DES ÉTATS GÉNÉRAUX, ET AUTRES ASSEMBLÉES NATIONALE S. TOME DIXIEME.  ■  DESÉTATS GÉNÉRAUX, ET AUTRES ASSEMBLÉES NATIONALES. T O ME DIXIEME. A LA HA Y E; Et fi tromt «Paris, Chez Bvisson , Libraire, Hótel de Coëtiofquet i rue Hautefeuille, N°. 20.   DES ETATS GÉNÉRAUX £ T AUTRES ASSEMBLEES NATIONALE S. rum» ■mi iiMiwnmi iMJiMiamMM^^^taa^^ CÉRÉMONIAL. ANALYSE ET PRÉCIS DES ÉtAfS DE 1483 , Et ördonnancss rendtus d'aprls les Êtatsi Ë x tr ait du manufcrit tiré de Ia bibliothequë du Roi, n°. 321, 8c tranfcric fur l'excraic qu'en a infére dans le regne de Charles VIII j M. 1'Abbé Garnier / que nous avons tori-» fronté avec i'original, & qui donne un Précis des États , & des Ordonnanees qui ont étè le réfultati Tome Xi  i E T A T S Nous n'avons pas befoin d'obferver que Ie ftyle des Harangues & difcours a été rajeuni avan-; tageufeaientpar l'Hiftorieneftimable que noias avons nommé j nous ne dirons pas combien la Colleclion des États , donnée par Quinet, en 1614, eft infuffifance , puifque la prefque totalité des Procès-verbaux que nous inférons ici ne fe trouve point dans eet ancien recueil. Etats fous Charles VIII. HjE tems marqué pour la tenue des états étanc enfin arrivé, Les députés allerent faluer le roi au ehateau du Pleiïïs-les-Tours, & lui furent préfentés par le fire de Beaujeu, le 14 de janvier. La cour fe rendit a Tours, 011 le roi fit fon entree folemnelle, & le lendemain les états s'ouvrirent. Comme depuis le commencement de la monarchie, jamais Ia nation ne s'ctoit occupée de fi grands intéréts , Sc n'avoit parlé avec tant de liberté ; comme d'ailleurs les régiemens qui fe firent dans cette affemblée , forment encore aujourd'hui la partie la plus confidérable de notre droit public, j'ofe elpérer que ceux qui lifent 1'hiftoire pour y puifer des connoiiTances folides , &c non pour fe procurer un ftérile amufement, me pardonneront les détails ou je vais entrer. Je les puifs daas  fe o is s Charles VIII. 5 Ia relation manufcrite de Jean MalTelin, official de Rouen, qui non-feulement na riert ccrit qu'il n'euc vu & entendu; mais qui joua lui-même un róle confidérable dans cette grande aiTemblée. Commeneons par donner une idéé du lieu ou elle fe tint, & de 1'ordre qu'oa y obferva. Dans une vafte falie de 1evêché , on avoic drelfé un échafaud élevé de quatre pieds, long de trenre-cinq, & occupanc toute la Iargeur de la falie, excepté environ cinq pieds que 1'on avoit laifTés a droite, pour y pratiquer un efcalier : au milieu de eet échafaud étoit placé le trène couvert d'un tapis de foie parfemé de fleurs-de-lys; aux deux cöcés du tróne, on avoic laifTé un efpace vuide de la Iargeur'de fix pieds, ou fe tinrent debout, d'un có:é le conue de Dunois & le fire d'A.bret;'de 1'autre, Ie comte de Foix & le prince d'Orange : a main droite & è fix pieds de diftance du tróne, étoit un fauteuil couvert d'un tapis, pour le duc de Bourbon, connétable de France; a gauche, u„ autre fauteuil plus bas pour le chancelier Guillaume de Rochefort. Derrière le fauteuil da connétable, on avoit mis un banc ou étoienc affis les cardinaux de Lyon & de Tours, les fix pairs eccléfiaftiques, & le comte de Veia- A a,  ^ E T A T S dome; de 1'autre coté & plus prés du trone," ian autre banc étoit rempli par les ducs d'Orléans & d'Alencon, les eomtes d'Angoulême» de Beaujeu & de BrelTe , les comces de Candale, de Penthievfë , de Tancarville, de Joigny, de Rouffi, & de Braynej les feigneurs de la Trémouille , de Breuil , de Maulévrier , de Chatiïlon , de Luxembourg , vicomte de Martigues, de Polignac , de Clermont - Lodeve, le vicomte de Turenne , le vidame de Chaitres, de la maifon de Bourbon-Vendome; le lire de Pons, Montmorenci, Eftouteville, Cro'i, & les chevaliers de Saint Michel , fe tenoient appuyés fur le dolfiers des bancs, ou étoient répandus dans tous les espaces vuides du parquet fupérieur. Le parquet inférieur étoit rempli de bancs dreflés en amphithéatre. Les plus avancés étoient pour les évêques , les barons, les chevaliers Sc les confeillers du roi ; au centre on avoit formé deux encios pour les greffiers ou fecrétaires des états. Voici 1'ordre dans lequel les députés fatent appelles : i°. les députés de la ville de Paris, capitale du royaume; 20. les députés de Eourc;ogne, première pairie de France 5 30. de Normandie ; 40. du duché de Guienne. On doit obferver que le comte d'Angoulême»  saus Charles VI.ft. 5 quoique plus proche de la couronne, puifqu'il étoit de la branche d'Orléans , n'eut rang qu'après le duc d'Alencon , priace d'une branche plus éloignée ; Sc que le vidame de Chartres fr de la maifon de Bourbon - Vendóme, n'effc. nommé qü'après plufieurs feigneurs qui n'étoient point princes du fang 5 c'eft que dans. ces grandes allemblées, les princes n'avoient d'autre rang, que celui de leurs pairies ou de leurs terres. 50. Suivoientles députés du 'comté de Champagne; 6°. du comté de Touloufe; 70. du comté de Flandres. Après les députés des fix anciennes, pairies, on appeila ceux des fénéchaulTées Sc des. bailliages , en obfervant pour les rangs , la date de le.ur réunion a. laxouronne. Lorfque tous les. députés eurent pris place; Sc qu'un héraut eut. crié, fakes fdence, le chancelier s'inclinant profondément au pieds du tröne, demanda au roi la permifïion de parler, puis fe tournant, vers 1'aflemblée , il lui adreifa le difcours. fuivant: « Mefleigneurs des états , depuis que par la » volonté du roi des rois, le roi qui nous gou» verne aujourd'hui eft parvenu au tröne , il » na rien defiré avec plus d'ardeur que de raf-» fembler auprès de fa perfonne, 1'élite de. A }  '6 E t a r i » Ia nation. Voici les mocifs qui Fy ont enr v gagé, » II a voulu vofts marquer fa reconnoiffance » des fentimens d'aÜégrtfle que vous avez faic » éclater a fon avénemsnt a la couronne; en » cela vous avcz imité vos généreux ancêtres , » dont l'attachement a leurs fouverains ne s'efi: » jamais dementi. » C'eft le caraétere du Francois, d'aimer fon » roi , d etre toujours pret a lui facrifier fes » biens & fa vie , & de ne jamais déiefpérec » du falut de la patrie, tant qu'il conferve fon » maïtre légitime ; pendant que les autres peu» pies flottenc éternellement entre FobéifTance » 8c la révolte , abandonnent leurs fouverains » fur un léger mécontentament , ou a l'afpeót » du moindre danger j lifez leurs hiftoires, £ » peine y trouverez - vous deux ou trois fou»» verains de fuite qui aient laiffé a leurs hé» ritiers, la pofleflion tranquüle du tröne : 8C » fans chercher des exemples éloignés, exa» minez ce qui vient de fe paiïer en Angleterre. » Édouard lailfoit en mourant deux fils , déja w grands, & qui donnoient les plus belles efj* pérances} eh bien! ils font égorgés aux yeux » de la nation s qui loin de les défendre, &S s> de les venger, courouoc ieuralïaiFm. Francois ,  sous Charles Vlll. 7 » vous n'avez point a rougir d'ü'ne lacheté » pareille : ouvrez nos annales-, vous y verrez » des rois enfans, plus honorés 3 mieux fervis » que les monarques les plus abfolus; vous y » admirerez un peuple qui femble ne s'attacher » a fes rois qu'en raifon du befoin qu'ils onc » de lui. C'eft a cette fidélité constante que » vou3 devez le glorieux avanrage d'être le » premier peuple de 1'univers : car quelle autre » nation oferoit fe comparer a vous ? Dès les » tems les plus reculés, les Gaulois, vos ans » cêtres, porterent la terreur de leurs armes » dans toutes les parties de notre continent 5 » ils fonderent des colonies dans 1'Italie, fur » le Danube, Sc jufques dans PAfie. Si les » querelles qui les diviferent , les foumirenc » aux Romains , ils vengerent cruellement leur » défaite; ce fut par le fer des Gaulois que » Jules Céfar alTervit fa patrie. Dans la fuite »> les Francs unis & incorporés aux Gaulois , » délivrerent 1'églife Romaine du joug des bar» bares , jeterent les premiers fondemens de » fa puiflance & de fa grandeur s 8c rctabli» rent 1'empire d'Occident, tombé depuis plu» fieurs fiecles. On les vit tranfportés d'un » faint zele, voler a la défenfe de leurs freres » opprimés par les infideles, arborer leurs éten- A4  8 E t A t S jm darts fur les murs de Jérufalem , fonmettre » la Paleftine , la Syrië, la Sicile, & la Grece v entiere. Qu'il eft beau de commander a mi » peuple fi généreux & fi brave! C'eft a votre w amour, a vos vertus , que le roi fe fent rem devable de la fplendeur de fon rang, &C » c'eft pour vous en témoigner fa reconnoifv fance, que fa majefté vous a rafiemblés. » Un fecond motif nort moins puiflant fur » fon cceur , a été le defir de vous voir, de » s'offnr a vos regards , &c d'accrcitre par la w 1'amour mutuel qui vous uniffoit déja; con» templez-le donc eet augufte prince , en qui m repofe aujourd'hui le falut de la patrie ; » que fa jeuneffe ne vous alarme point: Salor » inon j Ie plus fage des rois , étoit jeune lorf* >> qu'il monta fur le tröne ; Scipion parvenu » au confulat avant lage prefcrit par Jes loix, » répara les pertes de la république Romaine, » & la fit triompher de fon plus redoutable m ennemi. Saint Louis , dont le regne forme » une époque fi glorieufe dans notre hiftoire , » n'étoit pas plus agé que votre roi, lorfqu'il ». s'affit fur le tröne. » Dans des ames privilcgiées, Ja prudence » «'eft point incornpatible avec la fagefTe; vo* ® ere roi, tout jeune qu'il paroit, fait ce qu'il  sous Charles VIII. ^ »» doit faire, 8c en qui il peut placer fa coa» fiance ; jugez-en par le troifieme motif qui » 1'a porté a vous affembler. » II a voulu vous faire part de la conduite » qu'il a tenue jufqu'a préfent, vous expofer » fes projets, & vous affocier en quelque forte « au gouvernement. Immédiatement après la » mort du roi fon pere, il manda les princes » du fang , qui fans alléguer aucune excufe , » fe rendirent auprès de fa perfonne : par leur » confei!, il confirrna dans leurs charges tous » les officiers du royaurne , afin qu'ils conti» nuafTent de veilier a la fureté publique, &C » a rendre la juftice au peuple; par le confeil » de ces mêmes princes, il confia 1'adminiftra» tion des finances a. des hommes d'une pro» bité reconnue; informé que depuis quelques » années, le domaine de la couronne avoit été » confidérablement dirninué., il donna des let» tres-parentes pour y réunir toutes les branw ches qui en avoient été diftraites; car fon » intention n'eft pcinr de puifer dans la bourfe » de fes fujets ; ni de les furcharger d'impöts. » II commencera par confacrer les revenus du » dómaine a la dépenfe de fa maifon , & a » Pacquit des autres charges de Pétat, & ne » demandera a fes ftdeles fujets, que les con-  *0 E T A T S » tributions abfolument indifpenfables pour Ia » défenfe du royaume. Son premier vceu, fon » defir Ie plus ardent eft de voir fon peuple » content Sc heureux; c'eft 1'unique objet qu'il » a en vue dans les réformes qu'il a déja faites. » Comme la nation ftipendioit a grands frais » un corps de fix mille SuifTes, il les a ren» voyés dans leur patrie, aprcs leur avoir fait » payer tout ce qui leur étoit du; il a Heen» cié de même plufieurs compagnies des troupes » nationales, dont 1'état peut abfolument fe » paffer, tant que durera la paix; & pour la » faire durer cette paix fi defirable, il a ea» voyé des ambafïadeurs a toutes les puilTances » voifines, foit pour renouveller les anciens » traités , foit pour en contracter de nouveauxj » Ces foins multipliés ne 1'ont point empêché y> de s'occuper de deux objets importans : la » légiflation & la réforme du clergé ; quant » au premier , il a fait rechercher les ordon» nances du glorieux roi Charles VII, afin de » les mettre en vigueur; par rapport a la ré» forme du clergé, il a cru que fans manquer ») au refpect dont il eft pénétré pour les dé» cifions de 1'églife, il pouvoit, comme chef » de 1'état, prendre conneiffance de ce qui » concerns la difcipline 6c les aiceurs.  sous CharlIs VIIT. if *> Voila ce que le roi a déja fait; voici main» tenant ce qu'il exige de vous ; & c'eft ici le » quatrieme motif qui nous aflemble. II exige » que vous lui découvriez tous les abus qui » peuvent être échappés a fa connoifTance } Sc »> que vous ne lui déguifiez aucun des maux » qui affligent le peuple; ne craignez pas que » vos plaintes foient importunes, le roi aura » égard a vos remontrances, Sc vous, princes » qui m'écoutez , je vous fuppüe Sc vous ad» jure au nom de la patrie, notre mere com» mune, d'oublier tout efprit de parri , & de » laiiTer aux députés une pleine & enticre li» berté. » II eft queftion , & c'eft le cinquieme motif » de cette afTemblée, de former au roi un con» feil qui puiiTe le fecomler dans Ie defTein qu'il » a formé de maintenir le royaume en paix, » d'y rétablir la police & d'y faire fleurir la » juftice Sc le commerce % ce confcil doit être » compofé d'hommes a qui 1'expcrience du » paflé ast appris z prévoir 1'avenir, qui aient » un raraclere propre a concilier au roi 1'amour » de fes fujets, 1'eftime Sc la confiance de fes » voifins, qui connoiffent la conftitution de » 1'état, Sc qui, fur le modele éternel du ciel, i> faffenc raouvoir tous les refïorts du corps  12 L T A I S » politique fans embarras & fans confufïon. Sï » les voeux du roi font rernplis, la juftice fié- » gera fur Ie tróne & diótera des loix. Celui » qui offenfera la juftice, offenfera le roi, 8c » quiconque voudra prouver qu'il aime le roi, » commencera par obferver la juftice. Afin de » ne laifler aucun doute fur fes véritables fen- » timens , le roi m'ordonne de vous avertir » que perfonne ne foit affez ofé pour lui de- w mander quelque chofe d'injufte , car quicon- » 1'entreprendra, portera la peine due a fa té- » mérité : avec la juftice fiégeront a cöté du » tróne la prudence, la force 8c la tempérance, »> qui régleront toutes les aélions du monarque ; ►> c'eft alors que le peuple, fauvé du naufrage » & réparant journellement fes pertes, s'écriera » dans des tranfports d'aüégreife : O jour trois » fois heureux , qui a ramenè parmi nous la paix » & i''abondance, & qui nous a donné un prime » guidé par la fagejfe , & pere de la patrie ! »> Inutilement afpirerions - nous a tous ces » biens, fi. la concorde 8c l'union ne s'établif- »> fent entre tous les membres de 1'état; & »> c'eft a quoi vous devez principalement tra- » vailler. Rappellez-vous le jugemenr que Céfar » portoit de nos ancêtres: les forces du monde, « difoit-il j ne pourroitnt tien contre les Gaulois ,  aevs Charles VIII. if » s*ils étoient unis : quelle. caufe perdit Ia ré» publique Romaine , la rivalité de deux de » fes citoyens. Dois-je vous rappeller ici les » maux que la haine de deux puiflantes mai» fons a caufée a la France, fous le regne de » Charles, VI? Perdons-en, s'il fe peut, le » fouvenir douloureux. Je finis en remettant » entre vos mains les intéréts du roi, de Vér. » glife & du peuple. Voici 1'ordre que vous » garderez dans vos délibérations ; vous trai-. » terez d'abord les matieres qui concernent *> le bien général de 1'état; vous examinerez » enfuite celles qui ne regardent qu'une pro»» vince ou une ville; enfin, vous defcendrez » aux affaires des paniculiers. Ne confondez » pas ces objets: le roi vous donnera audience t> routes les fois que vous la demanderez ; &C » il ne refufera juftice a perfonne, pas tnême » au dernier de fes fujets ». Ce uifcours remplit la première féance." Le lendemain , 16 de janvier , fut confacré tour entier aux exercices de religion. Le 17^ les députés s'affemblerent fans admettre parmi eux aucun étranger ; ils élurent un préfident de 1'atfemblée, & deux fecrétaires : le préfident fut Jean de Villiers de Grollaye; évêque de Lombés , abbé de Saint Denis, 8c  J4 E T A T s en cette derniere qualiré, premier député de Paris ; les deux fecrétaires furent Jacques de Croifmare, député de Normandie, Sc Jean de Rains. On examina eniuite de quelle maniere on procéderoit dans les délibérations: on jugea que dans une il grande multitude d'opinans , il feroit difficile de parvenir a une conclufion générale ; que chaque député plus occupé des intéréts particuliers de fa province que du bien général du royaume, ne fongeroit qu'a attirer a lui toute 1'attention , Sc a faire valoir fon avis j qu'enfin on confumeroit en vaines difputes , un tems qui devoit être beaucoup mieux employé, en conféquence , on prit le parti de partager la totalité des états en iix divilions. La première comprenoit Paris, 1'ïfle-de-France, la Picardie, la Champagne Sc la Brie, le Nivernois, le Maconnois, 1'Auxerrois Sc 1'Orléanois: Lafeconde, les deux Bourgognes Sc le Charolois: La troifieme, la Normandie, Alencon & le Perche: La quatrieme, PAquitaine avec PArmagnac, le pays de Foix, FAgénois, le Querci Sc le Rouergue: La cinquieme, le Languedoc, auquel on  saus Charles VIII. 15 aflocia le Dauphiné, la Provence Sc le Rouffillon: Enfin, lafixieme, appellée Ia langue d'oil renfermoit le Berry , le Poitou , I'Anjou , 1c Maine, la Touraine, le Limofin, PAuvergne, Ie Bourbonnois, le Forêt Sc le Beaujolois, PAngoumois Sc la Saintonge. Chaque divifion eut une falie particuliere " pour travailler féparément aux matieres qu'on devoit mettre fous les yeux du roi. On convint qu'on fe raflTembleroit enfuite dans Ia falie générale , pour entendre la ledure des travaux de chaque divifion, en extraire les objets les plus importans, & en former un feul cahier, quï contiendroit les demandes de toute la nation. On fe fépara donc, & chaque divifion fe rinc renfermée pendant tout le refte du mois de janvier. Au commencement de février, les fix nations fe raffemblerent Sc fe communiquerenc leurs travaux refpectifs, Cependant les princes du fano11e s'oublierent pas. Dès le premier jeur de fevrier, Pierre dé Luxembourg, évêque du Mans ' fe leva au milieu de Paffemblce, Sc paria ainfi aux députés : « les ducs d'Orléans Sc dAlen» eon, les comtes d'AngouIême , de Dunois Sc » de Foix ayant appris qae vous fongiez afoula-  IÉ E T A T S » ger le peuple, écrafé fous le poids des impoCs,; » vous exhorcent a faire main-baffe fur les pen» fions Sc les gratifications accordées fous le » regne précédent, & au commencesnent de « celui-ci; qu'aucune crainte ne vous arrête. » Quoique ces princes aient eux-mêmes des j5 penlions, ils confencenc a ce qu'elles foient, » non-feulement réduites, mais totalement fup» primées , pourvu que eet arrangement tourne »> au foulagement du pauvre peuple. Ils vous » confeillent en même-tems, de bien prendre y> garde en quelles mains vous remettrez la pervi fonne du roi, Sc Padrniniftration du royaume. » Défiez - vous de ces anciens confeillers, fi » babiles a inventer de nouveaux moyens d'opm preflion. Armez-vous de courage, Sc chaifez » hardiment de la cour, ces hommes duts Sc » impitoyables , engraiffés du fang des malheu» reux. Ne vous laiffez efFrayer , ni par leur » crédit, ni par leurs menaces ; les princes qui » vous parient par ma bouche, vous prennent » fous leur fauve-garde , Sc font affez puiffans » pour faire exécuter vos régiemens ». On chargea l'évêque de remercier les princes du zele qu'ils montroient pour la caufe commune; mais comme on ne poiiYoic fe tromper fur le motif  sous Charles VIII. 17 iïiocif qui dictoic des ientimens fi généreux , on . ne leur en tint aucun compte. Le lendemain , il s'éleva une vive difpute encre les députés : en voici Poccafïon. En cherchanc les caufes de la pauvreté du peuple Sc de la difette dargent, le tiers-état s'emporta contre les abus de la cour de Rome , & demanda Ie rérablilTement de la pragmarique-fanction. Quelques cvêques offenfés de la trop grande liberté qu'oh s'étoit "permife a 1'egard du fainc fiege, Sc ne voulant point confentir a ce que 1'on nömmat aux bénéfices par élecriori , protefterent contre tous ces artielas. Le fecond ordre du clergé & le tiers-état défendirent leurs demandes avec vigueur, les efprits sechaufferenc de part Sc d'autre , & peu s'en fallut qu'on n'obligeat ces évêques difcordans , i fo'rtir d$, 1'aiïemblée. Les députés de la Touraine , de I'Alijöu Sfc du Mans, demanderent la fuppreflïon des ga«i belles, Sc expoferent fort en détail les horribies vexations que les hommes prépofé- a la levée de eet impot exercoient dans ces provinces. » Depuis quelques annécs, dirent-ils , les plus » riches families bat été' ruinées par des pro» cédures iniques, & plus de fix eens perfonnes ff ont été trainees dans les prifons , Sc punies Tornt Xi g  jS E t a t s I » du dernier fupplice : les eccléfiaftiques & les » nobles ne font point a 1'abri des pouriuites » des employés; chaque jour ils fe voient dé»> crétés, condamnés a des amendes, & arrêtés » fans avoir le moyen de fe défendre ; on affure » mcme, ajouterent-ils, que fous le regne pré» cédeni, des gens en faveur vendoient a des „ traitans, la dépouille des plus riches maifon» » de ces provinces, & faifoient de ces conhT» cacions un article fecret de leur bail ». Ces plaintes toucherent fenfiblement toute 1'affemblée; cependant on ne prit fur eet objet ■aucun parti définitif. Comme toutes les provinces s'accordoient a demander la fuppreffi^Jdes tailles, & qu'on ne pouvoit retrancher a la fois .tous les impöts, on ftatua feulement que fi Pon trouvoit quelqu'autre moyen moins onéreux pour le peuple, de procurer au roi le même revenu, on le fupplieroit cPabolir la gabelle ; que fi ce moyen paroifloit impoib'ble, on le laifferoit fubfifter, en demandant inftamment qu'on réprimat ia tyrannie des employés. Pendant qu'on travailloita rédiger les cahiers, piufieurs parriculiers vinient porter leurs plaintes aux états , & réclamer leur protection. Le feigneur de Croï repréfenta , que bien que par un article du traité d'Arras, il dut être remis en  sous Charles VIII. 19 pofTeffion de fes terres de Croï éc de Renti, ön n'avoit eu jufqii'ici aucun égard a fes demandes : il fupplia les états d'èmployer leur autoricé pour une fi jutte caufe. Charles d'Armagnac , fiere puiné du comte d'Armagnac, tué dans Lefloure, s*érendit fur les fervices que fës ancêtres avoient rendus i la couronne, déplora la mort de fon frere, expofa les tourmens qu'il avoit lui-même effuyés , quoi-' qu'on n'eüt rien a lui reprocher , repréfent'a qu'on 1'avoit dépouillé de tous fes biens, & fupplia les états de vouloir bien s'intérefier en fa faveur. Quelques jours après fe préfenta un avocat, des malheureux enfans du duc'de Nemours, leqüel paria ainfi : « Les foibles & malheureux « reftes d'une maifon illuftre implorent votrè » proteélion, & vous fupplient de les excufer, » s'ils ne fe préfentent pas eux-mêmes devant » vous; Paine, que ce foiri regardoit, eft tombé « malade, & fes freres font occupés a le fóulager. » Vous favez tous quel fut en fon vivant le » duc de Nemours, avec quel zele il fervit » 1'état; cepehdant , quelques calomniateurs w 1'ayant noirci dans 1'efprit du roi, il fe vit » trainé dans les prifons , livré aux interroga» tiöhs captieufes de quelques commiffairej B 2  ïo E t a t s » du nombre defquels étoient fes délareurs. j5 Quelque intérêt qu'ils eulfent a le perdre, » jamais ils ne purent trouver dans fa conduite » des motifs de le condamner; ils furent donc » forcés de fe défifter de leur entreprife , Sc » de le remettre entre les mains du parlement. h Cette célebre compagnie 1'auroit abfous , (ï » 1'un eut lailfé la liberté des furTrages ; mais » on tenverfa routes les formes : on transférale » parlement a Noyon ; on remplit cette compa» gnie d'étrangers, & on donna puur premiers » juges i 1'accufé , ceux mêmes a qui Pon avoit » déja diftribué toutes fes terres. Ainli lhéritage w de cette illuftre maifon devint la proie d'homw mes avides Sc corrompus ; trois fils qui don» noient les plus belles efpérances , deux filles, » dont Tune étoit déja nubile, n'eurent plus ni » maifon pour fe loger , ni pain pour fe nourrir, » ni vêtemens pour fe défendre contre la rigueur m du froid. Ces viétimes infortunées font ce» pendant Ie pur fang de vos rois; leur mere » étoit fille du comte du Maine , & coufine» germaine du roi : la malheureufe princefle » voyant 1'orage prés de fondre fur la tére de » fon époux , & ne pouvant le détourner ni » par fes prieres , ni par les larmes , expira de v douleur i fes pauvres cnfans, élevés dans la  sous Charlis VIII. II » fplendcur , & a qui rout ce qu'il y avoit de » grand dans le royaume fe faifoit honneur d'ap» parrerïir , déchus, dans un inftaat, de ce hauc » rang, pleurant la mort d'une mere, arrofés » du fang de leur pere, couverts d'opprobre, & » réduits a la plus affreufe indigence, n'ont plus » oü repofer leur tête , & ne fubfiftent que d'au» mönes. Soyez fenfibles i leurs malheurs ; & » puifque le roi vous a charges de lui découvrir » toutes les injuftices qui défigurent le gouver» nement, ne lui cachez point celle qui désho» nore le plus la nation ». Enfin, on vit arriver des députés du duc de Lorraine : ils repréfenterent que ce prince,après avoir délivré la France de fon plus terrible ennemi, avoit généreufement cédé au roi le grand batard de Bourgogne fon prifonnier, lequcloffroic la Franche Comté pour farancon; que le duc, loin de recevoir une récompenfe proportioimée a fes fervices, avoit été fruftré de la fucceffion du roi Rcné d'Anjou fon aïeul, que bien que mécontent d'un pareil procédé , & vivemenc follicité par les ennemis de Ia France, il avoit conftamment refufé de prendre aucun engagement contraire au ferment de fidéücé qu'iï devoit au roi, i raifon d'une partie de fes étars; que depuis la mort de Louis. XI, ils'étoit adrefffj B i  %% E T A T s au confeil pour demander juftice , mais qu'on s'étoit contenté de lui répondre, que le roi, tant qu'il feroit mineur, ne pouvoit contraéter aucun engagement valable; que cette réponfe paroiffoit un fubterfuge & un déni de juftice; qu'il prioic les états d'interpofer leur médiation , pour lui faire reftituer fon héricage, Sc qu'a cette condition, il promettoit de fervir le roi en perfonne, & de le défendre contre tous fes ennemis. Les états firent la même réponfe a routes ces requètes ; favoir, qu'ils étoient alors occnpés des affaires générales du royaume ; que lorfqu'ils defcendroient a celles des particuliers, ils auroient égard a la qualité des perfonnes qui avoient bien voulu leur confier leurs intéréts, Sc fereient valoir les raifons qu'ils venoient de leur expofer. En effet , on travailloit alors a 1'afFaire la plus importante Sc la plus difficile ; il s'agifToit de régler la. forme de 1'adminiftration pendant le bas age du roi , & de former le confeil. Des qu'on fut a la cour que les états délibéroient fur eet objet , les brigues fe réveillerent avec plus de chaleur qu'auparavant. Chaque jour ou voyoit arriver des meffagers de la part des trois contenoaHs. Les feigaeurs qui avoient déja été  sous Charlis VIII. 23 admis dans Ie confeil, n'étoient pas moins inquiets que les princes : trop foibles pour fe foutenir par eux-mêmes dans un pofte ii envié, ils formoient des cabales & fe choifilToienr un protecceur capable de les. défendre. Les députés voyoient avec chagrin , dans la lifte de ces confeillers, les noms de quelques-uns des anciens favoris de Louis XI ; mais Ia difficulté étoit de favoir comment on s'y prendroit pour les retrancher. Comme le fecret étoit mal gardé, chacim craignoit, en s'expliquam , de fe faire de puiffans ennemis, A Ia fin, la nation de Normandie ouvrit un avis quï, en parant a tous les inconvcnients, mettoit les princes du fang dans 3anéceflité de faire eux-mêmes la réforme qu'on defiroit. II confiftoit a laiffer la perfonne du roi entre les mains de ceux qui avoient fi fageménr dirigé fon enfance , a réferver au confeil tousi les objets de l'adminifl:ration publique ; a régler que, non-feulement les princes du fang auroient féance dans le confeil fuivant leur rang , mais qu'ils auroient Ie choix de huit ou de douze des anciens confeillers pour former le nouveau confeil, &c qu'ils fupprimeroient les autres ; qu'a ces huit on douze anciens que Pon conferveroit, on en ajo^teroit douze , quinze , ou mème vingt-quatre nouveaux, tités du co rp» B4  24 E T A T S des états , & a la nomination des hx nations , lefquels auroient les mêmes droits , rangs &c prérogatives que les anciens. Cet avis, qui tendok a mettre toute Ia force du gouvernement entre les mains du peuple, acquit en peu de tems de nombreux partifans : on cria qu'il n'y avoit point a balancer; que la nation, pendant la minorité du roi, fe trouvoit dépofitaire de 1'antorité fupiême , & avoit le droit de commander a tous fes membres, & qu'ainfi il falloit forcer, s'il en étoit befoin, les princes a fe foumettre a ce réglement. D'autres, & c'étoic le plus grand nombre , foutenoient avec Ia même chaleur, que dans un royaume héréditaire , tel qu'étoit celui de France , la nation n'avoit aucun droit a Fautotité , tant qu'il ref" toit des héritiers légitimes; qu'après la mort du roi, cette autorité paffoit toute entiere dans les mains de fon fils, s'il écoit en état de 1'exercer , & en cas de minorité, en celles des princes du fang fes tuteurs naturels ; qu'eux feuls avoient droit de former le confeil, & de régler toutes les branches de 1'adminiftration , & qu'ils n'étoient obligcs de prendre 1'avis da peuple; que par rapport a. la répartition & k la levée des impöts; quefi, dans cette cccurrence, les princes avoient bien voulu confulter la nation, & la  sous Charies VUL ,£5 choifir pouc arbicre de leurs droits refpectifs , cétoit de leur part une pure condefcendance, donc il falloit leur favoir gré , mais dont oa dcvoit bien prendre "garde d'abufer; cju'en les mécontenrant fur un article étranger au bonheur de la nation , on les obligeroit peut-être a rompre 1'affemblée, & qu'on perdroit fans reffource tous les avantages qu'on avoit iieu de s'en promettre ; que la prudence exigeoit que Pon fe renfermat dans les matieres qui étoient proprement du relfort des états, & qu'on laiffat aux princes le foin de juger eurs différends, comme ils le jugeroient a propos. Au fort de la difpute s'éleva Philippe Pot, feigneur de la Réche, député de la nobieife de Bourgogne , lequel paria ainfi : « Si je ne favois ce que penfe fur » la liberté & 1'autorité des états, la partie la »» plus éclairée de cette aflemblée, je n'aurois » garde de moppofer ici aux vaines clameurs » de la muttitude; mais après les preuves que » vous avez déja données de votre difcernement » & de vos lumieres, je -ne dois plus craindre » de propofer ce que la réilexion & la leéture » m'ont appris fur ce point fondamental de » notre droit public. Si je parviens. a me faire » entendre, j'ofe me flatter que ceux qui bla» ment les foins que nous nous donnons pour  • E T A T S » former Ie confeil , changeront cl'avis & de » langage. Avant que d'expofer les raifons fur » lefquelles je prérens fonder 1'autorité des états, w qu'il me foit permis d'interroger un moment « nos adverfaires. Penfez - vous , leur deman» derai-je qu'après la mort d'un roi qui Iaille » un fils en bas age , la rutelle de Penfant &C » 1'adminiftration générale du royaume appar» tiennent de droit au premier prince du fang ? » Non , fans doute , me répondront-ils ; car ce » feroit expofer la vie du pupille a un danger » manifefte : auffi la loi y a-t-elle pourvu ; »» elle défere 1'adminiftration au premier prince » du fang, & la rutelle a celui qui fuit immé»» diatement dans 1'ordre de Ia nailfance. Prenez » garde, leur répondrai-je , que par eet arranw gement,-vous n'affurez guere mieux la vie » de votre roi ; car les deux princes entre lef» quels vous femblez partager 1'autorité, peuyent » s'entendre & avoir le même intérèt. Mais de » quelle loi parlez-vous ? oü eft-elle ? qui Pa » faire ? oü Pavez-voss lue ? Je vous défie de » fatisfaire a aucune de ces queftions. Si la loi ■ »"dont vous parlez exiftoit-, penfez-vous que n le duc d'Orléans eüt confenti a mettre en » atbitrage une queftiou déja décidée, & a & compromettre fi -ficiiement fes droits ? En  sous Charles VIII. 17 w yain m'allcguez vous 1'exemple de Charles V; h eet exemple prouve contre vous : ce prince » ne parvint a la régence que deux ans après » la vacance.du trórie, & lorfqu'elle lui eut été » conférée par les états. » Je m'adrefle maintenant a ceux qui préten» dent que , dans un tems de minorité, Ia tutele » & l'adminifti-arion font dévolus a tous les » princes du fang , &c je leur demande s'ils » comprennent dans ce nembre , ceux qui def» cendent de quelqu'un de nos rois du coté » maternel; & en ce cas, ils auront une lifte » nombreufe de tuceurs &C d'adminiftrateurs , » parmi lefquels il fera difficile que la concorde » & 1'union puiffent s'établir. Mais je veux qu'ils » ne parient que de ceux qui defcendent du. » trone en ligne mafculine. Si ces princes fe » difputent 1'adminiitracion ,qui les mettra d'ac» cord ? qui ne voit qu'auffi-töt ils courront » aux armes , & que la patrie fera déchirée par » des guerres civiles ? qui ne voit encore que » dans ce cas 1'amorité fuprême deviendra f©u» vent la récompenfe d'un furieux , & d'un » pertubateur du repos public, qui dans un >> gouvernement fage mériteroit les punitions » les plus féveres ? quoi donc , me dira-t-on , n 1'état, pendant une minorité, refiera-t-il  28 E T A T S •dan. fanarchie 2 non certes, car alors 1'auto» me fera dévolue aux états généraux , qui ne » le chargeront pas eux-mèmes de radminif• tracion publique, mais qui ia remettront entre »>les mams des perfonnes qu'ils jugeront les •» Plus capables de s'en acquirer. Écoutez main- tenant ce que la Icdure & le commerce des » fages m'ont appris fur cette matiere impor» tante. » Lorfque les hommes commencerent a for» mer des fociétés, ils élurent pour maitres , « ceux de leurs égaux qu'ils regarderent comme »les plus éclairés Sc les plus intégres, en un » mot; ceux qui par leurs qualités perfonnelles » pouvoient procurer de plus grands avantages • a la fociété nailfante. Ceux qui après leur » élection ne fongerent qu'a senrichir aux. dé» pens de leurs fujets , ne furent point regardés «comme de véritables pafteurs, mais comme » des loups ravilfans; & ceux qui fans attendre «Icleóhon s'emparerent de 1'autorité fuprême, »ne furent point réputés des rois, mais del » tyrans. 11 importe exrrémement au peuple quel -eft celui qui le gouverne, puifque du carac» tere de ce feul homme, dépend Ié bonheur ' » ou le malheur de toute la fociété. Appliquons » maintenant ces principes généraux : s'il s'é.  SOUS C HAKT. ES VIII. 29 » leve quelque conteftation par rapport a la » fucceffion au tröne ou a la régence , a qui >♦ appartient-il de la décider, finon a ce mcme » peuple qui a d'abord élu fes rois , qui leur » a conféré toute 1'autorité dont ils fe trouvent »revêtus, & en qui reilde foncierement k » fouveraine puhTance ? Car un état ou un gou» vernement quelconque eft la chofe publique , » &c k chofe publique eft la chefe du peuple, » quand ;e dis Ie peuple , j entends parler de » la colleótion ou de Ia totalité des citoyens , » & dans cette totalité font compris les prin» ces du fang eux mêmes , comme chefs de k » nobleffe. Vous donc , qui étes. les repréfen>» tans du peuple, & obligés par ferment de » défendre fes droits , pourriez - vous encore » douter que ce ne foit a vous de régler 1'ad» miniftration & Ia forme du confeil? qui peur » maintenant vous arrêter ? Le chancelier ne »3 vous a-t-il pas déclaré que le roi & les1 »> princes attendent de vous ce réglement ? On » m'objecte qu'immédiatement après k mort dn » dernier roi, & fans attendre notre confen-:e» ment, on a pourvu a l'adminiftration & dretfé » un confeil, & qu'ainfi nos foins feroient dé» formais tardifs &c fuperflus. Je réponds que » 1'état ne pbavaiu fe palier d'adminiftrateurs,  $ö E T A t S » il a""été néceflaire d'en nommer fur le champ » pour vaquer aux affaires les plus urgenres j » mais que ce choix & tous les autres régiemens « qui ont été faits depuis Ia mort du roi , ne >♦ font que des régiemens provifoires, & qu'ils » n'auront d'autorité qu'autant que vous les au» rez confirmés. Ces affemblces d'états & le 3» pouvoir que je leur donne , ne font point >» une nouveauté t 6c ne peuvent être ignorés » par ceux qui ont lu 1'hifloire. Lorfqu'après » la mort de Philippe-le-Bel , il s'éleva une » difpute entre Philippe-de-Valois & Édouard, »> roi d'Angleterre, par rapport i la fucceffion 3> a la couronne , les deux contendans fe fou» mirent, comme ils le devoient, a la déci» fion des états généraux , qui prononcerent » en faveur de Pkilippe. Or , fi dans cette » occafion , les états ont pu légitimement difs> pofer de la couronne , comment leur contef» teroit-on le droit de pourvoir a 1'adminifira» tion & a la régence ? Sous le roi Jean , 5c » lorfque ce prince valeureux, mais imprudent, » fut emmené prifonnier en Angleterre , les » états affemblés ne confierent pas l'adminiftrav> tion a fon fils , 'quoiqu'il efit alors vingt ans » accomplis ; ce ne fut que deux ans plus tard » que ces mêmes états aflemblés pour la fe-  sous ChariësVIII. 31 f> conde fois , lui déférerent le titre & 1'auto» rité de régent. Enfin , lorfque le roi Char» les VI , parvint a la couronne ; agé feulement » de douze ans, ce furent auffi les états géné» raux qui pendant le tems de fa minorité, » pourvurent a la régence & au gouvernement. » C'eft un fait dont il refte aujourd'hui des » témoins. Après des autorités fi pofitives, dou» terez-vous encore de vos droits ? & puifque »> par la forme de votre ferment, vous êtes » ici affemblés pour faire & conüiUcr ce que felon, a> Duu & votre confc'unce, vous jugere^ de plus » utile a Péiat ; pouvez-vous négliger le poinf » fondamental de tous vos régiemens ? Car fi »> Pon n'obferve rien de tout ce qu'on va vous »promettre, a qui adrefferez-vous vos plaintes? » L'article du confeil une fois omis , je ne vois » pas a quoi bon vous vous donnerez tant de » peine fur tout le refte; il faudra donc, me »direz-vous, que nous commencions par dé,» pofer des hommes élus & protégés par les » princes du fang; & en ce cas, comment pour» rions-nous éviter leur difgrace ? Rien de fi » facile, & on vous en a déja indiqué les moyens; » il ne s'agit que de mettre les princes dans » la néceflité de fupprimer une partie de ce » confeil provifoire, & de la maniere dont on  31 E T A T S » nous a déja parlé , il paroit qu'on ne fera » pas faché de trouver un prétexte pour faire » cette rcforme qui vous paroit fi effrayante. En *> un mot, la raifon vous prouve que vous avé* » le droit de régler 1'adminiftration 81 la fofrrle » du confeil, un grand nombre d'exemples vous » le démontrent, le roi vous 1'ordonne, les princes j» y confentent , la patrie vous y exhorte par w la bouche de fon premier magiftrat. Si des » raifons fi fortes ne peuvent vous ébranler, » n'imputez déformais qu'a votre lacheté tous * les maux qui aftligent 1'état ; & vous qifi p confervez elicore des cceurs francois, ne fouf» frez pas que la nation vous accufe d'avoir » trahi fa confiance , & qu'un jour la poftérité » vous reproche de ne lui avoir pas tranfmis » Ie dépót de la liberté publique, te! que vous » 1'aviez re§u de vos peres. Sauvez vos «pms >> de eet opprobre ». Le difcours de Philippe Pot, fit des impreffions bien différentes fur les efprits : ceux qui penfoient comme 1'orateur, donnerent les plus grands éloges a fon zele patriotique , randis que ceux qui étoient dans des principes différens, blamoient fon audace , & le regardoient comme un féditieux. Les nations fe retirerenr, chacune dans fa falie particuliere, pour déübérer, & fe raifemblerent  sous Chari.es VIII. 35 raffemblerent enfuice pour parvenir a une con». clufion commune. La nation de Bourgogne s'etoit décidée pour 1'expédient propofé d'abord par la nation de Normandie. Sc dont nous avons déja rendu compte. En conféquence, elle fe* ferva aux princes la liberté de conferver douzs des anciens confeillers d'état a leur choix, auxquels feroient aflociés douze nouveaux , tirés en nombre égal des fix nations, & elle propofoit pour les fiens Philippe Pot, feigneur de la Roche, qui avoit fi bien plaidé la caufe dn peuple, Sc maitre Jean Raullin, dont on vanta la probité, les lumieres & la modeftie, La nation de Normandie nomma , de fa part, le grand fénéchal de la province , Sc Jean, Maffelin, official de Rouen. La nation de Paris , d'Aquitaine, de Langue d'oc Sc Langue d'oil perfifterent a remettre aux princes du fang le choix du confeil, & refuferent de procéder a aucune éleclion. Outre Ia crainte d'offenfer les princes, ces quatre nations avoient des raif©ns particulieres , pour ne pas accéder au vceu des deux aurres. Quelques-unes de ces nations étoient compofées d'un fi grand nombre de provinces, Sc ces provinces avoienE des intéréts fi difFérens, que le choix de deux députés devenoit en quelque forte impratica-» Tom.X. G  43 E t a i s ble. La nation de Paris , pat exemple, comprenoit , outre les députés de cette capitale» ceux de Plfle de-France, de Picardie,de Champagne , de POrléanois , du Nivernois, &c. Dans Jaquelle de ces provinces eut-on pu faire le choix de deux confeillers , fans mécontenter toutes les autres? La difhculté étoit encore plus grande , par rapport a ce qu'on nommoir la Langue d'oil , paree que cette nation étoit compofée d'un plus grand nombre de provinces , & de provinces plus éloignées les unes des auttes. Ces deux nations d'ailleurs, quoique plus nombreufes que les autres, auroient été réduites k fournir chacun deux députés, au lieu qu'elles formoient prefque tout 1'ancien confeil; elles ne pouvoient donc que perdre en adoptant le nouveau plan. La nation d'Aquitaine voyoit déja dans le confeil les feigneurs d'Albret & de Lefcun, comte de Comminges. &: n'eüt pu leur en fubftituer deux autres plus accrédités, ni plus capables de protéger la proVince. Le Languedoc , pays d'état, & gouverné par fes propres magiftrats, n'avoit pour objec que la diminution des impóts. Ses députés s'éïoient petfuadés qu'ils obtiendroient plus facilement leur demande , en s'erforcant de complaire aux princes &c aux miniftres , qu'en  's o v s ChArles. Vllï. $f s'embarquant dans une entreprife dont 1'ifTue écóit au moins douseufe. Ainfi reftoient quatre nations entre deux j mais comme ces deux plaidoient la caufe commune & comptoient bien des partifans dans les quatre autres, elles perfifloient opiniatrément dans leur avis. Pendant le cours de ces débats, arriva Ie jour que le roi avoit indiqué pour entendre Ia Ieóture des cahiers. La cour fe rendir a Tours , tc chacun reprit la place qu'il avoit occupée a Pouvertüre des états. Après qu'un hérault eut Impofé filence, tous les députés mirent un genou en terre. Aiors le chancelier fe lëvant, fléchit lui-même Je genou au pied du tröne -9 & demanda, au roi s'il avoit agréable d'entendre les ttès-humbles remoutrances de fes fujets. Le roi ayant fait figne qu'il Fagiéoit; le chancelier fe tourna vers I'alTemblée & dit : Quad il vous plaira , commence*. Maitre Jean Réli, chanoine & député de Paris , élu orateur par les états, prit la parole Sc prononca un difcours chargé dérudition , mais aride froid & prolixe; Porateur fut obligé de le couper par la moitié, afin de lailTer du tems 5 la leétute des cahiers , qui même ne put être achevée ce jour-la,, quoique la féance eüt djiré C t  3*6 E T A T S plus de trois heures. Le roi en indiqua unff nouvelle pour le lendemain. Avant 1'heure indiquée , les nations s'affembferent chacune dans fa falie particuliere, pour agiter de nouveau Faffaire du confeil. Jacques de Croifmare ouvrit un avis qui tendoit a rapprocher les nations de Paris & de Na/mandie; mais comme il ne levoic point la principale difficulté j qui conGftoit a favoir fi Ia nomination du confeil appartenoit aux états ou aux princes, fon avis fut rejetté des deux partis. Cependant un meffager du duc d'Orléany fe préfenta dans la falie des députés de Normandie, &c dit : « Le prince qui m'envoie M comptoit fur votre attachement, & s'étoit » hautement déclaré votre ami & votre protecj> teur; il n'a pu apprendre faus une extréme „ furprife, que vous fongiez a le dépouiller de M fon rang, en aflignant , comme vous faites » dans un cettain arrêté, le gouvernement & » la garde de la perfonne du roi a Monfieur n & a Madame de Beaujeu. S'il eft vrai que »> le royaume air befoin d'un régent, eet emM ploi ne reg'arde que le premier prince du ij fang. Peut-être fcriez-vous mieux de ne point » toucher cette matiere; mais fi vous croyea  SOUS <^HAR1ES VIII. 57 >> devoir en parler, dites feulement que Mon>> fieur & Madame de Beaujeu foient auprès » de Ia perfonne du roi, Sc rien de plus. » Les députés répondirent d'un air extrêmement embarralfé, qu'ils avoient apporté la plus grande attention a ne rien dire qui put préjadicier a un fi grand prince , Sc que dans eet article comme dans le refte , ils obéiroient a fes ordres. Il étoit bien vrai cependant que leur arrêté au fujet de la tutelle du roi, étoit concn en ces termes r Puifque le roi a été jufqu'a ce jour nourri & élevé avec beaucoup de douceur & de fageiTe, & que fon age exige qu'on redouble de vigilance & de foins; nous opinons & nous prions que Monfieur & Madame deBeaujeu continuent d'avoit le foin, la garde Sc le gouvernement de fa perfonne. Pendant qu'ön travailloit z réformer eet ar-ttcle, entra le feigneur de Lifie, bailli de Coutances , envoyé par Monfieur Sc Madame de Beaujeu, lequel dit : « Le prince Sc la prin» celfe qui m'envoient, ont déja connu en plu3> fieurs rencontres 1'amitié que vous leur por» tez ; mais rien ne pouvort leur être plus w agréable que la maniere dont vous vous» énoncez a leur égard. Ils m'önt chargé dfe » vous en témoigner leur reconnoilfance. Ge»- C $,  3s e T A T S » pendant, comme 1'attachement que vous leug » marquez a excité l'envie, ils aiment mieux; » facrifier leurs plus chers intéréts, que de ha>» farder le repos de 1'état; ils vous prient donc >> de retrancher ce que vot.s avez écrit de la » garde & du gouvernement du roi, & de » dire feulement que Monfieur & Madame de » Beaujeu foient auprès de la perfonne du roi » comme ils y ont été jufqu a préfent , 6a » comme le feu roi 1'a réglé par fon tefta» ment. » Les députés répondirent qu'ils fe conformeroient a la volonté des princes : mais. après le départ de 1'envoyé, & quands ils vinrent a fe regarder, ils refterent bien étonnés j car ils croyoient eet article fort fecret, & ne 1'avoient point encore communiqué aux autres nations : d'oü ils conclurent qu'üs avoient parmi eux au moins deux traitres ou deux perfannes vendues, 1'une au duc d'Orléans & 1'autre an fire de Beaujeu} A l'heure mdiquée pour l'affemblée générale ils retournerenr prendre leurs places; tout étoic prêt,& fon n'attendoit plus que la préfence du roi, lorfqu'un mefiager vint parler a 1'qreille du chancelier, qui fe Ieva & dit « Lq » roi a été informé qu'il y a encore quelques s» anicles fur lefquels vous n'êtes point d'ac**  sous Charles VlIÏ. . »> cord; commencez donc par vous accorder 9 » Sc demaiu, fi tour eft prëtj il vous donnera » audience. » Après s'être long-tems rourmentés , les députés convaincus qu'ils ne parviendroient jamais a une conclufion générale , tant que chaque nation voudroit défendre elle même fan avis , convinrent de s'en rapporter a un certain nombre de commiffaires , qui s'affembleroient le lendemain matin dans la maifon du préfïdent des états. Onze heures étoient fonnées avanc que ces commifTaires eufTent pu convenir d'un feul point ; a la fin, ceux de Normandie Sc de Bourgogne, excédés de tant de eontradictions, prirent le parti de décider; on dreffa les articl'es du confeil dans la forme fui van te : » Le roi étant dans fa quatorzieme année » » Sc montrant une fagefle, une prudence Sc » une difcrétion au-deffus de fon age, exp黕> diera lui-même toutes lettres-patentes, régle5» mens Sc ordonnances , d'après les délibérations » de fon confeil. Il ordonnera tout en fon nom p 5» & perfonne que lui n'aura le pouvoir de » faire aucune ordonnance en quelque genre » que ce foit. Les états fupplient le roi de » préfider lui-même a fon confeil le plus fou« vent qu'il lui fera poiïïble, afin qu'il puifla C 4  E T A T 5 » fe fofmer de bcnheur aux affaires Sc appren» dre a bien gouverner. » En 1'abfence du roi, le duc d'Orléans, pre» mier prince du fang, préfidera le confeil Sc » conelura a la pluralicé des voix. » Après le duc d'Orléans , Sc en fon ab» fence , le, duc de Bourbon, connétable de »> France. » Enfin le fire de Beaujeu, qui a déja rendu 4t des fervices fi importans a 1'état, aura la » troifieme place, Sc préfidera en 1'abfence des » ducs d'Orléans & de Bourbon. >> Les autres princes du fang auront enfuire » féance Sc voix délibérative dans le confeil» » fuivant 1'ordre de leur naiffance. » Et d'autant que les affaires dont Ie con» feil doit prendre connoiiïance font en grand » nombre, & qu'il eft utile que le confeil foit » toujours rempli d'hommes intelligens &c la» borieux, les états penfent qu'il feroit a pro» pos que 1'on tirat des fix nations, douze per»> fonnes recommandables par leur probité Sc » leurs lumieres, & qu'on les affociat aux an» ciens eonfeillers d'état; ils laiffent le choix » de ces douze nouveaux eonfeillers au roi Sc » aux princes. »> Enfin, les états confidérant avec qu'elle  sous Charle s VIII. '41I »> prudence le roi a été jafqu'ici élevé & nourri,' » fouhaitent qu'il ait toujours auprès de fa per-, » fonne des gens fages, éclairés & vertueux t> qui continuent de veiller fur fa fanté, Sc » de lui infpirer des principes de modération & Sc de vercu. »' On ne s'expiiqua pas d'avantage fur le gou-> vernemenc, Sc 1'on affecla de ne point nommer Madame de Beaujeu, paree que 1'on étoit averti que de quelque maniere qu'on s'énoncat fur fon compte , le duc d'Orléans s'en tiendroit offenfé Sc éclateroit peut-être. Au refte, elle n'eut aucun fujet de fe plaindre de cette reftriótion. De la maniere dont les articles étoient dreftés, elle confervoit toute 1'autorité dont elle étoit en poffelfion. On réfervoit au roi la plé-, nitude du pouvoir; Sc comme elle difpofoit du roi, elle reftoit la maitreffe du gouverne-; ment. S'il arrivoit que la préfence du duc d'Orléans la gênat dans le confeil, elle avoic Ia relfource d'y faire préfider le roi & dè rompre les projers de fon adverfaire ; le connétable , infirme & goutteux, ne devoit guere I'importuner par fa préfence : ainfi le fire de Beaujeu devenoit le préfident ordinaire du confeil. Enfin les états avoient donné une exclufien tacite au duc d'Alencon & au comte d'An-  "-. tain , vrai & permanent. II fe propofe dy » joindre douze nouveaux eonfeillers tir ésdp/ v, corps des états, avec le même pouvoir Sc » les mêmes prérogatives dont jouilfent au» jourd'hui les anciens. Enfin, il mandera au » premier jour les perfonncs les plus éclairées » de cette affèmblée, pour difcurer avec fon » confeil les principaux articles de vos ca» hiers.» L§ chancelier parloit encore s lorfque Char-  r4+ ET t a t s les d'Armagnac vint fe profterner au pied diï tröne, & demanda audience. L'ayant obtenuj il defcetjdit dans le parquet inférieur avec un avocat qui tint ce difcours : w Roi très chrétien, notre fouverain & na» turel feigneur; 1'unique héritier de I'illuftre » maifon d'Armagnac , voudroit bien être dif»» penfé de déplorer devanc votre majefté &C » cette célébre affemblée, des malheurs qu'il' » ne peut expofer fans fe couvrir de bonte, » que vous ne pourrez entendre fans être péw nétré d'horreur; mais tel a été la rage de» fes ènnemis , que quand bien même 1'affreufe » mifere oü il eft réduit ne le forceroit pas a js fe plaindre, ce qu'il doit a la mémoire de fes *> proches parens , impitoyablement égorgés , l'om bligeroit a. crier vengance; dans un temps fur» tout oü votre royale bonté vient d'annoncer » qu'elle étoit prcte a rendre juftice au der» nier de fes fujets. J'avois réfolu d'appuyer » de preuves juridiques les faits que je vais » rapporter ; mais réfléchiffant fur le peu de » tems qu'on veut bien nous accorder, & con» fidérant qu'après routes les lectures qui vien»» nent d'être faites , celles des aétes que j'a» w vois deffein de produite, ne pouvoit mm» quer de devenir fatiguante^ je me bornerai  sous Charzis VIbII. 45' j» a un récic fimple Sc fidele , premierement *> des cruautés barbares qu'on a exercés fur le » comte Sc la comtelfe d'Armagnac; feconde-; » ment des outrages que le fuppliant a lui^ *> même efiuyés. » *> Des délateurs ayant rendu fufpeót au roi »> Louis XI, la fidélité du comte d'Armagnac,' t> ce monarque foupconneux envoya contre lui » le comte de Dammartin a la tcte d'une armee » formidable. Certain qu'on 1'avoit noirci dans » 1'efprit du roi, le comte d'Armagnac demanda » la permiffion de fe juftifier, & offrit d'aller » plaider lui-même fa caufe au parlement de » Paris : fes foumiffions Sc fes offres furent » rejettées avec dédain. Voyant doncque fa perte » étoit réfolue, Sc voulant épargner le fang de » fes fujets, il prit le parti de céder a Porage; *> Sc chercha un afyle en Efpagne. Le pays » d'Armagnac étoit foumis; les villes s'emprefw foient d'ouvrir leurs portes a 1'armée du roi : » «pendant Dammartin s'y comporta comme » dans une terre foumife k 1'anathême. Non » content de dépouiller les particuliers, il pilla » les églifes, enleva jufqu'aux vafes facrés, & » marqua tous les lieax de fon palfage par des « incendies. De 1'Efpagne, oü le comte d'Ar-, maguac s'étoit retiré , il écrivit au roi pour  4<£ Ë T A ï S » implorer fa clémence, &. ofFric de ƒuftifier fi » conduite ; mais Ie roi ne voulut lui permettrt: » de rentrer dans le royaume, qu'a coudition » qu'il prendroic des lettres de grace & d'aboj> lition : c'eüt été s'avouer coupable des crimes » qu'on lui imputoit. Plutót que d'imprimer »> cette tache a fon nom , le comte préféra »> hautement 1'exil , la mifere & Pabandon : » heureux toutefois fi, content du témoignage » de fa conlcienee, il eut pu fupporter long« tems Padverficé , fans en être ébranlé 5 mais, » foit qu'il efpérat qu'en fe rapprochant il trou» veroit plus de moyens de faire triompher fon » innocence, foit que, n'écoutant plus que le >j défefpoir , il crue devoir tout rifquer poar fe » mer de Phorrible mifere oü il étoit réduit 2 *> il s'engagea dans une démarche imprudente , n & fans doute criminelle. Il rentra funivement » dans fes tertes, oü fes fideles fujets le recurent » a bras ouverrs.. Les ennemis qu'il avoit a la » cour étoient trop habiles pour ne pas profirer » de cette faute. Ils repréfenterent Pentreprife » du comte comme une révolte, une nouvelle m armée, plus .forte que Ia première , vint 1'in» veftir dans la forte place de LecFoure : il pou» voit s'y défendre, fon réfpect pour le roi » Pen empêcha. II traita avec le Iieurenant-  SOMS C H A R I Ë S VIIL 4-7- ï> général de 1'armée royale, & obtinc un délai » de quatre jours'pour fe préparer k un nou vel » exil. RafTuré fur la f©i des fermens , il fit, » dès le jour même , ouvrir les portes de la »» ville a 1'armée du roi. Le lendemain, Mon*> faucon & Ruffec de Balzac, gendre de Dam» martin, étant venus lui rendre une vifite , » le trouverent avec la corateffe fa femme, &c * routes les dames de fa cour. Après mille » proteftations d'amitié, accompagnées d'offres » de fervices , Monfaucon fe tournant vers » Gorgias , 1'un de fes fatelütes, lui dit : fais » ton devoir. A 1'inftant le fcélérat, tirant un> » poignard, fond fur le comte., & Ie perce d& » pkfieurs coups dans les bras de fa femme. » Peignez-vous ici toutes les circonftances qui » accompagnerent eet horrible forfait y repré» fentez-vous un prince généreux & fans dé» ^fiance , affailli par des laches qui, au mépris » des fermens les plus folemnels & des droits » facrés de 1'hofpitalité, le poignardent de fang♦> froid dans fa propre maifon, Sc fous les yeux »» de fa femme; voyez cette princeffe baignée » du fang de fon mari, le ferrant dans fes » bras, Sc tachant dattirer fur elle les coups » qu'on lui porte j confidérez toutes ces femmes *■ éPerd«es, poulfant des, cris aigus, les mies  r4? Ê T A T S >> tombant évanouïes , & les autres s'empref» fant de fecourir leur maitrelfe. A ce tumulte » a ces cris, d'autres lateilites cachés dans la » cour, s'élancent dans 1'appartement, &, fans » être attendris d'un fpeótacle fi touchant, fe » jettent fur ces femmes défolées, leur arrachent ji leurs colliers, leurs bracelets Sc leurs bagues, » déchirent leurs vêtemens , les trainent par les » cheveux; Sc ils fe préparoient a leur faire » effuyer les derniers outrages, lorfque Galton » du Lion , attiré par le bruit, entre 1'épée a la » main , Sc arrache ces viétimes éplorées des u mains de leurs raviffeurs. La comtefTe, ab» forbée dans la douleur , fut tranfporrée au » chateau de Buzet ; mais elle n'étoit point » encore parvenue au dernier terme de fes » malheurs. Bientót elle voit entrer trois autres » fcélérats .... Pourquoi craindrois-je de les » nommer , puifqu'ils n'ont point craint de »> commettre une action fi infame ? Caftelnau» Bretenoux , Guemardon Sc Olivier-le-Roux » entrent dans fon appartement, la forcent, le » poignard fous la gorge, d'avaler un breuvage » empoifonné, pour faire périr 1'enfant dont » elle étoit enceinte. O crime digne des Hérode, » des Bufiris Sc des Phalaris! Deux jours après, » 1? mare Sc 1'enfant exoirerent. Telle fut la fin » da  s 6 v s Charges VÏIÏ. 49 *» de ces iiluftres époux. Pafions maintenant au s* récit des malheurs du prince que vous voyez » ici. » Tranquille , il vivoit dans fes terres , igno'» rant même que fon frere eüc encouru la difh grace du roi, au moment ou il s'y attendoic w le moins, il fe voit invefti, chargé de fers, W &: traïné dans les prifons; après avoir fu'bi « divers incerrogatoires, après avoir été appli» que a diverfes reprifes a la queftion ordinaire >V & extraordinaire, il ftit enfin remis entre les mains du parlement de Paris, fon innocence » étoit avérée, & il touchoit au moment d'ètre » pleinement juftifié, lorfque ceux qui s'étoienc >> déja mis en pofTeiïiort de fes biens j eurenc » le crédit d'évoquer la procédure 8c de le ti»> rer de la conciergene pour le hvrer a Phi*> lippe Lhuiilier , gouverneur de la baftille, Cec j> homme barbare & féroeé, avoit apparemmenc » recu un ordre fecret pour le faire périr d'une » mort lente. 11 commenca par Penfermer dans t» un cachot ténébreux , plus profond que les >> folTés remplis d'cau qui ënrouirehr la baftille. »> Peau a la vérité n'entroit pomt pir la porte »» de la prifon, mais elle dég..mtoir concinuel»> lement de la voute fur fa tête nae 8c fur le * lit du malheureux; s'il vouioit marcher danj Tornt X; ' D  5© E T A T 8 » fa prifon , il ércic dans la fange jufqu'au gei » noux; quoique fes habits tombaffent par lam»beaux, on ne fongea point a lui en donnet » d'autres, on lui donna rarement des chemifes, jamais de chaulfures. La fureur de fes en» nemis ne fe borni point a ce fupDÜce lent; » Philippe Lhuillier fon geolier, ou plutót fon » bourre.m , fe plaifoit quelquefois a lui faire » arracber ks dents en fa préfence , ou a lui » faire donner cent coups de verges, fupplice » igdomihieü'x , invènté pour chatier des enfans. » Tcls font les outr.-ges qu'il a effuyés pendant » quatorze ans ehtiers, a la fin , on lui a rendu >> la liberté, dans un tems ou fon corps affoibli » par de longs tourmens a perdu toute fa vi» gueur : fes avides perfé-uteurs gardent encore » fes biens; & ce prince defcendu des rois de » France & d'Arrag >n , n'a point d'afyle fur la » terre , & fe trouve réduit a demander 1'aum móne. Sire , vous avez annoncé, par la bouw che de votre chancelier, que vous étiez pret » a venger les opprimés, & a faire rendre une » juftice exacFe, même au dernier de vos fujets, *> après eer engagement folemnel, pourriez-vous » dirférer un inftant a lever 1'opprobre que des » fcélérats ont imprimés au nom francois, &C » a punir des forfaits inconnus a nos aïeus ?  sóüs Charles VlII. yt » ïl n'eft point ici queftion d'un fait obfcur Sc » qui puifTè être enfeveli dans 1 oubli; il s'agit » d'une maifon illuftre qui a long tems rempli » les premières charges de la couronne, Sc qui w a verfé fon fang pour la patrie. Vengez un » innocent, alTaffiné par une infame trahifon; » vengez une princelfe de votre fang, époufe » Sc mere également inforrunée; vengez un w orphelin empoifonné dans le ventre de fa » mere; enfin , prenez pitié d'un prince mal»heureux, long-tems privé de la lumiere du »> jour , Sc arraché , pour ainfi dire, aux horw reurs du tombeau. Les fcélérats que je voói >» dénonce, non-feulement refpirent, mais ils onc » 1'audace de paroïtre dans cette alfemblée; je » les vois parés des dépouiiles du malheureux,' »> infulter par leurs ris a mes difcours & a fes » larmes. Riez , miférables , car bien-rot vous » pleurerez. Ofez envifager votre roi , je lis » déja fur fon front 1'arrêt de votre mort; & » vous, princes , qui m'écoutez , fouffrirez-vous w que votre fang foit impunément répandu par » des affaflins ? Si Ia nature a gravé dans vos cceurs » des fentimens d'humanité & de tendreffe pour *> vos proches , que tardez-vous a courir a la » vengeance ? mais non , arrêcez '& gardez-vous » de chercher une vengeance que la loi défa- D z  jfi, E T A T S » voueroic; roi, c'eft a vous feul que je m'a-> » dreffe. Le plus grand nombre des coupables » eft ici, les autres peuvent facilement être » arrêtés ; mettez-les entre les mains de votre » parlement, 8c li nous ne prouvons juridique» ment les faits que nous venons d'avancer , Ie » prince que vous voyez ici implorer votre mia féricorde, fe foumet aux mêmes fupplices » qu'il demande qu'on leur inflige ». Ce difcours véhément remplit 1'afTemblée 'd'horreur 8c d'effroi ; d'un cóté, on voyoit Charles d'Armagnac a genoux fondant en la;mes & implorant le fecours de 1'affembiée. De lautre, le comre de Dammartin, Ruffec de Balzac, Caltelnau-Bretenoux, Lhuillier & Oiivier leRoux , contre lcfquels 1'orateur s'étoit fi violemmenc déchainé, 8c qui n'ayant ofé 1'intetrompre , fe tordoient les bras , froncoient le foarcil 8c donnoient toutes les marqués de la plus terrible colere. Le chancelier crai-nant les fuites d'une fcene fi violente, paria un moment au roi, puis fe tournant vers 1'aflemblée , il dit : « Que Charles d Armagnac 8c les cnfans du duc de Nemours, pour lefquels les états .ont fupplié, fe préfentent au confeil , 8c on leur fera juftice ». Dammartin, quoique mal accompagné Sc vu  'sous Charies VIII. 53 de mauvais ceil,ainfi que-tous ceux qui avoient été en faveur fous le regne précédent, ne pue s'empêcher de dire en préfence du roi , que tout ce qui s'étoit paffe dans i'affaire du comte d'Armagnac, s'étoit fait par 1'ordre du roi,3£ qu'on avoit eu grande raifon d'ufer de rigueur envers ce comte , paree que c'étoit un léditieux un traitre. Le fire d'Albret & Lefcun, qui étoient préfens , dirent que Dammartin en avoit mend par fa gorge. A ces mots le vieux guerriesr met 1'épée a la main , tc fond fur fes ennemis déja préparés a le recevoir. La préfence du roi n'auroit pu empücher que la fcene n'eüt été enfanglantée, fi un grand nombre de perfonnes ns fe fufïent jettts entre les combatrans & ne les euffent féparés. On eut égard, dans le confeil, a la requête des ét2ts, en faveur des enfans du duc de Nemours ; ils furent rétablis dans les biens de leur mere, & admis a plaider au parlement pour la fuccefïïon de leur pere. Quant a Charles d'Armagnac, il obtint d'abord la reftitution des comtés d'Armagnae ëc de Rhodès; mais comme fes longues. fouf» frances avoient altéré fa raifon , le fire d'Albret fe fit adjuger rsdminiftration de fes biens en qualité de plus peoche parent, & le renierma dans une nouvelle priforu Le roi en étanfc Dj,  •54 E t a t s averti,Pen rira une feconde fois, &'lui nomma des curateurs. Ce retour de fortune ne fut pas de longue durée; il mourut fans lailfer de poftérité légicime, & fes biens, en vertu de plufieurs tranfaótions, furent réunis au domaine de la couronne. Revenons aux états. Nous avons dit que les dernandes de la nation avoient été lues a deux reprifes différentes dans rafTemblée générale , que le roi avoit exigé, avanr que d'y répondte, que les principaux articles fuffent difcutés de nouveau dans fon, confeil. 