C A B I N E T DES FÊES.  CE rO LU M Ê CO NT IE NT Ia Notice des Auteurs. Ia Liste *ct)mplette des Ouvrages qui compofent le Cabinet des FÉes en trente - fept volumes tanc//z-8°. Bü'ln-tx , avec figures & fans figures.  LE CABÏNET DES FÉES , o u COLLECTION CHOISIE DES CONTES DES FÉES, ET AUTRES CONTES MERVEILLEUX, Ornés de Figures. TOME TRENTE-SEPTIÈME. A AMSTERDAM, Etfe trouve a PARIS, RUE ET HOTEL SERPENT E, M. DCC. LX XX VI.   DISCOURS $ U R L' ORIGINE DES CONTES DES F£ES. x » o u s croyons devoir coramencer cWe ^oncep.u.neépïnepleine d*elprir', du comre Cjui ind.nue les.caradères de'Jette colleöhon, & la fortunê que chaque ouvrage fic dans les cercles. Nops mëttóns par & °nos ledleurs en étac de préjüger de qud|e mviiAr8 nous nous propofons de diflW fur un genre agréable & léger. ö épitre a m. l. c. d ? A X1.Q0OI mcngagez-vous, adorable SVl*« Cc vers eft pris d'une chanfpn , Oii, furie ton de I'éJdgie , Ccrtain éiève d'Apoücn Dcmandorc aucrefpis la vie A la Sapho de Peliilbn. Tom XXXF LI. ^  t Discours Quant a moi, c'eft avcc raifon , Que devant vous je m'humilie , Et que je viens en jétémie , Vous dire, fous un autre nom : A ciuoi m'engagez-vous, adorable Sylvie 3. . » e Faut-il, après le Renard blanc } Après Fleur d'épine la blonde , Après Tarare fon amant, Par un nouveau déchainement , laire encor trotter a la ronde , Et l'héritière d'Aftracan, Et le prince de Trébizonda ? © Puisqu'il ne dépend que de vous De me difpenfer d'cn écrire , Je vous demande a deux genoux De me fauver de la fetyre , Et de m'épargner le courroux De gens fenfés, & las de lire Des fables qui ne fofct plus rire. © Les Contes ont eu poOr un tems Des lecleurs & des partifans , La cour mcme en dcv'.nt avide ; Et les plus célaferes romans Pour les mceurs & les fentimens, Depuis Cyrus jufqu'a Zayde , Ont vu languit leurs orncmens , Et cette kóture infipide L'cmporter t'ur kuis agrémens.  p R i t i ,vr i n a" i R e, i En va:n des bords famenx d'Itaque, Le fage & renommé Mentor Vint r.cuf cnrlchir da tréfor Igue renferme fon Télcmaque ; En vain I aft de fon précepteur Ltale avcc délicate/Te, Dans ce roman de rare efpèce , Cc- qu'cnt d'utile, óu de tfofnpèüï , La poHtique & la tendrefTe , E: cette fatale douceur , Tendre filie de la rnolleil&'j Dont s'enivre un héros vainqurur , Aux pieds d'nne jeune maJtrefle Ou d'une habile enchanteivlfe , Telles qne les peint ce dccleur , Inftruit de rhumailie foibleffe , Et curieux imitatcur Du ftyle Sc des fables de Grèce. La vogue qu'il eut dura peu ; Et las de ne pouvoir cotnptïndf* Les myftères qu'ii met ch jeu ; Ou courut au palais les rcadre, Et 1'on s'emprefla d'y reprendrë Le Rameau d'or & i'OXeau bleu. Kif • © : VÊS^ E N s u I ï £ vinrent de Syrië Volumes de coutes fans fin , Oii 1'on avoit mis a defTeïM L'onentale allegorie s A ij  ^ Discours Les énigmes & le génie Du Thalmudifte & du Rabbin , Lt ce bon gout de leur patrie , Qui, loin de fe perdre en chemin , Parut, fortaht de chez Barbin , Plus arabe qu'en Arabie. Mais enfin, graces au bon lens , Cette inondation fubitc De califes & de fultans , Qui formoit fa nombreufe fuitc , Déformais en tous lieux profcrite , N'endort que les petfts enfans. Q C e fut dans cette paix profonde , Que moi, miférable péchcur, Je m'avifai d'étre 1'auteur D'un fatras qu'on lut par le monde. Je 1'entrepris en badinant, Et je fourai dans eet ouvragc Ce qua de plus impertinent Des contes le vain étalftge ; Mais je ne fus pas aflez fagc Pour m'en tcnir a ce fragment , Je joignis un fecond étage , Pour marquer les abfurdités De ces récits mal inventés : Un elfai peut être excufable ; Mais dans ces eflais répétés , L'écrivain lui-méme eft la fablc Des contes qu'il a critiqués.  PRÉLIMINAIRE. 5' Vous, qui difpofez de ma vie, Qui la comblez d'heur ou d'ennuis, Souffrez, de grace, que j'oublie Les engagemens oii je fuis. En vain je fais 1'apologie Du conté de la nymphe Alie , Et de la dernière des nuits, S'il me faut faire autre folie , Et coudre un nouveau fupplément Au dernier tome de Gallant ( 1 ). © Te ne connois que trop la hont/ De mettre au jour conté fur conté; Cependant, fi vous 1'ordonnez , Je vais , en dépit du lcrupule, Suivre les loix que vous donnez , Et me livrer au ridicule Des fatras que j'ai condamnés. C'eft ainfi que Pingénieux auteur des quatre Facardins, peignolt en badinant, un genre aimable qui tient rous fes charmes de 1'imagination du conteur, & qui, au lieude grands efForts, ne demande qu'une plume délicate & fine, un récit fimple, un ton doux , & beaucoup d'imagition pour préfenter avec intérêt d'une manière tantót piquante & tantöt afFedtueufe, la morale (1) Auteur des Mille & une Nuits. A Ü)  f Discours la plus faine, & 1'on peur clire la plus ufuclle. Nous ajouteronspeu de chofe a cette déhnirion fans cependant diifimuler que ce genre n'exifteroit point, chez une nation qui auroit rejete le merveilleux. Dans ce fiècle trop penfeur , pour ofer entreprendre 1'apologie du genre fabuleux , nous avouerons ingénument que nous avons ete frappé de fon origine-, il efl ceitain que le merveilleux tient a 1'ignorance; & li on doutoit de certe vcrité, il feroit poulble de la démoutrcr par le feul rapprochement des fables de chaque nation. On verioit tant de iedcniblance entre les fi&ions des Grecs & des Américains, qu'on ne feroit point tenté de difputer. La mcme msfure d'ignorance a produit par-tout une égale qtiantité d'apologues. Un fait bien éclairci par les contemporains, & abandonné ala tradition populaire, acquiert, après une longue fucceffion , tous les cavaétères de 1'imagination des conteurs. Telle eft 1'origine raifonnécde tous les contes en général. On vit na.ïzveOromafe,\e dieu du bien; Arïmaney le dieu du mal. Enfuite les peris, les génies, les fées , les noirs enchanteurs, Scythes, Huns, Arcadiens, Indiens, Afiatiques, tous ont imaginé des romans nationaux & des romans fabuleux. Les Grecs, du débris de mille fables abfurdes ou Krillantes, "composèrent leur mythologie, lts Romains en adoptècent une. grande  PRÉLIMINAIRE. 7 partie , les Maures les recurent des Afiatiques les Provencaux durenr tout aux Grecs, les anciens Bretons, tout aux Danois. On a fant cci it fur routes ces origines, que nous nous difpenfons d'étaler ici une érudition d'emprunt, qui nuiroit au genre auquel nous allons arriver, c'eft-adire a la féerie. Elle fut reproduite par les Arabes , & mife en oeuvre par les Troubadours. Les uns & les autres 1'avoient puifée dans les fables miléfienes , Sc avoient, pour parler Ie langage des artiftes, réduit dans un petit deffin, un grand tableau national ou mythologique. Les Arabes & les Troubadours, n'ayant aucuri intérêt a conferver les traits allégoriques des anciennes fables , n'en prirent que les peinturesqn'ils pouvoient s'approprier, & qui convenoient a tous les peuples. Les Arabes paturent s'en tenir a. toutes les couleurs qui peighoient la galanterie chevalerefque , qu'ils fondirent dans leurs hiftoires particulicres. Les Troubadours , toujours comptcs pour une clafle de beaux - efprits, deftim'e uniquement a chanter 1'amour, & laiffée fans influence fur fes affaires publiques, ne prirent prefque rien des anciennes f\bles de la Grèce. lis n'avoient quë de l imagination; fous un ciel aulïï beau, &c continuellement infpirés par un fexe aimable, vif, enjoué, qui aimoit 1'amour, & peu Ie fecret, A iv  8 Discours ils ne cherchèrent point a étudier les fïctions grecques. Ils firent mieux : ils ne chantèrent que kuis fuuvenirs. Le ton plaintif de leurs idyles, le réat, hifïorique de leurs romances, leurs tenGjnSj, ou defis poétiques, même leurs firvantes (uynques, trcuvèrent des admirateurs. Mais leur gloire n'aila pas plus loin. Les grands noms qu'oa trouve. panni eux, prouvent, en erTer, que leur gaie fcience n'étoit cultivée que par délaflement, &c qu'on n'y mettoit pas plus d'imporrance. On les accueiiloit par ^ tout, paree que la plupart étoient bien nés, fenfibles, 5c qu'ils padoient avec chaleur & avec grace. Ne vit-on pas, duraat les croifades, les Pélerins conljdérés & recus dans tous les chateaux ? C'étoit paree qu'il y avoit beaucoup de gentilshorames qui retournoient cbez eux fous ce modefte & fmguiier traveitilfement. Je ne prétends point prouver par li que les Troubadours n'aient point iiiflué fur les rqvolutions de la littérature frangoife. Le témoignage du Dance & celui de Pétrarque fuffiroit pour detruire mes alfertions. Ils ont, en effet, tranfmis a eette partie de 1'Europe moderne routes les richefTes de la Grèce & de 1'ancienne Rome. Ils ont fait d'une petite cour, 1'afyle des arts & des mufes, & d'une médiocre étendue de pays, un ctat pcücé qui a fervi de modèle a i'Europe entière; ils ons rnême été les rnaures da 1'Italie; on fait tout  PRÉLIMINAIRE. 'tf ce qu'ils ont fait pour la littérature francoife. Les fatiftes qui ont paru durant le règne de Charlemaone , furent auffi-tót oubliés. Les Troubadours fixèrenr les mufesjes Picards fuivirent de prés ces aimables auteurs. Dans ce tems la le comte Thibault foupiroit pour la reine Blanche. Alors on voyoit, & fous le règne de Philipe-leHardi, des makres publics de rime & de verufication qui avoient étudié fous les Troubadours. On croyoit, en montrant le méchanifme de la poéfie, donner le genie qui fait faire de bons vers, a-peu-près comme un maïcre de danfe qui donne des Iecons de fon art, & qui fait des élèves qui valent mieux que lui. Le roman de Lancelot du Lac, qui eft la fuite A-a fan Graal, d'abord public fous le titre de la Chancttey par Chrétien de Troies, achevé par Godqroy de Ligny, parok avoir accrédité la féerie en France. On croyoit aux fées depuis plufieurs ficcles; mais on les avoit romanciées avec une fone de chconfpection. Le fuccès du fan Graal, & du roman de Lancelot, la puiuance met vedleiife de la dame du Lac répandirent dans ' tour le royaume & chez Pétranger le goüt de la féerie. Cétoit dans le douzième fiècle. Le galant Philipe, comte de Flandres, qui vivoit en u^i, n'y contribua pas peu. Les gens fenfés crurent aux fées dass Jes romans, le peuple placa par-  ïo Discours * tout des fées 11 en trouvcit dans tous les chateaux qui tomboient en ririne, dans ceux qui ctoient au milieu des forèts. Celui de Lufignan avoit fa fee Mclufine. Lesfontainesmêmeétoient enchantées, les arbres l'étoient auffi. Nul francois n'a pu oublier la principale accufation de magie dont la Pucelle d'Orle'ans fut chargée. 11 y avoit auprès de Dompreuil en Lorraine, d'oii Jeanne étoit originaire , un arbre appelé XArbre des Dames , fous lequel les fées alloient fe promener. Les jeunes garcons & les jeunes fille du lieu, alloient danfer & fe promener au printems, fous 1'arbre enchanté. Le dimanche appelé des Fontaines, étoit remarquable-. Ce dimanche , 1'églife chante a 1'introït Utarejcrtifa/em.Les jeunes gens de Dompreuil apportoient ce jour la du pain qu'ils mangeoient fous 1'arbre. En revenant, ils pafloient a la fonraine Rdmuorum, des rameaux, &c en bjvoient de 1'eau qui faifoit des merveilles. La Pucelle étcit qaelquefois, de ces parties, & 'la voila bien convaincue de magie. Cet exemple fuffit pour prouver la crédulité des francois & 1'exiftence des fées qu'on retrouve dans tous les romans de chevalerie. On ne doit pas ignorer que le mot fée vient de fatum, fort, forcier, forcière , prophete , prophéteffe , eomme on veut, & qu'en conféquence les fées d»voien: prodnire des merveilles par-tout  PRÉLIMINAIRE. II ou efles paroifloienr. Les Italiens appellent encore fata, leurs forcières. On recrouve fouvent dans leurs traditions hiftoriques 1'exiflence des fées. Ils en avoient, comme les Arabes qui prétendoient qu'une de leurs provinces étoit babitée par des fées. On appeloit communément fée une femme d'efprit: c'eft ce qui a valu a Mélufine cette célébrité romancière dont elle jouit. En nous rapprochant de Pépoque ou ce genre a pris une forme nouvelle, nous trouvons que les Itaüens nous ont fervi de modèles. Le Pentamerone del fignor Baf Ie, augmenté par Alcffta Ab~ batutis , publié en 1671, a ouvert cette carrière. Boece de Bolfvert, né a Bolfvert en Frife , habile graveur, précéda les fiahcées dans fon pélerinage de ColombeUe & Volontaïrette, vers leur bienaimé dans Jcrufalem, Ce livre eft dédié aux filles modeftes, & affurément il leur convient. Madame le prince de Beaumont a imité 1'ouvrage original \ mais comme Boece a créé le ton de nos petits contes de fées, nous allons tranfcrire fon roman, & nous empruntercns h piume de M. le marquis ■de P ... . qui pofsède fi parfaitement 1'ancienne & Ia moderne littérature francoife. Nos lecteurs nous fauront gré de leur avoir fait connoïtre un roman qui n'eft point dans notre colleétioa, &C (\m eft le type de la Hföderne féerie.  