L A PRATIQUE DES VERTUS CHRETIENNES. TOME PREMIER.   PRATIQUE DES VERTUS CHRETIENNESj o u TOUS LES DEVOIRS D E L' H O M M E; AVE C LES DEVOTIONS PARTICULIER ES pour diverfes Occafions Ordinaires & Extraordinair es. ouvrage utile poür toütes les families. Traduit deL'ANGLOIS, augmenté & rédigé dans une nouvelle forme r ar JAQUES GEORGE de CHAUFEPIR, ^Jgjhur de VEglije Walonne d'AMSTERDAM. fkü a dX 0 m e premier. v .. J^T AMSTERDAM, Chevoirs des Hommes dans » toures leurs parties, & cda » avec une briéveté & un or„ dre, qui peuvent attirer, « lou;enir & animer le l ec„ teur ; avec une condefcen„ dance qui s'accommode a la ,5 portée des moins éclairés, ,» & en même tems avec une „ forcede raifonnnement, dont s» les plus avancés peuvent ti« rer du fruit. II me paroit » donc également propre 4 z »,ces  iv AVERTISSEMENT „ ces deux ordres de Lecleurs, „ pourvu qu'ils y apportent „ feulement un defir fmcere „ de faire ce que demandent „ leurs véritables intéréts pré„ fens 8? a-venir. Les Tiévo„ tions qui font a la fin , ne „ font en rien inférieures au „ Corps de 1'Ouvrage. Ce „ font des aides, dont les dif„ férentes infirmités des hom„ mes n'ont, hélas! que trop „ de befoin, & on a eu fpin » d'en donner pour tous les „ différens états de la vie. „ L'Introduction tient lieu de „ la Préface que vous me de„ mandez; ainfi tout ce qui „ me refte a faire eft de prier „ Dieu de tout mon cceur , „ que le généreux Auteurqui „ a trouvé le mqyen de mettre „ au Corban une offrande fl li- „ bérale, fans être vu des hom„ mes, en foit récompenfék dé„ cou-  du TRADUCTEUR. v „ couvert, par les fruits vifi» bles de Jon travail au mi„ lieu de cette Nation, qui n'eut „ jamais un plus preffant befoin „ d'un pareil fecours. §}ue la ,, Gr ace toute-puiffante de Dieu j, veuille bénir cette fainte fe„ mence, ÉÜ? nous en donner une „ riche moijfon". Ce font les vceux de votre, &c. » %77^ars H. Hammond. Il y a de 1'apparence que la première Editian parut cette année-la. Depuis ce tems on a été toujours curieux de connoitre 1'Auteur, mais fans pouvoir fe fatisfaire. 11 y a cependant plufieurs autres Ouvrages de fa fa9on, & tous enfemble ont été recueillis en un volume in-folio, imprimé a Oxford en 1684. Outre celui-ci, on a traduit en Francois, un Traité du * 3 Con-  vi AVERTISSEMENT Contentement cfejprit: Les devoirs des Dames en deux Parties. Amfterdam 1709: & Les Devoirs d'un Gentilhomme, imprimé Ia même année. Ces deux Ouvrages n'ont point été réimprimés. On peut cependant s'en procurer encore des Exernplaires. Ce qu'on défefpéroit de favoir, a été découvert il y a environ vingt ans, du moins fi 1'on s'en rapporte a Mr. Franfois Teek (*) , qui puhlia en ' 1739 quelques Lettres du Docteur Hammond. Dans la XVIII. il eft parlé de i'Ouvrage dont il s'agit ici, & 1'Editeur v a mis la Note fuivante: „ J'ai cru » pendant un certain tems, m que ce Livre avoit été écrit „ par C*) Voycz Bibliotb. Britann. Tomé XIII. p. I. p. n7.  du TRADUCTEUR. vu » par le Do&eur Guïllaume „ Coupel, Evêque de Cork & „ de Roff. J'ai cru enfuite „ qu'il étoit du célebre Abdias „ Walker. Mais le favant » Dofteur Robert Claverwg , „ a&uellement (1738) Evëque » de Peterboroug, a eu la „ bonté de m'apprendre, il y „ a quelque tems, que c'étoit „ 1'Ouvrage d'un Eccléfiaftique „ du Comté de Worceiler, „ nommé Basket". Un Livre auffi utile ne pouvoit manquer d'être traduit en d'autres Langues; une Femme de mérite, nommée Mrae. Dureli, le mit en Francois, & le dédia a la Ducheflë d'York, Mere des Reines Marie & Anne. II s'en eft fait diverfes Editions; j'en connois une ÜAmJïerdam de 1'année 1674, & je crois en avoir vu d'autres de la fin du fiecle paffé, fans pour-  vin AVERTISSEMENT pourtant ofer l'aiTurer. En 1719 , Mr. Dubourdieu en donna une nouvelle a Londres, retouchée, difoit-on, pour le flyle i mais, en la comparant avec 1'ancienne, on y remarque bien peu de changemens & de correftions. Deux ans après un Libraire de Delft publia une autre Edition , oü 1'on fit quelques nouveaux changemens , qui rendoient certainement cette Edition fupérieure a celle de Londres. On a encore imprimé eet Ouvrage depuis a Neufcbatel; je n'ai point vu cette Edition, mais on m'a allure qu'elle étoit conforme a celle de Delft. Quelqüe réputation que ce Livre ait eu, & a jufte titre, il n'étoit pourtant pas exempt de défauts, tant dans 1'Original que dans la Traduftion. 1. Comme 1'Auteur écrivoit dans  du TRADUCTEUR. rx dans un tems cui 1'on négligeoit abfolument la Moraleen Angleterre, les Prédicateurs n'infiftant que fur la Foi, il s'eft attaché principalement a la Morale , & n'a que peu ou point infifté fur les Dogmes, qui font cependant les fondemens de la Morale. II. Il a mis dans fon Ouvrage quantité de chofes relatives au tems & aux circonflances oü il écrivoit, qui ne font pas dun ufage général, outre certains tours d'expreilïon , certaines comparaifons, qui étoient de mife alors, mais qui ne le font gueres aujourd'hui. Ces défauts engagerent, il y a dix-huit ou vingt ans, un Auteur Anglois a donner un Ouvrage dans le même goüt, mais plus complet, fous le titre de The New whole T>uty of Man: containing the Faith as we!l  x AVERTISSEMENT well as TratJice ofa Chrifïïan: 1'Edition que j'ai, eit de 1'année 1745-, & porte au titre quatrteme. La Traduction de 1'Ouvrage ancien , quoique retouchée , étoit en bien des endroits dure, & en un petit nombre pas touta-fait conforme a 1'Öriginal, dont elle avoit confervé d'ailleurs les défauts. Comme ce Livre efl cependant d'une grande utilité, furtout pour les perfonnes qui n'ont pas le tems de faire de longues le&ures, & pour ceux qui n'ont pas de grandes lumieres, il y a environ deux ans que ceux qui font chargés du foin des Pauvres, defirant de pourvoir a leurs befoins fpirituels, comme aux temporels, me propoferent de retouche r eet Ouvrage, & d'y faire quelques changemens, qui le rendiffent  du TRADUCTECR. xi diiTent plus utile» Je me prêtai avec plaifir a un deffein fi conforme au but de mon Miniftere, & je ne tardai pas a mettre la main a 1'ceuvre. Après avoir aflez avancé dans mon travail , je m'appercus qu'il ne répondoit point a mon attente, & qu'il en réfulteroit une forte de bigarrure, qui ne remédieroit qu'imparfaitement aux défauts que je voulois corriger. Je pris donc le parti de changer de plan, & de fuivre une autre route. I. J'ai traduit de nouveau lOuvrage fur 1'Original Anglois, & ai taché d'y donner un tour plus Francois: je n'ai pourtant pas affeété de m ecarter des premiers Tradufteurs; quand j'ai trouvé, en comparant ma tradudion avec la leur, que le tour d'expreflion qulls avoient employé étoit ** 2 pré-  xii AVERTISSEMENT préférable , je 1'ai adopté. Iï. J'ai retranché certaines chofes uniquement relatives,ou au tems dans lequel 1'Auteur écrivoit, ou a 1'Angleterre, & qui n'étoient pas d'un ufage général pour les Chretiens de: tous les tems & de tous les; lieux. III. J'ai ajouté auiïi diversi morceaux, qui m'ont paru pro-' pres a rendre le Livre plus unie, & dont la plupart font tirés: de 1'Ouvrage Anglois, dont; j'ai parlé ci-deiTus. De ce nombre eft un Abrégé des Dogmes; de la Religion Chretienne, pari voye d'explication du Symbole. J'ai été obligé par-la de changer 1'ordre des Se&ions, &ï d'en faire un autre partage. IV. Enfin, pour engager les! perfonnes les plus occupées ai donner chaque jour une petite portion de leur tems a une lec- ture  du TRADUCTEUR. xm ture fi utile, j'ai divifé 1'Ouvrage en Journées, dont chacune ne contient pas plus d'un quart-heure ou d'une petite demi-heure de leflure, en terminaal chacune par une courte Pnere, qui fe rapporte a ce qu on a lu. Ces premiers changemens en demandoient nécelTairemerit dans les Dévotions particuliere* qui étoient dans une forme, a laquelle on n'eit gueres accoutumé hors de 1'Angleterre. Jen ai mis d'autres en la place, dont il n'y a, engénéral, que lordre & 1'arrangement quiloit de moi; j'ai puifé dans divers excellens Ouvrages, ce qui m a paru convenir le mieux au but que je me propofois, fans afpirer a la gloire de donner du neuf, qui n'auroit pas valu ce que je trouvois dans d autres. ** 5 t 3 Je  xiv AVERTISSEMENT, &c; J e me flatte , qu'avec ces changemens, 1'Ouvrage que je donne fera plus utile encore qu'il ne 1'a été, & qu'il contribuera a porterles Chretiens ala pratique des Vertus Chretiennes, C'eil 1'unique deflëin que j'ai eu, & par cette raifon j'ai ta~ ché de m'exprimer avec fimplicité & clarté, fans rechercher les ornemens du ftyle: Ce n'eft qu'en comparant mon travail avec celui des Editeurs précé-1 dens, d'unbouta 1'autre, quei 1'on fera en état d'en juger., Dieu veuille qu'il ferve a éclai- ■ rer & a fan&ifier ceux qui en feront ufage! Qu'il les porte efficacement a fe conduire com-' me il ejl féant felon PEvangile,, & a rendre honorable la doBri- ■ ne de notre grand Dieu G> Sati- ■ veur Jesus-* Christ ! Amfterdam le 12 Dé' cembre 1759.  T A B L E Du contenu de eet Ouvrage. T O M E I. INTRODUCTION Sar la NéceJJitê de travaükr aufalut de fon ame, fondée fur quatre Motifs. f. Le Prix de 1'A me. II. L'Avantage que nous recueillons de nos foin?. III. Les Diingers auxquels elle eft ex¬ po fée. IV. Le Succes que nous pouvoos nous promettre. S E C T I O N I. Page r. I. Des Devoirs de VHomme felon les Lumieres de la Nature. 2. II. Selon les Lumieres de l'Êcriture Sain- te. 4. NOS DEVOIRS ENVERS DIECJ. I. La Foi, aux chofes que Dieu affirme\ A ce qu'il commande; d fes Mew ces ; d fes Protnejfes. 7. IL L'Efpérance, oppo/ee d la Préfomption au Défefpoir. 15. III. L'Amour. Motifs d aimer Dieu, 6f Effets de eet Amour. 18. 4 SEC-  xvi T A B L E. S E C T I O N ir. Pag. 30, IV. La Crainte. Folie qu'il y a a craindre plus les hommes que Dieu. 31. V. La Confiance , dans les Hangers fpirituels 6? temporels, dans tous les Befoins. 36. Avantages^ de la Confiance. 40. VI. L'HumiTité: qui comprend. 45:. 1. La Soumijfion d'Obéiflance d la volonté de Dieu. 48. 2. La Soumijfion de Patience dans les Jffliëtions. 51. 3. La Soumijfion d la fagejje de Dieu.' jö". SECTION III. 61. VII. L'Honneur , par rapport 1. A la Maifon de Dieu. 62. 2. A fon Revenu. 64. 3. Aux Tems confacrés a fon fervice. ga. 4. A fa Parole écrite ou prêckée. 74. 5. Afes Sacremens. gj. Du Batême, £? des vceux qu'on J fait. 81. Profeffion qu'on y fait des Articles de la DoSlrine Chretienne. S E C T I O N IV. 88. De la vérité êf de l'excellence de la Révélation. gg. I. De la Foi en un feul Dieu. 92. le Pen, y3. Tout-  T A B L E. xvn Tout ■ puiffant Pag.04. Créatear du Ciel £? de la Terre qj. De la Providence 96. De la Trinüê 98. II. De la Foi en Jefus- Chrift joi. Preuves de la vérité & de Vexcellence de la Religion Ckretienne. 105. SEC TI ON V. ii2. III. De la Conception de Jefus-Chrift 112. De fa Naiffance j 1 j. IV. DesSouffrances de Jefus.Chrifl.w8. De fa Mort. ! 2 j. De quelle maniere il nous conduit d Dieu. 12(j. De fa Sépulture. jgi * V. Dg la Réfurreclion de Jefus ■ Chrift. 132. VI. De fon Afcenfion au Ciel. 135. De fa Séance a Ja droice de Dieu*. 137. SECTION VI. i4i. VII. Du Jugement dernier par 9efusChrift. * J{ll VJN. De la Foi au Saint Efprit. ivr* IX. De /'Eglife Cacholique. ijg! De la Communion des Saints. 162 X. De la Rémifljon des Péchés. 164. XI. De la Réfurreólion de la Chair. 169. Qu'elle ejl pojjible. j7o. * * 5 Prou-  xvrii T A B L E. Prouvée par l'Ancien Tejlament. Pag- 173- Et par le Nouveau. 174. XII. De la Vie éternelle. 181. Que l'éternüé des Piines efl compatible avec la Jujlice de Dieu. 183. SECTION VIL 193. De la Sainte Cêne 193. li De VExamen de Soi-même. 1^4. De la ConfeJJion des péchés. 208. De la Réfolution d'obéir d Dieu. 2IO. Comment É? d qurfs égards on doit l'exécuter d'abord. 212. Ce que l'on doit faire Ji Von a des doutes fur fon état. 217. II. Ce qu'il faut faire en Communiant. 223. lil. Devoirs après la Communion. 229. SECTION VUL 235. 6. De VHonneur dü au Nomde Dieu. 235- Du Blafphême. ibid. Des Sermens illégitimes, qui font ou des Sermens faux, ou 236. Des Sermens vains & téméraires. 240. Combien ils font criminels. 241. Moyens de vaincre l'habitude de jurer. 24J. SEC-  T A B L E. xix SECTION IX. Pag. 250. VIIf. D'voir envers Dieu. L'Adoration, qui confifte dans la 2jo Priere, dont les Parties font 1. La ConfeJJion des pêchés. ibid. 2. Les Requêtes. \ 252. 3. A demander d Dieu de détourner quelque mal de deffus nous. 4. UlnterceJJion. 25J- 5. L'Aclion de graces. 2j<5. Des Prieres Publiques, 238. ■ en Familie. 259. • en particulier. 260. Avantages de la Priere. 263. Condüions de la Priere. 267. Objet & Efficace de la Priere 274. IX. La Repentance. 277. Raifons contre le délai de la Repentance 280. Du Jeune, ^84. TO-  *x T A B L E. T O M E II. SECTION X. Pag. u Nos Devoirs envers nous-memes. Devoirs qui regardent l'Ame. z. I. Régler nos Penfées. ibid. Moyens d'y réuffir 4. II. L'Humilité. Sa nature &? en quoi elle confifte. 8. Sa Néceffité &fes Avantages. 11. De la bonne Opinion defoi-même. 13. De /'Orgueil, que c'efi un grand pêché. j 7> C'ejl un pêché trés ■ dangereux. 18. La folie de l'Orgueil. 21. Moyens d'éviter l'Orgueil. 22! De la Vaine Gloire. 2q." • Moyens de l'éviter. fes Avantages. 20- Moyens de l'acquêrir. 33. III. La Réflexion, par rapport d notr'e état &? d nos atlions. 34. SECTION XI. 4o. IV. Le Contentement d'Efprit Oppofé au Murmure &? d I'Ambidon. , 4I —— d /'Avance, qui eft un grand pêché. d l'Eavie. ^ Moyens  T A B L E. xxi Moyens d'acquérir le contentement defprit pag.46. V. La Diligence, qui comprend i. la Vigilance. 40. 2. L'Induftrie , oü Vapplication au. travail. ibid. Des f^ertus, qui regardent le Corps". I. La Chaftecé ou la Pureté extérieure & intérieure. Les Dangers de l'impuretè. jy* Moyens de pratiquer la Chafletê. ibid. S E C T I O N XII. 6a, II. La Tempérance. ibid. 1. Dans le Manger. Ö2" 2. Dans le Boire. qq\ Faux prétextes de ceux qui boivent avec excès. 67. Cornment on doit furmonter les difficultés qu'on trouve d fe dtfaire de cette habitude. 77. 3. Par rapport au Sommeil. 82." Péchés oi\ l'on tombe par l'excès du Sommeil. 83. 4. Dans nos Recréations. 8j! 5. Dans nos Habits. 89! Les regies de la Tempérance ne fa'. vorifent point l'Avarice. 92. Deux Vertus, qui intéreffent éga'. lement l'Ame £f le Corps. 93. La Patience. ibid. Le Renoncement k foi. méme." 95. SEC-  Jcxu T A B L E. SECTION XIII. 99. Nos Devoirs envers le Prochain. Ces Devoirs fe réduifent d deux Chefs généraux, la Juftice & la Charicé. J. La Jufïice Négative confifte d ne faire aucun lort au Prochain. I. Par rapport a Ion Ame; foit en lui caufant du chagrin 100. Soit en le faifant twmher dans le pèché; ce qu'on peut faire en différentes manieres. 101. 4. On doit éviter de faire du mal au prochain en fon Corps. (1) Du Meurtre. 105. Atrocité de ce crime. 108. C2") Des Mutilations. 113. (3) Des Bleffures 6f des Coups 115. Par quels principes on fe porte d ' outrager ainfi le prochain 116. (4) Du Suicide. Atrocité de ce cri¬ me. 118. SECTION XIV. 125. % La Juftice négative d l'égard des Biensdtt Prochain\ & (O De fa Femme. ibid. Complication de crimes dans VAdultere 126. (2} Du tert qu'on fait au prochain dans fes biens par Malice; 129. par Avance. 13©. De J'Oppreffion. 131. Du  T A B L B. xnn Du Vol indirect. Pag. 132. - direct. 137. La Fraude. 139. Jl l'égard des chofes qui nous ont été confiées. 140. Dans le Commerce; de la part du Mendeur. 142. De la part de l'Acheteur. 146. Raifons qui doivent en détourner. n 148. De la Reftitution. iji. SECTION XV. 154. 4. De la Juftice Négative d l'égard de la Réputation du Prochain. ibid. (1) Des faux témoignages. ijö. (a) Des Calomnies, tant publiquis que fecrettes. 157. (3) Du Mépris &> des Railleries. 162. Grandeur du tort qu'on fait au prochain en ruinant fa réputation. 165. Difficultê qu'il y a die réparer. 166. La Juftice négative doit régler nos penfées & nos fentimens, comme nos paroles cf nes aSïions. 167. II. La Juftice Pofitive. 1. Envers tous les Hommes en gênénéral, exige Cl) La fincérité ou d'être vérita. bles dans nos Difcours. 169. (O  KXiv TAB L E. (2) L'Hümanité fcp 1'Honnëteté. Pag. 170. (3) La Débonnaireté. 175. III. Envers certains ordres de Per/onnes J77- 1. De Veftime £f du refpecl qu'on doit aux talens & au mérite. ibid. Au Rang £? aux autres Avantages extérieurs. jgo. s. Devoirs envers ceux qui font dans quelque Beloin. 181. SECTION XVI. 3. Devoirs qui réfultent des relations que nous avons avec nos Prochains. jgg^ CO Des Débiteurs des Créanciers. l87. (2) Envers les Bienfaiteurs, £? en particulier envers ceux qui nous ontdonné de bons con/eils. 188. (3) Des fujets envers les Souverains, qui font l'Honneur 6? le Respecl. Les Tributs. 190. Des Prieres pour eux. L'Obéisfance., 19 r. C4) Des Troupeaux envers les Pasteurs; qui font l'Amour £f 1'Estime. 193. Le foin de pourvoir d leur entretien. L'Obéiffance. 194. De prier Dieu pour eux. 196. (5) Des Enfans envers leurs Peres £f Meres, qui font l'Honneur &  T A B L E. xxv. & le Rcfpe£t. Pag. 198. L'Amour. 199. L'Obéiffance. ao2. L'AJftfiance. 20^ Les Défauts des Parens ne dis* penfent pas de ces devoirs. 206. (6) Des Parens envers leurs Enfanst qui font, l'Entretien. 207. L'Education. 209. Lefoin de veiller fur eux. 514* ■ de leur procurer quilque Etabliffement. »1 j. De leur donner^de bons ExemJles: , 217. Dattirer fur eux la bénédiclion de Dieu. 2i8 D'ufer de leur autorité avec équité £f modération. 219. SECTION XVII. C7) Des Freres 6? des Sceurs, qui font l'Union £f VAmitié. 221. Envers nos Freres fpirituels, qui font 223. D'entretenir communion avec eux. T> r 224' Defupporter leurs foibleffrs. 225. De ramener les Errans & les Vicieux. 220". De prendrepart d ee qui leur arrivé. 227. (8) Des Femmes envers leurs Maris , qui font 229 L'ObéiJfance. La Fidélité. VA*** «war.  xxvi T A B L E; . mour. Pag. 229, 230. (9) Des Maris envers leurs Femmes, qui font 234, 235. L'Amour. La foi conjugale. L'entretien. L'inftru&ion 2^,6. Les Maris ö* les Femmes doi, vent prier les uns pour les autres. ibid. Avis d ceux qui veulent fe ma* fier. 237. Des Mariages illicites. 238. (10} Des Amis. De la véritable Amitié. Devoirs des Amis. 239. La Fidélité 240. L'Afftjlance dans tous leurs befoins. Le join de contribuer d leur falut. 241. La Priere. 243. La Confiance. 244. (il} Des Serviteurs envers leurs Maftres 5 qui font , VObéiffance. 244. La Fidélité. 24J. La Patience. La Diligence. 247. Clfl) Des Maicrcs envers les Domes. tiqucs , qui font , la Juftice. 249. Les Avertijfemens les Reprthenfions. 250. De leur êire en exemple. De leur procurer les moyens de s'infiruire. De 11'exiger que des chofes juftes. De les encourager. 151. SEC-  T A B L E. xxvii SECTIO.N XVIII. De la Charité envers nos Prochains. Pag. s-^. I. Par rapport aux rentimens du cceur, elle a pour ohjet l'Ame. 254.. Le Curps, les Liens & la Réputation. TT 2 de Jefus-Chriit. 2fió. La difproportioi qu'il y a entre les offenfes que nous devons pardonner & celles que Dieu nous pardonne. 267. C'ejt un devoir, dont la pratique efl agréable. 269. Le Danger qu'il y a d ne pas pardonmr- 272. La Reconnoijfance envrs DLu. 274. Avis fur ce fujet pour faciliter la pratique de ce devoir. 276. II. Par rapport aux Aótions, auxquelles elle eng.ige, 278 A l'égard de l'Ame. 279.' " du Corps. 282. Des Biens De 1'Aumóne. 285. • Motifs qui doivent nous jy por ter. 287. i Manürs de faire 1'Aumóne. 9.90. *** 2 Rai-  xxviii TA B L E. Raifons qui nous engagent dia Charité. Pag. 290. A quoi la Charité nous oblige d l'égard de la Réputation du Prochain. 302. La Charité efi un devoir de juftice. 304. De la Pacification des Différends £•? des Procés. 308. Conclujion. 317.  INTRODUCTION Sur la NêceJJltè de travaillcr ad falut de Jon Amc. L'Unique but du Traité, qu'oni. va lire, eft de donner aux perfonnes de tout ordre & furtout aux plus fimples des direclions courtes & claires, pour fe conduire dans la vie préfente de facon qu'ils puiffent être heureux dans celle qui eft a venir. Mail comme il eft inutüe de propofer aux hommes leurs devoirs , tant qu'ils ne font pas convaincus de leur nécesfité, avant que d'entrer dans le détail de ceux auxquels tous les Chretiens ibnt obligés , nous tacherons de les engager a s'acquitter d'un Devoir général, qui les portera naturellement a Ja pratique de tous les autres, c'eft de i penfer férieufement au falut de leur | Ame, & de s'y appliquer avec foin: puifque fans cela ils ne croiront ja*•* 3 mais  xxx Introduftion fur la Néceffïté mais avoir beaucoup d'imérêt a fuivre les iecons qu'on leur donne fur d'autres articies. Nous favons que 1'Homme eft compolë de deux parties, le Corps & l'Ame. Le Corps n'eft tjue j'tnveloppe de l'Ame, une maffe de chair fujette a un grand nombre de douleurs & de maux pendant qu'elle eft animée, & enfin a la mort même; & bien loin d'en faire alors quelque cas, on ne permet pas feulement qu'elle demeure expofée a Ia vue, & on 1'abandonne dans le tombeau a la corruption. JNoua ne laiffons pas cependant de prendre de granls foins de ce Corps , qui eft la moindre partie de nous - mêmes; tous nos travaux n'ont d'autre but, que fa confervation & fon entrecien. Mais pour l'Ame , la pius noble partie de nous marnes , nous n'y penfons guere, nous fommes indifférens fur 1'état oü elle fe tro^ve, nous la négligeons, comme s'il s'agiffoit d'une chofe a laquelle nous n'euffions aucun intérêt. Cette Négligence eft la fource de tous nos péches, & par cette raifon* qui-  de travailler au falut de fon Anw. xxxr" quiconque fe propofe de vivre Chretiennement, dok commeneer par y remédier; ce qui n'eft pas difficile, «Sc ne demande ni un profond favoir, ni des talens extraordinaires; 1'homme ie plus fimple, pourvu que ce ne fok pas un imbécille, en eft capable; il n'a qu'a fuivre a eet égard les mêmes regies, que le bon fens lui prefcric dans fes affaires temporelles. Nous allons donc prelTer quelques-uns des Motifs, qui dans Je cours ordinaire animent notre zele & nous excitent a employer nos foins par rapport aux chofes du Monde, & nous ferons fentir en peu de mots, qu'ils ont plus de force encore, lorfqu'il s'agit des intéréts de l'Ame. QüArRE Raifons principales réveillent notre vigilance, & nous animent: a Ia pourfuite d'un objet. r. Son Excelknce. 2. Son Ucilité par rapport k nous, quand il eft tel que nous ne pouvonsen être privés, fansrecevoir un préjudice confidérable. 3. Le Banger auquel il eft expofé. 4. L'Jppireme qu'il y a que nos foins pour le conferver ne feront pas inutiJes. ***4 I.  I. VEzuU lence de TAme. Pm. II. 7 XXXII Introhtlion fur la NêcrJJitê I. Personne n'ignore que nos foins pour les chofes du Monde font proportionnés a leur excellence & a leur valeur. Nous veillons principalement a la confervation de ce que nous avons de plus précieux, & c'eft ce que nous craignons le plus de perdre. On ne fe met pas en peine de ferrer & de placer dans un lieu für des chofes dont on ne fe foucie point, mais on a grand foin de mettre a couvert fon argent & ce qui eft de quelque valeur: or a eet égard il n'eft rien qui foit plus djgne de nos foins que notre Ame, puifqu'elle eft d'un bien plus grand pnx que tous les biens du Monde. Premieremm, en ce qu'elle eft faite a • 1'image de Dieu; c'eft lui qui a foufflé cn 1'homme cette refpiration de vie; & puifque Dieu tft le plus excellent & Je plus parfait des Etres, il eft évident que plus les autres ont de conformité avec iui, plus ils doivent étre eftimés. Or il eft certain, que de toutes les Créatures qui font fur Ia Terre, l'Ame de 1'homme eft la feule oü 1'on apperjoive les traits de 1'image de Dieu, 3c par conféquent qu'il n'y a rien qui mérite plus nos foin*. En fecond lieu \ l'Ame  de travailler au falut de fon Ame. xxxn l'Ame ne meurt jamais, & nous efti mons ordinairement les chofes a pro porcion de leur ourée: or l'Ame doii fobfifter éternellement; & elle furvivra aux richeffes, a la beauté, a Ia force, & a nos corps mêmes, qui retourneront en poudre; ainfi elle eft a eet égard encore d'un prix infini. foelie étrange folie n'y a-t-iidonc pas a la négliger, comme nous le faifons! Quoi! nous pouvons nous réfoudre a employer des jours, des femaines, des mois, des années, & même toute notre vie a la pourfuite d'une petiteportion des biens de ce Monde, qui nous échappent fouvent & que la mort nous enlevera un jour infailliblement,tandis que nous fouffrons que le Démon nous raviffe notre Ame, eet ineftimable & éternel tréfor! H. l'Utilité dont nous eft unei chofe, ou le grand préjudice que nous' cauferoit fa pene, eft un fecond Mo-/ tif qui nous porte a veiller a fa confervation. C'eft ce que le Sens-commun nous enfeigne par rapport a ce qui regarde la vie préfente. Si les cheveux nous tombent, nous ne nous en inquiettons guére, parceque nous *•* 5 pou- l T. Le Mal. eur qu'il y a perdrc 'fit Ame.  xxxiv IraroduHbn fur Ia Nêcejfitè pouvons nous en palTer fans peine; mais fi nous fommes en danger de perdre la vue, ou quelqu'un de nos membres, nous ne croyons pas pouvoir prendre trop de préeautions pour prévcnir cette perte, parceque nous la regardons comme un grand malheur. Mais certainement il n'eft point de malheur comparable a celui de perdre notre Ame. II eft bien vrai, qu'en un fens, nons ne pouvons la perdre, puifqu'elle exiftera toujours; mais nous pouvons h perdre dans un autre fens, & de maniere a nous faire fouhairer qu'elle füt anéantie; c'eft-adire, que nous pouvons être privésde 1'état de bonheur pour lequel elle a été créée, & ]a voir plongée dans la plus affreufe mifere: en ün mot, nous pnuvons la perdre dans les Enfers, d'oü il n'y a plus de retour, deforte qu'elle périt pour jamais. Ce qu'il y a de plus preifant, c'eft que cetie confidération intéreffe notre Corps , 1'objet de notre tendreffe, & de toui. nos foins ; puifqu'il doit certainement refTufciter, & être réuni a notre Ame, pour partager fon bonheur ou fon malheur. Si donc nous nous  de travailler au falut de fon Ame. xxxv nous occupons uniquement de ce Corps, & que nous ne prenibn* aucun foin de notre rvme, il eft evident que notre nésdigence fera la caufe de fon malheur éternel ; majs il n'eft pus moins certain que le Corps fera enveloppé dans le méme malheur. Deforte que, fi 1'on aime véritablement fon Corps, on ne peut en donner de preuve plus marquée, qu'en travaillant au falut de fon Ame. Confidérons férieufement comment nous pourrons fupporter des ardeurs éternelles: fi la moindre étincelle qui' tombe fur nous, nous pnroït infupportable , quelle frayeur ne doit pas nous infpirer 1'idée de voir notre Corps entier précipité dans des flammes dévorantes, non pour quelques heures, pour quelques jours, mais pour toute une éternité: enforte qu'après avoir paffe* plufieurs milliers d'années dans eet inexprimable tourment, nous ne ferons pas plus prêts den voir la fin, qu'au premier moment qu'il a commencé. Penfons ■ y murement, & fouvenons-nous en méme tems, que ce fera-la ce que nous recueillerons de notre négligence: que ce motif nous porte  Xxxvi IntroJuclion fur Ia Néceffitê tit. Les 1'tngers auxijuels F Ame efl expofée. porte a prendre au moins quelque foin du falut de notre Ame, quand ce ne feroit que par compaflïon pour notre Corps, qui doit partager fa mifere. III. Le troifieme Mocif qui nous porte a prendre foin d'une chofe, c'eft le Dancek auquel elle fe trouve expofée , foit de la part des Ennemis du dehors, foit par une mauvaife difpofition intérieure. C'eft a un danger du premier ordre qu't ft expofée la brebis, qui a toujours a craindre d'être dévorée du loup;,ce qui redouble la vigilance du Berger. Telle eft auffi la condition de notre Ame, qui eft fans ceffe en danger de la part de fes Ennemis, qui font la Chair, le Monde & le Diable; ennemis fi déclarés & fi eonnus pour tels , que la première chofe que nous faifons en faveur de notre Ame, c'eft de leur vouer une guerre éternelle, dans notre Batême: enforte que faire quelque treve avec eux, c'efttrahirnónfeulement les intéréts de fon Ame, mais violer fes vceux, & ce qui mérite la plus férieufe réflexion, fe rendre coupable de parjure. Mais, pour mieux comprendre a quel danger l'Ame eft expofée , exami- nons  de travaïïler au falut de Jon Ame. xxxvn nons le caracïere de fes Ennemis. On fait qu'a la guerre diverfes chofes concourent a rendre un ennemi redoutable. En premier lieu la Rufc , qui feule a fait remporter bien des victoires; & a eet égard le Diable eft un dangcreux ennemi: il y a longtems qu'il a donn e des preuves de fon caraétere artificieux, en féduifant nos premiers parens, qui étoient plus éclairés & plus prudens que nous; il n'eft donc pas étonnant s'il nous iurprend & nous trompe. Secondementla Vigilance & YAftivité d'un ennemi doit augmenter la crainte qu'il infpire, & c'eft en quoi le Diable n'a point d'égal; il fait fon affaire de travailler s notre perte, & il ne négligé rien pour réuftir dans ce deffein; /'/ i tourne autour de nous, cberchant qui ils' powra dévorer. II épie avec tant d'appücation toutes les occafions de remporter quelque avantage fur nous, qu'il eft bien fur de n'en laiffer échapper aucune. En troifieme lieu, un Ennemi a nos cótés eft bien plus a craindre que celui qui eft éloigné; car dans ce dernier cas on a le tems de s'armer & de fe préparer a le repouf- ferj Pietie V.  XXxvtii ïntroduclion fur la Nécefliti t Jam. m S7. fer; mais lorfqu'il.eft prés de nous,1 il peut nous affai'lir, quand nous ne fommes pas fur nos gardes. La Cbair eft un ennemi de eet ordre; nous 1'avons toujours avec nous, dirai-je? ou d ans nuire fein ; elie eft toujours a portte oe proficer des occalions de nous nure En quatrieme lieu, un ennemi eft dartg reux a proportion qu'il eft IdWi & perfide: celui qui cache fa haine fous des apparences d'amitié, eft géneralement mieux en état de iföus fiire beaucoup de mal, que celui qui fe montre a découvert. La chair eft tncore un ennemi de ce caracfere, elle en agit avec nous comme Joab e nvers Abner; fous prétexte de nous p, rlér oe patx, elle nous porte des coups mortels Elle s'empreflè a nous ft urnir des amufemens & des plaifirs, & fen-bie par -la nous affeórionner, m .is l'hamecon eft caché fous eet appa?: fi nous y mordons, notre perte eft cenaine. En cinquieme lieu, plus le t.nn hre des ennemis eft grand, p'us ilf- font redoutubles; or le Monde forne une pinffante armee contre nous. II n'y a ni état. ni condition, ni prefque de créature, qui dans un tems ou dans  k tramilkr au falut de fon Ame. xxxix dans 1'autre ne h'vre des combacs a l'Ame. Les Honneurs du Monden >as attaquent par l'Orgueil; les Richeffes par 1'Avarice; la Profpérité nous met en danger d'oublier Dieu; 1'Advtrfité nous expofe a murmurer contre lui. Notre Table méme nous eft en piége: les mets & les liqueurs que nou« y prenons, nous portent a la gourmandife & a 1'ivrognerie ; nos Compagnies, & méme nos plus intimes Amis, prennent fouvent parti contre nous dans cette guerre, en nous engageant au pêché par leurs exemples, ou par leurs perfuafions. Examinez attentivement tous ces objets, & dites-nous, fi une Ame, environnée de toutes parts d'ennemis dangereux, a le loifir de fe Jivrer au fommeil. Dalila même avertit Samfon , qu'il étoit tems qu'il s'éveülat, lorfque les Pbilijlins étoientJur lui; &J Jefus- Chrift nous dit que , fi le Pcrc1 de familie eüt fu a quelle heure de la nuit} le larron viendroit, il eüt veijlé &p n'eüt pointfouffen que fa mrifon eüt été percér. Or nous vivons au milieu des brigands, nous devons donc être fans eelfe fur nos gardes: & cependant qui de Jge XVI. Mat tb. XIV. 43.  Matth. XXVI. 40 Pf. L. 2a. XL Introdutïinn fur la Nkejptè de nous prend autant de foin de la confervation de fon Ame, lapartie la plus précieufe de lui- méme, qu'il en prend de fa maifon , & de chofts bien moins confidérables , qui lui appartiennent? II y a tout lieu de craindre que notre Ame n'ait fujet de nous faire, le meme reproche , que le Sauveur faifoit a fes Diièiples: efi.il p,ffible que vous riayez nu illm une beurt avec mo\! II feroit bien difficile a plufieurs d'entre nous de dire, quand ils ont employé une heure a veiller au falut de leur Ame, quoique nous fachions parfaüernent qu'elle eft continuellement environnée des plus dangereux ennemis. Quel doit donc être, hélas! le fort de cette Ame, a la perte de Jaquelle fes ennemis travaillent avec tant d'induftrie & d'activité , tandis que nous en avons fi peu pour veiller a fa confervation? Elle ne peut qu'avoir celui d'une ville afliégée, oü il n'y a ni garde ni fentinelles, qui doit néceffairement tomber en la puiffance de 1'ennemi. Confidérez ceci, vnus qui oubliez Dieu, & qui vous oubüez vousmêmes, de peur qu'il ne vous raviffi, & qu'il ny ait perfonne qui vous déhvre. Novs  de tramiller au falut de fon Ame. x« Nous avons dit qu'une chofe'peut être en danger d'une fecondc maniere, lorfqu'il y a quelque défordre ou quelque difpofition vicieufe au dedans. C'eft-la fouvent ce qui a lieu par rapport a nos Corps, qui font non feulement expofés aux attaques du dehors, mais qui ont aufii des indifpofidons intérieures. Nous fentons alors aflet qu'ils font en danger, fans qu'il foit néceffaire qu'on nousavertiffe dechercher des remedes a leurs maux. Mais tel eft auffi 1'état de notre Ame. Nous comptons que certaines pardes du Corps font attaquées, quand elles ne font pas bien leurs fonétions; que le goüt eftdépravé, lorfqu'il ne favoure pas les alimens; que 1'eftomac eft en défordre, quand il ne digere pas. Nous devons donc porter le même jugcment de l'Ame, quand nous appercevons que fes facultés ne font pas leurs fonctions, comme elles le devroJent. Les trois principaies Facultés font Y Entendement, Ja Voimitè & les Affections: & il n'eft pas difijcile de prouver, qu'il n'en eft aucune oü il n'y aic du déréglement. Que chacun exami- ne  xlii Introduftion fur la NéceJJlté ne férieufement fon propre coeur, qu'il confidere combien il connoit peu les chofes fpirituelles, & qu'il nous dife après cela fi fon Entendement n'eft pas obfcurci? qu'il faffe attention a la pente que fa volonté a vers le mal plutöt que vers le bien, & qu'il nous dife, fi la volonté n'eft pasdépravée? Qu'il obferve la force des defirs qu'il a pour les plaifirs du pêché, & 1'jniifférence & h froideur qu'il a pour Dieu & pour la Pie'cé, & qu'il nous dife encore, li les Affttlions ne font pas déréglées, & même rebelles a la voix intérieure de la Raifon ? Or comme dans les maladies corporelles le premier pas vers la guérifon eft de connoitre la fource du mal, il faut de même ici rechercher d'abord, d'oü vient ce défordre que nous appercevons dans notre Ame, & c'eft ce que nous alions faire en peu de mots. Dieu créa le premier Homme pur & faint; i! lui donna une parfaite connoiffance de fon devoir, & les forces néceffaires pour s'en acquitter, s'il le vouloit. Après 1'avoir créé dans eet état, il traitn une Alliance avec lui, qui portoit en fubftance, que s'il perfévéroit  de tmVailkr mi falut dc fon Ame. XLift; févéroic dans Ibbéiffanc'e qu'il devoic' a D:eu, fans fe rendre coupable d'aucun pêché, il conferveroit les forces naturelles de fon Ame, & qu'il ne mourroit point, mais qu'il feroit transporté dans le Ciel, pour y être éter' nei.ement heureux. Que fi au contraire il péchoit & défobéiffoit a Dieu, tant lui que fes defcendans après lui,perdroient cette connoiffance & cette force parfaite, qui le rendqient capab!e d'accomplir tout ce que Dieu exigeoit de lui; que de plus il feroit fujet, non feulement a la mort, mais . a la damnation éternelle dans les Enfers. Tel fut 1'Accord fait avec Adam,& avec tout le Genre-Humain en fa perfonne; & c'eft ce que 1'on appelle communément la première Auiance: ce fut en vertu de eet Accord que Dieu donna a Adam un commandement particulier, par lequel il lui défendoit de manger du fruit d'un feul des arbres, dont le Jardin, oü il avoit été placé, étoit enrichi, Mais Adam, féduit par les difcours du Diable mangea de eet Arbre, transgreffa 1'ordre de Dku. & par fa défobéiffance 2 ü  XLiv Introdutïïon fur la NéceJJttê il attira fur lui & fur toute fa poftérité la roalédiétion dénoncée. C'eft par ce feul pêché qu'il perdit également la parfaite cpnnoiffance de fon Devoir, & les forces néceffaires pour s'en acquitter. Et comme nous ibmmes formés a fon image , nous fommes réduits a la même condition que lui, & dans un état d'ignorance & de foibleffe, qui nous empêche & de connoïtre notre devoir & de 1'accomplir, ayant de la répugnance pour tout ce qui eft bon, & une inclination naturelle au mal: comme un eftomac malade , qui a du dégoüt pour toute nourriture faine, ne demande que des chofes propres a nourrir fon mal. Voila quelle eft 1'origine du défordre qui regne dans l'Ame, & cette corruption eft un mal naturellement mortel: ainfi nous croyons qu'il n'eft pas néceffaire d'en dire davantage pour vous convaincre que l'Ame eft en danger. 11 y a bien plus d'apparence que vous penferez peut-être que fon état eft défefpéré. Mais pour que vous ne prétendiez pas faire fervir cette penfée a juftifier votre négligence, nous allons d'abord vous prou-  de travailkr au falut de fon Ame. xv? prouyer Ie contraire, en preffant Ie quatrieme motif que nous avons indiqué. i, O Dieu , qui nous as créés a ton „ image, fais-nous la grace de con„ noïtre & de fentir 1'excellence de „ notre Ame, d'eftimer a proportion „ de fon prix cette noble partie de „ nous-mêmes, & de travaiiler avec „ foin a Ia garantir des malheurs qui „ la menacent. Que rien ne nous „ paroiffe digne de nos foins, en. „ comparaifon d'elle: que nous fervi-» „ roit'il de gagncr tout le monde, fi nous „ venions a la perdre ? Que la liaifon „ qu'il y a entre fon fort Sc celui de „ notre corps, nous touche & anime „ notre zele. Environnés d'un grand „ nombre d'ennemis rufés, perfides & „ afilifs, nous fentons que nous ne „ pouvons nous garantir de leurs pié„ ges que par une vigilance conti„ nuelle ; naturellement aveugles, „ corrompus& enclins au mal, com„ ment pourrions - nous leur réfifter, „ fi nous ne fommes toujours^fur nos „ gardes ? Veuille, Seigneur, nous don „ ner les forces, dont nous avons be;s fQÏn pour combattre le bon combat11 3 »dans Priere. [attb.XVL 5. Tïmoth.  ""xlvi IntroduBion fur la Nêceffité ii. JOOTÏNÉE iv. Les foin pour le falu, de F Ame m feront pas inuliles. „ dans cette guerre fpirituelle , ,, d'être vainqueurs par Jefus - Chrift ,i notre Sauveur. Amen. IV. Rien n'eft plus décourageam que de travaiiler fans efpoir de fuccès ; ainfi un grand Motif a veiller a la confervation d'un bien, c'eft l'Appa ren ce Qü'lL Y a Q.ue les soins QUJ l'on PREND ne seront fas inut1li.S Le Médecin, abandonne un maladd quand il défefpere de le gue'rir, parii cequ'il fait que ce feroit envain qu'i' lui prefcriroit des remedes; maïf quand il fe flatte de lui pouvoir rendrf la fanté, il ne négligé aucun det moyens qui y peuvent contribuer. A conïidérer la chofe de cette manierey nous avons toute forte de raifons d$ prendre foin de notre Ame; parcequ^ fon état n'eft pas fi défefpéré , qua nous ne puiffions efpérer fa guérifoni & qu'i! eft même certain que le fuceèi répondra a notre attente, fi nous fai| fons de notre cöté ce que nous dej rons. Car , quoique par le pêché d'Adan» Lout le Genre-Humain ait été envelop j pé dans 1'arrêt d'une condamnatiojw éternelle, Dieu a eu tellement com4 pas4  de travaiiler au falut de fon Ame. xivii paffion de notre malheur, qu'il nous a doliné fon Kils , & qu'il a traité par fon Miniftere une nouvelie Alliance avec nous , après que nous avons 'eu violé la première. Dieu traita cette seconde Alliance avec Adam, & en fa perfonne avec nous, immédiatement après fa chüte: elle eft contenue en fubftance dans ces paroles, oü Dieu promi:, que la Semence de la Femme brifmit la tête du Serpent. Elle renferme, comme la première, d'un cöté des graces que Dieu s'engage de nous communiquer, & de i'autre certains devoirs que nous devons remplir, Dieu y promet d'envoyer au Monde fon Fils unique, Dieu bénit éternellement avec lui , pour être fait\ homme, femblable a nous en toutes chofes, excepté le pêché, & pour faire en notre faveur tout ce qui étoit nécefiaire a notre bonheur. . Premierement, pour nous inftruire parfaitement de la Volonté de fon Pere, en nous affurant que notre obéisfance lui fera agréable, & qu'il ne manquera pas de nous en recompenfer. C'étoit la une des grandes vues de fon 3en IU.15. leb. II. 17, V. 15. 4 Mi-  XLvrii ïntrochttion fur la Nècejfttè Miniftere, & c'eft le but de tant de Sermons & de Pre'ceptes que nous trouvons dans 1'Evangile. A eet égard il eft notre Prophete, la Charge des anciens Prophetes ne confiftant pas uniquement a prédire 1'avenir, mais encore a inflruire. Notre devoir envers lui, comme Prophete, eft de Pécotfter attentivement, d'être toujours prêts a nous jnftruire, & de defirer de tout notre cmur de connoïtre la Volonté de Dieu, que ce charitable Sauveur eft venu nous ré veler. En second lieu, il devoit fatisfaire a la Juftice de Dieu pour nos péchés, non feulement pour celui d'Adam , mais pour ceux de tous les Hommes, qui fe repentent fincérement, & qui réforment leur vie; & par ce moyen jl devoit nous obtenir la rémiflion de nos péchés , la. faveur de Dieu, & nous racheter ainfi de 1'Enfer & de Ia damnation éternelle, qui étoit la peine dfte a nos péchés. C'eft ce qu'il a fait par fa mort. II s'eft offert en facrifice pour les péchés de tous ceux qui les pleurent amérement, & qui y renoncent. A eet égard 11 eft notre SaCRiFiCATEU.i j la fonftion des Sacrificateurs  de travaiiler au falut de fon Ame. xnx eateurs étant d'offrir des facrifices pour les péchés du pcuple. Notre devoir envers lui, comme Sacrificateur, confifte en deux chofes; a nous repentir fincérement & de tout notre cceur de nos péchés, Si a les abandonner, fans quoi ils ne nous feront jamais pardonnés, quoique Jefus-Chrift foit mort; Si a croire fermement, que fi nous nous repentons & fi nous changeons de vie, nous recueillerons les fruits de fon facrifice; que tous nos péchés, quelque grands qu'ils foient, Si quel qu'en foit le nombre, nous feront pardonnés, Si que nous ferons garantis des peines éternelles qu'ils avoient mérirées, Une autre fonclion des Sacrificateurs étoit de bénir le peuple, Si de prier pour lui: c'eft encore ce que Jefus - Chrift a fait pour nous. II avoit particulierement comimffion de fon Pere de nous bénir, comme St. Pierre nous le déclare: Dieu a en- Afl voyè fon fils Jéjus, pour , vous bénir; ce que eet Apötre ajoute, nous apprend en quoi cette bénédiétion confifte, en retirant, dit - il, cbacun de vous de vos iniquitês: & nous devons regarder ce qu'il a fait pour nous retirer de nos **** 5 ini- .111.25.  Rom. 1 3. vers nous-mêmes; celui de jujleme^t, | ce que nous devons a nos prochains; I & celui de religieufement, ce que nouj i devons a Dieu. C'eft a ces trois Chefs que nous rapportons tout ce Traité. , JVos Devoirs envers Dieu, envers Nous1 memes & envers nos Prochains. Nous j commencons par nos devoirs envers Dieu, paree qu'ils font le fondement j le plus folide de cous les autres. Nos Devoirs envers Dieu fe réduiij fent a ces deux principaux. premièreI ment, a le reconnoüre pour Dieu. En l fecond lieu ,mè n'en avoir point d'autre I que lui. C'eft a ces deux chefs que fe rapportent tous les devoirs particuliers qui out Dieu pour objet, & qua Bous allons indiquer en détail. Le reconnolre pour Disuy c'eft croire A 3 qu'il Trois erIres de De* 'oirs. nt. u. 12. Devnirs envers Dieu.  6 Pratique des Vertos i Timoth. JFJ. 1(5. qu'il eft un Efprit infini & glorieux,' qui a exifté de toute éternité, fans avoir eu de. commencemenc, & qui cxiftera toujours , fans avoir de fin: qu'il eft notre Créateur , notre Rédempteur , celui qui nous fanólifie, Pere , Fils & Saint - Efprit, un feul Dieu bénit éternellement: qu'il eft immuable, fans être fujet a aucun changement; qu'il n'eft point corporel, mais d'une nature fpirituelle & invilib!e, qa'aucun bomme ne /'a vu ni ne le peut voir , comme le dit 1'Apótre; qu'il eft infiniment grand & parfait, au-dela de tout ce que notre efprit peut concevoir & imaginer ; que n'ayant recu 1'exiftence de perfonne, il 1'a donnée a toutes chofes. Maïs outre ces vérités que nous devons croire par rapport a fon EfTence , il en eft d'autres encore: 1'Ecriture lui attribue diverfes Perfeftions; elle nous le repréfente comme infini' ment bon, miféricordieux, véritable, jufte, fage, tout-puiflant, fe fuffifant a lui-même, revêtu de Majefté; elle nous apprend qu'il regie & gouverne toutes chofes par fa Providence; qu'il connoit tout & qu'il eft préfenc partout. C'eft ce que les Théologiens appellent les Attributs de Dieu , que nous devons reconnoitre en lui fans avoir Ie moindre doute a leur égard; c'eft *a- dire que nous devons être fermeinent .  Chrbtieknes. Set}. I. 7 mement. perfuadés que Dieu poffede toutes ces perfeftions, qu'il les poflede dans le degré le plus éminent, & qu'il ne peut jamais cefTer de les polïé. ëer; n'étant pas poflïble qu'il ne foit toujours ir finiment bon, miféricordieux, vérituble, &c. Mais reconnoftre Dieu pour notre Dieu, emporte encore plus: c'eft auflï nous acqunter de tous les différens devoirs auxquels la Créature eft obligée envers fon Créateur. II. Le premier eft la Foi, ou la perfuafion non feulement de tout ce que nous avons dit de fon ElJence & de fes Attributs, mais auflï de ce qui eft contenu dans fa Parole; nous devons croire fermement, que tout ce qu'il nous dit eft parfaitement véritab!e. Cette Foi découle néceffairement de cette infaillible vérité , que nous reconnoiffons en Dieu, n'y ayant rien de plus naturel que de croire tout ce que nous dit une perfonne dont la fincérité & la droiture nous eft un für garant qu'elle eft incapable de nous tromper. Puis donc que 1'Ecriture Sainte eft la Parole de Dieu , cela feul fuffic pour nous perfuader que tout ce qu'el. le renferme eft trés - vrai. Les chofes contenues dans 1'Ecriture font de quatre efpeces. Première- f ment il y en a qu'elle affirme, ou attefte; c'eft de cette efpece que font touA 4 tes La Foi. lux chofet ie Dim afrme.  8 Pratique des Vertos A ce qu'i commande Afts Me«aces. tes les Hiftoires de la Bible, quand il eft dit, que telle & celle chofe eft arrivée, de telle & de telle maniere; par exemple, Jefus-Chrift eft néd'une Vierge , il a été couché dans une crèche &c. II faut mettre dans le même rang divers points de Do&rine, comme qu'il y a trois perfonnes dans une feule efience divine, que Jefus-Chrift eft le Fils de Dieu, & tels autres. Nous devons croire non feulement que toutes les chofes de eet ordre, que nous trouvons dans 1'Ecriture, font véritables, mais, comme elles font toutes écrites pour notre inft.rucr.ion , nous devons les envifager, comme devanc fervir a nous donner une connoifTance, qui foic le fondement fur lequel nous puiffions élever 1'édifice d'une vie chrétienne. L'Ecritüre contient, en fecond lieu, des Commandemens , par lefquel» Dieu nous prefcrit les devoirs qu'il exige de nous ; nous devons croire qu'ils viennent de lui, qu'ils font trèsjuftes & dignes de leur Auteur. Mais notre foi è eet égard doit nous porter è 1'obéiffance , & nous devons prariquer réellement ce que nous croyons qui eft jufte & raifonnable. Sans cela, la perfuafion que ces Commandemens viennent de Dieu , ne fert qu'a nous rendre plus inexcufables. Troisiemement , on trouve des Memcet dans 1'Ecriture: il y a un grand,  Chrktiennes. Secl. 1. $ grand nombre de paffages, qui dénoncent la colere de Dieu a ceux qui perfévcrent dans le pêché: & certe dénonciation comprend également toutes les punitions & les calamités temporelies & fpirituelles de la vie prérente, & des peines éternelles dans celle qui eft a venir- Nous devons croire fermemenc que ce font les menaces de Dieu luimême, & que tous les pécheurs impéuitens en éprouveronc infailliblement 1'effet. Et 1'ufage que nous devons faire de cette créance , c'eft de nous précautionner foigneufemenn contre les péchés auxquels ces chatimens font dénoncés; autrement notre foi aggrave notre crime, 11, nonobftant ces menaces, nous perfiftons volontairement dans le pêché. Enfin 1'Ecriture renferme des Pro* mejjes, tant pour nos corps que pour nos ames. Dieu a promis en divers endroits 'de pourvoir aux befoins de notre corps, & de lui fournir ce qu'il connoit lui être néceffaire : nous ne rapporterons que ce feul paffage: etercbez piemierement le Royaumi de Dieu & fa juftice, & toutes ces chofes, c'efta-dire, toutes les chofes temporelies qui font néceffaires , vous firont donnies par dejfus. Remarquez bien que nous devons cl'ercber prem;erement li Royaume de Dieu & fa jujtke, c'eft-adire que notre première & principale A 5 affaire A Fes Proueflcs. M«th. vi. 13-  ÉB PrATIQUE DES vertd» Matib. XI *9- afpiire doit être de Ie fervir & de lui obéir, avant que nous puiffions efpérer de reffentir i'effet de cette promeffe, même par rapport aux chofes temporel]e,-. Les promeffes faites è 1'ame font excellentes & en grand nombre: telle eft celle du repos & du foulagement > dès è préfent: Cbargez mon joug fur vous, & apfreiez de mot que je fuis débonnaire & bumbU de caur , £3? vous trouvsrez le repos d vus ames: mais il eft évident , qu'avant que nous puiflions avoir droit a ce repos , nous devons avoir cb^rgé fur nous le joug de JefusCbrifi, en dtvenant les feiviteurs & fes difciples. Enfin tous les biens acquis par Jefus - Chrift font promis a 1'ame, mais ce n'eft qu'a ceux qui accompliffent les conditions qu'il exige: la rémifiïon des péchés è ceux qui s'en repentent;une nouvelle mefure de grace è ceux qui font foigneufement ufage de celle qu'ils ont recue, & qui en follicnent par d'humbles prieres 1'augmentation : & le falut éternel a ceux qui perfévérent jufqu'è la fin de leur vie dans une lincere obéiiTance è fes commandemens La foi a ces Promeffes doit donc nous excitcr vivcmenc è accomplir la condition fous laquelle elles font faites; & tant qu'elle ne produit pas eet effet , nous ne faurions avec quelque ombre de raifon en attendre aucun avan-  Chretiennes, Sleflf. 