DES ÉTATS GÉNÉRAUX: E T AUTRES ASSEMBLÉES NATIONALE S. TOME SJXIEME,   DES ÉTATS GÉNÉRAUX, E T AU TRES ASSEMBLÉES NATIONALE S. TOME SIXIEME.- A LA HAYE, & fe trouye a P A R I S Chez BuiSSON, Libraire , Hotel de Coëtlofquet, rue Hautefeuille, N°. zo. i 7 S 8.   T A B L E. CHRONOLOGIE des Etats Glnéraux ,ou le tiersEtat ejlcompris, depuis l'an 161Ó juf qua 422 , (par Savaron). ' Page 1 Notice fur la Chronologie de Savaron. 116 Opinion de Savaron, fur iinfluence & la prépon~ dirance du tiers-Etat aux Etats Généraux. 250 Analyfes, Extraits & Abrégès des Auteurs & Hiftoriens qui ont krit fur les Etats Gêniraux. GEiivres d'Hincmar. 257 LaFrance Gauloife, par Hottoman, Jurifconfulte. 259 De tAffemblée générale des Etats, & de quelle matiere on y traite. Ibid. Comment /.'autorité de VAffemblée des Etats fut maintenue & continuée fous le regne des defcendans de Charlemagne. 271 Comment l'autorité du Concilegénéral'des Etats fut continuée fous le regne des defctndans de Hugues Capet. 2g2 De l autorité mémorable des Etats, pratiquée contre Louis XI. 2gg Des Pariemens & Siéges judiciaux de France. 294 Extrait de COuvrage inthulé: de la République , parEodin. ^oj  De la fouveralnetê. ^OJ Limites du pouvoir des Etats Généraux, Extrait de Bodin. Erreur de ceux qui penfent que le Royaume foit tonibé en éleclion. Extrait de Bodin. 3 ^ 'Impótsnepeuventêtre mis fans le confentemtnt du Peuple. Extrait de, Bodin. ^Q De quelle manure lesfupages peuvent être regus & comptés légalement aux Etats Généraux, & prépondérance du tiers-Etat. Utilité des Etats provinciaux. Extrait de Bodin. 3^ Tableau de la Conflitution Francoife, ou Autorité des Rois de France dans les différens dges de la, Monarchie. Origine de la Conflitution Fran* Fin de la Table, DES ÊTATS  DES ÉTATS GÉNÉRAUX E T AUTRES ASSEMBLÉES NATIONALE S. CHRONOLOGIE DES ÉTATS GÉNÉRAUX, Ou le Tiers Et at ejl compris , dcpuis Van 161b jufqua azx. Par Savaron. LOUIS XIII. Les Etats généraux mandés a Sens au dixieme de feptembre 1614, remis au dixieme d'o&obre | Paris, ouverts le zj du même mois, Sc le zj Tornt FI. A,  2 Chronologie février i6i 5; les cahiers préfentés au roi Loin's XIII, féant en fon lit de juftice. (1614 , iGiS.) H E N R I IV. L'aflemblée des Trois ordres a Rouen 1'an 1 596, fous le regne de Henri-le-Grand. (1 596.) Tenue d'états a Paris en 1'an ï f93 ; cafles paf arrêt de la cour du trentieme mai 1594. (1593.} H E N R I I II. 'Etats généraux mandés a Blois 1'an 1588, au quinzieme de feptembre , & ouverts le 16 d'oftobre. Mandés a Lyon 1'an 1574, & tenus a Blois en decembre 1'an 1576, par le roi Henri III. {j58S, tiy6, Ordonnances. , CommiJJion. Pap. Majfo ad regem Htnric. III.) CHARLES IX. Forme d'états a Moulins Can i566. Aux Etats généraux tenus a Saint-Germainen-Laye, par le confentement des princes, feigneurs , &£ officiers de la couronne , fut accordé i'édit, qui fut depuis nommé 1'édit de janvier, permettant le prêche aux fauxbourgs des villes; voulant que les officiers royaux y afliftaflent, k ce qu'ils puifTent témoigner leur déportement, commandant de garder les fctes,  5 E S ÉTATS. G E N ÉS. AU X. £ :& degrés d'affinité comme les catholiques , défendant toutes paroles injurieufes. (Af. de Tkou, ióS'i Ordonnancts. Du Tilkt.) Au roi FranCois II, fuccéda Charles IXe du nom, duc d'Orléans , en 1'age d'onze ans, en janvier 1560, les ètats a Orléans. (/36b. Du Tilkt. M. de Thou.) Etats conünués a Pontoife , tendans a accorder les différends , prendre garde aux dettes du roi; & que les eccléfiaftiques foulageaffent le roi d'une charge fi exceffive. ( /36b. Du Tilkt.). FRANCOIS II. Lettres patentes du roi du dernier d'Aoüti au prévöt de Paris, & autres juges , pour affembler gens de tous ètats, au dixieme décembre a Meaux , pour répondre aux plaintes & doléances, pendant lequel tems on prendroit garde aux plaintes pour les rapporter, afin d'y être pourvu , & réformer ce qui fe trouveroit être a réformer. ( /36b. Chron. abri' gée de.Du Tilkt.') L'ouverture des états a Orléans, environ le 19 novembre , qui devoient pacifier les troubles, mais il y eut peu d'avancement; les affaires étant retardées par le fait des prifonniers, & le tout interrompu par la mort du roi, le; A a  % Chronologie" ^eiidi cinquierhe décembre , par un catharre qüfï lui tomba fur i'oreiiie. (/i6b. Du Ttllet. M. de Tkou.) HENRI I ï. En 1'an 1558 , après la défaite de SairitQuentin, qui fut le 10 Aoüt 1557, on con- 'voqua des Etats a Paris en la falie de Saint Louis, & y furent faits quatre ordres , pour irouver moyen de croitre la finance qu'on demandoit au peuple ; a fcavoir , de Vèglife , 'de la noblejfe, de la juftice , & du tlers kat. \iS58. M. de Tkou , llv. 14. Coquille en fhift. ■de Nivernois, p. $85. Cet ordre eji tiréde Claude Sey'fel, liv. 1 de la monarchie , chap. 13 , 6* de {xirfon ,fermo de S. Ludovico.) Depuis font furvenus les rois de Erance , fcjui ont cönftituë , & voulu retenir égalité de juftice , enlrc les grands & menus, nobles & roturiers refpeclivement, & ont fait un tiers ordre & êtat dudit populaire, & dicelui avec les autrts êtats, a été demandé & regu le confeil & avis ; lorfque, pour les grandes affaires du royaume, il a fallu aflembler les trois ètats d'icelui, compofés depuis ledit tems, & retenus nüqu'a préfent des gens d'cgüfe, nobles & populaires , ' que ton nomme ie tiers êtat. ( l$4$. M. Riant.')  DES ÉTATS GÉNÉRAUX. $ FRAKCOLS Ier. Lequel traité (de Madrid) mis- en tenues; kfJits etats afemblés k Coignac , préfent le vice roi de Naples ,.le roi. fait déclaration du vouloir des princes ,. barons , & trois ètats , B'aceorder icelui traité, comme forcé,.&au grand préjudice du royaume de France, &Ci \Van ióiG. Croniquedc du.Tillet.,, Evéque. Du Tdlet au ncueil des rangs, iG décembre i^2y.} Le roi Francois IeF, preffé d'afFaires pous fupporter fon peuple affez chargé dailleiirs » avifa de procéder al'aliénation de fon domaine,' a raifondu denier dix, & de cedépêcha édits> déclarations &£ commiffions, qui fürent publiées , tant k la cour de parlement , que chambre des compies , peu.après., Tiercement étoient aver.tis.que pareilles aliénations faites par les feus rois,. avoient été,.annullées par faute defdites raifons ,. & aufli pour ce que les trois états ny avoient point confenü, &c, {Papprt^ iiv. 5 , titre 10 y.arrét 4.) LOUIS XIL Audït an mil cinq cent & fix,, lë jour dei'Afcenfion de 'notre Seigneur > jnoofeigneuc A %  ê Chronologie Francois de Valois , duc d'Angoulcme , feconde perfonne de la couronne de France, fianga en la ville de Tours, madame Claude, fille ainée dudit roi Louis, &c de madame Anne , ducheffe de Bretagne ; pour leque! mariage faire furent affemblés les états en ladite ville de Tours. (M Gilles, 1'an ijoo.) Quoi, entendant & préfuppofant que fefdits fujets lui vouloient parler de quelque grande matiere, comme il étoit vrai-femblable , incontinent écrivit k tous les princes & feigneurs de fon fang , & a la plus grande part des autres principaux prélats, feigneurs & barons de fon royaume , qu'ils (e duffent trouver pardevers lui au dixieme jour du mois de mai, dernierement paffe en ladite cité de Tours, lefquels ne failiirent point k eux y trouver.' Et aujji lefdits ambafjadeurs des villes y étoient déja arrivés, & avoient demandé audience audit feigneur,quila leur avoit accordée. (C7. Seyffet en l'hijl. de Louis XII, 1'an 1606.) Ledit jour avenant, fut icelui feigneur affis en fon fiége royal, &c lui afiiftoient lefdits princes & feigneurs de fon fang, & autres prélats & grands perfonnages. Autour de lui, étoient plufieurs grands barons, & nobles hommes de tous catés, grande multitude d& peuple, Et m-devantde lui furent lefdits ambafi.  des états généraux. f /odeurs des villes. Lefquels après qu'il fut commandé faire filence , & quils fe furent mik nue tête & a. genoux; l'".n d'entr'eux envoyé de par ia cité capltale de Paris, au nom de tous les autres, ramenteut très-élégamrr.ent, Sc commémora pluiieurs grands biens , & iouables chofes que ledit feigneur avoit faites au pfofit & a la gloire d'icelui royaume , auffi 1'humanité 6c bénignité qu'ü avoit «Té envers fes fujets. (Ibid. ) Quo comperto > grande aliquid ab his proponendum , poftulandumve , ut erat verifimile , ratus , ex- cunclis regni partibus jj regise ftirpis. imprimis, dehinc ceeteros principes, prselatos. infuper , & proccres complures ad dseoi maij decimum in Turonenfium metropolim. ad ie evocari jubet. Quo maturius, fi quid majoris, momenti poftulafetur ,refpondcre legatis poffet. Nee ad diem vocati defuere. Sed&urbinm legutk a rege audienda bnpetrata , anima ut apparebat^ fujpcnfi ajfuere, (i3o6\ CL.SeyfeL) Rege igitur fublimi, regiaque fede locato, prslatis , principibufque affidentibus plurimis , &C caetera nobilitate circumftante, cïrcumqus fufa multitudine , a fronie urbium legati conftitere. Et filentio facto-, nudaüs capitibus , popluibufqm in urra'ii defixis t uno, vice omnium Parifienfium legato , verba faciente, multa.de regis ia A 4  I Chronologie rcgnum univerfum meritis , de ejus etiam erga fubditos omnes dementia > benignitate , indul-' gentia , pietateque commemoravit. (i 506.) Difant au premier, que le très-chrétien roi Louis , douzieme de ce nom , au commencement de 1'an fufdit mi! cinq cent & flx ,étoit dedans fa ville de Blois, Ia reine avec lui &c madame Claude leur fllle, laquelle étoit en 1'age de fept a huit ans, tres-belle & moult tien enfeignée , & la fe pafla le tems en toute joie & plaifir ; car le roi étoit lors très-fain & en bon point, & tous fes pays heureux en paix, & plantureux en biens. Advient qu'en ce tems fur la fin du mois d'Avril, le roi penfant en fes affaires , s'en alla a Tours, la reine & madame Caude avec lui. Et fit venir devers lui Louife de Savoye» comreffe d'An* goulême, & fes deux enfans, lefquels étoient tant bien appris que le roi les aimoit moult a certes, & tant lui étoit agréable le nis , qui le plus proche k venir étoit de la couronne , que pour ce, & autres raifons apparentes, délibéra lui donner madame Claude fa fiile en mariage. Pour laquelle chofe trailer , voulut audit lieude Tours tenir confeil. Dont envoya a tous fes pariemens de France , & d toutes fes villes , pour faire venir vers lui de chacun lieu. gens fages & hommes confultés. Et tant qu'en.  DES ÉTATS GÉNÉRAUX. f peu de tems furent en ladite ville de Tours de chacune cour de parlement, préfidens &C confeillers, & de toutes Les principales villes de France , hommes fages ordonnés & députés par lefdites villes & pays de France, comme dit eir. Aufli y étoient tous les feigneurs du fang , grand nombre de prélats, le chancelier , & tout le grand confeil, ave-c la plupart de la nobleffe du royaume de France. Lorfque tous les etats furent la. ainfi affemblès le lundi, le mardi & le mercredi des Roifons , dedans la grande falie du Pieffis , le roi tient fiege royal, auquel lieu furent afemblés les états : c'eft a fgavoir, les prélats de 1'égliie, les princes & feigneurs du royaume, le confeil des pariemens & des villes de France , fur lelquels dudit confeil préfidoit meffire Guy de Rochefort, lors chancelier de France ; & la fut tenu confeil fur le traité dudit mariage , & oui 1'opinion de chacun , oü plufieurs belles chofes furent alléguées & faines opinions propofées , comme 1'afFaire le requéroit, en quoi gifoit 1'honneur du roi, la füreté du royaume, &C le falut de la chofe pubiique. Par quoi toutes allégations ouies , fut unicuement conclu &dit, que pour le bien & utilité du royaume de France, ledit mariage fe devoit accomplir & parfaire. Et de ce faire chacun defdits états, & tous enfemble  ïö Chronologie prierent le roi. Et pour faire la propofition au rol pour les villes & pays de Jon royaume de France t un nommé meffire Jean Bricot, do&eur- régent a Paris, &c chanoine de Notre-Dame, fut a ce ordonné. « Lequel montra au roi & a tous les » affiftans , le grand bien & profitable utilité» qui pour les bonnes alliances des amis con» nus, & le grand pénl & mortel danger de » celles des reconciliés & ennemis couverts , » fe peu vent enfuivre & ad venir fur le royaume » de France,& a toutechofe publique. Comme » autrefois par alliances étranges en étoit ad» venu ; a quoi étoit obvier fur toutes cliofes », »• & a ce avoir fmgulier égard. » Plufieurs autres bonnesraifons 8g propos afférens a ladite matiere, dit ledit Bricot. En tant que le roi, vu 1'opinion de fon confeil & la priere de chacun , confentit ledit mariage , & devant tous par la mam de maïtre Georges, cardinal d'Amboife & légat en France, les fit fïancer le jour de l'Afcenfion, dedans la grande falie du PleiTis - les - Tours : de quoi par-tout le royaume de France furent faits les feux de joie. (d'Ju ton en la vie de Louis XII, fan ïóoG.) Quamvis ducatus Britanniar &: Normanniae, quafi in centuplo excedant redditum ducatus Burgundiss, tarnen ducatus Burgundia; dignior,  DES ÉTATS GÉNÉRAUX. ï ï & excellentior judicatur. Et in convocations, trium Jlatuum Trancice , femper Burgundiones & Hedai funt primi poft Parifienfes , qui reprefentant principalem civitatem totius Gallias. (Chajfan. inCatal Glor. mundipar. 12, Conf.58.) CHARLES VIII. Audit an 1484 , furent les états tenus d Tours, oitfe trouverent geus délégués de toutes les villes royales du royaume , les uns pour Féglife, & les autres pour la noUeffè & juflee, & les autres pour le peupk commun. Er efdits états furent ordonnés pïuïieurs utiles & néceflaircs chofes, Sc fut avifé , pour óter tout différent, qu il nry auroit aucun régent en France, maïs que ladite dame de Beaujeu, qui étoit fage , prudente & vertueufe , en enfuivant la volonté du feu roi Louis, auro^t feulement le gouvernement de la perfonne dudit roi Charles, tant qu'il feroit ainfi jeune. ( Vignier N. Gilles , tan ^4-) . ; 1 Et par ce moyen que toutes les tailles cc autres équipolens aux tailles extraordinaires , qui par, ci-devant ont eu cours, foient du tout tollues Sc abolies , & que déformais , en enfuivant la naturelle franchife de France , & la doftrine de Saint Louis, « qui commanda Sc  'ti Chronologie » bailla par docTrine è fon fils, de ne prendre-;. » ne lever taille fur fon peuple fans grand »> befoin & néceflïté , » ne foient impofées r ni exigées lefdites tailles, ni aides équipolens a tailles, fans premiérement affembler lefditsi trois états, & déclarer les caufes & néceffités du roi & du royaume, pour ce faire, & que les gens dejdits états le confentent, en gardant les privileges de chacun pays. (*483>- Vigréer; Etats de Tours , pag. ój.) LOUIS XL Le roi vouloit toujours procéder en grande folemnité. Parquoi fit tenir les treis états a Tours ès mois- de mars & d'avrii 1-470 , ce que jamais n'avoit fait, ni ne fit depuis; mais il n'y appella que gens nommés , & qu'il penfoit qn'ilsne contrediroient point a fon vouloir. ( 14-ro. Philipps de Commines, liv. 3 , chap. 1, & Vignier. ) A cette aiTemblée y avoit plufieurs gens da jujlice , tant du parlement que d'ailleurs ; & fut conclu , felon 1'intention du roi, que ledit duc. feroit ajourné a comparoir en parlement k Paris. Enfuit 1'ordre & la maniere de 1'affiette du roi Louis XI, & de gens des trois états, tenus ea la ville de Tours, en ia grande falie de Fhótel  DES ÊT ATS GÉNÉRAUX. Yj archiépifcopal , le fixieme jour d'avril 1'an 1467, avantPaques , &C autres jours enfuivans, ïufqu'au quatorzieme jour dudit mois inclus. ( 1467. Du Tilkt -, au recueil des rartgs des grands de France.) En ladite falie avoit trois parquets clos de iois , d'environ la hauteur d'un homme , chacun a huifferie; c'eft a fcavoir , le premier pour le roi, lequel étoit au haut bout de ladite falie , & comprenoit toute la largeur d'icelle , auquel parquet convenoit monter trois marches de degrés : le fecond parquet pour les feigneurs du fang, connétable, chancelier & prélats , lequel étoit au milieu de ladite falie , prés de celui du roi, & étoit plus long que large, & y convenoit monter une marche de degré: le tiers parquet pour les nobles, comtes , barons, gens de confeil du roi, & gens envoyés de par les bonnes villes ; lequel parquet étoit grand & fpacieux, & environnoit de tous cötés celui defdits fieurs du fang. Item , audit premier parquet étoit affis Ie Toi en une haute chaire, en laquelle falloit monter trois hauts degrés; laquelle chaire étoit couverte de velours bleu, femé de fieurs de lys en lances d'or, & y avoit ciel & dofleret de rnême , & étoit le roi vêtu d'une robe longue de damas blanc, brochée de fin or de  'i4 Chronologie Chypre bien dru, boutonnée devant de boutons d'or , & fourrée de martres fubelines , un petit chapeau noir fur la tête, & une plume d'or de Chypre. Et aux deux cötés du roi y avoit deux chaires a dos, lóin de la fienne chacune de fept a huit pieds , 1'une a dextre , 1'autre a feneftre , toutes deux couvertes de riche drap d'or fur velours cramoifi; efquelles chaires étoient , c'eft è fcavoir en celle de main dextre , le cardinal de Sainte-Sufanne, évêque d'Angers , paré d'une grande robe cardinale, & en celle de main feneftre, le roi de Jérufalem & de Sicile, duc d'Anjou, vêtu d'une robe de velours cendré , fourrée de martres, & étoit gardé 1'huis dudit parquet répondant en la falie , par les fires de Bloc & du Bellay ; & 1'autre huis répondant en 1'hötel d'un des chanoines de 1'églife , qui avoit été fait pour la venue du roi , étoit gardé par les capitaine & archers de la garde dudit feigneur , & Guerin le Groin. Item , joignant & aux cötés de la chaire du roi, notredit'feigneur , étoient debout, c'eft a fcavoir, du cöté feneftre, MM. de Nevers & d'Eu, & du cöté dextre, M. le prince de Navarre , comte de Foix, & devant ledit cotnte de Foix étoit affis fur une des marches de ladite chaire le prince de Piémont, jeune enfant; .&  DES ÉTATS GÉNÉRAUX. 1% .derrière ledit roi de Sicile étoit affis affez lom fur une petite felle le comte de Dunois , grand chambellan de France ; lequel étoit fi goutteux, qu'il le convenoit porter a force de gens. Item, audit parquet étoient plufieurs autres feigneurs tous debout; c'eft a fcavoir, M. le vicomte de Narbonne , nis dudit comte de Foix, le lire de Peuvebroc , frere dudit roi Henri d'Angleterre , MM. de Tancarville , de Chatillon, de Bueil & de Longueville, Pierre M. de Laval, les fires de 1'Aigle , de Craon , de Cruffel, de laForêt , & plufieurs autres en grand nombre. Item, audit fecond parquet avoit deux haurs bancs parés de riche tapifferie , efquels bancs étoient affis ; c'eft a fcavoir , au banc de la main feneftre M. le marquis du Pont, M. le comte du Perche , M. Ie comte de Guife , M. le comte de Vendöme, M. le comte Dauphin , & M. de Gavré , comte de Montfori , vêtus de velours , & parés moult richement: & en 1'autre banc, a la main dextre, étoient affis M. le comte de Saint-Pol, connétable de France; au plus haut bout & joignant de lui, M. de Treynel, chancelier de France y vêtus de robes de velours cramoifi ; & plus d'environ quatre doigts t & au banc même ^  t6 Chronologie M. le patriarche de Jérufalem , évêque de Bayeux; M. 1'archevêque de Tours, MM. les évêques de Paris , Chartres, Périgueux, Valence , Limoges , Senlis , Soiffons, d'Aire , d'Avranches , d'Angoulême , de Lodeve , de Nevers , d'Agen, de Comminge , de Bayonne, & autres qui comparurent par procureurs. Itern , & audit parquet devant mefdits fieurs les connétable & chancelier, étoit maitre Jean le Prévöt, notaire & fecrétaire du roi, notredit feigneur, & greffier defdits trois états, affis fur une felle, & un buffet devant lui; & aux pieds d'iceux feigneurs du fang, connétable , chancelier , patriarche, an.hevêques & évêques, étoient affis, les autres notaires & fecrétaires du roi, notredit feigneur; & étoient commis a garder l'huifferie , les fénéchaux de Carcaffonne & de Quercy , vêtus de robes longues de velours noir. Item , & entre ledit parquet du roi & celui de mefdits fieurs du fang , connétable , chancelier, prélats & autres, avoit deux bancs parés de tapifTerie, regardant vers la face du roi, efquels étoient affis; c'eft a fcavoir, en celui de la main dextre, M. 1'archevêquc & duc de Reims, premier pair de France; M. 1'évêque & duc de Laon , M. 1'évêque & duc de Langres , M. 1'évêque & «ornte de Beauvais , & M. 1'évêque  DES ÉTATS GÉNÉRAUX. ij Févêque & comte de Chalons , tous pairs de France & en 1'autre banc étoient M. le comte de Dampmartin , grand maitre d'hötel; les fires de Loheac & Bois-Ménard , maréchaux ; &c le fire de Torcy, grand maitre des arbalêtiers de France, & après vient le batard de Bourbon , amiral de France , qui fut au rang d'eux, 8c le dernier affis. Item , & au tiers parquet étoient derrière le banc defdits feigneurs du fang, les corntes, barons , nobles & feigneurs, defquels les noms s'enfuivent. Et premiérement, les fires de Montray, d'llliers , d'Eftouteville , de Ferrieres , de Bonneftable , de Clere, de Gaucourt, de Moy , le vidame d'Amiens, le comte de Nefle, le comte de Rouffy , les fires de Gnilly, de Re vol , de Tornoelle , de la Fayette , de Treignac , de Monteil, de Soubife , de Dampierre , de Rochechouart, de Breffuire , de la Floceliere, de Mortemar, de la Greve, de RufTec , de Pruilly, de Mailly, de Crifie & de ThufTe , & autres en grand nombre, qui comparurent par procureurs. Item , & audit parquet, même derrière le banc defdits connétable , chancelier &prélats, étoient les gens du confeil du roi, & ambaffades qui enfuivent j c'eft a fcavoir , les fires Tomé Vh B  ï8 Chronologie de Taillebourg , de Maupas, de Moy & de Montreuil, maitre Pierre de Riole, Jean de Poupaincourt, Charles de la Vernade , Adam Eumée, Guillaume Compains, Pierre Clutin, Jean Viger, Jean Choart, Jean de 1'Anglée, Mathurin Baudet, & plufieurs autres en grand nombre, tous confeillers du roi notredit ftigneur, les chevaliers ou gardes des fceaux du roi de Sicile, & du duc d'Orléans, & autres ambaffadeurs, tant dudit duc d'Orléans, que du comte d'Angoulême. Et au bout d'en bas dudit parquet avoit plufieurs felles & formes, ou étoient affis plufieurs notables perfonnes, tant gens d'églife, bourgeois, nobles, qu'autres qu'illec étoient venus , garnie de pouvoir fuffifant, faifans, & reprèfentans La plus grande & faine partie des bonnes villes & rités de ce royaume; defquelles villes les noms s'ensuivent. Et premierement la ville de Paris, Rouen, Bordeaux, Touloufe, Lyon, Tournai, Reims, Troyes,Carcaflbnne, Béfiers, Bayonne, Rhodes, Alby, Nimes, Senlis, Xaintes, Angoulême, Orléans, Angers, Poitiers, la Rochelle, Bourges, Limoges, Montpellier, Tours,SaintFlour, Mande, Aix, Tulle, Cahors, Périgueux, Soiffons, Agen, Condon, Narbonne, BeauVais, Laon, Langres, Chaalons, Sens, Char-  DES ÉTATS GÉNÉRAUX. 19 tres, Compiegne , Dieppe, Saint Lo, Falaife, Vire , Carentan , Vallongnes , Montferrand , Saint Pourcain, Brioulde, le Mans, Noyon, Evreux , le Puy, Clairmont en Auvergne, Nevers , Meaux, Yffouldun, Niort, Saint-Jean d'Angély, Blois, Saumur, Milan , & de chacune ville y avoit un kom me d,églife & deux lais. Item le roi affis en fadite chaire, & lefdits roi de Sicile & cardinal, enfemble mefdits fieurs du fang, meffieurs les pairs eccléfiaftiques , prélats , nobles, gens des bonnes villes, & autres des fufdits, affis dans leurs chaires & fiéges chacun par ordre, comme dit eft, fe leva M. Ie chancelier de fon fiége, & alla devers Ie roi « notredit feigneur, & sagenouilla d fon cöté » dextre, & quand icelui feigneur lui eut dit aucunes paroles, s'en revint feoir en fondit lieu & fiége , 8c fit une trés-belle propofition en remontrant, &c. Et enfin le roi fe condefcendit que les trois états fe tiendroient & aflembleroient; & pour ce faire fut lieu affigné en la ville de Tours, pour illec eux y trouver au premier jour d'avril mil quatre cent foixante-fept. ( 1467. Chronique de Louis XI. Viguer.) Et puis fut taffemblèe defdits trois états tenue audit lieu de Tours, qui pour cette caufe y étoient allés; & illec le roi préfent, fut pour B »  io Chronologie parlé & conclu fur la queftjon pour laquelle ils étoient affemblés audit lieu de Tours, juf qu'au jour de Paques, qui fut mil quatre cent foixante-huit, que chacun d'eux illec venus s'en retournerent en leurs maifons , après la conclufion par eux prife fur le fait de ladite affemblée; Stpour cette caufe y étoient venus,. le roi premierement, le roi de Sicile, monfeigneur le duc de Bourbon, le comte duPerche, le patriarche de Jérufalem, le cardinal d'Angers, Sc plufieurs autres feigneurs, barons, archevêques, évêques, abbés Sc autres notables perfonnes, & gens de grande facon, enfembL auffiles ambajfadeurs venus audit lieu, pour cette caufe,. de la plupart de tout le royaume de France, & par tous iceux ainfi affemblés a grande Sc müre délibération , fut dit Sc conclu, qu'au regard de la queftion d'entre le roi, & mondit feigneur Charles, toucbant fon appanage, Sc de ce fe tiendroit pour bien content/douze mille livres tournois en affiette de terre par an, Sc titre de corrité, ou duché, & en outre, que le roi lui fourniroit en penfion par chacun an jufqu'a foixante mille livres tournois. Et que pour ce faire, lefdits trois états promirent de fecourir, & aider au roi: c'eft a fcavoir les gens.d'églife, -de prieres & oraifons & biens de leur temporel, & les nobles &  BES ÊTATS GÉNÉRAUX. II populair es, de corps & de biens, & jufqu'a la mort inclufivement. , . , , Les trois états de France. anemblftS. a Tours par conjmandement du roi Louis o.nzieme, en avril 1467., -avant paques jtrouvant raifonnahle. 1'ofTre dudit roi. a monlieur Charles dé 'France fon frere, -de dpuze mille livres de rente en titre de,duehé,fuiyant 1'prdonnance dudit roi Charles V, en oftqbre 1374,. jufqu'a 4S mille livres-tournois de penfion annuelle; requirent que cela ne fut tiré a cpnféquenee pour les autres puinés de la maifon de. France, laquelle- 'a' depuis été ac.crue. &: enrichie de plufieurs grandes feigneurieséchues a la couronne, lórs tenues par autres. ( 1467. Lakte ordinatiohes 1,,,%%J.„..D» Tilkt de Mejfeing, fils de trance , leurs appanages & bknfaits. Rofier de France. Nic. Gilles Guaguin.) Et pour cette caufe étoient venus le roi premïerement, le roi de Sicile, monfeigneur le duc de Bourbon, le comte du Perche, le patriarche Jérufalem, le cardinal d'Angers & plufieurs autres feigneurs, barons, archevêques, évêques, abbés, &£ autres notables perfonnes & gens de grande facon, enfemble auffi les ambajfadeurs venus audit lieu pour cette caufe 9 de la plupart de tout le royaume de France. Et qu'au regard du duc de Bretagne qui  xt Chronologie détenoit mondit feigneur Charles, & qui avoit pris les villes du roi en Normandie, lequel on difoit avoir intelligence avec les Anglois, anciens ennemisde la couronne de France,fut dit & délibéré par Ie/Mts trois états qu'il feroit ipmmé de rendre au roy lefdit-es villesEt pour ce faire, lefdits trois états promirent de fecourir, & aider au roi; c'eft a fcavoir, les gens d'églife, de prieres & oraifons ,& biens de leur temporel ;& les nobles & populaire, de corps & de biens,& jufqu'a la mort inclufivement; & qu'en tant que touchoit la juftice de tout le royaume, ie roi avoit finguliérement defir de la faire courir par-tout fondit royaume, •& fut content qu'on élüt nobles perfonnes dë tous états, pour y mettreremede & bon ordre. Et furent d'opinion, lejdits trois états, qu'a ce faire monfeigneur de Charolois fe devoit fort employer, tant a caufe de la proximité de lignage qu'il a au roi, comtne auffi de pair de France. Et puis après envoya fon ambafTade pardevers FafTemblée, étant a Cambrai, afin de fcavoir leur vouloir & réponfe fur ladite délibération prife par lefdits trois états affemblés , comme dit eft. Au mois de juillet enfuivant, vinrent &l arriverent & Paris plufieurs prélats, feigneurs , chevaliers, gens d'églife, & autres gens decor:-  DES ÉTATS GÉNÉRAUX, ij feil, que le ïoi ordonna venir, Sc qu'on difoit qu'ils étoient ordonnés pour mettre ordre 8i police en la juftice, & réformer en toutes chofes, & leur fut baillé moult grand pouvoir; & par icelui étoient nommés vingt-un commiffaires, dont monfeigneur Jean, batard d'Orléans, comte de Dunois, & de LonguevÜle, étoit 1'un & premier, Sc duquel nombre de vingt-un ne pouvoit être rien fait qu'ils ne fuffent treize, ledit comte de Dunois toujours devant,&le premier, Sc les appelloit-on lors, les réformateurs du bien public. Et fur ladite commiflion ainfi h eux baillée, commencerent è befogner le mardi feizieme jour dudit mois de juiilet audit an mil quatre cent foixante-fix, Sc pour bien commencer,&: mettre toujours en leurs faits Dieu devant, fut fait par eux cbanter une belle mefle du Saint-Efprit en la Sainte-Chapelle du palais royal a Paris; laquelle meffe fut chantée Sc célébrée par 1'archevêque de Rheims Juvenel, qui étoit élu Sc nommé 1'un defdits commifTaires. (1466. Chronique de Louis XI. Vignier }. Le famedi ( vingt-quatrieme jour du moïs d'aoüt) Sc conclurent qu'au regard des trois états, que requéroient être tenus lefdits princes Sc feigneurs, dire que leurrequête étoit jufte. ( 1466. La chronique du roi Louis XI). B4  *4 Chronologie Et puis fut 1'aiTemblée defdits trois états,tenue audit lieu de Tours, qui pour cette caufe y étoient allés. CHARLES VII. Orléans du roi, chambre première Et eft mon nom propre le cceur de lys Ainfi noramée en 1'affemblée pléniere , Des trois états oü étoient maints d'élys. Le conneftable m'a ce nom ici mis , Et plufieurs autres princes pleins de fcience Pour bien commun afl'emblés & commis, Et maintenir Ia bonne paix en France. Pour ce nsonftrer, je porte en ma banniere Les fieurs de France , dont eft men chef jolis," Et au-deflbubs par moult belle maniere Trois cceurs de lys fur champ de gueule fis. Le noble roi porter me 1'a permis A qui Dieu doint toufiours bonne alL'ance, Et lui deint force, & a tous fes amys De maintenir Ia bonne paix en France. Plus de huift mil poifant faine & entiere; L'an mil quatre cents cinquante huiö, fut misAu mois de juing, & de bonne matiere Qui te feint faire par nuiftre bien appris Mes habitans, t*i prince qui tout fis Veuille garder de guerre ou peftileace, Et de cheoir ès mains des ensemis, Et maintenir Ia bonne paix en France. ( 14!8. Infiription jur la cloche de Phorloge d'Orléans. ) Et avoient été auparavant mefdits feigneurs  des États Généraux. le dauphin & de Bourbon, devant Clermont & Montferrand, « en armes È\ toute leur puiffance, » pour les cuider réduire & mettre en leur » obéiflance ; dont les fujets d'iceux lieux fe « goavernerent moult grandement & honora» blement pour le roi, comme vrais & loyaux » fujets doivent faire a leur fouverain fei» gneur ». Les gens , du roi fe bouterent & logerent en toutes les places qui étoient en la limagne d'Auvergne, entre Aigueperfe & Clermont, (réfervé Riom, qui fe tenoit pour le duc de Bourbon ) le roi délibéra de partir & de s'en aller audit Clermont dudit lieu d'Aigueperfe , oii il fut grandement recu &; bien venu, & y fut environ quinze jours, vinrent pardevers lui les barons & trois états d'Auvergne, qui lui firent grande fête & grande révérence, & tint le roi fon confeil public, & paria pour lui monfeigneur 1'évêque de Clermont, en remontrant la maniere comment les feigneurs deffus dits avoient procédé en leur mauvaife volonté contre la volonté du roi, 6k comment le roi avoit mis ordre avec fes capitaines & gens de guerre, pour les tenir en frontiere, afin de les garder de dérober & détruire fon peuple, quand les feigneurs deffus dits manderent lefdits gens d'armes qui fe devoient tenir ès frontieres, comme dit eft, & auffi avoient pris monfeigneur le  *6 Chronologie dauphin fon fils,& lui auroient donné a entendre paroles & chofes plaifantes k fa volonté, afin de le mettre en parole & en fait, k 1'encontre de fon pere : « lefquelles chofes étoient » contre Dieu, raifon & nature ». Et pour ce requéroit le roi, lefdits barons & gens des trois états, qu'a fon befoin lui vouluffent aider de corps & de chevance; fi lui firent réponfe lefdits barons & autres des trois états, qu'a fon befoin lui vouloient aider notablement, & fi grandement, que le roi en fut content, & donnerent au roi les gens defdits pays certaine fomme de deniers. Monfeigneur le comte d'Eu travailla moult devers monfeigneur de Bourbon, pour voir fi on pourroit trouver bonne union entre 3e roi & meffeigneurs deffus dits, & y fit mauït devoyages,quirien n'y valurent, dont ledit comte eut aflez de peine , & k la fin, tant que meffeigneurs d'Alencon & de Bourbon vinrenf a Clermont, ou le roi étoit aux cordeliers, audehors de ladite ville, &c. ( 1441. Alain Charder ). Après Ja délivrance de ladite place du marché, fe partit le roi, & vint è Paris grandement accompagné, & étoient avec lui monfeigneur de laMarche, monfeigneur de Bourbon , monfeigneur le connétable , & plufieurs autres grands feigneurs; & de-la vinrent k Orléans,  DES ÉTATS GÉNÉRAUX. 2.? & furent affemblés les ambaffades des grands feigneurs de ce royaume , de ceux qui étoient cn leurs pays, c'eft a fcavoir 1'ambaffade de monfeigneur le duc d'Orléans, pour laquelle étoit monfeigneur le batard d'Orléans, 1'archevêque de Rheims, chancelier de France, & de ceux de la ville plufieurs notables clercs & bourgeois. Pour le duc de Bourgogne, 1'évêque de Tournai, le fire de Crévi, le bail'H d; Amiens & le fi'rè de Chevauchy ;pour le duc de Bretagne, 1'évêque de Nantes, 1'évêque de Saint Brieux ,& plufieurs autres ; pour le comte d'Armignac , le fire d'Efton & autres; pour ceux de Paris, tlvéque de Beauvais & plufieurs autres; & y avoit de moult notables gens envoyés de tous les pays cues de ce royaume, & pour le pouvoir mettre en bonne paix, juftice & police. ( 1439- La chr0' nique d'JLiin Chartier. Vignier). Et-en ladite ville d'Orléans le roi voifut opiner en fon hotel audit lieu, & fcavoir 1'opinion de tous fes ambaffadeurs defius dits ; &C furent tous mandés être devers lui, pour ouir ce qui feroit dit & demandé de par lui, ck aufil pour répondre fur 1'opifiion ck demande au bien de la chöfe publique. Après 1'affemblée de tous les deffus dits venus audit hotel du roi 3 vinrent le roi ck la reine de Sicile, accompagnés des feigneurs; c'eft a fcavoir, monfei.-  Chronologie gneur de Bourbon, monfeigneur du Maine; WSf^m^i le connétable, mefTire Pierre de Breragne,les ccmtes de la Marche, de Vendó-me & de Dunois. Si fut affis je roi & les feigneurs deffus dits, chacun felon fon degré. Et pareillementlespréiats & autres feigneurs & autres ambaffadeurs, dont il y avoit . grand nombre & multiplication de peuple. Et lofs % 1'archevêque de Reims, lequel propofa qevant leroi, & tous les autres feigneurs & ambaffadeurs deffus dits, le bon vouloir que le roi avoit au bien de paix, & comme il avoit de tout ion vouloir Sc pouvoir toujours été & étoit prêt d'y entendre; Sc toujours peur ce faire, avoit envoyé fes gens Sc ambaffadeurs par-tout oü les Anglois avoient voulu. convenir pour labourer Sc entendre au bien de paix. Et derniérement en la ville de SaintOmer, oii étQi.ent envoyés de par lui.M. le comte deVendome, monfeigneur 1'arehevêque de Reims & monfeigneur 1'archevêque de Narfconne, meffire Regnauld Girard, & plufieurs autres notables grands feigneurs , lefquels avoient déhbéré avec les ambaffadeurs du roi d'Ang'eterre, qu'au cas qu'il plairoit aux deux rois de ce qu'ils avoient pratiqué pour le bien de paix 1'une partie de 1'autre, Sc dont chacun des deux porteroitpar écrit devers Ie roi, que  BES ÉTATS GÉNÉRAUX. 1$ Gedans le premier jour de mai enfuivant,feroit un chacun audit Saint - Omer , pour la. conclure toute paix, ou toute guerré. Et pour ce le roi avoit mandé toute la compagnie qui étoit pour cette heure affemblée a Orléans , pour tendre un chacun au hien public, & au recouvrement du royaume, ck en dire en leurs confciences chacun fon bon & vrai avis, ck afin que nul ne put ignorer les demandes que faifëft 1'une ck 1'autre partie, pour demeurer les deux rois ck royaumes en bonne paix & union, Ie chancelier de France fit la bailler lefdits articles a tous ceux qui en vouloient avoir, afin qu'un chacun put mieux répondre, juger & parler fur chacun d'iceux felon leur entendement , ck fut dit que le deuxieme jour enfuïvant un chacun fe comparüt en la chambre du confeil ordonné pour ce faire , & y venir tous les jours foigneufement, jufqu'a tant que la chofe eüt pris fin & délibération. Et furent huit jours avant que Ia matiere fut délibérée, 6k la furent ouis tous, oü la plupart des feigneurs de ce royaume qui la étoient préfens, & auffi 1'opinion des ambaffadeurs & feigneurs qui étoient abfens, ck auffi 1'opinion de tous ceux des bonnes villes. Et en la préfence du roi de France ck de la reine de Sicile, furent propofés de tous ceux de ce royaume  30 Chronologie la étant, moult de belles chofes hautement & fagement, en démontrant la défolation , maux, pilleries, meurtres, rébellions, roberits 8c ranconnemens qui étoient perpétré') 8c faits fous ombre de la guerre. Et aufii les biens, la joie & les plaifirs qui viennent, & font par les pays oii paix eft; & plufieurs autres hiftoires anciennes & moult belles, fervant a la matiere, laquelle matiere, 8c les paroles dites audit confeil, feroient trop longues a écrire. Conclufion, fut dit que le premier jour de mai retourneroient lefdits ambaffadeurs audit Saint-Omer, pour conclure 8c fermer la befogne de toutpoint, au cas qu'il feroit ainfi que les Anglois y voudroient entendre. Ce qui a donné fiijet a Charles d'affembler a Orléans lts états gêuéraux ou non-feultment toutes les villes enyoient leurs députês Jelon les coutumes, mais tous les grands feigneurs qui n'y peuvent aller en perfonne, leurs agens en grand nombre. ( 1439. De Serres). En 1'an mil quatre cent trente, les états affemblés a Saumur. (1430. Antiquitès dAnjou ). Le roi ou prince, pour urgente néceffité, peut impofer tailles k fes fujets, felon la difpofition de Cynus, in l. ad injlruclionem c. de facrof. ecclef. 8c auffi aliéner ies biens de 1'églife, pour la garde, confervation 8c défenfes  DES ÉTATS GÉNÉRAUX. 31 des fortifications. Vrai eft que fur ce, feroit par aventnre requis le confentement des trois états ; c'eft a fcavoir de la nobleffe, du clergé & du tiersétat, ainfi qu'il ejl accoutumè a"être fait. ( 1416. Mafuer. titre 38, §. 2 ). Ex parte dilectorum Sc fidelium confiliariorum, ac aliorum officiariorum nonrae curiae parlamenti occitavi nobis fuit expofitum, cüm tam ad caufam ipforum quam uxorum fuarum ipfi, aut plures ex eis habeant aliqua haereditagia in pluribus, Sc diverfis locis occitanae, quorum occafione quamvis quieti, franchi, exemptique effe debeant ab omnibus talliis, juvaminibus, Sc fubfidiis nobis conceffis & concedendis per gentes trium ftatuum prsedifla; patriae, vel alias, attento flatu.in quo nobis continuo deferviunt. ( 1426. Stylus cur. pari. part. 3 , §.21). CHARLES VI. Le fixieme jour de décembre, furent mandés les trois états a. Paris , & furent ajfemblès dfaint Paul en la baffe falie. Et propofa maitre Jean le Clerc, Sc print fon thême: audita eft vox lamentatwnis & planctus Sion, Sc narra les diverfes guerres qui avoient été, la mort du duc de Bourgogne , & la paix faite aTroyes, Sc les place_s  32. Chronologie conquêtées, en requérant aide pour conduire le fait de la guerre. ( 1410. Jean Juvenal des Urfins). II fut délibéré par le roi ck lefdits feigneurs , qu'il étoit expédient d'affembler les trois etats , ck ce furent, ck de toutes parts vindrent gens, 6k furent envoyés a Paris, tant des gens d'églife , des nobles, que des bonnes villes. ( 14:2.. Ibid.) Et qu'il étoit néceffité de fe pourvoir contre les anglois , ennemis anciens du roi ck du royaume de France, laquelle chofe ne fe peut faire fans argent, ck pour ce requéroit aux trois états aide, qui étoit en effet une bonne groffe taille. A la délibération des trois états, il y eut diverfes imaginations ck opinions : entre les autres , ceux de la province de Rheims, bien notablement, montrerent que les aides ordinaires fuflifoient bien a foutenir la guerre fans mettre tailles, vu la pauvreté du peuple ck les pilleries, a caufe des divificns, ck plufieurs a leur imagination fe adhérerent,l'abbé duMontSaint-Jean, qui étoit bien notable clerc, paria fpécialement contre les gens de finances, ck ceux qui avoient eu dons exceffifs du roi. En montrant qu'on devöit reprendre de ceux qui avoient trop eu , ck que ce fait le roi avoit affez pourréfifter aux ennemis, ck foutenir fa guerre, en  DES ÉTATS GÉNÉRAUX. 3» en employant ce qui avoit étë dit par lefdits Gentian & Pauilly. (Id.p.jiz), Or eft ainfi que le roi de France par 1'enhort & follicide du duc de Bourgogne, man Ja lors a venir a Paris la plus grande portie des princes de fon royaume, avec les prélats, uniyerfité, ckapitres & plufieurs autres,& ceux des bonnes villes, afin d'avoir confeil & délibération fur plufieurs grandes affaires qui étoient en fon royaume. Et par fpécial fur la réformation de tous fes officiers généralement , defquels par très-longtems la plus grande partie s'étoient très-mal gouvernés en vers lui. Et pour ce quand les feigneurs des fufdits & autres furent venus audit lieu de Paris, & qu'ils eurent eu plufieurs grands confeils 1'un avec 1'autre fur les matieres , pourquoionles avoit mandés, conclurent enfemble que, pour tous les autres, 1'univerfité répondroit, & auffi remontreroit au roi & a fon confeil ce qui leur étoit avis de faire, & ainfi en fut fait en un certain jour qu'ils eurent audience en Fhötel de Saint-Paul par la forme & maniere qui s'enfuit ( 1412. Monjlrelet, vol. 1, ch. xcix )„ Dient les devant dits, que ceux des bonnes villes & les autres qui en préfence font venus a votre mandement, ont ce bénignement juré& promis; & toufdits jufqu'a maintenant entretenu, & Dieu devant entretenront. Torne FI. Q  34 Chronologie Et pour venir (notre trés-fouverain feigneur) aux deffufdits aide, confort & confeil, que vous avez requis de vos deffufdits notables -6* bourgeois, que vous pour le préfent avez mandé , votre nlle & vos fujets devant dits , voudront bien qu'il plot k Dieu de eux donner grace de vous bien confeiller & conforter; car a ce faire font prêts de vous expofer leur corps & leur avoir, de bon loyal cceur ils y font tenus, & ainfi ont-ils derniérement conclu folemnellement en la derniere congregatiën. Item, & qu'il vous plaife commander aux prélats & bourgeois des provinces y kant, qu'ils nomment tous ceux de leurs provinces qui ont xommis aucuns défauts ès chofes devant dites. Et pareillement 1'an mil quatre cent & fix, cii il y avoit encore de deux eens d dou^e vingt archevêques, évêques, quabbês & chapitres, ou procureurs pour eux, & de votre fang rois, ducs , comtes & barons, & encore de deux d trois eens notables cleres. Et y eut ordonné plufieurs cleres a débattre la matiere. Et entr'autres y étoit meffire Etienne FillaÖre , doyen de Reims, bien notable clerc, qui allégua le chapitre Aliud, & voulut maintenir le contraire de ce que dit eft. Mais M. mon pere, dont Dieu ait 1'ame, par ordonnance du roi, lui répondit & aiontra clairement qu'il avoit tort, Et kdit  des États Généraux; 3 ^ cloyen connoiffant fa faute, fe révoqua & print fon thême : locutus in lingua mea , notum fac mihi, Domine, finem mtum ; &C le déduit bien & grandemant, comme il le fgavoit bien faire. Et finalement fut la conclufion telle come deffus eft dit; & fut faite fubftracTion a bénédit. Et y eut avis & ordonnance faites, qui furent gardées & exécutées. ( 1406. Jean Juvenal des Urjins. ) Le comte de Foix affembla a Touloufe prefque les trois états du pays, gens d'églife, nobles & marchands , pour fcavoir qu'il étoit a faire. (1381.1^.) Le roi Charles V mort, il y eut quelque différend entre les trois freres, qui étoient oncles du jeune roi Charles VI, pour raifon de la régence & gouvernement du royaume, a la fin il fut arrêté par les états, que Thilippe , duc de Bourgogne, &£ le duc de Bourbon, qui étoit auffi fon oncle, du cöté de la mere, en auroit la tutele, &c. ( 13 80. Du Tillet ). Le mercredi en fuivant, 14e jour du mois de novembre, les gens d'églife , nobles & les bourgeois des bonnes villes, avoient été mandés a Paris pardevers le roi, fi furent affemblés au palais en la chambre de parlement, en la préfence du roi, de fes quatreoncles duc d'Anjou, de Berri,de Bourgogne de Bourbon, & de plufieurs autres C %  3<5 Chronologie nobles de fon fang , fut propofé par 1'évêque de Beauvais , lors chancelier de France, comment le roi avoit néceffité & metier d'aide de fon peuple , tant pour fa guerre, comme pour Ion état maintenir. ( Grande chronique. 1380). Nulli dubium eft, omne regnum, omnemque politiam reöè inftitutam , ex tribus hominum conftare generibus, quos ufitatiori appellatione, tres ordines, vel flatus folemus dlcere, ex J'acerdotali Jcilicet ordine, militari & plebeio. (N, de Clemen. de lap/u 6* répara. Inf}. cap. 16 ). Tune autem unaquaeque po'itia juftè, ac lau™ dabiliter regitur, quando quilibe't illorum ordirmm duobus aliis ad utilitarem miniftrat. Debet facerdotalis ordo in his quaa Dei & fidei funt, & quae ad cultum religionis , atque ad fahitem animae fpeöant, reliquos duos inftruere, & illi debent eidem inhis obedire. Militaris autem ordinis ejl, provinciam ipiam, &c duos alios ordines, clerum fcilicet, ac populum in perfonis, ac bonis fuis ab hoftium incurfione defendere, vicemque canum obtinere, qui oves a luporum tuentur infidiis. Ad plebeium verb pertinet ordinem, fuum negotium in quiete agere , agrorum laboribus, caeterifque artificiis in republica neceflariis , diligenter, atque fideliter infifiere, unde & caereri ftatus, & tota ingenere politia fuftentari valcant. Iftinamque velutoves  DES ÉTATS GÉNÉRAUX. 37 funt, juxta verba Domini apud Ezechielem : vos autem greges mei, & oves pafcuce metz omnes efiis. Et in pfalmo: nos autem populus ejus, & oves pafcuce ejus. « Simt etiam veluti pedes & bafes y> patriam ipfam fuftinentes . quibus proflratis , » aut tuentibus ipfam neceffe eft patriam con>r cidere ». Et ut in fumma concludam : perutile, \\r.b ne ceflarium mihi videtur ad univerfalem regni hujus, in curöis fuis membris, &abufibus reformationem , concilium tmiverfak trium ftatuum convocari, illicque vitia , & dilefta ordinum fingulorum , cfficiorun-.que , & miniftrorum , per fapientes aliquos, ad hoe ex ordinibus ipfis inftituendos, proponi , atque explkari r per confiliique definitionem , fingulis quibufque erroribus , exceffibus , ac lsefionibus congrua adhiberi remedia, legefque & provifiones, ac ftatuta opportuna fuper futuro regimine cenftitui, cum pcenarum graviffimarum adjeöione , in illos, qui de fingulis ordinibus , leges illas tranfgrediendo violaverint. Congruum nempe efle videtur, ut in ruina, vel periculo univerfali, univerfale etiam quorratur auxilium ; &C quod omnes tangit, ab omnibus probetur. Quis enim ufque adeö defipit, ut unius , aut paucoiv.m capitum (minus etiam fortaffis ad communern uülitatem affeflorurn ) judicio , rempubli- C 5  38 Chronologie cam tam Istaliter afïliclam ita congruè reformari pofTe exiftimet , ficut per generalem congregationem totius politise in unum collegae, ubi privatis repudiatis afTectibus major pars, ut verifimile eft, Spiritu-5anc~rö praeventa & directa, ad publicam patriae falutem sfpirabit. De ipfo namque Spiritu-Sanéto, qui fanftis fidelium congregaticnibus piè pulfatus adcffe confuevit, per apofiolum fcriptum eft: umcuique datur manifcfiatio fpiritus ad utilitatem. Et rürfus in evangelio : Spiritus - Sanclus quem mittet pater in nomine meo , ille vos docebit omnia , & fuggeret vobis omnia. Et ifïa mihi videtur via magis efficax, 5c falutaris , magis facilis , Sc opportuna ad frucluofam regni ipfius , lapfu horrendo deformati, reformationem. ( N. de CLmzngis de lapfu, & reparat. inft. in fine). Quid aut fi terrarium liliorum in fuo fcutó regio & divino rex nofter ad mores retorquere confiderandovolebat? Videbat enim qualiter liliorum fulgurat color oreus in campo azuro, velut in aethere puriflimo Sc ferenifiimo. Et nonne poterat per ternarium hoe liliorum conüderare vel tres virtutes prseriominatas, fi.iem ,fpem , charitatem, in anima jufti ccelica aureo fulgore micantes : vel ipfam attendebat k qua originantsr beatifnmam Trinitatem, in quo velut' intellc&uali fcuto triangulari per cir=-  DES ÊTATS GÉNÉRAUX. J$ cuminceffionem comprehendenter pofitam , vel tres animae vires fpeeulabatur, concupifcibilem , irafcibilem , rationalem. Aut fi juftius eft accipere tres partes imaginis, memoriam,intelligentiam & voluntatem. Aut denique appropriatius regie majeftati, tria lilia in fcuto , tresflatus infua regno confiderare fas habuit idem rex noller, ftatum dico militantium, ftatum confulentium, ftatum laborantium. Bi fiquidetn flatus , etfr in omnipolitia reperiri habeant, vel mediocriter inftituta, ufurpat tarnen fibiregnurm Francise. colorem aethereum ob fingularem religionis cultum; colorem verö aureum triplici ilh ffatui contulitexcellentiameritorum inutroque« Nam ubiquaefo viguit ufquam terrarum vel » in militibus ftrenuitas potentior, vel in con» fulibus & clericis fapientia divinior, vel irt » laborantibus & fubditis obedientia propen» fior, &c »? (Gerfo fernw. de S, Ludovico 9 part, 2,p. yS8 ). Vides ad■poftremum, öanima,regnum quartum fub te , regnum fcilicet praeclariffimumtFrancorum, cnm fuis appeditiis, ciijus ad te regimen hereditaria fucceffione devoluitur». Conftituitur autem fub ,te regnum illud in fubjeftione debita tripücis flatus principaiis. Statusunus eft militantium:, alius clericorum, tertius Bupgenfium ;, & hcec triplicitas nonne congrua fignaw C 4  '40 Chronologie tione figuratur in tripiici liliorum flore aureo , Écütum turn, quod coelico nitore fulget, ornantuin»? « Habes illos de primo ftatutanquam bra» chia fortiffima ad corpus tuum myfticum , » quod eft regalis politia , deffendendum, » Habes alios tanquam oculos perfpicaces ad » omnia difcernendum. Habes reliquos velut » pedes fixoshumi ad fuftentandum.Ubi placet » attendere, quia nihil horum membrorum « dicere poteft ad alterum , opera tua non » egeo. Errabunt itaque manus &c pedes, fefe» que confundent fi defint oculi : manibus » verö debilitatis, vel refcifis, quis vel pedes, » vel oculos tuebitur ? Collabentibus autem » pedibus, ut reliquum omne corpus reïpu» blicae decidat, neceffe eft ». ( Gerfo de com fiderat. quas debet habere princeps, part. 2, pag. CHARLES V. • L'an mil trois cent foixante-neuf, le fép. tieme jour de décembre, le roi Charles Vs fit convocation des gens d'églife , les nobles, des bonnes villes de fon royaume, pour être k Paris le feptieme jour de décembre l'an foixanteneuf, &c. ( 1369. Grande chronique). Le mardi vingt-unieme jour dudit mois de mai, veille del'Afcenfion, l'an defufdit, le roi  DES ÉTATS GÉNÉRAUX. 41 de France Charles fut en la chambre de parlement , en la maniere que le roi de France a accoutumé a être, Sc la reine Jeanne affife de cöté le roi Sc le cardinal de Bcauvais, chancelier de France, au-defïus, au lieu auquel fied le premier préfident, & a ce rang feoient les archevêques de Reims, de Tours , & plufieurs évêques au nombre de quarante, Sc plufieurs abbés envoyés a celle convention, foientefdits bancs, & par terre. Ei au rang oii feoient les laks de parlement, feoient les ducs d'Orléans , de Bourgogne, le comte d'Atencon, le comte d'Eu,le comte d'Etampes, tous des fleurs-delys, & plufieurs autres nobles du pays. Et auffi avoit a ladite affemblée , gens des bonnes villes eivoyés d ladite ajfemblée, ft grand nombre, qui toute ladite chambreen étoitpleine. (1359. Grande chronique ). Item, le vendredi matin enfuivant, onïieme jour du mois de mai, le roi, ladite reine, les prélats, les nobles 6c les bonnes villes furent raffemblés en ladite chambre de parlement, & furent tous d'un accord par la maniere qu'ils avoient été le jour précédent & la relevée. Ainfi fit le roi Charles - Quint a la reine Jeanne de Bourbon fa femme, en l'affemblée defdits trois états, qu'il tint en la chambre de fondit parlement a Paris, les neuvième Sc on-  4£ Chronologie zième mai 1369. En laquelle affemblée fut la guerre délibérée contre les Anglois. (1369. Du Tilkt au recueil des rois de France , & de leurs couronnes). JEAN; Item le dimanche dix-neuvieme jour du mois de mai enfuivant , fut faite une convocation a Paris des gens d'églife, des nobles & des bonnes villes par lettres de monfeigneur le régent, pour ouir un certain traité de paix,, lequel traité avoit été pourparlé en Angleterre. ('359). L'an de grace 13^8 , le jeudi après Quafiinodo , neuvieme jour du mois d'avril deffus dit, le régent qui avoit mandé par fes lettres les gens d'églife, les nobles & les bonnes villes de Champagne , pour être a Provins, & jacoit que le roi de Navarre eut écrit par fes lettres clofes aux deffusdits de Champagne qu'il feroit a ladite journée. Mais maitre Pierre de Corbe &c jneffire Robert de Roufh, archidiacre de Brie en Péglife de Paris , furent h iadite journée , & le mardi enfuivant, dixieme jour dudit mois, avant diner , paria ledit régent en fa perfonne , aux deffusdits de Champagne, & leur dit que le royaume de France étoit en trés-grand péril, & avoit bien a faire, fi comme ils fcavoient.,  DES ÉTATS GÉNÉRAUX. 43 & requis qu'ils y vouluffent mettre tout le bon remede qu'ils pourroient. (1358. Grande chro~ nlque~). Item, le mardi après ladite fête de Touffaints; s'affemblerent a Paris aucuns gens d'églife , nobles & autres envoyês des bonnes villes , es noms qu'autrefois étoient venus aux affemblées & s'affemblèrent aux Cordeliers par plufieurs journées, & firent tant que le parlement qui avoit été ordonné a être le lendemain de la faint Martin, & avoit été mandé par les bailliages , fut continué , quant aux plaidoiries , jufqu'au fecond jour de janvier, « oC » depuis fut continué par leurs ordonnances juf» qu'au lendemain de la Chandeleur ». (1357. Grande chronique ). Environ la Magdelaine en enfuivant , les ordonnés par les trois états , tant du grandconfeil des généraux fur le fait du fubfide, comme les réformateurs commencerent a décliner, & leur puiflance a appétiffer ; car la finance qu'ils avoient promife ne fut pas fi grande de plus de dix parts, & les laifferent les nobles, & ne voulurent pas payer, ni les gens d'églife auffi, & auffi les gens des bonnes villes, qui connurent Sc appercurent 1'iniquité defdirs gouverneurs principaux, (1357. Grande chronique ).  44 Chronologie Le dimanche devant Carême - prenant 5 nxieme jour de février, s'affernblèrent a Paris plujieurs des bonnes villes & du clergé; mais il Ji'y vint nul noble, & par plufieurs jours s'affemblerer.t a Paris plufieurs des bonnes villes & du clergé, corrime dit tft. Et finalement ordon» nerent que les gens d'églife payeroient demidixieme pour le tems a venir pour un an. Ceux qui n'avoient aucune chofe payé pour l'an paffe , payeroient auffi demi-dixieme, & les villes fermées feroient de foixante-cinq feux un homme armé, ou dix fols parifis pour le jour, & le plat-pays feroit de cent feux un homme d'armes. ( 1357. Grande chronique). Item, environ lafaint Remy enfuivant fe reconcilierent ceux de Paris envers monfeigneur le duc de Normandie, & firent tant qu'il retourna en ladite ville, & lui dirent qu'ils lui feroient très-grande chevance , & ne lui requirent rien contre aucuns des officiers, ni auffi de la déiivrance du roi de Navarre , laquelle ils lui avoient requife par plufieurs fois, & lui fupplierent qu'il voulüt que vingt ou trente villes s'affemblaffent a Paris : laquelle chofe il leur o£troya, & furent mandés par lui plujieurs villes, jufqu'au nombre de vingt, jacoit ce qu'ils n'en euffent requis que vingt ou trente, & quand ils furent aflemblés a Paris,  des États Généraux.' 45 ils ne firent aucune chofe, mais allerent devers monfeigneur le duc , & lui dirent qu'ils ne pourroient befogner, fi tous les trois états n'étoient raffembiés, & lui requirent les deffusdits qu'il les voulut mander, laquelle chofe il leur oclroya, & envoya lettres aux gens d'églife ., aux nobles & aux bonnes villes, & des manda. ( 1356. Grande chronique). Et entra ledit duc de Normandie le jeudi a Paris le vingt-neuvieme jour de feptembre , & fit une convocation de tous les trois états du royaume ; c'eft a fcavoir des gens d'églife , des nobles & des bonnes villes , pour être a Paris le quinzieme jour du mois d'ocfobre enfuivant. Item, le dimanche deffusdit cinquieme jour dudit mois de février, s'affemblerent a Paris plufieurs évêques & autres gens d'églife , nobles & plufieurs gens des bonnes villes du royaume de France, & par plufieurs journées furent affemblés en ladite ville, én 1'hötel des Cordeliers. & la firent plufieurs ordonnances. (1356). En celui mois d'octobre, les trois états en Languedoc s'affemblerent en la ville de Touloufe par 1'autorité du comte d'Armignac , lieutenant du roi au pays , pour traiter enfemble, pour faire aide convenable pour la délivrange du roi, (ijjó.Froifihrd.Nangy).  46 Chronologie Le mercredi enfuivant, qui fut le lendemain de la Touffaints , ledit monfeigneur le duc niancia au Louvre plufieurs du confeil du roi & du fien, 8c aucuns de ceux des trois états , dont deflus eft faite mention. (1356. Grande chronique ). Le vingt- cinquieme jour du mois d'oótobre, qui fut le famedi , vinrent a Paris plufieurs gens d'églife, nobles & gens des bonnes villes de Languedoc. ( 1 350. Grande chronique'). Et pour ce , le lendemain defdits trois états , qui étoient encore a Paris, ledit monfeigneur le duc étant a Montleheri, la ou il al!a celui jour au matin, s'afïemblerent en chapitre defdits freres Mineurs. (1356. Grande chronique). Le quinzieme jour du mois d'oftobre, qui fut le tamedi , vinrent a Paris plufieurs gens d'églife, nobles & gens des bonnes villes de Languedoc , 8c le lundi enfuivant furent affemblés en la chambre de parlement par le commandement de monfeigneur le duc de Normandie , qui la étoit pféfent , en la préfence duquel Pierre de la Forefi, archevêque de Rouen, & chancelier de France , expofa en la préfence defdits trois états, dont deffus eft faite mention , la prife du roi, 8c comment il s'étoit vaillamment combattu. (1356. Grande chronique). Lefquels des trois états , c'eft a favoir les gens;  DES ÉTATS GÉNÉRAUX. 