en tout temps dans une exacte propreté. Ces corvettes , qui feroient toutes de feize , dix-huit ou vingt canons , feroient doublées en cuivre , aménagées le plus commodément poffible , pour contenir a 1'aife affez d'hamacs k 1'anglaife , & de cadres a pieds pour coucher quarante ou cinquante alpirants ; on auroit foin de les tenir auffi bien aérées (1),. (1) Je fuppofe déja établis ces deux Ports, qu'il eft bien cITentiel 'a la France d'avoir, fur-tout a celui dc la Manche. (1) J'imaeinc qu'il feroit poflible de leur percer entre chaque fabord unc fenêtre de huit ou neuf poucesen quarré, dont lp-jour, percé obliquement, rombejcit dans 1'ccire-pont par un petit é:outil!ou onver*  C184T & de leur ménager, aux de'pens de la cale; une honnéte hauteur dans 1'entrepont; enfin , on les rendroit auffi commodes & auffi logeables qu'il feroit pofiible. bonne heure, il faut s'être appliqué longtemps  temps pour avoir acquis les connoiffances pui conftituent le bon marin. Je voudrois' donc que pour faire le pendant du bel établijfement des Ecoles de canonnage , on en' mftituit d'autres pour former a la manoeuvre. Ces Ecoles ne feroient pasdifpen-dieules & procureroient de bons matelots. Une vieille flüte. placée dans un endroit ecarté' du Port, y liiffiroit; de vieux cor- • dages & de vieilles voiles, hors de fervice ailleurs , feroient encore ici d'une grande utilite'. Tous les e'te's, depuis le premier de Mai jufqu'au dernier d'Oétobre, on y conduiroit tous les matins une efcouade de cette jeuneiTc, gue j'aipropofe' ,-dans le Chapitre precedent, d'aller recruter dans lés hopV taux ; on les choifiroit depuis 1'age de douzeans jufqu'a celui de vingt; on lui appreu-droit a mater & démater cette flütè , k' gre'er & la de'gre'er, couper & garnir les' manoeuvres , les placer , guinder les mats , enverguer les voiles , les border', les car- -guer &c ferrer , prendre des ris, toutes les manoeuvres enfin, ik a mettre le batiment,. bien amarre' , dans un quartier ilble' du Port, auffi en état que fi J'oo vouloit PetfJ iortir, & enfuite le dégréer abfolument.Cet exercice coptinuel [ne ferbt pas plut,öt fini, qu'on le feroit recommeucer, jufqu k ce qu'ils fuflent tous affez au fait pour faire tbutes les manoeuvres. Quelques Maïtres entretenus, & quelques Quartiers-Maitres,. le-roient chargés de les inftruire. Quand le-:  nombre que nous avons dit, Ie feroit parfaitement, on en choiflroit un autre. Si dans tous les Ports de la Marine de France, on e'tablilfoit de femblables e'coles , on verrok s'e'lever & fe multiplier une pépiniere de jeunes marins. Pour achever leur tducation, on les dikribueroit encore fur des corvettes , depuis feize jufqu'a dix-huit & vingt canons, qu'on feroit fortir dans les Rades & dans les environs des Ports , pour les former a la manoeuvre d'un vaiffeau. Ces corvettes e'quipe'es expres, pour perfécUonner les jeunes Officiers dans les manoeuvres & les e'volutions navales, ferviroient, en même-temps, a l'inftru&ion de ces jeunes gens; on avanceroit ceux qui montreroient plus de difpofnions & une plus grande application, afin de donner de Ytmulation aux autres, en les diftribuant tout de fuite dans les claffes des matelots & des r.autilants , fuivant qu'ils en feroient juge's capables. On leur apprendrok enfin, avec le plus grand foin , 1'exercice du canon,. celui de fufil & le jet de grenades. Je ne voudrois pas qu'il y eut en France un feul matelot qui ne füt tirer aufli bien un coup de fufil , que le premier foldat du premier Régiment de France. On m'otyectera , peutêtre , ce que j'ai déja entendu dire a plufieurs Cfïiciers de la Marine , que nos équipages r fur nos vaiffeaux & frégates , ne font jamais affez nombrcux pour qu'on mette des matelots a la moufqueterie, qu'étant la plupart  (*9*) émployes A fervir les canons , il eft inutifè de leur montrer a tirer un coup de fufil; cue les troupes embarquées , pour le faire \ Jont en fuffifante quantité'. A la bonne heure! Mais dans les occafions d'un abordage \ d'une delcente , de Pefcalade d'un Fort, d'une retraite, & de 1'attaque d'un vailieau que 1'on enleve a 1'ancre avec fes bateaux , on conviendra , avec moi, qu'il eft eflentiel qu'un matelot fache tirer jufte , & promptement charger fon fufil; & j'avance hardiment que fur cent, il n'y en a pas vingt qui foient en état de le faire avec la célérité requife. La Bourdonnais, qui en valoit bien un autre, inttruifit tous les équipages de fon efcadre a bien tirer. Auroit-il eu deux mille cinq cents hommes a faire le fiege de Madras , s'il n'avoit pas mis une partie des équipages de fes vaiffeaux a groflir fa petite armee ? Je le répete encore , il eft important qu'un bon matelot foit en même temps un brave^ foldat. Je ne m'arrêterai pas davantage a démontrer ces vérités; les bons effets dont ces établiffements feroient fuivis, fe précipitent en foule lbus ma plume , qui fe refufe a les écrire , pour paffer au fervice des Ports. Rien de fi bien vu , de fi bien penfe , que cette nouvelle régie des Ports & Arfénaux; de Marine , établie par 1'Ordonnance du 27 Septembre p76 ; mais comme dans mon plan , le vaiffeau confie' définitivement a un leul Etat-Major, n'eft plus fous la garde ni S z  . . . (I9a) la directionimmédiate des Officiers-du Port^. il eft néceffaire d'y faire quelques changements; & fans préambule inutile, voici ceux que je propofe, Ils tendent a diminuer , de beaucoup , ces Officiers fédentaires, que je eonvertis en places de retraites. On fait ici mention du port de Rochefort, paree qu'on le juge très-bon pour un Port de conffruction. En attendant , fur-tout, qu'on en ais; qjiti un dans la Manche. CONSTRUCTION,. A B R E S T }. Un Directeur , Un Sous-Directeur ,, Quatre Surveillants. A T O V Z O N Un Directeur ,. Un Sous-Directeur, Deux Surveillants.. A R O C H E F O R T , . Un Direöeur , Un Sous-Directeur, Deux Surveillants.. Ces fix places de Directeurs & de SousDirecteurs , feroient occupés par trois Capitaines de vaiffeaux , & trois LieutenantsCapitaines , retirés du fervice de merj &.  (193') celles des Surveillants, le feroient par detr Lieutenants ou Adjudants. ARTILLERIE, a B r e s t Un Direfienr, Un Sous-Directeur ,. Un Major , Deux Aidcs-Mojors , Deux Sous-Aides. a T o u x o n , Un Directeur, Un Sous-DireSeur, Un Major , Deux Aides-Majors, Deux Sous-Aides. a Rochefort,, Un Dircéteur , Un Sous-Direöeur ,. Un Major,. Un Aide-Major , Un Sous-Aide ( i). (i) Ces places de Sous - Aides - Majors ne feroient pas , dans le vrai , des places de retraites , paree qu'il ne feroit pas néceflaire d'avoir navigue' pous les obtenir-; on choifiroit pour les occuper ceux en qui on auroit trouve plus de talents pour bien difci- ■ plincr une troupe , &■ ce fervice fédentaire feicut le roeme dans tous les forts.  (r94) M A J O R I T É, A B R E S T , Un Major-Général , Deux Aides-Majors. A T o v z o n t Un Major-Géne'ral, Deux Aides-Majors. A RoCHEFORTf Un Majof-Ge'ntral , Un Aide-Major. De ces vingt-une places, onze , celles de" Directeurs & Sous-DireÖeurs , feroient comme nous venons de le dire , des retraites pour d'anciens Capitaines & Lieutenants-i Capitaines; celles de Majors , pour des Ma^ jors, a qui la fanté ne permet plus d'aller a la mer ; celles des Aides-Majors & SousAides-Majors de TArtillerie , feroient donnt'es aux talents & a la capacite', paree que I'activité de ces places exige un continuel exercice,& des hommes en e'tat d'agir. Enfin les Majorités & Aides-Majorite's de la Marine , feroient encote occupées par des Capitaines & des Majors. L E PORT. A B R E S T , I Un Directeur,  Un Sous-Directeur, Quatre Aides. a T o u t o n f Un Directeur, Un Sous-Directeur , Deux Aides. a R c>c h e f o r r. Un Sous-Directeur, Deux Aides. De tous temps, le fervice des Officiers de | Ports , m'a toujours paru très-ridicule. Que I fignifie d'abord cette fotte diftinction enI tre un Officier de port & un Officier de la Mai ï'ine ? Ce n'eft qu'iin pre'texte a 1'orgueil de I ces derniers. Il vient d'e'lever, dans 1'OrdonInancede'ja cite'e,une barrière inlurmontable 1 entr'eux, & les premiers. Il a ferme a jamais■ cette porte batarde qui avoit cependant iïfervi a introduire quelques bons fujets ; jmon intention n'eft pas de la rouvrir; mais jfi j'en deTaprouve 1'emploi, ce n'eft pas leimême motif: c'eft que leur fervice , comme1 je 1'ai déja dit, me paroit ridicule. Les traIvaux du Port, qui comprennent les mouIvcRients, amarrage , leftage & déleftage Ide tous les batiments flottants, ne font pas jdans un port comme Breft,d'une affez gran1de importance , pour occuper un fi grand anombre d'Officiers confommés dans Ie méi tier. Un Capitaine, un état Major, a qui Ie  ï£oi confie la proprie'té d'un vaiffeau , doit" être en e'tat de 1'entrer dans le port &de lë mettre en rade , la mife a I'eau , 1'entre'e & la fortie du'bartin , le tirage a terre, & le matement & le dématement, la carene ; enfin, tous les mouvements & les manoeuvres a faire dans le Port, ne font pas plus difficiles, & doivent, dans mon plan, s'exe'cuter fous les yeux des Officiers du vaiffeau , aide's des fecours du Port. Ce font 'ces re'flexions qui m'ont de'terminê a en diminuer le nombre. Je n'y mets donc qu'un Directeur , qui fera la retraite d'un Capitaine de vaiffeau; un Sous-Directeur , celle' d'un Lieutenant-Capitaine; & quatre Aides de Ports , qui feront des places de re'compenfe pour les Maïtres d'équipages entre-fcnus. Je regarde dónc toutes ces places comme' des retraites honorables & avantageufe pour les Officiers de tous les grades, que leur fante' ou quelques éve'nements imprévus forcent a auitter la mer ; & qui fe fentent encore affez de zele & d'activite' pour' être utiles a terre. On voit que ces fonctions du fervice lédentaire , emploie , fuivant mon plan , quarante-fix Officiers retire's du fervice de mer, & a qui elles doivent fervir de retraite & de re'compenfes. Si,. a ces quarante-fix Officiers , employe's' dans les A'rfenaux , on joint ceux que je' place dans les Départements , pour furyeillér les Commiffaires aux claffes, on aura foixante-  { *97 ) ïoixante-fiiize places de retraites , dans lefquelles un Militaire jouira , en paix , de la conlïde'ration qu'il s'eft acquife dans les arme'es navales. Je vais maintenant fixer les appointements •qu'il convient de donner aux premiers. Tour huit Directeurs , .1 chacun. . .. 60001. 48,0001^ Neuf Sous-Directeurs , a 5000 45,000 Huit Surveillants , 'a 3400 07,200 Trois Majors d'Artillerie, a. .. 4000 12,000 Dix Aides-Majors , a 3000 30,000 Trois Majors-Généraux , a.. . . 5600 16,800 Cinq Sous-Aides-Majors, a. . . . 