DES ÉTATS GÉNÉRAUX E T AUTRES ASSEMBLEES NATIONALE S. T O ME Q U IN Z IE ME.   DES ÉTATS GÉNÈRAUX E T AUTRES ASSEMBLEES NATIONALE S. A LA H A Y E, Et Je trouve a Paris, .ChezBtnssoN, Libraire, Hotel de Coetlofquet, rue Hameieuilie, N°. 20. 1 1 8 9* TOME QUIN Z IE ME.   DES ÉTATS GÉNÉRAUX E T AUTRES ASSEMBLEES NATIONALES. Monsieur de Bourges portant propos pour les trois ordres, fic un difcours l la louange de fa majefté fur fon ferment, & fur la recommandation dudit édit. Tome XV. J± HENRI III. SUITE DES ÉTATS Tenus a Biois en  Z ÉTATS Et après le ïoï prit lui-même le ferment des cardinaux, prince du fang, & autres princes & f-igneurs du ciergé, nobleffe & tiers-état, lefquels & tousd'une voix, les mains auciel, déclarerent qu'ils jureroicnt ledit édit. Après ledit édit juré & le ferment fait , le roi commenca un autre propos, favoir qu'en la derniere alfemblée des Etats, les avis & confeils des trois ordres avoient été fi mal exécutés, qu'au lieu d'une réformation &c établiffement de bonnes loix, tont avoit été mis en défordre , qu'il ne bougeroit jamais qu'Ü n'eüt fait un édit faint & inviolable pour le bien de i'état & foulagement de fondit peuple •, qu'il le juroit, le voiüoit Sc promettoit ainfi avec affurance, d'aimer & traiter fes fujets comme un pere doit aimer fes enfans, défendant a tous les députés de fortir que les cahiers ne fulTent réfolus & les ordonnances faites, pour auffitöt être publiées au parlement, ayant fait jurer de nouveau publiquement tous les députés, &: le promettre ainfi. Tous les ordres répondirent qu'ils le juroient Sc promettoient.  sous Henri III. 3 Remontrances trés - humbles de Meflire René, Comte de Sanjay , Vicomte héréditaire & Para geur de Pouou, &c. étant Députi de la, Nobleffe dudit pays, aux Etats-Généraux de la Monarchie Francoife , 1558. A U R O I, ^IRE, le faint & tros - augufte lieu que votre majefté tient légitimement en ce monde , votre piété & bonté excédente tous les princes de ce tems, & vos héroïques & trés chrétiennes entreprifes au rétabliffement de 1'état très-chrétien francois , avec le devoir de trèshumb'e vafTal Sc ferviteur, qui eft en moi appellé en la convocation générale de la nobleffe francoife, me donnent afliirance d'ctre oui & entendu au fait qui fe préfents, oü il eft queflion de 1'honneur de Dieu, union de fon églife, fervice de votre majefté , falut, honneur, bien , repos & réputation de la monarchie frangoife ; a q^ioi chacun doic apporter ce qu'il connoit en fa loyauté & confcience, pouvoir avancer vos faintes intentions. C'eft pourquoi , a mon avis, votre majefté ( d'ailieurs 'pien confeillée ) a voulu a 1'exemple des A 2  4 E t a t s vi&orieux rois vos prédécefTeurs , prendrel'avis des trois états & ordres de ce royaume , a ce que , par le confeil des gens chrétiens francois, 6c de longue 6c générale expérience , intéreffés 6c affe&ionnés en la même caufe, les faintes intentions de votre majefté foient conduites a leur fin. A quoi voulant de ma part très-humblement 6c fidelement fatisfaire en la décharge de ma confcience , 6c pour continuation , dès mon enfance , 8c témoignage de mon fervice , je remontrerai très-humblement a votre majefté trés chrétienne & invincible , que nous avons deux partis a nous contraires, 1'héréfie 6c 1'hérétique rebelle. Sire , quant a 1'héréfie , c'eft a meffieurs nos prélats 6c eccléfiaftiques a confidérer que cette bete monftrueufe d'héréfie a toujours par ci-devant fourni tant d'hérétiques rebelles , que depuis vingt-fept ans, plus de morts 6c de vaincus par nos guerres inteftines, moins de jouiffance des vitftoires, 6c toujours pertes'des grands capitaines 6c fideles chrétiens francois, fans avancement de la piété chrétienne. Pour ce , a mon avis, que la fource de 1'héréfie n'étoit tarie Sc purifiée , qui toujours produit hérétiques; de forte qu'a nos dépens (comme francais naturels, qui par les exemples 6c expériences fe font trop tard plus fages ) avons connu que pour remédier a ce grand & pefant trouble , il faüoit que , par une fainte èc  sous H e n Er III. 5 févere réformation , nos prélats filTent leur paix avec Dieu , pour eux conftitués par Jefus-Chrift entre Dieu & nous, moyenner le bien du peuple, & par la fainteté de leurs vies, continences, abftinences, charités , doctrines & faintes converfations , fermer la porte aux fcandales , provenans des abus, nourriffons de 1'héréfie, & par-la rendre leurs charges fi onéreufes en toute piété chrétienne, que les mondains attirés par la pompe, délices, & autres chofes du tout, par le devoir éloignés de la difcipline eccléfïaftique , défilïent de plus entrer en leurs chaires & cloitres. C'eft, Sire , ce que nous efpérons de nos peres fpirituels , auxquels je dirois volontiers qu'ils ont trcp tardé , tant pour le falut du peuple, quepbur le bien de 1'état, étant certain que tel défordre, fans fe vouloir réformer, a ruiné les églifes & royaume de Levant, & 1'empire de Conflantinople, & fait chemin a 1'empereur des Turcs jufques aux portes d'Allemagne. A cette caufe , les Turcs en leurs mofquées , prirent tous les tours pour les abus & héréfies des chrétiens.^ paree que par cette divifion, ils ont fait leurs conquêtes & les prolongent au grand reproche de ceux qui, retenus par la chair & par le monde ( ores inftmmens foibles contre hommes vraiment A j  g ÉTATS hommes) font aótes indignes du prix de norre rédemption. Je neparle ici de !a théologie , paree c'efl: rhofe excédente ma vocation, Sc feulement e:i paiTafit s je dirai, qu'ores q-ie nos adverfaires nous préfentent leurs cathéchifmes Sc formulaires de foi, auffi diffemblables & confus, comme il y a entr'eux de chefs de part, comme fi a eux fembiables nous vouluffions commencer a croire, Sc comme s'il étoit permis aux enfans irnpugner les décrets des peres, fans fin, Sc par confufion contr'évangélifer, ainfi que fi Dieu n'étoit toujours en fa fapience a lui-même femblable , Sc comme s'il étoit permis de foumettre la parole de Dieu, 1'églife & Dieu lui-même aux dietes, états Sc délibérations des princes, néanmoins nous fommes contraints de dire que peu de réfiftance fpirituelle iis ont trouvé aux pays qui en font affligés, Sc que 1'abus n'a ceffé quelque mal qui nous ait apporté 1'héréfie , Sc que f hérétique s'eft établi aux lieux oü moins les pré'ats ont réfidé en leur devoir, qui ne fe rravaiilent beaucoup d'empécher le loup d'entrer en leur bergerie , plus foigneux du térpporel que du fpirituel, Sc des biens Sc honneurs, que de Ia charge de laquelle je ne veux parler que tres - humblement , & avec trés - devote révérence, comme  sous Henk t III. 7 provenante de Ia fucceffive autorité apoftolique. Ceft donc, Sire, aux prélats a remédier a 1'héréfie , la déraciner par la fainte & févere réformatton des abus &c fcandales, pour ceffant a caufe, faire celTer 1'efTet qui font moyens inexpugnables &C plus forts que nos armes, & tels que le grand empereur & rol Charlemagne , votre prédéceffeur, a» pratiqués pour ranger fous fes pieds les hérétiques de fon tems •, autrement c'a toujours été, eft , & fera une entreprife fans fin, que la ruine de 1'état & 1'établiffement des hérétiques , ainfi qu'eft advenu en Hongrie ; auquel pays ne voulant entendre a la réformation & union, & s'arrêtant a contcfter par grandes divifions, 'a difputer du pere , du fils & du faint-Efprit, 8c de la vraie églife , i's fe font trouvés fans églife & miférabiement poffédés par les Turcs. A cette réformation, j'infifte plus que je havois délibéré, paree qu'autre que nos peres par tous les fiecles ont pratiquéque de 1'abus verrok le fcandaie, & du fcandale le fujet de la tentation d'introduire novalité en fégllfé , qui eft héréfie , & que ceffant la caufe, doit celTer 1'efTet, nous - devons tous croire que, comme Ia grande licence & délordres des peres glilTent infcnfiblemenc aux enfans, & en toute la familie , ainfi tous les états fort éloignés de leur devoir , recevront ré• I A 2  é t a t s formation en tous leurs ordres par la fanftification de nos prélats. Nerefteplus (Hmmodicité étant ótée du fanc tuaire, & par14 le chemin coupée au féminaire de la fauffe doótrine) qUe de rompre Sc défaire les hérétiques rebelles qui tiennent les villes de votre majefté, fuivant la réfolution de 1'édit de lumon, & le commandement fait a votre noMeflè. A quoi; Sire, toute votre nobleffe fe prepare avec réfolution d'y expofer valeureufement vie & biens fous votre autorité , de laquelle ils «e fe veulent jamais départir, & laquelle, avec juftice , a toujours précédé la force Sc les armes lorfque les rois, vos prédécefTeurs, ont voulu chatier leurs vafTaux & fujets rebelles, ainfi que que leroiPhilippe Augufte, ennuyé des infolences des Anglois, qui poffédoient de fon tems Nor«landie Aquitaine, Poitou, Anjou, Touraine -leMaine, indigné du parricide Sc meurtre commis a Chiavon par Jean Sans - Terre , roi dAnglererre, contre Artus, fils de Geoffroy, ionfrere aïné, qui devoit fuccéder a Richard Cccur-de-Lion , roi, duc & comte defdits pays , procéda premiercment par juftice , Sc depuis en execution d'arrêt de la cour des pairs ; tellement que par Ja force, jointe a la juftice, )ï conquit parne defdits pays, qui depuis ont été du domaine de la couronne. Aurant en fit Charles Vlf,  sous Hen kï III. 9 t^uand il a valeureufement & heureüferoent mis fin aux guerres des Anglois, & iceux fait paffer !a mer, fors la ville de Galais. Cette même ma" niere de procéder par la juftice &c par la force conjointement, fut fuivie contre les hérétiques Albigeois 5z Vauldois rebelles, paree que la juftice préfuppofe une autorité & pourfuite légitime de fouverain contre fon fujet, autrement ce feroit fe recevoir pair a pair, & lui dëférer le droit des armes, qui eft de grande conféquence , &c lui donner qualité de potentat fouverain ; outre que la voie de juftice eft digne de votre majefté , roi des Franc_ois, & la voie de la fuprême violence odieufe & ouverture pernicieufe , fi les loix font moins redoutées & fortes que les armes , fans lefquelies la juftice demeureroit ün mafque & anéantiffement d'autorité. C'eft pourquoi, Sire , votre majefté porte deux fceptres utiles en cette faifon , 1'un qui eft la verge de juftice, de laquelle la monarchie eft maintenue par les loix en fa fplendeur, & la hiérarchie militaire fieffée en fa grandeur & réputation ; &£ 1'autre fceptre eft la main de juftice1, ayant les doigts replies en la maniere que nos prélats, peres Ipirituels, donnent au peüple les bénédictions de Dieu, parlëquelvotre majefté doit tenir main-forte au fervice de Dieu, vraie Gatholique & apoftolique, foi recue en 1'égUfe Ro-  10 é t a t s maine & aux traditions & difciplines eccléfïaftiques, pour fcrvant a Dieu, être fem des hommes. A cela , Sire , & a tous les commandemens de votre majefté , votre nobleffe francoife a toujours offert fon trés humble fervice, qui ne fera petit, quand votre majefté fe fervira de moven' que vos prédéceffeurs ont tenu , pour non-feulement arrondir cette belle piece de terre, votre domaine, mais pour e'temifer leur nom , & de leurs fideles vaffaux en Afie , Afrique , & au refte de 1'Europe, y faifant couronner & recevoir de leurs vaffaux , empereurs de Conftantinople , & rois en Jérufalem, SiciJe , Naples, Armenië & Cypre. Ce moyen 'eft la force inexpugnable & incomparablede votre nobleffe, réglée héréditairemenr, & rangée par régimens de grands ducs & comtes, &par compagnies, fous les bannieres héréditaires de plus de fix eens barons, qui font , pourjvu qu'il n'y ait privilege, exemption, ni fraude , plus de cinquante mille chevaux; chofe que je fais pour en avoir été capitaine général , au ban & arriere-ban, depuis Fan mil cinqcent foixante & fept, qui font forces fieffées dues a votre majefté, fuffifantes pour vous metier couronner en Conftantinople. Sire, entre les dons degraces fpéciaux., par  sous Henri III. ii vous reeus de Dieu, par tant de couronnes Sc vicloires, votre majefté a fucceffivement trois hautes Sc exceliens titres; le premier , d etre roi très-chrétien de tous les très-chrétiens, qui préfuppofe inftrudion perpétuèlle de ne conniver, ni avec 1'abus, ui avec 1'héréfie ; le fecond. de roi des francois, qui eft un droit de monarchie innueufe de tous les francs Sc francois de runt* vers, Sc non de france, bornée Sc limitée fimplement par 1'abfurdité au préjudice de la poffelhon des monarques vos prédéceffeurs ; lefquels ntres héréditaires, avec la poffeffion, préfuppofent la légitime feigneurie du premier fils de 1'églife très-chrétienne de Dieu 5 laquelle feigneurie confifte principalement en la liberté fpintuelle de tous les peuples, fous la difcipline eccléfiaftique , comme le mit en avant & le foutint Charlemagne, votrepredécelfeur, contre Aygoland, roi des Goths ; le troifième eft de roi, héréd:taire des gaules Sc gaulois, païs & peuples prétendans privativement a tous autres. Le nom des échappés du périlleux déluge , par droit feigneurial Sc bénédidion paternelle, provenante de Gomer, fils ainé de Japhet, pour faire concurrence des bénédiétions Sc fucceffions légiriniss de la monarchie occidentale , Sc le tout mit au fceptre francois & héréditaire transféré a votre majefté,  12 é t a t s avec plus de pouvoir que tous les princes vos voiiïns. Nous favons , Sire, que bien fouvent les rois font affligés pour les péchés du peuple, comme aufïï les peuples pour les péchés des princes; mais a tout événement celui qui peut rémédier a un mal, & ne le fait, il eft coupable devant Dieu Sc les hommes , comme celui qui fait le forfait. Votre majefté a eu tant de belles vidoires Sc grandes & bonnes fortunes, que nous ne croirons jamais que Dieu nous veuille tout- a-coup abandonner, même en ce faint ceuvre , auquel il eft purement queftion de fon honneur, & du falut de fon peuple ; & s'il y a eu de 1'intermiffion entre vos heureufes précédentes entreprifes, nous croirons que cela vient de nos péchés, & que Dieu ayant éprouvé votre patience & perfévérance, il redoublera fes graces aux exécutions que nous ' efpérons de votre majefté accumulant vidoires fur vidoinss, Sc rang'eant fous vos pieds fes ennemis & les vötres. Telles vidoires, Sire , fe pourfuivent & s'acquierent par princes & feigneurs , tels que vous faurez bien choifir , non avaricieux ni enveloppés en chofes baffes, gens affedionnés a votre fervice & au bien de 1 etat , juftes Sc valeureux , non vaincus de la délice du travail Sc difpenfe, qui eft peu de chofe, eu égard au bien  sous Henui III. ■«5 qui provient des victoires, qui ne furent jamais, tïop cheres. Sire, votre majefté voit ici toute fa monar+ chie repréfentée par fes députés , tous crians mi* féricorde a Dieu, & fecours a votre majefté, 8c tous unis au bien de votre fervice. A favoir, f églife a prier Sc réformer les abus , comme nous croions, Sc en fe réformant nous réformer , &c encore a fubvenir aux néceffités de 1'état •, Ia nobleffe , a expofer vie & bien fidelement, valeureufement, & libérale'ment a votre fervice; le peuple & tiers-état, ores accablé de pauvreté Sc mifere , a piutöt manger la terre , que faillir én fes feryitudss &: en fon devoir. Ne refte , Sire , que prendre le confeil de deux bons &c faints peres de leglife , & votre réfolution 1'un , pape Zacharie, lequel écrivant aux églifes & princes francois de fon tems, difoit, qu'il n'étoit poffible d'obtenir vidoire oü les ècclefiaftiques étoient diffolus & corrompus ; I'autre, du faint pape Grégoire, qui écrivoit a Tbéodoric , votre prédéceffeur, & a la reine Brunecliilde , de tenir main-forte a la réformation de 1'état ecclefiaftique, difant, que la corruption des mceurs des geus d'églife eft caufe de la ruine du peuple •, Sc otitre , a pourfuivre vos faintes intentions contre les hérétiques, qui, plus reduits par la réformation, que vaiacus bat Iss arrnes}  14 E T A T S reprendront en toute foumiffion le lieu de leut peres. Commandez donc, Sire, comme notre maitre, gouvernez-nous comme roi débonnaire que vous êtes, aimez nous comme pere, gardez nous comme notre chef , & foyez très-chrétien , fouverain général des très-chrétiens 5 & faites que , comme nous cherchons avec nos armes , ce qui eft corrompu en la terre pour venir au ciel , ainfi meffieurs les prélats ^herchent ce qui eft au ciel, pour donner a votre majefté victoire durable en la terre. De cela, Sire, adviendra que Dieu fera fouverainement adoré , fon églife unie, la majefté royale fidelement fervie, vos fujets confervés &c delivrés de toute oppreffion , 1'état francois retenu en réputation ; & votre royale & tres - augufte perfonne , après les ccuronnes de la monarchie franpife , & des royaumes des Gaules & de Pologne , couronnée pour derniere & quatrième couronne, au ciel, & d'éternelle mémoire, en la terre. Le roi fe départant de fon fiége de juftice , toüs les aififtans le fuivirent & accompagnerent, crians, vive le roi! jufqu'en 1'églife St. Sauveur oü fuï chanté le Te Veum. Tous les princes y fureht pour remercier Dieu;  SOUS HENRI III. ij jamais le roi , la cour Sc le peuple ne furent fi joyeux. Le roi déclara au prévot de Paris qui 1'avoit remercié avec moi, qu'il oublioit tout ce qui avoit été fait a Paris, felon que ja il 1'avoit proruis Sc lui promettoit encore parole & foi de roi. Ledit jour dix - huitieme d'ocrobre ceux du gouvernement de Normandie fe remuerent contre M. d'Avinet député de Rouen, & ayant la première féance pour faire qu'entre eux il füt procédé a l'élection d'un préfident en leur gouvernement, ledit lieur d'Avinet 1'empêcha Sc remontra les privileges de ladite ville de Rouen, capitale de la province, que depuis 1'entrée des états il avoit toujours porté le propos en fon gouvernement, qu'il avoit fait a&e de préfident; il fut longuement fans vouloir fe départir de fa place •, enfin il fut ordonné que tant lui que ceux de la province fe retireroient, enfin M. Couffin fut élu pour préfider. Ceux de Normandie élurent M. le lieutenant de Caën, & déclarerent les autres gouverneifiens avoir élu. Le vingt-deuxieme nous fümes que par arrêt du confeil d'état, la nomination du dit lieutenant avoit été connrmée, Sc ledit d'Avinet débouté. Le vingt-unième fut difputs la féance de  k£ E t a t s . meffieurs de Picardie par ceux du gouvernement du Languedoc qui eurent voix Sc féance avant celui de Picardie, & les deux députés de Languedoc firent gouvernement. M. de Merle arriva de la part du roi, pour donner entrée a ceux de Beauvais & a ceux de Chateauneuf en Timerais. Fut apportée par M. Couffin la réponfe a une -requête préfentée par les marchands adjudicataires du fel, de laquelle réponfe ledit Sr. Couffin avoit été chargé. Fut réfolu quel'on enverroit aux deux ordres, pour leur faire entendre que ceux du tiers-état pour 1'avancement des affaires avoient délibéré d'entrer deux fois le jour, & qu'ils étoient d'avis de faire trois cahiers. Arriva le fieur de Montet, gentiik>mm<* dauphinois, lequel par un beau & rare difcours nous fit entendre les miferes du Dauphiné, la grande affe&ion qu'avoit M. de Mayenne deréfifter a 1'effèt & violence des ennemis hérétiques, mais qu'il étoitfans argent, partantqu'il étoit expédient deprendre deniers jufques a la fomme de iooooo écus,de quoi les recettes générales de Bourgogne, Auvergne &c Lyonnois, répondroient, jufqua ce que Sardiny ent fait payement de pareille fomme felon qu'il étoit obiigé de ce faire au mois de janvier prochain. Autant en fijt propofe par Je député de Fon- tenay  sous Henri III. t7 Tênay , pout avances faites a 1'arméc de M. de Nevers en Poitou. L'expédient dudit fieur ,de Montet fut regu en la chambre du tiers-état, Sc furent commis ceux de Provence Sc Dauphiné pour en porter propos aux chambres. Le Député de Beauvais demanda entrée en vertu dun arrêt. Le lieutenant de Senlis , Sc M. Charondas s'y oppoferent, & fut la caufe fi longuement traitée que 1'on remit d'y opiner. Le vingt-deuxierne 1'on n'entra pas, &fut ledit jour plaidée la caufe contre ledit fieur d'Avinet de Rouen , au confèil d'état, ou par arrêt d'icelui fut arrêté que les préfidens des gouvernemens des provinces feroient éledtifs ; de forte que pour cette raifon le privilege de la ville de Dijon ne fut par nous remué. Le dimanche vingt - trois , M. 1'Archevêque d'Embrun céiébra la meffe, Sc M. 1'évêque de Bazas prêcha, fort dévotement Sc dodement fut le texte Nemo vos feducat. Le lundi vingt-quatrieme, 1'on travailla aux cahiers provinciaux ; M. du Vergier de Bordeaux , jnfifta d'avoir entrée en vertu d'un arrêt qu'il difoit avoir obtenu contre les fieurs de Secafort Sc Metivier , lefquels empêcherent fon entrée Sc réception fur ce qu'ils maintenoient ledit fieur du Vergier être incapable, & que le fait d'héréfie Tome XV. £  1$ É T A T S contre lui objeétée, n'avoit été entamé m découvert a fa majefté , il fut avifé que 1'on députeroit du tiers-état pour faire entendre au roi fi nonobftant 1'incapacité alléguée & prife fur 1'héréfie , fa majefté vouloit que ledit fieur du Vergier eüt entrée , Sc que remontrances feroient faites pour tout 1'ordre, que 1'arrêt étoit contraire aux commiffions de fadite majefté , par lefquels il avoit été ordonné de choifir gens touscatholiques & fans fufpeétion. M. Duvert, avocat délégué de Troyes, fin commis pour y plaider. Le député de Niorr. voalut avoir une voix féparée avec celui de Poitiers, Sc fut réfolu que tous deux n'en feroient qu'une. Le député du Poitou , qui du commencement s'étoit rangé fous le gouvernement d'Orléans , fut par arrêt du confeil d'état condamné a fe mettre & prendre féance au gouvernement de Guyenne. Requête préfentée par les domeftiques de feu Monfieur, frere du roi, pour être payés de leurs gages Sc debtes ; rien n'y fut appointé. Les députés de Fontenay firent des plaintes très-grandes Sc juftes du ravage des hérétiques, Sc prierent 1'affemblée d'être affiftés pour fuppliet la majefté que 1'armée fut avancée vers eux, Sc il fut ainfi conclu. . Fut après mis en terme d'éiire un orateur, 5i  sous Henri III, i9 la contëntion fut grande , favoir fi ce feroit par bailliage ou par gouvernement que l'éle&ion fe feroit; enfin fut réfolu que ce feroit par gouvernement & a la pluralité des voix ; j'eus 1'honneur d 'être nommé ; des douze gouverneurs , j'en eus neuf; M. d'Oriéans, avocat a Paris , en eut trois , favoir, Paris, Normandie , Picardie; j'eus Bourgogne, Guyenne, Breragne, Champagne, Languedoc , Orléans, Lionnois , Dauphiné 8c Provence. J'eus 1'honneur auffi d être congratulé de tous , & me fut dit par le préfident du gouvernement d'Oriéans, que la difpute entamée, fi 1'on procéderoit par bailliage ou gouvernement, n'étoitque de crainte qu'ils avoient, quëfe faifant par gouverment, feize bailliages qu'ils étoient ( tous portés a me gratifier 8c reconnoitre ) ne fulfent emportés par la voix d'un gouvernement oü ils étoient cinq feulement. Le jeudi vingt feptieme 1'on fit rapport de ce que 1'on avoit dit au roi touchant M. du Ver- gier Bordelais, que ne faifant apparöir de fonabjuration, il ne pouvoit être recu. Meffieurs du Vert, Lauxerois 8c autres commis , firent réponfe que le roi vouloit qu'il ap. parut de ladite abjuration. Ceux de Langres par Fleuriot, habitant dudit lieu, entrerent en l'afiemblée, 8c requirënt que B 2  20 E T A ï S leurs cahiers fuflent recus, paree que le député" de Sens en avoit fait refus, il fut dit que leurs cahiers feroient remis entre les mains dudit député pour fidelement vaquer a en faire 1'extrait, Sc le joindre au cahier principal de la Champagne. M. Clerguet fit rapport de ce qu'ils avoient fait a 1'églife touchant les provinces affligées , comme on avoit été au roi, & de ce que le roi leur avoit répondu qu'il ne defiroit que leur foulagement, mais qu'il n'y avoit point dargent. M. Couffin entama la forme que devoienttenir ceux de Paris, en rapportant leurs avis, fans ufer de ce mot (Paris Sc 1'lfle de France); mais ceux de ladite Ifle fe mirent tellement a crier, qu'il n'y eut aucun jugement. Nous fimes rapport que notre cahier étoit compilé , priant la compagnie que nous euffions a commencer ; cela fut différé jufqu'au jeudi fuivant. Le jeudi trente-unieme 1'on s'aflembla par le commandement du roi. Les fieurs du Faucon Sc de Merle remontrerent de fa part que fon intention étoit que 1'on s'avancat, Sc que le chapitre de 1'églife fut par nous ouvert, pour après travailler au chapitre des finances, afin que par ce moven 1'on Kouvat fonds pour la guerrc.  sous Henei III. ii M. d'Oriéans, commis de la noblefle, M. 1'évêque de Chalons en Champagne, &c «elui d'Autun, vinrent au tiers-état dlre qu'ils avoient opiné , Sc qu'ils travailleroient au chapitre de 1'églife, Sc puis aux finances. Le jeudi troifieme novembre, les préfidens des gouverneurs furent députés pour aller a la nobleffe, fur un bruit excité que le tiers-état les vouloit faire taillables, Sc afin de lever cette opinion. Ceux de la noblefle firent réponfe qu'ils n'en avoient oui parler. Le fieur le Comte, maitre des requêtes, requit par procureur être rec.ii pour entrer en la compagnie , comme député de ceux de Xaintes , " Sc paree qu'il paroifloit de légitime pouvoir ; il fut débouté. L'on commenca le cahier général. M. de Bazas vint & dit, que fur le préalable touchant 1'autorité des états, 1'églife ne vouloit parler finon portant un chapitre au roi, Sc que 1'en attendoit favis- de la noblefle pour s'en ré-, foudre, il fut ainfi conclu par les trois ordres pour n'y perdre pas de tems. Ledit jour fut fait ouverture des cahiers, Sc l'on commenca par celui de Paris, auquel ehtre autres articles étoit coirchée une requête préfentée a la cour de parlement de Paris, contre M. de B 3  11 É T A X S SoiiTons, pour le faire déclarer indigne de la couronne, pouravoir aidé le roi de Navarre contre les catholiques, & avoir affifté a la mort de M. de Joyeufe , faite de fang-froid. Quatre gouvernemens adhérerent ï ladite requête ; quatre autres opinerent a ce que ledit article füt communiqué aux chambres ; quatre a ce qu'il füt rayé avec bonnes raifons, car il avoit juré ledit d'union, il avoit eu abfolution de fa fainteté , il étoit en cour faifant le catholique, par ainfi il n'v avoit pas raifon ; auffi qu'il étoit incivil d'apporteraux Etats - Généraux une requête d'une ville particuliere, pour être avouée par toute la France. Ce fut i'avis de notre province , lequel ayant été remué fur ce qua petit bruit je remontrai au fieur de Neuilly, qUe Cet article r.e feroit jamais avoué par les autres ordres, & que ce n'étoit qu'exciter du bruit mal-a-propos , 1 affaire remife en délibération, fut notre avis fuivi 8c 1'article rayé. Le quatre fut continué le cahier général, & entr'autres articles la publication du concile de Trente, réfolue fans préjudice des libértés de 1'églife Gallicane. Meffieurs de Villiers 8c de Loches vinrent de Ia part de la nobleffe, pour faire entendre leur réfolution touchant le préalabïe de 1'autorité des états en laquelle ils fe confonnoient.  sous' Henri III. 23 L'après-diné fut pourfuivi le cahier, & vinrent de la part du clergé meffieurs 1'archevêque d'Embrun , 1'évêque de Baras &: autres prélats, pour inviter le tiers - état a fe joindre aux prières que l'on entendoit faire au roi, pour envoyer une armée au pays de Guyenne, qui étoit le plus défolé Sc ravagé par les hérétiques , Sc afin que le tiers-état eüt a avifer , fi le roi de Navarre ayant les armes au poing , ne devoit être déclaré criminel de lèze-majefté divine Sc humaine , fes états confifqués, déclaré relaps, indigne lui Sc fa poftérité de la fucceffion Sc de tous droits fur le royaume , fuivant que le clergé 1'avoit réfolu » & que le lendemain ils en feroient pareille ouverture a meffieurs de la nobleffe. Le famedi cinquieme, M. 1'évêque de Bazas, accompagné d'autres eccléfiaftiques , entre lefquels étoit M. de Citeaux, nous porta propos de la part du clergé , que cejourd'hui matin, M. 1'archevêque d'Embrun avoit été mandé par le roi s lequel lui avoit dit, qu'il feroit bien aife qu'avant que de rien réfoudre pour le fait du rol de Navarre, il füt de nouveau fommé Sc requis de fe remettre a 1'églife catholique , Sc quoiqu'il fut alTurément que telle femonce ne ferviroit a rien pour le convertir Sc rapeller, néanmoins que cette lormalité gardée , il y auroic occafion de rendre la guerre plus jufte, Sc dé- B4  *4 É T A T S tournet le fecours d'Angleterre , fur quoi l'on vouloit que l'on eut a y pourvoir; que Cela ayant été rapporté au clergé, il avoit été réfolu d'une même voix , qUe 1'édit d'union ayant été juré , le roi de Navarre portant encore les armes contre Dieu & fon églife, ayant été excommumé, l'on ne pouvoit, & ne devoit-on plus ufer de recherche ; il allégua pareillement tout ce qui avoit été fait ci-devant pour le retirer, les voyages de la reine mere , & d autres qui étoient noroirement demeurés fans fruit, par ainl. cue 1'églife ne pouvoit faire davantage. Etant retiré, & farW mife en délibération,' le tiers-état fut d'avis de déclarer le roi de Navarre criminel de léze majefté divine & humaine, en la même ferme que meffieurs du clergé avoient couché leurs délibérations. Sauf qu'au lieu qu'il Ctoit porté que le roi de Navarre feroit déclaré herenque, l'on dït que ce n'étoit point aux laiques a faire tel jugement, & qUe nous ulericns de ce mot, que comme hérétique, il feroit privé de la fucceffion; & nota que ceux de Langiiedoc firent pareille requifition contre les fieurs de Montmorency.de Chatillon, 16 vicomte de lurenne & autres. M. de Neuilly, accompagné d'unde chacunc province, furent députés pourporter la réfolution au clergé , M.. FJarjot fut nommé pour la Bom-..  sous Henki III. 25 gogne, vers Je roi, & lui faire entendre ladite réfolution. Après-dïné vint un perfonnage de la part de meffieurs du clergé, qui fit entendre que meffieurs de la nobleffe étoient entrés au même avis, Sc que tous les députés du clergé, de la chambre des nobles fe délibéroient de s'acheminer vers la majefté. Nos députés partirent a 1'heure même, pendant 1'abfence defquels fut continué le cahier général, & iceux de retour , ledit fieur de Neuiliy rapporta que les propos avoient été tenus &porrés par M. 1'archevêque d'Embrun, tant pour le fait du roi de Navarre, que pour inviter fa majefté d'envoyer une armée enGuyenne, afin que cette province füt purgée du chef des hérétiques. Que fur cette propofition, le roi avoit répondu, qu'il eüt defiré que fon intention eüt été fuivie , pour par une derniere fommation inviter le roi de Navarre a fe reconnoitre , & quant a 1'arméede Guyenne , qu'il y avoit un bon lieutenant bien catholique , & qui lui avoit toujours lait fidele fervice ; cependant qu'il feroit par lui avifé, de conferver ladit province. Que ledit fieur d'Embrun avoit répliqué , que les troi's ordres étoient la réfolus de ne plus rechercher le roi de Navarre ; que c'étoit un membre pourri, Sc qu'étant excommunié, il ne pouvoit ctre par  l6 E T A T S cux en rien reccnnu. Suf quoi le roi lui ayant répondu : ehbien,fi vous craignez tant 1'excommunication , le légat du pape eft en ma cour pour vous abfoudre& délier, & néanmoinsne penfez pas, que ce que j'étois d'avis qu'il fut rapellé, ce foit pour le rendre habile a me fuccéder, car quand Dieu ne me donneroit lignée, je pourvoyerai de telle forte au royaume, que jamais roi ayant été hérétique ne vous gouvernera , ce qu'il defiroit être communiqué aux chambres. Sur ce 1'avis pris, fut réfolu que l'on perfifteroit a la première réfolution & que fa majefté feroit fuppliée de donner le gouvernement de Guyenne a un prince catholique , & non a .,. que pour 1'armée pareillement un prince catholique la commanderoit. Le lundi feptième l'on remua le fait du roi de Navarre , & fut dit, que le billet, en la forme que ceux du elergé 1'avoient couché , demeureroit. M. de Neuilly fit fa plainte pour quelques raports faits a fa majefté, & qu'en un mot, il ne vouloit pas fouffrir, dis-je , permettre que 1'article touchant le confeil que le tiers-état defiroit lui être donné paffat, & moins qu'il lui fut préfenté. Déclaration de M. Compan, fur laquelle fut  sous Henri III. 27 ©piné, & la négociation du fieur de Neuillylouée Sc avouée. Meffieurs de Rambouillet Sc préfident de Faucon , vinrent de la part de fa majefté, faire entendre que le roi ne vouloit plus permettre qu'on lui fit de plaintes ni remontrances pour chofes particulieres , fauf de les coucher au cahier, Sc qu'il étoit délibéré de réfoudre Sc clore le cahier, ou par chapitre ou étant repréfenté tout entier , Sc que pour montrer qu'il faifoit grand état de nos bons avis, que de chacun ordre il y en eüt quatre pour déduire les raifons des articles, pour après y ajouter ce qui feroit de raifon. Après furvinrent de la part de meffieurs du Clergé, M. 1'évêque de Comminge, accompagné d'autres notables eccléfiaftiques, lequel fit entendre au tiers - état que ceux de leur ordre étoient de leur premier avis, Sc demanda quei feroit le notre pour le fait du roi de Navarre; il fut répondu qu'il étoit conforme a celui de Meffieurs de 1'églife. II remontra qu'il étoit expediënt que quelques particulicrs approchaflent le roi, non par forme de commiffion, mais comme d'eux-mcmes, pour le perfuader a notre avis, a 1'exemple de ce qui avoit été fait pour 1'édit d'union, &: que nous pourrions en rclicntir le même fruit, cependant qu'il ailoit favoir Sc prendre langue de cc que la noblefle avoit  é t a' r s répondu a M. 1'évêque de' Chalons en Champagne, député vers les gentilshommes a eet éffet. II retourna auffitot vers nous, Sc nous dit que la noblefle, fur la propofition de M. Rambouillet, fe contentoit de faire article au cahier touchant la propofition contre le roi de Navarre, Sc que de notre part nous eufllons a y opiner ; cela fut remis a 1'aprèsdmé. Après-dïné fut réfolu que l'on perfifteroit a la première délibération, ce qui fut porté 5c déclaré a ceux du clergé, & a eet effet M. le Roy, député, lequel nous rapporta que Meffieurs de 1'églife avoient pris pareille réfolution ; rien n'en fut communiqué a Meffieurs de la noblefle, qui n'entrerent ladite après-dinée. Le mardi huitieme la propofition ouverte fur le même fujet, fut avifé que 1'oa en devoit avertir ceux de la noblefle, d'autant même que nous fümes avertis que Meffieurs du clergé y avoient envoyé M. de Chalons en Champagne ; Meffieurs le Roy, Chatelier & le lieutenant de SaintPierre-le-Moutiers, furent commis, lefquels a leur retour dirent que Meffieurs de la noblefle, s'étoient conformés a nos avis, Sc que de chacun ordre feroit député pour aller vers fa majefté ; M. Saulvier fut nommé ppur notre gouvernement.  sous Henri III. 2J) Vinrent en la chambre deux chevaliers de Malthe, affiftés de deuxgentilshommes, députés pour nous faire plainr.es & remontrances de ce qu'en France leurs priviléges commencoient a fe perdre &; diminuer, mêmement pour les grands prieurés, defquels le roi commencoit a difpofer,que par ce moyen , c'étoit faire perdre aux francois les premières dignités de leurs ordres : car nul ne peut être grand-maïtre qu'il n'ait été grandprieur; par ainfi que fi l'on ne laifioit la récompenfc aux vertueux , que ce feroit accaignardir les francois, & les dégoüter de bien faire ; ilsnous toucherent le fait de la commanderie Sc grand prieuré de Touloufe, qu'il n'étoit point de 1'ordre, avec autres raifons bien digérées, pour nous joindrea leur requête, ils délailferent leurs mémoires pour y opiner. Après-dïné M. Saulvier fit fon rapport, Sc nous dit que M. 1'archevêque d'Embrun avoit porté le propos pour tous les ordres , & avoit fait des remontrances touchant le roi de Navarre, avec beaucoup de bonnes raifons que le roi avoit recu de bonne part, avec réponfe qu'il favoir bien que, le roi de Navarre étoit hérétique, indigne de la couronne, qu'il étoit bien réfolu qu'il n'y auroit jamais part, Sc que de ce nous euffionsiremplir nos cahiers , délibérant de nous fatisfaire & contenter fans en vouloir faire le refus, mais qu'il  3=> E T A T S étoit délibéré de le lommer de répondre a nos requêtes , afin qu'il eüt raifon de fe moins plaindre, y obfervant cette formalité, & que ce füt un moyen pour retirer les catholiques qui le iüivoient, nous exhortant de ne 1'en plus importuner, vu fa fainte réfolution pour ce regard. II fut avifé que l'on fauroit ce que Meffieurs du clergé voudroient dire fur ce fujet, cependant 1 on travaillat a la continuation des cahiers. Nota. Que M. Charon de 1'ifle de France étoit 1'un des députés pour affifter Meffieurs du Clergé ; mais il faut obferver qu'a défaut d'un de la ville de Paris, le député de Bourgogne porte la paro'e, & fait le rapport en toutes commiffions. Requête pour révoquer M. de Montmorency du gouvernement, 8c le faire répor.dre fur la contremention a 1'édit d'union; ladite requête mife au cahier général. Le mercredi neuvieme, vint M. 1'évêque de Sarlat, de la part de Meffieurs du clergé, pour nous faire entendre qu'ils étaient bien affurés de la bonne volonté de fa majefté , & partant qu'ils fe réfoudroient de drelTer article par écrit touchant la réfolution prife pouE le fait du roi de Navarre , pour préfenter ledit article des premiers du cahier général, laquelle réfolution fut fuivie. Les remontrances données par Meffieurs les  sous Henri III. 3r chevaliets de Malthe , furént remifes cntre les mains de M. CouCIn pour en faire rapport. de Lux manda a M. Couffin & a moi , que le roi defiroit de nous veir a 1'iiTue de fon dïné, & lentrée nous fut donnée en fon cabinet par ledit fieur de Lux ; lors il nous dit qu'il favoit nos déportemens, & de toute la province, qui lui étoient fi agréables, qu'il nous en remercioit & qu'il les fauroit tres-bien reconnoïtre en tems & beu; après il nous fit part de toutes fes bonnes volontés & du regret qu'il avoit d'avoir été fi mal fervi, qu'il étoit k préfent fi bien difpofé, que nous ne partirions jamais fans contentement, qu'il ne defiroit rien plus que de laiffêr une bonne mémoire a la poftérité de 1'amour qu'il avoit pour fon peuple, & qu'il ne falloit pas efpérer autre éhofe de lui. II nous recut avec tant de refpect, qu'il fe mit.a devifer avec nous fort particulierement de la fuppreffion des officiers, des partifans, des dons immenfes , des mauvais debtes, de la mifere des villageois, & par propos interrompus , Meffieurs de Lux , Couffin & mbi, parlant les uns après les autres, fut le difcours continué plus d'une heure, n'y ayant autre que nous avec un M. de Satnt-Prié, & M. de Loignac affez éloignés. Sadite majefté fe plaignitdes fréquens blafphêmes, Sc qu'il ne penfait pas jamais avoir juré que fa foi. II nous dit que M. de Lyonviendroit le jour dsdemain  3i ÉTATS? apporter 1'état de fes dettes , oü nous euffions l prendre garde de celles qui étoient mauvaifes; il y eut infinis autres propos; le fujet nous fut préparé de parler de nos miferes , ce qui ne fut par nous oublié. Le roi ayant été fort fatisfait & nous honorés, il nous demanda fi nous n'étions qu'avocats , fur quoi lui ayant répondu, il nous dit qu'il voudroit bien que tous fufient pareils. Nous fïmes rapport a la compagnie de ce que le roi nous avoit dit. L'après-dinée fut commencé le chapitre des finances , & la recherche 8c punition des partifans mife en termes & réfolue. Le jeudi dix, fut la requête préfentée par Meffieurs de Saint-Jean de Hiérufalem, rapporté par M. Couffin, 8c délibéré qu'on les affifteroit pour la confirmation de leurs priviléges fans rien plus fpécifier. Le famedi douze, l'on continua detravaillerau cahier général, & vinrent deux de la nobleffe pour faire que l'on entrat en conférence enfemblement pour le chapitre de 1 églife ; M. Raimond fut député de notre province pour affifter a ladite conférence. L'après-dinée fut faite continuation, 8c fut entamée par le fieur Briflac, préfident de la noblefle , une propofition pour faire la guerre au duc de Savoye, fur qnoi fut dit que les trors ordres en pourxoient  sous Henri III. 33 pourroient entree en conférence au lendemain inatin , ilTue de la meffe aux Jacobins; ceux du clergé vinrent aux mêmes fins. Le dimanche, IVI. de Rambouillet, évêque du Mans, prêcha •, a 1'ifTue de la prédication , nous fünies a 1'affemblée fur le fujet du duc de Savoie , oü étoit le cardinal de Guife ; la réfolution remife au lendemain. M. d'Elbeuf arriva ledit jour. Le lundi, réfolution prife contre le duc de Savoie, a ce que fa majefté feroit fuppliée de bailler forte & puiffante armée a M. le duc du Maine , pour avoir fa réfolution Sc dudit duc , Sr des hu-* guenots du Dauphiné. M. le préfident de Neuilly , commis pour porter le propos au clergé , Sc moi pour le porter a la nobleffe. Le mardi quinze , M. de Neuilly apporta une requête de certains inventeurs, qui offroient de faire trouver douze eens mille écus, fans la foule du peuple , a la charge de leur donner vingtieme , ce qui fut rejeté. L'on propofa que l'on forceroit les receveurs Sc tréforiers pour faire augmentation definance, moyennant accrue de gages, fur quoi fut condu que remontrances en 'leroient faites au garde des fceaux. M. de Merle vint propofer de la part du roi , Tome XV. G  34 É T A T s que plufieurs gentilhommes demandoient don des biens des huguenots, de quoi il vouloit avoir avis des EtatSi Après-diné, M. de Neuilly fut comrnis pour porter la délibération touchant le duc de Savoie, qui lui fut donnée par écrit, qui étoit que 1'armée de M. du Maine feroit renforcée & rendue puiffante, tant pour avoir raifon des hérétiques du Dauphiné que pour empêcher que le duc de Savoie n'entreprït rien fur 1'Etat. Continuation du cahier général, 8c furent achevés les chapitres de la finance. Mercredi feizieme, continuation du même cahier, vinrent de la part de la nobleffe deux gentilshommes pour nous inviter de députer pour aller au roi, 8c lui porter la réfolution contre ledit duc de Savoie, que ceux de la chambre de 1'églife & ladite nobleffe avoient délibéré d'y aller en corps d'Etat; le tiers-état n'en commit que douze , 8c fut de notre province M. Venot. Chapitre de la fuppreffion du cahier de Paris examiné. Après-diné, l'on rapporta les arrêtés du chapitre des loix d'Etat, que les députés, pour entier en conférence avec les deux autres ordres, avoient jugés être digne d'être réfolus en plein bureau. Le premier étoit de commettre au gouvernement de Guyenne , un prince catholique non  sous Henri III. 35 fufpect, 8c étoit la difficuité fi avec le mot de prince l'on diroit ou autre feigneur , il fut dit que l'on pafferoit a ce que les deux autres en concluroient, fil'on ne pouvoit avoir un prince. Le fecond étoit de condamner la mémoire de Henri de Bourbon, prince de Condé, dernier décédé, 8c de fa poftérité 5 Tarnde palTa. Le troifieme d'exclure de la couronne ceux qui avoient été hérétiques depuis 1'age de quatorze ans, 8c ceux qui depuis 1'année 1585 avoient faitaótes d'hérétiques; ledit article fut rayé , & réfolu que Ton fe contenteroit de 1'édit d'union. L'on mit en termes, fi les députés a la conférence auroient pouvoir de réfoudre, rien n'en fut réfolu, 8c fe trouverent les gouvernemens partagés. M. Venot fit rapport du propos porté par monfieur 1'archevêque de Bourges au fujet de finjure de laquelle les Etats avoient occafion de fe p'aindre contre le duc de Savoie, & de 1'offre qu'ils faifoient a fa majefté de leur bonne volonté 8c moyens pour empêcher fes entreprifes fur 1'Etat, que monfieur de Briffac avoit porté la parole pour la nobleffe, qui avoit offert fa vie, armes & perfonnes pour tirer raifon de ladite injure , 8c qu'étant contrahit de parler pour le tiers-état, il avoit fuivi la réfolution prife a la chambre. L'on fit plainte que plufieurs fe défaifoient de leurs Etats a compofition de deniers, ce qui était C 2  3* É T A T S contraire a la promelTe du roi & a la dignité dej Etats. Nota. Que c'étoit M. Séguier, lieutenantcivil, & fon frere avocat au parlement de Paris, le préfident de Troyes & le prevót. Fut arrêté que l'on s'en plaindroit, 6c que les charnbres en feroient averties. MM. Duvergier & le E-ague commis pour aller aux charnbres a ces effet. Le jeudi dix-fept, l'on'propofa qu'au préjudice de ce que l'on faifoit pour la fuppreffion des officiers, un nommé d'Albany, partifan, pourfuivoit des tréforiers a lui payer la fomme , de feize eens écus, moyennant deux eens d'accrue de leurs gages, 6c il fut réfolu qu'il en feroit communiqué aux charnbres, a ce que fa majefté füt fuppliée de décerner prife de corps contre ledit partifan. Monfieur Venot commis avec le fieur d'Alengon. L'on continua le cahier des fuppreffions 1'aprèsdiné; ceux qui étoient députés pour entrer en conférence fur le chapitre de 1'églife rapporterent quelques articles, memement celui qui regardoit la condamnation de la mémoire du feu prince de Condé 8c de fa poftérité , auquel article on defiroit qu'il füt ajouté fans préjudice des princes catholiques de la maifon de Bourbon ayant juré 1'union, & qui vivront conformément au contenu d'icelui; 1'autre article concemoit les fauteurs d'hérétiques, l'on fut d'avis que 1'un 6c 1'autre fuffenc  sous Henri III. 37 rayés, & que l'on s'entiendroit aux termes de récht" Lefdits députés , a la conférence du clergé, detnanderent ou qu'ils fuffent révoqués , ou qu'ils eufTent un pouvoir plus ample; ce fut une difpute fort avant rcmuée, fur laquelle notre province fut d'avis de la révocation, & que nous n'avions pas puiiTance de déléguer. Nous fümes fuivis de quatre autres pro vinces; mais il palfa au contraire, favoir, qu'ils pourroientfe^réfoudrefurlesarticiescontenus aux cahiers de ceux du clergé , & de la nobleffe en ce que lefdits articles ne feroient contraires aux nótres, & qu'ils fuffent cohérens en quelque point, & auffi a la charge que les autres députés auroient pareil pouvoir en leurs charnbres, Continuation du cahier. Le vendredi dix-huitieme, M. Venot fit rapport, & nous dit que meffieurs de 1'églife avoient député M. 1'évêque de Comminges pour a 1'iffue du diner du roi, faire les remontrances requifes contre ledit d'Albany & autres partifans; 1'onavifa de continuer fa commiffion avec cinq autres qui furent députés. L'après-dinée, M. le préfident de Neuilly rapporta comme 1'état desfinances, communiqué aux ordres, étoit du tout défeétueux pour le regard du domaine, que tout y étoit fi obfcurément couché, que l'on n'y pouvoit rien comprendre , qu'a eet effet ils avoient envové vers. M. de Chenailles,  3S É T A T S pour avoir 1'état particulier des tréforiers. M. de Thefut, 1'un des députés pour 1'examen des nuances, dit que ledit fieur de Chenailles leur avoit fait réponfe que les tréforiers n'envoient aux intendans autre chofe que ce qui avoit été apporté, & qu'il ne pouroit rien plus. M. le préfident de Rys, fieur de Faucon,fut député par le roi qui nous fit entendre de fa part, que fur 1'article qui fe remuoit touchant Ia mémoire du feu prince de Condé & duquel il avoit été averti, il defiroit que quelques mots y fuffent ajoutés, defquels il avoit donné billet par ecrit qui portoit fans préjudice aux princes cathoiiques de la maifon de Bourbon ; le fieur de Neuiily lui fit entendre que ledit article avoit été rayé en notre chambre , & par ainfi que la chambre avoit jugé qu'il étoit inutile d'y mettre ladite adjonction ; que toutefois s'il lui piaifoit fe retirer, on y aviferoit; M. Rémond,l'un des députés de la conférence, avec ceux du clergé, fe lova pour inftruire la compagnie de ce que pour eet égard s'étoit pafte le matin' en leurdite conférence. L'on ne permit pas qu'il en parlat, ledit fieur de Faucon retiré, l'on mit en termes fi ledit fieur Remond devoit faire fon rapport : il fut contre 1'avis de notre gouvernement, conclu que ledit rapport feroit différé jufqu'a une plus grande & ample conférence fur ledit fujet avec les deux  sous Henri III. 3 ? autres ordres , & que cependant ledit fieur de Faucon feroit averti par notre préfident que rien ne fe traiteroit pour ce regard , au préjudice du bien public, & qu'on fe mettroit en devoir de notre cöté de ne point mécontenter fa majefté. M. Venot fit rapport de ce quavoit été remontré par le fieur évêque de Comminges au roi , oü il fembloit qu'il fe fut plutöt plaint de ce qui regardoit 1'ordre des eccléfiaftiques & de leurs mailons , occupées mêmement du cloitre de 1'églife du Mans, oü ledit fieur Fugny frere, ou parent des fieurs de Rambouillet ,■ s'étoient mis avec les foldats, que non pas de la pourfuite des partifansf & qua raifon du nombre de chefs de ladite remontrance, le roi avoit dit qu'on lui dpnnat requête par écrit pour y apporter remede , 5c ordonna ce qui feroit au befpin & foulagement de fes états. Continuation du cahier de fuppreffion. Le famedi dix-neuf, continuation du cahier le matin •, l'après-dinée fut fait rapport des points auxquels le pouvoir donné aux députés de notre chambre, étoit conforme a celui de ceux de la nobleffe, &c fut trouvé que le pouvoir de ceux de ladite nobleffe n'étoit fi grand & ample en ce que par icelui il n'étoit rien dit pour fe pouvoir conformer & réfoudre a 1'avis oü les deus autres ordres pafleroient. C 4  4° É T A T S II étoit auffi divers en ce que l'on ne leur dortnoit puiiïance d'avifer aux articles nouveaux qui auroient quelque conformité a la fubftance des articles couchés aux cahiers de la chambre du tiers-état ou du clergé, encore étoit a convenir de la forme du rapport ; M. du Vergier, préfident au gouvernement d'Oriéans, fut député pour parler propos a la chambre du clergé , a ce qu'ils euflent a députer de leur part vers la nobleffe, pour rendre leurs pouvoirs conformes & leur remontrer ce qui étoit néceifaire pour ce regard. Continuation du cahier. Le lundi vingt-un, fut entamé le chapitre de la nobleffe, & continué la matinée. Après-dïner M. Remond fit rapport de ce qui s'étoit paffé a la conférence avec meffieurs du clergé & de la noblefle, & le peu d'apparence qu'il y avoit, d'y tien conclure & accorder , vü que Je pouvoir des nobles n'étoit fi ample que clui des deux ordres, & néanmoins paree que meffieurs du clergé avoient volonté de commettre quelqu'un de leur chambre pour inviter la noblefle a fe réfoudre de donner de pareil pouvoir , fut furfis d'y opiner. M. le préfident de Neuilly fit rapport de Ia plainte faite au roi le jour d'hier par M. 1'évêque du Mans au nom des 'trois ordres, pour le n ia  sous Henri III. 41 vais ménage que l'on trouvoit aux financesj de quoi les intendans des finances préfens ne purent donner réponfe, & que l'on avoit été contraint d'envoyer a Paris en pofte , pour en prendre mémoire en la chambre des comptes. Fut apporté un billet de la part de la noblefle, pour ériger une chambre compofée de fix de chacun ordre , qui feroient tirés des charnbres des étatsavec fix commiffaires, que le roi nommeroit pour faire la recherche & procés aux partifans courtiers d'office & autres de ladite qualité. II feroit avifé que le roi feroit fupplié d'y mettre deux préfidens , 1'un qui feroit par lui nommé =, 1'autre par les états , & qu'ainfi la nomination d'un procureur général feroit faite par les trois ordres , pour faire choix d'un hom me roide &c entier , qui auroit un fubftitut en chaque province de laFrance pour étre mémoriés & inftruits des partis faits, commifllons exécutées, fans qu'il füt poffible d'entrer en compofition avec lefdits partifans •, a eet effet M. Duret, qui préfidoit au gouvernement de Lyonnois , fut commis pour en porter le propos au clergé, lequel a fon retour rapporta lefdits fieurs du clergé être de pareil avis. L'on mit auffi en terms de requérir par même moyen fa majefté , de furfeoir a routes levées  4* É T A T S de deniers Sc réduire les tailles, ce qui fut ainfi conclu; M. du Vert commis a ce t efTet. M. Duret, qui avoit été député vers la nobleffe pour lerection de la chambre , pour la recherche des partifans & financiers, ft fon rapport que lefdits de la nobleffe fe conformoient a 1'avis du tiers-état , & avoient ajouté , que ladite chambre fe drefferoit a Blois Sc feroit déambulatoire. M. Coqueley, confeiller au parlement de Paris, promoteur en la chambre du clergé, fut député en notre chambre pour nous faire entendre , que la propofition faite pour 1'éreclion d'une chambre, deflinée pour la recherche des financiers, enfemble la requête tendante a la décharge des tailles Sc fubfides extraordinaires, avoit été bien recue , Sc embraffée par les eccléfiaftiques , qui ne demandoient rien plus que la reftauration de 1'état, que c'étoit ou il falloit frapper fans nous arrêter a de petits articles de réformation, lefquels, quoiqu'ils fuffent utiles , ne faifoient maintenant au propos , vu 1'état du royaume , qui tomboit de tous cótés, Sc que fi le peuple étoit foulagé , Sc que pour le furplus, l'on établit vingt - cinq ou trente bons articles que l'on propoferok comme regie d'état , que cela fufnroit attendant un fiecle plus doux. II nous fit un difcours docte, bien agencé& plein de zèle , oü entr'autres  sous Henri III. 45 propos , il dit que c'étoit un miracle , qiï'un fimpie peuple affifté feulement d'un aftre benin ait le premier fervi pour le falut du royaume. Son fujet principal tendoit a la décharge du peuple, a la recherche des riches courtifans , partifans , & autres vermines d hommes, defquels il falloit ferrer 1'éponge , & partant que la chambre devoit être promtement établie ; il fe plaignoit aunom du clergé de ce qu'en notre cahier nous demandions que le peuple eüt voix a 1'éleclion des évêques, le chapitre qua propter de elecl. ne fut obmis, & fobrement nous reprit de ce que de fi pres nous vouiions entrer a. 1'examen defdites élections, Sc quoique nous fuffions tous bons Sc fermes catholiques , nous vouiions a la forme du confiftoire des prétendus réformés venir a choifir les miniftres de 1'églife •, cela fut trouvé mauvais. A fon départ chacun le loua de fa do&rine; mais pour 1'honneur de la compagnie, l'on mit en terme de fe reffentir dudit propos fans aucune véhémence, & faire la plainte auffi douce qü'avoit été le reproche toutefois il fut trouvé meilleur de ne dire mot , pour toujours main- tenir la bonne union avec ceux du clergé , avec lefquels depuis 1'affemblée le tiers-état s'étoit toujours bien entendu. L'on avoit réfolu dans ladite affemblée , c'efca-dire, dans ladite chambre , qu'on traiteroit de  44 État j la fimonie; mais ou prit la réfolution , qu'eüe feroit feulement pour la recherche de la malverfation des financiers & partifans. Quant a la requête pour la décharge des tailles , fon délibera qu'elle fe feroit par écrit, & qu'eile feroit préfentée au nom des trois ordres, lefquels viendroient en corps demander ladite chambre, & avoir droit fur ladite requête. Meffieurs Charon & Cornailles furent commis pourdreffer ladite requête. Meffieurs de Guyenne demanderentque le député de Fontenay eüt k fuivre le fieur de Ruelle, député de Poitou, pour tous deux enfemblement être au banc du gouvernement de labeurs, elle a fi vertueufement & fans varier défendu 1'églife catholique , fi généreufementelle a, par les mains de votre noblefle, maintenu 1'honneur des Frangois , & oppofé tant de fois fa prudence aux malheurs qui alJoient fac cager le refte de la fubftance du peuple. La vertu & la fainteté de la reine votre femme, Sire, conjoint beaucoup d'aiTurance en 1'ef-  sous Henri III. IO<) poir que nous avons de notre prochain bonheur, & tenons notre fiecle bien fortuné, d'avoir produit une fi rare lumiere de foi, de dévotion, de piété , de refpect & d'obéiflance a votre majefté. Supplions Dieu qu'en elle il veuille accomplir les vceux de vos bons fujets, vous donnant lignée, auifi remplie de fes graces que ce royaume en a de befoin. Votre volonté, SiRS, nous donne plus d'argument de bien efpérer que toute autre chofe , en ce qu'il vous plaït a cette heure entendre & recevoir les avis de votre noblefle, fur les plus importantes affaires de votre état. Mais avant que vous les repréfenter fommairement, toutes fois , Sire, j'accuferois volontiers mon infuffifance, fi chacun ne favoit affez que notre profeflïon confïfte plus au faire qu'au dire, & que 1'honneur dont elle eft pleine, peut couvrir de fon mérite le peu d'ornement de mon difcours. II me fuffira feulement, que comme en la difpute des deux muficiens, Pithon & Cephifius, Pyrrhus fit un jugement que Polibercon étoit meillcur capitaine ; qu'auffi voyant difcourir ces deux torrens d'éloquence , M. de Bourges & M. Bernard , votre majefté juge que je ne fuis ici qu'un foldaf. Cela donc me fait mettre a part Ia méfiance de bien parler, & dirai a votre majefté, que nous nous préfentons maintenant a fes pieds, pour lui  iio Etats requérir très-humblement le rétablilTement des premières regies èc honneurs de 1'églife, puis après de nos dignités, quant Sc le foulagement du peuple. Or, étant notre religion la pierre fondamentale de 1'état, il nous a femblé jufte , voire nécelTaire den aflèrmir les colomnes, & commencer par-la au remede de nos malheurs. Et pour ce, nous avons été forcés a vous requérir, par afiemblée, par ferment, par loi fondamentale, ce faint édit, que votre royale bonté nous a octroyé, avec 1'acte le plus célebre qui aye jamais été fait parmi nous. Par cette loi, Sire, vous avez témoigné que vous voulez être auffi bon Sc charitable a 1'endroit de vos fujets catholiques , que févere obfervateur de la juftice divine fur les hérétiques. (luvre certes, qui conftitue le vrai office d'un grand roi très-chrétien. Par-la, Sire , vous avez voulu couper le chemin a tous ces mauvais ccnfeils, qui fouloient introduire 1'humaine prudence parmi les ftatuts, Sc le zèle ardent de la foi, qui cntre les vrais chrétiens ne fe peut tempérer, ni attiédir d'aucune médiocrité ; mais fa perfeétion gït en 1'extrême, &c étant un feu envoyé du ciel, il ne fauroit qu'il ne brüle ; auffi doit-il confumer les divifions, qui peuvent altérer les affetftions Sc les elfets qui fe doivent confacrer au fervice de 1'hon.  sous Henri III. tï* neur Sc de la gloire de Dieu, a la réve'rence de votre autorité, a la confervation & au repos de lapatrie. Vous avez voulu , Sire, introduire paria une entiere oubliance du mal, une amniftie perpétuelle de nos malheurs ; Sc par-la, vous voulez, Sire, environncr les bannieres de none foi Sc religion du témoignage de votre vertu; puifque prévenant les très-humbles fupplications de vos bons fujets, les requêtes Sc avis de vos bons états , il vous a plu obliger votre majefté a la guerre contre les hérétiques: guerre non feinte , non fimulée, non fujette a treves , a accords, a paix Sc a traités ; mais qui établit la vertu & la générolué des armes des catholiques, 1'obftacle Sc le chatiment de 1'impiété des hérétiques ; la s'uniffent les defirs , la s'attachent les confeils , voire les ames de vos plus fideles ferviteurs, Sc la revient pour nous exciter la pieufe mémoire de! nos ancêtres. Les grands monarques, vos prédéceffeurs, ont fur cette même bafe élevé les monts de leur gloire jufques dans le ciel; auffi eft-ce cette divine ardeur, Sire, qui gagne les batailles, qui diffipe les ennemis, qui plante la terreur , qui conjoint 1'obéiffance, qui avance le mérite , qui couronne le labeur, fans laquelle rien ne fubfifte, rien ne fleurit,rien ne fe peut affermir. C'eft elle feule qui eft le lien , 1'ornement Sc la force de toutes chofes.  