47 'etèglife, répondirent par la bouche de monfeigneur Jean de Craon, archevêque de Reims. Les nobles , par la bouche de monfeigneur Philippes , duc d'Orléans, ck.frere gtrmain du roi: & les gens des bonnes villes , par la bouche d'Etienne Marcel, bourgeois de Paris , & lors prévöt des marchands , qu'ils vouloient faire tout ce qu'ils pourroient aux fins deflusdrtes. (1356. Grande chronique ). Le vendredi troifieme jour du mois de mars enfuivant, furent affemblés au palais royal en la chambre du parlement, & en la préfence de monfeigneur le duc de Normandie, du comte d'Anjou ck du comte de Poitiers, fes freres , & de plufieurs autres gens nobles , gens d'églife & gens des bonnes villes, jufqu'a tel nombrë que toute ladite chambre de parlement étoit pleine, ck précha maitre Robert le Coq, évêque de Laon, ck dit que le roi ck le royaume de France avoient été au tems paffé mal gouvernés, dont moult de mefchies étoient venus tant audit royaume, comme aux habitans dudit lieu, tant en mutation de monnoies , comme par prifes , & auffi par mal adminifirer, ck gouverner les deniers que le roi avoit eu du peuple, « dont » grandes fommes avoient été données par pluv> fieurs fois a plufieurs perfonnes , qui mal » 1'avoient deflervi ». Et toutes ces chofes  4^ Chronologie avoient été faites , fi comme difoit ledit évêque, par le confeil des deffus nommés, chancelier & autres , qui avoient gouverné le roi & le royaume au tems pafle. Et dit lors encore ledit évêque, que le peuple ne pouvoit plus fouffrir ces chofes, & pour ce avoient délibéré enlémble ; que les deffus nommés officiers &C autres qui nommerent lors , tant que fur le tout furent vingt-deux, dont les noms s'enfuivent: maitre Pierre de la Foreft, lors Cardinal & chancelier de France ; meflire Simon de Bufly ; maitre Jean Chamelart ; maitre Pierre d*Orgemont, préfident en parlement; monfeigneur Nicolas Braque ; Jean Poillevilain , maitre de la chambre des comptes, &c fouverain maitre des monnoies ; Enguerrant ,du Petit Celier ; Bernard de Fremant, tréforier de France ; Jean Chauveau ; Jacques 1'Empereur, tréforier des guerres ; maitre Etienne de Paris; ïhaïtre Pierre de la Charité , & maitre Ancel Choquard, maitre des requêtes de 1'hötel du roi ; monfeigneur Robert de Lorris, .chambellan du roi; monfeigneur Jean Turpin, de la chambre des requêtes; maitre Robert de Preaux, notaire du roi; maitre Regnauld d'Acy, avocat du roi en parlement; Jean d'Auxerre; Jean de Bechaiguë; le Borgne de Beaufe, préfident en la chambre des enquêtes; Geoffroy le  Ö È S Ê T A T S GÉNÉRAUX. ^ej le Mafurier, échanfon, feroient privés de tous offices royaux perpétuellement , ck aucuns ïiiaitres des requêtes de 1'hötel du roi, 6k aucuns autres officiers dudit monfeigneur le duc,iï comme deffus eft dit. (1356. Grande chronique'). Car il fut ordonné que nul tréforier ou officier du roi n'auroit la charge, direction 6k ma* niement de ces deniers t mais que les trois états commettroient certains perfonnages , bons, honnêtes ck folvables , pour en être les ordinateurs felon les inftruöions qui leur en feroient prefcrites, ck qu'outre ces commiffaires généraux ils en éliroient encore en chaque province neuf particuliers , trois de chaque ordre , defquels les trois du clergé jugeroient les eccléfiaftiques , les trois nobles ceux qui feroient de leurs qualités , ék les trois roturiers gens de condition roturiere, appelles toutefois chacun en leur endroit leurs autres compagnons au jugement des procés. Et au cas que 1'on appellat d'eux, on auroit recours aux députés généraux, qui en jugeroient en dernier reffort. Le roi jura de ne faire employer a autre ufage fes deniers , que pour le fait de Ia guerre ; comme auffi ces députés généraux jurerént fur les faints évangiles qu'ils ne les convertiroient ailleurs, nonobftant quelques mandemens qu'ils en euffent du roi. Et s'il advenoit que fous Tomé FI. I>.  Chronologie ömbre, de quelques impétrations les officiers dü roi les vóufuffent contraindre d'intervertir en au r s ufages ces deniers, permis aux députés généraux de s'y oppofer par voie de fait, voire d'implorer tout confort & aide des bonnes villes circonvoifines a eet effet. Et au furplus , ne pourroient rien ces députés & fuperintendans généraux des trois éiats, au fait de leur charge & adminiftration , s'ils n'étoient tous daccord enfemble. Ce néanmoins en cas de difcord , la cour de parlement les pourroit accorder. (1355. Commijjion & recherches de M. Pafquier, l. 2 , ch. 144). Lefquels répondirént, c'eft a favoir le clergé par la bouche de monfeigneur Jean de Craon , lors archevêque de Reims ; les nobles par la bouche du duc dAtkenes , & les bonnes villes par la bouche de Etienne Martel, lors prévól des marchands a Paris, qu'ils étoient tous appareillés de vivre & mourir avec le roi, & de mettre corps , & avoir en fon fervice, & de parler enfemble. ( 1355. Grande chronique). En celui an mêtne, a la fête faint Andry, affemblès d Paris par le mandement du roi les prélats, les chapitres, les barons de France, & leur fit le roi expojer fetat des guerres le mercredi après la fête faint Andry en la chambre de parlement par maitre Pierre Je la Forejï, lors archeyêque de Rouen & chancelier de France f & leur  bes États Généraux. 5 f tequu ledit chancelier pour le roi, qu'ils euffent aduis enfemble, quelle aide ils pourroient faire pour le roi. ( 1355. Grande chronique). Le roi de Navarre fit tant envers le roi l qu'il s'accorda de ne prendre point le dernier jour de novembre , 1'impöt qu'il demandoit aux trois états, finalement toutefois il fut ocCroyéauroi. (1355. Chronique. Du Tillet). PHILIPPE DE VALOIS. Environ ce tems en enfuivant le privilege de Loys Hutin, roi de France & de Navarre , fut conclu par les gens des états de France , prélént ledit roi Philippe de Falois, qui s'y accorda qu<& Ion ne pourroit'impofer ne lever taille en France fur le peuple , fi urgente néceffitê ou évidente utilitê ne le requéroit, & de l'oclroi des gens des états. (1338. Nicole Gilles. 1339. Rofier de France ). A. D. 1329. D. Philippus, Dei gratia Francorum rex chriflianiffimus , films quondam, claree memoriae D. Caroli comitis Valefii, mandavit pradatos & barones regr.i Franciae ad diem oaavdrum fefti beati Andreae proximö fubfequentis Parifius convenire per litteras fuas infra aram inclufas; quarum quidem litterarum , praslatis videlicet diredfarum, tenor fequitur, Scefttalis. Philippus, &c, D %  5i Chronologie Cüm igitur ad noftram ductum fuerit notitiam , quod vos , gentefqne, Sc officiales veftri afferitis per ballivos, Sz officiarios noftros, Sc per barones antlquos regni noftri Francise, vohis , ac fubditis veftris, dictique ballivi , Sc officiales noftri, & baronts prsdi&i aflérunt etiam per vos Sc officiales veftros, ac per curiarum veftrarum fatellites, Sc curfores, nobis &ipfis, noftrifqiie , Sc eorum fubditis, quamplura fuiffe retroaöis temporibus illata , Ö£ in praefenti adhuc inferri hinc indé gravamina, ,&c. Paulö poft. Nos autem praedi&is ballivis Sc officialibus noftris, atque baronibus damus per alias noftras litteras in mandatis, ut diÖa die Parifuis fimiliter interfint perfonaliter, &c. ( 1319. Bertrandi ca.rdina.lis adverf. Pctr. de Cugneriis ). Rex Philippus per communem triutn jlaluum confenfum aliquas inftituit ordinationes, quas bonum effet fervare, Sc fortaffis femel in pleno confilio legere, ad minus darent cogitationem & demonftrarent clarè , qualem in pompam unufquifque flatus regni efict lapfus, Sc decidiffet in omnibus rebus; interea notetur etiam tempus preteritum, quando Sc qualiter in camera compoti computabantur duodecim denarii, aut duodecim folidi pro reparatione tujiicarum regis, au Domini Delpbini. Et- fine  óes États Généraux.' '53' prolixo proceffu reducatur in memoriam tempus regis Joannis, quem multi videre potuerunt. Qnia ut relatione percepi, talis eft modo miles aut fimplex comes, qui majorem habet pompam in aureis & argenteis vafis, in tapetis, ia velis extenfis, in vinis, in cibis, in apparatu,' quam nominatas ille rex haberet. Quale ergo eft miraculum, fi regnum fit egenum , & il populus has pompas ferre non pofiit. ( 'JijQ. Froiffard, Nangis, & Gerfo, adregem Carolum Vƒ, ferm. fub nomine univerfitatis. ) Philippe de Valois appellé a la couronne par la lol du royaume, pour être fils de Charles, comte de Valois, s'aidoit de la loi Salique, par ce moyen avec le confentement de tous les états fut couronné roi. ( 1^18. Vu Tillet en fa chron. & Vigner ex V. Chron. ) Finaiement parties ouies, fut par lefdits états prononcé arrêt felon 1'aduis de tous les princes, prélats, nobles, gens de bonnes villes, juf iciers & notables, prins & accordés par les contendants, par lequel fut audit Philippe de Valois adjugé le royaume de France, & fut déclaré leur vrai roi & fouverain feigneur, privativement contre tous autres, & enjoint a tous de le reconnoitre tel, & de lui obéir r & alors fut oint a Reims, par Guillaume, archevêque dudit lieu, le jour de la Trinité, en prélenee D 3  '54 Chronologie dudit Edouard qui ne Fempêcha pas. Cela 'fitten l'an 13 zj. ( / J27. Papou l. 4, titre 1 , art. u 132-7. Froiffard & Nangius. ) PHILIPPE LE LONG. Après Ie trépas d'icelui Jean , les princes , feigneurs, barons, & prélits du royaume, & les habitans de Paris & de l'Univerfité, firent couronner roi ledit Philippe-le-Long , paravant comte de Poitiers : car il y avoit Ie duc de Bourgogne , ck aucuns autres qui vouloient foutenir que Jeanne fille dudit Loys Hutin ck de Marguerite fa première femme, niece dudit duc de Bourgogne, devoit venir au royaume. Mais envaio y travaillerent: ( car il ne fe peut, . ne doit faire par la loi de France) ck fut ladite Jeanne déboutée, & fut ledit couronnement approuvé en une afTernblée faite a Paris, en £a préfence d'un cardinal pour cette caufe en^oyé par le pape, ck firent tous les barons du royaume hommage audit nouveau roi Philippele-Long. ( 1316. N. Gilles, & Vignier. Guil. Brolius in Stilo Curia;, c. i6~, § 29.) En eet an, environ la chandeleur, furent affemblés en la préfence Deiblay, jadis chevalier du roi de France , qui nouvellement avoit été fait cardinal 3 pluf.eurs barons> nobles  DES ÉTATS GÉNÉRAUX. <$f prélats, & bourgeois, en la cité de Paris , lefquels tous enfemble approuverent le couronnement de Philippe-Le-Long, ckluipromiruitobédience comme a leur feigneur, ck a Louis fon fils après lui, tant comme vrai hoir..(_i jiö*. Grande chronique.') LOUIS H U T I N. Le roi Louis Hu tin co nel ut que 1'on ne léveroit tailles fans urgente héceffife., & far.s le eonfentement des trois états. ( 1314. N. GillesRefter de France. 13 3 c).. Nic. Gilles.) P H I L I P P E-LE-B E L Pour laquelle chofe icelui Enguerrant requis pour le roi aux bourgeois des ceuvres, qui illec étoient affemblés, qu'il vouloit fcavoir lefquelslui feroient aide ou non a aller contre les Flamans k oft en Flandres, ck lors fe dient, icelui Enguerrant fit lever fon feigneur le roi de France de-la oii il étoit affis , pour vpir ceux qui lui vouloient faire aide. Adont Etieane Barbet fs leva, & paria pour ladite. ville de Paris , & fe. préfenta pour eux, ck dit qu'ils étoient tous prêts. de lui faire aide chacun k fon pouvoir, & leien, ce qu'il feroit advenant, ck expediënt a aller & leurs propres couts 6k dépens, la oii il les vau.- D 4,  5Ö Chronologie droit mener contre les Flamands. Et après ce ledit Etienne les en remercia, & auffi après tous les bourgeois , qui illec étoient venus pour les communes , répondirent en autelle maniere , qus volontiers lui feroient aide; & le roi les en remercia. ( i j 14. AT. Gillj.s.) En eet an, le jour de la fête Saint-Pierre, le i*r. jour d'aoüt, Philippe - le - Bel, roi de France, affembla k Paris plufieurs barons, & (tvec ce, il fit venir plujieurs bourgeois de chacune cué du royaume > qui femons étoit a y venir, 3 donc iceux au palais a Paris, venus & affemblés le jour deffufdit, Enguerrant de Marigny, chevalier, coadjuteur de tout le royaume de France, du commandement du roi, monta fur un échafaud avec le roi, auquel les prélats & les harons étoient, & montra & manifefta auffi comme en préchant au peuple, qui illec étoit devant ledit échafaud, oyans tous les prélats, la complainte du roi, & pour ce, il les avoit illec faicl venir & aflembler. (1314. Grande chr.) Environ la fête S. Jean Baptifte, quelques, chevaliers, en la préfence du clergé & du peuple affemblês d Paris, mirent fus au pape Boniface plufieurs cas énormes, l'an 1303. ( 1303. Thomas Wal Jingan. in Ypodigmate Neufi.) Circa fefta Saticli Joannis Baptiftse, milites quidam in prefentia Cleri & populi, Parifius can-.  DES ÊT ATS GÉNÉRAUX. 57 gregati, papae Bonifacio itnpofuerunt plura enormia, &c. (1303. Thomas Vualfingan in Ypodig. Neuftrice.) Demum tarnen in publico parlamento Parifms prcelatis, baronibus, capitülis, conventïbus, collegiis, communitatibus & Univtrfuatibus villarum regni fui, &c. ( 1303. Ex continuatore Vuil de Nangiaco.) Multa tarnen matur'tate pr&habita, prcelatis, baronibus , & aliis fupradiiïis ( Abbate Cifiercii excepto)fibi adhcerentibus appellavit: appellationefque iuas die nativitatis beati Joannis Baptiftas in horto regaiis palatii, Parifius coratn cmni clero & pepulo palam & pubÜce l.egi fecit, &c. (Ibid.) Quod fereniffimus princeps Dominus nofter chriftianiffimus Philippus, dei gracia Francorum rex illuftris : Auditis quae per venerabilem virum archidiaconum Narbonenlem notarium, Sc nuncium veftrum , nuper fibi ex- partè veftra relata fuerunt, ac infpeais apuftolicis litteris claufis ei per eumdem archidiaconum prsfentatis , & quibufdam licet paucis , baronibus fuis tune fibi affiftentibus earum communicato tenore, ex hts tam Dominus rex, quam barones ipfi, ingenti admiratione & vehementi turbatione commoti, ftatim idem Dominus rex 4e baronum ipforum confilio , barones, cceteros^  5^ Chronologie tune aifinM al nQs v.ddka architpif:opos p 'Pijcopos, abbates priores conventuaks , decahos Prxpofitos, capüula. convers , atque colkZ ecclefiarum , tam cathedralium, qudm collegia regulanum , acfeculanum , necnon umverfiidies. & communistes villarum regni ad f am mandavit prcefenaam evotdti; ut prcelati, barones, decani , prcepofm, & duo de peritioribus uniufcujufjue cathedralis, velcolkgiatce ecclef.eepcrfonaliter'; cceteri verd per tzconomos, fyndicos , & procurators idoneos, cumplenis, & füfficïmüluS mandatis comparere (latuw loco & termino curaremus. P0rrï> nobis , azterifqueperfonis eccufiafticis fupradiüs, necnon baro:ibus, ceconomis, fyndicis, & procuratoribus communitatum , & villarum, & aliis fic yocatisyuxtaprcemifie vocationis formam, ad mandatum rtgïum : hac dié Martis decima prcefentis menfis aprilis , Jn ecclefia Beatae Mariae Panfïus, in pnEfati regis pra2fentia conffituds idem Dominus rex proponi fecit cunftis audientibu, palam, & publicè fïbi ex parte veftra fuiffe inter alia per preedia»m archidiaconum,, & litteras intimarum , « quöd de regno fuo , » qued a deo folo ipfe & prsdeceffores fdl » tenere haaenus recogniti font, temporaliter » vobisi"ubeffe,illudqueavobistenere'deberer, » neccontenti verbis hujufmodi fic mirabihbus* » ficque novis 6c inauditis a fseculo apud inco*  DES ÉTATS 'GÉNÉRAUX. ^ » las diöi regni, fed ea perciucere fatsgentes » executionis in «ctum. » {Littera Miffa P P. Bonif. ab ecchfidft. Fran.) Prelatos diai regni, ac magiffros in theologia & profeffores utriufque juris oriundos de regno prasdifto pro corrigendis excefïibus, necnon &C pro culpis, infoléntiis, & injuriis, atque damnis , qus pmlatis , &C ecclejïis , perfonis ecclefiafticis & fecularibus in regno conftitulis eódem &■ alibi, per ipjum 'Dominum rege/n & offiaanos, feu Baillivos fuos, ac cozteris patribus , comitibus, baronibus, aliifque nobilibus univerfitatibus , & populo regni inferri praeienditis emendandum , ad veftram praïfentiam evocaftis , &c. (Litera ead.) Ac favere in praefenti negocio ficut diéto- rum in theologia Sc magiftró'rum in utroq •, j'ufé de re» Et poft media fubfequenti quadragefima, congrega vit Parifius omnes barones, ac milites, atque totius regni Francix rnagijlratus, cum majoribus pmlatis & minoribus univerjis. ( 1310. Ex Continua. tore Vuil. De Nangiaco. ) Philippe par Ia grace de Dieu, roi de France, & a tout le royaume : lefquelles notre fire le roi fit expofer entendiblement,^r^v^r«o«j, & a tpus les prélats, les abbés, lesprieurs, doyens, prevóts , procureurs des chapitres & des couvens , des colléges , des univerfitès , & des communautés des villes de fon royaume, préfents par devant lui, pour lefquels fe ils par fa défordonnée volonté, étoient pourfuivies, Punités & 1'amitiés devant dites, fe déferoient & desjoindroient entre ladite cglife, & le roi Sc le royaume, & nous : car nous ne les pourrions , « ne vourions fourfrir » en nulle maniere, pour peine, perte, ne mef-  DES ÊTATS GÉNÉRAUX. 6i » chief que foufFrir en duffiés en perfonnes, en » enfans, en héritages, ne en autres biens : » Premierement entre les autres chofes qu'audit roi notre fire furent envoyées par meffaiges &C par lettres, il eft contenu , que du royaume de France, que notre fire li roi, & les habitans du royaume ont toujours êtè dit fon oh jet en temporalité, de Dieu tant feulement ,fi comme c'efi chofe notoire d tout le monde, Hen devoit être fubjet a lui temporellement, & de lui le devoit, & doit tenir, &c. (Lettre des barons de France, au collége des cardinaux.) A vous trés - noble prince notre fire , par la grace de Dieu, roi de France : Supplie, 5c requiert le peuple de votre royaume, pour ce qu'il lui appartient que ce foit fait, que vous gardiez la fouveraine franchile de votre royaume,« qui » eft telle , que vous ne reconnoiffiez de votre » temporel fouverain en terre, fors que Dieu, » & que vous faffiez déclarer fi que tout le monde le fcache, que le pape Boniface erra manifeftement, & fit pêché mortel notoirement, en vous mandant par lettres bullées qu'il étoit votre fouverain de votre temporel, & que vous ne pouvez prévendes donner, ne les fruits des églifes cathédrales vacans retenir, & que tous ceux qui croyent le contraire, il tenoit pour fjereges, {SuppUfih du peuple de Franee,}  5» Chronologie Le roi Phijippe-le-Bel ayant lu les lettres du pape Boniface V111, en voyées par 1'archidiaere de Narbonne; de 1'avis de fes barons, convoqua & affembla au mardi, dixieme jour du mois d'avril, en 1'églïfe Notre-Dame de cette ville de Paris, ks archevéques , évêques , abbès ,prieurs convemuds,doycns,p,évóts, chapitres , convens , colléges des églifes, tant cathèdraks que rêgulieres &Jéculieres, barons & nobles enfembks, les univerfités & communautés des villes de fon roy aume. (1301. Lettre des barons, au collége des cardinaux.) ( 1301. Platin. Naucler. Jean k Maire.) Audit jour, fa majefté en ladite églife de NotreDame, fitpropoferlateneur deslettres duPP.Boniface, que le temporel du royaume lui étoit fu]et, clergé, nobkffe, fyndics & procureurs des communautés & des villes. Et après ce, a la mi-carême fuivante, icelui rot afmbla d Paris tous ks barons , chevaliers t & maures du royaume, & tous ksprélats, & ks meneurs, &c, ( 13 o 1. Grande Chr.) Après lequel parlement, affembla le roi k Paris tous lesprélus, barons, docleurs & umverfuès de fon royaume, pour pourvoir k ce qu'aucune ir,terdia:.;-.i ne peut mettre au royaume ledit Boniface, de France, M. S.) Ce que pour ;uire arrêier aux états, enfemble les abfeudre du ferment de ridéiué qu'ds avoient  des États Généraux. 6% si lenr prince, il envoya un archidiacre de Narbonne, Legat en France, Sec. (1300. Chr. du Tilkt.') LOUIS IX. Convocato enirn ex toto regno concilio , pojlquam legatus rei chrijlianee in Syria Jlatim longa ora-r tione patefecit, omnes pari voto fidei caufam amplecïentes una cum rege crucefe infigniunt. ( 1269. Guaguinus. de S. Lu do.) Cum Parifium venijfet Ludovicus conventugenerali habito , rempublicam reformavit, flatutis optimis kg'ibus de jure a judicibus dicendo , & de ojficiis non emendis, &c. ( 1255. Id. Guaguin ) Quand il fut venu , le roi le recut moult honorablement, & affembla tantöt grand parlement de barons , d'archevéques, d'évêques, d'abhés , le légat admonefta en fa prédication les barons & le peuple , de fecourre la terre Soutre mer, tarchevêque de Bourges fe croifa & celui de Reims, 1'évêque de Beauvais , 1'évêque de Laon, 1'évêque cTOrl'uns, Robert, comte cl'Artois, Hul de Cafillon, le comte de Saint Paul, le comte de Blois, Jean des Barres, le comte de la ■Marche, le comte de Montfort, Raoul, k feigneur de Coucy, & moult d''autres princes nobles, & du peuple grande abondance. ( 1246. Grande chronique ).  64 Cmronologiè Semblablement le roi faint Louis affembla zm parlement a Paris, ou furent les pairs de France , barons, prélats & gens des bonnes villes, auxquels il remontra comment le comte de la Marche vouloit tenir terrè fans feigneur, &que ladite comté de la Marche étoit du fief de France , tenue de la comié de Poitou, & dès le tems du feu toi Louis, qui conquit toute Aquitaine jufqu'aux monts Pyrenees,& que ce néanmoins ledit comte de la Marche étoit refufant de faire rhommage audit Alphonfe fon frere , auquel Ü avoit baillé la comté de Poitou, leur demandant fur ce confeil. Et ils répondirent que le feigneur la devoit & pouvoit aflïgner a fon fief, puifque le vaffal étoit refufant. Si fit apprêter le roi fon armée, pour garder le droit de fondit frere ( 1240. Grande chronique. 1241. A7. Gilles). LOUIS VIII. Defunclo itaque Francorum rege Ludovico, regina ejus blanca fecit convocare generaliter archiepifcopos,. epifcopos ,& alios ecclefiarum prcelatos , cum magnatibus ad coronam fpeclantibus, ut \eni~ rent ad coronationem Ludovici filii fui & regis defunclï Parifios, pridie kalend, decemb. ( 1226. Mach. Paris. Ragucel. 1.5.) Statimque rege in Franciam remeante, & parlamentum  DES Ê T A T S GÉNÉRAUX.' jparlamentum Parifiis convoca'nte in vigilia Beats Mariaj Magdalena;, VicecomesToaroii Parifios veniens coram legato, ck regis Auglke Nunciis pra3fentibus,homagiumregi fecit. ( ixx^.Nang. de gejlis Ludov.) Anno Domini millefimo ducentefimo vigefimo quarto , Ludovicus rex Franciae, tertio nonas apud Parifios parlamentum generale tenuit, in quo Honorius papa indulgentiarn qua; in Late ra ncnlï concilio contra Albigenfes hsereticos fuerat infiituta , authoritate propria ad tempus revocavit, ck Raymundum comitum Tholofanum fide catholicum approbavir. ( 1224. Ibid.) En l'an de 1'incarnation notre Seigneur, deux cent vingt, aux nones du mois du mai, le roi Louis tient gènêral parlement d Paris. ( 1220» Grande chronique). PHILIPPE-AUGÜS.TE. En peu de tems après Jean Pol, cardinal & légat, ck ledit Othonien, affemblerent confeil des prélats du royaume de France, en la cité de Soiffons. A ce confeil furent préfens le roi ck fes barons, qui dura par quinze jours, & autant 1'appointement du roi 6k de la reine; mais U Tornt VU E  6& Chronologie roi qui fut ennuyé de la longue demeure & dé la longue difpuraifon des fages & des cleres qui ld étoient, s'en alla au matin, 6c emmena avec luiIngembourgfa femme , fans prendre congé, & laiffa les légats & les pré ats, 6c le confeil tout planier. ( izoi. Grande chronique. Nic. Gilles ). Au mois de mars emmila quarantaine, fit le roi aflembler tous les prélats de fon toyaume en la cité de Paris, & tous les princes & les harons. La furent croifés une grande multitude de chevaliers & de gens a pied. ( 1188. Grande chronique. N. Gilles & Rofier des Guerres). Anno Domini millefimo centefimo oclogelimo octavo, menfe martio, media quadragelïma Parifiis celebratum eft generale concilium a Philippo rege, convocatis omnibus archiepifcop'iSy epifcopis, abbatibus, & totius regni baronibus, in quo innumerabilis militum multitudo , feu peditum, facratillima cruce infigniti funt. Et propter hanc inftantem neceffitatem, oppidö enkn iter Hierofolymitanum rex afFeöabat, cum affenfu cleri & populi, quafdam decimas ab omnibus accipiendas effe eo tantiun anno decrevit; quae diclae , fandfae decirr.a; Saladini , quas in praïfenti libro pofuimus. ( 1188. Rigord. de geflis Philippi Augufli).  DES ÊTATS GÉNÉRAUX. 6f L O U I S-L E-J E U N E. D'Orléans s'en vint k Paris, qui eft fiége royal; car la foulojent les anciens faire leurs affemblées & pariemens, pour traiter de 1'ordonnance du royaume & de 1'églife, fi comme Pen trouve ès anciennes hiftoires. Et celwi nouveau roi le fit ainfi, felon ce que le tems & fcn nouvel age le requéroit. (i 145. Grande chroniq. Aimoini appendix lib.5, cap. ói, Gejla Ludovici Junioris ). HUGUES CAPET. Dux Hugo ad fexcentos milites collegiffe dicitur , ea fama conventum Francorum Compendiaco Palatio habitum v. Idus Maïas fubito diffolvit, acliquefecit ( Gerbert. epi. óg.Diederic, Meten. epif.) VI. Cal. April, conventus Francorum indiéhis eft, ibique criraine infidebtatis pulfabimur, quod epifcopum Verdunenfem licentia donaverimus, quodque in presbyterii honorem promoverimus, & ut res fiat impoffibilis , k nobis idem repetendus. (Gerberti epi. 80. ad imperatr. Theopaniam ). Ludovico Francorum rege mortuo, Francis E * . \  68 Chronologie regnum transferre volentibus ad Carolum du= cem fratrem Lotharii regis, dum ille rem ad confiiium difFert, rem Francorum ufurpat Hugo, filius Hugonis Parifienfis, ex Haguide Sorore primi Üthonis imperatoris, & regnavit annis novem. ( 987. Sigiberti chronicon. Nangius in ckr. an <)8y ). Excitatis ad trans marinam expeditionem multorum animis , tandem caria generalis apud Vezelacum Gallias oppidum, ubi B. MariaeMagdalenaeoffa recondita funt, indicitur , convocatis ex diverfis Galliae provinciis optimatibus, virifque inluftribus ; ubi Ludovicus Francorum rex crucem a Prastexato abbate, cum multa mentis alacritate linnens miütiam trans marinam profeflus eft cum Theodorico Flandrenli, & Henrico Theobaldi Blefenfis filio, comitibus, & aliis de regno fuo baronibus, virifque nobilibus. (9'>2. Gefl. Ludov. Junioris, pag. 138. Otto Frijing, liv. 1, c.j6~. Robertus de Monte in chr.) Nous avons témoignage certain que le peuple^ la gendarmerie & tous les prélats firent lerment de fidélité a Capet contre tous, fignamment contre Charles de Lorraine, & que les prélats ne uonnerent pas feulenaent leur ferment de bouche, mais auffi par écrit figné de leur main. Ce qui ma fait eftimer que l'éle&ion de  des Êtat's Généraux. €9 tapet fe fit du confentement volomdire de tous les états de la France, óu pöur le moins de la plus grande 8c meilleure partie , fignamrnent des princes 8c feigneurs, qui o'ccupóient lés grandes provinces du royaume, ( 987. Vignier^ Nan*. gius in chron. S)8y), Hugo Comes trans maté mittit, pro acceri fendo, ad apicem regni fufcipiendüm, Lüdo» vico Carolifilio, quenv rex Ethelftaniii, avunculus ipfiuSj;accepto priüs jurerando a Francorum legatis in Fra.-ciam, cum quibufdam epifa copis ,• 8c aliis fidelibus fuis diridit/ Ciji 8£ Hugo, 8c caeteri Francorum procerës obviam profedti, mox navim ingreffo in ipfis littoris arenis apud Bononiam fefe committent. Deindeque Laudunum ab ipfis deduclus, Sc regais ber,edi£tione ditatus, üngitur, atque coronatur a L>. Arthaldo archiepifcopo Remenfi ,'pra;feri» tibus regni principibus, cum epïfccpis viginti, & amplius. (9x6. Flodourd. in chron. ) b$ . 3r'q }ftnb . mnfisdol £ rnulms^ ROBERT. Porrö monachi commentitia fingunt privïlegia, eaque cujufdam Rbmani pontincis nomine falsö infcribunt, atque déindè frequentes ad Remenfem urbem'accedunt, ibi turn cel eberrimus procerum Gallise -Connntus habeba-:  jó Chronologie tur. Adfuit. etiam venerabilis Ambianomm epifcopus Godefridus. Procedit in medium abbas cum monachis luis,.accufat epilcopum Godefridum, quod magna ipfum injuria affecerit: proxert litteras comrnentitias, nulli, przeterquam Romano pontifici, ipfos effe fubjeöos, (1013. Nicol. Monachus de S. Godefrido Ambiaw l. 2. c. //). Inier multas follicitudines meas, cura tui, Domine , me non medlocriter afficit: ciim enim teprudenter agere accipio, laator: fin autem, triftor & timeo. Audito igitur inter alia, quod proxima folemnitate Natalis Domini confilium habiturusfis cumprincipibus regni, de pace componenda ; gaudeo. Sed audito quod Aureliana ciyitas, videlicet incendio vaftata, facrilegiis profanata , & infuper excommunicatione damnata, nee poft reconciliata, miror & paveö. {Fulberï, epijl.cj^, Robert0 regi). Excrefcente deniq-ue difcordia inter regem Carolum & Robertum , cum pene cunili regni proceres ad conjlituendurn regem Robertum , apud fanclum Remigium congregati effent, idem archiepifcopus langore depreilus, vita deceffit, tertia d 'ci'icet poftquam Robertus rex fa&usfuerat,' quarn verö die antequam vicefimurr! fecundum fui epilèöpatus expk>et annum.{Fiodoar. ecclef, . :///. L cap. 17).  DES ÊTATS GÉNÉRAUX. LOUIS-LE-B'EGUE» Credo etiam quia pater vefter, poftquam fcivit fe de fua infirmitate non poffe convalefcere, non dimifit ut vobis de regni difpofitione, quse ad Dei voluntatem, ck fanftae eccleliaeftatum, ck veftrum honorem, ac primorurrr regni & populi neceflitatem, ck utilitatent fcivit, qusedam fpecialiter non mandaverit.. Propterea neceffe eft, èk bonum videtur, ut illi etiam interfint, qui cum illo fuerunt, ck omnes communiter de communi neceflitate &C utilitate tradtent. Ego etiam , licet minimus illorum, ck debilis, ac infirmus, in Dei, ck veftrum fervitium, ck illorum obfequium, Domino annuente, libenter conveniam, ck fi aliquid utilitatis valuero conferre, voluntariè faciam, quia neceffe eft ut cum Dei, 6k veftris fidelibus tradletis 6k difponatis. (855. H'mcm. epif. liv. I. cap.8). « Primo, qualiter nos in regimine regni cum » honore ck falvamento , ac fupplemento de » bis quae neeeffaria funt, cum regno, ac domo .» veftra poffitis, confiftere ». Secundö ut praefatum capitulum a patre veftro nuper in Carifiaco denunciatum de honore fandtae ecclefiae- , 5k faceidotum , ac fervorum Dei debito privic E4  7* Chronologie legio ad effeclium perduci poffit: & ut ecclefiae in ifto regno per occalionabiles circadas, &c per debitas confuetudinarias exaétiones, qua; rêmpore Pippini, Caroli & H. Ludovici, non fuerunt ante annos viginti impofitas , non affligantur. Tertio, qualiter regni primores cum debita fecuritate, ac honore erga vos conliftere poflint , & caeteri nobiles homines in regno fecuritatem habeant, ne per diverfa ingenia a fuis opibus, quas habere potuerint, defpolientur, quia poflquam radix omnium malorum cupiditas, in regno ifto exarfit, ut nullus, aut penè nullus, honorem, aut aliquod bonum fine pretio poffet adquirere, aut tenere , aut fecuritatem habere, pax, & confilium, & juftitia, atque judicium, ficut neceffe fuerat, locum in ifto regno non habuerunt. Quartö, ut inveniatis cum Dei, & veftris fidelibus,qualiter iftae rapinae, 6c deprecationes in ifto regno ceffent, & mifer ifte populus qui jam per plures annos, per depraedationes diverfas, & continuas, &per exacfiones ad Nortmannos repellendos affligitur, aliquod remedium habeat, 8c juftitia & judicium, quas quafi mortua apud nos funt, revivifcant, ut virtutem nobis Deus reddat contra paganos : quia ufque modo jam ante plures annos locum in ifto regno defenlio $Qjl habuit, fed redemtio a & tributum. & non  DES ÊTATS GÉNÉRAUX. 73 foliimpauperes homines,fed ecclefias quondam divites, jam evacuatas habent. Quinto , ut concordiam, quas fecundüm Deum eft, qua nuper in Carifiaco pater vefter mentionem habuit inter fideles Dei, & veftros haberi, vigere qèantüm potueritis, fatagatis, & vos taiem erga eos praeparetis, ut verum confilium vobis dare poffint, & audeant. Quia neut per multos audivi, multiim deperiit de utilitate in ifto regno, pro eo, « quia Confiliarii quod >> fciebant bonum & utile, non audebant di» cere, nee ut dicerent , locum habebant». Nullus enim homo eft - iic fapiens, ut alterius non indigeat conülio , ficut fcriptum eft : audiens fapiens , fapientior erit, & intelligens gubernacula poffidebit,. & qui confidit cogitationibus fuis, impiè aget. Sextö, ut inveniatis cum Dei& veftris fidelibus qualiter pacem & amicitiam fecundüm Deum eum veftris fobrinis patrui veftri filiis habeatis , &C mutuum adjutorium vobis ad Dei vohmtatem, &c fanefse ecclefia;, ac veftrum honorem, atque communium fidelium veftrorum falvationem exhibeatis. CHARLES-LE-SIMPLE. Charles entendant le retour du roi Eude,  74 Chronologie avoit envoyë demander fecours au roi Arnoul, lequel parti de Bavieres & venu k Francfort, étoit paffe deca le Rhin pour venir vifiter les cités du royaume de Lotheric , oii encore il n'étoit entiérement reconnu ; la il recut de grands dons & préfens des évêques de ees quartiers. Puis ayant afTemblé un parlement a Worms, Charles 1'y vient trouver; tk par préfens le tira de fon parti, moyennaait qu'il lui fit hommage du royaume par lui ufurpé. ( 893. Fauchet. hb. xi fCap, 4., ex reginone ). CHARLES-LE-CHAUVE. Receflus commitiorum Compendianorum. In placito generali apud Compendium kal.;unit habuo s Dominus Carolus imperator, per capitula qualiter regnum Francia; filius fuus Ludovicus cum fidelibus ejus & regni primoribus regeret, ufque dum ipfe Roma rediret, ordinavit. (877. Goldafi. Vignier). Le roi Charles qui avoit fait le Noël de eet an huit cent feptente-quatre a Saint-Waft d'Arras, vint tenir le parlement de Chandeleur d SaintQitentin, & depuis un autre gênéral d Dunac , le treizieme juin, auquel il recut les dons annuels que fon peuple avoit accoutumé de lui faire. (Sj^.Fauchet, l. x cap, y.)  DES ÈT ATS GÉNÉRAUX. 7Ï Les affaires de Bourgogne ordonnées, le roi vint a Gondoulville, oü le parlement étoit affignê au premier feptembre. (871. Fauchet. I. x. iij. ) Puisretourna au palais d'Aix faire la fête de Noël,de l'an buit cent foixante-dix, laquelle paffée il alla tenir un parlement d Nimeghe , & faire alliance avec Roric ou Raoul Normand. ( 870. Fauchet. L x. ij.) Caroli Calvi imperatoris Augufti Receffus five capitulare comitiorum Pifienjium. A. C, Dccclxüj. (863.) Car les Normands s'efforcant de tous cötés ; & l'an huit cent foixante-trois arrêiés prés PoifTy, lors appellé Pips , (comme encore eft nommé en 1'églife de Chartres archidiacre de Pincerais , celui qui a la charge de ce quartier) ^e roi y fit ajfembler un parlement, & batir un pont, fortifié de deux chateaux aux deux boucs,au'il fit garnirde bons gendarmes. (863. Fauchet, /■ ix. xvij.) Caroli Calvi regis Francorum capitulare de fiatu ecclefiarum & rerum ecclefiafticarum corrigendo fancitum ac promulgatum in comkiis Suejjionenfibus. (853. Vignier, 85z.) La même annce , 1'empereur &C fon frere, fe virent a Valenciennes en un parlement tenu au commencement de noyembre. ( 853. M. Fait* $het, l. ix. cxiij) olias  7^ Chronologie LOUIS-LE-DÉBONNAIRE. Ludovicusrex menfe januario, generali conventu habito apud Franconofurt, quosde regno Caroli tenuit captivos remifit in Galliam. (877. Anonymus. ) Indé rediens circa kal. junii venit ad Tribuere , ibique generale placitum habuit. ( 87*. Ibid.) Rex verö mediante quadragefima apud villam Forhbeim,generali conventu habito, filios ftios de regni partitione inter fè difïïdentes, pacifïcavit, & quam quifque partem poft obitum fuum tueri deberet, liquidó defignavit. (872. Ibid. ) Ludovicus rex habito Ratisbonce conventu^ abquot primates fuos infidelitatisaccufatos, &c. (861, Vignier, contraBus.) Anno ab incarnatione Domini oclingentenmo fexagefimo, indict.viij. mediante februario menfe, decernentibus glofiofis regibus Ludovico Carolo, atqueLothario Juniore, in generali conventu optimatum ex regno almi Lotharii aftiim eft concilium epifcoporum Aquiferani palatio , &c. (860. Hincmar. de divort. Lotft. & Tetb.y è: . 'ril Indé condito placitO, & dejïgnatis ad hos  DES ÉTATS GÉNÉRAUX. JJ fpecialiter comitibus, in villa Alamanniaa , qusa vocatur Uima: Notingum epifcopum, & Eburhardum comitem miffos Ludovici nepotis fut fufcepit & audivit (8^8. Anonymus. ) In nomine fanclse & individua; Trinitatis. Carolus Dei gratia rex inluftris, epifcopis, & dileclis fidelibus miffis inluftribus, comitibus noftris inluftribus, falutem. Notum fit fidelitatï veftra;; quia decimo quinto kal. martii fecundüm facram autoritatem, fynodum venerabïlium efpifcoporum, ac conventum fidelium noftrorum apudCarifiacum fecimus convenire, &c. (856. Aimoin, l. 5, cap. 28. ) Legatos fuos ad fratrem fuum Lothariutn in Theodonis villa placitum habentem pro Giflaberto, qui eodem anno ad fidem ejus venerat, reconciliationis gratia direxit. ( 848. Anonym.) Sed & conventum populo compendii indicens, Vofagum per Mauri monafterium tranfiit, &: mediomatricum, quse altero nomine Metis vocatur , pervenit. Poft folemnitatem porro pafchalem, atque pentecoftes venerabilem diem, civitatem Vangionum (qua; nunc "Wormatia vocatur ) fecondum condiótum, ad celebrandum conventum generalem, abiit. (Incerti aucl. in vita Leudeuvici pii.) In his imperator. tota sefiate confiftens, in-  y§ Chron o l o g i e dixit genei alem conventum autumni tempore, id eft, feptembrimediante in Carifiaco. {Anonym. vita Leudeuvici.) Imperator verö praefatum epifcopum in Aquitaniam cum muliis gratiarum aöionibus remifit, & qua; vifa funtfuisfidelibus mandavit, & utfibi autumni tempore aliqui eorum in Cabillono occurrerent, imperavit: ibi enim generalem indixit conventum. {Anonym. in vita Leudeuvici.) Octingentefimus quadragefimus fecundus fequitur redemtoris annus, indiftione quinta, quo gallorum epifcopi conventum habent Aquifgrani, in quo ex petitione regum Francorum Ludovici & Caroli, decernunt dejuribus regni in Gallia hoftis ipforum Lotharii imperatoris. (842.) Imperator celebratojuxta Brigantinumlacum pafcha, poftea habito Wormatia conventu, Lotbario de Italia venienti reconciliatur, &c. (839. Avent. Contract. Vignier.') Imperator habito Noviomagi conventu, confilio quorumdam, Ludovico filio regnum Orientalium Francorum, quod ab eo acceperat, interdixit. (838. Aimoin. Avent. Ancien. Annales. Contract.) Imperator conventum apud Theodenhoue palatium habuit, ad quem Lotharius filkis ejus gravimorbo detentus, venire non po£uit, &c. (836. Contract.)  rb e s États Généraux: 7^ HInc autem metuens ne poft diéti fratres populo follicitato eadem facerent, ad conventum publicum eos venire prcecepit , totundit, ac per monafteria fub libera cuftodia commendavit. (Nethar. hijl. lib. i. de Ludeuvico.) Videns autem quod populus nullo modo diebus vita fus illüm relinquere, uti confueverat, vellet, conventu Aquis hyeme indiclo, portionem regni his terminis notatam Carolo dedit, id eft, a mari, per fines Saxionise, ufque ad fines B-ibuariorum. {Idem lib. 1.) Alio anno regni fui habuit generale placitum fuum in partibus Saxonise, ck ibi multa bona conftituit. Thegan. in vita Ludovici pïï. ) Addunt verö his quod ad res politicas pertinet, eumdem in Wormatia alium hoe eodem anno habuiffe conventum. (83 5.) Sequitur redemptoris annus ocnngentifimus trigefimus quintus, indiétione decima tertia, quo in Theodonis villa habitus eft conventus epifcoporum ; ck aliorum , ubi Ebbo remenlis epifcopus, qui author fuerat ut imperator Ludovicus privaretur imperio fuafione epifcoporum, fe ipfum judicans epifcopatuindignum, eo fe abdicavit. ( 83 5. Ex Baron.) Sequenti verè dominica , quse facraa qua-  $o> Chronologie dragefimae initium praecedebat ( addit author ïn vita Ludovici) in Metis civitatem dominus imperator, fed & epifcopi, & populus univerfalis illius convintus venit, & inter miffanun celebrationem feptem archiepifcopi, feptem reconciliationis ecclefiafticae orationes fuper eumdem imperatorem cecinerunt, atque omnes populi, hoe vifo pro plenaria reftitutione imperatoris, multas Deo gratiasreddiderunt. (83 5. Ex Baron.) Eodem anno Ingilheim villa regia generale placitum fuum habuit. {Id. Tkeg.) Sequenti anno habuit generale placitum fuum in Attiniaco palatio. (ld. Theg.) Quoniam quidam noffrum tempore fanflas memoriae- domi.ni Hludouvici pii Augufti in Attiniaco palatio tune fuerunt, quando in univerfali ffynodo totius imperii, etiam cum fedis Romana legatis, & in generaliplacito foemina quaedam non ignobilis genere , nomine Northildis, de quibufdam inhoneftis inter fe, & virum fuum^ vocabulo Agembertum, ad imperatorem publice proclamavit, quam imperator ad fynodum deftinavit, ut inde epifcopalis authoritas quid agendum effet decerneret. « Sed epifco» porum generalitasöüflaicorum,acconïugatorum >> eam remiflt judicium , ut ipfi inter illam , &C » fuum conjugem judicarent, qui de talibus » negotiis  DES ÉTATS GÉNÉRAUX. 8f » negotiis erant cogniti, » & legibus feculi fnfficientifFimè prsditi eorumque legalibusjudiciis eadem fcemina fe fubjiceret, & quod de quaeflione fua decrevifTent, fine repetitione teneret. {[Hinen de dlvort, Bioth.B. Tetb,) In coicm conventu cum multi infimularentur devotionis in patrem , defeöionis in nliurn : quidam verbis fimplicibus , quidam juramentis objeöa diluerunt. ( Vita Lcudeuvici pii. ) Imperator cum filiis Pipino » & Ludovico', Lugduni magnum habuitconventum. (Contraaus^) His ita difpohtis tempore miffse fancti Martini , Ludovicus cum fuis habuit generalem conventum in Attiniaco palatio, ubi inter alla base memoriae digna fafta leguntur. Mandavit filio Pipino per Eumoldum abbatem, res ecclefiafticas, quas in regno ejus erant , quas vel ipfe fuis attribuerat, vel ipfi fibi perceperant, abfque cunöatione ecclefiis reftitui. (834. i?» Baron.) La faifon fut fa fi avant paffee , que la feptembre approcha. Entour les calendes d'oclobre retourna Lothaire a Soiffons, fon pere print, qui étoit en Tabbaye de Saint-Marc, en étroite prifon, tk le mena avec lui a Compiegne. La vinrent les meffagers de Conftantin 1'empereur des Grecs , Mare archevêque d'Ephefe, & Tules maitre fergent a 1'empereur étant en Tome VI, ' F  Si Chronologie vovés. Si lui apporterent préfens, oii parlement qui la fut affemblé , fe purgerent aucuns p.ir ferment, & aucuns par fimples paroles, des cas que on leur mettoit fus. (833. Grande Chron. vol. i. en la vie de Louis le Débonnaire.) At ne publico aucloramento conjurati adverfus patrem niii deftitueremur, coaclu apud conpendiam ex toto regno epifcoporum, procerumaue confilioy Lotharius eduftum de cuftodia patrem , compendium perduxit. (833. Guaginus. S ei ff el de Louis 11.) Lotharius vero duxit fecum patrem ad coapendium palatium , & ibi valdè affixit eum cum epifcopis, & cateris nonnullis. Jufferunt enim cum ire in monafterium, & ibi effe omnibus diebus vita; fuse: quod iile renuens , non confenfit voluntati eorum; omnes enim epifcopi molefti fuerunt ei, & maxime hi, quos ex fervili conditione honoratos habebat, cum his qui ex barbaris nationibus ad hoe faftigium perdudi furit. (833. Theganus. 43.) Elegerunt tune unum impudicum, & crudeliifimv.m , qui dicebatur Hebo remenfis epifcopus, qui eratexoriginalium fervorum ftirpe , ut eum immaniter afrhxiffet cum confinaionibus caïterorum, inaudita locutifunt, inaudita fecerunt, cottidiè improperantes ei; abftulerunt ei gladium de femore fuo, judicio fervorum fuo-.  ÖES ÉTATS GÉNÉRAUX. rum , induentes cum cilicio. Tune impletum eft elogium jeremias prophetas dicentis : Servi ■dominati juni nöfirti O qualem remunerationem reddidifti ei? Fecit te liberum , non nobilem, quod impoffibile eil, poft libertatem. Veftivit te pupura & paliio , tk tu eum induirti cilicio. ïlle pertraxit te immeritum ad culmen pontificale, tu eum falfo judkio voluifti expellere a folio patrum fuorum. « Crudelis cur non » intellexifti praecepta domini, non ejl JervuS » jupra dominum fuum? Quamobrem contemp» fifti prscepta apoftolica ilhus qui ad tercium » ccelum raptus erat, ut inter angelos difceret » quod hominïbus ille fic praeciperet: Omnibus » poteflatibus fu'dimioribus jub/ecU eflote : non » ejl poiejlas nifi d Deo. Et iterum alius dicit: » Deum timete , regem honorificate, jervi jubditl » ejlote in omni dmore , non tantum bonis cV; »> modejlis ,jed etiam difcollh, hoe ejl enim gratii. » Tu vei ö Deum non thauifti, nee regem » honorafti. Si unifquifque gratiam Dei adi» pifci poterit talia faciendo , profeöö iram m Dei habebit talia contemnendo. Crudelis! » quis conüliarius tuus fuit, aut du&or tuus, »> &c. » {Idem 44.) Imperator conventu Noviomagi habito, omne's qui fibi contrarii fuerant, quofdam etiam praediis fpoliavit f quofdam exilio relegavit, &c. F x  §4 Chronologie (831. Flodoard. li. Epifc. Remen. Contiacius.) Sicque conventum publicum indici jufïït ex imperatoris fententia Neomagi, ad quem veniret ipfe imperator, non armata manu , fed ümplici comitatu : quod facieodum sque filio perfliafit. (830. Ex Baron.) Imoeiptorgenerqlem conventum menfe Auguflo Wormatice habuit. (8x9. Vignier. Anonym.) Au parlement è Wormes 1'empereur commenca de découvrir les confpirations & monopoles qui fe dreffoient ja contre lui; qui fut caufe qu'il renveya le prince Lothaire en Italië, & appella Bernard comte de Barcelonne &C de la Marche d'Efpagne, pour le faire fon grand chambellan. (8x8. Vignier.) Imperator Ludovicus eo tempore Aquifgrani palatio confnlens , conventum procerum ibi fieri media ferè hieme prasceperat. (828. Ex Baron.) Au parlement gener al tenu a Aix-la-Chapelle, le procés fut fait aux capitaines, par la fautei defquels les Sarrafins ctoient l'an précédent entrés fi avant en France. (827. Idem.) Porrö autumni tempore in Theodonis villam convenire generaliter fuum populum prajeepit. (8z6. Anony.) ...Imperator fanè Eeftate fequentiin Ingelheini conveutumpublicum habuit, ibique mjfTos papa;  e»e s États Gknèraux. $5 Romani quïrinum primicerium, & theophylactum Nomenclatorem cum magnis muneribus venientes, & fufcepit, & remifit. (825. Id.) Au parlement tenu a Aix la-Chapelle , 1'empereur Louis Jéclara , & inftitua fon troifie*me nis, nommé Louis, roi de Baviere, tk puis répondit aux ambaffadeurs des Bulgariens, qui tendoient a fin de bornage & de limitation de leurs pays & contréeSj d'avec celles des Frangois. (824. Vignier.) Menfe Februario fequentis hiemis conventus habitus publicus Aquifgrani, ubi cum in aliis,tüm maximè fervebat res in Marcha Hifpanica nuper damnofè, ignominiosèque peracla. (824. Idem.) Anno hunc fequenti imperator generalem conventum coire juflitin loco, cujus vocabulum eft Attiniacus , in quo convocatis ad confiüum epifcopis, abbatibus, fpiritualibufque viris, nee non regni fui proceribus , primo quidem fratribus reconciliari fiuduit, quos invitos attorideri fecerat, deinde omnibus quibus aliquii laefura; videbatur. (822. Ex Baron.) Au parlement tenu a Theovriile, 1'empereur Louis fit confrater par ies barons les barrages qu'il avoit faits de fes royaumesck: feigneuries entre fes enfans. (821.' Vignier.) Ludovici pii imperatori-s Augufti capitula in F 3  86* Chronologie generali conventu imperii in Ingilhenhabito, apoftoiica authoritare, & fynodaü fanctione, ownium videlïcet clericorum, ac lalcorum generaliter confenfu decreta.{_ 819. Lud. Pius.) Ludovici Pii imperatoris augurti capitula, quae falicis legibus addenda in comitiis Aquifgranenlibus conftituit, quffi & miffi & comités habere, & cceteris nota facere debent. (819, Lud. Pius.) InTheodonis villam conveniregeneraliterfuum populum prczcepit. (Ibid.). Sed poft paucum tempus idem ad feftiim fanöi Martini populum convocavit , filiumque Pipinumfugientemad fe quoquomodo revocare, voluit fed itle id refugiebat. {817. Aimoin. L 5. ca. 13. ) Qua hieme in eodem palatio Conventum publicum populifui celebravït. ( 817. Incert. aucl. in vita Hludouvici Pii. jErate fubfequente in Ingelheim palatio populus ejus convenit ad eum. ( 817 idem aucl. ). Ciimque ab hoe placito populum dimitteret, & fequens in Theodonis villam poft Pafcha conftituiffet ad hiemandum Aquifgrani fe eontulit. {817. Idem aucl. Hoe anno tertio Ludovici, ab eo celebratum conftat Conventum provincialem Aquifgrani, in eoque andfum Manulphum accepiffe  DES ÊTATS GÉNÉRAVX. tf licentiam aïdificandi Monafterium virginibuscanonicis regularibus•■:■ habent virae ejus act», a Gobelino confcripta. (8  és Chronologiè tractata, atque ordinafa funt, legibus etiant Capitula quaedam per ncceffaria , quia deerant, addita funt. {Sicj. Annalês Anonymi.) Receffus, five Decreta Comitibrum Aquifgranenfium, quas Ludovicus Plus Imperator1 habuiï A. D. dccc xviii, (818. Lud. Pius.) Ponö hoe anno ab eodem Carolo Magno habitum elTe generalem Conventum Aquss , veteres Francorum teftantur Annales. {812. Ex Baron.) Quartum iter in Aquitaniam pergens , tenuit placitum fuum Nivernis. Indé Tafïi'o Dux Bajovariorum, poftpotitis Sacramentis, poftpolita propinquitate ( erat enim nepos ejufdem Regis) ab eodem itinere fe abduxit* atque in Bajovariam fevertitur. (7C0. Ado.) Tune magnus Rex Carolus fuper flnvium Vuiforam veniens , ibi habuit placitum cum Saxonibus, & receptis obfidibus xij. reverfus eft in Franciam, & celebravit Pafcha & Natale Domini in Ariitaliio. {Anonym. in vita Carol. Magn. ) Cum autem "Wormatia Domnus Rex Carolus haec audiffet , tenuit ibi Synodum, & publicum placitum : ik cor.ülio habito , introivit cum fumma feftinatione, Deo adjuvante, in Saxoniarn. {Anonym. in vita Curol. Magn.) Afino fequenti Domnus Rex Carolus publi-  DES ÉTATS GÉNÉRAUX. §9 tüm Synodurn habuit ad Padeobrunen. Ibi convenerunt omnes Franci,' & omnes Saxones , excepto, quod Widochindus rebellis extitit, cum paucis aliis fociis fuis in Normandiam confugit. ( Idem.) Habuitque Rex Synodurn in villa. Duria, & tranfiit in Saxoniarn ad Lippia. (Idem.) Tune profpiciens fe ex omni parte pacerrt habere , confilhim fumit orationis caufa pergeret, & ad limina beatorum Apoftolorum iter pérgendi, & caufas Italicas difponendi, Sc cum Miffis imprimis placitum habendi de convenientiis eorurn , quod & faflum eft, & celebravit Natale Domini in Florentia civitate. (Idem.) Pervenitque idem mitiffimus Rex Carolus ad conjugem fuam Domnam Fseftradam Reginam in civitate Wormatia , & ibi ad invicem gavin funt, lstincantes, ac Domini mifericordiam conlaudantes : ubi Synodurn congregavit. (Anonym. in vita Carol. Magn.) Dommis igitur Carolus habuit Synodurn ad jam diclam villam Ingilenhein, ibique venit Thaffilo ex juffione ejus. ( Idem.) Habuitque placitum fuum ad locum Cuffiftaim in fuburbio Maguntiae urbis. (Idem.) Poft feptem verö dies Rex concione vocaia, cur veniffet Romam, omnibus patefecit, 6c  $c* Chronologie exinde quotidiè ad ea qua erant facienda^ operam dedit. (Idem.} fliifque abfohitis, Conventum habuit Imperator cum Primoribus, & Opdmatibus Francorum de pace conftittienda &£ confervat;da inter fïlios fuos , tk divifione regni facienda in tres partes, ut fciret unnfqjiifque illorum quam panem tueri, & regere debuiffet, fi fuperftes ei viverct. ( Idem. ) Imperator pace confirmata cum Emingo placitum fuum habuit Aquis , & in tres partes % regni fiii totidem exercitus divifit. (Anonym. m vita Carol. magn.) Tune imperator generali conventu Aquis folemnmr habito, Bernardum , fiüum Pippini, nepotem fuum , in Italiam mifit. (Idem.) Deinde habito- Aquisgrani generali conventu , filio fuo Ludovico regi Aquitaniae coronam impofuit, & imperialis nomini fibi confortem fecit. ( Idem.) Interjecto tempore imdique exercitibus re. giis Thaffilo conftrictus, ad conventum publicum Francorum , aüarumque gentium lub ditione eorum jam pofitarum in villa qua; diciter Ingileva, aut volens, aut nolens occurrit, in medio pofitus cüm criminalia ei objicerentur, &. ipfe perjuria fua publicè fateretur,; damnatus  bes Êtat s Généraux. 9* Spfe cum filio fuo Theudone ad mortem eft. (996. Adon.Chr.) Sequenti anno dommis rex Carolus Rhenum tranfiit, & in coïonia fynhdum tenuit. Ibi omnes Saxones venerunt, excepto rebelle Vidochindo, & illuc convenerunt Normandi Nuntii rrgis Sigofridi : fimiUter Avari convenerunt illuc, miffi a Cagano , & Vigurro. ( Anomym m vita Carol. magn.) Dommis fortis rex Carolus fuper Saxones Rhenum tranfiit ad Lippiam , & vaftando Saxoniarn pervenit ufque ad Huculin. Ibi concdium iniit. (Hnd.) Receffus, five capitulare comitiorum generaHum , anno domini dcc. txxvm. habitorum. ( 778 . Carol. magn. Goldajï. ) Caroli magni imperatoris Augufti conftitutio, de privilegiis nobilium Francorum & Germanorum, fubadis Saxonibus , fancita Padabrunni in comitiis generdïbus. (777. Idem.) Peraöa venatione Aquifgrani rediens, generalem populifui conventum, more folemni hahuit. ( Aimoin. I. 4, ca. 13 de Carolo mag.) ^ Hoe decretum eft apud regem , & principes ejus, & apud cunctum populum chriftianum, qui ' infra regnum Merovingorum confrftunt. ( Lex Bajoariorum ). Ut popidus. interrogetur de capitulis , quas  $2 Chronologie in lege noviter addita funt, & pojlquam omnes confenferim , fubfcriptiones , & manufirmationes fuas in ipfis capitulis faciant. ( Carol. mag. lib. 6, ca. c,3 ). Convocatifque fïliis , ac turba amicorum , generale indixit placitum in loco nuncupato Bigargio: ad quod properè convenientibus cunctis Franciae primorimus , decimo kalendas maïas rex folio refidens aureo, hoe apud eos differuit modo. ( Aimoin. I. 4, cap. 30 ). Generale quoque placitum Idib. Juniis in villa Duziaco tenuit: ubi & omnia fua dona accepif. Carolus in purificatione fanctae Mariae, cum fuis confiliariis placitum in monafterio fancti Quintini tenuit. ( Aimoin. I. 5 , cap. 31 ). Rex prima veris afpirante temperie, Noviomagum profeeïus eft, & ad locum qui Padabruno vocatur, generalem populi fui conventum habiturus , cum ingenti exercitu Saxoniarn profeöus eft. (Idem, lib. 4 , cap. yi ). Rex tarnen illorum perndise non immemor , conventum generalem trans Rhenum in villa Cusfeftin (quae fuper Menum circa Magunciacam urbem fita eft) more folemni habuit. (Idem, lib. 4, cap. 83 ). Habito itaque generali conventu fuper Rhenum, in loco qui Lippia vocatur, ibique in caftris confidens pontificis ad fe properantis,  des Êtats Généraux. 93 prsefioiatur adventum. (Idem, lib. 4, cap. #9. Wandelder tus, lib. de S. Go are ). Imperator autem "duobus conveutibus habitis , uno apud Niumagum ( propter falfas Henrici, filii Godofricli regis Danorum , poliicitationes , quibus fe illuc ad imperatoris praefentiam venturum promiferat. ) Altero apud Compendium ( in quo & annua dona fufcepit, & iis qui ad Marcham Hifpanicam mittendi erant, quid, vel qualiter agere deberent imperavit). Idem lib. 4, cap. uó\ Imperator vero diverfïs occupationibus ufque ad kalendas julii Aquifgrani moratus, tandem ad generalem conventum Wormatia; habendum cum comitatu fuo, menfe augufto ftatuit proficifci. (Aimoin. lib. 4, cap. "7). Supradidus vero imperator , cum jam inte!lexiffet adpropinquare fibi diem obitus fui , ( fenuerat enim valdè) vocavit filium fuum Leudeuvicum ad fe,cum omni exercitu, epifcopis, abbatibus, ducibus, comitibus, Locopofitis, habuit grande colloquium cum eis, Aquifgrani palatio, pacificè , & honeftè admonens, ut iidem erga filium fuum oftenderent, interrogans omnes, a maximo ufque ad minimum, ü eis placuifiét ut nomen fuum, id eft, imperatoris , filio fuo Leudeuvico tradidiffet. Illi omnes refponderunt Dei effe admonitionem  94 Chronologie illius rei. Quo fafto, in prima die dominica ornavit fe cultU regis, & coronam capiti fuo impofuit, incedebutque clarè veftitus , & ornatus ficut eum decuerat. Perrexit ad ecclefiam quam ipfe a fundamentis conftruxerat, pervenitque ante altare in eminentiori loco conftructum cseteris altaribus, & confecratum in honorem Domini noftri Jefu Chrifti, fuper quod coronam auream , aliam quam ipfe geftabat in capite fuo juffit poni. Poftquam diu oraverunt ipfe&filius ejus, loquutus eft ad filium fuum coram omni multitudine pontificum , &C optimatum fuorum ,admonenseum inprimis ^omriipotentem Deum deligere , & timere , « ejus » prscepta fervare in omnibus, ecdefias Dei » gubernare,5i defïendere a pravis hominibus: »> fororibus.fuis & fratribus , qui erant natu »> juniores, & neponetibus, & omnibus propin» quis fuis indeficientem mifericordiam femper » oftendere praecepit; deinde facerdotes hono» rare ut patres, populum diügere ut filios, » fuperbos & nequiffirnos hornines in viam » falutis coados dirigere , Ccenobiorum co.v» folator &pauperum effe : fideles miniftros, » & Dcumtimentes conftitueret,quimunera in» juftaodiohaberent: nullum abhonore fuo fine » caufa difcretionis ejiceret, femetipfum omni » tempore , coram Deo, & omni populo irre-  DES ÉTATS GÉNÉRAUX. 9f » prehenfibilem demonftraret ». Poftquarn hsc verba, & alia multa coram multitudine filio fuo oftenderat, interrogavit fi obediens voluiffet effe praeceptis fuis. At ille refpondit, libenterobedire, & cum Dei adjutorio omnia praecepta quae mandaverat ei pater, cuflodire. « Tune juflït eum pater , ut proprils manibus v> coronam , qua crat fuper altare, elevaret, & » capiti fuo imponeret », ob reeordationem omnium praeceptorum quae mandaverat ei pater. At ille jufficnem patris implevif. Quo fadto, audientes miffarum folemnia, ibant ad Palatium , fuftinuit filius patrem eundo , Sc redeundo , quamdiu cum eo fuerat filius. ( T/iegan, de gefiis Leudeuyici Pii imperat. ö"*, pag. ioz). Secunda divifio eft, qua totius regni ftarus, antepofito, ficuti femper, & ubicumque omnipotentis Dei judicio , qnantüm ad humanam rationem pertinebat, confervari videbatur , haec eft. Confuetudo autem tune temporis talis erat, ut non faepius, led bis in anno placita duo tenerentur. Unum, quando ordinabatur flatus totius regni ad anni vertentis fpatiurn, quod ordinatum, nullus eventus rerum, nili fumma necefiitas, qua» fimiliter toto regno incumbebat, mutabatur. In quo placito generalitas univerforum majorum, tam clericorum, quam  5>6 Chronologie laïcorum, conveniebat. Seniores propter conr filium ordinandum , minores propter idem confiliumfufcipiendum, & inter dim pariter traclandum, & non ex potefbte, led ex proprio mentis jntellettu, vel fentèntja confirmandum. ( Ex Adalhardo Carol. M. propinqw). Hincm. epift. 3 > cap. ). Interim vero, quo haec in regis abfentia agebantur, ipfe princeps reliquce multitudini, in fufcipiendis muneribus, falutandis proceribus confabulando rarius vifis, compatiendo femcribus, congaudendo junioribus, & caetera his fimilia, tam in fpiritalibus, quamque & in fascularibus occupatus erat: ita tarnen , ut quotienfcumque fegregatorum voluntas effet, ad eos veniret, fimiliter quoque quanto fpatio voluiffent cum eis confifteret, & cum omni familiaritate, qualiter fingula reperta habuiffent, referebant , quantaque mutua hinc & inde altercatione, vel difputatione ,feu amica contentione decertaffent, apertius recitabant. Sed nee illud praetermittendum, quomodo fi tempus lerenum erat, extra, fin autem, intra diverfa loca diftincla erant, ubi tk hi abondanter fegregati femotim, & caetera multitudp (eparatim refidere potui'Jent, pnüs tarnen caetera; inferiores peuo a; intereffe ininimè potuiffent. Quae utraque tarnen feniorum fufcepta- cula  OES ÉTATS GÉNÉRAUX. 97 cula lic in duobus divifa erant, ut primo omnes epifcopi, abbates, vel hujufmodi honorificentiores clerici, abfque ulla laïcorum commixtione congregarentur. Similiter comités, vel hujufmodi principes fibimet honorificabiliter ,d catera mult'uudïne primo mane fegregarentur. Quoufque tempus, five prsefente, five abfente rege, occurrei-ent, & tune praidicti feniores more folito clerici ad fuam, laïci verö ad fuam conftitutam curiam fubfelliis fimiliteï honorificabiliter prseparatis, convocarentur, Qui ciim feparati k casteris effent, in eorum manebat poteftate, quando fimul, vel quando feparati refiderent, « prout eos trac^andes caufae » qualitas docebat, live de fpiritalibus, five de » fecularibus, feu etiam commixtis, fimiliter » fipropter quamlibet vefcendi», vel inveftigandi caufam quemcumque convocare potuiffent, & re comperta difcederet in eorum volun» tate manebat. Haec interim de his quse eis h rege ad tractandum proponebantur. ( Idem cap . 