12 Discours Colombelle & Volontairette étoient fanirs. La diffétence de leurs noms indique afTez bien celle de leur caradtère. Colombelle étoit douce, réfléchie , docüe & prudente. Volontair ette , légère , inconféquente, portee au changement par gout, changeant de gout par caprice. Elle fe voit un jour éveiliée trcs-matin par Colombelle, qui 1 exhortoit a parrir pour le pélerinage de Jérufalem (voyage dont clles étoient conventies). Volontaire tte ju ge qu'il eft encore de trop bonne heure pour fe mettre en route : cependant elle cède aux inftances de fa fceur •, mais elle a foin de fe%nunir de quelques provifions pour en faire ufage lotfqu'il en fera tems. Colombelle blame cette piévoyance. Elle conduit fa fceur i une certaine rivière, & Poblige de s'y baigner comme elle: précaution qu'elle lui dit ctre indifpenfable avant que d'entreprendre 1 e voyage de la Sainte - Cité. L'eau paroit froide a Volontairette. Elle demande a Colombelle d\>ü cette rivière p rend fa fource , & combien de tems cette eau doit courir. Elle court tonjours, lui répondit fa condudrice; elle prend fa fource a Rome, dans les montagnes d'Italie, & elle vient jufqu'a Jérufalem. Après le bain, Colombelle excite fa fceur a prendre fes attributs de pélerine. Ils confiftent dans un manteau de cuir, un chapeau rabatcu, un bourdon, Le butde ce yoyage eft d'aller rejoindre a Jeru-  PRELIMINAIRE. Ij falem 1'amant célefte qui leur a prefcrit de s'y rendre. Volontairette n'imagine pas qu'un feul amant fuflfife a deux. Elle a même alfez mauvaife opinion des amans en général. Etes - vous fï iimple , dic-elle a fa fceur, de croire tout ce que les amoureux difent? lis fe vantent, fe louenr, fe blafonnent, batifTent des chateaux en 1'air, comme s'ils pouvoient faire tout: & ainfi « ils 55 font croire a ces fimples filles plüueurs bourdes » ( menfonges) ; ils donnent des louanges a ces » filles, comme li elles fufient (étoient ) des » déeffes: ils s'abaillent &z s'agenouillent devant » elles; c'eft toujours Sc par-tout ma maureflè ; voire (ils) les fervent a 1'envi, jufqu'a ce »j qu'elles foient dans leurs filets, lis envoient de :> petits prcfens, & dons de ehanfons, & lettres » amoureufes accoutrées de foie S: dor, pleines » de plaintes & trés - affeótueux allechemens )) (pièges); ils donnent les violons, des feftin? , 53 des comédies; ils font peindre emblémes , 35 devis & pourtraits (portraits) de leurs maï55 trelTes, lefquels, enclos dans des cachettes 3> d'or ou d'ivoire, i!s portent fur la poitrine; Sc 55 aufli des petits rubans de foie (qu'il appelleut 33 faveurs Sc livrées) aux chapeaux, épées Sc aux 33 bras; ils gémiflent lentemeiu, fe plaignent, 33 regardent de travers, font clins Sc fignes avec » leurs yeuxj Sc inventent mille forres de fi-  $4 Discours « nedes. Voire peuvent larmoigr.er comme s'it* fe fondoient d'amour, principalement quand » ils ont un efpoit & quêlque apparence de » proufit (profit); fi donc ces pauvies brebiettes » les veulent légèrement Sc bientöt croire , „ voila le poiffbn aux filets Mais iis ne » m'auront pas fi-töt, car je fuis fine contre fins. » J'entretiens bien les jeunes hommes, &c leur » montre un joli femblant, un bon vifage j mats « ce n'eft que pour mon paffe-tems , pour favoir » ce qui fe paffe par ( dans) la ville , pour rire, » pour devifer , jouer, danfer , Sc autres fem» blables plaifirs, ou bien pour en avoir quelque„ fois un petit banquet, pour ailer a chamot „ hors la ville, & pour en (y) boire du vin fucré Voüa un échantillon de la galanterie & de la coquetterie de ce tems-la. Qu'on ttaduife ce paffage en ftyle moderne , on croira que eelt une moderne francoife qui parle. ïl laat pept* èrre en excepter le vin fucré qui a trouvé parmi nous d'heureux équivalens. Colombelle cueWle des fleurs pour ion amant, & ptopoleafa fceurd'imicer fon exemnlc. Vulo;itairctts ne s'attache qu'anx fleurs qui Oflt le pfus d'cclat. Sa fceur lexhorte & prefcrer ceües q»i ont 1 odeur la plus fuave. Volontaires , &*• guéepar eet exercice, ouvre la gibecière & d«r jeune. Elle mange tout ce qu'ii y a da dmüUUi  PRELIMINAIRE. IJ difïipe le refte. Nouvelle Cernoiice a ce fujet; nouveau baiu pour laver les taches qu'elle a faites a fes habirs. On arrivé dans un village oü la gaieté regnoit de toutes parts. C'étoit un jour de fête ; un charlatan y rafïembloit beaucoup de monde autour de lui. Volontairctte , au lieu de fuivre Colombelle, fe mêle parmi cette foule. Elle n'en fort que bien pourvue de vermine ; elle voit un paon. « Regardez , dit elle a fa » fceur , comme il fe mire, fe tournant ca & la » ayant le toupet emplumaché , le col reluifant » Sc tendu, la poitrine élevée , fa queue éten» due au large & dreflee en haut Voyez quelfe » magnificence il montre en fa marche ? a Vraiment j'y prends plaifir ! II faut que je » m'agence auffi un peu a la mode ». Colombelle fe moque de cette nouvelle idéé; elle exhorte fa fceur a regarder les pieds du paon, fi peu dignes de fon plumage, & les fiens même qu'elle vient de fouiller par étourderie. La legon eft légèrement goutée, Sc 1'on fe remet en matche. Volontairette appercoit des pourceaux qui fe vautrent dans 1'cJrdure. Elle blame beaucoup leur fale inftincl:, & va folatrer au milieu d'un troupeau de chêvres & d'autres animaux ; elle caufe avec le berger? Mais dans ce moment un veau paffe devant elle & 1'arteint au vifage avec fa queue qmeft fort fale. Cet accident ramène la jeune pé-  iS Discours lerine auprès de fa fceur. Colombelle déclame doütre les vains amufemens qui arrêrent fa compagne a chaque pas, Sc lui peint les vrais plaifus qui les attendent a Jérufalem. » La, lui dit-elle, mon bien aimé menera la » danfe, marchera devant , Sc tous les autres le » fuivront h-abillés d'habits blancs Sc prccieux, „ couronnés de lauriers , & avec des rameaux » de palmes entre leurs mams. La ferons nous » (nous ferons) joyeufes dans ces falies dorées. » La promenerons-nous (nous nous promene» rons) dans les gtands jardins de Plaifance, » dans les galeries & allees entrelacées de fcr- mens de vigne, Sc chamgs & jardins diaprés » de toutes fortes de fleurs ; la oü mon bien,> aimé fe repajt entre les lys, la oü nous nous ré» créerons entre les tiches oliviers , entre les trcs» doux bois de lautiers Sidemyrthes; la oü nous 3) coucherons fous les peupiiers Sc verts tdleuls, f» auprès des eaux courantes de cette grande , » claire& douce rivièrej la oü nous repofetons » toujouis fous la plaifanre ombre de celui que » nous aimons, qui eft plus beau que le loleil, » plus odorifcrant & agréable que le baume , » plus doux que toute douceur , plus aimable 3) que tous les autres, notre vrai Sc unique fou» las du cceur, notre lien d'amour, notre joie , » notre bien, notre bpnheur, notre mer de par- » fait  f r a 11 M i N A ( R E< i7 ■ fait & Werain contentement , qui nous - condu,ra recreen, &toujoutsaccompagnera; G celefte mufique , fes augéliques rof- " ^"ols^^vro„tpar tour, & nous rien» dront toujours compagnie ». Nouvel accident qui afflige & huröiüe ^ T?* Qaclques payfans louoient fa bonne -ne&fapropreté. Elle monte fur une émt "ence pour etre mieux vue de ceux qui J^pIai, ^ro,enr.LePied lui glüTe5 elle tombe, & Ies eloges fe changent en brocards. Plus loin elle appersoK une tour, fur le haut de laquelle une -gle tantot voltige & tantót fereplfe. Elle envtele ortdecenobleoifeau, qui "peut s'él ! vera volonte & planer au fein des «ues. Que nepuis-jemoi-même, difoit-elle, mevoiréle vee, par lafortune, au-de/lus de tous mes qu elle forme fes nouveau* fouhaits, & -qile fes yeux contmuent detre attachés fur fWfe fon Fedheurte une petite éminence qui la flit;om. ber. Cette chute , & Ja morale ^ c ramenent la jeune pélérine d des voeux plus mJ £He promet a fa W detre i lavenir bien P?, elle sattache i poUrfuiVre un chien qui W aboyee • eI,e actaqiie un taure * Tome XXXVII, fi  ïg Discours prétexte qu'il ne fe détourne point de fon pafLe. Bien d'autres folies de ce genre prouvent i Ta fage Colombelle que fa fceur n'eft rien moms que changée. Elle ne peut même 1'engager a la fuivte conftamment. Volontairette prend , de tems aautre, une route différente Ceft dans une de ces excurfions qu'elle monte fur un chevalqmnanimors, ni felle, ni bnde ll 1 emporte au milieu d un marécage , d ou elle ne fe Lire quavec beaucoup de peine. Elle fe bleffe a la jambe en pourfuivant un faucon , & au pied en voulant fe repofer fur la route. Les deux pélérines s'arrètent dans une auberpe. Volontairette y trouve tout mauvais & gronde beaucoup la fervante. Ceft anffi dans cette auberge que les ambatTadeurs du bien-aime Ae Colombelle viennent complimentei les deux pélérines, » Bon p»U fade (grand bien vous "faffe) jeunes fdles, leur dit lun d entr eux > „ nous venons a vous, envoyes de la part de „ vonebien.aimé,q«i vous envoie ces delicate, . confitures , afin de vous refraichir (rafraicbir) un peu , & vous conforter & foulager dans ce l chemin. U vous a préparé un magnihque palais & tantot au fok un très-fomptueux ban' Guet. H vous arrend avec un ttès grand deur, l comme auffi tous fes domeftiques & coum„ fans. U vous exborte  ?fe.ÉLIMlNAi«.è. iy VOLONTAIRETTE. » Voyez j voyez, ma fceur, par cette fenêrre , » comme cette pie faute & fait de gentilles bii5» coles» Colöm belle. » Tais toi , babi'darde , efcoute ce que ces » hommes vénérables difent : cerres, c.'eft pour " nous autres qu'ils font envoyés. Fais donc » que leur ambaffade& femonce ne foient fans " aucun effet. L' Ambassadeur. » II vous exhorte & fait dire que vous [narij chiez droitement & fans vous arrêter : car le => porte fe ferme au foleil couchant, & fi volIS » perdez votretems, jamais voUS n'y ferez re» cues ni admifes; mais il vous faudra alors » demeurer for clofes en une nuit obfcure Sc " une infuportable misère. Partant, foyez aver» ties , ne vbus lailFez pas empStrer ni abufer » par quelques chofes frivoles 5 mais Ti vous » voulez aiFurer votre cas Sc affaire, fermez un * Peu vos veux > éroupez un peu vos creilles, » que votre langue fe taife un peu ; que la' » peine (fatigue) du chemin ne vous devienne » ennuyeufe, Sc rout vous fera bien comptéj Bij  i0 Discours » car votre bien-aimé vous aime d'un tres-grand •> & fmgulier amour. Volontaire tt e. „ Voire (oui) difent-ils (ils difent) cela ! „ qu'ils favettt bien cajoler! Mais qui fait s'il eft » vrai ? Colombelle. „ Qui fait s'il eft vrai! Qitels propos font ceux-ci , ma fceur ? Tenez, éprouvez la vérité » par ces délicates confitures. Volontairette. „ Vraiment, c'eft bien délicat! Cela me ra» fraïchit , & conforte totalement. C'eft ma „ faute, ma fceur: ca, venez, je vais avec ,» vous i mais maicbez un peu devant pour „ gagner du tems; & cependant je payerai 1'ho- tefle ". Elle la paie, en effet, ou, pour mieux dire, elle ne la paie pas; 1'hoteffe, qui eft prefque aveugle", lui rend 1'équivalent de ce qu'elle a recu, & la pélerine, peu fcrupuleufe, ne fonge point i la détromper; ce n'eft point tout, appercevant un très beau fruit, elle fe dit enceinte, engage 1'hotefle a le lui donner, pour fatisfaire une de cas envies, auxquelles les femmes fout expofées  preliminair. £, ti dans cec état: « Je fuis, pourfuit-elle, ÜTue de " la plus noble & de la plus illuftre' maifon de » route la Suifle; mon mari eft feigneur, a pluw fieurs fujets & valTaux, & en feigneurie eft-il » (ü eft) jufticierabfolu? J'ai damesd'honneurs, » chambrières, plufieurs fervantes deftbus moi w & a mon commandemenr; je fuis auffi fort » adextre (adroite) & bien drefTée pour imiter » routes chofes, & pour in venter quelques nou» veautés tant ès délicateffes de la viande (i)5 » qu'en la broderie a 1'aiguille & autres ouvrages » féminins, efquels (dans lefquels) je furpaOe » les autres de ma qualité. L'on me fert, honore » & careffe ès (dans les) compagnies avec im » tel refpeót que les autres femmes en font » envieufes. Plufieurs feigneurs ont jadis été » enamourachès (épris) de moi, & dreffé de » fomptueux banquets pour acquérir ma faveur " & bienveillance Mais je les (leur) ai ia » toujotirs par quelque gentille finelïe & quelque » beau tour, donner la figue „ i elle finit par dire a rhotefle que Colombelle qui 1'accompagnoit n'eft autre chofe que fa fervame. Peu de momens après, cette prétendue fervante Poblige a reftituec ce qu'elle neut pas du recevoir. II ne refte ï celle-ci que la pomme dont elle n'a point parlé; CO Les dames de la plus haute qualité préudoient. B iij  ji Discours mais cette pumme eft belle en dehors, & pourrie dans 1'intérieur. Voila de nouveau, les deux pélerines en route ; voila auffi la plus jeune qui s'efquive encore une fois i elle entre dans une cabane ou elle trouve quelques unes de ces femm'es que 1'on nomme DevinerefTes ou Egyptiermes. Soa premier fo'm eft de fe faire direjfc bonne aventure ; enfuite elle voit fortir d'une efpèce de cachot une viedle femme étique ayant les cheveux épars, les joues creufes, les yeux enfoncés , la peau ridée, eca:U leufe , le teint enfumé. Ce fpeóhe féminin offre a la jeune envieufe, de lui enfeigner 1'art d'être bientot riche, Sc de 1'être route fa vie; de lui apprendre a faire éclore le beau ou le mauvais tems , le vent favorable ou le vent contraire \ ï conjurer les morts Sc les efprits pour découvrir les tréfors cachés; a faire recouvrer ce qui aura étéperdu; a prédire quelle fera 1'ilTue de teile entreprife ou de tel projet; enfin, a donner de 1'amour a qui elle voudra, Sc auffi long-tems qu'elle le voudra. II en falloit moins pour renrer la curiofité de Volontairate. Sa bourfe eft le pnx qu'on exige pour lui enfeigner tant de chofes, & elle la donne : « ma cuifine eft pauvre Sc » maigre, difoit-elle tout bas, & le travail ne ,, me plak guères fi je puifTe (pms) rnaintenam .> par quelque facUiti, fcience ou fineffe, par-  pÉtlMlNAI R.Ï.' IJ « venir ainfi a de grandes richeffes ce feroit » chofe qui me duiroit La magicienne Pexhorre a bannir toute frayeur. Elle lui dénoue fes cheveux, lui frotte quelques partijs du corps avec certain onguent, Sc tracé autour d'elle un cercle avec la baguette noire qu'elie tenoit a la mam. La jeune pélerine doit refter de bout, & immobile au milieu de ce cercle. Elle y voit rapporter beaucoup de chofes dont elle ne devine pas 1'ufage j telles que les griffes d'un lion, les yeux d'un chien , les dents d'un loup , le fang d'un bouc , les oreilles d'un ane Sc les plumes d'un paon. Enfuite la magicienne pofe autour du cercle plufieurs torches de poix noire, toutes allumées. Elle prend en main un livre noir, au dedans Sc au dehors, il renfermoir divers caraótères étrangers, écrits avec du fang; « alors elle commenca a gromeler, a heur»> Ier , a gronder Sc conjurer, difant : Je te » c'onjure par ces fignes infernaux qui font dans » le rondeau, & par les fanglans caraétères conj» tenus au livre, qu'ayez a comparoitre ici, tu sj (toi) hécate , hécate porte ferpens avec toute j» la compagnie vagabonde, courfière par nuit, n efcoutante, caufatrice des difcordes, favante » plus qu'il ne faut, enquefterefle (enquêteufe) » des nouvelles, embrouilleffe (embrouilleufe) » des affaires d'autrui, amatrice des nouveautés. £ iv  *4 Discours » forcicre de nuit Alors il commenca I » fumer, & apparurent parmi les tonnerces, des » étranges facons de monftres fort hideux a voir. » Je tremblois de peur, (ajotite Volontairette » qui fait ce récit ;\ Colombelle], & la fueur » d'angoife m'ébouillonnoit de tous cótés. Je n m'envolai en grand hate hors du rondeau, ne » prenant ( n'ayant) égard ni a la fumée, ni aux 3> falots ardens. Ce font ces dammes fumeufes 33 & la poix btülante qui m'ont ainfi noirci & 33 brülé ma chevelure. Tel fut en effet, pout Volontairette, le réfultat de cette nouvelle échappée \ elle y perdit fa bourfe & fes cheveux, fans avoir acquis plus de prudence. On la retrouve dans les chapitres fuivans telle qu'on Pa vue dans ceux qui précédent. Dans Pun elle s'amufe a exciter le babil d'un perroquet, & recoit fur fes habits Pordure d'une cicogne; dans 1'autre , elle fe mocque d'un finge qui veut imiter le travail d'un potier, fon maitre, & qui ne réuffit a rien. Vos occupations, lui dit la rigide Colombelle, relfemblent beaucoup a celles de ce marmot; il ne réfulte aucun fruit des unes & des autres. Cependant , les deux voyageufes touchent d'alTez prés a Jérufalem. Elles 1'appercoivent du haut d'une montagne qu'il faut franchir pour y arriver. Le chemin eft étroit & bordé de préci-  PREXIMINAIRE. 