11 femble néceffaire avant tout, d'expofer ici le contenu de ces cahiers; ce travail eft pénible pour 1'écri■vain , il fera peut-être fatiguant pour le lecteur; mais il eft certainement utile, & cette raifon feule doit 1'emporter fur toute autre confidération. Pour jetter fur ces matieres difparates, toute la clarté dont elles étoient fufceptibles ; les états les partagerent en cinq chapicres, dont le premier eft intitulé di VEtat de /'Egl!Jetle fecond de VEtat de la NobleJ/e, le troifieme du Commun ou du Tkrs-Etat, le quatrieme de la Jufiice, & le cinquieme de la Marchandife. Dans le premier, les états fupplient le roi de ne pas différer plus long-tems a fe faire fa-  sous ChAmüs VIII. 55 Icrer, car quoique l'on£tion facrée ne conftitue poinr efTentiellement la royauté, ils femblent perfuadés qu'il y a des graces panscuiieres attachées a cette cérémonie religieufe , & ils cicenc 1'exemple du roi Charks VU, qui, conftamment malheureux avant fon facre avoit toujours profpéré depuis, Sc étoit parvenu a chaflec les Anglois du royaume. Ils demandent enfuite avec les plus vives inftances, le rétabl dement de la PragmatiqueSandtionj conftitution fainte , ajouteut-ils, formée fur la difcipline des premiers fiec.les de Pégüfe, autorifée par les cpnciles de Conftance Sc de Bale , adoptée par les états généraux du royaume, Sc regardée comme le fon-. dement de nos franchifes 8c de nos libertés; ils déplorent les maux arrivés a,1'état 8c a 1'eglife, depuis que Louis XI, en révoquant cette conftitution , avoit livré fon royaume a Pavide induftrie de la cour Romaine : ils ajoutent qu'il n'y a pas un moment a perdre, fans quoi tout Pargent qui refte dans le royaume pafTera en Italië; les bénérices 8c toutes les dignités ec-? cléfiaftiques feront conférés a des hommes' fan» mceurs 8c fans fcience; & le peu de régularité <$ui fubfifte encore dans quelques maifons religieufes, difpaïoitra enrierement. En cherchanc D 4  $6 . E' T A T S k rcprimer les abus de Ia cour de Rome, les} érars proreftent de leur obéiflTance & de leurfoumiifion au pere commün des fidèies. Cat comme i! ne répngne point , difent-ils , qu'un fi!s qui fè fen: injuftement maltraité par fon pere , implore le fecours d'un ami commun , Sc le conjure d'intercc'der pour lui ; de même les Francois, qui fc fentent grevés par leur pere fpirnuel , peuvent bien adreffer leurs plaintes «k leurs doléauces au roi leur pere temporel y contre tous ceux qui entreprendroienr de les. trouwer dans leurs droits, & div.t leurs liberth. E:i com'cquence, les gens des trois-états, fupplient le roi, le..r fouvtrain ftigneur, d'envoyer au pape des ambaffadeurs pour lui ren-, dre Pobédiénce filiale; lui expofer en mêmeu-ms Texrrème pauvreté de fes humbles enfans, q.'.i , dans tant d'occafions, on! généreufement faoifié leur vie & leurs biens puur la défenfè du faint fiége, & le prier de ne point s'orFenr' fer que déformais ils ufent de leurs dtoits &C de leurs franchifes. Si Ie fouverain pontife». ajovtrenr-ils, prétend que ces droits font abufifs'> les trois états font prêts a s'en rapporter a Ia décifian, d'un concile général duement aflemblé; proteftant qu'en cas que le pape refufe de. \eM ?emlre jultice, & qu'il entreprenne quek  sous C h A r m s' VI tl. 'j7' feue chofe contre la liberté de la nation 5c la. prééminence de la couronne , ils en pourfuU vront la réparation en tems Sc lieo. Après avoir expofé au roi la conduite qu'il devoir tenir a 1'égard du faint fiége, les troiss états lui repiéf-nterent que les rois fes prédécefïeurs avoient merité le glorieux tftre de trés-, chrétiens , par la proreótion qu'ils avoient ac-< cordée a 1'égUie; que tant qu*ils avoient honofe les miniftres des autels, 1'écat avoit ére fiche Sc 'floruTant au-dedans , crainr 5c refpeóté au* dehors; que depuis quelque tems 1'églife avoit été opprimé'e ; que für de faux rapports on; avoit faifi les biens eccléfiaftiques Sc trainé des, évèques en prifon ; que les commilfaires prépofés a la recherche des francs-fiefs Sc des nou-?, veaux acquets, avoient exigé de groiïes fommes pour des föndations, qui, depuis plufieurs fiecles,' jouiffoient d'une pleine exemption; qu'en fequeftrant le temporel des églifes , on étendoit la faifi'e jufques fur fes oblations 5c les dimes» Ils füpplient le roi , qu'en marchant fur les tracés de fes religieux ancêtrcs , Sc far-tout du glorieux roi Charles VII, 11 refpeóte les immuuités Ss les privileges du clergé ; qu'il ne faffe |> oint faifir déförmais le temporel des églifes , fans de grandes Sc juftes caufes , Sc que mêmej  5g K T A T * dans ce cas, il exempre de la faifie les dïme» & les oblations des fideles. Tels font les principaux articles contenus dans le premier chapirre. Le fecond , renferme les demandes de la nobleffe; eet ordre qualifié le nerf dt Cètat . fe plaint de 1'abus qui s'étoit introduit fous le dernier regne , de convoquer prefque toutes les années, le ban Sc 1'arriere - ban. Comme un grand nombre de gentl'shommes vieux ou infirmes, étoient obligés d'acquitter en argent le fervice auquel ils «toient tenus a raifon de leurs fiefs, Louis avoit fait de ce droit une des branches de fon revenu, la nobleffe demande, i°. qu'on ne la convoque que dans de grandes occafions, Sc lorfque 1'état eft en péril ; z°. que toutes les fois qu'on la convoquera , on ait la précaution de lui foufnir des vivres , afin qu'elle ne foit pas forcée de vivre de rapines; 30. que les vaffaux ne foient tenus de fervir que fous la banniere de leurs fuzerains , fans qu'il foit permis aux baillis & aux fénéchaux d'en difpofer a leur volonté; 40. enfin, que les dépenfes que la nobleffe avoit été obligée de faire pour le fervice de 1'état , 1'ayant réduite a conftituer des rentes fur fon bien , a dix pour cent, rachetables dans un certain tems, & que n'ayanc  sous Cbariis VIII. 59 pu fatisfaire a eet engagement au tems marqué, il plaife au roi de'preroger ce terme pouf deux ans. La nobleffe fe plaint enfuite des entraves qu'on avoit mifes a fon droit de chaffe, quoiqu'il foit permis a tout nob'e , difent les députés , de chaffcr dans fes bois, & que ce droit foit auffi ancien que la monarchie; cependant, fous le regne précédent, les gencilshommes ont été troublés dans cette poifeflion : 6- ont été faites contre eux & fur eux merveiüeufes exécutions par commifjaires & gens de pct'it état, dont fi font enjuivis plupeurs maux , & entr'autres grands dègats de bleds, par les bêtes fauves auxqu'elles on n'ofoit pas toucher, & étoient les bétes plus franches que les hommes. Louis XI, jaloux de dérober a fes ennemis , leurs généraux & leurs miniftres , & de les attacher a fon fervice , avoit conféré prefque toutes les plus grande! places a des étrangers : les trois états remontrent au roi, combien il eft dangereux de confier les clefs du royaume a des hommes qui ne tiennent a la France que par un intérêt pécuniaire , & citent 1'exemple d'un grand nombre de trahifons qui s'éroient faites par ces étrangers , durant la guerre avec PAngleterre j ils fupplient le roi de ne donner les  fïa E T A T S charges de gouverneurs, de fénéchaux & dé* baillis, qu'aux gencilshommes les plus accré-i dke's dans les provinces , paree qu'ils font plus JneéreiTés a empêcher les pillages des gens de guerre, Sc plus artentifs k fe précautionrcer contre les ennemis; quant aux charges de fa maifon, les gencilshommes, ajourent-ils, les ambitionnent fur toutes les autres, pour eux & pour leurs enfans , afin qu'ils foient mieu» connus de leur fouverain. Le chzpnrQ ducommun, ou du tiers-état, entre dans urn plus grand détail fur les caufes de 1'épui. fenaent du royaume. L'argenE % difent les trois états , eft dans le corps politique, ce que Ie fang eft dans le corps humain : il imporre donc d'examiner quelles faignées & quelles évacuations on a faites a I» monarchie depuis environ un fiecle. La première fut du tems des papes Alexandre & Martin, qui, en quatre ans de tems, tirerent de ce royaume des fommes fi confidérables; quelles furent évaluées a plus de deux millions dor. Pour étancher cette merveilleufe évacuatioa de pécune , furent faits certains concordatsavec le pape Martin ; mais Pon ne fut fi bien lier la plaie par concordats, que la fubtilité romaine ne «ouvrit la cicatrice par nonobfiancts & antefenis £  sous Charles VIII. 'éi teïlement qu'infinie fomme d'or & d'argent alla en cour de Rome , dont furent conduices les guerres d'Italie entre les héritiers du pape Martin. Les calamités fans nombre auxquelles ce royau*; me fut en proie, n'arrêterent point eet écoulement. Tandis que les Anglois conquéroient nos provinces , que des armées de brigands défoioient les campagnes , les colle&eurs de décimes & de penfions apoftoliques continuoient tranquillement i pomper la fubftance de 1'état , Sc fi Charles VI, par les ordonnances qu'il rendit en 1406 & en 1418 , n'eüt remédié a une partie de ces abuï, la France étoit perdue fanst refiburce» Tout le monde fait a quel excès d'humiliation tk de mifere 1'état étoit réduit, lorfque Charles VII monta fur le tróne. Ce grand roi rétablit tellement la police générale, & tint fi bien la main a ce que 1'argent ne fortït plus du royaume, qu'en peu de tems le corps politique commenca a refpirer & a entrer en convalefcence, mais il ne put emierement recouvrer fes forces : ce bon roi fut enlevé tfop tót a la nation ; & prefque immédiatement après fon trépas, le royaume rut livré de nouveau a. Favidué des érrangers.  &i E T A ï S Ce fut alors que Louis XI, féduit pat les ertifices du cardiual Jouffroi, revoqua la pragmatique, Sc foumit fon royaume au pape pout en ufer a volonté; démarche entierement contraire aux droits Sc a la liberté des iujets, préjudiciable au roi lui-même, & qui a enlevé a la France des fommes prodigietifes ; car dans ce royaume,'ajourent-ils, il y a cent un évêchés, & il n'y en a aucun qui, depuis la mort de Charles VII, n au ete vacant au moins une ou deux fois, & aucun dont la vacance n'ait produit au faint fiege au moins fix mille ducats* Quant aux abbayes Sc prieurés, qui font au nombre de plus de trojs mille en France , H n'y en a point dont la vacance n'ait fait fortir cinq eens ducacs , en prenant un terme moyen , ce qui, bien calculé, monte a. des fommes rnrrveilleufes Sc innumérables. Ajoutez-y cependant celles qui font forties poar indulgences , décimes, difpenfes, & voyages en cour de Rome ; ajouttz - y encore les taxes impolées au profic des légats ; car fous le regne précédent, on en a compté jufqu'a trois ou quatre qui ont donné de merveilleufes evacuarions a ce pauvre royaume , &c voyoir-on mener après eux des muiets chargés dor G* d'argent.  't e v s Csniis VIÏI. gf A cette occafion , les trois états fupplient le roi de refufer 1'entrée du royaume i fialue, qui y venoit encore en quaücé de légat; car, fans parler d s raiibns qu'on avoit de le regarder comme un homme fufpecF, fa légation étoit entierement inutile, puifque Ia France étoit en paix. Après avoir découvert cette première caufe de Pépuifement du royaume, les érats paffent «ux autres, & citent, i°. le parti que Louis XI avoit pris dacheter i grands frais la paix, la neutralicé ou Palliance de la plupart des princes voifins, & les fommes qu'il avoit fait paffer en en Angleterre, en AHemagne , Sc jufqu'en Portugal & en Ecoffe; z°. les vexaticns Sc les ra-! pines que les gens de guerre exëreoient impuiiément fur les laboureurs. C'eft une chofe criante, obfervent-ils , que les gens de guerre; ftipendiés pour défendre le peuple , foient précifément ceux qui le pillent Sc qui Poutragent; Quand un pauvre Iaboureur a toute Ia journée labouré a grande peine & fueur de fon corps ,' & qu'il a cueilli le fruit de fon Iaböür , dont" il s'attendoic vivre, on vient lui enlever la meilleure partie, pour la donner i tel qui le battra peut-être avant la fin du mois , qui 1'obügera de coucher par terre, Sc qui viendra déloger les  - E T A T S chevaüx occupés du labourage pour loger les fiens, Et quand le pauvre homme a payé, avec bien de la peine, la quote-part de la taille, a laquelle il étsiit impofé pour ftipehdier les gens d'armés, Sc qu'il efpere fe confereer avee ce qui lui eft demeuré , efpérant que ce fera pour vivre le refte del'année Sc pour enfemencec fa terre, vient une voiée des 'gens d'armes qui -jnangera' Sc déga.tera ce peu de bien que le pauvre homme avoit réfervé pour vivre. Souvent même i'homme de guerre ne fe contente pas de ce qu'il trouve dans la cabane du laboureur, mais le contraintj a grands coups de baton , a aller cherchet en ville du pain blanc, du poiiTon, épiceries, & autres chofes exceffives; &, a la vérité , fi n é.oic Dieu qui confeüle 'les pauvres & leur donne patience, ils chcrroient en défefpoir. Les maux que nous venons d'expofer , coiitinuent les états, ne font encore rien au pnx de celui dont il nous refte a parler. La triftelfè Sc la déplaifance innumérables , ies larms.. de pitié, les foupirs Sc les gémitfemenS de eceur défole, a peine pourroient fuffire ni pèrmettre 1'expiication du fardeau accablant des impotSi 1'énormité des maux qu'ils ont occafionnés ; & 1'injufte violence Sc ranccuiusmens qui ont été faits eii  SOUS C KARLES VIII, £5 «n levant & raviffant iceux fubfides qui euc jamais penfé ni imaginé voir ainfi traiter ce peuple jadis nommé Francois ? Maintenanc le pouvons-nous appeller peuple de pire condicion que ferf; car un ferf eft nourri, & ce peuple a été affomrné par des charges importables. En voici ia preuve. Les paroiffes qui., du tems de Charles VII, n'étoient impofées qua quarante ou foixante livres de taille, le font aujourd'hui par milliers; & les provinces qui 1'étoienr alors par milliers, paient aujourd'hui des millions. Le Languedoc , qui, a. Ia mort de Charles VII, ne payoit qu'e.nviron cinquante mille livres, fe trouvoit, a la mort de Louis XI, impofé a plus de fix cent mille livres. La Normandie a été traitée avec la même dureté, puifque cette province, qui, du tems de Charles , n'étoit impofée qu'a deux cenc cinquante mille livres, a été taxce fous le regne de Louis , a douze cent mille , non comprifes les petites tailles , les gabelles, & a*nres menu es impofirions , qui, routes enfemble, peuvenc être évaluées a trois cent mille livres. Ce terribie fléau, ajoutent les députés, a répandu la défo« lation dans cette province naturellement fercilei une parrie de fes habitans fe font réfugiés ent Angleterre ou en Bretagne ; d'auttes, en plus; Tornt X, E  46 E T A T S grand nombre, lont morts de faim & de mifere5 quelques uns, livrés an plus affreux défefpoir, ont égorgc, par pitié , leurs femmes Sc leurs cnfans, Sc fe font poignardés eux-mêmes fur leurs corps expirans : plufieurs hommes, femmes 6c eufans , par faute de bêtes, ont été centraints de labourer la charme au coü; d'autres labouroient de nuit, pour crainte qu'ils ne fuffent pris du jour, &c appréhcndés pour lefdites tailles. La maniere de percevoir 1'impot, ajoutent-ils, n'eft pas moins accablante que 1'impot lui-même. Tout le monde connoit les concufiions 8c les violences des commiffaires chargés de ce foin. Citons-en un éxenaple. Lorfque les habitans d'une paroilTe ont , avec beaucoup de peine payé leur quote-part, ils ne font point encore ti 1'abri des vexations; fouvent on les enleve & on les ernprifonne , jufqu'a ce qu'ils aient payé ce que n'ont pu acquitter les habitans d'une paroilTe voifine : ils n'en font pas même quittes pour payer cette doublé impofition; on les oblige, avant que de leur rendre la liberté, d'acquitter encore les frais du fergent, du greflier Sc du geolier, fans parler des dommages qui réfultent pour eux 8c pour 1'état, de la perte du tems Sc du, défaut de culture. JDe toutes ces confidérations, les trois états  SOUS CtlARtlS VUT. Cj conclurent que Ie roi devoit avoir pitié de fon peuple. & Ie décharger entiérement du fardeau «néreux des tailles. Mais avant 'que de former définicivement ce réglement, ils cturent qu'ils devoient lui indiqner Jes moyens faciles de fe priver de cette partie de fes revenus, fans afFoiblir fa puiffance. Le premier confiftoit, felon eux, a réünirau domaine toutes les branches qui en avoient été féparées, fous quelque ritre que ce put être. Ils étabirfloient que le domaine étant le vrai patrimoine de la couronne , devoit être employé a acquitcer les charges de 1'état, & qu'un roi ne pouvoit, fans une injuftice manifefte , en diftraire aucune portion. Le fecond a fupprimer les offices inutiles; & a réduire les gages de ceux que 1'on croira devoir conferver. Le troifieme i retrancher, ou du moins a modifier les penfions. Voici comment ils s'expriment fur eet article : Qu'il plaife a medeigneurs, qui prennent des penfions fur 1'état, de fe contenter du revenu de leurs feigneuries fans prendre aucunes penfions; ou du moins, s'ils penfent ne pouvoir s'en paffe r , qu'elles foient raifonnables , modérées & fupportabley , su égard aux afflictions & mifere du pauvre h z  68 • E T A T s peuple; car ces penfions ne fe prennent point fur le domaine du roi s il n'y pourroit fuffire, mais elles tombent toutes entieres fur le tiersétat , Sc il n'y a fi pauvre laboureur qui ne contribue a. les acquitter : d'oü il eft fouvent arrivé que le pauvre laboureur eft mort de faim, lui Sc fes enfans, paree que la fubftance dont ils devoient fe nourrir eft prife pour -lefdites penfions ; Sc n'eft point a. douter que , au paiement d'icelles } il y a telle.piece de monnoie qui eft partie de la bourfe d'un lar boureur, duquel les enfans mendient aux portes de ceux qui touchent ces penfions , Sc fouvent les chiens font nourris du pain acheté des deniers du pauvre laboureur donc il devoit vivre.' Enfin,, le quatrieme moyen confiftoit a réformer la milice. L'étst eft en paix, difentils, Sc doit être dilpenfé de ftipendier a grands frais des milliers d'homrnes inutiles : Si cependant 1'on eft perfuadé qu'il ne puilfe abfolument fe paffer d'un corps de rroupes taujours fubfiftant. ce corps ne doit pas êcre plus nombreux qu'il ne 1'étoit fous le regne de Charles Vil. En voici la preuve : Charles VII, avec ce petit nombre de troupes & le cceur de la nobleffe , tripmpha de fes ennemis , recouvra Ja Normandie Sc la Guienne , alTura le repos.  sOus Charles VIII. 6gr de la France , fut refpecFé de fes voifins & adoré de fes fujets , paree qu'il mettoit en Dieu fa confiance , qu'il fuivoit les avis des états généraux, qu'il rendoit une juftice exacte a fan peuple, & qu'il étoit un roi clément &c miféricordieux. Les troupes que 1'on jugera a propos de eonferver doivent être tenues fur une difcipline exacFe ; qu'on ne les confie qu'a dês capitaines connus , Sc qui répondent de la conduite de leurs foldats ; que les juges ordinaires foient autorifés a informer contre les délits Sc a s'allurer des coupables ; que dans routes les places de garnifon , on commette deux gentilshommes du pays , les plus. inregres & lés plus accrédités , affiftés du clerc des maréchaux , pour faire tous les mois la revue des gendarmes; informer des violences & des rapines exercéés dans les environs , & recrancher fur la paye de quoi en faire la réparanon.. Lorfqu'on aura retranché toutes les dépenfes ruineufes & fupeiflues, continuent les députés , il feta moins difficile de pourvoir aux néceffaires. Nous favons que 1'état de la maifon du roi, de la reine , les voyages des ambaffadeurs,, les gages des officiers civils &c militaires entrainent néceffakement de la dépenfe ; c'eft & Ei  7° E T A T S cela que les revenus du domaine doivent être employés, Sc s'il eft prouvé qu'ils ne puiffent y fuffire , le peuple Francois , qui s'eft toujours fait gloire d'offrir a fon roi & fa vie Sc fes biens, toutes les fois que des befoins réels Font exigé, fournira libéralement tout ce qui aura été confenti & réglé par les états. Paifqu'il a plu au roi de nous afFembler pour nous communicmer fes affaires , voici Paffaire importante & celle qui mérite le mieux de nous être communiquée. Jufqu'a ce qu'on nous ait clairement montrc le contraire , nous demeurerons convaincus que le domaine de la couronne auquel on a joint les gabelles , eft plus que fuffifant pour acquitter toutes les charges néceffaire de 1'état. Que toutes tailles & autres impofitions arbitraires foient donc tollues & abolies , & que déformais , en fuivant la naturelle franchife de france , aucunes tailles ni autres impofitions équivalentes ne puiffent être levées dans le royaume fans la participation Sc le confentement Iibre des états-généraux. Les députés firent encore quelques autres demandes moins importantes ; la première qu'il plut au roi de proroger de trois ans le terme ft'pulé dans les contrats pour Pacquit des rentes gue le malheur des naaées précédentes avöic  j Oïi Charies VIII. 7t empêché de rembourfer; la feconde , qu'on ne fotc,at plus les poffefleurs de fiefs infcrits fuc les róles des taillables a acquitcer encore le ban & 1'arrlere-ban: la troifieme , qu'il daignat confirmer , par une déclaration générale , les privi-t leges , franchifes & libertés de toutes les villes & communautés de fon royaume » fans que cha^. cune d'elles fut tenue de prendre des lettres particulieres. Le quatrieme chapitre embralTe un plus grandl nombre d'objets , & mérite une attention par*s ticuliere. La juftice, difent les trois états, eft dame 9C princeffe des autres vertus ; car fans elle nulla monarchie ni chofe publique ne peuvent profpérer , ni parvenir au fouverain bien , qui eft la bien du pays. II eft raifonnable & ttès-néceffaire d'avoir k icelle un fingulier regard ; con« fidéré que ce glorieux & très-chrétien royaume fur tous les autres a été doué • de cette noble vertu ; & que par ci-devant toutes étranges naziens , même les inhdeles, font venues dans ce royaume pour y trouver la lumiere de la juf-( tice. Ces heureax tems, ajoutent-ils, font bier» changés ; autant ce royaume étoit célebre par Ia juftice , autant il eft aujourd'hui défiguré par lt, E 4  7* E T A T S violence. II s'agit de découVrir la fource de cette funefte révolution. -Comme un roi ne peut fuffire feul a rendre la juftice a tous fes fujets , il a été nécelfaire qu'il fe fit remplacer par un grand nombre d'officiers fubordonnés les uns aux Vutres , & répandus dans toutes les provinces de la monarchie.; mais il doit bien prendre garde a quelles mains il confie ce précieux dépót, autrement il eft: refponfable dëvant Dieu Sc devant les hommes , de toutes les injuftices qui fe commettent en fon nom. C'eft pour cette raifon que nos plus gr%nds r»is,tels que S, Louis , Philippe-le-Bel , Charles V , Sc le glorieux Charles VII , conlidérant qu'ils ne pouvoient avoir par eux mêmes une üonnoiffance alfez exacte de leurs ftijets , pour n'être pas fouvent expofés a fe trompet dans le choix qu'ils en feroient, avoient ordonné que toutes les fois qu'il vaqueroit une place de judicature, le tribunal oü elle vaqueroit , éliroit, a la pluralité des voix , les trots hommes qu'il croiroit le plus eapables de la bien remplir, Sc les préfenteroit au roi, qui conféreroit la place a un des trois ; par ce moyen la confcience du roi étoit déchargée , Sc les places étoient toujours bien remplies.  sous Charies VIII., ?JV ., Mais depuis la mort de Charles , ce bel ordre a été entiérement perverti , & 1'on a fait un trafiosfconteux de tous les emplois , fouvent on donnoit a des facteurs les provifions d'un office avec ie nom en blanc pour y infcrire celui qui ofFriroit une plus grofle fomme de deniers. Par-la les places ont été avilies ; la porte a été ouverte a la corruption , & 1'exercice de la juftice eft devenu un brigandage. On a vu de -nos jours les vicomtés , les prévotés , vigueries & les charges de 1'élection ■, toutes les places qui demandent une probité 8c des lumieres reconnues , püifqu'elles donnent le droit de prononcer fur la vie & fur la Fortune des citoyens; on a vu ces charges conférées a des militaires , a des venevrrs ou a des étrangers , gens non-lettrés ni experts , lefquels incapables de les remplir par eux-mêmes, les affermoient a quicouque leur en offroit des profits plus confidérables. Pour remédier a ces étranges abus , 8c accomplir le voeu du roi", qui defire de faire regner Ia ■j juftice fur fon peuple ; il femble aux trois états, qu'on doit , avant tout , remettre en vigueur les éledions , & ne jamais s'en départir , toutes les fois qu'il fera queftion de pourvoir a un office  74 Et at* de judicature : car juftice ne peut être exercée J finon par des gens juftes. Et d'autant qu'il n'y a rien qui excite fi fortement un officier ou un ferviteur a bien, loyalement Sc diligemment fervir fon rniicre, que raffiirance de conferver fon emploi, tant qu'il en remplira exactemenc les fondions ; il femble aux mêmes états, qu'aucun officier ne doit être privé de fa charge, ni des émolumens qui y font attachés, s'il n'a été convaincu de préva» rication : car auttement il ne feroit vertueux ni fi hardi a gatdcr Sc 4 défendre les droits du roi; & fi feroit plus aigu Sc inventif a trouver exactions Sc pratiques , pour ce qu'il ferpit toua les jours en doute de perdre fon office. En conféquence, il femble aux trois états; que ceux qui avoient obtenu du roi Louis XI des offices a bon Sc jufte titre , & qui en ont été dépouillés fans caufe , doivent y être rétaWis, ou du moins être admis a en pourfuivre Ia reftitution en juftice réglée. Touchant les offices extrabrdinaires , qui de nos jours ont été créés en grand nombre , lei trois états penfent que cette nouveauté eft con. traire au bien public ; car multiplication d'of» éces eft augmentation de gages ; & fi ces of>  soes Charles VIIÏ. fïces n'ont point de gages , ceux qui s'en trouvenc poui'vus, inventent des pratiques extraordinaires pour titer de Pargent. Que ces offices foient donc promptement abolis. Plufieurs inconvéniens font arrivés au roi & k Ia chofe publique , de ce qu'un feul homme poffédoit fouvent deux , trois &c même quatre offices k la fois; 8c comme il ne pouvoit fuffire a les gérer tous enfemble , il étoit obligé de les faire exercer par des commis qui les prenoient a ferme, & n'avoient d'autre intérêt que d'en tirer de gros profits au detriment du peuple. Pout remédier a ce défotdre, il femble aux trois états , que nul dorénavant ne puiffe tenir plus d'un office royal, 8c que par 1'impétration d'un fecond, le premier foit cenfé vacant. Après ces régiemens généraux les états porterent leurs regards fur plufieurs branches particulieres de 1'adminiftration telles que la forme du grand confeil , les expédirions du fceau , les fonétions des fecrétaites du roi , les évoca* tions 8c les appels en matiere de procédure , les enquêtes, 1'ordre &C la fubordinatton des tribunaux , Pabus des commifïions extraordinaires, les fondions des différens officiers de juftice, &c. j pareourons rapidemenc tous ces objets.  7* E T A T f' Quoique Ie grand confeil de la juftice fut des* lors occupé d'affaires importantes, tant de celles qui regardoient les droits du roi, que des pro-] cès des grands perfonnages & autres de tous états; il n'avoit point encore acquis uue forme ftable & permanente. Le chancelier y préfidoir, mais il n'y étoit affifté que de quelques baillis ; eonfeillers du roi & autres officiers royaux, qui fe trouvoient par hafard a la cour , ou qui même s'y rendoient pour obliger une des deux parties. Souvent ils jugeoient dans une affaire,' fans avoir affifté aux informacions & aux plaidoyers. Les états demandent qu'on crée pour ce tribunal, un certain nombre de eonfeillers inftruits des Ioix & des diverfes coutumes du royaume ; qu'on leur afligne des gages ; qu'ils foient les affeffeurs du chancelier, & que feuls ils aient droic d'opiner dans le confeil. Ils fe plaignent enfuite des exactions des officiers du fceau. Comme ces officiers taxoient eux-mêmes leurs falaires, ils exigeoient fouvent des rétributions fi fortes, que plufieurs villes & comraunautés aimoient mieux s'expofer a perdre leurs privüéges, que de payer les fommes qu'on leur demaudoir. Les états requierent qu'on drefTe un tatif de la fomme que ces officiers ont droit d'exiger pour chaque expédition, &  sous Charles VIII. 77 qu'ils ne foient pas les maïtres d'y rien changer. Les fécrétaires du roi n'étoient gueres moins repréhenfibles que les officiers du fceau. La plupart étoient fi peu verfés dans la pratique , qu'ils rempliffbient leurs adtes de caufes de nullitéj d'autres abfolument incapables, fe faifoient remplacer par des clercs, fouvent plus difficiles a contenter que leurs inaitres, ce qui doubloit les frais, Les états fupplient le roi que toutes les fois qu'il Yaquera un office de fecrétaire, le chancelier, les gens du confeil & les maïtres des requêtes s'affemblent pour élire lea trois fujets qu'ils jugeront les plus capables de le bien remplir, 1'un defquels en fera pourvu> par le roi. Quoique 1'appel, difent les 'états, foit le feul "remede pour relever ceux qui fe fentent opprimés-, & que la puitfance royale ayant été érabli© pour protéger les foibles, on ne doive raifonnablement refufer aucunes lettres d'ajourne-. ment, en cas d'appel, ni en la chancellerie; ni au parlement ; cependant on a vu mille exemple du contraire dans ces derniers tems : pourqtioi font demeurés infinis griefs & oppreffions faits au pauvre peuple , fans réparation, & mainte bonne maifon détruite, & de pauvres iunocens mis k mort.... II femble au trois  78 ÊrAts ctats, que ainfi ne fe doit faire, & qu'il doÏE être enjoints a ceux qui autont le fceau de la chancellerie , que a nul ne foit fermée la porte de Ia juftice, ni déniées lettres d'ajournement en cas d'appel interjetté de juge ou commiiTaires, & s'il paroit que 1'on ait dénié a quelqu'un ces lettres en chancellerie, que les cours de parlement les déiivrent fur le champ. On a vu, continuent les députés, un autre abus fous le regne précédent. Quand la cour de parlement donnoit des lettres d'ajournement , en cas d'appel, fur le refus de la chancellerie , on évoquoit la caufe au grand confeil, afin que les appellans ne puffent poutfuivre leur appel.... II femble qu'aucune caufe ne doit être évoquée au grand confeil, ni ailleurs, lorfqu'une autre cour de juftice en eft déja faifie, & que celles qui feroient évoquées de la forte deivent être renvoyées devant les juges dont elles ont été évoquées Qu'il foit pareillement défendu aux cours fupérieures de reiever aucunes appellations en première inftance , foit en matiere civile, foit en matiere criminelle, fans garder 1'ordre des tribunaux intermédiaires. Les cours de parlement, ajoutent les trois ctats, qui devroient être Ia lumiere & Ia regie Aes autres tribunaux, n'ont pu fe préferver de  j8 o tr s Charhj VIII, Ia corruption générale. On fe plainc que les procédures y font trop longues Sc trop difpendieufes; que 1'ordre du tableau n'y eft point obfervé; que le fecret y eft mal gardé; que les épices y deviennent de jour en jour plu» fortes & plus ruineufes. Tous ces abus dénvent du peu d'attention que 1'on a etle ai* choix des magiftrats. Comme la plupart ont acheté leurs charges, ils ne penfent qua en rerirer du profit. II femble aux trois états être convenable Sc trcs-néceffaire mettre Sc donnet ordre Sc provifion ès-dites cours, afin qu'il y foit pourvu de grands perfonnages Sc notables^ & bien qualifiés, dage, fuffifante littérature, prudence & bonne Confcience , a la nomination & éledion d'icelles cours , ainft qu'il fe pratiquoit du tems du roi Charles VII. Que 1'échiquier de Normandie foit tenu une fois 1'an, & que pour le tenir, foient commi» des préfidens & des eonfeillers inftruits des cou-tumes & ufages du pays. Quant aux fergens , qui font les moindres officiers de la juftice, le nombre s'en eft prodigieufement raultiplié; car dans un bailliage eü il n'y en avoit autrefois que vingt ou trente, on en compte aujourd'hui cent & deux centj il eA d'autant plu* nécelfaire de les réduire ai*  8o E ï A T s nombre ancien , qu'ils font pour la plupart gens oifeux , excommuniés Sc de mauvaife vie. Les trois états s'emportent avec chaleut contre les commiffions extraordinaires, fi fréquenres fous le regne de Louis XI. Au tems paffe, difent-ils, quand un homme étoit accufé, il étoit pendu; car fans aucune infotmation ultérieure, il étoit appréhendé , ttanfpotté hors de fa juftice ordinaire , Sc livcé entre les mains du prévót des maréchaux , ou de certoins commiffaires, qui, & trouvés a pofte. trés fouvent fes délateurs, étoient eux mCmes fes juges,ou s'ils n'avoient pas le droit d'opiner , on leut donnoit des lettres pour aflifter a toutes les informaticus. H femble aux trois états qae telles maniere d'accufations (iniftres doivent ceffer; Sc ne dok-om jamais donner ni fouffrir tels comr miffaires extraordinaires ; mais fi aucuns font accufés de quelques cas ou crimes, bonnes Sc dues informations foient valablement faites par les juges ordinaires, Sc ftir-tout foient gardées en tel procés les formes de droit, en délivrant les innocens 5c puniffant les délinquans Sc faux accufateurs par juges ordinaires , ainfi que les cas le requierent.... Et avec ce, requierent lefdits états, que iceux commifiakes Sc autres juges ordinaires Sc extraordinaires, qui ainfi.fe font malverfés  sous Cbariis VIII. °r" jmalverfés en leurs charges .& offices, foient punis Sc corrigés felon 1'exigence des cas , Sc qu'ils en foient tenus de dédommager ceux qui ont été induemenc intéreffés , & que les cours fouveraines , fous Je reffort defquelles lefdits déllnquants Sc abufeurs font demourans, faffent de ce les correótions, p^unitions & réparations, tellement que ce foit exemple a tous autres, & que déformais tels abus Sc injuftices «'aient lieu en ce royaume. La crainte de fatiguer 1'attention du leébeur; me force de fupprimer ici plufieurs régiemens fur les privileges des étudians; fur la jurifdiction des maïtres des eaux & forêts ; fur celle des prévöcs des maréchaux; fur les droits d'épave , batardife & aubaine; fur les droits que prétendoient quelques grands officiers de la couronne , &c. Je finis par ce reglement plein d'humaniré Sc digne des anciens légiflareurs de la Grece Sc de 1'Italie. II femble aux trois états être profitable que toutes les bêtes ordonnées Sc députées pour le la* bour Sc culture de la terre,dont vivent 6c viennenc les alimens de tous les trois états, enfemble,les inftrumens Sc outils néceffaires audit labourage , ne fe puiffent dorénavant obliger, engager , ni prendre par exécutions quelconques, foit pour les Tome Xt P  ïi E T A T S deniers du roi, des feigneurs dire&s ou utilesi des marchands ou autres quelconques, fuppofé même que les laboureurs le voudroient Sc y confentiroient. Quoique le commerce n'eüt point encore acquis le degré de confidération oü il eft parvenu de nos jours, lea états le repréftntent dès-lors comme la principale fource de la richeffe Sc de 1'abondance d'un état; ils montrent que la liberté érant 1'ame du commerce, il fuffit pour le rendre floriffant d oter les entraves qui le gênent, Sc d'armer quelques vaiffeaux pour le pro» téger contre les puiflances étrangeres. Ils. fe plaignent des droits exhorbitans établis fur certaines denrées depuis le trépas de Charles VII, Sc particuliérement de 1'impot d'un écu mis fur chaque piece de vin qui ttaverfoit la Picardie; ils demandent que les nouveaux droits foient abolis, 8c que les anciens foient fi clairement énoncés, que les juges des lieux puiffent décider fur le champ, fans écriture Sc fans aucune forme de procés, les conteftations qui s'éleveront entre les commis 8c les marchands. Ils foutiennent que la trop grande multitude de foires eft préjudiciable au bien de 1'état s patce qu'elles font fortir Pargent du royaume  Sous Charles VI11. 83 pour des ouvrages naanufacturés chez Pétranger. Ils fupplient en conféquence, qu'on diniinue le nombre de celles de Lyon, Sc qu'on tranfporte même dans quelques autres villes, celles que 1'on croira devoir conferver , paree que la fituation de la ville de Lyon, fur Ia frontiere du royaume, favorife les fraudes &$ dérobe les coupables aux pourfuites de Ia juftice. A 1'égard de 1'impofition foraine & des hauts palfages , les états fupplient Ie roi de n'établir les bureaus oü fe per^oivent ces droits, que fur les frontieres du royaume, Sc de ne point les affermer a des partifans avides, mais de les faire régir par des hommes de probité, &c foumis a la jurifdiction ordinaire des lieux ou . ils fe trouveront établis. Ils expofent qu'y ayant en France un grand nombre de lieux oü 1'on fait contribuer les paffants pour 1'entretien des ponts Sc chauffées, ceux au pront defquels fe levent ces droits , négligent les réparations les plus indifpenfables ; que cette négligence a déja caufé la perte d'un grand nombre d'hommes Sc de bêtesde charges ; que plufieurs bourgs firués dans le voifinage de fes chauffées font aujourd'hui abandonnés , paree qu'on ne peut plus y aborder. Ils fupplient le toi d'obliger ceux qui levent des droits ? F %  $4 K T A T s de les employer a leur véricable deftination ; ils demandent de plus, que les feigneurs qui onr établis des péages fur leurs terres , garantiflent les marchands dans toute letendue de leur feigneurie. Enfin, pour obvier a tout monopole , ils fupplient Ie roi de renouveller les ordonnances de Charles V, & de Charles VII, par lefquelles il eft défendu a tout officier de juftice ou de finance, de faire lui-même le commerce, ni de s'aflbcier au profit des commercanrs. Tels font les principaux articles contenus dans. les cahiers que préfenretent les trois états \ monument augufte de la fageile de nosperes. Quoique le roi, par Ia bouche de fon chancelier, eüt, en quelque forte, dépofé fon autoriré entre leurs mains, on doit obferver 5 a la gloire de la nation , qu'elle n'abufa point de la foibleiTe de fon fouverain, de la mefintelligence des princes, ni du malheur des tems 5c des circonftantes; elle attendit a genoux la réptinfe du roi; toutes fes deman' des commencent par ces formules: quilplaife au 7oï, notre Jbuverain feigneur ; il femble aux trois états; les trois états fupplient trhs-humblement, &c. Si dans les querelles qui s'élevent enfuite, 5c dont nous allons rendre compte , quelques députés fortirent des bornes de la modération, il  sous Chablis Vllï. 8j faut attribuer cette faute a la chaleur de la difpute, & a un zele exceffif pour le bien publicDès qu'on leur reprocha qu'ils fembloient vouloir empiéter fur 1'autorité du roi, ils regarderent ce reproche comme un outrage, Sc fe défiftereht fur le champ d'une entreprife qui pouvoit faire fufpe&er leur fidélité. Dans la réponfe verbale que le chancelier avoit faite après la leéture des cahiers, il avoit promis deux chofes. La première, que le roi choifiroit, parmi les députés, douze nouveaux eonfeillers d'état, auxquels il donneroit la même autorité Sc les mêmes prérogatives dont jouiffoient les anciens. La feconde, qu'il manderoit un certain nombre de députés , pour difcuter avec le confeil, ainfi compofé , les principaux articles des cahiers. Les états , qui ne s'étoienc déiïftés qu'avec peine du choix des nouveaux eonfeillers, s'attendoient qu'au moins on leur laiffèroit celui de leurs repréfentans : ils furent ttompés fur ces deux points. Le roi laiffa fubfifler fon confeil tel qu'il étoit, & manda, fans la participation des états , feize députés pour aflifter aux conférences qui fe tiendroient fur les principaux articles des cahiers. Ce procédé mortifia extrêmement les fix nations, On murmura fur Ie choix des feize. Quelques-uns étóienr "* 1  E T A T S fufpe&s, en qualité d'ofEciers ou de penfionnaires du roi. Les autres n'avoient ni aflez de fermeté , hi affez de lumieres pour défendre les intéréts du peuple. On ftatua que, n'ayant point été autorifés par les états, ils ne pouvoient en aucune maniere les repréfenter. Le chancelier, inftruit de ce qui fe pafloir, fe rendit daas la falie de i'alfemblée, Sc paria de la forte : » Noffeigneuts des états , vous favez totfs quelle confiauce le roi vous a témoignée. Quand vous vous atfemblates pour déhbérer, il vous offrit deux de fes fecrétaires pour rédiger le3 aétes de vos remontrances. Vous demandates qu'aucnn étranger n'afliftat a vos délibérations; le roi voulut bien y confentir. Depuis ce tems, il vous a donné deux grandes audiences , ou vous avez eu la liberté de lui expofer de vive voix, Sc par écrit, vos demandes Sc vos plaintes ; il vous a écoutés avec bonté. Aujourd'hui il apprend que vous murmurez, paree qu'il a mandé feize de vos collegues pour difcurer les articles de vos cahiers: que prétendez-vous donc, & de quoi vous plaignez-vous ? Premiérement ; le roi n'étoit-il pas le maitre de faire examiner vos cahiers dans fon confeil, fans y appelier aucun de vous ? S'il ne Pa pas fair, c'eft une condefcendance dont vous devez lui favoir gré.  s e v s Chari^s VïIÏ. S? En fecond lieu, ne lui avez vous pas laiflé vousmême le choix des perfonnes dont il voudroit fe fervir dans fon confeil : vos murmures font déplacés, fouffrez que je vous le dife. Cependant , afin de vous mieux montret encore qu'il ne veut rien que de. jufte , & qu'il n'entend point ufer dt fes droits a la rigueur, le roi permet que vous élifïez fix nouveaux députés, un de chaque nation, lefquels, joints aux feize qu'il a déja mandés, affiftetont, en votre nom; a 1'examen qui doit fe faire de vos cahiers. J'efpere que par ce moyen les chofes tourneront £ votre fatisfaction >k Le préfident de 1'affemblée, aprés avoir pris 1'avis de quelques uns des députés, répondit: Monfeigneur, nous en de libérerons. Les fix na tions fe féparerenc chacune dans fa falie particuliere , puis fe communiquerent le' réfultat de leurs délibérations. On conclut, a la pluralitc des voix, qu'on remercieroit le roi d'avoir faic vifiter les états , & de leur avoir donné de nouvelles alfurances de fa protection; qu'a 1'égard du murmure reproché aux états , on diroit qu'on n'en avoit aucune connoilfance; qu'a la vérité, il avoit pu éehapper quelques plaintes £ur le choix des feize , qui paroiffoit fort étonsant; qu'il étoit bien vrai que les états avoient ?4 j  ** E T A T S JaifTé au roi & aux princes le choix de douze perionnes prifes également dans les fix nations, pour être admifes dans le confeil ; mais que cela n'avoit aucun rapport aux feize, puifqu'ils étoient prefque tous de la langue d'oil, & qU»ils étoient c hoi fis , non pour eonfeillers d'état , »aïs pour être repréfentans de fix nations; que les états ne vouloient ni blamer, ni autorifer ce choix ; que par rapport aux fix députés qu'on propofoit de joindre aux feize, ce mélange & cette union n'étoient point du goüt des états, & qu'ils n'y confentiroient en aucune maniere. Cet arrêté parut aux uns bien réfléchi, paree qu'en nommant les fix nouveaux députés, on auroit pam approitver le choix des feize, Sc que la nation fe feroit mife a la difcrétion d'un petit nombre d'hommes qui pouvoient être ou féduits , ou trompés ; d'autres le blamerent, comme un acte attentatoire a 1'autorité royale. Ils foutenoient que du moment que le roi avoic déclaré fa volonté , tout le monde devoit s'y foumettte; que 1'obéifTance étoit le feul moyen d'obtenir un foulagement, dont le peuple ne pouvoit plus fe paffer. Quelques autres, enfin, penfoient qu'on auroit du élire'les fix députés, leur donncr un pouvoir exclufif pour aflifter aux délibérations du confeil; mais a conditiën qu'ils  SOUS C H A R l E S VIII. ?9 n'auroient le droit de oonclure fur aucun article, fans en avoir communiqué auparavant avec 1'affemblée générale. Les feize, avertis qu'ils fe rendroient odieux a la nation , s'ils continuoient d'alïifter au confeil , reprirenr le chemin de Tours , & laifTerenc le chancelier & les princes dans le plus grand embarras. Réduits a traiter directement avec la totalité des états, ils fe rendirent dans la falie d'affemblée , oü le connétable , fans marquer aucun mécontentement de ce qui venoit de fe paffer, tint le difcours fuivant : « Vous favez Meffieurs, qu'après la le&ure de vos cahiers, Ie roi promit d'en faire examiner les principaux articles dans fon confeil, & qu'il a mandé, pour affifter a eet examen , feize députés tirés de cette aflemblée, nous avons entamé avec eux ce travail; & paree que la clafle des cultivateurs eft celle qui mérite les premiers foins du gouvernement, puifqu'eiïe alimente toutes les autres, nous avons cherché les moyens de lui procurer des foulagemens. Nous avons enfuite tourné nos regards fur la milice , &c nous avons confulté les officiers les plus éeiairés. Dvaprès leur rapport, nous avons jugé que le nombre de deux mille lances, anquel vous voulez reftreindre 1'état des troupes , efl: abfolument infuffifaute pour la dé-  9& E T A T S fenfe du royaume. Comme cette panïe me regarde , je me fuis chargé de la traiter avec vous; & afin que vous ne puilfiez foupconner qu'on ait aucun defTein de vous trompet, j'ai fait rédiger par écrit un état exact des forces, tant de cavalerie que d'infanterie , qui font abfolument nécelfaires pour affurer le repos de la monajchie ». Alors le connétable fit remettre eet écrit entre les mains d'un des fecrétaires des états pour en faire lecture. On parloit toujours de la faufTe fuppofition, que les états avoient ptopolé de conferver deux mille lances, 8c Pen s'erTorcoit de prouver que ce nombre n'étoit pas fuffifanr. La Picardie, difoit-on, eft menacée d'un cóté par les Anglois, qui font pafler des troupes a Calais , «Sc de Pautre par Maximilien „ qai n'atr tend que le moment de tomber fur PArtois j il eft donc indifpenfable d'entretenir de fortes garnifons dans les villes de Boulogne, de Terouane , d'Aire , d'Arras , d'Abbeville Sc de Péronne : le nombre de routes ces garnifons «ïoutoit a fix cents lances , & a deux mille neuf cent vingt hommes d'infanterie La Normandie, expofée aux ravages des Anglois , qui none point perdu 1'efpérance de Ia recouvrer , ne peut être défendue que par fept cents lances»  SOUS C H A R t E S VIII. '91 & un grand nombre de mortes paies. La Bourgogne eft inveftie de toutes parts par les Allemands, qui fe propofent d'y faire une invafion ; on ne peut donc fe difpenfer d'y placer au moins quatre eens lances, & une infantetie proportionnée. La Guyenne a tout a craindre des Anglois êc des Efpagnols, qui peuvent 1'attaquer par mer & par terre ; elle exige donc encore quatre eens lances & de 1'infanterie. Le Rouflillon & la Cerdagne, dont le roi d'Aragon réclame la propriété, peuvent occuper deux eens lances, & un grand nombre de gens de pied; enfin , il convient de placer au centre du royaume, deux eens lances prêtes a fe porter oü le befoin 1'exigera : fomme totale, deux mille cinq eens lances fournies, & environ fix mille hommes d'infanterie. Le leéleur doit fe rappeller qu'une lance fournie étoit compofée de fix cavaliers. Après la leéfcure de ce róle, le préfident de Paflemblée dit: « Très-haut & trés - puiffant prince, les états ont entendu ce que vous venez de leur propofer; avant que de répondre,' ils demandent la permiffion de délibérer: confidérez , dit le connétable, que vous ne pouvez être juges & parties, ni bien délibérer fur des matietes dont vous n'êtes pas fuffifamment inftruits, & qu'ainfi il feroit bon. que vous ad-  91 E T A T » miffiez dans votre affemblée, les capitaines qu5 'her de la malice de ceux qui ont intérêt a ca que les abus fe pcrpétuent, nous avóns cherché tin expediënt qui, bien qu'onéreux au peuple , tranche toute difficultë , Sc prouvera au roi comfcien eft grand Pamour que lui portent fes fideles fujets ». Nous ofFrons donc de payer a la rovale anajcfté, en forme de don Sc d'oclroi, la fomme que payoit le royaume au glorieux rei CharlesVITj mais a condition que cette contribution n'auri lieu que pour deux ans , au bont defquels les états feront de nouveau afTemblés ; Sc nous dernandons que dès ce moment on fixe , par'urié ■déclaration irrévocable , le tems Sc le lieu de cette future alFemblée. •■ 'Si 1'on ptend le partt de retrancher les d'penfes fuperfl.ies , nous croyons fermement que cette fommè" de douze cent mille livres , jöinte au produit du dom.rine, des aides & des gabelles, fera plus que fl:ffi— fante pour fubvenir a toutes les dépenfes néceffaifes , Sc qu'on pourra en réft)v..r une parrie trés - confidérable pour des befoi ns in-prévlis» Voici fur quoi nous nous fondons. Charlt-s V.I avoit des revenus bien moms coniiuénibjes que n'en a aujourd'hui notre roi . feüirqti'ï'1 ne poffédoit point 1'Anjou , le Mainè , iès deux Bourgogne, 1'Arrois , une grande paf de de la PÜ cardie, le Dauphin? , le comté de Provence, Tö/üe X* jtl  ji4 E T A T S ni le Rouffiilon. Charles VII avoit plus de charges a acquitter que n'en a aujourd'hui notre roi, puifqu'il avoir des fils Sc des filles , & qu'il payoit des penfions au roi René d'Anjou & au comte du Maine. Cependant, malgré ces charges , Sc avec des revenus beaucoup moins confidérables, Charles VII eut la cour la plus brillante de 1'Europe ; il fut un prince guerrier, généreux Sc magnanime ; i! recouvra, par la force de fes armes , les deux plus grandes provinces du royaume , la Normandie & la Guyenne , & laiffa en mourant d'immenfes tréfors. Nous adjurons donc la foi royale, Sc la votre , de ne rien demander au-dela de la fomme que nous offrons ». . Le chancelier, après avoir pris 1'avis des princes , dit a 1'afiemblée : « Le roi tiendra confeil fur vos offres , & vous fera favoir fa réponfe ». On fe difpofoit a fordr, lorfque Guillaume Poufinot pouffa des cris percans, Sc demanda audience. Cet homme , autrefois diftingué par fes lumieres, fa prudence , & une probité exacte , avoit eu le malheur de fe furvivre a lui-même : le grand age avoir affoibü la tète ; Sc a bien des égards, il étoit retombé dans l'enfance. «Prince, s'écria-r-il, fourTrirezvous qu'on déshonore 'ainfi ma vieillefle ? C'eft  »Hs Charles Vlll. ïij* t&ol qui ai été chargé de préparer cette falie d'affemblée, & MM. les députés fe plaignenc qu'on air porté la dépenfe a douze eens livres» Ecoutez ma juftification en deux mots. J'avois fait d'abord les préparatifs a Orléans, oü 1'affemblée avoit été premiérement indiquée ; je les ai faits enfuite ici j & les frais des préparatifs de ces deux falies ne moment qu'a cinq; cent foixante livres , dont une partie m'eft encore due : je fuis prêt a fournir tous les mémoires des oavriets. Les députés rirent beaucoup de 1'indifcrétion du bon vieillard : il n'y a eu de monifiés que ceux qui avoient rédigé les róles^ lefquels ne s'attendoient pas , fans doute, a fe voir fi facilement convaincus , ou de négligence, ou de mauvaife foi ». Au chateau du Pleflis-lez^Tours, il y eut de vives altercations entre"les princes & les gens; du confeil. On ne pou'voic accepter les orfres" des états, fans fe mettre dans--la néceflité de faire des diminutions confidérables'fur les penfions , les gages Sc les offices- Les princes. &£ les gens en place ne vouloieat poinr que ces retranchemens tombaüent lur eux, ni lur les gens attachés a leur parti. D'un autre cóté, il paroiffoit bien dirlicile d'engager les états a changer leur dernier arrêté, Le chancelier qui H 2  Ïï6 E T A T S fe trouvoic en butte 2 tous les partis , voulane effayer encore ce qu'il pourrolc gagtter fur les états , fe rendit 2 Tours, accompagné des princes, & adrefta le difcours fuivant 2 1'aflemblée.: « Meffeigneurs des états , le bien du roi eft le bien du royaume , le bien du royaume eft le tien du roi ; le dommage du roi eft le dommage du royaume, le dommage du royaume eft°le dommage du roi. Si donc je parle 2 Eavantage du roi, fongez que je ne dis rien qui ne foit également a 1'avantage du peuple ». «Vous avéz fait au roi d'utiles remontrances; il y aura tous les égards que méritent de fideles fujets : car vous ne doutez point qu'il ne lui foft plus glorieuxdecre roi des Francs que des Serfs. Mais, de votre cbté , vous ne devez pas oublier ce qui fut dit 2 un ancien peuple ; c'eft qu'en afpiranc a une trop grande liberté , on rifque de tomber dans la derniere des fervitudes. Ce n'eft pas un parti bien fage de fe mettre a la difctétion de fes ennemis , ni une grande füreté de dormir au milieu des ferpens. Je fuppofe, pour un moment, que le royaume n'eut rien 2 redouter de la part des étrangers , n'a-t-il rien a craindre des paflions dérégïées de quelquesuns de fes membres ? Qui contiendra les efprits inquiets & ambicieux, fi vous ótez au roi fes  «otjs Chari.es VIII. 117 troupes ? Qui aflurera aux loix leur exccutiou > Qui défendra la veuve & 1'orpheiin de la violence &c de Foppreffion ? Vous avez donné de juftes éloges a Charles VII, qui Ie premier, inftitua des compagnies d'ordcnnance : comment donc blameriez-vous vccre roi de vouloir les conferver ? CerteSj fi vous avez. eu intention de faire quelque chofe d'utile pour la patrie, e'eft ici lè moment de le montrer ». « Vous avez fupplié votre roi de fe eontenter de la même fomme que Charles VII levoit fur fes fujets 5 mais vous n'avez pas fait attentio» a la différence des rems & des conjoriéfcures. Charles V 11 étoit un prince inftruit par 1'adverfité, vigilant, intrépide & toujours en aétion. Votre roi eft a peine forti de 1'enfance , & fe trouve expofé aux embüches de tous ceux qui feront rentés de profiter de la foiblelfe de fon bas age, pour fe fouftraire au joug de la dépendance ; il a befoin par confcquent d'un plus grand nombre de guerriers : ne pouvant fe charger par lui-même des fains de 1'adminiftration ,' il abefoin de miniftresintelligens, & d'un.confeil nombreux ; il ne peut donc fe difpenfer de donner des penfions. Enfin, depuis les changemens. furvenus dans 'es monnoies, la fomme que ■vons offrez. n'eft plus la même que Charles Yll H £  'II8 E T A T S levoit fur fes fujets. Pefez bien toutes ces rail fons, &C écoutez ce que je vais vous propofer* ,Vous demandez qu'on foulage le Peuple ; le ioi fait plus ; car foulager, c'eft alléger quelque peu un fardeau, & ce n'eft plus feulement Palléger, quand on en ote les deux tiers : or, de cinq deniers , le roi en remet trois ; c'eft une grace plus grande que vous n'auriez ofé 1'efpérer. L'année derniere , les tailles montoient a trois •xnillions quatre cent mille livres; quelqu'onéreux que füt eet impót, le toi n'avoit-il pas le droit 'de le conferver , puifqu'il le trouvoit établi ? Certainement il 1'avoit; mais il ne veut pas s'en fervir : il entend que les quinze cent mille livres auxquelles il veut bien fe reftreindre , foient partagées , par égale portion, fur toutes les provinces qui, du tems de Charles VII, compofoienr la monarchie , & il fe réferve un arrangement particulier pour celles qui, depuis ce tems ont été réunies a. la couronne. Vous pouvez déformais vous retirer, non pas pour déiibérer , car vous avez entendu les volontés du roi , mais pour vous préparer a lui marquer •dignement votre reconnoiffance ». Ce difcours , loin d'exciter des applaudiflemens, fut fuivi d'un morne filence, puis d'un murmure confus, & de tous les indices d'un  sous Charles VIIÏ. 119* mécontentement général. Outre que les députés ne vouloient point fe départir de leur arrêté , ils trouvoient que le difcours du chancelier portoit atteinte a. la liberté nationale, Car li le roi pouvoit, de fon propre mouvement, & fans le confentement des états, augmenter les impots de la fomme de 300,000 livres, il pouvoit de même les doubier Sc les triplet, & alors torn-* boient toutes les prétentions des députés. Le préfident de 1'alTemblée, après avoir conféré quelque tems avec ceux qui 1'entouroient, de» manda qu'il füt permis aux trois états de débérer en particulier. «■ Puifque vous voulez encore délibérer, dit le chancelier, délibérez donc fur le champ , & rendez ce foir vorte réponfe ». Ce tems parut trop court, Sc la réponfe fut renvoyée au Jendemain. L'alTemblée particuliere des députés fut orageufe ; plufieurs ne s'étoient rendus a. Pavis du juge de Forêt que par condefcendance , Sc d'autres, en 1'adoptant, avoient été d'avis que les états ne Effent aucune offre, & qu'ils attendiffent patiemment que le confeil, pour fe tirer d'embarras, fit les premières avances , Sc propofat de rétablir ce qui fe pratiquoit fous le regne de Charles VII. Tous ceux-la vantoient leur prévoyance, Sc reprochoient aux autres leur aveugle H 4  '12C* E t a r s facilité. On fe reper.cit de s'êrre trop avancé on paria de fe rétracter ; on propofa même de reprendre lexamen des róles de la recette Sc de la dépenfe. Ceux qui étoient a la tête de ce partï difoient avec affurance, qu'au lieu de la fomme de 755,000 livres, a laquelle on avoit évalué le domaine, en y comprenant les, -aides Sc les gabelles, les députés, en fe chargeant eux-mêmes de la régie , pouvoient aflurer a 1'état un revenu de 1,900,000 livres ; qtPavec certe fomme, & fans rien lever fur le peuple, on feroit en état de ftipendier les douze mille lances qu'on vouloit bien garder, d'acquitter Ia dépenfe de Ia maifon du roi , de payer les gages des offi lers qu'on croiroit néceffaires , Sc de fatfe face a tous les événemens imprévus Ils den ando.ïent qne\eux des députés quon cbar* ge-, it de ta recette, mflênt auffi chargés de Ia d'p,a<"e, & |a«üs ne reudiffent compte de leur aan iriiftfati .') qu'aux états affcmblés Par ce moyen fi fimple, a:outoiènt-iIs , on délivrera Tetat les officiers de finance , qui abforbent une partie de fes revenus; on fe trouvera k portée de f pprirner les penfions Sc les autres übéraiirés in.-ifcretes qui épuifent le tréfor public, &" 1 n r-médiera fans peine a tous les abus qui' U laiu mtroduits dans 1'adminiftration. Tel étoïs  sous Charles VUL rit Favis des plus emporcés. Mais ceux que la cofere ou Pambition n'avöit point avèuglés, repréfenterent avec force , que le parti qu'on ofoit propofet ne pouvoit fe concilier avec la fidélité &C FobéifFance dues au fouverain ; qu'il répugnoic a la générofité franco'ife, d'abafer du bas age & de la foibleffe du roi, pour Ie dépouiller de Fautcrité que lui donnoient les loix , & qu'une pareïlle entreprife tendoit au renverfement de la monarchie. Les nations fe féparerent pour délibérer en particulier, puis fe communiquerent leur detniere réfolution. La nation de Paris déclara qu'eSle s'en renoit, pout le fond, au premier arrèté; mais qu'ayanc fait atterttion aux circonftances, elle contentoit a payer , pour une année feulement, fa part de trois cenrs mille livres d'augmenration que demandoit le chancelier, pourvu toutefois que les autres nations y donnaffent aulFi leur confentement. La nation de Bourgogne dit qu'elle ne prenoit aucun intérêt dans 1'afFaire préfente ; qu'en propofant de rétablir les impots fur le pied oü ïls étoient du tems de Charles VII, elle n'avöit point entendu être comprife dans la difmbution des 12.0,000 liv.; mais uniquemement de payer au roi la fomme qu'elle payoit au  •'<** E T A T S bon duc Philippe, contemporain de Charles VII. Ce fchifme des Bourguignons affligea extrêRiement les autres nations, qui comprenoienc que toute leur force confiftoit dans leur union. Les nations de Normandie, d'Aquitaine, de Langue d'oil Sc de Languedoc, s'accorderent a demander qu'on ne fe départit en aucun point du dernier arrêté, Sc que 1'orateur qu'on chargeroit d'annoncer cette réfolution aux princes, ne manquat pas de relever les principes dangereux Sc faux que le chancelier avoit ofé avancer. Le choix de eet orateur fe fit par acclamation; tous les regards fe tournerent fur Maflelin. Quelque flatteur que fut ce choix, il y réfifta longterm ; il repréfenta que la propofition qu'on alloit faire aux princes leur déplairoit affez par elle-même , fans qu'on prit encore la précaution de la faire annoncer par une perfonne qui leur étoit devenue infupportable, que fa franchife 6c le zele qu'il avoit montré pour la caufe commune,1'avoient rendu extrêmement odieux; qu'd étoit bien inftruit qu'on le regardoit a la cour comme un homme dur & atrabilaire; que la haine qu'on avoit concjue contre lui pouvoit s'étendre fur fes collegues, 6c qu'il n'étoit pas jufte que dans une caufe qui intéreffoit également toutes les nations, on rejetat fur une feule,  sous Charles. VIII. ix% toutes les commiffions triftes & périlleufes. Ces repréfentations furent inutiles: on ne trouva perfonne qu'on voulut lui fubftituer. Les princes & les gens du confeil avertis par leurs émiffaires de cette réfolution, ne favoient quel parti prendre. D'un coté, il éroit dangereux de compromettre 1'autorité du roi , en 1'expofant a un refus abfolu. D'un autre cbté, il leur paroiffoit honteux de céder après s'être fi fort avancés. D'ailleurs , on avoit trottvé par un calcul exact, que la fomme de 150,000 livn'étoit que le ftrict néceiTaire. Après bien des incertitudes, ils crurent que le meilleur moyen de fe rirer d'embarras étoit de gagner les hommes les plus accrédités dans chaque nation. Ils les manderent a la cour & s'attacherent furtout aux députés de Normandie , paree que cette nation paroiffoit entraïner routes les autres dans .fon avis. Dans une conférence particuliere , qu'ils eurent avec ces députés, ils leur repréfenterent que le roi, tout jeune qu'il paroiffoit, fe faifoit rendre compte de toutes les délibérations de 1'aflemblée; qu'il étoit a craindre qu'il ne coacht de facheufes impreffions contre la nation de Normandie , paree qu'on difoit affez hautement que c'étoit elle qui s'oppofoit a fes volontés, & qui ameutqit toutes les aatres; que  *H E T A T ff la fomme de 150,000 liv. que Ie roi deman* doit , étoit abfolument néceffaire pour fubvenir aux befoins de 1'état; qu'elle ne paroitroit point onéreufe au peuple, accoutumé a en payer une trois fois plus forte; que les députés des autres nations avoient déja confenti a cette impofition, & qu'il feroit d'autant plus facheux pour les députés de Normandie, de perfifter dans leur oppofition, que tout fe décidant a la plurahté des voix, cette impofïtion n'en auroit pas moins lieu , foit qu'ils 1'admifïent, foit qu'ils la rejettalTent ; que de quelque facon que les chofes tournalfenr, le roi & le confeil ne manqueroienr pas de moyens de punir & de récompenfer; que dans la répartition de 1'impofition , on fauroic diftinguer les provinces qui donneroient 1'exemple de la foumiffion , da celles qui ne fe rendroient qu'a la derniere ex-» rrémité. | Les députés de Normandie répondirent que perfonne ne devoit être furpris , qu'ayant juré de défendre la caufe du peuple , ils s'acquitaffent des obligations que leur impofoit ce ferment; que les tailles n'ayant été établies dans leur origine, que pour fubvenir a un prelfant befoin & pour un tems limité, elles auroient du ceffer du moment que la tranquillité avoir,  ?