3Ó ). P E P I N. Cette remontrance, ou harangue eft fous la perfonne de Boniface, lequel préfentant Ia couronne a Pepin, lui dit que les Gaulois, du confentement de tous états, par fes mains poTomt VI. G  e>S Chronologie foient cette couronne fur fa tête, pour marqué de fa charge & dig.dté ; & le paroient des dépouilles du roi Childcric, la maifon duquel ils ne haïifoient pas, ne la niémoire de fes ancêtres,ains fes mceurs laches, aimans & portans honneur k la vertu & luftre de fa race; lefquels fi une. fois ils appercevoit s'éteindre en lui par orgueil,oufe ternir par laeheté, que devoitïl penfer que feroient ceux qui auroient k le juger, ayans ja donné un tanr févere arrêt contre celui qui pcflede le royaume de fon chef? Que Pepin donc apprit k l'exemple & danger d'autrui, d'être & faire le roi, c'eft a-dire de mettre tout foin & fon entente a procurer le repos Mais fur la fin d'été, voulant achever la •guerre, il vient k Bourges tenir fon parlement en plaine campagne , d la fagon des frangois ; lequel achevé , mena fon armée fur la riviere de Garonne , ayant pris plufieurs rochers, cavernes ou chareaux en Limofm. (767. Annales de Fr. Du Tillet des facres & couron. Fauchet, liv. 6 , ch. e). Or, combien que la guerre de Guienne ne  des è t A t s G"e n ê r a ü x. 99 fut éteinte, & que Pepln Fit femblai;t de ne vouloir bouger de Ion royaume, & que cette année'iept cent foixante tk cinq , il tint un parlement génèral 'de tous 'les 'feigneurs de France, affeniblis au pdïais cÜAïtighy. (765. Ëbid. ) A cette caufe ayant fait a Longlair fes fêtes de Nqël & Piqués de l'an fept cent foixante &é qua t re , il conclud au parlement tenu d TFortrns , de ne förtir point ' de fon royaume pour cette année. (764. Idem. ibid.) Nónobftant la réfiftance de ceux qui le voulurent dcfendre yauTamment, il les 'forca & les battit eri plufieurs rencontres, principalement énunTieu nommé Sitüia , ou Situmia, ayant toujours le deffus des rencontres, avec tel étonnement des ennernis', qu'ils furent contraints de faire fa volonté, & promettre tous les ans foi trouver en taffanbléè & parlement ginérdl des Francois , pour honorablement lui préfenter trois eens chevaux de guerre. ( 7}8, Fauchet, liv. 0, ck. 5 ).' TenerAe placitum Pippinoregein compendio^ taffilo diïxi Bajovariorum ad ülum ibi vénit, feque illi in vafiallum commilit, atque fuper corpora fandtorum mar'tyrum Dionyfii, Ruftici, & Eleutherrii fimul, & fuper corpora SS. cqnfefforum martini, & gerrnani juravit, ut in omnibus diébus viïse fuse regi,'nliifqae ejus, w« G x  JOO' CHRONOLOGIE tegram fidern cum fubdirione fervaret. (758. Adon. Chr. 757. Fauchet l. 6. chap. ó.) Cependant 1'empereur qui ne pouvoit fitót perdre 1'efpérance de recouvrer l'exarquat, envoya des ambaffadeurs en France devers Ie roi Pepin, lors de féjour a Compiégne, ou il avoit fait affembler un parlement gênéral de tout le peuple Francois, en la préfence defquels les Grecs lui offrirent de beaux dons & préfens, (757. Fauch. ibid.) Plufieurs croyent que cette affemblée de Compiégne, foit 1'origine de nos pariemens, & le premier tenu en France; mais Grégoire de Tours nous a montré le contraire par tant d'afTemblées tenues fous les rois Mérovingiens. Cette opinion poffible vient de ce que durant le gouvernement des maires., 1'on n'en faifoit point, ouilsn'étoient pas libres. (jjy.Jdem ibid. ) RecefTus , five capitulare comijfiorum MettenJium, k Pipino Francorum rege, & patritio romanorum defenfore fanctas Dei ecclefis celebratorum. ( 75 5. Pipinus rex.) Cüm prsediöus rex Pipinus quod per legatos fuos petierat, non irnpetraffet, &c Aiftulphus hoe facere contempfüfet, evoluto anno rex d Kal. martii omnes Francos, ficut mos Francorum eft, in Btrnaco villa publica ad fe venire prcecepit, inif oque; confilio cum proceribus fuis, eo tempore  ©ES 'ÊTAT S GÉNÉRAUX. tOt quo folent reges ad bella procedere, Stephanus papa, & reliquae nationes, quse nationes, quaS in fuo regno commorabantur, Sc Francorurrt agmina ad partes Langobardia; , cum omni multitudine, perLugdunumGallis, &Viennam pergentes ,ufque Maurienam pervenerunt. (754, Collecl. chr. ex Toronico, lib. 6\) Les folemnitées paffées , le pape & le roï vinrent a Creci tenir unparlement, pour avoir i'avis des feigneurs Frangois, fut le voyage de Lombardie, dont le pape les preffoit. (7.54» Fauchet l. 6. chap. 6~.) Puis retourna par Vienne. ta célébra la fo> lemnité de paques. Tant oftoya a mont & k val, que la faifon fut prefque paffee. Son oft, qui travaillé étoit, fit féjourner. Puis vint au mois d'aoüt pour faire ledémourant de fa guerre d'Aquitaine. Par Bourges retourna , &C fijl parlement de fes barons, & meut, &C alla outre le fleuve de Gironde , tout le pays d'entour Lirnoges détruit par le feu, & par occifion. (Grandé Chr. en la vie de Pepin.) Iterum fequenti anno, commoto omni exercitu Francorum-, per trecas, inde antifiodorum iifque ad Avernum urbem ,, cum omni exercitu veniens, ibique ; cum Francis & proceribus fuis placitum fuum campomadlo tenens, poftea ligere tranfaöo, Aquitaniam pergens, ufque ad'Lemo- C£ 3  * o-i „Chronologie dicas accefiit , totam regicnem iliam vaftans j villa pubiicas, qus dicionis Guajofarii errant, totas igne crcmare praxepit. (ColLci Chr. ex Thoronicq l. 6. L. Nevernum, idem auctor,p. 72/.) Evoluto igitur acpo , commoto omni.exer^ Citu Francorum , tifque Aurcüanis veniens , ibi placitum fuum campomaii, quod ipfe primus pro campo marrio, pro utiütate Francon'm infiituit, tenens. Multis muneribus a Francis, & proceribus fuis ditatus efi. (Collecl. chr. ex Thor. lib. (T.) Par le confeil Sc avis de plufieurs des hauts princes, feigneurs, barons, prélats, & autres du royaume de France, envoyerent a Rome Bouchard archevcqne d'Y/ifebourg, & Foulques abbc de S.-Denis en France, & autres folemnels meffagers, devers le pape Zacharie, qui lors étoit, pour lui remontrer les chofes deflufdites , afin de fcavoir & avoir confeil a lui: lequel de raifon devoit mieux être dit, 8c appellé roi, & porter le fceptre Sc la couronne, Sec. (750Nic. Gilles.) Rex Pipinus difiracto in diverfa animo, propter duo bella , videlicet Aquitanicum jam olim fufceptum, & Bajoaricum, propter Tafiilonis Du cis defedtionem fufcipiendum, populifui generalem conventum habuit in Wormatia civitate» {Aimoin. lib. 4,, ca. <5i5\)  DËS ÈTATS GÉNÉRAUX. 10$ Pipinus rex ad conficiendum Aquitanicum bellumconventu Aurdianis,rza£«o, in Aquitaniaï» profefius eft. (Idem ibid.) C H I L D E R r C I I I. Pipinus miffa Romam legatione, Zacharianj PP. interrogat de regibus Francorum ex antiqua Merovingorum ftirpe defcendentiunr, qui regesquidem dicebanfur, fed poteftas regni, tota apud majorem domus hahebatur, excepto, quod cartae &'privilegia regis nomine fcribebantur , èc in martis campum, qui rex dicebatur, plauffro» bobus t-rahentibus , veöus, atque in loco eminenti fedens, femel in anno d pcpulis vifusr publica dona folemniter fibi oblata accipiebat,, ftante coram majore domus, tic quas deinceps eo anno agenda effent, populis- adnnnciante t ficque rege domum redeunte, caetera- regni negotia major domus adminifirabat. (743 .Annal*. Anonymi, A. C. 75 / .) S'il al'.oit en aucun lieu par aucune aventure, il fe faifoit charier en un cbarriot a bceufs ou a bugles , ainfi comme un payfan. Ainfi alloit au palais d la commune, aff&mblée.dupeuple, qu'une fois l'an étoit faite pour le profit commun du royaume. Après retournoit en fa maifon & deraouroit la toute 1'année^ ( 667. Grande Clir± &■ 4  to4 Chronologie vol. i, en la vie de Charlemagne. Chr. du Tilkt.) Quocumque, inquit, eundum erat, carpento ibat, quod bubus junais, & bubulco ruftico more agente trahebatur. Sic ad palaiium, fic ad publicum populijui conventum, qui annuatim ob regni utilitatem celebrabatur, ire, fic domum redire folebat. ( Egïnardus de vita Car. M.) CHILDERIC II. Childericill. Regis Francorum, & Pipini majoris domus, decretum in comitiis futjjionenfibus. In Dei nomine, & trinatatis, anno feptingentefimo quadragefimo quarto ab incarnatione Chrifti, fub die fexto nonas martii, & luna vxj in anno fecundo Childerici regis Francorum ; ego Pipinus dux & princeps Francorum , dum pluribus non habetur incognirum, qualiter nos in Dei nomine, una cum confenfu epif. coporum, five facerdotum, vel fervorum Dei concilio, feu comitum, & optimatum colloquio apud fueffinonis civitatem,fynodum, velconcilium facere decrevimus; quod ita in Dei nomine & fecimus. (744. Childericus II rex, , praster id quod in alia regna huc ufque detenuit. Pari conditione convenit Cal. Mart. omnibus adunatis, ut quicumque raptum facere pra;fumpferit, periculum mortis incurrat,« & nul» lus de optimatibus noftris de tam turpiffimo » vitio prsefumat rogare,fed inimicum Dei untif» quifque a modo perfequatur ». Qui vero edictum noftrum aufus fuerit irrumpere, judex loei illius folatio colleóto , ipfum raptorem occidat, & jaceat forbatutus. Et fi ad ecclefiam confugerit, reddatur ab epifcopo,& fine ulla precatione exinde feparetur. Et fi ipfa muiier poftea raptori conlenferit, ambo pariter in exilio tranfmittantur. Et fi foras ecclefiam. capti fuerint, pariter occidantur, & facultates illorum parentibus legkimis dentur, & quod fifco noftro debitum eft, acquiratur. De homicidiis vero ita juflimus obfervari, ut quicumque aufu temerario alium fine caufa occiderit, vitae periculo feriatur, & nulto pretio fe redimere unquam valeat. Et fi convenerit, ut ad compofitionem quis defcendat, nullus de parentibus, aut de amicis ei quicquam juvet. Quifquis fecerit fuum Weregildum, omninö componat, quia juftum eft, ut qui injuftè novit occidere, difcat juftè mori. De farfalio ita convenit, ut quicumque in  iro Chronologie mallo prasfumpferit, farfaliumminarefine üubïö fuum Veregiidum componat , quia omnino voljmus, ut farfalius reprimatur. Et fi forfitan, ut adfolet, judex hoe confenferit, & fortaffe adquiefcet iiium farfalium cuftodire, vita; përiculum per omnia incurrat. De furibus & malefdöoribus ita decrevimus obfervare, ut fi quinque , aut feptem bonae fidei homines, abfque inimicitia interpofna criminofum cum facramenti interpofuione effe dixerint, quomodo contra legem furtum perpetravit, fecundüm legem moriatur. Et li judex comprehenfum latronem laxaverit, vitamluam amittat, & haec difciplina in populo modis omnibus oblervetur. Similiter Cal. Mart. coloniat convenit, & ita bannivimus, ut unufquiique judex criminofum latronem, ut audierit,ad caiam fuam ambulet , &c ipfum ligare faciat, ita ut fi Francus fuerit, ad noflram prsfentiam dirigatur. Et fi debilior perlbna fuerit, in collo pendatur. Si quis centenarium, aut quemlibet judicem noluerit fuper malefaöorem ad prindendum adjuvare , fol. fexaginta omnino condemnetur. Et quicumque fervum criminofum habuerit; & judex rogaverit ipfum praefentare, & noluerit, fuum Weregildum omnino componat. j  DES ÉTATS GÉNÉRAUX. U# Similiter convenit, ut fi furtum faöum fuerit Capitale , de praefenti centena reftituat, &i caufator centenarium cum centena requirat. Pari conditione convenit, ut fi una centena in alia centena veftigium fecuta fuerit & invenerit, vel in quibufcumque fidelium noftrorum terminis veftigium miferit.& ipfum in aüam eentenam minimè expellere potuerit, aut conviöum reddat latronem, aut capitale de praefenti reftituat, & cum duodecim perfonis fe ex hoe facramento exuat. Si fervi ecclefiarum, aut fifcalini furtum admilerint, fimilem pcenam fuftineant, ficut reliquorum fervi Francorum. Diem Dominicum fimiliter placuit obfervare, ut quicumque ingenuus, excepto quod ad coquendum, vel ad manducandum pertinet, opera alia praefumpferit, fi Francus fuerit, fol. xv. componat, fi Romanus, vij. fol: fervus autem tres folidosreddat, autdorfum fuum componat. De Chrene chruda , lex quam paganorum tempore obfervabant, deinceps nunquam valeat, quia per ipfam cecidit multorum poteftas. Datum pridie Cal. Mart. anno vigejimo regni Domini nojlri Colonia. Ego Childebertus rex, una cum confenfu , & voluniate Francorum, & Neuftrafiorum, &  ii2 Chronologie exhortatione fancti Germani Parrhifiorum urbis Pontificis, vel confenfiu epifcoporum ccepi conftruere templum in urbe Parrhifiaca. ( Aimoin. 1.2, ck. 20 ). Qua; Chidebertus & Clotharius cum proceribus, & omni populo Francorum, habuerunt. (539. Ckildebert). C L O V I S. Anno enim decimo fexto, ex quo fceptra fufceperat regalia, pontifices & totius gemis principes Clippiacum convenire jubens , mediufque inter eos folio refidens, hoe abuit fermonis exordium. (Aimoin. I. 4,cap.4/). Convocatis igitur Francis, dicit ad eos: indignamini qusfo tam meam injuriam, quam interitum parentum veftrorum, ac recolite Thoringosquondam fuper parentes noftros violenter adveniffe, ac multa illis intuliffe mala. Qui datis obfidibus, pacem cum his inire voluerunt : fed illi obfides ipfos diverfis mortibus peremerunt, & intuentes fuper parentes noftros, omnem fubftantiam abfiulerunt, pueros per nervum fcemoris ad arbores appendentes, puellas amplius ducentas crudeli nece interfecerunt, ita ut ligatis brachiis fuper equortim cervicibus, ibfique acerrimo moti ftimulo, per diverfa  BES ÊTAtS GÉNÉRAUX. ïif diverfa petentes, diverfas in partes fceminas diviferunt. Aliis vero fuper orbitas viarum extenfis, fudibufque in terram confixis, plauftra defuper onerata tranfire fecerunt, confradtifque offibus canibus, avibufque eas in cibaria dederunt. Nunc autem Herminefredus quod mihi pollicitus fefellit, & omnino hsee adimplere diffimulat : ecce verbum diredhim habemus: eamus cum Deiadjutorio contra eos. Quod illi audientes, & de ranto fcelere indignantes,uno animo, eademque fententia, Thonngiam petiverunt. ( 514. Greg. Thuro. hifi. I. j> cap. y. Chron. du Tilkt). En ce tems étoit faint Remy, archevêque de Reims, dont il advint qu'entre les autres chofes qu'ils lui tollirent, & prïndrent un orcel d'argent , qui moult étoit grand tk pefant. Le prudhomme manda par unïïen meffage, & pria moult, que fe autre grace ne lui vóuloient faire, qu'ils voulfiffent rendre fon orcel. Le roi i-épondit au meffage, qu'il allat après lui jufqu'a, Soiflóns; car Ik feroient mifes enfemble & départies par fort toutes les chofes qu'ils avoient prinfes, & Ie roi lui dit: fi j'ai a ma part celui örcelquetu demandes, je te Ie rendrai maintenant. Quand le roi &: fes gens furent venus è Soiffons.il fit crier parmi lolt, que toute la proie fut mife enfemble, pou* départir & pouf; Tornt FL H,  n4 Chronologie rendre telle portion a chacun comme il devoit avoir par fort. Mais pour ce qu'il fe doutoit qu'un autre eut celui orcel, 8c qu'il ne lui échütpas a fa part, il appella fes princes 8c des plus nobles chevaliers qu'il eut, 6c leur dit ainfi: feigneurs mes chevaliers Sc compagnons , quand prince ou roi veut accomplir fa volonté d'aucune chofe envers fes gens, « il eft mieux » droit Sc raifon felon la dignité, qu'il fafie par » commandement que par priere »; mais toutefois j'aime mieux requérir aucune chofe de 'vous par débonnaireté Sc par grace, que par autorité 8c feigneurie; « car il appartient a lyran » d'accomplir fa volonté par cruauté », a bóns princes par débonnaireté 8c par douceur de paroles, la dignité de mon nom doit en fuivre les exemples de mon débonnaire pere. Si j'aï plus cher que Fon me porte honneur 8c révérence par la raifon de débonnaireté, que de paour , dont je vous prie plus par amour que par feigneurie, que vous me donniez celui orcel pardeffus ma portion, 8c je vous promets que je vous guerdonnerai bien cette bonté en tems 8c en lieu, fe je puis en amour vers vous impét. er cette chofe Sc en bonne grace. Les barons répondirent: « Sire noble roi, nous » connoiffons bien que nous t'avons fait fer» ment Sa hommaige, 8c que nous fommes tous  2> E S ÊTATS GÉNÉRAU36 11 5 » prêts de mourir, fe befoin eft, &c pour la » propriété de ton nom & royaume, & pour la » fanté de ton corps défendre. Sgaches qu'il » n'eft nulle chofe que tu nous requieres, ne » que tu demandes, que nous te doivons refu» fer, ne contredire : nous ne demandcns nul » droit en toutes ces dépouilles, a nous n'en » appartient rien : ta volonté en peut faire » pleinement, ou jetter en eau, ou ardre en » feu ».Le roi, après qu'il eut oui celle réponfe, il s'émerveilloit dela bonne volonté que les barons & tous ceux de 1'oft envers lui avoient; fi leur en feut moult bon gré, & les remercia tous. II vint avant adonc un des Francois, ému de grande légiereté de courage , & ferit de 1'efpece en 1'orcel, & puis dit au roi: tu n'emporteras rien de toutes ces dépouilles, fors que tu en auras par droit, & fort, & par droite portion. Moult s'émerveilloient tous de fa folie & de fa légiere hardieffe. Mais le roi qui ne fit pas grand femblant qu'il portat cette chofe en couroux , print 1'orcel &le rendit au meffager de faint Remy, ainfi comme il Lui avoit promis. Après que ces chofes furent advenues , le roi manda fes princes & fes barons. Commandé fut généralement que un chacun vint armé & revétu comme pour fon corps défendre & affaillir fes ennemis. Quana H z  n6 Chronologie 1'oft fut affemblé & chacun fut armé le mieux qu'il put, le roi iffit hors pour fon oft regarder, &l pour fcavoir comment & de quelles armes chacun étoit appareillé. Quandil eut tout 1'oft avironné , il vient a celui qui ferit de 1'efpece en 1'orcel, bien le regarda & advifa, & puis après lui ditrj'ai tout 1'oft vu &C ai prefque vu comment chacun eft armé & atourné, mais je n'ai nul vu, ne appergu plus mal accouftré , ne plus mauvais que toi, ne que ait armes moins fouffifans des tiennes; car ta lance, ton écu, ne ton efpece ne valent rien. Après mit la main a 1'épée de celui, & puis la jetta contre terre. Tandis comme celui fe baiffa pour prendre fon épée que a terre gilToit, le roi tira la fienne, &t le ferit fi grand coup parmi la tête, qu'il le jetta tout mort, tk puis lui dit cette parole: ainfi feris-tu en 1'orcel k Soiffons. Après ce qu'il fut mort en telle maniere, le roi départit fes gens: fi retourna chacun en fa contrée. ( Grande chron. volume l , en la vie de Clovis ). Tune rex legato prascepit dicens: fequere, inquit me uique Sueffionis, ibi qusecapta funt , forté miffa dividentur: & li mihi fors jufta vas, pro quo oras, dederit , in recipiendo eo nulla tibi generabitur mora. Parens ille praecepto iter regis ufque ad praedeftinatum prolecutus eft locum. Quó cum perveniffent,  DES ÉTATS GÉNÉRAUX. 117 ex regis ediclo , fuppellex cunfta in medium defertur lorte dividenda. Porrö rex veritus ne fortè forte miffa , urceus ad alterius deve-: niret dominium., convocatis principibus, hac eos alloquitur oratione : cum rationis ordo expofcat principem imperare potiüs fubditis quid velit, quam prece depofcere : ego tarnen, fortiflimi commilkones , malo cum gracia , quam cum aufiVritate quicquam k vobis exigere : « Tirannorum quippe eft levia quae» que cum vi & feritate fubjectis praecipere ; » bonorum vero principum ad-gravia etiam , » atque difficilia toleranda , fola lenitate in»> vitare verborum. Pcegii itaque dignitas no» minis , pii patris debet exempla fedtari, ut >> plus reverentiae fibi ex benignitate , quam » timoris exigat ex crudelitate »■. Redtius igitur duxi , manfueti anirai benevolentia id vos rogare , quod poffem regia ufus authqritate inconfultis vobis praeripere. Unde oratos vos omnes effe volo , ut vas iftud , urceum deraonftrans, veftra mihi munificencia extra fortis meae portionem tribuat , deque remunerationis premio nullus veftrum ambigat , cum me retributorem profitear., fi hoe cum bona quivero imperare gratia. Ad haec regi refpondentes Franci , dixerunt : « Nos , 6 inclyte » rex, acrammto olim tïbi fidem promijiffe re- H 3  i iS Chronologie » colimus , utque mortem pro corporis tuifalute » fubire parad ejfemus , profiuri non erubuimus : » Ji ergo vitam ipfam , qua cunclis charior ejl w opibus, ubi vovimus , quid majus erit quod » jujle negemus ? Sane ex his jpoliis nonpartem, » fed totum tuce poteflati cedimus , ut volueris » fac , aut mergi jluminibus , aut jlammis ju» beas tradi voracibus , nihil ad nos attinet , h tantum ut tuo jatisfiat dejiderio m. Tam devotam totius erga fe exercitus voluntatem rege admirante , atque laudante , unus ex Francis, Ievitate animi commotus , gladio urceum percutiens , ad regem dixit : tu , inquiens, rex nihil hinc accipies, nifi quod tibi vera fors auferre permiferit. Mirantibus caeteris, fimulque audaciam viri incufantibus, re^ moleftè id fe ferre diffimulans, vas fupra memoratum, Legato pontificis reddidit.^"/r/£72/o labenüs anni circulo , idem princeps exercitum adunari praecepit in campoqui Martius dicebatur, generale proponens ediclum , ut fic adeffent armati, ac fi contra hoftes pugnaturi. Procedit eo loco quod juffum fuerat exercitus , geftis militiaa clarus , ac nitore armorum confpicuus. Progreditur & rex Clodoveus , ordinatam fuorum aciem infpecturus : circuitoque agmine , devenit ad eum qui urceum fuo percufferat mucrone ; quem intuitus ? taliter allo-  DES ÉTATS GÉNÉRAUX. 119 quitur : univerfum , inquit perluftrans exercitum , te ignaviorem non reperi , nee inutiliora gerentem arma confpcxi: nam nee hafta , aut clypeus nee galea , aut gladius alicujus funt utilitatis. Et extenfa manu , Francifcam ejus terras de'jecit( quae fpatadicitur) ad quam reciplendam ciim fe ille inclinaffet, rex fuam vagina exemit, ejufque cervici valido conamine illifit dicens : fic tu Sueffionis in urceo illo mihi fecifti. Eo itaque mortuo , rex unumquemque ad propria redire praïcepit. ( Aimoin. I. I , ck. f2.) Igitur de ecclefia Remenfis urbis magnum hoftis urceum abftulerat cum reliquis minifterialibus , fanctus atque ; apofiolicus Remigius pontifex, ejufdem urbis ad Chlodoveum veniens, poftulat fi aliud de facris vafis recipere non mereretur , faltem vel urceum illum reciperet. Audiens rex dixit: mitte nuncios ufque Sueffionas ; ibi quas acquifita funt, dividenda erunt: fi mihi forsillud dederit, pé. titionem tuam implebo. Ciim prseda in medio dividenda poneretur, ait rex , Rogo ut faltem mihi vas iftud extra partem concedatis. Haec , rege dicente , refpondent Franci: Gloriofe rex , qutz cern'wus tua funt , fed & nos. tui fumus : Domine , quod tibi placet fac. Tune unus levis > invidus 8t facilis , voce magna H4  ne» Chronologie urceum impulit dicens. Nihil hinc accipies , nifi quod tibi fors vera largitur. Rex injuriam hanc patientia lenivit. Sorte pofita , acceptum urceum Beato Remigio tranfmifir, fervans abditumfub pe£torevulnus. Cal. martii jufft omnes armatorum phalangas cftenfuros venire , ubi cuncïos circuibat, venit ad urcei percufforem, dicens ad eum : inculta eft armatura tua , nequefecuris e-l utilis: apprehenfa fecure ejus, terras dejecit. Et ille ciim paululum inclinatus fuifTet, rex elevatis manibus, fecurim in caput ejus defixit. Sic , inquit & tu Sueffionis urceo. fecifti. Magnum fibi per hanc caufam Franci tïmorem ftatuerunt. (Collecl.chr.exTkoronïco i. 4 , c, 16.) Dehinc adveniens Suefïïonas, cundto onere praedaa in medium pofito, ait rex: Rogo vos, q fortiffimi praeliatores, ut faltem mihi vas iftud ( hoe enim de urceo fupra memorato dicebat) extra partem concedere non abnuatis.. Haec rege dicente , illi quorum erat mens fa* mor, aiunt: Omnia, gloriofe rex, quee. cernitnus , tua, funt : fed & nos ipfi tuo fumus do-' mino fubjugati. Nunc quod tibi beneplacitum videtur facio : nullus enim potefati tu refifer& yalet. Cum illi haec ita dixiffent , unus levis x jnvidus, ac cerebrofus cum voce magna , eleYatam bipennem urceo impulit, dicens; nibjJt  DES ÉTATS GÉNÉRAUX. 141 hinc accipies, nifi quae tibi fors vera largitur. Ad haec obftupefa&is omnibus , rex injuriam fuam patientiae lenitate coercuit , acceptumque urceum , Nuncio ecclefiaftico reddidit , iervans abditum fub peftore vulnus. Tranfacio verb anno, juffit omnem cum armorum apparatu advenire phalangam , oftenfuram in campo Martio fuorum armorum nitorem. (489. Greg. Turo. hifi. I. % , c. 27.) Perafto denique anno , cunclum fui exercitus apparatum folitö prodire jubet in campum , ui armorum fpeculetur de more nitorem. Quem conventum a Marte Martium vocare confueverant. Rex ergo inftru&as circumiens rité phalanges , ad eum , qui dudum percufferat urceum, pervenit, fpretifque ipfius armis , ejus tandem Francifcam projecit in terram. (Flodoar. Ecclef. Remenfi. hifi. I. I, c. i3.) Quod audiens Chlodoveus , quod fcilicet interfectus efiet Sygibertus, & filius ejus, in eundem locum adveniens , convocat omnem populum illum , dicens : audite quid contigerit. Dum ego, inquit, per Scaldem fluvium navigarem , Chlodericus filius parentis mei , patrem fuum infequebatur, verbo ferens', quod ego eum interficere velim. Cümque ille per Buconiam filvam fugeret, immiffis fuper eum  'iti Chronologie latrunculis , morti tradidit , & occidifs, Ipfe quoque dum thefauros ejus aperit, a nefcio quo percuflus interiit. Sed in his ego nequaquam confcius fum : nee enim poffum fanguinem parentum meorum efFundere , quod fieri nefas eft. Sed qtiia haec evenerunt, confilium vobis praebeo, fi videtur acceptum, convertimini ad me, ut fub mea fitis defenfione. At illi ifta audientes , plaudentes tam palmis, quam vocibus , cum elypeo eveöum fuper fe regem conftituunt , regnumqüe Sygiberti acceptum cum thefauris , ipfos quoque fuae ditioni adfeivit. « Profternabat enim quotidiè » Deus hoftes ejus fub manu ipfius , & au» gebat regnum ejus , eo quod ambularet recto » corde coram eo , & faceret qu» erant in oculis ejus. » ( Greg. Turo. hifi. l.z> c. 40.) Rex quoque veritate cognita, uni fe Deo famulaturum devotus fpondet. Procerum fanè regni, atque exercitus fe tentarurum fententiam. Placet conditio , & ex regis edifto » fit puhlica populi convocatio , conveniunt regni primates, nee militaris quoque manus defuit. { Aimoin. lib. 1 , cap. i&.y Après il dit k faint-Remy , & k la reine, qu'il tenteroit, & effayeroit le cceur & la volonté de fes barons , & du menu peuple 1  des États Généraux. 115 car ils fe convertiroient plus dévotement &Z plus débonnairement par belles paroles, que fe il faifoit a force. Cette condition plut moult a faint-Remy & h la reine. Le peuple & les barons furent tous enfemble par le commendement du roi ; & le roi fe leva au milieu d'eux , & commen5a a parler en telle maniere. ( 499. Grande Chron. en la vie d» Clovis. ) Faramundi legibus Salicis addenda; in comitiis Aquifgranenfibus , anno imperii fui quinto , cum univerfo ccetu populi promulgatae , & poftea in Theodonifuillanis comitiis confirmata; , & pro lege haberi juffa;. (490. Goldajlus.) Quam Clodoveus rex Francorum ftatuit, & poftea una cum Francis pertractavit ut ad titulos aliquid amplius adderet, fic ut h primo ufque ad feptuagefimum octavum perduxerit. Indé vero Childebertus poft multum tempus tractavit, ut quidquid invenire potuerit, ibi cum fuis Francis adderet: hoe eft, a Ixxviij, ufque ad lxxxiiij,quidquidinvenit,dignè ibidem impofuiffe cognofcitur. Iterum cürn hos titulos Clotarius a Germano fuo feniore gratanter excepit , fic & ipfe fimiliter 'cum regni fui fapientibus invenit , ut a lxxxiiij , adderet, & ita perfectum. Et indé qua; ipfe invenit , ad  ii4 Chronologie fratrem fuum refcripta direxit. Et ita inter fe firmaveruut, ut ifta omnia qua: confiituerunt, inviolabiliter , omnique tempore confervata fuiffent. ( ln fine, legis Salie ce. Traelatus legis. Saliccc.) PHARAMOND. Mais pour 1'interprétation , réformation 8c amplication des couiumes 8c polices des Francois , encore nonécrites, furent lors députés Vuifogaft J Salogaft , Bodogaft & Vuidogaft , qui n'étoient noms d'hommes , ains d'officiers , gouverneurs, baillis ou juges de quatre provinces: lefquels ès trois Salinghain, Bodinghain & Vuidinghain ; c'eft-a-dire pays des Saliens , Bodiens 8c Vuindiens, affemblerent les états; & par travis d'iceux , atrêterent , & firent écrire ladite loi, comme de nos jours a été obfervé, pour réformer 8c rédiger en preuve littératoire , les coutumes de France , 8cc. ( Du Tillet des anciennes loix de France. Prolog, legis Saliccc.) In comitiisquondam Salizenfibus per Francos. Sc eorum proceres decretae , Sc per regem poftea , cum eifidem Francis, & toto ccetupopulï% connrmata; , Sc fencita;. Anno Domini ccccxxiiij. (422. Sigeb. Goldafius A. G. cccc xxiv* de lege Salicd.)  BES ÉTATS GÉNÉRAUX. IlJ Regem vero caïterarum more nationam , Franci fibi eligentes Faramundum , Marcomiri filium , folio fublimant regio. (420. Aimoin. I. 1 , cap. 4, anno 2(f, Archetdii cy. Honorii Augg. Profper in Chron.) Placuit , atque convenit inter Francos, & eorum proceres , ut propter fervandum inter fe pacis ftudium , omnia incrementa veteriun rixarum refecare deberent, & quia ceteris gentibus juxta fe pofitis , fortitudinis brachio praeminebant , ita etiam legum authoritate praecellerent , ut juxta qualitatem caufarum , fumeret criminalis aöio terminum. Extiterunt igitur inter eos elecli de pluribus , quatuor viri his nominibus, Vuifogaftus, Bodogaftus, Salogaftus , & Vidogaftus , in villis qua; ultra Rhenum funt , Salehaim , & Bedohaim, Vuidohaim , qui per tres mallos convenientes , omnem caufarum originem follicitè difcutiendo, traclates de fingulis judicium decreverunthoc modo. ( Prologus legis Salica:. )  jiS Notice sur la Chronologie N O T I C E SUR LA CHRONOLOGIE DE SAVARON. Il n'eft pas néceffaire que nous faffions fentir combien une notice raifonnée fur la chronologie de Savaron, qui indique le caractere de chaque affemblée, & arrête les lecleurs fur les affemblées qui, en altérant la conflitution , ont occafionné les révolutions des dinafties régnantes ; il n'eft pas néceffaire , difonsnous, de faire fentir combien cette notice eft utile. Savaron place, a l'an 422, 1'affemblée des Francs, qui a été réellement tenue en 419 ou 420. Le prologue de la loi Salique , que nous avons inferé dans le ie volume de cette colleótion , annonce que cette loi fondamentale eft le .premier contrat civil de la nation, & qu'il fut hautement & publiquement tranfigé avectous lesmembres intégrans de 1'état. C'eft de cette première affemblée qu'il faut partir, pour reconnoïtre le droit de  öe Savaron: 117 ïanation , toujours convoquée dans les grandes occafions, & il paroït qu'elle s'étoit affemblée même avant Pharamond , & que 1'ufage en étoit reconnu depuis un tems immémorial dans les Gaules. L'exclufion des femmes k la Terre Salique eft bien plutöt la fuite d'une ancienne tradition , qu'une ftipulation formelle dans ce premier contrat national. On ne doit point confidérer comme une formule oifeufe le début de cette loi, placuit at que convenit inter Francos & eorum proceres. On s'arrêtera , fans doute, aces expreffions remarquables, citées par Savaron , in comitiis quondum fali^enfibus per Francos & eorum proceres decretce & cette diftindtion marquée & per regem pojiea cum eifdem Francis & toto catupopuli ( & tout le peuple ) confirmatce & fancitce anno domini ccccxxiiij ; il confte également , qu'ils élurent roi Pharamond. Franci Jibi eligentes Faramundum Marchomiri filium,folio fublimant regio. Leshiftoriens font d'accord avec Savaron que Vifiogafi , Befogafi, Salogafi, Wldogafi , étoient quatre officiers repréfentant les quatre provinces principales de la nation, qui vinrent en députation a cette importante affemblée pour réformer les loix , &z donner le caradtere de Joi a d'anciennes traditions,  ïz8 Notige sur la Chronologië 457- La dépofition de Childeric Ier & l'éleétiofi du cómte Gilles, commandant des troupes Romaines dans les Gaules , furent faites dans une affemblée nationale , &c Childeric ne dut fon retour qu'a une feconde affemblée. ( 463 ) 487. A Cette époque on retrouve plus que des traces des affemblées du champ de Mars &z de Pépoque des convocations. On les appella , dit 1'abbé Velly , que nous tranfcrivons de préférence a tous les autres hiftoriens qui difent la même chofe : « prefque dans les mêmes » termes, on les appella le champ de Mars, paree » que ces diétes fe tenoient au commencement » du mois qui porte ce nom. C'eft par la même » raifon que dans la fuite il futnommé le champ » de Mai. ces affemblées avoient plufieurs » objets: on y faifoit la revue des troupes : » on y déliberoit de la guerre & de la paix ; » on y travailloit a la réformation des abus » du gouvernement, de la juftice&desfinances. » C'étoit 1^ qu'oti donnoit des tuteurs aux » rois  de Savaron; f|| *> rois mineurs , qu'on faifoit le partage des » tréfors & des états du monarque défunt; » qu'on déterminoit le jour & Ie lieu pour » 1'inauguration du prince fucceffeurau tröne ; » qu'on inftruifoit le procés des grands eri» minels; c'étoit Ia enfin que les rois rece» voient tous les ans le don-gratuit. On apH pelloit ainfi le préfent volontaire en argent,1 » en meubles, ou enchevaux, que les grands » du royaume faifoient a leur fouverain. Ce » nom lui eft toujours demeuré , quoique par, » la fuite il ait ceffé d'êfre libre.Le roi pré» fidoit a ces diétes générales de la nationw » II étoit accompagné des grands officiers de » la couronne, du maire du palais, de 1'apo» crifiaire , ou aumonier, du chambellan , du » connétable , du grand échanfon, du réfé-« »> rendaire , ou chancelier. Les évêques, ou » les abbés n'étoient point difpenfés de s'y » trouver. >♦ On mandoit auffi les ducs & les comtesj » Ces djgnités héréditair es de nos jours » n'étoient alors que de fimples commiflions, » que le prince donnojt pour un tems. Le » roi , ou le maire du palais, propofoit les » queftions qu'on devoit examiner: l'affemblée » déliberoit: la piuralité des voix emporto|| 7'ome FI, \  130 Notice sur la Chronologie w la décifion: ce que la diéte avoit prononcé » devenoit loi de 1'état ». On doit remarquer attentivement.la traduclion que Savaron a faite de la grande chronique de la vie de Clovis. On y voit, a 1'occafion du vafe réclamé par S. Remi, les bornes de 1'autorité royale , la nature du ferment prononcé par les barons , & les privileges des Francs que Clovis refpe&a. Peut - être eut - il mieux fait de ne pointfe venger; & il n'obtint une vengeance que par une a£tion que nous ne pouvons trop approuver; ce qui prouve qu'il n'avoit pas le droit de punir. De quelle maniere le tua-t-il? ce fut avec emporte* ment:«tandis que celui-cifebaiflapourprendre » fon épée qu'a terre giffoit,leroi tira lafienne, » & le férit fi grand coup parmi la tête , qu'il » le jetta tout mort, & puis lui dit cette pa» role ainfi féns tu en 1'orcel a Soiffons.» CHILDEBERT Ier. Ici commence la première divifion du royaume en plufieurs lots , qui forment autant de fouverainetés ; « mais quoique divifés » &c gouvernés par des princes,( Velly,hifw toire de France ) également indépendans ,  de Savaron, 131 » ces états ne fuivoient qu'une même loi & *> ne faifoient qu'un corps de monarchie. Les » feigneurs des quatre royaumess'afiembloient » de tems en tems en un même lieu; on y » traitoit des affaires générales de la nation ; » on y jugeoit en commun les procés qui in' » térefToient l'empire par 1'importance du fujet, »> ou par la qualité des parties ». Childebert demande le confentement de la nation W cum confenfu & voluntatc Francorum & Ncufirafwrum pour batir 1'églife de Paris. CLOTAIRE II. II s'écoula environ un fiecle fans que Savaron faffe mention d'aucune affemblée générale. Cependant quoique nos rois fuffen^dans un état continuel de guerre , qui tenoit pour amfi dire la plus grande partie de la nation affemblée & en mouvement , il n eft pas moins certain que le fupplice injufte de Brunehaut fut ordonné dans une affemblée des grands, & des maires du palais. Ce fuplice auroit dü être davantage remarqué. II eft la caufe de 1'anéantiffement de la première dinaftie. Une grande injuftice ne peut guere être commife fans de grands facrifices. ClotaireIIavoit promis aux maires, qui avoient I %  131 Notice sur la Chronologie. été fes complices , de leur confirmer lamairie durant toute leur vie. II rendit donc la mairie héréditaire. De-la on vit ces régens devenir rois ; & les rois tenus en tutelle. L'indigne & criminelle familie de Thieri laifTa ufurper le tröne , & comme dit Pafquier , Dieu en fit une punition d la royale. Le regne deClotaire II méritoit encore d'être remarqué par le parlement tenu a Bonneuil. Savaron ne parle pas non plus de raffemblée de Maffelac , en 615 , après laquelle la convocation de Bonneuil eft placée. Elle fut la plus nombreufe de toutes celles qu'on eut vues; & jamais les demandes des feigneurs ne furent plus altierées , & le roi ne fut jamais plus doux. II accorda tout ce qu'on voulut. II eft bon d'obferver que jufques-la, il n'y a point d'exemple encore que les rois ayent refufé les juftes demandes de la nation affemblée, mais on voit les maires du palais , une fois de venus puiffans , abolir ces affemblées, qui ne font rétabliesque par Pepin-le gros; & ne fe tenoient que deux fois l'an. « II ne faut pas croire, ( dit 1'abbé Velly,) » cependunt que 1'adminiftration de la juftice » fut négligée: Chaque état, chaque profeffion ♦> avoit fon tribunal , comme fes loix &c fes \> coutumes L'eccléfiaftique étoit jugé par le  de Savaron. 133 » clergé, le militaire par des gens de guerre , » les nobles par des gentilshommes, le peuple » par des centeniers dans les bourgs & les » villages , par des comtes dans les villes , » par des ducs dans les métropoles ou ca» pitales. 11 n'y avoit aucun degré de jürif» diélion parmi ces tribunaux: on n'appelloit » de leurs fentimens qu'au roi. Sil'appel étoit » fondé , le juge devenoit refponfable des » dammages & intéréts ; fi 1'appellant avoit » été bien jugé ,*on le condamnoit a une » amende pécuniaire, s'il étoit noble ; au fouet, » s'd étoit roturier. On ne connoiflbit prefque » point alors d'autres peines que les taxes » pécuniaires. II n'y avoit gueres que le crime » d'état qui fut puni de mort : les autres fe » rachetoient a prix d'argent. La loi Salique » prefcrit ce qu'on doit au roi pour 1 amende, » a la partie pour réparation: on mettoit la » vie d'un évêque k neuf cents fous d'or, » celle d'un prêtre a fix cents , celle d'un » laïque a quelque chofe de moins, fuivant » fa qualité.Le centenier n'avoit point pouvoir >♦ de mort: le comte ne 1'avoit que dans cer>► taines circonfiances: le duc n'en ufoit qu'avec » de grandes précautions. La cour envoyoit » de tems a autres des commiffaires dans les » provinces ; jamais moins de deux; toujours I 3  134 Notice sur la Chronologie » un évêque , un duc , ou un comte. Leur » emploi étoit d'écouter les plaintes , & d'en » faire rapport au monarque ». On ne connoiflbit point fous la première race ce que c'étoit que gens de robe. Les juges, nous ne parions que des Laïques, rendoient la juftice, armés de leur épée, de leur hache, & de leur bouclier. Leur commifïïon , qui n'étoit que pour un tems, leur interdifoit toute acquifition dans Fétendue de leur jurifdiction. Elle demandoit une grande connciffance des loix nationales & des coutumes locales. Les Francois devoient être jugés fuivant la loi falique; le gaulois au-dela de la Loire, fuivant le droit Romain, celui des pays feptentrionaux fuivant le droit coutumier. Ils tenoient leurs affifes tous les huit ou quinze jours, felon la multitude des affaires, toujours dans un lieu public, oü chacun put avoir un libre accès. Chaque particulier plaidoit lui-même fa caufe; celles des veuves & des pauvres étoient privilégiées : ils étoient fous la protection de 1'églife : il n'étoit pas permis de rien déterminer contre eux, qu'on n'en eut donné avis a 1'évêque. Les prélats jouifToient alors d'une fi grande confidération, que non-feulement leur interceffion fauvoit la vie aux criminels, mais qu'on pouvoit porter devant eux une affaire commencée de-  de Savaron. 135 vant un tribunal féculier. La loi de Conftantin 1'ordonnoit ainfi; Charlemagne la renouvella : Louis le Débonnaire la confirma. L'évêque connoiffoit par lui-même öu par fon official, de tout ce qui pouvoit être la matiere d'un. pêché, des marchés faits avec ferment, des mariages, des teftamens, des facriléges, des parjures , de 1'adultere. Ce pouvoir énorme étoit fondé fur la dignité de leur caraflere , fur la fainteté de leur vie, fur 1'étendue de leur capacité. La plupart des feigneurs ne fcavoient ni lire ni écrire. Ennuyés d'être foumis comme le peuple a la correction des prêtres, ils fe mirent enfin a étudier les loix. Quelquefois le monarque rendoit lui-mêine la juftice. L'audience fe tenoit toujours a la porte de fon palais. Quand il ne pouvoit pas s'y trouver en perfonne, il commettoit deux officiers pour recevoir les placets, èc répondre fur le champ a ceux qui ne demandoieht pas une longue difcuffion. II y avoit, outre ces maïtres de requêtes, un comiejuge. II avoit pour confeillers, des gens d'épée comme lui, qu'on appelloit échevins du palais. Ce tribunal jugeoit de tout ce qui regardoit 1'état , le prince & le public. Lorfque le roi y préfidoit , affifté d'évêques, d'abbés & de ducs, il fe faifoit rapporter l'affaire par le comte juge; recueilloit • I 4  Notice sur la Chronologie les voix, enfuite prononcoit. On voit une formule de ce prononcé dans le fecond livre de Marculphe. Quelque tems avant le parlement de Bonneuil, il s'étoit tenu a Paris, un concile compofé de foixante dix-neuf évêques, de quantité de feigneurs, & d'un grand nombre de vaffaux du prince, qu'on appelloit hudes oufiddcs. C'eft le premier de cette efpece : on en affembla fouvent de pareils fous Charlemagne & fes fucceffeurs. Ce fut la que 1'on fit ces ordonnances fi célebres, qui porterent le nom de capitulaires, paree qu'elles avoient été faites dans une affemblée , ou , comme on parloit dans ces anciens tems, dans un chapitre général de la nation. Le concile, le quatrieme de Paris depuis 1'établiffement de la monarchie dans les Gaules, déclare nulles toutes les éledions, ou fimoniaques, ou faites fans le confentement du métropolitain, du clergé & du peuple. Le troifieme canon défend aux eccléfiaftiques, quelques rangs qu'ils tiennent, de fe prévaloir contre leur évêque du crédit des grands, ou même de 1'autorité du monarque. On régla par le quatrieme, que les juges féculiers ne pourroient ni condamner, ni faire punir un clerc a l'infiju de fon prélat. On excommunia les religieuzes qui auroient quitté leur habit, Enfin, on renou-;  de Savaron; 137 Vella la défenfe des mariages inceftueux. Le roi fit publier une ordonnance, oü, en confirniant les ftatuts du concile, il ajouta ce qu'il crut devoir aux prérogatives inviolables de la« couronne. Le monarque déclare par fon édit, que le prélat élu en Ia maniere prefcrite par les peres du concile, ne pourra être facré qu'en vertu d'un ordre du fouverain : que tout clerc qui aura recours au prince pour quelque caufe que ce foit, fera recu en grace, s'il fe préfente a 1'évêque avec des lettres de la cour : que 1 eccléfiaftique enfin ne pourra être jugé par le laïc, que lorfqu'il s'agira de quelque crime & qu'en ce cas les prélats & les juges iéculiers en connoitront conjointement. Clotaire, par la même ordonnance, décerne la peine de mort contre ceux qui auront enlevé de force, les veuves ou les vierges confacrées a Dieu, foit qu'elles demeurent chez elles, foit qu'elles vivent dans un monaftere. 11 finit par 1'abolition de tous les impöts nouveaux, ordonnant de s'en tenir a ce qui étoit en ufage fous les rois Gontran, Chilpéric & Sigebert. C'eft de tous les anciens édits qui font parvenus jufqu'a nous, celui ou toutes les forrhalités font Ie plus exaclement obiervées. On y voit, avec la  138 Notice sur la Chronologie foufcription du roi , celle du chancelier ou référendaire. C'étoit ainfi que par d'utiles régiemens, Clotaire s'efforeoit de couvrir 1'injuftice de fon ufurpation. Mais fi la diminmion des impörs lui mérita les applandiflemens des peuples Auflrafiens & Bourguignons, cette grande réformation ne fut nullement du goiït des grands, qui n'avoient trahi la familie de leurs maïtres, que pour vivre dans 1'indépendance. II priva Garnier, maire du palais, de fa place. On ne fcait fi Garnier étoit réellement coupable de quelque crime d'état, ou fi la crainte d'un fi méchant homme avoit déterminé ce prince a le maltraiter. Un auteur aflure qu'il n'affembla le parlement de Bonneuil que pour engager les feigneurs de Bourgogne a confentir è cette dépofition. Le fuccès ne répondit point a fon attente ; tous leprierentderecevoir le miniftre en grace, & de Ie confirmer dans fon emploi. II n'ofa les refufer tant il fentoit fa domination mal affermie ; & ce qui arriva 1'année fuivante , prouve bien que le crédit du maire 1'emportoit fur celui du monarque. DAGOBERT Ier. Nous n'ofons penfer que ce roi,qui a ordonné  de Savaron. 139 & fait la colleflion des loix des différentes nations foumifes a 1'empire francois, ait entrepris & achevé ce grand travail, & qu'il 1'ait revêtu d'une forme légale fans le fuffrage de la nation. C'eft auffi dans ces loix qu'il faut chercher 1'état des différentes claffes de fujets-, & quels étoient leurs privileges. C'eft-la qu'on verra dans combien d'erreurs eft tombé le comte de Boulainvilliers, en affirmant que, jufqu'a Charlemagne , il n'y a point eu de tiersétat. On y verra au contraire que ce tiersétat eft clairement reconnu dans les loix des peuples conquis ou foumis a 1'empire francis. C'eft de-la que pourroient partir prefque tous les habitans de nos provinces qui n'ont point rogé au paöe primitif. CLOVIS II. La jeuneffe des enfans de Dagobert fournit aux maires du Palais 1'occafion de s'élever fans ceffe & d'abaiffer les rois. II eft k remarquer que, jufqu'a 1'extindtion de cette race, tous les rois font morts en minorité , a 1'exception de deux, dont le plus agé mourut a trente-huit ans. Ce roi, fenfible aux malheurs dt fes fujets , qu'une grande famine défoloit, fit dépouilier les tombeaux de Saint-Denis, des lames d'or  Notice sur la Chronologie &C d'argent qui les décoroient; il enleva un bras du faint pour le placer dans fon oratoire; il n'en fallut pas plus pour le rendre odieux, & tout prétexte qui avilifloit le tröne, étoit faifi par les maires. Savaron veut fans doute parler de 1'afTemblée générale des prélats & des feigneurs de la nation , qui n'eut lieu que pour exempter 1'abbaye de Saint -Denis de toute jurifdicHon. CLOTAIRE III. Quand on écrit une chronologie des états généraux , il me femble qu'on doit marquer les caufes qui laiffent de longues lacunes & détériorent la propriété nationale; c'eft pendant le regne de ClotairelII, qu'Ebroïn, maire du Palais, devient defpote, après avoir forcé la reine a la fuite, défendit aux feigneurs de paroitre a la cour, & les difperfa. C'eft la première fois qu'on voit cette efpece de parlement rompu & difperfé, & qu'on ceffe d'entendre parler d'états ou de convocations générales. II faut croire que ces affemblées étoient tombées dans une forte de caducité Sc de mépris , puifqu'un maire, d'un feul mot, fans effort, les anéantit ; & que ni les grands ni la nation n'ont rien tenté pour s'affembler. Ebroin éleve Thierri  DE S A V A R 6 Ni Ï4Ï furie tröne; en fit defcendre Clotaire III, fans qu'il y eut la moindre réclamation. Les feigneurs, au lieu de s'appuyer fur la conflitution de 1'état, fe mettent en marche pour complimenter Fufurpateur; ils reeoivent, chemin faifant, 1'ordre de ne point aller plus avant, & de retourner. Ils obéiffent. Thierri lui-même, k qui Childeric offre fon appui, répond: je ne de-, mande rien ; on ma détröné injujlement ; j'efpert que le ciel prendra foin de ma vengeance. Eft-ce ainfi qu'une nation fe laiffe dépouiller du plus beau de fes droits, ou plutöt n'en faut-il pas conclure qu'elle en étoit déja dépouillée par le £ait?Thierriremonta cependant fur le tröne après la mort de Childeric II, qui fut aflaffiné, & •dont le trépas jetta la France dans une cruelle & violente anarchie^ Ce fut fous Thierri III, que Pepin, maire du Palais, affembla volontairement un confeil; il ne fut pas auffi jaloux d'affembler la nation pour, amufer le roi, condamné déformais k une nouvelle oifiveté, il rendit plus fréquentes ces affemblées publiques & faftueufes, oü le roi fe mon-; troit monté fur un charriot traïné par des bceufs* Cet équipage, jufques-la deftiné aux reines tlevint -un luxe des defcendans efféminés du grand Clovis. « On appelloit cours plénieres ces affemblgeS  141 Notice sur la Chronologie »> oü, fur l'invitation du roi, (dit Velly ) tous les ♦» feigneurs étoient obligés de fetrouver , on les »> tenoit deux fois l'an,a Noël & a Paques :1e pro» jet étoit, pour lbrdinaire un mariage ou quel» que grande réjouiffance;la durée unefemaine; h le lieu, tantöt le palais du prince, tantöt une » ville célebre, quelquefois une pleine cam»> pagne, toujours un endroit vafte, & capable » de loger commodément toute la nobleffe du » royaume. La cérémonie ouvroit par une » meffe folemnelle. Le célébrant, avant 1'épï»tre, mettoit la couronne fur la tête du roi, >> qui ne la quittoit qu'en fe couchant. Le mo» narque, durant tout le tems de la fête, ne » mangeoit qu'en pubüc. Les évêques & les » ducs les plus diftingués, avoient 1'honneur » d'être affis a fa table. II y en avoit une feconde » pour les abbés, les comtes & les autres fei» gneurs; la profufion, plus que la délicateffe , » régnoit fur 1'une & fur 1'autre. Chaque fervice » étoit. relevé au fon des flütes & des hautbois. » Lorfqu'on fervoit 1'entremets, vingt hérauts » d'armes, tenant chacun a la main uneriche »> coupe,' crioient trois fois , largeffe du plus » puijjant des rois, & femoient 1'or & 1'argent, * que le peuple ramaffoit avec de grandes » acclamations. Mille fanfares annoncoient Sc célébroient cette diftribution. Les divertifié-:  de Savaron. 145 » mens de 1'aprèsdinée étoient la pêche, le »jeu, la chaffe, les danfeurs de corde, les » plaifanteries, ou farceurs, les jongleurs, ou » violeurs, & les pantomimes. On peut dire » que le regne des Carlovingiens fut celui des » cours plénieres ». CLOVIS III. Nous ignorons pourquoi Savaron omet d* parler de raffemblée des états du royaume, tenue a Valenciennes en 692. On trouve dans les annales de Metz des détails fur cette affemblée, fur le rang des prélats & des feigneurs, &c leur nom. « Les acles de 1'affemblée de Valenciennes, «après Clovis; ( dit 1'abbé Velly) nomment » douze évêques ou feigneurs ; on leur donne » le titre d'illuftres, comme au roi, qui n'é» toit diffingué des grands de fon royaume que » par les qualifications de trés - glorieux., très»puux, tres-clément, trés-excellent. On voit en» fuite huit autres feigneurs, qui font fimple» ment appellés comtes; huit grafïons, c'étoient » des magiftrats prépofés pour juger les affaires » du fifcou de finance ; quatre domeftiques ou » gouverneurs des maifons royales; quatre » référendaires, dont Ia fon&ion étoit d'appofer  'ï44 Notice sur la Chronologie wIe fceau du roi aux aöes publics ; enfin; »quatre fénéchaux : c'étoient alors de fim» pies officiers fubordonnés aux maires. Ils » n'avoient que 1'adminiftration des revenus de »lamaifon du roi. Ce fut par la fuite la première , » dignité du royaume. Le comte du Palais n'eft >> nomméque le dernier. II avoit peut Être une » place a part aux pieds du roi, ou, ce qui eft » plus probable, étant obligé de rendre compte » de fes jugemens, il n'étoit point affis parmi » les juges. Uarrêc de 1'affemblée eft foufcrit par » un chancelier. C'eft ainfi qu'on appelloit ceux » qui écrivoient ou fignoient les aöes que le » référendaire devoit fceller. C'eft aujourd'hui » le nom du premier des magiftrats ». « II ne paroït pas que Pepin alt affifté a ce »jugemént; les aöes n'en parient point. II étoit » fans doute occupé aquelqu'expédition : on ne »le vit guère manquer a ces cérémonies d'éclat. »Ce fut dans une de ces affemblées, fous » Thierri, qu'il fit ordonner au nom du roi, I »qu'au premier ordre du maire du Palais, I » chaque duc fe tiendroit prêt a marcher, &c I » qu'au fecond il conduiroit, fans aucun retar» dement, les hommes qu'il devoit fournir en »tems de guerre. On ne connoiffoit point alors » ce que c'étoit que troupes réglées. Chaque » piovinca  B E S A V A R Ö til 'I4| »province avoit fa milice. On comrilandoit » d'ordinaire, celle qui étoit plus voifine des » lieux oü 1'empire portoit fes armes. Ceux qui » tenoient des bénijïces du prince ou de l'égüfe» » ceux qui poffédoient des ttrres Jaliques ; tous »> les francois enfin étoient obligés de fervir le » roi en perfenne ». « Quelque tems après, Pepin tomba dan* » gereufement malade a Jupil , une de fes mai» fons de campagne fur le bord de la Meufe t *> vis-a vis de fon chateau d'HeriftaU Grimoald » fe mit auffi-tot en chemin pour fe rendre » auprès de lui. Ce jeune feigneur paflant paf #> Liege, entra dans 1'églife de S. Lambert. II y » faifoit des vceux pour la fanté de fon pere ,'lorf» qu'un fcélérat nommé Rangaire, le per^a dë » plufieurs coups, dont il expira fur le tom» beau de celui quil invoquoit. II laiflbit un » fils encore enfant, appellé Theodald. Pepin » le fit Maire du palais de Dagobert* C'étoit » une entreprife injurieufe aux feigneuis qux » avoient toujours eu le droit d'élire ce prej» mier officier de la couronne ; a 1'état auquel » on donnoit un enfant pour gouverneur, & y> au roi, que 1'on mettoit fous la tutele d'un » enfant au berceau. Mais le. duc avoit foutë » autorité, Sc perfonne ne remua»* Terne FIt K  '346 Notice sur la Chronologie CHILDERIC III. Encore une lacune de trente ans pour les états généraux ! Charles Martel regne fans ofer prendre le nom de roi qu'il laiffe a Childeric. Pepin fon nis veut enfin franchir 1'intervalle qui le fépare , &C du rang de fujet, monte a celui de fouverain» II trouve un complice dans tm pape, & des feigneurs vendus qui le laiffent ufurper la couronne. Devenu roi, il ne craint plus les pariemens, & peu de rois de la feconde dynaftie en ont autant & fi fouvent convoqués. II les affemble en pleine campagne , a la maniere des Francois. Il ne craint plus de convoquer , au palais d'Attigny , un parlement genéralde tous les feigneurs de France. II conclut au parlement tenu d Worms'. II fait promettre a fes ennemis de fe trouver en CaffemlUe & parlement géniral des Franqois, pour honorablement lui préfenter trois eens chevaux de guerre. II affemble a Compiegne un parlement génêral de tout le peuple Francois. Ainfi, dès 757, la nation fe trouvoit remife dans tous fes droits, par un ufurpattur qui avoit fenti la néceffité de la flatter , & a laquelle il devoit fon élecfion.  BE S A V U O 447 CHARLEMAGNE. Vingt pariemens affemblés durant fon regne; annoncent un roi bien éloigné de dépouiller la nation. Les capirulaires lui font dus ; Sc c'eft dans cette colledtion intéreflante qu'il faut aller chercher des preuves de nos libertés. Nous en avons recueilli une affez grande quantité, afin que nos leöeurs pufienr être difpenfés d'aller prendre ailleursles autorités néceffaires. On trouve toutes les loix, toutes les grandes délibérations rêvetues du fuffrage de la nation ; in comitiis generalibus - generalem populi fui conventum... Ut populus interrogetur de capitulis , quiz in lege noviter addita fuut, & pof quam omnes confenferint, fubfcriptiones & manufirmationes , fuas in ipfis capitulis faciant. Toujours les grands Sc la nation. Point de loi fans un parlement général; point d'entreprife importante ; point de partage fans 1'approbation univerfelle. SM veut punir fon fiis , il affemble un parlement. Quel roi fut plus grand dans la guerre, Sc plus hwmain Sc plus jufte dans la paix ? « Les affaires ?> publiques lui déroboient la moitié de fon » fommeil ; le tems même de s'habiller étoit » occupé utilement. II écoutoitalorslesplaintes » de fes fujets, Sc jugeoit leurs différends avec K x  148 Notice sur la Chronologie" »> autant d'équité que de fageffe. C'eft aufll » dans ces momens qu'il donnoit fes ordres a *> fes miniftres & a fes officiers. Telle étoit la » fagacité de fon efprit, que parmi tant d'af»> faires on ne remarqua jamais en lui ni em» barras ni inquiétude.» La nation lui dolt une reconnoiffance éternelle , pour avoir non-feulement refpeclé fes droits, mais pour les efforts qu'il fit afin de les rendre inattaquables. LOUIS-LE-DÉBONNAIRE. Nous devons obferver que les hiftoriens, & Velly fur-tout, s'écartent prefque toujours de la bonne tradition hiftorique & des grands monumens, en ne parlant jamais que des prélats & des feigneurs de la nation pour repréfenter les états généraux : ce qui fans doute a été caufe que le comte de Boulainvilliers a affuré pontivement dans les lettres que nous avons déja inférées , qu'il n'y avoit point fous Charlemagne, & avant, de tiers-état; comme fi les différens peuples qui compofoient la monarchie , & qui avoient confervé leurs loix, n'avoient pas pu conferver également leurs I franchifes & leurs privileges. Ce qui étoit ef- | clave dans chaque pays refta efciave ; mais chaque état avoit. & conferva en palfant, ou I  de Savaron. 149 par la viöoire ou par capitulation , fous une autre puiffance, fes hommes libres, ck fon tierskat. Qu'importe fi cette dénomination eft poCtérieure! La qualification eft inutile dans les grandes queftions, le fait eft tout; d'ailleurs , Grégoire de Tours, que nous aurons occafion d'extraire, viendra a 1'appui de cette obfervation. Ainfi toutes les fois que nos hiftoriens an-, noncent une affemblée des feigneurs & des prélats , il faut fous entendre de toute la nation ainfi que les annales de Metz, Aimoin, & les chroniques le déiignent; ils s'expriment tous de la forte : Habuit magnum conventum populorum - populum convocavit-conventum a populo fuo celebrari jufjit - convenire generaliter populum fuum. proecepit - generali conventu populi fui. Les capi • tulaires en font foi; ils prouventque la nation-, toujours convoquée, donna toujours fon fuffrage. C'étoit enfuite de ces affemblées générales que les Rois «.députoient des mifjl dominici » (Velly) dans les provinces pour faire pu» blier &c exécuter leurs ordonnances; le peu» ple,outre le logement, devoit leur fourniï; » une certaine quantité de vivres. Leurs prin*> cipales fonctions étoient d'écarter les plain» tes Sc d'en répondre fornmairement, ü ceis.- K 1  150 Notice sur la Chronologie » fe pouvoit, finon d'en avertir le monarque^ » de pimir K s comtes ou les évêques qui au» roient prévanqué, de réformer leurs juge» mens iniques ; en un mot, de veiller k ♦> 1'exacte obfervation des loix. On les voit auffi » quelquefois employés a dreffer le dénombre» ment des fonds que le roi ou 1'églife donnoit « a titre de bénéfice. Ils faifoient les vifites ou » chevauchées quatre fois 1'an, c'eft a-dire dans w les mois de janvier, d'avril, de juillet & » d'oftobre. Leurs affilts fe tenoieni toujours » en un lieu public , ou tout le monde avoit » un accès libre & facile. Les juges y étoient » mandés & leur conduite examinée. On fent » toute la fageffe d'un pareil établifllment. »> On dolt fentir également qu'un pareil établif. fement n'a pu avoir été créé que par Ie peuple ; car il eft entierement en fa faveur, & contre les grands ; comment n'a-t-on pas vu que fi le peuple n'avoit jamais eu de repréfentant a ces états, i! n'y auroit jamais eu defemblables commiffaires? Comment n'y a-t-ou pas vu un refte de 1'ancienne municipalité, qui cor.ftituoit l'adminiftration de la plupart des citésavant Clovis? Et comment n'a-t-on pas remarqué que ces chevauchées avoient lieu après les affemblées, & enfuite des réiolutions pubüques? Nous le répétons encore, c'eft aux capitulaires qu'il  DE SAVARO N.. faut avoir recours pour éclaircir, parle fait, les droits de la nation. Cependant nous ne diflimulerons point que fous Louis-le-Débonnaire les feigneurs, &furtout les prélats , avoient la plus grande prépondérance dans les affemblées générales, qu'on ne pouvoit guère nommer nationahs. Celle de 829 eft une de celles qu'on doive noter ,.