25 pices. L'on nepeut y marcherqu'avec précautiom Volontairette, a qai toute prccaution eft a charge, veut monterplus haut que Ie chemin ne l'iödique. Le pied lui manque : elle tombe dans un préeipice d'oü Colombelle ne peut la retirer. C'eft une afFreufe folitude , ou 1'imprudente pélerine , froiflee par fa chute, gémit de fa difgrace, & ne trouve nulle confolation. Colombelle ooutfuit fa route, arrivé a Jérufalem , eft recue en ttiomphe par fon bien-aimé. 11 1'époufe , lui donne la couronne de gloire & recoit d'elle un chapelet. Ce roman eft tout myftique \ mais les fréquens écarts de Foloncairetce, lecontrafte que prodtiit fon caraclère jettent dans eet ouvrage une fotte de gaieté & d'intérêt qui ne fe rencontrent pas toujours dans les fiétions de puragrément. On atttibue encore Porigine de nos contes de fées, automan de Finette ou.P'Adroite Princejfe. Nous avons cherché ce roman , dont Pindication n'eft pas équivoque, mais nous n'avons pu le trouver, on n'a certainement point voulut parler de celui de Perrau't, que des bibliographes conteftent a eet auteur, par la raifon qu'il n'eft point dans les premières éditions, & qu'il a cté inféré dans celle qu'on a donnée ala Haye.Cependant on lit une efpèce de dédicace de Pe/raulci la comteffe de Murat. Nous penfons, en effet, que c'eft a Perrault  tS Discours que nons devons k renanTance des contes des fées; c'eft a la charmante fiction de 1'aurore &c du petit jour qu'il faut fixer la véritable fortune de ce genre. Quant a. fa moralité, la fin de 1'épltre de Perrault a madame de Murat, raffure les lecteurs. Mais ces fables plalront jufqu'aux plus grands efprits, Si vous voulez, belle comtelfe , Par vos heureux talens, orner de tels récits L'antique Gaule vous en preffe j Daignez donc mettre dans leurs jours les contes ingénus, quoique remplis d'adrelTe , Qu'ont inventés les Troubadours : Le fens myftérieux que leur tour enveloppe , Egale bien celui d'Éfope. Et Perrault avoit raifon. Il nous refte a parler de 1'occafion qui mit ak mode les contes de fées La révocation de 1'édit de Nantes avoit glacé routes les plumes, par k crainte de déplaire au roi, qui avoit nommé des cenfeurs royaux, fubftitués aux do&eurs de Sorbonne, lefquels avóient rempkcé les inquifiteufs de la foi. On n'ofoit plus rien écrire ; & fi Louis XIVn'eüt aimé paffionnément le théatre, peut-être Racine fe feroitil borné a embraffer le genre fatyrique, ou a  PRÉLIMINAIRE. tf écrire le panégyrique de ion roi. Dep'uis que madame de Maintenon Svoit paffe de la qualité de gouvernante des enfans de madame de Montefpan, a une condition certainemcnt bien élevée, la cour avoit pris un ton qui étoit propre a une femme pieufe qui étoit entourée de princes légitimés, encore jeunes , anxquels de bons exemples étoient néceffaires. L'établilfement de faint Cyr fembloit appeier routes les vernis, & affnrer un afde a la jeune innocence, afile néceffaire pour arracher aux calviniftes des demoifelles fans fortune. Louis XIV étoit pieux, 1'age, les malheurs publics, le caraclère de fa liaifou avec madame de Maintenon le ramenoit au pied des autels & a la fociété privce. On fait a quels teligieux devoirs il coufiuToit les vendredis 8c les famedis, les femaines de paffioH 6c les jours de la femaine fainte. II s'occupoit alors exclulivement du foin de donner de bons pafteurs auxéglifes , & la faveur n'y influoit point. Avanc de nommer un évêque, il alloit implorer pendant le faint facrifice de la meffe, les lumières du faint efprit qui ne lui manquoient pas fouvent, On fait combien ii aimoit fes petits mufidens , & les petits conceres établis dans fes appartemens, Ses enfans légicimés trouvoient des diftiaétions analogues a leur age, fans que madame de Maintenon qui les aimoit tant, eut  8 Discours rien a réprouver. Les fuccès du duc du Mair.e viennent a 1'appui de ce que nous donnons a entendre fur la bonne cducarion que madame de Maintenon avoit donnée aux princes. Les inftituteurs des princes du fang , parmi lefquels ou nomme Boffuet Sc Fénelcn; le mérite éminent de ces deux hommes juftement célèbres avoient répandu la faine morale, en la couvrant de fleurs, Sc la revêtifTant de formes aimables, car Fe'nelon avoit fait des fables. Aufli avec quel empreffement on multiplioit les bons livres a 1'ufage des princes! Quelle bibliothèque choiüe on imprimoit pour eux ! II fembloit que la nation vouloit épurer la galanterie au creufet d'une morale enfantine Sc" fage. Le galimathias de Scaron étoit rejeté, le temple n'étoit point encore élevé, le duc d'Orléans n'exiftoit a peine que pour lui, & pas encore pour la guerre, pour les arts, pour les plaifirs , Sc pour 1'intrigue. La cour s'agitoit cependant, car elle n'eft jamais plus intrigante quequand on ne va plus, Sc qu'on fe tient en place; aulli ceux qui connoiffent le règne dc Louis XIF~, depuis 16 94, font inftruits de toutes les agitations poiitiques qui fermentoient dans la cour, Sc que 1'exceffive prudence du roi appaifoit, ou déroboit a tous les yeux. Le tableau de ces cabales fut dévoilé, Si le libelle iacitulé XOmbre de Scaron, en dit aftez} & même  PRELIMINAIRE. 2 r> trop, 1'exil ne fuffifoit pas pour fermer toutes les boiiches. Dans le même tems vivoit une quantité de femmes qui culrivoir les lettres avec fuccès , d'autres les aimoient, éerivoient Sc fe faifoient unè réputation, en prenant un vol moins haur. Parmi cette demière clalTe, plufieurs étoient iüuftres par la naiffance , Sc jouifloient d'une grande fortune , étoient aimables Sc jolies ; leur porte étoit ouvette aux Mufes. Les femmes de qualité ne couroient point. On les trouvoitchez elles. Elles caufoieut Sc converfoient eiTéntiellement. Les plus galantes ne fe prenoient qu'a laconverfation: eUes étoient généraiement inftruites ; il y avoit un ton de dignité qui n'eft pas fi déplacé qu'cn le penfe. Les coteries étoient léellement des coteries. On fe borno.t. Le norabre des amis n'augmentoit ni ne décpifloit. On vieilliftbit enfemble , chaque cercle offroit prefque une familie. On y gagnoit plus de ftanchife , plus d'agrément. Onfavoitfe quereller, Sc oublier les quetelles. Les mceurs n'avoient pas fajt ce dernier pas de déclinaifon. Une femme offroit un appartement a un favant, a un ami : on n'en glofoit poiur. La fcience, 1'amitié paroiffoient des prétextes ou plutót des titres plaufibles. Les Mercures fe rempliffoient de queftions fur les ma.u.res d'aimer; d'un aatre  $o Discours coté , on tracoit des caraótères, ici des maximes* Comme on connoifToit ceux avec qui on vivoic, & qu'on vivoit long tems, on connoifToit le cceur humain. Les hommes ne s'éloignoient point des femmes , un duc de Saint - Aignan, un duc de la Rochefoucau-lt avoient donné de trop de bons exemples; on avoit une amie, on ne la quittoit pas, les vifites de 1'amitié ou de 1'efprit étoient auffi réglées que la pendule. On voulit s'arnufer, on fe donnoit un canevas, & le pent conté étoit fait. On fe peignoit 1'un &c 1'autre, & on rioit enfuite. Les romans de mademoifelle de Scuderi étoient trop longs, la morale trop galante; des perfonnes de qualité s'effayèrent dans le genre des contes, & réuffirent: on les imita, paree que cé travail parut facile, & qu'on n'ofoit plus être licencieux; car chacun faifoit retraite, ic oii marquoit le terme de fes jours ou aux incurables, ou dans des monaftères, ou dans la folitude. La conduite de mefdames de la Sabliere & de la Fayeite, fembloit indiquer un dernier emploi du tems aux femmes favantes. Parmi celles de qualité qui fuivirent de prés Perrault, il faut placet mlle de la Force, mefdames de Murat, d''Auheuil, d'Aulnoy; parmi celles qui accueilloient cette troupe favante, madame d'Epernon, qui fut la plus forte écolière de Malkbranche, la comfeife de Dalet, la prélidente  PRELIMINAIRE. $i Perrand, de Mefmes,de Bretonv'dlers, d' Entraguesj parmi celles qui faifoient des vers & de la profe, on peut placer la duchefle du Maine, la duchefle de Bourgogne, mademoifelle de Serment ; ü connue dans les Mercures du tems; mefdemoifelles Cheron, Bernard, Roland, Charlotce Patin, Roquemontroufje, du Hamel, le Vieux, de Saint~ Quentin, de Chancé, Nouvellon , de Cajtelli, de Louvencourt; item, mefdames de Plat - Buijfon , d' EncauJTebarat , &c trois religieufes mefdames de Frainqueville, de Chevry , Guy onnet. Je mets dans une clalfe a part les Scuderi, la comtefle de la Su^e , la Fayette , la Jattiere , les deux Deshoulieres , &c d'autres qui ne doivent point être confondues. Maintenant on retrouve la caufe de la renaiffance des contes de fées. On peut ajouter qu'on ne vouloit plus de romans allégoriques que l'Argenis de Barclay avoit mis a la mode , ni de ces Cléopatre & de ces Cadandre, que la Pohxandre de Gomberville avoit introduites. On dédaignoit les imirations anciennes de 1'ltalien, les romans hiftoriques; on demandoit ce que les Efpagnols exigent de leurs auteurs romanciers , un entretememento, une narration de dix a douze feuilles. L'étendue des contes de fées , rempliffoit ce nouveau plan. Quant au caraétère que tant de jolies roainsleur ont donné  3i Discours il nous fuffira, pour le faire connoïtre en peu de mots, de tranfcrire ce que nous avons déjadit dans notre profpeclus. — L'efprit Francois en a fi vite faiil le caraótère; il s'eft fi bien amalgamé avec le génie oriental ; il a fu fi bien s'approprier les richeffes de 1'allégorie \ il a mis tant d'amabilité , tant de graces, tant de légèreté dans ce travail, qu'on doit convenirque la féerie eft une des plus délicates & des plus ingénieufes branches de la littérature. Les contes des fées femblèrent deftinés principalement a la jeunefFe ; mais comme la mode s'étend auffi fur les livres, chacun fe mcla d'hiftoire des féeries. On y employa des intrigues, on éleva le ton ; on y mit tant d'efprit & tant de graces, que les contes de fées font devenus une ledure intéreffante pour 1'agemur, pourrhomme du monde qui a befoin de corner agréablement, & pour 1-homme délicat& fenfible. Rien en effét n'eft auffi décent que ce genre. Cette décence le placa dés fon origine entre les mains des jeunes demoifelles & des enfans; il eft devenu le catéchifme moral de la bonne éducation ; on 1'a trouvé par tout, au village, chez les curés, chez les bonnes, chez les rois; on les lifoit dans les veillées de chateau. La morale mife en adion & préfentée fons les traits de la fidïon , eft certainement 1'idée la plus  PRÉLIMINAIRE» 3J plus beureufe , pour faire couler fans force Sc fans gêne les fenrimens de la vertu dans un jeune cceur. On négligé peut ètre trop aujourd'hüi ce moyen; on veut de trop bonne heure une éducation férieufe \ on veut que 1'enfanc raifonne avant qu'il foit raifonnabie. Et qu'eft-ce qu'un enfant précoce! P/ienix vouloit des enfans qui devinffint un jour des gens raifonnables , Fan<* tajque , aimoit mieux avoir de joiis enfans, & pourvu quils brillajfent a jlx ans j elle s'embarraffoitfort peu quJils fujjent des fots a trcnte. On n'ignore pas que les contes des fées facilitoient 1'inftrucbion avec d'autant plus de fuccès, que 1'atreiniön de 1'élève, nécelTairement légère dans un age tendre , étoit fixée par le merveilleux des enchantemens, Sc que le ftyle fimple & naïf ce ces contes étoit plus a fa portée. On le voyoit fuivre le fil des événement , en attendre la fin, s'intérelTer aux mallieiireux, détefter les méchans Sc applaudir aux puniiions Sc aux récompenfes. A mtfure que fes facultés fe développoienr, fon imagination vive & ardenre , goiïtoit davantage le ftyle poëtique S: figuré des Orientaux , & fouvent il devoit a ces leélures les gcrmes du talent Sc du génie. Cette méthodö d'iriftruétion réunifloic encore le doublé avantage d'e«tretenir la bonhomie dans les families, Sc de lier plus étroitemsnt les pères aux enfans} Tome XXXV1L C  '54 Discours les enfans a leurs pères. Qu'elles étoient touchantes ces foirées de familie ! Les mères étoient les bonnes de leurs enfans, elles leur faifoient des contes; & felon 1'humeur de 1'élève , c'étoit la bonne ou la mauvaife fée qui figuroit le foir. Les contes des fées font 1'hiftoke du cceur Sc 1 ecole des rois. Les monarques , les princes qui en font les perfonnages dominans , les fublimes lecons qu'on y trouve, indiquent affez qu ils n'ont été imaginés que pour farmer Sc perfectum ner le cceur de ceux qui font deftinés a gouverner , Sc qu'il a été nécelfaire de mettre fur la fcène des puiftances d'un ordre fupérieur, qui euflent le droit de dire Sc de faire fentir la vérité? Que de moyens n'a-t 11 pas fallu employer ici, lotfqu'ils ne pouvoient être que proportionnés a la foiblelfe des hommes ? AJors n'eft-on pas forcé d'admirer la richeffè de ces moyens, la fmgularitéde 1'invention, labeauté des détails Sc le ton fimple Sc naïf de la féerie, en même tems qu'on y éprouve ce charme qui eft Ie propre des ouvrages d'imagination , qui féduit & qui ne permet pas d'en interrompre la lecture. C'eft fans doute ce qui fait dire a la Fontaine : Si peau d'ane m'étoit conté, J'y prendrois un pfaifir extréme.  »'■ R É l t M J N A ï R E Cependant quelques Jourraliftes, qui font en géiicral des lecteuts diffkiles osèrent condamner ce genre, L'abbé de Villiers prit la plume Si entreprit la fatirë des féeries. Quelques faccès qu'un rrès-médiocre poëme fur 1'atnkié, un art deprêcher, & fa réfutation des illufions du quiétifme lui euffent procurés, il ne lut point perfuader fes leéteurs : c'eft que le genre qu'il ofoit attaquer, étoit plein de ces graces légères > étoit embelli des ficbions les plus déli<-ates , & que pour fentir & apprécier ces effets, il faut plus que des principes rmftèves. Le gout prend plufieurs formes, celui de Boileau , quelqu'épuré qu'il fut, n'étoit pas celui qui infpirok Duclos & 1'auteur de Boca l celui qui put les juger. La critique tomba, les fées circulèrent. A la cenfure de 1'abbé de Villiers, on pouvoit oppofer le fuffrage de mademoifelle l'Efpinaffe, dont la réputation eft faire pour tous les ouvrages qui concernent 1 education. Elle préfère aux romans, les contes de fées, les contes Arabes , paree que le merveilleux n'eft pas dans Ia-nature, au licu que le roman étanr plus vraifemblable, en devient plus dangeieux. On fur cependant frappé d'une feu le obfervation de 1'abbé de Villiers qui avoit remarqué que parmi ceuX qui s'étoienr ex'ercés dans ce genre , les femmes fermoiem le plus grand nombre. L'obfervation C ij  jó" Discours étoit jufte ; il faiit ajouter que nous leur devons les meilleurs contes, ce qui donneroit peut-être la mefure de leur talent ; le jfiü paroït leur appartenirdans tous les arts. Rarement elles peuvent s'élever au jublïme; la nature leur a refufe les forces néceffaires pour les grandes entrepnfes. Ce genre a éprouvé les inémes variations que tous les acnes. II fut ingénu, naïf, aimable ; conteur fous la plume de Perraulf. Barbe-Bleue fe tapprochoit de ia clafle de fes jeunes ledeurs, & de ia dccence que madame de MainunonxzcoiWmandoit. Combien de fols cette ledure la fit elle fourire & tumber le fufeau de fes mams; eile patlbit la moitié de fes journées a filer & d conter; car elle narroit avec intérêt & volonricrs. L'aimable duc du Maine en plaifantoit dans fes lettres a madame de Monttjpan. Mademoifelie de la Fora, madame de Murat, d'Aulnoy , d'Auneiïil., prirent une manière moins fimple; mais jufques-la rien n'étoit outré: le ton convenoit aux jeunes chevalitrs de la Terraffb qui fuivoient Lju'ls XV. Ce Roi avoit inftitué 1'ordre dt la Tcnajfe, dont la fête fe célébroit le jour de la Saint-Barthelemi. Le devoir des Chevaliers étoit de jouer avec le roi fur ia terraffe des Tuileries. Aa retour, ou lifoit des Contes de fées. « Mefdames d'Aulnoy, de M~rat &c made» BwifeUe de la Fo'ce, ont fait des contes (die  PRÉtlMINAlRÏ, 37 » M. Ie marquis de P ) ou le merveilleux » femble racheté par la pureré dn gout , par la » fagelTè des idees, par Phonnêteté des tableaux , J5 par une certaine philofophie de moenrs qui » caracFérife le fiècle oü ils ont été écrirs. 11 y a » deux eens ans tout cela n'exifloit pas en France; » il regnoit au contraire une crédnlité fbtre , » une groffiéreté d'efprit qu'on a peine a conce» voir aujourd'hui. Les contes des trois femmes » que nous venons de nommer , ne font pas, » a beaucoup prés, les meilleurs ouvrages de » féerie que nous euffions eus depuis cent ans; » mais ils font en quelque facon les premiers » qui marquent la révolution des idéés ». Mais des écrivains trés-médiocres s'en mélèrent. Prcfchac, Lcfconvel & tant d'autres , gatèrent tout : les contes n'eürént plus que le titre de fées. Duclos, Voltaire, Crébillon, ne ramenden t point le genre a fa première candéuf. Ctébillon imita du mauvais coté les Mille & une Nuk que le chevalier de Mouhy voulut finger , & oü Moncrif n'avoit paru qu'un mince écolier. Le Régent n'étoit pas d'ur caraélère.a protéger les fées \ il avoit trop d'ardeur dans fes goüts, pour ne pas chercher des le&üres plus analogues a fes penchans. Tout ce qu'il put faire, ce fut de mettre en réputation le Tclémaque de Péneion que Louis XIV avoit réprouvé. Cette C iij  jfj Discours préliminaire. proteóHon lui valut la dédicace d'un tableau oü il étoit le Mentor, Sc Louis XV le Tclémaque. La duchefle du Maine, les foupers du Temple, rejetcrent ces petites leftures. Voltaire éccivoit cependaur a madame Gondrin, qu'on poavoit rite aux Contes des fées. Nous toucbons au déclin du genre, dont madame le prince de Beaumont voulut retarder la chüte. Elle s'appropria les contes qui entroient dans fon plan d'éducation, tailla , rogna, tit des livres qui font devenus le manuel des enfans & des adolefcens. J.-J. Rouffeau auroit pu donner uu nouveau modèle. La reine Fantafque ne laiiTe rien a defirer. La colledVion que nous donnons fervira a prouver que des hommes d'un age mur peuvent s'occuper de la lefture des fées. Si les écrivains , qui vont pillant des plans Sc des cara&ères dans les romans , pour en faire des fujets de comédie, veulent 1'ouvrir , ils trouveront affez de moüFons, a faire. Fufelier leur a montré le chemin, Sc Saint-Foix s'eft fervi erop heureufement de la. baguette, pour qu'il ne foit pas iipicé,  N O T I C E DES AUTEURS Qui ont écrit dans le genre des Contes de Fées. A A Pv. N A U D (M. Francois - Thomas - Marie de Baculard d' ), originaire du Comtac Venaiflin , confeiller d'ambaflade de la cour de Saxe , né z Paris. Cec Auteur eftitnable, qui vit encore, & dont on lit avec le plus vif intérêt les Ouvrages périodiques connus fous le titre des Délajfemem de l'homme fenjïbley a commencé de bonne heure fa carrière poctique. Si nous prenions date pour fon age fur lepoque ou parurent fis Adages, on le C iv  49 N O T I C E croiroitplus vieux qu'il n'eften effet. M. d'Arnaud eut un talent premature. 11 compofoit a 1'age ou les Adolefcens étudient les élémens de la larinité. Ses premières poë'fies refpirent la fraicheur & 1'efprit, Sc promertoient beaucoup. Déja Fauieur y laifte entrevoir fon ame & fes gouts. 11 n'a point trompé eet horofcope; car il n'a jamais fouillc fa plume par la fatyre Sc par des ouvrages iicencieux. S'il fe permit une fois une débauche d'efprit, il revint bien vite a fon ton ordinaire. On ne peut gueres donner un genre particulier a M. d'Arnaud. II les a traités tous avec aftez de diftinftion , Sc, dans la fuite, il en a négligé quelques uns : fon penchant & fa fenfibilit-é femblent 1'avoir fixé au drame Sc au roman fentimental. Le fuccès du comte de Comminge étoit fuffifant pour 1'engager a tirer parti de toutes les reflources que fon ame mélancolique Sc profondément pénc'trée lui offroir. II intérene, il touche, il défole; mais il ne déchire point, il ne multiplie point les atrocités , il eft fombre, fans être noir Sc odieux. II convient a des leéteurs honnctes fenubles : fes épreuves du Sentiment, fes Contes, fes Nouvelles , Sc enfin les Délaffemens de l'hommcfenjlble portent ce caractère de fenfibilité qui lui eft propre, & que nul Bctivain n'a fu développer comme lui. Toutes les fois que M. d'Arnaud nrend la phirae , il eft sur d'é.noivvoir Si dintéreiFer.  des Auteurs. 41 Nons nedonncn point k li de de tous fes Ouvrages, paree que nous fuppofons qu'ils font connus.II eft peu d auteurs qui foient auffi univerfelJement lus, & qui aienr autant a fe plaindre que lui du brigandage impuni des contrefadeurs qui lui ont ravi les deux tiers des honoraires que fes Ouvrages devoient produire. On nous affure que le Gouvernement vient a fon fecours , & nous 1'en félicitons , c'efl un homme de bien qu'on aura récompenfé fur k fin de fa carrière. Son éloignement pour toute efpèce de follicitation, 1'a privé des honneurs du Théatrc. Ses Pièces n'ont jamais été repréfentées i Paris j paree qu'il n'a point voulu folliciter. On rrouve dans les Mercures, les Conus de Fées & les Contes orientaux qu'il a compofés a difFérentes époques. On lira avec plaifir Fatïme & Sa/en, conté indien; Néhamïr, ou la Providence juftifiée, conté arabe. A R R A S ( Jean d' ), né a Paris, vécut environ en 1360. II paroir qu'il a joui d'une efpèce de réputation. Le duc de Berry, fils de Jean, roi de France , & fa fceur Marie, ducheiFe de Bar, lui ordonnèrent de compofer 1'hiftoire de la fée Mélufme. Jean d'Arras puifa fon roman dans les archives de la maifon de Lufignan, qui avoient paffe dans les mains du duc de Berry, Ce  4<3 N O T I C E roman étoit écrit ( ainti qu'il étoit d'ufage) er* vers & en profe. AUNEUIL. La comtefle d'Auneull fe nommoit Louife de Bojjïgny; elle avoit époufé ïe comte d'Auneuïl de 1'illuftre maifon de Barjoty alliée a celle de la Force. Son mari étoit Colonel du régiment de Ia Meftre de Camp, après Favoir été d'un régiment de fon nom. La comtefle d'Auneuïl, par fa naiflance, par fa fortune, par fon crédit & par les graces de fon efprit, renoit a Paris & a la cour un rang confidérable. Sa maifon étoit ouverte a tous les beaux-efprits & a toutes les femmes qui écrivoient. Elle mourut le 10 Janvier 1700. Elle eft auteur du roman intitulé : la Fyfannïe des Fées détruïte, qui a été dédiée a la ducheffe de Bourgogne. Elle a compofé le roman des Chevalïers errans & le Génie familier; elle a été célébrée dans tous les Journaux contemporains, & le méritoit par fes écrits. AULNOY. La comtefle d'Aulnoy étoit fille de M. le Jumel de Barneville , allié aux meilleures maifons de Normandie, & qui avoit été long tems au fervice. Elle fut mariée a Francois de la Mothe, comte d'Aulnoy, qui fut accufé du crime de lèae msjefté par trois Normands,  bes Auteurs. 4$ enfermc & menacé de perdre la rète.Un remords de confcience toucha tm des accufateurs, qui fe rétraéfca, & la liberté lui fut rendue. Sa femme s'étoit Hée avec lafameufe & belle madameTï^aer, qui eut la tête tranchée en place de gtève , Sc fut eompromife durant cette procédure. A la beauté, madame la comtefle d'Aulnoy joignoit beaucoup d'efprit Sc une grande facilité de s'exprimer, Elle plaifoit généralement a tout le monde, & rendoit inftruifantes les moindres chofes quelle difoit. Elle avoit beaucoup lu, fa mémoire étoit excellente ; & de quelque manicre qu'on s'entretint , elle étoit toujours au courant de la converfation. Perfonne ne favoit mieux amener 1'anecdote, Sc la faire fortir par 1'a propos. Sa facilité pour la compofition, étoit égale a celle de converferSes contes conviennent a tous les ordres de lecteurs Sc a tous les ages. Ils font diftingués par li fécondité de I'imagination, la naïveté des récïts, la pureté Sc les graces de fon ftyle. M. de Venion lui adrefla ce quatrain : Si 1'on récompenfoit ces vers , Si 1'on payoit ton éloquence Qui brille en mille endroits divers , Tu pourrois épuifer les tréfors de la France, Elle étoit nièce de la célèbre madame Dejlogss »  44 N O T I C E & mcre de madame de Héere, qui a fi bien marché fur fes traces, a laquelle le préfident de Vertron écrivoit: Dans Ia profe & les vers de 1'aimable Héere , Je Ic dis, comme je Ie croi , La fïtle c(l femblable a Ia mère , On y voit tout 1'efprit de 1'aimable d*Aulnoy. ■ Madame Ia comtefle d'Aulnoy eft auteur D'un Voyage en Efpaane ; Des Mémoires de la cour d'E/pagne ; Des Mémoires de la cour d'Anglcterre ; Des Aventures d'Hypolite , comte Douglas ; Du Comte de Warvkk ; Du Prince de Carency ; Et des Contes de Fées que nous avons inférés en entier. Elle mourur a Paris, dans le rnbis de Janvier 1705 , agée de cinquante-cinq ans. A U N I L L O N ( Pierre - Charles Sabiot), Abbé du Gué de Launay, mort le 10 Odtobre 1760, agé de foixante-feize ans. II eft traducteur A-ror, ou le Prince enchanté, roman Anglois'y in-i 1, 1750 ; De la force de l'Education ; Et d'une Oraifon Funibre de Lords XIV.  des Auteurs. 45 B JOLANCHET (1'abbé) , naquit le 16 Janvier 1707 , au bourg d'Angervdle, dans le pays chaïtraïn , de parens peu fortunés , mais libres Sc honnêtes. On peut dire qu'il fe créa lui-même. Il vinr a Paris pour y finir fes études au collége de Louis le Grand. Les Jéfuites le diftinguèrerit, le comblèrent de tant de bontés, qu'il entra dans leur uoyiciat en 17x4 , ou il ne refta pas longtems , fans autre motif de fa réfolution , que ie fentiment d'indépendance inné en lui II prit le partide fe confacrer teut entier a l'éducarion de la jeunefie, & réfolur, malgré fon averfion pour toure forte de gc-ne, de faire pour les autres ce qu'on avoit fait pour lui d'une manière fi généreufe. II n'eut pas la peine de chercher-, on leprévint, on 1'annonca. Ses anciens maïtres vedloient fur lui a fon infeu. Les pères Brumoy, Bougeant, CaJUL Sc Tingénieux Creffet lui avoient procuré une forte de répuration II profefla avec diftinétion les humanités &: la rhérotique dans deux colléges de province. M. de Merinville, évêque de Chartres, témoin de fon zèle Sc de fes fuccès, mais qui voyoit que fa  4^ N O T I C E fanté commencoit a s'altérer , lui oftrit un cartonicat, a condition qu'il fe feroit prèrre. Mon~ feigneur s lui répondit-il , je fuis erop honncte homme pour cela. Le fait eft qu'il ne fe croyoit pas digne de eet important miniftère \ il eut Cela de commun avec l'ilkiftre Nicole fon compatrio te. Sa fanté qui dépériflbit fenfiblement, le forca de defcendre aux éducations particulicres , fouvent plus utiles que les autres \ mais cette conlidération n'entroit pour rien dans fes calculs : il ne fongea qu'a faire le bien & il Pa fair. Son ami le plus intime, M. de Chavane, mort doyen du parlement de Paris, lui donna un premier indult qu'il oublia de placér & qu'il garda pendant cinq ans. II lui en donna un autre qui lui val ut un canonicat dans la cathédrale de Boulogne-fur-Mer. II part; Sc dans fa première lettre, •i— me voila donc arrivé ( écrit - il ) a Boulogne ) il ne s'agit plus que de favoir fi j'y refterai; c'eft ce qu'aucun mortel ne fauroit décider , & je ne Pofe moi-même. — C'eft a partir de cette époque, que les fcrupules, 1'indécifion Sc les fingularités de Pabbé Blancket, aikdent en augmentant. Son Chapitre le preiTa d'enrrer dans les otdres , il répondit comme la première fois & fit fa démiffion pure Sc fimple entre les mains de  des Auteurs. 47 M. dcMirepoix, qui lui donna huit jours pout y penfer : il perfifta. Delivré de fon canonicat, il reprir, ce qu'il appekut en riant, fon colkr dc misère , & redevint précepreur, titre dont il s'honora conftammeut. La fingularitë de fa démiffion excita la curiofité de bien des gens. D s grands voulurent connoitre un homme qui, gardant la peine & le chagrin pour lui feul, ne porton que la gaietc chez tous ceux qu'il fn'quentoit, un homme fur tout qui ne favoit ni demander, ni accepter, qui méprifoit fmccremenr les Tichelles, mais fans cynifme, fans jn°c.mce, &: ne condamnoit pas les autres a s'en pa Her. Les grands le connurent & 1'aimèrent, il 1'eflimèrc-nt alfez pour s'occuper de fa fortune rnalgré luimème. On le fait interprète a la bibliothèque du roi, pour les langues italienne , efpagnole & angloife. Après y avoir un peu rêvé, il va trouvcr M Bignon.