ui États Quand donc il s'agit de la confervation de ce qui eft ft faint & fi defirable, nous devons dépofer tout refpedt pour le fuivre, n'avouant pour compatriotes que ceux qui font touchés de même defir. Les veilles, les larmes Sc les travaux de ces anciens francois femblent nous demander vengeance de ceux, qui après tant de religieux fiecles ont violé les fépulchres de leurs peres Sc des nötres 5 Sc qui par le fer, la fureur Sc la rage ont voulu arracher d'entre nous cette unique religion, que ces peres faints avoient plantée par lunivers. Or, fi la guérifon du mal nous eft utile , 1'exploit n'en eft pas moins honorable a votre majefté. C'eft cette glorieufe peine qui a timbré de lauriers les couronnes de Clovis, Charles Martel, Charlemagne , Saint-Louis ; Sc qui, comme elle a toujours faitj remplira vos mains de palmes , foulant fous le pied de votre autorité, la téméiité, le parjure Sc les honteufes dépouilles des hérétiques. Cette piété ne maintient Sc n'éleve feulement ce qui eft humain &: caduque, mais 1'environne d'immortalité , Sc autre honneur que le fien ne doit produire que repentance. Que fi Ia clémence eft plus recommandable en un Prince que la vengeance Sc la rigueur, certes, le devoir nous commaade d'en féparer les injures que fon fait a Dieu •, car lors Ie glaive doit être miniftre, de la juftice des ïois, Si donc en Ia foi toute  sous Henri III. lï} toute errear mérite punitión, ceux-la font a bon droit conclamnés , qui ont poufle plus avant le témoignage de leurs démérites. Or,encre ces ames réprouvées, il ne fe peut reniarquer fetfe fi dangereufe, ni fi abominable, que celle des huguenots 5 comme donc fon impiété eft extréme, extreme en puiffe être le chatimenr. A cela, Sire , vous appeiie le repos de votre confcience, la confervation de votre état, & le vieilexemple de nos rois, qui n'ontjamais eftimé travail ni peine fi honorable, que celle oü fe préfentoit le fervice de Dieu, ayant toujours été aufli recommandables en piété, que redoutables en armes. Qr, il ne furfir a votre majefté de païoitre armée de vengeance contre les hérétiques ; nous efpérons que par ce moyen 1'églife fe purgera de nonchalance, de confidences, de fimonies & d'abus, fe réduira dans les bornes de fa première candeur , & fous les faintes loix des conciles facrés , même de celui de Trente. Et certes, je ne fais fi la fareurde fes ennemis eft plus grande , que déplorables fes débordemens. Qui s'abftiendroit de larmes, voyant entre les mains de quelles perfonnes fes honneurs & fes biens fe font difpenfés; & que fouvent les mains profanes des femmes & des foldats on: cueilli les fruits dédiés & voués a la paix des ames, & a la gloire de Dieu ? Tome XK 11  n4 États Veuille donc , Sire , le même Saint Efprit * qui a conduit votre majefté a une ft notable affcmblée, vous inipirer en teJle racen , que déformais la feule piété, & la feule élccftion difpenfe aux pafteurs les ames, les dignïtés , &c les charges eccléiiaftiques •, a ce que les peuples béniflent votre majefté , qui ayant recu a la fête du Saint Efprit les couronnes de Pologne & de France, fonda premierement en fon honneur fon faint ordre : mais enfin couronna fa dévotion du rétablifiement en 1'églife de la voie du Saint Efprit. Et cependant qu'il vous plaira vous occuper a ces faintes délibérations, Sire , votre noblefle vous témoignera toujours fon obéiflance, & les effets de fon très-humble fervice. Cette noblefle , de qui la vertu , la fidélité, & le courage a tant de fois acquis des vicloires a votre majefté , & même celle que vous voyez maintenant députée de fes compagnons, qui s'efforce deconferver par fes avis, bons ménages, & trèshumbles fupplications les temples, les hotels, les monumens, les villes , les palais, les droits, les loix, les coutumes, les pofleflions, les avantages , les dignités , & les bornes de ce royaume. Mais cette troupe n'eft feulement commife en cette aflemblée de la part de fes compagnons, Sire , nous regardons encore ceux dont nous fommes defcendus, & les ames, &cles courages,  sous Hemri III. u j & les enttetófes, & les effets, & ie riche iionneur de tous les chevaliers qui ont mis Ia main aux fondemens, avancemens , Sc confervation de eet empire, &c qui en diverfes fortunes nous ont tracé aux dépens de leurs vies les vrais marqués de ia nobleffe, & le fur chemin de vertu. Auffi ne font-ce pas les cahiers feulement de nos contemporains que nous apportons a votre majefté, c'eft 1'exemple de nos majeurs , & ce que la générofité héréditaire nous doit avoir apporté d'inclination au bien de notre patrie. Cette regie d'antiquité rend notre profeflion par plufieurs moyens la plus digne, Sc la plus recommandable que l'on fauroit imaginer ; ayant ceci de grand, qu'elle fait employer jufques a la vie de ceux qui en font, pour la défenfe, & pour la confervation de ceux qui par profeflion , ou par foibleffe ne fe peuvent défendre d'eux-mêmes. Et par la, SiR£ , les prophetes de Dieu, & leur miniftere faint, la juftice, les marchands, les artifans, les manouvriers, les vieux, les impotens, les veuves, les orphelins , les dames & leur honneur font de la protecfion de 1'épée du geRtiihomme. Tout cela n'eft rien au refoect des limites de la patrie qui repofent fous fa valeur, Sc le plus précieux gage des chofes humaines, 1'image Sc 1'oint du feigneur , la perfonne facrée de votre majefté, fa familie, fes droits, fou H 2  iVtf' États autorité, lont encore de 1'honorable devoir de notre garde. Mais ces chofes-la n'operent point tant d'eftime en une ame vertueufe, que fait un don plus haut, un bien célefte, un privilege plus important , un comble de tous devoirs, une maitrefie obligation qu'a la nobleffe chrétienne a la défenfe de la foi. Par le fervice donc que nous faifons a celui premierement a qui fervent toutes chofes, puis après a votre majefté , par la fidele amitié a nos égaux , & la protedion aux autres , nous accomplifibns le devoir de gentilhomme , que nos majeurs ont compris fous ce feul mot d'honneur. C'eft eet honneur, Sire, qui nous oblige a rendre compte exact de tout ce que nous demanderons, confeillerons, & confentirons en ces états •, & ne pouvons nous départir de tout ce qu'il nous a prefcrit, lans être defavoués de nos freres , fans faire injure a nos enfans, fans dégénérer de nos peres. C'eft eet honneur qui éclaire nos aélions, & les va fans cefte parangonnant a la piété , loyauté, &c conftance mémorable de ceux dont nous nous vantons d'être fortis. C'eft eet honneur qui nous repréfente ceux qui ont chaflë & vaincu les Goths, Vandales , les Ariens, les Albigeois, les Lombards, les Sarrazins & Payens: brefqui ont pourfuivi la défenfe de la foi, &l les vidoires de nos rois, des derniers rivsges de la mer océane,  sous Henri III. 117 bien loin par dela celle du levant 5 &C qui n'.ont kille autres bornes a la réputation de leur valeur, que celles que le foleil pi end a faire le tour de la terre. Toute la troupe de ces preux chevaliers femble difcourir nuit & jour ï nos yeux, nous demandant compte du zele & de la ferveur que nous devons avoir a la défenfe de la religion, fi nous y courons comme ils ont fait a perte de vie , a 1 abandon de femmes & d'enfans, & aux rifques d'ufer a la chaïne le reffe de nos jours, immolés au loyal acquit de la plus fainte , plus due, & plus jufte promeffe que nous pourrions jamais contraclxr. Tous leurs labcurs , toutes leurs fatigues, tous ces mémorables fiéges vaillamment opiniatrés , tant d'incommodités , de maladies , de faim, de pauvretés, denaufrages, & d'étranges avantures ajournent nos confciences, & nos 'ronneurs a de femblables rravaux: nous regardent pour voir fi la délicatefTe , fi la vanité,.fi la gloire déguifée, fi !e faux honneur, fi le gain infame nous dérournera du feutier qu'ils nous ont battu. D'ailleurs, ces armes enrouillées qui pendent au parois de nos temples, le blafon de ces vieux écus rapportés de tant de batailles, eft un dépót que nous avons d'eux , pour le reedre a nos enfuns , qui comme nous y prétendent leur part. N'ayant donc rien au cceur que de rendre a H j  11 S États Jamais le même tcmoignage de notre profeiïion, que nos devanciers, nous fupplions votre majefté vouloir favorifer 1'antiquité de nos droits & de nos franchifes, Sc reconnoïtre en nous les peines Sc les fideles fervices de vos majeurs quant Sc les nörres. Mais afin de les continuer mieux , Sire , il vous plaira interpofer votre autorité, a ce qu'en vous fervant, le bon ordre puifte correfpondre a notre intention ; Sc pour eet eftet, Sire , remettons-nous devant vos yeux les regiemens Sc les ordonnances militaires des rois vos prédéceffeurs t Sc de vous, Sire; & vous requérons auffi trèsinftamment, que ni par achats ni par faveurs aucun ne fe puifte attribuerle titre degentilhomme. La confervation de 1'ordre de meffieurs les chevaliers de Saint-Jean de Jerufalem touche de fi prés a la notre, que fans nous préjudicier grandement, nous ne la faurions pafier fous filence, Sc ne vous fupplier point du maintien de leurs privileges. Mais rétabliffement de tout empire- ne fe maintenant par la feule force Sc loyale valeur des chevaliers, ains la juftice étant 1'un des plus fermes appuis de toute domination , nous fupplions très-humblement votre majefté mettre la mama cette oeuvre, en retrancher les fuperfluités, Sc faire déformais que les charges, qui doivent dilpenfer 1'équité a vos peuples, fe puif-  sous. Henri III. 119 fent acquérir par prud'hommie, par mérite, 8c non par argent. j'ajouterai, Sire, que les mauvais ménages , les déréglemens , Sc larcins manifeftes des deniers facrés au foutenement du ioyaume, nous conrraignent a excker encore votre juftice contre ceux qui aux maniemens de vos finances fe font par trop difpenfés au préjudice du public. La pauvreté de votre peuple, Sire, fe conjoint a ces trés-humbles fupplications, fa miiere, fa difette, Sc I'oppreflïon de fon labeur implore dans fes larmcs Sc dans fes cris le foulagement de fes angoiftes ; Sc votre majefté, a. qui Dieu a commis tant de millions d'ames, accomplira 1'ceuvre, modérant les fubfides, reglant fes finances 9 rétabliflant Ia bonne juftice, policant les gens de guerre, faifant réformer 1'églife , Sc chatiant les ennemis de notre fainte religion. Par ainfi vous ferez le foleil, Sire , qui raleutira les orages, &c diffipera les brouillards de notre fiécle; nous participerons au falut , mais a vous feul en demeurera la gloire. Et lors puifte 1'églife florir plus faintement que jamais; puiffent les armes de la noblefle couper les nceuds Gordiens réfervés aubonheur de notre Alexandre; Sc puiffent les peuples fous la grandeur & les loix de votre majefté, jouir de tout autre repos, mais brüler du foin d'égaler a fes bienfairs les chants Sc les louanges de ces triomphes. Ainfi H 4  126 Etats durant vos ans, Sire, périffent les hérétiques, amfi prenncle ciel vengeancedeleurs erreurs, ainfi leurs dépouilles fervent de monumens aux rois , qu'ils en ont attachés, ainfi la France trouve pour jamais en leur perte fon falüf, fa lumiere & fa force : Ainfi les temples foient refiplendiffans de Ia gloire divine, ainfi en foient les pafteurs révérés, ainfi puifTe leur dévotïon, leur doctrine, & leur foin retirer les ames égarées de la foi, ainfi la religion fainre foit élevée de nos jours au comble de fes honneurs! Soit ainfi 3a nobleffe la terreur des ennemis , le iuftre &ie foutien de 1'état, les arcs-boutans deI'aurorité royale , ainfi fes armes puiffent multiplier les palmes, & avancer les bornes de ce royaume, ainfi fa générofité puiffent devancer la valeiir de fës peres, ainfi la paffaite obéiffance & la ïeuld vertu foient les guides de fa vaillance ; ainfi mihlet-e!le égaler fon courage ï fon devoir, èc.ïim pire de fon prince a la terre! Ainfi puiife le peuple être fauvé de fes maux, & jouir d'un ciel favorable, ainfi fè confondent fes calamités, ainfi Dieuveueillebénir fes peres & finir fes trava-jx, ainfi fon bien correfponde a fa droiture, & fon obéiffance a la grandeur & a la bonté de fon roi ! Fin de la harangue du Comte de Briffac. Pour moi , pour le tiers état, je dis en cette fortc: Sire, vos trés - obéiffans fujets du tiers-  SOUS II E N R I III. III état vous préferitent en toute humiiité les cahiers de leurs plaintes , remontrances Sc fupplications, pour être les articles vus & répondus par'votre majefté , a 1'entretenement de 1'édit d"union , réformation du défordre paffé, &: foulagement de votre peuple ; & paree que la coutume 3c liberté ancienne des états, per mettent que les plaintes publiques foient faites Sc rapportées publiquement , ils deflrent 3c requierent que fans rien changer de la forme ancienne , jour dë cette fernaine leur foit donné pour ouir en public leurs fupplications, a la charge de ne point fe déparrir pendant les huit jours qu'il a plu a votre majefté prendre pour la réfolution entiere des cahiers, lefquels expirés, ils fupplieront votre majefté les licentier, & permettre qu'ils puiffent être porteurs de bónnes nouvelles, publier 3c témoigner a vos provinces, vos faintes 3c juftes intentions; m'ont auffi donné charge expreffe de fupplier votre majefté, qu'en continuant fes bontés Sc clémences ordinaires, il lui plaife mettre en liberté nos confrères détenus Sc arrêtés, Sc les rendre a la compagnie du tiers-état entiers en leurs perfonnes & réputa'tioiï. Les cahiers furent recus en la chambre du confeil, toute remplie d'hommes, le roi étant affis dans une chaife prés de la cheminée, -Sr furent  ÉTATS mis nos cahiers entre les mains du fieur fecrétaire Beaulieu. Le roi, nos propos tenus, nous dit qu'il avoit entiere volonté de nous foulager & aimer, Sc faire mieux qu'il ne fit jamais, a la charge de lui être bons fujets & de vivre en fon obéiffance; que quelques chofes étoient avenues ces jours pafles a fon regret •, mais que contre fon naturel il avoit été forcé de ce faire, Sc qu'il n'y avoit aucun de fes fujets hors de paffion , qui mettant la main a la confcience ne dit que ce qui a été fait, a été juftement, 5c qu'il ne pouvoit faire autrement ; qu'il nous donnoit dimanche pour le jour de nos harangues , oü il vouloit qu'on parlat librement ; Sc quant aux prifonniers, qu'il ne pouvoit pour le préfent nous accorder nos requêtes, mais qu'il feroit toujours paroitre fa bonne clémence ; quant au fieur de Chalons en Champagne , que c'étoit un faux bruit, qu'il penfoit qu'il füt en toute liberté, qu'il en avoit une lettre de fa part, au refre qu'il n'entendoit pas qu'il eüt aucun mal pour. 'être de fes bons ferviteurs. Le fieur de Briffac lui dit que le jour affigné étoit le jour de fa fievre, c'eft pourquoi les harangues furent remifes au lundi. Le député du fieur de Matignon vint appox-  sous Henri III. 113 ter mémoires pour répondre a ce qui avoit été dit contre lui , lors préfidant au tiers-état, je lui répondis en cette forte : Monfieur-, 1'alTemblée du tiers-état de la France a recu de bonne volonté, Sc a vu de bon cceur les lettres & mémoires envoyés de la part de M. de Matignon , duquel la vertu, intégrité & générofité leur a été en général Sc en particulier finguliérement recommandé, non-feulement comme d'un feigneur Sc maréchal de la couronne de France, qualité qui n'eft propre qu'aux plus grands, fages Sc vertueux du royaume , mais pour la preuve que nous avons de fon zèle a la religion, de fa fidélité au roi & de fon affeotion au bien de 1'état: ce que tant de fois il a faitparoïtre par fléges Sc prifes des villes rébelles, par fes armes contre les hérétiques, parhafard de fa vie & perfonne contre les communs ennemis en divers lieux Sc provinces de la France ; que fi quelques articles ont été vus Sc lus contre le nom Sc réputation de M. de Matignon , ilfaut qu'il croie & tienne véritable qu'ils furent déguifés &c prétextés du bien public, que l'on déclara que c'étoit plaintes qui regardoient 1'état. La confervation des catholiques Sc le repos a 1'avenir de la province de Guyenne, vous affurent pareillement, M. de Matignon que rien de finiftre n'eft demeuré en cette compagnie , des libelles diffamatoires fi lachement divulgués  États a fon préjudice: il n'eft pas le premier de fon rang & qualiré expofé aux médifances. Ce fera donc a M. de Matignon de négliger ce qui s'eft dit, lu & écrit contre lui, tant pour 1'afiurance qu'il a lui-même de fes a&ions paffées, que pour les témoignages que nous lui en rendons, &-que ci-devant lui a été donné lorfque M. fon fils fe relTentant de 1'injure faite au fieur fon pere, fit dignement entendre ce qui pouvoit fervir a lever les mauvaifes impreftions & calomnies préparées. Car ayant eu entrée en cette chambre, & après qu'il fut oui, M. de la Chapeiie préfident du tiers-état, n'oublia rien des mérites, louange & intégrité dudit fieur de Matignon, lequel vous prierez de notre part de fe perfuader que nous croyons que la honte retournera fur les auteurs du blime. Vous 1'inviterez auffi, s'il vous plaït, de continuer fa dévotion a la reügion catholique , & fes entieres volontés, a la défenfe & confervation de 1'état; qu'en ce faifant, nous eontinuerons de l'aimer& honorer. Ce que je dis, je ne le dis de moi feui, mais au nom de toute 1'aifiemblée de laquelle vous entendez 1'aveu par la voix & 1'exciamation commune de toutes les provinces; quant au furplus des lettres , ce n'eft pas a moi d'y répondre ; Meffieii:s y délibéreront promptement. Le quinzieme, jour.de dimanche, nous fümes  sous Henri III. affembjés en la grande falie du chateau pour faire les harangues. Le roi y féoit en fon lit de juftice, 6c en la même forme que celui de fon propos. M. di Bourges paria pour le clergé, & fut fort long ; M. de Briffac pour la nobleffe , & moi étant ja monté fur le théatre préparé pour les orateurs, Sc après avoir fait les trois révérences accoutumées, & me mettant a genoux pour parler, le roi me dit qu'il remettoit mon propos au lendemain a la même heure qu'on avoit commencé; cela fut fait, paree qu'il étoit trop tard. Le lundi feizieme, i'affemblée étant fort grande, & la falie plus remplie que le jour auparavant , je commencai mon propos fur une heure & demie , lequel je continuai jufqu'a trois heures ; j'étois prés de M. Cartier, qui m'avertit de dire Domine , labia mea aperies, y allant je me fentis ému ; mais écant a deux genoux , Dieu me fit la grace de commencer, continuer le propos & le finir, fans aucune peur, changement, ni variation ; je fus oui avec telle attention , qu'une fyllabe ne fut pas perdue. Mon propos fut tel, felon que depuis il a été imprimé. SIRE, Vostres-humbles & trés - otéiffans fujets da  tis États • tiers-état de votre royaume , aftemblés par vaS' commandemens, louent Dieu & vous rendent graces tout d'une même voix , efprit Sc volonté, de reconnoïtre, comme iis ont toujours fait, votre ferme conftance, zele & fainte réfolution a la défenfe de la vraie ancienne religion de leurs pacres, feul ornement de votre couronne, & fondement de votre état. Ils ont auffi occafion de fe confoler, &: bien efpérer plus que jamais, de voir le jour tant fouhaité , auquel votre majefté eft difpofée d'ouir leurs plaintes, entendre leurs remontrances, prendre leurs avis, & recevoir leurs humbles fupplications. Leurs remontrances, SiRE, pour être au bien de votre fervice, falutaires & profitables au public , ne feront par eux fardées ou déguifées de quelque langage aftedté. Ils les veulent & entendent faire fimples , libres, juftes 6- véritables , fachant que les anciens 'avoient accoutumé de peindre la vérité toute nue, pour montrer qu'elle vouloit être ouie , vive & connue a découvert, fans voile , fard ni ornement quelconque. Principalement quand Ton s'adrelTe aux rois, que c'eft tout un peuple qui parle, & qu'il y va du falut commun. Nous fommes a cela invités & contraints,  so er s Henri I IJ. 1Zy d'ailleurs , par la franchife des états, par la liberté donnée, par la fÓreté promife , nécelfité de nos charges publiques, & obiigations particulieres de nos férmëns ; que quand nous n'aurions vos afTurances & promeffes, que, nous tehótisfadfées & inviolables, une feule raifon nous poufieroit aux libres difcours de nos plaintes Sc doléances. C'eft, Sire, qu'ayant Ie principal intérêt a la confervation Sc reftauration de votre état, vous feul aurez jeté la vue, & drefie vos prudens confeils, pour la confervation des trois ordres de votre peuple, vrai, ancien Sc ordinaire remede pour fauver Sc garantir le royaume de fa ruine, décadence & péril d'uu prochain naufrage. Y avoit-il moyen de le remettre e^fa première fanté, force & convalefcence, nettoyer le royaume de toute impiété, & nous rendre Ie ciel favorable , que de nous promettre fentieré exécutionde votre faint édit d'union; faintl'appehWnous, & fc doit ainfi qualifier, paree que nous croyons qu'il a été envoyé & minuté &c dicté du doigt de Dieu, comme les tables donnés a MoyfC) ^ ^ ^ ^ a Uraël. Mais qu'ai-je dit, promettre, vous I'avez folemnellement juré , Sc par 1'avisdevos états pour loi fondamenule de votre royaume, aVec  i28 États un fi grand contentcment de vos bons fujets , que la France ne s'eft jamais vu un jour fi profpére Sc heureux. Vous avez par ce feul ade, outre les autres marqués de votre piété, acquis un nom immortel & facré , votre mémoire a la poftérité, non moins que fit ce grand empereur Théodofe, par un pareil édit contre les hérétiques de fon tems, lequel fut trouvé fi nécefiaire a tout ie chriftianifme, que les peres anciens aifemblés au concile d'Afrique, jugerent qu'il le falloit renouveller Sc enregiftrer, outre les fandions principales de 1'églife, que depuis l'on a appellé les loix de 1'uniré , c'eft-a-dire, ledit de 1'union. Et a la vérité, Sire , vous ne pouviez ni ne deviez faire autrement : car les rois & monarques n'ont le fceptre en main, Sc ne font appellés aux dignités fuprêmes , fiuon que pour être niinifttes de la gloire de Dieu, défenl'eurs de fon nom, protedeurs de la religion, Sc difpenfateurs de fes graces. Quand le zele de la religion , plus grand Sc rare en votre majefté , qu'cn nul autre monarque du monde, ne vous eüt excité Sc enflammé votre ame pour la dévotion Sc publication d'un édit fi folemnel, il faut que les politiques Sc catholiques de contenance, qui ne font pas petite école en votre royaume, confeflent que la nécelfité de vos  sous Henri III. vos affaires , & la dignité de votre monarchie, requéroit que eet édit fut publié. Aux royaumes bien compofés, quand on foufffe qu'une opinion fauffe ou nouvelle fe gliffe & prenne place aux efprits & ceryeaux des fujets , pourêtre la diverlitédela religion reconnue, c'eft la fource de la défolation & perte de 1'état. , Anciennement, Sire, votre France étoit Ia maifon de Dieu & familie de fon églife, en laquelle habitoit cette fage & chafte maitreffe , la religion catholique , apoftolique & romaine , époufe uhique fans rides & fans macules, laquelle :.pourtant ne pouvoit être bravée par 1'effrontée impudence & paillardife d'une opinion nouvelle. L'on a laiffé par écrit pour un honneur & marqué finguliere de votre royaume , qu'il a été autrefois repréfenté au ciel par la nue blanche, en laquelle fut vu un ange couronné, portant le fceptre en fa main, femé & orné de fieursde-lys, non pour autre raifon que pour montrer Ia France n'être fujette aux ténébres & obfeurités de 1'héréfie. C'étoit une contrée du monde choifie par grace fpéciale, contrée oü Dieu vouloit avoir les églifes & les autels dreffés en fon honneur & gloire. Puifque donc la néceftité, maitreffe de toutes chofes , & la fplendeur du royaume requéTome XV. I  ijo ÉTATS roient que , comme en tous autres états, fonprincipal appui Sc fondement füt jetté fur la religion, il faut croire que par 1'exécution entiere de votre édit d'union, qui fe fera d'un franc defir , la caüfe de Dieu Sc de fon églife requérant francbement d'être pourfuivie, les héréfies feront chalfées comme les nues fe diflïpent au foleil, Sc que du défordre pafte , la France fera auflj fioriflante entre les fiens, Sc redoutable aux étrangers qu'elle fut onques. Mais avec cette union en une feule religion catholique, apoftolique Sc romaine, il eft bcfoin que toutes les villes Sc fujets de votre royaume , entrent en une aiitre union Sc bonne intelligence au feul but de votre fervice , continuation de votre dignité Sc défenfe du bien de 1'état. Qu'un chacun de nous fe fouvienne que vous êtes donné de Dieu, Sc facré notre roi pour nous commander , Sc que nous fommes vos fujets pour obéir ; outre que la concorde Sc union eft la vraie mere de tous les états Sc monarchiess tout ainfi que les inïmitiés Sc partialités font les femences de leurs crimes Sc défolations, felon que le rsmontroit aux Athéniens Leon Bizantin fur le fujet de leurs divifions. II eft vrai, Sire, que toutes partialitéslevées, Sc 1'ulcère de 1'héréfie clos Sc fermé, le refte da  sous Henri III. 131 Corps ne lahTe d'être corrompu , & fera toujours languilfant s'il n'eft pourvu a fes autres infirmités. Votre majefté les a reconnues quand elle nous a fait commandement pour la punition des blafphêmes &c recherche de la fimonie. Car a la vérité, les blafphcmes font langages maternels & ordinaires aux Francois. Les adulrères leur font jeux, la magie leur eft fubtilité d'efprit, & curioftté & honnête , la fimonie marchandife commune , bref que tous vices déteftables a nos peres, fuivent & accompagnent la France comme 1'ómbre fait le corps. Ce n'eft pas feulement aux eccléfiaftiques qu'il faut reprocher cette lepre fpirituelle de fimonie, & crier fi fouvent contre eux une réformation, quoiqu'elle foit plus nécelfaire au clergé qu'elle he fut onques. Nous avouons & reconnoiflbns que c'eft un poifon qui fe laiffe infenfiblement gouter par la noblefle, & une contagion qui n'infecfe pas moins le tiers-état. Car en ces deux ordres, il y eti a plufieurs qui ne font point de confcience de prendre fur 1'autel, qui ont des amis dépofitaires, les autres prennent le revenu des bénéfices par leurs mains, fe difent les garder pour un de leurs enfans, & par ce moyen font un mélange du bien fpirituel I 2  131 États & ecoiéfïaitique avec leur hoirie & fuccefïloa parernelle. De la procédé une partie 'de nos malheurs , les églifes ruinées , les dévotions éteintes, les fondarion négligées , les facremens profanés ; les pauvres auxquels une portion du bien eccléfiaftique eft affectie, crient a la faim, & fe perd la crainte de Dieu de jour a 'autre. Au torrent de tels abus nous avons trouvé & oppofé. dsux certains remédes, favoir, 1'élection requife a la forme de nos cahiers, & la prohibition de la pluraiité des bénéfices. Les remédes en font bons. & propres; mais la pratique y eft plus nécelfaire. que le confeil. Cette ftmonie n'a pas feulement eu fon régnc pour les bénéfices, mais jetrant fon venin plus loin s'eft couplée a deux de fes fceurs, efpéce de facrilege, non moins périlleufes a 1'état que dommageables a votre peuple, C'eft qu'a notre regret nous avons vu les gouvernemens des villes, places, & chateaux en commerce entre les gentilshommes, & iespa&ions permifes en beaux deniers comptans, quoiqu'elles foient fufpecles & interdites comme chofes facrées &c religieufes. il ne falloit que le mulet de Philippes de Macédoine, chargé dor & d'argent, pour ufurper vos places, troubler vos provinces &c vous dé-  sous Henri III. 13J Pouilier d'une partie de votre royaume par telles mar-chandifes & négociations. Nous laifions au jugement de votre majefté, s'il eft raifonnable que la fidélité de vos fujets, la füreté de leurs vies, & biens, 1'état de leurs' families, 1'amour de leurs femmes &c enfans, foient expofés au hazard, merci, commandement des moyens & ricbeffes d'un capitaine mal afrèctïonné. ■ Quant a la fimonie qui plus opprime vos autres fujets , c'eft la multitude effrénée & monftrueufe de tant d officiers inutiles, la vénalité des états de judicature , oü la corruption a été fi grande, que 1'ambition des plus riches ignorans de votre royaume leur a fait trouver place aux premières dignités. Le tems & fiécle fi miférabies, qu'il aimoit mieux être fils & héritier de quelques riches nluners que d'avoir de 1'entendement. L entendement fe tiroit plutot de la bourfe que non pas des livres , ni des cerveaux bien compofés 5 les hommes plutót reconnus a la dorure de leurs états, qUe par leur vertu, favoir & prudhomie. Combien y en a-t-il, Sire , qui fe font frayés le chemin aux états & dignités, non a la pointe de la vertu, felon qu'il fe doit faire , mais comme plus offrant& dernier enchériffeur, qui n'ont que I 3  i34 Etats la robe d'officier pour couvrir leur ignorance, Cependant 1'argent les a fait juges , Sc juges fi néceffaires, qu'il faut que la vie, 1'honneut, les biens, les perfonnes des eccléfiaftiques, nobles Sc pélerins paffent a leur mot, avis Sc jugemens , auffi bien que s'ils étoient dignement choifis, é!us, Sc nommés. Le mal de vendre Sc acheter les offices de judicature a été reconnu fi grand Sc préjudiciable 3 1'état, que par les fandtions des empereurs, par les loix anciennes, par les ordonnances de vos prédécefteurs Sc par les vótres, le trafic Sc vénalité en a été interdite. II a plu encore a votre majefté d'y pourvoir de nouveau par la promefie folemnelle, publique & jurée , faite a 1'ouverture de vos préfens états , avec afïurance d'élever Sc honorer les bons &c dodes de votre royaume au prix Sc recommandation de leur favoir 5c intégrité. Camille , grand capiraine romain, favoit bien dire en fon paganifme, que quand la juftice étoit mal reconnue Sc la vertu ingratement traitée, les Dieux en étoient couroucés Sc ne fouffroient cela fans vengeance Sc quelques coups d'enhaut. Nous remettons, Sire, le refte a votre prudence , Sc continuant nos plaintes, vous repréfenterons que Ia guerre n'a pas été feulement faite a votre peuple par des foldats enrblés Si  sous Henri III. 135 Jevés fous vos commiffions, mais par une autre forte d'ennemis , qui n'ont moins travaillé vos fujets, qu'une levée 8c venue de reiftres. Ce font, Sire , les partifans", ce font ceux, qui par importunités, immenfités des dons 8c fubtile invention du comptant, ont épuifé vos finances 8c vous ont mis a la beface. Ce font les inventeurs des fubfides, 6c édits nouveaux, les exécuteurs des commiffions extraordinaires, xourtiers & maquignons d'offices , vermines d'hommes 8c couvée de harpies éclofes en une nuit, lefquels par leurs recherches ont furetóvotre royaume jufqu'aux cendres de nos mailbus, Ils marchoient orgueilleux & en crédit, le fergent en croupe,pourexécuter a leur mot vos fujets, les évocations en main pour nous diftraire 6c faire plaider a un confeil des partfes, ainfi propremcnt appellé, paree qu'on difoit que quelques-uns de nos juges étoient nos parties même. Ils avoient les juffions a leur commandement pour forcer la confeience des bons, 8c violenter 1'autorité 6c religion de vos cours fbuveraines par barrement de gages , interdiction d'entrée 8c féances. Plufieurs édits ont été vérifiés 8c enregiftrés avec ces mots , par commandement plufieurs fois xéitéré. Aux édits juftes, 8c bons , les commandemens. dit prince fouverain ne font jamais néceffaires^ I 4  i}6 États J'ai parlé, Sire ,-de la confcience des bons, &c 'qü'elle a été forcée', paree qu'on a trouvé des ames vénales & corrompues, qui avoient part au butin , étoient juges & folliciteurs tout enfemble, & lefquelles pour une compollticn première du parti a dix mille écus, en ont tiré par violentes & injurieufes exécutions plus de cinquante mille. Votre peuple a été fi afïligé _ leurs biens fi fouvent 'diminués , le fang tout fuccé par ces voies extraordinaires , que la plupart de vos fujets croient toutes chofes a 1'abandon , en confufion &c réduites au défordre d'un premier cahos. Cependant c'étoit chofe étrange que nos inventions fe fouffroient au profit de" quelques particuliers qui, au milieu de leur luxe & jeux fe rioient de nos plaintes & de nos pleurs, fe rejouiifoient de nos miferes & triomphoient de nos dépouilles. Cette oppreffion , Sire , ne vous regardok 4jas moins que vos fujets. Car étant les nerfs du corps foulés & les membres languidés, il faut par nécelfité que le chef fe relfente de 1'indifpofition , tout ainfi que le chef malade, les membres le font'auffi. Que fi teile , fi grande nouveauté & oppreffion, nón jamais vues ni ouies en France, eüfiènt»fervi  sous Henri III. 137 au pront de votre majefté , nos plaintes n'en feroient juftes ni raifonnables. Mais quoi, Sire , nous favons que la gendarmerie a été fans montre, le foldat fans folde, les gages de vos officiers barrés & retranchés, les penfions des étrangers dues, les rentes non acquittées, le domaine engagé, & toutes les finances diffipées. Et néanmoins l'on projettoit faire accrue de nouveaux fubfides & levée de deniers; fur qui, Sire? fur un pauvre paflant détrouffé nud &. mis en chemife , ainfi faut - il parler de votre peuple •, mais il a plu a votre majefté par fa bonté naturelle , nous donner fefpérance de quelques rabais & modération ; c'eft le plus fur moyen d'affermir votre autorité & aflurer 1'état , car la modération apportera du contentement, le contentement de 1'amour & réconciliation, 1'amour de 1'obéiffance. II n'y a point de plus prompt remede, que de répéter les deniers de ceux qui 5 a la foule & oppreffion de vos fujets , ont butiné tant de richelfe. II eft tems de comprimer 1'éponge trop remplie, & purger la ratte trop enflée a la lonaueur des autres membres. Nos peres & francois en ont ufé de même aux afflicrions &C pareilles néceffités du royaume , mêmement & du regne du roi Jean, oü les  138 États confciJlers & adminiftrateurs des deniers publiés, furent recherchés & nommés en pleins états, avec une honteufe diffamation •, que fi pour la recherche des partifans nous avons articles expres dans nos cahiers, ce n'eft pas de chaleur de foi, ardeur ou animoiité, feion que ceux y ayant intérêt 1'ont publié, c'eft un article jufte & raifonnable. Les grands magafins de leurs tréfors, 1'accrue de leurs biens fans travail, leurs richefles foudaines fondent une accufation légitime& approuvée par Tanden proverbe , que jamais 1'homme de bien n'eft tót devenu riche. Quand Sylla, venu des bas-lieux, retourna de fon gouvernement d'Afrique, cx fe fut vanté qu il avoit de grands moyens, il lui fut reproché qu'il n'étoit donc pas homme de bien , vu que fon pere ne lui avoit rien laiffé. Auffi c'eft une maxime d'état tres - certaine que Tad miniftrateur de la république, officier & bon confeiller du prince, ne peut avec bonne renommée, dignement exercer fa charge, Je amafler beaucoup de bien tout enfemble. II eft impoflible qu'un office enrichiffe &C honore les hommes tout d'un coup ; puifque donc la recherche & accufation eft jufte & légitime , ous efpérons que la chambre néceflaire pour la  sotrs Henri III- 139 punition 8c par vous accordée, fera au premier jour érigée Sc établie. II en adviendra beaucoup de bons effets * vo^ tre juftice en fera louée, le peuple foulagé, les bons en auront contentement, les mauvais feront retenus en crainte , 5c fi cela apprendra a vos confeillersd'état, financiers, officiers de votre couronne, aux francois, étrangers 8c approchant votreperfonne, 5c fréquentans votre cour, qu'il ne fautbatir leur fortune ala ruine , foule Sc oppreffion de vos fujets. Que s'ils vouloient, ou pouvoient faire ce qui a été fait du paffe, il vaudroit mieux ne point changer de fiecle , Sc que les fangfues pleines fuffent demeurées. Nous dirions volontiers ce que l'on feint que le renard répondit a 1'hérifton, lui voulantchaffer les mouches de fes plaies, qu'il craignoit qu'il en vint d'autres qui le piquaflent davantage. Voila , Sire , comme des fujets bien affectionnés doivent parler a leur prince, comme des états libres 5c bien compofés doivent donner avis fans aucune prévarication de la caufe publique, avec tel refpeft néanmoins que votre majefté n'y foit en rien offenfée. Nous reconnoiflons 8c publions haut Sc clair, quele ciel Sc la nature vous ont libéralement enrichi de c; qui eft bien néceffaire pour nous régit  M° États Sc gouverner ; Ia dévotion vous eft recommanr dée , Ja prudence & la juftice vous aflïftent, votre clémence nous eft connue , laquelle nous implorons de nouveau en corps d etats pourle falut, liberté & perfonnes de nos confrères retenus & arrêtés; bref, qUe les perfedions de vos prédéceffeurs rois, fe font jointes & retrouvées enfemblement pour faire relüire votre majefté fur nous. Mais le mal a été que la lumiere de vos vertus a été empêchée , & n'a pu jetter fes rayons, ni les faire pénétrer fur Ja mifere & afflidion de fon pauvre peuple & défolé royaume, par 1'artifice & pratique de quelques mauvais confeillers. C'eft pourquoi Dioclétien avoit beaucoup a fe plaindre, qu'il étoit mal-aifé d'être roi j paree que les rois font juges d'un chacun , & cependant ils ne font avertis que par gens qui font a lentour deux , lelquels bien fouvent les trompent & leur déguifent la vérité de toutes chofes. Ce que nous difons, Sire, c'eft a?rès vous , qui le premier reconnoiffant le mauvais ménage, defordre&confufiondéplorable, avez commencé d'y mettre ordre par changement de confeil, par une révocation de plufieurs pernicieux édits, pat  sous Henri III. 141 Ia tenue de vos états & juftes intentionsd'établir de bonnes loix. Le feul moyen de bien regner & de fe maintenir, eft d'avoir des confeillers craignans Dieu, plus amateurs du peuple que de leur profit, non fujets a la rapine & avarice. Rien n'a recommandé le fiecle &C regne de Mare Antonin, que 1'alfiftance & confeil d'un Volufianus Scévola & autres grands pe'rfonnages , lefquels pour leur prudence étoient dits, reconnus & réputés comme oracles. Alexandre Sévere ne fut jamais en admiration, & n'a été fa mémoire éternelle jufqu'a nous, que pour avoir eu pour confeillers un Ulpiam, Julius, Paulus, Pompinius Quintilius, Marcellus, hommes favans &c les plus gens de bien de leur fiecle. " Ne cherchons point des exemples étrangers : il fuftit d'aliéguer que le roi Charles VII ,reftaura fon royaume a demi perdu &c occupé, par I'avis de 1'évêque de Clermont, du comte de Dunois, brave chevalier, & de meffire Jean Louvet, préfident de Provence , qui étoient vraiment des confeillers nés & difpofés au fervice de leur roi, a 1'amour & repos du peuple, & non a 1'amour & grandeur de leur maifon , tel qu'il les faut a-préfent, & que votre majefté. les faura bien choifir.  ï4i États Quant aux loix &c ordonnances, il n'eft pa3 beaucoup befoin d'en faire de nouvelles, il faudroit feulement que celles ja faites fuffent religieufement obfervées, exécutées & inviolablement gafdées. Lycurgue , grand légiflateur, ne voulut jamais que les loix par lui données aux Lacédémoniens, fuffent écrites & publiées, ains les fit apprendre par un bon ufage , & fréquens exercices. Les étrangers louent les francois d'établir &C conclure les plus belles loix du monde; mais il fe riemt de ce qu'elles font feulement imprimées, &C ne fe gardent point. . Ils ont plus eu de raifons ces années paffées denous faire ce reprocheque jamais. Car 1'orcjonnance derniere de Blois,projettée a votre événement a. la couronne , eft fort fainte &c néceffaire, & toutefois faute d'exécution inutile , & eft en beaucoup d'articles négligée. L'affemblée des états fut en 1'année 1576 ; le Cahier compilé & préfenté par les trois ordres , ne fut vu que trois ou quatre ans après, &c la publication de vos ordonnances remife en un tems qu'il n'y avoit article qui ne füt renverfé, perverti & corrompu par nouveaux édits, avec des dérogations toutes contraires a vos faintes & juftes réloiutions. Ce n'eft pas la facon qu'il faut ufer des loix,  sous Henri IIL 145 Flacon les compare aux belles peintures , lefquelles font facilement corrompues & effacées par 1'injure & longueur des tems, fi elles ne font bien confervées , entretenues 5c rcnouvellées par quelques traits de pinceaux. De même Sire, les ordonnances quelqus bonnes qu'elles foient, fe perdent de la mémoire des fujets, font fouvent a mépris, fi elles ne font confervées par les commandemens des rois, autorifées de leur puilfance , fuivies & pratiquées d'un prompt 5c continuel exercice. La force des loix conftfte en 1'exécution ; la vertu 5c juftice des princes 5c de toutes perfonnes, fe connoit confommée 5c rendue parfaite par la feule acrion. Les Atbéniens ayant a. eonftruire un temple, après avoir mandé tous les plus experts macons Sc artifans de leurs provinces, il s'en trouva un , lequel par grand & beau difcours, fit entendre le devis de fes ouvrages, comme il placeroit les pilliers, quel feroit le front du portail, comme dextrement il tailleroit les matériaux, bref, qu'a fon propos il fit le plus beau 5c riche tèmple de toute la Grece. II fe trouva un autre ouvrier qui n'avoit la parole fi a commandement, qui répondit en trois mots, qu'il feroit par effet ce qui avoit été fi bien dit; & dès-lors la befogne lui fut délivrée.  