& qui ofFre le monument le plus frappant des droits que le clergé commenca a s'arroger; de ce. moment il na déclina plus , & 1'influence jufques-la réfervée aux prélats, fut tranfmife aux moines & a tout le clergé. On reproeha a Louis de fe mêjer trop des affaires de 1'égiife, on 1'accufa des défordres qui régnoient dans toute 1'étendue de la monarchie. Quelques évêques. allerent jufqu'a prétendre « qu'étant prépofés » de Dieu pour gouverner les pécheurs, ils » pouvoient dépofer les rois, lo.rfqu'ils étoient » indociles a leurs avertiiTemens.» — Le peuple 6z les feigneurs n'avoient point tenu un pareil langage , & jamais ils n'ont cru avoir le droit de dépofer les rois; auffi les attentats dont Louis fut ia victime ne doivent-ils point être imputés au peuple & aux feigneurs. On vit Grégoire IV joeuer un röle dans un différend qui enlevoit a un- roi fa coiuronne , & un ar- K 4  152. Notice sur la Chronologie chevêque de Reims condamner fon roi & fo» bienfaiteur a une pénitence publique. CHARLES II, furnommé LE CHAUVE. L'afTemblée de 843 eft remarquable par Ia dépofition de Lcthaire. Velly , torn. i,p. 61, s'exprime ainfi: — « Tous d'un commun accord » le déclarerent déchu de fon droit, a la cou» ronne, & fes fujets déliés du ferment de fidé» lité,promette^-vous de mieux gouverner , dirent» ils aux deux princes Charles & Louis ?» Nous le permettons, répondirent les deux rois. <* Et » nous , dit 1'évêque qui préfidoit, nous vous » permettons, par l'autorité divine, de régncr d la » place de votre frere pour gouverner fon royaume i> felon la volonté de Dieu; nous vousy exkortons, » nous vous le commandons. »> C'eft, comme on voit, encore un évêque qui préfide une pareille affemblée, & le pouvoir du clergé ne ceffe d'empiéter, depuis Louis-le-Débonnaire, fur les droits des peuples, des grands , & , comme on voit, fur celui des rois. Le clergé. (Velly, torn. 1, p, 74) contraignit Charles II de jurer « qu'il ne toucheroit jamais a leur per* » fonne ni a leur ordre, qu'il ne leveroit au-^ W cune irnpofition indue, Sc qu'il n'exigeroiÉ  de Savaron. 155 » d'aucune églife d'autres tributs, que ceux qui » avoient été en ufage du tems de fon aieul 8c » de fon pere. » L'affemblée de 847, que Savaron n'indique point, fut une des plus importantes de ce regne, puifqu'elle établit pofitivement la fucceffion a la couronne « & qu'il fait pafTer en loi ( Velly, » torn. 11, pag. 75,) un point que plufieurs » faits, depuis la fondation de la monarchie, » rendoient au moins douteux. Lorfqu'il y » avoit plufieurs rois de la mailon de France , » fi 1'un d'eux venoit a mourir, la nation fe » croyoit en droit de difpofer du tröne vacant, » pourvu que ce fut en faveur d'un prince » du fang royal. On a vu Pepin fuccéder a » fon frere au préjudice de fes neveux, qu'il » fit enfermer dans des monafteres. Les fei» gneurs Auftrafiens, a la mort de Carloman, » donnerent 1'exclufion a fes enfans pour fe » foumettre a Charlemagne. Ce prince lui» même, dans lepartage de fon empire, femble » reconnoitre ce pouvoir éleöif: Si qudquun. » de mes enfans , dit- il, laijfe en mourant un fds » que le peuple veuille choifir pour lui fuccéder, » je veux que fes oncles y donnent leur confente» ment. L'exemple récent du jeune Pepin , que » Louis-le-Débonnaire dépouilla des états de w de fon pere pour les donner au prince Char-  ij4 Notice sur la Chronologie. ♦» les , fournit une nouvelle preuve, que juf» qu'alors il n'y 3voit eu rien de régié fur la »> fucceffion au tröne. C'étoit toujours le plus » fort qui Femportoit. L'affemblée de Merfen » décide enfin la queftion. Cet article fïdele» ment obfervé auroit empêché bien des » guerres ; mais il n'eut point force de loi; » bientöt on verra ces mêmes feigneurs re»> jetter ou reprendre, appeller ou dépofer » leurs rois fuivant leur caprice, fondés fur » ce principe , que le peuple étoit maitre de » choifir fon fouverain. » Le concile de Savonieres en 859 alia plus loin , les évêques s'obligerent a demeurer (Velly, torn. 2, pag. 85,) très-étroitement unis entre eux , peur corriger les rois, les grands feigneurs du royaume francois, & le peuple dont ils étoient chargés. Leroi permit encore a fes fujets, au fynode de Pontyon (idem pag. 114 ) de fe fervir, pour approuver fon cleftion, de ces termes fi peu favorablesau droit d'hérédité. «Nousquifommes » affemblées de la France , de la Bourgogne, de » l'Aquitame, de la Septïmanie, de la Neuflrïe & » de la Provcnce, Pelifons & le confir;r,ons d'un » commun confentement. » L'afiemblée de 877 annonce combien le pouvoir des grands feigneurs s'ccoiL accru, & toute la foi.blefié du tnonarque. Nous engageons nos  de Savaron. 155' Ieöeurs a parcourir le recneil des capitulaires , & k s'arrêter k i'affemblée de Chierfi-iur-Loire , dont parle Duchefne , tcme 2 , page 469. Les feigneurs confentent k tout; ils veulent bien reconnoitre le fils de Charles pour leur roi ; mais a condition qu'il leur confervera ce que les capitulaires, même de 1'empereur , accordent a leur rang & a leur perfonne. Charles ( dit Velly , page 121, tome 2 ,) pour les attacher. plus fortement a fes intéréts , ordonne , par le dixieme article , que, fi après fa mort quelqu'un de fes fidelles veut renoncerau monde, il pourra laiffer tous fes emplois k fon fils , ou k celui de fes parens qu'il voudra. C'étoit établir une efpece d'hérédité dans les charges : imprudente conceffion qui lui öioit le moyen le plus sur de contenir fes vaffaux. On peut la regarder comme l'époqr.e de cesgrands fiefs, qui , en partageant la lbuveraine autorité , 1'ont prefque anéantie. LOUIS II, farnommè L E B E G U E. Savaron n'a point confulté les monumens ; car il n'auroit point affirmé qu'on pourvut, dans les états de Y/ormes , au bien de 1'état. Ce roi regna peu d'années , qui ne femblerent confacrées qu'a laiffer multiplier les feigneuries,  ijö Notice sur la Chronologie les duchés, les comtés & les fiefs, & a affermir cette féodalité oppreffive qui fit gémir le peuple , & avilit la plus grande partie de la nation. Auffi doit-on remarquer que les exprefïions des formules des affemblées générales font changées : ce n'eft plus omnicoztu conventum generale , &c. , &c. , &c. Confenfu populi; c'eft feulement cum principibus regni •— cuncli regni proceres. Cette nuance étoit digne de remarque, & il importe de la préfentera ceux qui liront notre collection , dans 1'intention d'y chercher les bafes d'un travail , ou d'une étude quelconque. Le pape fe mêloit auffi de donner la couronne: ontrouve dans les annales de Fulde, épitre 125, an 880, ces paroles du pape a 1'égard de Charles-le-Gros , il faut que nous appellions en premier , & que nous choijijjlons fpécialement celui a qui nous donnerons la couronne. CHARLES-LE-GROS. N'ofTre rien de remarquable que le parlement , qui , en 887, le dépofa, fous prétexte qu'il avoit 1'efprit aliéné. Nous ne favonspas pourquoi Savaron a dédaigné d'en faire mention.  t> e Savaron; ff? E ü D E S, Savaron ne parle pas non plus du parlement tenu a Compiegne en 888 , dans lefquels les feigneurs & les évêques élurent pour leur roi Eudes, Comte de Paris & d'Orléans , & duc de Bourgogne. Cette affemblée de Compiegne fembloit avoir recu comme une tradition conftante , la conduite que les évêques & les feigneurs affemblés a Valence , avoient tenue & tinrent en 891 : nous avons examinè , difent-ils dans cette affemblée , fi nous devions prudemment, & avec jufike , êlire Louis, fils de Bofion ; toute Üaffembke efi convenue que leficeptre ne pouvoit pafifier en de meilkures mains. Ainfi fondés fur ks efpèrances qu'il donne & fur la volonté de Dieu , que nous croyons fiuivre , nous ihoijïjfons pour notre roi, Louis, fils de Bofion; & nous le jugeons digne de recevoir l'onclion, qui appartient aux princes élevês d ce rang. CHARLES- LE-SIMPLE. Ce regne , dont Savaron ne dit prefque rien , a eu plufieurs affemblées, dans lefquelles la féodalités'eftaffermie; & la nation a été foulée de plus en plus. C'eft 1'époque de toutes ces  ij8 Notice sur la Chronologie fouverainetés cni s'éleverent dans le fein de la monarchie.Telle eft 'la véritable origine de la nobleiïe , jufques-la ignorée en France. On vit ces nouvelles feigneuries procurer a. ces petits princes des vaffaux, au moyen des inféodaiions , &l le vaffal étoit obligé de marcher contre le roi , auffi-töt que fon fuzerain le commandoit. Savaron ne parle pas non plus du démembrement de la Normandie fait en 912, & qui fut arraché par les états k Charles IV. II ne parle pas de cette affemblée de 921 , dans laquelle le roi promet de changer de conduite , oii les feigneurs répondirent, on veutbien, en ce cas, continuer pour un an l'obéiffance qui lui a été renduc jufqu'a ce jour. I! ne fe paffa pas moins que feptmois, en négociations, pour obtenir des fujets une femblable réponfe. R A O U L. Ne fut qu'un ufurpateur ; mais il eft bon d'obferver que les Francois n'approuvoient point cette pofTeffion illégitime. Baluze rapporte plufieurs acfes, tous datés de la première & de la feconde année, depuis la mcrt de Charles, Jefus-Chrijl regnant, en attendant le légitime roi. La France n'étoit alors qu'une  de Savaron. 159 république mal policée , ( Velly , page 210 , tome x , ) ou la loi du plus fort étoit la feule connue ; mélange bizarre de monarchie &C d'anarchie , au chacun s'attribuoit autant de puiffance qu'il en pouvoit ufurper. Un interregne qui fuivit la mort de Raoul, comblala rnefure desdéfordres publiCs; & il parut évident que 1'ordre de ia fucceffion étoit compté pour rien. On ne connoiffoit prefque plus ni droit de nanTance , ni droit d'éleftion. Le plus fort s'élevoit fur les ruines du plus foible , pour être enfuite précipité lui-même par un concurrent, contre lequel il n'avoit pas même fongé de fe précautionner. On ne doit point laiffer échapper la lacune qui fe trouve dans la chronologie des états-généraux, ckqui prouve que dans ce tems de confufion on ne fongcoit gueres a les affembler. La faöion dominante 1'emportoit, il fuffifoit d'être plus fort. LOUIS D'OUTREMER. Hugues-le-Grand rappelle le véritable héritier du tröne : il eft facré k Laon; mais 1'ordre ne fe rétablit point. Savaron ne fait mention que d'une affemblée pour une croifade contre les infideles. II a tenté de donner ce  i6o Notice sur la. Chronologie nom a des conciliabules illégaux & partiels.La feule innovation qui doive caraótérifer fon regne, c'eft que la couronne, a fa mort, ne fut point partagée fuivant 1'ufage ancien; 1'ainé , que Louis avoit affocié au tröne, régna feul: le Cadet n'eut point de part au gouvernement, LOTHAIRE & LOUIS. N'ont rien laiffé qui puiffe fervir de preuve de la reftauration ou de la dégradation de la conflitution de 1'état. Le peuple n'étoit plus compté pour rien depuis trop long-tems, & le roi 1'étoit pour peu de chofe. Ici finit la race Carlovingienne. HUGUES-CAPET. Savaron placeaTan 982 1'éleétionde Hugues-' Capet; les hiftoriens la fixent a 1'année 987. It eft plus que douteux que la couronne lui ait été déférée dans une affemblée générale tenue k Noyon; il eft plus certain que Hugues fe paffa de 1'autorité d'un parlement, & que les troupes feules & fes vaffaux lui affurerent la couronne. Une lettrecitée parDuchefne, t. 2, p. 258, prouve ce que nous avan^ons. Le duc Hugues a affemble'Jix eens hommes d? armes ; & furie bruie de fon  d e Savaron; iSï fon apprcche, k parlement qui fe tenoit danskpalais de Compiegne, s'efl difjipé dès k onrieme de mai; tout a pris la fuite, & k duc Charles & k comte Reinchard, & ks princes de Vermandois • & révêque de Laon , Adalberon , qui a donné fon neveu en ótage d Bardas, ( nom de mépris donné d' Hugues-Capet) pour fexécution de ce queSigefred & Godefroi ont promis. Le parlement tenu a Orléans eft de 988, & ne peut être appellé un parlement. ROBERT. Ce roi n'aflembla point les états ;onnetrouve jque des affemblées eccléfiaftiques. La plus célebre eft au fujet des dimes inféodées aux; laïques, qui en recevoient Pinveftiture de nos rois, & ne pouvoient les vendre que de leur eonfentement. H E N R I Ier. Savaron auroit dü noter la fameufe treve du. feigneur, & il n'auroit pas dü oublier de rappeller 1'affemblée de Reims, une des plus nombreufes qu'on eut vue depuis celle de Bonneud. Nous allons rappeller en entier les expreffions de Velly, tom. 2, p. 379. On y vit Tomé VI, L  i6i Notice sur la Chronologie arriver, dit-il, plufieurs archevêques de France, de Bourgogne & d'Aquitaine ; trente-deux évêques, quantité d'abbés, un grand nombre de feigneurs, entr'autres Hugues, fils de Robert, duc de Bourgogne, & Gui Geofroi, duc de Guyenne, qui venoit d'augmenter fes états du comté de Gafcogne. Les relations de cette folemnité ne font aucune mention des douze pairs, nouvelle preuve qu'ils n'étoient pas inftitués. Le roi, dit Mezerai, remontra af affemblée les fervices qu'il avoit rendus d l'état, les pria tous en général, & chacun en particulier, de reconnoitre Philippe, fon fils ainé, pour fon fucceffeur, & de lui prêter ferment. Tous, d'une voix unanime, confentirent au couronnement du jeune prince, qui fut facré le jour de la Pentecöte par Germain de Bellefme, archevêque de Reims, & depuis chancelier du nouveau monarque. Ce qu'il y eut d'affez remarqnable dans eet événement, c'eft 1'attention du clergé a profiter de la circonftance, pour augmenter fes prérogatives. Les légats ( c'étoient Hugues, archevêque de Befancon, & Hermenfroy, évêque de Sion ) imaginerent de protefter contre ce couronnement, qu'ils prétendoient ne pouvoir fe faire fans le confentement du pape: ils furent trés-mal recus. On re laifla pas cependant de leur permettre d'affifter a la cérémonie. L'ar-  de Savaron. 163 chevêque de Reims, d'un auf re cöté,fe fit donner la confirmation des privilges de fon égEfë , tant pour le fpirituel que pour le temporel. L'adroit prélat prononca un long difcours pour montrer que le droit de facrer les rois de France appartenoit aux archevêques de Reims, conformément aux décretsdu pape Hormidas.du tems de Clovis; décret chimérique, puifqu'il eft conftant que cette pieule pratique étoit abfolument connue fous la première race. Gervais préfenta enfuite au jeune prince une formule de ferment, oü 1'on remarqueplus de zèle pour 1'avantage particulier du corps épifcopale, que pour le bien général de la nation , quoiqu'il n'y foit pas abfolument oublié. Elle étoit concue en ces termes : « moi Philippe, » qui vais, par la miféricorde de Dieu, être » couronne roi de France, je promets, en pré» fence du Seigneur & de fes fa'ints, que je » conferverai a chacun de vous en particulier, » & a vos églifes, vos privileges canoniques; » que j'obferverai les loix; que je vous rendrai » la juftice, & qu'avec 1'aide de Dieu, je vous » protégerai autant qu'il fera en mon pouvoir, » & comme il convient a un prince de faire » dans fon royaume a 1'égard des évêques » & des églifes qui leur font confiées , » felon 1'équité & la raifon. Je promets aufF L %  164 Notice sur la Chronologie » au peuple, dont le gouvernement me fera » conféré, de maintenir, par mon autorité, » l'obfer vation des loix ». C'eft le premier facre fous la troifieme race, dont on trouve quelque détail dans notre hiftoire. -— Quelque foin que le Clergé ait pu prendre de fes intéréts, il n'en eft pas moins vrai que ce ferment du roi ne peut pas être regardé comme fans conféquence a 1'égard du peuple. Les paroles fuivantes font remarquables : je promets auffi a mon peuple, dont le gouvernement me fera conféré, de maintenir, par mon autorité, l'obfervatïon des loix. Savaron, 6c même les hiftoriens, ne difent point qu'il y ait eu, en icöo, aucune affemblée. Ceperdant il eft plus que probable qu'a la mort d'Henri let il y en a eu une pour refufer la régence a la reine Mere, a Robert, duc de Bourgogne, qui y avoient des droits, 8c pour la conférer a Baudouin, comte de Flandre, qui n'y prétendoit point. Une pareille réfolution , qui n'eft point légitimée par une loi précife ne peut être que le rélultat d'une volonté unanime ou prépondérance. Savaron paffe également fous filence la réfiftance qui fut oppofée, en 1095 , a Pa^cal H > qui vouloit excommunier Philippe I" par Guiilaume VIII, comte de Poitiers 6c duc d'A-  deSa'varon. 165 quïtainè. Ce GuiHaume déclara en pleine affemblée qu'il ne fouffriroit point qu'on excommuniat en fa préfence le roi fon feigneur. Quoiqu'on ne puiffe donner le nom d'écats a de pareilles affemblées, il femble qu'on a tort de perdre les fils qui lient la conflitution de Pétat; & qui la reproduifent par le fait , par le fonds, maigré la différence ou la variation desformes. Le peuple n'étoit plus appellé , 51 eft vrai; mais ceux qui avoient ufurpé fon pouvoir, ne faifoient, après tout, que le repréfenter; il eft a propos de remarquer que jamais on n'a de» pouillé le peuple que dans les époques les plus défaftreufes, époques qui font la fatyre des rois qui ont régné, bien olus qu'un titre réel de puiffance. Ceux qui bravoient le monarque , qui élevoiont par-tout des chateaux forts, qui ordonnoient le brigandage, auroient-ilsrefpeété les droits du plus foible ? On a donné le nom de concile de Clermont a 1'affemblée de 1095, 011 la première croifade fut réfolue, qui fut compofée de tous les ordres de 1'état, & qui futunanimement proclamée. Jamais réfolution ne fe manifefta avec un accord fi parfait, Dieu le veut, Dieu le veut, s'écrierentils tous. Jamais une grande fottife ne fut plus librement confentie. Ce qu'il y a d'un peu furprenant, c'eft qu'évêques , abbés , moines., L 3  i66 Notice sur La Chronologie peuples, vaffaux, tous fe croiferent, hormis les rois: c'étoit réellement la folie de la nation , do; t les rois feuls tirerent tout le fruit qu'il étoit polfible d'en recueiilir. LOUIS VI. II n'affembla point les états; mais il a fait en monrart une lecon a fon fucceffeur, qui prouve combien il connoiffoit fes devoirs & ceux d'un roi: — fiouvene^-vous mon fils , dit-il, que la royauti n'eft quune charge puhlique, dont vous rendre[ un compie rigoureux d celui qui difpofie des Jceptres & des couronnes.Le peuple gémiffoit fous le plus dur elclavage; il Paffranchit dans fes domaines,& ii établit de droit les communes, qui avoient déja exifté dés la première race, ainfi que nous 1'avons déja obfervé; car puifqu'il y avoit eu dans chaque cité des fienieurs, les archembourgs ou les pairs, pour juger les habitans, il y avoit, fous un nom différent, des communes, & des bourgeois, ou des bons hommes, ou des hommes francs. La féodalité les avoit affervis , Louis-leGros ne fit, en les affranchinant, que les rendre a leur état primitif. Plufieurs hiftoriens ont confondu les faits, & regardé comme un établiffement nouveau,ce qui n'étoit qu'une infur-  de Savaron, 167 reétion. Au refte, les rois avoient perdu la moitié de leur autorité : pourquoi le peuple n'auroit-il pas perdu la moitié de fes droits ? Les villes du domaine du roi lui refufoient fouvent le tribut. D'ailleurs, nous allons extraire encore une fois Velly , que nous paroiffons fuivre & que nous citons fouvent, non que nous n'ayions point d'autorité préférable a fon affertion, mais pour mener enfemble deux objets; 1'un d'éclaircir Savaron & les points effentiels de la matiere que nous traitons; 1'autre pour analyfer du même coup un hiftorien dont nous aurions été obligés de donner enfuite de longs extraits, ainfi que nous le ferons pour les autres hiftoriens. C'eft donc pour éviter des redites que nous revenons fi fouvent a Velly. » On vit, ( dit eet hiftorien , ) alors re» naitre Tanden gouvernement municipaldes » cités & des bourgs: mais a condition que » ces villes , jdevenues autant de petites répu» bliques fous le nom de communes, fe char» geroient , elles-mêmes , de la levée des » hommes qu'elles devoient au roi, &c., &c, »> &c., &c. Ces établifTemens pafferent infen» blement du domaine du roi dans celui de » fes grands vaiTaux , en Bourgogne, en Nor» mandie , en Flandre & dans plufieurs autres L4  168 Notice sur la Chronologie » fiefs de la couronne. De-la 1'autorité des » maifons-de-ville , leurs officiers leur jurif» -diétion, leurs revenus ; on leur accorda » de plus un fceau particulier, le droit de » cloche pour convoquer les bourgeois, celui' » d'un beffroi pour faire la garde ; des loix » enfin , plus ou moins favorables , felon le » plus ou le moins que ces nouveaux citoyens » avoient donné pour fe racheter de la dé» pendance: car ces privileges s'achetoient k » prix d'argent. C'étoit toujours le fouverain » qui les confirmoit; & pour les rendre plus » folides encore , le feigneur qui les vendoit » donnoit pour caution un certain nombre de »> gentilshommes &c de prélats du voifinage. » Les premiers s'engageoient a prendre les » armes pour les maintenir : les feconds promettoient de lancer toutes les foudres de » Tégtifè , contre celui qui entreprendroit de >j les violer ». Nous fommes furpris que Velly glifie fur cette garantie ftipulée envers les communes par les prélats & par les feigneurs ; c'étoit prononcer un affranchiffement irrévocable, & élever tout-a coup a une égalité décidée le peuple jufques-la afiervi, & devenu par cette garantie un nouvel ordre , & une république <" ns le fein de la féodalité. II avoit le droit  de Savaron. 169 de refufer ce qui outrepafloit fes obligations; il avoit celui d'appeller des défenfeurs , &C par une fuite néceflaire , il prononcjoit fur la paix , fur la guerre , & pouvoit armer les feigneurs pour fa caufe , en payant la rctribution convenue. Certes , nous n'avons dans notre monarchie aucune conflitution plus marquée le ciergé , & la nobleffe n'ont jamais fi bien tracé la ligne de démarcation oh nnit l'obéiflance , & oii commence le plein exercice dudroitdel'homme libre. Le clergé &C la noblefle avoient ufurpé leurs privileges fous les Carlovingiens : le peuple rentroit dans les flens légitimement, & un contrat affuroit fa propriété. C'eft eet acte irréfragable qu'il peut mor.trer . Sc qui répond a tous ceux qui oieroient déformais contefter fes droits. II ne tarda pas de prendre fa place , & d'avoir, comme les eccléfiaftiques &c les nobles, fes pairs pour le juger. II ne demanda pour juges que des' gens du peuple , qui, dans plufieurs villes , fe qualifierent pairs bourgeois. Ce changement (dit encore Velly)procura » de grands avantages au royaume. Les villes » fe peuplereut. On y vit renaitre les fciences, » les arts Sc le commerce. Les villages fe mul» tiplierent, les campagnes furent cultivées ; » le payfan devenu maitre de fon induftrie,  170 Notice sur la Chronologie. » & recueillant pour lui le fruit de fes tra» vaux, prit a ferme ou a eens ces mêmes » terres qu'autrefois il faifoit valoir comme » ferfs & au pront d'autrui. Les cités devin» rent enfin fi riches & fi puiffantes , que pour » les engager a contribuer aux néceffités de » 1'état avec moins de répugnance , on jugea » d propos d'admettre leurs dêputês aux affemblées » générales ». II étoit tout fimple d'accorder des repréfentansaux états d'un nou vel ordre de citoyens qui tenoit le commerce, la richeffe dans fes mains , & qui repréfentoit les anciens habitans de ces cités qui fe foumirent a Clovis, fous des reftrictions qu'on refpe£la pendant long-tems; & qui, pendant lung-tems, formerent eet omni coetu , ce confenjus populi dont il eft tant parlé dans nos chroniques. » Ce fut ( continue Velly) en 1304 qu'ils » y parurent pour la première fois : mais feu» lement pour y repréfenter leurs befoins & » leurs facultés ». — lis n'ónt gueresexcédé cette mefure de pouvoir. Le tiers-état, dans toutes les affemblées générales, s'en eft tenu a propofer les réformes qui le touchoient de prés, & jamais il n'a embraffé la conflitution en grand , in quanto me attigit. Telle a été 1'expreffion habituelle de fon fuffrage, depuis qu'il  be Savaron. 171 a été rétabli dans un état de liberté; mais le droit d'opiner , donné aux cités , a eu le même effet que s'il eut eu une plus grande extenfion ; par la réunion des mêmes intéréts qui ont fait remonter jufqu'au principe de la légiflation , quoiqu'en ayent prétendu la plupart des hiftoriens. Velly ne tarde point de venir a notre avis quand il dit : ces communes formerent , infenfiblement dans le royaume , un troifieme corps , qui eut dans les diétes de la nation une autorité égale , ou même. fupêrieure a celle de la nobleffe & du clergé. ( titre3 ,page 95 ) On 1'appella , dit-il , tiersetat; nom inconnu dans les fiecles précédens , oii les feuls nobles & eccléfiaftiques avoient voix délibérative dans les affemblées ou pariemens. Nous avons déja obfervé que la voix délibérative , dont le peuple ne fut privé que depuis la décadence de la race Carlo vingienne, avoit également appartenu au peuple , aux nobles , au clergé: c'eft ce que Velly auroit dü diftinguer. Sous le regne de Louis VI les affemblées furent nommées états - généraux , ou affemblées des trois états. Leur pouvoir , comme Pobfervent les hiftoriens , ne fut plus auffi étendu que celui des anciens pariemens. Cepeniant, nous ferions embarraffé de prononcer fur ces limites : les états tenus durant  172 Notice sur la Chronologie la captivité du roi Jean , répondent négativement , & on y voit clairement la nation voulant & agiffant, comme dans 1'origine de la monarchie. Une foule d'exemples prouveroient auffi que la nation affimblée ne s'eft prefque mêlee que de finances & de loix ; beau coup de faits prouveroient également qu'elle s'eft mêlee un peu de tout; mais fans prétendre faire loi, ni entraïner la volonté du monarque,il eft bien vrai qu'elles n'ont plus été convoquées librement; qu'elles ne fe font tenues que fous le bon ptaifir du roi, & qu'il n'y avoit plus de tems pénodiquement déterminé. Pendant affez longterm les états ont nommé aux régences : c'étoit un refte d'un droit qui, fans que nous endifions davantage, dérivoit de fon ancienne autorité. LOUIS VII. II nous femble que 1'aiTemblée d'Orléans a dü fe tenir en 1137, & non pas, comme Savaron 1'avance, en 1145. Savaron n'a rien dit de raffemblée de la nobleffe & du clergé, qui fe tint, en 1146, a Vézelai en Bourgogne , oü S. Bernard fit ordonner une nouvelle croifade. II ne dit rien non plus du parlement, qui déféra, en 1147, la régence a 1'abbé Suger;le. brave comte de Nevers n'en voulut point.  de Savaron. 173' C'eft dans le regne de Louis VII, qu'on ïrouve une formation qui change la conftitutiort, en réduifant a un petit nombre de feigneurs un droit exercé par plufieurs. Nous voulons parler de 1'inftitution des duuze pairs de France qui compoferent le confeil fouverain de la nation, & qui par la fuite eut feul droit d'aflifter aux audiences du parlement, aux lits de juftice, aux facres & autres cérémonies d'éclat. II n'eft pas vrai que les douze pairs aient compofé le confeil fouverain de la nation. Ils n'y ont jamais pretendu ; mais ce fut un effai qui annoncoit déja la réduöion des autres privileges. Louis VII crut avoir contenté fa nobleffe, en refferrant fur douze têtes les prérogatives de la pairie ; on verra les cours de juftice repréfenter au petit pied, pour nous fervir de 1'expreffion de Pafquier, les états généraux. PHILIPPE-AUGUSTE, ou PHILIPPE II. Savaron parle trop fuccintement de rafTernblée convoquée en 1188, oüilfut queftion de venir au fecours des croifés, de marcher en perfonne, ou d'être impofé a une dime. II falloit venger des défaites , & la mort d'une foule de chevaliers & de princes. Cette dime a été appellée la dime faladine, ÖJ occafionna de vior  174 Notice sur la Chronologie lens murmures, fur-tout Je la part du clergé, dont le roi fe vengea avec nobleffe & avec beaucoup d'efprit. LOUIS Vilt Les hiftoriens affurent que les rois commencerent a connoitre toute 1'étendue de leurs droits a 1'époque de ce regne. On a dü s'appercevoir cependant que cette connoiffance eft antérieure, & que s'il y a eu quelque innovation fous Louis VIII, elle ne nous paroït devoir être appliquée qu'envers les papes , auxquels, k dater de ce regne, nos monarques ont répondu avec fermeté & dignité. On y trouve un grand exemple de la puiffance des pairs & de leur jugement, dans la procédure de Raymond VI, oü certainement les prérogatives de la nobleffe furent confervées; que n'a-t-on aufïi-bien garanti les privileges de la nation! Savaron a marqué le parlementtenu en 1124, pour la croifade prêchée contre les Albigeois; mais il a paffi fous filence les états tenus en 1x26 pour le même fait, il ne parle que de ceux convoqués dans la même année par la reine Blanche, pour le couronnement de fon 6Js.  deSavaron. 17J LOUIS IX. Ce roi tint les états a Compiegne en iajoj oü fe fit une récoriciliation générale entre les grands vaffaux , a 1'exception du comte de Flandres qui n'y vint point. Savaron n'avoit peut-être pas voulu en faire mention, paree que ce ne fut, a proprement parler, qu'une affemblée de tous les grands. Pourquoi une affemblée de grands fans 1'affiftance du peuple, pourrions nous dire ? Mais le roi qui fit tant de fages établiffemens, ne s'occupa pas aflez du tiers état, comme corps conftituant la monarchie. C'eft dans ce regne que les enregijïremens ont commencé, ou, pour mieux dire, qu'ils font devenus communs. Cette formule difpenfa de proclamer les ordonnances, & de faire jurer qu'on les obferveroit a jamais. Les pariemens enregiftrerent, & eet acte tint lieu de 1'ancien fuffrage public. On trouve dans ce regne , fuivant dom Vaiffete , hiftorien du Languedoc, torn. 3 , pag. 480 , 1'origine de nos érats généraux. Nous croyons qu'il fe trompe , & nous 1'avons déja prouvé dans nos précédens articles; mais nous ne lui difputerons point que la combinaifon des différentes éleftions provinciales, & les  '176 Notice sur la Chronologie.' divifions de diftri&s n'aient point été modélées fur les états de Languedoc, qui eurent lieu fous Louis IX : voici 1'ordonnance fur lefquelles eet hiftorkn s'appuye. Le roi fit en 1254 plufieurs ordonnances pour 1'adminiftration de la juftice. Un des régiemens les plus remarquables eft, dit-il, « que les fénéchaux >> ne pourror.t empêcher les habitans de tranf» porterou faire vendre, comme ils voudront, » leur bied, leur vin, 8c les autres denrées: » on leur défend feulement de fournir ni » armes , ni vivres aux ennemis de la religion » ou de 1'état. Si les circonftances exigent de » prohiber toute exportation, alors le féné» chal affemblera un confeil non fufpecf , 011 » fe trouveront quelques-uns des prélats, des » barons, des chevaliers, des habitans des » bonnes villes, pour donner leur avis fur la » néceffité de cette prohibition. Quand elle » aura paffé a. la pluralité des voix , on ne » pourroit la ré^'oquer que dans une pareille » affemblée. On confirme , de plus, la pro>f vince dans 1'ancitn ufage ou elle étoit, de » fuivre le droit écrit : non pas, dit le mo» narque , que 1'autorité de ce droit nous » oblige ou nous lie, mais paree que nous » ne voulons pas pour le préfent changer les » mceurs 8c les coutumes.» Cette ordonnance (ajoute  de Savaron. 177 (ajouie Velly), eft le plu's aiicién mohuriierit ou Pon Voie le tiers état appellé 'dans lés affemblées qui trairent d*objets intéreffaris pöiir le péuple. On en peut tirer, dit dom Vaiffetë*, 1'origine de nos états ; qui ne font deverius généraux que par le concours dés états partlculiers de chaque fêncchauffée qui s'aflembloierit d'abord fifparémerit , &i qui , s'étant réunies dans la fuite , n'or.t compöfé qu'üri feul corps. Le parlement affemble èri 1254611 1255 j s'occupa de plufieurs réformes, dont la plus importante pour le peuple étoit que lèsjugës prêteroient pübiiquement ferment aux affifes devant tout le peuple, afin qu'ils fuflent re*ienus & par la crainte de finJigrzation divini & 'royale, & par ia kortte , 'toujours infeparable du parjüfe. Le parlement tenu eri 1269, s'occupa beau« coup du foin de contenir a jamais les blafphémateurs; occupation digne de Louis IX j qui foutènoit cbntinuellernent les loix par les rnceurs. Nous ne mettrons point au hcmbre des parlemeris 1'affemblée des barons qui eut lieu en 1259, a 1'bccafióri dü traité de paix fcönchi avec 1'Angleterre; contre 1'kvis de tous les affiftans. Cifi la feule fois , dit Mézerai; qiiil Tome VI, M  fj% Notice sur la Chronologie lui arrïva de choquer la volonté de fes barons. Nous rapportons ce fait, paree qu'on verra eet exemple fouvent reproduit. Louis 1 X n'avoit pas même raifon , ce qui rendoit fon ©piniatreté d'un exemple encore plus dangereux. Je fais bien , difoit il, que le roi d'Angleterre n'a point de droit a la terre que je •lui laifle : fon pere 1'a perdue par jugement. Mais nous fommes beaux - freres : nos enfans font coufins - germains : je veux établir la paix & Tunion entre les deux royaumes. J'y trouve d'ailleurs un avantage , qui eft d'avoir un roi pour vaffal: Henri eft a préfent mon homme , ce qu'il n'étoit point auparavant.— Celaveut dire clairement en d'autres termes; ce'a me plait, cela eft de convenance pour moi &les miens; fansnuire trop a 1'intérêt de 1'état. Louis IX s'écarta également de 1'ancienne coutume qui exigeoit 1'affemblée générale, ou celle des barons pour nommer un régent. II nomma luimême, en 1269, avant fon départ, deux régens du royaume, de fa feule oc pleine autorité. Cependant , les derniers confeils qu'il ,donna a fon fils, peu avant fa mort, annoncent un prince jufte. — « Garde-toi, biau cher » fils , lui dit il, de trop grandes convoitifes: » ne boute pas fur tes peuples trop grandes » tailles ni fubfides , fi ce n'efi par grande  de Savaron. f) néceffité, pour ton royaume défendre: alors » même travaille-toi è procurer que la dépenfe » de ta maifon foit raifonnable & felon me» fure. Obferve les bonnes & anciennes coutumest » corrige les mauvaifes. Re garde avec toute di» ligence comment tes gens vivent en paix » deffous toi, par efpéciat és bonnes villes & » cités : maintiens les franchifes & libertés ef» quelles les anciens les ont gardées : plus elk's »> feront riches & puiffantes, plus tes ennemis & » adverfaires douteront de t'ajfaillir & de mé» prendre envers toi , efpéciakment tes pareils & » tes barons.» PHILIPPE III. Ce roi n'a rien laiflé qui puiffe être admis en preuve pour ou contre la conflitution de la monarchie. On ne cite qu'une affemblée de princes chrétiens , tenue k Montpellier en 4275 ou l27& -> oii il fut dit ou réfolu que iè domaine royal deviendroit inaliénable. Cette aiTecnblée paroït même douteufe. PHILIPPE IV, furnommé LE BEL. La majefté du tröne ( dit 1'abbé de Velly), foutenue avec gloire contre des vaffaux éga-  1S0 Notice sur la. Chronologie lement fiers & puiflans : une nouvelle pairie érigée en France ; le tiers état admis aux affemblées de k nation ; la juftice fouveraine réguliérement adminiftrée deux fois l'an a Paris , a Rouen , a Troyes ; les entreprifes de Rome reprimces avec éclat : les duels abolispour toujours en matiere civile ; 1'ordre des templier» exterminé dans toute la chrétienté ; la ville de Lyon réunie a la couronne , dont elle étoit féparée depuis environ quatre eens ans ; les apanages reftreints aux feuls héritiers males : tels font les événemens principaux qui ren lent a jamais célebre le regne de Philippe IV. — On ne peut, en effet, trouver un regne dont les opérations foient plus effentielles , & d'une nature auffi particuliere a Paccroiffemeat intérieur de l'état, & au maintien des droits de la nation. L'examen des états généraux va nous en convaincre, les déuiêlés de Philippe avec Boniface, Pefpece de divifion avec laquelle il avoit «911 une bulle de ce pontife hautain, infpirerent quelques cra'mtes :\ ce roi, qui craignoit les effets du fanatifme fur i'efprjt du peuple, accoutumé a refueöer le pape. li convoqua un parlement en 1301, a Paris, compofé des grands & des prélats du royaume ; deux députés des villes , communautés , cbapitres , univerfités, & les  B E S A V A R O N.' t$i fupérieurs des maifons religisufes. C'eft la première fois que nos rois ( dit Velly, tom. 7 » p. 195), ont appelléles communes pour prendre leur avis. Velly fe trompe, Sc on a déja vu dans cette analyfe de la chronologie, que des Louis-le-Gros les communes ont eudes députés». véritables repréfentansdes bonnes villes , ayant leurs coutumes, Savaron ne s'eft point trompé(quoiqu'en dife 1'abbé Velly ) , quand il' a a£firmé que les communes , dès la fondation de la monarchie , avoient entree, féance, opinion dans nos aflémblées. li eft faux, quoiqu'eu dife Velly, que les ókaWps de mars , champs, de mai ou pariemens, ne faffent compofés dans la première race que de la nobleffe , Sc qu'on n'y admït dans la feconde Sc la troifieme race que le clergé 8c la nobleffe. Nous avons marqué toutes les fois que nous 1'avons pu, les époques oü les privileges des communes ont* été ufhrpés, 8c ou on n'a vu, en effet, dans les affemblées que le clergé & la nobleffe mais ces ufurpations n'ont conftitué ni un droit pour ces deux ordres , ni une prefcriptio» contre le peuple, & il' y a ï parier que le peuple, fans y être défigaé, y venoit & j délibéroit. La fiïiation des droits des communes n'a jamais été aitaquée* Joachim le Granda eu sailon üe ïerufer le nom d'étatsï l'affsmblée- dQ  1S1 Notice sur la Chronologie 1302, qui fe tint en avril dans 1'églife de NotreDame de Paris, paree que le tiers état n'y fut pas confulté conointernent avec la nobleffe & le clergé, mais féparément. Ce fut une innovation & une efpece de violation des droits du peuple; mais on auroit tort de prendre k Ia rigueur ce que dit Pafquier , qui part de cette innovation pour reculer 1'époque de la reftauration des états généraux k l'an 13 41 , qu'il appelle fimplement injlitution. II n'eft pas vrai que , hormis les tems affreux de la féodalité , les communes n'aient point eu voix délibérative dans les dietes de la nation. II faut, comme on dit, lire Velly avec précaution. Dans ces états de 1202 , les communes préfenterent au roi une fuppüque, k 1'effet qu'il lui plüt garder la fouveraine franchife de fon royaume, qui eft tel que dans le temporel ie roi ne reconnoit fouverain en terre , fors que en dieu. Ce qu'il y a de remarquable, c'eft que les trois ordres ou états écrivirent féparément k Rome , & protefterent - en leur nom, contre toute démarche du pontife. Ainfi la nation exerca feule une autorité , dont jufques la les rois avoient été feuls dépofitaires ; car toujours les rois avoient manifefté aux puifiances étrangeres les réfolutions des états. Le parlement eft rendu fédentaire en 1304  be Savaron. 1S3 *>u 1305. Nous fommes en un royaume (dit Pafquier, pag. 59 , Recherches de la France), auquel pour la faciiité de nos rois les chofes viennent fort aifément a l'efTet. II n'y eut ff petit feigneur un peu en crédit, qui ne voulüt être immatriculé dans cette compagnie : bientöt le nombre en fut effréné. Pafquier ajoute ail'eurs que le parlemenrn'eft que les états généraux réduits au petit pied. Cette augufte compagnie a toujours été ( dit Pafquier, ) fort; recommandée en France. Comme "celle par laquelle fans efclandre , font vérifiées les volontés de notre prince. Les états généraux de 1306 ne s'occuperent qu'a régler les monnoies. Les murmures étoient devenus violens, & fa mauvaife foi du mo? narque n'ayant pas donné beaucoup de fuite a leurs remontrances, il fut obligé de convoquer les notables, des bonnes, villes pour remédier au mal dont on fe p'aignoit. Enfin , on vit ces états de TJpurs en 1311,trop célebres par une grande injuftice. L'affemblée étoit très-nombreufe le roi y prélida fon chancelier expofa. les preuves recueillies. contre les templiers; &: les états laifferent le roi maitre de s'arranger avec le pape, pour commettre irnpunément une infamierévoitante. Le roi conféra], a Poitiers ? avec le psp2, qui M 4  s§4 Notice sur la Chronologie confentit a tout, pourvu que les biens des tem-* pliers ferviffent a la conquête de la TerreSainte. Par cette condition,le pape annonca qu'il étoit convaincu qu'on pourfuivoit lestempliers bien plus a caufe de leurs grandes richefl'es, qu'a caufe du déréglement de leurs mceurs- ■LOUIS H U T I N. Ce roi calma & difperfa la ligue du Ver-' mandois, du Beauvoifis , de Champagne, de Bourgogne , du Forez , en rétablifant la nobleffe dans toutes les prérogatives (Velly), dont elle jcuiffoit fous Saint Louis ; il appaifa les. peuples en otant les impóts qui exciiqient leurs murmures , & fur-tout en leur facrifant Enguerrand de Marigny, qu'ils regaraoienp depuis long-tems comme. tauteur de leur mifere, C'étoit fatisfaire tout d-lafois , & fa haine perfonmlle contre ce feigneur , & le reffentiment gêncral de la nation , qui , toujours refpeclueufe envers fon roi, ne sen prend jamais fu'aux miniftres des maux quelle fouffre. Nous obferverons que la haine du peuple ne fut pas jufte , & que Marigny étoit innocent. Ce fut fous ce regne que la nation recut une, amélioratian trop long-tems defirée; nous voulons parler des amanchiffemens vendus a, prix djargenh Le roi déclara par un éciit, qu'étant  de Savaron. 185 roi des Francs , il ne devoit point y avoir d'efclaves dans fon royaume , & qu'il affranchiroit ceux qui pourroient acheter leur afTran-* chiffement. 11 n'y avoit alors ( dit Velly , torn. 8, pag. 29,) « que les bourgeois des villes » qui vécufTent librement : tous les habitans » de la campagne étoient ferfs, ou comme orï » parloit dans ces anciens tems , gens de corps, » gens de poete, gens de main-morte. » Tous ne furent point jaloux d'acheter leur liberté; mais comme le prince avoit befoin d'argent, ils y furent contraints. On voit des lettres du prince qui font affez lïngulieres : — « attendu, dit-il;; >> que plufieurs par mauvais confeil, ou faute h de bons avis , ne connoiffent pas la gran» deur du bienfait qui leur eft accordé , or» donne a fes officiers de les taxer fuffifam» mént & fi grandement comme leur condi» tion & leurs richeffes peuvent bonnen;ent » le fcuffrir.» Les juifs furent, par la même raifon , rappellés en France. C'eft encore fous ce regne que fa nation trouve un titre clair & précis, fu» Ia néceffité de donner fon fuffrage pour la lé vee des impóts , qui ne pourra être faite fans le confentement des trois états. L'interregne qui fuivit la mort de Louis Hutin, néceffita un parlement ( 13ï6), ou les  i86 Notice sur la Chronologie douze pairs difpoferent de la régence , Sz affurerent même la couronne dans la maifon régnante: on attendit 1'enfantement de la reine , & on n'accorda la régence a Philippe, que dans le cas oü la reine mettroit au monde un prince. La mort du prince donna des droits au régent, qui monta aufli tot fur le tiöne. PHILIPPE-LE-LONG. II ne trouva pas de meilleur expédient pour s'affermir fur un tröne qu'on lui difputoit, que «le convoquer, en 1317, une affemblée de prélats, de feigneurs, & de bourgeois de la capitale, tous , excepté 1'univerfité , qui toutefois(dit Velly,) approuvoit Ie couronnement, s'obligerent par ferment a lui obéir comme a leur légitime fouverain, & après lui a Louis fon fils. « Ce fut dans cette affemblée que l'on fit » la loi expreffe qui exclut de la couronne »> les princeffes du fang ; ou plutöt que ton » confirma qelle qui étoit établie avec la monar•» chie, mais dont 1'obfervation avoit été juf» ques-la pour ainfi-dire infenfible : tous les » rois , depuis Hugues-Capet, c'eft-a-dire dev puis trois'eens trente ans , ayant fuccédó » au tröne de pere en fils. » // fut prononcé  de Savaron. 187 quau royaume de France les femmes ne fuccedent point. Tune etiam declaratum fuit, quod ad coronam regni Francis muiier non fuccedit. Contin. Chron. Guill. de Nangis. Specil, torn. 3 , pag. 72. On trouve fous ce regne un exemple remarquable pour les franchifes de la nation. Philippe-le-Long ayant eu le projet de lever le cinquieme des biens de fes fujets, il fe forma des ligues pour s'y oppofer, entre le clergé, la nobleffe, & les bonnes villes , en 13 21. Le roi n'alla pas plus loin, & fufpendit 1'exécution de fes deffeins. CHARLES IV, dit LE BEL. Le feu roi ( dit Velly,) n'avoit laiffé que des filles. La fucceffion au tröne de male en male, autorifée depuis tant de fiecles, venoit d'être confirméepar les états généraux. Charles, comte de la Marche, fut reconnu fans oppofition. Quand il fentit fa fin s'approcher , il fit appeller les grands feigneurs qui étoient a la cour , & leur dit: « que fi la reine accou» choit d'ü'n hls, il ne doutoit point qu'ils ne » le reconnufTent pour leur roi; mais qtie fi » elle n'avoit qu'une fille , ce feroit aux grands  ?88 Notice sur la Chronologie » barons de France d adjuger la couronne a qid ». il appartiendroit: qu'en attendant il déclaroit » Philippe de Valois régent du royaume. » PHILIPPE VI. « Une fatale extrémité le réduifit k établir » une foule d'impots , d'abord ordonnés par » les états généraux, pour faire la guerre, &£ » pour un tems , depuis toujours continués Sc » augmentés fuivant la volonté des rois, & » les néceffités publiques. » Un parlement tenu en 1328, afFermit la couronne fur la tête de Philippe , rnalgré les prétentions d*Edouard HL Savaron n'a point fait niention de 1'afTemblée des princes , feigneurs, & notables bourgeois raffemblés dans la Sainte-Chapelle du palais de Paris, en 1333 ; oü ie rol an::onca fon delTein ■de fe erover , & oh ii nomma régent de i'état le prince Jean fon fils. JEAN II. En lifant 1'hiftoire de fon regne ( dit Viflaret, tome IX , pj.ge xj ) , on eft étonné de voir un fou'evement gé.iéral dans tous les efprit-s , & la nation entiere, occupée de fes  BE SAVARON. ï8^i fruls intéréts , témoigner peu de fénfibüité pour les malheurs du prince. Les reffources pour foutenir la guerre étoient épuifées : on n'en pouvoit attendre que de la bonne volonté de la nation : il falloit confulter tous les ordres , dont les fufFrages alloient devenir nécef- ( faires. Ici Villaret donne fon opinion fur Torigine & la compofition des états-généraux. II s'en faut bien que notre avis foit conforme au fien ; & quelque réferve que nous nous foyons impofée , on a du s'appercevoir que nous ne nous écartons point de Ia bonne Sc süre tradition des monumens les plus authentiques t Sc qu'au moins la vérité feule nous infpire. L'efprit de parti ne nous déshonorera jamais. II s'en faut bien que Velly & Villaret aient approfondi une matiere auffi importante ; mais quelques fuperficielsqu'ils puiffent être, comme nous ne publions qu'une colleöion , nous alIons continuer 1'analyfe commencée , & inférer ici ce que Villaret a écrit fur les états-généraux. Nous avons rerapli notre tache auffi-tót que nous avons prévenu nos lefteurs. En fe repréfentant ( Villaret, tome IX, page 117), les principales révolutions de notre monarchie, on s'appercoit fans peine que 1'autorité des affemblées générales a toujours dé-  190 Notice sur la Chronologie pendu de la puiflance ou de la foibleffe des princes. Tant que les rois de la première race conferverent la difpofition des fiefs ou bénétfices militaires & des dignités, & qu'ils ne les donnerent que pour un tems , cette multitude de leudes ou feigneurs qui compofoient les affemblées du champ de Mars , n'avoit garde de manquer de complaifance pour le 'fouverain duquel émanoient les graces & les récompenfes. Heureux les monarques , s'ils avoient toujours retenu dans leurs mains le mobile puiffant de l'affe&ion & de la fidélité des gens de guerre , dans lefquels on pouvoit dire que réfidoit alors la nation. Mais bien-töt oubüant 1'intérêt de leur grandeur, ils donnerent ou vendirent les charges &c les fiefs a titre d'hérédité. Ils fe perdirent également par une libéralité exceffive, ou par une bonteufe avarice ; n'ayant plus rien a donner ou a vendre , ils ne furent plus aimés ni redoutés. Ces mêmes affemblées , auxquelles , jufques-la, ils avoient impofé la loi, les affervirent a leur tour; le monarque ne fut plus qu'unfantöme, & 1'autorité fouveraine affoiblie , fit place a un nouveau genre de gouvernement. La puiffance des maires du palais éclipfa la majefié des rois. Ces redoutables miniftres continrent quelque tems une na-  de Savaron; iq£ tion belllqueufe, plutöt par la terreur que par 1'efpoir des récompenfes. Leur pouvoir é-oit fi bien sffermi , qre la révolution qui placa la poftérité de Charles Martel fur le tröne , fe fit prefoue fans effort. Le vafie génie de Charlemagne éleva la monarchie Francoife au plus haut degré de puiffance & de grandeur. » Loin d'abo'ir les affemblées rationales i jama;s prince ne les convoqua fi fréquemment ; elles embraffoient , même dans leurs délibérations , un plus grand ncmbre d'objets. Tout ce qui concernoit le gouvernement eccléfiaftique, politique & civil , y étoit réglé; mais le monarque étoit 1'ame de ces affemblées. Cette dépendance, a la vérité , étoit encore plus attachée a fon mérite perfonnel , qu'a fa dignité. Malheureufement pour la gloire & le borheur de 1'état; ce grand homme fut le dernier héros de fa race. L'ouvrage de la valeur de Martel, de la prudence de Pepin , de la magnanimité de Charles , fut détruit par les premières démarches du fils de ce dernier. Louisde-Débonnaire ne connut ni la juftice qu'il devoit aux autres , ni le refpecl: que fa propre grandeur exigeoit de lui. Sévere, ou plutöt cruel par foibleffe , il ofa faire juger la caufe des rois dans une affemblée, en  i^x Notice sur la. Chronologie faifant condamner fon neveu Bernard , roi d'Itaüe ». » La révolte de fes enfans le forca enfuitè de reconnoïtre une autorité au-defTus de la fienne i en fe fonmettant au jugement qui fut prononcé contre lui dans une autre affemblée, qui eut 1'audace de le faire defcendre du tröne. Violateur de la loi , il fut la vittime de fon injuftice- Ses defcendans , encore plus mal adroits * regarderent les grands de i'état comme autant d'ennemis : ils eraignoientdeles réunir en corps; & s'imaginant trouver leur avantage en les divifant, ils éviterent, autant qu'ils purent, les convocations générales ». « Sous la fin de la feconde race, on ne voit » prefque plus que des affemblées particulieres: » cette mauvaife politique acheva de tout » perdre. Les affemblées générales auroient » peut-être éte la reffource de 1'empire & du » prince, fi les foibles Carliens n'avoient pas » négligé trop long-tems de les convoquer: » ils avoient appréhendé que les états n'éclai» raffent les inconvéniens d'une mauvaife ad» miniftration ; & lorfqu'un gouvernement vi» cieux eut abfolument divifé toutes les parties ♦> de I'état, il n'étoit plus tems d'implorer lè » feul afyle qu'ils auroient pu trouver dans » une rëunion déformais impoffible. Louism le-Débonnairé  Öè Savaröns f93' * -e-Débonnaire lui-même, dans tin tems* w óii la corntption , qu'il avoit le premier1 « introduite j ne cömmencoit qu'a fe faire* » fentir , avoit éprouvé qu'elles étoient les" w reffources qu'un fouverain pouvoit trouver" » dans ces affemblées générales. Un parlement i » féduit ou intimidé par fes enfans , lWoit » dépoié: un parlement libre lé rétablit. Mais" » les derniers rois de la feconde race étoient » bien éloignés de pouvoir fe natter d'url » pareil fecoursi La nation étoit partagéé en\ » une infinitê de pörtions , dönt chaque chef ± » devtnu fouverain , avoit un intêrit vifible d » favorifer une divïfion qui entretenoit VindèpenA » danct & garantiffoit les ufurpations. De cette » anarchie, naquit le gouvernement féodal ± » que Hugues Capet trouva établi lorfqu'il >* parvint a la couronne ». » L'élevation trop prompte des deux pre*" » mieres dinafiies n'avoient eu qu'une durée » proportionnée a cette rapidité. La puhTance » fouveraine', fous la troifieme race , par une. » marche oppofée > s'avancant pas a pas, fit » des progrès plus lentSj mais plus sürs j jetta » des racines plus profondes. Les Garliens s'é» toient laifie dépouiller d'un pouvoir qu'ils » avoient reeutout entier. Les defcendans » de Hugues Capet augmenterent continue!*  194 Notice sur la Chronologie » lement ce pouvoir quils avoient recu très-borne » & rétablirent Pautorité royale , dont les » fondemens confacrés par le tems , ont enfin » acquis ce dernier degré d'immutabilité, au» quel les établiffemens humains peuvent par» venir ». » Nous avons vu la France, lorfque Hugues » Capet monta fur le tróne , former un corps » a peu prés femblable a ce que font aujour» d'hui 1'Allemagne & la Pologne. Nos rois » s'occuperent uniquement du foin d'aggrandir » leurs domaines, ou d'acquérir des vaffaux: » ils fongerent peu a peu a rétablir les anciennes' w affemblées de la nation : les feigneurs ne » les réclamerent pas , aimant mieux jouir » dans leurs grands fiefs d'une 1'ouveraineté » prefque indépendante, que de paroitre dans » ces affemblées générales , oii ils étoient tou» jours forcés de refpeöer dans le prince un » éclat qui éclipfoitle leur. Les rois,cepen» dant , voyoient fans peine ces petits fou»» verains fe déchirer &c s'affoiblir par des » guerres mutuelies, & la puiffance du mo» narque s'accroiffoit toujours de ieurs pertes. y> Specfateurs attentifs des démêiés particuliers , » les premiers fouverains de la troifieme race » furent profiter des circonflances , foit en » prenant parti dans les querelles , foit en  de Savaron»' 19? *> fe portant pour médiateurs 011 pour juges ■, » & tirant toujours avantage , ou de leur » fecours , ou de leur neutralité ». » A mefure que la puiffance des rois s'aug» menta , s'affermit, Findépendance des fei» gneurs diminua. Les affemblées générales devia» rent plus fréquentes & plus régulier es ; on les vit » renaitrt avec l'autcrité du fouverain. » Les affemblês particulieres n'avoientpas eu » Le même fort : établies dès le regne de » Charlemagne , elles avoient toujours été » tenues,depuis , affez régulierement. Hugues » Capet &£ fes premiers fucceffeurs, les con»> voquerent dans leurs dcmaines , ainfi que » le faifoient , dans les leurs , les poffeffeurs » des grands fiefs. Les rois , en réuniffant des » provinces a celles qu'ils poffedoient ,déja, » obligerent leurs nouveaux vaffaux a fe » rendrea leurs affemblées ou pariemens , qui » dès-lors étoient regardés comme des affem» blées générales par toutes les terres de leur » domination. C'eft ia raifon pour laquelle, les >* provinces qui ont été rappellées de bonne » heure a 1'ancien domaine de nos monarques , » n'ont point eu d'états particuliers depuis » cette réunion, tandis que celles qui ont été » réunies dans des tems poftérieurs & fous de » certaines conditions^.cpmme le Languedoc , N a  *9< NOTfCE SUR LA CHRONOLOGIE » la Provence, le Danphiné, la Bourgogne;} tt la Bretagne , la Flandres & 1'Artois , ont » confervé leurs états ou affetrtblées particu*» lieres >>. » Les affemblées générales ne fe tenóient » que dans les grandes occafiorts, telles que »> le couronnement des rois, ou les guerres »> que la nation avoit a foutenir contre les » étrangers. Ces affemblées ne furent long-tems » compojées que du clergé & de la nobleffe. Les »> peuples, rêduits d I'état de fervhude , n'étoient ni » appellês niconfultés dans les délibêrations publi» ques: mais lorfque les habitans des villes, élevés » au rang des citoyens , formerent dans l'etat » un' corps féparé du clergé & de la nobleffe , ils 4> dürent néceffairement être appellês aux affemblées Si convoquées pour la défenfe de la nation , qüi » leur devenoit commune avec les deux premiers » ordres ». » En effet, les premiers établiffemens des »> communes fe font formés fous Louis VI. Et » fous Louis VII fon fils on voit les gens des » bonnes villes affifier aux états de 1145. Ce » qui fervit encore a augmenter la confidéra» tion que le tiers-état commencoit d'acquérir, » ce fut 1'ufage que les rois introduifirent w d'employer des troupes foudoyées dans les v> armées. Les revenus des fouverains ne fuffi-;  DE S A V A R O Ni 19^ » fant pas au paiement de cette folde, il fal» lut que les fujets contrihuaffent è cette dé» penfe.il étoit a propos de confulter leurs& facultés ; & qui pouvoit en rendre compte » mieux qu'eux-mêmes ?■ li n'eft donc pas êton^» /zant que les députés des bonnes villes ayent itfc » appelles aux affemblées, far-tout lorfquil's'a^ » giffoit de.quelque impofition. On prenoit a-lors » avec les mefures néceffaires pour en faire la » répartition. On voit-encore fous faint-Louis » les députés des tiers états affifter a 1'affemblée » dans, laquelle on réfolut la guerre- contre le m comte de la Marche- Ainfi 1'on ne doit pas » regarder les états de 1-301 , fous Philippe le » Bei, comme les premiers ©u fe foient-treu» vés les députés du peuple ; mais comme ceux» ou ils a-ffferent pour la première fois avec voi^ » délibérativei. » Ce troifieme ordre , fbibl'e dans fès com-.. » meneerrrens , s'étoit confidérablement ag-». » gr-andi par les arts & le commerce, effeÊ» ordinaire de la- liberté. Les croifades & les, » guerresfanglantesqui les fuccéder ent avoient» épuifé-la nobleffe , tandis que les bourgeois, >r a> la faveur de leur obfeurhè'-, avbierit- acquis des,, » richeffes, qui furent avec raifon regardêes-comme» um dis prïneipales reffources de- l~étal, funv tout daas un iem$ ou i'argent éfou>deven% Ni '  198 Notice sur la Chronologie » le premier mobile de la guerre. Les fuccef» feurs de Philippe le Bel les appellerent » prefque toujours aux affemblées générale*. » Coinme le principal motif de ces affem») blées étoit de trouver des fonds pour föute»> nir la guerre , & que c'étoit ordinairemeht >i fur \§ tiers-état que tomboit la plus grande >> partie des impofitions, les fuffrages des dé» putés du peuple devoient néceffairement » avoir Ia principale influence dans les déli» bérations. Le troifierne ordre s'accoutuma par » degrés d fe prèvaloir de la nêceffitê des tems : >> après avoir balancé le crédit de la nobleffe , » il entreprit de difcuter les droits & d'atta» quer les limites de 1'autorité fouveraine. Ce » fut aux états de cette année qu'il ofa faire » le premier eflai d'un pouvoir ufurpé: on y vit » t'admimflration publique réglée & réformêe en » plufieurs parties , le prince tranfiger avec fes » fujets, abandonner le profit qu'il tiroit de la » fabrication des monnoies, en échange de f irn» pojition , d laquelle on Je Jóumit , & le peuple » affigner la rèpartition & la levée , fixer l'emploi » & decider du manimem des finances ». Plufieurs écrivains ont comparé la déclaration du roi Jean, rendue fur les remontrances des états de 13 5 5 , a la fameufe charte accordée a la nation angloife , par un prince du  d e Savaron; 199 même nom. On ne peut donc fe difpenfer de donner un précis des déübérations de cette aiïemblée céiebre , & nous renvoyons ce précis au volume ou nous traiterons particulierement de cette affemblée : nous allons nous borner a quelques obfervations dont nos lecteurs ont befoin pour n'être point induits en erreur par Villaret, qui n'a prefque dit que des demi - vérités , & qui fouvent a craint de dire ces demi-vérités. i°. II eft vrai que les Carliens craignirent de convoquer les affemblées générales. 2°. La divifion de la monarchie en fiefs & en petites fouverainetés devint un obftacle infurmontable a la convocation nationale. Ce ne fut que Peffet d'une ufurpation. Les droits de la nation furent fufpendus; mais le non exercice d'un droit, ne préfume point qu'il efl anéanti. Le gouvernement féodal éleva une puiffance intermédiaire entre le peuple &C le roi, qui nuifit également a 1'un & a 1'autre. 30. II eft vrai que Hugues Capet recut un pouvoir très-borné , que fes defcendans ont étendu : la conféquence eft facile a tirer de ce principe : ils n'ont pu s'accroïtre qu'en dépouillant & les vaffaux & la nation. La nation contribua peu, paree qu'elle étoit déja fpoliée. 4*?, II eft effentiel de remarquer que les af* N 4  aoD Notice sur la Chronoiogie femblées nationaies devinrent pUis fréquentes-; quand les rois furent affermis fur leur tröne, ce qui prouve que ces affemblées n'ont jamais été redoutables, & que Charlemagne en les rapprochant, favoit mieux que tous les fouverains qui lui ont fuccéde , quelles reffources il pouvoit tirer de ces fréquentes convocations. Les droits du peuple fuivirent fous les Capet la gradation que fuivoit 1'élévation du monarque; ils s'élevoient mutuellement ck dHm mouvement égal. La tenue non interrcmpue des états particuliers, régulierement rappelléa dans les provinces qui n'étoient point comprifes. dans 1'ancien domaine voyal , prouve que ia nation n'a jamais perdu le droit de s'affembler. 