1. il avantage : nous en flatter, ce feroit avoir une préfomption auflï folie que le feroit celle d'un ferviteur, qui fommeroit fon maïire de lui donner une recompenfe, pour n'avoir pas fair. l'ouvrage qui feul lui donnoit droit a ce falaire: il n'eft pas difficile de comprendre quelle réponfe le maïtre feroit k ce ferviteur, & c'eft celle que nous devons attendre de Dieu, li nous tombons dans le même égarement. II eft même certain que Dieu n'a eu d'autre vueen nous faifant ces promeffes, que de nous porter a la fainteté ; & qu'il s'eft propofé le même but en nous clounant fon Fils, en qui toutes fes promeffes font comme réunies. Nous en« vifageons pour 1'ordinaire 1'avenement de Jefus-Chrift uniquement du có-.é de la ïatisfaftion qu'il devoit faire pour nos péchés, & nous oublions les au* tres fins de fa mifliou. Et cependant il eft inconteftable que le grand but de fa venue a été de faire regner la vertu parmi les hommes. C'est-lA une vérité répétée fi fouvent dans 1'Ecriture, qu'on ne peut en douter, dès qu'on la lit avec attention & avec foi. Le Sauveur luimême nous dit, qu'il eflvenu pour ap- 1 peller les pêcbeurs d la repentar.ce; & 1 St. Pierre déclare , que Dieu a envoyé L fon fih Jéfus pour nous linir, en dé ournant c'bacim de nous de fes itfq iités: paro- rtattb. ix.  Tite IL u Galar. I. 4. Tite U. 12. t Cot. I. 30. 12 Pratiq.ue des Vertui paroles qui marquent clairement, que nous détourner de ws iniqultês , étoit dans les vues de Dieu la plus grande & la plus précieufe bénédi&ion qu'il avoic deflein de nous communiquer par Jefus - Chrift. St. Paul enfeigne même que c'étoit- Ia le but de la mort de ce chaiïtabie Sauveur. Lequel, dit-il, s'eji donné foi ■ mime pour nous, ofin qu'il nous racbetdi de toute iniquité, & qu'il nous purifiat pour lui être un peuple cboifi, zé é d faire de bonnes ceuvres: (k dans un autre endroit ; qui séfi donné foi-mime pour nous , afin. que felon la volonté de Dieu tw're pere , U r.ous ntirdt de ce préfent Jtecle mauviïsy c'eft-a-dire du pêché, & des coutumes corrompues du monde. Divers autres pafTages prouvent Ia même vérité, mais ceux-ci nous paroilïent fuffire, pour nous convaincre que le but de tout ce que Jefus - Chrift a fait pour nous, a été de nous engager a vivre faintement, ou, pour nous exprimer avec St. Paul, de nous enfeigner d renoneer d fimpiété & aux convoitifes du monde , fcf d vi%re dans ce préfent fucle fobrement, juftement rjf religieufement. Or nous favons que Jefus-Chrift eft le fondement de toutes les Promeffes , & qu'en lui toutes les promeffes de Dieu, font Out rjf Amen: deforte que fi Dieu 1'a donné pour nous porter au bien , ,fes promefles doivenE avoir le mém*  Chretiennes. Secl. I. 13 même bur. C'eft donc en faife uil étrange abus, que de les faire fervir a des fins direftement cqntraires è leur deftination, de nous en prévaloir pour nous livrer avec moins de remords au pêché; & c'eft cependanc 1'effec qu'elles produiront naturellement, fi nous croyonsêtre en droic de nous les appliquer, quelque vicieufe & déréglée que foit notre vie. St. Paul nous apprend a en faire un bien autre ufagë : Ayant dorc, dit-il, de telles promeffes , nettoyonsfious de toute vmpuretè ie cbair a"tfprit , en acbevant notre fimtlificaiion en la crainte de Dieu : c'eft en fuivant cette lec,on , que nous fommes en droit de nous appliquer ces promeffes, & que nous pouvons vivre dans la confolante efpérance d'y avoir part. Telle eft la Foi que Dieu demande de nous, une Foi qui réponde au but qu'il s'eft propofé en nous révélant dans 1'Ecriture les Vérités qui en fo.nc Pobjet; c'eft-a-dire de nous engager a mener une vie fainte. Se borner a les croire, fans leur donner de 1'influence fur notre conduite, c'eft ne faire rien de plus que ce que font les Diables, ainfi que nous 1'apprend St. Jaques: toute la différence qu'il y a, c'eft qu'ils font moins déraifonnables que quelques• uns de nous, puisqu'*'/,? tremblent, fachant bien que cette efpe«e de foi ae leur fervira de rien. Au- lieu 2 Cor. vil. [aq. n, ip<  14 Pratiqüe des Vertus Jaq. ii. 26 Priere. Heb. xi. 6 lieu que plufieurs d'entre nous , pleins d'une faufle confiance, vivenc tranquilletnent, fans avoir le moindre doute fur la nature de leur foi,quoiqu'ilsneproduifent aucun de ces fruits d'obéiffance qui en juftifient la fincérité. Que ceux qui fe font illufion la-defius, écoutenc la décifion de St. Jaques fur ce fujet: . comme le corps , dit - il, fans F efprit ejl mo>t, de-même la foi fans les otuvres ejl tnorte. ,, O D1e u! a qui il eft impojfwk de • „ phïre fans fa Foi, nous te fupplions „ humblement de produire en nous, „ par ton Efprit, cette Foi, qui eft „ agréable a tes yeux, la Foi opérante „ par la Cbariti. Ne permets pas que „ nous nous contentions d'une Foi „ mot-te & infrudtueufe. Que les vé- rités que tu nous enfeignes, agif„ lent efficacement fur nos cceurs; ,, que tes commandemens trouvent en nous la foumifiion qu'ils méritent; que tes menaces contre les pécheurs „ nous effrayent falutairement; & que „ les confolantes & glorieufes promef3, fes que tu nousfais, dous animent „ a remplir la condition fous laquelle „ nous pouvons en attendre 1'accom„ pliflemt-nt : que de cette maniere „ notre Foi foit abondante en bonnes ceuvies, qu'elle nous rende capables ,, de furmonter le monde , & nous „ trausfurme a 1'image de Jefus-Chrift, ,  Chretiënne*. StSt. I. ij en qui nous croyons , afin qu'au „ dernier jour nous puilïïons remporter ce qui eft la fin de notre Foi, le falut de nos ames, par ce divin Sauveur , au nom duquel nous t'invoquons, Amen". III. No tre fecond Devoir envers Dieu eft l'Esperance, ou ia confolante attente des biens que Dieu nous a promis. Mais il en eft d'elle comme de la Foi, elle doit être conforme a la nature des Promeffes, qui exigent certaines condicions de notre part: nous ne pouvons doncen efpérer l'accompliflement, qu'autant que nous Templifibns ces conditions: ou fi nous 1'efpérons fans cela , bien loin de nous acquitter d'un devoir , nous tombons dans une odieufe Prifomption, qui confifte a efpérer lorfque Dieu ne nous en a donné aucun fujet. C'eft Ie cas de tout homme qui efpere le pardon de fes péchés & la vie éternelle,indépendamment de la repentance & de 1'obéiffance , auxquelles feules ces graces font promifes: la véritable Efpérance nous purifie: St. Jean nous dit: que celui qui a cette efpérance, fe purifie foi-même, comme aujfi il ejl pur : c'eft-a-dire, qu'elle le porte a renoncer è fes péchés, & è travaiiler avec ardeur a être faint comme Jéfus- Chrift eft faint: tellement que 1'on eft en droit de conclure, que toute efpérance qui ne produit i Pierr» l. 9. iv. JODHNÉE. L'EfPEIUNCK. i Jea» i III. 8-  16 Pratiqüe des Vertus duit pas eet effet , quelle que foit la confiance qui 1'accompagne, n'eft que 1'efpérance de 1'Hypocrite, quipérira, felon le témoignage de Job. On pêche contre ce devoir, non feulement par la Préfomption , mais encore par le Défefpoir; par oh nous n'entendons pas ce que 1'on défigne ordinairement par ce nom: défefpérer de la miféricorde de Dieu , tant que 1'on perfifte dans fes péchés, c'eft une difpofition très-jufte. Nous avons ici en vue cette efpece de Défefpoir, qui nous jette dans 1'inaction , & nous porte a renoncer aux foins les plus indifpenfables ; quand on s'appercoic que 1'on n'eft pas dans 1'étac oti 1'on doit être pour pouvoir s'appliquer les promeffes divines, & que 1'on conclut de-la qu'on ne peut jamais y parvenir, & qu'en conféquence on négligé fon devoir, & qu'on perfévere dans le pêché, on fe rend coupable d'un défefpoir criminel, qui nóus conduit néceffairement a une perte inévitable , fi 1'on y perfifte. C'est cette difpofition que 1'Efpérance doit prévenir, en nous retracanc 1'univerfalité des promeffes de Dieu, auxquelles tous ceux qui accomplilfent la condition ont droit. Ainfi, quoique quelqu'un ne 1'ait pas encore accomphe & qu'il ne puifie par conféquent s'appliquer les promefies, 1'Efpérance lui  Chretiennes. Seft. 1. 17 lui dictera, qu'il peut acquérir encore le droic d'y avoir part, s'il y travaille lincéremenc & avec zele. II y a donc une étrange folie a 1'homme, quelque grand pécheur qu'il foit, de renoncer a toute elpérance de falut, tandis qu'il n'a qu'a changer de vie , pour être auflï alTuró d'avoir part aux promeftes de grace, que s'il n'eüt jamais pêché. Jesüs-Christ nous enfeigne cette vérité dans la Parabole du Fils prodigue Luc XV : oh nous voyons que ce Fils, qui avoit quitté la maifon de fon pere , & qui avoit dépenfé la portion de bien qu'il avoit recue, en ie livrant aux plus criminels excès, n'eut pas plutót témoigné fon repentir par fon retour chez fon pere, que celui-ci le recut avec autant de tendrefle que s'il ne 1'eüt jamais offenfé, & qu'il lui donna même des témoignages d'affection plus vifs & plus forts qu'il n'avoit jamais fait. Cette Parabole n'a d'autre but , que de nous apprendre avec combien de bonté notre Pere Célefte eft difpofé a nous recevoir, quelque grands qu'ayent été nos péchés, (I nous retournons è lui avec une fincere douleur de nos égaremens paiïés , & dans le ferme deffein de lui obéir a 1'avenir. Le retour d'un pécheur è Ia vertu, eft même un fpcclacle fi agréable a Dieu , que c'eft le fujet d'une efpece de triomphe dans le Ciel: oü ily a de l< Tomé I. B la ic XV. 10.  18 PjRATIQUE DES VERTUS l'Amoue. i. Mttifh mmeri Dieu. la joie en la préfence des Anges de Dieu, pour un feul pécheur qui vient a fe repentir: & oh eft 1'hommc qui ne préfere de réjouir Dieu & fes faints Anges par une prompte repentance, que de plaïre au Diable & a fes malheureux compagnons parun opini&tredéfefpoir? fur-tout puifque par notre repentance nous nous affurons un bonheuréternel, au-lieu que le défefpoir nous expofe a des tourmens qui ne finiront jamais. IV. L'Amour eft un troifleme devoir auquel nous fommes obligés envers Dieu. Deux motifs infpirent ordinairement 1'amour : 1'un eft le caraótere de bonté & les qualités eftimables de la perfonne que 1'on aime ; & 1'autre l'afTection & la tendrefle particuliere qu'elle a pour nous. Or ces deux motifs fe réuniffent pour nous engager a limer Dieu, il poffede dans Ie plus haut iegré ce qui doit exciter notre amour. I. Sa bonté eft infinie, & nous ne pouvons douter de 1'excellence de fa aature , fi nous croyons fincérement ]u'il eft tel que nous 1'avons repré("enté ci-defius. Une feule confidéra:ion fuffit pour nous oter tout fujet de bupcon è eet égard, c'eft qu'il n'y a ■ien de bon dans le Monde, qui n'ait ■ecu fa bonté de Dieu. Celle de eet ïtre infini eft comme une. grande mer, lont ce qu'il y a de bon dans les ciéaures décQuIe comme des ruiiïeaux de leur  Chretiennes. Se&. J. 19 leur fource. Or nous traiterions certainement d'infenfé un homme qui foutiendroit que 1'océan n'eft pas plus vaite qu'un petit ruifleau ; & il n'y a aflurément pas moins de folie è fuppofer que la bonté de Dieu ne furpaffe pas autant, & infiniment plus, celle de toutes les créatures. D'ailleurs ,leur bonté eft imparfaite,& mêlée de beaucoup de mal; au-lieu que celle de Dieu eft pure, parfaite & fans aucun mélange. 11 eft parfaitement faint, & n'eft fufceptible d'aucune impureté , ni il ne peut nous en communiquer aucune; car quoiqu'il foit le principe de tout ce qu'il y a de bon en nous, il n'eft 1'auteur d'aucun de nos péchés; c'eft ce que Sr. Jaques nous enfeigne expreffément; que pirfontie ne dife, quand] il eft tenté, que c'e/l Dieu qui le lente; car Dieu ne peut être tenté de mal, £f au/Ji ne tente -t-ilperfonne. II. Dieu eft non feulement bon en lui-même, mais il 1'eft au fouverain " degré. C'eft-a-dire, qu'il eft infiniment rendre & miléricordieux envers nous. Nous fommes compofés de corps & d'ame, & Dieu a témoigné a 1'un 6c a 1'autre une miféricorde & une tendrefle infinie. Ra'ppellons-nous feulement ce que nous avons dit de la feconde Alliance , & des graces qui nous y fonc offertes , qui font Jefus -Chrift lui-même avec tous les biens qu'il a B 2 acquis. iq. I. 13. II. Bfotlfi met Dieu.  20 Pratique des Vertüs Ezech. XXXIII. i acquis; & confidérons que Dieu nous les offre avec tant de fincérité & d'affeftion , que c'elt notre propre faute fi nous n'en jouifTons pas. Car il defire crès-véritablement & ardemment que nous les acceptions, & que nous en recueillions les plus précieux avantages , témoin ce ferment folemnel qu'il en fait dans Ezechiel: je fuis vt1-vant, dit ie Seigneur , que je ne prends point plaifir a la mort du tnécbant , m its plutót que le mécbunt fe üétourne de fort train & qu'il vive; a quoi il ajoute cette prefl'ante & affectueufe invitation: Détournez-ious, dètournez-vom de votre tnauvais train, pour quoi mourriez-vous? C'efi au même but que tend ce qu'on lit au Chapitre XV11I Si nous faifons une férieufe attention a ces vérités, nous ne pourrons douter qu'il ne s'intéreffe tendrement au fort de nos ames. D'ailleurs, que chacun fe fouvienne des di- \ verfes invitations a la repentance, qui lui ont été adrefl'ées, tantöt extérieurement par la Parole, tantót intérieurement par les follicitations fecretes de 1'Efprit de Dieu , qui n'avoient d'autre but que de le gagner, & de le preffer d'évitcr un malheur, & d'accepter un bonheur éternel; que chacun, dis-je, fe fouvienne de ces invitations , & de tant d'autres moyens que Dieu a mis en oeuvre dans la même vue, & il fera contrahit de recon- noitre  - Chretiennes. Seéi. 1. 21 rtoftre le tendre intérêt que Dieu prend, non feulement au faluc de tous les hommes en général, mais au fien en particulier. Si Dieu a pris tant de foin de nos ames, il n'a pas négligé nos corps; tous les biens dont ils jouiflent, la i fanté , la vigueur , la nourriture , le i vêtement, & tout ce qui s'y rapporte, I font de purs dons de fa Bonté: enforJ te qu'il eit impoffible qu'elle nous foit I inconnue a eet égard, tandis que touI tes les douceurs & tous les agrémens : dont nous jouiflbns chaque jour , en j font des effets & des preuves: & quoique les uns foient plus avantagés de ce I cóté-la que les autres, il n'eft perfon: ne qui, de fa^on ou d'autve, n'cn poffede affez, pour fe convaincre pleine* ment de la bonté & de 1'amour de Dieu ) envers lui, par rapport a fon corps, I Ces confidérations ne nous permettent pas de douter qu'il ne foit jufte & 1 conforme a la raifon d'aimer celui qui I è tous égards elt fi aimable. Tout le I monde en convient méme fi généralei ment, que fi vous demandiez a quel» qu'un s'il aime Dieu ou non, il re! garderoit comme une grande injure, 1 que vous en doutaffiez: öc néanmoins il n'eft que trop vifible , qu'il n'y en a qu'un très-petit nombre qui 1'aiment véritablement. Vous en ferez bientóc convaincu, fi vous examinez les efFets B 3 or-  Efeis dl FAmuur. Le dcfir i plaln. 1 JcanV.: 22 Pratiqüe des Vertüs ordinaires de 1'amour que nous portons aux hommes, & qu'enfuice vous examiniez fi vous pouvez produire de femblables preuves de votre amour pour Dieu. Pour abréger , nous n'entrerons pas dans le détail de tous les effets de 1'amour, nous nous bornerons a en indiquer deux. Le premier eft le defir de plaire è 1'objet aimé; & le fecond, le defir de le pofféder & d'en jouir: ce font - la les effets conftans de 1 amour. e Personne n'ignore , que lorfqu'on aime quelqu'un, on afpire ardemment a obtenir fon approbation, & que 1'on ne négligé rien de ce qui peut lui plaire. Ce defir de fe rendre agréable, eft aufli proportiomié au plus ! ou moins de vlvacité de 1'amour. Quand nous aimons paflionnémeTit, nous fommes afiidus & empreffés è plaïre a ceux qui font les obje'ts de notre amour. Si donc nous aimons Dieu autant que nous le prétendons , nous prendrons tout le foin poflïble de lui plaire en toutes chofes. Et comme nous jugeons de 1'arbre par fon fruit, nous pouvons de-même jugér de 1'amour que nous avons pour Dieu par les' fruits qu'il produit : c'eft la regie que Jéfus-Chrift lui-même nous a '. donnée : fi vous irfaimez , dit-il, gardez mes commandemens: & St. Jean nous , apprend auiii, que c'ejt ici 1'amour de Dieu,  Chretiennes. Seêï. I. 23 Dieu , que nous gardions fes commandemens: quand nous ne pouvons montrer cette preuve de notre amour pour Dieu, il eft impoflible d'en juftifier la réalité par d'autres. Ajoutons que notre amour pour Dieu ne doit être ni foible ni languiffant. Outre que 1'excellence de fa nature & fa bonté envers nous, qui font les motifs qui nous portent a 1'aimer, lont infinies , la même Loi qui nous oblige a 1'aimer , nous impofe 1'obligation de 1'aimer de tout notre cceur & de toutes nos forces , c'eft a-dire , autant x qu'il nous eft poflible , & par deffus toutes chofes. II fauc donc, pour obéir a ce commandemenc, 1'aimer fouveraincment: & fi nous avons pour lui eet amour ardent, nous ne nous bornerons pas è quelques foibles efforts pour lui plaire, mais nous y travaillerons avec tant de zele & de contention , que les devoirs les plus pénibles n'auront rien qui nous rebute , & que nous ferons prêts a faire le facrifice de notre repos, de nos biens, de nos parens, de nos amis & de notre vie même , lorfque nous ne pourrons les conferver fans defobéir a Dieu. Examin ons-nous felon cette regie. Avons-nous de pareilles preuves de notre amour a produire? Faifonsnous conftamment notre principale affaire de garder les commandemens de B 4 Dieu, Matth. XII. 37.  24 P R A TIQUE DES VERTUS t Jein. II Coicir. i. Kern. VIII. 7. Héb. X. 29. Lr iltftr de jiuir. Dieu, de lui obéir fans réferve? Travaillons-nous férieufement, & autant qu'il nous eft poflible a lui plaire, jufques a lui faire le facrifice de ce que nous avons de plus cher au monde ? Si nous pouvons nous rendre ce témoignage, nous fommes en droit de nous glorifier que nous aimons Dieu. Que fi, au contraire, nous perfévérons volontairement dans la tramgreflion de plufieurs de fes commandemens , que dis-je? -d'un feul, ne nous y trompons . point , Vamour de Dieu ne demeure point en nous. Nous n'en pourrons douter, li nous confidérons ce que 1'Ecriture dit de ceux qui vivent dans le pêché: qu'ils font ennemis de Dieu par leurs mauvaifes ceuvres: que Yaffetlion de la. Chair, (& tel eft le caraftere de tout homme qui perfifte volontairement dans quelque pêché que ce foit) efl inimitii cov.tre Dieu ; que celui qui pech volontairement, joule aux pieds le Fils de Dieu, t«r outrage ïlifprit de Grace. Ainfi, k moins que nous ne nous perfuadions oue Xinimitiè, les eutrages & le plus fanglant mépris , ne foient des preuves d'amour , nous ne devons pas nous imaginer que nous aimions Dieu, tant que nous continuons volontairement a defobéir è quelqu'un de fes commandemens. Un fecond effet de 1'amour, c'eft Ie defir de poffêder 1'objet aimé, & d'en jouir.  ChrEtiennies. Set}. 1. 25 jouir. C'eft ce qu'on remarque conitamment dans celui que nous nous portons les uns aux autres. Quand on a un ami que 1'on aime parfaitement, on defire fon commerce, on fouhaite d'être toujours avec lui. Notre amour pour Dieu produira le même effet, s'il eft lincere & dominant. Il y a deux manieres de jouir de Dieu: 1'une eft imparfaite , & a lieu dans cette vie: 1'autre parfaite & confommée, eft celle qui aura lieu dans la vie è venir. Celle de la vie préfente confifte dans le commerce, pour ainfi dire, que nous avons avec Dieu , dans les Exercices de piëté, dans la Priere, la Méditation, dans 1'ouïe de fa Parole, & dans la participation a la fainte Cene. Tous ces divers aétes de dévotion font deftinés a former un commerce intime & familier entre Dieu & nous; nous nous entretenons avec lui, nous lui parions, & nous fommes attentifs a ce qu'il nous dit. Si nous aimons donc véritablement Dieu , nous eftimerons infiniment, & nous rechercherons avec ardeur ces moyens de converfer avec lui, n'y en ayant point d'autres d'entretenir ce commerce dans la vie préfente : a 1'exemple de David , nous aimerons mieux un jour en la maifon de Pi Dieu, que mille ailleurs; nous ferons 11 ravis d'avoir ces occafions de nous apB 5 procher .lxxiv.  25 Pratique des Vertus procher de lui, nous en profiterons le plus fouvenc qu'il nous fera poflïble, & nous ne négligerons rien pour les faire fervir è ferrer de plus en plus les noeuds de notre union avec lui: en un mot, nous nous appliquerons a ces faints exercices avec la même joie, que nous reffencons en allant trouver le plus cher de nos amis. Ces difpoütions nous feront de förs garants de notre amour pour Dieu. Mais il y a tout lieu de craindre qu'il n'y ait qu'un petit nombre de perfonnes qui puiffent juftifier ainfi la réalité de leur amour; du moins h en juger par Ie dégoüt & la répugnance que les hommes témoignent pour ces exercices facrés, & par la négligence & la froideur que 1'on remarque dans la maniere dont ils y afliftent. Pouvons-nous penfer que Dieu nous regarde jamais comme des gens qui 1'aiment, tandis que nous témoignons tant d'éloignement &de mépris pour fon commerce , que nous ne le recherchocs jamais que lorfque nous y fommes forcés par la crainte, la honte , ou par d'autres motifs hurnains ? Vous ne croiriez certainement pas qu'un homme vous aimat, s'il fuyoit votre commerce, & que votre préfence lui füc k charge: fur quel fondement pourriezvous donc prétendre que vous aimez Dieu, tandis que vous tachez de vous éloigner  Chretiennës. Seêl, 1. 27 éloigner de fon commerce , & que vous n'approchiz de lui que par contrainte? Mais il y a une autre maniere de jouir de Dieu, plus parfaite; c'eft celle qui aura lieu dans le Ciel, oh nous ferons unis k jamais avec lui & le pofféderons, non comme ici-bas, par intervalles & pour peu de tems, mais fans interruption & éternellement. Certainement fi nous aimons Dieu autant que nous le devons, cette union avec lui fera 1'objet de nos vceux les plus ardens, & rien ne nous paroJtra pénible pour nous en affurer. Les fept années que Jacob fcrvit pour Rachel, lui fembleretit comme peu de jours , paree g qu'il faimoit; & 11 nous aimons vérita- 2< blement Dieu, nous ne trouverons pas que ce foit acheter trop cher fa communion, que de confacrer toute notre vie la fon fervice ; & la poffefiion de tous les avantages du monde ne nous paroitra pasdigne d'entrerencomparaiibn avec ce bonheur. Si nous pouvons nous rendre témoignage que nous afpirons ardemmenc a pofféder ainfi Dieu, nous fommes en droit de croire que nous 1'aimons. Mais il eft encore k craindre qu'il n'y ait que bien peu de perfonnes qui puiffent juftifier par cette preu. ve leur amour envers lui. Car fi 1'on examine la conduite des hommes, on * verra sn.XXIX.  Sfl PR/TIQUE DES VêRTTJS Nomb. XXXII. Matth. V: ai. verra qu'ils afpirent généralement fi peu a la pofieflion de Dieu, qu'ils ne daignent pas fe donner la moindre peine pour y parvenir. II y a même touc lieu de penfer qu'il en eft un grand nombre, qui, fi la chofe dépendoit de leur choix, préféreroient a la Poffefiion de Dieu dans le Ciel, de vivre toujours fur la Terre, & d'y jouir des avantages & des délices du Monde: tels que les enfans de Gad & de Ruben, ils voudroient avoir leur héritage en-dega de ce Jourdain, & ne defireroient jamais la Canaan Célefte; tant ils font attachés aux chofes d'ici-bas: ce qui prouve clairement qu'ils n'ont pas fait de Dieu leur tréfor , puifque fans cela, . felon la regie de notre Sauveur, leur cceur feroit avec lui. Il y a plus encore. 11 n'eft que trop évident, que plufieurs d'entre nous eftiment fi peu la poffefiion de Dieu, qu'ils lui préferent les plus honteux péchés, auxquels ils fe livrent par choix, quoiqu'ils perdent par-la, la part qu'ils pourroient avoir a fa communion ; & c'eft-Ia le cas de tous ceux qui perfiftent volontairement dans ces péchés. E n s'en tenant k ces regies, il y a lieu de craindre que plufieurs de cèux qui font profeffion d'aimer Dieu , ne fe trompent eux- mêmes. Et nous finiffons par ces paroles de St. Jean, qui, quoiqu'eljes regardent 1'amour que nous  Chretiennes. Secl. 1. 2J> devons a nos prochains, conviennenc très-juftemenc a celui que nous devons a Dieu : N'aimez point de parole 6f de kngusy mais a'ceuvre Cf de vi-1 rité. „ O Dieu! qui es Yefpêrance de tous ,, les bouts de la Terre, nous ce béniffons des nobles & confolantes efpérances que tu nous as données dans ta Parole. Ne permets pas que nous nous privions nous-mêmes du doux „ privilege de les nourrir avec fonde,, ment, foit en nous flattant que tu fermeras les yeux h nos péchés, foit „ en nous perfuadant que tu rejetteras „ notre repentance. Que la vérité & „ la fermeté de tes promeffes foient ,, 1'appui de notre efpérance; qu'elle ,, nous porte a nous purifïer, & qu'ain,, fi elle foit pour nous uneancrt füre » & ferme de l'ame, qui pénetre au de-1 „ dans du voile, oh jefus-Chrift eft „ entré comme avant- coureur pour „ nous y préparer place. Animés d'u,, ne telle efpérance, pourrions-nous ,, ne pas t'aimer, Seigneur? Nous te „ devons notre cceur, & parceque tu ,, en es feul digne, St parceque c'eft ,, toi qui nous as comblés de biens. „ Fais - nous la grace de chercher dans „ un tendre & fréquent commerce ,, avec toi les douceurs dont il eft la „ lburce , & que ces douceurs, toujours imparfaices ici-bas, nous faf: ,, fent i Jeai) ItU 3. Piiere. H«b. VI.  3© Pratiqde des Vertus v. Jour nf.Ii. La CuAir TÉ. Matth. 3 s8. fenc foupirer après celles qui font le „ bonheur de tes enfans dans le Ciel. Que notre amour pour toi nous porte è t'obé'r avec autant de joie „ & de plaifir que de zele & de fidé- lité , & qu'ainfi nous puimons obj, tenir par ta miféricorde la couronne „ de vie, que tu as promife è tous „ ceux qui t'aiment, par Jefus-Chrift „ notre Seigneur. Amen". $>•$ SECTION II. 1. De la Crainte. II. De la Confiance. III. De tHumiliti 6? de Jespatties effenlielles. la foumiffion d la xo onti de Dieu , rjf la foumifiloti aux difpenfations de fa Sagefje. I. VTOtre quatrieme devoir enjJN vers Dieu , c'eft la Crain- 'te, qui nait de la confidération tant de fa Jufiice que de fa PuifTance. Sa Juftice ne lui permet pas de juftifier le méchanr, & fa Puiffance le met en état de lui infliger les peines les plus féveres. Jefus-Chrift lui-même nous apprend que c'eft-la un très-jufte fujet .de crainte: crahnex celui qui peut dé' truire le corps cf l'ame dam la gebenne. Ce devoir nous eft prefcrit en divers au-  Chretiennes. Secl. II. 31 autres endroits de 1'Ecriture: Servez le \ Seigneur avec crainte: Craigtiez L'Eter- : nel, vous fes Saints: la crainte du Seigneur l eft le commencement de la fageffe. D'ailleurs toutes les menaces que nous lifons dans 1'Ecriture, qui dénoncent la vengeance de Dieu aux pécheurs.n'onc d autre but que de nous infpirer cette difpofition. La Crainte n'eft autre chofe qu'un profond refpefft pour Dieu, accompagné d'une religieufe frayeur, qui nous empêche de Poffenfer ; c'eft ce que nous apprend le Sage, quand il dit: que la crainte de l'Eter nel c'efi de baïr f lemal: deforte qu'on ne peut dire de 1 perfonne qu'il craint Dieu , fi cette crainte ne le porte è éviter le pêché. Dans le fond c'eft 1'effet ordinaire de la crainte des hommes; nous évitons foigneufement d'indifpofer contre nous ceux qui peuvent nousnuire; deforte que fi nous ne prenons pas les mêmes précautions pour ne point déplaire a Dieu , il eft évident que nous craignons plus les hommes que lui. Nous fentirons bientót 1'extrême folie qu'il y a dans ce procédé, fi nous f comparons ce que les hommes peuvent *, faire, avec la puiffance de Dieu. pm En premier lieu, il eft incontefta- D. ble , qu'il n'eft poinc au pouvoir des hommes, ni même des Démons, de npus faire aucan mal, fi Dieu ne le leur per- 'f. 11.11. tXXIV. 10. rov.lX. 10. rov. VIII. !• La folie 'H y a '.raindre. is les hom•s qut ■H.  Pf. xvi. 7 LV1. 12. Prnv. XVI 7- Gen. XXXIL 3* PR atiq^ue des Vertos permet, & ne leur en laifle la liberté: cnforte que fi nous nous confervons fa bienveillance, nous pouvorj* dire avec . David: 1''Eternel e(l d ma riroite, je ne craindrai point ce que l'bomme peut faire: quelle que foit leur malice, ii peut les réprimer, & les empêcher de nousnuire: il peut changer leurs difpofinons a notre égard, felon ce que nous dit le • Sage ; quand 1'Eternel prend plaijir aux %oyes Ge l'homme, il appaife même envers lui fes ennemis. Nous en trouvons un exemple remarquable dan* 1'Hiftoirede Jacob : fon frere Efaü marchoit è fa rencontre en ennemi, & Dieu fléchir. tellement fon cceur, qu'il donna a Jacob les marqués les plus affeftueuiês de 1'amitié fraternelle. Maïs, en fecond lieu , fuppofons les hommes en hberté de faire tout le mal qu'ils peuvent , leur puiflance ne s'étend pas fort loin : ils pourront peut-être nous dépouiller de nos biens, nous priver de la liberté, ruiner notre réputation, peut-être même nous óter la vie: mais c'eft -la aulïï, comme on le fait, tout ce qu'ils peuvent faire. Or Dieu peut faire tout cela quand il lui plaic, & ce qui eft infiniment plus, fa vengeance s'étend au-dela du tombeau, & peut faire fouffnr au corps & a 1'ame les peines éternelles de PEnfer, en comparaifon def-quelles la mort eft fi peu de chofe, qu'elle  Chretiennes. Set}. II. 33 qu'elle ne doic nous caufer aucune frayeur : Ne craignez point ceux qui peuvent tuer le corps, ö" qui ne peuvent rien fiire après , dit notre Seigneur; & il ajoute immédiaiement : mais je vous montrerai qui vous devez crair.dre, craignez celui qui, après avoir tiié, a la puijjance d envoyer da> s la geheime, je vius dis craignez celui-ld. Dans ces paroies, Jefus - Chrift meten parallele le plus grand mal que nous peuvent faire les hommes , qui eft dé nous óter la vie, avec les maux effrayans que Dieu peut faire tomber fur nous; & il nous repréfente ces derniers comme les feuls que nous devons redouter, d'oh il s'enfuit que nous ne devons craindre que Dieu feul. Ce qui mérite furtout la plus ferieufe attention fur ce fujet, c'eft que nous pouvons manquer envers les hommes, fans qu'ils le fachent: on peut voler le bien de fon prochain, attenter a fon honneur, & tenir la chofe fi fecrette qu'il n'en ait pas le moindre foup^on, & ne cherche jamais è s'en venger. Mais c'eft ce que nous ne pouvons faire a 1'égard de Dieu ; il connoic toutes chofes, même nos penfées les plus cachées ; il démêle les mouvemens les plus fecrets de nos cceurs; deforte que les péchés que nous avons Part de rendre iropénétrables aux hommes, ne fauroienc échapper a fes Tomé 1. C yeux' Luc. XII. ^, 5-  34 Pratique des Vertüs yeux clair-voyans,& il nous en punira: ëternellement , fi nous ne prévenons ce malheur par une prompte repentance. On ne peut donc difconvenir, qu'il eft plus für de déplaïre aux hommes qu'a Dieu: & cependant, helas! nous nous conduifons comme li nous étions perfuadés du contraire , rien n'étant plus ordinaire, que de nous expofer a toute 1'indignation de Dieu , pour nous mettre a couvert des dangers qui nous menacent de la part des hommes: c'eft ce qui arrivé, lorfque pour fauver nos biens, notre réputation , ou même notre vie , nous commettons quelque pêché; c'eft-la évidemment aimer mkux offenfer Dieu que les hommes. Ce qu'il y a de plus déplorable, c'eft que la crainte des hommes n'eft pas le feul motif qui nous porte i déplaïre a Dieu, puifque nous commettons divers péchés, fans y être engagés par quelqu'une de ces tentations, ni même par aucune : tel eft, par exemple, la coutume de jurer, pêché auquel ni le plaifir ni 1'intérêt ne nous portent. Souvent même nous qui redoutons fi fort les maux que les hommes nous peuvent faire , que nous fommes prêts a nous y dérober par les plus grands péchés, nous nous attirons ces mêmes maux par des péchés que nous commettons volontairement & par  Chretiënnes. Secl, II. 3^ par choix. Le Prodigue négligent fe vole lui-même; le Trompeur; 1'Homme de mauvaife foi, & en général. celui qui vit dans un déréglemenc fcandaleux , détruic fa propre réputation; 1'Yvrogne & le Gourmand s'attirenc des maladies, qui abrégent leurs jours. Pouvons-nous penfer que nous craignioDs Dieu, tandis que cette crainte a fi peudepouvoir fur nous, que, quoique le grand nombre de maux qui accompagnentdès a préfent le pêché, duffent lui donner une nouvelle force, elle n'eft pas capable de nous retenir? Tant s'en faut que ceux qui en agiffent ainfi craignent Dieu , qu'ils femblent au contraire le braver, & vouloir le provoquer a colere, quoi qu'il leur en puifie coüter dans ce monde ou dans celui qui eft a venir. Cependant telle eft la prévention injufte que nous avons pour nous-mêmes, que des gens de ce cara&ere ofent préténdre qu'ils ont la crainte de Dieu: parmi une multitude des pécheurs les plus fcandaleux, a peine en trouverezvous un qui avoue qu'il ne craint pas Dieu. II eft étrange que les hommes puiffent ainfi fe tromper eux-mêmes; mais, quoi qu'il en foit, il eft certain que nous ne pouvons tromper Dieu: il ne veut point êtremoqué; tellement que fi nous ne vculons pas le craindre k préfent d'une maniere qui nous porC 2 té  I I ■ La Con- 1'iance. Dans tous Hangers , piritucls. Jaq. iv. 7- Dans toui ,rs Dangers ie:iij>orels. fi Pratïq_ue des Vertus :e h éviter le pêché , nous le crainirons un jour, quund il fera trop tard, iour nous rnettre a couvert de la peiae que le pêché méme. II. La Cönpiance eft le cinquiene devoir auquel nous fommes obli»és envers Dieu. Elle confifte a actendre touc de lui, & a nous repofer fur lui, foit dafts tous les Dangers auxquels nous fommes expofés, foit dans tous nos Befoins. Nous devons nous repofer fur lui dans tous les Dangers , tant fpirituels que temporels. Du premier ordre font toutes les Tentations, qui nous expofent au péril de tomber dans le pêché. 'A eet égard Dieu a promis , que Ji nous réjijtons au Diable , il s'enfuira de nous. Nous devons donc, en premier lieu, demander a Dieu par des prieres ferventes le fecours de fa grace, pour furmonter les tentations; & en fecond lieu, les combattre nous-mêmes courageufement , fans nous relacher le moins du monde, & fans avoir la plus légere complaifance è eet égard. C'eft en nous conduifant de cette maniere, que nous pouvons compter avec confiance fur le fecours de Dieu ; ou il nous délivrera des tentations, ou il rous donnera la force d'en triompher. Nous ne fommes pas moins obligés de nous repofer fur Dieu dans tous les Dangers extérieurs & temporels: puis- que  Chretiennes. Setï. II, 37 que nous favons qu'il a la puiffance de nous délivrer, & qu'il ne manquera pas de Ie faire , s'il voic que cela nous foit avancageux, & fi nous forames du nombre de ceux è qui il a promis fa proteclion, c'eft a dire, fi nous le craignons fincérement: c'eft ce dont 1'Ecrirure nous aÏÏÜre en divers endroits: V Ange du Seigneur campe autour v '4e ceux qui ie craignent, £f les délivre: 8 Le Seigneur délivre l'ame de fes faints, & ceux qui fe confieht en lui ne périront jamais. Nous trouvons aufli divers exemples de J'accornpliffemerit de ces promeffes: celui des trois compagnons r de Danie! dans la foürnaife: celui de Daniël lui-même dans la folie des Lions, z & plufieurs autres. Le but de ces promeffes & de ces exemples eft de nous apprendre, que fi nous nous acquittons fidélement & avec conftance de notre devoir, nous ne devons point êire efFrayés de tout cè qui peut nous arriver, puifque le Dieu que nous fervons eft en état de nous garantir & de nous délivrer. Nous devons donc , dans quelque danger que nous nous trouvions , en premier lieu, implorer humblement fon afllftance, & enfuire nous repofer fur lui de notre fort, fans la moindre inquiétude, affurés qu'il nous donnera riflue la plus avantageufe pour nous. JVlais fur toutes chofes , nous devons C 3 avoir : xxxiv. 20. an. III. an. VI.  38 Pratique des Vertus" t Stm. sxvai. 7 avoir en lui une confiance fans réferve , & ne pas compter fur le fecours des créatures: & bien moins encore chercher notre délivrance par des moyens illégitimes, c'eft-a-dire en nous permettant quelque pêché: comme Saül, qui alla confulter la PythonifTe, c'eft-a-dire, felon fes idéés, le Diable lui-même pour trouver du fecours. Cette conduite trompe pour 1'ordinaire nos efpérances; & au-lieu de fervir a nous tirer de nos détrefles préfentes, elle nous précipite dans de plus grandes, & d'autant plus fêcheufes , que nous nous trouvons privés du feul appui qui peut nous foutenir dans nos maux, je veux dire la faveur & la bienveillance de Dieu, que nous perdons infailliblement, lorfque nous recourons a des moyens criminels pour nous tirer du danger. Mais fuppofons que nous puiflions par de pareilles voyes nous garantir d'un péril aftuel & préfent, nous fommes, helas! bien éloignés encore d'être en fureté, & nous n'avons fait que détourner le danger de deflus ce qui nous importe le moins, pour 1'attirer fur la partie la plus précieufe de nous-mêmes, qui eft nocre ame: tels qu'un mal-habile Médecin, qui pour guérir un doigc, appliqueroit des remedes qui porteroienc le mal au creur. Nous nous trompons donc grofliérement, lorfque nous penfons avoir,  ■€h r e t i e n n e s. Seft. II. 39 avoir été bien prudens, en fauvant noj tre liberté , nos biens, notre vie rr.ê| me, par un pêché: nous ne les avons 1 pas fauvés , mais nous les avons acheI tés k un prix exceffif, en donnant noj tre ame pour les conferver. Jefus} Chrift nous apprend combien peu nous i avons gagné a un tel échange: quel profit, dit-il , fera Vbomme , s'il fait ■ perte de Jon ame? Prenons donc la réiblution de ne jamais mettre aucune des chofes que nous pouvons poiTéder dans le monde a affez haut prix, pour vouloir les conferver par le moindre pêché: mais toutes les fois que nous nous trouverons réduits ou k renoncer a quelqu'un de nos avantages temporels , peut-être k tous, & k la vie même, ou a commettre un pêché, fouvenons-nous que c'eft le tems de nous acquitter du grand & héroi'que devoir de cbarger fur nous la croix.: ce que nous ne pouvons jamais faire plus a la let-J tre, qu'en de pareilles circonftances: fupporter les maux que nous ne pouvons abfolument éviter, c'eft tout au plus porter la croix: on ne peut dire véritablement que nous la chargeons, que lorfque pouvant nous tirer de danger a la faveur de quelque pêché, nous aimons mieux fouffrir, que de le commettre; car en ce cas-la nous ne fommes chargés de la croix que par notre choix, & non par une inévitable néC 4 ceffité; Msttb. tVI. afi. Matth. vi. 24.  40 Pratique des Vertüs Matth. X.tfl. 24. fpiriluc's. cefllté; ce qui eft très-agréable a Dieu, & ce qu'il exige en même tems de nouS d'une maniere fi abfolue, que fi nous y manquons, lorfqu'il nous met a 1'épreuve , nous fommes exclus du nombredes Difcipl'es de Jefus-Chrift,comme il nous le déclare lui - même en termes exprès : fi quelqu'un veut xenir après moi, qu'il renonce d foi-méme, & qu'il charge fa croix & me fuive. Ce iéroit un vrai traic de Sagefie Chretienne de nous préparer par quelques effais a eet entier renoncement è nousmêmes, en cas que nous y foyons jamais appel lés. Un homme qui dok difputer un prix a la courfe, s'exerce d'avance. afin d'être mieux en état de fournir la carrière avec fuccès: c'eft ainfi qu'il nous feroit auffi fort avantageux de nous priver quelquefois vorontairemenc de quelqu'un de nos plaifirs les plus innocens, de nous retrancher de nos aifes , de renoncer h un profit même jufte , afin de contractei* l'hribitude d'être affez maitres de nousmêmes, pour pouvoir renoncer a tout, lorfque 1'obéiffance que nous devonsa Dieu 1'exigera. ! Si nous devons nous confier en Dieu , & attendre de lui notre délivrance dans tous les dangers , nous devons avoir la même confiance dans tous nos Befoins , & être perfuadés qu'il y pourvoira. Ces Befoins font tem-  Ghretiennes. Sf.B. II. 41 temporels ou fpirituels. Nos befoins fpirituels fe réduifent proprement a celui des fecours de la grace, qui nous font néceflaires pour lervir D.eu , & fans lefquels nous ne pouvons rien. C'eft fur lui feul que nous devons nous repofer k eet égard, fans pourtant régliger les moyens qui peuvent nous les faire obtenir , qui font la Priere, & une grande application a proficer de la mefure de grace qu'i! nous a déja accordée: c'eft a cette condition que nous pouvons compter fur fes promeffes: il donwra le St. Efprit d ceux qui le lui demandent: d celui qui a, illuijera donné, c'eft-a-dire, que Dieu donne- ■ ra une nouvelle mefure de grace k celui qui fait un bon ufage de celle qu'il a recue. Nous ne devons donc pas nous laifler efFrayer par la difficulté des devoirs que Dieu nous prefent, mais nous fouvenir qu'il ne nous commande rien qu'il ne veuille bien nous rendre capableS d'accomplir, pourvu que nous ne nous manquions pas a nous-mêmes. Ainfi faifons de notre cöté ce que nous demons, & ne doutons pas que Dieu ne faffe du fien ce que nous attendons de lui. Mais comme nous avons auflï des befoins temporels, nous devons enco re a eet égard nous repofer fur Dieu & attendre de lui ce qui eft nécelfaire pour y pour voir. Nous avons fur eet C 5 article .uc.XI. 13. vis: th. vXV. 39. ê Dans nos Befoins Urn>orcls.  42 Pratique des Vertus pr. xxxiv. 10, II. h.xxxiii. tS. i Reis xvii. pr. civ.27. Mattb. vi. 11. t 1 ] ( ] I i I J J i 11 article des promeffes pofitives , dont nous fommes en droit d'efpérer J'accompliffement, fi nous fommes fidéle, ment attachés au fervice de Dieu: Rien ne manque d ceux qui craignent V'Eternel: ceux qui eberebent le Seigneur n'auront fuute a'aucun bien. L'mil de VEternel ejl fur ceux qui le craignent, fur ceux qui s'attendent d fa bonië, afin qu'il les retïre de la mort, &f qu'il les entretienne en vie durant la famine. Nous avons auffi des exemples qui fondent notre confiance, tel que celui d'Elie & de la pauvre Veuve, & plufieurs autres. Nous devons donc attendre de Dieu feul ce qui nous eft néceffaire, felon ce que dit Ie Pfalmifte: les yeux de toute crèxture s'attendent d toi , 0 Eternel, tu leur donnés leur nourriture en leur tems: & notre Sauveur nous a enfergné i demander chaque jour notre pain quaidien; pour nous faire fentir, que nous 'evons vivre dans une concinuelle déjendance de Dieu & attendre tout de ui. Nous ne prétendons pas cepenlant, que nous devions nous livrer a a pareffe, & nous attendre a êtrenouris par miracle: ce feroit fe tromper oi - même. Notre induftrie & un travail lonn.ête font les raoyens par lefquels )ieu pourvoic ordinairement a nos besins pour cette vie, & par conféquenC i ne nous eft pas permis de négliger ces  Cheetiennes. Seci. II. 43 ces moyens: celui qui ne veut pint tra-1 Vailler ne doit point manger aujji, nous 1 dit 1'Apótie ; & nous ne devons pas douter que Üicu ne conörme cette décifion , en permectant que les parefTeux manquent de pain. Mais après avoir fait nous-mêmes tout ce que nous pouvons légitimement , nous devons attendre Ie fuccès de notre travail de Ia bénéditiion de Dieu , fans laquelle nous ne devons en rien efpérer: & c'eft alors que nous pouvons nous repofer tranquillement fur les foins de la Providencè, pour cette portion de biens temporels qu'il fait nous être la plus utile & Ia plus avantageufe. Que fi nous nous trouvons hors d'état de travaiiler, fans avoir d'autres moyens de nous procurer les chofes ncceflaires a la vie , nous ne laiflbns pas d'être pbligés encore de nous repofer fans inquiétude fur Dieu , perfuadés que celui qui nourrit les corbeaux, faurabien fubvenir a nos befoins par quelque voye, quoiqu'elle nous foir. ioconnue, auffi longtems qu'il lui plaira de nous laiffer dans ce monde : bien loin de nous tourmenter nous-mêmes par des penfées pleines de défiance & par des foucis rongeans , nous devons, felon le précepte de Sr. Pierre , r'écbarger 1 tout notre foucifur Dieu, car il a foin de ?• nous. C'est fur quoi Jefus-Chrift infifte for- Thefi. III. o. Pierre V.  44 Pratique des Vertus Ha' h. VI. 23 & ju v. fortement dans Ie Chap. VI. de St. JMauhieu , 011 il nous montre clairement toute Ia folie de notre défiance: comme ce paffage eft admirable, nous le rapporterons tout du long. N'ayez aucun fouci pour votre vie, ce que vous mam\erez & ce-que vous boirez , ni pour votre corps de quoi vous jerez vétus: la vie riejl elle pas plus que ia nourrüure, 6f le corps plus qui le vêiemmt ? Regardcz aux oijeaux de Fair , car ils ne. Jement ni ne moijjonneflt, ni n'ajfembknt en des greniers, ö5 votre Pere cé'efte les nourrit : n'éies ■ vous pas beaucoup plus excellens qu'eux? Et qui ejl celui d'entre vous s qui par fon jouci puijj'e ajouter une coudè- d fa jiature? Et pourquoi êtes-vous en fouci pour le vêtement? Covfidérez bien comment crosjjent les lys des cbamps: ils ne travaillent ninefüent: néanmoins je vous dis que Salomon, en toute fa gloire, n'a point été paré comme l'un d'eux. Si Dieu donc revêt ainfi l'berbe des cbamps, qui ejl aujourd'bui, öf demain ejl mije au four, ne vous revttira -t-il pas beaucoup plutót , 0 gens de petite foi ? Ne foyez donc point en fouci, difant; que manger,ms-nous F ou que boirons-nous? ou de quoi ferons-nous vêlus ? Vu que Les Païens rechercbent toutes ces chofes; car votre Pere célefte connvü que vous avez befoin de toutes ces cbofes-ld. Mais cherchez prem'érment le royaume de Dieu öf fa jujlicet £ƒ toutes ces chofes vous Jeront don- r.ées  Chretiennes. Seéï. II. 45* nées par deffus. Ne foyez donc point en fouci pour h kndemain. car le letidemain fe fouciera pour joi - méme. A cbaque jour fuffil fa peme. Nous pourrions a;outer divers autres paflages; mais cela feroic inucile, celui - ci étanc fi forc & fi convaincanc. Nous nous bornons è vous mettre fous les yeux les grands avantages de ' la difpofition donc il s'agic. En nous confiant en Dieu, nous 1'engageons, & 1'obligeons , en quelque facon, a avoir foin de nous. Perfonne n'ignore que les hommes fe croyenc cenus de ne pas manquer a ceux qui fe repofenc fur eux fans réferve; a plus forte raifon devons-nous penfer qu'il en eft de même de Dieu. En fecond lieu , la pracique de ce devoir eft une fource de douceur & de cranquillité: il nous affranchit de ces foins immodérés, de ces foucis rongeans, qui agitent notre efprit, troublent nocre repos, & nous déchirenc fouvenc le cceur: il n'eft pas néceffaire d'en retracer ies défagrémens a ceux qui en ont faic 1'expérience, & qui les ont fentis. Or y a-c-il rien qui doive nous infpirerplusd'empreffement a profiter des moyens d'éloigner ces inquiécudes & ces chagrins? II ne nous arrivé que trop de le faire par des voyes criminelles: on voit les hommes tromper, voler, mentir, & fe permectre d'autres actions de cette nature, par Les Avan ages de a ".unfiance.  