óus Charles VIII. ii'J' été rétablie; qu'ils fe regarderoient comme des prévaficateurs & des traitres , s'ils ne s'oppofoienc de tout leur pouvoir aux foins que 1'on fe donnoit pour perpétuet eet impót avilifTant & deftructif de toute liberté , que le domaine de la couronne avoit fuffi pendant bien des fiecles a toutes les charges du gouvernement; que dans un tems oü le royaume étoit en danger, les états avoient accordé au roi de lever un certain droit fur le fel & fur les boiffons, a condition que eet impot cefferoit dès que le danger feroit patfé , que cette condition n'avoit point été obfervée , & que par un abus impardonnable, les aides & les gabelles avoient été annexées au domaine de la couronne; que par un fecond abus , beaucoup plus criant encore , le produit de ces impofitions avoit ceffé d'être employé a. fa véritable deftination , &C étoit paffé prefque tout entier enrre les mains des particuliers , par des coheeïfions indifcrettes; que de nouveaux malheurs, 1'inapplication de quelques-uns de nos rois , & leur profufion , ayant épuifé la fource des revenus publics , on avoit imaginé les tailles , qui , a la difFérence des autres impofitions, ne font pbirit bornées a une redevance fixe & certaine, mais - 4épendent uniquement du caprice de celui qui  HS E T A T S gouverne ; que eet impót avoic du ceffer avec le befoin qui 1'avoic fait naicre, & que dans un tems oü ia France étoit en paix , & netoic menacée d'aucune guerre dangereufe , on n'avoit plus aucun prétexte pour perpétuer ce tribut odieux , a moins qu'on n'eüt vérirablement dcffein de le rendre permanent & eternel. « Or, fi c'eft bien la votre defiein, ajoutoient les députés, interrogez votre confcience, & ditesnous fans «éguifement, fi nous, procureurs du peuple , & obligcs par ferment de le défendre, pourrions confentir a cette iniquité , fans métiter la co.'ere du ciel & 1'exécration publique; &c fi ceux qui entreprendroient de lever ces impötsfans notre aveu , ne feroienc pas coupables de concuifion, & obliés devanc D^eu a reftituer ce qu'ils auroient pris Nous ne vous diflimulerons pas même que plufieurs d'errre nous fentent déja des remords davoü accédé ii 'acilement a 1'octroi de douze eens miileïivres, & qc- voudroient blch qu'il fut encore tt mpsde ft rétracFer. » Les gens du confeil, que ce di co.irs avoit «rités;, répondirent ayec^igreijr :,n"efp*ére2 pas nous en impofer par toutes vos mies : nous pénétrons votre deiFein. Vous voulez rognerles ongles au roi & lui compter les morceaux ■ & comme vous n'ofea avouer ces crimineüts jnremièns,  sous Charles VIII. 117 Vous metcez en avant des fcrupules & des remords dans une affaire qui n'en comporte point; car, répondez , dans quel gouvernement, depuis que le monde exifte, le peuple a-t-il été difpenfé de fubvenir aux befoins de 1'état ? Prétendez-vous former une république imaginaire , ou plutót votre deffein feroit-il de rendre le peuple avare, indocile, querelleur & infenfible au bsnheur ou au malheur de la patrie? Si vous n'aviez pour objet que de le foulager, d'oü procéderoit la froideur, ou plutóc le chagrin que vous montrez lorfque le roi fait plus pour ce mèn-.e peuple , que vous n'auriez ofé 1'efpérer lorfqu'il fupprime les deux tiers des impóts ? Ceflez donc de nous alléguer vos fermens, & les prétendues obligations qu'ils vous impofent : vous avez juté de défendre le peuple, & non de le fouftraire au joug de l'obéiffance; de procurer le bien de Ia patrie, &c non de faper 1'autorité légitime & les fondemens de 1'adminiftration. Le peuple dont vous vous dites les procureurs, vous défavoueroit s'il étoit inftruit de 1'odieufe querelle que vous fufcitez -qu'on prenne au hafard quatre hommes de la claffe des contribuables , & qu'on leur déclare ce que le roi leur a remis, & ce qui leur refte déformais a payer: fi a cette nouvelle il ne s'en trouye pas au moias tuois qui né  *ï* Et Al ! faffent éclatet leur fatisfaéfcion & leur joie , nöuS confentirons que vous ayez raifon ; enfin , nous voulons bien que vous fachiez queplufieurs d'entre nous onr été d'avisque le roi impofat la fomme de quinze eens mille livres fur le royaume , fans attendre votre confentement : nous ne croyons pas que perfonne ofe lui contefter le droir d'exiger de fes fujets les fecouts abfolument indifpenfables pour la défenfe de 1'état. Car inutilemènt feroit il revèru du pouvoir fuprême, s'il n'avoit pasl'autorité de faire plier fous le ;oug du djvoirceux qui tendent a s'en affranchifc : la feule confidération qui ous ait empêchée d'accéder a eet avis, a été I'intérêt du peuple , que vous entendez fi mal, & 1'envie de prévenir les défordres inféparables d'une perception forcée.Faites vos reflexons randis qu'il en eft tems encore. Nous vous conjurons par eet amour que tous les citoyens doivent a la patrie, de finir eet injurieux débat, & de ne pas faire plus de mal au peuple, par une opiniatreté déplacée , que vous ne pourrez jamais lui faire de bien ». Comme les députés de Nornandie ne fe rendoient point encote, un homme, a qui fon age " fon rang (fans doute le duc de Fourbon ) donnoient une grande autorité, dit avec colert*: « Je neconnois le caractere & les mceurs des vilains, s'ils ne font oponmés, ils faucquils oppriment: otez-leur  5 Ó Ü S Cii ï R L E jS VU ï. ï i$ ë'tez leur le fardeau des tailles , vous lestendrez infolens, mut'ins & infochbles> ce n'eft qu'en les ttaitant durement qu'on peut les contente dans le devoir ». Sarpris d'enteftdre fortir ces ct'ranges paroles de la bouche d'un homme fi grave, & jugeant bien que la difpute , fi on la pqunoit plus avant alloit dégénérer en qucrelle & en perfanna,Lkés » les députés 'répondirent avec modération , qu'ils étoient pénétrés de refpeél pour les princes ; que fans le ferment qu'ils avoient fait de défendre Ia caufe du peuple , jamais ils n'aüroient eu la témérité de leur rien contefter; que fi ceux qui hg accufoient d'opiniatreté , pouvoient, pour tui moment, changer de r'de , tk ie mertre a leut place , on ne doutoit point qu'ils ne changeaffenc aufn de langage & de feminiens; que s'il plaifoic aux princes de met'tre la ,qu- ftion en difpute ïcinèè : les états ofrroient de préfernèr des avooats,' qui ionva r. roient leurs adverfaires qiie Ie toi rfa ras le droit de rien lever fur fes fujets fans leur aveiu Maïs autant que rïöiis en pouvons' juger, ajouterent-ils, ön ne cherche pas 1'éclaircilfement d'un oo'nt de droit, ón demahde nit acte de foumiiïioa. Ëh bien donc nous nous foürnettons; mais comme nous ne f&urk h . rróuver dï taifons pour engager noscollegues a fuivre riotfi Tomé X* I  ri3° E T A T s' exemple , nous nous fervirons uniquement vis-2-: vis deus, des mêmes argumens dont on s eft fervi contre nous. II n'y a plus qu'une chofe qui nous contrifte : on s'eft habitué d'impofer la Norman-, die comme faifant le quart du royaume, quoiqu'il foit évident qu'elle n'en fait pas la huitieme partie ». On promit aux députés qu'on auroit égard dans Ia répartition k cette demiere partie de leurs remontrances, ils retournerent k Tours, fctrou* verent fort avancé la négociation dont ils fe croyoient feuls chargés. On avoit ufé des mêmes armes contre les députés des autres 'nations , Sc «Hes s'étoientrendues fans beaucoup de réfiftance; Les articles qui concernoient 1'impót, furenr rédigés dans la forme fuivante: « i°. Supplient très-humblement les gens des trois états, le roi notre fouverain feigneur, qu'il lui plaife d'expédier & accorder les articles touchant 1'églife, la nobleffe, le tiers-état, la juftice & la marchandife, & d'écouter enfuite les doléances particuliere» des députés de chaque pror vince ». ^ « 2°. Pour fubvenir aux frais de 1'adminiftration, & affurer la tranquillité du royaume, les gens des trois états accordent au roi, leur fouverain feigneur, par matiere de don & o&roi^  soïs Charles VUL ïjï & non auttement, & fans qu'on puiiTe 1'appeller dorénavant caiile, mais don & octroi, & telle Sc femblable fomme ( i ) , qui du tems de Chatles VII, étoit ïevée fur ie royaume, & ce, pour 'deux ans tant feulement & non plus, a condition que cette fomme fera repartie également fur toutes les ptovinces qui compofent actueilemenc ïa monarchie >s « 30. Outre cette première fomme, les états qui défirent le bien, honneur, profpéricé & augmentation du roi & de fon royaume, & qui veulent lui obéir & cotnplaire, lui accordent la fomme de trois eens mille livres une fois payée & fans tirer a conféquence par maniere de don & octroi , pouf fon joyeux avénement a la cou- (i) Sous Charles VII, én 1456, le mare d'argent étoit a 8 liv. 10 fois , en le comparant au nêtre fur Je pied de 50 liv.; la livre d'alors étoit a celle d'aujourdhui, comme 8 liv. 10 fois fent a 50,ou comme 17 eit a 100; ainfi les iióoo liv. d'alors font de notrè rnonnoie courante 7,058,825 liv. 10 fois 7 den. Le chancelier avanca que le prix des monno'ses étoit changé, & que les 1200,000 liv. qu'offröient les états de Tours ne répondent plus aux 1400,000 livres du tems de Charles VII. On fait qu'en 1488 , quatre ans après les états de Tours, le mare d'argent fut porté s ï %  132, E T A T £ ronne, & pour fubvenir aux frais de fon facre & de fon entree a Paris ». t« 40. Qu'il plaife au roi de permerrre que les états puiffent commettre , & déléguer quelques députés , pour être préfens a la réparrition de ces deux fommes , &l que ces députés prennentavec les officiers de finance, les mefures les moins oncreufes , pour en faire la perception ; car il doit fufHre au roi que eet argent entre dans fon tréfor, bc il ne peut trouver mauvais que 1'on déüvre le peuple des exactions & des cruautés qui ont été ci-devant exercées pr.r les officiers coaimis au recouvrement de l'impoc ». « 5 0. Conformément a un article de leurs cahiers, ils fupplient & requierent qu'il plaife au roi faire tenir & affembler les états au bout de deux ans, & d'indiquer & déclarer, des ce moment, le tems & le lieu oü fe tiendra care affemblée ; car ils n'entendent pas que dorénavant, on impofe aucune fomme de deniers fur le peuple , fans convoquer les ctats & avoir obtenu leur confentement, conformément aux privileges & aux libertés de ce royaume». «• 6°. Si 1'on juge , dans cette future affemblée, que les affaires du roysume permettent une diminution , ou exigent des augmentariohs, toujours lefdits états, comme tics-humbles 5c  sous ChArihs VIII. 131 très-obéiffans fujets, feront prêts &c appareiüés de s'y employer de cccur, corps & biens, volonté & courage, fans rien épargner ; en facon & maniere, que le roi, notre fouverain feigneur, aura caufe de foi contenter de fon bon & loyal peuple , & de toujours 1'avoir en fingulier amour & perpétuelle recommandation ». Dés que ces articles furent rédigés, on. en informa le fire de Beaujeu, qui promit que le lendemain le roi fe rendroit a 1'aiferablce. Le chancelier & les princes s'y trouverent a 1'heure indiquée; mais le vent, la grêle 5c 1'orage retinrent le roi au chateau du Pieffis. Ce contretems déconcerta un peu 1'orateur : c'étoit le célebre Maffelin. « Nous avions efpéré, dit-il au commencement , que le roi honoretoit cette affemblée de fa préfence ; mais puifque c'eft a lui fenl que s'adreffent nos vceux , & qu'il eft ici repréfenté par les princes de fon fang, c'eft a lui auffi que j'adrefferai Ia parole , & je lui dirai : Prince augufte , fous quels plus heureux aufpices pouviez-vous commeneer votre regne > La fagelïe & la juftice ont guidé vos premiers pas. Vous avez affemblé les états de votre royaume , Sc vous leur avez ordonné de vous découvrir, fans ménagement, tous les abus'qui s'étoient introduits dans 1'adminiftration ; nous I 3  ?I34 £ T A T 8 avons obéi a votre commendement. Non conten* de montrer la plaie, nous avons en même-tems indiqué le remede. C'eft a vous feul qu'il appar, tient mainrenant d'opérer Ia guérifon ; votre gloire y eft intéreflée : nos déliberations font vótres, puifqu'elles n'ont été entreprifes Sc achevées qu'en votre no.m , & par vos ordres. La nation feroit déshonorée aux yeux des étrangers , fi, après s'être donn-e en fpeétaclependant tant de tems , Sc avoir entrepris de réformet toutes les branches de 1'adminiftration , il ne ïéfaltoit de tant de travaux aucun avantage, aucun bien réel pour la patrie. Continuez J prince augufte, a marcher dans la voie du confed ; mais défiez-vous d'une cfpece meurtriete de eonfeillers qui aftiegent 1'oreille des princes, $c qui creufent un précipice fous leurs pas : ils vous diront q'u'un roi peur tout, qu'il ne fe trompe jamais , que fa volonté eft la regie fuprême de la juftice : monftres dévoués a 1'execration publique, ce font eux qui confeillentr les mariages forcés, qui noirciflent les eccléfiaftiques par d'odieufes imputati'ons , afin de les obliger 2 réfigner leurs bénéfices ; qui fe rendene les détateurs des perfonnes riches, pour obtenir ]a confifcation de leurs biens ; qui mettent les offices i 1'encan, & qui f0nt un odieux trafic.  sous Chariês VIII. 135 de 1'augufte emploi de rendre Ia juftice. Exterminez prompteraent ces hommes contagieux^ fans quoi ils gateront, non-feulement votre c-ceur, mais ils infeóteront votre cour , 8c le corps «ntier de Ia nation ». «Après avoir écarté ces eonfeillers pernïcieux,' un roi qui veut gouverner équitablement, doit en choifir d'autres en qui il puifie placer fürement fa confiance* Qu'il honore 1'églife , paree que le mépris de la religion entrame la dépravation des mceurs publiques , 8c prépare la chüte d'un état. Qu'il écoute avec refpeéb les difpenfateurs de la parole facrée. Qu'il fe forme une idéé ou une image exacte de la vertu, afin d'y conformer fes penfées, fes paroles & fon maintien. Qu'il apprenne par fon exemple a fes fujets, a refpedter les loix. Qu'il chériffe la nobleffe , 8c qu'il la regarde comme le bras de 1'état 8C le foutien du tröne. Enfin, qu'il vive comme un pere au milieu de fes enfans, 8c qu'il demande, fouvent, avec une'tendre émotion : en quel état eft rnon peuple ? » S'il' apprend que ce peuple eft accablé d'im-' pöts, ou qu'il paie une fomme même modique, mais dont 1'état peut abfolument fa pafier, il doit fur le champ 1'en décharger ; c'eft un devoit Ie non une grace, a moins qu'on ne veuiilö 14  E T A T S abufer des mots , & craiter auflï de grace, Moe* d'un (romme robufte qui, rencontrant un autre homme dans fon ch'emin , s'abftienc de 1 outrager. Le peuple, dans une monarchie, a des droits & une vraie propriécé, puifju'il eft libre Sc non efclave, & q„e Ie gouvernement mosarchique, klon 1'opinion des anciens philofophes, eft le plus doux de tous les gouvernemens , celui qui fe concilie le mieux avec Ia hberté. Un abus, quelqu'invétéré qu'il foit, ne peut pref rire contre le droit nature!; & afliirer qu un roi qui , a fon avénement au tröne , * trouvé fon peuple furchargé d'impöts , eft auto«fé i ne point le foulager, c'êft avancer un principe injurieux & faux. A'i refte, nous n'avons pu apprendre, fans»ne vi*e douleur , qu'il fe foit trouvé des kommes affez ILhes , pour nous accufer de vouloirlogner les ongles au roi, fi je puis répéter ici leurs exprelfions , £V lui couper les morceaux. eer re atroce i^putation ne peut déshonorer que fon auteur. Convaincns que le bien & I'avantage du royaume font le bien & l'avantage du t»> - en cherchanf a foulager ie peuple, nous avons cru fervir le roi & remplir le devoir do fideles fujets. En biamanr les dcfordres de landen gouvernement, nous n'avons fait qu'exé-.  SOUS C H A B. 1 fe S VIII. 1}f enter fes ordres', puifqu'il nous avoit enjoint, par la bouche de fon chancelier, de lui décoavri'r-, fans management, tous les abus qui déiïgnroient 1'état. S'il nous eft arrivé de nous exprimer avec force & avec une forte d apreté , Ja matiere 1'exigeoit , & nous 'ne nous en repentons point, duffions-nous encore être regardés cbmme des hommes durs & atrabilaires ». » On fe plaint qu'ayant fait dans toutes les occafioris l'él ge des officiers de Charles VII, nous ayons gardé un filence olfencant fur le comnte de ceux de Louis XI ; nous prions que perfonne ne s'en troiue oftenfé : faire 1'éloge de Pierre , ce n eft point faire la fatyre de Paul. Si parmi ces derniers il fe trouve, comme nous n'en doutons piont , des hommes d'honneur ÓC de probité , qu'on les récompenfe &C qu'on les éleve, nous y conlentons. Mais comme nous, favions qu'il y avoit parmi eux des intrigans, des délareurs & des coureurs de confifcations, nous avons cru leur faire grace en ne les noramant pas , & ils doivent nous tenir compte de notre difcré-tion. S'il s'en trouve encore de reis aujourd'hui a la cour, nous prions &. nous requérons qu'on les éloigne au plutöt de la petfonne du roi ». » Je. yiens maiutenant' au principal objet de  138 E t a t s cette féance. Monfeigneur le chancelier nous ayant expofé les befoins de 1'état, a demandé qu'on répartit fur le royaume, une impofition annuelle de quinze cent mille livres. Nous fouhaiterions, trés hauts & rrès-puiffants princes, que le peuple francois füt dans une fuuation qui lui permit de n'écouter que fa générofité naturelle Sc fon amour pour fon roi; mais vous favez tous en quel exces de mifere & d'humiliation il eft tombé, Sc combien il importe de lui donner les moyens de fe relever. Defirant donc de complaire au roi, notre fouverain feigneur , Sc de ne pas actiever d ecrafer fon peuple, nous avons rédigé les articles dont vous allez entendre Ia leóture ». Alors le préfident de 1'affëmblée remit a I'un des fecrétaites des états, le cahier qu'on avoit ' dreffé la veille , pour qu'il en fit Ia leéture. Lorfqu'elle fut achevée, le chancelier répondit : « Le roi eft content de votre conduite. Cette nouvelle preuve de fidélité vous afture a jamais fa bienveillance. Comme dans les débats qui fè font élevés entre nous au fujet de 1'impÓt, nous avons rendu juftice a vos intentions , de votte cèté, vous ne devez point vous offenfer s'il nous eft échappé des expreffions rrop fortes, & S nous avons fait ufage de queiques principes.  •sous Charles VIII. 139 peut-être outrés. Vous connoiflez la méthode des orateurs ; ils fe fervent de tous les moyens qui doivent favorifer leur caufe, fans s'aftreindre a une exactitude fcrupuleufe. Aujourd'hui que nous fommes parfaitement d'accord, choifilfez un certain nombre de députés qui puiflent affifter, en votre nom, aux délibérations du confeil, & a la répartition des fommes que vous venez d'accorder au roi , en promettant d'ajouter au bout de deux ans, tout ce que les befoins de 1'état fembleront èxïger*, « L'après-midi les fix nations s'affemblerent pour procéder a ce choix; mais on fe trouva dans le plus grand embarras, paree que Je chancelier n'avoit point fixé le nombre des députés , Sc que les mêmes hommesne paroiffoientpaspropres a difcuter également toutes les matieres contenues dans les cahiers. Pendant qu'on délibéroit, Ie chancelier entra Sc dit : Je vous apporte une heureufe nouvelle ; le roi défire que vous foyez promptement expédiés : en conféquence, nous avons formé trois bureaux , oü Pon difcutera tout a la fois des matieres differentes : Ie premier quitraitera de la répartition de 1'impöt, aura pour chefs les feigneurs de Beaujeu, de Dunois , de Torci , de Comminges , Sc les évêques de Cou|aaces & d'Al'oy : vous pourrez y- envoyerquatre  r40 £ T A T $ perfonnes a votre choix; fi cependant vous jugez d'y en députer un plus grand nombre , le roi ne s'y oppofe pas : le fecond fe tiendra dans 1'hotel du cardinai de Bourbon , on y examinera ce qui concerne le clergé; tous les évêques qui voudront s'y trouver feront admis, le roijoindra a vos députés quelques magiftrats , pour prendre connoiffance de 1'oppofition que plufieurs évêques ont formée a vos demandes : je préfiderai au troifieme avec fix ou huit eonfeillers a men choix. On y difcutera les articles de vos cahiers concernant la juftice , & vous pourrez y envoyer un ou deux députés de chacune des fix nations : il ne reftera plus que les articles touchant la nobleffe & la marchandife, qui font en petit nombre , & qui ne pourront guere nous arrêter plus d'un jour: lorfque tout fera réglé, le roi viendra lui même vous vifiter, & vous témoigner la fatisfaótion qu'il a de votre conduite ». Après Ie départ du chancelier , les états procéderent au choix des députés , mais fans s'aftreindre au nombre qui leur étoit indiqué, fur-rout pour ce qui coacernoit l'impot: chaque province, chaque bailliage vouloit avoit fon repréfentant, & refufoit de remettre fes intéréts entre les mains de fes voifins. Dès qu'il s'agit de la répartition, la concorde & 1'union , qui avoient régné  sous Charles VIII. Ï4I jufqu'alors entre les nations, firent place a la dé-. fiance Sc a une fombre jaloufie. L'affaire de 1'églife s'agita avec aigreur, & dégénéra prefque en querelle perfonnelle. II faut remoncer k l'origine. Nous avons déja die que lorfque 1'on commencoit k rédiger les cahiers , plufieurs prélats fcandalifés de la liberré avec laquelle ou s'exprimoit fur les abus de la cour de Rome , Sc ne vouiant point confentir au rétabiifTernent de la pragmatique , avoient formé oppofirion k tous fes articles; Sc qu'ils avoient tellement irrité les efprits par cette démarche, qu'on avoit été fur le point de les exclure de Paffemblée. N'ayant pu parvenu k fe faire écouter, ils avoient adrené au roi une longue requête, dans laquelle ils établiffoient qu'étant les principaux membres , ou plutöt les chefs de 1'églife gal-, licane , ils avoient feuls le droit de propofer des régiemens par rapport k la difcipline eccléfiaftique ; que toutes les fois qu'il plairoit au roi de changer quelque chofe k 1'ordre établi , il devoic préalablement convoquer le corps entier des évêques, cequi ne s'étoit point fait dans cette aifëmblée des états, oüils n'étoient qu'en petit nombre; ils déclaroientque pour le bien de la paix & I'utilité publique , ils confentoient & approuvoient tous les articles concenus dans les cahiers, a i'ex-  14* E T A T s ception de ceux qui regardoient Ia difcipiine de 1 'églife ; mais qu"ayanc été témoins de Ia manierè peu refpe&ueufe dont on s'énoncoit a I egard du laint fiege , Sc des efforts que 1'on faifoit pour Ie rétabliflement de Ia pragmatique, ils fe croyoient obligés, en vertu du ferment d'obéiffance qu'ils avoient prêté au fouverain pontife ; de s'oppofer de toutes leurs forces a de pareils régiemens , Sc qu'ils employeroient toute leur autorité pour Ie combattre. Cette requête ayant été communiquée aux états; excita une indignation générale : on fe dé*chaïna contre la conduite des oppofans , Sc on ttouva leurs prétentions nouvelles & abufives. On fépandit que les états généraux n'étant ni des fynodes,ni des conciles, mais des alfemblées poÜtiques ; il n'y avoit aucune raifon d'y appelier les députés du clergé en plus grand nombre que ceux de la nobleffe Sc du peuple ; que dans le cas même ou 1'on voudroit accorder quelque préférence au clergé, il n'y avoit non plus aucun e raifon d'y appeller tous les évêques, tous lesabbés, tous les chanoines , tous les curés; que chaque bailliage n'ayant le choix que de trois ou quatre députés, ne pourroit fouvent fatisfaire au defir des prélats, qu'en excluant entiérementla nobleffe Sc le peuple j qu'apparemment les évêques ne prér  'sous Charies VIII. 143 tendoient pas repréfenterfeuls 1'état, uiferendre les uniques dépofitaires de la libernc &c des intéréts de la nation ; qu'ils auroient pu fe difpenfer, fi bon leur eüt femblé , de donner leur approbation aux articles des cahiers, qui ne concernent point 1'églife , paree que le confentement ou 1'oppofition de quelques particuliers , ne pouvoit ni valider, ni infirmer le vceu de la nation ; qu'au refte ceux qui compofoient ces états, fe difoient, ainfi que les évêques, enfans de 1'églife , &c faifoient profeffion d'être foumis au faint fiege ; mais qu'ils ne croyoient point déroger a 1'obéiffance filiale, en adoptant une conftitution fondée fur 1'autorité des conciles, approuvée par les états-généraux du royaume , & adoprée par un grand nombre de prélats , qui, pour ne rien dire de trop , valoient bien ceux qui la rejettoient avec tant de mépris. Quelques députés plus emportés que les autres , ajoutoient que les prélats ne fe montroient fi oppofés a la pragmatique, que paree que leur nomination avoit été contraire a fes décrets : ils difoient qu'on ne devoit point les nommer les évêques de 1'églife gallicane, mais les évêques du roi Louis XI, & qu'il paroiffoit affez qu'ils vifoienc au chapeau rouge. Ceci s'étoit paffé dans 1'affemblée des états : la difpiue fe renouvella avecaigreur dans la maifon  Ï44 Ë T A t S ■ du cardinal de Bourbon ; Sc elle auroit été ponf* féeplusloin, fi ie procureur-général , qui avoic eu ordre d alfifter i cette conférence , n'eüc interpofé fon autorité, Sc obligé les efptits les plus échauffés a g-irder le filence. II dédara qu'étanc Ie procureur du roi Sc du royaume, il étoit auto* rifé a prendre connoidance de tout ce qui avoic rapport a la tranquillité , ou a ia profpérité de 1'état: que la pragmatique fanction étoit de toutes les eonftitütions la plus précieufe, puifqu'elle empê hoit que 1'argent ne fortit du roymme , Sc qu'eÜc donnoit a 1'ég'ife des pafteurs éclairés Sc vigünns; qu'il ne fouffriroit pas qu'on donual afteinte a ce fage reglement, & qu'il étoit réfolu de tiaduire au parlement quiconque oferaic s'y ©ppofel déformais. Malgré cette menace, Ie procureur-général na cita perfonne a comparoïrre, Sc la pragmatique ne fut point rétablie ; en voici les raifons : Ie,cafj dinal Balue arrivoiren France en qualité de légat j &Ie bruir s'étoit répaudu qu'il pourroit diipofetde deux ou trois chapeaux de cardinal en faveiir de ceux qui auroient montré le plus de zele en faveur du faintfiége. Cette perfpeótiveéchaurFoit !e eöurai ge de plufieurs jeunesprélats, quiambiriomioient cette dignité étrangere. Quelques uns poffédoiehe toute la faveur des princes, Sc n'oublierent pas de  soüs Charles Vlll. 145 du leur repréfenter qu'ils avoient infiniment plus de facilitéarégompenfer leurs ferviteurs ens'adrefi fant directement au pape, qu'ils n'en auroient ü 1'on ptenoit le parti de rétablir les élections. Les prélats qui n'avoient aucune ptétention au cardinalat, n'en étoient pas mieux difpofés en faveur" de Ia pragmatique. Quelques-uns, comme Elie de Bourdeille, foutenoient qu'un chrétien devoit obéir aveuglement aux ordres du pape * d'autres, moins imbus de cette maxime ultramontaine, mais promus a 1'épifcopat contre les décrets de la pragmatique , craignoient que fi elle veneit afe rétablir, on ne s'autorisat de fes décrets pout les inquiéter ou leur manquer de refpeét. Tous confidéroient qu'ils avoient plus de facilké a difpofer des bénéfices dépendans de leurs fieges , moyennant certains concordats qu'ils paffoient avec la cour de Rome, qu'ils n'en euffent eus après le rétabliffement de la pragmatique, paree qu'alors ils euflent été contraints d'abandonner un tiers de ces bénéfices aux gradués & aux autres membres des univerfités. A toutes ces raifons fe joignit 1'intérêt particulier, de Madame, qui, dans ces circonftances critiques, ne vouloit point écouter le corps épifcopal, ni fe brouiller avec la cour de Rome. La pragmatique ne trouva donc alors de partifans que dans le tiers-état, & dans Tornt X. K  I4<5 E t a t s le feeond ordre du clergé & de la nobleffe. Cependant le zele que ceux-ci montrerent, ne fut pas entieremenr inurile. Les pariemens encouragés par le vccu de la narion, s'oppoferent avec plus d'ardeur aux entreprifes des papes: les élections eurent ordinairement lieu : les étrangers eürent beaucoup de difficukés a eiïuyer, avant que de fe mettre en poffeffion des bénéfices qu'ils obtenoient en cour de Rome ; en un mot, ia pragmatique , fans être rétablie, ne laiffa pas d'être réfervée dans tous fes points, jufqu'au regne de Francois premier. Pendant ce tems , le chancelier, affifté de huit eonfeillers, examinoit le chapitre des cahiers qui traitoit de la juftice & de la police générale du royaume. Sur chaque article qu'il lifoit, il prenoit Favis de fes affeffeurs j &. dés que 1'un d'eux formoic quelque objection, le chancelier écrivoit a la marge, rejettèou bien renvoyé a un plus mur examen. Si les députés qui fe trouvoient préfens vouloient répondre a PobjecFion, il les interrompoir, en leur difant qu'ils avoient rempli leur charge ; que les états n'avoient vis-a-vis du roi , que la voie de repréfenration qui leur avoit été ouverte , & que déformais c'ctoit au roi & a fon confeil a iu»er de la légitimité de leurs demandes. Un de-s  s o tt s G n a >r l i s. V11L 147 'députés perdant patience , fe leva de fón fiege Ji & dit avec colete : « Que faifons-nous ici, &c pourquoi nous a-ton mandes , fi 1'on ne nous permet pas de parler ? Affurément nous ne nous attendions pas qu'on traitat avec cette légéreté, les demandes & les repréfentations de la nation. Nous fommes témoins que vous n'avea rejetté tel & tel article, que paree que vous ne 1'avez pas entendu ». Cette fermeté en impofa au chancelier , &: on permit aux députés de parler auffi fouvent & aulli long-tems qu'ils le voudroisnt. On procéda avec plus de réferve a 1'examen des actieles, 5c 1'on n'en rejetta que deux ou trois qui en effet nè pourroient être admis, & qui s'étoient paffes dans les cahiers , a la fuggeftiort de quelques perfoiines mal intentionnées , tel étoit celui qui portoit que tous les officiers qui, fous le regne précédent, avoient été dépouillés de leurs charges , fans forrne de procés, y feroient rétablis : car fi ce réglement eüt eu lieu,' le chancelier lui-même n'eür pu conferver fon. office, puifqu'il occupoir la place d'un homme vivanr, & deftitué fans forme de procés. Dans le ttoilieme bureau , oü fe faifoit la; répartition de 1'impót , il y eut des quereJles flus vives, ëc les députés montrerent, a la K 2  Ï48 E T A T S honte de 1'humanité, combien , même cher les hommes les plus éclairés , 1'incérêt perfonnel 1'emporte fur le bien général; car , oubliant les liens qui unilfent tous les membres d'une même monarchie , ils ne cherchoient qu'a faire tomber fur leurs voifins, les fommes donc ils vouloient fe décharger. Les premiers firenc retentir la falie d'affemblée de leurs cris. lis fe crouverenc irnpofés a la fomme de 55,000 livres , la même qu'ils payoienr fous le regne de Louis XI. « Oü eft 1 equité, s ecrierenc-ils ? Oü eft la bonne foi ? Quoi ! tandis que 1'on ète aux autres provinces les deux tiers des impóts, on nous laifte gémir fous un fardeau accablant! Comrnent avons nous mérité la colere de notre fouverain ? Quel crime a-c-on a nous reprocher ? Aucun, répondirenc les gens du confeil. Vous êtes de fideles fujets, d'utiles citoyens : le roi vous aime & vous confidere j mais écoutez un moment les raifons d'une conduite qui vous paroit fi extraordinaire. Comme', fous le dernier regne, votre province étoit le théatre de la guerre & le quartier général des troupes, on apporta la plus grande attention a y maintenir Pabondance, &: elle ne fut point impofée dans la même proportion que les autres ; car, au lieu de cinquante-cinq mille livres , elle en auroit payé deux cent millei  sous Charles VIII. 149 Les garnifoms répandues dans Ia Picardie, loin de' Pappaavrir, y ont attiré tout Pargent da royaume. Ainfi il ne fetoit pas jufte que vous fufliez traités comme les provinces qui ont fouffert fous le dernier regne, & auxquelles le roi. veut procurer un foulagement. Faites attention a la fertilité Sc a 1'étendue de votre territoire ... »A la fertilité & a 1'étendue de notre territoire , répartirent les députés ! II paroït que vous* ne connoilTez guere la province dont vous parlez-: c'eft aujourd'hui la plus petite &: la plus miférable du royaume. Vous n'ignorez pas, fans doute, qu'on en a féparé le comté de Boulogne, le bailliage d'Amiens Sc de Vermandois, Sc Ia prévbté de Vimeu , pour les annexer a la généralité de Paris , & qu'aujourd'hui la Picardie, proprement dite , n'eft compofée que du comté de Ponthieu , Sc des prévótés de Péronne, de Roye Sc de Montdidier, Sc qu'elle comprend a peine cent foixante-dix villages. Si 1'on veut que nous puiffions fupporter le fardeau qu'on nous impofe, qu'on nous rende donc les terres qu'on nous a enlevées, Sc alors nous ceflerons de nous plaindre». Le confeil ne voulant point donnet cette morciftcation aux Parifiens , qui avoient monteé plus de complaifance que toutes les autres na- ^ 3  fcfl> E T A T S tions pendant le cours des querelfes précédent tes, promit aux Picards , qu'en échange des jerres qu'.ls avoient perdues , le roi uniroit a leur provwce le comté d'Artois. Cette offreétoic ^.Iufoire. La province d'Arrois , par les derniers traités., avoit été déchargée de toute efpece d'impot pour cinq ans, Sc la fomme dont on faifoic alors la répartition , n'avoit lieu que pour deux Les députés ne prirent point le cbange : ifs* infifterent fi fortement, qu'on fut obligé de leur offnr une diminution de dix mille livreSj k de quinze, Sc enfin de vingt. L'envie d'en obtemr une plus confidérable encore, Sc leur emportement les rendirent odieux, §c ils ne furent plus écoutés. La Normandie qui payoit les années précéoemes 996t7oo livres, ne fe rrouva plus impofee qu'a 36},<;IO livres. Quelque confidérable que fut cette diminution, elle ne put fattsfaire les députés : « Nous n'avons confenti, direnrils hardiment, a payer au roi, la fomme de ij0,000 livres, qu'a condition qu'elle feroit repartie par égale portion fur routes les provinces de la monarchie. Or, dans la diftribunon qu'on nous propofe, on „e garde pas nteme les apparences de cette égalité, Sr on Iaiffe trop éclater Ia haine qu'on n0US potte.  sous Charles VIII. I51 On ne rougit point d'impofer notre province , comme fi elle faifoit elle fettle la quatrieme partie du royaume, quoiqu'elle en faffe a peine la dixieme ». lis s'étendirent enfuite fur les malheurs qu'avoit effuyés la Normandie fous le regne précédent, & peignirent avec force 1'état de défolation oü elle étoit réduite ». « A quoi bon tous ces difcours , repartit fêvèque d'Alby ? Vous avez vanté la douceur du regne de Charles VII, voulez - vous que 1'on vous rende les mêmes avantages & la même condition dont vous jouiffiez alors? le confeil y confent... Les députés un peu étonnés , répondirent que dès le tems de CharléS VII, ils s'étoient déja plaints qu'on ne gardk pas alfez de proportion dans la répartition de 1'impót; qu'ils payoient cependant paree qu'alors la province étoit riche; que le changement arrivé dans leur fortune , & les accroiffemens qu'avoit pris la monarchie, rendoient cette difpofition plus frappante & plus intolérable. Les gens des finances fur qui retomboient ces plaintes, dirent que les Normands étoient le peuple du royaume le plus difficile a gouverner; que quelque chofe que 1'on put faire en leur faveur, il ne fattöh attendre de leur part que des murmures Sc des plaintes. Ce- dif- K 4  *5a E t a t '8 cours offenfant ne refta pas faas réplique : les députés prirenc è partie les généraux des finances. les recuferent pour juges, & ne voulurent avoir nen i démêler avec eux. Le fire de Beaujeu voyant que la difpute s'échauffoit, erdonna aux parties de fe retirer i,„ moment de la falie d'affemblée. Comme d un cöté il n>avoit point oublié les fervrces que lui avoit rendus la nation de Normandie dans 1'affaire de la régence, & que de i'autre il ne vouloit pas donner une' mortrhcation aux généraux des finances , il envoya offtir fa 35o,qoo livres; les autres provinces fe plaignirent moins fortement , paree qu'en effet elles fe trouverent moins chargées proporrion gardée. Mais les querelles devinrent plus vives entre les députés , lorfqu'il faliut «partir fur chaque diftriéb particufier les fommes impofées fur les provinces. Chaque député deplorou la mifére de fon canton , & vamok ks lkh^ & les refiources de fes voifins. La  sous ChA.ri.es VIII. 153 jaloufie , Fanimofité & Faigreur qui s'étoient emparés de tous les députés , donnerent naiffance a une difpute nouvelle dont il faut rendre compte. II s'agit de décider fur qui devoit tomber la taxe des députés, qui, depuis environ deux mois, réfidoient dans la vdle de Tours. Le tiersétat prétendoit que chaque ordre devoit payer les fiens, le clergé & la nobleffe foutenoient que tous les frais devoient tomber fur le tiers-état. Laqueftion fut portée devant le confeil, & un célebre avocat de Troye fut chargé de piaider la caufe du peuple. II repréfenta que tous les Francois étant freres & membres d'une même monarchie , devoient fe prêter un mutuel fecours , & ne pas être a charge les uns aux autres; que les eccléfiaftiques & les nobles-étant venus a cette affémblée pour y fbllicirer la confervation de leurs droits &c le rétablifFement de leurs privileges , il étoit naturel qu'ils y véculFent a leurs dépens , ou plutot aux dépens de ceux de leur ordre qui les avoient envoyés ; que poffédant la plus grande partie des biens du royaume fans être obliges , comme le peuple , de porter le poids des irnpöts ,' ils auroient mauvaife grace d'exiger une rétribution pécuniaire pour les foins qu'ils s'étoient don■ iiés dans une affaire qui les intéreffoit perfon-  E T A T S adkncot; qu'il feroit honteux que k portion' Ja plus fachè de la nation fut aux gages de la plus pauvre; que la demande du tiers-état étoit fi conforme k 1'équité naturelle, que plufieurs prélats s'y étoientrendusfansmême attendre qu'on les en requit; que 1'évêque de Poitiers, avant Ion depart, avoit établi une taxe fur les abbés les pneurs & les curés de fon diocefe, pour fub■venir aux frais de la députation, Sc que cette taxe avoit été acquittée fans aucune difficulté; q„e Pexemple de ce vertueux prélat étoit une lecon pour tous ceux qui confervoient au fond de leur cceur des principes de juftice & d'humanité. Phihppe de Poitiers', député de la nobleffe de Champagne, homme ardent & naturellemenc diferr, répondit avec colere : * Je voudrois bien que Pavocat qui vient de nous débiter tant de belles paroles, nous eut dit plus clairement s'il croit que les députés du clergé & de la nobleffe ont moins conttibué au foulagement du peuple, que les députés du tiers-état? Quelque hardi qu'il foit, je ne penfe pas qu'il ofat avancer une opnnon li manifeftement fauffe & abfurde; car, lépondez-moi? qui a rédigé les cahiers, qui a' plaidé la caufe du peuple , fi non les députés du clergé ? Qui a concilié a la nation la faveur des pnnces & fixé i'atremion du gouvernement fur  sous CtfAutïs VIII. 155' ïes cbjets de fes demandes fi non les députés de la nobleffe ? Enfin , qui doit prendre plus d'intérêt au bonheur ou au malheur du peuple, que le clergé 8c la nobleffe, qui ne peuvent toucher leurs revenus, fi le peuple ne jouit d'une forte d'aifance; & au lieu que les avocats 8c les gens de loi ne laiffënt pas de s'enrichir au milieu de la mifere publique? A quel titre ofent-ils s'arroger a eux feuls la défenfe du peuple 8c fè donner pour fes uniques repréfentans, comme fi. les députés du clergé 8c de la nobleffe n'étoient chargés que des feuls intéréts de leur ordre ? Qu'ils ouvrent leurs lettres de procuration 8C ils fe convaincront que chaque député n'eft point élu par un ordre de citoyens, ni chargé de procurer exclufivement Pavantage de eet ordre; maïs que toüs font également commis pour veiller aux intéréts de la province entiere; que les députés de la nobleffe, par exemple, ne font point élus par les nobles feulement, mais par les eccléfiaftiques & par le tiers-état. Diront-ils qu'ils mérirenc d'êrre plus fpécialement écoutés dans la caufe du peuple , comme faifant partie de eet ordre de citoyens ? Mais qui ne fait que les avocats, 8C autres gens de loi, compofent en quelque forte une claffe parriculiere , qui ne contribue en rien aux charges de 1'état ? Car, ou ils font bourgeois  xSg E Tïrf de quelque vüle exempte de tailles, ou ils ont quelque office qui leur donne les privileges de la noblelTe. Qu'ils nous difent donc, enfin", a quel mre ils prétendent avoir plus de droit que nous a la reconnaiffance ? Nous avons traité, il eft rrai, des matieres qui concernoient direéïement le' clergé & ]a nobleffe, mais perfonne n'ignore que le foulagement du peuple a été 1'objet capital de nos délibérations, & que du moment que nous avons obtenu ce point, nous n'avons plus difputé fur tout le refte. Quelle eft donc cette frénéfie de prétendre renverfer 1'ordre de la nature # d'affigner aux différens membres du corps' politique des fondions qui leur font étrangeres? De vouloir que le clergé & la noblelTe , qui font les yeux & les bras de ce corps, faffent encore Ia fondions des pieds. Si 1'avocat étoit écouté, tout fe trouveroit confondu; il n'y auroit plus trois ordre de citoyens, mais trois chofes publiques ou trois gouvernemens féparés. Ecoutons cependant les raifons qu'il nous apporte , toutes les claffes des citoyens , dit-il, doivent fe prêter un mutuelfecours, & n'être point a chatge les unes aux autres : je conviens de ia vérité de ce principe , car cette expreffion, être a charge, renferme toujours quelque idéé d'injuftice ou d'importunitéj mais je nie que les différens. ordres  SOÜ6 CHARLES VIII. 157 d'un état foient a charge les uns aux autres , lorfqu'ils rempliffent les fondions qui leur font affignées par la conftitution de ce même érat. Tout le monde fait que les fondions du clergé font de prier, d'inftruire Sc de veiller a la confervation de lafaintedodrine; que celles de la nobleffe font de voler a la défenfe du royaume, de couvrir fes frontieres, Sc d'affurer la tranquillité des citoyens; que celles du peuple confiftent a payer les impbts Sc a procurer par fon travail des fubfiftances i toute la nation. Chacun de ces ordres ne peut féparer fes intéréts de ceux des deux autres, Sc il doit remplir fans murmurer les fondions qui lui font affignées: fi 1'avocat ignore ces principes, qu'il retourne a 1'école, ou qu'il confulte les enfans qui fortent du college. Mais a quoi bon employer ici tant de raifonnemens , lorfqu'd ne s'agit que de confrater un fait? Les provinces de Normandie Sc de Languedoc ont tous les ans des affemblées d'états: qu'on interroge leurs députés , Sc qu'ils nous difent fi jamais le tiers-état a fait quelque difficulté d'acquitter la taxe entiere de tous les députés , de quel front oferoit-on demander a la nobleffe des contributions ? Elle n'a que du fer pour la défenfe de la patrie, SC s'il falloit que je m'adreffaffe a elle pour obtenir le rembourfement de ma dépenfe, je prends ici  *5* E T A T S le ciel a témoins que j'aimerois mieux en faire le facrifice ». L'avocat voulut répliquer, lorfque le chancelier lui rnipofa fiience, 6c donna gain de caufe aux deputes de la nobleffe & du clergé, mais en les exhortanc tous, & chacun en particulier, i „p pas ufer de leur droit a Ja rigueur. «J'ai déja faitcalculer, leur dit il, a quoi pouvoit montes cette taxe ; elle paflè Ia fomme de cinquante mille livres : prife toute entiere fur Ie peuple, elle ne peut rnanquer de lui être très-onéreufe dans 1'état d'épuifement oü il eft réduit : au lieu que fi vous confentiez , pour cette fois feulement , & fans tirer a conféquence, qu'elle füc egalement réparrie fur tous les otdres de 1'état elle ne feroit prefque pas fentie. Vous en uferez comme il vou« plaira. Le droit eft pour vous : fhumanité, la commifération & la pitié pari ent feules en faveur du peuple ». Malgré les fe.mences de divifion que Ia jaloufie avoit répandues dans 1'ame des députés, Jorfqu'ü s'étoit agi de la répartition de 1'impót , les fix nations commencerent a fe rapprocher tc a vouloir former des délibérations communes. Elles chercherent d'abord les.moyens d'empêcher que la fomme de rrois cent mille livres, accordée pour une aunée feulement, ne s'unit  sous GriARiÊs VIII. Sc ne s'incotporat avec celle de douze cenc mille, qui devoic durer jufqu'a une nouvelle convocation d'états. Elles le propoferent enfuice de fuppriraer les élus 5c les receveurs particuliers, aufli onéreux au peuple que Pimpöc luimême. Enfin, routes les provinces vouloient fe former en pays d'états, a i'exemple de la Normandie Sc du Languedoc. Le chancelier, inforjné de ce qui fe palïoit, preffa 1'expédition des cahiers , Sc manda que le roi fe rendroit inceffamment a 1'affembiée. Une heure après avoir regu eet avis, les députés furent furpris de yoir arriver le roi Sc les princes. Lorfque tout le monde eut pris place , & qu'un hérault eut impofé filence , le chancelier dit : « MefTeigneurs des états, les travaux que vous avez entrepris pour la patrie font aa-delfus de tous les éloges que j'en pourr re.1, compofe des princes do f ««.s,co„!in„ldetrivai,ler »^r»lcs D«..el,r.VlH)eonte„„ie„cciniJo: = te preker fe ,„ £ vo,e,,t r„,„ „ ,„p„t dK /„.j^; «antpirce,u.el[esé..oie„ f ' P.-ceouonnavfe pjs foi„ Je ,^ ' ^ g,ges „a>n Ieur donnoit autr ouo„lesfalffemircheren e 'e f"r C£ lu= fes tóffe & finéeW ropax j  sous Charles VIII. ï s ^ quelles puiffent être). Doyac étoit homme de neme trempe, & néanmoins fon maitre Pavoit fej gouverneur d'Auvergne. Le premier fut attaché au gibet, Ie fecond efforillé & fuftigé premierement 4 Paris, puis 4 Montferrand, ifej de fa naiflance. II y en avoit peut.être de , coupables qu'eux, mais il n> en avoit point dplus odieux; & d'ailleurs ft avoient maI des princes. Doyac fut affez habile pour mettre Ion argent i couvert, & quelqaes années ès affez heureux pour fe rétablir, ayant renduquelque fervice 4 faire palTer Partillerie dans les «nontagnes, au VOyage d'Italie. On condamna «uffi le médecin Coétier, i reftituer 5o,ooo qui furent employés a la guerre de Naples. II y avoit auprès de Francois II , duc de Bretagne, un homme de pareille écoffe,auffi impudent, & encore plus méchant qu'eux, mais bien plus habile : c'étoit Pierre Landais, fils d un tailleur du fauxbourg de Vttié. II gouver- ' noit fon prince depuis plus de quinze ans, & avoit élevé aux charges du pays, les gens de fa forte & de fes parens, entrautres, les Guibés, «Is de fa fceur, i caufe de quoi il y avoit beau-  tïö-üs C n 'a u t I s VIIX. '17^ iroup d'envie contre lui de la part des feigneurs; Elle fe paffa en murmures fourds, tant que le duc eut de la vigueur; mais lorfque 1'efprit de ce prince commenca a baiffer, elle produifit des intrigues & puis des faétions pout le perdre ; particuliérement depuis qu'il voulut fe maintenir par des crimes, & qu'il eut fait mourir de cruelle faim dans la prifqn, le chancelier Jean Chauvelin , & Jacques de 1'Efpinay, évêque de Rennes. II arriva donc, durant qu'on tenoit les ctats a Tours, que les feigneurs du pays s'enhardirent de le vouloir enlever d'auprès du duc; mais comme ils eurent manqué leur coup, il déchaïna contre eux toute 1'autorité du prince , & les ré* duifit a la facheufe nécelfité de fe défendre. Le duc d'Orléans qui fe trouvoit pour-lors a Tours; s'étant mis en fantaifie d'acquérir Ia Bretagne ; en époufant la falie ainée du duc, defcendit en ce pays-la pour offrir fon fecours a eet homme.' II faifoit fon compte , que s'il lui étoit obligé de cette maniere, il lui moyenneroit ce riche mariage , Sc qu'au refte, il trouveroit bien les moyens de faire déclarer nul celui qu'il avoit contraóté avec la fille du roi Louis XI. Les feigneurs eulfent bien defiré recourir a la proteétion de ce jeune priuce , daas lequel il paroiffoii;  *74 Etats.&c: beaucoup de marqués d honneur & de problté j »a« Landais ]es ayant prévenus, ils s'adrelferenr* a la dame de Beaujeu, fon ennemie, qui embrafTa auffi.töt leur caufe. Ce feu ayanc couvé quelques années, éclata enfiu a la ruine emiere «e la Bretagne.  *7l LOUIS XII. ÊTATS TENUS A TOURS; le 10 Mai ijoó*. J'ai racónté, dit le P. Daniël, comment le roi,' dans la réfolution d'abattre la puiffance des Venitiens, & de conquérir fur eux tout ce qu'ils avoient enlevé de 1'ancien domaine du duché de Milan, avoit, par le traité de Blois du 22 feptembre de 1'an 1504 , confirmé le mariage déja projetté entre madame Claude de France, & Charles duc de Luxembourg, a dés conditions auffi avantageufes pour cette princeffe Sf pour ce prince,' quelles étoient préjudiciables a 1'état. J'ai ajoutc quelles Pétoient a un tel point, que la commune opinionfut quele roi n'avoitfait ce traité que dans la vue de venir a bout de fes projets contre les Vénitiens, fans avoir envie de 1'exécuter jamais ; & ce fentiment étoit fondé fur la tendreffe qu'on favoit qu'il avoit pour fes fujets, & fur 1'honneur & le plaifir qu'il fe faifoit de porter le titre de pere du peuple, qu'on lui donnoit dès-lors. La grande maladie donc il fut attaqué en  ê t a t 8 1505, & dont on crut qu'il ne récliapperoït pas , lui fit faire de nouvelles réflexions Sc envifager de plus prés les étranges conféquences de ce manage , qui non feulement tranfportoit a la maifon d'Autriche de fi beaux domaines «comme étoient le duché de Milan, Gênes , le comté d'Aft, mais qui mettoit la France a la difcrétion d'un prince étranger , par la podcffion ,du duché de Bretagne, du duché de Bourgogne du comté de Blois , & d'autres domaine* confidérables du royaume. II fe fi| dès-lors partout le royaume, entre Ia nobleffe & dans les pnnapales villes, des afTemblées oü 1'on propofoit les moyens de prévenir ce mal, Sc defquelles on auroit dü appréhender de facheufes fuites fous, un prince moins aimé de fes fujets que n'étoit le roi ; mais il n'y fut point con. clu autre chofe, finon qu'on lui repréfenteroit avec foumiffion les conféquences dangereufes de ce traité ■ qu'on le fupplieroit de les prévenir en e rompant, Sc qu'on lui propoferoit d'affembier les états pour délibérer fur un fujet fi important. Quelque füc le principe de ces mouvemens, ü ne pouvoit lui pla.re, les princes n'aimant pas qu'on s'mgere dans les affaires d'état Sc qu'on trouve i redire i leur conduite ; mais comme ü étoit aforé de I'affecFion de fes fu- jets ,  s O u s Louis XII. l-j'j jets , que lui-même étoit fort por té a faire ce qu'ils fouhaitoient, ainfi qu'il 1'avoit afilz fait connoïtre par 'la ligue qu'il avoit faite avec le roi d'Aragón contre le roi de Caftille, «Sc que d'ailieurs cela lui fourniffoit un moyen de le tirer, avec quelque honneur, de ce rriauyais pas, il les écouta, & confentit a 1'alTemblée des états, qu'il convoqua a. Tours pour le mois de mai. L'ouverture en fut faite ie dixiemë de ce même mois, & ce fut le docieur Bricot, fameux dans l'univerfité de Paris par fon éloquente, qui 'fut choifi pour porter la parole ; i! s'en acquit» dignement ySc après avoir flatté le roi par 1'eiidroit qui le touchoit le plus agréa°b!emenc , c'eft a-dire, par la tendre afFecFion qu'il avoit pour fes peuples , par le grand ordre qu'il avoic mis dans Ja juftice, dans la miiice, dans les finances, Sc tout cela par rapport au bien & att foulagement du royaume ; après avoir montré avec combien de juftice il méritöit le glorieux furnom qu'on lui donnoit', de pere du peuple. II entra dans le détail des grands inconvéniens du mariage de madame Claude de France avec un prince étranger, k caufe du démembremenc de tant de beaax états que la princelTe pórteroic en dot a fon époux, Sc dont quelques - uns Tornt X. M  ï?8 E T A T S ouvroient aux ennemis 1'enrrée jufques dans Ie cceur du royaume. Enfuire il fupplia ie roi, au nom de tous fes bons fujets , de ne pas paiTer outre fur un fi important article, & de vouloir k bien faire époufer la princefle au prince Francais, comte d'Angoulêrae, fon héritier préfompuf, au cas que fa majefté n'eüt point d'enfans males. La harangue étant finrie, le roi répondit par la bouche de fon chancelier, qu'il avoit pour très-agréable la remontrance des états : mais qu'il s'y agilToit d'une affaire de fi grande imV portance , qu'il y vouloir penfer férieufement avant que de fe déterminer au pani qui convicndroit le mieux. Sur ces entrefaites, les députés des états de Bretagne arriverent a Tours ; & comme plus mtéreffés encore que les autres Francois , a caufe du duché de Bretagne qui changeroit de mame , par le mariage de la princefle, ils préfenterent en leur nom , une requête pareille fur le même fujet. Le roi ayant mis 1'aftaire en délibération dans un confeil, oü il appeikv les plus confidérables des trois érats, leur propofa 1'unique peine.qu'il avoit a confentir a la demande qu'on lui avoit faite , qui étoit de manquer a la paroie qu'il  sous L'outs XIï. 'Yf$ avoit donnée pour ce matiage au roi des Ro~ "snains, «5c au roi de Caftille. La chofe fut examinée avec grande application , Sc tous conclurent que le roi n'étoit «-point obiigé a renir ce traité, paree qu'il n'avoir pu le faire, d'autant que par le ferment qu'il avoit fait a fca facre, il étoit obligé par defTus toutes chofes a prouver la sureté de fes iujets, &c le bien public du royaume, Sc a ne pas caufer un auflï grand p.éjudice , que celui dont il s'a.uijfoit j qu'il n'étoit point en fon pouvoir d'aliéner le domaine de la couronne , a moins qu'il n'en revïnt un avantage plus confidérable a 1'état ; que 1'aliénatiön qu'il faifoit en cette occafion ¥ étoit infiniment préjudiciable au royaume, «Sc lui caufoit un mal irréparable ; qu'enfin, quelques traités Sc quelques fermens qu'il eüt faits, ils ne pourroient obliger perfonnellement Ia princelTe, qui étoit alors en bas age, que quand même on en feroit venu jufqu'aux fiancailles» ce qui n'étoit pas, elle n'auroit par cette raifon aucun engagement, lis finirent, en difaue que ce n'étoit pas feulemeht un cöhfeil qu'ils lui donnoient touchant la rupture de ce manage, mais les vceuX de tous fes peïiples qu'ils lui préfentoient tout de nouveau, 'Sc qu'ils le conjuroient d'écouter. M *  l8o E T A T S Le roi cotivaincu par tant de raifons, qui ne lui perfuadoient rien de' contraire a fon inclin-.tion , ordonna 1'alfemblée générale des états pour le lendemain „oü il leur déclara qu'il accordoit a leur zele, pour fa gloire, & pour l'inrérêt de fes peuples, ce qu'ils lui avoient demandé avec de fi prelfantes inftances ; que la princeffe n'épouferoit point le duc de Luxembourg , & qu'il confentoit a fon mariage avec Francois , comte d'Angoulême fon héritier préfomptif. Ce fut une joie incroyable dans toute 1'aflemblée , que la plupart exprimerent plus par leurs larmes que par leurs difcours, Sc le roi en fut fi touché lui-même , qu'il ne put contenir les fiennes. II mit le comble a cette joie, lorfque le vingt & unieme jour de mai, fête de 1'Afcenfion, la princeffe fut fiancée au prince en prér fence de toute la cour, par le cardinal d'Amboife, Sc enfuite le roi congédia les écats. C'eft ainfi que ce prince corrigea la plus grande faute qu'il eut faite & qu'il eut pu faire de fon regne, fi toutefois il eut jamais envie de la faire. Car , ainfi que je 1'ai déja remarqué, il y eut un autre fin dans le traite conclu a Blois. II prévoyoit qu'il auroit bien des moyens Sc bien des occafions de fe défendre de  sous Louis X11. i comme deffus, audit lieu, «Sc furent mandés vers lui Iefdits des états, auxquels, par fon chancelier, il fic dire ce que s'enfuit : Meffuurs, Ie roi, notre fouverain feigneur, a profondémenc penfé k Ia requête que Juf £r« jeudi dernier pa/Té • fur quoi il vous fait  sous tovis XII. *$7 dTte que, ainfi qu'il a accoutumé faire en fes affaires, mêmement en ceux qui touchent le bien Sc utilité de fon royaume & de fes fujets, lefquels il a fort a coeur, que bien fouvent il a veillé quand lés autres dormoient, par quoi 1'avez juftement baptifé Pere du peuple, Sc combien qu'il ne fe défie point de vous , Sc eft bien affuré que vous ne lui voudriez faire requête qui ne fut bonne Sc duement fondée ; touterois il a bien voulu mander Sc convoquer tous les princes de fon fang, les barons Sc principaux eonfeillers de for» royaume, aufii de la duche de Bretagne , pour leur communiquer la requête que vous enfemble lui avez faite, pour fur ce s'aider de leurs opinions Sc confeil. Et après ce qu'il a eu leur avis, lui ont remontré , par plufieurs raifons évidentes, pour le bien & utilité de fon royaume, fes pays, fujets, Sc de toute la chrétienté, qu'il confenie Sc accorde que le mariage de madame Claude de France, fa fille unique , Sc de monfieur le duc de Valois, foit fait -, non-feulement lui ont donné ce confeil, mais lui ont d'un commun accord , requis & prié fe confentir audit mariage, comme vousv autres. Et pour ce que le roi, notre fouverain feigneur, a toujours defiré & defire fur toutes chofes, le bien Sc utilité de fes royaume SC  !