1800 9,000 Huit Aides dc Port, 'a 1500 12,000 Total, 200,5000!" C'eft donc encore iooooo livres qu'il en coüteroit pour le fervice fe'dentaire des Ports ; mais auffi qu'on confidere , que fi les appointements de ces places font confide'rables, il font, ou doivent être la récompenfe de plufieurs anue'es de fervice bien employe'es , & le prijj d'un travail quotidien & utile. Je ne m'arrêterai pas plus long-temps k de'montrer les avantages, fans nombre , qui re'fulteroient de mon plan , ils fe prefentent eu foule a mon imagiuation; mais j'ai trop bonne opinion de la fagacite' de mes Lefteurs, pour entreprendre de les détailler.Puiffent-ils faire adopter les innovations que je propofe! T  (iq8) CHAPITRE IX. De la nourriture des Equipages , de Vemploi des forces navales en temps de paix, cy de quelques autres objets d'utilitépour la Marine. Il me refte a traiter de deux grands objets pour la Marine , la nourriture du matelot , & 1'emploi des forces navales en temps de paix. Je rends juftice aux intentions du Gouvernement , elles font droites & pleines d'humanité. En re'glant les vivres de la ration du matelot, en quantité fuffifante , il a déliré qu'on n'en donnat que de bonne qualité; mais qu'il y a loin de fes intentions lages & bienfaifantes, a la maniere dont elles font exécutées ! Il feroit plus avantageux , pour 1'économie & la fanté des hommes d; mer , que le Gouvernement, au lieu d'abandonner cette régie lucrative a des Compagnies puiffantes & accréditées, qui ne lom pas toujours animées de 1'elprit de défin téreftement que ces parties exigent, daigna deicendre kü-même dans tous ces détails, plus importants qu'on ne croit (i). Je n (i) Note de VEditeua. Les dcfirs;de 1'Auteur en- é remplis en partie dep ris que ceci eft écrit. M.is ■ écpir. dangereux de laifler a la cwjaidité des corr-  marreterai pas a prouver qu'en général la nourriture eft mal choifie, mal employée & plus mal répartie; qu'on ne mee pas afiez de loins dans le choix , de précautions dans 1'emploi & la qualité des viandes que 1'on fale, ni dans la maniere dont on les apprête. L'intention du Roi eft que fes agents achettent de bon vin; il eft prefque toujours mal fervi; ce font pour 1'ordinaire les vins des qualite's les plus inférieurs dont les vivriers fournifient leurs magafins ; & on les diftribue indiftinctement aux vaiffeaux qui ne quittent pas les mers d'Europe , comme a ceux qui vont au long cours, cette répartition eft vicieule La fermentation qui fe fait dans les cales des vaiffeaux qui vont dans les pays chauds altere bientót la qualité médiocre d'un vin qui fe léroit confervé dans un vaiffeau qui n'auroit pas paffe' le tropique. Cette diftinction eft fimple, & il eft criant qu'on n'y \ faffe pas plus d'attention. Le bifcuit, qui fe fait avec les meilleures farines de Bordeaux , eft originairemenc très-bon , ^mais la crainte d'en manquer la néceftité d'employer celles qu'on appréhende de voir vieillk, ou qui doivent faire (place a celles que 1'on fait venir j le défaut jgnies des vivres, un champ rrop libre , il ne falloic Ipas les remplacer avec lc defir dc s'appropricr leurs |bénéfi_ces , & les appiiquer, au contraire , a 1'amé,'Loxation des fburnitures.  ( aoo) (d'eiriplacements vaftes, commodes & bien airés , le manque abfolu d'étuves bien conftruites & luffilantes, oblige a en forcer la quantité au-delTus du beloin du moment, pour profiter d'ailleurs d'un inftant ou la main-d'oeuvre eft a bon compte ; toutes ces caufes , & bien d'autres , qu'il feroit trop j long de déduire, font qu'il fe vieillit dans ; les magalins, s'y gate; & li 1'on n'eft pas ; en garde contre la furprilë , c'eft toujours du plus vieux & du plus mauvais qu'on i cherche a fe débarraner de préférence ;; fouvent même on arrache un ordre a 1'autorité furprife , qui vous force a le prendre tel qu'il eft, & alors le matelot le mange, mauvais , ou fi 1'humanité de fes Chefs i s'intérefle pour lui, on le change au premier Port ou on relache, & c'eft autant de perdu pour le Roi , dès qu'on eft parvenu a le faire embarquer. Quelle in-dignité! Il eft encore un autre abus de la répartiticn , que je défaprouve , c'eft de ne pas faire conlbmmer , dans les Rades , une partie des vivres embarqués pour la campagne , fous le prétexte fpécieux que 1'armement doit toujours être complet; il arrivé dela , qu'un leng féjeur, en Rade , les dé^ tériore confidérablement; & on croit en-i fuite partir avec de bons vivres, quand on] en n'a que de mauvais. Une partie dond des viandes falées les plus anciennes , Ié bifcuit le plus vieux, le vin, le fromage J  (lei; & les autres menues provifions doivent fe» confommer. Le vin journellement , le bifcuit trois, & la viande un repas dans la femaine. Au moment du départ, on remplace ces conlbmmations par des vivres frais, & toujours meilleurs que ceux qui ont léjourné dans la cale des vaiffeaux. Ne feroit-il pas a défirer qu'on écartat du bord , par le moyen d'une efpece de galerie d'un pied & demi de large , les cloilons des foutes a pain des frégates ? on éviteroit deux grands inconvénients. L'humidité qui filtre a travers les murailles d'un batiment, & pourrit le bifcuit, & la perte entiere d'une foute de pain , lorfqu'elle fe trouve percée a I'eau d'un boulet du moindre calibre ; on prendroit, fur la longueur , le terrein qu'on perdroit fur la largeur. Je trouve qu'en général, on ne varie point affez la nourriture des gens de mer , & qu'on ne fait pas affez d'ulage des reffources que la fertilité de notre lol peut nous procurer dans tous les genres. Pourquoi rejettet-on celui des choux-croütes ? C'eft une li bonne nourriture , c'eft un li bon légume è mettre dans la foupe des Matelots ? Pourquoi ne pas adopter le puding des Anglais * Les farineux employés ainfi , font fi bons t fi nourriffants ! Pour en faciliter la préparation , je voudrois qu'on tentat un effaL Au lieu d'embarquer les légumes en nature , comme pois, feves, fayots, gourganties , qui tienaent tant de place , fe durcif-  (aoi) fcnt , font piqués des vers , ne cuifent jamais bien , & deviennent une nourriture defagréable & mal-faine ? Ne pourroit-on pas trouver un moyen , & d'en embarquer Ja farine bien tamifée, bien prelfée , & bien ttuyée dans de petits barils de la moitié moins grands des quarts ou ont met celle de froment. On en diftribueroit une certaine quantité a chaque homme , ou pour mieux dire , chaque plat, des petits chaudrons , & on mettroit dans la grande , pour Ie refte de 1'équipage , une quantité de cette farine proportionnée au nombres d hommes qui y vient tremper fa foupe . qu'elle épaifïiroit, en la rendantplus nourriflante. II ne faut pas oublier de dire , en pafiant, que les trente Volontaires embarqués fur un vaiffeau du quatrieme rang, compoieront trois plats ou tables qui auroient chacun leur chaudiere particuliere : & il me paroit convenable, que des jeunes gens bien nes foient traités un peu plus favorablement que les gens de 1'équipage. Je demanderois qu'on leur abandonnat une petite loute en avant, pour y renfermer leurs provifions, & qu'on leur accordat la permiffion de placer deux cages fur la dunette. On prétend qu'on a trouvéle fecret d'empécher I'eau douce de fe corrompre dans les pieces ou tonneauxdans lefquelsonla renferme au fond de cale, en mettant dans chaque piece:  (ao3) . .• . oe deux,üt\e ou deux fois plein les mams joirp tes de chaux vive tamife'e, elle fe de'pofe, dit-' on, fur le fond de la piece , que 1'on roule doucement, ce qui tapiiie fes parois interieurs d'un fe'diment qui empêche I'eau de pe'nétrer dans les pores du bois. Pourquoi ne pas fuivre conftamment ce moyen ft fimple de conferver I'eau douce , & de prévenir fa corruption; fi cette corruption, ce goüt, cette odeur infecfe , eft un des germes du fcorbut , qui fait périr tant de matelots. _ Je voudrois , encore, qu'on fit diftribuer de temps en temps aux equipages qui naviguent fous les climats brülants^de la Zone Toride , une limonade compofe'e avec du vinaigre , ou du citron & de la nit'lafTe» Quelques bariques de bon vinaigre, ou quelques facs de citrons, qui font fi connus dans nos Colonnes, qu'ils ne coütent que la peine de les cueillif , avec quelques bariques de me'lalfe, qu'on pourroit exiger en forme d'impöts, fuffiroient a cette conlommation , qui feroit un remede & un préfervatif contre les maladies putrides 8c inflammatoires. Pourquoi ne voit-on pas compter au rang de leur nourriture, fi non nabituelle , du moins fre'quente, le rk Sc le gruau , qui font deux fubftances fi faines Sc fi rafraichiffantes. La feconde eft commune en France , & quand le Gouvernement voudra , les forêts de la Guyanne lui fourniront la première en abondance ? Pourquoi , enfin , ne fait-on pas faire, aux e'qui--  pages , une coniommation journaliere Je' moutarde, dès que c'eft un bon antifcorbutique ? La Bourdonnais, que j'aime a citer , paree qu'il avoit un génie plein de reffources; la Bourdonnais, dis-je , fupple'a admirablement bien aux vivres qui lui manquoient dans la traverfée de Plfle de France aux Indes, en faifant diftribuer , aux équipages de fon efcadre, du café cuit a pleine chaudiere , pour humeöer du riz cuit de même , qu'il leur donnoit a déjeuné. C'eft un fait que j'ai entendu raconter a plufieurs anciens Officiers de la Compagnie des Indes. -La néceffité d'une meilleure régie , dans 1'adminiftration des vivres , eft fuffifamment démontrée ; paffons a un autre objet. Expêdhions dans le Notd. L'emploi des forces navales, en temps de paix, doit avoir plufieurs principaux motifs. Accorder de la protecfion & de 1'encouragement au commerce; tenir en exercice un corps nombreux d'Officiers , k qui un long féjour , k terre , feroit perdre I'pabitude de h mer ; ajouter k fon expérience, & lui fournir les moyens de perfeftionner fes connoiffances. II fèroit , en eff'et , inutile d'entretenir k quatre-vingt , ou de faire monter k quatre-vingt-dix le nombre de nos vaiffeaux de lignes , pour les laiffer pourrir dans nos Ports. Je dis donc qu'il eft abfolument indifpenfable d'en  C*9$1 ; n , avoir toujours un tiers arme , c'eft, dans ma fuppolition , trente vaiffeaux & vingc fre'gates qu'on employeroit a promener fansceffe, & a faire relpeéter notre pavillon 7 a foutenir Sc a aider nos t'changcs dans tout le Monde connu ; a vifiter Sc a protérr ger nos Colonies ; a faire de nouvelles dé— couvertes, ou a perfeöionner les anciennes. Je vais fuppofer un moment, que le Port que 1'on proj'ette dans la Manche , eft. actieve', j'en fais un nouveau département, & j'y place a demeure quinze vaiffeaux de lignes ; trois du premier rang que je prends a Breit; trois du fecond, que je prends a Toulon ; fept du troifieme rang , &c deux quatrieme , que j'öte encore du port de Brcft , ce qui réduit ce dernier a quarantehuit vaiffeaux , & celui de Toulon a vingtfept. L'un armeroit donc tous les ans feize vaiffeaux , 1'autre - neuf, & le port de la Manche cinq. Ils feroient envoyés , ces cinq derniers , dans toutes les mers du Nord', avec deux frégates Sc trois corvettes ;. ils fortiroient en