DESÉTATS GÉNÉRAUX, ET AUTRES ASSEMBLÊES N ATIONALES, TOME TRE1ZIEME.   DES ÊTATS GÉNÉRAUX, ET AUTRES ASSEMBLÉES N ATIONALES. A LA HA Y E; 'Et fi treuve j> P a r i Sj Chez Buisson i Libraire, H6tel de Cocdofquae; me Hautefeuille , N°. io. TOME TREIZIEME   DES ÉTATS GÉNÉRAUX E T AUTRES ASSEMBLÉES NATIONALE S. SUITE DES ÉTATS T E N U S SOUS HENRl 11 fc États de Mobuns, Cependant en France , le roi qai étoit encofö enfant, mais qui avoit été déclaré majeur , ayanï paflé 1'hiver a Blois, après le voyage de Bayonne , alla a Moulins en Bourbonnois, au mois de jan« vier, oüilavoic mandé a un certain jour lesgrands du royaume , qu'on avois renvoyés 1'anni* Tome XIII. * A  ft E t A T S précédente ; mais il avoit mandé principalement les Coligny èc Francais de. Montmorency, fils du connétable , afin de fe réconcilier avec les princes de la maifon de Guife j car Cipierre, un peu devanc que de mourir, avoit averti le roi que leurs diffèntions nourriffoient des partis en France, & les plus avifés le jugeoient ainfi. Néamuoins, pour ne pas faire paroltre que cette aflemblée fe faifcit plutót pour des particuliers, qu'en confidération de i'état, 1'on fit venir en même-tems les principaux de toutes les cours du royaume, pour fatisfaire aux plaintes de toute la France, que le roi avoit ramaffées pendant les deux ans qu'il en avoit fait la revue, & pour apporter de leurs avis les remedes convenables aux maux qui fe répandoient de tous cötés. Ceux que 1'on manda furent : Chriftophe de Thou, premier préfidenc au parlement de Paris, & Pierre Séguier, préfident; Jean d'Affis, premier préfident de celui de Touloufe ; Jacques-Benou de Laggebafton, de celui de Bordeaux ; Jean Truchon, de celui de Grenoble 5 Louis Lefévre , de celui de Dijon; & Henri Fourmeau , préfident au parlement d'Aix , tous illuftres par leur dignité, & par 1'intégrité de leur vie. Lorfqu'on les eüt fait venic dans la chambre oü étoit la reine mere; Henri, èuc d'Anjos j Charles, cardinal de Bourbon j  sous Henri III. ^ Louis, prince deCondé j le duc de Montpenfier; le Dauphin/on fils j Charles & Louis de Lorraine, cardinaux j les ducs de Nemours, de Longue vil 1» & de Nevers; Anne de Montmorency, connétable de France, & avec lui, le cardinal Odet> Gafpard de Coligny, amiral, & Francois de Coligny , colonel de 1'infanrerie fran<-oife , fils de la fcetir du connétable de Montmorency, marcchal de Bourdillon; Dampville , fils du con* nétable , & Francois de Scepeaux de Vieilleville , maréchal de France; Louis de Saint - Gellais Lanfac j Louis Dognies } comte de Chaulnes j Jacques, comte de Cruiïbl; Honoré de Savoye, comte de Villars ; Bertrand de Simiane de Gordes , tous chevaliers de 1'ordre; Jean de Mor= villiers , évêque d'Orléans j Jean de Montluc de Valence, 8c Sébaftien de Laubefpine ,. de Limoges : le roi dit en leur pre'fence , qu'a fon. avenement a la couronne il avoit voulu voyager par toutes les provinces de fon obéiiïance, pour entendre les plaintes de fes fujers, qui avoient été tourmentés de diverfes fa^ons,. les années précédentes, & dans les demieresguerres civiles, & y pourvoir par les meilleurs moyens qu'il fefoit poffible ; que c'etoit pour ce fajet qu'il les avoit fait afferabler, & qu'il les prioit,& què mênxe il leur commandoit par 1'autorité royale A. &  4 E T A T S qu'ils y penfafTent attenrivement, & felon qu'il 1'efpéroic de 1'arnour qu'ils avoient pour lui Sc pour 1'état, afin d'obéir a la volonté de Dieu & décharger fa confcience, de fouiager le peuple , Sc de rétablir la juflice dans fa première gloire Sc dans fa première pureté. Enfuite le chancelier de PHópiral commenca , &après avoir beaucoup parlé des grands maux de 1'étar, il conclut qu'iis prccédoientde la mauvaife adminiftration de la juflice , a quoi il falloic apporcer remede : que le roi avpit aflez bien reconnu cela par fon voyage de deux années; que pour lui il ne pouvoit appeller les chofes par un autre nom que par le leur; qu'il parloit donc comme il penfoic j que ceux qui étoient établis pour rendre juflice commettoient de grands exces par des concuiTions & des voleries , & que comme des fautes de cette nature étoient grandes, il n'avoit pu les diffimuler fans fe rendre lui-* .même coupable ; que par cette impunité, & par cette trop grande hcence, on nourrifibit les deux .peftes les plus funefles des états, principalement en ceux oü 1'on élit les princes, comme il arrivoit autrefois a Rome, a la mort des empereurs, & qu'il arrivé maintenant a la mort des papes. & mêrne parmi nous,ouiI n'y apoint d'inrerregnes, Jprfque des princes mineurs viennenc a, fuccédêï  SOBS HfiKR.1 III. J au royaume; que comme II la porte étoit alors ouverte aux concuffions, aux vexations Sc aux féditions, les méchans entreprenoient toutes chofes J Sc que les autres abufoient de leur autorité, Sc des charges publiques, comme dè ieur ptopre bien , a la ruine du public , au mépris du refpeét qu'on doit a Dieu^ Sc de 1'autorité du prince, fans avoir égard a 1'utilité communes qu'il ne falloit point accufer le tems, ni attribuer cela a la malice des hommes; qu'en efFet il n'y avoit point de tems qui put empêcher, ou le juge de garder le droit Sc la juftice, ou le théologien d'interprêter 1'écriture fincérement 5c de bonne foi, ou un fage capitaine de bien conduire une guerre, Sc de défendre le roi & les frontieres du royaume : qu'il falloit donc corriger les fautes des hommes & les ramener dans le devoir, plutot que de blamer le tems qui fuit prefque toujours les mceurs des hommes. Qu'il fembloit que le mieux que 1'on pouvoit faire, étoit de faire de bonnes & de faintes ordonnances par 1'autorité royale, de 1'avis des plus g'ens de bien Sc des plus fages ,qui fuffent gardées religieufement & inviolabletnent a 1'avenir; qu'il ne nioit pas ce qu'on difoit pour 1'ordinaire, qu'il y avoit en France affez de loix & d'ordonnances, & que cette rnultitude, comme un trop grafid nombre de juges, A 3  éf E T A T S étoit caufe que la France étoit abondante en pro"* cès; mais qu'aufli il étoit véritable qu'on avoit befoin de nouveaux remedes pour en étoufFer les nouveaux maux, Sc que les loix anciennes ayant été abolies, ou faute d'ufage ou par la licence » il en falloit de nouvelles, par lefquelles on püt guérir les maux préfens, & pourvoir i la calamité publique : qu'ainfi pour extirper les nouvelles fectes qui naifToient Sc qui fe répandoient de tous cêtés , il avoit été befoin de nouvelles conftitutions de Théodofe, de Valantinian & des autres empereurs , & que maintenant aufli il fembloit qu'il étoit de 1'intérêt de 1'état de faire de nouvelles ordonnances j que li 1'on ne les obfervoit pas, comme cela ne pouvoit arriver que par la faute Sc par 1'avarice des miniftres mème, il falloit les punir févérement, & öter des petites jurifdiétions du royaume ces fortes de peftes Sc ces fangfues de la miférable populace qu'il falloit retrancher tant de juges fupperflus , qui ne fe nourrilToient que du fang du peuple Sc de la multiplication des procés; qu'il falloit fupprimer, dans les juftices inférieures, les cours préfidiales, ou entiérement, onenpartie; leur augmenter leurs appointemens des deniers publicss & leur óter les épices que paieat leurs parties'; qu'il condamnoit cette marchandife publique qu'on faifoit de la juftice.  'sous Henri III. 7 Enfuite il s'étendic fur la püiflance royale Sr fur fes droits, & dit : que le roi ne pouvoit fóuffrir que ceux qui n'avoient que le droit dé vérifier les ordonnances s'atrribuaflent le pouvoit de les interprêter : que cela étoit de 1'autorité de celui la feu! qui faifoit les loix, c'eft-èdire du prince; qu'il n'approuvoit pas aufli que les charges de juftice fuflent réfignées, fi ce n'eft par les peres dcjd vieux en faveur de leurs enra&s, pourvu qu'ils fuflent capables de ces charges; qu'il falloit donc , pour ce qui étoit des nominations qui fe faifoienr par les cours fouveraines ; óter les brigues & les mauvaifes coutumes qui s'y^ étoient introduites. Puis ayant fait une digreffion fur 1'origine, 1'aurorité & 1'établiffemèht des cours du royaume, il paria de recrancher & de diminuer le nombre fuperflu des chambres & de le réduire a fa première inftitution. II agita aufli long-tems lequel étoit plus expédient que les pariemens fuflent fédentaires , ou ambulatoires \ comme ils étoient autrefois, & de leur donner des appointemens aux dépens du public, fi les forces de 1'épargne ne le pouvoient fóuffrir, en aboliflant ce que les parties ont accoutumé d.e donner, & qu'ainfi lWagon fordide de recevoir des préfens, étant entiérement otée, les juges fuflent foumis ï la cenfure, & que chacW'fut A ±  g E T X T S obligé de rendre raifon de fa charge. Puis il concluoit par routes ces raifons, qu'on devoit plutöt établir des juges biennaux & triennaux que perpétuels. Enfuite il propofa beaucoup d'autres chofes touchant la correérion de 1'ordre de judicature, Sc le rétabliffement de 1'adminiftration civile , & lorfque ceux qui étoient préfens eurenc dit leurs opinions en plufieurs délibérations, enfin 1'on fit un édit, au mois de février, qui fut appellé 1'édit de Moulins, du lieu ou il fut fait, Sc qui eft au refte de grande autorité Sc en grande confidération. II contient quatre-vingt-fTx chefs , par lefquels on confirme encore celui qui 'avoit été fait k Paris, il y avoit plus de deux ans, Sc qui avoit été depuis confirmé,le roi étant en Roufllllon. L'on ordonnoit auffi par eet édit d'autres chofes pour la réformation de 1'ordre de judicature, pour couper cherain aux longueurs des procés, pour afiurer la tranquillité publique, & au refte on les rapportoit comme ayant été réfolus par le roi en fon confeil. L'on ©rdonnoit entr'autres chofes, que ceux qui avoient été condamnés au paiement de quelques fommes, pourroient être mis prifonniers, faute de paiement , quatre mois après que la fentence leur auroit été fignifiée, &C q'u'ils ne s'en pourroient exempter qu'en fai-  SOUS HtMUI III. $ £ant ceffion de leurs biens; que pour remédier aux faufletés & aux chicaneries qui fe fent dans les procés, on n'admettroit des preuves que par des contrats , & des promefles des chofes qui pafleroient la fomme de cent livres , & qu'on rejetteroit routes autres preuves par témoins *, qu'on limiteroit les fubftitutions a 1'infini au quatrieme dégré 5 que les fubftitutions &c toutes donations entte -vifs feroient lues publiquement, Sc rapportées dans les actes de Ia jurifdiction la plus proche du domicile de ceux qui auroient fait les fubftitutions ou les donations, Sc que cela fe feroit dans fix mois après la mort du teftateur, ou après que la donation auroit été faite , qu'autremenr , elles feroient nulles. Que toutes donations entre-vifs, mutuelles , réciproques, onéreufes 3 faites a caufe de mariage , & toutes autres de quelque nature qu'elles fuflent, feroient infinuées Sc rapportées dans quatre mois dans les aóbes de la jurifdiétion la plus proche des lieux ou des chofes données , qu'autrement elles feroient réputées nulles , tant au regard des créanciers du donataire , que des héritiers xlu donateur ; qu'on répéteroit les chofes que les mineurs avoient perdues aux jeux de hafard , êc que cette répétition fe feroit par les mi-  *0 E T A T S neurs, par leurs peres , par leurs tuteurs, pat leurs curateurs; qu'on aboliroit entiérement les confrairies, les banquets accoutumés pour batons & autres chofes femblables, comme des occafions qui donnoient beu a la fuperfiition , aux troubles, a la débauche, aux difputes Sc aux monopoles. L'édit ayant été rapporté a la cour, & mis en délibération , le parlement fut d'avis de s'y oppofer pour quelqu'autrcs chefs; c'eft pourquoi lorfque le roi fut de retour a Paris, Sc qu'il eut ouï les dcputcs de la ceur, l'on enroya au parlement , le dixieme de juiller, de nouvelles Iettres, par lefquelles on répondit a fes demandes. Et ces lettres, avec 1'édit précédent, ayant été lus dans le parlement, le vingttroifieme de juillet, Ton y ajouta que pour les chefs qui avoient été marqués par la cour, l'on en feroit au roi de plus amples remontrances ; & enfin ledit eut lieu : & le vint*ttroifieme de décembre, l'on vérifia les lettres par lefquelles on répondoit aux dernieres demandes de Ia cour , & qui confirmoient eet édit, fuivant Iequel, ou peu s'en faut, on rend juflice dans tous les pariemens du royaume , Sc dans les autres juridiclions. Avant que le roi vint de Moulins a Paris,  SOWS HlNRl lil. H les Colignis furent reconciliés, en apparence, avec les princes de la maifon de Guife, ce qui avoit été la principale caufe de 1'affemblée. Ainfi , lorfque Gafpard de Coligni , amiral de France , fe fut purgé par ferment , de n'avoir point été 1'auteur du meurtre du duc de Guife, & de n'y avoir jamais confenti, le roi qui iiiterpofa en cela fon autorité, leur commanda d'être amis ; ils s'embraflerent donc en la préfence du roi , Sc fe donnerent la foi 1'un a 1'autre, de ne fe plus fouvenir des chofes paffées, & de ne prendre jamais querelie pour cela. Cet accommodement fut fait entre Anne d'Efte, veuve du feu duc de Guife; Charles, cardinal de Lorraine , fon frete ; Sc Henri , duc de Guife, fils du mort, qui étoit n'aguere revenu de Hongrie , Sc qui déja en cet age, montrant en lui de belles marqués de la veren de fon pere, avoit fait concevoir de lui de glorieufes efpérances. II fe gouverna de telle forte, en cette affaire , que tout le monde put reconnoitre qu'encore qu'il ne contredit point a cet accord , il n'étoit pas obligé par les chofes doiat les autres étoient convenus,& que quand 1'occafion fe préfenteroit , il ne manqueroit jamais ni de courage, ni de force. Le cardinal de Lorraine, &c Francois de Montmorency,  *1 E T A T S furent aufli reconciliés; le premier ayant afiurê que s'il avoit diffcré de montrer les lettres qu'il avoit obtenues de la reine , il ne 1'auroit point fait avec intention de méprifer 1'autorité d'un gouverneur du roi:, & 1'autre ayant dit, qu'il n'avoit point eu deffein d'offenfer le cardinal, ni de lui faire injure, mais qu'il n'étoit allé en armes audevant de lui, que pour conferver 1'autorité du roi. ( De Thou. ) Ordonnances du roi Charles IX, enfuite des étals de Moulins. Charles, par la grace de Dieu, roi de France, a tous préfens & a venir, comme, pour pourvoir aux plaintes & doléances a nous faites par nos fujets , en divers lieux, au voyage qu'avons continué depuis deux ans par les provinces de notre royaume, entr'autres chofes, fur le fait de 1'adminiftration de notre juftice, nous euflions avifé pour la réformation & réglement d'icelle, aflembler, en celle de nos villes oü ferions féjour cet hiver, les gens de notre confeil & aucuns préfidens & confeillers de nos cours de parlement & grand confeil, mandés & députés pour cet effet; lefquels feroient venus a notre ville de Moulins, nous y étant, ou après  seus Henri III. ,ij comm unication entr'eux, fui vant notre commandement, de leurs cahiers, articles, & rapport fait d'iceux a notre confeil , avec autre propofés pour 1'obfervance , renouvellement & déclarations de nos ordonnances & de nos prédécelleurs ; le tout mürement délibcré en norredit confeil, auquel notre tres-cher frere le duc d'Anjou préfidoit, & depuis rapporté St revu en notre préfence, affifté de notre très-honorée dame Sc mere la reine, de notredit frere , des princes de notre fang, & plufieurs autres feigneurs & confc-illers de notredit confeil. Savoir faifons, que de leur avis , Sr, de nos certaines fciences, pleine puifiance & autorité royale s avons ftatué Sc ordonné , ftatuons Sc ordonnons, par édit &ordonnance irrévocables, ce qui s'enfuit. Indication des articles de cette ordonnance. Article i. Les ordonnances feront gardées Sc obfervées au parlement & autres cours qui pourront faire des remontrances. Art. 2. Quand les édits & ordonnances auronr é?é envoyés au parlement, il y fera promptement  14 E T A T S procédé; & quand après les remontiances le roi aura fait connoitre fa volonté, il fera paffé outre a la publication. Art. 3, Les mercuriales feront tenues au parlement tous les trois mois. Art. 4. Les gens de ladite cour procéderont rigoureufement contre les juges de leur reffort qui auront enfreint les ordonnances. Art. 5. Les juges & officiers des fieges inférieurs feront tous les ans recueil des ordonnances mal obfervées en leur fiege, & les enverront aux pariemens de leur refiort. Art. 6. Ledure fera faite des ordonnances tous les fix moss aux pariemens. Art. 7. Les maitres des requêtes de 1'hótel feront leurs chevauckees par toutes les provinces. Art. 8. Qui réferve d'ordonner des féances de grands jours. Ajtf. 9. Aux vacances d'ofEces de confeillersaux pariemens, ils nommeront pour y entres  sous Henri II ï. perfonnes capables, agées de vingfcinq ans paffes, lefquelles feront fujetces a 1'examen. Art. 10. Qui regie la maniere de faire ledit examen. Art. 11. De la forme fufdite pour les fieges debaillages & fénéchautfées, les lieutenans & procureurs du roi des préfidiaux. Art. 12. En cas de réfignarion un mois fera donné aux procureurs du röi pour s'enquérir de la capacité du pourvu , a comprer de la préfen»tation. Art. 13. Rédudion des préfidiaux. Il n'y en aura qu'un au principal fiege & viile capitale de chaque bailliage. ^ Art. 14. Les gages des offices fupprimés; réfervés a ceux qui demeureront, a la charge de »e psendre aucune épice. Art. 15. Les préfidiau?: connoïtront en dernier refiort des matieres excódant deux cent cinquante üvres une fois payées , & dix livtes de revenu.  ï6 E T A T S Leurs jugemens feront exécutoires jufqn'a cinq cents livres une fois payées, & vingt livres de rente. Art. 16. Défenfes de faire deux féances & ja-, gemens féparés en même fiege. Art. 17. Les pariemens ne pourront prendre connoiflance par évocation des jugemens des préfidiaux ès cas qu'ils pourront juger en dernier refiort. Art. 18. Les parties ne pourront revenir contre les jugemens en dernier refiort defdits préfidiaux. Ai r. 19. Défenfes a tous juges de rien prendre des parties, de prendre penfions, ni de tenir offices de feigneurs temporels ou eccléfiaftiques. Art. 20. Les prévót de Paris, baillis & fénéchaux des provinces, feront de robe courte, gentilshommes , & d'age '& fufEfance requis. lis réfideront, finon leurs offices déclarés vacans. Art. 21. Les ordonnances de Louis XII feront obfervéas  $ o v s H e n ie i IÏI: ij öbfervées au fujet des gouverneurs qui ne pourront donner lettres de grace ni rémiffion, évoquer les caufes, s'entremettre du fait de la juf-; tice, Sec. Art. 22. Défenfe i tous gouverneurs de donner aucunes lettres de grace, rémilïions & pardon , foires, marchés, & légitimation, d'évoquet les caufes pendantes devant les juges ordinaires „ Sc de s'entremettre aucunement du fait de juftice. Art. 23. Défenfe aux gouverneurs, baillis; fénéchaux Sc tréforiers de faire aucune levée de deniers. Art. 24. Les baillis & fénéchaux prêteronr aide & confort pour appréhender les accufés décrétés. Art. 2 5. De même pour les appelles & ajourné* a ban par contumace. Art. 26. Défenfe de recevoir ni receler lefdits appelles & ajournés. Art. 27. Injonction aux baillis & fénéchaux de faire obferver les édics de pacification. me XUU B  *S E T A T S - Art. 28. Les condamnés par défaut Sc contu» mace, pour peine emportant confifcation, perdront les fruits de leurs héritages & la propriéré de leurs biens, au bout de cinq ans. Art. 29. Ceux qui tiendront en leurs maifons contre lefdits décrets, fubiront la confifcation de leurs places. Art. 30. Les hauts jufticiers qui foufFriront ports d'armes ou violences, fans en faire pourfuites, feront privés de leurs juiïices , & les juges & officiers; pour la meme négligence, priyés de leurs états. Art. 31. 32, 53 & 34. Deshuifliers& fergens, de leurs verges 3 records Sc défenfes de les outrager. '<■ Art. 3 5. ConnoifTance des délits déférés aux juges des lieux oü ils auront été commis. Le juge du domicile renverra le délinquant au lieu du délit.  g 6 V S M i N R ï III. 15» Art. 36. Défenfes a tous juges & greffiers, fous peine de répétition du quadruple t de rien prendre des officiers. Art. 37. Ceux qui feront rinftruétion en matiere civile ou criminelle , fujette a taxe , ne pourront faire lefdites taxes, qui fe feront cs cours , par les préfidens, & aux fiéges, par les lieutenans aux confeillers, & les confeiller-s auxlieutenans. Art. 38. Des procés des gens d'églife , qui feront inftruits & jugés en la grand'charabre ou tn la chambre de la tournelle. Art. 39 & 40. Des procés criminels des eccléfiaftiques. Les juges & officiers loyaux inftruiront les délits privilégiés avant de faire aucun délaiflement defdites perfonnes aux juges d'églife,  *e E T A T s pour le délit eommun ; lequel délaiifement fera fait a la charge de tenir prifon. Nul ne pourra jouir dudit privilege s'il n'eft dans les ordres , & pour le moins fous-diacre. Art. 41. Les prévóts des maréchaux, vi-baillis 6V|vi-fénéchaux, connoitront des cas a eux attribués par les édits, & pourront faire toutes captures, &c. Art. 41. Si on leur difpute la compétence, ils fe pourvoirontpar requête de renvoi, qui fera jugée par les officiers dupre'fidial le plus prochain du lieu ou la capture aura été faite. Art. 43, 44 & 45. Lefdits prévóts des maréchaux, vi-baillis & vi-fénéchaux , tenus de faire leurs chevauchées auxchamps, 8c endrefler procés-verbaux; fans féjourner aux villes, tenus de faire invenraire des biens des prifonniers , & ne pourront exiger aucuns frais ni dépens.  S Q W S H E N S. I III. Art. 46. Connouront auffi les juges Sc préfidiaux, par concurrence & prévention des cas attribués auxdits prévöcs, vi baillis Sc vi-fénéchaux, pour les juger en dernier refiort, ainfi cjue des procés contre les vagabonds. Art. 47. Les préfidiaux., pour 1'année feule= ment, jugeront fans appel, au nombre de fept; tous excès, ports d'armes Sc affemblées üli~ cites. - ' Art. 48. Les condamnations de fommes pé-; cuniaires, promptement exécutées par contraintes. Art. 49. Les ordonnances pour les criées Sc Sc adjudications, fe.ron.t étrohement gardées dans tout Ie royaume. Art. 50. Défenfe de troubler les commiflaires qui feront commis au régime & gouvernement des terres Sc héritages faifis par juftke.  E T A T I* Aft. 51. Les condamnés k délaiffer aueun hér ritage, feront tenus de ce faire, nonobftanc toute oppofition, fauf enfuite a fe pourvoir. Art. 52. Pour les réparations & améliorations adjugées aux condamnés, ne feront empêchées, les exécutions de* jugemens pour le fait de la pofleffion & intraduétion en icelle des perfonnes qui auront obtenu jugement a leur profit. Art. 53. Dès la condamnation en dernier reffort, fera acquis hypothéque fur les biens da condamné. Art. 54. Pour les faits fujets a preuve de témoins, de toutes chofes excédant cent livres une fois payées, feront paffes contrats devant notaires. Art. 55. Les pteuves de tonfure, profeflüon  SOUS H E N X. I III. i| «n religion Sc jugemens, feront recues par lettres Sc non par témoins. Art. 56, De ceux qui jouiront des privilege^ de gardes gardiennes, Sc commitimus. Art. 57. Toutes fubftitutions faites avant 1'ordonnance d'Orléans, reftreintes au quatrieme degré. Art. 58. Toutes donations entre-vifs feront infinuées aux grefFes. Art. 59. Les deniers perdus au jeu par les mineurs, pourront être répétés par eux, leurs" tuteurs Sc leurs parens. Art. Co. Les caufes difKciles feront appoin«j tées.  *4 ElAïj Art. 61, Lesrequêtes civiles ne feront plaidées a 1'audience fans être communiquées aux avocat & prpcureur général. Art, 62. Défenfes aux cours de recevoir les parties i faire inftance par fimple requête, pour révoquer les jugemens donnés en connoiflance de caufe. Art. 63, 64 Sc 65. Es di&onscies jugemens Sc arrers feront écrits , au commencement, les noms des préfidens & confeillers qui y auront afljfté. Défenfe a tous greniers d'expédier aucune expédition fur requête, fi elle n'a été rapportée & fignée de 1'un des préfidens, &c Art. 66. Les produéïions des incidens mis au greffe pour être diftribués par les préfidens a qui bon leur femblera,  sous Henri II f. 2^ Art 67. Ne feront jugés aucuus dtfauts fans appeller les procureurs qui pourfuivront le jugement, & ceux contre lefquelson le pourfuivra. Art. 6%. Aucun procés ne fera jugé par commiflaires, que l'on dit petits corn.mifTaires, finon ès cas défignés par les ordonnances, qui font inflances de dommages Sc intéréts , criées, &c. Art. 69. Défenfes de procéder aux jugemens defdits procés de commiflaires, de dix a onze heures, & de cinq a fïx, ni ès jours de dimanches Sc fêtes. Art. 70. Les évocations n'auront lieu hors les cas marqués par les ordonnances*? Art. 71. Les maires, échevins, confuls , capitouls , &c. continueront 1'exercice des caufes civiles , criminelles & de la police , fans pou-  l6 E T A T S voir fe meier des inftances civiles entre les parties. Art. 72. Des villes efquelles les officiers du roi ou des hauts-jufticiers ont la police &C non lefdits corps & communautés. En chaquc quartier ou paroiffe d'icelles , feront élus, par les bourgeois & citoyens , un ou deux d entr'eux, qui auront la charge, adminiftration & police, lefquels auront puiflance d'ordonner & faire exccuter jufqu'a la valeur de foixante fols pouc une fois. Art. 73. Les officiers du roi tiendront la main a 1'obfervance des édits fur les hópitaux , Sc feront rendre compte aux commiffaires'commis au régime des biens & revenus d'iceux. Les pauvres ne pourront demander 1'aumóne qu'aux lieux d'ou ils font, & les habitans contribueront a la nourriture defdits pauvres. Art. 74. Qui enjoint de faire exécuter les  SOVS HïNK.1 III. 2.7 ordonnances qui interdifent les confrairies ^ aflemblées &C banquets accoutumés pour batons & autres chofes femblables. Art. 715. Les gradués qui fe préfenteront pour obtenir des bénéfices , feront examinés par les e'vêques. Art 76. Tous archevéques & métropolitains bailleront leurs vicariats a perfonnes conftituées en dignités ecclc'fiaftiques, réfidant dans le reflorc du royaume. Art. 77. Défenfe d'imprimer &c débiter aucuns libelles ou écrits diffamatoires. Art. 78. Défenfe d'imprimer aucuns livres fans privilege. Art. 79. Toutes promefies faites par financiers , pour fait de compte , n'auront aucun eflët après le compte rendu & clos entre les parties.  1° E T A T 3 Art. 80. Les brevers de don , congé & difpenfe, n'auront aucun effet un mois après la date d'iceux. Art. 81. Défenfe a tous juges d'avoir égard aöx lettres clofes a eux envoyées pour le faic de la juftice. Art. 82. Qui enjoint aux hoteliers d'avoir en leurs maifuns un tableau attaché en la principale entree , auquel feront infcrites les ordonnances concernant lefdites hótelleries & le taux des vivres. Art. 83. L'ordonnance des arbitres pour les jugemens des caufes entre proches parens , en fait de pattage & autres différens, fera obfervée. Art. 84. Qui ordonne 1'obfervation desédits portant fuppreffion de procureurs.  sous Henri III. 2g Art. 85. Quiordonne Pobfervation des ordonnances portant défenfes de recevoir ès cours les pere, enfans , freres , & autres perfonnes conjointes. Art. 86. Défenfe de blafphême & juremensdu norn deDieu, d peine, non-feulementd'amende pécuniaire, mais de punition corporelJe , fi le cas y échet. Seconde déclaraüon des ordonnances prêcédentes , fakes par le roi, fur les remontrances d lui rêitéries par les gens de fa cour de Parlement d Paris. Charles, par la grace deDieu, roi de France, k tous ceux qui ces préfentes lettres verronc -y falut: comme nous avons fait aflèmbler en notre ville de Moulins, grand nombre des principaux officiers & miniftres de notre juflice, de tous les pariemens de notre royaume, pour, en préfence de nous, de la reine, notre très-honorée  3» E T A T S dame 8c mere , les princes de notre fang , & gens de notre confeil, y étant, nous en grande compagnie 8c aflemblée, être procédé au régiement de notre juftice, en la meilleure forme que faire fe pourraj a quoi auroit été par notre commandement vaqué par longue efpace' de tems, a grande & mure délibération : finalement auroient été dreffés plufieurs bons articles, lëfquels bien entendus aurions voulu fortir efFet de loi & ordonnance générale entre tous nos fujets : a cette fin les aurions envoyés fous notre grand fcel a tous nos pariemens, en la plupart def•quels lefdites ordonnances auroient été publiées. Aurions néanmoins recu les remontrances de notre parlement de Paris , fur aucun defdits articles , fur lefquels aurions fait entendre a* notredi: parlement, nos vouloir Sc intention fur notre fcel, dés le dixieme jour de juillet dernier paffe, 8c depuis, auroit notredit parlement réitéré certaines remontrances , fur lefquelles aurions derechef fait rcponfe , 8c entendre a notredit parlement , notre bon plaifir dés le premier jour d'aoüt en fuivant. Ce • néanmoins en publiant lefdites ordonnances le feptieme jour dudit mois, notredite cour au-  sous Henri lil. jr rok excepté de ladite publication, plufieurs articles, Sc fur autres réfervé a faire itératives remontrances , les chofes demeurant en 1'état; dont feroit advenu que nofdites ordonnances ne font aucunement publiées, gardées ni obfervées. Pour ce, eft il que defirant óter tout moyen & occafion d'incertitude entre nos fujets, & les faire vivre en loi claire Sc certaine foas notre autorité Sc adminiftration de la juftice , après avoir derechef fait voir en nocre confeil lefdits articles , remontrances & rcponfes fufdites, de 1'avis de notredite dame & mere , des princes de notre fang & gens de norredit confeil, ouï de vive voix les préfidens de notredit parlement, & nos avocat Sc procureurgénéral en icelui, avons de nos certaines fciences , pleine puiflance & autorité royale, dit & déclaré, difons Sc déclarons , voulons & nous plak , que nofdites ordonnances foient Sc demeurent généralement publiées , obfervées Sc gardées, tant en jugement que dehors de nos cours & jurifdktions, & entre nos fujets, fans aucune exception ou réfervation jouxte , toutefois& fuivant nos lettres de déclaration envoyées en notredit parlement Sc felon le cojiteriu ers  J2 SOUS H E N R ï 111. ces ptéfentes. Par lefquelles déclarons notrö vouloir & intention avoir été 8c être, que les gens de nos pariemens puiffent nous faire 8c rcitérer telles remontrances qu'ils aviferont fut les édits, ordonnances 8c lettres-patentesqui leur feront adrefle'es ; mais après avoir été publiées , feront gardées & obfervées fans y contrevenir, encore que la publication fut faite de notre exprès mandement , ou que l'on eut retenu &C réfervé d'en faire plus amples ou itératives remontrances. Déclarons, aufli que nous avons prorogé & prorogeons jufqu'a un an prochainement, venant le délai donné a nos baillifs & fénéchaux, qui ne font de la qualité portee par nos ordonnances , de les céder a perfonnes capables. Et quant aux articles concernant les prevots des marchands, \ice-baillifs 8c vice-fénéchaux ou leurs lieutenants , déclarons pareillement que nous avons toujours entendu, comme encore entendons la connoifTance defdits prévóts, vicebaillifs & vice-fénéchaux 3 ou leurs lieutenants , être régléc felon les cas a eux attribués par nos ordonnances 8c de nos prédécefleurs : aufquelles charges fera par nous pourvu de gens de qualité, expérience, diligence , 8c prudhommie, lefquels  sous Henri III. ^ lefqaels routefois n'entendons qu'ils affiftenc m opinent aux jugemens de leurs compétences ou incompétences , que nous avons attribués par nofdites ordonnances a nos juges préfidiaux, pour être par eüx jugés incontinent & fans délai, & fans aucun efpace, fur peine de fufpenfion oe leurs états. Nous réfervant au furplus de pourvoir i h reformation des grefles de notredite cour de parlement a Paris , & diminution du nomfare exceffif des procureurs recus en icelui , dépuis les dcfenC,s den recevoir aucun, après avoir fan: vo;r en notre confeil, ce qui aura été fur ce fait, par les gens de notredite cour. Déclarons néapmoins dés d préfent notre platfir & volonté être , que le nombre défdirs procureurs foitréduit & limité, & lequel dés a préfent nous réduifons & limitóns au nombre de deux cents, par le décès & trépas de ceux qui font 4 préfent recus, & feront arrêtés pour dementeren leurfdites.charges, fans queci-après pour que.'que occafion , ou fous prétexte que ce foit, ledit nombre puifie être augmenté. ^ Si donnons en mandement a nos amés & féaux , les gens tenant notredite cour de parlement a Paris, que ces préfeutes nos lettres Tornt XIJI. G  41 E T A T S de déclaration , avec les précédentes ci-defTus mentionnées, ils faffent lire , publier , enregiftrer & procéder a ladite ledture & publication incontinent & fans délai, toutes autres affaires délaiftées, garder & obferver, faire garder & obferver le contenu inviolablement ; enfemble de rous nos édits & ordonnances véritiés en notredite cour , fans permettre qu'il y foit aucunement contrcvenu: enjoignant a nos amés & féaux , avocat & procureur général; y tenir la main , fur le devoir de leurs charges, &z nous avertir des contraventions, fi aucunes font faites : car tel eft notre plaifir , nonobftanr quelconques ordonnances & lettres a ce contraires. Donné a Paris le onzieme de décernbre i$66. Signé, par le roi en fon confeil de l'AuBESr IIvEa Et fcdlè du grand fcel en cire jaune, fu£ doublé queue. Lues , publiées & enregiftrées : ouï le procureur-général du roi , diï commandemsnt trés-  sous H b n r. r III. 4i expres dudit feigneur , & par lui plufieurs foh réitéré, ainfi qu'il eft concenu au regiftre de la cour. Fait, toutes les chambres d'icelle aflemblées , a Paris, en parlement, le vingt troifieme jour de décembre, 1'an mii cinq een? foixante-fix. Signê 3 Dutillet En parlant, dit un hiftorien moderne, des difficultés que le parlement de Paris oppofa a 1'ordonnance de Moulins, de 156S, Bugny-on avoit dit : « Ne font les ordonnances fait.es en » pleines aiïemblées des états de ce royaume,'du »• confeil privé du roi, des députés de fes cours » de parlement, telles que les préfentes, fujettes » | aucune publication ni vérification des cours » d'iceux pariemens dece royaume; les autres au » contraire fe doivent publier principalement au » parlement de Paris, auquel eft demeuré le nom » de cour des pairs, & femblablement 1'autorité >• & puiflance de les homologuer, ainfi qu'eüe » a fait de tout tems, & fait encore i préfent, » finon que le roi veuille & commaiide d'au» rorité abfolue , comme il fait ici, qu'il lolt » obéi en fes ordonnances «. C *  44 E t a t s FORME PRÉPARATOIRE DE LA CONVOCATION DES ÉTATS, et notice , SUR LE RE G NE DE HENRI III. M'ijfwns fecreltes & particuliere adrejfe'es aux dijfêrens ordres, & aux officiers , tam militaircs , civils , que munic'ipaux, pour les inviter a apporter aux itats des difpojitions pacifiques. E n cette même faifon , courut par la Franc© une exhortation avouée, en fórme de depêches, adrefiee a mefiieurs les gouverneurs des provinces , & en forme d'avis donné aux trois états généraux, parlant a chacun d'eux, & pour ce qu'il y a dedans les chofes fort notables pour cmouvoir un peuple a 1'obéiflance du roi, & a ne prêterlibrernentl'oreille a ceux qui voudroienc remuer dans 1'érat, je les ai ici rapportces avec 1'ordre qui y eft obfervé, parlant premiérement au ciergé, fecondement a la nobleffe , tiercement au peuple, quartement au* officiers dg la couronne.  sous Henri III. 45 Au c Ier gé. t< Meffieurs éccléfiafliques, prenez garde a » cette dépêche, il n'y a pas un de vous qui ne » fache de point en point les articles de la derniere » ligue (pour ne vous parier de plus loin ) qui » fut faite par plufieurs princes , & au décu du » roi a Péronne, en 1'au 1584, lefquels étoient 11 » fpécieux , plaufibles & favorablemeiu recus, Sc »» embraffés de tout le monde, qu'il fembloit » ( principalement a ceux de votre ordre ) que » 1'ange de Dieu devoit promptement exterminer » celui qui contrediroit a leurs progrès. Qu'en eft» il arrivé, après quatorze ans de guerre barbare » & inteftine , Sc fans intermiffion, quelque pru» dence& dépenfe que les papes, Ie confiftoire, » la plupart des princes de 1'Europe, Sc prefqu'un» chacun de vous autres y ayiez apporté ? Rien , » comme vous favez, que 1'avancement de 1'hé»réfïe, la démolition des temples, plufieurs « communautés privées du fervice divin , le » chatimeut honteux de quelques religieux , la » mort précipirée des principaux chefs Sc auteurs 53 d'icelle , la pauvretéde tout le clergé de France, » par Ia vente de votre temporel.,. & une telle. sa confufion en 1'adminiflracion de ves affaires %  4^ E T A T S 5» pat les économes fpirituels & temporels, pour » les titulaires abfens, que les procés en durent m encore au grand confeil & aiileurs. C'eft par » miracle que ces malheurs font paffes & ont été « abolis, non fans étonnemenr, par la générofué » du feu roi d'heureufe mémoire , qui a redreffé » les auteli, Sc remis la meffe en une douzaine » des pl-jsforces villes de France, pourle moins , » ou il y avoit trente ans & plus qu'elle en étoit » otée ; vous même avez été remis en vos béné» fices & maifons d'oü ie canon vous avoit chafïé: »> tous ces défordres étoient dérivés de ïadite. » ügue, fource fatale de nos maux, qui rendoit la » France fi débile , que fi fa majefté eut tant foit ? Peu r^fléchi aux efforts qui lui ont été faits a >> ton avénement a la couronne , nous étions a » préfent étrangers dans notre patriej mais fa»dite majefté, bien affiftée du Saint - Efprit, » Sc bien fervie de lés bons ferviteurs, traita » avec les fujers dévoyez de fon obéillance, & «avecies étrangers, a la confervation duquel »> traité il vous a iïnguliérement obligés pour » les raifons ci - deffus , & pour vous y avoir » eompris autant favorablement que vous avez » pu defirer, tanr pour votre foulagement, que # pour la conrinuarion de vos autorités & fraq-  sous Henri Itl. 0 a chifes. Or , meffieurs, en récompenfe de fes 4i peines , le roi attend que chacun de vouS » tous faurez aider de votre part, comme pre» miers membres de cette monarchie Francoife, *> a conferver foigneufement 1'état; faites-y » donc votre devoir .pai vos piétés & bonnes » inflruclions , en prenanr le bas age du roi a pour un trés - ample fujet d'exercer votre « fidélité ; & rendant au frere 1'amour que vous « deviez a fon ainé , rendez auffi a votre pays » ce que vous lui devez , imitant en zere Sc pru» dence vos devanciers, afin qu'a votre imitariori » un chacun fe puiffe ranger a fon devoir >u A la nohlcffii « Meffieurs de la noblefle, honorez les princes » i caufe de leurqualué, qui eft la pius apparente » qui foit parmi les hommes; & fi Vous avez5 « 1'honneur d'être bien auprès d'eux, ne Vous » en retirez jamais , fi vous ne connoitfèz claire» ment qu'ils veuillent faillir & décliner a. leur » devoir envers le roi ieur fouverain feigneur & » le votre, car en ce cas la néceffité de 1'étaÉ » vous difpenfe de votre foi. Vous, meffieurs,. » vous êres le nerf de cec état, fa force SS  4? E T A T S » fon bouclier ; vous êtes - vous bien trous> vés d'avoir couru toute la France , avec »j vos armes fur le dos & en la compagnie des u'étrangers, pour le foutien de quelques-uns 5) defdits princes & pour'leurfervice particulier, » oubliant imprudemment celui que vous deviez » a votre roi & k cette couronne ? votre honneur »s eft il accru? vous ou vos enfans vous êtes-vous j3 élerés aux premiers grades de 1'état ? vos » noms en font-ils plus illuftres ? vos biens » font - ils augmentés ? vos dettes font - elles » acquittées ? n'avez - vous .pas plutot empiré >> qu'amendé votre condition ? Cette derniere » émotion, & ce qui a fuivi, ne vous a-t-elle pas >» fait repentir du paffé, & connoitre noroirement 33 qu'il n'y a que blame , reprocae, appréhenfion 33 & infamie pour ceux qui s'arment contre 33 le roi, cela vous a auifi appris qu'il n'y a ss infortune plus extreme, &que l'on doive plus » redouter, que celle qui fépare & éloigne les » enfans de 1'obéifTance du pere , & la noblefte » de celle de fon roi. Quand cela arrivé 3 la juf» tice divine permet que les vengeances s'exer.3 cent fans exception dage, de parenté, ni de , vqualité, par inhumains afTaffinats , dont une » partie des principales races de votre corps eft » éteinte ;  sous H e n r i III. 49 w éreinte; furprifes, fiéges, dérnolirions & brÜ» lemenc de maifons, raviftement Sc violemenc » des filles Sc femmes , pillage de vos biens, les » campagnes délaiflees en deferts & rougies' do >> votre fang, la famine publique, dont la mé» moiré nous eft fi-fraiche Sc préfente, que fi vous » connoiiTez bien ce que vous êtes & ce que vous w avez enduré par le paffé, Sc ce que vous pouvez, » prenant garde au pafte & au préfent, il n'y a » perfuafion, prétexte ou ambition de qui vive » qui vouspuiffenc jamais tromper, ni faire ou» blier que la plus méchante condition des hu» mains eft d'avoir des difputes domeftiques, & » anathême qui les füfcitéra. Ces princes que » vous avez tint!airnés, que vous avez fuivi Sc » couru fi longuement leur fortune; ne vous ont» ils pas abandonnés en faifant leur accord avec » le roi, hormis les abolitions qu'ils ont fait » obceniraquelquesuns, ont-ils eu aurre foin » de fubvenir a tant de ruines que vous ave» » fouffertes en vos maifons, parquelques honnêres » gratifications, lorfque vous avez eu affaire d'eux » pour appaifer vos querelles, dont vous n'êtes »> que trop fournis, ou pour vos procés civils ou >» criminels , ou quelque autre occafion , ne vous w ont-ils pas délaiffés ou froidement affiftés j fi » vous avez quelquefois recherché leur appni auTome XllU Jj)  $0 E T A T S >j prés du-roi, pour quelque gouvernement, ca» pitainerie , lieutenance ou autres bienfairs , » n'avez-vous pas été plus contens de P;:ccueil » que fa majefté vous a fait, de fa franchife & » liberté de parler a vous, de fa facilitéa oótroyer » vos demandes, que vous n'avez été fatisfaits » d'eux qui ne vous préfentoientque par maniere » d'acquit. Enfin , meffieurs, tel fupport & ami» tié que vous avez eus ci-devantdefdits princes, » vous ne les devez pas efpérer autres a 1'avenir; » pourvu qu'ils contentent leurs paffions , & qu'ils »3 cherchent par votre allifcance leur fortune, ils » n'ont aucun foin de ce qu'il pourra arriver en » votre particulier; ils vous carefient s'ils ont a » vous employer, & fi vous les priez ils vous ►> méconnoifient; ils n'ont point d'ange pour » vous ouvrir les portes lorfque vous êtes prifon» niers pour 1'amour d'eux; ils mettent vos têtes » fur un échafaud pour garantir les leurs, Un ma» réchal de France, grand capitaine s'il en fut ja» mais, y a mis depuis ia fienne, pipptS par » étrangers. Que le roi faffe confifquer vos fiefs, » ils ne vous bailleront point de leur bien en ré» compenfe du votre perdu : un premier préfi» dent d'une cour fouveraine eft prefque réduit i» a 1'aumöne, lequel fait moins de pitié a ceux >► qui lont caufe de fa pauvreté, qu'aux autres.  sous Henri III. ^ »> Outre ce que dellus, reprefentez - vous, mef» fieurs , que Ie roi eft bon & qu'il regarde »les étacs comme fes confervaceurs natu. »rels, 8c partant que votre fervice ne lui » doit jamais manquer, tant en cette confi» dération, que pour 1'érroite obligation qu'un »chacun de vous doit avoir a la mémoire de » ce grand capitaine , le feu roi fon pere , qui par » fa vertu & courage incomparab'es a fait acquérir » ala plupart de vous autres , les armes ala main, » enpleine campagne ,a Ia vue de Paris & ailleurs, » contre les rebelles & étrangers , 1'honneur » d'avoir été Ie falut de votre pays : foyez-le » encore maintenant felon les occurences , de » peur que ce lot ne pende. Au refte , puifqu'en » nos actions privées nous ne voulons point de » commandement expres ni particulier de per» fonne, en tout ce que nous voyons pour nous, » de 1'utiiité & du profit, écant en cela msïrres *> de notre conduite, faires-en de même, té» moignez votre générofité fans attendre des » prieres ou des remontrances du roi, 8c vous » gardez fur-tout que quelque prétexte qu'on » pourroit avancer, vous fépare ou débauche de - votre devoir. Voyez foigneufemenr la lettre » que la reine mere vous écrit, & fuyez toures » autres recherches, comme écueils très-pétilleux. D z  52. E T A T S w Nous avons tous a nous plaindre de ce que la » vertu, 1'expérience, les fervices, & même la tt fidélité, font lans eftime & mal récompenfés, k n caufe de la vénalné Sccommerce de toutes les » charges de ce royaume , qui eft un menage ou » avarice que les guerres paffees de la ligue , du » bien public, Sc de la réformation en la conduite des affaires nous ont vallu , & en favez u trés bien la caufe. Toutefois procédons en nos »» plaiutes comme nos prédiceffeurs nous ont » appris, préfenrons nous avec de tres-humbles » requêtes , lorfque nous aurons 1'honneur d'être » convoqués, comme fa royale majefté nous en « a fait pir fadite tettre . & nous aflurons qu elles » feront volonciers vues &c confenties par Ie roi, »öV par fadite majefté, 8c nos feigneurs du » confeil, pourvu quJ< lies foient modeftes & » raifonnables : ce n'eft pas a nous a conftituer » une réformation, un foulagemenr, mais a le M requérir & delirer, & fuivant ce chemin nous » ne pourrons jamais nous fourvoyer. Au peuple. v Peuple , je vous dirai que 1'obligationque j'ai a >■> levrs majeftés , pour leurs gratifications, ne m'a » fait, niauclergé,nia la nobleffe,nia vous autres, » ccrire toutes les précédentes Sc fubféquentes con.  sows Henri III. » dérations : car pour ma fortune, collatus [urn » in obfcuris Jicut mortuiJaculi, ains comme fujet » trés - humble de leurs majeftés, intimtment » aftectionné a ma patrie, & appréhendant que >> nous ne foyons a 1'avenir, comme nous avons s> jadis été, la rifée Sc la pitié de tous nos voifiris , » Sc même des barbares, m'ont induitacontribuer » a ia concinuation de la paix , ce qu'un bon Sc » naturel Francois y doit. Vous écoutez atttnti» vement tout ce qui fe dit des affaires d'aujourV) d'hui, Sc appréhendez grandement les alarmes » que l'on vous en donne, je vous affure que » c'eft avec raifon , Sc vous advife que vous y » êtes les plus intéreffés, Sc fi vous ne travaillez »> a bon efcient a éteindre ce feu tandis qu'il « s'allume ou qu'il fe couve, vous en ferez les » premiers embrafés, Sc fervirez s'il croit davan» tage , comme vous avez autrefois fait, de ma» tiere pour le faite durer. Jugez de tous les in» convéniens qui en peuvent réfulter, & vous afTu» rez que comme peuple vous en ferez aux champs » & dans les villes, la bute oü fe frapperont les y> coups de colere Sc d'infolence, de 1'ami & » de 1'ennemi du Francois Sc de l'étranger. Soa» venez vous que le mépris que vous avez fait » par le pafTe de 1'autorité royale; le refpect &c * la créance que vous avez eus aux chefs de partt D3  54 E T A T s » qui vous avoient fermë les yeux, & fubornés » par leurs beaux dires 6c prétexre de religion ou »> de bien public, & nous avoient prodigieufe» ment divifes , ont fourni d'argument a toutes » les tragédies qui fe lont pafTées en France, Sc » a notre vue, dont il vous eft demeuré comme » aux autre->,par leur longueur & votre opiniatreté, »> des plaies trés-mal aifées aguérir, auxquelles » il y a néanmoins quelque amendement par les »> falutairés remedes qui y ont été appliqués par wie feu roi, très-excellent médecin, d'avoir, »> cornme il a fait, fauvé la vie a notre pays , Sc » recouvert comme grand capitaine cette monar» chie perüue, lefqueis continueront fi Dieu plak » par fa majefté, fi vous demeurez conftamment » fes fidèles fujets & ferviteurs; Sc pour vous y »aftremdre roujours davantage , repréfentez» vous devant les yeux vos miferes paflées, les » labeurs iafinis, les périls & la clémence de » Henri II, duquel l'on peut dire : « Quceris Htnrico parem » Nemo eji nijiipfe. . * Et que fes fucceffeurs n'oat fait nul déplaifir a «aucun de vous autres, & le roi, pour notre 3» bonheur , fent qu'il pourra faire déformais » du bien a tout le monde, &c fe faire craindre  sous Henri III. 55 » & punir les féditieux. Ce faifanc, vous quitterez » bientöc les armes que vous avez a la main, » qui ne vous font que débaucher de votre tra» vail, Sc advortez les defieins que l'on pourroit >> former fur votre facilité Sc inconftance accou» tumée. II s'eft offert des occafions d'altérer la » paix, depuis la déplorable mort de fon pere » le roi Henri II, que Dieu abfolve , fi la reine » mere ne s'y fut courageufement Sc fagemene » oppofée j jufqu'a préfent, nous en fommes en » poffeffion par fon foin Sc vigilance: ne foyez » pas de votre part fi inconfidérés d'en perdre la » jouiffance , & tous enfemble renoncons a toute » mauvaifes pratiques, rendons nous capable3 du » repos ou nous fommes , acquis par tant de fang, » premiérement par nos bonnes prieres envers » Dieu, afin qu'il conferve le roi, duquel par » moyens humains dépend !e falut de nous tous, w par corre&ion de notre vie, Sc puis" après par » une obéifiance & fidélité exemplaire envers » leurs majeftés, afin que ce floriflfant royaume » pe fe déchire, ou diffipe de notre tems, & que » nous ne foyons point accufes par notre pofténté » d'avuir été miniftres ou adhérens a de fi pi» toyables efTets, qui peuvent arriver d'unrenou» vellement de troubles, ou trop négligens , » comme nous pourrions reprocher a nos peres, t> 4  5'' E X A T S »> de n'en avoir pas fu arracher les racines des » Ie commencemenr, comme vous voy,ez. II n'y » eut jamais regne plus exempt de guerre, & v moins garni de teneurs de chemins, pour em» pêcher Ie: commerce d'aller & venir fürement » ejue celui-ci; aidons tretous de coeur & d'entiere » affeétion a fa majefté régnante, de continuer de » bien en mieux : le roi vous écrit la lettre fui» vanre, a laquelle vous vous arrêterez, fans «i chercher d'autre parti ». Aux officiers ie la couronne. '« Vous, nos officiers de la couronne & de Ia » juftice, qui êtes 1'ceil, la bouche & la main de «votre prince, & le pivot de 1'état, donnez de « bons confeils a fa majefté, fur toutes les occu» rences qui fe préfenteront, gardez bien de >> défailiir d vous-même, faites exaófcement ob» ferver les loix & ordonnances de cette monar>► chie, & chauez par les mêmes loix tous ceux » qui y contreviendront fans exteption, ni accep»> «on ; car ordinairement la punition de quel» ques pervers & méebans, affure les gens de bien »& vrais Francois , & donne terreur aux » autres >>.  sous Henri III. Commijjion auxiks Commififaires allant par les provinces, afin d'avoir féance aux êtats pioyinclaux. ( Mém. de Nevers, t. i.) Henri, &c. a nos amés & féaux les commiffaires par nous députés pour la tenue des états de notre pays & duché de Normandie , au di:nme jour d'Ottobre prochain, falut : nous avons commis & député nos amés Sc féaux, &c. & les deux ou trois d'entr'eux,en Pabfence des autres, pour aller & fe tranfporter en notredit pays & duché de , &c. voir Sc vifiter nos fujets, favoir, & entendre comme les chofes qui touchent le fervice de Dieu, & les charges Sc dignités eccléfiaftiques , font faites , tenues, maniées & exercécs; quels font les déportemens de la nobleffe, Sc comment la juftice Sc nos finances font adminiftrées , Sc notre dernier édit de pacification eft gardé Si obfervé, avec charges expreflës d'entrer en 1'affemblée defdits états 5 & après que la réfolution que vous aurez charge d'y faire, de notre part, aura été réfolue Sc" arrêtée , de propofer en icelle a 1'inftant, Sc faire entendre par eux notre fufdite droite & bonne intention, felon qu'elle eft amplement fpécifiée Sc déclarée au pouvoir Sc comnaiffioa  5$ E T A T S générale , & en l'inftruétion que leur avons fait bailler : & ce fait, d'ouir & entendre les plaintes Sc doléances qui leur feront faites fur ce fait par les délégués defdits états , & pourvoir le mieux qu'ils pourront, felon le pouveir qui leur eft donné par notredite commiffion générale 5 & pour les chofes auxquelles ils ne pourront pourvoir , feront tenus de les renvoyer pardevant nous , nous donnant néanmoins fur icelles leur avis Sc d'autant que nos vouloirs & intentions font qu'ils puifïent dignement & librement faire ; exécuter leurfdites charges 3 a ces caufes, nous vous mandons & ordonnons par ces préfentes, que vous ayiez a recevoir Sc admettre nofdits commiffaires , & les deux ou trois d'entr'eux, en Pabfence, maladie ou autre empêchement des autres, en ladite aftemblée des états de notredit pays Sc duché de, &c, Sc leur donner Sc laifTer prendre féance en leur ordre & rang , chacun felon fa dignité , état &Z grade, pour après & fuivant que dit eftci-deffiis, fatisfaire a la charge que leur avons baillée , ainfi qu'il eft amplement porti par nofdites lertres de commifïions générales & inftruóbions qu'ils ont, fans leur faire, mettre ou donner, ni fóuffrir leur être fait, mis ou donné aucun trouble ou empêchement ains au contraire rout  sous Henri III. 59 aide , confort & affiftance, felon la bonne affection qu'ils portent au bien de notre fervice , & au repos & foulagement de nos fujets. Gar tel eft notre plaifir, Donné, Sec. Lettres baillêes auxdits Commijjaires, pour dêlivrer aux Gouverneurs , afin de les accompgner en Cexecution de leur pouvoir & commiffion. Monteur , &c. j'eftime avoir fufKfamment témoigné la finguliere affeétion que j'ai de pouw voir au foulagement de mon peuple, 6c le faire jouir d'un aiïuré repos , voire avoir fatisfait a cela par bonnes ouvertures & remontrances, au defir de mes bons Sc affeclionnés fujets. Mais je n'y ai pas encore fatisfait a moi-méme, qui, foigneux de relever mon pauvre peuple des calamités Sc oppreflions que 1'injure du tems, Sc le malheur des troubles paffes lui ont fait fentir , veux de tout mon poffible lui apporter quelque nouvelle confolation 8c allégement, Sc pour ce faire, j'envoie certains bons, dignes Sc notables perfonnages fort zélateurs & amateurs de la police eccléfiaftique & temporelle, Sc du bien & tranquilité publique par lefdites provinces de mon royaume, Sc même en votre charge pour régler Sc réformer autant qu'ils pourront  ÏO! E T A T S les chofes qui en 'ont befoin, tant en 1'état du clergé que de la noblefiê , que du tiers-érat, dont je leur ai fait expédier & bailler ampfe pouvoir , commifïïon & inltruction qu'ils vous comuniqueront, felon la charge qu'ils en ont. En 1'exécution de quoi, je vous prie les aflifter, & leur donner tout le confeil, confort, aide& main-fortedont ils auront befoin: tenant la main que 1'honneur & fervice de Dieu foit remis & mainteilu ès lieux ou il auroit été difcontinué, les eccléfiaftiques puhTent jouir de leur revenu, les nobles foient retenus ès hornes de 1'équité, raifo i & juftice , mes finances foient bien fidellement & également adminiftrees , felon nos ordonnances , ainfi que vous entendrez plus particuliérement de mefdits coramilfaires , & vous me ferez fervice très-agréable. Priant Dieu , Monfieur , &c. vous avoir en fa fainte garde. Ecrit a, &c. Aux Evêques, d même fin. Notre amé & féal, &c. le zele & affeétion que nous avons premiérement a 1'honneur de ^Dieu, puis au bien &c foulagement de notre peuple , lequel nous defirons confoler de fes miferes , calamités & affliétions , fait que nous envoyons certains bons, notables & dignes  sovc Henri III. ^ jperfonnages par les provinces de cettui notre royaume, Sc même en celle de, &c. pour pourvoir & donner ordre a toutes chofes qui méritent reglement & réformation, & même rétablir le fervice divin ès lieux ou il avoit été difcontinué par le malheur des troubles panes*' réintégrer les eccléfiaftiques qui feront violen' temeiat dépofledés de leurs bénélices, en la paifible jouifiance d'i eux ; faire réfider ceux qui doivent réfidence , & des autres affaires concertant le bien du clergé de la province. En quoi ayant lefdits commifTaires befoin de votre affiftance , & de celle d'aucuns eccléfiaftiques, nous avons bien voulu vous faire la préfente, pour vous prier de vous trouver Sc afiembler avec nofd. commifTaires, lorfqu'ils feront fur les lieux te qu'ils vous en avertiront, ou bien d'en^ voyer 1'un de vos vicaires généraux , Sc aucuns des principau-c du clergé de votre diocèfe. auxquels nofdits commifTaires propoferont notre - intention en cet endroit; a 1'efFet Sc exécution de laquelle vous & vo; délégués tiendrez la main de tout votre pouvoir, comme il con- Ivient a votre dignité Sc office, Sc il eft de leur devoir ; & vous nous ferez plaifir crès- agréable. Donné a, &c.  