§5 E r A , s de faire chofe qui ftfc agr cJq^ «»« ledit mar.age. Et combien que par ci-devant actepourparledumariagedemaditedameClaude ^«^^èfois ü ny a chofe traitée i Püiflè nuire ou empêcher ledit maria.e , L ^"7 aeuque parole, Et pour ce que nous fommes tous moreels, & qu'il n>a chofe plus - Iheured'icelle, Ie roi, notre fbuverain L «neur veut que, fi Je cas advenok d vie attepas, fans avoir lignée mafculine, que vous promettiez & faifiez promettre & P« habuans des cités & viljes dont [Qns «es envyes, felon la forme qui vous fera baiilée P" eent, de.faire accomplir & confommer ledit ^rrage, & que vcus obéir„ & ^  sous Louis XII. 18$ cas advenant, mondit feigneur de Valeis, votre vrai roi, prince & fouverain feigneur, & que de tout ce envoierez vos lettres & fcellés de chacunes cités & villes, en dedans la fête de la Madeleine prochain venant; combien que le roi, a 1'aide de Dieu, aie bon efpoir tant vivre qu'il fera confommer ledit mariage ,• & verra les enfans de fes enfans. Après que monfieur le chancelier eut fini fon propos, ledit doóteur Bricot, pour lefdits états, commenca a dire : Domine magnificafti gentem, & multiplkafti latitid ; & autres plufieurs allégations de la fainte écriture, difant : voxpopuli, vox Dei, hcec dies quam fecit dominus, & qmm expecïavimus, & venimus in eam. Et après, ceux des états fe mirent a genoux, & aufh ledit docteur , & dit : Sire, nous vous remercions trèshumblement de la part de tous vos fujets, de 1'accord qu'il vous' a plu leur faire; nous prions aDieu qu'il vous veuille longuement laiffer vivre en bonne profpérité &C fanté , la reine-, madame votre fille, monfeigneur de Valois, & meffeigneurs de votre fang. Et quant a vous envoyer les lettres & fcellés qu'il vous a plu nous ordonner, toutes les cités «Sc villes de qui nous fommes envoyés , font & feront prêts a vous obéir j car il n'y a ville & cité qui n'ait un fouet  '9° ÜTAtl * trois cordons: le premier eft le eeetir de vos fujets, qui vous aiment très-parfaitement; le fecond cordon eft force, car tous en généra'l Sc en particulier font délibérés de mettre corps Sc biens en danger pour vous ; le troifieme eft le moyen desprieres & oraifons que vos fujets font tous les- jours pour votre bonne fanté Sc profpérité, difant : vive t vive , vive le roi, après fon regne lui doint Dieu fon royaume de paradis. Après ce que ledit doóteur eut parlé, monfieur ie chancelier alk parler au roi, puis retoarna en fa place, Sc dit, en fouriant, ces paroles auxdits des états : Meffieurs, le roi reconnoit de plus en plus 1'amour & 1'affecrion que fes bons fujets ont en lui, Sc vous fait dire que s'Ü a été bon roi, il fe parforcera de vous faire de bien en mieux , & le vous donnera a connoïtre, tant en général qu'en particulier. Et paree que le roi fait que vous, Mefieurs, qui ctes xri préfens , êtes les principaux du confeil des villes Sc cirés qui vous ont envoyés devers lui, & que vorre abfence pourroit porter préjudice a la chofe publique, a caufe des affaires qui furviennent de jour i autre, il vous donne congé de vous en retourner, Sc eft d'avis que feulement demeureront nn de chacune ville , pour lui dire les affaires d'icelie, fi aucuns en ont,  sous- Louis XII. l<)t' £ quoi le roi leur fera prompte & brieve expédition. Lors fe leva ledit chancelier, & prit un livre des faintes évangiles, fur lequel tous ceux des états jurerent d'entretenir tout ce que deffus eft dit, Sc le faire ratifier par ceux defdites villes Sc cités. Le jeudi vingt Sc unieme du mois de mai, le roi & la reine vindrent en la falie , qui étoit fort richement parée; Sc li-tot après y fut apportée madame Claude , laquelle le feigneuc Infant de Foix portoit en fes bras; Sc avec eux vinfirent le duc de Valois , Sc tous les autres princes Sc barons; aufli madame de Bourbon, d'Angoulême , Sc les autres princeffes , Sc tanc de dames & damoifelles , qu'il fembloit que Ie royaume des femmes y fut arrivé. Lors, monfieur le chancelier lut certains articles du traité de manage, contenant en fubftance, que fi le roi avoit lignce mafculine, ledit mariage con-; fommé, donnoit audit feigneur de Valois , & a ladite dame pour fon dot, les comtés d'Aft, Sc de Blois, les feigneuries de Soiflons Sc de Coucy, Sc la reine , en ce cas , donneroit a ladite dame Claude cent mille écus. Et au cas que le roi eüt lignée mafculine, Sc que celui qui feroit roi voulüt recouvrer lefdits comtés Be feigneuries, feroit, pour récompenfe, teflu donner'au-  cl ;gnem ^ de ™->&a ladite dame Après furent faites & folemnifées Jes fia„. carlles de mondit feigneur de Valois, Sc de macute dame Claude >„ / . . , rjuae' ^'"^"ca monfieur Ie iéaat. l^epms lefd.es fiancailles, le roi fit pafle > uj ie roi, paur ]es é . ^ • plus -oyeux du monde. ETaurre pare ,e roi pric le ferment des princes & barons^ de fon royaume, & pareillehlt de kres en la ferme qili ^ f &fur les famtes évangiks de Dieu . pour ce par nous corporelkmenr «ouchées, queius ferons & procurerons par effet de norre pouvoir ,u%a expofer corps & biens, que Ie mariage' de madame Claude de France, Sc de monfet gneur Ie duc de Valois, lequel il a plu a„ roi par le commun avis, accord Sc opnfentemenc de' nous & Je rous les autres princes de fon fa„, ceux de fon confeil, Sc des principaux feigneurs 1 Sc  sous Louis XI ï. 193 Sc barons, cités Sc bonnes villes du royaume, confentirconclure Sc accorder, fe fera, confommera Sc accomplira incontinent qu'icelui feigneur Sc dame feront en lage pour acompür Sc confommer ledit mariage; oi pour ce faire, n'épargnerons corps ne biens, mais les espoferons comme dit eft. Et fi le roi, ce que Dien ne veuille, va de vie a trépas, fans laiffer enfans males , nous tiendrons & répurerons mondit feigneur de Valois pour notre roi & fouverain feigneur, Sc comme a tel lui obéirons. En témoignage de ce nous avons figné ces préfentes de notte main , & a iceiles fait metcreie fcelarmoyé de nos armes. A Tours , le vingt-unieme de mai mil cinq cent fix. Lettre du Roi Louis XII au Jieur de Chievres. Duquel acFe mondit feigneur roi de France avertit incontinent monfieur de Chievres , lieu* tenant général du roi, Sc autres fes officiers ès pays de par deca, en la forme & maniere contenus cs lettres fur ce écrites par ledit feigneur roi audit fieur de Chievres , dont la teneur s'enfuit. Mon Coujin , les députés des principales Sc plus grofles villes & cités de mon royaume, fe font hativement trouvés devant moi en cette ma bonne ville «Sc cité de Tours, comme ils Tomé X, N  194 E T A T s m'avoient fait avertir, Sc illec, en Ia préfence de tous les princes & feigneurs de mon fang, êc autres grands & notables prélats & perfonnages de mon confeil, que pource j'avois mandé Sc fait aflembler a grand nombre, fachant leurs venues , après plufieurs grandes remontrances qu'ils nous ont fait, licence par eux demandée & obtenue , m'ont très-humblement fupplic Sc requis, pour le bien, füreté Sc pront de moi, de mon royaume, Sc de toute Ia chofe publique d'icelui, Sc pour obvier a plufieurs grands dangers Sc inconvéniens qui autrement en pourrdient advenir, que je vouluffe entendre & faire traiter le mariage de ma fille Claude de France, avec notre coufm le duc de Valois , comte d'Angoulême, comme très-iicite Sc convenable pour plufieurs grandes & bonnes caufes , raifons Sc confidérations que fur ce ils ont dit Sc déclaré , &. qui font évidentes' Sc notoires ; §c depuis ladite requête ainfi faite, font venus les barons Sc feigneurs de mon pays Sc duché de Bretagne, avec ceux des bonnes villes, qui ont adhéré a la requête a moi faite par ceux defdites groffes villes de France, Sc en icelle ont perfiilé, & de ce fait femblablement fuppiication Sc requêre : fur lefquelles remontrances Sc requête, j'ai bien voulu avoir 1'avis Sc confeil  •s o "ü s l o ü i s Xlï. ï'9j defdits princes Sc feigneurs de mon fang , Sc gens de mon confeil, lefquels finalement fe font Jféföhïs , que pour lefdites caufes & raifons fuf-, dites Sc alléguées par ceux defdites villes, Sc autres qui feroienc rrop longues a raconcer, ledit mariage eft accordé a 1'humble fupplication Sc requête de mefdits fujets, comme -très-jufte Sc tfès-raifonnable } Sc non pas feulement le m'ont confeillé, mais particulierement Sc généralemenc m'ont tous fait femblable requête, fans ce que je doive avoir égard ni m'artêter a ce que, comme il a été très-bien dit Sc remontré en leurs préfences , par ci-devant quelque traité avoit été fait entte moi Sc mon frere Sc coufin Ie roi de Caftilie , touchant le mariage de madite Êlle avec mon coufin le duc de Luxembourg fon nis, qui fut pour aucunes eonfidcrations que j'avois lors, qui de préfent celfen't. Jacoit ce qu*il n'y ait, ni pourroit avoit chofe qui me Kat ne madite fille , de préfentement contrac-' ter & faire ledit mariage, pour autant que l'ua ni I'autre n'avoient lage requis pour ce faire : Sc davantage ce feroit par moi contrevenir au, premier ferment folemnel par moi fait a Reims, en recevant mon facre &C couronnement , quï e(t de fairs toute. ckcfe que connoitrai être au bien^fureti & confervaüon de mon royaume, fans.  l9S E T A T S cqnfintir ni permettre dirt&ement la diminution d'icelui. O: , je n'euffe pu , 5c ne pourrois , pour mon honneur & devoir, & fans le trop grand mal contentemtnt defdits princes & feigneurs de mon fang, auxquels cette chofe touche , «5c auffi de mefdits fujets , dénier a faire & traiter ledit mariage; mais j'ai conclu , par leurfdits avis & opinions , de faire les fïancailles d'eux deux. Toutefois, pour lefdits mariages ainfi faits & conclus a ladite requête , je n'ai entendu & n'en.tends , en quelque facon que ce fóit, de me dépotter & éloigner de la bonne amitié, fraternité «5c alliance qui eft entre mondit frere & coufin le roi de Caftilie, «5c auffi de la communication «5c fréquentation qui eft entre nos royaumes , pays «5c fujets, «5c ceux de mondit fieur frere «Sc coufin, mais de ma part les entretenir en quelque maniere que ce foit. Lefquelles chofes j'ai fait favoir a mondit frere &c coufin le roi de Caftilie, & auffi vous en ai bien voulu avertir, afin que ne vous imaginiez pas que pour ce je veuille faire aucune rupture avec mondit coufin, fefdits pays «5c fujets ; car il ne me trouvera jamais fi délibéré de bonne amitié , paix & fraternité qu'il fera , ainfi que par expérience il trouvera, & eftime tant de lui, & qu'il aime tant le bien de moi & de mon  sous Louis XII. 197 royaufne, quand il entendra & confidérera bien les chofes deflus dites, qu'il n'aura caufe de s'en mécontenter ; vous priant que de votre part , vous veuiüez aider Sc tenir la main a Fentretenement de ladite amitié 8t fraternité d'entre nous, qui fera le bien de nous & de nofdits pays & fujets, a quoi de ma patt n'y aura faute. Je prie Dieu, mon Coufin , qu'il vous ait en fa garde, Ecrit a Montils-lez-Tours, le dernier jour de mai 1 506. Ainfi figné , Louis; Sc du fecrétaire, Gedoyn. Et au-detfus : a mon coufin le feigneur de Chievres. Opinion de M. L'abbé Garnier fur les Etats de 150c?. Louis avoit déja pris des mefures pour r;mpre un mariage trop préjudiciable a fon peuple , mais ces- mefures n'étoient pas fuffifantes : 1'engagement étoit public , confirmé dans deux ou trois traités, garanti par des princes du fang, par les principaux officiers de la couronne. L'aóte qui le rompoit étant demeuré fecret, 6c n'ayant été communiqué qu'a trois ou quatre capitaines des gardes, pouvoit être regardé comme frauduleux. II étoit fur-tout imporrant de s'aflurer contre la reine ; car bien que les prieres d'un mari expirant, les exhortations du cardinal d'Amboife lui N j  '5^ E T A T S eulfent arraché une efpece de confentemene pou* le mariage de fa fille avec 1'héritier de la cou«onne, il paroiffoit afleas, par Ia violence qu'elle s'étoit faite en cette occafion , combien elle tenoir afon premier engagement, & combien elle avoic d'averfion pour le parti qu'on lui propofoit. Or, elle étoit fouveraine; elle avoit des gardes, des levenus confidérabies , une cour nombreufe ; & avec de pareilles reffources, il ne lui auroit pas été difficiie, fi le roi venoit a mourir , d'enlever fa fille. Enfin, il falloit fauver la réputation du xoi, Sc lui prcparer une réponfe aux plaintes de la maifon d'Autriche. On crue devoir recourir, dans cette occafion , au remede qu'on a coutume d'emptoyer dans fes grandes maladies de 1'état. La plupart des villes & communautés du royaume, foit qu elles agiffent de leur propre mouvemeno* foit qu'eiles ne fifient que fuivre les impulfions. fecretes du confeil, adrefferent au roi des requêtss. pour demander l'affemblée des états généraux. Louis 1'indicjua pour le i0 de mai, dans la ville de Tours. Les députés s'y étant rendus de toutes Jes provinces du royaume , conférerent enfemble pendant trois jours, & élurent pour orateur, Thomas Bricot, chanoine de notre-dame, premier député de Paris. Le .4,ie roi vint prendre féance, accompagné des princes du fang, d©  sous Louis XII. i99 quelques cardinaux, des premiers feigneurs & des grands officiers de la couronne. Cette afTemblée ne reffembloit i aucune de celles qu'on avoit vues julqu'alors en France j car au lieu que dans les autres, Forateur étoit chargé de porreV au rot les griefs de la nation , d'expofer i fes regards la mifere publique, & de le préparer a recevoir favorablement le cahier des doléances, Bricot ne fut chargé que de retracer au monarque fes bien* faits, & de lui payer, au nom de ia nation, tm jufte tribui de louange. « Dès votre avénement i la couronne , lui dit-il, votre fage£fe a diffipc les orages qui avoient toujquts patu inféparableS d'un nouveau regne; votre" magnanimité a ralTuré ceux qui trembloient d'avoir encouru votre tndignation : image de Dieu fur la terre, vous n'avez venoé vos injures que par vos bienfaits; pere commun, vous n'avez vu'dans tous vos fujets, que des enfans tendres & foumis. En vam des voifins jaioux, comptant fur nos divifions ordinaires , s'étoient-ils préparés a ravager nos provinces i battus , repouffés , ils ont demande humblement la paix. Dans ces tems d'alarmes &C de troubles ou les revenus ordinaires de la couronne paroiflent infuffifans , vous avez foulagé le peuple •, les tailles ont été diminuées d'un tiers. Des foins plus glorieux ont encore fignalé N 4  200 États les commencemens de verre regne ; des Iöfc %es ont affuré la fortune des citoyens , les abus om s'étoient glifTés jüfques dans le fanctuaire de Ja Juftice , ont été retranchés ; & Ce que nos Peres „'auroient ofé ni prévoir, ni efpérer, le laboureur n'a plus tremblé 4 1'approche du guer"er; &, pCur me fervjr de pexpreffion ^ Fophête, le mouton bondit au milieu des loups & le chevreau joue parmi les tigres. Quelles aclions de graces peuvent vous rendre des fujets que vous avez protégés , enrichis ! Comment s acquuteront-ils de leurs obligations ? Daignez, 5>ire, accepter le titre de Pere du Peuple, qu'ils vous déferent aujourd'hui par ma voix >>. A ces mots , im doux murmure s'éleva dans laffemMée; il fut fuivi de jo;e & d>app!aijdif_ femens. L'orateur, après s'être recueilü un moment en lui-même, ponrfuivir ainfi : « Vos bienfa.ts, Sire, ont paffé notre attente } mais «e nous aunez-vous comblés de biens, que pour nous plonger dans des regrers plus amers ? Votre amour pour la patrie doit-il finir avec votre vie P N aunez-vous pris tant de peine en faveur de vos fideles fujets , que pour les livrer vsusaême a la merci des étrangers, & leur faire perdre en un inftant le fruit de tant de fang & «e travaux ? Que ne F«is-fe tetraccr aux yeu*  sous Louis XII. 101 ie votre majefté, la douleur profonde, la conlternation a laquelle la nation entiere s'abandonna dans ces momens tertibles ou nous trerablames pour vos jours ! Profternés au pied des autels , effrayés du feul danger qui vous menacoit, fans aucun retour fur nous mêmes} nous ne demandions au ciel que la contervation d'une tête fi chere. LoiTqu'un rayon d'efpérance eut dilfipé cette terreur profonde , nous vimes avec effroi le péril qu'avoit couru 1'ëtat ; toutes les fuites d'un trop funefte engagement fe préfenterent a notte imagination, Cependant nous gardions lé filence ; la faveur que le ciel venoit de nous accorder combloit nos defirs : nous ne doutames plus qu'un roi fi fage n'ouvrit les yeux fur le danger qui nous menacoit ; la ciainte de lui déplaire par une démarche précipitée nous arrêta lon^-tems, & même, depuis que nous fommes ici alfembiés , nous avons encore délibéré s'il n'étoit pas a propos de garder le filence , &C d'attendre en paix ce. qu'il vous plairoit d'ordonner. Votre bonté , Sire , a pu feule nous infpirer de Ta confiance. Nous nous fommes rappellés que dans les cruels inftans oü vous parolffiez toucher a votre derniere heure , vous déclarates que vöus ne regrettiez la vie, que paree que vous n'aviez point encore affuré le  101 e t a r ê repos de votre peuple. Ce font ces patoïes l jamais mémorables qui nous enhardiffent a dépofer aux pieds de votre majefté notre très-humble requête ». A ces mots, l'afTemblée tomba a genoux , les bras levés vers Ie tröne. L'orateur, dans Ia même attitude , poutfuivit d'une voix baffe & -tremblaute : « Puiffe Ie fuprême arbitre des deftinées prolonger la durée de votre regne ! Paifle-t-Ü, propice a nos "ceux , vous donner pour fucceffeur un fils qui vous reffemble ! Mais fi fes décrets éternels s'oppofent a nos vceux, s'il ne nous juge pas dignes d'une fi grande faveur, adorons fa juftice, &Z ne fongeons qu'a faire ufage des dons qu'il nous a faits. Sire , vous voyez devant vous un précieux rejetton du fang des Valois; fils d'un pere veitueux, élevé fous les yeux d'une mere vigilante, formé par vos confeils &: par votre exemple, il promet d'égaler la gloire de fes ayeux : qu'il fok Pbeureux époux que vous deftinez a votre fille , & puifle t-il retracer i nos neveux 1'image de votre regne ». Ce difcours , Ia pofture fuppliante oü il voyoit fes fujets , émurent le cccur paternel de Louis ; des larmes d'attendriffement coulerent de fes yeux. Le chancelier Gui de Rochefort, après  sous Louis XII. 205' s'êcre mis a genoux au pied du trbne «C-avoir xeai fes otdres, s'avanca vers 1'affemblée, & die ; « Meffeignears des états , le roi , notre fouverain & naturel feigneur, ne blame pomt. la démarche que vous avez faite, il rend juftice aux fémimens qui vous i'ont infpiréeï;8? voit avec la plus vive fetisfatStidn i quel point la patrie vous eft chere. Il accepte le titre de Pen du Peuple qua vous lui déférez ; vous ne pouviez lui faire un don qui lui fut plus agréable. Si les foins qu'il s'eft donné ont toutné au profit de la chofe publique , U déclare qu'il faët en rendre gtaces a Dieu , & qu'il s'efforcera de mieux fake a 1'avenir. Quant a la requête que vous lui avez ptéfentée, elle roule fur un objet fi important , que quelque déférence qu'il alt pour les confeil* de fes fideles fujets , il ne veut rien ftatuer a eet égard , fans avoir pns 1'avis des princes de fon fang, des grands & des premiers magiftrats du royaume. Retrouvezvous donc ici dans fix jours , & le roi vundra lui-même vous apprendre fa réponfe». Le lendemam,les députés de Bretagne, qui n'avoient point été admis dans 1'affemblée, paree que la reine , leur fouveraine , étoit jaloufe d'empecher la réunion de ce duché au refte de la monarchie , préfenterent au roi une requête  l04 E T A T S entierement conforme au vceu général de Ia nation. Louis ayant aTemblé un confeil extraordinaire , oü il donna entrée aux premiers préfidens des pariemens de Paris, de Rouen & de Bordeaux , a un grand nombre de prélats & de feigneurs , déclara publiquement les engagemens qu'il avoit conrractés avec la maifon d'Autriche, les fermens qu'il avoir prctés & fait prêter par les gouverneurs de plufieurs provinces , d Parchiduc Sc d Pempereur. II ne diffimula point qu'il fe croiroit obligé de les accomplir a quel. 277. Louis , affuré des difpofitions favorables de 1'empereur, affembla Ie clergé de fon royaume dans la ville de Tours ; & après avoir fait expofer par fon chancelier les procédés violens de Jules, les démarches inutiles qu'il avoit faites pour 1'appaifer , il pria 1'affemblée de lui prefcrire la conduice qu'il pouvoit tenir, en fureté de confeience, pour préferver fes fujets & fes alliés d'une odieufe tyrannie. Le clergé ftatua fur les huit queftions qui lui furent propofées; que Ie roi pouvoit légitimement ufer de fa puiffance pour délivrer fes fujets de toute oppreflïon ; dépouiller, au moins pour un tems, le pape des places fortes dont il ne fe fervoit que pour troubler le repos de fes voifms ; fe fouftraire a fon obéiffance, non poirit abfolument ni en toutes manieres, mais Sutant qu'il feroit néceffaire pour une jufte défenfe ; fe conformer, pendant le tems de cette fouftraction , a 1'ancienne difcipline dans tous les cas oü 1'ufage moderne vouloit qu'on s'adreffat au faint hegej que tout ce que ie roi pouvoit  sous Louis XII. *tj pour fa propre défenfe , ü le pouvoit pour celle de fes alliés, fi ceux-ci étoient irijuftement opprimés, tk fi leurs intéiêts étoient inféparables de ceux de fa couronne que les cenfiires que le pape prononceroit, ou auroit déja prononcées pour des intéréts purement temporels, «C fans obfetver les formes juridiques , feroient nulles & de nul effec. Les principaux membres du clergé, plus zélés pour les droits de la couronne que le roi lui-même, demanderent la permilfion de nommer des députés , pour notifier au pape leurs décifions, le prier de mettre fin z une guerre qui fcandalifoit fes freres , d'affembler un concile général, oü 1'on procéderoit a la réformation de l'ég'ife dans fon chef & dans fes membres. Ils fupplierent le roi de vouloir bien, au cas que Ia réponfe du faint pere ne fut pas . favorable, porter 1'empereur $ les aurres princes chrétiens , a donner aux principaux membres de 1'églife , c'eft-a-dire aux cardinaux qui s'étoient déja éloignés de la cour de Rome , toute la protedion dont ils auroient befoin pour indiquer &c célébrer un concile général, a 1'exemple des conciles de Pife, de Ccnftance & de Baile. Enfin ils convinrent de fe raflembler dans Ia ville de Lyon, le premier jour de mars de 1'année fuivame, afin de.ftatuer définitivemenc O j  2,+ Ë T A T S fur Ia réponfe du pape. IJS défendirent , par f r°Vlfion ■ de s'adr^, pour aucune affaire , a la cour de Rome , „i d'y faire pafTer de 1'argent, & ,IS accorderenc libéralement au roi un don de cent mille écus fur Ies bien* eccléiiaftiques. L'ambafTadeur que Maximilien avoit promis denvoyer, arriva fur la fin de cette aflcmblée; cetoit Mathieu Lang, évêque de Gurcfc. Sc fon premier miniftre. II ne put alfifler qu'aux detnieres féances ; mais ayant eu communicanon de toutes les délibérations ptécédentes, il y foufcnvit fans aucune réferve , promir que 1 empereur affembleroit, de fon cöré, IVIife de Germame, Sc qu'il enverroit au concile de Lyon finon tous les prélats d'Allemagne, au moins ceux de fes pays héréditaires , fur lefquels il avoit plus d'autoriré. II demanda , au nom de 1 empereur fon maitre , un recuerl authentique des maximes fondamentales des libertés de 1'ég ife Galbcane, afin de les faire adopter par ie clerge de Germanie. En efïet, Maximilien remit ces exemplaires aux docteurs les plus cé'ebres aux eccléfiaftiques les plus éclairés de fes états ' qui tous célébrerent, a 1'envi, les vues bien! infantes d'un fi généreux monarque, & le „ommoieat déja le fibérateur de la patrie. Ils seQi-  sous Louis Xlt. ;MÏ prefferencde pub&r, fous le ut» de gnef. de nacion geïnde, une lifte des abus 1. pks criante la cou.de *^>*^ * croyoient qu'on ailoit remédier. Mais tel eft leLalheurdes états oü f intérêt du fouverain eft différent de celui des fujets } rarement on s'y occupe long-te-s de ce qui ne touche que fouts intéréts. Maximilien u'avoit alors pour objet que de s'infinuer de plus en fbM-J coulance du roi, & d'i^mrder le pape. ne fic Pas attemion, fans doute , combiea ü .ftrnhumam, combien il eft même daugereu* de faire fentir a un peuple fes maux , de lui en montrer le remede, quand on n a pas un delirfincere de le foulager. Au refte , ü paya chcr cette démarche indifcrette. Dans ces memes écoles qu'il rempMoit de fermentation, select dès-lors le fameux Martin Lucher quw uuuobfcurquil étoit, devoit potter une fi rucfo atteinte a fon autorite. O 4  2lc? FRANCOIS K O» P«la d>affembl„,es dt„s . 'Zr 'eS & '« Pi" du royaume £n 1».« pour l«.nv«« 4Tölir dreJ.,>nc P"Wnt après ,a faint Mmtm ■ cn.nc^r pour KnvilM de fi ™ « £rrr °n cerMin ~~ *■■<•« - • Ion ft prop^^-ü dtf. '•obligerarép„„drefttIech :; * ptm :;°;raement petiw' * l« dépurcs des différente, provinces dn  sous Francois I. itf diqué : lè roi ouvrit 1'alFemblée , a laquelle affifterent, de la parr de 1'empereur , Lannoi 8c Alarcon. Les députés de Bourgogne , comme partie intéreffée, furent les premiers entendus. lis déclarerent que s'étant donnés a la France fous les fils de Clovis, ils avoient conftamment formé depuis ce tems-la, la r-remiere pairie du royaume. Que le roi , quelque puiffant qu'il fut d'ailleurs, n'avoit pas le droit de les aliéner, fans leur aveu, puifque le ferment qui unit les fujets au fouverain , lie le fouverain a fes fujets , &c ne peut êtte détruit que par un confentement réciproque ; qu'au refte , ce lieri n'uniiFoit pas feulement les bourguignons au. roi, mais a tous les auttes membies de la monarchie, qui avoient dtoit .de s'oppofèr a un engagement contraire aux Ioix , & dtftructif de toute liberté. Francois tacha de s'excufer fur la dure néceffité oü il s'étoit trouvé de facrifier une partie pout fauver le tout. 11 remontra aux Bourguignons qu'ils feroient traités avec douceur par leur nouveau rnaitre , ,mais qu'on leur conferveroirjous leurs privileges , & pria 1'afFembIée de le^mettre a portee d'accomplir fon fetment. «Ce ferment., répartirent ies Bourguignons , eft nul , puifqüil eft contraire a un premier ferment que vous prctates a la nation  '**t E I A T s en recevant 1'oncFion facrée, puifqu'il eft contraire aux liberrés de votre peuple Sc aux Ioix fondamentales de la monarchie , puifqu'il a été fait par-un prifonnier, & arraché par la violence. Si toutefois vous perfiftez a rejetter de fideles fujets; fi les états généraux du royaume nous retranchent de leur affociation, il ne vous appartient plus de difpofer de nous : rendus 4 nous mêmes, nous adoprerons telle forme de gouvernement qu'il nous plaira, nous déclarons d'avance que nous n'obéirons jamais a des maïtres qui ne fcroient point de norre choix ». Les autres députés qui formoient 1'affemblée , joignirent leurs repréfentations a celles des Bourguignons , & fupplierent le roi de ne plus leur demander un coufentement qu'ils ne pouvoient lui accorder. Les députés de 1'empereur avoient été témoins de cette déclaration : Fran$ois les chargea d'en rendre compte a leur maitre, Sc de lui ofFrir deux millions d'écus d'or en échange du d: ché de Bourgogne, II ajouta que bien qu'on le follicitat de recommencer ^guerre, Sc qu'on lui eut déja offert des partis avantageux, il prér féreroit toujours de remplir fes engagemens, tant qu'on ne lui demanderoit que des chofes qui feroient en fon pouvoir.  Sous Franc ois I. nj i 517. ( iW^erdjy. ) Le 17 de feptembre , le roi Francois I ayant convoqué une aflembiée des plus utiles perfonnes des trois états de fon royaume, pour leur demander avis de ce qu'il devoit faire touchant la délivrance de fes enfans, protefta qu'il étoit prêt de retourner en prifon , comme il Favoir promis, fi on jugeoit qu'il y fut obligé , plutóc que de faire rien de préjudiciable a 1'état. Le viugt-feptieme du mois, chacun des trois ordres féparément répondit que fa perfonne appartenoit au royaume, non pas a lui; que la Bourgogne étoit membre de la couronne , Sc qu'il n'étoit qu'ufufruitier de 1'un Sc de 1'autre , qu'ainfi il n'en pouvoit pas difpofer. Au refte, ce qui étoit le vrai motif de cette alFemblé«, ils lui offrirent deux millions dor pour la rancou de fes deux fils, & Faffurerent que s'il en falloic venir a la gucrre , ils n'y épargneroitnt ni leurs biens ni leurs vies. Jfimblée des Notables a Paris. 1527. (M.fabbê Garnier. ) Le roiconvoqua, pour le i6novembre, unè affemblée de notables dans la graude falie du  110 E I A i f palais, & vint quelques jours auparavant fe leger au palais des rournelles. Le parlement, qui avoit enfin recouvré le procureur-général & les deux eonfeillers précédemment interdits lui envoya une députation folemnelle pour le cornPlimenter & Ie fupp!ier dVnorer la féance de fa prefenee. Ledit feigneur ótant fon bonnet de oeffus fa tere, les remereia bien fort, & pria la cour de faire , eomme de eoutume , bonne & ro.de jufl.ee, fans nul épargner ni favorifer, de quelque état & condition qu'ils fuffent. II d-t qu'il avo,c toujours eu intention que juftice ,.tb,enadmi"iftréei&q-efiI»on avoit bien fau par ei.devant, qu'il falleic encQre ^ raire, & encendoit ainfi : qu'il étoit délibéré vemr en ladire eour deux ou trois fois la fe»a,ne affifter aux plaidoieries & au cpnfeil, fcnendroitla main a faire exéeuter les arrêrs de la cour. Au jour & i riieure i„diqués pour Paffemblee, ü vint prendre féance fur fon fiége royal Afadroue,le duc de Vendóme,le prince de Navarre Je comte de S. Pol, le duc d'Aibanie, le duc de Longueville, le prince de Ia Rocheiur-Yon, & Louis , prince de Cleves. A fa ■gauche, Ie cardinal de Bourbon, évêque de Laon} Ie cardinal de Lorraine, évêque de Metz ;  sous Francois I. iVi le cardinal Duprat, archevêque de Sens. Sur un banc moins élevé, les quatre préfidens du parlement de Patis; les premiers préfidens de Touloufe , de Rouen , de Dijon , de Grenoble & de Bordeaux. Sur deux bancs paralleles , Pun a droite, Anne de Montmorency, grand maitre; Chabot, amiral; Robert Stuart d' Aubigny, capitaine de la garde Ecoffoife } Jacques de Genouilfac, dit Galiot, grand écuyer : 1'autre, a gauche, les archevêques de Lyon, de Bourges,; de Rouen ; les évêques de Paris, de Meaux , de Lifieux, d'Auxerre, du Puy, de Bazas, &c. Dans' le parquet inférieur} fix maïtres des requêtes, les eonfeillers du parlement de Paris, deux ou trois eonfeillers de.chacun des autres pariemens , & enfin le prévot des marchands 6c les échevins de Paris. Derrière eux, les gentilshommes de la maifon du roi, un grand nombra de fénéchaux ou baillis. La mere du roi ,p que fon fexe exciuoit de cette affemblée , vint fe placer dans une tribune , accompagnée du duc de Nevers , du vieux Guillaume de Montmorency, fon chevalier d'honneur, & d'une fuite nombreufe de dames. Lorfque tout le monde eut pris place , le cardinal chancelier dit : « levez la main , 6c jurez de ne rien révéler de ce que vous allez entendre w. Enfuite le roi  S4Ï E T A T S' prenant Ia parole , tint Ie difcours Auvaflt ï « L'afFaire qui nous affemble m'a paru d'une fi grande importance , que quoique tous ceux que j'ai confultés me repréfentalfent qu'elle n'étoit point de natute a être mife en délibération, qu'elle étoit purement du relTort de 1'autorifé , j'ai cru devoir vous Ia communiquer. II s'agit de prononcer fur Ie fort de votre roi, fur la fortune de tous les membres qui«compofent la monarchie. Je vais vous expofer ma conduite , mes malheurs , mes fautes peut-être. Vous qui êtes 1'élite des trois ordres de 1'état, fongez a ce que vous devez a la patrie, Sc donnez-moi Ie confeil que vous jugerez, dans votre confcience, le plus expédient pour le falut commun ». « Lorfqu'il plut au tout-pui/fant de m'appeüer au tröne, je trouvai le royaume chargé d'une dette de dix-huit cent mille livres , les troupes découragées, prefque toutes les pufances de 1'Europe liguées contre nous, & prêtes a inonder nos provinces : je crus devu r prévenir leurs delfeins. Je palTai les monc Sc allai les défier dans leurs foyers : une vicloire éclatante couronna notre audace ; Ie duché de Milan , ia feigneurie de Gênes furent ajoutés a nos provinces ; les négociations acheverent ce que ia  SötfS f RAJfCStS t. i*| .guerre avoit fi heureufement commencé, & la plupart de nos ennemis devinrent nos alliés; La paix duroit depuis ttois ans , lorfque Charle* d'Autriche, ébloui de Péclat de la couronne impériale, aéfavoua fes premiers engagemens ;. Sc alfuré des fecours du roi d'Angletetre & du pape, qu'il avoit détachés de notte aüiance ; m'envoya défier au milieu de mes états. Nos armes profpererent dans les paysbas, mais furent malheureufes en Italië : nous perdlmes 1'état de Milan. Le defir de réparer cette perte , le» prieres des Vénitiens, les feuls alliés qui nou» reftaiTent au-dela des monts , m'engagerent a envoyer une nouvelle armée en Italië : elle ne réulfit pas mieux que la première. Rcbuté de 1'appauvriffement de mon peuple, fur qui retomboient les frais de ces expéditions lointaines, je réfolus de me renfermer dans les anciennes limites du royaume , d'abandonner mes droits fur 1'kalie , ou du moins , d'attendre des cireonftances plus favorables pour les faire revivre. La fortune, obftinée a nous perfécuter, me fufcite bientöt un nouvel ennemi. Charles de Bourbon, que j'avois comblé d'honneurs & de biens, entreprit de me renverfer du trone: Etouffant le cri de la reconnoilfance Sc de j^honneur, brifant tous les liens qui devoient  i24 E T A T S 1'attacher a la patrie, il fema Ia féditlon & Ia révolte'dans les provinces. & pattagea d'avance, avec ,.os ennemis, les débris de la monarchie. Voyant fa trame découverte , & obligé de fuir, il reparut bientot devant Marfeilies, a la tcte d'une armee formidable. J'avois levé , a grands feais . puur ie combattre, des bandes nombreufes d'avanturiérs, de lanfqueners & de SuilTes : fa retraite precipitee rendoit toute cette dépenfe ïhutile. Je réfolus de le pourfuivre en Italië. , Ceux qui condamnent ce projet ignorenr, fans doute , que fi nous fufTions arrivés quatre jours plurot, nous n'aurions point trouvé d'ennemis a combattre , & que nous recouvrions 1'état de Milan fans effufion de fang. II eft aifé de blamer les malheureux. Tout ce que je puisdire, c'eft que fi mes fujets ont eu du mal, jen ai eu avec eux. On ne me reprochera pas de m'êrre fouftrait au danger. Ne pouvant, par mes efforts, arrêter Ia viétoire , j'ai fauvé I'honneur-j & Peïfonne, du moins, ne fe glorifiera d'avoir vu fuir le roi des Francois >>. « 1'rifonnièr en Italië , j'attendois ce qu'il plairoit au vainqueur d'ordonner de mon fort. On ne tarda pas 'a m'appotter de fa part des conditions , mais fi déshonorantes & fi préjudiciables , que je les rejettai avec indignation. Je  % ö 'v s Franco! s.' ï. 'ztf Je confidéra'i que je n'étois qu'un foible mortel > ïujer a tous les accidens de la natute, Sc qu'il aie convenoit pas que 1'étac, qui ne meurt jamais , que des millions d'hommes fuffent immolés a mon avantage perfonnel : je réfolus de confumer plutót le refte de mes jours dans une prifon. L'es agens de 1'Empereur, qui défefperoient de vaincre ma réfoluticn , s'aitacherent k me tromper. Ils me repréfenterenr que tant que ie ferois en Italië, les négociations palFeroienc par les mains de Bourbon , mon plus cruel ennemi 5 que ceux qui avoient befoin de feu alloient le chercher • que 1'empereur étoit un ptince clément, débonnaire & magnanime; que les gtands d'Efpagne qui formoient fon confeil > étoient fi renom-més par leur générofiré, qu'ils n'infpireroient a leur maitre que des fentimens dignes de fon rang; qu'une entrevue termineroit a Famiable tous les débats, & rameneroit Ja paix. Je les crus dautant plus facilement, que , jugeant des fentimens de 1'empereur par ceux que j'aurois eus a fa place; je ne pouvois m'imaginer qu'un vainqueur voulüt abufer de la confiance de fon prifonnier, Sc ques maïtre de diéter des Ioix, il fe refpecFat. affez peu pour recoutir a. d'indignes artifices. Je ne tardai pas 4 être défabufé. Une prifon plus rude que la Tornt X. P  226* E T A T S première m'attendoit en Efpagne. On demanda ma fceur, pour tranfiger, difoit-on, avec elle, mais en effet pour 1'arrêter; & fi mes malheur* ne m'euflenc rendu défiant, elle feroit reftée prifonniere avec moi». « Accablé de eet excès de mauvaife foi, voyant la négociation dans un état déploré, je fuccombai fous le poids du malheur j mes forces m'abandonnerent, & je vis, fans effroi, la mort s'approcher. Rendu a la vie, contre toute efpérance, je ne re9us ce don du ciel que pour en faire le facrifice a mon peuple : ne pouvant plus lui être utile, je ne voulus pas lui nuire. J'abdiquai la couronne. L'acFe fut apporté en France, Sc doit encore fe. retrouver ... Alors 1'amiral Chabot fe levant de fa place, tira eet acFe de fa poche, 6: le rnontra a raifemblée. « L'effet de eet acFe, qui fut notifié a Fempereur , fut de rendre ma prifon plus dure. Cependant ma mere, qui gouvernoit en mon abfence, me mandoit que ma préfence devenoit de jour en jour plus néceflaire; que je ne filfe aucune difficulté de figner toutes les conditions qu'on me préfenteroit, paree que les engagemens d'un prifonnier ne font point obligatoires. Et fur mon refus, elle autorifa les plénipotentiaires a conclure. Le traité de Madrid fut rédigc  SOUS t R. A N C O I S I. 2.27 aux condirions que perfonne de vous n'ignore; ' Quoique je fuffe convaincu que la prifon annul* lbit rous les fermens qu'on peuvoir exiger de moi, je me défendis encore de le figner & de le jurer, & ne me rendis enfin, qu'après avoic fait rédiger un ade de proteftation. Les F.fpa« gnols eux mêmes fonc fi bien perfuadés de la nullité de ce premier engagament , qu'ils m'ont envoyé deux fois des ambaffadeurs pour me demanier une ratification que je leur ai conf-, tamment refufée ». « Depuis ce tems , le ciel , qui nous avoit éprouvés par de longues difgraces , s'eft adouci a notre égard ; les puifiances d'iralie ont époufé notre querelle ; le roi d'Angleterre a lié fes intéréts aux nbtres, 8c concerté avec moi toutes fes démarches. De deux ennemis qui nous reftoient encore , le plus implacable a péri fous les murs de Rome; 1'autre, après bien des rergiverfations, parair enfin dFpofé a fe contenter d'un dédornmagement en argent pour fes ptétentions fur la Bourgogne. Nous lui envoyons, le roi d'Angleterre 8c moi, de nouveaux ambaffadeurs , pour lui porter nos dernieres propofitions. S'il les accepte , il faut tenir prêce la fomme dont on conviendra ; s'il les rejerte, il &ut poufier vigoureufement la guerre en Italië, P %  128 E T A T S & la porter en mêrne-tems dans les pays-bas ; oü il eft facile de 1'endommager. J'ai fait calculer Ia recette & Ja dépenfe des deniers publics. La feule guerre d'Italie nous coüte trois cent cinquante mille livres par mois, & emporte par conféquent plus de la moitié du revenu de 1'étac II faut cependant entretenir des garnifons fur toutes nos frontieres, une flette dans la méditerranée, des ambaffadeurs dans toutes les cours de 1'Europe , payer les gages des officiers prépofés i 1'adminiftration de la juftice, ou chargés d'auttes fondions publiques. Les revenus ordinaires , avec quelque économie qu'ils foient adminiftrés ne fuffifent déjA pas pour tous ces objets,& ne peuvent par conféquent entrer en ügne de compte pour ia guerre que nous nous propofons de porter dans les pays-bas. Si, pour allégc-r le fatdeau , nous prenons Je parti d'affoiblir 1'armée d'ftalie , nous coutons rifque d'échouer de tous cotés , & de nous confumer en pure perte. Telle eft la fituation de nos affaires. Voici maintenant fur quoi vous avez a. délibérer ». * Ou 1'empereur acceptera nos dernieres offres; & dans ce cas, il faut trouver deux millions d'écus d'er , dont douze cent mille payables fur le champ, & lss huit cent mille autres a diffé-  sous Francois I. 129 rens termes ; ou il les rejettera , Sc alors il faut des fonds extraordinaires pour poulfer la guerre en Italië, Sc la porter dans les pays-bas. Si vous jugez que 1'état ne puiffe fubvenir a cette dépenfe , il faut ou rendre la Bourgogne, ou trouver bon que je retoume me conftituer prifonnier si Madrid. Car de croire que les chofes puiflent refter dans 1'état oü elles font, Sc que j'achette ma liberté au prix de celle de mes enfans, qui font ceux de la chofe publique, ce feroit me faire outrage. D'ailleurs, quel feroit le fruit de cette barbare politique ? Je puis moutir demain , Sc au lieu d'un roi , vous en auriez deux a\ racheter. Si par les arrangemens qui peuvent être pris, ma préfence cefle d'être néceflaire, je pars pour Madrid. Ecartez de vos délibérations tout ce qui me touche perfonnellement, Sc ne confultez que 1'intérêt de nocre commune patrie, a qui nous devons tous également, lorfque fes befoins 1'exigent, le facrifice de notre vie Sc de notre liberté ». Lorfque le roi eur ceffé de parler , le cardinal de Bourbon, pour le clergé, le duc de Vendóme pour la nobleffe , Sc le préfident de Selve pour le tiers-état, le remercierent de 1'amour qu'il portoit a fon peuple , Sc de 1'honneur qu'il leur faifoit, en leur communiquant 'avec tant de  *30 £ T A T s franchife, fes deiïeins , 1'état de fes affaires, & les fecrecs les plus importans de 1'adminiftration. Ils lui demanderent fi fon plailir étoit qu'ils délibcraffent en commun , ou qu'ils fe retuaffent dans des chambres particuiietes. » II eft plus a propos, répondit Ie roi, que, conformément a ce qui fe pratique dans les afiemblees d'états, chaque ordre délibere en particulier. Mais avant toute délibérarion , j'exige que chacun de vous prenne leéture de 1'acle d'abdication, qu'on vous a feulement montré; c'eft le feul moyen que j'aie imaginé pour fortir d'embarras : fi quelqu'un en trouve un meilleur, qu il le- propofe ». Après quelques jours de délibérarion, Ie roi & les députés des trois ordres ayant repris leurs paces , le cardinal de Bourbon fe leva, & dit: « Sire , la foible portion de 1'églife Gailicane' lel affemblée a délibéré fur les objets dont il a plu a.votre majefté de lui faire part, & elle a conclu, a I'unanimité des voix, que dans un befoin auffi preïïant, & ou il s'agit du falut de ^ecat, elle pouvoit faintement & juftement fans attendre la permiffion du faint fiége , depofer a vos pieds une partie des biens qu'elle «ent de Ia übéralité de vos glotieux prédéceffeurs; elle vous offre.d titre de don gratuit,  sous Francois I, 131 h fomme de treize cent mille livres , dont elle vous prie humblement de vouloir bien vous contenter. Pleine de confiance en vos bontes , elle ofe vous demander trois chofes; la première, de prendre en confidération 1'état déplotable oü eft réduit le pere commun des fideles, Sc comme fils ainé de 1'églife, de vouloir bien 1'arracher des mains de fes barbares perfécuteurs ; la ieconde, d'exterminer une feéte impie , qui du fond de 1'Allemagne, oü elle a pris naiffance, commence k fe répandre parmi nous, & menace 1'églife & 1'état d'une entiere fubverfion ; U troifieme, de conferver, a 1'exemple de vos glorieux prédécefteurs , les droits 5c privileges, de 1'églife Gailicane ». Le duc de Vendbme fe leva, & dit : Jl ne refte plus k examiner que le troifieme, qui confifte k obüger 1'empereur de fe contenter d'une fomme de deux millicns d'écus d'or, pour la ran?on des fils de France. Ce nom feul indique afiez nos obligations k leur égard ; ils font la portion la plus précieufe de notre héritage, le gage de. la félicité publique, Pefpérance & 1'appui de la patrie. C'eft. de cette mere commune que nous tenons notre exiftence, nos biens, notre rang, nos privileges, en nous en conférantl'ufage, elle n'a point eu intention quenous nous en prévalulïions i fon préjudice; elle s'en eft réfervé Ja propriété, & elle a le droit  S O V S F R A N C Ö I S I. Ï35 d'en dépouiller les enfans ingrats , qui la né•ligeroient dans fes befoins. Les membres de votre parlement de Paris , fire , les députés descours fouveraines de votre royaume, détefteroient toutes diftindions qui les exempteroient de contribuer a une dette facrée. lis demandenc d'être taxés comme le refte des citoyens , & ils vous offrent dès ce moment, leurs biens , leurs corps 6c leur vie ». Le prévöt Sc les échevins de Paris a genoux, ajouterent k ce que venoit de dire le premier préfident, que les fils de France leur appartenoient k un titre plus fpécial qu'a tout le refte du royaume , puifqu'üs étoient enfans de Paris , ,qne fes fideles bourgeois vouloient contribuer a leur rancon dans une proportion plus forte que les autres villes du royaume; qu'ils fupplioient fa majefté de difpoier abfolument de leurs biens 5c de leur vie , 6c d'avoir toujours pour recommandce fa bonne ville de Paris. • Jvïagnanimes Francois 1 s'écria le roi; comment pourai-je jamais payer dignement tant d'amout ? C'étoit k moi a vous prier de m'affxfter dans mes befoins ; c'eft vous qui me conjurea d'accepter & de prendre. Meffieurs du clergé , je recois votre don , 6c je confervera» vos privileges , avec autant Sc plus de foin  qu aucun de mes prédéceffeurs. C'eft princina^ Wnt poar titer le faint pere des mains de ^perfecuteurs,que j'ai faic pafler une nou_ veile armee en Italië : je travaiilerai de coa_ eert avec vous, a conferver dans toute fa pu-re le depót facré de la religion, & a prefer,er fym du poifon de 1'héréfie Luthe'rienne, comme mp oblige mon titre de roi «en. Princes &feign,urSj vos ^ ies mrens & ceux de mes enfans , car je fuis »c gennlhoa.me.&non pas roi, & mes en'ans nont point de plus beau titre que celui de chef de la nobleffe. Meffieurs de la juftice & vous tous mes fideles fujets , j'aurois fait «ec jote le facnfice de ma liberté d mon peuple , *«I meeree de notre commune patrie : mais ' PUllqUe V0US ma préfence néceftaire, je -vrat au milieu de vous. Car, n ayant point ece pnfonnrerfur ma parole , & n'ayant poh. donne ma foi, les engagemens qu'on m'a ar«ches font nuls, & je puis ,es e f donner la moindre atteinte a mon honneur, Ie M de tous les biens qu'il ne feroit pas en mon pouvoir de vous facrifier. Quant d Ia ceffion de la Bourgogne, fi l'on me demandoit mon avis je répondrois, comme gentilhomme, quil faudroit me paffer cent fois fur le ventre  sous F-a. a n o o i s I. 237 ivant que d'obtenir mon confentemenc. Jugez de ce que j'en dois penfer comme roi, puifque'votre généreufe amitié a paflé mon artente , & qu'il ne me refte plus rien a m'expofer a votre tour , ce que je puis faire, tant pour votre fatisfaction particuliere que pour 1'uttlité générale du royaume. Quelque envie que j'aie de mériter votre amour Sc votre eftime, dans une adminiftration auffi étendue, bien que des chofes échappent a mes regards, ne craignez point de me donner des avertiffemens , & foyez sürs que je les prendrai toujours en bonne part». ASSEMBLÉE DE 1529, rA t occafion du dèfi que francais premier & Charles quint fe firent réciproquement enfuitt de la réfoludon prife dans tJiffemblèt des Notables , tenue a Paris, l'an 15 27. ( Voye\ M. Cabbè Garnier.) Francois , accompagné des princes, des ducs; des ambaffadeurs étrangers, Sc de tous les officiers de fa maifon , fe rendit dans la grande falie du palais , y manda -Granvelle, a qui il avoit rendu la liberté , Sc lui dit : « Monfieur 1'ambaffadeur , il m'a déplu Sc il me déplaït encore de la rigueur dont j'ai été forcé. d'ufer  £ T A T S i votre égard, je ne m'y fuis porté que pout préferver les miens dés mauvais traitemens d'un prince qui foule aux pieds le droit des gens, je dois un témoignage public a votre intégrité, a vos vertus; en défendanr, comme votre caractere vous y obligeoit, les intéréts de votre maitre , vous ne m'avez donné aucun motif perfonnel de plainte, & il n'a pas tenu a vous que la paix ne fe foit faire. Votre maïtre voug dédommagera fans doute du défagrément paffager qu'il m'a forcé de vous donner; & Ci je puis contribuer. en quelque chofe a votre fatisfaóHon, demandez le moi avec confiance. J'ai de mon 'cèté un fervice i vous demander; dans la réponfe que 1'empereur votre maitre a faite aGuyenne, mon héraut, & a Calvimont, mon ambaffadeur; il a dit des chofes qui bleffent mon honneur , & que je ne puis paffer fous filence. Chargez vous'donc de eet écrit, que vous lui remettrez en main propre ». Granvelle qui peut-être favoit déja, ou qui' devinoit aifément ce qu'il contenoit, s'excufa for ce qu'ayant recu fes lettres de rappel , il n'avoit plus aucun caraclrere public. « Puifque vous refufez de vous en charger, continua Ie roi, au moins ne me refuferez-vous pas-d'en entendre Ia leéture, & d'ob-  soïs Frakcöis I. 155 tenir de votre roaïtre un fauf conduit pour un héraut qui vous accompagnera i votre rerour & le lui remettra ». Alors le roi donna ordre i Robertet d'eu faire leéture al'aflemblée. Nous , Francois, par la grace de Dieu, roi de France, feigneur de Gènes ; a vous Charles , par la même grace, élu empereur, roi des Efpagnes.... Vous faifant entendre que fi nous voulez charger que jamais ayons fait chofe qu'un gentilhomme aimant fon honneur ne doive faire; nous difons que vous avez menti; & qu'autanc de fois que vous le direz,vous mentirez, étant délibéré de défendre notre honneur jufqu'au bout de notre vie. Proteftant que fi après cette déclaration, en autres lieux vous écrivez de telles parolés qui foient contre notre honneur , que la honte du délai du combat en fera votre, vu que venant audit combat , c'eft la fin de toutes écritures. « Monfieur 1'ambaffadeur, ajouta le roi, votre maitre m'a contraint d'ufer de ces expreftions : dites-lui, je vous prie, qu'après ce qui vient de fe paffer entre nous , je mattend, qu'il répondra en gentilhomme , & non en praticien ; s'il continue de faire les écritures , il faudra bien que j'oppofe a fon chancelier un homme de fa profeflion, & plus homme de bien que lui ».  *4a t,„, U fauf-conduir qae |e roi demjnJ ; j pere», dans une „ombreufe afTemblée de g«nSdEfpagne> &ice pereur f 3%.„ ftmpleIMm Ie d,an,P & " d-ornbar; Guvenn,, felon £ "J En fa.fant a„emion a ^ que pre ce _ , J • S" touchat dé pi "ptL°'lV° r i , P P es 1 "onneur, lui Def0,f !»< la confcenee * b ' 'X' vanrage. Si Pon fe rapp£,Ie le t[alt ^ »vonS rappel, dVès PllilW„ J ™' a condune des deux f„nVerai„s. Fta„ . nre lemenr avide de dangers * brave 1" >' voubir bien fe barrre; J3j avoir déclar^ f, r i u ' • s Pmt, oud n'avnir poi„t dn„„é fa fo a «pi.ca.,o„s ou, auroienr laide d«s doures Au con.ra.re PempeKÜ[ , ~ A. ?W« fes f0„aioK £n C£|les mais  8 Ö U S f HA N C O 'l S ï. 24ÏI ptiU qui, jaloux de la répatation de fon rival , & fayant furpris dans un moment de foibleffe, vouloir au moins lui faire perdre le titre de chevalier fans peur & fans reproche , infiftoic •fur les éclairciffemens, bien aiiüré d'ailleurs, que quelque démonftration qu'il fit de vouloir fe battre,fes fujets ne lui permettroient jamais, & qu'il trouveroit au befoin mille moyens de fe dégager fans compromettre fa réputation-, au lieu de remettre fur le champ a Guyenne 1'affurance du champ , que lui demandoit fon adverfaire, rce qui auroit terminé toutes les écritures , il dit qu'il feroit porter fa réponfe pan tm héraut. Bourgogne, c'eft le hom de ce héraut , fe rendit a Fontarabie, d'oü il écrivit a Saint Bonnet, gouverneur de Bayon'ne , pour obtenir un fauf-conduir. Saint - Bonnet , qui avait eu le tems dè confulter la cour , répondit : Le roi ne veut plus recevoir de nouvelles écritures; fi vous apportez 1'affurance duehamp> fans autre 'explication , je vous £erai palier ea toute sureté jufqu'a lui. Le héraut répondit qu'il apportoit 1'afTurancê du champ, avec quelques. autres pie^es toutes relatives au combat; & fur cette affurance, il fut amené a Paris;,' Francois avoit fait préparèr pour lui donnet audience , la grande falie du palais, öü il f* Tornt X, Q.  241 E T A T 5 rendit accompagné du roi de Navarre, fon beaüfrere, du duc de Vendóme, d;) Fiercule d'Efte, nouveau duc de Charrres, par fon mariage avec madame Renée, des ducs d'Albanie Sc de Longuevilie , des cardmaux Sc évêques de France, Sc des ambalFadears de prefque rous les fouverains de PEurope. Avant qu'on introduisit le héraut, le roi expliqua 1'origine Sc les progrès de la querelle; il diftiugua le traité de Madrid, qui étoit nul, comme extorqué par la violence , d'avec le prérendu manquemenr de foi que lui reprochoit 1'empereur j il foutinc toujours qu'il n'avoit point donné fa foi , Sc qu'il «'avoic même pu la donner, puifqu'il n'avoit pas été un feul ihftant prifonnier fur fa parole. II fit lire la lettre que 1'empereur avoir écrite a Calvimórit , Ja réponfe en forme de cartel qu'il avoit cru devoir y faire. «Si j'étois capabie , dit-i!, de diflimuler un pareil outrage , au défaüt des vivans , les portraits de mes glorieux prédéceffeurs , qui ornent cette falie éleveroient la voix pour défavouer un homme fi peu digne de tenir ici leur place. Cette affaire d'honneur doit être vuidée* par les armes & non par des écritures. Mon héraut a préfenté le carrel fans explicarion Sc fans harangue; celui de 1'empereur doit en üfer de  is 6 u s fRAfccórs I. 145» ïa même maniere ; je ne lui ai fait expédiet un fauf-conduit qu'a cette condition. S'il m'apporte la füreté du champ, qu'il foit le bienvenu, j'aurai le choix des armès ; s'il nous apporte un plaidoyer, je ne prétends pas lui donner audience : qu'on le fa (Te entrer ». » Dès qu'il fe fut avancé dans la falie , &£ avant qu'il eut entiérement fini fa treifiema révérence : Héraut , lui dit le roi, m'apportestu la füreté du champ ? >v Sire , répondit Bourgogne , permettez-moi de faire mon office » i «Commence , dit le roi, par me remettre 1'affurance du champ, & je te permettrai de dire enfuue tout ce que tu voudras », Bourgogne , fans fe déconcerter , commenccut, ainfi fa harangue : La facree majefté •, mais le roi lui cqu* pant la parole : Je t'ai déja dit de me remettre 1'affurance du champ , & qu'cnfutte tu haranguerois a ton aifej danne la-moi, car c'eft a\ cette condition feule , & fous cette réferve , que tu as obtenu un fauf conduit; & je ne puis croire que ton maltre ait pouffé i'hypocrifie & la mauvaife foi jufqu'a t'envoyer fans cette patente ». Non, fire, mon maicre n'ufe point d'hypocrifie , & s'il yous plait de m'enrendre jufqu'au bout, vous verrez que j'rrpportg de quoi vous contentet. * Produis donc cette Q *  244 £ T A T s patente, donne-Ia-moi te dis-je» ? BourgogJ répondit qu'il ne pouvoit s'écarter de la' maX che qui lui avoit été tracée ; qu'il avoit ordre de fon maïtre de ne remettre cette aiTurance qu'après avoir expliqué de vive voix, les chofes dont o,, pavoit chargé. «Ton man-re, répliqua Je ror , n'a point d'ordre è donner ici ; les chofes en font au point qu'il n'eft plus befoin de paroles : d'ailieurs je n'ai rien d.démêler avec toi, je n'ai k faire qn'avec 1'empereur, & c'eft les armes k la main que nous devons vuider la qüerélte. Qu'il me foumiffe 1'afTurance du champ, je te la demande pour la derniere fois». Sire, répondit le héraut, je „e puls remplir mon office fans votre permiilion; fi VOus refufez d'entendre ce c,ue je fuis xhargé de vous dire de la part de mon maïtre, frites-moi donner aéte de votre refus , & je me retire. Je ne m> oppofe pflS, dit le roi ; qu'on Ie lui doriné. Et ainfi finit 1'alTemblée. nroch.vcrÈ>al, contenant la défenfe du Roi tresckrétien, contre Télü en Empereur, délayar.t le combat d'emr'eux. Extrait d'un Auteur contemporain, c'ité par Daniël. fin Ja grande falie du palais royal de Paris, ir le commandemcnt du roi, a été drelfé un  sous F r a k c o i s I. 145 tribunal au devant de la table de marbfe. de la huuteur de quinae marches , auquel ledu fel|heui s'eft trouvé le dixiemé jour de feptembre , . Fan rail cinq cent vingt Kuit, pour ouïr parfer le béraut d'armës, que 1'on difóit 1'élu en empereur lui ènvoyer. Ft étoit ledit feigneur accornpagné en la maniere qui s'enfuit. Premierement, êicii i fa main dexcre . affis dans une chaué , très-haut, très-excetlenr & très-puilfanr prince , le roi de Navarre, duc d'Alencon & de Berry , comte de Foix & d'Armagnac, &c. En ce même cbté, étoient aifis fur un banc, monfeigneur le duc de Vendomois ,'pair de France , lieutenantgénéral & gouverneur de Picardie ; dom Hercules d'Efte, fils aïné du duc de Ferrave, duc de Chartrés Sc de Montargis • ie duc d'Albanië, régent Sc gouverneur du royaume d'Ecofie ; le duc d^ Lodgueville , grand dhambeilan : prés lefquels, a un autre banc , étoient affis les préfidens & eonfeillers de la cour de parlement j & derrière eux, plufieurs gèntilshommes & gens de lettres. De Pautre coté , étoient alFis en chaires féparées , melfeigneurs les révérendiffimes , monfeigneur le cardinal Salviad, légat de notre faint pere le pape, & du faint fiége apoftolique; monfeigneur le cardinal de Bourbon , évêque & duc ie Labn, pair de France j monfeigneur le car- Q 5  E T A Itrt^'f^^^'' »•«<* t"«r Ie de Lomi„ ' ; Me(reignws m amban. ^ - £ t" a A"8,e,erre' ^fenfeur de & . , ' ««-w»» é. ,rès.ha„t, ttfs.£ïccli;„' £ ambarr,Je„ du ttès.i,!uftre duc de M önes , J arnbafïadeur de la feigneurie de ce.EnBn ^ banc foient, l\:vêq:i ^.nrpnnce, le roi de Hongrie; Pév.pue d c ^ Langre. , pair de France ; lVvêque Jmte de Noyon parr de France ; Parchevêcue de Lyon ^ de Macon,de Lindes. de Va bes T r maUreS Je» & confeiller d gran confeil Aux deux ^ de ^ f *** ^ & mar-^I ^ France ; & ,e feigneur de Bryon „m^i j v 'e eénéral & „ We' ',e"«'»™- $eneral & gouverneur de Bourgogne. Et derrière  s 0 „ s F n A K 9 o T s I. *47 Mire cha.re , étoient plufieurs cheval.ers , 7. • c'eft a favoir , le comte de Laval , g7C le comte de Brienne, Ligny & Rouhy ; ccofToiie ; lecom.c u "Frarce. le fei,neur de Fleuranges , ^arechal de franc ° . o ff„u • le feieneur de Genou.ac, le feigneur de Ruffey , Ie leignt _ f - ' «, maitre de 'artillerie de l ïance , grand ecuyet & mau-e ae Loys, monfeigneur de Clevese o ■u 5c le comte de "Uarpy. üc Humieres, « ie p étoient, le comte d'Etampes. *m*mj£ * avec lui plufieurs gentbsnommes de la f Leneur,'entte lefquels etoipnt, e bre 4^W^c. kfei rdeGuymenéi comte deTancarvUe c 0 ( le fils du comte de Roufiy, le n * , - 1« feumeur de la Kocuepc. , de Fleuranges, ^ eaux & feigneur Douarty.grana ma - r <\o- 1p feicneur du Lude , ie ieiB S| ^^eVmebon.tóllUeRoue»; , J. Verets i & ootte les nw.tres dho- S Jes deux cents gentilshommes de »  «aa bas de a fa)!* A i lans» ««bar Jevoit jTO e.n • Po„ *'W-.,,..,t„rtil , * uier de ouelaue.: fi/}.; - /• . 0 anaire,  s o i s Franco is I. 249? 'de fang, Sc autres maux qui en adviennent. A bien voulu , ledit feigneur , que cela fut connu par toute la chrétienneté, afin que chaciir* puiffe juger a la vérité dont procédé le mal Sc la longueur. D'autre part , auffi a fait. ladite aflemblce , pour remontrer qu'il n'a légiérement entrepris un tel a&e ; car le droit eft de fa part;, Sc quand eut fait autrement , fon honneur eut été grandement bleffé , ce que les feigneurs de fon fang, Sc autres fes fujets du royaume» n'euffent trouvé bon. Et fachant la caufe du combat. Sz le droit d'icelui feigneur, fe comporteront comme bons loyaux fujets doivent faire, efpérant , avec Paide de Dieu, y aller; de forte que clairement fe verra fi le droit eft de fon cöté , 5c que. contre vérité ü a été accufé d'être. infraéteur de fa foi. Les rois , fes prédéceneurs Sc aucêtres , dont. les effigies font en taille afSgées par ordre en icelle falie, qui ont en leur tems fucceffivement fait aéfces glo-. rieux, Sc augmenté grandement leur royaume , eftimeroient ledit feigneur n'être capable d'être leur fucceffeur , s'il foufi'roit, contre fon honneur , une telle note lui être par 1'élu en empereur imputée, & qu'il ne défendit de fa perfonne fon honneur , ainfi & par la forme Sc maniere accoutumées. E: pour entendre k ma,-  M° E T A T 3 tiere , faut préfuppofer qu'après qüe par fortune de guerre, ledit feigneur roi fut pris de fes ennemis devant Paris, a nul defquels ne bailla fa foi, penfant que feroit par la magnanimité de 1'élu en empereur, mieux traité en Efpagne, autour de lui qu'ailleurs , confentit y. êtremené; ce que fut fait fur fes galeres, qu'il fit armer a ces fins. Et 'lui arrivé en Efpagne, fut mis au chateau da Madrid , oü a été nuit Sc jour gardé par gros nombre de hacquebuciers , Sc autres qui lui e-nnuyoit & fachoit grandement; tellement que pour la détrefTe oü il étoit, devint malade jufqu'a la mort. L'élu en empereur le vifita, Sc depuis, fur fa guérifon, fe traita un accord entre les députés d'icelui é!u en empereur , & les ambafïadeurs que madame mere dudit feigneur y avoit envoyés a ces fins, par vertu du pouvoir, quand il partit d'icelui pour paffer par les monts , par lequel elle ne pouvoit obliger la perfonne dudit feigneur , même que par 1'infpeétion d'icelui traité. Chacun évidemment pourra connoitre qu'il efr déraifonnable, tant en paroles qu'en effet, & violentement extorqué ; & que jamais prince qui eut été en liberté , n'eut paffé un tel traité, ne pour fa délivrance premis telle ranrjon qne celle qui fut promife. Lequel traité toutefois  SOUS FllANCOIS I. 45? firent jurer audit feigneur qui étoit prifonnier, contre les proteftacions que par plufieurs fois il avoit publiquement faites , lui étant encore bien malade , en danger de récidivation Sc de la mort. Après lequel traité ledit feigneur , tenu toujours fous la garde des deffusdits hors la liberté, fut mis en chemin pour retourner en France , fur les otages de melfeigneurs fes enfans; auquel fut dit par plufieurs fois, qu'après qu'il feroit en France en fa liberté, fallok qu'il baillat fa foi, fachant Sc connoiflant ce qu'il avoit fait Sc premis en Efpaigne étoit nul, Sc fi n'eft records ledit feigneur, que ledit élu en empereur lui dit jamais que s'il n'accompliffoit le contenu audit traité, le tiendroit infraöeur de foi; & ores que Iefdites paroles lui auroient été dites, ledit feigneur n'étoit en fa liberté pour lui répondre aucune chofe , Sc n'y auroit donné fon confentement. Par ainfi, au cas de préfent, il y a deux chofes a confidérer ; 1'une, le traité extorqué violentement , fait par ceux qui n'avoient pouvoir d'obliger fa perfonne , Sc lequel, quant au demeurant, a été accompli par madame me're dudit feigneur , qui a baille otiges mefleigneurs les enfans dudit feigneur; Fautre eft la prétendue foi dudit feigneur , fur laquelle ne peuvent faire fondement, devant  E T A T S qu'au moyen d'icelle ne Pont mis en liberté". Or, en matiere de guerre, la foi d'un prifonmer, fi celui k qui eüe a été baülée ne Je en entiere liberté ; n'a aucun effet d'obliger; de forte que s'il évade de ceux qui le gardenr*' «e peut être redargué de foi enfreinte. Et par ainfi , atcendu qu'ils ont toujours tenu ledit feigneur fous groffe garde , Sc n'ont fait fondement fur fa foi , ne Ia peuvent accufer> car elle en rien ne 1'oblige : auffi par plufieurs fois les miniftres dudit élu en empereur ont dit & confelfé que la foi qu'ils prérendo.ent avoir dudit feigneur étoit nulle, paree qu'il n'étoit en liberté, & que Ia oü il fe~ toit, étoit néceffiaire que de nouveau leur baillat la foi. Ce que ledit feigneur ne fit , ains feulement baillac melfeigneurs fes enfans en otages, qm étoit une autre grofie & grande fujétion, pour moncrer qu'ils ne s'arrêroient a fa foi,&nelemettoient en pleine liberté fur icelle. Auffi faut préfuppofer qu'en matiere d'honnear & combat y a aflaülant Sc défendeur, t'aiTailIanc baille la füreté du champ , Sc le défendeur provoqué & affailli baille les armes. Or, avertit ledit feigneur roi, tant par fes ambaffiadeurs, heraut darmes qu'autres , que ledit élu en «mpereur le blamoic d'avoir rompu fa f0i, &  % O V s h A J! C O I S ï. 25t avoit de grofles paroles touchant grandement fon honneur , ainfi qu'il fe pourra voir par lettres miffives qu'icelui élu en empereur a écrites * maïtre Jean de Calvimont, préfidenc de Bordeaux, ambaffadeur dudit feigneur en la cour d'icelui élu en empereur, lefquelles ledit feigneur fit lire devant toute 1'affiftance , &C dont la teneur s'enfuit : « Monfieur 1'ambaffadeur, j'ai vu les lettres que m'avez écrites , touchant les paroles que vous dis en Grenade. Et auffi ai vu les extraits de votre procésverbal , par lefquels j'entends très-bien que ne voulez avoir fouvenance de ce qu'alors vous dis, pour en avertir le roi de France votre maïtre, afin que vous redie lefdites paroles pour fatisfaire a votre defir: c'eft ce que je vous dis alors , après plufieurs propos qui n'étoient de grande fubftance , pourquoi n'eft befoin les répéter , que ledit roi votre maïtre avoir fait lachement & méchamment de non m'avoir gardée la foi que j'ai de lui, felon le traité de Madrid, & que s'il vouloit dire du contraire , je lui maintiendrois de ma perfonne a la fienne. Voila les propres paroles fubftancielles que je dis du roi votre maïtre a Grenade , & je crois que ce font celles que tant defirez favoir : car ce font les mêmes que je dis au rei votre maïtre en Madrid, que je le  a54 EUTs n«adroi,poariache & méchanr, s'il me failloic de ia foi que j ai de lui i& en les difant, je lui garde mieux ce que je lui ai premis, qu'il U9 fait a moi :je les vous écris volontleis fignées deimmain,afinqued'icie2cnavantvout ni dudit Madrid ,ledix-huitiemejour du mois de Mars ian mil cinq cents quatre . vingt-huit. Ainfi figne, Charles, & comrefignéLalemand: &ala refcnption defdites lettres eft écrit • A monfeigneur, ambaffadeur du roi de France maure Jean de Calvimont, chevaher, fecond prefident de Bordeaux, étant i préfent a Pofa en Caftilie. Ft le dixieme jour après la date dicelles xertres en pleine affemblée & afliftance comme celle qui étoit lots préfent, après avoir ooi 1 ambaffadeur dudi: élu en empereur & qu'il print congé de retourner par d.vers fon «laitre, & qu'on tenoit pour affèure* qu'icelui elu en empereur, avoir affailli & biamé ledit roi de foi non gardée pour la confervation de fon honneur & pour foutenir ia .