Juin , pour rentrer a la fin de Septembre. Aux Antilks. Les feize de Breft , formeroient cinq divifions ; la première , de quatre vaiffeaux & deux frégates , qui partiroient en Septembre , pour aller aux ifles du Vent; oü ils arriveroient dans les premiers jours da  Novembre, y féjourneroient jufqu'au pi'e-i mier Mars , d'oij ils partiroient enfuite pour fe rendre a Sant-Domingue. Aux In des. La feconde , de trois & deux frégates , Jeroit expédiée , pour 1'ifle de France, dans les premiers jours d'Oftobre, elle y feroit ?Arr[vt'e' en comprenant le temps de fa relache au Cap de Bonne-Efpérance, dans Je commencement de Mars un mois ou deux lui luffiroient, dans cette Ifle , pour ie rafraichir & faire Ibn eau, fes vivres & fon bois; elle partiroit donc pour 1'Inde au eommencement de Mars & de Juin ; elle fejourneroit trois ou quatre mois a la cóte de Coromandel, & en partiroit k la fin de Septembre , pour en aller pafier trois k la cote Malabar , qu'elle quitteroit pour faire fon retour k 1'ifle de France , le premier de Janvier au plus tard , d'ou elle mettroit,enfin , a la voile pour 1'Europe , en paffant Ear 1'Afcenfion , dans les premiers jours de Mars , pour arriver en France , en Juulet. Aux Anülles & a la Guyanne. La troifieme divifion , compofée de trois vaiffeaux , deux frégates & deux corvettes , deftinée k remplacer la première partie pour les ifles du Vent, partiroit dans fe courant de Novembre pour la Guyanne y  (107> (dans un Port ou Etabliffement fitué dan» le fleuve des Amazones.) d'ou, après quelques mois de féjour , elle appareilleroic pour aller aux ifles du Vent , & y arriver un peu avant, ou peu après le départ de la précédente , pour les ifles fous le Vent. Celle - ci après quatre mois de féjour dans les différents ports de SaintDomingue, en partiroit pour aller dans les Ports des Etats-Unis , dans le commencement de Juillet, & y féjourneroit jufqu'au premier d'O&obre, qu'elle feroit fon retotur en France. A la cóte des Etats-Unis. La quatrieme divifion , de trois vaiffeaux; deux frégates & deux corvettes, mettroit a la voile dans les premiers jours d'Avril r pour aller montrer notre pavillon fur les cötes du Sud & du Nord des Etats-Unis , & fur celle de Terre-neuve , protéger & Ie commerce & la pêche, & faire fon retour a-peu-près au même temps que les batiments pêcheurs. Sur les cótes de France. La cinquieme divifion, formée de trois vaiffeaux & trois frégates , refteroit tout 1'été fur nos cótes , pour protéger les petites corvettes d'évolutions. pour aller montrer  i ao8) Aux Antilles. Nous avons laiffé aux ifles du Vent les vaiiTeaux, frégates, & corvettes de la troifieme divifion , qui y font venus relever ceux de la première; achevons leur campagne après un féjour de quatre mois dans ces Colonies , ils en partiroient avant 1'hivernage pour faire direetement leur retour en France. Dans la Mer Méditerannk. Les neuf vaiffeaux de Toulon , avec trois frégates & trois corvettes fe difperferoient en trois divifions , en Italic, dans 1'Archipel & fur les cötes de la Barbarie, partant & rentrant a des temps fixes , «Sc a des époques différentes. En découverte , & a la cête de Guinee. II refte encore quatre frégates que 1'onenverroit alternativement au Sénégal & a la cöte d'Afrique , pour y faire refpefter le commerce & le pavillon Francais , & en découverte , ou en meffage. Au refte, toutes ces_ époques ne font fixées ici que pour fe faire entendre, on fent que les circonftances, les vents & mille événements qu'on ne peut prévoir , contxibueroient 3 les varier , en les retardant ou en les avancant.  {109) Ces armements fixes , annuels & réguliers tiendroient perpétuellement notre Marine en haleine , en impoferoient a nos ennemis , qui feroient toujours fürs de nous trouver prêts a repouffer les infultes de 1'envie ou de la haine , & a maintenir par-tout nos droits & nos prérogatives. Ils etabliroient , dans le fervice , une régularité avantageufe a la fourniture des vivres, aux confommations & aux levées de matelots; de maniere qu'aux premières apparences d'une rupture, en doublant fes efforts, le Gouvernement fe trouveroit tout .d'un coup en état de faire face par-tout a la' fois de déployer toute fa puifTance , fans étre'expofé aux tatonnements de 1'inexpérience & de la timidité , qui cherche a effayer fes forces avant d'agir efficacement. Ils procureroient encore un grand bien , ces armements réglés , ce feroit d'augmenter le nombre des gens de mer dans toutes les profeffions; paree que ■ la néceffité de pourvoir de matelots ces divifions de la flotte Royale obligeroit le commerce , qui fe verrok affuré d'une proteaion efficace & périodique , a chercher tous les moyens poffibles pour fe procurer des équipages. Les vaiffeaux , frégates & corvettes dont je viens de faire mention , emploieroient luivant le calcul que j'ai fait ci-devant \ environ douze mille (i) hommes des claf- Ci) On a vu Chapkrc fixieme, qüp je n'emplole que deux cents quatre-vingt-dix hommes des claflcs fur un  les, c'eft a-peu-près le cinquieme de ce qu'on en compte en France; fuppofons que le commerce en occupe le doublé, c'eft beaucoup, il refte encore les deux cinquiemes, ü nous ne difons pas la moitie', pour la pêche des cötes, le batelage des rivieres , 8c pour fournir a la perte qui s'en fait tous les ans; & puis, comme je viens de le dire , un commerce avantageux &c lucratif , faura bien-töt fe procurer des reffources, &c en multiplier 1'efpece. Je crois qu'il y auroit auffi un avantage décidé , -pour le Commerce 8c pour la Marine , a ne faire de levée que tous les trois ans, c'eft-a-dire , que les douze mille hommes appelle's , pour la première fois , au fervice du Roi, a des époques différentes, pour éviter la confufion , y refteroient trois ans de fuite, feroient employés pendant ce temps a deux ou trois armements confécutifs , 8c feroient enfuite renvoyés au commerce après avoir été remplacés par d'autres, qui le feroient a leur tour, par une troifieme levée , qui, au bout de trois ans, feroit encore relevée par la première. On s'attend bien , malheureufement , que cette derniere ne feroit pas entiérement Vaiffeau dc foixante-quatre, ce qui fait jufte la moitié de fon équipage. Ainfi , on ne doit pas s'étonner fi trcnte vaiffeaux , vingt frégates , & huit ou dix corvettes , n'en emploient que doure milJe au plus ; je ne compte , dans ces douze mille hommes , ni les volontaires, ui peut-être les mouffes, &c.  (in) compofée des mêmes hommes qui ont paru la première fois au département. La navigation & le commerce maritime confomment bien du monde , & dans une efpace de üx ans la faux du temps doit en avoir bien moiflonné. On pourvoiroit a leur remplacement, en prenant fur les deux autres cinquiemes qui n'auroient pas marché. De maniere qu'une grande partie , fur 'neuf ans , en auroient palTé trois au fervice du ivoi, & üx au commerce. . Pour diminuer, & en même temps anéantm , s il eft poffible , 1'éloignement & la repugnance que prefque tous témoignent pour Je lervice , aux avantages que nous avons deja tóché de leur procurer , ajoutons des motifs d'émulation , établinbns des diitmctions qui puiffent faire germer en eux un efprit de fagefle , d'ambition & d activité. Je voudrois donc qu'un matelot novice , ou juvenin, qui fe feroit comporte' avec lageffe , qui auroit montré de la bonne volonte,du zele & de 1'intelligence , pendant les trois premières années de fon fervice , remportat, en allant au commerce, des preuves authentiques de fa bonne conduite , qui lui ferviffent de recommandation. En conféquence , je defirerois qu& tout bon lujet, parvenu au titre de matelot , füt difringué par un ancre brodé en Jaux or fur le revers gauche. Si, pendant ion ablence & les trois autres années de lervice, fa conduite ne s'étoit pas démen-  («O tic , on ajouteroit, a la première ancre , *ine feconde , les deux brodées en fiutoir ; enfin, en le congédiant pour la troifieme fois, s'il avoit continue' a fe bien compor■ter , fi fa fcience , dans le métier , égaloit fa conduite & fes mceurs, il feroit fait nautilant ou gabier , & obtiendroit le médaillon , qui repréfenteroit deux ancres en hulton. Si fon age , fa fanté lui permettoient de reparoitre encore une quatrieme fois au fervice , alors il obtiendroit la vétérance , & fon médaillon feroit furmonté d'une couronne , & fa lolde augmentée. Chaque ancre apporteroit, avec une augmentation de vingt fous par mois, le médaillon d'un écu & Fa vétérance de fix livres. Ces difiinctions, cette vétérance , ce médaillon feroient la fource de mille avantages précieux, & feroit germer, dans la claffe des hommes la moins ménagée & la plus néceffaire, routes les vertus du patriotifme. Enfin , pour habituer le matelot a tous les climats, lui faire connoitre toutes les cótes que le commerce fréquente & vivifie, proportionner fon fervice a la durée de Ion engagement, il faudroit avoir une fcrupuleufe attention h ne pas employer deux fois | de fuite les équipages aux voyages les plus longs , comme ceux de 1'Inde ou de 1'Amérique , & avoir foin de leur donner , au retour de chaque campagne , un congé de délaflèment. Entrons, pour nous faire entendre, dans quelques détails. On a vu que 5  (lf3) ia divifion de Ia Manche , quï iroft parcou-rir , en fe féparant en deux , Ia Baltique & & les mers du nord de 1'Europe , rentreroit a la fin de Septembre , ou au commencement d'Octobre ; or , pour les interets des gens de mer, comme pour les avantages de la population , on permettroit a la moitié des volontaires, novices, maiftraiices, matelots & autres gens claffe's,- de partir au mois de Novembre pour aller chez eux voir leurs femmes ou en prendre, avec ordre de fe trouver au Département, au premier Février, pour relever 1'autre moitié qui iroit, a Ibn tour , fe repofer dans fa familie juf-qu'au premier de Mai, qu'il fe rendroit au Département pour reprendre la mer en Juin , & ainfi de fuite. Mais c'eft fur-tout. a Breft , ou la recommandation que je vien.& de 1'entretien annuel d'un vaifieau de ligne ou d'une frégate ; & quand on ne parviendroit, je fuppofe , qu'a trouver, par cette voie , de quoi folder ces dépenfes du quart ou du tiers des armements (i) Le Clergé paie , a la vérité, une taxe fous Ie nom de don gratuit; & comme 1'on fait, c'eft ia partie la plus utile & la plus pauvre de 1'Egliie, les Curés qui patent cette taice : mais pourquoi cette différënce „■ & cette mégalité de contribution, entre les citoycua1 d'un même état ? PourqUoi ceux qui joüiffent des' plus grandes prérogatives , & qui font quclquefois inutiles au bien public , paient-ils moins qu- le laboureur qui eft fi néceffaire ? La Républiqxe de Venife Vient de donner des Réglements rur cette matiere qui' paroiffent faits pour fervir d exemple aux autres Na.