ÜZ E T A T S Aux cours de Parlement, a même fin. Nos amés Sc féaux, encore que nous ayons ci-devant fuffifamment témoigné , Sc faic connoitre la grande affection que nous avons de pourvoir au foulagement de notre peuple , Sc a le faire jouir d'un affuré repos , 5c que nous eftimions avoir en cela fatisfait a nous-mêmes } qu'ayant fort a cceur de relever nofdits peuples Sc fujets des calarnités Sc ópprefïions que le malheur des troubles paffes leur ont fait fentir, voulant leur apparter route la confolation qu'il nous fera poffible. C eft. pourquoi nous envoyons certains bons , dignes notables óc.expérimentés perfonnages, amateurs de la police eccléfiaftique Sc temporelle , & du bien Sc repos publics, par lefdites provinces de notredit royaume, Sc même en celle de , &c. pour résder Sc réformer, autant que faire fe pourra, ce que la malice du tems a perverti & gaté, tant en 1'état eccléfiaftique , lanoblefTe , que tiers-état ; dont nous leur avons fait expédier & baüler nos lettres-patentes de pouvoir & corr.miftion, avecample inftruction : a l exécution defquelies nous vous mandons 6c ordonnons trés expeeftément d'affilter nofdits commifTaires , 6c tenir la main que 1'honneur Sc fervice de Dieu foit  sous Henri III. £j maintenu Sc réfervé ès lieux ou il auroit été difcontinué, les eccléfiaftiques jouiftent de leur revenu , les nobles foient retenus ès bornes de 1'équité , raifon & juftice, fans outrager ni vexer nos autres fujets, & notre juftice foit bien également rendue, Sc diftribuée a nofdits fujets, far les cas & felon que vous en ferez avertis, priés & admoneftés par nofdits commifTaires , auxquels, fi befoin eft, Sc vous en requerent, vous donnerez entrée & féance en norre cour de parlement, au lieu, rang & ordre qu'il convient & appartient k leurs qualité, états Sc grades, ainfi qu'il eft accotitumé , fans y faire aucune difhculté. Car, &c. Donné a, &c. Aux gens des trois états ,d même fin. Nos amés Sc féaux, très-chers Sc bien amés ; nous avons donné charge a nos amés Sc f.'aux; coufeillers , les commifTaires par nous députés pour aller en notre province de, &c. vous propofer & faire entendre la finguliere affeétion & droite intention que nous avons de faire remettre toutes chofes a leur première dignité tc fplendeur , & par même moven vous iéclarer ouvertement 1'état de nos affaires & les grands engagemens- faits de nos dumaines, aides & gabelles & autres deniers des recette géné-  i54 Etatj ra!e de nos finances, qui font a. caufe du peu fonds qui nous refte pour notre dcpenfe ordinaire & autres que nous fommes contraints faire par chacun an, pour la confervation de ce royaume. Sur quoi nous vous prions, Sc néanmoins mandons les ouir, Sc leur donnet autant bonne réfolution & réponfe fur ce fait qu'i) c'tï néceflaire, & que nous nous prometrons de votre accoutumée bonne volonté, a tout ce qui touche le bien de nofdites affaires, Sc la manutention de notre état , Sc par conféquent de vos perfonnes, honneurs, biens 8c facultés , qui y font conjoints iffféparablement , ainfi que vnus entendez plus patticuliérement de nofdits c*mmifTaires , qui nous gardera de nous étëndre davantage en cet ehdroit. Donné a , £cc. Aux ha Hl is. Notre amé Sc féal , nous avons ci-devant affez témoigné la finguliere affecVion que nous avons de pourvoir au foulagement de notre pauvre peuple , 8c a leur faire jouir d'un afturé repos, pour lui apporter quelque confolation de fes miferes gc calamités paflées. Voire nous eftimons avoir en cela fatisfait par vraiesScouvertes déraonftrations au defir de nos bons 6c afreétionnés fujets ; tnais nous n'avons pas encore fatisfait i nous même en  sous Henri ÏIÏ. èn cette bonne intention. C'eft pourquoi nous1 «.nvoyons certains bons, dignes & notables per* fonnages , amateurs de Ia police eccléfiaftique & temporelle, & du bien Sc repos public, par les provinces de ce royaume, Sc même en celle de, Sec. pour régler & réformer, autantque faire fe pourra , ce que la rhalice du tems a corrompu & altéré, tant en 1'état de la noblefle que' du tiers-état, dont nous leur avons fait expédier & bailler nos lettres-patentes de pouvoir Sccommiffion, avec ample inltruétion de notredite 'intention en cet endroit; fuivant lefquelles, Sc ce qui vous fera dit Sr ordonné de notre part, par nofdits commiffinres, nous voulons & vous mandons trés - expreffémenr tenir la main que I'honneur & fervice de Dieu foient maintenus Sc remis ès lieux oü ils auroient été difcontinués, les eccléfiaftiques jouiffent de leur revenu , les nobles fe componenten toutemodeftie ,droiture&juftice , fans outragerni vexeruos autres fujets, &'que notre juftice, dont nous avons eu plufieurs plaïrites , foit bien&également rendue & diftiibuée a touS nofdits fujets, fur les cas, felon 8c ainfi que vous eii ferez avertis; Sc vous fera de par nous ordonné par nofdits commifTaires. Et afin qu'ils puifiènt pro-; pofer & faire entendre a nofdits fujets notredite bonne Sc droite intention, vous en ferez con-f Tarnt XlU. I  66 E T A T s voquer de chacun defdits états de votre reflbrt; en tel nombre , autant de fois , & en tel lieu que nofdits commifTaires vous manderont & ordonneront de notre part, fans y faire faute : car tel eft notre plaifir. Donné a, &c. Aux villes. Trés - chers & bien amés, confidérant que Ia première chofe que nous devons rechercher & procurer, aprcs 1'honneur de Dieu, eft le foulagement de notre peuple & de nos fujets, Sc qu'après les grandes afiliétions , foules & oppreffions qu'ils ont fenties & fouffertes durant les guerres & troubles paffes , nous ne les pouvons mieux confoler qu'en les faifant jouir d'un affuré repos, nous avons avifé de députer Sc envoyer certains bons, dignes, notables Sc expérimentés perfonnages, zélateurs de la gloire de Dieu Sc du bien Sc tranquillité publics, par les provinces de cettui notre royaume, 4 celle fin de faire voir & vifiter nos fujets, favoir Sc entendre comme les chofes qui touchent le fervice de Dieu Sc les charges Sc dignités eccléfiaftiques font faites Sc exercées j quels font les déportemeas de Ia noblefle, Sc comment nos juftices & finances font adminiftrées, afin d'aflurer Sc fortifier de plus en plus rétabliffement de notre dernier  sous Henri I ï I. ^ édit de pacification; eftimant qu'il n'y a rien qui faffe plutót connoitre le bien & Ie mal qui fe retrouve entre nofdits peuples & fujets, que de les faire vifiter par perfonnages d'autorité, qualité & expérience, dont nous avons bien voulu vous avertir, vous dire &c mander , comme nous faifons par la préfente, que fuivant 1'avis & mandement qui vous fera fait par nofdits commifTaires , vous ayiez a vous trouver prés d'eux lorfqu'ils feront fur les lieux, pour entendre ce qu'ils propoferont & repréfenteront de notre intention, en cet endroit, a Pexécution de 1'honneur & de la gbire de Dieu , le bien de notre fervice , & notre foulagement &: repos ; car, &c. Donné, &c. Rèfiexions de Méprai fur Henri III, d r0ccafion des états de 1576. A la mi-novembre, la plupart des députés fe trouverent a Blois, rendirent leurs complimens au roi , aux reines, au duc d'Anjoa & au chancelier, s'aiïem bierent chacun k part, élurent leurs préfidens ; Ie clergé , Pierre Del' pinac , archevêque de Lyon; la noblefle, Claude de Beaufremont Senefcey; le tiers-état, Nicolas Lhuilier, prévöt des marchands de Paris; em- E a  ■' Quelque réfolution que le roi témoignat, néanmoins il craignoit fi fort de perdre fon repos, & d'augmenter Ie pouvoir des Guifes, qu'il voulut que les états envoyaflent vers les deux princes Sc vers Dampville, pour les convier de venir a 1'afTemblée; Sc cependant, afin d'avoir des garans envers le public, de la guerre qui s'alloit commencer, il defira prendre par écrit 1'avis des plus grands feigneurs, Sc de fes principaux confeillers. Ils conclurent tom qu'elle étoit jufte & néceflaire; non pas peut* ctre qu'ils le crufTent ainfi , mais paree qu'ils penfoient que c'étoit fon defir de la faire, ou du moins d'en feindre 1'envie, afin de tirer de 1'argent des états. II demandoit deux millions dor pour les frais, Sc les favoris firent jouer tous les refforts imaginables pour avoir cette gorge chaude. Le tiers-état qui favoit bien qu'il eut payé pour tous, ne put jamais êtte induit a y confentir, non plus qua 1'aliénation du domaine, fur laquelle Bodin ayant remontré avec une E4  •}% Etaï i liberté gauloife, que le fonds du domaine ap«* partenoit aux princes, & que le roi n'en étoic que fimple ufager; il perfuada tellemenc 1'af* femblée de ce fentiment , qu'elle répondit a Bellievre, que le roi y envoya pour cela, que Ie droic commun & la loi fondamentale de 1'état rendoient la chofe abfolument impoffible. En ces difpofitions fe tint la feconde féance, le dix-feptieme de janvier, au même lieu & avec le même ordre que la première. L'archeyêque de Lyon, orateur du clergé, & Ie baron de Senefcey, de la noblefle , commencerent leur harangue a genoux, leurs députés étant debout êé découverts ; mais dés la feconde période , on les fit lever , & leurs députés s'aflirent & fe couvrireut. L'orateur du tiers-état avoit été traité de même aux états d'Orléans, mais cette fpis on le laifla prés de demi-heure a genoux , & fes députés toujours de bout & nu - tête, On avoit chargé ce dernier ( c'étoit Verforis ) de fupplier le roi de réunir tous fes fujets dans la religion catholique par des moyens doux 5? fans guerre , de demander abfolument 1'éleétion des bénéfices, fans en rien remettre a. la vplpnté du roi , de toucher fortement la mauvaife adminiftration des finances , &c d© faire, inftanqe, fur la punition de cewx qui les  'sous H i n r r III. 73 avoient pillées , comme aufli fur 1'expullion des étrangers hors du gouvernement, Sc fur Ia difpenfation des deniers publics. Après cette féance, & que les états eurent travaillé quelque tems a leurs cahiers , les Iiguears firent conclure que le roi feroit fupplié de défendre tout autre exercice que de la religion catholique. Cela palïa a la pluralité des gouvernemens , non pas des voix des députésy encore ne paffa-t-il que de deux fuffrages; & bientot après, ceux de Paris craignant que les premiers deniers ne s'en priflent fur leurs rentesde 1'hótel-de-ville, fe voulurent rétraéter. Les huguenots ayant eu avis de ce qui fe pafloit, dreflerent une contre-ligue , dont le prince fe déclara Ie lieutenant, fous 1'autorité du roi de Navarre, & pubüa un manifefl© plus fanglant que pas un autre qui eut encore paru , Sc qui marquoit fon humeur véhémente, fon courage franc & hardi, & la chaleur qu'il avoit pour fa religion. Vlritablcs points fur lefquels ks états futurs doivent sarritzr. II faut s'occuper des moyens d'acquiter fa friajefté des, dettes qu'eüe &c nos feu roia}fes  74 E T A T s pcre & freres ont été concraints de faire, pout la néceflité des guerres écrangeres & ciyiles. Sur quoi je confeflé bien que je ne vous puis donner grand éclairciffement, mais néannioins je vous en touchetai quelques petits po:nts, lefquels j'eftime que vous ne jugerez être déraifonnables, eu égard a 1'urgence des affaires de fadite majefté.' A laquelle je m'afTure que vous ferez tous offres a vous poffiblcs , fuivant en ce les traces de nos ancêtres francais , qui étant convoqués en affemblées générales d'états, n'ont jamais manqué d'offrir a leur roi & prince naturel tout ce qui étoit en leur pouvoir, comme en font ample foi les états qui furent aflemblés en 1'an mil trois cent quatorze du tems de Philippe-le-Bel, & les états plufieurs fois tenus du tems du roi Jean , & de Charles-le-Sage fon fils, & les états tenus a Tours en 1'an mil quatre cent quatre-vingt-trois, du tems du roi Charles VIII; en tous lefquels états lesFrancois onc toujours montré une grande «Sc naturelle affedion envers leurs rois, a leur aider de tout leur pouvoir, & leurs rois aufli une réciproque &r naturelle affedion paternelle envers iceux leurs fujets , en leur faifant entendre les affaires efquels ils prétendoient employer les aides qu'ils demandoient, & prenanr leur  SOUS HëNR.1 III. yj avïs & confeil fur toutes les grandes affaires du royaume. Et de fait,cette communiaition familiere de nos anciens rois avec leurs fnjet.§., a été fi ordinaire du ccmmencement de cette monarchie, que tous les ans les états s'affembloient une fois , au premier jour de mai , a Paris ou ailleurs, ou le roi les appelloit. Vrat eft:, que cela fe faifoit aufli pour vinder les appellations fuprêmes des procés, paree que de ce tems-la les pariemens n'étoient pas encore érigés. Depuis , quand ils furent érigés > les états ne s'afTemblerent plus fi fouvenr, paree que les affaires ne le requéroient pas , mais tant y a que nos rois anciens les ont fait toujours aflembler , quand ils ont eu quelques grandes affaires fur les bras, ou que la corruption ( qui fe gliffe toujours par laps de tems parmi un peuple ) a requis une réformation. Et combien que en cela n'y ait point eu de terme préfix par aucune loi , pour convoquer les états de tems en tems , mais feulement quand la néceflité a fembïé le requérir, fi eft-cé qu'il feroit bon & utile qu'il y eut ordonnance poiir les convoquer de tems en tems. Et ce, a l'imitation des athéniens, qui de dix en dix ans s'affembloient pour rcformer lesabusqui s'étoient gliiTés en leur république, & au maniement des grandes affaires: & des an-  i& E T A T S ciens romains, qui avoiem des cenfeurs, lefquels de tems en tems faifoient revue générale des fénateurs & autres magiftrars , pour corriger les abus & les corruptjons qu'ils y trouvoient. Cela tenoit en devoir chacun, grands & petits, qui tachoient tous de marcher droit, fentanc le tems approcher de la cenfure ou revue. Venanr donc a notre propos , femble que des trois états de France , il n'y en a point duquel fa majefté puifle mieux ni plus juftement avoir aide & deniers que de 1'état du clergé. Car il eft c«rtain que le clergé de France tient pour Ie moins le tiers des biens du royaume, comme chacun le voit a I'ceil , tant en confïdérant le général comme en confidérant particuiiérement le clergé de chacun évêché ou de chacune ville. Cependant il eft tout certain que le clergé ne fait point la cinquantieme partie du peuple de France \ car on voit bien que, par tous les endroits du royaume , pour une perfonne du clergé , il s'en trouve plus de cinqaante. voire cent d'autres. Tellement qu'ctant cet état ft petit en nombre en comparaifon des autres, & étant fi riche Sc opulent que de tenir le tiers des biens du royaume poux le moins, il s'enfuit évidemment qu'il a meilleuc  sous Henri III. 7y moven de fournir deniers a. fa majefté que la noblefle ni le tiers-état. Davantage, chacun fait qu'il eft aujourd'hui en France moins de prêtres & moines , de la moitié qu'il n'étoit il y a vingt ans : car plufieurs fe font retirés de cet état, & peu s'en font mis , & plufieurs aufli font morts. De maniere que n'étant le clergé que de la moitié du nombre qu'il fouloit être, quand bien fa majefté prendroit la moitié des. biens & revenus dudit clergé, il demeureroit toujours aufli riche a proportion des perfonnes ; qu'il étoit il y a vingt ans, ou du moins il ne s'en faudroit guere. Or comme il eft évident que , par ce moyen, fa majefté peut prendre grands deniers fur le clergé , aufli eft-il. certain qu'elle a bon droit & titre pour ce faire , notamment fur le temporel dudit clergé. Car il ne faut douter que le roi ne foit fouveverain , ayant toute puiflance fur ledit temporel. Combien que le pape Boniface VIII , en 1'an mil trois.cent, fe voulüt fe dire fouverain tant -au fpirituel que temporel , écrivant au roi Philippe-le-Bel en cette maniere : « Boni» face, évêque, ferviteur des fervireurs de Dieu » a Philippe, roi dé France, craint Dieu Sc » garde fes commandemens. Tu dois favoir que # nous a fommes par-deflus toi, tant ès chofes  7% E T A T S » fpiritueiles que remporelles, Sc que la colla» tion des bénéfices ne t'appartienc poinc. Par» tant fi tu as en garde ceux qui font vacans, » je veux que tu en réferves les fruits a ceux v> qui en feront par nous pourvus , & fi tu les as » conférés a aucuns, nous déclarons nulle ta » collation , & réputons pour fous ceux qui » croient autrement. Donné a Latran , le qua» trieme des Nones de décembre, 1'an fixieme » de notre pontificat ». Mais le roi Phiüppe fit une réponfe a fa fainteté, telle que la chofe le méritoit, en cette maniere : <• Phiüppe, par » la grace de Dieu, roi de France , a Boniface, » fe difant pape , donne falutation petite ou » nulle. Sache ta grande fadaife, que nous n'avons » aucun fupérieur aux chofes temporelies, Sc » que Ia collation d'aucuns bénéfices & la per» ception des fruits d'iceux nous appartiennent »• de droir royal , auquel nous nous maintenons » en pofiefiion contre tous : réputant pour fous » Sc infenfés ceux qui croient autrement. Donné , &c. Par laquelle réponfe de Philippe-le-Bel il fe voit que le roi de France eft fouverain fur le temporel des bénéfices, comme aufli cela eft: conforme au droit divin, qui ne donne aux lévites que les dimes Sc prémices, fans aucune part  sous Henri III. 79 des pofleflions 8c héritages qu'on appelle temporels. Et de fait, le clergé de France, aulTi-bien que la noblefle & Ie tiers-état, reconnurem de ce même tems le roi Philippe pour fouverain du temporel, en pleins états généraux qui furent tenus pour ce fait. Aufli n'y a-t-il point de raifon pourquoi la fouveraineté des biens temporels d'un pays doive appartenir a autres qu'au princc fouverain d'icelui. Cela préfuppofé, il faut entendre que les rois de France ont toujours eu droit de prendre fur les pofleflions Sc héritages, droits de cenfive > de lods, quints Sc requints, en cas d'aliénation quand iceux biens étoient de fief ou riere-fief royal : droit d'aides & fubventions, quand iceux biens étoient rotluiers 8c en outre droit de ban Sc riere-ban, de confifcation & d'aubaine, quand le cas échéoit. Lefquels droits appartiennent au roi & a la couronne de France , par droit & fou-: veraineté, dès le commencement de ce royaume; voire dès le tems du roi Clovis, premier roichrétien, devant qu'aucunes églifes fuflent fondées en France, tellement que par les fondations depuis faites, des églifes du royaume , Sc par les dotations Sc acquifitions de biens faites a icelles, les droits fufdits du roi Sc de la couronne n'ont pu être éteints, ni empirés. C'efl  Sq E t a t s pourquoi les rois de France ont toujours eü droit de prendre fur les biens temporels acquis a 1'églife femblable droir, qui leur fut pu écheoir vraifemblablement des lods , quints, requints , confifcations , & autres femblables droits, fi iceux biens fuffent demeurés en main des gens laïcs , lequel droit a été d'ancienneté taxé Sc liquidé au tiers du prix Sc valeut d'iceux biens , payable de quarante en quarante ans , & a été appellé amortiffement, paree qu'il fe paye par gens de main-morte , qui n'ont aucuns héritiers en iceux biens, lefquels étant entre leurs mains font faits inaliénables. En la perception de ce droit d'amortilTement, fe font maintenus nos anciens rois de France, de tout tems immémorial, comme fe voit par les ordonnances des rois faint Louis , de Philippe-le-Bel, Charles-le-Sage , Charles VI, Sc de plufieurs autres rois de France ; lequel droiE eft jufte Sc équitable, fondé fur le droit commun , même felon 1'opinion des dodeurs canoniftes, comme de Joannes Andreas, Sc Panormitanus , & des dodeurs aufli en droit civil, comme Joannes Faber , Baldus , Jafon , Sc plufieurs autres , dont s'enfuit que fa majefté, par bon droit Sc titre, pourro.it lever un amortiffement, pour le moins, fur tout le temporel des églifes de  - .. sötrs Heni^i III. §i de France , vu même ia grande & urgente néceffité que fa majefté a de dfeders , & qa'ü y a plus de quarante ans que Ie clergé n'a payé aucun amorriffemenc. Davarirage, fa majefté pourroit prohibeÈ töutes réfignations de bénéfices, & faire réoir lés vacans par commifTaires , qui les bailleroient a ferme, a la charge de faire faire Ie fervice dïvin par les plus favans & capables prétres qüi fe pourroient trouver ; & , par ce moyen les revèrius entiers des b'aüx a ferme viendroienÉ ati profit du roi, fans que hul en fik grevé m le fervice divin diminué : & ne faut acuter* que dans peu d'années, Ie roi ne tirAr par ce moyen, grands deniers, pour aider l acquitter fes dettes. Et après qu elles feroient acquittées, fa majefté fe pourroit vulder les mains defdits bénéfices , & en refaifir le clergé; mais attendü la grande nécéffité préfente du'roi & du royaume, il ne faut douter qu^ bon droit le roi ne fe puifie faifir defdits bénéfices vacatls, comme fit le roi Phiüppe-le-Bel, en l'm mil trois cent quatre, du confeutement du pape Benedia, qui accorda que Je roi prft, ponr certain tems , lefdits bénéfices vacans , & les dïmes des autres bénéfices non vacans, &c pour pouvoir rédüire Ia monnoia Tome XlIL £  Sz E T A T $ arfoibüe en fa valeur ancienne , qui n'étoit pas caufe fi pqndéreufe .>que celles qui preffent aujourd'hui fa majefté a trouver deniers. Je ne doute pas que , de prime face, meffieurs du clergé ne trouvent un peu dut ce qué je viens de dire, 5c qu'ils ne difent qu'on ne veut tout charger fur eux ; mais quand ils auront examiné les raifons de ce fair , je crois qu'ils confefferont que je ne dis chofe qui na foit bien vraie 5c eqüitabfe ; & même , ils doivent confidérer que , quelque chofe que le roi füt prendre fur eux , ce font toujours les autres deux états qui le payent par effet. Car, de quoi eft-ce que le clergé paie les deniers qu'il fournit au roi? N'eft-ce pas des dimes, rentes 6c penfions que les nobles & rotiuiers leur paientr Ne font-ce pas eux & leurs ancêtres qui ont donné au clergé les fonds &c poifeilions qu'ils tiennent p pour fondation de fervices, dont il ne fe dit pas la centieme part ? Par ainfi, il ne leur doit pas grever de payer Ubéralement , vu que ce de quoi ils paient eft plus d'autrui que d'eux. Et même les dïmes ( qui leur appartiennent a meilleur titre que nul autre bien) ne font pas tellement z eux , qu'un propriétaire foncier ne les en puifle fruftrer s"il veut , en courertiflant {a. terre en pré, 6c fa vigne en garenne.  sous Henri ML §3 Quant a lever aucuns deniers fur la ncbleffe , ll n'y a aucun moyen ni apparence, vu que la plupart des gentilshornmes font ruines & appauvris, par ces guerres civiles. Et fi bien il y en a quelques uns, qui en ces guerres aient pro» firé, par rancohs ou burins a eux acquis par droit de guerre , au hafard de leurs vies , cela el* chofe fi rare & fi petite , qu'elle ne mérite qu'on en fafie compte. Auffi peu y a-t-il d'apparence que fa majefté puifie prendre aucuns deniers fur le tiers-état, lequel eft tant foulé qu'il n'en peut plus. Ainfi feroit bien requis qu'il plüt X fa majefté le décharger des tailles , en les réduifanr a 1'étac qu elles étoient du tems du roi Louis XII, fuivant ce qui fut déja propofé' aux demiers états généraux tenus è Orléans , vu même que les guerres ( pour lefquelles les tailles ont été inventées ) celferont, fi* Dieu plaït. Bien fembie, toutesfois , que fa majefté pourroit faire quelque emprunt fur ceux dudit tiers-état, qui fe font enrichis depuis quinze ans en $ , au maniement des deniers & affaires commims des villes & communautés , ou par négociation de grains& d'autres efpeces & rnarchandifes, qas la calamité du tems a fait être de bonne déduite. Car la raifon veut bien qu'une partie du pro- F a  $4 E T A T S fit qui eft e'mané aux parckuliers de la calamité publique , retourne au public. Mais ou:re ce moyen il n'y a apparence aucune que le roi puifte tirer du tiers-état, deniers ni moyens, quant a préfent. Bien eft vrai que , fi le pauvre peuple avoit joui d'une bonne paix deux ou trois ans , Sc qu'il put librement exercer ï'agriculture Sc le commerce , il pourroit puis après avifer de fournir a fa m?jefté , quelque fomme de deniers, fi lors les états étoient derechef affemblés , pour délibérer & conférer des moyens qu ils auroient. Et feroient lors de tant plus encouragés les pauvres fujets a faire tout leur pouvoir, paree qu'ils fe verroient avoir été maintenus en paix , fans oppreffion, quelques années, fans laquelle paix on n'en peut guere tirer. Car, comme une poffeftion ne peut guere rendre a fon m'aïtre , fi elle n'eft bien cuïtivée Sc clofe, aufli ne»peut guere rendre le peuple au roi, s'il n'eft cultivé d'une bonne paix, 6c clos, par bonne loi Sc juftice. Mais il femble que ce feroit un grand Sc bon moyen pour trouver deniers, s'il plaifoir i fa majefté imiter le pere de familie endetté, qui fe veut dédetter. Car , ayant cinq ou fix métairies, il fe reftreint en 1'une, Sc donne a ferme les autres a des bons cultivateurs, leur  sous Henri 11^ 8j donnant charge de payer fes dettes. Aufli, sll plaiföic a fa majefté trouver bon de donner a. ferme fon domaine , fes droits d'impofïtion toraine, de gabelles d'aides, Sc de fes autres tributs Sc revenus qu'il prend en chacune province, aux citoyens des principales villes, au plus haut prix que les chofes fufdites ont vaiu depuis vingt ans en ca, en ferme ou en recette, f-lonqu'il feroit liquide eu la chambre des comptes , femble que ce feroit un bon ménage pour acquitter fadite majefté, qui eft affez riche, ft fon bien étoit bieü ménagé. Cat les feü rois Louis X'.I Sc Francois I , ont bien fouvent entretenu quatre &c cinq puiftantes armées, qui étoient bien payées de leurs revenus ordinaires , fans furcharger le peuple extraordinaire* ment. Par ce ménage ceux des bonnes villes de chacune province , qui auroient a ferme le bien du roi , le pourroient rnieux faire valoir fans perte & fans fouler le peuple, que nuls autres. Et pourroient employer les deniers de leurs fermes ( dès qu'ils les auroient recus) au. paiement des dettes de fa majefté, & même au rachat de fon domaine. Sauf la partie que fadite majefté fe voudroit réferver fur chacune fer me , ou fur aucunes d'icelles, pour les états Sc aflignacions ordinaires, en caflanr routes IeSa  16 E T A T S extraordinaires , comme il feroit requis. Et fi au bout de quelque tems ( comme de deux ans ), fa majefté faifoit raflemb'er fes états , Sc qu'elle vit que les bonnes villes de fes provinces euflent bien Sc utilement ménagé fon bien, elle leur pourroit continuer lefdites fermes , ou bien les leur óter , felon que fon bon plaifir feroit. Mais quoi que ce foit, il y a apparence que fes fujets fe porforceroient de fi bien ménager fon bien, que cela peut être caufe qu'ils fuflent exempts de tailles Sc emprunts , qu'il leur conviendroit autrement payer a fadite majefté , pour lui aider a acquitter fes dettes, felon le devoir que doit le fujet a fon Prince. Pour conclufion de cette remontrance, femble , meffieurs , que , pour parvenir aux points de la police ci-deflus touchés, ou autres qui feront trouvés meilleurs, il eft requis que tous unanimement , nobles 3 eccléfiaftiques , roturiers, catholiques, Sc de la religion prétendue réformée, tendions droit a ce but, de vivre en bonne paix & concorde les uns avec les autres , fans rien vouloir avantager ni entreprendre les uns fur les autres , nous réglant d'une bonne affeétion , felon 1'édit de fa majefté , car la paix nous eft non-feulement néceftaire , mais auffi falutaire; c'eft-a-dire, que  sous Hbnri III. 87 nous ne pouvons plus fubfifter fans icelle, ains s'en va tout ce royaume en une ruïne & défolation évidentes, fi nous continuons en nos guerres civiles. Confidérons , je vous prie , 1'excellent état auquel ce royaume étoit par une longue paix, du tems du roi Philippede-Va!ois , qui avoit d'otdinaire a fa cour, quatre ou cinq grands rois , outre plufieurs grands ducs & comtes , tant étoit 1'état de France opulent & magnifique, fi que le roi fembloit être, pat maniere de dire, comme un roi des rois. Et, fans prendre de fi loin, confidérons feulement que! étoit 1'état de France, du tems des feu rois Francois I & Henri II , & le comparons a 1'état d'aujourd'hui; hélas, nous verrons qu'il y a dinxrence comme du jour a la nuit, & comme d'une maifon bien batie a des vieilles mafures de quelque maifon ruinée ! Ce qui doit bien enflamber le courage pour avoir pitié de notre pauvre patrie & de nous-mêmes, & de-nos femmes, enfans, paiens & amis, pour ne les laifier revoir la com buftion de notre patrie, & tant de miferes & calamités que les guerres civiles apportent, & pour ne les plonger aux vices , corruptions & ignorance que les confufions inteftines engendrent & nourriffent. F4 ,  SS E T A T s Les exemples de nos voifins nous doiveut bien faire fages en cet endroit, car nous voyons que 1'Allemagne & 1'Angleterre n'ayant pu venir au deiTus de cette religion , ni par les feux , ni par la guerre, enfin ont trouvé le meilleur de la lailfer avoir fon cours en toute liberté, §c de vivre en paix les uns avec les autres. Si vous, meffieurs des états, voufiez entreprendre de perfuader a fa majefté d'altérer quelque chofe en fondit édit de pacification, au préjudice de ceux de ladite religion , i{s vous pourroient alléguer plufieurs raifons péremptoires, par lefquelles vcus ne ppuvcz entreprendre cela. Ils diroient que , fi pour Ie bien de paix, les catholiques ont accordé que 1'exercice de ladite religion eut licu, il y a cei;t fois plus de raifon &c d'occafion maincenant de 1'aceorder , attendu la grande néceffité de paix, fans Iaquelle ce royaume approche évidemment de fa fubverfion entiere ; & qu'il eft certain que 1'infracTion de 1'édit de fa majefté nous replongeroit au même abyme de guerres $c combuftions que fit , ii y a qyinze ans, l'infraéïion dudit édit de janvier. Et fi vous répïiquiez a cela, que la paix fe peut bien avoi.r fans fóuffrir ledit exercice, ils vous répondroien? que non, &c que I'expérience du pafte, fait foj  sous Henri III. g9 de ce qui en pourroit advenir. Et que , bien qu'ils aiment & defirent infiniment Ia ccnfervation , fplendeur & profpérité de ce royaume leur patrie , néanmoins 1'honneur de Dieu &C le falut de leurs ames ( qu'ils conftituent en 1'exercice de leurdite religion ) leur font encore plus chers que nulle autre chofe. Ils allégueroient auffi qae c'eft a faire aux conciles de connoitre du fait de la religion , & aux etats de la police; & qua tout événement les états fe doivent premiérement policer & régler eux-mêmes en général & particulier, avant qu'entreprendre de donner reglement a ceux de ladite religion. Et en fomme , ils débattroient tout ce que les catholiques vouoroient décerner ou pourfuivre contre eux , par les mêmes raifons & nullitcs qu'il ont débattues par ci devant Ie conciie de Trente. Tellement qu'il feroit a craindre que la guerre ne fe rallumat , qui les voudroit priver de 1'exercice de leurdite religion & da bénéflce dudit édit de fa majefté ; auquel parrant l'on ne peut ni doit rien diminuer , ni changer fans le confenrement de ceux de ladite religion, pour evner les m^ix qui s'en pourroient enfuivreOr, comme ia néceffité veut qu'on laiffie £  «>© 1 T X T S ceux de ladite religion 1'exercice d'kelle, aufli 1'équité Sc 1'utiüté veulent que l'établiflement de la juftice qui leur a été accordé leur foit obfervé , paree qu'ils ont grandes occalions de récufer la plupart des magiftrats du royaume, ou pour être leurs ennemis déclarés , ou pour être gens corrompus & dépravés , non avancés en état par leurs verrus & mérites , mais par argent, ou pour être perfuades fuperftitieufement en kurs conkientes , que c'eft mériter envers Dieu , de condamner ceux de ladite religion , a tort ou a droit. Et d'autant que pour cet effet, Pexemple de nos aneêtres nous veut grandement fervir, tant pour nous garder de retomber aux fautes oü ils font tombés , que pour les imiter en ce ou ils fe font fagement gouvernés , j'en veux ici réciter un fort mémorable, Sc bien convenab'e en ce tems. Les guerres civiles d'entre la maifon d'Orléans Si la maifon de Bourgogne durerent prefque tout le long du regne du roi Charles VI, qui regna quarante-fix ans, & une bonne partie du regne du roi Charles VII, tellement qu'en tout elles durerent environ foixante ans. En ces guerres-la ces mai-  sows Hekri III. $i fons d'Orléans &c de Bourgogne, il y eut fept paix rompues, & la huitieme tint. La première fut appellée la paix de Chara'es,qui fut faite 1'an 1408 , par laquelle le maifacre commis en la perfonne de Louis , duc d'Oriéans , ne fut puni que parfimple banniflement des exécuteurS d'icelui, de maniere que Jean , duc de Bourgogne , ( qui 1'avoit fair faire ) demeura du tout impuni, a caufe du refpedt de fa grandeur* Après cette paix ainfi batie, les ducs de Berrï & de Bourbon , oncles du roi & premiers princes du fang (après Charles, duc d'Orléans & fes freres, enfans dudit défunt Louis) furent reculés du confeil du roi, & du maniement des affaires , par les menées du duc de Bourgogne. Cela fut caufe qu'ils fe liguerent avec ledit duc d'Orléans. L'an mil qaatre cent dix fut faite la feconde paix , par laquelle , entre autres chofes , fut accordé que lefdits ducs d'Orléans & de Bourgogne s'éloigneroient fept lieues pour le moins de la perfonne du roi. Sur Pexécution de cet article, par la menée du duc de Bourgogne , le roi él ut pour fon confeil , douze chevaliers , quatre évêques, Sc quatre gens de parlement, tous ou la plupart partifans dudit duc: de quoi le duc d'Orléans  91 E T A T S étant mal content , fupplia le roi fon oncle; doter de fon confeil ces partifans du duc de Bourgogne. Et paree que de tout cela il n'en fut rien fait, la guetre civile fut renouvellée par d'Albret, d'Armagnac , Sc plufieurs , tous partifans de la maifon d'Orléans. Le duc de Bourgogne qui polfédoit le roi, abufant de Pautoricé de fa majefté , fit, par lettres-patentes, déclarer criminels de léze-majefté, tous lefdits princes & feigneurs, Sc leurs adhérans , Sc en outre, les fit bannir du royaume. Ledit duc de Bourgogne avoit des prêcheurs a fa pofte, qui dénigtoient de tout leur pouvoir le duc d'Orléans & fes partifans. Deux ans après , en mil quatre cent douze, fut faite la troifieme paix, par laquelle, entr'autres chofes, fut accordé que chacun renrreroit en fes états Sc offices, même ceux qui étoient des favoris du duc d'Orléans , qui en avoient été dépoffédés par les mences du duc de Bourgogne. Cela fut bien accordé , mais non exécuté; de forte que la guerre fe renouvella, en laquelle ledit duc fit faire de grandes cruaurés dans Paris , par le moyen des bouehers. Puis , en Pan mil quatre cent treize , fut faite la quatriema paix , par ie moyen de monfieur le dauphin^  sous Henri III. 9^ Louis 5 duc d'Aquitaine, fils aïné du roi, lequel embralfa le parti des Orléanois , & les approcha du roi fon pere, & en recula les Bourguignons. Par cette paix fut ordonné que les perturbateurs du repos public feroient faifis & punis par juflice , Sc les proviaces maintenues en repos & tranquilliré, & 1'édit defavoué ( comme chofe abominable & déteilabie), par lequel le roi, après la feconde paix, avoit déclaré les ducs de Berri Sc de Bourbon fes oncles , Sc le duc d'Orléans , & fes freres , fes neveux , Sc le duc d'Alencon , comtes d'^Ibret, d'Armagnac , Sc autres feigneurs , avoir commis crime de iéfe-majefté, & par lequel leur honneur avoit été blamé, a l'inftigation des féditieux Sc troubleurs de paix, en reconnoiflant lefdits princes fes bons & fideles parens, & tous les Orléanois, en général, fes bons Sc fideles ferviteurs & fujets. Le duc de Bourgogne fe voyant ainfi défarconné Sc dénigré , reprit les armes. Sur cette levée d'armes, en 1'an n*al quatre cent quatorze , fut moyennée" par monfieur le dauphin, une cinquieme paix, par laquelle il fut accordé, entr'autres chofes, que le traité de Chartres tiendroit, & que les crimes Sc mafTacres commis par les parti-  94 E T A T s fans da duc de Eourgogne , étoient abolis & pardonnés, excepté de cinq cents perfonnes des partifans dudit duc , & fujets du roi, dont fa majefté fe réfervoit pouvoir de faire faire punition & juftice. Et en outre, fut accordé que les princes & grands feigneurs tant d'un parti que d'autre, fe retireroient chacun en fon pays & maifon , & ne viendroient a la cour du roi, de deux ans. L'année enfuivante , fut donnée une bataille a Azincourt en Normandie,, contre les Anglois, laquelle ils gagnerent , & y mourut un trés-grand nombre de grands princes & feigneurs de France, partifans du duc d'Orléans , lequel y fut prit prifonnier , avec le duc de Bourbon. Cependant le duc de Bourgogne ( ayant les occahons avantageufes , par le moyen de ladite bataille perdue ) voulut ufurper le titre de gouverneur du royaume , fous couleur de 1'indifpofition du roi, qui étoit perclus de fon fens par maladie. Mais fur ces nouveaux remuemens du duc de Bourgogne , intervint une fixieme paix , en Tan mil quatre cent dix-huit , moyennée par monfieur le dauphin 3 qui avoit époufé la rille dudit duc ; laquelle paix ne dura guere , tant paree que plufieurs grands feigneurs , par-  s o v s Hemr.i III. rifans du duc d'Orléans , prifonnier en Angleterre , ne la voulurent approuver, que paree que ledit dauphin mourut, & en fa place fuccéda Charles fon frere, qui fut dauphin après lui, & après fon pere fut roi. Sur l'infraótion donc de cette paix, furent exercées des grandes cruautés & tueries parmi le royaume , & même a Paris, contre les Orléanois, qu'on nommoit Armagnacs , de forte que pendant ces cruels troubles , les Anglois occuperenc Rouen & toute la Normandie. Par ce difcours de ces longues guerres civiles du tems de nos ancêtres , & de tant de paix qui furent faites pour les appaifer, nous duffions bien apprendre a deux doigts de fagelfe, pour ne faire point durer fi longtems nos guerres civiles, qui n'ont ja que trop duré, &c pour ne rompre point fi fouvent les paix , mais obferver religieufement & de bon cceur celle qu'il a plu a Dieu & au roi nous donner ; laquelle il feroit bon de faire jurer a tous ( même aux grands ) par juremens les plus graves & folemnels que peuvent avoir ceux d'une & d'autre religion, & que l'on baillac feellez de part & d'autre refpeélivement , pour 1'obfervation , fuivant  9& E T A T S ledit exemple de la paix d'Arras , afin de fe pouvoir aflurer les uns des autres , Sc que ceux qui ne la voudroient jurer & baüler feellez , fuflent déclarés, en pleins états , ennemis de la couronne de France, & de da chofe publique.  n H E N R I III. ÉTATS DE BLOIS de i576-M77, Tirês des memoires de Bodin , des mémoires de le Maguyer, des mémoires du clergé par Du Taixy des mémoires de Nevers, du recueil dc Quinet, formant le recueil complet defdits états. Extrait d'un journal fait par M. le duc de Nevers , pendant les états tenus a Blois es annêes i & 1577, qui peut être regardé comme un bonfommaitt des états. (Mém. de M. le duc de Nevers ) N J-ious navons pu recouvrer Poriginal du difcours que M. de Nevers avoit fait de tout ce qui s'étoit palTé pendant les premiers états de Blois; mais 1'extrait que nous en donnons fair, voir aflez clairement qu'elle étoit 1'intention de la cour dans cette aflemblée , & qu'elle étoit celle des ligueurs. Henri III, qui véritablement étoit un grand Prince Sc un grand efprit, confondit par fa prudence & par fa modération , les deiTeins de tous fes ennemis de 1'une & de 1'autre religion. II rendit M. fon frere fi odieux Tornt xiu. q  E T A T S aux Huguenots par les déelarations qu'il lui fit faire contre eux, qu'il le miten érat de ne pouvoir jamais faire de parci confidérable. Il regagna l'affe&ion du roi de Navarre Sc de tous les religionnaires, en fe declarant contre la guerre civiie,& fit manquer cette grande machine de la ligue, en découvrant les refforts , les artifices Sc les fauiTes apparences dont fe' fervoient ceux qui la produifoient au peuple , comme la feule reffource qui lui renoit dans la confufion générale des affaires. ' J'arrivai le dimanche au foir douxieme décembre 1576 , a Blois , penfant que les états fe tinffent le lundi 3 mars. Mais les chofes n'étant pas préparées , l'on en remit 1'ouverture au jeudi fix. Le dimanche , le roi tint un petit confeil, oü étoient les reines , fa mere & fa femme , monfieur , Sc meflieurs les cardinaux de Bourbon , Montpenfier, chancelier de Chavigny , grandaumonier , pour voir comment il auroit a fe gouverner, pour faire qu'il n'y eut qu'une religion en fon royaume ; Sc rint exprelTément ledit confeil ce jour-la, afin de commencer une fi faince ccuvre avant qu'aucune province fut arrivée en fa cour , de peur que l'on ne dit que ce fufTent été eux qui 1'eulTent incité a telle louable entreprife. Or li fut réfolu y que fuivant la re-  sous Henri III. e? quête qne les trois affemblées lui feroient de lui permettre qu'il n'y eut qu'une religion en fon royaume , qu'il 1'accepceroit. Le lundi 3 , étant allé le matin chez le roi je trouvai qu'il parloit de cette affaire. Et paree qu'il favoit affez mon fentiment , il me communiqua fa délibération, m'en demandanr mon avis i qui fut conforme au fien ; mais qu'il falloit bien confidérer comme l'on auroit a s'y conduire, pour ne pas précipiterun dernier ramede a 1'extrémité de la maladie • dont Ia royaume étoit travaillé. Enfuite de ce, il fuj parlé des affociations qui fe faifoient par let provinces , & de la forte qu'il s'y falfoic gouYerner pour en tirer du fruit. Quand tout fut affez débattu , je dis i fa majefté t pour conclufion • qu'il ne falloit pas penfer d'exécuter aucune délibération , fi elle ne fe refolvoit d'entretenir monfieur fon frere en amitié avec elle. Car, outre que cela rendoit les huguenots foibles , elle feroit caufe que plufieurs feroient au fervice de fa majefté. Ce qui la fit derr.eurer penfive. Et lors , elle me dit: j'ai beaucoup de bonne volonté pour lui. M. lechancelier dit que Monfieur n'avoit jamais montré tant d'affeétion pour fa majefté : qu'il faifoic ce que je trouvai fort bon , fachimt G 3  ÏO© £ ï A T S que les méchants ne cefleroient de troubler cette bonne intelligence. Le roi dit que de fon cóté , ü ne donneroit aucune occafion a Monfieur fon frere , de fe tentet. Et fur ce, le confeil fut achevéj prenant fa majefté, fur elle, d'acheminer une affaire de fi grande importance. Le mercredi, douzieme décembre, le roi m'a dit , que le baron de Senecey élu de la noblefle pour porter la parole , ne vouloit pas conclure a ce qu'il n'y eut qu'une feule religion : difant qu'il ne falloit point entrer en guerre : ce qu'il trouva fort étrange. Je lui dis qu'il falloit pariet a lui pour le gagner, Sc mander le pcre pour le gaigner aufli. II me dit que le pere le confeilloit a cela. Je lui dis qu'il falloit eflayer tous moyens , &C Vf faire réfoudre par amitié ou autrement; ce qu'il trouva bon de faire. Du quatorzieme décembre , fut dreffe par la reine , la forme des propos que le baron de Senecey devoit dire touchant la religion; &C le roi a la mefie le vit, Sc y corrigea ces mots: la plus faine Sc meilieure partie du royaume, c'eft a-dire ceux de la religion ronaine. Je c^agnai les députés du Lyonnois le matili pour y mettre une feule religion.  sous Henri III. 101 Le dix-neuvieme décembre , le roi m'envoya querir le marin , me montra une exhortation qu'il faifair aux dépucés, pour faire cenir bon pour la religion cathoüque. Le roi rabroiia Monfieur pour avoir dit qu'il falloit efTayer de prendre la chariré j difant qu'il falloit prendre garde que cela ne nous amenat a la guerre. Le vingt deuxieme décembre après diner,' le roi. la reine fa mere, la reine fa femme, M. M. les cardinaux de Bourbon Sc de Guife , MM. de Montpenfier, prince , dauphin ; ducs de Guife & du Maine , MM. de Chavigny & de Chiverny , & moi avec M. de Saune fecrétaire dV'tat, déclara fa volonté fur la déclaration qu'il vouloit que l'on fitpar-tour fon royaume ; Sc qu'il vouloit qu'il n'y eut qu'une feule religion , & fut traité de la force de Ia France , & réfolu que ce feroit pour fix mois feulement fans toucher a 1 arriere ban , & qu'il feroit nommé au roi trois capitaines , Sc qu'il en choifiroit un. Fut réfolu que , Monfieur feroit une harangue au roi, en pleins états, pour l'alfurer qu'il lui, ebéiroit, & emploieroit fa vie pour f'éxécutioa de fon commandement ; & de même tous les princes en feroient autant. G $  tOz E T A T S La reine, mere a die , qu'elle efl: réfolue de ne permettre qu'une religion , Sc qu'il n'y aura qu'une difEculté qui les puiffe empêcher de palTer outre. Le vingt -quatrieme décembre , au confeil du cabinet de la reine , le roi déclara fa volonté : qu'il ne vouloit plus qu'il y eüt deux religions en France , & qu'il ne pouvoit aller contre fon premier ferment fait au facre. Qu'il avoit fait 1'édit par force , penfant qu'il düt avoir la paix. Que , voyant le contraire , &C ctant rtquis par les états , Sc que tous princes en faifaient ainfi dans leurs pays. Le maréchal de ColTé , fut d'opinion que l'on ne parlat fi librement au roi de Navarre , de peur de 1'aigrir. Ce que le roi ne trouva bon , Sc fut réfolu d'envoyer Biron. Le vingt fixieme décembre, fut réfolu que Ie grand aumónier feroir une déclaration des occafions qui avoient mu le roi, a ne vouloir qu'une religion en fon royaume , & ce fur 1'averthTement que je lui en donnai. La reine dit qu'elle avoit fait la paix, en efpérance que voyant fon fils agé de vingt-cinq ans , qu'elle le fupplicroit de ne permettre qu'une religion en fon royaume. Le même jour le maréchal de ColTé opina I  SOUl H H N E. I III. 10 J le premier, pour favoir li l'on envoyeroit «lire ouvertement au roi de Navarre, la réfolution du roi, d'une religion, & fut d'opinion que non; le roi, au contraire , & tous les. autres, Ia reine, les cardinaux de Bourbon .& de Guife, Chancelier, Biron Sc moi. Le vingt-neuvieme décembrè, le roi a été faché du propos que M. de Bellievre tint hier k la reine-mere , difant qu'elle devoir bien avifer a une claufe, que le roi avoit fait mettre dans l'inftruétion de M. de Biron , pour le roi de Navarre , qui porte , qu'a caufe du ferment folemnel que fa majefté avoit au fait facre, d'óter 1'hércfie de fon royaume; qu'il ne pouvoit faire autre ferment au préjudice d'icelui', Sc tint plus, qu'il favoit être contre fa volonté, k 1'imitatian des rois fes prédécefTeurs; car par la fa majefté venoit a fermer la porte a toutes capitulations qu'il pourroit faire ci-après; même aux traités qu'il peut faire avec les princes étrangers; & pour ce avoit dit a MM. le Chancelier Sc Chiverny , qu'il vouloit faire une déclaration devant tout le confeil, comme il avoit fait cette réfolution , de ne permettre autre exercice que la religion catholique, felon qu'il l'avoit juré a fon facre, devant le corps de Jéfus-Chrift, qu'il prit fur 1'heure Sc devant G 4  il04 E T A' -T s monfieur, le roi de Navarre & toute la cour; Si qu'il déclareroit que ce qu'il avoit fait a ce dernier édit de pacificacion , avoit été feulement pour avoir fon frere, Sc charter les reiftres Sc les forces étrangeres hors de fon royaume ; que c'étoit fa derniere réfolution; qu'il ne vouloit fur ce aucun avis , qu'il efpéroit que Dieu 1'aideroir, que fes bons fujets le ferviroient, Sc qu'il oteroit le courage a ceux qui avoient nagé entre deux eaux, de tenir plus ce chemin la. Cette réfolution fut louée , Sc fa majefté aufli, de tous ceux de fon confeil: MM. les cardinaux de Bourbon Sc de Guife, duc de Guife , d'Uzès , Chancelier , maréchal de Cofle, Chavigny , Morvilliers, Limoges , Chiverny, Bellievre, Maugiron , Suze, Saint-Supplice, Eiron, préfident Nicolaï Sc moi; après la reine cOnfirma cette réfolution, Sc le fit aufli monfieur, par mon confeil, difaht qu'il employeroit fa vie Sc fes biens pour fervi'r' en une fi fainte entreprife. Le vingt-quatrieme 1575,1e roi s'eft étonné des avis de Montpenfier Sc de Guife , pour être courts; mais ils les ont ainfi fairs, de peur que le roi ne les-montrat aux huguenots, comme M. de Guife ta dit a ma femme. Le comte du Villéc, qüi commande en Avi-  sous Henri III. 105 gnon, a intelligence avec Damville, & tienc cette ville laa fadévotion. Le cardma'1 d'Armagnac s'y laiflTe aller aulïi. Le comte eft porté par le neveu du pape, que Pon dit coucher avec fa femme , & defire le tenir loin; néaiimoins il le faudroit óter, Chiverny me Pa dit. Le douzieme janvier la reine fe courrouca contre Mirambeau , & dit que le roi, elle &: monfieur, qui étoit la, avoient délibéré'de ne plus permettre qu'une religion en France. Le treizieme janvier, le roi a dit qu'il ne vouloit plus entendre a aucune paix , oü s'il s'agit de la religion tant foit pen, & qu'il ne fe repentoit pas de 1'avoir fait. La reine au jardin , avec M'. de Viilequiet &C moi , a dit qu'elle fe repentoit' d'avoir donné avis au roi de cette réfolution ; car elle penfe que l'on jettera le tort fur ceux qui 1'auront confeillé , h qu'il ne deveit pas fitót faire une telle déclaration , a favolr", qu'il vouloit qu'on crut qu'il ne fe ' peut obliger a aucune promeflé qui font contrairés'a celles qu'il avoit faites a fon facre. Le quinzieme' janvier, le roi fe facha contre Ia reine, fur les eonffejllers qu'il veut envoyer au roi cie Navarre , favoir, Limoges, Bellievre , Valence & Foix, d'autant qu'elle les foutenoit,  10(5 E T A T S pour avoir été avec eux faire Ia paix derniere, tc la reine fe facha contre monfieur, paree qu'il foutenoit le roi contre elle. Le roi Ie matin donna charge a Villequier Ie le jeune , préfent Chiverny, de parler a la reine pour 1'appaifer. Le dix - neuvieme janvier , la reine a dit au roi , préfent Chiverny, qui me Fa dit, que Bellievre avoit écrit en SuifTe eu faveur des huguenots. Le vingt-deuxieme janvier, la reine fe plaignit a moi que le roi ne trouvoit pas bon, que l'on lui parle d'avoir perfonne ; elle me dit aufli qu'elle n'ofe rien faire a part , & qu'il le trouve mauvais. Que le roi Franc,ois premier après avoir éloigné le connétable voulut ouvrir les paquets & faire tout de lui-même , mais que tout demeura ; dont il fe facha & prit 1'amiral d'Annebault & le cardinal de Lorraine. Elle me dit, que je voyois bien qu'elle ne peut pas tout ce qu'elle vouloit. Le vingt-quatre janvier , le roi a dit, que Ia reine fa mere eft trop facile, mais qu'il la fera réfoudre j & qu'elle déclarera ne vouloir u'une religion. Loignac dit au roi, dix jours après, qu'il avoit dix hommes qui tueroient le roi de  sous Henri III. 107 Navarre; la reine die qu'il falloit feulemenc Ie prendre. La Berge a eté dépêche pour pratiquer le comte de Turenne ; car l'on penfoit qu'il fe dut ranger du cóté du roi, mais il n'en a rien fait. Le roi voyant qu'il ne pouvoit avoir de fes états un fecours tel qu'il défiroit, après avoir propofé a fon confeil le peu de moyens qu'il avoit de faire la guerre, délibére d'avifer aux expédiens qu'il y auroit pour demander fecours aux états. Ils firent une affemblée 1'après dinée, cü étoient les reines fa mere & fa femme .. les, cardinaux de Bourbon & d'Eft, le Chancelier, le maréchal de ColTé , Morvilliers , Lanfac, Limoges , Chiverny, grand aumónier, Bellievre Sc Nicolay, premier préfident des comptes, Sc Viller,oi, fecrétaire d'état, qui rtcaeilloit les opinions. La propofition faite , chacun opina fans ordre ; j'arrivai lorfqu'il n'y avoit plus que moi a opiner, Limoges , le chancelier Sc les deux cardinaux, fi bien que je ne peux ouir que les deux opinions fufdites, avant qu'il me fallüt opiner, de quoi le roi fe facha; mais la reine fa mere lui dit, qu'il fit opiner tous les au:res qui reftoient a opiner , me vou.  ïoS E T A T S lant excufer , pour ce que je n'avois ouï ni la propofition, ni les avis de meffieurs ; le roi perfifta, il me die que j'en favois affez fur ce; je parlai en ces termes: Sire, je regrette infiniment le piteux étac auquel feront vos affaires , li vous êtes contraint par vos fujets , même catholiques , pour entretenir la foi & la religion catholique, de faire une guerre fi dommageable a votre royaume , & avec fi peu de moyens , toutesfois puifque c'eft une chofe qui concerne votre fervice, & le bien de ce royaume, que de maintenir la belle & fainte déclaration que vous fites 1'autre jour , & la reine votre mere , de ne vouloir plus en votre royaume que la religion catholique; j'eftime qu'il faut auffi que tous ceux qui vous feront affectionnés ferviteurs & fujets , s'y employent jufques a la derniere goute de leur fang, comme de ma part je fuis déiibéré de faire. Ledit duc de Nevers offrit au roi deux millions fur la forêt de Semonchesj item. dix milles écus de rente qu'il avoit en terrein dans la Flandres , & en d'autres obligées a Schombert pour quatre millions, qu'il s'offrit de retirer , pour bailler a quelque princes Alleraands, afin d'amener en France fix mille  sows Henri lil. 109 lanfqueners. 11 excita la noblefle, £ 1'imitation «le fes prédécefleurs, qui alloient li libremenc en la guerre fainte contre les infideles; que c'étoit la même chofe contre les huguenots étant quellion du fervice de Dieu & de la religion, conclut ainfi : A cette caufe , Sire ; je fuis d'avis que Ia noblefle aide a cette tant facile entreprife, fans prendre garde qu'elle y hafarde fa vie & fes moyens , plusque nuls autres des deux autres ordres, mais non pas que l'on donne un feul Hard a votre majefté; Sire , ( & je vous fupplie de me pardonner fi j'en parle ainfi.) mais a 1'imitation de vos prédécefleurs , qu'on fafle une offrande a Dieu , pour être employé a fon honneur & fervice , & pour ce , qu'on établiffe un tronc aux églifes , auquel teute la noblefle aye a faire une offrande au faint facrement de 1'hötel , pour être employée au payement de la gendarmerie 3 felon qu'il fera avifé. Le vïngt-cinq janvier , le matin , la reine envoya Villequier au roi, lui dire qu'elle étoit réfolue a une feule religion : le roi lui renvoya dire qu'il étoit bien aife qu'elle étoit fi bien difpofée, qu'il y étoit réfolu de même j monfieur de Chiverny me 1'a dit.  IIO E T A T S Levingt-fiï janvier,le roi réfolut que monfieur le cardinal de Bourbon , princes, dauphin , chancelier , Coffé , Morvilliers , &c moi allaffions vers le clergé , la noblefie &C le tiers-état, pour leur demander aide en certe occafioh ; favoir: a 1'églife douze millions en fix mois après deux millions par mois a la noblefie en général , & a tous états deux millions de livres. Ce que nous fimes, excepté le prince dauphin qui s'en alla fans y vouloir venir , & après que monfieur le cardinal eut dit que le roi nous avoit envoyé-la pour les raifons qu'ils entendroient de M. le chancelier. Ledit fieur chancelier déclara la volonté du roi aux trois ordres , & les pria de les aider en une fi bonne & fi fainte réfolution , de ne vouloir qu'une feule religion j & après lui, ledit fieur cardinal fit une petite exhortation a tous les trois ordres féparément , leur remoutrant le devoir de bon chrétien & de bon fujet du roi, & amateur de la patrie. Les trois ordres firent une même réponfe qu'ils y aviferoient le lendemain. Le vingt-fept janvier , le roi commenca « porter des pendans d'oreilles , ce qu'il n'avoit pas fait il y avoit plufieurs mois. Le fept février , la reine propofa d'envoyet  sous Hhnri III. jji 1'abbé Gandagne vers Ie roi de Fez, pour avoir deux millions d'or , de vingt ou vingt-cinq qu'il a , & elle efpere d'en avoir réponfe dans deux mois , comme aufli pour établir quelque rrafic de trois ou quatre millions par an , en ce royaume. Le huit février , il a été propofé de faire une trève , pour un mois , mais le roi a dit qu'il feroit comme le Turc , avec lequel il n'y a point de ftireté pour les trèves. La reine a dit que le roi avoit trop tót fait fa déclaration pour Ie fait de Ia religion. Le roi a dit qu'il étoit vrai, mais qu'il falloit bien que les états la fcuflènt, Sc qu'il ne changera jamais; 5c puis que le roi de Navarre dit qu'il doit plutot obéir a dieu t qu'aux hommes; ainfi le veut-il faire. Le roi a déclaré hardiment qu'il ne vouloit qu'une religion ; & a dit M. le chancelier , Sc a moi: n'ai-je pas parlé bien clair ? parlant du fait de la religion. La reine a dit qu'il falloit que le roi prït cette réfolution , touchant la religion , afin que s'il s'en trouvoic mal , il ne fe plaignit que de lui. Le neuf février , le roi me dit Sc a monfieur le chancelier, s'il n'avoit pas bien parlé hier,  HO E T A T S & qu'il attendoit que quelqu'un 1'en louat.' Après diner confeil. La. reine mie en avant de permettre quelque religion , en attendanc Ie concile général. Ce qui fut rejetté ; & le cardinal de Bourbon dit qu'il ne falloit pas, qu'il y avoit plus d'intérêt que nul autre, pour y avoir deux neveux , mais qu'il leur ferviroit de bourreau , s'ils étoient huguenots &c reb elles. Le onze février Chemeraut m'a dit, que ceux d'Agen , lui avoient offert de prendre le roi de Navarre , en décembre dernier fi le roi 1'euc vouiu , & qu'il le lui dit & a la reine aufli } mais qu'ils ne le voulurent pas. Le roi a dit a la mefle au cardinal de Bourbon , que MM. de Lion 3c d'Embrun, penfoient avoir tout fait; mais qu'ils en étaient bien loin puifqu'i'ls avoient baillé leur cahier, & que maintenant la reineöcluitenoient les cardinaux pour faire ce que bon leur fembleroir, comme fe moquant de ce qu'ils avoient fait 3 après s'être expofes , pour lui , & felon fa volonté. Le ttcize février } le baron du Magnac m'a dit , que le roi a dit aux députés du roi de Navarre , qu'il ne vouloit qu'une religion en fon royaume. Le quinze février, le roi a dit aux cardinaux  sous Henri III. , naux de Bourbon , & d'Eft , qUe de Vienne avoit été gagné de la reine, pour parler pour le roi de Navarre , & leur a promis de tenir bon pour le fait de la religion. Le dix-fept février , le roi a dit * monfieur de Vilie-cierc , fur la venue de Richelieu, qu'il ne vouloit qu'une religion en France , quand tout devroit fe perdre , & combien il étoit combattu par ceux qui étoient prés de lui mais qu'il perfifteroit. Le roi m'a dit qu'il fera que Montpenfier pariera tout haut en fa réponfe , & que chacim de nous en dira fon opinion. Leroi m'a dit qu'il vouloit aller trouver la reine fa mere , de peur qu'elle ne penfac qu il padie a part a aucun. Je lui dis que tandis qu'il ne mettra pas la reine de fon cötéj il ne fera chofe qui vaille. Lors, il haufia les epaules & partit. Le dix-huit février, monfieur le cardinal de Guife , m'a dit qne Chiverny avoit été lancé Ft .reine, pour ce qu'il tient ferme pour ia religion catholique & dit : que Vélut lui avoit dit : & qu'Aufonville lui avoit dit qu'il «mr au cabinet de la reine , qUa„d elle Ie menacoit. La reine dit avant hier au cardinal de B0UrTome XIII. ^ '  ï 14 E T A T S bon , qu'il ne falloit pas qu'il perfuadat au roi d'être aufli dévotieux qu'il étoit en Avignon , ou il ne bougeoit d'avec les jéfuites , & ce fur le fujet des comédies , qu'elle vouloit faire jouer en carême , ce que ledit cardinal ne trouvoit pas bon. Le 28 & dernier février , M. de Montpenfier étant arm é hier , fit entendre aux trois états qu'il vouloit les aller trouver pour parler k eux tons enfemble. Mais le lieu étant trop petit, l'on délibéra qu'il parleroit a 1'églife, pu:s il la noblefle, &c puis au tiers-état. 11 dit qu'il étoit néceflaire d'avoir la paix. Qu'il s'affuroit que le roi de Navarre retrancheroit plufieurs articles de 1'édit de pacification , pourvu que l'on ne 1'abolit du tout. La réponfe des érats fut qu'ils ne pourroient rien changer de leur réfolution. Qu'ils trouvoient fort étrange que M.de Montpenlier allat devers eux , pour leur perfuader de permettre la religion huguenotte; lui qui faifoit tant le catholique. Le matin , le roi délibéra de commencer a répondre aux articles des députés , & aflembla enlaprcfence de la reine fa mere, & de Monfieut Sc MM. les cardinaux de Bourbon , de Guife &. d'Eft MM. de Montpenfier, prince Dau-  sous Henri III. llf phin, de Guife , du Maine , maréchal de Cof- 6 , Biron , Morvilliers , d'Efcars • Chiverny i Beihevre , Roftaing , préfident Nicolay & Je procureur-général i Paris , & moi; M de Lanfac 7 vint tard , qui n'opina pas, & les quatre iecreuires d'état. La, il ordonna que le procil. reur général qui avoit confronté les trois cahrers des députés , feroient commis pour faire une feule réponfe ï ceux qui liroient fon exttait ; & que trois fecrétaires tiendroient chacun un des trois cahiers , & Je quatrieme ecnroit la réfolution que l'on prendroir. Ce qui fut fait. Le procureur général commenca par Ie cahier de 1'églife , 8c dit: qu'ils défiroient une ieule religion ; a qi,oi les deux autres ordres ctoient conformes. Lors Villeroy, qui avoit le cahier de 1'églife, lut Partiele; & que ce!ui qui portoit que les mariés & les non-mariés fans difpenfe du peuple , fuflent contrahits de demeurer en leurs maifons, ou de vuider Ie royaume , & déclarés incapables de fuccéder a quoi les deux autres ordres étoient conformes Le roi voulut fur cet article avoir Popinion' de 1 aflemblée , pour en ordonner ; & il com. manda i fon procureur général d'en opiner comme il fit; & conclut que cela dépendoir de fa volonté. Mais le roi voulut qu'il die fon H z  II<£ E T A T 5 opinion. Elle fuc que, pour le peu de moyen. qu'il avoit de faire la guerre , & d'exécuter fa réfolution ; il étoit d'avis de remettre cec atticle pour une autre fois. Le préfident Nicolay , voulut s'en remettre au roi, comme 1'autre , mais il fut prelfé de dire fon avis , tous les autres de même; 5c nul depuis ne remit au roi d'en ordonner. Morvilliers dit, qu'il étoit de 1'état de 1'églife, qu'il lui feroit mal de parler contre ; mais qu'il voyoit bien que c'étoit une chofe que le roi ne pouvoit faire : 5c pour cela il fut d'avis de mettre fur ledit article , que le roi avifèra par tous les meilleurs moyens de reduire fes fujets a une religion, 6c maintenir la paix en fon royaume. Les maréchaux de Colfé Sc de Biron , foutenant leur opinion , dirent que 1'empereur Charles, Pavoit fait touchant 1'intérim: & que , depuis quinze ans , le roi n'avoit pu remettre la religion , comme il avoit défiré j 5c qu'elle ne fe pouvoit oter par les armes. Le chancelier , en peu , dit qu'il étoit d'avis que l'on dit audit article , que le roi defire qu'il n'y air plus qu'une religion en fon royaume ; 5c pour ce qu'il falloit avifer de tous les meilleurs moyens de 1'y établir.  sous Henri III. n7 M. du Maine dit après lequel je dis mon avis , que je dirai ci-après plus amplement. M. de Guife opina. MM. les cardinaux furent d'un même avis, de ne vouloir qu'une feule religion , & prin- ' cipalement le cardinal de Bourbon. II opina néanmoins après Montpenfier, Sc die qu'il ne fe falloit pas arrêter aux forces humaines, car Dieu donneroit du cceur Sc de la force a ceux qui combatcroient contre fes ennemis. II opina fort bien. Le prince Dauphin dit affez mal-a. - propos , que , tout catholique devoit défirer qu'il n'y eut qu'une religion ; & pour cela qu'il étoit d'avis que l'on fit la paix. M. de Montpenfier dit, qu'il étoit catholique , & qu'il avoit délibéré de mourir en cette religion ; mais qu'il confeilloit de faire la paix, pour ce qu'il n'y avoit ni argent ni hommes ■> Sc qu'il étoit plus expediënt dé contenir les huguenots de quelque chofe , puifqu'il n'y avoit pas moyen de faire autrement. Monfieur dit , pour le peu d'expérience qu'il avoit, il n'avoit point d'avis a donner, mais puifque l'on avoit tant penfé a cette réfolution , de ne vouloir qu'une feule religion, ü ne pouvoit pas confeiller de la changer. H i  !