érité, auroit ledit feigneur roi fait rép01.fe par écth a^dic elu en empereur, figné de fa main , laquelle , fait lire en icelle affiftance de Ia teneur qui «enfu,c:NousFranSois par la grace de Dien toi de France , feigneur de Geties, &c. A neus  s © V S ? R A K C O I S I. *$$ Charles par la même grace élu en empereur des Romains & roi des Efpagnes , faifons favoir que nous écans avertis qu'en toutes les réponfes qu'avez faices a nos ambaffadenrs Sc hérauts envoyés devers vous pour le bien de la paix , vous voulantfans raifon excufer, nous avez accafé en difant qu'avez notre foi , & que fur icelle , ou notte promeffe , nous en étions allés & départis de vos mains & de votre puilfance. Pour défendre notre honneur , lequel en ce cas feroit contre notre honneur trop chargé, avons. bien voulu vous envoyer ce cartel, par lequel , encore que tout homme gardé ne puiffe avoir obligation de. foi , &C que cela ncms fut excufe affez fuffifante: ce nonobftant, voulant fatisfaire a un chacun & a notre honneur, lequel nous avons bien voulu garder & garderons , fi Dieu plaït jufques a la mort : vous fat* fant entendre que fi vous nous avez voulu charger, non pas de notredite foi & délivrance feulement , mais que jamais, nous ayons fait chofe qu'un gentilhomme aimant, fon honneur ne doive fairenous difons que vous avez mentï par la gorge , & qu autant de fois que vous le direz vous mentirez, étant délibéré de défendre notre honneur jufqu'au dernier bout de notre vie. Pourquoi puifque ( comme dit eft ) vous  E T A T s nous avez voulu contre votre vérité , doréfM* vant ne nous efcrivez aucune chofe , mais „ou* aflurez le champ, & nous vous porterons les ar* mes : proreftant que fi après cette déclararion en autres lieux vous écrivez ou dites paroles qui ioient contre notre honneur, que la honte' du délai du combat en fera vötre, vu que venant audit combat , c'eft la fin de routes les écrirures. Fait en notre bonne ville Sc cité de Paris levingt-huicieme jours de Mars Pan mil cinq cent vmgt-feptavantPaques. Ainfi figné , Fran* cois: lequel fut envoyépar un héraut darmes en Efpagrte , qui fans autre parole ni conteftation le mie en la préfence d'une grolte alfemblce de gens entre les mains dudit élu en empereur, Si a demandé depuis icelui élu en empereur, u„ fauf-conduit audit feigneur, pour lui envoyer un héraut, lequel fauf-conduit lui aété limiré pour aPporter la süreté du champ, Sc non autrement; & d'autant que ledit fei» gneur defire, comme dit eft ci-deflus, cetté matiere prendre brieve fin Sc exoédition, nour le foulagement de la chrétientc , ne veut & n'êntenda. entrer en paroles, ni autre conteftation qui poürroient tendre a déguifer & prolonger PafFaire. Et d'autant que ledit élu en empereur a fait fon accufatioa , & ledit feigneur  sous Francois I. 157 gneur roi baiilé fes défenfes , ne refte plus que le camp dont lelu en empereur doit fournir, & ledit feigneur les aimes. Et par ainfi ledit héraut ne baille la patente authentique pour la süreté du champ , & a obfetver Ie contenu en fon fauf conduit , ledit feigneur n'entend lui donner audience. Et ce fait, a commandé , ledit feigneur , qu'on fit venir pardevers lui ledit héraut. Ce qui a été fait, & a comparudevant ledit feigneur affublé de fa cotte d'armes j auquel héraut dudit élu en empereur, le roi a dit : héraut, portes-tu la süreté du champ telle qu'un alFailleur, comme eft ton maïtre , doit bailler a un défendeur , tel comme je fuis } Le héraut lui a dit : Sire, il vous plaira me donner congé de faire mon office. Alors, le roi lui dit : « Baille-moi la patente du champ, 5c je te donnerai congé de dire après tout ce que tu voudras de la part de ton maïtre. Le héraut comnaence a dire : La très-facrée majefté.... Sur lequel mot, le roi lui a dit de rechef; Montte-moi la patente du champ, car je penfe que Félu en empereur, foit qu'il foit gentil prince, ou le doive être, qu'il n'auroit point voulu ufer de fi grande hypocrilie , que de t'envoyer fans ladite füreté du champ, vu ce que je lui ai mande j &c mfli tu fais bien que Tornt X, R  *58 E T A T S ton fauf-conduit contient que tu portes ladite füreté. Ledit héraut a répondu qu'il croyoic porter chofe que ledit feigneur roi s'en devroit conrenter. A quoi ledit feigneur roi a répliqué : Héraut, baille^moi la patente du champ, baille-la-moi, s'elle eft fuffifante, je 1'accepte, & après , dis tout ce que tu voudras. A quoi ledit héraut a répondu , qu'il avoit commandement de fon maïtre de ne la bailler point qu'il n'eüt premierement dit aucune chofe qu'il lui avoit donné charge de dire. Alors le roi lui a dit : Ton maïtre ne peut pas donner des Ioix en France; & d'autre part, les chofes font venues i tel point qu'il n'eft plus befoin de paroles , & fi dois être averti que je n'ai fait porter paroles par mon héraur a ton maïtre, mais ce que je lui ai demandé a été par écrit figtté de ma main. A quoi ne falloit autre réponfe que ladite füreté du champ, fans laquelle je ne fuis délibéré de te donner audience, car tu pourrois dire chofe dunt tu ferois défavoué; & auffi ce n'eft pas k toi a qui j'ai a parler, ne a combattre. mais feulement a i'élu en empereur, Ledit héraut a dit lors audit feigneur qu'il lui donnat donc con~é & fauf-conduit pour s'en retourner; ce que ledit feigneur lui a accordé, & a dit audit héraut : Preuds  V $ F R A N C O I S I. »0J- mme dans une affaire de cette importance; mais ils repréfenterent en public & en paraculier,les avantages de 1'union propofee, done renende, feroit la paix éternelle dans le pays, bien dont ils n'avoient point joui depuis plufieurs fiecles, & dont üê ne fetoient jama.s affurés, tandis que la Bretagne ne ferme poine un membre inféparable du corps de la France, oue fi la poftérité d'Anne de Bretagne venovt Ifinir, ceux qui pourroient afpirer a la pofleffion de ce duché ne manqueroient pas de ie mettre auffitbt en mouvement; que la France de fon ebté ne laifFeroit pas volonners eckapper une. province de fi grande étendue.&.fi „éceflaire a la fureté du refte de 1'etat ; qn on .erroit revenir en Bretagne les armces anglorfes oour V porter la défolation fous ptetexte de Lours , que la nobleffe fe partageroit entte les deux pards, comme elle avoit fatt de toue temS)&que les peupfe** ^f™~* piongés dans les funeftes calamiees dont Is voyoient encore les triftes reftes dans leurs vrlles & dans leurs campagnes ; qu'au refte on prendroit toutes les mefures poffibles pour la confervadon des privileges, & que quand meme on coutroit le rifque de quelque dommage de 'ee cbté-U, ce n'étoit tien en comparaifon des R 4  2é>4 £ T A bitter-? i oen • Ar C , P famen« Peu raai, „Ir r "°,remP°"«aiftmem; T t M' d—'f-ce et ra T *? deraandaffent = ra,'ilsdev0ient.,e8"cer corarae „„, erp£ce de • 11 «e le Pa(reroit poillt exP"!. Monfieur d=M„„tejea„,erae„da„tce dit qra lui coneenofi dans !. p, * »«uf01t e„ reneo„,re. „ ,., „, £ fon cmuorteraen, ! mS,s par, & H 6 "lma »*""»oim de öern.Cs,.&onjear fic compre^  sovs Erahgoi» I. 2^5 dre que ce n'étoit qu'une cérémonie dont il s'agiffoit; qu'elle n'étoit de nulle conféquence pour les intéréts particuliers de la Bretagne; mais qu'elle n'étoit pas indifférente pour rendre 1'union plus authentique, & que la demande que les états en feroienr eux-mêmes , donneroit une nouvelle force a 1'ade , qui de cette maniere , ne feroit pas regardé comme fait feulement avec le confentement ; mais encore a 1'inftance des peuples. Le député fe rendit, Sc plufieurs autres, que fa réfiftance avoit tenus en fufpens, fuivirent fon exemple. Le roi en fit aufïitót faire la charte, qui commencoit par ces termes : « Francois , par la grace de Dien, roi de France , ufufruitier des pays Sc duché de Bretagne , pere & légitime adminifttateur des biens de notre trèscher Sc très-aimé fils le dauphin, duc & feigneur propriétaire defdits pays & duché, favoir faifons, Sec. ». Elle contenoit la requête de 1'union, oü Fon demandoit que monfieur le dauphin fit fon entrée a Rennes, comme duc de Bretagne : elle calfoit tous les acFes qui pourrcient être contraires a cette union 5 défendoient a tous ceux qui portoient le nom de Bretagne, a. caufe qu'ils defcendoient de la maifon de Bretagne  a6Y Etatj par les femmes, de le porter déformais, Sè de prendre les armes pleines de Bretagne & fans différence, & ordonnoit fpécialement aux defcendans des batards de la maifon de Bretagne, de brifer leurs armes par la barre, diftinftion ordinaire des fils naturels. La requête fut préfentée le quatrieme d'aoüt, & la charte expédiée le vingt-unieme de feptembre. Quelque avantageufe que füt 1'union du duché de Bretagne a la couronne, Ie parlement de Paris fit une remontrance au roi, fur une des principales claufes de Pafte d'union. C'étoit fur le titre de propriétaire du duché de Bretagne, qu'on donnoit a monfieur le dauphin, en laiffant feulement au roi celui d'ufufruitier. II repréfentoit que cette claufe étoit contre la coutume Sc les Ioix du royaume, felon lefquelles le domaine de la couronne eft inaliénable & ne peut être donné aux enfans de France qu'en apanage, Sc nullement en avancement d'hoirie. Le parlement même envoya au roi une formule route dreffée, pour le changement qu'il prétendoit qu'on devoit faire dans Pafte d'union fur ce point; mais ce prince ne crut pas qu'il füt k propos d'incidenter dans cette comefture, ainfi Pafte fubfifta tel qu'il avoit été fait d'abord  sous Francois V. Après Fheureufe conclufion d'une fi importante affaire, le roi reprit le chemiri de Pa-; ris, 5c comme dans le mouvement oü fe trouvoient 1'Angleterre & 1'Allemagne, il préveyoit bien qu'il ne feroit pas long-tems fans être obligé de prendre parti. 11 commenca £ teut difpofer pour 1'exécation du projet qu'il atoit formé d'une nouvelle milice.  iét H E N R I li. ASSEMBLEE DES ÉTATS e» 1558. gén. du Languedoc. t V ) T roi voulant pourvoir aux befoins de Vétzt & obtenir un fecours extraordinaire de fes peu-' Pies, alfembla les états généraux du royaume aPansle.de janvier, de l'an ,557 (,558). II appella a cette affemblée des députés des pariemens du royaume qu'il nomma, & qiJi compoferent un quatrieme état entre la nobleffe & Ia bourgeoifie. Pierre du Faur, troiIjeme préfident au parlement de Touloufe, fut deputé par cette cour. Le roi y appella auffi des deputes des principales villes du royaume , qu'il nomma. Celui de Touloufe étoit un ancien capitoul, & Raimond du Pois , bourgeois de Carcaflonne, y alïifta pOUr cette ville. L'affemblee conclut de prêter au roi trois millions, tc de repartir cette fomme fur tous les gens aifés du royaume, dont on arrêteroit un état. Le roi nomma le premier préfident Maufencal, le  sous Hénri II. 2.6"9 préfident du Faur , Antoine de Saint - Paul , maïtre des requêtes , Bérenger Portal, Pierre de Cheverry, & Francois Chef^de-Bien, tréforiers de France ou généraux des finances, pour dreflër la lifte des gens aifés, des généralités de Touloufe Sc de Montpellier, qui prêteroient au moins cliacun la fomme de cinq eens écus. Pendant la tenue des états généraux , les Efpagnols firent quelques tentatives pour pénétrer en Languedoc; mais on s'y tenoit fut fes gatdes. On répara , entre autres , les fortifications de Carcaflbnne , Sc ils n'oferent rien eatreprendre. Etats tenus en 1558. Le mercredi cinquieme jour de janvier, Paa. 1557 (ƒ 1558)", le roi fit aftemblée de gen» des trois états , en fon palais a Paris, falie Saint Louis, felon 1'ordre Sc féance qui enfint : Au chef de ladite falie, pout montet auquel y avoit fix degtés, étoit : Le roi en fa chaife , élevée d'un degrc plus haut, Sc plus haute que celle de monfeigneur le dauphin, vêtu de robe de fatin noir, fourrée de martte; fur fa tête un bonnet de velours,  1JO E T A t S auquel avoic une plume rouge, papillotje d'or,' & portoit le grand collier de fon ordre ; fur lui avoit un des dofliers, & parement de velours bleu, femé de fleurs-de lys d'or, & A fes pieds un oreiller. Monfeigneur Ie dauphin , vctu comme le roi, en fa chaife couverte de drap d'or, fife a la dextre dudit roi fon pere, un degré plus bas, fans dais, un oreiller aux pieds. Un peu plus bas , dudit cóté dextre , y avoit un fiege couvert de drap d'or, auquel étoient aflis : Le cardinal de Lorraine. Le cardinal de Bourbon. Le cardinal de Sens. Le cardinal de Chatillon. . Le cardinal de Guyfe. Sur un efcabeau couvert de fleurs-de-iys en potence, étoit 1'évêque de Chalons , pair de France. Au cóté feneftre, y avoit un fiege couvert de de drap d'or , auquel étoient aflis : Le duc de Lorraine. , Le duc de Ne vers, ayant le grand collier de 1'ordre du roi. Derrière la chaife du roi, étoient debouc ï Le comte de Sancerre.  £ÖÜS Iï. te fleur de la Roche du Chevaliers de 1'or» Maine , ( dre du roi, ayant Le fleur de Boardillon, C leurs grands coU Le fieur d'Urphé, J liers. Au bas du parquet, a la main dextre, eo trois fieges, étoient L'archevêque de Tours. L'archevêque d'Aix. L'archevêque d'Arles. L'archevêque de Bordeaux L'évêque de Chalons. L'évêque de Clermont. L'évêque de Rennes. L'évêque d'Angoulême. L'évêque de Montpellier. L'évêque d'Evreux. L'évêque de Glandeve: L'évêque de Senlis. L'évêque de Carcaffonne; L'évêque de Bayonne. L'évêque de Nevers. L'évêque de Ryez. L'évêque de Caftres. L'évêque de Nantes. L'évêque de Bayeux. L'évêque d'Amiens. L. evêque de Saint Papoul;  L'évêque de Lodeve. L'évêque de Vences. L'évêque de Meaux. L'évêque de Moncauban. L'évêque de Lavaur. L'évêque de Metz. L'évêque d'Auxerre. L'évêque du Mans» L'évêque de Soilfons. L'abbé de Sainre Genevieve de Paris. L'abbé de la Ferré. Au-deflous iefdirs évêques, fur un fiege i Pare, éroient, maïtre Michel de Lhopital, furintendant des comptes. Maïtre Jean Lhuilier , préfident des comptes. Maïtre Pierre de la Place, premier ) Des géné- ptéfident. ' fc,„. i \ /■ raux des», Maïtre Jean le Charron , préfident. ) aides. En autres fieges, dudit cóté, étoient : Les prevót des marchands &c échevins de la ville de Paris, & autres marchands & gens du tiersétat mandés. Au bas du parquet, i ia mainfeneftre, étoient ; Six préfidens du parlement de Paris. Un préfident du parlement de Touloufe. Le premier préfident du parlement de Dau- phiné. Un  sous Henrï II. Un préfident du parlement de Barieaux. Le ptemier préfident du parlement de Bourgogne. Le premier préfident du Parlement dé' Provence. Le premier préfident du parlement de Normandie. Le premier préfident & le plus ancien confeiller du parlement de Bretagne. Devant le fiege defdits préfidens, a 1'endroit du tiers préfident du parlement de Paris, en defcendant, y avoit un fiege couvert de velours bleu , fems de fleurs-de-lys d or, fur lequel étoient aflis : Le fieur du Mortier, ^ L'archevêque de Vienne, f Confeillers au L'évêque d'Orléans , f confeil privé. Le fieur d'Avanfon , J A la main feneftre y avoit un petit fiege, prés de 1'entrée dudit parquet, fur lequel étoient; Les gens du roi audit parlement de Paris. Derrière eux étoit le,. gteffier civil dudit parlement. Et après lui, les lieaterfans-généraux de Troies & Poitiers, mandés. Derrière lefdits préfidens defdits pariemens, étoient fur le haut: Tornt X. S  a74 E T A T s Les fieurs de Rurfey, Mirambeau, comte de Saninghan , féncchai de Lyon , & grand nombre de gentilshommes mandés , & autres gentilshommes de la maifon & fuite du IQU Sur le nlus bas degré, defcendant du fiege du roi, étoient : Les tréforiers Sc généraux de France. Les fecrétaires des finances Sc de la chambre du roi. Au-dedans dudit parquet, afTez prés dudit dernier degré, y avoit un grand bureau couvert de drap d'or, Sc un fiége derrière, fur lequel étoient : MefFire Claude de 1'Aubepine, chevalier, fecrétaire d'état & des finances du roi. ClaufTe , chevalier , fecrétaire d'état Sc des finances du roi. Jean du Thiert, chevalier, fecrétaire d'état Sc des finances du roi. Pour tenir le regiftre en ladite affemblée. Ladite falie étoit tapiffée de velours bleu, femé de fleursde lys d'or, de draps d'or , & autres trés-riches rapifleries. Le roi fit lui-même fa propofition , & lui r-pondirent mondit fieur le cardinal de Lorr.une pour 1'églife, ledit duc de Nevers pour les princes Sc nobleffe, Sc ledit fieur du Mortier pour le tiers-état,  sous H E N R i H> 27S toonde /28«« frVÜ* W r m**<* ***** ■^m dc Jasmcr ióSB &n Warimmt. Le roi en fon fiege , paré comme de coutüme, I fa dextre aux haüts lieges, étoient : ' Monfeigneur le dauphin.' Le duc de Nevers , pair de France. ' Le feigneur Alphonfe d'Efte 5 frere du duc öe Ferrare. A la feneftre, étoient : m*t cardinal de Lorraine , archevêque & duc de Reims , premier pair de France. Le cardinal de Ghatiilon , évêque & comte 'de*tfeauvais, pair de France. "Le cardinal de.'Bourbon. Le cardinal de-Guyfe. . < - *W Piêas du roi; fat le premier degre, eto»: Le prince de Condé , tenant le lieu de grand chambeüan. , , Le prévot de Paris au-defious , fur ie degre par lequel on defcend au parquet ,ctenant une verge blauche en fa main. ii) Ou duTüïet n'eft point exaft; ou ilfaut croireque Jféance «e fut pas complecte. On y voit des perfon«age. qui n'itoient point a 1'ouverture ; fc on n y vo» point tous ceux qui y avoient eus eatree.  *76 E T A T s Et la chaife qui eft aux pieds du roi; C0Hrerre du rapis du /iege royaI , étok , Le cardinal de Sens, garde des fceaux de France. Au fiege bas dudit parquet, au defibus defdits cardmaux, étoient fix préfidens de "ladite cour. Sur une felle ou ferme, couverte de tapis W de fleurs-de-lys, au dedans dudit parquet du cote dextre, étoient : ' Le fieur. d'Urphé, chevalier de 1'ordre, c0„. feiller au confeil ptivé. Le fieur du Mortier, *} L'archevêque de Vienne, f Confeillers 'aa L'évêque d'Orléans, ( confeil privé. ' Le fieur d'Avanfon , J r Derrieree«» au bas du fiege dudit parquet, étoient : * L'évêque de Rennes, DeMefmes, J MaJtres Vlallart, V A»„ t »'/ . V des requetes L eveque d'AngouIême , [ de Phótel. Bemand, l De Saint Pol. Sur deux felles ou formes, couvertes comm* 1'autre, au dedans dudit parquet, du cóte de« maitres des enquêtes, étoient: L'archèvêque d'Aix. L'évêque d'Evreux.  sous Hbnri II. 177 L'évêque de Nanres. L'évêque de Caftres. L'évêque d'Amiens. L'évêque de Nevers. L'évêque de Sens. L'évêque de Bayeux. Sur une autre forme , couverte comme les ptécédentes , étant au dedans dudit parquet, du coté de la gtande falie , étoient : Le fieur de Bourdillon, chevalier de 1'ordre du roi. Le fieur de la Roche du Maine, chevalier de 1'ordre du roi. Ès bas fiegés, du cóté defdites chambres des enquêtes, de celui de ladite .grande falie, batreaux des avocats, & fur deux petites formes , au dedans dudit parquet, des deux cbtés dé mon bureau, (Du Tillet parle lui-même.) couvert comme les autres, étoient les eonfeillers, treffier criminel , notaires, avocats 8t procureurgénéral du roi en ladite cour. Au dedans dudir parquet \ du cóté de ladite grande falie , entre lefdites deux petites formes , étoit le greffier civil, fon bureau , couvert d'un tapis femé de fleurs-de-lys, devant lui. A 1'entrée dudit parquet étoit , debout, le premier huiflïer. Ès deux fiéges èfquelles fe tiennent & fiéent deux huifliers , quand on plaide a 1'entrée dudit parquet, étoient deux huifliers de la chambra S J  kl>* Etat* 'du roi, porranc chacun une maffe d'argenr dorü ^ de mieux a faire dans le moment préfent. La conférence fe tint chez le garde des fceaux.Le cardinal de Lorraine dit que le roi, Pour fubvenir au, dépenfes qu'il couvenoit de raire avon befoin de trois millions d'écus d'orque le clergé, outre les décimes ordinaires, en' pa.eroit.feul un million ; & que , po„r accé. ierer Ia perception , on avoit dreffé une lifte ^ mdle perfonnes en état de faire une pareiHe -ance, dont- üs feroient enfuite la répartition " co"cit°yens; qu'il fe fervoit a leur egard du terme dW, paree que Ie roi fe propofo.tde esrembourferun jour, & qu-en artendant, il leur paieroit la rente de cette fomme au denier douze , au lieu que le million du clerge ecoit en pur don ; & ajoura que Pintention du roi «oir de diminuer coufidérablement la w^Ie pour Pannée fuivante, & de fupprimer  sous Henri II. 2J5 entiérement tous les droits d'enttée\ de fortie 8c de paffage fur les denrées 8c les marchandifes, afin d'encourager Ie commerce. Les députés fe retirerent fort contens de tout ce qu'ils venoient d'entendre } mais lorfqu'il fut queftion de dreffer la lifte qu'on leur demandoit, ils s'appercurent qu'ils alloient fe rendre fouverainement odieux a leurs voifins & a leurs parens, 8c qu'ils n'éviteroient pas même de tomber dans des méprifes qui ruineroienc rout le fruit de leür travail, puifqu'ils manqueroient de moyens de connoitte au vrai la fortune de ceux qu'on leur propofoit d'infcrire ; car tel homme i grandes polTeffions qui eft dénué d'argent comptant, 8c tel négociant affefte d'étalet 1'opulence , lequel ne fe foutient que par le crédit, 8c touche au moment d'une faillite. Etats de 1 5 58. Extrait de M. l'abbé Garnler. Le roi vint a Paris oü devoit fe tenir 1'aflemblée des états généraux. Je me fers du mot états généraux , pour me conformer au langage des hiftoriens du tems, quoique je n'ignore point que cette aflemblée méritoit un tout autre nom i car elle ne fut point précédée d'états provinciaux pour procéder au choix des députés, &  E T A T S Féparer la matiere des cahiers de doléanees t le tems & Jes cirC.nftances ne comportoenc p« ces lenteurs : il n> parut, pour 1'ordre du derge, que des archevêques & des évêques pour la nobleffe, que des fénéchaux & des bail' lis ; Sc pour le tiers-état, que des maires * des echevins. Le roi jugea encore i propos d'y appelier les premiers préfidens de tous les pariemens du royaume, dont 1'autorité , toujours relpecke de la nation, ne pouvoit que donner du poids aux réfolutions qui feroient prifes dans cette aflembiée. Et comme le nombre de ces magiftrats , en y comprenant les gens du roi du parlement de Patis , égaloit i peu prés celui des repreientans des autres ordres, ie roi les détacha, pour la première fois, du tiers-état, pour en former un corps diftinct, fous le nom d'état de la juftice, qui eut rang avant celui du peuple. Ces grandes aifemblées ( dit Mézeray , t. V ) autrefois fi nécefiaires pour le maintien de 1'état & de la liberté publique , n'ont guere fervi , depuis le roi Jean , qu'a augmenter les fubfides. Certe fois on trouva a propos de les divifer en quatre, dirtinguant le tiers-état d'avec les officiers de juftice Sc de finance. Tous enfemble accorderent au roi trois millions d'écus d'or qu'il leur demandoit : on les leva fur les plus aifés du royaume,  SÖUS HfiSR.1 II. Tr&f On ne fauroit marquer en trop de lieux &c *rop fortement, deux édits qui furent faits cette année ; 1'un pour retrancher 1'abus des mariages clandeftins, 1'aurre pour alfurer la vie aux; enfans qui naiffoient hors le mariage. Celui-ci ordonnoit que les femmes & filles qui auroient caché leur grofïeffe , & qui ne pourroient prouver que leur fruit eüt recu le baptême & fépulture , feroient condamnées a mort, comme convaincues de favoir défait. L'autre annulloit tous les mariages faits par des enfans de familie , fans le confentement de leurs pere & mere , fi ce n'étoit que les fils, quand ils les contraéteroient, euffenc trente ans paflés , & les filles vingt-cinq; êc, afin de donner un nerf plus rude aux fantaifies amoureufes des jeunes gens , la peine d'exhérédation y fut ajoutée ( nétant pas jufte que les enfans qui défobéiffent en matiere fi importante, a ceux qui leur ont donné la vie , recueillent leur fucceffion). L'intérêt particulier du connétable produifk ce dernier édit. Son fils ainé s'étoit engagé par.parole de préfent avec la demoifelle de Pienne, fort belle fille & de bonne maifon. Le pere qui defiroit le dégager d'avec elle, pour le marier a la fille naturelle du roi , veuve d'Hocace. Parnefe, s'éceit pour eela adreffé avl pape,  i88 E T A t S & avoit envoyé fon. fiis foiliciter cette affaire J Rome ; ma,s comme il étoit vu que le fai,J Pete, rrès ng.de, éloignoit la définité de cette affaire, il avoit été confeillé de prendre le re-] mede en France, & avoit obtenu eet édit du roi : même, afin qu'il püc fervir * fon déffein il V avoir fait ajouterqu'atrendu qu'il étoit fondé la le, de Dieu , il auroit effcC r E>ès les premiers jours , 1'affemblée des états eut part a la joie des heureux exploirs du duc ^ Guyfe, dont le bonheur furpaffoit même J attente de tout Ie monde. On fut qu'en huit jours ue tems, depuis le premier de janvier J»fqu'auhuitieme,il avoit pris Calais ; puis, en peu de jours encore, la ville de Guynes qui fut rafée , & celle de Ham. Le gouverneur de Calais fut retenu prifonnier avec cinquante perfonnes notables, mais tout le refte mis dehors, les  sous Hénri les bourgeois auffi bien que les foldats. Le roi Ëdouard III en avoit ainfi ufé a 1'endroic des Francois, quand il 1'avoit pris fur eux , deux cent dix ans auparavant. JEtaiS de 1558, réputés Etats imaginair es. ( Extr. de G, Coquille.) En l'an 15 <; 8 , après la défaite de SaintQuentin, qui fut le 10 aoüt 1557, on.convoqua les états imaginaires, 5c y furent faits quatre ordres, pour trouver moyen de croirre la finance que 1'on demandoit au peuple , £• favoir de 1'églife, de la nobleffe, de la juftice 5c du tiers-état. Tomc X. %  2j?0 FRANCOIS II. Etatsde 15É0. Extrait de M. Pabbê Garnier. Lis retranchemens ( dit M. l'abbé Garnier) qUe, Wl rm avoit faks da"s fa maifon , ne fuffifoienc pas encore pour en acquirter les charges de 1'érar. Le crédit étoit anéanti, le commerce abattu, 1'agncuïture abandonnée dans quelques provinces. Les Guifes ne pouvoient impofer fur k= peuple , des femme* auffi cenfidérables que celles dont ils avoient eu befoin, fans rifquer oexciter ï un fotdevement général. Si pour cyiter eet inconvénient, ils prenoient le parti d affembler les érats généraux, & de mettre la nation i portée de chercher elle-même un remede a fes maux, cette différence tardive ne tourneroit-elle pas contre eux? Car, quel gré leur fauroit-on d'avoir accédé a une demande qu'ils avoient conftamment rejettée depuis Plus d'un an ? D'ailleurs étoir-il sür que dans Ia fermentation ou étoient les efprits, eerte grande affemblée procurat aucun bien? Les proteftans énorguuilis de ce premier fuccès, & alfurés de ia  sous Francois II. 29* proteöion des princes du fang, ne demanderoient ils pas la liberté de confcience , lVxetcice public de leur coté , des temples & des ' revenus pour leurs miniftres ? Le clergé * tous ceux qui reftoient attachés a 1'ancienne religion , écouteroient-üs patiemment cette fcandaleufe demande, & n'exigeroient-ils pas du monarque qu'il ufat de toute fa puiflahce pour exterminer cette dangereufe engeance ? Dans lè'chöc prefqu'inévitable de deux faéfcions fi puiliantes & fi animées 1'une contre 1'autre , quel para prendroit ie gouvernement > en fuppofant meme que par une forte de miracle oa parvint i fufpendre leur animofité , & a faire en forte que öroteftans & catholiques déïibéraflent d'un ccmmun accord fur les befoins de 1'état ; ne devroiton pas s'attendre que les trois ordres s'uniroienc pour demandér- 1'abrogation du concordat, le ïétablifiemenï de la pragmatique & de la fuppreifion dés annates ? Que le cleroé voudrok s'arTranchir des décimes ; Ie peuple du taillon , des gabelles , de la' paie de cinquante mille hommes ; que tous fe plaindroient amérement de la déprédation des finances fous le dermer regne , s'en prendroient a ceux qui avoient eu part a'1'adminiftration, & fous ombre de réformer les abus, attemeroient a 1'autorité roya- ,T z  E T A T , lePComrnent un roi de dix-fept ans étoufferoitC,ameu"'^eroic-ilaces entreprife, ? Dans cetre cruelle alrernative, les Guifes n'ofant prendre un parti définirif, Sc forcés cependant de fe mettre ,en défenfe , firent parcir Ie Rhingrave pour PAllemagne, écrivirenc au colonel Recrod.anx princes de Saxe , Sc aux autres al, ' roi avoit dans cetce contrée , de fermer des régimens qui furent prêts a partir auffi-tot qu'ds feroient mandés > aux ambaffadeurs que Ie roi avoit en Suiffe, de faire Ia mcne demandeaux cantons, & de donner de Ja pubhcnea leurs démarches, afin que le bruic de ces levees extraordinaires, conrint les mécon«»», en leur faifant voir que leurs proJe« etment decouverts. Mais paree que les Guues n.gnoroient pas que eet appareil n'impoferoic qu autant quxls auroient des moyens de fubvenir aane fi forte dépenfe, ils fe réfolurentennn dengager le roi Sc Ia reine-mete , a convoquer a Fonta.nebleau , non point les états-géné- ' raux, non pas même une afTembiée de notables mars un confeil extraordinaire oü feroient •Ppelles les princes du fang , les grands officiers de la couronne, les confeillers-d 'état, les chevaliers de 1'ordre , & les mairres des requêtes, afin que les. hommes les plus intéreffés au falut de Pé-  s o v s P r a n e o i s II. *95 tat, s'accordalfent s'il étoit poffible, fur le moyen de rétablir la tranquillité publique , & tinflTent la main a 1'exécution du parti auquel on fe feroit arrêté. Cette alfemblée elle-mème n'étoit pas fans dangerj car on devoit craindre que les princes ne s'y rendiffent fi bien accompagnés , qu'ils demeutaffent les plus forts Sc abfolument maïtres de difpofer du gouvernement. Les Guifes , que le péril regardoit , n'ofant entreprendre' de regler le nombre d'officiers que chacun auroit la liberté d'amener \ de peur que eet» précaution n'engendrat la défiance Sc fournie aux princes un prétexte plaufible de fe refufer è 1'invitation du roi , en prirent deux autres , dont perfonne n'avoit droit de s'offenfer, la première fut de diftribuer dans les environs de Fontainebleaules compagnies d'ordonnances dont ils difpofoient, Sc d'affigner i quelques lieues plus Ioin des quartiers aux vieilles bandes qu'ils avoient tirées trois mois auparavant de Piemont; la feconde fut de mettre un intervalle li court entre la convocation de Pouverture de 1'affemblée , que les mal-intentionnés ne puflent ni concerter les projets , ni faire de grands préparatifs.la lettre eft datée du dernier de paillet, ■& l'ou vers ure fut fixée au 10 d'aout. T i  E T A T S i j6 *.( tn/l. gén. du Unguedoc. ) Laflembiée des états généraux du royaume que le roi avoir convoqué a pontoife , au mois daour ayant été transférée bientót après a , m Gsrm^n-en-laye, confirma unanimement Wgenceila reine mere; mais les députés ie partagent touchant les moyens de remédier aux défordres des finances. Ceux de la nobleffe «Sc du tiers-état opinerent vivement, couformement a leurs inftructions, a öter au cleraé une partie de fes biens, & a s en fcrvir pour les beloms de 1'état. Le clergé vouiant éviter lahenanon de fes domaines, convint de donner W cent mille livres au roi, tous les ans,pendant fix années, pout Ie rachat de fon domaine & Ie paiement de fes detres. Les députés du clergé qui s'étoient rendus en même tems a PoifTy pou» le fameux colloque entre les cathoiiques & les proteifans , fignerent donc une procuranon ie q,atorze d odobre , de Pan i5 ft majefté Jefdites de» ,eouètes P Le ro. de loi-même dit cprtl avoit bon ».o.g„agedefesferïiceSj&aiirab «»»„ de U qae d'non™ de fon ro^nfe, & qudPte„„,te» bonne pattceo^iUna™; Vaience d„p,ner, ce qn.y fit " pour la premiere op;,lion dodit £ Vaience, ,1 „e roncha que le fait de la religion »mnaeaun,firentMM.d-A™fo„,d-Or.i:s;  SOUS FlVANCOIS II, 30I de Vienne Sc da Mortier, qui tous opinerenc ce jour-la 1'un après 1'autte, entre lefquels ledic fieur de Vienne en emporta 1'honneur d'avoir, non-feulement opiné direétement, dextrement & de bonne grace, mais auffi au grand plaifir Sc contentement du roi, Sc de la plupart de toute la compagnie. L'opinion dudit fieur de Vienne fut principalement fondée fur une bonne corhparaifon qu'il fit au roi, lui difant que fon royaume étoit fondé fur deux principales colonnes , de 1'entretenement defquelles il étoit bien nécefifaire qu'il fut grandement foigneux, pour éviter qu'elles ne s'ébranlalfént, &c que tout 1'édifice & batiment de fon royaume ne tombat en ruine & dqfolation. II fondoit 1'une des deux colonnes, de la religion \ 1'entretenement Sc fondation de laquelle avoit dès long-tems été fi recommandée aux princes, que ceux mêmes qui n'avoient jamais eu connoiffance du vrai Dieu , & étoient néanmoins fort foigneux de 1'entretenir Sc conferver, &C a plus forte raifon , lui qui portoit le nom de très-chrétien, avoit occafion de ce faire. Confidéré même qu'il pouvoit connoitre qu'il étoit homme comme le moindre de fes fujets, Sc que ce qui lui faifeit avoir tant d'au-  302 Etats totité, comme il avoit fur tout le refte des hommes, Sc qui lui bailloit le glaive en la main fur eux, procédoit de Ia religion , fans laquelle nul ne le craindroit ni moins lui fub- viendroit. Que la religion aujourd'hui étoit fi corrompue , qu'elle étoit compofée de deux manieres de gens appellés , les uns papiftes, Sc les autres évangéhftes; & que cette comiption procédoit du défaut des évêques, & autres miniftres de 1 cglife , & de ce qu'ils ne réfident point en leurs églifes Sc évêchés , Sc enfin de ce qu'ils vendoient fi déshonnêtement les facremens. Sur toutes lefquelles chofes , ledit fieur de Vienne fit de grandes exécrations Sc admirables,' Sc conclut par ce point, que le roi fe devoit fervir en fon confeil, d'autres gens que des eccléfiaftiques, afin de les envoyer tous en leurs dioeefes pour prêeher & adminiftrer les facremens, Sc veiller fur leur troupeau ; & far-rour, que fa majefté fe garcat bien d'en difpenfer aucun , peur quelque caufe que ce füt , fur peine d'être dorénavant lui-même caufe du déford re. 1'auttê colonne fut fondée fur l'amitié de fes fujets, fur laquelle il fit- une grande dif-  SOUS E R A N C O I S II. 5O3 greffion de la différence qu'il y avoic d'un tyran a un bon prince; t'un fe faifant craindre , & lVutre aimer. Concluant, quanc a ce peine, qu'il fe devoit communiquer a fes fujets , entendant leurs requêtes; & auffi fe nourtir telïement aux affaires , que 1'accroiffement de la connoiffance d'iceux lui vint avec l'accroifTement de 1'age, 6c que 1'accoutumance de ce faire les lui rendit faciles 5c aifés. Et que par ce moyen , non feulement il fe feroit aimer de fon peuple , mais auffi releveroie les miniftres qui font pres de fa perfonne, des calomnies & mauvaifes impreffions qne le peuple en avoit; 4 faute que lui-même ne me.ttoit peine d'entendre a fes affaires, & fe communiquer a fes fujets. Avec autres infinis traits excellens qui furent grandement loués, eftimés, & agréables a la plupart. Le lendemain , qui fut le 24 aout, rout le refte de la compagnie opina au même lieu <5c même beure 3 & Ie commencement fut par M. le cardinal de Lorraine. Ledit fieur amiral dit qu'il avoit voulu faire figner lefdites requêtes qu'il avoit préfentées au roi le premier jour de 1'affemblée, mais qu'il lui £ut répondu que s'il plaifoit au roi , qu'ils les figneroient en petit ou en grand nombre , vöir  + ItATS fe préfenteroient eux-mêmes a fa majefté at nombre de cinquante mille, pour le moins. Quau demeurant, il ne fe pouvoic entre les hommes une chofe plus deloyale ni plus dangereufe, que de voir que le prince fe cra.gmt de fes fujets , Sc qu'il fót contra;nt de prendre garde contre eux, & qu'en femblable, les fujets eulfent crainte & mauvaife opinion de leur prince , & que c'étoit mal avifé de nourrir un jeune prince en cette crainte, & de donner telle occafion a fefdits fujets t ,Et P°urfui^nt la-deffus fon opinion , 'conclut a a reformation des abus de 1'églife, & que nouvelle fut ötée au roi Sc i 1'affemblée des états & néraux du royaume. Les opinions des autres meffieurs furent affez communes au refte de celles de M. le duc de Guife & de M. le cardinal de Lorraine. Ledit fieur de Guife fonda fon opinion fur ceux qui avoient parlé que c'étoit mal avifé de noumr en crainte le roi, difant que ce n'étoit point aux fujets de bailler nourriture a leur prince, mêmement aulourd'hui que chacun fait qu'il eft de foi nourri en toute plénitude de vertu& que quand il defendroit aucune chofe , il avoit la reine fa mere pour vraie nourriture ; pat quoi ce langage ne devoit être ainfi tenu. Et  S O W fi F R.' A' H C 'Ó' ï I II, Et pour le regard du renfort de fa garde, ü n'en avoit jamais été d'avis, finon que depuis que fes fujets avoient pris les armes contre lui. Et ne fert de lire que n'étoit contre lui,' ains contre aucuns de fes miniftres ; car M. fon frere & lui n'avoient jamais offenfé perfonne^ ou mécontenté aucun, pour le regard de leurs affaires privées j & que fi on avoit pris occa-; fion de quelque mécontentement, c'étoit a caufe de 1'adminiftration des affaires du royaume : a raifon de quoi, c'étoit avoir pris les armes contre le roi, fous prctexce dc fee prendre contre fes principaux miniftres, & qu'il ne voyoit aucune raifon pour laquelle la nouvelle garde du roi devoit être ótée. Et pour le regard de la religion, il s'en rer mettoit a ceux qui cn étoient en cela plus dodtes que lui, bien afRiroit-il que tous les conciles du monde ns fe fauroient détourner, ne lui faire changer 1'ancienne forme de faire de fes prédéceffeurs, principalement quant au S. facrement. Et pour Ie re^rd d'affembler les états , il s'en remettoit a fa majefté. M. le catdinal fonda fon opinion fur le contenu defdites deux requêtes préfentées par Iedic fieur amiral 3 difant qu'il n'y avoit rien moins Tornt X, ^JT  $0~6 E T A T S que fidelle obéiflance en ceux qui faifoient lef- dites requêtes. v Et combien qu'ils fe difent obéilTans , c'eft pourtant a condition que le roi fera de leur opinion Sc de leur fecte, ne pour le moins qu'il approuvera leur opinion j fe remettant a un chacun , s'il étoit raifonnable que le roi Sc les fieurs de fon confeil fuffent plutot de 1'opinion de tels galands, qu'eux de 1'opinion du roi & defdites perfonnes de fon confeil. Et quant a leur bailler temple , ce feroit de tout approuver leur idolatrie , Sc que le roi ne Ie fauroit faire , fans être perpétuellement damné. Et pour le regard du concile général ou national, il n'y voyoit pas grande raifon, puifque ce n'étoit que pour réformer les mceurs des gens d'églife, vu que c'eft chofe que chacun fera facilement de foi-même, par le moyen des admonitions générales Sc particulieres qui leur pourront être faites. Et que le furplus de 1'état de Ia religion avoit été fi fouvent arrêté Sc conclu, qu'il ne falloit qu'obferver ce qui en avoit été arrêté, & que 1'affemblée de tous les conciles du monde ne fauroit ordonner autre chofe que 1'obfervation des ptécédens.  sous Franc, oïs, II. 307 Et fur ce que Fon auroit dit que les fupplians defdites requêtes fe trouveront au nombre de cinquante mille hommes de leur fedte Sc dè leur opinion. Le roi en propofera un million de la ftenne , & qu'il eft aifé de voir de quels zeles font fondés tels fupplians, par leurs placards &: Hbelles difFamatoires qu'ils produifeut contre tous , Sc qu'il en a fur fa table vingt-deux qu'on a faits contre lui, lefquels il conferve trèscurieufement comme les marqués du'plus grand honneur qu'il pouvoit jamais recevoir, d'avoir été blamé par tels méchans , Sc qu'il efpère que ce fera le vrai éloge de fa vie , Sc pour le rendre immortel. Pourquoi il concluoit que tels féditieux & perturbateurs du peuple Sc du. royaume , fuffent grievement punis, piincipalemént ceux qui s'élevent avec armes , comme ils avoient cidevant faits. Bien étoit-il d'avis que ceux qui fans atmes iroient en prêche , chanteroient les pfeaumes, Sc n'iroient point a la rneiFe , Sc autres particularités qu'ils obferyent, puifque 'les peines n'avoient de rien fervi jufqu'a préfent, que le roi devoit défendre que 1'on ne les tqucnat plus par la voie Sc puninon de juftice, étant trësmarri que 1'on en ait fait u grieves punitions V x  3o3 E T A T s que celles ci-devant, Sc qu'il voudroit que fa vie ou fa mort püc en cela fervir de quelque chofe a tels pauvres dévoyes , qu'il 1'expoferoit d'un très-grand courage 3 Sc très-libéralement, mais que les évêques Sc autres perfonnages doivent travailler a les gagner Sc corriger fuivant 1'évangile, corripc fratrem tuum inter te & ipfum. Et que cependant les baillis Sc les fénéchaux fulTent envoyés réfider en leurs charges, pour punir ceux qui porteroient armes, Sc les évêr ques & les curés en leurs diocefes, pour prêcher Sc admonefter les autres, Sc que dans deux mois} ils fe rendroient réfolus Sc informés des abus de 1'églife , pour en avertir le roi, afin de regarder a la nécelfité d'aflembler un concile général ou national. Et pour le regard des états généraux du royaume, qu'il en étoit d'avis, afin de rendre réfolu & paifible un chacun , de la bonne adminiftration que le roi fait des affaires d'icelui royaume , Sc de faire voir au doigt Sc a 1'ccil la bonne efpérance de mieux. Le lendemain vingt-cinquieme, les chance* liers de 1'ordre opinerent tous 1'un après 1'autre Sc au même lieu Sc heure ou le parquet conjr  sous Francjois II. 309 clut bien vïte , & oü tous conclurent a 1'opinion de M. le cardinal. Le roi & la reine mere remercierent trèsaffectueufement un chacun du bon confeil qu'ils lui avoient donaé, Sc promit ledit feigneur roi de le fuivre & de fe gouverner felon icelui. Ledit feigneur cardinal dit qu'il feroit faire 1'arrêt Sc conclufion pour les communiquer a toute la compagnie , Sc qu'il feroit ébaucher le furplus des affaires qui avoient été ptopofées au commencement, pour les relever de peine Sc pour pareillement en faire réfolution. Et depuis a été réfolu que les états généraux du royaume feroient affemblés , & qu'au defaut du concile général y auroit concile national ; & après qu'il a été délibéré lequel devoit être tenu le premier, ou les états, ou le concile national, Sc du lieu oü ils fe pourroient tenir : a été conclu que les états généraux feroient tenus les premiers , Sc mander au dixieme décembre, a Meaux , Sc que les états patticuliers en chacune province feroient premierement tenus afin qu'il foit réfolu de ceux qui fe trouveront auxdits états généraux ès doléances qu'ils auront a faire. Et pour ce que le pape, 1'empereur Sc les V 3  3ÏO E T A T S princes chrcciens font prefque d'accord du concile général. II a été conclu que les archevêques, évêques , St autres prélats fe trouveront au vingtieme de janvier, a Paris oü le roi fera pour être par iceux délibéré ce qui fera digna d'être remontré audit concile général, oü il y auroit aparence qu'il fe tint bientót, &'délibérer fur le national au défaut du général. . Et cependant lefdits évêques & prélats feront réiïdence en leurs diocefes , Sc aux lieux oü ils doivent réfider tant pout étudier , que fe préparer pour faire rapport des abus. Et les gouverneurs , baillis Sc fénéchaux , de même pour informer du tout, Sc tenir le peuple en union fans proccder par voie de punition contre aucuns des fufdits, finon contre ceüx qui s'éleveront en armes, Sc feront les féditieux, ayant toutes fois un arrêt mental au cerveau du roi, pour découvrir cependant 1'imprudence des fois. .Hac habet in fumma.  CHARLES IX. ÉTATS TENUS A ORLÉANS, en 1560. Vordre & féance gardée en la convoeaüon & af' femblée des trois états du royaume de France , faite par le roi Francais II, & ^ frn déch, continuée par le roi Charles IX fon frere , en la ville d'Orléans, aux mois de dêcembre & janvier 15 60. ( Manuf. de la bib. de Gentv.) Le treizieme décembre mil cinq cent foixante, le roi étant arrivé en la grande falie que le feu roi Francois fon frere avoit fait dreffer pour y tenir les états de fon royaume, fit propofer par fon chancelier ce qu'avoienr \ faire les députés des pays, pour ladite cbnvocation, en laquelle fa majefté tenoit le plus éminent lieu. , % A coté dudit feigneur roi , feoit a main ieneftre \ en égale hauteur, la reine fa mere ; du même cóté, un degré plus bas, madame; & après elle, la ducheffe douairière de France, V 4  *r\ Et xTS aurcoté dextre,; un degré plas bas;tous fc, b'Hes de demi, chacun de fa facon. Aux pied, d„«», f„r les degrés, étoit afïï, leduc de Gutfe^rand-chambeilan, apnt en 'a main le baten de grand-maïtre. Quafi vis-i-vis Jes pieds du roi, Je roi de Navarre etait trois ou quatre pas plus loin, e connetable aflis fut une efcabelle, renan du chancelier lequel étoit aflis a Pautre cöté Prés des connétable & chancelier, un peu amere étoient a genoux deux huiffiers du rei avec leurs rnaffes. Du cóté dextre, un peu a Pécart, & au-' deflbu. dul ege du roi de Navarre , tirant vers !! C01m™hl*> étoient aflis les cardinaux de Gul™"' L°rraine' B°Urb0n' Chm™ & , yis-a"vis au cóté feneflre du roi étoient ! inces du fang, favoir, Ie comte dauphin dAuvergne, fils du duc de Mo«Penfier.le, princes de Ia Roche-fu,Yon , & lemarquis de Beaupréau fon fils nnique. Et au même rang & fiege, Ies ducs d'AuJe prince de Joinvilie, & le marquis  SOUS C H A R t E S IX. 313 d'Elbeuf , princes tenus comme étrangers , ■ d'autant que par la loi falique , encore qu'ilff foient forts proches parens & confanguins de la maifon Sc couronne de France, néanmoins en font exclus pour être ilfus de femelle qui n'y ont aucune part. En Faire, deux degrés plus bas, étoient affis le grand écuyer , les maréchaux de Bnffac &: Saint-André, Sc Famiral ayant la vue tournée vers Sa Majefté. Derrière eux y avoit un bureau jouxte , lequel étoient affis les quatre fecrétaires d'état. Sur les degrés qui faifoient la fcparation de Faire du roi a 1'autre aire, étoient affis les futintendans des finances. Du cbté droit du bureau étoient affis fur un banc, les évêques d'Orléans, Vaience, Amiens , eonfeillers du privé confeil Sc autres. En un autre banc, du cóte feneftre dudit bureau, étoient affis, les fieurs Dumortier,; d'Avanfon Sc de Saluce, aulfi eonfeillers laïcs dudit confeil, ayant tous le vifage tourné vers le roi, hormis les fur-intendans des finances. Vis-a-vis le bureau des fecrétaires d'état, il y avoit une efpace vuide le long de la falie, large d'environ trois pieds d'un cóté Sc d'autre. Le long de la falie, il y avoit plufieurs bancs,  3'4 E T A T s fur le premier defquels du cóté droit étoient aflis plufieurs évêques, fur le refte du même cóté partie des députés y étoient, au moins les premiers, qui fe préfentoient tous d'églife. Du cóté feneftre , au premier banc, étoient les chevaliers de 1'ordre, Sc au-defTous les gentilshommes & députés pout la nobleffe. Et au refte defdits deux cótés étoient les députés dudit tiers-état. - Au bout dudit efpace, vis a-vis du roi, étoient les hérauts d'armes, Sc derrière eux le peuple en herfe. Derrière le roi étoit le fieur de Sipiere, fon gouverneur. Derrière monfieur , étoit le fieur de Carnavalet. Derrière le roi de Navarre étoit le fieur Defcars. Derrière la reine étoit le fieur de Curfol , chevalier de 1'ordre Sc d'honneur de ladite dame. Derrière madame 3 étoit la dame de Curtan. Derrière madame de Ferrare, aux deux cótés de la cheminée , étoient les quatre capitaines des gardes avec leurs archers. Puts il y avoit une féparation de bois, fut laquelle étoient appuyés les gentilshommes de  C b A «. t • « IX- ''S U chambre du roi, « derrière eu. fatf-g* toromes de la maifon, chacun avec leur* ^nT'coté dex.re, derrière les cardinau* j „o,, u„ Pe« «fpen- vers la falie ou é.menr '^"chancelier apres avoir etc parler au roi, ^aUderuiere^.^^ de la main que ehacimJ j^ huiffiet eut ene que le roi n füc affis & couvert , commenca aH.fi • HJRJNGUE du Chancelier aux États tenus «Odèans.U^dlcembrei^o. Messieurs. Dien qui avoic donné 1, volonré au feu roi Traucois d-atfembler Sc femoudre les erars de feauBae en cene ville d-O.léans, a .celle Itinuée au roi €harles fon frere no.re fou . , . & 1 la reine mere des deux verain feigneur , «• * '* '°'vr combien que par la mort du 'feu roi, femHatque lefrats Lfent föe inte.rompus * lllchangemenrderoidütapporreravee 7 leutshaines & »t*M7« d"a ! remps de leu.s magbWres , de F« L diffe».ionnepo..S. dommage a leur repu- "Tetx-ci.commeWch.énens.fefoordé. pouml de .ousfoupcoosae aoc.es paflmna, non a lemps, mais a toujours. A„t g ne fur rm grand ro. fuccen-eu. nA teandiunjour.ainf.qu-ildenfo.r» ambafiadeurs d'un aur.e m fon vo,fin des fo ces ou-il avoir par me. & pat «™> ie fon ^ . «v nu ï de fes rite. des grands „. qua vin. fon fils qui leb.if.il> ,oue , & s affi. J. lui fc lors fm 'epris le propos paa ^.t meffieurs ,our.e les forces que ,e ,ous ai ci-devant monaées , vous d.re* . votre.oi qn. vonsavexvuloro. An..|one , Zamé\ obéi de fon fils, vouknr donner X Imendre par li ** ^ V» " "^affirmerUroiquiafamereacfe. fees bleu accordaua avee lui, .au. de prmce» ' fon fang, duca, com.es, b,ons, ^.u..r * . . n»e devons reconnoicre de 1* fe.gneurs, ceque devo ^ fcule bonte de Uwu, cai ^  *18 Et ats pourrok faire que cent rnilüons de perfonne, obciflentaun, les fort, aux foi bles, les vieux & anciens, a 1'enfant, les fages & expérimentés a celui qui pour fon tendre age ne peuvent avoir encore acquis prudence ^ expérience ^ Donc étant Ie gouvernement tel, les fonden,ensiettésfurl'u„lon}accord&confentemenc de «nt.de prince, Sc feigneurs , nous devons efperer tout hen , toute paix, repos Sc rranquiliite attendant que notre jeune roi croiiTe d ans et de vertu qui ja commencent a poindre Sc «Ween lui . la religion de trés-vertueufe Sc tres-fage pnncelfe. Ia reine fa mere , Sc qu'il urUtr &;apab,e de un tel & fi grand royaume que celui-ci Or, meffieurs , paree que nous reprenons lancienne coutume de tenir les états ja délaifle. - par Ie temp, de quatre vingt ans ou envirun , ou n y a mémoire d'homme qui puifTe atteindre. Je dirai en peu de parole ce que c'eft de tenir esetats, pour qaellc caufe on les aflémble , Ja racon, Ja maniere qui y préfidoit, quel bien en vienr au royaume, au peuple , & mL, Sli Cft Utlle de tenir les états ou non. II eft certain que les anciens rois avoient  , o V S C « A ». 1 ■ ■ lX- . «* Pauemblée Je mus les fujets, ou de depu.es ;Z;3Xes>pIe„dte,e„ruvis&eoufe, oukLspl.iu.es&doléuuees.orleurpou.vo.c ainfi que de raifon. Ceci étoic anciennemenr appellé temr le parieten: & encore en aretenule nom es royaumes T-Angleterrec.EcolTe.mais pour ce que par 7 UPn les rois connoifloient toutes les ruL^ulls ui conce.noien. funiverfa, L lespriucesq«iIegatdoie„tleputt,cuhe,U lm de pa.lemen. eft demeuié aux aud.euces prlZ & particulieres qui fon. .enues pat «mm „ombrede juges é.ablis par le ro., qu on d,. Pte:rdieucespubUques&Séuéra.esque.e I0i s-eftréfervées.on. pris 1= nom de.acs. Les ..ars éroieu. affemblés pour d.ve.fes caufa K felon les oceureuees & occalions qm Ie p'feu.oieu.,Sepourdemanderfeeoursdegeus L deniers, & pour donner ordre a la juft.ee !u aua g« s de guerre , ou pour l'apanage des enf „s de t.anee, comme adv.„. au .ems du ". Louis XI, ou pon. pou.voi.au gomrerne-. ment du royaume, & auttescau.es.  appartenir ie royatm. A l ' PO"voic de ChaHea-le lT l t?"V" ™" ' ' / eroic partie. de^:f,;;:::vri:f;rrtgMdsbi- &"ne de fon r„ 3 J", h.7. d W~her la per- &p~vi,;o„s„ei;i::;&obrcni'fa^deS Que Ie roi d,m; ctats, diianc S ie roi dirmnue autant de fa puiffance d* prendre 1'avis & confe:, > , r ƒ ance' de , " Vu e"gendre méptis, & abaiiTe k «ignité & ma/efté royale *» ^^^^^ faire iuffice i rh, t . " fuJets» & ,uuice a chacun. Les Imv ' i <■ 7 6 la S«e«M«e faire la juftice j car  sous Charies IX. 321 les tyrans Sc mauvais rois fonc la guerre autant que les bons rois, Sc bien fouvent le mauvais la fait mieux que le bon. Auffi dans le fcel de France n'eft empreinte la figure de roi armé Sc a cheval, comme en beaucoup d'auttes pays , mais féant en fon ttoné royal, rendant & faifant la juftice. A cette caufe, la bonne femme qui demandoit audience au roi Philippe , qui s'excufoit, difant qu'il n'avoit loifir de Pöuïb dans fa grande raifon, ne douta point de lui répliquer : ne fois donc roi. Et n'y a chofe au monde qui faffe tant haïf les rois a leurs peuples , que le déni de juftice. Philippe , pere d'Alexandre, fut tué par Paufanias, a qui il avoit long-tems dénié de faire droit de 1'injure qu'il avoit recue d'un autre.' Démétrius, roi de Macédoine, perdit fon royaume pour refufer Paudience a fes fujets,' & même pour un acte qui fut tel. Un jour lui avoient été préfentées plufieurs requêtes, St les ayant mifes dans le pli de fon manteau , paffant fur un pont, les répandit, Sc les jetta toutes dans 1'eau, fans les daigner lire, dont le peuple indigné fe fouleva Sc le chafla hors de fon pays. Davantage les rois tenans les états oïent la voie de vérité, qui fouvent leur eft cachée par Tome X, X  États les ferviteurs. Pour cette caufe, tm bon & ancien auteur les admonelte de lire les hiftoires & livres qui enfeignent comme il faut gouverner les royaumes ; car par la lecon d'iceux , les rois connoitront ce que leurs amis ne leur ofent ou veulent dire. Combien de pauvretés, d'injures, de forces ou d'injuftices fe font aux peuples, qui font cachées au roi, qu'ils peuvent ouir 8c entendre tenant les états! Cela retire les rois de trop grever & trop charger leurs peuples, d'impofer nouveaux fubfides, de faire grande & extraordinaire dépenfe, de vendre offices a mauvais juges, de bailler évêchés 8c abbayes a gens indignes, 8c d'autres infinis maux que fouvent par erreur ils commettent. Car la plupart des rois ne voient que pat les yeux d'autrui, 8c n'oïent que par les oreilles d'autrui, ne jugent que par 1'arbitrage 8c ju^ement d'autrui; & au lieu qu'ils devroient me. ner les autres, fe laiifent mener eux-mêmes; qui eft la caufe qu'aucuns bons rois , fe défiant d'aucuns qui étoient autour d'eux, fe font déguifés & mêlés entre le peuple inconnus , pour favoir 8c entendre ce que Pon difoit d'eux, non pour punir ceux qui en difoient mal, mais pour foi amender 8c corriger.  sous Chari.es IX 31J Le bon roi Louis douzieme prenoic plaifir a voir jouer farces & comédies, même celles qui éroienc jouées en grande liberté, difant que paria il apprenoit beaucoup de chofes qui étoient faites en fon royaume} qu'autrement il n'eut fues. Ceux qui difent que le roi diminue fa puiffance par la tenue des états , ne le ptennent pas bien ; car encore que le roi ne foit contraint 5c néceffité de prendre confeil des fiens, toutefois il eft bon 5c honnêce de faire les chofes parconfeils, entre les princes , confeils, parlement &c autres. Théopompe fut roi des Paithes, 5c créa des magiftrats qui furent appelles les éphores , &c ordonna que les rois ne feroient aucunes chofes d'importance fans leur confeil. Sa femme le tanca, lui difant que c'étoit honte a lui de. laiffer a fes enfans la puiffance royale moindre qu'il ne 1'avoit rec,ue de fes prédéceffeurs. A quoi Théopompe répondit : moindre n'eft-elle , mais plus modérée , 5c ores bien qu'elle füt moindre, elle fera par ce moyen de plus longue durée ; car toutes chofes violentes ne durent guere. Quant a la familiarité , elle n'a jamais hui aux rois. Les rois voifins font fervis a genoux & tête nue ; mais font-ils plus aimés que les X i  5*4 E T A T S notres ? II faut bailTer les yeux devant le grandfeigneur, ce que 1'on faifoit devant le roi de Perfe : en eft-il plus aimé de fes fujets ? Les rois anciens, les derniers de ia race de Pharamond, ne fe faifoient voir qu'une fois l'an, comme les AiTyriens; & les uns & les autres' vinrent a mépris vers leurs fujets, & en perdirent leur royaume. La facon de ne fe laiffer voir a fon penple & ne communiquer avec lui , eft barbare & monftrueufe : nee vifu facïïis, nee diclu affabilis ulli. Les anciens Romains avoient de coutume que chacun en fa maifon vit, deux fois le jour, route fa familie , le matin & le foir, & étoit le pere de familie falué par chacun ferf, par ces mots , ave, falve , qui valoient a dire, bon jour, bon foir. Cette coutume fut délailTée, quand les richelTes vinrent a Rome , & le grand nombre des ferfs. Galba le retint opiniatrément, comme dit Suetone, Ce qui eft loué en une familie, doit être trouvé bon en un royaume j car il n'y a rien qui tant plaife & contente le fujet que d'être connu, & de pouvoir approcher de fon prince. Si le roi pouvoit voir fon peuple fouvent & fans incommodité, il feroit très-bien de le vouloir con-  sous Charlês IX. 315 noïtre. II eft vrai que ceux qui tiennent 1'opinion contre, parient plus pour eux que pour le ptince : ce font gens peut-être qui veulentfousgouverner ik conduire tout a leur vouloir &C plaifir, & craignent leurs faits être connas par autres, afliegent le prince, & gardent que nul . n'approche de ;lui. Car vouloir dire que toutes grandes affemblées foient a craindre & doivent être fufpectes ; oui aux tyrans , mais non aux princes légitimes comme eft le notre. Et fi nous regardons au tems pafte pour notre inftruttion a 1'avenir, nous trouverons que tous les états qui ont été tenus, ont porté profit & utilité aux princes, les ont fecourus a leurs grands befoins , comme après la prife du roi Jean , & autres tems ; ce qui fe taira, de peur d'être ttop long. S'il y a abus , cela eft venu d'aucunes firn pies Sc groflieres perfonnes qui ne favoient leur office & devoir envers le prince, qui eft le fupplier trèshumblement èc obéir. Car s'il eft vrai, comme dit Ariftote, qu'il eft bon & utile au feigneur de commander, ainfi 1'eft-il au ferf dobeir. La même proportion eft de la raifon a la langue, que du roi aux fujets , toutes &. quantes fois que 1'un & 1'autre veut fortit de fon rang & faire 1'officede 1'autre, il lui en prend & prendra maU  *16 * T A T S cequieftadvenucVadviendra toujours, quand e fujet voudra palier outre, & commander au aeu d obéir. Les états derniers furent tenus au commencept duro,ch lesV]If Le roi Louis XII, fon .Plus grande Puiffance,„ip0ur crainte quii eüt f6 ^^toritéa fon peuple, „u envi^de Je maWer,cariUefutoncques roi plus Po- qu tin anno, guere mettre charge a fon peuple, & quand i. en avoit befoin , le trouvoit fort obeilTant fa„, alretub!er Jes ^ ^ fo.gne«x de conferver les perfonnes & biens de fes Vt, , & pourvoir a W néceflités, fans attendte qu'd en füt requis. § Or les états qui font affemblés en ce lieu ont «e dehberes par le feu roi, a Fontdnebleau, avec ion confeil, ou étoient plufieurs grands princes de fon fa„g & aiures grands & «e f-i confeil, pour trouver moyen dappaifer les feduion. qui étoient en ce royaume , i caufe des mal contens & de Ia religion ■ & jufqu'a ce, fut.ordonne que les édits du roi feroient gardés qui font contre les fédnieux, poiir chatier ceux' qui font auemblées illicites & portent armes. Neanmoms pour óter ce mauvais vouloir *  sous C H A R i £ s IX. -?i7 la caufe de fédition , furent admoneftés les évêques i faire réfidence en leurs évêchés pour aller par prieres , oraifons & exernple de bonne *ie retirer ceux qui font dévoyés de vraie rehgion , ainfi furent envoyés chacun en fa charge , les gouverneurs, baiilis & fénéchaux, afin de reprimer les audacieux par leur préfence & autorité. , Ce néanmoins depuis les avis 8c dehberations pris 4 Fontainebleau , aucuns n'ont délaiffé de faire affemblée , tenir les champs, prendre villes, forcer chateaux , 8c faire chofe mal aifée a fupporter, de maniere que le rol * été contraint a fon grand regret de mettre gens fur pied, & s'afiurer de villes & platpays. Refte i délibérer par quels tnoyens pourront appaifer les féditions & pourvoir quelles cefient a 1'avenir. Les bons medécins veulent avant tout connoitre la caufe du mal 8c icelle èter car c'eft la vraie voie de bien 8c furement guérir , & garder que le mal ne retourne, ce qui adviendra s'il tfa d'appaifer feulement la douleur. Le femblable eft des Ioix, car celles qui tendent feulement i punition de crime , fervent bien pour quelque temps, mais bientót après c'eft a refaire X 4  E T A T S * Pue que devant, tant ainfi que voyons advemr quand on coupe u„ ^ °» pour une r,ge coupée fort une douzaine de "jetton, de ia racine qui étoit demeurée; fc P-a„t,ies loix des Perfes ont été Jouées fur routes autres, paree qu'elles ent été faite, plus Pour garder que les homn,e. devinffent vicieux que pour punir les vices. Voyons donc ce que c'eft fédition ,& d'ou elle vient Sc pour queJIe caufe> Premierement,;e fuppoferai Ufle chofe «a aucun doute, que toute fédition eft ma«vaife & perrncieufe au royaume & république, encore qu elle eut bonne & honnête caufe; car vaut rmeux a celui qui eft auteur de fédion de fouffnr toute pertes Sc injures, qu etre caufe d un fi grand mal *r «i> . en rT ' & d une g«erre civile en fon pays. De cela faut louer Scipion & Oceron aRome; Ariftide, au contraire, blarner ; Aiab.ades , Coriolan , les Graches, Silla Manus Jules Céfar,& plufieurs autres, qui \ par ambmon , ont préféré leur honneur & oL deur au falut des pauvres citoyens & de leur repubhque, ont été caufe de Ia mort d'un nombre mhni d hommes. Sédi?n d°nc eft u»e divifion entre les fujets *uu meme prince ou république, comme f«  sous ChAR£«s IX. 319 i Rome quand le peuple fe fépara des nobles & du fénat; & n'aguere en Allemagne, oü les nobles & grands fe battirent eux-mêmes; comme ès guerres de Silla & Marius , de Céfar Sc Pompée. Au temps de Charles VI , entre les deux maifons de Bourgogne , Orléans & du regne du roi Louis XI, la guerre qu'on appelle le. bien public; en Angleterre , entre ceux de rofe blanche & rouge. La fédition vient prefque toujours de malcontentement qu'aucuns recoivent d'être mjuriés ou d'être méprifés , ou de crainte qu'on a de 1'injure ou du mal, & pour icelui éviter & fuir , ou de grande oifiveté , pauvreté ou néceflité. | II nous faut chercher la caufe de ces prcfentes féditions. L'injure: eft ce en bien, en l'honneur,ou en la perfonne. Nul prince ou autre feigneur ne fe peut plaindre qu'on lui ai* bté biens ou honneur; depuis la mort du roi Henri , chacun eft demeuré en fes biens , états & offices , s'ils ne font payés de leurs gages , états & penfions c'eft raifon qu'ils prennent patience, & qu'ils attendent. la commodité du roi , comme ils feroient d'un detteur leur voifin qui n'auroit  *5° E T A T * -gent en main. La pauvreté des Francois e» eft canfe , laquelle eft remife des Wues guerre. de douze anSjdurantIe regne du feu roi Henn. S'il. fe plaignent qu'ils ne font honorés & recompenfés felon leur mérite ,& ou'autre le font plus qu'eux; qu'üs penfent que ^ d0U fervir fo" roi du bien & de la vie • qui eft fervice perfonnel comme de fujet naturel non comme de valfal, d caufe du fief, Z ?