5°. Villaret fe trompe en avancant que les habitans des bonnes villes furent élevcs au rang des citoyens par les defcendans- des Capet, Tout n'étoii pas efclave fous k féodalité ; les rois multiplierent les franchifes aprix d'argcnt, mais il y avoit beaucoup d'hommes libres;öö fuppofé que la féodalité eut rendu 1 'efclavage plus univerfel qu'il ne i'a été, ce n'eüt été qu'ime ufurpaiion plus criante; car dès Tori-s gine dz la monarchie, le peuple avoit joui de fa liberté, Sc avoit été régulierement appellé aux pariemens. Les gens de§ bonnes villes, o» pour nom  de Savaron.' iof ifervïr d'une plus ancienne dénomination, les hommes libres ont toujours eu voix délibérative aux parlemens. Villaret fe trompe en fixant a l'an 1301 1'époque ou le tiers-état a eu voix délibérative. Qu'on remonte a i'établiffement des communes , & on .verra fi elles ne délibéi roient pas. 70. On demandoit le fuffrage du tiers-état quand il s'agiffoit des impofitions : on ne le demanda pas toujours quand il n'étoit queftion que de décider de la paix tk de la guerre. Cela étoit juüe. II ne marchoit point. II s'enrichiffoit en paix , tandis que la nobleffe fe ruinoit, 85 que le clergé tk le pape s'impofoient des décimes pour les croifades. Nous parierons plus au long de la prétendue nfurpation que Villaret croit devoir reprocher au tiers-état pendant les états tenus fous le roi Jean. Nous prouverons qw'il s'eft trompé. La prifon du roi Jean obligea le régent d'af-. fembler les états généraux (1356) ; mais les députés n'y apporterent point des intentions, bénévoles. La rigueur .exceffive des impöts, tk la conduite du roi Jean, avoient indigné tous les ordres. Ik principalement le tiers état,. qui, n'ayant rien & efpérer de la faveur du, roi, fupporte le fardeau des fubfides fans le rnoindre dé4QO-m3gern,en,u Tqus les corps 8  loi Notice sur la Chronologie divifés entr'eux , ne fe trou Verent d'accordque pour faire éclater leurs mdrtoferes j fakes trop ordinaire* (dit Villaret,) des malheurs de t'êtat, quifemblent répandre fur ceux qui le compofent, un efprit^ de vertige qui les aveugle, & leur fait méconnoitre leurs véritables intéréts. La nobleffe étoit ruinée, & les families illuftres avoient perdu la moitié de leurs parens a 1'armée ; la plupart étoient prifonniers è Londres. On murmuroit contre le roi. Le peuple indigné du luxe des nobles, fe foulevoit contr'eux, & accufoit le monarque. Les habitans de la campagne fe permirent contre la nobleffe, des qualifications dérifoires, & des fobriquets humilians. Huit eens députés compoferent cette célebre affemblée. Nous en donnerons des détails, quand il en fera tems, & quand 1'ordre chronologique des procés - verbaux le permettra. Nous ne parierons ici que de 1'ordonnance que Charles V , alors régent du royaume, rendit en plein parlement ( 13 5 9 ), qui femble prouver que le roi peut infirmer les délibérations des états & interprêter leurs proteftations; & que le droit des remontrances eft prefque le feul réfultat des affemblées modernes des états gé-; néraux. Charles déclara en parlement qu'il avoit toujours regardé (Villaret, tom. IX,  de Savaron. 203 pag. 3 67), comme fujets fideles & affectionnés, les vingt-deux officiers que 1'aflemblée des états de 1357 1'avoit contraint de deffituer ; que 1'appréhenfionde plus grands malheurs n'auroit pas été capablé de le faire céder k 1'irnportunité desennemis du gouvernement, s'il n avoit efpéré que dans des circonfiances plus heureufes, il lui feroit libre de fuivre les mouvemens de fa juftice : que le tems étoit arrivé de refiituer en leurs états & renommêes, des officiers qui n avoient été pourfuivis qu'en haine de leur auachement au bien génêral & ,d f honneur du fouverain ; qu en confêquence il les rêintègroit dans leurs biens & dignitês, ordonnant qu'ils feroient pay és des gages de leurs offices, comme sits les avoient toujours confervés. Le prince ajouta qu'il defroit que fa déclaration fut fgnifiée au pape, d tempereur , aux princes, aux villes , afin que ce témoignage authentique effagdtjufquau moindre foupgon quauroit pu faire naitre la dejlitution de ces officiers. C'eft ainfi que fut éludé le vceu des états , & qu'une délibération prife dans l'affemblée nationale , fur anéantie d'une maniere humihante pour tous les états. Une foule de réflexions naïtroient fous notre plume , & nous fommes perfuadés qu'on les fera pour nous. Savaron n'a rien dit de raffemblée des états généraux de 1357, dans laquelle les nobles,  t»4 Notice sur la Chronologie outre les fubfides, s'obligerent unanimement de fervir k leurs dépens pendant un mois , fans y comprendre le tems néeeffaire, foit pour fe rendre a 1'armée, foit pour fe retirer. II ne fait mention dans cette même année que de la convocation des états pour le traité de paix avec les Anglois , qui fut unanimement rejetté; & il a omis la- précédente affemblée pour les fubfides. Le peuple , a foccafion du traité de paix, montra bien qu'il étoit attaché k 1'orgueilde la couronne , & a en conferver toute la dignité , quoiqu'il prouvat auffi qu'il n'étoit point difpofé a permettre qu'on 1'accabhit d'impöts. II re}etta le traité propofé par les Anglois, en s'écriant que toute la nation étoit réfolue de faire bonne guerre au roi d'Angleterre. Villaret devoit condamner le peuple qui sefufoit le fubfide , paree qu'il ne le pouvoit point , felon lui , fans forti* des hornes de 1'obéiffance; & il paroit bien que dans eet hi£. torien &dans plufieurs autres , le parti eft pris de n'affigner aucunes limites a l'autorité* Le fait fuivant fe trouve juftifié , & par le préffdent^ Hénault , & par Villaret , « quoiqu'il pnvat les ducs, dont il eft mention, d'un droit de priorité entre les pairs, dont ils avoient joui j.ufques-lè. Jeanll décjara. fon nis premie*  ï>ë Savaron. icy pair de France. Par cette déclaration, il dépouilloit de cette prérogative les ducs d'Aquitaine & de Normandie, qui jufquesda avoient précédé les ducs de Bourgogne comme pairs. Ce fait (ajoute Villaret , torn. IX, pag. 515 , & il copie le préfident Hénault), eft remarquable en ce qu'il prouve que 1'autorité royale peut en quelque forte changer la nature des chofes , en donnant a une inftitution nouvelle la priorité des tems fur de plus anciennes.» — Nous n'ignorons point qu'une foule d'exemples viennent a 1'appui de femblables acfes 4'autorité. CHARLES V. * La France (dit Villaret,) paroiffoit réduite au dernier degré d'abaiffement. II y avoit peu d'apparence qu'elle put fe relever fi-töt de tant de pertes; mais il eft dans tous les états, & fur-tout dans le notre , des reffources qui n'attendent pour fe manifefter que les lumieres d'un génie a&if qui fache faire jouer a propos des refforts inconnus au vulgaire. Charles V peut apprendre a tous les monarques la route qu'ils doivent fuivre pour fe couvrir de gloire, rendre leur état florif|ant, Sc affurer la félicité des peuples que Ia  io6 Notice sur la Chronologie providencé leur a foumis. II travailla toute fa vie pour le bonheur de fes fujets , il les aima, il en fut aimé; il mérita leur plus tendre attachement. C'eft le plus beau trait dont on puiffe couronner fon éloge. » L'adminiftration bonne ou mauvaife ébranle en quelque forte la maffe entiere de la nation , & forme fon caractere général, dont la direttion dépend abfolument du fouverain qui la gouverne. L'ordonnance de Charles V pour Ia majorité des rois, du zi Mai 1374, auroit dü être rendue devant les états affemblés; le roi crut fuppléer cette affemblée par 1'enregiftrement au parlement, en fa préfence & celle du dauphin , du duc d'Anjou, de plufieurs autres princes, feigneurs & prélats, du recfeur & des principaux membres de 1'univerfité, ainfi que du prévöt des marchanas & des échevins de la bonne ville de ParisLa majorité (Villaret) de nos rois depuis 1'établiffement de la monarchie avoit éprouvé plufieurs variations, appuyées toutefois fur le même principe. Ils ne pouvoient être majeurs que lorfqu'ils étoient affez forts pour foutenir les fatigues du fervicë militaire. La majorité qui marchcit toujours depuis avec la faculté de porter lest'ajmes fut reiardée jufqu'a vingt-un  de Savaron: '107 ans. Charles V, par fon ordonnance, rend les fouverains majeurs dès qu'ils ont atteint la quarorzieme année. Le chancelier de Lhöpital, a 1'occafion de la majorité de Charles IX, expliqua 1'ordonnance de Charles V. II fut dit que l'efprit de la loi étoit que les rois fufient majeurs d quator^e ans commencês & non pas accomplis, fuivant la regie que dans les caufes favorables annus incgé fans paroïtre le vouloir, fit réponfe par fon chancelier aux députés de la maifon d'Autriche. » Le roi , comme il vous 1'avoit annoncé , a fait examiner votre requête; quelque coilfiance qu'il ait d'ailleurs en votre zele & en vos lumieres, il n'a pu fe difpenfer de confulter fur une matiere qui intérefle fi efTentiellement le fatut de I'état, les princes de fon fang & les.-hommes diflingués qui forment fon confeil. Puiique leur avis a été conforme a vos défirs , il ne veut pas différer plus longtems a vous donner une pjeine fatisfaction : il m'a chargé, &c. öic, &c. — La plupart des fouverains  "BE S A V A R Ö N.' l^f fóüverains effrayés de raccroiffement fubit que prenoit la maifon d'Autriche, & jugeant fagement qu'il étoit de leur intérét que la France , qui feule pouvoit un jour lui fervir de contre» poids, ne fut pas démembrée, applaudirent k ce noitvel arrangement. I! n'y eut que Philippe, roi de Cafïille, & 1'empereur Maximilien , qui témoignerent leur mécontentement. Savaron n'a point mis au nombre des états généraux le concile national de Tours convoqué en 1510. Nous convenons qu'il ne peut être affimilé tout-a-fait k une affemblée générale : mais nous croyons devoir placer ce concile k la fuite de la chronologie des états , paree qu'il y eft bien plus queftion de politique quedematieres eccléfiaftiques. Louis Xlll'avoit affemblé pour raffurer fa;confcience fur les réfolutions qu'il devoit néceffairement prendrecon« tre Jules II. — Le clergé (ditM. 1'abbé Garnier 1.12 , p. 278 ) ftatua fur les huit queftiöns qui. lui furent propofées, que le roi pouvoit légitimement ufer de fa puiffance pour déüvrer fes fujets de toute oppreffion: dépouiller, du moins pour un tems, le pape des places fortes, dont il ne fe fervoit que pour troubler Ie repos de fes voifins: fe fouftraire a fon obéiffance, non point abfolument, ni en toutes matieres/mais Mutant qu'il feroit néceffaire pour une jufte d«Jorne KL q  24* Notice sur la Chronologie fenfe: fe conformer pendant le tems de cette fouftraöion en Fancienne difcipline , dans tous les cas oü 1'ufage moderne vouioit qu'on s'adreffat au faint fiége: que tout ce que le roi pouvoit pour fa propre défenfe, il le pouvoit pour celle de fes alliés, fi ceux-ci étoient injuftetnent opprimés, & fi leurs intéréts étoient inféparables de ceux de la couronne: que les cenfures que le pape prononceroit ou auroit déja prononcées pour des intéréts purement temporels, & fans obferver les formes juridiques, feroient nulles & de nul effet. Les principaux miniftres du clergé, plus zélés pour les droits de la couronne que le roilui-même, demanderent la permiflion de nommer des députés pour notifier au pape leurs décifions, le prier de mettre fin a une guerre qui fcandalifoit fes freres, d'affembler un concile général, &c. &c. &c. Ils dcfendirent par provifion de s'adreffer pour aucune affaire a la cour de Rome, ni d'y faire paflér de 1'argent: & ils accorderent libéralement au roi un don de cent mille écus fur |es biens eccléfiaftiques. FRANCOIS I". Savaron en parlant du traité de Madrid, qui fut infirmé par la réfiftance du parlement,  BE S A V A' R O N« '24J' ailroit du ajouter que Francois Ieï fit affifter Je vice roi de Naples venu en France pour demander I'exécution du traité, k 1'audience qu'il donnoit aux députés de Bourgogne , lefquels déclarerent a fa majefté qu'ils ne confentiroient jamais a la cefiion , qu'elle avoit faite de ce duché par le dernier traité. 0:i remarque fous ce regne 1'oppofition conftante que la nation mit è i'aliénation du domaine, que les befoins du roi néceffitoienf. HENR1 II. On doit plutot appelier aflemblée des notables, que du nom d'états généraux , la convocation qui fut faite après la défaite de Saint-Quentin ; les députés fe réunirent dans une des falies du parlement. Ce fut dans cette afTemblée d'états que la magiftratureprit féance , pour la première fois, & iorma un quatrieme ordre; juiques - la elle n'y avoit pas pris de place, & c'eft a tort ( Voyez Abrégé Chronologique du préfident Hénaut,) qu'on Fa confondue avec le tiers état: elle n'y a point reparu depuis: elle n'aflifta ni aux états de Blois, ni a ceux de Paris. Nous oblerverons que ce fut fous ce regne qu'on affemblat le moins fouvent les états  244 Notice sur la Chronologie généraux, qu'on ne Pavoit fait jufques-la , &C cependant jamais ils n'eufTent été plusutiles, & jamais regne n'avoit été occupé de matieres, pour lefquelles Pavis de la nation étoit abfolument indifpenfable. II s'agifToit de rejetter ou d'accueillir les nouvelles opinions. II nous fembie que tous les points de croyance, & que les réfolutions qui doivent enfuite retomber fur la nation en corps ou individuellement, devroient être fanctionnés par les états généraux. Rien ici n'attentoit aux droits du tröne : al n'étoit queftion que de fixer I'état & la condition de la moitié des citoyens, & de leur conferver leur ancienne exiffence, ou de les en dépouiller. Dans tout cela le roi n'avoit rien perdu, la nation feule affemblée devoit feule prononcer, & fe faire a elle-même des conditions. De cette négligence , ou plutöt de eet oubli des privileges de la nation , il en eft réfulté ces perfécutions, ces guerres civiles qui ont ravi le tröne, & le jour au dernier des Valois. FRANCOIS II. Ce regne vit continuer les mêmes défordres , & les mêmes violences s'accroitre de plus en plus. La mort du jeune roi ne permit  de Savaron. 247 pas qu'on tint les états convoqués a Orléans. Les députés fe crurent dépourvus des pouvoirs néceffaires auffi-töt que Ie roi fut mort, & fif ent quelques difficultés de fe trouver a Pontoife, oü les états furent transférés par Charles IX. CHARLES IX. Ce roi retint les anciens députés, & les états eux ■ mêmes arrêterent que les députés continueroient d'agir en vertu de leurs commiffions, fur le principe ( Voyez Ie préfident Hénaut), que par la loi du royaume le mort faifit le vif; que 1'autorité royale ne meurt point, & qu'elle paffe fans interruption du roi défunt k fon légitime fucceffeur. Les acfes d'Orléans ne produifirent rien d'utile k la conftitution, on s'occupa beaucoup trop de matieres eccléfiaftiques. Le colloque de Poiffi peut être placé parmi les affemblées des notables, & on auroit pu , dès eet inftant, arrêter tous les malheurs qu'une rigueur mal entendue fit fondre fur le regne de Charles IX & d'Henri III. II n'étoit peut-être pas impoffible de concilier les efprits k ce colloque. Ce ne font point des phrafes ni de 1'efprit qu'il falloit, c'étoient les ltimieres d'une faine politique, & des intentions pacifiques. Q 1  *4<5 Notice sur la Chronologie Mais que pouvoit-on attendre d'une nation qui lifoit fans frémir de couroux la thefe de Jean Fouquerel, oii on avancoit cette affreufe propolition, renouvellée du regne de Louib-leDébonnaire , & du pontificatde Grégoire IV; papa pcteji reges & imperatores hercticos deponere. Le parlement défenfeur ■ né de la monarchie , rendit un arrêt contre cette thefe. HENRI III. Savaron ne parle point de 1'affemblée de 1574; dans laquelle on délibéra fur le parti que Pon prendroit contre les huguenors. Les états de B'.ois de 15 76 font remarquables, en ce qu'il fut ordonné que les princes du fang précéderoient tous les pairs, loit (dit le préfident Hénaut) que les princes ne fuffent pas pairs, foit que leurs pairies fuffent poftérieures k celles des autres pairs , on y régla le rang entre les princes du fang fuivant leur proximité k la couronne. Après que cette déclaration eut été enrégiftrée, Chriftophle de Thou , lors premier préfident , affura le roi que depuis 1'avénement de Philippe de Valois k la couronne , il ne s'étoit rien fait de fi utile pour la confervation de la loi falique. La jaloufie contre les Guifes en fut un des motifs.  d e Savaron. 247 Les états de Blois de 1588 font trop fameux^ pour que nous ne renvoyons point au procèsverbal de ces mêmes états; mais nous ne pouvons nous défendre de tranfcrire ici les courtes réflexions du préfident Hénaut. Les demandes infolentes des députés aux états de Blois, Sc I'audace du duc de Guife parvenue a fon comble^ forcerent enfin le roi a fe défaire de ce prince , qui étoit devenu trop puifTant pour qu'on lui donnar des juges. Ce n'étoit point une terreur panique que la crainte des entreprifes qu'il pouvoit former; il fe trouvoit dans des circonf» tances pareilles a celles dont Pepin profita* H E N R I IV. Savaron, en parlant des états de 1593•}. auroit dü les appeller prétendus etats , puifqulfe furent tenus par les ligueurs, Sc convoqués par le duc de Mayenne; il auroit dü ajouter que le parlement n'avoit caffé que ces prétendus états. Laffemblée tenue k K.ouen en 1596, ne fut qu'une affemblée des notables; ce que Savaron auroit dü dire. La pefte qui défoloit Paris, fut caufe qu'elie fut transférée a Rouen. Dans cette affemblée, les ducs de Joyeufe& de Luxembourg, fe difputerenc la préféance Sc refuferent d'y* prendre place. Q 4  Notice svr la Chronologie LOUIS XIII. Nous nous bornerons au fujet des états tenus En 1617, il fe tint a Rouen une affemblée de notables qui n'eut pas plus de fuccès que les précédens états. Fin de la notice fur la chronologie de Savaron.  *5° O p i n i o w O P I N I O N DE SAVARON, Sur rinfluence & la prépondérance 'dit lias Etat aux Etats Généraux. Voici ce que dit Savaron dans une préface a fa chronologie des états généraux, laquelle ne fe trouve point dans la plupart des éditions qui en ont été faites : — « L'opinion con$ue par aucuns que le tiers état n'étoit jadis avant. le regne de Charles VIII, appellé aux étatsgénéraux , qu'il n'y avoit entree, féance ni voix délibérative & réfolutive, ne faifant que requérir 1'ordre du clergé tk de la nobleffe,. bi a déterminé a raiTembler ici mes preuves.» Outre la réfolution de ces états & affemblées, touchant nos maximes fur le refpedi du a nos rois, tk fur leur fouveraineté fainte tk facrée , eft grandement a noter la réfolution du tiersétat, propofée aux prétendus états de Paris, de l'an 1593, au louvre, le dimanche 16 mai, fur la préféance tk prérogative requife par le  de Savaron. 255 légat, comme repréfentant la perfonne de fa fainteté. « A quoi lui auroit été répondu que ceux du tiers - état n'avoient été ignorans de leur devoir envers fa fainteté, laquelle ils reconnoifloient comme chef de 1'églife : mais que d'aiüeurs ils avoient tous le ferment a la confervation de la grandeur, autorité 6c dignité de cette monarchie : que la plupart de la compagnie étoient, les uns officiers aux cours fouveraines , les autres chefs de la juftice ès provinces , les autres magiftrats ès villes , tous réunis & inftruits ès loix & privileges de France , qui leur apprenoient de ne reconnoitre aucun étranger pour chef : qu'en 1'affaire qui fe préfentoit , il étoit bien queftion de maner la religion avec I'état & I'état avec Ja religion; mais encore que la fpirituaiité y fut mêlangée avec la temporalité , néanmoins que nous ne reconnoiflions 1'autorité &c fouveraine puiffance du pape, finon aux chofes qui étoient purement & meres fpirituelles , tellement qu'étant feulement queftion d'ouir un ambafTadeur qui vouloitrepréfenterle droit d'un étranger ennotre état, a la face &C au confpect des états, contre les loix fondamentales de I'état, nous ne pouvions prendre un étranger pour juge, comme ne voulant être notre état un compromis Sc arbitrage. A quoi auroit été répondu par ledit  O P I N I O ff fien légat qu'il Jouoir grandement PafFecliorr des Francois a la confervation de leur monarchie; mais auffi qu'il devoit croire qu'il étoit principalement queftion, au fujet qui fe préfente du fait de la religion, ou lepape, duquel il repréfente laperfonne, avoit le principal intérêt; partant que 1'on devoit paffer par fon jugement, & fe foumettre a icelui lequel comme pere commun de tous, n'y apporteroit jamais aucune paffion, ains une bonne volonté pour nous maintenir & conferver notre religion ; toutefois que fi on faifoit quelque fcrupule )kdeffus, il avoit advifé que 1'on mit une chaire vuide au milieu du daiz , & qu'il feroit au cöté droit d'icelle, & M. du Maine au cöté gauche , ou qu'il n'y eut que deux chaires ious ledit daiz, lui étant affis a la droite, ledit fieur du Maine au deflbus, ou bien que 1'on continuat la conférence en fon logis, comme elle avoit été commencée,, » Pour les états, le recueil de tant d'autews fait voir que le tiers-état y a été convoqué . par les rois, ya eu entree, fiance, opinion, avant d'être compofé des magiftrats & officiers du roi, qu'il a conféré avec les deux ordres, déhbéré, réfolu, fait porter la parole par fes députés, quelquefois a part, & le plus fouvent par le délégué des trois ordres. Le commun  de Savaron. 15$ intérêt de tous, le renouvellementdesfermens, la vénération des rois qui fe faifoient voir , fuperbement parés Sc haut montés fur un tröne doré , recevans les préfens Sc offrandes de fes peuples, 1'ordre des états pratiqué aux pays d'états , la commiilion des rois adreffée aux provinces pour 1'affemblée des trois ordres, la nomination des commiffaires Sc élus de chacun ordre pour affeoir Sc impofer les octrois Sc fouages, les comptes rendus par les receveurs en la chambre, font preuve que le tiersétat a fait partie des trois états , Sc que 1'ordre tenu en ces derniers ( 1614 ) efttiré de l'ancien des premiers tenus fous les rois des trois families a Pinftar des anciennes républiques bien ordonnées, autrement ce feroit défunir Sc démembrer ce corps accompli Sc perfectionné du nombre de trois. Mais d'autant que quelques habiles hommes & doctes antiquaires ( Fauchet, 1. 6, c. 1, Pafquier , 1. 1 , c. 7, Loyfeau Sc autres) femblent avoir fondé 1'opinion contraire fur ce qu'en la plupart des états, Sc pariemens de la première, feconde, Sc bien avant dans la troiüeme race , ne s'y trouvent que les prélats, barons, & comtes, comme j'ai rapporté de bonne foi, pour d'autant mieux faire voir que le tiers-état ne délaiffe d'être entendu fous ces noms de  '*14 Opinio» barons & de comtes , auxquels les mandement étoient adreffés pour affembler les trois ordres de leurs provinces & contrées, & emmener avec eux aux états-généraux les députés, comme 1'on fait encore aux baillis tk fénéchaux , ou leurs lieutenans fubrogés au lieu de ces comtes qui recoivent les commifiïons, affemblent les états provinciaux tk font déléguer aux généraux. La plus grande partie des chroniqueurs & hiftoriens écrivent que les prélats & barons dépoferent le roi Childeric , tk introduifirent Pepin; mais 1'épitre du pape Zacharie au roi Pepin , & 1'hiftoire de Nicole Gille y ajoutent le tiers ordre ; 1'un en ce qu'il dit que Pepin fut élu roi du con'éntement omnium ordinum , 1'autre par le confeil & advis de plufieurs hauts princes, feigneurs, barons , prélats & autres du royaume de France. , A la convocation des états de Pan 1188, ne s'y trouvent nommés que les prélats, barons & comtes, toutefois les peuples la préfens , fe croifent & accordem la dime falédine. Mathieu Paris, ancien hiftorien, ne parle que des prélats & barons affemblés en la ville de Paris du commandement de la reine Blanche, régente en France; nos auteurs ajoutent les députés des bonnes villes, & S. Louis, par fon teftament,  de Savaron» ij 5? rend ce témoignage que fes bonnes villes & cités 1'avoient affifté contre les princes qui afïectoient la régence, & les barons de leur faftion dans les grandes chroniques de S. Denis, aux états de Paris de Pan 1140, ne s'y trouvent que les pairs, barons & prélats, & Nicole Gille fait fuivre les gens des bonnes villes. Villani, italien , le continuateur des annales de Stheron Pan 1301, les grandes chroniques & platine en parlant des états de Paris de Pan 1302 & 1303 , omettent les députés des villes & communautés ; néanmoins les lettres des évêques & prélats de France au pape, des barons au college des cardinaux, la trèsttumble fupplication du peuple au roi Philippele-Bel, & la plupart des hiftoriens y comprennent en mots exprès & fouvent réitérés, les délégués, procureurs & fyndics des villes, communautés & univerfités, qui concerterent avec les eccléfiaftiques & nobles, contribueren! leur ^voix &c prirent réfolution avec eux. Le roi Philippe - de-Valois convoqua aux états a Paris les prélats, baillis & barons, néanmoins il eft certain que les délégués des villes s'y rendirent avec eux & y affifterent. L'autre raifon fur laquelle eft fondée 1'opiniqn contraire, eft que le tiers-état a été adjoint  256 Opinion de Savaron. aux autres, pour fur ces appas de vain honneur & entrée aux états lui faire plus aifément avaler la pillule & accorder les levées & impöts; mais les dons annuels & oörois que les trois ordres payoient au roi, le fecours qu'il fourniffoit a fa majefté en fes néceffités, les offres fouvent faites & affermentées par les eccléfiaftiques aux érats-généraux d'aider le roi de leurs prieres & de leur temporel, & par les nobles & bourgeois de leur chevance, cceur, corps , jufques ala mort inclufivement, le fecours que continuellement ils ont donné au roi jufqu'a l'an 1408 qiïe le roi Charles VI afFranchit les deux premiers Screjetta le fait fur 1'autre, éludent ces raifons. ANALYSES i  317 ANALYSES, extraits et abrégés .Des Auteurs & Hiftoriens .qui onp écrit fur les Etats Généraux, (Euvres d'Hincmar* To us les écrivains qui parient des affemblées aationales fous les rois de la feconde race , s'appuient fur le témoignage de ce prélat, qui ecnvpit cinquante ans après la mort de Charlemagne, & qui, par conféquent, a voit pu voir. eet empereur. De religieus de Saint-Denis , il étoit devenu archevêque de Reims en.845. II fut toute fa vie extnêmement zélé pour les droits de Téglife Gallkane, Les courfes des Normands jettoient alors 1'akrme dans tout le royaume, Hincmar s'étant retiré de fa ville menacée par ces barbares , mourut a Epernay l'an 88 z , accablé de douleur de voir la France ainfi livrée au pillage. On a raffemblé fes ©euvres en deux volumes in-foüo. II a Compofé plufieurs traités pour rmfirucfion des princes fes contemporains , qui le confultoieal Topic Fl. %  258 Analyse des Historiens^ fouvent. Adhèlard, abbé de Corbie, un des confeillers de Charlemagne, parent de ce monarque, & depuis miniftre de fon fils , avoit laiffé des détails fur la forme des pariemens convoqués par Pepin, Charlemagne & Louis-leDébonnaire : ce font ces monumens précieux qui nous ont été tranfmis par Hincmar, dans une de fes épïtres. Notre defiein étoit d'en donner une analyfe en forme ; mais ce travail fe trouve déja dans plufieurs endroits de notre colle£tion ; & nous ne pourrions rien ajouter aux nombreufes & longues citations que fait de cette épitre M. Legendre de Saint-Aubin , dans le morceau que nous avons extrait de eet auteur, vers la fin de notre premier volume, a 1'abrégé du récit d'Hincmar dans le morceau de M. Lepaige , vers la fin du fecond , p. 418 & fuivantes; enfin k la traducfion d'une grande partie de cette même épitre, inférée dans la première lettre du comte de Boulainvilliers, page 17 du torn. 4.  sur les états généraux. LA FRANCE G A U L O I S E , Par F. Hot t o man , Jurifconfultel C e junfconfulte entiérement dévoué au rot de Navarre (Henri IV) , fe chargea de repouffer les injures que Rome proféroit contre ce prince, & il le fit avec fuccès, quoique un peu groffièrement. Nous n'avons extrait de fa France Gauloife , précifément que ce qui a rapport aux états généraux ; eet auteur mourut en 1590. De l'affemblée générale des Etats , & de quelles matieres on y traite. (Extrait de 1'ouvrage ci«deffus.) C h a p. XL Admirons le grand fens & Ia prudence que montrerent nos majeurs en établiffant 6c ordonna'nt la forme de leur police. Voici donc R z  •iSo Analyse des Historiën* fommairernent prefque toutes lesmatieïes qn'ofi y déübéroit : premiérernent, de I'éieclion on de la dépofition d'un roi ; conféquemment de 'la-paix-Se de la guerre , & des loix publiques, des fouverains états & offices , gouvernemens & admiuinrations ae la chofe publique : d'affigner quelque partie du domaine auxhoirsmalcs du-roi défunt, ou d'établir douaire aux ffiles { ce qu'ils appellerent d'un mot allemand apaJiage, qui vaut autant a d:re, comme part exclufoire, c'eft a-dire qui forcloft les puinés ou les filles du droit qu'ils pourroient avoir au demcurant de la fucceffion) ; finalement de toutes les matiercs qu'on apptlle communéanent encore a préfent ajfiürcs d'Jiats, pour autant qu'il n'éioit loilihle de décider de quelque affaire concernar.t létat de la chofe publique , ünon qu'en l\inenib'ce des états : or, quant a la création ou dcoofnion des rois , nous en avons plufieurs témoignages, tant du teftament de Charlemagne que de plufieurs auteurs , toutes fois en mettrons-n.ous ici un du ze livre d'Eginhart, fous l'an 806, ou faifant mention de Charlemagne. II tint (dit-il,) un parlement -avec les principaux & grands feigneurs du royaums,pour avifer aux moyens d'établir & entretenir paix entre fes enfans, |k de faire les partages du royaume, Sembla-  SUR LES ÉTATS GÉN-ÉRAUXT. 2r&£ Slement Aimoin au chap.- du ?e livre „ ©ii il parle du roi Charles-le-Chauve, ayanfc tenu , dit-ii, affemblée générale a Carifiac , il «vit la ceinture èk. 1'épée a fon fils Charles» & une couronne i"ur la tête, luïdonnant pour fon partage la N-euftrie r & a fon 'autre fils. Pepin , 1'Aquitaine :' car les fis du roi avoienS voirement telle & fi grande prérogative en ces affemblées d'états, que cependant, encore que kurs peres , par teftament r les euffent nommés kurs béritiers , fi falloit - il que. le peuple les>. confirmat;.qui étoit une coutume ufitée entre tous les Francais, tant Orientaux qu'Oczidentaux. dont, entre plufieurs. témoignages-,- 55 en a un fort notable au ie liv.de ViüchinduSE Saxen,. 011 ayant dit peu auparavant,. quo 1'empereur Henri défigna pour fon fucceffeue tin fien fils nommé Oddo \ il adjoiste , apr-èsie décès de Henri> teut-le peuple des Franepia& des Saxons ,élut pour fon->prince öddo-,, der long'-tems- défigné par fon pers pour lui fuc— eéder , &L aflignerent le Heugde 1'éledtiongénérale-au chateau d'Aix.Puis après, ce même: auteur expofant lal harangue faite au. peuple* par 1'évêque de- Mayence, qui., avec (on armement & fa fuite , attendoit la. venuecie ce. prince:- voici r dit-il , je vous amene öddo T que feu. Henride bonne.métnoire , a débgné- R 3  iSz Analyse des Historiek* fon fucceffeur , & lequel , raaintenant ; tous les princes vous ont élu pour roi ; fi cette élecfion vous plaït, déclarez-le en levant la ma:n öroite au ciel : alors tout 1c peuple en levant la main , commenca a crier a haute voix, vive k roi. De ce paffage , Sc plufieurs autres femblables , on peut aifément recueillir que les Francois, orientaux & occidentaux, avoient une même facon en 1'élection de leurs rois; auffi étoient-ils fortis d'un même pays, & ont vécu long-tems fous mêmes rois & princes , ayant mêmes loix & coutumes. Quant a 1'adminiflration du royaume , Aimoin nous fournira un témoignage formel, au 5e livre , chapitre 3 5 , ou il parle encore de Charles-le-Chauve; Charles, dit-il, voulant aller k Rome , tint un parlement général a Compiegne le premier jour de juin ; auquel il ordonna, & mit par chefs & articles , la maniere que fon fils Louis , affifté de fesféaux confeillers & des princes du royaume , tiendroit a gouverner la France , jufques a fon retour de Rome. Et au même livre , chapitre 42 , ou il parle du roi Charles-le Simple : les feigneurs de France, dit-il , jugeant qu'il n'étoit pas en age capable d'adminiftration d affaires Sc de gouvernement, ( comme auffi n'étoit-il) tinrent confeil de matieres de grande  SUR 1ES ÊTATS GÉNÉRAUX. aS} conféquence , & les principaux de France , de Bourgogne & d'Aquitaine, s'étant affemblés , élurent Oddo , auteur de Charles , & gouverneur du royaume, touehant les loix& c'onftitutiotts qui s'y faifoient. Gaguin le certifie affez en la vie du roi Louis, furnommé Saint* Le roi Louis, dit-il, étant arrivé a Paris , tint parlement général , réforma 1'état de la république , établiffantj de très-bonnes loix , que les juges euffent a adminiftrer droite juf* tice a chacun, & n'achetaffentpoint les offices, &c. Quant aux états & gouvernemens dont on pourvoyoit des perfonnages connus & approuvés, Aimoin en fait mention aa 36e. chapitre du 5e livre , oh il parle de Charlesle-Chauve , lequel, avant fon couronnement j avoit départi les gouvernemens a fa fantaifie & qui bon lui avoit femblé • mais les princes & feigneurs du royaume firent convoquer les états-généraux , & dépêcherent des ambaffadeurs vers le roi. Et fi ne voulurent fouffrir que le roi fut couronné, que premier il n'eüt ufé de leur confeil & autorité a inveflir &t pourvoir de ces états-la ceux qui en feroient dignes. Les feigneurs du royaume , dit-il, indignés & marris de ce qu'il avoit donné des états a quelques-uns fans leur confentefnent, a raifon de cela confpirerent contre hri , U R 4  **4 &9kint dés Historïêns torent let» affemblée è part au village d* Witmar; & fe-lè envoyefent une ambaffade :a Loms, & Louis auffi vers eux; & Eginhart, au 2e livre; Charles tint un parlement a Com-' Piegne, oir, par 1'avis des états, il bailla aa •comte Rodibert la chargé du pays qui eff entre la riviere de Loire & de Seine. hem f en la éöntinnation de 1'hiftoire de Gregoirede-ToarS,.aU livre ti-% chapitre 54e :°cette année-la,.dit-i! , le roi Clotaire fe trouva k Troyes en Champagne, avec les feigneurs & fujets de Bourgogne , ok il les foiliQta de dire s'ils vouloient fubflituer quelqn'nn en I'état de Varharius, qui étoit décédé , a quoi ils ïépondirent tous que non ; & qu'ils ne vouloient point élire un maire du palais mais qu'ils défiroient d'être en la bonne grace du toi; & par ainfi, ils accorderent avec lui. Et au chapitre ïói , le roi Théodoric étant mort, les Francois éiurent roi Clovk fon fils , qui étoif fort jeune, Peu de tems après il mouruf. Grimoald , ( avec le roi Childebert) , fut élu maire du palais. En ce même lieu , fe termi* noient auffi lés différens des grands princes % & principalement dev.x qui fembloienf empórtnr avec- eux la mine de I'état public ; Car Aim-oin , au livre 4% chapitre ier, oü Ü parle de Clotairé , fils clé Chilpéric, auque-ï  '5t7R lês États Généraux. 'ïé% Brunechild demandoit le royaume d'Auftrafie v en écrit ainfi: Clotaire, dit-il , lui répondit qu'elle devoit faire convoquer 1'affemblée des grands & nobles perfonnages de France , & la mettre en délibcration du confeil des affaires d'état, & que de lui, il obéiroit en tout & par-tout a leur détermination , & qu'il ne contreviendroit aucunement k ce qu'ils auroient commandé : autant en dit celui qui a pourfuivi 1'hilloire de Grégoire , au livre ï i , Clotaire, dit il, répondit qu'il s'en tiendroit au jugement des députés des états de France , &t promettoit de mettre k exécution tout ce qui feroit avifé entr'eux, moyennant 1'aide de Dieu. Semblablement au 8e livre du même auteur , chapitre 21 , Bofo Gontran ffit accufé' d'avoir violé un fépulchre , & fut adjourné aux états pour y être jugé. Le roi Childebert & lesfeigneurs du royaume étant venus aux états , & Gontran, recherché pötir ce fait, s'étant enfui fecretement; tout ce qu'il poffédoit ert Auvergne , appartenant au public , fut confifqué. Aimoin, au ne chapitre du ^e livre, oh il parle du roi Loüis-Débonnaire , qui étoit en diffenfion avec fes enfans , conhYme les \nêmes; ainfi, comme 1'arriere faifon dei'autömne 5 dit-il, approehoit, cenx qui tenöiênt le parti eontraire a 1'empereur f demandoiens  i6é Analysé des Historiens qu'on lint une affembfée générale en quelque part de France; & au chap. i f, il commanda que fon peuple généralement s'.:fièmblavt au village de Théadon , & un peu plus avant; mais quelque tems après il cönvoqua Le peuple & la fête faint Martin, & eiTaya par tous les moyens de faire retourner vers foi fon fils Pepin, qui fuyoit fa préfence , mais lui n'en vouloü rien faire. Et Gaguin déduifant Ia même hiftoire : les complices de la conjuration, dit-il, voyant bien qu'ils ne pourroient venir a bout de demettre le roi fans 1'autorité du confeil des princes, firent tant leur effort pour faire tenir une affemblée en France, mais Louis s'y oppofoit, étant bien averti que les Francois étoient gagnés, & perfuadés par fes ennemis; a raifon de quoi il affigna les états a Mayence, & défendit que perfonne n'y fut recu qui portat armes; mais afin que fes enfans qui avoient confpiré contre leur pere , ne fuffent deftitués ce 1'autorité & confentement publique. Lothaire fon fils - aïné , ayant fait affembler un parlement général de tous les feigneurs & évêques du royaume, tira fon pere de prifon & le mena a Compiegne. Et de rechef Aimoin, au 38e chap. du 5e livre, oh il parle du roi Louis - le - Begue , qui tint journée k Marfue , & y mit en délibération des états de  SV R LËS ÉTATS GÉNÉRAUX. l6, faire paix avec fon coufin. En ce parlement, dit-il, il fut accordé par 1'avis de fes féaux & confeillers , qu'üs garderoient entr'eux ces articles tic capitulations de paix , &c. Maintenant pourfuivons au refte des autres matieres qui s'y traitoient; car je trouve d'abondant, que la coutume étoit, fi on avoit mis fus quelque crime è un prince ou a autre qui fut de noble & ancienne maifon, qu'on l'ajournoit a comparoir en ce parlement-la , & a rendre raifon de fon fait, e» cette maniere la reine Brunehaut ayant été accufée & convaincue de plufieurs crimes tic méritant la mort. Le roi Clotaire fit affembler les états de France, auxquels il dit ainfi, comme récite Aimoin au 4e livre, chap. ier;vous, mes bons amis &C compagnons d'armes ,& trés-illuflres feigneurs de France, ordonnez & jugez quelle punition dolt fouffrir celle qui eft convaincue de fi horribles rcaléfices, & Adon en 1'age fixieme , fous l'an 583 , parlant d'elle-même : elle fut, dit-il, fententiée & condamnée par les Francois , en la préfence du roi: &, fuivant la fentence, attachée a des chevaux rebours &c farouches , qui 1'emporterent furieufement & la démembrerent ; il s'y traitoit auffi des partages du domaine du roi, Si des apanages & provifions qu'on donnoit aux puinés de France  i63 Analyse öes Hfsto rien? (ains que nous avons dit) ; de quoi AimoirJ donne .des exemples au f livre , chap. 94 9, oir il parle de Charlemagne. Ces chofes étanf. parachevées, 1'empereur tint parlement avec fes princes & les plus notables de France , &■ couféra avec eux des moyens d'établir une paix qui put durer entre fes enfans , & départit le royaume en trois; afin que chaeuti d'eux feut quelle portion il auroit k gouverner après le décès de fon pere. Et a 1'endroit oh il paria du partage fait entre les enfans du roi Louis, au 5"e livre, chap. 40; eux, dit-il, étant allés k Amiens, diviferenf entr'eux le royaume de leur pere , ainfr qu'il fembla bon aux féaux conleillers. Item , au chap. 4.1 , ou il parle de Carloman , qui tenoit affemblée a "Worms. Aeette diete vint Hugues, dit-il, pour demander la portion du royaume que fon frere Louis avoit eue en aparage. Qui plus eft, on peut rapporter de plufieurs autres paffages , que quand le roi vouloit employer quelque grande fomine de deniers-, comme a bat>r teraple &C fonder colleges ou monafleres, il en- deman4doit 1'avis aux états; comme dit Aimoin au chap. 41 du 4e livre , ou il parle de Clovis II , qui préfidoit aux étafs, & dit qu'il commenca. ainfi fa harangue. Combien que le foin dfe cette principauté ter-riene , ó citoyens dë  SUR L£S ÈTATS GÉNÉRAUX. 2.69 Trance m'admoncfte de vous appeller pour «onfulcer & déltbcrer des affaires pübliques, nCc. Mais a tant eft - ce affez parlé de cette jnaiiere, car je penfe que les témoignages que nous avons allégués , donnent évidemment k connoïtre ce que nous avons dit au commen.cement, a fcavoir, que nos devanciers , vrais francois & confervateurs de leur liberté, en.nemis de toute domination Sc tyrannie, foij*neux de maintenir fermement eet excellent précepte, que le salut du peuple est la suprème i.01, donnoient Sc mettoient toute J'adminiftration du politique du royaume eo la difpofition de 1'affemblée des états, qu'on appellqit (ainfi qu'il a été vu ci-deffus ,) quelquefois placitum , pour autant que comme porte 1'ufage de lalangue latineplacitum, proprement iS'appeire la réfutatiori Sc conclufipn finale, qu'on prend touchant une matiere, qui a été débattue Sc difputée entre plufieurs. Car touchant la liberté, que le peuple y auroit dü donner fon avis, il y a un ar.ticle dedans les .ordonnances de Charlemagne qui en fait foi^ è fcavoir, la oü il dit ; qu'on interroge Sc xlemande 1'avis au peuple, fur chaque article de ceux qu'on a adjoutés de nouveau a la loi.; .& après que tous y aurönt confenti, qu'ils pppofent au pied des articles kurs feings Se,  17° Analyse des Historiens foufcriptions de leur main, par oü il appert que le peuple de France , n'étoit anciennement obligé è garder autres loix que celles-la, qui auroient été autorifées par fes voix & fufFrages: & que telle étoit 1'ancienne coutume ains que le montre, ce qui eft a la fin de laj loi d'AUemagne; a fcavoir, ceci a été ordonné par le roi & fes princes & par. tout le peuple chrétien, qui eft fous le royaume de Mérovingiens. Et le chapitre 38 du 5 e. d'Aimoin , qu il eft dit ainfi, & en ce parlement fut accordé, que ils obferveroient les articles qui s'enfuivent, par le confentement de leurs féaux, & 1'accord en fut fait & paffé entre les notables , les rois, par le confentement d'eux & leurs communautés de leurs féaux fujets, &c. Pour le dernier ; ces pariemens acquirent telle réputation & autorité vers les autres nations, que quand les princes étrangers avoient quelque différent a démêler enfemble, bien fouvent ils en foumettoient la décifion au jugement des états, lémoin celui qui a pourfuivi 1'hiftoire de Grégoire de Tours, au livre II, chapitre 37 , cii il dit : que l'an douzieme du regne de Théodoric, lequel gouvernoit Ie pays d'Alface, oü il avoit été nourri par commandement de fon pere Childebert, il avint que'fes fujets firent ouelques courfes fur les terres de Théodeberr^  sur les états généraux. 27i en maniere d'hoftilité, mais de peur que le différent ne paflat outre, les deux rois s'accorderent enfemble, de faire convoquer une affemblée générale au chateau de Saloiffe, & la, vuider leur débat par voie de juftice , s'en rapportant a 1'arbitrage des états de France. Comment 1'autorité de l'Affemblée des Etats fut tnaintenue & continuée fous le regne des defcendans de Charlemagne* Chap. XV. Extrait de la France Gauloife. Après avoir fufftfamment déclaré quelle fut la forme de notre ancienne police, k la grande autorité qu'eut le parlement général de nos états de France, fous le regne des Mérovinsiens, c'eft-k-dire. des defcendans de Mérouée, il faut conféquemment que nous expofions quel gouvernement il y eut fous celui des Catlovingiens, c'eft-a-dire, des rois de la race de Charlemagne. Or, autant que nous pouvons juger & retirer de toutes les hiftoires de France & d'Allemagne, qui font mention de I'état de France, le même honneur 6c la même autorité  271. Analyse des Historiens fut gardée aux états, comme elle étoit auparavant , de forte que le fouverain jugement & la décifion de tous affaires, n'étoit point en la difpofition de Pepin, ou de Charles, ou de Louis, mais totalement en la puiffance de la majefté royale, laquells majefté avoit proprement Sc vraiment fait fiége en 1'affemblée folemnelle des états, ainfi que nous avons déduit ci-deffus : on peut tirer certaine infiruction de ceci; premierement du deuxieme livre des Chroniques d'Eginhart, fous Pan dcccvi, oü parlant de Charlemagne, il dit: 1'empereur tint un parlement avec les grands feigneurs Sc plus notables de France, pour étabür & maintenir la paix entre fes enfans, & pour partager le royaume. II adjoute incontinent, ce partage fait, le roi le coucha par tefiament, qui fut folemneliement obfervé par les Francois; Pon peut tirer même témoignage du livre d'Eginhart, déja fouvent allégué, ou difcourant ce qui advint après la mort de Pepin; il en parle ainfi : les Francois, dit-il, ayant fait folemneliement affembler Ia congrégation générale des états, élurent fes deux fils rois, k telle charge Sc condition qu'ils diviferoient tout le corps du royaume en deux portions egales, Sc que Charles gouverneroit cette partie que leur pere Pepin avoit tenue: & Caroloman, 1'autre  SUR LES ÊTAT"S GÉNÉRAUX. 273 Pautre de laquelle leur oncle avoit 1'adminiftration , tk , par oü il eft affez évidemment donné a connoitre que toute la même autorité qu'avoient eue les états du royaume fous le regne des Mérovingiens, prefque i'efpace de trois cents ans; ils la retindrent encore depuis que la poftérité de Mérouée fut éteinte, de forte que combien que le roi laifTat des hoirs après lui , toutefois i!s n'étoient point tant inveftis de royaume par droit de fucceflion héréditaire, comme par 1'avis tk volonté des états. Et pöürtartt fi le fils du roi étoit mineur, on lui bailloit un tuteur en 1'affemblée des états. Aimoin , livre V, chapitre 42. Le roi Louis étant mort, fon fils Charles, qiü depuis fut appellé le fimple , étoit au berceau ; les feigneurs de France voyant eet age incapable de régner, s'affemblerent pour pourvoir aux affaires d'état, tk d'un commun confentement, les feigneurs de France, de Bourgogne & de Guyenne, élurent Odo pour être tuteur du roi tk gouverneur du royaume. Outre cela, encore les autres matieres plus hautes tk affaires d'état, ne fe vuidoient point autrément que par les états, ainfi qu'Eginhart, au fecond livre desChroniques le certifie. L'an 863 , dit-il, le roi Pepin tint un parlement a Nevers l'an 864, Le roi- Pepin tint fon parlement a' Worms. Tornt FL $  174 Analyle des Historiens L'an 866, le roi Pepin tint fon parlement a Attigny. Item leroi tint fon parlement aOrléans. Sembiab'ement Aimoin aa feptante & unieme chapitre du quatrieme livre, oii il parle de la guerre des Saxons : le roi, dit - il, fur le tems nouveau, s'en alia k Noyon, pour s'achejniner de la en Saxe, avec une groffe armee, & tenir une affemblée générale de fon peuple a Padebrune : & au chapitre feptante & feptieme, quand 1'hiver fut paffé , il tint affemblée générale de fon peuple a 1'accoutumée k Padebrune. Ët au chapitre feptante & neuvieme, & ayant trouvé fa femme k Worms , il délibéra y tenir affemblée des états. Auxquels paffages il parle continuellement de Charlemagne , lequel combien qu'il eut conquis prefque 1'empire entier de toute 1'europe, par fes grands faits darmes & heureufes victoires, & ce fut acquis de - Ia le furnom de grand , toutefois jamais il n'öta aux Francois leur premier privilége & ancienne liberté, ni ne s'effaya jamais d'entreprendre chofes d'importance fans 1'avis du peuple, & fans 1'autorité des perfonnages notables de fon royaume. Après le décès de Charlemagne , c'eft bien une chofe certaine que fon fils Louis adminiftra le royaume tout de la même forte, & en la même condition que fon pere, ainfi que 1'au-  SUR LES ÉTATS GÉNÉRAUX. 175 teur de la fuite de 1'hiftoire d'Aimoin le raconte. Après la mort de Charles (dit 1'hift.) , 1'empereur Louis avoit donné aiïignation au peuple , pour fe trouver a 1'aiTemblée générale , au lieu de Théödofade , comme par quelque préfage & fignification de Favenir. Et au chapitre trente-huit, oü il fait mention de 1'accord de paix fait entre le roi Louis oC Louis fon coulin : ils firent affembler un parlement général, dit-il; & en ce parlement ils accorderent entre eux de garder les chofes qui s'enfuiventdu confentement de leurs féaux amis & confeillers, &c. Et au chapitre 41 , oü il parle de CaroJoman, fils de Louis le Begue : & en cette forte, dit-il, il fe départit d'avec les Normands, pour s'en retourner a "Worms , oü il devoit tenir fa diéte générale , au premier de Novembre. Et au chapitre fuivant, o„ü il parle de Charles le fimple : les principaux de France, dit-il, voyant que fon age n'étoit pas capable d'adminiftration, tindrent confeil d'affaires de grande conféquence, item 1'auteur des annales de Reims, fous l'an 93 5. Pendant , dit-il , que ce roi Rodolphe fe tenoit a Laon , le propre jour de Paques y eut mutinerie entre les gendarmes du roi & de 1'évêque , oü plufieurs laïcs & cleres furent bleffés & tués. Au moyen de quoi le roi tint un parlement a So'iffons ayec S *  x,B Analyse des Historiens' les plus notables de fon royaume. II parle encore plus clairement fous l'an 946. Lorfqu'il étoit queftion de rétablir le roi au royaume. Edmond , roi d'Angleterre , envoya des ambaffades vers le prince Hugues, pour le rétabliffement du roi Louis : au moyen de quoi ce prince tint un parlement avec fes neveux Sc les plus grands feigneurs dn royaume. Un peu après, il ajoute Hugues, duc des Francois, ayant convoqué Hugues, fils de Richard, Sc autres grands feigneurs du royaume, rétablit fur icelui le roi Louis, qui avoit été détenu prifonnier prefque 1'efpace d'un-an. II ne faut pas obmettre ainfi ce que le même auteur appelle ce parlement royal, l'afTemblée générale des états de France, comfiie fous l'an 961. Orto, fils du prince Hugues , vint trouver le roi Loihaire a Laon, ès jours des retes de Paques. Aufii divers princes & autres, tïnt de France que de Bourgogne, tindrent une Wemblée Sc parlement royal k Soiffons. Richard , fils de Guillaume le Norrriand, fe mit en campagne pour venir rompre cette affemblée , mais il fut affailli & mis en fuite par quelques bons ferviteurs du roi, qui en tuerent quelques-uns de la fuite de Richard. II eft déja affez aifé a ceux qui voudront prendre la peine de recueillir des faits que nous avons produits, que la connoif-  SUR LES ÉTATS GÉNÉRAUX. 277 fance , le jugement & la décifion finale des affaires , concernant I'état politique ck univer1 el de ce royaume, appartenoit a la congrégation générale du peuple, ck ( comme nous parions aujourd'hui ) a 1'alTemblée des états; & lui demeura ce droit en fon entier jufques au regne de Charles-le-Simple, c'eft-è-dire plus de cinq eens ck cinquante ans durant, ck que , par 1'efpace ck révolution de tant de fiecles, cette anciennepolice de nos ancêtres fut tenue, non-feulement comme vénérable, mais comme inviolable ck facrée; ce qui me fait émerveiller grandement, du jugement de quelques modernes, qui n'ont point eu bonte de mettre en leurs livres, que 1'honneur de cette introducfion d'affemblée d'états eft due au roi Pepin, comme il en avoit été le premier auteur; car c'eft tout 1'oppofite. Eginhart, chancelier de Charlemagne, nous certifie fi évidemment que rien plus, que c'étoit une coutume 6k police ordinaire qu'obfervoient ceux de la maifon de Mérouée, de tenir tous les ans, au premier jour de mai, affemblée générale de leur peuple , £k de fe faire mener k cette affemblée fur un charriot trainé par des bceufs. On ne fauroit trouver, non pas même imaginer un roi qui puiffe fubfiffer fans peuple- Voila déja une diffcrence qui eft entre le roi ck le royaume; venons S 3  178 Analyse des Historiens mainTenant aux autres. Le roi eft mortel, aufiïbien que le moindre de fes fujets , mais Ia royauté eft perpétuelle, & même immortelle s'il faut dire ainfi, comme les jurifconfultes, quand i!s parient des colleges & des univerfités. Le roi peut-être forttraitde fon fens, & perdre Tentendement, ainfi comme il advint a notre roi Charles VI, qui donna fon royaume aux Anglois; comme de fait il n'y a gens plus aifés a être tranfportés d'entendement, ne qui laiffent plutöt abattre & fupplanter leur raifon & jugement , aux attraits des voluptés, que ceuxlè. Mais le royaume a fa fageffe propre & particuliere , certaine & bien affeurée, réfidente au confeil de fes anciens, & perfonnages d'honnettrs, qui ont la dextérité de gouverner, jointe avec la maturité de 1'entendement, & le favoir mê!é avec 1'expérience & fageffe , comme en ceux qui repréfentent Ie chef & Ia tête de toute la chofe publique. Le rbi peut être vaincu en une bataille, & en moins d'une journée être pris & emmené prifbnnier par Pennemi viöorieux, hors des limites de fon royaume. Ainfi comme il advint au roi faint Louis, Jean & Francois Ier. Le royaume deftitué de fon roi demeure néanmoins en fon entier; mais aufii-töt que la nouvelle eft venue d'une fi grande perte & calamité, on fait figni-  sur les Êtats Généraux. 279 fier raffemblée des états; les principaux perfonnages du royaume s'affemBlent en confeil , pour chercher quelque remede aux préfentes calamités; ainfi qu'il fut pratiqué formellement en ces cas-la. II peut avenir qu'un jeune roi: mal nourri, ne fe lairra pas feulement corrompre Sc gater, foit par faute d'expérience ,' foit par légereté volage de fon naturel , par deux ou trois de fon confeil, qui fe feront infinués en fa grace, & qui au demeurant, feront gens vicieux, avaricieux, Sc prenant k toutes mains fous fon autorité, ou par quelques jeunes mignons de la cour, qui ne cherchent autre chofe , qu'a l'entretenir en amour , voluptés , Sc autres vicieux paffe-temps; mais même it fe peut faire qu'une femme le tiendra fi bien fous fa main •, qu'il ne fera pas maitre de foimême, mais qu'il en fera fi fol 8c fi abefiy , qull lui lairra entre fes mains 1'adminiftration des principaux affaires du royaume. De quoi' les exemples font fi fréquens aux hifioires, que nul ne peut douter qu'il ne puiffe bien encore advenir. Mais le royaume eft appuyé fur Ik fageffe Sc fur le confeil de fes anciens & fages gouverneurs. Nos ancêtres n'ont point empêché nos rois d'avoir leur confeil privé, mais ils n'ont point voulu auffi que ceux qui feroient du corps d'icelui , s'émpêchaiTentd'autre chofe S 4  iSo Analyse des Historiens que de manier & gouverner les particulieres affaires du roi. Mais quant a 1'adminiflration de I'état univerfel du royaume, ils avoient leurfénat, c'eft-a dire , un confeil général compofé de feigneurs & autres perfonnes notables de toutes fortes & qualité, qui déliberoient des affaires par commun avis, & même remontroient Lbrement au roi, quand il étoit befoin , Ce qui étoit le meilleur pour la police de fon royaume. L'an 1356 , lorfque le roi Jean for pris par les Anglois & emmené en Angleterre , il fe tint un tel confiftoire & parlement général du royaume, auquelfe trouverent auffi queiques confeijlers du confeil privé du roi ; mais il leur fut enjoint de fortir de la chambre des etats, & dénoncé que s'ils pourfuivoient a y venir, que les députés des états ne s'affemb'eroient plus; & de ceci le témoignage s'en trouve en la grande chronique écrite en Fran^ cois. au vol. 2 oiül eft parlé du roi Jean, feuillet 169. Mais il n'y a jamais prefque eu nation, ny i:.'n jamais été temps oü 1'on ne remarquat cette différence qui eft entre le roi & le royaume, Le roi des Lacédémoniens ( ainfi que témoigne Xenophon) & les éphores juroient réciproquement les uns aux autres tous les mois, les rois, de régner felon le contenu & 1'ordonnance des loix; les éphores, qu'ils main-  sur les États Généraux. 181 tiendroient 1'autorité royale, fi les rois gardoient leur ferment. Nos prédéceffeurs ne nous ont laiffé plus exprès enfeignement, qu'au droit & au nom des magifirats, car ceux qui ont quelque état du roi en fa cour, & font appellês ferviteurs & officiers du roi, font dégradés incontinent après la mort du roi, teilement qu'ils ne font en dignité que par emprunt. Tels font les maitres-d'hötel chez le roi, ks valetsde-chambre & autres officiers de la cour; mais ceux qui étoient officiers d'état s'appelloient par nos devanciers les officiers de France , comme nous retenons encore cette maniere de parler quand nous difons connétables de France, amiral de France, chancelier de France; pource qu'anciennement les états du royaume les élevoienten telles charges &C dignités.: defquelks ils n'étoient dépoffédés ni par mort, ni par la volonté du roi; & même aujourd'hui ceux qu'on appelle officiers de la couronne demeurent en kurs états, encore que le roi meure , &c ne ks peut-on démettre qu'en leur ötant la vie pour crime capital.  zSi Analyse des Historiens Comment l'autorité du Concile général des Etats fut continuée fous le regne des defcendans de Hugues-Capet. Chap. XVII. \ja onneur& 1'autorité du concile général des états, ne fut de rien moindre, fous Ie regne de la poftérité de Capet, qu'elle avoit été fous les autres deux races , qui avoient régné auparavant; ainfi comme nous en pouvons retirer certain témoignage de Froiffard, Monffrellet, Gaguin, Commines, Gilles, &c autres hiftoriens Francois, ce précepte tant de fois mis en avant, & qui ne fcauroit être trop répété , a fcavoir que le salut dü peuple doit estre la souveraine loi , étoit encore en vigueur Nous choiiirions feulement les paffages les plus formels & qui font les mieux a propos. Le premier exemple fe peut prendre de l'an 1318, auquel tems après le décès du roi Charles-le-Bel, qui mourut fans laiffer aucuns enfans, mais feulement fa femme énceinte, Edouard, roi d'Angleterre, qui étoit fils d'Ifabeau fceur du feu roi, prétendoit la couronne de France tui appartenir par droit de  SUR LES ÉTATS GÉNÉRAUX. iSj fucceffion , ayant pour partie Philippe - de Valois , coufin-germain du feu roi, 6c commenca le débat entre ees deux princes fur le gouvernement du pofthume , qui appartientau plus prochain. Pendant le débat , la reine accoucha d'une fille, ce qui fut caufe que leur différend s'échauffa encore davantage, a raifon qu'au lieu qu'il n'y avoit que le gouvernement qui fut contentieux; le.fujet de leur différend vint a être le royaume, prétendu par chacun d'eux. Finalement pour mettre fin a ce différend , toutes les deux parties fe foumirent a Parbitrage des états , qui eft un argument fuffifant , pour conclure qu'en plufieurs cas au moins 1'autorité du concile des états 1'emporte fur toute autre, puifque ces deux rois s'affujettirent au jugement d'icelui; ce qui eft affuré, non - feulement par nos hiftoriens, mais auffi par Polydore Virgile, au neuvième livre de fon hiftoire. Qui plus eft, Claude de Seyffel, srchevêque de Marfeille, au livre intitulé la monarchie de France, affirme que tous les deux rois fe trouverent en 1'affemblée des états, Paffaire ayant été aigrementdébattue , en danger de noife , par 1'avis des grands feigneurs & d'» tous les états folemneliement affemblés, fut dit a plus grande voix que Philippe-de-Valois feroit préféré; qu'il auroit la garde de la reine  184 Analyse des Historiens enceinte; tk que le royaume lui demeureroir fi la reine accouchoit d'une fille. Cette hiftoire 1 déduite au long dans Froiflard, vol. 1 , ch. 22; Papon, au premier chapitre du quatrieme livre des arrêts, article 2; Gaguin, en la vie de Philippe-de-Valois, 6c plus amplement par de Seyffel, au livre fufmentionné. hè ieeond exemple fe trouve advenu l'an 1356, lorfque le roi Jean fut pris auprès de Poitiers par les Anglois & mené en Angleterre. II n'y avoit lors, après avoir rec,u une fi notable perte, autre efpérance de reffource qu'en 1'autorité tk concorde des états, au moyen de quoi ils furent incontinent fignifiés tk convoqués a Paris, tk combien que le roi eut trois fils , Charles , Louis tk Jean , dont Painé étoit déja en age fuffifant 6c capable d'adminiftration , toutefois il en fut élu d'autres, 6c furent députés douze de chaque état, perfonnages de bon entendement 6c vertueux, auxquels fut commife Padminifiration des affaires du, royaume , 8c, ambaffadeurs dépêchés en Angleterre, avec commiflion de traiter paix avec PAnglois par 1'autorité des états ; témoins Froiflard , vol. 1, chap. 170; Jean Bouchet, au quatrieme livre, feuil. 