4<5 PR ati que des Vertus par la crainte de 1'indigence; mais ifs éprouvent aflez ordinairement que ca font-la des remedes trompeurs; puilqu'ils attirent la malédiction de Dieu fur nous, & par-la font plus propres a nous précipiter dans la pauvreté, qu'a nous en garantir. Si vous fouhaitez un préfervatif fur & infaillible contre les lbucis, repofez-vous fur Dieu. Qoelle raifon feroit craindre l'indi. gence a un homme, qui fait qu'il eft ï'objetdes foins de celui qui poffede un fonds inépuifablc de biens, & qui ne permettra pas qu'il manque de ce qui lui eft utile & néceffaire. Si un homme riche & fidele dans fes promeffes s'étoit engagé envers un pauvre, a ne jamais le lafffer manquer du néceffaire, celui-ci feroit, fans doute, tranquille & content, & n'auroit plus fur les moyens de pourvoir è fa fubfiftance les mëmes ïnquiétudes que par le paffé. Cependant les promeffes des hommes peuvent tromper nos efpérances; ils peuvent devenir pauvres & fe trouver ■ dans 1'impuiffance de tenir leur parole, ou changer de fentiment & n'avoir plus la volonté de nous faire du bien. Mais nous favons que nous n'avons rien de pareil h craindre de Ia part de Dieu. C'eft donc 1'outrager de Ia maniere la plus indigne,de n'avoir pas en fes promeffes autant de confiance qu'en celles des hommes. C'eft nous faire un grand corc  Cbretiennes. SetJ. II. 47 tort a nous-mêmes, que de nous remplir Pefprit de tant de foucis & d'inquiétudes, quand nous pouvons fi furement rejetter notre charge fur Dieu. Nous finiffons par ces paroles de l'Apótre: Ne foyez en fouci de rien : mais l qu'en toutes cbofes vos reqidtes foient noti-IV jïées d Dieu, par des prkres, des fupplications, avec aclions de graces. „Qvmete craindroit, ö Roi des ATa,, tions, car cela t'appartient ? Que Pi. Je dée de la févérité de ta Jufiice con„ tre les transgrefieurs de tes Loix, & „ celle de ta Puiflance infinie, par la„ quelle tu peux leur faire fentir tout „ le poids de ta colere , nous infpi,, rent une fainte frayeur, & nous „ fafient craindre de t'offenfer. Ne „ permets pas,ó Dieu,que nous ayons ,, jamais peur de l'bomme mortel, è? du Pre fils de l'bomme, qui ejl comme de l'ber„ be, & que nous c'oubliyons toi, qui es notre Créateur & notre Maftre. „ Que convaincus que la crainte du ,, Seigneur ejl le commencement de la Ja*j 8eJTe, cette crainte nous tierine dans „ le devoir,& nous porte è nous con„ former en toutes chofes a ta volon,, té. Fais-nous aufiï la grace, Sei„ gneur, de nous confier en toi dans „ tous les états & dans toutes les cir„ confiances de notre vie. Que per„ fuadés de ta fagefle, de ta bonté & de ta puifiaoce, nous nous repofions „ fur . 6. Priere. em.X.--. v. IX. 104  Match. VI. jo- vr. Joui Nl'ih. l'humili- TÉ. tToMffanci a Ia Volom de Dieu. 4& P r A T IQU E DES VERTUSr fur roi feul, & attendions de ra feu„ le bénéoict'on TheUreux fuccès de nötre travaii pour le temporel & ,, pour le fpiritueJ i allures qu'en cuerclrint premierement ton Royaume •» Ö" Jx f&J&e . toute* les autres cbofes ,, nous /tront don- i s , dans la mefure que ta fugeffe jugera êrre la plus expédiente pour notre oien Accordenous ces graces pour l'-amour de Jefus-Chrift ton Fiis bien- aimé, notre ,, Sauyeur. Amen". Ilfc, Un fixierne devoir envers Dieu c'eit l'lIumiliïé, qui n'eft autre cnofe que ce lennmenr de notre baffelTe & de 'a grandeur infinie, qui produic en nous.une profonde & fincere foumiffion pour lui. Cette foumiffion eft de deux ordres; foumiffion a fa volonté, & foumiffion h fa fageffe. n Notre founvffion a la volonté de é Dieu, aft une foumiffion d'obéiffance, L ou ure foumiffion-de patience. Celle d'oié'ljance confifte è être toujours prêts a acquiefcer è fa volonté, enforte que lorfque Dieu nous la fait connoitre par f; s commandemens , nous nous mettions en devoir de l'accomplir promptement & avec p'aifïr. L'humüité eft tiès - néceffaiie pour nous y porrer, n'y ayanc pas de gens moins nropres a obéirque lesorgueilleux: auffiles homme* n'obéifient-ils jamais qu'a ceux en qui ils reconnoiffent de la fupério- rité  Chretiennes. Sect. II. 49 rité fur eux. II en eft de même ici. Si nous ne fommes intimément perfuadés que Dieu eft infiniment au deflus de nous, que nous fommes comme un néant devant lui, nous ne lui rendrons jamais 1'obéiflance qui lui eft düe. Si donc nous avons deffein de lui obéir fans réferve, comme nous le devons , fi nous voulons nous fauver, pénétrons-nous de la diftance immenfe qu'il y a entre Dieu & nous. Confidérons qu'il eft un Dieu dont la Majefté & la Gloire font infinies, & que i nous ne fommes que de pauvres vers de terre; que fa puiffance eft fans hornes , qu'il peut faire tout, & que nous ne pouvons rien, pas même faire un cbeveu blanc ou noir, felon 1'expreffion de notre Seigneur; qu'il eft v infiniment pur & faint , & que nous fommes fouillés, impurs, & piongés dans toute forte de corruption ; qu'il eft immuable, & que nous fommes fujets au changement a chaque inftant de notre vie; qu'il eft éternel & immortel , & que nous fommes fragiles & mortels, & que , dès qu'il retire notre rf fouffle , nous retournons dans notre pond-re. La méditacion de ces vérités ne peut que nous faire reconnoitre 1'extrême difproportion qu'il y a entre Dieu & 1'homme , & nous faire dire avec Job, lorfqu'il fe fut approché affez de Dieu, pour démiier quelques traits de Tomé I D fa Matth. 36. CIV. 29.  Job XLII. S, 6. LOC. XVIU Eraie Ï.XIV. 6. LucXVD Ho. 50 .» „Ai^üE des Vertos fa grandeur: Maintenant mes yeüx te voyent: c'eft pourquoi j'ai horreur de moi - méme, êf me repens fur la poudre £ƒ fur la cendre. Lors que 1'humilité nous a portés ainfi a l'obéiffancejnous ne devons pas nous en dépouiller, comme fi elle ne nous écoic plus d'aucun ufage : elle nous eft encore , non feulement trèsutile, mais fort néceffaire, pour nous empêcher d'avoir trop bonne opinion de nos vertus, puifque fi nous nous y livrons une fois, elle fera perdre a nos meilleures afftions leur prix, & les rendra très-défagréables a Dieu : nous au■ rons le fort du Pharifien , auquel le Péager futpréféré, malgré fa régularité a obferver la Loi, paree qu'il ofa s'en glorifier. Nos meilleures ceuvres font fi imparfaites, & fi mêlées de corruption , qu'en les comparant avec la perfeclion & la fainteté de Dieu, nous pouvons dire a la lettre avec le Prophete Efaie, que toutes nos juftices font comme le drop fouillé: nous en faire un titre d'orgueil, c'eft une folie égale 4 celle d'un gueux , qui tireroit vanité de fon habillement, quoiqu'il ne foit couvert que de haillons. Nous devons toujours nous fouvenir de ce précepte . de notre Sauveur, quand vous aurez fait toutes les chofes qui vous font commandéesj dites, nous fommes des ferviteurs inutiles; d'autant que ce que nous étions tenue  Chretiennes. Se&. II. mis de faire, nous l'avons fait. Si donc, après avoir fait tout ce que Dieu nous commande, nous ne pouvons prétendre a un titre plus relevé qu'è celui de Serviteurs inutiles, fur quel fondement pourrions-nous avoir une haute idéé de nous-mêmes, tandis que nous forames fi éloignés d'avoir accompli ce qu'il y a de plus efientiel dans ce que Dieu nous commande? N'avons-nous pas raifon de croire plutót que nous méritons le nom de lache fcf de mécbant ferviteur P : La feconde efpece de foumiffion a la volonté de Dieu eft celle que nous d avons nommée de Patience, qui confi- \ fte a foufFrir ce qu'il juge a propos, comme 1'obéifiance confifte a 1'accomplir. Cette Patience n'eft autre chofe, qu'un volontaire & tranquille acquiefcement k toutes les afRiétions qu'il plait a Dieu de nous envoyer. C'eft un devoir,dont 1'humilité nous rendra la pratique aifée. Quand nos cceurs font intimément pénécrés d'eftime & de refpeft pour Dieu, il eft impoffible que nous murmurions contre lui, quelle que foit fa conduite envers nous. C'eft ce dont on voit un exemple bien frappant dans le vieux Heli: après avoir i entendu les efFrayantes menaces de n Dieu conrre lui, qui -lui annoncoient la deftrudtion de fa familie, la privation duSacerdoce,la pene de fes deux D 2 fils Matth. :xv. 26. Soumiflioo ï Patience la volonté : Dieu. Sam.lII.  pr. xxxu 9' j2 PrATIQUE DES VeRTUS fils en un même jour (malheurs accablans s'il en füt jamais) il ne Jaiffa pas d'acquiefcer tranquillement & fans murmure, par cette feule raifon, qu'elles venoient de la main de Dieu. C'eft 1'Eternel, dit-il, qu'il faffe ce qui lui femblera bon. Cette confidératiort . produifit lc même effet fur David: je mefuis té, dit-il, IS je n'ai point ouvert ma boucbe, parceque c'eft toi qui l'as fait. La penfée que Dieu étoit 1'auteur des afiiiQions qu'il éprouvoit, lui impofoic filence, étouftoit fes plaintes & fes murmures ; & cette penfée doit nous infpirer les mêmes fentimens dans toutes nos difgraces, fi nous defirons de bonne-foi que notre humilité foit agréable a Dieu. Car nous ne croirions certainement pas , qu'un enfant eütf 1'humilité qu'il doit avoir pour fon Pere, qu'un ferviteur eüt celle qu'il doic a fon Maïtrc, fi, lorfqu'on les corrige & les chatie, ils perdoient le refpect öc fc révoltoient contre eux. Cependant c'eft ce que nous faifons toutes les fois que nous murmurons & que nous nous impatientons, quand Dieu nous afHige. Nous manquons alors, non feulement d'humilué , mais nous péchons contre la juftice; car puifque nous fommes 1'ouvrage de fes mains, Dieu a droit de faire de nous ce qu'il lui plak; & par conféquent vouloir lui contefter ce droit, c'eft la plus haute injuftice: il y  Chretiennes. Seiï. II. J3 ya même une extréme folie, car Dien n'a en vue que notre bien , quand il nous afflige. Ce Pere célefte eft bien, différent de nos peres felon la chair, qui chatient quelquefois leurs enfans, non pour leur avantage , mais pour contenter leur humeur chagrine. Mais Dieu n'eft point fujet è de telles foibleffes, ce n'eft pas volontiers qu'il afflige les enfans des hommes. Ce font nos pé-1 chés, qui, non feulement lui fourniffent un jufte fujet, mais qui le forcent & Ie mettent dans Ia nécefiité de nous punir. II a pour' nous les entrailles & 1'amour du plus tendre des peres : or quand un pere voic qu'un enfant eft opiniêtre & rebelle, & qu'il court a une perte infaillible, quelle plus forte preuve pcut-il lui donner de fon affection paternelle, que de Ie chatier & de le corriger, pour tacher de le ramener par ce moyen a fon devoir ? On ne peut même dire qu'il a une véritable eendrede pour lui , s'il négligé de le faire. I! en eft de même par rapport a Dieu, quand il voic que nous nous abandonnons au pêché ; ou il doit ceffer de nous aimcr, & nous laiffer a nous-mêmes & è nos paffions déréglées , ce qui eft le plus grand malheur qui puiffe nous arrlver; ou, s'il continue a nous aimer, il doit nous corriger & nous punir, pour nous porter £ ramendement. C'eft pourquoi D 3 nous Lament. II. 33-  S4- Prattque des Vertüs Pf. LXXXI. Le fruit des dflictions. nous devons, toutes les fois qu'il nous frappe, non feulement fouftnr patiemrnent les coups de fa verge , mais, pour ainfi dire, la baifer; c'eft-a-dire, que nous devons être reconnoiffans envers lui, de ce qu'il ne nous abandonne point a la dureté de notre coeur, & de ce qu'il continue a prendre foin de nous,en nous envoyant des afflidlions, qui font comme autant de meffagers qui nous rappellent a lui. C'eft donc une grande folie, que de murmurer de ces coups, dont Dieu nous frappe avec des intentions fi pleines de bonté: c'eft en agir comme un malade impatient, qui chargeroit d'injures le Médecin qui vient pour le guérir: fi ceIui-ci 1'abandonne, & qu'il meure de fa maladie , chacun voit a qui 1'on doit s'en prendre. Mais, pour nous acquitter de notre devoir dans toute fon étendue, ce n'eft pas affez d'être tranquilles & foumis dans les afflictions, & de les recevoir avec reconnoiffance, il faut encore que nous rapportions du fruit, fans quoi tout le refte nous eft inutile : il faut qu'elles produifent en nous Pamendement, qui eft le but que Dieu fe propofe en nous les envoyant. Dans cette vue, il eft trés-néceffaire, lorfque nous fommes affligés, de compter avec nous-mêmes, d'examiner notre cceur & notre conduite, de rechercher foi-  Chretienhes, Setï. II. 55 foigneufement par que's péchés nous avons attiré fur nous les effets de la colere de Dieu; & quels que foient ceux dont nous nous trouvons coupables, nous devons lui en faire une humble confeffion & y renoncer pour 1'avenir. Tout ce que nous ajouterons touchant la patience, c'eft que nous y fommes également obligés dans toutes fortes d'affliclions ; foit qu'elles viennent immédiatement de la main de Dieu , enforte que les créatures n'y ayent aucune part, telles font les maladies, & d'autres épreuves de eet ordre; fok que les hommes foient les inftrumens dont Dieu fe fert pour nous affliger. Car il eft inconteftable, que lorfque les hommes nous font du mal, ils ne le peuvent faire fans la permiflion de Dieu , & qu'il eft le maftre de fe fervir d'eux pour nous chatier, comme de nous chatier directement lui-même. Ce n'eft donc qu'une fauffe patience, que celle qui prétend qu'elle veut bien fe foumettre a Dieu, tandis qu'elle ne veut rien fouffrir de la part des hommes. Le faint homme Job, qui nous eft propofé comme un modele de patience, ne mit aucune différence entre fes afrliclions; il recut la perte de fes troupeaux , que les Chaldéens & les Sabéens lui enleverent, avec la même réfignation , que celle des biens qui D 4 fa-  jo" Pratiq_ue des Vertus Job i. 21. Soumitfinn t \a l'agellc d Vitu. furent confumés par Je feu du Ciel. Lors donc que nous fouffrons quelque chofe de la part des hommes , quelque injufte qu'elle foit par rapport a eux, nous devons reconnoftre qu'elle eft très-jufte par rapport a Dieu , & au lieu de nous livrer contre eux k la colere , & de former des deffeins de vengeance , comme on le fait ordinairement, nous devons regarder a Dieu, reconnoftre qu'il nous afflige avec juftice , implorer avec ardeur le pardon des péchés qui 1'ont porté a nous frapper , & fupporter patiemment & avec reconnoiffance fes chatimens, jufques a ce qu'il trouve è propos de les faire ceffer, en difant avec Job: le nom de ï" Eternel foit léni. L'Humilité confifte non feule■ ment a nous foumettre a la volonté de Dieu , mais auffi è fa fageffe. C'eft-adire , que nous devons reconnoftre qu'il eft infiniment fage, & par conféquent que tout ce qu'il fait eft toujours ce qu'il pouvoit faire de meilleur & de plus convenable. Cet acquiefcement a fa fagefte doit s'étendre tant è fes Commandemens, qu'a la maniere dont il regie les événemens. Premiérement, quelque chofe qu'il nous ordonne de croire ou de faire, nous devons nous foumettre n fa fageffe, en ajoutant foi a tout ce qu'il nous commande de croire, quelque incompréhenlible que cela Pa-  Chretiennes. SeSt. 11. 57 paroiflö a notre efprit foible & borné, & en exécutant tout ce qu'il nous prefcrit, quelque contraire que cela foit a notre raifon charnelle & è nos inclinations ; perfuadés que fes commandemens font très-juftes & très-raifonnables , quelque extraordinaires qu'ils nous paroiffent. En fecond lieu, nous devons nous foumettre è fa fageffe par rapport a la maniere dont il régie les événemens, en reconnoiffant qu'il conduit tout trèsfagement, non feulement en ce qui regarde le monde en général, mais auflï en ce qui nous concerne chacun en particulier. II n'y a point de raifon qui doive nous empêcher d'acquiefcer avec plaifir a fes difpenfations, puifque tous les biens font des dons* purement gratuits de fa bonté, qu'il n'eft pas tenu d'accorder a 1'un plutót qu'a 1'autre, étant le maftre de les diftribuer en telle mefure qu'il lui plait. Nous ne devons donc pas être mécontens, fi Dieu nous a placés au deffous des autres; s'il nous appelle a avoir plus de peines & a une vie plus laborieufe; s'il nous a accordé moins de talens,ou ménagé des circonftances moins favorables qu'a ros prochains; mais nous devons nous appüquer de tout notre pouvoir, & avec foumiffion, a nous acquitter des devoirs de 1'érat ou il nous a placés. La pauvrecé même n'autorife pas a porD 5 ter  $8 Pratique des Vertus ter envie aux riches, mais c'eft une rasfon preffante d'être humbles, contens & foumis. L'ignorance , le manque de capacité ou d'inftrucb'on, la médiocrité de nos talens, ne nous donnent pas le droit de murmurer contre Dieu de ce qu'il ne nous en a pas accordé davanrage, mais nous obligent a ne rien négliger pour faire un bon ufagedu peu qu'il nous a donné. Une conftitution délicate & foible n'eft pas un titre légitime de nous plaindre de ce que Dieu ne nous a pas accordé autant de force & de fanté qu'a d'autres , mais c'eft un motif toujours fuhfiftant qui doit nous engager a perfeclionner les qualités de notre ame. Enfin 1'incertitude & Ia briéveté de Ia vie doit nous faire éviter de perdre notre tems en plaintes inutiles de Ia vanité ou de Ia bafieffe de notre condition, nous devons au contraire nous rappeller qu'il ne nous importe gueres de vivre plus ou moins long - tems » mais de vivre bien» 11 doit fuffire aux perfonnes qui ont une piéïé réelle & folide, de favoir que Dieu leur a réfervé leur portion dans une autre vie. Nous devons donc être contens, dans quelque état, dans quelque condition que Dieu nous place, ëc quetque chofe qui puiffe nous arriver, quand même les événemens font contraires a nos defirs, 6c qu'ils renverfent les projets de félicité que aous avons formés. Ce  Chretiennes. Secl. ii. $q Ce qui perfeótionne 1'humilité aux divers égards ou nous 1'avons confidérée, c'eft le mépris du monde, qui confifte a reconnoicre que nos meilleures aétions font imparfaites & fort éloignées de ce qu'elles devroicnt être; a envifager tout ce que le monde nous offre, comme petit & peu confidérable en comparaifon de la fainteté & de la perfecbon de Dieu , & du bonheur qu'il a préparé a ceux qui 1'aiment. II confifte encore a être contens de la portion des biens temporels que la fage Providence nous a accordéè, a ne pas en rechercher la poffefiion par aucun pêché volontaire, a nc pas defirer avec trop d'empreffement de les voir augmenter , ni a nous décourager & nous abattre, quand ils fe font des ailes & s'envolent; a faire un ufage modëré des plaifirs légitimes qui peuvent fatisfaire nos fens, ainfi qu'il convient k des perfonnes qui cherchent leur bonheur, ncn dans les plaifirs dc cette vie, mais dans la poffefiion de ceux de la vie k venir; k n'avoir que peu d'eftime pour les richeifes & pour les honneurs , enforte que nous foyons toujours prêts a y renoncer, dès que ces avantages fe trouvent en concurrence avec notre devoir envers Dieu ; enfin 4 fupporter les affliclion.-; & les traverfes de la vie préfente avec patience & fermeté, en regardant d Jé/us le Cb'f ö3 h< le b.XII. i,  fb Pratique des Vertus Priere. Elite LVH. Rom. VIII. 27. le Confommateur de notre foi: perfuadés que la fageffe infinie de notre Pere Célefte , nous difpenfe toujours ce qui nous eft le plus utile & le plus avantageux. ,, O Dieu! qui es fouverainement ,, élevè, qui babites dans l'Eternité, & qui néanmoins te plais a babiter avec „ les E/prüs humbles, fais-nous la gra., ce de marcher toujours en toute hu„ milité devant toi. Pénetre-nous de „ ta grandeur & de ta majefté, fais- nous fentir vivement la diftance im3, menfe qu'il y a entre toi & nous, „ afin que nous nous foumettions fans 3, réferve a ta volonté , en obéiffant a ,, tes commandemens: que convaincus „ de notre impcrfeótion & de notre „ corruption, nous n'ayons jamais de ,, hautes idéés de nous-mêmes, nous ,, fentions que nous fommes toujours „'au deflbus de ceque nous devrions 3, être, & reconnoiffions que , quand 3, nous aurions fait toutes les chojes que „ tu nous as cnmmancées , nous ferions „ des j'erviteurs inutiles , qui n'aurions „ fait que ce que nous étions tenus de „faire. Donne-nous d'acquiefcer en „ tout è ia maniere donc tu regies les „événemens, perfuadés que toutes ,, cbofes contnkuent au bien de ceux qui „ t'aimei.t: que bien loin de murmu,, rer des épreuves par lefquelles tu ,, nous fais pafier, ou de nous en prsn-  Chretiennes. Stél. III. 61 ,, prendre aux inftrumens que tu em„ ployes pour nous affliger, nous te reconnoiffions dans toutes nos voies, ,, nous attendions avec humilité ce qu'il te plafra d'ordonner de nous, „ en difant, c'eft VEternel , qu'il fajje ,, ce qui lui femblera bon. Accorde„ nous ces graces pour 1'amour de Je- fus • Chrift, notre Sauveur. Amen." SECTION III. I. De l'Honneur qui eft dü d Dieu, £? uux chofes qui le regardent, comme II. Ja Maijon , III. fes Revenui, IV. les Tems confacrés d Jon Jervice, V. fa Parole, &f VI. Jes Sacremens. Du Bapténie. I. T E feptieme devoir envers Dieu v J_y c'eft de lui rendre l'Honneur ni qui lui eft dü; c'eft-a-dire de lui té-N* moigner, tant intérieurement qu'exté» di rieurement, le refpect. & la vénération qu'exige fon infinie Majefté. L'Honneur intérieur confifte a avoir de lui les plus grandes idéés, & a le refpecter infiniment plus que tous les hommes. L'extérieur confifte a faire paroitre nos idéés & nos fentimens par nos aclions. Ainfi c'eft-la un devoir général , qui doic [i. jouis.- e. 'IION- ur du »  1 Différent manieres d'honorer Dieu. Sa Maifoi: 62 Pratique des Vertüs doit influer fur toute notre conduite; nous devons vivre d'une maniere qui faffe éclater cette haute eftime, cette profonde vénération que nous avons pour Dieu. Or perfonne n'ignore, que quand nous refpeétons particuiiérement quelqu'un , nous évitons foigneufement de faire rien de honteux tSc d'indécent en fa préfence , & c'eft ainfi que nous devons en agir a 1'égard de Dieu, fi nous I'honorons véritablement : comme il voit tout; & que nous ne pouvons nous cacher a fes yeux, nous devons éviter de rien faire de contraire au refpect qui lui eft dü. « Maïs il ne fuffit pas d'honorer Dieu ainfi en général, nous devons 1'honorer par divers acles particuliers , qui vanent felon les chofes qui en font les objets: car nous fommes obligés de 1'honorer , non feulement immédiatement lui-même, mais de lui témoigner notre refpect dans toutes Jes chofes qui ont du rapport a lui. On peut les réduire a fix principales. 1. Sa Maifon. II. Ses Revenus. III. Le Jour confacré a Jon Jervice. IV. Sa Parole. V. Ses Sacremens. VI. Son Nom. Nous devons a chacune de ces chofes un certain degré d'eftime Sc de refpect. . II. Premierement, nous devons refpedter la Maifon de Dieu, c'eft-a-dire, les Temples confacrés è lui rendre Ie culte public, non comme ayant quel-  ChretIennes. Secl. III. 63 quelque fainteté en eux-mêmes, mais par rapport a leur deftination ; & nous devons éviter de les profaner, en nous en fervant a d'autres ufages. C'eft ce que nous enfeigne Jefus-Chrift, lorfqu'il chaffa du Temple ceux qui vendoient cc achetoient: ma maifon, ditil , fera appellèe maifon de priere ; ne '■ faites point de la maifon de mon pere un. 1 lieu de marcbê: ce qui prouve évidemj ment, que 1'Eglife ne doit fervir qu'a I rendre a Dieu le culte qui lui eft dü, & que notre but, en y venant, doit ; être uniquement de nous acquitter de : ce devoir. II faut éviter de lier des 1 converfations, de traiter d'affaires, de débiter des nouvelles, ou de s'en informer ; de s'occuper a examiner curieufement & d'un ceil critique les autres; toute diffipation , toute pofture indécente. Toutes les fois que nous entrons dans Ie Temple, fouvenonsnous que c'eft la Maifon de Dieu, & : un lieu 0Ï1 il eft particuiiérement préfent , & fuivons ce confeil du Sage: i quand tu entreras dans la maifon de 1 Dieu, prens garde d ton pied: c'eft.-èdire, conduifez-vous dans ce faint lieu d'une maniere, qui marqué Ie profond refpect & la crainte religieufe , que vous infpire la majefté fouveraine de celui devant lequel vous vous préfentez: fouvenez-vous que votre feule ©ccupation doit être alors de conver- fer Matth. CXI. 13. ean II. 16. iccléf.V.j,  6+ PilAT1QUE DES VERTUS Son Reve nu. fer avec Dieu , & que vous devez bannir de votre efprit toutes les penfées terreftres , même les plus Jégitimes, afin de pouvoir 1'invoquer avec tout le recueillement dont vous êtes capable : fouvenez-nous que vous devez tenir tellement vos paffions en bride, qu'elles ne vous caufent aucune diïtraction , quand il s'agic de vous approcher du tróne de grace, d'implorer le pardon de vos péchés, de célébrer les louanges de Dieu, de folliciter fes bénédiótions, & de lui témoigner votre reconnoiffance des bienfaits dont il vous a comblés. Quel n'eft donc pas le crime de ceux qui s'abandonnent a des penfées, qui par elles-même fontcriminell.es! c'eft è 1'exemple de Judas trahir Jefus-Chrift en le baifant, tandis qu'on eft a la tête de fes ennemis. III. La feconde chofe que nous devons refpecter, c'eft ce que j'ai appellé le Revenu de Dieu; c'eft-a-dire , ce qui eft particuiiérement confacré a 1'entretien de ceux qui vaquent a fon fervice , tels qu'étoient les Sacrificateurs & les Lévites fous la Loi , & tels que font aujourd'hui les Miniftres de PÉvangile. Nous devons refpecter ce qui eft deftiné a eet ufage, & ne jamais penfer a 1'appliquer a aucun autre. C'eft de cette efpece que font les dons volontaires de ceux qui, de leur  Chretiennes. Secl. III. Gy Jcur propre mouvement, ont autrefois donné de leurs biens & de leurs terres pour ce faint ufage. 11 n'appartient ö, aucun particulier de les détourner de cette deftination, fans fe rendre coupable de facrilege; & les Souverains ne doivent faire fervir des biens de eet ordre a d'autres ufages , qu'autant que l'incérêt de Ia Société en général & celui de 1'Eglife le demandent, pour prévenir des abus préjudiciables a 1'une & a 1'autre. Il y avoit d'aillëurs autrefois parmi les Juifs, & il y a eu toujours dans tous les Etats Chretiens quelque chofe d'affigné par les Loix du Pays pour la fubfjftance & l'cnr.retien des Miniftres de la Religion. Rien de plus jufte & de plus néceffaire que ceux qui, par la nature de leur vocarion, ne peuvent s'appliquer aux profeiTions par lefquclles d'autres gagnent leur vie & s'enrichiffent dans le monde , foient . entretenus d'une maniere honnête & convenable , & déchargés des foins qu'exigent nos befoins temoorels; c'eft la doctrine de St. Paul: Qui ejl-ce qui va jamais d la guerre d fes tiépens ? Qui 7 eft - ce qui plante la vigne ne mange t>as 1 de fon fruit? Qui eft-ce qui paü le troupeau fi? ve mange pas du lait du troupeau ? La L< i ne dit ■ elle pas aufft la mê~ me chofe? Car il eft écrit dans la Loi de Moïfe : tu n'emmufelleras point le bosuf qui Tmne I. E fou- 1 Cor. IX 'i. ij.  rJ6 Fratique des Vertus foule le grain. Or Dieu a-t-il foin des Lceufs? Et n'eft-ce pas entiéretnent pour nous qu'il a dit ces cbojes? Certes elles font écrites pour nous: car celui qui laboure, doit l.ibourer avec efpérance ; &? celui qui foule le bied, le foule avec Vefpérance d'y avoir part. Si nous vous avons Jemé des biens fpirituels, eft - ce une grande cbofe que nous recueillions de vos biens temporels ? Ne Javez-vous pas que ceux qui s'emploient aux chofes facrées, mangent de ce qui ejt facrè; 6? que ceux qui fervent a l'autel, participent d l'autel ? Le Seigneur a ordonkê tout de même , que ceux qui annoncent l'Evangile, vivent de VEvangile. II eft donc jufte & néceffaire en général, de pourvoir a 1'entretien de ceux qui exereent Ie Miniftere, & de refpecter ce qui eft confacré a cec ufage. La maniere de s'acquitter de ce devoir varie fe'.on les circonftances. Dans les lieux ob les Pafteurs ont un revenu fixe affigné par les Souverains & les Magiftracs, le refpect dü a Dieu exige qu'il foit, autant qu'il eft poffible, proportionné è leurs befoins légi« times, & qu'on les en laiffe jouir paifiblement. C'eit une extréme injuftice de leur en faire un fujet de rcproche , comme s'ils recueilloient des fruits fans travail. Outre qu'ils doivent employer leur tems & leurs peines au bien fpirituel de leurs troupeaux, n'ont-  CHRETIENtfEJi Seti. lil. 6j n'ont-ils pas été obügés a de confidérabies dépenfes pour fe mettre en état de remplir les forctions de leur emploi? Ne pourroient-ils pas acquérir du bien. par les mêmes voyes que les autres? En d'autres ëndroitSi les Loix de 1'Etac ont affigné pour 1'entretien des Miniftres des Dixmes. Refufer de les payer, ou ufer de fraude a eet égard, c'eft manquer au refpect que 1'on doit a Dieu, qui fe plaint fur ce fujet des anciens Jui.fs , en ces rermes: l'lomrne i pillera-t'il Dieu, que vous me pillez ? Et n vous dites , en quoi t'avons nous pillé ? Vous l'avez fait dans les dixmes les offrandes. C'eft donc fe rendre coupable envers Dieu, & c'eft en même tems être injufte envers les hommes, puifqu'en pareil cas les Mmiftres ont fur les dixmes les mêmes droits que cha» cun a fur Ie bien qui lui appartient. Il y a auffi des Eglifes oü let Troupeaux fe font engagés è pourvoic a 1'entretien de leurs Pafteurs. On eft obligé , non feulement de leur payer fidélement ce qu'on a promis de leur. donner, mais de Ie faire d'une maniere qui n'ait rien qui diminue de la dignité du Miniftere: chacun doit, felon fon pouvoir, adoucir leur travail, en contribuant k la jufte récompenfe qui leur eft düe. Manquer è quelqu'un des égards que nous venons d'indiqueri c'eft cémoigner que 1'on fait peu de cas E a da i. 8.  68 Pratique des Vertus Les Tems confacrés k fon fervice. du Miniftere Evangélique , & que 1'on ne refpetfte gueres Dieu lui - même, err j portant une main profane fur ce qui eft en quelque faeon fon revenu. IV. Nous devons, en croifieme lieu, ! témoigner notre refpect. pour Dieu, en j fanctinant le; Tems confacrés a fon fervice :• comme c'eft lui qui nous donne tout le tems que nous avons,- il nous en redemande une certaine portion, ! par forme de tribut. C'eft ainfi que j les juifs obfervoient le Septieme Jour, i & que les Chrétiens obfervent le Di- j manche. Les premiers étoient appellés j a cclébrer particuiiérement dans leurs Sabbats la mémoire de la Création; & ,] nous devons célébrer dans les nötres , la Réfurreótion de Jefus - Chrift, par la- j quelle il nous a frayé le chemin a une meilleure vie, que nous efpérons après i celle-ci. On doit employer ce Jour au fervice de Dieu,auquel il eft confacré. : Premiérement en public & d'une maniere folemnelle dans les Affemblées I religieufes, dont perfonne ne doit s'ab- j fenter fans de juftes raifons. En fecond lieu, en particulier chez foi, en I adrefi'ant h Dieu nos prieres en familie, | & en inftruifant ceux qai lacompofent; & enfin dans les dévotions du cabinet, I en s'occupant de la priere, de la lerftu- ] re, de la méditation, & d'autres exer- i eices de piété. Cest pour nous ménager le loifir né- 1  Cbretiennes. Se£i. III. 69 néceffaire pour ces divers aétes de dévocion, que Dieu nous a commandé de nous repofer, & de ne pas nous occuper de nos affaires temporelles. II ne faut donc pas s'imaginer, que la ceflation du travail fok tout ce que Dieu demande de nous dans ce Jour; on doit employer a des exercices de piété, tout le tems qu'on prend fur le travail ordinaire de fa vocation. Le Dimanche n'a jamais été écabli pour nous fournir 1'occafion d'être dans 1'oifiveté, mais uniquement pour changer le genre de nos occupations, en nous appliquanc aux chofes fpirituelles. A plus forte raifon, Dieu n'a-t-il pas eudeffein, en nous ordonnant de nous repofer de notre travail, de nous fournir plus de tems pour Pemployer a fatisfaire nos paffions criminelles ; ufage funeffe qu'en font tanc de perfonnes, les unes pour fe Hvrer è la difïïpation & a des amufemens frivoles, d'autres pour faire des parties de plaifir, dans lefquelles ils font bien éloignés de s'occuper de Dieu & de fon fervice, & d'autres enfin pour fe rendre au cabaret avec plus d'afliduité qu'a l'Eglire. Dieu nous a prefcric Ie repos en ce jour-la, premiérernent pour nous repréfenter un repos de fainteté, je veux dire, le foin de nous abftenir du pêché, auquel nous fommes pbligés pendant tous les jours de notre Vie,; & en fecond lieu» ■E 3 pour  yo Pratique des Vertus pour nous retirer de nos affaires temporelles , & nous donner le tems de vaquer a fon fervice, & de nous occuper du falut de nos ames. Si nous examinons mürement cette infhitution , nous fentirons combien il nous eft a antageux qu'il y ait ainlï un tem-, fixé, deftiné a eet ufage, qui revienne chaque femaine. Nous fommes tellement attachés au monde, & occupés des chofes témporelles , que s'il n'y avoit pas de tems réglé pour vaquer au fervice de Dieu , il y a tout lieu de douter que nous en marquaffions nous-mémes un ; & que la condition de nos ames feroit alors trifte, puifqu'elles ne recevroient aucune nourriture; au lieu que dans 1'état préfent des chofes elles ont une nourritu• re réglée, qui leur eft afiignée chaque Dimanche: cc fi nous voulons bien employer ces Jours facrés, ils doivent être pour elles des Jours de feftin, & leur peuvent fournir une viande fpirituelle, propre a les nourrir en vie éternelle. Nous ne devons donc pas regarder ce Jour avec dégoüc & chagrin, comme faifoient les profanes lfraélites, qui diArios foient: Qiiav.d ejl-ce que le Sabbat fera " 5' pafft, ufiu que nous mettions en nente le froment ? comme fi tout le tems que nous dérobons aux affaires de cette vie , étoit un tems perdu. Nous devons, au contraire, regarder le Dimanche  ChRETIENNES. St&. UI. 71 che comme celui de tous les jours de la femaine qui nous procure le plus grand profit , & qui nous réjouit le plus, comme un jour de moiffon, dans lequel nous faifons provifion pour toute la femaine & même pour toute notre vie. Mais il y a, outre les Dimanches, d'autres Jours que 1'Eglife a confacrés pour célébrer la mémoire de quelque faveur particuliere de Dieu, comme la Naiffance, la Réfurreclion & 1'Afcenfion de Jefus-Chrift, la Defcente du St. Efprit. Nous devons employer ces jours, conformément au but que 1'Eglife s'eft propofé, qui eft d'adorer Dieu folemnellement & de lui rendre en particulier nos actions de graces pour le bienfait dont nous célébrons la mémoire. Si nous fommes véritablement reconnoiffans de ces ineftimables faveurs , nous ne trouverons pas que ce foit trop que de confacrer quelques jours dans 1'année a faire éclater nos fentimens d'une facon extraordinaire. Nous devons bien prendre garde que nos Fêtes foient vraiement fpirituelles, en employant ces jours faintement, bien loin de les faire fervir, comme cela n'eft malheureufement que trop ordinaire , a fatisfaire notre vanité, notre inrempérance, notre fenfualité par des excès de bonne ehere, ét par des plaifirs criminels, Notre E 4 grande  72 Pratique des Vertus grande affaire doit être alors d'employer notre tems a faire des progrès dans la connoifiance & dans 1'amour de Dieu & de notre Seigneur Jefus-Chrift, a nous affermir dans la foi des mylteres de la Redemption , en méditant les preuves qui en étabhffenc la vérité, & a répondre au but de 1'Avénemenc de notre Sauveür, qui a été de faire regner ia pureté & la fainteté. Il y a des lieux oh 1'on célebre encore la mémoire des Apótres & de quelque^ autres Saints : fi nous folemnifons ces jours, nous devons bénir Dieu de tout notre cceur des graces qu'il a accordées è ces faints hommes , & particuiiérement de ce qu'il s'eft fervi d'eux pour nous faire connoitre JefusChrift, & la voye du Salut. Nous devons méditer les exemples de fainteté qu'ils nous ont donné dans leur vie, & nous exciter a les imker. / Nous fommes obligés aufii d'obferver les Jours de jeune & d'humiliation , étabüs par les Souverains ou par 1'KgUfe , foit qu'ils foient réglés, foit qu'ils foient indiquës en des occafions extraordinaires. Nous ne devons pas feule.ment nous abftenir de manger, ce qui n'eft qu'une mortifican'on corporelle; mais nous devons afHiger nos ames, 310US humilier profondément devanc Dieu, lui faire une fincere confeffion de nos péchés, lui témoigner la dot*- leur  Chretiennes. Seèï. III. 73 leur amere que nous en avons, comme de ceux de la Nation dont nous faifons partie, en implorer le paddon par des ptieres ferventes, par lefquelles nous devons aulïï tacher dé détourner les jugemens que nos crimes ont attirés fur nous: fur-tout nous devons renoncer a nos péchés, en déliant les Hens d'i»l niquité, & en faifant des ceuvres de miféricorde, comme de rompre notre pain aux affamès, &c. ,, O Dieu! dont la Majefté eft in,, finie , nous t'adorons avec le plus ,, profond refpect., & nous reconnoif,, fons que tu es digne de toute notre „ vénération. Ne permets pas que ., nous concevions jamais de toi. des ,, idéés indignes de ta fouveraine per„ feftion, & que nous manquions a te ,, rendre 1'honneur qui t'eft dü. Fais3, nous la grace de ne jamais entrer dans tes Temples, que rempüs d'u„ ne religieufe crainte, en penfanc „ que tu y es préfent d'une fagon par,, ticuüete , & que nous te devons ,, bien plus d'égard qu'aux Grands de „ la Terre, devant qai nous fommes ,, attentifs a nos paroles & è nos ac„ tions. Que tout ce qui t'appartienc, de quelque maniere que ce puiffe ,, être , foit facré pour nous. Fais,, nous auflï la grace de regarder com,, me un avantage précieux, de pou- voir dans des tems fixes & régies E 5 „ va- Eftie V11I.6, Ptiere..  a Tim. lil. 17. t Saai. ii. 30 Vilt. JOUR- La Paroie ie Dieu. 74 Pratiqüe des Vèrtüs vaquer uniquement a ton fervice, ,, & travaiiler a la fanctïfication & au ,, falut de nos ames; cc que bien lom ., de regretter cette portion de notre tems, nous fentions que c"eft celle ., qui eft la plus utilement employée. ,, Donne-nous que par Ia leélure & la ,, méditatiou affidue de ta fainte Paro.. le, & par un bon ufage des autres ,, moyens d'inftruction que tu nous j, préfentes , nous foyons rendus ao- complis &? parfaitement inftruits d tou' ,, te hunne oeuvre; & que refpectant ainfi tout ce qui eft a toi & tout ce )} qui vient de toi , nous puiffions ■,, éprouver que tu bonores ctux qui t'boj, norent. C'eft au nom de jefus,, Chrift notre Sauveur que nous te demandons ces graces. Amen". V. Nous devons. en quatricme lieu, témoigner d'une facon particuliere notre refpect. pour Dieu, en honorant fa fainte Parole, contenue dans Jes Livres du Vieux & du Nouveau Teftament. C'eft dans ces Livres facrés qu'il nous inllruit de fa volonté cc de notre devoir; nous y trouvons tout ce que nous devons favoir, croire, efpérer & pratiquer pour obtenir le falut éternel: ils méritent donc tout notre refpecl: , nous devons les étudier & les lire avec foin , & ne jamais laiffer paffer un jour fans nous acquiter de ce devoir. Ir,  Chretiennes. SfSt. III. 75 Il ne fuffit pourtant pas de lire 1'Ecriture Sainte, il faut auflï faire uneattention particuliere a ce que nous lifons ; nous devons remarquer ce que Dieu nous ordonne de croire, quels font les devoirs qu'il nous prefcrit, quels font les péchés qu'il veut que nous évitions, quelles récompenfes il promet è ceux qui obfervent fes commandemens 5 quélles font les peines dont il menace ceux qui font ce qu'il défend. Nous ne devons pas nous borner a faire une attention fuperficielle a ces chofes, mais ticher de les graver dans notre mémoire , par un retour perpétuel de réflexions & par de fréquentes méditarions, pour les faire fervir a notre inftrudbon & a régler notre conduite, Lorfqu'il nous arrivé d'être tentés de commettre quelque pêché, fouvenons-nous que Dieu 1'a défendu dans tel ou tel endroit de fa Parole, & qu'il a dénoncé fes jugemens a ceux qui s'en rendent coupables. De même, quand il fe préfente une occaflon de faire quelque bonne atfion, rappellonsnous que c'i ft le devoir auquel nous fommes exhortés en tel ou tel pnffage, & que Dieu y a attaché de glorieufes récompenfes. C'eft par-la que nous nous munirons contre le pêché, & que nous nous fortifierons dans 1'habitude de la vertu. Maïs, oucre cette voye d'inftruction  f6 Pratique des Vertus Les Catd chilmes. Trov. XXII. 6. tion par fa Parole écrite, Dieu nous en a donné une autre par fes Miniftres, dont la ciiarge confifte è nous inftruire de la volonté de Dieu, en nous expliquant fa Parole pour nous en faciliter Pintelligence j en 1'appliquant aux circonftances particulieres' oü nous nous trouvons, & en nous excitant a mettre fes lecons en pratique. C'eft-la le but des Catécbifmes & des Sermons , auxquels nous devons allifter avec attention & avec refpecl:, pour profiter des inftrudtions qu'on nous donne. Les Catécbifmes font une méthode particuliere d'inftruire les ignorans par voye de Demandes & de" Réponfes, proportionnée a la nortée des plus fimples , afin de leur faire connoïtre plus aifément les Vérités 6c les Devoirs de notre fainte Religion. Ils font d'un ancien ufage dans 1'Eglife Chretienne, ik d'une trés-grande utilité fur-tout pour les enfans, qui font fujets a oublier, & è manquer d'attention, deux défauts auxquels on remédié par les Catécbifmes. D'ailleurs, 1'expérience juftifie que les premières inftrurftions, qu'on a recues dans la jeunefl'e, laiffenc de plus profondes traces: de-la eet avjs de Salomon: infiruis le jeune en. fant d Ftntiée de Ja voye, quand même il Jera devenu vieux il ne s'en,. retirera point. Les Peres & les Meres font particu-  Chretiennes. Sett. III. )f liérement obligés de veiller ainfi a 1'inftrudtion de leurs enfans , s'ils ne veulent avoir a fe reprocher leur perte éternelle; & fi après avoir fait de leur cöré ce que leurs lumieres & leur écac leur permettent, ils fencent que leurs enfans ont befoin de plus d'inftructions , ils doivent appelier a leur fecours les Pafteurs ou d'aucres perfonnes intelligentes. Qu'il feroit è fouhaiter que tous les Farens s'acquittaffent de ce devoir! mais il n'en eft que trop qui ymanquent: de-la 1'ignorance honteufe qui regne parmi les.Chretiens , entre lefquels il s'en trouve qui connoifTent aufii peu Jefus-Chrift & fon Evangile que des Païens. Pour ce qui eft de ceux qui par la faute de leurs Parens n'ont pas été inftruits dans leur jeunefTe, ils fe rendent coupables s'ils perfiftent dans leur ignorance; & il eft de leur devoir de s'appliquer de tout leur pouvoir a acquérir la connoifTance des principes de la Religion. Quiconque , de quelque age & de quelque condition qu'il foit, qui fent fon ignorance fur les Vérités & fur les Devoirs de 1'Evangile , doit chercher a s'inftruire, s'il veut éviter la damnation éternelle. On ne doit pas être retenu a eet égard par une fauffe honte: car il eft honteux de perfévérer volontairement dans 1'ignoran'ce ; aulieu que le delir de s'inftruire eft loua- ble,  78 Pratique des Vertüs La 1>rédic tioti de 1: Parole. ble, & mus concilie Peftimedes gens fages. Ec fuppolé qu'on fe rrouve expofé aux railleries des profanes & des gens du monde, on doit moins craindre cette efpece de honte , que celle a laquelle on fera expofé au jour du jugement , fi 1'on a perfifté volontairement dans 1'lgnorance de fon devoir. Bien loin que cette ignorarce puiffe fervir d'excufe aux péchés dont on fe rend coupable , c'eft au contraire un nouveau pêché qui aggrave les aütres, en ce que 1'on méprife les lumiercs qui nous font offertes, mépris auquel Dieu dénonce les plus féveres ehaumens au Chap. I. des Proverbes. t- Quant a ceux qui onr déja une certaine mefure de connoiffance des principes de la Religion Chretiennej Dieu leur a donné une autre aide oour faire des progrès, favoir la l'rédicaiion de fa Parole: fecours d'autant plus néceffaire, que ceux qui font lts mieux inftruits de leur devoir, font fujets a 1'oublier, & que quelquefois la violence des paffions les porte a y manquer, lors-même qu'ils s'en fouviennent. II eft donc très-avanrageux qu'on nous remette notre devoir devant les yeux pour en prévenir 1'oubfi ; & que 1'on nous exhorte fréquemment a réfifter a ces pafjions qui nou1- portent au pêché, en nous offrarr les fecours dont nous avons befoin; & c'eft-la le but de  Chretïennes. Stófc III. 70 la Prédication. Elle eft deflinée a nous avertir d'être en garde contre nos ennemis fpirituels , & a nous mettre en main les armes néceflaires pour les combattre; c'eft-a-dire a nous faire connoftre les fecours & les moyens par lefquels nous pouvons réüfter aux tentations & en triompher. Tel étant le but de la Prédication, nous devons affifter aux Sermons dans la ferme réfolution de nous acquicter de notre devoir, avec cette foumiffion d'efpiic düe aux Oracles de Dieu ; & en appliquant les inftructions générales , qu'on nous donne , a notre état particulier , afin que nous puiffions croitre en la grace £? en la connoijjance de Dieu notre Pere & de Jefus-Cbrift notre Seigneur & Sauveur. Ce n'etfc pas afiez d'écouter unSermon, quelque attention que nous y apportions; nous devons mettre a profit les exhortations & les avis, qu'on nous a donnés, & les faire fervir a furmonter nos pafïïons & a déraciner nos péchés les plus cachés. Ce font-Ia les maladies de Pame, pour la guérifon defquelles Dieu a établi le miniftere de fa Parole; & comme un malade ne peut efpérer la guérifon de fes maux corporels, en fe bornant a entretenir fon IVlédecin ou a jetter les yeux fur lui, a regarder fes ordonnances & fes remedes, nous ne devons pas nous flateer auflï de nous af- fran-  go Pratique des Vertus Jaq. I. 22. Luc XII. 47. •JéanIV. i. franchir du pêché, fi nous ne nou* appliquons la parole de Dieu, afin de nous mettre en écat d'éviter Ie mal, & de faire le bien: profitons de eet avis' de 1'Apótre St. Jaques: mettez en effet la parole, ö5 ne l'écoutez pas feulement, en vous trompant vous • mêmes: quand Dieu éclaire nos efpnts, nous devons auffi nous conduire comme des enfans de lumiere. Ne mefurons donc jamais notre piété fur le nombre des Sermons que nous avons entendus , comme fi ce témoignage extérieur de refpect. pour Dieu étoit un caractere für du vrai Chretien; mais jugeons en par les fruits de vertu & de fainteté que nous aurons produits avec le fecours de la grace:.fans cela nous ne fommes que plus coupables , puifque celui qui a connu la volonté de fon mattre fc? qui ne 1'a point faite , fera battu de plus de coups; Ce n'eft pas que nous devions acquiefcer aveuglément a tout ce que 1'on nous prêche; il faut éprouver les efprits pour favoir s'ils font de Dieu , c'eft-a-dire qu'il faut examiner la nature des inftructions qu'on nous donne. Tout ce qui tend a affoiblir les vérités fondamentales de 1'Evangile, les grands my • fteres qu'il nous révele, ou a autorifcr des aótions contraires aux préceptes de Jefus - Chrift, comme la rebellion , Pinjuftice , le mépris pour le pro-  Chretiennes. Setit. Hl, 81 prochain &c. ne mérite nullement de nous fervir de regie; mais lorfqu'on nous annonce la doQrine qui ejl felon lapiitê, ne pas en profiter, c'elt manquer au refpect, que nous devonsa Dieu. VI. Nous devons , en cinquieme lieu, honorer Dieu, en refpeétant les Sacremens, qui font le Batême & la Sainte Cene. Nous devons les eftimer autant qu'ils le méritent, & y participer avec un profond refpecL Ils doivent nous paroitre d'un grand prix , & nous devons les regarder comme des moyens dont Dieu fe fert pour nous faire part des plus précieufes bénédidtions. Le Batême nous fait entrer dans fon Alliance, nous rend membres de JefusChrift , nous donne droit a tous les biens précieux dont il eft le principe, qui font le pardon des péchés, la grace pour nous fanétifier; & le Ciel méme, fi de notre part nous rempliffons les conditions de 1'Alliance. La Sainte Cene eft non feulement un figne & un mémorial de Jefus-Chrift & de fa mort, mais ce divin Sauveur s'y donne lui-même è ceux qui y participent dignement, & il leur y communiqué tous les fruits de fa mort. Nous devons eftimer ces faintes inftitutions, & témoigner notre refpect. pour elles par la maniere dont nous y participons. Comme nous recevons aujourd'hui: le Batême dans notre enfance, on ne Tornt I. F neut Titt I. x. Lei Sacre* mens, f .eBaténn,  Voeux, du Batême. \z Fratiqüe des Vertüs peut attendre de nous, que nous faffions rien, foit avanc de le recevoir, foic en le recevanc. On exigeoit autrefois très-rigoureufement a 1'un & a 1'autre égard des devoirs de tous les adultes qui étoient batifés. Quaut a nous, il fuffit, pour nous donner droit au Batême, que nous foyons nés dans le fein de PEglife, c'eft-a-dire de Parens Chrétiens; & nous pouvons faire par d'autres tout ce qui eft alors requis de nous;ils promettent en notre nom, que nous accomplirons les conditions de 1'Alliance, quand nous ferons venus en age de raifon: moins nous fommes en état d'agir par nous-mêmes dans cette occadon , & plus nous fommes tenus dans la fuite de remplir nos engagemens. Si vous demandez quels font ces engagcmens ? vous n'avez qu'a vous rappeller les promeffes que vosParrains & vos Marraines ont fakes en votre nom , telles qu'elles font exprimées dans le Catéchifme de la Liturgie Anglicanc, & qui font eflentiellement contenues dans les autres Liturgies. Ils ont promis que nous-renoncerons au Diable &? d toutes fes ceuvres, d la pompe & d la vanité de ce préfent fiecle mauvais, ei? aux convoitijes criminelles de la cbair; que nous croirons tous les Articles de la Foi Cbretienne; que nous oléirons d la fainte voloniè de Dieu & 4 fes com-  Chretiennes. Seft. IJl. 83 mandeniens , 6? que nous y marcberons tous les jours de notre vie. Par Je Diable, nous entendons en général tous les Anges rebelles, & furtour leur Chef, Pennemi déclaré de Jefus-Chrift & de fon Eglife, qui après avoir féduit nos premiers parens, a toujours eu depuis, par la permiffion de Dieu , un grand pouvoir dans le monde, & continue k travaiiler a notre perte, en nous follicitant par fes tentations au pêché, & en nous accufant enfuite devant Dieu. Les ceuvres du Diable font en général toutes fortes de vices & de crimes, & en particulier, Pidolètrie, Ja magie, le métier de devin, ou la confiance en ceux qui 1'exercent , & dans les créatures; mais furtout ce font les péchés dont Je Diable eft principalement coupabIe,& auxquels il taehe de porter les hommes; tels font Porgueil , 1'envie, le meurtre, la haine, le menfonge , Ia fraude, la féduction, furtout en matiere de Religion. Quand nous renoecons au Diable & a fes ceuvres, nous nous engageons a nous oppofer a cette puiffance ufurpée qu'il exerce dans le monde , k réfüter aux attaques perfonnelles qu'il nous livre , «St è ne participer en aucune fagon k fes crimes, comme nous ne voulons point partager les peines auxquelles il eft condamné. Fa Les  §4 Pratique des Vertu* Gaht. V. 19-.21, Les Chrétiens renoncent auffi a Iapotnpe 6? aux vanités de ce préfent Jïecle maiivaii, c'eft-a-dire a toute forte d'excès dans les rcpas, dans les plaifirs & dans les habits, ils s'engagent a ne point aimer, les richefies & les grandeurs du monde, a ne point fuivre les coutumes du fiecle, qui font criminelles en elles - mêmes; ils renoncent aux richeffes & aux grandeurs , non abfolument énteur da -iel & ae 1» reirs. lean I. 3. Colofl". I. 6, 17.  &S Pratique des Vertu* 1» Providence. Je fentiment des Sages de tous les tems, que le monde devoit a Dieu fon exiftence & fa confervation. IV. Le même Etre tout-puifïant & tout-fage, qui a faic & qui foutienc toutes chofes par fa parole puifïante, les gouverne aufli par fa fage Providen* ce , & dirige tous les événemens : il prend foin de ce bas-monde, même de ce qu'il y a de plus per.it; il a réglé 1'ordre & la fucceffion des événemens dans tous les fiecles, depuis le commencement jufques a la fin du monde, & il prend particuiiérement connoiffance des actions des hommes. Ces Vérités, enfeignées plus pofitivement, plus clairement & plus conftamment dans 1'Ecriture , que dans aucun Ouvrage des hommes les plus favans, font auffi parfaitement conformes a la droite Raifon. Elle nousdicte, qu'un Etre préfent par - tout & infiniment fage, doit être inftruit de tout ce qui fe paffe dans l'ünivers , & qu'il ne Jui eft pas plus difücile de prendre connoiffance des plus petites chofes que des plus grandes; qu'un Etre infiniment puiffant doit gouverner & diriger chaque chofe de la maniere qu'il juge la plus avantageufe au bien général ; & qu'un Etre. infiniment jufte & bon, qui gouverne le monde, doit prendre garde d'une fa toutes chofes, de conduire en toute vérité, 2 de prédire 1'avenir, de fonder toutes cbo- 1 [fes , même les cbo fes profondes de Dieu; 1 d'être joint au Pere, qui ne donne point fa gloire h un autre, comme un objet de foi & d'adoration dans le Batême «Sc dans la Bénédiftion Apoftolique ; «Sc enfin , que le pêché commis ' contre lui ne fera pardonné ni dans ce x : fiecle ni dans celui qui eft a-venir. Il eft évident par tous ces paffages ! que nous devons croire la dotftrine'de Ja Trinité; qui , qurjiqu'elle furpaffe la Raifon,n'eft pas contraire a la Raifon: G 2. nous 1 Timoth. III. 16. Rom. IX. p. |ean V. 16. Héb. I. 12. |ean X. 15. fean L 3. 'enn V. 23; léb. ï, 6. t«ft. V. 3,4; Cor. VI. 9- Cor. III. 6. ^an XIV. 6.XVI.IJ." Cor. 11. 3. Martli. li. 32.  loo Pratique des Vertuï' Priere. nous croyons fur le témoignage de Dieu que la chofe eft, mais nous en ignorons la maniere. N'entreprenons pas de fonder les profondeurs de la nature divine. Contentons-nous d'admirer & d'adorer les trois perfonnes de la trés-glorieufe Trinité, entant qu'elles ont concouru è notre falut. Re* connoiflbns 1'immenfe charité du Pere, dans le don qu'il nous a fait de fon Fils pour mourir pour nous; 1'admirable condefcendance de notre charitable Sauveur, qui par la dignité de fa perfonne a rendu fes fouffrances d'un prix infini: évitons foigneufement de corc* trifter jamais 1'Efprit faint, par le fecours duquel nous devenons participans de la vie éternelle. „ Di eu tout-puiffant & éternel , „ feul digne de nos hommages, nous * t'adorons comme le plus grand, le ! „ plus parfait & le plus refpeétable de j, tous les Etres, comme notre Créa- j ,, teur, notre Confervateur , notre 9, fbuverain Maitre, & notre Rédemp- teur. C'eft a toi que nous devons i tout ce que nous fommes & tout cel „ que noas efpérons. Fais-nous lal „ grace de fentir le prix de cette Ré*| ,, vélation par laquelle tu t'es fait con- ■ „ noitre a nous ; que ni la profon-j deur des myfteres qu'elle nous ap-| „ pelle a croire, ni la fainteté & l'é* tendue des devoirs qu'elle nouss „ pref-]-  Chretiennes. SeSt. IV. 101 ,, prefcrit, ne nous empêchent jamais », d'y acquiefeer fans réferve. Qu'il nous fuffife de favoir que c'eft toi qui ,, nous parles, pour captiver notre en„ tendement fous l'obéifl'ance de la )> roi, & pour nous foumettre entiére„ ment a tes commandemens. Que ta „grace, Seigneur jéfus, que ton „ amour, ó Pere Célefte, que ta com„ munion, Efprit Saint, feul Dieu bé„ nit éternejlement, foient & demeu„ rent a jamais avec nous! Amen". VI. Dans leficond Article du Symbole, nous faifons profeffion de croire] en Jesus-Christ fon Fils unique notre ] Seigneur; parceque nous devons croire 'c en Jefus-Chrift, comme nous croyons en Dieu: c'eft ici fon commandement, que i nou:_ croyions au nom de fon fils Jejus-2 Chrift, qui fauvera fon peuple de Jes tó.» chés. Notre foi en Je/us-Chrift notre2 Seigneur confifte donc, non feulement a être bien perfuadés qu'il eft le Fils éternel de Dieu, comme il 1'a déclaré lui-même; qu'il eft le vrai Mefïïe & le Sauveur du Monde; mais elle renferme auflï pour nous 1'obligation d'obéir è tous les commandemens de notre Seigneur & de notre Roi, & de nous confier en lui feul, pour obtenir par fa médiation auprès de fon Pere la vie éternel le, & les graces néceffaires pour y parvenir: ce qui fait dire a St. Pierre: qu'il n'y a point d'autre nom Ai G 3 fous x. JoURIEE. .» Foi ea efus:bri(t. Jean ii/. 5- lattb. I. [. t IV, u.  loa Pratique des Vertus E.om. XIV. 7, s fous le Ciel, qui foit donné aux homvies, par lequel il nous faille être fauvés. il eft donc abfolumenr. néceffaire de croire eet Article, puifque nous ne pouvons être fauvés par Jefus-Chrift, a moins que nous ne croyions en lui. Quand nous donnons le titre de Cbrijl ou de Mejjie k nocre Sauveur, nous faifons profeffion de croire que Jéftis eft celui que Dieu a confacré par Ponction la plus fainte , pour remplir Pimportant empioi de Sauveur du Genre- humain: ce qui comprend les charges de Prophete, de Sacrificateur & de Roi, dont nous avons parló dans 1'Introduótiou, comrae auffi des devoirs auxquels notre foi a cec égard nous engage. Quand nous reconnoiffons JefusChrift pour notre Seigneur, c'eft non feulement par rapport k eet empire univerfel qu'il a fur toutes chofes, mais en particulier par rapport k celui qu'il a acquis fur noLis par fa mort, ayant détruit par elle celui dont nous éiions les efclaves. Puis donc que Jefus-Chrift eft notre fouverain Maf tre, parcequ'il nous a achetés, & que c'eft a lui feul que nous appartenons par droit de propriété, nous devons nous fouvenir que nous ne fommes point k nous-mêmes; que nous devons faire fa volonté , & non la nótre; & que nul de nous ne vit d foi ne meurt d foi, muis au Seigneur. Jl  | Chretiennes. Setï. IF. 103 Il y a des gens qui prétendent fe' i conduire par la faine raifon, qui femI blent être choqués de la dignité de la I perlbnne de celui que nous croyons i qui s'eft donné foi-même en facrifice 1 pour les péchés des hommes. Com1 ment eft-il poflible, dit-on, que le Fils I unique de Dieu ait été fait chair & I foit devenu homme? Comment conceI voir que Dieu ait porté la condefcen; darice jufqu'a envoyer fon Fils ; & que celui-ci ait confenti a être envoyé, I & qu'il ait fait des chofes fi étonnanj tes pour fes créatures ? Surtout comj ment accorder avec la raifon Ia fuppofj fition , que Dieu ait tant fait pour des 3 créatures auffi fragiles , auffi foibles I que les hommes , qui ne font , felon I toutes les apparences, qu'une trés - pei tite; trés - vile cc peu confidérable parjtie de 1'Univers? I II faut d'abord avouer que Ia Raifon Humainen'auroit jamais découvert, I fans une Révélation expreffe, ce moyen |'de réconcilier les pécheurs avec un IDieu offenfé. Mais auffi il eft cerrain I d'un autre cóté, que dès que ce moyen 1 nous eft révélé , il n'eft pas fi inconce'ivable, que fon incompréhenfibilité feule doive engager raifonnablement un homme judicieux & fage a révoquer en jdoute Ia vérité d'une Révélation duement atteftée, comme il ledevroit, fi l.T rfnfl™« -A..JUA~ c. • 1 ' G 4 abfur-  104 Pratique des Vertus ïlntth. X. ig. jo. abfurdité ou des contradictions. Pour ce qui eft de la poffibilité de 1'incarnatjon du Fils de Dieu, quelque myfté* rieufe qu'en foit la maniere , il n'y a dans la chofe même , rien qui doive nous empécher d'en croire la poffibilité , comme nous croyons 1'union de l'Ame & du Corps, ou quelque autre vérité certaine; dés que nous voyons que la chofe même n'implique pas contradiftion, quoique nous fentions que nous ne pouvons en découvrir la maniere. II paroftra tout auffi peu contraire a la raifon, que Dieu ait eu une condefcendance fi extraordinaire pour lés créatures , qu'une perfonne d'une auffi grande dignité que fon Fils unique ait bien voulu s'offrir lui- même en facrifice pour les péchés des hommes; fi 1'on confidere mürement que la gloire & la grandeur de Dieu ne fouffrent aucune diminution, de ce qu'il examine, gouverne & dirige toutes chofes par fa fage Providence; du foin qu'il prend des moindres créatures, enforte qu'a?i pajjereau ne tombe point en terre, ni un cbf-veu de notre tê:e, fans fa connoiffance; & de 1'attention qu'il donne a chaque particule de la matiere même inanimée dans 1'Univers: fi 1'on confidere, dis-je, mürement cela, on ne trouvera aucune raifon de penter, que ]e Fils de Dieu fe foit réellemcnt dégradé, en s'intéreflant pour les pécheurs, ius'  C h r e t I e n N e s, Set). W. ICtf jufques a revêtir leur nature pour leur révéler plus clairemenc la volonté de Dieu, s'offrir lui-même en facrifice pour 1'expiation de leurs péchés , & pour les porter a la repentance, &. leur procurer un bonheur éternel. C'eft bien un exemple étonnant & admirable d'humilité & de condefcendance, mais qui n'a rien de flétriffant pour celui qui 1'a donné. Ces réflexions, & d'autres de^ la même nature, nous font connoïtre la vérité & 1'excellcnce de la Religion, Chrétienne, de cette maniere d'adorer & de fervir Dieu que Jefus-Chrift a révélée aux hommes, qui renferme des Articles de foi qu'on doit crojre, des Préceptes qu'il faut pratiquer , & des motifs qui doivent portera 1'obéiffance, La vérité de cette Religion eft déroontrée par tant de preuves de la derniere évidence, que Jefus-Chrift & fes Apótres ont données de la divinité de leur miffion, & par la nature même de la doctrine qu'ils ont enfeignée , qui eft digne de Dieu, & qui tend a 1'avantagé" & au bonheur du Genre-humain. C'est un fait reconnu généralement, non feulement de tous les Cbretiens, mais des Juifs & des Païens, qui ont parlé de ce tems-la dans leurs Ecrits, qu'il y a eu un homme appellé Jefus-Chrift, qui vivoit fous 1'empire de Tibere; que ce Jéfus ait été cruciG5 Sé: Preuves He a vérité & ie 1'excelence de la Religion ^liretienne.  ioS Pratique des Vertus Bé , c'eft ce qu'avouent également & les Juifs & les Cb.rer.iens, qui malgré la honte qui femble en rejaillir fur eux, 1'adorent comme Dieu. II eft encore très-vraifemblable que ces faits ont été confignés dans les Regiftres publics a Rome, fur la relation envoyée de Jérufalem par le Gouverneur a 1'Empereur: les anciens Chretiens dans leurs .Apologies en appellenc a ces Regiftres, ce qu'ils n'auroient ofé faire , étant auffi modeftes & auffi fages qu'ils 1'étoient, fi jamais une iémblabie relation n'avpit été envoyée, ou qu'elle n'eüc plus fubfifté. Deforte qu'il n'y a pas d'Hiftoire,conftatée par des témoigna, ges plus unanimes de gens, d'ailleurs oppofés dans leurs fentimens, que celle de la vie & de la mort dé JefusChrift. D'a i l l e ur s, toutes les anciennes Frophsties qui avoient le Meffie pour objet, ont été accomplies en lui feul: une voix célefte lui rendit témoignage en diverfes occafions; il fut revêtu du pouvoir de faire des miracles, & il eut furtout le don de prophetie , dont il a juftifïé la réalité par raccompriflement de fes prédiétions; ce qui eit la preuve la plus forte d'une miffion divine, parceque rien ne démontre plus évidemment une puiffance & une fageffe infinie. ■Les Miracles. qu'il a opérés ne prou-!  Chretiennes. Se3. IV. 107 prouvent pas moins la divinité de fa miffion. Le pouvoir de faire des miracles , quand ils font grands & iuconteftables , opérés fréquemment & en public , eft une des preuves les plus démonftrativesde la mifllon divine d'un Docteur. C'eft de-la que Nicodeme con'-. clut que notre Sauveur étoit envoyé de Dieu. Jefus - Chrift lui-même infifte fur fes miracles comme la grande preuve de fon autorité divine, & il compte la réfiftance a leur évidence comme yne circonftance qui aggrave 1'incrédulité: fi je n'eujje fait, dit-il, parmi eux les osuvres que nul autre n'a faites, ils n'auroient point de pécbé: il déclare même , que réfifter opiniatrement a 1'évidence de fes miracles,c'eft pécher contre le St. Efprit. Ses plus grands ennemis avouent qu'il en afait, quoiqu'ils les attribuent a un pouvoir magique : il a guérï un grand nombre de perfonnes en les touchant fimplemenr. ou par un mot, quelquefois même fans qu'elles fuffent préfentes ; les maladies 'les plus incurables ne réfifterent pas a fon pouvoir; il guérit un aveugle-né, il -rendit la fanté a une femme travaillée d'un mal facheux dcpuis dix-huit ans; il ordonna a un homme paralytique depuis trente-huic ans de fe lever &_de cliarger fur lui fon lit; il multiplia quelques pains & un petit nombre de poiffons au point de fufHre a nour-; rir can III. s Tcnn ;v. 24,  m. n. 22. i i ] p jc8 Pratique des Vertus rir quelques milliers de perfonnes, il refïufcita divers morts, & particuiiérement Lazare, qui avoic été quatre jours dans le fépulcre. II opéra tous ces miracles publiquemenc & en préfence de fes ennemis mêmes; & ils étoienc effeétivement fi publics «Sc fi inconteftables, que les Apótres en appellent fur eet article aux Juifs euxmêmes, difant, que Jé jus de Nazaretb fut un bomme approuvé de Dieu parmi eux par des prodiges £f des miracles, que Dieu avoit faits par lui au milieu d'eux, comme ils le favoient eux-mêmes. Mais le grand miracle qui a démontré pleinement la divinité de Ia miffion de notre Sauveur, c'eft fa Réfurreétion; qui eft un fait que tous les Chretiens onc non feulement cru, mais qu'ils regardent comme le fondement fur lequel porte toute leur foi *. Ajoutons que l'Efprit de Prophctie a réfidé en lui, & que la divinité 3e fa miffion a été démontrée par l'ac:omplifiement des Prédictions qu'il a fakes: quand des Propheties ont été ilaires & que 1'événement les a vériïées, on les a toujours regardées comne une preuve évidente d'une miffion fi'vine. Notie Sauveur a prédkfamort, e genre de cette mort & fes circon- ftan- * Voyez ci dcflbus I'Artieïe de la Réf.irrection |e Jefiii-Chnft.  Chretiennes. Secl. IV. ïoö ftances; la trahifon de Judas, la l&cheté de fes Difciples, lereniement de St. Pierre , fa RefurreÉtion, & l'Effufion des dons miraculeux du Sr, Efprit. 11 a prédit Ia ruine de Jérufalem, qui arriva quarante ans après fa mort, & avant que la génération préfente fur. paffée, comme il 1'avoit annoncé; le Temple & la Ville furent renverfés jufques dans leurs fondemens, & il n'y reita. pierre fur pierre , conformément a la prédiétion du Sauveur: les fignes qu'il avoit dit qui précéderoient cette ruine, les circonftances qui devoient 1'accompagner & la fuivre, s'accordent parfaitement avec ce que 1'Hiftorien Juif Jofephe rapporte. 11 affura encore fes Difciples, que PEv3ngile feroit prêché parmi toutes les Nations, que fa Doctrine triompheroit de toutes les oppofitions de la puiffance & de la malice humaine, & que les portes de 1'Enfer ne prévaudroient pas contre elle; comme c'étoient-la des chofes purement contingentes par rapport h nous, & dont la plupart ne devoient pas naturellement arriver , 1'accompliffement de femblables prédiétions prouve que notre Sauveur avoit 1'efpric de prophetie , & par conféquent que Dieu 1'avoit envoyé. A moins donc que nous ne croyions eet Article, oü feroit notre foi & notre efpérance par rapport a la rédemptioa pro-  Priere. Héb. I. iio Pratique des Vertus procurée par le facrifice de JefusChrift: & que lui feul, qui eft Dieu & Homme,pouvoit accomplir? Le facrifice devoit êtré d'un prix infini, pour * avoir quelque proportion avec Ia grandeur de nos péchés, commis contre un Dieu dont Ia bonté & la 'majeifé font infinies. C'eft par cette foi que nous fommes affranchis de tous les doutes & de tous les fcrupules que nous pourrions avoir fur 1'adoration que nous rendons a Jefus- Chrift, puifque fi nous lui déférons les honneurs divins, fans être convaincus qu'ils lui font dils, nous nous rendons coupables d'idolatrie, & nous violons le premier Commandemenr. C'eft encore par cette intime perfuafion de la dignité de Ia perfonne du'Sauveur,que nous apprenons a ennobür nos affections autant que nous en fommes capables, en admirant rincompréhenfible charité du Perej dans 1'envoi de fon Fils bienaimé, pour mourir pour nous dans le tems que nous étions fes ennemis, & des créatures rebelles; le merveilleux amour & 1'extraordinaire condefcendance du Fils, en s'humiliant lui-même a un tel point pour nous, qui méritions les plus redoutables effets de fa colere & de fon indignation, pour venger la violation de fon Alliance. „ Divin Jésus, Fils éternel du Dieu j. „ vivant, qui es la rejplendeur de fa  C H R E T I E N N E S. Setl. IV. I11 „ gloire, £? la vive image de fa perfon- ne, nous reconnoiffons que c'eft en ,, toi feul & par toi feul que nous pou,, vons trouver Ie faiut es Vertu* que le Sauveur du Monde eft ni de f ent' me 67 a été fait fujet d la Loi, fans avoir eu aucune tache de la corruption originellc, afin qu'il püt nous délivrer de nos péchés. C'a été-la la foi des Apó" tres & de tous* les premiers Chretiens, qui ont regardé eet article comme étant d'une fi grande importance , qu'ils 1'ont inféré dans le Symbole. Notiae Sauveur eft né a Bethléhem, oh Marie & Jofeph s'étoient rendus po"r obéir a 1'Edit d'Augufte; la Providence ayant ménagé cette circonftance, pour accomplir un Oracle, & pour faire connoitre la naiffance du Mefiie. Quoiqu'il naquit dans une étable, dans la baffeffe & Pobfcurité, les Anges céJébrerent fon avénement & 1'annoncerent a des Bergers , qui fe rendirent a Bethléhem; & après avoir vérifié ce qu'un Ange leur avoit déclaré, s'en retournerent louant & glorifiant Dieu. Les Juifs étoient dans 1'attente générale de la venue du Mefiie, dans le tems qu'il eft né, comme on le voit par une ancienne tradition univerfellement regue, que le Mefiie paroïtroit a la fin du fecond Millénaire , par le calcul des Docteurs Juifs quelque tems avant la naiffance de n^f-e Sauveur, qui déterminerent 1'avénement du Mef- i fie dans 1'efpace de cinquante ans; & la jaloufie d'Hérode touchant un Roi des Juifs, qui devoit naiire vers,, ce  Chretiennes. Seèï. V. 117 ce tems-Ia, confirme encore ce fait. D'ailleurs le témoignage de riiiltorien Joléphe eft exprès; il 'rapporte que les Juifs fe rebellerent contre les Romains, encouragés par une célebre Prophetie contenue dans leurs faints Livres, qui portoit que vers ce tems-Ia il devoic naftre un Prince fameux parmi eux, qui auroit Pempire de toute la Tcrre. Les Païens s'actendoient aufli a quelque chofe de lémblable, comme on le voit par le témoignage de deux des plus fameux Hiftonens de Rome. Suetone dit, que e'étoit une ancienne '& générale opinion, fameufe dans touc 1'Orient, que les Deftins avoient déterminé que de la Judée fortiroit celui qui regneroit fur PUnivers. Tacite rapporte que plulieurs étoient perfuadés , & que les anciens Livres des Prêtres le portoient, qu'en ce tems-la 1'Orient auroit le deflus, & que ceux qui auroient Pempire du Monde, fortiroienc de Ia Judée. Qüakü notre Sauveur a paru dans le Monde, il a dilïipé les profondes tériebres de 1'idolatrie, & arrêté le cours de la corruption , qui regnoient malheureufement par route laTerre: il a été la lumiere des Gentils , comme la [_,, ghire de fon peuple J/rdè'l. Nous ne pouvons donc manquer fous Ia conduite d'un tel Guide d'acquérir la connois&nce de la volonté de Dieu pour Ia li 3 vie c, 1!.  Je?n I. iii. 34' Coloff. 1 9- Öes Soi frances i Jefiis- n8 Pratique des Vertus vie préfente, & la confolante efpéran. ce d'une félicité éternelle dans une vie a-venir; il eft digne de tout notre acquiefcement; foit que nous confidérions .la dignité de fa perfonne, la clarté &i la perfection de les préceptes; foit que nous faffions attencion a 1'éclat de fon cxemple, aux encouragemens qu'il donne, aux fecours, & aux glorieufes récompenfes, qu'il promet a tous ceux qui s'engagent a fon fervice & qui y is.perféverent. Celui qui eft mi fein du Pere, qui u recu l'cfprit fans mefure, en qui la plinitude de la Divinité babite cor* \ forellement, ne peut qu'a voir une par- ] faite connoiftance de ce qui eft vraiement conforme a la volonté de Dieu: d'oh il s'enfuit, que nous avons tout I fujet de fuivre avec confiance la voie. qu'il nous a tracée pour obtenir le falut; & nous ne pouvons qu'y parvenir, fi nous ne nous manquons pas a nous'mêmes, en le négligeant. L'E- I vangile nous montre le véritable objet de notre culte, il nous donne de juftes & nobles idéés de eet Etre que nous I devons adorer, & il eft trés-propre a I élever notre nature au plus haut degré de perfection dont elle eft fufceptible ïci-bas. if- UI. Dans le quatrieme Article du e Symbole nous faifons profefiïon de croire, que ce même Jefus - Chrift, le Fils éternel de Dieu, engendré du Peru  Chretiennes. SeQ. V. 119 ! a-e avant tous les fiecles, vrai Dieu, Ie t Prince de gloire , l'héricier de toutes ; chofes, le Mefiie promis, qui ayanc j pris la na'.ure hurnaine, a toujours écé ! le méme qu'il étoit auparavant , a ) Joufert fous Ponce Pilate, a été cruj cifU, eft mort, e? a é é enjéoeïi. Tout le cours de fa vie, depuis fa \ naiffance dans une étable jufques a fa morr fur la-croix, a été une fuite de ! fouffrances; mais c'eft furtout dans fa i Paffion qu'il a foufFert les maux les ; plus cuifans en fon corps, & qu'il a \ ^té en proye a des frayeurs & a des 1 angoiffes inexprimables & inconnues j cn fon ame, qu'il a fué des grumeaux I de fang. II fut trahi par un de fes disi ciples, renié par un autre. Saifi & lié par des foldats cruels & infolens comme un criminel, chargé par des fauxtémoins; condamné par le Juge, qui déclara lui - méme qu'il ne trouvoit 1 aucun crime en lui; il recut des foufI Üets, des coups de verge, on lui cra! -cha au vifage; il fut infuhé & moqué 1 par le peuple, les foldats, & enfin par 1 le Souverain Sacrificateur même; acca: blé d'opprobres, de mépris, & d'ame' tes railleries par fes ennemis, il fuc enfin condamné a la mort fur les cris tumultueux de la populace, crudfie-le9 ■ €rucifie-le. II fut donc cloué è la croix, & après y avoir été attaché plufieurs foeures il rendit 1'efprit. Ce genre H 4. de  120 Pratiq_ue des Vertü» Mstth. XXVI. 3 Matth. XXVtl. 4 de fupplice s'appelloit Crucifiement, & c'étoit un des plus douloureux & des plus ignominieux. On peuc juger des douleurs qu'il caufoit, puifqu'on percoit de cloux les partjes les plus nerveufes du corps, & qu'il ne donnoit la mort que lentement : 1'infamie qui y étoit attachée parmi les Romains eft évidente, en ce qu'il étoit réfervé aux Efclaves. ït n'eft pas moins certain que notre Sauveur a foufFert en fon ame; témoin les frayeurs & les extrêmes angoiffes qu'il reffentit, d'abord en Gethfémané, jmmédiatement avant que d'être faid par fes Ennemis: alors fon ame fut fai- i. Jte de Irifieffe jufques a la mon: il fua da lang, & il pria trois fois fon Pere, que, ftl étoit pojjible, cette coupe amere pafjdt fans quil la bót: témoin cette jnconcevable détrefie qu'il exprima fur la croix, en s'écriant d'une maniere fi douloureufe: Mon Dim! mon Dieu! Cpourquoi m'as-tu abandunné? C'eft ainfi que 1'idée des maux a venir remplit fon ame de frayeur , & le fentiment des maux qu'il fouffroit, d'angoifTe, de trifteffe 6i de douieur. Ce n'eft pas qu'il ait foufFert les tourmens des damnés; car n'ayant point connu de pêché, il ne méritoit ni ne pouvoit foufFrir de peine. Mais quand nous confïdérons, combien notre divin Jéfus connoifToin parfaitcmcnt tout le demente du pé-  Chretiennes. Seiï. V. ui ché, combien il étoit zélé pour la gloire de Dieu, & avec quelle ardeur il defiroit le falut des homme'-; & qu'il favoit en même tems combien feroit petit le nombre de ceux qui feroient fauvés, comment un Monde rebelle & ingrat anéantiroit le but de fa mort, & rendroit inutiles les deffeins de fa charité, nous pouvons concevoir en quelque facon cette angoiffe dont fon ame fut accablée d'une fi étonnante rrtaniere, jufques a lui arracher ces paroles, mon urne eft faifte de toutes parts de trlftejfe jufques d la mort: il n'eft pas difficile de comprendre, que lui, qui portoit 1'amour pour nous jufques a mourir pour nous fauver, devoit être pénétré de douleur, en prévoyant que fa mort même ne nous empêcheroit pas tous de périr. Observons ici que notre divin Sauveur n'a foufFert que dans fa nature humaine: mais comme elle étoit unie è la divinité, & qu'il y avoit une intime union des deux natures en la perfonne du Fjls , enforte qu'il en réfultoit une véritable & réelle communication de noms & de caradteres , on peut fort bien dire que le Fils éternel de Dieu a foufFert tout ce que JefusChrift homme a foufFert en fa chair; paree que 1'on peut attribuer a la perfonne, en laquelle les deux natures ent été unies par la puiffance de Dieu, II 5 les  122 Pratique des Vertu» i Pierre T «1. riébr. XIII co. les propriécés qui appartiennent a chacune des natures féparement. Notre Sauveur a donc foufFert la mort cruelle & ignaminieufe de la croix, pour nous délivrer de la colére a - venir, & pour nous acquérir une rédemption éternelle; pour nous donner un parfait modéle de patience & de foumiffion a la volonté de Dieu, & de toutes les vertus néceffaires pour nous rendre participans de tous les fruits de fa fatisfadtion: il nous a laijjé un exemple, afin ' que nous luivions fes tracés. En efFet , lorfque nous avions trèsjuftemcnt encouru 1'indignation du Tout pu'fFant, & que nous avions mérité des peines éternelles, notre cha- j ritable Sauveur a efFacé 1'obligation qui étoit contre nous , & en vèrfant fon j précieux lang, pour prix de notre rédemption , il a fatisfait a Dieu pour nous; il a bien voulu être offert en facrifice pour nous, porter nos péchés I en fon corps fur !e bois, & expier nosiniquités par la feule oblation de luimême pour nous tous. 11 eft mort non feulement pour notre bien & notre avantage, mais en notre place; enforte que s'il n'étoit point mort , nous ferions péris éternel lement, fans pouvoir échaper a la juftice d'un Dieu irrité. De-la vient que le fang de Chrift, répandu pour nous fur la croix , eft appellé Ie fang de 1'aHiance', parceque c'eft  Chretiennes. Secl. V. 123 c'eft en conféquence de 1'efFufion de ce fang, qu'il a plu a Dieu de traiter une Alliance de grace ót de miféricordc avec le Genre• humain , par laquelle il a promis & s'eft engagé , en confidération des fouffrances auxqueiies ,'efusChrift s'eft volontairement expofé pour 1'amour de nous & en notre place , de pardonner leurs péchés a tous ceux qui fe repentent fincerement & qui croieut, & de leur donner la vie éternelle. La nécefïïté de croire que JefusChrift a foufFert eft évidente , en ce que par-la nous avons une entiere certitude qu'il a été véritablement homme; fans quoi il n'auroit pu nous racheter. Nous fommes encore affurés par-la, que la Juftice de Dieu a recu la fati>faccion qui lui étoit döe pour nos péchés, dont il ne pouvoit, felon fes décrets, Je faire de rémijjion fans ef- ] fufian de fang. Nous apprenon*- encore2 par-la, que notre Sauveur eft véritablement touché d'une tendre compaflïon pour nos maux, étant un Souverain Sacrificateur fidele cjf vüjèrieordieux, fenlible pour avoir ienti nos infirmités, & par eette raifon prêt a fecomir ceux qui 1 font tentés. Enfin notre foi è eet égard1 nous prepare a recevoir avec patience les maux de cette vie; car fi Dieu n'a pas épargné fon propre Fils, comment épargneroit-il fes enfans adoptifs, qui ne Kbr. IX, '' V Tébr, H, i.  124 Pratique des Vertus Hébr. XII. 8. ColotT. IL 14. Galat. V. 24. -- VI. 14. Priere. Eph. 11. 4. Luc. I. 78. Galat. IV. 4- Hebr. VII. 26. Hebr. IV. 15. ne peuvent avoir de preuve plus évidente qu'ils font tels, que lorfqu'ils éprouvent fes correcïions paternelles; puifque fans cela , felon la remarque de l'Apötre, r.ous fommes des enfans juppojéi & non ligitimts: mais Jorlque nous foufFrons avec Jefus - Chriit, nous fouffrons auffi comme lui, & nous imitons 1'exemple admirable d'humiüté , de patience & de foumiffion fans réferve a la volonté de Dieu, qu'il nous a laisfé, devenant ainfi participans de fa fainteté. Comme il a effacé 1'obligation qui étoit contre nous, laquelle confijloit en des ordonnances, £? nous étoit contraire , Payant attacbée d fa croix , nous devons auffi apprendre , que fi nous voulons être de Chrift, nous devons cru:ifier h cbair avec fes convoitifes, & ne nous glorifier en rien , finon en la croix ie Jefus - Chrift crucifiê. O Dieu! qui es ricbe en miféricor„ de, nous te béniffons de ce que par „ un effet de ta grande charité tu as ,, daigné nous vifner de l'Orient d'en,, baut, & dans l'accompli ffement des „ tems envoyer ton Fils unique, fait de ,, femme èf fait fujet d la hoi. 11 nous „ convenoit d'avoir un Souvcrain Sacri„ ficateur faint, innocent, fans tacbe Q* ,, féparé des pécbews , qui fut tenté en „ toutes chofes oomme nous, excepté le pêcté, & tu nous as donné ton propre „ Fils. Concu par la vertu de ton  Chretiennes. SecJ. V. 125 „ Efprit fainc dans le fein d'une chafte „ Vierge, ü a participé d la cbair c55| ,, au Jung, comme les enfans y partici,, pent, cc il a été confacrê par les fouf,, frances les plus ameres en fon corps 1 „ «Sc en fon ame. Donne-nous, Pere ,, céiefte, de fentir touc le prix de ce ,, que nocre divin Rédempteur a faic ,, pour nous fauver, d'embraffer par „ une véritable foi fon facrifice, com„ me 1'unique moyen d'obtenir la ré,, miffion de nos péchés; d'imicer 1'e,, xemple d'humilité, de patience & „ de foumiffion è Ia volonté qu'il „ nous a lailfé, & de recevoir les cha„ timens par lefquels tu nous affliges „ comme des preuves de ta tendreffe „ paternelle, & de les regarder com,, me des traics de conformité avec „Jefus-Chrift, afin qu'après avoir „ foufFert avec lui «Sc comme lui, „ nous' puiffions auffi regner avec lui aux fiecles des fiecles. Amen". IV. Quoique Jefus-Chrift füt Dieu & Homme, il n'a pas laiffé de mourir£ réellement, par la féparation aftuelled de fon ame d'avec fon corps, donc 1'u-C nion conftituoit fa vie encanc qu'homme. C'eft ce qui paroit évidemment par les endroits de 1'Ecriture, qui difent qu'il'eft mort, «Sc furtout par ces paroles: Pere, je remets mon efprit entre1tes mains! fcf ayant dit cela , il rendit4 l''efprit i par une fuite des maux «Sc des tour- Hebr. ii* 4« Hebr. ii. o. «I. JOUK. e Ia Mort : Jefus. Iirift., \c. xxiiiv i.  126 Pratique des Vertu» Jean X. ïi De rjuelle naniere ie Ais • Chrilr. nous consult a Dieu Mauh.V.3 tourmens qu'on lui avoit fait fouffrirqui ne pouvoient, fans miracle , ne pas détruire 1'öeconomie naturelle du corps, qui eft néceffaire pour entretenir fon union avec 1'ame. 11 eft vrai que ce fut volontairement qu'il fe foumit è la violence de fes ennemis , & qu'il n'auroit pu y être contraint fans ce dévouement libre & volontaire, ce • qui lui a fait dire, nul ne m'óie la vie, mais je la laijje de moi- même i mais après s'être ainfi löumis, il ne pouvoit feIon le cours de la nature éviter la mort. v Apres avoir ainfi confidéré les humiliations de notre bien-heureux Sauveur, il ne fera pas hors de propos ■d'examiner quelles imprefïions fa Vie, fa Doctrine & fes Souffrances doivent faire fur nous, & d'obferver par quels degrés il nous conduit k Dieu. Cette recherche nous convaincra bientót, 3ue pour nous empêcher de tomber ans le pêché, il a eu deffein de régler nos penfées, qui nous y portent; & de nous obliger k veiller fur nos regards, qui excitent les penfées en nous. Pour prévenir tous les maux qui naiffent du defir déréglé des richesfes, il nous a fait connoitre cette admirable difpofition d'ame, qualifiée •dans fon Evangile du titre depauvreti iïejprity qui nous rend capables d'être détachés même de ce que nous poffé- dom  Chretisnnes. Setï. V. 127 I dons de bon & d'utile. Pour nous 1 éloigner des tentations qui peuvent 1 nous porter au menfonge & a la méI difance, il nous a déftndu toutes les I paroles inutiles, afin que notre applii| cation a les éviter nous garantifle du :| danger de tomber dans ces grands criI mes. Pour prévenir les funelfes effets i de la colere & de la vengeance, il a $ détruit ces pafTions dans leur fource , ■\ en nous ordonnant d'aimer nos ennei mis, & de faire du bien è ceux qui d nous font tort. Pour nous rendre faci1 le la pratique de la patience, vertu fi j néceffaire dans cette vallée de larmes, [ il nous a dévoilé les utilités de 1'ad1 verficé , & 1'avantage qu'il y a ó être j perfécuté pour 1'amour de lui; il nous j a appris que ce que le Monde appellé infortune & calamité, devient fouvent 1'heureux infirument de notre bonheur J dans la vie préfente & dans celle qui 1 eft a ■ venir: bienbeureux Jont ceux qui Mi | pleur ent: bienbeureux Junt ceux qui Jont 5, f perjécutés ; & pour nous rendre tran| quilles & contens en nous-mêmes & | complaifans envers les autres, il exige | de nous d'avoir un vif fentiment de notre foiblefie & de nos imperfedtions, & d'être toujours prêts a nous affujetir aux plus vils offices pour le bien de nos freres affbgés. Poür donner plus de poids a tous ces préceptes, il les a appuyés par fon exem- tth. V.' to.  128 Pratique des Vertüs exemple; ayant pratique lui-même les plus difficiles, comme les plus ordinaires. 11 nous a prêché la piété & la dévotion par de fréquentes retraites, en paffant des nuits entieres en prieres, & en prenant occafion des circonftances temporelles de s'élever a des méditations fpirituelles; il s'eft conformé non feulement aux inftitutions divines , mais auffi a celles des hommes, qui pouvoient contribuer a 1'avancement de la vertu. Pour nous former a Phumilité, ce Prince de gloire s'eft abaiffé jufqu'a naïtre dans la pauvreté , jufqu'a prendre la fimplicité d'un enfant. II a paffé trente années de fa vie dans Pobfcurité, aiTujetti h fes parens ét inconnu au monde; pour fe rendre propre a exercer la charité la plus univerfelle, toute fa vie a été employée en bonnes ceuvres: pour réprimer tout mouvement d'ambition , jl refufa tous les Royaumes du monde & leur gloire , & lorfque le Peuple voulut le déclarer Roi , il fe retira, enforte qu'on ne put le trouver. Pour nous apprendre a nous foumettre a> 1'Autorité Civile , il paya le tribut, quoiqu'il n'y füt pas tenu , & qu'il füt obligé de faire un miracle pours'acquitter de ce devoir. Pour nous infpirer le détachement du Monde, il ne voulut aucune part a fes biens, le Fils de l'homrae n'ayaut pas de quoi repofer  tHRETIINNIS. Setl. V. 129 fer fa tête. Parfaitement content dans fa condition baffe & obfcure, il nous a enfeigné par-la a nous réfigner a la volonté de Dieu dans toutes nos afflic* tions. Dans fon extréme agonie il renonga au fentiment le plus vif de la nature, & fe foumit a la volonté defoti Pere. Dans le deffein de nous empêcher de violer les loix de Dieu par égard pour les jugemens des hommes, il s'eft expofé au mépris du Monde; «Sc pour être utile au Genre-humain, il voulut bien palier pour le dernier des hommes, pour un magicien, un impofteur, un ami des péagers & des pécheurs, un fédufteur du peuple. Pour nous apprendre a réfifter a toutes les tentations qui pourroienc nous porter a la colere, & k conferver une entiere égalité d'ame au milieu de tout ce qui feroit capable de nous impatienter, il fupporta la ftupidité de fes Apótres, «Sc leur lenteur a croire ce qu'il leur enfeignoit clairement; «Sc il repouffa les plus outrageantes aceufations de fes ennemis avec la plus grande modération & un modefle ülence,ne rendant point outtage pour outrage. Pour nous en^ gager a pratiquer le pénible devoir d'aimer nos ennemis , il pria ardemment pour les fiens dans le tems qu'il éprouvoit les plus cruels effets de leur malice , qu'il attribua a leur ignorance; Pere, dit-il, pardonne - Uur, car ils ««Luc. j Tomé l. 1 Jaunt"^' :xm.  130 Pratique des Vertus favent ce qu'ils font; & pour nous aninier a remplir notre devoir, il nous offre le pardon du paflé, & une patfaite réconcdiation avec Dieu . par les mérites de fa mort & de fa paffion , pourvu que nous retournions a lui par une fincere repentance , par une vraie foi, & par une entiere obéiffance a fes commandemens. Il nous fortifie & nous met en état de faire notre devoir, en éclairant nos entendemens obfcurcis,en portant notre volonté vers le bien , en animant notre courage au milieu des obftacles, des dangers & des tentations: il excite nos craintes en nous menacant de peines éternelles dans la vie a-venir,& réveille nos efpérances par des promeffes de récompenfes éternelles tant pour le corps que pour 1'ame; qui font les plus puifTans motifs pour éloigner les hommes du pêché, & pour les porter è Ia vertu, par le moyen de laquelle ils peuvent parvenir a la vie éternelle. Notre plus grand foin doit donc étre de travaiiler a lui plaire, en refpeétant toujours fes commandemens, & en ne négligeant rien pour engager les autres a les refpecfer. Nous devons faire de continue Is progrès dans la piété , afin d'être rendus conformes a fon image; mettre a un haut prix tous les moyens & toutes les occaüons de con- verfer  CHRE TIENNES. SecJ. V. rjr verfer avec lui; ]a priere, la méditation, 1 ouie & la leéture de fa Parole laparticipation aux gages de fon amour! qu'i nous a lanlês dans le Sacremen de la Sainte Cene. Nous devons fouffnr plus lorfque Ion faint nom eft blafphémé , que lorfque nous recevons quelque injure perfonnelle , & foupirer après fon apparition glorieufe, afin de pouvoir le polTéder fans interruption dSre tOUte ]'éternicé dans la gloire du de la croix fut enféveli,ce qui avoit ? été repréfenté par jonas , qui fut trois c jours & trois nuits dans le ventre d'un grand poiftbn, & annoncé par le Prophete Roi dans ces paroles; ma cbair bahtera en affurance , car tu n'abandon- * neras pas mon ame au fépulcre, & ne permet tras pas que ton Jaint fentl la corruption; ce qui indique clairement que Ion corps devoit étre mis dans 1c tombeau, mais non pas pour y être fujet è la corruption. Efaie dit encore plus formellement: on avoit ordonné fon fé- ] pulcre avec les mécbans, mais il a été u avec lericbe en fa mort. Cet Article de notre hox doit produire en nous 1'effet que nous mdique St. Paul: nous fommes Ro enjévehs avec lui en Ja mort paf le Batême, afin que comme Cbrijl efi reffufcité des morts par la gloire du Pere, nous iuffi pareillement marcbions en nouveauté de vie. I 2 ' vr. a ?épuTta! de Jefushrift. PP. VI. o, lof ïfcïe II. 3, ra. VI. 4.  132 Pratique des. Vertüs Sa RéïiiT rection. VI. Nous failbns profeffion de croi' re dans le cinquieme Article du Symbole , que Jesus ■ Christ eft rejfujciti des morts le troifieme jour. Le Fils bienaimé de Dieu , crucifié cc mort pour nos péchés, ne demeura pas long-tems dans 1'état de mort, mais le troifieme jour * il fe refilifcita par fa propre puisfance, en réuniflant la même ame au même corps qui avoit été enféveli, & fortic ainfi du tombeau le même homme. C'eft ce qui eft attefté par des Témoins dignes de foi, bien informés de la vérité du fait. Ces Témoins font les Femmes pieufes , qui vinrent dans le deffein d'embaumer fon corps, & qui le trouverent reffufcité: les Apótres,qui converferent fréquemment avec lui après fa réfurreélion, & qui fe convainquirent, en le voyant manger «Sc boire avec eux, qu'il avoit un vrai corps, «5c 1'un d'eux toucha les marqués que les cloux avoient laiffées «lans fes mains, «Sc mit fa main dans ,fon cóté : tous les autres Difciples, auxquels * II fut trois jours dans le fdpulcre , felon la maniere de compter «ncienne & moderne, & fe3on ceile de 1'Ecriture en particulier. C'eft ainfi tju'il eft dit, qu'il y avoit quatie jours que Laznre étoit mort, quoique ce quatrieme, oü. il rellufcita, yfüt compris; qtie buit jours pour circoncire Jefus-Chrift dtoient accomplis, dans lefiuels celui de fa naiffance <5c celui de la circoncifion «koiem compris.  Chretiennes. Seft. fT. 133 •auxquels il étoic apparu, ont attefté la méme chofe; & plus de cinq eens freres , qui 1'avoient vu a une fois. II fut vu enfuite de Jaques & de Saint Etienne quand on le lapidoit, & il apparut a Saint Paul fur le chemin de Damas. On ne peut contefter que ces Témoins ne foient dignes de foi, ni les foupgonner d'impofrure, tant parceque ia doctrine qu'ils prêchoient défend le menfonge fous peine de damnation, que parcequ'ils ont fcellé leur témoignage de leur fang. N'avons-nous pas encore en faveur de la vérité de ce fait le témoignage des Ennemis méme de jefus - Chrift? Les Soldats, mis autour du fépulcre pour empêcher fes Apótres d'enlever fon corps, fent-irent la} terre tremblcr fous leurs pieds, & virent un Ange , dont le regard étoit comme un éclair, & le vêtement comme de la neige; la frayeur les rendit comme morts, tandis que celui qu'ils gardoient reprenoic la vie : quelques1 uns d'entre eux fe rendirent è Jérufa< lem, & rapporterenc aux Souverains i Sacrificateurs tout ce qui s'étoit pafle, I lorfque Jefus-Chrift étoit rcffufcité. I Les Anges encore, cette armée céles: te, qui avoient annoncé i'heureufe : nouvelle de fa naiffance , ont rendu témoignage a fa réfurreclion. L'un roula la pierre qui fermoit le fépulcre, & s'affit deflus; deux autres, 1 3 ca Matth. :xviu.  LucXXIV 5,6- t Cor. XV. 17 134 Pratique dss Vertos en vêtetnens blancs, aflis 1'un k la tête & 1'autre aux pieds de 1'endroit oü avoit été le corps de Jéfus, dirent aux . femmes : pourquoi chercbez-vous parmi les morts celui qui eft vivant ? il n'eft point ici, mais il eft rejjufcité. La raifon pour laquelle Jefus-Chrift ne s'eft montré qu'a fes Difciples & non a toute la Nation Judaïque, c'eft qu'il étoit néceffaire que ceux qui devoient être les premiers Prédicateurs de fon Evangile,euffent la plus parfaite certitude de la vérité de fa réfurrection; néceliïté qui n'avoit pas lieu par rapport a d'autres; puifque la même raifon, qui 1'auroit obiigé de fe montrer aux Juifs, auroit dü 1'engager a le faire voir k tout 1'Empire Romain , & même dans la fuite des fiecles a tous les Incrédules. Il falloit que Jefus-Chrift reffufcitat des morts, pour faire voir qu'il avoit acquitté la dette pour laquelle il étoit mort, & que fon facrifice avoit été agréable k Dieu:./? Chrift n'eft point ■ rejjufcité, vous étes encore en vos péchés. 11 eft encore reffufcité pour prouver qu'il étoit le Meffie, & pour démontrer Ia vérité & la divinité de fa doctrine, dont il avoit prefcrit la pratique a tous les hommes. II en avoit appellé a fa réfurrection , comme k la preuve qui juftifieroit qu'il étoit uri vrai Prophete: il falloit donc que fa prédiétion s'ac-  Chretiennes. Seiï. V. 135 s'accomplrt, ou il auroit du paffer pour un importeur, 1'accompliffement des prédictions étant un caraclere auquel Dieu vouloit que ies Juifs reconnuffent les vrais Prophetes : fi Chrift n'eft point rejjufcité, notre foi eft mine. Dieu ayantJ reirufcicé notre Sauveur , après qu'il J avoit été condamné & mis a mort pour avoir pris la qualité de Fils de Dieu, fa réfurreclion démontre qu'il 1'eft véritablement : s'il eft le Fils de Dieu, la doctrine qu'il a prêchée eft émanée de Dieu, & nous enfeigne la voye du Ciel. La réfurreclion de notre Sauveur nous eft auffi un gage de la nótre; parceque par fa réfurreclion il eft devenu les prémices de ceux qui dorment. Nous x fommes affurés de reffufciter en vie éternel le , puifque celui qui a promis de nous reffufciter, s'eft reffufcité luimême. VII. Nous déclarons dans Ie fixieme V Article du Symbole , que nous^' croyons que Jestjs-Christ eft monté au Ciel, 5= s'eft affis d la droite de Dieu le Pere tont ■ puiffant. Le même Jéfus , qui eft reffufcité par fa propre puiffance pour notre juftification, après avoir con-Ro firmé durant quarante jours la vérité de fa réfurreftion, par différentes apparitions a fes Apótres, s'entretenant 1 avec eux des chofes qui regardent le Royaume de Dieu , acheva fa courfe lur Ia Terre, en héniffant fes Difciples-, I 4 car x* Ocur. :vni. 22. Cor. XV. 7- 1 Cor. V. 20. Afcenfioii Tefusrift. ii.rv.as. «a. 1. Luc IV. 51.  rVft.i.o.u 136 Pratique des Vertos car pendant qu'il les bénifïbit, & qu'ils .avoienc les yeux fixés vers le Ciel , il fut élevé, ÊP une mie le foutenant l'emporta de devant leurs yeux; & dans lc moment que Jéfus venok de monter au plus haut des Cieux , deux Anges apparurent a fes Apótrcs, qui leur firent la confolante promefle, que ce Jéfus qui avoit été élevé d'avec eux en haut au Ciel, reviendra un jour d'une ma- 1 niere glorieufe pour juger le Monde, j Circorïftances ménagées pour confirmer la vérité & la réalité de ce grand myfterc. Ici il falloit des témoins ocu- , Jaires, ce qui n'étoit pas néceffaire par rapport a la réfurrection en elle-même; j parceque toutes les preuves de fa vie | depuis fa mort, étoient des démonftra- I tions de fa réfurrection. Mais les A- I pótres ne pouvant le voir au Ciel, il falloit qu'ils 1'y viffent monter, afin de I pouvoir attefter fon afcenfion. D'ailleurs, notre Sauveur leur avoit déclaré auparavant oh il devoit aller, & quelle puilTance iui devoit être conférée. II leur avoit promis, comme une preuve de fon exakatioti a la droite de Dieu , de leur envoyer le Saint Efpric d'une facon fenfible; deforte que lors- j qu'ils reffentirent les merveilleux effets de fa préfence dans le Ciel, ils eurent de fuffifantes preuves de fon exaltation, & de fon afcenfion dans les Cieux des ; Cieux, oh fa nature humaine eft éie- • ' vee :  ChretiEnnïs. Sett. V. 137 vée fort au • deffus des Anges, des Archanges, des Principaur.es & des Puisfances, & même a la droite de Dieu. L'Ascension de notre Seigneur au Ciel étant fi avantageufe aux hommes, on peut demander & on a demandé, pourquoi il n'y eft pas monté a la yue des Juifs , afin que ceux qui avoient été trompés dans le tems de fon crucifiement, fufient convaincus de jeur erreur. On répond qu'il étoit d'une néceffité abfolue , que ceux qui devoient annoncer 1'Evangile, eufient le plus haut degré d'évidence de la vérité des faits qu'ils devoient attefter, & que cette néceffité n'avoit lieu que par rapport a eux. Dieu fe propofoit de fauver les hommes par la foi, qui eft une perfuafion fondée fur le témoignage d'autrui, & incompatible avec la vue. D'aüleurs, on peut douter avec raifon, que des gens, qui avoient attribué les miracles du Sauveura lapuiffance du Démon, & qui avoient corrompu les Garde? pour publier que fes Difciples avoient enlevé fon corps, euffent été convaincus par fon afcenfion , & qu'ils n'euflent pas précendu que c'étoit 1'apparitionde quelquephantóme. VIII. Jesus • Christ, étant affis d la$* droite de'Dieu, elf devenu notre Inter-j^. ceffeur & notre Avocat auprès'du Pere, pour plaider notre caufe, folliciter en 1 5 notre druitc de  138 Pratique des Vertus pr. cx. i Mare XVI. ip. Êphef. l 2c i notre faveur, expofer nos befoins, & pour offrir nos prieres a Dieu, en vertu du mérite de fon facrifice fur la croix pour les péchés de tout Ie monde. Cette féance a la droite de Dieu avoit été prédite en termes exprès dans ces paroles: le Seigneur a dit d mon Seigneur, fieds-toi d ma droite, jufques d ce que j'aye mis tes ennemis pour le marebe-pied de tes pieds. Et les Auteurs facrés nous aflurent, que notre Jéfus eft aótuellement en poffefiion de ce haut degré de gloire: 1'un nous dit quil fut élevé en haut au Ciel, 6? s'ajfit d' la droite de .Dieu: un autre déclare que Dieu 1'a reffufcité des morts, ê? 1'a fait qfeoir dfa droite dans les lieux célejtes. Ces expreffions ne doivent pas fe prendre è la lettre, mais dans un fens figuré, étant empruntées de ce qui a lieu parmi les hommes:comme d'être affis è la droite d'un Prince eft eftimé le plus haut degré d'honneur, Pexpreffion de 1'Ecriture emporte d'abord , que Dieu a élevé Jefus-Chrift au plus haut degré de gloire & a la fuprême dignité: de plus, la droite de Dieu pouvant encore fignifier fa puiffince infinie, cette expreilion peut auffi défigner ('autorité fouveraine Sc l'empire que notre Sauveur a recu de Dieu : ainfi quand il eft dit , être affis è Ia dröite de Dieu, cela marqué ia pofieflion tranquille & perpétuelle Ju plus haut degré de gloire, de majefté Sc d'autorité. C e r  Chretiennbs. Secl, V. 139 Cet Article confirme encore notre foi, en nous aflurant de plus en plus de la divinité de la miffion de notre Sauveur: fi Dieu lui - méme ne 1'avoit pas envoyé,il n'auroit pas fcellé fa doctrine. Son Afcenfion dans le Ciel fortifie notre efpérance; en voyant notre nature tellement e:;altée, nous fommes affurés qu'elle eft fufceptible du plus haut degré de gloire ; & Jéfus étant notre Chef, nous pouvons en qualité de membres de fon corps, nous attendre a être recus dans le célefte féjour, ou il eft affis en gloire , puifque luimême a déclaré qu'il eft allé nous préparer place. Rien de plus propre a ennoblir cc è épurer nos defirs, en nous rappellant que notre tréfor eft au Ciel, & que par conféquent nous ne devons pas nous attacher aux chofes périfTables de la Terre; que notre grande occupation dans ce monde doit être de nous préparer pour le Ciel, óc de .travaiiler è revêtir les difpofitions néceflaires pour être admis en la préfence de notre Sauveur, a qui nous devons tant de reconnoiffance & de dévouemcnt. Nous devons encore apprendre d'ici, que nous pouvons compter fur le pardon de nos péchés, que notre obcilTü nee, fi elle eft fincere, quoiqu'imparfaite , fera agréée ; ck fur la protection de Jefus - Chrift dans Ia guerre fpintuelle que nous avons a foutenir, affu- Tean Ï1V. s. 3.  