ïl8 E T A T S Je dirai maintenant la rruenne, paree que Ie roi la cotitinua &: la reine aufli. Je dis donc , Sire , Dieu vous a inftitué roi , pour maincenir & agrandir fa religion, & pour rendre juflice a chacun'; cela fait que vous étes refponfable ' devant lui du devoir que vous y ferez ; nous devons tous n epargner aucune chofe pour faire notre devoir. Vous ne favez pas, Sire, quand Dieu vous prendra, c'eft le proverbe commun , faifons ce que nous pouvons , & Dieu fera le refte , c'eft ce que fit le roi Saint-Louis, votre prédéceffeur, qui, après avóir perdu une bataille'en Terre Sainte contre les ennemis du nom de Dieiij ne perdit pour'tant pa's 'lé courage d'y retourner: voila quant a Dieu. Quant aux hommes, je,vous fupplie.de ne pas trouver mauvais "fi. je ne puis vous donner avis de changer votre première délibération ; paree que Payant faite avant que de vcnir en cétté ville , & pour autres telles confidcrations, que je veux eftimer bonnes y fi les huguenots ne s'en contentént pas, vous ferez forcé de faire exécuter votre réfolution avec les armes, employant les moyens que Dieu vous avoit mis entre les mains. Si a préfent on vous voit char ger de deflein, fans avoir aucune nouvelle oc-  sous Henri III, tip cafion qui vous y force , que dira toute la chrétienré ? Je ne vois rien qui vous y contraigne de nouveau ; & d'aüleurs les trois étars vous ayant préfenté leur requête , tant de leur propre volonté, 'que par lordre de votre majefté , ils fe trouveront fort étonnés de voir un tel changement; de plus, une celle nouvelle répandue par tout le monde donnera fujet de croire que le zele de votre majefté envers Dieu fera refroidi; je fuis donc d'avis de tenir ferme a la première réfolution , & de ne rien changer , finon quand vous ferez forcé de le faire: cependant je me réfous de vous donner avis de fuivre mon premier proverbe : faire bien , & laifter a Dieu a faire le refte; il connoic mieux que nous même ce qui nous eft néceffaire. Partant, pour laiffer la mémoire a la. poftérité de votre fainte intention , vous devez avifer, puifque vos fujets vous requierent qu'il n'y ait qu'une religion en votre royaume , de vouloir connnuer en vous ce beau nom de Très-Chrétien , que vos peres vous ont lanTé en hérirage, La reine mere nPayant dm' alTêz impatiemment, combatit mon avis, & dit qu'il falloit différer 1'exécutioti de ce qui avoit été convenu, jufqu'a ce qu'elle eut vu que la chofe étoic H4  Ï20 E T A T S toute certaine &c en Ja puiiTance du roi. Elle fit aufli remettre la réponfe des cahiers , qui fe devoit commeneer le premier jour de carême , jufqua cejourd'hui, que la partie étoit faite , comme il fe peut voir par les opinions; aufli après que monfeigneur tut opiné, elle dit ainfi fon avis , pour détruire ce que j'avois dit. Mon fils, vous favez que j'ai été 1'une des premières qui vous a conleillé de ne permettre dans votre royaume qu'une feule religion , & que je vous ait dit qu'il vous falloit fervir du moyen des états qui fe trouvoient ici; vous favez d'avantage quelles pratiques & quelles menées j'ai fait avec les députés des trois états; même avec M. de Lyon , qui , du commencement, n'y vouloit pas mordre, comme aufli beaucoup d'autres de 1'églife, de la noblefle & du tiers - état ; auxquels par votre comman'dement j'ai parlé, & les ait induits a cette réfolution ; & pour dire la vérité, ils ne s'y fuflent jamais fourrés que par votre commandement; Ja plupart d'eux alléguans qu'il n'avoient pas pouvoir de ce faire par leurs cahiers ; par la l'on peut voir que mon intention a toujours été de voir qu'il n'y eüt qu'une religion catholique & romaine en votre royaume ; cela me fera  sous Henri III. m parler plus hardiment; mais depuis feize ans, que le roi votre frere vinr a la couronne , j'ai toujours effayé d'entretenir ladite religion , plutót que de la détruire. La reine ajoura a ces paroles , qu'elle étoit catholique , & qu'elle avoit aufli bonne conference que nul autre pouvoit avoir; qu'elle avoit beaucoup de fois hafardé fa perfonne contre les huguenots du temps du feu roi ; qui eft pourtant ce qu'ejle ne craignoit pas , car elle étoit prête de mourir , ayant csnquantehuit ans, & efpérant aller en paradis j paree qu'elle rre défiroit pas de vivre après fes enfans; que cela lui feroit une cruelle mort , & qu'elle étoit obligée de dire que jufqu a ce que le roi ait le moyen d'exécuter cette réfolution d'une feule religion , qu'il ne le doit pas déclarer ; que fi fes prédécefleurs avoient été a Conftantinople pour la religion , que le royaume étoit pailible ; que s'ils euflen: été comme il eft , ils eutTent fait comme lui ; qu'il voyoit bien ce qu'avoit fait le roi d'Efpagne a fes fujets de Fiandre, auxqueis i! avoit laifté 1'exercice de la religion en Zélande, Frize & Hollande ; que ce ne feroit pas une chofe nouvelle, quand il permettroit 1'exercice de la religion aux lieux cü il ne le peut em.  111 E T A T S pêcher; que quand les princes écrangers fauront cette déclaration , même le pape , ils s'en réjouironc , 8c feront bien aife d'entendre que les chofes auront pu fe pacifïer fans guerre , que quant a elle, elle ne vouloit pas s'en autorifer parmi les catholiques pour détruire ce royaume ; qu'elle n'avoit deffein que de lui conierver ; qu'en le perdant, la religion feroit perdue ; qu'au contraire , ce royaume étant confervé , la religion le fera aufli ; qu'il y a peu de moyens de f-.ire la guerre ; qu'il n'y en a pas prefque de vivre ; que le prince de Condé prendra les villes & les campagnes, &c que jufqu'a cette heure, l'on n'a pu lui réfifter ; que pour elle, elle ne défire point mettre 1'état en un tel fufard , ni la perfonne du roi j pour 1'intérêt qu'il y a; que s'il y en a d'autres qui ne fe foucient pas de la perte de cet état, pourvu qu'ils puifTent dire , j'ai bien maintenu la religion catholique, ou qui efpérent d'y faire leur profit par fa ruine ; qu'elle n'a rien a dire, mais que pour elle, elle ne leur veut pas refTembler ; qu'elle confeille au roi de le conferver, Sc fa perfonne enfin, efpérant que Dieu le favorifera, en forte qu'il réunira un jour les deux religions en une, telles 8c fembiables furent les paroles  sous Henri III. 113 de la reine , après laquelle !e roi paria ainfi: Meffieurs chacun a vu de quelle «ffedlion j'ai embrafté ce qui étoir pour Fhonneur de Dieu, &: combien j'ai défiré de voir qu'il n'y eut qu'une religion en mon royaume. Même , j'ai brigué, s'il faut ainfi dire , les gens des trois états , qui n'alloient que d'r.ne fefie , pour les pouffer a demander une feule religion , dnns la croyance que j'avois qui m'aideroita esécutcr une fi fainte réfolution. Mais voyant le peu de moyens qu'ils men ont donné , cela me fait connoïtre le peu d'efpérance qu'il y. a d'exécurer ma première intention. Laquelle je venx bien que chacun fache avoir été telle toiues-fois, comme dit M. de Nevers. II eft permis de changer fon opinion , quand i'occafion s'en préfente. De mon coté , je ne penfe point failür fi je ne déclare pas maintenant que je veuiile entretenir une feule religion dans mon royaume ; puifque je n'ai pas les moyens de le faire. Je defire qne l'on connoiffe men intention , afin que hors du confeil l'on n'aille pas médire de moi, & publier des chofes qui me portent préjudice. Quant a moi , je penfe être affeórionné a ma religion, plus qu'aucun autre; il y en a qui, pour fe faire nppeüèr piüiers d'églife, difent a travers tout ce qui leur vient a la  124 E T A T S bouche. Je veux donc remettre cet article a la fin des autres. La reine mere , bien aife de cela , fe leva pour aller a la promenade: Elle me dit en riant, comment, rnon coufin , vous nous vouliez envoyer a Conftantinople ? je lui répondis que je penfois que telle füt leur intention , & que pour cela j'avois affeótion a foutenir que je ne penfois pas qu'ils euflent changé d'opinion. Elle me dit qu'elle ne 1'avoit pas changée ; mais qu'ils 1'avoient feulement différée. Je lui dis qu'elle étoit changée; paree qu'ils la vouloient préfentement refoudre : & fur ce propos en riant, elle paffe outre , difant a d'autres , que je les voulois envoyer a Conftantinople. Ainfi pafla cette bonne journée toute différente des autres. Le foir , il fut joué une paftorale , encore que le matin , le prédicateur eut dit en la préfence du roi , que c'étoit très-mal d'y aller. M. le cardinal de Bourbon, m'a dit que Ia reine mere du roi, lui dit au bois de Vincennes, Iorfqu'elle alla voir Monfieur qui étoit au lit, le foir que la Molle fut décapité ; qu'elle avoit penfé que mondit feigneur lui donna d'une dague dans le fein , & qu'elle ne s'en approchoic guere. M. de Rubenpré , dit au fieur  sous Henri III. cardinal de Bourbon, en la préfence de M. de Montpenfier , que le roi de Navarre, lui avoit dit, que fi la reine n'y étoit, il s'affuroit du roi. Mais, qu'il avoir connu qu'elle ne 1'aimoit pas; & qu'elle avoit été caufe de lui faire eflayer de tuer Bufly a Paris , lui difant qu'il faifoit Pamour a fa femme , & pareillement qu'elle avoit écric que M. de Guife lui failToit l'amour : & avoit dit , a M. de Guife , que le roi de Navarre ne trouvoit pas bon qu'il recherchat fa femme. Le dixieme mars , il a été trouvé un vilain paquet fous le chevet du lic de la reine, médifant du roi & d'elle : l'on a fait mettre en prifon tous les poëtes de la cour. Le onzieme , Ia reine fut allarmée de ce que le cardinal de Guife , avoic vu les états de 1'Efpagne , s'imaginant qu'il vouloit commauder aux finances. Le quatrieme mars , nota que quand le roi fit opiner chacun fur les cahier des états, pour fcavoir s'il décideroit Partiele de la religon: Monfieur lui demanda ce qu'il diroit. il lui fit réponfe qu'il falloit tenir bon , comme fit mondic feigneur. Mais ayant vu le changement du roi, il a penfé que fa majefté Pa fait parler ainfi, pour le mettre en mauvais ménage , avee les hugue-  n6 Etats nots iïSc 1! en a été fdché. Aufli-têt on fut le feul deiTein de S. M. Sc la lindes états. Occaficn de fajlemldèe des états de Blois en 1570 - 1577» -Jebri U copic de le Magnier. Le très-chrétien roi de France & de Polsgne,' Kenri lil du nom , connoilTant que le delir de la guerre augmentoic de jour en jour au cceur de fes luiers, Sc que la longueur du tems, la perte de leurs biens , la défolation da leurs maifons &. la ruine de leur pays. ne ics pouvoit retirer Sc incitér a inertie fin a leurs divifions & animofités; deluan: eocfet'veé les reliques de fon paternel Sc légitime hérkage debeaucoup diininué, & quafi du tot:: confommé par 1'ardeur des guerres civiles avenues du regne du roi Charles IX fon prédécefleur & fiere, fe réfolutenfin, comme bon pri.nce3 de donner quelque remedeau mal, qui gagnoit tellemenc fur toutes les parties du corps de la France , qu'elle étoit demeurée comme en Jaugueur , fans grande efpérance de falut : Sc pour cet effet voulut réconcilier tous fes fujets, Sc les faire vivre fcus fon obéilfance Sc protectiqn , en route allurance &c confiance les uns des autres. Ce qu'il ne trouva fi facile, qu'il efpéroit S: eut volomiers defiré, d'autanr que le feu étoit par uop embrafé, & que chacun, par le  sous Henri III. 117 fecours des forces écrangeres, fe promettoit une alïurée vicFoire de fon ennemi: tourefois Dieu lui fut tant favorable , qu'outre 1'epinion & attente de plufieurs , contre la volonté de ceux qui faifoient grand gain de notre perte 8c fe nourrifloient de nos mauvaifes humeurs, il vinc a chef de 1'ceuvre, après lequel il avoit fi longtems travaillé; & avec le confeil de la reine fa mere, Monfieur fon frere, tous les princes du fang, 8c autres plus fignalés & fages perfonnages de fon royaume , fit un édit de pacification , qui fut publié par toutes les rerres de fon obéiflance. Et d'autant qu'il connoiflbit que les abus qui avoient de long-tems pris pied en ce royaume , donnoienf occafion a plufieurs de fe mécontenter & lever les armes , il déclara par ce même édit, fuivant la requête 5c humble fupplication que tous fes fujets lui avoient faite, que fix mois après la publication d'icelui , il tiend roit fes états libres & généraux en fa ville de Blois , pour ouïr les plaintes 8c doléances de fon peuple, réformer toutes chofes , & couper ( fi faire fe pouvoit) la racine de cet arbre de fédirion , qui avoit jetté tant de branches de malheurs par toute la France , ce qui donna grande occafion de réjouiflance a tous fes fujets , & les éleva foudain en efpérance de quelque repos 6c  123 E T A T S foulagement •, puifque le roi vouloit ouïr leurs plaintes, connoitre leur mifere & réparer ( avec Favis de fes états) le dégat avenu par la guerre inteftine : forme qui a été de tout tems obfervée & gardée en ce royaume , & a laquelle , ïorfque les chofes ont été grandement troublées , il a faliu principalement avoir recours : car foit qu'il ait été qucftion par le pafïé de rctablir les anciennes loix & ordonnances , réformer les abus , remettre fus la bonne difcipüne, modérer les dépenles, foulager le peuple , fubvenir au roi, pourvoir au gouvernemenr du royaume, empêcher les féditions , remédier aux révoltes , appaifer les troubles ; il ne s'eft jamais , au grand contentement de tous , raieux exécuté, qu'avec 1'avis d'une aflemblée générale des rrois états. Ou ioir que le mécontentement eut trouvé lieu en plufieuFs pour 1'ignorance des affaires, ce qui eut pu altérer la füreté de 1'état, il ne s'eft trouvé remede plus prompt que de faire entendre aux alfemblces publiques comment routes chofes s'étoient patfées , & le comporrement de ceux qui en avoient eu la charge; étant facile paree moyen de contenter les bons, & óter les occafions aux mécontens d'abufer de ce prétexte , pour induire les fimples a fédiïion , qui pour ne connoure les affaires, s'ai*- griffent  sous Henri III. I1? griïfent aifément par faufiês perfuafions. Ainfi lifons nous, que Clotaire s'écant fait feigneur des Auftrafiens & Eourguignons pour afturer 1'état de fon pays de nouvelle conquête, fic alTembler fes états, & donna tel contentement de foi , que jamais roi ne fut plus aimé, ni plus fidellemenr fervi. Pepin prévoyanr que le mépris des loix & anciennes ordonnances troubleroit le repos public , duquel il étoit priucipalement foigneux, afTembla les trois états a Compiegne, & avec leur confeil fit plufieurs ordonnances fur le fait de la juftice & police. Charles le Chauve voyant que la corruption des mceurs des gens d'églife & de juftice couvoit une pefte de fédition dangereufe pour fon état, convoqua les états i Poiffi ; & avec leur avis reforma ceux de 1'églife, fuivant les décrets & conftitutions canoniques, & regIa ceux de la juftice. Le royaume étant échu au ro! faint Louis avant qu'il eut atteint Page de de quatorze ans , les états furent aflem'biés } Paris par Ia reine Blanche de Caftille fa mere> & fut pourvue au gouvernement du Royaume' & du roi. En cette même ville furent depuis tenus par le roi Jean premier du nom; & depuis encore par le roi Charles VI. pour avoir leut avis fur le fait de la guerre , cours des monTornt XIII. j  IJO E T A T S noies, & reglement du royaume. Charles VIL les aflernfcla en la yille de Blois. Et depuis Charles VIÜ. les convoqua a Tours, oü du tems du roi louis XI. ils avoient été affemblés auparayant. Le roi Francais fecond du nom, les avoit convoqués i Orléans quand il mourut, lefquels depuis par le confeil de la reine fa mere , furent coutinués du regne de Charles IX. fon frère , qui avoit fuccédé a fa couronne. J'omets plufieurs autres aflemblées faites, tant après le décès de Louis-Hutin , que du regne de Philippe de Valois, Sc autres: étant affez notoire a tous , que lors que 1'état a été ébranlé par fédition , ou que les abus ont amené un défordre général, auquel il a fallu pourvoir ; ou que les dammes des guerres civiles ont été épandus par tout le roy?ume pour ces miferes communes, & pat une clameur univerfelle , la facon ancienne a été d'aifembler les états , pour avec le confeil & bon avis des fujers , remédier aux maux univerfels qui touchoienc a tous en général. Ce que con« noillant notre roi , & voyant que toutes chofes étoknt'tant depravées ; plufieurs de 1'églife fans piété , zele Sc dévotion; plufieurs de la juftice fans équité , intégrité Sc prud'hommie; partie ds la noblefle diflolue , Sc débordée en tous  sous Henri III. t^t genres de vices; les marchands fans foi & loyauté; & le commun peuple, fans crainte il délibéroit dès-lors que par la mort de fon frere le roi Charles IX, la couronne lui échut a fon retour de Pologne , affembler ces états, & commencer en même tems a regner .& k réformer : mais d'autant que tout le royaume étoit en telle combuftion , qu'il y avoit plus grande apparence de craindre une perte uniyerfelle, qu'efpérer une correction il voulut ( pour donner quelque effet a fon intention, qui n'eüt pu autrement réuffir, & apporter le fruit qu'il prétendoit) paciner toutes chofes, & óter la crainte des armes, qui troubloit . tellement 1'efprit de tous fes fujets , qu'il leur eut été impoffible donner tel confeil & avis, qu'il pouvoit efpérer & attendre d'eux. Enfin ayant jetté les fondemens d'une paix , & voyant qu'en route hberté & affurance , ils pouvoient s'acheminer oü ils les convoqueroit, il les affembla en ladite ville de Blois, defirant avec leur confeil & bon avis réformer toutes chofes , remettre fus la pauvre France , & relever les ruines du plus florilfant empire qui foit en la chrétienté. A cet effet, fuivant la forme ancienne, & qu'on a accoutumé garder en telles convocations, il décerna dès Ie mois d'aoüt commiffions ex- I a  IJl E T A T S preffês k tous les baillis, fénéchaux, prê\6ts, juges, lieutenans, maires, & autres i qui il appartient , i ce qu'ils euflent a faire aflembler chacun en fon telfort, les gens d'églife, nobles & du tiers-état, pour avifer entre eux de dreffer les cahiers Sc remontrances qu'ils trouveroient être a faire pour la réformation univerfelle , & le repos Sc tranquillité du royauBle-, choifir & élire tels d'entte eux qu'ils voudroient pour apporter lefdits cahiers, Si fe trouver en 1'affemblée générale, avec ample & fufiifant pouvoir. Déclarant qu'il vouloit & entendoit que lefdits états fulfent libres & généraux, cc que chacun put remontrer & donner avis de ce qVi feroit néceffaire pour le bien du royaume Sc foulagement du peuple. Ayant ainfi fait entendre a tous fes fujets fon intention 6c volonté, pour faire paroitre qu'il defiroit fervir d'exemple , Sc mettre le premier la main a la réformation, il régla fa maifon , Sc y établit un fi bon ordre , qu'il n'y avoit celui qui ne s'émerveilla comment toutes chofes étoient devenues fi bien réglées, qui étoient auparavant en grande confufion. Sa maifon étant ainfi réglée, il donna ordre aux affaires de fa ville de Paris, & en partit pour aller au chSteau d'Oliuvilte, prés Chatres fous Monrléry,  sous Henri III. ijj oü monfieur, fon frere, 1'alla crouver pour 1'aceompagner & feconder en un acte fi néceffaire & profitable au public. Dela s'achemmerent enfemble pour venir aux états,.& pallcrent par Orléans 3 oii le roi & la reine fa femme firent leur entrée ; comme ils firenc depuis arrivans en ladite ville de Blois, autant honorablement & magnifiquement que les moyens des citoyens le purent porrer. La reine mere du roi y étoit arrivée quelques jours auparavant, qui faifoit diligenter toutes chofes néceffaires pour 1'afTemblée. Le roi étant en cette viile trouva que la plupart des députés nétoient encore arrivés, qui fut caufe que les ennemis du repos public femerent un bruic que les érats ne fe tiendroient; ce qui fut trouvé faux par Févénement. Ce bruit néanmoins retarda quelques-uns des députés , auxquels furenc dépêches- couriers, &£ aux princes du fang & autres y pour les hater de venir le plutot que faire fe pourroit. Cependant, pour avancer toujours les affaires, le roi commanda aux députés qui étoient arrivés de s'affembler entre eux., &c communiquer de leurs charges,j ce qu'ils firent 1'efpace de quinze jours, avant que les états fuflent ouverrs. Toutes chofes avoient déja (ce fembloit) tres-bon com- 1 i  134 E T A T s mencement quand ce prince connoiffant que les confeils des hommes font vains , fi Dieu ne leur aflifte, commanda par toute fa cour &C fon royaume que chacun fe mit en prieres & oraifons pour appaifer 1'ire de Dieu , Sc impétrer fa grace. Et d'autant que deux des principaux moyens que nous avons pour y parvenir, font les jeünes & oraifons , il commanda le jeune par trois jours confécutifs ; auquel par fon exemple il incita chacun. Le jour de S. André, qui étoit le fecond jour du jeune, fe fit une proceffion générale , oü fe trouverent vingt, tant archevêques qu'évêques, Sc un grand nombre de noblefle, 8c gens du tiers-érat. Le dimanche enfuivanc, il fe réconcilia avec Dieu , communiant au faint Sacrement de Pautel. En tous ces aétes de piété & dévotion, il fut accompagné & fuivi par la reine fa mere, la reine fa femme, monfieur, fon frere , Sc autres princes Sc feigneurs. Les princes du fang qui avoient volonté d'aflifter en cette affemblée étoient en cour, Sc tous les députés venus , quand le roi afligna le jour de la première féance au jeudi fixieme de décembre , Sc fit avertir tous les députés qu'ils euffent a fe trouver ce même jour au matin en 1'églife de faint Sauveur, pour ouir avec lui la mefle du  sous Henri III. 135 faint Efprit , a ce qu'il lui plut les infpirer , régir & gouverner en cet acte; ce qu'ils firent. L'ordre de la féance avoit été arrêté par le roi & fon confeil, pour öter tonte altercation entre les députés , Sc empêcher la confafion. De cet ordre trois copies avoient été baillées, 1'une au fieur Doignon , maitred'hótel du roi, fervant de maitre des cérémonies en 1'abfence du fieur de Chemaux; 1'autre a un héraut qui appelloit les députés \ Ia troifieme a ceux qui les conduifoient en la forme St maniere qui enfuit. Nicolas Raymond , héraut du titre de Normahdie , revêru de fa core d'arme de velours violet, femée de grandes fleurs-de-lys d'or', étoit a la fenêtre qui répond dans la cour du chateau, ou y avoit un tapis' de velours violet, femé de fleurs-de-lys d'or, Sc delrl appellois a. haute voix les députés , fuivant l'ordre qui avoit été arrêté. Comme ceux qui avoient été appeliés étoient entrés, on refermoit la bafiê porte de la montée ; Mathurin de 13oynes , héraut du titre d'Orléans, les recevoit, Sc Mi. chel Pelletier Sc Etienne de la Riviere , héraats des titres de Guyenne Sc Champagne, auffi revêtus de leurs cotes d'arme, les conduifoient jufques dedans la falie , Sc avertifloient le fieur I4  IJÓ E T A T S Doignon de quelles provinces ils étoient députés , lequel les conduifoit en leurs places j & après qu'ils étoient conduits , le héraut en appelloit d'autres, qui étoient conduits & placés comme les premiers; or furent-ils, tous appellés felon l'ordre qui enfuit : La ville, prévóté St vicomté de Paris. Les délégués des trois états de Bourgogne , première pairie de France, y compris les bailliages deDijon, d'Autun, Chalons-fur-Saone, Auxois & la Montagne, avec les pays adjacens des bailliages de Maconnois, Auxerrois, Barfur-Seine, & Charolois. Les élus pour le duché de Normandie, baitHage de Rouen, Caen, Caux , Contenrinj Evreux , Gifors , Menton Sc Dreux. Le duché de Guyenne,. fénéchauffée de Bordeaux, Bazas, de Périgord, Rouergue, Saintonge, Agenois, pays Sc eomté de Comminges, pays Sc jugerie de rivieres, Verdun, Gaurej baronie de Jarnac , & Mareftans; d'Arcs, Sc fénéchauffée des Launes , Saint-Séver , Albret , fénéchauffée d'Armagnac, Condom&Gafcogne; haut Limofin Sc ville de Limoges; bas pays deLimofin, y compris Tulles, Brives, Uferche Sc Quercy. Le duché de Bretagne Sc fes dépendances.  «ous Henrï III. 137 Le comré de Champagne Sc Brie, Troyes , Sc les bailliages de Chaumon: en Bafligny, Vitry, Meaux, Provins, Sezanne , Sens , Langtes Sc Chateau-Thierry. Le comté de Touloufe Sc gouvernement de Languedoc , Touloufe , Beaucaire, le Puy en Velay, Montpellier , Carcaffonne , Narbonne , Béliers & Lauraguais ; le bailliage de Vermandois y les fénéchauffées de Poitou Sc Maillezais, d'Anjou , du Maine , y compris le comté de Laval, de Touraine Sc Amboife, de Berri, Saint-Pierre-le-Moutier , de Bourbennois, de Forêt, de Beaujolois; fénéchauffée Sc pays de Ia baffe Marche;la fénéchauffée du bas pays d'Auvergne j les bailliages des montagnes d'Auvergne ; la fénéchauffée de Lyon j les bailliages deChartres, d'Orléans, de Blois, de Dreux, de Mantes Sc Meulan , de Gien , de Montargis, du Perche ; Ie bailliage & baronie de Chateauneuf en Thimerais ; le bailliage d'Amiens; les fénéchauffées de Pontbieu Sc de Boulonnois; la gouvernance de Perrone, Mondidier & Roye; les bailliages de Senlis, de Valois > de Clermont en Beauvoilis, de Chaumont en Vexin, de Melun, de Nemours, de Nivernois &c Donziais ; Ie pays de Dauphiné Sc ce qui en dépendj les bailliage Scgouverne-  IjS E t a T S ment de la Rochelle; la fénéchauffée d'Aiigoumois ; les bailliages de Montfort & Hotidan , Etampes & Dourdan ; le comté de Provence; la ville de Marfeille ; le comté de la Marche; le bailliage de Vendömois; les fénéchaulTées d'Aix & de Bayonne, de Chateau-Thiery, & le marquifat de Salluces. Enfuivent les noms & furnoms de ceux qui furent élus par les duchés , comtés, bailliages, fénéchauffées, provinces & villes du royaume, députés pour fe trouver auxdits états. Des députés de YEglife , il s'en trouva cent quarante , entre lefquels y avoit quatre archevêques , dix-fept évêques , &c deux chefs d'ordre. De la Noblejfe, foixante-douze, fans ceux qui y arriverent depuis la première féance. Et du Tiers-état, cent-cinquante, non-compris ceux qui y vinrent enfuite de ladite première féance. Noms dei Députés. Prévóté de Paris. Clergé. Révérend pere en Dieu , meffire Pierre de Gondy , évêque de Paris ; nobles & difcrettes perfonnes, Me Louis Séguier, doyen ; Me Jean de Breda , grand archidiacre ; Me Julien de  sous Hekri III. 139 Saint-Germain , chanoine théologal; Me Miche! le Ber, auffi chanoine de 1'églife deNorreDarne de Paris; avec Me Jean Pelletier, chanoine de Saint-Honoré Sc grand maicre du college de Navarre. Nobkjje. Noble homme Louis de la Villeneuve , feigneur de Bonnelle. Thrs-Etat.Mc Nicolas Luyllier, prévót des Marchands de la ville de Paris; Me Pierre Verforis, avocat au parlement de Paris; Me Auguftin le Prévót, échevins de ladite ville; Me Charles de Villemontée, pour la prévóté & vicomté de Paris. Bourgogne. Clergé. Noble Me Phiüppe Berbis , confeiller du roi en fa cour de parlement, & doyen de la Sainte-Chapelle de Dijon, député du clergé pour tout le duché de Bourgogne. Bailliage de Dijon. Clergé. Ré vér-end pere en Dieu, frere Nicolas Boucherat , dodeur en théologie , abbé de Citeaux. NpbleJJe. Le feigneur de Saint-Riran. Tiers-Etat. Me Pierre Jam in. Me Guillaume Royer.  E T A T S Bailliage cCAutun. Clergé. Révérend pere en Dieu, meffire Charles Aillebouft , évêque d'Autun. Noblejfe. Le feigneur de la Motte-Maflilly. Tlers-Etat. M« George Baiot. Me Claude Banault. Bailliage de Chdloris-fur-Saóne. Clergé. Noble Me Adrien de Roveray , au> mónier du roi, doyen de Beaune & pr.ie.ae de Chaigny. JVobleJfe. Le feigneur de Senecey. Tiers-Etat.Me Nicolas julian. Me Claude Guillaud. Me Pierre Villedieu , & Me Benoït Laurin, n'ont vérifié leur pouvoir. Bailliage d'Auxois. Clergé. Me Anroine Borenet, doéteur ès droits, prévót de 1'églife d'Autun. Noblejje. Le feigneur de Miffery. Tiers-Etai. Me Philiberc Efpiard. Me Georges de Clugny. Bailliages des Monlaignes. Clergé. Vénérable Mc Claude Jobard , curé de Sainte-Colombe»  tous Hem ui III. 141 Noblejjé. Le feigneur de Lanti. Tiers-Etat. Me Edmé Raymond. Bailliage de Mdcon. Clergi. Révérend pere meflire Antoine d'Amauze, abbé commendataire de Saint-Rigaul. Noblefle. Le feigneur de Roche-Baron. Tiers-Etat. Me Jean Bouyer. Bailliage de Bar-Jur-Seine. Clergé. Réijérend pere meflire Gabriel de Genevois, abbé de Maares Sc doyen de Langres. Tiets-Etat. Me Jean du Rud. Me Jacques Vigner. Bailliage d\4uxerre. i Clergé. Vénérable Me Jean le Sourd, tréforier, Sc Me Sébaftien Royer, chanoines en 1'églife d'Auxerre. Tiers-Etat. Me Nicolas Brigedé. Me Germain Boirot. Me Germain Grellé. Duché de Normandie. La ville & bailliage de Rouen '. CW. Noble Me Martin deMartimbault^con-  f41 E T A T S feil Ier du roi au parlement, chancelier & chanoine tn la grande églifc de Rouen. Noblefle. Le feigneur de la Lönde. Tiers-Etat. 'Me Emery Bigot , & Jacques le Seigneur , pour la ville de Rouen. Me Antoine le Barbier pour le bailliage. Le bailliage de Caen. Clergé. Révérend pere en Dieu, meflire Bernardin de Saint Francois, évcqiie de Bayeux. Me Marguerin de la Bigne, dodeur en théologie. Noblefle, Le Seigneur de Sourdeval. Tiers-Etat. Me Martin Varin. Bailliage de Caux. Clergé. Révérend pere Me Jean de Fautereau , abbé de Sery. Noblefle. Le feigneur de Rauftimeny. Tiers Etat. Guillaume de la Frefnaye. Bailliage de Contentin. Clergé. Révérend pere en Dieu, meflire Louis de Saint-Gilles , évêque de Porphire. Noblefle. Le feigneur de Gratot. Tiers-Etat, Gratian Bouillon.  SOUS HlNRl III. j^jf Bailliage d'Evreux. Clergé. Vénérable Me Jean Gueberc, pénicentier & chanoine de 1 'églife d'Evreux. Noblefle. Le feigneur de Chambrey. Tiers-Etat. Me Thomas du Viyier. x . -." ' '' Bailliage de Gifors. Clergé^énérable Me David Bourdon, chanoine d'Andely. Noblefle. Le feigeur de Meneville. Tiers-Etat. Jean I'Anglois. Jacques Acar. Bailliage d'Jlencon. Clergé. Vénérable Me Louis de Calambert, fous Ie Perche. Noblefle. Le feigneur de Rabaudanges. Tiers-Etat. Me Thomas Cormier. Jean James. Comté & Bailliage de Dreux. Clergé. Vénérable Me Machurin Angibout, curé de Serville. Noblejfe. Le feigneur de Ia Fofle. Le duché de Guyenne. Sénéchauflée de Bordeaux. Clergé. Révérend pere én Dieu, meflire Anroine de Sanfac, archevêque de Bordeaux.  144 E T A T s Noblefle. Le feigneur de Merville. Tiers-Etat. Me Jean Emar. Sénéchaujpe de Ba^as. Clergé.Révérend pere en Dieu, meflire Arnaut dePontac, évêque de Bazas. Vénérable Me Phiüppe Pafcaut, archidiacre de Bazas. Tiers-Etat. Jean de Lauvergne. Archambault Rollé. Senéchauffée de Périgord. Clergé. Vénérable Me Francois Arnaulc, doven de Catenac. Noblefle. Le feigneur de Limeul. Tiers-Etat. Me Hélie de Jan. Senéchauffée du Roucrgues. Clergé.Vénérable Me Bernardin de Corneliian, archidiacre de Concques en 1'églife de Rhodès , dépurc pour le diocefe de Rhodès & Vaure. NobleJJe. Le feigneur de Saveufan. Tiers-Etat. Me Francois du Rivi. Me Pierre Bourany. Sénéchauffée de Xaintonge. Clergé. Noble Me Louis Guitarr, doyen de Xaintes. Le  SdÜS Hsnb.1 iii. ï^j. , Noblefle. Le feigneur de Mirambeau. Tiers-Etat. Me Mathurin Gilbert. Sénechauflée d'Agenois. Clergé. Noblefle. Tiers-Etat. Michel BoifTonnade. Pays & comté de Comminges. Clergé. \ Noblefle. Le feigneur de Ia Hilliere. Tiers-Etat. Me Jean Bertin. Pays & Jugerie de Rivieres, Verdun, Gaurtj baronie de Lernac & Mare/lans t Dacque, & les LauneSi, Clergé. Noblefle. Tiers-Etat. Saint-Sêver. Clergé. Noblefle. Tiers-Etat. Bernard de Caplane.1 Albret, Jenéchauflée £ Armagnac , Condom 6", Gafcogne, Clergé. Noblefle. Tiers-Etat. Haut Limofin & ville ie Limoges. Clergé. Noble Me Jean de Puflïllhon, préval de Sainc-Martial de Limoges, Tornt XIII. K  14$ E T A T S Vénérable Me Jacques Petiot, prévót de Saint-Junian. Noblejfe. Le feigneur de Jorviac. Tiers-Etat. Me Simon de Bouais. Me Paris de Buar. Le bas Limofint comprenant Tulles , Brives & Ufarches. Clergé. Révérend pere, frere Francois de Ncufville , abbé de Grammont. Noblejfe. Le feigneur de Maignac. Le feigneur de Saint-Bauzille. Tiers-Etat. Me Jean de la Fagerdie. Me Pierre de Lefcot. Me Jean Bonne r. Sénêchaujfée de Quercy. Clergé. Vénérable Me Antoine Regourt, archidiacre en Féglife de Cahors. Noblejfe.Le feigneur de laChapelle deLozieres. Tiers-Etat. M& Pierre de Regaignac. Me Jean de Marignac. Jean Ponfade. Me Paul de la Croix. Le duché de Bretagne & fes dépendances. Clergé, Révérend pere en Dieu, meflire Emard Hennecpin , évêque de Rennes.  $ e v t H i k r i 1 if. I47 Révérend pere en Dieu, meflire Francais Thomé , évêqu e de Saint-Malo, Révérend pere en Dieu, meflire Roland de Neufville, évêque de Leon. Vénérable Mc Alain de^ulpris, archidiacre de Leon. Vénérable Me Pierre de Birdy, archidiacre de Ia mer , en Péglife de Nances. Vénérable Me René de Maury, tréforier era Téglife de Saint Brieux. Noblejfe. Le feigneur de Coarguin. Le feigneur de la Méjouflande. Le feigneur de la Roche. Le feigneur de Pont de Croix, Le feigneur de Garoz. Tiers-Etat. Députés génêraux pour le duchi> Tiers-Etat. Me Artus de ï'ourbeur., Me Pierre Martin. Me Roland Bourdin. Me Pierre le Boulanger, Me Francois" ^ouau. Me Rabert Poullan. Mc Jean le Gobien. Roland Charpentier, Me. Beraard Lebihan J & Mc Guillaunae Guynemao, députés paniculiers.  14$ £ T A T 8 Le comté de Champagne & Brit. Bailliage de Trqyes. Clerné. Vénérable M Guillaume de Taix,' doyen de 1'églife de Troies. Vénérable Me Francois Perret, archidiacre de la même églife. Noblejfe. Le feigneur de NyiTey. Tiers-Etat. Me Phiüppe le Belin. Bailliage de Chaumont en Bajfigny. Clergé. Révérend pere, MeGabriel leGenevois, abbé de Mores, prieur de Condes- Vénérable Me Guillaume Roze, docFeur en théologie, doyen de 1'églife de Chaumont. Nohlefje. Tiers- Stat. Me Nicolas Jobeün. lAe Francais Goatiere. Robert Neurrien. Bailliage de Vitry. Clergé.Vénérable Me Pierre Sybert, docteur en théologie, grand archidiacre en 1'églife de Chilons. Noblejfe. Le Seigneut d'Eftauges. Jun-Etat.Mc Jacques Linaiges, Me Germain Godet.  S O V S H E M R I III. TACjï Bailliage de Meaux, Ciefgê. Noblefle. Tiers-Etat. Me Roland Coflët. . , Jean Ie Bel. Bailliage de Provins. Clergé. Vénérable Me Claude Moiflaulc, doyea de Provins. Noblefle. Le feigneur de Syfgi. Tiers-Etat. Gerard Janvier. Bailliage de Se^anne. Clergé. Vénérable Me Bernard Jouvot , chanoine & archidiacre de Sezanne. Noblefle. Le Seigneur de Planfy. Tiers-Etat. Me Fran$ois de Villiers. Bailliage de Sens. Clergé. Révérend pere en Dieu, meflire Roberc de Pellevé, évêque de Pamiers. Noblefle. Le feigneur de Vullemies. Tiers-Etat. Me Jean Rocher. Bailliage de Langres. Clergé. Révérend Me Gabriel leGenevois , abbé de Mores , doyen en 1'églife de Langres, aufli député de Chaumont. obNlefle. & *  IjO E T A T S Turs-Etat. Me Guillaume Médard, & Me Antoine Bouvot, députés particuliers fous Sens. Bailliage de Chdteau-Thieny, Clergé. Vénérable Me Jean Gouthier, doyes de la chrétitnré de Chareau-Thierry. Nob/efie. Le feigneur de Rochepot. Tiers Etat. Ze comté de Touloufe & gouvernement de Langueioc, Sénichaujfce de Touloufe. Clergé. Me Pierre P;affis, prévot en 1'églife Saint?» Etienne de Touloufe. Nobleffe. Tiers-Etat. Me Bernard de $uperfanc"feis, Me Sanfon de la Croix. Sénéchai.ffie de Beaueaire. Clergé Révérend pere en Dieu, meflire Rémond Cavalezy , évêque de Nimes. Vénérable Me Antoine Nicolas, précentewr de 1'églife de Nïmes. Noblejfe. Tiers-Etat. Bailliage de Vellay & fénéchauffée du Puy* Clergé. Noblejfe. Le feigneur & vicomre de Polignae, Tiers-Etat. Gay Bourdcl , dit Irail. Guy de Lyques. Sénéchaufféc de Cercaffonne & Béters. Clergé, Révérend pere en Dieu, meflire Claude d'Oraifon, é?êque de Caflres.  sous Hënri III. 151 Nebiep. Tiers-Etat. Me Raymoud Ie Roux. Me Jean Gibron. Montpellier. Clergé. Noblejfe. Tiers-Etat. Sénéchauffée de Laiiragak. Clergé. Révérend pere en Dieu , mefiire Aiexandre de Bardis de Vernir, évêque de Saint-Papoul. Noblefle. Le feigneur de Narbonn«3 baron de Campaudu. Tiers-Etat. Antoine da Lourde. Bailliage de Vtrmandois. Clergé. Révérend pere en Dieu , meflire Jean de Bours , évêque & duc de Laon. Me Antoine de Plancques , doyen de SaintQuencin. Noblefle.Koble Ifambert dePlanquer, feigneur de Hefdingueul. Tiers-Etat. Me Jean Bodin. Sénéchauffée de Poitou & Maille{ais. Clergé. Noble MeAnroine de Sayette, doyea de Pégüfe de Poiders. Me Francois Laqueliier, chanoine. Me Pierre Préyöt, chanoine. K 4  IJl E T A T S Noble Me Jean de la Grezile , prévót de Parthenay, en 1'églife de Lucon, député pour le clergé de Lucon , recu a préfenter fon cahier , fans préjudice de MM. ies dépurés de Poitou. Noblefle, Le feigneur de Roian. Tiers-Etat. Me Pierre Rat. Me Jofeph Bafcle. Me I éonard Thomas , & Me Anclré le Beau, députés de Montmorillon , fous Poirou. La Je'néchaujjée eTAnjou. 'Clergé.Kévévend pere en Dieu, meflire Guillaume Ruzé, évêque d'Angers & confefTeur du roi. Vénérable Me Adam de la Gaure , grand vicaire & official d'Angers. Vénérable frere Pierre Marquis , grand pricur de Sainr-Nicolas d'Angers. Noblefle. Le feigneur des Rues. Tiers-Etat. Me Hilaire Juheau. Jean Cotteblanche. Senêchauflée du Maine y compris le comte de Laval. Clergé. Vénérable Me Pierre Viel, doéfeur en théologie. Vénérable frere Pierre Bellot, prieur deSaintVincent du Mans.  sous Hen r i III. 155 Noblejje. Le feigneur de Thouars. Tias-Etat. Me Fhilippes Tharron. Me Mathurin Rochet. Jean Journe, pour le comté de Laval. Bailliage de Towaine & Amboife. Clergé. Vénérable MeSimon Galand , chanoine en 1'églife de Tours, pour le clergé de Tours. Révérend pere Me Pierre Fortia, grangier & chanoine de Saint-Martin de Tours, député pour ladite églife. Noblejfe. Tiers-Etat. Me Gilles du Verger. Me Guillaume Ménager. Me Pierre Blondel Öc Me Louis Trincaut, pour la fénéchauffée de Loudunois. Bailiiage de Berri. Clergé. Révérend pere meflire Gilles Gninault, abbé de Saint Genoux-fus-Indre , pour le clérgc de Berri. Vénérable Me Martin Fcrret. Noblejfe. Le feigneur de Rochefort. Tiers-Etat. Jacques Gallot. Me Francois de Valcnticnnes. Me Gabriel Bonnyn. Bailliage de S'aint-P'ierre-k-Moutkr, Noblejje. Clcrtjê. Tiers-Etat. Me Jean Guyot.  154 E T A T S ■Sénéchauffée de Bourbannols. Clergé. Noblefle. Le feigneur de Saint-Géran. Le feigneur de Sendre Tiers-Etat. Me Guillaume Duret. Etienne Mallet. Hugues de Cuzy. Le Bailliage de Forét. Sous Ia fénéchauflée de Lyon. Clergé. Noblefle. Le feigneur de Chevrieres. Tiers-Etat. Me Pierre Pommier Me Jean Rouzier. Bailliage de Beaujollois. Sous Ia fénéchauffée de Lyon. Clergé. Noblefle. Le feigneur de Roche-bonne Tiers-Etat. Me Aymé Choulier. Sénéchauffée & pays de la bafle Marche. Clergé. Noblefle. Tiers-Etat. Me Jacques Brujas, Sénéchauflée du bas pays d'Auvergne. Clerge. Révérend pere en Dieu, meflire évêque de Clermonr. Vénérable Me Annet de la Chefnaie, abbé commendataire de Belles-Aigues.  sous Henri II ï. t^f Noblejje. Le fei gneur de Fonrenilles. Le feigneur de Montroorin. Le feigneur de Monrravel. Tiers-Etat. Me Jean Texcoris. Me Jean de Eafmaifon, dit Poignèr, Me Antoine de Ia Chefze Guerin Faradefches. Chriftophe Pin^on. Bailliages des montognes d'Auvergne. Clergé. Révérend pere en Dieu, meflire Antoine de Sénécaire , évêque du Ptiys, dépuré pour le clergé du Puys. Vénérable Me Pierre Johannis, pour le clergé de Saint-Flour. Noblefle. Le feigneur de Cabanes. Tiers-Etat. Me Jean de Mirar. Me jean Brandon Me Annet Tavernier. Me francois Guillebaulc. La Sénéchauffée de Lyon.. Clergé. Révérend pere en Dieu , meflire Pierre d'Epinac , arcbevêque & comte de Lyon, primat de France. Vénérable Me de Marnas, chanoine & facnftain de i eglife Saint Juft.  tjtf E T A T S Noblejje. Le feigneur de Beauregard. Tiers-Etat. Antoine Scaron. Jean de Maflo. Philibert Pérault, pour Ie plat pays de Lyon« nois. Le Bailliage de Chartres. Clergé. Vénérable MeRaoul Charpentier, docteur en theologie. Vénérable Me. Francois de Vaux , aufli docteur en Théologie. Noblejfe. Le feigneur de Maintenon. Tiers-Etat. Me Ignas Ollive. Me Nicolas Guillard. Bailliage d'Orléans. Clergé. Révérend pere en Dieu, meflire Mathurin de la Saulfaye , évêque d'Orléans. Vénérable Me André de Maffer, doyen de 1'églife d'Orléans. Nuklejje. Noble Francois de Quinquempoix comte de Vignorris. Tiers-Etat. Jacques Chauvreux: Me Jean Malaquin. Le Bailliage de Blois. Clergé. Noble Me Francois Defnaolins, doyen de Saint-Sauveur.  S O V S HlNR.1 III. NoUefle. Le feigneur de Chantemelle. Tiers-Etat. Me Simon Ryallan. ^Bailliage de Dreux. Clergé. Nobiefe. Le feigneur de Ia FolTe. Tiers-Etat. Me Bernard Couppé. Bailliage de Marnes & Mulan. Clergé. Vénérable Me Antoine de Gamaches i doyen de Mantes. Noblefle. Le feigneur de Liencourt. Tiers-Etat. Me Jean Phifeau. Me Jacques Byon. Euftache Pigis. Bailliage de Gyen. Clergé. Vénérable Me Sébaftien Royer. Noblefle. Tiers-Etat. Me Pierre ArnouL Bailliage de Montargis. Clergé. Relig. perfonne frere Martin Piftoris ; docteur en théologie, de l'ordre des Jacobins. Noblefle. Tiers-Etat. Me Nicolas Charpentier. Bailliage du Perche. Clergé. Vénérable Me Louis de Chaiembert, archidiacre de Bellemoys, en 1'églife de Séez.  Ï58 E T A T S Noblejje. Le feigneur de Damilly; Tiers-Etat. Me JofephBriflard. Etienne Gaillard. Bailliage d'Amiens. ClerglUêv erend pere meflire Antoine Defprez; abbé de Sainr-Jean d'Amiens. Noble Me Louis Carquillaud , prévot eit 1'églife d'Amiens. ( Noble fe. Le feigneur de Ia Broflë & Meuyeu, Tiers- Eiai. M Jean le Quieu. Mc Jacques Picard. Ia Sénéchauffée de Ponthieu, Clergé. Wm'rable Me Jean Savary, docteur ea théologie, chantre & chanoine de Saint Vulfran d'Abbeville. Noblejfe. Le feigneur de Rubenpré. Tiers-Etat. Me Pierre le Boucher. La fénéchauffée de Boulonnois. Clergé. Vénérable Mt Florent Erenel, doyen de Boulogne. Noblejje. Le feigneur de Difque, Tiers-Etat. Me Furli de la planche. Me Pierre le Clerc, pour Calais Sc pays reconquis.  SOUS H £ N R. I III. rjg Pèronm , Roye & Mondidicr. Clergé. Noblejje. Le feigneur de Botonyille. Tiers-Etat. Fouru* de Fremicourt, Sc Me Roberc Chocquec , pour Péronne. Ancoine Bignon, pour Mondidier. Bailliage de Senlis. Clergé. Révérend pere Mc Jean de BrouilTy, abbé de la VicFoire-lès-Senlis. Noblejfe. Le feigneur de Jouy. Tiers-Etat. Me Jean Painvart, pour Senlis Sc le bailliage de Chaumont en Vexin. Bailliage de Valois. Clergé. Vénérable Mc Claude Rangueil, doyen de Crépy en Vallois. Noblejfe. Le feigneur de Connelieu. Tiers-Etat. Me Louis des Avenelles 3 prévót de Crefpy. Bailliage de Clermont en Beauvoijis. Clergé. Vénérable Me Gabriel le Dean, cha* noine de Saint-Marcel-lès-Paris. Noblefle. Le feigneur de Rumeuil. Tiers-Etat. Me Charles Cunelier.' Bailliage de Meluni Clergé. Vénérable Me Jean Peignet, doyen de Melun.  léo E T A T 8 Nobleffe*. Le feigneur de Verneuil. Tiers-Etat. Louis Mardnet. B.üliihgi 'de Kernours. Ckr?i. Vénérable Mg Jean Maumont, doyea de Milly «Sc Nemours. Noblejfe. Le feigneur de Moret. Tiers-Etat. Me Jean Thiballier. Bailliage de Nivernois & Donif.ais. Clergé.Vénérable:Me Pierre Paukt, archidiacre & official de Nevers. Nopleffe. Le feigneur de Chaulemy. Le feigneur Biancheforr. Tiers-Etar. Me Gay Coquille. Me Martin Roy. Pa vs de Dauphine & ce qui en dépend, Clergé. Révérend pere en Dieu , meflire Guillaume Davanfon , archevêque d'Embrun. Révérend pere frere Jacques de Fay , abbé de Saint Pierre. Révérend pere en Dieu, meflire Pierre Villars," archevêque 8c comte de Vienne , pour le Viennois. Noblcffe. Le feigneur de Leftang. Le 'feigneur de Moneftier. Le  S O V 3 H H M R I UI. rfj, Le feigneur de Briancon. Tiers-Etat. Me Jacques Collas.' Me Benoit de Flandrois. Me Charles Millard. Généraux. Claude Arnaud, dit Valloru Claude David. Me Guillaume le Blanc. Me Gafpar BufTo. Me Michel de Vezic. Me Francois Allan. Me Jean de Bonrg, pour le bailliage de Viennt fous Dauphiné. Bailliage & gouvernement de la Rochelle. Clergé. Noblefle. Tiers-Etat. Sénéchauffée eP An goumois. Clergé. Révérend Me JeanCalluau , archidiacre de 1'églife d'Angoulême. Noblejfe. Tiers-Etat. Me Gay Cothu. Bailliage de Mon fort & Houdan. Clergé. Vénérable Me Euftache Pyais Noblefle. • ' Tiers-Etat. Me Noël RafFron. , Nicolas Guyer, labctureur. Bailliage d°Etampes. Clergé. Vénérable Me Artus le Long , shanoitt* de Notre Dame d'Etampes. TomeXUU &  tgl .III £ T A t S Noblejfe. Le feigneur de Vouflay. Tiers-Etat. Me Jean Houy. Le comté de Provence. Clergé. Révérend pereen Dieu , meflire Guillaume de Blanchi, évêque de Toulon , pour tout le clergé de Provence- Notleffe. Tiers-Etat. La ville de Marfcille. Clergé. Noblefle. Tiers Etat. Me Francois Sommat. Le comté de la Marche. Clergé. Noblefle. TiersEtat. Bailliage de Vendómois. Clergé. Noblefle. Le feigneur de la Poiflonnene. Tiers Etat. Me René du Pont. Me Nicolas Bouchart. La Sènéchauflée d'Jix. Clergé. Vénérable Me Guy de Chanfleneiges, prieur de Mareil. Noblefle. Tiers-Etat. La Sènéchauflée de Bayonne. Clergé. Vénérable M« Sanfon du Hayet ; chanoine de Bayonne. Révérend Me Jean Baquier, abbé de Pamoulr, pour Aire. Noblejje. Tiers-Etat.  s o w s Henri III. i Fairs d'FJgliféi M. l'évêque de BauvaisL J: v M. le chancelier de Birague. ! ' M. de Biron , grand-maitre &é l'Srrifrerfet' Meffieurs du Confeil privé de robe longue, qui eurenê féance aux états, furent; M. de Morvilliers. L 4  ê t i r j • M. de Lenoncoart. M. de Limoges. M. du Puy. . M. de Cheverny. M. de Royfli. M. de Bellievre. iUlkti . M. Amiot, grand-auraonier du rot. . M. de la Guelle, procureur général du roi au parlement de Paris. Mi.Nicolaï, premier préfident des comptes a Paris. M. des Roche-Fumée. M. Viart, préfident de Mets. M. Pévêcjue de Nahtes. - Meflieurs les chevaliers de l'ordre & confeillers 'du confeil privé du roi de robe.courte, qui eurent feance aux états, furent: u- .«asvJ'b 01,3 al .M M. de Saint-Sulpice. M. de Piennes. M. de Villeqpier J'ainé. M. de Lude. M. de Rambouillet. M. de Brion. M. de la Motte-Fenelon. M. de Püygaillard, M. de Maugironi  sous Hekri III. \6cf M. de Ia Roche Poziy , Painé. M. de Caylus. Meffieurs les Secretaires d'ltat. • M. de Fizes. M. de Villeroi. M. Brulart. M. Pinart. Tous les princes & chevaliers portoient leur grand ordre au col. Pendant que le roi defcendoit par les degrés de Ia galerie , dont a été parlé, route 1'afTemblée fe leva, ayant Ia tête découverre, 8c ceux du tiers-état un genou en terre, Sc demeurerent ainfi jufqu'a" ce que le roi Sc les reines fe furent affis; Sc après eux , monfieur 8c autres princes , qui demeurerenr quelque peu debout , & puis s'affirent, par le commandement du roi, qui commanda auifi a M. le chancelier de s'afïeoic, 8c a. ceux de fon confeil; £c quelque peu après-lui commanda de faire feoir toute 1'afTemblée a ce que chacun put voir 8c entendre plus facilement.Le fieur de Villequier, le jeune, premier gentilhomme de la chambre du roi l étoit affis aux pieds du roi , pour 1'abfence de M. le duc ;de Mayenne, grand-chambellan,qui n'étoit encore arrivé ; M. de Biron grand-maitre de 1'arrillerie , comme officier de  XjO E t a t i la couronne, étoit affis fur le fecsncl degré. de l'échaffaud , contre le troifieme pillier i main gauche j les deux huiffiers de la chambre tenans leurs malles, avoient un genou fur le premier degré de l'échaffaud , Sc la tête découverte. MM. les fécretaires d'état étoient affis fur le dernier degré, comme dit a été, entre lefquels M. de Hzes, comme étant le premier , écrivoit cï qui fe difoit. Vis-a vis de la table de MM. les fecrétaires, quafi contre la muraille, quarre héraurs d'armes éroient a genou tête découverte. Aux deux cotés de la chaire du Roi étoient les fieurs de Chavigny & Lanfac, debout, tenans leurs haches, ou becs de corbin,comme capitaines des deux eens gentilshommes, entr'eux deux le fieur de Larchant, capitaine des gardes. Derrière la chaire , devant la barrière, étoient fix archers du corps, tenans leurs hallebardes, revêtus de leurs cafaques blanches , enrichis de broderie d'argenc. Derrière la chaire de la reine , mere du roi, éroit M. le grandprieur, comme chevalier d'honneur de ladire dame. Derrière cette même chaire étoit aufli M. Pabbé de Vendóme. Derrière la chaire de la reine, femme du roi, étoit M. le cemte de Fiefque , fon chevalier d'honneur. Derrriere la chaire de monfieur, frere du roi, M. le comte de Saint-Aignan.  sous Henri III. 171 Toute 1'aflemblée étoit fort attentive, Sc avoient tous les yeux tournés vers le roi, quand d'une bonne grace, parole ferme , haute Sc diferte , il commenca a parler ainfi. Harangue du Roi. Meflieurs , il n'y a perfonne de vous qui ne fache les caufes defquelles j'ai été mu a convoquer cette aflemblée : pour ce , n 'eft-il befoin de confommer le tems en paroles, pour vous le faire entendre. Je crois aufli qu'il n'y a celui qui ne foit venu bien inftruit Sc préparé , pour farisfaire a tout ce que j'ai mandé par mes commiflions, publiées en chacune province , & m'aflure davanrage, qu'il n'y a homme en certe compagnie qui n'y ait apporté le zele & affeétion qu'un bon Sc loyal fujet doit avoir envers fon roi Sc le falut de fa patrie. Préfuppofant cela, j'efpere qu'en cette aflemblée de tant degens de bien , d'honneur Sc d'expérience, fe trouveront les moyens pour mettre ce royaume en repos, pourvoir aux defordres & abus qui y font enrrés par Ia licence des troubles, délivrer mon peuple d'oppreflion, & en fomme donner remede aux maux , dont le corps de cet étit eft tellement ulceré , qu'il n'a membre fain ai entier, aulieu qu'il fouloit être le  Ï7X E T A T S royaume plus floriflant, plus henreux, 8c fur tous autres renommé de religion envers Dieu , d'intégrité en juftice , d'union entre les fujets, d'amour & obéiffance envers leur roi , 8c de bonne foi entre les hommes. Toutes lefquelles chofes fe voient maintenant tant altérées, 8c en plufieurs endroits fi eftacées , qu'a peiue s'en reconnoit ombre ni marqué. Certainement quand je viens a confidérer 1'étrange changement qui fe voit par-tout depuis le tems des rois de très-louable mémoire mes pere 8c ayeul, & que j'entre en comparaifon du pafte au préfent, je connois combien heureufe étoit leur condition, la mienne dure & difficile. Car, je n'ignore pas que de toutes les calamités publiques & privées qui adviennent en un état, le vulgaire peu clairvoyant en la vérité des chofes , de tous maux qu'il s'en prend a fon prince, Pen accufe 8c appelle a garant, comme s'il étoit en fa puiftance d'obvier a tous finiftres accidens , ou d'y remédier aufli promptement que chacun le demande. Bien me conforte qu'il n'y a perfonne de fain jugement, qui ne fache la foürce dont font dérivés les troubles qui nous ont produit tant de miferes & de calamités : de la coulpe & blame defguelles le bas age , auquel le feu roi mon  sous Henax III. 175 frere Sc moi érions alors , nous juftine affez. Et quant a la reine ma mere, il n'y a perfonne de ce tems-li qui ait pu ignorer le$ incroyables peines Sc travaux qu'elle prir pour obvier aux commencemens des malheurs, Sc les empccher: mais autre fut la détermination de la providence divine , dont elle porte les angoiffes & ennuis qui ne fe peuvent comprendre , Sc pour la finguliere affedion qu'elle avoit a ce royaume, amour Sc maternelle charité envers nous fes enfans, voyant Ie danger de la diflipation de notre paternel & légitime héritage, la confervation duquel, après Dieu, je lui dois , Sc tous univerfeliement qui aiment la France font tenus de lui en rendre immortellcs louanges de la grande vigilance, magnanimité , foin & prudence , avec lefquelles elle a tenu le gouvernail pour fauver ce royaume , Sc notre minoriré contre 1'injure des vagues , & 1'impctuolïté des mauvais vents de partialité & divifion , dont cet érat étoit de toutes parts agité. Pareillement il n'y a perfonne qni ne me doive rendre ce témoignage , qu'auffitör que j'eus atteint 1'age de porter les armes & faire fervice au feu roi mon frere, Sc k ce royaume je n'ai épargné labeur ni peine; j'ai expofé ma  t74 E T A T s perfonne & vie a tous bafards de la guerre , oü il a été befoin par les armes d'eflayer a rnertre fin aux troubles. Et d'autre part oü il a été befoin de les pacifier par reconciliation , nul plus que moi ne Pa defiré , ni plus volontiers que moi n'a prêré 1'oreille a toutes honnêtes & raifonnubles conditions de paix que l'on a voulu mettre en avant. Nul n'ignore aufli le devoir ou je me mis de pacifier ce royaume avanr que d'en partir pour m'en aller en Pologne. 11 eft pareillement notoire a tous en quelle combuftion je trouvai les chofes a mon retour , plufieurs villes & places fortes occupées, les revenus de la couronne en plufieurs lieux ufurpés , le commerce failli, partic des fujets debordés en route licence; bief tout ce royaume plein de confufion. Ce que voyant a mon arrivée, je m'effor^ai par tous les offices & moyens de douceurs qui me furenr poflibles , de faire pofer les krmes , lever les défiances , aflurer chacun , rendre tous mes fujets capables de mon intention , que ma volonté ne rendoit qu'a pacifier les troubles par une bonne reconciliation , & faire vivre tous mes fujets en paix & repos fous mon obéiflance. Toutefois je travaillai lors en vain, & demeura ma bonne intention fruftrée. Ce que  sous Henri III. 175 voyant a. mon très-grand regret, je fus contraint de recourir aux extrêmes remedes que je m'eflorgai éviter, comme un rocher dans la mer: ayant ja par expérience connu les maux que les guerres inteftines apportent a un état, combien de miferes les fujets de ce royaume avoienr ja fupponces pat 1'injure d'icelles, & que fi le malheur étoit qu'elles continiialTent, je ferois aufli contrahit de conrinuer les charges Sc tributs fur mon peuple, voire a Paventure les multiplier; comme les dépenfes des guerres font infinies & ineftimables. Je confidérois d'avancage , que toutes occa» iïons Sc moyens me feroient tollus au commencement de mon regne , de faire gouter i mes fujets Ie fruit de ma bénignité , Sc de la volonté avec laquelle je venois les foulager tous , gratifier chacun felon fon mérire, prévoyant dela, qu'aulieu de ce que plus je défirois , adviendroit ce que plus j'abhorrois ; pouvant affirmer en vérité , que de tous ks cceidens de ces dernieres guerres , je n'ai rien fenti fi grief, ne qui m'ait pénérré fi avant dans le cceur , que les oppreflions Sc miferes de mes pauvres fujets, la compaflion defquels m'a fouvent ému a prier Dieu de me faire la grace de les délivrer en bref de kurs maux,  Jj6 E T A T S ou terminer en cette fleur de mon age, mon regne & ma vie, avec la réputation qu'il convient a un prince defcendu par longue fucceflion de tant de magnanimes rois , plutöt que de me laifler envieillir entre les calamités de mes fujets , fans y remédier, Sc que mon regna fut en la mémoire de la poflérité remarqué par exemple de regne malheureux. Bien dois-je rendre grace a Dieu que en toutes ces cogitations d'orages Sc tempêtes, il m'a toujours conforté d'une ferme confiance, qu'il ne m'a point mis cette couronne fur la tête pour ma confufion, ni le feptre en main pour verge de fon ire j mais qu'il m'a colloqué en ce fouverain degré de royale dignité pour être inftrument de fa gloire, miniftre Sc difpenfateur de fes graces Sc bénédictions fur le nombre infini de créatures qu'il a mis fous mon obéiffance Sc protection. Aufli le puis-je appeller a tcmoin , que je me fuis propofé pour unique fin , le bien , falut Sc repos de' mes fujets, Sc que a cela tendent tous mes penfemens Sc deffeins, comme au port de la plus grande gloire &: félicité que je puifle acquérir en ce monde. En cette intention , après avoir bien confidéré les hafards , Sc inconvéniens qui étoient de tous cötés a crain ere, j'ai finaiement pris la voie de douceur &  sous Henri III. 3*g '& reconciliation, de laquelle l'on a ja recueilli ce fruit, que elle a éteint ie feu de la guerre f dont tout ce royaume étoit enfkmbé, & en 4anger.de le confommer entierement, qui n'eüt foudain jetté cette eau delfus. Je fais bien que d'une fi grande combuftio» qui a duré fi long-tems, que celle des troubles de ce royaume , il eft demeuré beaucoup de reliques, lefquels pourroient facilement r'al, lumer le feu qui ne les amortiroit du tout, aquoi je veux principalement travailler, accommodant, autant que poftible fera, toutes chofes pour afFermer &: afturer une bonne paix, laquelie je tiens être comme Ie reméde feul tk unique pour conferver le falut de cet état: auffi eft-il trop évident que fans Ia paix, toutes les ordonnances , provifions & régiemens que je ferois ici pour foulaget mes £ajecSj ne profiteroient de rien. Soyons donc par h raifon,par les exemples ■des malheurs d'autrui, & le trop d'expetience des njcres , enfeigné. Je crois auffi que fi chacun fait fon devoir , avec I'aide de Dieu, cette aftemblée ne fe départira point que n'ayons faic iêi&ndement d'un repos affuré, trouvé les remedes pour foulager mon pauvre peuple, pourvoir aux abus & ranger tous états en leut -bon Tornt XIII, M  '178 E T A T S ordre 8c difcipline j car il n'y a rien fi difficile ; dont avec le travail Sc univerfel confentement de mes fujets (tous lefquels vous repréfenterez ici) je ne me puifte promettre PifTue que je defue. Pour ces caufes je vous prie 8c conjure tousj par la foi Sc loyauté que me devez , par 1'aftection que me portez , par 1'amour 8c charité qu'avez envers votre patrie, au falut de vous, vos femmes , enfans , poftérité ,' qu'en cette affemhlée, toutes paffions mifes en arriere, veuillez tous de cceur Sc volonté unis, mettre vivement la main avec moi a ce bon ceuvre, pour m'aider a aflurer ce repos fi néceftaire , extirpex, autant que faire fe pourra , les racines- Sc femence de divifion , réformer les abus, remettre la juftice en fon inrégrité, Sc cn fomme repurger les mauvaifes humeurs de ce royaume, pour le remertreenfa bonne fantc, vigueur Sc difpofttion ancienne. Quant.a" moi, ayez jé vous prie cette opinion , que je reconnois de la grace de Dieu ■ce que je fuis, que je ne veux pas ignorer pourquoi il m'a mis en ce plus haut lieu d'hon-, neur 8c dignité, & moins veux mal ufer de la fouveraine puiffance qu'il m'a donnée •Je fais que j'aurai une fois a lui rendre compto  sous Henri Ut 17$ de ma charge, & veux auffi protefter devant lui en cecte aflemblée, que mon intention eft de regner comme bon, jnfte & légitime roi, fur les fujets qu'il a mis fous ma conduite ; que je n'ai autre fin que leur falut, repos & profpérité, nul fi grand defir que de les voir unis & vivre en paix, & fÜUS mon obéiffance, voir mon pauvre peuple foulagé, mon royaume repurgé des abus qui y ont pris pied par 1'injure du tems, & le bon ordre & difcipline rétablis en tous états. Vous affiurant que a cette fin je travaillerai jour & nuit, j'y employerai tous mes fens , mon foin & mes labeurs , fans y épargner mon fang & ma vie, s'il en eft befoin. Aa demeurant foyez certains, je le vous promets en parole de roi, que jeferai inviolablementgarder & entretenir tous les regiemens & ordonnances qui feront en cette aflemblée par moi faites; je ne donnerai difpenfe au contraire, ne permettrai qu'elles foient aucunement enfreintes. Par quoi fï vous correfpondez a mon intention , il n'y a rien qui pffifle empêcher le fruit de nos labeurs; car il faut croire que Dieu affiftera cette congrégation en fi fainte entreprife, de laquelle fi je puis venir i chef, j'efpere quê Pon verra fous mon regne , ma couronne aufli fieunifame, & mes fujets autant lieureux, qtt»iis AU  jSo E T A T S aient jamais été en autre temps de mes prédécefleurs. Chofe qu'avec rous mes vceux & plus affödueufes prieres , je requiers inceflamment ,a Dieu ,-comme le plus haur point d'honneur Sc gloire oü je faurois atteindre en ce monde, & a^uquel fi je puis parvenir , je me fentirai Itès-heureux Sc content. M. le chancelier vous fera entendre plus amplement ma volonté. Le roi ayant fini, toute 1'afTemblée fe leva pour le faluer, d'autant bonne affedion que .jamais roi fut falué Sc honoré de fes fujers, :pour le grand contentement qu'ils avoient pns de 1'ouïr fi bien, difertement Sc élégamment parler, fans élever ou baifler fa voix , qui étoit fi bonne, qu'il fut fi facilement entendu de tous les afliftans, bien que la falie foit grande; fans interpofer ou répéter une fyllabe, fans hé fiter ou fe troubler aucunemenr, combien que fa harangue fut longue , Sc que pendant qu'il difoit, ou fit tel bruit a la porte, qu'il fut contrahit de commander par deux fois qu'on fit faire filence. Et ce qui ravit davantage 1'afferablée en admiration , eft qu'ayant par le pafte fait preuve de fa magnanimité Sc vaillance, ayant donné tant de bons Sc fuffifans témoignages de fon intégrité , piété Sc juftice, il montra en cet  sous Henri Hl. ï S x a&e , qu'il n'étoit feulement né a bien faire * mais aufli a bien dire , chofe qui ne /eft encore remarquée en un grand prince , tel qu'il eft. Ec non-feulement a bien dire , mais aufli a bien perfuader, montrant une fi naïve affection , une fi bonne & vraiment paternelle volonté envers tous fes fujets , un fi grand defir de les conferver & réndre heureux , qu'il n'y eut celui de tous ceux qui 1'entendirent , qui fe peut contenir de foupirer & pleurer. Ce qui ne fera trouvé étrange de ceux qui voudront attentivement lire cette belle harangue , pefer toutes chofes , & fe propofer leur roi parlant en fi beaux & graves termes, ayant cette grace attrayante , de laquelle il eft doué, conjointe avec fa royale dignité. Car je m'aflure qu'ils fe fentiront fi fort émus , que pour confirmarion de mon dire, ils ne demanderont autres témoins qu'eux mêmes. Déja chacun étoit jraflls & rentrés en foïmême, d'oü le roi par fon éloquence 1'avoit tranf? portée, quand M. Ie chancelier de Birague fe leva pour déclarer plus a plein la volonté du roi,fuivant le commandement qu'il avoit recu ; mais le roi, avant qu'il commencat, le fir feoir & couvrir j puis d'une belle gravité & centers! 