M   REMAK.QUES sdr TROIS DISSER.TATIONS, ïl'ÏHEIS EN L'AN I78I. p A R IA ÏOCIITI DES SCIENCES ITABLII A riISSINGUI INTITVLEES DISSERT ATIONS, sur l'amelioration ECOLES PUBLIQUES, composees p ar messieurs h. j, krom, Profefieur & Pafteur en cette Ville. k. van der palm, Maltre de Peufion a Delfshaveu. o c. van voo-rst, alors Pafteur a St, Anna ter Muiden. AUXQUELLES ON A AJOUTE LES REMARQ^JES Dl FEU II PROÏISSEÜR NAHUIS, & QüEiC^UES AUTRES, TIREES DE CERTAINS AUTEURS Q^UI NE SONT ÏAS CONNUS, r A r P. F. PERRENOUB, a middelbour g, Chez H. SNEL, Imprimeur de la Ville.   AVER.TISSEMENT, JSien que 1'on n'envifage fouvent les difcours préliminaires que 1'on met a la tête des produftions de ce genre, que comme une rufe de 1'ecrivain pour prévenir le lecteur en fa faveur; je ne faurois cependant me difpenfer de Finflruire de ce qui a donné lieu a eet EiTai, & des motift qui m'ont déterminé a en faire part au public. Dès que ces trois DilTertationsparurent, j'y remarquai, a Ia première lecture, plufieurs chofes trés utiles, qui pourroient contribuer a 1'amélioration des Ecoles publiques des Provinces unies, principalement des Ecoles Hollandoifes, que ces favans Auteurs ont eu particulierement en vue, en conféquence du Programme de la Société, ce qui eft fans doute caufe que quelques uns d'entr'eux ont traité trés fuperficiellement ce qui regarde les Ecoles Fran^oifes, & le peu qu'ils en ont dit, me parut fufceptible de beaucoup d'objections & de remarques ultérieures, de mêmeque plufieurs articles concernant les Ecoles Hollandoifes. • 2  AVERTf SSEMÉNT. C'eft ce qui m'engagea, en parcourant eet ouvrage, de faire par-ci par-la quelques remarques, que j'etendis infenfiblement au dela des bornes que je m'etois d'-abord prefcriu s , fans avoir alors deöein de les mettre au jour, puifqu'elles contenoient la reflitation de plufieurs imputations a fa charge des Maitres d'ecole : m'inia^hvonr que 1'on attribueroit plutót cette démarche a desmotifs d'intérèt perfonnel, qui n!éurenfc jamais de part aux fentimens demon coeur, qu'au lcnable dcfir de contribuer au bien public, en mdiqnant la fource des dëfauts qui ont lieu dans la direélion des Ecoles, de menie que les moyens les plus faciles d'y remédier. Confidérant de plus, que quelque raifonnable qu'il foit de rendre hommage a la vérité, mes róflexions pourroient peut - être déplaire a des perfonnes que la 'prudence me prefcrivoit de ménager. Ne voulant indifpofer perfonne contre moi, & fur- tont des Auteurs dont quelques üns ont acquis tam de reputations parmi les gens de lettres, qui font d'ailleurs refpectables par leurs ta4ens, par leurs vocatiens &parlesPrix que  AVERTISSEMENT. la Société des Sciences a trouvé bon de leur affigner. Mais voyant dans la fuite que perfonne ne daignoit prendre la peine de faire 1'Apologie des Maitres d'ecole, & qu'eux, par leur filence, fembloient palfer condamnation llir tout ce qu'on leur impute, ce me femble, tant a tort; je ne voulus pas différer plus long-tems a faire ufage de mes rernarques , y etant encouragé par des perfonnes qui m'honorent de leur amitié, je les remis a un de mes intimes amis, pour les traduire en Hollandois; lui laiffant ia liberté d'y amplifier & d'y retrancher comme il le jugeroit a propos: liberté dont ii fe prévalut a ce point qu'il les augmenta, nonobftant quelques retranchemens, a peu prés de la moitié, comme il fera facile de s'en convaincre, fi 1'on veut prendre la peine de confronter la Brochure Hollandoife, fur 1'amélioration des ecoles, qui parut 1'année paffée chez K. Snel &lW.A. Keel, Imprimeur & Libraire en cette Ville , avec celle-ci. Avouant franchement que j'ai profité , en divers endroits, des lumieres * 3  AVERTISSEMENT. du Traduóteur, bien fupérieures auxmiennes; mais j'ai eu foin de noter, d'un fimple guillemet, les additions dont j'ai faitufage. Mais quelle imprudence, dira -1 • on , après avoir fourni 1'ebauche d'une brochure, qui, quoiqu'ecrite dans un trés bon but, & marquée au coin du bien public, a eu fi peu de fuccès, qu'a peine les Maitres mêmes favent-ils qu'elle exifle. A quoi bon de s'expofer au caprice ou a Tindifférence du public & a la mauvaife hümeur des particuliers, en hazardant de nouveau cette Brochure, dans un idiome généralement ignoré du vulgaire, & qui, quoique retouchée & augmentée de beaucoup d'obfervations utiles, felon raoi, a 1'education de la jeuneffe, ne fera peut - être pas plus accueillie que 1'a eté la traduction. II eft vrai que ce n'eft pas toujours la bonté infïrinféque d'un ouvrage qui décide de fa deftinée; c'efl plutöt 1'afpecl: fous lequel on 1'ofFre au public, qui le fait accueillir ou rejetter. Rarement réuffit-on lorfque 1'on propofe impartialement des améliorations qui n'ont d'autres motifs que le bien  AVERTISSEMFNT. public & 1'amour de l'humanité. „ II n'eft: point furprenant", dit 1'ecrivain d'un ouvrage périodique, „ qu'un homme qui a le „ courage de fe dévouer a 1'utiÜté de fes „ femblables, n'éprouve que de 1'indifFé„ rence & du mépris. S'il eft. véridique, „ on 1'accufe de pufillanimité; impartial, „ on lui impute de la jaloulie; vif & fm„ cere, on lui fuppofe de 1'aigreur'V On déplait généralement en ne flattant aucun intérêt particulier; mais ce font la de petites mortifications dont on fe confole aifément, lorfqu'on eft animé d'un défir fincere d'être utile a fes Concitoyens. II eft bien plus fenfible de fe voir dénigré par des perfonnes que 1'on refpeóle infiniment, tant k caufe de leur pièté que de leurs qualités perfonnelles, & qu'il importe de défabufer, eu egard a 1'influence qu'elles ont fur les Ecoles de cette Ville. Voila juftement le cas oü nous nous trouvons; II y a des gens qui fe font imaginés que ces Remarques etoient ï'avorton d'un ennemi implacable de Mr. van voorts; ils trouvent que 1'ecrivain s'eft permis des faillies piquante^ * 3  A VERT1SSEMENT. remplies de préfomption & dénuées de folidité. Bien que ce compliment ne foitpointdu tout flatteur, il a pourtant beaucoup contribué, quelqu'incroyable qu'il puhTeparoftre, a ne me plus cacher fous le voile de f anoyme, ce qui les a peut - être induit en erreur. Indigné de 1'audace d'un vil préfomptueux, comme on le nomme, qui ofe apprécier quelques aflertions des Disfertations favantes, approuvées & courronnées par une Société refpectable qui n'a fans doute pas tant fait attention a ce qui pouvoit s'y trouver de défectueux, qu'a 1'utilité qui en réfulteroit pour 1'education de la jeuneffe, fi les Ecoles etoient fur un pied k en pouvoir profiter. Quoi qu'il en foit, je ne m'obflinerai point a me difculper d'ignorance & de préfomption; c'eft au public a en juger, & dès qu'il aura prononcé, j'acquiefcerai, fans murmurer, a fon jugement. • Mais je ne ferai pas fi facile a 1'egard du principe odieux d'animofité, que 1'on m'impute gratuitement. Je procexte, fans craindre que mon  A VER TISSEMENT. coeur me démente, que jamais des motifs fi vils & fi laches ne furent les mobiles qui me dirigerent: il n'eft done nijusteni equitable de m'en accufer. J'ai cru, comme je le crois encore, que les forties violentes du détraóteur des Maitres d'ecole, qui ne 1'avoient apparemment jamaisoffenfé,les farcafmes dont fa Differtation eft farcie > les traits fatiriques qui y font parfemés, méritoient bien qne 1'on y rispoftat fur ce ton. On ne s'eft pas fait, il eft vrai, un fcrupule de rire lorfque le fujet s'y prêtoit, mais on s'eft fait un devoir de ne rien dire qui paffe les egards dus a fa perfonne & a fon caraclere, quelque puiffe d'ailleurs être fa fa9on de penfer au fujet des Maitres d'ecole. Si, par mégarde, cela m'etoit malheureufement arrivé ; j'en ferois mortifié'. il eft vrai, que n'ayant d'abord fait ces Remarques que pour ma fatiffaction particuliere, j'y ai traité quelques articles avec moins de circonlpeétion que je n'aurois fait, fi je m'etois figuré qu'elles duffent un jour paroitre en public. On voudra bien , par cette raifon , confidérer que s'il y a quelques en* 5 '  AVERTISSEMENT. droits un peu vifs, on a cru nécefïaire de ne rien retrancher, & de n'avoir d'autres ménagemens que ceux qui la vérité prefcrits, pour faire fentir, je ne dirai pas le peu de folidité, mais même le ridicule de quelques affertions qui m'ont para abfurdes. Si j'ai tort ce n'eft que pour avoir fuivi, trop a la lettre, un ancien adage qui dit: Celui qui chajje la balie doit s'attendre au renvoi. Mais on ne produit pas fimplement eet ecrit pour difculper les Maitres d'ecole, ce feroit un fujet auquel le public prendroit trop peu de part pour le fatiguer de cela uniquement; quoiqu'il ne lui doive point être indifférent, fi ceux a qui 1'on confie la première education de la jeuneffe font bourrus, fougueux & préfomptueux, un motif plus intéreffant m'y a encouragé. Je me fuis flatté, peut-être a tort, qu'en indiquant la vraie caufe du peu de fuccès de 1'education des énfans du menu peuple; qu'en démontrant que les défauts qui ont lieu dans les Ecoles, fur lefquels on ferecrie tant, ne doivent prefque jamais être mis fur le compte des Maitres, & qu'en-  AVERTISSEMENT. ebauchant un plan fimple & peu couteux l trés propre a reélifier ces défauts, on engageroit probablement les Vénérables Magiftrats a opérer eux-mêmes cette reforme* fi falutaire pour la Société en général, propofée avec fi peu de fruit depuis plus de fept ans. Quoi de plus digne deleurattention! Un Viceroi d'Irlandenerecommandat - il pas 1'année paffée a la rentrée du Parlement de ce Royaume, les EcoJes des Protestans & les autres etablifiemens publiés de charité, comme un objet qui mérite leurs foins & leurs encouragemens; après quoi il ajoute: „ J'efpere que bientót un plan „ etendu & folidement penfé pourlarefor„ me générale de 1'education, fera porté „ au point de maturité nécefiaire pourune „ prompte exécution". On verra, par 1'ebauche du plan que je traeerai ci-après, que cette reforme ne rencontreroit pas tant d'obftacles dans ces Pro vinces, qu'on fe lïmagineroit d'abord, du moins fi Ton veut mettre la mainkl'oeuvre; &c'efl cette flatteufe efpérance qui m'a fait paflér par deffus tons les fcrupules, qui m'avoient tenu juf-  AVERTISSEMENT. ques k préfent en fufpens: avouant en même tems ingénument ^ que je n'ai pas deflein de m'eriger en cenfeur des favans Auteurs de ces Difïërtations, ce qui feroit une préfomption, infupportable de ma part. Je fuis trés perfuadé que ces Meffieurs font trop modeftes & trop inteiligens pour fe croire infaillibles, & qu'ils ne s'offenferont pas qu'une perfonne qui s'eft dévouée, pendant vingt quatre ans confécutifs, au pénible ouvrage d'eduquer la jeuneffe, prenne la liberté de faire quelques obfervations fur leurs Differtations, D'autant plus, qu'elle n'a eu d'autre but, en réfléchiffant fur eet important fujet, que fon inftruftion particuliere , & de contribuer en quelque forte, s'il etoit poffible, a perfe&ionner 1'education nationale. Appellé a rinftruétion de la jeuneffe; quoi de plu? naturel! que de m'occuper de tout ce qui a quelque rapport a unevocation fi utile, & en même tems fi peu confidéréc: vocation refpeclée des Payens & „ vénérée des Juifs", comme le dit 1'Auteur anoöyme d'une Differtation qui vient  AVERTISSEMENT. deparoitrek Jmfterdam, „ qui a pourbut „ le bien - être de la jeuneffe &la profpérité „ des individus, ne fauroit dès-la même „ être trop encouragée par les particuliers, „ ni trop favorifée des Magiftrats". Si 1'entreprife eft bien au defïus de mes forces , elle fe bome cependant a la fpherede mon etat. Si je n'ai pas dit tout ce que j'aurois pu dire , j'ai du moins la fatiffaéti* on de n'avoir rien dit que je ne penfe, & qui ne me paroiffe utile. S'il ne réfulte aticun bien de eet effai; je me flatte qu'il ne nuira pas non plus; ce ne fera , au pis aller, que du papier barbouillé mal a propos , comme cela n'arrive maintenant que trop. Que fait-on? fi cela n'encouragera pas quelque perfonne habile h former un plan d'amélioration plus folide, mieux penfé & plus facile a exécuter. En ce cas, j'aurois bien lieu d'être fatisfait, vu que ma peine ne feroit pas tout a fait inutile. Quelle conjonclure plus favorable pourroit-on défirer ? maintenant qu'on a lieu d'efpérer que le calme, la fubordination & le bon ordre vont être rétablis dans la République. Négligé  AVERTISSEMENT. roit-on la principale chofe qui intéreffe egalement tous les citoyens ? Tous ont un intérêt trés grand a concourir a ce but falutaire qui peut tant contribuer, dans la fuite, au repos & a la tranquillité de la chere Patrie. C'eft de quoi aucune perfonne fenfée ne difconviendra, auffi 1'Auteur anonyme du mode Frangois, imprimé a Londres, en 1786 , exige-t-il d'une bonne adminiftration „ d'avoir foin que les Maitres foient „ revêtus d'une autorité fuffifante pour en „ impofer a la jeuneffe, toujours ennemie du frein, pour 1'amener a cette docilité „ qui eft le premier pas vers 1'education. „ On conduit par la raifon les hommes rai„ fonnables, mais ceux qui ne font pas en „ age de 1'être, ne reconnoiffent fouvent d'autre empire que la néceffité. Cen'eft „ qu'en les contraignanthabilement, qu'on „ parvient a fixer leur attention, a vaincre leur légéreté, a foumettre leur préfomp„ tion. La néceffité de travailler & de „ bien agir leur fait enfin aimer le bien par M habitude, comme la raifon le leur fait  AVERTISSEMENT. s, enfuite aimer par difcerneinent: & 1'ha„ bitude du bien une fois prife ne s'efFace que „ trés difficilement. L'habitude, dit un „ vieux proverbe, devient un fecond na„ turel; & c'eft fur - tout a une education „ vigoureufe qu'il appartient de faire con„ traéter une bonne habitude". Or, pour parvenir k ce point falutaire, il faut un plan uniforme & vigoureux, qui, etant etayé de 1'autorité législative, ait pour bafe la profpérité commune du peuple, & mette les Maitres a 1'abri des foupcons d'agir arbitrairement ou par caprice. II ne fuffit pas qu'il y ait des Ordonnances poxx Ia direction des Ecoles, mais il importe extrêmement, tant pour la tranquillite' des Maïtres, que pour la Satisfaétion des Parens, qu'on les rende pubüques ; ceux - ci exigent fouvent des Maitres des chofes qui y font direftement contraires, ce qu'ils n'auroient garde de faire s'ils en etoient prévenus. N'avons nous pas vu récemment, au delüt de 50. Bourgeois de cette Ville, préfenter une Requête au Vénérable Magiftrat, oii ils fe plaignoient que les vacances etoient trop  AVERTISSEMENT. longues, & fupplioicnt qu'on les remit fur I'ancien pied; tandis qu'il confte par les Statuts de la confrairie que les jours de vacances qui y font fixés, etant combinés, redoubleroient a peu prés les campos qu'on accorde aétuellement aux jeunes gens, ce quj. tourneroit par-la même a leurdéfavantage. — lis fe récrient auiïi, quoique bien ia tort, que 1'ecolage eft trop cher.— J'ai cependant démontré, cïair comme le jour, qu'a peine eft - il fuffifant pour faire fiibfïfter les Maitres d'ecole.— lis demandent par conféquent qu'il foit diminué. — II faut donc que les pauvres Maitres d'école foient la victime de leur impuiflance ou de leur mauvaife volonté; car il y en a, parmï les fupplians, qui font bien a leur aife, qui feroient fans regret, pour fatiffaire leurs fantaifies, des facrifices bien plus confidérables que n"exigè feducation de leurs enfans. Toutefois on ne fauroit diffimuler qu'il n'y en ait quelques uns a qui cette même education eft une charge trés ohéreufe, &qui, pour y fubvenir, autant qu'il leur eft poflible dans leur etat d'indi- gen-  A V E RTISSEMENT. geïice, ne fe privént fouvent, finon du néceffaire, du rrioins des douceurs dont ilê pourroient jouir dans leur etat. Ce projet pare a tous inconvéniehs, fans qu'il en réfulte la moindre confufion dans 1'ordre focial; &il contribueroit certainement a la civilifation du pèuple. ,, Mais il ne „ fuffit pas", dit 1'Auteur anonyme dans ia Diflertatiöh que j'ai déjacitée, „ que 1'on „ défire une chofe; que 1'on fepJaigne des „ difficultés de 1'oliteriir; que 1'on propofe „ même de tbms en tems ce qu'il faudroit ;, faire; ü 1'on ne recherche pas la caufe „ de ces défauts, & 1'ayant découverce, „ fi 1'on n'indique pas des moyens fuffifans „ pour les rectifier". Voila, cher Iecteur, les principauxmo-tifs, fans faire mention des inftantes foilicitatioris de 1'Editeur, qui ont motivé cette brochure; je ferai charmé fi on la trouve aflez"' intéreffante pour juftifler Ia fantaifie qui m'a pris de la mettre au jour, & fur-tout fi elle pouvoit être de quelque utilité. Je ne prétends pas 1'annoncer fur le pied d'une juftification complette des Maitres d'ëfolë |'  AVE RTISSEMENT. ni comme une Diflertation fur 1'améliorntion des Ecoles, mais uniquement comme un recueil de remarques auxquelles les affertions de quelques Savans ont donné lieu. J'ai ordinairement fuivi, quant a 1'ordre, la marche du livre , & j'en ai inferé par-ei par-la quelques fragmens dans cette brochure , pour la fatisfaction de ceux qui n'ont pas les Differtations, en marquant k la marge les pages du livre fur lefquelles mes remarques portent. Je me flatte qu'il paroitra fuffifamment que la caufe principale du mauvais etat des Ecoles, réfulte de la modicité des revenus, que produit 1'inftruction de la jeuneffe dans cette République; de forte que les gens capables veulent rarement s'y vouer; c'est ordinairement le refuge des miférables; d'autant plus, qu'il ne faut prefque ni crédit ni fonds pour commencer. De la réfultent généralement les défauts dont on fe plaint, qui, confidérés en eux - mêmes, doivent néceffairement être corrigés. Mais le nombre n'en est pas fi grand qu'il plait a ces Meffieurs de le fuppofer,& il  AVE R.T ISSEMENT, me paroit, non fans fujet, que 1'on abïen tort de tant inculper les Maitres & les Mai. treffes d'ecole; puifqu'il ne leur est prefque pas poffible de diriger leurs Ecoles d'une autre maniere, ni de fuivre une grande partie des regies prefcrites dans quelques mies de ces Differtations. C'est ce que je me propofe' d'abord de prouver. Secondement, je donnerai une efquiffe d'un plan d'amélioration plus facile a exécuter: vu que les difficültés qu'on eprouveroit immanquablement dans 1'exécution des plans tracés dans les Differtations, font peut être une des principales caufes de leur inéxécution. En 3mlieu, j'indiqueraf quelques changemens utiles qui pourroient probablement s'effeéluerpar les Infpecteurs des Ecoles. II ne me.reste plus qu'a folliciter 1'indulgence du lecteur pour les fautes d'ortographe qui fe font gliffées dans ces remarques, (1) & principalement pour 1'incon** 2 (1) II eftjiéceiïaire d'avertir que je me fuis conforme, quant aux accens fur les c, a la regie fui?anfe, qui me paroit fondée: „ Oo  AVERTÏSSEMENT. gruité du Style; vu que mes occupations m'ont empêché d'y donner toute Tattention néceflaire: ne doutant point que tout défectueux qu'il puiffe être, il ne foit encore asfez clair pour en faifir facilement le fens \ ce qui peut fuffire. ,, On fê dispenfe" dit M. Dom Devtenne dans fon excellente Grammaire imprimée k Paris, en 1786. „ de mettre Paccent aigu furies e quifontaucommen„ cement des mots, & qui font feuls une fyllabe, „ comme elire, eprouver, parcé que ces e etant tous „ fans cxception fermés, il dévient inutile d'employér 1'accent pour le faire connoitre.  REMARQUES sur TROIS DISSERt ATIONS püblieës én I781. Par la Societè Zèlandoife des Sciences ètablie & Fleffingue. I. P A R T I E. I W e pöfe d'abord en fait que les Maitres & les Maitreffes d'ecole font beaucoup moins blamables, qu'on ne veut 1'infinuer dans quelques unes des Differtations & des annotations que nous allons examiner; & que c'eft bien a tort qu'on les y a tournés en dérifion , ce qui me paroit incompatible avee la gravité du fujet que 1'on etoit appellé a y traiter. j'eus déja cette idéé en lifant la 1 7 & la i8e page, ou le Profeffeur krom analife la maniere défeftueufe d'apprendre a lire aux enfans , & de les faire réeiter par coeur, ajoutant enfuite: qu'il feroit bien a fouhaiA  s> REMARQUES sur „ ter que ce défaut n'eüt pas fouvent lieu j, dans les villes, k 1'egard des Maitres & „ des Maitrefles d'ecole, oü 1'on a la cou„ tume de mettre les enfans depuis 4 a 5 „ ans jusqu' k 7 ou 8 ans: il femble qu'ils j, s'imaginent qu'il fuffit que 1'on connoifle „ les lettres, que 1'on prononce les Syllaj, bes 6c les mots entiers de fuite, que c'eft „ Ik ce qu'on appelle lire; comme on fe „ contente auffi quand ils apprennent par s, coeurj, qu'ils récitent fans héüter, quand „ même ils n'y comprennent riert, & qu'ils fautent des mots d'oü dépend tout le fens, „ par oü ce que 1'on entend ne reffemble j, qu'un pur brédouillage ^ ne prenant pas „ même la peine de corriger ces petits dró„ les, s'ils ont un mauvais accent, ou s'ils „ s'accoutumcnt k trainer d'un' ton lamen„ table, ce qui eft aflèz ordinaire k pluj, fieilrs ecoliers lors qu'ils récitent." , J'obferve Ik delfus, que le Profeffeur , ne distingue pas alfez les différens èges , des enfans', & qu'il met fur le compte des Maitres & des Maitreffes d'ecole, ce qui eft ordinairement la faute des ecoliers: cora-  trois Dl SS ERTATIONS 3 bien n'arrive -1- il pas & ceux -ei deretombcr tóujours d *iïs les mêmes fautes, nonobftant qu'on les en ai déja corrigés, pourainfidire, des milliers de fois ? , Les enfans de eet age la font rarement i en etat de comprendre la moindre explicati, on, ils s'attachent uniquément k i'exté, rieur & au fon: il fuffit pour s'en con, vaincre de confidérer les réponfes, tout , h. fait a rebours, qu'ils font prefque tou, jours a dés demandes trés différentes, qui , commencent par les mêmes mots; comme j il feroit facilê d'en citer quantité d'exem, pies s'il etoit néceffaire; mais je meflatte que le Profefleur n'en disconviêndra pas; il j alléguera feulement que c'eft ce qu'il leur , faut apprendre & expliquer, pour lé leur , faire comprendre. i Je répóns, que le jugement \renant ra's rement avant 1'age, il eft prefqu 'impoffible , qué des enfans de 5 ou 6 ans foient fus, ceptibles de comprendre quelque chofe, , dans les Catéchismes les plus fimples mê, mes qu'il y ait: comment peut - on donc ; exiger qu'un enfant de 7 a 8 ans, récite A 2 ■' ■ -■■  4 REMARQUES sur , avec difcernement le Catéchifme de Heh , delberg, que le Profeffeur a fans doute en 3 vue, puis qu'il en parle particulierement , dans la fuite, & qu'il n'y en a prefque point , d'autre que celui ci; dont tout le fens d'une , période puilfe dépendre d'un feul mot' ? Quelque excellent qu'il fok, jenele trouve guere propre pour inftruire avee fuccès des enfans de eet age; je préférerois celui de Mr. van den berg , paree qu'il traite en abrégé des principales Hifloires de 1'Ecriture Sainte auxquelles font jointes quelques réflexions morales a leur portée, propres k leur former le coeur, , en leur donnant en même , tems une idéé de 1'Etre fuprême & de fes , perfections adorables. , II me paroit que 1'on doit être content, , fi des enfans de cet&ge la, entendentfuf- , fifamment le Catéchifme que nous venons , de nommer, ou quelque autre femblable, , pour ne point faire de réponfe contradic- , toire, en donnant, par ci par la, quel- , ques explications fuperficielles; furtout, , lorfqu'on fait attention que la plupart des , Pareus ne fe mêlent point de rinftruftion  trois DISSERTATIONS 5 , de leurs enfans, ce qui est fortblamable; , mais ce n'eft point la faute des Maitres & , des Maitreffes d'ecole. , Et quand même ce que les enfans réci- , tent par coeur ne feroit qu'un pur bré- , douillage, il ne laifferoit pas que d'être , utile, paree que par ce moyenon leur fa- , cilite la leclure, on cuïtive leur mémoi- , re en y inculquant quelque chofe qui leur , eft déja utile, & qui dans la fuite le leur , devient encore bien davantage. , Cependant, je ne disconviens pas que , 1'on ne foit obligé d'emp-cher les enfans , de brédouiller en les