—Je vous entends, monfieur, lui du le Bibliathécaire du roi , mais nous ne r^cevrons point iadémiffion de votre place d'interprète, comme M. de Mirepoix a recu celle de votre canonicat de Boulogne. Au refte, ils'aeir ici d'une récompenfe, & non d'un emploi. Qrt le fit cenfeur; mais cette fois, il accepta Ie titre , & refufa la penfion. Ses smis le firent nommer Garde des livres du Cabinet du Roi : place ho-  48 N O T I C E norable Sc Iacrative ; mais après lui avoir apprts la nouvelle, ils ne lui laifsèrent pas le rems d'y rénéchir. — Je pars demain pour Verfailles, écrivit-il a fon ami, & {e compte que mes livres y arriveronr après demain. Hélas! j'ai grand peur que mes chers livres S: moi nous ne revenions bientöt. II euc a la cour, le talent d'être vrai fans rudelTe , Sc honnête fans familiarité. II obfervoit fcrupuleufement tous les égards de convention , dont les nuances lui étoient parfaitement connues. On avoit beau 1'appeler mon chery il répondoit toujours monjïeur. Cependant il périfloit de chagrin & d'ennui. — Ah ! mon ami, lui difoit-il, puiffiez-vous être aufli heureux oü vous êtes, que je l'ai été peu dans ce Pays ci! Je le quitterai, s'il plait a Dieu, vess la fin de Thiver, Sc je retournerai probablement comme j'étois venu, avec une pauvreté honnête qui ne m'effraie point, quand elle eft jointe a la liberté , a la fanté du corps Sc a la tranquillité de Tame. — Il quitta fa place comme il l'avoit dit, Sc revint a Paris; mais le féjour de Verfailles l'avoit guéri de toute illufion, en lui montrant de trop prés ce qu'on n'admite guères que de loin. Comme les paflions font partout les mêmes, Paris, après cette nouvelle & dernière expcrience , ne lui parut plus qu'un défert. Se jugeant incapable de commercer déformais avec les hommes, qu'id ne póuvoit plus eftimer  DES AüTEÜRiSi '49 eftimer autanc qu'il le vouloir -y & redoutant la préfence habkuelle des amis dont il avoit fruftré les efpérances, Ü prit le parti d'aller cacher a Saint-Germain-en-Laye , les reftes d'une vie dont il croyoit le terme plus prochain qu'il ne 1'étoit t car il y a langui dans la triftefie pendant prés de dix-fept ans. II ne fe fut pas plutöt réfugié dans ce dernier afyle, qu'il prouva bien qu'on ne change point de catadtère en changeant de demeure. Je fuis confumé, écrivoit-il, par une mélancohe cruelle que je ne puis plus vaincre, & contre laqueüe je ne trouve ici auctme relToarce. Cela finira bien tót, s'il plak a Dieu. — S'il ne perdit pas la raifon, il faut convenir qu'elle fut fouvenc offufquce par de fombres vapeurs Plufieurs Gens de lettres fe firent un devoir d'épier fes bons momens. M. Trocherau de la Berliere, favant trésdiftingué, M. de Rochefort auiTi avantageufement connu par fes Ouvrages que par 1'excellence de fon cceur, ne 1'ont pas quitté jufqu'au dernier moment. II eft tems de montrer 1'abbé Blanchet par des cotés plus intérelTans, & de réfoudre, s'il eft poffible, le problême moral que nous préfente fa vie. On vient de voir comment il vivoit avec luimtme. Voyons maintenant comment il vécut avec les autres. Tornt XXXFIL D  •JC N O T IC B II paroit que, dés fa j ermede, il eut au-dedans de lid-mème deux mobiles qui ne cefsèrent de le pouffer en fens contraire. La force de fes organes n'étoit pas proportionnée a celle de fon ame. Il avoit plas d ardear que de puiffance. Vous ne fauriez croire, difoit-il, combien c'eft un rude exercice pour moi, que de manier une plume : il y a des jours ou j'aimerois mieux faire deux lieues a picd, qfe d ecrire deux lignes. — Lorfqa'il ne dcpendit plus que de lui-même , il ne put pas fouffrir les befognes predées, & fur - tout de commande , a moins qu'elles ne lui paruffent indifpenfables. Je m'en lappelle un trait fort bifarre pour ne tien dire de plus, & qu'il s'eft toujours reproché. L'amitié dont 1'honoroit un trés - grand Seigneur, non moins recommandable par fes mceurs que par fes talens & par fon efprit, fut 1'un des principaux motifs d'un petir voyage qu'il fit en Angleterre. II n'y étoit arrivé que depuis peu de jours , lorfque M. le duc de * * * ,. ambaftadeur en cette cour, fe trouva prefle de joindre a une dépêche imporrante la traduótion de quelques difColïS prononcés au parlement d'Angleterre. Le duc partagea cette tache en trois parties: il s'en réferva une, remit Parure a fon Secretaire, &C pn'cio'uammer.tenvoyarautre a 1'Abbéqui favoic très-bien 1'anglois , & s'amufoit fouvent a tra-  ö e s Auteurs; M duire les plus beaux morceanx écrita en cette Iangue. L'Abbé voit airiyer a 1'improvifte le pa-* quet de 1'AmbafTadeur : dès qu'il eut appris ce qu'il contenoit, & ce qu'on lui demandoit ,■ il s'écria : — ó ciel, comme on'me traite! c'eft' juftement le jour de ma Blanchifïeufe, & 1'on me charge comme un baudet! Que faire ? que devenir dans ce maudit Pays ? H fit fon pa- quet, & fe fauva. Malgré tant de fingularités, 1'abbé Blanchet étoit fenfible & compatifTant. La détrefle des autres fe peignoir fur fon vifage; & quand il foupconnoit que quelqu'un de fes voifius manquoit du néceffaire; il ne pouvoit pas fe réfoudre' a prendre les moindres alimens avant de les avoit fecourus. Pourquoi n'a-t-il jamais manqué d'affifter un aveugle? c'eft que, difoit- il, ces infortunés fout dénués de lorgane qui commande la pitié, & qu'il faut les rechercher avec d'autanc plus de foin, qu'ds font plus négligés. Je vais enfin parler de fon efprit & de fes ouvrages qui ne font que 1'expreffion de fes propres fentimens. On ne voit pas que 1'abbé Blanchet ait jamais eu d'autre but, en exercant fon efprit, que de remplir fon cceur de fentimens honnêtes, que de le rendre de plus en plus agrcable a ceux qu'il fréquentoit. Quoiqu'il ait parfairement rcuffi ^ ces deux égards, il n'en a pas moins prouvé qns Dij  }1 N O T I C fi 1'efprit eft comme Ia richefte, que fouvent il lert plus aux autres qu'au proprictaire. Il ne rivalifoit avec perfonne ; Sc fans émulation, fans fonger aux éloges, il travailloit de toutes fes forces, paree qu'il n'étoit jamais plus heureux qu'en travaillant. S'il ne louoit pas toujours, car il ne fa-, voit pas mentir pour confoler les geus, il n'a jamais bleue perfonne, même dans Ie fdence du cabinet. Quant au goüt, il en étoit Papbtre > Sc non lè fatellite. Quant au ftyle, le négligé des graces lui plaifoit beaucoup plus que toutes les parures. L'abbé Blanchet étudia long-tems Sc n'oublia rien. 11 s'attacha fur-tout a 1'art de bien narrer, tant en profe qu'en vers : eet art en fait de littérature lui paroifloit la clef de tous les autres, Il s'y difpofa par la leéture réftéchie des bons Auteurs latins, italiens, efpagnols Sc angloiS> fans néoliger fa propre langue dont il avoit appris les finefies , dans les cercles choifis , ou 1'idiome national s'épure & fe maintient. Pour fe perfectionner en même tems dans 1'art d'écrire Sc de parler, il eut recours au moyen le plus sur & fe mit a traduire: ce qu'il appeloit en badinant, verfer du francois dans les moules des anciens , afin, difoit-il, de s'aecoutumer aux belles formes. 11 ne refte de ces nombreux eflais que la traduction de ïhijloire dt la familie d'Hièron par The-  des Auteurs." 5$ Live; la Conjuration de Pifon centre Neron par Tacite. Du latin il pafla a d'autres langues ; ce fut alors qu'il imita quelques contes efpagnols & anglois, & qu'il entreprit de traduire ce qu'ont de plus ingénieux le fpeclateur &c quelques autres joutnaux qui parurent en Angleterre prefqu'en même tems. Apres avoir traduit, il voulut enfin compofer. II m'eft permis de déclarer ce que je penfe de fes contes; j'avoue que 1'exécution m'en parok telle en général que la jeunefle les lira avec autant de fruit que de plaifir, que les gens de gout les reliront plus d'une fois, & que les philofophes ne les dédaigneront pas. Convenons cependant que tous les contes ne font pas de la même impoitance. Ce n'eft quelquefois qu'une naïveté, comme dans les princellés bien nées, ou bien une facilité comme dans 1'académie filencieufe; mais c'eft alors que 1'Abbé montre le plus de ralent; car il en faut beaucoup pour donner a des riens une forte de confiftance. On a reproché a quelques auteurs de Contes Orieneaux, d'ailleurs fort ingénieux, de n'avoir prefque rien d'oriental que le titte, 1'oh ne fera pas ce reproché a 1'abbé Blanchet. Les papiers qui ont été trouvés dans fon portefeuille orrient plufieurs ébauches de contes & d'anecdotes, D Lij  54 N o t i c e qu'il auroit peifeóHonnés , fi fa déplorable exiftence lui avoi: permis de fe livrer conftamment aux délices de la compofition. 11 publia dans fa jeunefle une Ode contre les incrédules , que 1'abbé des Fontaines annonca avec éloge. 11 a cumpofé une grande quaritltë de vers iur toutes fortes de fujets • on n'a pu en recuedlir qu'une petite partie. 11 les communiquoit diffi* pilement, & il exigeoit qu'on les lui renvoyat. 11 paffbit une mauvaife nuit, quand le paqU'ét arrivoit trop tard. II avo:t grand foin de les bruler, & il fe comparoit a Saturne qui dévoroit fes enfans. On en a retenu quelques.uns , & 1'on cite encore ce triolet. A TROIS SCEURS. Aimables foeurs entre vous trois , A qui mon cceur doit-il fe rendre ï II n'a point fait encor de choix, Aimables foeurs, entre vous trois j Mais il fe donneroit, je ciois, A la moins fiére, a la plus tendre : Aimables foeurs, entre vous trois, A qui mon cceur doit-il fe rendre 5 Fontenelle prétendoit que dans ce genre, on ne pouvok pas mieux faire.  des Auteurs. 55 En voici d'autres qu'on attribuoit aux poé'tes les plus galans qui ne s'en défendoient pas. Quand on le difoit a 1'abbé, il répondoit : Je fuis charmé que les riches adoptent mes enfans. Sur une jeune Perfonne habillée en reiïgieufe. Que cette veftale a d'appas! Heureux celui qu'elle aime 1 Le bandeau ne tui meflielj pas : II femble un diademe; Et s'il étoit deux doigts plus bas, Ce feroit 1'amour même. Le portrait de madame la duchelTe de pa. rut du meilleur ton. Telle eft 1'inconcevable Hortenfc , Egalement fidelle au caprice , au devoir , Vertueufe fans qu'elle y penfe, Et chatmante fans le favoir. On le plaifanta il y a quelques années, fur ce qu'il n'avoit jamais fait d'énigmes : il en fit une qui eut beaucoup de vogue, & qui donna la torture aux amateurs de ce genre. La voici: On vous annonce une maifon ■A louer en toute faifon ; D iv  $6 N O T I C E El'.c a deux portes, trois fenêtres ,' Du logement pour quatre maitres , Même pour cinq, en un befoin; Écurie 8c grenier au foin. Elle eft: dans un quartier qui pourroit ne pas plaire En ce cas, le propriétaire , Avec certains mots qui font peur , Et fa baguette d'enchanteur Emporcera maifon , meubles & locataire , Et tant fera , qu'il les mettra En tel endroit que 1'on voudra : On connolt eet hotel célèbre A fon écriteau fingulier Pris dans barême, ou dans l'algèbrej Et 1'on trouve au calendrier Son nom & celui du forcier. Le mot eft Fiacre. Ceux qui ont fréquente 1'abbé Blanchet dans fes belles années, conviennent qu'il les enchan« toit par fes récits toujours variés, ou par des réflexions tour-a tour férieufes & badines, que la-propos, le tour &c 1'expreffion rendoient originales , lors même qu'elles n'avoient pas le mérite de la nouveauté. Que 1'on ne croie pas cependant que fa converfation fentoit le projet & l'apprèt : elle étoit fimple , facile , naturelle , & les innocens artifices qu'il employoir pour plajre , ne pottoient aucun ptéji^dice a fa naï-  des Auteurs." 57 vete; car quoique fin , il étoit naïf. Notre la. Fontaine a prouvé que ces deux qualités ne font pas incompatibles. M. Bouvart étant il y a environ quarante ans a toute extrémité, dit a fon ami Blanchet Da caradtère dont je te connois, tu ne feras jamais rien pour ta fortune : il y a grande apparence,' mon ami, que je n'irai pas loin, & quand je ferai mort que deviendras-tu?— L'Abbé voulut répondre ; mais le malade profitant de fon avantage, lui impofa filence & diéfca fes volontés. — J'entends que ta vie durant tu jouifies des dix mille écus que j'ai gagnés ; ne t'eftarouche point, le fonds retournera a ma familie. — M. Bouvart en revint. Quelque tems après 1'abbé raconta ce trait a madame la duchefie d'Aumont, qui en fut fi ravie, qu'elle le pria de recommencer. — Bon, madame, ce que je viens de vous dire, n'eft rien en comparaifon de ce qui fuit. Quand mon pauvre Bouvart fut hors d'affaire , eft-ce que je ne le trouvai pas tout honteux d'en être revenu ? Tels furent le caradtère, Pefprit & les talens de eet homme de bien. II eft mort a Saint-Germain en-Laie le 19 Janvier 1784. Les gens de bien le regrettent, fes amis le pleurent encore, & les pauvres bcniffent fa mémoire. Cette vie aétéécrite par M. Dufaulx de laca-  58 N O T I C E démie royale des infcriptions & bellesdettres; fon parent & ami. Nous n'avons pas réfifté au charme de cetre lecture, & nous avons érendu la notice au-dela des hornes que nous nous fommes preferites. Mais il eft fi doux d'entendre un homme de bien louer 1'homme de bien, & le génie célébrer le génie! Nous avons regretté d etre contraints de faire des coupures dans un ouvrage généralement bon , bien penfé , bien approfondi, & rempli de réflexions ju fles & fages. La finguiarité du caradtère de 1'abbé Blanchet eft fi piquante, il contrafte fi fort avec fon cceur, que nous ctions fius de plaire a nos ledreurs. Puiffions nous avoir fouvent de pareilles vies a leur offrir. Le volume qui contient les Apologues Orientaux de 1'abbé Blanchet, fe trouve chez Didot le jeune; il fert de fuite aux Variétés morales & amufantes du même auteur. BASTIDE {Jean-Frangois de) , eft né a Marfeille le i $ Juiilet 1714. Venu trop jeune a Paris, abandonné de trop bonne heure a lui-même , il n'a pu perfectionner fes études, & les fuccès que fa mufeobtint dès les premiers elfais, 1'éloigncrenr a jamais de tous les genres qui demandoient de 1'application & des recherches. II n'étudia point, ne s'appliqua point. Les fociétts  des Auteurs.' 