„ §ratuitement, non comme les SuiiTes & Aliemands qui font mercenaires , qui ne «Wnt fervice fooi, en payant; & eft leurierv.ce volontaire, & Je nótre néceffaire. Quele ror ne tient la couronne de nous, u-scle Dreunde la loiancienne du royaume: qu tl donne & diftribue les charges & honneurs aqu. il lui plau,tellement qu'on ne lui peut & foit dite, pourquoi ès fommes de ietons> Ma.ntenantrlfait valoirun, maintenant mille" mamtenant cent mille ; donc ne devons eftimer JUjure s'il nous refufe & prefere autres è nous. Lui voudnon, nous donner royaume même i uous atmer 5c favorifer , Si minus flVoris & grau* minus etiam invid^ Ce fom chofes aependent de la volonté d'autrui, defquels nous n°US ^ C°ntenrer * tell« «efure, quelles nous ioienr données.  sous Charles IX. 3*< Refte que ces féditieux font en partie gens marris de la paix, gens qui ne veulent fe foumettre aux Ioix, ordonnances & jugemens , qui ont accoutumé vivre de rapine & labeur ktrui, ne favent , ou ne veulent labourer la rerre ou retourner a leurs métiers, ou qui vivent en oifweté, auri turpcs Jui ahcm appctmtes. Les romains ufoient d'un tel remede , que quand il advenoit fédition en leur ville, iondain tiroient hors de la ville les féditieux & les menoient i la guerre contte leurs voiGns. Les Êeyptiens les employoient k folfoyer laterre, & tirer pierres pour leurs grandes pyramidcs pour ne les tenir oiGfs. Les bons capitame. faifoient travailler les foldats , comme fit Marius aux foffes du rhóne, dont eft venu le nom de mali Mariani. Après les guerres des Anglois, du tems du regne de Charles-quint , coutroient grand nombre de foldats qu'on appeüoit les compagnies qui gatoient tous les pays. Le remede fut de les envoyer en Lombardie & ès Efpagnes. Toutes chofes font a préfent paifibles , Dieu merci ,-moyennant la paix que nous a laiflee le feu roi Henri, tellement que nous n'avons a employee cette forte de gens, fi ce n'eft leur  ET ATS perfuader de vouloir vivre en paix,&ou ils eroient autrernent Jes chatier des peines contenues es édits & ordonnances. Meffieurs, je dirai un inot du contentement quun chacun des états doit avoir en droit foi; Lr"; C n'eft/---tent,^ jufqualafia de fes jours défire toujours mieux avoir. ' Les rois devroient être contens de leurs pars & f0yaUme' °ter I,a-bition qui leur fait défirer autres nouveaux roraumes. Alexandre-le-gra„d apres avoir conquêté tout le monde, fouhakoic qu tl reut plufieurs mondes , comme fi celui-ci 116 ™ "PabJe de c°nte„ter Pambition de ce r01' VnUS'W nous nous repoferons, dit Pyrrhus, & nous ^ vrons en paix, repos & i notre aife< R . «-pech. dele faire préfenremenr fansVendre tant de peine, lui répondit eet ami ? Ainfi fe -oqua de Pambition du roi qui n avoit fin n> raiion. 1 Jevoudrois auffi que les rois fe contentalTentde  s O V s C H A R. L E s XI. 333 leurs revenus, chargeaftent le peuple le moins qu'ils pourroient, eftimaffent que les biens de leurs fujets leur appartiennent, imperia non domino & proprictaie. Auffi que les fujets lesaimaiTent Sc les reconnulfent pour rois èc feigneurs, les aidaflent de leurs perfonues & biens, leur obéiflent, non de bouche Sc confentement feulement, Sc par lm faite révérence & autres honneurs, mais de vraie obéiffance qui eft de garder leurs vrais & perpetuels commandemens, c'eft-a-dire , les lorx, édits Sc ordonnances, Sc ne vouluffent s'cgaler i leurfdits rois Sc feigneurs , fe difpenfer defdites Ioix & ordonnances auxquels tous doivent obeir Sc font fujets, excepté le roi feul. Que 1'état de 1'églife reconnoiflant fa grande puilfance,quieftfur les ames de la meilleure partie de nous, voire fur celle du roi les honneurs & dignités qu'il a en ce royaume , les biens meubles Sc immeubles qu'il tient de la hberalité de rois, ducs, comtes , barons Sc autres perfonnes privées & amorties par les rois, qui pour ce font ferment au roi, fe fouviennent qu'ils ne fontqu'adminiftrateurs, Sc qu'ils en rendront compte.fecontentantdel'ufage defdits biens diftribuant le refte aux pauvres après avoir pris Ie néceffaire , ne prennenc or ni argent pour les  *M E T A T S facremens Sc „e vendent les chofes ^ Le noble qui pour fa nobleffe a infinis grands P"v,leges , eft exempc de toutes tailles, iLo/ï_ :°nS^ f^^capable de tenir rands 1 petusfiefsac/ufticefur lespets du roi, puifW fur es biens & vie, tient les premiers honneurs dece royaume, foic en gUerre, foit eu paix, connétablie, maréchaulfée , grandes -aKnfes,bailliages,fénéchauftées&Lres tantdons^libéralués d^ feigneur, ne dok Pource senorgueilIir,car fa nobleffe vient de Javertudefesparens,&fef0uvienne du dire deCacon , que tous rois Sc princes font venus * d6fcendus de SC rous ferfs de Js d autant qu'il a plu, de force Sc puilfance, -nt do,,, atreplus humain & gracieux uf£r delepee contre Pennemi , a la coafervacion Sc pauvres fujets du roi. Le peuple fe doit contenter de fa fortune quineftpetue s'il eft laboureur de terre; car' ceft leplusnobleétat qui fou, & dont le fruit -ene nededalgnant mettre iamaina la charrue. La marchandifefair de grandes richeffes qui font honorer &eftimer les hommes,,es fonC vme a leur aife,& leur donne moyen de les  sovs Charles IX. 33 5 faire venir aux ctats; Sc ne doit le tiers-état être marri fi les autres font plus honoré que lui: car comme en un corps il y a membres plus honnêtes les uns que les autres , les moins honnêtes font touteFois plus nécefiaires & unies que les nobles. Auffi nulle potte d'honneur n'eft claufe audif tiers-état; il peut venir aux premiers états de 1'églife & de la juftice ; Sc par faits darmes, peut acquérir nobleffe Sc autres honneurs. Conclufwn. Si chacun état fe contente de fa fortune Sc bien, s'abftient du bien d'autrui, penfe plus a bien faire fon état qu'a reprendre les autres fe foumet a 1'obéiftance de fon prince, Sc de fes Ioix Sc ordonnances. Nous vivrons en paix Sc repos. L'on dit que 1'autre Sc principale caufe de fédition eft la religion , chofe fort étrange Sc prefque incroyable , car fi fédition eft mal voire. Thucidide dit qu'il comprend en foi toute forte de mal, comme eft ce que la religion 1'engendreraPCe mal, fi elle eftbonne , eft 1'eftet contraire a fa caufe. Davantage fi fédition eft guerre civile, pire que celle de dehors * comment advient-il qu'elle foit caufée 8c produite de la religion même chrétienne 8c évangélique qui nous commande fur-tout la paix Sc 1'amitié entre les  3 3^ Et hommes Non enim ^nfioL, fcd pads aum ffr V TrellgIon te]Je**.*» qui a veu enc p!anter avec armes ? poolers fonc bien contre fa profeffion, „ui eft defouffrir Ia force , non la • faire. Ec c?eft en ce que dir faint Chrifoftöme, que fommes b>en différens des Gentils qui ufent de force , fcconrRugnentle. chrériens de paroles & per. fuafion, *e vaut Fargument donc ils s'aideL qudspremienr les armes pour Ia caufe de Dieu' - caufe de Dieu ne.vent être défendue avec armes, miM t m ^ , f^on na pris fon commencemenr par armes, -ftrerenuecVconfervéepararmes.SiPondifoi que:Ies armes qu'ils prennenc ne font pouroffenfcr aucun, maïs pour fe défendre feulement, cette excufevaudroitpeut.ecrecomrerétra comrele roi lemfouverain feigneur; c* il ^ lo.fible au fu;et de fe défendre contre le prince, -ure fes magiftrats,„on plus qu.au hls Contr ^.^V f°lc i ^ ou a droit, foit que le pnnce & magiftrats foient difiolus * maLi lolt quils foient bons. Encore fommes-nous. plus tenus d'obéir au P"nce qu au pere, ainfi ont fait les bons chrftlCnS ^ °in ™"c» Par patience, ont prié Dieu  sous CHARtEs IX. 337 Dieu pour les empereurs 8c juges qui les pet-, fécutoient. Les payens même ont connu cela , 8c ont loué ceux qui ont porté patiemment les injures qu'ils avoient recues de leur part, biame ceux qui fe vengeoient. Et nous, chrétiens, ne devons recevoir 8c approuver 1'opinion des Grecs & Romeins touchant 1'honneur qu'ils laitfent aux tytanmcides. La vérité eft telle que fi les hommes étoient bons 8C parfaits, ils ne viendroient jamais aux armes pour la religion. Mais auffi ne pouvons-nous nier que la religion , bonne ou mauvaife , ne donne une telle paffion aux hommes que plus grande ne peut être. C'eft folie d'efpérer paix, repos 8c amitié entre perfonnes qui font de diverfe religion, & n'y a opinion qui foit tant profonde dans le cceur des hommes que 1'opinion de religion , ni qui tant les iépare les uns des autres. Les Juifs ont eftirtté tdute autre nation comme étrangere & leur ennemie. Lés autres nations ont eu femblable opiniön des Juifs. Je laiffe les mahométiftes, qui nous ont toujours réputés leurs ennemis, & nous eux. ^ Entre les chrétiens , même kame a éte dusant la divifion des arfiens, & autres hérétiTomé X,  Et.it, q»os. Combien de fediti„„s font ajrtmes de Perfo„„«, brölemens de fiuis •' Nous l'expcrimemons au- «u.feroieu, de diverfe religie,, "Te -™ qoe ia coeHaio,, de ,,ligioa ^ " J qui eft cenfée da pays. 6 p e Par contraire, 1'adr.iffion de relieio,, „! %«Ie pere du ffls, le frere du frere fe -ar, de f, femme , „en „^„ „Z'ü C'eft ceouieloigueie^er de obcilTance a fon mi • p"*ier a/erteVa,U,iVre ^ ^* fa femme admonefte le, femme, chréciennes, de «ft maner avec Jes geocils & payens, diftat qJ «eft poffible PU'lJs pui/rent w J 11 ?r-7"a-.°-quefafemme baifea- ^ 13 fae ,C Premier ««éden qu'el,c renco„ -a? car c'eft la _ des ^ ^ ba.fer. Qu, p ft^, ? ^ fi j ft aux aucres ma.fon, Pour vifirer * confoler Ie,  s o v s Charles IX. 3 0 malades & afHigés, ou fe levera la unit de les cotés pour aller prier Dieu ? Cettes, il entrera en foupcon d'inconftance & adultere. Et partant les Romains , qui ont été les plus' fages politiques du monde, ont défendu &C prohibé, nova facra, novos ritus, novere in rcpublkd; n'ont voulu qu'il y ait eu diverfe religion en une maifon ; mais que les enfans tinffenc la religion du pere : Sc pour ce , les jurifconfulres difent que les fils de familie font in facris , les émancipes nés , Sc la femme étoit eompagne avec fon niarï, divina humana qu* domus. Les anciens conciles & faints peres ont défendu oratoires privées ; qu'il n'y eut qu'une «glife i qu'une forme Sc maniere de religion. Si donc la diverfité de religion fépare & divife les perfonnes qui font liées de fi prochains liens Sc degrés, que peut-elle faire entre ceux qui ne fe touchent de fi prés ? L'admilfion des langues ne fait la fépatation des royaumes; mais celle de la religion, d'un royaume en fait deux. Dela fort un vieux proverbe : une foi, une loi, un roi. Et eft difficile que les hommes , étant en telle diverfité & contrariécé d'opinions, fe puiffent contenir d'en venir aux armes; car la guerre, comme dit le bon poëte, fuit de prés Sc accompaane défordre Sc débat. Y i  34° £ T A T S Gaudcns vadit difcordia Pallas auam cum fanguineofequuur Bellona fragiLfo, A cette caufe eft befoin öter Ia caufe du mai, & y donner quelque bon ordre par un confeil, comme il fuc ainfi dernieremenc i Fontamebleau , & duquel Ie pape nous a donné efperance, au grand & inftanc pourchas & requeces du feu roi Francois. Cependant, Meffieurs, gardons Sc confervons lobciflance a notre jeune roi ; ne foyons fi Prompts & faciles a prendre Sc fuivre nouvelles opnnons chacun d fa mode & facon ; déJibérons long tems devant, & nous inftruifons • car n'eft queflion de peu de chofe , mais du fauvement de nos ames ; autrement feroit loifible a chacun prendre nouvelle religion k fon plaifir. Voyez Sc prenez garde qu'il n'y ait autant demons & , manieres de religions qu'il y a de families & de chefs de maifons & d hommes. Tu dis que ta religion eft la meilleure, ,e défens la mienne : lequel eft le plus raifonnable que je fuive ton opinion, ou toi Ia m.enne? „u qul en jugeta,fice n'eft un faint concile ? Cependant, n'innovons rien légérement; ne mettons la guerre ou fédition en notre royaume; ne travaillons ou confondons toutes chofes.  s o V S C H A R t * S IX. ?4T Je vous promets que le roi Sc la reine n'oubhront rien pour avancer le concile ; & ou ce remede failliroir, uferont de toutes auttes provifions dont fes prédécelfeurs ont ufé. Et MM. les prélats, & autres gens deghie, feront mieux, s'il leur plak, qu'ils n ent fa" ci-devant , confidérant que la diOoluuon de notre églife a été la caufe de la naiffiince des héréfies, Sc la.réformation pourra être caufe de les éteindre. Nous avons fait ci-devant comme les mauvais capitaines qui vont aflaillk le fort ae leurs ennemis avec toutes leurs forces , laiflant depourvus & dénués le logis. 11 nous faut dore„avant garnir de vertus & de bonnes & H aflaillir avec les armes de charue, pneres &oraifons, paroles de Dieu, qui font propres a tels débats. La bonne vie, comme dit le proverbe , perfuade&provoqueoraifon.Lecouteau vaut peu contre 1'efprit, fi ce n'eft I perdre 1'ame enfemble avec le corps. , Les albigeois furent une forte d'heretiques du tems du pape Innocent III & du roi PhihppeAugufte,Pour lefquels titer de leurs erreurs, cepape envoya deux fiens légats del ordre de Cïteaux. Advint qu'en même tems un eveque Y 5  E x A r , ^agne grand nomme de bieB , pour fc decharger de fon évêché; ce gul Jui fut «fafc par le pape, paree que Iedit , ton honnere homme & craignant Dieu Palfanr d Montpellier , voulant entendre comme allo,t 1 affaire des albigeois , paria & commumqua avec Jes deuxcifterfiens, tógats du pape, qu. lui dirent qu',Is faifoiem ^ ^ qu'ils pouvoienr, toucefois „e profitrient guere • & que leur avis étoit que fi quelques grands perfonnages, de grande dignité & autorité vouloxent fe revêrir & vivre a Ja ^ ' prechoient lefdirs hérétiques , ils efpéroient Lr « moyen qu'ils attireroient tour Ie peuple ,8c & fer°lem Plus avec 1'wemple de leur bonne vie queux legats n'auroient pu faire par leur precher 8c fermonner. Dont perfuadé ce bon évêque, il prit pareil & femblable habit que lefdits hérétiques, vêru «un fac, tête & pieds nuds, faifa„t de ds feunes, & par cetce facon de vivre, il rerira en peu de tems prefque tout le peuple qui adhcroit auxdits Albigeois. Cela nous fert d'exemple pour monrrer quelle eft Ia force de Ia bonne vie des pafleurs, regames auxquelles armes, & comment Jes é_ dccelfeurs & anciens peres ont vaincu les hé-  , o V S C H A R t e s IX. 343 rétiqueS de leurs tems \ nous devons par tels moyens effayer de retirer ceux qui font en erreur, & ne faire comme celui qui voyant homme ou béte chargée dedans la folie au lieu de les retirer, leur donne du pied. Nous les devons aider fans attendre qu'ils nous demandent fecouts , qui fait autrement eft fans, charité. C'eft plus haïr les hommes que les vices. Prions Dieu inceflamment pour eux, Sc faifons tout ce que poffible nous fera , tant qu'il y aura efpérance de les réduire Sc convernr. La douceur profitera plus que la rigueur Sc ai- greur. , A tous ces mots diaboliques , faóhons, ledi,tions , luthériens , hugnenots , papiftes , Sc ne changeant le nom de chrétiens , regardez combien &de maux ont apporté en ït'alfê les noms de Guelphes Sc Gibelins, les uns de la part de 1'empire, les autres de 1'églifej Sc paree qu'aucuns fe font trouvés lefquels ne fe peuvent contenter Sc qui ne demande que tumutte, trouble Sc confufion , qui ne croyent comme eft vrai femblable en Dieu , font ennemis de paix Si de repos public, qui plus eft ont befoin d'être chatiés Sc admoneftés. Le roi ci-devant i été contraint Sc pour» ci-anrès y envoyer fes forces, ce qu'il ne peut Y4  Eïats «P« ledit feigneur fair & fera a fon r fa,S la ^tion eftfidiffcije ft> ' ie Peur, que les bons ne fouffrencavec les mauvais; ce que croyons advenir par p„uition & vine , comme éverfion de ville & pays par Fftes, gUerre &faminejgrofres te^ ' P autres accidens. II y a beaucoup de chofes qui font en appa«nce dure, & aigres, & qui font néanmoLs falutaires qui font comme quand nous mettpns le feu aux granges & aux bleds de nos fujerapour couper les vivres a Pennemi, ou abattons a maifon de notre voifin pour arrêrer l ;°UrS ^ ce mo>- ^s meilleures & fames medecmes font les plus ameres. &l eft ce que jufques ici a été procédé fi doucement que cela femble pluröt Correffioa Paterneüe que punition. „ n> a ^ ^ W, ni «naraille. de villes abattues, ni maifons brulées, ni privileges ótés aux villes comme les princes voifins ont fait de notre' ternps en pareils troubles & fédirions ,d'aiMt eft» qu'auffitöt <]ue leroi aura eu & öté fes forces, ils ne -nent fc fiflenr pis que devant , & que ce foit comme la guerre des Patthes & AWdes.  $ o v s Charles IX. 341) Il eft néceffaire de deux chofes faire 1'une ou que le roi tienne toujours fus une armée pour les retenir, qui feroit a grande foule du peuple & nuance du feigneur, ou que vous bourgeois & habitans des villes vous en preniez le foin & charges fur -vous, auffitot qu'appercevrez que quelqu'un s'élevera en notre vitte,- le prendre & faire punir felon les lois & édits , & 1'exterminer, qu'il n'en foit plus de nouvelle; car fi nous fommes tous comme un corps' duquel le roi eft le chef, il eft- beaucoup mieux de couper le membre pourri, que permettre qu'il gate & corrompe les autres Sc les faffent mourir. S'il y avoit un homme peftiféré ou infecle de lepres, vous le chalferiez de. votre vilie. 11 y a plus de raifon de chaffer les féditieux. Anftote parle d'un certain pays oh les habitans répondent de la füreté des chemins & pavent auxpalfansle dommage qu'ils ont recu des brigands & larrons. Tels & femblables flatats font en plufieurs lieux dltaüe, cela eft caufe que les hommes du pays en font plus prompts a tenir en fureté les chemins, a venger l'injure faite iautrui, comme en cas femblable, en Efpagne, & ès lieux qui font prés de la marine , auffitot que 1'on voit le  34* Eiai, figne du feu ou We, chacun courc afin de cnailer 1 ennemi étranoer. Nous devons être plus foigneux de chaffer le domefhque & familier en cetce caafe & qui nous touche particulierement & principalement avifer donc de prendre cette charge fur nous , & fes corps de ville de garder quelles iednions n'adviennent plus, les amorrir & les appaifer. Le roi i cette fi„ nous mettra les armes en main. Confidérez combien nous fera aifé que d avoir des garnifons en nos maifons pour empccher tels troubles. La ville d'Amiens & plufieurs auttes, qui font ès frontieres, eftiment bien grand fait privilege & honneur de fe garder elle-meme & leurs villes contre 1'ennemi, & etreexempts des logis de foldats. Le roi tiendra le plat-pays en füreté par le moyen des gouverneurs , des baillis, fénéchaux&de la nobleffe ,& quand fera befoin nous aidera de fes forces. Les gens d'églife feront leurs devoirs avec P"eres & prédications , ainfi adviendra que chacun fera devoir de fa part, & en tant quelu, touche que Dieu fera fervi & honoré le roi obéi, & jouirez en paix et repos de nos  sous Chari.es IX. 347 Après que vous avez entendu , meffieurs , comme Ia maifon du roi eft bien compaffée de grands & bons eonfeillers & miniftres , bien dénotés & bien obéifTans au roi & a la reine, bien unis & conjoints enfemble , ce qui nous doit fervir d'exemple a aimer Sc révérer nos feigneurs , vivre entre nous avec charité Sc amitié ; refte a vous raconter le ménage du roi qui eft en ' fi pauvre Sc fi piteux état, que jamais pere de quelque état Sc condition qu'il foit, ne laiffa orphelins plus engagés Sc plus endettés que notre jeune prince eft demeuré par la mort des rois fes peres Sc freres. Tous les frais Sc dépens de douze ou treize armées d'une grande , longue Sc cruelle guerre font tombés fur lui; trois grands mariages a payer & autres chofes longues a retirer, le domaine, les aydes, les gabelles & partie des tailles alienés. Sa volonté eft très-fainte de vouloir acquitter la foi de fes predéceffeurs en cela. II ne refufe fe réduire a cette mefure Sc épargner qu'un prince feroit contenu , pourv.u que fa majefté royale ne foit offenfée : il a recours a vous comme ceux qui n'ont jamais failli a fecourir leur prince, vous demande avis & moyen de fortir  348 E T A T S de fes affaires, ce qui „ous fera p,us ^ après avoir vu par lui même 1'érat & J'avoir fait voir par aucuns de nos députés, & j'efpere que 1'ordre qui y fera donné , fera comme un réglement perpécuel de la maifon de France, lequel le roi & la reine font bien dehbérés faire garder & entretenir. La derniere partie de notre propos fera que Je roi & la reine entendent qu'en toute fórete &hberté vous leur propofiez vos plaintes, doleances & autres, requêtes qu'ils recevront bemgnement & gracieufement, & y pourvoi. ront en telle forte que vous connoitrez qu'ils auronr plus d'cgard d votre pront qu'au leur propre, qui eft 1'office d'un bon roi. HARANGUEde Quintin au nom du clergé de France, prononcè par lui, de vive voix & par cceur, partie hit & rêchée par écrit, devant le roi Charles IX, tenant fes états généraux en la ville d'Orléans, le premier de janvier i ko3 environ une heure après midi. Roi rrès-chrétien , notre naturel & «fouverain feigneur, ce titre feul outrepalfant tous ceux que jamais prince ni monarque ait portés, lequel acquis par les grandes & admirables  sous Charles IX. 349 vertus de vos prédéceffeurs vous eft directement échu pour 1'héritage du domaine & patrimoine royal, moins aliénable Sé-féparable de votre couronne , que terres } feigneuries, villes, chateaux ou pofleffions que vous ayez. Ce cant excellent titre dis-je de très-chrétien fait avoir au clergé de votre royaume , qui, fuiyant votre commandement, fe préfente ici devant vous , & lui donne non pas efpérance, mais indubitable alfurance de certainement obtenir ce que votre majefté lui commande & enjoint de demander, n'ayant propofé de faire a fon roi très-chrétien que requêtes Sc remontrances très-chrétiennes Sc très-néceffaires au falut de chacun. Et vous , madame , notre finguliere princefle reine & donattice, qui êtes caufe de cette noble Sc tant infigne affemblée , ja quafi par laps d'un bien long-tems, favoir de foixante dix-fept ans oubliée, votre grande prudence qui nous a réduits, contient Sc conduit en mieux ; 1'expcrience que nous avons de vos excellenres vertus , nous affure aufti que par votre douceur 5c bénignité, vous prendrez nos trés humbles remontrances, non feulement de bonne part, ains leur donnerez bonne fin. Vous, nos très-illuftres feigneurs du fang de cette  35° E t A t s noble maifon de Bourbon IV, pouvons dire fainee maifon , confidérée la fainte cige d'ou fortent ces floriffans arbres & rejetons, defquels le premier eft plus haut, eft le roi de Navarre, nous fait certainement efpérer & attendre une heureufe iflue & conclufion de la préfente convocation, comme fi préfentement nous voyons-la votre oótave & progéniture Saint-Louis. Nos très-révérends feigneurs cardinaux , chefs, appuis & foiitiens de notre état, nous conforrent en I'atrente que nous avons d'être trèsbénignement ouïs en nos très-humbïes & eccléfiaftiques prieres que nous avons a faire. Si faut aufli nos autres très-excellens feigneurs , ducs & princes , tous catholiques , ferviteurs de Dieu & propagateurs de fon églife romaine & catholique, affiftant a la majefté de notre roi très-chrétien Chatles IX. Or, fire, puifque Dieu par fa grace noas a mis au cceur & a divinement infpiré votre confeil, ainfi que 1'autre jour M. le chancelier propofa de continuer & parachever ce que la très-recammandable mémoire de votre prédéceffeur & frere , notre feu bon &c innocent roi , dont Dieu ait 1'ame , auroit faintement commence, a favoir , de reconnoirre particulierement par une convocation générale , legrand &  sovs Charles IX. 551 honorable peuple duquel Dieu vous a fait roi & gouverneur, afin auffi que Ie peuple öbéiffant a Dieu en toute foumiffion, reconneiffe fon fouverain feigneur, je fuivrai 1'ordre & prendrai les caufes qui font inférées & contenues aux lettres de notre feu bon roi. In primis loué foit Dieu , qui comme il fit en Daniël, en Samuel, en Salomon & en Jofias , pareillement a fufcité fon efprit en deux bien jeunes rois Francais, de tenir & convoquer les trois états de leur royaume. L'efprit paree nous donnant a entendre, fire, notre royaume eft certes monarchie , toutefois aucunement participans & tenant de république , foit ariftocratique , foit démocratique , qui eft ce qui le fait, a fait & fera fi Dieu plait longuement durer & profpérer. Et fi cette convocation quafi naturelle &c toute accoutumée aux Gaulois , avant qu'ils euffenc rois ni Romains dominateuts, les Grecsla nomment vfrótffo,,.. id eft cekorum & Gallorum omnium convent-u aut concilium. Nous prierons notre feigneur fire, qui, a eet endroit, nous impartit fon faint efprit, de nous affembler & faire par enfemble communiquer, que fon plaifir foit toujours maintenir êc faire conferver autour de nous puifTance , vérité  Jjl E T A T S juftice Sc confeil; par ce moyen la majorité cue nous baille 1'ufance de France fera divinement confirmée , Sc dirons pour ce que le voyons. Parcite natales timidi numerare Ca.faribus Deorurti virtus contigit ante diem ingenium caelefte fuis volucibus annis furgit & tenaces , fert mala damna mora;. Sire, les trois états de votre royaume convoqitës Sc aftemblés par le pafte , n'ont jamais eu qu'une bouche Sc un corps, dont vous êtes le chef; 1'organe Sc la bouche éroit 1'églife; pour le préfent, les deux autres demeurant toujours en un même cceur , en un même corps & fous un même chef, Sc voulant y demeurer , ainfi qu'ils ont publiquement protefté. Toutefois, difent-ils , pour quelques raifons par leur bouche veulent parler a part. L'églife gailicane, fous grande cu mille caufes a cela mouvant quant a ma perfonne, a pris Sc choifi le dernier , le moins habile , le plus rude & moins expérimenté , pour me préfenter devant votre majefté. Cet honneur ont ils fait a votre clergé Sc univerfité de Patis, fire, de laquelle j'ai par ci devant été jeune , Sc fuis maintenant vieil enfant, femper infans , veusje dire. Né  sous Charles IX. 353 Ne refte que de me retourner a Dieu, lui préfentant 1'oraifon d'Efter , quand elle vouiuE parler a fon grand roi Artaxercès , die Aiïuérus pour fes freres tk peuple Ifraélire : memento mei Domine & confirma me, da mihi fiduciam domine nx gratiam , tribuè fermonem compofitum in ore me in conjpeclu regis. Ester . . 40 . . Sc 14. Après ce , venons a la caufe de votre affemblée. Par lertres parentes de Fontainebleau du dernier jour d'aoüt dernier pafte , il plüt a fa majefté nous faire publiquement entendre trois principales & grandement urgeiites raifons qui 1'aienc induite de généralement affembler les trois étati de fon royaume. Raifons véritab'lemenr. conformes & correfpondantes a votre héréditaire & patrirnonial titre de roi trés -chrétien. La première qui doit en toute bonne entreprife préceder . eft i'honneur , la vé.nération, 1'aumöne & le fervice de Lieu , lequel voulez & cornmanderez plus que toute chofe être gardé & pbferyé en votre roy.ii ne qui, par ce moyen, fleunra , & vo.is, lire, en iceluï fur les autres en toute gloire profpéritéj fa promefle eft infailifble, qui nous dit,: ptiihjum quarite legnum dei & jujiitiam ejus & omnia adjicientur nabis, Tome X. Z  3 J4 E T A T s La feconde eft pour unir & exarnïner les griefs , plaintes & doléances des affligés eni notte royaume, entendre les remontrances qui feront fur ce faites, pour donner tel remede que le mal requerra'; paroles dignes du roi, que Ie grand roi des rois lui a infpiré de fa grace , pour par-deflous lui longuement gouverner fon peuple ici bas , paree que le propre office du roi eft faire jugement en juftice, & délivrer les opprimés par violences de la main & puiflance des opprefleurs & calomniateurs. La troifieme caufe de cette aftëmblée générale procédé d'une indicible bonté, d'une clémence ineftimable dont on ne fe peut affez émerveiller, ni ne la peut-on affez louer en un li grand 8c abfolu monarque. C'eft, fire , que vous avez en général convoqué rous vos fujets pour confeffer devant eux ce que felon 1'exigence de néceffités du royaume, ils font 8c ont fait pour vous qui eft autres que les vouloir remercier du tout repugnant 8c directement contraire a je ne fais quel malin efprit fouftlant aux oreilles du prince : quod omniet funt re gis. Sire , quant a cette caufe qui dépend feulement de cette excellente bonté 8c bénignité; je me tairai toutes fois en pafiant pour récom-  s o v s C « a r t e s IX. 35f penfe telle quelle ; je dirai que par la grace de Dieu vous êtes auffi roi d'un peuple , qui, fans la profpérité, fans la vidoire, fans le falut de fon fouverain prince , n'a jamais voulu, non pas avoir aucun bien , mais refter en vie» Vtilerius Maximus dit ceci , ptemier chapirre du deuxieme livre : Herodotus , Diodorus Jiculus, Strabo, loqumtes de celti*. Je viens a la première catholique & fainte caufe d'une tant notable congrégation , qui conferve la finguliere confervarion de 1'honneur, révérence & vénération de Dieu avec une vie emiere , & pleine reftauration de fon fervice , duquel nous, nous dis-je en douleur, qui nous appellant eccléfiaftique fommes les premiers par trop indignement & fcandaleufement éloignés; les autres auffi tous auxquels femble que Dieu couroucé donne reéleurs &c fupérieurs confervant a leur mceurs , ce que tous d'une voix a notre grande confufion, nous confeflons devant votre majefté , fire , St la fupplions très-humblement, quando tam quod ait Hieronïmus regum leges non evangelia timemus, C'eft - a - dire 3 puifque de nous même nous ne nous y remettons de nous y vouloir par fon autorité réduire: habet reos confitentes nullus eriL falfis reddere jura labor. Z t  f-J* E T A T S Sire , c'eft 1'endroic qu'il faut feul réparer dans 1'églife, reftituer & réformer , & non pas réformer 1'églife- car 1'églife n'a ride en foi , macule j ne difformité qu'il fai!le réformer, n'a corruption qu'il faille déracineï, n'eüt oncques ne jamais n'aura.... L'églife eft I'amie toute entierement belle, fans fi, n'y taches aucunes. L'églife eft la chafte vierge, non maculée,, non corrompue, laquelle Saint-Paul veut époufer & dit être époufée a notre feigneur Jéfus-Chrift. Les miniftres d'icelles faut-il que vous initiez, fire, exhortiez, follicitiez a ne la plus difformer n'y maculer; & que leur ótiez Poecafion de fe faire a l'églife ne a fa hiërarchie ne faut toucher: quia corpus chrifti efl. A votre majefté, fire, ja divinement infpirée a cette plufque nécefiaire , 8c non-feulement mile réparr:tion pour l'églife me femble toutes remontrances être vaines fuperflues , un court 8c brief admoneftement de Saint-Grégoire fuffira, qu'il fit a deux freres en ce temps-la regnant vos prédécefleurs, quas reges Francorum, 1'un nommé T/uodoricus 8c 1'autre Theodcbertus, environ Pan fix cent trois ou quatre, dit ainfi en 1'épitre cent quatorze du feptieme livre de fon régime , touchant les mauvais prélats de ce royaume. Faut craindre qu'une bien grande cala-  g o V S C H A *. t H s IX. 357 snité n'advienne aux pays ou tels- indignes prélats font confticués au lieu de régime. Ce que pour lors leur fut écrit penfé préferitemenc doit être écrit & pourfuivi, fire, de nous affembler en. concile pour nous-même, connoiffant nos évidentes Sc énormes fautes nous réformer qui fera reftituer 1'état ecciéfiaftique en fon premier état & fplendeur , qui fera comme Joas dixieme roi de Jérufalem. vu la ncgligence Sc malverfation des prêtres Sc facnfi.cateurs , avoir foin de reftaurer Sc rédifier act-uellement le piteux démoliflement \ les herribles Sc lamentables ruines du remple& maifon fainte de Dieu. Votre majefté, fire , qui, par une naturelle fcienne bonté , nous oit Sc veut ouïr humainement en ce paffage de réformation, prendre de bonne part les très-humbles requêtes Sc remonuances^que toute obéiftance' lui veulent faite fi c'eft fon bon plaifir fes pauvres &C dévots orateurs , les gens d'églife de fon royaume. Tout au commencement vous préfentent Sc mettent- devant les yeux 1'exemple du bon pere Matathias parlant a fes cinq enfans, furnommés Machabée , glorieux prince Sc valereux capitaine de 1'armée de Dieu contre les profanateurs du Z3  35* EiATi faint temple.violateurs del'antique religion de leurs ancêtres, peres & majeurs mourant; ce bon homme, il commandoit a fes enfans'de batarller pour la défence du temple , comme avoient fait fes prédécefieurs , & leur difoit en teftant fouvenez » VOus des ceuvres que vos peres & progeniteurs ont fait en leur tems , & par ce moyen vous acquerrerez une grande & ample gloire, & pareillement un nom perpétuel & immortel. A ce propos, Sire, nous voulons dire, s'il vous plaïc, que vous penfiez que Charles premier n'a point accru ni aggrandi fon nom , faiiant de Carolus un Carolus magnus ; & fon fils auffi, de Ludovkus fimplement, n'a fait un Udovtcus pi»s, nom d'excelienre religion; ni thikppus fecmdus n'a été furnommé Augujius t c eft- i_ dire, confacré , plein de révérence & magnificence; & Louis neuvieme n'a pas acquis le nom de Saint en ce faifant; ce dont nous voulons très-humblement fupplier votre majefté. Sire , j'ai feulement nommé ces quatre pour brieveté, fans toutefois nul exclure des autres, qui font en nombre jufqu'è vous, Sire , de' cmquante-cinq baptifés & chrétiens , tous ayant porte la couronne que vous portez, tenu le  , O V S C H A R t * S IX. 3i? fceptreque vous tenez, affis au trone ou vous êtes affis ; lefquels , mmW g^uum confinfi, pardeffus tous autres pnnce. , ont em^ porteJgaguileprUSlenoaiaetrcs-cxcellcn, princes chrétiens. P Nous vous fupplions, Sire, 8c requerons tant humblement que faire le pouvons, de contrevenir a ces fataniques^cauteleufes a^ oui viennent aflaillir votre royaume fous 1 e*Ur fifter. A cette fin, non autre;,Dieu vous arm le glaive en main pour défendre les bons 8c Pon« les mauvais. EncccM.ayez mémoire, S.re , de tous vo» antécelleurs; faites-nouslire pour faifoit Affuérus, rei **g*<* f®> > ^ ^ " & annales du tems pafié ; par-la vous connotrrez quelle & combien forte réfiftance ris ont per L oul'an5oo,quifatrandubaPtemeOU Tclovis jufqu'a hui, qui fout mille * ta»» ans que la très-chrétienne monarebe fransje dure enun même état de religion, fous une for fous une loi, fous un roi, & durera, Stre P r votre royalfuPPort,aide&confort apresD1eu, qui vous récompenfSra de gloire 8c de renommee. Jn fempiternum.  16° E X A T S Charlemagne, en 1'infcription de fes ordonnances & lettres-oar.nr^ clcies parentes, ecnvant aux P-vmces oü xi dominoit & deca & dela les "TT ^ n*M^« de ces mots: fr ƒ«& z>„ ^ ^/or eccUfaficspouJlaüs ordinibus feu fLla. ns ptnmu dignhaübus faluum. Ce titre fe Ut ^ un We, tanr imprimé que non imprimé, commundu moins dans les bibliotheques, oui eft mruulc : Capitula CaroU. S'il vous plan-, Sire, confidérer qu'il mef) non fa fe,fe dignicé , roi &r£dteur d„ royaume des Fxancoxs, mais quant & quantes. met U ch,r,e de fa dignicé; c'eft a favoir, dévotdéfenfeur, rnmble adjuteur de la fai«« é^life de Dieu. ;eiie,ide,Sire5&te!!e défenfe nous arrndons de vous, inauam ; Charles !X ; quels nous a fair Charles premier, quels dé;i pac effet nous fentions , & de jour en ^ F nmentions au trop brief regne de notre /„ bon & iWteceiW roi Francois If. Tout le clergé de votre royaume, j d*ux genoux de cceur & de corps humblement décbis devant votre majefté, vous requierent de connnuer, vous prie d'être fon protecFeur 8c  sous Chariïs IX. 36» défenfeurvous fupplie de tenir la main que la religion depuis le tems fufdit jufqu'a préfent obfervée en votre royaume , foit entretenue perpétuellement, fans donner lieu a feéte quelconque contraire. Votredit clergé , fire , protefte devant vous en toute humiiité , que par la prétendue réformation des églifes, des eccléfiaftiques, fautil dire, ils n'entendent que rien foit immué , imminué ou changé des articles de la foi Sc faint facremens, & üfages diceux, Sc tradition eccléfiaftiques , ordonnances Sc conftitutions des faints peres, Sc cérémonies de tous tems obfervées en l'églife romaine catholique Sc univerfelle de laquelle ils n'entendent aucunement fe départir, ains veulent en icelle vivre Sc mourir. : Ce propos ci vous incite;& admonefte, fire, puifque votre royale humanité le nous permet de vous interpeMer & demander aucune chofe grandement nécelTaire & requife a 1'union, paix , tranquillité, concoide &. confervation de votre ancienne religion, qui toutes dépendent de votre autorité & puiffance royale, que Dieu nous a dela haut permife Sc recommandée principalement a eet effèt. Premierement , fire, vous fupplions que fi  56z E T A T S quelque fo%eur de vieille héréfie, par impieté s'ingéroit & vouloir incroduire & renouveller aucune feéte 14 condamnée, comme font ünU verfum toutes celles de ce tems calamiceux Sc féditieux, & a celle fin préfentat requête, demandat temple & permiffion d'habiter en ce royaume, comme fe font impudemment ou par outrecuidance ingérés n'a guere aux états parnculiers d'aucunes de nos provinces , que tels porteurs de requêtes, comme fauteurs d'héréUqiïés, foient eux-mêmes tenus & déclarés pour hérétiques , & que contre eux-mêmes comme tels foit procédé felon la rigueur des conftitutions canoniques & civiles : ut auferatur malum de medio nojiris. C'eft. ici 1'une des.vieilles & pernicieufes vexations de l'églife catholique , k laquelle toujours les hérétiques & fchifmatiques fe font voulu égaler, en érigeant églife contre églife, autel contre autel , temple contre temple \ audace & malignité , piéca condamnée par le canon apoftolique. Sanchcs Aihanafius , environ l'an 350, répondant a 1'empereur Conflamius , de genes filius Lonflannus magni, qui lui demandoit une églife & quelque certain bien en Alexandrie, pour la tongrégation des Arriens j quibus erat addiclif-  S o V S C H A R t « S IX. fimus , nous enfeigne la réponfe que nous devons faire a 1'improbité de femblables demandeurs. C'eft raifon , dit Athanafius , d'obéir £ ce que je demande , mais auffi accorder ma re* quête; je demande-que pareillemenc aux villes par eux féduites , Sc dont ils occupent les églifes, ils nous laiffent une place Sc lieu pour prier Sc nous affembler. L'empereur , quelque dévoyé Sc pervern quü füt , trouva la requête de ce faint perfonnage équitable, mais non pas .les hérétiques & Arriens j car ils aimerent mieux n'avoir églife en Alexandrie, ni par toute 1'Égypte , que dedans leur ville en ocWer une aux catholiques. Thiodorius Qrmfis récite ce que deffus , deuxieme livre de fon hiftoire eccléfiaftique , chap. u. Voremenus , en fon f livre , chap. zo , dit pour certain : ces bailleurs de requêtes, pour avoir entre nous leurs particulieres fynagogues, s'en déporterent plutót que de nous.accorder la pareille entre leurs receleurs & réceptateurs, ce qu'ils n'ont auffi pouvoir de faire. Environ quarante ou cinquante ans après , hoe eft anno Domini.. . trecenttfimo nonagefimo divas Ambrofius, tout a plat refufa de receveur aucun arrien, ni de leut accorder lieu pour fe congreger en la ville de Milan dont il étoit  ^ E t a r s évêque, combien que 1'empereur Vaientinianus fecundus 1 en preffa rforc; ains armata qUafimanu , 1^(VoulutContrainar,L'empereurc„oit dun core avec fes gens d'armes > w, ^ -fim omniajuns. Ambrofius répondoit - 1 autre avec fes clercs : ** Ul\ ° "«**>* , fua divina funt im- peraeoru potejlatl fubjeHa nQn f^ }J ^ ^ comp0fe deuX traités intitulés , de Bafüas tra**s : 1 un Contra auxenüum- Pautre , ad MarcelUnam fororem fkam. Thomas capitaine général des gens , tant \ Pied qaacheval.de 1'empereur Archadius l'an 4io ou^ii lnacJïinaot0ötïCre Iac0!ronnede Wo.,le voulanr chafler de fon empire , pour couvnr fM malin vou,oir & ^& I non|,ne trouve meilleur que de lui demander ^ la v.Ile de Conftantinople , un particulier temple p0lir prier, difoit il , & chanter avec les Hens, qu. tous étoient hérétiques, tels que font jourd'hui les demandeurs d'églifes,a favoir crriens negantes- omni potcnüam verbi & divinitatem Lhrijii. Arcadius craignant la puiffance de ce fameux cap.ta_.ne, Ie voulant appaifer, h„ promet , & Wam fic appeüer l'archevêque Joannes ChriMomus, pour affigner k ^ cg ^ ^  sous Charles IX. 365 faire, difant a ce terrible capitaine, ou tu es de la religion & foi de ton roi , ou tu n'en es pas. Si tu en es , nos églifes te font toujours ouvertes; viens-y prier. Si tu n'en es pas , il ne te faut donner lieu pour conventiculer en cette ville ; mais comme un traure, il te faut chaffer du royaume & de Fempire. Se voyant découvert, il fe retira déclatant la guerre contre fon prince , en laquelle il fut bientót après rnalheureufement meurtri: Socrates, chap. 5, liv. 6; Théodofius, chap. 32, liv. 5 ; Sozomenus , chap. 4, liv. 8 , écrivent bien au long cette. hiftoire , laquelle plus avant je ne difcourerai. Ces trois exemples, pris de 1'antique & pnmitive églife , nous montrent affez combien Sc de quand long-tems font effrontés les demandeurs d'églifes temples féparés par leurs conventicules , ce qui leur vient par une f :cceffion direde d'hérétiques a hérétiques, comme de pere a fils. Autre bien humble requête nous avons a vous faire, fire , conforme au dire de Jufiinianus , empereur , en fes authentiques Ioix nouvelies, novelle 6 & 115 j mais les lifant, je ptendrai la femblable loi de Charlemagne, qui plus nous doit mouvoir, comme fi par vous - même  3°* E T A T S étoit faite, au lieu & livre préallégué capituU Caroli. C'eft au dernier chapitre de fefdites ordonnances, épilogant les précédentes .• omnesfecundum canones & fecundum patrum regulas viven cogam- c'eft-d-dire, jecontraindrai tous mes fujets a vivre felon les canons Sc felon les regies des peres. Sire , pour 1'honneur de Dieu , poUr le falut de votre ame, conferyation de votre royaume , _accr01fiement d'icelui , Iongifflmos annos , garder - cetre funte Sc facrée loi , & Ja faites a tous ddigemmentgarder ; prenez cure Sc fob que vivions & nous nous gouvernions tousen&par Ia regie Sc difcipline & inftirucion des faints peres anciens Sc canons de l'églife, 1 Sire , comme très-chrérien que vous êtes de nom Sc voulez êcre de fait, n'endurez jamais d.re de ces bons öc anciens peres auxquels nous devons notre chnftianifme, & feion Ia doctrine defquels nous demandons vivre , que c'étoient bons rêveurs ,& les concilcs par eux ordonnés, Sc célébrer belles rêveries pieines de contrariétés. C'eft un biafphêmc non moins abominable que celui de 1'héréfiarque Montanus en l'an I7S > 1»" tels eftimoient avoir éré les faints prophêtes Ifayas , Hiéremias, Ezéchiel Sc les autres.  sous C h a r t e s IX. 3^7 'difoitce malheureux, que non par infpiration Sz révélation divine , comme gens rranfportés « t*T«„t, dit le grec , hors de fens & d'entendement, & venant ils prophétifoient j c'eft 1'impiété de Maudonius en l'an 34S , qui voit le Saint-Efprit, avec tous fes effets. A ces deux exécrables & damnés hérétiques, ce tout & par tout reffemblent ceux qui maintenant ofent calomnier les conciles antiques ès faints auteurs d'iceux, aucune fois divers entre eux je le confefle pour la diverfité des tems & diffarité des caufes contraires; non, car ils font fait & proviennent de 1'efprit en foi & a foi, toujours femblables & ftables,in &urnum. Diftinguez les temps, dit Saint-Auguftin, & vous accorderez i'écriture. Ceux-la pareillement font indubitables montaniftes qui ont ofé & ofent prêcher & écrire que depuis cinq eens ans. L'évangile de notre feigneur &C fauveur Jéfus-chrift n'a été jufqu'apreTent, entendu , c'eft ^dire, que notre Dieu Jéfus nous a failli de promeffe, nous a du tout abandonner fans nous envoyer 1'efprit confolateur & dofteur de vérité. Mais cette maudite héréfie n'eft nouvelle, ains comme toute ancienne , moderne, renouvellée, commencée dès le fufdit Montanus,  3«S E T A T S qui difóu que 1 efprit de Dieu n'avoit jamais ece donné qu'a lui , ne apofiolis quidem. Tertuben leur répond , vous verrez , dit il en parlant a eux que |a vérité les atrendoit a fon fecours , autrement étoit-elle perdue; donc avant qu'ils fufTent nés on évangélifoit fauffement , croyoit mal , tant de millions d'hommes ont été faulfement baptifés , tant d'ceuvres, en foi fauifement exetcées, tant de bonnes verrus en graces n'ont été bien faites n y opérees, tant de faints & faCrés offices ont été mal & déceptoirement adminiftrés , font pafles quatorze eens ans ou environ que Tertuhanus répondit ainfi pour nous aux hérétiques de fon tems pleins de telles vanteries qui a dure & dure encore maintecant, car le propte delherefie eft de fe lécider & prélumer être plus que mille autre qui ait été, voila pourquoi lont appellés gnoftiques. Certainement la langue eft remplie de blafphêmeSj elle eft fans frein lach'ée a toure mal difance nefeiens quïd loauatvr, n.aue de fuol^ur Quand depuis trente ou quarante ans na eu hoore de dire qu'a préfent on entend fincerement 1'évangile jamais auparavant entendu. En nos jours tant corrompus qui entend plus entierement  sous Charles IX. }6$ entierement Pévangile, c'eft-a-dire, 1'intégriti de vie, Ia faluation de Fame , les ceuvres faintes Sc falutaires, 1'obéiflance «5c révérence due a. fes fupérieurs, la mutuelle & fraternelle charité da prochain, 1'amour & crainte de Dieu , telle qua 1'entendoient nos perpétuellement vénérables dé anciens peres des conciles aflemblés fous 1'autorité de Charlemagne, cinq en nombre ; favoir : * é* Mogununum, Remenfe. Turonenfe. Cablenenfe. Et Arelatenfe.' Tous congrégés depuis l'an huit cent dix. Faut ajouter omnium gallicanorum conciliorum cekberrimum conc 'dium Aquisgranenfe quandoregnaret Ludovicus Pius. Environ l'an huit cent vingt, avec trois livres finguliers compofés par les évêques étant au dernier concile enyoyés a Pepin roi d'Aquitaine, fils du dernier Louis, par la fimple IecFure defquels on connoit promptement fi ces bons peres étoient ignorans de 1'écriture. Je me déporre d'innumérables autres faintes Sc catholiques aflemblées non gallicnres 8c gaK< Tome X, A a  ï?7° E T A T 5 licanes depuis célébrées, ne voulant autre chofe par cette heure moutrer, finon que la France depuis levangile recue ne la jamais ignoré, fcmper carnib. monftris par Ie témoignage de SaintHierome , contra vlgilantium, 1'un des parriarcheS de ces monftrueux gnoftiques & fi gtands dercs en f'évargile. Sanclus Bernardus ClarevalUnJls étoit en Fan •1153, après huit eens ans, après mille ans paffes , n'entendant levangile, que je ne fais quels accoles indigne d'être plus avant nommés entendent, je le crois, mais il entendoit levangile de notre feigneur «Sc fauveur JéfusChrift. Véritablement, fire , fi Ie Saint-Efprit étoit én Bacillus magmis, en Gregorius na^jan^enus , èri Chrifoflomus Sc auttes faints doéteurs de Fégüfe Grecque , s'il éroit en Cyprianus, Ambrojïtis, Hicronimus, Augujlinus, & autres faints en l'églife latine. 11 n'eft point en ces renou* veliés év3ngélïq'.!es,<5.' s'il y eft, il n'étoit point aux fiifdi::; Ji'iit. x amis dc Dieu, fondateurs enfci gneurs Sc inftttutcut s dc notre foi & créance ch'rèlienne; cnr als (om de parole «Sc de fait dcchinc & tv.crv.r4 , en religion «5c humble cbéïffaucc les uns aux autres contraires. Sire, fe fjut ces uïfclid, par iefquelles nous  sous Charles IX. 371 fupplions très-humblement votre majefté de ne vouloir avoir n'y recevoir les mauvais propos de ces licentieux & prcefuges libertins ne penfanc quoi qu'ils diflimulent qu'a une anarchie, qui veut dite être fans prince & fans roi, ne cherchant que de vivre acéphales, c'eft-a-dire, fans chef. Si Dieu, provoqué des péchés de nous autres eccléfiaftiques, a permis comme il fait toujours que cette rebellion ,-fchifme & fédition commencat premierement a fon fanétuaire & a fa maifon, favoir, eft contre l'églife, fi ces rebelles machinateurs des infolites & exécrables facremens , fe fouftraient de la puiftance & communion eccléfiaftique, nul autre potentat ne doic êtte affuré renoncer , 8c buiflons croiteront fur la terre, & mon peuple, dit-il, mais beaucoup plus en croitra fur toutes les maifons de la cité qui faüte & féjouït par defliis les autres. Joignons a ces divines prophéties Texpérience qui découvre leur intention par le pays d'oü les féditieux viennent & ou s'enfuient les féditieux. Sire, vos très-humbles & dévGts o.rateurs du clergé de votre royaume requierrent inftamment 8c d'une voix, votre royale majefté que Aai  371 E T A T S de fa fuprême & fouveraine puiffance, fon bon piaifir foit, en fuivant la voie de ce très-baut, très-pui(fant & non moins chrétien roi Charlemagne, de faire vivre tous les habitans Sc regnicoles, tant aux chefs qu'aux membres, felon les canons de nos faints & révérends prédéceffèurs, entre lefquels ils y a toujours eu par un même degré perpétuelle & continue fucceffion, fans difcorde n'y diverfité de mceurs, prédication ou doftrine , qui font les deux uniques & finguliers fignes de l'églife catholique. Quels fignes Sc fymboles ne font en l'églife dite des hérétiques, ils s'appellent églife foit, mais j'entends églife que notte feigneur dit Sc protefte avoir en haine, Sc la nomme l'églife des mauvais, Sc les malins , pour ce faut parler clairs & dire, l'églife romaine SC catholique , n'en y a point d'autre de laquelle ils ne font. Sire, ces raifons tant idoines Sc concluantes, meuvent le clergé de votre royaume , de vous fuppher inftamment de ne vouloir admettre les noms chrétiens en la converfation Sc congrégation de vos tres-humbles Sc très-obéiffans fujets chrétiens; or, eft-il, fire, que les hérétiques ne font pas chrétiens , ainfi que le dit Sc pröne Tenulianus au lieu préallégué.  sous Charles IX. 37 3 Sire ne fouffrez que Ia porre foit ouverte & ceux qui font en mépris & en divifion de 1'habitation , de leur bon gré, fortis de la maifon, qui s'en font exüés & bannis : eux mêmes fe font condamnés , dit 1'apötre ; donc par aurrui ne doivent être abfous. Ne les faut endurer dire que leur religion eft bonne, ne fouffrir qu'ils la comparent a la notre ; c'eft a nous qu'ils doivent croire , fans attendre concile, pöur être fondés en traaitions apoftoliques, en la doctrine de rous les anciens peres & do&euts de l'églife, en Ioix & conftitutions de tous les faints paffés conciies. Non pas nous croire a eux qui font fans aucuns vieux fondemens ni approbation de 1'antiquité, interprétant 1'écriture felon leur langue & particulieres affeétions. Ces caufes nous enfeignent, Sire, enhardis auffi du zele que nous nous voyons avoir a la réparation & réformation de la maifon de Dieu, d; poutfuivre plus ontre , & vous découvrir ce qui outrageufement nous bleffe, en attendant remede» Nous demandons, Sire, nous fuppüons , nous requérons inftamment, comme chofe plus que nécefTaire a 1'intégrité, a la pure & fincere fidélité de votre royaume, que déformais tout cora» A a j  374 E T A T s roeree de quelconque marchandife, livres, ou autre, foit interdit, nie & defendu a tous hérétiques, feéhteurs, rénovateurs & défendeurs de doctrine ja condamnée. Et ipfo, qu'ils fenrent mal de la foi, ou qu'ils en doutent, Et ipfo, qu'ils ne fuivent droitement la regie de croire Sc de vivre qui nous a été dreffce & baillée par l'églife rorttaine & catholique. Ils font excommuniés -y donc ne raur hanter, converfer, parler Sc marchander plus avec eux. Certainement tels marchandife Sc trafic ne font qu'un vrai monopole d'héréfie , Sc font les marchands vrais monopoleurs, vendam en gros & pubiiquement leurs draps & denrées, débitant latilement leur hcréfie damnée. Qui ne nous croit-il le peut voir, tant eft la chofe découverte. A cette caufe, fire, nos trés-humbles Sc dévóts orateurs du clergé de votre royaume vous fupplient univerfellement de ne plus admettre ni recevoir tels marchands a quelque Commerce que ce foit. Et de ce vous requierent particuliérement ceux de votre duché de Bourgogne Sc clergé de votre ville Sc diocefe d'Autun, comme les plas pemicieufement ehdommagés, de telles fréquentations fe joignantj Sc fuivant la même requête  sous C h a r i i s IX. sgi que votre églife primace la première & métropohtaine de votre ville de Lyon vous fait auffi bien humblement Sc fpécialement en cette fainte caufe. Sancties , etiam primas eeclejiae Lugdunenfis, anno falutis ccntefimo fexagejimo fit le fem« blable Sc ne voulut oncques fouffrir qu'entre fon peuple de Lyon demeurafTént les Valentiniens , qui , par leur faulfe opinion, pervertiffoient les fimples gens Sc matrones, dit-il, fur la rive du Rhöne. Recours au premier des cinq livres qu'il a impofés au cinquiemc livre de 1'hiftoire eccléfiaftique d'Eufébius. Donc eft notre requête. jufte , raifonnable 3 fainte & catholique , accompagnée de 1'exprès commandement de Dieu , qui uous enjoint f fire, & commande de la nous intériner Sc accor-> der, répétant en divers lieux & par diverfes fois fondit commandement. Exodi , chap. 1, 3 & 4. Deutéronome , chap. 7 ; Jofué, chap. 9; Luc , chap. 2. Il parle des idolatres & gentils aliénés de la, foi; les hérétiques, entre les chrétiens, font eftimés Sc réputés pour tels. Les mots de ladite lpi s'en fuivent. Gardes-toi bien de faire jamais amitié, d'être confédéré, de contrafter mariage avec eux; gardae-toi qu'ils n'habkent en ta terre , n'aient Aa 4  '*7* Etats cune compaffion d'eux j tues-les, frappes les juf- qu'a extincFion, qui eft Ja mort. Et s'en fuit la raifon du commandement a fin d'aventure, qu'ils ne faflent pécher contre moi fi tu crois leur opinion : opiniones utique Hyeronytrus pro diis inidügit, qui fe fera une offenfe & fcandale, dont s'enfuivra ma fureur contre toi, «Sc bienrót après je t'effacerai du tout. Sire, & vous madame, pour le falut de vos ames, pour la manutention de votre fceptre, gardez-vous bien de ces horribles & formidables men aces. Voila,fire,ce qu'en toutefimplicité,obédience," humilité , fbumiftion «5c correcFion , votre clergé de France propofe «Sc remontre a votre majefté, touchant 1'honneur «5c fervice de Dieu en votre royaume & pour 1'extirpation & abolition de ce qui lui eft contraire j favoir des feéFes «5c héréfies, le tout plus amplement & articulement déduit & correcFé en fon cahier. Pour 1'exécution defquelles grandes & héroïques chofes «5c entier accompluTement d'icelles, 1'excufe du foible «3c tendre age de votre royale perfonne, n'a aucun lieu «5c ne fera recue ; car Dieu nous répondroit incontinent ce qu'il répondit a fcn prophete Jétémias : nóli dicere quia puer tgofum, ne dit point; je fuis encore trop jeune ;  ,ovs C H A R I E s IX. 377 car Daniël i douze ans condatnna les luxurieux vieillards. Samuel, beaucoup plus jeune , repric Héli, ji décrepit. Salomon, fair roi a douze ans, au même tems 'donna ce tant & difficile jugement entre les deux femmes contendantes de leur enfant. Jofias, a huit ans, fut élu Sc falué roi, & tout incontinent purgea le temple de Dieu Sc autres lieux de fon royaume , pollus Sc infertés par certains corrupteurs Sc fédurteurs de fon peuple. Nous attendons certainement que fefpritde Dieu , qui fe montre a ce commencement être en nous , accomplira tels Sc femblables artes par vous. Madame , 1'hift-oire ne fera longue du tems quë Conjlandnus Magnus, étant régent de la Gaule, Sc y demeurant fur la marine de Normandie & de Bretagne , fut fait empereur , ainfi que décrit Euftbius, au premier des cinq livres de la vie dudit Confiantïnus , Sc d'autres après lui. Deux rebelles du commencement Arnens , 'eccuperentrempire oriental; Ludus , la Grece, la Thrace Sc 1'Afie ; Maxendus , la Syrië, la Pa- leftine Sc la Lybie. Et lors étoit en Alexandrie Catherine, dame de grands biens , de nom Sc de grande maifon ,  V* E T A T S joutefors pfe, renommée pour êfre — ^ f fefme du tour e" f» foi 8c foi de Jéfas-Chrift. , ^***<»m la fit difputer avec fes doe ^^^"^^^^ Nous efpérons , madame, que tout ainfi que Greceaeu&fe vanceabon drok de {sL ^ ^^r^^1'^ -cienne.la Jrance parlement aura 8c a dé]a fa Catherine ^ vous, a Ja confufion& totale ruine & perdi«o» de ces nouveaux Arriens. C'eft 1'efpérance ^e nous avons de vous, madame. *°tre plus grande plaie vous eft découverte.ure, -mn a rumcJiie mcdednquieft , • P°ur la guer.r , norre première & principale doleancevous eft exPJiquée , fire , comme a notre f"§tr e°ilfo,-->-ftlemaldiabolique& iornble trouble que nous fouffrons par feLs & ^efies; nousaffaiiJaut intervallement de to«s cores & voulant.fans pitié ruiner notre fainte fi>erarchJe romaine & catholtque , nous y attendons Je remede& prompt fecours. Deuxpoints reftent encore, que fi de votre grace Je permetrez, fire, je ]es réciterai breve_ ment & fuccintement. ITun concerne nos perfonmS CCCldlaftiquesj 1'autre les biens qui nous font recommandés pour adminiftrer. Quant au pre-  sous ChARUS IX. ?79 premier, je dirai pour nous, & généralement fe peut prendre pour tous. Sire, nous reconnoifions les tribulations & calamités que fi longuement avons fouffertes en ce royaume nous être envoyées de Dieu pour punttion de nos péchés , pour les purger 8c nettoyer, puis a lui nous retirer. Néanmoins a peu de nous la peine a ouvert les yeux; peu de nous ont fait leur profit de ces mbulations. Tous les jours quelqu'un tombe en abomiuation de pêché , plufieurs en hercfie; par quoi toujours eft étendue la main de Dien fur nous, &ya danger qu'ü ne veuiile contitnier „os calamités temporelles 8c les joindre aux eter- nelles. , , . . Si Jérémias vifitoit aujourd'hm les «ou etats de votre royaume , comme il vifita les états de Juda & Jérufalem, il pourroit faite un meme rapport ft fon Seigneur 8c diroit: je n'ai trouve juftice ni foi, les prêtres, les peuples, les grands Lies pette.ont rompu le frein & le hen de la loi ï tu les as affligés & ils n ont voulu douloir, « les as atctaits & ils fe font endurcis, & n ont voulu recevoir difcipline. En eet endroit, fire, je dirai que combien que foyons pécheurs, toutefois ne voulons-nous pas fuivrecetteobftinationindigneimaisdès-a-prelent  3*° Ë T A T i'""' de™r& pouïo:r> <*»*. tói l m0tt •.blMi"et P°UI«loire & prof r COmi,affion d5 "« Pannes Jprfen. Uees plt frinces h,r, f dC ,fc pmiculiéremenc, & déS« r pe?Mes font ™ ■ M & ^crêc, i Dieu fa,] en fi d. 2" rs a hit * « f a aucune ,„jarc> f0it d.mai„jfoit *p, 30 > 34» 76 & 8o'  9 4 E T A T S Sironneveut accepter & tenir les parole* avec les adaons de notre Dieu Jefus-ChrilF & «e fes apötres pour loi divine; fi le confentement,un.verfei des églifes appellées primitives . >veclufageaCcoutaine,»'eft auffi loi divine je ne fa,s plus qu'on pourra dire , fans contro- verfe, lei divine. Nul ne doute que Ia loi des hommes ne veuilleetteprocédée par cledion , les livres «n font pleins ; j'en propoferai des antiques & ré- centes quelques-unes. L'an 326 fut ainfi conftitué au quatriemeca- non Nicceno finodi. L'an 54o , fmodius Amiochenus de rechef lordonna, can. 23. D'autres en grands nombres faits unanimement par toutes les provinces chrétiennes. Comme en Tan 5i6Ia France étant en extrarchie ceft-a-dire, regnant enfemble les quatre hls de Cloveus , roi premier baptifé a favoir : Lnildebenus parijiarum. Clotarius Suejfwnum. Clodomims Aurelianenfium Thcodorius medio matricum reges. Au fecond concile, re„u encette ville d'Oreans , par leur commandement , f„ iurum 1 elecFion commandée , in. can. 7o. L'an  sous Charles IX. 385 L'an 540 , Jujlinianus ès fufalléguées deux novelles j montre, Quomodo appareat epifcopos ordinari. Ja font plus de douze cents ans pafiés que ces Ioix d'éle&ion furent promulguées. Carolus magnus & Ludovicus Pius fon fils, ès années huit cents & huit cent trente les ont renouvellées ex diclo , libro capitulorum Caroll , oü ils difent epifcopi Jecundum Jlatuta canonum , 6r de propria diocefi ob vitd meritum & fapientia domini cligantur canon, facrorum , &c. 63. Difent ces deux rois, vos prédécelfeurs , que les évêques furenr pris & élus de leur propre diocefe , ayant égard a ce qu'ils ont mérité par leur bonne vie , fageffe & prudence. Semblables ordonnances avons nous d'auttes rois leurs fuccelfeurs jufqu'a vous , fire , de Philippe Augufte, du roi Saint-Louis , l'an circiter 1150; de Philippe-le-Bel , circiter Pan 1500 , de Louis-Hutin , l'an de Louis XI, Pars circiter 1467 ; de fon fils Charles VIII , Pan 1483. Ne faut par de plus prolixes allégations , de canons , Ioix , ou ordonnances confommer le tems. Sire , pour conclufion , nous attendons la vótre , fupplions Sc requérons trés humblement que felon ces faints décrets & canons , regies Tome X. B b  )*S E T A T S de nos paflés bons peres , amis de Dieu , votre majefté nous faïTe & laifle vivre. Par le confentement Sc tranfgreffion defquels je ne m'arrêterai dire ni raconter les miférables calamités , les horribles & indicibles maux polmques& fpirituels qui fontadvenus Sc adviennent chacun jour , vexent, tourmentent Sc perfccutent indignement l'églife : la commémoration de Pun fuffira pour juger combien font énormes les autres. Les déteftables & damnées fecl.es , les exécrables Sc maudites héréfies du jourd'hui foudainement faillies en place , que la fainte Sc facrée loi d'éleólion füt , par exprès commandement } fans autres connoiffances de caufe, déplacée. Qu'il foit vrai, fupputens les tems de 1'abrogation , qui fut en l'an 15175 le même tems & oü fut faite fubrogation de 1'infernale doctrine de Luther 3 horror fit auribus chriftianis , prenant fon fondement fut certains jubilés de pleniere rémiffion , que pour lors on prêchoit. Par ce veux-je dire Sc affirmer que fi la loi d'éleébi.on revient a l'églife , tout incontinent 1'héréfie s'enfuira de l'églife , & n'auront les aurres états occafion de réprendre Sc fe plaindre de 1'ignorance , négligence , diflblution , irré-  sous Charles IX. 387 vérence , excès , infolences , mauvaifé «Sc fcandaleufe vie de nous autres eccléfiaftiques, Ni d'accufer Sc réprendre a bon droit , les ruines , démolitions , éverfions Sc deftruéhons des églifes ; mouftiers , monafteres , maifons SC habitations d'iceux , dégats Sc conforhptions immodérées des biens eccléfiaftiques. Les maux ne proviennent que pour chacune églife n'élire pas fon refteur. Ne peut que vraie ne foit la propbétie de Saint-Grégoire ; je la dirai pour 1'importance d'icelle , faut avoir peur qu a tous les pays ou font tels prélats indignes deglife , n'advienne extréme malheur Sc grande défolation. Prenons au fens contraire un argument commun Sc bien fort, dont a la reftitntion de la fainte Sc facrée loi d'éle&ion, tout bien, tout honneur , toutbonheur, toute profpérité, toute félicité , fera quant Sc quant reftituée a votre royaume de France. Qui eft la caufe pourquoi tant inftamment Sc avec tant de parole nous la vous demandons, fire , Sc nous affurons 1'obtenir pour le defir que nous vous voyons avoir , de relever 1'ordre Sc Pétat eccléfiaftique, de le remettre Sc reftituer en fon premier degré d'honneur dont il eft chu loardement, ou fans élecFion ne remontera ja- Bb i  3*8 £tat* mais , ni ne prendra les renardeaux, comme il lui eft commandé , qui ruinent & démoliflent la vigne du fage ; c'eft-a-dire , les hérétiques qui gatent Ia vigne élevée par-deffus toutes , qui mangent la vigne d'éledion , qui eft l'églife. Puifque le fanduaire de Dieu ne fe peut pofféder par héritage , c'eft-a-dire , par fucceflion de fang & proximité, ni lieu qui foit en l'églife , donc il faut y venii par éledion. Puifqu'entre le prélat & l'églife il y a certaine conjondion fpirituelle , beaucoup plös étroite que n'eft le mariage corporel de Phomme & de la femme J donc faut-il qu'entre eux intervienne foitun mutuel confentement, une réciproque volonté , le mariage feroit autrement forcé , fait en crainte «5c par autres vouloir que des parties contraétantes, quel mariage ne valut onques rien 8c eft reprouvé & condamné par jugement univerfel du monde, malos & infelices habere foles exiius aïunt. S'il vous plaït, vous avertirez de confidérer , fire-, fi du tems des éledions l'églife 8c les autres prélats ne fe porroient pas mieux & plus Êdélement envers Dieu «5c leurs princes qu'ils ne font maintenant. Par éledion on tache du tout 4 trouver un bon prélat, q«i, dès fa jeunelTe, aura milité  SOUS C H A R 1 t S IX. }S«) en l'églife avec fincérné de vue & bonne eonverfation , qui depuis après fon éledion fera examiné & confirmé en France par fon fupérieur , qui le connoic , non pas 4 Rome , oü il eft inconnu , & oü 1'argent de France va en vacaÓce , courfes , bules , difpenfes & autres ex* pédidons ; mais ne parions de eet inconvénient burfal , je parlerai feulement du grand inconvénient de confeience., Par fenrence de concile „ conforme 4 Ja défimrion , a été dit & proféré ce qui s'enfuit: qui funt autores & caufa malorum paftorum participes crunt pcenarum , quas ipfi mali paflores in fecreto Dei judicia patkntur. La mauvaife vie du miniftte eft imputée devant Dieu , s'il eft tel devant les hommes , 4 celui qui le fait miniftre, & feront de femblables peines tous deux punis, Sire , je dis en toute humilité , vous- avez alfez a rendre compte devant Dieu de votre tout grand & ineftimable temporel, qui eft un fa» bien lourd, grand & pefant, fans davansage vous charger du fpirituel. Toutes fois , fire , pour la maligne quaUté du tems, s'il vous plaifoir encore porter ces deux. grands faix , de pourvoir & donner ordre, tant au temporel que fpirituel ; nous vous fupplions Kès-humblement d'élire & nommer perfonnes. Bb i  39° E T A T S a l'églife d'éminente fcience, de fainte converfation , de vive foi , accompagnée de bonnes omvres , qui fachent défendre ladite foi contre les mais-fentans , en vivant loyalement, non charnellement, Sc déguifés d'habits , defquels la famteté de vie, au feul regard, élo.gne les peches, fou doctrine pour les bons Sc mauvais, qui par votre commandemenr convoqués , fachent vous bailler bons & faints confeils. Secomiement, Sire , nous déclarons i votre clémence & bonté royale, un mal qui nous eft fort grief Sc quafi du tout nous abat; c'eft , fire , qu'ordinairement quatre, cinq & fix fois pan * voite jufqu'a la neuvieme , on prend & nous fait on payer décime du peu de temporel que nous pouvons percevoir de nos églifes , voir jufqu'a uxoffrandes ? Et qui pis eft ne font impofées pour une année feulement Sc comme il faudroit, in necefarus rei publkae funBionibus : mais font mifes fus tous les ans; deforte que d'une chofe extraord.naire a été faite une ordinaire, jufqu'a exiger la recette defdites décimes, en état, gages, faJaire, fur ie même clergé. Et en eft 1'exécution trop plus étrange que de dettes civiles, «Sc fi ttès-rigoureufe , que les meffes paro1ftlaIes n'ont été célébrées en plufiem.  