ecoutant; maisc'eft , bien fouvent infruélueufement, & il n'y , a certainement guere de Maitres d'ecole, , fi inéxacls, qu'il plait au Profeffeur de le , fuppofer; ils nepeuvent pas toujours faire , comme ils le fouhaiteroient bien, le nom- , bre de leurs Ecoliers eft trop grand, & ils , ne fauroient fubfifter d'un plus petitnom- , bre, le falaire eft trop modique, c'eft , la la fource des défauts comme nous 1'a- , vons avancé. , Le bourdonnement dont le Profeffeur A 3  6 REMARQEüS sur. , fe plaint a la Page i ome eft prcfqu'inévi, table; il importune certainement les Maï, tres, & contribue beaucoup a rendre ce pos, te désagréable; mais c'eft un mal néceflaire , auquel ils font fouvent obligés de conni, ver: car fi 1'on confidere le nombre des , ecoliers, & la néceffité de les faire lire , & epeller leurs lecons, on comprendra , bien qu'il n'eft guere poffible d'cmpêcher , qu'.il n'y ait quelque bourdonnement dans. , une ecole' de 80 h 90 ecoliers , oti il y a un Maitre & un Soiismaitre, quelque fois deux, qui ecoutent leurs lecons & les. leur expliquent; tandis que tous les autres font occupés, foit a epeller , foit k chiffrer cu a apprendre par coeur.. Je n'ai aufu* jamais eu la fatisfaction de remarquer, malgré toutes les peines poffibles, qu'ils s'y accoutumaffent comme d'eux - mêmes, ainfi que le Profeffeur le dit; c'eft toujours la contrainte qui les réduit au filence. II faut faire attention qu'une école ne fauroit être reglée comme un Catéchifme ? oü il n'y en a jamais qu'un qui réponde h !a fois, & les autres doiveut feulement  tro.is DISSERTATIONS 7 ecouter. Les enfans peuvent encore fe contenir tous les huit jours , pendant une heure ou deux que le Catéchisme dure; mais s'ils y devoient aller deux fois par jour, durant des années confécutives, je crains bien h la fin qu'ils ne s'emancipaflènt, & qu'ils ne priffentia liberté (nonobftant les les exhoitations réïterés du Pafteur, & 1'influcnce qu'il, a par fi VQcation fur leur efprit) de caufer< un bourdonnement qui 1'incommoderoit extrêmement, 11 est; vrai que les Miniöres ontunmoyen plus efflcace'. pour fe faire obéïr, que ne le font les chatimens des Maitres, lorsque leurs Difciples les chagrinent trop, par leur malice ou par leur etourderie; c'eft de les renvoyer & de leur défendre de revenir, ils ne diminuent point par la leur revenu. Mais les Maitres ne le doivent faire qu'k la derniere extrémité, & il arrivé prefque toujours, lorfqu'ils y font forcés, que les Parens ou les Tuteurs des enfans congédiés prennent leur parti, & déviennent ainfi des ennemis irréconciliables des Maitres, -auxquels ils nuifent autant qu'ils peuvent. A 4  8; REMARQUES sur ?ag- • Le Profeffeur fait dans ce "paragrapfa l' une defcription de fhumeur emportée, & des chatimens trop féveres de plufieurs. Maitres, qui ne leur eft point du tout fiat?, teufe, , On ne difconvient pas qu'il ne s'en puis-, Ü fe trouver quelques uns fujets a quelque , inégalité , & qui font peut être par fois , un peu trop feveres'; mais je ne faurois meperfuader, que ce défaut foit figénéral, qu'il plait au Profeffeur de 1'infmuer dans eet article, qu'il. termine par un proverbe trés propre a répandre du ridicule fur les Maitres d'ecole: il faudroit des preuves , & quand , même il en citeroit quelques excmples; , dans quelles profeffions ne trouve -1- on pas , des gens de ce earactere. N'y en auroit-il , point parmi les Profeffeurs & les Minis, tres, & s'ils ne le font pas reifentir a leurs , Difciples, n'y en a -t-ilpoint d'echantil, lons dans leurs ouvrages ? N'arrive -t-il , pas aflëz fouvent que 1'un témoigne cons tre 1'autre qu'il eft prompt & emporté, , qu'il le fait bien voir quelque fois dans , des Aflemblées Ecléfiaftiques ? Com-  trois DISSERTATIONS 9 > ment pourra - t-on , introduire une refor, me k eet egard vis - k - vis des Maitres . d'ecole ? II n'eft pas poffible d'en faire , 1'objet d'un examen, quoiqueIa promptitus de & 1'emportement foient des pasfions , trés condamnables a & qui infeétent malheu, reufement plus ou moins toutes les Clas, fes des Citoyens; il n'eft donc pas eton, nant s'il fe trouve des Maitres qui pren, nent quelque fois de 1'humeur en tenant , ecole'. Celui qui a eté parmi la jeunes fe , aura fans doute expérimenté que les enfans font fouvent fi volages, fi défobéïsfans & font fi peu de cas des exhortations réiterées qu'on leur addreffe pour leur bien être, qu'il n'eft point etonnant s'ils echauffent par fois les Maitres d'ecole les plus patiens 6c les plus modérés: car ils font hom mes , 6c leur patience n'eft pas tellement a 1'epreuve qu'on ne puiffe 1'epuifer, Je m'etonne que cela ne leur arrivé pas d'avantage, lors que 1'on confidere les rompemens de tête auxquels ils font expofés. Pourmoi je trouve que 1'affertion du Profeffeur infe^ A 5  io REMARQUES sur rée a la Page 4m egard aucün tort, du moins aux endroks oü , 1'on fait un examen; deux qui ont des , taléns ne devant point p&tir pour ceux , qui n'en ont pas; de forte que les re, proches qu'on leur fait ici, rejailliffent , uniquement fur ces derniers, qui ne man, queront pas d'alléguer, que s'ils ont eu , trop bonné opinioil d'eux - mêmes > ils ne , fe feroient cependant point opiniatrés dans , ce deffein , fi Meflleurs les Examinateurs , les en avoient diffuadés; mais les ayant > au contraire approuvés & protégés, il ne , leur etoit refté aucun doute k ce fujet; & > qu'ils trouvent fort etrange qu'ön veuille  16 RËMARQUES SUR, Pag. 72 jusq. 75- ? acïuellement contefter leur aptitude a tenir , ecole. , Je ne crois pas non plus qu'on puifFe , trouver a redire aux Maitres d'ecole de ce , qu'ils ne fuivent jSas la méthode que le , Profeffeur prefcrit ici; paree qu'elle eft , trop difficile Jur le pied oü font les Ecoles. J'avoue que c'eft un trés bon moyenpour exciter 1'emulation parmi lesjeunes gens, de divifer les Ecoliers par Clalfes, dans les Ecoles oü 1'on enfeignë les Langues etrangeres; mais quant aux Ecoles Hollandoifes, j'y trouve plufïeurs difficultés: car, pourqu'eilesrépondent au but, il faut de tems en tems avanccr ceux qui le méritent, & faire retrograder les négligens, fans cela je ne vois pas qu'elles fuffent d'aucune utilité. Qui eft - ce qui fera cette promotion ? fi c'eft le Maitre, les Parens le taxeront de partialité&d'injuftice. Surquoi fondera -t-il la concurrence ? fur leurs ecritures, dira-t-on, pour les ecrivains: mais eet art eft fort arbitraire, de forte que ce qui agrée a 1'un, n'eft pas dugoutdel'autre. Quant a 1'Arithmétique, il n'y a point d'inconvénient, fi ce n'eft qu'il arrivé fou- vent  TRóis DlSSERTATIÖfïS 2? vent qu'un bon chiffreur eft un mauvais ecrivain, ou un mauvais lecteur, & quel<}uefois tous les deux enfemble; quelle place affignëra - t-il a celui ci? Quedeclameurs! que de mécöntentemens de la part des Parens! II faut auffi confidérer que ces Ecoles font compofées de toutes les Claffes des Citoyéns, il arriveroit fouvént que des enfans de bonne familie fe trouveroient placés entre des poliifons ou des malpropres, ce qüi n'agrëeroit point aux Parens des premiers, «Stpourroit les déterminer a retirer leurs enfans de 1'ecole, de même que lorfqu'ils ne fympathifent pas avec ceux qui fontproches d'eux< Les Maftres ne font déja que trop chagrinés a ce fujet, rionobftant 1'attention qu'ils ont de placer chaque disciple feloh fon rang. , Pour cé qui êft de cette planclie noire, , oü le Profeffeur veut que 1'ori eefive quelt ques lettres oü petites Syllabès avéc dé la 4 craye pour les apprendre aux enfans; je , ne crois pas que cela réuffiffe: ön a affez , de peine de lés contraindrc de re|arder i' dans leurs livres. Combien, a plus forte i' raifon, n'en aura-t- on pas de les obliger B  i8 REMARQUES sur ? k regarder une planche , vers laquelle fis , ne fauroient lever les yeux, fans avoir , occafion de voir par toute 1'ecole ? k , peine les y jetteront - ils, bien qu'on le 9 leur recommande fouvent; & quand mê, me on pourroit les engager a etudierles , Lettres fur cette planche, il n'y en au? roit tout de même pas beaucoup qui put , montrer les lettres de la planche dans , fon Alphabet. , On ne réuffira pas mieux avec ces Let? tres de carton , un enfant prendra 1'u pouf , 1'n, le d pour le p, puisqu'elles font ab, folument la même chofe, fuivant la ma, niere dont on les tient devant foi i le d s'eii , deffus deffous eft p , 1'n eft u 6k:c. On 9 peut, il eft vrai, pour prévcnir eet in, convénient, marquer le deffus & le dess fous des lettres par quelques fignes, mais • il eft auffi diflicile de le faire obferver 5 aux enfans, que" de leur apprendre k , connoïtre la lettre même, & ils s'y ac, coutument tant, que fans cela ils ne la ; connoiffent plus, ne fachant comment la 5 tourner, de forte que rancienne'maniere  tróis DISSËRTATiöNS 19 i eft a eet egard; comme a plufieurs autres, , encore la meilleure: car en employant du jj tems, en ufant de patience, & en faifant , journellement répéter les lettres aux ert, fans, on vient a la fin a bout de les leur , inculquer dans la mémoire. , On cohvient qu'un des rïieilleurs moy, ens pour apprendre a lire aux enfans, c'eft , de les tous faire fuivre daris le même livre, , pendant que 1'uri d'eux y lita haute voix : , auifi cela eft - il béaucoup plus en ufage , que le Profeffeur ne fe 1'imagine; mais il ne faut point le faire, felon moi, tandis qu'il y en a qui ecrlvent, comme il le prétend, ce feroit une directicn trés nuifible, vü que le Maitre ne fauroit être a la fois auprës des ecrivains & de ceux qui récitent, 1'un ou 1'autre dëvroit abfolument en fouffrir: oh rie fauroit être comme dit le prdverbe, au four & au inoülin, D'oü je cohclus, que pendant que les ecrivains font occupés a ecrire, le Maitre ne doit faire autre chofe qu'aider les eommencans, prendre garde qu'ils s'accoütument a bien tenir la plume, & qu'ils aientune bonne attitude en ecrivarit, B 2 Pag. 75 77»  20 RE MARQUÉS sur Pap 6t." regarder les ecritures de ceux qui font plus avancés & leur en montrer les défauts;. en un mot, les faire ecrire tous en général avec atftention & affidüité. II eft vrai que le favant Profeffeur ajoüte dans la page fuivante. 5, Que le Maitre en ecoutant la 2de Claffe, „ jettera de tems en tems 1'oeil furlesecri„ vains pour leur faire tenir la plume com:,f me il faut ócc. S'il y a beaucoup d'ecrivains, une infpection faite fi a la h&te, & tandis que 1'on eft öccupé a autre chofe, nefuffitpas: s'il n'y en a guere, il peut bien facrifier un quart d'heure au moins, pour les inftruire d'un Art fi néceflaire dans ces Provinces. Quoiqué je ne défaprouve point qu'on iaffe apprendre a ecrire aux enfans dé la main gauche; je ne fuis cependant pas du fentiment du Profeffeur, qui veut qu'on les faffe auffi bien apprendre de cette main que de 1'autre. II faut donc qu'ils commencent d'apprendre a ecrire en même tems des deux mains; & je p'rëférerois d'attendre de les faire ecrire de la main gauche, jusqu'a ce  TR.Q.IS DIS SE RT ATI ONS 2* qu'ils fuffent paflablement ecrire de la droice, pour les raifons fuivantes qui me paroiffent trés fondées. 1. Paree qu'ils ont alors la forme des lettres dans 1'idée, ils font en peu de tems des progrës rapides & qui ne portent aucun préjudice üt 1'ecriture de la main droite qui eft la principale;_ mais en lés faifant commencer auffi tót de 1'une que de 1'autre, on les retarde. certainement a 1'ecriture & a d'au^ tres ehqfés néceifaires; puifqu'ils ne fauroient apprendreni.ortographe, nia chiffrer, ni langue, etrangere, avant de favoir ecrire paflablement:. or lorfque 1'on confidere, combien il faut quelque fpis de tems pour. les amener a ce point, malgré toutes les peines que 1'on prend k leur, egard. N'eft-on doficpas en droit d'en conclureque fi jamais cette coutume etoit généralement adoptée, , elle feroit( bien plus nuïfible qu'utile a la jeuneffe ? • 2. Combien n'y a - t- il pas d'enfansdes gens.de baffe condition qui fortent de 1'ecole, même avant d'être en etat d',ecrire lifiblementun fimple billet; de foke que fi B 3  $a RE MARQUÉS sur Pon avoit fuivi avec euxla méthode que le Profefieur prune tant, a peinc iauroient - ils former des Lettres des deux mains, ce qui ne leur feroit pas d'une grande utilité, 3. La main droite etant de la manicre dont nous ecrivons plus propre k eet erfet que la gauche, il s'enfuit qu'on ne doitap-. prendre a ecrire de celle-ci que pour en faire ufage en cas de néceffité, comme le Profesfeur le donne auffi a entendre , ce qui n'arrivêra probablement qu' a un tres petitnombre de perfonnes, & ordinairement pour peu de tems. N'est-il donc pas abfurdede fliire employer aux enfans un teins fi précieux pour apprendre une chofe, dont il e^t fort incertain fi elle leur viendra jamais a point? furtout lorfqu'on peut la leur faire apprendre plus faqilement, & fans préjitlicier aux autres autres genres d'etude d'un ënfant, de la maniere que nous ayons propofée; & c'est auffi la marche qu'ont fuivi ces trois enfans, dont le Profefieur fait niention que 1'ecriture de la main gauche , ne ie cédéit guere k celle de la main droite; ayant tout lieu de croire quec'etoient trois  trois DISSERTATIONS 23 6e mes ecoliers qu'il avoit en vue. L'ainée furtout, qui réuffit auffi mieux que les deux autres, ne commenca a ecrire de la main gauche, qu'après avoir une main kpeu prés formée. On entretient en eux une certaine emulation , en leur faifant comprendre qu'il faut déja être bien avancé a 1'ecriture, avant de fe mettre a ecrire de la main gauche, ils rcdpublent leurs efforts, &parviennent fouyent en peu de tems a avoir une bonne main :, une bagatelle peut quelque fois les y ëncouragcr ou les en dégouter. Au lieu que fi on les fait ecrire trop tot de la main gauche, ils fe négligent de la droite, ce qui fauroit être autrement, &ils n'attrap ent presqne jamais une bonne forme d'ecriture. Tout ce que le Profeffeur ajoute pour etayer fon fentiment, touchant 1'exercice des deux mains, ne décide rien, paree qu'en mille autre cas, on peut s'habituer a fe fervir indifféremment des deux mains fans perdre le moindre tems ., ni nuire en aucune maniere a ce qu'un enfant doit néceffaire* ment apprendre, ce qui n'a pas liéu ici comme je 1'ai toujours remarqué. B 4  Ta^ Pag. «2. 1 5 ; "» j 5 1 } 24 'REM.ARQUËS sur je m'etonne extrêinement que le Profesfeur exige ici d'un Maitre qui a 40 a 50 •ecoliers de tenir un bon Soufmaitre; il eft vrai qu'il pourroit bien 1'occuper, mais ilne fauroit 1'entretenir des revenant-bon de fon ecole, quand même 1'ecolage feroit fixé a 5 o Sols parmois, ce qui feroit un prixexhorbitant pour le peuple. „ Per-fonne ne doit en aucune maniere „ chatier que le Maitre"; de forte que le Soufmaitre qui doit être un hommeTicapable en eft'tout a fait exclu, bien qu'il foit chargé d'inftruire les jeunes" gens, de veiller fur leur conduite & de tenir-1'ordreparui eux; on ne lui accordc cependant pas me autorité fuffifante pour fe faire craindre. 11 nV en a point de capable qui voudra s'engager a ces conditions, &fi quelqu'iyi fe refolvoit a 1'entreprendre, ce né feroit pas pour longtems; il eft impoflible de gouverner les enfans fans pouvoir employer les moyens de fe faire obéïr. Fautil qu'un Soufmaitre , fi on ne lui obéït pas, fe plaigne au Maïtre % celui - ci punira -t-il un enfant fanl prendre la moindre infoiv  WoH DISSERTATIONS 25 [ mation ? Le Maitre eft alors en quelque , forte 1'exécuteur des ordres du Soufmai, tre; fait-il 'des perquifitions fur ce qui , s'eft paffé? Le Soufmaitre va cionc ainfi , de pair avec 1'ecolier, qui, voyant le peu , d'autorité qu'il a fur lui, cette de le '{ confidérer comme une perfonne char, gée de veiller fur fon education, nel'en, vifage tout au plus que comme fon egal, , & il n'y a point de Soufmaitre, quel , qu'il foit, qui puifte tenir de cette ma, niere dans une ecole. ' Un Soufmaitre intelligent fe contentera de menacer des , ch&timens que le Maitre employeroit en , en pareilscas, a moins qu'on rie le pouffe , k bout, en ne faifant aucun cas de fes % avertisfemens, il faut alors qu'il puiffe fe , faire refpe&er. Suivons donc auffi a eet , egard 1'ancienne coutume , & laiffons aux , Sousmaitres qui s'acquittent bien de leurs , devoirs, '1'autorité dont ils ont étérevêU tus jusqu' k Préfent'.' ' Je remarque en abrégé fur les 13 ou Ïl4me pages fuivantes. B 5  %6 REM AR Q U E S sur. ï28 Que la fantaifie des Parens, ni' même la grande différence des facultés des jeunes gens, ne permettentpas torjjours au Maitre de faire apprendre a tous les Difciples, ni même a plufieurs d'entr'eux , dans le même livre > bien moins encore de pouvoir lenr faire apprendre la même lecon, ce qui eft une grande diiliculté pour les Maitres. Le Profeffeur femble attribuer ici, la 'caufe du peu de progrès que plufieurs ecoliers ont fait, aprës avoir etudié un an ou. deux 1'histoire de la Patrio, la Géographie &c. au déraut d'entendre, du moins fuffifamment, la langue dans laquelle on leur a enfeigné ces Sciences. Ne pourroit - on pas faire la même objections contre les Academies? Au reste fi cette infinuation eft jufte, a quoi faut - il donc attribuer la profonde ignorance de quelques perfonnes qui ont cepcndant été inftruites de leur Réligion dans leur Langue materneïle? a leurindolencé, a leur ftupidité & a leur peu de jugement, dira-t-on. Eh bien, voila jufte-' ment de quoi il s'agit, & c'eft cequ'aucun  troïs DISSERTATIONS 27 Inftituteur eclairé , felon moi, ne s'avj£era n'eft pas bien infprmé de la grande diflëy rence qu*il y a entre les Ecoles-penfion».' nail'es des Filles; étant libre a chacun de , choifir une ecole pour fes enfans fui, vant fon rang & fa condition, ce qui enérve , entierement fes plaintes; ce n'eft pas la , faute des Maitrefles de penfion', fi les Parens, par un fentiment d'amour propre ou de vanité, font clioix d'une ecole oü leurs  trois BISSERÏATIÖNS 3? enfans doivent tenir uil rang au deffus de leur etat & de leurs facultés. Ainfi je paffe. ala DISSERTATION de monsieur van dér PALM. A 1'endroit oü il examine qu'elles perfonnes font les plus prqpres pour enfeigner les langucs etrangeres a la Jeuneffe Batave. Je convierts que pour y bien réuffir, il eft abfoïümént nécêffaire que ié Maitre fache le Hollandois & foit en ejtat de le traduire. „ Si on en admët, qui n'ënten„ dent pas même les princip es de la Langue „ qu'ils fe propofënt d'enfeigner, dont les „ feminiens ne foient pas orthoxes, n'etant „ que peu ou point tonnus, d'une hu„ meur violente & emportée". C'eft' k Meffieurs les Infpecteürs des Écoles & autres perfonnes prépofées a veiller fur I'educatign de la jeuneffe de prevénir éét abü's;•' C 3 Pag. 23?. Pag; 242.  38 RËMARQUES sur il eft question de favoir; fi on eri trouvë de tels dans les Villes oü il y ar des Infpecteurs, & cela etant, il eft k fouhaiter qu'on y remédié au plutót. Nonobftant tous les effbrts d'un' bon Maitre, je doute fort que fon ecole puifle être, comme il eft rapporté a la page 241, une yive image du Pays dontil enjeigmla Lan^ gue; m'etant toujours appercu que lesmeilleurs Maitres regnicoles contraflent infenfiblëment dés manieres de s'exprimerpeu exactes, aprochant plus ou moins de la Langue du Pays. II me femble qu'on peut remarquer,fans offencer perfonne. que c'eft undéfaut auquel les Maitres Hollandois de nation, qui enfeignent les Langues etrangeres, font encore plus fujets en parlant ces Langues. 9> II paroit paree que nous avons dit ci}y devant (continue le même Auteur) que „ nous recommandons pour 1'amélioration w de nos Ecoles, a nos compatriotes bien mtentionnés de ne fe fervir d'autres Mai„ tres que de ceux qui font nés & elevés „ dans notre Patrie. J'ai déjaprouvé qu'il „ ne nous manque pas de gens qüi pour-  trois ÖiSSËR^ATlONg 39 „ roient s'en rendre capables. L'article „ prineipal pour eux c'eft la Langue. II w faut qu'ils la parient coulamment, & qu'ils „ én fachent les principes; il faut auflï „ qu'ils donnent des preuves de leur capa- citéj par un examen éxaft de tout ce „ qu'ils fe propofent d'enfeignêr k la jeu„ neffe, avant qu'on leur permétte de lui „ donnef- des inftruétions. Les Parens jV n'ont k préfent qu'k choifir. , J'avouë ingénument que je rt'ai pas , bien pu faifir le fens de ce paffage. Je , ne fais fi 1'intention de 1'Auteur eft féu, lemënt de diffuader aux Parens d'envoyer i leurs enfans a 1'école chez des Maitres i regnicoles, ou s'U vöudroit tout k fait; , exclure ceux-ei de tenir ecole dans ces , Provinces, comme ön feroit fondé k le j croire, eu egard a la maniere dont il les , dépeint en général, & en particulier a la ; page 242, oü il troüve bon de mettre , en queftion, fi on he doit pas chercher i én partie la caufe de la dëgënération de , plufieurs de nos concitoyens dans e»S f Maitres etraügers. C 4  40 R.EMARQUES sur, , J'aime pourtant mieux-eroire, qu'il I veut fimplement déconfeiller aux Parens , d'envoyer leurs enfans a 1'ecole chez un , Maitre né dans 1'etranger; non feulement , paree qu'il leur laiffe le choix; mais furtouc, , paree que 1'idée d'interdire aux perfonnes 9 nées hors du Pays, la faculté d'enfeignêr 9 leur Langue maternelle k la Jeuneffe Batave 3 eft fufceptible de trop d'objeétions. Cette inhabilité ne feroit - elle pas contraire a la Conftitution & a la forme du Gouvernement de ces Provinces, oü je ne fache aucun Art ni Profeffion quelesetrangers ne puiffent exercer, dès qu'ils ont fait leurs chef-d'oeuvres & acquis le droit de Bourgeoifie. Eft - il donc plus dangereux d'y admettre des Maitres étrangers, pourvu- qu'ils aient les qualités & la capacité requifes y que d'y appeller des Profeffeurs & des Miniftres des Pays étrangers , dontplufieurs y ont occupés, & y occupentencore avec honneur quantité de Chaires dans les principales Villes de ces Provinces ? Gette prohibition pourroit - elle avoir lieu ? vu que cette République eft dans un befoin  tróis D1SSERTATI0NS 41 continuel de monde, tant pour fa défenfe que pour eelle de fes Colonies d'Orient & d'Occident, qu'elle ne fauroit conferver longterm fans y. envoyer continuellement des emigrans , foit originaires ou étrangers. Conviendroit - il de mettre aétuellement des entraves aux différentes relTourees que les étrangers trouvent dans ces Provinces , dans le tems même que les Söuverains des Pays voifins de cette République ont adopté un Systeme de Politique directement oppofé a celui de leurs Prédeceffeurs, accordant tous les encouragemens poffibles pour attirer du monde dans leurs Etats? Et bien que ceci ne paroiffe d'abord pas avoir une grande influence fur la Politique de eet Etat; cette influence eft pourtant trés confidérable, paree que les étrangers qui ne veulent pas entrer dans le militaire ou dans la domefticité, n'ont d'abord prefque point d'autres reflburces que de chercher des places de Soufmaitres, pour apprendre la Langue & les manieres du Pays: On leur accorderoitpeut être cette faveur , puifque le Profeffeur Nahuis y eonfent page 494, mais ft on ne leur perC 5  & REMARQUËS SUR. mettoit pas dans la fuite dé devenir Maitres, te feroit le vrai moyen d'en faire de vils mercenaires, qui ne fauroient exercer les fonétions de leur pofte avec lë zele & 1'emulation néceflaire; & feroient par conféqucnt d'un affez foible fecours k ceux qüi les employeroient: eh un mot, ce feroit une chofe auffi déraifonnable que de vouloir exclure des Corps de métiers les étrangers qui auroient fait leur apprentinage , & travaillé comme compagnons le teiiis fixé par les Ordonnances. D'ailleurs 1'exemple d'une feule perfonne j qui a réuffi par fon induftric & fa bonne conduite & fe procurer un etabliffemertt honnête & tant foit peu lucratif, fuffit pour déterminer un grand nombre de fes compatriotes a tenter s'ils h'auroient pas le même fuccès; n'y ayant que Tappas du gain &la facilité de trouver a s'occuper, qui puiffent les engager k quitter des Pays fains & agréablês, pour venir fe fixer dans un Pays qui eft en gënéral trés malfain. Toutes ces raifons me perfuadént j que Mn van der palm ne prétend pas que 1'on interdife aux étrangers la facultë d'être  trois msSERTATIONS 43 Maitres d'ecole dans ces Provinces; maiè qu'il diiïuade feulement les Parens de leur confier leurs enfans; tan^is qu'il recommande les Holfcmdois qui font Francois d'origine, au moins c'eft ce que je conclus en lifant cette phrafe, qui font nés & ekvés par* mi nous. Je ne crois pourtant pas que lyAüteur entende parlk ceux qui font Waüons d'origine, parcequ'ils ont un trés mauvais accent qu'ils ne changent prefque jamais. II n'ignore pas non plus , qu'il y a h préfent quantité de defcendans des Francois refugiés qui ne favent plus pas un mot de Irancois. „ Ne noüs etonnons póiht, dit - //, q"u'il 4, y ait tant d'habitans des Pays- bas qui ont ont appris les Langues & les ont enfuite i, tout oubliées*'. Quand on confidere ce paflage dans la connexion, il eft evident que 1'Auteur en' attribue la faute aux Maitres étrangers; ce qui me parroit fort abfurde. Je n'ignore pas que la plupart des enfans qui ont appris le Francois dans les Ecoles * l'oubüent vite; mais cela provieöt trés fou- Pdg* 244.  