118 ; N. Gilles , en la chronique du roi Jean. Nous prendrons le tiers exemple de l'an 1375 , lorfque le teftament du roi CharlesQuint, furnommé le Sage, fut lu ck ouvff  sur les États Généraux. 285 publiquement, par lequel il avoit inftitué Philippe , duc de Bourbon, frere de fa femme , tuteur de fes enfans; & au regard du gouvernement du royaume , il ordonnoit que fon frere Louis, duc d'Anjou, en eut la conduite jufques a ce que fon fils Charles fut majeur d'ans, & qu'il le put gouverner lui-même ; car, nonobftant cela , les états furent affemblés a Paris, & le teftament étant déclaré nul, fut ordonné que Padminiftration du royaume feroit roife entre les mains de Louis , oncle du jeune roi; mais h telle charge , qu'il manieroit cette adminiftration par 1'avis & confeil de certains perfonnages , députés par les états ; & que le duc de Bourbon prendroit la charge de la tutelle , 1'inftitution de 1'enfant. Et la même fut faite une loi & ordonnance royale : a fcavoir que tout légitime héritier de'la couronne , auffi-töt qu'il auroit atteint le quatorzieme an de fon age, fut facré & couronné roi, & que les feigneurs &C fujets lui fiffent foi & hommages avec ferment de fidélité. Ainfi Ie récite Froiflard, vol. 2, chap. 60; Boucllet, au quatrieme livre , feuiil. 124 ; la chronique de Bretaigne, &c. Le quatrieme cas échut l'an 1392; car le même roi Charles VI ayant foudainement perdu 1'èntendement, fut mené preniierement a Sens 6c de-la a Paris, ou fut tenue 1'affemblée des états,  286 Analyse des Historiens & ordonné que le gouvernement du roi feroit entre les mains des ducs de Berry & de Bourgogne ; témoins Froiffart, quatrieme vol. chap. 44 , & fur ce ne faut oublier.ce que Papon, au cinquieme livre des arrêts , tit. 10, art. 4, dit avoir été allégué en la cour de parlement, lorfque le roi Francois Ier de ce nom, voulut ahéner une partie de fon domaine : a fcavoir que pareilles a'iénarions faites par les rois précédens, avoient été annullées, a raifon de ce que les états n'y avoient point con.énti. Le fixieme exemple avint l'an 1426, a 1'occafion de Philippe duc de Bourgogne , & de Hanfroy due de Gloceflre, qui avoient long-tems nourri inimitié mortelle 1'un contre 1'autre au grand dommage de la république; mais a la fin ils s'accorderent entre eux de démêler leur qnerelle par un combat d'homme è homme en champ clos; mais 1'affemblée des états fe mit entre deux, & ordonna que 1'un & 1'autre poferoit les armes, & feroient arbitrer & décider leur différend par 1'autorité des états, plutö.t que le vuider par voye de fait. Cette hiffoire eft amplement expofée par Paradin en la chronique de Bourgogne, au troifieme livre, fous l'an 1426. Le feptieme exemple eft en l'an 1468; lorfque les états furent aflignés è Blois au premier jour de décembre a caufe du diffé-  SUR LES ÉTATS GÉNÉRAUX.' l$f rend furvenu entre Louis XI & Charles fon frere, \k fut ordonné que le roi bailleroit k fondit frere , pour fa légitime & pour fon apanage, quelque duché de la valeur de douze mille livres de rente pour le moins. Et davantage , que le roi lui fourniroit de fes finances la fomme de foixante mille livres. L'auteur de la chronique de Bretagne, au quatrieme livre , feuill. 200, décrit amplement cette hifloire. Le huitieme exemple fut pratiqué l'an 1484, lorfque Louis Xle venant a décéder, laiffa fon fils Charles agé de treize ans, car les états furent affemblés a Tours, & ordonné qüe la charge de la nourriture du jeune roi feroit donnée a fa fceur Anne , & 1'adminiflration du royaume commife a certains perfonnages élus 8c députés par le confeil; combien que Louis duc d'Orléans, proche parent du roi, la demandat , 8c de ceci font foi les attes de ce colloque des états, qui font imprimés a Paris; 8c Jean Bouchet, au quatrieme livre, feuill. 167; pour conclufion ce que dit Guillaume Budé, au troifieme 8c cinquieme livre. De ajfé, fembl« ne devoir être oublié, car il déclare que 1'autorité de haufler ou abaiffer les deniers a toujours appartenu au peuple de France. Davantage , Charles Dumoulin, fort diligent rechercheur dg telles matieres, témoigne en fon der-  488 Analyse des Histoiuensnier commentaire des contrats & ufure's, qu'il a trouvé ès regiftres de parlement & de !a cour des monnoyes, plufieurs loix de France , par lefquelles étoit ordonné qu'on ne feroit ne hauffe ne rabais de monnoye que par le confentement du ppuple, qui a töujours déclaré fa volonté fur ce point, comme y ayant auffi le plus d'intc. êt fuivant Favis des jurifconfultes , qui difeni; que 1'autorité de celui-la, qui a intérêt en quelque affaire , doit intervenir néceffairement qü'arfd il eft queftion de cette affaire, & que ce qui artouche toutes perfonnes doit être approuvé de tous. De F autorité métnorable des Etats , pratiquée contre Louis XI. C hap. XIX. ,1 ous ces témoignages que nous avons allégués nous peuvent fuffiïamment inftruire, non feulement que 1'ufage des états s'eft auffi fouvent pratiqué par nos ancètres, comme la néceffité Fa requis; mais auffi que cette congregation la a toujours été vénérable; & puifoue nous fommes fur cette matiere, il eft' raifon- nable  Sur les États Généraux. 1S9 «able de ne point laiffer ici fous filence un «xemple qui fut pratiqué de la mémoire de nos peres a 1'endroit du roi Louis Xf. Lequel on tient communément avoir été plus fin & plus rufé que tous fes prédéceffeurs. Car le roi Louis gouvernatellement le royaume, qu'en plufieurs chofes il fe dévoya hors des termes de bon prince, n'aimant fes fujets, reculant & méprifant les princes du fang & feigneurs du royaume, & élevant des perfonnes de baffe & viie qualité a grands états, fans en prendre ailleurs confeil qu'en fa fantaifie. Cela enfeigna a la nobleffe de France, & au peuple de chercher & defirer 1'autorité des états afin de pourvoir au bien public. Et pour autant qu'il étoit aifé k voir qu'il ne s'y voudroit point foumettre , les princes émus par les continuelles plaintes & follicitations du peuple, délibérérent de fe mettre aux champs, afin de procurer le bien public & remontrer au roi comme l'adminiftralion de la chofe publique étoit corrompue &C gatée. (Ains comme récite Phillippe de Commines au livre I, chapitre 2..) Car ils y vouloient aller armés & en équipages de guerre, afin que fi ïe roi refufoit de pourvoir au bien public & de prêter Toreille a bons & fages cönfeils, ils le puffent mener par force a la faifon ; & fut caufe que Cette guerre , qui avoit Tomé Fl,  iep Analyse des Historiens été entreprife pour le bien public du royaume, en fut communément nommée la guerre du bien public. Les noms des princes qui fe déclarerent 8c qui en prirent la conduite; ainfi comme de Comines, Gilles 8c la Marche 1'ont laiffé par écrit, étoient, le duc de Bourbon, le duc de Berry , frere du roi, les comtes de Dunois, de Ne vers, d'Armignac Sc d'Albret, 6c le duc de Charolois, qui en étoit le chef, & qui commandoit fouverainement a toute 1'armée. Si faifoient publier & fignifier hautement par.tout oü i!s pafïbient, qu'ils entreprenoient cette guerre pour le bien public, prcmettant au jreuple affranchiffement Sc immunité de tailles 8c impöts (Ce font les propres mots de Gilles, au quatrieme livre, feuillet i 5 2); Sc envoyerent ambaffadeurs Sc lettres a Paris, a la cour de parlement, aux eccléfiaftiques Sc au recleur de 1'univerfité, les priant de ne penfer point que cette armée fe fut affemblée pour faire tort ou violence a Ia perionne du roi ; mais afin de \e raniener a la raifon Sc a exercer 1'office de boi roi, ainfi comme la confidération du bien public le demandoit. Voici auffi prefque les propres mots qui font mention de ceci aux ■snnales, qui font intitulées les Chroniques de Louis XI,. 8c font injprimées a Paris , par Galliot du Pré, au feuiiie.t 27. Le premier èc  sur les États Généraux. 291 le principal article de leurs demandes, étoit qu'on tint 1'affemblée des trois états, pour ce que de tous tems c'avoit été le feul & propre expédient pour obvier a tous maux , & qui auroit eu toujours vertu &c efficace de remédier, a femblables coniufions & troubles. Et de rechef au vingt-huitieme feuillet, il eft recité que audiance publique fut donnée aux ambaffadeurs des princes, a Paris, en la maifon de ville, la oh fe trouverent les députés de 1'univerfité, de la cour de parlement & des magiftrats : & renvoya-t-on les ambaffadeurs avec cette réponfe, que leur requête fembloit être raifonnable, & fur ce, fut fignifié le colloque des états Èft bien a noter ce que dit Gaguin en la vie du roi Louis, ou il récite la réponfe que fit Charles, frere de Louis, aux ambaffadeurs qu'il avoit envoyés vers lui : Charles , dit-il, écouta les ambaffadeurs; mais il répondit qu'il n'y avoit moyen plus propre pour faire la paix que de convoquer 1'affemblée générale des états, qui étoit la droite voie qu'il falloit tenir pour pacifier les troubles & réunir les efprits divifés les ühs contre les autres. De quo; les ambaffadeurs ayant averti Louis par meffagers exprès, lui eftimant être le meilleur pour lui d'ufér de délais & remifes, afligna les états a Tours, au premier avril, l'an 1467? Et \% T 2  ■ztp. Akaiyse des Historie-ns temps de i'affignation venu , les princes de toift le royaume s'y trouverent en perfonnes. Tout le même eft técité ainfi en ces propres termes ès annales que nous avons alléguées au fetullet 64, & en la grande chronique, (volume4, fcuillet 241, ou eft auffi adjoutée une chofe qui eft bien digne de mémoire; a fijavoir, qu'il fut ordonné en ce concile des états, qu'on choifiroit certains perfonnages de chacun état, vertueux, graves& de bon entendement, auxquels on donneroit la charge d'établir le gouvernement de la chofe pubiique, qui s'en alloit perdre &£ qui pourvuffent au fait du droit ik de la juftice. Nicolas Gilles en dit encore davantage ■en ce paflage que nous avons coté. Après la bataille de Montlhery, dit-il, furent choifis tk députés plufieurs perfonnages de bonne réputation a raifon de leur vertu & prudence, pour avoir la charge & procuration du bien public, ainfi comme il avoit été accordé entre le roi & les princes. Et Ie premier de ce nombre la fut le comte de Dunois, qui avoit éte le principal auteur de cett<* ligue. Or, étoit-ce une ancienne coutume depuis que 1'autorité & puiffance des eccléfiaftiques fut accrue en telle grandeur qu'on la voit aujourd'hui , que tout le peuple étoit départi en trois états, dont les eccléfiaftiques en faifoient 1'un; & quand on  sur les États Généraux. 293 établiffoit des procureurs tk adminiftrateurs"extraordinaires de la chofe pubüque, d'en éiire douze de chacun état-Partant en ce concile la,., ii fut conclu qu'on éliroit trente-fix procureursde la chofe pubüque r. lefquels par un commun confeil ,donneroier.t ordre & remede aux calamités publiques- De quoi, Monftrellet, au volume 4, feuillet 150, écrit auffi en cette forte : premierement, dit-il, il fut ordonné. que pour raccouftrer & régler I'état de la chofe publiquer. & foulager- le peuple de tributs tk. dommages, feroient choifis trente-fix hommes,, par 1'autorité du roi, douze du clergé,, douze de la nobleffe tk autant dé la juftice, & que Cömmiffion & puiffance leur feroit donnée de. regarder dequellesmaladies tk vicesle royaumeétoit affiégé & gaté, & d'y appliquer le remede v. & le roi promit en parole de roi-, qu'il tiendroitpour bon tk feroit obfer.ver tout ce que ces trente-fix-hommes aurcient arrêxé entre eux~ Voila.ce qiPenrécite Monftrellet,.anquel01ivieir de la Marche, au trente-cinqnieme chapitre de fon hiftoire , s'accorde & raconte Iss mêmeschofes de point en point, fpécifiant le mêmenombre de trente - fix ~ & fi. adjoute encere davaritage. Gjüe le roi ne tint pas-fa promeffe, ains rompit tk viola ia foi qu'il avoit inviola— blemeni jurée, dont il fourdit tk s'alluma une- T 3  294 Analyse dés Histcriens & ambulatoire , n'ayant point de fiége arrêié en groffe tk calamitèüfe guerre en France, laquelle dura prés de treize ans. Par ainfi, toute 1'infamie de ce parjure retourna fur ce roi, tk le dommage fur le pauvre peuple qui n'en pouvoit mais. Des Pariemens & Sieg.es judiciaux de France. Chap. XXI. Sous les regnes des defcendans .de Hugues Capet, s'eft élevé ( a Paris) un état inconnu k nos ancêtres, que les uns appellent gens de juftice , les autres praticiens, lefquels depuis trois eens ans en-ca ou environ, ont fupplanté toute 1'autorité de 1'affemblée des états (telle qu'elie a été déclarée ci-deffus ) . ... Les autres villes envieufes tk jaloufes de eet acerciffernent, ont fait tout leur effort d'avoir de femblabies fiéges de juftice ; de forte que déja on CQmpte fept de ces cours fouveraines tk parlemens érigés en France & villes de Paris, de Touloufe , de Rouen , de Grenoble , 'de Bourdeaux, d'Aix , de Dijon , qui font tous arrêtés §C fédentaires; tk le huitieme, qui eft mobile  SUR LES ÉTATS GÉNÉRAUX. 19$ certaine ville , qu'on appelk le grand-confeilï hem le neuviertte établi en-Bretagne par le rol Henri, l'an 1 505. Voila les principaux fiéges &t gouvernemens de ce royaume de plaidoirie, au-deffous defquels il y en a encore d'autres moindres Quant a ce mot de parlement, qu'on a donné a ces principaux fiéges de' j'udicature en notré óncien langage francis , il ne fignifie auttë chofe qu'un colloque & conférence de plufieurs perfonnes affemblées &z amaffées en un certain lieu, pour traiter & confulter enfemble d'affaires publiques ; de forte que les vieilles chroniques app'ellent toujours parle* ment un colloque &' pour - parler, qui eft fignifié & promis de la part de deux chefs de guerre, quand ils veulent traiter & capituler quelque paix enfemble : & auffi par même raifon , le concile général, en vieux francois * s'appêlloit parlement, düquei mot on ufe encore en Angleterre : & partant Philippe de Commines, au premier chapitre du 4* livre de fes mémoires, dit que le roi d'Angleterre ne peut exiger tribut de fes fujets, fans le confentement & autorité du parlement, L'affemblée des états du pays en Bretagne a retenu ce même' riom. Tandis que le peuple de ce pays-ia a eu un roi, comme en le peut connoi-tre par plu- T 4  '%e)6 Analysé des Histortens fieurs paffages cie leurs annales, fpéeialemenff au livre troifieme, ou il eft parlé des fottes paches du duc Pierre Mauclerc avec le roi de France , fous l'an 1130 . Barthole & autres docleurs d'Italie prennent ce mot de parlement pour les états généraux d'un pays ; car Barthole , fur la loi 7 , c. de legation. lib. 10, le gouvernement de la province (dit-il) affembla ua parlement & y propofa ce qui concernoit 1'uti•lité puhlique. 11 ajoute, notez, que les gouvernemens des provinces affemblent le parlement général de. tout le pays: non pas que tous ceux -de la province y doivent aller , mais chaque ville y envoie des dépurés ou ambaffadeurs qui la reprcientenf. Et fur la .même lei, Jean de la Place, quand il faut. (dit-il) pourvoir a quelque cas pour le profit de toute la province , le parlement général fe doit affembler ; non1 pas que tous ceux de la province y aillent, aina feulement quelques ambaffadeurs ou fyndics de chaque ville, laquelle ils repréfentenr. En ce concile ou parlement on demande que chacun donne un bon & profitable confeil. Item Lucas de Penna :1a maniere (dit-il) de propofer en un parlement ou confeil général , eft qu'on reqmert que chacun y metre en avant un avis fain,& utüe, Mais les rois de la maifon de Capet, pour faire fener peu a peu cette auto-  5ÜR LES ÈTATS GÉNERAUX. 297; hté des pariemens , & k la fin la faire perdre de tout, fubftituerent un certain nombre de confeillers, au lieu de cette affemblée d'états, & lui öterent ce ncm vénérable de parlement, pour le donner a ce confeil qu'ils avoient fait k leur porte , &c oii demeurant 1'environnerent d'une merveilleufe autorité, & lui donnerent de grandes prérogatives; car premierement ils ordonneren? qu'il n'y auroit aucune loi ni ordonnance royale qui fut valable , que premierement elle n'eüt été approuvée, vérinée & autorifée par ces confeiliers-ci ; fecondement, qu'il n'y auroit magiftrat en toute la France, ni civil ni militaire, qu'il ne fallüt qu'il fut inftallé & mis en poffeffion de fon état par cette cour, & qui neprêta? ferment entre leurs mains,puis : qu'il ne fut loifible d'appeller de leurs jugemens & fentences , mais que leurs arrêts fuffent fermes & irrévocables. Quand le préfident d'un parlement eft au fiége , il ne fe leve pour faire place a aucun (dit Conan au premier livre ) , fi ce n'eft au roi. Finalement toute la prérogative , toute la puiffance & autorité dont avoit joui par tant d'années le concile des états, ainfi qu'il a été montré , ce parlement 1'a toute tirée a foi; & pour s'y maintenir, a donné ordre que les rois fuffent de la compagnie, au moins ceux qu'ils ont eftimés  498 Analysé des Hïstóriêns ne devoir être contraires a leurs deiTeins. Parquoi arrêtöns-nous un peu ici, & Confidérons quefs en ont été les premiers fondemens tk les Eioyens par lefquels il eft parvenu k la puiffance & grandeur oü il fe trouve maintenant. Premierementdonc,fiitbatiun palais royal a Paris, fuperbe en magoificence & fomptuofité , par le commandement, comme difent aucuns, du roiLouis Hutin, ou comme tiennent d'autres, du roi Philippe-le-Bel, environ l'an 1 3 14 , par Pentremife & conduite d'Enguerrand de Marigny , comte de Longtieville. Voici ce qu'en dit Gaguin en la vie de Louis Hutin ; ceftui Louis Hutin , dit-il, établit & arrêta la cour de parlement a Paris pour y être perpétuelle , afin que les plaideurs ne fuffent plus difcommödés de changer ainfi fouvent de lieu. Voila ce qu'en dit Gaguin ; car quant a 1'opinion de ceux qui' rapportent l'introducfiön du parlement ftable & arrêté k Pepin ou a Charlemagne , il fera bien aifé a juger, paree que nous dirons maintenant combien elle eft impertinente ; car même il'ya encore aujourd'hui plufieurs loix & ordonnances faites par Charlemagne, oü il n'eft fait mention ; en forte que ce foit, ni de parlement ni de cour fouveraine ; mais feulement y eft ordonné que les officiers de juftice tiennent les plaids cn certains lieux, tk qu'il fe faffe des;  Sur les Êtats Généraux; 299 affemblées générales, qu'il appelle placita a la mode de cetems-la, comme au 35e chap. du 4e livre de la loi francique, oh il y a ces mots: qu'il faffe tenir feulement trois générales affemblées Panné e, fmon que d'aventnre quelqu'un foit accufé , ou que quelqu'un accufe un autre , ou quelqu'un foit appeilé pour rendre témoignage, &c. II y a encore plufieurs loix de ce méme roi qui font de pareille fubftance Entre les ordonnances du roi Philippe IV, furnommé le Bel, on lit un article de cette fubftance , l'an 1302. « Davantage pour la com» modité de nos fujets & Pexpédition des » caufes,nous avons délibéré d'ordonner qu'il » fe tienne deux pariemens a Paris deux >> échiquiers a Rouen. Les jours de Troyes fe » tiendront auffi deux fois l'an, & un parle>> ment a Touloufe, comme il avoit accou» tumé de fe tenir autrefois , fi le peuple de la » terre s'y accorde. Item, pour ce qu'il y a » plufieurs caufes qui fe plaident en notre par» lement, entre grandes & notables perfonnes, » nous voulons & ordonnons qu'il y ait deux w prélats & deux autres perfonnes fuffifantes , » laïques de notre confeil, ou a tout le moins » un prélat & une perfonne laïque, qui affiftent » continuellement en nos'parlemens pour dén libérer &c pour ouir lefdites caufes », En  3öo Analyse' des Histortens quoi on peut bien remarquer quelques pointe notables : a favoir premiérement, que les procés & les jugemens n'étoient pas fort frécuens en ce tems-la, ck puifqu'il n'y avoit pas un grand nombre de juges affis en ce parlement ; car quant aux autres jurifdiclions ck bailliages du royaume,,il y ena une ordonnance du roi Philippe-le-Bel, en ce même livre de l'an 1302,. qui eft couchée en ces termes : « Nous en» joignons davantage que nos fénéchaux. êk » baillifs tiennent leurs alïïfes dedans le circuit » ck enceinte de leurs fénécbauffées ck bail» liages , fommairement de deux mois en deux » mois pour le moins ». Qui plus eft, M. Budc écrit au même pafiage que nous avons cotté cideffus , que l'an 1393 il fut ordonné par le roi Philippe-le-Bel , que Ie parlement fut compofé de perfonnes de trois qualités ; a favoir de prélats , de barons 6k de cleres mêlés avec des gens laïcs, & que les laïcs fuffent pris en partie de la nobleffe ck en partie du commun peuple. Item, que les prélats & barons advifafiènt entre les perfonnes de cette troifieme qualité cellesqui feroient les plus propres k exercer chaque jurifdiöion , ck qu'ils en choififlènt trois pour envoyer ès provinces qui ufoient de droit— écrit pour leur adminiftrer juftice : èk s'il advenoit qu'il fallut confulter fur quelque matiere  sur les Êtats Généraux. 301 criminelle , qu'ils appellaffent les mieux lettrés & plus favans perfonnages qui fe trouveroient, afin d'en avoir les avis & confeils Ceux-ci font allés toujours en s'augmentant, a mefure que les procés fe font multipliés ; & de ce petit nombre de trois ou quatre juges qui étoient affis en ces premiers pariemens , il en eft forti une grande fourmiliere de juges 8c de confeillers. Au demeurant, pour les loger dignement, il leur fallut premiérement édifier (comme nous avions commencé a dire tantöt) un beau palais iuperbe, fomptueux & magnifique , qui fut bati par le commandement de Louis Hutin ou de Philippe-le-Bel; & puis au lieu de ce premier Sc petit nombre de Juges , il fe fit un département en trois chambres, la grand'chambre, la cour des enquêtes & la chambre des requêtes, duquel partage Budé fait mention au paffage que nous avons allégué ; mais pius amplernent Gaguin en la vie de Louis Hutin. Je fais toutesfois que quelqu'un a marqué en la marge du livre intitulé , le Style de la cour de parlement, ou Etienne Aufrier retient ce même nombre , les mots qui s'enfuivent : au contraire , il n'y a eu que deux chambres au ccmmencement; car ïa chambre des requêtes eft une juftice inférieure. On y a depuis ajouté une troifieme chambre, appellée la petite chambre des en-  302 Analyse des Historiens quêtes , mais l'an 15 22, le roi Francois voulant attraper {bisante mille écus, érigea une quatrieme chambre de vingt nouveaux confeillers, qui payerent chacun trois mille écus de finance, dont la cour fut défïgurée. Depuis ; le nombre des préfidens augmenta a prix d'argent, & de rechef le mème roi, & pour la même caufe , crca vingt autres confeillers l'an 1543 ; lur quoi ne faut oublier que ce Gaguin &C Budé ea ont laiffé par écrit, pour donner a entendre qua ces affemblées de juftice n'étoient ni perpétnelles ni certaines, comme elles font a préfent, & ne fe tenoient, finon quand le prince le commandoit, & felon que les affaires fe préfentoient; a favoir que tous les ans, au mois de novembre , il faut que 1'édit du roi foit réfréchi, afin qu'il foit loifible de renouveller le parlement. Et afin qu'on fache (dit Gaguin) que que le roi eft auteur de cette affemblée, on prononcé tous les ans les édits du roi, par lefquels eft donnée autorité aux juges de renouveller 1'exercice du parlement a la fête SaintMartin, c'efl-a-dire ie douzieme de novembre ; & pour montrer de combien ce royaume &£ autorité judiciale s'eft augmenté en peu de tems , on peut alléguer 1'ordonnance du roi Charles feptieme , qui fut publiée l'an 1455 , environ cent ans après que le parlement fut  slr les États Généraux. 303 établi a Paris , dont la fubftance eft telle: «après » ia fête de Paqiies jufqu'a la fin du parlement, » les préfidens &C confeillers doivent être afïem» blés en leurs chambres , a fix heures du ma» tin : depuis la fête S. Martin , après 1'heure » fufdite ». Et un peu après: « il eft très-né» ceffaire que les préfidens & confeillers de la » cour viennent après-dïner au parlement pour » juger & pour expédier les caufes ». Voila Pordonnance qu'en fit Charles feptieme. Mais fi on veut monter plus haut, & confidérer I'état du tems de Charlemagne, on trouvera que les états de judicature étoient tout autres, & que Padminifiration de la juftice avoit toute autre forme , comme on 'le peut voir par fes ordonnances, & nommément du chapitre 74 du 4e livre de la loi francique , ou eft eet article. Que le comte ne tienne .point' fon fiége , finorl a jeun , &c. Et quant a ce nom de Parlement, pour. juger en quel, honneur il eft monté en peu de tems, on peut prendre pour argument certain le privilege que'donna Louis onzieme a ceux du DaCfphiné ; car au lieu qu'il y avoit pour le Dauphiné une compagnie de préfidens & confeillers établie a Grenoble avec autorité de cour fouveraine en ion reffort, qu'on appelloit le confeil du Dauphiné, Louis onzieme étant dauphin de Vienne, abolit ce  304 Analyse des Historiens rom de confeil, & voulut que déformais on ï'appellatparlement,s'étudiantpar-lade récompenfer les honneurs qu'il avoit re^us desDauphiüois , combien qu'au demeurant il n'ajoutat xien de nouveau a 1'autorité de ce confeil, ainfi que le témoigne Gui Pape, confeiller de Grenoble, en la queftion 43 , & de rechef en Ia queft. 1-74. EXTRAIT  Sur les Ètats Généraux. lof EXTRAIT DE L'OUVRAGE 1NT1TULÉ! DE LA RÉPUBLIQUE. Par Bodin. !Nous nous difpenfonsde donner unehiftoiré des auteurs que nous abrégeons, paree que nous avons un but plus important, paree qua nous ne prenons d'eux que les écrits Sc les opinions qui peuvent entrer dans cette collection , 8c former un foyer de lumieres en toutes les matieres , 8c fur tous les points dé difcuffion relatifs aux états généraux. Les dicfionnaires ont donné la vie privée de tous ces écrivains, 8c toutes les fois qu'on peut renvoyer fes ledteurs aux fources, il efl au moins fuperflu de farrêter fur des détails qu'il peut fe procurer ailleurs fans le moindre effort. II fuffit de dire que les principes de Bodin font très-monarchiques, & que ce magiftrat célebre fut particuliérement attaché è Henri III St au duc d'Alen9on, 8c qu'il fe fit un nonnen Tornt FI. X  3Q6 Analyse des HistorienS infini aux états d'Orléans,. de Blois, & dans les principales affemblées oii il fut appellé. II s'éleva contre la tyrannie, même un peu trop contre les iibertés de la nation ; mais il foutint conftamment le parti royalifte , & confeilla les fnoyens les plus mcdérés aux adminiftrateurs & au roi. On a dit que ïefprit des loix de Montefquieu fe trouve tout entier dans Bodin. On a été trop loin, il eut été plus jufte de dire que la république de Bodin a fourni un texte , & des divifions au célebre Montefquieu , que areille a celle de Carinthie (i), oü encore è préfent on voit une pierre de marbre prés fa ville Sainte-Vitus en un pré, fur laquelle fnonte un payfan, auquel eet office appartient jpar droit fucceflif, ayant k dextre une vache fioire, a feneftre une maigre jument , & le peuple tout autour. Celui qui vient pour être «duc, marche avec grand nombre de feigneurs iVêtus de rouge, & les enfeignes au devant de 3ui, & tous bien en ordre, hormis le duc qui eft habillé en pauvre berger, avec une houlette, & celui qui eft fur la pierre crie en Sclavon : qui eft celui, dit - il, qui marche fi iravement ? Le peuple répond que c'eft leur ' prince : alors celui-la demande, eft - il juger (i) Fornje d'inveftir le duc de Carinthie,  *5UR LES ÉTATS GÉNÉRAUX. $t§ Cherche-t-il le falut du pays ? Eft-il de fraoche condition , digne d'honneur, obfervateur de la religion? On répond il'eft, 6c le fera. Alors le payfan donne un petit foufflet au duc, 6c demeure le payfan exempt des charges publiques, tk le duc monte fur la pierre branflant 1'efpée tk parlant au peuple promet d'être jufte, 6c en eet habit va a la meffe, puis prend 1'habit ducal 6c retourne fnr la pierre , 8c]recoit les hommages 6c fermens de fidélité. Vrai eft que le duc de Carinthie n'étoit anciennement que le grand veneur de 1 'empereur(i),6c depuisque 1'empire eft tombé en la maifon d'Autriche, a qui le duché appartient, 6c la qualité de veneur, 6c la forme ancienne de 1'inveftir eft abolie, 6c le duché de Carinthie , Stirie, Croatie, les comtés de Cilie 6c de Tirol, ont été annexés au duché d'Autriche. Et quoi qu'on écrive du royaume d'Arragon, la forme ancienne qu'on gardoit envers les rois d'Arragon, ne fe fait plus, fi le roi n'affemble les états : comme j'ai appris d'un chevalier Efpagnol. La forme étoit que le grand magiftrat (i), qu'ils appellent la juftice d'Arragon , dit au roi ces paroles : Nos qui vakmos tanto come vos , y podemos mas que vos , ( i) L'an 1331. r r ( 2 ) La forme qu'on gardoit aux états d'Arragon.  Analyse des Historïens vos elegimos Recon ejias y eflas conditiones entra vos y nos , un que mande mas que vos , c'eft-adire, Nous qui valons autant comme vous, & pouvons plus que vous, nous vous élifons roi, a telles & telles conditions entre vous & nous, qu'un commande plus que vous. En quoi s'eft abufé celui qui a écrit que le roi étoit alors élu du peuple , chofe que jamais ne fe fit : car il eft bien certain que Sanche-le-Grandconquêta le royaume par le droit des armes fur les mores, quiPavoient eu fept eens ans: & depuis fa poftérité, males & femelles ont eu le royaume par droit fucceflif, de proche en proche. Et de fait Pierre Bellugue Arragonnois ( i ); qui a diligemment écrit du droit d'Arragon, écrit que le peuple n'a aucun droit d'élire le roi, finon en ligne défaillant (i). Auffi eft - il impoflible & incompatible que le roi d'Arragon. eut moins de puiffance que les états d'Arragon, vu que le même auteur Bellugue dit, que les états ne peuvent s'afiembler, s'il n'y a mandement exprès du roi ; & ne peuvent fe départir étant affemblés, s'il ne plaït au roi les licencier : fi eft-ce que la juftice d'Arragon, & tous les états demeurent en pleine fubjeétion { i) In fpeculo. i) In fpeculo tit. 14, §. veniamus, num. 6. du  SUR LES ÈTATS G É N LH A U X.' 32^ «lu roi, qui n'eft aucunement tenu de fuivre kurs avis, ni accorder leurs requêtes, comme dit le mcme docleur (1): ce qui eft général a tous états de monarchie, comme dit Oldrad (2), parlant des rois de France Sc d'Efpagne : qui ont, dit-il, puiffance abfolue* Vrai eft que ces docteurs ne difent point que c'eft de puiffance abfolue : car fi nous difons que celui a puiffance abfolue , qui n'eft point fujet aux loix, il ne fe trouvera prince au monde fouverain, vu que tous les princes de la terre font fujets aux loix de Dieu ck de nature, ck a plufieurs loix huniaines communes a tous peuples. Et au contraire, il fe peut faire que 1'un des fujets fera. difpenfé ck abfous de toutes les loix, ordonnances Sc coutumes de fa rèpublique, ik ne fera point prince ni fouverain. Or il faut que ceux-la qui font fouverains, ne foient aucunement fujets aux commandemens d'autrui , St qu'ils puiffent donner aux fujets, ck caffer ou anéantir les loix utiles , pour en faire d'autres : ce que ne peut faire celui qui eft fujet aux loix, OU a ceux qui-ont commandement fur lui. C'eft pourquoi la loi dit, que le prince eft ablous (1) Extrerao , & tit. i-o , num. 10. ( 2 ) Confil. 69. Tomé FIf 2£  3zi Analyse des Historiens de la puiffance des loix (1) : 6k ce mot de loi emporte auffi en Latin le commandement de celui qui a la fouveraineté. Auffi voyons - nous qu'en tous édits ók ordonnances on y ajoute cette claufe (x), nonobftant tous édits & ordonnances , auxquels nous avons dérogé, ck dérogeons par ces préfentes, ck a la dérogatoire des dérogatoires : claufe qui a toujours été ajouiée ès loix anciennes (3) : foit que la loi fut publiée du même prince , ou de fon prédéceffeur. Car il eft bien certain que les loix, ordonnances, lettres-patentes , priviléges , ck ottrois des princes, n'ont aucune force que pendant leur vie, s'ils ne font ratifiés par confentement exprès, ou du moins par fouffrance du prince qui en a connoiffance, ck mêmement des priviléges. Et pour cette caufe , Bartole étant député ambaffadeur vers 1'empereur Charles IV, pour obtenir confirmation des priviléges de Pérouze, en obtint la "confirmation portant cette claufe, jufques a ce qu'ils foient révoqués par nos fucceffeurs : au préjudice def- (1) l. princeps de legib. 1. facratiffime. e. C. (2) L. forma. de offi. preto. C. Bal. in 1. cunflos pöpulos , col. col. de iumma trinit. C. & in c. uk. deoffic. Archi. Bal. in 1. refcripta. de preci. imperator!. C. Alexand. confil, ior , num. 5.  SUR LES ÉTATS GÉNÉRAUX. tij quels il ne pouvoit rien faire (i). QU1 &xt *a caufe que M. de 1'Höpital, chancelier de France, refufa fceller la confirmation des priviléges, & exemptions de tailles de Saint - Maur des Foffés, qu elque mandement qu'il eut de ce faire: paree qu'ils portoient perpétuel affranchiffement : qui eft contre la nature des priviléges perfonnels, & qui diminue la puiffance des fucceffeurs : & ne fe peuvent donner aux corps & colléges , qu'a la vie du prince , qui les ottroye, ores que le mot perpétuel y foit ajouté, ce qui n'eft pas aux républiques populaires Sc Ariftocratiques. Auffi voyons - nous en ce royaume a la venue des nouveaux rois, que tous les colléges & communautés demandent confirmation de leurs priviléges, puiffance &C jurifdittion: Sc même les pariemens & cours fouveraines , auffi bien que les officiers particuliers. Si donc le prince fouverain eft exemt des loix de ces prédéceffeurs, beaucoup moins feroit-il tenu aux loix & ordonnances qu'il fait: car on peut bien recevoir loi d'autrui, mais (i) Bald. in tit. de pace Conflat. verbo amplius. Felin. in c. i, num. 5 , de prob. Afflic. in tit. quum lunt regalia in proffimio , num. 1. Carolus Rukius, confil. 91, libri 1, num. X a  324 Analyse des Historiens. il eftimpoffible par nature de fe donner loi (i); non plus que commande a foi-même, chofe qui dépende de fa volonté, comme dit la loi: Nulla abligado cpnjïftere poteft qua d voluut at e promitentisftatum capit : qui eft une raifon ncceffaire, qui montre évidemment que le roi ne peut ê:re fujet a fes loix. Auffi voyons - nous a la fin des édirs & ordonnances ces mots : Car tel est notre pl ai sir , pour faire entendre que les loix du prince fouverain, ores qu'ellesfuffeatfondées en bonnes & vives fcaifons , -néanmoins qu'elles ne, dépendentque de fa pure & fra.iche volonté; mais quant aux loix divines & naturelles , tous les princes de Ia terre y font fujets, & n'eft pas en leur puiffance d?y contre venir , s'ils ne yeulent être coupables de leze-raajefté divine, faifant guerre a Dieu , fous la grandeur duquel tous les monarques du monde doivent faire jcuz , Sc baiffer la tête en toute crainte Sc révérence. Ei par ainfi , la puiffance abfolue des princes .(i) L. ille a quo. §, teinpeftivum, ad Trebell. L pen. de aibitris, cap. innotuit de eleót. {2) Ex c. neir.o 1 r , q. 3. Jöan. And. in cap. i, rap. & in regul. cui licet de Reg. 18}; 6, dub:um , de praïbènd, lib. 6.  SUR IES ÉTATS GÉ N É R AXTX. 3 2j & feigneuries fouveraines , ne s etend aiteünement aux loix dc Dieu & de .nature ; St celui qui a mieux entend li que c'eft de puiffance abfolue , 6c quï a fait ployer les rois & empereurs fous la fienne , difoit que ce n'eft autre chofe que déroger au droit ordinaire (r) ; il n'a pas dit aux loix divines St naturelles. Mais le prince n'eft il pas fujet aux loix du pays , qu'il a juré garder ? 11 faut diftingner, fi le prince jirre a föi-même qu'il gardera fa loi y ir n'tfr point tenu de fi loi non plus que du ferment fait a foi-même (2): car même les■ fujets ne font aucunement Tenus du ferment qu'il font (3) és conventions, defquelles laloi per met de fe départir, ores qu'elles foyent honnêtes Sc raifonnables: & fi le prince fouverain promet a un autre prince garder les loix que lui ou fes prédecefleurs ont faites, il eft obligé les garder , fi le prince auquef la parole eft donnée y a intérêt, jacoit qu'il n'eüt point juré ; 6c fi le prince auquel la promeffe eft faite, n'y a point■ d'intérêt , ni (1) Innocent, lib. 4, Pon. max. 1 , cap. innotuit,1. v nion la , li ie roi n'eft captif ou furieux , ou en enfance ; car fi le prince fouverain eft fujet aux états, il n'eft ni prince ni fouverain, & la rèpublique n'eft ni royaume ni monarchie , ains une pure ariftocratie de plufieurs feigneurs en puiffance égale , ou la plus grande partie commande la moindre en général , ck a chacun en particulier j il faudroit donc que les édits ck ordonnances fuffent publiés au ncm des états, ék commandés par les états, comme ea feigneurie ariftocratique , ou celui qui préfide n'a puiffance aucune , & doit obéiffance aux mandemens de la feigneurie, qui font toutes chofes abfurdes ók incompatibles j auffi voiton qu'en 1'affemblée des états de ce royaume tenus a Tours, alors,que le roi Charles VIII .étoit en bas age, ck que les états étoient plus  334 Analyse des Historiens autorifés que jamais, Relli, orateur , portant la parolepour tous les états, commence ainfi i très-haut , très-puiffant , très-Chrétien roi , notre fouverain tk naturel feigneur , vos humbles tk trés-obéifTans fujets , &c. , venus ici par votre commandement, comparoiffent tk fe préfentent devant vous en toute humilité, révérence tk fujerion, &c. Et m'étant chargé, de par toute cette noble affemblée , vous expofer le bon vouloir, 1'affeöion cordiale , le ferme tk arrêté propos qu'ils ont a vous fervir & obéir , tk fub venir en toutes vos affaires, commandemens tk bons plaifirs. Bref , tout le difcours tk narré des états ne porte rien que fujetion , fervice tk obéiffance, On voit le femblable aux états d'Orléans Et combien qu'aux pariemens du royaume d'Angleterre, qu'on tient de trois en trois ans , les états ufent de la plus grande liberté, comme font les peuples de feptentrion, fi elï-ce qu'en effet ils ne procédent que par fupplications tk requêtes. Et au parlement d'Angleterre, tenu l'an 1556 au mois d'ocfobre, tous les états d'un commun confentement avoient réfolu, comme ils firent entendre a la reine, de ne traiter aucune chofe qu'elle n'eut déclaré un fucceffeur è la couronne : toutefois elle fit réponfe qu'on lui vouloit faire fa fofie auparavant qu'elle f»t  SUR LES ÉTATS GÉNÉRAUX. 335. morte ; mais que toutes leurs réfolutions n'auroient aucun effet fans fon vouloir, & ne fit rien de ce qu'ils demandoient; comme j'ai appris par les lettres de 1'ambaffadeur du roi. Auffi les états d'Angleterre ne font jamais affemblés, non plu s qu'en ce royaume & en Efpagne, que par lettres patentes & mandemens expres émanés du roi, qui montre bien que les états n'ont aucun pouvoir de rien décerner, ni commander, ni arrêter , vu même qu'ils ne fe peuvent affembler, ni fe départir fans mandement expres. Encore peut-on dire que les ordonnances faites par le roi d'Angleterre è la requête des états ne peuvent être caffées fans y appeller les états. Cela eft bien pratiqué, & fe fait ordinairement, comme j'ai f911 de M.Dail, ambaffadeur d'Angleterre, homme d'honneur & de fijavoir ; mais il m'a afiuré que le roi recoit ou refufe la loi fi bon lui femble , & ne laiffe pas d'enordonner a plaifir, & contre la volonté des états, comme on a vu Henri VIII avoir toujours ufé de fa puiffance fouveraine; jacoit que les rois d'Angleterre ne font point facrés , finon en jurant qu'ils garderont les ordonnances & coutumes du pays; car ce ferment la fe doit rapporter a ce que nous avons rapporté cideffus, Mais on peut dire que les états ne fouffrent pas qu'on leur impofe charges extraordi-  33ö Analyse des Histqbie^s naires, ni fubfides, finon qu'il foit accordé & confenti au parlement, fui want 1'ordonrance du roi Edouard I, en la grande cbarte, de laquelle le peuple s'eft toujours prévalu contre les rois. Je répörtds , que les autres rois n'ont pas plus de puiffance que le roi d'Angleterre, paree qu'il n'eft en la puiffance de prince du monde, de lever impöt a fon pjaifir fur le peuple , non plus que de prendre le bien d'autrui: comme Philippe de Commincs remontra fagement aux etats tenus a Tours, ainfi que rous Jifons en fes mémoires; & toutefois, fi la néceffité eft urgente, en ce cas le prince ne doit pas attendre 1'affemblée des états , ni ie confentement du peuple , duquel le falut dépend de la prévoyance & diligence d'un fage prince, Nous conclurons donc que Ia fouveraineté du monarque n'eft en rien altérée, ni diminuée pour la préfence des états; ains au contraire , fa majefté eu eft beaucoup plus grande & plus iüuftre, voyant tout fon peuple lereconnoïtre pour fouverain , encore que par telle affemblée les princes ne voulant pas rebuter leurs fujets, accordent & paffent plufieurs chofes, qu'ils ne conf?nfiroient pas, sils n'étoient vaincus des requêtes, prieres & juftes doiéances d'un peuple aftligé & vexé le plus fouvent au defceu du prince, qui ne voit, & qui n'entend que par les yeux,  Sur les États Généraux. 337 yeux, les oreilles, & le rapport d'autrui. Par ainfi on voit que le point principal de la majefté fouveraine & puiffance abfolue, git prinxipalement a donner loi aux fujets en général fans leur confentement. Et fans aller au pays d'autrui, on a vu fouvent en ce royaume certaines coutumes générales abolies par les édits de nos rois, fans ouïr les états, quand rinjultice d'icelle étoit oculaire ; comme la coutum'e de ce royaume en tout le pays coutumier, toucbant la fucceffion des meres, & biens de leurs enfans a été changée fans affembler les états, ni en général, ni en particulier. Qui n'eft rien de nouveau; car dès le tems du roi Philippe-leBel , la coutume générale en tout ce royaume, qui (1) ne foutfroit pas que celui qui avoit perdu fon procés, fut condamné aux dépens, fut caffée par édit fans affembler les états; & la coutume générale , qui défendit. (2) de recevoir le témoignage des femmcs en caufes civiles, fut abolie par édit de Charles (3) VI '" " ■ *" ———»Er ( 1 ) Contra jus commune , L eum quem tenere , de judic. ff. ( 1) Lege Julia, de teftibus, canorsico jure aliter cavetur. Bar. in tra£ta. de differentiis juris ciyilis & panonici. (3) L'an 1394; Tomé FI. 3T  33§ Analyse des Historiens fans appeller les états. Car il faut que le prince fouverain ait les loix en fa puiffance pour les changer , & corriger felon 1'occurrence des cas, comme difoit le jurilconfulte SextusCecilius, tout ainfi que le maitre pilote doit avoir en fa main le gonvernail, pour le tourner a fa difcrétion; autrement le navire feroit plutöt péri qu'on n'auroit pris 1'avis de c.eux qu'il porte. Ce qui n'eft pas feulement néceffaire au prince fouverain , ains auffi quelquefois au magiftrat, comme nous avons dit de Pompée , & des dix commiffaires. C'eft pourquoi Augufte , après la guerre Aöiaque, fut abfous par le fénat de la puiffance des loix , jacoit q&'-'d ne fut que chef de fa rèpublique, Sc non pas prince fouverain , comme nous dirons en fon lieu. Depuis Vefpafien, 1'empereur fut auffi exempté de la puiffance des loix , par la loi du peuple expreffe, comme plufieurs penfent, St qui fe trouva encore a Rome gravée en pierre, que le jurifconfulte (i ) appelle la loi royale; combien qu'il n'y a pas grande apparence que le peuple, qui long-tems auparavant avoit perdu toute puiffance, la donnat a celui qui étoit le plus fort. Pline le jeune, parlant du ferment que fit iTrajan, s'écrie : Voici, dit-il, un cas étrange, 11) L. i. de conftit. princip.  sur les Ètats Généraux. 339' & qui jamais n'a été vu, que 1'empereur jure dé garder les loix, &c. oü il montre que c'étoit chofe bien nouvelle. Et depuis Théodoric , voulant gagner la faveur du fénat & peuple romain, fuivit 1'exemple de Trajan , comme nous lifons en Caffiodore , ecce, dit il, Trajani nojlri clarum feculis reparamus exemplum j jurat vobis, perquemjuratis. Et eft vraifemblable, que les autres princes ont mis cela en coutume , de faire ferment k leur couronnement, ores qu'ils ayent droit de fouveraineté par droit fucceffif, II eft bien vrai que les rois des peuples de feptentrion font des fermens, qui dérogent a la fouveraineté; &-de fait la nobleffe de Danemarck empêcha le couronnement du roi Frédéricau mois d'aoüt 1559, jufques a ce qu'il eut juré folemneliement, qu'il ne pourroit faire rnourir ni confifquer homme noble , ains qu'il fera jugé par le fénat: que tous gentilshommes auront jurifdidtion & puiffance de la mort fur leurs fujets fans appel, & fans que le roi ait part aux amendes ni confifcations; que le roi ne pourra donner office fans le confentement du fénat; qui font tous argumens que le roi de Danemarck n'eft pas fouverain; mais ce ferjment fut premierement arraché de la bouche de Frédéric, aïeul de celui-ci, lorfqu'il étoit . en guerre contre Chrifüerne roi de Danemarck, y x  340 Analysé des Historiens qui mourut en prifon, oii il avoit été vingt-cinq ans, & depuis fut continué par Chriftierne, pere de Frédéric , qui a fait le même ferment; & afin qu'il ne put y contrevenir, la nobleffe traita ligue avec la ville de Lubeck, Sc le roi de Pologne Sigifmond Augufte , qui n'avoit gueres plus de fouveraineté que le roi de Danemarck. Mais il faut de deux chofes 1'une; c'eft a fcavoir que le prince qui jure de garder les loix civiles, ne foit pas fouverain, ou bien qu'il eft parjure s'il contrevient a fon ferment, comme il eft néceffaire que le prince fouverain y contrevienne pour cafTer, ou changer, ou corriger les loix felon 1'exigence des cas , des tems, Sc des perfonnes, ou bien fi nous difons que le prince ne laiffera pas d'être fouverain, & néanmoins qu'il fera tenu de prendre 1'avis du fénat, iou du peuple, il faudra auffi qu'il foit difpenfé par fes fujets du ferment qu'il aura fait de garder les loix inviolablement; & les fujets qui font tenus & obligés aux loix , foit en particulier , foit en général, auront auffi befoin d'être difpenlés de leur prince, fur peine d'être parjure : de forte que la fouveraineté fera jouée k •deux parties, Sc tantöt le peuple, tantöt le prince fera maitre, qui font abfurdités notajbles, & du tout incompatibles avec la fouveraineté abfolue, Sc contraires aux loix Sc k la  sl\r les États Généraux. 341 raifon naturelle. Et néanmoins on voit des plus fuffifans foutenir, qu'il eft néceffaire que.les princes foient obligés de faire ferment de garder les loix ck coutumes du pays. En quoi faifant ils anéantiffent ck dégradent la majefté fouveraine , qui doit être facrée, pour en faire une ariftocratie, oubien une démocratie: auffi advient-il que le monarque fouverain , voyant qu'on lui vole ce qui lui eft propre , & qu'on le veut affujettir a fes loix, il fe difpenfe a la fin non feulement des loix civiles , ains auffi des loix de Dieu ck de nature , les faifant égales. II eft donc befoin de bien éclaircir ce point ici. C'eft une forme de faire qui eft ck a toujours été en toute rèpublique, que tous ceux qui font les loix , afin de leur donner plus grand poids ck autorité, y ajoutent ces mots : Par édit perpétuel et irrévocable , ckc. ck en ce royaume on met au eommencement de tels édits, A tous présens et a venir, &c. qui montrent un trait perpétuel a la poftérité ; & pour montrer encore plus la différence d'avec les édits faits par maniere de provifion , on les fcelle en cire verte, en lacs de foie verte ck rouge, ck les autres en cire jaune. Et néanmoins il n'y en a pas un perpétuel, non plus qu'en Rome, oü celui qui publioit une loi ajoutoit a la fin qu'il ne pouvoit y Y 3,  34* Analyse des Historïens être dérogé , ni par le fénat, ni par le peuple ; & fi cela eut eu lieu, pourquoi le peuple , du jour au lendemain , eüt-il caffé les loix? Tufcais, dit (i) Ciceron, quele tribun Claude, par la loi qu'il a fait publier, a mis k la fin, que le fénat ni le peuple ne pourroienty déroger en forte quelconque; mais il eft affez notoire, que jamais on n'a eu égard a cette claufe, Ut nec per Jenatum, nee per populum lex infirmari po(Jit; autrement, dit-il, on ne verrok jamais loi caffée , vu qu'il n'y a loi qui ne porte cette claufe, k laquelle néanmoins on déroge ordinairement; ce qui eft encore mieux déclaré en la harangue de Fabius Ambuftus, fur Poppofition des tribuns, qui foutenoient que le peuple n'avoit pu faire deux confuls nobles, obftant Ia loi qui vouloit qu'il y en eut un roturier. Fabius dit que la loi des douze tables (2) portoit que le dernier mandement du peuple étoit le plus fort. Les Perfes, Médois , Grecs & Latins, ufoient de même forme pour valider leurs édits & ordonnances que font nos rois, qui mettent quelquefois cette claufe, fans que par ci-après il puhTe par nous ou nos fuccef- ( s ) Ad Attic. lib. 3 , ep. 72. {2^ Quod poftremum juffie populus id ratnm diol 1, fed & poffeflbres de legib. ff.  SUR LES ÉTATS GÉNÉRAUX. 34J fèurs y être dérogé t ou , fans avoir égard a la dérogation , que dès a préfent nous avons déclarée nulle. Et toutes fois on ne fcauroit (1) tellement fe donner loi, qu'on ne s'en puiffe départir , comme ncms avons dit; car 1'édit qui, fe fait après, porte toujours dérogation expreffe a la dérogatoire. Et quant a la. vérificatiön des édits faits par les états, 011 parlement, elle eft de grande cohféqttëneè pour les faire garder, non pasque fans icelle ïe prince fouverain ne puiffe faire loi: auffiThéodofe dit (2) humanum ejfe y pour montrer que le confentement du fénat, non tam mcej/ïtatis ejl , quam humamtatis z comme en pareil cas quand il eft dit que c'eft chofe bien féante (3)3 un prince fouverain» de garder fa loi , paree qu'il n'y a chofe qui le faffe plus craindre & révérer des fujets; & au contraire il n'y a rien qui plus ravalle 1'autorité de fa loi, que le mépris qu'il ( 1) L. a Titio. §. nulïa obligatie de ver. 1. ille k quo. §. tempeftiwum , ad Treb. 1. fi quis. in principio*. delegat. 3. 1. penul. de arbitr. ff. Bal. in li de fideicommif. C. AlexancL 2.24., Übl>6j Panor. in c. pro illorum de prsebend: ( 2 ) In d. 1. humanum de legib. C. ( 3) L,, digna vox de confti.. prin. C. 1. ex impor«&&>. de leg. %, & Lex imperfeft. de teftament. C, Y 4  344 Analyle des HlSTOR-ÏENS en tak. Mais fi le prince défend de tuer fur peine de la vie, n'eft-il pas obligé a fa loi ? Je dis que cette loi n'eft point fienHe,mais c'eft ia loi de Dieu & de nature , a laquelle iL eft plus étroitement (z) obligé que pas tin des fujets, & n'en peut être difpenfé, ni par le . fénat, ni par le peuple, qu'il n'en foit toujours ïeiponlable au jugement de Dieu , qui en fait mformation k tqute rigueur , comme difoit Salomon , c'eft pourquoi Mare Aurele difoit que les magiftrats font juges des particuliers; les princes des magiftrats & Dieu des princes. Vcujè 1'avis de deux princes qui furent onques eniwes entre les plus fages : je mettrai encore celui d'Antigon, roi d'Afie, lequel oyant dire a un flatteur que toutes chofes font juftes aux rois;: oui , dit-il, aux rois barbares &'tyrans. Le premier qui ufa de cette natterie fut Anaxarque envers Alexandre le Grand, auquel il fit croir e que ,1a déeffe Juftice étoit a la dextre (l ) Livius, lib. 3. (2) Bal. in §,. uit. eol. 1, tit. q; feudum dare. Mart. Laud. in tracta. de princip. verf. 30. Bal. in 1. 2 , co!. 7, ver. item no. de fervitut. & aqua. Felin. in c. J , col. 10, verf. qnint. Alexand. confil. 126 , cano funt «juasdarn. 25 , q. 1. Specul. titul. de leg. §. nunc. & éi, 'm ï, uli. li contra jus C«  sur les Êtats Généraux, 345' de Jupiter, pour montrer que les princes ne font rien qui ne foit jufte : mais tot après il éprouva cette juftice, étant tombé entre les ' mains du roi de Cypre fon ennemi, qui le fit romprefurune enclume. Séneque dit bien teut le contraire, Cafaricum omnia lictnt, propter hoe minus licet. Et par ainfi ceux qui difent généraïement que les princes ne font point fiqets aux loix , ni même a leurs conventions, s'üs n'exceptent les loix de Dieu &c de nature, & les juftes conventions & traités faits avec eux , ils font injure (1) a Dieu , s'ils ne font apparoir d'exemption fpéciale , comme on dit en matiere de privileges. Et même Denis , tyran dé Sicile, dit a fa mere qu'il pourroit bien la difpenfer des loix ck: coutumes de Syracufe , mais non pas des loix de nature (1). Et plufieurs fe font (3) abufés de dire que le prince fouverain ne peut rienordonner contre la loi de/Dieu, s'il n'eft fondé en raifon apparente : & quelle raifon peut-on avoir de contrevenir a la loi de 'Dieu? 11 refte encore cette objeöion; (1) Accur. inl. princeps.de legib. ff. (a) Plutar. in apophte. Grecor. (3) Anto. Butrio. Imola. Paftorum. in cap. qua» in ecclefiarum , de conft. ex 1. quolies de precib. Irnperat. C. Felin. in die. col. 5 , verfi limita. 8t col. 14.  34^ Analyse des Historiek^ fi le prince eft obligé aux loix de nature % Sc que les loix civiles foient équitables & raifonnables, il s'enfuit bien que les princes font auffi tenus aux loix civiles, & a cela fe rapporte ce que difoit Pacatius a 1'empereur Théodofe, tantum tibi licet, quan'um per leges licebit. Je réponds que la loi du prince fouverain concerne le public, ou le particulier, ou 1'un Sc 1'autre enfemble, Sc en tout cas qu'il eft queftion du profit contre 1'honneur, ou du profit qui ne touche point 1'honneur : ou de 1'honneur fans profit, ou du profit joint a 1'honneur, ou bien de ce qui ne touche ni le profit ni 1'honneur : quand je dis 1'honneur, j'entends ce qui eft honnête de droit naturel, & quant a ce point il eft réfolu que tous princes y font fujets» attendu que telles loix font naturelles, ores que le prince les faffe publier, Sc a plus forte raifon quand la loi eft jufte & profitable : fi la loi ne touche ni le profit ni 1'honneur , il n'en faut point faire état: fi le profit combat 1'honneur,. c'eft bien raifon que 1'honneur 1'emporte a comme difoit Ariftide le jufte, que 1'avis de Thémifiocle étoitfort utile au public, & toutesfois deshonnête & vilain: mais fi la loi eft profitable , & qui ne faffe point de brêche a la juftice naturelle, le prince n'y eft point fujet; ains il la peut changer ou caffer fi bon luifembie»  SUR LES ÉTATS GÉNÉRAUX. 347 jpourvu que la dérogation de la loi apportant profit aux uns, ne faffe dommage aux autres fans jufte caufe ; car le prince peut bien caffer &C annuller une bonne ordonnance, pour faire place a une autre moins bonne ou meiileure , attendu que le profil, 1'honneur, la juftice, ont leurs degrés de plus & moins. Si donc il eft licite au prince entre les loix utiles, faire choix des plus utiles ; auffi fera-t-il entre les loix juftes Sc honnêtes, choifir les plus équitables Sc plus honnêtes , ores que les uns y ayent profit, les autres dommage, pourvu que le profit foit public Sc le dommage particulier: mais il n'eft pas licite au fujet de contrevenir aux loix de fon prince, fous voile d'honneur ou de juftice; comme fi au tems de famine le prince défend la traite des vivres, chofe non-feulement profitable au public , ains auffi-bien fouvent jufte Sc raifonnable: il ne doit pas donner congé a quelques-uns d'en tirer au préjudice du public , Sc des marchands en particulier; car fous ombre du profit que les flatteurs Sc corratiers emportent, plufieurs bons marchands fouffrent dommage , Sc en général tous les fujets font affamés: Sc néanmoins ceffant la famine Sc la difette , il n'eft pas licite au fujet de contreve. nir a 1'édit de fon prince , fi les défenfes ne font levées: Sc ne lui appartient pas de fonder  348 Analyse des Historiens fa convention en 1'équité naturelle , qui veu qu'on aide a Tétranger , lui faifant part des biens que Dieu fait croitre en un pays plus qu'en 1'autre; car la loi qui défend eft plus forte que 1'équité apparente, fi la défenfe n'étoit direclement contraire a la loi de Dieu & de nature : car quelquefois la loi civile fera bonne, jufte & raifonnable , & néanmoins le prince n'y doit être fujet aucunement: comme s'il défend fur la vie de porter armes, pour mettre fin aux meurtres 6c féditions, il ne doit pas être fujet a fa loi: ains au contraire il doit être bien armé, pour la tuition des bons & punition des mauvais. Nous ferons même jugement des autres édits &C ordonnances qui ne touchent qu'a partie des fujets, & qui font juftes pour le regard de quelques perfonnes, ou jufqu'a certain tems ou en certain lieu , ou pour la variété des peines qui dépendent toujours des loix civiles, ores que les défenfes des crimes foient de droit jdivin 6c naturel; auxquels édits 6c ordonnances les princes ne font aucunement tenus, finon tant que la juftice naturelle des édits a lieu , laquelle ceftant, le prince n'y eft point obligé , mais bien les fujets y font tenus, jufqu'a ce que le prince y ait dérogé ; car c'eft une loi divine & naturelle d'obéir aux édits 6c ordonnances de celui a qui Dieu a donné la puiffance fur  SUR LES ÉTATS GÉNÉRAUX, 34c) iious , fi les édits n'étoient direclement contraires a la loi de Dieu, qui eft par-deflus tous les princes; mais c'eft une (1) incongruité en droit de dire que le prince peut chofe qui ne foit honnête, vu que fon pouvoir doit toujours être mefuré au pied de juftice : ainfi parloit Pline (2) le jeune de 1'empereur Trajan 3 ut enim 'felicitatis ejl pojfe quantum velh ,fi magnitudinis yelle quantum poffis , qui veut dire que le plus ■haut dégré de bonhèur, c'eft de pouvoir ce qu'on veut; 6k de grandeur, C'eft de vouloir ce qu'on peut: en quoi il montre que le prince ne peut rien qui foit injïïfte. ''Auffi c'eft rrial parler de dire que le prince fouverain a puiffance de voler le bien d'autrui ck de mal faire, vu que c'eft plutöt impuiffance, foibleffe ck lacheté de cceur. Si donc le prince fouverain n'a pas puiffance de franchir les bornes des loix de nature, que Dieu, duquel il eft Fimage, a pofées, il ne pourra-auffi prendre le bien d'autrui fans ca!-Ié qui foit jufte ck raifonnable, foit par achet, "ou échange, ou confifcatión légitime, en traitant paix avec 1'ennemi, fi autrement eilr ne fe peut conclure, qu'èri"prenant du bien des • "— , , "• . ; ■1 ■ , ;— 1 T » ( i') Nepos de verèor.'iigriif Alex. cónf. 59 > liv. 4» «g?ov":in 1;< 1 ,. de conftif. princ. {1) In panegyric.  5?o Analyse des Historien9 particuliers pour la confervation de I'état: quoiqne plufieurs ( i ) ne foient pas de eet avis : mais la raifon naturelle (i) veut que le public foit préféré au particulier , & que les fujets relachent non-feulement leurs injures & vengeances , ains auffi leurs biens pour le falut de la rèpublique : comme il fe fait ordinairement, & du public au public, & du particulier a 1'autre. Ainfi voyons-nous au traité de Péronne, fait pour la délivrance du roi LouisXI, prifonnier du Comte du Charolois, qu'il fut dit que le feigneur de Torci pourroit faire exécuter fon arrêt contre le fietir de Saveufes. Le prince ne peut prendre ni donner le bien d'autrui, fans le confentement du feigneur: & en tous les dons, graces, privileges ck acfes du prince, toujours la claufe, Sauf le droit d'autrui eft entendu, or qu'elle ne fut exprimée. Et de fait cette claufe appofée en 1'inveftiture du (i ) Hoffien in c. quanto de jure jnrand. Butrio ibi. col. 2 , Innocent. & Panor. in c. in noftra. de injur. ( i) D. 1. item Ci verberatum Fel. in cap. cüm non liceat. col. 5, de refcrip. Corne. conf. ioo, li. Alex. conf. 15, li. Col. 2. Cum anfi. incol. 