59 'dans lefquelles il fut lancé, contribuèrent, fans doute, a lui former un ftyle peu naturel & briljante de ce bel efprit qui étoit devenu de mode, & que des littérateurs agréables , mais parfaitement ignorans , avoient mis en crédit. Nous fommes faehés de retrouver dans tous les écrits de M. de Baftide , i'influence de ce public auquel il vouloit plaire , & qui Lui tenoit compte de fon exrrême facilité. On ne conteftera certainement point a eet auteur d'avoir de 1'efprit, & beaucoup plus que des écrivains qui jouifïent d'une grande célébriré. La manière avec laquelle eet efprit eft employé , nuit feule au mérite de de 1'Auteur. On lit encore les ouvrages d'Amioty paree qu'ils ont du naturel , une correcte fimplicité. On ne lir plus ni Chapelain, ni Voiture , Bal\ac eft juftement apprécié ; Fontenelle & la Motte ont plus perdu qu'ils n'ont gagné a avoir-trop d'efprir. II y a auffi une qualité dont on'ne paroit guères jaloux, & je ne fais pourquoi, qui cependant établit la fortune conftante des ouvrages, c'eft la fenfibilicé de celui qui écrit, c'eft cette chaleur qui anime & le ftile & la peniee ; c'eft auili 1'imiration vraie & jufte de la nature, fans charge, fans afféteria, fans gigantomachie. La peinture des ridicules, exige la même mefure & les meines conveuances dans 1'afTeinblage des couleurs. On n'a pas tou^  So N O T I C E jours trouvé ces qualités prccieufes & malheüreufement trop raies dans M. de Bajiide. Nous parlerons encore du genre & de 1'importance des matières vers lefquelles le bon efprit d'un auteur fe dirige fans effort. 11 n'eft pis douteux qu'avec beaucoup moins de talent, un auteur qui choifit bien fes fujets, & qui ne traite que ceux qui ont un degré marqué d'utiKté, ne réuffifle mieux que celui qui s'embarrafle peu du fond, & s'épuife a enluminer des formes légères qui ne portent fur rien. Alors on autoit tort de prononcer fur le mérite des deux auteurs; il faudroit feulement dire que 1'un a mieux employé fon tems que 1'autre. Ainfi nous fommes ttès-éloignés de conclure , que M. de Bajiide n'ait eu aurant de moyens de fe faire valoir qu'un autre , & on doit fe garder de Ie frapper de I'anathème de la médiocrité. On peut donner au public des ouvrages médiocres , fans que l'auteur foit pour cela convaincu de médiocrité. Je pourrois citer parmi les hommes de lettres, honorés du faureuil académique , plufieurs écrivains qui fe font trouvés dans la mëme hypothèfe : on me difpenfeta de prouver cette définition. Neus ne pouvons ne pas confeiller aux jeunes .«teuts , de s'écarter du penchant qui les gourmande trop, d'imiter tous les genres qui réuftif-  des Auteurs.^ 6j fent. II faut que chacun foit ce que Ie ciel a voulu qu'il fut. Chacun a fon talent, il faut le cultiver, le développer, & c'eft tout perdre que de fe borner a 1'imitation d'un talent qu'on ne pofsède point. Les petits vers, les déclarations d'amour, les bouquets a Philis, les queftions fur des fujets galans, les Contes defées, moraux, allégoriques , étoient a 1'époque oü M. de Bajiide parut , les genres dominans. II n'y avoit que 1'opéra qui put lutter avec avantage contre cette belle renommée. Audi les vers pleuvoient de tous les cbtés; les plus médiocres étoient accueillis; de li 1'abbé Abeille recu a 1'académie francoife, 1'abbé Pellegrin recherché , & rant d'autres. Ce n'eft pas qu'il n'y eüt dans le même tems des romanciers d'un mérite fupérieur, il fuffiroit de nommer le Sage, Marivaux , 1'abbé Prevot, ni qu'on ne podcdat des auteurs dramatiques eftimé?. Crébillon vivoit, Foltaire jouifloit de fa brilbnte dedinée ; mais c'eft qu'alors on lifoitplus volontiers qu'aujourd'hui; on lifoit tout. II y avoit une fourmillière de poëtes qui n'étoit pas dénuce de talent & qui pouvoit briller un jour entier, Lapreffe publioit tout, les romans les plus mediocres s'imprimoient &c trouvoient des acheteurs. Un homme qui avoit un nom deverm cher a la littérature, paree qu'il étoit rils d'un père qui  "Si N Ó T I C E tenok le fceptre dramatique, Crébillon joignok" aux avancages de la figure Sc de la perfonne » beaucoup d'efprir & cerre lorre de talent qui s'a£~ tache Sc faifit avec fineffe les furfaces. II vivoit dans le monde, il connoifToit les femmes, il les peignoir légcrement, ainfi qu'il les aimoit. On crut retrouver dans fes petits romans la peinture du cceur humain, & il n'y avoit réellement que 1'liiftoriette de quelques femmes & de quelques cercles. On dévora fes romans qui en effet fe claffoient a part Sc ne refTembloient point a ceux qu'on avoit lus : les Contes Mofaux de M.Marmontel n'exiftoient pas; mais Ü faut tout dire, peut-être que fans les écrits de Crébillon on n'auroit pas eu les contes moraux \ Sc fi Boijjl qui ré-> digeoiile mercure, n'avoit aimé les contes, peutêtre que M. Marmontel, tronvant moins de facilité , n'auroit pas compofé un recueil moral qui reftera. M. de Bafüde voulut imirer Duclos , il voulut imiter M. Marmontel; il écrivirlesaventures de Viclolre Pond , Sc les Confeffions d'un Fat. Mais plus flatté de la brillante réputation de Crébiïlóq q®e ïóutes les femmes ptónoie'nt, il fit la Trentaïne de Qythcre ; les Têtes-Folles >■ le Trlbunal d'Amour; le Faux - Oracle. Par-tout on trouve de 1'efprit, de la facilité, de 1'agrémenr, mais jamais de caradtère, jamais rien de fenti, rien d'appEofondi. Le travail du fok  DES A U T E \' R. S. C?J étoit imprimé le lendemain. Les Journaux parloient de lui avantageufement; il inféroit dans les Mercures des vers galans, de jolis contes, des rcponfes amoureufes , des queftions d'amour, tout paroifloit bon dans ce cadre , paree qu'un tableau efFace 1'autre , & que 1'erTet eft décidé par le fuccès d'une première leéture. II fut fè.té , couru, & on peut dire qu'il mit fa réputation littéraire au comptant. II eut tort certaiuement, &• il en eut un plus grand de courir après ces petites modes qui naiffent & tombent, & 112 font que de 1'enjoümenr. Dans toutes ces productions, Fefprit fe diffipe en inutiles prodigalités, & rien ne rede; paree que rien ne peut marquer. Cette facilité d'écrire pröJuilit la lettie a Jean-Jacques Roujjeau, au fuiet de la lettre a d'Alembert. On doit voir que nous ne nous arrêrons point fur les ouvrages & ie ralent de M. de Bajiide, par un motif de maiveülance, nous lui rendons plus de juftice que rous les poligraphes qui ont parlé de lui & qui Font jugé avec une iniufte prevention. Nous prouvons qu'il a beaucoup d'efprit, qu'il y en a dans tout ce qu'il a fait, qu'il auroit pu mieux faire , & nous ne Lui teprochons que d\.voir trop négligé 1'érudition, & d'avoir tiop couru v^ts des fuccès faciles & la globe d'un jour. Ce déiau: de calcul ne prouve  é4 'Notie! rien contre le talent. II a aimé les lettres & il les a cultivées toute fa vie; il a exécuté des entreprifes littéraires qui doivent le clalTer parmi tous ceux qui ont bien mérité du public. S'il n'avoit eu Marivaux pour modèle & pour nval, il auroit recueilli plus de célébrité de fon nouveau fpeétateur. Mais on ne lui difputera point le mérite d'avoir mis a exécution &: de foutemr la Bibliothèque des Romans. II eft vrai qu'il a du a M. le marquis de P le plan de cette col- leftion d variée & fi intéreffante, dans laquelle 1'érudition la plus vafte & 1'agrément des plus riantes fidions, fe réuniffent, & qu'il a été aidé pendant plufieurs années par eet homme de qualité, auffi favant que rempli de gout. Jamais on ne concut un projet plus heureux & plus fait pour réuffir. On rendoit un véritable fervice a la littérature francoife , en retirant de la pouffière des bibliothèques, ces vieux romans qu'on ne lifoit point, & qui font fi intéteffans a lire, on claffoit enfin une branche littéraire que fa „op grande richeffe décrioit. On faura toujouts gré a°M. de Bajiide d'avoir foutenu fon entreprife & de la conduire encore auffi-bien qu'il lui eftpoffible. II ne faut point avoir 1'injuftice de croire que la direftion d'un ouvrage péiiodique, auquel on ne contribue point de fa plume & de fes recherches, fok d'une mince confidération. Les  r> E S A 1 T E ü ft 3.' ÊTj, Les coopcrateors travaillent, compofent , chacun apporre fon génie; mais fi ie rédacteur foumet toutes les producties aux cofcvenances & au ton deja étabhs de Ibuvrage, s'il feut le mérite des morceaux & fait des oppofitions dans les genres afin que Van paroifieavecavantagea cóté de Tau' rre, on doit convenir que cette manutention fuppofe au mo.ns le talent d'un coopérateur. D'aiileurs M.deBu/u,ea mis du fien dans fa collection, & on y ht plufieurs extraits de fes romans. . N°us i,,vitons tous les jeunes littérateurs a imiter & A ne pas imiter M. de B,fide Qr'üs imitent fon honnêteté, fe réfetve, jamais'fa plume ne s'eft fouillée du fiel de Ia fatire. II a cultivé les lettres fans haïr les littérateurs & faHS en médire. Qu'ils ne 1'imitent point, quand il court trop après les fujers que La mode careffe Sc met un jour en réputation. Nous dirons comme 1'abbé de Salnt-Pierre, il ny a que Ce qui eft unie qui eft vraiment bon. Nous avons parlé de Al de Bajiide, parCQ qu'il a écrir des contes de fées, & nous avons Ia avec fatisfaétion Ie coute qui a pour titre : le Bea* Plaïjïr, imprimé en 1756'. BEAUCHAMPS (Pierre^FrancolsGoDA*„ n) Tome XXXVII. E  C é s Auteurs? ff in 17j c , „ . uuSuemmi h'.i"""- Simmend. La Capüfs. Le batyrique. jri^ La Curiofimame. Le Ponraiu Pires. Lesjes ^céJ«s\j{ (° N0'M [*yans ^s r°» Sp^rTe é£aon complet Fij  g+ Notice Indépendamment de ces pièces, il en a fait quelques autres pour la comédie Italienne les llies4eCordcrko , DonQuichoae, le défabufc, Sc quelques canevas relatifs ï ce fpec* tacle, ainfique des glans & morceaux de pieces francoifes non linies. Ce genre de littérature n'étoit pas le leul auquel M. Coypel s'appliquat. H . 1 ai dé plufieurs écrits relatifs a la pdnture ; Sc les difcours qnil faifoit a 1'académie fur cette maticre, font la plupart imprimés. U a écrit lui-même la vie de fon père, qui fe trouve dans le recueil des vies des premiers peinttes du roi. Cet eent eft: remarquable , Sc par la maniète dont il juge fon père, Sc pat la modeftie avec laquelle iVparle de lui-mème. Cette aimable modeftie , joime a des talens li variés, étoit bien propre a faire rechercher fa compagnie. Auffi voyons-nous par une immenfité de lettres qui reftent, qu'il étoit le centre, le charme Sc le lien d'une fociété délicieufe, ou 1'efprit, les talens, les connoiflances Sc la gaieté, fembloient fe difputer le droit d'en diverfiher les amufemens. Nous en ferons mieux l'éloge, enr „ommant MM. de Cayhs, de CUvure ,Freret,de des ouvrages de M. Coypel (qui a beaucoup écrit) Sc que 1'on y fera entrer toutes fes ccmédies.  »es Auteurs. 85 Mlrabeau, de Foncemagne, 1'abbé de Rothelin, de Bo guainvWe , Rigault, LargïHkre , Fagon , Hchétius, Marhaux, madame Doublet , madame le Manhand, mademoifelle Quinnut 3 6c beaucoup d'aurres, dont quelques-uns plus intiiWes fe raffembloient fouvent Sc faifoient enfemb!e a'ternadvement le fouper des fèihféAvfis, II n'étcir pas permis d'excéder ce prix". M. Coypel étoit délicat & fenfible; plein d'attenrion pour tour le monde, i! ne fe feroit pas pardönné la faute la plus légere, & cette timidite lui nuifif: elle donna a prefque tous fes ouvrages une rtinte rrop douce; mais s'il ne fut pas le premier peintre & Ie premier lictérateur de fon tems il en fut peut-être 1'homme le plus vertueux. La vertu forma fon caraótère didinétif ; elle fembioit s'être placée dans fon cceur pour en diriger tous les mouveméns : elle conduific fa plune Sc fon pinceau ; elle ammoit fa voix, & daus tout ce que fit M. CoJFel, il n'eut jamais en vue que de faire le bien de toutes les maniètes. II tachoit de rendre fa morale aimable , en la faifant palier par la voie du plaifir : fes pièces, compofées dans eet efprit, pourroienr ainfi préfenter un cours d'éducation intéreflante pour la jeunefle de Pan & Parure fi.xe. Se promenant, après une inondation avec un F iij  %S N o t i c e de fes nmis, qui nous a communiqué ce trait, ii appercut dans la plairie des Invalides , un» chjiimière abattue \ il l'eny.>ya auffi tQt s'informer de 1'érat des pauvres gens qui 1'habitoient, tk , fur fon rapport , il pril le parti de la faire tétablijr, avec des augmentarions &c des aifances plus lonfilérables; & il le fit fans qu'on ait fu d öü le bie ,f,it piovenoit, II étoit famiber avec ces forres d'aftions ; & quoiqu'il eut au plus dix mille livres de rente, il en confecroit a cec ufage deux mille qu'il mettoit a part dans un fac, Pour acquérir même plus de moyens, il engagga M. le duc d'Orléam , qui daignoit lui payer un caroffe depuis la mort de fon père, de permettre qu'il convertit ce bienfait en aiimone ; & d lobtint. Ce prince qui avoit appris de lui a deffiner & a peindre, avoit pour lui une amitié toute remplie de confiance. 11 le confidéroir &C alloit a fon égard jufqu'aux attentions. U n'aim^t pas le feu, mais quand il favoit que M. Cypel de voit venir : Faitcs bon feu, difoit il, car ie eft fii/leux. Ce même prince ayant compofé une pièee de vers, la do- na a M. Coypel, & le pria de lui en dire fon fentiment. Celui-ci, après l'avoit lue, en fit 1'élogej mais M. le duc d'Orléans lui ayant demandé s'il pouvoit la faire jmprimer & y mettre fon nora. Sur fa réponfe qui étoit pégative, il la déehira & la jeta au fe_H4  des Auteurs. 87 Une autrefois 1'appartemenr du prince écant plein de coimifans, un homme de iettres célèbre arriva, Sc s'écant placé a cóté de lui, il faifoit 1'étalage de fon efprit. M. le duc d'Odéans que cela n'amufoit point, ayant regardé autour de lui, appercut Coypel Sc lui fit figne d'approcher. Depuis quand, lui dit-il, êtes-vous ici? Vous favez que j'aime a vous voir Sc a caufer avec vous; Pourquoi napproche^-vous point? J'aime mieux , lui dit Coypel, être derrière vous, a ma place, qua cóté, fans coiféquence. Ce mot dit fans malice, fut entendu du bel efprit qui sen vengea. En rracant ces traits de la part d'un prince vcrtueux, fenfible Sc bienfaifant , nous nous rappelons avec attendriiïement celui de M. le Régent, vis-a vis cl'Jntoin*. Coypel, père de celui dont nous parions. Sachant qu'il étoit foliicité pour aller en Angleterre, Sc tenté de s'y rendre par des chagrins qu'il avoit éprouvés , il arrivé a fa porte, fans fuite, Sc dans un fiacre; il le fait demander fans fe faire connoitre , Sc le voyant étouné de rencontrer fon altefié dans un pareil equipage : Montei, lui dit-il, je veux me promener avec vous. Vous ave^ des chagrins , il faut les diffiper. Un trait pareil étoit bien capable de faire évanouir Sc les chagrins Sc les projets. Fiv  g3 N O T I O B CAZOTTE ( M. ) néa Dijon : il a été Commiiluire de la Marine ; il eft Auteur De la Patte du Chic, conté Zinzimois j Des Mille & une Fadaifes ; D'O fevationsfur la Lettre de J.