r44 &ÉMARQEÜS sur • Vent de toüt autres caufes que de 1'incapacité des Maitres. \ Qui fait! fi on avoit , le bonheur de connoitre quelques uns des , Difciples qui ont eu 1'avantage de profiter j des inftru&ioris de Monfieur van der , palm, qui eft Hollandois; & qui en, feigne par cönféquent la Langue Francoi, fe par principe & en perfecUon, ft 1'on . n'y en trouve:o.t pas auffi qui 1'ont déja , oubliée, & peut être méffie qui n'en ont , jamais fü grand cliofe'; tant pour avoir fréquenté 1'Ecole Francoife trop jeune qiie pour en êtrë forti trop tót, ou a caüfe du peu de conception des enfans, du manque d'occafion del'enrretenir, & furtöü't, la timidité de parler Francois que 1'on remarque en plufieurs: N'en feroient-ce point la les vérkables caufes ? On envoyefouventles enfans aux Ecoles Francoifes avant de favoif lire en Hollandois; on les y laiffe deux ou trois ans rarement quatre, & forï compte qu'ils ont appris le Francois pendant ce tems la, quoiqu'on en ait employé une bonne partie a leur enfeigner autre chofe, & furtout leur Langue matcrndle; ainfi \ fi 1'on fak attem  trois DISSERTATIONS 45 tien auxfacultés des enfans qui vont aux Ecoles Francoifes', & a la manieré de pênfer de nömbre de Peres & de Mere-s , 'on ne fera point etonné qu'ils s'en trouvent qui y font fii peu de progrès pendant 3 oir 4. ans; tandis que d'autres les dévancent dans un an óu deux, ce qui pröuve que ce n'eft pas la faüte des Maitres. • , On ne fauroit djsconvenir en raifon, riant impartialement, qu'il n'y ait eu, & 9 qu'il n'y ait peut être encore de mauvais , fujets parmi les Maitres étrangers des Eco, les penfionaires de ce Pays, qui ontpu ou , pourroient encore inculquer des principes , dangereux a la jeuneffe; mais n'a-t-on , rien a craindre a eet egard des originaires ? , ti s'agiroit de favoir ce que 1'Auteur en, tend par le 'mot dêgénèration & en quoi , elle confiste, s'il s'etoit expliqué plus , cLairement, onpourroitl'examineravecplus , d'exactitude'; mais il me femble qu'on peut remarquer en général, que, parmi les Mar-. tres étrangers & originaires, on en trouve plufieurs qui fe rendent tres recommandables par leurs talens & par leurs moeurs;  46 RE MAR QUE S sur. Tag 250, * tandis que quelques autr#6, foit par igno* rance, foit par pédantisme qu par des moeurs» irrégulieres fe rendent ridicules & méprifables. „ On aura remarqué, combien peu j'ai „ parlé jusqu'ici d'apprendre par coeur, je 1'ai fait k delfein, certes, il n'y a point „ d'ouvrage plus ennuyant & moins utile auxEcoüers: Ceux qui apprennent facile„ ment, oublient vïte ce qu'ils ont appris, „ & on ne peutcontraindre qu' avec peine , a force de menaces & k coups de b|ton, „ ceux qui apprennent difficilement; de „ forte que je juge qu'il n'en faut faireufa* ge qu' autant qu'il est nécelTaire pour fa„ voir quelques mots," Quant aux premiers, la difficulté fera bien tót levée, il n'y a qu'k, les faire récapituler fouvent ce qu'ils ont appjis. Pour les fe-« conds, je voudrois, avant d'en venir k ces extrémités, & furtout aux coups de baton, attendre un peu plus longtems avant de les faire apprendre par coeur, & jusqu'k ce qu'ils fuffent paflablement lire; ne leur donner enfuite que de tres petiteslecons, que  trois DÏSSERTATIOl^S 42 1'on augmenteroit infenfiblement a mefure que 1'pn s'app-ercevroit qu'ils apprennent plus facilement, & qu'ils y prennent du. goüt;' il faut furtout les y encourager en les louant k propos, en leur donnant de tems en tems quelques petites recompenfes, qui font bien fouvent plus efïicaces que les me naces & les chatimens , qui ne doivent être employés qu'a la derniere extrémité; enobfervant de ne les pas ré/itérer trop fréquemment, crainte qu'au lieu de les corriger on ne les endurchTe, comme 1'expériencel'a fait voir plufieurs fois... Néanmoins, il ne faut pas; négliger de les faire apprendre par coeur, de la maniere que nous venons de prefcrire^ c'eft du moins le fentiment de Mr. J. P. de Croufaz. Profeffeur en Philofophie & en Mathématique k Laufanne, dans fon excellent Traité de 1'education des enfans imprimé a la Haye en 1722 chez les Freres Vaillant & Prevost. „ 11 eft trés important, dit-il'page414. „ de fe prévaloir de la mémoire des enfans^ „ On retient toute fa vie ce que Ton 3 appris dans cetagela,- & non feulement  48 REMARQUES sur „ on apprend aifément, mais onfe ménage „ une facilité dont on fe prévaudra toute fa vie. De toutes les facultés de 1'ame, „ la mémoire eft la moins imparfaite dans „ les enfans: on retient affez bien ce que 1'on y, a appris dans eet age & on apprend faci- lement. Puis qu'il faut que les enfans „ prennent du plaifir a apprendre, & qu'ils „ y foient encouragés par les fuccès; c'eft „ donc leur mémoire qu'il convient le plus „ d'exercer. De tout tems il eft établi „ qu'on defline eet &ge a apprendre les „ Langues. Voila le fentiment d'un favant Profeffeur qui eft diamétralement oppofé k celui de Mr, van der palm, qui prétend qull eft fi pênible & fi ennuyant aux enfans apprendre par coeur. Quoiqu'il foit certain, qu'a moins qu'ils n'ayent 1'esprit êxtrêmement bouché, ils furpaffent les hommes faits a eet egard: ce qui meperfuade que la méthode la plus propre & la plus fure pour enfeigner le Francois a un enfant, ou telle autre langue vivante, eft, i. de lui apprendre autant a épeller & a lire, qu'il • . •• foit  trois DISSERTATIONS 49 foit en etat d'apprendre de petites lecons par coeur qu'on lui expliquerapomTaccoutumer infenfiblement a parler Francois; 2. II faut le faire traduire & lui enfeigner en même tems les parties de 1'oraifon qui font a fa portée; , mais fi 1'on differe de faire , traduire a un enfant, jufqu'a ce qu'il fache , paffaitement diftinguer toutes les parties , du discours, qu'il entende toutes les Con, jugaifons, il court grand rifque, pour , peu bouché qu'il foit, de ne faire, pen, dant quelques années , que trés peu de , progrès. Les enfans aiment a voir le , fruit de leur peine, & il n'y a rien qui , les encourage davantage que de faire quel, ques petites traductions'. Auffi m'a-t-011 affuré que c'eft la praftique conftante des Ecoles Latines de ce Pays. D'ailleurs, fi la méthode de faire apprendre des lecons aux ecoliers qui apprennent ia Langue Francoife, eft de fi peu d'utilité; d'oü vientqti'oii leur en fait tant apprendre aux Ecoles Latines , & qu'on y eft ü eet egard fi exaél ? je prévois que 1'on merépondra, c'eft que , 1'on y enfeigne une'languemorte, qui n'eft, D  5© RE MARQUÉS sur dès le commencement jufqu'a la fin, que regies & exceptions, & que 1'on ne fauroit apprendre que par principes. Maisnefautil pas auffi bien apprendre le Francois par principes que par 1'ufage, fi 1'on en veut retirer quelque fruit? Ne feroit-il pas abfurde de dire que puifque 1'on n'apprend le Latin que pour 1'entendre & 1'ecrire, il faut beaucoup exigcr de la mémoire; tandis qu'on apprend le Francois pour 1'ehtendre, 1'ecrire & le pari er coulamment, & cepemkuitilne faut guere apprendre par coeur. C'eft aux perfonnes intelligentes qui veillental'education de la jeuneffe de décider laquelle de ces deux méthodes eft la meilleure; me contentant d'ajouter deux autorités qui me paroiffent de quelque poids. La ire eft du célébre de Croufaz , qui fait voir (Pag. 305) de quelle maniere il entend que 1'on cultive la mémoire des jeunes gens; „ qui eft de toutes les facultés ,,, d'un enfant, celle qui eft laplusformée, „ & qu'on peut exercer avec le plus de „ fruit: Mais enXexercant, ajoute-t-Hun 7, peu après, on peut toujours cultiver fa  troï's DÏSSERTATIONS 51 i,, raifon & fón jugement. jl,e .Langageetfc „ fondé en regies: ces regies ont leurs prin* i, cipes & ceux - la même qui font arbitrair „ res, donnent lieu k des conféquences qui ert découlent nécelfairement". La feconde fe trouve dans la ï öme page de la Grammaire du célébre Refiaut. Le „ raifonnement feul, ditHl, ne fufflt pas pour 1'étude d'une langue. II faut que la méï, moiré fe charge & fe rempliffe d'un grand ;, nómbre de mots ék de combinaifons difr i, férentes &c". Voila qiti prouve, ce nie fèffible, què 1'on doit apprendre par coeur, foit dans un livre ou de vivevöix; mais j'aurai encore Occafion d'en parler ci - après. „ Nous fuppofons, ditMr. van Der, „ palm, qu'un Maitre qui enfeignè la „ Langue Francoife ou Angloife ait 3 o Eco„ liers, perfónne ne feplaindra de ce nom^„ bre, qu'il les inftruife le matin depuis 9 „ heures jufqu'a midi; & 1'après midi '„ depuis 2 heures jufqu'k 4 heures. Qui „ fera-ce qui etant affuré de la bonne ini'i ftruftiön & des progrès de fon enfant?,; D 2  Pag. 2J7. 52 REMARQUES sur. „ refufera a un Maitre ƒ50 par an pourfes „ peines ? Celui qui ne peut pas les paycr „ fera mieux de ne point faire apprendre „ de langues étrangeres a fes enfans. „ Voila un revenu de ƒ1500 par ?.n, „ outre qu'il a encore tout le foir pour foi, „ fans compter les profits qui réfultent des fournitures". , Si cela peut ainfi avoir lieu, il a cer, tainement bien de quoi fubfifter: mais 9 combien peu d'endroits ya-t-il dans la , République, oü 1'on voudroit tant payer? On ne donne dans la plupart des Villes, oü il y un Maitre penfionné que 20 fouspar mois, de forte que 50 Ecoliers & ƒ400 de bénéfice ne fe montent encore qu'k ƒ 1000 par an. Et pour ce qui eft des profits que les Mat-tres peuvent fairefur les fournitures a ecrire &c. C'eft un avantage, quelque raifonnable qu'il foit, dont ils ne jouiffent pas en cette Ville , quoiqu'il n'y ait point de Maitre dans aucune autre Profeffion, qui ne livre & ne profite fur les matériaux qu'il met en oeuvre. II leur eft exprefiement défendu*  trois DISSERTATXONS. 53 lous peine de/50 d'amende, derienlivrer a leurs ecoliers que 1'encre & les plumes, qu'ils font obligés d'acheter ici chez les Libraires j de maniere que ce Réglement oppreffif pour les Maitres ne les privé feulement pas du gain qu'ils pourroient faire fur ces différens articles; mais il femble même les priver de la faculté, qu'ont, pendant la Foire , tous les autres habitans de s'en pourvoir h meilleur marché des Marchands fbrains. N'eft-on donc pas en droit de confidérer ce Réglement comme un grand obftacle a 1'amélioration des Ecoles de cette Ville, lequel on devroit par conféquent inceffamment abolir ? d'autant plus, qu'il donne occafion aux Libraires d'exercer un monopole odieux envers les Maitres d'ecole. , Quant a la caufe de la profonde igno, rance des Maitres, que 1'Auteur dérive , en partie de leur trop grand nombre, ne me , paroit point du tout fondée, même fuivant , fa fuppofition de 3 o difciples pour une eco, le oü 1'on enfeigne les Langues etrangeres, , & 50 ou 60 pour les Ecoles Hollan, doifes; vu que les premiers en ont fouD 3 Pag. 26$.  |4 REMARQUES sur , vent 60 ou 70, & les derniers 100 k , 120 & quelquefois plus; loin doncque. , le nombre des Ecoles foit trop grand, il , n'eft feulement pasfuffifant, fi onveutles , mettre fur un bon pied. , Je finirai mes refiexions fur cette Dis, fertation, en remarquant que 1'Auteur y i fournit une preuve evidente de cette vérité. , inconteftable, que 1'expérience eft le meil, leur Maitre^ On n'a qua lire la page 273, , qui peut fervirde regie a tous ceux qui fe 4 mêlent d'inftruire la Jeuneffe; elle com, prend 1'effentiel, de eet important fujet; 9 favoir, que quand même un enfant feroit 4 peu de progrès, les frais des Parens & peine du Maitre ne manqueroient pas , d'être doublement recompenfés, fi 1'on. , rénffit k lui former le coeur: en effet, , un enfant qui ne fait pas grand chofe, , mais qui a un bon coeur, vautinfiniment , mieux qu'un autre qui eft plus eclairé, , mais qui. a le coeur vicieux & corrompuV C'eft une vérité. reconnue de tout lemonds, que la vertu efl préférable a la fcience, Je^ paffe maintenant.  trois DISSERTATIONS 55 a la DISSERTATION de monsieur van VOORST. , j'avoue ingénument que j'ai eu delapei, ne a comprendre le fens de cette Hypo, thefe': „ Comme Fexpérience nous foürnitdes „ exemples, que les défauts corporels s'e-. „ tendent & fe multiplient, nous pouvons „ de même auffi apprendre de cette fidele „ maitreffe, que les défauts de 1'ame fe „ perpétuent trés fouvent". , Ainfi , fuivant cette affertion , unhom, me tortu ou boffu engendre un rabougri; , & une ame violente & emportée procrée , une ame fougueufe & turbulente , dans ce , cas, 1'ame, fi je ne me trompe, s'etend , & fe multiplie, puifqu'elle reproduit un , dëfaut qui eft en elle, pour ainfi dire,de , génération en génération. Ce qui m'emD 4  Pp $60 $6 REMARQUES sur , pêchoit d'en faifir d'abord la fignification, 3 c'eft que 1'expérience nous fournit beau, coup d'exemplcs du contraire.— J'ai s fouvent vu des Parens ftupides & igno, rans qui avoient des enfans vifs&enjoués; , tandis que des Peres & des Meres intel, ligens, & fpirituels en-avoient qui etoient , lourds & hébêtés; comme auffi des enfans , qui etoient droits & bicnfaits, bien que , les Parens fuffent tortus & boffus. II , me femble qu'on pourroit autant alléguer , d'exemples contre cette afiertion qu'en , ia faveur, ce qui me la fait cónfidérer com, me fort hazardé-e'. „ II eft vrai, du- /, plufieurs pcrfon■ „ nes feront bien ctonnées quand elles ap99 prendront que 1'on fait mention de défauts, „ & mcme de grands défauts; plufieurs, „ ne pourrois-je. pas dire prefque tous, „ croient que tout y eft dans 1'ordre; les „ Ecoles font cependant encore fur le mê3t me pied que dans leur Jeuneffe": , II n'y a guere de Perfonnes de bon fens, 3 qui n'avouent qu'il y a bien des défauts I & des irnperfeclions dans les Ecoles, y  trois DISSERT ATIONS $y , eüt - il feulement moyen d'y remédier f mais , je crains bien que la Diflertation de 1'Au, teur n'y contribue pas beaucoup*. „ La queftion eft donc defavoir, fices „ Ecoles font effectivement propres a civi„ lifer la Nation ? & je réponds franehej, ment que non". , Hé! voici une réponfe elaire & catégo, rique, qui prononce tout d'un coup la , fentence de toutes les Ecoles, il n'y en , a point dê bonnes dans les Pays-bas; , excepté les Latines. „ Menacer, crier, c'eft encore bien du ; bonheur fi les Maitreifes ne donnent pas • „ quelques coups imprévus, font les moy„ ens que leur fageffe extraordinaire, & „ leur connohTance exquife du coeur hu„ main, met ert oeuvre, pour faireobfer„ ver a ces petits innocens une tranquillité ,, impoffible". , Voila qui eft diamétralement qppofé , aux fentimens du Profeffeur krom, qui , veut de la tranquillité dans les Ecoles: &en , examinant attentivement ces Differtations, % on y découvre prefque partout une diP 5 Pag. 537- 13».  53 REMARQUES sur Pag. , verfité d'opinions entre ces deux favans. , Auteurs qui fait un contrafte affez fingu, lier dans le même livre. , Le Profeffeur exige que les enfans mon, Prent aux Maitres les Lettres clans leurs li, vres; Monfieur van voorst, ne , yeut même pas quils mettent les doigtspro-, , che. , Le Profeffeur eft cTavis que le Maitre , prenne une Clajfe a part. Non dit Mr. , van voorst, tous a la fois, c'eft man, quer le hut que cf en appeller un a part. , Mais il faut finir ce Paralelle, qu'il feroit ennuyant d' enten dre da van tage, en , faifant encore quelques remarques fur 1'e, légance du ftyle de 1'Auteur. , Que de charmes dans ces petites levres , pendantes! Quelle compafiionne devroient pas exciter ces joues arrofées de larmes!. , Que ces fanglots & ces foupirs fontpeints , au naturel! II efh vrai que 1'humeurrebar, bative qu'il artribueaux Maitreffes vers , la fin de la même Page, n'a pas trop bonne, grace', 6k n'efl point conforme au naturel de. leur' Sexe, qui eft bien plus porté a,  trois DIS SER TA TI ONS 59 trop cajoler les enfans qu'a les rudoyer; mais cette mine rechignée des Maitrelfes eft peut être un de ces défauts héréditaires dont il fait mention a la page 3 1 &. , L'Auteur, après avoir tourné les Mai, treffes d'ecole en ridicule, introduit en, fuite 1'enfant k 1'ecole d'un Maitre , en , continuant fur le même ton ironique.' ,, On mettra a préfent 1'enfant a 1'ecole, d'un Maitre: le choix eft tombé fur un „ tel , pour des raifons importantes, on „ penfe rarement a la capacité, on en a „ des preuves convainquantes: eet homme, „ eft capable ! de tels & de tels y ont été. „ k 1'ecole; avez - vous bien vu fonenfei„ gne ! il en fait long"! II fe peut fort bien que e'étoit la la maniere de penfer de nos ancêtres, & que le Pere du Cenfeur des Maitres d'ecole aura eté dupé de cette facon lorfqu'il le mit. k 1'ecole mais il eft trés certain que les gens fenfés ne raifonnent aétuellement plus ainfi, ils ne jugent pas de la capacité d'un Maitre fur la fimple étiquette d'une enfeigne', il leur faut des preuves plus convainquantes, Pag. 344..  6a RE MARQUÉS sur , qu'ils peuvent fe procurer en voyant fon 5 écriture; en examinant s'il fait bien chif3 frer, en 1'entendant lire, chanter & raifon, ner: ils peuvent auffi s'informer s'il , eft trop févere & comment il fe fert de 3 Vinjlrument redoutable, comme il plait a , 1'Auteur de nommer, a ce que je crois, y un baton ou une verge. Ce font Ja des , moyens plus fürs de fe perfuader de fa caa pacité, que de s'en rapporter aux renfeigne 3 mens d'une enfeigne , qui ne fignifient pas , grand chofe, fi les Parens veulent fe donner 3 la peine de faire quelque perquifition a eet , egard. Eh ! qui eft-ce qui oferoit a pré, fent avoir faudace d'y faire mettre autre 3 chofe que ce qu'il entend a fond! II fe, roit dangereux de s'y hazarder'; tandis que les Maitres & les Maitreffes d'ecole ont un eritique fi redoutable dans ces Provinces, s'il y en avoit beaucoup d'auffi animé contre eux, il n'y en a point qui y put tenir» „ On conclut, continue -t-il\ le marché }> avec un homme de cette capacité le plus „ avantageufement qu'on peut: (il eft fa-  t„^- 0I33ER.TATIONS 61 „ cheux qu'il failletantdonner! c'eft pour „ devenir pauvre,) Ceci ne fait guere d'honneur aux Parens* qui n'auroient garde, s'iïs etoient bien pénêtrés des obligations que ce titre refpectable leur impofe, de faire paroitre une léfine qui les avilit; ils fentiroient qu'on ne fauroit marchander l'inftruction k profit, a moins qu'ils n'envoj^ent leurs enfans a 1'ecole que pour s'en débarralfer ou par maniere d'acquit: Un Maïtre pouvant donner plus ou moins de foin a un difciple a mefuré qu'on le paye, ce qui ne feroit certes que jufte. A mauvais'. payeur mauvais ouvrier9 dit le Proverbe. „ Enfin le tems arrivé, pourfuit-il, que „ 1'enfant ira gayement a 1'ecole, dont il >, fe promet des merveilles". , D'oü lui peut venir cette gayeté s'il a * eté fi mal a la petite ecole, comme ilplait , a 1'Auteur de 1'infmuer; il n'eft pas con, cevable, comment il peut-s'en former une , idéé fi fiatteufe; mais je m'imagine que , Mr. vam voorst compofa cette page i & quelques fuivantes, aprés une trop forte 144-  Pag. 344- €2 REMAü^ueo oo,. , méditation, alors 1'imagiriation s'égare & , le cerveau devient débile'. N'auroit-on pas lieu de croire que c'eft plutót ici une fatyre contre les Maitres d'ecole, qu'une DifTertation deftinée a 1'amélioration des Ecoles ? fa bile s'evapore a chaque trait de plume ! On diroit a 1'entendre que prefque tous les Maitres font igrtorans, bóurrus, vains & préfomptueuxi traitant tous les enfans de la même maniere, fans faire aucune attentiort aux différentcs humeurs qu'ils Ont; enfeignant en général la jeuneffe machinalement. Qu'il doit avoir eu de mauvais Maitres pour s'en former de fi petites idéés! Qu'il aura été frappé, pour ne rien dire deplus, d'apprendre que la DifTertation d'un Maitre d'ecole 1'avoit emporté fur la fienne! 5, Le Maitre grave daigne fe lever, dit - iI-> „ pour fouhaiter le bien venu au petit hom„ me, par une inclination majeftueufedefa „ vénérable tête". Que pouvoit - il inventer de plus avilisfant pour les Maitres que cette reception ? Qui fe feroit imaginé qu'on traitat auffi la tète d'un Maitre d'ecole de vénérable! c'eft  trois DISSERT ATlONS 63 ici fans doute un narré comique pour faire rire les uns & aigrir les autres, bien loin de les corriger. Eft - ce un bon moyen d'infpirer le refpeél que les enfans doivent a leurs Maitres de tourner ceux-ci en ridicule (a) N'eft - il pas a craindre qu'un portraitfi ironique des Maitres, ne prévienne encore davantage les enfans contre eux? & quelle idéé, les Peres & Meres qui n'ont jamais eté a 1'ecole , ne doivent - ils pas s'en former? Que faut - il dire de ces phrafes ? „ yous tiendrez yous tranquïlles l Cela ne va pas „ bien, il faut que cela aille mieux, ou je yous. . . L'Autëur s'eft dechainé ci - devant contre les cris & les ehatimens des Maitres; il t&che k préfent dé répandre du ridicule fur les manieres les plus fimples de s'exprimer que les Maitres font obligés de répéter kchaque inftant, s'ils ne veulent pas fuivre la maxime qu'il prefcrit aux Maitreffes d'ecole; de laijfer aller les enfans leur train, jufqitfr ce quils comprennent ce que c'eft quordre". (a) Voyez recueil de quelques remarquespage 433.  64 REMARQUES sur J'avoue que ces locutions n'ont pas tant de gflfce que fes phrafes favorites; mon cher petit, mon aïmable enfant; mais elles font peut-être bien autant d'impreflïon furies jeunes gens, & font dès - la même un objet de difcipline, cependant, comme - elles n'ont en elles mêmes rien de choquant, je croi3 qu'il ne veut blamer ici que la maniere de les prononcer, , mais ne pourroit-il pas , bien arriver, que les Maitres font quelque, fois femblant de s'échauffer, lorfque la , douceur ne fait plus rien, pour eviter , de fe fervir de Tinflrument redoutable''. , Après avoir ainfi dépeint les défauts , des Ecoles, & les avoir colorés des plus , noires couleurs, il les repête encore fuc, cintement; non qu'il eüt oublié quelque , chofe, ou qu'il y eüt quelques traits , d'obfcurcis , car il dit franchement'. „ Qu'un lecteur penfant a déja décou„ vert les défauts qui ont lieu dans la ma„ niere de tenir ecole". , II y adonc des perfonnes, fuivant 1'Au, teur, qui ne penfent pas, c'eft pourquoi , il ajotue', Que  troïs D-ISSERTATIÖNS 65" „ Que je les n.omme enccre en abrégé, „ pour fubvenir a 1'intelligence de tout le >, monde". , Non qu'il doüte de la force de fes , preuves, il n'a que faire de prouver ce \ qu'il avance, il a bien de propos délibé, ré décrié les Maitres d'ecole de la maniere \ la plus flétriffante; comme s'il ne difcu-r , toit jamais • aueun devoir qu'a 1'occafioiï , de 1'efcapade d'un enfant, ce qu'ils font . plutêt, dit - il, fans raifonner que d'une. , maniere- raifonnable\ „ II n'y en a guere (c'eft adiredesMaf„ tres) qui foient affables". — Éft - il bien étonnant qu'ils n'ayent pas toute lapoljteffe & 1'affabilitë qu'il feroit k fouhaiter qu'ils euffent ? eux qui font toujours parmi les enfans, qu'ils doivent exhorter & reprimeneler a chaque inftant. Qui ignore que nous contractons par 1'habitude une feconde nature? Leboucher, par exemple, a quelque chofe d'impitoyabïe; le chirurgien n'eft •point ému k la vue des aceidens les plus funeftes; & les périls les plus éminens ne font qu'une légere impreflion fur les marins.. È  66 REMARQUES sur jusq. $19' L'Auteur qra eft la douceur même vis a vis des enfans; traite - t- il affablcment les Maï, tres d'ecole, & felon les préceptes de , 1'amour fraternel, dont il eft double; ment obligé d'en donner 1'exemple & , d'en précher la pratique? Qu'efl-ce qui , peut lui avoir infpiré cette animofité con, tre eux que 1'on y distingue fi clairement? Ce n'eft pas au moins le bourdonnement d'une ecole, ni lalégéreté des jeunes gens.