1. 53 & 158, col. 1 & conf. 106, li. 3 , & latiff. confi. 216^ *& confil. 6j, li. 1, nu, 3, ck conf. 136, num, ij lib. 2,  sur les États Généraux. 351 duché de Milan , que fit 1'empereur Maximilian au roi Louis XII, fut occafion de nouvelle guerre, pour le droit, que les Sforces prétendoient au duché , que 1'empereur n'avoit pu , ni voulu donner. Car de dire que les princes font feigneurs de tout, celas'entend(i) de la droite feigneurie ck juftice fouveraine, demeurant a chacun la poffeffion 6k propriété de fes biens. Pour cette caufe nos rois par les ordonnances 6k arrêts de la cour, font (z) tenus vuider leurs mains des biens qui leur font échus , par droit de confifcation ou d'aubeine , s'ils ne font tenus de la couronne nuement êk fans moyen, afin que les feigneurs ne perdent rien de leurs droits. Et fi le roi eft débiteur a fon fujet, il fouffre condamnation : 6k afin que les étrangers ck la poftérité fache de quelle fincérité nos rois ont procédé en juftice, il fe trouve un arrét de l'an 1419, par lequel le roi fut débouté des lettres de reftitution qu'il avoit obtenues, pour couvrir les défauts contre lui acquis. ( 1 ) Felin. in cap. quas in ecclefiarum. de conft. éól. 11. Bal. conf. 563 , fine lib. 1, Jaf. in authen. quas actiones. de facrof. c. 4, in *e aftio. de tei ttendic. affli. in conft. Neapo. lib. 4, tit. 1 £ 2 ) Gallus, q.  35i Analyse bes Historiens Et par autre arrêt donné l'an 1166, le roi fut condamné payer la dime a fon curé des fruits de fon jardin. Les particuliers ne font pas traités fi rigoureufement: car le prince fouverain n'eft jamais reftitué comme mineur, étant toujours réputé majeur, quand il y va de fon intérêt particulier & néanmoins la rèpublique (1) eft toujours réputée comme un mineur, qui eft pour répondre a ceux qui font d'opinion, que , la rèpublique ne doit point être reftituée (1), en ce qu'ils confondent le patrimoine du prince avec le bien public, qui eft toujours divifé "en la monarchie, & tout un en I'état populaire & ariftocratique. Ainfi voit-on la droiture de nos rois, & 1'équité des pariemens, ayant préféré la rèpublique aux particuliers, & les particuliers aux rois: & fe trouve encore un arrêt du parlement, donné contre le roi Charles VII, par lequel il fut condamné de fouffrir qu'on coiipat les bois qu'il avoit J •prés la ville de Paris, pour 1'ufage public en ■général, & de chacun en particulier; &z qui plus eft, le prix lui fut taxé par 1'arrêt, ce qu'on ne feroit pas a un particulier. Lors pn pouvoit juger k vue d'ceil la différence d'uu vrai prince au tyran: car combien qu'il fut ^ 1) L. Rempublicam de jure Reip. C. grand  sur les États Généraux; 375 grand roi & vittorieux de tous fes ennemis: fi eft-ce qu'il fe rendoit plus doux & ployable a la raifon , a 1'équité & au jugement de fes magiftrats, que le moindre de fes fujets. Nous avons dit jufqu'ici en quelle forte le prince eft fujet aux loix tk aux conventions par lui traitées avec fes fujets, refte a voir s'd eft fujet aux contrats de fes prédéceffeurs; & fi telle obligation eft compatible avec la fouveraineté, pour réfoudre en bref une infinité de queftions (1) qu'on peut faire a ce propos; je dis que fi le royaume eft héréditaire, le prince y eft aufïï-bien tenu que feroit un héritier particulier par les regies de droit: & en cas femblables , fi le royaume eft déferé par teftament & autre qu'au prochain bgnager. Et ce cas il faut diftinguer, fil'héritier inftitué veut accepter I'état, en qualité d'héritier, ou renoncer a la fucceffion du teftateur, tk demander la couronne en vertu de coutume tk loi du pays : tk au premier cas le fucceffeur eft tenu des faits & promeffes ( 1) De quib. Cyv. Bar. Bal. Sali. in 1. digna. de legi. C. Jaf. in 1. j. de conftit. prin. li. Feli. in c. tranllato de conftitut. ( z ) Quia in fucceffione juris non veniunt obligione* defan£i:i. ca. lieer, de voto ext. Tome VI. 2  '354 Analyse des Historïens de fon prédéceffeur, comme feroit un héritier particulier : mais au fecond cas, il n'eft point tenu aux fairs de fon prédéceffeur, encore qu'il eut juré: car le ferment du prédéceffeur ne lie point le fncceffeur (i); mais le fucceff.ur eft tenu en (i) ce qui feroit tourné au profit du royaume. C'eft pourquoi le roi Louis XII, quand on lui demanda 1'artillerie qu'on avoit prêté a Charles VIII, fit réponfe qu'il n'étoit pas fon héritier. J'ai vu & lu de plus fraïche mémoire les lettres du roi Francois II, du 19 Janvier, l'an 1559, qui écrit ainfi aux feigneurs des ligues. Jacoit que nous ne foyons tenus aux paiemens de dettes faites par feu notre très-honoré feigneur & pere , pour ce que nous n'avons appréhendé cette couronne comme fon héritier : mais paria loi & coutume généralement obfervée en ce royaume , depuis la première inftitution d'icelui, laquelle ne nous ob!ige feulement qu'a 1'obfervation des traites faites & paffées par nos prédéceffeurs rois, avec les autres ( 1 ) Ut Innoc. in ca. veritatis de jure. (2) Bal. in titu. de pace Ccnftantise in verb. fuccelTori.m, & in 1. pen. de bonis quae liberis , C. & in c. j, princ. de vir. ext. in c. j. de prob. ubi d, 1, Affii. dec. 222, num. 7 , deci. 17, num, 5.  Sur les Ètats Généraux. 355' princes &z répubüques, pour le bien & ütïïitê de cette couronne. Toutefois defirant décharger la confcience de feu noftre dit fieur & pere, nous nous fommes réfolus d'acquitter celles qui fe trouveroient loyaument dues, &c. vous priant modérer les intéréts a la même raifon qu'ils ont cours en vos pays, & qu'ils font permis par vos loix, &c. Ce fut accepté par les Suiffes, & 1'intérêt qu'ils prenoient a: la raifon de feizepour cent, fut réduit a cinq pour cent: ce qui s'accorde a un (1) ancien arrêt donné l'an 1254, par lequel il fut dit," que le roi n'étoit pas tenu aux dettes de fes prédéceffeurs. Par quoi ceux-la s'abufent quï s'arrêtent aux propos tenus au couronnement des rois de France pour ce regard : car après que 1'archevêque de Reims a pofé la couronne fur la tête du roi, les douze pairs de France y prêtant la main, lui dit ces mots : arrêtex-vous ici, &C dès maintenant jouiffez de I'état, lequel jufqu'ici vous avez tenu par fucceffion paternelle , & maintenant comme au vrai héritier vous eft mis entre les mains de 1'autorité de Dieu tout-puiffant, & par ia tradition que nous évêques & autres ferviteurs de Dieu préfentement vous en faifons. ( 1) Au liv. Olim. fol. 105, lib. 3.  3Jê Analyse des Historienö Car il eft certain que le roi ne meurt jamais, comme Ton dit, ains fi-töt que 1'un eft décédé, le plus proche male de fon cóté eft faifi du royaume, & en poffeftion d'icelui auparavant qu'il foit couronne (1): Sc n'eft point déféré par fucceffion paternelle , mais bien en vertu de la loi du royaume. Si donc le prince fouverain a contratté en qualité de fouverain, pour chole qui touche I'état Sc au profit d'icelui, les fucceffeurs y font tenus: Sc beaucóup plus fi le traité s'eft fait du confentement des états, ou des villes & communautés principales, ou des pariemens, ou des princes, & plus grands feigneurs , or que le traité fut dommageable au public , attendu la foi Sc 1'obligation des fujets. Mais fi le prince a contracté avec Pétranger, ou bien avec! le fujet pour chofe qui touche le public, fans le confentement de ceux que j'ai dit, fi le contrat porte grand préjudice au public (i) , le fucceffeur en I'état n'y eft aucunement tenu : Sc beaucoup moins s'il y vient par droit d'élection. ( i ) Jugé par arrêt du 16 avril 468. (2) Cynus & dd. in 1. ligna vox. de conflit. princ. C. & Bal. in c. j. de natu. feud. tradunt, fi magnum e,ft detrimentum non teneri.  sur les États Généraux. 357 auquel cas on ne peut (1) dire qu'il tienne rien du prédéceffeur, comme il feroit s'il avoit I'état par réfignation (z) : mais fi les ac~r.es de fon prédéceffeur ont tourné au profit public, toujours le fucceffeur (3) y eft tenu , quelque qualité qu'il prenne , autrement il feroit permis de tirer profit au dommage d'autrui , par fraudes & voies indireöes, &c la rèpublique pourroit périr au befoin, que perfonne n'y voudroit mettre la main, contre 1'équité & raifon (4) naturelle. Et par ainfi les arréts du parlement, qui font au livre intitulé Olim, donnés l'an 1256 & 1284, par lefquels il fut dit que le roi ne feroit point tenu des obligations de fon prédéceffeur, ont été déclarés , comme j'ai dit, par plufieurs autres donnés en. cas femblable : &c néanmoins 1'opinion de ( 1) Arg. fi quis domum locati. ff. ( 2 ) Arg. d. difeclo de prebent. Bal. in 1» uit. de tranfaft. C. ( 3 ) Not. in c. j. tit. qui fucceiTor. tene, &c. uit. ne prselati viresj & in c. abbate , fanè de re judic. Jafo. late in 1. i, col. 3 , de confti. princ. canon, liceat. 12, q. 2, &c, quia juxta 6, q. 1. & glof. ibi. Bal. in titu. de pa. Conft. veib. fuccefforum, text. in c. 1, de prob. ( 4 ) L. nam hoe aatura, de condi, in dedeb. ff. Z 3  35S Analyse des Historiens Balde (i) a été ainfi reprouvée, qui veut qu'on öte I'état au prince fouverain, s'il ne met k exécution le teftament de fon prédéceffeur, fans faire les diftinflions que nous avons pofées. Mais , dira quelqu'un , pourquoi fautil difiinguer, puifque tous princes font fujets a garder le droit des gens ? Or les conventions, Sc dernieres volontés en dépendent (i): je dis néanmoins que ces diftinöions y font néceffaires : car le prince n'eft pas plus obligé au droit des gens, qu'a fes propres édits: & fi le droit des gens eft inique, le prince y peut déroger par fes édits en fon royaume, & défendre (3) a fes fujets d'en ufer: comme il s'eft fait du droit des efclaves en ce royaume» jacoit qu'il fut commun k tous peuples, & le peut faire auffi ès autres chofes femblables, pourvu qu'il ne faffe rien contre la loi de Dieu. Car , fi la juftice eft la fin de la loi, la loi oeuvre du prince, le prince, eft image de Dieu; il faut, par même fuite de la raifon, que la loi du prince foit faite au modele de la loi de Dieu. ( 1 ) In procemio decret. ( 2) L, ex hoe jure , de juftitia. ( 3 ) Joan. And. in ca. uit. de immunitate ecclelV  srn LES ÉTATS GÉNÉRAUX. 3|9 E R K E ü R De ceux qui penfent que le Royaume foit tombé en éleclion- (Liv. VI, chap. V. Bodin.) A VANT-PROP OS», N ou s le répétons encore ; nous n'adoptonsaucun fyftême,& nous avons cru devoir inférer ce chapitre , afin de prouver notre impartialité. Plufieurs Hiftoriens ont donnetant de pouvoir a la nation , qu'ils ont affuré qu'elle élifoit fes rois. Sans prétendte réfuter cette opinion confolante & flatteufe, nous inférons ici 1'opinion de Bodin , & nous prion* nos Leaeurs de ne point oubüer que nous recueilions toutes les matieres importantes qui reraoliffent ordinairement les féances des Etats. généraux ; nous préfentons ces faitsqui fervent de bafe a 1'autorité , & a la nation , qui affurent les droits de Tune & la puiffance de 1'autre. Ce n'eft pas affez de dire que la monarchier loyale & légitime eft meiileure que la démc- Z 4  $6o Analyse des Historiens cratie ou ariftocratie, fi on nedit monarchie devolue par droit fucceflif au male le plus proche du nom, & hors partage; car combien que la monarchie légitime foit toujours preferable aux autres républiques , fi .eft-ce qu'entre les monarchies , celle qui vient r>ar droit fucceflif aux males du „om , pJUS proche & hors partage, eft beaucoup plus louable & plus süre que les autres qui viennent par fort ou par choix, ou bien au male qui n'eft pas le plus proche , ou qui eft le plus proche de 1'etoc paternel , mais qui doit partage a fes co-héritiers de toute la monarchie, oude partie d'icelle; ce qui eft befoin d'éclaircir par raiions néceflkires , & par exemple , pour lever 1'opinion que plufieurs imprimem aux fujets d'autrui, &parcemoyen entretiennent les rebelhons pour changer les monarchies bien ordonnées , & remuer ciel & terre. Et tout cela fe fait fous le voile de vertu , de piété & de juftice. Et mêm.eil s'en trouve qui ofent publier hvres , & foutenir contre leur prince naturel è la couronne par légitime fucceftion que Ie droit de choix eft meilleur en la monarchie : ö que la monarchie eft heureufe oii les états du peuple font choix d'un roi jufte & droiturier, qui craint D-eu fur-tout qui honore la vertu ] qui fait prix des bons,'  SUR LES ÉTATS GÉNÉRAUX. 361 "qui chatie les vices , qui décerne le droit loyer aux gens de bien, & la peine aux mcchans, quia les flatteursen horreur , quirient fa foi & fes promefl'es , qui banmt les fangfues de cour & les inventeurs des nouvelles exaftions , qui épargne le fang de fes fujets comme le fien, qui venge les injures d'autrui &C pardonne les liennes ; &£ qui , fur-tout, a la religion d'honneur devant les yeux. Ayant mis ces louanges au coatre-poids d'une tyrannie comblée de tous vices , foudain la populace fe met en 1'efprit qu'il n'y a rien plus heureux que la monarchie qui tombe en éiection. En toutes monarchies électives , il y a un danger qui advient toujours , c'eft qu'après la mort du roi , I'état demeure en pure anarchie , fans roi , fans feigneur , faris gouvernement , & au hafard de fa ruine , comme le navire fans patron , qui doit fon naufrage au premier vent; & cependant les voleurs &i meurtriers affaffinent comme il leur plaït, avec efpérance d'impunité. Aunt liforii-nous .que , pendant les éleöions des fultans d'Egypte , le pauvre peuple & les meil eures villes de tout le pays étoient faccagées par les Mamelucs : fi on dit que cependant on établira un gouverneur , je dis  Analyse des Histortens qu'il n'y aura pas moins de difficulté qu'a faire un roi. Mais pofons le cas qu'il fe faffe fans ccntredit , fans afftmbler les états , auxquels appartient de nommer le gouverneur ; qui fera garant de fa foi ? qui 1'emj.éth' ra ri'emahir Pétat 1'ayant en fa puiffance ? qui eft ce qui le défarmera s'il ne veut ? On a vu comme .s'y porta Guftave , pere de Kan , de Suède , qui , de gouverneur , fe fit roi fans attendre 1'éleclion. Et fi on laifTe le gouvernement au fénat, comme il fe fait en Pologne, Sc fe faifoit en Rome anciennement , le darger n'eft pas moindre que cependant les plus forts ne s emparent des fortereffes. Quant aux guerres des Romains Sc puis des Allemands advenus pour les éleöions des empereurs , toutes leurs hiftoires ne font pleines d'autre chofe , oü chacun peut voirle piteux fpeöacle des villes faccagées , des provinces pillées Sc fourragées des uns ou des autres. Encore y a-t-il un autre inconvénient, c'eft que le plus beau domaine pub'ic eft tourné en particulier , comme il s'eft fait du domaine faint-Pierre Sc de 1'empire d"A!Iemagne; car les princes éliis, fcachant bien qu'ils ne peuvent laiffer I'état a leurs enfans , font leur profit du public par venditions Sc donations : comme Raoul , 1'empereur exempfa de 1'empire toutes les villes de la-  'sur les États G é nér aux. 36*3 Tofcane a prix d'argent : Robert , aafiï empereur , donna trois villes impériales è fon fils: Henri j>r occupa la Saxe : Frédérick 11 affranchit Nuremberg ; Othon III affranehit Ii'ne ; Louis de Baviere fit le femblable a la ville 'd'Egra ; Henri V vendit tout ce qu'il put, & Charles III, ne pouvant payer cent mille écus qu'il avoit promis a chacun des électeurs, leur vendit tous les tributs de 1'empire pour faire élire fon fils empereur, comme il fut, & tot après débouté par ceux la même qui 1'avoient élu. Ayant auffi coupé les plus forts nerfs de la rèpublique , tout le corps de 1'empire refta fi foible, que Cbarks, duc de Bourgogne, fit la guerre aux princes d'Allemagne. Enccre y a-t-il un point qui eft bien a pefer , c'eft qu'un homme de bas lieu , monté foudain au plus haut degré d'honneur , penfe être quelque dieu en terre. Et d'autre part , 1'amour eft fi ardent du pere au fils , que le pere renverfera plutöt ciel & terre , s'il a puiffance qu'il ne laiffe la couronne a fon fils. Toutefois ce ne font pas les plus grands inconvéniens ; car il fautpar néceffité choifir un prince étranger, ou qui foit du pays; &C néanmoins fi la monarchie tombe en choix , chacun y voudra afpirer ; & entre plufieurs égaux , il eft impoiubie qu'il n'y ait, de grandes  364 Analyse des Historiens faöions qui diviferont les fujets, 8c tes feront partifans : & ores qu'iis ne fo'ent égaux en vertu ni en biens, fi eft-ce qu'ils préfumeront etre égaux , 8c ne voudront point obéir 1'un a 1'autre. Si le prince étranger accepte I'état, s'il lui en vient un plus grand , Ül fera contraint de laiffer le premier , comme fit Louis roi de Hongrie, lequel étant auffi élu roi de Pologne,s'en retournaaufii-töt en Hongrie , laiffant un lieutenant : comme la raifon veut que chacun foit plus foigneux des fiens que des étrangers: non pas qu'il fut débouté du royaume , comme on a voulu faire contre tout droit 6c raifon depuis peu de jours: jacoit qu'il n'y eut ni claufe ni condition qui dit rien de 1'abfence : & que les états de Pologne ont tranfporté tout le droit royal en celui qu'ils avoient élu, & qu'ils ne peuvent révoquer , attendu qu'il n'y a contravention quelconque au traité , auquel on ne peut oppofer condition , non plus qu'a la donation parfaite & confommée : joint auffi que les empereurs de Rome 8: puis d'AHemagne , élus en la même forme que ceux de Pologne, ont gouverné fort long-tems les empires par lieutenans : ou bien fi le prince étranger retient 1'un ou 1'autre état, ce qu'il ne peut faire aifément s'il n'eft proche voifin ; qui doute qu'il ne faffe un  sur les États GiNÊRA'u^: foyaume des deux s'il peut, ou qu'il ne falie d'une principautéAriftocratique une droite monarchie ? Nous en avons un exemple de Charles V, empereur, qui avoit changé 1'ariftocratie des Allemands en un royaume, 8c avoit fait venir Philippe fon fils jufques en Allemagne, pour le faire roi des Allemands, fi le roi de France n'eüt rompu fes deffeins. Et fi le prince étranger ne peut unir I'état d'autrui au fien, fi en fera-t-il une métairie du fien tant qu'il vivra, & en tirera tout le profit qu'il pourra pour fervir au fien; ou fera confentir les grands feigneurs qu'il tiendra en fa puiffance , de choifir celui qu'il aura nommé , 6c auquel il portera faveur. Le royaume venant par droit fucceflif, comme a toujours été le royaume d'Angleterre, tombe en choix quand il n'y a proche parent, ni du cöté paternel, ni du cöté maternel ; 8c de dire que les rois de France étoient éledtifs, 6c que le royaume tomboit en choix anciennement: cela a été fait fous la lignée des Mérovingues, ou des Carlingues, ou des Capets. Quant a la première ligne, Agathius, auteur Grec 8c fans reproche, qui a écrit l'an 500, dit que les Franques ayant choifi la meilleure forme de rèpublique qu'il eft poffible, &_en cela ayant furpaffé tous leurs voifins,  $66 Analyse des Historiêns n'ont point d'autres rois que par droit fucr ceffif. Et le même auteur, en un autre lieu , dit que Théodobert, fils de Dietrich ou Théodoric , & petit- fils de'Clovis , quoiqu'il fut encore ibus le gouvernement d'un pédagogue, fut appellé a la couronne, fuivant la loi & coutume du pays. Nous avons un autre auteur fort ancien, a fcavoir Cédrenus, qui a écrit l'an 1058 du tems de Philippe Ier, roi de France , qui dit auffi que les Franques n'ont point d'autres rois que par droit fucceflif, fuivant leur ancienne coutume. En quoi il montre 'cjue les trois lignes des rois de France ont ufé du droit fucceflif. Et s'il eft advenu que Charles & Carloman, enfans de Pepin , fe foient fait élire par la nobleffe, comme ils furent (1), ce n'a été que pour affurer leur état, & clcrre la bouche a ceux qui étoient de la maifon de Mérouée : comme en cas pareil ont fait quelquefois ceux de la maifon de Capet, qui avoit débouté ceux de la maifon de Charlemagne ; & même Odet f e fit élire par les barons en 1'abfence de Charles, fils de Louis-le-Begue,l'an 1388, &: quelque temsaprès, a fcavoir l'an 1415 ,Raoul, fils du duc de Bourgogne, fe fit auffi élire pour en débouter Charles-le-Simple , auquel Hebert, comte de Vermandois, avoit arraché une réfi- cette caufe, le conful Fabius fit defcendre fon pere de cheval pour lui faire honneur comme au conful en public , qu'il pouvoit néanmoins en fa maifon faire mourir, en vertu de la puiffance paternelle. Si la Royne demeure fans 1) L. nam quod attiriet. ad Trebe!,  Analyse des Historiens rnari, qui eft le cas de la vraie gynécocratie J I'état eft expofé au danger des étrangers ou des fu.ets: car li le peuple eft généreux & de bon cceur , il portera impatiemment que la femme commande. Or il n'y a rien qui foit plus dangereux en une rèpublique que le mépris de la majefté, de laquelle dépendla confervation des loix & de I'état, qui feront foulés aux pieds a caufe de la femme , contre laquelle il n'y aura jamais faute de moqueries, de contumélies, de libelles diffamatoires, & puis de rebeliions & guerres civiles. Et s'il lui advient de porter Ia moindre faveur a quelqu'un des fujets , on en fera toujours ftniftre jugement : car même les plus fages &c pudiques ont bien a faire a fe garantir des faux bruits : beaucoup moins pourra la princeffe fouveraine couvrir fes faveurs , non plus qu'un brandon fur une haute guette , qui fera caufe d'erhbrafer le feu de jaloufie entre les fujets & ks armer les uns contre les autres. Si les fujets font fi laches, qu'ils fouffrent par force : ou autrement la gynécocratie en I'état fouverain , il ne faut . pas douter que chacun des fujets ne foit auffi contraint de la fouffrir en fa maifon : car c'eft une regie politique, que ce qui eft trouvé bon &t fouffert en public, fera toujours tiré en conféque/ice en particulier.. Or tout ainfi que ia familie eft renverfée ou la femme commaadc  Sur les Êtats fcÉNêR Atr*. "jSjf öu mari, attendu que le chef de familie per# fa qualité pour devenir efclave : auffi la rèpublique , a parler proprement, perd fon nom oü la femme tient la fouveraineté, pour fagë qu'elle foit : & li elle eft impudique, qu'ert doit-on efpérer? Bref, il ne le trouve peuple fi efféminé, qui ait approuvé la gynécocratie-, jufques a ce que Ia ligne des Normands rois dfc Naples fut faillie en Conftance femme de Henri t & depuis encores en Jolande, fille de Jean dè Brienne, qui époufa Frédéric II, empereur auquel Manfroy fon batard ayant fuccédé , & marié fa fille Conftance en la maifon d'Arragon, alluma le feu des guerres, qui ont continué deux eens ans entre les maifons d'Anjou Sc d'Arragon, pour avoir donné entrée aux filles en Ia fucceffion du royaume de Naples. Mais depuis qu'on eut appercu tant de fcandales & guerres advenues pour ce royaume la entre les princes chrétiens, il fut arrêté au collége des cardinaux, que dès-lors en avant le royaume de Naples ne tomberoit plus en quenoudle : & en 1'inveftiture faite a Alphons , roi d'Arragon, l'an 1345 , & aFerdinand^roi d'Arragon , l'an 1448; en novembre, il ^ft expreffément porté, que les filles ne fuccéderont point au royaume de Naples tant qu'il y auroit males en ligne direöe ou collatérale jufques au quatrieme degré inclufivement: mais 1'ouverture  384 Analyse des Historie ns- étant faite en Italië a la fucceffion des filles, fut depuis pratiquée ès foyaumes de Hongrie 8c de Pologne, qui échurent a Marie & Hédwige, filles de Louis, roi de Hongrie ck de Pologne, ce qui jamais n'avoit été vu. Et quafi en même tems Marie Volmar fuccéda aux royaumes de Norvege , Suéde & Dannemarch, contre les loix & coutumes anciennes du pays: & le même exemple fut fuivi au royaume de Caftille, auquel fuccéda Ifabelle de Caftille, ayant gaigné les plus grands : & combien qu'elle fut des plus fages princeffes qui fut onques, fi eft-ce que les états du pays en firent plainte : & fur ce qu'on allégua qu'auparavant Socine, fille d'AIphons, avoit apporté le royaume de Caftille a Sillon fon mari, fi eft - ce qu'il fut repliqué par les états, que Cela s'étoit fait par force , & que dès-lors, les états de Caftille avoient protefté que c'étoit contre les loix du pays : ce qui fit hater le mariage de Ferdina d & d'Ifabelle , pour tenir le peuple en bride. Et combien que Henri , roi de Caftille , eut déclaré par fon teftament, que le royaume appartenoit a Louis IX, roi de France , a caufe dè fa mêre Blanche de Caftille, & que les barons de Caftille avoient écrit au roi de France qu'il vint prendrë poffeffion du royaume , fi. eft - ce que jamais il n'ofa entreprendre de- querellef  SUR LES ÊTATS GÉNÉRAUX. 38$ quereller le royaume, quoiqu'il eut le con-; fentement des feigneurs du pays en lettres fcel-; lees qui font encore au tréfor de France. Nous trouvons auffi que par force & finefTe , Ferdinand, fils de Léonor, fe fit adjuger le royaume d'Arragon: comme en cas femblable fit le comte de Barcelone, ayant époufé Perrine, fille du roi d'Arragon : ce qui fut fait auffi au royaume de Navarre, auquel fuccéda Henri le Large," cornte de Champaigne,a caufe de fa femme,' & depuis , Philippe-le-Bel, roi de France , k caufe de Jeanne de Navarre : & depuis il eft tombé ès maifons d'Evreux , de Foix, d'Albret, de Vendöme : de forte que ce royaume la en moins de trois eens ans a été tranfporté en fix maifons étrangeres. Quant au royaume d'Angleterre, nous trouvons bien au tems de Domitian (1), qu'il tomba en quenouille, Sc que les Anglois ne faifoient point de difference entre les males & les filles pour la fucceffion du royaume : fi eft - ce qu'il y avoit plus de quinze eens ans que cela ne s'étoit fait, quand Marie fuccéda a fon frere Edouard VI, non plus qu'au royaume d'Ecoffe, auquel fuccéda Marie Stuart : car il ne fe trouve pas de cent & cinq rois qu'ils ont en leurs hiftoires ( 1 ) Tacitus in vita agricolse. Tome FI. B ij  ^86 Analyse bes Historie-ns qu'unc feule fille ait fuccédé a la couronne. Or combien que les élecïj ons des monarques foient dargtrcufes, pour les raifons qwe nous avons dédukes ci-deflus: fi eft-ce toutefois qu'elles font plus tolérables , venant de ügnes de males ■a défailhr, que voir le royaume tomber en que* nouille, paree qu'il faut fouffrir une pure gyhécocratie contre les loix de nature : fi la princeffe béritiere fe marie ( ce qui eft néceffaire pour avoir un fucceffeur affuré), le mari fera fujet ou étranger. Quant au fujet, la princeffe penferoit fe faire grand déshonneur d'époufer fon ferviteur, vu même que les princes fouverains font gaande difficulté d'époufer une fujette: jomt auffi la jaloufie qui eft a craindre, fi elle époufe celui qu'elle aimera , laiffant les plus nobles & plus grar-d. fi>g leurs, qui mépriferont toujours.ceux qui font de bas lieu. Et peut-être que celui qui fera nommé n'en tiendra compte. Tous ces inconvéniens & abfurdités fuivent ïa Oy écocratie , qui a pris fon origine pour avoir ptrnii} au* femmes la fucceffion des fiefs, les males défaillans en ligne directe & cqlJatéra'e; pms quand on eut gagné ce point, ©n obtft qu'elles fuccédero-e: t aux fiefs en ligne direfte, & fèroitnt préférées aux males col'até aux , & peu a peu la permifiion fut entendue aux dignués, comtés, marquifats,  sur les Ètats Généraux. 30*7? 'duchés, principautés, &£" puis aux royaumes : jacoit que parJeS' loix des fiefs les femmes fuffent déboutées des fucCeflions féodales ,'encore qu'il n'y 'eut male , fut en ligne diretfe oü collaterale, s'il n'étoit fpécialement (1) convenu par 1'inveititure: mais la loi falique le tranche tout court, & défend expreflement que la femme puiffe fuccéder aucunement aux: fiefs, de quelque nature qu'ils foient, qui n'eft point une loi feinte, comme plufieurs penfent ; car elle fe trouve ès plus vieilles &' anciennesloix des Saliens ès vieux livres écrits a la main fous le chap. d'Allode ; & au chap. 1 de matrimonio ad morganaticam, & au tréfor de Francé en ces termes de mot a mot: de terra vero SALICA NULLA PORTIO HjEREDITATIS MULIEREVENIAT, SED AD VtRILEM SEXUM TOTA TERRyES HjEreditas perveniat. Et au décret du rot Childebert inféré entre les loix faliques , oü it eft ordonné que repréfentation auroit lieu en ligne directe, il n'y a que les males appellês. Et pour néant le parlement des pairs de France eut donné fon arrêt entre Philippe de Valois §2 ( 1 ) Cajpola in traft. de imp. milit. elig. ix , oppof.' Raymi. in d. traEh nobi. q. c. Fel, in c. fuper eo de teftib. Platea in 1. i, col. I , de dignit. 3 , ca. §. füue de fucceiï. feud. c. 1, quid fit inveft. Bb a  3§8 Analyse des Historiens k roi d'Angleterre Edouard IV, par lequel il tut dit qu'il ne fe pourroit aider d'autre loi ni coutume que de la loi falique , s'il n'y eut point eu de loi falique. Et combien que après la mort de Louis Hutin, roi, Odet , duc de Bourgogne, fut d'avis que Jeanne, fille de Hutin, dtvoit fuccéder a la couronne, ft eft-ce qu'il fut réfolu par ks états affemblés en la ville dc Paris que les filles ne fuccéderoient a la couronne, comme nous lifons eal'hiftoirede Nangis. Et même (i) Balde, auparavant Philippe de Valois, appelle la coutume de fucccéder a la couronne de male en male , jus gentium gallorum. Mais encore il n'y avoit jamais eu peuple fi lache, qui endurat fous le voile de la fucceffion féodale , que ks femmes empiétaffent'a fouveraineté, &c moins encore en Afie & en Afrique qu'en Europe: quoique ce foit, la France, Dieu merci, s'en eft toujours garantie; car la loi falique, que M. le Cirier, confeilkr en parlement, dit avoir été faite avec grande quantité de fel de fageffe , ne fut pas feulement ajléguée & pratiquée fous Philippe & Charles le Bel, defquels les filles ne prétendirent rien ( i ) In cap. fignif canit. de refcriptis , & in 1. li plures de condit. infertis , C. & in 1. exhocjure, de juftitia, ff. & in authent. hoe amplius de fideicommifli. C. & in authent. habita. ne filius pro patre. C. apertius  SUR LES ÉTATS GÉNÉRAUX. fg§ au royaume, ains auffi fous Clotaire, Sigebert & Childebert, qui furent préférés aux filles des rois, qui ne querellerent onques la couronne. C'eft pourquoi (i) Balde parlant de la maifon de Bourbon, tient que le male de même nom au millieme dégré de confanguinité , fuo céderoit plutöt a la couronne, qu'une fille fut admife, ce qui ne doit pas feulement avoir lieu ès royaumes, ains auffi ès duchés & principautés, qui ont les marqués de fouveraineté. Et de fait la loi falique a été pratiquée en la maifon de Savoye ; car Pierre de Savoye fit débouter fa niece Conftance de la fucceffion de Savoye , par fentence des arbitres accocdés l'an 1256 , combien qu'a la vérité c'eft tout un que les femmes commandent en fouveraineté , ou bien que les Princes fouverains obénTent aux femmes, comme difoit Caton 1'ainé après (2.) Ariftote. etiam in 1. 1, de fenatoribus , ubi controverfiam, Vilefiacam Edouardo III, narrat. ( 1 ) Bald. in 1. centum unde legitimi. C. ( 2 ) Arift.. lib. 4, c. 6 , polliticon. Bb j  390 Analyse des Historiën-s I M P O T S Ne peuvent être mis fans le confentement du peuple. (Extrait du Livre VI, de Bodin.) Il s'agit trouver trois natures de deniers leve's fur les fujets , les uns extraordinaires , les autres ordinairès, & la troifieme forte , qui tlënt de 1'un & de 1'autre , qu'on appelle deniers cafuels , fous lefquelles efpeces font compris tant les deniers qui viennent des jurifdicfióhs , fcel, monnoyes, poids & mefures, que pareill'ement ceux qui font pris fur les chofes vendues, de quelque nature qu'elles foyent, ou fur les dóns, %s , & ïucceffipns échues, ou fur la vente' des offices; ou par forme de taille, foit k caufe des perfonnes fimplement, qu'on appelle capitation , foit k caufe des biens meubles , ou immeubles , & des fruits qui viennent deffus ou dedans la terre , comme tous minéraux & tréfors : foit pour les pprts & paffages , ou de quelque autre impofition qu'on puiffe imaginer: car combien qu'elle füt fale'& orde, fi qft-ce  SV r LES ÊTATS général- 19* fflue les princes exaöeurs la trouveront toujours de'bonne odeur, comme difoit Vefpafien; defquelles chargés & impofmons les plu* anciennes font réputées domaines, comme 1 mrpofition foraine : les autres ordinaires , comme la taille ;• les dernieres , font extraorctmajres ? que les Êatins appeloient temerarium tnluiumz comme font les iubfidesfur les viUes tra. cnes& perfonnes pnviféglées , decimes , dons charitatifs & gratuits équipollens a deames qu* font levé, par commiffion. Et a parler propre ment, la taille , le taiilon , les aides, l\qmvalenf, Tot-trof, les crues, la gabelle étoient vrais fubfides, ÖCdeniers exfraordmaires jft vaat Louis IX, qui le premier le va la- taille, comme le préfident le Nfa.ftre a remarqué , maïs il na pas dit* que c'étoit par forme de ftfltye neceffaire pendant la guerre ; & qu'il n en üt onques recepte Ordinaire : ains au contraire s'adreffant t Philippe fon fiïs ame 8r fuccefleur dit ces paroles dans fon teframent, qui (e tróuwe* encore au tréfor de France , &r eft ^rtgrfrre en la chambre des comptes : SOTS devot ^ fervice de Dieu : ayes le cceurpiteux Sc cï&ritable aux panvres « & les conforte de tes menfaits : garde les bonnes loix de ton royaume " ne prends.tailles.,.ni aides de tes fujets, ü urgente néceffité & évidente utihté ne te le-faifc & B b 4  39* Analyse des Historiens faire , & pour jufte caufe, & non pas volontairement: fi tu fais autrement, tu ne feras pas repute roi, mais tyran, &c. Je laiffe les autres claufes du teftament. On dira, que le roi Clotaire exigeala tiercé partie des rentes&revenus des églifes, & Chilperic la huitiemepartie du vin du cru de chacun (9) : & peut-être que limpot de l'huitlieme du vin eft venu , & que Louis le jeune prit pour quatre ans la vingtieme partie du revenu de fon peuple l'an 1167, toutefois il eft bien certain que cela ne fut qu'un fubfide extraordinaire : non plus que la maletote de Charles VI, car même il fut attefté aux etats de ce royaume , le roi Philippe de Valois Préfent, l'an ,338, qu'il ne fe leveroit aucun impot fur le peuple, fans fon confentement, & de fait au lieu de trois millions quatre-centmille francs que le roi Louis XI levoit 1'année qu'il mourut outre le domaine , les députés des tro.s états tenus a Tours offrirent au roi Par forme de don pour deux ans feulement iemblable ottroi que levoit Charles VII &pour fon avenement trois cents mille livres pour une fois feulement, laquelle fomme feroit égalée fur les trois états, & fans tirer k conféquence , vl2 Gre2°r' Tur°neof"lib' 9'c'30 > & A^moa-  '&UR LES ÉTATS GÉNÉRAUX. 39$ ©u que 1'on put appeller ledit ottroi taille 011 impöt. Ce qui a toujours etc, 6c eft encore bien gardé en Efpagne , Angleterre, &C Allemagne; & fut. remonrre aux états tenus k Tours fous Charles Vïïï par Philippe (1) de Comir.es, qu'il n'y avoit prince qui eut puitfance de lever impöt fur les fujets, ni prefcrire ce droit, finon de leur confentement. Encore voit-on ès commiffions décernées pour les aides, tailles 8c autres impöts, que le roi employé la proteftation ancienne de les öter, fi tot que la néceffité le permettra. Et combien que Philippe le Long fut le premier qui mit un doublé pour livre fur Ie fel vendu, fi eft-ce qu'il protefta dès lors en décharger fes fujets : & depuis Philippe de Valois déclara par lettres patentes de l'an 13 z8 qu'il ne vouloit, & n'entendoit que le droit de gabelle , qui étoit alors de quatre deniers fur livre, fut incorporé au domaine : combien qu'il femble qu'il n'y ait impöt plus facile a porter , étant égal a tous fujets , ÖC d'une chofe qui eft aucunement publique- ( 1 ) En fes mémoires, necunquam jusillud prasferibi poteft. c. nullus. I. q. 1.  394 Analyse des Históriens D E quelle maniere les fuffrages peuvent' être reais & comptés légakmeht aux Etats Généraux , & prépondérance du Tiers. Etat: utdité des Etats Provinciaux. (Extrait du Livre III, de Bddin.) En toutes communautés, quand il eft queftion de ce qui eft commun a tous en particulier & diviiémem, le confentement expres d'un chacun y eft requis (i) ; mais s'il eft queftion de ce qui eft commun a tous par individu 9 & conjointfment il fuffit que la plupart foit d'une opinion pour obliger le furplus r pourvu qu'il ne foit rien ordonné contre les ftatuts du* collége établi par ie fouverain, ou bien parle fondateur du corps & collége autorifé par le fouverain : demeurant donc ie ordonnancesde la rèpublique, & les ftatuts en.leur entier. Le collége peut faire ordonnance qui ob'ige la moindre part'e en nom colköif, & tous les colléges en particulier (2.), pourvu que les ( 1 ) Ca. dile&.i de exceffib. praelal. 1. per fundurn. ruft. prsed. & reügiolum de rerum divif. in inftit,. (2) L. 3 Sc 4, quod cujufque univarfi.:ato  SÜR LES ÉTATS GÉNÉRAUX. 39 deux tiers aient affifté a 1'affemblée , or qu'ils n'aient pas été tous d'un avis, ès chofes qui concernent la communauté ; mais la plupart de tous affemblés en corps ne font point tenus aleurs ftatuts, & beaucoup moins tout le collége, non plus que le prince a fa loi (1), ou le teftateur a fon teftament (2), ou les particuliers k leurs conventions (3 ), defquels ils fe peuvent départir d'un commun confentement, & fuffit des deux tiers du collége pour caffer 1'ordonnance faite de tout le collége (4) : ce qui eft général k toutes fortes de communautés, état, corps ou colléges, s'il n'eft queftion que de chofes communes a tous en nom colleclif; mais files états font affemblés de plufieurs corps, comme les états de 1'empire & de toutes les républiques compofés des trois ordres, k fijavoir de 1'ordre eccléfiaftique, de la nobleffe & du peuple, les deux ne peuvent rien faire au préjudice du tiers : comme Bodin député par le tiers état de France k Blois, remontra aux deux ( 1 ) L. princeps de legib. b a Titio. §. nulla de ver^ obligat. (2 ) L. ü quis in principio de lega. 1. ( 3 ) L. ab emptione de paétis, (4) Innocent in c. humüius. de majoritate. Lud, Roman, in tit. dearbitris, col. 15.  396 Analyse des Historiens ordres, que c'étoit chofe pernicieufë è I'état de ce royaume, de nommer trente-fix juges pour afffter au jugement des cahiers des états, pour beaucoup de raifons nécefTaires par lui difcourues; mais vcyant que 1'archevêque de Lyon préfident de I'état eccléfiaftique mit en avant que 1'égüfe & la nobleffe 1'avoient ainfi réfolu, Bodin remontra qu'on avoit de toute ancienneté gardé telle prérogative a chacun des trois états, que les deux ne pouvoient rien attefterau préjudice du tiers, & que cela avoit paffé fans difficulfé aux états d'Orléans, & même qu'il é'.oit ainfi pratiqué aux états de 1'Empire, d'Angleterre & d'Efpagne, & pour cette caufe fupplia les deux ordres de prendre de bonne part s'il l'empêchoit comme ayant charge du tiers état. Qui fut caufe que la chofe étant mife de rechef en délibération , 1'ordre eccléfiaftique la nobleffe changerent d'avis, & ce jour li le roi dit en préfence de Razé, évêque d'Angers & d'autres feigneurs, que Bodin avoit manié les états a fon plaifir. Mais s'il étoit queftion d'une chofe commune a tout le corps ou collége , & qui ne portat ccupaux autres membres entiers du corps univertel, la plupart en peut décider a fa difcrétion, or que toute la communauté eut ordonné que les ftatuts ne fuffent caffés, fi tous les collégues n'étoient de eet avis;  «UR les êtats GenÉR atjxï! tff *ar toujours la plupart de la communauté eft réputée pour le tout, même la loi a voulu que celui qui fera élu du collége ou de la communauté pour traiter & décider les affaires communes, puiffe obliger un chacun du collége. En quoi s'abufent ceux-la qui ont écrit que les deux tiers du collége ne peuvent rien faire (i), fi le collége a fait ftatut que tous y confentent ï car fi cela avoit lieu, un feul pourroit empêcher en ce cas les avis, arrêts & délibérations de toute la communauté, qui eft contre la difpofttion formelle de la loi (z), qui veut que la plupart en tous atles, concernant la communauté foit la plus forte, & que la plupart des deux tiers puiffe donner loi a tous en partiticulier ( 3 ) , foit qu'ils aient été prélens ou arffens, & même ès chofes légéres il n'eft befoin que tous foient préfens, pourvu que tous foient appellês (4). La jufte royauté n'a point de fon- ( 1 ) Pan. ita fcribit in c. conftitutus de appel. gl. in ca. fi cui. de elect.. lib. 6. ( 2 ) L. quod major, ad municipal. 1-3,1. nominatim. de decu. C. 1. ubi de tutor. 1. 3 , de decretis. ( 3 ) L. 3 , 1. 4,1. item. quod cujufque univerfit. Bar. Angel. Caftrenf. ibi. Ant. Pano. in c. paftoralis. de refcrip. §. 1, 1. 2, de praediis curialium. (4) Ca. fi ad ea de conceff. prabenda; ca. quod  398 Analyse'des Historiens dement plus afsüré que les états du peuple J corps & colléges: car s'il eft befoin lever deniers affembler des f:rces , maintenir 1 état contre les ennemis, cela ne fe peut faire que par les états du peuple Sc de chacune province, ville & communauté. Auffi voit-on que ceux-la mêmes qui veulent abolir les états des fujets, n'ont autre recours en leur néceffité , finon aux états Sc communautés, lefquels étant unis enfemble, fe fortifient pour la tuition Sc défenfe de leurs princes : Sc mêmement aux états-généraux de tous les fujets, quand le prince eft préfent, laon communiqué des affaires touchant le corps univerfel de la rèpublique Si des membres d'icelle: la font ouies Sc entendues les juftes plaintes Sc doléances des pauvres fujets , qui jamais autrement ne viennent aux oreilles des. princes : la font découverts les larcins, concuffions Sc voleries qn'on fait fous les noms des princes qui n'en fcavent rien. Mais il eft incroyable'combien les fujets" font aifes de voir leur rof préfider en leurs états : combien ils font fiers d'être vus de lui : & s'il oit leürs plaintes, Sc recoit leurs requêtes, ores que bien fouvent ils en foient déboutés , li font-ils bien glorieus d'avoir ficut de elect. Panor. in cap. bone eo Felin. in ca, cum, omnes de conft. i  §ÜR LES'-ÊTATS GÉNÉRAUX. 399 eüaccèsa leur prince: ce qui eft mieux gardé •en Efpagne qu'en' lieu du monde , oü les états par ci-devarit étoient tenus -de deux ou trois ans 1'un : tk en A-gltterre auffi, paree que le peuple ne baiile point de taille, ff les états ne font affemblés. Toutefois il y en a qui fe font efforcés par tous moyens,de-changer les états particuliers de Bretagne, Normandie,Bourgogne tk Languedoc, Dauphiné, Provence, enéIe£Hons,difant -que les états ne fe font qu'a la foule du peuple : mais ils méritent la réponfe que fait Philippe de Commines a ceux qui difoient que c'étoit crime de leze-majefté d'affembler les états. Je ne veux pas nier qu'il n'y ait de 1'abus '& des larci'ns,-' qui ont été bien averés par les extraits des états de Bretagne, l'an 1566. Je fai bien auffi que les penfions des états de Languedoc revenoient a plus de vingt-cinq mille francs, fans les frais des états , qui ne coütoient gueres moins: mais on ne peut nier que par ce moyen le pays de Languedoc n'ait été déchargé fous le roi Henri de cent-mille livres tous les ans: ck le pays de Normandie de quatre cents mille, qui furent éga1ées fur les'aufrés gouvernements qui n'ont point d'états, & néarimoins il eft bien ' certain que les éleöions coütent deux fois autant ' au roi tk aux fujets que les états, ck en matiere 4'irnpöts, plus il y a d'officiersplus y a de ';  5foo Analyse des Historiens piikries ik jamais les p'aintes ck doléances des pays gouvernés par élecrion ne font vues , lues, m\préïeinées , ou quoi ce foit on n'y a jamais degard, comme étant particulieres; Sc tout ainii que plufieurs coups d'artillerie 1'un après 1'autre, n'ont pas fi grand effet, £our abattre un fort, que fi rous enfemble font délachés , auffi les requêtes particulieres s'en vont le plus fouvent en fumée : mais quand les colléges, les communautés, les états d'un pays, d'un peuple, d'un royaume font leurs plaintes au roi, il lui eft mal aifé de les refufer. Combien qu'il y a mille autres ntilités des états en chacun pays, cYft a l?avoir le bien concernarft la communauté de tout le pays, s'il eft queftion de faire kvét d'hommes. ou d'argent contre ks ennemis, ou bien ck hatir fortereffes, unir ks chemins, refaire ks po.its, nettoyer k pays de vokurs, & faire tête aux plus grands: tout cela s'eft mieux fait par ci-devant au pays de Languedoc par les états, qu'en autre province de ce royaume. ils ont oidonné douze cents livres par chacun an pour l'inftruttion de la jeuneffe de tout le pays en la ville de Nimes, outre les autres colkges particuliers : ils ont bati les. belles fortereftes du royaume, ils ont fait exécuter Buzac , k plus noble voleur qui a été de notre mémoire , duquel ni juge, ni magiftrat,  SUR LES ÉTATS GÉNÉRAUX. 40* magiftrat, ni le parlement même de Touloufe n'avoient pu avoir la raifon : car il faifoit fes voleries par forme de juftice , ck fi hardi de» s'attacher a lui. Ils ont auffi ordonné dbuze cents livres d'état pour un prévöt des maréchaux, ck outre cela vingt-cinq livres pour chacun procés qu'il rapportera des exécutions par lui faites. J'ai bien voulu cotter en paffant ces particularités, pour faire entendre le grand bien qui réuffit des états, qui font encore mieux réglés ès républiques des Suiffes ck de 1'empire d'Allemagne, qu'en autres républiques de 1'Eu* rope. Car outre les états de chacune ville ck canton , ils ont leurs états généraux : les dix circuits de 1'empire ont leurs états féparés , auxquels fe rapportent les états particuliers des villes impériales ck contrées: ck les états des circuits fe rapportent aux états de 1'empire qui fut long-tems a ruiné fans celle police. "Tornt VI\ C c  4«u Analyse des HisTORiENS TABLEAU DE LA CONSTITUTION FRANgOISÈ, Ou autorité des Rois de France dans les différens dges de ■ la Monarchie. PREMIER AGE. Origine de la Conflitution Frangoife. I/origine du peuple franc influe fur Ia nature de fes loix : elle remonte k des tems fi reculés, qu'il ne refie aucun veftige qui affiire que fes premières loix ayent été écrites. Les ufages de chaquevpeuple fe confervoient dans chaque canton par Ia voie feule de la tradirion , & ces divers ufages interrompus ou changcs par la force des armes de la dominatiou romame, n'ont été mis par écrit que lo ig-tems après la réunion des divers cantons du peuple franc fous un feu'! & même chef.  SUR LES ÉTATS GÉNÉRAUX. 4): mais il paroït qu'elles ne commencerent a fe former en cour de juftice & k devenir fédentaire que fous Philippe-le-Bel. Ces affemblées générales ou pariemens exer$oient une jurifdiclion fuprême fur toutes les parties du gouvernement, fur toutes les perfonnes & fur toute efpece de caufes (i) ; on y ( i) Eodem anno caftro Veziali magnum parlamsntum congregavit ubi archiepifcopi - epifcopi, abbates & magnas pars baronum Francia; convenerunt. Encyc. torn. XII , pag. 2. (2 ) Bouquet, pag. 430, Ie procés fait, en 713 , s la reine Brunebaut, mere & grand'me-re de tant derois, attefte cette vérité, Frédégaire , chap. 42,  SUR LES ÉTATS GÉNÉRAUX. 4O9 délibéroit de la paix, des fecours néceffaires pour la foutenir, du mariage de nos rois, du partage de leur fucceffion entre leurs enfans. Elles avoient le droit d'élire leur fouverain (1), de lui accorder des fubfides (2) , dê faire des loix, de réformer les abus, de juger en dernier reffort les procés criminels des grands du royaume & autres affaires majeures. Ce fut dans un parlement que Pepin fut élevé au tröne par 1'autorité du pape, 1'onction du faint chrême & le choix de tous les Francs (3). Mais comme les chefs de la nation avoient öté la couronne a une familie pour la faire paffer a (1) Ego Ludovicus, mifericordia Domini Dei noftri, & eleëione populi rege conflitutus,. . .. Balufe , cap. reg. Franc. pag. 273, 274. ( 2) M. dê Montefquiea & M. 1'Abbé de Mabli, ont prouvé que la propriété des hommes libres parmi les Franqs n'étoit fujette a aucune taxe , & ceuxTci n'auroient pas confenti a fubir un joug qu'ils regardoient comme une marqué de fervitude. — L'état n'exigeoit d'eux que le fervice militaire. Efprit des Loix, liv. 12. Obfervations fur 1'Hift. de France. ( 3 ) Tepinum .... per autoritatem papa , & unctionem fanöi chrifmatis , & eleólionem omnium Francorum in regni folio fublimatus eft.... Bouquet Recueil des Hiftoriens, tom. V, pag. 9.  4io Analyse des Histoiuens une autre, on exigea deux un ferment, par lequel ils s engagerent de maintenir fur le tröne cette même familie (1). La nation fut fidelle a fes engagemens fans fe départir dudroit de choifir fon fouverain. Pepin prit poiTeffion du tröne : mais loifqu'il fut queftion de p^rtager fpn domaine entre fes enfans > ces princes furent obiigés de coafultêr la nation. Elle le fut encore en 768 , lorfque.Pepin nomma Charles, tk Carioman pour lui'fuccéder & regner conjointement (2) : enfin les Francs confirmerent cette difpolition dans une affemblée convoquée | la mort de Pepin, & nonfeulement ils nommerent roi fes deux fils , mais encore ils réglcrent de leur propre autorité les limitesde leurs do'maines (?). Ce fut dans un parlement tenu a Aix-la-Cha.pelle en 813 , que du confentement de tous les Francs,tLouis le Débonnajre fut élevé a 1'em- ( 1 ) Ut nunquam de alterius, .... legem in avo. prasfumant eligere. . . . Bouquet, tom. y/pag. 10. ( 2 ) Una cum confenfu Francorum & procerum fuo- 1 rum , feu epifcoporum conventu, Ap. S. Dibnifit, capiiul. v. i, pag. 187. ■ ( 3 ) Vita Caroli magni. . . . Ap. Bouquet. . . tom. V, pag. 50.  -"SUR LES ÉTATS GÉNÉRAUX. |ïï pire (i). Ce fut dans un parlement que fut fait le partage de la fucceffion de Charlemagne entre fes trois fils, & que fe terminerent toutes ks difputes qui s'ékverent entre les defcendans de la familie royale (2). Ce grand prince reconr>üt & confirma ce point important de fa jurifdittion dans la charte qu'il donna pour k partage de fa fucceffion. Ce fut dans un parlement tenu k Meaux en 879 , qu'il fut délibéré fur le choix du fucceffeur de Louis le Begue, & que la royauté fut déférée a Louis ö£ k Carloman fes enfans, quoique fortis d'une race répudiée (3). Hugues Capet, chef de la race regnante , porté fur le tröne en 887 tröne auquel il n'avoit aucun droit , reconnut telkment 1'indifpenfable néceffité des fuffrages de la nation ( 1 ) Boulainvilliers, de 1'ancien Gouvernement de France, tom. Ier , lettre 3 , pag. 267 , • • • • & >> y a ceci de remarquable , que ce n'étoit pas a Louis-leDébonnaire a fuccéder-a 1'empire, mais bien a fcn neveu , prince d'une grande efpérance , fils de Pepin, frere ainé de Louis le-Débonnaire; preuve fa"ns réphque que les Francs avoient le droit de choifir leur fouverain. (ibid.) (2) Boulainvilliers, ibid. pag. 283. (3) Boulainvilliers, ibid. pag. 287.  4ii Analyse des Historiens pour s'y maintenir, que pour fe les acquérir &fe faire confirmer dans la poffefTion du fceptre qu'il venoit d'envahir, il affembla peu après fon couronnement, un parlement a Orléans , parlement dans lequel il obtint ce qu'il defiroit, & dont il recut Ie droit inconteflable de la couronne qu'il a tranfmife a fes .defcendans (i). Ce fut dans un parlement qu'il fut ftatué fur le gouvernement du royaume pendant le voyage que Philippe Augufte fe propofoit de faire a la Terre-Sainte, & que ce prince, du confentement de fes barons, confia la tutelle de fon fils & la garde de fon royaume a Ik dame fa mere. Enfin dans un parlement tenu k Montpellier en m6,le mardi d'après la Touffaint (i) , il fut arrêté que le fils de Louis VIII, alors menacé d'une mort prochaine, feroit reconnu pour roi, & qu'on le feroit facrer immédiatement après la mort de fon pere. II feroit inutile de multiplier les citations, ( i ) Boulainvilliers , pag. 290 , Louis V éjant mort fans enfans, Charles s duc de Lorraine , fon frere , auroit dü lui fuccéder j cependant les Francs élurent d'un commun accord Hugues - Capet. (1) Boulainvilliers, tom. II, lettre 6, pag. 11»  SUR LES ÊTATS GÉNÉRAUX. pour prouver que ces affemblées du parlement étendoient leur autorité fur toutes les parties de radminiftration politique du gouvernement, par 1'élection de leurs rois , & qu'ils partageoient avec le fouverain la puiffance légiflative (1). ( 1 ) La Loi Salique écrite contient encore une chofe remarquable; fcavoir, « que les Francs feroient juges » les uns des autres avec le prince , & qu'ils décer» neroient enfemble les loix a 1'avenir, felon les oc» cafions qui fe préfenteroient. » Encycl. tom: IX, Pag- 671., au m°t loi falique, . . . Kar. cal. tit. 36, Baluze, tom. II, pag. 178. Clotaire II répond aux ambaffadeurs de la reine Brunehaut, qu'il faut convoquer une affemblée de Ia nobleffe & délibérer en commun des affaires communes. — Clotarius refpondit conventum nobilium deberc eum aggregare Francorum , & communi traSatu de egm* mimibus confulere rebus. . . . Aimoin. liv. 4, chap. 1. Childebert en ufa de même Iorfqu'il fit de nouvelles additions k la loi falique, Childebertus traSavit ( y eft-il dit,) cum Francis fuis. Ce même prince , dans un décret contenant d'autres additions , s'exprime ainfi: — Cum nos omnes calcndiis martii ( cóngregati ) , de quibufque conditionibus una. cum noftris optimatibus pertraftavimus. —— Ces 'additions furent faites en différens pariemens ; 1'une eft datée da champ de mars d'Attigny; une autre du champ de mars tenu a Maftrick. —. Encyclopédie, toni. V,  414. An-alyse des Historiën s- . Ilnousrefte encore des traces du pouvoir que nos rois y exercoient. Les annaiiftes de ces tems au mot ewegiftrement. , . . Capitul. édit. de Balufe t tfirh. i" , pag. 17; & dans le même endroit il répete , parï^conditwne convenit omnibus adunatis, -Capitul* -ibid. La loi des Allemands & celle des Bavarois, furent faites de la même maniere : — qua temporibus Clotarii tegis , und cum prineipibus fuis id funt, 34 epifcopis , ty 34 ducibus & ^2 comitibus , vel ctztero populo confiituta eft ; hoe decretum eft apud regem & principes ejus , & apud cunSlum populum chrifiianum qui intra regnum Merengorum conflant. ——> Toutes les autres leis de ce tems font mention du confenrement de la nation; —— placuit atque convenit inter Ftaficos & coram proceres ; ««— 'uk convenit & placuit feudis noftris. Encyclopédie tom. V . pag. 7Ö0 , au mot enregiftrement ; — & dans 1'Appendix de Gregoire de Tours , il eil dit : in univerfis feudis tam fublimibus quam pauperïbus placuit & convenit nobis. Charlemagne fe comporta de Ia même maniere ; — Ut populus , dit-il i interrogetur de capitulis , qua in lege noviter addita funt & poftquam omnes con/enferint t fubferiptiones & manufirmationes Juas in ipfis capitulis faciant. . . . Capitul. tom. 1", pag. 394: — & dans un autre endroit ,il dit encore : generaliter omnes admone* mus ut capitula qua, preterito anno , le%c falicce cum omnibus confenfu, addenda ejfe confuimus , jam non ultcrius  SUR LES ÉTATS GÉNÉRAUX. 41^ affurent qu'elle étoit très-limitée, Sc que chaque objet de délibération étoit foumis au jugement de 1'affemblée. Ipfe rex, difent-ils ,Jedebat infella regia circumflante exercitu , pmcipieb atque is die Ulo quidquid a Francis deeretum erat, (j) II nous en refte auffi de la maniere dont les loix étoient approuvées : on en faifoit faire lec- capitula ■ fed tantum leges dïcantur , imö pro lege falita. teneantur Capit. tom. Icr, pag. 356 Plufieurs Capitulaires de Charles-le-Chauve portent également qu'ils ont été faits confenfu populi & conflitutione regis; & notamment ceux des années 344 &, 604. . . . Capitul. tom. II, pag. 178. Dans un autre endroit, il ajoute que les Capitulaires des rois ne peuvent être regardés comme loix, qu'autant que les Francois les ont regus ck en ont ordonné 1'exécution ; — & c'eft en parlant des Capitulaires de fon pere & de fon aïeul, qu'il dit : — Propterea per Capitula. avi & patribus noflri qux Francis pro lege tenendd judieaveram , & fideles noflri in -gtneraliplacito noflro confervanda decreverunt. . . . Gapitul. tom. II , pag. 231. Hugues-Capet écrit a 1'archevêque de Sens que —1 Regali potentid in pullo abuti vilentes , omnia négocia reipublicte. in confullatwne & fententia fidelium noflrörum difponimus. Hincmar. de Ord* Palat. cap. 29 & 30, au Recueil des Hiftoiriens de France , tom. IX. . . . , Voyez le ftyle uniforme des Capitulaires. ( 1 ) Bouquet, tom. II, pag. 647.  416 Analyle des Hïstoriens ture dans 1'affemblée; & fi elle y donnoit fon confentement ; tous les Francs s'exprimoient en criant trois fois , nous en fommes contens 3 & alors la loi étoit confïrmée par la fignature du roi & des principeux laïcs (i). II nous en refte également de la forme dans laquelle les requêtes étoient préfentées au roi, pour lui demander juftice dans une requête adreffée par les Francois a Charlemagne, de 1'année 801, pour le fupplier de difpenfer les eccléfiaftiques du fervice militaire ; ils concluent a ce que leur demande foit accordée, s'il délire qu'ils continuent a le fervir en fideles fujets (1), expreffions remarquables, & dont il ne convenoit de fe fervir qu'a des hommes qui connoiffoient toute 1'étendue de leur liberté & de leurs privileges. Ce grand monarque recut leur requête de la maniere la plus gracieufe , en leur obfervant quil ne pojfédoit pas feul F autorite lêgijlatrice (3) ; qu'il 1'expoferoit a Faffemblée générale, paree que toutes les matieres qui concernoient les fujets devoient (1) Capitul. tom. I", pag. 267. . . . Robertfon-, tom. Itr, pag. 3,45, aux notes. ( 2 ) Robertfon , tom. Icr , pag. 345 , aux notes. ( 3 ) Capitul. tom. Ier, pag. 405 , 407 , 408 , 409 & 440. être  SUR LES ÊTA'TS GÉNÉRAUX. 417 être difcutées ck réglées d'un confentement •général. II eft probable, d'après un capitulaire de Charles-le-Chauve, en 851 , one le fouverain ne pouvoit refufer fon confentement a ce qui étoit propofé ck réglé dans cètte affemblée (1). C'eft ainfi que nos plus grands rois fe font toujours montrés les plus'religieux obfervateurs du ferment qu'ds prêtoienr lors de leur élection au tröne, ferment qu'ils faifoi'ent-entre les mains des évêques choifis ck pröpöfés par la nation (2.): en voici la formule, h Ego Ltrdo» vicus, mifericordia Domini Dei noftri & » elecTwne populi rex conjlitutus, ordinibus epif» coporum videlicet, facerdotum, canonicór » rum, monachorum, atque fanfitimonialium » regulosa-patribus confcriptos,ck apoftolicis » atteftationibus roboratos ex hoe in futurum » tempus me illis ex integro fervaturum pol« liceor, etiarri me fervaturum leges, 6k fta« tuto populo qui mihi ad regendum miféri- (1) Capitul. tit. 9. 5. 6. vol. 11, pag. 47. ( 2 ) Anno 877 , u In compendio palatio hsc quas » fequunrur ab epifcopis petita font apud Ludovicurii i) regem , ut ab eo promifib epifcopis. » Capitul. Lug. Dal. reg. anno 877, pag. 271. Tome VI, D d  418 Analyse des Historiens I» cordia Dei committitur per commune conci» Hum fuklium noflrorum , fecundüm quod prew deceffores mei imperatores & reges geftis inf» erirerunt, 6k omnino inviolabiter tenendo ók w obferyando decreverunt. Ego igitur Ludo» vicus rectutidinis ck juftitice ampre hanc fpon« taneam promiiïionem meam relegens, manu » propria tinnavi. » (ij 11 n.e faut pas cacher que cette formule a varié. On a cherché h dimimier Ie poids des obligations en affoibliffant 1'énergie des promeffes : mais 1'a-t-on dü? (i) Les affembiées générales de la nation qui fe tinrent fous les deux premières races, ne furent ,pas uniformes par le nombre de perfonnes qui y furent admifes , ni pour le tems ck les lieux oii elles fe tenoient : elles n'avoient point dë ( i) Capitul R. Franc. Dal. pag, 273 & 274. ( 2 ) Le ferment des rois de la troifieme race jufqu'a Louis XI, étoit encore conc.u en ces termes : « Populo ■»> credito in jure fuo confiftentem noftra autoritate coni) celTorum. » Preuves des lib. chap. 7, n°. 