-J. Roufleau ; Dj ia Guerre de l'Opéra ; De Sdène eveillé par les Nymphes ; ~Lt' Jtivie- , poëme ; De Mil'rd, impromptu, roman. Cet Auteur, qui eft vivant, a beaucoup d« gaïté, beaucoup d'imagination, & des tournures originales. 11 s'eft acquis une forte de célébmé dans un genre fur-tout qui n'a aucun rapport avec les fées, quoiqu'il tienne beaucoup au merveilleux of aux procédés de la cabale.  des Auteurs. S9 D D EB LA NES {Henri Barthelemi), de meftre-de-camp de cavalerie, ne en Auvergne, morele 1- Février i754, agé de quarante-fept ans, eft auteur De JS/craïr & Meloe, ror»an oriental, in-ii , D I X M E R I E. ( M. de la). Cet A uteur vit encore; il pafte les jours au fein de 1'amitié, en cultivant doucement les mufes fans fe mêler dans les partis & fans embrafler aucune feófce. Ses loifirs font ceux d'un honnête littérareur qui i des talens & des connoiflances; èc qui fait un ufage eftimable de tous les deux, II a coopéré a la rédaótion du Mercure, auflitót que M. Marmontel en eut cedé le brevet a M. de la Place. Il a inféré dans ce Journal, des Contes Moraux, qui n'enfrenr point dans Ie genre de ceux que M. Marmontel écrivoit, & qui ne font point dépourvus d'agrément & d'invention; 1'allégone y eft plus prodiguée 5 les mceurs y font traitées en grand, & peignent toutes les i3ations avec amant de déücatefle que de vérité. Lamorale de ces Contes eft toujours pure & inté-  9» N O T I c t reffimte. 11 a embraffé également la féerie, le roman, proprernent dit, le Conté Orïental^ dans tous les fujets il a fu intétefler. II a travaillé ï un Journal Efpagnol dont nous reerettons la difcontinuité. Ce Journal qui nous manque pouvoit établir des rapports entte nous & une nation avec laquelle les lettres n ont guères de communication. On ne nous teprochera potnt de ne pas multipliers ouvrages pénodiques, & de ne pas ponder trop loin cette kbrication; mais on doit nous accufer de mertre trop d indirférence dans la recherche des livres etrangers. On écrit de bonnes chofes aitleurs auffi bien qu'en France & pourquoi ne ferions nous pas jaloux de compofer par nos feuilles periodiques, un Catalogue unlverfel de toutes les produd-ons Futéraires de l'Europe ? L'Angleterre , 1 Allernare, 1'Efpagne & Utabe ont des lavans, des littérateurs inftruits qui s'occupent de matieres inftruclives Sc curieufes. It faut tradu.re ou du moins annoncer ces bons ouvrages. M. de la Dlxmerïe qui fait 1'Efpagnc* avoit concu le pian dont „ous venons de parler, Sc donnoit ^f*** de fupplément au Journal éuanger. II eft facheux cue ni 1'un ni Fautre n'ait point éré continue. Les poéfies de M. de la Dïxmene font faciles & iugénieufes. H auroit pu traiter des fujets d une étendue plus confidérable, Sc ne 1'a pas vouluj  des Auteur s? 51 Ie travail des Journaux lui a enlevé bien des moniens, car il a coopéré comme nous avor.s die, su Mcrcure } i 1' Avant-Coureur, a la Bibiiotluque des Romans , Sc il a rédigé le Journal Efpagnol. II a eu beaucoup de part a 1'ouvrage fur 1''Origine des Arts, par M. Goguet, Les Dialogues des morts qui ont été puMiés dans les Mercures font remplis de pmlufopbie; ces perfonnages y confervenr leuis caraétères: la morale fort du fujet fans efforr. II eft: auteur de 1'ouvrage qui a pour titre: Zes Deux Ages du geut & du génie. On peut voir dans la France Littéraire la lifte de fes Ouvrages. Parmi les Contes des Fées, nous avons djftingué Lindor Sc Delie ; Sc parmi fes Contes dans le gour. oriental , nous avons !u avec plaiiir Abbas Sc Sahry , nouvelle perfane, Sc Abdallah Sc Balfora, DREUILLET( Madame), eft née k TorIoufe en 16[6, Sc s'appeloit mademoifelle de Montlaur. Elle époufa M. Dreui 'let, prélident aux Enquêtes du Parlement de Touloufe, devint veuve après quelques années de mariage, & fe fixa k Paris. Elle y connur madame la ducheSÏè du Maine, qui voulut 1'avoir auprès de fa perfonne. Elle fut une des femmes aimables de Ia.  5>i N o t r c* e fociété de Sear.x, habita, I'été , dans Ie chareau, & a 1'hotel de Touloufe pendant 1'hiver. Elle moufur en 1750, généralemenr efUmée & regrettée. Peu de femmes ont eu une réputation d'efprit aufll continue ; c'eft fans doute a caufe de la qualité de fes próneurs , car elle n'a compofé que des vers de fociété. II eft vrai qu'elle eft auteur Du charmant conté intitulé: le Phén'ix, Qui ne connoït ce joli ouvrage! Nous nous difpenferons d'en dire davantage. DURAND (Catherine Bedacier , depuis madame Durand), vivoit au commencement dc ce fiècle , & tient une place diftinguce' parmi les femmes qui ont cultivé les lettres. Peut-être 1'adulation a-t-elle outré les éloges; car nous n'avons trouve dans fes ouvrages qu'une médiocrité foutenue, & nous ne favons point pourquoi fes courtlfanes furent fi bien accueillies. C'eft a madame Durand qu'on doit 1'invention des Proverbes Dramadques. On trouve dans le recueil de fes CEuvres, les premières pièces de ce genre qui font au nombre' de huir, parmi lefquelles il y en a deux ou trois qu'on lit avec plaifir. 11 faut donc la compter a fon tour parmi ce petit nombre d'auteurs qui ont créé des genres. Quelaue mince que foir celui qu'elle a imaginéj plufieurs écrivains n'ont pas dédaigné de  des Auteurs. *>$ •fuivre cette carrière, de rappétifler Jhalie , & Je réduire au plain pied le théatre de la nation. •Qn peut appüquer a la manie des Proverbes, ce que Piron difoit de Ia comédie dont on rafoloit dans les fociétés. Eile a Rcformé le quadrille en plus d'une maifon. OUVRAGES DE MADAME DURJND: La Comtejfe de Mortanes ; "Les Mémoires de la Cour de Charles VIII; Le Comte de Cardonne , ou la Conjïance viclo- rieufe ; Les Belles Grecques ; VHijloire de Henri, Duc des Vandales; Les Petits Soupers de l'été ; Hijloire des plus jameufes Courdfanes de la Grtce • La Vengeance contre foi - même , ou le Chat amoureux ; Des Poéjies ; Ses Comédies en projè. Elle mourut, en 1736", dans un age ttè*avancé. DUC LOS, mort fecrétaire de Ihadêmlfi fiancoife, & membre de celle des infcriptions & belles-lettres. II éroic connu aupanvaat par  94 ö T I C E les romans de la barone de Lu$, & par leS Confijjions du comte de***. A ajoa fut compofé d'après une döuzaine d'eftampes, dont les deffins & les planches étoient reftés entte les mains de M. Boucher, mort premier peintre du roi Cet artifte les ayant montrés a Duclos, & ayant paru embarrafle de 1'ufage qu'il en pourroit faire, ils fervirent de guide a Ducto qui cömpofa Acajoü. 11 eft néceffaire de^ dire a quelle occafion ces gravures avoient été faites. Le comte de Tejjin > pendant qu'il étoit miniftre de Suède en France , avoit compofé un petit ©uvrage de fociété , intitulé Jxunillane , ou l'Infante Jaune. 11 fit faire le deffin & les planches par Boucher, A peine avoit-on mis la dermère main A ce travail, que le comte fut rappelé en Suède pour y remplir la place de miniftre d'état, 2: gouverneur du prince royal de Suède , dont U s'acqmtraavechonneLir' & pendant laq ielle il eompofa, A 1'imitation de Fénélon, des lettres fur Téducation des princes qui font un cours complet de morale. II lailFa toutes les planches qui fefvoient a la première édition d'Acajoui L'épitre dédicatoire de ce roman fit du bruit; elle étoit adreftee au public , Duclos fe moquoit ouvenement & bravoit fon protedreur & fes juges. Cette hardieftb réullit, & procura A fon auteur cette réputation qu'il a conftamment  des Auteurs." 95 foutenue, d etre au defTus des préjugés les plus refpeétés Ori ifnprima eontre lui une critique lntitulée Réponfe du public a l'auteur d'Acajou. Freron en eft l'auteur. Cette critique déplut au public qui défendit Duclos, lequel bien averti par cette complaifance , du gout de ceux qui le lifoient, a continué d'être hardi Sc vrai. II a continué d'être encouragé par les applaudiffemens & même par les critiques , auxquels 2 en impofa a la fin par fa bonne conrenance. II a tenu pendant les dernières années de fa vie, le fceptre de la littérature qu'il avoit conquis. II le manioit quelquefois affez rudement; cepen* dant il a été jufqu'a fa mort, refpecté & admiré. Ayant été nommé hiftoriographe de France, il eut la noble fermeté d'imiter le garde des fceaux Morvilliers, qui avoit refufé a Charles IX d écnre 1'hiftoire de fon règne. Duclos ne voulut rien publier pour ne pas fe perdre , & pour ne pas trahir Ia vérité. — Si je ne puis parler aux contemporains , difoit il , j'apprendrai aux fils ce qu'étoient leurs pères. Je n'ai jamais penfé qu'en me chargeant d'écrire 1'hiftoire, on m'eiit pris pour 1 organe du menfonge. En tout cas on fe feroit trompé. Idéé du Conté de Jaunlllam, ou l'Infante Jaune , imprimé a Badinopolis, en 1741. L'auteur eft repréfeuté a la tête du livre ea  jé Notice robe de chambre , écrivant dans fon cabmèt entouré de magots , de génies badins, de rats de papillens & de fumée. Le héros dn conté eft le prince Percebourfe. On le voit dans la première eftampe, habillé a la francoife , fuivanr la mode Sc le coftume de 1740 . fe pomemnt en rèvant dans lallée des Idéés. Dans la feconde on le voir encore raifonnant avec la fee aux Echarpcs qui eft fortie d'une grofedle que le prince avoit cueilli. Dans la troifrème on voit deuxpetitesnaines trouvées dans un autre grofeillier, Sc qui vouloient donner des croquignoles au prince qui en eft fort embartafté. Dans la quatrième , le prince affis toujours dans la même allée, voulant maftger un abricot, en fait forti* „ne tète charmante, un peu trifte Sc penchée. Dans la cinquième Percebourfe ayant , non fanspeine, trouvé le corps de fa prmcefle, lm rend Sc y rajufte la tète Sc les mams qui M appartenoient. Dans la ftxième la fée Vicuufk marie Percebourfe avec la princefle Penfivc. Dans la feptième on voit la princefte Penfivi déja matiée, arrêtée par le géant Borgne Lz huitième repréfente la fée Luim, prenant foin d'un jeune prince encore enfant, que Ion appelle le Prince des Coudes, Sc qui parojt deftme i être 1'amant de JauniUane, ou 1'inf.mre Jaune, fille de Penfye Sc de Percebourfe. Dans la neu- vie me  ses Auteurs. 9/ vième & dernière, attendu que le titre fait la dixième , on voit que Penfivt renverfe un verre magique, ce qui lui attire des malédiétions de la part de 1'enchanteur GroJJourcils & de la fée Robïnet. On ne fait plus ce que tout cela decent , le conté fink brufqrtement, paree que I auteur retourna en Suède. Duclos mourut le z6 Mars 1774. Les ConfeJJions du Comte de * * * j Conjldérations fut Us Maurs ; Hijloire de Louis IX; Remarquesfur la Grammaire du Port Royal; Differtatïons dans les Memoires de l'Académie des Belles- Lettres. H parut en i759 , un roman in-1±, zy^9at titre : Les Têtes-Folies, qui eft une imiuüoa du roman d'Acajou: & il fatu convenir que c'eft une ingénieufe bagatelle. II a eu beaucoup de part k 1'édition de i76i, du Diclionnaire de l'Académie Francoife. II avoit commencé une feite k 1'hiftoire de cette compagnie, que M. d'Alembert a continuée en pubhant les éloges des académiciens morts. D'Alembert étoit 1'écrivain qui pouvoit remplacer entièrement Duclos. L'un & lautre aimoienc la vénté , & avoient le courage de la préfenter , & de la rendre tont k la fois inftrudive & piTome XXXm. q  9S Notice ouante, fans jamais la faire dégénérer en feite ^enfecafme. Qne les auteurs qu. aocont i prononcerfur les reputarions, prennc.it 2?««A» & d'Aknibert pour modèles. DUCLCS (/e e*wa«« DE) trui vit peUt" etre eikore , .ft auteur d'un ouvrage inntule , Lrin^C«r Mtt** «#së*^«^**»' z vol. w 11 1756. Ceft une irrikation des «?i^«»!f & des <& Favwrj. DEROIS. II eft auteur DilLouPGalcuxScc\Q la Jeune FeUle , fit 11, 1744. Ces deux romans furent attribués a madame ^r^v,,quls'endcfendit&nWpst.rti £tf nous devons teer Vd ne nous apom &é podlble de conifeer 1'exiftence de ce mon!,.ur ^ Rok, dont U n'eft fakmentmnqua.a tete de fon livre. On crok que le comte de Cayhs s'eftcachéfouscenom. n0f ( Alexandre), eft Anglois 5 U a pafté - j c '« ïndes. Pendant qu d  des Auteurs* ^ dabovd pour fon ufage & pour fe familiarifer avec le perfan j enfuite il rendit publique fa tradudion. On peut lui reprocher de s'êrre erop attaché a rendre le tour méraphorique des perfans. Le tradudeur francois des Contes perfans , a conférvé les mêmes défauts. Ces contes patoiffent une imitation des Mille & une Nuits. M. Dow eft auteur de VHïfloire de l'Indojtan t i vol. «2-4°., qui a été traduite en francois en J76 8. Ceft un Ouvrage eftimable a tous égards. Nous croyons que TAuteur vit encore. G ij  N o T I c 1 F FAGN AN {Madame), elle eft mais elle vit dans la retraite, & na conferve au eUegardelefdencedepuisunetrentatnedannees, fes Ouvrages font: Kanor, Contes des Mes, in-ii,i1S°> Minet-Bleu&LouVette,in-ii,^ Le Miroir des Princejfes onentales , «s-xi. «751 Cerornanfutdédiéalamarquife^P^y , nui ototéaeoit 1'Auteur avec une forte d at- ? ! O ne peut pas dire que les ouvrages 1 font des chefs-dWres, % en leslifanr,onneft point 2 réunidou del'enjoümentaia vtvacue,^ elle favoit wmir fes éccits; un colons doux Sc isf« r^ULT^FAÜQUES {Majmotfellc) : eUeeft née dans ie Con.tat Venaiffin, fe 6c re-  bes Auteurs. $01 ligieufe aux Urfulines d'Avignon, fe pourvut a Rome, en caiTarion de fes vceux, & vint setablir a Paris, oü elle compofa les romans dont nous donnons la lifte : Le Triomphe de VAmitié, in-u, 1750 : c'eft un ouvrage ingénieux, rempli de traits brillans d'efprit, mais oü on trouve aufli peu d'ordre que de vraifemblance ; Abajjaï, Conté oriental, in-i x, 17 j2, : ce roman eft écrit avec chaleur & avec efpric; les fituations font neuves, les réflexions font fines, mais trop fréquentes. Les Contes du Serrail> «-12, 17 5 $ • Durboulour, Conté de Fées ; Les Préjugés trop bravés & trop fuivis : Fa^lillat; Les Mémoires de Mlle Doran étincellent d'efprit, font pleins de fituations piq ;antes, & on y trouve des caractères prononcés ; Les Zelindiens : Fréderic le Grand au temple de timmortalitè; La dernière Guerre des bétes pour fervir a ïhijloire du dix-huitièmefitcle. On croit MUe Fauques retirée en Anglererre, oü peut-être elle vit encore. Nous.aurions mal rempli notre tache, fi non? en reftions-lA. Mlle Fauques eft, parmi les femmes G iij  101 Notice connucs dans la littérature, celle qui a fait preuve de plus d'efprit & de talent. La ledure de fes romans en larffe une agréable certitude Comme nous n'avons point inféré dans notre Colleüwn , le conté cY AbajTai, nous invitons le Public a en faire la leóture ! il en fera fatisfait. Le fujet de ce conté eft tiré de la Bijfóóifièque Oriëntale de cYHerbelot. L'original eft un roman arabe. Un verra ce que M»e Fauques a fu y ajouter. Un peut lire également les autre Contes de Fees , que nous regrettons de n avoit pas pu recueiihr. Les bomes que nous nous fommes données pour ne pas multiplier les volumes , en font la caufe unique MUe Fauques verfifioit avec hciiite, öc fa poëfie avoit des graces Sc de la couleur Les Poetes contemporains 1'on: célcbrée, & M. ƒ«bader lui a adreffé de trèsdongues Epures dans lefquelles il renÜ, fans fadeur, juftice au talent poërique de Mlle Fauques. PÉNELON {Francois de Saugnac de la MoxrE FiNEtoN) , Ptécepteur des Enfans de France, Sc depuis archevèque, duc deOambrai, ptince du Saint Empire, étoit né au chateau de iénelonenQuerci,leóAomi65t,dunemai- fon ancienne. II compofa ces Fables & ces Contes pour l «du* canon du duc de Bourgogne.  