-tjoces de 1'Europe. V %  que je propofe, 1'Etat ne peut-il pas faire les frais du refte ? Difons-le , fans crainte de déplaire. Quand on veut avoir une Marine puiffante , il faut s'attendre a lui faire de grands facrifices ; ils paroitront bien moins confidérables, fi 1'on lépare des fonds de la Marine , ceux deftinés pour les Colonies ; ces deux objets, qui n'ont qu'une-même eaiffe , devroient être abfolument fe'pare's. Je vais plus loin , la régie r comme les dépenles des Colonies, devroient être détachées du Miniftere dè la Marine , & confiée a 1'habilcté d'un nouveau Secretaire d'Eïat, il y a de quoi 1'occuper autant que les autres» Puifque ces citadelles fïottantes font li dilpendieufes, employons donc tous nos effbrts a les conferver , failbns les durer aufli long-temps qu'il fera poflible. J'ai fait voir ce que la propreté & les fbins aflidus d'une attention active & intéreffée peuvent produire ; je vais encore examiner , s'il n'y a pas d'autres moyens de veüler a leur confervation. Jé vois d'abord, avec étonnement, que nos fortereffes, nos citadelles, les remparts mêmes de nos villes font, la plupart, garnis de canons de fonte , tandis que nos vaiffeaux gémilfent fous le poids énorme d'une artillerie de fer , moins difpendieufe , a la vérité, mais infiniment plus péfante & plus dangéreufe. Je ne vois pas pourquoi nos vaduaux. du premier 8c du iécond rang ne  lont pas tous armés de canons de fbnt'e-1 & pourquoi les batteries de trente-iix de, nos vaiffeaux de foixante-quatorze, & cel-les de nos plus fortes frégates, ne font pas foutes fondues de ce métal ? C'eft qu'il eft uifiniment cher me repondra-t-on , fans doute , s'il falloit s'en procurer a prix d'argent; mais nous Pavons.il exifte, il eft trouve ce me'tal, il ne refte plus qu'a 1'emPjoyef- Eh effet, de quelle utilité directe eft a la France cette immenfe quantité de cloches que 1'on voit dans chaque Eglife des villes & de la campagne , dans ces Abbayes , ces couvents d'hommes & de filles auïïi multipliés qu'inutiles , a ces Chapelles de Confraires, qui ne devroient pas exifter ? Qu'on faffe main-baffes fur toutes ces cloches , fur ces carillons, produits de 1'orgueil & de Pabus des richeffes. Ne vaut-il pas mieux en dépouiller les Eglifes, que d'arracher Ia fubftanee de i'Ardfan & du Manoeuvre , que le Traitant vexe plus que 1'impót ne Pappauvrit ? Qu'on s'empare de tous les _ canons de fbnte qui borcfent les fortifications de nos Places frontieres, qu'on les rempiace par des canons de fer, & qu'on rélerye enfin pour la Marine & pour 1'Arfillerie des armées de terre, la foute ce Hiétal précieux, qui n'éclate jamais , &'ne produit pas les ravages trop fréquents que le fer occafïonne. II ne s*eft pas donné, pour ainfi-dire ,.dans cette guerre , un feul combat, entre des armées navales, qu'un ou  plufieurs canons creves , n aient mis hors ac combat plus de foixante ou quatre - vingt hommes. En raflèmblant, dans nos arfenaux maritimes, tout ce métal inutile & mal employé ailleurs, on trouvera , j'en luis fur , de quoi armer toute la Marine de France ,füt-elle du doublé plus nombreufe que je ne' la fuppofe lei. Mais, me dira-t-on encore, les cloches font néceffaires au culte. On ne peut abfolument s'en palfer. A la bonne heure , aufli je ne prétends pas en interdire 1'ufage , je ne veux qu'en diminuer la quantité. Une cloche ou deux dans chaque cloeher des Paroiffes, & un timbre pour 1'horloge , font fufhfants. Je fuis perfuadé que ce n'eft pas exagérer , que de porter a quatre vingt mille , au moins, le nombre des eloches groffes ou petites , dont le fon aigu nous importune. Que d'argent perdu !• Les Prêtres , les Moines, le Clergé , en; un mot, va jetter les hauts cris. Je fauraii bien les faire taire, & il fera bien heureux,li je ne lui fais pas payer encore les frais de tranfport & de main-d'muvre. Ce métal que les Moines tiennent faftueufement fufpendn dans les airs pour nous étourdir d'un yain bruit, & nous faire reflbuvenir de leur inu| tilité , eft-il donc fi néceffaire a leur exiltence ? Que doit penfer ,s'il en eft qui penfe, Un Artifan laborieux , occupé d'un travail continuel & pénible , lorfqu'il fe yoit diffl trait par le fon importun des cloches d'una  . C 2,19 T fiche Abbaye, dont le fort 1'a rendu voifin f Ne doit-il pas voir, avec un de'pit mêlé d'indignation, l'indolence & la mollelfe de dix k douze fainéants, qui, aprèss'être bien rempli la panfe , vont plalmodier de mauvais latin qu'ils n'entendent pas , croupiffent dans la pareffe & regorgent d'abondance ; tandis que lui, pauvre here, forcé, pour vivre, k un travail journalier , ne le quitte qu'a regret, pour dévorer un mauvais diner. S'il fait comparaifon de fon fort au leur , il fe demandera . fa ns dnnre . pourquoi ces gens, fi peu utiles, ont tant de bien , & lui, dont le travail elf nécef- wire , tant ae milere & tant de mal ? Qu'ils vivent donc obfcurément dans leurs cloitres , puifqu'on les y laiffe en paix, & qu'ils ceffent d'averrir le nuklir- Hpc he,irPc Aa leurs prieres. La matiere de leurs cloches fera mieux employée en canons fur les vaiffeaux deffinés k défendre nos cötes , nos Colonies & notre commerce. ■A-lléger les vaiiTeaux du poids énorme d'ime artillerie qui les affaiffe, les fouffraire aux vers rougeurs qui les attaquent , les préferver des eaux de pluie qui les pourriffent,c'eff fe mettre dans le cas de lesrenouveller moins fouvent. L'entretien de quatrevingt ou quatre-vingt-dix vaiffeaux de ligne & de foixante frégates devientde jour en jour plus difflcile k nos forêts, fi mal aménacr,-'^ aax „ii„, ' _ — _i fuffire, les bois ds première qualité &c de  (aio j fbrts e'quariffages , font rares , & fe trou-ivent a peine dans les Provinces de l'inte-' rieur du Royaume. Pourquoi n'imitons-nous fas 1'Efpagne qui- n'emploie que les bois de ifie d'Encube , dans la conftruótion de fes meilleurs vaiffeaux ? Les valles forêts de la Guyanne procureront a la France les mêmes reffources, quand elle voudra prouver au Portugal qu'il ne poffede pas lanavigation exclufive du grand fleuve desAmazones, & que fes pre'tentions, fur larive droite de ce fleuve, lont des chimères.L'efpagne lui permettroit aife'ment celle du fleuve de 1'Orénoque , & lui abandonneren , peut-être même , pour un leger e'quivalent , la proprie'te' de fa rive gauche_ ? alors circonfcrivant, dans un terrein limité & convenable, les Colonies Hollandailès , elle trouveroit, dans les derrières de cette vafte portion de 1'Ame-rique , toutes les reffources que fes forêts lui refufent. Ceux qui foutiennent encore que les bois, quoique de belles venues, crus en maflifsde forêts, font trop humides & trop tendres ,- pour les ufages de la conftrucfion , defireront de les voir aménage'es, fuivant le fyftéme de M. Pannelier, ou ils demanderontque le Gouvernement faffe border fes grands chemins , a dix pieds en dehors du foflë y de bons chênes, bien efpace's, qui, venus en plein air, auroient la durete' ne'ceflaire, & dont les branches latérales, libres de s'e'tendre en tous lens, donneroient une plus grande  grande quantité de bois courbe. On ne s'étonnera pas moins de voir quarante lieues de landes entre Bayonne & Bordeaux, condamnées a la ftérilité, tandis qu'on pourroit les employer a nous produire des forêts de pin & fapins qui fuppléeroient , en partie , au nombre dc mats que nous failbns venir du Nord , a grands frais. Enfin je voudrois que le Gouvernement ne permit pas au commerce des batiments de plus grand port que de cinq cents tonneaux ; cette prohibition auroit plufieurs avantages , elle laifferoit plus de relfources a< la Marine Royale dans nos futaies , & obligeroit les Négociants Armateurs , k entretenir un plus grand nombre de matelots. Tous ces objets , d'une utilité directe pour la Marine1 ,■ font négligés ou mal connus, paree qu'on'nes'occupe point afïez de fon importance , ou paree que le defir d'avoir une Marine puiiTante & redoutable, au lieu d'être conftant & féfléchi , n'eft jamais que momentané & relatif. Dans le fyftéme aftuel de 1'équilibre de 1'Europe, dans la jufte opinion que le commerce eft a un Etat puiffant ce que la circulation du fang eft a un corps robufte, il eft plus effentiel pour la France d'avoir dix vaiffeaux de ligne de plus , bien entretenus , & dix régiments de moins. C'eft dans 1'entretien de ces vaiffeaux, dans les foins vigilants & éclai re's, néceffaires leur a confèrvation, qu'il faut porter la plus fcrupuleufc X  (i".) exactitude ; c'eft d'eux que dépend une folide puifTance : hatons-nous de le dire , pour n'avoir plus rien a recommander fur cet article ; il feroit a de'firer qu'un article de 1'Ordonnance obligeat tous les Capitaines de vaiffeaux & frégates , au retour de chaque campagne , de dreffer un devis bien motivé 8c bien pre'cis de 1'e'tat des re'parations a faire a fon batiment, dont un doublé figné de lui &c de fon Etat - Major , feroit envoyé au Confeil de Marine , &c 1'autre feroit remis au commandant du Departement; afin que des motifs particuliers de haine ou d'antipathie , des vengeances , des reffentiments pue'riles , des accès dé mauvaife humeur , ne puffent arréter , retarder ou empêcher, au gre' de ce Chef le travail de ces réparations indifpenfables) dont il feroit tenu un Journal exact. Je ne m'arrêterai pas plus long-temps a prefcrire les moyens qui doivent tendre a la profpérite' de la Marine ; je fuis bien perfuadé que Pintérêt imme'diat de Chefs de chaque vaiffeau ou frégate, contribuera plus que toutes mes recommandations , a maintenir fa fplendeur , en cherchant a perpétuer leur gloire.  ( "3 ) CONCL USION. Si tant d'erreurs phyfiques ont aveuglé les nations entieres ; fi on a ignoré , pendant tant de fiecles, la direction de 1'aimant, la circulation du lang , la pe'fanteur de 1'athmofphere ? Quelies prodigieufes erreurs les hommes ont-ils dü commettre dans le Gouvernement ? Quand il s'agit d'une loi phyfique , on 1'examine du moins ajourd'huï avec quelque partialité, & ce n'eft pas en recherchant les principes de la nature que la fureur des pallions, & la néceflité preffante de fe de'terminer, aveuglent 1'efprit mais en fait de Gouvernement, on n'a e'té fouvent conduit que par les pallions , les pre'juge's , & le befoin du moment. Ce font la les trois caufes que la mauvaife adminiftration qui fait le malheur & prelfe la chüte de4a Marine actuelle. Ce lont elles qui ont produit tant de coutumes bizarres , d'Ordonnahces contradicfoires , d'abus renaiffants a re'former. La légiflation politique , dont la Marine eft une branche efientielle, eft encore un chaos prefque par-tout. Les hommes fe font conduits a 1'aventure dans tout ce qui regarde leur vie , leurs biens f comme dans leurs inftitutions politiques. Un Auteur ce'lebre a défiui le mot abus, un vice attaché a tous les ufapes , a toutes X a  (ai4) lesloix, a toutes les inliitutions humaines'; Le detail n'en pourroit étre contenu, dit-il, dans aucune bibliotheque. Les abus gouvernent les Etats. Maximus Me eft qui minimus urgetur. Cette maxime eft bien vraie. Heureux , fans doute , heureux celui qui eft le moins atteint. Mais de tous les abus les plus dan^ereux , les plus difficiles a de'raciner , a de'truire , font ceux qui tiennent a 1'opinion. En parcourant toutes les branches de 1'adminiftration maritime , j'en ai trouve' plufieurs qui prennent leur fource dans une vieille habitude conlacrée par le temps. Les ufages qui paroilfent, aux yeux des gens les moins prévenus , plus ou moins ridieules , obtiennent, par leur antiquite', de la multitude , un refpeót, qui eft d'autant plus_ durable qu'il n'eft pas réfle'chi. Cette opiniatreté religieufe n'eft pas cependant la plus difficile a vaincre. On doit s'attendrc a e'prouver bien plus d'obftacles des abus que les pre'juge's «5c 1'amour-propre d'un corps lè croient intérelle's k foutenir. De ce nombre eft , fur-tout, la divifion que je propofe. Elle excitera, je 1'ai déja dit , une clameur générale. La Marine eft trop adroite pour exprimer fes vrais motifs, elle fe gardera bien de feplaindre de la perte de fon influence , & de paxoitre regretter le fyfttme d'unité qu'elle a formé avec tant de peines , qu'elle chérit plus que la plus précieule de fes prérogatives, comme celui ? enfin, qui conftitue fa  (12->) force & fa réfiftance contre les entreprifes de 1'autorité. Elle criera fi haut, elle s'emportera fi fort contre un projet qui la lie , fous une forme nouvelle , a la diftinée des vaiffeaux , qu'elle fera croire aux gens , qui jugent de tout, fans examiner rien , que changer fon exiftence, c'eft la détruire , & qu'innover dans ce corps, c'eft le conduire a une deftruétion prochaine ; enfin il ne tiendra pas a elle que 1'Auteur de ce projet ne paffe pour un vifionnaire , & bien loin de fouffrir qu'on admette une réforme utile , elle finira par perfuader aux oififs fuperficiels , qui 'la condamnent ou 1'approuvent fuivant les difpofitions du moment , que fa conftitution eft la meilleure qu'elle puiffe être , & que les abus qui s'y font gliffés doivent paroitre non-feulement irréformables , mais même utiles; & en effet , on eft fi accoutumé a leur inconféquence , qu'on ne la fent plus. Les préjuge's qui la gouvernent femblent éternels ; & cependant un mot , un feul mot du Monarque , peut les anéantir. Ne nous lafions donc pas de répéter qu'un Etat ferme peut tout faire , tout corriger ; que le grand défaut de prefque tous ceux qui gouvernent, eft de n'avoir que des demi-volontés & des demi-moyens. Si Pierre le Grand n'a voit pas voulu fortement, deux mille lieues de pays feroient encore barbares. On fe demande , tous les jours , comment dunner de I'eau dans Paris a tentg  (aaef) jnille maifons qui en manquent ? Courment payer les dettes de 1'Etat ? Comment le fouftraire a la tyrannie réitéré d'une PuifTance , & a laquelle on paie en tribut les premiers fruit? ? Ofez le vouloir, ofez 1'entreprendre, & vous en viendrez a bout plus aifëment que vous n'avez extirpe' les Jefuites , & purge' le theatre de petitsmaitres. Après 1'emploi d'une autorite' directe, il refte deux autres moyens politiques, c'eft d'attaquer les abus qu'on veut de'truire avec la verge du ridicule; on le charme de la perfuafion. Un des grands moyens , fans doute , d'affoiblir , de diminuer les préjuge's , c'eft d'abandonner cette maladie de 1'efprit, au régime de la raifon qui éclaire lentement, mais infailliblement'les hommes. Cette raifon , quand on veut 1'écouter , eft fi douce, fi fage; elle infpire 1'indulgence , elle étouffe la difcorde , elle fait taire les prétentions de 1'amour-propre , elle affermit la vertu , elle rend aimable 1'obéifTance aux loix, 1'accomplifTement des deyoirs , plus encore qne la force de 1'autorité ne fait les maintenir. C'eft a cette raifon perfuafive, éclairée des lumieres de la philofophie, a feconder les effbrts du Gourvernement, a donner 1'exemple de la docilité aux intentions du légiflateur. Malheureufement les hommes, pour la plupart, entetés dans leurs opinions, entrainés par une aveugle prévention, conduits par des  intéréts fouvent oppofés au bien général J fe roidiffent contre les inlinuations d'une lage politique , & forcent le Souverain, dont la volonté eft conftante, a employer fon autorité pour faire ployer des volontés trop oppofées a la fcience , & prefque toujours ce n'eft pas pour leur plus grand bien. Soit qu'il ufe de la contrainte ou d'une voie plus douce, fon devoir Poblige a bien examiner le génie & le caractere de fon peuple , comme un pere obferve celui de fes enfants , & d'y adapter les principes de fon adminiftration. Leur bonté conlifte a contenir également toutes les profellions de 1'Etat II ne doit pas fouffrir ces élans d'un amour-propre ridicule qui fait qu'un Corps fe prife trop au-dela de ce qu'il vaut: la corruption, le délire eft au comble , quand ce n'eft pas fur des fervices rendus a 1'Etat, fur des actions de bravoure , & fur 1'eftime qu'il a fu infpirer a fes concitoyens, qu'il fonde cet orgueil toujours déplacé. La hauteur qu'on reproche a la Marine ne s'appuie malheureulement fur aucun de ces motifs ; elle prend fa fource dans la vanité des diftmótions attachées a la naiffance ; & cette petiteffe d'efprit, qui la rend li exclufive , eft le plus grand des défauts qu'on lui conconnoiffe. On ne fauroit trop répéter auffi qu'un Corps dont le fervice eft li pénible , dont 1'activité eft a ccompagnée de tant de défagréments , de tant de privations, qui fe  dévone fi généreufement a des fathnies continuelles , a des dangers toujours renaiüants doit avoir dans fa conftitution des vices bien effentiels, des préjuge's bien rebutants , pour être lans celle en but ï ia haine ; difons plus , a 1'indignation de toutes les autres claffes de citoyens , & pour qu'on ne lui tienne aucun compte des lacrifices étonnants qu'il fait a la patne. bes prétentions , plus étonnantes encore lont caufe de cette injuftice , de cette reprobation générale. Il faut avoir 1'équité den convenir, fi 1'orgueil intolérant 3e k Marine , plus encore que les graces que le Gouvernement verfe fur elle a grands fiets excite contre elle lajalcufie, ïa haine, & envie des autres Corps, en avouant'que accorde de rtcompenf es, plus on lui impofe J obh-ation de les mériter, & de les rece vqir dun ton modefte. II faut auffi convenir avec tous les gens de fang froid, qu'il eft bien délagréabfe pour elle^d'être juWe par- desi ignorants, pour la plupart, qui nentendent rien au métier de la mer ou Tri^A V°!ient rien d'imP°ffiWe quand il sagit de lui trouver des torts ; par des K^'a qui "Vant aucune connoiffance des lieux ou elle a éprouvé des revers ou des difficultés infurmontables valeur de fes moyens , diffimulent, par une «Kuvaife foi marqué 0U une inconfe'quence  ridicule , une partie de ceux qui lui étoient oppofés, jugent fa conduite avec un ton tranchant, une févérité excitée par unej'aloufie 1'ecrette , qu'ils n'auroient pas même pour nos ennemis. C'eft un malheur, & un malheur ine'vitable pour la Marine. Tant qu'elle perfiftera , ou que le Gouvernement perfiftera pour elle dans ce fyltême d'unite' qui conftitue fa force, fon effence rétroactive, & la rend d'autant plus redoutable au-dedans , qu'elle eft plus néceffaire aH dehors ; la Nation fe croira toujours en droit de lui demander compte des eftbrts qu'elle n'a pas tenté,& de la rendre refponfable des fautes de fes Généraux , qui font plus fouvent les fiennes. La Marine n'a pas affez fenti, en adoptant ce fyftême d'unite', qu'on reprochera a tous , la mauvaife volonte' des uns , la mal-adreffe des autres, 1'infubordination de ceux-ci, 1'ignorance ou la lacheté de ceux-la ; & qu'enfin les fauffes manoeuvres d'un feul vailieau, la honte de fa dt'faite , rejailliront lur la Corps entier. Elle en a plus d'une fois fupporte' 1'opprobre ; & , ce qui prouve la néceffité de changer fon efprit, c'eft 1'efpece d'infenfibilité qu'elle en a montrée : il a même e'té un temps , qui n'eft pas éloigné, oü dans 1'opinion publique c'étoit un titre favorable pour les talents d'un Officier,que la haine de fes camarades , tant ^on fuppofoit d'injuftice dans leurs préjuge's. Nous le difons hardimeiit , paree que  •flous vivons heureufement dans un fiecle cm la recherche de la vérité eft permife dans tous les genres. Nulle confidération particuliere ne doit empêcher d'examiner cette vente toujours précieufe aux hommes julques dans les chofes indifférente*? ï£ tient a la Nation entiere; il eft comme un de ces monuments publiés, expofés aux veux & aux mgements de tous les hommes. Je ne fais donc qu'ufer du droit naturel que tre penlee; &fi j'ai propofé mes idéés fur la conihtuuon de la Marine, c'eft en la confi! derant comme un établiffement politique lmffi fur a néeeihté de ie changer? dé le defunir & de le réfondre entié?ement lentir lutilte. Je ne me permettrai plus que cette réflexion .- Qu'on" affemble Cl le Generaux qui fe font montrésala téte de nos armées navales , ou qui afpirent f cette dangereule prééminence1 ; qïiHes fomme de répondre avec une franchife dé gagée de tout efprit de Corps, ■tout ménagement, & qu>orf Jeur demande s ils aimeroient mieux commander a des armees nayales,conftituées fuivant mes nrin jpes qu'A celles que 1'on équipe ufo™" d hui, fuivant ceux d'une vieille Routine & d une eorriplailance inouie ; & fi leur chofx n eit pas en ma faveur, je confens de naffer f our un imbécille ou un fou. P  Les nouvelles difpofitions que je propofe ans cet Effai, ótent a la Marine tous les éfagréments que je viens de dt'crire; il eft rai qu'elles lui font perdre, en même-temps, ne confiftance qu'elle cht'rit prefque autant [ue fa gloire, & qui eft prefque toujours [.compatible avec elle. Il faut donc, pour infi uire , lui créer malgré' elle une exifence durable ; il faut lni ménager, fans nterruption, de nouvelles reffources; il faut rouver les moyens de la maintenir dans une plendeur permanente. Je viens de les indiluer ces moyens; ils font un peu dilpenlieux, je 1'avoue; mais on n'aura jamais de Vlarine qu'on ne foit difpofé a lui faire des acrifices continuels. Pour fubvenir aux :rais de 1'entretien d'une Marine formiiable, la maintenir , en paix comme en juerre , fur un pied toujours refpectable, il ie faut point e'couter les confeils d'une timide économie; il faut diminuer les de'penfes lans les autres parties de Padminiftration, §)our verfer fur celle-ci des fecours abonpants, fixés & re'ite're's. Prenons exemple pe nos ennemis , ils ne ne'gligent, ils n'éBpargnent rien , pour fe ménager les moyens IJde rélifter par-tout, & faire face a tous a h fois. Qu'on juge de 1'étendue des reffouriïces qu'ils s'étoient préparées d'avance , par lies moyens étonnants qu'ils