sous C H A *. t 1 s IX. 39» diocèfes,aux dimanches * autresftte.commandées , tant pour ce que les cures fuyant la prinfe par défaut de paiement defdues.keimes fe fout abfentés de leurs paroifies & les out abandonnées. Que auffi Par les rigueur* des esecutions précédentes . les églifes font demeurees fans ornemens , livres 6c cahiers , lepels en aucun lieux ona vendu al'encan au detnrnent des pauvres ames fujettes, au deshonneurdu royaume Sc irritation de la majefté de Dieu contre la votre , Sire. A cette caufe, n'ayant égard l notre parnculier .mais du tout a votre ame 5c de ceux entre les mains defquels elle eft , nous vous requerons &interPellons, fire, comme de ctóqo.n fepeut, ne doit refufer de vous abftemr de prendre fur le clergé, décimes, emprunts , fubfides , impbts , francs-fiefs 6c nouveaux acquets. Ja deux ou quatre fois & vous lefdits jours amortis, payer 8c dont on a fait finance. Pharaon'pat le confeil de Jofeph quand il rendit le peuple juif tributaire , declara les poffeffions de'fes facrificateurs, ëtreimmunes Sc franches de toute impofition , regale , en ht ^Cyrus verfarum primus , rendit aux prêtres Judaiques ocfynagogiftes, les vafes du temple de 6b 4  jZ ffr,",n,""l'« * «'«es d» rempde ic ^s,iKpri joMeIesiJeleut rremenr ^ doivenr auranr faire. Je crains auam"*«ia« n'eft fa„s cotlIenr. „, Balrhafar, „eveu de Nabuchodonofor, n'ayant Po- la révérence qi,, deyo. ^ W aYeaT vbT^' '& aVO,t Pren(*rè a ion " ' " C°nEre '«P-reide la falie, la condamnation. mais, quand ils ne pourroient être inftruics pour le devoir qu'ils ont k leur falut & a votre majefté. Et vous, fire, ne pourrez être refponfable devant Dieu , qui s'en pourroit offenfer, tout ainfi que 1'on dit de Théodoric &C Thébdebert, qu'ils moururent miférablement, pour ce qu'ils coirmencerent a bailler leurs bénéfices, par faveur, par argenr ou par ami, Sc s'y feroit délaiffer la principale partie de votre état, qui eft d'être équitable Sc faire juftice a tous. Car ce n'eft affez a un roi d'être bon , s'il ne pronte a fes fujets, Sc ne veut entendre leurs plaintes pour y remédier , comme faifoit Otho, ce qui 1'cleva a Pempire , Sc depuis qu'il fut empereur , il étoit fi diligent a Fentretenit en paix par juftice , qu'il ne permettoit chofe contraire a 1'équité. Et certainement quand le peuple fe trouve content en la république, il remercie Dieu d avoir un tel roi ou empereur. Au conttake , quand quelque malheur lui furvient, il reme: la caufe  4' E T A T S fur fes gouverneurs, & aides que c'efl par Ia faute de fon prince. Ainfi les fujecs s'eftimoient très-heureux fous le regne d'Antoine, après la mort duquel tant de malheurs lui furvinrent; ils référoient la caufe fur 1'empereur Commode , Sc véritablement le peuple quelquefois porre la pénitence que Dieu lui baille pour le pêché de ion, prince. Et qu'ainfi ne foit Ia famine, advient el'e par trois ans pour le pêché dc Saiilj l'ire de Dieu fur le peuple, pour le pêché de David. Le peuple ,affligé eüt-il long-terns a fouffrir pour fon roi Achab. Voila comme Dieu avertit les rois a bi en vivre; voila comme les princes prtideus fe doivent gouverner, Sc avec leurs fujets s'entretenir. C'eft la Sunamire que David aima ; c'eft cette prudencequi faifoit craindre Salomon; c'eft elle qui fait les princes commander} Sc que les puiO'ances font adorées en adminiftrant juftice , fans laquelle on les appelle tyrans , Sc tout le peuple court fur eux comme firent les Siciliens contre Denisle-Tyran, tc les Ae,rigentins cóntte les Phalaris; comme firent les Macédonieus, qui abandonnerent & délailferent Ie rei Demetrius. Et Trafibule, après avoir bani les trente tyrans de la république d'Athènes , introduit la loi  fous CharlH.s IX. 41Ï amniftie j c'eft-a-dire, la loi d'oblivion des maux paffes, Sc leur fit adminiftrer la juftice, qui eft le vrai moyen de bien policer Sc adminiftrer un royaume; car fans juftice, fans prudence Sc diligence des miniftres du prince , la république ne fe peut jamais maintenir, non plus que le navire fur la mer conduit au port fans pilote. Les rois fe fervent de miniftres dans la juftice , comme ils ont accoutumé d'employer les capitaines aux régimens de leurs armées , Sc tout ainfi que 1'on ne baille point telle charge qua gens expétimentés , doit le ptince élire les hommes vertueux , capables , gens de bien, hommes véritables Sc haiïïant 1'avarice , qui ne fe laiffent corrompre par dons Sc ne prennent aucuns préfens, ains felon les ordonnances Sc Ioix de Dieu qui juge Sc punit. Ainfi la belle Afttee nous rameneroit lage doré. Ainfi le bon tems reviendrok en la France. Ainfi révédons-nous la tranquillité defirée du regne de Philippe-le-Bel, qui , quand le palais de Paris fut bati, fe logeoit céans , ne craignant d'être importune pat les folliciteurs de procés, parcequ'il y en avoit alors bien peu. II faudtoit aufli , fuivant nos ordonnances, que les confifcations ne fnffent données avant  4Ti E T A T g qu'êrre adjugées, & celles des condamnés converties en eeuvres pitoyables. ■ C'eft le vrai moyen de racheter Ia paix pubhque , union Sc concorde entre tous états : ainfi no„s & votre poftérité , nous nous fentirons de votre juftice & bénignité. O bonté de Dieu! ce feroit la lumiere éclairante a toutes les créatures ; ce feroit le profit & plaifir que vos états , fire , nous doivent apporrer. Ce fout les trois états que Stipodame Müelefien, cherchoit en fa république. Ce font les trois états que Diothime difoit être nécelfaires pour la confervation des royaumes : ce font les trois chofes qUe Ies ro;s doivent defirer d'avoir; la religion, c'eft-a-dire, Ia netteté de -leur confcience ; la noblelTe , pour Ia défenfe par les armes ; & Ia juftice, pour la confervation de leurs fujets : tellement que fi enfemblement nous y employons chacun fuivant la vocation a laquelle Dieu 1'appelle, tout ainfi que la troulfe bien garnie de fleches, fonifierons ce corps de France Sc la verrons plus que jamais flonlFante, pourvu que par votre réglement vous nous otiez les caufes des féditions qui ont détruit toutes les républiques & anéanti les royaumes , & fait rafer les murailles des villes que la foudre*  SOUS C H A R. 1 I S XI. 41$ même ne pouvoit abattre. La paix Sc le repos public, font les plus fortes murailles du monde," font les nerfs du prince, c'eft Panimal immortei entre les autres princes &j régions. Sire , vous êtes aujourd'hui celui qui pouvez rendre telle la France ; nous vous devons obéiffance Sc fidélité , Sc vous ctes le Dieu ordonné' pour fervir a votre peuple de pere Sc vrai pafteur; Dieu vous a appellé Sc réfervé pour la défenfe de notre poftérité , pour la tuition de vos pays Sc augmentation de votre royaume : ce que nous defirons tous enfemble. - Et afin que nous ayons le moyen de vous fecourir de nos forces Sc puiflance , fire , il vous faut maintenir la nobleffe en fes privileges Sc libertés, aufli antiques quel'inftitution des rois > Sc qui ne peuvent, pour raifon , être féparés Sc démembrés.dè leur état Sc cenditioo , fans que le prince fe facrifiant trop foi-même, diminue Sc afloiblilfe la grandeur de fa majefté , de laquelle la nobleffe eft la principale colonne. Plaife vous donc , fire, de nous les continuef Sc maintenir , vous fuppliant ne laifler échapper une fi bonne Sc louable occafion, qu'une fi honorable compagnie ne foit en vain affemblée j qu'il ne foit plus dit par les ennemis de votre couronne Sc haineuxde vos fujets, qu'en France  États Üy a plufieurs aflemblées pour bonnes & juffes caufes, mais peu de réfolutions, ce que plaifa £ Dieu que maintenant n'advienne. Charles Perier, libraire & imprimeur juré en 1'univerfué de Paris, voyant que fur la requête par lui préfenrée a la cour, afin de pouvoir im, primer ou faire imprimer cette harangue , avoit été répondu mhil ud curiam, qui étoit raiftblement le débouter & interere de Pimpreffion d'icelle. A même fin, s'adreffa au prévót de Paris ott fon lieutenant, ce requérant le fubftitut du procureur général du roi au chatelet, lui fit expreffément inhibitions Sc défenfes de Pimprimer. Ce nonobftant de rechef fe retira en la chancellerie de Paris, en laquelle il obrint privilége le a5 de janvier 1560, en vertu duquel elle fut incontinent imprimée Sc divulgée par-tout, dont le roi en fon eonfeil-privé , averti par lettrespatences , manda a la cour de parlement de faire défenfe a tous libraires imprimeurs & autres, d'imprimer, vendre & diftribuer , tant cette' harangue que les autres, non encore mifes en lumiere ; enfemble les cahiers préfentés par Jes ftacs Sc réponfe par lui faite a iceux , fur les peines contenues defdites lettres, &: de faifie Sc  $ O V 5 C H A R t B S IX. 415 confifcatien de ce qui fe trouveroit imprimé au. contraire. Par ce moyen , les affaires du royaume autanc ou plus découfues & turbulentes que la pofténté ne pourra ci-après imaginer , & qui d'autant plus doivent être tenues fecrettes & inconnues aux étraneers , leur étoient entierement découvertes. Joint que pour y remédier Sc néanmoins que 1'affemblée Sc convocation des états ne demeurat infrnétueufe, &C les réponfes frites fur les plaintes j doléances Sc remontrances d'iceux , ne leur fufTent illufoires, 1'intention du roi étoit de les digérer & diriger en forme d'édits Sc ordonnances j qui feroient par lui autorifés , puis vérifiés , lus , publiés & regiftrés ès cours de parlement, chambres des comptes , généraüx da k juftice fur le fait des aides , Sc par-tout ailleurs qu'il appartiendra , afin d'être notoire a. tous fes fujets, Sc par eux étroitement gardés Si oblervés.  HARANGUE faite au nom du Peuple & Tiers-Etat de France, entierement prononcée de vtve voix , par de ÜAnge, d l'infant que le fieur de Rochefort eut parachevé de parler pour la Nobleffe. Sire, Laars facile que les anciens rois Sc empereurs ont donné 4 leurs peuples , a toujours été en eux marqué fi recue, que par icelle leurs noms en ont été perpétuels. . Entr'autres, de Mars, auquel Hérodian , hiftonographe bien renommé, commencant 1'hiftoire qu'il a écnte des empereurs romains quant Sc quant, rommence fon hiftoire par le facile accès des peuples ; car, dit-il, non content a chacun qui fe préfentoit de ballier fa main droite, le bon empereur prohiboita fes gardes d'empêcher aucun qui voulut parler a lui. Et devant lui eft écrit de Céfar-Augufte Sc de Tibere-Céfar , que 1'un fe rendoit fi acceffible, qu'il permettoit d'être appellé en jugemenc pour porter témoignage , Sc patiemment d'être objeété ; qu'aux éleftions il fe trouvoit Sc bailloit fa voix & fuffrage comme 1'un du peuple ; qu'il fit Ie lieu pour rendre juftice plus conftreint, n'ofant 41* E t a t ï  sows Charles IX. 417 n'ofant prendre 8c extorquer des voifins leurs maifons. , Et de 1'autre, il eft réeité qu'en recevant 8c faluant ceux qui fe préfentoient , il excédoit prefque 1'humanité de tous autres : chofe de grande louange a fi grands feigneurs 8c monarques; comme auffi c'eft vice quand ils fe rendent inacceffibles 8c mal-aifés, eft quafi cornmun aux plus grands, comme témoigne Socrate, quand il dit : Paucis ad reges adieus patel, aulici ad gratiam 6* dicunt &faciunt omnia. Et autres qui ont traité des conditions requifes ès rois , ont témoigné que la facilité & humanité font en eux les plus requifes, comme les premières vertus , amenant pour exemple de facon différente. Alexandre & Philippe, pere «5c fils , rois de Macédoine, dont le pere, par fon humanité 8c facilité, tant augmenta fa grandeur , non-feulement de terres, mais de bonne opinion ; tc au contraire, il eft écrit du fils que, grave dedecus imperio patris concitavit. Et pourtant, Sire, que votre peuple voit que vous prenez le chemin de vertu, imitant les feus rois, mème vos pere 8c frere; «5c permettez, nou-feulement facile accès a votre majefté, mais en fi tendres ans, exécutez 1'entreprife louable Tornt X. D d  4l8 E T A T S du feu roi votre frere , en la convocation de tous les états de votre royaume, fpécialement de votre peuple & tiers-état, pour enter.dre de lui ce dont il fe peut douloir 5 laquelle chofe, comme elle furpalTé les autres fufdits exemples de facilité Sc bonté, de tant plus, par ce moyen , votre nom, Sire , en fera rehauflé 8c perpétué ; Sc de tant plus votredit peuple Sc tiers état, après avoir rendu a Dieu grace immortelle , de vous avoir a ce infpiré & conduit, a occafion de croire Sc efpérer de vous Sc de votre regne, tout le contraire de ce qu'on écrit de Céfar CaÜgula, pour n'en avoir été meilleur au commencement, ni meilleur a la fin. Si eft ce que le fuccès corr.munément eft heureux en France a ceux qui adviennent jeunes a regner , commencant par Clotaire fccond , lequel lors du décès de Chilpéric fon pere, demeura agé feulement de quatre mais , accompagné toutefois d'une prudente & courageufe mere Fredegonde, dès lequel tems Phenr fut fi grand au jeune roi, Sc la vertu en fa fage mere , qu'en la journée de SoilTons il gagna la baraille , & tellement profpéra , que felon Fhiftoire de fon tems > il demeura feul roi, paifible, agréable Sc grandement aimé de fes fujets.  sous Chariel ]X. 4t« Er depuis le roi Saint Louis, lequel étaut dé meurden 1'age de douze ans, fous la charge de fa mere la reine Bianche , fuivant la difpofirion d'aurre Louis le roi fon pere, &c au commencement de fon regne étanc furvenu plufieurs fimulcés & divifions ; 1'adminiftration fur fi bonne , que pour aucuns regards , par paix &c pour autre , par guerre & victoires, le tout fut appaifé , & enfin il emporta & retienc a cejourd'hui le titre excellent de Saint. D'autres rois leurs fucceffeurs fe préfentent pour exemple , lefquels honnêtes, & pour brieveté, me fuffit d'avoir pu apporter ceux qui conviennenr mieux a notre tems, pour aucunes divifions que 1'on y voit être aucunes au commencement d'un roi jeune , accompagnés routefois les deux d'une mere, tant prndenre dame & reine comme ja par trois regnes autant agités qu'il eft potlible. La preuve en eft fi grande, qu'il faut confeifer que la France s'en doit tenir plus qu'heureufe ; &c quanc eft de moi, j'ai choifi de ne parler plus avant de fes grandeurs & vertus , comme chofe beaucoup plus raifonnable de s'en taire, que n'en pouvant dire ce qui en eft , d'en dire trop peu. Encore vous voyant, Sire, accompagné de vos Dd i  ■410 E T A T S proches , Ie roi de Navarre Sc autres princes da fang tous bien unis & convenans avec la reine , comme autre ce que chacun en connoit. Monfieur le chancelier nous en a certifié en 1'affemblée première, princes magnanimes & vos confeilers nés. Le pauvre peuple , Sire, fe tient heureux de pouvoir vivre fous votre obéiflance , Sc a jufte argument d'efpérer que telle concorde ne peut apporter que foulagement Sc augmentation de' 1'état du royaume , Sc dire , major eft felichas bono regi panre quam imperare. Et vous fupplie trés - humblement de croire qu'il ne defire, comme y ayant plus d'intérêt que tout autre, fi ce n'eft Paugmentation de vos majeftés Sc grandeurs. Et bien qu'anciennement, pour chofe véritable & mieux convenable aux princes libres , fut dit qu'il étoit requis en icelle les langues être libres , chofe qui par cette raifon , Sire, devoit m'excufer, ayant pris charge de votre peuple de parler librement des chofes les plus grandes, & fur lefquelles faut croire qu'après Dieu , tout votre pouvoir & avoir font appuyés , devant votre majefté en public , accompagné des grands en toute grandeur, fi la rerre en contient, chofe  sous Charles IX. 411 que je n'eufie ofé pour me fenrir foible en fi grande entreprife, fi auparavant l'afFecYion de votre peuple & tiers-état n'eiit été excité pour ce faire par la miffive , qu'a ces fins il plüt au feu roi votre frere envoyer a toutes les provinces, dont ü vous plait être 1'exécuteur, & par 1'alfurance de mondit fieur le chancelier en ladite aftemblée. . Quoi voyant & qu'en cela je fuivrai le commandement de mon roi & fouverain feigneur, fatisfaifant auffi a 1'afTeótion fi raifonnable d'un tel peuple , je me fuis enhardi de parler amplement &c librement. Suppliant votre majefté croire que fi d'aventure je potte parole mal polie, propos rudement couchés & tout autrement qu'il n'appartient devant un tel 6c.fi grand roi, que cette chofe non-feulement en moi , mais en une infinité d'autres qui 1'eulTent entreprife beaucoup mieux, doit être excufée , pour être impoffible a qui que ce foit s'en acquitter felon votre grandeur, &c de la chofe de laquelle il convient faire pro- pofition. - . . ■ Et pour autant qu'aucuns pourroient faire difficulté que le tiers - état, moindre que les avures états s'entremette de telle chofe pour répondre , Sire , eft confidérable, que non-feule- Dd 3  4*« E T A T S ment en ce royaume mais en plufieurs provinces bien lointaines Sc éttangeres, a été découvert , par expérience j que le tiers-état eft celui qui doit amant ou plus i ces fins être entendu , comme le plus nécelTaire & requis , & fur lequel, tant nous, S.re , que tous les autres états , avons fou tenus. Selon laquelle confidération , ceux qui 0nt étoit de la pol.ce d'Arhène, après 1 avoir en ce grandement approuvée iè difcouru fes gens du tiers-état, jufquaux batlleurs de navires & piïotes. L% conclurent que c'eft la partie du peuple laplusnéce(Taire;quec'eft-d'eiIe dont les réoubhques font plus augmentées que de totnes les autres , & partant doit être plutót crue Si recue. Et encore autre lieu de la Grece eft réfohmon pnfe , que toiires chofes- néceffaires parviennent ou de 1'dgricultureou de ia manufacFure." ^ Et en France, du tems du feu roi Charles VI, J'hiftoire de fon tems porre « qu'en la ville dd Paris lui fut porté parole , laquelle i! recut comme véritable, que plufieurs trouvoient étrange & injurieufe : favoir eft que la pompe Sc snagnificence de ceux qui accompagnoient les rois , rechoit toute fur le pauvre peuple, Sc kat fuperftae dépenfe étoit leur ruine & occafion de fa calamité.  « o v s Charles IX. 4M S'il eft donc vrai , Sire , que foit pour la néceffité ou fuperfluité, tout tombe fur le pauvre peuple & tiers-érat, il vous plaira leur accorder être plus que raifonnable , que c'eft celui de tous les |tats plus recevable a parler de toute chofe, comme le plus foulé. Et pour y entrer , vous repréfente une des anciennes difficultés qui ait été entre les favans-, dont les aucuns difoient que les fins & itfues de tous les royaumes & républiques , étoient certaines &c naturelles, comme de tous animaux., & pour aider è leur opinion , remémoroient tant des royaumes & répubiiques, avoir fleuri par le pafte & diminué fur tous les autres, dont ne reftoit que le feul nom & 1'hiftoire pour fervir d'exemple aux aurres de prendre pareille fin. Mêmement , que lorfqu ils cuidoienr ne pouyoir être ajouté aucune chofe i leur grandeur & puiftance , 1'a été 1'heure a laquelle fe ont pns fin. Les atures difoient tout le contraire, & que la fin eft ueile que 1'adminiftration; & les royaumes être tels que font les rois & adminiftrateurs. Auquel propos convient le dialogue d entre Théopompus , roi de Lacédemone , & un autre prince , lequel remontroit au roi que loc- D d 4  E T A T S cafion pourquoi Sparee avoir fi bien & fi longuement duré, procédoit de ce que les rois qui avoient regné , avoient trés bien regné «5c tres-bien cemmandé; Ahl répondit le roi, c'eft Paree que les peuples leur ont trés bien obéi, & toujours entendu a leur commandemenr Dont plufieurs fages ont pris argument d'écrire que les deux parties ; fCavoir eft de bien eengander & bien obéir, la première concernant « rots & ceux qui fous eux commandeur, We, le peuple font fi con]ointe en un royaume bien conftrtué, que 1'un fans 1'autre en eft 1'éveri'on, & concluent qu'il eft impolïib e. dobéir bien a ceJui qu; ne ^ & Ipbetftance du peuple doit procéder de la prudence&de la dodfrine du prince, c.,r ce n'eft des vertus communes & vulgaire» de favoir bien commander. Et c'eft pourquoi Homere nommoit Ie roi Orefte par un mot grec qui , fe!on 1'interprétationde Platon, fignifioit familier de Dieu, car ii dit que ce n'eft quaüré convenable' aux pn„ces,ains aux feuls rois ,-deiquels s'ils fe gouverneur par bons confeils, s'ils abrent probué, juftice , & magnamité, Ia conféauence neceffiure eft, quod omnes adjuvtruur, fiuaum que capiant, qui cum Mis commercium habmt. >»  sous Charles IX. 415 Et pourtant , Sire , votre peuple vous fupplie trcs-humblement de fouvent ramentevoir tels dircours, de fouvent confidérer & pefer, ce qu'emparte ce nom Sc titre de roi , & ce qui eft advenu de difgraces a plufieurs rois , pour n'avoir bien regné, ni fagement commandé. Et d'autant , que votre peuple vous voit tout bien acheminé pour regner , & fi bien confeillé , comme il 1'aiTure d'être bien régi, il vous fupplie, vous aflure d'être bien obéi, Sc de penfer a ce dont les anciens fe font émiffés; qui eft que , aux adminiftrations des royaumes, bien fouvent ont fait fous prétexte d'un faux profit , & d'une faufte utilité pour laquelle plufieurs ont été rétirés , de ce que la vsrtu Sc la raifon leur commandoit. Car , rapportant ce coips myftique dont vous êtes le chef, Sc vot.e peuple les membres a un corps naturel , comme font les anciens fages ; comme fi tout ainfi que , fi un chacun membre du corps naturel cuidoit prévaloir, prenant pour foi la nourriture du prochain membre ; il faudroit dans peu de> tems que tel corps fut débifité & mourut. Auffi en ce corps myftique , vous , Sire, qui en êres le chef fi tombiez en telles erreurs , Sc cecites que raffoibliftement de. votre peuple  4lff E T A T S fut augmentation de votre grandeur , dans peu de tems, s'enfuivtoit que tant vous que votre peuple, feriez a neant , & auriez pris fin; chofe que les mêmes fages ont connue être non - feulement accidentelle & confidérable , mais de néceifaire conféquence , partant de perpéruer, on bientót voir la fin du royaume, ou république. 'tQui a été la caufe que tous s'attachent a deux préceptes de P'aton , dont Ie premier eft que les rois ou adminiftrateurs , prennent tellement garde a la commodité du peuple , qu'ils rappottent tout ce qu'ib feront k icelle, oubliant leur plaifir ou profit particulier. L'autre qu'ils traitent le mal en défaut qui peut-être au peuple par intégralité , ne laifTant une partie pour l'autre , car qui ferait aufrement , ce ne ferait qu'engendrer partialité & fédition. Et c'eft pourquoi autres ont écrit, qu'un prince & un roi doivent travailler a ce que mê.nes affaires occurant tous les jours , ils ne fe laiffent trompet. Donc peur avoir pris occafion: Oduvius Auguftus , cujusfczlicitas cattris , fait optata prbu cipibus , quand il fe moquoit des rois oui alloient pêcher avec des filets & tiftmmew d'or;l'ufage & le dtgat defquels on ne pouvait  sous Chakies IX. 417 être récompenfé par quelque prife ou pêche qu'ils fiffent. Et les autres difent que les royaumes doivent être tellement adminiftrés, que 1'homme envers Dien , & 1'amitié envers les hommes , foient appercus; car de la violence Sc oppreflion du peuple , s'enfuit volontiers que les violents Sc opprefteurs du peuple, viennent enfin a fervir & tandis qu'ils commandent , font toujours en crainte, eontendent Sc combattent leurs fujets Sc citoyens, fe défient de leurs plus proches , de'ceux mêmes ès quels ils commettent leur garde , ne s'en craignent moins que de ceux qui les guettent. Et pour ce fe perfuadent les fages qu'il n'y a vie' fi niiférable que de rois qui regnent avec fang SC violence , Sc qu'il n'eft plus mauvais Sc moins durable gardien d'un royaume que la crainte. Comme la . meilleure garde & force pour le roi , eft la bénévolence de fes fujets, car, difent-ils encore, que pour un tems les Ioix Sc la liberté honncce femblent être fubmergés & foumis, fi eft-ee que tout cela'reviert qiietquefois. Qui peut avoir occafionné 1'empereur Amonius Pius, quand averti- qu'il fut dVne eonjuraticn qui fut dée'ouverte , il prohiba d'efi-  4*$ E T A T s quérir plus avant : ne plures innend odium augerent. Et depuis , Probus qui difoit ne lui être plus befoin de gardes , n'ayant plus d'ennemis , comme il fe promettoit par fa vertu n'en avoir jamais. Auquel difcours , Sire, tant vous, que votre peuple, pouvez prendre argument raifonnable de beaucoup efpérer, car comme tant vous que vos prédéceffeurs, avez toujours recherché 1'amitié en yos fujets, & par le moyen d'icelle, grace a Dieu, augmenté 1'état du royaume, de même vos fujets fans menterie ni flatterie, peuvent dire qu'en eux eft nee la plus volon taire obéiflance qu'un autre peuple quel qu'il foit ait eue , & qu'en eux ne fe trouve nul exemple & mémoire d'avoir févi en la perfonne de leurs rois, ce cjui fouvent eft avenu a plufieurs autres peuples , en quoi, Site , très-humblement ils vous fupplient de Vouloir continuer &c les vouloir maintenir en talie & fi bonne volonté. . .. ... Et, par ce , Sire , qu'a 1'imitation de JulesCéfar , vous pourriez delirer que votre peuple, non-feulement ne fut lézé, mais hors de tout foupcon de mal ; ce qu'aucuns qui croient plus facilemeut Ie mal que le bien ne fe pourroient  sous Charles IX. 419 perfuader a caufe des commotions & divifions, fous prétexte de la religion , qui ont paifé, lefquelles ne veut votre peuple nier, moins excufer, comme en étant bien Sc nullement compulfes de tels confeils Sc levées. Si eft ce qu'ils vous fupplienr très-humblement, Sire , d'entendre que les bons & vrais juges, lorfqu'ils veulent procéder a la punition d'un crime ou maléfice , tachent prineipalement k favoir qui a donné Poccafion , Si d'ou elle peut avoir procédé fur quoi, li on fe rapportoit a 1'opinion d'aucuns anciens philofophes , on poutroit dire : Sic erat in jaclis, Sc avec Aufone : Certa fi deer et a, eji forti, quid can ere proderit. Et Titus Vefpafianus, lequel ne voulut oncques punir ceux qui avoient contre lui afpiré a Pempire. Dicent principatum facïo dari, Suetone Ulo. Et Ci on fe rapportoit k autres philofophes ayant connoiflance du vrai Dieu, ils diroienc que c'eft fa permiflion , qu'entre le peuple naiffent fchifmes, contentions Sc fcandales , pour 1'approbation des bons. Et fur ce prenanr argument , LacTrance dit que c'eft de la prédiction de Jéfus-Chrift , & de fes vicaires , que plufieurs fectes Sc héréfies devoient être , qui meneroienc le pauvre peuple fimple en ténébtes  4J° E T A T S & Ie conduiroient dans des voies toutes contraires aux fiennes , & en tous les deux cas on voudroit ptétendre , que tant moins tels ave', nemens font communs que les caufes en font ótées. Les ©ccafions pour lefquelles au palfé en France le peuple s'ejft émeu, ca été pour nonvelles inventions de fautet le peuple , tant a force de changemens, emprunts, fubfides qu'autrement; & pour cette occafion , depuis l'an M50 jufqu'en Fannée 1581 , s'en trouve neuf bien étranges, fans comprer celles qui ont été depuis, a quoi s'il falloit avoir égard, il y auroit beu de s'en prendre a tels nouveaux inventeurs, grands dépenfiers & exécrables exacFeurs. Ne pouvons douter que ceux qui fe font dernierement émus fe couvroient du prétexte de religion, car ce ne feroit chofe nouvelle ains long-tems y a entre autres chofes connues , qu'aucuns eulfent pris faux prétexte, fe fentant opprimés des calamités pafièes , Sc fe fuftenc retirés a 1'occafion & ombre de religion , qui leur fembloit avcir plus d apparence pour amener un changement. Et cela celfant, fi on confidere le peu de devoir que les anciens miniftres de la religion onr bit, c'eft certes le vrai but , c'eft 1'occafion du mal  sous Chari.es IX. 451 le peu d'inftrucFion qu'a le peuple, & beaucoup de mauvais exemples que 1'on a eus. Auquel propos votre peuple , Sire, protefte devanc votre majefté , qu'il n'adhere & ne cherche de mauvaife opinions , vivant fous votre obéiflance Sc foi de l'églife générale chrétienne & catholique défire qu'en actendant le concile général, & en défaut d'icelui lenational, qu'il vous fupplie de procurer & faire tenir, il vous plaife procéder a la réformation des mceurs d'aucunes chofes qui efi le propre de votre devoir & autorité, que les rois de France, comme protecFeurs Sc fondateurs de la plus grande partie des églifes de France , ont accoutumé. Ce n'eft chofe nouvelle que pour eet efFet fi foienc propofées plaintes en alfemblées publiques ; car felon Fhiftoire de France, autant en fut fait du temps de Philippe-le-Bel, pour la réformation des perfonnes religieufes Sc eccléfiaftiques qui abufoient telletnenr de leur autorité , qu'en telle affemblée la reine oppinant la première fut d'avis de leur óter la jurisdiétion, ou a tout le moins la moindrir; toutefois le roi Philippe , a 1'imitation de fes prédéceffeurs rois très-chrétiens, qui la leur ont donnée Sc maincenue , protefta que telle  45 * E T A T s aftemblée n'étoit faite pour amoindrir les droits des perfonnes eccléfiaftiques, ains plutot pour les augmenter bien pour amender leurs fautes & erreurs. En paravant lui , le roi Louis , furnommc le Gros, comme il eft dit, perdit fon fils ainé, Sc délaiifa fon royaume a fon autre fils Louis le Jeune ; & entr'autres chofes qu'il lui confeilla commanda, fut de maintenir a fon poflible les miniftres de Dieu Sc de fon églife. Ce que depuis fit le roi Saint - Louis , par un écrit qu'il laiffa au roi Philippe fon fils , depuis trouvé aux archives du roi Charles V, par lequcl.confeillanr que principalement il procurat que ceux qui avoient magiftrats en fon royaume avec fon peuple ne fuffent travaillés; plus principalement lui recommanda les perfonnes dédiées a la religion Sc au fervice de Dieu. A cette caufe , Sire, votre pauvre peuple vous fait trés humblement fupplier qu'a 1'imitation de ces bons rois Sc autres vos prédéceffeurs rois trés chrétiens, il vous plaife vous vouloir maintenir en ce titre de roi très-chrétien , Sc en FafteéHon vers la religion Sc bons miniftres d icelles en quoi votre peuple Sc tiers-état vous omrent tout ce qui eft en leur pouvoir , jufqu'a  SOUS C M A R t E s IX. 433 Jufqu'a n'y épargner ni vie ni bien , revenanc donc a la propofition de telles fautes. Semble. a votre peuple & tiers état qu'outre les miniftres d'icelle églife , ttois vices Sc défauts y pullulent, principalement & qu'iceux rejettés amendés, on doit efpérer une fimple, pure 8c bumble reverfion a norre fainte églife; lefquels défauts font principalement 1'ignorance , 1'avarice, & fuperflue dépenfe ou pompe des miniftres. Quant a 1'ignorance commune de la plupart de ceux qui tiennent les premiers lieux en l'églife jufqu'au moindre , elle eft fi notoite qu'il xi'y a üeu de le révoquer en doute. Comme aufti 1'expérience montre outre Ie iémoignage des anciens que 1'ignorance eftncnfeulement la mere, mais la nourrice de toute ettêur; 8c dit Platon après avoir entrepris de faire un long difcours , pour montrer que c'eft par 1'ignorance que de trés-grands potentats ont été perdus, & que de même caufe femblables événemens peuvent en fuivre. Partant que tous les légiflateurs- doivent travailler a donner a leurs citadins la prudence 8c óter d'entre eux 1'ignorance. L'ignorance ayant été connue telle , les an-" eiens décrets Sc eonftitutions de l'églife y ont Tornt X, £e  4J4 £ T A T S voulu pourvoir, non-feulement par bonnes ordonnances , mais par nouvelles érections de nouveaux officiers enchacune églife cathédraleou collégiale , quand furent faites & dreffées les maitrifes d'écoles, & plus fraichement quand l'églife gailicane a voulu que la tierce-partie des bénéfices appamnt aux gradués nommés , & qu'en chacune églife cathédrale gailicane , il y auroit une chanoinie tbéologale pour un lecteur. Ce que toutes fois 1'on voit n'avoir eu tant d'effet par le pafié que 1'on ne voie aujourd'hui la plus grande part des miniftres non feulement être ignorans, mais que c'eft la même ignorance,tellement que les mceurs corrompues ont amené un tel dédain de prêcher Sc enfeigner, i quoi plus principalement ils font appelles; Sc de tant puiflant grand Sc tiennent plus gtand lieu rant plus y font tenus, qu'il femble être contre la dignité d'un grand prélat, non feulement de fouvent officier , mais encore plus grande honte de prêcher & enfeigner. Et prenant 1'exemple des plus grands, même les fimples curés le dédaignent Sc lefont faire pat des pauvres gens ignorans& prêtres indigens, lefquels toutes les fois qu'ils difent les meffesparoiffiales ne difent Sc ne remontrent qu'une même  sous Charlhs IX. 435 chofe «5c ne font qu'une même remontrance , laquelle ils font fervir a. tous fermons «Sc a toutes faifons. L'autre défaut eft 1'avarice qu'on y voit autant <5c plus notoire , tant aux chefs qu'aux membres, & fait bien a propos que ceux qui les premiers porterent les pécunes en Lacédémone furent comdamnés a mottjiSc leurs oracles difoit aThéopompus que les murs de Sparte ne feperdroient jamais que par avarice. L'autre vice que 1'on voit aujourd'hui pulluler entre les perfonnes eccléfiaftiques, eft le luxe «5c la fupetflue dépenfe «5c pompe des prélats, qui par-la cuident repréfenter la grandeur de Dieu par leur grande autorité, bien que ce foit tout le contraire qu'ils le doivent repréfenter par foi & intégrité de vie, comme fut connu par le feu de bonne mémoire Louis , furnommé le Pitoyable, roi Sc empereur. Et au troifieme «5c quatrieme concile de Cartage , fous Innocent, pape premier de ce nom, affifta Saint-Auguftin , «5c fut ordonné que les évêques auroient prés le temple leur petite loge garnie de pauvre ménage & vivroient petitement; la oii aujourd'hui on voit tout le contraire ; mais y auroit plutót lieu d'entrer en. eomparaifon d'entre eux Sc les anciens rois Ee %  43^ E T A T S d'Orient Sc das lades qui recurent tant de vitupere d'une magnificence fi grande. Les aréopagiftes, ceux mêmes auxquels le vrai Dieu éroit inconnu, faifoient profeifion de mefurer les religions, non par fimplicité & grande dépenfe , mais par une exacte Sc curieufe obfervation, ce que les premiers inftituteurs leur en avoient laiffe, fans permettre qu'aucun point y füt ajouté ou diminué. Et ce fufdit roi Débonnaire fit une fpéciale conftitution & ordonnance pour les gens d'églife; d'eux s'habiller Sc orner pour diminuer telle pompe Sc fuperfluité comme chofe déplaifante i Dieu , & qui engendroit grand dommage a votre peuple. Et combien que les gens de la juftice foient du tiers-état & qu'il y eut quelque apparence de propofer premierement ce qui concerne la nobleffe, fi eft ce qu'en confidération, de ce qu'entre les miniftres de la juftice pareils défauts requitrrent réformation , Sc que la juftice eft partie de la religion délaiffant a ci-après de parler de la nobleffe. Votredit peuple, fire, vous fupplie trèshumblement d'entendre qu'il s'apparoit comme la principale colonne fur laquelle on fait les royaumes Sc républiques être foutenus, eft la  sous Charles IX. 437 juftice «5c les anciens ont dit , écrit & enfeigné, que Jupiter même ne pouvoit bien gérer un principal fans juftice, «5c que 1'oracle de Chelon étoit fort confidérable; lequel affuroit qu'un prince devoit concevoir en fon efprit les plus grandes & immortelles chofes, favoir, eft la juftice. En laquelle juftice, on voit principalement lefdits ttois vi.ces pulluler. Quant a 1'ignotance, 1'on pouvoit ramentevoir qu'Ariftipus a été loué , «5c lui eft attnbué apophtegme , qu'étant interrogé pourquoi feroit meilieur 1'enfant inftruit «5c dode , c'eft afin, dit-il , qu'en théatre on ne voit une pierre aflife fur les autres, paree qu'un ignorant «5c indocte , c'eft la meilleure comparaifon eft prefque une pierre & non autre chofe, «Sc pour ce , elle demeure a un fi grand détriment du peuple qu'il n'y a aujourd'hui chofe dont il fe puifle fentir fi grévé « foulé que de ce qui advient par magiftrats ignorans. Car après avoir dépendu chofes infinies, tel fuccombera en fa caufe qui a bon droit , Sc puis lont contraints de rentrer en rétraftion de jugement, & a fes fins en plus grande dépenfe que jamais qui eft leur entiete ruine Sc perte. Ee j  43^ Etaii Et qu'il y ait tant d'ignorance, la faute a commencé de ce qu 'a ce qui fe doit recouvrer par vertu fe recouvre par argent, Sc le défaut de favoir eft fuppléé par les richeffes, pourvu qu'on ait des finances , il importe peu qu'on ait dü favoir qui eft vraie perte entre le peuple, Sc contraire aux anciennes Sc nouvelles ordonnances de France Sc établiftement de la juftice. En ce qui concerne l'avarice, le pauvre peuple a occafion de dcfirer ce que dénroit favoir, eft qu'il eüt été au tems que premiérement les magiftrats de Rome commencoient a prendre ; car, dit-il, n'eut permis que telles gens euffent longuement adminiitré , auffi de dire que la juftice leur eft plutöt vendue que rendue. Le dender défaut entre les miniftres de la juftice eft 1'immodeftie d'aucunes Sc fuperflues dépenfes que aucuns d'eux font , tant en vetement d'eux que de leurs femmes, jufqu'a porrer plus grand état au dernier rang que lés anciens Sc 1 eurs femmes ne faifoient au premier. Car , difoient les anciens , quand ceux qui adminiftrenr Sc préfident publiquement , nonfeulement on prend garde a ce qu'ils font en public , ou a ce qu'ils font fecrettement, mais auffi de ce qu'ils font par jeu en leur maifon , leurs families, leurs femmes, jufqu'a leurs geftes Sc  SOUS C II A R L E s IX. 459 couchës , qu'on s'en enqüierc curieufèment. Ët'c'eft pourquoi Peticlès étanc demeuré magiftrat, ir changea incontinent, tant fa forme de t ivre que toute autre facon , marchant par toutes autres voies & chemin , ayant choifi cette feule Voie par laquelle on fe peut conduite au lieu deftiné pour rendre juftice. . . ^ ! Et ailleurs eft écrit qu'a telle perfonne n étoit loifible d'affifter a aucune tragédie ni comédie , afin qu'a: bon efcient ou par vu ils en fuflent avec ceux qui contreviennent a la loi. Dont peuvent avoir pris origine deux ordonnances des rois faint Louis & Philippe-le-Bel, par lefquelles les magiftrats & officiers de }a juftice font prohibés jouèr ès-dez ou carrés, ne eux trouver ès tavernes ès lieux diflolus, & partanc eft loué ce fage 'empereur romain., de ce qu'il démit uh quefteur, paree qu'il entendit qu'il s'employoit a danfer & gefticuler. Et c'eft pourquoi les anciens n'ont trouvé étrange que le fenat aréopagifte ait été le plus excellent de toute ia Grece ; car, difent-ils, en cette compagnie , n'étoit recu aucun, s'il n'étoit né d'honnete lignée , & qu'il n'eut longuement fait preuve de fes vertus. Pourquoi fupplie très-humblernent votre majefté , comme de chofe très-néceffaire , qu'il vous plaife de commahd'er a tous vos jufticiers 'en Ia E e 4  I T A T S juftice, de quelque qualicé qu'ils foien de {e réformer entre eux pour ce regard au plus près de ce que leurs prédéceffeurs faifoient, & ne fe trouver e„ mafquerie,/eux de paumeou autres, porter chauftes ne autres habillemens découpés chennfes rabattues, ceuvrées de diverfes couleurs mies; femmes fi communément, tant de robes de velours & tout autrement habillées & modeftes; que leur intégrité & modeftie foient fi apparentes eu toutes chofes, que ce foit au pauvre petiple exemple fuffifant pour leur réformation. Auffi que 1'édit de „e porter foie fur foie, & b forme a un chacun de s'habilfer, fait par le roi Henr» votre pere , foie étroitement entretenu avec mdiction&multiplication de peine contre les infracteurs & ceux qui font chargés de le faire entretemr & efpere Ie pauvre peuple que s'il lefdus trois vices en la religion Sc en la /uftke votre felicitéferadefiréede tous les princes & rois vos fucceffeurs. Quant l Ia nobleffe, il eft certain qu'elle a pris ongme Sc commencement de ia vertu ,& que les honneurs & autorités qui appartiennent L „Q. bles, leur ont été donnés en confidéution de la défenfe qu als étoient, comme font tenus faire & porterdu peuple, &a leur décharge leurfervir,  sous Charles IX. 441 fur ce ès guerres, ce que fi tous les nobles de France ont fait, c'eft le jugement des princes «Sc grands feigneurs quientcommandc;& voyant le grand nombre de la nobleffe , laquelle fi pareillement faifoit fon devoir, cuider le pauvre peuple qu'elle fuffiroit pour rélifter aux ennemis. Néanmoins ils voient que par le paffe , durant les guerres , tant de chofes finiftres font aucuns «^'étrangers avoir été foldoyers, & pour ce tant d'impofitions prifes fur le peuple , qu'il eft contrahit de s'en douloir devant votre majefté. Et a ce propos vous repréfenter qu'en la nobleffe , pour le regard d'aucuns , les anciens ont obfervé qu'il y en a qui conftituent la nobleffe en une nonchalance qu'il femble a une telle maniere de nobles que c'eft a eux grand avantage de compter des vaillances de leurs majeurs , d'être richement vêtus, affis ès lieux éminens & plus honorables , avoir des chateaux fuperbement! ba" tis & fomptueufement parés, & toutes autres chofes qui ont en foi plus d'admiration que de nobleffe. Car les anciens Romains fur lefquels les vaillans plus communément fe patronnent, faifoient tout le contraire , & pour un acte digne de chevalerie fait en la guerre , fe contentoient de recevoir quelques petites bagues, épingles ou  441 E T A t s quelque autre chofe femblable, pour monument & enfeigne certaine de leur vertu , fans s'amufer a toutes telles autres fomptuofités. Qui a été la caufe que Diogene fut grandement loué, quand il eut dit que telle noblelTe n'étoit que prétexte & manteau de malice. Quant au tiers-état & au pauvre peuple, en ce qui eft en foi, meffieurs, il vous fupplie trèshumblement, Sire , de croire qu'il eft appauvrf** «5c furchargé; qu'il ne lui refte que le feul nom «5c la feule vie pour être employée 1 votre dévotion «Sc fervice , dénué de route chevance. Et partant qu'il vous plaife prendre exemple a ce que par une grande louange on récite de Darius fils de Xerxès roi de Perfe , qu'en routes chofes périlleufes & douteufes, il y a eu en lui plus de prudence qu'en plufieurs autres, même A impofer tribut fur fes fujets, 8t qu'il faifoit toujours par avis «Sc confeil Sc non autrement a les lever il gardoit telle modeftie , qu'il faifoit inquifition avec les princes & gouverneurs des provinces , qui avoient tout commandement dè nullement grever fon peuple. Et encore que par telle inquifition fe trouvoit qu'il n'y avoit aucun impót exceffif, néanmoins il ne permettoit être levé , finon la moitié de ce qui juftemenr avoit été impofé; car, difoit-il,  sous Charies IX. 44? plus grande richefle lui étoit la bonne grace de fon peuple , que legrand nombre d'argent. Et Tybere Céfar, quand par fes officiers SC gouverneurs-fut follicité ne charger fes provinces, il répondit faifant comparaifon d'un bon rol'aun bon pafteur , qu'un bon pafteur fe doit contenter de la toifon- de fa brebis, fans Ja perdre Sc 1'engloutir. Et des Aréopagiftes il eft récité , que connoilfant combien il y a de mal Sc danger a impofer Scexigerdes tkfecfe dÊfln&u* k fublicavcüi^libus. Donc , Sire , comme la différence d entre vous , votre regne , votre peuple Sc les fufdits, eft Grande aux barbares & infideles , aux tyrans de leurs peuples , fujets par force & non de leur bon gré Sc volonté ; vous , sire , iffu de li bonne part, vous , Sire , très-chrétien , vous vrai rol, combien eft - il plus raifonnable que vous les outrepaffitz,& bénignement traitiez votre peuple SC le foulager Sc maintenir , en quelque moyen de vous faire fervice, comme ils ont très-grande affe&ion. % Sire , une des chofes moins convenables a üh'roi , c'eft qu'aucuns ne partent de lui Sc de devant fa majefté mal contens ou triftes, ce que pourroit faire votre peuple , fi d'aventure leurs  "*44 E t A T s députés & délégués retournoient èspays & pro^ vinces d'oü ils font venus i fi grands frais fans réponfe raifonnable , fur les requêtes & demandes qu, vous ont été faites préfentement, & autres contenues en leurs cahiers. Chofe qui pourroit, outre Ie dommage de votre état public , mettre pour Favenir votre peuple hors d'efpoir d'obtenir par aucun moyen de votre majefté, ce qu'ils verront. êtte néceflaire pour votre fervice. Et partant, fire, il vous fupplie trés-hum; blement ayant égard i ce & a la pitié de votre pauvre peuple, ii vous plaife, ayant recu leurs cahiers, ordonner la réponfe fur iceux telle que votte peuple attend de votre bonté , Sc de tant Jlus il pnera Dieu pour votre profpérité Sc lante. PKOcks-yERBAL contenant ks ordonnanceSi aflcs , comparhions & autres chofes faites & ordonnces par les députés du clergé de France «ffemblés a Orléans , pour comparoir devant li roi en 1'affemblée générale des trois états. Le mardi dix-feptieme jour de décembre «1.1 anq cent foixante , le clergé Sc état eccléfiaftique de France étanc affemblé au couvent des  '8 o U S C H X X t E S IX. 445 fcordeliers d'Orléans, les perfonnes des députés des provinces, archevêchés, gouvernemens SC pairies ei-après nommés & déclarés. Pour fatisfaire au mandement du roi , qui avoit ordonné les trois états de fon royaume être affèmblés, premierement en la ville de Meaux , Sc depuis alfignés en ladite ville d'Orléans, ont, d'un commun accord Sc confentement, voulu Sc ordonné que pour la conduite dudit état eccléfiaftique Sc de 1'affaire qui fe préfente, feroient élus aucuns prélars de la compagnie, pour recueillir 8c recevoir les voix Sc opinions defdits députés Sc conclure felon les avis , 8c de la majeure partie d'iceux , de ce qu'il conviendra faire. Seroient auffi députés quelques perfonnages, pour rédiger par écrit les expéditions , ordonnances Sc conclufions qui feroient faites par 1'avis dudit clergé, 8c en bailler acte a qui il appartiendra. Lefquels du clergé unanimement ont prié Sc requis Sc de fait ont élu Sc nommé très-révérends peres en Dieu, meffeigneurs Simon dc Maillé, archevêque de Tours , Sc Gabriel U Feneur; évêque d'Evreux • lefqaels en ont accepté la charge, déclarant expreflement que la forme de la féance ou du patier , ni autres chofes quelconque qui feroient faites en ladite atTetoblée,  44^ E t a t 5 ne porteroient aucan préjudice aux privileges; prééminences, prérogatives & autres droirs quelconques de tous lefdits états, provinces , diocèfes , gouvernemens & pairies ; ni a aucuns d'eux en général ni en particulier , Sc en onr lefdits du clergé voulu «5c accordé , que lefdits feigneurs archevêque de Tours Sc évêque d'Evreux , puilfenc «5c leur plaire commettre Sc députer tels perfonnages qu'il leur p]aira j pour mettrs «5c diriger par écrit lefdites expéditions Sc ordonnances, «5c en faire acres Sc tous regiftres, peur. en aider , bailler copies «Sc extraits a ceux dudit clergé qui en voudroient avoir. Lefquels feigneurs ont nommé «5c commis pour dreffer «Sc rédiger par écrit les ades du jourd'hui, révérend pere en Dieu mellire Jacques de Brenan, Abbé de Bois-Aubry, chanoine «5c official de Tours «5c vicaire dudit feigneur archevêque. Et pour le jour fuivant, ledit fieur abbé de Bois-Aubry & Me Francois Legier, fecrétaire dudit feigneur archevêque. S'enfuivent les noms des députés des provinces , archevêchés «5c évêchés «5c gouvernemens qui ont comparu en ladite affiemblée, les jours «5c an que deflus.  sovs Charles IX. 447 Pour U province & pairie de Reims. Noble Sc vénérable Me Nicole Prifon , dodeur en théologie , & Jean tEpaulatd , doyen de Soiflons , députés pour le clergé du bailliage de Vermandois. Me Nicole Breton , doyen de Noyon , députe pour les chanoines Sc chapitre de Noyon , pairie de France. Nicole Griveau, doyen Sc chanoine d'Amiens, & Robert Tournier, dodeur en théologie & chanoine dudit lieu, députés pour le clergé du bailliage d'Amiens. Jean Carpentin , doyen Sc chanoine d'Abeville , Sc Honoré Bris , chanoine dudit lieu ; dépuis pour le clergé de la comté Sc sénéchauffée de ponthieu. Jean Brigard , doyen Sc curé d'Orbais, député du clergé du bailliage de Vitri. Dom-Pierre Ponchin , prévot de 1'abbaye du Mont Saint-Quentin , député pour le clergé de la prêvbté de Péronne. Claude Orgueil , doyen de faint-Thomas de Crépy , député pour le clergé du bailliage de Valois. Nkolt deMoufz, doyen & chanoine de Cler-  448 E T A T s mouten Bauvoifis , député pour Ie clergé, & bailliage de Clermonr. JoJJe Ciamerel, religieux, dodeur en théologie ■ abbe de Sainr-Juft , 8c Jem de Moufl > de Senhs pour le diocefe & bailliage de Senlis. Florem-Brunel, chanoine & chantre de l'églife de Terrouanne, tranflaté X Boulogne , déouté pourkfénéchaulfée de Boulonnois. ? Lugle de U Morliere, doyen de Montdidier, depute pout le gouvernement , & ptévöté de Montdidier. Pour la province de Tours, & duché dt B&etagn e. Meffire, ttès - révérend , Simon de Maillé, archevêque de Tours, & révérend pere en Dieu. 7 3a,« députés  SOUS C H A R L B S IX. 445 députés du diocéfe d'Angers , & fteié''Nicote Cailleau , religieux , ordre de faint Bénoit 8l 'autres de faint Auguftin , Prémontré 8c Citaux du diocefe d'Angers. Me PUrre Chonard , tréforier & chanoine de Tregnier jj député pour tout le clergé diidit diocefe. Me Jean-Parcenaux , député pour' le clé'rgé de Cornouailles. : Révérend pere ■ en "Dieu y Philippe diï Bec t évêque de Rennes. Noble & vénérahle Odvier Montauban, abbé de la Chauiine. René de Ia Haye, abbé de faint-Aubin , 8c députés pour Je clergé des neuf'évêchés' de Bretagne1," pour les états du pays. Pour la. province de S E N s. Noble 8c vénérable maitre Cknflóphe d'Illkres, chancelier de Punivedicé de Touloufe- & vlcaire général- de FarchevêqW de fens, & Claadrde Maucourt, chanoine-de l'églife diidit lieu ; députés pour ledit axfch'evechéV Ledit fieur d'Miieres , -député pour Ie clergé de Melun. ( v - ' André de granmont, député pou'r le clergé de Provins. ' Nicole Card'mau grand archidiacre de Sens^ Tome X. ff  45° E T A T $ curé de Poligny , député pour le clergé de Nemours, & Chateau-Laudon. Francois - Martin Boulanger, chanoine , & Pifloris, docteur en théologie, députés pour le clergé de.Montargis. Maïtre Jean Tarel, curé de Saint-Martin, 'Sc Anus le Long, chanoine de l'églife collégiale de Notre-Dame d'Eftampes députés pour le clergé d'Eftampes. Jean - Quintin , doéteur , régent & doyen de la faculté de droit , de la faculté de Paris. Pierre Hubert, chanoine de Paris. Nicole Griyau, doyen d'Amiens. Jaeques le Noir , curé de Saint-Jean en grcve, a Paris, députés pour le clergé de Paris. Michel Boucher , fous-doyen de 1'Eglife d'Orléans. Pierre Mimebel, Sc Matthieu de la Saujfaye, députés pour le clergé d'Orléans. Louis Charpentier, docteur en théologie. Jaeques de Montelon , grand archidiacre de Chartres , dépi tés pour le clergé , Sc diocefe de chartres. Jaeques le Vafior , Sc Jaeques le Roi, députés pour le clergé de Blois. Gabriel Dupuis Herbaut , député pour Ie clergé de montfort. Pierre de Sabaterey , vicaire général de Monfeigneur i'Illuftriftlme Cardinal de Bourbon , au  SOUS C « A R t E S IX. 451 vicariat de Pontoife ; & Francois de Mauger , députés pour le clergé dudit Mantes. Vakntin Btrnier , curé & official de-faint Hylaire de Nogent-le-Rotrou , députés pour le clergé dudit lieu. Etienne le Mochkr , chanoine de faint Etienne de Dreux, député pour le clergé & bailliage dudit lieu. 9 Audebert Maceri ; docteur eu théologie > curé de Jouy , & Etienne Ckibsu , prieur de Grandchamp , député pour le clergé de Meaux. Antoine Pericard, archidiacre & chanoine de l'églife de Troyes, député pour le clergé dudit Troyes. Hugues de Bertaut, dit de bois verd, pour le clergé de Nevers. Pour la province de B o VR GES. Nobles & vénérables Jean Dupont, chanoine, & fous chantre de l'églife de Bourges , &C Jean de Montenay , prieur & doyen des églifes de Mont-lugon i député par le clergé Sc diocèfe de Bourges. Me Etienne Mangin , chantre de l'églife cathédrale de Clermont, Sc Anne de Lacheval, abbé de Vailgue , députés pour le clergé dt diocefe de Clermont. Ff *  45* E T A T $ Franfois Boyot , fous-chantre en 1'églife cathédrale de Limoges , Foucault plaifant alias de Bouchia , protonotaire du faint fiege apoftolique de Rome , & Jean de Veillam, aumönier du roi ; prieur curé de Surêne , député pour le clergé du diocefe de Limoges. Antoine de Pofoly , prieur de fainte Afrique, député du diocefe de faint Flour. Jean Sabatieres , chanoine en l'églife cathédrale de Rodez , député pour le clergé des diocefes de rodez Sc Vabres. Frere Louis de Montalembert, abbé de Souillac, aumönier fervant du roi. Antoine Régour, archidiacre de Cahors , & M. de Bardalliac, chancellier de 1'univerfué de Cahors , député pour le clergé du diocefe de Cahors. Pour la province de B O R D EAUX. Nobles & vénérables perfonnes Me Franqttis de Sallignac , grand archidiacre Sc auditeur dudit Bordeaux, Sc Guillaume de la Chajfagne> chanoine de ladite églife , & archiprêtie d'entre Dordaigne , députés pour le clergé dudit Bordeaux. George de la Trimouille , abbé de faint Loup. Sieur de Rayau Sc Antoine de la fayette , chanoine de l'églife de Poitiers, chantre de  sous Charles IX. 45$ Périgueux , députés pour les diocefes de Poitiers , Lucon & Maillerais. Francois de faint Gelas , doyen de l'églife d'Angoulême, abbé de Bourgournée , député pour le clergé d'Angoulême. Me Gotonntt de Lauriere, chanoine de Périgueux , & Allaïn de Ferrierc , abbé de faint Amaudan , & chanoine de l'églife de Périgueux , députés du clergé de périgueux. Géoffroi d'Jnglier, chanoine & chantre dè l'églife de Xaintes, & René d'Jnglier , prieur de faint André , au pays d'Aunis , gouvernement de la Rochelle & pays 8c diocefe da Xaintes. Frangois de Belagier , abbé Déyffes , & Bernard de la Touche, abbé de Blémond , députés du clergé d'Agen. Pierre de Beygnac , official de Sarlat , député pour le clergé dudit lieu. Louis Dubuc, chanoine du Mas d'Agénois., 8c Giraut Bajuchent, curé de Fougerole , député du clergé du diocefe de Condom. Pour la province de Rouen. jj Nobles Sc honorable perfonne , Me Claude Capuis, chanoine 8c chantte de rouen , député du clergé de Rouen. Ff 5  454 E t a t s Raben Boutran, docteur en théologie, député du clergé de Caux. Philippe Mu/lel, dodeur en théologie, & Jean d'Jrgouges, curé de Vaubadon , députés pour le clergé de Caen. Meelas de Pierrepont, chanoine de Coutances, député pour le clergé de Cotentin. ^ Révérend pere en Dieu Me PUm Duvalt cyéque de Séez , député du clergé dudit diocefe. ^ Révérend pere en Dieu Me Gahriel le Ve-,eur , eveque d'Évreux, Me Simon Vigor, dodeur en théologie, députés pour le diocefe d'Évreux. Me Jean Dupont, dodeur en théologie , & Guillaume Legot, licentie en théologie, députés du diocèfe d'Avranche , & du bailliage de Mortagne. Me Guillaume Pinel, curé de.... député pour ie clergé du bailliage de Giron. Pour la fénêchaujfêe de Cakcassonm, cantenant dix diocefes & évéchés. Révérend pere en Dieu Francais de Faucon Eveque de Carcaffonne, Sc noble & vénérable JeandeCkambert, abbé commandataire de Villernagne,dcputés pour les trois états de ladité fenechauïTée, pour eux trouver aux états géné-  sous C h a r i e s IX. 455 raux de France , pour Fétat eccléfiaftique des diocefes étant en ladite fénéchauftée, favoir, eft 1'archevêché de Narbonne & les évéchés de ladite province , qui font Carcaffonne , Aire , Acqs, Lodeve, Saint-Pont & Aleth, pour les évéchés d'Alby & de Caftres , étant de la province de Bourges , & pour 1'évëché de Mirepoix , étant de la province de Touloufe, & néanmoins étant de ladite fénéchauftee de Car«aflonne. Pour la province d'JüCH. Noble & vénérable Jaeques de Montleron , grand archidiacre d'Auch, 8c révérend pere Jean Bemand , abbé de Serrnon , pour le clergé de Farchevêché d'Auch, & des fuffragans d'icelui étant en Guyenne. Noble & vénérable Mkhel de la Vergne, docteur en droit, fire Guülyeragwc, grand archidiacre de Cayes , député pour le clergé du diocefe de Bazas. Me Jean Jany, licentié en droit, député du clergé du diocefe d'Acqs. Pour la province de ToVLOVSE. Révérend pere en Dieu, meftire Robtrt de Ptïoé , évêque de Pamiers, & vénérable Gaf- Ff4  *>* -■■ Er ats province de Lr ON. Nobles & vénérables perfonnes, ^ W, TfW; Chan°lne & «métier de l'églife collége le de Sainr Paul , official * ^ ^ «e Lyo»!