144 ê T a T s non par aatre confidération, finon que la beauté des ouvrages, Tart & induftrie des ouvriers, fe reconnolt a la feule opération. Maintenant, Sire , que vous êtes a batir &C remettre la juftice en fon intégrité , & lui drèffer un temple nouveau, ou les hommes n'entrent que par la porte de la vérité , que tous trafics d'états & marchandifesen feront chafles, ils nous faut feulement i'exécution entiere de vos faints propos, que nous tenons ja autant affurés, que nous favons votre majefté être véritable. Votre volonté y eft difpofée , vous en avez la puiffance, le bien de votre royaume le requiert; par ainfi, Sire , ne permettez pas que ci-après par nouveaux édits prétextés de Ia néceffité de vos affaires, l'on faffe breche a aucun article de vos ordonnances, & chaftez loin ceux qui vous confeilleront le contraire. Que fert-il de garder bs portes clofes d'une ville pour empêcher qu'elle ne foit furprife, fi quelque mauvais habitant introduit 1'ennemi de debojrs par 1'efcalade, ou autre ftratagême propre a fa trahifon ? Que profiteront tant de loix & ordonnances, quedeviendront les avis de vos états , que ferviront nos labeurs & voyages contre les furprifes ordinaires des partifans, fi par leur importunité, &c  sous Henri III. I4J & conjuration ; notre repos eft ci-après troublé, ie défordre remis &c vos édits enfreins &c violés, C'eft pourquoi, Sire, nous vous fupplions liumblement, que 1'ceil de votre prudence foic toujours ouvert a la défenfe de votre pauvre peuple , décharge & foulagement d'icelui a & que vos falutaires réfolutions ne foient en rien changées & altérées. Nous efpérions que par une plus longue vie, la reine , votre très-fage & très-honorée Dame & mere, nous y profiteroit beaucoup pour la preuve & expérience qu'a eu la France de fes bons & utiles avis. Mais puifque fes jours étoient bornés, &: que fa dignité de reine & princefle ne lui donnoit privilége de prolonger fes années & fe promettre le lendemain , il faut que la volonté de Dieu, & la néceflité du tombeau vous ferve de confolation & patience, & s'il faut efpérer, que fon ame bienheureufe fera des prieres au ciel, qui feront plus certaines & profitables a votre majefté & a 1'état, que tous les confeils du monde. Cependant nous aurons recours a la faveur & bienveillance de la reine, votre rrès-chere époufe, en laquelle vos fujets ont vu reluire tant de dévotion,piété & vertuschrétiennes, qu'ils attendent de fon aide le foulagement par eux efpéré, avec une confirmation de vos bonnes & juftes Tornt XY. K  146 États intentions 'mivies & afliftées de celles des princes jcatholiques de votre fang. Le refte dépend en partie ,du chef de votre juftice & garde de vos fceaux, lequel choifl pour fes mérites & au bruit certain de fon intégrité, ne permettra pas que des ordonnances faites de fon tems &c avenement foient violées de fon tems même. II eft par neus reconnu d'une confeience 11 entiere, qu'il aura plus de fouci.de continue! fon bon nom que de conferver fa dignité. ■ II fait bien qu'un Romain avoit accoutumé de dire , qu'il aimoit mieux vivre en bonne opinion du peuple, que d'être au confulat ou dicfature perpétuelle. II ne fera pas en peine d'engager fa renommée, ni de faire ce que fit le bon chancelier Commodus a Fauftine , vu, Sire, qu'avez promis de régler votre puiffance a la raifon, &c que dignement vous avez foumis votre majefté a la loi , qui eft le plus beau & riche propos qui fe puifte lire en toutes les annales de vos prédéceffeurs, ■& lequel mérite d'être gravé en lettres dor. t • En ce faifant nöus ne regretterons plus les faints régiemens des 'anciens rois, l'on ne pariera plus de la juftice d'un Charlemagne,St. Louis, <& Iftiiïippes-Augufte; moins ferons-nous état de 1'aftïction patemelle du roi Louis XII.  sous Henri III. 147 - Nos livres ne feront remplis que de votre fagefte & amour; le ciel s'ouvrira pour faire découler fur votre chef & couronne toutes manieres de profpérités. Dieu vous fera la grace de voir votre lignée , laquelle en toute valeur fera valoir le nom de Valois, duquel la continuation fera le falut de la France. Et en outre la douceur d'une faifon fi heureufe , & la jouiflance des frtijts par nous efpérés de la conclufion des états, nous confirmera au fervice que nous devons a votre majefté, lequel de nouveau eft par nous afluré par un ferment folemnel en corps d'état, & pour loi fondamentale, pour en toute fidelité aimer, honorer & obéir a fa majefté , & paree que la faifon fe préfente, oü nous pouvons faire preuve des effets de nos bonnes volontés, & que d'ailleurs le défautdes moyens commande a plufieurs de nous un bref départ. J'ai charge exprefle de vous fupplier, de nous donner congé, afin que, retirés dans nos provinces, les uns foient porteurs de vos faintes & louablcs infpirations, $i les autres authorifés du titre magiftral qu'ils portent , vous y faffent obéir, & que tous enfemb'ement courants même forturie, nous nous tirions d'un péril commun , & vous rendions certain témoignage que nous fommes &c demeurerons très-fideles, très-humbles K 1  148 Etats Sc tres-obéiffans fujets jufqu'au dernier foupk de nos vies. Le propos fini, le roi fit de nouveau publier 1'édit d'union en loi fondamentale , Sc nous affura qu'il ne changeroit jamais de volonté. Furent auffi lus quelques articles des réfolutions prifes fur une partie des cahiers avec promeffe de parachever fans difcontinuation. Ainfi qu'il fe départoit, & étant encore fur le théatre, il dit hautement que je lui avois dit fes vérités fans 1'offenfer. Néanmoins que je lui avois parlé en homme de bien avec autres propos ouis par la plupart de 1'affemblée. II chargea M. 1'archevêque d'Embrun, 1'évêque du Mans, ceux de Bazas Sc de Lizieux , de me les faire favoir Sc entendre ; ce qu'ils firent avant que d'être fortis, de la falie. Étant forti il n'y eut homme de ceux que je connoilfois, & autres a moi inconnus, qui ne me congratulat: I.aus Deo. Le mardi dix - feptieme , les trois ordres s'affemblérent chacun dans leur chambre. Ceux du tiers-état avant que de rien propofer me firent eet honneur , que de me remercier en corps, Sc après les préfidens des douze gouvernemens me firent les uns après les autres de beaux Sc docles difcours avec le témoignage de toute louange Sc  sous Henri III. ,4, gratifïcation & offres de fervice Sr amitié de leurs provinces ; pendant que leurs préfidens parloient, tous ceux du gouvernement étoient debout Sc nue tête j je fis parciliemcnt mon devoir de les remercier, Sc m'excufer fi je n'avois fi dignement fait que ma charge le requéroit; mais que ce m'étoit un grand bien Sc contentement de les voir. Plufieurs me firent eet honneur que de me donner des vers. II fut mis en terme & réfolu, qu'avant que les états fuffent levés. nous pourfuivrions pour la derniere fois la liberté de notre préfident Sc autres députés retenus. La charge me fut donnée d'en porter le propos, quoiqu'il füt périlleux d'en parler davantage , vu les prieres Sc les importunités paffées. Je portai le propos au roi pour ladite délivrance, lorfqu'il fortoit de la meffe; il nous fit réponfe qu'il y aviferoit, Sc que c'étoit une affaire d'état oü il vouloit penfer de prés. Depuis étant retournés en notre chambre, nous primes congé particulierement les uns des autres avec beaucoup de regret des chofes paffées &c appréhenfion des périls Sc troubles prochains; plufieurs avoient la larme a 1'ceil, & difoient que notre féparation auguroit que la France s'en aJioit féparée, Sc que jamais ne feroient vus  i5© Etats états fi bien aflemblés avec plus de zele pout la religion &c repos du peuple. L'après-dinée dudit jour, toutes les provinces allerent prendre congé du roi en fon cabinet. La nótre fut des premières, & après que le roi nous ent avertis, qu'il avoit intention de mieux faire que jamais, il m'appella & en préfence de tous, il me dit que je pouvois bien me vanter que jamais homme de fon royaume ne 1'avoit tant contenté, que j'avois un roi qui m'aimoit &m'honoroit , ce qu'il feroit paroitre en bref, cependant que je ne partiffe point fans le voir en particulier. Les jours de mercredi & jeudi furent employés par moi en des vifites particülieres. Le vendredi matin,le roi me fit appelier dans fon cabinet, oü ledit jour perfonne n'avoit eu entrée, paree qu'il fe trouvoit mal des dents. II me chargea de plufieurs propos de créance envers M. le duc de Mayenne, & me tint plus de trois quarts d'heures fur le fujet de la mort de M. de Guife, m'ayant pour mon particulier témoigné toutes affections, & qu'il ne me laifferoit longuement en Bourgogne. Nota, que lefdits propos de créance étoient beaux en paroles, mais ia fuite des promeffes périlleufe. II me demanda ma harangue qui lui fut pré-  sous Henki III. 151 fentée Ie lendemain par M. Ie confeiüer de Montholon, paree que jetois contrahit de partir. Le jour même, la reine me manda par M. Divet, fon prédicateur. Je fus recevoirfes commandemens avec offre de fon amirié. Elle me demanda auffi ma harangue, qui depuis lui fut préfentée par M. de Montagu d'Autun, paree que pour lors elle n'étoit reliée comme il falloit. Monfieur le garde-des-fecaux me manda, me voulut entretenir & me dit que le roi 1'eüt defiré , mais lui ayant fait connoïtre les caufes de mon retour, il ne me prefik pas davantage. Le famedi je partis de Blois bien accompagné avec monfieur de la Tournelle doyen d'Autun, lequel me fit 1'honneur de m'attendre deux jours , m'accommoda d'un cheval de pas, & me fit toutes les amitiés qu'on peut recevoir. Faifant a mon retour a Autun , depuis je vins a Arnayle-duc & palfai a la Buffiere , oü meffieurs de la Buffiere, Befchard & Chilleret, mes bons amis, m'attendoient bien joyeux de les revoir. J'arrivai le premier de février a Dijon en bonne fanté , bien vu & recu d'un chacun. K4  e t i n Extrait du Cahierpréfenté au Roi par les Députés du Tiers - Etat de France , convoqués aux Etats-Généraux du Royaume, en la ville de Blois » au ij Septembre 1588. Sire, "V"o s très-humbles, très-fideles Sc très-obéiifansfujets, les gens du tiers-état de votre royaume, vous préfentent en toute humilité le cahier de leurs très-humbles & très-juftes remontrances, plaintes Sc condoléances, fuivant le commandement a eux fait par votre majefté en 1'alfemblée des états par vous aflïgnés en votre ville de Blois, cette préfente année 1588 , au cpiinzieme jour du mois de feptembre , Louant Sc remerciant Dku de toutes leurs puiftances, de ce que fon fainfr nom ayant été fi long-tems pollu Sc blafphêmé en votre pauvre Sc miférable royaume par un nombre infmi de vices méchans Sc abominables, dont indignement nous nous avons couronnés; fa haute & redoutable majefté, cenéanmoins au lieu de nous punir Sc allumer fon courroux juftement irrité par nos offenfes, auroit ufé d'une douceur incroyabie , Sc d'une clémence qui n'eft propre  sous Henri III. 155 qu'a lui, nous regardant d'un ceil de juftice &£ de pitié comme fes enfans , & au lieu de nous perdre, auroir touché votre cceur de fon faintefprit, vous infpirant de convoquer vos états, de prendre le vent propre & favorable pour nous mettre au but de repos & tranquilité. En quoi, Sire, la feconde louange vous eft due, qui , confidérant d'un ceil piteux & humain & d'une douceur qui vous eft naturelle, 1'oppreflion de la ealamité de votre pauvre peuple, 1'avez voulu foulager par cette convocation de vos états, afin que fes plaintes ouies & fon mal reconnu, votre main douce & favorable y donnat 1'allégement: chofe certainement qui tombe au cceur des bons rois qui font comme les peres de leurs pauvies fujets , & telle jufqu'a préfent votre majefté s'eft montrée a 1'endroit de votre penple, qui louant l'affeétion que vous avez de le fecourir , vous eftime auffi bon prince que vous êtes un grand roi , & voue perpétuellement a votre grandeur tout fervice & obéiffance. Et pour opérer le fruit de cette convocation, & ne retomber aux ineonvéniens de vos états derniers , ils vous fupplient en toute humilité qu'il vous plaife leur oélroyer que les ordonnances qui feront par vous faites fur leurs juftes requêtes & remontrances, foient & demeurent perpétuellement gardées & obfervées par tous vos fujets,  154 États même vos cours fouveraines & autres vos juges , fans qu'elles foient fujcttes a vérifications a vofdites cours , ains qu'elles y foient feulement publiées & regiftrées fans aucune ïeftriction, ou modi fication , fur peine de nullité, & que vofdites ordonnances prennent leurs forces de ladite publication qui en fera faite dans l'aflemblée de vos états, votre majefté y féant, & que tous arrêts & jugemens qui feront donnés contre & au préjudice de la teneur de vofdites ordonnances foient déclarés dcs-a-préfent nuls & de nul eftet; & permis aux parties intéreffées de fe pourvoir en votre confeil, par fimple requête, fans qu'ils foient obligés d'en obtenir de civiles ou de propofition d'erretir. Auffi ordonné que dorénavant aucune lettre de juffion ou autres extraordinaires ne foient oc- troyées contre vos ordonnances, arrêts & iu^e- i - ■ ■ mens de vos cours, & fi aucunes étoient expé- diées, qu'on n'y eüt égard. Et que ci-après votre majefté n'entend aller en fes pariemens, ou autres cours fouveraines pour y faire publier aucuns de fes édits ou lettres de fon autorité, ains que fon intention eft de laiffer 1'entiere liberté & connoiftance a fefdites cours, pour pouvoir vérifier tous édits & patentes, les charnbres afiemblées, & déclarer toutes vérifications autrement faites nulles.  sous Henri III. M5 De tkat de P églife. D'autant que 1'intégrité de 1'églife eft le fahït & la v'>e de eet état, il a profpéré & eft parvenu au comble de toutes grandeurs & perfeótion, de forte qu'un ancien a bien dit, que Ia France étant née avec la religion, ne périroit qu'en y périffant la religion ;a cette occafton fera votre majefté fuppliée ördonner que votre édit d'union, vrai maintien de la religion, foit infait au premier article des ordonnances qu'il vous plaira faire fur les remontrances de vos états, & regiftré e.n la chambre des comptes au regiftre des chartres, & porté en votre tréfor , afin d'y être regardé comme loi fondamentale de 1'état avec les autres chartres & titres. En conféquence d'icelui plaira a votre majefté déclarer Henri de Bourbon roi de Navarre hérétique & notoirement relaps, criminel de lezemajefté divine & humaine au premier chef, inhabile & incapable de fuccéder a la couronne de France, privé de tous droits & prérogatives de prince & pairie, tant lui que fes hoirs procréés & a procréer, & fes biens nuement mouvans de la couronne de France , unis & ihcorporés au domaine d'iceile , & les autres acquis & conhfqués a votre majefté; & fpécialement ic déclarer privé  l$e États du gouvernement de Guyenne , avec défenfes a tous vos fujets lui rer.dre aucune obéiffance & refpect, & que dès-a-préfent un prince ou feigneur catholique , lequel il vous plaira , en foit pourvu, & faire publier cette dédaration en pleine affemblée de vos états, & après en vos cours de parlement &c autres fouveraines pour y être regiftrées. Que tous hérétiques de quelque état, qualité ou condition qu'ils foient, foient punis de peines indicies & portées par les ordonnances des défunts rois Francois premier, & Henri II, & leurs biens employés aux frais de Ia guerre, & a cette fin ordonner qu'en chaque ville principale de vos bailliages & fénéchauffées foit élu un notable bourgeois pour faire recette des deniers de la vente defdits biens, & les diftribuer felon 1'ordonnance & mandement de votre majefté. Que les hérétiques qui ont démoli, ravi Sc emporté les joyaux & ornemens d'icelle, s'ils font vivans hérétiques, foient punis des peines defdites ordonnances, & leurs biens employés aux réparations defdites églifes; & oü ils auroient fait abjuration & vivroient catholiques, en foient tenus civilement; & oü ils foient décédés , leurs héritiers en foient tenus a la valeur des biens héréditaires. Que les catholiques ayant re$u en dépot les  sous Henri III. x^ )oyaux Sc ornemens de 1'églife, les rendent s'ils font en nature ou bien la valeur d'iceux. Que ceux qui ont été miniftres furveillans ou relaps, foient déclarés indignes Sc incapables de tous offices royaux & charges publiques en ce royaume , & que ceux qui depuis dix ans ont été hérétiques, s'ils ont offices ou charges, foient tenus s'en démettre, Que tous les eccléfiaftiques conftitués aux ordres facrés qui feront mariés pendant les troubles de ce royaume, foit qu'ils aientfemmes, enfans ou non , vuident le royaume, & y foient contraints encore qu'ils foient a préfent catholiques. Qu'aucunes lettres de légitimation ne foit ciaprès octroyées aux batards nés & procréés de prêtres, perfonnes religieufes, ou gens mariés ; Sc fi aucunes étoient oétroyées, ordonner qu'on n'y ait aucun égard, foit pour fucceffion, bénéfices, dignités, offices Sc tous autres droits dont les déclarer inhabiles Sc incapables. Qu'a tous vos fujets qui ne font retournés a la religion catholique, le procés foit fait Sc foient punis fuivant les rigueurs defdites ordonnances, fans fe pouvoir aider d'aucunes permiffions, Sc que tous contrats qui fe trouveront par eux avoir été faits depuis votre édit d'union, vérifiés en vos cours, foient caffés & refcints, Sc ceux faits  158 Etats auparavant icelles foient fujets a la recherche par les fautes & abus qu'on y pourroit avoir commis, & a eet effet viennent a déclaration ceux qui ont contra&é avec eux dans un mois, a peine d'être déchus de tous droits, & être déciarés fauteurs dhérétiques. Que la connoiffance de la punition des hérétiques foit attribuée en première inflance a vos baillifs Sc fénéchaux, ou leurs lieutenans - généraux , maires, échevins, capitoux , Se autres magiftrats des villes ayant toute juftice, Se ce par prévention , a la charge que ceux qui pféviendront procedent a la confection des procés des accufés inceftamment & fans connivence, a faute de quoi les juges fupérieurs y tienneut la main fans que le préfent article attribue jurifdiction a ceux qui n'en ont point. Que les confréries intermifes & prohibées par 1'édit de pacification , foient rétablies pour être le fervice divin continué comme il étoit auparavant, fans pour ce faire aucuns banquets, ou monopoles. Que les forciers, devins, enchanteurs, magiciens, noueurs d'aiguillettes , tourneurs de facs & autres de telles pernicieufes qualités, foient punis de mort, &c jugés par vos baillifs Se fénéchaux, ou leurs lieutenans & juges préhdiaux au nombre de fept, Sc les fentences d'iceux exécutoires nonobftant appel.  sous Henri III. Que Partiele 3 5 de vos ordonnances de Blois, contre les blafphémateurs du nom de . Dieu 5c des faints foit inviolablement obfervé. Qu'il foit procédé 8c pourvu aux bénéfices électifs par éleétion fuivant les fanctions canoniques , nonobftant le concordat fait -entte le pape Léon X 8c le roi Francois premier, a la charge que les officiers des lieux y affiftent, avec les maires £c échevins des villes. Que le concile de Trente foit publié, gardé 5c obfervé par tout votre royaume , avec la confervation des droits de votre couronne 8c priviléges 8c libertés de féglife gallicanne , exemptions des chapitres 8c communautés, pour lefquelles exemption; defdits chapitres 6c communautés foit fi fainteté fuppliée. Que 1'article 6 de 1'ordonnance d'Oriéans foit obiervé , 8c ajouté que les évêques 8c archevcquee faffent en perfonne leurs vifitations de trois ans en trois ans pour le moins, 6c les archidiacres tous les ans, fans que les doyens Ruraux puiffent vhiter a 1'avenir, 8c foient les vifitations defdits archevêques & évêques gratuites, 6c quant aux archidiacres, ne prennent que dix fols fur chacune paroiffe dont moitié fur la cure. Qua peine de nullité,les évêques ou diocéfains ne faffent expédier aucune approbation ou vifa des pourvus en cour de Rome, qu'ils n'aicnt vus  Uo ÉTATS lefdits pourvus fans donnet commiffion hors diocèfe pour donnet ladite approbation, & en cas de refus, que fade contienne la caufe d'icelui afin d'être connue au métropolitain. Soit enjoint a tous évêques, abbés, prieurs, Sc chapitres qui ont des bénéfices unis, d'y faire enttetenir le fervice divin , Sc la régularité aux bénéfices réguliers felon leurs fondations, a ce contraints par vos baillifs & fénéchaux ou leurs lieutenans , pat faifie de leurs temporels. Que tous archevêques ou évêques non facrés dans les fix mois, Sc abbés non pourvus a 1'ordre de prêtrife dans 1'an, foient tenus rendre & reftituer les fruits de leurs bénéfices, lefquels dcmeureront vacans Sc impétrables, fans qu'aux difpenfes obtenues l'on ait aucun égard. Que dorénavant n'y aitplus d'économe, ains les fruits des prélature, abbayes & bénéfices vacans foient pris & recueillis par les chapitres & autres communautés eccléfiaftiques pour les conferver a qui ü appartiendra. Les archevêques & évêques foient tenus ciaprès commettre gens capables & filmfans pour faire la prédication aux villes de leurs diocèfes , Sc principalement aux villes murées, & néanmoins admoneftés de préférer les théologiens Sc rehaieux mendians defdites villes, pour faire lefdites orédications , Sc s'accommoder aux nominations r qui  sous Henri iii. tst qui leur feront faites par les curés & margUÜiierS des églifes. Les villes efquelles il n'y a églife cathédraie, collégiales fuffifantes pour gagner un précepreur de la jeunefte, feit pris fur lés prieurés non con ventuels, excédans la fomme de fix vingt écus de revenus affis dansle rèfiort pour fournit la fomme de cent écus par an pour un précepteur, a quoi lefdits bénéfices foient tenus contribuer a proportion de leur valeur & revenu , & pour icelle puilfent bailler & amortir les bénéfices fimples dépendans de leurs bénéfices. t Ez d'ailtant qu'en quelques abbayes & pneurés de ce royaume, les religieux ont compofé avec les abbés & prieurs, ayant divifé entre eux leurs revenus, ne vivant plus en cömmun au grand fcandale de votre peuple, qu'il plaife a votre majefté ordonner que lefdits abbés, prieurs & religieux, vivront dorénavant en commun , a peine d'être privés de leurs revenus, & foit en ce cas procédé a la faifie d'iceux, par vos juges ordinaires des lieux. Quedéformais & venant vacation des abbayes & prieurés démoniales, il y foit pourvu par élettion des religieufes du couvent, & foien: les abbeffes & prieurés triennalées feulement, conformément au troifie.ne article de 1'ordonnance Tome XV. l  ïCx ÉTATS d'Oriéans , nonobftant toutes provifïons qui pour- roient avoir été octroyées au contraire. Que les rcligieufes qui font en moindre nombre de fix en leurs prieurés, foient transférées aux chefs de leurs monafteres, dont elles dépendent, & le revenu d'iceux incorporé audit chef de monaftere, a eet effet, enjoindre a vos bailiis, fénéchaux , Sc leurs lieutenans , a la requifition de vos procureurs, des maires, échevins, jurats , capitoux , & au premier d'eux qui préviendra, procéder a 1'exécution de ce que deflus par provifion, nonobftant appel, Sc fans attendre autre commiffion ou mandement. , Que les abbés & prieurs, ayant la collation des prieurés ou autres bénéfices, defquels les religieux font capables , foient tenus les préférer a tous autres, comme leur étant lefdits bénéfices principalement affeétés. Que toutes perfonnes, foit nobles ou autres, foient indifféremment recus aux monafteres Sc colleges, nonobftant tout ufage contraire , Sc -néanmoins qu'ès-lieux oü il y a fondation pour aentilshommes, il foient en concurrence préférés aux autres. Tous monafteres Sc chapitres foient remplis de nombre de religieux & chanoines ordonnés Sc accoutumés d'ancienneté, Sc oü il n'apparoïtroit  sous Henri IIL ifj de nombre pour les fondations, foient vus pat vos juges , Sc a ce faire, contraints les abbés , prieurs, religieux, doyens & autres chefs des monafteres & chapitres, par laifie de leurs temporels , & que la penfion des défaillans foit donnée a Thöpital plus proche, jufqu'a ce que ledit nombre fo t rempü , & de 1'exécution du préfent article foient chargés vos pronireurs, les reóleurs Sc adminiftrateurs, & maïnes defdits colleges &höpitaux, afin d'en être tenus en leurs propres 8c privés noms. Qu'ès maifons 8c couvens de religieux Sc religieufes enfemble des jéfuites, ne puiffent être recus Sc admis aucuns mineurs a faire profeffion qu'auparavant ils n'ayent averti leurs peres 8C meres , ou tuteurs, 8c fans qu'ils ayent pris congé d'eux , felon 1'honuêteré pubiique Sc anciens décrets, finon que lefdits mineurs fuffent, quant aux males, agés de vingt ans , & les fiiies de dix-huit. Que les valides & non eftropiés ne foient pouvus des places des religieux laïcs aux abbayes , Sc les pourvus de ladite qualité en foient rejettés. Que tous les archevêques, évêques, abbés, prieurs conventuels, Sc bénéficiers ayant charge d'ame, réfident fur leurs bénéfices, nonobftant la ] faveur de leurs études en théologie, Sc toutes L z  ié4 États autres caufes femblables, &£ y foient contrahits par les juges ordinaires par faifie de leurs temporels. Que pour faire que 1'églife foit delfervie comme il appartient, ordonner que les bénéficiers, auxquels a été confcré en cour de Rome ou aüleurs un fecond bénéfice a la charge de remettre le premier dans deux mois, & autres tems, que ce décret foit déclaré avoir lieu dès 3a prife de poffeffion , fans attendre la poffeffion annale & pacifique, a ce que fous cette couverture ne fe faffe poffeffion de litige, pour tenir pluralité de bénéfices contre les faints décrets. Qu'aux cures unies aux églifes cathédrales, collégiales , abbayes & prieurés , il y ait dorénavant un vicaire perpétuel. Que les proclamations des ventes des biens admodiations, marchés & autres, qu'on acoutume de publier ès prónes des paroilfes, fe faffent a 1'avenir es iffues des grand'meffes paroifiiales, pour ne troubler le fervice divin. Que 1'article 15 de 1'ordonnance d'Oriéans touchant l'adminiflration des facremens & fépulture , foit obfervé nonobftant toutes ordonnances & édits foit de Blois, Moulins, ou autres, & toutes déclarations contraires. Que tous vicaires perpétuels puiffent librement faire leurs charges &c fondions en 1'adminiftra-  sous Henri III. ifj I rion des facremens & convois des fépultures, fans I Remander congé aux curés primitifs , nonobftant '| les priviléges qu'ils pourroient prétendre au I contraire. Qu'il foit enjoint a tous curés & vicaires a I la diligence de vos procureurs, de porter ès tjj greffes de vos bailliages Sc fenéchauffées par r| chacun an les regiftresdes baptêmes & fépultures, I &avos juges les parapher, batoner & chilfrer en il chacune page, fans qu'eux ni leurs grefliers puif:i fent prendre aucun falaire pour la réception, paraphe & chilfre defdits regiftres, & ou a ce ■ faire vosdits juges puiffent contraindre lefdits ii curés par faifie du temporel de leurs cures. Que les cures qui ne font de valeur de jo écus jde revenu, foient dechargées de décimes & 'j lefdits décimes jettées fur les autres bénéfices du 'diocefe. Que toutes réferves, même celles obtenues dejpuis Sc au contraire de ladite ordonnance ch tBlois , foient déclarées nulles. Que tous bénéfices tenus en confidence foient jdès-a-préfent déclarés vacans & impétrables , &: les confidentiaires, déclarés inhabiles & incapables de tenir jamais bénéfices, auffi les procu' rations pour recevoir les fruits defdits bénéfices Rulles, Sc que nonobftant icellcs lefdits fruits L }  \C6 ÉTATS foient faifis par vos officiers, & employés aux frais de la gnerre contre ies hérétiques. Et pour connoïtre ies confidentiai es , erdonner que les provifions defdits bénéfices foient regiftrées aux grefles des bai liages & fenéchauffées oü font affis les bénéfices , & ce quinze jours après la prife de poffeffion, jugeant les poffeffoires defdits bénéfices. Que toutes actlons de confidencc & maniere de garder des t énéfices foient déniées , & ordonner que dès-lors que telles promeffes viendront a connoiffance de vos juges, que les contradans directement ou indireétement foient privés par vosdits juges de tous droits auxdits bénéfices & condamnés en amendes extraordinaires. Que déformais la fimonie, ou concubinage publics des eccléfiaftiques, foient déclarés cas privilégiés & comme tels exemplairement punis. Que les penfions fur les cures foient déclarées nulles, & celles qui font fur les autres bénéfices ne foien: promifes qu'ès cas de droit. Quen declarant Tarnde 29 des ordonnances d Orléans, concernant la coupe des bois des eccléfiaftiques , les chevaliers & commandeurs de Malthe y foient compris. Que les perfonnes eccléfiaftiques ne foient fermieis ou aflociés aux fermes, fi ce n'eft pour le  sous Henri III. 167 regard des dixmes 8e autres droits eccléfiaftiques qui fe recueillent en leurs paroiftes Se ne faftent trafic de marchandifes. Que les bénéfices deformais ne puiiTent être donnés a ferme fans réferve du principal manoir, pour éviter que les gens laïcs , leurs femmes 5c enfans foient vus demeurer parmi les eccléfiaftiques. Qu'a 1'avenir nul étranger ne puifte tenir bénéfice en votre royaume foit régulier ou féculier. Des Hopitaux & Maladreries. Que le revenu des petits höpitaux des villes 5c autres lieux proches d'icelles, foit uni au grand hfipital defdits villes plus prochaines, a la charge des fondations. Que les comptes du revenu defdits hopitaux qui font dans les villes & lieux prochains d'icelles, foient rendus devant les magiftrats defdites villes 5c de ceux étant de dehors devant vos juges plus prochains Sc gratuitement, fans toutefois préjudicier aux coutumes d'aucuns lieux. Que tous malades 8c lépreux foient entretenus ès-proferies 8c maladreries 5c hopitaux des lieux d'oü ils font, finon aux plus prochains, fans divaguer de lieux en autres , 8c felon qu'il fera ordonné par vos juges a connoiflance de caufes, L4  ió8 États appelier ceux a qui 1'adminiftration defdits maladreries Sc hopitaux appartienr. Que les hopitaux, les proferies & maladreries foient exemptes de décimes , aliénations francsfiefs Sc nouveaux acquits. Que tous curés, vicaires, notaires Sc autres perfonnes publiques qui auront recu teftament ou autres difpofitionsportant legs, aumönes, fondations aux pauvres & lieux pitoyables , foient tenus dans quinzaine après le décès des teftateurs le déclarer au bureau des pauvres ou adminiftra- , teurs des lieux pitoyables , Sc leur en donner exploit figné de leurs mains, a peine de payer en leurs propres & prive's noms, les fommes & chofes recelées avec ITntérêt Sc amendes arbitraires. Le femblable foit fait aux fufdites peines par les héritiers des teftateurs ayant en puift/ancc leurs teftamens & autres difpofitions écrites & lignées de leurs mains. Des Univerftés. Soit votre majefté très-humblement fuppliée ordonner a vos cours de parlement, ou autres tels juges ou commilfaires qu'elle députera, procéder a la réformation des univerhtés, colléges Sc bourfiers, pour iceux régler felon les ftaruts & fondatiöns, comme auflï faire pouryoir aux  sous Henei III. 1V9 plaintes qui fe font de principaux makres & régens defdits colléges. Pareillcment faire régler le fait de 1'imprimerie & les maitres imprimeurs , compagnons & libraires. Que défenfes foient faites aux empiriques , exercer la médecine &c chirurgie , qu'ils n'ayent été auparavant re$us & approuvés par la faculté de médecine. Et afin que Ia jeuneffe foit mieux inftruite en la connoifiance & amour de Dieu, ordonner que tous les colléges ès-jours de dimanches & autres fêtes, les principaux ou régens, interprêtent a leurs écoliers un cathéchifme ap^rouvé de 1'églife , & que lefdits principaux faffent affifler leurs écoliers aux divins facrifices, a peine, en cas de négligence, de la démiffion de leurs charges. Suivant le 88 article des états derniers de Blois, les privileges des univerfités demeurent confirmés, & ne foient les docteurs, régens» compris ès róles des tailies, impofitions ordinaixes & extraordinaires. De ia Jujlice. II plai ra a votre majefté que les ordonnances, par vous & vos prédéceffeurs rois, faites fur le reglement de la juftice, fignament celles de 15 j q,  170 États Orléans, Moulins, Rouflillon, Amboife, Blois,. qui ne feront révoquées ou modérées par 1'édit qui fera par vous fait, fur les requêtes Sc reremontrances de vospréfens états, foient inviolablement gardées, fans que vos cours fouveraines , ou autres juftices ou juges, puiffent y contrevenir , fur peine de nullité des jugemens. Que vos cours de parlement, charnbres des comptes& autres fouveraines, ne puiifent vérifier aucuns édits pour quelques caufes que ce foit, que premicrement vos édits n'ayent été communiqués aux procureurs - fyndics des états auxdits pays, Sc icelui pleinement oui, Sc déclarer les vérifications autrement faites nulles, Sc a eet effet, permettre a toutes vos provinces pouvoir élire procureurs - fyndics. Que défenfes foient faites a vos cours fouveraines, juges, préfidiaux Sc autres, faire aucun proces de grands ou petits commiffaires, en quelques caufes & matieres que ce foit, même en cas ci-devant permis , ains leur foit enjoint juger tous procés a 1'crdinaire, fans pour ce prendre autres émolumens ni vacations, que les épices qui feront taxées modérément, fur peine de concufïion Sc privation de leurs offices , & dont il vous plaira charger l'honneur Sc confeience de vos préfidens, devoir & diligence de vos procureurs-généraux Sc leurs fubflituts.  sous Henri III. 171 Que pour le foulagement de vos fujets, dé* fenfes foient faites a vos cours fouveraines prendre commilfaires en première inftance des criées, fubhaftations par décret, & de ce qui en dépend, encore qu'elles fuffent pourfuivies en conféquence d'exécution de leurs arrêts, ains la renvoyer & délaiffer aux juges des lieux , ou les héritages font affis. Soient aulÏÏ les procés Sl différends mus pour les impofitions , aides j tailles & oétrois, faifies faites fur iceux , leurs reliquats &c ce qui feroit enfuivi, renvoyés dès-a-préfent en 1'état qu'il font, pardevant vos juges des lieux des pays oü il n'y a point d'élus, pour y être jugés & décidés, & par appel en vos pariemens ou cours des aides, fans que pour 1'avenir les parties pour raifon des circonftances & dependances ou intéréts que votre majefté y pourroit prétendre , puiffent être aucunement diftraites ailleurs, que pardevant vofdits juges. Au fembhble ne puiffent vofdites cours, fous prétexte d'un appel de quetque incident , évoquer & retenir le principal, a peine de nullité des arrêts qui feront donnés au contraire. Que tous arrêts & jugemens de vos cours & autres vos juges, foient fïgnés par les préfidens & confeil'e s qui y auront affifté, a peine de nullité defdits arrêts & jugemens, comme auffi les  r7* Etats conclufions de vos procureurs foient fignéesd'eux , Sc de vos avocats qui les auront déiibérées. Que les officiers de vofdites cours Sc autres, ne puiifent obtenir aflïgnation de leurs gages Sc penfions, fur les amendes adjugées en leurs jurifdictions, fur peine de privation de leurs états, Sc que telles affignations ci - devant oóhoyées, foient révoquées. Et d'autant que par le ig9 article de 1'ordonnance de Blois, eft permis aux préfidens & confeillers de vos cours, & maïtres des requêtes exécutant commiffions, prendre pour greffiers leurs clercs & domeftiques, dont advienr grand inconvénient, plaife a votre majefté, dérogeant audit article, ordonner que les préfidens, confeillers & maïtres des requêtes en 1'exécution de leurs commiffions, foient tenus prendre & fervir des greffiers leurs clercs, commis & autres perfonnes pubiiques des lieux ou iis déplaceront, ou des lieux oü ils exécuteront, fur peine de nu Ui ré de procédure. Que défenfes foient faites, tant de vos cours fouveraines, qu'autresdes feigncurs, fe rendre adjudicataires, foitpar eux ou perfonnes interpofées, des ventes ou adjudications par décret ou autrement, qui fe feront en leurs fiéges & jurifdidions, fur peine de privation de leurs offices Sc nullités defdites adjudications pour 1'avenir, finon qu'ils  sous Henri III. I?3 fuffent oppofans aufdites ventes, & de leur chef tant feulement. Que les officiers de vos cours fouveraines & charnbres des comptes, ne foient de votre confeil privé, auffi cjue les réfultats de nouveau in, troduits foient éteints & abolis. Que la réduótion faite des offices de judicarure, tant en vos cours fouveraines, baillia^es, fénéchauifées advenant ci-après vacations d'iceiix' comme auffi des prévóts des maréchaux & vicebaillis, foit procédé a 1'éleéfion, felon ia forme portée par vos ordonnances, & pourvu par votre majefté gratuitement, fans prieres, pourfuites ou faveur d'aucunes perfonnes, & déclarer les provifions autrement obtenues nulles, défendre a vos juges auxquels elles sadreffieront y avoir égard, & déclarer les peines indides par vos ordonnances encourues par les contrevenans. Que les perfonnes pourvues d'offices de judicature, non fujettes a fuppreffion ni réduction , puiffent pour une fois feulement réfïgner de pere' a fils, beau-pere 3 gendre , fiere k fiere, d'oncle a neveu, fans qu'il foit befoin d'obtenir difpenfe des quarante jours, pourvu que les réfignans vivent lors de la réfignation admife, & le réfignataire foit de la qualité requife. Que les parens & degrés prohibés par les ordonnances , pourvus d'offices non fupprhnés, tant  I74 ÉTATS a vos cours, charnbres des comptes, préfidiaux., qu'autres vos jurifdidion?, foienrles derniers pourvus transférés, ou tenus 'es réligner & s'en défaire dans trois mois après la publicafion de 1'édit, qui fera par nous fur ce fait, Sc a détaut le tems pafte, déclarés vacans Sc impétrables, & prohiber a 1'avenir, en ajoutant aux précédentes ordonnances , que le beau pere , gendre & beaufrcre, puiffent être pourvus d'offices en même lieu & fiége. • Les notaires & tabellions eonjoints de parente Sc affinité , comme de pere & fils , beau-pere, gendre , coufin-germain Sc neveu,ne peuvent enfemble recevoir inftrument, contrat ou obligatioü, ni les uns pour les autres. Pour exciter vos officiers a fidelement exercer leurs offices, fans crainte ou refped deperfonne, plaife a votre majefté d'ordonner en cas qu'aiicun d'eux füt tué ou affafliné faifant fa charge , ou en conféquence d'icelle , qu'elle foit réfervée a fa veuve, enfans Sc héritiers, pour pouvoir vous préfenter hommes dignes Sc capables, finon leur en faire récompenfe. Que les deniers néceflaires pour 1'inftrudion des procés criminels, foient pris fur les recettes de votre majefté en chacune province, ielon les mandemens de vos juges auxquels la connoiffancc appartient defdits procés criminels, & pour la  sous Henki III. Ï75 conduite desprévenus & accufes, foient paffés en vos charnbres des comptes, fans aucun retranchement, fauf a être pourvu contre vofdits juges en cas de malverfation , felon la rigueur du droit Sc de vos ordonnances, Sc le même foit ordonné des revenus des hauts - jufticiers, pour parfaire tous proces criminels. Que les officiers Sc domeftiques de votre maifon , ne jouilfent du privilege dt'coèmuttmus, s'ils ne fervent actuellement & vérifient de certificat , comme ils font couchés en 1'état par copie de la quittance de leurs gages duement expédiée , Sc attachée fous le contre-fcel ; que ce privilege ne leur foit accordé, & a tous autres qui en doivent ufer, que pour caufes excédentes la valeur de cent écus, & qu'elles foient perfonnelles ou poffeffoires, non mixtes ni hypothéquaires. Que tous gardiens Sc dépolitaires des chofes mobiliaires en défaut de les faire vendre par les faifüfans, dans fix mois du jour de 1'établiffement, s'en puiifent faire décharger, encore que les oppofitions formées ne fuffent vuidées au regard des commiffaires étabiis au régime des héritages faifis, ils s'en puiffent faire décharger rrois ans après leur établiffement, fans pouvoir être contraints , continuer efdites charges , lefdits trois ans paffés, combien que les différends  i7<» États des créanciers , débiteurs ou oppofans ne fuflent terminés, &: les biens faifis Entrez en créance avec eux, Sire, voyez leurs moyens qui vous feront plus fecourables Sc profitables, que eet argent venant de l'accroifternent des tailles, de la propre fubftance du peuple. Ils font prêts d'y entrer, agréez-les, acceptez leurs prieres Sc leurs offres, afin qu'ils ayent tant plus d'occafion de louer Dieu en votre bonté Sc clémence , Sc lui réndre prieres immortelles pour votre profpérité & regne. Piaife auffi a votre majefté póurvoir a rétabliffement de la chambre de juftice, qui vous a été requiie par vos états. C'eft; votre autorité, Sire , ceft  104 États votre bien , c'eft 1'honneur & grandeur de votre majefté, c'eft le repos & füreté de votre peuple a 1'avenir. Dècharges & remifes accordées par le roi d fes fujets. Rremierement. T-i e s levées faites en la préfcnte année fur es contribuables aux tailles pour 1'entretenement des gouverneurs &c gens de guerre , qui tiennent garnifon en certaines places de ce royaume : &t auffi de ce qui a été impofé a la requête d'aucunes provinces & communautés des villes , qui peuvent revenir en tout a fix eens trente-fix mille écus , dont fera remis au peuple cinq eens mille écus , & le furplus montant fix-vingt feize mille écus, retenu pour les plus nécelfaires garnifons , ci , cinq eens mille écus. La fubvention des villes clofes, trois eens foixante-fept mille huit eens foixante-fix écus deux tiers. La crue des clochers , trois eens quatre mille neuf eens cinquante écus. Le fol pour livre de ia draperie, foixantefix mille écus.  soüs Henri III. L'impofition des toiles, cent mille écus. L'impofition des cuirs, quarante mille écus. Le nouveau fubfide du vin, foixante Sc onze mille écus. La crue qui fe devoit lever en 1'année prochaine pour 1'armée navale, cinquante mille écus. Le parifis des épices eftimé a cent mille écus. Somme, quinze eens quatre - vingt dix - neuf mille huit eens feize écus deux tiers. Et outre ce, le roi a accordé Sc remis a fefdits fujets la fomme d'une million foixante - fix mille huit eens cinquante écus, fur le principal de la taille ou crue , felon le département qui fera fait par fa majefté. Revenans toutes lefdites décharges Sc remifes enfemble , a la fomme de deux millions fix eens foixante-fix mille fix eens foixante-fix écus deux tiers , evalués a huit millions de livres. Accordé par le roi le famedi 3 décembre 1588. Extrait de facie de la préfentation faite d Sa Majefté dudit cahier par les députés du Tiers-Etat. JL( e mercredi quatrieme du mois de janvier 158? après-midi, tous les députés du tiers-état  alTemblés en 1'hotcl de ville de Blois, pouf en corps s'acbeminer en 1'églife des Jacobins vers meffieurs de 1'églife, Se de la tous affemblés vers le roi pour lui préfenter le cahier général du tiers-état, fut repréfentée par le greffier la minute dudit cahier , laquelle fut fignée par les préfidens des provinces, lors préfens, par ledit treffier Se monfieur Jean Guilleaume, évangelifte, pour êrrc préfenté a fa majefté; 6c fut avifé, que monfieur Bernard feroit au nom des députés du tiers-état ladite préfentation ; Se s'étant tous lefdits députés avec meffieurs du clergé Sc de la nobleffe acheminés vers le roi environ les trois heures après-midi , monfieur 1'archevêque de Bourges ayant ufé de préface Sc recommandation de la bonté Sc bienveillance de fa majefté, des juftes plaintes du clergé , préfenta leurs cahiers; monfieur de Briffac , pour la nobleffe ayant fait le femblable, monfieur Bernard ayant le cahier en fes mains, remontra a fa majefté , que fes très-obéiffans fujets du tiers-état lui préfentoient en toute humilité le cahier de leurs plaintes, avis Sc fupplications , pour être les articles vus Sc examinés Sc répondus par fadite majefté a 1'entretenement de i'édit d'union , réformation du défordre Sc foulagement de fon peuple, & paree que par la coutume 8c liberté des états, l'on avoit permis que les plaintes  SOUS HltÏKI III. io7 pubJiqucs fuflent faites &c rapportées publiquement, ils defiroient & requéroient que fans rien changer & altérer de la forme ancienne , jour de la femaine leur fut donné pour ouir en public leurs fupplications, a la charge de ne fe point départir pendant les huit jours qu'il avoit plu a fa majefté prendre pour la réfolution entiere des cahiers, lefquels expirés ils fuppli eroient fa majefté les licencier, & permettre qu'ils puffent être porteurs de bonnes nouvelles, publier & témoigner z leurs provinces fes faintes &c juftes intentions ; lui avoient auffi donné charge de lupplier fa majefté , qu'en continuant fa clémence & bonté ordinaire, il lui plüt mettre en liberté leurs confrères , & les rendre a la compagnie du tiers-état entiers en leurs perfonnes & réputation , adhérans a la requête de meffieurs de 1'églife pour la perfonne du fieur évêque de Chalons en Champagne, duquel la doctrine &C prudhommie étoit finguliercment recommandée aux trois ordres-, que cela les confirmeroit en leur devoir & en la volonté qu'ils avoient de continuer le fervice, fidélité , que très-humbles fujets doivent rendre a leur roi ; après lequel propos il lui préfenta ledit cahier, qu'il fit prendre par monfieur de Beaulieu, fecrétaire, &dit, qu'on avoit fuffifamment témoignage de la bonne & droite affeftion qu'il avoit toujours eue au  io8 États bien Sc foulagement de fon peuple , qui en connoïtroit les effets par la réponfe qu'il feroit dans peu de jours a leurs plaintes. Dèclaranon du Roi après le meurtre du Duc de Guife & du Cardinal & de l Archev'.que de Lyon, fur tattentat, felonie & rébellion du Duc de May enne, Duc & Chevalier £Aumale , & ceux qui les affiflerent. H enri , par la grace de Dieu , roi de France Sc de Pologne, a tous préfens Sc venir, falut. Comme il n'y ait commandement de Dieu , religion, ni loi recue entre les hommes, qui puiffent excufer le fujet de prendre les armes, lans 1'ordonnance ou permiffion du fouverain, auquel il a plu a fa divine bonré donner toute autorité fur lui, Sc a lui réfcrver le glaive de puiifance pour en ufer, a la confervation des bons, punition Sc chatiment des mauvais -, que fera-t-il du fujet qui prend les armes contre fon propre roi très-chrétien , légitime Sc naturel; Et fi ce crime eft abominable devant Dieu Sc les hommes, Sc doit être la honte Sc la confufion de ceux qui le commetrent, il n'y a plus de nom entre les chrétiens, aflez cxécrable pour les Francois, ft par  sous Henri III. &09 par la deloyauté, attentat & felonnie, ils ne font plus les enfans de leurs peres,. ces anciens Francois, lefquels par tant de vertus, au'péril de leurs vies, ont acquis Sc été rêmarqués entre'toutes "nations du monde, pour être les plus fidele's èVlès plus loyaux a leurs rois ! Et fi a ce crime tant exécrablc on peut ajouter quelqu'accroiiTement pour les obligations , bienfaits Sc g'ratihcations particulieres, recues par le fujet qui s'arme "contre fon bienfaiteur & fon roi légitirne & naturel, le duc de Mayenne , le duc & chevalier d'Aumaie fönt dignes de ce nom, qui n'eft point encore en ufage ; Sc comme leur rébellion Sc déloyauré eft fans mefitre & fans exemple, auffi fe doiventils apneler les plus infideïè's Sc les plus déloyaux de ce monde, Sc laiffer a. leur poftérité cette marqué d'ingratirude Sc rébellion pour fervir de luftre a la loyauté de ceux qui feront demeurés fermes en leur fidélité , & en la jufte Sc légitime obéiffance, que Dieu leur commande porter SC rendre a leur roi. Or, toutêfois jufques-la étoit arrivée autre clémence & bonté, que voulant oubüer routes chofes paffées, & les juftes occafions qu'ils nous avoient données de les ch ariër Sc traiter felon les mérites de leur . délovauré. recherchant en nous-mêmes leur propre falut Sc la guérifon de leurs piaies par les nótres, même k confervation de'leurs vies Sc de leur honneuï Toms XV.- O  2io États aux dépens de notre autorité : nous avons de* puis quelcjues jours envoyé devers eux, par plufieurs Sc diverfes fois, aucuns de nos bons & fideles ferviteurs & fujets, avec nos lettres bien exprefies, Sc depuis encore par de nos hérauts d'armes , leur faire entendre notre bonne Sc fainte intention, Sc que nous étions encore prêts , non-feulement d'oubHer les chofes paffées, mais de les recevoir en r.os bonnes graces, Sc les chérir Sc embraffercomme nos bons Sc loyaux fujets, en faifant leur devoir Sc les foumiifions que juftement ils nous doivent. Néanmoins, tout ainfi qu'une ame ambitieufe Sc déloyale efr du tout incompatible avec l'alfiftance de fon Dieu, «S-' par fon infidélité n'eft plus fufceptible de la raifun qui la pouvoit contenir ou ramener a fon devoir ; comme auftila chenille quï fe nourrit de ia même liqueur dont les mouches produifent le miel & la cire, Sc toutefois la convertit en venin; ainfi, notre bonté Sc clémence, mifes en i'eftomac de telles peifonnes abandonnées de Dieu Sc de fon efprit, ont été convertie? en corruption Sc non. point én la fubftance qu'ils en devoient tirer-, car au lieu de s'humilier comme ils devoient, Sc reconnoitre leur faute , ils cn font devenus plus orgueilleux, Sc fe font précipités opiniatrément eux-mcmes en la ruine de leurs ames, de leurs vies, de leur honneur Sc réputatlon, Sc de leurs faeukés domeftiques, fe faiuftant de nos vil-  SOUS H E np, I III. 21 ï les Sc chateaux \ entreprenant par leur déloyauté Se rébellion , contre notre autorité, nos magiftrats, Sc contre nos bons Sc loyaux fsrviteurs Sc fujets, même contre les préiats, évêques Sc autres gens d'églife, jufqu'a les emprifonner, piiler leurs biens, les ranconner , Sc par tourmens leur faire réfigner leurs bénéfices a gens de leur parti, fans autre confidération de leur mérite ou qualité ; feulement i! fuffit qu'ils aient part a leur méchanceté, & par toutes autres voies demefuiées, d'hoftiiité, de rébellion Sc félonnie , le tout fous couleur Sc prétexte de piété Sc de religion , comme ils döuvoient feulement approcher de la notre Sc de celle de tant de gens de bien Sc d'hónneur, qu'ils nerfécutent comme criminels, feulement paree qu'ils font fideies ferv'itear's Sc fujets de leur rei, Sc qu'ils ne veulent pas fe damner, nl avoir part en leur déteftable. rébellion. Ayant a la bouche ce qui efi le plus éloigné de leur coeur, faifant voile Sc manteau de l'honneur de Dieu, pour réfifter .V fon exprefle parole , Sc détruire par leur a'mbi-' tion, félonnie Si déloyauté fa religion cathölique,'1 apoftölique Sc romaine, ainfi que cTéja 'fax 0ir fieurs fors' ils ont fait, en prenant rips' villes & les armes pour nous divertir Sc empêcher lörfque nous étions le plus préparé Sc réfolu d'ajtër" en perfonne faire la guerre aux hérétiques; aufii • feroient-il bien marris qu'il n'y en "eüt plus en' Oz  ii2 États France , paree que leur ambitieux deflein n'auv roit plus couverture. Et encore que par la grace de Dieu nous ne foy.ons tenu de rendre compte de nos actions qu'a fa divine bonté feule, tou^fois, afin que la fimplicité d'aucuns de nos fujets ne foit point abufée de leur fauffe impofture, &C n'eftiment faiiffement que le feu duc de Guife a été chatié , paree qu'il étoit protecteur 8c défenfeur de la religion catholique, apoftoiique 8c romaine , ou pour 1'affecbion qu'il avoit au' foulagement du peuple , & a cette occafion, que lefdits duc de Mayenne, duc 8c chevalier d'Aumale 8c leurs affociés , ont une grande &légitime occafion de s'unir enfemble, tant pour leur confervation particuliere 8c de la religion,. que pour la vengeance de celui qui eft mort pour eux (comme-ils en font courir le bruit pour anime* &,féduire n°s fujets, 8c nourrir leur ambitieufs rébellion), nous voulons bien faire entendre , que méchamment ils ont voulu faire couvrir leur déloyauté de l'honneur de Dieu, accroiffement de k religion Sc aftecTion au public; car fans nous ajnufer aux particularités de la vie defdits feu duc de Guife & de fon frere , dont la mémoire eft encoie..trop fraïche en ce royaume, principalement entre ceux qui les connoiflent le mieux ; pour ne perare tems a i'écrir.e, il nous fuffira feulement de dire, que peu de jours auparavant fa mort,  sous Henr.i III. 215 icêlui duc de Mayenne, entr'aütre's "chofes, nous manda par un cavalier d'hsfineur, qu'il nous envoya expres, que ce n'étoit pas affez a. fon frere de porter des patenotres au col , mais qu'il falloit avoir une ame Se une cörifcience ; que nous priffloas bien garde a nous , qu'il falloit que luimcme , duc de Mayenne ou ledit chevalier vinffent pour nous avertir, Sc que le terme étoit fi brief, Se que s'il rie fe hatoit il étoit bien a. craindre qy'il n'arriveroit pas affez a tems. Pareillement les mémoires, les lettres ne font pas perdues, des ptatiques Sc recherches d'amitié faites avec le roi de Navarre Sc les hérétiques, tant dehors que-dedans ce royaume, a quelque condition que ce fut, pourvu qu'on lui promït amftié Sc affiftance a fon établiffement. On fait affez quelles penfions il tiroit des étrangers, par quelles prome ffes Sr a quelle fin. Les alliances qu'il a cherchées de ceux qu'il conda.mnoit le plus devant les hommes, comme fauteurs d'héréfies, ne font ïnconnues qu'a ceux qui ne les veulent pas favoir. Ce font les acfes fignalés qu'il avoit tirés de la vie des apótres & des commandemens*de Dieu pour conferver Ja religion catholicjue , apoftoiique Sr romaine, Sc le foulagement du peuple; au contraire, l'on fait bien oü étoient employées nos armées , quelle étoit notre intention d'y aller eft perfonne a ce printenis, Sr qu'il n'a pas tenu O 3  * 14 Etats a nous que ledit duc de Mayenne n'ait fait la guerre aux hérétiques, auffi bien que notre tréscher & féal coüfin le duc de Nevers , qui fut encore a cqntinuer notre entreprife, li nos forces n'eulTent été diyerties par la, déloyauté defdits duc de Mayenne,..duc & chevalier d'Aumale, comme déja icelui duc d'Aumale fit le femblabie en 1'année derniere , par la furprife de nos villes en Picardie ; & fe peut dire par les ccuvres de leurs mains, que les huguenots n ont jamais trouvé tant de faveur, ni ce pauvre royaume, tant de mifere Sc d'oppreffion, qu'en. 1'ame Sc en la vie du feu duc de Guife, duc de Mayenne, duc Sc chevalier d'Aumale. Quant au foulagement du peuple, foit confidéré 1'état préfent de ce royaume, les pertes &.ruines qu'il a reaies depuis 1'année i 5 85, que lefdits feu duc de Guife Sc les fufdits d.e Mayenne Sc d'Aumale , prirent contre nous & notre autorité, Sc foit fait jugement. de la mine prochaine de cedit royaume, par les chofes avenues depuis ce tems-la, pour en faire comparaifon avec les années précédentes 83 & 84 , & le réglement que nous avions donaé &c commencé d'établir en celui-ci notredit rovaume, a 1'hon neur de Dieu Sc au foulagement de notre peuple , Sc accordé fon foulagement Sc les charges de guerre enfemble, avec les ceuvres dudit feu duc de Guife &c des dehus nomniés, lef-  sous Henri III. ,215 quels depuis, ce tems - ia. n'ont -jamais ^pofé ies armes, tantöt fous un prétexte tarrcQ$ feus..un autre. Soit entendue auffi js. conter.ance dudit feu duc de Guife & de ceux qui" 1'affifioient, iorfque nous accordr,mes aux députés de nos états, contre fon efpérance, la décharge Se réducTicn des .tailles a celles de 1'année Ï£#j pourvu qu'iis coimafr fent les moyens de.jempiacer fe fonds & fatiffaire a 1'entreténement de la; dignité. royale Sachez-le de vos députés qui font des provinces ou ceux de la religion ont quelque lieu de retraite. Confiderez 1'état auquel ils étoient auparavant la guerre, & celui 011 ils font a cette heure. Et quant & quant vous jugerez de quoi a fervi depuis quatre ans la perte de la vie d'un million d'hcmmes, la dépenfe d'une miniere d'or, la ruine du peur ple de France , que l'on a confentle a meilleur marché & plus aifément que s'il eüt été queftion de la défaite des Ottomans, ou de joindre a notre couronne toutes celles de la chrétienté.. II eft impoflible que vous demeuriez immobiles après cela, & que vous ne remarquicz que c'eft un ouvrage & un eftet extraordinaire , &C d'une caufe extraordinaire. La-deflus je vous dirai que tout ainfi que cela doit arrêter vos yeux & vos mains, pour connoïtre que ft vous débattez contre Dieu, vous débattez en vain : de même je dois lever les mains au ciel, pour ms garder de m'enfler de ces profpé rités , & lui en attribuer la caufe, étant très-certain, que ft je faifois autrement, Dieu tourneroit fa vue P 3  13» Ê T A T 3 ailleurs, Sc donneroit cn deux mois plus d ava«rage a mes ennemis fur moi, qu'en quatre ans je n'ai eu de faveur de lui. J'efpere qne je ne le ferai point, par fa grace : Sc pour eet effet , je veux que ces écrits pour moi fe voient par tout le mende. Que aujourd'hui j'ai voulu demander au roi monfeigneur la paix, le repos de fon royaume, Sc le mien. J'avois au commencement de ces armées le refpect de ma confeience, & mon honneur, que j'ai toujours fupplié très-humblement fa majefté de laiffer entiers. Les guerres n'ont rien diminué de cela , mais elles n'ont rien ajouté auffi fur quoi je puiffe me rendre difficile. Je 1'en fupplie donc rrès humblement. Et quant avous, meffieurs, je penfe que fi vous 1'aimez, fi vous aimez fon état, fi vous en connoiffez les maux Sc les remédes, vous devez avoir commandé a vos députés qui étoient a cette aflemblée , de commencer Sc finir leurs conclufions par la. Je vous en prie, Sc vous en femons auffi. Je fais bien qu'en leurs cahiers ils ont pu inferer cette générale maxime , qu'il ne faut qu'une religion en un royaume, Sc que le fondement d'un état eft la piétéqui n'eft point en lieu oü Dieu eft diverfement fervi : Sc par confequent, mal. Je 1'avoue, il eft ainfi, a mon tresgrand regret. Je vois force gens qui fe plaignent  sous Henri III. 231de cela, peu qui y veuillent remédier. Or je me fuis toujours offert ala raifon, & m'y offre encore. Que l'on prenne les voies accoutumées en telles chofes. S'il y en a d'extraordinaires , que l'on en chcrche. Et moi , & tous ceux de la religion nous rangerons toujours a ce que decernera un concile libre. C'eft le vrai chemin, c'eft: celui feul que de tout tems on a pratiqué. Sous celui la nous paflerons condamnatlon. Mais de croire aifa coups d'épée cela fe puifte obteniï de nous, j'eftime devant Dieu, que c'eft une chofa impoffible. Et de fait, 1'évenement le montre bien. II ne faut pas que je fois long fur ce propos: car c'eft une matiere déja difputée. On m'a fouvent fommé de changer de religion. Mais comment ; La dague a la gorge. Quand je n'euffe point eu de refpeét a ma confcience , celui demon honneur m'en eüt empeché , par maniere de dire. Qui ouit jamais parler que l'on voulut tuerunTurc, un Payen naturel; le tuer, dis-je, pour fa religion , devant que d'effayer de le convertir ? Encore eftimé-je que le plus grand de mes ennemis ne me penfe pas plus éloigné de la crainte & de la connoiffance de Dieu, qu'un Turc. Et cependant, on eft plus fevere contre n.oi, que l'on ne feroit contre ce barbare. Que diroient de moi les plus affectionnés a P4  J3- États la religion catholique, fi après avoir vécu forf ques a trenre ans d'une forre, ils me voyoient ftibitement dranger ma religion, fous 1'efpérance dun royaume; Que diroient ceux qui m'onr vu & éprouve courageux, fi honteufement je quittcis, par Ja peur, la faconde laquelle j'ai fervi Dieu des le jour de ma naiffance 3 Voila des raifons qui touchent l'honneur du monde. Mais au fonds, quele .confcience ? Avoir éré nourri, inftmic óc élevé en une profeffion de foi, & fans ouir, & fans parler, tout d'un cou? fe jetter de autre cöté ! Non, meffieurs, ce ne fera jamais' le roi de Navarre, y eüt-il trente couronnes a gagner. Tant s'en faut qu'il !ui en prenne envie, pour 1'ef] érance d\me feule. Inflruifez-moi, je ne fys point opiniarre: prenez le chemin d'inftruue, vous y profiterez infiniment. Car fi vous me montrez une autre vérité que celle que je cro.s, je m'y rendrai, & ferai plus. Car je penfe que n'y laifferai nul de mon parti , qui ne s'y rende avec moi. Vous ferez uu beau gain & Dieu, une belle conquête de confciences en la miemie feule. Mais de nous conter des paroles, & fars raifons, nous perfuader qu a la feule vue' des armes, nous devons être perfuadés, jugez, meffieurs, s'il efc raifonnable. Or laiffons cel:. Si vous defirez mon falut firn. plement, je vous remercie. Si vous ne fouhaitcz  sousHênki III. 133 ma converfion, que pour la crainte que vous avez qu'un jour je vous contraigne, vous avez torr. Mes aétions réfiftent a cela. La facon de laquelle" je vis & avec mes amis , & avec mes ennemis, en ma maifon , & a la guerre, donnent affez de preuve de mon humeur. Les villes oü je fuis, & ou depuis peu je fuis enrré en felont foi. II n'eft pas vraifemblable qu'une po'gnée de gens de ma religion, puiffent contraindre un nombre infini de catholiques, a une chofe a laquelle ce nombre infini n'a pu réduire cette poignée. Et li j'ai avec fi peu de forces débattu & foutenu fi long-tems cette querelle, que doivent -faire donc ceux qui avec tant & tant de moyens s'oppofëroient puiffans, contre ma contrainte pleine de foibleffe. II n'y auroit point de prudence a cette procédure. II n'eft pas queftion de cela a cette heure. Je ne fuis point en état de vous 'faire ni bien ni mal pour encore , Dieu merci. Je ne ferai, s'il lui plait, jamais en cette épreuve, ni vous en cette peine.'Nous avons tous un roi, qui me laiffera bien de 1'appréhenfion , quand il mourra de vieillefle. Ne nous tourmentons'point tant de 1'avenir bien éloigné, que nous oublions le préfent qui nous touche. Dieu a fait Voir aü jour les fonds des defleins de tous ceux qui pouvoient remuer en eet état.  *34 Etats II a déeouvert les miens auffi. Nul ne vous, nul de la France les ignore. N'eft-ce pas une mifere qu'il n'y ait fi petit ne fi grand en ce royaume , qui ne voye le mal, qui ne crie contre-les armes, qui ne les nomme la fievre continue Sc mortelle de eet état. Et néanmoins jufques ici nul n'a ouvert la bouche pour y trouver le remede. Qu'en toute cette affentblée de Blois. nul n'ait ofé prononcer cc facré mot, de paix, ce mor, dans 1'effet duquel confifte le bien de ce royaume. Croyez, meffieurs, que cette admirable Sc fatale ftupidité eft un des plus grands préfages que Dieu nous ait donné du declin de ce royaume. Notre état eft extrêmement malade. Chaorole voit. Par tous les fignes on juge que la caufe du mal, eft la guerre civile. Maladie prefque incurable , de laquelle nul état n'échappa jamais. Ou s'il en eft relevé , fi cette apoplexie ne 1'a emporté du tout, elle s'eft au moins terminée en paralyfie, en la perte entiere de la moitié du corps. Quel remede? nul autre que la paix qui fait 1'ordre au cceur de ce royaume , qui par I'ordre, lui rend fa force naturelle, qui pari ordre, chaffe les defobéiftantes Sc malignes humeurs, purge les corrompues, Sc les remplit de bon fang, de bonnes intentions, de bonnes volontés, qui, en fomme, le fait vivre. C'eft la paix, c'eft la paix.  SOUS H li N R I III. 13 5 q'ü'U faut demander d Dieu , pour fon feul rerne* de , pour fa feule guérifon. Qui en cherche d'autre, au lieu de le guérir le veut empoifonner. Je vous conjure donc tous, par eet éerst, autant catholiques, ferviteurs du roi monfeigneur , comme ceux qui ne le font pas. Je vous appelle , comme Francois. Je vous fomme , que vous ayez pitié de eet état, de vous-mêmes , qui le fappant par le pied, ne vous fauverez jamais , que la ruine ne vous en accable ; de mot encore, que contraigniez par force a voir, a fouffrir , d faire des chofes, que fans les armes je mourrois mille fois plutot que de voir , de fouffrir , &c de faire 5 je vous conjure de dépouiller d ce coup les miférables aigreurs de guerres Sc de violences, qui diffipent Sc démembrent ce bel état, & qui nous diftraient, les uns par force , les autres trop volontairement, dei'obéiffance de notre roi: qui nous enfanglantent du fang les uns des autres , Sc qui nous ont déjd tant de fois fait la rifée des étrangers, Sc a la fin nous feront leur conquête : de quitter, dis-je, toutes vos aigreurs, pour reprendre les baleincs de paix Sc d'union, les volontés d'obéiffance & d'ordre , les efprits de concorde , par laquelle les moindres états deviennent puifians empires, &  2 3 États par laquelle le notre a fi longuement flori le premier royaume de ceux de la chrétienneté. Bien que j'aie mille & mille occafïons de me plaindre en men particulier de ceux de la maifon de Guife, d'eux , dis-je, mesparens,& parens fi proches, que hors du nom que je porre , je n'en ai point de plus ; bien qu'en général la France en ait encore plus de fujet que moi •, Dieu fait néanmoins le déplaifir que j'ai de les avoir vu entrer en ce chemin, dont le cceur m'a toujours jugé que jamais ils ne fortiroient a leur honneur. Dieu me foit témoin, fi les connoitfant utiles' au fervice du roi, Sc je puis dire encore au mien, puifqu'ils avoient eet honneur de m'appartenir, & que mon rang précede leleur, je n'euife été , Sc ne ferois très-aife qu'ils employaffent beaucoup de parties que Dieu Sc la nature leur ont donné pour bien fervir ceux a qui ils doivent fervice, au lieu que les mauvais confeils les pouffent au contraire. Tout autre au. monde hormis moi, fe riroit de leur malheur , feroit bien aife de voir 1'indignation , les déclarations, les armes du roi monfeigneur, tournées contre eux ; mais, certes, je ne le puis faire, Sc nele fais pas, finon pour autant que , des deux maux, je fuis contraint de prendre le moindre. Je parlerai donc librement a moi premierement,  sous Henri III. 237 & puis a eux , afin que nous foyons fans excufe. Ne nous enorgueillifibns ni les uns ni les autres. Quant a moi, encore que j'aie recu plus de faveur de Dieu en cette guerre, qu'en toutes les paffées, Sc qu'au - lieu que les deux autres partis ( quel malheur qu'il les faille ainfi nommer ) fe font affoiblis, le mien enapparence s'eft fortifié, je fais bien maintenant, que toutes les fois que je fortirai de mon devoir, il ne me bénira plus, & j'en fortirai, quand fans raifon Sc de gaieté de cceur, je m'attaquerai d mon roi, Sc troublerai le repos de fon royaume. De même eux, qui depuis ces quatre dernieres annëes ont mieux aimé les armes que la paix, qui les premiers ont remué en eet état, & ont fait ce troifieme parti fi indigne de la foi de France, Sc je dirai encore , de celle de leurs ayeux , puifque Dieu par fes jugemens leur montre qu'il n'a pas eu agréable ce qu'ils ont fait, puifqu'il touche 1'efprit de notre roi pour les recevoir a fa douceur accoutumée, comme lui même le déclaré, qu'ils fe contentent. Nous avons tous aftez fait Sc fouffert de mal ; nous avons été quatre ans ivres, infenfés & furieux. N'eft-ce pas affez 5 Dieu ne nous a-t-il pas affez frappés ies uns Sc les autres , pour nous faire revenir de notre endormiflement, pour nous ren-  2.3 8 Etats dre fages a la fin, Sc pour appaifer nos furies ? Or, fi après cela, il eft loifible, que comme trés humble Sc très-fidele fujer du roi monfeigneur, je dis quclque bon avis a ceux qui le confeillent •, qui a jamais oui parler qu'un état puifte durer, quand il y a deux parris dedans , qui ont les armes a la main 3 Que fera-ce de celui-ci, oü il y en a trois ? Comment lui peuton perfuader de faire une guerre civile, & contre deux, tout a un coup 3 II n'y a point d'exemple, point d hiftoire, point de raifon, qui lui promette une bonne iffue de cela. II faut qu'il falTe la paix , Sc la paix générale avec tous fes fujets, tant d'un c6té que d'autre parti, tant d'une que d'autre religion , ou qu'il rallie au moins avec lui, ceux qui le moins s'écarteront de fon obéiffance, Sc ï ce propos, qu'un chacun juge de mon intention. Voila comme je rends le mal pour le bien, comme j'entends l'animer contre fes fujets qui ont été de cette belle ligue j Sc vous faveztous, meffieurs, néanmoins, que quand je le voudrois faire, Sc en fa nécelfité lui porter mon fervice , ( comme je le ferai, s'il me le commande ), en apparence humaine , je traverferai beaucoup leurs deffeins, Sc leur tailler.-.i bien de la befogne. Xappelle a cette heure tous les autres de notre état qui fint reftés fpeétateurs de nos folies.  sous Henri III. Z}9 J'appellenotrenobleffe, notre clergé, nos villes, notre peuple. C'eft a eux que je parle. Qu'ils confiderentoü nous alions entrer ; ce que deviendrala France ; quelle fera la face de notre état, fi ce mal continue ; que fera la noblefle, fi notre gouvernement fe change, comme il fera indubitablement, & vous le voyez déja, fi les villes par la crainte des partifans , font contrainrcs de fe renforcer dans leurs portes, de ne fouffrir perfonne leur commander, & de fe cantonner ï la Suüfe ; il n'y en a nul de cette volcnté , je m'en affure, mais la guerre les y forcera a la longue, & a mon grand regret j'en vois déja naitre les commencemens , qui avec eux , portent un mie!, tipe douceapparence, a laquelle le mcüleur & le plus loyal bourgeois du monde fe raiffe aifémént emporter. Que deviendront les villes, quand fous une apparence vaine de liberté , elles auront renverfé 1'ancien ordre de ce bel état ï quand eiles auront toute la nobleffe ennemie , le piat-pays ennuyeux & defireux, quant & quant de les faccager , s'imaginant dans leurs coffres, dans leurs boutiques, des richeffes fans compte ? Que feront les principaux habitans, qui tiennent tous les offices de la monarchie , ou aux finances, ou i la juftice , ou a la police , ou aux armes ? & dont-chacun compte entre leur fortune  i4« ÉTATS domeftique , la valeur de leur ét t ? Cela eft perdu , fi la monarchie fe perd. vui leur donnera ce libre exercice de la marchand.fe ? Qui leur garantira leurs polTeftions aux champs 3 Qui tiendra 1'autorité de leur juftice 3 Quels en leroi t les décrets 3 Qui commandera a leurs armes 3 Soinme , quel fera leur ordre 3 Pauvres abufés ! Cette fureur pour un mois ou deux durera , tout ainfi comme l'on dit, que la fievre pour un tems nourric le malade •, mais de penfer qie fur des fondemens de colere & de vengeance , on puifte établir une inteüigence aflurée, Sc une formed'état durable, cela ne fe peut, n'ayant point été ni vu ni lu, qu'un état fe foit changé , fans ia ruine des villes , qui en font toujours ies principaux appuis. Et toi, peuple , quand ta nobleffe Sc tes villes feront divifeés, quel repos auras-tu? Peuple , le grenier du royaume, le champ fertile de eet état, de qui le travail nourrit les princes , la fueur les abreuve , les métiers les entretiennent , 1'induftrie leur donne les délices a rechange, a qui auras-tu recours quand la nobleffe te foulera , quand les villes te feront contribuer 3 Au roi? qui ne commandera aux uns ni aux autres 3 Aux officiers de fa juftice i Ou feront-ils J A fes lieutenans 3 Quelle fera leur puiflance 2 Au maire d'une ville 3 Quel droit aura-t il fur la nobiefte? A  sous Henri III. 2+1 Au chef de la nobleffe ? Quel ordre parmi eux > Pitié, confufion, défordre, miferes par - tout j & voila le fait de la guerre. Ce n'eft pas par oubli que je ne dis mot du clergé. Mais je ne veux parler d eux , craignant qu'ils ne m'advouent, m'eftimant plus leur ennemi, que je ne fuis. A la vérité, j'ai plus d'occafion de me plaindre de leur ordre, que de tous les deux autres de la France, mais n'importe , il y a des gens de bien parmi eux. Quant a leur profelfion & leur religion, en quelque chofe je leur fuis contraire; en mille, ieür ennemi, en d'autres, nous fommes d'accord ; ne fut-ce qu'en ce qui touche la confervation des priviléges de 1'églife de France, & la liberté d'iceJJe. Quoique ce foit, fi j'avois avec eux toutes les prifes du monde, je les mettrois fousle pied a cette heure ; emporté par une plus force confidération, qui eft celle du fervice de mon roi, & du bien de eet état. Cependant qu'efperent-ils ? Faire la guerre, & payer leurs décimes au pays oü ils ont le plus de crédit 5 Aux lieux oü j'ai puiffance, je leur tiendrai quafi tout, & a cela je ne puis remédier. Mais i la longue , la diffention s'étant mife entierement par-tout, que peuvent-ils devenir J Qu'ils regardent quel chemin prennent nos villes, nos peuples, notre nobleffe, & qu'ils confiderent, eux qui ont, ou doivent avoir la Tome XF. Q  242 ÉTATS piété en recommandation, s'il y a rien qui f foit contraire, que les vices &c débordemens , s'il y a rien qui déborde tant les hommes, que la licence de la guerre civüe. Qu'ils jugent encore, fi eux, qui ne fe font enrichis& augmentés que par la paix, par 1'ordre, par 1'obéiifance a nosrois, par la dévotion, n'iront pas déformais en diminuant, par la guerre, les confuiions, 1'impiété, & la mutine défobéifhnce. Après avoir parlé a tout le monde en particulier , je dis encore ceci en général. Soit que Dieu benifTe les deffeins de notre roi, & qu'il vienne a bout de tous les mutins de fon royaume, il eft miférable, s'il faut qu'il les fafle tous punir comme ils le méritent. Quoi punir une grande partie de fes villes 3 une grande partie de fes fujets; Ce feroit trop, c'eft un malheur j c'eft une rage que Dieua envoyée en ce royaume, pour nous punir de nos fautes. II le faut oublier, il le faut pardonner, & ne favoir non plus mauvais gré a nos peuples, a nos villes; qu'a un furieux, quand il frappe, qua un infenfé, quand il fe promene tout nud. Soit au contraire, fi ceux de la Ligue fe fortifient tellement, qu'ils lui réfiftent , comme certes il y a apparence, ( & j'ai peur que fa patience foit leur principale force: Dieu voulant, peut-être, exercer fur nous fes jugemens, &z nous  sous Henri III. 24$ &e favons pas que ce fera de nous & de lui,) quedirons-nous des Francois; Quelle honte que nous ayons chaffé rios rois 3 Tache qui ne fouilla jamais la robe de nos peres , Sc Ie feul avantage que nous avons fur tous les vaffaux de la ■chrétienté. Cependant , n'eft - ce pas un grand malheur pour moi, que je foye contraint de demeurer oifif 2 On m'a mis les armes en main par force. Contre qui ies employerai - je a cette heure? Contre mon roi? Dieu lui a touché le cceur. II a pris la querelle pour moi. Contre ceux de laLigue? Pourquoi les mettrai-je au défefpoir? pourquoi moi, qui pirêche la paix en France, aigrirai-je le roi contre eux, Sc öterai pai 1'appréhenfion de mes forces, Sc Jui 1'envie, a eux 1'efperance de reconciliation. Et voyez ma peine, Car fi je demeure oifif, ou ils feront encore leur accord , & a mes dépens, comme j'ai vu deux ou trois fois avcnir; ou ils affoibliront tellement le roi, & fe rendront fi forts, que moi après fa ruine, n'aurai guères de force ni de volonté pour empêcher la mienne. Meffieurs, je parle auffi a vous, que je fais, a mon très-grand regret, n'êcre tous compcfés d'un humeur. Les déclarations du roi monfeicmeur. Sc principalement fes dernieres , publient affez qu'il y en avoit entre vos députés, Sc quafi la Q »  i44 États • plus grande partie, a la dévotion d'autre qüe de lui. Si vous avez tant foit peu de jugement, vous croyez avec moi, que je fuis en grand hafard. Auffi eft le roi , auffi eft le troifieme parri, auffi ctes vous, & en gros & en detail. Nous fommes dans une maifon qui va fondre: dans un bateau qui fe perd, Sc n'y a nul remede que la paix: qu'on s'en imagine , qu'on encherche tant d'autres que l'on voudra. Pour conclufion donc 5 moi meilleur (je le puis dire) Sc plus intérelfé en ceci que vous tous, je la demande au nom de tous, au roi monfeigneur. Je la demande pour moi: pour ceux de la Ligue, pour tous les Francois, pour la France. Qui la fera autrement; elle n'eft pas bien faite. Je protefte de me rendre mille fois plus traitable, que je ne fus jamais. Si jamais j'ai été difficile , je veux fervir d'exemple aux autres , par 1'obéiffance que je montre a mon roi. Mais après vous avoir tant Sc tant de fois protefté Sc déclaré ce qui eft de men devoir, Sc de notre profit commun, je déclaré donc a la fin. Premierement, a ceux qui font du parti du roi monfeigneur , que s'ils ne fe rangent avec moi, s ils ne s'accordent a cette fainte délibéiation, non de faire la guerre a la Ligue, ou a ceux de Lorraine, non a Paris , d Orléans,  sous Henri III. 24J ou a Touloufe ; mais a ceux qui empêcheront Ia paix Sc l'obéilfance due a cette couronne •, qu'ils feront feuls coupables des malheurs qui arriveront au roi Sc a ce royaume. Et moi au contraire, décharge de ce blame , Sc de la foi que j'ai a mon prince: duquel, autant que j'ai pu, j'empcche & empêcherai le mal; veuille , ou non. Et quant a ceux qui retiennent encore Ie nom «5c le parti de la Ligue, je les conjure, comme Francois, je leur commanderois volontiers encore, comme a ceux qui ont eet honneur de m'appartenir, «Sc de qui les peres euffent recu ce commandement a beaucoup de faveur, je m'eU affure. Si ce n'eft facon, je le ferai néanmoins après le roi, comme le premier prince, &le premier magiftrat de France. Qu'ils penfent a eux, qu'ils fe contentent de leur perte , comme je fais des miennes, qu'ils oublient le particulier pour le public , qu'ils donnent leurs paffions, leurs querelles, leurs vengeances, Sc leurs ambitions, au bien de la France, leur mere , au fervice de leur roi, a leur repos, Sc au nótre. S'ils font autrement , j'efpere que Dieu n'abandonnera point tant ie roi, qu'il n'acheve en lui fon ouvrage , Sc qu'il ne lui donne envie d'appeller fes ferviteurs prés de lui, & moi ie premier qui ne veux autre titre, Sc qui y allant pour eet  24* États effet, aurai affez de force Sc de bon droit pour 1'affifter, Sc lui aider a oter du monde leur mémoire, Sc de la France leur parti. Finalement, après avoir fait ce qui eft de mon «Sevoir en cette fï folemnelle proteftation que je fais. Si je reconnois les uns ou les aurres, ou fi endormis, ou fi mal affeclionnés , que nul ne s'en émeuve; j'appellerai Dieu a témoin de mes actions paffées, a mon aide, pour celles de l'avenir. Et vrai ferviteur de mon roi, vrai Francois, digne de l'honneur que j'ai d'être premier prince de fon royaume , quand tout le monde en auroit conjuré la ruine , je protefte devant Dieu Sc les hommes, qu'au hafard de dix mille vies, j'effaierai tout feul de 1'empêcher. J'appelle avec moi, tous ceux qui auront ce faint defir, de quelque qualicé Sc condition qu'ils puiffent être. Efperant que fi Dieu benit mon deffein, autant comme je montre de hardieffe a 1'entreprife , autant aurai-je de fidelité après ea avoir vu la fin: rendarrt a mon roi, mon obéiffance, a mon pays, mon devoir , 8c a moi-même, mon repos «5c mon contentement, avec la liberté de tous les gens de bien. Et cependant, jufques a ce qu'il ait plu a Dieu donner le loifir au roi monfeigneur , de pourvoir aux affaires de fon état, y remettanc  sous Henri III. *47 la paix qui y.eft £ néceffaire 5 je déclaré, comme celui qui ai eet honneur de tenir le premier lieu fous fon obéiffance , que fi en fon abfence je ne le puis ft bien fervir , que je 1 etabliffe par tout fon royaume, je ferai au moins en partie aux liöux ou j'aurai plus de pouvoir, reconnoitre fon autorité. Et peur eet effet, je prends en ma proteétion & fauve-gardc du roi monfeigneur, Sela mienne, tous ceux de quelque qualité, religion & condition qu'ils foient, tant de la nobleffe , de 1'églife, que des villes , que du peuple , q4 fe voudront .ünir avec moi en cette bonne réfolution. Sans permettre qua leurs perfonnes & biens il foit touché en manicre quelconque, en autre forte qu'en tems de pleine paix, Sc. que par les loix du royaume on a accoutumé d'y toucher. Et bien que plus que nul autre j'ai regret de voir les différends de la religion , Sc que plus que nul autre j'en fouhaitaffe les remédes, néanmoins reconnoiffant bien'que c'eft de Dieu feul, Sc non des armes Sc de la violence, qu'il les faut attendre , je protefte devant lui, Sc en cette proteftation, j'engage ma foi Sc mon honneur que par fa grace j'ai jufqu'ici confervé entiers •, que tout ainfi que je n'ai pu fouffrir que l'on m'ait contrahit en ma confeience , auffi ne fouffrirai-ie ,. ni ne permettrai jamais que les cathx>  *48 État* liques foient contraints en la leur , ni en leurexercice libre de la religion. Déclarant en outre que aux villes qui avec moi s'uniront en cette volonté, qui fe mettront fous 1'obéiifance du roi monfeigneur , & la mienne, je ne permettrai qu'il foit innové aucune chofe, ni en police, ni en 1'églife , finon en tant que cela concernera la liberté d'un chacun. Prenant de-reelief tant les perfonnes, que les biens des catholiques, & fpécialement des eccléfiaftiques fous ma protecfion & fauve-garde. Ayant de long-tems apprins que le vrai & unique moyen de réunir les peuples au fervice de Dieu, & d'établir la piété en un état, c'eft la douceur, la paix , les bons exemples , non la guerre, ni les défordres; & que pai ïes défordres, les vices &c les méchancetés naiffent au monde. Fait d Chatelleraut, le 4 Mars 1585. Aïrififignè, HENRI. Et plus bas, Laliier.  sous Henri IV. 14 j HENRI IV. ETATS DE LA LIGUE. J1 E prétexte de la ligue étoit de maintenir en France la religion catholique, & d'empêcher tout proteftant de fuccéder a la couronne. Les chefs de cette union étoient le pape, les cardinaux de Bourbon, de Lorraine, de Guife, de .Vaudemont & de Vendóme ; 1'empereur, les princes de la maifon d'Autriche , le roi d'Efpagne , le grand maltre de Malthe , la feigneurie de Venife, la république de Gênes ie de Lucques, le grand duc de Florence •, les ducs de Lorraine, de Guife , lieutenans - généraux de la ligue, les ducs de Mayenne, de Mercoeur, d'Aumale, d'Elbeuf, de Nevers, de Savoie , de Ferrare, de Nemours , de Clèves, de Parme, &c autres jufqu'aux évêques de Cologne & de Mayence. Mais ceux que 1'on pouvoit regarder comme 1'ame du parti , étoient le duc de Guife , *Sc Philippc II, roi d'Efpagne, quoi qu'a vee des  25° Etats vues différente*. Le projet du duc de Guife étoit de détróner Henri HE, & de fe mettre a fa place ; celui du roi d'Efpagne éroit de faire éiire reine de France 1'infante fa fille , qu'il chériifioit fingulierement. (Voyez 1'Efpric de la Ligue , t. 3. pag. 1S5)). Qn peut voir dansles Mémoires de Nevers, les fermens de 1'union jurés par les colonels & bourgeois de Paris, & lus au parlement. Le duc de Guife ayant été tué a Blois, le 22 décembre 1588 , pendant la tenue des états, Henri III fut affafiiné a fon tour, le premier aoüt 1589. Alors le duc de Mayenne devient chef de la ligue. II perd la bataille d'Yvri. Henri IV fait le fiége de Paris, & le duc de Parine, général du roi d'Efpagne, en fait lever le blocus. Le duc de Mayenne ayaat découvert le projet des efpagnols, &c bsjkip qui avoient eu tant de pouvoir a Paris, étant tombés en difcrédit, enfin les états de la ligue s'afiemblent 3 Paris, en 1592. « II n'y avoit plus a reculer, dit M. Anquetrii dans fon Efprit de la Ligue. Excepté le roi , toutes les parties belligérantes defiroient les états, paree que toutes, efpagnols, ligueurs, grandes vides , princes, commandans , fe trouvoienr pendant la guerre dans une fituation chancelante, a laquelle ils efpéroient qu'une aiTemblée folemnelie des états du royaume, don-  soüs Henri IV. ijt neroït une affiette fixe. Tous comptoient y gigher quelque chofe : les chefs, la confirmation de leurs dignités •, les étrangers, des places fron" tieras, peut-être des provinces; &c les peuples, la paix. Le roi au contraitre ne pouvoit regarder cette affemblée que comme un orage formé contre lui. Le moins qu'il dut appréhender, c'étoit d y voir livrer a 1'examen de la multitude, un droit auffi certain que le fien ». 6cc. PROSÈS-VERBAL & pieces authentiques des états de la ligue, tenus d Paris en 1593 » lefdites pieces tirces du quatrieme voiumk des Mémoires d'Etat de M. de Villeroy. Sommaire préliminaire de M. de Villeroy. jVfoNSiEUR le duc de Mayenne, lieutenant-gér néral de 1'état & couronne de France, ayant tou;our3 recherché pour le devoir de la charge &c autorité qui lui a été commife , les vrais moyens pour affurer la religion catholique, apoftoüque &: romaine , conferver ledit état & couronne en fon entier, & y établir quelque ordre & tranquillité, auroit jugé n'en pouvoir trouver de plus légitimes & affurés, que 1» convocation des étao  25* États généraux, laquelle ayant été mandée par plufieurs fois, n'auroit pu être fi-töt avancée pour les notoires empêchemens. Enfin voyant approcher les députés des provinces, Sc villes catholiques de ce royaume , pour le defir qu'elles avoient de trouver quelque rernede a leurs maux, auroit affigné lachte alfemblée en ia ville de Paris, au mois de Février. Mais prévoyant que les vrais fondemens pour la reltauration de la religion & de 1'état, fe doivent batir fur la réconciiiation des catholiques , pour avifer, ainfi unis & rallies, par un commun confeil, aux moyens de parvenir a un fi grand bien , Sc auffi pour óter tout fujet de plainte a ceux qui n'auroient été invités , 8c de n'approuver les réfolutions qui feroient prifes en raffemblée, Sc après avoir mürement fur ce délibéré avec fon confeil, Sc de 1'avis d'icelui, auroit fait fa déclaration , Sc par icelle convié ies catholiques qui fuivoient le parti hérétique, de s'en dép artir, Sc prié tous les princes, prélats, officiers , feigneurs Sc autres catholiques, après s'être ainfi féparés de 1'affociation defdits hérétiques , de fe trouver en ladite alfemblée , ou envoyer perfonnes de leur part, pour y faire ouvertures propres au rétabliffement de la reiigion 6c repos de 1'état, leur promettant toute füreté, honneur Sc refpeét, felon leur rang, dignité Sc mérites , laquelle déclaration auroit été publiée  sous Henri IV. le cinquisme janvier , vérifiée par la cour de parlement, 8c enregiftrée de la teneur qui eft ici inférée. Déclaration de M. le duc de Mayenne. C harles de Lorraine , duc de Mayenne , lieutenant - général de 1'état 8c couronne de France : A tous préfens 8c a venir, falut. L'obfervation perpétuelle 8c inviolable de la religion 8c piété en ce royaume, a été ce qui 1'a fait fleurir fi long-tems par-deflus tous autres de la chrétienté, 8c qui a fait décorer nos rois du nom de très-chrétiens 8c premiers enfans de 1'églife: ayant les uns, pour acquérir ce titre fi glorieux, 8c le laifter a leur poftérité, pafte les mers, 8c couru jufques aux extrêmités de la terre , avec grandes armées , pour y faire la guerre aux infideles; les autres combattu plufieurs fois ceux qui vouloient introduire nouvelles feéles & erreurs, contre la foi 8c créance de leurs peres. En tous lefquels exploits , ils ont toujours été alfiftés de leurs nobleffes , qui très-volontiers expofoient leurs biens 8c vies a tous périls, pour avoir part en cette feule vraie 8c folide gloire , d'avoir aidé a conferverla religion en leur pays, ou a 1'établir  *54 E T A T s ès-pays lointains , efquels le nom Sc 1'adoratio» de notre Dieu n'étoit point encore connu : qui auroit rendu ieur zèle & vaieur recommandable par-tout, Sc ieur exemplc a été caufe d'exciterles autres potentats a les enfuivre en l'honneur Sc au péril de pareilles entreprifes &: conquctes; ne s'étant point depuis, cette ardeur Sc fainte intention de nos rois Sc de leurs fujets , refroidie Sc changée , jufques a ces derniers tems, que 1'héréfie s'eft gliffée fi avant dans le royaume, Sc accrue par les moyens que chacun fait, Sc qu'il n'eft plus befoin remettre devant nos yeux , que nous fommes enfin tombés en ce malheur , que les catholiques mêmes, que 1'union de 1'églife devoit inféparablement conjoindre , fe font, par un exemple prodigieux Sc nouveau, armés les uns contre {es autres, Sc féparés, au lieu de fe joindre enfemble pour défenfe de leur religion. Ce que nous eftimons être avenu par les mauvaifes impreffions Sc fubtils artifices, dont les hérétiques ont ufé pour leur perfuader que cette guerre n'étoit poinc pour la religion , mais pour ufurper ou dYflipet 1'état, combien que nous avons pris les arm-s, mus d'une fi jufte douleur, ou plutót cenrraints d'une fi gtande néceftiré , que la caufe n'en puiffe être attribuéé qu'aux auteurs du plus méchant, déloyal, Sc pernicieux confeil qui fut jamais donné a prince; Sc la mort du roi avenue par un coup  sous Henri IV. 255 malhéureux Sc de la main d'un feul homme , fans 1'aide ni fu de ceux qui n'avoient qu'occafion de la defirer. Nous avons encore témoigné que notre feul but Sc defir étoit de conferver 1'état, fuivre les loix du royaume, en ce que nous aurions reeonnu pour roi monfeigneur le cardinal de Bourbon , plus prochain & premier prince du fang 9 déclaré du vivant du feu roi, par fes lettres-patentes vérifiées en tous les pariemens, Sc en cette qua'ité, défigné fon fucceileur , oü il viendroit a décéder fans enfans males ; qui nous obligeoit a lui déférer eet honneur, Sc lui rendre toute obéiffance , fidéiité Sc fervice , comme nous en avions bien 1'intention , s'il eüt plu a Dieu de le déiivrer de la captivité en laquelle il étoit. Et fi le roi de Navarre , duquel il pouvoit efpérer ce bien, eüt tant obligé les catholiques, que dele reconnoitre lui-même pour fon roi, Sc attendre que nature eüt fait finir fes jours , fe fervant de ce loifir pour fe faire inftruire , Sc réconcilier a 1'églife, il eüt trouvé les catholiques unis Sc difpofés a lui rendre la même obéiffance & fidélité après la mort du roi fon oncle. Mais perfévérant en fon erreur, il ne nous étoit loifible de le faire , fi nous vouiions, comme catholiques, demeurer fous 1'obéiffance de 1'églife catholique , apoftolique Sc romaine , qui i'avoit excommunié Sc privé du droic qu'il pouvoit prétendre a la  25* États couronne. Outre ce que nous euffions, en le faifant , enfraint & violé cette ancienne coutume, fi religieufement gardée par tant de fiecles Sc la fucceffion de tant de rois, depuis Clovis jufques apréfent, de ne reconnoïtre au tröne royal, aucun prince qui ne fut cathohque , obéiffant fils de 1'églife, Sc qui n'eüt promis & juré a fon facre , & recevant le fceptre Sc la couronne , d'y vivre Sc mourir, de la défendre Sc maintenir, Sc d'extirper les héréfies de tout fon pouvoir ; premier ferment de nos rois,'fur lequel celui de 1'obéiffance Sc fidéiité de leurs fujets étoit fondé, Sc fans lequel ils n'euffient jamais reconnu, tant ils étoient amateurs de notre religion, le prince qui fe prétendoit appelé par les loix , a Ja couronne. Obfervation jugée fi fainte Sc nécelfaire pour ie bien Sc falut du royaume , i par les états-généjaux affemblés a Blois en 1'année mil cinq eens foixante & feize, lorfque les catholiques n'étoient encore divifés en la défenfe de leur religion, qu'elle füt tenue entr'eux comme loi principale & fondamentale de 1 etat s & ordonné avec 1'autorité Sc approbation du roi, que deux de chacun ordre 'feroient députés vers le roi de Navarre & le prince de Condé, pour leur repréfenter, de la part defdits états , le péril aufquels ils fe mettoient pour être fortis de 1'églife ; les exhorrans de s'y réconcilier, Sc leur dénoncer, s'ils ne le faifoient, que, venant  sous Henri IV. ljy Yenant leur ordre pour fuccéder a lacouronne, ils en fer0lent perpétuellement exclus , comme incapables. Et la déclaration depuis faite a Rouen en 1'année x5S8 , conrirmée en 1'afiemblée des derniers états j tenus au même lieu |de Blois, que cette coutume & loi ancienne feroit ir.I violablement gardée , comme loi fondamentale du royaume, n'eft qu'une fimple approbation du jugement fur ce donné par les états précédens, contre lefquels on ne peut propofer aucun jufte foupcon, pour condamner ou rejetter leur avls & autorité. Auffi le feu roi la recut pour loi, & en promit & jura 1'obfervation en 1'églife & fur le précieux corps de N. S. comme firent tous les députés des états , en ladite derniere alfemblée avec lui, non-feulement avant ies inhumains maffacres, qui l'ont rendu fi infame & funefte mais auffi depuis, lorfqu'il ne craignoit plus les' morts, & méprifoient ceux qui reftoient, qu'il tenoit comme perdus & défefpérés de tout fakt: 1'ayant fait pour ce qu'il reconnoiffoit y être te,nu & obligé par devoir , comme tous les fouverain* font, Uuivre & garder des loix qui font comme colonnes principales , ou plu tót bafes de leur état. Onnepourroit donc juftement banier les catholiques unis , qui ont fuivi 1'ordonnance de 1'églife, 1'exemple de leurs majeurs, & la loi fondamentale du royaume , qui requiert au prince qui préTome Xy, r  2jg États tend droit £ la coöronne , avec la próximité da fang, qu'il foit catholique, comme qualité efifentielle &c nécelfaire pour être roi d'un royaume scquis a Jefus - Chrift , par la puiffance de fori évangile , qu'il a re$u depuis tant de fieeles, felon, &c en la forme quelle eft arinoncée en 1'églife catholique, apoftolique & romaine. Ces raifons nous avoient fait efpérer que fi quelque apparence de devoir avoit retenu plufieurs catholiques prés du feu roi, qu'après fa mort, la rciigion , ie plus fort lien de tous les autres pour joindrt les hommes enfemble, les uniroit tous en la défenfe de ce qui leur doit être le plus cher. Le contraire feroit toutefois avenu,contre le jugement & prévoyance des hommes, pour ce qu'il fut aifé en ce foudairi mouvement, de leur perfuader que nous étions coupables de cette mort, a laquelle n'avions aucunement penfé ; & que l'honneur les obiigeoit d'alfifter ie roi de Navarre, qui publioit en vouloir prendre la vengeance , & qui leur promettoit de fe faire catholique dedans fix mois. Et j étant une fois entrés, les offenfes que la guerre civÜe produit, les profpérités qu'il a eues , & les mêmes calorrmies- que les hérétiques ont continué de publier contre nous , font les vraies caufes qui les y ont depuis retenus, & donne moyen aux hérétiques de s'accroitre fi avant que la rciigion & 1'état en font en péri-1. Quoiqne nous ayons vu de loin le- mal que cetts  sous Heski IV. 259 divifion devcit apporter, & queUe feroit caufe detablir 1'héréfie avec le fang Sc les armes des catholiques, que notre réconciliation feule y pourïoit remédier, Sc que pour cette raifon nousl'ayons foigneufcmcnt recherchée; fi n'a-t-il jamais été en notre pouvoir d'y parvenir \ tant les efprits out éréaltérés Sc occupés depaifiion, qui nous a empêché de voir les moyens de notre falut. Nous ies avofis fait prier fouventefois de vouloir entrer en conférence avec nous , comme nous offrons de fe faire avec eux, pour y avifer; fait déclarer tant a eux qu au roi de Navarre même, fur quelques propofitions faites pour mettre le royaume en repos, que, s'il délaiffoit fon erreur, & fe réconciÜoit si 1'égiife, i notre faint pere, SC au" faintfiege, par une vraie & non feinte cenverfion,& par aélions qui puiffent donner témoignage de fon zele a notre religion , nous apporterfons trèsvolontiers notre obéifiance, & tout ce qui dépem doit de nous, pour aider a faire finir nos miferes ; Sc y prócéderions avec une fi grande franchife & fincérité ,. que perfonne ne pourroit douter que notre intention ne fut telle : ces ouvertuxes.Sc déclarations ayant été faites, lorfque nous avions plus de profpérité Sc de moyen pour' ofet entreprendre, fi ce defir eiït été en nous plutóc que de fervir au public , Sc chercher le repos du royaume, A quoi chacun fait qu'il auroit toujours R 2  zéo Etats répondu qu'il ne vouloit être forcé par ces fujets 9 appelant contrainte, la priere qu'on lui faifoit de retourner a 1'églife , qu'il devoir plutöt recevoir de bonne part, Sc comme une admonition falutaire, qui lui repréfentoit le devoir auquel les plus grands rois font auili bien obligés de fatisfaire , que les plus petits de la terre : car quiconque a une fois re^u ie chriftianifme , Sc en la vraie églife, qui eft la notre, dont nous ne voulons point mettre 1'autorité en dpute avec qui que ce foit, il n'en peut non plus fortir, que le foidat enrölé ié départir de la foi qu'il a promife Sc jurée , fans être tenu pour déferteur Sc infra&eur de la loi de Dieu , Sc de fon églife. II a encore ajouté a cette réponfe, après qu'il feroit öbéi Sc reconnu de tous fes fujets , qu'il fe feroit inftruire en un concile libre Sc général, comme s'il falloit des conciles pour une erreur tant de fois condamnée Sc réprouvée de 1'églife, même par le dernier concile tenu a Trente , autant autentique Sc folemnel, qu'aucun autre qui ait été célébré de plufieurs fiecles. Dieu ayant permis qu'il ait eu de 1'avancage depuis * par le gain d'une bataille, Ja même priere lui fut encore répétée , non par nous qui n'étions en état de le devoir faire, mais par perfonnes d'honneur, defireux du bien Sc repos du royaume » comme auffi, durant le fiége de Paris, par pré_  sous Henri IV. 161 Iats de grande qualité , priés d'aller vers lui de la part des affiégés, pour trouver quelque rcmede en leur mal. Auquel tems s'il Te füt difpofé , ou plutót, fi Dieu par fon Saint - Efprit, fans lequel përfohne ne peut entrer en fon églife, lui eüt donné cette volonté , il eüt beaucoup mieux fait efpérer de fa converfion aux catholiques,qui font juftement foupconneux & fenfibles en la crainte d'un changement qui rcgarde fi pres a l'honneur de Dieu, a leursconfciences, &aleurs vies,qui ne pe • vent jamais être affurées fous la domination des hérétiques. Mais 1'efpoir auquel il étoit lors d'affujettir Paris, & par eet exemple , la terreur de fes armes, & les moyens qu'il fe promettoit trouver dedans , d'occuper le refte du royaume par la force, lui firent rejetter ces confeils de réconciliation a 1'églife, qui pouvoient unir les catholiques enfemble, & conferver leur religion. Dieu les 'jri ayant délivrés, a 1'aide des princes, feigneurs, & d'un bon nombre de noblefle du royaume, &c de 1'armée que le roi catholique , qui a toujours alfilfé cette caufe de fes forces & moyens, dont nous lui avons tres - grande obligation, envoya fous la conduite de monfieur le duc de Parme , prince d'heureufe mémoire, aflez connu par Ia réputation de fon nom & de fes grands mérites , il ne laifla pourtant de rentrer bientót en fes premières eipérances ; pour ce que cette armée étran- R 3  États gere , incontinent après le fiége levé , fqrtit hqr* ie royaume. Et lui, ayant mandé les fiens, aflembla, par leur prompte obéiffance une grande armée, avec laquelle il fe rendit maitre de la campagne, & fit publier lors tout ouvertement Sc fans plus diffimuler , que c'étoit crime de le prier Sc parler de converfion , avant que l'avoir teconnu, lui avoir'prêté le ferment d obéiffance Si fidéliré ; que nous étions tenus de pofer les armes , de nous adreffer ainfi nuds Sc défarmés a lui par fupplicarion, & de lui donner pouvoir abfolu fur nos biens Sc fur nos vies, & fur la religion même , pour en ufer comme il lui plairpït, la mettant en péril certain par notre lacheté, au lieuqu'avec 1'autorité Sc les moyens du faint-fiége, 1'aide du roi catholique, Sc autres potentats qui affiftent Sc favorifent cette caufe, nous avons toujours efpéré que Dieu nous feroit la grace de la conferver : tous lefquels n'auroient plus que voir en nos affaires, fi nous 1'avions une fois reconnu : fe démêleroit cette querelle de la religion, avec trop d'avantage pour les hérétiques, entre iui, chef Sc proteóteur de 1'héréfie , armé de notre obéiffance Sc des forces entieres du royaume, & nous qui n'auripns pour lui réfiiler, que de fimples & foibies fuppiicadons, adreffées a un prince peu defireux de les ouir Sc d'y pour voir. Quelque injuife que foit cette va-  sous He^ri IV. i6"3 lonté , 8c que la fuivre lok le vrai moyen de ruiner la religion , néanmoins entre les catholiques qui railiftent, plulieurs fe font laiffés perfuader que c'étoit rébellion de s'y oppofer. c; que nous devions plutöt obéir a fes commandemens & aux loix de la poiice temporelle, qu'il veut établir de nouveau , contre les anciennes loix du royaume, qu'a 1'o'rdonnance de 1'églife, 8c aux loix des rois prédéceffeurs, de la fucceflïon defquels il prend la couronne , qui fie nous ont pas appris a reconnoitre des hérétiques, mais au contraire a les rejetter, a leur faire la guerre, 8c a n'en tenir aucune plus jufte ni plus néceffaire, quoi qu'elie fut périileufe , que cellé-la. Qu'il fe fouvienne que lui-même s'eft armé fi fouvcnt contre nos rois, pour introduire une nouvelle doctrine dans le royaume •, que plufieurs écrits 8c libelles diffamatoires ont été fa;ts 8c publiés contre ceux qui s'y oppofoient, 8c donnoient confeil d'étouffer de bonne heure le mal , qui en naiifant étoit foible ; qu'il vouloit lors qu'on crüt fes armes juftes, pour ce qu'il y~ alloit de la religion & de fa confcience ; que nous défendons une ancienne religion, auffitöt regue en ce 'royaume qu'il a commencé', 8c avec laquelle il s'eft accru jufqu'a être le premier & . Ie plus puiffant de. la chrétienté , que nous connoiffons ' affez ne pouvoir être gardée pure , inviolable, & R i  i,f4 ÉTAT* hors de péril fous un roi hérétique , encore qui J'entrée , pour nous faire pofer les armes, & le rendre makre abfolu, on en diffimule & prornette le contraire. Les exemples voifins, laraifon , & cecjue nous expérimentons tous les jours, nous devroient faire fages, & apprendre que les fujets fuivent volonriers la vie, les mceurs, & la religion même de leurs rois, pour avoir part en leurs bonnes graces, honneurs & bienfaits, qu'eux feuis peuvent diftribuer a qui il leur plak ; & qu'après en avoir corrompu les uns par faveur, ils ont toujours Je moyen de contraindre les autres , avec leur autorité & pouvoir. Nous fommes tous hommes, & ce qui a été tenu pour Ikke une fois, qui néanmoins ne 1'éroit, le fera encore après pour une autre caufe, qui nous femblera auffi jufte que la première qui nous a fait faillir. Quelques confidérations ont fait que plufieurs catholiques ont-- penfé pouvoir fuivre un prince hérétique, & aider a 1 etabiir. L'afpecf des églifes, des autels, des monumens de leurs peres, plufieurs defquels font morts en combattant pour ruiner 1'héréfie qu'ils foutiennent, & le péril de Ja religion. préfent, &a venir, ne les en ont point détournés. Combien devrions nous donc plus craindre fes faveurs & fa force, s'iJ étoit établi & devenu notre makre & le roi abfolu, lorfqu'un chacun las & recru, ou plutót du tout  sous Henri IV. 1*5 ruine par cette guerre , qui leur auroit été fi peu heureufe , aimeroit mieux fouffrir ce qu'il lui plairoit, pour vivre en füreté & repos, & avec quelque efpoir de loyer & récompenfe, obéiffant a fes commandemens, que de s'y oppofer avec péril, On dit que les catholiques feroient tous unis lors, & n'auroient plus qu'une même volonté pour conferver le-ar religion : par ainfi qu'il feroit aifé d'empêcher ce changement. Nous devons defirer ce bien, & toutefois nous ne 1'ofons efpérer fi a coup. Mais foit ainfi que le feu éteint, il n'y ait a 1'inftant plus de chaleur dans les cendres, & que les armes pofées , notre haine foit du tout morte , fi eff-il certain , que nous ne ferons pourtant exempts de ces autres paffions, qui nous font auffi fouvent faillir ; que nous aurons toujours le péril fur nos têtes, & feront fujets malgré nous aux mouvemens & paffions des hérétiques, qui feront, quand ils pourront, par conduite ou par force, & avec 1'avantage qu'ils auront pris fur nous ayant un roi de leur religion, ce que nous favons déja qu'ils veulent. Et fi les catholiques vouloient bien confidérer dès maintenant, les aélions qui viennenc de leurs confeils, ils y verroient affez clair : car on met les meilleures villes & forterelfes qui font prifes , en leur pouvoir ou de perfonnes qui font reconnues de tous tems- Jes favorifer. Les catholiques  ztftf Etats qui y réftdent, font tous les jours accufés & couvaincus de crimes fuppofés ; la rébellion étant le crime, duquel on accufe ceux qui n'en ont point. Les principales charges tombent déja entre leurs mains. On eft venu jufqu'aux états de la couronne. Les bulles de nas faints peres les papes Grégoire XIV Sc Clément VIII, qui contenoient leurs faintes Sc paternelles admonitions aux catholiques, pour les féparer des hérétiques, ont été rejettées Sc foulées aux pieds avec mépris, par magiftrats qui s'attribuent le nom de catholiques , combien qu'ils ne le foient en effet. Car s'ils étoient tels , ils n'abuferoient la fimplicité de ceux qui le font, par des exemples tirés des chofes avenues eu ce royaume , lorfqu'il étoit queftion d'entreprife contre la liberté des priviléges de 1'églife gallicane , Sc non de fait femblable au nótre : le royaume n'ayant jamais été réduir a ce malheur, depuis le tems qu'il a recu notre religion, de fouffrir un prince hérétique, ou d'en voir quelqu'un de cette qualité qui ait prétendu droit. Et fi cette bulie. leur fembloit avoir. quelque difficulté, étant catholiques, ils y devoient procéder par remontrances , Sc avec le refpect 6c la modeftie qui eft due' au faint fiége , &c non avec fi grand mépris, blafphême Sc impiété, comme ils ont fait ; mais c'eft avec deffein, pour apprendre aux autres qui favent être meilleusa  sous Henri IV. 2g7 catholiques qu'cux, a méprifer Ie chef de leglife, afin qu'on les en fépare plus aifément après. II y a des degrés au mal; on fait toujours commencer par celui qui femble le moindre , ou ne i'être point du tout; le jour fuivant y en ajoute un autre ; puis enfin la mefure fe trouve au comble. C'eft en quoi nous reconnoilfons que Dieu eft grandement courroucé contre ce pauvre & défolé royaume, & qu'il nous veut encore chirier pour nos péchés; puifque tant d'adions qui tendent a la ruine de notre religion , 8c d'autre coté tant de déclarations par nous faites 8c fi fouvent répétées, même depuis peu de jours, d'obéir & nous remettre du tout a ce qu'il plaixoit a fa fainteté 8c au faint fiége, ordonner fur la converfion du roi de Navarre, fi Dieu lui faifoit la grace de quitter fon erreur, qui devroient fervir de témoignage certain de notre innocence & fincérité , & juftifier nos armes comme néceffaires, ne les émeuvent pas , 8c qu'on ne laiffe pourtant de publier que les princes unis pour la défenfe de la religion , ne tendent qu'a ia ruine 8c diffipation de 1'état: combien que leur conduite & les ouvertures faites, du commun confentement deux tous , même des fouverains qui nous aftïftent, foient le vrai & plus affig4 moyen pour en öter ia caufe ou le prétexte a qui en auroit la volonté. Les hérétiques  i€i États s'attachent ld-deiïus au fecours du roi catholique , qu'ils voyent a regret; «Se nous tiendroient pour meilleurs Francois, li nous nous en vouiions palier, ou, pour mieux dire, plus aifés a vaincre, ii nous étions défarmés: a quoi nous nous contenterons de leur répondre, que la religion affligée «5e en très-grand péril dans ce royaume, a eu befoin de trouver cetappui; que nous fommes tenus de publier cette obligation , «Sc de nous en fouvenir perpétuellement •, «5e qu'en implorant le fecours de ce grand roi, ( allié & conféderé de cette couronne ) il n'a rien requis de nous; «5c n'avons fait de notre cöté aucun traité avec qui que ce foit, dedans ou dehors le royaume, a la diminution de Ia grandeur 8e majefté de 1'état, pour la confervation duquel nous nous précipiterons très-volontiers d toutes fortes de périls, oourvu que ce ne foit pour en rendre maitre un hérétique: mal que nous avons en horreur, comme le premier & le plus grand de tous les autres. Et ft les catholiques qui les favorifent «5c afllftent, fe vouloient dépouiller de cette paflïon, fe féparer d'avec eux Sc joindre, non point d nous, mais d la caufe de notre religion , «Sc rechercher les confeils & remédes en commun, pour la conferver, & pourvoir au falut de 1'état, nous y trouverions fans doute la con-  sous Henri IV. xe9 fervation de 1'un & de 1'autre, & ne feroit pas au pouvoir de celui qui auroit mauvaife intention, d'en abufer, au préjudice de 1'état, & de fe fervir d'une fi fainte caufe , comme d'un prétexte fpécieux, pour acquérir injuftement de la grandeur & de 1'autorité. Nous les fupplions donc & adjurons au nom de Dieu c> de cette même églife , en laquelle nous proteftons tous les jours, les uns & les autres, vouloir vivre 77 ©ut au nom de tous Sc avec le congé Sc perinifiion que fa majefté leur en a donnés, voulu par eet écrit fignifier audit fieur de Mayenne & autres princes de fa maifon, prélats, fieurs Sc autres perfonnes, ainfi affemblés en ladite ville de Paris , que s'ils veulent entrer en conférence Sc communicationdes moyens propres pour affoupir les troubles, a ia confervation de la religion catholique Sc de 1'état, Sc députer quelques bons Sc dignes perfonnages pour s'aflémbler en tel lieu qui pourra être choiii entre Paris Sc Saint-Denis, ils y en envoyeront Sc feront trouver de leur part, au jour qui fera, Ipour ce, convenu Pc accordé, pour recevoir Sc apporter toutes bonnes ouvertures, qui fe pourront excogiter pour un ft bon effet, comme chacun y apportant la bonne volonté qu'il doit, ainfi qu'ils le promettent de leur part, ils s'affurent que les moyens fe trouveront pour parvenir a ce bien; protefians devant Dieu & les hommes, que fi cette voie eft rejettée , prenant autres moyens illégitimes, qui ne pourroient par conféquent être que pernicieux a la religion Sc a 1'état, Sc achever de réduire la France au dernier période de toute mifere Sc calamité , la rendant la proie Sc butin de 1'avidité Sc convoitife des Efpagnols , & le triomphe de leur infolence, acquis néanmoins par les menées Sc pafliens aveuglées d'une partie de ceux qui portent le nom de  178 ÉTATS Francois, dégénérant du devoir Sc de l'honneur qui a été en fi grahde révérence a leurs ancêtres, bi coulpe d'un mal qui en aviendra, ne pourra ni devra juftement être imputée , qua ceux qui , par tel refus, feront notoiremenr reconnus en être la feule caufe, comme ayant prëféré les expédiens qui peuvent fervir a leur grandeur Sc arabition particuliere , Sc de ceux qui les y fomentent, a ceux qui regardent l'honneur de Dieu Sc le falut du royaume. Fait au confeil du roi , oü lefdits princes , Sc fieurs fe font expreffément affemblés , Sc réfolus, avec la permiftion de fa majefté, de faire la fufdite offre Sc ouverture. A Chartres, le vingt-feptieme Janvier 1593 ,fignê REVOL. d>ETTE propofition, comme elle étoit de tresgrande conféquence , après avoir été vue & examinée , donna bien a penler a ceux auxquels elle étoit adreffée, pour les difficultés qui s'y préfentoient \ eftimant que c'étoit un trait jetté par un fingulier artifice, pour interrompre le cours de ce qui fe devoit traitcr &c délibérer aux états, rejetter la haine du peuple fur eux , s'ils refufoient les ouvertures de paix &c de réconciliation , &c pour tracer la voie de 1'établiflement du roi de Navarre , fi la conférence leur étoit accordée. Ce qui en faifoit encore plus mal juger, étoit que  sous Henri I279 par le difcours d'icelle, ils fa:foient de la religion un acceffoire a 1'état, & ne faifoient rien1 que par la permiffion & congé du roi , qiuïf difoient leur être donné de Dieu, proteftant lui être naturellement obligés j & ne fe trêaivoft, ledit écrit, figné par autre que par Revol fecretaire d état dudit roi de Navarre; ce qui étoit fi mal recu, qu'on ne penfbit pas mériter feulement une réponfe , Se fur-tout, M. le Légat, a la première lecture, la prononca êrre très-pernicieufe & pleine d'héréfie & d'impiété ; & afin qu'il en apparüt plus clairement, & confidéré que c'étoit une affaire concernant la foi, il donna charge a quelques notables docïeurs de la facu'lté de théologie, pour examiner icelle propofition, & donner leur jugement & cenfure , ce qu'ils firent, & après avoir communiqué avec toute la compagnie du college de Sorbonne , publierent leur avis, qui tut mis en lumiere , auquel, avec beaucoup de raifoüc exemples & autorités de 1'écriture fainre, ik remarquoient que cette propofition éro;t *Murds, hérétique, fchifmatique, pleine de biaiphême & de rébellion a 1'églife, tenant & fomcnant un hérétique. Aulfi demeura-t-on long tems a s'y réfbüdre, joint que ladite propofition étoit adreflée aux princes conjointement avec les étatss. &c étoit néceifaire d'av.olr leur avis oc réponfe. Enfin le jéudi S 4  2.S0 É T A T S vingt-cinquieme février, l'affaire mife en déiibération aux états , fut gravement débattue , &C Oütre les fufdites raifons, furent apportées plulieurs autres grandes confidérations fur la conféquence que le bruit de tels coiloques pourroit apporter par tout ie royaume ; que les fuccès de femblables conférences qui regardoient les affaires de la foi & religion, uavoient jamais été par le jugement de toute 1'antiquité, &par i'expérience même, que funeftes & dangereux: qu'on pouvoit vaincre ceux a qui on avoit affaire , mais non les convaincre & perfuader: & comme difoit Sifinnius a 1'empeieur Theodofe , Hujuf'nodi collatior.es & colloquia , non Jblum non rcconciliare fchifmata , fed contentiones magis accendere ; non fedare ingenia, fed irritare. D'autre part, on voyoit n'être moins dangereux & odieux de refufer la communication requife , pour trouver les moyens d'alfoupir les troubles & conferver la religion & 1'état, comme ils difoient être leur but & principale intention, & proteffoient, ceete voye étanr rejettée de tous les malheurs qui pourroient arriver a faute de favoir embraffée. Et déja ia longueur dont on ufoit a fe refoudre fur ladite réponfe, étoit mal interpretée par plufieurs , & prife par les propofans grandemenc a leur avantage, qui en avoient fait femer le bruit & envoyé les extraits par-tout, pour met-  sous Henri IV. ïsi tre des impreflions de leur defir Se affection au repos du royaume & foulagement du peuple , Se du refus qu'on faifoit fondé , comme ils difoienr, fur des deifeins ambitieux, Se autres particuliers intéréts. On mettoit encore en confidération 1'état des affaires, la néceflité du peuple, Sc furtout de la ville de Paris, Sc le peu d'efpoir qu'on avoit de la venue de 1'armée , fans l'affifirance de laquelle on ne pouvoit exécuter aucune réfolution des états; Sc auffi que monfieur de Mayenne , par fa déclaration publiée avant 1'ouverture defdits états, Sc de laquelle il étoit fait mention en ladite propofition , les y convioit ; Sc par ce moyen ayant offert de lesouir, c'étoit par après trop de blame de les refufer. Qu'on effaieroit s'il étoit poffible d'en retirer ce fruit, qui feroit le plus grand qu'on pourroit efpérer, de diftraire les catholiques de l'alfiftance Sc fociété des hérétiques , pour fe réunir enfemble ; ou n'y pouvant rien avancer, faire connohre leur tort Sc opiniatreté, fe juftifier davantage , fi on étoit contraint, pour fauvet la religion , de recourir a des extraordinaires remédes. Tellement que la déliberation s'enfuivit par un commun avis des trois ordres, que l'on ne conféreroit directement ou indireólement avec le roi de Navarre ou autre hérétique , ni de chofe qui concernat fon établiffement Sc obéiffance , ni de la doérrine de la  ï8l ÉTATS foi: mais que l'on pouvoit conférer avec les catholiques fuivans fon parti, pour les chofes qui touchent la confervation de la religion , de 1'état Sc repos public, & de leur réunion a 1'églife catholique , apoftolique , Sc romaine , le tout après en avoir conféré avec monfieur le légat: Sc qu'a cette fin feroit faite réponfe a ladite propofition, en termes les plus doux Sc gracieux que faire fe pourroir, Sc fans aucune aigrcur, Sc que, tant en la réponfe qu'en la conférence, on pourroit montrer & déduire les raifons, pour lefqueües on ne devoit reconnoitre un hérétique pour roi , ni perfonne qui fit profeffion d'autre religion que de la catholique , apoftolique & romaine. Cette déiiberation ayant été rapportée par députés exprès a monfieur le légat, il 1'ap • prouva Sc eut pour agréable, efpérant qu'on en pourroit rapporter Ie fruit qu'on defiroit, qui étoit la réunion & reconciliation des catholiques •, Sc fuivant cette déiiberation , fut dreflee la réponfe qui fut envoyée a Chartres par un trompette en ces termes.  