Apoe.*;in 21. Pricra. liom. VI. 4 Coioff. in. i. 5, 6. 140 Pratiq.uk des Vertu* afïbrés qu'a la fin nous ferons plus que vainqueurs: c'eft ce qui nous infpirera la noble ambition d'avoir part a la gloire, a laquelle notre divin Chef eft déja élevé; puifqu'il a promis de faire af/eoir avec lui fur fon tróne celui qui vaincra. „ Sauveur charitable! qui t'es livré volontairement a la mort pour ,, nous racheter de la malédiction éter,, nelle , & qui t'es réduit au plus „ profond abai'ffement pour nous mé,, riter la gloire, fais-nous la grace de nous confacrer fans réferve a faire ta „ volonté. Que tes Préceptes , ton ,, Exemple & les fecours de ton Efprit j, nous infpirent les fentimens d'humi„ lité, de piété, de charité, le déta,, chement des créatures, qui doivent „ diftinguer tes vrais Difciples. Don„ ne-nous que, comme tu es ref,, fufcité par la gloire du Pere , nous ,,'rèjfufcitioris avec toi en nouveauté ,, de vie , & eberebions les cbo fes qui ,, for,t en haut, la oè tu es ajfis d la „ "droite de Dieu. Qu'étant dés ici„ bas vivifiés, reJJa/citét £? affis en„ femble avec toi dans les lieux céles,. tes par une foi vive, & par une espérance ferme, nous puifiions un jour occuper les glorieufes places que tu es allé nous préparer 'dans le „ Ciel. Amen". SEC-  Chretiennis. Secï. VI. 141 SECTION VI. I. Du Jugsment dernier. II. Du Saint Esprit, de fon Office 6? de la maniere dont il opere en nous. III. De i'Eglife Catbolique 6? de la Oimmunion des Saints. IV. De la Remijfton des péchés. V. De la Réfurrection du corps: Réponfe aux objeèlions contre ce Dogme. VI. De la Vie Eternelle, oü Vonjustifie l'équité de Dieu par rapport d l'éternité des peines, rjf oü 1'on prouve combien le pêché eft inexcufable. I Qüasd nous faifons profeffion , x Nadans le feptieme Articce du n Symbole, de croire que Jesus - Christ & vitndra pour juger les vivans &f les morts, Ji nous déclarons que nous fommes fer-c memenc perfuadés, qu'a la fin du Monde notre Seigneur defcendra du Ciel en fa nature humaine. Pour ce qui eft de la maniere & des circonftances de fon avénement, 1'Ecriture nous apprend, qu'il fera ré-^ vélé du Ciel avec les Anges de fa puiffance; c\vx'ü defcendra avec cri d'exborta-i tion fjf voix d'Arcbange, avec la trom-1 pitte de Dieu; qu'z'Z viendra en fa gloire * 6? en celle de fon Pere £? de fes Anges,2: & fera ajfis fur le tróne de fa gloire, & ? que<3 III. Tour- tk. [ugement irnies par :fm'. rhetr.1.7. Theff.IV. atth.XVI. Matth. XV. ji, 1.  142 Pratique des Vertus i ThelT. iv. 14,16,17. t Cor. XV. 52. Tite ii. 13. Aft. XVII. ji, que toutes les nations feront affemblées devant lui, qu'ïi les féparera les uns d'avec les autres, comme le berger fépare les brebis d'avec les boucs; que ceux qui dormem dans le fépuicre , s'évdikront; que ceux qui font morts en Cbrijl refifu/citeront premierement; que ceux qui Jeront encore en Die feront tranfmuès, cf ravis dans les nuées au devant du Seigneur. Ce qui nous inftruit fuffifamment de la glorieu/e apparition du grand Dieu C? Sauveur Jefus-Cbrijl, qui viendra aiors tout bnliant de 1'éclat de fon corps céleite, revêtu de toute 1'autorité que fon Pere lui a donnée comme au Juge univerfel, & accompagné de fes milliers de faints Anges, qui 1'environneront, non feulement pour rendre fon avénement pompeux & magnifique, mais auffi pour être les Miniftres de fa juftice : affis fur fon tröne de gloire il fommera tout le Genre-humain de comparoitre devant fon redoutable tribunal , oü chacun fera examiné févérement fur toutes fes actions. L'Ecriture nous enfeigne, qu'en rejfufcitant Je/us ■ Cbrijl des morts, Dieu a donné certitude d tous les hommes qu'il jugera le monde univerfel par lui. Le juge lui-même nous inftruit dans 1'Evangile de la maniere dont Dieu en agira dans ce grand jour avec fes créatures. St. Paul déclare en termes ex- près,  Chretiennes. Seft. VI. 143 prés , que nous devons tous comparoitre\.. devant le tribunal de Cbrijt; & Sc. Pierre , que le jour du Seigneur viendra, dans leguel ks Ciéux pajjeront avec un 1 brult jïffiant de tempête, fjf les élémens feront dijjous par la cbaleur. Il eit évident par tous ces paffages, que le Pere ] ne juge perform , man qu'il a donr.é tout jugement au Fils; & il ordonna è fes Difciples de prêcber au peuple, £? de té-1 moigner que c'ejt lui qui ejl ordonné de Dieu pour é're le Juge des vivans fcf des morts. II faut obferver ici que, quoique Ie droit de juger apparcienne a Dieu , donc nous fommes les fujets, il a commis Pexercice de fon autorité a cec égard au Fils de Phomme, afin que 1 tous bonorent le Fils comme ils bonorent le Pere , & que nocre divin Sauveur foit publiquement glorifié en la méme nature en laquelle il a foufFert , afin que celui qui pour 1'amour de nous a comparu devant un Tribunal de la Terre, foit par cette raifon établi Juge de tout le Monde ; que lui, qui fut le mé-t\ prifi le rejetti d''entre les hommes, ap. paroifte en la gloire de fon Pere, accompagné du magnifique cortege de miiliers d'Anges ; que lui , qui fut condamné & crucifié pour nous faire abfoudre , ait le pouvoir d'abfoudre ou de condamner touc le Genre - humain. D'ailleurs Jefus-Chrift ayant un corps humain, paroitra d'une maniere vifible; ce iCor.V.io. 2 Pierre II. IQ. ean V. 22. iü. X. 42. ean V. 23. aïeLHI.3.  Jude vs. i Cor. V 144 Pratique des Vertus ce qui convienc aux autres circonftances de ce grand jour, oh touc doit fe palTer a la vue de touc le Monde. Enfin les hommes étant jugés par un Juge de même nature qu'eux, qui a reffenti leurs infirmités, on ne peut demander de preuve plus convaincante de 1'équité du jugemenc, parceque notre Juge connoït parfaitement couc ce qui peuc influer fur nous, excufer ou aggraver nos crimes. Les Anges ne feront pas moins jugés que les hommes au dernier jour: 5-les Anges rebelles font rêfercis Jous l'obfcurité en des liens éterneU jufques au ]ugement de la grande journée: car 1'Apo- i-cre die, Ne favez-vous pas que nous jugerons les Anges , ou que nous ferons affis avec Chrift, & que nous approuverons la fentence qu'il prononcera contre eux? Tous les hommes qui auronc jamais vécu,&ceux qui vivront a la venue de notre Sauveur, feront asfemblés devant lui, les Grands & les Petits comparoicronc devanc te cnbunal de ce Jéfus, que Dieu a établi Juge des vivans & des mores. Ni les richeffes, nile crédit, ni les grandeurs ne delivreront perfonne de la main de Dieu; ni la baffeffe & 1'obfcurité de 1'efclave le plus vil ne pourront le dilpenler cle fe préfenter devant fon Juge, car ils font tous également 1'ouvrage de les mains. 11 n'aura point auffi égard k des  Chretiennes. SeSt. VI. 145 des quahtés & a des circonftances , qui n'ont aucune relation au fond de la caufe, il jugera felon qu'on aura fait en ■ Jon corps, Joit bien, joit mal. Il fera un examen févere de 1'ufage que nous avons fait des talens qu'il nous a confiés: routes les faculcés que nous avons recues , toutes les graces & tous les bienfaits dont nous "avons jouï, tous les moyens & tous les fecours que nous avons eus pour vivre faintement , & pour glorifi-r notre Maïtre par nos vcrtus, nous feront remis devant les yeux , & nous ferons appelles a en rendre compte. N'en doutons point, notre juge nous demandera compte de nos Sens; quel ufage nous en avons fait, fi c'eft celui pour lequcl ils nous avoient été donnés, pour enrichir notre entendement, & régler nos corps; ou fi nous en avons fait des inftrumens de pêché, & s'ils ont fervi a faire entrer la vanité dans nos cceurs. II nous demandera compte de 1'ufage que nous avons fait de notre Rai/on & de notre Conjcience; fi nous avons travaillé aurant que nous le pouvions k les perfectionner, fi elles ont été des guides fideles de nos actions ; ou fi nous avons permis qu'elJes aient été féduites par des principes faux & infenfés , ou réduites en efclavage par nos paffions & nos convoitifes. 11 nous demandera compte de notre Mémoire, Tome I. K fi : Cor. v. ra.  146 Pratique des Vertus Rom. xi1u 14 fi nous y avons amaffé un tréfor de chofes utiles, ou fi nous Favons fait dépofitaire de chofes vaines, frivoles & infrudtueufes. II nous demandera compte de 1'emploi que nous avons fait de notre Tems dans ce monde, fi nous 1'avons employé aux foins légitimes d'une honnête vocation , en en mettant a part une portion convenable pour fervir Dieu plus particuiiérement, & cn ne nous occupant d'ailleurs que d'une maniere innocente & fage; ou fi nous 1'avons prodigué dans 1'oifiveté , au jeu, en divertifiemens, en des converfations frivoles ou criminelles, tandis que nous négligions notre principale affaire. II nous demandera compte de 1'ufage que nous avons fait des biens qu'il nous a accordés de tems en tems pour nous foutenir & nous recréer; fi nous en avons ufé avec actions de graces, fobrement , & avec modération ; ou fi nous en avons abufé en nous livrant au luxe , a la gourmandife , a 1'ivrognerie, & en les faifant fervir a accomplir les convoitifes de la cbair. 11 nous demandera compte de nos connoiffances , & de nos qualités intellectuelles, des avantages de notre éducation, de notre fanté, de nos forces, de nos richefles, de nos honneurs, de notre crédit, de notre réputation , & de tous les talens particuliers par lefquels il nous a diftingués des autres: il  Chretiennes. Stel. VL 14? il examinera fi nous avons employé les avantages donc nous avons jouï a faire beaucoup de bien , & a écre finguliéremenc uciles dans notre généracion ; ou fi nous en avons fait uniquement les inftrumens de notre orgueil & de notre vanité, de notre amour-propre, fi ce n'eft ceux de nos vices & de nos crimes. Enfin il nous demandera compte de toutes les occafions & de tous les moyens de falue que nous avons eus, de tous les confeils fages qui nous ont écé donnés, de touces les éxhortations chretiennes qu'on nous a adreffées; de FEvangile de fon Fils qu'il nous a fait connoitre, de 1'ufage que nous avons faic de fa Parole & de les Sacremens , de toutes les fuggeftions intérieures de fon St. Efpric, pour nous éloigner du pêché & nous porter k la vercu. II examinera fi nous avons employé ces graces conformémenc au buc qu'il s'eft propofé en nous les difpenfanc, fi nous avons faic des progrès & rapporté des fruits proportionnés aux fecours que nous avons eu, ou fi nous avons écé des ferviteurs négligens & inuciles, Nous ferons comptables k notre Juge de tout ce que nous venons d'indiquer, & de plufieurs autres chofes, auxquelles nous ne penfons feulement point. C'eft alors que la fageffe & la juftice de la Providence brilleront aux yeux de touc £2 :-rj.  148 Pratique des Vertu s rtlnivers , en rcndant a chacun felon fes ceuvres. Alors la conduite de rhomme de bien fera jullïfiée & approuvée , & il fera abondamment dédommagé de ce qu'il a (buffert: tout fera pleinement dévoilé & mis dans fon vrai point de vue: la fincérité & la droiturc paroftront dans toute leur beauté: 1'artifice toujours attentif a en impofer fera dépouillé de fes fauffes couleurs, & tous les prétextes feront dévoilés devant les hommes & les Anges, & tout ce qui tend a déguifer la difformité du vice fera mis au grand jour. En un mot , tous ceux qui dans ce Monde employant la fraude & la rufe pour couvrir leurs criminels deffeins , feront convaincus , -a leur honte , que cette vraie fimplicité , qui a été 1'objet de leur mépris & de leurs railleries, eft la véritable fageffe , & que ces indignes décours , qu'ils ont tant eftimé , étoient réellement une haute folie. Quoique nous puimons recueillir de 1'Ecriture , que tous les hommes fubiffent un jugement particulier , entant que les gens de bien pafienc a leur mort dans un état de bonheur, & les méchans dans un état de mifere, cependant les déclarations de notre Sauveur & de fes Apótrcs touchant le Jugement, & les Paraboles qui s'y rapportent , nous renvoient évidemment au  Chretiennes. StcK. VJ. 14» au jugement dernier & univerfel. Ce ne fera que dans ce grand jour que 1'homme entier fera parfaitement heureux ou entierement malheureux, parceque c'eft alors que les corps reflusciteront; cc comme ils ont eu part avec 1'ame aux vemts & aux vices, ils en partageront auifi les récompenfes & les chatimens: ce ne fera quê dans cc jour que le bonheur ou le malheur pourront être juftement proportionnés au mérite ou au démérite des hommes; car les effets de leurs bonnes ou mauvaifes aétions , après leur mort, peuvent contribuer k aggraver leur punition , ou a augmentér leur recompenfe, felon les bons ou mauvais exemples qu'ils ont donnés, les établiffemens utiles & pieux qu'ils ont faits, les coutumes propres k favorifer la corruption & Ie vice qu'ils ont introduites. En ce jour-la la fageffe de la Providence, dans les adverfités que les gens de bien éprouvent dans ce Monde, fera juftifié , & fa juftice p!einement dévoilée paMes peines féveres auxquelles les méchans feront éterneilement condamnés, pour avoir abandonné Ie Dieu de leur falut. C'eft pourquoi ce jour eft appellé particuiiérement le jour du Seigneur. Les feulcs lumieres de la nature nous enfeignent qu'il eft jufte & raifonnabje, qu'il y ait- un jugement a-veK 3 nir.  150 Pratique des Vertus nir. La faine raifon nous dicte qu'il y a une différence effentielle entre le bien & le mal: & c'eft en conféquence de ce principe que le» hommes fe font unanimement accordés a attacher des récompenfes a 1'un & des peines a 1'autre ; & leurs efpérances ou leurs craintes par rapport a un état a-venir dépendent de la maniere dont ils reglent leurs aétions relativement a ces difFérences réelles entre le bien & le mal. Une conduite vertueufe eft accompagnée de tranquillité & de fatisfattion dans la vie prélente, & de la confolante efpérance d'une recompenfe future, tandis que le crime, quelque fecret qu'il foit, eft comme un poids a 1'ame, & la remplit de terreur. Or il eft impoffible de rendre raifon de ces feminiens, fi 1'on n'admet une perfuafion naturellede la certitude des récompenfes & des chatimens a- venir. Deli vient qu'un grand nombre de Païens chériffoient la vertu plus que la vie & tous fes avantages , & qu'ils abhorroient le vice plus que la mort mê^ me. D'ailleurs, les difpenfations de la Providence Divine envers les hommes ne fe bornenc pas è la vie préfente: les gens de bien fouffrenc fouveDt, même pour la juftice, & les méchans fleuriffent & font heureux a la faveur de leurs crimes: il femble donc que, pour décharger la conduite de Dieu envers Thorn-  Chrïtiinnis. Stft. FI. 151 Phomme de Faccufation d'injuftice, il elt raifonnabie qu'il y ait un jugement a-venir , oü les récompenfes & Jes peines foient diftribuées convenablement. Apprknons de-lè que Dieu recompenfera ou punira dans la vie a - venir a proportion du bien ou du mal que nous aurons fait dans notre condition mortelle. Car au dernier jour les degrés de bien & de mal entreront en conudération auffi-bien que la nature & la qualité de nos actions : d celui d qui il ejt l beaucoup donné, il fera beaucoup redemandé; celui qui feme cbicbement, recuHlle- • ra auffi cbicbement, & celui qui feme libiralement, recueillera auffi libéralement. Notre Sauveur nous enfeigne clairement dans la Parabole des talens, que les récompenfes feront proportionnées a 1'ufage qu'on en a fait: celui qui avoit gas,né dix talens , fut établi fur dix villes, & celui qui en avoit gagné cinq, 1 Jur cinq villes. St, Paul affure en termes exprès , que la gloire des Saints 4 aura divers degrés a la réfurrection ; & Jefus-Chrift nous a déclaré lui - méme, que Tyr & Sidon, Sodome £f Gomorrbe 1 feront trailè'S moins rigotireu/ement au2 jour du jugement, que les Pécheurs impénitens, qui ont connu & rejetté les conditions dc falut par ce divin Sauveur. Soyon's donc perfuadés de 1'équité d's voyes de la Providence de Dieu, n'y K 4 ayant ,ucXTI.4t. Cor.IX.*. Luc XIX. S-19. Cor. XV. 3--41. ïitth. XI. L--j4.  55 2 Pratique des Vertus Rora. II. > Mare XII 32. ayant rien de plus propre a conmbuer a i'avancement de la piété, que 1'idée que le plus petit acte de bonté ne demeurera pas fans recompenfe; que plus on eft homme de bien , & mieux on eft qualifié a avoir parta la communion de Dieu; & que plus on eft endurci dans le mal, plus on a a attendre de ;. peines, & plus on s'amajje de colere au jour de la colere cj3 de la déclaraiion du 'jugement de Dim: Et quant d ce jour 8* d I heure , perfonne ne le fan , non pas méme les Jinges qui jont au Ciel, ni auffi le Fils, mais le Pere. Nous devons donc régler notre conduite avec tout le foin & toute la circonfpecnon poffible, & en ne perdant jamais de vue notre devoir, afin que nous puiffions rendre nos comotes avec joie & non a regrer. Nous devons veiller fur nous-mêmes par un fréquent examen, afin que notre conduite dans eet état d'épreuve puiffe être honorée de 1'approbation de notre Juge, quand nou"? comparoitrons devant fon redoutable tribunal. Evitons foigneufement le moindre pêché, parcequ'il n'y en a aucun afléz peu confidérable pour être négligé dans ce jour oh tout 1'Univers fera appellé a rendre compte. Ne nous flattons point de cacher dans le plus profond fecret la moindre infradfion aux Loix de Dieu, puifque routes nos aétions feront alors expofées au grand jour,  Chretiennes. Sed. VI. 153 jour, & rëvélées aux yeux du Monde entier, a notre honte éternelle. Que les medilances & les caiomnies des mechans ne nous découragent point, puifque notre innocence fera reconnue par cului qui ne peut Te tromper dans ï'arrêt, qu'il prononcera en notre faveur. Faifbns valoir tous les talens que la Providence nous a confiés; car nous ne fommes que des adininiftrateurs, qui devons en rendre compte. Soyons fïnceres dans nos paroles & dans nos atlions, parcequ'en ce jourla tous les fecfets des cceurs feront ma. nifeftés. Evitons tout jugement précipité a l'égard des autres, parceque celui qui juge fon prochain , n'ccbappera point au jugement de Dieu. t\biindons en cette forte de bonnes ceuvres, qui feront en ce jour-la des titres pa iculiers de diftinótions, telles q ie fi int de donner a matiger a ceux qui ont faim, de couvrir ceux qui font nuds, parceque notre travail ne fera pas vain 1 c au Seigneur. Soyons humbles & ja'oux :.3fur notre conduite, parceque, quoi ;ue nous ne nous reprochions rien a nousmêmes, nous ne fommes pas pour cela juftifiés , car celui qui nous juge efl le Seigneur. C'eft ainfi que nou1* apprendrons a faire notre paix avec Dieu par une véritable & fincere repentance, enforte que le grand & terrible jour de fa colere ne nous furprenne pas K 5 fan» or. xv.  154 Pratique dei Vertus Trierr». fans être préparés a entrer dans la joie de notre Seigneur. „ Souverain Arbitre du fort de „ toutes les Créatures! qui as ordon- né un jour pour juger le monde uni„ verfel par Jefus-Chrift ton Fils, fais„ nous la grace d'être falutairement „ frappés du compte rigoureux que ,, nous aurons a rendre de nos pen- fées , de nos paroles , de nos ac,, tions, de nos talens, de nos biens, de nos facultés, & de tous les dons „ que nous recevons de ta main libé,, rale. Ne permets pas que nous né,, gligions de profiter du tems agréable & du jour du falut, taudis que ce „ jour eft encore nommé. Pénétre- nous d'un profond refpect & d'une „ crainte religieufe pour notre Juge. Donne-nous d'être fobres & de veil„ Ier dans Pattente de cette grande ,, journée , oh Jefus-Chrift rendra a chacun felon fes ceuvres. Hélas! Seigneur, nous favons que s'il nous ,, jugeoit fur ce que nous fommes, „ nous ne pourrions éviter un arrêt de condamnation, Mais ce qui nous „ raffure & nous encourage, c'eft que „ celui qui fera notre Juge, eft auflï „ notre Sauveur, difpofé a avoir com„ paffion de nous, ayant appris a être feniible a nos foiblefles, par les cho„ fes qu'il a foeffertes. C'eft-la la „ fouitce de 1'efpérance que nous avons „ de  Chretiennes. Scèt. VI. 155 s, de n'êcre pas confondus dans ce for„ midable jour , & que nos eiForts, „ foibles & imparfaits, s'ils font fince- res, ne demeureront pas fans recoms, penfe. Fais-nous la grace, 6 Dieu, j, d'en faire 1'heureufe expérience, „ pour 1'amour de ton Fils bien-aimé. Amen". II. Dans le buitieme Article du Symbole nous faifons profeffion de croire au Saint-Esprit: car jefus-Chnft avoit promis è fes Difciples avant fa mort de leur envoyer le St. Efprit pour les conduire en toute vérité , pour leur annoncer lts cbofes d vemr , & pour le glorifier. Cette promeffe s'accomplit le jour de la Pentecóte, ils furent remplis du St. Efprit. C'eft la troifieme perfonne de la trés-fainte Trinité, diftincte du Pere & du Fils , & qui procédé de 1'un & de 1'aurre; car il eft aDpellé VEfprit de C rifl , l'Efprit du Fils, comme celui du Pere, étant d'une même effence avec eux , & faint par rapport è la divinité de fa nature. Car comme le Fils eft engendré du Pere de maniere qu'il eft un même Dieu avec lui, le St. kfprit aufti procédé de 1'un & de 1'autre, de facon qu'il eft un feul & même Dieu avec le Pere & le Fils. Sa fonétion' particuliere eft , comme nous 1'indique le titre de faint, de nous fanétincr, de renouveller notre nature corrompue, & de ia rétablir dans XIX. Jou*- >IÉE. Ju Saintifprir., Jean SVI. ij.  Ij6 Pratique des Vertuj i Cor. II. 14. a Pierre I af. * dans fa perfudcion & fa dignité primitive, de nous difpofer a recevoir ces vérités , qui ne peuvent fe difarner que fpirituelltment, & qui Jont j'olie d l''humme churnel , en ouvrant nos ceeurs, pour nous rendre attentifs aux chofes qui ont écé écrites par fon infpiration, préchées par les faints hommes qu'il a pouJJ'és; en produifant en nous cetcefoi, qui eft un don de Dieu, & que S eei Eipric divin peuc feul faire nanre; . & en nous donnanc cetce,nouvelle vie, fans laquelle nous ne pouvons enrrer j au Royaume de Dieu , ni avoir part j aux biens promis aux vrais Croyans & réfervés pour eux dans le Monde a-venir. C'eft donc eet Efpric faint , qui rend notre foi éclairée, qui enflamme notre charité , & qui donne de 1'effi- , cace a touc ce que nous faifons & penfons. En effet, c'eft 1'Efprit divin qui nous difpenfe les fecours & les graces dont nous avons be-lbin pour remplir les conditions, de l'accompliffemenc defqnelles dépend le falue, foic en illuminanc notre entendement, lorfque nous recherchons fincerement & avec application les vérités cé'eftes, foic en porcanc nocre volonté vers le bien, & en donnanc un heureux fuccès aux courageu -, efforts que nous faifons pour le pratiquer. Nous n'obcenons ces graces que par 1'ufage des moyens que Dieu  Chretiennes. Se&. VI. \$f Dieu a établis; qui font d'humbles, finceres & fervente* prieres, la fréquente & dévote participation au Sacrement de la Sainte Cene , la lecture & 1'ouïe de la parole de Dieu; ül tels autres acr.es de dévotion, propres a nous faire obtenir les graces que nous follicitons; & nous devons nous conduire a eet égard comme des membres foumis de la Communion des Saints , a laquelle feule Jefus-Chrift a promis ces influeuces du St. Efprit. Si nous nous appüquons conftarnment a nous conduire comme des fujets de ce Royaume, qui n'eft point viandè ni bréuvige , mais juftice, paix cf joie par le Si'. Efprit, notre conv'erfatiöh fera dans les Cieux, & tout notre plaifir fera en Dieu; nos efpérances , nos vceux , nos deflrs feront fixés fur les chofes qui font en haut, & nous vivrons ici bas de cette vie célefte, dont la perfection fera ciaprès notre bonheur dans le Royaume de Dieu & de Jefus-Chrift fon Fils; Car le Pere, le Fils & le Saint-Efpric nous font repréfentés comme cóncourant, chacun féparément, a notre falut ; Dieu a tant aimé le monde, qu'ila en- J voyé fon fils unique; & c'eft par lui que. nous allons par le même Efprit au Pere. Nous ne pouvons douterde la néceflité de eet Article de foi , fi BrJtft faifons attention qu*il eft pris du forfculaire du IJatêmé, que Jéfus-Chrift lui- Roin. XIV. 17. :in Mi 16.  « Cor. VII. i. i Thefr. IV. s. Be 1'EgHn Cathelique Mttth. xvi. 18. »«. II- 47 158 Pratique des Vertos lui-méme a prefcrit. D'ailleurs la foi au St. Efprit tend a exciter en nous le defir des dons & des graces donc il eft Ie principe, de cette nouvelle naiffance dont il eft 1'auteur, qui renouvelle entierement & fpiritualilê nos ames; afin qu'étant toujours conduits par lui, foutenus par fon fecours , & vivant dans une étroite communion avec lui, ; nous puifüons devenir des temples oü il prenne plaifir d'habiter. Nous devons donc travaiiler d nous nettoyer de toute impurtté de cbair rjf d'efprit, pour acbever notre fanclification en la crainte de Dieu, dcnt la volonté eft notre fancïification, & qui dés le commencement nous a élusa falut, étant fanctifiés par le St. Efprit, qu'il envoye pour nous inftruire de fa volonté, & pour nous conduire en toute vérité. III. Nous déclarons dans le neuvieme Article , que nous croyons 1'EgliJ'e Catbolique, la Communion des Saints, parceque Jefus-Chrift a promis de fonder une Eglife, en difant , fur cette pierre je bdtirai mon Eglife; & nous la voyons déja fondée, dans ce paffage des ASte$t . oh il eft dit que le Seigneur ajoutoit de jour en jour d l''Eglife des gens pour être fauvés. Cette Eglife fe reduifoit alors aux douze Apótres , & a ceux qui croyoient en Jefus-Chrift, qui étoient unis enfemble , affidus a 1'ouïe de la Parole, rompant le pain de maifon en maifon,  Chretiennes. Seiï. VI. ifg maifon, & préfentant leurs prieres en commun è Dieu. On peut donc dire que tous ceux qui embraffent 1'Evangi» le & qui y obéiflent, forment une feule Eglife, entant qu'ils font membres du même corps, & que par un même Efpric ils font unis a un feul Chef, qui eft Jefus-Chrift, & qu'ils ont le même fondement , la principale pierre étant Cbrijl: profeffanc la même foi, qui eft unique, participant aux mêmes Sacremens, qui font la livrée du peuple de Dieu ; enforte que, quoiqu'ils foient plujieurs, ils font unis par un feul Batême, & font un feul pain éf un J'eul corps. C'eft ainfi que nous fommes unis auiïi , étant appellis d une feule efpirance de notre vocation, & nous devons être ] un, en gardant l'uniti de l'ejprit par le Hen de la paix, unis fous une même ] difcipline & fous un même gouvernement , & conduits par les mêmes Pafteurs è la vie éternelle. Si, par la foibleffe & la corruption humaine & par les artifices de Satan, 1'unité de 1'Eglife vifible n'eft pas telle qu'elle devroit être a ces derniers égards , il eft certain néanmoins que tous les vrais Croyans font, ont toujours été & feront toujours conduits par celui qui eft feul le bon Berger, leur Pontife éternel , leur Roi , leur Prophete, a ces demeures céleftes, oh la joie , la paix, 1'amour, la Concorde, Ephéf. li. 20. EphéT. IV. 5. 1 Ter. ï. 1;. Ephêf. V. 4. EphéC V. 3.  Mattb. XVI. 18. Matth. XXVUI.20. % Tiraoth II. 19. Héb. XII. 14Ro: . VUL 2li, 29. 160 Pratique des Vertus dc, 1'unké, le bonheur & la gloire ne finirom jamais. Fondés fur les promeffes de notre Seigneur, que les portes de l'Enfer ne prévaudront jamais contre fon 1' ;life, qu'il fera avec J'es difciples jufques d la fi-< du Monde, il eft raifonna- ; Die de croire que cet e Eglife exifte, qu'elle a toujours exifté depuis le tems des Anótre* , & qu'elle fubfiftera jufques a la fin du Monde. Cett e Eglife peut a jufte titre être 1 appeilée Sainte, entant qu'elle eft fé- j paree du feite du monde par une voca- | tion fainte , qu'elle a des inftitutions \ faintes, établies de Dieu lui - même, & ] que ceux qui la compofent,font obligés \ particuiiérement, en fe nommant du • nom de Qbrijl, de fe retirer de l'iniquité, & de recbercbsr la [anEtification, fans laquelle nul ne verrei le Seigneur , étant 1 prédejlinis d être conformes d Vintage de \ Cbrijl, & cppellés efficacement, élus, Jan&.fiés , & jujiijiés , & devant être . ;parfaitementi faints , en quittant cette vie. Les premiers Peres n'entcndoient d'abord par PEglife Catholique , que PE ;bfe en général, enrant que compoféede toute? les Egiifes particulieres. C'eft en ce fens cue nous appellons, par exemple, les Epitres de St. Pierre Catholiaues , parcequ'elles s'adreffoient a PEglife en général. C'eft encore ainfi qu'on appella dans les fiecles j fuivans  Chretiennes. Scft. VI. 161 fuivans Egüfes Catholiques, les lieux confacrés au Service Divin, oh toutes les perfonnes de 1'un & de 1'autre fexe d'un certain diftridt s'alTembloienc, pour diftinguer ces Temples des Chapelles fondées par les Moines. Quelquefois auffi on défigne par le titre de Catholiques des Egüfes nationales, comme faifant profenion de la vraie foi avee le refte de 1'Eglife de Dieu, par oppolition auxSchifmatiques & aux Tiérétiques. D'ailleurs 1'Eglife Chretienne peut être appeSlée Catholique, entant qu'elle eft répandue parmi toutes les Nations, ou que du moins elle recoit dans fon fein tous les Peuples fans diftinction , & qu'elle n'eft pas bornée a une feule Nation , comme Ia 'Religion Jud Tque , & que fon Culte 'n'eft pas attaché a un lieu particulier, comme les Sacriflces anciens & tout le Culte Lévicique. Nous croyons que c'eft a cette Eglife que Dieu a ajouté & ajoutera toujours ceux qui doivent être fauvés; & comme il n'y eut que ceux qui.étoienc dans 1'Arche qui échapperent au déluge , nous n'avons aucune. raifon de penfer qu'aucun de ceux qui font hors de 1'Eglife Chretienne, feront fauvés de la colere a-venir, & obtiendront la gloire promife aux Saints. Nous devons donc travaiiler avec tout le foin pofïible k n'en, être pas excius, foit en Tomé 1, L en-  De 1» Cc in unie 111 i Saint?. 162 Pratiq.uk des Vertus encourant juftement fes cenfures, par des péchés fcandaleux , dans lefquels nous perfiftions , ou en tombant dans 1'Apoftafie , 1'Hérélïe , ou le Schifme. Souvcnons-nous toujours que cette Eglife écant fainte, nous ne pouvons en être des membres vivans, a moins que nous ne foyons faints; envain fans cela en fommes-nous extérieurement membres, bien loin que cette qualité nous foic avantageufe , elle ne ferc qu'a aggraver notre crime , puilque 1'rigHfe Catholique eft la communion des Saints. . . m. A prendre le terme de Saints dans '« un fens général, il déflgne tous ceux qui ont été batifés, qui profeffenc la Eoi Chretienne, & qui font les membres vifibles de 1'Eglife de Jefus-Chnlt. Ec comme le bon grain croic avec 11vraie , les Saints ont extérieurement communion avec les Hypocnces dans la même Eglife: les uns & les aucres recoivcne le même Batême, mangent du même pain, boivenc du même vin, a la table du Seigneur, felon ion ïnlti- ■ tution; ils écoutent la même doctrine : & profeffenc excérieuremenc la même : foi ; mais ils ne parcicipenc pas H la 1 même grace falucaire, ni a cette même : foi qui eft opérante par la cbarüi , tu 1 au renouvellcment d'efprit & de cceurr du vieil- homme. La profeffion que nous faifons de. r croire:  .Chretiennes. Se6. VU io"j (croire la Communion des Saints, nous ; oblige a travaiiler a atteindre le plus haut degré de fainteté qu'il nous eft ipoffible, parceque nous devons palTer de deffous la puiffance de Satan fous celle de Dieu, fans quoi nous ne pouvons avoir notre héritage avec ceux iqui font fanctifiés en Jefus-Chrift. La profeflion de eet Article doit encore infpirer è tous les vrais Croyans la plus jvive reconnoiftance pour Dieu, qui les a admis dans fa communion, les a rendus participant de fa nature divine , &: les a choifis pour habiter les demeures céleftes, féjour d'un bonheur éternel. Cette profeffion doit auffi enflammer leur charité les uns pour les autres; car s'il eft naturel d'avoir un amour fraternel pour nos freres & nos fceurs felon la chair, nous devons a bien plus forte raifon avoir la plus tendre affection pour ceux qui' nous font unis par une plus noble relation, qui fonc nés de nouveau avec nous par une même naiffance fpirituelle, qui vivent de la méme vie fpirituelle , & qui font conduits par le même Efprit; enforte que fi nous devons faire du bien è tous les hommes , nous fommes obligés furtout d'en faire a ceux qui font avec nous les domeftiques de la foi , les membres d'une même communion, <5c qui participent-aujp mêmes privileges, L 2 aux Pierre 1.4.  De 1» Re- miffion des Péchés. 164 Pratique des Vertus aux même» avancages, & aux mêmes promeffes que nous. IV. Dans le dixieme Article nous faifons profeflion de croire la RemiJJlon des péctés. II faut donc rechercher quelle eft la nature du Pêché. II confifte a nous laiffer entrainer par quelque defir, paflion ou intérêt, k ce qui eft en foi injufte & illégitime, è faire ce que notre Confcience nous dicte être contraire a la volonté de Dieu,connue par la Raifon ou par la Révélation; , contraire a la vérité, la juftice, ou la', charité. II eft évident par - la, que le i pêché, confidéré cn lui-même, & indé- ■ pendamment de fon oppofition obftinée 1 a ta volonté révélée de Dieu, eft fou- ■ verainement déraifonnable & inexcufa- ■ ble. Pécher, c'eft agir contre la con-' venance morale des chofes, contre ceti ordre éternel, cette équité, que Dieu. a établi dans Ia conftitution primitive: de la Nature ,contte les lumieres de las Raifon, le diétamen de la Confcience, le jugement dépréoccupé de notre Ef-" pric, le fentiment unanime de tous les' gens fages & vertueux, & même con*i tre celui des méchans eux-mêmes; contre toutes les notions naturelles quei nous avons des attributs & de la volon-i té de Dieu; le Pêché détruit le bomi heur du Genre-humain , altere notrr fanté, la paix de notre ame, & donna atteina  Chretiennes. Secl. VI. 165 )J atteinte a notre réputation panni les i perfonnes fages & raifonnables. I] af;| fujettic notre raifon aux afFeiftions les I plus balles, a des appétits déréglés óc 1 brutaux , a des paffions honteules ; il A nous rend coupables & fujets a la pei» ne que 1'ofFenfe mérite juftement de la I part du Lé^ifhteur, cc nous ne pou- ■ vons être affranchis de cette peine que I par la fatisfaétion de Jefus-Chrift. I t 9-VE ce foic en vertu de cette fatis- ■ rattton que nos péchés nous font parI donnés, c'eft une vérité fondée fur les I paffages exprès de 1'Ecriture , qui fe I rapportent a ce fujet, & nous difent, I que fans epfufion de fang il ne fe fait point I de rimiffton ; qu'en la confommation des '■ \i fiecles Chrift eft apparu une feule fois, I pour l'abolition du pêché par le facrifice I de foi-même; que par fes meurtriffures I nous avons la guérifon; que fon fang eft 1 rif répandu pour plufieurs en rimiffton des^ mpéctés ; que nous avons rèdemption par i $ fon fang; la rémiffion des cffenfes, felon \ les richeffis de fa grace. Cette doctrine I n'eft point contraire a ce que 1'Ecriture iö nous enfeigne ailleurs, que 1'amour de if Dieu pour les horomes 1'a engagé a -fienvoyer fon Fils au Monde; il les a I aimés & a eu compaffion d'eux cn les I confidérant comme fes créatures , qui I étoient miférables : & comme ils 1'an.voient offenfé , óc qu'ils étoient pécheurs, il étoit digne de fa miféricorde Li de Héb. ix. 12, 20. Eftïe -III. 5. m«tth. xvi. 28. phtf. i. 1  Rom. iii. 22. Galat. UI. 22. j65 Pratique des Vertos de trouver un facrifice proportionné a fa juftice infinie & a ce qu'exigeoic fa gloire. L'assurance que nos péchés ont été effacés par le iang de Chrift , eft donc le centre des confolations du Chretien; car tous ont pécbi, & J}nt entiérement privis de la gloire de Dieu; il a même tout enfermi Jous le pêché, & s'il ne nous avoit lui-même montré la route du bonheur, nous aurions été toujours en proye aux allarmes par le fentimeut de notre crime, & par la crainte de la colere de Dieu. Mais la doctrine de la rémifiion des péchés eft pour tous les Croyans la fource des {dus pures confolations, & la preuve a plus certaine de la bonté de Dieu, qui a concilié ainfi la miféricorde avec la juftice , & nous a gratuïtement ramis uue dette , que nous n'aurions jamais été en état d'acquitter. C'eft ce qui doit nous infpirer le plus ardent amour pour notre Pere Célefte, qui a livré fon Fils a la mort pour nous; c'eft ce qui doit exciter en nous la plus vive reconnoiffance pour un Sauveur, qui eft devenu fils de 1'homme, pour nous rendre enfans de Dieu ; c'eft ce qui dóit nous faire fouvenir fans cefle, que nous ne fommes plus a nous-mêmes , & que nous avons été achetés au plus haut prix, par 1c fang de Jefus-Chrift. Il  Chretiennes. SeS. VI. 167 Il ne délivre néanmoins perfonne de ]a peine du pêché, qu'il ne foit auparavanc affranchi de la fervitudedu pêché; d'oh il s'enfuit que ceux qui font encore affujetcis a fon empire, ne doivent pas s'attendre a être affranchis de la peine. A la vérité Chrift s'eft offert en facrifice propiciatoire, en oblation parfaite & fufüfante pour les péchés du Ivlonde; mais fon but n'a pas été que tout le monde,ni perfonne en particulier foit déchargé de la peine , abfolument & fans condition; mais feulement que tous ceux qui , par une véritable repentance renoncent au pêché, & deviennenc juftes , obtiennent la rémifCon & foient réconciliés avec Dieu; car il n'eft pas mort pour affurer aux hommes la liberté de pécher, mais pour les retirer de toute iniquité. II eft vrai que Jefus-Chrift a mis en lumiere *t la vie &f l'immortalifé , & qu'il leur a ouvert 1'entrée au Royaume de Dieu; mais ce n'eft point pour que ceux qui ne font pas renouvellés ét régénérés, aient part a ce bonheur fpirituel , & foient admis a joui'r de ces récompenfes 'pures & faintes; c'eft afin que ceux qui ont rorapu avec le pêché par une vraie repentance, & <|ui ont renohcé a 1'miquité pour vivre a la juftice, affifrent éternellement zafejlin des nóces de l'/lgneau. Car autant qu'il eft impoffible que Dieu ceffe d'être faint, & que L4 la m. I.  i68 Pratique des Vertos iCor.VI.i Pricro la pureté de la nature divine puiffe compatir avec le pêché, autant eft-il impoffible a un pécheur d'obtenir fon pardon, & d'être admis dans le Royaume des Cieux , tandis qu'il perfévere ».dans le vice:' Ne vous abufez point, dit St. Paul, ni les impurs, ni les idol.aires, ni les adulteres, ni les efféminés, ni ceux qui babitent avec les mdles ,. ni les 2arrons, ni les avares, ni les ivrognes, ni les mèdifans, ni les ravijjeurs, c'eft-adire aucuns vicieux , qui vivent dans 1'habitude de quelque pêché que ce foit , n'bériteront le royaume des Cieux. Enforte que puifque Dieu n'a promis la rémiflion des péchés , que fous les 'conditions d'une vraie foi, d'une fincere repentance, & dü pardon accordé a ceux qui nous ont offenfé; nous devons travaiiler tous les jours a mourir au pêché & a vivre a Dieu , «St être difpofcs a pardonner a nos prochains, comme nous defirons d'obtenir notre pardon. , „ Esprit-Saint! qui es un avec le „ Pere & le Fils , nous te fupphons „ humblement de nous faire part de „ tes dons & de tes graces. Eclaire „ nos efprits & nous conduis en tou„ te vérité , purifie nos cceurs , en„ flamme notre charité: veuille nous „ laver, nous fanclifier, noas juftifier, „ afin que nous connoifïïons par une „ heureufe expérience , que bienbeu. ' „ reux  Chretiennes. Secl. FI. 169 „ reux eft celui dont la transgreffion eft „ quittée. dont le pécbé eft couvert, & d qui Dieu n'impute point Jon iniquité; „ que nous fenüons,que nous avons té„ demption par le fang de Cbrijl, la rirnif„ /ion des offenjes , felon les ricbejjes de ,, la grace de Dieu; qu'étant Jon ouvra,, ge, créés en Jefus- Cbrijl pour les bon„ nes ceuvres, nous nous y appüquions avec zele & avec foin , & démon„ trions par-la que nous fommes véri„ tablement membres de cette Eglife fainte, que notre Sauveur aracbetée „ par Jon fang , & que nous ayons communion avec les Saints; fcelle„ nous pour le jour de la ridemption „ éternelle , & ne permets pas que j, nous ayons jamais le malheur de te ,, contrifter. Forme en nous ces fain„ tes difpofitions, qui nous font né,, ceflaires pour être un jour admis „ dans la fociété des Anges & des Ef„ prits bicnheureux , qui vivent & „ regnent avec Jefus-Chrift éternelle„ ment. Amen". V. Dans Vonzieme Article du Symbole nous faifons profeflion de croire la Rifurreclion de la Cbair: nous devons croire comme une vérité eertaine, que comme il eft ordonnê d tous les bommes de mourir une fois , ils doivent aufli un jour reffufciter. C'eft -IJ une doctrine parfaitement conforme j la Raifon, & aux idéés naturelles que L s n0U! i>r. xxxn. t. :oioir. 1.1 j. Eph. II. 10. Atft.XX.a«. Eph. IV. 30. XV. JouR- Nte. De la Ré. furreclion de la Chair. Héb. IX. 27.  Qu'elle e poflible. 170 Pratique des Vertus . nous avons des perfeétions de Dieu, & c'eft ncanmoins ce qui a fourni aux anciens Puïens & aux IncréUules de nos jours une de leurs principales objections contre la Religion Chretienne, fous prétexte que la réfurrection d'un mort eft impoffible. Les Païens ont cru qu'il étoit contraire au cours de la Nature, qu'aucune chofe parfaitement corrompue puilTe retourner a fon premier état, ou qu'un corps véritablement mort puiffe reprendre vie. Et il eft vrai qu'ils n'ont jamais découvert dans la Nature aucune caufe ou opération qui ait produit ou qui ait pu produire eet effet; enforte que nous ne pouvons connoitre par les lumieres naturelles, que Dieu ait delTein de reffufciter les morts: c'eft-lè une chofe qui dépend entiérement de fa volonté, & qui ne peut par conféquent être connue qu'autant qu'il s'en explique luimême. Mais d'autre cóté , cette doctrine étant révélée, n'a évidemment rien de contraire a la Raifon. C3r nous ne devons pas tant juger de la poffibilité des chofes, par le pouvoir de la Nature, que par la puifiance de Dieu. t Cependant il eft prouvé par la Création, qu'il eft auffi aifé è Dieu de reffufciter un mort, qu'il lui a été de créer & de former 1'homme au commencement; le récabliflement d'un corps  Chretiennes. Sttï. VL 171 corps réduit en poudre , quelque difperfées qu'en foient les parties, fuppofe moins de puiffance, que la création de toutes chofes de rien & a fon feul commandement. J e n'ignore pas qu'on fait ordinairement une objection, qui femble d'abord embarraffante & donner atteinte a cec Article de notre foi: comment, dit-on, chacun pourra-t-il a la réfurrection avoir le même corps, puifqu'il y a des corps qui ont été dévorés par les Antropophages, qui vivent de chair humaine, ou par des poiffons, qui a leur tour ont fervi de nourriture ? car ces corps fe font convertis dans la fubftance de ceux qui s'en font nourris. Pour éclaircir cette difHculté, remarquons que notre corps n'eft pas toujours le même, qu'il eft quelque chofe de fuccèffif ;il perd continuellement de la matiere dont il eft compofé, & il en acquiert de nouvelle, enforte qu'il eft prouvé par Pexpérience que notre corps change fréquemment, & que celui que nous avons eu a un certain age n'eft pas moins a nous, que celui que nous avons lorfaue la mort nous mee au tombeau : d'oü il s'enfuit , que li une portion de la matiere, qui eft entree dans la compofirion de notre corps, en quelque tems que ce foit, reffufcité, & conftitue un corps humain, il ne fera pas moins a nous & le même que  i Cor. X\ 36, 3713 172 Pratique des Vertus que nous avons eu, que celui dont 1'arae a été féparée a notre mort, Cette réflexion réfout pleinement la difficulté propofée , puifque le corps que ceux a qui il arrivé d'être dévorés, ont cu avant eet accident» n'eft pas moins le leur, que celui qui fert de nourriture a céux qui les dévorent. D'ailleurs, comme chaque grain de froment contient un germe imperceptible, oh fe trouve renfermée la plante qui doit naitre, qui fe développe en fon tems, & fe montre lorfque le refte du grain eft corrompu , nous pouvons concevoir que notre corps mortel & corruptible n'eft auffi que 1'enveloppe de quelque germe ou principe caché, qui fe développera a la Réfurrection , & paroitra dans fa forme naturelle, & en ce cas-la les corps ne pourront être confondus: ce n'eft donc pas fans une '• raifon grave qué St. Paul employé cette comparaifon, & que les anciens Peres en ont fait ufage. Si nous faifons même attention a ce qui fe paffe dans la Nature, & aux changemens que chaque chofe fubit, Ja réfurrection doit nous paroitre trés - probable. La Nuit fait difparoftre le Jour, qui meurt pour ainfi dire, & qui renaft le lendemain: 1'Hyver fait mourir en quelque facon l'Eté,la Terre fe couvre pour ainfi dire de morts; mais au Printems toute la Nature reprend une nouvelle vie & fleu-  Chretiennes. Se8. VI. 173 fleurit: le grain enféveli dans la terre & corroropu, revit & fe multiplier penferoDs-nous donc que 1'homme, qui eft le maftre de toutes ces chofes qui meurent & renaiffent pour lui, demeureroit pour toujours dans les liens de la mort, fans fe relever jamais? Quelque impoflible que cela ait paru k la plupart de* Parens, quelques-uns des plus fages ont penfé autrement fur ce fujet (a). < Mais fi nous confultons 1'Ecriture bainte, nous trouverons que la Réfur-Pa redtion du Corps y eft clairement en-T' ieignée, & que Dieu en a donné des exemples pour nous convaincre pleinement: Je/ais, dit Job, que mon Ré- T dempteur eft vivant, & qu'ü demeurera •< le dernier jur la Terre, & encore qu'après ' ma peau on ait rongé ceci, je verrai Dieu de ma cbair, je le verrai pour moi & mes yeuv le verront £? non un autre Le Prophete Daniël nous dit que plufieurs d de ceux qui dorment dans la pouffiere de la terre , fe réveilleront, les uns pour la vie éternelle & les autres pour des opprobres & We infamie éternelle. David témoigne fa foi a eet égard, en diiant, ]e verrai ta face en juftice , jeferai rajfafié de ta reffemblance , quand je (a) V»y. Grotius Traité de la Vérité de la Refiere! 1728. NWe 2°' & 27'- Edit' d'A"" Prnuvée, r l'Aucien flamtn:. )b XIX. j aö, 27. 111. XII. a. XVII. iS  ' i Rois XVII. 20, 21, 22. ■ aRois iv. 35- a Rois XIlI. 21. Var leNm vemi ïtfla ment. Matth. XXU. 31 , Mat h. X. 2t>. 