*^*, , précenteur . comre& chanoine de Lyon, députés pour le clerge & fenéchaulfée de Lyon , baillilge de Forers & Beaujoiois, étant dudit diocefe , J^ues-.harno^ dodeur ès droits, chantre & chanome d'Autun , & vjcaire géfl-raj dg •onfeigneur Pévêque dudit lieu , député du clerge & diocefe d'Aurun. Révérend pere en Dieu, Me francais Maugerard, évêque de Negrepont , dodeur en théologie, chanoine de Langres , député pour le cerge & l'églife de ladite ville, & poUr le derge du batlliage de Bar-fur-Seine, diocefe de Langres. Ui Amdm Le **> «odeur théologal de  S O V S C H A R. ï. Iis IX. 4S7 Chalons, député pour le clergé Sc diocefe de Chalons-fur-Sóne. Noble Sc vénérable Me Philippe Gayant , archidiacre, chanoine, official & grand vicaire général de Macon , député pour le clergé Sc bailliage de Macon. Frere Jean Locquet, abbé de Moriraont j docteur en théologie , Sc Me Adrien Roye , doyen de Chaumont, députés pour le clergé Sc baillage de Chaumont en Bafligny, étant de ladite province de Lyon. Frere Claude de Crets, doéteur en théologie, député pour le pays & duché de Boutbonnois , étant de ladite province. Frere Pierre Dorfy, docleur en théologie Sc prieur de Baudechoux, député pour le clergé Sc bailliage de la Montagne, étant de ladite province. Me Martin du Puy, doyen d'Avalon , député pour le clergé du bailliage d'Auchois. Pour le pays de Da v p hin é, contenam deux provinces, favoir , eft Vienne & EUBRVïï. Révérend pere en Dieu meffire Aimard de Maugiron , évêque de Glandeve, Sc noble Sc vénérable Me Pierre de Colombiers , chantte Sc chanoine de la grande églife cathédraie de Vienne, députés pour ledit pays. de Dauphiné 5  45* E T A T S contenant lefdits deux provinces «Sc archevêchés de Vienne & d'Embrun. Ce fait lefdits du clergé pour préfenter au roi les cahiers des états , «Sc ld déclarer «5c faire entendre la bonne volonté, défir & aflêction que tout 1'état eccléfiaftique «5c dudit clergé a de lui porter honneur & obéilfance , <5c de vivre fous le gouvernement de fa majefté , en toute humilité , union, douceur & patience, «Sc, faire autres remontrances en tels cas apparrenans, ont nommé & élu monfeigneur niluftriflime cardinal de Lorraine, s'il lui plait en prendre la peine, & pour favoir prornptement fa volonté, lefdits du clergé ont prié mefdits feigneurs archevêque de Tours «5c évêque d'Évreux, eux tranfporter par-devers ledit feigneur cardinal; <5c en cas qu'il ne le veuille faire, ont prié lefdits feigneurs archevêque & évêque, ou 1'un d'eux en vouloir prendre la peine, Sc oüils s'en voudroient excufer ont nommé Me Jean Quintin } docteur, «Sc doyen de la faculté de Paris;, préfent en ladite aflemblée. Pavantage paravis defdits du clergé a été ordonné que pour rédiger& mettre tous les cahiers defdits provinces, archevêchés , évéchés Sc gouvernemens «5c un chacun defdites provinces «5c archevêchés , députeront deux ou trois pour le plus lefquels comparoicront vendrediprochain huit heuresdumatin  soes Charies IX. 450 audit convent des cordeliers en la falie du réfectoire dudit lieu , pour ülec ou autre lieu qui fera avifé par mefdirs feigneurs archevêque de Tours Sc évêque d'Évreux, dreffer Sc rédiger tous les cahiers en un, pour tout ledit clergé Sc état eccléfiaftique de France , aux chargss Sc conditions & refervations fufdites. Et a 1'inftant iflue de ladite congrégation & lefdits feigneurs archevêque de Tours Sc évêque d'Évreux , fe font tranfportés par devers mondit feigneur le cardinal de Lorraine, auquel ont fait entendre la dévotion dudit clergé, nomination & élecFion de fa révérendiflime Sc iiluftrilFime perfonne telle que deffus. Lequel pour certaines bonnes & grandes caufes 11'auroit accepté ladite charge, Sc pareillement ledit feigneur archevêque de Tours & évêque d'Évreux fe feroient excufés, au moyen de quoi lefdits fieurs par avis, éiecFion , opinion Sc nomination deldits du clergé, auroient conclu que ledit Me Jean Quintin , demeureroit élu & chargé pour préfenter au nom defdits états les cahiers Sc articles qui lui fetoient baillés par les députés defdits états, même ceux dudit clergé, Sc faire réponfe aux remontrances du roi auxdits états , prononcées par la bouche de M. le chancelier , le vendredi treizieme jour du préfent mois de  E T A T S décembre, en la falie en laquelle lefdits états étoient congregés, en préfence du roi & de la reine fa mere, princes, feigneurs & autres de fon confeil. A la charge toutefois que ledit Quintin , auparavant que de faire ladite réponfe , la communiquera auxdits feigneurs archevêque de Tours & évêque d'Évreux, & autres députés defdites provinces, lorfqu'ils feront appelles pour rédiger lefdits cahiers en un ; ce que ledit Quintin a accordé & promis faire. Du Fendredi, vingt-cinquieme jour de. Décembre. Et ledit jour vendredi, en ladite falie du réfectoire des Cordeliers, huit heures du matin , étant ledit état du clergé de France afFemblé a 1'aflignation que delTus , mefdits feigneurs archevêque de Tours & évêque d'Évreux y préfidant, ayant été fait par eux la remontrance auxdits du clergé, de prier de rechef mondit feigneur révérendifïime & ïiluftfiffime cardinal deLorraine, de porter laparolepour tous lefdits états , aété arrêté& conclu, qu'au partir de cette afFemblée, mefdits feigneurs de Tours & d'Évreux , accompagnés de quelque nombre de ladite alfiftance , fe tranfporteroient pardevers mondit feigneur le cardinal, pour le prier de rechef vouloir faire les remontrances au  sous Charles IX. 461 roi pour lefdits états, même pour ledit clergé. Ce fait ont été appellés les députés defdites provinces, archevêchés , évéchés, pairies & gouvernemens , pour élire & nommer deux ou trois perfonnes de chacune province , pour rédiger tous les cahiers defdites provinces en un, en la forme qui s'enfuit; tous lefquels & chacun d'eux auroient protefté comme deffus, favoir eft que la féance , 1'omiffion de 1'ordre de leurs prééminences & prérogatives , ne leur pourra nuire ne préjudicier ; ce qui a été ordonné par mefdits feigneurs préfidant en ladite aflemblée , du confentement de tous après quoi. Lyon. Meffieurs les députés de la province de Lyon ont nommé noble &c vénérable Mc Benoit Buatier, vicaire-général & official de monfeigneur le révérendiflime cardinal de Tournon , archevêque dudit lieu. Révérend pere en Dieu, Francois Maugerard , évêque de Negrepont, doóteur théologal, chanoine & vicaite de Langres ; Et Me Jaeques Charnot, chanoine & vicairegénéral de monfeigneur l'évêque d'Autun. Meffieurs les députés de la province de Vienne  4*ï E T A T s & Aucun, ont nommé révérend pere en Dieu meffire Aimard de Maugiron , évêque de Glandeve, & noble & vénérable M= Pierre dc la Cohmbiere , chantre & chanoine de Ia grande églife de Vienne pour tout ie pays de Dauphiné, contenanr deux provinces, favoir, Vienne & £,„. brun. Province dc Sens. Meffieurs les députés de la province de Sens ont nommé noble & vénérable M« Chrifiopht hers, vicire-général de Sens, chancelier de Touloufe, & Jaeques le Noir, curé de Saint-Jean enGreve a Paris. Province de Bourges. • Meffieurs les députés de la province de Bourges ont nommé noble & vénérable Me Jean Dupont, chanoine de l'églife cathédrale de Bourges, & Etienne Mangin , chantre de l'églife cathédrale de Clermont. Province de Bordeaux. Meffieurs les députés de Ia province de Bordeaux ont nommé noble & vénérable Me Fran- ■ gojs de Polignac , grand archidiacre & chanoine de Bordeaux; Antoine de la Fayette , chanoine  s o v s Charles IX. 463 prébendé en 1 églife de Poitiers, & chantre de Périgueux; Frangois Gelas, doyen d'Angoulême , & Gatonnu, dit Lauritres, chanoine des deux églifes de Périgueux, ou deux des quatre. Province rfAvcH. Meffieurs de la province d'Auch ont nommé noble & vénérable Me Jaeques de Montleron , docteur ès droits, grand archidiacre d'Auch; Michtl de la Verpie, doóteur ès droits; S. de Guilleragnes , grand archidiacre de Bazas. Province de Ro ü EN. Meffieurs les députés de la province de Rouen ont nommé révérend pere en Dieu Me Gabriel le Veneur, évêque d'Évreux, &C noble &C vénérable .perfonne Me Philippe Mufiel, dodeur en théologie.- Province de ToVRS. Meffieuts les députés de la province de Tours ent nommé très-révérend pere en Dieu Me Simon deMaillé, archevêque de Tours, & révérend pere . en Dieu meffire Angenne du Rambouillet, évêque du Mans. Ec davantage pour le pays Sc duché de Bretagne, révérend pere en Dieu Me Philippe du Bee,  4^4 E t a t s évêque de Rennes , noble & vénérable Me OlU vier de Montauban, abbé de la Chaulne , 8c René de la Haye , abbé de Saint - Aubin, ou deux d'entre eux. j Province & pairie de Re ims. Meffieurs de la province de Reims ont nommé noble & vénérable Me Nicolas Griveau , doyen d'Amiens, 8c Jean l'Fpaulard, doyen de Soiffons. Province de Narbonne. Meffieurs les députés de la province de Narbonne ont nommé révérend pere eu Dieu meffire Frangois de Faucon-, évêque de Carcafïbnne ,'contenant dix diocèfes , & noble 8c vénérable Me Jean de Chambert, abbé de Villemagne , & Léonord Acquilon, prévót de l'églife cathédrale de Montpellier. Province de To ulous e. Meffieurs les députés de la province de Touloufe ont nommé révérend pere en Dieu meiïïie .Robert de Pélevé, évêque de Pamiers , & noble 8c vénérable Me Gafpard de Villeneuve , curé de Murer , dotleur en chacun droit. - j3 Leiquellesnominations faites, a été lu le cahier des  sous Chari.es IX. 465 des remontrances, plaintes Sc doléances de la province de Sens. A 1'inftant eft comparu Me Gafpard cT Any, vicaire Sc official d'Auxerre, qui a préfenté une feuille de papier , contenant les remontrances , plaintes Sc doléances de ceux du clergé de la ville de Gien, fignée de mandata dominorum Benoit, fcriba capituli, Sc requis lefdites remontrances être faites avec celles du clergé Sc état eccléfiaftique de France , fur quoi auroit été ordonné les mettre pardevant le fecrétaire pour les repréfenter, quand on fera la réduólion de tous les cahiers en un. Et advenant Fheure de dix a onze heures du matin , Sc auparavant que ledit cahier füt parachevé de lire, 1'aflignation a été continuée a deux heures après - midi de cedit jour, au logis du Sauvage , rue neuve, auquel lieu eft logé monfeigneur l'évêque d'Évreux. Dudit jour di relevie, A laquelle heure Sc lieu font comparus meffeigneurs les archevêque de Tours Sc évêque d'Évreux, Sc pareillement mefdits fieurs les nommés par les députés defdites provinces, en préfence defquels a été continuée & parachevée la lecFure dudit cahier de la province de Sens. Et ont mefdits feigneurs archevêque de Tours Tome X, G g  '4&<* E T A T S & évêque d'Évreux, parlant mondit feigneur de Tours , dit & remontré que mondit feigneur le cardinal de Lorraine pourroit porter la parole pour les états , pourvu que ceux de la noblelTe & du tiers-état y confentiffent. A cette caufe, par 1'avis Sc délibération de toute l'afliftance , ont été députés lefdits fieurs Griveau , Mufid & Mangin, pour eux tranfporter vers lefdits états de noblelTe Sc tiers-état, pour en favoir leur avis; Sc paree que ledit état de nobleffe n'étoit affemblé ici, fe font préfentement tranfportés vers le üers - état affemblé au couvent des carmes; lefquels tot après auroient fait réponfe qu'ils aviferoient enfemble , & feroient réponfe Te lendemain auxdits du clergé. Les articles du cahier de la province de Sens, parachevés , ont été lus ceux des provinces de Lyon & de Rouen. L'aflignation continuée au lendemain huit heures du matin, au logis duSauva^e. Du famedl zi de décembre. Le lendemain 21 dudit mois & an , en ladite heure de huit heures du matin , au lieu fufdit, préfidens mefdits feigneurs l'archevêque de Tours Sc évêque d'Évreux , enfemble lefdits  sous Charles IX. 4GJ feigneurs évêques de Glandeve , de Pamiers , de Carcafionne 6c de Negrepont , 6c autres nommés fufdics par lefdites provinces. Ont été lus les articles de la province de Touloufe , contenant Beaucaire , Languedoc 6c Carcaffon se. Et a 1'inftant a été remontré par mefdits feigneurs archevêque de Tours 6c évêque d'Evveux, a ladite aflemblée , qu'il feroit expédient d'aller vers meffieurs de 1'état de la nobleffe, favoir qui ils voudroient nommer pour porter la parole pour tous lefdits états ; & a cette fin ont été députés lefdits fieuts Grive.au , Muflel 6c Manginy lefquels préfentement s'y font ttanfportés. Et cependant ont été lus les articles des provinces de Bourges 6c Bordeaux. Après la leélure defquels lefdits fieurs Griveau , Muflel & Manght , ont rapporré qu'ils avoient été vers lefdits de la nobleffe étant affemblés au couvent des Jacobins, auxquels auroient fait entendre ce que deffus 5 6c leur au* roient fait réponfe qu'ils en délibéreroient enfemble le lendemain, & en feroient réponfe ledit jour. Et quelques-uns auroient auffi dit, qu'ils pouvoient bien envoyer vers lui des princes du fang, pour le fupplier de porter la parole. Et ont été lus les articles de la province Gg 2.  4^ E T A T 5 d'Auch, Sc a 1'inftant 1'aflïgnacion a été continuée audit lieu du Sauvage, deux heures après midi dudit jour. Dudit jour de relevée. A laquelle heure Sc lieu mefleigneurs les arche veque de Tours Sc évêque d'Évreux, & autres fieurs nommés comparans ; ont été lus les articles des provinces de Reims , de Vienne 8c" d'Embrun, Sc ceux de la province de Touraine Sc duché de Bretagne. Incontinent aptès eft comparu Me Jean Quintin, doéteur , lequel audit nom & comme procureur de Puniverfité de Paris , a préfenté certains articles contenant les remontrances de ladite univerlité, réquérant lefdits articles être réunis avec ceux du clergé. A quoi par les députés de la province de Sens, par la bouche dudit le Noir, curé de Saint-Jean en Greve a Paris , a été dit que ladite univetfité étoit en ladite province au diocèfe de Paris , oü n'auroit comparu. Sur quoi auroit, par 1'avis de 1'afliftance, été déclaré que lefdits articles feroient recus avec ceux de ladite province de Sens , pour d'iceux avec tous les autres articles, être fait un cahier concernant 1'état général dudit clergé en l'églife  sous Charles IX. 469 de France ; 5c s'il y a aucunes chofes particulieres concernant le fait particulier de ladite univerfité , feront remifes a la fin dudit cahier , avec les autres articles Sc remontrances particulieres de chacune defdites provinces. Ce fair , pour continuer a rédiger Sc dreffer an feul cahier de tous les articles Sc remontrances defdites provinces 6c diocèfes Sc gouvernemens , & defdites remontrances particulieres, a été continuée 1'afïïgnation au lendemain heure d'une heure après midi. Du Dimanche 12 de Décembre. Et le dimanche 22 defdits mois Sc an , a ladite heure 5c audit lieu , monfeigneur 1'êvêque d'Évreux , mondit feigneur de Tours abfent par maladie, comparans Sc affiftans les fieurs defTus nommés defdites provinces. A été avifé que ledit feigneur d'Évreux, avec tel de la compagnie qu'il lui plaira, ira vers le Roi de Navarre, lui offrir les prieres de l'églife , 5c lui recommander les affaires du royaume , même dudit état eccléfiaftique. Incontinent après , pour réduire tous les cahiers defdites provinces en un, a été commencée la lecFure du cahier de la province de Gg }  4"70 E T A T S Sens , pour icelui examiner Sc accorder avec les autres , ftioii I'avis de iadite affiftance. A rinftant font comparus nobles & vénérables petfonnes meffieurs . . . Montere, fieur de Rondeau, liobert Aymard, lieutenant criminel de Sens} &: Jaeques Aubi avocat i Rouen , envoyés par mefdits fieurs du tiers-état , lefquels ont fait entendre de par ledit état, que pour réponfe a ce qui leur avoit été propofé vendredi dernier par lefdits députés du clergé , fur la nomination de la perfonne de monfeigneur le cardinal de Lorraine, pour porter la parole au roi pour tous les trois états; lefdits du tiersécat ont avifé que pour la grandeur &c hauteffe de mondit feigneur le cardinal , & qu'il eftdu nombre de ceux qui examineront & jugeront les remontrances defdits états Sc autres grandes caufes, ils n'auroient ofé entreprendre le requérir prendre cette charge, & avoient arrêté & conclu nommer un de leur état pour faire leurs remontrances particulieres. Et après la remonrrauce a eux faite de par Ie clergé, par mondit feigneur l'évêque d'Évreux, préfident en ladite affembiée, ils ont déclaré que ce que lefdits du tiers- états ont fait, n'eft aucunement pour eux départir d'avec lefdits du  sous Charles IX. 471 clergé, mais au contraire, défirenc grandement demeurer unis, & que tous lefdits états foient & demeurent en union. A quoi ledit feigneur évêque d'Évreux a de rechef fait remontrance de par lefdits du clergé , que ledit clergé, n'a voulu & ne veut faire ni pourchaffer en l'alTemblée générale defdits états aucune chofe qui ne foit a 1'honneur de Dieu , bien & profit dudit tiersétat, priant lefdits feigneurs dudit tiers-état, le faire ainfi entendre en leur affemblée, ce qu'ils ont promis faire. Ce fait a été continuée leéVure & examen dudit cahier de la province de Sens , & avenant 1'heure de cinq heure , Fafïignation a été remife Sc continuée au lendemin huit heures du matin, audit logis du Sauvage. Du lundi 23 de dïcembre. Et ledit jour vingr trois defdits mois &C an J a ladite heure de huit heures du matin, audit lieu du Sauvage , comparant ledit feigneur évêque d'Évreux &c nommés defdites provinces fufdites. A été continué 1'examen dudit cahier de ia province de Sens, & a 1'heure de dix heures, ledit feigneur d'Évreux, accompagné de plu- Gg 4  472 E t a t s fieurs de ladite affiftance, s'eft tranfporté vers ledit feigneur roi de Navarre, fuivant la détibératton précédente pour lui faire les remontrances particulieres , & 1'affignation continuée a deux heures après midi audit logis du Sauvage. Dudit jour de relevée. A laquelle heure 8c lieu comparant lefdits feigneurs comme defius, a été dit pat ledit feigneur évêque d'Évreux, que, fuivant la délibération dudit état, il avoit été vers le roi de Navarre , lequel lui auroit fait très-honnête réponfe. Ce fait a été continué 1'examen dudit cahier de la province de Sens, & avenant 1'heure de cinq heures, l'aflïgnation a été remife & continuée a Jeudi prochain deux heures après midi, pour la révérence du jour 8c fête de Noc'1. Du jeudi 16 décembre. Et ledit jour 16 defdits mois & an , a ladite heure de deux heures après midi , comparant audit logis, ledit feigneur, évêque d'Évreux, préfidens 8c feigneurs nommés defdires provinces fufdites. A été délibéré fur la requête mife en avant  'sous Chari.es IX. 475 pat lefdits feigneurs nommé de Montauhan , abbé de la Chaulne , Sc N. de la Haye, abbé de Saint-Aubin , au nom des états de l'églife , nobleffe Sc tiers-état de Bretagne , aux fins contenues en ladite requête fignée. Sur quoi a été ordonné qu'après que le cahier de 1'état ^eccléfiaftique aura été drefle Sc communiqué aux autres dudit état de l'églife Sc clergé de France fera délibéré pour ledit clergé fur le contenu en ladite requête & remontrance defdits fieurs de Montauhan Sc de la Haye au nom que deffus Sc comme ledit clergé verra bon êrre, paree que 1'afliftance préfente n'a charge que de dreftèr ledit cahier. ProvENCE , contenant deux provinces AlX & Jrl-es. A i'inftant eft comparu révérend pere en Dieu Me Louis de Bénil, évêque de Vence, 1'un des députés des états de Provence , lequel a dk comparoir en ladite aflemblée pour le regard dudit état eccléfiaftique, fans toutesfois faire féparation de fa charge d'avec ceux des autres états requerrant acte de fa comparution. Ce fait a été continué , 1'examen dudit cahier de la province de Sens, Sc avenant 1'heure de cinq heures a été remife Sc continuée Paf-  474 E t a t s fignation au lendemain fept heures Sc demie du matin audit lieu. Du vendredi 27 de décembre. Et ledit jour vingt-fept defdits mois & an, a 1'heure dc fept heures & demie , étant alfemblée audit logis defdits feigneurs d'Évreux & autres fieurs nommés defdites provinces, a été continué 1'examen du cahier de ladite province de Sens. Et a 1'infiant a été propofé par ledit feigneur évêque d'Évreux, qu'il avoit entendu que Ia reine avoit ordonné que dedans dimanche en bailleroit tous les cahiers de tous les états, Sc que ceux qui ne feroient prêts pourroienc néanmoins bailler les cahiers de chacune province. Sur quoi a été ordonné par Ia délibérarion de toute 1'aftiftance, que pour obéir a 1'intention de Ia reine Sc éviter a longueur Sc abréger le négoce , fuivant ce qui eft ja commencé, fera parachevé de drefter tous les cahiers defdites provinces, un feul cahier au nom de tout le cletgé, par, mefdits feigneurs évêques d'Évreux Sc dc Pamiers, Sc le fieur de BoisAubry , pour ledit cahier drefle être par lefdits nommés.  sous Charles IX. 47? Et a ledit feigneur évêque de Vence, pré-, fenté certain autre cahier contenanc mémoires &z inftruftions defdits trois états de Provence , a lui & autres dénommés audit cahier , baillé pour comparoir pardevant le roi en 1'alFemblée générale des trois états de france a Orléans ou ailleurs, figné J. de Saint-Chamont , archidiacre d'Aix , premier procureur né du pays; Bérard, alTelTeur & procureur du roi; J. de Funel, conful d'Aix & procureur du pays; Stèphan , conful d'Aix, procureur du pays. Lequel feigneur évêque de Vence a dit n'avoir charge de faire aucunes plaintes eu doléances particulieres au roi pour le clergé a Pégard des chofes qui doivent être traitées en 1'iflemblc'e des prélats & autres eccléfiaftiques aftignés par le roi au vingtieme janvier prochain a Paris, mais feulement quant a préfent avec tous les états du pays de Provence. Et que ce qu'il en fait préfentement eft afin que fi tous les trois états de France s'accordent enfemblement faire quelque remontrances au roi, pour tous lefdits états, y faire de fa part ce qu'il a eu charge avec les autres députés du pays de Provence, qui font les fieurs de Contat; Jefeph Durand; fieur de Funel; Louis l'Evêque; fieur de Rogier, tk Me Jean Imkert, dit Grana-  E I A T 5 gcou de Bragulgnan , tous dénommés au com^ mencement dudit cahier. ( Auquel feigneur évêque de Vence a été fait réponfe que 1'affemblée n'étoit de tout le clergé rnais feulement des députés des provinces, pour dreffer le cahier dudit état eccléfiaftique. Ce fait a été continuée 1'alTignation au lendemain deux heures après midi , a laquelle M. Quintin fera averti d'apporter 1'oraifon & harangue qu'il doit prononcer devant le roi pour 1'état de l'églife, pour être communiquée auxdits fieurs nommés defdites provinces; eniemble la propofition faite par M. le chancelier a la derniere affemblée des états. Et néanmoins ordonné que cependant lefdits ieigneurs évêque d'Évreux & abbé de Bots. Aubry, continueront de procéder a 1'examen dudit cahier de Sens, &pareillement des autres cahiers defdites provinces, pour d'iceux dreffer «n feul cahier, felon 1'avis & ordonnance dudit clerge & des nommés par lefdites provinces, ce qu ils ont fait. _ Et avenant 1'heure de onze heures, ont continue 1'affignation pour y ptocéder entre eux, comme deffus , l deux heures après midi audit logis.  sous Charies IX. 477 Dudit jour de relevée. A ladite heure fontcomparns lefdits feigneurs d'Évreux, de Pamiers, Sc ueurs de Bois-Aubry, qui ont continué de procéder comme delfus a la réducFion dudit cahier. Cependant eft arrivé audit lieu révérend pere en Dieu meffire Jean de Morvilliers, évêque d'Orléans, lequel a dit Sc remontré que le rol Sc la reine lui avoient ce matin commandé venir vers le clergé, pour lui déclarer que leur intention étoit de donner audience dimanche prochain aux états Sc partant qu'ils euflent a êrre prêts de leur cahier Sc de ce qu'ils ont a faire Sc oü ils n'en pourroient fitöt être prêts , qu'ils euftent a propofer Sc faire ce qu'ils pourroient. A quoi a été fait réponfe par mondit feigneut l'évêque d'Évreux, que le clergé avoit fait tout ce qui lui étoit poffible, rédiger tous les cahiers de tous diocefes, provinces, gouvernemens 8c voieries de France, en nombre de quatorze; Sc encore pour lefdits quatorze , en faire un, auroient nommé certain nombre de perfonnes defdites ptovinces , jufqu'au nombre de vingthuit ou trente ; lefquelles pour plus facilement accélérer ie négoce, fe feroient remis a trois d'entre eux qui faifoient toute diligence a eux  478 E T A T S poflible, de paracliever le cahier, lequel pour la mulciplicité des autres cahiers, ne pouvoit être fi promptement parachevé. Suppliant toutesfois le roi & la reine leur vouloir accorder temps jufqu'a mardi prochain , dedans lequel remps ils efpéroient fatisfaire a ce qui a été propofé pat ledit feigneur évêque d'Évreux, q«i a fait réponfe, qu'il en feroit réponfe au roi & a la reine. Incontinent après , nobles hommes les feigneurs de Lognes & Venton , députés du pays de Champagne & Bourgogne, font entrés audit lieu, lefquels ont dit avoir été envoyés de par 1'état de la nobleffe, pour faire leurs excufesde n'avoir été , pat ledit état, envoyé plutöt parversMM. de l'églife, pour leur faire réponfe a ce qu'ils leur avoient mandé touchant le fait de h nomination &c éleétion de monfeigneur le cardinal de Lorraine, pour porter Ia parole pour tous les états. Et combien qu'ils euffent toujours eu & aient certaine connoiOance qu'il n'y a perfonne qui mieux ou fi bien Ie put faire que confidérant fa grandeur ,& qu'il feroit 1'un des juges des chofes qui s'offrent , ont élu l'an de leur corps , qui eft le fieur de Silly, feigneur de Rocheforr,, pour faire les remontrances pour ledit état de la nobleffe.  sous Charles IX. 479 Priant ledit état du clergé 11'avoir opinion que pour cela, ils aient eu aucune volonté eux de partir d'avec ledit état de l'églife , 8c de Punion d'icelui, & au contraire déclarent qu'ils y veulent demeurer, & pour ce faire feront prêts d'y employer leurs perfonnes 8c biens. A quoi par le feigneur d'Évreux a été fait réponfe , au nom dudit clergé, que ledit état de l'églife loue.Dieu de la bonne volonté que lefdits feigneurs de la nobleffe avoienr de ne en rien eux* féparer de Punion du corps de 1'état eccléfiaftique , les priant faire entendre a leur compagnie , que lefdits de l'églife n'ont autre aftedion , finon leur faire paroitre qu'ils veulent entiérement faire leur devoir au fervice de Dieu 8c falut des autres états , même de ladite noblelTe, & autres bonnes 8c faintes remontrances. Les priant davantage ; déclarer auxdits de la nobleffe , ne trouver mauvais fi lefdits de l'églife , ont fait proteftation , comme de chofe non accoutumée , que pour la diverfité des cahiers , 8c des perfonnes députées pour porter parole , pour chacun defdits états ; ne fera pourtant dérogé a Punion 8c intégtité du corps defdits états; 8c qu'il n'en adviendra aucune diftindion, ni féparation.  4§0> E T A T S A quoi , par lefdirs fieurs de Langnt Sc de Vcnton , a été répondu , qu'ils feroient rédt de tout auxdits de la nobleffe , & qu'ils avoient charge de faire pareille proteftation. Et ont lefdits feigneurs évêques d'Évreux & de Pamiers, avec Je fieur abbé de Bois-Aubry ; continué i la confeétion dudit cahier , & avenant 1'heure de cinq heures , a été remis le négoce au lendemain huit heures du matin. Du Samedi 28 Décembre. Et ledit jour 28 defdits mois & an , a ladite heure , comparant audit lieu , lefdits feigneurs d'Évreux èc de Pamiers ; & le fieur abbé de Bois-Aubry , a été procédé par eux , a Ia continuation de ladite réduction defdits cahiers en un fcul. Et fur 1'heure , eft comparu frere Gilles de la Barre, foi difant délégué pour le clergé de la baronie de Chanceux en Timerais, qui auroit préfemé cèrrain cahier figné de lui , contenant les remontrances , plaintes & doléances du clergé dudit lieu ; auquel auroit été fait réponfe par ledit feigneur évêque d'Évreux , qu'il eut a bailler fon cahier , aux députés de la province de Sens , pour être inféré au cahier général de ladite province, comme étant fujet & au dedans d'icelle. Et  sous Charles IX. 481 Et avenant 1'heure de neuf heures , con^ fidérant mefdits fieurs la grande longueur quï était en la confeófcion dudit cahier, ont avifé qu'il feroit expédient qu'un feul y procédac pour être plutot fait, & être rapporté en 1'affemblée de tous mefdits fieurs , nommés defdites provinces. Et pour ce faire , ont ordonné tous les cahiers , être faifis ès mains du fieur de BoisAubry , pour dreffer avec le fecrétaire ledic cahier général , a icclui rapporter au lundi fuivant a deux heures après midi audit logis, auquel jour , lieu & heure eft continuée 1'afftgnation pour ouir la leclute dudit cahier. Et néanmoins eft ordonné qu'il feroit fait favoir audit fieur Quintin qu'il apporte 1'oraifort qu'il doit prononcer pour être ouie & entendue des nommés defdites provinces , & pour ce faire , a été affignée 1'heure de deux heures aptès midi de cedit jour. Du lundi 30 de Décembre. Et ledit jour de lundi a. deux heures après midi : comparant audit lieu , mondit feigneur d'Évreux , monfeigneur de Tours , encore abfent pour fa maladie ; comparant auffi meffeigneurs de Glandeve ,dc C&rcaQcnne , de PaTornt X. H ft  4S1 E t A T s miers , de Vapms , de Vence , & de Negrepont; enfemble tous les nommés defdites provinces, & plufieurs autres députés du clergé , a été lu par ledit Légier, fecrétaire X haute voix, le cahier général de tout le clergé, ainfi rédigé comme defius. Ce fait a été continué 1'affignation au lendemain huit hsures du matin aux cordeliers, pour faire lecture dudit cahier, en préfence des députés de toutes lefdites provinces archevêchés, évéchés 8c gouvernemens. Du Mardi, 5 1 Décembre. Ledit jour de mardi , a huit heures du matin, au couvent des cordeliersjcomparant mefdits feigneurs les archevêque 8c évêque de Tours 8c d'Évreux , préfidens; & mefleigneurs les évêques de Glandeve , de Séez , de Carcaffonne, de Pamiers , de Vannes , de Vence & de Negrepont , & les fieurs députés dudit clergé de france , enfemble plufieurs religieux , difant avoir charge de leurs ordres ; a été lu a haute voix , le cahier contenant les articles 8c remontrances générales de tout ledit clergé, par ledit Lcgier, fecrétaire. Et icelui lifant a été avifé que aucuns articles d'icelui, feroient réfervés a. 1'après midi  sows Charibs IX. 485 dudit jour , audit lieu , pour être plus amplement délibéré fur iceux. Et advenant 1'heure de onze heures , a été remife &c continuée Paffignation a une heure après midi audit lieu , &: déclaré que , s'il y avoit aucuns qui vouluffent bailler quelques articles particuliers , ils euffent a les apporter a ladite affignation. Dudit jour de relévie. A laquelle heure d'une heure après midi comparans les feigneurs archevêque, évêques & fieurs députés , que deiïus auroient été faites & propofés plufieurs remontrances particulieres, aucunes defquelles ont été trouvées générales, & mifes au cahier , & autres remifes au concile. Et fur le différent mu , fur {'article préfenté par les députés de Normandie , touchant les déports; fcavoir : s'il feroit mis en Partiele général ou particulier , a été ordonné par 1'avis de la plus grande partie , qu'il demeureroit era Partiele particulier. Auffi a été ordonné que demain matin , premier jour de l'an , feroit célébrée audit couvent des cordeliers , une meffe du faint- Hha  4S4 E T A T S Efprit, & que mefdits fieurs les députés y alfifteroient a huit heures. Du mercredi premier de Janvier 1561. Ledit jour de mercredi , advenant ladite heure de huit heures du matin , a été dite & célébrée ladite meffè audit couvent , a laquelle ont affifté plufieurs defdits feigneurs , députés , enfin de laquelle fe font retirés en ladite falie du réfeélorie , oü étoit monfeigneur l'évêque de Vannes ; lefquels tous ont dit que Ton fe trouvat a 1'heure de deux heures , en la grande falie des états , pour affifter en 1'affemblée qui y doit être faite ledit jour de tous lefdits états. Et ont continué 1'affignation defdits du clergé au lendemain , audit couv:nt des cordeliers. Du jeudi 10 de Janvier. Ledit jour dudit mois , audit couvent des cordeliers , a une heure après midi , comparans mefdits feigneurs archévêque de Tours , & évêque d'Évreux , préfidens enfemble : meffeigneurs les archévêque de Bordeaux, évêques de Glandeve, de Carcaffbnne , de Pamiers , du Mans, de Vannes , d'Auch , de Vence , & de  sous Charles IX. 485 Negrepont , Sc tous les autres députés dudit clergé. A été délibéré fur 1'aumone qu'il falloit faire aux religieux Sc couvent des cordeliers , 8C autres frais qu'il a convenu faire , peines Sc falaires , qui ont été employés a la réduóhon dudit cahier , Sc autres chofes , Sc pour en ordonner enfemble , figner ledit cahier , a été continuée 1'affignation au lendemain midi. Du vendredi 3 de Janvier. Auquel jour trois dudit mois a ladite heure ; paree que ledit cahier , n'étoit parachevé de mettre au net, a été remife 1'affignation au lendemain huit heures du matin , aux fins qu© deffus. Du famedi 4 de janvier. Ledit jour 4 defdits mois Sc an , audit lieu ; ont comparu lefdits feigneurs archevêque de Tours Sc évêque d'Évreux, préfidens , & lefdits feigneurs évêques de Glandeve, de CarcafTonne , de Pamiers, du Mans, de Vannes Sc Vence Sc de Negrepont, Sc autres fieurs députés dudit clergé , eu préfence defquels a été lu a haute voix par ledit legér, fecrétaire , le cahier général Hh 5  48(? E T A T s des remontrances de tout Ie clergé, lequel a été approuvé par ladite afliftance. Et ainfi que ledit Legio- a commencé a lire les articles des remontrances particulieres, Iefquelles étoient écrites a la fin du cahier général, s'en étant trouvées quelques-unes qui n'avoient pas été écrites dans ledit cahier général , fut avifé d'en faire un cahier particulier qui pourroit être attaché audit cahier général , le tout enfemble baille a M. le chancelier : & paree que ledit cahier ne pouvoit être figné fi promptement, ni lefdits articles particuliers drefles «5c fignés par ceux qui les figneroient. A été ordonné que ledit cahier fera préfenté tel qu'il eft par mefdits feigneurs archevêque de Tours & évêque d'Évreux , d monfeigneur le cardinal de Lorraine , pour être préfenté au confeil du roi «5c y être examiné , cependant qu'on en pourra dreffer un autre'«Sc le figner, & auffi lefdits articles particuliers femblablement fournis 8c fignés. A été continuée 1'aflignation au lundi enfuivant, une heure après midi, audit lieu. Et incontinent après mefdits feigneurs archevêque de Tours 8c évêque d'Évreux , fe font tranfportés vers mondit feigneur Ie cardinal de  sous Charles IX. 4^7 Lorraine; lefquels pour ce que mondit feigneur le cardinal leur auroic dit que ledit cahier ne feroit recu s'il n'étoit figné , & qu'il étoit necelTaire en toute diligence de le foutnir, ont anticipé ladite affignation le lundi au jour de famedi, heure de trois heures après midi, pour figner ledit cahier , lequel cependant a été redteflé Sc mis au net , & iefdires remontrances particulieres mifes & attachées i une lulfe i part. Dudit jaar de relevée. A laquelle heure de trois heures après midiaud. couvent, ont comparu mefdits feigneurs archevêque de Tours Sc évêque d'Évreux , préfidens, & les fieurs évêques ci-deflus nommés , avec la plus grande partie des députés du clergé , & après que mefdits feigneurs préfidens ont déclaré que mondit feigneur le cardinal de Lorraine leur avoit dit que ledit cahier ne feroit recu s'il n'étoit figné , «Sr qu'il étoit befoin irtltu figner Sc préfente.r , le plutot que faire fe pourroiu. A été ordonné que ledit cahier fera préfeatement figné par ceux qui font gréfens , «5c le lendemain être rapporti audit lieu par ledit Legier, fecrétaire, pour être parachevé de figner ? par ceux qui ne 1'auroi.ent figné cejourd'hui. * H h 4  4S§ E T A T 3 Et a été contimiée 1'affignation au lendemain heure d'une heure, attendant deux après midi. Du Dlmanche 5 de Janvier. Et ledit jour s dudit mois, ledit Legier fe feroit tranfporté en ladite falie des cordeliers , £ huit heures du matin , auquel lieu plufieurs des députés fe feroient auffi trouvés pour figner ledit cahier. 2c ledit jour une heure , en attendant deux heures après midi audit couvent , comparans mefdits feigneurs archevêque de Tours & évêque d'Évreux , préfidens , & aucres feigneurs évêques & fieurs députés dudit clergé. Après qu'il a été remontré par aucuns de l'afiiftance , que 1'ordre des prééminences & prérogatives des primacies, pairies , archevêchés, évéchés , gouvernemens Sc autres dignités, n'aroit été gardé en fignant ledit cahier, & qVaiicuns ont figné les derniers , qui devoient être les premiers. A été ordonné comme par ci-devant, que par 1'omiffion dudit ordre, attendu Ia précipitation & accélération dudit négoce, ne préjtidiciera aucunement aux prérogatives , prééminences , autorités, dignités Sc priviléges d'aucuns; ce que tous meffieurs les députés ont voulu Sc con-  sous Charles IX. 48? fenti"t Sc ordonné en être donné ade pour förvir & valoir a tous ceux qui le voudront avoir &C lever. * A été aufll ordonné par ladite affiftance , que ledit cahier , enfemble les articles particuliers , feront baillés & préfentés au roi en la perfonne de M. le chancelier, dedans le lendemain par ledit MzJean Quintin, dodeur, affiftant avec lui lefdits fieurs abbés de Bois-Aubry , Griveau, doyen d'Amiens , A'Ulieres, chancelier de Touloufe , vicaire de Sens , Capuis , chantre de Rouen , Salignac , grand archidiacre de Bordeaux, & Buatier , vicaire de Lyon. D.ivantage a été ordonné que pour fatisfaire aux frais qu'il a convenu faire efdites affemblées , tant pour la confedion dudit cahier qu'autres chofes, feroit payé par chacun diocefe, un écu fol. Dont feroit baillé audit Legier, fecrétaire, tant pour fon rembourfement des frais qu'il a faits , que pour les peines , labeurs & vacations qu'il a employé a ladite affaire, cinquante écus fol. Et du refte fera baillé quatre écus aux clercs qui ont befogné fous lui. Dix écus aux héraults d'armes du roi. Vingt écus a«x rcügieux Sc couvens des cor--  '4fo E t a t s deliers oü ont été faites lefdites alTemblces dudit clergé. Et Ie refte fera diftribué a ceux qui ont gardé les portes & qui ont fait autres vacations pour Iefdites affaires , felon qu'il fera ordonné pr mefdits feigneurs archevêque de Tours 8c évêque d'Évreux. Et - moyennant ce , ledit Legier , fecrétaire , fournira a chacune defdites provinces « diocèfes qui voudront avoir copie dudit cahier , figné de lui, en lui payant un écu fol feulement, outre ladite fomme de cinquante écus, ce que ledit Legier n'a accepté , d'autant que chacun cahier coüte plus d'un écu a faire tranferire. Ce fait, 1'afiignation a été continuée a mercredi deux heines après midi , audit couvent des cordeliers , peur communiquer des affaires dudit clergé, fi aucunes furviennent. Du lundi 6 dc Janvier. Ledit jour 6 defdits mois & an , lefdits fieurs Quintin , abbé de Bois-Aubry , doyen d'Amiens , chancelier de Touloufe , chantre de Rouen , archidiacre de Bordeaux 8c official de Lyon, accompagnés de plufieurs autres dudit clergé 8c dudit Legier fecrétaire , fe font tranfportés vers mondit fieur le chancelier, étant en fon logis au cloïtre de Saïnte-Croix,  8 O V S C H A R t 1 S IX. 491 Anquel ont baillé & préfenté , par les mains dudit Quintin , ledit cahier figné defdits députés , enfemble par commandement & ordonnance de meffieurs les députés du clergé, Jaeques de Bienaffis . abbé de Bois-Aubry Sc Leper, avec les articles & remontrances particulieres attachées audit cahier; lequel fieur chancelier a recu , pris Sc déclaré que 1'après dmée dudit jour, le porteroit au roi Sc a fon confeil. Du lundi 13 de Janvier. Et le lundi 1 3 de janvier audit an, a 1'après midi dudit jour , lefdits du clergé congtégés «5c affemblés audit couvent des cordeliers , avec grand nombre des deux autres états illee femblablement affemblés par 1'ordonnance du roi, ils font venus le roi de Navarre & M. le chancelier , lefquels ont fait de par le roi , propofition & remontrance auxdits états, qu'ils ont baillées en un papier écrit, non figné , dont la teneur eft ci-après inférée ; difant que chacun/ defdits états eut a en délibérer SC y faire réponfe le plutót que faire fe pourroit. Enfuit la teneur dudit écrit. Ce que le roi Sc fa mere defitent le plus en ce monde , eft le loulagemem de leurs peuples  4n E T A T S & fujets, Sc leur déplak incroyablement que Ia mahce du tems paffé ait réduit le roi en 1'extrême néceffité oü il eft; Iaqueue veut qn>iU fachent par le menu ayant a cette caufe commandé que cependant que 1'on eft après a voir leurs cahiers, pour parvenir a tout ce qui fera poflible a les rendre contens; que 1'on leur faffe entendre les dépenfes paifées Sc comme toutes chofes ont été maniées , les priant députer quelques-uns d'entre eux de chacune province, pour les voir avec ceux de fes finances. Auffi les retranchemens & réducfions d'états qu'ont fait leurs majeftés pour 1'avenir, afin d'épargner tout ce qu'on peut ménager , & employer ce ménage i la décharge de fondit peuple. Mais comme il eft impoffible d'y pourvoir fans leurs bons fecours , ladite Dame qui aime , comme ils peuvent penfer, le roi fon fils, Sc fondit peuple , duquel elle connoït dès longtems la bonté a fon recours a eux, pour les prier de le vouloir confeiller &c aider des remedes propres d la guérifon de ce mal \ qui feroit d'acquitter le roi fon fils, les affurant bien qu'étant hors de eet ablme , elle fera enforte que les tailles & autres charges extraordinaires dont ils font chargés , feront réduices aux plus gracieus  IX. 49? termes quelles aient été de long-tems , & même du tems du roi Louis XII; a quoi il n'y aura aucune faute tant qu'elle vivra. Et pour leur en donner encore plus d'aiïurance , elle a bien voulu prier le roi de Navarre leur faire femblable promelfe, afin que s'il plaifoit a Dieu 1'appeller , il foit comme garant de cette fienne promeffe , pour moyenner envers ledit roi fon fils, quelque forte d'effet. Que ladite Dame entend que le fecouts qu'ils voudront faire foit manié par eux , 8c ne paife par autres mains que les leurs , afin qu'ils connoifient que ce n'eft que pour acquitter le rot fon fils , qui par ce moyen pourra les foulager felon la bonne volonté qu'ils en ont. Du vendredi 17 de Janvier; Ledit jour 17 defdits mois 8c an , heure de hait heures du matin , lefdits du clergé étant féparément congrégés audit couvent des cordeliers. Mefdits feigneurs archevêque de Tours 8c évêque d'Évreux, préfidens , avec les autres^feigneurs évêques 8c fieurs députés du clerge, a été lu publiquement 8c a haute voix par ledit Leskr3 fecrétaire, ledit écrit contenant la propo-  494 E T A T s fiticm & remoarrance faites par ledit roi de Navarre Sc ledit fieur chancelier. Ce fair, a été ordonné comme ci-devant par plufieurs fois, que Pomiffion de 1'ordre de ladite féance de parler & opiner , ne porte aucun préjudice aux prééminences , &c. de chacune defdites provinces Sc diocèfes , bailliages , fénéchauffées, &c.; & qUe de chaque province, dudit clergé, en feroit nommé un peur communiquer avec eux des finances du roi; ce fait, rapporté être délibéré par lefdits du clergé , fur ladite propofition & remontrance. Et pour ce faire ont été nommés : Noble Sc vénérable Me Chriftophe d'Illhres, pour la province de Sens. Nicolas Griveau , pour la province deReims. Frangois Boyot, chantre de Limoges, pour la province de Bourges. Jaeques de Moruleron, archidiacre d'Auch, pour la province d'Auch. Benmt Butler, official Sc vicaire-général de Lyon pour ladite province. Monfeigneur l'évêque d'Evreux,pour la province de Rouen. ^ Monfeigneur 1 'évêque de Pamiers, pour la pro* vince de Touloufe.  sous Charies IX. -495 Monfeigneur 1 évêque de Carcaffonne, pour la province de Narbonne. Monfeigneur l'évêque de Vaience , pour la province de Provence, conrenant les deux prc- vinces d'Aix & Arles. Ec advenant 1'heure de dix heures, a été con-^ tinuée 1'affignation a deux heures après-midi. Dudit jour de rekvée. A laquelle heure comparant les députés du clergé, y préfidant mondit feigneur d'Évreux , onc été nommés aux fins que deffus. Pour la province de Touraine , mefdits feigneurs archevêque de Tours & évêque du Mans, &c 1'un d'eux en 1'abfence de l'autre. Fors les députés de Bretagne , qui ont dit ne pouvoir nommer , pour 1'abfence de monfeigneur l'évêque de Vannes , de préfent malade, qui eft le pnncipal du duché de Bretagne , & que cejourd'hui on lui en communiquera pour en venir le lendemain , requérant délai de ce faire jufqu'audit jour de lendemain. Pour la province de Bordeaux , noble homme Me iranr.ois de Salignac , grand archidiacre & auditeur dudit Bordeaux. Et pour le Dauphiné , contenant deux provinces, Vienne & Embrun, mondit feigneur l'évêque de Glandeve.  ÉTATS Et a été ordonné que les fofdits nommés fe tranfporreronr le lendemain matin au logis de M. de Bouroê, furintendant des finances, pour commumquer avec lui & autres , des finances du roi, aux fins contenues en ladite ptopofition & remonrrance faite par ledit fieur roi de Navarre & monfieur le chancelier, pour en faire leurs rappor» auxdits du clergé, au lundi en fuivant, une heure après-midi. Et davantage ordonné que cependant feroit communiqué de Ce que delfts i meffeigneurs les cardinaux, de préfent en cour, par aucuns de meffieurs de la compagnie qui ont accès d eux. Du lundi 20 de janvier. Et ledit jour vingr, a ladite heure d'une heure , attendant deux après-midi, comparant audit couvent des cordeliers lefdits du clergé préfidens mefdits feigneurs archevêque de Tours & évêque d'Évreux. A été fait récit, au nom des nommés fufdits par mondit feigneur d'Évreux, qu'ils avoient communiqué avec ceux des finances, & leur avoit été baillé copie de 1'état contenant les recettes, mifes & dépenfes des deniers du roi , paur les an- "Cesfiniflant le dernier jour de décembre 1560. Enfemble  SOUS C .H A R. L E S IX. 497 - Enfemble 1'état des retranchemens & féducïlons d'états faits par le roi & la reine fa mere , pour 1'avenir, afin d'épargner tout ce qui fe peut ménager pour employer a la décharge de fon peuple. Defquels états a été fait Ie&ure en 1'affemblée du Clergé , ï haute voix , par ledit Legiet , fecrétaire , Sc pour délibérer fur le contenu en ladite propofition & remontrance & communicacion des chofes fufdites, concernant lefdites.finances , & y faire réponfe par ledit clergé , a été continuée ladite aflignation au mercredi enfuivant , heure de fept heures du matin , audit lieu. j2 Et ordonné que cependant, fuivant le réqui-; fitoire de ce fait, pat les députés de Guienne, i Auch Sc Bretagne, que chacun des députés dudit clergé pourra communiquer dudit officiaire, fi bon-lui femble, avec ceux des deux autres états de leurs provinces & pays pour en être mieux i inflruirs. Du mercredi, iz de janvier. Ledit jour defdits mois & an , comparans lefdits du clergé, audit couvent d?s cordeliers, i ladite heure de fept heures du matin, mefdits feigneurs de Tours & évêque d'Évreux', pféfi^ f tomeX. li  498 ' E T A T S dens & y affifterent mcffeigneurs les évêques fuf* dits & autres. On a commencé d délibérer fur le óonrehu en ladite propofition & remontrance , & advenant 1'heure de dix heures , a été continuée 1'aflignation a 1'après-dmer dudit jour tk heure de deux heures, audit lieu. Dudit jour de relevêe, A laquelle heure ont de rechef comparu tóus lefdits fieurs du clergé ci - dellus nommés, & ont continué d'opiner & délibérer comme defius. ^ Et advenant cinq heures, a été eontinuée 1'alfignation au lendemain huit heures du matin. Du jeudi 23 de janvier 15 61. A laquelle heure de huit heures du matiri; comparans lefdits du clergé comme deffus , ont continué la délibérarion ci-devant corr.menccé\ Sc adyenant onze heures, a été 1'affignation re-' mife a deux heures après-midi, audit lieu. Dudit jour de relevée. A laquelle heure & lieu font comparus lefdits du clergé, y préfidans lefdits feigneurs fufdirs,  sous Charles IX. 499 & après avoir tous délibéré fur ladite propofition & remonttance, a été conclu qu'il feroit fait téponfe par écrit, de par ledit clergé au roi & a Ia reine, dont la teneur en fuir* AU ROI» Les députés du clergé, fur la propofition qu*il a plu a fa majefté & a la reine fa rriere leur faire entendre par le roi de Navarre & M. le chaneé lier , le 16 du préfent mois de janvier 1561 , afin de députer aucuns de chacune province y pour voir , avec ceux des finances , les dépenfes paffées, & entendre par le meriü 1'extrême néceffité qui en eft 1'épargne, & auili les retranchemens & rédudlions d'états qu'ont fait leurs majeftés pour Favenir, & póur leur confeiller & aider de remedes propres pour Tacquitter. Remontrent que comme très-humbles & obéif1 fans au roi & i la reine fa mere , ils ont fait toutes diligences d'avifer fi par qiielqne moyen leut feroit pollible promptement fatisfaire a leurs volontés , toutefois paree qu'ils n'ont pouvoir ni mandement de ce faire , ains feulement d'apporter remontrances, plaintes & doléances dudit clergé, fuivant le mandement du roi Francois , dernier que Dieu abfolve. S'ipplienc très-hurftblement leurs majeftés les I i 2  500 E t a t s vouloir excnfer, offrant que s'il leur plak faire bailler auxdirs députés copie dudit état des finances 8c retranchemens , avec déc'.aration plus araple de leurs volontés & lettres de convocation pour s'affernbler a ce néceflaires , faire tout devoir de conférer & cornmuniquer auxdits du clergé, & autres états des pays, lefquels ayant entendu les grandes affaires 8c volontés du roi , pourront même donner leurs avis , qui fera rap-, porté a leurs majeffis, la par-tout & autant qu'i leur plaira commander, 8c leur êcre donné expéi dition Sc réponfes a leurs cahiers , pour incontinent eux retirer en leurs pays, 8c cependant plaire i leurs majeflés qn'aucune levée de deniers ne foit faite fur ledit clergé. Ainfi Jigné par commande.menc 8c ordonnance de meffieurs les députés du clergé. Legier. Et advena-nt cinq heures , a été continuée i'affignation au lendemain enfuivatit, huit heures du matin, audit lieu. Du vendrtdi, ii de janvier i56i. Le vingt-quatrieme jour defdits mois an , a ladite heure de huit heures du matin, comparans lefdits du clergé, préfidant monfeigneur de Tours, pour les caufes 8c remontrances faites en ladite aflemblée, a été conclu qu'il feroit  sous Charles IX. $ot préfenté requête au roi au nom dadit clergé , fignée par ledit Legier, {eaémte , telle & ent la forme qui s'enfuit. AU ROL Supplient trés - humblement les députés du clergé , difant que combien par leur cahier ils aient fait remontrance a fa majefté , pour pouveir & donner ordre a ce que les hérétiques Sc féditieux foient réprimés , toutefóis étant avertis que nonobftant la féance des préfens états, lefdits hérétiques Sc féditieux continnent de plus en plus , même les facramentaires *, en leurs maiheureufes entrefes. Par le moyen de quoi font lefdits fieurs du clergé, contraints de rechef faire la préfenté remontrance Sc fupplieation, tendante a ce qu'il plaife a fa majefté confïdérer que la fédition Sc divifion qui croit de jour en jour en fon royaume 3 vient pour la plupart defdits facramentaires, qui prétendent par leurs faits Sc prédications , abolir la fainte melTe, facrifice perpétuel du très-faint corps de notre Seigneur Jéfus-Chrift ,prix de notre rédemption, ce que l'églife , accompagnée du Saint - Efprit depuis la paflïon de notre Sauveur y nous a confervé jufqu'a préfent. Même tous les rois trés chrétiens fes 'prédc- li  5®V £, T A T S cefleurs prohibans ces facramentaires , diviferfes fujets d'avec lui, & les fouftraire de 1'obéiffance qu'ils doivent a Dieu , a l'églife & a fa majefté , pour plus facilement prendre Leurs biens & inciter les voifins de ct royaume a fuivre de fenw blables moyens Sc faire uq état populaire, & a fin pnver fa majefté de fa couronne, fupprimer touie religion Sc tous les facremens inftiuics de Dieu , rec,us eu l'églife Sc adminiftrés par les prêtres, comme il fe voit par expérience au, grand regret de fpn pauvre clergé. . Aufü lui plaife confidérer qu'il n'eft pas queftion feulement des fins limices 4e fon royaume , mais de nous priver du vrai corps de JéfusChrift notre Seigneur , réellement par nous, recus, eftimé de nous. plus que tous nos biens, & perfon.ne qui le maincient &c conferve en fa couronne. Pour ces caufes , plaife a yotre majefté maintenir lefdits du clergé & tout fan peuple, en 1'ancienne coutume Sc obfervation de tous les. facremeus de l'églife, fpécialement de ladite mcfle ; & par édit perpétuel, faire que lefdits facramentaires &: autres hérétiques oui voudroieiit empecher ledit faint facrement de Ia meffe, foit par prédicarions & affemblées publiques ou ftcrettes ou. par force, Sc demeureï  I SOUS C H AR 1 E S IX. 503 en ce pertinax & obftinés, ne foient tolérés en ce royaume, le tout felon les Ioix ancienes , êc lefdits du clergé feront tout devoir d'annoncer, faire annoncer la parole de Dieu au peuple , &t leur adminiftrer les faints facremens. en la plus grande pureté que faire, fe pourra : quoi fatfant , toutes chofes lui fuccéderont en toute propriété. Ainfi figné , par commandement S£ ordonnance de. raeifieurs les députés du clergé , Legier. A été continuée ladite aflignation au lender Siain deux heures après midi.. Du famedi:■ 25 janvier, ijtfïjj Ledit jour vingt cinq defdits mois & an, k ladite heure de deux heures après midi, comparans lefdits du clergé comme deffus. A été remontré par monfeigneur. l'archevêquede Tours , qu'il avoit a M. le chancelier la réponfe defdits du clergé , faite a la propofitisn du roi de Navarre &C de M. le chanceiier; enfemble la requête cFdeftus inférée, lequel les auroit porcées au confeil privé , pour y être faix ïéponfe. Ce fait Me Jean... Quintin a fait entendreauxdits du clergé le contenu en certain papier pon - figné, qtul adit.lui avoir été .baillé pa^ Li.4 11  ?°4 E t A i s ■ M. la chancelier, conrenant en inftance cö>*i« déclaration de deux articles de i'oraifon dudit Qumtin, 1'un touchant préfenternent de requête pour avoir temple, & l'autre touchant «ux;qBi out dit que depuis huit eens ans Fél vangde n'avoit été emendu qu'a préfent, difant ledtt $ub»in avoir d:.mandé i m k chan_ "her s'il communiqueroit ledit papier audit du clerge, ce qu'il auroit accordé. Lefdits du clergé, après avoir conféré I'oraifon dudit Quintin, avec leur cahier, & avoir iur ce amplemenc délibéré, ont été d'avis qu'en ladite oraifon il n'y a . chofes contraires au contenu en leurdit cahier, & qu>en 1'une m en l'autre n'y a obfeurité n'y article touchant -a-jcune perfonne en particulier , k partant qu'ü netou befoin en faire déclaration. Et que ledit Quintin accompagné des députés des provinces fe tranfporteroit vers mondit fieur le chanceher p0Ur lui en faite remontrance, 8c -ordonné qu'il laiffera 8c baillera copie de l'oJifon par lui prononcée au nom dudit clergé Levant Je roi , le premier jour de ce mois , en laflemblée générale des états, fignée de lui 8i paraphée, ne va-ietur3 même i Tendioit des deux arncles dont ci-deffus eft fait mention: ^^ ^è«dé acie dudit avis defdits du cf^rsé. o —  sous Charles IX. 505 L'alTignation continuée au mardi vingt-cinq du préfent mois en fuivant, heure de huit heures du, matin 1 5 <51. Du mardi 25 janvier 156*1; Ledit jour vingt-cinq defdits mois Sc an i a ladite heure de huit heutes du matin audit couvent dss Cordeliers, comparans lefdits du clergé , y préfidant nofdits feigneurs archevêque da Tours & évêque d'Évreux, aififtans pareillement mefdits feigneurs les évêques de Pamiers; du Mans & de Vannes. A été remife de rechef en propos la remontrance dudit Quintin , faite ledit jour de dimanche , & avis fur iceile , pour de rechef y délibérer plus amplement. Sur quoi l'aflignation a été continuée a 1'aprèsdmée dudit jour deux heures après midi, i Iaquëllë heure fe trouvera ledit Quintin, pour délibérer fur la réponfe Sc aöion de grace qu'il conviendra faire au roi & a la reine a la prochaine 8c derniere affembiée defdits états. Dudit jour de relevk. Et a ladite heure de deux heures après midi audit lieu comparans lefdits du clergé Sc lefdits feigneurs préfidens fufdits.  SoS E T A T 5 A été drdonrié qu'il' feroit fait a&e de la re-: montrance dudit Qjtiniin , avis & conclufiou fur ce fait, & paree que ledit Quintin a déclaré n'avoir été encore vers mondit feigneur le chancelier , a été- de rechef ordonné qu'il iroic aux fins. que delfus, accompagné des dépurés des provinces , Sc que ledit Quintin feroit ladite réponfe Sc aétion de grace au nom dudit clergé. A été continuée 1'aflignati'on au jeudi en fui-, vaat huit. heures du matin. Du Jeudi 30 Janvier tj'éAi Ledit jour 30 dudit mois a ladite heure. de huit heures du matin, audit lieu & couvent de. Cordelliers,préfident mondit feigneur d'Évreux, Sc comparans mefdits feigneurs évêques de Pamiers, de Carcaffonne, du Mans, de Vannes, & autres feigneurs députés dudit clergé. Ledit Quintin a dit avoir été vers mondit feigneur le chancelier , accompagné d'aucuns dudit clergé Sc a recu la réponfe dudit feigneur chancelier, difant Ie contenu audit papier non fignifie n'avoir été fait par lui, mais feulement lui avoir été baillée par aucuns qu'il n'auroit nommés , Sc après avoir remontré audit fiamiers . & icelle Iue puohquement par ledit , fectetaire en ladite aflèmblée du clergé. Et après ledit Quintin auroit auffi lue ia ré Ponfe&aéHon de grace qu'il avoit rédigée par -t ;& 3près la ledure d'icelle a été ordonné Veil* feroit communiquée a mondit feigneur 1 cveque d Evreux, pour y ajouter 5c diminuer fi beioin eft. " Le vendredi dernier jOUr du mois £ ladite fceure de fept heures du matin, audit lieu! -ondtr feigneur l'évêque d'Évreux préfident J »eÖKs feigneurs évêques de Pamiers, du Mans de Vannes ,& autres fieurs députés dudit clerge camparans. ö A été continuée Ia Iedure desTcponfes faites par le roi aux articles dudit clergé Sur la fin de ladite ledure feroient venus en ladite affemblée , les révérendiffimes & illuf. «nffimes melfeigneurs lescardinaux de Lorraine & de Bourbon , par lequel feigneur cardinal de Lorraine ont été faites plufieurs remontrances pour faire entendre auxdits du clergé la bonnê  sous Char-les IX. 509 volonté qua le roi & la reine ont au fait de Ia religion, Sc pareilleaaent melfeigneurs les princes Sc autres feigneurs du confeil, tant de l'églife qne féculiers. Et a été lue en préfence defdits cardinaux l'aótion de grace que lefdits du clergé entem dent aujourd'hui être faite en leur nom par ledit Quintin. Et tot après font départis mefdits feigneurs les cardinaux de Bourbon Sc de Lorraine, Sc a ï'inftant auroient été appelles lefdits fieurs députés des trois états par les hérauts d'armes, pour ètre conduits Sc menés en la grande falie defdits états. Du famedi premierfévrier 1 5<5"i. Ledit jour premier de février audit an, lefdits députés du clergé comparans audit lieu des Cordeliers, heure de fept heures du matin, y préfidens meffeigneurs les archevêque de Tours Sc évêque d'Évreux, y afliftant melfeigneurs les évêques de Pamiers , de Carcaffonne, de Glandeve, Dablh, de Vance Sc de Négrepont. Après avoir entendu la leéture des articles du cahier du tiers-état, en ce qui concerne 1'état eccléfiaftique, & de la réponfe faite par le roi fur iceux 3 a été ordonné qu'il fera baillé re-  quéte au rol, au nom ducht clergé , pour la modification & plus ample déclaration d'aueunS defdits articles, fous le mémoire qui en eft préfentement fait. Et pour dreffer ladite requête, ont été priés mefdits fieurs évêque de Pamiers, abbé dé Eois^Aubty & curé de Saint-Jean en Gtêve i Paris. Et a été continuée 1'affignation ï deux heures, attendant trois heures après midi. Dudit jour de relevée. A laquelle heure après trois heures après* midi, comparans lefdits fieurs du clergé y préfidans monfeigneur d'Évreux. En continuant Ia propofition faite cejourd'hui matin, a de rechef été ordonné qu'atrendu le partement du roi, fera baillé requête a ce que 1'exécution des rcponfes faites aux cahiers , tant dudit clergé que des autres érats, foit furfife jufqu'au mois de mai prochain, que lefdirs états doivent être de rechef affemblés a Fontainebleau ou a Melun, comme fut hier déclaré par mondit feigneur Ie chancelier , en Ia falie des états, le roi & Ia reine y étant, Sc cjtre copie de ladite requête, enfemble les articles des remontrances-qu'il convient faire, feront  soüs Charles XI. 51T fcaïUées ï móndit feigneur l'évêque de Pamiers, pour faire diligence envers le roi Sc fon confeil privé , que ladite requête foit répondue & fatiffait auxdits articles Sc remontrances lui étant d la cour, ce qu'il a offeft faire; ainfi figné, Jacques Bienassis 8c Legier.  SU TABLE DES MATIERES coritenues dans ce Volume. ÉTATS DE CHARLES VIII. CERÉMOXiAL^analyfi & précis des états dc 1483 , & ordonnances rendues d'aprés les états. Extrait du manufcrit tiré de la bibliothéquc du roi, n°.3ii ,.cy tranfcrit Jur t'extrait qu'en a inféré dans le regne de Charles Vlll, M. l'abbé Garnier, que nous avons confronté avec l'original, & qui donne un précis des états & des ordonnances qui ont été le réfultat , page E Etats de Tours, l(j Sur les états de Tours , de 1483 , ^3 Réfumé dc ces états, j g Opinion de Mérerai fur ces mêmes états, 170 ÉTATS DE LOUIS XII. Etats tenus a Tours, le 1 o Mai 1506, 175. Affemblée des principaux du royaume de France , a Tours  DES MATIERES. 515 Tours , fan 1 5 06 > 181 Plus ample relation de la féance dudit roi Louis XII, aux états de Tours, Fan 1506 , tirée dun manuf crit, 183 Lettre du roi Louis XII au fieur de Chievres, 193 Opinion de M. Üabbé Garnier fur les états de 1 506, 197 Etats généraux tenus a Tours en 15 10, 2.08 Concile nationaltenus d Tours en 1 <;lo, 212, ÉTATS DE FRANgOIS I. Projet du parlement de convoquer les états pendant la prifon du roi. 1525. 216 Etats tenus d Cognac. 1521?. id. Affemblée des notables d Paris en 1527, 219 Affemblce üfe 15 29, aoh 1 ^ urés du manüfctü dc la biblïothcque de fainte Genevieve. Difcours de ce qui a été propofé & délibéré a l'ajftmblie des princes} chevaliers de 1'ordre, & autres grands feigneurs, étant dppeïUs J confeil du roi, tenu le vingt-unieme jour du mois daout dénier 1 ? . ÉTATS DE CFIARLES IX. UaUS è 0rUa»s> V * 1'ordre & féance  I DES MATIERES. 515 gardée en la convocation & ajfemblée des trois états du royaume de France, faite par le roi Francois 11, & après fon décès, continuée par le roi Charles IX fon frere , en la ville d'Orléans, aux mois de décembre & janvier 1560. ( Manufcrit de la bibliotheque de fainte Genevieve ) , 311 Harangue du chancelier aüx états tenus d Orléans, le 13 décembre 1560, ?if Harangue de Quintin au nom du clergé de France prononce par lui, de vive voix & par cozur, partie lue & récitée par écrit , devant le rei €karles IX, tenant fes états généraux en la ville d'Orléans , le premier de janvier 1560, environ une heure après midi, 348 Requête préfentée au Roi & a la Reine par la plus grande partie des Délégués de la Nobleffe, tendante d fin de re/et des articles prêtendus inveclifs tf injurhux couchês en la harangue de Quintin aux Etats d'Orléans 1 5 60 , ès quels il appelloit Arriens & hérétiques , ceux qui demandoknt Vêvangile être purement prêchê en quelque lieu ajfondê pour s*afjemblcr & faire prier es , 39S Harangue pour la Nobleffe , faite par le fieur de Rochefort, & prononcée comme la précédentt, ès lieu, jsur & an que deffus, 402 Kk a  Sl6 TABLE Harangue faite au nom du Peuple & Tiers-Etat de France , entierement prononcée de vive voix , par de ÜAnge , d Pinfiant que le fieur de Rochefort eut parachevé de parler pour la Nobleffe. Proces - verbal conttnant les ordonnances , acles comparitions & autres chofes faites & ordonnées par les députés du clergé de France affemblés k Orléans , pour comparoir devant le roi en rajjemblée générale des trois états , 444 fin de la Table.