sous Henri IV. 28} Réponfe du duc de Mayenne , Lieutenant général de 1'état & couronne de France , Princes, Prdats , Seigneurs & Députés des provinces , affemblés a Paris, d la propofition de Meffieurs les Princes, Prélats, Officiers de la Couronne, Seigneurs, Gentihhommes & autres Catholiques étant du parti du Roi de Navarre. N ous avons vu , il y a déja quelques jours , la lettre qui nous a été écrite & envoyée par un trompette , fous votre nom. Nous defirons quelle vienne de vous, Sc du zele Sc affection qu'aviez autrefois Sc avant cette derniere mifere, a conferver la religion , Sc rendre le refpeét Sc obéiffance qui eft due a 1'églife , a notre faint pere Sc au faint fiege. Nous ferions bientöt d'accord j joints Sc unis enfemble contre les hérétiques ; Sc n'aurions plus befoin d'autres armes pour rompre Sc brifer ces nouveaux autels élevés contre les nótres, Sc empêcher 1'établiffement de 1'héréfie, qui pour avoir été foufferte Sc tolérée, ou plutót honorée de loyer Sc récompenfe, lorfqu'on la devoit chatier , ne demande pas feulement aujourd'hui d'être regu Sc approuvée; mais veut devenir maitreffe , Sc commander impérieufement fous 1'autorité d'un prince hérétique.  284 États Encore qu'il n'y ait perfonne dénommé en particulier par cette lettre , & qu'elle ne foit foufcrite par aucun de ceux dont elle porte le nom , Sc que nous foyons par ce moyen incertains de qui elle vient, ou plutöt trop affurés qu'elle a été faite du mouvement d'autrui, & que les catholiques n'ont a préfent au lieu oü vous êtes, Ia liberté qui feroit néceifaire pour fentir, dalibérer Sc réfoudrc avec le confeil Sc jugement de leur propre confcience, ce que notre mal Sc le falut commun des Catholiques requiert , nous n'euffions pourtant dirferé fi iong-tems a y faire réponfe , n'eüt été que nous attendions que 1'affemblée fut plus remplie Sc accrue d'un bon nombre de perfonnes d'honneur des trois ordres, qui étoient en chemin pour s'y trouver, dont la plupart étant arrivés, crainte que notre nop long filence foit calomnié, nous la faifons aujourd'hui, fans plus ufer de remife pour artendre les autres qui reit ent a venir. Et déclarons en premier lieu, que nous avons tous promis Sc juré a Dieu, après avoir recu fon précieux corps, Sc la bénédiction du faint fiege, par les mains de monfieur le légat, que le but de nos coufeils, le commencement, le milieu, Sc la fin de toures nos a&ions, fera d'aflurer & conferver la religion catholique, apoftolique Sc romaine, en laquelle nous voulons vivre Sc mourir : la verité  sous Henri IV. zgj quï ne peuc mentir, nous ayant appris qu'en cherchant avant toutes chofes le royaume & l'honneur de Dieu , les bénédiclions temporeiles s'y trouveront conjointes, entre lefquelles nous mettons au premier lieu, après notre religion, la confervation de 1'état en fon entier : & que tous autres moyens, pour empêcher la ruine & dillipation , fondés fur ia feuleprudencehumaine , fentant 1'impieté , font injuftes, contraires au devoir & a la profeflron que faifons d'être catholiques, &fans apparence d'avoir jamais aucun bon & heureux fuccès. Etant délivrés des accidens & périls que les gens de bien prévoyent 6z craignent a caufe du mal que 1'héréfie produit , nous ne rejetterons aucun 'confeil qui puifle aider a amoindrir ou faire finir nos miferes :' caf nous reconnoilfcns alfez &c fentons trop les calamités que la guerre civiie produit, & n'avons befoin da perfonne pour nous montrer nos plaies : mais Dieu & les hommes favent qui en font les auteurs. Nous fuffit de dire que nous fommes iuftruits & enfeignés paria doctrine de 1'églife, que nos efprits & confciences ne peuvent être en tranquilité & repos, ni jquir d'aucun bien, tant que nous ferons en crainte & foupcon de perdre notre religion, dont le danger ne fe peut diffimuler ni éviter, fi on continue , comme on a commencé. Ceft pourquoi  t%6 ÉTATS nous jugeons, comme vous, que notre réconciliation eft très-néceflaire. Nous la defirons, la rtcherchons avec une charité, Sc bienveillance viaiment chrétienne, & vous prions Sc adjurons au nom de Dieu, de nous 1'odroyer. Ne vous arrètez point aux reproches & blames que les hérétiques nous mettent fus. Quant a 1'ambition qu'ils publient être caufe de nos armes, il eft en votre pouvoir de nous voir en dedans , 5c découvrir ft la religion nous fert de caufe ©u de prétexte. Quittez les hérétiques que vousfuivez Sc déteftez tout enfemble. Si nous levons lors les mains au ciel pour en rendre grace a Dieu , fi nous en fommes difpoiés d fuivre tous bons confeils, a vous aimer, honorer, rendre le refped Sc fervice d qui le devrons, louez-nous comme gens de bien qui ont eu le courage Sc la réfolution de méprifer tous périls, pour conferver leur religion •, Sc de 1'intégrité 6c modération, pour ne penfer d chofe qui fut co.ntre leur honneur & devoir. Si le contraire avient, accufez notre diflimulation, & nous condamnez comme méchans. Vous mettrez, en ce faifant, le ciel Sc la terre contre nous, & nous ferez tomber les armes des mains, comme vaincus, ou nous laifferez fi foibles, que la vidoire fur nous fera fans péril Sc fans honneur. Blamez cependant le mal qui eft en 1'héréfie, qui vous eft connu ; craignez plutót ce chancrequi nous dé vore  sous Henri IV. 287 $c gagne tous les jours pays, qae certe vaine & imaginaire ambirion, qui n'eft pas, ou qui fe trouvera feule & mal aftiftée, quand elle fera dépouillée de ce manteau de religion. C'eft aufli une calomnie fans raifon, de nous accufer que nous introduifons les étrangers dans le royaume. II faut fouffrir Ja perte de la religion, de l'honneur , de ia vie &des biens, ou oppofer Ia force aux hérétiques , auxquels rien ne peut plaire que notre ruine. Nous fommes contrains nous en fervir, puifquevos armes font contre nous. Ce font les faints peres & le faint fiége qui ont envoyé d notre fecours ; & encore que plufieurs ayent été appelles d cette fouveraine dignité depuis ces derniers mouvcmens, il n'y en a un feul qui ait changé d'affedtion envers nous : témoignage affuré que notre caufe eft jufte. C'eft le roi catholique , prince allié & confédéré de cette couronne, feul puiffmt aujourd'hui pour maintenir& défendre la relio-jon, qui nous a aufti afliftés de fes forces & moyens,' fans autre loyer ni récompenfe que la gloire que ce bon oeuvre lui a juftement acquis. Nos rois en pareille nécefficé contre Ja rébellion des mêmes hérétiques, avoient eu recours a eiiK : nous n'avons fait que fuivre leur exsrople, fans nous engager, non plus qu'eux , d aucun traité qui foit préjudiciablea 1'état ou d notre honneur, combien  aS8 ÉTATS que notre néceflité ait été beaucoup plus grande que ia leur. Repréfentez-vous plutöt que les anglois, qui aident a établir 1'hérélie , font les anciens ennemis du royaume , qui portent encore le titre de cette ufurpation , & ont les mains teintes du fang innocent d'un nombre infini de catholiques, qui ont conftamment enduré la mort «Sc la cruauté de leur reine, pour fervir a Dieu «Sc a 1'églife. Ceflez aufli de nous tenir pour criminels de lèze-majefté, pour ce que ne voulons obéir a un prince hérétique ; «Sc prenez garde qu'en baiffant les yeux contre la terre pour y veir les loix humaines , vous ne perdiez la fouvenance des loix qui viennent du ciel. Ce n'eft point ia nature, ni le droit des gens qui nous apprend a iecönnoitre nos rois, c'eft la loi de Dieu , celle de fon églife «Sc du royaume qui requierent nonfeulement la proximité du fang, a laquelle vous vous arrêtez, mais aufli la profeflion de la religion catholique, au prince qui nous doit commander. Et cette derniere qualité a donné nom d la loi que nous appelions fondamentale de 1'état, toujours fuivie «Sc gaidée par nos majeurs, fans aucune exccption : combien que 1'autre pour la proximité du fang, ait été quelque.'ois changée, demeurant toutefois le royaume en fon entier, <3e en fa première dignité. Pour  sous Henri IV. a'gpPour venir donc a cette fi fainte & iiécelfaire reconciliation, nous acceptons la conference que vous deniandez, pourvu qu'elle foit entre Catholiques feulement, & pour avifer aux moyens de conferver notre Religion & 1'Eftat. Et pour ce que vous defirez qu'elle foit faite entre Paris & S. Denys, nous vous prions avoir pour agréable le lieu de Mom* martre, S. Maur ou ChaiJioi, en la maifon de la Reine, & d'y envoyer, s'il vous nlart* vos Deputez dans la fin de ce mois , a tel jour qu'aviferez; dont nous avertilfans, ne faudrons d'y faire trouver les nötres, & d'y apporter une affection fmcere & exempte de toutes mauvaifes paffions, avec prieres a Dieu que Piifue en foit bonne, que nous y puiffions trouver tous enfemble la confervation de notre Religion, & un bon, affuré & durable repos. En ce defir nous ie prions auffi de vous conferver & donner fon efprit, pour connoïtre & embrafler Je plus utile & falutaire confeil, pour votre bien & le notre. Fait en Alfemblée, a Paris, le quatrieme Mars 13*93. Si gnes, Marteau, e>e PileSj Cordier Thielement. Tornt XV, %  -gpO É t A t s Replique d la fufditc Réponfe. 'Après 1'envoi & réception de ladite propofition a Paris, le defir que l'on a de cette part, d'en voir rcüffir le Fruit auquel elle tend, retirit encore quelques jours en cette ville de Chartres, Sa Majefté, & les Princes & Seigneurs qui avoient aflifté a la dchbération cficelle, pour attendre s'il y feroit fait réponfe. Mais ayant pafte huit jours fans en être venu aucune nouvelle, les affaires & les démonftrations dudit fieur de Mayenne, de vouloir entreprendre quelque chofe avec 1'armée étrangere, qu'il étoit allé trouver a cette fin, donnerent occafion a Sadite Majefté, & aufdits Princes 8c Seigneurs de fe pardr & féparer en divers endroits oü les occafions de la guerre les appelloient : de forte que lorfque ' ladite réponfe fut apportée 8c recue en cette ville de Chartres, qui fut. le huitiéme de ce mois de Mars, il ne s'y trouva que petit nombre defdits Princes «Sc Seigneurs, & ne fe font encore depuis pü rejoindre pour refoudre des perfonnes, moyens «Sc lieux de la conference. Toutefois, ayant, ceux d'en-  ^ sous Henri IV. 2511 tr eux'qui étoient demeurez ici, averti oü il a été befoin, de ia reception de ladite réponfe, 1'ordre a été donné de fe raffembler a Mante, oü fetrouvera dans peu de jours compagnie fuffifante pour entendre a vaquer a cette affaire. Et afin que le tems qui a couru avant d'en donner quelque nouvelle a ladite alfemblée de Paris, ne puifle être tiré en autre argument, que de la vraye caufe qui a apporté cette longueur, les Princes & Seigneurs qui font encore a prefent en cette ville de Chartres, l'ont, avec nouvelle permiffion de Sa Majefté, voulu faire entendre par eet écrit a ladite alfemblée de Paris; & que dans le quinziéme jour du mois prochain, ils leur feront plus particuliere déclaration de ce qui dépend d'eux, pour 1'acheminement & réfolution de lachte Conférence , tant en ce qui touche les füretez, qu'autres chofes qui y écherront. Pendant lequel tems, s'il plaifoit aufdits Sieurs qui font en ladite aflcmblce, d'avertir lefdits Princes & Seigneurs, des noms ou de la qualité & nombre de perfonnes qu'ils voudront a cette fin députer, cela aideroit a avancer d'autant plus la conclufion , laquelle Dieu par fa grace veüiile reciproquement adrelfer au feuI buc de Ia confervation de la Religion Catholi^ T 2  "États que & de I'Etat, comme c'a été Ie principat Kiodf, & fera toujours Hiritènaon des Princes & Seigneurs Catholiques qui reconnoiifent Sadite Majefté. Fait au confeii d'icelle, tenu a Chartres, oü lefdits Princes & Seigneurs fe font alfemblez avec fa permilfion, comme eft,le 20 de Mars 15*03. Signé REVOL. Et a la ftiperfcription eft écrit, a Monfieur, Monfieur le Duc de Mayenne, & autres Princes de fa -maifon, Prélats, Seigneurs, & autres perfonnages affemblez a Paris. Et cacheté du cachet des armes de M. le Cardinal de Bourbon. Réponfe d la fufdite Replique. Messieurs, par vos lettres du 2j) du mois paffe, vous demandez que notre Conférence foit remife jufqu'au 16 de ce mois. Nous euffions plütbt defiré de Pavancer, tant nous 1'eftimons ueceffaire pour le bien commun des Catholiques: mais puifqu'il ne fe peut faire autrement, nous attendrons votre Commodité, & le tems qu'avez pris : pourvü que ce foit- fans plus differer, comme nous vous en prions de toute notre affection. Nous  sous Henri IV. a$ y députerons douze perfonnes d'honneur & da qualité, qui ont de 1'integrité & du jugement aux affaires, & font très-deflreux de voir Is Reli gion Catholique, Apoftolique & Romaine: en füreté, & Ié Royaume en repos-. Vous avez choifi. le lieu pour la Conference entrecette Ville Sc faint Denis 5 & nous Pavons. accepté, comme nous faifons encore, foït en 1'un dè ceux qui font nommez par vos; precedentes lettres, ou tel autre- qu'aurez plust agréablë. Quand aux füretez & paffeports 9, ils feront donnez en blanc pour ies rempïi'r du nom de vos Députez, s'il vous plaït faire de merrie pour les nótres. Ne languiflbns plüs,. Meffieurs, en I'attente dè ce bien,mais jouifvfons-en tót, s'il nous döit arriver : óu fi lë contraire ayiërit, que le blame en d'emeure a ceux aufquels il devra être-imputé. Nous. prions Dieu cependant qull vous eonfèrve.^ & nous faffe ia grace que I'iffuë dé cette Conference foit telle, que tous lés gens de bien la defirent. Fait en notre alfemblée tenue a Paris le y*. jour d'Avril ïye-3. Et a la fuperfoription eft' écrit, A Mejfi urs , Meffieurs les Princes s Prélats s Officiers d& la Couronne s & aaiT %  ao^f K T A T S tres Sieurs Catholiques , fuivant le parti. du Roi de Navarre. Ainsi donc, la Conference étant acceptée j il y eüt quelques difficultez fur le lieu : & pour s'en accorder, fut pris expediënt le Mercredy vingt-unicme Avril, d'envoyer des Deputez de part & d'autre, pour reconnoitre les lieux autour de Paris, qu'ils trouvoient Ia plupart ruinez & inhabitables: & choifirent le Bourg de Surenne prés Madrid, joignant 1'Abbaye de Lonchamp, pour le plus commode & logeable. Et remarqué que pour le département des logis , ayant fait jetter le fort a un payfan, fur un quart d'écu, a croix ou pile, la croix écbüt au parti de 1'union , «Sc Je cartier du village oü étoit 1'Eglife: d'oü les plus curieux faifoient des préfages que la vicioire demeurcroit a la Croix «Sc a 1'Eglife. Le vendredy vingt-troiliéme, on proceda a la députation, & furent nommez ■ 'Jeguez tant de Ja part des Princes, q des Etaïs 3 MelTire Pierre d'EpinacA: che\ cque  sous Henri IV. *9T Comte de Lyon, Primat des Gaules, député aux Etats geheraux pour les Provinces de Lyonnois, Forêt & Beaujolois : Meffire Francois Pericard, Evêque d'Avranches, Depute du Duché de Normandie : Meffire Geoffroy deBilly, Abbé regulier de faint Vineent deLaon, Député de Vermandois : Meffire André deBrancas, Chevalier, Sieur de Vilars» Amiral de France, Lieute.iant general au Gouvernement de Normandie : Meffire Francois d'Averton, Chevalier, Comte de. Belin, Maréchal de Camp és armées Catholiques , Gouverneur & Lieutenant general en, 3a Ville , Prevóté & Vicomic de Paris : Meffire Pierre Janin, Baron de Mont-jeu,Confeiller au Confeil d'Etat, & Préfident en la Cour de Parlement de Dijon Jean-Louis, de Pontalier, Chevalier , Baron de Talrne & Jaffigny, Deputé pour la Nobleffe du Duché de Bourgogne ; Louis de Montigny, Seir " eneur dudit lieu, Gouverneur de Succijuo,. Il 1'Ifie de Ruys,, Député pour la Noblefle du*Duché de Bretagne : Nicolas de Pradel Sieur de Montolin, Député par le Comte de Champagne: Meffire Jean le Maitre, Prcüdent en la Cour de Parlement de Paris „ Député de ladite Ville Meffire EtienneBet- T 4  206* ÉTATS nard, Avocat au Parlement de Dijort, & Vicomte maïeur de ladite Ville, 8c Député de Bourgogne : Maxtre Honoré duLaurens, Confeilier 8c Avocat general du Roi en la Cour de Parlement de Provence, & Deputé pour ledit Pays & Comté. On avifa auffi d'y mettre Ie Seigneur de Villeroi, qui étoit lors abfent, de la part defdits Princes; & étoit, leur pouvoir, pour comparoir au nom defdits Princes, & Etats en ladite Conference, oüir les ouvertures 8c propofitions qui feroient faites. du parti contraire, y répondre comme ils jugeroient devoir être fait par leur prudence, 8c faire auffi, de leur part 8c en leur nom, toutes autres ouvertures qui pourroient fervir a la réunion des Catholiques, confervation de la Religion Catholique, Apoflolique & Romaine , bien 8c repos de eet Etat: pour, lefdites ouvertures 8c moyens refpectivement propofez, difcourus & examinez entr'eux, en être fait rapport par lefdits Dcpmez a 1'Alfemblée, afin d'y prendre la réfolution qui feroit trouvée la plus propre, utile & eonvenable. On drelTa, outre ce, aufdits Deputez des articles pour fervir de memoires 8c inftructions conformes a la fufdite délibération, &  sous Henri IV. 207 aux conditjons fous lefquelles on avoit accordé la Conference. Lettres des trois Etats ajfemble^ a Paris, d Monfieur le Duc de Mayenne &■ autres Chefs Catholiques; Messieurs , fi les malheurs de ce tems ne nous eulfent traverfez en nos bonnes & faintes déliberations , nous euffions mis fin il y a déja long-tems, a notre alfemblée des Etats, laquelle elf, comme vous fcavez, pour avifer aux moyens de défendre & conferver la Religion Catholique, Apoftolique et Romaine , Sc remettre, s'il eft poffible , ce Royaume tant affligé a fon ancienne dignité & fplendeur; mais pour ce que les nouveaux accidens qui font furvenus en nos affaires, nous ont contrahits de remettre nos principales refolutions pour quelque tems, attendans une plus opportune & commode occafion, nous avons eftimé être necefiaire de eontinuer ladite alfemblée des Etats, & ne permettre la rupture d'icelle durant ces trois mois, pendant lefquels nous ne ferons inutiles, Sc efperons de faire de bons re-  flo8 Ë T A T S glemens pour le foulagement du pauvre peuple : après avoir avifé les moyens de mettre a exécution le faint & facré Concile de Trente, lequel nous avons reeft & publié en notre Alfemblée, pour le fetd & unique remede que nous avions jugé plus convenable pour remettre en 1'Eglife 1'ancienne difcipline, & les bonnes Loix Eccléfiaftiques, & correclion des vices introduits par 1'heréfie & Iicence effrenée, que les guerres civiles apportées en ce Royaume defolé, & qui, comme nous efperons, prendront fin par Pobfervation des bonnes ck.faintes ordonnances contenues audit S. Concile. Nous vous prions donc , Meffieurs , de ne vous ennuyer de la longue demeure & fêjour que font par deca vos Députez avec nous, 8c croire que nous avons continué notre tenue des Etats pour beaucoup de grandes confidérations bonnes & juftes, Jefquelles nous vous ferons entendre plus particulierement par vos Deputez : comme auffi nous prions que fi aucuns d'iceux ont obtenu congé de nous pour aller quelques jours en leurs maifons pour leurs neceflitez & affaires particulieres, de tenir la main qu'ils revierinent promptement nous trouver au tems ?. eux préfixj & fuivant la promefte & f. . e .  sods Henri IV. epo qu'ils nous ont fait, comme verrez par 1'aÖG que nous vous envoyons du ferment folennel que nous avons tous fait & juré pour demeurer fermes & unis enfemble pour la défenfe & confervation de la Religion Catholique, Apoltolique & Romaine; & lequel ferment nous defirons que faffiez de votre part, & le faffiez garder & obferver par tous ceux de votre Province. Et moyennant ce, nous efperons que Dieu benira toutes hos bonnes 8c faintes intentions a fon honneur 8c gloire, confervation de notre Religion y extirpation des heréfies & foulagement du pauvre peuple tant afïïigé : comme nous le fupplions j Meffieurs, vous avoir en fa fainte 8c digne garde, vous prians donner ordre au payement des taxes de vofdits Députez, 8c qu'ils foient renvoyez au tems qu'ils ont promis, 8c plus grand nombre, fi faire f® peut. ,1  3oo è t a t $ Lettre du Roi d'Efpagne aux trois Etats de France affemble\ a Paris. Dom Philip ïe , par lagrace de Dieu, Roi d'Efpagne , des deux Siciles , de Jerufalem, &c. Tres-Reverends , illuftres , magnifiques, & nos bien aimez, je defire tant le bien de la Ghrétienté, & en particulier celui de votre Royaume, que voyant de quel pront & importance font a un chacun les moyens & expediens que l'on va traiiant pour établir Sc accommoder les affaires d'icelui, ( bien qu'il foit notoire a tout le monde ce qui par ci-devant s'eft fait Sc procuré pour ledit Royaume, Sc 1'afliftance qui y a été donnée Sc ordonnée encore prefentement de ma part, ) je ne me fuis pas contenté pour tout cela, que je n'envoye encore maintenant un perfonnage de la qualité qu'eft le Duc de Ferie, pour fe trouver par dela en mon nom: Sc y faire inftance de ma part, a ce que les Etats ne fe feparent point fans y prendre une bonne Sc profitable réfolution , en laquelle j'entends que ce foit de 1'élection d'un  sous Henri IV. 30* Roi autant Catholique que le tems le requien, par le moyen de laquelle le Royaume de France fe puilfe remettre en fon ancien état, & reftituer enicelui la Chrétienté, inftitution qui pouvoit fervir d'exemples aux autres. Et puifqu'après tant d'autres chofes par moi ci-devant faites, que l'on a vües & peut011 voir a prefent, je fais encore voir cette ici, il fera bien raifonnable que vous tachiez par dela faire votre pront de 1'occafion, & que l'on me paye 8c rende tout ce que j'ai merité envers ledit Royaume, en me donnant fatisfaclion ; laquelle encore qu'elle ne foit veritablement & purement que pour votre bien & avantage, li eft-ce que pour cela même, je la reputerai bien grande, & pour ce, vous ai-je voulu admonefter, tous mes amis alfemblez, a ce que vous qui faites profelTion de fuivre & embralfer le fervice de Dieu, montriez a cette heure tout ce que vous avez veritablement fait pour icelui jufqu'a prefent, qui fera chofe propre 8c digne d'une fi grande Alfemblée, comme particulierement vous dira le Duc de Ferie auquel je me remets. De Madrid, ce onziéme Janvier 1593. Et plus bas ( Yc/El Rey ) Dom Martin de Idiacque j 8c a la fuperfcription, Aux très-Reve-  302 États xends , Illttftriffimes, Magnifiques & nos bie* 'Aimez, 1'Affemblée des Etats generaux de France. Copie de Lettre de Monfieur le Duc de Guife aux trois Etats ajfemble^ d Paris. Messieurs, auparavant que de recevoir vos lettres du 17 du mois pafte, j'étois en la même intention qu'elles m'ont trouvé, de me rendre a Paris ft-töt que 1'occafion Sc le fujet qui me retiennent ici, m'en pourroient avec l'honneur ouvrir le moyen, n'ayant rien de plus cher au monde que de faire paroitre en une fi celebre Sc honorable Affemblée, comme je ne me veux point départir de la réfolution qui y fera prife, voulant avec mon fuffrage y porter ma vie, Sc tout ce que j'ai de pouvoir pour en rendre une certaine preuve. Mais étant encore retenu pour quelques jours, fur 1'efperance d'un combat qui fe prefente avec Monfieur de Nevers, je vous fupplie très-humblement, Meffieurs, me donner ce loifir, & me permettre d'attendre mes amis que j'ai  sous Henri IV. 303 appellez pour un li honorable fujet, vous affürant fur mon honneur & fur ma vie* qu'incontinent après, je fatisferai a ce que vous defirez de moi, n'ayant autre but ni deifein particulier que 1'obéïlTance que je vous dois , & a Monfieur mon oncle que j'honore comme Pere, & vous, Meffieurs, comme ceux qui pouvez au nom de celui que vous êtes affeniblez , apporter par vos prudences un alfuré repos en eet Etat, que je fouhaite de tout mon cceur, priant Dieu, Meffieurs, qu'il vous donne en toute profperité, très-heureufe & très-longue vie. A Auxerre,le feptième jour d'Avril ifpj. Et plus bas, votre très-humble & très-affeftionné ferviteur, Charles de Lorraine, Guife. Et a la fuperfcription : a Meffieurs, Meffieurs les Députez des Etats alTemblez a Paris. 'A Monfieur le Duc de Mayenne & autres Princes de fa maifon. Messieurs , nous fommes avec la penniffion que le Roi a dès ]e commencement accordee , tellement refolus a la conference qui a été reciproquement trouvée bonne entre  g04 Ê T A T S aucuns Députez de part & d'autre, qtiê fans le retnrdement que les occafions, neceflaires mentionnées en notre replique, y ont apporté, nous euffions abregé, autant qu'il nous eüt été poffible, les formalités qui la doivent préceder, & afin que 1'intention de cette part foit en cela d'autant mieux coimu'ë, encore que foyez demeurez retenus a nous nommer ceux que vous entendez employer en cette negociation, toutefois pour ne confommer le tems que Ie bien auquel l'on afpire, requiert d'accelerer, Sa Majefté ayant par nous été avertie du contenu en votre dernier écrit du y de ce mois, n'a fait diffi> culté de faire expedier fon palfe - port ert blanc, & le nous envoyer, afin de le vous faire tenir pour le remplir des noms de ceux que vous voudrez choifir pour vos Députez, jufqu'au nombre de ceux que vous avez mandé, fi tant y en voulez commettre. Et pour notre regard, nous n'avons voulu differer de le vous envoyer auffi-tót que 1'avons recü, comme nous attendons que le femblable nous foit envoyé de votre part, auffi en blanc, 8c pour pareil nombre de vos Députez. Et quant aux lieux que vous nous avez nommez de faint Maur, Montmartre ou Chaliot, d'autant que les Députez étant logez en même lieu,  sous Henri! V. 305Keil, pourróient plutót mettre fin audit affaire, nous avons eflimé que celui de faint Germam en Laye , feroit commode pour eet effet : ce qui nous a mu ie vous propofer, a ia (ufdite fm , pour plus prompte réfolution , & non pour apporter aucune Jongueur, en changeant notre première deiignation d'cntreParis & faint Denis. Donc pour vous mieux aliurer, nous vous nommons aufli AuberyÜliers, & vous remettons le choix des deux, au cas que faffiez quelque fcrupule fur le icmier : cependant nous prions Dieu qu'il vnilS ait en fa fainte garde. Fait a Mante, au Conieil du Roi par Ja déiiberation des Princes Prélats, Officiers de la Couronne, & autres oieurs Catholiques reCohnoifFans Sa Majefté qui s'y trouvent de piefent. A Mante, ce Ï3e jour d'Avril ïyp3. ' Signé, De Beaulieu. Et a Ia fuperfcription, a Meffieurs, Meffieurs le Duc de Mayenne, & autres Prince, de fa maifon Prélats, Seigneurs, & autres perlonnages alfemblez a Paris. Home XV.  il»? iè ï a f ï Réponfe d la fufdite Lettre. Messieurs, en même tems que nous fïmes réponfe a votre replique, nous envoyames demander a M. le Duc de Mayenne un paffieport, avec tant d'efpace en blanc que vous le puilfiez remplir de tel nombre de perfonnes qu'il vous plaira députer pour fe trouver a la conference de nous tous tant defirées II nous 1'envoya bien-tot aprcs, comme nous faifons prefentement a vous, efperans que vous vous en contenterez. Nous recümes hier celui que nous avez envoyé avec vos lettres du 13 de ce mois: s'il vous eüt plu faire chcix de 1'un des trois lieux que nous avons ci-devant propofez, nous penfous qu'il fe fut trouvé plus commode qu'aucun de ceux que nous avez nommez , defquels néanmoins, pour faire connoitre a un chacun que nous defirons 1'avancement de ce bon oeuvre, acceptons celui d'Aubervilliers, nous ayant fernbié, S. Germain en Laye, trop éloigné & incommode, tant pour la difficulté des bacs, qu'autres confidérations. Nous avons député trois des nötres, pour aller reconnoiue, 6k le moyen de nous y accomojodcr.  sous Henri IV- 307 Nous vous prions de nous envoyer un pafteport pour eux, & d'en députer d'autres de votre part a même effet, pour lefquels vous énvoyerons même fürëté. S'ils fe pouvoienè trouver Samedy a midy au vil lage de la Chapelle j nous lë defirerions pour aller de compagnie fur le lieu, marquer les quartirs pour les uns & les autres : que fï le terme vous femble court, que ce foit du moins Lundi prochain a même heure: & au cas que ce lieu ne fe trouvat fi commode, que vous 1'avez par avanture jugé, que vous donniez tout pouvoir k vos Députez, ainfi que nous ferons aux nötres , de s'accommoder enfemble des trois que nous avons premiererSient propofez, & que la réfolution qu'ils auront prile* foit agréée de part & d'autre, afin que l'on puifte donner quelque comniencement a eet affaire : & fi vous trouvez bon gue ce fut Jeudy prochain 22 du prefent .mois, fans plus de remife, nous le defirons, & vous en prions très-arfediieufement, & de nous en faire promptement antendre vos volontez; attendans lefqiielles, nous fupplions le Créateür vous avoir, Meffieurs, en fa fainte garde & protedioiwDe notre Affemblée tenue a •Paris, le quinziéme jour d'avril iyo?* Signé , Marteau , Depiles, Cordiêr,  30c? É T A * « Xf^rtf us fortifier contre la tyrannie de 1'heritier: vous remettant devant les yeux ce dire très-vulgaire & veritable, que fronte capiUt*, pofl efi occsfio calva. Au fürplus li vous connoiffiez , Meffieurs, que fous Is nom & autorité de fa Sainteté, je puiffe en ceci vous faire quelque bon office, vous pouvcz hardiment difpofer de moi felon que jugerez être plus a propos, comme de celui que trouverez a toute heure & en toutes occurrences, très-proaipt a vous départir tout mon labeur, & ce peu de confeil & induftrie qui cd en moi : ce que je fèrai toujours avec une telle devotion, que fi je povvois conghuiner & joindre avec mon propre fang, vos voiomez, & accorder vos conventions, je \*y empbyerois auffi volonuers que je vous en fais offie > pria.nt notre.  "S1^ États Seigneur qu'il lui piaife vous infpirer a prendre une réfolution qui foit a fa fainte gloire & au falut du Royaume. Lettres tnvoyèes par les Député^ d la Conference du parti contraire, a ceux de ce parti j fur les nouvelles de la derniere Propofition faite par les Efpagnols j offrans marier leur Infante d un Prince Frangois. Messieurs, avant feu par Monfieur de Taleme, que l'on defiroit de votre cóté que priffions en bonne part ce que differiez de faire réponfe a ce qui des le 11 de ce mois vous a été par nous propofé, & que dans Dimanche prochain nous fcaurions votre réfolution, nous avons efiimé , s'agiifant du bien commun 6c repos de eet Etat, de vous devoir faire la réponfe qu'avez déja fcue par ledit Sieur de Tal eme. Et toutefois , Meffieurs, nous fomjnes contraints de vous dire que les Princes Sc Seigneurs de la part defquels nous fommes ici venüs, fe trouvent en bien grande peine «ie ce qu'en chofe qui concern© fi avant 1$  sous Henri IV. 317Religion Catholique, & ie falut de ce Royaume , ils n'ont vü jufqu'a préfent qu'il lui ait été donné 1'avancement qu'ils jugent être fi neceffaire pour faire cefler nos miferes , & remettre notre Patrie en quelque meilleur état: qui eft la caufe que nous vous prions avec toute affection, de vouloir confiderer par vos prudences , que nous avoss a rendre compte aufdits Princes & Seigneurs , non feulement de vos actions , mais auffi d'une li longue demeure & tardement qui avient en cette négociation, pendant laquelle ce Royaume fe corifomme , nous ne dirons pas a petit feu , mais d'une violente flamme , avec un furieux embrazement qui ne tardera , s'il ne plaït a Dieu par fa fainte grace de nous infp'irer meilleur confeils, d'anéantir 6V réduire en cendre les uns & les autres : ce qui nous fait craindre que nóus ne foyons aux derniers jours de la maladie. Et nous voyons que de jour en jour, d'heure a autre, il fe met en avant nouvelles inventions pour avancer & precipiter notre ruine , fi 1'ambition infatiable de ceux de la part defquels elles font propofées, n'étoit connu'é a un chacun de vous, comme a nous-mêmes ; fi l'on ne fcavoit a notie grand dommage , la violente paffion que de tout tems ils ont montrée de fubjü.guer  Ë t A y s notre Patrie ,. & fouler aux pie Is la dignité de nos Francois. Nous nous étudions a vous 1'écrire ; mais vos prudcnces n'ont befoin de hotre inftruction; II nous fufllra de vous dire que depuis la venuë de ces Députez du Roi d'Efpagne , ils ont aifez fait connoïtre par leur dire 8c actions , le chemin qu'ils ont préparé pour empoifonner ce Royaume ; ils difent maintenant une chofe, maintenant 1'autre. Cés grands zelateurs de l'honneur de Dieu, ne demandoient au commencement, linon qu'il füt pourvü a ce qui concerne la füreté de la Religion Catholique ; ( vous nous 1'avez mandé & fait imprimer « ce zele de Religion les a fait entrer en goüt de demander le Royaume pour un Allemand : ils veulent contre la Loi Salique, Loi fondamentale du Royaume, mettrele fceptre entreles mains d'une fille» Voyans que leur finene n'avoit pas fiiccedé de ce cótéla , ils propoferent de bailler la fille d'Efpagne a celui que Ie Roi des Efpagnols choifiraj c'eft-a-dire, que vous mettrez I'éleclion de ce Royaume au jugemeat & difcrction du Roi qui en a toujours été le plus certain ennemi , & le propofant avec tant de finene , que les aveugles peuvent voir qu'ils n'ont autre but que de perpétuer nos miferes, n'épargnans pour eet effet, ni paroles , ni argent4  sous Henri- IV. 5 ij» ni pro me [fes , qu'ils fcavent bien ne pouvoir être Contrahits d'obferver, pour nous tenir toujours defunis , & nourrir 1'inimitié & zizanie qu'ils ont femée parmi nous. Ils fcavent que fur la déiiberation de nommer celui qui devra époufer Madame 1'Infante, ils feront aifément coiiler une couple d'années; & n'eiliment pas ( attendu la foiblelfe en laquelle ils croyent nous avoit réduiis) que le Corps de eet Etat puilfe fubfifterfi longuement. Meffieurs,nous fommes contraints d'ufer de ce langage devers vous , non pour eftimer que vous n'y voyez auffi clair & plus clair que nous; mais pour ce que nous defirons que vous êc un chacun fcache qu'elle elf en cela notre bonne opinion: furquoi nous ne pouyons avoir autre réfolution que de vous affermir 8c roidir de plus en plus a nous oppofer aux mauvais & pernicieux defteins des ennemis communs de eet Etat. Ce n'eft pas que nous ne cherchions par tous moyens poffibles aux hommes qui ont de Dieu l'honneur & Ja chanté de leur Patrie, de nous reconcilier 8c réiinir avec vous. Nous eftimons que Ie but oü doivent tendre les gens de bien eft de pouvoir vivre en repos avec dignité : ce mot de repos comprend 1'un 8c 1'autre » confiftant en ce qui concerne la confervation 4e notre Religion t de notre honneur , vie 6c  5*0 États / biens. Si cette guerre ne fe fait pour autre occafion, nous ne voyons pas chofe qui puifte empêcher que nous ne vivions les uns & les autres en paix , concorcle & toute amitié. C'efi le defir commun de tous les gens de bien, qui fervent fa majefté; ils ne pretendent aucun droit fur vos biens ; ils eftiment le mal qui vous avient, être le leur propre , & s'alfürent tant de vos bontez que vous n'eftimez pas que leur mal foit votre bien; ils defirent votre confervation, vous tenans pour membres trcs-honorables , Sc trcs-utiles au corps de cette Couronne pour le foutenement de laquelle ils combatent Sc combatront jufqu'au dernier foupir de leur vie. Quand ils fe perdront, vous perdrez vos freres & amis , qni méritent d'être tenus pour bons appuis de la Monarchie Francoife 5 ils fon t de vous & de votre malheur, même jugement. Quelle malédicüon vous peut maintenir confeiller d'aiguifer vos coüteaux contre ceux aufquels nous fommes obligez de defirer tout bien & prWperité ? Nous defirons fur toutes ch0fes q^ la Religion Catholique foit confervce, que 1'ordre ancien en la fucceffion de la Couronne, foit obfervé : de quoi pouvous-nous donc être accufez, fi ce n'eft que nous ne pouyons  sous Henri IV. 321 fjouvöns ni voulons confemir de fouffrir Ie jong des anciens ennemis de la France ? S'il y a chofe qui de part & d'autre foit demandée avec raifon , celui qui s'oppofera fere jugé déraifonnable; il en fera blamé tout le tems de fa vie , & fa mémoire fera honteufe & déteftable a la poftérité. Au contraire la mémoire de ceux qui s'employeront loyaument a délivrer leur Patrie du danget extréme ou le malheur 1'a précipitée, demeurera perpetuelle & très-honorable aux fiecles a venir; ,& eux vivans, feront aimez , refpeétez & lionorez de tous les gens de bien, comme vrais enfans de Dieu Sc vrais Francois. Nous eftimons a la vérité que notre maladie eft très-grande, trèsdangereufe & prefque mortelle : mais'nous 11'eftimerons point qu'elle foit incurable, s'il plaït aux gens d'hönneur Sc de valeur , tant d'un parti que d'autre , fe dépoüillans de toutes autres paffions que de la Religion Sc de 1'Etat , confidérer murement les caufes Sc les remédes qui fe peuvent apporter a notre mal. Comme un navire agité des vents Sc des vagues, s'il donne fur un banc , force eft qu'il s'ouvre, tellement que prenant eau , s'il, n'eft: promptement conduit a quelque port ou rade t il va a fonds , & fe perd avec les hommes Tome XV. V  ' Ê T A T S & tout ce qui eft dedans : mais étant arrivé a port j ii peut être fecouru , & ce qui eit dedans fauvé avec le Navire que l'on pourra refaire & remettre au bon etat qu'il étoit auparavant : ainfi nous defirons qu'il aviennë en ce Ro\aume qui a donné fur un banc, fur un éciieil de fédition , qui 1'a miferablement ouvert aux étrangers. II eft a un tres - évident danger de fe perdre & écouler a fonds, fi nous tardons de le conduiie au port de la paix : mais nous voulons efpérer avec la bonne aide de Dieu , que fi nous fommes fi heureux de nous bien refoudre a une bonne reconciliation, non ftu'ement nous nous garantirons de la viólence de nos ennemis , mais auffi que nous reprendrons nos premières forces & les mêmes degrez d'honneur & de préeminence que ce Royaume a tenu depuis'mil ans en ca fur les Royaurnes de la Chrctienté. C'efl le but oü nous tendons , que de conferver cette Monarchie Francoife ; c'eft le but oü tend 1'Efpagnol que de 1'abbatre, & vous follicite, pour eet efiet , avec une fi violente importunité, qne vous procediez, nous ne dirons plus a 1'élection d'un nouveau Roi.; mais que vous lui en donniez la nommination. Nous eftimons d'être bien fondez en nos opinions, que Té-  sous Henei ÏVi 3 ^3 leclión qui fe feroit en ce Royaume , d'un autre Roi que celui que Dieu & nature nous a donné , mettroit les affaires de ia Religion Catholique & du Royaume de France, au plus miferable état qu'on i'ait vu mil ans en -ca. Aulli n'eftitnóns-nous pas que vous vouluffiez ni puffiez, comme auffi il n'appartient aaucun , quel qu'il foit, violer la Loi fondamentale du Royaume, qui donne la Couronne au plus proche en dégré , en ligne mafculine , au Roi dernier decedé. Les chofes a venir font invifiblesj&n'yarien decertain que ce qui eft de Dieu , & pafte. Le plus certain jugement que nous pouvons faire de 1'avenir, eft de nous refoudre par ce qui eft de pafte. Ceux qui difent que c'eft chofe aifée d'öter la Couronne au Roi , ne fe remettent pas affez devant les yeux , qu'étant au fervice du feu Roi tout ce qui eft maintenant conjoint au parti dont eft fait Chef Monfieur le Duc de Mayenne , comme auffi étoient tous les Catholiques qui font demeurez fermes & conftans au fervice de Sa Majefté , le Pape , le Roi d'Efpagne faifant toute affiffance au dit feu Roi , qui fut auffi favorifé des deniers des Venitiens & du grand Duc de Tofcane, ce néanmoins , tous ces Potentats , toutes ces X 2  ÉTATS grandes forces ne parem abbattre le Roi, n'étant lors que Roi de Navarre. Maintenant 'que legitimement 8c felon 1'ordre du Royaume , il porie fur la tête la Couronne de France , s'étant fait MaitÈe d'un fi grand nombre de Villes & pays , lui ayant , tous les Princes de fon fang & autres Princes , toüs les Officiers de la Couronne, ( un excepté de Nobleffe , ) en un nombre fi infini, fait une li grande & expreiïe déclaration de la volontë qu'ils ont de le fervir & lui rendre toute lidelle obéiffance, le tenant auffi fortifié de tant d'amitiez &d'alliances des Potentats étran* gers , comme fe peut-U dire que cefoit chofe aifée de lui 6'ter cette Couronne ? II fe peut dire avec beaucoup d'apparence , qu'il eft aifé avec Pappui des Princes qui foutiennent le parti qui lui eft contraire, de continuer longucment , ou plutot perpetuer les miferes & calaminitez que ce Royame a fouffertes depuis cinq ans en ca. A quoi de notre part, nous defirons de tout notre cceur, qu'il" foit remedie; vous prions & conjurons au nom de Dieu par la charité qui eft duë a la Patrie de vous jóïndre & unir avec nous en ce faint defir , & nous fortifier de vos faintes volontez. 11 faut que de part & d'autre nous nous  sous Henri IV. 325* efforcions decouper la racine a ce mal de divifion , par tous moyens poffibles. Nous feavons affez que nos ennemis, ne prennent autre argument pour nourrir entre nous la divifiön * & ne couvrent leurs mauvaifes volontez que du manteau de Religion :. c'eft ce qu'ils ont ordinairement en la bouche & qu'ils ont le moins dans Le cceur. Enfin chacun a vü 8c fcait maintenant l'apoüume de leur exccrablè ambition ; il n'y a bon Francois qui ne foit offencé de la puanteur qui en forts Noüs accordons avec vous, qu'il faut que de part & d'autres nous foyons prudens : auffi n'eft-il pas queftion de le vouloir être plus. qu'il ne faut. II y en a qui difent que fi les Catholiques étoient joints enfemble , il feroit aifé d'óter la Couronne au Roi. Qui, nous garentira que les Catholiques qui entreprendront de la lui bter , viennent a bout de, leur entreprife ? II y a plus d'apparence que fi le Roi eüt été deftitué de. 1'affiftance de fes fujets Ca-, tholiques > &c füt venu a bout de fes ennemis ( comme toutes chofes qui fe décident par le jugement du coüteau, font douteufes 8c incertaines ) que la trop grande prudence dont on-/ eüt voulu ufer 4 n'eütfervï d'autre chofe que debater fans aucune néceifité , la ruine de la Re.-»  'Ï2.6 Ê T Jt t J ligion Catholique : car étant ainfi que Fon feroit venu a des confeils extrêmes , il feroit fort a craindre qu'auffi de 1'autre part, on ne füt venu a des confeils extrêmes. Quelle ne-? cefiité nous a dü ou doit forcer a prendre un confeil fi hazardeux , que d'expofer la Religion Catholique a un fi grand & évident danger , & avec la Religion , ce beau Royaume de France , notre douce Patrie, nos honneurs, nos vies & nosbiens? S'il eft procédé a 1'éleétion d'un autre , il fe peut dire qu'au lieu d'avoir trouvé le chemin du repos & de la paix, l'on aura bati en ce Royaume un temple a la Difcorde, drelfé un autel a la continuelle perpetuité de nos miferes , qu'il n'eft befoin que nous vous reprefentions; paree que vous en fouffrez votre bonne part , cömme aufli nous y participons a la bonne .