174 Pratique des Vsrtus ie ferui réveillé. On peut encore con." iulter Efaïe Chap. XXVI. 19. & Ezécbiel Chap. XXXVII. Que fi ces preuves ne fuffifenc pas, les Faits dépoferont en faveur de la Réfurrection: Dieu exauca Elie, lorfqu'il lui adreffa fa priere pour que l'ame du fils de la veuve de Sarepta, qui étoit mort, revïnt en lui: EUJée reffufcita le fils de Ia Sunamite ; & Ie pouvoir qu'il avoit è eet égard, ne mourut pas même avec lui; car un homme , qu'on alloit enfévelir, ayant été jetté dans le fépulcre de cc Prophete, ayant touché fes os, revécut £ƒ [e leva fur fes pieds. Si nous ouvrons 1'üvangile, nous y trouvons d'abord eet argument frappant, par lequel Jefus-Chrift. lui-même réduifit les Sadducéens au filence: Qudnt d la réfurrection des morts, n'avezvous point lu ce dont Dieu lui-méme vous a parlé, difant, je fuis le Dieu d'Mra' ham, d'ljaac rjf de Jacob: or Dieu n'eft pas le Dieu des morts, mais des vivans: ce raifonnement étonna toute la multitude, & ferma la bouche aux Sadducéens: & s'il ne frappe pas & ne réduit pas au filence les Incrédules de nos jours & les Sociniens , il faut qu'ils foient plus obftinés & plus endurcis que les anciens Sadducéens, qui n'eurent rien a repliquer a une preuve fi décifive de la réfurrection. Ailleurs il apprend a fes Difciples a craindre celui qui  Chretiennes. SecTe. VI. 175 qui peut perdre le corps 6if l'ame dans la gebenne: mais fi le corps peut être expofé a des tourmens dans la gehenne, il faut qu'il reffufcité auparavanc, & qu'il foit réuni a fon ame, avant que .de paffer dans eet état de peine. II promet de recompenfer au jour de la réfurrection des juftes ceux qui auront foulagé les pauvres , les malades & tous ceux qui foufFrent. II déclare en x termes exprès, que l'beure viendra, en Haquelle ceux qui font dans les fépulcrts \ enlendnnt fa voix cif fortiront, ceux qui auront bien fait 'en réfurrection de vie, if ceux qui auront mul fait , en réfurrection de condamnation. Il s'appelle lui-même la réfurretlion £«f 'la vie; &J« nous lifons dans 1'Apocalypfe, que la ,mer rendit les morts qui étoient en elle, 2 que la mort & le fépulcre rendirent les morts qui étoient en eux , pour être jugés felon leurs asuvres. Et St. Paul, plaidant fa caufe devant Felix, déclare ouvertement, qu'il efpere que la rél'ur-a reciion des morts, tant des juftes que des 1'. injujles , arrivera. Quelques Philofoph -s le regarderent comme un homme qui annoncoic des Dieux étrangers, paree qu'il leur annoncoit Jéfus (f la Ré- a futreéfion. Ce méme Apótre enfeigne, 1? que nous comparoürons tous devant lezC tribunal de Cbrijl , afin que cbacnn emporte en fon corps , Jelon qu'il aura fait ou bien ou mal; & que té Seigneur Jé- r jus V' Matth. XV. 35,30. Jean '. 28, 29. an xi. 25. Apoc. :x. 13. fh XXIV. ft. XVII. or. V. 10. hilipp. . 21.  iTbeff. IV. 16. i Cor. XV 12, IJ. 1 Cor. XV. 19. Matth. • IX. 2$. Luc VII. ij Jean XI. 39 > 43 = 44 176 PHATIQJOE DES V£RTUS Jus transformera notre corps vil , afin qu'il Joit rendu conforme d fon corps glorieux. 11 apprcnd aux Theffaioniciens de quelle maniere fe fera la Réfurrection, & que ceux qui font morts en Cbrift rejfujciteront prtmierement; & il prouve .aux Coiinthiens notre réfurrection par celle de Jefus-Chrift. Tous Ces pafiages démontrent évidemment que dés le commencement du Chriftianifme le dogme de la Réfurrection a été regardé comme un Article de foi efientiel, qj que c'efc encore 1'efpérance des Fideles; car fi les morts ne rejfufcitent point, les Chretiens Jont les plus mijérables de tous les bommes.' Ce qui confirme cette doctrine, c'eft que notre Sauveur 1'a prouvée par des faits ; il reffufcita la fille du principal de la Synagogue: le fils unique d'une •veuve de la vïlle de Naïm: Lazare fon ami, qui étoit mort & enféveli depuis ' quatre jours. Et ce qui 1'emporte lur tous ces exemples , c'eft la Réfurrection de Jefus-Chrift lui-même, qui a démontré ü hautement fa puilTance & fa divinité. II eft donc inconteftablc que les morts reffufciteront. Cette Réfurrection fera univerfelle ; tous les hommes , dont les corps ont été mis dans le tombeau , reffufciteront, tant les juftes que les injuftes. Il réfulte de-la que la folie de ceux qui n'ont d'autre reffource que 1'Athéifme <  Chretiennes. SeEl, VI. i7? - théifme & 1'fréligion , eft au defïlis de toute expreffion , & furpaffe tout ce que 1 unagination peut fe reprélénrer. Car quel eft 1'état d'un tel homme , Jorique D:eu prend fon ame? Peut-il être fur qu'il n'y a point de Dieu? Ou peut-il fe convaincre Kr.même qu'il n'y a point d'état a-venir? L'incrédule le plus obltiné n'a jamais prétendu avoir de demonflration fur ce fujer; cc fUp. pofé qu'il 1'eüt, toute la confolation, 'toute 1'efpérance qu'il pourroit avoir, leroic celle des brutes, Pefpoir de pétir comme s'il n'av0it iamais exiftéi Car quelle efpérance l'incrédule peutJl nournr, quand Dieu, ou, pour pariet avec lui, le Sort ou le Hazard Ie pnve de la vie? Quel eft le fondemenc fur Iequel il ferepole? Son efpérance n eft tout au plus que comme une toile d'araignée, ou comme la pouffiere que le vent chafTe de defTus la terre. ba prorpérité & fa joie n'eft que pour un moment , & l'adveriiié doit naturellement le jetter dans le défefpoir. Peut- on attendre quelque confolacioa dun Hazard aveugle? E: quelle reslource peuc efpérer dans I'affliaion un nomme qui ne croit point que toutes chofes foient gouvcrnées par une Intelligence fage, qui dirige tout pour notre bien ? Lks corps des yrais Chretiens, fujets a préfent aux douleurs, aux ma'aTorne I. m die  Matth. XXÜ. 3» t Cor. XV. 42' 178 Pratique des Vértus dies & a la mort, ne mourront plus; ils deviendront comme les Anges , immortels comme eux, & par conféquent ils feront a couvert de tant d'accidens facheux, auxquels ils font a préfent expofés: car la récompenfe étant éternelle, le fujet qui y a part doit être éternel aufli : c'eft ce qui fait dire a 1'Apótre, il eft femè corrupiible, il reffufcitera incorruptible. Les corps des Juftes, vils & corruptibles a préfent, fujets a rinfirmité & a la difformité par leur nature , reffufciteront glorieux, brilleront comme le Soleil, & feront rendus conformes au corps glorieux de notre divin Sauveur: ces corps affujettis a préfent a la fatigue, a la foiblef. fe , au déclin, fe releveront agiles, vigoureux & adtifs; ils feront en état de fuivre 1'Agneau par-tout 011 il les conduira; & leur force fera fuffifante pour les conferver toujours dans le même état, fans aucun affoibliffement & fans la moindre al'tération: le corps tft femi infirme , il rejjufcitera plein de force : animé a préfent par les efprits animaux , il fera alors animé par le Saint-Efprit; il fera perfedtionné & rendu propre h fervir d'organe a nos < ames ; ü eft femè corps animal, il ref' fufcitera corps fpirituel. A 1'égard des corps des Méchans, Hs feront rendus propres a fouffrir les 1 peines éternelles, qu'eux-mêmes fe font  . Chret ie n n e s. Se<$. VI. 17c font attirées; ils fouifriront h jamais, lans être confumés, 1'exécution de ce terrible arrêt; allez, maudits, au ha éternel. Notre foi fur eet Article doit nous engager a nous refpecter nous-mêmes, & a ne pas fouiller nos corps par des plaifirs fenfuels & brutaux, mais a les préparer par Ia pureté & par la fobriété, è la gloire & è la félicïté auxquelles ils font deftinés. Elle doit encore nous foutenir dans les maux & les infarmités, auxquelles nos corps font fujets dans cette vie, puifque lorfque nous les reprendrons , ils ne feront plus expofés aux douleurs , aux maladies, 111 a la dilTolution , car la mort Jera engloutie en mtloire. L'efpérance de la réfurrection doit nous confoler de la perte de nos parens & de nos amis , qui ne périffent point, mais qui dorment, & qui fe réveilleront au dernier jour dans un état de perfeétion «Sc de gloire. Elle doit auffi nous engager, non feulement a faire nous-mêmes des progrès dans Ia connoiffance lalutaire, mais è contribuer, autant quil dépend de nous, è ceux des autres; h nous oppofer au vice & a encourager la vertu, furtout parmi ceux avec lefquels nous avons des liaifons damitié, ou fur lefquels nous avons quelque autorité. Notre foi k eet égard nous armera nous-mêmes contrö M 2 lei Matth. xxv; 4IJ 1 Cor. KV. tét  Aét. XXIV lö. Priere. i Cor. XV 20. 1 ThelT. I\ 4- Uom. VI. ij» 180 Pratique des Vertus les frayeurs de la mort, puifque nous fommes affurés que nos corps, après avoir été réduits en poudre, & après avoir été la proye des vers, revivront è la réfurrection générale, feront changés & deviendront des corps glorifiés en vertu des promeffes & par la puiffance de Dieu. Surtout cette foi nous excitera a travaiiler a avoir une conjcience fans reproche devant Dieu £ƒ devant les hommes, pour ne pas nous voir exclus de la bienheureufe immortalité , tant du corps que de i'ame, que notre divin Sauveur a promife a tous ceux qui auront perfévéré dans fon fervice pendant tout le cours de leur vie mortelle. ,, Nous te béniffons, 6 Dieu! de „ l'efpéfarjce d'une bienheureufe réfurrection que tu nous as donnée „ par Jefus-Chrift ton Fils bien-aimé .,, notre Sauveur , qui par Ja réfurrec-^ ,, tion a été fait les prémices de ceux qui „ dorment. Fais - nous la grace d'y ré„ pondre par la pureté de notre goüt, de nos inclinations , & par la fain„ teté de notre vie: Que pojfédant 110• „ tre vaijfeau en fanStification öf en bon„ neur , nous évitions avec foin de „ faire de nos membres des injlrumens d'iniquité. Que l'efpoir de reffufciter ,, un jour avec des corps aftifs, pleins de force, dégagés de toute paflion „ terreftre , incorruptibles & immorJStelss  Chretiennes. Se&. VI. i8r »j tels, nous foucienne dans les maux „ auxquels nous fommes expofés ici „ bas , nous confole dans nos afflicsi tions, nous muniffe contre les „ frayeurs de la mort: Que nous net- n „ toyant de toute impureiè de cbair £P „ d'ejprit, & te préjentant nos corps en r< „ Jacrif.ce vivant , faint agréable ,u „ nous puiffions nous affurer que ton „ KJpm qui a rejjufcité Jefus des Rn „ morts, babite en nous, & qu'un jour"„ ce menu Efprit re (fufcitera nos corps „ mor tels & les rendra conformes aum „ corps glorteux de notre bienhcureux"1„ Sauveur, au nom duquel nous t'in„ voquons & nous te demandons ces „ graces. Amen". VI. Nous faifons profeflion dans lcXv douzieme Article du Symbole , de^ croire quü y a une vie éternelle , uneDe ; vie qui n'aura jamais de fin , & pour^" j laquelle font deftinés tous ceux qui ' «"uicteront, les méchans comme les bons. Ainfi, quand nous lifons que '! les mechans feront détruits & qu'ils 1 penront, qu'ils mourront pourfamais, f no,,Jrs nre devons pas entendre'par-la I quits feront anéantis, mais qu^ils fei: ront pnvés éternellement de la préfen: ce & de la faveur de Dieu, condamnés , fans retour a un état demifere, d'angoifle , de remords & de défefpoir: qu ils Icront tourmentés de ce ver qui ne meurt point, dans ce fm Sui ne sèM 3 teint Cor. VII. ra. XII. m. VIII. lipp. III. t. JOUR- ia Vie nclle.  * Tim, I. io, 182 Pratique des Vertus teint point. Mais les juftes feront élevés au plus haut degré de perfection dont leur nature foi: fufceptible , ils participeront a la gloire que le Pere a donnée au Fils, & ils feront un, comme le Pere & le Fils font un. En effet la vie &f l'immortaliié que Jefus-Chrift a viije en lumiere par fon Evangile, & qu'il a promife a fes fideles Difciples, confifte a être transféré d'un état de foiblelfe , d'anxieté, de trouble , d'affli&ion , de revers , de vexation , de douleurs réelles, de foins riéceffaires, & tout au plus de plaifirs imaginaires, dans un état de bonheur & de contentement folide, de plaifirs m&les & raifonnables , de plaifirs qui ne feront traverfés ni par les maladies ni par des accidens facheux , dont nous ne nous lafferons jamais par Pennui ou le dégoüt, qui ne feront troublés ni par les infultes de nos ennemis, ni par notre fenfibilité aux malheurs de nos amis, ni par 1'inégalité de notre propre tempérament. Dans eet état toutes les puiffances & les facultés de notre ame feront élevées au plus haut degré de perfection donc elles font fufceptibles. Nous vivrons dans le contentement & la paix la plus parfaite , dans une pleine liberté , & dans une parfaite jouiffance de nousmêmes. Nos corps, qui dorment dans la poufïiere, fe releveront, & feront réunis  Chretiennes. Secï. VI. ig3 réunis a nos amis , pour vivre dans !a Cué du grand Roi, la Jérufalem célefte, lc vrai Paradis , le féjour éternel de la lumiere & du bonheur , que le Seigneur remplit de fa gloire , donc chaque objet releve 1'éclat, & contribuera a augmenter notre félicité, & ce qui en fera le comble , c'eft que Vhéritage que nous attendons, eft incorruptible & ne fe flétrira jamais, aue notre m.iilon dans les Cieux eft éternelle, 2 ék que la mort n'aura plus de pouvoir fur nous. Il n'y a point de difpute fur 1'éterni- ( té du bonheur des juftes, parcequ'il»' eft évident que Dieu, felon les richelFes ne de fa grace, eft le rnaftre de recompen-ia' fer la fincere obéiffance de fes créatu-Di re's, autant au - dela du mérite de leurs ceuvres foibles & imparfaites, qu'il le juge a propos; mais 1'éternité.des Peines , dont les méchans font menacés, femble a bien des gens fujette a difficulté , parcéqu'a confulter les idéés naturelles que'nous avons des perfecr tions de Djeu, il efc certain que perfonne ne fera puni au-dela.de fes démérites. Mais il Pon examine mürement Ia nature des. aétions. humaines , on ne peuc douter que Dieu ne foic jufte, & que quieonque foffeble volontairemenc rie mérite une peine érernélle. La ryifon en eft, qu'un être raifonnable M 4 & Cor.V. i. )uc 1'éter:é des Pcrs eft com:il>le avec juftice de :u.  184 Pratique des Vertus & intelligent a non feulement en luimémc le pouvoir d'agir , te qui iui eft commun avec les êires privés de raifon; mais il a encore en lui un principe ou pouvoir fupérieur pour diriger fes actions vers un certain but déterminé, & a des fins fixes & conftantes. II a la faculté de juger des conféquences des actions, avant que de s'y porter, de ce qu'il y a de conforme ou de contraire a la raifon dans les vues qu'il fe propofe ; & il a la faculté , après Paction , de connoïtre s'il a agi dans de bonnes ou de mauvaifes vues. 11 eft le maftre ou de fuivre les mouvemens dcréglés de fes pallïons & de fes defirs, comme font les brutes qui périffent; ou de les réprimer & de réfifter a leurs follicitations, en fuivant les lumieres fupérieures de la Raifon & de la Religion. II eft même impolfible que Phomme n'üit un but, quelque chofe qu'il faffe: lors-même qu'il s'abandonne le plus aveuglement aux imprefilons btutales de fes paffions, il agit cependant dans quelque vue , & avec un fen* tirtYeht' de connoilTancc que les brutes n'ont point, qui lui dit, qu'il fe porte volontairement & de deflein prémédité vers un objet criminel par des moyens de fon propre choix. De la nak' ce jugement de réflexion , que nous appellons confcie-ice', par lequel un homme approuve ou condamné fes actions,  Chretiennes. Se&. VI, igjr actions, & fent qu'il fera approuvé ou condamné par ceiui a qui il doit enfin rendre compte. Si un homme s'accoutume, pendant le cours ordinaire & général de fa vie, è pefer les chofes d avance, c'eft-a-dire, ó examiner s'il veut fe conduite en êrre raifonnable; sil s'accoutume a confidércr dans toutes fes actions ce qui eft jutte & raifonnable, ce qu'il doit faire & ce qu'il eft en droit d'attendre des autres; ce qui eft conforme a la volonté de Dieu, & ce qui peut naturellement être approuvé au tribunal d'un Juge infiniment éclairé & impartial; fi, dis-je, un homme fe gouverne par ces principes , & qu'il ne les perde jamais de vue, fes actions feront cn général vertueufes & bonnes. Si, au contraire, un homme eft dans des principes relachés & impies, qu'il n'nit aucun fentiment de juftice & d'équité , aucune crainte du jufte jugement de Dieu; s'il n'a en vue que de fatisfaire fes penchans, de donner un libre cours a fes paffions , d'avancer fes intéréts préfens, & de fuivre fes caprices les plus déraifonnables , fes actions ne peuvent qu'étre méchantes & vicieufes. Et comme il ne s'eft jamais trouvé perfonne , dans aucun liecle & dans aucun p'iys, qui n'ait regardé comme une injuftfeé, la violence ou la fraude M s dont  j2<5 -Fratique des Vertu» dont il ésoic 1'übjetde la.partd'un autre; la même chofe a lieu lorfqu'il fe rend cöupable de violence ou de fraude en- • vers les autr.-s, & par conféquenc la fentence. qu'il prononcjoit en ce cas contre celui qui lui failbit tort, eft en effet une fentence qu'il prononce contre lui ■ ii ê.ne. On peut en dire autant de touce autre adt-ion mauvaife, impic ou vicicufe, Celui qui commet un crime fe condamné toujours lui • même , & eft' intéiieurement convaincu qu'il mérite d'être puni. Les hommes ont beau fe diftraire & écarter 1'idée d'un objet defagréable; ils ont beau fe flatter par des objeétions contre la différence effentielle entre la vertu & le vice, & fe dire a eux-mêmes, quoiqu'ils ne puiffen't jamais en être bien perfuadés , qu'ils joui'ront de la paix, en mavchant felon les defirs de leur coeur, & en ajoutant pêché a pêché; ijs ont beau difputer hardiment, & foutenir en généra} que toutes les actions humaines font égales par leur nature; que la moralité des actions eft une belle fpéculation de Philofophes, ój, |es notions de vertu & de vice des produéiions de la Coutume & des. I oix ; le jugement particulier qu'un njé.ch'-inc porte de quelque adtion injufte d'un autre , donc il fouffre , le convaincra toujours de bien connoitre cette différence entre le bien & le mal moral,  Chretiennes. Setl, VI. 187 i moral, donc il nc veuc pas convenir, I ou donc il ne veuc pas faire la regie de fa conduice. C'eft ce que 1'Apocre appellé V oeuvre de la Loi, écrite dans le . coeur des hommes, par laquelle ils Jont ' loi d eux -mêmes, leur conj'cience rendant aufji témoignage, £ƒ leurs penjies s'&ccu\fant ou s'excujant entre elles. II eft donc cercain que les hommes connoiffenc & fencenc naturellemenc la différence qu'il y a entre le vice & la vercu, &, ce qui en eft unefuice, quel fruic ils doivent s'accendre a recueillir de leurs actions; & il eft naturel qu'ils craignent que ce jugement de leur confcience ne foit auffi celui de Dieu , & c'eft une vérité que 1'Ecviture enfeigne trés* clairement. Le fenriment de la coulpe eft fi néceffairemenc défagréable au cceur humain , que les pécheurs les plus endurcis fonc coujöurs accencifs a fe décharger du blame de ce qu'il y a de criminel dans leur conduice, en en rejetcanc la faute fur touc ce qui fe préfence a eux. Tantöt c'eft que Dieu ne les a pas faits meilleurs; & qui eftce qui peut réfifter a fa volonté ? Tantóe c'eft le Diable qui les tente; év, comment des hommes foibles peuventils fe foutenir contre un ennemi auffi puiffant & artificieux? Tan tót c'eft la corruption originelle de leur nature; & qui peut changer la conftitution avec Roni, II. 4, 15'  138 Pratique des Vertui Jaq.I. 14 avec laquelle il eft né? Tantót ce font les ufages & les coutumes du Monde; peut-on fe fingularilèr, en s'oppofant au torrent ? St. jaques confond fans replique ces vains prétextes, & tous les autres quels qu'ils foient, en décidant clairement, que de quelque maniere que les circonftances extérieures puisfent aggraver ou exténuer le pêché, cependant le pêché en foi & par fa nature confifte dans la détermination libre de la volonté de 1'homme, & qu'il eft plus ou moins coupable, a proportion que fon choix s'écarte de ce que ditce fa raifon: chacun eft tenté, quand il eft attiré amorcé par fa propre convoltij e. Observons donc , en premier lieu, que perfonne ne peut dire qö'il foic contraire a la raifon , que ceux qui par une défobéiffance volontaire & opiniatre è leur tout- puiffant Créateur, ct a leur généreux & tendre Bienfaiteur, par une vie habituellement vicicufe, fe font rendus, durant leur état d'épreuve , incapables de jouir du bonheur que Dieu a préparé pour ceux qui 1'aiment & qui lui obéiffent , en foient exclus & privés pour jamais. A 1'égard de la durée de cette peine , il n'eft perfonne qui puiffe préfumer, dans cette ceconomie d'ignorance&d'obfcurité , d'être capable de bi?n juger , par la raifon feule, de ce qui a ccc égard  Chretiennes. Seft. VI. 189 égard eft compatible ou incompatible avec la fageffe, la juftice óc la bonté du fuprême Gouverneur du Monde , puifque nous ne connoiffons ni le genre, ni la maniere , ni les circonftances, ni les degrés, ni les fins de la punition finale des méchans. Mais nous fommes affurés que la Juftice de Dieu fe juftifiera pleinement elle-même, que toute bouche fera fermée devant lui, & fera contrainte de reconnoïcre la parfaite équité de fes jugemens , & de condamner fa folie & fa perverfité; puifque, quant aux degrés de févérité des peines qui feront infligées aux pécheurs impénitens , ces peines feront exactement proportionnées a leurs péchés, comme une récompenfe de leur crime, enforte que perfonne ne fouffrira au-dela de ce qu'il a mérité. Cet Article de foi doit donc nous éloigner du pêché, cc nous porter a la repentance cc a une vie fainte; nourrir en nous une crainte religieufe pour ce Dieu infiniment grand, qui eft jaloux, qui eft un feu confumant, óc qui ne i fouffre poinc qu'on fe moque de lui.2: Cette doctrine nous apprend auffi è tremblsr d Ja parole, a 1'idée de la /or-E ce de fa colere , cc de ce qu'il y a de 2: terrible dans fa vengeance ; a mettre au plus haut prix cette précieufe rédemption , procurée par le fang de Je- lebr. XII. i. aie LXVr. Pf. XC.  Mébr. XII. 14, coiom 111. 1. Philipp. III. 14. Rom. VIII. 18, 2 Cor. iv. 17. ioo Pratique des Vertus Jefus-Chrift, par- laquelle tous les vrais croyans font purifiés de leurs péchés, & délivrés non feulement de la mort éternelle , mais faits héritiers d'un bonheur éternel. C'eft ce qui doit nous infpirer les pi'us ardens defirs de goüter ces joies céleftes, dont la vilion de Dieu eft la fource,& nous engager k redoubler nos efForts pour parvenir è cette fainteté, fans laquelle perfonne ne verra Dieu. Notre foi touchant ]a vie éternelle nous apprend auffi a méprifer le Monde , & a cbercber les cbofes qui font en haut, enforte quoubliant les cbofes qui font en arriere , Cf nous avancant vers celles qui font devant nous, nous tirions vers le but, favoir au prix de la vocation célefle de Dieu en Jefus - Cbrijl. Elle doic auffi nous encourager a charger fur nous la croix de Jefus - Chrift nous faire fuppörter avec patience les afflicbons de la vie préfente, fachant qu'elles ne piuvent contrebalancer la gloire qui doit être révélée en nous, & que notre légere offiiftion, qui ne fait que paffer, produit en nous un poids éternel d'une gloire fouverainetnent excellente. Concluons. La Religion Chretienne ne nous propofe comme Articles de foi que des doctrines révélées , qui font parfaitemenc conformes k la faine raifon. Les Dogmes que Jefus - Chrift a enfeignés, tendent naturellement k réfor-  Chretiènnès. Setï. VI. i9f h\ réformer les hommes & a corriger leurs I rnaeurs, & ils font trés - pro pres a proI duire eet effet : ce ne .font point de ; yam es fpéculations pour amufer la cuI fioiité humaine , bien moins encore font - ils deftinés a exercer notre crédu« Jité, ou a éprouver jufqu'ou nous pouvons porrer notre raifon a fe foumettte è la foi. Mais d'un cóté ils font clairs & fimples , très-dignes de foi, par leur conformité avec la raifon; & de | 1'autre ils ont une relation immédiate a la pratique, & font le fondement Sc la bafe de toutes les vertus humaines 1 & divines. | '[La différence de fentimens & les i difputes fur des points particuliers pari mi les Chretiens, ne donnent aucune atteinte h la vérité de la Religion en général, fi 1'on en excepte cependanc ! ceux qui ont corrompu les doctrines i fondamentales , & méme anéanti le grand but de toute 1'Oeconomie Evan: géhque. D'ailleurs il n'en eft pas des t difputes qui font parmi les Chrétiens, comme de celles qu'il y a entre les Pmlofoph.es; celles -ei roulent fur tout le fyftême de 1'Univers , au-lieu que les autres ne regardent que Pexplication de quelques points particuliers. \ ür eet ordre de difputes n'ébranle cn i: rien la vérité du corps même de la Re] hgion , & ne doit en aucune facon émpécher que les dogmes les plus clairs,  Priere. Pf. xxxi 20. pr. xxxvi y- pf. xc. ii Heb. xii. 29. Tite ii. i 102 Pratique dis Vertus clairs, les plus importans , reconnus pour fondamencaux , n'influent fur le cceur &. fur la conduite de tous ceux qui croyent. cè que Dieu a révelé, & qui reconuoiffent 1'obligation cti ils font d'obéir a fes commandemens. „ O Dieu, qui es vivant aux fie„ cle* des fiecles, quelle admiration, ,, queile reconnoiifance , quelle reli,, gieufe frayeur ne doit pas nous in., fpirer ïinmortalité, que Jefus-Cbrijl „ a mife en lumiere par jon Kvangile! O „ combien font grands les biens que tu ré,, J'erves d ceux qui te craignent, &f que „ tu as faits pour ceux qui fe retirent ,, vers toi en la pré/ence des fils des bom„ mes! Ils feront rafiafiés de la grais',, fe de la maifon, & tu les abreuveras „ au fleuve de tes dé'-ices. Mais auffi qui •„ eft-ce qui connoü la force de ta grande colere contre les pécbiurs? Qui ne fré„ miroit a 1'idëe de ce ver qui ne ,, meurt point t de ce feu qui ne s'éteint „ point? Qui ne trembleroit de tomber ,, entre tes mains , puifque tu es un feu confumait? Fais-nous la grace, ,, Seigneur, de nous pénétrer de ces „ grands objets, de nous en occuper „ par de fréquentes méditations , afin ,, qu'ils influent fur nos fentimens & „ fur nbtre conduite , & qu'ils nous i.„ portent efficacement d renoncer cl „ Vimpiéti rjf aux convoitifes du monde, „ ty d vivre dans ce préfent fiecle, fobre„ ment»  Chrïtiennes. Set}. VJL 193 „ ment, jujïement Éf religieufment, en „ attendant l'apparition glorieufe de notre „ grand Dieu & Sauveur Jéfiis-Cbrijl, „ auquel, comme a toi, ó Pere! & a „ 1'Efprit Saint, feul Dieu bénit éter„ nellemcnt, foit honneur , gloire, „ empire, magnificence & force aux ,, fiecles des fiecles. Amen". $ -fc-:-^ £■$ $ SECTION VII. f I. De la Sainte Cene. II. Devoirs qu'il faut pratiquer avant que a'y participer. III. Ce qu'il faut faire en y participant. IV. Après y avoir participé. I. A Pres avoir examiné les Articles /11, de la Foi Chrecienne, il s'agit T°' de rechercher quel eft le refpect. que^' nous devons au fecond Sacrement que Jefus-Chrift a établi dans fon Eglife, qui eft la Sainte-Cene, deftinée a faire la commémoration de la mort de ce divin Sauveur, & des ineftimables avantages qu'il nous a procurés par fon facrifice. L'ordre expres de notre divin IVlaïtre nous oblige indifpenfablement a rempür ce devoir: c'eft-lè Ia cérémonie caractériftique de la Religion Chretienne, par laquelle nous Tsme I. N nous svir. rni5f. Ia Sail -ene.  194- Pratique des Vertui Devoirs qu précédent 1 Communion. De V Examen de foi-mém i Oor. XI. 3t« nous déclarons publiquement les difciples de Jefus-Chrift. Mais fi nous ne devons pas négliger de participer a ce faint Sacrement, nous ne devons pas auffi venir a la Table Sacrée fans une préparation convenable: il faut pefer foi'gneufement ce que nous devons faire, avant que de communier, en communianc, & après avoir communie. ' IL St. Paul nous inftruit de ce 'que nous devons faire avant la Communion, quand il dit, que chacun s'éprouve Joi - même, & qu'ainfi il mange de ce ''pain fif boive de cette coupe. Mais avant que d'entrer dans le détail de eet examen qu'il faut faire, il faut obferver en général , qu'il s'agit proprement dans la Sainte-Cene de renouveller avec Dieu 1'alliance que nous avons fake avec lui dans notre Batême: comme nous 1'avons violée en différentes manieres, Dieu nous permet, en fes grandes miféricordes, de la renouveller dans ce Sacrement: & fi nous le faifons avec un coeur droit & fincere, il a promis de nous recevoir dans fa communion, & de nous communiquer toutes les graces, qu'il étoit difpofé a nous communiquer par notre Batême, fi nous ne nous en étions pas rendus indignes par notre propre faute. Puis donc qu'il eft queftion de renouveller notre alliance avec Dieu, il s'enfuit que ces trois chofes font néceflaires. Pre-  Chïetieksbs, Sety. VU. r95> Premierement, que nous fachions en quoi confifte cette alüance. En fecond lieu que nous recherchions è quels égards nous 1'avons violée. Troifieme■ment, que nous prenions la réfolution de lobferver exactemenc, durant le refte de notre vie. C'eft h nous éprouver fur ces trois articles que fe réduit IJixamen de nous-mêmes, qui doit précéder la Communion. D'abord nous devons examiner , fi nous avons des lumieres fuffifantes fur Ia nature de cette alliance. C'eft ce qui eft abfolument néceffaire, pour pouvoir nous acquitter des deux autres parties de notre devoir a eet égard • car il eft impoflible de découvrir les pechés oa nous fommes tombés, & de prendre des réfolutions pour 1'avenir fi nous ne connoiffons en quoi confifte l alliance. Commencons done par examiner , fi nous comprenons bien ce que c'eft que cette alliance, oh nous ommes entrés par notre Batême; quelles font les graces que Dieu nous y a promifes, & quels font les devoirs auxquels nous nous fommes engagés. Et comme 1'alliance que Dieu a traitée avec cnacun de nous dans le Batême n'eft autre chofe que I'application faite' a chacun en particulier, de 1'alliance quil a traitée en Jefus-Chrift avec le Genre-humain en général , nous devons examiner fi nous avons les luN 2 mieres.  io6 -Pratique des Vertus mieres néceffaires fur ce fujet; fi nous trouvons qu'elles nous manquent, il faut d'abord nous mettre en devoir de chercher les inftruftions dont nous avons befoin: & en attendant qu'on en ait de meilleures, on peut lire ce qui a.été dit dans l'lntrodudtion de eet üuvrage fur la feconde Alliance, qui eft le fondement de celle que Dieu traite avec nous dans notre Batême. Et-comme on y trouvera que 1'obéisfance a tous fes commandemens eft la condition qui nous eft impofée , & que nous nous fommes formellement engagés-dans notre Batême a remplir, nous devons auffi contioftre quels font ces commandemens de Dieu auxquels il faut obéir. Si nous les ignorons, r,'ayons point de repos que nous ne foyons afïez inftruits fur ce fujet, pour pouvoir nous acquitter de tous les devoirs que Dieu exige de nous. Le grand but de ce Traité eft de donner a eet égard les inftruétions néceffaires, & les plus ignorans font ceux qu'on exhorte le plus inftamment a le lire. S'il efl des perfonnes qui fe foient approchées de laTable du Seigneur fans avoir ces connoifiances néceffaires, elles doivent gémir du pêché qu'elles ont commis par-la, & ne pas être affez téméraires pour y venir encore, fans s'y être préparées en acquérant les lumieres dont elles ont befoin, & elles doi, vent  < Chretiennes!. Sett. VIL 197 vent y travaiiler promptemenr. Car 'quoiqu'on ne doive pas venir a la Communion dans eet état d'ignorance, fi 1'on y perfitte volontairement, ce n'eft plus une excufe légitime, li 1'on s'en abftfent. Nous devons examiner , en fecond lieu, è quels égards nous avons violc 1'alliance; & c'eft a quoi nous fer.vira la connoifïance dont je viens de parler. Le feul moyen de découvrir quels font les péchés oh nous fommes tombés, c'eft de comparer nos actions avec la Loi de Dieu, qui doic nous fervir de regie. Lors donc que nous entreprenons de nous examiner fur eet article , il faut nous rappeller les différentes partjes de notre devoir, & nous demander a nous-mémes fur chaque point, fi nous nous en fommes acquittés. II n'eft pas queftion de fe borner a favoir en général, qu'on a violé la Loi de Dieu, mais il faut ne rien négligqr pour découvrir a quels égards en particulier nous 1'avons transgreffée. Rappellez-vous, autanc quil vous fera pofïïble, tous les divers périodes de votre vie, & examinez dans chacun en quoi vous avez manqué: faites attention, non feulement aux actes les plus grofïïers, mais aufü aux paroles, & méme aux penfées les Plus fecrettes; car, quoique les Loix xiumaincs ne s'étendent pas jufques a, ■N 3 ces  ■IS8 PRATIQUE DIS VER.TÜS ces dernieres, celle de Dieu le fait, enforte qu'en défendant les péchés , elle en défend auffi la penfée & le defir , qui font auffi découverts aux yeux de Dieu, que les actions les plus publiques. Cette recherche détaillée eft extrêmement néceffaire, puifqu'il n'eft aucun pêché dont Dieu nous ait pro» mis le pardon , fi nous ne le confesfons & ne 1'abandonnons. Or pour faire 1'un & 1'autre, il faut avoir une connoiffance claire & diftinéle de fes péchés. Car comment peut-on confeffer un pêché , dont on ignore que 1'on eft coupable? Ou comment peuton prendre la réfolution d'y renoncer, fi 1'on ne s'appercoit pas qu'on y eft fujet ? Nous pouvons donc conclure certainement de-la , que 1'examendont il s'agic, eft non feulement utile, mais abfolument nécefl'aire, pour rendre notre repentance effective & réelle : car il y a tout lieu de penfer, qu'en n'examinant point fes péchés en détail, on ,ne s'en repentira qu'a demi, ce qui ne fuffit pas pour en obtenir le pardon. Dieu ne 1'ayant promis qu'ii ceux qui y renoncent fans réferve. Si Ce devoir eft néceffaire dans tous les tems, il 1'eft furtout lorfque noas venons a la Table du Seigneur: c'eft alors qu'il nous importe que notre repentance foit fincere & entiere, & par con-  ChuEtienne». Stlt. VII. 199 n conféquent que eet examen approfon1 di de notre cceur eft particuiiérement | néceffaire. Car quoiqu'il ne nous foit I pas poffible , quelque foin que nous I nous donnions, de découvrir chaque 1 pêché que nous avons commis penI dant notre vie, ou de nous en fouve1 nir, & qu'il foit vrai en même tems I que nous pouvons obtenir le pardon 1 de ce qui nous eft ainfi abfolument i inconnu, fans autre confeffion que cel| le de David, Purge-moi des fautes ca-p | cbées, cela ne nous excufera pourtant J point, fl elles ne nous font cachées, 'j que parceque nous aurons négligé de | les rechercher. II faut donc bien prenj dre garde de ne pas fe tromper dans 3 cecte importante affaire, & fonder ce 0 qu'il y a de plus fecret & de plus j caché dans notre coeur; ne rien ouij blier pour connoitre a fond 1'état de 1 notre ame, puifqu'il eft impoffible fans | cela de guérir nos playes. Si nous devons faire une exacte rei cherche de tous les péchés, quels qu'ils i foient, que nous avons a nous repro- cher, nous ne fommes pas moins obliI gés de travaiiler foigneufement è en i démêler les degrés, parcequ'il y a di- verfes circonftances qui les aggravent: ! telles font les fuivantes. 1. Lorfque 1 nous péchons contre nos lumieres, c'eft-a-dire, lorfqu'étant bien affurés qu'une aéiion eft eriminelle, nous ne M 4 lais- •.xix. 15.  2oo Pratique des Vertus Liic. xi\3 46. lailfons pas de nous y porter, a caufe du plaifir ou de 1'avantage préfent que nous y trouvons, ou par quelque autre motif: c'eft Jefus-Chrift lui-même qui nous apprend que cette circonftance aggrave le pêché: le Serviteur, ditil, qui a connu la volonté de fon Maitre, Ö1 ne~ 1'a point faite , fera battu de plufleurt coups. 1. Ce qui aggrave encore le pêché , c'eft lorfque nous le commettons de propos délibéré , après avoir eu le tems d'y penfer, & non par furprife. 3. Ce qui en augmente furtout 1'atrocité , c'eft lorfque nous péchons malgré la réfiftance & les avertiflèmens de notre confcience, & quoiqu'elle nous dife dans le moment même, que nous ne devons pas nous porter a telle ou telle nction, & qu'elle nous en met le danger devant les yeux. Cette circonftance eft li aggravante, qu'elle fait du moindre pêché un trés grand crime; car il eft évident que c'eft-la un pêché volontaire, qui, quelque léger qu'il puiffe être par rapport a la. chofe même, eft infiniment odieux aux yeux de Dieu: il y a plus; cette circonftance rend criminelle une aétion, d'ailleurs indifférente en ellemême. Car, quoique ma confcience fe trompe , en me djétant que cette afftion eft mauvaife, tant que j'en fuis perfuadó, je pêche en la faifant , puii'qu'en ce cas-la je me porte volon- tai-  Chretiennes. Sed. VII. 201 tairement a faire ce que je crois qui déplaic a Dieu: & Dieu, qui nous juge fur les mouvemens de notre volonté , & non fur les idéés de notre entendement, me 1'imputera a pêché, comme fi 1'aétion étoit criminelle en elle-même: d'oh il s'enfuit que de commettre un pêché contre les lumieres de fa confcience, c'eft fe rendre doublement coupable. 4. La fréquente réitération du p'éché eft une quatrieme circonftance, qui 1'aggrave; parcequ'on devient non feulement plus coupable par la multiplicité desacr.es, mais encore que chaque acte devient plus criminel & plus inexcufable. C'eft par cette regie que nous jugeons des fautes que 1'on commet contre nous: nous pardonnons plus aifément une offenfe la première fois qu'on nous la fait, que lorfqu'on y revient; & plus on 1'a réiterée, plus elle nous paroït odieufe: la même chofe a certainement lieua 1'égard des fautes commifes contre Dieu. 5. Les péchés commis après des vceux & des rélblutions d'amendemenc, font encore plus crians, parcequ'ils renferment une violation de nos promeffes. Cette circonltance entre plus ou moins dans touï les péchés volontaires, qui font une violation des vceux de notre Batême. Et d'ailleurs nous nous fommes engagés par de nouveaux vceux, fi ce n'eft en N 5 d'au-  202 Pratique dës Vertus d'autres occafions, du moins lorfque nous avons participé a la Sainte Cene, qui, comme nous l'avons dit ci-deflus, a été inftituée pour renouveller les engagemens oh nous fommes entrés par notre Batême. Plus ces vceux ont été fréquemment réiterés, plus nous fommes coupables en retombant dans des péchés auxquels nous avions renoncé. C'eft ce qui mérite d'être bien mürement pcfé; & lorfqu'onfe difpofc a s'approcher de la Table du Seigneur, on doit s'examiner particuiiérement fur Partiele des vceux faits en pareille circonftance, pour favoir ü on ne les a pas violés. Si en d'autres occafions, foit de maladie, foic de perplexité d'espric, on en a fait quelqu'un, il faut s'en demander févérement compte a foi-même, examiner comment on Pa accompli, en fe fouvenant que chaque pêché, commis contre des vceux de eet ordre,nous rend coupables de parjure, indépendammeritde ce qu'il a de criminel en lui-même. 6. Mais ce qui eft plus encore que tout ce que nous avons dit, & ce qui aggrave extrémement le pêché, c'eft lorfqu'on Pa commis fi fouvent, qu'il eft tourné en habitude. Parmi les habitudes même, les unes font plus odieufes que les autres. Lorfqu'elles font tellement confirmées, que le cceur s'eft endurci, & que nous n'avons plus aucun fentiment du ■  Chretiennes. Seiï. VII. 203 du pêché. Lorfque nous y perfiftons, nonobftant les moyens extraordinaires que Dieu employé pour nous corriger , tels que font la maladie , ou d'autres afflictions, deftinées, femble-til, a nous rappeller a notre devoir. Lorfque les cenfures & les exhortations, tant dé Pafteurs que de nos Amis , ne font aucune impreffion fur nous , & ne fervent qu'a nous aigrir contre eux, ou a nous porter a prendre la défenfe des péchés qu'ils reprennent. Lorfqu'enfin les habitudes vicieufes ont jetté d'affez profondes racines, pour nous faire aimer le pêché non feulement en nous-mêmes, mais encore dans les autres, & que, comme dit St. Paul, nous ne commtttons pasRom feulement les cbofes, mais nous favarijóns auffi ceux qui les commettent, & t&chons d'engager dans le vice tout autant de perfonnes qu'il nous eft poffible; alors 1'habitude criminelle eft a fon plus haut degré , & c'eft le comble du danger, comme celui de la corruption. Voila comment on doit s'examiner fur fes péchés, en recherchant è 1'égard de chacun, combien il s'y trouve de ces circonftances aggravanees, afin d'en bien comprendre toute 1'énormité. Le but de eet examen eft de nous donner une affez jufte connoiffance de bos péchés, pour nous humilier, & aous . i. 3*-  Pratique des Vertus pr. li. i< nous faire fentir Ie danger auquel nous nous fommes expofés, en offenfant Ia majefté redoutable de ce Dieu , qui peut fe venger de nous d'une facon fi terrible: confidération bien capable d'mfpirer de Ia douleur même aux perfonnes les plus charnelles. Ce n'eft pas tout pourcant: il faut encore que cela nous infpire une jufte horreur de la lacheté & de 1'ingratir.ude avec laquciie nous avons outragé un Dieu fi bon et fi charitable, & payé du plus indigne retour fes tendres compaffions & les richeffes de fa miféricorde. C'eftlè une réflexion qui doit furtout exciter en nous la plus vive Sc la plus profonde douleur, une contrition proportionnée en quelque maniere a la grandeur de nos péchés. Plus cette douleur fera vive, pourvu qu'elle ne nous porte pas è défefpércr de la miféricorde divine, plus elle fera agréable a Dieu, qui a promis de ne point mé: ,.pri/er k cieur contrit & brifé, & plus elle produira , felon les apparences, notre amendement. Car fi nous avons une fois fenti les angoiffes d'une ame pénétrée du fentiment de fes fautes, nous ferons d'autsnt plus éloignés de nous livrer encore au pêché. Quand nous ferons tentés par quelqu'un de fes plaifirs paffagers , notre propre expérience nous mettra en état de les comparer avec les cuifans re- mords  Chretiennes. Seü. VIL 205 mords & avec les terreurs d'une confcience qui nous accufe ; comparaifon, qui déterminera bientóc quicon* que a redend ces remords & ces terreurs, è ne plus s'y expofèr. Travailiez donc a amollir votre cceur, ét a y faire naftre cette douleur profonde & fmcere. II ne faut pas cependant que ce foit la vue feule du danger auquel vous vous ëtes expofé, qui la produife: quoique ce motif puiffe & doive nous mfpirer de la trifteffe, fi c'étoit néanmoins le feul, ce ne feroit pas une triftejje a falut, & qui püt nous faire» Coi obtenir notre pardon. La raifon en eft10évidente: cette douleur ne doit fon origine qu'a 1'amour de nous - mêmes, & a la crainte du chatiment. Mais celle du vraiPénitent a aufii pour principe 1'amour de Dieu; il s'afflige de 1'avoir ofTenfé, quand il n'auroit aucun cbidment è craindre. Ainfi le vrai moyen de faire naïtre en nous cette contrition, c'eft de nous exciter a 1'amour de Dieu, en nous rappéllant les nombreux efièts de fa miféricordc envers nous, & furtout la grace qu'il nous a fake de nous épargner, & de ne pas nous enlever de la Terre daus les momens oü nous avons pêché. Confidérons férieufement le nombre & la grandeur des péchés par lefquels nous 1'avons provoqué, & les défobéisfances volontaires dont nous nous fommes .Vil.  Jerem. II 19- 206 Pratiqüe des Vertos mes rendus coupables, peut-être durant une longue fuite d'années, enforte qu'il auroit pu trés-juftement nous précipiter il y a iong-tems dans les Enfers. 11 fe peut même que nous ayons devant le- yeux plufieurs exemples de pécheurs moins coupables que nous , qui ont été ravis tout d'un coup au milieu de leurs péchés. Et a quelle caufe attribuer notre confervatiou, fi ce n'eft aux tendres compaffions de Dieu, dont 1'ceil nous a épargné, & qui n'a pas voulu que nous périffions dans notre pêché? C'eft-la une réflexion , qui profondément méditée , ne peut que réveiller en nous quelques fentimens d'amourpour un Dieu fi miféricordieux & G patiënt, a moins que nous n'ayons un cceur de roche: & eet amour ne peut que nous faire fentir, combien c'eft une cbofe amere pour nous d'avoir abandonné l''Eternel, & d'avoir payé fes tendres compaffions d'ua fi odieux retour; il nous infpirera de la honte & de 1'indignation contre nous-mêmes, d'avoir été capables d'une fi noire ingratitude, Que fi la feuleconfidération du fupport de Dieu eft fi propre a faire naïtre en nous cette fainte trifteffe, quellesimpreffions ne doivent pas faire les graces fans nombre dont chacun en particulier peut fe rappeller qu'il a été 1'objet ? II n'eft donc perfonne qui ne doive entrer a eet égard dans le plus grand  CHRETIENNES. Sett. VII. 207 grand détail qu'il lui fera poflible, & le rappeller tous les bienfaits de Dieu, pour exciter dans fon coeur Ia plus vive & la plus profonde contrition. Il faut ajoucer a tous ces efforrs des prieres ferventes, & demander i Dieu de nous conduire par fon Saint Efprit dans la revue de nos péchés, & d'amollir nos cceurs, afin que nous puiffions les déplorer par des larmes d'une fincere douleur. „ O Dieu! qui fondesles cceur s& les 3> reins , nous nous humilions devant^ s. toi pour te fupplier de nous faire laa: 3, grace de nous bien connoftre nous3> même», & de faire 1'examen de nos) tre cceur & de notre vie avec toute 3> la fincérité ét la droiture que de3» mande de nous une recherche fi im»s portante a notre falut. Nous ne »3 pouvons douter que nous ne foyons 33 coupables devant toi ; mais que 93 nous fommes la plupart du tems 3> éloignés de connofcre toute 1'éten3, due de notre corruption. Nous 3j fommes effrayés, quand nous pen», fons en combien de manieres on 3. peut violer ta Loi, par combien de 33 circonftances on peut aggraver fes 3, péchés. Quelle ne doit pas être „ notre confufion & notre douleur, „ d'avoir a nous reprocher tant d'ini3> quités, de t'avoir offenfé fi fouvent 33 contre nos lumieres, de deffein prémédité, Priere. rem. XI,  i Jean ii a< • pr. vi. i. ii Cor. Vil IO. i J*an ii. i, z. Heb. VII. xvm JOURNÉB. De la Con feilien des péchés. 208 Pratiqoe des Vertu* M médité, & malgré les avertiffemens „ de notre confcience ; d'être retom„ bés fréquemment dans les mêmes „ fautes, après t'avoir promis folem„ nellement de vivre mieux & de c'ê„ tre plus fideles, & d'y avoir perfifte „ malgré les exhortations que tu nous „ as fait adreffer. Ha! Seigneur, fi .notre cceur nous condamné , que ne „ devons-nous pas craindre de toi, ,, qui es plus grand que ce cceur, £f ,, q-d connois toutes cbofes. O Dieu! ne ',, nous reprends point en ta colere , ne ,, nous ebdtie point en ta fureur; fais , „ naftre en nous cette trijtejje , qui produit une repentance d falut, de la,, quelle on ne fe repeni jamais. Tu ,, noes as donné toa Fils, pöur être ,, la propitiation pour nos péchés, & no- tre Avocat auprès de toi. Fais-nous ,, la grace que notre repentance foit telle que nous puiflions éprouver, ,, qu'il peut fauver pleinement ceux qui ,, s'approebent de toi par lui, étant tou„ jours vivant pour intercéder pour eux: „ Amen". La Repentance doit être accompagnée d'une humble Confeffion de nos péchés a Dieu. Cette confeffion ne doit pas feulemeDt être générale, mais il faut entrer dans le détail de toutes nos fautes, autant que notre mémoire : pourra nous les rappeller, fans oublier | les circonftances aggravantes que notre I  Chretiennes. Seft. VIL 209 tre examen nous y aura fait découvrir. 11 fauc même confefler en général les péchés cachés & oublies, puifque nous ne pouvons douter que nous n'en ayons un grand nombre de eet ordre a nous reprocher , 'ènforte que chacun doit dire avec David: Qui ejï-ce qui connoit fes fautes tommij es par erreur? Pur-1 ge-mor' des fautes cactê's, Ce n'eft qu'après avoir ainfi confefTé nos péchés avec une vive componction, & une véritable horreur pour ces c-ffenfes que nous avons faites a Dieu, que nous fommes en droit de nous flatter de connoitre notre mal, éc qu'il eft tems d'y appliquer du remede. C'ESTdonc alors que nous devons avoir notre recours a celui que Dieu a établi pour être la propitiation pour nos 1 péchés, c'eft - a - dire a Jefus - Cbrijl. 1'A-2 gneau de Bieu qui ote les péchés du Mon- ' de; & que nous devons demandcr trèsardemment a Dieu , que nos péchés foient lavés par fon fang précieux, & que pour 1'amour de lui il veuille être réconcilié avec 'nous. Et nous pouvons être afTurés d'obtenir cette grace, pourvu que nous renoncions fans retour a tous nos péchés, & que nous nous appliquions fincéremant h obéir a tous les commandemens de Dieu. Sans quoi nous efpérerions envain d'avoir part aux biens que Jefus-Chrift a acquis aux vrais Fideles, & dc recueil- Tome I, Q lir pr. xix. lom. III. i- :an I. 19  RéTolutioi d'oWir a Dieu. 210 Pratique de» Vertus lir quelque fruit de fa mort. Il fauc donc que nous prenions la réfolution de rendre a Dieu cette obéiffance univerfeiie. C'eft le troifieme Chef fur lequel nous devons nous examiner, avant que de venir a la Table du Seigneur. i A Pégard de 1'étendue & des objets de cette réfolution, nous nous contenterons de dire, qu'elle doit répondre exadtement a toutes les parties de notre devoir, c'eft-a-dire, que nous ne devons pas nous borner è prendre en général la réfolution d'obéir aux commandemens de Dieu, mais d'obéir a chaque commandement en particulier. Nous devons furtout renouveller la rélolution de nous corriger fur les articles oh nous trouvons que nous avons principalement manqué' a notre • devoir par le pafte. Et a eet égard il nous importe beaucoup de prendre garde que nos réfolutions foient finceres & fermes, & non fuperficielles <5c prifes par coutume & par maniere d'acquit, pour n'y plus penfer dans la fuite, comme cela n'eft que trop ordinaire a bien des gens, lorfqu'ils s'approchent de la Table du Seigneur. Car il eft certain que fi 1'on y vient fans avoir une parfaite haine pour tout pêché, quel qu'il foit, on s'en approche indignement; & que celui qui hait fans réferve tout pêché, ne peut manquer de '.  