déploient. auKurd'hui. C'eft 1'abondance ou ils le lont itoujours trouvés , qui les a mis a meme de ilréparer promptement les dommages que  nous leur avons caufï C'eft la difette «s menu* munitions navales, trop 'n|- PEafs>^ leur aP^ d'unePft preparé des luccès. La Marine anp-lai verroit avec unepitié dédaign ufe les^ï d arme )ts réglés *|; Jaires a leur équipement. La Marine aval n„T" comme un ™4JÏ puiffance indireéte & relatif, n'a Ss fl la principale occupation du Gouvernement egara. Ceit un reproche que 1'on trn.Jh dulecï^v^ oLoJKZÏl riem pr,£Ced?nt > «Kerrogeons les Hiftd riens de celui-ci, nous y verrons la con3 nation dece quej'avan/e. Un des plus CT gjg* après avoir fait une énunKiï örUJante des reffources que la faeeffe X Cardinal de Fleurv avoit préparé ! l0u1k fV, a 1 epoque trop courte oïiil paru pren I « pour avouer ce qui nous manouefon f3 : - Plaint qu'un feul reffort fe CoTrJcZrÈ » foible dans cette vafte & pu Se n af " chlne fi habilement conduite. Loul Yvll  |jepee "a ne tfouva Point dans fes Ports l'uf/?0ttes nombreu*es> de ces grands letabhffements de Marine qui font 1'ouf rage du temps. Un effort précipité ne *eut, en ce genre, fuppléer en ce qui defriande tant de prévoyance & d'applicafion. II n'en eft pas de nos forces martiInes, comme de ces trirêmes que les Rotoains apprirent fi rapidement a conftruire «Sc agouverner. Un feul vaiffeau de guerre jtft un objet plus grand que les flottes qui geciderent autrefois , auprès d'ASium , 1de 1 empire du monde. Tout ce qu'on a pi! faire (pour le moment,) on Pa fait, nous Avons armes plus de vaiffeaux que n'en foit la Hollande , qu'on appelle encore Vuiffance maritime; mais il n'etoitpas pofIJble d'égaler en peu d'anne'es PAn°Te■jre, qua, étant fi peu de ehofe fans 1'emWtt de la mer , regarde depuis fi lon°-]emps cet empire comme le feul fondement de fa puifTance, & comme ï'efTence |e fon Gouvernement. Les hommes rt'ufflflent toujours dans ce qui leur eft abfoflment néceffaire. Ce qui eft néceffaire k I Etat, eft toujouts ce qui en fait la Ëce : auffi la Hollande a fes navires mar, hands; la Grande Bretagne, fes armées 1 . ' ^ . France fes armées de terre.» ?£etoit 1'opinion de ce temps, que 'la •mee n'avoit befoin que de fes armées de : I; opinion que |la prompte décadence j .a Marine de Louis XIV avoit établie  (134) C'étoit ainfi que penloit, je 1'ai déja dil ce Miniftre qui prêtoit la main aux ren „ du Gouvernement dans le commenceme w de cette guerre de I741; ü étoit ^ f> cette extreme vieillefle ou il ne refte p.; « que deux objets, le moment qui fuit,. « Péternité. Il avoit fu long - temps tei l » comme enchaïné ces flottes de nos voif t « toujours prêtes a cburir les mers , & n s'élever contre nous ». ( On a préten \ que c'étoit en négligeant notre Marine qt avoit fu endormir lajaloufie de nosrivau: Ses négociations lui avoient » acquis: 7> droit d'efpérer que fes yeux, prêts a ?y fermer, ne\erroient plus la guerre; m \ }> Dieu qui prolonge & retranclie a Ion j i « nos années, frappa Charles VI avant 1 | » & cette mort imprévue , comme le 11 « prefque tous les événements, fut le fig I >, de plus de trois cents mille morts. Eni >j la fageffe de ce vieillard refpeöable, 73 fervices , fa douceur, fon égalité, j t) défintéreflementperfonnel, méritoient « éloges , & fon age nos excufes. On t »j croire que s'il avoit pu lire dans Pavei » il auroit ajouté a la puilfance de 1'Eta w rempart de vaiiTeaux, cette force qui { » fe porter a la fois dans les deux héi t> pheres. Et que n'auroit-on point exéci » Le Héros aulTi admirable qu'inforti >j qui aborda feul dans fon ancienne pat » qui feul y a formé une armée , qui ag^ n tant de combats, qui ne s'eft aftbibli  » force de vamcre, auroit recueilli le fruit «de ion audace plus qu'humame ; & ce » Pnnce , fuperieur a Guftavt-Vafa, avant » commencé comme lui , auroit firn de « meme. » Mais enfin, quoique ces grandes refl » fources nous manquaffent, notre gloire » fe conferva fur mer; tous nos Officiers » de Marine., combattant avec des forces » interieures, firent voir qu'ils euffent vain« cus s ils en avoient eu d'égales ; notre » commerce fouffrit, & ne fut jamais inter» rompu ; nos grands e'tablifTements fubfif» terent & ceux de nos ennemis furenc » renverfes aux extrémités de 1'Orient « C eft que la Marine n'avoit pas encore manifefte ces prétentions fingulieres, cette laloufie baffe & chatouilleufe. qui nê veut pas reconnoïtre le mérite qui n'a pas pris naiffance chez elle ; c'efT qu'elle n'avoit pas encore montré cette répugnance invincible, d admettre dans fon Corps & defèrvirlous desintms; répugnance a laquelle elle a quelquefois facrifié fa gloire Arretons nous; tirons le rideau fur le paffé • mon deffein n'eft pas de faire ici Ia fatyré d un Corps ou j'ai long-temps fervi: je me contenterai de dire, en paffant, que 1'efcadreduDuc d'Auville, chargée d'attaquer Acadie fut la première ob 1'on remarqua les funeftes effets de la méfintelligence & de fajaloufie entre les chefs & les fobordonnes. L'impunité dont ellefut fuivie per-  h3*> mit a ces idéés, fi nouvelles & fi étrangeS i de s'accroitre & dc le développer; il s'en forna un fyfttme fuivi , d'après lequel , ce qu'onappelie FhOftMOI particulier du Corps, les avantages, fes prétentions. les préjugés furent maintcnus avtc trop d'opiniatrcté pour la profpérité de 1'Etat & 1c vctitah-le intérêt de la Marine. L'infoeciaoce & la foiblefle du regne pafte' favoriferent cet égoifme audacieux , d'ou 1'on vit naitre bientöt cette indifterence pour le bien de 1'Etat, qui gagne encore tous les jours. Enfin, le patriotifme fut prefqu'étouftë ; & par-tout ou la raifon auroit du commander, 1'habitude & le préjugé firent réfiftance. Cette infenfibilité pufillanime augmenta la confiance de nos ennemis; ils profiterent de nos fautes, de nos bévues fur terre, de notre mal-adreffe fur mer, & fur-tout de 1'orgueil defpotiqüe de notre Marine. Perfuadés que notre engourdilfement n'auroit qu'un temps, que le plus petit événement pourroit amener une révolution, ils fe haterent de porter leur Marine \ un fi haut point de profpérité & de fplendeur , que 1'Angleterre, avant cette guerre , fe croyoit eu état de balancer feule , par fes forces navales, tonte la Marine de 1'univers, C'eft cette confiance préfomptueufe qui lui a donné, pendant quelque temps le fceptre des mers. Heft vrai que toutcontribue dans fon Gouvernement a favorifer cette orgueilleufe prétention. La  ^ira Npti0n ,anglaif^ a dit encore avec ta fon , Raynal, «garde fa Marine comme » le rempart de fa fureté , comme la fouree » de feS ,Icheffee . c, ft dans h « dans la guerre , le pivot de fes efpé» rances auffi leve-t-eife , & plus vo£nw tiers, & plus promptement, une flotte »quun bataillon. Elle n'épargne aucun «moyen de de'penfe, aucune" «ffourï de » politique , pour avoir des hommes de *> mer. » Les fondements de cette PuifTance fii« rent jettes, au milieu du dernier fiecle » Par ce fameux ade de navigation , qu{ « afTuroit aux Anglais toutes fes produc» tions de leur vafte empire, & Li leur « promettoit une grande partie de celles « des autres regions. Par cette loi, on fem» bloit dire a chaque peuple de ne penfer » qu a fpi; cependant cette lecon a été inu» tile jufqu a nos jours, & aucun Gouverne- Z tT* neiruPnfe ?°Ur reSIe de fa cnduite. » U eftpoffible que les yeux s'ouvrent & qu'il » s ouvre bientöt „ (Si ce moment n'eft pas venu,il n'eft pas loin.) „Mais laGranE » Bretagne aura toujours joui pendant plus » dun fiecle des fruits de fa prévoyance & v peut-etre acquis, dans ce long irttervalle, « tfges ,! C£ P°Ur Perp£'tUer fes avan' Sans doute e!!e s'eft ménagé de erands moyens. On eft forcé ftvouS qu'elffij avec luccès contrs tro1S PuifTances conjuY  rées contre elle ; mais convenons aufh qu© c'eft leur mal-adrelfe, & le peu d'accord qu'elles mettent dans la combinaifonde leurs forces , qui ralentit leurs fuccès, & retarde la chute de leur rivale, toujours prête a profiter habilcment de leurs moindresfautes. Et quelle fupe'riorite' 1'opinion dominante en Atigleterre , les difpolitions du Gouvernement , & 1'expt'rience du Tribunal & de l'Amirauté,ne lui donnent-elles pas lur ces Puiffances confédérées , dont les opérations maritimes font dirigtes par des Miniftres, plus abfolus , a la vérité, mais bien moins vcrft's dans cette partie ! » C'eft une ve'rite' bien reconnue aujourr> d'hui, ajoute le même Auteur, que la ba7) lancedupouvoir a paffe' auxTS'ations mari7) times. Comme la naure de leurs forces les x rapprochent de tous les pays qui bordent 7> 1'Oct'an, & fes différents golpnes , il leur 7> eft peffible de faire du bien & du mal a plus }> d*Etats; elles doivent donc avoir plus d'a» liés , plus de confidération & d'influence. 7> Ces avantages ont frappé plus ou moins 7> les Gouvernements que leur fituationmet77 toit a portée de les partager, & il n'en 7i n'eft prefque aucun qui n'ait fait plus ou 7i moins d'efforts, des efforts plus ou moins heureux , pour y réuffir. » C'eft dans le choix de fes efforts, dans leur emploi, leur application, leur direcÜ( n cue nous avons fait, & que nous failons voir encore tous les jours, notre uégligence»  notre entêtement, & notre Jneptie. N'eft-il pas e'tonnant, par exemple, que la conftruction , cet art n beau , fi fublime , que nous avons tant perfectionné , foit encore affujetti a des re'gles fi varie'es ? Qu'au milieu des chefs-d'osuvres que nos conftructions ont produit dans tous les temps, 1'Architecture navale foit encore enveloppe' de tant de problême a re'foudre ? Sans être bien alfure', fi c'eft la coupe de fes lignes d'eau, ou la trop grande fondue de fa maffe, qui ajoute ou öte k la ce'le'rite' de la marche cfun vaiffeau ; pour le rendre plus leger, fans rien ajouter k fes difpofitions pour.. divifer le fluide, on le conftruit foible d'échantillon , on augmente fes mailles, on diminue fes liaifons, on fait, en un mot, un vaiffeau long & foible", hors d'etat de porter fon artillerie, qui Marqué avant d'être forti du port, & qu'il faut radouber& refondre fouvent au retour d'une première campagne de deux ans. N'y a-t-il pas une efpece d'inconféquence & de contradiction k confidcrer le vaiffeau dont on veut calculer le déplacement d'eau , comme un folide rempli de par-' ties homogenes, tandis que pour calculer fa viteffe, on s'imagine d'oter k fa folidite' ce qu'on avoit ajoute a fa maffe ?' Ne feroit-if pas plus avantageux, pour les progrès de. 1'art, de faire naviguer nos ingenieurs-* Conflrucfeurs ? Ils Pont demande tant de fois, & ils fentent, en effet, qu'ils acqué-> reroient, dans une ou plufieurs ..campagnes t ■ YA  ( 240 ) plus ómé&ün les efforts qüe les vaiffeaux ont a loutenir contre le mauvais temps, groiie mer, & le poids énorme de leur artillerie , qu'ils ne pourroient en foapconner dans trente annees d'études & d'exercices £édentaires dans un Port. Ils léntiroient bien mieux de queile importance font les liaifons: cc li ma gre les moyens que nous avons propcf és plus haut pour augmenter fa force CueJque partie du vaiffeau venoit k prendre du jeu ils verroient a tout moment quel eft l eftet de oe ,'eu , fes progrès, & fes conféquences; & ils jugeroient bien plus furement dans 1'agitation continu elle de la groffe mer , qae dans la fituation tranquille de ce vailieau , dans ce Port ou dans la Rade, des enorts qu'il a du faire pour vaincre tant de rapport de folidité. Les réparations qu'ils ordonneroienten conféquence, feroient bien mieux combine'es. Cependant, commentfontelies faites , ces rt'parations ? A la hate, pour 1 ordinaire, avec plus de pre'cipitation, & encore plus de négligence. Chaque Port a fon^fyffême, fes ufages , fa routine , dont ü n aime point a fe dt'partir, on les fiiit avec une minutieufè exaétitude ; ainfi quoiqu'il y ait loin , fans doute , des navires de horne k nos vaiffeanx aöuels, on peut dire, avec Ravnal, oue fArchitecture navale eft encore loin de la perftction , puifcu'il regne tant de varie'te' dans les differents atteiiers. Un autre vice, un autre dtfaut de la confi Iruciian; c'eft la rentree, qui devient a la  ( ) mode. On veut rapprocher, dit-on, les poids du eentre de gravité, & on ne s'appercoit pas que ceux qui s'en écartent jufqu'a un certam point, dans le lens de la largeur des vaiffeaux, fait 1'effet d'un balancier, qui diminue & raientit les ocillations du roulis. C eft une obfervation, confirme'e par 1'expérience, que les vaiffeaux, qui ont beaucoup de rentree, font ceux qui roulent le plus ; ils font encore fujets a être de'mate's par un coup de vent ou un gros houle, paree que leurs haubans n'ont pas affez de de'pattemenr. Au plus prés , quand le vaiffeau obéiffant i 1 impulliond'un mauvais coup de barre, vient au-devant de la lame , un cöte' qui rentre en talus, lui aide a fauter a bord, tandis qu'une muraille droite la repouffe. En géne'ral, on ne fauroit trop le répéter, nos vaiffeaux font trop longs, trop étroits, trop peu Iie's , & trop föibles d'échantillon. En les retréciffant, on cherche encore a donner moins de portee &c plus de force aux baux qui les traverfent, il feroit bien plus fimple de rapprocher ceux-ci. Les ponts ne font jamais trop fohdes pour fupporter une artillerie fi petante. J'ai remai que'auffi que la plus grande tpaiffeut des baux , n'eft pas toujours dans Je lens vertical , il font, pour 1'ordinaire plus large dans le plan horifontal , & cé devroit être tout le contraire. Une autre abfurdité , dans les regies de la routine , fans en avoir d'autres raifons que J'ufage; c'eft de vouloir que le beaupré  (141) faffe , avec la prolongée de la quille , tul a-n> gle de quarante-cinq dégrés, il eft même des Conltructeurs qui Paugmentent, cependant le beaupré , dans cette ikuation, eft trop oblique ; il en réfulte que la mature eft mal appuyée , que les focs , dont 1'eftet, dans les vaiffeaux longs fur-tout, eft fouvent effentisl, devient prefque nul; & voila la raifon de tant d'abordages & de fauffes manoeuvres. Toutes ces réflexions , & bien d'autres , ont été faites avant moi très-inutilement, paree que chaque Ingénieur-Conftructenr tient a fon fyftême dont il ne veut pas fe départir. C'eft une raifon de plus pour écouter les fréquentes réclamations du Corps de la Marine , c'eft le plus intéreffé a la folidité qu'on defire , c'eft lui perpétuer , s'il' eft poffible , les inftruments de fa gloire. Croyons-le donc dans tout ce qui ne choque pas fes préjugés d'orgueil & d'exclufion , il fent aujourd'hui, mieux que jamais, combien il eft indifpenfable de s'inftruire. « A mefure que la Marine eft devenue « une fcience , c'a été une néceffité , dit >; Raynal, qu'elle füt étudiée par ceux qui jj en font profeffion. On eft parvenu len7> tement, mais enfin on eft parvenu a faire 77 comprendre aux Officiers de Marine , 77 que ceux qui auroient des idéés géné71 rales fondées fur des régies de Mathé71 matiques , auroient une grande liipério71 rité fur ceux qui, n'ay^nt que des ha*  »j bitudes, ne pourroient juget des chötes p que par leur analogie avec celles qu'ils'f> auroient déja vues. En conféquence, on >} a ouvert des écoles dans tous les Dépar» tements ». Les Mathématiques lont la balè de toutes les connoiffances que les jeunes gens y recoivent, ou leur y donne aufli quelques foibles notions de 1'Architedure navale , & d'autres parties aufli importantes. C'eft quelque chofe, mais ce n'eft pas tout, on a vu plus haut combien cette Hiftruflion étoit 1'uffifante. C'eft encore I'avis du célebre Auteur que je viens de citer. " Dans un métier , dit-il, ou la dik j: pofition de la mer & des courants , le k mouvement du vaiffeau , la force & la » variété du vent, les fréquents accidents « du feu , la rupture ordinaire des voiles » & des cordages, cent autres circonftank ces multiplient a 1'infini les combinai» fons ; 011 fous le tonnerre du canon & p au milieu des plus grands dangers , il f} faut prendre fur le champ un parti qui » décide de la victoire & de la fuite ; ou k les réfolutions doivent être fi rapide , « qu'elles paroiffent plutót 1'effet du léntiw ment que le fruit de la réflexion ; dans » une telle profeffion , la théorie la plus n favante ne fauroit fuffire. Dénuée de ce w coup fur & rapide que la pratique feule , f> &c la pratique la plus fuivie , peut donr> ner, elle perdroit, en méditation , le ?; temps de 1'aótion. « En effet, quel eft 1c  (244) fflann le moins verfe' dans la pratique de Ion art, qm ne fait pas qu'un inftant d'incertitude , dans 1'e'volution , une diftance mal effimée ; une manoeuvre mal jugée , la yiteffe du vailfeau mal connue , trop ralentie , ou trop acce'le're'e, peuvent occaüonner les plus grands défordres & les plus grandes fautes. Il elf donc bien effentiel de connoitre a fond les qualite's de fon vailieau, de favoir les circonftances oh il Ie montre plus docile aux imprelfions de fes voiles & de fon gouvernail , pour avoir prefcrit a 1'efprit les moyens qu'il faut employer pour le guider avec précifion, maitnfer fa direction & bien re'gler fes mouvements. Tous les vaiffeaux ne font pas tgalement faciles a conduire , c'eft une obfervation effentielle. Ces connoiffances & bien d'autres , qui font le fruit d'une longue pratique bien moins le re'fultat & Ja réflexion , que de 1'habitude , viennent ie placer d'elles-mémes, &, pour ainfidne, fans effort, dans la téte d'un marin bien organifé , plus ou moins bien dipofe' a les recevoir , & place' dans des circonftances plus ou moins heureufes ; il faut donc que 1'expe'rience acheve 1'homme de mer, que 1'e'tude des fciences exaftes aura commence'. Oui, fans doute , & il faut convemr que cette rtunion , qui ne fe fait qu'a la longue, fera bien plus promote dans les lujets pre'pare's par les inflruétions & les exercices que j'ai propofe's au Chapitre huitieme.  , : .(145) Enfin je ne puis m'empêcher de le dire encore une fois, plus j'envifage, fur toutes les faces, les abus & les inconvénients que j'attaque, 1'infenfibilité & le découraragement qui en font la fuite, & plus je ir* perfuade que le Gouvernement ne trouver jamais que des moyens infuffilants pour y remédier , tant que la forme aftuelle d'adminiftrer la Marine , n't'prouvera aucunes des mortificationsque j'indique. Cette adminillration , elle-même, a combien d'abus n'eft-elle pas, aliujettie ? Que de rapports diverfement complique's il exifte entre les Départements & le Miniftere. Leur étendue eft efirayante, fi on y joint encore le pefant fardeau de la geftion des Colonies ; & comme toute la force morale & phyfique d'un Miniftre ne fauroit fuffire k une tache fi immenfe , & a. de fi vaftes fujets d'attention , il arrivé ne'cefTaircment que c'eft] du fond des Bureaux que la Marine eft gouvernée , & felon qu'ils font plus ou moins e'claire's , plus ou moins vigilants , ( difbns-le hardiment) plus ou moins gagne's par la Marine, ce Corps puiffant prend de Palcendant , accroït fon pouvoir & fon influence , il fe trouve plus a même d'e'pier fes démarches, d'éventer fes projets, de les barrer , & de les faire échouer k temps quand il les juge contraires k fes intéréts. De fon cóté, le Miniftre, dans une perpétuelle défiance , ramene k lui tous les fils de 1'adminiftration ; il fe trouve que Z  c'eït dans le lieu mime ou 1'on ne fait que par des rarports t'loignés , ou 1'on ne croit ,que ceux cue 1'on peut concevoir , ou 1'on n'a jamais le temps d'approfondir , qu'on veut diflger , conduire toute la machine , & fans s'arrtter a difcuter des innovations propofe'es , on (uit, par une pente habituelle , des formes anciennes & des ulages routiniers. Enfin , & ceci elf une réfiexion importante , 1'on ne peut fe dilfimuler que le bien n'ait été fouvent retardé par la défiance & la timidité du Miniftre qui 1'avoit concu& il ne faut pas s'en étonner. Les meilleures inftitutions ne préfentent, le plus fouvent, que des dimcultes dans le principe, & Pavantage lointain qui en doit réfulter , eft obfcurci par les critiques, & par les paffions des hommes. Quelle d'rfï'érence entre la fatigue impuiifante d'une telle adminiftration , & le repos & la tranquillité que pourroit donner un Confeil de Marine lagement compofél Auffi n'eft-il aucun Miniftre lage , qui n'ait dtfiré un pareil établilfement, li , trompé par une fauffe apparence d'autorité, il n'eüt pas craint de diminuer fon pouvoir en le partageant. Au lieu de fentir , qu'en ramenant a lui une multitude d'aftaires au-deffus de 1'attention , des forces & de la mefure du temps, d'un feul homme , ce n'eft plus lui qui gouverne, ce lont fes Commis ; mais d'un autre cöté, ces Commis ravis de leur infiuence , pour fe  a i < i-47) rendre plus neceiiaires, ne manquent jamais de perfuader au Miaiftre qu'il ne peut pas ie détacher de commander a un féul détail, qu'il ne peut pas killer une feule volonté libre , fans renoncer a les prérogatives , & diminuer fa confiftance ; comme li 1'établiffement de 1'ordre & fon maintien ne devoit pas être le feul but de toutes les adminiftrations raifounables. En me faifant obferver qu'il n'eft rien dans ce monde qni ne foit foumis a quelque inconvénient , on me demandera , peutêtre , qui m'a donné le droit, la hardieffe de relever les erreurs, les abus qui fe font gliffes dans le re'gime de la Marine, d'attaquer fes préjuge's, & d'inviter & une réforme néceffaire. fe répondrai, avec un Ecrivain célebre, fans abufer de la comparaifon , que tout homme de génie eft Magiftrat né de fa patrie ; il doit Péclairer, s'il & peut. Sondroit eft fon talent. Citoyen obfcur ou diftingué , quelque foit fon rang & fa naiffance , & fon efprit toujours- noble prend fes titres dans fes lumieres. Son tribunal eft fa Nation entiere, fon juge eft