-mefure. Non plus que nous ne pourrions fouffrir 1'ardeur de deux Soleils, s'ils étoient au Ciel ; aufli ce Royaume de France ne peut fouffrir la domination de deux Rois. Nouslifonsen notre HiAüire les fanglantes batailles qui om êtë données entre les Francois , & les ruines extrêmes avenues en ce Royaume , cs-temi des deux premières races de nos Rois, a caufe que le Royaume fe divifoit emre les eiü«ns  sous Henri IV. 327 des Rois. L'hiftoire dit qu'en cos bataiiles v il s'entretua un fi grand nombre de Nobleffe Francoife , que depuis ce tems le Royaume lfavoit pu être remis en fa première fplendeur. Les Rois & fuccefieurs de Hugue Capet ont trop mieux avifé a la fürcté & repos de cet Etat, lailfians la Monarchie & fouveraineté a leurs fils ainez ou au plus proche en degré de leurs fuccefleurs en ligne collaterale. Nous difons donc que ceux qui auroient confenti a l'éleclion d'un autre Roi , auroient élu Ia voie de voir en ce Royaume , tout le tems de nos' vies & celles de nos enfans , tout malheur, ruine & défolation: car pour faire joüir en paix de cette Couronne , celui qui auroit été ainfi élu , il faudroit que le Roi prefene regnant, lui cedat volomaircment la place,, ou qu'il füt forcé de le faire. Qu'il veuüille ceder de fon gré une telle dignité, il n'y a homme fi fol qui le croye : auffi peu doit-on croire que ce foit chofe aifée de 1'cn dépoüiller. On 1'a vü en campagne eombatre contre un plus grand nombre & principales forces des Piinces qui vous affillent , jointes aux. votres ; vous avez connu fa valeur , & m'affüre que fes ennemis , s'ils ne fe veulent faire tort} ne nieront point qu'il ne foit un X 4  r32$ Etats Prince très-génereux & très-valeureux , & Ie plus digne de bien défendre la Couronne de France, qu'homme qui foit fur la terre. Si-tót que l'on aura élu un autre Roi, la nécelfité contraindra les uns & les autres defe refoudre a des confeils extrêmes : il n'y aura plus nul moyen de faire autrement: Sc le Roi qui regne a prefent, auquel Dieu a donné la Couronne , Sc celui qui fe pretendroit avoir été élu , voudroient ufer de puiffance Royale, contre ceux qu'ils auroient déclarez rebelles. Pourquoi eft-ce que fans nécelfité Sc comme de gaieté de cceur, nous aurions fur nos têtes cette calamité avec 1'embrafement , ruine Sc défolation de notre Patrie ? Aucuns difent que c'eft le zele de Religion, la confervation de leur vie, biensöc honneurs qui leur faitprendre ce hazard. Si l'on peut obtenir par la paix ce qu'on defire, il n'eft pas queftiondefe mettre plus avant au labyrinthe de cette guerre, que l'on trouve plus longue Sc plus rude a fupporter que les uns & les autres n'eftimoient , lorfqu'elle commenca. Ayant donc épröuvé combien la rigueur de la guerre nous apporte de ruine, eftayons maintenant ce que pourra la raifon & la douceur; Sc ne meuons pas en ligne de compte quelques vaines efperance*  sous Henri IV. 32$ ;que l'on nous propofe , que vous trouverez enfin n'êtres autres que fonges d'hommes malades &inventions de ceux qui ont conjure notre ruïne. Enfin telle éleclion n'apporteroit a votre parti que'ce qui eft déja, & qui n'a fervi jufqu'a préfent qu'a vous ruïner & nous avec rous. Pardonnez-nous fi nous nous avancons jufques-la, que telles inventions ne ferdiroient qu'a vous divifer;&au lieu d'attirer vfe votre cóté les Princes & la Noblefle qui ert le Roi , vous les lierez & affectionnerez davantage a continuer le fervice de Sa Majefté: étant auffi a croire que plufieurs d'entre vous prendront opinion que tels confeils ne font pas pour finir la guerre , mais plutót pour la perpetuer pour le tems de nos vies. Pour notre regard, nous proteflons devant Dieu & les hommes que nous n'avons omis chofe qui foit a notre pouvoir, pour parvenir avec vous a une bonne reconciliation. Comme vous avez fait entendfe , vous defirez qu'il plüt au Roi de fe reconcilier a 1'Eglife : nous nous y fommes longuement employez , pour le zele que nous avons a la Religion Catholique, paree que nous eftimons que ce foit notre grand bien , comme auffi nous fcavons que ce feroit le votre, & pour ce aufli qui en  33° £ T A T S a été dit de votre part, & qu'avez montré d'en defiier, ainiï que nous fommes bien informez de ceux qui en ont parlé, & ne 1'or.t pas fait fans en avoir bonne charge. Quand nous vous avons dit en la conference que le Roi contenteroit tous fes bons fujets Catholiques au fait de la Religion , vous nous avez dit que vous en rejoüffiez , & le deliriez de tout le cceur; priez Dieu qu'il infpirat au cceur de fa Majefté cette bonne volonté de fe reconcilier avec le faint Siege; que de votre part, vous envoycrez par-devers fa Sainteté, pour avoir fon bon & paternel avis fur 1'Etat des affaires de ce Royaume; & feriez tous bons offices : nous prians de nous vouloir comporter en forte , qu'il n'avienne aucun fchifmé en 1'Eglife Catholique, & que nous employaffions a contenir toute chofe en douceur & au chemin qui nous eft ft neceftaire. Meffieurs, nous n'avons rien omis de tout ce qui eft en notre pouvoir, afin de vous donner tout le contentement que pouviez at;endre de perfonnes qui vous aiment, & defirent votre amitié. Le Roi s'eft déclaré qu'il accordera volontiers une trêve , afin de donner relache a fon pauvre peuple , de tant de miferes que la guerre lui fait fouffrir. II y a cinq femaines  sous Herri IV. 33X que cela vous a été propofé de notre part, Sc réiteré en la derniere Conférence que nous avons faite. Nous avons avec beaucoup de patience Sc d'incommoditez, attendu votre réponfe. Ce n'eft'pas la néceffité des affaires du Roi qui nous a fait parler. Sa Majefté avoit loin fon armée prète, qui a durant ces longueurs, exécuté la prife de la ville de Dreux, qui a fouifert ce que les ennemis de ce Royaume defirent, au très-grandregret de fa Majefté & de fes ferviteurs, dont il vous peut affez apparoir, paree que fur la nouvelle' qu'on eut de 1'entreprife de la ville de Dreux, nous ftfmes entendre que vous vous deviez hater de nous faire réponfe. Nous en avons écrit a fa Majefté, qui nous a fait fa benigne réponfe, qu'encore qu'il tint pour afluré la prife de la ville de Dreux, fi eft-ce qu'il vouloit donner au bien public le dommage qu'il pouvoit fouffrir, pour ne favoir remife en fon obéiffance. Meffieurs, nous ne pouvons regarder a yeux fecs, les calamitez de ce Royaume , la défolation des bonnes Villes , & fur tout celle de Paris qui a tant fouifert, II ne s'agit ici des feux qui fe mettent en la Tartarie ou en la Mofcovie; c'eft notre Patrie qui brule., qui fe perd, que l'on reduit en poudre  332 Ê T A T 1 & en cendrè. Nous en pleurons & en gemiffbns en nos cceurs; nos intéréts font pleurer nos amis & rire nos ennemis, qui eft 1'extrémité des malheurs qui peuvent arriver aux hommes. Nous atlendons votre réponfe que nous avons interêt de fcavoir. En bref, & comme nous penfons le bien fcavoir, la bonne ville de Paris y eft plus intereflee que nulle autre; elle n'a déja que trop fouffert oir nous ne fcavons que c'eft de fouffrir. Nous n'ignorons pas que les Efpagnols vous veulent païtre de 1'efperance de leurs armes, qui ont été battues, quand elles ont voulu combatre ; & depuis ont fui le combat comme la pefte, effimans qu'ils font affez de nous ruïner, faire confommer nos forces, & mourir par nos propres armes, la Nobleffe Francoife , tant d'une part que d'autre. Quelque armée qu'ils puiffent faire venir pres de Paris, ( qui n'en approchera point qu'a leur grande honte 8c confufion ) elle ne fervira de rien que d'achever de confommer les vivres qui font encore en cette bonne Ville ; 8c pour en approcher 1'armée du Roi, il fe trouvera lors que la grace de Dieu aura réuni Sa Majefté a la Religion Catholique : ce qui redouble le courage a tous les bons fujéts Catholiques , qui pour  sous Henri IV. 33$ fien du monde ne le pöurroient maintenant abandonner: & nul d'eux ne le peut plus faire , fi ce n'eft en abandonnant fon hönneur, les ayant, Sadite Majefté,gratifiez d'un gage qui leur eft fi cher & fi précieux , que -de s'ètre déclaré de fi bonne volonté a fe joindre a eux en la Religion Catholique , & témoigner par tous bons effets a notre faint Pere l'honneur , & le refped qu'il lui veut porter , & a tous fes fucceffeurs au faint Siege Apoffolique. Nous vous difons derechef que la fainte réfolution de Sa Majefté a redoublé le cceur aux bons Catholiques , dont les principaux ont dit que bien qu'il leur ait été grief d'avoir cidevant confommé tout leur revenu a la fuite de ces guerres , maintenant ils vendront fort volontiers leurs plus beaux heritages pour témoigner a leur bon Roi, s'étant fait Catholique, 1'affection qu'ils ont de s'oppofer a tous ceux qui entreprendont contre fon autorité. Ils confiderent, & nous avec eux, que cette guerre ruine la Religion Catholique: apporte toute confulion & déréglement en tous les Ordres de ce Royaume; remplit notre Nation de tout vice, corruption de mceurs , mépris de toutes loix divines & humaines; que la Juftice eft foulce aux pieds, & foumife a la  334 Ê T- A T s Violence des plus forts & des plus méchansA Ils confiderent que nous voyons déja plus d'un million de families réduites a pauvreté; & la plupart a mendicité ; qu'il n'y a prefque ün feul Eccléfiaftique qui jouifle en repos de fon benefice, en étant déchaffe; que le fervice divin eft abandonné , fe trouvant une bonne partie des fujets de ce Royaume, qui font fans Pafteurs Eccléfiaftiques , & adminiftration des faints Sacremens ; que les Princes mêmes & principaux Seigneurs ne peuvent jouir de leur revenu. Confiderans par la ce a quoi eft reduite prefque toute la Noblefle, fe repréfentent devant les yeux en quelle décadence , ruine Sc defefpoir font toutes les villes de ce Royaume, & principalement celles qui fuivent votre parti : mais fur tout ils ont une extréme compaftion du pauvre peuple des champs , du tout innocent de ce qu'il fe ruine «en ces guerres. Les raifons déduites ci-delms, Sc plufieurs autres que nous omettons, nous font du tout refoudre que nous ne pouvons, ni devons avoir de part ni d'autre aucune efperance de faiut en cette guerre, la continuation de laquelle pourroit faire perdre la Religion de ce Royaume, Sc les gens d'honnenr & de valeur qui affeclionnent la  sous Henri IV. 3 3 ƒ confervation d'icelui. Nous avons déja fouffert une infïnité de calamitez, au deiïr , au fouhait & a la.devotion de nos ennemis. L'Efpagnol a jetté les yeux fur nous, & fait fon compte que la partie de eet Etat ne peut avenir au profit de ceux qui s'entrebattent maintenant: c'eft pourquoi il favorife fi puiffammem cette divilion, que nous prions Dieu vouloir bientót finir par une bonne reconciliation, a fa gloire premierement, & pour la confervation du nom & de la couronne Francoife, repos & contentement de tous les gens de bien, tant d'une part que d'autre. II a plu a Dieu nous vifiter par Ia rigueur de beaucoup de miferes Sc calamitez que nous avons fouffertes; nous les prendrons pour admoneftement d'un bon pere, fi nous voulons être appdlez fes enfans, en ce que jufqu'a préfent d n'a pas permis notre entiere ruine , comme il femble que toutes chofes y étoient & font encore tournées. De fa grande mifericorde , il nous donne tems pour nous reconnoitre Sc fuivre meilleurs confeils , ayant été affez avertis par 1'experience des maux que de part Sc d'autre nous avons foufferts, que le chemin qui a été fuivi jufqu'a prefent, eft Ie chemin dc la mort de ce Royaume. Nous vous prions  3 68 Etats de nous pardonner fi peut-être nous avöns parlé de ces affaires avec plus de vehemence que quelques-uns ne voudroient. Nous adreffons cette lettre a perfonnages de grand honneur , que nous eftimons aimer & affectionner la profperité de eet Etat; & penfons que fi les gens d'honneur qui font parmi vous, fe voudront déclarer auffi ouvertement de ce qu'ils ont fur le cceur, comme font fans aucune prudence ceux qui font contraires a la paix, que le nombre de ces protecteurs de la fédition & guerre civile fe trouvera fi petit & de fi peu de confideration, que nous ne tarderons longuement a voir une bonne & heureufe fin a nos malheurs, & ce Royaume remis en fon ancienne fplendeur & dignité : & fur ce, Meffieurs, nous prions Dieu après nous être humblement recommandez a vos bonnes graces, vous donner trés bonne 8c trés longue vie: le 23 Juin IJP3' Lettre  sous Henri IV. 3 6*0, Lettre des Lieutenans & gens du Confeil de la ville de Reims aufdits Etats. Gneurs , le briüt étant ici tout commun que la paix fe traite par dela avec ceux du parti contraire, & que le Roi de Navarre, comme l'on nous a mandé , eft non feulement en volonté, mais auffi en réfolution de fe faire Catholique, étant duement informé que notre Religion eft la plus certaine & la plus ancienne, nous avons penfé être de notre devoir vous faire la préfente pour vous fupplier, au nom de Dieu, de conilderer que cette négociation eft de telle importance , que de la dépend, comme nous crayons, tout le bonheur ou malheur de ce pauvre & dcfolé Royaume, tant pour nous , que pour toute la poftérité. II n'eft homme de bien qui ne recherchev plutót la paix que la guerre, ni bon Chrétien qui ne defire la converfion de ceux qui errent, foit en foi, foit en mceurs. Mais auiïi nous fcavons que la Religion doit être fi chere au bon Chrétien & vrai Catholique, qu'il ne la doit engager fi peu que ce foit, ni expofer a aucun peril, tant ^m'il y a moyen de 1'aiTurer j d'autant qu'une Jome XV, Aa  57° États fois perdue, elle ne fe peut plus recouvrer: Dieu juliement puniffant 1'ingratitude ou plutot 1'impiété de ceux qui en font fi peu dè cas , que de la poftpofer a quelques commoditez temporeiles. Nous voyons qu'il n'a pas été poffible jufqu'a préfent , de réunif les Eglifes Hérétiques cc Schiffnatiques de l'Orient, &que pour leurs herefies & fchifmes, •elles font toutes tombées fous la tyrannie du Turc. Chacun fcait 1'extrême diligence que plufieurs de vertu & de fcavoir prennent pour rétablir la Religion Catholique en Angletetre: Sc néanmoins tant s'en faut qu'il en forte quelque bon elf et, qu'au contraire Ia perfécution y eft aujourd'hui plus grande qu'elle ne fut oncques. La Reine qui eft du tout confederée avec le Roi de Navarre, & fon principal fupport , en fon dernier Parlement, a mis en avant des Loix contre les Catholiques, li rigoureufes & barbares qu'il n'en fut jamais vu. de femblables que l'on fcache , jufqu'a priver la femme de deux tiers de fon doüaire, & le mari de tous fes biens , tant meubles qu'immeubles, & óter leurs enfans a 1'age de fepc ans aux parens, pour les faire inltruire en 1'herefie. Dieu qui n'a acceptation de perfonne, nous chatira de même, fi nous nous laifibns priver ft Jschement de notre fainte  SOUS H E R R ï IV. 371 Religion,, fous prétexte d'une paix temporelle que l'on nous propofera. On rcpliquera qu'il n'y a aucun danger de perdre la Religion, fi le Prince qui prefente la paix, fe fait Catholique. C'eft ici qu'eft le nccnd de la befogne. Un fi grand & fi foudain changement, eft plus a fouhaiter qu'a efpérer. Par les hiftoires Grecques & Latines , nótres & étrangeres , nous fommes affez inftruits que les Princes hérétiques fe font toujours peu fouciés des promeftes qu'ils avoient faites aux Catholiques. L'Em péreur Conftance devenu Arrien, a tout bout de champ trompoit les Catholiques. SaintHilaire, tout l'honneur de nos Gaules, lui reprochoit qu'il faifoit profeffion de foi fans foi, qu'il honoroit les Prêtres pour les exter*miner, qu'il parloit de la paix quand il vouloit la guerre, qu'il faifoit des fermens quand il vouloit tromper. L'Empereur Anaftafe a fon couronnement, promit folennellement au Patriarche Euthimius , & figna de fa main la promelfe qu'il lui faifoit, qu'il n'innoveroit rien en la Religion , & recevroit le Concile de Calcédoine. Se voyant établi, il redemanda fon feing; & le Patriarche le lui refufant comme de raifon, il lui fit plufieurs outrages, & finalement le priva de fon Églife , & 1'envoya en exil. Genferic, Roi des Wandales4 Aa 2  37* Etats pour un tems, contrefit le Catholique, & promit au jeune Valentinien d'être fidele a J'Empire , & perfecuta horriblement les Catholiques. Nos Hifioires nous recitent que les Comtes de Thouloufe, infedez de fherefie des Albigeois, firent plufieurs accords , plufieurs tréves, & plufieurs paix avec les Catholiques ; & plufieurs fois fe fóumirent au faint Siege Apoftolique j Sc nonobftant ne lailferent de retournertoujoursaleurs anciennes erreurs, & perfecutoient les Catholiques comme auparavant. II y a fix ou fept vingt ans ou environ, que George, Prince fort belliqueux, Sc des premiers du Royaume, fut élüRoi de Bohème; & pour ce que la plupart des Catholiques ne vouloient confentir a telle éledion, il prcmit folennellement fe faire Catholique; il fit la même promeife a 1'Empereur , quand il lui contirma fon éledion; Sc pour ce 1'Evêque d'Alonne a qui le droit apparrient de facrer les Rois de Bohème, quand le Siege de Prague eft vacant, comme il étoit alors, ne le vouiut facrer pour l'avoir toujours connu hérétique, il envoya jufqu'en Hongrie querir deux Évêques qui le facrerent: Sc en fon Sacre il fit le ferment accoütumé de maintenir la Religion Catholique Sc d'exterminer les hérétiques; il fe foumit même au faint Siéga  sous Henri IV. 3" 7 3? Apoftolique , & promit au Pape toute obéiffance filiale , comme font tous les Princes Catholiques au commencement de leurrcgne; & néanmoins en la fin , il fe moqna de tout le monde , protefta en pleine Afiemblée que la Religion de laquelle il avoit fait profeftion jufques-la , étoit celle qu'il croyoit être feule Catholique, & laquelle il avoit promis de garder inviolablement, & qu'il ne déteftoit rienplus que 1'herefie. Tout de même en a fait la Reine d'Angleterre de notre tems; pour ce qu'elle fuccedoit a la Reine Marie Catholique Princeffe , Sc qu'elle ne lè pouvoit établir aucunement , au commencement elle fit mine d'être Catholique & fe fit facrer par un tel quel Evêque , (car celui a qui le droit en appartenoit , la connoiftant hérétique , n'y voulut pas toucher ) Sc fit le même ferment que les Rois Catholiques faifoient auparavant. Et néanmoins quand elle fe vit établie, auffi-tót après elle abolit la Meffe pour- y introduire fon Prêche; & toujours du depuis n'a ceftee & ne cefFe jufqu'a préfent de perfecuter les pauvres Catholiques, en toutes les fortes 8c manieres- qu'elle fe peut ïmaginer. Toutes ces exemples Sc autres femblables nous donnent une jufte crainte de Aai  374 États perdre notre fainte Religion, fi fous prétexte de quelque incommodiré temporelle, & d'une paix qui ne peut venir que de Dieu, nous nous fions a la promefie d'un homme mortel, d'un Prince non moins infedé d'hcrefie, ni moins affedionné a fa fede que tous les précedens; & devons avoir toujours devant les yeux le bon avertiftement que nous donne 1'ancien Livre Tertulien, difant : il ny a point d\iffüran»e en la promejfe du diable, ni de l'hérétique : ou bien cettui du bon faint Bernard, vrai Francois de nation Si de Religion: Pceil efi plus certain pour nous affurer des perfonnes que le jurement. Nous n'avons jamais connu le Prince dont eft queftion , autre qu'heretique; nous 1'avons toüjours vu Chef des hérétiques ; nous fipavcns qu'il a protefté au Synode de Montauban, que pour plufieurs Rojmimes femblables a celui de France, il ne voudroit changer de Religion j jufqu'a prefent nous n'avojis rien vü, Sc ne voyons en lui rien de Catholique ; même nous fommes bien avertis que contre la promefle qu'il fit au commencement a Meffieurs les Princes, Prélats Sc Seigneurs qui fuivent fon parti, il a mis a Efpernay, & en plufieurs autres Places Catholiques, des Gouverneurs hérétiques.  sous Henri IV.- 3Jf Comme donc nous y pourrons-nous fier? Quelle pleige, quelle camion, quelle affürance nous en pcut-on donner? Penfez, Noffeigneurs, penfez qu'en un cas de telle confequence, l'on ne peut faillir deux fois, que la faute eft inellimable & irreparable. Vous avez été choifis de toutes les Provinces de ce Trcs-Chrétien Royaume, pour nous pourvoir d'un bon Roi trés-Chrétien , très-Catholique, & nullement fufpecf d'herefie : & par mie conflance vraiment Chrétienne, & uk vrai zele a la Religion & a 1'Etat, vous nousle donnez tel, vous ferez caufe que Dieu en fera loüé éternellement, & vous obligerez. & nous & toute la poftérité a jamais, pour en rccevoir en ce monde Sc en 1'autre, une gloire immortelle. Mais auffi fi pour quelque refpccl humain, (que Dieu ne veüille) ou par 1'irnportunité de qgielqnes-uns , qui ne peuvent, ou ne vculent conliderer de quel poids eft la Religion, Sc fi fous couleur dequelque repos & commodité temporelle, v ous. nous laiftez tomber entre les mains des hérétiques, & vous mettez en danger de.perdrela Religion , vous attirerez fur vous & fur nous la malédïction de Dieu, que jamais vous& nous ne pompons expier , quelque bie» que nous puiffions faire au monde: partauK Aa ±  37^ E ï a t s nous vous prions, NoiTeigneurs, de bien pen* fer & de confiderer que 1'ennemi tend a vous diüiper, fans faire aucune conclufion fur Ie fan pour lequel vous êtes aflemblez; & rompre notre armee, en attendant Ie préparatif defdites forces, & le tems propre pour ruiner de fond en comble notre Religion. Dieu qui tout gouverne & difpofe des Royaumes de ia terre , comme il lui plait3 Dieu vous donne fon S. Efprit - & ftflè la grace de vous acqmtter de vos charges a fa gloire, & au falut du pauvre peuple. AReims, ce vingt-fixiéme mai iS93. par vos très-humbles & obcïiTans ferviteurs les Lieutenans & gens du Confeil de la ville de Reims, Signé Godinet, Griffier du Confeil. Lettre miffive de la ville d Meffieurs les Deputei des Etats d Paris. A Monfieur le Prevoft de Paris ou fon Lieu, tenant civil. IVf o n s r e u r Ie Prevót , je vous ai Z Levant ecrit plufieurs fois pour I'Afiemblée des Etats, qUe j'ai defirée & pourfuivie inf-  sousHehriIV. 377 tamment il y a long-tems,. & néanmoins n'ai pu la faire tenir, a mon trés-grand dcplaifir, pour divers empêchemens furvenus depuis, qui font affez connus d'un chacun. Maintenant que les jugez plus néceftaires que jamais, & que la retardation en feroit trop dommageabïe, je les ai fait affigner en cette ville au vingtiéme du mois prochain auquèl jour fans faillir, pour & fans plus ufer de remife, 1'ouvertuie s'en fera pour les continuer après fans intermiffion , jufqu'a ce que Dieu nous ait fait la grace d'y prendre quelque bonne & fainte réfolution pour la confervation de notre Religion , & le bien affuré repos de eet Etat, qui eft ce que nous devons efperer de 1'integrité & prudence d'un fi grand nombre de gens de bien qui feront aflemblés pour y pourvoir : a quoi j'apporterai auffi très-volontiers de ma part, ce que1 je pourrai pour y fervir. Vous le ferez donc publier, felon qu'il eft accoiitumé, par les lieux 8c endroits de votre refibrt, afin qutj les Députez fe trouvent audit jour pour coramencer heureufement ce bon oeuvre. En cette volonté, je prierai Dieu, Monfieur le Prevót, qu'il vous maintienne en tout heure 8c profirf périté. Ecrit a Paris, le 26e jour de Novemd bre 15$^  37% États Et phis bas votre trcs-affeöionrjé & meilleur ami, Charles de Lorraine, figné. Lu & publié a fon de trompe & cry public, hors les portos S. Antoine, S. Marcel, S. Jacques, de BuiTy, S. Honoré, S. Dems, & pareiilement ès carrefours & autres lieux accoutumez a faire cris & publication en cette ville de Paris; par moi Marin Malloire, Sergent au Chatelet, PrévÓté & Vi-» comté de Paris, afïiflé de deux trompettes, le Vendredy 2.f jour du mois de Novembre *S93- Signé, Mailoire. Réponfe defdits Etats aux Lieutenant & Confeil de Reims. IWessieurs, II y a déja quelque tems, que fur les Communications de M. le Duc de Mayenne, envoyces par nos Princes, nous avons été députez pour nous trouver a 1'Affemblce generale des Etats de ce F*oyaume, induite par plufieurs & diverfes lettres & en divers lieux, & enfin par la grace & bonté divine, après plufieurs traverfes & empcchemens, réfoluë & ja, commencée en cette ville de Paris, en laquelle nous fommes  sous Henri IV. 370 venus le plutöt qu'il nous a été poffible, fuivant que notre zele envers Dieu, notre Religion ancienne, & ie devoir commun envers 1'Etat & notre patrie, nous y oblige tous. Nous fcavons femblables Communications vous avoir été envoyées, & a même fin, fuivant lefquelles nous aprenons auffi que vous avez procuré l'éle&ion & nomination des Députez de vos Villes & Provinces, lefquels n'étant encore ici comparus, bien que la plupart des autres y foient déja arrivez, fi efl-ce que devant traiter en cette fi celebre" Compagnie, du plus grand & important affaire qui fe puiffe jamais prefenter pour le bien de notre Religion & de 1'Etat, nous defirons pour la réfolution des points les plus principaux, la venu'ë de vos Députez; & d'autant que le retardement peut apporter beaucoup de préjudice a cette caufe, nous vous prions 8c conjurons au nom de Dieu, auquel nous fommes ici affemblez, de faire & procurer que vos Députez, lefquels nous ne doutons aucunement avoir déja été élus, s'acheminent 8c rendent en cette ville de Paris fans plus de délai ou remife, en la meilleure diligence qu'ils pourront, pour faire preuve avec nous, en un aéle fi folennel, de vos pieté, fidéiité 8c droites intentions pour le  So États Jen de tout le Royaume; & paree que mondit Seigneur nous a aflïkez d'avoir pourvü * donné ordre pour la füre conduite de vofdns Députez fous bonne efcorte, nous efperons qu'ds ne voudront manquer a leur «evoir, & nous ferons fort rejoüis du bonbeur de leurs prefences, attendans lesquels «ons fupplions le Créateur Jes avoir & vous auffi, Meffieurs, en fa fainte garde & proteehom De notre Aflemblée tenuë a Paris, ie frxième jour de Fevrier iyp5. Et plus bas : vos bons amis les Trois Etats de France' Lettre defdits Etats d Monfieur le Duc de Mayenne. Monsieur, Nous avons toujours eu craintc que vous éloignam de nous, Pennemi fit quelque entreprife de confequence fur nous, lur nos voifins, comme il eft avenu , ainfi que nous venons d'être avertis, a la ville d Odeans, de laquelle. il s'eft fi fort approche, que l'on nous a dit qu'il s'eft faifi du portereau, & fait ce qu'il peut Pour s'y fortnier: ce qui lui fera fort aifé dans peu de tems, s'il n'y efi promptement remédié, ainfi  sous Henri IV.v 38'* que nous ont rap porté ceux qui connoiiTent le pays. S'il avenoit faute de cette Ville la, nous ferions ici peu affurez, n'y ayant aucune place entre cy & la qui tienne notre parti. On fcait qu'il y a des faétions en la Ville, & que Monfieur de Guife étant paffe par la pour aller fecourir les affiegez du Bourg de Cerly en Berry, oü Monfieur de la Chatre, Gouverneur du Pays, Pa conduit «Sc accompagné., la plupart des gens de guerre qui étoient dedans, Pont fuiyi: de quoi les habitans fe trouvent étonnez. Après la pefte toute fraïche de Meung, travaillez de toutes fortes d'inconimoditez cSc de neceffitez, il y a déja long-tems, & fe voyans maintenant fi étroitement preffez des ennemis, s'ils ne font confolez de quelque efperance, de prompt fecours, il y a danger que pour ne fe laiffer réduire a 1'extrémité oü ils ont vü leurs voifins, qu'ils ne prennent quelque réfolution au defavantage de cette caufe, quelque refiflence que puiffent faire les gens de bien qui ne font pas les plus forts par tout. Vous connoiffez mieux que nous, le danger & le moyen de fecourir ces bons Citoyens la, dont la confervation par votre moyen, a, dès le commencement, maintenu ce partij & dont la perte & la ruïne, que Dieu jj*  38a . Etats veüille permettre, tireroit après foi le demeurant. On commence déja d'apprehender ici ce malheur, comme fi l'on le voyoit préfent. II vous plaira y donner 1'ordre que vous connoïtrez neceffaire, avec 1'avis du Confeil des gens de guerre que vous fcaurez bien choifir, ne voulans entreprendre de vous en dire autre chofe que vous repréfenter 1'extrémité oü fe trouve reduite cette Ville-la, remettant a votre bon jugement, prudence & avis les moyens de la délivrer, ainfi que nous 1'avons aflurée par une dépêche que nous lui avons faite en même tems que celleci. Vous vous y employerez felon le befoin & la nécelfité, dont nous vous prions bien affe&ueufement; étleGréateur qu'il vous veüille trien heurer & profperer, Monfieur, vos bonnes & faintes entreprifes. De notre Alfemblée, tenue a Paris, le 26 Fevrier iy tholiques. Celui de Latran, fait fous Inno-i cent III, Pape plein de pieté, & fans aucun reproche, avec grand nombre de Prélats, ordonnoit que tous les Princes jureroient d'exterminer les hérétiques dcnoncez par 1'Eglife, & purger leurs Royaumes, Terres Sc Jufifdidiöns , de cette ordure d'herefie : autremëhl! qu'ils étoient excommuniez, & leurs vaffaux Sc fujets dcclarez abfous du ferment de fidéiité, Sc de leur fujettion Sc obéïflance. Que cc Concile avoit été recu par toute la  SOUS H E N E ï IV. 4-?^ Chrétienté, & particüliéVérnent en France , ce qui fe voyoit par le ferment fait par nos Rois en leur Sacre, qui étoit mé mot a mot du texfe dudit Concile. Au Concile de Telede étoit écrit qu'un Roi ou Prince ne pouvoit être recu qu'il n'eüt jugé de ne foufirir. aucun. en fon Royaume, qu'il ne füt CaUioli'qüe : s'il venoit a être infraéteur de ce ferment, qu'il füt en execraticn Sc anathê:r,e«Si on dit que ce Concile eft fait pour 1'Efpagne, ce feroit chofe honteufe, que les Francois leur cedaffent au zele de la Foi & Religion. Que fi le droit divin y étoit fi expres T. Pufage & la pratique des Peres Sc anciens Chrétiens y étoit conforme, comme on pouvoit montrer par plufieurs exemp'les : queMathathias & fes enfans les Machabées étoier.t louëz par 1'antiqnité, Sc rscommandables a la poftérité , comme ferviteurs de Dieu, pour n'avoir voulu fouffrirv Sc s'être oppofez a. Ia. tyrannie d'Antiochus leur Prince Souvcnun,pour la défenfe de iear foi & Religion. Licinius & Maxencc cpü étoient les deux. premiers Princes Apoftats de- 1'Empire, avoientdonné occafion aux Catholiques de s'éiever contr'etix; Sc recourir a Conftantin qui les avoit vaincus & défaits tous deux fur cette E e 4.  41° Etats querelle. Conftance Arien, fils de Conftantin, ayant chafle faint Athanafe de fon Siege, les Catholiques avoient imploré le fecours de Conftans fon frere qui 1'auroit contraint a faire cefler ces perfecutions & violences. Qu'il y avoit une infinité de femblables exemples qu'il omettoit; prioit feulement de regardef avec quelle liberté les anciens évêques, ces colomnes de 1'Eglife, Saint Athanafe, Saint Hilaire, Saint Chryfoftome, Saint Gregoire Nazianzene , & Saint Cyrille parloient aux Empereurs & Monarques de leurs tems, lorfqu'ils étoient hcrctiques & ennemis de KEgüfe,Ies appellans loups, chiens, ferpens, lygres, dragons, lions ravilfins , antechrifts 5 Sc ufoient de plufieurs autres paroles cfjntumelieufesj & fur tout Lucifer, Evêque de Sardaigne, par fes livres & écrits adrefiez contre Conftance : qui étoit bien loin de les reconnoitre & confeiller de leur rendre obéiffance : car autrement ijs euftent parlé d'enx avec honneur, qui eft une des principalcs marqués de 1'obéilfdnce. Venant après au Droit hnmain, il remar* qua qu'il y avoit plufieurs decre:s tk conftitutions Eccléfiaftiques, plufeurs Loix Si Edhs des; Empereurs Conftantin, Theodo/e, Mar-, Uen, Juftinien,par klqu*]s ein/annes pei.  sous Henri IV. 441 nes, les hérétiques 8c leurs fauteurs étoient déclarez indignes de tous biens, honneurs, autoritez & charges publiques, voire des plus petites & moins importantes: comment* donc feroient-ils capaLles de Ja plus haute & excellente dignité du monde f Pour les loix de La Monarchie de France, il dit—qu'il ne vouloit repeter Ie te ft ment folennel de Saint Remy, ni les ancie!! édit? de nos rois, les regiemens 8c ord es de eet Etat : car le feul ferment qu'ils ét< . t tenus de prêter a leur Sacre 8c Courom 3,ment, de défendre la Religion Catholique, Apoftolique & Romaine, 6c exterminer les hérétiques, 8c fous lequel ils recevoient celui de fidéiité de leurs fujets, & non autrement, montroit affez combien cette qualité étoit neceffaire & fondamenta'e. Auffi qu'aux premiers Etats tenus a Blois, avoit été propofé que le Roi de Navarre 8c le Prince de Condé feroient admoneffez de laiffer leur heréfie; autrement qu'ils feroient indignes de jamais fucceder a cette Couronne : 8c telle avoit été reconnuë, la volonté du Roi, conforme a la propofition des Etats. Et aux deux derniers Etats avec quels fermens pnblics 8c folennels, quels contentemens 8c applaudiflërnens de tout le peuple Francois, avoit-on  442 États recu & juré cette Loi pour fondamentale de 1'Etat? Et ne falloit dire qu'elle eüt été pratiquée par artifice, ou extorquée par violence , fi on n'appelloit force, 1'ïnftante réquifition de tous les Ordres: & quoique la fin d'iceux Etats eüt été funefte 8c tragique , & qu'il femblat n'avoir été iibres, fi ed-ce qu'ils n'avoient laifle d'infifter jufqu'aux dernieres harangues, que ladite Loi füt autorifée & confirmée , & Ie Roi même en auroit fait particuliere déclaration , qu'il n'entendoit rien changer en icelle : ains vouloit qu'elle fut ferme , flable 8c irrevocable. Dit qu'il n'étoit befoin de s'étendre plus ampiement en la déduélion des Loix divines & humaines ; que la feule raifon Sc experiénce rhontroit affez quel danger il y avoit dc fe foumettre fous la domination d'un Prince de contraire Religion. Car tenant ia fienne pour vraye , il ne falloit pas douter qu'il ne s'employat de tous moyens a 1'avancëment d'icelle , & a 1'anéantilfement de celle qui feroit contraire. Et outre , que fa volonté feroit de foi plus forte & plus puiffante , que celle même qui étoit écrite, 1'autorité Royale lui fourniffant mille moyens pour 1'exécution de tcls deffeins, mais deux principalement. Le premier étoit 1'exempie  sous Henri IV. 44? qui avoit tel pouvoir fur les fujets , qu'ils fe laiiToient aifément aller a 1'imitation des vices ou des vertus de leurs Souverains , & furtout les Francois que l'on difoit être finges de leurs Rois. Sous David, Ezechias , Jofias , le peuple fe trouvoit avoir été fort Religieux : quand Jeroboam choifit une autre Religion, tout le peuple y avoit couru après. En la Chrétienté , par 1'exemple du grand Conftantin , tout le monde avoit embraffé la foi j fous Conftance, 1'Arianifme, & 1'Athéifme fous Julien 1'Apoftat. De notre tems Elenri huitiéme d'Angleterre , combien avoit - il trouvé des feflateurs de fon Schifme? Edoüard fon fils , avec quelle facilité avoit-il changé la Religion ? La devote Marie n'avoit-elle pas chaffé en bien peu de tems 1'heréfie , & en auffi peu de tems Elizabeth introduit le Calvinifme ? Nouvellement n'avoit-on pas vü le Duché de Saxe tenir la Doctrine des Luthériens , embraffer le Calvinifme 5 & bannis la précedente par la volonté du même Prince, & depuis a 1'appetit du tuteur de fes enfans , la doétrine de Luther rétablie, 8c celle de Calvin condamnée 8c rejettée ? Et ne falloit aller rechercher les Hiffoires & reciter des des exemples étrangers; qu'on experimentoit déja avec trop de regret, ce que pouvoit  3J44 États 1'exemple & 1'autorité du Prince hérétique, s'il étoit établi& reconnu par les Catholiques, qui voyoient de leur vivant faper les fondemens de ieur Religion ; & ni les démolitions des Autels , ni les ruines de leurs Eglifes , ni les blafphêmes Sc indignitez commifes contre Ie faint Siege & 1'autorité de 1'Eglife , ni 1'infolence de Miniftres de 1'heréfie , dont il ne vouloit parler plus aigremenr , ne les pouvoient retenir. L'autre moyen que les Princes hérétiques avoient quand ils étoient reconnus pour Rois , étoit la force Sc autorité d'avancer aux honneurs , dignitez & charges publiques , ceux qu'il leur plaifoit, & les obliger par ce moyen a dépendre de leur volonté -3 Sc déprimer par la feverité Sc terreur de leur Sceptre, ceux qu'ils n'avoient pu corrompre par faveur 8c bienfaits , s'ils vouloieut faire empêchement 8c refiftance k ïeurs mandemens. Qu'il ne falloit autre té* morgnage que les perfecutions que les Catholiques avoient fouffertes fous Conftance, Vafens, Genferic , Hunneric , Trafimonde, & autres Princes Ariens, qui avoient été fi cruds que fi ces Peres anciens qui s'étoient tronvez parmi les feux & Hammes de telles violen ces , faint Athanafe , faint Gregoire Kaaiauzene, Ruftin & Vi&or d'Utique, ne  sous Henri IV. 44.5" les euflent lailTées par écrit , elles fembleroieat incroyables. Et qui voudroit ajoüter foi, oyant reciter a la poftérité les inhumanitez & tourmens que la Reine d'Angleterre avoit fait fouffrit aux Catholiques de fon. Royaume ? Qui n'auroit horreur fe reflbuvenant des cruautez innombrables que 1'heréfie avoit exercées en la France : laquelle ayant eu ce crédit, lorfqu'elle étoit battu'ë & combattuë par nos Rois, quel traitement en pourroiton efperer, étant fortifiée de 1'autorité royale , & devenuë maitreffe & fouveraine ? Qu'ayant tant d'exemples voifins Sc domeftiques, 1'experience & la raifon, il ne falloit penfer qu'ils fuffent ft laches , ni fi peu jaloux d'un joyau fi cher Sc précieux que la Religion , de la vouloir engager au pouvoir d'un Hérétique , Sc lui mettre cette haute Sc abfolue autorité, comme un glaive en main pouï la détruire. Ne vouloient faire ce deshonneur au peuple Francois très-Chrétien, Sc tant renommé pour fa piété , de conferttir qu'il eüt un Chef Hérétique & retranché du Corps de 1'Eglife : 8c avant que voir cela, ils étoient refolus, avec la grace de Dieu , de tenter plütót toutes fortes de confeils, pour extraordinaires qu'ils püftent être , jufqu'a leurs propres vies , qu'ils ne pouvoient facrifier pour un plus  44^ Etats faint & honorable fujet. Trouvoient étran voire en eet état. Aux dangers du changement de Religion , repliquoit qu'il étoit d'autant plus a craindre en France, que ï'autorité Royale y étoit plus reverée > Sc que les Francois légers amateurs dè nouveautez , s'y lailferoient aifément aller, 8c fur tout les courtifans , qui pour avoir crédit, feroient toujours de la Religion du Roi Sc de la Cour^ Pour ce qui étoit de 1'invitation, ou pour n'avoir été bien entendu , ou faute de n'avoir eut la grace de fe bien expliquer , repeteroit encore les raifons pour lefquelles ils n'y pouvoient ni devoient entendre. Premierernent pour ne fe départir dës mandemens du faint Siege, Sc Bulle de fa Sainteté , qui étoit un; dés fondemens de leur caufe : autrement leur feroit imputé qu'ils s'ën fervoient ou la rejet-toient felon qu'elle leur fembloit utile. Davantage , pour ne contrevenir a leui ferment , s'ils entroient en aucun traité Sc conference avec 1'Herétique-j & pour ne faire aucune ouverture de reconnoiffance : .aquoi ils avoient fouvent protefté , ne pouvoir rm vouloir entrer en aucune forte. Qu'il y avofc G & I  47° États eu ci - devant beaucoup d'occafions j qui les eut voulu embraffer , pour penfer a la converfion qu'on avoit negligée, même au tems des grandes profperitez; & avoit-on bien pris loifir d'entendre a chofes qui n'étoient fi importantes que Ie falut de 1'ame. Et quant aux derniers Etats , cela avoit déja été réfolu de n'ufer plus de telles fémonces & invitations. Le prioit de croire qu'ils ne s'étoient mêlez de la Legation du Sieur de Pifany , pour 1'avancer , ni pour traverfer; & que les mémoires des SieursEvêque de Lifieux & des Portes, n'en avoient été aucunement chargez : mais que fa Sainteté pour Ie grand zele qu'elle avoit a l'honneur de Dieu, & jaloufie a ce qui pouvoit apporter préjudice a la caufe de la Religion , de fon propre mouvement, avoit ufé de la procedure qu'on avoit vu'ë, qui étoit un bel exemple & vive exhortation aux Catholiques , pour leur faire apprehender Ie peril oü ils étoient , donnans faveur & affiftance aux Hérétiques.  sous Henri IV. 471] Autre. Difcours de Monfieur de Bourges > refutant bravement les raifons de la Ligue. Monsieur de Bourges avec fa compagnie , fe retira, & demeura jufqu'environ les trois heures; après, étant revenu au même lieu , ledit Sieur dit : que chacun alleguoit divers exemples , 8c fe fervoit de 1'autorité des écritures, pour preuves de fes opinions, 8c Ia retorquoit en divers fens: mais qu'on en pouvoit avoir 1'intelligence , invoquant 1'efprit de Dieu , qui ia donnoit a ceux qui Ia demandoient, 8c imprimoit en leur ame la connoiiTance dc la verité : Intellecliim bcmum dat petentibus eum : comme au fujet qui fe traitoit de la reconnoiffance ou rejeclion des Princes : car Ja'voix de Jefus-Chrili, 8c de fes Apótres, étoit évidente, & Ja prédication continnelle des Chrétiens , qu'il falloit craindre Dieu, honorer leRoi, rendre aDieu ce qui lui appartenoit, que toute ame devoit être fujette aux puiiTances ordonnées de Dieu, autrement que c'étoit relifter a fa volonté, 8c troubler 1'ordre 8c tranquilité publicjue, que- GS 4  472 États. les défobéiiïances avoient toujours éte fuivies de vangeances Sc punition de Dieu , & de toute forte de malheurs Sc infelicitez : & plufieurs autres lieux femblables, qui recomrnandoient exprefiement l'honneur , obéiffance , & refpecf envers les, Rois 8c Magiftrats , ores qu'ils fuflent payens Sc méchans : confideré que Dieu les établiifoit felon fon bon plaifir, 8c felon les merites ou demerites des peuples : auffi ne fe vouloit arrêter pius longuement a contredire les lieux 8c exemples alleguez , qui ne pouvoient empêcher de fe refoudre a ce qui étoit commandé par 1'expreffe parole de Dieu. Mais en ce qu'on avoit oppofé 1'autorité & le jugement des Papes , c'étoit un rocher auquel il n'avoit voulu heurter ; & quant a lui qui parloit ores qu'en abfence,il baifoit en toute humilité les pieds de fa Sainteté , fi eft-ce qu'il croyoit que les Papes étoient , long-tems y a , poffedez par les Efpagnols ; Sc quoique leur intention fut bonne, ils étoient craintifs ,. Sc avoient telle peur d'offenfer le Roi d'Efpagne , qu'ils étoient contrahits de fe laifler emporter aux paffions qu'il avoit de nous troubler ; que cela fe pouvoit bien voir par ies procedures par eux faites fur les affaires de France, & par les Bulies par eux envoyées 8c  sous Henri IV. 473 publiées , fans garder 1'ordre & formalité qui y étoient neceffaires , pour favorifer les deffeins d'Efpagne. Ce n'étoit pas le moyen de ramener les Princes qui étoient dévoyez, au fein de 1'Eglife. Les anciens Papes alloient eux-mêmes au-devant , les rechercher avec tout le refpeft, comme le Pape Anaftafe , qui étoit allé au-devant de Juftin : Jean étoit allé jufqu'a Conftantinople trouver Juftimen, pour le retirer de quelque erreur Eutichienne. Que telles rigueurs Sc feveritez implacables, ne fervoient qu'a mettre le feu en la Chretienté, perdre & ruiner les Royaumes , comme de notre tems on avoit vü ceux d'Angleterre Sc de Hongrie : efperoit de voir le Saint Siege remis en tel étatqu'il fe comporteroit comme médiateur Sc pere commun de le Chrétienté, & montreroit 1'effet de la bienveillance qu'il a toujours portée a cette Couronne. Au demeurant, que le Roi étoit un grand Prince & genereux ; en la fleur de fon age , qui étoit non feulement pour gouverner ca Royaume , Sc le défendre contre les étrangers , mais fe rendre redoutable a fes voifïns; Sc fi on avoit remédié a ce défaut, feroit un grand appuy pour la défenfe de 1'Eglife. Au contraire de faire fortune fur le fecours & promeife du Roi d'Efpagne, c'étoit s'appuyer  474- États parmi inclinato & mace-ice depulfx , étant vieux & caduque, qui laifferoit au milieu de ia tempête , ceux qu'il auroit embarquez. Et pour répondre plus particulierement aux Bulles , difoit qu'elles n'avoient jamais été fignifiées , & pouvoit dire , n'en avoir eu aucune notice; pouvoit bien auffi mettre en avant le privilege de cette Couronne , qui touchoit feulement les Rois , de ne pouvoir etre excommuniez , mais encore pour leur refped , les Princes , leurs domeffiques , & Officiers du Pvoyaume. Touchant les lettres de 1'Ambaffiadeur dAngieterre mentionnées, ce pouvoit être chofe fuppofée par ennemis particuliers de Sa Majefté , & pour calomnier Ja droite intention de ceux qui avoient envoyé le Sieur de Pifany. Revint a 1'invitation , & dit que leur intention n'étoit pas que cela tirat long trait, mais qu'auffi-töt demandé , auffi-tót feroit-il accordé , modo conftat, modo agatur : toutefois n'y vouloit plus infifter , les voyant tous alienez de ce chemin. Entra en quelque réponfe fur les lieux alleguez, & dit, quant aux exemples d'Edon & Lobna , que c'étoit laquelle écriture fut telle.. Écriture produire par les Catholiques du, parti du Roi de Navarre Messieur, Nous avons donné 8c rendu compte, la oü nous devions, de ce qui s'eft paifé entre no us iur le fujet pour lequel cette alfemblée * Hh. 3  486 États été faite depuis le commencement, qtie nous entramès en conference, aux derniers erremens oü nous en fommes demeurez. Nous jugeames que ce'a ne fe pouvoit affez fuffifa-nment traiter par lettres; & qu'il étoit befoin que ce füt d'une voix, par aucuns d'éntre nous, qui après en avoir fait le difcours, puiffent reoliquer aux objedions qui pourroient être faites. Meffienrs de Schomberg & Revol prirent volontiers cette charge, comme ils en furent priez par commune déiiberation faite entre nous. Leur voyage a été un peu plus long que nous ne 1'euffions defiré, pour ne vous tenir longuement en fufpens d'une affaire, dont nous connoiffons que Pacceleration efi plus neceffaire pour le bien commun de tout le Royaume. Car ' fi le mal prelfe d'un cóté, nous croyons, qu'il ne fe fait moins aigrement fentir de 1'autre, en toutes les pauies de 1'Etat, dont la Re igion tient le premier rang, & ne recoit moins de detriment; en fa qualité, par la guere, que les autres parties, qui, avecicelle font la confervation eiuiere de 1'Etat. L'indifpofition de M. de Schomberg, qui lui arriva, en chemin, en allant, & 1'abfence de M. le Cardinal de Bourbon , auquel il a fallu donner communication des chofes 3  sous Henri IV. 487 oü il tient fi grand 'lieu, pour y apporter fon avis, ayec les autres Princes & Seigneurs, avec qui il avoit a dcliberer de ce qu'il écheoit de nouveau en notre charge, de leur part, ont été caufe d'un peu de retardement en la réponfe que nous en attendiöns 1 mais ce devra être avec moindre regret, fi ce peu d'attente davantage efi recompenfé de quelque bon fuccès au pririeipal, comme nous defirons & Pefperons. Nous ne voulons vous celer, Meffieurs , felon ce qlie nous ent rapporté lefdits fieurs Schomberg & Revol, que les termes,par lefquels vous avez conclu vos premiers progres , n'ayent été trouvez un peu étranges 5 vü la fin pour laquelle nous. fommes affemblez: & que la première conception , qu'ont fait ceux que nous reprefentons, h'ait produit quelque opinion qu'il y eüt moins de dïfpofitïen de votre part a la perfeclion de cette oeuvre, qu'ils n'y ap= pofterit de leur coté. Mais ils ont trouvé quehjue rigueur aux mots : nous n'avous oublié d'y donner PadóucilFément que nous avons recüeilli des autres demonftrations que vous nous avez faites, de ne vouloir reculer au bien que nous cherchons & connoiffons les uns & les autres, être fi necelfaire, encore que les déclarations. n'ayent été fi es- H li %  4^8 États prefles que nous leur en ayons pü donner 1'entiere affiürance qu'ils euflent pü defirer. Or , Meffieurs, notre but counnun eft d'avifer par enfemble aux moyens d'affürer la Religion Catholique Sc i'Etat. Nous vous avons dit, que nous n'en connoiffons autre, felon Dieu, & i'ancienne & continuelle obfervance du Royaume, ni par raifon d'Etat, qu'en la perfonne du Roi appellé a la Couronne par droit fucceffif, qui eft fans controverfe , & lequel nc nous aviez nié; comme auffi nous croyons, que vous jugez, que perfonne n'en peut débatre ni difputer avec lui. Vous y arguez feulement le défaut d'une qualité que nous defirons comme vous, pour réünir les. cceurs Sc volontez de fes fujets, en un même corps d'Etat, fous fon obéïf* fance. Nous ne 1'ayons feulement defiré pour le zele Sc devoir que nous avons en notre Religion, mais auffi toujours efperé, (.vu. fon naturel, oü nous n'avons jamais connu aucune opiniatreté) que Dieu lui toucheroit le cceur Sc 1'infpireroit a donner ce contëntement au commun foühait de tous Catholiques, Si le tems a été long, le malheur des continuelles guerres, oü l'on 1'a tenu occupé, en eft 1'excufe trop Jegitime: toutefois nos vceux Sc prieres n'ont en cela cti cependant du tout vaines, JJ eft. ficchi  sous Henri IV. 4S0 jufques la d'en vouloir prendre les moyens, &,même tels, que fes principaux fervuëurs lui ont voulu eonfeiller. En quoi ils ont voulu faire l'honneur a notre S. Pere le Pape, qui convient a fa dignité, pour rendre fa perfonne & fon Ppntificat remarquables, du plus grand heur, qu'ayent eu de plufieurs lïecles aucuns de fes prédeceireurs : & peur maintenir ce Royaume toujours uni avec le S. Siege 8c les autres Etats Catholiques, chacun fcuit FAmbafiade qui a été envoyée, vers fa Sainteté, pour eet effet. Ce n'eft pas qu'un ne fgache qu'il y a autres voyes pour y proceder; & de cela nous n'avons été difcordans en opinions avec vous. Et puis que l'on voit Pattente du remede defiré & recherché de fa Sainteté, trop longue, & confequemment préjudiciable au bien de ce R,oyaume, joint que nul ne peut pas ignorer les traverfes & empêchemens qui y font donnez, ni de quelle part, pour rendre notre mal fi long qu'il pourroit enfin devenir incurable; les mêmes, qui avoient donné ce confeil de pren-. dre la voye de Pvome, Pont tourné de prendre remede a nos maux, qui eft dans le Royaume, en ce qui touche la converfion de Sa Majefté : ne laifiant toutefois d'avoir toujours intention de rendre l'honneur &, la fouattf*  4£° ^ É f A T S fron a fa Sainteté, qui h,i appartient. Er comme Sa Majefté s'étoit flechie au premier avis, elle a volontiers embrafTé ce fecond : ayant réfolu de convoquer, auprès de foi, un bon nombre d'Evêques & autres Prélats & Bodems Catholiques, pour être inftruit, & fe bien réfpudre avec eux de tous les points concernans la Religion Catholique. Les depêches ont été faites avant que lefdits feurs de Schomberg 8c Revol foient partis de Mante. Elle a outre réfolu, de faire en même tem* une affemblée du plus grand nombre, que faire fe pourra, des Princes & autres grands perfonnages de ce Rovaume, pour rendre Pafte de fon inftruction & de fa converfion, plus folennel & témoigné dans le Royaume, & parmi toutes les nations Chrétlennes. Ainfi, Meffieurs, ce que nous vous avons ci-devant dit, que nous efperions, touchant fadite Converfion, nous ofons & Je vous pouvons a prefenu alf'urer, comme le fcachans par fi exprès, par la déclaration que Sa Majefté a faite aux Princes & Officiers de fa Couronne, & autres Seigneurs Catholiques qui font prés d'elle, & eux a nous, paree que lefdits fieurs Schomberg 8e Revol nous ont apporté de leur part, qu'il ne nous peut plus demeurer aucune Qêeaftoa  sous Henei IV. 45>r d'en douter: y étant, Sa Majefté, refoluë, non comme a chofe qui dépènd du fucccs & événement de cette conference, mais pour avoir connu & jugé être bon dc le faire. Nous fommes trcs-aifcs de vous pouvoir donner cette nouvelle, croyans que vous la rccevrez pour bonne, felon ce que nous avons connu de vos cceurs & intentions ; & ef * perons auffi que vous ne ferez plus de difficulté de traiter des conditions Sc moyens de la paix, avec la füreté de la Religion Catholique & de 1'Etat, qui eft la fin par laquelle cette alfemblée a été faite & accordée. Nous n'entendóns vous preffer d'entrer pour cette heure en traité avec Sa Majefté : mais il nous femble, que le pouvez & devez faire fans fcrupule, avec les Princes & Seigneurs Catholiques que nous reprefentons : autrement feroit en vain, que vous avez accepte 1'offVe & femonce qu'ils vous en ont faite, & le pouvoir que nous en avons de leur part, après en avoir eu copie Sc commumcation d'icelui. Ce fera pour gagner tems & commencer de fe rapprocher de la réunion a laquelle il nous faut venir , fi nous n'aimons mieux rendre les ctrangers maitres de nos biens Sc moyens, que les poffeder nous mêmes; & néanmoins, pour ne vous engager  '492 États plus avant que ce que vous voudrez, en ce qui touche le Roi, vous pourrez referver, s'il vous femble, que rien ne fera effeétué de ce qui feroit accordé, jufques a ce qu il foit Catholique. Et afin, crue fon inftruöion ne foit interrompuë ni empêchée, peur les occupations de la guerre, Sa Majefté eft contente d'accorder une treVe générale pour deux ou trois mois, encore qu'elle connoifte bien, qu'elle puiiTe porter beaucoup de préjudice a fes affaires : ce que nous eftimons devoir être d'autant plus volontiers embrafie dc votre part, que, avec le bien quapportera ce bon oeuvre, chacun pourra faire fa recolte en liberté; & fera un grand heur pour tous, s'il plait a Dieu nous donner ia paix, & qu'elle nous trouve poiirvüs des fruits que fon aura ferrez par le moyen de ladite treve: ce qui n'aviendra, fi l'on ne met ce temperament au défördre de la guerre. M. de Lyon répondit, qu'il penfoit que Meffieurs fes Collegues le difpenferoient de dire, qu'il étoit bien aife de Ia converfion du Roi de Navarre, & en loüoit Dieu, & defiroit qu'elle fut vfaie & fans fféhon : & pna de trouver bon qu'il prit avis de fa compagnie pour faire réponfe : ce qu'ayant fait, & après avoir murement confulté ck  sous Henri IV. 49f deliberé, fut réfolu, que ledit fieur de Lyon feroit la réponfe, avec le moins de parolès qirii feroit pofiible, pour ne faire chofe qui put préjudicier a la déiiberation des Etats : s'en remettoit d'en faire rapport a Paris, & en conferer avec M. le Legat , MM. les Princes , Ambaffadeurs de Sa Majefté Catholique, & Etats : vu la jaloufie & importance d'icelles propofitions : cependant qu'il n'y avoit aucun danger, conformément a la réponfe dudit fieur de Lyon, de rendre de nouveau, témoignage d'avoir plaifir & contentement dè ladite converfion , & defirer qu'elle füt bonne & fainte, & non feinte & fimulée ; Sc que les effets répondilfent aux déclarations. Et pour montrer Popinion que Pon en pouvoit avoir, que ledit fieur leur exhiberoit les lettres patentes, accordées eu faveur des Miniftres de 1'hérefie, qui avoient été lues le jour précédent aux Etats. Et fur ce qu'ils avoient dit, vouloir dorénavant trailer par écrit, fut avifé d'infifter a ce que tout cé qui avoit été traité Sc difcouru en la Conference, dés le commencement, fut rédigé par écrit; afin que la verité füt connuë, Sc qu'on s'en accorddt, & deputat deux de (chacune part; Sc qu'auparavant on ne recevroit aucune écriture. Ledit fieur de L,on  45>4 États fit la réponfe fuivant ladite réfolution, avec tant de dexterité, que donnant fatisfadion a ceux, pour lefquels il portoit la parole, il n'offenca aucunement ceux qui en attendoient néanmoins quelque meilleure réponfe, comme ils difoient. II eft vrai que, paree qu'en faifant fonner fi haut cette converfion, & les füretez qu'on offroit pour la Religion Catholique, ( car on ne leur ouït jamais prononcer, Apoftolique & Romaine ledit fieur de Lyon, avec plus de vehemence que de coütume, dit, qu'il leur laiffoit juger, quelles affürances Sc conditions on pouvoit prendre en affaire de telle confequence : ne vouloit entrer en difcours des moyens, que les Princes, une fois reconnus, avoient de fe démêler des promeffes qu'ils avoient dpnnées, Sc des maximes d'Etat qui étoient reeuës fur ce fujet: que i'Hiftoire Eccléfiaftique n'étoit qu'une narration du fuccez de pareilles promeffes Sc évenemens, qui leur devoit fervir de miroir Sc exemple, pour en faire certain jugement. Mais pour leur montrer qu'eft> ce qu'ils pouvoient efperer de telles converfions, promeffes & füretez, ils leur vouloient bien montrer, ce qu'ils avoient recu depuis deux jours en ca, avec extréme regret Sc fcandale : c étoient des Lettres Patentes, cx-  sous Henri IV. 405" pediées par le Rei de Navarre, portans affignation de fix-vingt mille écus, pour 1'entretenement des Miniilres & écoliers en Théologie, pour fubroger en leur lieu, avec 1'Etat: qu'ils étoient fort ébahis, comme ceux qui étoient Catholiques, pouvoient oüir telles abominations, & y participer fans horreur & apprehenfion d'en être grandement coupables devant le jugement de Dieu : que c'étoit pour envenimer, non feulement le Royaume, mais pour infeéier toute la Chrétienté de ce venin de 1'hérefie, a ia perte d'un nombre innumerable d'ames. Et comme aucuns d'eux voulurent dire, qu'il n'y falloit ajouter foi, & y chercher-des excufes, leur fut repliqué, que ce n'étoient,point extraits ni chofes fuppofées, qu'on avoit vu & lü aux Etats les propres originaux des Patentes fceliées du grand fceau par un Chancelier qui fe difoit Catholique; fignées, Potier, Secretaire d'Etat, qui fe difoit Catholique; controilées & fignées, Subiet; & atteflées avoir paffé par le confeil : que c'étoit trop tót oublier fa Religion : c'étoit profaner Ie fceau de France, & les Fieurs de Lis impolluës de la tache de 1'hërefie , que s'en fervir pour mettre en proye 1'héritage precieux de notre foi a fes ennemis, & ie domaine de 1'Eglife, au butin  4P5 Ë T A T S des miniftres: faire honte a 1'image de nos Rois, qui étoit gravée avec le Sceptre en main, comme un foudre & tonnerre pour diffiper les hérelies, de 1'employer pour 1'avancement & établiiTement d'icelles, & pour la ruine de 1'Eglife j que de leur part, ils penfoient que tout Catholique devoit plutöt fouffrir la mort mille fois, que de proftituer ainli fa Reügion, Sc confentir a telles impietez : que les hérétiques fe garderoient bien de faire ce pas de clcrc a notre avantage. Et après en avoir parlé tous enfemble, le fieur de Bourges demanda d'en être oüi; car il vouloit éciaircir la compagnie, & montrer comme cela étoit palfé. Que veritablement Meffieurs de la Religion ( fur ce mot le fieur du Laurens fe leva, & s'addrelfant audit fieur: de Bourges, Monfieur, ajoütez-y, prétenduë; car Religion fans queue ne lui appartient pas) avoient fort importuné le Roid'accorder telle aQlgnation, & en avoit été parlé au confeil : mais que le fieur de Revol & autres , fcavoie'nt bien que M. le Cardinal de Bourbon & lui qui parloit, 1'avoient empêché, 8c remontré au Roi, combien cela feroit préjudiciable a fon fervice; & avoit été réfolu de ne 1'accorder; 8c ne fcavoit, comme depuis il étoit palfé, Sc croyoit que lefdites Patentes  sous Henri IV. 49^ Patentes étoient de 1'année iy.pi,> Et ayant été repliquéj qu'il y en avoit d'autres dè 1'année prefente qui étoient fignées, mais n'étoient encore fcellées, auroient tous fait demouftration de le trouver mauvais, & en être bien marris : & par ce, remontré qu'il y falloit bientöt remedier tous enfemble „ pour ne tomber en ces malheurs 8c crainte de voir encore pis: prians lefdits Députez, de moyenner, que leurfdites propofitions fuffent bien confiderées en l'alïemblée. On traita auffi ce jour, de quelques cöntraventions frites de part & d'autre, aux articles de la fu£» penfion & celfation d'armes; ce qui fut débatu par les fieurs de Belin & de Vic; & fur le point du départ, le fieur de Revol donna la fufdite écriture a un de la compagnie, pour la communiquer; qui fut recuë; confideré que le même jour, ils en avoient diftribué plufieurs copies a ceux de Paris, qui s'étoient trouvez la audit jour. Le Jeudi 20, M. de Lyon fit rapport de la fufdite Conference, en la même forme & affiftance que la précedente, & après fit leélure de 1'écriture qui avoit été donnée; & en la lifant, s'arrêta fur quelques points, pour informer la compagnie de la verité dès chofes paffées, particulierement fur la qua'ité'de$ Tomé XF> l ï  493 ÉTATS paroles, qu'ils difoient avoir trouvées bien aigres, qui étoient, pour avoir toujours foütenu, qu'ils ne pouvoient avoüer & reconnoitre un hérétique pour Roi; & qu'ils ne vouloient ufer d'aucune priere ni femonce en-; vers le Roi de Navarre, pour le faire Ca-< tholique; fur ce qu'ils difoient qu'on étoit demeuré d'accord, c'étoit qu'on leur avoit dit, qu'il avoit pü fe faire inftruire s'il eüt voulu, n'ayant eu faute de Prélats & Docteurs. Ajoüta, qu'ü avoit oüi d'aucuns qui fe plaignoient de lui , que c'étoient les fruits de la Conference; Sc qu'elle avoit conduit les affaires en 1'état qu'on les voyoit: mais que ce n'étoit pas la qu'il le falloit rapporter, ni 1'imputer a la Conference : car on n'y avoit traité que par 1'avis, 8c fuivant 1'intention de 1'affemblée : mais que le Roi de Navarre avoit réfolu de faire cette promeife 8c déclaration, comme il étoit aifé a voir, pour retenir les Catholiques de fon parti, defquels il craignoit être abandonné : 8c auffi pour empêcher des divifions fecretes qui croiffoienc infenfiblement, 8c étoit fur le point d'éclorre quelque grand eifet Sc changement , 8c n'eüt laiffé