1. Les variations que ce ferment a éprouvées depuis, ji'empêcheront pas que le ferment ancien, exigé par la nation , n'attefte perpétuellement a la poftérné les droits du peuple Francois, & les devoirs de fes rois.  SUR LES ÉTA.TS GÉN.ERAUX. 419 lieu fixe pour leurs féances, 6c 1'on s'affembloit dans le lieu que le roi trouvoit plus commode , 6c quelquefois, felon que les affaires 1'exigeoient (1) : mais dès le moment que la nation fut affervie par le régime du gouvernement féodal, dont la foibleffe des defcendans de Charlemagne favorifa 1'établiffement, gouvernement qui dégénéra en oppreffion, ces affemblées diminuerent fenfiblemenr., de forte que, pendant une longue fuite d'années, la nation femble avoir oublié le droit qu'elle avoit de s'affembler 6c de participer au gouvernement. Les nobles, les grands du royaume, dont les ufurpations devinrent exceffives 6c infuportables, avoient réduit le corps entier d'un peuple libre dans une véritable fervitude. Cette oppreffion s'étoit non-feulement gliffée dans les campagnes, mais même dans les villes 6c dans les bourgs. Auffi voit-on que leurs habitans étoient privés des droits les plus naturels. L'on exigeoit d'eux fans pitié des fervices de toute efpece. II ne leur étoit pas permis de fe maner, de difpofer des fruits de leur indufirie, d'accom- ( 1) Robertfon, tom. Icr, pag. 338 -k fuiv. Dd %  4io Analyse des Historiënj jnoder un procés fans en avoir acheté la permifiion de leur feigneur, & les maxirr.es étroites & tyranniques d'une ariftocratie militaire arrêtoient toute efpece d'induftrie (i). Alors tout changea. Les capitulaires tomberent en défuétude; toute union civile & politique fut rompue, Pancienne conflitution fut oubliée ; & il ne fubfifta plus entre le monarque & les fujets qu'une relation purement féodale ; 1'autorité royale n'en avoit plus que 1'ombre; les ducs, les comtes, les grands officiers de la couronne , avoient trouve le fecret de rendre héréditaires les dignités qu'ils ne tenoient originairement de la libéralité de nos rois que pour les exrrcer a vie , & tant qu'il leur phiroit. Chaque comre , chaque baron s'étoit arrogé dans fes domaines tous les droits qui avoient été jufqu'dlors les attributs de la royauté & principalement de rendre la juftice, de battre monnoie, de faire la guerre. Chaque territoire gouwemé par des coutumes locales reconnoiffoit un feigneur'particulier & avoit des intéréts qui lui étoient propres. Tout fe régloit & fe décidoit par ces coutumes , & la formalité de rendre hommage au roi étoit, pour ainfi dire , ( 2) Robertfcn, tom. Ier, pag. 13 & fuiv.  SUR LES ÉTATS GÉNÉRAUX. 421 le feul acte de dépendance auquel ils avoient bien voulu refter foumis (1). Dans un royaume ainfi, divifé, a peine reftoit-il quelque principe commun d'intérêt £k d'union. De - la, Ia cefïation des affemblées générales, paree que la nation ne formant plus, un corps, les régiemens qui en feroient émanés n'aurpient pü avoir une égale vigueur dans toutes les parties de I'état. Le roi pouvoit bien faire publier ck exécuter des loix nouvelles dans fes domaines particuliers, paree qu'il y étoit Funique feigneur : mais s'il eut prétendu rendre ces loix communes a tout le royaume , les barons auroient pris l'allarme ck auroient regardé cette entreprife comme une atteinte a leur jurifdidtion. Ceux-ci, de leur cöté, n'évitoient pas moins de faire des loix générales , paree que le droit de les faire publier auroit appartenu au roi. C'eft ainfi que la nation perdit pendant long - tems la puiffance légiflatrice , ou plutöt en abandonna 1'exécution, Les anciens ufages exercés par 1'abus que les grands firent du pouvoir féodal avoient précipité la nation dans des malheurs qui exigeoient des remedes, ck ces remedes ont précipité les (1) Robertfon, tom, 1", ibid. Dd j  '411 Analysé des FÏis'toriëns grands dans Ia privation de leur puiffance, & prelque de tous leurs droits : preuve certaine que toutes les extrémités fe touchent Si font. également dangereufes. Louis-le-Gros tenta de porter les premiers coups a ce coloffe qui éb*-anIoit les fondemens du tröne, Si d'élever une nouvelle puiffance qui put contrebalancer celle des grands vaffaux qui fouvent failoieut Ia loi au monarque même ( i ). Le moven qu'il crut le plus sur pour réuffir, fut d'affranchir les habitans des villes de fes domaines, d'abolir jufqu'a la plus legere tracé de fervitude, de les étabür en corps pofitique, & de les faire gouverner par des magiftrats de leur propre choix. Ces magiftrats avoient le droit de rendre la juftice dans leur territoire, de lever des taxes, d'incorporer & d exercer une miücc , Si d'en choifir les officiers , milice qui étoit aux ordres du fouverain, Si qui fe mettoit en campagne au premier commandement. Les barons fuivirent eet exemple, Si accorderent aux habitans des villes de leurs domaines de pareilles immu- (i) Robertfon, tom. ler, pag. 31. Voyez fur eet objet le même auteur aux notes 16, 17 & 18, pag. 23 6 & fuiv. .  SUR LES ÉTATS GÉnÉRAU-X. 41?. nités. Ils ne fentirent pas alors combien elles étoient contraires a leurs principes politiqueS & dangereufes a leur puiffance. Epuifés par les fommes énormes que leur avoit coüté 1'expédition de la terre fainte, ik adopteren! avec avidité un moyen de fe procurer de 1'argent 1 & 1'attrait d'un fecours préfent leur fit perdre de vue un danger qui étoit éloigné. Les villes ainfi affranchies devinrent de petites républiques gouvernées par des loix connues de tous les citoyens & égales pour tous» La liberté,, partie effentielle de leur conflitution , commenca a renaitre , 6c la reconnoiffance autant que 1'attachement pour leur fouverain qui les avoit dégagés de 1'oppreffion des grands, leur tit accorder a la couronne des fecours d'argent qui donnerent au gouvernement une farce nouvelle. On ne fut nas long - tems a fentir les effetsde cette nouvelle inftitution, dont 1'influence falutairc fe répandit fur le gouvernement & fur les mceurs. L'efprit d'induftrie fe ranima; le commerce devint un objet d'attention; la population augmenta , enfin 1'opulence & la liberté s'introduifirent dans des villes , qui avoient été pendant fi long-tems le fiége de la pauvretc & de la tyrannie. Dd 4  4M Analyse des Historiens Les habitans des villes déclarées libres patdes chartres de communauté qui leur furent accordées, infpirerent aux habitans de la campagne le defir le plus vif d'obtenir les mêmes priviléges; & les feigheurs frappés des avantages qu'ils avoient retirés des premières conceffions qu'ils avoient faites, s'emprefferent d'en accorder de nouvelies ( i ); infenfiblément 1'ufage des affranchiffemens devint plus fréquent, & nos rois cédanr autant a la nécetfité qu'au defir d'abaiffer le pouvoir des nobles, s'appliquerent a en rendre la pratique univerfelle. Leur exemple, tk plus encore les fommes confidérables que les feigneurs pouvoient tirer de ces affranchifTemens, porterent le dernier coup è 1'efclavage & firent renaitre la liberté (2). Une autre opération non moins importante que celle-ci , contribue encore a diminuer 1'autorhé des grands; ce fut la faculté , introduite par St. Louis, d'appeller aux tribunaux (1) Etabliffement de Saint Louis, liv. 2j ch. 54, Ordon.i. tom. Ier. ( 2 ) Ordonnance de Louis X & de fon frere , a lis v déclarerént.que la nature avoit fait tous les .hommes » libres.; que leur royaume étoit appellé le royaume » des Francs 5 qu'en conféquence ils ordonnoient que » les affranchiffemens fuffent accor'dés dans leurs états' >» è des conditions ;uues & modérées. »  SVTH les états GÉjSTÉRAüX; 42.5 du roi des fentences rendues par ceux des Barons (9 a). De toutes les entreprifes qu'ils avoient ofé tenter fur les droits du fouverain , la plus extraordinaire & la plus importante fut fans doute celle de rendre la juftice' dans leurs domaines , & de juger en dernier reffort toute les caufes civiles de leurs vaffaux. Cette tentative produifit quelques bons effets ; elle fixa tous les yeux fur une jurifdiction différente de celle des barons ; on vit avec une-forte de fatisfacfion la fupériorité que la couronne s'attribuoit fur les juftices territoriales. Les vaffaux , fouvent opprimés par leurs feigneurs & toujours dans une dépendance fervile, apprirent a regarder leur fouverain comme leur protecfeur , & cette difpulition des efprits contribua beau coup k faciliter 1'ufage de ces appels. Par la fuite du tems , les tribunaux du roi acquirent la confiance & la vénération publique ; le peuple s'accoutuma volontiers a abandonner les juftices partiales des barons pour" porter leurs caufes fous des yeux plus pénétrans & moins corrompus. On limita enfuite leurs jurifdiöions , en ne leur permettant de connoitre que d'affaires de peu d'importance , & bien-töt nos rois reprirent le- ( 1) Robernpn, tom, l", pag, 54.  4*6 Analyse des Historiën^ droit de rendre la juftice a leurs fujets. Par cette tournure adroite , il reculerent un peu les bornes de leur autorité : mais elle étoit encore très-limitée. L'adminiftration intérieure étoit foible & in.parfait2. Le corps nombreux de la nobleffe , toujours formidable malgré les divers moyens qu'on avoit tentés pour 1'affoiblir , obfervoit avec une jaloufie inquiéte tous les mouveraens du fouverain , arrêtoit fon ambition & prévenoit tous les projets qu'il pouvoit former pour étendre fa puiffance. Les rois n'avoient alors d'autres revenus que ceux qu'ils tiroient de leurs domaines , & ils étoient trop modiques pour fub venir aux frais d'une entreprife importante, de maniere qu'ils étoient obligés d'avoir recours a la bonne volontc des peuples , pour en obtenir des fecours extraordinaires; fecours qu'ils accordoient fouvent avecrépugnance , 6c toujours avec économie. A ce moyen, ils ne pouvoient mettre en campagne que des armées peu propres a un fervice long &pénible. Au lieu de foldats aguerris, ils n'avoient eu la plus grande partie d'autres' troupes que celles que des vaffaux étoient ob.igés de leur fournir. Ces troupes ne fervoient que pendant un tems fort court. Plus attachées aleurs feigneurs qu'au monarque,  sur les êtats Généraux. 417 elles s'occupoient peu du foin de feconder fes vues ; & quand même elles auroient été plus favorablement difpofóes , toujours auroient-elles été des inftrumens peu propres a de grandes entreprifes. Plufieurs évenemens fuccefhfs , que la révolution des tems fit naitre , commencerent k mettre nos rois en état de difpofer avec une autorité plus abfolue , des forces de leurs domaines , de former des entreprifes plus confidérables , 6c de faire des efForts plus grands 6c plus vigoureux. Le premier fut celui qui réunit a la couronne les domaines étendus que 1'Angleterre poffédoit dans le continent. Le fecond fut i'étabiifiement d'une armée toujours fublTftante , même en tems de paix. Charles VII , en établiffant la première armée fur pied , que 1'on eut connue en Enrope , prépara une révolution importante ; 6c en örant aux nobles la direttion de la force militaire de I'état , fource de 1'autorité 6c dii crédit immenfe qu'ils avoient acquis,il porta un coup terrible au gouvernement féodal, 6c le blcffa dans le principe même de fa force. Le gouvernement féodal, frappé par fes fondemens , s'ébranla 8c tomba enfin fous les coup redoublés que nos rois lui porterent. Alors la nation reprit le droit de s'affembler  4zS Analyse des Historiens & de concourir a 1'adminiftrationpoiitique de I'état , dont elle a conftamment joni jufques fous le regne de Philippe-le-Bel ( i ). ( 2 ) Les Ordonnances de Louis VI, de Louis VII, de Philippe-Augufte, de Louis VIII, font mention du confeil, du confentement, de la volonté, du concours des feigneurs , de>. préiats , des barons , des fideles. Le même ulage fe perpétue fous Saint Louis en 1230, 6k fous Philippe-le-Bel. Ordonnance de 1213. « Per voluntatem & affenfum t> archiepifcoporum , epifcoporum , comitum, barow num & militum regni Francs , qui judajos habent & » qui judaeos non habent , faciant ftabilimentum fuper s> judaos , quod juraverunt tenendum illi quorum ?> nomine fubfcribuntur.» Nouveau Recueil des Ordonnances , pag. 47. Dans le parlement afTemblé a Villeneuve-le-Roi, en 1204, Philippe-Augufte y propofa la fameufe ordonnance mtitü'lée : Stabilimtntum feudomm. . . . « Con» venerunt & affenfu publico firmaverunt ut primo die » maii in poflerum ita fit de feodalibus tenementis.» II y eft fait mention que le roi , le duc de Bourgogne, le comte de Nevers, de Boulogne ck de Saint - Pol , le feigneur de Dampierre , ck plufieurs grands du royaume , convinrent de eet établiffement. Joinville, dans fon hiftoire de Saint Louis , fait mention des. pariemens que tenoit ce prince. 11 fuffit d'en donner quelques exemples, tels que fon ordonnance du mois de mai 1246 oir il dit: « Haec autem omnia de comprani » conulio ck affenfu diflorum baronum & militum vor  sur les Etats Généraux. 42,9 Animés par leur fuccès fur le gouvernement féodal, nos rois tournerent leurs vues du cöté 3) lumus & prscipimus.» Et celle qu'il fit toucban1 le cours des fterlings , oü il dit également : « Fa&a 5) fait htec ordir.atio in parlamento omnium fan&orum , 3) anno millefimo ducentefimo féxagefimo quinto, n Ehcycf. tom. V , pag. 700 , au mot Enregiftrement. Nous en citerons encore une du même roi. II affemble en 1230 un parlement a Annecy, oü il déclare le comte de Bretagne déchu de la tutelle de fon fils , & fes vaffaux déliés du ferment de fidélité. Cette ordonnance eft intitulée au nom de tous ceux qui compofoient Ie parlement, & tous y appoferent leur feing; de communi confdio baronum. Colleétion du pere Mariene, tom. ler,pag. 12.39. Sous Philippe -le - Hardi , nouvelles ordonnances des années 1272 , 1174» 1275 » 1277 & I2-^3' Sous Philippe-le-Bel, en 1295 , qui fit apprcuvefén plein parlement une ordonnance faite par lui & fon confeil huit ans auparavant; pre(entibus duce Burgundia. , comité fanfii Pauli , cohftabulario , epifcopis Tornacenüs & Dolenf.s. Et Pierre Flotte, recitata fait pfaêdifra ordinatio & approbata in parlamento omnium faniïorum , prefente toto parlamtnto. Nouveau Recueil des ordörSnances, pag. 316. . . . Encyclop. tom. V, pag.700, au mot Enregiftrementa Autre ordonnance du 3 o&obre 1303 , 28 févrtér 1308; deux autres du jeudi avant les Rameaux de fa même année ; une du premier mai 13 fj. II s'en trouve de femblables fous Philippe VI, dit  430 Analyse des Historiens de ces affemblées du parlement , dont 1'autorité les gênoit ; lis préparerent des refforts pour la diminuer infenfiblement. Leurs pre- de Valois , des 24 juillet 1331, 10 juillet 1336, 17 mai 1345 , & après la Saint-Martin d'hiver, en 1347. Encyclopédie , toni. V, pag. 701, au mot Enregiftremenr. II eft remarquable que le parlement étoit alors rendu fédentaire. La première ordonnance oü il foit fait mention d'un enregittrecnent qui emporte en même-tems vérification de la piece, eft celle de Philippe de Valois, en 1334, touchant la régale. Encyclop. ibid. Ce fut dans deux pariemens, en 1316& 1328,que fut décidée Ia queftion de la fucceffion a la couronne , en faveur de Philippe-le-Long & Philippe de Valois , & celles qui s'étoient élevées entre Charles-le-Bel & Eudes, duc de Bourgogne, au fujet de 1'apanage de Philippe-le-Long, dont ce duc prétendoit que fa femme, fille de ce roi , devoit hériter. Sous le regne du roi Jean , les princes, les prélats , les barons , furent convoqués en parlement pour y délibérer des plus importantes affaires de I'état. Ce fut dans un parlement que fe réunirent les maifons d'Orléans & de Bourgogne, que le défordre des tems avoit divifées. Ce fut encore dans un parlement que furent jugés ' Thaflillon, duc de Baviere, Bernard , roi d'Italie , & Carloman, accufés de crimes de rebellion. Enfin , Charles V Ie confulta lorfqu'il entreprit la guerre contre les Anglois,  SUR LES ÉTATS GÉNÉRAUX: 4311 miers pas furent foibles Sz incertains. Ils commencerent par en changer la forme, On y admettoit bien toujours les barons ; mais on ne donna plus ce titre qu'aux vaffaux immédiats de la couronne , foit laïques, foit eccléfiaftiques ; arrangement qui diminua beaucoup le nombre de ceux qui avoient droit d'y affilter. Enfuite la pairie étant devenue réelle, on ne qualifia plus du titre de pairs que fix des plus grands feigneurs laïques & fix évêques. Ceux-ci , &c les abbés connus fous le nom de prélats , avoient tous entrée au parlement. Mais a 1'égard des bauts barons laïques, a peine , y compris les cleres, montoient-ils au nombre de trente (1). Les affaires s'étant multipliées par 1'ufage des appels, qui devenoient trop fréquens fous le regne de St. Louis, & leur décifion plus difficile pour les ordonnances qu'il fit & les formes qui furent établies, le prince faifit ce prétexte pour y inTroduire des gens lettrés , qui n'eurent dans le commencement que voix confultative, &c auxquels on donna bien-tot voix délibérative (i). A ce changement, on en ajouta un autre : (1) Encyclop. tom. XII f au mot Parlement. (1) Encyclop. Ibid,  j43& .Analysé des His'toriens -ce fut de s'emparer du droit de nommer les perfonnes qui avoient entree au parlement y -& d'adreffer des lettres, a ce fujet , a ceux dont le roi faifoit choix pour compofer 1'af-femblée (i). Philippe-le-Bel, par fon ordonnance de 1302, fous le fpécieux prétexte d'un voyage qu'il alloit faire , ou il menoit fon confeil , de la -multiplicité des affaires , de la commodité de fes fuiets & de 1'expédition de leurs caufes , fixa les féances du parlement a -Paris, & dctermina qu'il y en auroit deux .par an (2). Ses féances furent d'abord de peu de durée; mais les affaires s?accroiffant chaque jour par la réunion de plufieurs baronniesa la couronne, ( 1 ) Encyclop- Ibid, Ordonnance non imprimée , au tréfor des chartres, qui ne peut être avant 1295, ni poftirieure a 1298. (2) Cette ordonnance n'eft pas 1'époque de la création du parlement; elle en parle comme d'un tri. hunal qui exiftoit de toute ancienneté. Les olim fous les dates de 1302, en parlant de certains ufages du 'parlement, difent : hoe dudum faftum fuiffe. Dans une ordonnance de 1309 , que 1'on trouve dans le même regiftre., il eft contredit': in parlamento longis temporibus obfervatum fuijfe, «Encyclop. Ibid-, par  SUR LES ÊT ATS 'GÉNÉRAUX. 43 3^ 'par la réferve des cas royaux , elles devinrent plus longues. Philippe-le-Long profita de ces chargemens pour exclure les prélats du parlement (1) ; & Philippe de Valois fit le röle de ceux qui étoient deftinés pour le tenir, & qui prenoient gages (2). Indépendarriment de ces perfonnes,' on voit qu'il y en. avoit beancoup d'autres qui avoient entrée au parlement , & qui pour voient continuer d'y venir, Dutillet fait mention des diverfes affemblées du parlement , tenues en 1413 , auxquelles affifterent nombre de barons & chevaliers : aujourd'hui les pairs laïaues font les feuls qui repréfentent les anciens barons (3). Enfin, ceux qui rempliffoient les places de préfident & conféiller étoient quelquefois changés fuivant les conjonctures ; mais Louis XI par fon ordonnance dé 1467, ayant ftatué qu'il ne feroit pourvu a aucune place de préfident & de confeiller , finon en cas de vacance , mort, réfignationou forfaiture, ck Francais ler« ayant rendu ces glacés vénales , elles font devenues ftables ck inamovibles (4). (1) Ordonnance du 3 décembre 1319. {2) Ordonnance du 11 mars 1344. ( 3 ) Encyclopédie. Ibid. ( 4 ) -Encyclopédie. Ibid, Tornt VI, Es.  434 Analyse des Historiens C'eft ainfi que le parlement , tel qu'il exifte aujourd'hui, a été fubffitué a 1'ancien parlement, è 1'affemblée générale de la nation. C'eft ainfi que la nation a laiffé éclipfer le droit imprefcriptible , qu'elle avoit de tout tems , de concourir a 1'adminiftration politique du royaume; & a la puiffance législative; droit qu'elle ne tenoit que d'elle-même, & que nos rois ne lui avoient pas donné. SECOND AGE. Formation des Loix: . les loix font fans cóntredit fobjet le plus important pour une nation libre. Leur forma* tïoii avoit toujours effentiellement dqpendu dö concours de la volonté du roi & de ï'aflem» blée nationale. C'étoit au champ de mars que la nation propofoit au roi les régiemens qu'elle jugeoit convenables & propres aux circonftances, régiemens qui ne pouvoient acquérir force de loi que par 1'autorité du monarque; c'étoit dans cette même affemblée que les róis propofoient leurs ordonnances ou capitules qui n'acquéroient 1'autorité de loi que par 1'accepr  'sxjr les Ètats Généraux. 43^ tatlon ou confentement de cette affemblée, C'eft un point de fait dbnt les preuves font fans nombre. Parmi celles rappbrtées; la réponfe de Charleinagne a la demande de difpenfer les feccléfiaïliques du fervice militaire, en eft une des plus éclatantes & des plus incohtefiables; Nos rois ne tentèrent les premiers actes de législation qu'avec bëaucotip de retentie, afin de ne pas allarmer leurs fujets par 1'exercicè d'une nouvelle autorité (1). Ils éviterentj paf leurs premières ordonnances, d'ufer de commandement; ils traitdieht ou plutöt ils tranfiegeoient avec leiirs fujets; ils leur indiquoiént les mëfiires qu'ils jugeoient les plus utiles au bien public, & les engageoient k les adopter (z)l Les établifferriens de S. Louis, quóique tfèsi propres a fervir de löix générales, ne furent point arinoncëes comme cctrirnandemehs abfölus, mais feulement cororne un code de lobe deftiné k fervir de regie dans I'ëtendue de fes domaines. Le refpect que Ton avoit pour les vernis de ce monarque ne contribua pas peti ( 1 ) Robertfon, tom. hT, pag. 157. Voyezla hötê 38 , pag. 349. ( 2 ) Ordonnance de Philippe-Aueufte. Ordonnance de Louis VI»; Èe 2  #3 'homme de génie, nous fait voir la puiffance i> des rois de France fe former, mourir deux ( 1 ) Obfervation fur l'Hifroire de France , tom. II, PaS- 35 5- ( 2,) Recued des ordonnances , tom. I" , pag. J & 5. { 3 ) Robertfon , tom. Ier, pag. 158.  SiUR LES È'T'ATS CÉsh-AÜX. '457" » fois, rënaïfre de même-, Umguir enfuite pon- ' » ciarit plufieurs fiecles ; mais prèoaht mfehfi»» blcmentd.es forces. s'accrcïtre de toutes parrs V & monter au plus haut point; femblable-a » ces fle uves , qui, dans leur cours, perdent leurs-eaux ou fe cacHent fous terre , puis » reparoiffent de nouveau groffis par les ri- '?> vieresqui s'y jettentck entraïnent avecrapi- 'M dité tout ce qui s'oppofe a leur paffage » (r).. Mais reprenons 1'ordre des faits.'. La nouvelle forme que nos rois avoienê ' donnée au parlement- depuis le regne de Philippe-le-Bel, parlement -auquel ni les barons 'ni les évêques n'affiftoient plus■; le même nom donné a deux corps , dont on pourroit faire fentir la difrerënee fuivant les tems & les c;rconflances , (1'on veut dife ie parlement' ren cru fedentaire , & le parlement compofant lafTent--blée générale-de la nation)' contribua infimment-a foconder leurs - vues, Sck trom per la. nation qui eonfondit. aifément leurs droits Sc. leurs fonciions. Ges eirconlrances réuniès- infpirerenr aux, rois 1'idée de fe-fervir du parlement comme d'un infirument propre a lui faire goütcr Fexer-- ( i ) Encyclopédie j.tom. Vlï, pag. iS>i , au mot. •jFrancet E e 3.  438 Analyse ges Historiens. cice qu'ils vouloient faire de la puiffance Ié-' gislative (r). La nation accoutumée k voir les nouvelles loix examinées ck autorifées avant d'être publiées, ne fentit pas affez combien il étoit différent de s'en rapporter fur eet objet important k 1'affemblée nationale ou a un tri» 4>unal nommé par le roi. Mais comme ce tri» bunal étoit compofé de perfonnes très-recommandables ck très-verfées dans la connoiffance des loix , lorfqu'un nouvel édit recevoit la fancfion de ce corps, il n'en falloit pas davantage pour engager les fujets a s'y foumettre (z). De-la 1'ufage introduit ck confervé jufqu'è nos jours d'envoyer les nouveaux édits au parlement pour être yérifiés , examinés ck enregiftrés. D.eAk le droit de cohequrir a la législation.fj) De-la cette maxime fondamentaledans la jurifprudence francoife ; que fans cette formalité les édits ck ordonnances n'auroient aucun effet &c ne pourroient faire loi (4). De-la la ( 1 ) Robertfon , tom. I", 354 , aux notes. ( 2 ) La Rochcflavin , des pariemens de France. ( 3 ) Tom. 1C1 , aux notes , Robertfon. ( 4 ) Le roi Jean difoit que le parlement étoit efentielleir.ent & conftitudvement établi pour poutvoir aux apires de toute la rèpublique, aux fiennes, & a celles de fon royaume. Charles - le - Sage en avoit Ia même, idéé, lorfqu'^  sur les États Généraux. 43^ néceffité abfolue d'une délibération libre &£ ïéfléchie pour connoitre, par les formes nationales, fi 1'édit eft émané du prince , s'il n'ëfi point contraire k 1'intérêt du roi & de I'état, oppreffif pour le peuple , ou deftrutteur des déclaroit que le parlement tenolt les rénes de fon êtat. Ordonn. du Louvre , torn. II & III , pag. 5 41 & 4§2*. Charles VI , en faifant déchirer, en, fa préfence , certaines lettres & ordonnances, pour n avoir été vïfées par la cour de parlement, mais foudainement & hativement publiées. Du.Tillet, des.Rangs, pag. 393., Paris 1586. Henri II, lorfqu'il fit réponfe par fon;ambaffadeur 9 Charles ■, Quint , que la vérification au parlement ejt néceffaire-, tant de difpofition de droit que par ks ordonnances & ufances du royaume. . . . Mémoires dreffés & envoyés par M.. le chancelier. Second mérnoire. Charles IX, lorfqu'après des infiruéfions de fa main,. il fit déchrer au pape , par fon ambaffadeur , que par la conflitution de fon gouvernement, & fuivant les anciennes ordonnances inviolablemcnt obfervées , rien ne pent avoir force de loi. publique en France, qu'il ne foit publté & autorifé en vertu d'un ar réi du parlement. Preuve. deslibertés, chap. 22 , n°. 35. Enfin, Louis XIV lui-même-, lorfqu'il difoit que les. Ipix. & les.ordonnances étoient envoyiesdans les compagnies jbuveraines., établies principalcment pour autorifer lajuflice des volontës des rois , & les faire recevGtr par les. peuplis avec le rcfpell & la vénéra.üon qui kar efl due. Neren , ïom, 11 , pag. iS„. 4  44Q Analyse des Historiens loixfondamentalesdumyaume(i).De-la,quah« tité cl'édits modinés , changés & corrigés (i). De-la, enfin, une plus'grande quantité d'autres rejettés , même fans remontrances, malgré les ordres précis & réitérés de ros rois (3). (1) Encyclopédie, tom. V, pag. 399 , au ma* 'Enre^iflrement. (2) Ordonnance de 1361 , portant qiïclles ont été •vues, corrigées & lues en parlement, Necon , pag. 612 , aux notes de Guy Coquille. (3) La Roeheflavin, quatrieme Gen. 1621 , pag. 935;. Linna;us, notitia regni Francias , liv. i; cap. 9, pag. 223. La Roeheflavin tompre plus de cent édits rejettés par arrêts du parlement, depuis 1562 jufqu'ea 1589; & Linneus en cite encore beaucoup d'autres depuis. Arrêts par lefquels les enrcgiöremens des édits , déclarations , lettres parentes , & lettres de juftice font lefufés; fcavoir, arrêts des 3 & 29 janvier, 8 juillet 21 aout 1597; 5, 17 & 26 juin;, n feptembre 1598 ; 5 janvier , 20 février, premier mars , 26 avril, 12 mai, 23 juin, 19 juillet, 28 aoüt , 5, 16 & 30 décembre 1600 ; 3 février , 12 feptembre , 28 novembre 1601 ; 23 janvier, 16 mars 1Ó02 ; 15 & 24 mars 1603; 1" feptembre , 2f novembre 1604; 1330111 1605, • 2 décembre 1606; 5 mai, ió juin, & 28 juillet 1607; 21 juin, 6, 1.7 & 20 juillet 1613 ; 21 juin 1617; M & 17 novembre,, 11 décembre 1618 ; & quantité d'autres qui tous prononcent en ces termes : La cour * déclaré & déclaie n'y avoir lieu de regijlrer. . . . La  sur les États Généraux. Mais dans ce nouvel ordre de choles, il en eft un remarquable. Nous avons vu que juf» qu'au tems de Philippe-le-Bel, il n'y eut d'autre affemblée repréfentative de la nation, que le parlement, compofé alors des feuis grands vaffaux de la couronne & de lettrés magiftrats choifis pariïii les nobles. Nous avons vu ce prince habile diminuer ia puiffance du parlement d'une maniere infenfible a la nation , & dégoutant d'abord les grands d'une affemblée devenue tribunal de jurifpruden.ee par la multitude des affaires particulieres qu'il permit d'y porter , au .lieu des affaires générales que 1'on y traitoit; par radmifïion des gens du roi qui n'y furent introduits d'abord que pour confulter, & y eurent enfuite voix délibérative; & perpétuant, après, la durée de cette affemblée , & la rendant féclentaire ; & par une politique adroite detruire d'une main ce parlement, cour a declarè & dédare n'y avoir lieu de vèrification.,.. La cour a dédare &■ dédare n'y avoir lieu d'ehregijlrer.... La cour a dèjdarè & dédare ne pouvoir procéder au regifire , &c. Quelques-uns de ces arrêts ponent : Et le roi fera tres-humblement fupplié d'avoir la préftnle dèlibéraüon agrèMe , comme faite pour le bien de fon fervice ,' ou comme fake pour le bien du royaume. Voyez les Remontrances de Touloufe.  '442 Analyse des Historïens & de 1'autre en faire fortir un nouveau de fes. racines, qui avoit 1'air de lui reffembler, & qui ne lui reffembloit en effet que par le droit de concours k la puiffance législative qui lui fut tranfporté ; mais la nation , par ce changement n'étoit pas privée du droit d'accorder des im-< pots. Cette matiere lui étoit réfervée , & il auroit été difficile d'y toucher fans la réveiller de fon affoupiffement. II falloit donc 1'affembler pour en obtenir ; &c 1'embarras fe renou-> velloit en proportion des befoins qui devenoient plus fréquents. Pour obvier k eet in* convénjent , les vues de Philippe-le-Bel lui firent adopter 1'idée de ne l'affembler que par députés & d'y admettre le tiers-état (i), ordre ( i ) Encyclopédie , tom. VI, pag. 20 , au mot 'Etats. Les premiers états généraux furent affemblés par Philippe-le-Bel en 1301 ; les plus connus font ceux tenus en 1313 ou 1314, de 1321, 1-338, 1339 & 1343; fous Philippe de Valois en 1350, 1355 , 1356, 5357 » J3)8 & 1369 : beaucoup d'autres fous Charles ;VI, qui le trouvent tout au long dans les préfaces de M. Secouffe. Sur les tom, III & fuivans, des ordonnances de la troifieme race. . . . Sous Louis X I en 1467 ; fous Cha-rles VIII en 1.506; fous Henri II en 1558; fous, Charle_s IX en 1560, 1563 & 1566; (bus Henri 11%  sur les États Généraux. .445' qui n'y fut admis que pour balancer avec plus d'avantage le crédit ck 1'autorité des deux autres , c'eft-a-dire , la nobleffe ck le clergé. Par cette tournure , il fraya la route a fes fucceffeurs de s'emparer de cette branche de la liberté nationale: de-da 1'origine des états-généraux , états qui ont éprouvé le même fort que 1'ancien parlement ou affemblée générale de la nation , & qui ne fubfiftent plus depuis 1614, L'on ne fe propofe pas de donner une chronologie exacte de tous les états généraux qui ont «té tenus depuis Philippe-le-Bel jufqu'a leur ceffation , on fe bornera a faire voir qu'elle étoit leur autorité. Tous les hiftoriens font d'accord qu'elle n'a-. voit trait uniquement qu'aux impöts. C'étoient eux qui avoient le pouvoir de les accorder au nom de la nation. Ils avoient le droit d'en fix er la quotité, 1'emploi, d'en détermiper la régie., la perception ck la durée. lis nommoient k eet effet (1) des généraux des aides qui en avoient en 1576, 1588, 1593 tk 1614. II y eut auffi des affemblées prövinciales, mais il n'en eft pas queftion ici. ( 1) Les états généraux tenus en 1343 , furent les premiers ou l'on ne fixa point 1'emploi des deniers, 'Encyclop, Ibid, pag. %t.  £444 Analyse des Historie la fupérintendance,. & des éltfS par diocèfês pour taire rimpofition & la levée des deniers-: ©öjéts dont on rendoit compte aux états qui s'aiTembloient dans un tems marqué. Philippe-le-Long ayant mis , fans confulter les états , une impofition fur fes peuples , tous les ordres s'émurent & réclamerent contre cette entrepife. II y eut même des particulier* qui en interjetterent appel au jugement des états-généraux s tant on étoit perfuadé qu'ils avoient eux feuls le pouvoir de mettre des impofitions ! Ce prince fut obligé de les con*. voquer ; mais 1'impöt ne fut point accordé ; ÖC pour prévenir dans la fuite de pareilles entreprifes fur les droits de la nation, il fut arrêté dans 1'affemblée des états, tenue en préfence du roi en 13 ; 8 &• 1359, que ton ne pourroit impofer ;x lever taillettó France fur le peuple, mime en cas de néceffité ou utilité, que de foclroi des états (i). Charles VII fut le premier de nos rois qui franchit cette barrière, en impofant, de fon au» torité privée & fans confulter. les états , Ia taille fur fes fujets; mais la juftice, la néceffité reconnue de cette impofition & la fage économie du prince qui Texigeoit, juflifierenr aux yeux de la nation cette démarche hardie , &c por- { 1 ) Encyclop. Ibid, pag. aa.  feUR 1ES ÉTATS GÉNÉRAUX. 44^ ïerent les peuples a la payer fans murmurer; impofition cependant qui n'excédoit pas vingt fois par tête pour le plus haut impofé, & dont le produit total ne furpaffa jamais fous fon regne le montant de la folde des francs archers que ce roi avoit confervé (1). II y eut dans la fuite beaucoup d'autres tenues d'états; mais 1'indécence avec laquelle ils fe comporterent en plufieurs occafions, & la hardieffe de leurs démarches fufcitées principalement par le tiers-état, furent 1'écueil ou fe brifa la puiffance qu'ils avoient eue (2) : de maniere qu'on les affembla moins fréquemment, &C qu'ils n'eurent plus que la voye de ffmples remontrances. Cependant les étatsgénéraux tenus fous Charles IX donnerent lieu a trois célébres ordonnances qui furent dreffées fur leurs plaintes; celle d'Orléans en 1560, c.elle de Rouffillon en 1563, celle de Moulins en is66; & les états-généraux tenus a Blois fous Henri III, donnerent auffi lieu k 1'ordonnance de 1579 (3). ( 1 ) Villaret, Hul. de France , tom. XVI, pagj 32.4, 325 & 32S. ( 2 ) Encyclopédie , ibid. pag. 24. Ce fut dans les états généraux tenus en 1358. {3) Encyclopédie, ibid. Boulainvilliers, tom. II, l  44 ordres contraires a la loi que l'on pourroit » extorquer du monarque (z). » ( 1 ) Stabilité des loix. Patia vel placha qua per fcripturatn légitime ac juftiffime fatfa funt , dummodo dies vel annus fit evidenter expreffus, nuïlatenus immulari permittitur. Balufe , capitule, lib. 6, pa;. 981 &C982. ( 2 ) Encyclopédie , tom. IX, pag. 644, verbo Loi, Tomé FI. F f  450 Analyse des Historiens Le motif & 1'effet des loix doit être Futilité, le bonheur &c la profpérité de tous les citoyens (i). La raifon naturelle confirme dans tous les efprits la néceffité de ce premier caractere de la loi qui doit opérer fon immutabilité, paree que rien ne doit être fi cher aux hommes que les loix deftinées k les rendre bons, fages & heureux , & qu'elles font tellement effeniielles pour 1'ordre de la fociété, que l'on ne pourroit y rien changer fans bleffer eet ordre lïéceffaire, & en troubler 1'harmonie (2). C'eft fans doute de ces loix utiles & immuables que l'on a tiré eet axiome : Lex imperat regibus, paree que, dans tous les tems, Futilité & le falut du peuple a été chez toutes les nations recommandé par la raifon & par les loix, falus populi optima lex. Auffi Charlemagne], fupérieur a la gloire dont fon tröne étoit environné , ne dédaignoit pas d'en tempérer 1'éclat pour fe conformer au vceu de la nation fur Futilité de chaque loi, avant d'en imprimer le caracf ere k fes capitules. Ainfi le capitule ne devenoit loi immuable que lorfque le confentement de la nation, prouvé par la fignature de ceux qui la repréfentoient, avoit i (i)Ifidore. . . , Ordonnances royaux,pag.447. j(a) Encyclopédie. Ibid,  sur les États Généraux. 45» concouru a fa formation ou a fon adoption: exemple mémorable qui a toujours été conftamment fuivi par fes fucceffeurs jufqu'a Philippe-le-Bel. C'eft donc le concours de la nation & de 1'autorité royale qui ont été la marqué diftinttive & effentielle de la ftabilité & de Fimmutabilité de la loi (1). Dans un état oü il n'y a pas de loix immuables , I'état du citoyen eft incertain , teut eft foumisa 1'arbitraire; & dans un état oh n'yü pas de loix fondamentales, la fucceffion au tröne ne peut être fixe , puifque le fucceffeur eft déclaré par le prince, par fes miniftres, oupaf, une guerre civile (2). Ön appelle loix fondamentales d'un état celles qui embraffent fa conflitution, & par lefquelles le corps entier de la nation détermine la forme de fon gouvernement, la convention entre le peuple & celui auquel il dé* fere la fouveraineté, qui réglent la maniere dont il doit gouverner, & qui prefcfivent des bornes a 1'autorité fouveraine. Ces régiemens font appellês loix fondamentales , paree qu'ils font la bafe &. le fondement de I'état, fur lequel 1'édifice du gouvernement (1 ) Balufe , cap. Rgg. Franc. pag. 273 & 274. ( a*) Encyclopédie, tom. IX, pag. 644 , verbö Lol Ff i  jfji Analyse des Historiens eft élevé , & que les peuples les confiderent comme ce qui en fait toute la force Sc toute la ïïïreté(i). Si le corps entier d'une nation, en fe donnant des maitres, fe réferve le pouvoir légiflatif, la nomination de fes magiftrats , confie a un fénat, a un parlement le pouvoir judiciaire , celui d'établir des fubfides, Sc qu'elle donne au fouverain, entr'autres prérogatives, le pouvoir militaire Sc exécutif; que le gouvernement foit fonclé fur ce pied-la par 1'ordre primordial d'aiTociation entre le fouverain &. le peuple , eet acie primordial portera le nom de loix fondamentales de I'état, paree qu'elles en conftituent la füreté & la liberté (2). De telles loix ne rendent point la fouveraineté imparfaite : mais au contraire elles la perfedtionnent en réduilant le monarque a la néceffité de faire le bien, & en le mettant dans l'impuiffance de faire le mal. 11 y a encore une autre efpece de loi fondamentale de droit Sc de néceffité effentielle dans tous les gouvernemens, même dans ceux ou la fouveraineté eft, pour ainfi dire, abfolue ; Sc ( 1) Encyclopédie , tom. IX , pag. 660 , verbo Lat fondamentale. ( 2,) Encyclopédie. Ibid.  sur les États Généraux, 455 •cette loi eft celle du bien public, dont le fouverain ne peut s'écarter fans manquer plus ou moins a fon devoir (1). D'après ces principes , on doit regarder comme loix fondamentales du gouvernement francois, celles qui affurent Pindépendance de la couronne, qui Pont rendue héréditaire , & qui en ont exclu les filles, celles qui reglent 1'ordre de la fucceffion au tröne , qui donne a ( 1 ) Difcours du premier préfident du Harlay , au lit de juftice, du 15 juin 1586. « Dans la remarque & la défignation des ordon« nances qui s'obfervènt en ce royaume, nous ufons » de diftinétion ; car nous appellons les uns les or» donnances des rois , & les autres du royaume. Celles n que nous appellons royales peuvent être changées » pour les tems; & il n'eft pas fans exemple que, » felon la variété des tems, la néceffité ou commox dité de leurs affaires , il y ait diverfité de loix, paree j> qu'elles font mortelles comme les rois ; mais pour ce j> qui eft des loix du royaume , elles font immortetles, »» & ne peuvent être changées, variées ni altérées , » pour quelque caufe que ce foit. « Entre ces derniers , il y en a une certaine & in3) violable , fcavoir qu'une loi n'eft point loi, ni une n ordonnance tenue pour ordonnance , qu'elle n'ait été » apportée en ce lieu (le parlement), qui eft le con» fiftoire des rois & du royaume, délibérée, publiée » & regiftrée; & cela a toujours été obfervé. » Tréfoi; des harangues, feconde- partie , pag. 198. F f 3  4)4 analyse des His tqrieks la nation le droit de fe choifir un maitre dart* le cas d'extintlion de Ia maifon regnante, celles qui lui confervent le droit de concourir k la •puiffance lég'.flative, & qui conftiturnt la forme du gouvernement francois; celles qui garantiffent aux fujets la füreté de leur perfonne ck de leur vie, la propriété de leurs biens, 1'ufage légitime de leur liberté, le droit de veiller k la confervation de leur honneur , celui d'être jugés par leurs juges naturels, ék gouvernés fuivant la forme de la fociété dont ils font membres. De ces loix primitives ck fondamentales, il en réfulte néceffairement une autre non moins précieufe au peuple francois , religieufement obfervéc jufqua nos jours, èk qu'il envifage comme le rempart de fa liberté ; c'eft de ne publier aucune ordonnance ou édit, qu'il n'ait été vérifié au par'ement, formalité effentielle pour lui imprimer le caraftere de loi & la force exécutrice. La vériflcation.des loix n'eft donc pas une forme de vain cérémonial, puifque cette vérification dérive du droit du corps entier de la nation de concourir k la puiffance légiflative , droit qui prend naiffance dans le contrat primordial entre elle ck ie fouverain, ck par lequel «die a deteraiiné la maniere dont elle vouloit  SUR LES ÊTATS GÉNÉRAUX. 4?5 être gouvernée (i). Méconnoïtre une vérité auffi éclatante & auffi généralement reconnue , c'eft trahit- la nation & les rois même ; c'eft rompre tous les liens quiattachent & quilient les fujets au monarque ; c'eft enfin d'un peuple libre vouloir en faire un peuple d'efclaves. L'on ne s'eft donc pas trompé en regardant le parlement comme repréfentant la nation en cette partie (2) , & s'il plaifoit au roi d'öter k ce tribunal le pouvoir qu'il lui a donné de la fuppléer dans I'exerciee de ce droit, ou que la nation le réclamat,.il feroit de fa juftice de la réintégrer elle-même dans ce droit; droit qui lui appartient inconteftablement, auquel elle n'a jamais renoncé, dont elle a conftamment joui pendant plus de quatotze fiecles ; droit enfin dont aucune autorité légitime ne peut la dépouiller, & auquel on n'a pu porter atteinte fans fon aveu. ( 1 ) Encyclopédie , tom. V , pag. 699. ( 2 ) En France , on a toujours reconnu la néceffité de faire approuver les loix nouvelles par la nation, ou par les cours fouveraines qui la reprtfentent en cette partie , & qui étant dépofitaires de 1'autorité royale , exercent, a eet égard , un pouvoir naturel émané du roi même pour la force de la loi. . . . Difcours dut chancelier Olivier, au parlement, en 1^9. Ff 4  Analyse des Historiens Les puiffances étrangeres (1), les états généraux (2), les chanceliers & les miniüres (.1 ) Charles-Quint exigea de Francois Ier, que Ie traité de Cambrai fut vérifié & enregiftré dans tous les pariemens , gn préfence des procureurs généraux , qu'il leur donneroit pouvoir fpécial & irrévocable. „ Pour » illec confentir aux entérinemensfufdits , & eux fouw mettre volontairement a 1'obfervance defdits traités , « & qu'en vertu d'icelle foumiffion, Ie roi feroit a ce » condamné par arrêt & fentence définitive defdits pariemens en bonne & convenable forme. » Recueil des Traités de paix. Paris, Léonard, 1693 , tom. II, pag. 366. 4 Alais ce Prince alarmé par des proteftations da mimftere public , & perfuadé que 1'enregiftrement n'avoit pas été fait en bonne & convenable forme, envoya deux ambafTadeurs au parlement de Touloufe , pour faire enregiftrer Je traité nouveau du confentement du procureur général Hiftoire de Languedoc , tom. V, pag. 130. . . . Lafaille, tom. II, pag. 70. . . . Laroche. . . . édit. in-fol. pag. 3j4. (2) « Les états de Blois, en 1576, feplaignoïent » que les inventeurs des fubfides & édits nouveau* "avoient toujours les juffions & comman»> demens pour forcer la confcience & Ia religion des »> compagnies fouveraines , par retranchementdes ga» ges, par interdiftion d'entrée & de féance.» Combien d'édits ont été enregiftrés & véririésavec ces HlOtS : par commandtmtns plufaurs fois rütérés, qui „e  sur les États Généraux.' 457 les (1) plus recommandables (2) , leshiflorio.graphes les plus illuftres que la France alt font jamais néceffaires quand les édits font juftes & bons ! Mezcrai , tom. III, pag. 746. Les mêmes états chargerent leurs députés , en 1577 de dire au roi de Navarre. .. . . « Qu'il faut que tous « édits foient vérifiés & comme controles ès cours de » parlement , avant qu'ils obligent a obéir, lefquelles , 33 combien qu'elles ne foient qu'une forte des trois états . 3) raccourcis au petit pied , ont pouvoir de fufpendre 3) modifier & refufer les édits « . . . . Mém. du duc de Nevers, tom. 1% pag 44. Paris 1665. (1) Le chancelier Olivier dit dans le lit de juftice du 2 juillet 1549 , « que le parlement rendu féden3) taire n'en étoit pas moins le lit de juftice de nos 33 rois, la cour & féance des princes & des pairs , le » dépot des ordonnances qui s'y faifoient la plupart, 33 le roi y féant, & autres de par lui. 33 ( 2 ) M. de Caftelnau , ambaffadeur en Angleterre , difoit « que les pariemens font en tant comme huit 33 colonnes fortes & puiffantes , fur lefquelles eft ap3) puyée cette grande monarchie; les édits n'ayant ■» point de force , & n'étant approuvés des autres ma33 giftrats, s'üs ne font recus & vérifiés efdits parle33 mens, qui eft une regie d'état, par le moyen de la~ 33 quelle il ne pourroit, quand il voudroit, faire des 3» loix injuftes, que bientót après elles ne fuffent rejet33 tées» . . . . Mémoires de Michel de Caftelnau, lib." 2 , chap. 4.  458 Abrégé des Histo riêns eus (tj, nos rois eux-mêmes, & nommément celui fous lequel nous avons le bonheur de Nota. Pau, Befancon , Douai, n'appartenoient point encore a la France. ( i ) Un de nos hiftoriographes a dit que fans le parlement, le roi ne peut rien ordonner'ni dilpofer concernant la chofe publique ; .... que telle fut de tont tems 1'autorité des pariemens chez les Francois, qne les ordonnances du roi ne peuvent être exécutées lans arrêt du parlement; . . . . fine quo fenatu , rex de reipublicce Jlatu & provenlibus regni nihil unquam fiatuere aut difponere convenit , . . . . ejus parlamenti tanta fuitautoritas fernper apud Francos ut qua rex ipfe de republica, de jute & proventibus regni fiatuerït, ex fine ejus Jenatus decreto non procedant Bened. fol. 84, n°. 188. Et un autre quelques annés après. « Que les ordonnances de nos rois n'ont forcê de » loix , tk qu'on n'eft ïenu d'y obéir qu'après que Ie » parlement a examiné fi elles font juftes ou injuftes., » & qu'il les a folemneliement approuvées. » Hatc fernper fuit regum Franciie benigna moderatio ut non prius refcripta fuavim legis habere voluerint, aut obfequii neceftatem requirere quam d fenatu «qua fint, aut iniqua cogniturn fuerit, accedente poftea jolemni fenatus approbatiane... Anne Robert, liv. a, chap. n , pag. 449 , édit 1604.... Et nn autre encore dans le fiecle fuivant, a que 1'au» torité du parlement donne la fanftion aux loix du » prince ; que fes loix ne font pas exemptes de la cen» fure du parlement; . . . . qu'elles ne paffent a Ia » poftérité qu'en vertu d'arrêts du parlement. » ft*  sur les États Genéraüx; 459" VÏVre (1), ont rendu dans tous les tems les témoignages les plus authentiques a ce principe fondamental qui conftitue la liberté nationale. Les ordonnances de Moulins, de Blois, celle de 1667 , par lefquelles on a voulu porter atteinte a ce principe; 1'exemple de FrancoisIer, qui abolit la pragmatique-fanftion, ce fameux boulevard des libertés de Féglife gallicane , dont 1'abolition excita les regrets de tous les tuna eft. . . . quam authorem principes facrandis, pro' mulgandifpae JancTionibus fuis voluit; cujus confdii cenfurae conftitutiones fuas exime ediSiaque fua noluit , imb cujus decretis hujufmodi fua aSla confecrari aternitad velint. . . . Guill. Dudeanot , in Pand. pag. 128 ; &c c'eft ce qui a fait dire a Pafquier , que le parlement a toujours été deffiné pour les affaires publiques & la Vérification des édits : car tout ainfi que fous Charlemagne & fes fucceffeurs ne s'entreprenoit chofe de conféquence au royaume , que l'on ne fit affemblée de prélats & de barons pour avoir 1'ceii fur cette affaire ; auffi ie parlement étant arrêté , fut trouvébon que les volonrés générales de nos rois n'obtinffent point lieu d'édits , finon qu'elles euffent été vérifiées & homologuées en ce lieu (le parlement). Recherches de la France, tom. I£r, liv. 2, chap. 4. ( i ) Traité entre les rois de France & de Sardaigne i fur les limites de leurs états, du 24 mars 1760 , earegiftré dans tous les pariemens du royaume.  '46b Analyse des Historïensbons Francois; le concordat qui en fut la fuite J par lequel ce prince & Léon X fe donnerent refpe&ivement ce qu'ils favoient ne leur pas appartenir , ne prouveront autre chofe a la poftérité , fi ce n'eft que la plénitude de la force & de la puiffance réfide dans le fouverain; qu'il vaut mieux céder a 1'autorité que de dor.ner lieu aux malheurs que pourroit occalionner une réliftance trop opiniatre, &c que l'on ternït la gloire des plus beaux regnes par 1'abus du pouvoir arbitraire. Mais il n'en réfultera pas tnoifts que le droit de vérification ne foit une loi fondamentale de I'état, paree qu'elle eft 1'expreflion du vceu de la nation & du concours de 1'autorité royale ; loi que nos rois font dans rheureuf-* impuiffance de changer ; & quels cfforts n'ont-ils pas fait pour abattre ce rampart de notre liberté , efforts qui n'ont malheureufement que trop réuffi par les lits de juftice dont on a introduit 1'ufage dangereux ? La préfence de nos rois au parlement n'avoit pour objet, dansles premiers tems, que de donner a la délibération de la nation 1'autorité que pouvoit lui imprimer le caradtere de loi, ou de confulter la nation fur les ordonnances ou capitules que le roi vouloit établir en loix,& auxquels il defiroit procurer la ftabilité &l'immutabilité. La préfence du roi au parlement  SUR LES ÉTATS GÉNÉRAUX. 461 annongoit aux nations étrangeres le concert redoutable du monarque francois & de tous fes fujets ; elle eft défignée aujourd'hui fous un titre particulier inconnu avant le roi Philippe-leBel , quileur apprend la contraditfion de leurs fentimens : elle n'eft plus annoncée que fous le titre redouté de lit de juftice , titre quiporte la confternation dans tous les ccevirs. Leroi eft toujours cenfé également préfent dans fes confeils & dans fes pariemens: la réalité de fa préfence; 'fa préfence effective dans fes confeils, ne fait point changer de nom a la féance ou au réfultat des délibérations de ce tribunal ; par quelle raifon fa préfence effeaive dans le plus augufte de fes tribunaux , dans fa cour dés pairs, y fait-eile changer le feul titre qu'elle portoit autrefois d'affemblée du parlement ? La juftice qui émane des décifions de fa majefté, foit dans fes confeils,foit dans fon parlement, n'eft-elle pas toujours cenfée la même ? Ne doit-elle pas porter par-tout le même caraêtere d'équité, de dignité, de puiffance, & la même impreffion d'autorité , de refpecf &de foumiffion ? Les anciennes affemblées de la nation que le roi honoroit de fa préfence, étoient plus véri'tablement des lits de juftice , quoiqu'elles n'en portaffent pa's le nom. Elles étoient 1'efpoir 8c le plus ferme appui d'un peuple libre : les pre-  '461 Abbrégé des Historiens miers lits de juftice qui ont été tenus furent defirés du peuple, paree que les rois n'y venoient que pour délibérer avec le parlement fur les affaires les plus importantes de I'état, foit qu'il fut queftion de déclarer la guerre aux ennemis de la couronne, foit qu'il fut k propos de conclure la paix pour le foulagement des peuples (i). Ils font devenus par la fuite un objet de crainte & de terreur. On y opinoit en préfence du fouverain en pleine liberté ; les voix y étoient comptées, & le chancelier de France y recueilloit deux fois les avis (2), dont le plus grand nombre obtenoit toujours la prépondérance. Le titre de lit de juftice & 1'appareil qui 1'environne annoncent au contraire aujourd'hui la privation de la liberté des opi- • nions; par conféquent le refus d'être éclairé. Cependant la fplendeur du tröne , 1'éclat de la majefté royale ne produit point dans les confeils Ia gêne des opinions; fa majefté les écoute avec complaifance, enpefe lesmotifs & ne dédaigne pas de fe déterminer le pius fouvent par le nombre des fuffrages ; c'eft le même roi ; ce (1) Difcours de M. Talon , au lit de juftice de 1649- Encyclopédie, tom. IX, pag. 581, verbo Lit de Jufiice. ( 2 ) Encyclopédie. Ibid,  SUR LES ÉTATS GÉNÉRAUX, 463 font également les premiers magiftrats de la nation; c'eft au même lit de juftice une affemblée encore plus augufte , puifque c'eft auffi 1'affemblée des princes ck des pairs qui, par leur naiffance , en font effentiellement les principaux membres. Le roi entre dans fes confeils pour y examiner les objets qui vont y être propofésril entre au lit de juftice au contraire, avec 1 opimon que quelques •uns de tes miniftres lui ont perfuadé d'adopter, & avec la volonté déterminée de la faire exécuter : 1'affemblée de la nation avec fon roi, fous les deux premières races , ck dans les premiers tems de Ia troifieme , annongoit a toute la France que fes intéréts avoient été pefés & débattus avec la plus fcrupuleufe attention. Un lit de juftice annonce feulement aujourd'hui que le roi veut être obéi, ck que le dégré de confiance qu'il accorde a deux ou trois de fes miniftres , 1'emporte fur celle qu'il donne aux princes de fon fang, aux pairs, aux premiers magiftrats , ck a tout ce que la nation peut avoir de plus recommandable. Cependant les rois ck leurs miniftres font fujets a 1'erreur comme les autres hommes; plus Ie pouvoir eft abfolu , plus 1'erreur efl dangereufe. L'abolition de la pragmatique-fanction fuffit ponr en convaincre; facrihee par  464 Analyse des Historiens" Louis XI a 1'efpofr de procurer la couronne de Naples a un prince de fon fang , il ne tarda pas a reconnoitre combien il avoit été trompé, &C il s'emprefla de la rétablir dans fa première force. L'abus du pouvoir pratiqué par le duc de Bourgogne, que Pafquier, dans fes recherches, nomme le fléau de la France (i), en eft une preuve non moins authentique. II perfuada a Charles VI d'envoyer Euftache de Laitre , qu'il avoit fait nommer chancelier Sc le comte de Saint-Pol, au parlement, le 30 mars 1418, pour y faire enregiftrer par force un édit révocatoire des fages ordonnances faites quelques années auparavant pour réprimer les entreprifes de la cour de Rome. C'eft le premier Sc malheureux exemple d'un enregiftrement forcé, Sc non librement délibéré (2). Les fuites Sc les effets de eet exemple, devenu funefte.a la nation par l'abus qu'on en a fait, mettent dans le plus grand jour les dangers auxquels on s'expofe en s'écartant des regies. Si quelque chofe étoit capable de juftifier de pareils écarts, ce ne pourroit être fans doute que { 1 ) Pafquier; pag. 65. (a) Encyclopédie, tom. IX, pag. 582, verbo de Juftice. les  sur les États Généraux; 465, les grands avantages qui en réfulteroient. Eh| quels font ceux qu'ont produits cette foules d'édits enregiftrés de force, ck par des adres d'autorité abfolue ? En fixant les regardS fur la mifere des peuples ck fur 1'épuifemenÉ actuel des finances, quiconque voudra examia ner ék approfondir les époques, reftera con? vaincu que plus les impöts fe font accrus , plus I'état s'eil affoibli ck obéré , comme s?il y avoit une efpece de relation phyfique entre les dégrés de furcharge des peuples 6k les dégrés de déprédation des revenus du royaume. Charles VII, ce héros dont la fageffe fauv$ la France, ck qui affermit la couronne chance-? lante ck ébranlée par la fadfion angloife , cej prince mécontent du parlement de Paris, mzU gré la fermeté de cette compagnie a s'oppofei? aux entreprifes du roi d'Angleterre 6k du duc de Belfort, Charles VII diminua 1'étendue du reffort de cette cour, ck créa un parlement & Poitiers: mais en ayant reconnu les inconyé-?' niens, il fe rendit aux remontrances quj I114 furent faites , & ce nouveau tribunal ceffa d'exifter, quoique 1'édit de fon infhtution ait déja été exécuté (1). ( 1) Hiftoire da France, par Villaret, tom. 3ïyi pag. 83 & 84.  5j(5e> Analysé des Historie ns Charles VII ne rougiffoit pas de revenir fin* fes pas, lorfqu'il s'agiffoit du bien du royaume* » II eft un arbitraire dépendant uniquement t> des principes & des préjugés. L'efclavage *> des fujets eft la bafe la plus affurée de la »> puiffance fouveraine : ainfi penfe le divan de *> Mahmoud..,. grand fultan de Tufquie .... *> un monarque ne regne véritablement qu'au*» tant qu'il regne fur un peuple libre », (i) Voila la première maxime du conleil de nos rois f il femble que l'on ait craint que les atteintes portées a ces maximes en 1770 n'aient été trop frappantes : on s'eft empreffé d'en pal* lier les conféquences par des affurances poftérieures : « Terreur des principes une fois reeon* » mie, les conféquences tombent néceffaire* *» ment par cette connoiflance (i) ». Le roi a déclaré dans fon édit de février 1771 , qu'il ejl des loix immuables , des loix Jacrées, qiiil ejl dans l'heureufe impuiffance de changer. II a répété le 13 avril fuivant, par la bouche de fon chancelier , 1'affurance qu'il avoit donnée a fes fujets de ne vouloir régner que par les loix & les ( 1 ) Amufement de la Raifon, imprimé a Paris eu 1747, avec approbation & privilege» ( 2 ) Même livfe,  SÜR LES ÉTATS GÉNÉRAUX. 4?7 formes fagement établies (l). ü a aulhentiquement déclaré qu'il « veut contenir fes fujets » fous 1'empire des loix, pour leur affurer k » tous cette liberté qui n'exifte qu'avec les » loix, & qui périt avec elles; qu'il ne veut 5> point de miniftres aveugles & paffifs du pou» voir abfolu; qu'il dédaigneroit une obéif» fahce avilie par la fervitude, Sc repoufferoit » loin de lui des magiftrats qui n'auroient pas f> le courage de lui dire la vérité ; que fon » cceur défavoueroit les loix mêmes fi elles » trompoient fes vues , fi elles faiibient le mal», heur de fes peuples (z) ». C'eft ainfi que Charles VII eut parlé ; c'eft ainfi qu'il a agi. Par ce même édit du mois d'avril 1771 ,1e roi a raffuré fes fujets fur les alarmes qu'ils avoient congues fur leurs droits de propriété Sc fur 1'inamovibilité des offices ; enfin fon chancelier a indiqué un terme qui doit préferver la race future des événemens qui ont occa- ( 1 ) La fervitude vient d'être anéantie par fimpératrice de Ruffie , dont les peuples étoient accoutumés a 1'efclavage b tk toute 1'Europe retentit defeséloges & de fa gloire. . . . Gazette univerfelle de Littéra-» ture, avril 1771 , nö. 10, liv. 4* (2) Déclaration de Ï766. Difeours de M, le chancelier , le 13 avril 1771.  <*68 Analyse des Historiens fionné ces alarmes tk des malheurs dont la • France gémit. Le terme jufqu'auquel on peut porter la fermeté, tk au-dela duquel la réfifi. tance fe changeroit en défobéifiance , cette borne eft pofée par la raifon & par les loix (i). Ces déclarations précieufes , ces principes de gouvernement li dignes d'un roi, véritablement le pere de fes fujets, renferment tout 1'objet des defirs tk des vceux de la naticn: mais en même tems ils prouvent la force du droit national qu'ils expriment, & dont la tradition efi trop conftante pour être méconnue ; ils prouvent que ce droit imprefcriptible réclame dans le cceur, & contre les faitsde ceux même qui le foulent aux pieds: ils donnent 1'efpoir confolant de voir le prince eomparer ce qui fe fait fous fon nom avec les fentimens de fon cceur, & réparer les malheurs dont nous fommes les témoins. On lit dans Montefquieu cette maxime d'une fage tk profonde poiltique: « s'il » eft vrai qu'il ne faut pas changer, lorfque » les inconvéniens égalent les avantages , en» core moins le faut-il, lorfque les avantages » font petits & les inconvéniens immenfes. » ( i ) Dii'couis de M. le chancelier , lors de 1'inflak feüoa du nouveau parlement de Paris. Fin du torne fixieme.