5  ï$2' E T A T S nance ce bon vieillard fe tournan; vers le roi; die ainfi t Remontranct de M. de Birague, chancelier de France, felon qu'elle a été par lui prononcéc en l'ajfemblée des états tenus d Blois. Sire , ce qui vous a plu me commander de remontrer Sc faire entendre a MM. les députés des trois états du royaume , ici afTemblés, en quel état fe trouvent les affaires communes Sc les vötres, & quels remedes font plus néceffaires, Sc meilleurs au mal préfent & danger éminent, femblera de prime face bien aifé & facile; toutesfois a qui voudra examiner toutes chofes ne fe trouvera de petit poids & importance; attendu que dela dépend , ou la reftauration Sc falut, ou la défolation Sc perre univerfelle de ce royaume; car fi le mal eft confidéré Sc connu , & que chacun veuille travailler a trouver les remedes conve.nables, Sc étant trouvés les appliquer au mal, il eft très-certain que , bien qu'il foit grand, il fera facile d'y pourvoir j tellement, que non-feulement il ne croitra, empirera Sc gagnera davanrage fur le corps de ce «oyaume, mais s'appétiflera, appaifera Sc cef-  sous H t M K. I III. lS}! fera du tour; Sc cette France, étant rerourné a fa bonne convalefcence , reprendra fa première vertu , force Sc vigueur. Mais au contraire , fi nous ne voulons rechercher & entendre les caufes du mal, repurger les mauvaifes humeurs qui engendrent fi griéves maladies , chercher les remedes, Sc nous en fervir, s'empirant de jour en jour, il deviendra incurable , fans qu'on puifTe efpérer aucun falut. En quoi , Sire , deux chofes me confolent principaiement, l'afiurance que j'ai de votre bonne volonté, Sc 1'efpérance que je congois de la finguliere affection de tous vos bons fujets, qui font ici préfens , Sc de ceux pour lefquels ils font ici venus; avec Ia prudence, fain jugement, avis Sc expérience defquels il n'y a rien fi difficile, de quoi (comme vous avez très-bien dit , Sire ) ne penfiez venir a chef. Ce qui me fait croire que je n'aurai grande peine a les rendre capables, & moins a les difpofer Sc induire de vous feconder en cette fainte Sc bonne affecFion , que vous avez de pourvoir Sc remédier a toutes chofes ; bien me fuis-je perfuadé , que la plus grande Sc principale difficulté fera de trouver les moyens pour y pourvoir , qui femblent fi couverts Sc cachés , qu'a grande peine fe peuvent-ils appercevoir; & néanmoins j'efpere que M 4  1^4 É T A T $ Dieu, pat fa divine bonté, vous fera Ia grace de les defcouvrix, avec 1'aide de cette hoiiorable compagnie. A laquelle, fuivant votre commandement, Sire, je m'adreflerai & m'effbrcerai , en vous fatisfaifant, & a eux , donner le meilleur contentement qu'il me fera poffible. M. le chancelier s'kant tourné vers t'aflemblée. Meffieurs, je ne veux en cet endroit & rang que je tiens, imker les grands orateurs, non tant pour ne m'être depuis longs - tems exercé en cet art, ou pour mon age feptuagenaire, qni pourroit avoit de beaucoup diminué ma mé^ moiré, & amoindri mon aétion (qui font deux des principales parties de 1'orateur) que paree que de ma nature & volonté je me fuis roujours éloigné de eer arr, comme étant mieux féant& convenable a ceux , quipouffiés d'un defird'honneur& vaine gloire, veulent paroitre par-deffus tous les autres, ou tromper les auditeurs en palliant& déguifantles matieres. Ce qui n'a lieu en mon endroit, qui ne penfe & ne veux dire que la vérité, & imirer la coutume des Lacédémo«iens, ufant de langage le plus brief & fuccint qu'il me fera poffible, eftimant bien non dicere virum gravem , & prcefertim in dignitate confiitu-  sous Henri III. ïS$ tum , fermone uti , nedum falfo & fucato ,fed nee fuperfluo. Ce que je vous prie croire, Meffieurs, & n'attendre de moi autre chofe, que !a pure Sc fimple vérité , que je me déübere vous repréfenter, fairs fard óu diffimulation , n'ayant aucune paüion ou affedion particuliere, qui m'en puifTe divertir. L'on a de coutume aux aflemblées pareilles a celle - ci, s'arrêter longuement a difcourir fur le nom des états, d'oü Sc quand ils ont pris leur origine , pour quelles occafïons , a quels effers on les a affiemblés, & quel bien eft réuffi de telles aftemblées. Panant laiffant les chofes qui fe pourroient curietifement rechercher & alléguer i ce'propos, je dirai feulement ce qui me femble néceflaire d'être entendu Et pour commencer par le nom des états , je trouve que quand on dit, les états du royaume de France, on entend principalement les trois fortes de gens, ou qualités de perfonne , qui font comme les principales parties clu royaume. Bien qu'il femble, a qui vouriroit fubtiüfer davantage, itpjfe ce royaume foir compofé de plus de trois efpeces de perfonnes, mais il eft aifé, de rapporter toutes les autres a trois, qui eft un nombre parfait & de grande excelïence. Ce nom de trois états femble avoir été depuis peu d'années mis en ufage, mais en effet nous trouvons que la prati-  I8 les réunir Sc rejoindre enfemble , Sc faire que vous, qui êtes pour tous fes fujets ici aflemblés en corps, vueillez être unis en efprit Sc femblables en voloncé, pour le bien de fa  l88 E T A T S majefté & de fon royaume; & étant ainfi bien unis , ayant cet honneur de repréfenter le plus puiftant & plus redouté royaume de la chrétienté , voire de tout le monde , vous confidériez bien l'occafion de cette convocation \ 8c vueillez confeiller & aider a trouver les moyens , a ce que tout le refte de fes fujets puiffe vivre en paix, repos & tranquilité entr'eux , en amitié & charité , telle qui convient a bons compatriotes, & tous enfemble envers fa majefté, en telle révérence 8c obciffance que bons fujets doivent a leur prince légitime 8c naturel. Je ne veux ici confommer le remps a vous remontrer quel bien 8c profit apporte l'union 8c concorde , laquelle de petites cités fait de grands 8c fleuriffans empires. Combien de maux 8c malheurs accompagnent la difcorde 8c divifion, mere de la perdition 8c défolation des plus grandes monarchies. Les fentences des graves perfonnages , les hiftoires 8c exemples des anciens 8c les vótres vous le déclarent afiez. Et ce que je puis dire fans grande compaftion 8c douleur , la trop grande expérience qu'en avez faite, eft trop plus que fuftifante pour vous le perfuader 8c faire croire a vos dépens. Je vous puis dire, que Ie roi vous a donne la paix, pour laquelle la reine fa mere a rant  SOUS HÜNR.I III. 189 travaillé, Sc d'efprit & de corps, comrne chacun fait. II n'a rien épargné, tant en biens que réputation, pour Ie grand defir qu'il a toujours eu de mettre fon royaume en quelque repos, Sc le garder de la ruine qui le mena^oit. Mais je puis dire auffi, que s'il y a eu quelque difficulté a barir cetre paix, il s'en ttouvera de bien plus grande a 1'effectuer Sc entretenir. hoe opus, hic labor. C'eft, meffieurs, a quoi il nous faut principalement travailler; car fans Ia paix, union Sc concorde , il ne faut penfer qu'on puiflë mettre ordre aux affaires ; Sc au contraire , avec icelle fera bien facile d'y pourvoir , & remettre toutes chofes en bon état, Car tout ainfi que la divilion a tout garé Sc Sc ruiné , 1'union raccouftrera Sc rebarira tout, par le moyen des bonnes provifions qui feront faites avant qu'on fe départe , en remédiant aux fautes Sc abus de chacun état, pourvoyant aux plaintes Sc doléances, Sc fur-tout ótant & extirpant les racines du mal. En quoi le roi entend que chacun propofe fes doléances librement Sc franchement, ainfi qu'il penfera être siéceflaire Sc a propos; avec la modeftie, refpeófc Sc difcrétion convenable a perfonnages vertueux Sc prudens , tels que vous êtes; & defire aufli grandement fa majefté t que  IJIO E T A T S ce qui fe propofera tende plus tot £ pourvoir aux fautes qui pourroient par ci-après avenir ^ qu'a vengeance ou punition des paflees; lefquelLes elle veut & entend que chacun metre en oubli, comme fa majefté les a du tout efr facées de fa mémoire. Je comaiencerai donc a 1'état eccléfiaftique ^ comme étant le premier, plus digne Sc plus excellenr, & auquel font commifes les chofes facrées, qui font a bon droit préférées d toutes les autres. Comme de fait il ne s'eft jamais trouvé nation rant fauvage Sc barbare , oü les chofes qu'ils eftimoient appartenir a leurs dieux n'aient éié faintes & facrées , & ceux qui en avoient la charge , refpedés , honorés & révérés par-. defliis tous autres. Que fi ces anciens payens encore enveloppés dans les ténebres d'ignorance, Sc aveuglés en leurs fauflés religions, ou plurot fuperftitions, ont porté ce refpect a ceux qui étoient députés pour le fervice de leurs faux dieux , a plus forte raifon nous , qui avons été éclairés de la lumiere de i'évangile, & avons la vraie religon, devons nous avoir ceux de cet état eccléfiaftique en fingulier honneur & révé-: rence, les maintenir & garder en leurs droits,' prérogatives, Sc prééminences. Aufli faut-il,que comme cet ordre eft a bon droit plus a eftimet  sous Henri III. & honorer que les autres , il ferve de fanal ou grande lumiere du monde mife fur la montagne & lieu plus éminent, qu'il ait en foi une belle clarté Sc fplendeur de toute vertu Sc intégrité, non couverte ou cachée, mais apparente & pleine de lueur, pour éclairer a tous les autres ; Sc que leur vie, a laquelle le refte fe conforme , foit pleine de fainteté; leurs aótions, que plufieurs enfuivent, droites leurs paroles, faimes & dévotes ; & pour finir en bref, qu'ils foienttels , que leur vacation le requiert. Car , s'ils fe trouvoient diflolus Sc dépravés , leurs paroles Sc prédications contraires a leur vie n'aiiroienc telle force Sc vertu que nous devons defirer; ils font députés a prier Dieu pour eux Sc tout le' refte du peuple ; que s'ils vivent mal, il eft: difticile que leur priere &C oraifon air grande efficace, & qu'ils puiftent impétrer pardon de leurs fautes Sc des nötres, qui ont provoqué 1'ire 'de Dieu, & tiennent encore fa main appefantie fur nous. Partant, femble bon de prendre garde aux abus qui fe pourroient en-; raciner, ou qui déja auroient pris quelque pied en cet état, regieree qui fe trouvera déréglé, & avifer aufti aux plainres Sc doléances qui en feronc faites, Sc qui fe ttonveront fans difficultés rai-  191 E I A I i fonnables , auxqueiles le roi eft tout réfolu de pourvoir, menie en ce qui dépend direótemenc de lui, comme font les nominations; car je puis a'Jlirer, que pour quelque inftance ou importunué , qui lui puifle être faite a 1'avenir, il nenomtnera aux bénéfices que perfonnes dignes Sc eapabies , & fera en forte , que tant ceux de cet étar , que les autres gens de bien de ce royaume , auront occafion de fe contenter. Je viens maintenant a 1'état- de nobleffe , qui tienc ie fecond & plus honorable degré après 1'état eccléfiaftique. Nous voyons, que les nobles font conftitués aux hauts degiés d'honneur, ont les plus honorables charges , tiennent les premières dignités, fiefs , Sc feigneuries; & même le plus fouvent font pourvus des préUtures & bénéfices, ou:re ce qu'ils font exempts des charges & impors, Sc ont plufieurs beaux droits &c privileges; ce qui fait que plufieureeftiment cet état bien accornmodé & peu foulé;mais qui voudra contrepoif.r les charges de la noblefle, a raifon defquelles toutes ces prérogatives & franchifes ont été oclroyées, il jugera qu'eile ne les a graruitement; fujette de prendre & porter les arrnes pour la tuition Sc défenfe ,-du royaume & du roi; abandonner leurs femmes, enfans, &; maifons , pour aller aux frontieres , Sc faire  s ö ü s H x m k i III. faire de leur corps comme un rempart a tout fin pays, accompagner Ie roi en toutes fes expéditions, employer & la vie & les biens pour le fervice du roi, pour le bien public, repos univerfel. Bref, n'épargner rien & fe montrer quafi prodigue a épandre fon fang, pouraccrokre & conferver le royaume; ce qui me fair dire, que la nobleffe faifant le devoir auquel elle eft appellée, telles dignités, exemptions, & privileges lui fonr juftement dus, & ne leur doivent être enviés. Vrai aft, que je fuis contrainr de dire , qu'il s'en trouve quelques-uns en cet état, auxquels il eft difficile de remarquer la moindre des vertus, qui rendoit anciennement la nobleffe tant louable en cette France. Car qui voudra avec moi remettre en mémoire le pafte, il fe reflöuviendra aifément, que l'on a vu la gendarmerie de France, que j'eftime en pattie la fleur de la noblefle , étant au camp ou en garnifon , dedans ou dehors le royaume, faire profeflion de craindre & honorer Dieu , fréquenter les églifes oüir dévotement le fervice divin vivre avec leurs hótes en toute douceur & modeftie, avec leurs voifins en amitié, obéir au roi & a juftice, contraindre les rebelles & mutins d'y obéir; & ncanmoins tres-hardie, crainte, & redoutée des peuple» voifins & nations étranges. Tornt XIII,  194 E T A T S Mais maintenant au préjudice & grand deshonneur de eer état , s'en trouvent quelquesunsfans crainte deDieu, fans révérence a la relioion , fans honneur a juftice , contemnans & méprifans les loix , débordés en tous genres de vices , déreglés en fairs & dits , blafphémans le nom de Dieu , travaiilans leurs hótes , moleftans leurs voifins, & ufant de grandes cruautés & violences; 6c toutesfois laches, couards, & mois; de maniere qu'il femble qu'avec les vertus cette générofué, hardietfe , vailiance tanr recommandée aux gendarmes Frangois, foir en eux rout éteinte & amortie. Auffi certes ne me puisje perfuader, que telle maniere de gens doivent être mis au rang de la nobieffe Francoife, crainre & redourée par-deffiis toutes les gendarmeries .du monde; ains plutót devons-nous crqire, que fans être nobles , ou de race ou de vertu, ils s'intronifent en cet état. A quoi il fera facile de pourvoir avec 1'aide de bons feigneurs, de vaillans & vertueux gentilshomnies, qui tiennent encore bon pour 1'honneur & réputation de cet état, & fi Dieu nous fait la grace de vivre en union, concorde & bonne paix. Refte le tiers-état, qui pourroit auffi être appellé état commun , d'autant qu'il comprend plufieurs perfonnes, comme ceux de la juftice,  sous Henri III. i^j ceux qui fe mêlent des finances, les gens de pied qui fuivent les ordonnances, les marchands qui font une grande communauté, les pauvres labouretus & payfans. Cet état d'autant que les autres font excellens & honorables, d'autant femble - t - il être utile & nécelfaire , étant femblable aux nerfs & veines du corps hu«nain , qui lui donnent force Sc nourriture, Sc fans lefquelles le corps ne fe pourroient tretenir & foutenir. Cet état, aufli bien que les autres, fe trouve grandement altéré , changé Sc corrompu, encore qu'il femble que fa maladie ne provienne tant de mauvaifes humeurs, que de débilité St foibleffe, pour avoir été maltraité, & beaucoupé vacué de tous biens & fubftance,qu'il eft: prêt a fuccomber, s'il n'eft promptement fecouru; |e parle principalement des pauvres laboureurs & habitans des champs, fans lefquels nous ne pouvons vivre; & néanmoins les avons fi mal traités , tant abattus Sc foulés qu'ils n'en peuvent plus; defquels nous devons prendre pitié, bien qu'ils fe foient pour Ia plupart retirés de cette grande fimplicité qui les rendoit fupportables ; car pour le regard de ceux de la juftice, ils ne fe font maintenus en leur devoir , intégrité & prudhommie, les financiers en leur fidélité, les marchands fe relfentans de Ia mi* N i  I? fainte s royale , & vraiement paternelle volonté , que vous avez de les foulager & mettre en repos. Pour laquelle ils ne vous peuvent oftrir autre chofe, finon ce qu'il leur refte de fang & de vie, pour être employés k votre fervice, & le refte de leurs biens Sc moyens, qui ne vous feront jamais épargnés; s'aflurant tant de votre bonté, Sire, qu'en cette aflemblée vous trouverez des remedes pour finir les maux de Pétar,  211 de tout ce qui s'eft négocié en la compagnie du t iers-état de france, en F aflemblée générale des trois états, ajjigné par le roi en la ville de Blois au 15 novembre ï^jó^pris des mémoires de Al. L. Bodin, fun des députés. JL e dix-huit de novembre , le roi fit fon entree," Sc la reine peu après lui. La reine mere étoit arrivée le jour précédent; & d'autant qu'il y avoit encor<: bien peu de députés arrivés, Sc que la grande falie des états n'étoit parachevée, il n'y eut aucune préfentation jufqu'au viugtcinq enfuivant. Le vingt-deux, le roi ordonna qu'il donneroit audience après fon diner, les lundi, mercredi Sc vendredi. Le vingt-trois , quelqües députés des trois ordres fe préfenterent au roi fans être appelles , lui faifant entendre qu'ils étoient venus de tel ou tel pays, fuivant fon mandement, pour lui préfenter les requêtes Sc doléances chacun de fon etat. Le vingt-quatre, fut fait un cti de par le RECUEIL  sous Henri III. it. roi par tous les carrefours de la ville, que chacun état s'aflemblat a deux heures après midi, pour entendre a ce qu'ils avoient affaire: 1'état eccléfiaftique en 1'églife Saint-Sauveur; la noblefle au Palais; le tiers-état en la Maifon-de ville; combien que l'ordre eccléfiaftique s'étoit ja plufieurs fois affemblés au logis du cardinal de Bourbon» Suivant ce cri, les ordres s'aflerablerent auxdits lieux; & en Ia falie du riers-ém, les. députés de chacune province furent appellés , fuivant l'ordre tenu a Orléans, Sc fe préfenterent ceux qui s'y rrouverent, & furent leurs noms ecnts. Le jour même I'archevêque d'Embrun , accompagné de quelques.uns de fon ordre, alk vifiter la noblefle & le tiers-état, leur faifant d honnêtes remontrances pour les unir en même volonté. Le prévót des marchands de Paris, comme premier député, le remercia, & Pun des députés de Bretagne fervit. de greffiêr, jufqu'a ce qu'on eut élu un préfident Sc un grefher. Ce jour même y eut quelque différend entre ■ les députés des trois ordres pour les états de Bourgogne Sc les députés de chacun bailliage. Vrai eft que les députés généraux du tiers-état, de Bourgogne n'y vinrent point, & icelui de O 3  114 E T A T S Ja noblefle s'en départir, & celui de 1'églife s'accorda avec les députés particuliers pour y avoir féance , fi bon lui fembloit, fans voix» Le vingt-fix & vingt-fept, le tiers-état s'affeinbla , & plufieurs qui avoient été abfens fe préfenterent , Sc pour préfident fut élu le prévót des marchands , préfident des comptes, députés avec un échevin , Sc Verforis avocat pour la ville de Paris, tous trisis ne faifoient qu'une voix, & pour greffier fut élu Pierre Boulengé, député de Bretagne, & pour affeffeurs , le Royer Sc Cuvillier, députés de Bourgogne Sc de Clermont. Le vingt-huit, en 1'afTemblée du tiers-état, après plufieurs débars qui furent pour les gouvernemens, nombre Sc ordre dJiceux , mëmement pour les gouvernemens d'Orléans Sc de Guyenne, fut arrêté que ceux qui étoient en differend , fe retireroient par devers le roi, & fe feroienr régler dedans trois jours, Sc cependanr qu'on opineroit par gouvernement. Et fut aufli ordonné que les députés de chacun gouvernement s'affembleroient en Pun des logis des députés , felon leur,commodité , pour vérifier leurs pouvoirs , Sc accorder leurs cahiers. Le jour même Fut député le préfident du tiers-état, avec quelques autres députés , jufqu'au nombre de fix t'  s o ü s Henici III. pour vifeér 1'églife , 8c la remercier du bon office qu'elle avoit fait a 1'endroit du tiers- état. , , Le vendredi trente, fut faite proceffion generale en 1'églife Saint-Sauveur, oü le roi Sc les reines affifterenr. Décembre 1570. / Le premier de décembre y eut grande alter* Cation entre les députés de 1'Me-de-France 8c les députés de Bourgogne, fur ce que Bodin, député de Vermandois , & le premier après les députés de la ville , prév&té 8c vicomré de Paris, difoit qu'il devoit avoir féance après ceux de Paris 8c les députés de Senlis, Valois, Manre , Clermonr, Melun, Dreux 8c autres députés de l'Ifle-de-France, vouloient avoir féance, après le député de Vermandois. Ce que les députés de Bourgogne 8c de Bretagne empêcherent. Les députés de Plfle-de-France fe fondoient qu'il étoit néceffaire d'être après ceux de Paris, pour opiner tous enfemble au gouvernement de 1'Me-de-France; comme il avoit été arlèté qu'on opineroit par gouvernement , ceux de Bourgogne difoient, que, aux états de Tours 8c d'Orléans ils avoient eu féance après ceux de Paris. L'affaire fut renvoyée au roi pour en ordonner; lequel en même différend entre les 04  2I* E T A 7 S nobles \ adjugea la preffcance aux députés de Bourgogne, qui fuc caufe que le député de Vermandois ne voulut pas débattre le différend devant le roi, craignant femblable arrêt. Ce jour même fut arrêté que le député de Langres bailleroit fon cahier au député de Sens, ou bien au roi , pour en ordonner, fut aufli lu on arrêt du privé confeil entre les députés des treize villes d'Auvergne, élus i Clermont# & le député de la fénéchauflée d'Auvergne , élu £ Riom. Et fur le différend qui étoit entre eux, Sc autres du gouvernement de Lyonnois, fut dit qu'ils auroient féance promifcuement fans préjudice de leurs ordres. Fut aufli lu un autre & femblable arrêt entre les députés généraux élus par les érars de Dauphmé, & les députés particuliers dudit Dauphiné. ■ Furent aufli envoyés, de la part da clergé , meflieurs l'évêque de Bayeux, & autres audit tiers-état, peur leur faire entendre qu'ils avoient délibéré de communier le jour fuivanr i faint Nicolas, & les inviterent i faire le femblable. • Ce jour même , les gouvernemens furent appellés d'ordre comme s'enfuit : 1'Ifle de France Bourgogne , Champagne, Languedoc, Picardie , OrléanSj Lyonnois, Dauphiné , Provence, Bre-  sous Henri III. 217 tagne , Normandie. Sous ie gouvernement de Guyenne , demeura Ie gouvernement de Ia Rochelle, pour lequel n'y eut aucun député. Sous le gouvernement d'Orléans, Poitou, Touraine , le Maine , Anjou , Blois , Amboife , Angoumois; & le marquifat de Saluce fous Dauphiné. Le dimanche deux de décembre, la plupart des députés communierent en 1'égüfe de S. Nicolas. Le lundi 3 de décembre , les gouvernemens chacun en particulier entrerent en conférence , & vérifierent leurs pouvoirs. Cela fait au gouvernement de 1'Ifle de France, Verforis ouvrit le cahier de Ia ville de Paris , ou Partiele de la religion fut lu 3 par lequel il étoit requis qu'il plüt au roi unir rous fes fujets en une religion catholique romaine; & après que Verforis eut remontré que cela étoit nécelfaire, conclut. Le député de Ia prévóté de Paris lut un femblable article , nonobftant tous édits, Sc conclut. Bedin , député de Vermandois , devant que opiner, lut tout haut le premier Sc douzieme article du cahier général de Vermandois , qui portoit qu'il plat au roi maintenir fes fujets en bonne paix, & dedans deux ans tenir un concile général ou national, poux  llS E T A T S régler le fait de la religion ; & puis, après avoir longuement difcouru fnr les incommodirés dc la guerre , fut inrerrompu par Verforis, qui répondit a ce que difoic ledit Bodin, député de Vermandois, lequel répliqua; & cependant intervint Ie grand prévót de Phótel, qui vint querir le prévót des marchands. Et la compagnie étant raffemblée après diner , Bodin continua, & enfin conclut que 1'cdit de pacification fut entretenu. Le député de Senlis conclut avec ceux de Paris, & le député de Mantes, qui ajouta ces mots, par douces &c faintes voyes. Le député de Valois fut d'avis que Partiele de la religion fut réfervé a la fin. Et après que chacun eut dit fon avis , ils fe trouverent partis par le député de Vermandois, qui fe réduifit a Popinion de ceux qui vouloient que Partiele fut réfervé a la fin. Le jour même il fut arrêté au gouvernement de Bourgogne , que le roi feroit requis de maintcnir fes fujets en la religion romaine, pourvu que cela fe fit fans rentrer en guerre» Le cinq décembre , le riers-érat s'alfemble & arrêté d'envoyer le préfident de la compagnie avec quelques autres fupplier le roi, de donner féance au tiers-état, honorable & a part, & que il ne füt point derrière les deux au re;  s o v s Henri III. 119 étars. Fut auffi arrêté, s'il fe préfentoit quelqu'un pour former oppofuition & protefter contre les états, que le roi feroit fupplié de palier outre, fans y avoir égard. Le jeudi fix dudit mois; le roi fir fa propofition en la grande falie, pour ce préparée, affis en un haut fiege , & a fa dextre la reine mere, puis monfieur, frere du roi en même rang, & la reine a cóté feneftre , puis en potence du córé dextre étoient le cardinal de Bourbon , le marquis de Conti & fon frere , puis M. de Montpenfier & le prince dauphin , le duc de Mercoeur, frere de la reine, les ducs de Maine & 'd'Uzès , & vis-a-vis a cóté feneftre les évêques de Langres , Laon , Beauvais, comme pairs de I'rance , & au bout de l'échaffaud le chancelier étoit affis en une chaire a cóté feneftre, audevant duquel échaffaud y avoit douze bancs de rang du cóté dextre , & autant a feneftre; fur les fix premiers bancs a dextre étoit le clergé, fur les fix a feneftre étoit la noblefle, & derrière les deux ordres d'un & d'autre cóté étoit le tiers-état , felon l'ordre qu'ils furent appellés , faifant le feigneur d'Oignon 1'état du grand maïtre des cérémonies abfent, & au travers des douze bancs , y en avoit d'autres au devant , en longueur , oü  wmn «O E T A T S étoient affis les confeillers du privé confeil, & le refte de Ja falie plein de toutes fortes d'hommes fans ordre, & au haut de la falie y avoit des galleries pour les dames & gentilshommes de cour. Le roi fit fa harangue d'une grace & action tres-belle. Puis le chancelier. Après, les préfidens de chacun des trois ordres dirent brievement qu'ils avoient entendu la propofition du roi , & de monfieur le chancelier , & qu'ils s'efforceroient de la mettre a exécution , & dura la propofition deux heures ou environ. Le fept décembre en 1'afTemblée du tiersetat, fut artêté qu'on fupplieroit le roi au nom de tous les états (aptès en avoir communiqué aux deux autres états ) que fur les articles qui feront propofés par lefdits états généralement ou féparémenr , feroit donné réglement par les juges qu'il p'airoit a fa majefté de nommer, appellé de chacun ordre un des députés de chacun gouvernement , faaf tc-utesfois auxdits états ayant vu la lifte des juges , lui pouvoir fur ce faire les remontrances qu'il appartiendroit, lequel réglement demeureroit pour une loi inviolable. Eut aufli arrêté, que pour compofer le cahier général, après que les cahiers particulicrs fe-  SOUS H E N R I 1 11". 221' roient arrêtés, feroic nommé un ancien député de chacun gouvernement, qui feul porteroit la parole > & que les autres députés de chacun gouvernement feroient affis prés dudit ancien élu , pour lui donner avis. Ce jour même, Verforis fur élu pour porter la parole au roi pour le tiers-érat. L'églife au• paravant avoit élu 1'archevêque de Lyon , &c la noblefle, le baron de Senecey , fils du grand prévót de 1'hótel. Ce même jour , quelques-uns de la noblefle vinrent en PalTemblée du tiers-état , touchant la requête qu'on devoit faire au roi pour les juges des cahiers , & fut réfolu que chacun defdits états enverroit douze perfonnes pour faire ladite requête, & que auparavant les trentefix députés a cette fin fe trouveroienr le jour fuivant a faint Sauveur qui étoit le dimanche. Le lundi dixieme dudit mois, les trentefix députés des trois ordres étant aflemblés a faint Sauveur , 1'archevêque de Lyon élu préfident & orateur par l'églife , dit qu'il s'étoit trouvé une requête fur le bureau fans auteur, qui portoit que le roi feroit fupplié au nom de tous les états, autorifer tous les articles qui feroient artêtés unanimement par tous lefdits états; & quant aux articles qui feroient en dif-  tXi E T A T S cords , qu'il plüt a fa majefté y donner régie» ment par 1'avis de la reine la mere, &C de meflieurs les princes du fang, & des pairs de France, Sc des douze députés de chacun ordre, fur quoi il étoit befoin de conférer; mais d'autanr que les douze envoyés par le tiers - érat n'avoient autre puiflance que d'entendre ce qui feroit dit par les deux états, Sc rapporter le tout a 1'aflemblée , cela fat caufe de ne rien réfoudre. Mais ladite conférence fut différée a deux heures après midi, Sc fut arrêté en 1'affembiée que les douze députés iroient conférer avec les deux autres états, le accotder la requête fufdite , fauf tontesfois que les députés des trois ordres que le roi appelleroit, n'au roient point voix délibérative pour juger, ains feulement pour remontrer au roi ce que ils verroient le plus expediënt, Sc que le roi feroit fupplié de bailler la lifte des confeillers du privé confeil. * . Etant les trente-lix députés en conférence aprês diner, il fut arrêté par l'églife Sc la noblefle , que la requête feroit faite au roi verbalement, fans ufer de la modification dudit tiers-état, lequel ne voulut y confentir; & les douze députés du tiers-état en firent leur rapportje mercredi fuivant audit tiers-état aflemblé,  sows Hewri III. 221 qui arrëta que le tiers-état confentiroit la requête ainfi qu'elle étoit couchée, pourvu que cs articles oü 1'un des états feulement auroic intérêt, les deux autres n'auroient qu'une voix , & que cela feroit expreflement déclaré. Le douze, les trenre-fix députés fufdits firent ladite requêre au roi étant avec la reine mere & monfieur en fon cabinet, qui fit réponfe fur le charnp, que les cahiers lui étanc préfentés , il feroit telle réponfe par 1'avis de fes confeillers du privé confeil qu'il feroit avifé defquels il promit leur bailler la lifte, Sc que les trente-fix députés des trois ordres feroient ouïs comme il étoit requis, fans toutesfois avoir voix délibérative, fi que lefdits états auroient occafion de s'en contenter. Mais quant a ce qui étoit requis que le roi accordat qu'il autoriferoit tout ce qui leroit arrêté par les trois états unanimement, qu'il ne pourroit accorder cela, ne fachant ce que ils pourroient de* mander. Le quinze dudit mois, Partiele de la religion fut remis en délibération en Plfle de France, qui ja étoit accordé par la noblefle, que le roi feroit requis de réduire tous fes fujets a une religion romaine ; fur quoi Verfotis dit que le roi Pentendoit Sc le vouloit ainfi,  «4 E T A ï s qu'il 1'en avoit afluré; a quoi le député de Vermandois dit que c'étoit 1'ouverture de la guerre. Après plufieurs remontrances , il conclut a ledit de pacification fuivant fa charge. Tous les autres conclurent comme ceux de Paris, en y ajoutant ces mots, par les plus douces 8c faintes voies que fa majefté aviferoit : a quoi le député de Vermandois fe réduifit, fans aller ni protefter au contraire : alors , le prévót des marchands de Paris dit, Nunc dimitis fervum tuum domine, &c. Le feize, vint un homme envoyé de Reims, & un autre de Chalons , depuis encore un autre de Soiftons , avec procuration defdites villes , faite chacune en particulier, 8c fans y appelier les prévóts du plat pays , pour défavouer le député de Vermandois, comme ayant demandé deux religions; a quoi ledit député leur fit réponfe que leurs défaveus, étoient défectueux, en la forme & en la matiere , comme il eft bien au long contenu au procés-verbal. Lefdits députés fe retirerent au roi , qui les renvoya a fon confeil , oü la réponfe dudit Bodin fut trouvée fi jufte , que plufieurs dudit confeil ctaienr de même avis, & lefdits députés defdites villes s'en retournerent. Le  sous h e k fc. ï Ilï. ii$ Le jour même quelques députés du roi de Navarre arriverent, qu'on difoit vouloir faire quelques remontrances aux trois états '■• par la permiiTion du roi. ; Le dix-fept, fut arrêté en 1'afTemblée du tiersétat. que le jour fuivant i!s fe raffembleroient pour ouïr lefdits députés du roi de Navarre, & que dedans trois jours tous les gouvernemens apporteroient leurs cahiers accordés , pour compofer le cahier général. Ce jour même le député de ChStelleraut dit, que Chatelleraut étoit de 1'anrien gouvernement de Guyenne, duquel les députés de Poitott s'étoient diftraits , pour fe joindre au gouvernement d'Orléans; requérant qu'il lui fut permis fe joindre au gouvernement de Guyenne, ce qui fut empêché par ceux de Poirou , & protefté de part Sc d'autre , Sc fut dit qu'ils fè pourvoiroient par-devers le roi. Le mardi dix-huit, lefdirs députés de Navarre, & autres miniftres ne fe prefenrerent auxdirS états ■ comme on dfoit afin de les approuvei: le même jour le procureur général du roi au parlement de Paris, apporta un cahier contenant plufieurs articles, principalement pour le réglement de l'églife & de ia juftice, pour y avifer Sc en prendre ce qu'on jugeroit ie plus expéTome XIII. p ^  1X6 E T A T S dient, comme il avoit fait le jour précédent i 1'état eccléfiaftique & de la noblefle. Et le jour même vint un jacobin faire une requête, que fuivant le coacile d; Trenre , il fut permis aux mendians d'avoir immeubles. Il fut dit qu'on aviferoit fut fa requête, en dreflaat le cahier général. Le lundi vingt-quatre , vigile de Noël , Palfémblée du tiers - état commciica a compiler le cahier général , & fut commencé par 1'ouverture du cahier de 1'Ifle-de-France. Le vingt-fix, en 1'aflemblée du tiers-état, fe préfenttrent les députés des univerfités de Paris, Poitiers & Orléans, préfentans leurs cahiers a 1'aflemblse , pour les inviter a la religion catholique romaine. Ce jour même il y eut différend entre le fyn'dic général de Provence &C le député du tiers-état , a qui auroit entrée & féance. Le fyndic éroit chevalier de l'ordre , qui vouloit entrer aux trois états, mais il fut débouté par Péglife & par la noblefle ; mais le tiers-érat ordonna qu'il auroit entrée , féance & voix avec les députés du tiers-états, d la charge qu'il ne pourroit entrer aux deux autres, & fit le ferment. Ce jour même , quel ques députés de l'églife  SOUS h X N jC ï III. 127 comparurent en 1'afTemblée, exhorcant le tiersérat a foutenir une religion catholique romaine feulement, Sc le concile de Trente, 5c regarder fur les atticles généraux Sc communs aux trois états, pour iceux compiler en un cahier & le faire autorifer au roi, afin que la chofe fut authentique. Ce jour même, en 1'afTemblée du tiers-érat, a la pluralité des gouvernemens fut arrêté, que le roi feroit fupplié réunir tous fes fujets a la religion catholique Sc romaine, par les meilleures Sc plus fainres voies & moyens que faire fe pourroit, Sc que tout autre exercice de religion prétendue reformée fut èté, tant en public qu'en particulier ; les miniftres dogmatifans, diacres, furveillans, contraints vider le royaume dedans tel temps qu'il plairoit au roi ordonner, nonobftant tous édits fairs au contraire, èc que le roi feroit fupplié de prendre en fa protection tous ceux de ladite religion, autres que lefdits dogmatifans, miniftres, diacres & furveillans , en attendanr qu'ils fe reduiroient a la religion catholique. Lequel article paffa aux voix des gouvernemens de 1'Ifle-de-France, Normandie, Champagne , Languedoc , Oriéans , Picardie Sc Provence ; mais les gouvernemens de Bourgogne, Sretagne, P i  22.8 E T A T S Guyenne. Lyonnois, Dauphiné, furent d'avis qu'on devoic ajouter audit article, que 1'union de ladite religion fe fit par voies douces & paciiiques , & fans guerre. Toutesfois les lept gouvernemens •Pemporrerént. Mais il eft a noter que le gouvernement de Guyenne avoit dix-fept députés , & le gouvernement de Provence n'en avoit que deux. Alors les députés de Saint Pierrele-Moutier & de la Marche , & quelques autres d'Auvergne , ■ demandereiit acte de Partiele qui auroit été fait par leur gouvernement, pour leur fervir de décharge envers ceux qui les avoient députés; ce qui fut refufé'du confentement de Paftemblée, pour ne faire ouverture aux nuilités &C proteftations qu'on pourroit former contre J'avis defdits états. 11 y eut grandes altercations & plaintes des cinq gouvernemens fufdits. Le même jour il fut défendu au député de Provence, chevalier de l'ordre, de plus apporter d'épée en l'alTembIée du tiers-état, pour le différend qu'il avoir eu avec fon col!egue, qu'il menacoit; & promit de ce faire. Le vingt-huitderelevée fut remontrépar ceux de Guyenne, qu'ils auroient eu avertiftement, que ceux de la religion s'étoient emparés de pluheurs places, villes & chaceaux , & qu'il étoit raifönnable qu'on remonrrat au roi qu'il y  SOU* HfiNRl III, 2lg pourvüt. Pareilles remontrances furent faites par l'églife , &c tut donné charge au préfident & maire de Bordeaux avec quelques autres, d'aller avec les députés de l'églife & la noblefTe, pour en faire remontrance au roi, & depuis fut conti' nuée le jour même la compilatioa du cahier. La fe rit en 1'afTemblée du tiers-état de grandes plaintes & doléances, de la part de ceux qui avoient conclu a 1'entretenement de Ia paix , contre ceux de Touloufe & autres qui vouloiens amoindrir la perte des villes occupées. Le roi fit réponfe aux députés fufdits , qu'il avoit poarvu a ce qu'on demandoit, & néanmoins dit sux députés qu'il feroit bon dechoifir quelques-uns d'entr'eux pour les envoyer en qualité d'ambalfadeurs, vers le roi de Navarre, le prince de Condé, & le maréchal Damville, fans dire a quelle fin. Sur le rapport fait par le préfident Aymond, de Ia réponfe du roi, furent élus MM. Belin, député de Troies ; Ménager, général des finances de Touraine ; & Malequin, député d'Orléans, a la charge qu'ils déclareroient en pleine alfemblée les caufes de leur légation, pour favoir s'il étoit nécefTaire, & cependant fut continuée la compilation du cahier. Le lundi trente-un décembre, Belin , député de P 5  I30 E T A T 8 Champagne, fut déchargé de ladite légation i en faifant inftance attendu fa vieillefTe de foixantedix ans, & Malequin pour une furdité d'oreiile; & en leurs places furent fubrogés le fyndic de Provence, chevalier de l'ordre, & un échevin de Rouen, auffi députe. Ce jour même furent députés douze perfonnes dudit tiers-érar, a la requête de l'ordre eccléfiaftique, pour fe trouver a Saint-Sauveur avec pareil nombre des deux autres états, pour délibérec fur les inftructions qu'on devoit bailler aux ambaifadeurs, & rapporter le tout en Paflemblée; & cependant fut continuée la compilation du cahier. Ce jour même vint le premier préfident de la chambre des comptes, en Paflemblée du tiersétat , ayant ja été vers les autres états envoyé de par le roi, pour faire entendre auxdits états le fonds de fes finances , & les dettes contractées par fes prédécefleurs , qui montoient a la fomme de plus de cent millions, & qu'a cette fin , il avoit principalement aflemblé les états, pour acquitter la foi de fes prédécefleurs & la fienne; fur qHoi furent députés douze perfonnes de chacun ordre, pour entendre dudit fieur préfident en quel état étoient les finances, en conférer & avifer, pour rapporter ce qui auroic  sou* Hbnri 111. M» été communiqué £ chacun état, & fur ee , donner avis , pendant que les autres dépurés procéderoient a la compilation du cahier général. Depuis, le rapport fait par lefdits députés au fait des finances, il fe trouva qu'on ne pouvoit entendre au vrai ledit état des finances, attendu que ledit préfident ne bailloit rienqu'en abrégé, & plufieurs penfoient que les abrégés n'étoient pas fairs au vrai, ni pareillement les dons &C penfions ne furent point communiquées auxdits états. Janvier 1577. Le mercredi deux, jour de janvier , de la Riviere , fyndic de Bordeaux, apparta a 1'affemblée du tiers-état, les inftructions qu'on devoit bailler aux ambaftadeurs , vers lefdits princes & maréchal Damviile , difant que lefdites inftruétians lui avoient été baillées par ceux du clergé , peut être lue en 1'alTemblée de chacun ordre, a la charge de n'en rien rédiger par écrit, ni mettre fur tablettes. Lefquelles inftrudions étant lues par diverfes fois, futavifé par l'atfemblée du tiersétat, de corriger les paroles aigres & piquantes3 & icelles communiquer aux autres états. pouf? le tout revu & accordé, en être retenu copie fignée & mife par-devers le greffier. Lequel fyndic de Bordeaux ayant porcé lefdites inftruaions P 4  XiZ E T A T S corrigées , rapporta qua. quelques députés du clergé viendroient de relevée pour en communiquer plus amplement en 1'aflemblée dudic tiers-état, & a cette fin les évêques de Bayeux Sc d'Autun vinrent en ladite aflemblée avec un cahier beaucoup plus ample, duquel étoient extraites les fufdites inftructions, avec la forme d'une procuration Sc lettre de créance auxdits princes ; & remontrerent a la compagnie, que les états de l'églife & de la noblefle avoient avifé que lefdites procurations, inftruétions &c lettres , feroient fignées feulement des greffiers defdits états, Sc qu'il n'en feroit retenu aucune cepie. Lefdits évêques s'étant retirés pour lai.Ter délibéter le tiers état, fut réfolu que les premières inftruétions feroient fuivies , attendu que ledit cahiet étoit plein de paroles dénonciatives de la guerre , Sc obligatoires aux frais d'icelle; & néanmoins que la copie defdites premières inftructions demeureroit par-devers le greffe; & Ie tiers-état fit noter entre - ligne , les endroits piquans & contumelieux. Le trois janvier fure. t derechef rapportées les grandes inftruétions, Sc relues ainfi que l'églife Sc la noblefle les avoit accordées, Sc fut arrêté quelles feroient fuivies felon quelles avoient été  sous Henri III. 13 j corrigées par Je tieis-état, & iignées par les greffiers , & copie laiifée entre les mains du préfident de 1'aflemblée , qui feroit cachetée jufqu'au temps que les ambafladeurs retourneroient , &C fut continué cependant a compiler le cahier. Ce même jour, Bodin député de Vermandois requic la compagnie du tiers-état, qu'il fut employé article au cahier par lequel le roi feroit fupplié ordonner que les fergens & notaires dès-lors en avant feroient tenus de dater les aétes par les heures , du moins devant ou après midi; & quant aux teftamens , qu'il feroit mis aufli s'ils étoient paflés le jour ou Ia nuit , remonrrant la coutume prefque de tous les autres pays , & les faufletés qui font commifes a faute d'y employer les dates des heures, ce qui fut accordé par 1'aiferaablée, ores que ledit Bodin député n'en eut rien par fon cahier. Ce même jour, fur i'avertiflement donné par aucuns de 1'aflembiée, que les députés de la noblefle & de l'églife entendoient faire jetter fur le tiers-état les frais des ambafladeurs qui feroient envoyés vers le roi de Navarre &c autres, & qua cette fin ils avoient pratiqué quelques commiflions du roi, fut arrêté que le tiers-état n'en payeroit rien, attendu qu'ils ne fe faifoient a la promotion dudit tiers-état;  234- E T A T S & d'autant que les deux autres états vouloient auffi faire payerau tiers-état leurs vacations pour être venus aux états, il fut auffi accordé que chacun defdits états payeroit fes députés , & que s'il y avoit commiffion au contraire « qu'on y formeroit oppofition, &C fut continué a compiler le cahier général. Le vendredi matin, quatre dudit mois, étant lefdites inftruétions avec les procurations Sc lettres de créance qu'on devoit bailler aux ambafladeurs , & rapporté par l'évêque de Bazas, efquelles on avoit encore laiffe plufieurs paroles piquantes, que le tiers-état avoit avifé de rayer, &c que le préfident du tiers-état & autres députés avoient rcmontré audit évêque , que telles paroles étoient dénonciatives de la guerre , & obligatoires aux ftais d'icelle; l'évêque confefla que MM. du clergé n'étoient promoteurs de cette légation; ains le roi, qui vouloit que lefdites paroles que le tiers - état vouloit rayer fuflent employées. II ajoutoit auffi , que la noblefle n'étoit d'avis qu'aucun ambafladeut fut envoyé au prince Condé. Ce jour même l'évêque d'Autun vint au logis de Bodin député , & lui fit entendie que plufieurs gens d'honneur avoient avifé, qu'il feroit bon qu'il fut ehivoyé peut le tiers-  sous Hisri III. 23$ «tat vers Ie prince de Condé , avec ledit évêque d'Autun, & Montmorin pour la nobleffé. Bodin lui dit qu'il étoit mal difpos pour un tel voyage , attendu la rigueur du tems , joint aufli qu'il s'étoit trop affedionné pour la paix, & qu'on le pourroit tenir pour fufped, &i en tout événement qu'il n'avoit ni chevaux nt moyens d'en acherer. L'évêque d'Autun lui promit de lui faire bailler rour ce qu'il faudroit , ce que ledit Bodin ne voulut accepter. Ce même jour de relevée 011 élut au lieu de ceux qui s'étoient excufés de la légation du tiers-état , le préfident de Poitiers, & le fyndic de Provence , chevalier de 1'Ordre , qui depuis s'en excufa par fon collégue, qui fur mis en fon lieu , tellement que 1'archevêque de Vienne, le feigneur de Rubempré j & le général Ménager , furent envoyés au roi de Navarre ; l'évêque d'Aatun , Montmorin , & le préfident de Poitiers , au prince de Condé; l'évêque du Puy , le feigneur de Rochefort , & de Tole, au maréchal de Dampvilie , & fut toujours continué a compiler le cahier général. Lefamedimatincïnq janvier, les inflrudions des ambafladeurs furent rapportées au tiers état, par 1'archevêque d'Embrnm , & l'évêque d'Autun, ainfi qu'elles étoier.t corrigées par le tiers-  E T A T S ccac, & lecture faite furent fignées par les trois fecrétaires des trois états, a favoir, Brouet , Brianzon & Boulanger, enfemble les lettres de créance & la procuration , & la copie de tout retenue par lefdits fecrétaires, & le tout ployé en paquet, & cacheté de cire d'Efpagne , & paraphé par ledit Boulanger & mis entre les mains du préfident de 1'afiemblée du tiersétat. Le fix, les ambafladeurs députés au roi de Navarre par les états, partirent en compagnie du fieur de Biron, ambafladeur pour Ie roi. Le lundi fept dudit mois vint en 1'aflemblée du tiers-état l'évêque d'Autun , & fit une requête verbale a ladite aflemblée au nom du feigneur Danets, évêque de Lavaur, a ce que ledit tiers-état eut a fe joindre avec lui, pour fuppher le roi lui permettre réfigner fon évêché en faveur de Genebrard , le&eur du roi en Hebreu, & doéteur en théologie, nonobftant la réfervé qu'on difoit être faite en faveur du feigneur de Pybrac, ou de celui qu'il nommeroit. L'aflemblée fur-le-champ fit réponfe .qu'elle ne fe pouvoit empêcher de ladite requête , attendu mêmement ce qui avoit ja été réfolu par 1 aflemblée fur le fait des élcélions & nominations des évêques.  sous Henri Iïï, 237 Ce jour même partirent les ambafladeurs des étars j députés vers le maréchal de Dampville. Le mardi huit dudit mois, le feigneur de Mifery Sc autres députés par la noblefle , comparurent a 1'afTemblée du tiers-état , qui remontra de la part de la noblefle qu'elle avoit avifé a un réglement de la gendarmerie, qui étoit de réduire le nombre d'hommes d'armes qui feroient entrerenus en tems de guerre, Sc en paix, au nombre de trois mille , qui revenoit a neuf mille chevaux, Sc les gens de pied a vingt mille en tems de guerre , Sc k douze mille en tems de paix , & que les ^deniers qu'on leveroit pour la gendarmerie ne fuflent employés ailleurs , & que les états fuppliaffent le roi de PordonRer ainfi, & faire arrêter les deniers des tailles & du taillon pour le quartier de janvier, février Sc mars, ès mains de quelque notable bourgeois de chacune ville , a ce qu'ils ne fuffent employés en autres ufages , qu'au* paiemenr des forces qui feroient levées pour le fervice du roi, fi tant étoit qu'on vïnt a la guene. Sur laquelle propofition fut réfolu par le tiersétat, qu'il en feroit délibéré en Paflemblée, Sc de route la difcipline militaire, après avoir parachevé le chapitre de la juftice j Sc pour  138 E t a t4 faire entendre ladite réfolution a la nobleffê; furent députés le Préfident de Tours Sc quelques autres, &c fut continuée la compilation du cahier général. Ce jour même tous les députés de Bourgogne des trois états furent mandés au cabinet du roi après diner , & en préfence du duc du Maine, gouverneur dudit pays, le roi leur expofa qu'ii étoit befoin d'avifer les moyens d'exécuter ce qui feroit par lui arrêté a la requête des états, füt-ce par affociation ou autrement, les priant d'y faire leur devoir, & que le plutot étoit ie meiüeur, Sc qae ledit feigneur duc leur feroit entendre le furplus de fon intention, Sc cela fait tous lefdits députés étant fortis accompagnerent le duc du Maine en fa chambre , qui leur déclara le fujet de ladite alfociation, qu'il difoit être dreflée pour Ia manurention de la religion, défenfe de 1'état, du roi, Sc confervation du peuple, Sc pour faire enrretenir ce qui feroit arrêté aux états , les exhortant a renir la main que ladite affociation fut accelérée en la plus grande diligence que faire fe pourroit, par ceux qui les avoient députés. Et d'autant que ledit feigneur duc n'avoit ladite affociation, il donna heure au lendemain pour la leur communiquer, con-  sous Henui III. tinua'nt toujours lefdits députés a leurs cahiers généraux, autant l'églife que la nebleffe Sc tiers-état, comme ils faifoient toujours fans inrermiiïion , s'ils n'étoient interrompus paE lavenue de 1'un des états, ou députés d'icelui, pour faire quelque remontrance a 1'autre état, ou de la part du roi. Le neuf dudit mois, le préfident de Tours fit fon rapport a PafTemblée, de ce qu'il avoit négocié avec la noblefle, fur le fait de la gendarmerie , comme il a été dit ci-deflus, Sc dit que la noblefle lui avoit dit, que le tieis-état ne devoit aucunement refufer a fe joindre a une chofe fi utile Sc néceffaire, mais on s'arrêta a la première réfolution ja prife. Ce même jour , des Avenelles , député du tiers-état de Valois, récira aufli a 1'affemblée ce qu'il avoit entendu avec les autres députés des trois états, pour le fait des finances qui fe traitoit en une chambre féparée, oü le premier préfident de la chambre des comptes avoit communiqué avec lefdits députés, Sc remontra ledir député de Valois, qu'on avoit vu que plufieurs rentes couroient fur le roi, qui étoient confiituées pour dettes non dues, Sc plufieurs autres abus commis aux finances. £t fur ce le tout mis en délibération, fut  *4» E T A T S arrêté qu'on fe joindroit avec les états de l'églife & de la nobleife , pour fupplier le roi , s'il étoit befoin de procéder par arrêt & faifie de fes deniers, qu'on.ne touchat aux deniers deftinés pour le paiement des rentes par lui conftituies , & pour les gages de fes officiers, & qu'il ne feroit a préfent touché au réglement de Ia gendarmerie; & fut de rechef député le préfident de Tours & autres , par devers lefdits états, pour leur faire favoir ladite réfolution , & les inviter a contribuer de leur cóté au fair de la guerre qui fe préparoit. Lefdits dép rtés du tiers-état & les députés au fait des finances furent chargés de donner avis aux d putés des autres états, que recherche füt faire des rentes mal conftituées, & fur le roi, qui fe trouveroieut ufuraires , ou pour dettes non dues , & n'étant entrees aux coffres du roi, les contrats qui en avoient été paffes, annullés , & les arrérages qai en avoient été payés, comptés aa fort principal, fi aucun fort y avoit eu. Ce même jour le duc du Maine communiqua aux députés de Bourgogne la r'orme d'affbciation, pour extirper la religion prétendue réformée , enfembie un mémoire contenant quelques moyens pour l'inftruóbion de la guerre , & du tout fut faite ledture, après laqaèÜe fut  sous Hénri III. 141; fut avifé qu'il feroit délibéré féparément pat chacun état dudit gouvernement , de la réponfe qu'on feroir audit feigneur duc , pour s'en réfoudre rous lefdits rrois états enlemble, en l'églife Saint-Sauveur, heure de midi. Le roi fit auffi appellet particulierement plufieurs députés pour le fait de ladite affociation, qu'il envoya aux gouverneurs des provinces , pour la faire figner aux gentilshommes & villes ^ chacun en fon reflbrt, ce que plufieurs firent, les autres différerent, les autres refuferent, comme la ville d'Amiens, qui envoya députés expres pour le faire trouver bon au roi. Et d'autant qu'on doutoit que les villes de Guyenne qui étoient encore en 1'obéifTance du roi, fuffent prifes, ou qu'elle fe révoltaflent, on envoya garnifon en plufieurs, qui en partie les recurent, en partie les refuferent. Le jeudi 10 dudit mois au matin comparurent en 1 aflemblée du tiers-état qui continuoit toujours a la compilation du cahier , quelques députés de Ia noblefle, laquelle avertie par le préfident de Tours , de la réfolution du tiersétat, fur le réglement de la gendarmerie, envoya lefdits députés pour faire trouver bon 1'arrêt des deniers de la taille Sc du taillon, comme dit eft , Sc de fe joindre ai la fupplication de Tornt XIII. Q  axl Etatj ladite noblefle , qu'elle avoit délibéré faire att roi. La matiere derechef mife en délibération , fut réfolu abfölumenr que ledit tiers-état n'adhéreroit aucunement a ladite requête , Sc s'il s'en faifoir pourfuite par la noblefle , que le tiers état s'y oppoferoit, Sc qu'a cette fin on en dreiferoit requête par écrit pour préfenter au roi ; & d'autant que ladite noblefle faifoit 'bouciier du clergé, avec lequel elle difoit être d'accord dudit arrêr des deniers, fur arrêté que ledit préfident de Tours & autres députés de chacun gouvernement, fe tranfporteroient par devers le clergé , pour leur faire enrendre les raifons du tiers-état, & les divertir de 1'intcntion de la noblefle , pour 1'intérêt que ledit 'clergé y avoit , étant chofe affez claire que la noblefle ne rendoit a autre fin qua fe décharger de tous les frais de la guerre qu'ils éroient tenus de faire, ayant tous les fiefs, prérogatives de noblefle , privileges & exemptions pour faire la guerre. Le vendredi onze dudit mois , 1'affemblée des états continuant chacun en fa falie £ la compilation de fon cahier, comparut le feigneur de Villequier, envoyé de par le roi aux falies defdits trois états , & fit entendre audit tiers-état, que le roi trouvoit étrange que l'on  S O V S 'H E K R I IIL »43 s'occupoit feulement a des difputes frivoles 8c inutiles , & qu'on -ne touchait point au principal , qui étoit de faire fonds audit'feigneur pour fubvenir a fes urgentes affaires, exhortant qu'on eüt k y pourvoir & donner ordre. Il déclara aufli qu'il avoit charge du roi de faire défenfe expreffè a tous les députés de .ne partir de Blois que leurs cahiers ne fuflent arrêtés, & qu'il n'y fut donné réfolution , linon que par le roi ils fuflent licenciés. ■ Ce même jour comparut 1'archevêque d'Embrun , envoyé par le clergé , avec quelques autres préiats qui récita ce que l'ordre eccléfiaftique , 8c de la noblefle avoient accordé, d'aflembleo les dépütés envoyés au fait des finances, en la maifon du doyen de faint Sauveur , & que le tiers-état y fir comparoir les douze qu'ils avoient députés, qu'a cet effet fe pourroit expofer le différend qui était entr'eux & la noblefle, pour le fait de la faifie & arrêt des deniers des tailles & du taillon qu'on vouloit faire, & qu'on aviferoit quel fond on pourroit faire au roi pour fubvenir aux affaires qui fe préfentoient. Surquoi fut arrêré que les députés aux finances s'y trouveroient & rapporteroient le tout a 1'aflemblée, fans réfoudre aucune chofe , jufques £ ce qu'ils eufient avis Q *  144 Et at s de 1'affemblée du tiers-état, quicependant continuoit toujours a la compilation du cahier général , difputant avec bonnes & vivcs raifons les articles dudir cahier. Ce même jour, de relevée , fut réfols par tous les députés des états de Bourgogne , affemblés £ faint Sauveur , que l'on n'entreroit en 1'atfociation fufdite, que premierement les états de Bourgogne n'en fuffent avertis, 8c au même inftant la réfolution fut rapporrée au duc du Mair.e , gouverneur de Bourgogne, qui dit qu'il le feroit entendre au roi. Ce même jour , Bigot , avocat du roi au parlement de Rouen , député avec les autres au fait des finances pour le tiers étar , qui avoit été i la conférence faite avec les autres^ députés, fit tapport de ce qui avoit été traité, mèmement que perfonne defdits députés n'avoit .fait aucune ouverture des moyens pour fubvenir aux affaires du roi; tellement que ladite conférence avoit été remife au dimanche enfuivant, heure de midi. Le famedi matin, douze dudit mois, fur l'avertiffemsnt qui fut donné par le procureur général en 1'afTemblée du tiers-état, que le roi lui avoit commandé de dire aux députés defdits états, qu'ils envoyaffent aucuns d'entt'eux vets  SOUS H E N R. I III. M$ fa majefté, pour entendre, aucunes chofes qu'il avoit a leur dire pour fon fervice; & a lïnftant quelques-uns députés des trois états, s'étant tranfportés vers fa majefté, rapporterent tantót après, que Poccafion pour laquelle il les avoit mandés, étoit pour leur commander qu'ils exnédiaffent leurs cahiers en toute diligence , & que fon intention étoit de donner audience & que les harangues fuflent faites devanr lui, le jeudi enfuivant, quoi que lefdits cahiers ne fuffent expédiés ; paree qu'il vouloit que le fwjet des commiflions qu'il avoit décerné ci-après , fut pris fur ce qui lui feroit propofé par lefdires harangues. Leur avoit aufli commandé qu'ils avifaflént quels moyens il y auroit de le fecourir en fes affaires, & fur ce que 1'archevêque de Lyon (qui étoit pour le clergé ) l'ayant fupplié de leur faire lui - même la première ouverture de quelques moyens, il avoit préfenté un mémoire contenant plufieurs moyens pour lui faire fonds a ces finances, & d'icelui fait expédier trois copies pour les trois états. fur lequel rapport fut arrêté que les députés pour les finances fe trouveroient en la conférence qui avoit cté continuée au dimanche enfuivant, & après avoir receuillice qui feroit propofé en icelle con-  14^ E T A T S férence par Ie clergé &C la noblefle , en feroient rapport au lundi pour en délibérer. Ce jour même de relevée , le préfident du tiers-état fir une nouvelle recharge, pour avifer aux moyens de fecourir le roi, fur quoi après avoir délibéré, fut le tout remis au lundi enfuivant-, après avoir ouï les députés aux finances } fur la conférence qu'ils devoienr faire. Le lundi quatorze dudit mois , 1'avocat Bir got, député de Rouen, & Ie préfident deTours>, qui le dimanche s'étoient trouvés en Ia conférence avec les autres députés du clergé & de Ia nobleffe , pour le fait des finances , rapporrerenr que le mérnoire contenant les moyens Sc ouvertures qu'il y avoit pour faire fonds au roi, que ie roi même avoit prcfenri >aux députés , avoir été lu , Sc icelui mis en délibéra;ion par les députés du clergé & de la nobleffe, Sc ncn "par ceux du tiers-état qui n'avoient pas charge d'opiner, attendu la défenfe que Ie tiers-état leuren avoit faite, ains feulement de faire leur rapport de ce qu'ils entendroient. Ce qui avoit donné quelque mécontentement audit clergé & a la nobleffe, difant que le tiers-état les fervoit a couvert. La chofe mife en délibération-,  sovs Henri III. M7 le tiers-état s'arrêca de fe tenir aux premières réfolutions, fe défiant aucunement des deux états, qui ne faifoient rien que pour fe décharger fur le tiers-état. Ce jour même le duc du Maine ayant communiqué avec les députés des trois états de Bourgogne, leur fit entendre que la volonté du roi étoit pour 1'avancement de 1'affociation; qu'un député de chacun bailliage dudit pays de Bourgogne fe tranfportat audit pays, pour faire entendre 1'intention dudit feigneur , aha que perfonne ne fit difficulté d'entrer en ladire affociation , &C que commiffion feroit dépêchée pour afiembler les états dudit pays, oü ledit feigneur ne faudroit fe trouver. Ce jour même de relevée , les députés du tiers-état du Dauphiné, firent entendre a 1'affemblée dudit tiers état les pttfes des villes tl places fortes occupées par ceux de la religion, & les calamités dudit pays , exhortant ladite aflemblée d'avifer les moyens de fauver ledit pays , autrement prorefterent qu'ils n'aflifteroient a. la cloture du cahier. Les mêmes remontrances furent faites par les députés de Guyenne» & du Languedoc, fans toutesfois protefter. Le mardi quinze dudit mois, Verforis, orateur élu pour le tiers - état , récita a 1'affemblée les Q4  E T A T S points principaux de la harangue qu'il devoir faire le jeudi enfuivant devant le roi, en I'affemblée générale de tous les étars. Après 1'avoir oiii, chacun gouvernement délibéra a part, ( comme il fe faifoient en toutes délibérations, devant que répondre chofe quelconque, s'il y avoit tant foit peu de difficulté ) & après avoir déhbéré, chacun des douze députés qui étoient élus de chacun gouvernement, pour dire ('opinion du gouvernement, remercierent ledit Verforis de la bonne volonté qn'il avoit a exécuter la charge d'orateur, hormis les députés du Dauphiné, qui dirent qu'on le remercieroit après qu'il auroit fait fa charge. Et fut arrêté qu'il ajouteroit quatre points a fa harangue : le premier , que la réanion de tous les fujets du toi a une religion catholique romaine qu'on demandoit au roi, s'etitendoit par doux moyens & fans guerre, & de fupplier fa majefté de maintenir fon peuple en paix, & réunir fes princes les uns avec les autres, & lui repréfenter les calamités & miferes qui accompagnoient les guerres civiles; & lui fut répéré qu'il n'oubliat ces mots fans gueire , & de tendre a la paix en toutes fortes. Le fecond point, qu'en parlant des éleétions des archevêchés, évêchés, abbayes & autres  sous Henri III. bénéfices confiftoriaux, qui fe feroienc ci-aptès, comme il avoit été réfolu par l'aflemblée du tiers-érat, qu'il en parlat précifément, fans rien remettre a la volonté du roi, comme il avoit rapporté qu'il diroit par fa harangue. Le tiers point, qu'il touchat au vif l'adminiftration mauvaife faite par ci-devant au fait des finances du roi, Sc qu'il s'en fit recherche; Sc s'il faifoit quelques offres au nom du tiersétat , qu'elles fuflent générales Sc non particulieres. Le deraier point qu'il touchat le fait des étrangers, comme il étoit arrêté au cahier général. Ce jour même le préfident de Tours fit quelque récit de ce qu'il avoir entendu en la conférence des finances ; fur quoi fut délibéré Sc arrêté qu'on fe tiendroit aux premières réfolutions, Sc qu'on ne feroit aucune ouverture de nouveaux fubfides ou moyens, finon de ceux qui feroient portés par les cahiers. Le mercredi marin feize dudit mois, Ie comte de Suze fut euvoyé de par le roi en 1'affemblée du tiers-état, après avoir été aux autres affemblées, & fit entendre Ie mécontenrement que fa majefté avoit de la longueur de laquelle les états procédoient a la réduétion de leurs cahiers j auffi qu'il étoit aveni qu'il y en  IjO E T A T S avoit quelques-uns qai s'efforcoient de détourner les bonnes volontés des autres, difant que leurs charges &C procurations ne portoient aucun moyen pour fecourir fa majefté aux affaires urgentes qui fe préfenroient , exhortant lefdits députés d'avancer leurs cahiers en toute diligence , ne prêter 1'oreille a ceux qui s'eftorccient de dérourner leurs bonnes volontés, & de voit les procurations qu'ils avoient, pour connoitre fi elles n'aidoient a la néceffité des affaires du roi, mèmernent pour la guerre qui fe p:éfentoir, de laquelle les pays qui avoient envoyc les députés, devoient être affez certain, puifqu'ils leur avoient donné charge de demander une feule religion catholique. A quoi fut fait réponfe fur le champ par Ie préfident de Bordeaux , nommé Hémart, fans charge de la compagnie, & outre fon ordre qui étoit le quatrieme, k favoir , qu'en ne demandoit pas la guerre, en demandant une religion carholique romaine , ce qui fe pouvoit faire par conciles, par réformation des abus, & au furplus qu'ils aviferoient tous les moyens de fubvenir a fa majefté. Ce jour même de relevée, aucuns des députés du clergé & de la nobleffe comparurent en 1'affemblée du t iers-_c:at, fe plaignant par Ia voix de  sous Henri Ilï. 1 évêque de Bazas , que les députés du tiers-état ne s'éteient ce jour la ni le précédent trouvés a la conférence des finances , ainfi qu'ils avoient promis , pour trouver les moyens de fecourir le roi en fes affaires; auxquels fut donné quelque légere excufe, & après leur retraite fut arrêté qu'il feroit délibéré fur lefdits moyens le vendredi enfuivant, pour après en avertir le clergé Sc la nobleffe; Sc cependant le préfident de Tours fut député avec autres pour leur faire plus amples excufes. Le jeudi dix-fepr dudit mois , le roi féant en la grande falie des trois états, au même ordre que dit a été ci-deffus, & en affembiée plus grande & plus preffée , y étant en outre le duc de Guife entre le duc de Mercceur Sc de Nevers, Sc le duc du Maine , grand chambellan , au premier dégré de l'échafFaud des princes devant le roi, après que le chancelier eut eu 1'avis du roi, fut commandé par un héraut a. 1'archevêque de Lyon , orateur du clergé. Lors fe mettant a un pulpirre a genoux devant le roi, après avoir dit une claufe de fa harangue , on lui dit qu'il fe levat, comme il fit, Sc dura fa harangue cinq quarts d'heure. Puis le baron de Senecey paria pont la nobleffe demi-quart d'heure; Sc Verforis  l^X E T A T S paria une heure Sc demi, Sc fut a genoux en parlant prés d'une demie-heure , jufqu'a ce que le héraut lui dit qu'il fe levar par commandement du roi, & tous les députés fe leverent, & fe découvrirent quand 1'orateur du clergé commenca de parler; & tót après on leur dit qu'ils euffent a s'afTeoir. Autant en firent-ils quand 1'orateur de la noblelTe commenca a parler; mais quant au tiers état, il demeura toujours debour & tête nue dutant que 1'orateur du tiers-état paria comme il leur avoit été enjoint en entrant en la falie, combien que plufieurs députés du tiers-état, s'aflirent & fe couvrirent, voyant que le clergé & la nobleffe étoient affis Sc couverts, & n'ayant entendu le commandement de fe tenir debout ni découverts; & depuis ils entendirent que le tiersétat aux états d'Orléans avoit été autant privilégié que les autres , Sc que 1'orateur paria debout. Et d'autant que les harangues font publiques, il n'en fera fait ici aucun récit. L'orateur du clergé emporta 1'honneur de bien dire; l'orateur du tiers-état ne repondir pas a Pefpérance qu'on avoit de lui, Sc plufieurs fe plaignoient fort qu'il avoit omis les rrois points principaux dont on 1'avoir chargé trcs-exprcfTement deux jours devant fa harangue.  