de le faire fans la Conference, fcachant de quoi cela lui importoit: Sc eüt apporté plus grand préjudice , 1'ayant fait fans  §dus Hensi IVè '49^ Méuhé réponfe & confideration de leur part i & qu'il falloit bien y avifer & déliberer, 1 & non fe plaindre. M. de Mayenne prenant la parole, dit, que le fieur de Lyon & fes Condéputéz, n'avoient rien fait que ce qu'on pouvoit attendre de perfonnes très-dignes de la charge qui leur avoit été commife, & qu'on leur avoit beaucoup d'obligations $ qu'il falloit y remedier, & penfer de faire quelque bonne réponfe, Comme 1'importatance du fait le requeroit ; & prioit 1'affemblée d'y bien avifer; que de fa part il en confereroit avec Meffieurs les Princes, avec la Cour de Parlement & fon Confeil d'Etat; & feroit entendre le jour qu'on fe pourroit raiïembler pour réfoudre ladite réponfe. Or comme ès affaires plüs grandes & plus arduës, les bons confeils font plus neceffaires, on jugea qu'en cettui-ci qui fe prefentoit, il étoit requis d'y apporter beaucoup de prudence & circonfpeclion. AuCuns prévoyans de de loing oü tendoit cette propofition, étoient d'avis de rovnpre la Conference, comme infru&ueufe; & que les Catholiques qui étoient du parti du Roi de Navarre, montroient n'avoir autre but que fon établilfement, a quelque prix que ce fut; qu'on reconiioiflbit li %  yoó État & bien par eftet, (quelques deneins fecrets qu'euffent les uns & les autres ) que les enfans de lumiere étoient toüjours vaincus cn la prudence humaine, qui n'étoit ïnftrument propre pour 1'avancement de la caufe de Dieu. Toutefois on eftima, que c'eüt été trop d'avantage a ceux qui avoient fait ladite propofition, fi elle demeuroit fans réponfe : joint 1'état & difpofition des affaires, qui ne permettoit de fe réfoudre a tel confeil, avec autres confidérations très-grandes, que 1'évenement montra par après n'avoir été vaines & inutiles. Le premier point contenant 1'offre de la converfion , n'étoit rejetté par aucuns, qui eftimoient que c'étoit la plus courte voye pour mettre fin a nos maux, fi on pouvoit affürer la Religion. Mais au contraire \a> plupart, & principalement 1'ordre de 1'Eglife, tenoit cette offre pour fort fufpecte; & que cette converfion étoit un coup d'Etat plütót que de Religion; qu'il y avoit moins de fouci de Pinftrucfion de 1'ame, que de la deftrucfion de la Religion & de 1'Etat: de gagner la couronne du Ciel, que d'affürer celle de la terre. Que c'étoit chofe grandement a fouhaiter, que de voir un fi beau changement; & pouvoir prendre le remede d'oü le mal étoit procédé. Mais que cette maladie inveterée n'étoit fi  sous Henri IV. yoii aifée a guerir , fans une rare & extraordinaire grace, & miracle fpécial de Dieu : Facilis defcenfus Averni , fed revocare gradum , &c. Et c'étoit ce qui faifoit trouver cette fi foudaine métamorphofe plus étrange, n'ayant yü aucunes marqués par lefquelles on put juger telle converfion être oeuvre de Dieu, ni aucune difpofition, & pour les mceurs, & pour la foi, perfeverant toujours, celui qu'on difoit converti, en fon heréfie. Et ce qui augmentoit les foupcons de cette ficlion, étoit que cette converfion ne fembloit proceder du propre mouvement, mais parimportunitez humaines , pour donner contentement aux Princes voifms Catholiques, fortifier les Catholiques qui 1'affiiloient, la plupart defquels ne demandoient qu'une Melfe pour cuider mettre leur confcience en repos , fans s'enquerir davantage, diiliper 1'union, & parvenir par artifice a ce que la force n'avoit pü avancer. On remarquoit encore, que telle propofition n'avoit été faite dès le commencement, mais après deux autres bien diverfes , de reconnoitre le Roi dé Navarre tel qu'il étoit; & de le fommer de fe faire Catholique; Sc après touta coup, & d'un plein faut, le propofer converti. On difcouïoit que toutes ces conjedures étoient fortifiées  jroa Ê t a t s par le cours de fes. aétions paffées , par la na* ture de 1'heréfie, ( qui eft en la poffeffion de perfidie , & a la déception pour accident ipféparable) par les préceptes de 1'Eglife, par les exemples de 1'Antiquité, & expérience de tousles fiécles. C'étoit unftratagéme de guerre, pour vaincre l'ennemi, que de prendre fa caiaque & fon écharpe , afin de fe pouvoir fourrer pêle-mêle fans être connu. Que la maxime étoit y a long-tems reciie & pratiquée, que les, Royaumes s'acqueroient comme on pouvoit, & fe gouvemoient comme on vouloit. Ne falloit ramener les exemples des Anaftafes, des Bafiliques , des Julien: falloit feulement jetter les yeux en Angleterre, & y voir ce que Jean Henri VIII. 8c cette Jezabel y avoient fait : laquelle avoit diftimulé deux ans entiers , pour s'établir en la Tyrannie qu'elle exerce a préfent i ne falloit trouver mauvais, fi hccc nos vefiïgia terrerent: que cela feroit la plus dangereufe 8c iniidieufe perfécution qui put avenir a 1'Eglife. Toutefois on réfolut que le meilleiir confeil 8c expediënt étoit de laiffer le jugement de cette converfion a Notre Saint Pere, & en rapporter au Saint Siége la connoifTance, comme au port 8c refugeou la Religion ne pouvoit faire aucun naufrage; ócio;"ine difoit ce bon A.bbé de France: Opor°*-  sous Henri IV. W tel ad veftrum referri Apoftolatum , pericula quceque emergentïa in regno Dei : dignum ibi poiijfimum refarciri damna Fidei, ubi non poterat Fidesfentire defeSum: haec quippe erat hujus prcerogativa Sedis. Que s'il y avoit de la fincérité, elle paroïtroit devant celui qui étoit affifté & conduit du Saint-Efprit. Au contraire , s"il y avoit du menfonge , s'il y avoit du platre & de Ia cerufe, elle fe fondroit a 1'afpecl de ce Soleil de la Foi, toujours ardent Sc toujours luifant fans éclipfe, &c qui ne pouvoit jamais être obfcurci par les ténébres de 1'heréfie, ni par les voiles de Fhypocrifie : comme Fexemple de Lothaire fous le Pontificat de Nicolas I, Sc plufieurs autres montroient affez. Au fecond article auffi n'y avoit faute de difficultez & diverfité d'opinions. L'avis d'aucuns étoit d'accepter 1'offre a traiter de la fureté de la Religion, Sc que ce feroit le moyen de toucher au doigt la vérité ou la feintife de la converfion : car fi elle étoit telle qu'on difoit, s'il y avoit des rayons du SaintEfprit, on en verrok rejaillir des flames & étincelles : s'il y avoit du feu d'enhaut, il auroit confommé tout ce qui y feroit de vicieux, on y verrok une ardeur de facrifier le refle de fa vie a la gloire de Dieu, & fceller de fon fang 1'Editde 1'Union des Catholiques > extk-r I1 &  yo4 États' per, ou chafler 1'heréiie, a laquelle tant s'eri faut qu'on fe reconnüt obligé pour en avoir été foütenu, qu'on la confeneroit êtremotrice de tous les défordres & ruine de ce bel Etat , & de Ia confufion horrible oü il étoit reduit; autrement on auroit jufte occafion de craindre, que ce ne füt une feinte piété, & que la parole étant donnée aux uns, le cceur ne fut demeuré aux autres pour gage, quand on verrok 1'opportunité d'un retour & changement: auquel ïems le repentir feroit tard , après la faute, & la plus grande faute qui put jamais arriver. La contraire opinion néanmoins prévalut , de traiter & conferer aucunement avec celui qui étoit retranché de 1'Eglife, excommunié & condamné, qui ne pouvoit être tenu pour xéuni, abfous & reconcilié, qu'après le jugement du Chef & Prince de 1'Eglife: car ce feroit apporter un préjugé a 1'ordonnance du Saint-rEfprit, & faire ouverture a Ia reconnoiffance, qui n'avoient rien de commun avec ia reverfion, non plus que les peines temporelies avec les fpirkuelles, Etant bien certain que la porte de falut feroit ouverte; & que les pecheurs étoient recüs non feulement feptuagiès fytiès , mais toutes les fois qu'ils voudroieat retourneï i 1'Eglife , qui n'avoit jamais le gil^k fcn»é4 fe falloit affurer que Sa Sainteté*  sous Henri IV. yoƒ embraffant avec contentement le falut d'un homme , quelque grand rang qu'il tint, pouryoiroit auffi fagement au falut d'un miliiou d'ames qui lui font commifes, comme au Pafteur fouverain de 1'Eglife Univerfelle. Pour le dernier point de la Trêve, qui étoit fort chatoüilleux, vu 1'état des affaires, on demeura d'accord de n'y toucher qu'après la réponfe des précedens, tellement qu'enfin toutes chofes ainfi mürement confultées & délibérées , comme il y avoit en cette alfemblée de grands perfonnages , & pleins de pieté & de doflrine, & rapporté a 1'avis de Meffieurs les Princes & de leur Confeil, 1'arrêt & réfolution fut prife de la réponfe, Mercredi fecon de Juin: Que pour la converfion du Roi de Navarre, ils euffent a fe pourvoir par devers fa Sainteté, a qui appartenoit le droit de 1'abfoudre & remettre au giron de 1'Eglife: Qu'on ne pouvoit toucher aux füretez de la Religion, avant qu'être éclaircis du premier point. Et quant a la Trêve, on remettoit a en faire la réponfe, après avoir feu leur intention fur ce que deffus. Cependant les Députez qui demeuroient a Surêne , s'ennuyoient des longueurs & retardement , difans que c'étoient des temporifemens affeclez, pour attendre des forces; & firent courir bruit de leur départ, êc  yo6 États fin de la conference : toutes fois ne pafiêrenr plus outre que S. Denis. Leur fut fait entendre , qu'on leur rendroit réponfe au premier jour; & furent priez de fe trouver au lieu qu'ils aviferoient, entre Paris & S. Denis, ce qui fut fait. Séance du Samedi cinquieme Juin. Cette conférence fut tenue a laRoquette, qui eft une maifon aux champs, hors la porte S. Antoine , oü étant les Députez aflemblez , M. 1'Archevêque de Lyon commenca par une excufe du retardement dont on avoit ufé a leur faire réponfe , les priant de ne le prendre en mauvaife part, ni entrer en foupgon que ce füt par artifice ou mauvaife volonté: mais que Paffaire de foi étoit très-grande, ayant été neceflaire de conférer avec beaucoup de perfonnes , comme ils fgavent , Sc encore avec leurs amis, qu'on ne vouloit offenfer, ni feparer d'eux en aucune facon: auffi que fon indifpofition notoire avoit été en partie caufe de cette longueur. . - La réponfe qu'il avoit charge de leur faire, étoit, quant a la converfion du Roi de Navarre 2  sous Henri IV. 'ƒ07 qu'on defiroit la voir vraye, & fans aucune ficlion : mais diroit librement, que tant s'en faut qu'on )a put efpérer telle, qu'au contraire, ils avoient grande occafion de croire & juger autrement: car fi elle procedoit de fincerité , on n'eiit recherché tant de dilation & remifes; s'il étoit touché de quelque infpiration, il ne demeureroit point en fon heréfie, il n'en feroit point 1'exercice public, ni prêteroit l'oreille a fes miniflres; il blameroit 8c detefteroit publiquement fon erreurj il les chafferoit loin de lui j on verrok des fruits dignes de pénitence: que le premier degré pour fe difpofer a Ia grace de Dieu, a recevoir le don de Ia foi , c'étoit de quitter le mal, & abandonner fon erreur : Declina a malo , & fnc borium. On ne lifoit pas que ceux qui fe faifoient les premiers Chrétiens , marchandaflent fi longuement, cVquecependant ils facrifialfent aux Idoles. Soudain que Dieu les avoit touehez, ils abandonnoient leurs fuperftitions ; témoin eet Eunuque que faint Philippe convertit, 1'ayant trouvé fur les chemins; fi-töt ' qu'il fut perfuadé, auffi-tót étoit dcfcendu de fon charriot, 8c s'étoit fait baptifer, au premier ruifiéau d'eau qu'il avoit trouvé. Quand S. Paul avoit été apellé de Dieu, incontinent U avoit dit : Domme, quid me vis facere ? Il  ?o8' États1 n'avoit remis 1'affaire a fix mois. Aufli ce n'étoit ouvrage des hommes, que d'afligner certain jour pour fe faire Catholique; c'étoit un don de Dieu fingulier; c'étoit une lampe ardente , qui ne s'allumoit que par le feu d'enhaut: cette volonté qui étoit infpirée de Dieu, operoit en un moment, & ne recherchoit des remifes. Toutefois, que ce n'étoit a eux d'approuver ou d'improuver ladite réduélion ; mais en laifloient le jugement a N. S. Pere , qui feul avoit 1'autorité d'y pourvoir, & le remettre au fein de 1'Eglife. Et pour le regard des traite? de paix & füretez de la Religion , ils n'y pouvoient entrer pour plufieurs grandes confidérations: car ce feroit traiter avec le Roi de Navarre, qui étoit hors de 1'Eglife , & a laquelle ils ne le pouvoient tenir pour réüni & reconcilié, qu'on n'eüt feu la volonté du Saint Siége : que s'ils n'avoient pü accorder de le fommer ou inviter, pour les raifons qui avoient été déduites , beaucoup moins traiter de chofe, qui püt faire ouverture a fa reconnoiflance & établiflement direciement ou indirectement: que c'étoit préyenir le jugement de fa Sainteté, a laquelle ds étoient refolus de fe conformer en ce fait, ou il étoit queftion de la Religion : & qui plus étoit 3 quand il faudroit entrer aux füre*  sous Henri IV. $ ö$ fez propofées , ne voudroient y toucher fans 1'avis de fa Sainteté. En ce qui étoit de la Trève, après avoir été fatisfaits fur les deux premiers points , ils leur feroient réponfe. Monfieur 1'Archevêque de Bourges confulta avec fa compagnie: & après , étans en* femble, dit, qu'il reconnoiifoit la bonne volonté , que lefdits Députez de Paris apportoient au bien de eet Etat, reconnoiffoient le contentement qu'ils avoient de la converfion du Roi, comme c'étoit chofe dont dépendoit le bien univerfel de ce Royaume, & le feul tnoyen de le mettre en repos : que c'étoient les vceux, les fouhaits , les prieres de tous les gens de bien & vrais Frangois, & a quoi devoieat tendre tous ceux qui defiroient la grandeur & avancement de 1'Eglife s 8c croire que eet infigne & remarquable exemple de la converfion du Roi en rameneroit beaucoup a fon imitation , & feroit le moyen d'óter les heréfies , fchifmes & les troubles, qui y étoient. . Qu'ils leur avoient donné affürance qu'il y vouloit proceder bien-tót, & li folennellement , que toute la Chrétienté connoitroit fon intention & fincerité ; mais qu'ils en pouvoient a préfent dquaier de plus grandes aflii-  yio e f a ï j xances , ayant vü depuis leur derniere entte* vüë, expedier les recharges 6c mandemens aux Prélats 6c autres notables perfonnes de fon Royaume, par 1'aifeinblce qu'il avoit convoquée, 6c pour le defir qu'il avoit d'executer fa p rome (Te 3 qu'il n'y manqueroit point, étant Prince franc , libre , qui n'avoit aucune diffimulation; 6c ne 1'eüt dit, s'il n'en eut eu la volonté. Quand a ce qu'ils avoient dit n'avoir pas beaucoup d'occafion d'ajoüter foi a ces promeffes, en voyant les effets fi contraires , les prioient de confiderer, que fa Majefté avoit affaire avec beaucoup de perfonnes ,. qu'elle defiroit Contenter, fi faire fe pouvoit, tant dedans que denars le Royaume , avec fes amis 6c alliez : aufli qu'en acte fi important , il n'y vouloit être mené par force ou par précipitation , mais vouloit apprendre, être inftruit, 6c après avoir oüi les raifons, faire fa déclaration publique 6c folennelle : autrement il faudroit qu'il eüt été touché d'une miraculeufe 6c extraordinaire converfion , comme faint Paul, 6c celles dont ils avoient parlé : 6c qu'il falloit bien qu'en acte fi folennel de la converfion d'un Roi, on y obfervat quelque autre refpeét 6c ceremonie, qu'en celle d'une perfonne privéet  sous Hen ei IV. 1 yiy "Que s'il ne montroit encore les effets de ce mouvement dont il avoit fon ame touchée j & de la connoiflance qu'il avoit de notre Religion Catholique, cela n'étoit ni nouveau ni fans exemples ; car on lifoit de 1'Empereur Conftantin dans Nicephore, Eufebe , & 1'hiftoire Tripartite , qu'il avoit de* meuré long-tems avant que faire publique profeftion de foi > voire qu'il avoit facrifié aux Idoles , comme en paffant par Vienne en Dauphiné , le jour de la Pentecóte , il facrifia aux Idoles en public, quoiqu'en fecret il füt Catholique : & Gregoire de Tours écrivoit de Clovis notre premier Roi Chrétien , qu'il avoit demeuré long-tems après avoir eu connoiflance de notre Foi, d'en faire déclaration publique. In tnora modici temporis , non fit prcejudicium. Ce n'étoit que pour peu de tems , & ils en verroient bien-töt les effets , & d'une facon ou autre, il y étoit refolu. Ils fcavoient que ce ne feroit au contentement de tous : mais falloit que ceux qui n'y prendroient plaifir 3 fe grataffent la tête. Au furplus, avoit deliberé de fe retirer a fa Sainteté , Sc defiroit de lui donner toute fatisfadion, rendre tout refped Sc foumiffion , & prêter 1'obedience qu'ayoient de coüturae  ff 13' È T ï T § les Princes Chrétiens , & telle que fes pré-* déceffeurs avoient faite , voire plus ample fi befoin étoit : reconnoiffant combien il inv* porroit d'en donner affürance a fa Sainteté , pour la défiance qu'elle pourroit avoir de fes aöions paffées, & foupcon a 1'avenir. Mais en ce qui concernoit 1'Etat , fi fa Sainteté cuidoit y toucher aucunement , pour la connexité des Cenfures , & déclaration de la capacité ou. incapacité du Royaume , ils les croyoient trop bons Francois , pour prétendre que les Etrangers s'en püffent aucunement snêler, & qui fcavoient affez les droits & les loix du Royaume , & libertez de 1'Eglife Gallicane ; & que les Etrangers même qui n'avoient moindre jaloulie a la Souveraineté de leurs Etats , ne vouloient fouffrir que les Papes entrepriffent aucune connoiflance fur leur temporel ; Sc fans en rechercher des exemples de plus loin , le Roi d'Efpagne qui etl tant Catholique , n'avoit pas voulu fouffrir que le Pape ni les Légats qu'il avoit envoyez en Portugal , fe mêlaflent aucunement des affaires dudit Royaume. Ce n'étoit pas qu'il entendit parler du Roi d'Efpagne qu'avec honneur j c'étoit un Grand Prince, Sc fi grand qu'il ne lui manquoit pour fa Monarchie d'Occident , que cette pauvre Couronne %  sous Henri IV. y13 Couronne, qu'il avoit déja devorée en efperance : mais s'il étoit leur adverfaire a préfent, il pourroit être ami, bon frere & allié: ils Favoient vü de leur mémoire. Pour la difficulté qu'on faifoit de vouloir entrer au Traité de la paix Sc füreté pour la confervation de la Religion , ils les prioient leur pardonner , s'ils leur difoient librement ni voir ni fcavoir aucune raifon ou fcrupule qui les en düt empêcher: car étant, le Roi, réfolu & ayant donné parole d'être Catholique , comme ils voyoient qu'il s'y difpofoit , c'étoit beaucoup avancé d'employer le tems qui fe préfentoit , attendant fon alfemblée , a faire ledit Traité , & donner une bonne odeur a tout le Royaume de cette negociation , & faire concevoir efperance de quelque repos Sc foulagement. Et puifque ce n'étoit avec le Roi qu'ils confereroient , mais avec eux qui étoient Catoliques, 8c envoyez dela part des Princes Catholiques , & qui avoient toujours eilimé n'être moins obligez d'affeétionner Sc rechercher les moyens de la füreté de la Religion , qu'eux-mêmes : & fi quelque fcrupule les arrêtoit, pour les confidérations par eux reprcfentées , que M. le Legat leur en pouvoit bailler difpenfe, pour n'empêcher 1'avancement d'une fi bonne oeuvre. Et outre. Tom XV. Kk  SJ4 États qu'ils avoient toujours protefié, que tout ce qu'on traiteroit , feroit nul , & de nul effet , fi le Roi ne fatisfaifoit a fa pronieffe : & pour conclure , ils ne voyoient autrement qu'il eüt été befoiri d'être venu en conference, fi on ne vouloit entrer en ces moyens. Quant a la trêve, elle étoit fort préjudiciable aux affaires du Roi; Sc toutefois ils 1'avoient préfentée, pour faciliterlefdits traités de paix Sc moyens de füreté ;& pour témoignagede leur affedion au foulagement du peuple, s'en remettoient k eux, & en proteffoient, requerans (confideré combien importoit ce qui fe traitoit a préfent ; 8c que tout ce qui s'étoit paffé , n'étoit que difcours Sc difputes ) que tout fut mis psr écrit , au moins les conclufions : car ce n'étoit rien fait, fi on ne demeuroit d'accord. Monfieur 1'Archevêque de Lyon , après avoir confulté avec fa compagnie, répliqua que tout ce qui étoit avancé touchant 1'efpoir Sc promeflë de converfion , n'étoit que raifons humaines , & confidérations d'Etat, qui n'étoient moyens capables de recevoir la foi Sc grace de Dieu : que fi tel acte devoit donner contentement Sc fatisfadion a la Reine d'Angleterre , Sc autres ennemis de 1'Eglife fes alliez, qu'eft-ce que les Catholiques en pou-  sous Henii IV. y i e voient efperer ? Quelle plus certaine ccnjecture de la ficlion & fimulation ? Auffi avoientils eu quelque avis des Ambaffiadeurs mandez en Angleterre & Allemague , fur ce fujet: & voyoit-on bien que les miniltres n'en avoienf pas grande apprehenfion : & qui plus étoit, que le Roi de Navarre ne promettoit que de fe faire inftruire , qu'il y avoit longtemps qu'il Ie demandoit, & qu'il étoit malaifé de fe promettre, que ceux qui l'inftruiroient , le puffient induire par les remonftrances : que Dieu feul qui étoit formateur des cceurs , pouvoit juger de 1'intérieur & de 1'avenir pour le regard des exemples mis en avant, répondit, que veritablement Conftantin avoit eu quelques mouvemens de la foi Chrétienne 5 mais foudain qu'il en fut vraiment touché , il en avoit fait & les déclarations Sc les aétions convenables : & s'il n'abatit foudain les Idoles, ce n'avoit été faute de volonté , comme il le montra après, mais attendant 1'occafion plus propre pour la propagation de la Foi Sc Religion. Et quant a Clovis , on lifoit bien qu'il étoit continuellement exhorté Sc follicité par la Reine Clotilde fa femme ; mais qu'il n'avoit jamais pu être émü & perfuadé, jufqu'a ce qu'au milieu de la bataille , il füt contraintd'implorer 1'aide  $i6 États de Dieu ; & ayant connu fa miraculeufe afliftance en bataille , revenant de la vidoire , avoit fait foudain une belle profelfion de foi, accompagnée d'une merveilieufe contrition de cceur & abondance de larmes ; & étant admonefté par Saint Remy Archevêque de Reims , d'abolir les Idoles & les fuperfiitions Payennes , avoit répondu qu'il étoit tout pret, & alloit y exhorter fon peuple , comme ii fit au même inftant : mais avant que parler, il avoit été prévenu par les acclamations publiques de tout le peuple , renoncant a leur idolatrie & paganifme ; & 1'avoit tellement difpofé, qu'il s'en étoit fervi pour combatre & exterminer les hérétiques Arriens : que le même Auteur écrivoit que le bon Evêque Avitus voyant que Gondebaut , Roi de Bourgogne, fe vouloit faire facrer en cachette , pour crainte du peuple qui étoit pour la plupart infidelle, 1'avoit refufé , ufant de ces mots : Si verè credis quod Chrifius edocuit, extquerey & quod corde te dicis credere , ore frcfer in publicum. Trouvoit bonne 1'oifre qu'on faifoit de rendre le refped & foumifjïon a fa Sainteté qu'il appartenoit: mais qu'il falloit que ce füt en effêt , & par une vraye humilité Chrétienne , Sc filiale obéiffance: jremettant entierement la conyerfion a fon ju-  SOUS HÊNRt IV. jfÏ7< gement, non avec des conditions & modifïcations qu'on propofoit ,. qui étoient les ouvertures d'un Schifme pernicieux & dangereux : confefloit qu'en ce qui étoit du pur. temporel, cette Couronne ne dépendoit que de Dieu feul, Sc ne reconnoiftoit autre : que comme Francois , Sc nourris a la connoifTance des Loix du Royaume , ils fcavoient ce qui étoit de la dignité Sc fouveraineté d'icelui: mais que la oü il étoit queflion de la foi & Religion, comme d'être reconciliéa 1'Eglife» d'être abfous des cenfures EccléGafliques Sc excommunication, & ce qui en dépendoit , c'étoit au Pafleur de 1'Eglife univerfelle d'en a\oir la connoifTance , comme celui auquel Jefus-Chrift avoit commis legouvernementde fon Églife , qui peut lier Sc délier , Sc qui a cette. divine prérogative, Ne fides ejus unquam deficiat. Pour autres points , ne vouloit repeter les raifons ci-devant ayancées, qu'il eftimoit être de tels poids , qu'il n'y pouvoit avoit aucune réponfe fuffifante; & fur ce qu'on difoit qu'il n'étoit donc befoin d'entrer en aucune Conference , fi on ne vouloit traiter de la füreté de la Religion Sc des moyens de paix, ce feroit rapporter beaucoup de fruit de la Conference, fi les Catholiques fe vouloient tous réuriir *  51S Etats même volonté , & a Pobéïffance de 1'Eglife Catholique , Apoftolique & Romaine , pour la confervation de leur Religion & extirpation de 1'heréfie: étant impoflible de batir autrement aucune folide paix , comme ils avoient dit au commencement. Sur ce qu'ils requeroient être procédé par écrit ,ils avoient toujours été de eet avis , & Pavoient requis dès le commencement.'Comme ils deiiroient tous les aétes de ladite Conference être redigez par écrit, offrans de commettre deux d'entr'enx, pour convenir & s'accorder de ce qui s'étoit pafte, les prioient d'en commettre de leur part, ayant tenu regiftre fidelle de tout ce qui s'étoit pafte. Ayant fini, on entra confüfément en difcours & difputes de Ia puiffance du Pape , du reglement 8c diftinclion des puiftances fpirituelles 8c temporelies , des libertez de 1'Eglife Gallicane, dès Bulles d'excommunication ; paree qu'aucuns vouloient dire que ce n'étoit que monitions ou fimples déclarations. Après avoir diné enfemble, on fe retira pour confulter chacun a part. Le fieur de Belin vint rapporter h fa compagnie, qu'il avoit parlé avec le fieur de yic, comme de lui-même, & non au nom de la compagnie; 1 qu'il tenoit tout pour rompu; & prioit qu'on I  , sous Henri IV. S1? re trouvat mauvais, fgachant la neceffité de la ville de Paris, s'il procuroit de leur ballier quelque foulagement; 6c qu'on avifat le malheur qu'il arriveroit, fi a leur retour, on publioit la rupture de la Conference, même fur 1'offre qui étoit faite de la tréve. Sur quoi fut avifé qu'on fe raffembleroit, pour arrêter a quoi on demeureroit d'accord: ce qu'ayant été fait, ledit Sieur de Lyon répeta fommairement les trois points , & fur tout remontra qu'il ije fe pouvoit faire autre chofe, que de remettre le jugement de la converfion a Notre Saint Pere : que faire autrement, c'étoit introduire un fchifme trés-dangereux en ce Royaume, qui en étoit déja par trop taché & diffamé : & au lieu d'y remedier „ c'étoit mettre herefie fur herefie , fchifme fur fchifme, avec un grand fcandale a toute la Chrétienté : que c'étoit a eux qui étoient Catholiques, d'y bien avifer, pour les grands; maux qui en arriveroient, «6c pour l'honneur de eet Etat très-Chrétien, qui avoit eu toujours cette réputatïon d'être ennemi des herefies, & n'avoir pu fouffrir les fchifmes & duquel on pouvoit dire ce que difoit le faint perfonnage 6c bón Francois Saint Bernard en fes Epïtres, qu'on fe gardat de faire Kk 4  S2° États Un fchifme en la terre oü l'on avoit de coütume de réparer les fchifmes. M. de Bourges dit, qu'il entendoit qu'on mandat au Saint Siége; mais ne fe vouloit obliger, fi c'étoit avant ou après j qu'il fe vouloit expliquer plus avant, Sc faire ouverture de lui-mème, laquelle il cuidoit que Meffieurs fes Collegues ne defavoüeroient: c'étoit que le Roi fe feroit abfoudre, ad fu~ turam cautelam, & iroit a la MefTe; & après avoir eu 1'abfolution, manderoit une Ambaffade a Rome, pour demander Ia benediction du Pape, & lui faire 1'obédience accoütumée, pour ufer du mot ufité en Cour de Rome. Car, pour parler iibrement, ils ne vouloient pas mettre le Roi en cette peine & hazard, Sc fa couronne en compromis au jugement des étrangers; & fous prétexte de connexité Sc dépendance de 1'excommunication, lui baiüer connoifTance de 1'incapacité prétenduë : combien que ce n'étoit proprement excommunmation, mais déclaration: Sc qu'il y avoit des remédes domeftiques Sc ordinaires, fans recourir aux etrangers extraordinaires: qu'il montreroit, quand il feroit befoin, par droit commun , Par raifons Sc par exemples, que les Évêques pourroient  sous Henei IV. 5"2i bien y pourvoir en France, & qu'on fcavoit affez quels étoient les privileges de TEgiife Gallicane. Car fi le Pape vouloit repellere eum d limïne judicïi, dire qu'il eft relaps , impénitent, condamné, ou entrer en autres fetnblables confidérations, ou en feroit i! ? Quelle faute auroit fait fon confeil ? En quel état feroit cette Couronne? Qui feroit le Curateur aux biens vacans ? Aux perfonnes privées, on pouvoit ufer de ces termesla , mais non aux perfonnes illuftres & de fi haute & éminente dignité; même aux Rois & Princes Souverains, qui portoient leurs Couronnes fur la pointe de leurs épées, 8c n'étoient attachez aux loix & confiitutions vulgaire* : que pour parler bon Francois, ils n'étoient réfolus d'engager la Couronne dela les monts. La replique fut faite généralement par ceux de 1'affemblée, requerans de produire les Canons 8c les exemples que les Évêques enffent pouvoir de revoquer & retraéler les jugemens du Saint Siége, confirmez par cinq ou fix Papes tout de fuite, qui ne pouvoient être que jugemens fouverains & arrêt du Saint Efprit: que Ia connoifTance, moderation 8c interpretation n'en pouvoit appartenir qu'au Saint Siége, tant de droit, que paree  S22 États que par lefdites Bulles, leurs Saintetez s'en étoient toujours réfervé la connoiflance , & 1'avoient interdite a tous autres, de quelque qualité qu'ils fuffent, comme on pourroit voir par la lecture d'icelles, oü l'on verrok bien fi ce n'étoient que fimples déciarations, comme l'on vouloit dire; qu'on ne trouveroit pas qu'en la connoiflance ou procedure du crime d'héréfie, il y eüt particulier privilege & acception de perfonnes: au contraire que comme il y avoit plus de doute Sc de danger, on y devoit. apporter plus de caution Sc prévoyance. Que ferons-nous donc, dit M. de Bourges ? Trouvez-nous quelque moyen ; affüreznous; joignez vous avec nous: prions le Pape qu'il faffe ce bien a la France. M. de Mayenne nous y peut beaucoup aiderg. & fe rendre garant, envers fa Sainteté de la bonne volonté du Roi, & moyenner qu'elle mande en bref a M. le Cardinal de Plaifance, qui aime tant le bien de ce Royaume, qu'il voudra avec nombre de Prélats Eccléfiaftiques s'employer a une fi fainte & fi bonne ceuvre. M. de Lyon répondit que ce n'étoit a eux qu'il fe falloit adrener pour telle affaire; qu'ils ne pouvoient ni devoient y toucher;  JOUS HlNRI IV. $2% c'étoit a eux a fe pourvoir comrrre ils devoient , Sc comme ils 1'entendoient; c'étoit a Notre Saint Pere feul, auquel il fe falloit addreffer pour juger de ladite converfion , Sc de ce qui en dépendoit, & ordonner la penitence ; a eux tous d'entendre fes mandemens Sc intentions , comme enfans de 1'Eglife : que M. de Mayenne étoit par trop informé du devoir qu'il devoit a 1'Eglife, & refpeét a Sa Sainteté, pour entreprendre chofe qu'elle put trouver mauvaife, ou apporter quelque préjugé a fon intention en affaire de telle importance , qui regardoit la Religion & 1'Etat de la Chrétienté. Bien les pouvoit-il affurer que M. de Mayenne embrafferoit très-volontiers les moyens que Sa Sainteté jugeoit être propres pour le bien du Royaume, voyant la Religion hors de tout peril & danger, n'ayant autre but & interêt. Sur ce, on entra en longue difpute les uns contre les autres, & avec telle contention , qu'on jngeoit tout être rompu ; & qu'il ne falloit attendre autre iffne de la Conference; jufques-la que ledit Sieur de Bourges dit: Meffieurs, nous nous retirerons donc avec vos congez: Sc comme on fe levoi', parlant avec le Sieur de Bellievre, ils di-  S24 Etats rent qu'il „e falloit fe départir ainfi , & abandonner une fi bonne oeuvre: M. le Comte de Schomberg prendra Ia peine de faire encore un voyage, & rendre capables ceux qu'il appartient, de ce qui eft du devoir & de la raifon : & nous ferons entendre Ia réponfe Vendredi prochain, Dieu aidant. Et paree que le terme de la furféance darmes étoit expiré, on demanda de la proroger. Les députez du parti du Roi dè Navarre répondirent n'y pouvoir confentir, & en avoir expreffes défenfes, reconnoifians fort bien que tout ce qui fe faifoit, n'étoit que pour gagner Je tems, & faire avancer les forces étrangeres : outre qu'il fe commettoit beaucoup d'abus au reglement , & qu'on faifoit entrer grande quantite de vivres. On leur dit qu'on fcavoit bien qu'ils avoient quelque entreprife a une place de confequence: que fi c'étoit Pour cela, 13 mine étoit éventée, 6V qu'ils ne devoient faire difficulté de continuer la furféance durant les Fêtes de Pentecóte -prochaine : en- ' fin de part & d'autre fut mandé aux garnifons de fe contenir pour trois jours. Et étant fur leur départ, lefdits Députez du parti du Roi de Navarre demanderenr que puifqu'on ne vouloit rien donner par  sous Henri IV. j2ƒ ecrit, dn moins que comme un particulier d'entr'eux avoit donné leur écrit, auffi de leur part quelqu'un ufat de même faveur. On prit loifir d'y déliberer fur ce qu'un de la compagnie vouloit offrir de la bailler : fur quoi ii y eut diverfité d'opinions, même fur la qualité de 1'écriture qu'on produifoit, trouvant qu'il y avoit des termes qui ne répondoient a 1'intention des Etats, & qui fembloient engager par trop avant. Enfin par la pluralité des voix, fut réfolu, que fi quelque particulier en vouloit donner, & non au nom des Etats ni de la compagnie, il lui feroit permis : ce qui fut fait, étant ledit écrit de la teneur qui s'enfuit. R É P O N S E. Messieurs, vous nous avez dit, & depuis écrit que le Roi de Navarre fe doit faire infiruire, & rendre bon & vrai Catholique dans peu de jours; que ce vceu & defir étoit en lui, ou pour mieux dire, qu'il étoit Catholique en 1'interieur de fon ame, il y a déja long-tems : mais que le malheur de nos guerres 1'avoit empêché de 1'effeduer.  526 États Vous nous invitez fur cette aflurance, de traiter avec vous des moyens de bien afTurer la Religion, & mettre le Royaume en repos, lui fe faifant Catholique; & pour arres de fa bonne volonté, offrez, en fon nom, une furféance d'armes pour deux ou trois jours. Cette propofition nous elf autant agréable, que celle que nous fites a Pentréè de notre Conference, de le reconnoitre des maintenant fous efpoir de fa future converfion, nous fut déplaifante & ennuyeufe. En quoi fi notre réponfe vous fembla aigre, excufez ou plutót loüez notre zele , & confeilez qu'il étoit jufie: & que ne le pouviez efperer autre de nous, qui fommes toujours demeurez fous 1'obéïffance de 1'Eglife, du Saint Siége, & des commandemens des Saints Peres. Nous defirons cette converfion que promettez : prions Dieu qu'elle avienne, qu'elle foit vraye & fincere j & que les adions qui doivent préceder, accompagner & fuivre cette bonne oeuvre, foient telles que Notre Saint Pere, auquel feul appartient d'en faire le jugement, & de le reconciKer a 1'Eglife, en puifTe demeurer fatisfait, & Ia Religion affürée, a fon contentement & des Catholiques, qui après avoir fouffert tant de miferes, ne defirent rien plus que de joüir d'un  sous Henri IV. j/27 bon & durable repos, fans lequel ils prévoyent & jugent bien la ruine inévitable de eet Etat. Nous ne pouvons toutefois vous celer que ne voyons encore rien en lui qui nous puiiïe donner eet efpoir. Celui qui veut faire le bien, doit premiereinent laiffer le mal: qui veut entrer-en 1'Eglife, & recevoir 1'inftruction par les mains des Évêques, Prélats & JJocleurs, comme vous le publiez déja par tout, les doit approcher de lui, éloigner les Miniftres, difcontinuer 1'exercice de la Religion qu'il commence a blamer : & néanmoins chacun fcait qu'il efi toujours le même en fes paroles & aöions, & en fa conduite. Nous nous étonnons bien davantage de ce que nous avez dit & repeté fi fouvent, qu'il étoit Catholique en fon ame dès longtems, quand nous confiderons qu'elles ont été fes aclions du paffé. Car s'il eft vrai, comme fe pourroit-il faire que cette affeétion cachée en 1'ame d'un Prince, qui a pü toujours en cette aétion ce qu'il a voulu, eüt produit des effets fi contraires, & tendans du tout a 1'établiffetnent de fon erreur, & a la ruine de notre Religion, comme chacun les a vüs & connüs? Ou bien, s'il s'étoit conduit ainfi,  S2$ É T A T S étant déja Catholique en fon ame, que de- voris-noüs craindre de J'avenif? II vaudroit mieux dire qu'il ne Pétoit pas lors, tel au moins que les Catholiques qui reconnoiifent 1'Eglife Catholique, Apoftolique & Romaine, le veulent & defirent : mais que Dieu lui en donne aujourd'hui Ie mouvement & Ia volonté: c'eft lui feul qui le peut faire auffi quand il lui plaït. Et ce difcours nous fatisferoit davantage que de mettre encore en avant, comme vous faites, qu'il s'étoit fiéchi a la priere des fiens. Car les confidérations temporelles, & les raifons humaines peuvent bien changer 1'exterieur: mais notre ame ne peut être teinte & renduë capable de cette dodrine, que par la grace du S. Efprit. Vous êtes affez inflruits, Meffieurs, de la forme & des moyens que 1'Eglife a prefcrits pour venir a une vraye converfion. Nous vous exhortons & prions de lui en donner le confeil. II fe peut bien faire inftruire par des bons Évêques, Prélats & Dodeurs; & c'eft ce que nous vous avons dit, conferans avec vous. II peut auffi faire voir a chacun par fes adions, que cette inftrudion Paüra changé. Mais c'eft a Notre Saint Pere, & au Saint Siége  sous Henri IV. $29 Siége d'y mettre ia première & derniere main» comme étant celui feulqui a le pouvoit & 1'autorité d'approuver fa converfion , Sc lui donner Pabfolution, fans laquelle il ne peut être tenu pour converti, Sc reconcilié a 1'Eglife parmi nous. Quand il fe prefentera Sc envoyera de fa part, le reconnoiffant Chef de 1'Eglife avec la foumiffion Sc le refpeét qui lui eft du, nous nous proinettons tant de la pieté, integrité Sc prudence de Sa Sainteté, que fans aucune paffion ou confideration de 1'interêt de qui que ce foit, elle y apportera tout ce qui fera jugé être de fon devoir Sc foin paternel, pour-conferver Sc mettre s'il eft poffible ce Royaume en repos : dont il a déja montré que la confervation lui étoit, après Ia Religion , plus chere que toute autre chofe. Vous ne devez faire aucun préjugé de fa volonté fur le refus qu'il a fait ci-devant de recevoir Sc ouïr M. le Marquis de Pifany : car il étoit envoyé de la part des Catholiques qui afllltent le Roi de Navarre, & non de la fienne: qui fut un mépris duquel il fe pouvoit tenir offenfé, Sc un témoignsge auffi que Ia volonté de celui, de la converfion duquel on lui donnoit quelque efpoir, en étoit du tont éloignée, puifque lui-même Torne XV. ' LI  États n'y envoyoit en fon nom, Outre ce, qu'au même tems que le voyage fe fit, les Magiflrats qui tiennent lieu de Parlement en fon parti, donnoient des jugemens diflamatoires contre la Bulle Sc autorité du Pape Sc du Saint Siége. Or nous voulons croire qu'on y procedera a 1'avenir d'autre facon, 6c avec plus de refpeét 6c confidcration de la dignité du Saint Pere, 6c au devoir que nous avons au S. Siege. C'eft donc ce que nous pouvons répondre fur 1'ouverture que nous avez faite de fa converfion, que la defirons vraye 8c fincere; mais qu'elle fe doit faire avet 1'autorité 6c confemement de Notre S. Pere : qu'il fe doit addreffer a lui, 6c non a nous. Tout ce que nous y pourrions apporter davantage, feroit d'envoyer de notre part vers Sa Sainteté , pour lui repréfenter Pétat deploré 8c miferable de ce Royaume, le befoin qu'il a d'un bon 6c alfüré repos: néanmoins que fommes deliberez de fouffrir tout, moyennantla grace de Dieu, plutót que de laiffer notre Religion en peril, entendre la-deffus fon intention, recevoir fes commandemens, 6c y obéir: en quoi nous procederons avec telle foi Sc integrité, qu'un chacun connoitra qu'avec la Religion, nous aimons Sc voulons rechercher  sous Henri IV. yji de tout notre pouvoir le bien & repos de ce Royaume, qui ne peut faire naufrage & perir, que n'y trouvions notre ruïne, comme vous la votre. Avant que cette converfion foit avenue, 8c qu'elle foit ainfi recuë & approuvée; nous vous prions prendre de bonne part, fi nous differons de traiter avec vous ; car nous ne Ie pouvons faire fans approuver dès maintenant cette converfion, dont le jugement doit néanmoins être remis a Sa Sainteté. Nous defirons davantage, quand 1'approbation en feroit faiie, prendre 1'avis de notre Saint Pere fur les fiiretez requifes , pour conferver en ce Royaume la feule & vraye Religion, qui eft la Catholique, Apoftolique 8c Romaine. Avec ce, nous confiderons que quelques difficultez pourroient naïtre fur le traité defdites füretez, qui empêcheroient ou retarderoient 1'effet de cette bonne oeuvre, au blame de ceux qui en feroient peut-être les moins coupables , ou après la converfion elles pourront être demandées publiquement, 8c comme a la face de toute la Chrétienté, qui y a trèsgrand interêt, aufli-bien que nous : chacun detneurant obligé d'y apporter ce qu'il doit. Pour le regard de la furféance d'armes, après que ferons éclaircis de votre intention LI 2  3"32 ê t a t s fur les deux précedens articles, nous y ferons réponfe, qui témoignera que ne delirons rien plus que le bien, décharge & foulagement du peuple. Jeudi io° jour de Juin la fufdite Conference fut rapportée, & après plufieurs dofles Sc graves difcours faits dans les charnbres fur ce fujet, on approuva ce qui avoit été traité par les Députez, hors 1'écriture donnée, laquelle ne fe conformoit entierement a la réfolution prife: mais fut remontré par lefdits Députez, qu'elle n'avoit été donnée a leur nom, moins encore des' Etats, Sc par ainfi qu'on n'en pouvoit faire aucun fondement: & 1'Ordre de 1'Eglife en particulier, protefta de ne 1'avoüer aucunement: néanmoins fut trouvé bon d'entendre leur réponfe au jour Sc lieu qu'il feroit avifé. Séance du Vendredi on^iéme jour de Juin. C e fut le lendemain 11 du mois, jour de Saint Barnabé, au lieu de la Villette, au milieu du chemin de Paris & Saint Denis, cn la maifon du Sieur d'Emeric 1'un des  sous H eïk i I V. y ? 3 Députez, oü arriverent lefdits Sieurs de part & d'autre, en même heure, enviroa le midi : & ne fut poiïible dvempêcher qu'il ne s'y trouvat un grand nombre d'hommes venus de Paris, attentifs de fcavoir I'iflue dc la tréve propofée, plus pour prendre quelque relache a tant de miferes & prefqne incroyables, que cette grande Ville fouffroit depuis long-tems, que par faute d'affeétion a fa Religion, en laquelle il fe faut alTürer qu'elle ne variera jamais, avec la grace de Dieu; Sc ne voudra laiffer perdre pour quelque refpeét que ce foit, eet honneur immortel qu'elle s'eft acquis , d'avoir plus enduré que n'a jamais fait Ville du monde, pour la Reügion, Sc montré a la France Sc aux fiécies avenir, un exemple admirablc dédevotion, Sc d'une foi Sc conftance invincible. Après donc s'être affemblez, M. de Bourges pri'a la compagnie de fe reftbuvenir de ce qui avoit été fait en la précedente Conference, Sc avifer fi on n'y avoit rien oublié 5 Sc dit que les Sieurs de Schomberg Sc de Revol, étoient allez vers les Princes Catholiques, leur repréfenter ce qu'il falloit : dont ils s'étoient dignement & énergiquement acquittez, comme il apparoitroit promptement par bons effets. Ne penfoit être befoin d'ufer de plus longs difcours • LI 5  États car leur intention étoit de ne traiter que par écrit: & d'autant qu'on avoit iniifté d'y rediger tout ce qui s'étoit pafte entr'eux dès le commencement, ils 1'avoient fait, fans y avoir rien oublié de ce qui étoit de la fubftance, comme on verroit par la déclaration, laquelle après avoir été lüé par le Sieur de Revol, il préfenta fignée de chacun d'eux, requerant la réponfe, 8c fmgulierement fur la tréve, ou il employa de grandes proteftations. Comme les Députez des Princes Catholiques & Etats s'afTembloient, 8c retiroient a part pour déliberer; arri verent les Sieurs de la Chaftre 6c de Rofne, qui furent priez. d'affifler 6c bailier leurs avis fur ce qui fe prefentoit, 8c fur la diffieulté, fi on recevroit ladite déclaration, de laquelle leélure derechef faite par le Sieur Bernard, fut par commyn avis réfolu de la prendre avec les qualitez 6c conditions, que le Sieur de Lyon leur protefteroit, comme il fit, qu'il y avoit, en eet écrit, a leur corredion, du changement, 6c pour les termes dont on avoit uféj 8c pour la fubfiance, combien qu'il en ap- ■ prochat aucunement : mais que leur iuten- ■ tion avoit été de s'accorder pour faire un dif- • cours de tout ce qui avoit été traité, propofé: & débatü 5 afin que la verité fut connue : 8c;  sous Henri IV.. 53? que de leur part, ils avoient tenu regiftre de jour en jour, oü le tout étoit fidellemcnt rapporté, prefque jufques aux mêmes paroles. Quant a la tréve, on ne fcavoit comme on leur en faifoit tant d'inltance, vu le iiege de Dreux qu'on avoit commencéj & que M. le Duc de Mayenne avoit mandé au Comte Charles de cefifer d'affieger & prendre des places, & de ne palier outre : néanmoins qu'ik feroient toujours reconnoitre combien le foulagement du peuple leur feroit recommandable. Ledit Sieur de Lyon ajoüta qu'il avoit. une plainte a faire de la part d'aucuns Prélats qui étoient en raffemblée, contre unChauveau, qui fe difok Eccléfiaftique, & prcchoit publiquement 1'heréfie, & détraöoit,, en chaire, du Pape & de fon autorité : que pour les Miniftres qui étoient parmi eux > il s'en remettok a eux : mais de tolerer que cela fe fit fous le furplis, c'étoit chofe paf trop honteufe & feandaleufe. Le Sieur de. Bourges repliqua qu'il devok fuflire de voir les principales conclufions rédigées en écrit;. que du fait de Dreux, ils en parleroient; & pour le regard de Chauveau, s'il y avoit des témoins, feroient informer, & chatier ceux qui fe trouveroient coupables. Voici 1'écrit qui fut baillé» LI 4  S3& Etats Meffieurs, en nos premières Conferences, nous vous avons prié fur Jes differends qui empêchoient notre reconciliation, & fur ie cöimnun defir & befoin de la paix, qui ne peut être que fous un Roi legitime , ni fous autre que celui qui en a le droit par la Loi du Royaume, de vouloir confi'derer avec quelle patience les anciens Chrétiens ont toujours obéï aux Princes Souverains & Magidrats par eux ordonnez, bien qu'ils fuflent Payens, ennemis & perfécuteurs de ceux qui faifoient profeiïion de la Religion Chrétienne : leur patience procedant non de leur petit nombre ou foiblèfle, mais des enfeignemens qu'ils avoient en la Sainte Écriture, cxhortations & exemples des Saints Peres. Nous vous avons néanmoins remontré, peur Je 1 egard du Roi qu'il a plu a Dieu nous donner, que nous ctions en meilleure condition qu'er.x ; cc que ce que nous defirons tous pour le règafd de la Religion, nous i'efperons de la grace de Dieu, felon la promeffe crue Sa Majefté auroit faite a fon avenement a la Couronne, & par plufieurs démonftiations & déclavations fubféquentes, d'en vouloir prendre les moyens; dont faifoit affez de foi la dépêche de M. le Marquis de Pifany vers Notre Saint Pere le Pape, laquelle bien cppelle fut fous autré  sous Henri IV. jf>7 nom que de Sa Majefté, n'étoit toutefois fans fon feu & defir : de forte que nous avions occafion de 1'eftimer comme faite par ellemême. A cela fe conformoit fa permiftïon & volonté de notre Députation & venue en cette Conference : fur quoi nous vous aurions invitez & conjurez au nom de Dieu, & pour 1'affedion que vous avez a la Religion Catholique, & au bien & repos de eet Etat, de vouloir joindre vos vcevix avec les nötres , eftimans que Sa Majefté fupplie d'un commUn accord, de ne vouloir plus differer Feftet & exécution d'une fi fainte réfolution, que croyons qu'elle avoit dans le cceur, feroit d'autant plus incitée d'acceJerer ce contentement a fes bons fujets, quand elle connoïtroit que eela put facihter la paix, que nous jugeons fi neceffaire pour la confervation de la Religion Catholique, & pour faire ceffer les troubles Sc calamitez dont ce Royaume eft fi miferablement affiigé. C'eft, en fomme, la priere que nous vous avons faite en premier lieu, Sc non autre, ni a autres conditions ; Sc pour ce que nous avons feu, que ce qui vous a été dit de notre part, a été en plufieurs lieux, pris & interpreté autrement que notre intention,  'S3% États nous 1'avons bien voulu deréchef repréfenter en ce peu de mots ; & eftimé être a propos de le vous bailler par écrit, pour ne laiffer aucun doute en 1'efprit de perfonne, de la fmcerité avec laquelle nous avons voulu & Voulons toujours proceder en ce fait. Nous ne pouvons auffi moins faire, pour plus claire intelligence de ce qui eft, fur ce, paffé entre nous, que de dire que n'avons pü obtenir de vous autre réponfe, fi ce n'eft que vous defiriez, comme nous, la converfion de Sa Majefté, & vous en rejouiffiez : mais que ne pouviez entrer en aucun traité avec nous, qui füt a fon prorit, que n'eufïiez, fur ce, 1'avis de Sa Sainteté, alleguans avec quelque paffage de rEcriuire, des raifons d'Etat qui regardent, comme vous dites, la confervation de votre parti, par lefquelles foütenez ne vous pouvoir plus amplement déclarer fur ladite priere. Cela ayant été rapporté aux Princes & Seigneurs, de Ia part defquels nous fommes ici venus, par deux d'entre nous, & le tout reprefenté a Sa Majefté, elle auroit pris Ia. bonne & finale réfolution, que nous avons baillée par écrit dès le dix-k; jour de Mai, portant Palfürance de ce q paravant nous difions efperer, a laq..  sous Herki IV. 5"39 pour briéveté nous nous remettons, n'y voulans & n'y pouvans ajoüter aucune chofe. II refte maintenant a vous dire qu'après avoir entendu ce que M. 1'Archevêque de Lyon nous a dit au nom de vous tous, a notre derniere eritrevüë, en réponfe de notredit écrit, nous en avons pareillement donné compte a Sa Majefté, & aux Princes & Seigneurs qui font prés d'elle : étant, deux d'entre nous, allez faire eet office au nom de tous. Votre réponfe confifte principalement en deux points : au premier, vous continuez a déclarer le contentement que ce vous fera de voir la converfion du Roi , fmcerement effectuée : affoibliffans néanmoins ce témoignage par quelque défiance que vous montrez fur ce que depuis ladite déclaration, vous avez en" tendu que Sa Majefté a continué Pexereice de fa, Religion, comme elle faifoit auparavant. Meffieurs, quand on vous accordera ce que pour ce regard vous dites , il ne fe trouvera toutefois qu'il y ait aucune contrariété a ce que nous avons baillé par écrit, ni auffi aucune contravention ès promeffes de Sa Majefté , lequel eft d'ailleurs connu pour Prince de bonne foi, nourri en la fimplicité militaire,  '54° ÉTATS qui n'a point ni defard en fes paroles ni en autres chofes. Que fi quelques-uns ont voulu colomnier ies actions, s'il étoit ainfi qu'il eut dans le coeur autre volonté que d'effeduer & obferver ceq.ul a fi expreftement promis & allure; de fe vouloir faire inflruiré, & comentcr fes bons fujets Catholiques au fait de la Religion au heu de ce qu'il fait, il n'etlt pas eu faute de confeil & d'invention pour faire quelques actes exterieurs , afin de faire croire qu'il eft ahene de ladite Religion. Mais la facon éloignée de tout artifice, avec laquelle il a procédé jufques a prefent, peut afTurer un chacun que ce qu'il aura une fois pro,™ ,] Pobfervera faintement & de bonne foi. N, le Roi Clovis , ni 1'Empèreur Conftantin le Grand, ne déclarerent pas au premier jour ce a quoi ils s'étoient refolus en leurs cceurs touchant Ia Religion Chrétienne • ce que combien qu'il ne convienne en la per. W de Sa Majefté, d'autant qu'ils tenoient la loi Payenne, & elle Chrétienne , feulement feparée de notre foi & Religion par quelques erreurs, dont l'on doit tachér dele Wtirer toutefois il femble n'être hors de propos de Ia mettre en coniideration , pour  sous Henri IV. 5-4* montrer que les changemens , oü il va non feulement de la confcience, mais aufli de 1'exemple , mêmement des perfonnes de fi grande dignité, ne fe peut faire en un moment , & faut que les formes qui y font requifes, precedent-; L'autre point de votre réponfe contient', que vous ne pouvez traiter d'aucun accord avec nous , fi ce n'eft par 1'avis du Pape , remontrans que vous n'approuveriez en aucune forte la converfion de Sa Maiefte, fi ce n'eft après qu'elle aura été jugée , & approuvée par Sa Sainteté. A cela nous répondons , que nul n'a montré plus que les Princes & Seigneurs , de la part defquels nous conferons de ces affaires, & avec lefquels nous fommes joints , defirer qu'il foit deferé a Sa Sainteté , & au Saint Siége Apoftolique; & encore que nous n'ayons vü jufques a prefent de fa part,, que toute faveur , fecours d'hommes, de confeil , & de toutes autres chofes a votre parti en cette guerre , & nc/us au contraire en avons fenti & recu toute defaveur, fi eft-ce que cela n'a point changé ceux que nous repréfentons , ni fait perdre le deiir extréme qu'ils ont toujours eu , & auquel ils contiauent, de regagner la bonne grace de Sa Sainteté.  (j^s Etats Le refus ou plutot rigueur , fi ainfi nous 1'ofons dire, avec la révérence que nous lui devons , qui a été ufée a Monfieur le Marquis de Pifani, de ne le voir & oüir, la charge qu'il a euë de leur part, n'a de rien diminué de leur bonne affection & obfervance envers Sa Sainteté, & le Saint Siége : auffi ont-ils entendu,&croyent cela être avenu; non par mauvaife volonté qu'elle leur porte , mais pource qu'aucuns de vos Miniftres s'y font tellement oppofez, éVavec telle importunité & proteftation, que Sa Sainteté violentée avec cela de la tirannie des Efpagnols , a été retenuë de faire le recüeil & traitement audit fieur Marquis , que meritoit fa legation & qualité, & que nous efperons néanmoins qu'elle fe refoudra enfin de lui oétroyer. Pour le regard de Sa Majefté, fi fa confcience & fa ferme réfolution de fe bien unir avec Sa Sainteté & ledit Saint Siége , & l'opinion qu'elle a du bon naturel de Sadite Sainteté , qu'elle efiime auffi Prince très-vertueux & amateur du repos de la Chrétienté, ne 1'affuroient de la trouver favorable au bien de ce Royaume, les apparences & procédures paffées fourniroicnt affez jufte argument pour s'excufer & juftifier envers le monde: fi elle demeuroit retenuë de s'adreffer a Sa Sainteté.  