—. Ne feroit - on pas porté a croire qU'il a eu autrefois des démêlês avec quelque Maitre d'ecole, qui 1'aura relancé de la belle maniere; & que c'eft peut être ce qui lui a fuggeré cette efpece de mépris pour tous les Maitres d'ecole en général. , Nous nous contenterons dcremarquer , • fur le contenu de ces deux ou trois pages, f que perfonne ne s'étant encore avifé de , tenir ecole de cette maniere; ce feroit , peut être une imprudence de la condam, ner. Qui fait! fi on ne fauroit déja , pas introduite dans toutes les petites Eco, les de 1'Union, pour peu que fe Proffes, feur krom & Monfieur van der palm  trois DISSERTATIONS 6f ■? fttflent du même avis.; mais c'eft malheu\ reufement le. contraire| Monfieur va^ » der palm n'en parle point, & le j Profefieur krom. avance _ direcfement , 1'oppofé, de même que le Profefieur , nahuis ,; qui dit; ,9 Que les. enfans. ne doivent pas joue.r „ pendant 1'ecole, qu'il faut les tenir a leurs „ places. ,. Monfieur van, voorst, s'imagine \ Peut être.que ces jeux, _par petites troui pes, fe pafferoient fans bruit ni tintama., re; .ce feroit alors. une preiive qu'il » confuite plus les anciens Auteurs.,, qu'il , n'a examiné attentivement les petits, eu, fans de. nos jours', qui favent déja fe déguifer lorfqu'ils font en préfence des Eecléfiaftiques; Quiconque. connoït la jeuneffe par expérience, comprëndra aifément que le teins de, 1'ecole fe pafferoit avant qu'ils euffenf envie de s'aifeoir., ,. Quel tapagel , que de pleurs & de,plaintes n'entendroit, on pas. parmi ces petites troupes! 1'un fe , plaindroit qu'on le poufle ;unautre qu'on 9 le tourmente; un troifieme, que fés pe« è 2  -<58 RE MARQUÉS sur. ,j tits camarades ne veulent pas qu'il joue , avec eux. Mais il faut quitter, il fufflt , d'avoir vu un jour de réjouiffance des , enfans de 3 ou 4 ans jusqu'k 5 ou 6 ans, , pour fe convaincre de 1'impoffibilité de , cette méthode, & que rien n'eft plus , propre k faire perdre le tems aux enfans ,• a 1'ecóle. II eft vrai, que 1'Auteur dit , pour 1'appuyer': „ Que c'eft une vérité inconteftable que „ les enfans dc eet &ge qui doivent beau„ coup s'affeoir font maladifs. Nous avouon^s que le mouvement eft trés utile k la jeuneffe : mais faut-il juftement choifir pour cela les heures de 1'ecole ? N'y a-t-il pas affez de tems pour fe diffiper pendant le refte du jour? Ne pöurroient - ils pas être au moins 3 ou 4 heures par jour un peu tranquilles? les momens de récréations leur feront alors beaucoup plus agréables. N'eft - il donc pas abfolument néceffaire de les accoutumer de bonne heure a une discipline bien entendue, fi on ne veut pas les elever comme des fauvages ?  trois DISSERT ATIONS c%>: , Quant a ce qu'il rapporte d'un enfantS , qu'il a vu chez, un de fes bons amis, ? eet exemple ne ruifit pas, pour faire auto.-, , rité en faveur de fa méthode. 1. , Paree qu'il dit que c'étoit quelque ? chofe de feniblabie, de forte que ce n'é, toit pas précifément la même chofe. 2. , Paree qu'il ne dit pas, fi ce futavecpeu , ou beaucoup -de peine que 1'on réuffitk , lui faire apprendre quelques lettres, quoi, que ce rut la Heffentiel. Qui fait fi les , Païens n'ont pas bien dü dire mille fois, , mon fage pent gargon; qui fait même s'ils , n'ont point dü fe fervir de Vinflrument re, doutable, ou du moins I'en menacer. , Enfin, quoi qu'il en foit, jepenfeque , 1'on ne fauroit tirer d'un feul cas la con, féquence que cette maniere d'apprendre k , connoitre les Lettres foit praticable dans , les Ecoles; car y faudroit plus de Mai, trefles & moins d'ecoliers, il n'y auroit , alors pas moyen de fubfister'. „ Mais il faut que je continue, dit-il, „ il eft plus que tems de les faire commen„ eer a écrire: comments'y prendre ?avec E 3 60. Pag. 367.  -0 REMARQUES sur „ douceur & en leur promettant quelques 9f recompenfes. Et un peu après: Que 5, la contrainte & la force ne produira ja„ mais une bonne forme d'écriture". 11 eft certain que les louanges , quelques traits fur leurs livres a écrire, ou quelqües petites recompenfes, les enco.uragent généralement plus que toute autre méthode; & il n'y a peut être point de Maitre qui n'esfaye ces encouragemens; mais il n'en eft pas moins certain , qu'ils ne font pas toujours efficaces a 1'égard de plufieurs, ce qui n'eft point furprenant, dés que 1'on confidere, combien les humeurs des enfans font difféV rentes, ce feroit une abfurdité de prétendre de les faire tous mouvoir par lés mêmes refforts pendant des années cönfécutives. II y en a qui fe relachent & fe négligent fi "Vifiblement fur ce point; malgré toutes les exhortations du Maitre, & les petits chatimens (&y qu'il employé pour donner du (h) Comme de leur faire faire la parade avec Ieurslivres h. ecrire ou avec un ecriteau, de les faire récrire, ou de déchirer avec un grand mépris ce qu'ils ont gnffonné, ou enfnu, de les rstenir & 1'ecole & même de les faire jeüner.  trois DISSERTATIÖNS 71 poids k fes exhortations, qu'il fe trouve quelquefois contrahit, s'il veut faire fon devoir, d'avoir recours a des cMtimensplus féveres, qui ont trés- fouvent de bons effets, ce qui me perfuade que c'eft principalement k eet égard qu'une févérité modérée eft abfolument néceffaire; , c'eft auffi Tarticle , qui dépend le plus de la volonté des Eco, liers: ils peuvent quelquefois, nonobftant , qu'ils faffent leur poffible, ne pas réuflir , k chiffrer ni aapprendre par coeur, cequi , n'a jamais lieu a 1'égard de 1'écriture , au , moins jusqu'a un certain point'. „ On eft ordinairement long - tems oc„ cupé a faire réciter des lecons (aux eco ? liers qui apprennent le Fraaicois) ,, qu'ils „ oublient presque auffi vite qu'ils les ont „ apprifes: il fera beaucoup plus utile que ?, celui qui les enfeigne, les entretienne au„ paravant beaucoup de 1'utilité de cette ,? Langue, 6k: qu'il leur infpire 1'envie de „ 1'apprendre. , Si- eet entretien a lieu durant 1'ecole; , il faudra vraifemblablement, fi ce n'eft pas , une Ecole penfionnaire, que le Maitre E 4" Pag. 370.  72 REMARQU£S sus, \ harangue prefque tous les jours, puifqifii , vient journellement des ecoliers qui ont a befoin d'être encouragés. C'eft bien $ dommage que F Auteur foit tant contre a 1'ufage des livres dans les Ecoles Frano coifes; car fans cela, les Maitres pour3 roient le prier de leur faire une DifTertation 3 fur 1'utilité de la Langue Francoife, pour , la faire apprendre par coeur aux ecoliers'. „ II peut leur enfeigner cequiconcerne s, la prononciation, ies Déclinaifons & les „ Coniugaifons dans quelque livre; mais „ il fiiut, que tout le refte s'apprenne fur „ Ie cliamp. Le Maitre peut, par exem„ ple, en faire venir quelqu'un vers lui, „ ou il ira auprès d'eux& leur demandera: „ comment diriez - vous cela ? il leur fera „ incontinent traduire tous les entretiens „ qu'ils auront eus : en donnant des recom„ penfes a cëux qui 1'enténdent lemieux& .„ qui lui répondent de même en cette Lan: „ gue, il les encouragera a s'exercer a la Maifon ou a traduire des livres en fa $i préfence.  trois DISSERT ATI ONS 7.3 Qui eft-ce qui fe feroit imaginé qu'il faut qu'un Maitre employé fon tems aenfeigner une chofe aux enfans, qu'ils peuvent mfiniment mieux apprendre dans le livre; etant même impoffible que cela puifie fe pratiquer dans une ecole/ " Le Maitre ne fauroit être auprès de , plufieurs a la fois , tous les autres devront ] donc attertdre; óf comment fe refloüvien{ dra- t - il quels mots il a demandé h ces , fix , & quoi a ces fix autres, ou refte,» ra-t-il auprès des fix premiers jusqu'k ce , qu'ils les fachent tous promptement', il pourroit alors trés bien arriver que les autres h'auroient point de tour. II me paroit inconeevablê comment un homme d'esprit s'eft mis eed en tête; un livre n'eft - il pas deftiné pourfuppléer al'abfence du Maitre? & un ecolier en apprenant dedans, voit de quelle maniere les mots font ortographiés, les prononce avec plus defacilité, &ils s'inculquent par eonféquent mieux dans lamé* moiré qu'en les lui faifant répéter comme k un perroquet. % 5  74 REMARQUES su*. Qu'y a-t-il de plus propre pourinftrurTe un enfant qu'un livre, oü nonfeulement il peut apprendre, mais même répéter mot a mot ce qu'il a déja appris, & dans lequel un Maitre peut lui faire remarquer les différentes fignifications des mots qui ont la même prononciation, comme Tente&Tan4e, cent, fens, 'fans, fang, dont tous les mots ont a peu prés le même fon, quoiqu'ils fignifient des chofes trés différentes de même que quantité d'autres, ce qui efl un article trés important en Francois, & que les ecoliers apprennent bien mieux a diftinguer par le moyen d'un livre que fans livre: , outre^ qifon les priveroit de 1'oc; cafion de s'êxercer a la maifon. Quand , même un Maitre n'auroit qu'un éleve, , cette méthode feroit encore a rejetter'. , Comment eft-ce qu'un ecolier qui ne fe fert point de livre a 1'ecole, peut s'exer, eer a la maifon, ou traduire des livres , enpréfencc du Maitre? Ne feroit-il pas , plus naturel- & plus facile que ce dèr, nier lui fit au paravant expliquér ces livres > a 1'ecole <5c lui en. fit faifir le fens, en  trois DISSERTATIONS 75 , lui ordonnant de mettre pur écrit ce qu'il , vient d'expliquer, foit k la Maifon ou k , 1'ecole, & de le corrigèr enfuite en fa , préfencepour"lui faire remarquer les , regies de la fyntaxe qu'il n'a pas obfervées, , dont il doit déja avoir une idee'; & il doit favoir par. coeur une noraenclature des mots les plus ufités, k moins qu'il ne veuille prendre k chaquèinftantleDictionnaire k la main; & n'eft - il' pas trés probable qu'il les oubliera beaucoup plus vite que, s'il les avoit appris. par coeur. -■ , Que 1'on prenne la peine de comparer , cette méthode avec celle qui a eté. en ufa, ge jusqü'k préfent, & 1'on jugera aifément , laquelle des deux eft la meilleure. ' ' . , Après ayoir ecouté la lecon d'un enfant , on lé fait auffi lire quelques mots enFran, cois & en Hollandois jusqu'a ce qu'ils les , lifent coulamment, alors on lui ordonne , de les apprendre par coeur pour les réeir ,:• ter le lëndemain: en continuantainfi k 1'e, gard des Dialogues il fera dans peu de , tems en état de parler Francois, & les , Maitres fachant prefque fur le bout dü  76 RE MARQUÉS sur. , doigt, tous les Livres de P. Marin ou d'au, tres Auteurs dont ils fe fervent a leurs s Ecoles, font reflbuvenir aux jeunes gens a lorfqu'ils font embarraffés, oü ils ont ap9 pris cette. phrafe ou cette regie, qu'ils ne r roublient prefque plus jamais, dès qu'on , la leur a ainfi remémorée; furtout fi les , Maitres pour les y encourager donnent * une petite récompenfe a celui qui s'en , fouvieVidra dans une autre occafion , foit , en 1'excufant d'une amende ou en le gra, tifiant d'une marqué de diligence. J'avoue cependant, que, dès qu'un ecolier eft en etat de comprendre 1'Hiftoire de la Bible, quelques Catéchifines faciles, 1'Histoire de la Patrie , la Gëographie , 1'abrégé du Catéchifme de la nature par Monfieur Martinet, ces Livres lui font alors bien plus utiles que les dialogues. Quant aux Déclinaifons & Conjugaifons, que 1'Auteur approuve pourtant que 1'on fafle apprendre dans un livre; cela eft certainement nécefiTiire pour leur en donner une idéé; mais comme c'eft le fondement de la Langue Francoife, il ne fuffit pas de  Tiiois DISSERTATIONS 77, tenir la, il faut leur faire faire toutes les femaines , au moins, quatre a cinq Dëclinaifons jusqu'a ce qu'ils les fachent toutes promptement. II faut auffi qu'ils falfent deux ou trois Conjugaifons par femaine; & lorfqu'ils entendent paflablement les quatre Conjugaifons régulieres, il faut les leur faire récommencer par les trois autres différentes formes, qui font, 1'interrogative, 1'interrogative négative & la négative , enfuite les verfjes imperfonnels, irréguliers & défeétueux qui font le plus en ufage; de cette maniere ils acquierentuneconnoiffancefolidedes m férens verbes, des modes, des tems cc des perfonnes, On leur fait aUffi expliquer, dès qu ils éntendent quelque chofe, & même après cela coucher par écrit en Hollandois des périodes faciles, compofées pour la plupart des mots & des phrafes qu'ils ont déja appris , afin de les leur inculquer d'autant mieux dans la mémoire: renfermant les regies les plus fimples du difcours, que 1'on rend peu a peu plus difficiles, a mefure  78 REMARQUËS sur qu'ils y font des progrès. Ils déviennent ainfi mfenfiblement en état de traduire des livres; furtout lorfque 1'on a foin de ne leur rien faire apprendre par coeur, qu'ils ne comprennent dans leur Langue matemelle, «l qu'on leur dicle toutes les femaines un Iheme (c) fur quelque fujet utile & agré^ able, comme un abrégé par demandes & réponfes de rinftruétion générale de la maniere decompofer toutes fortes deLettres^ extrait du Secretaire parfait ou .d'autres Auteurs, avec quelques formules de lettres relatives a chaque explication, afin de leur procurer 1'occafion de confronter la Pratique avec Ia Théorie, &d'apprendreaéerire fur les principaux fujets qui fe préfentent. On peut regler leurs places fuivant le nombre des féutês qu'ils font dans ce Thême, & le Maitre, le corrigeant & en comptant les fautes en préfence dé fesDisciples, eft ab'folument exempt du foupcon 'd'en avoir favorifé quelques uns au préjudice des autres. II fuffit de les replacer F 01 Comme 1'Auteur le prefcrit aux Fcoles HolÖ eoiles page joo^  trois DISSERTATIONS f$ au "commencement de chaque Mois; mais afin que ce ne Foit pas toujours les plus avancés qui priment j &. pour exciter en général d'avantage 1'emulation parmi les jeunes gens; on affignera les autres femaines desprix -a ceux qui auront le moins de fautes en proportion géométrique de leur dernier Thême, par exemple, ..celui qui auroit eu 12 fautes dans un dief é précédent & 6 dans le fuivant, gagneroit celui qui en auroit eu 3 & 2. paree que ce demier ne differe que d'un tiers & 1'autre de la moitié; mais il eft néceffaire, pour prévenir une objeftion qui fe préfente naturellemcnt, favoir, qu'il y a fans doute des ecoliers quine manqueroient pas , après qu'on les aplacés, de faire exprès bon nombre de fautes dans le Thême fuivant pour avoir enfuite occafion de gagner & coup fur; il eft néceflaire, dis-je, defixer chaque jour que 1'on difte ce Thême les fautes de la ire & 2de Claffe a un certain nombre, plus ou moins grand, fuivant qu'il eft difficile, & priver ceux qui 1'excédent de toute concurrence pendant quinze jours. Et quant a ceux de la 3me Claffe, onleur  8o REMAÏiQUES sur doniiera feuiement les Thêmes corrigés des deux premières Clafles afin qu'ils corrigent éux - mêmes les leurs, ce qui eft bien plus facile pour le Maitre, & beaucoup plus utile pour fes ecoliers, que s'il les corrigeoit d'abord lui même. L'envie qu'ils ont d'être délivrés de cette peine & de parvenir aux Claffes oü on les avancé leur infpire affez d'émulatiön, fans qu'il foit néceffaire de faire ufage d'autres moyens d'encouragement- On ne fauroit fe figurer qu'aprés Favoir expérimenté combien ces Thêmes font utiles aux jeunes gens, non feuiement paree qu'ils fe forment ainfi une idéé dü ftyle epiftolaire qui eft ün des principaux point d'une bonne education; mais principalement, paree qu'ils faififïènt & miennent mieux les principes de rortographe qu'on leur explique a cette occafion qu'en tout autres. ïl feroit bien k fouhaiter que cette coutume fut plus générale, particulierement dansles Écoles Hollandoifes,' oü onlesfaift ordinairement epeller & ecrire des nomenclatures, qui, quoiqu' utiles, n'approchent point de 1'utilité d'un difcoürs fuivi, paree que  trois DISSÊHf AÏIÖNS 81 que ces mots ifolés ne leur donnent aucune idéé des principes de 1'ortogfaphe, del'accentuation & de 1'ufage des Lettres capitales, contre lesquels tant de monde pêche fi lourdement. L'AuteUr, après avoir propofé la maniere d'mftrüire les enfans, paffe a celle de les gouverner. „ J'ai actiieljeniént en vue la conduite 5, des enfans que 1'on doit diriger de telle 5, forte;, qu'ils ne fe comportent pasfeule„ ment d'une maniere hohnête a 1'ecole >, 5, mais auffi lorfqu'ils én font déhors". ; C'éft beaucoup exiger d'un Maitre, il ; fne femble que les Parens1 doivent. Faire 5 leur devoir a la maifon, & quant aü refte, 3 agïr dé concert avéc le Maitre, k 1'egard 3 de la directiori de leurs enfans. „ On repréfehtera aux enfans qui oiït „ fait quelque mal, la nature de ce mal ,, & fes fuites, ce que fapprouve fort, oü 3, s'ils në font pas fufcéptiSles de cömpren,, dre tout a fait cc raifonnemënt, on „ les traitera raifonhablcment d'une autre „ maniere, par ëxefnple, fi c'eft un enfarit F Pag. 372- Pag. 573  82 RE MARQUÉS sur „ qui en pince ou egratigne un autre, „ on le regardera fixemcnt en montrant la place oü .il 1'a pincé ou egratigné : on „ branlera la tête, &, fi c'eft un enfant „ qui ait eté offencé, on lui donnera quel„ que chofe de bon ou d'agrcable, en „ préfence de celui qui a fait le mal; & fi „ cela n'agrée pas a ce dernier, qu'il fe „ mette a crier, il faut bien fe garder de „ faire a fa fantaifie, mais il faut montrer „ le mal qu'il a fait & continuer a branler s, la tête; ccpcndant s'il redouble fes pleurs „ & fes criailleries, il faudra plutót, dans „ cette extrémité, 1'appaifer par quelques „ petits coups de baton, qu'en lui donnant „ cq qu'il veut abfolument". Qucl verbiage! L'Auteur qui entend fi bien fait de fe conformer au langage des enfans , n'auroit - il pas pu prefcrire quelques petites locutions pour leur faire fentir le mal qu'ils ont fait, & les fuites qui en réfultent, moins ridicules que ces hochemens de tête , plus intelligibles pour eux , & plus déccntes pour le Maitre, que de lui faire joucr le perfonnage de pantomime?  trois blSSÉR TATIONS 83 car je m'imagine que c'est principalenient les Ecoles qu'il a en'vüé, puifqu'ilpariede feplacer les enfans qui ne fympatifent pas, Comment un Maitre pourra-t-il corrigéf. fes difciples qui auront ia mauvaife coutume de branler la tête, au lieu de répondre honnêtemerit a ce qu'on leur dëmande, s'il leur en donne lui -même 1'exemple? Ne fe trouveroit - il pas dans le cas de la fable de 1'ecrfvice qui d^fend a fa fiHe de marcher a recülons? Ce quelque chofe de bon ou/fagréabïe, c'eft fans doute des bonbons, des peintures oii des jouets: il faudroit donc què les Maitres ou les Maitreffe en euffent une bonne provifion, car ü eft probabi e qu'ilsfeplaindroient&crieroient k chaque inftaht, afin d'obliger Ie Maitre a les appaifer. Ne feroitce pas lk le vrai moyendelesyinciter,&de les apprendre k friandcr? Que fait-on ? fi ces petits evéillés , voyant qu'ils ën font quittes pour uil regard de travers, ou tout au plus pour une petite mercuriale, pleine de compafflon i prononcéé" avec la plus grande afft F 2  84 REMARQUES sur. biltté poffible, nc s'entendroicnt pas cnfemblc pour fe jouer de la crédulité du Maitre, II eft certain que la Mere la plus idolatre de fes enfans, ne fauroit s'exprinler d'un ton plus doucereux, ni avoir plus de complaifance pour cux , en pareil cas,. que de les frapper doucement pour les appaifer: en effet, un enfant qui en pince ou egratigne un autre, qui fe met en colere fans fujet, caufant du défordrc a 1'ecole par fes cris ïn> portuns , uniquement paree que le Maitre donnc quelque chofe a celui que cepetitgarncment a olfencé, montre un trés mauvais naturel; & bien loin que cc cMtimenr foit fuffifant pour le réprimcr & le rectifier, il 'me femble bien plus propre a. 1'endurcir dans fon opiniatreté; qui eft un vice qu'il faut punir trés férieufeincnt, qu' a le corriger; rien n'ctant, felon moi, plus incompatible avec une bonne education, ni plus nuifible au bonheur de lafocieté engénéral, qu'une correct.ion fi indulgcnte , & qui fera k coup fur de trés peu d'cffet. J'en appelle hardiment a 1'expérience: ne voyons nous pas tous les jours que les Meres qui en agifient ainfi, gatent  trois DIS SER TA TI ONS 85 prefque autant leurs enfans que celles qui leur fouffrent tout par une tcndrefïè aveugle; tandis que les Peres fenfés, qui fe fervent de la verge, felon le précepte du plus fage des Rois, font crains & respeftés. , Après avoir propofé les moyens d'avoir , de meilleurs Maitres, il ajoute': „ Ce Maitre pourra de la maniere indi„ quée, inftruire un bien plus grand nombre „ d'enfans, pendant le tems ordinaire de 3, 1'ecole, qu'il ne fauroit faire a preTent „ avec pluüeurs Sousmaitres". , N'eft - ce pas une chofe tout k fait con, tradictoire qu'un Maitre puilfe enfeigner , plus d'enfans, lorfqu'il doit les inftruire , de vive voix, qu'il ne feroit quand ils ap, prennent dans un livre ? , Nous allons maintenant pasfer a fen, droitle plus important, oü 1'Auteur décelc , fa prévention contre les Maitres d'ecole» , par fes etranges exprcfflons, congés , en ces termes'. „ On demandera a préfent comment on „ pourra généralement avoir ces Maitres „ & ces Maitrefles"? F 3 Vag. 383. Pag. 383.  gó REMARQUES sur „ Enverra - t-on les Maitres & les Maiv trefTes aétuelïement en fonétion dans quel„ que Ifle déferte,, pour apprendre a jafer „ aux animaux, a condition'que ceux - ci des, vroient les po.urvoir de nouriture, Ce feroit bien la maniere la plus commode de „ de s'endéfaire; mais ce ne feroit pas „ agir chrétiennémeht: leurdonnera -t-on des penfions ? Cela leur agréeroit 'bien: ja P'oü' viendroient les fonds s'ils les méri3, toient" 9 Vous étes bien expéditif, Monfieur, 3 van voorst,'je ne doüte point que , vous n'ayez appris la maniere de fe défaire. des chqfes inutiies de Martinette la , fervante cTJrgan, dans la ComédiedeMo, Kere, le, rnalade imaginaire: cette Femme , parle. auffi d'arracher un oeil & de cou, per un bras. En cónféquence de votre , charmant plan , on n'aura plus befoin des , Mjaitres d'ecole d'apréfent,; de forte qu'ils , feront a charge, comme 1'eft un bras ou I unejambe.dont on n'a plus 1'ufage. Qu'ils % plient donc bagage! Qu'ils décampent k , 1'Ifle déferte/ ils ne mécitent plus de dc-  trois DISSERTATIONS 87 , meurer parmi les honêtes gens. Vous les , avez auparavant un peu turlupiné en leur , attribuant une gravité ironique, & un , hochement de tête ridicule qu'il vous plalt , de nommer majeftueux, & comme fi cela , ne fuffifoit pas, vous continucz encore k , leur laver la tête. Eft - ce pour infpirer , aux jeunes gens 1'honneur & le refpeft qu'ils , doivent a leurs Maitres \ fuivant le précep- , te du 5*e Commandement ? Vous avez , fans doute bien prévu par votre fagacité , ordinaire, que nonobftant vos railleries , piquantes, ils ne fauróient jamais mériter , votre eftime , a caufe de leur ftupidité in- , compréhenfible ,. ce qui vous a détermi- , né de propofer h cette heure de les relé- , guer a une Ifle déferte. , Quelque exacl que foitnotre Cenfem-, , il me femble cependant qu'il y a ici une pe- , tite faute. A la bonne heure que 1'on , banniffe dans des Ifles inhabitées, des per- , turbateurs du repos public, & ceux qui , ont commis des crimes enormes; mais 3 non pas des gens qui n'ont commis d'autre F 4  8?' REMARQUES sur Pag. , faute que d'avoir trop bonne opinion 4e , leur capacité, , Quelque rude que fut eet exil.' ce fe-t , roit ppurtant le fort de ces malheureux: fi , c etoit agir en chrétien. Put - on feuiement , en prouver un exemple parmi les chrétiens; 9 mais jc ne le crois pas, car 1'Auteirr qui , eft fi verfé dans 1'hiftoire ancienne en au9 roit bien fait mention, Le pis aller, dit-il, feroit que les In„ fpeéteurs des Ecoles leur donnafTent quqln que affiftance des hourfes, , Qvie de bonne volonté! & ce n'eft en.? core que pour les plus mplheureux; op, , aura plus de foin des autrps, on leur don, ner.i des office,s \ mais quels offices fcront , ce? Ce font des gens fi préfomptueux , que je ne fajs pas a quoi on pourra les ocr , cuper? Auront-ils fujet de fe. plaindre , que, par eet arrangement, on leur öte le , pain de la bquche ? Non fans doute; laju, ftice & fequité brillent egalement dans , fon charmant plan des Maitres d'ecole des , pauvres, des Maifons de charité , & de , ceux des Villages'.  