tous Henri III. 153 La réponfe du roi fut brieve, c'eft a favoir qa'il avoit agréable la déclaration faite par les députés, de 1'affedion qu'ils avoient a 1'honneur de Dieu, de fon églife Sc de fon fervice; (car les trois orateurs, d'un commun confentement, avoient requis &c fupplié le roi très-inftamment, qu'il voulut réunir tous fes fujets - la religion catholique Sc romaine) Sc que les cahiers des trois états mis en fes mains, il pourvoiroit a leurs plaintes Sc doléances par les meilleurs moyens qu'il aviferoit ; Sc cependant il fit défenfe a tous les députés , de ne partir qu'il n'eüt mis une conclufion a fes états, afin que chacun defdits députés en rapportat a ceux de fa province un tel effet qu'il pouvoit efpérer. Le vendredi matin dix-huit dudit mok, les députés du tiers-état s'afTemblerent pour continuet la compilation de leur cahier, a quoi tout le jour fut employé. Ce jout même le préfident du tiers-érat, en qualité de prévót des marchands de la ville de Paris, requit en 1'afTemblée qu'il fut permis a ladite ville de Paris , d'avoir juge Sc confuls ; nonobftant la réfolution prife par Paflemblée pour la fuppreflion d'iceux; & oü il feroit débouté qu'on lui oétroyat afte, a quoi fe joignirent quelques autres députés , pour leurs villes ,  a54 Etat» comme Troies, Orléans, Auxerre; de laquelle requête ils furent déboutés, & FacFe délivré. I Ce jour même, le préfident Hémart, de Bordeaux, préfenta quelques articles, concernanc j la généraüté des états, & moyens de fubvenir au roi, qu'il dit lui avoit été baiilés par ceux du clergé, pour en délibérer par le tiers-état; fur I quoi fut avifé que le cahier feroit achevé, ce fait qu'on délibéreroit fur lefdits atticles. Futent auffi nommés douze perfonnes , un de chacun gouvernement qui étoient les plus anciens ou premiers de chacun gouvernement, pout revoir le cahier général & ie remettre au net; & fat arrêté que ies fept élus en 1'abfence des autres , pourroient befogner & paffe r outre. Et ce jour la Bodin , député, préfida en 1'abfence du préfident, qui n'y fut point de relevée, ni les députés de Paris, Le fanicdi matin , dix-neuf dudit mois, fut commencé a la révifion du cahier général par les douze députés, & arrêté que tous les autres s'alfembleroient pour délibérer fur les articles baiilés par le clergé au préfident Hémart, pour le fait des finances , & qu a cette fin les députés de chacun gouvernement iroient ès maifons particuüeres des plus anciens dépurés, oü les cahiers parriculiers auroient été compi-  sous Henri III. 155 Iés,& le jour fuivant de relevée que 1'aïïemblée générale du tiers - état fe fetoit pour y donner réfolution. Le dimanche vingt dudit mois, en 1'afTemblée générale du tiers-état tenue de relevée, les articles généraux furent réfolus , Sc ourre fut arrêté qu'il ne fe feroir aucun cahier commun des points & articles dont les trois états étoient d'accord , Sc que chacun defdirs érats préfenteroit fon cahier féparément; furent femblableraent propofés , par les dépurés de 1'Ifle-deFrance, quelques moyens pour acquitter le roi, 6c fur iceux délibérer , Sc la délibération continuée au lendemain, Sc le préfident de Tours, député pour communiquer iceux moyens au tlergé & a la noblefle, pendant que les douze dépurés befognoient a la révifion du cahier. Le mardi vingt-deux dudit mois, fut Iue par le préfident du tiers-état en 1'afTemblée, une lettre qui lui avoit été écrite par le général Ménager, qui étoit 1'un des députés qui alloit trouver le roi de Navarre, en date du onzieme dudit mois, par laquelle il lui mandoit que 1'archevêque de Vienne fon collégue en la même légation , lui avoit communiqué fon pouvoir qui porroit une claufe générale d'ajouter aux 'inftruétions qu'il avoit , ou d'en changer Sc  1<^6 E T A T S diminuer felon qu'il connoitroit être befoin J Sc qu'il eür été befoin que ledit Ménager eut eu femblable procuration y fur quoi il fut arrêté qu'il ne feroit rien ajouté au pouvoir dudit Ménager. Ce jour même de relevée, Bodin , député de Vermandois , préfident en 1'abfence des députés de Paris, comme premier dépuré de 1'Iflede-France après eux, fir délibérer fur quelques moyens concernanr le ménage du domaine du roi , mêmement fur la faifie Sc revenu d'icelui, après que Bigor , député de Rouen , eut rappotté quelques articles qu'il avoit appris en conféranr avec le clergé, avec lequel avoit été lors dépuré ledir Bodin , pour conférer avec les députés de l'églife, entre lefquels étoit 1'archevêque de Lyon, préfident, qui montra que le roi pouvoit tirer plus de fept millions de rentes mal conftituées , Sc qui couroient fur lui. Le mercredi vingt trois dudit mois, le roi manda en fon cabinet aucun des députés du tiers-état; a favoir , un de chacun gouvernement, Sc auxquels il fit entendre la néceflité de fes affaires ; Sc qu'il éroit befoin de faire fonds, tant pour le préfent que pour Pavenir; mêmement leur déclara qu'on lui avoit donné averciffëment  sous Hew'-rï UI. avertiffement d'une invention qui ferviroic pou£ faire fonds , au fouiagemenc de fon peuple, &defiroit quelle fut goutée par fes états, pour fur icelle donner avis; & a 1'inlbtóit fit entrer meffieurs Jouliet, de Chatiilon, le chevalier Foncet, & un nommé la Borde , aai recitetenc ladite invention, qui éïoir en fotrirnfi, que pour rou» fubfides, aides & gabelles qui demeureroienr abolis , feróit accordé au roi un oótroi de quinze millions, qui fe payeroit par feux , le plus haut ne portant que cinquante livres, & le plus petit que douze deniers , & promirent de faire quelques projets, Sc en donner auxdits députés. Le jeudi vingt-quatre dudit mois, fut affëmblé le tiers - état , a la même fin que le roi avoit mandé les douze députés, qui étoit pour avifer quels moyens il y avoit pour lui faire fonds, tant pour le préfent que pour 1'avenir, Sc comme le préfident da tiers-état mettoit en avanc qaelques moyens pour acquitcer le roi , furvnit ledst Chatiilon, qui dit qu'il avoit commandement du roi de parler feulement aux douze députés, anxquels fa majefté avoir ja parlé, afin de faciüter les moyens pour faire fonds aux finances dn roi & foulager le peuple. Ledit Chatiilon fut- prié de dire les moyens en Tome XIII,  1)8 E T A T S pleine aflemblée, donc il s'excufa, & néanmoins préfenta le projer Sc figure de ce qu'il entendoit faire, concenu en trois feuillets de papier, dont chacun prit copie pour y donner avis Sc en réfoudre quelque chofe, pendant que les douze autres députés a recourir le cahier général, hatoient la befogne de leur part Sc en chambre féparée. Ce jour même comparurent en ladite affemblée du fiers état quelques députés du clergé & de la noblefle, & par ia bouche de 1'archevêque d'Embrun firent entendre qu'ils étoient d'accord entr'eux , de préfenter la requête au roi, pour fupplier fa majefté de révoquer plufieurs offices par lui nouvellemant érigés, Sc pendant ia féance des états, & contre la réfolution defdits états , comme étoient les greffes des tailles, & les offices des regrateurs & vendeurs de fel, invitant ceux du tiers-état a foufcrire avec eux ladite requête, ce qui fut accotdé, Sc ladite requête fignée par le fecrétaire du tiers - état. Fut aufli mife fur une autre requête , pour fupplier fa majefté de caffer tous confeillers de fon confeil privé, qui étoient en nombre effréné, & y en établir de nouveaux , jufqu'au nombre de dix-h.uk ou vingt-quatre ijien zéjés Sc affcéiionnés a fon fervice, pouc  sous Henri III. 2^ par 1'avis d'iceux & d'aucuns députés jufqu'apareil nombre , donner réglement fur les remontrances defdits députés. Entrerent pareillement en conférence des moyens pour fubvenir au roi a fa n< ceffité pré» fente, & lui faire fonds en fes finances , &c furent d'une part & d'autre propofé quelques expédiens , & fur ce que dit eft, après fa retraite dudit clergé & de la nobleffe , fut réfolu que le roi feroit fupplié de réduire fon confeil privé au nombre de vingt-quatre, non compris les princes; auffi qu'il lui feroit donné avis de lever par forme d'emprunt telle forome qu'il feroit avifé par les états, fur fes financiers , comme tréforiers & receveurs généraux &c particufiers, fermiers de fon domaine , aides &c gabelles , &c de ceux qui avoient fait pVti avec lui, comme ceux qui avoient Ia douane, fes parties cafuelles fc autres femblables. Le famedi matin vingt-fix dudit mois de janvier, comparut en ratfemblée du tiers-état un dodeur-régent de Poitiers , qui préfenta un cahier au nom de Puniverfité , touchant la réformation des univerfités de ce royaume cV pria Paflemblée qu'il ffit Iu, & déliberé'fur icelui, ce qui fut fait. Le jour même comparut ledit Chatiilon, le R a  i6o E T A T s chevalier Poncet, Sc de la Borde, en ladire aflemblée , qui firent une. ample explication des profits prétendus, 5c revenans au peuple, par 1'introdudion de 1'odroi des quinze millions, par ledures des trois tables , Sc démonftrations telles quelles par eux fur ce faites , Sc la réponfe aux objedions; fur quoi fut arrêté qu'il en feroit délibéré en chacun gouvernement a part , le tout rapporté 4 Paflemblée, pour ce fait en faire réponfe au roi. Ce jour même Paflemblée fut convoquée après diner par commandement du roi, pour cuïr ce qu'il avoit a propofer audit tiers-état par la bcuche de fon chancelier, qui dit que le roi 1'avoit envoyé pour dire a Paflemblée qu'ells avifat les moyens de faire fonds aux finances du, roi, felon l'intention propofée par lefdits Chatiilon, Poncet, Sc la Borde, & a lui fournir en derniers comptant deux millions pour fournir aux frais de la guerre qui fe préfentoit; avec lequel chancelier étoient , le cardinal de Bourbon , le duc de Nevers & de Morvillier , Sc fit ledit cardinal une harangue en peu de paroles , par laquelle il exhortoit 1'affemblée a vivre en union de la religion catholique SC romaine , Sc a perfévérer en 1'obéiflance Sc fidélité que chacun devoit a fon prince. Sur le tout  sous Henri III. x&t fut briévement répondu par. le préfident du tiers-état que tous les députés dudit tiers-état étoient autant affectionnés au fervice du roi, tam, en général qu'en particulier , qu'il fe pouvoit defirer; toutesfois d'autant qu'ils étoient pour des provinces qui avoient été extremement affligées par les troubles que fa majefté prendioit en bonne part, s'ils prenoient temps pour délibérer fur la propofition dudit chancelier , Sc puis lui en faire réponfe dedans le jour de mardi enfuivant. Le lundi vingt-huit dudit mois, fut délibéré fur les deux propofitions dudit chancelier, 8c rcfolu par toute 1'affemblée fur Pinvention de 1'oétroi de quinze millions, qu'il feroit remontré au roi que les députés n'avoient aucune charge de faire aucunes offres. Le mardi vingt-neuf de relevée, on commenca a relire le cahier général en pleine affemblée du tiers état, après avoir été revu Sc corrigé par les douze députés. Le mercredi trente dudit mois , 1'affemblée fut convoquée pour continuer la leclure publique dudit cahier, & de relevée recevoir monfeigneur frere du roi en ladite aflemblée , pour toucher de la partie de deux millions , & faire entendre ia néceffité du roi; mais il n'y fint ce jour la, R 3  l^l E T A T S a caufe qu'il demeura bien tard en Paflemblée de ia noblefle. Ce même jour furvint un grand trouble en 1'aflemblée dudit-tiers état, paree qu'un nommé Paris, dcóteur en médecine & député de Limoges, voulut révoquer Partiele de la religion couchée au cahier, difant qu'i icelle devoir être ajouté, que Ia réunion de Ia religion catholique & romaine , que le tiers-état demandoit, fe devoit faire par douces & faintes voies, & fans guerre; & qu'il avoit été ainfi arrêté par toute Paflemblée , que 1'orateur Verforis avoit été expreffément chargé de dire ainfi ; & fur ce que Verforis dit, qu'il 1'avoit fait, alors fe leva le premier député du Dauphiné, qui dit, qu'il étoit trop hardi de parler ainfi ; lequel député du Dauphiné fut aigrement repris par les autres députés dudit pays , &. des gouvernemens de Lyonnois Si de Guyenne. Et d'autant que le prévót des marchands mit la main fur ledit député de Limoges, difant qu'il le meneroit au roi ; le lieutenant général de Limoges 1'empêcha avec paroles hautes & piquantes, & toute Paflemblée fit un grand cri ( hormis qirelquesuns) contre le préfident & autres qui les foutenoient, qui étoient en petit nombre, en forte que le préfident fortit par 1'huis de derrière,  jovs Henri III. 165 voyant le cri fi haut & li grande émeute de Paifemblée , qu'il y avoit a craindre. Après qu'il far forti, plufieurs. propoferent qu'il falloit en élire, un 2Urre , ce qu'entendu par ledit préfident , Sc qua le bruit étoit un peu cefié, il retourna fans mot dire. Verforis dit que Tarnde de la religion avoit ainfi été arrêté comme il étoit couché ; mais on lui repliqua que toute raifembiée 1'avoit corrigé, auparavant qu'il fut mis au net ; Sc qu'auparavant fa harangue il avoit été chargé de demander la paix, Sc que la réunion de la religioa catholique fe fit fan* guerre ; comme de fait, le jour d'après fa harangue , il fut défavoné par cinq gouvernemens, p?sr défaveu exprès , ores qu'il ne füt préfent. Pour appaifer ces troubles , quelqu'un des députés s'avifa de mettre une requête en av'ant qui parloit d'autre chofe , en forte que Partiele de la religion demeura fans être coerigé. Le jeudi dernier jout de janvier, en 1'aflemblée du tiers-état, fut réfolu, que fi monfeignenr frere du roi venoit en Paflemblée pour demander les deux millions, on lui feroit réponfe , que les commiflions que le roi avoit envoyées par. las provinces pour aficmbles fes états j étoient a deux. fins, 1'une, pour lui laire. R 4  E T A T S les plaïntes & doléances qu'ils aviferoient, & 1'autre pour regarder les moyens d'acquitter ie roi, fans qu'il fut rien parlé de deux millions, tellëmèfct que lefdites provinces n'avoienr donné charge a leurs députés de faire aucunes offres. Par quoi feroit fa majefté fuppliée de prendre en bonne part, s'ils ne lui pouvoient oétroyer le fecours qu'il demandoitj'penfoient bien néanmoins que lefdites provinces étant averties de fon intention feroient tout devoir de Ie fecourir, c i me elles avoient toujours fait en fes uéceffïtés. Ce jour même de relevée , monfeigneur fre.re du roi vim en ladite alfemblée du tiersétat , accompagné des ducs du Maine, de Nevers,Sc de Mor villier, par ia voix duquel il expofa fa charge, rouchant les de^x millions , & de Péétroi de quinze millions, faifant entendre cómbiea Pun Sc Faucre importoit a fa majefté. La réponfe fut faite par le préfident du tiersera», p, tant Fa parole, qui fupolia monlieur i i ' rmetirequ* ladite délibération fut lue par té greffier qui Pavoit émoloc.uée ; ce que mon"fieur ne voulut , étant comme on prcfumoic, ji a erti de ladite déh! éiacion; raais il exhorra IXilen'blèe de délibérer derechef fur ce qu'il  sous Henri III. 2651 avoit propofé, & de faire en forte que Pintenrton du roi fon frere fut fuivie; ce qui fut mis éncore en délibération, ledit feigneur s'étant retiré ; & la réfolution fut fuivant ce qui avoit été arrêté. pour le regard das deux millions , & de Pintention de Poétroi nouveau, & arrêté que ledit préfident le feroit entendte a fadite Majefté. Février 1577. Le vendredi premier de février, comparurent deux gentilshommes, envoyés par la noblefle , qui remontrerent qu'étant avertis de nouveau , qu'en la ville de Paris plufieurs étoient prévenus d'ufures, &C qu'oli étoit après pouc obtenir don du roi des confifcations 6c amendes efquelies ils pourroient être condamnés; a cette caufe voyant la néceflité dudi'r feigneur, avoient réfolu de le fupplier de ne faire don defdites confif- ations éc amendes , ains les employer a fes affaires , & encore prendre par emprunt telles fommes qu'il connoitroit lui être nécelTaires, fur un tas d'étrangers qui avoient fait parti avec lui , &c s'étoient fait donner les principales fermes de ce royaume, plutót q«e lur fes fujets naturels , exhortanc  266 Ë T X T t ledic tiers-état d'adhérer avec eux a ladite requête , ce qui leur fut accordé. Ce jour même de relevée, le préfident du tiers-état fit relation des propos que le roi lui avoit tenus le matin , fur la réponfe qu'il lui avoit faite, fuivant 1'avis du tiers-etat, étant accompagné de douze députés de douze gouvernemens difant que Ie royaume eut un grand mécoHtentëment dudit état; en particulier des députés de 1'Isle de France, fe perfuadant qu'il y en avoit quelques-uns fufcirés par fes ennemis, qui diveniftaient les autres. Par quoi leur commanda d'avifer de rechef touchant les deux millions que fa majefté demandoit pour fix mois, & PocFroi de quinze millions fufdits , & ne chercher excufes fur leurs procurations; fur quoi fut avifé qu'on s'aftembleroit le j«ur fuivant après-midi. Et d'autant que c'étoit le jour de la purification, Paflemblée fut remife au dimanche, 6c néanmoins elle fut faite ledit jour de la purification. Le député d'Auxerre demanda au préfident, en fortant de 1'afTémblée , pourquoi le roi taxoit plutot 1'isle de France, que les autres gouvernemens 1 le préfident lui dir, qu'il n'enten* doit parler que de Bodin député de Vermans»  sous Henri III. 267 dols , qui détournoit les autres , ainfi que. ledit député d'Auxerre l'avettit , d'autant que ledit Bodin opinoit pour le bien du peuple, & les dix députés de i'Isle de France , fuivoient le pias fouvent Favis dudit député de Vermandois J enforte que le préfident du tiers état, prévót des marchands de Paris , & député d'icelle , étoit contrahit de prononcet fuivant 1'avis des députés de Plsle de France , qui étoit le premier gouvernement, lequel étoit fuivibien fouvent des autres gouvernemens. Cela fut caufe que les députés de Paris; auxquels Bodin s'ctoit toujours oppofé quand il étoit queftion du bien public , femerent plufieurs propos dudit Bodin devant le roi, & a la reine fa mere , qu'il étoit contraire au profit du roi, comme ledit Bodin fut averti de quelques-uns; & paree que ledit Bodin étoit ordinairement au diner du roi, fi la néceflïté de fa charge ne 1'empêchoit , & que le roi le faifoit parler des propos & difcours qui étoient mis fus, comme il avoit toujours fait dès le 25 «ovembre , que le roi 1'envoya querir;,& après Pavoir gratifié en préfence de plufieurs gentilshommes, lui commanda d'afiifter a fon diner , paree qu'il avoit fait trois jours auparavant confirmer la coutume de fon aïeul, &  E f A I ! oaïr difcourir a fa table de tous propos graves &7 honnêtes. Le roi ne fe put tenir de dire, -yant mal parler dudit Bodin, qu'il étoit homme de bien, dequoi jedit Bodin fut averti par 1'avocat du roi, Bigot qui étoit préfent. Depuis auffi il fut averti par plufieurs autres, que le roi avoit toujours très-mauvaife opinion de ceux qui lui rapportoient les avis de 1'aiïemblée , Sc qui par flatterie fe vouloient agrandir au dommage de ceux qui les 'avoient députés , jufques a dire qu'ils étoient perfides & déloyaux, 6c qu'il ne fe voudroit plus fier a eux. Le deux. dudit mois de février, quoiqu'il fut fête folemnelle , Sc qu'on eut remis ia délibération au lundi, néanmoins 1'aifemblée fe fit , oü de reelief on mit en déiibétation le fait des deux millions pour fix mois , oétroi de quinze milhons, oü les députés de Paris remuerent ciel %c terre pour les faire s'accorder; mais la réfolution fut'fuivie ainfi qu'il avoit été arrêté atq^aravant. La raifon étoit, que les députés de Paris craignant que pour le fait de la guerre on' artêtat les rentes de la maifon de ville» qui étoient de trois millions cent trente-deux mille livres de rente, ce qui eut caufé une fédition bien grande en ladite ville, en laquelle les députés de Paris ni les plus grands n'eufTent  «$ o v s Henri IIL 2. fon nature, é]o;gné de ^ defordres, & grandement defireux de maintemr fon peuple en bonne & loyale concorde qu, étoit le folide & principal moyen de con' ferver fa couronne. A quoi l'évêque d'Autun auroit répondu que s'il plaifoit audit feigneur prince entendre' «a charge , enfemble celle de Ia nobleffe Sc du tiers-état, il connoïtroit par bonnes & juftes raifons , fauf fon honneur Sc révérence, qu'il avoit été trés-mal informé de Ia fincérité dont 1 on avoit ufé en ladite convocation & afiemblee defdits états, Sc i lacjuei|e s>étoient les premiers perfonnages du royaume, qui y avoient apporté une grande pureté, bonne vqionte & mtégrité de confcience, dont ils avoient Tornt XIII, j  Z74 E T A T 3 üit evidente preuve, par 1'ouverture de tous bons moyens , pour affermir perpétuellement la paix en ce royaume , ou le rétablir en fa première fplendeur. Er préfentant les lettres de la part d'iceux états audit feigneur prince , le fupplierent leur vouloir donner audience , ce que ledit feigneur prince avoit refufé, Sc perfcvéré en fes premières remontrances. Toutesfois que fi ledit évêque d'Autun avoit quelque chofe a lui propofer de la parr du roi, il lui donneroit Sc aux autres telle audience qu'ils délireroienr; a quoi auroit été répondu par ledit évêque d'Autun, que lui & ceux qui Pafiifloient ne pouvoient porter parole audit fefrj gneur prince en autre qualité que de députés i du clergé, de la nobleffe & du tiers état; Sc «éanmoins voyant fes requêtes n'avoir lieu, lei fupplia avouer les humbles recommandationsi que lui faifoient- meffieurs du clergé, qui luii offroient tout honneur, refpeft Sc révérence , comme a un prince rrès-iüuftre , & qui avoit ce: honneur d'être exttait des rois de France ; comme auffi fit le femblable le feigneur de Montmorin pour la nobleffe , Sc le préfident de Polders pour le tiers-étar. Ledir feigneur, prince remercia très-humblemenr meffieurs du clergé, difant qu'il les avoit aimés Sc honJ  sovs Henri UI. rés, & qu'en cour ce qu'il lui étoit poflible , il les maintiendroit Sc conferveroit ; comme aufli meflieurs de la neblefle , étant tout difpofé a leur faire fervice ; 6c pareillement meffieurs du tiers-état, defquels il avoit grand pitié Sc commifiration pour les grands maux qui pourroient tomber fur leurs têres, & que c'étoient ceux qui fe difoient les états qui leur coupoient la gorge. Ce fait , lefdits députés faluerent derechef ledit feigneur prince, & fe retirerent. Ce difcours ainfi fait qu'il eft couché ci-deflus en 1'aflembiée du tiers-état par lefdits députés, ils furent remerciés par la compagnie, & avifé qu'il en feroit autant écritau regiftre dudit état, après qu'ils aflurerent qu'ils avoient rapporté les chofes comme elles s'étoient paflees a Ia vérité , Sc les propres dictions dont ledit feignenc prince avoit ufé. Le famedi neuvieme jour dudit mois, les cahiers des trois états furent préfentés au roi par les trente-fix députés, douze de chacun état, ce qu'on avoit voulu faire le jour précédent; mais le roi fit différer la préfentation jufques audit jour, Sc promit y faire bientot réponfe, & re^ut aufli. ladite requête touchant le confeil privé, qu'il dit lui avoir été agréable; Sc dès-lors Ie bruit S a  176' E T A T S coarut qu'il avoit licentie les feigneurs de Lenoncourt 8c de Limoges qui s'en allerent. II pria lefdits députés de ne partir que les ambaffadeurs envoyés au roi de Navarre & autres ne fuflent de retour , & que ceux qui s'en iroient feroient paroirre la mauvaife volonté qu'ils auroient a. fon fervice. Ee mardi, douze dudit mois de février, 1'archevêque d'Embrun & le feigneur de Maintenon , accompagnés d'autres députés du clergé 8c de la 'nobleffe, fe préfenterent en 1'afTemblée du tiers-état, préfidant lors en ladite affémblée Bodin, député de Vermandois, en 1'abfence du préfident & des députés de Paris. Ledit archevêque d'Embrun dir que le clergé 8c la nobleffe étoient d'accord entr'eux, pour élire douze perfonnes de chacun ordre , pour aflifter a la décifion des cahiers, 8c de fupplier le roi les recevoir , exhortant ceux du tiers-état de faire le femblable , ainfi qu'il . avoit été ja réfolu. Bodin, préfidant pour Paflemblée, les remercia forr affe&ueufemenr, de ce qu'ils s'étoient toujours montrés prêts a femondre 8t convier 1'affemblée aux chofes qu'ils jugeroient être utiles tc néceflaires •, 8c qu'en cela ceux dudit tiersétat devoient plutót prévenir; 8c combien que ce qu'ils demandoient füt ja réfolu, toutesfois  «ous Hinri II ï. 2,77 pour 1'honneur qu'on faifoic h Paflemblée, il les pria de leur donner un délai. pour en délibérer derechef, & que le jour fuivant il feroir réponfe. La chofe fut mife.en délibération le jour même de relevée, préfidant ledit Bodin, député de Vermandois , en 1'abfence dé ceux de Paris: fut réfolu que le tiers-état ne feroit éleétion de députés, pour juger Sc aflifter au jugement des cahiers, n'y conférer; & fi les autres états s'efforcoient d'en choifir & nommer quelquesüns , que le tiers-état s'y devoit oppöfer. La1 charge de póf tér la parole au clergé Sc a la nobleffe fut bailïéé audit Bodin. Le mercredi, treize dudit mois, Bodin te député étant en Paflemblée, fut prié derechef de porter la parole audit clergé & a la noblefle, touchant la réfolutisn prife le jout précédent; ce qu'il fit , acompagné du préfident de Moulins , & fix autres députés ; Sc en la falie du clergé on fit afleoir ledit Bodin , député, joignant 1'évêejue de Laon , & fes collegues après lui. Après avoir fait une préface d'honneur , il commenca fon propos par une maxime politique , qu'il n'y a rien plus dangereux en matiere d'état que de fe tenir ferme &: arrêté en fes propos, ains qu'il faut changer & s'accommoder aux plus S ,  Ï78 E T A T S faines opinions. Continuant, il dit que ceux de fon ordre'avoient requis le roi, avec les deux autres ordres, a ce qu'il plüt è fa majefté vouloir prendre du corps des états de chacun ordre, certain nombre de députés j mais que cela s'étoit fait fans avoir affez pefé la conféquence de Ia requête, qui étoit caufe que depuis ils avoient mis 1'affaire en délibération; & après avoir longuement débattu, enfin avoient réfolu de ne faire aucune éleétion des députés de leur corps, & fupplier le roi ne prendre perfonne pour afTifter au jugement ni a la conférence defdits cahiers ; d'autant que les états n'avoient pas cette puiffance, qui étoit un point peremptoire, auquel il n'y avoit point de replique, ck même qu'il n'étoit pas permis a un fimple procureur fubftituer, beaucoup moins aux députés , ayant charge publique & de telle conféquence. Et quant ores ils euffent eu puiffance de choifir èc nommer quelques perfonnes pour juger lefdirs cahiers, fi eft-ce qu'ils ne délibéroient pas le faire, attendu le préjudice perpétuel qu'ils feroient a s'il eft poflible. (L'archevêque de Vienne dit que les miniftres avoient fait effacer cette claufe entre-ligne^ Sc que le roi de Navarre la fit ajouter). Prie Paflemblée de fe contenter de fa réponfe ; Sc néanmoins fi elle en defire une plus araple , la prie ne rrouver mauvais, qu'en chofe de telle conférence & importance il y penfe davantage , Sc attende avis d'une aflemblée de ceux de ladite religion & carholiques unis , qui fe doit faire par commandement du roi, a Montauban, dans peu de jours. Cependant, la compagnie fe p|ut affurer qu'elle trouvera  JOVS HïNRl III. 291 le roi de Navarre toujours très-enclin & affeétionné k la paix , Sc a tout ce qui appartienc vraiment a 1'honneur de Dieu, au fervice du roi Sc repos du royaume, quand il devroit pour cet effet fe bannir volontairement, & aller pour 1'honneur Sc réputation du roi expofer fa vie hors d'icelui, avec une bonne troupe de même volonté Sc affection. Après que ledit archevêque de Vienne eut fait leóture & récit des chofes fufdites , il dit qu'il avoit fait pareil récit au roi, qui lui avoit commandé d'avertir 1'affemblée, pour entendre quelque chofe qu'il avoit a leur dire pour fon fervice." , smiii Arriva auffi fur la fin de ladite relation Ie feigneur de Bienez©n , envoyé de la part de la nobleffe, pour avertir la compagnie, que le jour du lendemain lefdits feigneurs députeroienr quelques-uns de leur ordre , pour conférer avec le clergé de ce qui étoit a faire fur la réponfe du roi de Navarre. Cela fait, le préfident du tiers-état remerciaau nom de l'affemblée lefdits ambafladeurs de 1'honneur & bon office qu'ils avoient fait a la compar gnie, Sc fut 1'affignation donnée au lendemain, pour avifer ce qu'on auroit a faire. Le famedi matin , feize dudit mois, en Ti  1?1 E T A T S 1'aflemblée du tiers-écat , actendant la venue du préfident, fut arrêcé que le roi feroit fupplié de révoquer les commiflions qu'il avoit ja fait expédier pour la taxe des députés de la nobleffe, qui fe vouloient payer fur le tiersétat, Sc aufli ordonaer, atcendanc la décifion des cahiers , que fes monnoies feroient revues en fes recettes, au prix qu'elles avoient cours en ce royaume, & que les commiflions feroient délivrées aux députés gratuitement. Ces deux derniers articles ne futent accordés. Le préfident arrivé, le fait du roi de Navarre fut mis en délibération , & a ia pluralité des voix arrêté qu'on n'y toucheroit, &: qu'on n'entreroit en conférence de cela , ni d'autres rnatieres qui fe pourroient préfenrer a 1'avenir , difant que les députés avoient fait leur charge, & qu'ils n'avoient point de puiffance après avoir préfenté leurs cahiers. Et pour faire entendre ladite réfolution au clergé Sc a la noblefle, trois furent députés. Ce jour-li, le député de Vermandois ne put aflifter a 1'affemblée pour maladie qu'il avoit. ieiioqidai Le lundi dix-huit dudit mois, les trois fufdits députés firent rapport a 1 aflcinblée de ce qu'ils avoient conféré avec les dépurés des autres états, touchant la réponfe du roi de Naf-ïb^3:■•■>! uof .idr, '.«lier* . o>  sous Henri III. varre, & qu'ils avoient pris femblable réfolution que le tiers état, Sc réfölurent d'en faire la réponfe au roi. A Pinftant 1'archevêque de Vienne , Sc Ie fieur de Rubempré , deflufdits députés des trois états , ditent a 1'aflemblée que le roi de Navarre les prioit , avant que 1'affemblée fe départit, intercéder vers le roi d'Efpagne pour lui rendre fon royaume qu'il tenoit injuftement, donc ils avoient oublié de parler, faifant lë dilcours de leur légation. Bigot, Pun des députés du tiers-état, en fit le récit a Paflemblée; & comme ils avoient, avec les députés du clergé Sc de la noblefle, fait réponfe au roi touchant le roi de Navarre , par la bouche de 1'archevêque de Lyon , & demanda congé pour tous. A quoi fa majefté auroit fait réponfe , qu'elle commenceroit a voir les cahiers qui lui avoient été mis ès mains, & y vaqueroir fans intermiflion, depuis une heure après midi jufques a trois. Cependan't defiroit bien que tous les députés demeuralfent jufques a la fin , pour remporter en leurs provinces quelques bonnes réfolutions. Et d'autant que le féjour de tous lefdits députés pourroit ètre par trop ouéreux. auxdites provinces, fe contenteroit qu'il y en eut un de chacun ordre qui afliftat k la décifion defdits cahiers, pour lui faire entendre T 1  2.Q4 E T A T S les motifs & raifons des atticles; Sc que ceuxU étant nommés, les autres s'en pourroient bien retourntr. Après avoir ouï Sc entendu cette réponfe, ks députés du clergé Sc de la noblclfc .e . etirerent, & Bigot préfenta la requère fufdite touchant les taxes Sc monnoies, que le rei bailia au chancelier , pour la voir. Ledit rapport tait par ledit Bigot, fut réfolu que 'e roi feroit fupplié de donner purement congé a tous lts depuks du tiers-état, Sc les excufer de nommer aucuns d'entr'eux pour affifter a la décifion des cahiers , fok pour y opiner ou donner raifon des articles. Pareillement de n'admettre pour cet effet aucun député des autres états, Sc néanmoins expédier lefdits cahiers , le plutót que fa commodicé le permettroit. Le préfident Hémard , avec un député de chacun gouvernement, furent nommés pour faire ladite réponfe. Fut auffi arrêté que dès ce jour aucun des députés ne pourroient faire ne requérir aucune chofe en la qualité de députés des états. Le mardi-gras, dix-neuf dudit mois, 1'affemblée 'du tiers-état fut convoquée par commaiidement du roi , pour ouïr M. de Morvilliers de la part du roi, qsi expofa a ladite affemblée comme fa majefté defiroit expédier les  sous Henri III. ic^ cahiers, & commenceroit a y vaquer le lendemain, fuivant fa promeffe. Et afin que le voyage defdits députés ne fut infruótueux , les pria de ne partir fans fon congé expres. Après que ledit feigneur de Morvilliers fe fut retiré, il fut réfolu que la délibération du jour précédent tiendroit, Sc douze furent députés pour en avenir le roi , & demander inftamment congé pour le tiers - état, pour beaucoup de raifons que propofa le préfident Hémard, fuppliant fa majefté vouloir excufer. lefdits du tiers-état, de nommer ou fóuffrir nommer aucuns des députés pour la décifion defdits cahiers; remettant le tout a fa difcrétion & prudence, & de prendre k fon confeil ceux qu'il fauroit bien choifir. Le roi dit qu'il leur feroit réponfe le lendemain une heure après midi, & que les députés qui s'étoient retirés fans congé avoient fait une grande faute, laquelle i! leur pourroit bien faire fentir en leurs provinces, Le mercredi vingt dudit mois, compartirent en la falie, prés du cabinet du roi , les députés du tiers-érat, ou la plus grande partie d'iceux. Li le roi, affifté de la reine fa rnere Sc de la reine fa femme, des cardinaux de Bourbon , de Guife, & d'Eft, des ducs du Maine 6c de Nevers, & T 4  a95 E T A T S autres feigneurs, pour répondre aux requêtes faites a fa majefté le jour précédent, par lefdits députés, afin d'être licenciés , dit qu'il avoit propofé voir & décider les cahiers qui lui avoient été préfentés, & qu'il défiroit, en fuivant une requête qui autrefois lui avoit été faite au nom de tous les députés, .que certains députés aflif. tafl] pt, Sc fuflent préfens a la décifion defdits cahier*, pour Pinftruire des raifons qui les avoient mus a toucher lefdits articles en leurs cahiers, voulanr bien de tant gratifier lefdits dépurés-, encore que cette coutume n'eut été pratiquée aux états tenus par fes prédécefleurs rois. Et d'autant que ies députés envoyés par les états au maréchal Dampville nétoiein de retour, par lefquels il auroit fait promettre audit maréchal, Sc autres de fon parti, toutes les füretés néceffaircs,JaiiL-5as.)qu'il fe rangeat fous 1'obéiffance du roi, il feroit peut-être néceflaire d'effettuer lefdites füretés; joint aufli que le prince de Montpenfier devoit venir dans quatre ou cinq jo,,is,qui pourroit apporter quelques nouvelles fat lefqueJies il auroit meftier de leur confeil avis. Et fi tant étoit que Dieu permït que ce royaume retombac en quelques. troubles, qu'il faudroit par néceffité qu'ils avifalfenc queis moyens il y auroit pour Ie fecourir; s'affurant >'* • t ï»ü39» A .< r.ixwij 6i>üpno:>ivu'  sous H e n R i 111. 2.97 que la noblefle ne lui manqueroit de fecours , tel qu'elle avoir toujours donnéa fes prcdeceffeurs rois. Qu'il fe fioit bien aufli que le clergé Sc les trois états feroient leur devoir, comme ils avoient accoutumé de tout tems. Que de fa part fi étoit réfolu de vendre des biens de fon domaine pour trois eens mille livres de rente a perpétuité; ce qu'il defiroit être fait par 1'avis defdits députés, auxquels pour cet effet il ordonnoit s'afTembler ; & oü il penferoit que le féjour de fi peu de jours feroit a la foule des provinces , leur permettoit d'en nommer fix ou douze de chacun ordre, qui repréfenteroient le corps des érats. Le jeudi vingt-un dudit mois, les trois états fe raffemblerent chacun a part , pour délibérer fur la propofition du roi, qui conrenoit quatre chefs. Le premier, de demeurer attendant la réfolution des cahiers ; le fecond, de lui nommer aucuns pour aflifter a ladite réfolution; le tiers, de le fecourir; le dernier , de lui donder avis fur 1'atiénation de fon domaine. Ei fut réfolu par le tiers-état , après avoir délibéré fur le tout, de ne confentir 1'aliénation du domaine a perpetuité, pour le tout ni en partie, & de ne confentir que aucuns des députés afliftafTenc a la décifion des cahiers , & de ne faire offres quelconques touchant le fecours que ie roi dz°  1$S E T A T S mandoit, faute de puiffance; Sc néanmoins qu'on attendroit le retour des ambaffadeurs envoyés par les états & par le roi au maréchal de Dampville Sc au roi de Navarre, Sc que ladite réfolution feroit communiquée au clergé & a la nobleffe, pour après la faire enrendre au roi par cercains députés de chacun gouvernement. Le vendredi vingt-deuxieme jour dudit mois de février , les fufdits députés ayant communiqué avec ie clergé & la nobleffe, différerent de rendre réponfe au roi, ayant entendu que ladite aliénation du domaine a perpétuité étoit néceffaire, du moins pour trois eens mille Ijv. Pendant qu'on délibéroit furvint un gencühomme de la part du roi, qui averest le préfident Hémaft qu'on différar la délibération jufques au lendemain; que le roi avoit délibéré envoyer de fa part un gentilhomme a 1'affemblée, qui fut caufe que 1'affemblée fut rompue , avec un murmure bien grand de route 1'affemblée que ledit préfident & Bigot, avocat du roi a Rouen, étoient praciqués & corrotnpus. Et tie fat, ledi^^^pt Hémart, préfident du parlement de Bordeaux Sc maire de la ville, & dépuré pour ladite ville, en eut main-levce de fes gages arrétés, Sc douze eens livres de peituon le jour précédent, chofe qui fut aiuü-röt éventée. H,envoya  sous Henri III. *99 audit Bodin un nommé de la Riviere, fon collegue fufdit Sc député de Guyenne, pour s'enquérir fi les états pouvoient confentit 1'aliénation du dcmaine a perpétuité. Bigot en cas pareil envoya auffi le lieutenant-général de Limoges, fon ami intime, nommé du Bois, pour favoir dudit Bodin la même difficulté; lequel fit réponfe que Favis commun étoic que le roi n'étoit que fimple ufager du domaine; Sc que fa majefté entrctér.ue, & fes officiers payés, le furplus fe de voit garder pour les affaires de la république J & quant au fonds SC propnéré dudit domaine , qu'il apparteneit au ^ peuple , SS par conféquent pourroient bien conconfentii 1'aliénation i-erp tuelle dudit domaine, ' [éi .xovincts avoient baillé prociuation exprefle i cjtié En & non autrement. Et néanmoins i ,ce le voudroient bien, fi eft-ce . •• Sfe doit pas faire pour le bien du peuple; car par ce moyen le peuple s'obhgeroit, & toute la poftéricé , anourrir & entretenir le roi & le royaume , & faifoit une ouverture inévitable £ mille impofuions , dépouiliant le roi de tout ce qu'il peut avoir pour 1'entretenement de fon état. Beaucoup moins fe doir-il faire par les états , étant plufieurs abfens?& licencics, & n'ayant aucune puifiance. Le député de Vermandois .ue pouvoit Jager que  5®® E T A T lefdits préfident & avocat duroi ignoraflent Ut loix du domaine', mais que c'étoit pour fentit *H trouvoit bon qu'il füt aliéné, ayant quelque peu de réputation de 1'aflemblée des états, pour netre point corrompu; & qu'OB avoit aufli opinion qu',1 en détourneroit plufieurs par fon avis. Or, pour le faire déloger de 1'aflemblée, ledit Bodin penfe que ledit Bigot ou autres avemroient le roi qu'il ne confentiroit jamais ladite ahénation i perpétuité; & pout y obvier, qu'il feroit bon que le roi % quejQue déck_ «non, que ledit Bodin, député de Vermandois n'étoit pas affeótionné £ fon fervice ; Sc de fait, le roi rnanda le jour même de relevée, certains députés des trois états, & leur fit entendre le mécontentement qu'il avoit d'aueuns députés qui ne vouloient confentir 1'aliénation de fon domaine , & qu'il „e pouvoie penfer que cela ne leur procédé de mauvaife affeébion a fon fervice. Bigot ( qui avoit vu ledit Bodin autrefois procureur du roi en la réformation générale des eaux Sc forêts de Normandie, Sc connoiffoit qu'il avoit mis les plus grands feigneurs du pays en procés, qui occupoient les Vorêts du roi, & le plus beau de fon domaine $ faifou grande inftance auxdits députés, que le  sous Henri III. 301 domaine fut aliéné a perpétuité, efpérant par ce moyen gagner beaueoup pour tout le pays , outre la récompenfe qu'il en efpéroit en particulier, Sc en follicitoit fort ledit Bodin. Le famedi vingt -trois dudit mois de février g' le fieur de Bellievre fe trouva parcommandement du roi en 1'aflemblée du tiers-état, qui avoit été remife a ce jour-la , & expofa derecbef 1'intention du roi touchant 1'aliénation perpétuelle dudit domaine, a laquelle fes fujets fe devoicnt conformer : & combien que par les loix du royaume , le domaine fut facré Sc inaliénable, fi eft-ce que telles loix n'avoient lieu en tems de «éceffité, comme étoit celle de préfent, qu'il y alloit du falut du peuple Sc de la confervation de 1'état , en enfuivant ü la loi des douze tables , Snlus populi fuprema < lex ejlo: Sc fe devoient, telles loix qui avoient ; été établies pour la manutèntion de 1'état, fa\\ vorablement interpréter , non pas in ejus perjiiciem traki, maxime, qu'il étoit plus expédieiit 1 vendre partie du domaine, pour conferver le Tefte , qu'en ne vendant rien expofer le tout en proie ; & telle vente Ie devoit plutot appelier confervation qualiénation du domaine. Pour lefquelles caufes lefdits du tiers-état devoient confentir 1'aliénation , ou donner d'autres  }01 E t A t s moyens k fa majefté pour la guerre qui fe pré-, fentoir. Le préfident Hémard fit réponfe pour Ia compagnie, que le fieur de Beilievre devoir prendre en bonne part les raifons pour lefquelles elle h'avoit donné confentement a ladite aliénation , qui font telles en fubftance : ptemierement , que lefdits députés n'avoient charges des provinces de confentir ladite aliénation , ce qui étoit néceffaire; que par la loi fondamentaie de ce royaume , cette aliénation étoit prohibée & défendue ; que le domaine du roi eft comme le fonds d'une femme que le mari ne pouvoit aüéner , n'écant le domaine de l'églife tant privilégié que le domaine du roi , d'autant qoe le domaine de l'églife fe pouvoit aüéner par les faintes conftitutions en certains cas , & en gardant les folemnités ; mais quant au domaine du roi , il n'y avoit cas auquel il put être aliéné , etiarh avec folemnité; que le domaine du roi étoit une cor lonne qui fervoit pour le foutenement de la couronne, laquelle partant il falloit plutót regarder k fortifier qu'i démolir Sc démembrerj que le domaine étant aliéné, le moyen étoic oté au roi d'entretenir fon état, & affigner a Pavenir dots, douaires Sc apanagcs, que c'étoit  sous Henri III. 303 chofe inaudice que Ie domaine fut vendu k perpétuité, & fans rachat , de laquelle lés écats pourroient être remarqués par la poftérité , attendu que cela ne s'étoit jamais pratiqué , quoique le royaume fut venu en trop plus grand danger qu'il n'eft a préfent, même du tems du roi Jean; que la néceflité des affaires n'étoit telle qu'on dut venir a ce point de vendre le domaine , d'autant que le roi avoit fonds d'ailleurs pour faire la guerre , fignamment par deux millions de livres qu'il faifoit lever fur le peuple, par le- fecours qu'il tiroit du clergé, par la retenrion des rentes conftituées , & gages de fes officiers , & par la vente de quelques offices par lui nouvellement érigés , comme regratiers a fel, & greffiers de tailles; que le domaine étant aliéné, il feroit néceffaire pour 1'entretenement de 1'état du roi , d'en remplacer autant qu'il en feroit óté , & que cela retourneroit fnr le pauvre tiers-état feulement, & non fur les deux autres , qui le confentiroient aifémenr. Nonobftant lefquelles raifons ainfi déduites , dit ledit fieur préfident audit fieur de Bellievre , que la compagnie délibéreroit fur Ia propofition par lui faite, comme il advint après la rettaite dudit fieur de Bellievre. Et la réfolution fut prife par 1'afTemblée, qu'il  304 E t a t s qu'il ne feroit touché au domaine du roi, Sc qse fi fes affaires étoient fi urgentes Sc preffées, qu'il fe pourroit accommoder de la moitié des rentes coniïituées , tant fur les villes , que communautés de ce royaume, excepté les rentes qui étoient dues aux veuves Sc pupilles; pourroit aufli lever emprunts fur les financiers, Sc ceux qui ont fait parti avec lui, Sc encore vendre du domaine de l'églife , jufques a telle fomme qu'il aviferoit êtte de befoin. Et pour faire entendre cette dtjrniere conclufion au roi, fut député le préfidenr Hémard , qui étoit fort indigné de n'avoir pu obtenir ledit confentement , Sc le roi fort faché de ladite rélolution. Le mardi vingt-fix dudit mois de février k compagnie du tiers état fut aflemblée après diner, pour rgcevoir meflieurs l'évêque du Pay , de Rochcfort Sc Tole , qui étoient revenus de devers le maréchal Dampville , Sc ouir Sc entendre 1'effet de leur légation ; qui fut, qu'ayant trouvé ledit maréchal en la ville de Montpellier , ils lui avoient préfenté les lettres qui lui étoient écrites par les états , Sc propofé les chofes defqueiles ils avoient été chargés par leurs mémoires Sc inftruétions, lefquelles il avoit prifes de bonne part, Sc mettant a 1'oppofite beaucoup  aews Henri lil» j©| beauceup de raifons en avant, qui devoient mouvoir les états d'entrecenir la pait plutöt que remettre ce royaume aux troubles dont il étoit forti, ainfi qu'il eft plus au long contenu ès inftructions Sc lettres par lui baillées auxdits ambafladeurs. Mais il eft a noter, que les proteftans Sc catholiques unis avec ledit maréchal, enfemble ledit maréchal, ne voulurent pas que les lettres, inftruétions & paroles de créances fuflent tenues fecretces & commn» niquées feulement audit maréchal, mais le tout Fut dit Sc lu publiquement. Le rapport fait par lefdits feigneurs évêque du Puy, de Rochefort Sc de Tole, de leur négociation au voyage qu'ils avoient fau vers monfieur le maréchal Dampviiie, l'évêque faifant la relation i l'églife, le gentilhomme a la noblefle , Sc le troifieme au riers-état; Sc néanmoins toujours s'accompagnant les trois affemblées , fat arrêté, fur 1'avertiffement qu'ils don* nerent, que le clergé & la nobleffe fe devoient affembler le jour fuivant en l'églife S. Sauveur," pout délibérer fur le même rapport, comm© aufli fur quelque traité de paix, qui couruc depuis le retour de monfieur de Biron devers ]e roi de Navarre j que quelques députés du tiers-état fe trouveroient en ladite affemblée , Tornt XIII. Y  '3o6 Ef At» Sc couféreroient aufli avec lefdits du clergé Sc de la nobleffe, pour en faire après leur rapport ; ce qui fut effeótué, & s'affemblerent le jour fuivant ( qui fut le mercredi pénultieme dudit mois de février) au matin, aucuns des députés des trois états, en l'églife S. Sauveur, en laquelle affemblée fut entr'autres difcours fait ouverture, par quelques-uns du tiers-état, de faire inftance de la paix envers le roi; Sc foutenu a 1'oppofite par d'autres, tant du clergé que de la nobleffe, que cela fe pouvoit faire fans contrevenir directement a Partiele de la religion , porré par les cahiers; enforte que cette affemblée fe déparrit fans effet. Ce même jour, pénultieme de février, aucuns députés du tiers-érat, au nombre de trentedeux de divers gouvernemens, s'affemblerent en la falie du tiers-érat, comme ils avoient réfolu fecretteraent , pour s'oppofer tant qu'ils pourroient a ce que le tiets-état ne demandac la paix, jagoit que 1'affemblée générale ne fut aflignée qu'au jour fuivant. Ce qu'ayant entendu Bodin, député de Vermandois , comme le .premier de 1'affemblée en 1'abfence des députés de Paris, leur remontra que 1'affemblée étoit aflignée au jour fuivant. Et fur Ie bruit qui fut fait par toute ladite affemblée particuliere,  sous Hbntii II ï. je.*^ qui vouloit ufer de proteftations, ledit Bodin fit lïgne au greffier qu'il fe retirat, ce qu'ii fit: &c voyant qu'il fe reciroit, ladite affemblée pria un des affeffeurs des grefEers de leur délivrer aétes de leurs proreftations , a favoir qa'ils n'entendoient changer ni altérer leurs cahiers, ni demander la paix, & qu'ils n'avoient point de puiffance, que leur pouvoir étoit expiré J qu'il n'y avoit plus d'états, proteftant auffi de nullité de tout ce qui feroit réfolu en 1'affemblée le jour fuivant par les autres députés.' Bodin leur remontre que s'ils n'avoient plus puiffance , c'étoit crime capital de s'afiembler fans mandement du roi, ck de traiter de la paix ou de la guerre, cas réfervés a la fou* veraineté; & moins pouvoient-ils encore s'aurorifer en leurs proreftations, n'ayant ni corps ,' ni college, ni magiftrat, ni greffier, ni tabellion. Les fupplia de vouloir différer telle affemblée , laquelle de fa part il ne pouvoit approuvet j ce qu'ayant refufé, ledit Bodin tk quelques-uns pacifiques fe retirerent. Et depuis lefdits députés particuliers firent écrire par 1'un d'iceux leurfdites proteftations, & les fignerent,' &c firent une requête particuliere fignée defdits trente-deux , pottant que le roi feroit fupplié de faire droit fur les cahiers, auxquels ils pro^  ■ •«§ E T A T S teftoient ne vouloir rien ajouter ni diminuer ; ni demander la paix pour icelle requête pre- | fenter , au cas que les autres députés préfentafr fent requête tendant afin d'avoir la paix. Le jeudi dernier de février , les députés des treis états furent convoqués a Saini-Sauveur , pour ouir la négociation & remoiitrance de la paix, que fit le fieur de Montpenfier, étant de retour du roi de Navarre. Et dautant que le lieu n'étoit aflez capable , il dit aux ordres Pun après Pautre, ce qu'il avoit fait coucher par ; écrit, dont la teneur s'enfuit r Meffieurs, vous favez qui a mu leurs majeftés de m'envoyer vers le roi de Navarre , & comtien ia faifon oir nous étions lors de mon partetncnt , mon indifpofition, age Sc longueur de chemin, me pouvoit difpenfer d'un fi facheux ! voyage. Toutesfois poftpofant cette peine Sc travail si 1'affecFion que j'ai au très-humble fervice i du roi Sc lepos de la France , je n'ai différé de Pentreprendre, & aller trouver ledit fieur roJ I de Navarre, cn la ville d'Agen; oü après lui I avoir bien particuliéremen» fait enteadre Pin* téntipn de leurs majeftés, il m'a repréfenté : tant d'occafions de méeontentement 5c défiance qu'il dit avoir, que je me fuis vu plufieurs fois en terme de m'en revenir, fans rien tireB l  SOUS HlNRI III. $09 ie réponfe de lui, qfti put fatisfaire 4 fadite majefté. Finalement, je lui ai fait tant de bonnes & faintes remontrances en public 8c en particulier, qui le devoient rnouvoir a fe ranger a la raifon , & reconnoitre ce que par droit divin & humain il doit a fon royaume 8c .fouverain feigneur , que je 1'ai laiffé en une bonne volonté de rechercher tous les moyens qu'il pourra pour parvenir i la paix, & qu'il ne tiendra a lui que ne 1'ayons. Ce qu'auparavant mon arrivée en cette cour , j'ai fait entendre a leurfdites majeftés , par M. de Richelieu , & depuis par M. de Biron , afin qu'il leur plut fur le fait de la négociation prendre quelque bonne réfolution, leur ayant fait par eux propofer tous les moyens & remedes que j'eftimois les plus propres, pour pacifier les troubles qui de fi long-tems nous travaillent. Je crois , meflieurs, qu'il n'y a perfonne de vous qui fafle doute du zele que j'ai toujours porté a 1'avancement de 1'honneur de Dieu , & foutenemént de l'églife catholique 8c romaine; flc qu'en une fi lainte querelle , & pour le fervice de mon roi , j'ai a routes les occafions qui fe font préfentées expofé ma vie 8c mes biens & aflifté a plufieurs batailles, tant en la préfence de fa majefté, que comme fon lieute*  $ÏO E T A T $ nant général, Sc ayant charge de fon armée. C* néanmoins, quand je confidere les* maux que let guerres paffées nous ont apportés , Sc comfeien la divifion tend a la ruine Sc défolation de ce pauvre royaume; combien'nos voifins étrangers font leur profit de notre malheur, 8c tachent de nous y nourrir , afin de. voir une fubverfion en notre état, qui a été fi fleuriffant, Sc Ia nation francoife fi redoutée , Sc crainte de toutes autres nations; quand je penfe aulli le peu de moyen que leurs majeftés ont de faire la guerre , la perte que ce feroit de tant d'hommes expérimentés au fait d'icelle, Sc affeótlonnés a leur fervice , enfemble le défaut de tant 'de chofes néctffaires , les forces que tiennent nos ennernis tant en cê royaume qu'ès pays étrangers; les grandes dettes du roi Sc Ie peu de moyen , voire du tout nul, de fe pouvoit jamais acquittcr s'il faut recommencer Ia guerre J que les journées & batailles que nous avons données depuis fcize ans en 9a, n'ont pas tant profité , pour appaifer les troubles Sc amener a la vraie connoiiTance de notre religion catholique ceux qui s'en font divifés , qu'eüt fait un amendement de nos vies, avec une bonne réformation en tous les états de ce royanma , laquelle eft très-néceflaire. Davantage, quand je me  s e v s H i m R i IH. 311* repréfente devant les yeux les calamités efquelles j'ai vu le pauvre peuple plongé, par tous les lieux oü j'ai pafte a mon voyage , & fans efpérance de jamais s'en pouvoit relever, finon par le moyen d'une paix , laquelle unanimement & d'un commun accord^tant les catholiques qae ceux de la nouvelle opinion, m'ont fait requête de procurer a Pendroit de leurfdites majeftés ;*me repréfentant d'ailleurs les pilleries, oppreftions , ran<;onnemens, violemens de niies Sc femmes, Sc autres innumérables indignités qui fe commettent en leur endroit, que quafi on ne leur donne aucune patience ou relache, ce qui les met au défefpoir ; tant pour voir aufli la marchandife , 1'agriculture, Sc le tralie cefler,' que pour être du tout fpoliés de leurfdits biens , aucuns d'eux contrahits d'abondonner leur pays , 3c les aurres impunément meurtris Sc occis ; 'Ënalement me reffouvenant de la guerre que 1'empereur Charles-le-Quint a eue contre les potentats d'Alemagne, pour même occafion qué celle qui s'oftre , ayant eu les principaux auteurs d'icelle, captifs Sc a fa merci, Sc néanmoins réduit a cette néceflité de les laiffer vivre en 1'exercice de cette religion ; 9c ayant égard ; que le roi d'Efpagne, qui eft tant catholique, après avoir fait fi long-tems la guerre ès Pays- V4  ■ 3»* Et ats bas, a été contraint, pour la confervation 'dudit pays de fon obéiffance , aatorder a trois ou quatre des princes qui tiennent le premier degré,, ce qui avoit été conclu par les états pour le fait de la religion. Toutes ces confidérations , meffieurs, Sc une infinité d'autres , que je vous pourrois amener pour l'expérience de mon age , Sc le maniemenr des charges Sc affaires que j'ai cues, font que je fuis contramt de donner avis a leurs majeftés, de fe réfoudre a une paix; & adouciffant ce qui eft de 1'étroite obfervation de la déclaration qu'il a n'agueres fair publier , vouloir ramener ceux de la nouvelle opinion a quelque bonne raifon , ainfi que je leur ai témoigné la volonté dudit fieur roi de Navarre être difpofée a tetrancher Sc dimiJiuer Pédit de pacification dernier , étant le feui femede & le plus expédient que je fache au mal qui travaille Ia France. Et me femble , meffieurs, que pour la confidération d'icelui, vous devez avoir ce même fentiment avec moi, & faire requête a leurs majeftés d'entendre k la paix, Sc d'ajouter tels autres moyens Sc raifons pour y parvenir, que la néceffitc (qui nous eft a tous commune ) le requiert. Non que par cela j'entende approuver autre religion que la catholique & romaine, mais étant d'avis  SOUS HlNKt III. 3 X J feulement de tolérer Sc fóuffrir pour quelque tems celle que- tiennent ceux de la nouvelle opinion , Sc h leur permettre en quelques lieux qu'on connonra apporrer moins de troubles &C dommage a ce royaume, atrendant que pat un bon concile., ou autre tenue d'états, ou par autres bons moyens, leurs majeftés aient tellement remis Sc reconcilié leurs fujets les uns avec les autres , que Dieu nous faffe la grace de ne voir autre religion régner parmi nous que la catholique Sc romaine , qui eft celle que leurs prédécefleurs rois ont toujours tenue Sc fuivie , & en laquelle je pretefte vivre Sc mourir. Ledit fieur ayant achevé , il fut remercié par Ie préfident Hémart pour tout le tiers-état , du foin qu'il avoit de ce pauvre royaume, Sc le fupplierent de permertre de s'aflembler pour en délibérer; ce que par ledit fieur étant pris de bonne part, lefdits députés du tiers-état fe tranfporterent a 1'inftant en la maifon de ville, oü ayant mis en délibération la propofition dudit fieur, cottclurent a. la pluralité des voix, que le roi feroit fupplié, par requête écrite , de réunir fes fujets en la religion catholique , apoftolique & romaine, par tous moyens faints Sfi légitimes, Sc fans guerre, felon & aihfi qu'oa avoit donné charge a Verforis de 1'ea fupplier,  314 Etat» quand il faifoit fa charge, par délibération fur ce faite le 15 janvier dernier, l'aéte de laquelle feroit attaché a ladite requête. En cette affemblée , le député de Carcaflönne opina feul pour le gouvernement de Languedoc, car ceux de Touloufe n'y voulurent alïifter. Auffi les députés des gouvernemens de Champagne, Picardie Sc d'Orléans, furent d'autre avis; c'eft a favoir, qu'on fe devoit purement arrêter a Partiele du cahier touchant la religion. Mais la pluralité Pemporta , tellement que la requête fut dreffée par le préfident Hémart, Bigot Sc Bodin , lue Sc arrêtée en une autre affemblée. Ce même jour fut mis en délibération au confeil, de répondre a la requête du tiers-état, Sc en ce faifant traiter la paix avec les princes: la reine mere fit merveille de bien dire pour la paix , comme le bruit courut, Sc fut fecondée des fieurs de Biron , maréchal de Coffé, le feigneur de Montpenfier, Morvilliers, Bellievre, ainfi qu'on difoit. Les ducs de Guife, du Maine, de Nevers, & le cardinal de Guife, tenoient le contraire. Mais le roi inclinoit toujours a la paix, Sc l'ambaffadeur du dac Cazimir» qui demandoit trois millions de livres, y donn» coup. Le dimanche troifieme jour dudit meis, le fieu^  SOUS HlNR.1 III. 315 de Biron partlt pour aller vers le roi de Navarre , & faire retrancher ce qu'on pourroic de 1'édir. Des affemblées générales du clergé de France. ( A Bes & mém. du clergé, torn. 1, part. 2.) Acte fait aux érats de Blois, 1'an 1577 J repéré ès affemblées générales tenues a Melun Xe a Paris , ès années 15 79 , 15 8z &C 15 8 5 , 8C envoyé aux diocefes,par lequel les cardinaux» archevèques, évêques , eccléfiaftiques & députés efdirs états & affemblées , pour la confervation du bien de l'églife, font très-humbles remontrances au roi, a ce qu'il ne foit rien levé fur les biens , meubles &: immeubles des ecclér fiaftiques de France, finon aux cas de néceffité , pour la confervation de l'églife & de 1'état, & du confenternent univerfel du clergé , pourquoi lui fera permis de s'afFembler , par fa majefté , ( exhortant meffeigneurs les cardinaux 8c autres prélats, qui font a la fuite de la cour, de ne confentir a aucunes nouvelles levéesa. peine de nulliré & d'ètre défaveués ) , & li befoin eft, on pourra s'y oppofer par inrerdictions publique? , excommunications, cenfures  5ï£ E T A T 8 eccléfiaftiques, & autres voies permifes & 3e droit. Aujourd'hui vingt-deuxieme jour de février, 1'an mil-cinq-cent foixante-dix-fept, nous cardinaux, archevêques , évèques , abbés, doyens , prévóts, archidiacres, tréforiers, & autres dignités, chanoines, prieurs, curés, & autres bénéficiers, féculiers & réguliers, tant députés des diocefes Sc clergé de France , pour 1'état de l'églife en 1'affemblée des états-généraux, qu'autres, nous trouvant en cette ville de Blois, congrégés en la chambre capitulaire de l'églife collégiale de S. Sauveur , pour le foulagwnent de ce royaume, foutien & confervation de 1'étajL eccléfiaftique, a 1'honneur de Dieu, grandeur Sc aatorké du roi, Sc décharge de nos confciences , avons fair la préfente déclaration & proteftation en la forme Sc maniere qui s'enfuit : Paree qu'il n'eft , en fac,on quelconque , licite ou tolérable de voir fi fouvent employer les biens eccléfiaftiques , Sc ce que de fi long-tems avoit été dédié a Dieu , Sc légué a fon églife , a autres ufages que celui auqael lefdits biens font deftinés par difpofition de droit divin. Et d'avantage nous voyonspar expériente, outre  60VS HBN8.I III.' flf les eeafures Sc peines de droit porties par le» ^faiots décrets que d'ailleuts tels biens font non-feulement inutiles pour ceux qui s'en font jroulu fervir par telle voie, ou fe les apprcwr prier; mais auffi grandement pernicieux Sc dom» mageables a eux, Sc au bien & fuccès de leurs affaires. Pour ces confidérations Sc plufieurs au» tres, nous , fuivant la très-humble requête por» tée par le cahier de nos remontrances, tendant a ce que le roi par la finguliere affedion qull a a 1'honneur de Dieu , ne permette pour quelque caufe ou occafion que ce foit dorénavant, Sc pour le tems a venir, pris Sc levé aucune chofe , tant fut les meubles & fruits des ecclér fiaftiques de fon royaume, que fur lesimmeu? bles, terres Sc héritages a eux donnés Sc délaiffés, ou pat eux acquis Sc achetés, &Fgénéralenaent fur toas Sc chacuns biens appartenans ansdits du clergé, comme étant de foi inaliénables Sc hors de tout commerce des hommes, cenfés Sc réputés le vrai domaine des eccléfiaftiques Sc de fon églife. Avons déclaré Sc déclarons , que pour notre devoir Sc füreté de nos confciences, avons avifé enfemble, Si tous d'un commun confentement , Sc nous nous fommes donnés ia foi les uns aux autres au nom de Dieu Qc- de la faiute Trinité, Sc avons juré & pro-  J I 8 E T A I ! tefté, jurons & proteftons , chacun pour fort regard , en qualité de députés, 8c encore chacun fe faifant fort pour fon diocefe, auquel ils feronr jurer, tant en général qu'en particulier ratifier le même fi befoin eft, tous unanimement 8c conjointement, en adhétant aux priviléges de l'églife gallicane , confirmés par plufieurs ordonnances & arrêts de la cour de parlement de Paris, 8c remontrances fouvent fur ce faires.' En enfuivant aufli Pexemple des bons évêques anciens de ce royaume , qui ont maintenu & gardé parmi plufieurs perfécutions lefdits priviléges , au tems des rois Louis-le-Gros, 8c Louis-le-Jeune fon fils , Philippe-le-Bel, Charles VI & Louis XI, s'éranr acquis en ce , grande louange, & montré un courage invincible êc rrès-généreux ; faifant paroitre combien ils defiroient plutór plaire a Dieu feul qu'être agréables aux hommes , de faire tout ce qui fera en nous, tk. de nous oppofer, fi befoin eft, a toute maniere de gens qui viendront au contraire , par inrerdiétions pubüques, excommunications, cenfures eccléfiaftiques, 8c toutes autres voies légitimes qui vous font permifes Si ordonnées de droit. Et toutefois pour montrer clairement de quel zele 8c affection les eccléfiaftiques embraffent le bien de cette cou-  sous Henri Ilï. 31$ konne , & comme nous fommes prompts & difpofés i Ia fecourir en fes grandes Sc importantes affaires: n'enrendons que fi a 1'avenir fe prér fenroit quelque légitime & jufte occafion pour la confervation de cet état, mêmement que pour la défenfe de la religion catholique, apoftolique Sc romaine , l'on füt contrahit, après avoir tenté tous les moyens , avoir recours auxdirs biens eccléfiaftiques pour en tirer fecours, que fa majefté n'en foit fecourue, mais que cela fe faffe moyennant, Sc a la conditiën que la difpofition de droit tk. privilége de l'églife gallicane foient entiérement obfervés & gardés, & que le confentement univerfel du clergé j intervienne fans fraude ni contrainte, & qu'a. cette fin leur foit permis eux affembler, Sc que le tout fe faffe avec les folemnités requifes, fous le bon plaifir Sc autorité du pape. Et en ce cas, Sc non autrement, lefdits eccléfiaftiques , comme vrais difpenfareurs Sc légitimes adminiftrateurs des biens de 1'églife, feront tel fecours a fadite majefté , fur ce peu de bien qui leur refte de tant de fubventions, aliénations , pertës Sc dommages paflés, qu'elle aura jufte occafion de fe contenter, au cas que les deniers foient par eux feuls adminiftrés Sc employés, ou pat leurs commis Sc députés,  310 E T A T S pour obvier a une infinité de fraudes 8c abu9 manifeftes, appellant Dieu en témoin , & proteftant que quelque confentement exprès ou tacite, qu'on pourroit préfumer avoir par aucuns de nous , ci-devant été fait &. prêté au Contraire , n'entendons que cela nous porte, ni a nos droits Sc libertés aucun préjHdice £ 1'avenir, ni qu'il nous en puifTe être en rien recherché ou imputé ; déclarant que ga été fans notre légitime confentement, 5c a notre trèsgrand regret Sc déplaifir. Ainfi avons arrêté 6c ainfi 1'avons promis Sc juré, le promettons 5c jurons , de fóuffrir routes peines, voire la mort, plutót que d'endurer a 1'avenir que, par tels finiftres moyens 8c mauvais confeil, 1'héritage de Dieu foit diflipé ou vendu, au grand fcandale &C mépris de ce royaume, jadis tant florilfant Sc lequel n'a profpéré 8c ne pourroit fe remettre en fa première fplendeur , tant 6c fi longuement que tels pernicieux confeils 8c effiets auroient lieu. Nous aflurant que Dieu, qui elf juge de nos bonnes 5c faintes intentions, & qui nous a donné cette infpiration St bonne Yolonté, prendra notre caufe en main, Sc favorifera ure fi Sfainre réfolution. Et a ces fins feront fuppliés meiïeigneurs les cardinaux, 8c tous autres prélats, fe trou- vant.  sous Henri III. ^ ij vant pour 1'avenir en cour, ne prêter ancun confentement a aucunes levées ou charges fut le clergé, foit par forme de décime , ou autres fubventions, fur les fruits defdits bénéfices , oü par ventes Sc aliénations du domaine de l'églife, ou autres impofitions quelconques, a peine de nullité, & d'être défavoués, comme dès a-préfent défavouons tous confentemens, accords , tranfaótions, Sc autres charges quelconques qui pourroient être faites a Ia foule, charge & préjudice du clergé, voulant que celui d'entre nous, ou autre eccléfiaftique, de quelque qualité ou condition qu'il foit, qui viendra au contraire de ce que deflus, direcFement ou indirecFement, foit tenu pour ennemi de Dieu Sc de l'églife, déferteur de fon état, facrilége & incapable de tous bénéfices , honneurs , prérogatives & libertés eccléfiaftiques, & indigne de toute communion Sc fépulture. Et pour pleine & entiere force , vertu Sc valeur de Ia préfente ordonnance & proteftation, l'avons fignée de nos mains,fait figner Sc retenir par les fecrétaires de notre affemblée de 1'état eccléfiaftique , pour y avoir recours, Sc par eux en être délivré copie , quand Sc i qui il appartiendra & befoin fera. Fait i Blois les jour & an que deflus. £t eft fignée la minute des préfentes, Charles, cardinal de Tornt XIII. x  }l$ E T A T S Ainfi fignés, fans préjudice de leur rang Sc grade. Par ordonnance de ladite aflTemblée : Arnoulf fecrétaire; Paulet, fecrétaire. Gette déclaration fut répécée en laiTemblée du clsrgé, tenue a Paris, Pan 1585 , & fignée des feigneurs dé» putés en cet ordre. Charies, cardinal de Bourbon. Louis, cardinal de Guife. P. de Villars, archevêque de Vienne. R. de Baume, archevêque de Bourges, A. Cavigiani , archevêque d'Aix. N. Langelier, évêqüe de Saint-Brieux. P. de Villars, évêque de Mirepaix. G. de la Martonie, évêque d'Amiens. A. évêque de Cahors. Claude, évtque de Noyon. L. Al amani, évêque de Macon. J. de Laubefpine, évêque deLimoges. Anne de Givry, évêque de Lifieux. G. le Genevois , doyen de Langres. G. de Billy, A. de Saint-Vincent. L. de Ia Barge , archidiacre Sc comte de Lyon. M. de Martimbosc, chanoine & chantre de Rouen. A. Defplanques, doyen de Saint-Quentin.  