Chretiennes. SeS. VU. Z\t de prendre la réfolution d'y renoncer; parceque le renoncement è un objet eft une fmee naturelle de la haine qu'on lui porte, & qu'on ne fe plak gueres avec ceux qu'on hak. Par cette raifon, fi pon ne prend pas une réfolution, qui par fa fincérité foit de nature a étre approuvée de Dieu, le Scrutateurdes cceurs, on ne peut être cenJe haïr le pêché, & par conféquent on ne peut participer dignement è la iainte Cene. II faut donc examiner nos réfolutions è fond , afin de ne nous y pas tromper, ce qui feroit infiniment dangereux ; puifqu'il eft certain que nous ne pouvons tromper Uieu, ni abtenir fon approbation par aucun acte, qui ne foit parfaitement hncere & exempt de diflimulatioD. Maïs fi nous devons prendre la réiolution d'obéir fans réferve è tous les commandemens de Dieu , cette réfoIution doit auffi s'étendre aux moyens qui peuvent contribuer 4 fon exécution. Examinons donc avec foin, par rapport a chacun de nos devoirs quels font les moyens les plus propres * nous en faciliter la pratique, & détermmons-nous è en faire ufage, quelque défagréables qu'ils puiffent être a la chair. Et d'un autre cóté, confidérons attentivement quelles font les chofes qui peuvent nous porter au pêché, & prenons la réfolution de les O 2 éviter.  Gomment & a quels égard» on doic Ptx'écuter d'abord. 212 Pratique dei Vertüs éviter. C'eft ce que nous devons faire a 1'égard de tous les péchés, quel» qu'ils foient, mais furtout a 1'égard de ceux dont nous nous fommes déja rendus coupables , parcequ'il ne nous fera pas difficile de découvrir par quel3es voyes & par quels degrés nous y fommes tombés; quelle compagnie ou quelle oecafion nous a féduit, comme auffi qucltes tentations font les plus capables de nous faire fuccomber , & par conféquent quelles précautions nous devons prendre pour nous garantir de ces péchés. Nous fentirons fans peine que nous devons éviter les occafions qui nous y ont entrainés. Il ne fuffit pas même de prendre la réfolution de le faire a 1'avenir, il faut mettre d'abord la main a 1'ceuvre, & commencer cette nouvelle carrière, en faifant fans délai tout ce que les circonftances nous permettent de faire. Et il y a effectivement plufieurs chofes que 1'on peut & que 1'on doit faire , avant que de s'approcher de la i Sainte Table. D'abord nous devons renoncer a tous nos péchés, fans exception. Ce n'eft pas aflez de former le defiein de mortifier dans la fuite nos paffions & nos convoicifes, il faut le faire avant que de fe préfenter a ia Table du Seigoeur, & étouffer tout goüc , tout amour a eet égard. Nous ne pouvons ea-  Chretiennes. Se&. VU. 213 entrer en communion avec JefusChrift , a moins que nous ne renoncions aux péchés, méme les pluschéris. La raifon en eft évidente. La Sainte Cene eft notre nourrirure fpirituelle: or comme on ne prélente point des alimens a un mort, il faut que nous vivions de la vie fpirituelle, avant que de pouvoir être nourris fpirituellement: & tandis que nous perfiftons non feulement dans quelque pêché aftuel, mais dans le goüc pour aucun pêché, nous n'avons pas la vie fpirituelle, & nous ne fommes aux yeux de Dieu qu'un Cadavre, incapable de recevoirla noirriture. On peut è la vérité manger le pain & boire le vin , mais on ne recoit pas Jefus-Chrift, & on prend au contraire, felon que Saint Paul le die, yin < propre condamnation. Nous fommes*9' donc indifpenfablemcnt obligés d* renoncer a tout pêché, avant que de venir a la Sainte Table. Il n'eft pas moins néceffaire de mettre notre ame dans une difpofition vraiement chretienne & célefte, en y faifant regner les vertus qui peuvent nous rendre agréables a Dieu. Après en avoir banni le vice & chaffé pour ainfi dire le Diable , nous ne devons pas la laiffer vuide, de peur d'éprouver par expérience ce que dit le Sauveur; que eet ennemi re vient bientót, & que notre derniere condition ejl alors m O 3 pire lor. xi. :.xi.2Ï.  414 Pratique des Vertus fire qui la première. Nous devons folJiciter , par d'ardences pneres s le Saint Efprit d'y venir habiter & d'y produire toutes les vertus dont il elt le principe; ou, fi nous avons le bon* heur d'en pofféder déja quelques-unes, prions-le de les augmenter óc de les épurer, & ne négligeons rien pour les rendre agiffanr.es en nous. Par exemple, fortifions notre humilité, par la confidération de la grandeur cc du nombre de nos péchés; notre foi, en méditant les promeffes que Dieu a faires a tous les pécheurs repentans; nocre amour pour Dieu, en nous re* tracanc fes miféricordes infinies envers nous, óc furtout le bienfait ineftimable dont nóus célébrons la mémoire dans la Sainte Cene, Ie don qu'il nous a faic de fon Fils pour mourir pour nous. Nous devons auffi rendre plus *vif notre amour pour nos prochains, & même pour nos ennemis, en réfléchiffant fur 1'admirable exemple que notre Sauveur nous a donné, lorfqu'il elc mort pour nous, qui étions fes en* nemis: óc a eet égard nous fommes obfigés, avant que de communier, de Timiter furtout en pardonnant fans réferve a ceux qui nous onc offenfé; óc en revêtanc envers eux des fentimens de charité , qui fe manifefient dans 1'occafion par des eifets réels. Et fi nous avons eu jamais le malheur d'ou- blier  Chretiennes. Seiï. VIL 215 blier tellement ce bel exemple , que Jefus-Chrift nous a donné, que nous ayons faic quelque torc ou quelque injure a nocre prochain, nous devons avouer notre faute, lui en demander pardon, & réparer, autant qu'il nous eft poffible, le corc que nous lui avons faic, foic en fa réputacion, foic en fes biens. Sans cecte réconciliation avec nos freres, nous ne devons pas efpérer qu'aucun aéte de nocre culce puilTe être agréable a Dieu, felon que nous 1'apprend Jefus-Chrift: fi tu apportes ton offrande d l'autel, £3? que ld il te-fouvienne que ton frere a quelque cbofe contre toi, laiffe-ld ton offrande devant l'autel, & va te reconcilier premierement avec ton frere; puis viens & offre ton offrande. Nous voyons la que , quoique 1 offrande foic déja fur l'autel, il faut plutót ne la point offrir, que de la préfencer avec un cceur rempli de haine & ennemi de la paix. Que ft cette charité eft d'une fi indifpenfable nécesiité dans tous les acres de notre Culte, elle 1'eft bien plus encore dans celui , oh en participant au même pain & a la même coupe, nous faifons profeflion d'être unis, non feulemenc avec Jefus-Chrift, nocre Chef, mais auffi les uns avec les autres, comme Jes membres d'un même corps. Par conféquent, fi nous nous approchons du Sacrement dans quelque difpoliO 4 tioa Hatth. V. I ,*4-  2ió pratiq.ue des vertus 2 Cor. ii tion contraire a la charité, nous nous *endons coupables de la plus criminelne hypocriüe , en faifanc folemnellemenc profeflion d'être animés de eet amour fraternel, que nous ne reffentons point. La Dévotion eft encore une difpofition trés •néceffaire dans cette occaiion, & pour Pexciter & 1'enflammer en nous, nous devons nous ménager des tems de retraite, ou dégagés de nos affaires ordinaires, nous nous occupions uniquemenc de notre préparation, dont une parcie elfentielle confifte è réveiller & è rendre plus vif notre goütpour les chofes fpiritueiles & céleftes. Dans ce deftein nous devons écarter abfolument tous les foins du Monde , qui, comme autant de poids, retiennent notre ame, & l'cmpêchent de s'élever vers le Ciel. La Priere eft un des principaux moyens par lefquels cétte Dévotion fe déploye; & nous devons prier fréquemment & avec ferveur, en allant a la Table, parceque c'eft le moyen le plus efficace d'obtenir toutes les autres graces dont nous avons befoin pour être bien préparési Envain ferions-nous tous nos efforts, fi nous négligeons la Priere; ce feroit nous confier en nos propres forces, indépendamment du fecours de Dieu, fans lequel nous ne [. pouvons nous promettre de fuccès; car nous ne Jammes point capables de nousmêmes  Chretiennes. Ssiï. VII. 217 mêmes de pen/er quelque chofe, comme de nous-mêmes, mais notre capacité vient de Dieu. Sollicitons-le donc avec ardeur de nous foutenir par fa grace, afin que nous puiffions venir a fa Table fi bien difpofés , que nous ayons part aux biens qui y font accordés è tous ceux qui s'en approchent dignement. Telles font les faintes difpofitions avec lefquelles nous devons venir a ce Feftin Sacré, c'eft: en quoi confifte ld robe de noces dont il faut être revêtu, fi 1'on ne veut éprouver le fort du convive de la Parabole, qui fut jetté dans les tinebres de debors, oü il y a pleurs x & grincemens de dents. Car, quoiqu'aujourd'hui 1'on puifle deraeurer aflïs a la Table Sacrée fans en être arra» ché, Saint Paul aflure qu'on y mange 6f 1 boit fa propre condamnation ; & quoi-i' qu'il foit incertain en quel tems on en reffentira 1'efFet, on ne peut fe fouftraire a ce malheur, fi on ne le prévient par la repentance; & on ne peut douter qu'il ne nous expofe a des peines infupportables, car qui d'entre nous pourra fijourner avec les ardeurs itir- ' nelles ? Nous n'ajouterons plus, h ce que nous avons dit fur les devoirs qui précédent la Communion, qu'un Avis. C'eft que fi quelqu'un, après avoir fait un mür examen de fon cceur, ne croic pas pouvoir encore fe rendre un O y bon Mat eb. Kil. 13. Cor. XU Efaïa (Xiii. m  si8 Pratique des Vertus bon témoignage, & que par conféquent il doute s'il eft en droit de venir a la Table du Seigneur, il ne doit pas s'en rapporter encierement k lui • mêrae. Car fi c'eft une ame vraiement humiliée, que le doute agite, il fe peut qu'elle fe juge avec trop de rigeur. Si, au contraire, ce n'eft pas la fon cas, il eft è craindre que fi elle ne cherche 1'éclairciffement de fes doutes que chez elle-méme, elle ne fe juge trop favorablement. Quel que foit notre état, fi nous participons a la Sainte Cene dans 1'incerticude a eet égard, «ous nous engageons de plus en plus dans les doutes & les fcrupules, fi ce n'eft dans Ie pêché. D'autre cóté, fi 1'on s'abftient de Ia Communion, parceqa'on eft incertain fur fon état, & que les craintes qu'on a foient fans fondement, c'eft fans raifon qu'on s'éloigne de ia Table, & 1'on fe privé des avantages qu'on y pouvoit rccueillir. Puifqu'il y a donc tant de danger a fe tromper foi-même , nous fouhaiterions, comme nous 1'avons dit, qu'on ne s'en fiat pas k fon propre jugement, mais que 1'on confult&t un Pafteur distingué par fa piété & par fa difcrétion, & que 1'on fuivfc fes directions; parcequ'il y a de Tapparence qu'il feroit mieux en état de juger de i'écat de notre confcience, fi nous le lui expofions fans déguifemenc, que nous ne le pon-  Chretiinkis. Só&. VU 219 d pouvons faire nous - mémes. C'eft auffi I Je confeil que 1'Eglife (AnglicaneJ ld donne dans fes Exhortations avant la i Communion, qui portent que s'il y a ê^Jfions, ne profpérera point; muis queX. celui ^ui les confeffe & les abandonne, ,, obtitri- Priere» Pro». C v1u. Ij»  322 Pratique des Vertus Ijcsn II. j ï Pierre II. li. *!>tth. 3ü. 2J. ,, obtiendra mifiricorde. C'eft a cette ,, miféricorde que nous avons notre ,, recours par Jefus-Chrift, qui eft la .,, propitiation pour nos piel is , dans le deffein fincere de ne plus en abufer* „ Nous avons formé en bien des ocj, caiions des réfolutions d'obfervcr tes commandemens, mais elles ont „ été foibles & paffageres; qu'il n'en „ foit pas ainfi de celles que nous „ prenons , qu'elles foient fermes & ,, durables. Pour eet effet, fais-nous ,, fentir la néceffité de mettre incef- famment la main a Pceuvre, & 1'in,, térêt que nous avons a renoncer a ,, ces paffions , qui font la guerre d ,, nos ames. Que ton Efprit Saint pu- rifie nos cceurs & y habite défor„ mais ; que foutenus par fa vertu puiffante nous travaillions avec fuc,, cès è afFermir notre foi, a entrete„ nir notre humilité , a enflammer ,, notre charité; qu'ayant toujours „ devant les yeux Pexemple de notre ,, divin Sauveur , nous apprenions de ,, lui d être dibonnaires ö" humbles de „ cceur. Fais-nous la grace, Seigneur, „ qu'après npus être examinés avec toute Pattention & toute la fincérité „ requifes, & avec un defir ardent de ,, faire notre devoir , nous puifiions ,, éviter la févérité de ton jugement, „ en nous jugeant nous-mêmes, Exau- js ce-  Chretienhes. Stel. VIL zaï ce-nous, Dieu de charicé, pour Pa„ mous dc Jefus-Chrift ,con Fils notre 53 SauveurI,Amen". III. Apres avoir développé les de-: voirs que nous devons remplir avant' que de nous approcher de Ia Table du! Seigneur , il s'agit d'indiquer ce quec nous devons faire en participant a la' Sainte Cene. Premièrf.mënt , quand nous fommes arrivés è la Table, humiüons-nous « reconnoiffons combien nous fommes mdignes dc 1'honneur d'y êcreadmisdans cette vue, rappellons-nous devant Dieu quelques-uns des plus grands & des plus énormes péchés donc nous nous iommes rendus coupables, Ia violation des vceux que nous avons tant de fois renouvellés en pareille occafion , & furtout de ceux que nous avions faits k notre derniere Communion. Méditons enfuite les fouffrances ameres de Jefus-Chrift, qui nous font recracées dans ce Saeremenc. A la vue du pain rompu, fouvenons-nous i comment fon facré corps a été déchiré par des cloux fur la croix; è Ia vue dit vin verfé, fou venons -nous comment Ion précieux fang y a écé répandu; difons-nous a nous-mêmes que ce mer notre foi, en confidéranc la mort ! de notre Sauveur, comme le facrihce : offert pour expier nos péchés, appai- ■ fer la colere de Dieu, nous afiurer de ! fa grice, & nous rendre les objets de: fa miféricorde. Demandons a Dieu. avec foi, mais humblement, de vouloir accepter la fatisfaction de cette ( innocente viftime, de fon Fils bien - ai-i mé, de nous pardonner, en confidé-: racion dc fon mérice, nos péchés, oei d'écre encierement récoacihé aveci nous. El€  OïT R E f i E N N E S. Sed. Vil 2g$ r_ En troifieme lieu, faifons rcfflexion fur ces mémes objets, pour rendre nó■ tre reconnoiffance vive. Penfons 4 Ia honte & aux douleur* que Jefus1 Chriil a foufFert , & rappeilons-nous I lurtout Jes cruelles angoiffes de fon I ame, qui lui arracherent ce cd amer: $ mon Dieu! mon Dieu! pour quoi nï as-Ui v \\ abandonni? En confidérant qu'il n'a | fbuftert ainfi que pour nous etnpêcher >t de pénr, nous fendrons qu'il nous eft I ïmpofiiblc de reconnoïtre digrjement i ce qu'il a fait pour nous, & nous taI. cherons du moins de réveiller en nous 1 des fencimcns de Ia plus fincere & de s la plus vive gradtude ; puifqu'un de nos principaux devoirs dans cette oci cafion confifte a louer & a célébrer i cette milêricorde infinie , qui nous a | rachetés a un fi grand prix. Rien de 8 plus convenable par conféquent que i de dire avec David; je prendrai la cou- Pr ipe de délivrance, cjf finvoquerai le norit 12.' { de l'Eternel. j EixoNs'notre méditation fur les i fouffrances de Jefus - Chrift, en quatriei me lieu, pour enflammer notre amour d pour lui, n'y ayant rien qui y foit plus « propre ; parceque 1'amour de notre i Saureur pour nous y brille d'une facon s particuliere, comme le dit Saint Jean: \A ceci nous avons connu fa charité, qu'ilt fcai ia mis fa vie pour nous. Perfonne ne psut^. jmontrer un-plus grand amour , que ce^m: ■ Tome I. P iui. Matth. tvu. 4 CX7I i'tr. :v.i3.  ■*5 PRATÏQ.ÜE Dï» VtKTOf Mttth. V. 46. lui* ei; f avoir quand quelqu'un met fa vh pour fes amis. Jefus-Chrift a méme porte 1'amour plus loin, puifqu'il eft non feulement more, mais qu'il a fubi la mort la plus infame & la plus dou« loureufe , non pour fes amis , mais pour fes ennemis. Si donc, après de pareils prodiges d'amour de foncóté, nous lui refulïons un jufte retour d'amour du nótre, nous ferions pires que les plus méprifables des hommes, puifque les Péagers-mêmes aimtnt ceux qui les aiment. Quels reproches ne devonsnous pas nous faire , de ce que notre amour pour lui eft fi froid & fi languifiant, tandis que fa charité pour nous a été fi tendre & fi ardente! Quels efforts ne devons-nous pas faire pour allumer cette fainte namme dans nos cceurs , & pour porter notre amour jufques è être prêts a imiter fon exemple, en lui faifanc les plus grands facrifices, & celui de notre vie même, toutes les fois qu'il nous y appellera, & que notre obéiflance è fes commandemens nous expofera è fouffrir. Mais en même tems prenons la réfolution de n'entrer dans aucun accommodement avec fes ennemis, & de ne jamais donner entrée dans notre cceur au pêché. Que fi jufques alors nous en avons nourri quelqu'un , faififfons cette occafion de lui donner la mort & de le crucifier; oifrons-k fur le champ en  Chretiennes. Sttt, VII. 227 en facrifice k celui qui s'eft facrifïé pour nous , & donc le but principal a été de nous racbettr de toute iniquiti. Faifons vosu folemnellement de renoncer è tous nos péchés, & furtout a ceux oii nous fommes tombés le plus fréquemment; & pour être en état de 1'accomplir , demandons ardemment a notre Sauveur crucifié, qu'il lui plaife, par la vertu de fa mort, de mortifier & d'éteindre nos paffions criminelles. Lorsqüe nous allons recevoir le pain óc le vin confacré , fouvenonsnous que Dieu nous offre le fceau de la nouvelle Alliance , qu'il a rraicée avec le genre humain en fon Fils. Car puifqu'il nous donne ce divin Sauveur I dans le Sacremenc, il nous donne avec I lui tous les biens de fon Alliance, le i pardon des péchés, la grace fanccifian! te, & le droit a 1'héritage éternel. Ad! mirons ici la boncé infinie de Dieu, : qui nous communiqué de fi précieux 1 tréfors: mais n'oublions pas que ce n'eft que fous la condition que nous remplirons de notre cóté nos engagemens. Prenons donc la ferme & férieufe réfolution de lui obéir, en élevanc nocre cceur vers lui avec toute la dévotion poffible, pour lui demander de nous faire reftentir la vertu de la mort de Jefus-Chrift. Aussitot que nous avons regu Ie Sacremenr, offrons è Dieu avec tout le P 2 rej rite 11.14.:  i Je:n II. i 228 Pratique dei Vertus recueillement & toute la fenfibilité poffible, nos actions de graces pour un auffi grand bienfait, en les accompagnant de ferventes prieres, pour obtenir les fecours du Saint Efprit, dont nous avons befoin pour accomplir les veeux que nous venons de renouveller. ■ Rappellons nous enfuite que Cbrijl ejl la propitiation, non feulement pour nos péchés, mais auffi pour ceux de tout le monde ; & afin que notre charité s'êtende auffi loin que la fienne, prions pour tous les hommes, & demandons qu'ils puifient avoir part aux fruits de fon facrifice. Recommandons encore a Dieu fon Eglife en général, & celle dont nous fommes les membres en particulier. N'oublions pas de prier pour nos Supérieurs tant dans 1'Etat que dans l'Eglife , pour nos Parens, nos Amis, & pour tous ceux qui fe trouvent dans quelque néceffité. S'il fe fait quelque Collecte pour les pauvres, comme cela fe doit toujours, donnons libéralement felon nos moyens. Ou fi , par la faute d'autrui, ou par quelque circonftance particuliere , il ne s'en faifoit point, mettons a part ce que nous aurions deftiné a ce pieux ufage, ct 1'y employons a la première occafion. Nous devons tacher de nous acquitter de ces devoirs pendant que les autres communient, afin que nous pujs*  Chretiennes. Secl. VU, f22j puiffions , lorfque Jes Prieres pubiiques recommenceront, après Ia dïflribution de Ia Sainte Cene, y pren ire pare avec toute l'Affemblée; ce que nous devons faire avec toute la dévotion poffible. IV. Voyons, en troifieme lieu, quels font les devoirs que nous devons remplir après avoir communié. La première chofe que nous devons faire après être de retour chez nous, c'elt d'offrir è Dieu un nouveau facrifice de louanges, & de le bénir des graces insfbmables qu'il nous a accordées dans le Sacrement , & de le fupplier humblement de nous favorifer toujours de 1'afliitance de fa grace, pour nous mettre en état d'accomplir les réfolutions que nous avons prifes de lui obéir Nous devons furtout implortr fon fecours par rapport aux chofes oli nous avons Ie plus fujet de craindre quelque recbüte, foit a caufe des mauvaifes habitudei que nous avons contraétées, foit a caufe de quelque penchant naturel qui nous y porte. Apre's nous être acquittés de ce devoir, ne nous livrons pa» d'abord i nos affaires temporelles , mais employons le refte du jour en exercices depiété, en méditations, en prieres, cn leétures utiles, en converfations pieufes, en un mot a tout ce qui eft propre è entretenir le feu facré allumé P 3 dans Devoirs iprèa Ia -oinmu. don.  Som. S30 PRATIQUE DIS VERTU» dans notre cceur. Lorfqu'enfuite notre vocacion nous oblige a retourner a nos occupations ordinaires, nous devons nous fouvenir toujours, que nous avons une affaire plus importante encore , qui eft d'accomplir les promeffes que nous venons de faire a Dieu; enförte que, quelle que foit notre profeflion, notre cceur foit occupé de cette grande affaire. Souvenonsnous de tout ce que nous avons réfolu, & toutes'les fois que nous ferons tentés de retourner a nos anciens péchés , faifons réflexion que nous avons fait folemnellemenc vceu d'y renoncer, & pcnfons a 1'atrocité du crime oh nous tomberions, & h 1'affreux malheur auquel nous nous expoferions, fi nous faifions volontairement quelque chofe dc contraire a nos vceux. Car, lorfque nous avons communié, nous avons contracté alliance avec Dieu, & nous avons fait, pour ainfi dire, un traité d'amitié avec lui. Tant que nous y fommes fideles, nous n'avons rien a craindre, & toute la malice des hommes & des Démons ne peut nous mi nuire; car, comme dit Saint Paul, fi Dtiu ejl pour nous, qui fera contre nous? Mais fi nous violons nos engagemens, en nous livrant a quelque pêché volontaire , nous nous déclarons contre Dieu, il devient notre ennemi; & ouand tout 1'Univers concourroit a no- tre ;  Chretiennes. SicJ. VIL 231 i tre défenfe, il ne pourroit nous mettre I en fürcté. Ce n'eft pas tout. Nous nous attiI rerions par-lè un ennemi dans notre I propre fein , c'eft-è-dire notre conI fcience, qui nous accufera & nous feil ra les plus amers reproches. Mais fi I Dieu & notre confcience nous font la. I guerre , nous ne pouvons qu'être exI trêmement miférables, même dans cette I vie, outre une attente terrible de colere V I dans celle qui eft a venir. Si nous [ nous fouvenons bien de ces vérités, il lorfque nous fommes affaillis par quel1 que tentation, nous ne pourrons 1'enli vifager que comme un ennemi perfide, [ qui vient nous ravir notre paix, notre I Dieu <3c notre ame. Et nous fentirons i que d'y préter 1'oreille , ce feroit man1 quer infiniment plus a nos véritables i intéréts , que fi nous recevions chez 1 nous un voleur, qui n'y viendroit que : pour enlever ce que nous avons de plus ■ précieux. 1 Que Pexpérience que nous avons i faite de la bonté de Dieu è nous pardonner, ne nous enhardifie pas a lui faire de nouvelles offenfes: outre que c'eft le comble de la corruption & de l'ingratitude de fe faire un ticre de rellchement de cette miféricorde , qui nous offre le plus prefTant motif a la repentance, plus Dieu nous a pardonoé, di moins avons -nous fujet d'efpéP4 rer éb.X.*?.  2$2 Pratique des Vertus rêr qu'il veuille nous pardonner encore; parceque la grace qu'il nous a accordce aggrave notre pêché, qui en eft Pabus le plus odieux. Un Roi,' qui auroit fouvent pardonnéune offenfe, manqueroit a ce qu'il doit a la justice, s'il continuoit k ufer d'indulgence envers celui qui retomberoit encore dans la même faute, & s'il ne 1'abandonnoit è la rigueur des Loix. II en elt de même ici. Dieu n'elt pas moins jufte que miféricordieux, & fa juftice ne peut manquer de venger enfin févérement Pabus jde fa miféricorde ; or peut-on en abufer d'une facon plus odieufe , que de pécher dans l'efpcrance d'en être l'objet? Ce feroit donc nous tromper miférablement nous - mêmes, que defonderla-deffus 1'efpoir de 1'impunité. 1 h ne fuffit pas que nous foyons attentifs a accorsplir nos vceux, pendant quelques jours, pour n'y plus penfer dans la fuite; nous devons nous cn fouvenir continuellement. Car fi nous les violons , qu'importe que ce" foic plutót ou plus tard ?■ Peut-êire même fe-rend' on a certains égards plus criminel, fi 1'on a tardé a les violer; car fi nous avons tenu nos promeffes li tongremps , c'eft une preuve qu'il ne nous étoit pas impoflible de les garder toujours: qriand donc nous y manqucrons dans la fuite, ce n'eftpoint. par  Chriti'ennes. Seif. Vit 233; par foiblefle, & parceque nous ne pouvons nous en empéchcr, mais par un principe de malice, parceque nous ne voulons pas les accomplir. D'ailleurs 1'habicude d'une vie chretienne doit naturellement- nous la rendre plus aifée, puifque les difficaltés qui s'y rencontrent, ont leur fouice dans les habitudes oppofées. Nous ferions donc inexcufables, fi après avoir furmonté une partie des obftacles, nous fuccombions lachement aux tentations: ainfi nous devons toujours veiller fur nous-mêmes, & éviter foigneufement tout ce qui pourroit nous porter h vioJer volontairement nos vceux, de quelque facon que ce foit. Quoique chacun des vceux de cette nature nous lie pendant toute notre vie, cela n'empêche pas que nous ne devions les renouveller fouvent; je veux dire, que nous devons participer fréquemment è la Sainte Cene; parceque c'eft dans ce Sacrement que Dieu nous communiqué les biens les plus précieux, & que Jefus-Chrift nous a ordonné de le célébrer en mémoire de lui: deforte que notre intérêt & notre devoir nous y obligent également. „ Dieu de Charité! tu nous as fait ,, 1'honnïur de nous appeller bien des fois a ta Table Sacrée , & nous „ nous en fommes approchés. Mais y „ avons nous apportê les difpofitions P j „ que Priere.  t%% Pratique des Vertb» J3«n ï. 20. pr. CXIX. iofi. „ que demandoit cette faint'' action»? „ A ons nous penfé, comme nous le „ üevions, aux pmmeflé.s que .us '.'avions faiies ? Non, Seigneur! & fi nous avons encore le bo- heur de ,, pouvoir réparer le paffe, c'tft a ion fupport paternel que nous en forn4, mes redevables. Fais-nous la grace „ de mieux connoftre & de remplir „ plus fidelement notre devoir a 1'avenir. Que toutes les fois que ta „ nous inviteras a nous affeoir a ta „ Table, nous nous humiliyons dans „ le vif femiment de notre indignité ; ,, nous penfions avec Ia plus amere „ douleur aux péchés par lefquels nous avons contribué auxfoufFrances „ de notre bon „Sauveur ; & foyons intimément perfuadés qu'il eft 1'A,, gneau qui 6te les fichés du Monde. „ Que la vue de fon immenfe charité „ excire notre reconnoifiance , enflanv „ me notre amour, & nous fafie prendre Ia réfolution d'être' déformais fidele.» a ton Alliance. Ne permets s, pas que les occunations du tVionde j, nous falfent perdre de vue notre ,, grande affaire , qui eft d'accomplir „ pos vceux j & de faire voir que fi ,, nous t'avons juri a'obj'erver les or„ donwv>ces de ta jujtice, nous fommes ,, auffi fcrmement dérerminés è le te„ nir ; & que bien loin de nous nréM valoir de ta miféricordc pour t'of-  Chretiennes. Secl. VUL 435 „ fenfer, elle eft pour nous un en„ couragement a t'obéir tous les jours j, de notre vie. Exauce-nous, Pere ,, Célefte , pour 1'amour de ton Fils „ bien-aimé! Amen". SECTION VIII. I. Du Re/peel dü au Nom de Dieu, ö des Pécbis qui y font contraires , telt que font le Blafpbême, les Sermens faux ou téméraires. II. Du Purjure. lil, Des Jurernens. IV. Moyens de fe garantir de ce picbê. V. Quel eft le respect dü au Nom de Dieu. I. "N^TOus devons enfin honorer Dieu JL > en refpeEtant fon Nom , dans ros penfées, dans nos paroles & dans nos actions. Nous comprendrons aifément en quoi confifte le refpect qui eft dü au Nom de Dieu , en examinant par quels péchés il eft deshonoré; parceque ce fera le vrai moyen de lui témoigner notre refpect, que de les éviter. Le premier eft le Blafpbême, qui confifte a parler mal de Dieu, dont le plus haut degré eft de le maudire. On s'en rend auffi coupable, lorfque, fans 1'exprimer par fes paroles, on nourrit des xx. JOURNÉE. Dn Refpect dft au Nom de Dieu , & par quels péchés on le déshonore. U Blifphême.  236 P.-ATIQJBE DES VlRTl/ff Rorru IL 24. Les Ser mens illégilimes. des penfées qui déshonorent Dieu; parceque, connoiffaat le cceur de tous les. hommes, il regarde des penfées de eer o'dre comme un des plus grands outrages. On blafphême auffi Dieu par fes actions, lorique faifant profesfior, de le fervir, 1'on vit d'une maniere déréglée , tellement qu'on donne occafion aux autres hommes de concevoir des idéés indignes de celui que 1'on reconnoït pour fon Mafcre & fon Seigneur. C'eft de cette forte de blasphême dont parle Saint Paul, quand il dit a ceux qui font profeffion d'obferver Ia Loi, que par leur conduite vicïeufe ils font caufe que le nom de Dieu ijl blafpbirni par mi les Gentils; c'eft-adire , qu'ils penfent defavantageufement de Dieu, comme s'il favorifoit Ie pêché, quand ils voient que ceux qui fe qualifient fes ferviteurs, s'abandonnentau vice. On deshonore le Nom de Dieu, en fecond lieu,par les Sermens faux, ét par le. Sermens vains tjf timéraires. 11 y a deux cfueces de faux Sermens, les uns pour affirmer une chofe , les autres pour confirmer une promeffe. Les premiers confiftent a affufer avec ferment qu'une chofe eft arrivée de telle ou telle maniere, tandis que 1'on fait que ce que 1'on affkme n'eft point »rai: c'eft-la fe rendre coupable directemenc de parjure; on tombe mé-, me  ChrEtiEnnes. SetJ. F1IL 237 me clans ce crime, lorfqu'on aiirme comme certaine une chofe donc on doute, quoiqu'elle puiffe être vniie; car en ce cas la on jure au hazard, puirque 1'on fait que ce qu'on allure peut être faux; & 1'on ne doit jamais faire de ferment, qu'on n'ait une parfaite certitude de la vérité de ce que 1'on attefte. A 1'égard des Sermens par lefquels on promet certaines chofes, ils peuvent être faux, foit dans le tems qu'on let.fait, foit après les avoir faits. Le ferment eft faux, fi lorfqu'on le faic on n'a pas deffein de le tenir, ou fi on 1'entend dans un autre fens que celui oh 1'on fait que le prend la perfonne a qui on le fait; car le but du ferment étant d'aiïurer ceux a qui on le fait, qu'on accomplira fes promeffes, il faut 1'entendre dans le fens oh nous favons qu'ils Ie prennent. D'autre có* té, quelque finceres que nous foyons en faifant un ferment, fi nous le violons dans la fuite, nous fommes parjures. Puisque Ie Sermenc par fa nature nous lie a uo cel poinc, il nous importe extrêmemenc de prendre garde que la maciere de nos fermens foit légicime; aucremenc nous nous engageons dans un cerrible piege. Par exemple, fi Pon faic fermenc de cuer quelqu'un, on devient meurcrier fi on Paccomplic,  «33 Pratique des Vertos & parjure fi on ne le dent point; deforte qu'on fe met dans la nécefiité de pécher, quelque parti que 1'on prenne. Mais il n'y a rien qui nous aflujettifle davantage k cette malheureufe nécefiité, que de faire deux fermens diamétralement oppofés. Par exemple,fi on promet avec ferment de donner tout fon bien k quelqu'un, & qu'cnfuite on s'engage de Ia méme maniere è le donner ou tout ou en partie è un* autre , il eft évident qu'il faut manquer a 1'un ou a 1'autre, & devcnir parjure , puifqu'il eft impofiible d'accomplir les deux fermens oppofés. C'eft-lè le malheur oh fe jettent tous ceux qui font des fermens contraires a ceux qu'ils ont déja faits: & c'eft-li une forte raifon pour engager les perfonnes qui aiment Dieu , & qui ont leur falut a cceur, a ne jamais fe mettre ainfi dans la malheureufe nécefiité de violer quelqu'un de leurs fermens. Que fi 1'on demande ce que doit faire une perfonne qui s'eft engagée de cette maniere par des fermens oppofés? Nous répondons , qu'elle doit d'abord fe repentirfincérement de s'être rendue coupable en faifant un ferment illégitime , & s'en tenir enfuite k celui qui eft jufte; c'eft-lè tout ce qu'elle peut faire pour réparer fa faute, & pour fe mettre en état d'en obtenir lc pardon devant Dieu. II,  CüRlTlBNHIS. Stil. VJll 83P II. Ce que nous venons de dire, fait Connoftre fuffifamment les diverfes efpece» de Purjure; nous ajouterons feulement quelques réflexions póur faire voir combien il eft odieux, & jufques a quel point il deshonore le Nom de Dieu. Tout ferment confifte a prendre folemnellement Dieu a témoin de la vérité de ce que 1'on dit: c'eft donc lui faire le plus grand outrage qu'il eft poflible , que de 1'appeller a témoin fur une fauffeté; puifque c'eft fuppofer une de ces deux chofes; ou qu'il ne fait pas fi nous difons vrai ou non; ou qu'il eft difpofé i favorifer nos menfonges. Par la première de ces fuppofitions, on lui ravit un de fes plus glorieux attributs, qui eft la connoifTance de toutes chofes; on témoigne penfet qu'il eft auffi aifé a tromper que le plus ignorant des hommes, ce qui eft fans contrtdit le deshonorer; puifque parmi les hommes.mêmes on regarde comme un des plus grands affronts d'être traité comme un efprit crédule & aifé a tromper. L'autre fuppofition eft encore plus injurieufe : s'imaginer que Dieu eft difpofé a favorifer nos menfonges, c'eft 1'en rendre complice; c'eft non feulement le dépouiller de fa Divinité, puifqu'il eft impoffibie qu'il mente , ou qu'il approuve le menfoge dans les autres, mais c'eft encore le faire feinblable au Diable, qui Combien Ic Parjure dcf. ■ouor» Diiu.  Jesm VII] 44' pesTureme»s vnins & lératiaires. Matth. V. 3i—36. 240 P R A TIQU Er.DIS: V E H I Ut . qui eft mentetir 6? U Pere du menfonge; & iln'enfaut pa* davancage pour'prou» ver aue c'eft le plus grand outrage que Pon puiffe faire a Dieu. QuE.fi quelqu'un dou*oit encore que ce péclié foit fi odieux, qu'il pefe mOreincntce que Dieu lui-même en dit dans le troifieme Commandement, oh il déclare folemuellemenc, qu'il ne tiendra point pour innocent celui qui aura pris fon nom en vain: cette menace, ajoutée a ce feul commandement, indique affez que lc pêché que Dieu défend.eft undes plus odieux devant lui. Si 1'on jette les yeux fur le Chap. V. du Prophete Zacharie, on y verra que Je chStiment eft proportionné a 1'atrocité du crime , & qu'il ne va pas moins qu'a la ruine entiere non feulement de celui qui le commet, mais de fa maifon même. D'oh il réfulte que tous ceux qui ont a cceur leur bonheur temporel & éternel, ne peuvent 1'éviter avec trop de foin. III. On deshonore encore le Nom de Dieu par les Juremens vains &f tèmè' raires , qu'on mêle dans fes difcours ordinaires, & que Jefus-Chrift défend expreffement: Mais je vous dis moi, ne jurez point, ni par le Ciel, car c'eft le tróne de Dieu; nipar la Terre, car c'eft le marebe-pied de Jes pieds; ni par Jér u/ahm, car c'eft la ville du grand Roi. Tu. ne jur er as ptint auffi par ta tite, car tu n?  Chretiennes. Sed. VUL 34,1 ne peut faire un cbeveu blanc ou noir, Nous voyons dans ces paroles, qu'il ne nous eft pas feulement permis dé jurer par aucune Créature, è caufe de Ja relation qu'elles ont a Dieu; c'eft donc,a plus force raifon, un grand crime de profaner fon fainc Nom par des juremens vains & téméraires. Ce pêché, par je ne fais quel charme du Démon, eft devenu fi commun & comme a la mode, qu'il faic de jour en jour de rapides progrès, & que peu de perfonnes s'en garantiffent. JVIais fouvenons-nous que, lorfque nous comparoicrons devanc le cribunal de Dieu, & que nous ferons appellés k rendre compce de la profanation de fon nom, ce fera envain que nous alléguerons la coucumeou la mode: au contraire, c'eft une circonftance qui aggravera nocre fauce, d'avoir appuyé par nocre exemple une coucume criminelle, au-lieu de nous y oppofer & d'en arrêcer , autant qu'il nous étoit poffible , le cours. .En effet, quoi qu'en penfe ce fiecle profane, c'eft un pêché trés atroce:ü oucre qu'il eft directemenc contraire au" précepte de Jefus-Chrift, il prouve qu'on a crès-peu de refpect pour Dieu, & qu'on penfe baffement de lui; car toutes les fois que nous jurons, nous le prenons a témoin & pour juge de la vérité de ce que nous difons: & Tme L Q goni, Combien s fonterslinels.  :fi'4a Pratique des Vertus comme fa Majefté eft infinie , le refpect qui lui eft dü , ne permet pas d'en appelier h lui que pour des chofes d'une grande importance, qui intéreffent fa gloire, ou quelque avantage confidérable du prochain. Mais ce n'eft pas Ie cas quand nous jurons en converlation , les chofes les plus frivoles faifant alors le fujet de nos fermens; il arrivé même que 1'on jure pour des fujets fi vains & fi méprifables, qu'un homme fage rougiroit d'en parler feulement. Or n'eft-ce pas témoigner un injurieux mépris pour Dieu de 1'appcller folcmnellement pour juge fur des chofes de néant? 11 eft le fouverain Roi du Monde; & quoiqu'on s'adreffe a un Roi dans des affaires fort importantes, quel Prince ne fe croiroit infulté, fi on 1'appelloit a décider les différends qui naiffent entre des enfans dans leurs amufemens ? Et il eft eertain que plufieurs chofes fur lefquelles on jure, ne font pas de plus grande conféquence, preuve bien évidente qu'on ne refpecte pas Dieu autant qu'on le devroit. En .«econd lieu , 1'habitude de jurer conduit directement au Parjure; quand on s'eft rendu Ie ferment fi familier , on fe portera vraifemblablement aux fermens les plus refpedtables, fans attention & fans réflexion: car comment ceux qui jurenc a chaque in- ftact  Chretiennes. Sect. VIII. 243 j ftant pourroient- ils conrerver le moinI dre refpect pour le Serment ? & s'ils" i ne fe renderit pas coupables de parjuI re, c'eft un effet du hazard, & non Ie 1 fruit de leurs foins a 1'éviter. D'ailI leurs, quand on a 1'habitude de jurer,I on eft non feulement dans la difpofi) tion prochaine de fe parjurer , lorf1 qu'on eft appellé folemnellement a ferJ ment, mais on fe parjure, felon toutes les apparences, fouvent dans lei :l juremens vains & téméraires qu'on fe ü permet. Car en faifant la fuppofition la plus favorable, s'ils échappent fans i qu'on y penfe, quelle certitude a-t1 on que 1'on ne ment point auffi ? & fi 1'on ment en jurant, on eft néceflairemcnt parjure. Auffi eft-il certain que fi 1'on examine avec quelque foin i les jureurs de profeflion, on s'apperCevra qu'ils fe parjurent trés-fouvent,' car ils font ferment fur des chofes fauffes, comme fur celles qui font vraies, fur celles qui font douteufes, comme lur celles qui font certaines: c'eft cc que reconuoitront, je m'aflure, ceux qui, coupables de ce pêché, fe donneront la peine de s'examiner fans pré. vention. En troisieme lïeu , c'eft un pêché auquel ni le plaifir ni i'intéréc ne portent. La plupart des autres péchés nous féduifent par 1'un ou par 1'autre' de ces motifs,mais ici rien de feroblaq 2 Me j  244 Pratique des Vertus ble: deforte que 1'on fe damne fans en retirer aucun avantage. Le feul qu'on puiffefe propofer, c'eft d'être cru lorsqu'on afftrme quelque chofe par ferment : mais bien loin d'en recueillir ce fruit, il n'y a pas de gens dont on fe défie davantage que des jurcurs de profeflion; & ce n'eft pas fans raifon. Car pourquoi fe perfuaderoit • on qu'un homme , qui ne fait pas fcrupule de profaner le nom de Dieu, s'en feroit de mentir ? L'empreflement même k conflrmer les moindres chofes par ferment, donne lieu de foupeonner que c'eft un voile dont on fe fert pour cacher la faufleté de ce qu'on affure, deforte que les jureurs d'hibitude ne peuvent compter fur le feul avantage qu'ils pourroient fe propofer; car ils n'en peuvent prétendre aucun autre : enforte que c'eft ici un pêché qui eft fans excufe , puifqu'on n'y eft porté par aucun attrait capable de tenter i c'eft donc témoigner pour Dieu autanc de mépris que d'ingratitude , que de 1'offenfer ainfi fans raifon ni motif. Ce qui prouve que, quoique 1'on regarde ce pêché comme trés - léger, depuis qu'il eft devenu fi commun , il s'en faut de beaucoup qu'il ne Ie foit ni en lui-méme ni aux yeux de Dieu. Que ceux qui ont eu Ie bonheur de le garantir de cette criminelle habitude, veillent donc fut eux-mêmes, pour  Chretiennes. Stel. FIII. n\y j pour en éviter jufqu'aux premiers prin\ cipes; & que ceux qui fonc aflez malheureux pour y être engagés, y re| noncenc fans déiai , s'iis onc a cceur i leur falut. Qu'on ne dife pas qu'il eft bien difficile de renoncer a une vieille habitude: bien loin que ce foit-!a une excufe, au contraire, plus 1'habitude ! eft enracinée, cc plus on doit fe hater I de la vaincre, en faifant réflexion [ qu'on n'a que trop longtemps vécu I dans le pêché a eet égard. Si la force I de 1'habitude a augmenté la difficulté, i c'eft une nouvelle raifon de travaiiler i a y remédier promptement , de peur j que la difficulté ne fe change en impos\ fibilité: & plus on y trouve de diffi; culté , plus on doic être diligent a ; faire foigneufement ufage des moyens 1 qui peuveut contribuer a y faire réusfir. IV. Premierement , il faut fe péS nétrer de ce qu'il y a d'odieux dans ee ; pêché, fans fe regler fur ce qu'on en; ; penfe communément dans le monde. Quand on en fentira bien toute la grandeur, il faut confidérer le danger auquel il nous expofe, puifqu'il nous privé de la faveur de D;eu, cc qu'il ne peuc manquer de précipiter pour iamais ceux qui y perféverent, dans les abimes de 1'Enfer. Cette réfiexion feule fuffiroit pourmunir contre ce pêché, fl 1'on s'en occupoir férieufement. CaiQ 3 je Moyens ie 'aincrel'bi- licude d« uier.  »,0 Pratique des Vertus je voudrois bien demander a ceux qu alleguent qu'il leur eft impoffible de fe corriger de cette habitude, 11 la crainr te ne les empêcheroic pas de jurer, fuppofé qu'ils fuffent affurés que le premier ferment qui leur échapperoit, leur coüteroic Ia vie ? Je ne puis me perfuadcr qu'un homme , dans fon bon fens, ne füt affcz maitre de foimême pour s'en abftenir en pareil cas. Or comme la damnation éternelle eft bien plus redoutable qu'aucun fuppiice temporel , la raifon demande que la crainte de nous expofer aux peines de 1'Enfer, nous rende plus circonfpects , que celle de quelque fupplice que ce foit. Ce qui empêche que cecte conlidération ne faffe 1'impreftion qu'elle devroit, c'eft ou que 1'on ne croit pas bien fermement que ce pêché nous damnera, ou que fi on le croit, on envifage ce malheur comme fi éloigné , que 1'on n'en eft pas fort affeccé : mais 1'une & 1'autre de ces penfées eft égalemect mal - fondée. La première , parceque tout homme qui perfévere volontairement dans quelque pêché que ce foit, eft en état de damnation, & par conféquent que s'il perfifte dans celui dont il s'agic ici , c'eft-la fa condition. A 1'égard de Ia feconde , on peut fort bien fe tromper , en regardanc la damnation comme fort éloignée; car qui peut s'af- furcr  Chretiennes. Scel. VIII, 247 furer qu'il ne recevra pas le coup de mort, au moment qu'il aura le ferment a la Souche? & quand même il pourroit compter que ce danger ne le me. nace point, la damnation éternelle eft toujours le plus terrible des malheurs, quelque éloignée qu'elle foit. Un fecond moyen, c'eft d'être parfaitement véritable dans tous fes difcours, afin que tout le monde nous croie fur notre fimple parole ; puifqu'alors nous n'aurons jamais befoin d'avoir recours au ferment, pour pcrfuader la vérité de ce que nous difons: ce qui eft le feul prétexte par lequel on puifië colorer Phabitude de jurer. Elf troisieme lieu, il faut examiner foigneufement ce qui nous porte principalement a ce pêché; fi c'eft le vin, la colere, la compagnie ou 1'exemple d'autrui , ou quelque autre caufe; & fi 1'on a véritablement deflein de fe corriger, il faut éviter les occafions qui nous y engagent. En quatrieme lieu , on doit ticher de penfer continuellement i Dieu avec le plus profond refpect, parceque fi L'on en contracte 1'habitude, elie détruira bientót celle de profaner fon faint Nom. N'en faifons jamais mention dans nos difcours, même les plus ordinaires, fans élever notre cceur vers lui: évicons avec foin de 1'employer Q 4 fans  Pf,CXLI.; Que' eft I rrfp 'ct dü an Nuni de Dieu* rr.xcix.s priere. 248 Pr atiq.ue des vertus fans néceffkc: c'eft en nous accoutuinanc a refpecter de cette maniere le nom de Dieu, lorsqu'il eft feulement nommé, que nous aurons un excellent: préfervacif contre la profanation qui 5'en faic dans les fermens, Kn cinquieme lieu , il faut veiller amdumenc cc conftammenc fur foi-méme pour ne pas picber par Ja longue; puifque fans cela tous les autres moyens feroient inutiles. Enfin nous devons avoir recours a la Priere , & demander ardemment è Dieu, qu'il nous faffe la grace de nous corriger de cette criminelle habitude, ou de nous en préferver, en difanc .avec David: Éternel, mets une garde d ma boucbe, rjf garde le guicbet de met Itvres. Si de nocre cóté nous employons les moyens néceffaires, Dieu ne nous refufera pas auffi fon fecours. Veuillet-il en fa grace faire connoïtre è tous ceux qui font coupables de ce pêché, combien i! eft odieux! : V. 11 eft aifé de comprendre, par Ie dérail oh nous fommes entrés fur les differentes manieres de profaner le Nom de Dieu , en quoi confifte le respect que nous lui devons: il s'agit d'éviter foigneufeinenc fous ces péchés, par un principe de vénéracion pour ce faint Nom, qui eft grand, merveilleux 6? faint. 3, O Dieu! dont le Nom eft grand, mci>  Chretiennes. Seèr. VIII. 249 ,, merveilleux & faint , nous te fep. j, plions de nous faire Ia gvace de le ,, refpecter, comme nous le devons. j, Infpire-nous un amour dominant „ pour la vérité , afin que nous ne ,, nous en écarcions jamais. Pénétre,, nous d'une profonde vénération ,, pour ta Majefté , afin que fi nous ,, fommes jamais appellés a rendre cé3, moignage fur quelque chofe que ce „ foic, ou è confirmer nos promeffes ,, par ferment, nous nous fouvenions ,, que , jurant par le Dieu de virité, ,, nous ne pouvons nous écarcer de la ,, vérité, fans te faire le plus grand ,, des oucrages, & fans nous expofer ,, è ca jufte colere. ,, RKNDs-nous prudens & circon„ fpeóts a eet égard, afin que nous ne ,, tombions pas dans la tencation (Sc ,, dans le piege, Ne permets pas auffi, ,, Seigneur, que nous foyons afiez „ corroropus pour prendre ton Saint „ Nom envain dans nos difcours ordi,, naires, par légéreté, par coutume, „ ou pour nous conformer aux ufages du fiecle. Que remplis d'une reli„ gieufe crainte , nous penfions tou„ jours a cette terrible menace, que ,, tu ne tiendras point pour innocens „ ceux qui auront manqué au refpect „ dü a ton Nom. O Dieu 1 mets une ,, garde a notre boucbe, £f garde le 3, guicbet de nos levres: nous te le deQ 5 rnan-  550 Pratiqüe des Vertos mandons au nom de Jefus - Chrift ,, notre Sauveur. Amen". XXI. Jou» niïe. De l'Auo ratiün. De la Priere er 'le les ^iK-rciues fardés. SECTION IX. L Be VAdora'tion düe d Bieu : oü 1'on traite des diffirentes parties de la Priere. II. Bes Prieres publiques, tant ■dans 1'Eglife, qu'en Familie. III. B.s Prieres particulier es. IV. Des avan~ tages de la Priere. V. Bes conditions de la Priere. VI. Be l'objet & de l'efficace dt la Priere. VU. Be la Repentance. VIII. Bu Jtüne. • I. T TN des devoirs les plus indifpenfables auxquels nous fommes obligés envers Dieu, c'eft l'Adora. tion, par laquelle nous faifons parriculieremenr. hommage, a fa Majefté fouveraine; & comme 1'adoration n'ap* partient qu'a lui feul, ce devoir eft de la derniere importance : il confifte a adorer Dieu intéricurement de 1'efprit, & extérieuremenc du corps. L'Adoratioh intérieure confifte dans la Priere, dans laquelle Pame s'adrefïe a üieu, & qui a diverfes parties, felon les objets donc il s'agic. D'apord il y a la Confeffion, qui confifte a reconnoftre nos péchés devant  Chretiennes. Secl. IX. 251 vant Dieu, tant en général qu'en par. ticuüer. La confeffion généraLe eft cel? le oh nous avouons que nous fommes pécheurs, fans entrer dans aucun détail. La confeffion particuliere confifte a fai? re 1'énumération de nos péchés & de leurs divers acces. La première doit toujours faire partie de nos prieres folemnelles, tant publiques que particulieres: la feconde convient plus proprement k la priere du Cabinet; & plus on la réitere, cc mieux on s'acquitte de fon devoir. 