tRCH.s DISSERTATIQNS 39 II paroit , dit - il, qu'il y a plus de diffi„ cujté a 1'egard de ceux qui font dans les „ Ecoles des pauvres, dans les Maifons de „ charité ou dans les Villages, , C'eft une -chofe démontréea fuivant , lui, que 1'on peut agir arbitrairement avec , ceux qui fe font établis de leur chef, ce , font des pédans qui fe laifleront bien ran, ger ; mais quant a ceux qui ontétéappel, lés dans les Maifons de charité ou dans , les Villages, cela n'iroit pas fi facilement; , car il y a une grande différence. , ? Ceux qui ont eté appellés ont obtenu , gratis leurs emplois & le dróit de bourgeoi, üe des Villes & des Villages oü on les a , appellés, les autres les ont achetés, par , conféquent moins de faveur pour ceux - ci. , Cpux qui ont eté appellés ont prefque 9 tous été francs de garde & d'autres char, ges; les autres ont dü monter la garde , ou s'abonner, & fupporter tous les autres ? impöts. , Ceux qui fe font etablis arbitrairement , ont contribué felon leurs facultés a 1'entre? tien des Maitres d'ecole des pauvres. F 5  t$ REMARQÜES sur , N'eft - il donc pas jtiste qu'on traite les pre, miers avec plus de rigueur que ceux - ci, , fans qu'ils aient fujet de fe plaindre, a ce , que prétend 1'Auteur, puhqu'ils fe font , bien portés réciproquement du dommage. , Oui, précifément autant qu'un marchand , en détail ou un artifan en porte a un autre'. Si jamais cette maxime etoit adoptée, on pourroit öter tout d'un coup aux trois quarts des habitans d'une ville les moyens de fubfiftëf; fous pretexte qu'ils fe fontnui les Uns les autres. Quel argument! , Cependant on gardera les Maitres qui , ont eté appellés, moj-ennant qu'on falie , les changemens qu'il a eu foin d'indiquer'. „ On peut donher a ces Maitres des „ Soufmaitres des Ecoles des Arts, a la „ diredion defquels ils doivent faire atten'? tlon' & de q«i ils apprendront comment „ on doit traiter les gens & les enfans". Pour le coup nous y voila; il y a déja lopgccms mie jeremarque que vous ctes dans les bonnes, graces de ce Cenfeur. Prenez denc courage mes chers compagnons, votre fort eft bien doux en comparailbn de celui  trois dissertation. 9ï de tant de vos Confrères qu'on propofe de chaffer ignominieufement, ou du moins a qui on veut óter les moyens de gagnerhonnêtement leur vie, Que vous êtes heureux! on va vous affocier de jeunes gens pour vous diriger & pour vous inftruire, fous les aufpices desquels vous ne fauriez- broncher, pourvu que vous vouliez vous dépouiller de eet ancien préjugé, que 1'jexpérience eft la ineilleure ecole, & que vous vouliez'être attentifs.. a leur Méthode & aux préceptes qu'ils fe feront un pkifir de. vous donner: quelque remplis de votre mérite qu'on vous dépeigne, je ne faurois meperlüader que vous foyez affez préfomptueux pour ne vous pas foumettrea de jeunes gens intelligens , qui auront fait un cours de Maitre d'ecole de trois ou quatre ans, qui eft prefque le tems requis pour former un Jurifconfulte aux Académies. II eft vrai que plufieurs d'entre vous ont blanchi dans le métier; mais que cela ne vous faffe point de peine, c'eft ici un plan fmgulier, que Monfieur van voorst a eu 1'honneur de mettre le premier au jour; de forte qu'il  02 REMARQUES sur n'eft pas ëtönnant que 1'exécution en foit extraordinaire. Mais afin de ne pas héfiter a vous fou, mettre de bon coeur a ces fages préceptes, , prenez bien garde de lire la page 463 , , on y exige qu'un jeune homme, après 9 avoir paffé fes etudes de Maitre d'ecole, , foit encore une annce ou deux fous la di-. , re&ion d'un bon Maitre d'ecole, pourap-, , prendre a mettre en pratique cc qu'il aap, pris par la Théorie; gardez vous bien de , la lire, car 1'avis qu'on ydonne aux jeu, nes gens efl fondé fur ce principe crronné, , que la Pratique eft pour le moins auffi utile , que la Théorie; & ce préjugé eft fi enraciné , qu'il y a plufieurs Procureurs, qui aprés 9 que fciire Als font gradués, les font encore , ecrire un an ou deux a leurs etudes, etant , dans 1'idée qu'ils en feront meilleurs Juris, confultes. II y a auffi affez d'apoticaires, , qui non feuiement font travailler leurs , fils a leurs boutiques pendant leurs etudes, , mais même après qu'ils font Médecins, , s'imagïnant, auffi bien que leurs Peres, ? quc cela leur eft fort utile; & c'etoit auffi,  ois DISSERTATIONS. 9* , a ce que Fon nia ajfurè, le fentiment d'un p Profefieur en Médecine, qui avoit oecupé , ce pofte, plus de 30 ans, avec beaucoup , d'honncur; il eft vrai, qu'il etoit déjaagé & qu'il avoit peut-être auffi bien befoin , d'un jeune Maitre. , Ayant parcouru ces trois Differtations, , nous ferons quelques remarqnes ultérieures 9 fur la fuite de eet ouvrage'. „ II arrivé fouvent", dit un des Auteurs iïes fupplèwens, lorsqw les fages ne déliberent pas &c> „ Que les Maitreffes d'ecole ,agifiant par „ un principe d'economie, tienheat leurs „ Ecoles dans des apartemens obfeurs & „ etouffés, au grand préjudice des enfans „ qu'on leur a confiés". On n'en fauroit disconvenir, mais cc n'eft pas toujours par economie, c'eft fouvent par néceffité \ on aura bientöt remédié a ce défaut, fi 1'on introduit une reforme utile. „ Quant aux Ecoles Francoifes, ditfei „ Monfieur le Profejfeur nahuis, je vou „ drois les incorporer dans les Ecoles ame P4g, 400» ' Vag.' A9h-  94 REMARQUES sur h 'mms , & eek me paroit trés nécefiaire , pour ne pas fenuire réciproquement, en " fölflmt enfei'gncr dans ces dernieres, tout „ ce que 1'on apprend dans les premières Ce n'efl döne ici qu'un changement de nom qui n eft d'aucune conféqnence. h On ne devroity admettre, ajoute-t-il » que des Maitres Hollandois; düflènt-üs „ prendre des Soufmaitres pour enfeignerles „ Langues étrangcres". , Le favant Profes, feur fe fiattoitque cela feroit d'abord tom' Der les Ecoles Francoifes en décadence' II n'eft pas a préfumer que cela arrivé-' roit -amfi; car quelle perfonne fenfée ne préférera pas de mettre fon enfant a une ecole, oü le Maitre entend lui même ce qu'elle veut qu'on enfeigne a fon enfant plutöt que de le mettre dans une autre ecole oü le Maitre eft obligé, pour eet effet, d avoir recours a un Soufmaitre f Monfieur van der palm, qui mérite fans doute une entiere confiance a ce fujet paree qu'il en parle par expérience & avec connoiffance de caufe, eft d'un tout autre feiïtiment. Voyez la page 253.  trois DISSERTATIONS 95 N'eft - ce pas une grande imprudence h un 9 Maitre de faire enfeigner a fon ecole par , un Sousmaitre , ce qu'il n'entend pas , lui-même? Ne doit-il pas en quelque , forte dépehdre de ce jeune homme, lui , paffer mi llechofes, crainte.qu'il ne parte ? , ce qui feroit un coup fenfible pour le , Maitre , comme on en a vu plufieurs fois , 1'exemple'. „ Mais, continue -t-il, n'eft - il pas hon„ teux & même fort incivil de ne point „ apprendre la Langue d'une Nation dans „ le fein de la quellé. on demeure, a la„ quelle même on appartient comme ori* „ ginaire". , Quoiqu'il paroiffe, paree qui précecfe 5 cette période, que ce reproches'addrefïè , principalement aux enfans des Francois , qui demeurent dans ce Pays; il s'etend auffi , indireftement fur les perfonnes qui font , Venues s'yetabür': certainement celles qui onteu 1'occafion, le tems & lafaculté d'apprendre cette Langue, & qui en ont négligé 1'etude, font bl&mables; mais le nombre n'ert fera pas grand, fi 1'on confidere••  9<5 REMARQUES sur i . Que h plupart de ceux qui y viennent font ordinairement des gens d'un certain-Age, qui doivent travaillef toüt le jour pour fubvenir a leur entfetien & a celüi de leurs families , qui ne favent fouvênt pas même régulieremeilt leur Langue maternelle, ce óui fait qu'on a beaucoup plus de peine d'en apprendre Une autre. 2. Que d'obfcacles n'a pas a fürmontcr celui qui s'y veut appliqucr, fa prononciation Cft difficile, fon irrégularité rebutantc, & la variation de fon ortographe en rend la le&ürc trés pénible furtout aux Francois.' je n'ai pas deflein de m étêridfé davantage fur ce fujet, je m'cn rapporte a ce qu'en dit le Profeffeur krom daiis les annotations de ia page 8 8. Que f öii fe donne la peine de les lire avec attention, , ckl'onconviendra , d'abord qu'un Francois demande fo'uvent, , non fans fujet, des cxplicatiöris qu'ori , ne fauroit lui donner, ni lui ihdiquerun , Aüteur qu'il puiflë füivr'c en totite fureté'. 3. Qu'y a-t-il dé plus mOrtifiant pour üne perfonnc qui a de 1'cducation & des feminiens, dés qu'elle a furnionté le* pre* mie-  trois DISSERTATIONS pf mieres difficultés, & qu'elle commence a un peu difcourir , d'être fans ceffe toufnée en ridicule & expofée a la rifée de toute une compagnie ; oü il y a föuvent des gens qui parient fort mal, & qui n'ont aucune teinture de leur Langue maternelle. (V) Ne vaudroit-il pas mieux imiter a eet égard les Francois, que 1'on aime tant a contrefaire fur des chofes moins utiles & quelquefois nuifibles, qui, loin de commettre de pareilles baiTefiés, font polis, prévenans & corrigent d'une maniere obligeante les étrangers qui apprennent leur Langue ? & c'eft ce qui a fans doute le plus contribué a la rendre fi univerfelle. Enfin, ne vaudroit-il pas mieux s'efforcer d'apïanir les difficultés qui donnent de 1'eloignement aux étrangers pour la Langue du Pays que de leur faire ce reproche. „ Auffi ont - ils (les enfans des Francois) „ fuffïftmment occafion d'apprendre, dès „ leur enflmce , cette Langue kla maifon, & „ ayant paffé les Ecoles ordinaires, ils G ,(d) Voyez Tannotatipn a la Page 418.  Pag, 491- p8 RE MARQUÉS sur „ pourront fe perfectionner dans les Ecoles „ des Arts. Ce que j'ai dit ci - devant peuty fervir de replique. J'ajouterai feuiement qu'on ne fauroit trop tót leur faire changer de pro^ nonciation, car fi 1'on differe jufqu'a ce qu'ils foient en etat de fréquenter les Ecoles des Arts, on n'y réuffira que difficilement, & peut - être point du tout: d'ailleurs c'eft une coutume prefque générale, qu'auffi tót que les Parens favent un peu de Hollandois , & que leurs enfans ne vont pas aux Ecoles Francoifes, qu'ils leur parient toujours Hollandois; ainfi qu'ils ignorent entierement la Langue maternelle de leurs Peres & Meres. „ II me paroit, ojoute le même Auteur,! „ qu'on doit feuiement conferver les Ecoles „ penfionnaires des filles ? Sont- elles donc plus utiles que les Écoles penfionnaires des garcons ? Sont - elles fur un meilleur pied ? N'y a -1 - il que peu ou point de reformes k faire? Que 1'on prenne la peine de lire la DifTertation Ingenuas &c, page 166 & quelques fuivantes, oü ce fujet eft parfhite-  troi's DISSÉRTATJ.0NS 92 ment traité. Au refle il faüt remarquer que prefque toutes les jeunes Démoifelles que 1'on envoVe en penfion, ont été dégroffies, s'il M'est permis de ine fervir de ce terme, dans les Ecoles inférieures, & qu'elies ne vont ordinairement en penfion que dans un age oü le jugement & les pafiidns commencent a fe dëvelopper, qui eft le tems plus propre a faire faire des progrès a Ia jèuneffe, lorfqu'ön s'en fert avec art 6i discernement. „ Je voiidrois, continue -t-il, faire dis „ paroitre le nom diftingué d'Ecoles Frari„ coifes, quand même on n'yparlerokque „ Francois, qu'on n'y lirók que des Auteurs „ Francois » je voudrois qu'on y enfeignat „ k fond la Langue & les Moeurs Hollan„ doifes, & les comprendre ainfi fousl'idée „ d'Ecoles Hollandoifes. , Je 1'entends enCaite avéc ëtonnemené , quelques pages après, s'enoncer en ces , termes. „ II faut bien que nous ayons des Ecoles Francoifes, mais il faut què cefbient des „ Ecoles Natknales, c'eft kèixcdesEcoH G 2  ioo REMARQUES sur „ Hollandoifes Frangoifes, & non point de tel,, les, qui, au lieu de civilifer la Nation con„ formément k fon inftitution primitive, in„ fpirent au contraire k la jeuneffe ungoüt ,, etranger qui 1'eïoigne du Patriotisme, par „ oü, hélas! nous fommes petit a petit „ tant dégénérés du naturel & du carac„ tere de nos Ancêtres"t II eft certain, fi cette affertion eft véritable , que les Ecoles penfionnaires des garcons que 1'on voudroit fupprimer, font bien moins dangereufes que celles des filles que 1'on eft d'avis de conferver; paree qu'on les y envoie bien fouvent dans un age propre a contractei' facilement ce goüt etranger, 1'amour de la parure, le luxe, la frivolité &c, & que s'en retournant a la maifon paternelle, elles conferveroient prefque toute leur vie, les funeftes imprcffions que cette education, peupatriotique, auroit pu faire fur elles, puisque c'eft dans ces Ecoles qu'on les perfectionne & qu'on met, pour ainfi dire, la derniere main h leur education ; Au lieu que les garcons font ordinairement en penfion , dans un age oü ils font  trois DISSERTATIONS tot bien plus occupés des jeux de 1'enfance, que d'apprendre les moeurs & les manieres des étrangers, qu'ils ne fortent des Ecoles penfionnaires que pour entrer direétement fous une autre direétion, aux Ecoles Latines ou ailleurs. N'eft - il donc pas etonnant que 1'on propofe d'abolir les unes & de conferver les autres? puisqu'il eftclair comme le jour, que fi celles des garcons font nuifibles , celles des filles le font bien davantage; etant infiniment dangereux que le beau fexe foit imbu de préjugés qui alienent du Patriotisme: , car quoiqu'il pa, roiffe d'abord que cette noble vertu doive , principalement être le caraftere diftinclif , des hommes. Qui eft - ce qui ignore 1'in, fluence qu'une Mere a fur le cöeür d'un • , fils chéri dès fa tendre jeuneffe, & quel, lesfuneftes fuites, la maniere de penfer des , Meres peut avoir pour la Patrie & pour t , les moeurs'. Le Profeffeur Je Croufaz dit, page i9me du Traité de 1'education que nous avons déja cité: G 3  REMARQUES. sük „ Certainement il eft honteux de néglï„ ger, comme on Fait, 1'education d'un M f cxe, dont les lumieres & la vertu pour: „ roient avoir tant d'influence.fur les moeurs. „ des hommes ? Les filles, dont 1'educatiM on a été négligée, ou en de inauvaifes mains» font incapables, lorfqu'elles font „ devenues femmes, de eontribuer a don„ ner une bonne éducaüon a leurs enfans. „ Souvent même elles empèehent qu'on y ,2 réuffiffe'': par oü il paroit qu'il eft auiii important de veiller a 1'education des filles qu'a celle-des, garcons. ..- „ Nous avons une raifon particuliere en „ Frnnce", dit fAbbé de Fleurf „ dcfou„ halter que les fermnes fpient éclairées & „ raifonnables, c'eft le crédit & la confi„ dération qu'elles ont dans le monde. „ Cette raifon eft d'autant plus fondée que „■ perfonne n'ignore la force de la coutume , „ ni combien les préjugez ontd'cmpire fur „ e;les, elles fe font outre cela une efpe„• ce de Iwntedes'écaiterd'unufiige établi, „ elles craignent la critique des autres fern-mes, & celle de la plupart des hommes'*.  trois DISSERTATIONS 103 En effet, le bonheur de la focieté, la paix des families , & les moeurs des citoyens ne dépendent -'ils pas en grande partie de 1'education que 1'on donne aux filles? Qu'y a -1 - il de plus nuifible a une nation, que lorfque le beau fexe, qui en devroit être 1'ornement & les délices, eft volage, impérieux & rempli de préjugés ? Défauts qui proviennentfouvent d'une edücation vicieufe; d'oü réfnltent ordinairement ces divifions dans les ménages, ces educations contrariées fi funeftes k la jeuneffe Batave. „ Rien ne s'oppofe plus k la bonne édu„ cation des Enfans", dit le Profeffeur De Croufaz page 44. „ que les contestations „ d'un Pere & d'une Mere: foit qu'elles „ regardent cette edücation: foit qu'elles „ roulent fur d'autres fujets. C'eft ici un „ mouvement perpétuel , Feffet reproduit „ fa caufe, & le mal fe renouvelle de gé-> „ nération en génération fe multiplie & „ dévient enfin fans reméde, „ Au lieu page 58, que.des Mereséle„ vées avec plus de foin, feroient en état „ de bien élever a leur tour leurs Enfans. G 4  io4 RE MARQUÉS sur. „ Elles auroicnt pour cela plus de loifir «Sc „ de facilité que leurs Maris". On voit par ces paffages de quelle importance ces Auteurs célébres ont confidéré 1'education du beau fexe. N'eft -il donc pas fort fmgulier que le Profeffeur nahuis veuille garder ces Ecoles intacles; tandis que le Profeffeur krom, y a bien plus trouvé de reformes a faire qu*a celles qu'on voudroit abolir ? N'eft - il pas etornant, pendant quel'ons'efforce d'un coté, a redonner quelque lustre aux ecoles Hollandoifes, qu'on tache en même tems cle 1'autrc, de rabaiffer & ravaler les Ecoles Francoifes jusqu'a leur öter le titre distingué, comme on le nomme, cT Ecoles Francoifes de Een fon f Qu'on leur donne le nom qu'on voudra, il n'en fera pas moins vrai que les Parens mettent principalement leurs enfans aux Ecoles Francoifes pour apprendre cette belle Langue; de forte qu'il eft auffi naturel de les nommer Ecoles Francoifes-, que de donuer aux Ecoles Latines le nom de cette Langue, que 1'on ne nomme jamais Ecoles IMfandoifes Latines..  trois DISSERTATIONS 105 , On n'aura pourtant pas voulu faire al, lufion, par ce titre Ecoles Hollandoifes , Francoifes, a 1'addreffe d'une Lettre anonv, me, imprimée il y a quelques années, & , intitulée Au Hollandois Francois, dans la, quelle on faifoit finement fentir a quelqu'un , qui avoit fait une tradu&ion eftropiée, , fon ignorance en la Langue Francoife. Si , malheureufementilvenoitdansl'idée, par , ce titre SEcoles Hollandoifes Frangoifes, , que 1'on y enfeigne un pareil jargon com, me celui de cette traduaion, cela ravale, roit beaucoup ces Ecoles vis :a-vis de , ceux qui entendent cette Langue \ puifque , le ftyle etoit Hollandois, quoiqu'il eüt imi, té 1'ortographe de Mr. de Voltaire'. II faut quelque chofe de plus que des Ecoles & des livres pour apprendre parfaitement le Francois; il eft abfolument néceffaire de fréquenter des gens qui parient bien , pour fe former un bon ftyle & apprendre a parlee coulamment, nonobftant que leProfesfeur nahuis dife: „ Que celui qui a appris une Langue „ étrangere, ck qui l'entend parfaitement, G 5 Pag.  io6 REMARQUES sur „ elï bien plus capable de 1'enfeigner métho„ diquement a fes compatriotes, & de les, ^inftruire des principes de cette Langue , „: que ceux qui font apprife dès leur jeu„ neife, comme langue maternelle, fans y, „ quafi faire attention; ceux - ci laparleront „ mieux, mais ils ne fauroient mieux 1'enfei„ gner aux autres que les premiers, il s'en fau„ dra même de beaucoup qu'ils n'y réuffif» fentfibien; fur- tout,s'ils ne faventpas k „ fond la Langue de ceux qu'ils doivent en„ feigner, n'etant alors pas en etat de faire „ voir a leurs Difciples, le rapport que les „ deux Langues ont enfemble, cequieftun „ des pointsle plus effentiel, pour acquérir „ une connoiifance raifonnée d'une langue, „ & pour y frayer un cherain commode". Ce qui a eté dit touchant les pages 241 & 494 , peut a divers egards fervir de réi plique a cette page & a la fuivante , j'ajouterai feuiement deux ou trois remarques. 1. Que le nombre de ceux qui entendent parfaitement le Francois, fans 1'avoir ap, pris ailletirs que dans ce Pays, efttrès petit, iurtout parmi les Maitres d'ecole nation-  trois DISSERTATIONS ioz laux, dont la plupart n'ont jamais vu la France que fur les Cartes Géographiques, ce qui eft pourtant trés néceffaire pour fe perfeétionner par 1'ufage qui eft le Tyran , des Langues. i. Eu egard k ce que nous avons dit ci devant des qualités rcquifes d'un Maitre Francois, qu'il ne doit pas fe bomer de favoir le Francois comme Langue maternelle, mais qu'il faut qu'il en fache les regies & les principes; ne feroit-il donc pas trés ridicule de foutenir qu'une perfonne qui fait bien les principes de cette Langue, mais Gul ne la parle pas coulamment , puiffe mieux 1'enfeigner que celui qui 1'entendpar regies, & qui ia parle bien & naturellement ? Qui eft - ce qui douteroit, ff un Reftaut, un 'Menage^m de la Touche & tan£ d'autres avoient fu le Hollandois, qu'ils n'euffent pas été auffi en etat d'enfeignêr leur Langue maternelle k la jeuneffe de ces Provinces, que des Flollandois qui font en partie redevables de ce qu'ils favent de cette belle Langue & ces grands Maitres ? N'eft - il donc pas plus naturel" de conclure que, de deux Maitres  io8 REMARQUES sur dont 1'un eft originaire & 1'autre rcgnicob, fachant egalement bien les deux Langues \ il eft indifférent, quant a la Langue, lequel des deux choifir? Ce font d'auires raifons qui nous doivent faire déciderauquelil convient de donner la préférence; & s'ils n'ont pas ia même capacité celui qui fait mieux le Francois eft préférable pour ce qui concerne la Langue, s'il poffedc d'ailleurs les autres qualités requifes. 3- Enfin, fi cette aflcrtion eft véritable ; Qu un Hollandois peut mieux enfeigner le Francois a la Jeuneffe Hollandaife quun Francois même f il s'enfuit néceffairement; Qu'un Francois' qui aura appris le Hollandois par regies, eft bien plus en etat d'apprendre cette Langue a fes compatriotes qu'un Hollandois qui auroit appris le Francois méthodiquement, quoique ce dernier parlat mieux Hollandois que le premier, & qu'il en fut auffi bien les principes; c'eft ce que'1'on auroit bien de la peine a faire accroire aux Francois, qui trouveroient abfurde de dire qu'on peut trés bien enfeigner une Langue vi-  troïs DïSSERTATIONS 109 vante qu'on ne parle pas foi - même coulamment, & qu'on prononce fouvent affez mal. J'ai infiniment de refpect pour la pieté, les lumieres & les talons de ce grand homme, que toute la République révere a jufte titre, & qui dans fa courte carrière a donné tant de preuves d'une profonde erudition; mais il me femble qu'on peut remarquer fans blefter le refpeét dü a fa mémoire, que fon autorité fur eet article auroit beaucoup plus de poids, s'il avoit eté Profeffeur de la Langue Francoife, comme ill'etoit en Théologie , & je doute fort qu'il eüt avancé fi légérement & d'une maniere fi affirmative, qu'il y a tant de Hollandois de la claffe des Maitres qui favent le Francois a fond & qui le parient parfaitement; quelques Grammaires compilées, & d'autres imparfaites, ramaffées par lambeaux, fans ordre & fans difcernement, font, felon moi; des preuves bien peu convainquantes. , Mais fi je penfe différemment k divers , egards de Meffieurs les Auteurs de 1'ouvrage , en queftion; je fuis parfaitement d'accord , avec eux fur plufieurs chofes, & princi-  iio REMARQUES sur Pan. zi9. , palement en ce que dit Monfieur van , der palm'. „ Ceft une chofe affez connue que plu„ fieurs Parens, par la folie complaifitnce * qu'ils ont pour leurs enfans, leur font „ fort nuifibles, fur-tout a 1'egard de „ ce qu'ils doivent apprendre al'Ecole. II „ feroit certainement utile de s'oppofer h ce „ défaut; ce qui contribueroit beaucoup „ a civilifer nos Ecoles: mais comme ceci „ n'est pas compris dans le plan de la fo„ cieté, qui ne s'enquiert pas tant des „ moyens de civilifer les Peres & les Me„ res que les Ecoles &c". , II eft certain que la correction des Pa, rens n'eft point comprife dans le Program, me de lat focieté, &. qu'elle n'eft point , du reffort des Maitres d'ecole': mais comme c'est la fource de tant d'inconvéniens que 1'on rencontre dans 1'education des enfans, il eft evident que cette affertionj etant développée, tend direéternent a disculper les Maitres d'ecole. II eft donc tres important de remonter a :ette fource, & d'en faire voir les funests.  