sous Henri III. 3x7 Cl. Arnoulr, doyen de Sens. J. le Roi, chanoine de Paris. G. de Taix , doyen de Troyes. ahobw'iffl P. Sibert, grand archid. de Chalons. isiash Louet, arch. d'Angers. J. le Monier, chanoine de Charcres, ?nj?I J. Miette, grand archid. de Sens. ■ \>mq J. Amelor", prieur de Sainr-Martin-des Champsi J. Tifaur, chanoine de Touloufe. J. Girard, arch. de Bourges. J. Gorravi, arch. de Rodez. A. Bonal, chanoine en ladite églife. R. Julien, chanoine d'Auch. J. Benier , arch. de Tarbes. N. de Villars, prieur de Beaumont. Ar. Du Ménil , arch. de Paris. J. de HaufTy, arch. de Leótoure. Alberr, prévör de Verron. De Caftera, arch. de Narbonne. An. deBorenet, prévot d'Autun. jhjhA Chrifti, chanoine de Nantes. Jacques de Olieres, aumónier de Saint-Vi£tor de Marfeille. G. Bellanger, chan. d'Aix. Dequincarnon, chanoine de Bazas. Bichau , prieur de Bazas. Ainfi fignés, fans que l'ordre des feings puifïe X4  3*4 E T A T $ Louis de Ia Grefille, pour le Clergé du diocefe de LuiTon , &c autres. Et plus iigné & écrit par 1'ordonnance de mefdits fieurs Languiller & Borenet, fecrétaires. Cette proteftation fut répétée en 1 affemblée de Melun , & Jignée des feigneurs députés en l'ordre ci-deffous. P. de Pinac, archevêque da Lyon ; A.Prevot, archevêque de Bordeaux ; A. Cavigiani, archevêque d'Aix : Defcart, évêque duc de Langres; M.Langiller, évêque de Saint-Brieux;F.Raguen-. neau , évêque de Marfeille; A. de Pontac, évêque de Bazas; R. Gavalélï, évêque de Nimes 5 Cóme, évêque de Chalons ; P. de Villars , évêque de Mirepoix; Auguftin le Cirié , évêque d'Avranche; J. de S. Bslin, évêque de Poitiers ; A. Sorbin , évêque de Nevers; Claude Dangennes, évêque comte de Noyon ; Boucherat, abbé de Citeaux; Anne de Givry, abbé de Saint - Bénigne ; de Billy , abbé de Saint-Vincent; Jacques Defay , abbé de SaincPierre; G. Genevois, doyen de Langres ; & T. Dulaur, chantre de Rhodez, promoteur de 1'affemblée ; Cl. Arnoul, doyen de Sens ; G. de Taix, abbé de BaiTe-Fontaine, doyen de Troyes; A. Defplanques, doyen de Saint - Quentin ; M. de Martin-Bofc, chanoine & chancelier de  • OWS HïNRI III. 315 Rouen; de Lallïer Aymini, prieur de Monofque; Mauguin , abbé de Clermont; B. Gilles, primiffier d'Arles; Cl. Moyflant, doyen de Provins ; Bellanger, chantre d'Aix ; Gallanr, député, chanoine de Tours; M. tinec, député de Tours; Marnas , chanoine de Saint-Juft de Lyon ; de Baudoin, chanoine de Xaintes ; J. Ergo de Vienne, Danglade, chanoine, Sc Ouvrier de Bazas , députés d'Aix ; Dubarry, chanoine d'Auch ; M. Bertrand ; Delabigue , fcolaft. BajoiTen ; de Phuyzilhon , prévót de Saint-Martial de Limoges; P. de Benoift , chanoine de Saint-Étienne de Touloufe ; de Hanfy, archidiacre de Leétoure; Legot de Montault, chanoine de Vivier; Carther , curé de Vienne; N. de Briroy, archidiacre de Beauloret;G. Chevalier , abbé de Trizay; Sibert , archidiacre dc Chal ons; J. Bonnefïons , député de Narbonne, doyen de Montréal ; Paulet, archidiacre de Nevers ; Tiffaut , député & chanoine de Saint - Servin de Touloufe ; Poneer, prieur de l'églife de Saies de Bourges; Paulo Dolmeran, fous-prieur de Monmajour ; R. de Maurin , tréforier & chanoine de SaintBrieux ; J. Prieur, chantre Sc chanoine de Meaux Jean Benoift, chauoine de Saint-André. X5  3ia E t a t s Bourbon; Louis, cardinal de Guife; Louis; cardinal d'Efte; P. d'Efpignac , archevêque de Lyon; A. Prevöt, archevêque de Bordeaux; G. Davanfon, archevêque d'Embrun; P. de Villars , archevêque de Vienne; Jean , évêque deLaon ; d'Oraifon , évêque de Caftres ; Pellevé, évêque de Pamiers; Ruzé , évêque d'Angers; Arnauld , évêque de Bazas ; Alexandre, évêque de S. Papoul ; Etienne de Séneétere , évêque de Clermont: Daillibouft , évêque d'Autun. Rolant de Neufville , évêque de Laon; G. Leblanc, évêque de Tholon ; Jean de Miguen , évêque de Digne ; Cavaleray, évêque deNimes; Aymar Ennequin , évêque de Rennes ; F. Thomé , évêque de S. Malo; le Genévöis, pour Langres; A. Rougrey , pour Chadons en Bourgogne ; Rehé de Maulvi , prieur de S. Loup & tréforier de S. Brieux. pour Bretagne ; M. de Martinbofc, chancelier de l'églife de'Rouen ; Defplangues , doyen de S. Quentin , pour Vermandois; la Saycere, pour Poitou; Prevot, pour Poitou ; Guebert , pénitencier d'Evreux ; le Jardinier, député d'Alengon; Debrets, pour Senlis , abbé de la Victoire ; Claude Ranguel, pour Valence ; Brunei, pour Bologne ; de Bourdon , chantre d'Andely & Gyfors; L. Guytard , "deyen , député de Xaintonge ; Chauleu , pour  sovs Henri III. 313 Péronne, Mondidier Sc Roye; P. Gyber de Vaguel, abbé de Pontaux. L. Diau, pour Clermonten Beauvoifin ; G. de Tay , pour Troies; Puhaiel, chantre, pour le clergé de Bayeux; Morfuis , pour Provins ; Verbès, pour élu du clergé de S. Flour , au haut pays d'Auvergne ; Richier, député de Rennes; P. de Vieille , député du Mans; S. Bello , député dadit Mans; Jacques de Faix, abbé de S. P., pour le Dauphiné; F. Defmoulins, pour Blois ; A. Regourt, pour Cahors ; L. Devaux de Puiffillon, pour Limoges; Penot, pour Limoges; F. Armand , pour Périgueux &: Sarlat; A. N. T. H. Samarche, peur Nantes; N. D. S. Gilles Sc de Porpliere , députés de Conftantin; de Fontereau, de Bellay, députés de la province d'Auch; M. de Lavin, pour le bailliage de Caen j L. Royer , pour Auxerre; Momont, pour Ne-, mours; Pigier, pour Montfort-l'Amaury; P.oulet, pour le diocefe de Nevers; Mf Angibouft, pour Dreux ; A. Nicolas, député pour Nlmes; Debardy t pour Nantes ; MarnoiTe , pour Lyon ; Hattelou, abbé de Leftore, député de Mende; MuiTet, député d'Orléans ; Dabarne, Aichidiacre d'Angers ; Alin de Pourpris , archid. de Rouen; Jobart , pour la Montagne ; Piguier , doyen de Melun ; Delchemot t pour Meaux, X z  S*8 E T A T s nuire ni préjudicier aux prérogatives 5c préémt- nences dun chacun defditsfieurs, Sc au-deffous «ft^fjt;i sap. tlu&o L jd ^>jt- " Par ordonnance de 1'affemblée, Borenet, mémoires des affaires du clergé de France ès états de Blois , 1576 6- 1577, par Guillaume de Taix, doyen de l'églife de Troyes, deputé efdits états pour le clergé du bailliage de Troyes. Le dimanche 25 Novembre 1576, j'arrivai a Blois, avec Me PhiJippe Belin , député pour k tiers-état du bailliage de Troyes, & Me Bernard Loiiot, député pour le clergé du bailliage de Sezanne, étant demeuréa Orléans; M. Francois Bernard , archidiacre d'Arceys en l'églife de Troyes , mon co - député , Sc M. le Maire Belin, co-député dudit fieur lieutenant. Et m'étant enquis fi meflieurs de l'églife s'étoient déja aflemblés pour le fait defdits états, il me fut dit que les 25 5c 24 dudit mois, ils s'étoient feulement entrevus 5c falués les uns les autres , en deux petites affemblées faites par eux eu Pahbaye de Saint-Loiner audit Blois, 5c n'avoient traité que de la préféance de meflieurs, les  sous Henri III. §29 archevêques de Lyon & d'Embrun, & que combien que Iedic d'Embrun fut plus ancien archevêque , fi eft-ce qu'a caufe que ledit de Lyon étoit en fa primace Sc territoire d'icelle, c'eft a favoir en 1'évêché de Chartres , Ia préféanee lui demeuroir. 1 Et avant les chofes fufdites , avoit été vuidé le différend d'entre meflieurs les archevêques d'Embrun & de Vienne, difant ledit de Vienne qu'il devoic précéder en féance, Sc délibération ledit d'Embrun , a caufe qu'il étoit facré Évêque devant lui; & ledit d'Embrun foutenant le contraire , a caufe qu'il étoit promu a Parchiépifcopat plutot que lui. Ce différend bien entendu par ladite affemblée , qui fut pnée par les parties d'en juger , fut dit: Que fuivant la coulume de l'églife gallicane, ledit fieur d'Embrun , comme- premier en promotion a 1'archiépifcopat , précéderoit ledit fleur de Vienne , encore qu'il fut facré Évêque devant 1'autre ; Sc par ainfi fut arrêté pour 1'avenir, que prior in promotione, prior erit in fejjïone 3 encore qu'il fut pojlerior in confecratione, Sc fut allégué , que gratia promolionis faila per pondficem , mérite fon ordre Sc lieu en toutes chofes , nonobftant que confécration n'ait enfuivi ladite promotion. Après ce que deflus, fut prié M. le doyen de  334 E t a t $ achevée ladite litanie, & les prieres propres en' tel cas faites par ledit fieur archevêque d'Embrun, le roi & tout ,1e monde fe retira; mais faut noter qu 'après 1'offertoire de la grand'mefle oü le roi feul , felon la coutume , alla k loffrande , M. l'évêque d'Angers monta en chaire ; & fit une prédication. Le fixieme dudit mois ne fut tenue aucune aflemblée, mais fut fignifié par toute ia ville, i fon de trompe, que le roi vouloit ce jour-la faire ouverture des états; & pour ce , que tous les députés euffent a fe trouver en la cour du chateau, heure de dix a onze heures, caufe pour laquelle rous s'y trouverent , & fur le midi furent tqui convoqués par quatre hérauts , qui les appelloient felon les gouvernemens du royaume; commencant toutefois par la ville de Paris, fans toucher au gouvernement de Plfle-deFrance * tk puis fuivant par Bourgogne , Normandie , Guyenne, Bretagne , Champagne, &c; Et étoient lefdits députés recus au pied du degré qui va en la grande falie dudit chateau, par Doignon , makre des cérémonies pour ce jour-la qui les conduifoit tous enfemble ; favoir, l'églife , noblefle, & tiers-érat; après les avoir reconnu par nom & furnom , felon le billet de leur province, les menoit en la-  $ o v s H i n k i III. 335 • dite falie, & puis les faifoit mettre felon leurs dignités aux bancs qui leur étoient préparés, féparément les uns des autres : cela fait, il alloit faire appelier les autres , & les menoit comme deffus. Cela dura environ une bonne heure & demie , Sc étant achevé , & mis chacun en fon lieu , fans aucune confufion ni dclordre , l'on alla querir fa majefté, qui vint accompagnée comme il s'enfuit : Tous meflieurs de fon confeil privé, de longue robbe, comme meflieurs de Morvilliers, Limoges , le grand anmbnier , Sc autres , Sc ceux de courte robe jufques au nombre pareil aux autres fuivoient; & fe mirent les chevaliers fur un banc a cóté gauche, les autres, fur un autre a coté droit: aprês ceux-la , vinrent les évëques de Laon, Sc Langres , ducs Sc pairs de France, avec celui de Beauvais, comte Sc pair, fe mirent fur un banc qui leur étoit prépare en haut du coté gauche : Sc puis vinrent mefleigneurs Ie cardinal de Bourbon , de Montpenfier, Sc Ie prince Dauphin , qui fe mirent fur un autre banc a cöté droit: puis vint le roi qui fe mit en fon fiege, la reine regnante a fon cóté gauche , Sc la reine mere, & monfieur , a fon coté droit: Sc puis monfieur le chancelier qui s'alla mettre devant le roi , loin d'environ  • - Ui E T A T S remontrances duditpromoteur, Paflemblée ayant prêté 1'oreille , aptès avoir fait retirer ledit fieur archevêque, qui protefta avant que partir que cet honneur étoit dü a fon églife , & qu'U ne 1 appétou point par ambition , mais pour ne laiffer perdre les droits & ptérogatives de fon archevêché, ladite affemblée , toutes chofes mürement délibérées & confidérées , ordonna que ledit fieur, pour fes grandes qualités, préfideroit, mais que ce ne feroit pas, paree qu'il étoit archevêque de Lyon , mais feulement per con* cefwnem, Sc non autrement - ce qu'il accepta , & demanda aófce de cela Sc de fes proteftations qui lui fiat accordé. Le dernier jour dudit mois ne fut tenue aucune affemblée , i caufe de la fête de S. André, a caufe aufli de la proceflion folemnelle que Ie' Roi fit faire , a laquelle il comparut, avec monfieur fon frere, les reines & toute la cour, en Pordre qui s'enfuit. Premierement marchoit toute l'églife de Blois, cordeliers, jacobins , paroiffes, rehgieux & les chanoiftes, puis fiuvoient deux petits enfans de la chapelle du roi , qui avoient a deux genoux commencé , devant le grand autel, la Litanie, après la fin de la -rand'meffe, céiébrée en pontificat par 1'archevêque d'Embrun; lefquels petits enfans , après avoir chanté  sous Henri III. 355 jufques a fancla Maria , ora pro nobis , fe leverent, & continuant ladite litanie, vinrent a fe mettre devant les chantres de la chapelle du roi, qm chantoient tout ce que lefdits petits enfans avoient chanté avec une fort grande mélodie, qui incitoit grandement le peuple a dévotion j après lefdits chantres, tout vêtus de furplis, fuivoient les dorens Sc autres députés des états en ordre confus , avec leurs robes noires , bonners carrés 8c cornettes; puis venoient meffieurs les aumoniers du roi, vêtus de leurs roquets , au nombre defquels je me mis, & marchions deux a deux. Les abbés bénirs nous fuivoient, Sc puis les abbés chefs d'ordre, comme celui de Citeaux & de Grammont, Sc après eux meffieurs les évêques, avec leurs roquets, robes Sc camails violets , & puis venoit ledit fieur archevêque d'Embrun en pontificat, lequel étoit fuivi par Ie roi, toute la cour Sc le peuple. II avoit été ordonné que ladite proceffion com- mencerok a Saint Sauveur , comme elle fit. &- iroit jufques a Saint Calais, qui eft la chapelie du chateau, Sc en icelle entrerent feulement de peur de la foule, les chantres , députés & aumoniers, avec lefquels y avoit quelques abbés commendataires , les autres abbés , les évêques , archevêques, le Roi Sc quelques dames; «Sc étant sjttsna -iov£ zsiqr t ïiiuiie "liïsq"< r jp>3 ? •••«  3IO E T A T t Blais de pourvoir d'un portier ou huiflier ecclcliaftique , qui garderoic la porte du lieu oü fe feroient les aflemblées. A été ordonné que, pour obvier aux clameurs qui pourroient advenir pour les prééminences des affiftans en leurs délibérations, meffieurs les archevêques , évêques Sc abbés , chefs d'ordre , délibéreroient les premiers; Sc après eux feroient appellées par les préfidens de 1'aflemblée les voix felon les gouvernemens. Et toutefois pour les relevèr de peine , & aufli pour ufer de briéveré en une fi grande compagnie, il fut permis audit préfident d'appeller les voix felon que l'on feroit aflis , & ordonné que fans contention l'on s'affeoiroit ainfi que l'on viendroit, & que les abbés, encore qu'ils fuflent bénis, crofles Sc mitrés , ne précéderoient point en féance ni délibération les doyens des églifes cathédrales ; bien fut-il accordé a deux qui étoient la; fav-oir celui de Saint Jean d'Amiens , qui eft de l'ordre de Prémontré , Sc celui de Saint Pierre de Vienne, ordre de Saint Benoït, que s'il fe faifoit une proceflion folemnelle, ils marcheroient en icelle derrière lefdits doyens» tób'i 55 , ;^^^dm^, Ce même jour fut allégué par le promoteur, que combien que la préféance par-deflus tous les affiftans eut été défcrée a M. 1'archevêque de  Sous Henri III. 331 Lyon, pour les raifons déduites ci-defliis, li cft-ce que pour cela il n'étoit pas dit qu'il dut prélider en ladite aflemblée, d'autant que c'étoit une aflemblée d'états qui n'obfervoir pas , & ne devoit obferver les grades ni prééminences de la hiérarchie eccléfiaftique , attendu que c'étoit une aflemblée convoquée par le mandement du Roi, & non pour un fait eccléfiaftique feulement, fnais pour une réformation & police de tout un royaume , en laquelle réformation on pouvoit faire préfider celui que la compagnie ehoifiroit; toutefois ledit promoteur protefta ne favoir aucune chofe qui put empêcher que ledit archevêque ne préfidat ; car il le reconnut pour un trésexcellent perfoiinage , comme A la' vérité il étoit, en doélrine , en prudence , ea probité de mceurs, & en toute autre qualité requife a un bon prélat, même il dit fes vertus devoir plutót engendrer admiration que défiauce de lui , mais qu'il falloit , en telles manieres , craindre les conféquences ; car fi pour être archevêque de Lyon , il devoit préfider, un autre archevêque en voudroit quelque jour prétendre autant en telles affemblées , & felóri les lieux ou l'on fe trouveroit ; lequel archevêque toutefois ne feroit ni doóte ni prudent, ni digne de telle prééminence, & partant qu'il y falloit bien penfer. Auxquelles  33^ E T A T S quatre pas, en une chaire couverte de drap de velours, tout femé de fleurs de-lys d'or, & a coté gauche : Le roi féant ainfi en un lieu élevé environ trois pieds plus que le plan de la falie, 8c ayanr fes cent gentilshommes, avec meilleurs de Lanfac 8c Chavigny leurs capitaines, & quelques EcofTois , 8c Francois derrière fa chaire ; monfieur de Villequier repréfentant le grand chambellan fur deux car* reaux de velours a fes pieds; & les fufdites reines, princes , pairs , & chancelier, a 1'entour de lui fur ledit lieu , qui étoit ( comme dit eft ) élevé en forme d'cchaffaud , avoit a fa dextre, fur le plan de ladire falie, tout 1'état eccléfiaftique , a fa gauche la noblefle, 8c derrière icelle le tiers - état; vis-a-vis de fa majefté étoit une table carrée au bas dudit échaffaud, couverte d'un tapis de velours femé de fleurs-de-lys d'or, 8c a 1'entour d'icelle les quatre fecrétaires d'état, Villeroy , Sauve ( al. Fizes) , Bruflard , cc Pinard : 8c au même vis-avis , faifant quafi le milieu de ladite falie, étoient les fufdits meffieurs du confeil privé. Les chofes ainfi difpofées, & étant ladite falie pleine d'une infinité de gens , tant de la cour que de la ville , Sc les dames Sc demoifelles en des hauts lieux qui leur étoient préparés  5 O o $ Henri II I. préparés & tapiffés 5 comme aufli toute ladite falie, tant haut qu'aux cótés, Sc les pilliers d'icelle revêtus de drap de velours violet, femé de fleurs-de-lys d'or. Le jeudi dix-feptieme , nous allames £ une meffe du Saint-Efprit que nous fJmes dire a Saint. Sauveur, pour fupplier Dieu de bien infpirer ceux qui devoient faire nos harangues, & donner la volonté au roi de les bien ouïr, 6c nous y faire droit Sc bonne juftice. L'après-dïné , environ midi, nous fümes appelles par les hérauts d'armes, felon nos provinces, ainfi qu'il avoit été fait en la propofition des états, Sc fümes menés par un defdits hérauts, & M. le mahre-d'hótel Creney, faifant office de maitre des cérémonies,comme avoit fait le fieur Doignon en ladite propofition, en nos fieges de la faile, & même lieu &coté droit du roi, que nous avions eu auparavant ; en laquelle falie le roi entra un peu après avec les reines fa mere & fa femme, la mere du coté droit, fa fename du gauche, en leurs chaires préparées; Monfieur , frere du roi, au-deflbus de fa mere Sc de même coté. Monfeigneur le cardinal de Bourbon s'affit le premier , en un banc mis la pour meffeigneurs les princes; après lui étoit fon neveu le marquis de Conti, puis monTomc XIII, Y  .3} «t E T A T $ feigneur le prince dauphin, puis le duc de Mercceur, puis M. de Guife avec fon baton de grand-maïtre, puis M. de Nevers, puis M. le marquis d'Elbeuf. Vis-a-vis d'eux s'ailirent fur un autre banc du cóté gauche, MM. les cardinaux de Guife Sc d'Eft, MM. de Reims, de Laon, & de Beauvais, pairs de France; aux pieds du roi étoit affis leduc de Maïenne, grandchambellan de France ; &C bien bas après , du cóté gauche, M. le chancelier, puis les quatre fecrétaires d'état a leur table , Sc le confeil privé du roi, tout ainfi qua la propofition; favoir, ceux de longue robe a la main droite, Sc ceux de courre a la gauche; le maréchal de Coffé étoit la contre un pilier affis , mais je fais quel rang il tenoit, ou de panetier , ou de maréchal. Au milieu de leurs bancs, vis-a-vis du roi & de la rable des quatre fecrétaires d'état, qui étoit au haut théatre,fur mis un petit pupitre, couvert d'un tapis de velours violet , femé de fleurs-de-lys d'or; auquel après que le roi (vètu fort richement, Sc toutefois d'un petit manteau, & non grand ni royal, mais bien de drap d'or, doublé de toile d'argent, Sc paffementé de parlement d'or fi richemenr qu'on difoir que fur ledit manteau, & fur le pourpoint Sz les chauffes de même, y en avoit quatre  sous Hekri III. 3j<) tnille aunes) fe füt affis, &c la falie écant touc ainfi parée qu'elle étoit en ladite propofition, Ie roi fit appelier 1'archevêque de Lyon , qui avoit charge de haranguer pour l'églife , &C s'étant venu mettre a genoux devant ledit pupitre , comraenca fon oraifon , puis le roi lui commanda qu'il fe levat; & un peu après , a caufe que nous tous de l'églife étions debout, il nous fit dire par M. le chancelier que nous nous affiffions, & un peu après, que nous fuffion? couverts , ledit fieur archevêque demeura toujours découvert; & quand il venoit a fupplier de quelque chofe , en fuppliant faifoit une fort grande révérence, nousmettions tous la main au bonnet, & nous levions & fléchiffions la tête , & puis nous recouvrions. Ainfi commen5a , finit & acheva fa harangue ledit fieur archevêque, avec une fort grande hardieffe , éloquence & bonne grace, fans jamais s'égarer ou fe perdre en facon que ce foit , & toujours bien entendu par toute la-falie, en laquelle y avoit plus grande compagnie deux fois qu'il n'y en avoit en ladite propofition. Lui donc ayant heureufement commencé, pourfuivi & achevé fadite harangue, fe mit a genoux , & puis s'en alla remettre parmi meffieurs les prélats en fa place. Après lui fe ptéfenta M. le jeune baron Y x  340 E T A T s de Senecey, qui, avec toutes les mcmes cérémonies , fut ouï, Sc prononca fa harangue de bonne grace Sc affurance; mais elle fut courte comme d'environ un bon quart-d'heure, oü celle de 1'archevêque avoit duré environ une heure Sc demie. Ayant achevé, fe préfenta M. Verforis , lequel demeura fort long-tems, Sc deux, voire trois fois plus a genoux que les autres, puis lui fut commandé par ledit fieur chancelier qu'il fe levar; mais tout le tiers-état demeura toujours debout, Sc ne lui fut jamais commandé de s'affeoir, ni de fe couvrir; ledit Verforis fut forr long en fa harangue , & n'eüt-on pas penfé, vu la groffeur & pefaateur de fon corps, qu'il eut pu continuellement parler par 1'efpace de plus de deux heures, comme il fit. Or , tous trois s'acquitterent fort bien de leurs charges, parierent librement au roi , toucherent les points d'importance pour Ie bien de tout le royaume, convinrent au point d'une feule religion, & quafi en tous autres, qui fut une chofe fort émerveillable , Sc que l'on eüt jugé procédet du Saint-Efpriten fomme tous trois mériterent une grande louange; mais pour pariet a la vérité , felon mon petit jugement, Sc fans aucune paffion, M. de Lyon mérira le premier honneur; car, Sc en pureté de mots  sous Henri III. 341 bien choifis, Sc jamais répécés, 6c en accommodation de fentences Sc hifbires , Sc en véhémence de perfuafions & vérité du fujec, il furpaffa les aucres, defquels le dire ne fut quafi qu'une répétition du fien ; tous trois toutesfois furent fort prodigues de louanges euvers la reine mere, St particulierement celui de la nobleffe , qui la fit plus grande que la mere de S. Louis ; mais j'ai opinion qu'ils le firent pour lui faire avaler plus doucement famertume que lui apporteroit ce qu'ils devoient demander contre les érrangers ; car tous trois parierent aigrement contte eux tous, excepté les princes, Sc conclurent qu'il s'en falloit paffer; les raifons pourquoi, corame auffi les beaux traits de leurs harangues , je ne veux toucher ici, car tout en a été depuis imprimé. Eux donc ayant achevé, le roi prit la parole, & fort gentiment & difertement fit entendre combien telles remontrances lui étoient agréables, promit y fatisfaire en tout ce qui lui feroit poflible, 5c furtout pour le fait de la religion catholique, pour laquelle il protefia de nouveau vouloir employer fa vie propre ; enfin nous ordonna k fous de 11e bouger ni partir de ce lieu qu'il n'eüt répondu aux cahiers de tous fes états. Cela fait, il fe leya, 8c chacun, ou la plupart, donnant  34* E T A T s la principale Iouaage audit fieur de Lyon, les autres taxant la longueur dudit fieur Verforis, & fes difcours affez mal Hés, fentant plus fes plaiaoyers du palais, que non pas la harangue d'un grand orateur , qui fur-tout doit fuir la confufion qui apparoiffoit quelque peu en fadite harangue. On le biama aufli bien fort d'avoir diflïmufé fur Ieselecbions & autres chofes. Chacun aufli difoit bien de M Senecey ; mais il ne faut oublier qu'entre fon pere & M. de Brion , frere de M. le grand-écuyer, y eut un petit différent pour leur féance , & en vinrent jufques a s'entrepouffer un peu, de quoi M. de Guife étant averti, defcendit du haut théatre pour les venir appointer; ce qu'il fit, & advint cela avant que le roi füt arrivé en ladite falie. Mais ne faut oublier que ledit fieur d'Embrun fut repris en la fuperfcription des lettres qu'il écrivoit, d'autant qu'il n'avoit mis que : A Meffieurs, Meffieurs, &c. Et il fut dit, que vu que cette aflemblée repréfentoit tout le corps de l'églife , il falloit qu il mk : A Meffeigneurs, Mefieigrieurs , ainfi que l'on faifoit quand on écrivoit aux cours fouveraines. Ne faut oublier aufli que lefdites lettres portoient, que les troubles dudit Dauphiné venoient de la mutinerie du tiers-état contre Ia nobleffe, au milieu  * o v s Henri III; Hl 'dé laquelle mutinerie , tooc le bien de 1'églife; étoic faifi , ou ravi de pare ou d'autre. Or, ces points étant vidés, on vint a traiterde la préfidence ; mais, ó Dieu , quelle peine & quel rompement de tête cela nous fit ; car d'un cóte M. de Lyon nous remontroit qu'il étoit primat, & en fa primatie, & que felon l'ordre hiérarchique il devoit préfider; d'ailleurs M. de Bordeaux difoit qu'il étoit auffi primat & le plus ancien , Sc qu'en toutes aflemblées 1'honneur de préfidence avoit été déféré aux plus anciens, fans que le lieu oü on étoit app'ortat quelque avantage ou défavantage a la préfidence. L'affemblée de fon cóté maintenoit tacitement, que ni 1'un ni 1'autre ne devoit préfider, jure, vel antiquitaüs , vel primatie:, a caufe que la.il n'étoit pas queftion de leur jurifdiólion, mais d'un fait public pour toute l'églife , ou un évêché , ou archevêché ne reconnoiffoit 1'autre pour fupérieur. De moi je le maintins apertement, me fondant que fi 1'un ou 1'autre emportoit droit de préfidence , il ne faudroit jamais que les affemblées éluffent de préfident; car pour cerrain on feroit par tout ou on iroit en primatie, &C partant voiü votre préfident tout trouvé, s'il y eft, & n'y éranc, le plus ancien d'après ai s'attribuera la préfidence, Je n'ofois pas dire •< s, Y 4  J44 ÉTATS par tel moyen le roi nous donneroit tel préfident qu'il voudroit; car il ne faudroit que dire : je veux que 1'aflemblée fe faffe la ou la, & le préfident feroit fait , & créé de même. En quelque affemblée aufli qu'on foit on na pem faillir de trouver le plus ancien in promotion , Partant (difois-je) vous voila dépouiliés de toute éiedion; que fi (repliquois-je après) ni le primat, ni le plus ancien ne font fuffifans, comment fera compofée cette affemblée? il y aura (peut-etre) plufieuts beaux membres fous un chef mal féanr. Vous voulez donc (difoit M. de Lyon ) introduire une éleétion , & par icelle faire un autre monflre; car tacitement vous entendez élire celui qui fera le plus agréable i la compagnie; & fi vous prenez Sc choififfez un curé, eft - il raifonnable qu'il préfide aux évêques? efl-il raifonnable qu'un évêque préfide aux archevêques ? Sc concluoit comment j'étois fi hardi d'alléguer cela, & s'ébahiffoit fi la compagnie vouloit mettre cela en délibération. Sur quoi ladite compagnie lui dit, qu'il étoit raifonnable qu'on en délibérat, Sc pour ce il vit qu'il étoit requis que lui Sc M. de Bordeaux aufli fe retiraffent; ce qu'ils firent après s'être fans infinis honneurs 1'un a 1'autre, Sc protefté» favoir, celui de Lyon , que teut ce qu'il fai-  sous Henri III. 34$ foit n'étoit que pour maintenir 1'honneur de fon églife & primace , & celui de Bordeaux, que l'ordre accoutumé être tenu en l'églife, &c 1'honneur dü a 1'ancienneté lui faifoit débattre ladite préfidence. Eux retirés, Paflemblée arrêta incontinent que ni Pun ni 1'autre ne préfideroit per jus hinc inde ptcetenjum ; mais on procéderoit a la pséfidence par éleébion, fervaio tarnen ordinc hUrarchico^èc a cette caufe celui qui préfideroit, préfideroit per concejjionem , & non alias. Cela conclu,l'on fe mie a élire; mais pour parler franchement d'une compagnie célebre ou j'étois, & en laquelle j'avois voix, il faut que je confeflè que nous fommes hommes, 6c que combien qu'on eut le jour de devant appel lé Deum prxjïdem , cV ultorem , combien que le dimanche précédent, moi n'étant encore arrivé en ladite aflemblée , on eut communié , fi eft - ce qu'il étoit aifé a juger que tous les efprits ne procédoient pas a cette éleótion comme reconnoiflant Dieu préfident, car il y fut découvert des paflions merveilleufes, les uns tenans bon pour ledit fieur de Lyon , les autres pour celui de Bordeaux; enfin, fix provinces élurent M. de Lyon, & fix autres M. de Bordeaux; reftoit la province de Bourges, a qui érant demandé Popinion, elle dit qu'elle n'en pou-  J45 , ,E T A T S voit donner, a caufe qu'elle étoit mi-partie; Voila donc 1'afTemblée en plus grande peine que devant, les uns difanr qu'il falloit y procéder via fcrutimi , par petits bulletins mis en un calice, qui de fait fut apporté fur table ; les autres qu'il falloit fe réduire les uns aux autres \ une tiercé opinion fut encore mife en avant, qu'il les falloit faire préfider tous deux, & qu'il n'y auroit point de danger , pourvu que ce fut per concejfionem. Tout cela mis en délibération, rien ne plut, finon que l'on adhéra quelque peu acette tiercé opinion, mais auffitót elle fut divifée en deux doutes; car les uns vouloient que ce füt alternativement, les autres'que ce füt par enfemble. Que dirai-je la-deflus, ces difEcultés furent débattues aprement, & les deux factions étoient fi opiniatrement & étroitement bandées 1'une contre 1'autre , qu'elles nous tinrent depuis neuf heures du matin jufques a entre une heure aprèsmidi; car perfonne ne vouloit démordre, & foupgonnoit - on que quelques prélats de la compagnie faifoient fecrettement telies menées contre monfieur de Lyon, pour quelque mauvaife opinion qu'ils avoient concu de lui, ou pour quelque envie qu'ils lui pcrtcient, pour avoir été fait depuis nagueres confsiller du roi  sous Henri III. 347 en fon confeil étroir, chofe qui les faifoit entrer en telle défiance de lui qu'il faillit ce jour-la a recevoir une honre merveilleufe, Enfin fe fachant la compagnie , principalement de ceux qui en fimplieité de cceur procédoient en cette éleótion , & fe fouvenoient que ledit fieur de Lyon avoit tant bien fait aux états de Blois ( le fufdit Guillaume de Taix parle ici d'une affemblée générale du clergé , tenue a Melun, en 1579, oü il .étoit député pour le clergé de la province de Sens ) , tk depuis s'étoit montré avoir fi bon zele au bien eccléfiaftique ; qui aufli craignoient que fi par indignation il s'en alloit de 1'afTemblée, comme il eut fait fi on lui eut donné un préfident par deflus lui prefferent 1'affaire de fi pcès qu'il fut conclu qu'öté tout fcrutinium , & toute alternation , les fufdits deux archevêques préfideroient tous ' deux par enfemble avec égale puiflance, & fans avoir autre voix que celle de leur province. Et quant a la difficulté que faifoient ceux qui avoient envie de rompre cette conclufion, Sc exclure du tout ledit fieur de Lyon de la préfidence, a favoir qui parleroit le premier d'eux deux , qui colligeroit les voix , qui prononcereit les arrêts ; il fut dit qu'ils étoient tous deux fi prudens & fi bons amis qu'ils s'en  34* E T A T S accorderoient bien par enfemble , & de fair Pon remit cela a leur difcrétion. Voila la fin de la plus facheufe difpute qui pouvoit fe paffer en toute cette aflemblée; laquelle terminée , on pria meffieurs les évêques de Ba^p Sc Noyon, avec les deux promoteurs , d'aller appeller les fufdits lieurs archevêques, qui de quatre a cinq heures durant avoient été abfens , attendant cette réfolution , Sc les faire remonter en la falie de 1'aflemblée^, oü leur étant prononcé cet arrêt par monfieur 1'archevêque d'Aix en Provence, ils 1'accepterent tous deux fort gracieufemenr, fous toutefois les proteftations qu'ils fe firent 1'un Sc Pautre, que cela ne put préjudicier a la prééminence de lears églifes ; dequoi ils requirent acte, qui leur fut accordé; Sc fur ce point chacun fe retira pour aller diner, ayant a bon efcient jeüné la veille de la faint Jean. L'après -dlné dudit jour, fur les quatre heures, meffieurs fe rafiemblerent pour vuider les deux autres points propofés, favoir comment on opineroit, ou per capita ou per provincias, Sc quell© province parleroit devant ou après; il fut conclu que Pon opineroit per provincias, pour obvier a la Jongueur des opinions per capita, efquelles chacun fe voudroit montret avoir  5 O V S H E K K I III. 34} bien étudié, <5c être de bon jugement aux affaires, & par ce moyen tiendroit quafi toute une matiné 1'affemblée en audience pour une feule affaire. Outre cela la colledion des voix feroit trop pénible pour les préfidens , s'il falloit fe fouvenir de toutes les opinions en un fi grand nombre : pour obvier a ce , il valoit mieox que chacune province prie fes députés ï parr, Sc qu'il füt réfolu entre eux cè qu'il leur fembloit de ce qui fe traiteit, Sc ptjis les fiffent rapporter par 1'un denree eux; ce faifant, il n'y auroit que freize voix a colliger, n'en ayant chacune province qu'une feule, & n'y étant plus celle d'Embrun. Et quant a la féance , &t ordre de parler, j'avois baillé un billet que j'avois tiré d'un vieux protocole , auquel tous les noms des archevêchés étoient écrits; il fut dit que le dernier mentionné audit billet commenceroit è parler le premier , & les autres confécutivement jufques au premier; Sc a une autre délibération, le fecond dudit billet commea. ceroit, & puis le tiers , Sc puis le quart, Sc ainfi des autres, jufque a ce que chacun eut été le premier a fon tour. Cela fut trouvé fort bon Sc raifonnable, pour obvier a toute ambition , contention Sc querelles qui pouvoient venir des jaloufies dune prérogative Sc précminencc.  35° E ï a t s Après cet ordre écabli , il fut avifé de terminer le différend des doyens des églifes cathédrales &c abbés titulaires pour la préféance qu'ils prétendoienc les uns fur les autres. M. de Cïteaux commenca, & fit une longue & doóle remontrance pour les abbés ; il lui fut fur l'heure, répondu par M. le doyen de Langres, & faut que je dis qu'a bien affailli bien défendu; il eft impoffible de mieux dire de part ni d'autre, & leurs deux harangues mériterent beaucoup , defquelles pour ce que j'en ai pu retenir, ledit fieur de Citeaux alléguoit quatre principales chofes pour nous convaincre. La première, qu'en infinis textes dês canons qu'il ailégua , les abbés étoient toujours nommés les premiers; la feconde , qu'ils étoient facrés & avoient puiffance de conférer ordres; la tiercé , qu'aux conciles & affemblées de Rome ils avoient place & voix, ce que n'avoient pas les doyens ; pour la quatrieme, il produifit un acte d'une affemblée faite a Orléans il y avoit cent ans, en laquelle 1'abbé de Citeaux, tV quelques autres abbés, avoient été immédiatement après les évêques & devant tous autres commis des églifes du royaume. Ledit fieur doyen de Langres lui répondit au premier point, que fi le loifir lui étoit donné de  sous Henri III. 351 tefeuilleter les canons, il en trouveroir beaucoup oü les doyens feroient mis avant les abbés ; mais que fans fe donner cette peine , cela n'apportoit pas grand droit; car il dépendoit de la volonté de ceux qui écrivoient lefdits canons , & qui vouloient par avanture favorifer a la fainteté de quelques bons abbés de ce tems la , ou a farnitié & connoilTance qu'ils avoient avec eux; mais pour efFacer cette première raifon , il propofoit pour un argument invincible , l'ordre ancien de la hiérarchie de l'églife, auquel les abbés étoient mis poft oflarios, n'ayant aucune place aux ordres tk dégrés de l'églife , oü au contraire les doyens & chanoines ont été de tous tems le fénat, & les freres des évêques. Que Saint Bemard les avoit reconnus pour tels, ufant de ces mots en fes ceuvres , Dominis mtis, & m a gift ris t Dominis Decanis. Et pout le regard de la confécration & puilTance de donner ordres, il répondit que quant a ladite confécration , il confeffoit que cela leur étoit un hönneur procédant de la volonté des papes & évêques , pour lequel ils ne devoient prétendre grande prééminence par-delfus lefdits doyens, qui étoient comme facrés in ipfo corporc epifcoporum quorum membra trant. Et davantage la confécration abbatiale a plus  5: ' £SZ £ T A T S été pour Iionorer les maifons de religion que pour donner autorité aux abbés extra ilias (al. Juas) domos. Quoi qu'il en foit, les abbés ne devroient, felon Popinion même de SaintEernard, haberc annulum , vu que nullam conirahunt cum ecclefiis fuis matrimonium. La crolTe auffi & la mitre ne leur fert qu'aa cloïtre, pour humilier toujours de plus en plus les religieux fous la conremplation de tels ornemens, qui toutefois ne font pas que les abbés fint fratres tplfcoporum, comme les doyens; mais ils font feulement appelles &commandés par les évêques, fils, qui emporte en foi fujettion; mais qu'il étoit bien aifé a voir oü readoient meffieurs les abbés d'aujourd'hui, en fe voulant élever pardeffus les doyens, c'eft que comme leurs prédécelfeurs du lieu qu'ils tenoiént le plus bas en l'églife , même après les ofiiarii, comme dit eft, ils font venus, en pouflant les autres, jufques au degré oü ils font aujoutd'hui. Aufli eux voudroient bien encore en pouflant arriere les doyens, fe mettre par-deflus les évêques même s'ils pouvoient. Et pour le regard de conférer ordres, cela ne leur fervoit de beaucoup pour obteuir Ie lieu qu'ils demandent au- deflus defdits doyens, vu qu'il y a affez de doyens , & autres dignités eccléfiaftiques, qui ont  SOUS H Ê N R I UI. ont pareille puiffance en ce royaume , & ph,s grande avec; car fedibus vacanübus , ils font évêques eux-mêmes, & funguntur vero epijhopotum muaere eüam fupcr abbatts, fi par privilege ifc n'en font exempts; ce que les abbés ne fatiroient & ne purent oncques faire : dailleurs ladite puiffance de conférer ordres ne s'étend que in dauflro , & encore c'eft par privilege , qui ne peut être donné au prc'judice de ceux qai y ont imérêt, fi ce n'eft de leur confentement. Voila pour répondre au fecond poir.r. Et quant au tiers , qui concerne la féance Sc voix aux conciles & aux affemblées & proceffions de Rome, il y fatisfit, difant que s'il éto.t queftion du concile de Trente, les doyens n'avoient garde d'y affifter & demander leur place, vu qu'ils n'y étoient point appel/és- Sc pour le regard des autres, il eft certain ' meffieurs les évêques y affiftant, repréfentoient leurs églifes Sc chapitres; Sc pour cette occafion les doyens étoient la avec eux, in ilhruni 'orPorctJiitadicendum. De facon que Ia féance defdits abbés ne leur apporte aucun préjudice * idem fmticndum des affemblées & proceffions de Rome, encore qne , comme monfieur de Citeaux a dit, il y »fc a Rome quelques doyers & archidiacres , felon les rems Sc occafion, Tome. XI)7. ? ' 5  354 E T A T s qui ne précédent les abbés, ni en aflemblée," ni en proceflïon ; fi eft-ce que cela n'y fait rien, car il eft a préfuppofer qu'ils font li pour affaires , Sc non pour quereller des féances: & fi la dévotion leur prend d'aller a une pro* ceflion , ils aiment mieux tenir quelque petit lieu , humblement & couvertement, que d'aller préfomptueufement prendre rang devant les autres, cette modeftie leur donnant plus d'honneur , que ne feroit une trop audacieufe témé«! rité. Pour le regard de l'aéte propofé il y a cent ans , Sc qui faifoit le quarrieme point,. il dit que cela n'obligeoit perfonne, Sc qu'il n'étoit pas donné avec lui; d'avantage, il potte ce mot de commis, & on ne fait qui ils étoient, pout le moins n'eft-il point dit qu'ils fuflent doyens, Sc pour ce il n'y falloit avoir égard. Voila la fin, concluant par d'autres gentils difcours, comme les moines euflent été pris des chapitres, que les chapitres en euflent fondés plufieurs, Sc le pouvoit, & en fomme que les moines n'étoient du monde , ni de la hiërarchie ancienne eccléfiaftique, ainfi qu'ils ne devoient quereller cette prééminence , laquelle il fupplioit meflieurs les affiftans vouloir adju ger préfentement a nous autres, Sc en débeuter du tout lefdits abbés.  SOÏI Hl N R I III. j.j Ayant achevé ce propos, il y eut un député de Narbonne, doéteur en théologie , qui nia tout a plat i M. de Citeaux , que les abbés euflent voix délibérative aux conciles; mais qu'ils difoient feulement ces mots: confenjt, & fubfcripfi. Pour moi je demandai audience pour-un petic mot, qui, m'étant, accordé par MM. les préfidens, j'aflurai tout haut a la compagnie , que non-feulement un doyen de Troies, mais aufli un archidiacre , Sc au défauc d'un doyen, ou d'un archidiacre , un fimple chanoine précédoit tous les ebbés du diocefe, foit aux aflemblées, foit aux proceflions. M. de Citeaux fe facha contre ledit de Narbonne, & contre moi, difant que nous 1'interrompions en fa réplique qu'il vouloit faire ; confeiïa toute. fois que ce que j'avois dit étoit véritable, mais que ce que ledit de Narbonne avoit allégué étoit faux. Sur quoi il répliqua quelque chofe fort a propos, Sc toutefois non fans colere , difant que ledit doyen Pavoit piqué : & ledit doyen au contraire reprit Ie propos, & demanda qu'on lui fit droit , & a nous aufli, difant joyeufement ce mot; Meffieurs, il y a long-tems que nous fommes au bas bout; ditesnous, s'il vous plaït, afctnde fuperiüs , c'eft le fruit quo nous efpcrons de netre longue hu- Z a  356 Etaïs miiité ck modeftie. Or, difoic-il cela d'autant cjue ledit fieur de Citeaux, & les fieurs abbés de faint Benigne de Dijon , faint Vincent de Laan , & faint Pierre de Vienne , tous trois gentilshommes de fort bonnes maifons , & bien apparentés , tous trois titulaires, & a qui nous déférions beaucoup , tant pour les chofes fufdites, que pour leurs honnêtetés, comme auffi. audit fieur de Citeaux , pour fon bon favoir, grand age & expérience merveilleufe es chofes du monde, étoient toujours aflis immédiatement après les évêques. A quoi ledit fieut de faint Pierre , au nom des autres, dit qu'il prenoit meflieurs les archevêques & évêques pour juges de ce différend ; & quant z nous que c'étoit chofe afiurée que nous le définons comme eux , efpérant qu'ils porteroient le parti de leurs membres , fans toutefois fonner mot. S'étant lefdits abbés retirés , nous nous retirames aufli, & fümes fuivis quafi de tous les autres députés, comme y ayant intérêt , a caufe qu'ils étoient quafi tous , o& archidiacres, ou tenant autres dignités en l'églife; de doyens des cathédrales , il n'y avoit que celui de Sens, celui de Langres &c moi, qui étions afliflés de celui de faint Quentin , & de celui de Provins. Meflieurs les prélats feuls  SOUS HïKRI Hl. J & de leur confeil, comme il vous a plu de nous le commander , mais auffi de tous leurs moyens, encore que de ma partje fois réfolu de m'y employer jufqu'a la derniere goutte de mon fang , & au dernier foi de mon bien. Je veux outre cela, Sire, vous dire, puifqu'il vous plak me le commander , mon avis au m.eux qu'il me fera poflJb]e . M pas tel qu'il devroit être, & tel que je fouhaitero.s qu'il füt pOUr vous contente ; il vous plaira de m'excufer , & en attribuer la caufe feulement a la foibleffe de mon efprit , au pnx de la grandeur & de 1'importance de la matiere, & non i faute d'affeótion que j'ai a votre fervice; j'ai donc penfé, Sire, être bon de cemmencer par les moyens qui me iemblenr les plus convenables pour porter cha¬ cun  SOUS H £ N B. I III. mn i la douceur, i vous obéir, 8c pour ce, rejetter les calomnies qu'aucuns voas pourroient donner, de leur avoir fauffé votre promefTe , pour vous faire paroitre prince véritable, comme vous 1'êtes, & par tels moyens les difpofer z fe fier en nous , ainfi que feront tous ceux qui auront encore quelque refte de bonne volonté. Dela , je viendrai fujr 1'occafion qu'a votre majefté d'apprêter fes forces pour établir la paix , afin de chatier les méchans , Sc conferver les bons: & en dermer lieu , étant contraint d'entrer en la guerre , je vous repré fen te rai les moyens que vous pouvez avoir d'entretenir vos forces, Sc les chofes qui me fernblent les plus néceflaires que vous avez & confidérer en la conduite 6c en 1'exécution d'une auffi grande 6c auffi difficile entreprife que celle-ci. Sire, je commencerai a dire z votre majefté, que comme tous les grands & foudains changemens font dangereux en un état, pour les inconvéniens qu'ils amenent, celui-ci, que vous avez un peu diligenté , n etant pas des moindres , a boa befoin d'être fagement exécuté , comme vous avez déja délibéré de faire, afin que l'iflue de cette entreprife, qui eft fi chrétienne, fi vertueufe Sc fi hardie, venant a bien fucr Tornt XIII. A a  }70 E T A f S céder, Vous faffe accroitre 1'honneur & Ia louange que vous méritez , & qu'elle vous empêche de le perdre , comme vous feriez fans doute , fi le contraire advenoit. Aufli je prévois bien que de la fin de cette entreprife dépend le comble de votre féücité ou la perte totale de votre état. II vous plaira donc , Sire , ici diligemment 8c foigneufement veiller, pour y prévenir ceux qui vor.droient anticiper fur yous, ainfi «jju/il a été ci-devant fait. Je louerai , Sire , fans comparaifon plus la piété 8c la clémence en un roi, rel que vous êtes, envers les fiens , que la rigoureufe juftice ; 6c par même moyen , je trouverai fort bonne votre procuration , de tacher a réduire vos fujets a vous rendre l'obéiflance qu'ils vous doivent, en vous fervant des moyens les plus doux , plutót que de la force. Pour cela , Sire '% j'eftimerai qu'il feroit trés-bon de fe fervir des exhortations Sc admor.itions amiables que quelques perfonnages délégués de votre part feront au roi de Navarre , a M. le prince de Condé 8c M. le maréchal Dampvilie 8c autres , même quand elles feront accompagnées d'une certaine affurance de votre bonne grace Sc d'un entier oubii des chofes paffées, pourvu qu'ils vous reconnoiffcnt pour leur roi j ce fera un témoignage  s. o v s H i i III. 371 jeertain de votre bonté, & de 1'amitié que vous avez en leur endroit, 8c il fera d'autant plus fort que vous le6 enverrez rechercher jufques en leurs maifons , contre la fa^on ordinaire de tous les princes fouverains. Les prieres 8c les perfuafions que , fuivant votre volonté , leur feront auffi quelques délé*-, gués par les gens des trois états de votre royau-. me , ferviront d'un affez ample témoignage du defir que vous avez de les reten^: avec eux, de les retenir avec vous, 5c de les voir réunisavec tout le refte du royaume , ne voulant admettre a une fi bonne oeuvre aucune chofe qui foic en votre puiffance. D'ailleurs la déclararion de votre vouloir & le commandement expres que vous avez fair aux lieutenants-généraux de vos provinces, de conferver en toute sureté ceux qui fe difent de la religion réformée, & autres de leur parri & de les prendre en leur proteétion," ne bougeant de leurs maifons, rendra unepreuve certaine a un chacun de la bonne volonté , voire de 1'amitié que vous avez a Pendroit de tous vos fujets, qui vous font 8c qui vous feront obéiffans. Donc il me femble, Sire , que vous ne pourriez pas, pour ce regard , faire davantage ; 6c que fi par ces doux 8c gracieux moyens vous ne pouvez leur fléchir le cceur 8c les, Aai  jjX E T A T S induire a vous rendre i'obéifiance qu'ils vous doivent, il fera mal-aifé de croire qu'aucuns autres de telle qualité puilTent profiterde quelque chofe. Je ne crains rien , Sire , finon que tous ces bons offices ne foient pas pris en bonne part, a caufe des perfuafions que l'on pourra faire a plufieurs , qu'ils leur eft impofiible de fe fier' ci-après fur vos promeffes, leur ayant fitóc fompu la foi^ le ferment fi foSemnel que vous leur avez n'aguere fait en public , tenant votre lit de juftice au parlement de Paris , fur Pentretenement de Pédit de pacification du mois de mai deruier paffé. Car on les portera a fe foulever, Sc a fe réfoudre de courir plurót la fortune d'ctre tué ies'armes au poing que d'être maflacrés en leurs maifons, chofe qui én apparefsce leur paroirra véritable Sc d'autant plu;, qu'ils ont été nourris en une conrinuelle déhance. C'eft ce qui m'a donné occafion de faire apparoir le contraire , afin que vous puiftiez juger que ceux qui diftcreront de vous obéir , ne feront pas ret'enus pour aucune occafion qu'ils aient de ne fe pas fier en votre très-véritable parole; mais pour une certaine malice qui fera dedans le cosur. Ma raifon eft que nul ne doit différer de fe  sous Henri III. '373 Ücr en celui qui a la crainte de Dieu devant les yeux,quieftobfervateur& de fa foi & de fa promefle. Or, Sire, vous ne pouvez, avec un plus amplerémoignage , vous faire paroitre tel qu'en declarant que vous voulez entrerenir Sc garder le ferment qu'avant tous les autres vous aviez fait a Dieu Sc a tout votre royaume ; puifqu'il ne vous eft aucanement permis d'y contrevenir, 1'ayant fait en jugement, en vérité, Sc avec révérence: ce font les ti-gis condicions qu'un bon ferment doit avoir pour obliger les perfonnes a les garder & pour faire connoure qu'il foit tel. En premier lieu chacun a vu que vous 1'avez fait i votre plus grand èc trèsvéritable lit de juftice 3 auquel une fois feule pour route votre vie vous prononcez, comme en jugement, vos plus dignes & vos plus excellents décrets. Secondement , pouviez-vous affirtner chofe plus vérirable que d'être très-chrétien, comme vous 1'avez fait, en promettant Sc en vous obligeaut , comme tous princes catholiques font tenus de Ie faire en cette occafion? En eftét, le ferment du facre eft la feule marqué Sc le véritable témoignage de la foi intérieure d'un prince portam titre de cbrétien. En dernier lieu, ruil ferment ne fe peut faire avec plus de révérence Sc de crainte que devant  174 E T A T $ le corps du créateur, comme vous avez fait le votre en le recevant, ou pour votre fanétification , ou autrement pour votre domination. Davantage , non-feulement c'eft un ferment, celui que vous avez fait a votre facre , mais un contrat exprès Sc folemnel fair avec Dieu en le requérant, qu'ainfi que vous le garderez de même il vous aide. C'eft un ferment, Sire, que nul ne vous pourra perfuader de ne pas garder, fans vous aflurer enfin que Dieu , au lieu de vous aider, ne vous faffe périr mifcrablement, ainfi que vous 1'avez requis en le faifant. Cela montre affez que vous ne 1'avez pas pu révoquer , Sc que vous êtes tenu de le garder. Que fi nous voulions avouer qu'un tel ferment fe peut enfreindre, a pareille raifon , l'on en pourroit autant dire des vceux des gens d'églife» qui font d'une femblable obligation ; de quoi il s'en enfuivroit une fubverfion totale d'état. Donc, il faut conclure qu'il ne vous eft pas loifible de rétracler ce qu'avec tant de cérémonies, vous avez juftement promis a Dieu & a tout votre peuple, quand il vous avoue pour fon roi, moyennant les fufdites & autres promefTes; non plus qu'il vous eft permis de rétraéter^ celle que votre majefté a faite d'être chrétien, & encore moins pour une fimple oc-  sous Henri III. 375 cafion. Quant a moi, je crois fermerneut que ceux qui fe difent de la religion réformée , & qui réellement en font profeiüon, ne pourront pas s'cloigner de cecte mienne opinion, pour praciquer le femblable , quand ils enfeignent que les fideles ne fe peuvent obliger * ni moins encore être tenus de garder ce qu'ils auroient ju ré contre 5c au préjudice de leur première obügation, 5c de la proteftation faite en leurs temples ; 5c que tous les fermens 8c toutes les promefiês qu'ils pourroient par après faire au contraire du premier ferment, ue les obligeront aucunemenr a les garder. Ce que n'aguere ont trés - bien pratiquéle roi de Navarre , M. le prince de Condé, 8c autres des principaux de leur opinion, quand après avoir fait ferment fi folemnellement, 8c promis de leur franche volonté, en 1'églife catholique , de vivre felon la religion apoftolique &C romaine, ils font néanmoins retournés a leur prétendue religion. Ce qui. eft un affez. fort argument pour leur faire trouver bon que vous ne gardiez pas une promeffe extorfionnaire &£ quafi contrainte , laquelle vous avez faite au préjudice de votre premier , jufte 5c folemnel ferment, voire inviolable contrat que vous avez. fait avec Dieu, par lequel vous êtes obligé de Aa 4,  37* , E T A T S ne permettre pas qu'il fe falTe en votre royaume aucun autre exercice de religion que de Ia vótre; ce que même les rois & les reine* d'Angleterre ont fait de notre tems en leurs pays,. & ce que les princes d'Allemagne font auffi,. & tous les calviniftes aux leurs mêmes, a Geneve. II y a encore un autre point a confidérer , qui eft, qu'ils tiennent que nos gens d'églife ne fe penvejit pas obliger par les vceux qu'ils font en religion , d'autant qu'ils les eftiment contraires i la parole de Dieu; c'eft pourqaoi ils leurs permettent de fe marier. Pourquoi donc trouveront-ils mauvais que vous ne vous tcniez pas obligé de garder une promeffe que vous avêz faite direétement contraire i la parole de Dieu, a votre religion, & préjudiciable aux loix de votre royaume? 11 n'eft pas, ce me femble, raifonnable qu'ils ayent des privileges plus grands en leur religion que nous en Ia notre. Partant, Pon ne peut en vérité dire autrement , finon que vous feriez très-mal de vouloir tenir uné promeffe qui eft du tout contraire si vowe confeience & a la parole de Dieu; car chacun fait afïez que l'on ne doit pas obferver un ferment pernicieux & méihant. L'on fait qu'Hérode fut biamé d'avoir fait mourir faint Jean-  «OVS'HSNRI III. 377 Baptifte, pour ne pas violer Pinjufte ferment qu'il avoit fait a fa fille , comme Pont aufli été d'autres en pareil cas. Par conféquent, Sire , votre majefté fereit aufli grandemenr blamée fi elle vouloit garder Sc renir une promefTe, par laquelle elle feroit caufe de la mort éternelle de tant de millions d'ames de fes pauvres fujets, qui feroient féduits par les miniftres hérétiques. Je ne veux pas nier que ce ne foit un ferment, celui qu'au mois de mai dernier vous avez fait en votre cour fouveraine du parlement de Paris, pour 1'entretenement de- votre édit; mais je dirai aaffi que Pon volt a i'ceil votre intention'.er* plufieurs endroits d'icelui, ou vous Paare'z feit' conditionéllemfent ,< après avoir con* fidéré qu'il n'eft pa's en votre puiffance feule de faire tenir ün concile général, Sc qu'il n'y a guere que trois ans qu'il en a été tenu un fort- libre, Sc fort folemnel; même' qne tout votre royaume, par les gens députés des trois états affembiés en cette ville, a réfolu de vous fupplier dè ne pas permettre qu'il foit plus exécuté autre religion que ia catholique Si romaine. Et pour conclufion , tant pour les raifons fufdites \ qüauffi paree qu'au lieu que vous aviez-penfé que votre édit apporteroit ia  '37* Etat» paix en France, au contraire, il étoit prêt d'engendrer encore d'autres divilions Sc d'autres malheurs plus grands, Sc que vous voulütes , en modérant cet édit, vous faire cennonre pour roi catholique , Sc obfervateur de votre parole. Je crois bien que la défenfe que vous ferez qu'il ne fe faffe plus en ce royaume autre exercice que de la religion catholique, fachera ceax qui fe difsnt vrais réformés. Toutefois , s'ils ont la crainte de Dieu devant les yeux, & s'ils ont de la charité fatemelle , iis ne voudront pas être caufe de mille méchancetés qui fe commettroient a leur occafion en ce royaume, ■voir même de faire déchirer leur patrie pour commodité particuliere, & pour s'opiniatrer a vouloir platót ouïr le prêche chez eux, qu'aux pays étrangers, ou il leur fera permis d'aller. Mais s'ils ne refufent pas de fe fier en la promelfe que vous leur faites , Sc s'ils la tiennent pour loi inviolable, étant faite avec les trois états de votre royaume, ils vous feront bons êc fideles fujets; & pluiót que de fe rébeller contre vous, & d'ofténfer Dieu pour ce regard , ils s'en irontailleurs oü ils auront moyen d'exercer leur religion. Ils fouffriront même plutöt la mort, ainfi que Luther confeilla de faire aux princes j?roteftans élevés contre 1'empereur Charles--  s o n Henri III. 379 Quint. Au contraire , ceux qui différeront d'obéir a vorre ordonnance, feront connoitre que ce qu'ils feront ne fera pas pour aucune jufte défiance qu'ils pourront avoir de votre majefté, ni pour le feul zele de la religion ; mais pour le peu de refpect & d'amitié qu'ils vous porteront, & pour une certaine opiniatreté qui regnera en quelques-uns, & en d'autres une avidité de s'enrichir. Vous ne trouverez pas étrange, s'il vous plait » Sire, li je me fuis un peu étendu fur cette matiere , qui appartient plutót aux docteurs qu'aux capitaines , & qui femble être éloigné de votre commandement. Car j'ai eftimé que je le devois faire ici fommairement, en attendant que d'autres mieux ftylés que moi fur icelle, le faftent amplement & en public. Ce qui eft: trés- expédient pour votre fervice , afin de foutenir & de favorifer votre première & votre gracieufe délibération, & pour faire connoitre que tant s'en faut que l'@n puiffe accufer votre majefté d'avoir faufté fa parole, & de-la , prendre occafion de ne fe fier plus en vous , comme a un parjure; qu'au contraire vous devez être loué & prifé de ce que vous 1'entretenez, ce qui fera par conféquent que perfonne ne pourra  3*» E T A T S différer k fe conforraer a votre airaable admonition. Par-Ia donc , Sire, vouspouvez voir qu'aacun hornme de bien nVaura juftes occafions de fe défier de vos promeffes; tk que s'il y en avoit aucuns qui , fous ce prétexte , voululfent différer, ou qui craignilfent de vous obéir, qu'a ceux la il fera bon de faire paroïtre au plutót votre fceptre royal, de même qu'un fage pere montre les verges a fon enfant; non pas pour le battre ni pour le uier, mais pour le tenir dans le devoir & dans 1'obéiffance. Tant plus, Sire , vous différerez de vous faire connoïtre poar roi a telles fortes de perfonnes, tant plus leur orgueil & leur opiniatteté augmenteront , & leur fetont méprifer cette fi fage admonition que vous leur faites faire, cV par même moyen ils rendront inutile la première délibération que vous avez faite d'nfer a 1'endroit de tous vos fujets de toutes les graces & de toutes les douceurs que vous jugerez a-propos, plutöc que d'aucune rigueur Sc plüt a Dieu, Sire, qu'avant que de faire votre tant fainte déclaration, vous eufliez pris en main votre fceptre royal , cela , Sire , eut beaucoup contribué a faire recevoir en bonne part votre paternelie admonition.  $ o v s H i n *. i III. 381; Je fais bien, Sire , que l'on vous dira que fi vous armiez , cela leur donneroit de la crainte & de la défiance, & leur ferviroit d'occafion pour prendre lesarmes; mais, comme |'ai déja dit a votre majefté, s'ils vous eftiment prince véricable» ils auront plus d'occafion de fe confier en votre parole, vous voyant les forces en main pour la leur entretenir que s'ils vous voyoient défarmé ; & ils ne s'en ctonneront non plus que font les catholiques : au contraire ceux qui ne fe voudront pas alTurer en votre parole, il fembiera qu'ils vous tiennent pour parjure ; d'oü je vous laifle a penfer qu'elle bonne volonré ils pourront vous porter , 8c quelle affurance vous pourrez aufli prendre d'eux. Voila pourquoi, Sire , il me femble que vous ne devez pas différer de vous rendre le plus fort, & pourquoi vous ne devez pas auffi, a 1'occafion de qui que ce foit, porter un fi grand préjudice a vos affaires. Car vous voyez manifefteraent que vous n'avezpasde meilleur moyen de ranger les outre-bloquez & la raifon 3c de conferver les bons que par la force. C'eft pourquoi je fuis d'avis qu'au plutót vous fafliez en forte de vous rendre le plus fort en votre royaume, afin que vous ayez moyen d'entre- ■  3?i E T A T S tenir la foi & la parole a ceux qui la recevront," de les conferver en leurs biens & en leurs honneurs , & de vous faire obéir par les autres. Je ne doute pas que quelques-uns ne difent que votre majefté fera Ia caufe de tanr de cruautés que Ton commettra en votre royaume, li elle ne veut pas permettre qu'ils y faflent 1'exercice de leur religion ; mais ce fera fans confidérer murement, que s'ils vous étoient obéiflants, comme ils doivent, ils ne prendroient pas les armes & ne tiendroient pas les villes; qu'il n'y auroit point degens de guerre parmi les champsqui ruinent le pauvre'peuple; & que la France feroit en paix : & ils feroient par-la obligés de conciure que le pouvoir de faire tout Ie bien & Ie mal qui adviendra a leur patrie eft dans leurs mains 6c non dans les vótres , & qu'ils feront caufes de toutes les cruautés & de tous les malheurs qui, a leur occafion particuliere fe commettront en ce royaume. Entre tous ceux de cette religion, je veux croire , Sire, que le roi de Navarre fe pourra ou fe devra ranger du coté de votre majefté, car il eft votre beau-frere , & il vous eft fi proche parent, qu'il eft la feconde perfonne, après vous, capable de fuccéder a votre couronne,  sovs'Him&i III. 3S3 I Ia confervation de laquelle il a grand intérêr. Aufli a-t-il déja expérimenté & connu votre promeflè en arrivant en ce royaume, & même de fraiche mémoire a 1'endroit d'un plus grand que lui. D'ailleurs ce lui feroit un trop grand mal d'encourir votre inimitié , & celle des états de ca royaume, pour foutenir la querelle des miniftres de Calvin , lefquels feuls vous entendez qu'ils fortent de vos provinces,' & non pas les autres , comme étant les féducteurs de vos fujets a Fenconrre de vous êc de votte état, & qui ne défirent point d'avoir de roi ni de noblefle, mais un gouvernement de république populaire, a la facon de Geneve, ainfi que les huguenots favent trés bien. J'eftime donc, Sire, que tous les offices d'amitié que vous pounez faire audir roi de Navarre feronr bien employés , pourvu qu'ils ne foient pas détournés par les paffions particulieftss defdits miniftres féditieux, qui ne feront point de fcrupule de le mèttre dans le danger de fe perdre , pour leur commodité particuliere. Je ne parle point ici de M. le Prince de Condé ,car j'eftime qu'il doit faire une même & une femblable réfolution que fera le roi de Navarre. Quant k M. le Maréchal Dampville, comme il eft catholique & qu'il a fait profeffion d'être  3.S4 Et a 1 s tel tout le tems de fa vie , & qu'il eft forti d'une race ft chrétienne, je ne puis juftemenc douter qu'il veuille plutót contrarier votre fainte entreprife que de lafavorifer, puifqu'il pourra avoir de vous toutes les füretés qu'il defireia. Aufli depuis quelque tems en ca , il a pu connoitre en fa maifon & ailleurs combien vous oubliez facilement les chofes paffées , quand on vous reconnoït pour roi; ce qui lui pourra feryir d'exempie, & le pourra faire réfoadre a vous aider comme il en a les moyens , pour parvenir au but d'une li catholique réfolution que vous avez faite. Et pourvu , Sire, qu'il plaife a Dieu de fléchir tellement le cceur a 1'un des fufdits qu'il fe range prés de votre majefté, je tiens Pentreprife très-aflurée tk trèsfacile. J'ai été contraint de mettte en avant routes les raifons fufdites pour rejetter les opinions étranges &c toutes les occafions que l'on pourroit prendre pour différer i. vous rendre 1'obéiflance qui vous eft due. Je ne Iailfë pas de craindre que plufieurs n'y faffent pas de réflexions , paree que je fuis contraint. d'appuyer mes premiers fondemens fur la feule vétité, pour ea prendre des concluflons telles que je jugerai être expediënt , afin que je puiffe vous donner un avis cer- tain j  söüs Henri III, ram , felon ma confeience , fur cette matiere, laquelle j'eftime être de très-grande importance & non fans difficulté , pour le peu d'affurance que vous avez , ayant trop d'efprits contraires au repos de ce royaume. Partant je r'eprendrai mon premier propos, & vous donnerai avis, Sire , de ne pas laifTer de pourvoir i vos affaires, pour quelque crainte qae vous puifliez avoir d'effrayer les méchans; car l'on a déji expérimenté que les forces que la reine votre mere leva en vous attendant au retour de Pologne , ne furent pas pour faire aucun déplaifir i ceux qui étoient entre vos bras, & qui vous étoient obéiffans; mais feulement contre les rebelles: donc nul ne pourra croire que les forces que vous afTemblerez foient contre lui, s'il ne veut pas être rebelle. C'eft pourquoi, Sire, votre majefté doit maintenir fe réfoudre a elle dès aufli tót que les érats feront parachevés, vers les provinces qui font les plus malades , avec des forces convenables, pour leur apporter une guérifon telle qu'il leur fera néceffaire. II feroit expédient de commencer par la Guyenne; & pour cela , il faudroit commander dès-d-préfent de faire marcher de ce cèté-la vingt enfeignes de gens de pied, de vos ordonnances qui fonc en Normandie & en Picardie , ou elles ne Tornt XIII. g k  3§6 E T A T S ferviront de guere , a caufe des alTociations que P®n dir y are bien établies; 8t il faudroit donner charge a quelques perfonnages d'honneur , de les amener aux plus grandes journées qu'il fera poflible , dans le Poitou, au commencement de février. C'eft-la que je fuis d'avis que votre majefté fafTe 1'amas de fon armée , & qu'elle affure les capitaines de leur faire faire montre auili-tót qu'ils y feront arrivés avec les cni.es de leurs compagnies qui ne font que de pinquante foldars, jufques a deux cents chacune ; & qu'elle commande expreffément a celui qui les conduira, de les faire vivre par étapes , fans fouler aucunemènt fon peuple. Lefdites vingt compagnies , avec les dix compagnies de votre garde , étant complettes , elles feront le nombre de fix rnilles.hommes de pied, qui me femble être une force affez fuffifante: pv.-L^ »v t«,-.y".r > — *r«ïrï i — ceux qui iront vers les fufdits princes bc autres , Pon voie que le befoin en requiere davantage ; car lors il s'en pourra lever au pays de Guyenne jufqu'a vingt ou trente autres compagnies, ou tel notnbre qu'il conviendra , felon les forcesde vos ennemis. Et néanmoins pour empêcher dès-a-préfent qu'audit pays perfonne n'y puiffe facilement leyer des foldacs, èi pour tenir vos,, ja AlVX >tw>t  sows Henri III. 3g7 affaires en réparation ,!il fera bon de depêche* des commiflions a quelques capicaines de ces quartiers Ia , qui foient affectionnés a votre fervice , afin d'entretenir une bonne partie dans 1'efpérance de vous fervir , advenant 1'occafion d'un tel commandement. II me femble; Sire , que perfonne n'en pourra prendre allarme fi' il eft fait avec cette condition , que l'on ne dreffe pas lefdites compagnies qu'auparavant ne fe révolte aüditv.pays contre votre autorité, & que derechef vous le commandiez. Vous avez , Sire , douze cents fuifies de votre garde , lefquels je ferois d'opilïion d'aug-' rhenter jofqu'è deux miile , ou deux mille quatre cents pour garder votre artillerie , & la conduire a bras , comme il fera befoin de faire quelquefois en des lieux eftmus inacceftibles, & par oü le plus fouvent on fuiprend les fortereffes , ce qu'avec une moindre quar.rité on ne pourroit faire. J'eftime qu'il fera bon qu'on faffe cette r«crue , fous le prétexte de vouloir' renforcer votre garde , fans que pour ce on demande une levée aux lignes , pour éviter les' frais qui y vont, & afin de ne fe mettre pas en danger d'être refufé d'eux , a caufe du mécontentement qu'ils ont de n'être pas payés d« o fe j  3SI Etat* leurs anciennes penfions , ni de leurs nouvelles dettes. Il me femble aufli néceffaire que vous ayez avec vous douze cents hommes d'armes , dcpartis en feize compagnies de trente lances chacune , faifant deux cent cinquante chevaux , qui teviendront en effet a. mille , lefquels avec deux cents archers de votre garde, cent des gentilshommes de votre maifon , la nobleffe volontaire , & les fufdits gens de pied , feront, 1 mon avis , une force fufhfante pour faire lefdits effets. Je penfe qu'il fera fart a propos, li c'eft votre bon gkjfif > de prendre une partie de celle qui eft en Guyenne , & le refte des perfonnes que vous voudrez amener avec vous. La faute de fonds que je vois en vos finances, me fait craindre que vous ne puiffiez pas aifément entretenir une plus grande quantité de forces; & pour cela je me fuis reftreint a vous donner avis de n'en pas lever préfentement davanrage. Aufli pour vous dire le vrai, j'eftime que pour le préfent il n'eft pas befoin d'en avoir un plus grand nombre : d'ailleurs advenant que l'on ne veuille pas obéit a votre majefté , il fera bien mal-aifé aux rebelles de mettre en campagne une armée approchante de  sous Hsmri III. 38* la votre. Enfin , le grand nonibre de foldats ne vaut pour forcer Sc aftamer un fi grand nombre de villes fortes qui tiendront contre vous, qu'un peu de tems qu'il vous faudra attendre contnbuera pour les réduiré a votre obéiflance , ainfi qué je dirai eft fon lieu. Quant a Péquipage de 1'artillerie , il me femble que huit eaftons , fix coulevrines , quatre batardes Sc deux moyennes; & pour dix mille coups a tirer pour chacune defdites pieces, fuffiront ponr le préfent peur un camp volant, puifque le tems ne vous le permettra pas, & que vous n'avez pas des gens de pied propres pour affaillir plufieurs villes fortes , comme je le dirai ci-aprés. Auffi un plus grand attiraïl vous coutteroit beaucoup plus , Sc ne vous apporteroit pas un grand profit. Pour le regard des pionniers j'eftime que huit cents ou mille fuffifont, pourvu qu'ane partie d'eux foit rafraichie dè deux mois en deux mois ; lefquels il feroit fort bon de faire lever maintenant, paree que de fix femaines après , vous ne pourrez pas les avoir , ni pareillement lés chevaux & 1'artillerie. Au regard des vivres, je fuis d'opinion qu'on envoie en diligence un horfiroe bien expérimentc, a Bordeaux , qui , avec M. 1'amiral Sc autres intelligens en cette affaire , avife de bonne heure a Bb 3  59° Etais faire audit pays, toute Ia provifion,qu'il vous fera néceffaire , même en cas qu'il foit befoin d'en envoyer querir ailleurs, foit par terre, ou encore mieux par mer; je fuis d'avis qu'on le faffe faire au plutor : Car, si caufe de 1'arriere - faifon , les vivres feront par-tout fort courts 5 Si d'autant plus audit pays, fi l'on n'a pas envie de vous obéir , paree qu'ils feront retirer aux villes ceux qui font d la campagne. Et d'autant qu'il eft néceffaire , tant pour les vivres, que pour les autres affaires, de tenir Ia mer en fureté , étant courue par une infanité de pitates; il me fembleroit d propos qu'il plüt d votre majefté, entre les huit galeres qu'elle a Nantes , de faire armer quelques nombres de navires, Sc d'en donner la charge a quelques petfonnages d'honneur, & bien intelligent au fait de la marine. Davantage , j'eftime qu'il faudroit mander d vos vices-amiraux de Ponant, de vous avertir de la quantité & qualité des navires dont vous pourrez faire état qui pourront vous fervir en une occafion , enfemble de ia dépenle qu'il y conviendra faire , afin qu'?u befoin votre majefté fache au vrai oü elle pourra le recouvrer,& par quels moyens.  sous Henri III. 'f4 Et paree que , Sire, a mon avis vous fte fauriez partir de cette ville qu'environ la mifévrier , a caufe que les états ne pourront être plutot parachevés , & que cependant la Guyenne pourra avoir befoiu de votre préfence ; j'eftimerois qu'il feroit néceffaire que M. de Montpenfier y fut , fok pour tacher de ranger 8c de ramener le roi de Navarre a vous aimer , vous honorer 8c vous fervir, que pour re, tenir les perfonnes a votre dévotion , & furtout pour pourvoir aux affaires qui fe pré'fenteront en attendanc votre arrivée de par dela , . qui fera au commencement de mars, toutefois je crains que fi vous lui commandez d'y aller, il n'y arrivé guere plutöt que vous , & qu'il ne vous y faffe pas ce que vous defirez, étant mal difpofé comme il eft j c'eft pourquoi , il me femble qu'il fera plus a propos a Mi$ , comme je- dirai ci-après; 8c pour ce , a ftfte de lui, il faudroit prier meffieurs de Chau.vigny 8c de la Vaugaion & autres d'aller a Bordeaux, pour conjointement avee M. I'amiral qui eft un bon perfonnage, & qui s'accotofttt)dera bien avec eux , mettre ordre , en vblis attendanc , aux chofes les plus néceffair-rr. £e ces quartiers de dela \ 8c cependant, ^otft'fctenir les prwicipaux de cette provhu-e W%a B b 4  W E T A T S votre amitié, qu'il vous plftc y ^ pIljfienfs lettres honnêres , defquelles ils fe reflentent honorés, & dont ils fafTent grande eftime / pour les montter d leurs voifins & d leurs amis. L'avermTement de faire garder les villes 'de votre royaume , & principalement les plus fortes, eft très-néceifaire, même celles des paf. fages , & oü s'exerce votre juftice ; & plót d Dieu que cela eut déjd été fait , & que pllifieurs de fraiche mémoire n'euiïent pas été furprifes • car le plus grand embarraffement que je vois en cette affaire, proviendra du grand nombre des villes fortes que vos ennerais tiennent, & il fera encore plus grand , s'ils en furprennent quelques-unes aux provinces qui font nettes, & defquelles vous faites état de tirer du fecours. II n'y aura perfonne de ceux qui fe diront vos ferviteurs, qui fe puiffent offenfer de cet avertiffement, puifque c'eft une chofe qu'eux-mêmes pourront défirer. Si je n'ai pas plutót parlé des finances qui font le nerf de Ia guerre, cd été que pour donner une plus grande intelligence d'icelles , j'ai eftimé qu'il falloit montrer auparavant quelles forces j'étois d'avis que vous euffiez prés de vous , afin que felon icelles, vous puifliez faire fonds de la dépenfe ; laquel|e  SOUS H I H R I III. 39-5 néanmoins j'avois auparavant réglée felon le p«u de moyens que vous avez , & aufli eii égard aux forces que l'on peut lever contre vous. Toutefois je n'ai fu tant faire qu'elfe ne monte par mois a environ deux cent mille livres : favoir eft ; Pour les fix mille hommes de pied, environ cinquante-fept mille livres. Pour les deux mille quatre cents fuiflés, environ trente-cinq-mille livres. Pour les cinq-cents hommes d'armès, environ cent - mille livres pat quartiet, fêvenant par mois k trente deux mille livfes. Pour 1 equipage de 1'artillerie, par eftimation, trente mille livres. Pour les vivres, ]e në puis qu'en dire ari vrai, d'autant que je ne fais pas le befoin qu'il y en a audit pays. Néanmoins, poüt entfercnir quelque équipage, pour vous faire fécoufir aux endroits néceflaireS, Sc fpécialement quand vous ferez têre-a-tète contre Parmée de vos ennemis, felon que plus particutiéreme'nf. je le dirai ci-après, je ferois d'avis dé faire état au móins de douzemille livres pat mois. Plus, pour les états de Parmée, Sz pour les parties inopinées trente cinq mille livres.. Revenant en tout lefdites fommes k deux  334 Etaii cents mille livres; qui eft ce qu'il vous faudra au moins avoir par chacun. mois pour votre armée. Et s'il vous convient faire lever en Guyenne encore deux ou trois mille hommes, la dépenfe augmentera de vingt-deux a vingt" trois mille livres par mois, qui reviendra tous enfemble, avec dix-fept mille livres que je mets pour les parties extraordinaires , foit de vivres ou autres , s\ deux cents cinquanre mille livres, y compris les cinq centshommas d'armes. Cette fomme de deux cenr cinquaate mille livres parok petite, comme a la vérité elle 1'eftj mais en la calculant pour un an , qu'il faudra qu'elle continue, elle mon te jufq.ua trois millions de livres , Sc c'eft ce qui m'éronne ; car je fais bien que de toutes vos finances vous n'avez feulement de quoi entretenir votre ordinaire en la prcfente annie. Toutefois, puifque c'eft pour la gloire de Dieu , pour le bien du royaume, Sc pour votre honneur Sc votre contentement, Sc qu'ainfi vous le vouiez, il fe faut éverruer & faire le rnieux que l'on pourra, Sc en prendre honnêtement oü. il y en aura, en 1'intention de le rendre , comme je Pour trouver donc la fomme qu'il faut pour  sous Henri III. 395 Ie premier mois je faits état que des trois cents mille fvres du taillon que vous devez recevoir par quartier , vous en aurez a la fin du prochain cent cinquante mille livres feulement, paree qu'une partie en eft aflignée $C que 1'autre ne fe pourra lever en aucune des provinces qui feront embrouillées. Ces cent mille livres-la viendront a propos pour faire faire la montre, pour un quartier , auxdits cinq cents hommes d'armes , au commencement de mars : quant au furplus , qui fe monte a cinquante miile livres , il fe pourra employer au paiement d'autres compagnies des gens d'armes , qui ferviront en Dauphiné, en Poitou,en Périgueux & en d'autres.pays embrouillés, oü il eft néceffaire qu'il y ait des forces pour empecher de mal faire a ceux qui en auroient la volonté. Plus, le pape vous baille aufti« töt quarantemille livres qu'il avoit promis 1'année derniere, pour 1'entrerenemenr, durant deux mois, de fept mille fuiftes ; cela fera environ cent dix mille livres , defquels vous en pourrez employer foixante- fept mille, a faire montie a vos bandes francoifes, lorfque les crues feront faites , &C que vous eommencerez a marcher, mais non pas plutót, afin de ménager le mieux que vous pourrez vos finances, Pour le furplus, qui fe  39* États monte a environ trente-cinq mille livres, vous les pourrez employer, avec d'autres qu'il faudra trouver par quelque moyen, au paiement des montres qui font dues aux douze cents fuifles de votre garde , afin que vous puiffiez faire avec eux un compte arrêté du tems paflé, jufqu'a cette nouvelle crue ci-defTiis dite de pareil nombre. Pour le regard, il faudra prendre par emprunt, fur quelques-unes de vos recettes générales, trente-deux mille livres, pour leur faire faire la montre en Bourgogne, & de-la au plutot, les acheminer par Défize droit en Poitou , oü je fuis d'avis que vous faffiez Pamas de vos forces. Voifa donc, Sire, comme vous pourrez affez bien payer les gens de guerre le premier mois; mais les autres ne feront pas fans grande difficulté. Toutefois voyant qu'eu cette réfolution il y va , je puis dire, de la perte ou du falut de votre royaume, je fuis d'opinion que vous preniez , par forme de pret & non autrement , la cmquieme partie des dix millions , qui fortent par chacun an de votre bourfe, fans que vous vous en puiffiez fervir d'un Hard. Certe cinquieme partie fera juftemenr deux millions par an , & par quartier, cinq cent mille livres, & par mois, cent foixante-treize mille livres j  sous Hsnr-i III. 3J7 Saais d'autant qu'il y a quelques parties de ces dix millions qui font plus privilégiées que les autres, vous pourrez a ceux-la n'y pas toucher, & des autres en prendre une dixieme partiè feulement; & pour les autres qui font moins confidérables , & qui auront moyen d'atteudre leur rembourfement, jufqu'a ce que la guerre foit finie , votre majefté en pourra prendre davantage, ou bien dès maintenant les faire affigner fur Pengagement ou fur la vente de fon domaine , une partie duquel je fuis d'avis que vous n'épargniez pas en cette occafion fi urgente, pout fauver le refte. II me déplait, Sire, de vous donner un tel avis, d'autant qu'il eft contraire a mon intention, & que je ne 1'eftime guere convenable; néanmoins j'aime encore mieux vous le donner tel, qu'a faute de ce vous laifler perdre votre état; car, pour 1'argent, vous le pourrez recouvrer, mais fi votre royaume étoit une fois perdu , il n'y a point d'argent qui vous le pent faire recouvrer. Je fais donc état de cinq cent mille livres par quartier, qui rqviendront par mois a bon compte a cent cinquante mille livres. Si les états vouloient vous fecourir de quelque bonne fomme , comme a la vérité ils le devroient faire , vous pqurriez. vous pafler  Ë I A I S de vous fervir de ce moyen, d'autant que je ne 1'eftime bon que pour une derniere nécef11 ré. Je penfe auffi que des fix cent mille livres que M. le cardinal de Guife doit recevoir par trois ans confécurifs , fur les bonnes villes de ce royaume, pour'le paiement de douze cent mille florins que vous devez au comre Manffeld , qüi a fervi les huguenots , auquel ledit cardinal s'eft obligé; vous pourrez faire état de tro:s cent mille livres qui fort'iroient de votre bourfe , & faire en forte que-ledit fieur cardinal fe contente que vous les receviez moyennant quoi il vous plaife, comme c'eft la raifon, de le défendre contre ledit comte , au cas qu'il voulut, a faute de fon entier paiement, 1'offenfer en fon évêché de Metz. Ce qui , comme je pénfe , n'adviendra pas, même recevant la moitié de fa dette. La crainte que j'ai que vous ne demeuriez court d'argent , me fait encore vous donner avis, Sire, de vous fervir de 1'argent qui fe leve pour 1'arriere-ba'n. Pour cet effet, il feroit expédient d'écrire a tous les baillifs & a tous • le* fénéchaux , d'envoyer incontinent les röles des fiefs qui font en leurs reffbrts a 1'arriereban, avec les taxes, pour connoïrre a quelle  sous Hbnri III.' 59*> fomme ils pouroient monter , li vous ne les faites pas marcher ; cette fomme , Sire , fi vous y êtes bien fervi, pourra revenir a cinq ou fix cent mille livres; celle-ci étant jointe avec la précédente du fieur cardinal de Guife, vous pourrez faire état de huit cent mille livres par an, qui reviendront a bon compte a cinquante mille livres par mois ; mais, Sire, fi vous faites réfolution de vous fervir des taxes dudit arriereban, il eft néceffaire de la tenir fecretre , de peur que ceux qui y font fujets, en étant aver» tis, ne s'offrent a marcher en perfonne pour épargner la raxe de leur lief, & que par ce moyen ils ne fruftrent votre attention , ou a tout le moins qu'ils ne vous empêchent d'en recevoir une fi grande fomme ou fi promptemenr. Si vous n'aviez pas , Sire , a fupporter d'autre dépenfe que celle-ci , je ferois fort content en mon efprit; mais quand j'ai confidéri qu'outre celle de votre armée , qui fera de deux cent cinquante mille livres par mois , il vous en faudra encore fept; vingt mille, livres pour un autre en Dauphiné , comme je dirai bientöt, & environ fept vingt mille livres pour faire faire au moins une montre cette année a votre gendarmerie , laiffant a patt 1'effet de votre maifon ëc. celle de la reine, qse j'eftime que  4»0 E T A T $ l'on pourra entretenir; d'ailleurs je me trouva fort cconné de vous voir fi peu de moyens & mi li grand faix fur les bras , qui augmenteroit deux fois autant, s'il falloit lever fix mille reiftres, & autant d'allemands ou de nulles. Néanmoins, puifque 1'entreprife eft fainte & jufte , & pour le bien du royaume , il eft trèsnécefTaire, pour ne fe pas laifkr envelopper en urje telle affaire , de s'évertuer jufqu'a ce que nous n'en puifticns plus, pour le grand intétêc que chacun y a , courant une même forrune que vous; pareillement meftieur3 les ^ens d'églife; lefquels je puis dire affuremenr, que bien qu'ils aient par le paflé employé une grande partie de leurs biens pour le fervice de cette couronne, & qu'ils aient foutenu quafi toute la dépenfe de cette derniere guerre ; néanmoins ,ils ont encore bonne volonté de faire ce qu'ils pourront a. cette occafion, felon que plufiears des principaux d'entr'eux me 1'ont afturé. A cette caufe , paree que je me défie que 1'affbciation que vous avez envoyée n'aguere faire dans vos provinces, réuilife a un profit tel qu'on 1'efpere , a caufe d'une infiniré d'occafions qui pourront furvenir, & fur tout pour la grande difficuité qu'il y aura fur le département de la finance qu'il faudra faire , tant fur  s e u s Henri II ï. ^.qi fut l'églife & fur les villes , que fur le plat-pays, je ferois d'avis de moyenner que le clergé fit a pare une offre de vous ballier au moins cent mille livres par mois, moyennanc lelquelles ils feroient exempts de la contribucion a ladite affociarion. Cette offre, ce me femble, vous feroit un fecours certain Sc plus a propos que s'il étoit confondu avec lefdites affociations, defquelles Vous ne pouvez encore connoïtre quel fervice vous en pourrez efpérer: bien ert-il vrai que je ne voudrois pas déJarer maintenant mon intention , de peur que cela ne les retardat ; mais je voudrois attendre qu'elles fuffent parachevées, ainfi qu'elles le pourroient être dans ce mois-ci, fuivant ce que vous leur avez mandé expreffément, Sc que le clergé y eut fait fo» offre; paree que pour lors fi quelques uns fe plaignoient de voir ledit clergé diftrait d'icelles , eftimant qu'il füt exempt , Sc alléguoient qu'ils ne peuvent pas d'eux mêmes porter torn? la dépenfe de ladite affociation , l'on pourra pour lors leur faire connoïtre comme ledit clergé étoit taxé d'entretenir en chacune de leurs provinces particulières : afin de leur óter 1'occafion de fe plaindre & les contenter par ce moyen, je ferois d'avis qu'on employac les cent mille livres que donneroit l'églife Tome ZUL Cc °  ^02, E T A T S au payement de Parmée qu'il me femble êtrs expediënt de faire en Daupbiné, comme je dirai tantót. Je tiens pour certain que le pape vous fecourera au moins de cinquante mille livres par mois, lefquelles viendront fort a propos pour Pentier payement de ladite armée. Vous ferez fort bien , Sire , d'exciter ceux des alfociations, & avec de belles paroles, de lever de Pargent pour les fix mois de fervice que vous leur avez deftiné, afin de le tenir tout pret pour 1'employer. L'occafion s'en offrant, il ne faut pas attendre plus tard a le lever, de peur qu'il ne fe préfente une telle néceflïté de marcher que leur retardement jvous apportat un très-grand dommage, ou a tout le moins vous empêchat d'avoir un fecours tel que vous attendriez d'eux; car les derniers états ainfi levés, vous pourrez fur la fin de 1'aniiée vous fervir d'une partie de ceux qui n'auront pas été employés; mais il.fe faut bien donner de garde d'en parler , de crainte que l'on ne détourne votre intention.Cette fomme, Sire, encore qu'elle ne fut guere grande , néanmoins elle vous apporteroit quelque commodité , de même facon que les petits ruifleaux enflent les rivieres» Ceft pourquoi il ne faut pas  sous Henri II ï. 405 mépiifer en cette néceffité toutes les petites fommes que vous penferez pouvoir recevoir. J'eftime, Site, que vous pourrez recevoir quelque fervice de cette afiociation dans les provinces ou elle fera établie, & fpécialemene pour garder & pour entretenir le pays en votre obéiflance. Et certes ce ne feroit pas peu de chofe pour éviter la dépenfe des gens de guerre, qu'autrement il faudroit laifler dans les provinces, & qu'on pourra par ce moyen employer ailleurs; aufli cela étant bien établi donnera quelques craintes aux huguenocs, qui favenc fort bien, pour 1'avoir fouvent expérimënté , combien les aflbciations font profitables 3 Sc fur-rout les étrangers en feront cas. Voiid pourquoi, Sire, je fuis d'avis de les faire continuer, & d'y vaquer diligemment, aha d'en tirer le plus de fervice que l'on pourra. Je ne m'amuferai point a particularifer le fer-, vice qu'elles pourront rendre a votre majefté, jufqu'a ce que j'aie vu quel ctabliflement elles auront par-tout votre royaume ; car je pourrois travailler en vaih , mais je vous dirai bien que s'il vous eut plu rerarder votre déclaration jufqu'a ce que ladite aflóciation eüc été établie ( comme dès la première fois qu'il vous piuc de m'en parler pirivément C c 2  404 E T A T S je vous le dis) vous eufliez pu efpérer d'en tirer plus de fecours , que polfible vous ne feriez maintenant qu'ils fauront votre délibération, qui étoit la feule caufe qui Pavoit fait commander , &c qui Peut fait parachever. Ce qui en -vérité devoit plutot échauffer les vrais catholiques , vos fujets & affectionncs a leur patrie, que non pas les refroidir. J'eftime, Sire, que vous entendez vous fervir du revenu de ceux qui feront rebelles, pour Pemployer au fait de la guerre qu'ils vous contraindront de foutenir. ■ Ce qu'ayant délibéré de faire , il faudra mettre un meilleur ordre a la levée d'iceux, que celui qui a été ci-devant, paree qu'en plufieurs endroits ce revenu ne s'eft pas levé, ou a été trés mal employé. Je ne veux pas mettre en confidération , que pourvu que vous payiez votre armée dix mois pour douze, elle aura occafion de fe contenter, paree que je réfervé ces derniers revenans-bons, fi on les veutretenir avec les autres, des montres de pareil'.e nature , pour les néceflités extraordinaires qui pourront arriver ; aufli je defirerois, s'il étoit poflible , de voir les gens de guerre fi bien payés qu'on les put bien difcipliner, les rendre obéifians & les empêcher de piller  sous Henri III. votre peuple ; ee qui eft expediënt de faire, puifque cette affociation eft-faite pour le foulagement de vos pauvres fujets, cc non pour leur ruine. Voila, Sire, tous les moyens les plus propres Sc les plus fur que je connoifle, pour trouver de 1'argent en cette occafion fi preflante; lefquels encore qu'ils viennent k bien fuccéder , je crains néanmoins qu'ils ne püiffént fuffire pour le fait de la guerre ; c'eft pourquoi il fe faut vivement employer a en faire la maille bonne Sc a en trouver d'autres , s'il eft poffible , Sc il ne les faut pas méprifer, bien qu'on ne les puiffe léver que d'ici a fix mois , voire un an; car enfin ces deniers arriveront touc z propos , k mefure que la néceftité augmentera. Sur-tout, Sire, il ne faut pas permettre qu'iis foient divertis en autre ufage Sc en autre fervice que pour la guerre, comme celui qui vous eft par-deiïus tous le plus néceffaire & que vous ne pouvez diminuer fi facilement que les autres dépenfes, voire que 1'état de votre maifon, je fuis d'avis que vous le reftreignez le plus que vous pourrez , afin que vous faftïez connoïtre a un chacun le bon ménage que vous voulez faire en cette entreprife, ayant commencé parvousnaême. Que s'il eft ainfi régie, comme auffi Cc 3  4J6 ' E ~ A T s celui de la reine, j'eftime que vous le pourrez enrretenir des huit cents mille livres que l'on dit qui vous reviennent feulement de bon des douze millions de iivres que vous avez de revenu , outre le taillon , & des deux'cents mille livres oü je fais état que pourront monter vos parties cafuelles en la préfente 'année. Cette charge particuliere des finances doit être 'départie a une perfonne qui ait grande affection a votre fervice, & qui y puiffe veiller jour Sc nuit , & de facon qu'il en faffe fon propre fait ; car en cela il peut arriver deux inconvénients, 1'un par faute de faire venir 1'argent a. propos pour vous en fervir; & 1'autre, que la fmance étant venue , elle foit divertie en d'autres ufages moins preffés : c'eft pourquoi il vous plaira d'y bien avifer. Je ne doute aucunement, Sire, que vous n'ayiez penfé que vous pouviez tirer quelque commodité de cette affemblée des états , pour vous mettre hors de «éceflité , comme il eft plus que raifonnable que chacun s'y employé. Toutefois je me défie qu'il ne vous donnent pas un auflr prompt Sc un aufti grand fecours qu'il vous eft néceffaire; paree que la plupart font venus pour demander rabais Sc exemption. Néanmoins je veux efpérer qu'on leur pourra faire trouver  sous Hemri III. 407 bon 1'avertiffement de 1'octroi nouveau que la reine votre mere nous a commandé, a. M. de* Chiverny & a moi, de vérifier; pour être départi également, le fort portant le foible , fur ceux qui font taillables depuis un fol jufques a. cinquante livres au plus, chargé fur 1'eftimation des trois millions de feux que lui dit être en votre royaume, en déchargeant tous les trois états de toutes les tailles & de toutes les autres impofitions & gabelles qui ont été mifes depuis le roi Louis douziéme. Si cette quantité de feux fe trouve en votre royaume, j'eftime, Sire , qu'on en pourra tirer part au moins vingt millions de livres, a la décharge de vos fujets. Cela vous mettroit hors de néceflïté. Néanmoins il fera impoffible encore que cela' fut trouvé bon par lefdits états & peut reuffir de vous en pouvoir fervir en la préfente année ; c'eft pourquoi il vous eft néceffaire de trouver cependant quelqu'autre plus prompt fecours en cette extrémité. Je ne vois pas qu'on le puiffe efpérer beaucoup grand du cóté de la nobleffe. Quand au clergé , j'en ai dit ci-devant mon opinion ; les villes d'ailleurs font chargées de payer lix cents mille livresrpar trois années confécutives pour être employées au paiement des douze cents Horins du comte Mansfeld. Quant aur C c 4  4oS E T A T S piac pays , la plupart demande exemption des tailles, comme j'ai dit, ce qui eft bien éloigné d'en donner davantage; fi bien que je me défierois fort que vous puiffiez tirer grand fecours de cette aflemblée des états , fi je ne connoiflois la bonne volonté que plufieurs vous portent > &c qui favent ^tre urgente néceffité, & qu'auffi a ce coup il y va de leur ruine ou de leur repos. Cela me fait d'autant "rmeux efpérer que la reine votre mere n'oubliera rien pour apporter tous les bons offices qui y font requis , & qu'elle ufera de toutes les perfuafions néceffaires , fans y perdre un feul moment de tems. Or, Sire, pendant que vous ferez vos préparanfs pour vous acheminer en Guyenne , il lera bon d'écrire a M. le maréchal de Montluc de vous venir rencontrer. II fera même expédient d'en faire de même aux plus apparens de ces quartiers-la, pour les retenir en vous le plus que vous pourrez, & pour leur faire favoir que vous ne trouvez pas bon qu'ils pratiquent avec ceux qui ne vous reconnoïtront pas , Sc qui ne vous feront pas obéiflans , afin que par ce moyen vous puiffiez rendre ceux-la d'autant plus foibles de perfonnes 5c de crédit. Voila,' Sire, tout ce qu'il me femble fort expediënt,  sous Henri lil. 400 que M. le prince Dauphin , gouverneur du Dauphiné , s'achemine au plutóc de ce cóté la, pour mertre en votre obéiffance les lieux & les places qui voudront êrre rebelles , ou a tout le moins pour tenir vos affaires en réputation. J'efpere que fi on lui donne de quoi , il vous y fera quelque bon fervice ; puifqu'en ce paysla les huguenots ne tiennent plus maintenant que la Mare , Sere, Die & Lyvron ; les trois premières defquelles villes font affez facües a prendre , comme auffi Lyvron , s'il étoit bien affailli. Ce n'eft pas néanmoins que je fois d'avis qu'il s'y amufat , s'il arrivoit qu'il. fallüt faire Ia guerre , pour le peu de force qu'il aura , a faute d'argent , & pour le grand tems qu'il faudroit employer a le forcer; mais qu'il fermat Lorial , qui eft tout proche ledit Lyvron, pour y loger cinquante chevaux, & une compagnie de gens de pied , afin de les tenir de fi prés, qu'ils n'euffent pas le loifir de faire grand mal, en attendanc qu'a faute de vivres, ils fuflent contraints de fe rendre. 11 en pourra faire de même aux autres villes , s'il ne peut pas les forcer. Encore que la préfence dudit fieur prince en ce pays-la n'y fit autres chofes que de 1'empêcher d'être tourmenré , & d'être pillé, & de tenir en réputation vos affaires, ce fera  4io Eiats encore beaucoup; & même s'il étoit foulagé en ce qu'il aUra befoin par M. le maréchal de Rers, Sc par M. de Gardes, & par tels autres qu'il vous plaira avifer : pour cela, le plutöt que vous lui pourrez faire favoir votre volonté fera le meilleur, afin de le difpofer a s'y acheminer avant que la faifon s'avance d'avantage. Les forces qu'il me femble que vous lui Touvez bailler, s'il arrivé qu'on ne veuille pas vous reconnohre pour roi, ni vous obéir , feront pour le moins de fix mille hommes de pied , qui vous couteront foixante Sc fix mille livres par mois; trois cents hommes d'armes, faifant fept cent cinquante chevaux, vous coüteront foixante Sc fept mille livres par quar«ers ; Sc cent chevaux-iégers, deux mille cinq cents livres; Sc outre ce , les cent hommes d'armes de Parriere-ban du Dauphiné. Quant k 1'artiilerie, il s'en pourroit fervir & s'en aider aux occafions de la quantité qui lui feroit néceffaire, fans que pour cela, il foit obligé faire un grand état ordinaire. Néanmoins, foit pour huit cents pionniers qu'il y faudroic employer ördinairement, foit pour Pattirail de quelques pieces qu'il pourroit toujours trainer avec lm, p0ur brauqueter certaines méchantes  sous Henri III. 411 bicoques, il lui fuffirok qu'il eut vingt mille livres par mois. II eft bien vrai que pour deux ou trois mois qu'il y pourra employer a prendre ou k forcer lefdites quatre villes du Dauphiné, il y faudra au moins mille uu quinze cents pionniers, mais je crois que ce pays-la les fournira des villages d'autour , fans faire aucune levée qui coüte davantage au peuple que cinquante livres chacun. Plus , pour quelque attirail de vivres , dix mille livres. Et enfin , pour les appointemens de Parmée , & pour les parties inopinées , feize mille liv. revenant le tout par mois , a bon compte, a cent trente-cinq mille livres, k caufe que ladite gendarmerie fera payée par quartiers, ce qui ne reviendra pas moins qu'a vingt-deux mille livres. Cette fomme étant bien ménagée , & les forces étant bien employees , j'eftime qu'il vous y fera quelque bon fervice. A quoi le maréchal de Rets le pourra grandement fecourir , & fpécialement a bien ménager votre argent , pour lui bailier lefdites forces. Je ferois d'avis, Sire, de faire acheminer audit Dauphiné fept compagnies frarigoifes , des dix que vous avez en Piémont, oü elles ne vous fervent de guere, Sc de leur commander,  4li ÉTATS dé faire leurs crues de cinquante foldats, donc eües font compofées , jufqu'a deux cents chevaux; a'ufli pour vous dire Ie vrai, quand ce ne feroir que pour en óter quelques-uns de ld, je fouhaiterois qu'elles en fuflent dehors, craignant que pour n'avoir recu que deux montres depuis deux ans en ei , elles ne priffent occafion de faire quelque fédition d Carmagnole, fufcitée poflible par quelqu'un que vous connoiflez mal affectionné d votre fervice, Je penfe que quand il demeurera trois compagnies dans ledit marquifat, 1'une pour être mife en ladite ville de Carmagnole avec les cent foldats du chateau ; une autre d Saluces , Sc la troifieme pour être départie en divers chateaux ; cela fuffira d préfent que vous dites avoir le roi d'hfpagne ' pour ami, & que les gens dudit pays font aflectionnés d votre couronne. II y a auffi audit marquifat de Saluces, Ia compagnie de chevaux-légers du fieur Jules Centurion , laquelle incommode grandement ledit marquifat, Sc qui fervira bien en Dauphiné , fi vous trouvez bon de 1'y faire aller; elle connoit lepays , & elle y eft bien aimée: Jl faudroit charger le fieur Jules de 1'augmenter de cinquante qu'elle eft jufqu'd cent. Je penfe auffi que vous ferez fort bien de  sous Henri III. at3 vous fervir de cinq compagnies Corfes qui font en Provence , pour être vaillans 6c gens de fervice ; ordonnant de bonne heure audit fieur Alfonce, leur colonel, de remplir fes bandes, de cent qu'elles font, jufqu'a deux cents ; ce qu'il fera fort aifément , pour n'être guere loin de la Corfe. Je vous ai propofé de vous fervir des fufdits régimens 6c compagnies , pour éviter la dépenfe qu'autrement il faudroit que vous fiffiez a lever de nouvelles bandes au lieu d'icelles , & a faire de nouveaux régimens qui engendreroient de la confufion, & qui vous feroient de la peine a contenter. Pour cette occafion , outre lefdites compagnies, vous pourrez commander a chacun d'eux d'augmenter leurs régimens jufqu'au nombre de trois mille hommes chacun , & ordonner a celui de Piémont de lever ce fupplément audit pays de Dauphiné, pour faire en forte que les foldats n'aillent pas fervir les autres. Ainfi je ne vous ai pas propofé de lever un plus grand nombre de gens de guerre, pour le peu de moyens que je vois être en vos finances. Que s'il étoit autre, je vous donnerois pareillementun autre avis. Je vous fupplié dene pas rrouyer étrange fi je me fuis reftreint a la moindre  4X4 E TA? 8 dépenfe qu'il m'a été poflible; car j'eftime que fi vous aviez plus de forces que vous n'en pouvez entretenir, cela ameneroit de la confufion parmi vos gens de guerre , avec danger de faire rebeller le peuple. Aufli ayant confidéré les forces qua prefent l'on pourroit lever contre vous , il m'a femblé qu'il n'étoit pas néceffaire de vous faire entrer en plus grande dépenfe, & qui feroit inutile, au moins jufqu'a ce qu'elles paroiffent plus nombreufes qu'elles ne font; car lors vous pourrez foudainernent eu faire lever un autre nombre tel que vous eitimerez néceffaire. Davantage , Sire, il ne fe faut pas feulement attendre a la grande quantiré de forces, pour venir a bout de cette entreprife; mais il faut un peu de tems, par le moyen duquel on les faffe mourir de la faim. La ville deMenerve t'ientle comtatd'Avignon en fujétion, & lui caufe douze mille livres de frais tous les mois; cela me fait vous donner avis de la faire au phitöt remettre entre les mains du pape, afin qu'il puiffe vous fecourir des forces qu'il tient audit comtat, ou plutöt des douze mille livres qu'il y dépenfe par mois, qui viendront fort a propos pour 1'armée dudit fieur prince. Aufli tandis que le capitaine Ferriere fera en ladite ville, j'aurai toujours peur  sous Henri III. ^ qu'il ne la baille aux huguenots fes confrères, & qu'en ce faifant elle ne tienne long-tems ce pays - la en fujétion , pour être difficile a forcer. Quant a la Provence, je 1'eftime libre, après que ladite ville de Menerve, qui en eft voifine, fera en main füre , ou pour le moins elle ne tiendra pas M. le maréchal de Rets fi empêché, qu'il ne puilTe vous fervir ailleurs , & que de-la il ne puiffe vous aider de fes moyens. Voila, Sire , ce que je vous peux dire touchant les affaires du Dauphiné, pour peu de loifir que j'aie eu, & pour éviter laprolixité. Je creis,Sire, que vous n'ignorez pas combien il vous importe de laiffer , pendant votre longue abfence de ces quartiers-ci, un bon ordre aux provinces qui font derrière vous & a tous ceux que vous croirez affectionnés a votre fervice; afin que «on-feulement l'on ne vous y brouille pas; mais que chacun vous y fecoure de tout fon pouvoir comme il feroit befoin que Pon fït. Pour cela , Sire , je trouverois qu'il feroit très-nécef.faire d'y laiffer quelques perfonnages d'autorité, pour y commander, & même a Paris, au cas que Monfieur de Montmorency vint vous fervir en votre armée, ou qu'il füt tellement malade, ainfi que l'on dit qu'il eft , qu'il ne put vaquec  4'* E T A T S a la charge de fon gouvernement, & je penfe que "M. de Montpenfier feroit le plus prepre, nonfeulement pour cette ville & pour le pays d'autour ; mais pour avoir comme une furintendance amiable fur les autres gouverneurs circonvoifins, lefquels a 1'occafion de fa qualité & de fon age lui déféreront ce qui pourra furvenir pour votre fervice , pendant votre longue & votre lointaine abfence de ces quartiers-ci. J'ai nommé ledit fieur de Montpenfier, parceque je penfe qu'il n'ira pas fitót en Guyenne , a caufe qu'il eft délicat, ou qu'y allant, il ne vous y faffe pas un fervice tel que vous le defireriez; c'eft ce que je vous fupplié de croire. Toutefois , Cl votre volonté eft qu'il y aille , ou que vous vouliez Ie tenir prés de vous , comme il eft expédient pour votre réputation que vous foyez bien accompagné en ce voyage , de notables perfonnes, j'eftimerois qu'il feroit plus ï propos d'y laiffer M. le cardinal de Bourbon que nul autre, en cas que Ie roi de Navarre , fon neveu , fe déclarat contre vous, car auffi bien il a réfolu de fe retirer en fon diocefe de Rouen , a caufe da regret que ce bon Prince auroit de voir contre vous celui qui repréfente feu M. fon pere , & qui lui eft fi prsche. Craignant, comme il dit, que. tel regret ne füt caufe de fa mort. Cette nrecau. ■-noniMoiM ï>nu" sai'fa'naïq «uov lêup idi ; t5'a.uott ba \u/.v^?on»  s o v s Henri III, ^VJ hon, Sire, comme elle eft d'importance, & qu'il eft néceffaire qu'elle foit bientot prife , elle a auffi bon befoin d'être bien pefée avant cue de la réfoudre. Car, fi M. de Montmorency s'excufe de vous accompagner, au cas que fon frere Je maréchal Dampville ne fe range pas a fon devoir, afin deviter le foupcon que Ton pourroit prendre fur lui s'il étoit prés de vous, qu'il le voulut favorifer. Je ne fais pas commenc vous pourrez bonnernent envoyer quelqu'autte pour commander a Paris , s'il arrivé que iedit fieur de Montmorency vienne a fe bien porter, & qu'il veuille prendre a ccteur cette nouvelle commiffionjcar, Sire, il pourra fe plaindre que vous lui ferez tort, fi vous voulez mettre uné autre perfonne que lui pour commander en fon, gouvernement , d'autant que vous ne 1'avez pas fait au voyage de Lyon , de Guyenne, & finallement de Bayonne, en 1'an 15746c 1575 , qui dura deux ans. Toutefois fi vous defirez de mettre quelque Prince de votre fang pour commander en ladite ville, Vous pourrez alléguer que ledit fieur cardinal y a autrefcis commandé, tant du vivant du feu roi votre pere , au voyage d'Allemagne, en Pan 1553, que du feu roi votre frere en 1'an 1562, au commencement des premiers troubles; fur quoi vous prendrez une réfolution Tornt XIII. D d  418 E T AT s telle qu'il vous plaira. Je vous dirois cependant qu'il eft très-néceflaire de mettre bon ordre a la garde des villes d'alentour de Paris, de peur qu'en furprenant quelqu'une , l'on ne travaille fi fort votredite ville, qu'au lieu d'en être fecouru , vous foyez contraint de la fecourir. Pour cela , Sire , il me femble que vous devez avoir nn role de ces villes la , & felon leurs qualites , mettre dans chacune un Gentilhomme , avec quatre, fix, dix ou douze foldats pour y commander, & pour avoir 1'ceil a fairs faire exaótement la garde par les habitans; il faudroit que lui & fes foldats fifient par intervalle la ronde Ia nuit, pour garder feulement ces villes de furprifes, puifque de force il n'en faut rien craiudre; il fera bon auffi de deftiner quelques compagnies de Gendarmes voifines dela, pour fervir aux occafions quife pourront préfenter, cc le plutót que vous pourrez , Sire, établir cet ordre, non-feulement dans les villes qui font autour de Paris , mais dans celles des antres provinces , qui font de grande importance , ce fera le meilleur, afin de Ie voir exécuté avanc que vous vous en éloigniez, comme étant une chofe tout-a-fait néceffaire pour votre fervice. Et pour donner moyen aux habitans d'icelles d'entretenir lefdits gouverneurs & leurs foldats,  sous Henri II t, il leur fau droit permettre de lever ou d'impofer fur le fel, ou fur quelques autres rnarchandifes qu'ils avifereienr, la fomme qui fera requife pour leur paiement. Je ferois d'avis auffi , pour les raifons füfdites , qu'il vous plüt de careffier M. de Nemours le plus qu'il vous fera poffible , Sc de faire enforte qu'il foit content de vous ; il faudroit même le prier d'avoir l'eeil fur les quartiers d'Orléans , de Berri, de Nivernois Sc de Botirbennois, & ailleurs , oü vous aviferez être expédient, & d'avoir une bonne inrelligence avec celui qui demeurera a Paris; car, Sire, fi pendant votre abfence, il y a dans les provinces de votre part, plufieurs perfonnages dé grande qualité, Sc qui foient affectionnés a votre fervice , vos affaires s'en porteront mietïx. Auffi il me femble que vous devez, avant que'de paffer en Guyenne , faire reprendré quelques petits chatêaux foibles qui font cn Poitou , & fpécialement, Bouteniile , afin de laiffer le pays libre, Sc même Ie grand cheasfei , pour venir a vous de Paris, d'AHemagné Sc d'Italie, comme étant une chofe qui vous eft grandeinent néceffaire. Daiüeurs, il faudroic faire de benne heure des blocus aux villes fortes de Saintdnges\ 'pour les' reffèrrer de prés Ddi  4^0 E t a r s & enfin pour les arfamer. Les forces de 1'aflo» ciation pourroient fervir bien a propos pour cela; & a tout le moins, je penfe que M. deLudes Sc M. Ruffé y feront fidellement leur devoir avec telles qu'il auront; c'eft pourquoi il fera bon d'avifer au plutot a Pexécution , pour n'être pas contraint par après de retarder votre voyage, ou bien , fi vous le pourfuiviea , de ne Ie pour voir pas fi facilement exécuter. '-lo.J'entends que le haut Limofin eft tout entier fous votre obéiflance; c'eft pourquoi pour vu qu'il fe conferve en 1'état qu'il eft , vous en recevrez du fervice, & fpécialement pour recouvrer, avec le tems, quelques villes que vos ennemis occupent dans le bas pays ; lefquelles néanmoins font aifées & prendre avec le canon. Cependant, je ferois d'avis que M. de Chambéry fe tint en la ville de Limoges, comme il a fait par le pafte, pour donner toujours courage a ceux de ce pays de fe conferver en votre obéiflance. Excepté Yffoire , qui n'eft pas forte , Sc eft au milieu de la Limagne , tout le refte du pays d'Auvergne eft en votre obéiflance; 11 bien qu'en y faifant des blocus comme aux autres "villes rebelles \ le pays ne feroit guere troublé : cnais pour ce faire , je ferois d'avis d'y en:  '8 T a ï £ ^ öx£= sous Mënri III. 45.T voyer monfieur de , pour y com¬ mander , afin d'oter , a caufe de fa qualicé , la difcorde qui eft entre M. de Saint-Eran , Ia noblefle du pays , & les treize bonnes villes, de peur qu'en la laiflanr continuer, elle n'engendrat quelqu'inconvénient en certe province ; bien eft-il vrai qu'il faudroit que ledit fieur de s'y gouvernat fagement & comme un vrai zélateur de votre fervice, & non comme partial, de peur d'y allumer le feu encore plus grand qu'il n'eft pas. Pour le regard du Périgueux & du Quercy ; puifque vous avez déja commandé d'y faire bien garder les villes , le refte de leur confervation doit dépendre de vous , quand vous ferez arrivé en Guyenne ; c'eft pourquoi je n'ên parlerai pas ici comme j'ai fait des autres provinces qu'il faut laiffer derrière vous, car elles ont beioin d'un bon ordre ; de peur que lorfqu» vous en ferez éloigné, l'on ne vous y brouille , afin de divertir vos armées de la Guyenne Sc du Languedoc, comme poflible vos ennemia feroienÊunfiTltado enov nsi Jta éngï: En toutes les proviraces fufdites, il eft néceffaire , Sire , que jufques a ce que les forces de 1'affociation. y. foient bien établies, vous y kiffrez. quelques. compagnies de gendarmes-*  4« - E T A T S pour être mifes en gamifon en certains lieux ; afin de s'en fervir aux occafions qui pourroienc furvenirfoudainement; Ie département defquelles je laiiTerai a votre bon jugement, pour ne favoir pas au vrai celles que vous eftimez y être les plus propres. J'ai différé de parler jufqu'a préfent de ma voifine la Charité, laquelle m'a été fi chere par ie paffe , qu'elle m'a fo.uvent gaté Ie Nivernois; |k je crains qua ce coup, fi elle n'eft remife en votre obéiflance , elle n'acheve de le ruiner entiérement. Cela me fait defirer qu'on la puiffe forcer pendant votre féjour en ces quartiers-la , pour le grand bien que cela apporteroit a vos affaires. Toutefois me défiant que cela fe puiffe exécuter, d'autant que vous n'avez les forces prêtes qu'il faudroit, comme auffi a caufe que la faifon de 1'hy ver y eft du tout contraire, & davanrage .qu'étant affez forte , il y faudroit employer plus de tems , qu'il ne vous convient en féjourner de par de-ca , il me femble au moins que votre majefté doit derechef enjoindre a des Landes & aufli a la Nocle, de licencier les forces qu'ils y ont fait entrer, outreles douze foldats qui y devoient feulement être; que s'ils n'obéiffeftt pas, vous pourrez y envoyer au plutót, pendant que vous ctes ici, une partie de vos gardes, pour fermer 2c  SOUS II B N R I III. pour fortifier le fauxbourg_ de ladite ville au bout du pont du coté du Berry & que vous pourrez a 1'inf- tant faire rompre ledit pont, enforte qu'on leur otel'efpérance de pouvoir y rentrer. Davaruageil faudroit cinquante foldats ou plus a la garde de ce pont, pour empêcher les ennemis depafler par bateaux; cela leur otera Ia commodité qu'ils efperent de cette ville-la par le moyen de ce paffage. II faudroit de plus du cóté du Nivernois , faire fermer quelque petit village proche de ladite ville , & y loger quelques foldats a* pied &acheval, pour les empêcher de'courir Ia campagne, & de faire aucun maL Pour ce faire, Sire , il me femble que vous ne devez pas attendre la réponfe des princes & feigneurs , puifque le commandant eft de cet avis; auquel, & non a eux, vous avez baillé ladite ville. Aufli fi vous attendez a Pexécuter quand vous ferez prêt a déloger de cette ville , vous ne pourrez alors vous aider pour cet effet de vos gardes , & vous ferez contraint de lever des forces nouvelles, qui ruineront tout ce cóté-la, &t 1'empêcheront autant de vous fecourir. Cette entreprife, Sire, facilitera bien ioin d'empêchcr le fait que vous favez de ladite ville: c'eft pourquoi il me femble néceflaire de Pexécuter au plutót que vous aurez réponfe dudit des " ■ Dd4  424 E T a t s Landes &'de la Node, fi vous n'avez pas moyen de mieux faire. Vous favez , Sire, combien les faliines onc pronte a vos rebeües ; c'eft pourquoi je ferois d'avis que de bonne heure Sc fans perdre de tems, vous vous faififtiez de celles de Brouages pour le grand fecours des deniers qu'ils en tirenr. Et quant a celles dei Pecquais, il fuftïra lorfque ledic fieur Prince fera eu ces quarciers de de-la, qu'il avife des moyens de faire quelqu'effort , avec 1'aide de vos galleres , & de celles de vos .Voifins & amis , afin que s'il arrivé que leditfieur Maréchal ne fe range pas de votre cóté , il lui puiffe óter le prcfic du fel, qui lui eft bien grand , ce qui apporte un grand dommage a votre royaume. Maintenant que j'ai affez difcoum fur les provifions qu'il me femble que vous devez faire dans votre royaume , & fpécialement' dans les provinces que vous laifferez derrière vous , je vous dirai qu'il eft trés-néceffaire de fermer la porte aux Allemands, Sc les empêcher d'entrer en France contre votre volonté. Pour ce faire, mon opinion feroit de retenir huit mille Réïftres , ou fi vous n'en avez pas les moyens, de faire femblant de le faire, tk prier les Gondy, ou Antoine d'0, d'envoyer de 1'argent a Francfort,  sous Henri III. 425 ou a tout le mojns de le faire en apparence , pour Pemployer , en ladite levée. II faudroit même mander a vos colonels de fe tenir prêts pour une telle levée au premier mandement que vous leur en ferez , afin de tenir vos affaires en grande réputation & en crédir, rant dans ce Pays-la qu'en celui-ci ; tk par-la donner occafion a plufieurs de vos fujets de vous obéir lorfqffils fe verront quafi frufttés d'avoir du fecours étranger, & que par conféquent ils fe croiront perdus. Cette provihon, Sire, eft fi néceffaire & fi profirable pour votre fervice , que j'ofe dire qu'il vous faut trouver de Pargent pour la première montre de ces huit mille Reiftres, ou des fix mille au moins ; avec fix mille autres Lanfquenets , que Pon pourra a Pinftant lever fur la frontiere : enfemble pour trois ou quatre mille hommes de pied , francois , outre les huit ou dix compagnies de'gens de pied, de vos ordonnances , qui font en Champagne; lefquelles troupes avec celles de Faffociation des provinces voifiues, j'eftime devoir être de forces fufhfantes 5 pourvu qu'elles foient accompagnées d'un nombre de gendarmerie tel que vous 1'eftimerez capable pour pouvoir battre les Réiftres huguenots, qui voudroient entreprendre d'y venir, ou ï teut le moins pour les incom-  '4-6 E T A T S moder tellement de vivres, que d'eux-mêmes ils fe défiffent: il eft vrai que pour ce faire , il faudroit que votre armee logeat bien ferrée voire qu'elle campat , pour contraindre les cnnemis d'en faire autant, & pour les incommoder du tout. Je vous ai propofé de vous fervir , en cette occafion , des troupes de l'affociation, d'autant qu'il me femble qu'elles feront plus propres pour cette affaire qu'ailieurs; auffi la nobleffe & chacun partira de fa maifon plus volontiers , quand on faura que c'eft pour battre les Rcïfires, & faire la guerre dans leurs provinces mêmes. C'eft pourquoi je fuis d'avis que l'on deftineces troupes-la feulement pour cet effet, & pout tenir net & défendre refpeóti vement leurs provinces , pendant que vous tacherez de venir a bout des autres qui font embrouillées. Je ne parlerai point de Ja facon & comment £ avec un plus grand avantage, l'on pourra combartre les Réiftres; s'il eft expédient que ce foit a la frontiere , ou bien avant qu'ils foient affemblés a la place même, paree que je laifferai cette affaire a M. de Guife, qui eft gouverneur de la Champagne, oii j'eftime que fa préfence fera tres-néceffaire, & quil fera beau qu'il y foit auffi-têt que les états feront parachevés,  sows Henri III. 417 afin de tenir vos affaires en réputation , d'öter 1'occafion aux huguenots de faire une autre petite levée de quinze cents ou de deux mille Reiftres, comme ils ont fait derniérement, lorfqu'ils vous virent fi éloigné, Sc qu'il n'y avoit perfonne a la frontiere ; car cela afFoibliroit votre réputation , & empêcheroit le bon acheminement de vos affaires. Vous avez vu , Sire , par expérience , la quantité de faux averciffemens qui vous ont été donnés cl'Allemagne, plus al'avantage des huguenots , qui 'ne font vétitables ; & combien que quelquefois ils vous aient apporté un grand dom.mage , il n'y a néanmoins jamais été pourvu. Cela m'a ému a vous repréfenter de quelles imporr'ances femblables chofes font a votre fervice , afin qu'il vous plaife d'y pourvbir Sc de faire prefque audit pays un ménage nouveau d'hommes ditholiques intelligens , pour vous avertir siïrement de tout ce qui s'y paffera; 5C fur-tout fi l'on n'y fait point quelque levée, quand & en quel nombre ; pour cela, Sire , il me femble que les princes catholiques vous y pourront grandement fervir, 8c fpécialement pour favoir quand ils auront délivré leurs pcuvoirs , Sc pour quel nombre de Reiftres ; afin qu'au même tems l'on puiffe aufli , fur leur avis V  4*8 E T A T $ faire délivrer les vètres, & non plutot, pour ëviter une dépenfe inutile ou plas grande qu'il ne conviendroic faire au cas que vos ennemis feigniffenc de lever huk ou dix mille Reiftres, pour vous faire lever les vótres , & que par après ils n'en levafTent que mille, en attendanc la faifon des vivres , pour lever les autres. Car cela vous feroit confomtner envain un millioa trois cents mille livres ou environ, tanc pour quatre mois, pendant lefquels vous feriez contraint de lesentretenir, & ceux des hérétiques auffi. Voili pourquoi , Sire, pour éviter une telle dépenfe , & les inconyéniens qui peuvent furvenir par faute d'être averti bien a propos, je ferois d'avis qu'en cette occafion, vous népargnaffiez aucune chofe. Je luis bien marri de ne vous pouvoir pas donner avis ou vous pourrez recouvrer cette fomme de treize cents mille livres,; mais je fuis contraint de vous dire qu'il VOus eft néceffaire de la trouver pour le falut de votre royaume. Du moins il faudroit que vous euffiez au moins cent cinquante mille livres , pour la prem.ere montre de vos fix mille Reiftres.; comme auffi quatre-vingt mille livres , pour vos hx mille Lanfquenets; car pour les autres montres, vous aurez le loifir d'y pourvoir ;  .soos Henri III. 41$ quoi qu'il vaudroit rhieux de bonne heure faire un fonds , fi vous le pouvez , de toure la fomme entiere, pour le grand intérêc que vcus y auriez, fi vous manquiez de les payer tous les mois, comme vous le favez trés-bien. Et parcé que je ne fais oü vous pourrez recoüvrcr fi promptement ces trois cents cinquante mille livres, d'autant que je fais qu'elles vous font trèsnécefTaires , afin auffi que vous ne demeuriez pas court dargent, en une fi faiiite entreprife , & qui eft fi importante a. votre réputation öt au bien de ce royaume ; je vous fupplié de faire état de dix mille livres de rente que j'ai en Flandres , qui valent quatre cents mille livres , afin de les ballier a quelque prince allemand , ou a quelqu'autres qui vous promette de vous arnener fix mille Réiftres, tout auffitót que vos rebelles en levront un paieil nombre , & les prier de fe contenter de cette fomme pour la première monrre ; car bien que je les aie obligés par votre commandement , il y a quatre mois, au fieur de Schomberg , au nom des autres colonels , pour le paiement des Reiftres qui vous ont n'aguere fervi , je lui en obligerai d'autres au lieu d'icelles , afin qu'en une néceffité fi urgente } vous ne différiez pas a exécuter la première &c la plus importante ' lioviuoq Y*b ïïlioi si zuov t_ «9. 