sous Henri IV. J43 Mais par notre écrit précédent, ce que nous vous avons dit ouvertement la fainte intention de Sa Majefté, qui eft de contenter, au fait de la Religion , tous fes bons fujets Catholiques, & fe comporter, pour le regard de 1'obéiffancè & refped: qui eft diï a Sa Sainteté, ainfi que doit un Roi de France, premier fils de 1'Eglife , Très-Chrétien & Très-Catholique , nous vous le confirmons derechef, comme fcachans bien que Sa Majefté continue en cette volonté; ne devez douter qu'ayant ce defir de fe bien unir avec Sa Sainteté, il ne le fafte par les moyens que l'on doit parvenir a cette bonne reconciliation. Pour eet effet , Sa Majefté a mandé & convoqué, ainfi que déja vous avons déclaré, les Princes de fon fang , autres Princes, un bon nombre de Prélats de 1'Eglife & Docfeurs en la Faculté de Théologie , les Officiers de fa Couronne, & plufieurs autres Grands de ce Royaume , enfemble aucuns des principaux & des plus notables Officiers de fes Parlemens; efperant, moyennant la grace de Dieu &bon confeil qui lui fera donné par une fi notable alfemblée , qu'il fera pris unefi bonne & fi'fage réfolution touchant le fait de fa converfion & abfoiution , que Sa Sainteté & tous les autres Potentats Catholiques auront occa-  États fion d'en être bien contens &: fatisfaits ; & tenons pour afTüré que nul defirant la confervation de la Religion Catholique , Sc la profperité de eet Etat, n'y voudra contredire. Au demeurant, la ruine que nous voyons en ce Royaume , Sc fouffrons tous avec infini regret de gens de bien, Sc que nul bon Francois ne peut regarder a yeux fecs, doit faire chercher tous les moyens , entant qu'il eft au pouvoir des hommes , de hater les remédes pour empêcher la totale ruine de notre Patrie. C'eft.a cette fin que Sa Majefté vous a fait dire par nous fa bonne réfolution'touchant la trève, a laquelle fi vous ne voulez entendre , finon entant que ferez plus avant fatisfaits , que nous ne pouvons Sc ne devons par raifon de ce que defirez pour votre réponfe , Dieu qui eft le juge des uns Sc des autres , fera que tout ce Royaume connoitra Sc verra clahement, d'oü vient, Sc a qui devra être imputé le retardement du bien & foulagement qui aviendra par le moyen de ladite tréve , qui nous pourroit, avec 1'aide de Dieu , acheminer a une bonne paix. Fait 1'onziéme jour de Juiri. Ainfi figné , 1'Archevêque de Bourges , Chavigni, Bellievre , Gafpard de Schomberg } Camus , de Thoul & Revol. Le  sous Henri IV. y^ Le Dimanche fuivant, après Ja Heffe, ledit écrit fut lü & rapponé, & remis a y deliberer Je Jendemain quatorziéme : Sc paree qu'en premier lieu par Jedit écrit, ils faifoient une récapitulation fort artilicieufe , pour couvrir Sc faire glifTer leurs premières propofitions , Sc venir a celles qu'ils cuidoient avoic quelque apparence, on trouva que Ja plus belle réponfe, Sc naïve éloquence étoit de leur prefenter en face Ja verité , par un fidéle rapport qu'aucuns de Ja compagnie feroient chargez de drefier le plus diligeminent qu'il feroit poffibJe ; Sc au Jieu de eet abregré , réprefenter les difcours au Jong fans rien cacher & déguifer. Pour Je fecond point , on connoiflbit bien, tant par ledit, écrit, que par le rapport de la piéce précedenre Conference, Sc proteflation de Jeur future cauteJe , qu'ils ne tendoient, Sc prétendoient qu'a précipiter ouvertement ce Royaume a un fchifme , Sc faire quelque aüdacieux attentat contre 1'autorité du Saint Siége, qui leur étoit juftement redoutable : mais puifque les Députez y avoient affez répondu , & fait les idmonitions néceffaires pour les en retiter, c'étoit tems perdu d'y employer d'autres réponfes. Et pour voir encore plus claire* ment le deffein de leurs futures cauteles Tome XK Mm  jfgg E T A' T S enfuite des paffées , découvrir les faintes in. tentions qu'ils difoient apporter en ces traitez, au rétabliffement & füretez de la Religion Catholique , du même tems on recouvra la promeffe par laquelle ils s'étoient obligez aux Hérétiques de ne rien faire au préjudice de la Religion Reformée , des Edits de liberté de confcience , de la bonne union & amitié qui étoit entr'eux, en attendant une affemblée mélée de 1'une 8c 1'autre Religion pour reftaurer ce Royaume a la mode d'Angleterre : lequel contrat n'a befoin d'autres pinceaux , ni d'autres couleurs pour être reprefenté au vif , que d'être lü , comme il ne pourra fans larmes , ou fans foüpirs, par ceux qui foHt de bouche 8c de cceur Catholiques , y voyans ces beaux accouplemens , ces fociétez' 8c alliances avec les ennemis de Dieu , qui ne font que conjurations contre 1'Eglife , pour la déchirer par telles divifions 8c confufions de foi , 8c tirer le Royaume en perpetuelle defolation.  sous Henri IV. 541 > Protneffe faite par les Catholiques da parti du Roi de Navarre aux Hérétiques. Nous, Princes & Officiers de la Couronne , & autres Sieurs du Confeil du Roi fufnommez, voulans öter a ceux de la Religion dite Reformée, toute occafion de douter qu'au traité qui fe fait de prefent a Surefne entre les Députez des Princes, Officiers de la Couronne, Catholiques reconnoiflans Sa Majefté, par fa permirfion , & les Députez de 1'affemblée de Paris , foit accordé aucune chofe au préjudice de ladite Religion Reformée, & de ce qui leur avoit'été accordé par les Edits des défunts Rois, attendans la réfolution qui pourroit être prife pour le retabliffemem & entretenement du repos de ce Royaume, avec Pavis des Princes, Seigneurs & autres notables perfonnages tant de Pune que de 1'autre Pveligion, que Sa Majefté a avifé faire venir éc affembler en cette ville de Mantes au 20 de Juillet prochain, Nous promettons tous, par la permiffion de Sadite Majefté, qu'en attendant ladite réfolution} il ne fera rien fait & Mm 2  '54'S États paffe en ladite affemblée par lefdits Députez de notre part, au préjudice de la bonne union & amitié qui eft entre les Catholiques qui reconnoiifent Sadite Majefté, & ceux de ladite Religion , ni des Edits. Promettons auffi d'avertir lefdits Députez étant a Surefne, de notre prefente réfolution & promeffe par nous faite, comme jugée neceffaire pour éviter toute altercation entre les bons Sujets de Sadite Majefté, afin que de leur part ils ayent a s'y conformer: en foi de quoi nous avons figné la préfente, le 16 jour de Mai, Pan iy 03. Signé, Francois d'Oriéans , Comte de Saint Paul, Hurauh, Chancelier, de Montmorenci, Meru, R.oger de Bellegarde, Francois Chabot, de Brion, Gafpard de Schomberg, & Jean de Levis. Quant a latréve a laquelle on n'avoit voulu contefter, on fut contrahit d'y entrer: mais on y trouva tant d'épines Sc perplexitez, qu'on ne fcavoit qu'elle réfolution y prendre. On voyoit les afHiétions generales du Royaume, les nécefïitez du peuple, Pextrémité de la ville de Paris, 1'état auquel on fe trouvoit pour lors, le foulagement que le peuple pouvoit prendre  sous Henki IV. J*4f par la tréve & fufpenfion d'armes, fans qu'elle put, comme on penfoit, apporter aucun préjudice a ce parti , ni avantage aux ennemis t au contraire que les bonnes villes refpirans & reprenans haleine , auroient plus de moyens de fe fortifier en leur réfolution. Les autres jugeoient 1'affairede telle confequence, qu'on expofoit la Religion en peril trés-évident -y que c'étoit contrevenir au ferment folennellement prêté de ne faire aucune paix ou tréve avec 1'Herétique , ouvrir la voye a la diffipation Sc dïffolution des Etats, & perdre efpoir de ce qui étoit attendu avec fi grande devotion, qui*. étoit P/elecüon d'un Roi très-Chrétien & Catholique : qu'il ne falloit penfer que le peuple ayant goüté la douceur d'une tréve & joüififance de fes commoditez, ne recherchat pat après avec une grande avidité la paix. Mais ce qui rendit encore l'affaire plus perplexe „ fut une grande remontrance que vint faire aux, Charnbres M. le Cardinal de Pelué, Préfident en 1'Eglife avec une délaration & proteflation: de la part de Monfieur le Legat, fuivant la. lettre qu'il lui en avoit envoyée , pour la faire Iïec & enregiflr£r aux Etats, comme il s'enfuit. M m 3.  SS6 États Lettre de Monfieur le Légat. Monseigneur, puifqne la maladie dont je fuis dele-Hu, ne permet que j'aiile parler moimême a Meffieurs des Etats , je vous prie humblement vouloir fuppléer & fatisfaire pour moi a cette charge, comme celui qui fur tout autre pourrez très-dignement & avec beaucoup d'efficace vous en acquitter, tant pour la fingüliere pieté qu'avez toujours montré d'avoir envers Dieu & voire Patrie , que pour le trés illuftre grade , lequel meritoirement vous tenez en 1'Eglife Catholique. Afin donc qu'aucun ne puiffe ci-après ignorer qu'elle eft mon opinion & intention touchant cc qui cc traite a prefent en Paflemblée defdits Etats, il vous plaira faire entendre de ma part a mefdits Sieurs ce qui s'enfuit: que puifqn'en la Conference qui s'eft coritinuée par plufieurs jours avec les Députez des Catholiques qui fuivent le parti contraire, on s'eft vainement efforcé de les induire a quitter 1'Hcrctique, auquel ils montrent de vouloir toujours adherer, voire' plus opiniatrement epie jamais; -ce que non * feulemcot ils ont protefté cn  sous Henri IV. termes très-exprès, mais encore fe font elfiayez. d'attirer les vrais Catholiques fous le même joug de 1'heréfie, & de leur faire reconnoïtre icelui pour leur Roi, alléguans que aon-feulement il avoit propofé d'embrafTer la Religion Catholique, mais que de fait il étoit déja. Catholique: a quoi ils ont toujours ajouté plufieurs autres femblables paroles, qui font ou du tout faufies, ou beaucoup éloignces de la foi & doctrine orthodoxe , & du refped & obéïlTance qui eft du a Notre Saint Pere le Pape, & au Saint Siége Apoftolique : étant chofe notoire que leur prétendu Roi de Navarre n'a jufqu'ici donné aucun figne., par lequel on doive jugcr qu'il y aft en lui quelque piété, ou qu'il foit Catholique: vu qu'att contraire , tous fes deffeins ne femblent avoir autre but que de rulner par tous les artihees & rufes dont il fe peut avifer., la Religion Catholique , Apoftolique & Romaine , a ce que pafaprcs, fuivant 1'exemple d'Angleterre,. il la puifte entierement bannir de la France X & de fait il fe voit que tout ouvertement ïL fait tous fes eftorts pour rendre Schifmatique ce très-Chrétien Royaume , en le voulant diftraire de la foi, & fainte alliance qu'il a avec le Saint Siége Apoftolique. Pour ces caufes i'ai penfé être de mon devoir d'exhorier % M.1b. A  'SS2 États prier &adjurer Meffieurs des trois Etats, puifqu'ils fe voyent maintenant du tout déchüs de Fefperance qui les avoit fait entrer en Conference avec lefdits Députez du parti contraire, ils veuillent deformais s'abftenir de plus conferer avec eux, & ne permettent en aucune maniere qu'il foit parlé ou fait mention en leur alfemblée de 1'Herétique, prétendu Roi de Navarre, confomiément a la fainte réfolution qui par ci-devant en a été prife en Ja même alfemblée. Car comme il eft certain que les affaires & deffeins des Hérétiques font grandement avancez, lors qu'on traite en quelque maniere que ce foit d'admettre a eetiè Couronne un Hérétique relaps : auffi n'y a-t-il pomt de doute qu'aucun ne peut entreprendre tel traité, fans encourir des peines & Cenfures ordinaires contre les fauteurs des Hérétiques, Et combien que je fcache que Meffieurs des Etats foient d'eux-mêmes très-bien inftmits de tout ce que deftus, & partant je nfve aucune occafion de döufer de leur I piété & prudence, ni du refpect & I ■lonté qu'ils nortent a. Notre Saint Pér* k au Saint Siége Apoftolique, voulant pintor èh qu'ayant découvert de plus en plus cë niers jours Iesartifices& Po'-ftmaiiou dè ! >:• . rétique, & de ceux qui lui adherem, . j fe  sous Henri IV. yyj trouvera aucun de mefdits Sieurs des Etats qui y veüille déformais avoir affaire, ni traiter avec eux : li effi-ce que, pour ne manquer au devoir de ma charge, je veux ouvertement leur protefler, que fi on faifoit autrement, ce que Dieu ne permette, Sa Sainteté fe fentiroit grandement offenfee d'une faute, dont a la vérité 1'importance feroit très-grande. Et quoi que Sadite Sainteté ne foit jamais pour abandonner cette fainte caufe , a la défenfe de laquelle elle s'employera toujours de tout fon pouvoir; fi eft-ce qu'elle pourra bien quitter ceux qu'elle verroit fe comporter, en ce qui feroit du fait de ladite caufe, autrement que des vrais Catholiques ne devroient faire. Et ne faut pas qu'aücun fe perfuade que Sa Sainteté püt jamais trouver bon ce qui, en quelque maniere que ce fut, pourroit être traité avec 1'Herétique relaps, ou ceux qui le favorifent: comme a la vérité nous devons tous efpérer que Dieu n'abandonnera jamais de fon fecours & affiftance , ceux qui fincerement & de bonne foi, s'employeroient a la défenfe & manutention de fa fainte Églife. Au moyen de quoi je veux bien aufli protefler pour mon particulier , qu'ëtant Legat du Saint Siége en ce Royaume , je n'approuverai jamais aucune «hofe qui repugne tant foit peu aux faintes  $S4 Etats intentions de notre Saint Pere : mais plütot me retirerai incontinent de cette ville & de tout le Royaume , oü l'on traiteroit ci - après avec 1'Herétique , de paix , ou de tréve , ou d'autre chofe queiconque qui puitfe lui apporter aucun avantage. Car il n'y a danger auquel je ne veüille expofer ma perfonne, plütot que demeurer en un lieu , oü l'on falfe devant mes yeux des trans qui mettent la Religion Catholique en un danger tout évident d'être perduë en ce Royaume. Et partant je vous fupplie , Monfeigneur , avec toute 1'affection qu'il m'efr poffible , de vouloir bien vi-vement exhorter de la part dn Saint Siége Apoftolique & de la mienne encore, tous Meffieurs les Prélats & autres du Clergé, de quelque grade & dignité qu'ils foient, que comme ils fe font par cidevant montrez fermes défenfeurs de la Religion Catholique, ils veuillent toujours être femblables a eux-mêmes, a ce que par les effets ils fe faffent connohre pour vrais & légitimes enfans du même faint Siége , & quant a ceux de la Nobleffe & du Tiers-Etat, qu'il vous piaife les prier & adjurer ou nom de Dieu Notre Seigneur Jefus-Chrifi, que fe reffouvenans du ferment folennel qu'ils ont réitéré par plufieurs fois , & dernierement encore en pleine Anémblce defdits Etats, pron  sous Henri IV. SSS mettans a Dieu & a fon Églife, de ne vouloir jamais avoir aucune alliance & fociété ou commerce avec les Hérétiques , ils ne fe laiffent en facon queiconque ébranler de la ferme conftance , qu'avec beaucoup de zele & piété, ils ont jufques ici apportée a la défenfe & manutention de la Religion Catholique. Et en outre , paree que Notre Saint Pere connoit affez que le falut de ce trcs-noble Royaume dépend entierement de Pelection d'un Roi très-Chrétien, il vous plaira auffi, Monfeigneur , d'exciter tant qu'il vous fera poffible , Meffieurs defdits Etats , de la part de fa Sainteté, de vouloir, le plus promptement que faire fe'pourra, élire un Roy qui foit non feulement dè nom & d'effet très-Chrétien & vrai Catholique, mais qui ait encore le courage & lesautres vertus requifes pour pouvoir heureufe. ment reprimer & anéantir du tout les effbrts & mauvais delfeins des hérétiques. C'eff la chofe du monde, que fa Sainteté preffe 8c defire. C'eff a quoi tendent tous les vceux des bons Catholiques , & ce que principalement requiert la ncceffité des affaires publiques.*C'eft, en fomme, 1'unique fondement, fur lequel cct aftligé Royaume femble avoir établi 1'entiere efperance de fon falut: en quoi  $$& États. il faudra prendre foigneufement garde que toutes chofes fe paffent avec telle prudence cc difcretion, que tous les Catholiques en general, 8c notamment les Princes qui jufques a prefent ont genereufement combatu pour la foi Catholique contre les hérétiques, 8c qui autrement en quelque maniere que ce foit, ont affillé cette fainte caufe , connoïlfent' évidemment que toutes les refolutions qui feront prifes & arrêtées en ladite Alfemblée, ne tendent a autre but qu'a la défenfe-de la Religion Catholique, & au commun 8c bien confervation de cette Monarchie, 6c que meritoirement ils acquiefcent 8c approuvent, en tant q fera, telles 6c fi louables refolutions comme j'ai une ferme affurance que M< des Etats ne manqueront jamais en cune qui foit de leur devoir, auffi leur veux-je bien promettre de la part de Sa Sainteté 8c du Saint Siége Apoftolique, toute Paffi-ll faveur qui fe peut efperer d'un peretres-i iin a Pendrqit de fes plus chers enfans , qui fe trouvent environnez de tant de difficultez 8c miferes: vous priant auffi que, pour mon p ticulier, il vous piaife les alfürer que brafferai toujours d'une trés-prompte volonn:. tout ce que je pourrai connoitre fervir auc. j&ement a cette fainte caufe, 6c a remettre ce  sous Henri IV. JJ7 Royaume en fon ancienne fplendeur & dignité. Ecrit a Paris, ce 13 jour de Juin. Cette remontrance arrêta la déiiberation de la tréve, tant pour la révérence dudit Seigneur Cardinal, que pour le refped que toute 1'Affemblée pottoit a un Legat lateral du Saint Siege, même en ade qui regardoit 1'exercice de la Legation. II eft vrai que depuis, 1'affaire par plufieurs fois mife en déiiberation , la Nobleffe fut d'avis de faire la tréve; & la refoudre promptementpour tel tems, & a telles conditions que M. de Mayenne trouveroit bien: & que ledit Seigneur feroit fupplié de vouloir entendre a la faire trouver jufte & raifonnable, tant a Monfieur le Legat, qu'aux Miniftres du Roi Catholique, pour les rendre capables des caufes & occafions d'icelles. Le Tiers-Etat trouva bon de s'en rapporter audit Seigneur Duc , qui avoit la connoifTance des affaires, & pouvoit juger fi elle étoit expediente & neceffaire , poürvu que ce fut avec 1'avis dudit Seigneur Legat, & Ambaffadeur de Sa Majefté Catholique. Le Clergé declara ne fe pouvoir départir des faintes exhortations & admonitions portées par la lettre de Monfieur le Legat,ni confendr par confequent a aucune tréve & traité avec 1'Herétique. - Mais tant s'en faut que ledit Seigneur Legat  États y put confentir, que voyant qu'on en traitoit, & qu'elle s'en alloit refoluë, il délibera de fe retirer, & en fit les proteftations en public: ce qui donna occafion eux Etats de députer grand nombre de Prélats & principaux des deux autres Ordres par devers lui, pour le prier de n'abandonner la ville Capitale du Royaume, qui avoit tant bien merité de Ia Reli gion j 6c confiderer que fon départ pourroit apporter un grand ébranlement a 1'état d'icelle , & coiiféqüernmènt de tout le corps de Punion, dont ladite ville étoit le coeur : que le bruit s'épandroit bien-tót par la France, qu'il y avoit de la divifion & mauvaife intelligence entre ceux qui devoient être mieux unis & alliez -que jamais : ce qui ne feroit qu'un affoibliffement de cceur aux bons Catholiques , & un mauvais augure pour le fuccès de I'Alfembiéc, laquelle au contraire fe reffentiroit toujours beaucoup fortifiée de fa préfence en cette Ville, pour procéder a quelque bonne & fainte réfolution fur les affaires pnncipales pour lefquelles elle étoit convoquée, 8c dont il efperoit avec la grace de Dieu , de voir une très-heureufe iiTuë , Pintehtion des Princes 8c des Etats en rien diminuée ni altérée. Cette parole fut portee par Monfieur le Cardinal de Pelleyé, avec beaucoup d'efficace  sous Henri IV. yj^ Sc gr'avité , accompagnée d'autres beaux & dofles difcours, qui mo&troiènt en ce vénérable Seigneur pleins d'ans, d'honneur & de doctrine, un grand zele a Phonneur de Dieu, & au falut de ce Royaume, tant fur ce fujet, que fur Paifurance qu'il donnoit de la bonne difpofition defdits Etats a recevoir le faint & facré Concile de Trente. Monfieur le Legat répondit qu'il regrettoit de n'avoir 1'éloquence fuffifante pour remercier une fi honorable compagnie de l'honneur qu'elle lui faifoit, & ledit Seigneur Cardinal: encore pour un office de tel merite & conféquence , lui déplaifoit d'avoir été prévénu , ayant fait état de communiquer fa réfolution a tout le Corps des Etats , comme il fe reconnoifibit être obligé. Que ce n'avoit jamais été I'hitention de notre Saint Pere , & du Saint Siége, ni fa volonté d'abandonner la défenfe de la Religion Catholique, ni la caufe de la France: mais feulement de fe retirer en un lieu, ou avec plus d'utilité & moins de blame pour Sadite Sainteté & le Saint Siége , il eüt pü aider a Pavancement de Pune & de 1'autre: même voyant ceffer pour le prefent la principale occafion de fa demeure, qui étoit 1'élection & promotion a la Royauté, & qui avoit été le fujet & objet principal de fon afiiflance  jr é'O È T A T S a 1'affemblée, fuivant la teneur de fa Legation Sc commiffion. Qu'étant averti que par défaut de forces , on craignoit un fiége, & qu'on ne parloit que de tréve , de paix , de certaine feinte & mafquce converfion, & que la voye de la fufdite pleciion étoit pour ie prefent exclufe par la même foibleffe & impuiffance, il ne penfoit être obligé de foütènir un nouveau fiége; mais qu'il étoit plus utile & convenable au rang qu'il tenoit, & a la dignité de la perfonne qu'il repréfentoit, de fe retirer en lieu plus éloigné, pour n'oüir parler des fufdites'chofes, Sc plufieurs autres indignes Sc impertinentes, Sc auffi pour n'avoir forces ni moyens pour empêcher la tréve: protefla que s'il étoit queflion de proceder a 1'éleétion fufdite, il ne craindroit point le feu, ni le martire même, ains s'y prefenteroit trés-volontiers pour 1'obligation qu'il avoit a fa charge, Sc ne feroit difficulté de foütènir un autre fiége , comme Dieu lui en avoit autrefois fait la grace, 1'état des affaires le requerant ainfi. Néanmoins il prioit la Compagnie de croire qu'il ne fe füt difpenfé de-prendre aucune réfolution , fans 1'avis Sc bonne intelligence de M. le Duc de Mayenne , & fans , lui-même en perfonne , Palier faire entendre aux Etats ; Sc efperoit fur tout avec Paide de Dieu , qu'il s'y  sous Henri IV. y<5i s y conduiroit avec la maturité & prudenee que requeroic un fi grand & important affaire. Cela étant rapporté a 1'Alfemblée , elle ne fe trouva entierement affürée de la volonté dudit Seigneur Legat, & craignant un foudain départ, (comme les bruits en couroient au grand étonnement des Catholiques) quelques jours après fit une autre Députation pardevers ledit fieur a même effet, en laquelle outre les fufdites confidérations, furent reprefentez par 1'ordre du fieur de Lyon plufieurs autres inconvéniens qui s'enfuiyroient de fon départ: fut prié de ne prendre pour importunité , s'il en étoit derechef requis de la part defdits Etats : que même la Divine Majefté bien fouvent vouloit nos prieres lui être redoublées avant que les accorder & exaucer. Monfieur le Legat, après avoir ufé de pareils remercimens qu'auparavant, dit que Monfieur le Duc de Mayenne lui avoit fait eet honneur que de lui en parler, & encore Meffieurs les Miniftres de Sa Majefté Catholique, & tous les Ordres de cette Ville , & qu'a prefent voyant cette célebre & iterée interceffion qu'il prenoit, non pour importunité , mais pour extréme faveur & obligation, fe voyoït comme forcé de condefcendre a tant de bons avis qui lui étoient donnez j & d'ailleurs, que par les dernieres z Torne XV. N n  $•6*2 É T A T f dépêches de Rome du onziéme Juillet, qu'il avoit recuës pai un courier expres, il avoit un peu plus de liberté de fe difpenfer touchant fon arrêtement: defiroit au premier jour rendre compte a 1'Alfemblée de fes refoiutions , & que cependant elle demeurat en bonne efpérance: priant Dieu de la favorifer de fa fainte affiftance & benedidion. Ainfi Monfieur le Duc de Mayenne, Prince très-fage & très-prudent, avec 1'avis de Meffieurs les Princes , Seigneurs & Députez des Etats, refolut d'entendre a une tréve generale par tout le Royaume, pais, terres & Seigoéuries de la proteétion d'icelui, par Ie tems 'Sc efpace de trois mois, non en conféquence de la Conference; mais pour Je refped du bien public , repos Sc foulagement du peuple , ne youlant en ce defir, ceder a quiconquc ce fut, & pour autres grandes confidérations, ayant employé pour Je traité des articles Sc conditions d'icelle tréve, d'autres Députez de fa part, que ceux de la précedente Conference, fcavoir, les Sieurs de Chaflres , de Rofne , de Bafibmpiere , de Villeroy, Préfident Jeannin Sc Dampierre. Et propofant en 1'Alfemblée les motifs qui 1'avoient induit a ladite tréve, témoigna le regret qu'il avoit qu'on eut pü proceder h J'eleöion defirée, vu  sous Henri IV. r53 mcmement 1'offïe faite par les Ambaffadeurs de Sa Majefté Catholique, de laquelle il fe feffentoit obligé comme du plus grand honneur qui put arriver a fa maifon, mais qu'on pouvoit juger ies affaires ne s'y trouver pour lors difpofées i comme de fait, c'avoit toujours été le but de- cette generale convocation , la fin ou tendoient par un même confentement les inftruöions & memoires des Députez des Provinces, le defir de Notre Saint Pere & dit Saint Siégë le fujet des prieres continuelles de 1'Eglife , les fouhaits & les vceux des Ga^ tholiques comme au fouverain remede, après Dieu , pbür garentir de naufrage la Religion parmi tant de tempêtes & impetueux orages , & retirer ce Royaume prefque du tombeau oit la violence de l'heréfie 1'avoient plongé & précipité: & craignoit grandement, le peuple Caiholique, de fe voir fruftré de cebien , fi la réfolution en étoit plus lönguement differée, même fur une fi belle occafion qui fe préfentoit par 1'efpoir d'une heureufe alliance entre ces deux grands Empires, les pivots & les poles de la Chrétienté, qui eüt apporté le repos en icelie , la terreur aux ennemis de la Foi , l'extermination de 1'héréfie, & le fondement de tout bonheur a la France. Muis ou. Nn 2  $6/l États que Pindignarion de Dieu pour les péchez de ce Royaume , ne füt appaifée, ou que fa volonté füt de differer cette oeuvre en autre tems pour plus grande manifeftation de fa glóire & de fes inerveilles , ou pour autres fecrets & jugemens incompréhenlioles de fa providence, il ne'permit ies affaires étre pour lors difpofées pour les conduirë a leur perfeclion. Et comme s'il vouloit faire preuve de la conftance & fidéiité des fiens jufques au dernier degré des tentations & extrémjtez, voici en même tems une nouvelle occurrence , qui donna fujet a Monfieur le Legat de faire publier une lettre, la copie de laquelle il manda a la ville de Saint Denis le 24 du mois, pour la faire fignifier aux Évêques & autres Eccléfiaftiques qui y étoient affemblez. Lettre de Monfieur le Legat, aux Catholiques de France. Nous avons entendu que Henry de Bourbon , foi difant Roi de France & de Navarre, a fait affembler quelques Prélats & autres perfonnes Eccléfiaftiques de fon parti en la ville de Saint Denis, oü il a encoreinvité quelques-  sous HenriTV. y6* locutus fuerit his quïbus ipfe non loquitur, urius eft ex ipfis qui exterminare Ecclefiam Dei volunt: & cüm corpore vobifcum effe videantur, mente & animo contra vos funt. Et répondoient a leurs excufes qu'ils avoient fait courir, que c'étoit feulement, ad futuram camelam, que cela pouvoit avoir lieu, in foro occulto & interiori : mais qu'on avoit bien montré d'avoir eu autre but Sc intention : Sc ne falloit jacere retia ante oculos pennatorum s qu'on avoit befoin en telle affaire d'apporter de la fincèrité, non de la cautelle: de la' firhplicité, non de Parti nee: des pieufes confidérations du falut, & non des deffeins d'état, Sc temporelles interets. Que 'pour aller a 1'Eglife, falloit paffer par la voye Royale, c'efta-dire, par la forme prefcrite par les Saints Canons Sc Conciles, & non par des détours Sc fentiers inconnus ; Sc falloit entrer, Phuis ouvert, par la permiftion de celui qui gardoitdes clefs, non par la fauffe porte & en cachette. Que, quand il n'y auroit autre indice, celui-la feul étoit fuffifant pour faire entrer en doute Sc défiance. Se riöient aufli de ia fubtilité excogitée du peril de la mort,  Ïf74 États. pour Partiele & dernier point d'icelle, peril afiëclé, & pour une action injufte Sc reprouVée, qui aggravoit le pêché, au lieu da difpofer & fervir de prétexre a 1'abfolution. En tout événement, foit que Ja procedure ne fut approuvée, c'étoit avoir jette Ie fondement d'un fchifme : ou qu'elle fut ratihée, il demeuroit un grand mépris a 1'autorité du Saint Siége, une grande ouverture a fe mocquer des cenfures & excommunications, tenir pour lllufoires les Canons & conftimtions Eccléfiaftiques. Exhortoient le peuple 2 È T A T S foit qu'on eut égard au nombre & qualité des Évêques , Prélats, Docteurs , Ambaffadeurs des Rois , Princes , Seigneurs Sc Republiques Chrétiennes, Sc plufieurs grands Sc excellents perfonnages qui--s'y étoient trouvez de toutes les parties du monde , foit qu'on avifat aux beaux Regiemens & Ordonnances qu'on y avoit fait, par la confirmation de la Doctrine, confutation des Héréfies , Sc rétab'liffement de toutes bonnes mceurs Sc difcipline Ecclefiaftique. Et pouvoit dire en un mot, que ledit Saint Concile portoit bien la marqué de ion Auteur , qui étoit le Saint Efprit, Sc n'étoit procédé du cerveait Sc jugement des hommes. Scavoit bien qu'en ce qui concernoit la Foi Sc Doctrine, les Francois Catholiques n'avoient jamais fait difficulté , mais avoient feulement app'rehendé Ie changement de quelques coutumes & abolition de privileges , qu'ils s'imaginoient plütöt par une vaine apprehenfion , que pónr être appuyez fur aucun fondement de verité. Mais a préfent fê foümettans aux Ordonnances de 1'Eglife par une vraie obéïifarce , comme vrais Sc legitimes enfans, ils pouvoient a bon droit ié vendiquer le titre de très-Chrétien , hereditaird Sc propriétaire a nos Rois & a notre Nation : ce qui lui faifoit coneevoir une meilleuré efpérancc  sous Henri IV. $91 efpérance des affaires que jamais , ayant toüeflimé que la plupart des calamitez que cë Royaume avoit fouffertes depuis long-tems, 6c qu'on refTentoit a préfent , procedoit pour avoir été refraétaires aux Ordonnances du Saint Efprit & de l'Eg*life univerfelle : fi bien que juftement on avoit pü réprocher ce qua Saint Etienne reprochoit aux Juifs ,' Semper Spiritui Sanclo refifliti, 8c fe fouvenoit d'avoir appris aux Hiftoires que tous les troubles qui avoient été en 1'Eglife Oriëntale fous 1'Empereur Valens , n'étoient furvenus que par la permifllon & jufte Jugement de Dieu , póur avoir rejetté le Concile de Nicée , ,1'approbation ou improbation duquel Saint Baiiie difoit être la marqué pour difcerher les Hérétiques des Catholiques : 8c Saint Ambroife écrivoit a Valentin le jeune , Sequor , inquit traclatum Niceni concilü , a quo nee mores , nee gladius me poterit feparute : que la rume de Conftantinople 6c de 1'Eglife Grecque , qu'on avoit vu autrefois fi reluifante en toute pieté 6c Doctrine , n'avoit été permife de Dieu, finon a caufe du Schifme par lequel ils s'étoient oppofez a ce celebre Concile de Florence : 8c languiffoient encore aujourd'hui fous 1'op prefnon 6c tyrannie des Turcs 8c infideles. Au contraire, que tous les Royaumes Torne XV. Pp  Tjp^ Ë T A T S Sc Etats qui avoient recu ce faint Concile de Trente, & particulierement encore aucunes Provinces & Evêchez de ce Royaume , avoient reffenti les fruits des faveurs & benediétions de Dieu : Sc efperoit que ce feroit ici un bon commencement pour Ia reftauration de eet Etat 8c réformation de toutes les parties d'icelui dépravées & corrompuës, & rétabliffement entier de la Religion Sc fervice de Dieu. Les Harangues achevées , la Compagnie alla en 1'Eglife de Saint Germain de 1'Auxerrois, faire chanter le Te Deum , lequel étant lïni , Monfieur le Legat dit a haute voix l'oraifon pour rendre grace a Dieu : & puis après donna fa folennelle benediétion a toutle peuple qui étoit en grande quantité , lequel, en s'en retournant, montroit une extréme joye 8c allegreiïe , loüant fa divine bonté de tout ce qui s'étoit palfé.  sous Henri IV. S95, Arrefl folennel contre ce qui sJeft fait par la Ligue contre l''autorité du Roy Henri IV 3 & Mémoire du Roy Henri III } avec révocation du pouvoir du Duc de Mayenne '3 après la Réduclion de Paris. ( Ti ré des Mémoires de Nevers, Tom. II.) Extrait des Kegiflres de Parlement, du fat Mars IJP4. La Cour ayant le douzieme jour du mois de Janvier interpellé le Duc de Mayenne, de reconnoïtre le Roy , que Dieu & les Loix ont donné a ce Royaume , & procurer la paix, fans qu'il y ait voulu entendre , empefché par les artifices des Efpagnols & adherans: & Dieu ayant par fa bonté infinie , délivré cette Ville de Paris , des mains des Etrangers , & reduite a 1'obéiffance de fon Roy naturel & légitime, après avoir folemnellement rendu grace a Dieu de eet heureux fuccès , voulant employer 1'autorité de Ia juftice fouveraine du Royaume , pour en confervant la Religion Pp 2,  yp'tf Etats Catholique , Apoftolique & Romaine, empefcher que fous le faux prétexte d'icelle les Etrangers ne s'emparent de 1'Etat , & rappeller tous Princes, Prélats , Seigneurs, Gentilshommes, & autres fujets a la grace Sc clémence du Roy , a une générale reconciliation, reparer ce que la licence des guerres "civiles a altéré de 1'autorité des Loix & fondement de 1'Etat, droits, honneurs de la Cou.xonne. La matiere mife en délibération en ladite Cour , toutes les Charnbres d'icelles affemblées, a déclaré Sc déclaré tous Arrefts, decrets , Ordonnances Sc fermens donnez, faits Sc preftez depuis le vingt-neuvieme jour de Décembre iy88 , au préjudice del'autofité de nos Roys Sc Loix du Royaume , nuls & extorqués par force Sc violence; Sc comme tels , les a revoquez & annullez , Sc ordönné qu'ils demeureront abolis & fupprimez. Et par fpécial a déclaré , tout ce qui a été fait contre l'honneur du feu Roy LIenri III , tant de fon vivant que depuis fon déccs , nul: Sc fait deffenfes a toutes perfonnes de parler de fa mémoire , autrement qu'avec tout honneur & refpect; & autre ordonne qu'il fera informé du déteftable parricide commis en fa perfonne , & procédé extraordinairement contre ceux qui s'en trouveront cou-  sous Henei TV. ƒ07 .pa-bles. A ladite Cour révoqué & revoque le pouvoir ci - devant donné au Duo de Mayenne , fous la qualité de Lieutenant Général de 1'Etat & Couronne de France r fait deffenfes a toutes perfonnes de quelque état Sc condition qu'ils foient , de le recon— noitre en cette qualité ; lui prefter aucune, obéiffance Sc faveur, confcrt & aydes , a peine d'être punis comme criminels de lezeMajefté au premier chef : Sur les mêmes peines enjoint audit Duc de Mayenne, Sc autres Princes de la Maifon de Lorraine ^ de recon-ioitre le Roy Henri IV de ce nomRoy de France , pour leur Roy Sc Souverain Seigneur i & lui rendre 1'obéiffanceSc fervice dries , Sc a tous Princes, Prélats-, Seigneurs , Gentilshommes , Villes , Communautez& particuliers de quitter leprétenduparti de 1'union, duquel ledit fieur Duc deMayenne s'eft fait chef, Sc rendre au Roy,1 fervice , obéiffance Sc fidéiité, a peine d'être lefdits Princes , Seigneurs & Gentilshommes. dégradez de Nobleffe , Sc dëelarez roturiers eux & leur poftérité , de confifcation-de corps, & biens , rafemens Sc démolitions des Villes,. Chateaux & places qui feront refracTaires aux commandemens Sc Ordonnances du Roy ; «k> Pp 3  j-p8 États caffé & revoqué, caffe & révoque tout ce qui a été fait , arrefté Sc ordonné par les prctendus Députez de 1'Affemblée tenue en cette Ville de Paris, fous le nom d'Etats Généraux de ce Royaume , comme nul & fait par perfonnes privées, choilies, pratiquées pour la plupart par les factieux de ce Royaume & partifans de 1'Efpagnol , & n'ayant aucun pouvoir légitime ; fait deffenfes auxdits prétendus Députez de cette qualité , de ne plus s'affembler en cette Ville ou ailieurs , a peine d'êtres punis comme perturbateurs du repos public, criminels de leze-Majefté ; Et enjoint auxdits prétendus Députez , qui font encore de prefent en cette Ville de Paris , de fe retirer chacun en leurs maifons, pour y vivre fous 1'obéiifance du Roi & faire le ferment de fidéiité par devers le juge des lieux : & auffi ordonna & ordonne , qu'a 1'occafion d'iceux cefféront , Sc au lieu d'icelle fera a perpétuité folemnifé le vingt-deuxieme jour de Mars , Sc audit jour faite proceffion générale en la maniere accoutumée, ou affiftera ladite Cour en robe rouge, en memoire Sc pour rendre graces a Dieu de Pheureufe délivrance Sc réduclion de ladite Ville en Pobéiflance du Roy, & afin que perfonne ne  sous Henri IV. puifle prétendre caufe d'ignorance de ce prefent Arrêt , a ordonné & ordonne qu'il fera. leu & publié, a fon de trompe & cry public par tous les carrefours de cette Ville de Paris Ine & publié en tous les Sieges de ce refïbrt: & a cette fin fera imprimé a la diligence du Procureur Général du Roi , & de tous les Subftituts, aufquels elle a enjoint de tenir la main a 1'execution d'iceux & en certifier ladite Cour. A ordonné & ordonne que les Avocats 8c Procureurs receus en icelle, tant auparavant les prefens troubles que pendant iceux , continueront 1'exercice de leurs charges , en faifant par eux le ferment de fidéiité j duquel fera fait leéture. Fait en Parlement ledit jour 8c an, publié a fon de trompe & cry public par les Carrefours de cette Ville de Paris, le lendemain êc dernier jour du mois dé Mars iyc^. M. Fleubï , Rapporteur».  'óoo Ë T a T S Extrait de Ia vie de Marillac , par le Beau , Manufcrit de la Bibliotheque de Sainte Genevieve. ( On voit dans ce fragment les caufes de l'Arrêt du Parlement 3 relatif d la fucceffion de la Couronne > celles des Etats de la Ligue & de la Réduction de Paris.) Enfuit de ce qui fe paffa a la Ligue , eoncernant la Loi falique & autres aclions im- portantes. Dans le parti de la Ligue, & longtems auparavant la réduction de la ville de Paris en Pobciffance du Roi , fe formerent deux factions | des uns qui vouloient un Roi Catholique, & des autres qui vouloient auffi un Roy Catholique, quoy qu'étrangers , moyennant qu'il fufl puiffant pour les maintenir, qu'on appetloitla Ligue EfpagnoJlei la Ligue Franco; fe cmporta enfuite le deffus, par Je courage & réfolution que prirent Meffieurs du Parlement, demeurez a Paris, de donner eet  sous Henri IV. éot Arreft notable, concernant la Loy Salique, qui a efté de iï grande importance, qu'a 1'occafion d'iceluy, & du tiers party , le Roi fe feit Catholique, & tous les Efpris Francois fe ralliérent. Or M. de Marillac a efté de cette bonne Ligue, & en un point tellement remarquable, qu'il a efté celui qui Ie premier a faiét la propofition qui a efté caufe de eet Arrêt. Et pour 1'entendre il convient remarquer, que M. le Garde des Sceaux du Vair ayant inféré entre les aélions & traittez oratoires, un difcours intitulé , fuafion de 1'Arreft au Parlement pour la manutention de la Loy Salique , en 1'argument duquel il a mis que fur le fubjet des propofitions préjudiciables a 1'Eftat, qui fe faifoient aux Eftats aflemblez dans le parti de la Ligue, quelques-uns des Confeillers des Enqueftes requirent qu'on aflemblaft les Charnbres pour pourvoir aux affaires publiques, fans rien fpécifier; fur quoy il faut confiderer que ces motifs quelqv'uns des Enquêtes requirent &c. ne fe peuvent entendre d'aucun Confeiller en particulier , comme tel fimplement: car jamais cela ne fe feit, que quelques particuliers.de leur chef & mouvement feuls demandafient 1'Affemblée des Charnbres; mais il entend des  002 États Enquêtes en corps, parlans par Jeur Députés ; ceux qui font verfés a 1'ufage du Parlement entendent affez la fignification de ces parolles & qu'elles montrent que cette penfée eftoit premierement néedans le corps des Enquêtes, qui par conféqüent en avoient parlé, Sc y avoient efté excitez par quelque propofition » & avoient députez deux Confeillers de chacune Chambre pour demander a la grande Chambre., ladite Alfemblée, comme il fe difoit par le difcours fuivant. Le vingt-troifiéme jour de Juin iyp3- JVL de Marillac, lors Confeiller en la Cour de Parlement en la feconde Chambre des Enquefies , eftant au Bureau de ladite Chambre , reprcfenta a ladite Compagnie, que l'on traittoit a 1'alfemblée des Eflats plufieurs chofes de grande confequence, qui fembloient obliger la Compagnie d'ouvrir les yeux, pour advifer a ce qui feroit bon de faire , il commenca par le fujet de la tréve qui eftant lor* pour dix jours , Sc avoit efté accordée , Sc continuée de dix jours , depuis le deuxiéme Mai jufques a ce temps , laquelle en faifant difficulté de continuer, car ceux qui tendoien» a rupture ne pouvoient fouffrir aucune chofe , qui peut donner lieu aux Francois de fe reVoir enfemble, & que cela eftoit de grand  sous Henri IV. 6*03 préjudice : il repréfenta auffi que l'on propofoit de faire un Roy, & que le Parlement s'y devoit oppofer, déduifants cela plus au long , & enfin il conclud qu'il feroit a propos de députer deux de la Compagnie pour aller a la première Chambre des Enqueftes demander auffi deux Députez pour aller tous enfemble a la grande Chambre demander Paffemblée des Charnbres, pour déliberer fur cela: lors les cinq Charnbres des Enquefies eftoient réduites en deux a caufe do 1'abfence de plufieurs. Ce difcours eftonna la plus grande part de la Compagnie , non qu'ils ne 1'approuvaflent grandement tous , mais une partie par cramte, ( qui eftoit grande ) d'aultant que le danger n'eftoit pas moindre que de la vie, partie par. .opinion, que cela ne ferviroit de rien, rejettoient au commencement la propofition ; mais Monfieur de Marillac infiftoittoujours, mefme qu'ils eftoient obligez de faire quelque chofe, en une affaire fi importante , qu'ils eftoient Officiers de la Couronne , & qu'ils devoient au moins faire quelque acte , qui fervift a la. poftérité , pour témoigner qu'ils n'avoient point approuvé ce qui fe faifoit par violence; enfin on accorda de députer quelqu'nn avec luy, & on nomina 1'un des Confeillers de Ia  604 Ê T A T S mefme Chambre qui n'efbit pas fi ancien qwc luy en réception, fur cela il prift fubjet de remonfirer a la Compagnie & les prier de députer un plus ancien que luy en réception , qu'il feroit affez chargé de nier qu'il avoit fait cette propofition ; fans avoir encore celle de porter la parole a la première Chambre , a quoy après le refus de plufieurs , la Compagnie s'accordant députa M. de Soulfour qui 1'accepta volontiers. Meffieurs de Soulfour & de Marillacallerent de ce pas a la première Chambre des Enquefies en la maniere accouftumée, ou après leur avoir fait entendre le fubjet de leur voyage, ils demanderent qu'il plufi a la Compagnie députer deux Confeillers d'icelle, pour aller tous enfemble a la grande Chambre, demander 1'affemblée des Charnbres , pour déliberer s'il feroit a propos de prier Monfieur de Mayenne de continuer la tréve , & advifer auffi fur plufieurs affaires importantes; cette Compagnie fe trouva auffi furprife & efionnée que la feconde Chambre, & après quelques difficultez nommc deux Confeillers, mais ne voulurent jamais nommer de plus anciens , afin que la parole & le hafard demeuraft a la feconde Chambre , 8c députerent Meffieurs Fayet, depuis Préfident aux Enquefi.es, & le  sous Henei IV. óby Preflre. Tous ces quatre enfemble allerent a la grande Chambre, en laquelle M. de Soulfour plus ancien, fait la mefme propofition qu'il avoit faiéte a la première Chambre; ils trouverent^ la Compagnie auffi furprife de ce langage , lequel néantmoins elle receut fort bien, & accorderent 1'auemblée, 8c 'qu'elle fe feroit le vendredy prochain, lendemain de Ia Saint Jean. Ce jour de vendredy 2ye jour de Juin, les Charnbres furent affemblées, & comme i'on commencoit a déliberer , arriva en la Cour ie Premier Préfident Vetus, envoyé par Monfieur de Mayenne , priant la Compagnie de ne point paffer outre a cette déiiberation , que dans le dimanche prochain, il conclueroit la tréve, & fi cela n'efioit il trouvoit bon que la Compagnie s'auemblaft pour déliberer, 8c luy faire entendre ce qu'ils verroient bon eftre. Le lundy matin vingt-huitiéme du mois , n'ayant eu aucun advis, le Parlement s'affembla, & au lieu de parler de la tréve , de laquelle feulement Monfieur de Mayenne penfoit que l'on deuft traitter, on s'arrefta particulierement fur cette eleclion, ou nomination d'un Roy dont 011 parloit aux Êftats. La Cour manda les Gens du Roy, qui ayant entendu le fubjet de 1'aITèmblée prirent  '606 États par la bouche de M. Molé, faifant lors la charge de Procureur General , leurs conclufions fort generalles & convenables au fubjet, & fur icelles la Cour déliberant* s'en enfuivit 1'Arreft ci-devant tranfcript. Les opinions fe porterent non a remontrer , mais a caifer tout ce qui fe faifoit aux Eftats contre la Loy Salique & les Loix fondamentales du Royaume, & comme l'on veit le cours & confentement des opinions , quelqu'un interrompant la fuitte propofa qu'il eftoit bon d'envoyer a 1'heure mefme demander audiance a M. de Mayenne pour les Députés de la Cour, afin que 1'Arreft qui interviendroit peut eltre exécuté, auparavant que l'on fceut ce qu'il contenoit, ce qui fut approuvé , & a 1'inftant on envoya vers Monfieur de Mayenne pour lui demander cette audiance , pour laquelle il donna 1'heure entre onze & douze ; ainfi la Déiiberation fut parachevée& 1'Arreft conclud tel qu'il eft publié, Sc M. le Préfident le Maiftre député pour luy aller faire entendre avec quelques Confeillers. Sur le point de partir-, il vint un Gentilhomme de la part de Monfieur de Mayenne , prier la Compagnie de remettre 1'audience a une heure aprèsmidi; cela étonna un peu la Compagnie, craignant que l'on vouloit éluder l'aétion, mais  sous Henri IV. 6*07 il faüut faire bonne mine , aufli chacun fe retira pour aller difner a la hafte. Incontinent après M.le Préfident leMaifire&vingt Confeillers , entre lefquels eftoient M. de Marillac, fe rendirent au Palais, 8c dela partirent a pied, paffans fur le quay des Auguflins pour aller trouver M. de Mayenne qui logeoit a Pfiofiel de Nevers, auquel lieu ils fe trouverent en une grande falie haulte ,accompagnés de peu de perfonnes, entre lefquels eftoient M. PArchevefque de Lyon 8c M. de Rone. M. le Préfident le Maiftre après avoir un peu difcouru des droits de la Couronne & de Pintéreft de ce qui fe traittoit, de Pordre de ce qui s'eftoit paffé au Palement, ce que conte-^ noit la réfolution qui y avoit été prife, finit fon difcours en ces mots: « 8c portam: Monfieur , la Cour m'a donné charge de vous dire, qu'elle a caffé & caffe tout ce qui fe fait & fe fera ci-apres en 1'affemblée des Eftats , contre la Loy Salique & ies Loix fondamentales du Royaulme , Monfieur de Mayenne fe monftra eftonné de ce langage 8c de cette maniere de parler, 8c repondit peu de paroles; difant entr'autres: vous vous fuffiez bien paffé de donner un Arreft de fi grande importance,fans m'en communiquer. Et auffitót la Compagnie (e retira, & depuis il prit occafion de conférer  ■6oS ÉTATS avec elle , M. le Préfident le Maiftre & quelques Confeillers ; mais il n'y put trouver d accommodement, ni les fléchir ; il fe paffa entr'eux des paroles fi courageufes qu'il ne fe peut rien dire davantage. Depuis M. de Mayenne fe refolut de caffer eet Arreft, mais n'ofa 1'entreprendre, le voyant appuyé de tant de gens de qualité , & fcachant que la Compagnie y eftoit tellement affermie, qu'ils avoient fait tous ferment de perdre plutoft la vie, que de fe departir de leur Arreft. C'eft ce qui a deu eftre cogneu pour la verité de cette adion, & pour entendre ce que dit M. le Garde des Sceaux du Vair avoir été requis par quelques uns des Confeillers des Enqueftes qui fera mieux entendu, eftant ainfi expliqué plus au long, pour ce que le principal de cette adion, a efté le courage de M. de Marillac de la propofer en un temps oü le peril eftoit fi évident, qu'il falloit s'expofer a toutes chofes extrêmes pour ofer quelque chofe de femblable. M. du Vair fit en cette aélion très-dignement, comme il a toujours fait; mais non pas avec une fi longue dédudion que ce qui eft dans le traitté fufdid ; les opinions en furent affez libres &refoluës, mais fans vehemence ni exageration, ains fimplement & en la plufpart, avec grande rctenuë  sous Henri IV. 6op retenuë & crainte , eftant tous un acte de grande generofité , de dire ce que l'on penfoit quoique foiblement, M. de Mayenne ne penfoit pas que l'on deut parler d'autre chofe que de la tréve , & avoit pour cela fouffert cette déiiberation, pour ce qu'il eftoit bien aife que la Compagnie en fit inftance, pour s'en fervir contre les partifans de 1'Elpagne » qui craignant 1'accommodementdes Francois» empefcherent la continuation de la tréve , 8c portoient les affaires en rupture, ee que M. de Mayenne efiayoit d'éviter. Enfuit VArreft qui intervint au Parlement le 2.8 Juin i5q^. Sur la remonftrance cy devant faicte a la Cour par le Procureur Général du Roy , & Ia matiere mife en déiiberation , ladite Cour, toutes les Charnbres afïemblées, n'ayant comme elle n'a jamais eu intention que de maintenir la Religion Catholique, Apoftolique & Romaine, & 1'Eftat 8c Couronne de France, fous la proteöion d'un Roy très-Chrétien , Catholique & Francois , a ordonné 8c ordonne que remonftrances feroient faites cette après-dinée, par M. le Préfident le Maiftre, affifté d'un bon nombre de Confeillers de ladite Cour, a M, Tome XV. Qq  cTïo États le Duc de Mayenne , Lieutenant Général de FÈftat & Couronne de France , eftant de pré•fent en cette Ville, a ce que qu'aucun traitté ne fe faffe pour traftsférer la Couronne en la main de Prince Sc Princefle eftrangers , que les Loix fondamentales du Royaulme foient gardé'es Sc données par ladite Cour pour la déclaration d'un Rv^y Catholique & Francois. execiitez , & qu'il ait a employer Pauthorité qui luy a éfté commife , pour empefcher que fous prétexte de la Religion , la Couronne ne foit trans férée en main eitrangere , contre les Loix du Royaulme , & pourvoir le plus prompteinent que faire fe pourra, au repos du peuple , pour 1'extrefme nécelfité , en laquelle il eft reduict, Sc néantmoins dès-a-préfent a ladite Cour déclaré Sc déclaré tous traittez faits & a faire cy-aprcs pout 1'établiffement de Prince ou Princefle eftrangers , nuls Sc de nul etfet Sc valeur, comme faiéts au préjudice de la Loy Salique Sc autres Loix fondamentales du Royaulme. Faiö en Parlement le vingthuitiefme jour de Juin 1^93- SiS,lé DU Til let. Cet Arrefl eftant confideré comme grand eftonne.ncnt a tous ceux de la faclion, voyant cette Compagnie oppofée a leurs delfeins, croyant que les Francois fe rangeroient vo-  sous Henri IV. 6ii) ïontiers a fon opinion, ils avoient effayé, mais en vain, de gagner les principaux en plufieurs occafions, & entr'aultre en une alfemblée tenue le z8 May audit an iy 297 Lettre du Roi d'Efpagne aux trois Etats de France affemble^ a Paris , 300 Lettre du Cardinal de Plaifance, Légat du Pape , aux Etats Catholiques, affemble^ a Paris , ^0§ Lettre Ju Cardinalde Pellevé a Vaffemblée des Etats a Paris, 312 Lettres envqyées par les Député^ d la Conférence du parti contraire, a ceux de ce parti , fur les nouvelles de la dernière Propofition faite par les Efpagnols, 3l6Lettre des Lieutenans & gens du Confeil de la ville de Reims aufdits Ecats , 565) Lettre miffive de la ville k Meffieurs les Député^ des Etats a Paris 375 Réponfe defdits Etats aux Lieutenant & Confeil de Reims , rj^g" Lettre defdits Etats a Monfieur Is Duc de Mayenne , Lettre defdits Trois Etats affemble^ è- Paris, aux Maire & Échevins de la ' ville de Reims , Lettre des Etats a M. le Duc de Guife,  DES MAT IER ES. 63t Lettre defdits Etats aux Député^ de Reims, ^ Première Séance du Jeudi vingt-neuvieme Avril> 400 Seconde Séance du Vendredy trenden: e Avril> 405Remontrance du Sieur de Rambouillet , . 406" Troifieme Séance , Quatrieme Séance du Mercredy cinquïeme jour de May. ^ Sommaire de la Harangue de Monfieur VArcheveque de Lyon , 423 SecondDifcours de Monfieur de Bourges, 428. Séance du Jeudi cinquieme May } ^j-p Autre Difcours de Monfieur de Bourges , refutant bravement les raifons de la Ligue, Seance du Lundy dixieme jour de May, ^jS Séance du Lundi dix-fentïeme Mai. Écritureproduite par les Catholiques du parti du Roi de Navarre , ƒ Séance du Samedi cinquieme Juin, f06 Seance du Vendredi on^iemejour de Juin, J"32 Promeffe faite par les Catholiques du parti du Roi de Navarre aux Hérétiques , Lettre de Monfieur le Légat, ƒ yo Lettre de Monfieur le Legat } aux Catholiques de France , jcT^  T A B L E, &c. Ajfemblée générale du Dimanche 8 Aoüt, j$e Serment prété par les Princes, Seigneurs & Député^, j-8i ArreJI folennel contre ce qui s^eji fait par la Ligue contre Vautorité du Roy Henri IV , & Mémoire du Roy Henri III. ƒ9 5" Extrait de la vie de Marillac , óoo Fin de la Table,   BIBLIOTHEEK DER RIJKSUNIVERSITIET Rapenburg 70 - 74, Leiden De Bibliothecaris, voor deze,