trois DISSERTATIONS mi influences, car comme il ne fuffit pas de fauchcr les mauvaifes herbes pour les détruire dans un jardin, mais qu'il faut les arracher föigneufement avec les racines; il en eft de même ici pour reformer utilement 1'education nationale, il faut remonter a la fource du mal, & 1'extirper dans fon principe. Saus cette précaution, on feroit précifement, „ comme (O celui qui remettroit a un Maitre a danfer des boiteux & des paralitiques pour les dreffer". Ecoutons la deffus le célébre Archevêque de Cambrai. „ Tout ce qu'on peut faire, dit - il, pour l'inftruétion des En,, fans eft inutile, fi les Parens ne veulent „ concourir eux - mêmes k ce travail. Le „ fondement de tout eft, qu'ils ne donnent „ a leurs enfans, que des maximes droï,, tes, des exemples édifians : c'eft ce „ qu'on ne peut efpérer que d'un trés pej, tit nombre de familie. On ne voit dans „ la plupart des maifons que confufion que „ changement, qu'un amas de Domesti„ ques, qui font autant d'esprit de travers, (e) De Croufaz.  ii2 REMARQUES sur „ que divifion entre les Maitres. Quelle „ alfreufe école pour la jeuneffe! On objectera peut - être que 1'on n'a pas tant a fe plaindre de ces défordres dans ce Pays. Jen conviens, mais n'y en a -1 - il pas un grand nombre d'autres qui font prefque auffi pernicieux a la jeuneffe: on s'en convaincra facilement, fi 1'on confidére ïmpartialement 1'Education phyfique & morale , que la plupart des Parens donnent k leurs enfans. N'eft - il pas evident qu'on les HimjcLui, ucs ics premiers momens de leurs naiffance, par les maillots, par les corps, & en les étouffant a moitié fous le poids des couvertures, écdevant les paniers afeu, a une plus dure fervitude que celle oü ils ont eté; de forte que s'ils ont le bonheur de ne pas fuccomberkdes foins adminiftrés dans un bonbut, jel'avoue, mais qui produifent malheureufement un effet tout contraire. Le maï-aife que leur caufe cette gêne, les rend de mauvaife humeur, & la trop grande chaletir affoiblit leur conftitution, ce qui influe fur tout le rcfte de la vie,  trois DISSERTATIONS 113 vie, fuivant le fentiment de Platon, Cf) de Mr. Ji/nker. (g) & de plufieurs Inftituteurs modernesi , Quel rapport, dira -1 - on, peut avoir la première edücation phyfique des enfans, qui n'ont encore aucune connoiffance, avec leur ed cation morale? Je réponds qu'elle en a une trés grande, paree qu'en contrariant la nature dans fes opératipns, on 1'empêche de fe développer auffi heureufement qu'elle auroit fait fans ces foins mal - entendus, qui obftruent les mufeles des enfans 9 affoibliffent confidérablement leurs organes qui, dans la fuite, doivent avoir tant d'influen* ce fur les facultés de 1' ame, dont 1'exercice dépend en grande partie de la force de ces organes. H ;•('''*: % (ƒ) „ II n'eft pas croyable, dit Platon, combien^ les trois premières années de la vie influent furtöutë 99 la Vie fi 1'on en prend le foin qu'on doit. (g) Ne fentira - t-on jamais" dit Mr. Junker dans 1'avant - propos de la Tradu&iori de la découverte de PAmérique par Mr. Campé, „ Ne ientira-t-on ja- mais, dit ïf qu'un enfant encore au berceau peut v déja contracler des vices, & que 1'éducation pour ,', produire tout fon èffet, doit commcnccr avec Fixi-i ftence de 1'enfant.  H4 REMARQUES sur C'eft du moins le fentiment de Monfieur Foucroy, Confeiller du Roi au Baillag'e de Clermont en Bcauvoifis, dans ie Livre intitulé Les Enfans èlevès felon Fordre de la nature ; lequel après avoir folidement démontré 1'utilité de fa méthode pour elever les enfans du premier age; Méthode qui mérite bien d'être lue dans le Livre même, par tous les Peres & les Meres qui prennent a coeur 1'education phyfïqué de leurs enfans, ajoute page 114. „ fi le Phyfique des enfans „ prend par mon éduca'tion un accroiffe,j ment trés rapide, duquel on ne peut avoir „ d'idée fans en avoir été le témoins; fi „ elle leur procure des forces corporelles „ qui femblent prématurées, le moral doit „ néccflairement s'en reffentir, par la relation „ immédiate qui fubfifte entre les organes „ 'du corps & les facultés de 1'ame. Elles „ doivent fe manifefter d'autant plus faci„ lement, que les mufcles & les nerfs ont „ plus de foupleffe ók de reffort, & qu'ils „ mettent toutes les parties plus en état „ d'obéïr a la volonté de 1'individu. Or c'eft „ précifément le cas oü font mes Eleyes".  trois DISSERTATIONS 115 II continue, page 251 , en ces termes. „ Que Ie Citoyen de Geneve donne par fois „ d'excellentes lecons. En voici une en„ tr'autres qui me paroit fmgulierement „ propre a dévenir le fondement & le prin, cipe de toute éducation. „ Pour exercer un Art, dit M. R.. Qi) „ il faut commencer par s'en procurer les; „ inftrumens, il faut les faire affez folides „ pour refifter a leur ufage. Pourappren„ dre a penfer, il faut exercer nos mem„ bres, nos fens, nos organes qui font les „ inftrumens de notre intelligence, &pour „ tirer tout le parti poffible de ces inftru„ mens, il faut que le corps qui les four„ nit foit robufte & fain. „ Ainfi loin que la véritable raifon de „ 1'homme fe forme indépendamment du „ eorps, c'eft la bonne conftitution du „ corps, qui rend les opérations de 1'e.f„ prit faciles & füres". L'education phyfique de notre Jeuneffe a -1 - elle quelque analogie avec ces principes d'education, qui font fondés fur des raifons folides, & que 1'expérience a couH 2 nile.  116 REMARQUES sur ronnés des plus heureux fuccès ? Que le nombre des Parens eft peut l qui, réfléchiffiuit féricufement fur cette importante matiere, ne fe laiffent pas dominer par les préjugés de la coutume, ont le courage de s'en ecarter! Combien peu y en a-t-il qui foient perfuadés que 1'education phyfique a quelque influence fur 1'education morale de leurs enfans, qu'on ne négligé auffi que trop ? II feroit bien a fouhaiter que tous les Peres ck les Meres fuffent bien convaincus de fimportance des Lecons que le Profeffeur de Croufaz, leur donne page ome du traité de 1'education des Enfans. „ On ne fauroit trop, dit -il,' répéter „ cesvérités: Que les Enfans ont unbcfoin „ infini d'éducation ; Que fimportance de „ cette matie-re ne fauroit être exagerée; „ Que tout eft capital dans eet age, qu'on „ ne fe fait aucun fcrupule dc tant négliger. „ Les habitudes des hommes flits décident „ de leur probité & de leurs défauts, de „ leur félicité & de leur mifere. Chacun a „ les fiennes, & chacun fait celles qui le do„ minent. „Ces habitudes naiffent dés 1'en-  trois DISSERTATIONS uj | fance & jettent des racines qui durent „ jusqu'a la vieilleffe, & qu'on n'arrache „ presquejamais entierement. Sinouspou„ vions rappeller dans notre mémoire, tout „ ce qui nous eft arrivé dans ce premier age, „ nous y trouverions les véritables caufes ,, de tous ces penchans fecrets qui nous „ dominent, de ces averfions qui nous pré- viennent, de ces fantaifies auxquelles „ nous nous étonnonS d'être aifujettis, de „ ces inégalités qui nous déshonorent, de „ ces goüts que nous ne faurions juftifier. „ Tout eft nouveau pour les Enfans; tout „ excite leur attention & leur admiration: „ Un rien les ravi't ou les épouvante^ cha„ que objet fait dans leur tendre cerveau, „ des impreffions profondes;, elles s'ycon„ fervent, & tout ce qui y a le moindre rap,, port les entretient nous en eprouvons cba„ que jourl'efficace, mais nous avonsperdii „ Fid'ée de ce qui y a d'abord donné lieu ; „ nous n'étions pas en en état d'y réfléchir & „ d'en confier le fouvenir a notre mémoire". On objecfera fans doute que, quoi que Fon eonvint.de la vérité de ces.aifertions, H 3  ii8 REMARQUES sur elles n'ont cependant qu'un rapport indirect avec 1'Apologie des Maitres d'ecole"? Nous 1'avouons; mais comme on exige d'eux, dans quelques uncs des Differtations, bien plus qu'on ne peut raifonnablement en exiger, comme nous nous flattons de 1'avoir démontré, il eft trés naturel d'alléguer tout ce qui tend a les difculper: Ces affertions, etant confidérécs par la liaifon qu'elles ont avec 1'education morale., cadrent trés bien ici, & forment enfemble une autorité en notre faveur. On objectcra peut-être encore que, quand même notre éducation phyfique feroit auffi eloignée de fa fimplicité primitive, & auffi défectueufe qu'on ie prétend; notre edücation morale n'eft cependant point fi imparfaite qu'on la repréfente. Quoi qu'il en foit, -il eft trés certain que le paffage du Profeffeur Crovfaz, que nous allons rapporter , eft trés applicable a nombre de Peres & de Meres de ces Provinces: „ La plupart des Parens, dit - //Page 15» „ font de leurs enfans de petites idoles, ce „ font d'innocentcs créatures, qu'on nepeut  trois DISSERTATIONS 119 „ fe laffer d'admirer & a qui on facrifie tout; " tous leurs défirs font facrés, il faut \\ les fatisfaire, il faut les prévenir, il faut „ les ex citer, leurs foibleffes font aimables: tout change dcnonl en leur faveur: 1'en'l vie efl en eux vivacité; le menfonge preu • " ve d'efprit, la colere preuve de valeur". " J'aime a me perfuader qu'il n'y a que trés peu de parens fi idolatres de leurs enfans, pour s'oublier au point de pallier des défauts firévoltans, & furtout le menfonge; cependant plufieurs Pcres & Meres prétendent qu'on ne puniffe ces vices, même dans les Ecoles, que par une reprimande qui, dès qu'ils y font accoutumés, fut ordinairement bien peu d'impreffion fur eux. On eft généralement dans le premier &ge trop indulgent k leur egard, 011 n'a pas le courage de s'oppofer efficacément a leurs petits défauts, que 1'on envifage fouvent comme des gentilleffes; quoique ce foit le tems le plus propre a leur donner le pli qu'on fouhaite. L'humeur inconftante & acaridtre des gardes & des autres domeftiques, ne contribue auffi que trop a gater les jeunes gens; tanli 4  i2o REMARQUES sur tót en les flattant & en les applaudifiant même Jufque dans leurs défauts; d'autre fois en les agacant & en les contrariant mal - a - propos , comme s'ils avoient pris a niche de les rendre infolens & de mauvaife humeur Committent-ils quelques etourderies, on leur fait de longues harangues inintelligibles pour eux , & on les accoutumc ainfi , dés leur bas - age, a ouïr de grands mots oü ils ne comprennent rien. A la bonne heure fi 1'on en reftoit la, mais on finit ordinairement par les menacer de les envoyer a 1'ecole, ou de le faire dire au Maitreimprudence qui leur infpire cette averfion ' pour les Maitres & les Maitrefles d'ecole ' qu'on remarque a nombre d'enflms, dont plufieurs en confervent prefque toute leur vie quelque impreffion; ce qui fans doute n?arriveroit pas, fi les Parens avoient la prudencc de fairê comprendre a leurs enfans, que c'eft un grand bpnneur d'allera 1'ecole, & une faveur toute particuliere qu'on leur accorde, dont on ne manquera pas de les priver, dès qu'ils s'en rendront indignes: 3eur répréfentant en même tems les avanta-  trois DISSERTATIONS 121 ges qui réfultent d'une bonne edücation, que des milliers d'enfans, qui en feroient peutêtre un meilleur ufage qu'eux, n'ont pas le bonheur d'avoir. PlufieursPeres & Meres ont 1'indifcrétion , aprés avoir gftté leurs enfans, d'exiger des Maitres qu'ils les corrigent des fautes qu'ils ont commifes a la maifon, ne faifant pas attention qu'une femblable conduite, ne fauroit manquer de faire de funeftes impreffions fur leur efprit, enleurperfuadant que les Maitres s'arrogent un droit qui ne leur appartient pas. N'eft - ce pas une chofe déplorable, que plufiêurs Peres & Meres foient obligés de fe fervir du nom du Maitre pour gouverner leurs enfans, comme font ces gardes ignorantes, qui employent les noms des figures gigantesques pour imprimer de la crainte aux enfans qu'on leur a confiés, qu'ellesrempliffentdepréjugés, & rendent pulfillanimes dès leur tendre enfance? , II n'arrive que trop fouvent qu'on fait , fuccéder le Maitre au loup-garou. Ce méchant dróle, dit - on, éa plus peur de la ■ malebête, je fèurm bien le ranker, il faut H 5  122 REMARQUES sur. , quil aille a l'ecole, & je dirai au Maitre , qu'il le doit bien battre. N'eft - ce pas la 5 le langage de plufieurs Meres mêmes? , Ceft encore bien du bonheur fi elles n'y , ajoutent pas, que le Maitre leur doit , donner beaucoup a apprendre. Voila , comme on parle en préfence des enfans, , & on prétend de les corriger de cette maniere ; mais on fait tant de mal en le , leur difant une leule fois , que les Mai, tres les mieux intentionnés ne pourront , jamais le reparer. La raifon en eft toute y fimple , ils ont unpréjugé contre les Ecoy les, paree qu'on les leur a fait envifager , comme un chatiment: On ne fauroit plus , leur perfuader que c'eft pour leuravanta9 ge, ils ne s'appliqueront qu'autant qu'ils y , feront forcés; s'imaginant qu'on leur , fait tort, en les faifant apprendre avant , d'avoir fait du mal; puis qu'on leur a , repréfenté 1'etude comme une punition. Nonobftant cette finiftre prévention qu'on a infpiréc aux enfans, la plupart des Parens ne laiffentpas d'ajoutertrop légérement foi aux rapports, que leurs enfans neman-  trois DISSERTATIONS 123 quent pas de leur faire journellement, a la charge du Maitre, dès qu'ils s'appercoivent qu'on les ecoute avec plaifïr: critiquant continuellement fa Méthode; qu'il leur donne trop d'ouvrage; qu'il fait de la différence entre fes difciplesqu'il eft emporté & trop févere; qu'il ne fe donne aucune peine & leur egard, les abandonnant, pour ainfi dire, a eux-mêmes, & qui fait quoi encore! Enfin, il y a des Parens qui ne fe font aueun fcrupule d'attribuer la faute au Maitre , en préfencc de leurs enfans, du peu de progrès qu'ils font a 1'ecole; au lieu de la leur imputer; en leur repréfentant naïvement, le tort qu'ils fe font a eux - mêmes par leur négligence, le chagrin qu'ils leur caufent, aufli bien qu'a leur Maitre, dont ils n'ont pas fujet de douter un moment de fes bonnes intentions a leur égard. Non point que je délaprouve que les parens examinent fi leurs enfans font des progrès a 1'ecole, bien loin de la; c'eft une chofe trés louable , il eft même de leur devoir de s'enquérir de la méthode du Maitre & de la direétion qu'il tient a fon ecole; mais on doit le faire avec  i24 REMARQUES sur prudence, fans témoigner la moindrc défiance de fa capacité ni de fa bonne volonté envers eux. Des Parens intelligens profitent des moindres circonftanccs pour faire comprendre a leurs enfans la confiance entiere qu'ils ont a leurs Maitres; car tout ce qui tend a diminuer la bonne idéé, qu'il importe extrêmement qu'ils ayent d'eux, efl trés nuifible k leur éducation: de forte qu'on peut bien appliquer aux Maitres d'ecole , ce que le célébre Tiffot dit des Médecins. „ La confiance des malades a ceux qui „ lestraitent eft d'une fi grande conféquen„ ce, que fans elle, les remédes les plus „ efticaces ne produifent que trés rarement 3, les bons effet qu'on avoit lieu de s'enpro„ mettre". La coutume, qu'ont divers Parens de faire faire des plaintes aux Maitres par leurs Domeftiques, eft auffi pernicieufe a 1'education de leurs enfans, paree qu'ordinairement ils y ajoutent toujours quelque chofe, & ils favent fi peu gardcr le fecret, que les enfans font déja inflruits dumeffagelong-  trois DÏSSERTATIONS 125 tems avant le Maitre: les billets méme k ce fujet, dont les Parens chargent quelquefois leurs enfans, ont auffi des inconvéniens, fi on les ecüt après un examen dont ilsn'auront pas eté fatiffaits; car quelque peu de pénétration qu'ait un enfant, il lui fera facile d'en déviner a peu prés le contenu, comprenant bien que c'eft pour inculper le Maitre & lui laver la tête. Bien loin que les Maitres foient trop féveres, c'eft un défaut qu'ils peuvent juftement imputer a quelques Peres & Meres, qui puniffent des fautes légeres avec trop de févérité; par oü les enfans fe roidiffent contre les correótion, ou du moins ne s'en foucient guere, qu'on leur inflige dans la fuite pour des cas plus graves. D'autres? furchargent la mémoire de leurs enfans, en leur impofant de trop grandes tiches, ne leur laiffarit que peu ou point de liberté; leur donnant ainfi dès leur tendre jeuneffe du dégout pour 1'etude: en reprimant trop leur vivacité naturelle, on emouffe leur efprit, on veut avoir des enfans pofés avant  ii6 REMARQUES sur qu'ils ayent du jugement, & on en fait de petits hébêtés, au. dire de Mr. Foucroy. Quel contrarie etonnant ne remarque-t-on pas dans la maniere de penfer de la plupart des Parens, a 1'egard des punitions que les Maitres font contrains d'infliger, de tems en tems, h leurs ecoliers, pour maintenir 1'ordre & la tranquilité fi néccffaire dans une école, & pour plufieurs autres raifons. L'un ne doit abfolument point refter a 1'ecole, 1'autre ne doit fur - tout point avoir de coups, car on ne pourroit plus le faire retourner a 1'ecole. II ne faut donner que de trés petites lecons a un troificme, crainte qu'il ne prit du dégout pour le travail, & quand même il ne les fait pas, il faut bien fe garder de le contraindre a les apprendre, de peur de furcharger fa mémoire, & de lui infpirer de 1'averfion pour 1'etude. On fe flatte qu'on ne traitera pas rudement un tel, paree que c'eft un enfant fi fenfible qu'il cn déviendroit malade auffi bien que fa Mere, & mille femblables fadaifes! D'autres ne doivent point payer d'amendes, paree que n'etant pas accoutumés de porter de 1'argent  trois DISSERTATIONS tz? » fur eux, on ne fauroit encore fe réfoudrè k leur en donner, de peur qu'ils ne 1'employaffent k quelque friandife. Enfin il y a des Parens, & ce font certainement les plus raifonnables, qui fouhaiteroient qu'on n'employ&t point d'autres cMtimens dans les ecoles, que de priver leurs enfans des récréations ordinaires, & de ne leur accordef aucune partie de plaifir jusques k ce qu'ils fe foient rangés k leur devoir, ayant fans doute remarqué que cela faifoit quelquefois plus d'imprefïion fur eux, que des corrections plus rudes, & moins analogues k la nature d'un être raifonnable: Toutefois j'ofe affu* rer que ce n'eft pas toujours un moyen efHcace, que plufieurs d'entr'eux n'en fon$ aucun cas; on diroit même qu'ils y trouvent des agrémens qui flattent leur indolence naturelle. D'ailleurs c'eft ce qu'on ne peut guere pratiquer qu'k 1'egard despenf^ onnaires, paree que, quant aux ecoliers èxtemes, les Parens devroient agir de concert avec les Maitres, & c'eft qu'on , mais il eft auffi tres applicables aux Mai, tres des Villes, oü 1'on en trouve fouvent , qui lifent & ecrivent fort bien, & quine , favent pas chiffrer, tandis que d'autres , lifent & chiffrent bien, qui cependant ecri, vent ou chantent mal'. II me femble, lorfqu'on trouve qu'un poftulant n'eft pas en etat d'enfeignêr a ecrire, qu'il fiudroit le borner a la leémre &c, jusqu'a ce qu'il eüt la capacité requife pour montrer a. ecrire. En effet, un Maitre qui a des talens &une bonne main, perd , avec les petits enfans qui ne favent ni lire ni epeller , un tems précieux qu'ilpourroit employer bien plus utilement, & c'eft auffi une chofe trés ennuyante pour lui de s'amufer avec des Abécédaires, qui, nonobftant toutes les peines poffiblcs qu'il fe donne k leur egard, n'apprennent prefque rien autre chofe qu'a connoitre les lettres, pendant un long efpace de tems qu'ils font a fon ecole, ce qui eft fuffifant pour décourager toute perfonne qui a quelques talens de fe dévouer a 1'education de la jeuneffe.  trois DISSERTATIONS 14/ On poorroit enfuite ayancer les ecoliers, fous la direótion des Infpecieurs, d'une ecole' a 1'autre, & pour prévenir tout abus,. il faudroit obliger les Maitres d'ecole de ne point accepter d'ecolier qu'il ne fut muni. d'un billet des Infpecteurs, par oü on aboliroit une coutume qui eft bien plus nuifible & plus générale qu'on ne penfe. Plufieurs Peres & Meres, voulant précipiter 1'education de leurs enfans ou leur eomplaire, les mettent aux Ecoles Francoifes lorfqu'ils auroient encore bien befoin d'apprendre a lire en Hollandois, & quelque fois même qu'ils ne favent pas encore epeller comme il faut, ce qui eft caufe que les enfarts ne peuvent abfolumcnt point faire les progrès qu'on auroit eu lieu de s'en promettre, fi les Parens avoient eu la patience d'attendre encore quelque tems. Etquoiqu'un Maitre puifie dire pour les en difluader j c'eft bien fouvent fort inutilement, il y a peu de Peres & Meres qui veuillent être confeillés fur eet artiele, bien que plufieurs reconnoifient enfuite qu'ils ont eu tort.— Un Maitre doit, en pareii K 2  148 REMARQUES su*. cas les congédier prudemment, paree qüe s'ils refufent directement leurs enfans, a caufe qu'ils ne font pas alfez avancés, les Parens s'en formalifent fouvent, ce qui tourne quelquefois a fon désavantage. D'autres difent, foit par amour propre, foit par ignorance, que leur enfant litdéja paflablement; néanmoins on s'appercoit, dès qu'il vient al'ecole, qu'il ne fait feuiement pas epeller comme ii faut. D'autres enfin, avouent franchement qu'il n'epelle pas encore promptement; mais qu'ils craignent qu'il ne 1'apprenne jamais dans 1'ecole oü il eft: d'ailleurs qu'il èft trop grand pour aller plus long tems k 1'ecole Hollandoife, qu'il a des camarades plus jeunes que lui qui apprennent déja le Francois. , On dira fans doute que ce plan feroit , incompatible avec le droit qu'ont incon, teftablement les Parens de faire inftruire , leurs enfans oü ils veulent, & en ce qu'ils , jugent a propos: mais ce n'eft que la , nouveauté qui donneroit lieu k cette ob, jeétion'. Jen'alléguerai pas pourle prouVer, ce qui fe pratique dans d'autres pays,  trois DISSERTATIONS 149 oü les villes & les villages font feuls chargés de 1'entretien des Maitres d'ecole, les Parens n'y ayant aucun frais a fupporter pour l'inftruétion de leurs enfans, ce qui-n'a pas lieu dans ce Pays: je me contenterai de remarquer que 1'on y obferve cependant a peu prés le même ordre aux Ecoles Latines, que celui que 1'on vient de propofer pour les autres Ecoles. Les Parens n'ont rien a dire dans celles - la, & s'ils vouloient s'y ingérer, on leur feroit obferver que ce n'eft nil'agenile tems qu'on a eté a 1'ecole qui doivent faire avaneer a une claffe fupérieure; mais uniquement la capacité, dont plufieurs n'en fauroient juger. II faudroit, pour obvier aux deux inconvéniens que j'ai indiqués , favoir, que le nombre des ecoliers eft prefque toujours trop, grand & les revenus trop modiques, que 1'on etablit trois fortes d'ecoles, & de chaque forte autant qu'il paroitroit néceffaire , en propofant aux Maitres actuels de fe déclarer a quelle forte d'ecole ils fouhaiteroient d'être admis , bien entendu, qu'ils feroient tenus de donner des preuves de leur K 3  I5Q RE MARQUÉS sur capacité, fans qu'ils puffent plus changer > dans la fuite, qu' avec 1'approbation de Meffieurs les Infpecleurs des Ecoles. On pourroit fixer, cc n<(? femble, le nombre des ecoliers de cette maniere : La ire claffe d'ecole. 40 Ecoliers a 53 fous par mois, ce qui fait par an - * ƒ1272 La 2^e clajfe d'ecole. 50 Ecoliers b 40 fous par mois, montant par an a - 1200. Et la %e dafje dj ecole. 