7  41® JE T A T S de toute les autres précautions, cal eft de fermer la porte aux fecours que vos rebelles pourroient efpérer d'Allemagne. Je vous ai propofé, Sire , de lever des Lanfquenets plutöt que des SuilTes; Parce que d'un coté, je crains que quand 1'oecafion vous preffera, vous ne puiffiez pas fitót les avoir, tant pour le mécontentement qu'ont de vous ceux des ligues , a caufe du retardement que vous apportez a leur payer ce que vous leur devez, qu'auffi paree que les Allemands vont aux affauts, & font tous les fervices que font les Francois , & fans cérémonie. II eft yrai que pour une bataille les fuiffes font fans comparaifon meilleurs, & qu'ils folu fort fideles, ainfi que vous 1'avez expérimenté. Le voyage que vous avez délibéré de faies faire a' M. de Villequier vers ce nouveau comte Palatin, me femble fort a propos , & je crois qu'il eft néceffaire qu'il foit exécuté au plutöt, afin de tacher de 1 'attirer k vous, fi faire fe peut, finon pour découvrir fon intention , & dela paffer plus outre vers les évêques, & 1'abbé de Foles , & vers les princes catholiques, & même vers les Lanfgraves , pour leur faiie entendre votre délibération , &.Ia requête que tout votre royaume a condu de vous faire, pour yous fap-  sous Henri III. 451 pïier de ne pas permettre que l'on y faffe aucun exercice que de la réligion catholique &c romaine , & pour prier les catholiques affectionnés a notre religion , de vous y aider de leurs bons confeils &c de leurs moyens, & fpécialement de leurs bons avis. J'eftime, Sire, que fi vous faites cela , vous recevrez un grand contentement de fon voyage , & encore plus s'il eft bientót éffeétué. C'eft Sire, ce qui me femble que vous devez exécuter, tant du coté de 1'Allemagne qu'ailleurs. Ayant donc accommodé Sc préparé toutes ces chofes, je ferois d'avis, Sire, qu'aufli-tót que les états feront finis , & que vos forces feront affemblées , fans attendre davantage , vous vous en alliez en Guyenne, Sc dela en Languedoc, foir pour y établir la paix, comme je le defire de rout mon cceur, ou pour vous y faire obéir par la force. Pour cela,Sire; vous aurez favorable les mois de mars, avril; mai, juin, juillet, aout & feptembre, paree que pendant ce tems-la l'on ne pourra amener en votre royaume des forces étrangeres, a faute de vivres , qui feront pour lors au platpays , ce qui les combattroit eux-mêmes. C'eft pourquoi vous aurez une belle commodité pendant tout se temps-la d'employet vos moyens  45* Et Ars a Vous faire obéir; comme je vous fupplié auffi de faire, fans que vous retardiez pour queique chofe que ce foir, de vous acheminer au pluröc en ces quartiers-la, quand bien l'on vous denneroic efpérance de pacifier toutes chofes fans qu'il fut befoin que vous y allaffiez; car, je craindrois fort, Sire, que ce fut pour vous amufer , & pour vous faire perdre ce beau tems la , ainfi que bien fouvent les rebelles oiit taché faire; ce qui leur a réufiï. Quand vous ferez arrivé dans Ia Guyenne, fi chacun vous y obéit, comme je le fouhaite, ifvous fera bien aifé de les recevoir en votre bonne grace, Sc par leur bon avis , Sc avec toute la douceur Sc 1'amitié remettre ce paysla en paix Sc en repos. Au contraire, s'il veulent vous faire la guerre, Sc vous contraindré de les chatier, je ferois d'avis que vous fiffiez faire un role de toutes les villes qui tiendront audit pays, afin que fur icelui vous puiiïiez avifer lefquelles feroient les plus aifées & les plus faciles a forcer, & lefquelles en les premat vous accommoderont le plus. Pour cela , il faudroit attaquer premieremenr celles qui font fur les paffages, Sc puis les ayant prifes , ii faudroit démolir celles qui font mal affectionïiées Sc qui font foibles. Pour les autres, il les  SOUS H I N R I Ui les faudroit bien faire garder, comme auffi faare chatier avec rigueur celles qui auront attendu le canon; car, par ce moyen, vous donnerez bien de la frayeur & de la crainte aux autres de ne pas faire les opinidtres, & vous leur óterez 1'occafion de vous faire perdre le tems qui vous eft fi précieux, Pour ce même effet, il me femble qu'il ne fera que bon de. déterminer le loyer , 1'honneur & le profir qu'au. ront celles qui vous reconnoïtront &c qui vous obéiront de bonne heure, foit en les exemptant de tailles pour fix ou neuf ans, fcic en leur donnet quelqu'autre privilege, tel qu'il vous plaira. Et quant aux autres qui feront rebelles , votre majefté leur impofera telles peines qu'elles auront méricées ; par ainfi vous les pourrez incker a vous prêter 1'obéiffance qu'elles vous doivent : & par même moyen, mettre le foupcon & la défiance entre ceux qui les commandent, qu'elles ne fe départent de leur confédéracion. La prife de telles villes, quoique peu fortes, mettra une grande partie du plat-pays en liberté , & renfcrmera d'autant plus vos ennemis dans les moindres places : que fi dies fe trouvoient trop fortes, je ne fuis pas d'opinion quon les batte , n'y que vous vous y amufiez Tome XIII. £ '  43* Et ais d Vous faire obéir; comme je vous fupplié aufli de faire , fans que vous retardiez pour queique chofe que ce foir, de vous acheminer au plutöt en ces quartiers-ld, quand bien Ion vous donneroic efpérance de pacifier toutes chofes fans qu'il fut befoin que vous y allafliez; car, je craindrois fort, Sire, que ce fut pour vous amufer , & pour vous faire perdre ce beau tems ld , ainfi que bien fouvent les rebelles ont taché faire; ce qui leur a réufli. Quand vous ferez arrivé dans la Guyenne, fi chacun vous y obéit, comme je le fouhaite, il vous fera bien aifé de les recevoir en votre bonne grace, Sc par leur bon avis, Sc avec toute la douceur & 1'amitié remettre ce paysla en paix Sc en repos. Au contraire , s'il veulent vous faire la guerre, Sc vous contraindré de les chatier, je ferois d'avis que vous nffiez faire un röle de toutes les villes qui tiendront audit pays, afin que fur icelui vous puilfiez avifer lefquelles feroient les plus aifées Sc les plus faciles d forcer, & lefquelles en les prenant vous accommoderont le plus. Pour cela , il faudroic attaquer premierement celles qui font fur les paflages, Sc puis les ayant prifes , il faudroit démolir celles qui font mal affeclionnées Sc qui font foibles. Pour les autres, il les  les faadrou bien faire garder, comme auffi faire chatier avec rigueur celles qui auront attendu Ie canon; car, par ce moyen . ^ donnerez bien de Ia frayeur & de ia crainte aux autres de ne pas faire les opiniatres , &C vous leur óterez 1'occafion de vous faire perdre le tems qui vous eft fi précieux, Pour ce même effet, il me femble qu'il ne fera que bon de déterminer le loyer, 1'honneur & le profir qu'aiï. ront celles qui vous reconnoicront & qui vous obéiront de bonne heure, foit en les exemptant de tailles pour fix ou neuf ans, foit en leur donn nt quelqu'autre privilege , tel qu'il vous plaira. Et quant aux autres qui feront rebelles , votre majefté leur impofera telles peines qu'elles auront méritées ; par ainfi vous les pourrez inciter a vous prêter 1'obéiffance qu'elles vous doivent : & par même moyen, mettre le foupcon & la défiance entre ceux qui les commandeur, qu'elles ne fe départent de leur confédération. La prife de telles villes, quoique peu fones ■ mettra une grande partie du plat-pays en Hberté, fcrenfermera d'aurant plus vos ennemis dans les moindres places : que fi clles fe trou. voient trop fortes, je ne fuis pas d'opinion quon les batte , n'y que vous vous y amufiez, Tornt XIII. v  434 E t a t s pour le peu de meyen que vous aurez de les forcer; mais il faudroir palier outre Sc les ferrer; cependant avec des blocus, en y mettant quelques chevaux & quelques gens de pied , foit de 1'aflociation , ü elle y eft établie , ou des compagnies que vous aurez levées audit pays , tant pour tenir les chemins libres a venir des autres provinces jufqu'a vous , comme une chofe qui eft très-néceftaire, comme pour leur óter les moyens de faire une ïn'finiré de maux, Sc für-touc de recouvrer des vivres. Par-la , votre majefté les contraindra dans un an ou dix-huit mois , a lui obéir, n'étant point fecourues dü coté de PAllemagne. Sire , encore que je me dufte pafter de difcourir des exploits que vos armées pourront faire , d?autant que Pévénement eft fi éloigné Sc fi incertain , & que venant a ne pas bien fuccéder , on pourroit trouver i trange mon avis: néanmoins , pour le defir que j'ai de vous fatisfaire en rout ce qui dépendra de moi , je n'ai pas voulu laiflér derrière aucune chofe que je penfaffe vous pouvoir fervir, m'aflurant que vous prendrez le tout en bonne part , & que vous excuferez les fautes que vous y remarquerez. Je vous dirai donc y Sire, qu'allant attaques  sous Henri III. ^ les fufdites vüles & dorre les autre* , il n'y a perfonne qui puiffe vous empêcher de le faire , fans fe mettre en danger d'être battu , n'étant pas fi fort que vous, comme j'eftime qu'il ne le peut être. Donc, après avoir pris * enfermé les places qui feront les plus importantes , ' je ferois d'avis que vous allaffiez droit öu fera leplus fort & le plusapparent de ces quartiersla armé contre vous, de faire ordinairement camper votre armee, ou bien Ia Ioger fort ferrée, comme vous pourrez faire, ayant 1'attirail de vivres fuffifans pour les nourrir , afin que votre ennemi Iogeant è. 1'écart, vous Ie puiffiez aifément battre, & s'il veut s'enfermer dans un camp , vous Ie puiffiez affamer a faure de vivres, ou a tout le moins, Ie contraindre de fuir devant vous, comme j'eftime qu'il fera , prenant avec foi quelques troupes de gens de cheval, & peu de bagage , pour vous faire courir après lui, & tacher de vous amufer; ce que je ne fuis pas d'avis que vous faffiez , mais bien plutot de le faire fuivre par une pareille troupe que la fienne , ou plus forte 8c bien choifie , que votre majefté fera conduite par quelque bon chef & bien avifé, afin de 1'attraper & de le combattre, ou de Ie contraindre de s'enfermer en quelque ville, ce E e z  ■fat Etat» que faifant, mon opinion eft qne fi votre majefté penfe le pouvoir, forcer dans un mois , voire dans deux, elle n'y épargne pas ce temsla , ni la dépenfe ; car la prife du chef éronne tour le refte du corps ; au contraire, fi elle n'eftime pas le pouvoir foicer dans ledit tems , qu'elle ne s'y amufe pas , pour le grand préjudice que ce lui feroit de perdre les occafions de mieux faire ; & fur-tout il faut interrompre la récolte, outre qu'en un grand fiége, le plus fouvent les armées fe défont d'elles-mêmes, comme il pourroit avenit » la votre, fans que votre majefté en rapportat aucun fignalé profit. .. Si d'ailleurs celui-la n'ayant pas de quoi vous faire tête en la Guyenne , étoit fi mal avifé de s'acheminer vers la France , penfant d'y faire quelque diverfion de vos armées , je ferois d opinion de le laifler aller, & de le faire feulement fuivre par quelques troupes legeres, en mandant aux provinces d'afTembler leurs forces, foir de 1'afTociation ou autres , pour lui courir fus, & le conttaindre de fe perdre , comme il feroit en bref, n'ayant point d'artillerie , ni de gens de pied , qui fuflent propres pour forcer un petit village fermé qui Jui refuferoit les portes; c'eft pourquoi, au  iotjs Henri III. 437 lieu de penfer renfcrcer ladite troupe, eu tixant pays, elle feroit courue a force, & bientot mife en défafroi , le voyant fugitif devant les votres ; tellement qu'après avoir rodé Ie pays, qui eft tout le mal qu'il pourroit faire, il feroir contraint peu a peu de fe perdre. C'eft ce qui me fait penfer qu'il ne fera pas & mal avifé de fortir de la Guyenne , & mcme Ia raifon ne le veut pas , ni aufli peu qu'il s'enferme dans quelque ville, a moins qu'il ne penfe , par un long liége , vous y pouvoir amufer pendant que les flens feront la récolte, ou en attendant qu'ils ayent leurs forces étrangeres , Sc quant Sc quant ruiner votre armée." Mais plutot, comme il connoit que fes forces Sc celles de M. le maréchal Datapville étant féparécs , feroient trop foibles devant les votres , & que 1'un ayant été défait, il cauferoit la ruine de 1'autre, il tachera de fe joindre avec ledit maréchal, pour par après eflayer de vous attirer en leurs embuches, Sc vous embarrafler Sc incommoder tellement votre armée de vivres, qu'elle put fe défaire d'elle-même, ou bien s'engager en pays étroit & avantageux i leurs forces, pour pouvoir combattre les votres. Pour cela, Sire, je ferois d'avis que votre majefté les laiffat aller , & qu'elle s'arrêtat i £ e 3  43S E T A T s prendre les villes & les chareaux de la Guyenne & du Languedoc , qui lui feront les plus propres pour lui faire recouvrer une grande partie du pays ; cela les fera réfoudre , Sire , ou a. vous laiffer parachever votre conquête, qui eft ce que vous devez deftrer le plus, ou venanc a vous pour vous en empêcher, ils donneront beau moyen a* votre majefté de les cambattre. -D'aurre cóté, Sire, li vous eftimiez que leurs forces étant aflemblées, foient plus fortes que les vótres : ( combien que j'en doute fort, paree qu'ils feront contraints d'employer leurs meilleurs foldats , a la garde d'un grand nombre de villes catholiques qu'ils tiennenr, a caufe qu'ils fe dé-, fient qu'elles ne fe Tangent fous votre obéiflance , ta»t paree que vos chatimens font légers, qu'aufli paree qu'ils voyeht manifeftement que votre querelle eft feulement contre les miniftres leurs anciens ennemis, & que vous aycz volonté de tenir Jeurs forces féparées , vous pourrez faire marcher droit k un bout du Languedoc, 1'armée que vous aurez en Dauphiné, au même inftant que le fieur Dampville marchera contre vous; car par ce moyen , s'il ne fe voit pas aflez fort pour combattre en divers endroits , vous le pourrez forcer pour garder fes villes & fes pays, en atiendant, mais en vain,fi tme fois vous y  ■ sous Henri III. 439 avez bien pourvu, qu'il puiiTe être fecouru au mois d'Octobre par des forces étrangeres; ce qui eft leur dernier refuge. Cependant 1'aucre chef qui eft en Guyenne , n'ayant point de quoi vous faire tête, & fe tenanta 1'écart, vous donnera le loifir de recouvrer toutes les villes qui font moins fortes, & de refferer tellement les autres par des blocus, qu'^ faute de vivres elles foient forcées de fe perdre,. ce qu'enfin elles feront, fi une fois vous fermez la porte i leurs fecours étrangers, par le moyen que je vous ai ci-devant ouvert. Je vous fupplié très-hamblement, Sire, de croire que le plus prés que vous pourrez tenir votre ennemi fera le meiljeur; car n'ayant que des gens ramaffés fans difcipline, Sc qui ne lui ont point d'obligation, au moins que bien peu, Sc qui, la plupart , ne le fervent finon a caufe que par ia ils ont le moyen de piller ; ils s'étonneront d'abord, Sc bientot après ils s'écarteront, quand ils verront qu'ils ne pourront plus dérober , & qu'ils feront contraints de combattre Sc de partir. Il me femble, Sire, que 1'expérience deschofes paiïées doit vous le faire connoïtre y car vous avez vu que fouvent l'on vous a fait tenir votre armée loin de la 'eur, quand il a été queftion de traiter de quelque accord, a caufe de lat grande peine qu'ils ont X.tetenir leurs gens, quand, E e 4 ■  44° E T A T s ils font logés tête-a-rête des vötres. Et de fait, fi une telle difgrace & une telle néceflité arrivé a vos ennemis, l'on pourra tirer dela une conféquence manifefte de leur ruine entiere ; d'autant qu'ils ont déja été réduits par les guerres paffées a une telle extrémité. Ainfi plufieurs les tenant pour perdus les quitteront, & il vous fupplieront de les recevoir en votre miféricorde, auxquels il fera fort aifé de faire un bon acceuil, pour donner occafion aux autres de les imiter. Je ne parlerai point ici du beau moyen que vous avez de vous retrancher contre le roi de Navarre, dans le pays qu'il a de pardela, tant en fouveraineté que fous votre obéiflance, car je veux eftimer, jufqua ce que je voie le contraire» qu'il fe réfolvera a vous aimer tk a vous fervir. Après, Sire, que vous aurez affez bien acommodé vos affaires en Guyenne, comme aufli ledit fieur prince en Dauphiné , vous devez néceflairement , au plus tard dans Ie mois d'avril , faire marcher vos deux armées aux endroits du Languedoc qui Ie tiendront davantage en fujétion , pour le gater & Ie ruiner tellement que les villes fortes ne pouvant plus recouvrer aucuns grains,elles fe rendent par la famine, comme fans doute elles feront dans  ■sous Henri III. 441 un an. II faut cependant braqueter lè plutot que vous pourrez , celles qui- ne font gueres fortes. II faut pareillement faire des blocus aux autres, en attendant qu'elles foient contraintes de fe jetter entre vos bras. II eft a préfuppofer que plufieurs villes le feront, ou les catholiques font les plus forts, lefquelles n'ont aucun intérêt au parti huguenot, mais qui, au con-. traire , fouffriroient un grand dommage s'ils foutenoient la querelle des miniftres. Cette exé~ cution , Sire , comme il me femble, qu'elle Vous eft du tout néceffaire pour venir a bout de la conquête du Languedoc, auffi me fait-elle craindre qu'en vous y avancanr trop, vos armées ne foient les premières affamées, tant a caufe de 1'arriere-faifon des vivres, qu'aufti paree que vos ennemis apporteront dedans les villes fortes , tous ceux qui fe rencontreront dans ie plat-pays; Sc d'ailleurs il vous fera mal-aifé d'en faire apporter par rerre, auparavant que vous ayez recouvré une grande partie des villes qu'ils tiennent. Voila pourquoi, Sire, je fuis d'avis, tant pour cette occafion, qu'aufti paree qu'il vqus eft néceffaire de faire toujours loger vos armées bien ferrées, comme j'ai dir ci-deflus, voire même camper par le beau chemin, que lo-». geant a 1'écart, vous donniez ordre audit fieur  441 E T A T s maréchal, de faire Wenc des entreprifes fur les ennemis, ce qui les ruinera en peu de tems , Sc qile vous faffiez venir quantité de vivres par Ia mer. Cela vous fera bien aifé du cóté de la Sicile , par le moyen du roi d'Efpagne, des pays du pape Sc du grand-duc de Tofcane. De votre cóté vous vous en pourrez faire venir de la Bourgogne par le rhóne, & de Ia Provence par mer; car autrement il vous feroit impoflible de vous avancer dans ce paysH, Sc d'y pouvoir camper ; Sc ne le faifant pas, vous ne pourrez venir a bout de la conquête d'icelui. Pour cela , Sire , je ne doute aucunement que le pape, le roi d'Efpagne Sc le grand-duc de Tofcane ne vous fecourenc volontiers, Sc fpécialement le roi d'Efpagne; pour la grande obligation qu'il vous a, de ce que vous n'avez pas voulu, de fraïche mémoire, favonfer contre lui fes fujets de Flandres. II ne vous refufera pas de vous aider defdits moyens, même de fes galeres & de fes forces, fi vous en avez befoin, pour Pentreprife des falines de Pecquais. II eft bien néceffaire, Sire, que vous ayez un état au vrai de la quantité des poucires qui font en vos magafins, & des lieux ou elles font, tant pour vous en fervir fuivant les occafions  sous Henri IIL 443 qui fe préfenteront, que fi vcus venez a en avoir faute, vous puiffiez avoir le loifir d'en envoyer acheter a Gênes, oü j'eftime qu'il s'en pourra recouvrer a bon prix , &C ailleurs auffi , fans que vous attendiez que la néceffité vous contraigne d'y envoyer lorfque peut-être il fera trop tard. Je vous fupplié, Sire , d'avoir la penfée que j'ai dit ci-devant qu'il fuffiroit pour votre armée d'en avoir pour tirer dix mille coups de pieces d'artillerie, que j'ai entendu qu'il falloit que vous les etiffiez ordinairement prés de votre majefté & non pour toute cette guerre: car je fais alTez qu'avec fi peu de poudre, qui ne feroit que cent foixantedix milliers, il n'y auroit point de bicoque qui ne s'opiniatrat pour la lui faire bientót confumer , & pour la* réduire en une telle néceffirc qu'il ne füt plus en fon pouvoir d'abattre un colombier , bien loin de forcer une ville forte. Cela vous arriveroit aifément , Sire , & d'autant plus fi vous confidérez ce que l'on vous dit a la Rochelle , que vous en aviez confommé qüatre eens milliers , qui font pour vingt ou vingt-cinq mille coups de canon ; c eft pourquoi j'eftime qu'il vous en faudra avoir de prête tout autant, &c plus, a caufe du grand dégat qu'en feront vos deux armées pour battre tant do  •444 E t a i i villes qu'il vous faudra forcer en cette préfente année. Je me réjouis infiniment de voir Monfieur fi bien réuni avec vous qu'il eft, & de voir une fi grande amitié entre vous deux & la reine votre mere, que je puiffe dire que de trois perfonnes vous n'en faites qu'une; je fupplié, Sire , notre Seigneur de vouloir entretenir cette union,, qui eft fi néceffaire, tant pour 1'augmentarion de la religion catholique , pour Ie bien dece royaume, que pour 1'honneur & le contentement de vous trois, & de ne permettre pas qu'aucun foit fi hardi même d'eflayer de difieu-. dre ce lien fi néceffaire Sc fi profitable a ce royaume , pour les maux Sc pour les. malheurs que cela, ameneroit.. J'eftime donc, Sire, que vous retiendrez pres de vous mondit feigneur, & qu'il commandera votre avant-garde; & je crois qu'il fera en votre. abfence tout ce que vous feriez vous-même fi' vous y étiez, afin de lui montrer par-li tous bsfignes d'amitié qu'il vous fera poflible. Je crois encore , Sire, que fi vous avez les moyens de faire quelqu'autre armée royale que Ia vötre, votre majefté entend qu'il y commande ; Sc aufli j'eftime que cela feroit bien raifonnable. Je fuis marri, Sire, de ne vous pouvoir pat  s o v s Henri III. 445 donnet un expédient plus prompt & plus facile ponr venir a bout de ceux qui méprifent vos admonitions paternelles , & qui veulent être vos ennemis; néanmoins puifque les affaires donnent une bonne efpérance , il me femble que le tems ne vous doit pas ennuyer, ni encore moins vous étonner , mais que Vous devez vous réfoudre d'endurer une infinité de méchancetés que vos ennemis commettront fur vos fujets, pour tacher d'intimider un chacun : car ils feront fans doute leur dernier effort, ou pour fe fe"ndre les maitres de votre royaume , ou pour être anéanris; je dis, Sire, ceux qui ne voudront pas vous être obéiffans. Je me puis, Sire , grandement tromper en ce difcours , pour 1'événement incertain des chofes encore fi éloignées de nous; toutefois j'eftime que je ne vous en ai repréfenté aucune qui ne puiffe réuflir, fi elle eft foigneufemenr exécutée , comme elle le fera fans doute par votre fage conduite, & par les fideles avis de la reine votre mere; néanmoins , Sire, s'il fe trouve que je me fois abufé , il vous plaira de m'excufer fur ma trop grande affeótion , qui m'a fait outfe^ paffer les bornes de 1'avis qu'il vous a plu me commander de faire , lequel reprenant je vous dirai, que encore que je m'aflure que ceux du  446 E T A T s Dauphiné n'oublieronr pas de confeiller audit fieur prince de tenir bien nets les deux bords du rhóne pour en entretenir le commerce libre , tk fpécialement pour les vivres, fi eft-ce que je n'ai pas voulu lailfer d'en dire ici un mot en paflant , a caufe de 1'incommodité que cela ameneroic a votre fervice s'il étoit empêché; afin que de bonne heure l'on ne leur donne pas le loifi.r de fortifier aucun petit village, pour la difhculté que l'on auroit par après a le leur faire quitter. La chofe, Sire, qui vous eft la plus chere dans cette entreprife, c'eft le tems; il me femble que vous le devez bien ménager , afin de ne pas confumer en vain vos finances , Sc de ne pas perdre les belles occafions qu'il vou* préiente , fans efpérance de les pouvoir ci-après recouvrër ; car d'un coté fi voustardez a partir , ou que par les chemins vous vous amufiez, enforte que par le moyen de vos deux armées vous n'inrerrompiez pas ia récolte des fruits que pourront faire les villes qui ne voudront pas vous obéir , elles en feront une,- telle provifion que de deux ans après vous ne les pourrez pas recouvrër, Sc poflible de votre vie. Aufli fi pendant ces fept mois-la , vous ne recouvriez pas la plus grande partie des provinces qui vous feront  sous Henri III. rebelles, il ne fera pas fi facile de le faire en hiver, Sc moins encore s'il venoit des Reiftres a leur fecours. Pour cela, Sire, je vous fupplié très-humblement de ne pas retarder 1'exécution de vos deffeins, pour quelqu'occafion que ce foit, & moins auffi fous prétexte d'aucun traité inutile , Sc qui ne foit pas tel que vous pour rez defirer pour 1'honneur de Dieu, pour le bien de votre royaume Sc pour 1'accroiffemenc de votre réputation; car je prévois que 1'un de leurs plus grands artifices fera de mettre en avant quelque négociation abufive , & fpécialement fur le fait de la religion , pour vous y amufer. Toutefois fi vous vous reftbuvenez de la déclaration que vous avez faite, de ne vouloir pas être obligé a garder une promefte que vous pourriez faire contraire an ferment que vous fites d votre facre d'extirper Phéréfie, vous verrez , Sire, clairement le peu d'efpérance qu'ils pourront avoir que vous leur donniez Ia paix, par laquelle il leur foit permis d'avoir quelque peu d exercice de leur opinion, SC par conféquent que ce qu'ils vous propoferont, avec cette condition, ils le feront, non avec intention de la garder de leur part, mais de vous amufer feulement. Auffi, Sire, je vous fupplié très-humblement  44* EïiTf de bien confidérer avant que de penfer a faïré aucune paix, quelle qu'elle foir, qu'ils s'obligent de n'en vouloir aurre affurance que Ia parole que vous leur en donnerez, afin qu'ils ne foient pas affez méchans pour vous accufer tacitement que vous êtes un prince fans foi; car l'on fair affez qu'il eft véritable, que qui offenfe ne pardonne jamais: Sc par cette raifon , étant convaincus qu'ils vous offenfent joumellement, ils tachereront duranr telle paix déhante; de s'affurer mieux de leurs affaires , comme en partie cela a déja été fait; Sc 1'occafion fe préfenrant bien a. propos pour eux, ils vous requéreronr que vous les fafliez entrer & obéir en vos villes principales, & fpécialement en celles ou.font vos pariemens, alléguant que ce leur feroit une trop grande honte de n'y être pas regus , comme s'ils étoient des traitres Sc des méchans. Que fi cela ne leur eft pas accordé, ils diront qu'ils y va de leur honneur & que votre refus les contraint d'en faire des plaintes, qu'ils feront avec bravades Sc menaces , comme plufieurs par le paffé ont pu faire , & vous forceront par-la d'acquiefcer aleur demande , ou de rentrer en rupture , bien que par leur traité fecret il vous euflent promis de n'en faire aucune inftaijce; cat alors ils auront pris le tems f»  sous Henri III. 449 fi a propos a leur avantage , &c a votre préjudice poar obtenir leur requête , que la crainte de retourner derechef a la guerre plus dangereufe pour votre état , que celui-ci étant quafi anéanti de moyens, vous ferez contraint de leur accorder teut. Penfez donc, Sire, maintenant, que fi en ce cas-la vous leur voudrez feailler de vos villes, ayant Pexemple de fi fraïche mémoire , comme eft celui de M. le maréchal Dampville, qui s'eft rendu man-re d'une bonne partie du Languedoc; ce qui vous por-; tera un grand préjudice, s'il ne veut pas fe ranger de votre coté : & cróyez , Sire , qu'en faifant cette mauvaife paix, vous ferez contraint • ou de perdre vos provinces , ou de retornbec derechef a la guerre; paree que tandis que les divifions feront en votre royaume , comme la fource & 1'entretenement de tous les maux ordinaires, vous aurez des compagnons au gou-; vernement, & vous irez toujeurs demal en pis ; car il vous fera impoffible, comme il vous eft: très-ëxpédiënt & néceffaire de vous faire connoïtre pour roi, de régler votre dépenfe & les dons immenfes que fans, difcrétion Pon vous fait faire, de récompenfer les bons &c de chatier les méchans, & faire comenir chacun en fon devoir. II faut aufli que vous' rrayailliez pour Tornt Xlll. p f  41© E T A T S caffêr & anéantir tant de gens de guerre qui piilenr vos fujets , & leur mangent les entrailles, pour défengager votre domaine, & enhn pour faire enrretenir les belles ordonnances que vous voulez faire avec vos états, & accommoder fi bien vos affaires que chacun ne penfe qu'a vous obéir & i vous reconnoïcre, comme il doit, pour feiil & unique ftigneur en ce royaume: car, Sire , durant telles divifions vous n'oferez mécontenter aucun , de peur qu'il ne fe range du parti contraire ; tellement que vous n'aurez jamais que renouvellement de malheurs & diminution de vos moyeus, tout ainfi que vous avez expérimenté depuis neuf ans en ga , que vous avezcommandé aux armées; & qu'cnfin vous êtes réduit a n'avoir quah plus de quoi vivre cette année-ci, tk qa'en 1'autre vous n'aurez rien du tout, fi a ce coup-ci vous ne demeurez pas le maitre; ar, Sire, fi vous dirférez davantage, vous donnerez un beau moyen k un chacun de mal-faire, 6c fans crainte d'être chatié; &C par conféquent vous leur donnerez occafion de faire peu de compte de vous obéir: ce qui eft pourtarit la feule & unique caufe qui maintienc les rois & les princes en la polfeflion de leurs états. Je vous fupplié , Sire de penfer que la éu & le but de ceux qui fe défient, eft d'affu-  sous Henri III. 4yi rerlenrs affaires le plus qu'ils peuvent ;&comme ils eftiment qu'il leur fera mal-aifé de s'affurer davanrage en vous , voyant tous ces changemens, ils veilleronc de telle forte que la plupart du tems vous vous trouverez furpris, ainfi qu'il eft déja advenu par la première paix, dans Ia Guyenne , & fpécialement dans le Languedoc: par-la , Sire, vous pouvez tirer un argument certain que de belles négociations abufives, & d'une paix rempüe de défiance , vous n'en pourrez temporter qu'un très-grand dommage, Sc que le moindre fera qu'il vous faudra laifTer couler quelques jours , jufqu'd ce que vos états foient finis , fans que vous ayez fait les décrets rigoureux , contre les rebelles & les hérétiqües , que l'on a projettés. Je crois bien quen continuant 1'ancienne facon de faire la paix , vos ennemis tacheront de rejetter une telle défiance fur ceux qui feront prés de vous , comme s'ils étoient vos gouverneurs & que vous fuftiez un enfant ou un infenfé qui fe laifTe aller a leurs paftions. Mais ce fera fans avoir égard que , fous prétexte de vouloir vous excufer , ils font un grand tort a votre age , qui eft de vingt-cinq anspaffés & a votre bon entendement , dont vous avez donné des experiences aun chacun. Ils n'oublieront fans doute aucun Ff i  4jl E T A T S moyen , foit celui-ci ou quelqu'autre pour embarraffèr vos affaires , & pour renouveller fouvent les féditions & les guerres, par le moyen defquelles il fe fortifient d'autant plus que les peuples font déja fi aigris , & ont pris une telle licence, que pour peu qu'ils voyent leur prince affoibli, ils font prêts de ne lui pas obéir. De cela, Sire , il eft a craindre qu'il ne s'enenfuive bientót une fubvention entiere de votre état, Cet inconvenient, Sire , vous regarde, & d'autant plus que les affociations 'qui vous ferviront bien , fi vos affaires profperent , vous pourront nuir'e , fi on voit qu'elle viennent a empirer. Et davantage il n'y aura niAnglais, ni Allemand, ni aucune autre nation , qui en cette divifion &c en ces calamités ne courre au pillage de votre royaume, pour en prendre chacun une partie. Cela me contraint, Sire , de vous dire , que je tiens pour certain que vos affaires font incontijient au point de bien ou de mal aller, ni plus ni moins oue font les malades ou leurs crifes , de L'ilTue defquelles dépend leur guérifon en leur mort; de même , Sire, a ce coup votre, état fe doit remettre ou bien fe perdre. II faut donc , Sire, qu'il plaife a votre majefté d'y faire fon dernier effort, afin de ne fe pas laiffer fuccomber par de telle forte de gens, & qu'elle nat-  sous Henri IIT. 455 rende pas aTannée prochaine, qui peut être encore pire , fi elle n'en fort pas celle-ci entiérement ; ce que j'eftime toutefois que votre majefté entend de faire, pttifqu'elle veut foigner a fes affaires avec une conduite telle qu'elles le ré-; quierent. Je n'entends pas , Sire , pour tous les préparatifs , & pour tous les avis que je vous ai donné ci - deffus , vous difluader de cette entreprife, mais je veux vous fupplier que vous embrafliez plutót une faime paix s encore même qu'elle ne foit pas du tour a votre contentement, & que par icelle vousperdiez quelque chofe de votre état, que non pas de faire une guerre , qui feroit fi dommageable a plufieurs de vos fujets; car je ferois trop mal advifé fi je vous donnois un avis fi hardi, qui bien qu'il foit affez clair, peut toutefois, par plufieurs inconvéniens, caufer la perte de votre état, non plus que j'ai fait ci-devant en de femblables délibérations.. Car, Sire, fi les chofes venoient k empirer, & poffible par faute de fuite , je me foumettrois au danger d'être blamé} de la même facon qu'on a vouIk qnelquefois blamer quelques perfonnes de vous avoir confeillé de refufer a Lyon une paix honorable, qui depuis a été caufe de vous en faire faire une qui vous ff3  4H E T A T S étoit dommageable, Sc qui vous a reduit i la néceffité oü vous êtes ; mais bien, Sire, je vous fuppüerai toujours de vouloir pacifier votre royaume plutot par la douceur que par les armes, Sc plutöt par une bonne paix , fainte & ftable , que par des treves femblables a celles qui ont été faites depuis feize ans, & qui nous ayant reduits a la mifere oü nous fommes , nous menacent d'une entiere ruine. Je laifierai cela , Sire , a votre fage jugement , pour en délibérer, &. pour advifer , a ce qui fera le meilleur a faire. Je dirois bien Sire, que continuant votre fufdite délibération, je crains que vous n'ayiez a furmonter de grandes difficultés , la plupart defquelles viendtont plutöt de ceux qui fe diront vous être les plus aftêctionnés , que de vos ennemis découverts ; car, avec leurs cautelles, ils vous contrarieront de tout leur poflible, afin de détourner votre fainte & votre jufte réfolution, Sc auffi afin de vous voir continuellement en ia peine & en ia necéffité de rechercher jufqu'a la derniere perfonne , & de vous aflujétir a leur accorder de bravades leurs injuftes demandes, ainfi que par le paffé le feu roi Sc la reine votre mere ontprefque toujours été cöntraints de faire, non-feulement par les princes, feigneurs- Sc ■gemilshommes, par les gens de robes longue*,  sous Henri III. 455 d'ég'ife , 8c par les villes & communautés, mais aufli par de fitnples foldats , & des perfonnes privées. Voila pourquoi , Sire , je vous fupplié de conferver le grand courage que vous avez montré en cette dcclaration que vous avez fi hardiment faite, & de pourvoir fi bien a vos affaires que vous puiffiez vous développer d'unê telle fujétion , 8c éviter de tels inconvtniens i car, Sire, fi vous n'apportez une continuelle app'ication pour bien 8c foigneufement conduite vos affaires, il eft a craindre que par Ia méchanp ceté de plufieurs qui font dans votre royaume , les maux ne devieiment beaucoup plus grands qu'il n'ont été par Ie paffe. Car de même que les médecins feroient bien marris qu'il n'y eut jamais de malades , 8c les avocats feroient bier» fachés qu'il n'y eut point de procés, de la même facon telle forte de geris, avides Sc méchans feroient bien marris qu'il n'y eut point de troubles en votre royaume, de peur de perdre leur trafic, 8c le profit qu'ds y font. Pour cela, Sire, il me femble qu'il ne fera-pas mal-a-propos de donner quelque efperance a tous , au nombre defquels les cabaleurs font les premiers; qu'ayant secouvert votre autorité, ils autont autanc ou plus de crédit & de pouvoir en votre endroit, qu'ils n'en ont a préfent, Sc encore plus de bienfaits £ Ff 4  45^ E T A T S afin que par-Ia au lieu de tacher de vous tenir plongé en affaires, il ne vous y occupent pas , mais plutót qu'ils vous aident k en fortir, ainfi que feront, fans aucun myftere, vos bons &t Joyaux ferviteurs Sc Cujets. Sire, au maniement d'un état il eft plus expé'dient a un grand prince d'avoir prés de foi un petit nombre de perfonnes , mais bien choifies, qu'une cohue de gens qui ne tachent qua rappor, ter toutes les nouvelles qu'ils y apprennent: voilapourquoi , Sire, je fouhaiterois qu'il plüt a votre majefté de faire choix a votre gré Sc a votre 'contentement, fans avoir égard a qui que cefoic,' 'd'un petit nombre de perfonnes qui vous foient bons & affeótionnés ferviteurs; qui foient remplis d'inrégrné éc de fidélité pour votre fervice ; afin que par après vous puiffiez avoir une parfaite confiance fur eux , Sc vous en fervir auprès de votre perfonne, Sc de Ia reine votre mere , qui n'êtes qu'un, pour vos réfolutions en cette urgente affaire, ainfi que feront tous les princes; car d'un cóté elles ne feroient pas fi fujettes k être divulguées a un chacun comme elles le font; & de 1'autre , dans un fi grand nombre d'affaires que vous aurez fur les bras, k caufe des difficultés qui furviendront Sc qui vous feront difficiles afoutenir, & «ncoreplus quand vous feress  sous Fenri III. 4$7 contraint d'employor une partie du joura carefler la noblefle de Guyenne , comme elle le defire en attendanc que vous le puiffiez faire par effet, ils vous y pourroient beaucoup foulager, &C fpécialement en certaines miemies affaires qui ne font pas dignes d'occuper votre efprit élevé , Sc qui néanmoins ont befoin d'être exaótement foignées & exécutées , de peur qu'il ne vous avienne , comme fouvent il eft arrivé a quelques-uns, qui ,par faute de fermeté & d'exécution ont perdu de belles entreprifes. Et de fait il ne vous fervira de guere de travailler comme vous faites tout le jour a faire vos réfolutions, fi elles font publiées auparavant que d'être eftectuées, &c de même fi elles demeurent fans exécution , ou fi elles font retardées , ainfi que fouvent ön Pexpérimente, & que vous vous en êtes vous même tourmenté. Gela vous doit, Sire, émouvoir a élire de telles perfonnes , afin qu'étant inftruites de 1'état de tout votre royaume, Sc de vos intentions , comme il faut qu'elles le foient, pour pouvoir voas donner des avis certains & profitables , elles vous foulagent, êc quelles fbient refponfables & foigneufes del'exécution de vos ordonnances, êc des commandemens que vous leur ferez; au lieu que maintenant perfonne ne veut s'y entrernettre, & que  458 E T A T s d'autres ne Iaiffent pas faire. C'eft pourquoi j Sire, cette grande charge Sc ce foin , demeuranc fur vous feul fait craindre que vous ne le puiffiez Jong-temps fupporter fans vous en trouver mal, & fans que le fil de vos aftaires foit interrompu, & d'autant plus , fi elles font traverfées par'les artifices de quelques-uns, qui apart 8c quafi encachette, ont coutume d'effayer de les détourner Sc de les empêcher fous quelque beau pretexte, felon leurs paffions & leurs affeótions , afin de vous voir enveloppé dans des troubles , & que vous foyez contrahits de vous fervir deux feulement, ainfi que j'ai dit ci deiTus. Ces gens-lA3Sire> pour empêcher que perfonne n'approche dumaïtre, & qu'ils ne perdentpas les moyens de mal faire , lachen t de faire accroire que les ferviteurs qui font par lui autorifés lui enlevent fon honneur Sc que d'ailleurs ils font fi grands Sc fi puiffans, que de ferviteurs qu'ils fOIK f jJs veulent devenir compagnons. Mais tant s'en faut que cela foit véritable fi le maïtre eft fage comme vous êtes, qu'au contraire ils lui aident a 1'augmenter , fans qu'ils y participent de la moindre partie , ni qu'il puifienc auffi agrandir leifr maifon n'y leurs amis : cela d'un coté fe voit par les chroniques , Si par les hiftoires, voire par celles des hérétiques, ou touce la louange & tout le  sous Henri III. '459 blame eft donné aux rois Sc aux chefs des armées , fans que l'on nomme aucanement ceux qui les ont bien ou mal confeillés. D'ailleurs, (1 le maicre diftribue, non-feulement les états Sc les biens felon les mérites, Sc non pas par faveur & a la nomination de tels ferviteurs, mais au contraire qu'il leur defende de lui en, faire aucune requête, ils ne feront que de vrais fommiers, qui portent toutes les peines & qui font fujets aux calomnies , fans pouvoir jamais s'autorifer aucunement , ou les fiens a Pén* contre de lui. Cela fait affez manifeftement connoïtre le grand profit que font les princes , par le fage avis & le fidele fervice de leurs bons & affectiomiés ferviteurs , & quant Sc quant fait voir le félon langage de ceux qui, par une méchante intention feulement, ne voudroient pas qu'il s'en fervït. Pour cela , Sire, dans une telle confufion , vos affaires feront toujours divulguées •, elles demeureront fans exécution, & elles s'embarrafferont tellement qu'il eft a craindre qu'elles ne vous amenent une ruine irréparable. Non-feulement, Sire, vous avez gtand befoin & grand intérêt de vous faire bien fervir, afin de conduire a bon port cette entreprife, pour la commodité de votre royaume, Sc pour  ^ E T A T S Ia vótre même , mais auffi poUr Ie grand m& Fd.ce qu'elle feroit a votre réputation & I votre renommée, s'il arrivoir qu'elle ne fuccé«fat >Pas comme vous avez penfé; car, au lieu de vous -louer, Sire, Pon vous blamera, (quoique ventablement a tort en beaucoup de cho*es ) mtis ffir-tout d'avoir réfolu une fi grande entreprife , fans avoir premiérement confidéré Jes moyens de 1'exécuter, & de 1'avoir n'aguere bien voulu perdre , quand elle étoit en votre main & en votre puiffance. On vous blamera auffi d'avoir fait exécuter trop tót , & toute *eule, Ja prife du Saint- Efprit, & d'avoir i ion occafion perdu plufieurs villes qui n'étoient pas averties de fe trouver fur leurs gardes; on vous blamera auffi d'avoir trop'retardé les affociations; & même, fi par après, vous definea de faire la paix, & que Vous puiffiez 1 avoir i 1'occafion de votre déclaration , l'on vous blamera de 1'avoir trop tót faite, & auparavant que d'avoir confulté vos moyens. Parlant, Sire, votre délibération demeurant fans effet, encore qu'elle foit très-fainte & très-jufte , elle fera néanmoins recue en mauvaife part; & on dira que vous avez «fé d'une grande precipitation, & que vous avez apporté peu de femete a fa conduite; tellement, Sire, que  sous Henri III. 46% dans vos bonnes & faintes intentions , vous n® manquerez pas d'être blamé en touc ce qui fuccédera mal, ainfi que c'eft la coutume quafi de touc le monde , qui juge des chofes par leur événement ; au contraire , fi vous employez la prudence & les moyens qüe Dieu vous a donnés , pour en venir a bout, j'efpere qu'ayant vingt mille hommes de votre cóté contre un , vous aurez au plus tard dans dix-huit mois , fi chacun fe veut. employer felon fon devoir, remis la foi, la religion 8c la piété chrétienne en votre royaume comme elles étoient par le paffe; & que vous donnerez a vos fujets une paix 8c un repos perdurable. Cela vqus fera acquérit une renommée qui fera perpétuelle $ laquelle vous augmentera davantage , 8c a votre poftérité , ce précieux tréfor de gloire & d'honneurs ,' que vos prédécefleurs vous ont laiflé. Qife s'il plaifoit a Dieu, Sire , d'infpirer M. le maréchal Dampville de faire ce qu'il doit a Dieu 8c a votre majefté , vos affaires s'en porteroient bien mieux. Cela me fait penfer que s'il vous plaifoit lui demander franchement, que pourvu qu'il défende aux huguenots de faire aucun exercice de leur religion en fon gouvernement, & qu'il les empêche d'être les plus forts dans les villes ; au refte, vous trouverez bon qu'il commette a  Sf ö*! E T A T S leurs gardes, telles perfonnes catholiques qu'il voudra : & pour conclufion, il faudroit le prier, non-feulement de ne p;s favorifer ceux qui voudront être héréciques & rebelles, mais de vous aider a les ranger a la raifon. Je crois , Sire, que cette- confiance que vous prendrez en lui, le pourra cmouvoir a ne pas agrandir les hérétiques , pour diminuer la religion catholique, de laquelle il fait profeffion , ainfi que tous les bons chrétiens font obligés &c doivent faire ; & même lui, d'autant plus qu'il eft i(Tu d'une race fi catholique, & fpéciale. ment d'un pere , qui, pour 1'honneur de Dieu & le fervice de fon roi, mourut d la bataille qui fut donnée prés de Saint -Denis, en 1'an 1567. Auffi pour dire le vrai, je ne puis penfer qu'étant feigneur d'entendement , il ne confidere bien que s'il fait autrement , il fera la caufe de la ruine de fa maifon. Car, d'un cóté , bien qu'il fe rende maitre abfolu du Languedoc durant fa vie, il ne faut pas douter qu'un roi de France, auffi-tót qu'il aura recouvert fes moyens , ne 1'en chaffe , de même qu'il eft avenu ci-devant au comte de Touloufe.- Cependant il fe mettoit en danger de perdre , pour fes enfms , la fucceffion de M. de Montmorenci fon frere, qui le regarde , ourre le  sous Henri III. .46 j tort qu'il feroit a la renomnsée de fa maifon. Si bien que pour toutes ces raifons , j'enime qu'il fe pourra c.mouvoir, &c fe ranger de votre coté; & d'autant plus, li l'on pouvoit trouver moyen de le contenter pour le fait du SainrEfprit , qui comme je m'aiTure, lui doit bien toucher au cceur. Si d'ailleurs, M. de Eiron pouvoit faire quelque chofe de bon avec le roi de Navarre, vous viendriez aifément a bout de votre intention. Mais , certes, Sire , .je crains que par la malice de quelques uns , il n'en rappone feulement qu'une négociation mêlée de quelques apparences, pour vous retarder, & pour vous faire perdre le tems , & même les occafions de vous prévaloir de vos moyens aux affaires qui fe préfentent. C'eft a quoi, Sire, il plaira a votre majefté de ne fe pas endormir , ni de fe contenter de cela ; car, encore que pour caufe je ne pafTe pas plus outre en ce propos, je vous dirai néanmoins, Sire, que tant plus vous envoyerez rechercher , coup fur coup , vos fujets, pour s'accommoder avec vous (pafTe peur cette première fois ) & que vous n'attendrez pas que vous le foyez par eux, mais que vous vohs rendrez indulgent en votre endroit, au lieu qu'ils le devroienc être envers vous 3  4^4 • E i a i s tant plus auffi vous ferez augmenter leur orgueil & leur crédit parmi leurs cënfédérés; <$£ au contraire vous le perdrez parmi les villes Sc parmi ceux qui vous font affeólionnés , car ils pourront penfer en cette incerticude, que d'ici a fix mois, vous vous accorderez avec les rebelles , & que vous les abandonnerez ; cela les fora réfroidir, Sc fpécialement fera réfoudre les villes a ne fe partialifer pas contre leurs gouverneurs , de peur qu'étant délaiffés par vous, Sc par ce moyen demeurant en leurs puiflances, ils ne les chatient rigoureufement comme ils ils en ont vu les exemples ; chofe , Sire , qui nuiroit grandement a vos affaires , foit a conduire votre entreprife jufqu'au bout, ou bien pour faire quelque meilleur accord , que n'a pas été le dernier édit de pacification , en cas qu'il vous en prie envie, ou que vous y fuffiez contraint. Je vous prie , Sire , de croire auffi que pendant que l'on ne vous verra pas en campagne, Sc même encore plus fort que vos ennemis , l'on n'eftimera jamais que vous agiffiez a bon efcient, pour tant d'expériences qu'ils en ont. Et d'un cóté , vos bons ferviteurs ne fe pourront réfsudre a embraffer vivement vos commandemens Sc vos intentions , comme il eft néceffaire,  sous Henri III. 4-? 5 liéceiTaire; 'ie 1'autre, les méchans fe raiTureronc de la crainte d'un fi grand tonntrre que leur a été la déclaration de la religion que vous avez fi hardiment faite ; & de plus , voyant que de la requête que vos trats ont arrêté de vous faire , il ne s'en enfuit pas des effets de même, ils croiront qu'il vous fufhra de 1'avoir fait prononcer, fans l'exécuter. C'eft pourquoi, Sire , il me femble qu'il vous eft très-nécefïcire fi vous voulez exécuter votre fainte intention de vous montrer tellement réfolu & fi ferme en votre délibération , que l'on penfe que qu::nd , par maniere de dire , vouj devriez aller tout feul contre ceux qui ne vous veulent pas obéir, vous avez délibéré de le fair*; pour en venir a bout. Pat-la, Sire, vous pourrez faire perdre 1'optnion qu'a tout le monde, que cette réfo-» lutien s'en ira en fumée , comme d'autres ont déja. fait; & que par ce moyen , vous pourrez d'un cóté óter 1'occafion a ces perfonnes de vous eontrarier, en leur faifant perdre Pefpérance de pouvoir vous en divertir, & de 1'autre, les induire a vous y aider, comme ils feront lorfqu'ils vous verront ainfi réfolu. Que fi une telle réfolution vous paroit trop grande, j'eftime , Sire , qu'il vaudroit rnieux que vous filhez de bor;ne heure quelque nou vel accord, Tornt XIII, Q g '  466 E T A T S cjiii foit le pHis a. votre avantage que voos pourrez , que d'attendre a traiter lorfque vous y ferez contraint par quelque mauvaife iilue de vos affaires , ou après que votre royaume fera encore plus ruiné , vos moyens plus af foiblis , & que par votre commandement, vcs bons &c aftettionnés ferviteurs auront dépenfe en vain le leur ; tk ce qui pis eft , quand ils feront partialifés contre ceux qui penfcront avoir le plus de pouvoirs auprès de vous. Cela, Sire, les feroit dépiter, fans doute , & vous abandonner. C'eft pourquoi , fi vous étiez réduit en une telle néceffité , vous feriez quafi contraint de faire une paix préjudiciable a votre fervice & a votre réputation , tk telle que vcs rebelles la voudroient. II vous eft aufli tièsnéceffaire de bien ménager vos finances, ainfi qu'il appartient , & de faire un tel effort dans cette année , que vous ayiez recouvett la plupart des pays que l'on tient contre vous; car, je prévois que fi vous n'en forrez en celle-ci ou la fuivante , vous n'aurez pas de quoi vivre, bien loin d'avoir de quoi faire la guerre; étant bièn rnalaifé que vous puiffiez vous fervir, pour votre noUrïiture: feulement , des deniers qui appartiennent i plufieurs de vos ferviteurs, ainfi que vous le pourrez faire maintenant ,  sous Henri III. 467 quo'qu'a. mon grand regrec , mais pour le falut de votre royaume , pour le bien de vos fujers; car au lieu d'efpérer d'avoir du fecours de vos fujets, il y aura danger que vos affaires étant en un tel état**, que vous ne pourrez faire ni bien , ni mal a perfonne , veus ne tombitz en un fi grand mépris du monde , que plufieurs , non feulement ne vous fecourent pas,mais qu'ils refufent de vous obéir. Cela vous doit' faire connoïtre , Sire , combien il vous eft expédient de bien avifer a vos affaires , & d'en continuer le fil avec une telle fermeté , qu'il ne puiffe être inrerrompu de perfonne ; d'autant qu'un tel retardement apporteroit un grand préjudice a votre fervice. Je vous fupplié, Sire,' de ne douter aucunement que ceux qui .voudront vous être rebelles, ne rachent de rout leur pouvoir de vous faire couler ces fept moisla, fans que vous en rapportiez aucun fruit. Car, cependar.t ils pourront faire Ia récolte, envitailler leurs \iiles & attendre que leurs forces écrangeres leur arfiveat ', pour après vous contraindre non-feulement d'ehtre'tc-dir 1'édit dernier , mais auffi de leur donner toutes les autres plus grandes füretés qu'ils vondront avoir, & cela avec diminütion de votre autorité, car ils feindront qu'ils ne fe peuvent autrement Gg z  4 c'eft pourquoi il eft a préfumer qu'une paix telle qu'ils la pourroient avoir leur feroit cent mille fois plus agréable que la guerre, fi 1'honneur de Dieu & Ia religion de leurs ahcêtres n'y étoient point offenfés ; mais ils ont appris par un nombre infini de témoignages de leurs devanciers, qu'ils ont enduré mille travaux &c mille marcyres pour la foi catholique j que la perte des biens & des commodités de ce monde n'eft rien en comparaifon de la gloire célefte & très-chrétienne qui leur eft promife en mourant pour Ia protection & la défenfe de leur fofS* c'eft pourquoi ils ont fait une brave réfolution de fecourir &c d'aïder fa majefté de leurs biens & de toutes leurs facultés , en une fi prompte & une fi fainte querelle qu'eft celle-ci, &c de n'y pas épargner même leurs propres vies. Mais pour tirer le fruit que chacun efpere de cette ligue Sc affociation , il femble qu'il eft très-néceftaire que fa majefté faffe publier fa réfolution par chacune province , le plutöt qu'elle le pourra, afin de retenir, par ces moyens, fes bons & fes fideles fujets & ferviteurs en leur première & en leur ancienne dévotion, & dans 1'affection qu'ils ont envers Dieu & envers elles : & pour retirer ceux qui, pour beaucoup de  E T A T S divers prétextes & bien legers , & «qui pour de vaines occafions qu'ils fe font forgées d'euxmêmes en leurs fantaifies , & fans avoir aucun autre cerrain fondement de raifon, fe font ci-dtvanr aliénés & diftraits du fervice SC de 1'obéiflance qu'ils doivent a fa majefté A quoi ils fe réduiront d'autant plus aifément quand ils auront entendu la réfolution que fa majefté a prife,■ laquel'e les empêchera de perdre tout a un coup leurs biens , leur réputariöh Sc leurs vies . & , ce qui leur doit être le plus chcr , les empêchera de perdre leurs ames. Et d'autant que telle publication pourroit aufli embrafer Sc irriter les mauvaifes volontés de ceux qui font mal afftétionnés au fervice de Dieu & du roi, & qu'elle leur pourroit faire prendre le parti contraire pour s'oppofer a fes entreprifes, & troubler ce royaumt, ainfi qu'ils ont toujours fait par ci devant, lorfque fa majefté a eflayé d'y érablir 1'exercice de Ia vraie religion catholique , hors laquelle il n'y a point de falut, auparavant que le feu foit plus grand & plus allumé, Sc que les for es des ennemis foient aflemblées &c unies, ii femble être néceffaire d'y remédier promptement par tous les moyens dont on fe pourra avifer. Car  sous Henri III. 48$ Car il eft trés - certain qu'il fera plus facile & plus aifé de leur réfifter au commencemeiit, que li après qu'ils auront uni leurs forces, Sc qu'ils fe feront pourvus &t munis de toutes chofes néceffaires , on les vouloit combattre. Cela fe feroit avec beaucoup plus de hafard & de dépenfe , que fi tout d'un coup il y étoit pourvu. Ce qui femble bien aifé , s'il plak a. fa majefté de mettre fes forces en campagne , Sc courir fus a fes adverfaires ; car , étant étonnés des premiers coups , ils feront facilement rompus Sc mis en défordre, quand ils n'auront pss le tems ni le loifir de pourvoir k leurs affaires. Pour y patvenir, il fembleroit néceffaire qu'il plüt a fa majefté de dépêcher quelqu'un vers . tous les gouverneurs de fon royaume-, oü il croira qu'il en foit de befoin , Sc qu'il leur envoyat autant des articles de la fainte ligue Sc affociation , avec pouvoir Sc commifiion de faire aflémbler tous les états de leurs gouvernemens , foit par bailliages ou autrement, comme lefdits gouverneurs aviferont être Ie ineilleur Sc le plus expédient pour 1'exécution de 1'intention de fa majefté, pour fon fervice & pour le foulagement des provinces. En ladite affemblée, il faudroir leuf faire entendre la Tornt XIII, H h  4Si E T A T S •réfolution de fa majefté tk le contenu en ladite ligue , tk la leur faire aufti folemnellement jurer tk figner , ou a tout le moins , par les principaux defdits états , & par ceux qui auront charge tk procuration des communautés. Et paree que nous avons toujours connu par expérience , que nos ennemis fe font plus fervis de furprifes & de fubtilité que de la vertu Sk de la force ouvene, pour éviter a telles furprifes dont l'on voit déja des commenccmens en quelques provinces de ce royaume oü il fe commet tant de cruautés , tant de meurtres & d'inhumauités qu'on a de 1'horreur de les raconter ; il femble que lefdits gouverneurs, par 1'avis dtfdites affemblées, doivent pourvoir tk donner ordre a la füreté & a la défenfe des villes tk des places "fortes de leuts gouvernemens , & mettre de bonnes gardes aux portes, tout ainfi que l'on faifoit auparavant 1'édit de pacification ; & encharger aux maires , échevins s confuls tk autres chefs des villes d'y ap» porter tout le foin &c toute la diligence qu'il leur fera poflible. Et paree qu'il eft mal-aifé , voire qu'il eft impofiible de fe pouvoir garder des ennemis domeftiques; fi l'on trouve par lefdites villes, places tk provinces, quelques perfonnes de parti  sous Henri III. 483 contraire , féditieufes, & qui aient ci - devant porté les armes contre le fervice de Dieu & du roi, ou contribué pour cet effet, ou qui autrement foient fufpectes; afin de fe délivrer du foin & de la garde de telles gens, l'on s'en faifira , pour en faire ainfi qu'il eft porté par les articles de la fainte ligue & afTociation. Les états étant alTemblés auxdits gouvernemens y il fera avifé du nombre des gens de guerre , tant de cheval que de pied, qui fera ïiécefTaire pour la tuition & pour la défenfe de la province , non-feulement pour la garde ÖC pour la füreté des villes & des places fortes , mais aufli pour pouvoir réfifter aux forces étrangeres, fe fecourant les bailliages , les villes &C les villages, & autres lieux , les uns les autres , felon le befoin & les occafions ; afin que le nombre defdites forces étant déterminé , lefdits états puiflent faite des efTres volontaires pour la manutention & pour 1'entretien d'icelles, chacun felon fes moyens & fes facultés. Lefdits gouverneurs aviferont avec les états de leurs gouvernemens , des moyens Sc des expédiens pour lever les deniers des contribiations, & pour faire aufli les paiemens defdits gens de guerre , avec le moins de perte & le moins de Hh z  484 Ë T A t s dépenfe que faire fe pourra, &c fans exactiofti fans foule Sc fans opprefïïon du peuple. Et d'autant qu'en Guyenne , en Languedoc , en Poitou, & ès autres provinces fufpectes , les ennemis ont plus de forces 6c plus de moyens , Sc qu'il y a beaucoup de villes, de places & de perfonnes , lefquelles bien que très- afreccionnées au fervice de fa majefté, néanmoins , pour n'être pas fecourues Sc alliftées, pourroient être contraintes >de prendre parti : il feroit expédient que fa majefté y envoyat prompte ment quelques grands feigneurs d'autorité , avec des forces correfpondantes & proportionnées a celles des ennemis , Sc avec pouvoir 6c comrniffion de lever fur les lieux autant de gens qu'il en feroit befoin, afin de prévenir les ennemis , rompre 5c difliper les menées de ceux qui voudroient prendre parti, Sc maintenir 6c conferver en toute füreté les bons , les obéiffans 5c fideles fujets & ferviteurs de fa majefté. II faudroit lui donner une bonne provifton d'artillerie , de poudre Sc de munitions, 5c autres commodités nécelTaires pour 1'entretenement defdites forces; a ce qne, par faute de moyens, 1'exécution de quelque bonne entreprife ne put pas être différée ou empêchée,  sous Henri III. 48 5 Que li quelques-uns de la nouvelle opinion, par une infpiration divine , fe veulenc liguer, s'unir & afTocier a la fainre ligue; les affociés les y recevront, Sc les prendront en leur.garde & proteótion, eux, leurs biens, leurs families & leurs enfans; a la charge toutefois qu'ils ne pourront faire aucune forme d'exercice Sc de leur religion , foit en public Sc en particulier ou privé , ni autre aéte qui puifTe engendrer ou apporter du fcandale aux voifins; «Sc a la charge auffi de contribuer aux fiais de faiTociation , chacun felon fes moyens & fes facultcs , ainfi que par les affociés il fera avifé.. Et oii ceux de la nouvelle opinion feroient quelques affemblées, quelques menées ou pratiques fecrettes, ou autres actes, enforte qu'ils puifTent donner quelques foupcons de remuement; en ce cas , ils feront déclarés avoir encouru les peines portces, Sc autrement, par les articles de Paffociation, contre ceux du parti contraire, Sc feront contre eux lefdites peines exécutées avec toute la rigueur, 5c fans autre forme de procés. En tout ce que defTus, Ia diligence eft extrêmement néceffaire , pour prévenir les ennemis y lefquels, comme ils ont déja découvert quelque chofe de cette fainte ligue , ils font Hh 5  4?