le Public , & non le Defpote qui ne Teutend pas, & le Miniftre qui ne veut pas Técouter. La feule voie qui lui refte eft donc 1'impreflion , puifqu'il ne pourrok percer auprès du Tróne, & que tout abus qu'on veut réformer eft le patrimoine de ceux qui ont plus de crédit que le Réformateur. Et puis, ft mes exprelïïons choquentl'amourZ x  r>48) propre de quelque particulier, dcnt j'attaque les prejuges , que m'importe, je n'ai rien k craindre, j'écris fous un Gouvernement qui appelle les lumieres; & la vérité ne le bleffera pas, pourvu qu'elle foit utile a la patrie. Je re'pe'terai donc fans celfe, avec franchiffe, que la France eft encore loin d'avoir perfeöionné la conftitution de fa Marine. Nous avons d'abord marché au hafard , & k taton , paree qu'on a pre'fe'ré une routine qui confacre les erreurs k ces innovations heureufes qui fecouent 1'art & lui donnent tout Ion de'veloppement. La routine conduit les hommes dans prefatie toutes les aöions de leur vie ; on ne renéchit que dans les grandes occalions , & quand il n'eft plus temps , c'eft ce qui a produit autant d'erreurs dans le Gouvernement que dans la Philofophie. On me permettra donc de re'capituler ici les abus que je veux détruire en énumérant les moyens que j'offre pour y parvenir. Je propolé d'abord un Confeil de Marine , paree qu'il n'y a que cette voie de rendre ftable & uniforme Ion adminiftration, & de diriger , avec plus d'utilité & de connoiffances , les opt'rations. Je divife enfuite ce grand Corps pour diminuer fa puifTance , i'empécher de re'fifter k Tautorite' qui doit ie régir , le plier k une difcipline fcVere , inflexible , rendre les fautes perfonnelles, & lui öter, en les partageant, le delir de les pallier. La nou-  ( H9 ) veile forme que je donne aux Etats-Ma ni de fèmoncer les Admimftrateurs , chargés d'ordonner & de dinger les opérations de la Marine. Je dis ma pehlée fans enthoufiafme , & jVrpere qu'on m'écoutera , paree que je crois avoir vu le bien, avoir raontré le mal , & avoir indiqué le remede. Au refte , quelque foit I'accueil qu'on me prepare , je ne me fuis point eftrayé ni desclameurs de l'intérêt, ni des ris del'incpnféquence ; j'ai encore moins redouté les perfécutions des préjuge's , que la foibleffe de mes talents. Raffuré par la pureté de mes intentions , j'ai vu , fans m'étonner , les difficultés de mon projet. Ainfi Colomb , partant pour découvrir un nouveau monde, ne céda point aux premiers murmures de fon équipage. J'ai eu fa hardieffe , je n'aurai peut-être pas fes fuccès. Mais fi je me fuis égaré, fi j'ai quelquefois embraffé  la chimère du mieux polüble, qu'on m'excufe & qu'on me pardonne. Le délire d'un citoyen qui rêve au bonheur de ia patrie, a quelque chofe de refpe&able. Profonde'ment affecté des maux fans nombre que de vils préjuge's trop enracinés , & qu'uu mot du Gouvernement peut détruire, font ala conftitution maritime de la France^, j'ai cru que le moment étoit propice , oh un Prince jufte & bienfaifant occupe le tróne , entouré de Miniftres éclairés, pour en détailier les abus & les vices opprelfeurs. Tranquille dans ma médiocrité , fpectateur éloigné des premiers événements de cette guerre, je me fuis fenti piqué d'un aigiilon de gloire, & j'ai prefque voulu entrer dans une carrière que j'avois quittée, & dont je ne me diflimulois aucun des défagréments. J'eulTe vu de plus prés & avec plus d'indignation , fans doute , toutes les caufes qui s'oppofent a la felicité , a la grandeur & a la puifTance de la Marine ; j'eulTe vu que tous ces obftacles avoient pris racine dans fen propte fein , & que le feul moyen d'en guérir fa conftitution étoit de les en arracher. En confidérant avec réflexion tous les défordres & le découragement qui en réfulte, j'ai concu le projet d'une réforme indifpenfable, & en admirant de loin les efforts étonnants que le Gouvernement fait pour la Marine , j'ai gémi de leur inutflité pour 1'avenir , & je me fuis dit; il n'en feroit pas ainfi d'une Marine bien conftituée  & réellement puiflante ; je dis réellement , paree qu'il faut bien diftinguer , je ne faurois trop le re'pe'ter, la puilfance ve'ritable fonde'e fur la bonne proportion, & la vi- Fueur de la conftitution maritime , d'avec apparence de la puilfance fondée fur une trop grande extenfion de fes moyens , fur des triomphes momentanés , fur les talents d'un grand homme, en un mot, fur tout ce qui ne peut pas durer. Une Marine conftituée fur mes principes fera facile a gouverner ; fon adminiftration fera uniforme & ftable ; elle mettra fa gloire a re'pondre aux intentions du Gouverment ; jamais fa pre'fence ne genera le commerce; nul acte d'une autorite opprelhve. Toujours prête k lui donner du fecours, elle fera refpecter les fujets de 1'Etat dans toutes les contre'es, fur toutes les cötes; elle facilitera les échanges , applanira les dêbouche's, & portera toujours fur fespavillons ces trois mots, qui font tout le code du commerce maritime : liberté, fureté, proteclion. Elle accueillera les matelots étrangers, leur fera gouter les avantages de fon adminiftration , leur ouvrira fes arfenaux , fes ports & fes vaiffeaux ; elle ne craindra pas 1'efpionnage , paree qu'il rfy a que la foiblelfe ou 1'ambition qui cache fes moyens ; une Marine puiflante laifle voir les liens , comme un Etat floriflant laifle voir fes chemins, fes Villes , fes campagnes , fes peuples ; fure que le fpe&acle de fa force & de fes ref-  fources fera denrer de 1'avoir pour amie plutöt que pour ennemie. Si, malgré Pafpeét impofant de fa puiffance , 1'Etat fe voit forcé de repoulfer par les armes les outrages de la jaloulie, ou les oftences d'un voilin trop ambitieux, c'eft alors que la Marine, dont je viens d'ébaucher la conftitution , déploiera tous fes efforts; alors tomberont de deffus les yeux ces bandeaux du préjugé, qui prétend que le génie francais n'eft pas fait pour la Marine. Celle dont j'ai peint 1'adminiftration , limple , puiflante & folide,reffembleraa ces vaftes machines , qui, par des reflbrts peu compliqués , produilent de grands efforts ; fa force niïtra de fa force; la profpérité de fa profpérité; le temps qui detruit tout augmentera fa puifTance; il démentira ce préjugé vulgaire , qui fait imaginer que toutes les inftitutions humaines font foumiles a une loi impérieufe de décadence. Si Pon jette les yeux fur Phiftoire, cette loi femble exifter; elle eft écrite fur les débris de tant de flottes vaincues , fur les naufrages de tant de vaiffeaux ; mais elle n'eft point irréfiftible, elle n'y fait point partie de ce fatalilme qui lans ceffe détruit & reproduit 1'univers. Si une fage adminiftration fait maintenir les principes de fa conftitution , la Marine s'élevera toujours jufqu'a ce qu'elle ait atteint le point de fon afcendance , ou de fa plus frande force. Si le Gouvernement eft affez abile pour démtlerce point par dela lequel  ion devation ne feroit que l'affoiblir , s'il fait 1'y arrêter, s'il fait 1'y foutenir; la Marine , fixe' a ce fait de puiffance & inébranlablcment aft'ermie fur la mer orageufe qu'elle aura fu dompter, pourra voir, lans s'étonner, les efforts de 1'envie combine's contre elle. O ma Patrie! ce tableau ne fera peut-étre pas toujours un rêve fantaftique! Tupeux le re'aliler, tu peux avoir une Marine ainli conftituée. Un jour , peut-être , e'chappant aux préjuge's de fon fiecle, & place' dans des circqnftances plus favorables, il s'élevera fur le Tröne, un Prince qui voudra , d'une volonté ftable, cette grande re'volution , & un grand homme qui 1'ope'rera fous fes yeux. Dans les Ecrits de mes concitoyens, dans les miens , peut-être, ils en puiferont tous deux le delir & les moyens; ils changeront nos opinions, ils dt'truiront nos erreurs , donneront du reiTort au Gouvernement maritime, & porteront le flambeau de la ve'rité dans toutes les parties de fon adminiftration. Ils lübltitueront , a notre re'gie e'troite & routiniere, qui entrave & tapifle les opérations , la conftitution vafte & folide que j'ai tache' de de'peindre. Alors s'e'vanouiront ces faulfes lueurs qui nous égarcient, cette pratique , cette routine adopte'e par la parefte & foutenue par 1'ignorance ennemie de toute inriovation , ces préjuge's que nous appellons des principes ; alors s'écroulera ce fyftême monftrueux Sc  (*57) de'courageant, qui facrifie tout a rintérft de fa propre gloire ; alors s'anéantiront , devant ces hommes fupe'rieurs , ces petits moyens que la vanitt! a ttablie pour faire une barrière au me'rite: dès qu'il fera connu , il aura droit a leur faveur ; ils rendront la Marine ce qu'elle peut devenir; enfin, ayant mis le comble a fa prolpe'rité , & ne pouvant plus ajouter a fa gloire qu'en la rendant durable , ils n'auront plus qu'a jouir de la reconnoiflance des peuples. F I  TA BLE DES CHAMTRES CONTENUS DANS CET OUVRAGE. I JLNTROBUCTION y pt z Chap. L Maniere de divifer le Corps de Marine , avantages qui en réfulteroient; nouvelle formation des EtatsMajors , nombre d'Officiers qn'on y comprend , nouvelle dénomination , nouvelle marche de leur avancement • changement dans l'uniforme. ' %g II. Des Vaiffeaux de ligne & Frégates ; de leur nombre , divifion , aménagements, dijlribution ;préjugés nuifibles a la force de leurs éckantillons; moyen d'ajouter a leur folidité, en. augmentant la circulation de 1'air extcrieut dans leur membrure. $y III. Du nom & du rang de chaque Vaiffeau ; du nombre d'Officiers dans chnque Etat-Major , de leur totalité , comparée avec ce que le Roi en entretient acluellement ; de l'état incer- .. tain des Auxiliaires, des appointements & des femefires. a(? IV. De la Dèfcipline; des différents dé-  taïh d'un Vaiffeau, confés h différents Officiers; de l'affemblée des Levées, de l'emploi des Volontaires , & de la police inférieure des Voijleaux. ilS V. De la nécejfui de donner un uniforme aux Matelots , avautages qui en réfulteroient dans le fervice ; de leur cafernement dans les Ports; diflinclions dans l'uniforme , fuivant les différents grades & métiers, Z2, VI. De la formation de 1'équipage d'un Vaiffeau de foixante-quatre canons, & de la dijlribution des pofles pour le combat. 146 VII. Des abus qui fe font gliffès dans les Claffes ; du defpotifmc des Commiffaires; moyens d'y remédier en établiffant des Officiers-Commandants , fous les 'yeux de qui fe feront les levées , & pardefréquentes infpeciions; nouveaux moyens d'augmenter leurs reffources , t$Q VIII. De l'éducation des Gardes-Marines & Ajpirants ; nouveaax objets aya/outer ; avantages d'injlruii e a ia manatuvre les jeunes gens qu'on defline a peupler les claffes ; du fervice des Ports , envifagé comme des placet de retruites, IJ5 IX. De la nourriture des Equipages ; de l'emploi des forces navales en temps de paix, & de quelques autres objets d'utilité pour la Marine , tg8 Conclufon, 22.3 Fin 'de la Table.