11 feroit même très-utile de nous rappeller, dans les prieres fecrettes que nous faifons tous les jours, quelques-uns des plus grands péchés que nous avons a nous reprocher, quelque long-temps qu'il y ait que nous les ayons commis; parceque nous ne devons pas penfer que nous pu'ffions les trop confeffer, &. les dépjorer trop amérement. Cette vive couleur doit toujours accompagner la confeffion ; nous devons étre lincéremenc affligés des péchés dont nous faifons 1'aveu, & reconnoftre de tout notre cceur notre extréme indignité h eet égard. Car le but de notre confeffion n'eft pas d'inftruire Dieu de no» péchés, il les connoit mieux que nous ne les connoiffons nous-mêmes; mais de nous humilier, éc tant qu'elle n'a pas produit eet effet, nous ne devons pas nous flatter qu'elle foit falutaire. L*  2^2 Pratique des Vertus La feconde parcie de la Priere confifte a demander a Dieu tout ce donc nous avons befoin, tanc pour 1'ame que pour le corps. Nous devons demander pour nos ames le pardon de nos péchés, pour 1'amour de JefusChrift , qui a verfé fon fang afin de nous 1'obtenir; & folliciter en même rems la grace & Paffiftance du Saint Efprit, pour nous rendre capables de renoncer a nos péchés, & de rendre a Dieu 1'obéiffance que nous lui devons. Et a 1'égard de ce dernier article nous devons demander en détail toutes les vertus, telles que la Foi, l'Amour,le Zjle, la Pureté de cceur, la Repentance cc les autres vertus de cette efpece, mafs furtout celles qui nous manquent. Hous devons donc examiner attentivemenc quels font nos befoins, óc a quels défauts nous fommes le plus fujets. Sommes-nous orgueüleux? demandons avec ardeur Phumdité; fommes-nous portés a 1'impureté? demandons la chal'teté: cc ainfi de toutes les autres graces, felon que nous trouvons que nous en avons befoin. Dans tout ce qui concerne 1'ame, nous devons toujours pricr avec beaucoup de ferveur, folliciter même avec importunité, cc ne pas nous rebutcr , en penfant que Dieu ne nous exauce point, parceque nous n'obrenons pas d'abord ce que nous lui demandons. Quelque longr temns  Chretiennes. SeB. IX. 253 temps que nous ayons follicité une grace fans 1'avoir obtenue , ne nous laflbns pas de prier, mais recherchons plutöt d'oh vient que nos prieres fonc 11 infruclueufes: examinons fi ce n'eft pas nous mémes qui mettons obftac!e a leur fuccès. Nous demandons peut être a üieu de nous donner la force de furmoncer cel ou tel pêché, tandis que nous ne le combactons jamais, & qu'au-lieu d'y réfifter , nous cédons lachement toutes les fois que 1'occafion s'en préfente , que même nous nous expofons volontairement a la cencation. Faut-il être furpris après cela que nos prieres foient fans fuccès tandis que nous y mettons nousmêmes obftacle ? Corrigeons - nous donc a eet égard, faifons fincérement touc ce qui dépend de nous, & ne craignons point que Dieu nous manque de fon cóté. Nous devons auffi prier Dieu pour nos corps, & lui demander les chofes néceffaires è la vie: mais il ne fauc les lui demander que dans la mefure que fa fageffe jugera nous convenir Ie mieux. N'encreprenons jamais de régler nous-mêmes notre portion, ni de demander cecte opulence & ces grandeurs, que notre cceur naturellement vain pourroic nous faire defirer: contentohs-nous de prier Dieu de nous placer dans la condition qu'il connois la  254 Pratique des Vertos la plus propre a nous faire répondre aux deux grandes fins de notre vie fur 1a Terre, qui font de le glorifier & de fauver nos ames. La Priere confifte, en troifieme lieu, a demander a Dieu de détourner quelque rnal de deflus nous, foit le mal moral j qui eft le pêché , ou le mal phyfique , qui én eft la peine. C'eft furtout le premier dont nous devons prier Dieu de nous garantir ,: en le fuppliant de vouloir par la puiflance de fa grace nous empêcher d'y tomber. Quels que foient les péchés pour lefquels nous nous fentons Ie plus de penchant , demandons ardemment a Dieu de nous en préferver : c'eft ce qu'il faut faire tous les jours, mais furtout lorfque nous fommes expofés a quelque violente tentation , & en danger de tomber dans le pêché : c'eft alors que nous avons fujet de crier comme St. Pierre , quand il fentit qu'il enfonCoit dans les eaux; Stigneur, fauve-nous; car nous périjjons! & que nous devons prier Dieu humblement de nous délivrer de la tentation, ou de nous donner la force d'y réfifter, parceque ni 1'un ni 1'autre n eft en notre pouvoir. Nous devons encore ticher de détourner par nos prieres les peines du fiéché, & furtout les peines fpiritueles, telles que font la colere de Dieu Contre nous, Ia privation de fa grace &  Chretiennes. Stel. IX. 255 | & Ia damnation éternelle. Ce Tont-lè I des maux dont nous ne pouvons folI liciter avec erop d'ardeur d'être garanI tis. II nous eft permis auffi de prier j Dieu de nous épargner les peines temI porelles , c'eft-a-dire, les affiidtions extérieures , pourvu que ce foit avec j une parfaite foumiffion è fa volonté, I en imitant 1'exemple de Jefus-Chrift I lui - méme, qui difoit, 72072 point ct que je veux, mais ce que tu veux. I La quatrieme partie de la Priere eft l'interceffion, qui confifte a prier les uns i pour les autres: c'eft ce que nous de' vons faire pour tous les hommes en ; général , tant pour les étrangers que | pour ceux que nous connoiflbns, mais 1 furtout pour ceux avec lefquels nous , avons quelque relation particuliere; I pour nos Supérieurs dans 1'Etat cc ! dans PEglife, pour nos Parens & nos I Amis. Nous devons prier auffi pour 1 les AfHigés, & particuiiérement pour : ceux dont les afflidlions nous font connues. Nous devons même prier pour 1 ceux qui nous ont offenfés, qui nous : méprifent & nous perfécutent; c'eft ce que nous commande exprelTément Jefus-Chrift, & ce dont il nous a donné lui-même 1'exemple Ie plus frappant, en priant pour ceux qui le cruciSoient : Pere, pardonnt-leur. Nous devons nous intéreffer pour toutes ces différentes perfonnes, comme pour nous- Matth. xxvi. 3*. M«ttfr, v.44. r.uc * XXIII. 34.  256 Pratique des Vertus nous-mêmes, & demander a Dieu pour elles les mêmes graces que nous follicicons pour nous, de leur accorder, felon leur état & leur vocation, toutes les bénédidtions fpirirueiles & temporelies dont elles ont befoin, & de détourner de defius elles tous les maux* les garantir du pêché & des peines qu'il attire. La derniere partie de la Priere eft l'Atlionde graces, qui confifte è louer & k bénir Dieu de tous fes bienfaits, tant fpirituels que tèmporels, envers nous & envers ceux qui nous appartiennent; envers 1'Eglife & 1'Etat dont nous fommes les membres & les citoyens; & envers le Genfe-humain en général. A 1'égard des graces fpirituelles, nous devons d'abord le bénir de celles qui nous font communes a tous: telles font le don qu'il nous a fait de fon Fils, 1'envoi de fon Efprit, & tous les moyens qu'il a employés pour ramener les pécheurs a lui. Fnfuite nous devons le louer des bienfaits qu'il nous a accordés a nous eri particulier , comme font d'être nés dans le fein de fon Eglife, d'avoir été élevés dans la Religion Chretienne, & d'avoir eu par-lè 1'avantage précieux de jouir de fa Parole & de fes Sacremens; enforte que , fans y avoir eri rien contribué de notre part, nous avons eu en raain les moyens de par- vë«  Chretiennes. Seè. IX. 257 venir a Ja vie éternelle. D'ailleurs il n'y a perfonne qui n'ait regu enccre de Dieu d'autres graces fpirituelles, qui méritent toute fa reconnoiffance. Telles font particuiiérement, fa patience envers nous, nous ayant laiffé le tems de nous repentir de nos péchés , au - lieu de nous retrancher, quand nous les avons commis. Les invitations a la repentance, qu'il nous a adreflecs, non feulement par le miniftere extérieur de fa Parole, mais encore par les luggeftions intérieures de fon Efprit. Et fi nous fommes du nombre de ceux en qui ces invitations ont produit, avec le fecours de la grace, defalutaires effers, en les faifant renoncer k une vie profane & mondaine pour mener une vie chretienne, nous fommes obligés d'une facon toute. particuliere a célébrer fa bonté, comme lui étant redevables de la plus grande de toutes les faveurs. Nous ne fommes pas moins tenus k lui rendre grace de fes bénédictions temporelies, tant publiques que particulieres: Ia profpérité de 1'Ecat & de PEglife , & les délivrances fignalées qu'il a accordées k Van & a 1'autre font du premier ordre: les biens dont nous jouifibns, la fanté, la nourrkure, le vêtement, les amis, & autres avantages de cette efpece, les foins de la Providence , qui nous garantie de Tom /. ■ jr, mlla  ïj8 Pratique des Vertus Des Priere publiquet. mille dangers, qui nous a délivrés de divers grands périls, font des bienfaits Ëameuiiers, donc nous devons louer 'ieu. II eft impoflïble de marqter en détail coutes les graces que chacun a recues de Dieu, parcequ'elles different en degré & en tfpece, felon les perfonnes qui en font les objets. Ce qu'il y a de cercain , c'eft que les moins favorifés le fonc affez, pour devoir confacrer toute leur vie a bénir Dieu. 11 feroit encore crès-ucile, que chacun Fit réfiexion fur les diverfes circonftances de fa vie, & fur les bienfaits qu'il a recus en différens tems; & qu'il en formÉlt comme un catalogue, du moins des principaux , qu'il les eüc toujours préfens, pour les rappeller fouvent devant Dieu dans les fentimens de la plus profonde reconnoiffance. i II. Nous devons vaquer è la Priere tant en public qu'en particulier. En public dans 1'Eglife , oh nous nous réuniffons pour adreffera Dieu les prieres qui nous intércffent tous. On doit être d'autant plus affidu a ces prieres publiques, que Dieu a promis fes. graces d'une facon particuliere è celles que les Fideles lui préfontent en commun. Ceux qui, fans raifon légitime, négligent d'y affifter, & en général aux exercices publics de Dévotion, fe retranchent eux "mêmes de la com-  CHÏltTltNNES. St&. IX. 259 I communioa de 1'Eglife , & s'infligenr. | volontairement la plus févere peine, I qu'eile peut exercer envers les plus j coupables pécheurs; ce qui eft une 1 haute folie. I Une feconde efpece de Prieres pu1 bliques, font celles qu'on doit faire en i familie. Chaque Chef de familie eft refponfable è Dieu du falut des ames | qui font confiées è fes foins. 11 eft j méme difficile de concevoir comment : on peut eutretenir un vrai fentiraenc f de Religion dans une maifon, fans des ü exercices réglés de Dévotion. Rien :' n'eft plus propre a porter les enfans & ü les domeftiques a s'acquitter de leurs ! devoirs : & c'eft un excellent moyen i cPattirer fur eux la bénédiccion de Dieu , que de fe réunir chaque jour en corps, pour célébrer fes glorieufes perfectious, & pour lui demander les graces dont il» ont befoin. Nous ne devons pas oublier de nous acquitter de ce devoir en prenant nos repas: il faut demander h Dieu de bénir les alimens qu'il nous accordé pour notre fubGftance, puifque c'eft par fa parole cc par la priere qu'ils font fanctifiés. La Religion Naturelle mêrae nous apprend a reconnoftre les bienfaits que nous recevons; nous avous d'ailleurs fur ce fujet 1'exemple de Jefus Chrift & de fes Apótres. Tous les Evangéliftes rapportent que notre SauR 2 veur  aób P*atiq_ue des Vertu* Att.XXVII. 35- iCor.X.ji. De la Priere du cabinet. Ou doit prier Préqueiiiruenr. veur béniffoit Dieu, & lui rendoit gra« ces, dans ces occafions. Saint Luc !e rapporce de Saint Paul, & eet Apótreen parle comme d'un ufage commun de 1'Eglife parrai les Chretiens de fon :ems. III. La Priere du cabinet eft celle qu'on fair. en fon particulier dans Ia retraite, & hors de la vue des hommes: on peut y entrer dans un plus grand détail de fes befoins, qu'il ne convient de le faire dans les prieres publiques. La régularité a afïïfter a celles-ci, ne difpenfenullement des autres: elles font également néceffaires, & c'eft fe faire illufion que de vouloir compenfer par les unes 1'omiflion des autres. li y a tout lieu de penfer, que ceux qni font aflidus au Culte public, & qui négligcnt les Dévotions particulieres,cherchent plus la louange des hommes que celle qui vient de Dieu: d'ailieurs ils péchent contre 1'ordre exprès de Jefus»Chrift au Chap. V!. de St. Matthieu, qui nous prefcrit de prier en fecret notre Pere, de qui feul nous devons attendre notre récompenfe, & non des vains applaudiflemens des hommes. Nous devons nous acquitter fréquemment de ce devoir, du moins le matinee le foir; parcequ'il eft très-néccffaire que nous commencions & finiiïions nos occupations , quelles qu'el-  Chretiennes. Seft. IX. $6i qu'elles foient, en faiftne hommage è Uieu , non reulcmenc pour nous acquitter de ce que nous Jui devons mas pour notre propre intérêt, puisque nous ne pouvons efpérer de fuccès « de lürete, qu'en nous mettant fous la proceéhon: pouvons-nous ne pas trembler a. 1'idée des dangers auxquels nous fommes expofés jour & nuit k moins qu'il ne nous prenne en fa gar2eV& q,u'J'ntnous couvre de 1'ombre delesailes? Nous devons vaquer a la P^,ere^1p!uï fré(Iuei™ent qu'il nous eit poflible, k proporcion de notre loilir & de nos affaires: & par les affaires , je n'entends pas celles que nous nous nous faifons nous-mémes fans nécefiité, maïs les occupations indifpeniables de notre vocation, qui ne permettent pas toujours de faire des prieres en forme, Cependant ceux qui ont le moins de loifir , peuvent au milieu de leur travail élever- fréquemment leur cceur a Dieu par-de courtes invocations. Quant aux perfonnes qui ont plus de loifir, elles font auflï naturellement obligées de donner plus de tems k lexercice de la priere. Oue ceux qui en trouvent aflez pour feVlivrer aux difïïpations & aux vanités du fiecle, pour fatisfaire même leurs pasfions cnminelles, n'alléguent point qu il leur manque pour vaquer a la priere, mais plutór qu'ils travaillent a R 3 ra-  flrja Pratique des VErtü> Eph. v. 16. . Priere. racbeter le tems, qu'ils ont mal employé , en confacrant a Pavenir a ce faint exercice une portion plus confidérable de leur loifir. „ Pere de miféricorde! qui nous as, „ non feulement permis, mais com- mandé de te préfenter nos requêtes, „ pourrions-nous négliger de profiter „ de ce privilege, & de t'obéir dans ,, une chofe dont nous avons tant ,, d'intérêc de nous acquittcr ? Nous fommes de miférables pécheurs, qui t'avons offenfé , ét qui t'ofFenfons ,, chaque jour: quelle raifon de nous „ humilier devant toi, pour te confef„ fer nos péchés, t'en témoigner no„ tre douleur , & pour implorer tes „ compaffions ! Expofés è mille be„ foins difFérens, fpirituels 6: tempo„ reis , a qui aurions-nous notre re„ cours, fi ce n'eft è toi, qui es le „ Difpenfateur de tous les biens? En,, vironnés de dangers de tout ordre, de qui pouvons-nous attendre du ,, fecours, pour rious garantir du pé„ ché, & nous mettre a couvert des „ maux qu'il attire, fi ce n'eft de toi ,-, feul , qui peux faire avec efficace en „ nous & pour nous , au • Aela de ce que ,, n^us pouvons demander & pen/er ? , Obligés de nous intéreffer au bon,, heur de nos prochains, comme au ,, notre propre, c'eft è toi que nous , devons les recommander. Comblés M de  Chretiennes. Secl. IX. 26"; de tes bienfaits, quelles louanges „ ne devons -nous pas t'offrir? „ Fais-nous la grace, ö Dieu , de i ,» proportionner nocre zele dans la priere au befoin que nous avons de j ton fupport, de ta proteécion , de j iy ton fecours; de nous acquiccer de ,, ce devoir avec joie en public, dans „ nos families, en particulier, au miï j, lieu même de nos occupations tem,, porelles", & qu'en te préfentant >, nos requêtes au nom de Jefus-Chrift - j, notre unique Médiateur, elles , „ foient exaucées felon fes promeffes. i Que la mèditation de nos cceurs, rj? les „ paroles^de nos boucbes te foient agréa, ,, bles, ó Eternel, notre Rocber fff notre Rédempteur. Amen". IV. Si nous failions mürement réiiexion fur les Avantages de la Priere, i nous fentirions qu'il eft de la fageffe de! nous acquiccer de ce devoir auffi fré i quemmenc, que nous Ie faifons raremenc pour 1'ordinaire. Premierement, c'eft un grand honneur pour nous pauvres vers de terre, d'avoir Ie privilege de nous adreffer li hbrement è ce Dieu , donc la majefté eft au deffus des Cieux. Si un Roi permectoic a un de fes moindres fujecs de 1'encretenir familierement, & k toute heure , on regarderoit cette liberté comme le plus grand honneur, & quelque méprifable que eet homme eüc R 4 été, i 'f.XIX. 15. XXII [OURNÉIÏ. e, Avaniges de la rierc.  $64 Pratiqüe des Vertus Ecelefiaftiq XXXV. 18 19. été , il deviendroit 1'objet de 1'envie de touc le monde; & il n'y a pas de douce qu'il n'embraflac avec plaiür toutes les occafions de proficer de cette précieufe faveur. Ceft-lè cependant bien peu de chofe en comparaifon de l'honneur dont nous pouvons jouir, puifqu'il nous eft non feulement permis, mais que nous fommes même invités a avoir commerce, & a nous entretenir avec le Roi des Rois: quel doit donc être nocre empreffement a nous prévaloir d'un fi glorieux privilege? En second lieu, c'eft le plus grand avancage que 1'on puifle concevoir, puifque c'eft par la priere que nous pouvons attirer fur nous coutes forces de bénédiélions temporelies & fpirituelles : il n'eft point de priere, faite avec les difpofitions requifes, qui nc fafle defcendre quelque bénédiction fur nous, fuivant ce beau mot de Jéfus fils de Sirach: la priere de i'humble perce les nuées, £? il n'a point de repos qu'il ne fe foit approché du Seigneur. 11 11e fe détourne point que le Souverain n'y ait eu égard. On eftimeroit heureux un homme qui auroit en main un moyen infailiible de pourvoir è tous fes befoins, quand même il lui encoüteroit beaucoup de peine & de travail: or il ne ticnt qu'a nous de jouir de cec avantage ; la priere eft ce moyen infailiible de  Chretiennes. Sed. IX. 265 de nous procurer, finon tout ce que nous croyons nous être néceffaire , certainement tout ce qui 1'eft en effet, &que Dieu faic nous être utile & avantageux. Bien loin de nous laiffer entrainer a notre indolence a eet égard, confidérons que nous avons fans ceffe befoin que Dieu nous donne des mar* ques de fa faveur, & qu'ii y auroit de la folie a négliger un moyen nefficace de pourvoir t ce qui nous eft nécesfaire. En troisieme lieu, c'eft un devoir qui n'a rien de pénible, & qui eft au contraire trés-agréable. 11 ne demande ni peine ni travail: 1'homme le plus foible, comme le plus vigoureux, peut élever fes yeux & fon cceur vers Dieu, & lui aureffer fes vceux. Ce devoir n'a rien de contraire a nos inclinations naturelles; il ne nous engage k aucune dépenfe , il s'agit feulement de fixer nos penfées fur les chofes céleftes; nous ne pouvons pas même nous plaiudre qu'il nous faffe perdre du tems , puifque nous "pouvons nous en acquitter en travaillant aux affaires de notre vocation. Quelles douceurs ne nous offre pas 1'exercice de la priere? Dieu eft Ia fource du bonheur, il y a des plaifirs d fa droite Pf, pour jamais ;1 deforte- que plus nous nous approchons de lui , pius nous fommes heureux, & que fa préfence R 5 eft XVI. u.  265 P*a!ti'q_üe des Vertos eft même la fource du bonheur dont od jouic dans le Ciel. Or dans cette vie la priere eft le moyen le plus für de nous approcher de Dieu , & par conféquent elle doit naturellement nous procurer de 1'agrément cc du plaifir. Si nous en jugeons autrement, ce ne peut être que par la mauvaife dispofinon de norre cceur, qui eft dans le cis d'un malade, qui a du dégoüt pour les meilleurs alimens. La Priere eft un devoir agréable , mais c'eft un devoir fpirituel; tcllement que fi notre cceur eft charnel, attaché aux plaifirs & aux vanités du Monde, il n'eft pas furprenant que nous ne goütions pas de plaifir dans un exercice tout fpirituel , & que comme les Ifraélites nous méprifions la Manne , & foupïrions après les potées de cbair de 1'Egypte. Lors donc que nous nous fentons de la langueur & du dégoüt dans la priere, défions-noüs de nous-mêmes , pufifions notre cceur de touc amour pour le pêché, travaillons a le mettre dans une difpofition fpirituelle & célefte; cc bien loin de trouver du défagrément dans eet exercice, il nous paroitra une occupation plcine de plaifir. Ne nous plaignons point de la difficulté du devoir, mais de la répugnance cc de la froideur de notre cceur. Une autre raifon qui nous rend quel-  Chretiennes. Selt. IX. 267 quelquefois la Priere défagréabie, c'eft le défaut dexercice. Ün faic qu'il y a bien dei chofes, qui dans les conimenccmens nous paroifTenc pénibles, cc que Phabitude nous rend agréables. Si c'eft la notre cas a Pégard de la Priere, nous n'avons qu'i nous y appliquer plus fréqueiTiment, & c'eft même une raifon qui don nous engager a nous en occuper fouvent. V„ Ce n'eft pas pourtant affez de prier fréquemment , il faut encore 1 prier bien, tant par rapport a la matiere de nos prieres, ou aux chofes que nous demandons , que par rapport a la maniere, c'eft è-dire, aux difpofitions avec lefquelles nous devons prier. Premieremënt, nous ne devonn demander que des chofes juftes & conformes a la volonté de Dieu: ainfi demander que Dieu nous venge de nos ennemis, qu'il béniffe de mauvais deffeins, c'eft demander des chofes injuftes & qui font contraires è la volonté de Dieu. D'ailleurs, il eft des chofes juftes en elles-mêmes, qu'il ne nous eft pas permis de demander , lorfque nous les foüicitons dans des vues criminellcs; alors nous demandons é? ne}* recevons point , parceque nous demandons mal} pourquoi? nous demandons afin de dépsnfer en nos voluptéi. Enfin il peut arriver que nous ne demandons que des Contlitinns la ia Prieie. I. iv. 3.  Mare. XI. 24. *S8 PrATIQUE des VERtüS des chofes juftes en elles - mêmes, dans des vues ïnnocentes & légicimes , & qui ne font pas cependant conformes a Ja volonté de Dieu, ou parcequ'il connoic qu'elles ne nous font pas utiJes, ou qu'il en eft d'autres qui conviennent mieux aux circonftances oh nous nous trouvons: c'eft dans cette claffe qu'il faut placer toutes les bénédiétions temporelles. En fecond lieu, nous devons prier avec foi, felon ce que Jc Sauveur difoit a fes Apótres: tout ce que vous clemanderez en priant, croyez que vous le recevrez, fjf il vous fera fait: cette foi confifte a être fermement perfuadés , que Dieu peut nous accorder ce que nous lui demandons, & qu'il nous 1'accordera pour 1'amour de JifusCbrijl, fi cela eft convenable a fa gloire & avantageux pour nous. Nous devons prier, en troifieme lieu, avec Humilité, fentir vivement combien nous fommes indignes des graces que nous demandons, & par cette raifon nous fommes obligés de les folliciter uniquement pour 1'amour de [efus. Chrift. J L'Attention eft encore abfolument hécefiaire dans Ia Priere; nous devons penfer è cc que nous faifons, & éviter de nous diftraire fur des objets étrangers. La Priere eft un acte de 1'esprit, deforte que fi nous laiftbns er>-er nos  Chretiennes. Secï. IX. ö«p nos penfées, nous nous approchons de Dieu des levres, ce qui' n'eft a fes yeux qu'un hommage qu'il méprife, & qui ne peut nous procurer aucun avantage; qui ne fervira méme, comme Jacob le difoic è fa mere , qu'a nous attirer des malédidlions; puifque c'eft: profaner une des plus folemnelles parties du fervice de Dieu, c'eft fe rendre coupable d'hypocrilie, & témoigner un outrageant mépris pour la redoucable majefté de celui devant lequel nous comparoiffons. D'ailleurs il y a une extréme folie a nous laiflèr encrafner a de frivoles penfées, dans le tems que nous nous préfentons devant Dieu , pour lui expofer nos plus grands intéréts temporels ou fpirituels; de quel droit prétendrions-nous que Dieu nous écoute, lorfque nous ne nous écoutons pas nous-mêmes , qu'il füt attentif k des requêtes, auxquelles nous ne daignons pas penfer? Nous fommes d'autant plus intéreffés è être eu garde contre ces diftractions dans la Priere, que nous y avons naturellement du penchant. Pour les éviter nous devons, lorfque nous nous difpofons a prier, nous pénétrer tel tement de la grandeur & de Ia majefté de ce Dieu devant lequel nous nous préfentons , que nous craignions de nous permettre rien de vain & de frivole en fa préfence. Nous devons encore een. SXV1I. u.  tjo Pratïqoe des Vertos cote faire réflexion fur rimportance des chofes que nous avons è lui demander , parmi lefquelles il en eft de fi nécefiaites a notre bonheur, que fi nous ne fommes pas exaucés, nous ne pouvons qu'ecre les plus miférables de toutes les créatures; & nos diftractions ne peuvent que rendre Dieu fourd h nos vceux. Nous devons auffi implorer le fecours de Dieu d'une facon particuliere a eet égard, & commencer nos prieres en lui demandant de nous faire la grace d'être attentifs & recueillis dans ce faint exercice. Enfin nous devons veiller, autant qu'il nous eft poffible, fur notre cceur, & écarter toutes les diftractions; que s'il nous arrivé d'en avoir quelqu'une , bien loin de nous y livrer, éloignonsla avec indignation , & demandons-en pardon a Dieu. Si nous trsTaillons ainfi Gncérement & avec foin è nous munir contre les diftractions, Dieu nous mettra en état de les furmonter en grande parrie, & il nous pardonnera en fa miféricorde celles que nous n'aurons pu prévenir: mais nous ne devons point nous flatter de Putte ni de 1'autre de ces graces , tant que nous aurons a nous reprocher de la négligence fur eet article. Le Zele & Ia Ferveur eft une cinquieme condition requife dans nos Prieres. Ce n'eft pa,s affez d'y appor-  Chretiennes. Se&. IX. 2?1 ter rattention néceffaire pour favoiY ce que nous demandons, mais nous devons, dans les diverfes parties de nos prieres, être pleins d'ardeur & de dévotion. Ce ne font pas des prieres impuiffantes & froides, qui puifient nous faire obtenir de Dieu les graces que nous follicitons. Nous favons qu'elles ne font aucune imprefïïon fur nous-mêmes; puifque fi un Pauvre nous demandoit 1'aumóne d'un air moqueur, comme s'il lui étoit indifférent de 1'obtenir ou non , nous jugerions ou que fes befoins ne font pas fort preflans , ou qu'il a beaucoup d'orguei), & nous n'aurions'aucun égard a fes demandes. A plus forte raifon devons-nous penfer, que les graces que nous demandons è Dieu , étant d'un tout autre prix encore, nous ne pou. vons efpérer qu'il Jes accordé a des prieres froides & qui ne partent pas du cceur. Nous ne devons pas nous flatter non plus, que nos facrifices de louanges & d'accions de graces lui foient agréables, s'ils ne partent d'un cceur vivement pénétré du fentiment de fes bontés; fans cela ce n'elt qu'une pure formalité, qui ne peut jamais plaire a celui qui demande.Je cceur, & non le fimple hommage des levres. On en peut dire autant des autres parties de la Priere. Nous devons donc, lorfque nous nous approchons dc Dieu, dans  »7» PRATICiUS Dï$ VëRTWs d3ns ce faint exercice, animer notre dévocion , & réveilier autant qu'il nous eft poffible toute notre ferveur, & comme nous fommes par nous-mêmes incapables d'y réuifir, demander a Dieu d'eiiflammcr nos cceurs de fon feu célefte; & quand nous le fentirons allumé, ne permettons pas qu'il fe rallentiffe ou s'éteigne par quelque pêché volontaire, ou par notre négligencc a 1'entretenir avec foin. Nous devons, en fixieme lieu, prisr avec pureté, c*«ft-a-dire, que nous fommes obligés de nectoyer nos cceurs de toute paffion criminélle, de tout pêché; c'eft la penfée de Saint Paul, quand i! prefcrit aux hommes d'élever leurs mairts pures , en priant; & il donne pour cxemple de cette pureté , le foin d'éviter la colere & les dijputts, c'eft-a-dire 'ces querclles & ces contentions aigres, qui font fi communes parmi les hommes. En effet, il eft ccrtain , quequicon que nourrit dans fon cceur du goüt pour ce pêché, ou pour quelque autre que ce foit, ne fauroit ilever des mains pures vers Dieu , & que fes prieres , quelque fréquentes & zélées qu'elles foient, font inutiles, & qu'il ue doit pas s'attendre que Dieu les exauce: c'eft ce que nous enfeigne le Pfalmiste, quand il dit: fi j'eujje penfi quelque outrage en mon cesyr, le Seigneur l Tim. II. 3, Pf. LXVI, .I8- '  Chretiennes. Seiï. IX. 273 gneur ne m'eüt point icouté. Salornon die plus, il allure que les prieres d'un tel homme ïbnc non feulement inutiles, mais odieufes: le facrifice des méebans eft • en abonination u 1'Eternel. Or, que peut-il nous arriver de plus cruel, que de voir que nos prieres nous tournent en pêché? Dela vient auffi que c'eft une des malédiétions qui fetrouvent dans le Catalogue qui fe lit au Pf. CiX. NeF foyons donc pas aiïez ennemis de nousmêmes pour 1'atcirer fur nous, ce que nous ferions certainement, finous préfentions a Dieu des prieres avec un cceur efclave du pêché. Nous devons auffi nous propofer dans nos prieres un butjufte & légitime, non feulement a 1'égard des chofes que nous demandons, comme 011 Pa vu ci-dcffus, mais encore par rapport a Paction même. Nous ne devons pas vaquer a Ia priere, dans la vue d'être loués par les hommes, comme ces hypocrites, dont parle le Sauveur, ni I par compagnie ou par coutume, pour 5' imiter les autres; mais nous devons prier, pour adorer Dieu & lui rendre 1'hommage que nous lui devons, pour témoigner que nous le regardons comme 1'unique fource de tous les biens, & pour obtenir les biens qui nous font néceffaires ou aux autres. Enfin nous devons joindre h tous ces aéles, & ^ COutes ces difpoCcions Tmie I. S d© 'rov.XV.8, f. ClXi imh. VJ,  iCor.VI.2c K.XGV. 6 Objet & El licace c'e 1 Fiiare. 274 Pratique des Vertus de 1'ame, 1'adoration extérieure, qui confifte è fe préfenter devant Dieu dans une attitude décente , humble & refpectueufe , qui exprime les fentimens intérieurs de vénération de 1'ame. C'eftIa une efpece de tribut que nous payons de nos corps , felon l'exhortation de ,St. Paul, de glorifier Dieu en nos corps £? en nos ejprits, qui lui appartienv.ent également, puifqu'il les a créés & rachetés. Souvenons-nous , toutes les fois que nous nous difpofons a la priere , ,de ce que dit le Pfaimifte: Venez, proJlernons • nous, inclinons-mus, c? fiêcbiffons les genou% devant l'Éternel qui lious a faits. VI. Ir. eft évident par tout ce que 'nous venons de dire fur la Priere , qoe c'eft non feulement un devoir auquel nous fommes obligés envers Dieu ,mais encore un hommage que nous ne devons qu'a lui feul, & qu'il n'eft aucun autre être qui y ait droit. Car, fi la priere eft un des principaux actes du Culte que nous devons au Créateur & au Gouverneur du Monde , & un aveu de la dépendance oh nous fommes de lui, il eft inconteftable que d'être invoqué, eft, & fera a jamais, une des prérogatives de fa fouveraine Majefté, qui nc peut être communiquée a aucune créature. D'oh il s'enfuit, que c'eft faire injure a Dieu , d'invoquer & de prier quelque créature que cc foit, quel-  Chretiennes. SeÏÏ. IX. 275 quelque élevée qu'elle puilTe être, même dans le Ciel, foic Anges ou Saints, foit la bienheureufe Vierge même, puifque c'eft rendre a une créature 1'honneur qui n'eft dü qu'a notre Créateur. L'efficace de la Priere doit nous encourager a nous y appliquer : David dit que VEternel eft prés de ceux qui ont pi le emir rompu, qu'il accomplic les de-lf firs de ceux qui le craigncnt, qu'il entendra leurs vceux & les délivrcra; que les yeux de ï1 Eternel font jur les juftes:, & Jes oreilks attentives d leurs cris. Notre Sauveur dit a fes Apótres; quoique vous . demandiez en mon nom , je lef er at; il ré-1 pete même cette prooieflTe,yï kous demandez quelque chofe en mon nom, je le ferai. Ec il ne fauc pas penfer qu'elle ne regard&c que les Apótres feuis, puifque St. Jean nous dit: Mes hien-ahnês, fi notre cctur ne nous condamné point, nous™ avons ajjuratice envers Dieu, & quoi que nous demandions nous le recevons de lui. Demandez, die Jefus-Chrift, & il voust, fera donné; eberebez, & vous trouverez;7 heurtez, & il vous fera ouvert. Car quiconque demande , regoit; quiconque ebtrcbe, trouve; & il fera ouvert d celui qui beurte. Quoi de plus tendre & de plu# confolant que cette promeife! furtout fi 1'on pefe ce que le Sauveur ajoute dans les verfecs fuivans: Qj-dfra l'pom* me d'entre vous qui donne une ikrre d fan fils,. s'il lui demande du pain ? s'il Int S' 2r de- : xxxïv. , 19, 2=i Mll XlVï Jean III; ', 22. imÈ. Vil; ,3,9, 3, li.-  ö76 Pratique des Vertus Priere. demande unpoiffon, lui donnera-t-il un ferpem? Si donc vous, qui êies micbans, favez bien donner d vos enfans des cbofes bonnes, combien plus votre Pert, qui ejl aux Cieux, donnera-t-il des biens d ceux qui lts lui demandent? Nous trouvons d'ailjeur5 dans 1'Ecriture divers exemples de raccompIiOement de ces promesfes: nous n'avons qu'a nous rappeller ceux de Moyfe, d'Elie, d'Elifée, de David , d'Ezcchias , de Jonas & de pluOeurs autres , dont les prieres ont été ex'aucées. Pere Célefle! rous nous préva„ lons du glorieux privilege que tu nous „ accorues de nous préfemer devant ,, toi, & de t'adreïTer nos humbles re„ quêtes. Nous fencons , Seigneur, „ que c'eft pour nous le plus grand „ honneur de jouir de la liberté d'entrer „ en commerce avec toi, & qUe c'eft „ un avantage inefb'mable de pouvoir „ t'expofer nos befoins, folliciter tes „ graces, te témoigner notre refpect, ,, notre reconnoiffance, notre amour, & notre foumiffion. Hélas! nous „ déplorons Pinfenfibilité & la ftupidité „ de notre cceur, qui ne laiffe que trop ,, perdre les occafions de s'élever vers „ toi, ou dont les difpofitions font fi ,, fouvent peu propres a te rendre nos „ vceux agréables. Purifie-Ie toi-même, 3, enflamme notre dévotion; donne- nous defeatif une fainte joie en nous „ ap.  Chretiennés. Set}. IX. 27; „ approchant de tof, d'écre pénétrés de „ ton infinie Majefté, de c'adreifcr noj prieres avec un empreflement pro„ portionné è nos befoins, avec une ferveur que rien ne puifie rallentir, „ avec une attention & un recueille„ ment que rien ne foit capable d'in. ,, terrompre. Ecarté ces diftraclions, „ ces foucis rongeans, qui troublent „ en tant d'occafions nos facrifices fpi„ riruels. Et que de cette maniere nos „ prieres montent devant toi comme „ le parfum,& qu'elles te foient agréa„ bles par Jefus-Chrift ton Fils , au „ nom précieux duquel nous te les pré„ fentons, dans Pefpérance que, felon „ fes promeffes, elles feront exaucées. Amen". VII. La Repentance eft encore un devoir auquel nous fommes indifpenfa-. blement obligés. St. Paul nous Penfei-j gne , quand il Pappelle la repentance en*. vers Dieu: comme il n'eft aucun pêché que Dieu n'ait défendu, nous ne tranfgreffons jamais fes commandemens, foit par rapport k nos prochains, foic par rapport a nous-mémes, que nous n'encourions fa difgrace, k moins que nous ne nous repeDtions. La Repentance confifte k renoncer a pos péchés, & k pratiquer tous les devoirs qui nous font prefents dans PEvangile. Elle eft d'une fi indifpenfable nécefiité, que nous ne pouvons manS 3 quer XXIII 'OÜKNÉE. )e u Relentsnce,lift. XX. 2  27,8 Pratique des Vertus LucXIII. Matth. vi. 34. quer de nous perdre, fi nous la négligeons, felon cette décifion du Sauveur, ï-Ji vous ne vous amendez, vous pirirez tous Jêmblablemev.t. JNous avons déja donné les direótions néceffaires pour s'acquitter de ce devoir, en parlanc de la Préparation a la Sainte Cene. II fuffira d'obferver ici, qu'on ne doit pas regarder la repentance , comme un devoir dont on ne doive s'acquitter que dans des tems de Communion: ce feroit fe tromper. Car comme c'eft Ie feul moyen d'éviter les fuites funeftes du pêché, nous devons en faire ufage aulfi fouvent que nous avons le malheur de pécher, & par conféquent tous les jours. 11 n'en eft aucun oh nous nedevions nous repentir des péchés oh nous fommes tombés, puifqu'il eft vrai de dire a eet égard, comme a celui des autres maux, avec Jefus-Chrift, qu'a cbaque jour fuffit fa peine: chaque jour fournir affez ue fujets a notre repentance: il faut donc compter chaque jour avec nous - mêmes. Mais comme ceux qui tiennent un compte régulier de leurdépenfe, ont de certains tems fixes pour en faire la fólde totale, & pour examiner a quoi elle monte toute , nous devons auffi avoir des tems déterminés pour nous humiber foiemnellement devant Dieu, dans le fentiment de tous les péchés de notre yie, & plus ces tems reviendrorit fré-  Chretiennes. Secl. IX. 179 fréquemment, & plus nous travaillerons utilement a nocre falut. La raifon en eft fenfible : en faifant ainfi fréquemment la revue de nos comptes devant Dieu, nous nous appercevrons des immenfes dettes que nous avons contractées avec lui, ce qui nous humiliera, & nous fera defirer ardemment d'être les objets de fa miféricorde, deux difpofitions particuiiérement requifes pour obtenir notre pardon. Ceux qui pourront deftiner un jour de chaque femaine h cec examen, cravailleronc donc efficacement a leur faluc: & quant aux perfonnes plus occupées, qui n'auront pas le loifir de s'y appliquer fi fouvent, elles doivent néanmoinsle faire le plus fréquemment qu'il leur fera poffible, n'y ayant point d'occupation dont elles puiffent recueillir plus de fruit. Il eft d'ailleurs des occafions extraordinaircs oh nous devons auffi nous acquitter de ce devoir, telles font les tems de caiamité & d'affliction ; c'eft alors que-Dieu nous appellé d'une facon particuliere a la repencance: quand nous fommes attaqués de maladie, en proic a la douleur ou dans 1'iffliction , quand notre ame s'abat en nous, nous fentons toute notre foibleffe ; & olt trouver des reffources , fi ce n'eft en renoncanc a nos péchés ? Car fi nous fommes fourds a la voix de Dieu, nous devons craindre d'être punis d'avoir S 4 wl-'  ftéb.«XII. 280 PR A TIQUE DES VERTUS s.miprifé le cbdtiment du Seigneur. On regarde furtouc comme le tems de Ia Repentance celui de ja mort, & bien des gens renvoicnc ce devoir a cette époque. Avouons-le, c'eft le tems de renouveller fa repentance; mais certainement ce n'eft pas alors qu'on doit la commencer , & c'eft la plus haute folie que de la différer jufques a ce tems • lè ; puifque c'eft au moins hazarder fon falut fur tant d'incertitudes , qu'il n'eft point d'homme lage qui voulut rifqueT de cette facon la moindrc chofe de quelque prix. Premierement , je demande a ceux qui comptent de fe repentir a leur more, comment ils favent qu'ils auront feulement une heure pour le faire ? Ne voyons nous pas tous les jours des gens emportés toot d'un coup? & qui peut s'affurer qu'il ne fera pas dans le cas? Supposons, en fecond lieu, qu'on ne loit pas enlevé par une mort fubite,que quelque maladie nous avertiffe de fon approche; peut-être que nous ne ferons pas attention a eet avertiffement, & que, comme il eft ordinaire aux malades, nous nous flatterons jufques au dermer moment de 1'efpoirde nous rétabhr;enforte que la mort fera toujours imprévue , quelque lentemenc qu'elle t approche. En troifieme lieu, quand même on ponoouroit le danger oh J'on fe trou- ve,  Chretiennes. Seft. IX. aSi ve , qui peut s'affurer de fe repentir alors même? La Repentance-eft une grace de Dieu , qui n'eft pas a notre tiifpofition; & c'eft une conduite auffi jufte , qu'ordinaire è Dieu , d'abandonner les hommes a la dureté de leur cceur, & de ne leur point accorder fa grace, quand ils 1'ont négligée &méprifée pendant long-temps, qu'ils ont réfiité aux invitations & aux exhortations qu'il leur a adreffées. Maïs fuppofons, en quatrieme lieu, que Dieu, par un effet de ia patience infinie, continue a vous offrir fa grace, comment favez-vous,qu'après y avoir réfifté pendant trente, quarante ou cinquante annces, vous triompherez tout d'un coup de votre endurciffement, & ferez ufage de cette grace, qui vous eft offerte? fl eft inconteftable que vousy trouverez moins de difficulté a préfent, que vous ne ferez alors. Car, en premier lieu , plus 1'habitude du pêché aura jet té de racines dans votre cceur, & plus il fera difficile de 1'en arracher. II eft bien vrai, que fi Ia repentance ne confiftoit que dans une fimple fufpenfion des aétes du pêché, le lit de mort y feroit le plus propre , puifqu'alors nous fommes hors d'état de commettre la plupart des péchés; mais il faut bien plus;la vraie repentance rcnferme aufii une entiere haine pour le pêché , & un véritable amour pour Dieu. Oï quelle S 5 ap-  S32 -Pratique bes Vertui apparence y a-t-il qu'un homme, qui a chéri le pêché & l!a pourri dans fon fein durant touc le cours de fa vie , & qui a eu de 1'éJoignement pour Dieu ét pour la Piété, paffe tout d'un coup de 1'amour a la haine; qu'il puiffe hafr le pêché qu'il airrja avec tanc de paflion, & aimer Dieu & la Vercu, qu'il haïffoit aupafavant ? D'ailleurs, les douleurs que i'od fouffre, les angoifles qui accónjpagnent fouvent les maladies mortelles, !a foibleffe du corps, ne nous permeaent gueres de travaiiler a un ouvrage aufli Jifflcilequc la repentance, pour lequel nous avons befoin de toute norre Hgueur. Si 1'on fait reflexion fur ces d'fHcultés, on fentira qu'il y a peu d'apparence que 1'on puiffe faire alors, ce que 1'on ne veut pas entreprendre tandis que la chofe eft bien plus facile. Mais, en troifieme lieu, cè qui eft le plus ècraindre, c'eft que la repentance a laquelle Ia vue de la mort nous porte, ne foit pas réelle & fincere, puifqu'il eft certain qu'eüe naft uniquement de la crainte de l'Knfer;& quoique ce foit-!a une bonne difpófkión, quand on a le tems de la perfeétionner, elle ne fuffic pas feule pour nous procurer le falut, Or Pexpérience prouve que les Repen-. tances au lic dc la mort n'ont fouvent d'autre principe ; on voit plus d'une fois que ceux qui avoient paru fe repencir a la vue d'uae mort prochaine, font  Chretiennes. Secl. IX. 285 font auffi vicieux & quelquefois pires qu'ils n'écoienc, lorfqu'il a plü a Dieu de leur rendre la fanté; preuvc évidente que leur converfion n'écoit pas réelle: d'ou il s'enfuic, que s'ils étoient morts avec cette repentance apparente, Dieu, qui fonde les cceurs, ne 1'auroic pas agréée, puifqu'elle n'étoit pas fincere. En réuniffant toutes ces réflexions, il en réfulte clairement, que différer fa repentance jufques au lit de mort, c'eft expofer fon falut aux plus grands rifques. En vain alléguera-t-on 1'exemple du Brigand converti, fur lequel tanc de gens fe fondent, puifqu'il y a une extréme différence entre fa conduite & la nötre. II n'avoit peut-être jamais entendu parler de jefus-Chrift auparavant; ainfi tout ce qu'on pouvoit attendre de lui, étoit'de le reconnoitre dés qu'il en avoic Poccafion: au-lieu qu'on nous Pa non fculemenc préfenté, mais on nous a preflé dc nous attacher a lui depuis notre enfance, & cependanc nous J'avons rcjecté. Er quand même il p'y auroit pas cette différence , c'eft une bien foible efpérance que celle qu'on ne peut fonder que fur un feul exemple, car nous n'en trouvons aucun autre pareil dans toute 1'Ecriture Sainte. Les Ifraélites furenc nourris de la manne du Ciel, mais ne regarderoic-on pas comme un infenfé, celui qui négligeroic dc. pour- Luc XXIII. 43.  EccleC XII. i, , Da Jeuiu Joël U. ia. i Rois XXI. 27. Jou»* U1.5. sft Pratique des Vertos pourvoir i fés befoins, dans Pattente d un femblabie miracle? Cependant eet exemple n'eft pas moin* concluant que autre; Je finis cec arricie par ces paroles du Sage; Souviens - toi de ton Cria- • teur aux jours de ta jeuneffe, avant que les jours maurais viennent, & que les ans arrivent de/quels tu diras , je n'y trends plus de plaifir. * J ^ • VIII L'Ecriturf. joint ordinairement Je Jkune a la Repentance. On jeunoit fous la Loi dans le grand four des Expiations, comme cela parok*, en comparant le verfet3i. du Chap. XVI t vTr,Vui5u>,avec le5.verfet du Chap. 7 1' / ^-[a:e V& c'étoir Par 1'ordfe exprès de Dieu. Nous voyons auffi que lorfque les Prophetes appelloient le peuple; -è la repentance & a Phumiliation, ils les appelloient en même rems aujeüne; témoin Joël: mainlenant donc aujjt,a dit l'Éternel, retoumez-vous juf. ques a moi de tout votre cosur, en jeüne & enpleurs. Le jeüne a toujours paru un accompagnement fi convenable de 1 humiliation , que Pimpie Acbab luimême lobferva, & que les Ninivites qui étoient Païens, y eurent recours. II n «ft pas moins jufte & agréable a Dieu depuis Pavénement de Jefus-Chrift' qu'il Pétoit auparavant. Nous voyons aue c'eft un devoir, dont il fuppofe que Ion doit s'acquitter quelquefois, puifW il donne des directions pour éviter la ^iaine  Chretiennes. Seft. IX. 28- vaine gloire en Ie pratiquant, & qu'il allure , que lorfqu'on s'en acquitte , non pour plaire aux hommes, mais a Dieu, il le récompenfera. De-Ia vient que les Saints. I'ont pratiqué: Anne fer-] wit d Dieu en jetines fcf en prieres nuit &f jour: dans eet endroit Ie jeüne elt joint a la priere, comme faifanc partie du Service de Dieu. Les premiers Chrétiens obfervoient régulierement Ie jeüne. Quoiqjj'il convienne particuiiérement aux tems d'humiiiation , il n'y eft pas tellement borné, que nous ne devions aulfi le pratiquer lorfque nous avons des graces exrraordinairés è demander a Dieu. C'eft ainfi qu'Ejlber, appellée k travaiiler a prévenir la ruine 1 de fa Nation, obferva avec tous les Juifs un jeüne folemnel ; que quand Paul & Barnabas furent écablis dans 1'Apoftolac , on joignic le jeüne a la 3 priere. Lors donc que nous avons un befoin extraordinaire des lumieres & des graces de Dieu, pour le temporel ou pour le fpirituel, nous ne pouvons rien faire de plus utile que de rendre nos prieres plus fervenres, en les accompagnant du jeüne. C'eft néagmoitus dans nos tems d'humiiiation que nous devons principalement 1'obl'erver, paree qu'outre qu'il enflamme notre dévotion & notre zele, ce qui n'eft jamais plus néceffaire que quand nous implorons Ie pardon de nos péchés, c'eft une es- j'atth. /i. 16. FItli. iv. 6. Aft. xm.  e8<5 Pratique des Vertu* a Cor. Vli. ii. efpece de vengeance, que St. Paul met entre les devoirs de la Repentance. Car, en refufant a nos corps, foit en tout, foit en partie, leur nourriture ordinaire , ou en nous abfienant de ce qui peut flatter foD goüt, nous nous infligeons une forte de ebltiment de nos excès paffes, ou des autres péchés que nous avons è nous reprocher; effet nature! de cette indignation que tout pécheur doit concevoir contre lui-même. Et lans-contredic ceux qui aiment li fort leurs aifes, qu'ils ne peuvent fe réfoudre a fe priver d'un repas, par une efpece de chatiment de leurs fautes, nnontrent qu'ils n'ont pas beaucoup de regrec de les avoir commifes ; & par conféquent qu'ils ne fentenc pas cette fainte indignation, que PApótre roet entre les devoirs de la Repentance, dans le paffage cité ci-deffus. On ne peut douter que 1'exercice de cette fainte vengeance fur nous-mêmes, a caufe de nos péchés , ne foit tièsagrcable a Dieu. II ne faut pourtant pas penfer que le Jeüne , ou quelque autre. ceuvre que nous puiflions faire, foit une fatisfaction pour nos fautes; il n'y a que le fang de Chrift qui ait cette vertu, & cVft auffi par lui feul que nous devons attendre le pardon de nos péchés , (St non par nos ceuvres. Et comme 1'efficace du Sacrifice de notre-" Sauveur n'eft appliquée qu'aux pécheurs vraie-  Chretienne>. Scêï. IX, aSy vraiement pénitens, nous avons aütanc d'intérêt a produire tous les fruits de la Repentance , que ü notre falut en dépendoit uniquement. L'Ecriture ne détermine rien fur le nombre de nos jeünes; c'eft a la pieté de chacun a fe prefcrire a eet égard des regies, felon que fa fanté ou d'autres raifons 1'exigent. Mais comme il nous eft avantageux de nous humilier Je plus fouvent qu'il nous eft poflible, il en eft de-même du jeüne, pour vu qu'il ne foit pas préjudiciable a notre fanté , ni a d'autres devoirs , & qu'il foit une aide a notre dévotion. Car ceux qu'une abftinence totale rend moins propres aux Exercices de piété, doivent régler leurs jeünes de maniere qu'ils ne mettent pas obftac'e au but que 1'on fc propofe en les obfervant, c'eft-a-dire, qu'ils doivent, en prenant quelque nourrirure, éviter tout ce qui pourroit flatter la chair. „ Grand Dieu! qui regardtr d ceux „ qui font offiigés, qui ont'l'efprit brifit & qui tremblent d ta parole , mais ,, qui es un feu confumant pour les pé„ cheurs rebelles, nous fommes con- fus en ta préfence, &nousn'ofons lever les yeux vers toi. Si le nom,, bre & Ja grandeur de nos péchés nous infpire une jufte terreur, 1'in„ fenfibiliré & la durecé de notre cceur „ nouseffrayc encore davantage. Nous „ne Pxiere. Elsïc LXV1. 2.  2ïï Pratique des Vertus &&' „ ne fentons pas comme nous le de„ vrions cette vive & amere douleur „ de t avoir offenfé, cette fainte &pro„ fonde trtjlejje, qui produit une repen„ tance a/tuut, dont on ne fe repent ja„ mais. louche toi-même nos cceurs, „ fais-nous la grace de fentir combien „ nous lommes coupables d'avoir man„ qué è un Bienfaiteur fi généreux, a „ un Pere fi tendrc & fi compatiffai'r; „ combien c'eft une chofe amere de t'a„ bandonner & de violer tes comman„ demens. Accepte nos iacrifices de „ repentance, malgré leur imperfec„ tion, pour 1'amour de Jefus-Chrift; 3, que lef mg de ce charitable Sauveur „ nous vettoye de tout pêché. Donne„ nous de produire des fruits abondans „ de repentance, & de faire ufage de tous les moyens qui peuvent con„ tnbuer a te donner des preuves de „ notre humilité , de la fincérité de „ notre retour vers toi, & t'engager, „ a nous faire entendre cette confolan»? KJ"31*; M°n ma Fille, tes fé„ ctis tt\ font pardonnés. Exauce-nous „ pour 1'amour de notie divin Rédemn»j teur. Amen". F FIN du Tomé Premier.