60 Ecoliers a 30 fous par mois, ce qui fe monte par an a - 1080. II faudroit, en conféquence de ce plan, avancer d'une ecole a 1'autre, les Maitres qui le. mériteroient, ce qui exciteroit une noble emulation entr'eux, & a mefure qu'ils avanceroient en age, ils auroient moins cl'ecoliers & plus de revenu, ce qui leur procureroit, dans leur vieilleffe, 1'occafion de prendre de bons So.usmaitres. N'eft-ce pas.la auffi une amélioration effentielle? II me paroit qu'il conviendroit de mettre les Ecoles, oü 1'on apprend les. Langues  trois DISSERTATIONS 151 etrangeres, & en même tems tout ce que 1'on enfeigneroit dansles Ecoles des Arts, dans 1'ordre fuivant: Celles de la 1re clajfe, 3 o Ecoliers a ƒ 6 par mois, montant par an a. - - - f2160 Celles de la 2^ clajfe, 40 Ecoliers a 70 fous par mois - 1920 Celles de la %e clajfe 50 Ecoliers a 53 fous par mois 1590 Et fi 1'on jugeoit néceffaire d'eriger une 4^ forte d'ecole oü 1'on n'enfeigneroit qu'a epeller & a lire, on pourroit y admettre: 40 Ecoliers a 30 fous par mois, ce qui fe monte par an a - 720 En etabliflant des Ecoles de divers prix, on n'a pas tant en vue la différence de 1'inftructlon qu'on y doit donner, ni la fupériorité des talens des Maitres de la premiere & feconde clafles d'ecole, que de procurer a plus de monde 1'occafion de pouvoir faire apprendre a fes enfans des langues qui peuvent leur être d'une trés grande utilité, fuivant le genre de profeflion auquel ils fe K 4  ï52 REMARQUES sur deftineront, dont la plupart d'entr'eux feroient vraifemblablement privés lans cette modification, foit par une economie mal placöe des Parens, foit que leurs facultés ne leur permettent pas de faire des dépenies fi conficlérables pour l'inftrucliion de leur enfans, ou enfin, qu'ils ne fentent pas toute rimportance d'une bonne edücation; & malgrè cette attention il pourroit bien arriver que 1'on nous citeroit le proverhe qu'on dit vulgairement : Faire du cuir d'autrui large co.urroye. Cependant il s'en faut de beaucoup, que je ne fixe le prix en général aufïi haut que Mr. van der palm, qui le met apaffé ƒ 4 par mois, ce qui n'eft certaincment point trop , lorsqu'on a de feftime pour les Sciences & qu'on en fent 1'utilité. On ne trouvera point que ces prix foient exorbitans pour les Villes maritimes, fi 1'on confidere qu'il y a bien des Villes en Hollande uü 1'on paye davantage aux ecoles Francoifes, comme a Haarlem, oufon doune ƒ6o. par an d'ecolage par enfant, oü le nombre des ecoliers n'eft point limité , &;  trois DISSERTATIONS. 153 oü la coutume d'arrêter les mois qu'on a en d'autres endroits, eft entierement inconnue; cependant on n'y enfeigne rien deplus qu'on ne feroit dans les Ecoles quejeprens la liberté de pmpofer. Eft-ce donc que la Lecfure, 1'ecriture, 1'Arithmétique, 1'Ortographe, le chant des Pfeaumes , les Elemens de la Réligion, 1'Hiftoire de la Patrie & la Géographie ne font pas des Arts & des Sciences d'un affez grand prix pour la jeuneffe , pour accorder ce modique falaire k ceux qui font chargés du pénible ouvrage de les lui enfeigner: d'autant plus, qu'on pourroit laifler les enfans dans les Ecoles inférieures, pendant qu'ils ne feroient pas a même d'y faire des progrès, proportionnés au prix de 1'ecolage. Néanmoins pour lever cette difficulté , & pour ne pas obliger les Parens a payer plus qu'ils ne peuvent ou qu'ils ne veulent pour rinftrucfion de leurs enfans, il faudroit néceffairement ajouter d'autres Ecoles k celles - la, par exemple , quelques unes de 100 Ecoliers a 20 fous par mois, ce qui fait par an - - ƒ1200. K 5  154 RE MARQUÉS sur Mais il faudroit, pour enfeigner tant d'enfans, qu'il y eüt dans chaque ecole un Sousmaitre a qui le Maitre donneroit ƒ i oo par an & la table; moyennant qu'on lui fit une penfion annuelle de ƒ300. II feroit bien a fouhaiter qu'il y eüt un plus grand nombre d'ecoles pour les pauvres , oü i'oninftruiroit la jeuneffe gratis, fuivant le plan de la Differtation Jngenuas &c. „ Des etabliffemens" dit 1'Auteur du Mode Frarigois, ,, qui offrent aux enfans des „ citoyens fans fortune une edücation peu „ luxeufè, mais fuffifante pour les condui„ re indiftinétement a une profeffion hon„ nête, depuis celle d'artifans jufqu'aux „ plus nobles etats, felon la condition des „ fujets, ces etabliffemens font fans doute ,i -beaux & vraiment patriotiques". Telle eft entr'autre 1'inftitution qu'on vient tout récemment de former au milieu d'une nation, qui, jufqu'aprcfent, aparu affez indifférente au fujet de 1'education du menu peuple; inftitution par conféquent bien louable & bien digne d'être imitée.  trois DISSERTATIONS 155 Voici ce qui en a eté publié dans quelques papiers publiés de ces Provinces: „ Parmi le nombre des inftitutions que „ 1'on fait de toute part pourprocurer del'e„ ducation aux enfans du bas peuple qui font „ beaucoup d'honneur a ce fiecle éclairé ; il „ n'y en a point qui furpaffe la Societé Pa„ triotique de Smlle, qui a établi 19. „ Ecoles gratuites pour les filles pauvres, „ & 3. pour les garcons, enfans d'ouvriers „ peu aifés: on ne fe contente pas de les „ inftruire gratis, mais on pourvoit auffi a „ leurs befoins temporels, par des bienfaits „ péeuniaires en faveur de leurs parens, M lorfqu'ils font reconnus pour des gens de probité. Onentretientannuellementdans „ les premières 460. filles, & dansles „ fecondes 72 garcons". „ On leur apprend le métier auquel ils „ paroiffent propres; & s'il s'en trouve quelques uns en qui on découvre des „ difpofitions plus relevées, le plan de „ Finftitution eft de faire toutes les dépen„ fes convenables pour pomTer un tel fujet „ au plus haut point oü il puifle parvenirx  15$ RE MARQUÉS sur » foit dans les Arts, foit dans les Sciences. „ Voila une Societé vraiment Patriotique „ s'il en fut jamais. Jamais aucune fon„ dation n'a fait plus d'honneur k 1'huma„ nité, & c'eft ce qu'on doit appelier faire véritablement le bien". On objectera vraifemblablement qu'on a ju%i*a préfent fort négligé, dans la plupart des Etats de PEurope, oü la Reformation n'a pas pénêtré, 1'education des enfans de la ïie du peuple; mais qu'il n'en eft pas de même dans nos Provinces, oü 1'on a eu foin d'eriger des Ecoles alimentées pour les enfans orphelins des bourgeois & des pauvres, de même que des Ecoles, oü 1'on inftruit gratuitement les enfans dont les Parens font dans 1'indigence.—. Cela eft vrai, mais oferoit - on foutenir que nos etabliffemens foient d'une utilité fi unU verfelle que celui-ci, qui ne doit fon creclion qu'a une Societé Patriotique. A Fexception d'un petit nombre d'inftitutions , Ibrmées par la générofité de quelques perfonnes charitables, nos Ecoles de charité ne font pas comparables a celles -la. II ne  trois D1SSERTATIONS 157 fera pas néceffaire, pöuf s'en convainofe, d'entrer dans des détails que nous voulons eviter pour n'offenfer perfonne; il fufnra donc de remarquer en général: 1. Que fi 1'on confidefe le grand nombre d'ecoliers qu'il y a ordinairement dans ces fortes d'ecole, on conviendra fans peine qu'il eft moralement impoffible qu'on puifïe, k tous egards , donner k ees ecoliers une edücation propre k les civilifer. Un feul e emple fera fuffifant pour le démontrer: il y a quelques années que le Maitre d'ecole d'une Diaconie, ayant bien au deli de 200 ecoliers , demanda k fes fupérieurs de lui accorder un foufmaitre pour Taffi!"ter, ce qui lui fut refufé, k moins qu'il ne le prit pour fon compte. Le Maitre, n'ayant que pour vivre trés fobrement, ne fongea plus k prendre de Soufmaitre. Douteroit - on encore que ces Ecoles ont grand befoin d'une meilleure direclion? 2. Que lorfqu'on etablit un Maitre dans les Ecoles alimentées, non feuiement 011 ne choifit que trés rarement une perfonne qui ait déja tenu ecole, quelque naturel  t58 REMARQUÊS sur qtfil fut, mais onexige ordinairement, fans döute par un principe d'economie ou de léfine, que les poftulans n'ayeht point d'enfans; & pour ne pas rendre cette précaution illüfoire, on appelle des perfonnes avancées en age, qui ne font plus a même de faire des progrès pour s'acquitter convenablement des fonctions de leur nouvelle vocation , qui exige pourtant toute 1'energie d'un homme dans la fleur de V&ge. II y a plus: Eft-ce que des perfonnes qui n'ont jamais expérimenté cette folllcitude paternelle, ou qui, avec Ie tems, en ont oublié les douces impreffions ? qui ne fauroient être inquietés de ces vives allarmes qui agitent les Peres a 1'approche du moindre danger qui menace leurs énfans ? qui n'ont jamais reffenti la vive douleur qu'on eprouve, Iorfqu une mort prématurée nous enleve ce que nous avons de plus cher en ce monde, ou s'ils fontreffentie, n'en ont plus, par i'efpace de tems qui s'eft ecoulé, qu'unc idéé confufe & peu fenfible? Eftce donc que ces perfonnes font auffi propres a dévenir tout a coup peres & Maitres  Trois DISSERTATIOrNfS ï59 de ces inftitutions pieufes, que celles qui favent par expérience toute fimportance des devoirs paternels, & qui font convaincues des obligations qu'ils leur impofent? qui peuvent continuellement fe répéter, c'eft ainfi que je fouhaiterois qu'on eiiagit avec mes enfans, fi jamais ils etoient dans cè cas ? L'etat de pere fait naturellement prendre un intérêt plus vif au bonheur de la focieté, il infpiré a toutes perfonnes qui penfent bien, des vertus fociales, & met les individus plus en etat de gouverner des enfans & des adolefcens. Ce lien naturel, qui unit le Pere a 1'enfant, doit néceffairément infiuer fur la maniere de penfer & d'agir de celui-Ik, vis-k- vis de ces pauvres orphelins, le rendre plus fenfible & plus compatiffant k tout ce qui les intéreffe , & lui faire redoubler de zele & d'aétivité pour leur procurer, autant qu'il dépend de lui, tout le bien être poflible temporel & fpirituel. Et comme il n'eft guere poflible, que les enfans fentent jamais toute 1'etendue des obligations qu'ils ont k leurs Parens avant  ico REMARQUÈS sur d'être Pere; il me femble prefque auffi difficile que des perfonnes, privées de cette tendre relation, puiffent apprécier au jufte comment il convient de traiter les enfans dans ces Ecoles pour les civilifer & les former a la vertu. Ainfi la principale raifon qui fait qu'on exclut les poftulans chargés de familie, feroit celle qui, felon moi, leur devroit faire donner la préférence. II faudroit, pour remédier aux incorivéniens qui réfultent d'un trop grand nombre d'ecoliers, divifer les Ecoles des pauvres, qui font trop nombreufes en trois ou quatre claffes, qu'on devroit placer dans la même maifon, chacune dans un appartement apart, en faifant deffervir chaque cïaffe par un Soufmaitre, fous la dire&ion du Maitre qui auroit 1'oeil fur toutes les claffes, & qui en feroit en même tems refponfable. On pourroit, par exemple, mettre les commencans dans la claffe inférieure. Dans la feconde claffe, ceux qui lifent & ecrivent. Dans  trois DISSERT ATIONS iói Dans la troifieme ciaffe, cetix qui chiffrent, qui font des Thêmes, des conjugaifons & dés Déclinaifons. Et enfin dans la quatiïeme claffe , oü lé Maitre dunneroit lui - même les inftrüctions, ceux qui apprendroient a compofer des Lettres, 1'Algebre, laGéométrie, la Navigation &c. trouvant le fentiment du Profesfeur nahuis trés raifonnable, de ne point gêner les pauvres, & de les laiffer apprendre les Arts & les Sciences qu'ils fbuhaitent, pourvu qu'ils y ayent de bonnes difpofitions. II conviendroit auffi d'obliger les MaitréS des Ecoles privilégiées,par oüj'entends toutes celles qui font entretenues par le public, foit en tout ou en partie, d'enfeignêr, aü inoins une heure par jour, leürs fousmaitres, ce qui pourroit trés bien fe faire, ayant fuffifamment de tems pour cela h'6r§ des heures dé 1'ecole. Cet arrangement contfibueröit beaucoup a exciter une noble emulation parmi les jeunes gens, qui s'appliqueróient fans doute iiiieux, pour être avancés d'une ecole 5 L  162 REMARQUES sur 1'autre, & même parmi les Soufmaitres qu'il faudroit examiner tous les demi - ans, les recompenfer & les avanccr a mefure qu'ils g'en rendroient dignes. Bien entendu que 1'on congédieroit , avant d'avoir fervi le tems fixé, ceux qui feroient négligens, ou 1'ayant accompli, on les deffcineroit aux petites Ecóles, fi leur conduite ou leur maniere .de gouverner la jeuneffe n'y mettoient point d'obftacle; en ce cas , il faudroit les exclure du droit de jamais tenir ecole dans eet endroit lk; nonobftant 1'examen qu'ils y auroient déja fubi en devenant Soufmaitres. II feroit néceffaire que les Parens, qui profitent des Ecoles alimentées ou favorifées, fuffent tenus d'envoyer leurs enfans toute 1'année k 1'ecole du foir, k moins d'en avoir obtenu 1'exemption des Infpecteurs. II n'y a rien de plus contraire k line bonne edücation, que ce tintamare & ces paroles indécentes que 1'on n'entend que trop fouvent le foir dans les mes; oü ils font expofés k toutes fortes de dangers, & oü ils n'apprennent en même tems que  trois DTSSERTATIONS. '163 du mal i on pourroit même fuppofer cue cela eft incompatible avec une bonne PolL e„ C'eft, du moins, ce qui fit dire, il y a quelques années, au Sölliciteur Général de la £hambre des Communes d'Angleterre, en propofant un BUI pour régler la Police de Londres, que quantité de géns qui etoient journellement facrifiés, terminoiènt ordinairement leur funefte carrière par le gibet \ auroient eté des membres utiles k la Société, fi 1'on avoit furveillé k leur enfance: Je laifle cette aflertion telle qu'elle eft, & quoi qu'il en foit, je me flatte que perfonne ne contredira 1'utilité d'empêbherj autant qu'on peut, que les enfans du menu peuple ne battent les rues. Tout ce que 1'on vient de pröpoferpeut s'exécuter par les Infpeéteurs des Ecoles, ou par d'autres perfonnes prépofées fous 1'autorité des Magiftrats; qui ftatueroiertt des Régiemens > analogues k chaqué clafie d'ecole , tant pour leur direclion externë qu'iiv terne; qu'on pourroit toujours reclifier dans ia fuitê, dès qu'on le jugeroit néceflaire; h 2  149 REMARQUES sur Quant aux Ecoles penfionnaires, il n'y auroit fimplement qu'k les mettre au rang des autres lortes auxquelles elles ont le plus , de rapport, & les affujettir aux mêmes Règlemens entant qu'ils feroient compatibles avec 1'ordre d'une Ecole penflonnaire. C'eft ainfi, fi je ne me trompe, qu'on pourroit opérer une reforme vraiment utile, qui ferviroit debafe a 1'amélioration des Ecoles. La fimple enumération des avantages qui en réfulteroient, fuffira pour le démontrer. II ne s'etabliroit plus de Maitre qu'il n'en fut capable; ils auroient tous été examinés comme fousmaitres, & après avoir fervi en cette qualité le tems requis ou plus longtems, pendant lequel ils auroient eu toutes fortes d'encouragemens, ils le feroient encore avant d'être recu Maitres. lis nepourroient plus, par conféquent, quitter directement le rabot, la charrue, la livrée ou Fechope pour le devenir ce qui eft certainement un grand abus, qu'on ne tollere nulle part que je fache & dans aucurie profefiion que dans celle - ci. II eft conftant  trois DISSERTATIONS i<55 que les Ecoles penfionnées fourniroient dans quelques années d'habiles jeunes gens, qui avec une bonne Théorie, auroient déja beaucoup d'expérience, ce qui eft un grand avantage, „ car 1'expérience" dit le Profefieur deChavames, „ a inftruitles hom„ mes dans tous les tems, elle eft & elle fera „ toujours le feul moyen de les former". Tout fimple que ce projet paroifie d'abord , il répondroit cependant, je m'afliire, au but qu'on fe propofe en confeillant dans les Differtations. 1'erection d'une Académie pour former de jeunes Maitres; je crois même qu'il feroit préférable, non feuiement paree que 1'exécution n'en leroit pas fujette a tant de difficultés, mais principalement, paree que 1'on fait des progrès plus rapides dans la Théorie , lorfqu'on s'exercejournellement dans la Pratique en donnant des inftructions a d'autres. Deplus, ce feroit une chofe bien etrange pour ces jeunes etudians, accoutumés a la maniere de vivre de r Académie & a prendre de tems en tems des récréations, d'être obligés, après avoir achevé leurs etudes, de. retrograder au rang L 3  ï66 REMARQUES sur de fousmattre, en s'affujettiffimt kun genre de vie fédentaire & laborieux, au milieu d'une centaine de jeunes eveillés, fur lesquels leur profonde Jageffi du coeur humain ne feroit peut - être pas autant d'impreffion, que les exhortations toutes fimples de leur Maitre. Celui qui veut dévenir Maitre d'ecole doit s'y deftiner, pour bien être, dès 1'adolescence, comme l'.on fait k 1'egard des. autres Profeffions; on va k 1'ecole avec plaifir pendant 1'enfance; on y refte fans répugnance comme-2 d ou 3rne Sousmaitre, &, en montant de'cette maniere par dégré, on dévient Maitre lorfque 1'dge & la capacité le permettent: on s'accoutume ainfi jnfenfiblement k un genre de vie, quel'habitude feule rend fupportable, & que tout autre n'embrafle prefque jamais que par néceffité. " Ces Sousmaitres, pouvant bien fubfifter de leurs appointemens, n'auroient pas befoin de donner des lecons en ville, ni de faire en quelque forte la fonclion de domestique, puifque les Maitres feroient raifonnablement recompenfés de leur entretien,  trois DISSERTATIONS io> tellement qu'ils auroient affez de tems pour s'exercer eux - mêmes dans les Arts & les Sciences qui font abfolument néceffaires a yn Maitre d'ecole. Des enfans de bons bourgeois ne fe feroient alors aucune peine d'occuper ce pofte, qui eft, pour le moins, auffi honorable que d'etudier d'une bourfe. On objectera peut-être qu'en. multipliant davantage les Ecoles des pauvres, ily auroit fans doute quelques perfonnes qui, quoiqu'en etat de payer l'inftruétion de leurs enfans, ne manqueroient pourtantpas d'en»vouloir faire ufage au préjudice des autres Ecoles ? Mais il feroit facile d'y rémédier. Ces Ecoles font acluellement fous la di« rection des Diaconies, il n'arrive pourtant pas fréquemment que les Parens demandent la permiffion d'y mettre leurs enfans fans néceffité; & pour öter entierement tout fujet de plaintes k eet egard, il n'y auroit qu'a autorifer les Infpecleurs des Ecoles d'agir de concert avec les Diacres, dans une affemblée combinée d'autant de Diacres que L 4  i68 REMARQUES sur d'Infpeéteurs qui fe tiendroit tous les trois mois ou tous les demi - ans; oü les Parens, qui iouhaiteroient d'envoyer leurs enfans a ces Ecoles , feroient obligés de comparoitre perfonnellement; ce qui feroit d'autant plus néceffaire que le Diacre Préfident, qui donne feul a préfent cette permifïion, change dans quelques Villes tous les trois mois , & dans d'autres tous les mois, par oü il arrivé fouvent qu'un Diacre Préfident refufe ce que- fon Succeffeur permet. une quinzaine de jours après. Et quant aux Ecoles penfionnées, il n'eft pas probable qu'on en abus&t - il n'y a guere de perfonnes, d'une claffe mitoyenneóc au deffus, qui veuillent fe montrer moins opulentes' qu'elles ne font effectivement, furtout lorfqu'il s'agit de leurs enfans chéris: d'aifieurs le nombre des ecoliers etant fixé, les ïnfpeéteurs pourroient, lorfqu'il y auroit plufieurs Sollicitans pour remplir quelques places, choifir les enfans de ceux qui font le plus a 1'etroit. On auroit plutót a craindre. que beaucoup de monde, qui auroit bien befoin d'en faire ufage, ne s'en abftint  trois DISSERTATIONS 169 par. un principe de vanité. Quöiqu'il en foit, il eft conftant que ce plan eft le plus propre k former des Ecoles d'enfans k peu prés d'egale condition. On préviendroit par Ik quantité de plaintes, réelles ou imaginaires, que 1'on entend journellement; car quelque néceffaire qu'il foit de faire aller les enfans k 1'ecole dés leur tendre jeuneffe, pour former des liaifons entre les divers membres de la fociété, fi néceffaires k fon bonheur & k fa profpérité; cependant les gens de condition n'en veulent pas entendre parler.—. Les Ecoles, difent-ils, font dans un fi mauvais etat, que ce n'eft qu'k 1'extrémité que 1'on y met fes enfans: un tel Maitre n'a rien k faire: un autre va k rebours: un troifieme a beaucoup trop d'enfans, on ne fauroit a caufe de cela fe réfoudre d'envoyer les fiens chez lui. H faudroit, pour complaire k d'autres, renvoyer tous ceux , qui ne font pas d'un rang k peu prés egal k celui de leurs enfans. Les Bourgeois d'une claffe inférieure, difent au contraire, qu'ils ne prétendent point que leurs enfans aillent k une telle ecole, paree qu'il y a trop de L 5  i7o REMARQUES sur jeunes gens de bonnes maifons, que leurs enfans feroient méprifés, ou du moins qu'on en feroit peu de cas, & quantité d'autres fèmblables futilités. Toutefois il eft certain qu'en rangeant ainfi les Ecoles, on pourroit faire obferver firictement les Régiemens concernant 1'initruaion, & examiner exaétement aux vifites les progrès des enfms, ce qui ne fauroit maintenant avoir lieu; un Maitre pouvant toujours s'excufer du peu de progrès que font fes ecoliers, par en attribuer la caufe au grand nombre fans lequel il ne fauroit prefque fubfifter; ou en en rejettant la faute fur le compte des Parens, ce qui n'arrive que trop fouvent comme nous 1'avons vu. On feroit des reprimandes aux ecoliers négligens qui feroient plus d'impreffion fur eux, pour peu d'ambition qu'ils euffent, que toutes les exhortations qu'un Maitre leur addrefferoit, & que tous leschatimens qu'il leur infligeroit pendant cinq ou fix mois; tandis que ceux qui fe feroient bien appliqués recevroient des Prix, ainfi qu'il a eté propofé dans les Differtations. Ce feroit  TROIS DISSERTATIONS 171 un puiflant tnotif pour exciter une noble eriiulation parrni les jeunes gens; fur-tout fi 1'on en régloit la distribution, fuivant le Plan d'education de Mr. J. J. Schneither, Maitre de penfion a Leide: il annonce dans ce plan, qui m'a paru un excellent modele, qu'on fera tous les 6 mois, dans fon ïnftitution , un examen public, après lequel on aflignera les prix fuivans; favoir. N° 1. Pour celui qui fe fera le mieux comporté en tout dans 1'Inftitution, foit envers fes Maitres, foit a regard de fes condifciples. 2. Un pour celui qui aura entretenu fes hardes & fes livres dans le meil1'eur ordre , felon qu'on en jugera par 1'examen qui fe fera la veïlle de 1'examen public. 3. Un pour celui qui aura le moins - de fautes, pendant le cours de fix mois. 4. Un pour lameilleureLetaefraneoife. 5. Un pour la meüleure Lecture allemande.  172 RE MARQUÉS sur N° 6. Un pour celui qui aura fait le plus de progrès dans la Géographie. 7. Un pour celui qui fera jugéleplus avancé dans l'Hiftoire. S. Un pour celui qui aura compofé la meilleure lettre. 9- Un pour la meilleure Verfion, qui fera pour 1'examen. 1 o. Un pour la meilleure Ecriture &c. Auxquels il conviendroit encore, ce me femble, d'enajouter deux autres. Savoir: Un a celui qui expliqueroit le mieux en fa Langue maternelle un auteur de la Langue etrangere qu'on inflruit dans une ecole. Et 1'autre a celui qui feroit jugé le plus avancé dans 1'Arithmétique, 1'Arpentage ou Ia Navigation. Que de peine! Qued'exhortations!pour Ia plupart du tems infrucmeufes 5 n'epargneroit-on pas par-Ia aux Maitres! .Que de bons effets ces prix ne produiroient-ils pas fur 1'education nationale! II ne feroit pas non plus néceffaire pour 1'effeftuer de reléguer les Maitres d'ecole, aftuellement en fonclion, dans uw Isle in-  trois D1SSERTATIONS 173 habitée il n'y auroit fimplement qu'k fixer le nombre de ceux qui auroient des Penfions, & donner ces Places aux Sollicitans les plus capables; les autres pourroient en même déclarer a quelle claffe d'ecole, ils défirent qu'on les employé, II eft plus que probable qu'ils feroient tous placés, k quoi il convient de faire attention, n'etant ni juste ni raifonnable de priver des gens de leur gagne pain, qui fouvent font agés & hors d'état d'entreprendre autre chofe pour vivre. Oü faudroit - il, dira -1 - on , trouver des fonds fufÉfans, tant pour 1'achat d'un fi grand nombre de prix, que pour fubvenir aux frais que requiert abfolument 1'amélioration des Ecoles. On pourroit fe contenter de répondre que 1'on s'en rapporte k ce qui a eté dit k ce fujet dans les Differtations, &deremarquer que ce plan n'exige pas, k beaucoup prés, des fonds fi confidérables que le leur; puis qu'on s'y borne uniquement a procurer un entretien honnête aux Maitres d'Ecole des pauvres, & k favorifer de quelques fecours pécuniaires ceuxoü les artifans, qui fontordi-  174 RE MARQUÉS sur ïiaïrement, comme Ie remarque trés bien Ié Profeffeur nahuis , le plus chargés de families & le moins en etat de fubvenira 1'inftruction dont elles ont befoin, pourroient envoy er leurs enfans a 1'ecole a un prix trés modique; & ce ne font que ceux - ci qui participeroient aux libéralités de la Nation. Les autres Ecoles fe reformeroientinfenfiblement, dès qu'elles feroient fixées a un certain nombre, de même que celui des ecoliers ; qu'on féconderoit férieufement les Maitres, & furtout lorfqu'on les recomp en feroit honnêtement de leur peine En effet, n'y auroit-il pas quelque chofe de flétriffant pour des gens de diftinétion & de bons bourgeois qu'ort allat quêter, comme le même Profeffeur Ie propofe, pour 1'entretien des Ecoles oü font leurs enfans ? Ne feroit - il pas un peu dur pour les Peres & les Meres qui n'ortt point eu d'enfans-, & bien plus dur encore pour ceux qui Ont eü le malheur de fe le* voir enlever dès leur tendre jeuneffe, d'être obligés de contribuer a l'infïruftion des enfans , dont les Parens font bien plus ïiches qu'eux? v  trois DISSEÏLTATIONS 175 Mais comme je prévois, malgré tout cela, que la principale objeclion, dont on cherchera peut-être h fe prévaloir, fera d'alleguer 1'impoffibilité de jamais parvenir h former ces fonds, fur-tout dans un tems de trouble & d'epuifement, tel que celui oü malheureufement nous nous trouvons maintenant; j'indiquerai donc encore quelques moyens qui me paroilfent propres ala faire difparoitre. On eft accoutumé dans plufieurs Ecoles, principalement dans celles oü 1'on enfeigner les Langues etrangeres, de faire payer des amendes aux ecoliers lorfqu'ils commettent des fautes legeres, & c'eft certainement un cMtimertt qui eft trés raifonnable. Le produit de ces amendes eft, dans quelques ecoles, deftiné pour les pauvres, dans d'autres , on donne pour cela aux jeunes gens une partie de plaifir, c'eft bien la coutume la plus générale, mais je doute que ce foit la meilleure; & enfin il y a des ecoles oü les Maitres le diftribue aux ecoliers qui fe font diftingués dans quelque genre 4e leurs etudes.  i?6 RËMARQUES sur Je n'ignore pas qüe plufieurs perfonnes blament les recompenfes pécuniaires, & les énvifagent comme etant fufceptibles d'infpireraux jeunes gens des fentimens vils & rampans & furtout 1'avarice qui eft un vice nuifible au bonheur de la Société, qu'il faut détruire autant qu'il eft poflible. J'avoue que cette objection eft aflezplaufible, quoique 1'on puifle généralement aflurer que c'eft bien moins 1'apas du gain, qu'un principe d'honneur qui inciteles jeunes gens a fe diftinguer, c'eft auffi le motif le plus' iioble pour les contraindre habilement, <$c le plus propre a leur infpirer la docilité requife, qui eft le premier pas vers 1'education , On donneroit a ce motif toute 1'energie dont il eft fufceptible, &on applariiroit en même tems la première difficulté, s'il plaifoit aux Vénérables Magiftrats d'afligner le provenu des amendes de toutes les Ecoles, oü les Maitres n'ont point de penfion > a 1'achat des prix qu'on y diftribüeroit. Quant au refte , ne feroit-il pas injurieux h la nation & fur-tout aux Peres de la Pa-»'* trie,  trois DISSERTATIONS 177 trie, dans un Siecie auffi éclairé que 1'eft Ie nótre, & au milieu d'un peuple dont la munificence a toujours eté le propre & le caraétere diftmctif, de douter un moment., qu'un obftacle fi facile a furmonter, parut füffifant pour en empêcher 1'exécution. Que 1'on prenne la peine de lire, pour fe convaincre de la facilité de trouver ces fonds, ce que Ie Profeffeur krom dit a ce fujet, pages 105 & 106, oü il déplore, non fans fujet, que dans quelques endroits de notre Patrie, on mariqué d'occafions convenables pour faire inftruire les enfans; tan dis que de tems en tems, on envoye des foinmes confidérables dans les Pays étrangers pour batir ou entreteriir les Eglifes, les Cures & les Ecoles des Profestans &c. Quelle plus forte preuve pourroit - on en citer, que la fomme importante de pafte* fi 1000 , que 1'on colleétat en cette Ville, il y a environ 24 ans, en faveur des Vaudois, pour fubvenir a 1'entretien de leurs Minifees & de leurs Ecoles. Les Péres de la Patrie, qui permirent & cncouragerent . M  178 REMARQUES sur cette collecte d'une facon toute particuliere, fachant la principale caufé du peu de fuccès des Ecoles de ces Provinces pour civilifer le menu peuple, fe difpenferoient ils de coopérer efficacément a une chofe qui a une relation immédiate avec le bien être & la prospérité de leurs Concitoyens ? Non certainement, & je ne doute point que la réuffite neréponde pieinement a fattente qu'on en a , & même qu'elle ne la furpaife, fi 1'on s'addrelfe refpectueufement a eux, & qu'on leur repréfente: Que fi les Collectes ne produifoient pas les fommes néceffaires pour cela; Qu'il y a encore d'autres moyens d'y fuppléer fans avoir recours aux Finances publiques. Qui fait! combien d'emplois on pourroit maintenant abolir fans nuire k la population, fi 1'on deftinoit les appointemens de ces emplois fupprimés k 1'encouragement des Ecoles; paree qu'a mefure que ces fonds accroitroient, il faudroit auffi augmenter leur nombre & diminuer en même tems celui des ecoliers, qu'on a fixé, par economie, le plus haut qu'il fut poffible.  trois DISSËRTATIONS 170 Ne pourroit-on pas auffi y afilgncr une partie des revenus qUe certaines Gardés Bourgeoifes ont de plus que les autres \ ce qui retabliroit entr'el'les Une efpece d'egalité trés Taifonnable? Ne feroit-ce pas Ik ie plus noble ufage que 1'ön en put faire pour le bien public. Qui auroit Fame affez baffe pour s'y oppofer ? Seröit - ce.... Arrêtons - nous! ne nous mêloris point de chofes qui ne font pas de notre compétence. Contentonsnous d'indiquer les moyens qui pourroient contribuer k 1'amélioration des Ecoles. Toujours eft - il certain que ceux qui font abonnés payeroient plus volontiers \ s'ils favóient que lëur argent dut être employé k une chofe fi louable, & les bas - officiers qui font chargés de recueillir les abonnemens, n'auroient pas alors tant de mcrtifications & de reprocheskeffuyer: reproches qui font d'autant plus fenfibles, qu'ils ne font fouvent que trop véritables. II faudroit, outrécela, accorderquelques faveurs k tous les Maitres d'ecole en général, comme^i. des Mailbus pöür y tcnirecole: il n'y a prefque point de Ville, oü Fon n'en M 2  i8o REMARQUES sur trouvat facilement 1'occafion a peu de frais. A Fliffingue, par exemple, la Magiftrature donne, dit-on, quelquefois une prime pour reparer une maifon, en augmentanc un peu la fomme, on auroit une ecole bien appropriée, ce qui accommoderoit bien les Miitres, vu qu'ils ont toujours beaucoup de peine a trouver des maifons bien fituées en louage. Ne feroit-ce pas la le vrai moyen de placer les Ecoles dans unediftance convenable les unes des autres pour la commodité publique ? 2. De les excmpter de la Garde-bour geoife, ce qui ne feroit d'aucune charge au public. N'eft-il pas jufte? n'eft-il pas raifonnable que ceux qui exercent, en fa faveur , des vocations fi pénibles , & qui influent fi directement fur le bien-être de toute la Societé en général, foientexempts des charges publiques qui nuifent eflentiellement aux fonctions de leur etat ? car il eft imposfible qu'un Maitre qui a monté la Garde pendant la nuit, puifle le lendemain tenir ecole avec autant de zele & d'affiduité qu'a 1'ordinaire. C'eft auffi une coutume lonftante  trois DISSERT ATIONS 181 dans plufieurs Pays, d'affranchir les - Maitres de toutes charges qiielconques; ce qui eft un puifiant motif pour engager des perfonnes qui ont des talens a fe dévouer I 1'education de la jeuneffe. On objectera peut - être encore que eet ordre donneroit plus de peine aux Infpecteurs des Ecoles; j'en conviens, mais je ne crois pas que ce foit une raifon fondée pour en diffuader 1'exécution; car ce n'eft qu'en examinant les ecoliers claffe après claffe, en ce qu'ils auront etéinftruits, qu'ilspourront fürement juger des progrès 'qu'ils auront faits, avancer & recompenfer ceux qui ont profité , & faire retrograder les négligens & les pareffeux: j'ofe même aflurer qu'il n'y a que des vifites faites danscegoüt qui puiffent être de quelqu'utilité. Outre que 1'on pourroit pour prévenir cette objection, etablir des commiffaires particuliers (f)- pour chaque claffe d'ecole: enunmot, riennepaM 3 (0 Les Commiffaires, etant revêtus d'une certaine autorité, infpirent , dit un Auteur anonyme, du ,, refpeft aux jeunes gens , paree qu'ils ne les voyent 9. pas fouvent, & plus de confiance aux Paruis 5 ils  Bz REMARQUES sur roitra difficile pour eet important ouvrage, fi 1'on eft bien convaincu de la vérité de l'afTeraon du Profeffeur de Crotifaz, que je ne faurois m'empècher de rapporter ici. „ Rien," dit-il page 565, „ ne paroit „ plus digne d'attcmion que 1'amélioration „ des Ecoles; 1'education des hummes a j, plus d'inuuence qu'on ne fauroit dire dans „ la focieté, foit en bien foit en mal ,& s'il „ y a quelque chofe qui mérite les foins „ de ceux qui la gouvernent, c'eft lê bon ?, Etat des Ecoles, objet pourtant de leur m indifierencc: il n'y a prefque rien dont „ on foit moins en peine. Ilreconnoit, dans la page fuivante, „ qu'on „ ne fauroit guere rendre de fervice plus con„ fidérabk. a la Société. que de mettre les „ Ecoles fur un meilleur pied qu'elles ne font, alors les gens dequalitéfeferoient 5, un plaifir d'y envoyer leurs enfans, les empêchent les Maitres d' agir trop arbitrairement ; „ d' un autre coté ils prócurent 1'occafion d'exécuter ,, des chofes qui font impoffibles ou dangereufes a une ^, feule perfonne, quoiqu' abiolument néceffaires,par „ cxemple, comme de ren rover un ecolier d'un mé. chant oraöere ; d'en refufcr d'autres qui pourroient nuire a Ion ecole &c.  trois DISSERTATIONS. 183 „ autres profiteroïent de leurs exemples & „ apprendroient h vivre avec eux. II fe formeroit dès 1'enfance des liaifons entre „ les differens Ordres qui compofentlaSo,, cieté dont la RépubHqueprofiteroit&qui „ ferviroient a y conferver la tranquilité", „ II eft certain" continue -1 - il, „ que les „ enfans profitent beaucoup plus, quaid ,, ils font avec d'autres; tout ce qu'un en„ fant fait en compagnie, il le fait avec j, plus de plaifir & d'empreffement; la fo„ litude & 1'aparence même de la folitude „ Fattrifte; la vue des gens de fon age le „ recrée & 1'anime tout autrement que la ,, préfence des hommes faits, ce qu'il voit „ faire aifément & hardiment a un autre „ enfant, il le concoit aifé, il Feffaye & „ Fexécute. Au refte il eft néceffaire de prévenir le public, avant de finir cette feconde partie, qu'on n'a rien avancé touchant les Vifites, que ce qui fe pratique déja avec beaucoup de fuccès dans d'autres Pays oü les Maitres d'ecole , même ceux qui enfeignentles Langue etrangeres , font entretenus par les Villes M 4  184 REMARQUES sur & les Villages \ témoin une Lcttre ecrite il y a quelques années de Gerieve, & inferée dans les papiers publiés; oü 1'on met au rang des avantages ineftimables de cette Ville , autrefois fi floriffante, l'inftruftion gratuite, dont tous Jes Citoyens jouïüentindirTéremment, dès les premiers principes jufques aux Sciences les plus relevées: Privilege bien précieux fans doute, puifqu'il eft le caradtere diftinótif de la vraie liberté, Mais fi contre toute attente, les Maglftrats ne daignoient pas prendre cette importante affaire a coeur, faudroit - il donc que les Ecoles reftaffent dans le trifte etat oü elles font prefque toutes en général, fans la moindre amélioration ? II eft certain que fans leur concours les reformes que 1'on voudroit exécuter fe reduiroient a peu de chofe ; je vais pourtant les indiquer; & c'eft ce qui fera le fujet: de la troifieme partie, HL PARTIE. T jgs changemens que les Infpecleurs voudroient entreprendre d'introduire dans les  trois DISSERT ATIONS 185 Ecoles pour les mettre fur immeilleur pied, ne répondroient jamais que fort imparfaitement a ce but , fi les Vénérables Magiffrats ne daignoient pas y concourir d'une maniere efïïcace en affignant les fonds néceffaires k eet effet. On a démontré ci - devant qu'on ne fauroit remédier convenablement a la fource principale des défauts dont on fe plaint, qui proviennent en partie du trop grand nombre d'ecofiers & de la différence d'kge & de capacité des jeunes gens, qu'en etabliffant diverlês claffes d'ecoles dont on fixeroit le nombre, de même que celui des ecoliers. 11 eft conftant que cela ne dépend point des Infpeéteurs des Ecoles, & qu'il ne feroit même ni jufte ni equitable d'y affujettir les Maitres, fans leur accorder quelque dédommagement, c'eft ce qui m'a fait propofer des penfions pour les Maitres qui enfeignent les enfans des artifans , én augmentant 1'ecolage de ceux dont les Parens font en etat de le payer; c'eft auffi ce qui m'a déterminé k fixer le nombre des Ecoles, afin que tous les Maitres puiffent fe maintenir honnétement & fe foustraire de cette maniere M 5  185 REMARQUES sur i une trop grande dépendance des Peres ö: des Meres, pour être immédiatement fous celle des Infpeéteurs comme dans les Ecoles Latines; ce qui ne pourroit fans • doute qu'être trés avantageux a 1'education nationale, Cependant il y a des chofes qui feroient trés utiles, qu'ilspourroient facilementexécuter & qui ne leur couteroient que la peine d'en obtenir 1'approbation comme : i. De ne point recevoir de Maitre dans fes Villes qu'il n'eüt eté Soufmaitre, ainfi qu'on 1'a déja dit; & fur-tout d'abolir la coutume déraifonnable de faire payer les Soufmaitres lorfqu'ils font leur examen: la fomme eft modique, je 1'avoue, ce n'eft qu'environ ƒ 11, en cette Ville; mais c'eft ponrtant beaucoup pour un jeune homme qui n'a rien, & qui n'a aucune proportion avec les avantages qui en réfultent: il eft vrai, que venant a s'etablir dans la fuite, on lui en tient compte, mais ni plus ni moins, il perd les frais de fon Acte & quelques autres ; outre qu'il faut qu'il donne fon argent lorfqu'il en a le plus befoin; tandis  trois D1SSERTATIONS 187 qu'il préféreroit de payer ƒ 100. & même ƒ'150, fi jamais il devenoit Maitre pourvu qu'il fut exempt des frais de la reception en qualité de Soufmaitre. II fauroit au moins alors pour quoi il le donne; mais a prefent ce n'eft que pour occupcr un pofte trés pénible dans une Ville, oüilnerefterapeutctre pas trois mois; il doit pourtant donner jufqu'a fon dernier fou, pour entrer dans une place fujette a tant de défagrémens. A la bonne heure, fi c'etoit la 1'uniquemoyen de parvenlr a la Maitrife , mais quelqu'un, fachant Ure & ecrire, n'a pas befoin de ' paffer par cette epreuve pour dévenir Maitre d'ecole, il n'a qu'a demander h faire un examen , & pour peu de capacité qu'il ait, le voila paffé Maitre a moins de frais que celui qui a eté Soufmaitre; outre qu'il ne hazarde pas fon argent, ne le donnant qu'au moment qu'il en va faire ufage. C'eft certainement un facrifice un peu dur pour une perfonne ambulante, & qui a déja rebuté plufieurs jeunes gens qui avoient des talens. Je m'etonne fort que le Profeffeur krom, qui demeure ici, &qut  i88 RE MARQUÉS sur a eté fi attentïf a tout ce qui conceme les Ecoles, n'en ait point fait mention, non plus que des Ordonnances des Etats de Zélende & du V. Magiftrat de cette Ville, d'autant plus, que cela avoit un rapport immédiat avec le Programme de la Societé des Sciences. II me femble donc, eu egard a la néceffité d'avoir de bons Soufmaitres, & k la d-ilnculté de les trouver, que 1'on ne fauioit trop vite annuller f article qui oblige les Soufmaitres de tant payer k leur reception. 2. Les Ecoles des Maitrefies n'etant proprement, pour les garcons, que des endroits 'oü on les envoye pour s'en débarrafler, oü Bs fe gatent quand ils y font long-tems, par la trop grande complaifance qu'elles ont pour eux, foit par foiblefle ou par des vues d'intérêt, & oü ils contractent fouvent de mauvaifes habitudes qu'on a bien de la peine k changer dans Ia fuite, ainfi il faudroit dès leur quatrieme année, les faire aller aux Ecoles des Maitres k epeller, oü ils refleroient jufques k I'age de 7 ans, ou jufques k ce qu'ils  trois DISSERT ATIONS 189 fuffent paflablement lire avant de pafler ans Ecoles a ecrire. Mais comme il eft: utile aux Filles d'y être plus long - tems pour apprendre a lire, a tricoter &c. il cuiiviendroit qu'on les y laiffkt jufqu'a leur 8 ' année, avant d'aller aux Ecoles k ecrire, oü elles refteroient jüfques k ce qu'elles fuffent en etat d'aller aux Ecoles Francoifes ou aux Ecoles a coudre. Ainfi les Maitreffes n'y perdroient rien , puifqu'elles garderoient les filles plus long - tems; & etant débarraffées des garcons, elles auroient bien moins de rompement de tête, & pourroient par conféquent donner plus d'attention a leurs petites ecolieres. Plufieurs perfonnes font d'opinion qu'il ne convient pas que les filles fréquentent les ecoles a ecrire de garcons, paree qu'elles doivent recevoir un autre genre d'education que ceux-ci. On n'en fauroit disconvenir, mais il me femble, fauf meilleur avis, que ce n'eft pas encore proprement le tems d'y faire une différence fenfible; car les, principales occupations de celles - la, jufqu'a 1'dge de 11 ou 112 ans , doivent être  toó REMARQUES sur d'apprendre a lire, aecrire,l'Arithmétique, 1'ortographe &c. en quoi elles réiiffifTent toujours mieu.r k 1'ecole d'un Maitre qu'a. celle d'une MaitrefTe, quoique 1'on y admette un Maitre d'ecriture, comme 1'expéiienje ie prouve journellement.— Tous les Parens n'ont malheureufement pas la patience de fuivre une marche qui leur paroit trop lente; il y en a qui tachent d'accélerer 1'education de leurs enfans, & fur - tout celle des filles , prétendent qu'a l'&ge de ï 3 ou 14 ans , elles ayent non feuiement paffé toutes les claffes des ecoles de leur fexe, mais m$me qu'elles ayent déja flut un apprendffage. Eft-il donc etonnant, que des Parens qui exigent d'elles des chofes qui farpaffent leur foible conception, ayent fouvent lieu de regretter ce qu'ils ont employé a leur edücation? Sans doute qu'en reformant ces abus, il en refufteroit une partie des avantages qu'offrent les différentes claffes d'ecoles; mais Ia principale difficulté, concemant les Ecoles favorifées qui font abfolument néceffaires, fi 1'on ve.üt faire une reforme vraiment utile  trois DISSERTATIONS 191 & qui ne foit pas onéreufe au peuple, ne fauroit être levée fans fecours pécuniaires „ proportionnés au nombre d'ecole de cette forte qu'il conviendroit d'etablir; & c'eft: ce qui ne dépend point des Régens des Confrairies: car quoi que 1'ecolage foit k peine fuffifant pour avoir de bons Maitres qui ne fe furchargent pas d'ecoliers, il feroit cependant exhorbitant pour le menu peuple qu'il importe le plus defavorifer&quiagrandement befoin d'education: n'etant pas probable qu'il fe préfente des perfonnes k talens & opulentes pour enfeigner gratis ou a un prix trés modique les enfans des gens de baffe extraction. Etablira -1 - on, pour y remédier, quelques Maitres qu'on ne bornera point quant au nombre des ecoliers, mais qui s'engageroientde ne demander que 20 fous par mois par ecolier, alors ils en auroient tant qu'il feroit moralement impoffible qu'ils pufiènt les inftruire. Eft - ce donc affez qu'ils aillènt feuiement a 1'ecole, & qu'ils n'apprennent dans 4 a 5 ans, que ce qu'ils auroient facilement pu apprendre dans deux ans, fans le trop grand nombre d'ecoliers ? ce qui me  192 REMARQTJES sur perfiiade que ces fortes d'ecoles font d'une abfolue néceffité. Je me flatte même que 1'exécution ne rencontreroit pas tant d'obftacles, au moins dans cette Ville, qu'on fele figiireroit d'abord: & ce qui me porte a le croire; c'eft i. qu'il faut avouer a la louange de ces Provinces en général & de cette Ville en particulier, qu'on y a beaucoup de foin des pauvres infirmes, qui font logés & entretenus d'une maniere capable de leur faire oublier leur etat; cependant il me femble que les deniers que 1'on affigneroit pour procurer une bonne edücation aux enfans des artifans ckc. feroient auffi bien employés qu'a faire de fuperbes edifices, deftinés a adoucir 1'etat malheureux de ceux qui y font admis.—■ Qui fait même fi une bonne edücation & des moeurs réglées, qui en font fouvent le fruit, n'en auroient pas garand plufieurs de cette retraite humiliante; & fi Ce ne feroit pas dans la fuite une véritable economie! 2. C'efi: qu'une Académie a deffiner, erigée depuis quelques années, alafolUcitation de quelques amateurs, a non feuiement obtcnu beaucoup de' faveurs duMagiftrat, mais  ?%ois DISS.ERTATIONS ïp| auffi que la diftribution des Prix confidérables qu'elle affigne aux Eleves, fe faife eu préfence de deux Bourgucmaitres & d'un grand concours de monde, ce qui donne beaucoup d'eclat a la cérémonie, &cltun puiffant aiguillon pour la Jeuneffe. Douteroit- on maintenant un inftant, que le V. Magiftrat de cette Ville ncfaifuTcvolontiers tout ce qui lui paroitra utile pour mettre les Ecoles fur un bon pied; etant fans doute bien perfuadé, que le bon etat des Ecoles eft d'une bien plus grande importance pour le bien - être de la Société en général qu'une Académie a deffiner. II n'y a pas même fort long-tems qu'ils en donnerent des preuves, lorfqu'a la Sollicitation de prefque tous les Maitres de cette Ville, qui fe plaignoient, non fans fujet, du mauvais etat des Ecoles & du peu de revenu de lapkqrrt d'entr'eux, ils délibérerentmürement furies moyens qu'ils avoient pris la liberté de propofer pour y remédier;, mais trouvant, de même que les Régens de la Confrairie , que ces moyens nerépondoient point au but, ils chargerent ceu::-ci N  194 REM. sur trois DISSERTATs de reformer les anciens Régiemens; mais quelque bien concus qu'ils puiflent être, its feront de fort peu d'effet pour 1'amélioration des Ecoles fans fecours pécuniaires, comme je me flattë I'avofr démontré. En fuppofarit toutefois que la fituation actuelle des Finances ou d'autres cfrconftances nepermiffent pas de faire en faveur des Ecoles de cette Ville , tout ce qui feroit néceffaire ï ce fujet \ les premiers achemïnemens ne peuvent qu'être trés louable &dignes du zele des Magiftrats éclairés, fous les aüfpices defquels nous avons 1'avantage de paffer tranquiïlement nos jours. Je m'eftimerois fuffifamment dédommagé. de ma peine, fi mes réflexions pouvoient eh quelque forte contribueral'amélioration des Ecoles; mé figurant que ce plan, quoiqUe tracé trés imparfaitement, ne manquerbit pas d'avoir, fi 1'on daignoit en faire üfage, une influence falutaire fur eet objet important; Puiflent Magiftrats & Citoyens, "Parens & Maitres tous concourir a faciliter ufië reforme fi défirable pour 1'Etat & 1'Eglife. E 1 ■ N.  E H H' A T- A«: /fe* princ}pales fautes a corriger, ADVERTISSEMENT. Page 2. Ligne 24. repu^ations, /z/èz réputation; 7. 1'anoyme, lifez 1'anonyme. • 8. 3. qui la vérité prefcrits, lifez que la yénté prefcrit» REMARQ ÜES, —— 3. 3. ai lifez ait. ' " 3- — 10 &ailleurs, fait, font.iïfe&faih, font. • —- 7' 8. réïterés, lifez réïtérées. 10. ■ 23. jn, lifez il. 22. -18. autres autres. lifez autres. 26. 16. obje&ions, lifez obje&ion. r - 28. — 13. lepieds, lifez le pied. • 251. — on, lifez ou. - 38. 14 & ailleurs, s'offencer, lifez s'of- fenfer.. 7j. —1^. & 20 qu'ils les lifent , lifez qu'il les bfe. 75>. $, dicté, Ayêz, Thême, —— 83. 15. Maitrefle, lifez MaitrelTes. -—114. 2. Baillage, /{/êz, Bailliage. ■—- izf. • iy.lescorreótion, /z/ez les cörrecïr'ons •—— i,3°' 6'.nerelaclient,/?/è2inefereIachent •—* "~ '•13. vigilens, lifez vigilans. ——172. ■ 9' fera, lifez fe fera. •—' lH' — 4. en même, lifez en même tems.' r7.?> *~"—~ZS' diftribue, lifez diftribuent. 183. —j 2J. langue, lifez langues. — 186. — ip. & quin'a 5 lifez&cequin'a&; 1^0. p? tachentj lifez tachent. *—■ *.92t ——-ïi. leur etat, lifezieut etat précédent