bes Auteurs. ioj II a fait un petic Traité fur la Tragédie & fur la Comédie. Le préfent le plus utile que les Mufes aient fair aux hommes, (dir 1'abbé Terrajfon) c'eft le Télémaque ; car fi le bonheur du genre humain pouvoic naitre d'un Poéme, il naitroir de celui-la. Ce fut en 169S , que Fénelon commenca a faire imprimer le Télémaque, fous ce titre : Suite du quatrième livre de TOdyffëe. 11 n'y en eut alors que deux cent pages d'imprimées; le gouvernement fit arrèter 1'impreflion. Le peu qai en avoit paru, & les copies manufciires de ce qui reftoit a imprimer , fe débitèrent pendant quelque tems. Il fut imprimé 1'année fuivante a la Haie, en quatte petits volumes. L'édition qui fut enfin entière, eft de 1701 , & fut düe aux foins de M. de Saint- Hemy, auteur de Mémoires, pourfervir al'Hifloire de France. En 1717 parut en France l'édition approuvée de Télémaque. Louis XIF~ ne vivoit pi'is, le Régent qu'on comparoit a Mentor, n'étoit pas faché de mettre le Télémaque dans les mains de Louis XV. Le Télémaque fut critiqué par un abbé Faidit, jadis père de 1'Oratoire , & par un nommé LcfconveL Les onze premières Fables, font des récits d'aventuies feintcs, dont 1'allégorie c.ehe avec are les préceptes de morale que Fénelon vouloit faire goüter a fon difciple. Un ouvrage bien G 'n ■  ic-4 Notice philofophiquement écrit, feroit celui dans lequel l'auteur s'oubliant entièreraent, & ne fanant aucune réflexion, en feroit faire beaucoup a fon lecteur. C'eft la manière de Fénelon. 11 raconte... 8c on refléchit pour lui. Les Contes de Fées font des apologues, comme ceux cXEfope 8c de notre la Fontaine ; il n'y manque que la verfification J mais Fénelon a trouvé le fecret de fe paffer de Poëfie , Sc de donner un Poéme en profe. 11 a cepéndant fait des Chanfons, oü la penfée eft embellie par une poëfie facile & douce. Quand on nous a accufe de n'avoir point d'idiles en francois, de n'avoir jamais fu peindre la fimplicité des campagnes, on avoit oublié l'auteur du Lélémaque. Combien d'idiles ne trouveroit-on pas dans fon ouvrage! Tous les tons, toutes les couleurs y font confondus, capprochés-, un tableau fuccède ï 1 aittre; par tout le fentiment ou la morale, lont cachcs fous les plus riantes defcriptions. Quei aureur a fu autant répandre de charmes fur les ptpduótions! fORCE ( Charlotte-Rofe de la ) fille de Francois de Caumont, marquis de Cafiel-Moron , maréchal de camp, naquit en Guienne, dans le chiteau de Cafenove,, prés de Bazas , vers 1 an ,650, & eft morte a Paris, en t>»*> de foixar.te-quatorzs ans,  des Auteurs. i©c Marguerite de Ficof, fa mère, étoit dame de Gifenove, & fille du baron de Caflelnau. II paroit qn'elle n'étoit pas auffi bien partagée des dons de Ia fortune, que de ceux de la naiflance & de 1'efprit. Sa vie n'offre rien d'intéreflant. Nous avons d'elle VHijloire de Marguerite de Valois ; U Roman de Gufiave Vafa, oü k fiótion la plus ingénieufe efl jointe a 1'hiftoire la plus intc- re(Tante ; \JHijloire fecrète de Bourgogne ; Mémoire kijlorique, ou Anecdote galante & fecrète de la Duchejfe de Bar, fceur de Heijri IV J Une Épure d Madame de Maintenon; Et les Contes de Fées, Elle avoit épotifé en i6H7 , Charles de Brion ; mais le mariage fut déclaré nul dix jours après. Cette notice eft de M. Ie M. de P ...., & noUs n'avons rien trouvé a y ajouter. FONTANELLE(M. Jean Gaspard de ), né a Grenoble, le 29 Oétobre 1757. II eft auteur des Ouvrages fuivans : Les Jv enture s Philofophiques , in-iz, 17Ü5 ; Les Métamorphofes d'Ovide, nouvelle traduclion;  io6 Notice Les Effets des Paffwns , trois Parties in - ü , EJJ'ai fur le Feu facré & fur les Vefales , m-% •, 1768 ; Pierre -le- Grand, Tragédie; Lorédan , Tragéd-ie , en quatre actes; Ericie ou la Veftale, Tragédie en quatre actes; Les Anecdotes Africaines. II a rédigé les Gaines Littéraire & Politique de Deux-Por.ts , depuis leur établiffement en I77o jufquau premier Juin 1776. Ü aété chargé de la partie politique dn Journ.il de M. Panckoucke , de?uh le premier Juin 177^ i la «union de ce JSbira*/ au Afcrcare, M. de Fontanelle continua fon travail, & eft, depuis deux ans, rédaóteur de la Ga\ette de France. II a compofé les Souhaits , conté arr.be. M. de Fontanelle eft un Üttérateut modefte qui n'a jamais cherché des proueurs ni le bruit. 11 a écrit dans fon cabinet fil a livre fes ouvrages au Public, fans les fuivre, fans les recommandet: ll a joui de fes fuccès. Ses Tragédies font regretter qu'il ne fe föit pas entiérement adonné au théatre. 11 avoit toutes les qualités qui y font réuffir. La Tragédie de Lorédan eft dans le grand genre; celle cYÉricu eftpleine de philofophie & d'énergie. Ses autres produótions font piitement éemes.  des Auteurs. 107 Tl pofsède le talent plus rare qu'on ne penfe de préfenter avec intérêt les nouvelles politiques, SC de procurer des leóteurs a cette clafle de Journaux. Tous fes jugemens fur las ouvrages de littérature font fains & fages, il n'afflige perfonne, & ne témoigne que 1'amour de la perfection. II feroit a fouhaiter que les prétendus juges des travaux littéraires fuflent doués de !a modeftie, de la fagefie, Sc de la vertu de M. de Fontanelle. FROMAGET. Cet Auteut, qui ne s'eft point élevé foit en profe , foir en vers , audefTus de la médiocrité, eft: mort en 1750. II eft auteur ~DeKara Mufiapha, conté oriental, in-i 1 en 1745; De Mirima , Impératrice du Japon , in - 11 , !745 > De plufieurs Pièces de Théatre. 11 compofa en fociéré avec le Sage , YÉpreuve dangereufe, ou le Pot-au-Noir, en un acte, en 1740. II fit quelques Comédies cn commun avec Panard. Ses Comédies annoncent de la gaité, un efprit naturel 5c agréable.  io8 Notice G CjALAND étoit né en 1646, a Rollo en Picardie ; quelques-uns prétendent qu'il naquit a Noyon. II fut membre de 1'académie des infcriptions & belles-lettres, lecteur du roi & profefTeur de langue arabe , au collége royal. Il mourut en Février 1715, généralement eftimé par fes mceurs & par fon érudition. Les Mille & une Nuits qu'il a traduites de 1'arabe, font un recueil dans le goüt de nos Contes de Fées. Les éditeurs qui ont publié en 1717 le dernier volume, n'on fait qu'y ajouter une conclufion. II a ttaduit l'Orientaliana, qui eft un recueil de maximes & bons mots des orientaux, appuyés d'exemples qu'il a traduits du Divan , oü fe retrouvent les maximes orientales. Il afait la préface de la Bibliothèque oriëntale, par d'Herbelot. II a traduit les Fables de Bidpaï , qui ont été d'abord écrites en indien, traduites enfuite en arabe, & confondues avec celles de Lockman^ reduites aptès en turc , fous le titre de Hou Mayoum Ramé, ou Livre Impérial. C'eft dans ce dernier état que M. Galland entreprit de les mettre en francais. Mais de quatorze livres que  des Auteurs. ro9 contient 1'ouvrage turc, quatre feulemem ont été traduits par lui, & publiés en 1714, neuf ans après fa mort. M. Cardonne vient d'achever cette tradudtion (dit M. le marquis de P ) 11 feroit inutile de diflimuler qu'on retröuve ces Fables parmi celles cYEfope & de la Fontaïne. Pour cela il fuffit de favoir que Plancide moine gtec du bas empire , eft le premier qui anpnbhé les Fables d'Efope, qu'il fuppofe avoir éte Phrygien, vivant du tems de Créfus, roi de Lydie. L'on croit quE/bpe eft le même que Lokman, fabulifte arabe, auquel les auteurs mahometans attribuent prefque toutes les Fables que Plancide a publiées fous le nom d'E/ope. En poudant encore plus loin ces recherches, o» trouve que Lokman eft le même que Bidpa'ï cmi compofa les Fables pour un roi nomjné Dabchelin, lequel en fut fi content, qu'il fit du Bracmane fon premier miniftre, & qu'il conferva fes Fables comme des maximes précieufes qu'il tranfmic i fes fuccefleurs. Ceux - ci firent très-maUpropos un fecret de ces maximes, fi bien qüe Cojroïs premier , furnommé Noufchirvan ]e plus grand d'entre les rois de Petfe, adorateur du feu, en ayant entendu parler, eut bien de la peine a les recouvrer pour en faire la réde de fa conduite. II parvint enfin a connoitre ces maximes & les pratiqua. Ses fuccelTeurs les  iio Notice abandonnéren: 5 & fu*ent fóumis par les caïires. Deux de ceux-ci les firenc traduire de 1'ancien perfan, en arabe, ce furenr Almaar &c Mamoud auxquels la connoiftance & la pratique de ces maximes, portèrent encore bonbeur. Enfin ces bolles & utiles Fables fi rechercbées en Arabte &C aux Indes , n'éroienr poinr encore connues en Turqme. AH Tche-Leh-Ben-SaVebe, Mollak tresbabiie qrd proffit la théologie & le dtoit a Andrinople, les traduifit, & les dédia a Sokman II, qui accueiUit fon ouvrage , & eleva le tradudeur ï la dignité de Cadi de Brou\]e. Ce livre, depuis 1540 , eft regardé par les Savans de 1'Empire Ottoman, comme le medèle de la plus parfaite éloquence dont la langue turque puifïeêtre fufceptible. GUEU LETTE (Thomas-Simon) , avocat en Parlement, & fubftitut du procureur du roi auCbatele:; un grand fond de gaïté , une facilité ptódigieufe, beaucoup d'imagmation & ae fecoïïdifé aiTurèrent a M. Gaeuletuune réputanon parmi les amateurs du genre oriental. II a traduit avec exaditude & avec goüt J il a imité avec une vérité étonnante le ton, les fables , les allégones desOrientaux. H a piodigué les images h des tableaux nouveaux fuccèdenr fans interruption a ceux qu'on a déji lus : on eft tranfporté fur le  des Auteurs. tif Üeu de Ia fcène ; qu'on reüfe les Sultanes de Gu^arate, les Aventures du Mandarin Fum-houm, les Mille & un Quart - d'Heure, & on fera convamcu de Ia juftefie de nos obfervations. II na point un merveilleux auffi brillant que le comte Bamikon qu'il a voulu imiter' mais placé i uii ton plus bas, réduit a ce mode qu'il s'étoit fait d lui-même , il va de pair avec l'auteur des Quatre Facardins. II paroit fortir du domaine de 1'imagination, & pofer fa des bafes connues tanJ;s qn Hamilton tient toujours une marche factice, & entaffie bifarreries fur prodiges. M. GW lette eft plus prés de nous, plus prés des mceurs & d'un peuple qu'il femble peindre; il dit ce qae nous fommes tentés de croire ; il ajoute des graces a un genre eftimé, & ne cherche point , comme Hamilton, d'en créer un qui ne reflembk a rien. II a eu des imitateurs : Hamilton eft refté feul. Ce n'eft peut-être pas Ia plus miuce portion de la globe de ce dernier. Celui qui n'a ni concurrens, ni rivaux dans ce genre, eft, i coup sur, un homme de génie. M. de Voltaire s'eft placé un moment dans la claffie des imitateurs de M. GueuLtte. Le roman de Zadig eft calqué fur les Soirees Bretoneu Nous ailons peut-être trop bin, car fe fervir d'un cadre déja ufé, pour y placer au lieu d'une eftampeantique, un tableau frais & gtacieux, ce  ll% Notice n'eft ni plagier, ni copier. PWMènn on fe ^ pèteroujoursenmovale.Leior.desdern1eisJceft Inêtre pas venus les premiers. Montagn* a» fans doace , écrit tout ce ^ ^enarguesj penfé , le duc de la Rochefoucault avoit traite 1 on vrage de la Faufeté des vertus humaïnes quand Efprit le compofa t mais chacun aapporte fa ma- P<,fo.ire, mais i! fa» «ai que ™. > laiffi des deffins, ion. un grand ma.tre a ure ,„« envogue. " f"ƒ k r*»s f»v=.i des ptas biillanres foeietes. Les je,,nes an.enrs.quUroienr.onioars .reuver a dans le genre devenu ccleb.e fa s-èmbarraflit s'il, onr ou ncn. pas les «a.ens p[;Fes, .mimlenr M. « & M. ML*» & défendi. pas plus de ce penctac, queALv^nWufnr»er»u.der1rdc,..e lefarfaUcheval-er^spubfa-ffi^ LedesAfi'fe^n'^rs.iesC,,,^»- L-„. Toures les Wuar.ons qu.  ü E S A U T E ü R S. tlJ «teint » de 1'origina!, „e doivenr point «re rcgardee, comme des productions médtocres. LeromMdefc)qu.onacomF,aare/, ™q« poat ne pas valoir autanr q„e pQ n1o,al3b1enecnt,&parédeIaplusdouce&de la plus aimable fiction. I e Théatre de la foire, qui cherchoit a étayer fa rcPutatmn naifTante, montra a fes auteurJeS -ueds ^ Conus OrUntaux.FufelUrtle' Dorneval les ouvrirent, & y prireiu ^ ^ f"jets.M ^fecopialui-même3&donna des comed.es i vaudeville au Théatre. II étoit P«te plas quun autre vers ce genre fccüe & leger ; car d eton emêmement gai; & avec moins _donglnahtedanSleton&danslemotque^ d en avo,t autant que lui dans Ie caractère II J mo1tlatable5tenoitmaifon,&recevoitvoIonti;s fesamls&lesgens de lettres. II avoit une mal fon de campagne a Choifyde-Roi, dans laouefle d avoudreifeun théatre fur lequeliltépétolfe P-es celles de * Erun, & de fes ami, MJ dame Ze«d„W y jouott, M. Gueukae préfi. dou la troupe. Ceft chez lui qutm Abhé fe' . fenta pour ,ouer la comédie : il fLU a é ? . 1-propofadifférens roles, dont pas u[ nl Z voit il repondit qu'il favoit forc bien ' 7e/ne XXXFII. H  u.U> tai»°me Jever „„ prove.be : Af. I AL°~'{ J mel.ve;Ueu* poer k^»"0ne,teVe^ l „c ll„ufur,„»r cknS 1S role d= f »< . • -J metto,t fonefte. lUvalaun ,ourA>/>""? M f quapres a." c .r.nJe oaite lui „ou; „'afirurons fut fübtóraI d» L roi au Ctótelet; U mourut doyen procureur da tot au ^ ae ^ST^iU ^ *** ? 1 es amis. 11 avoit d'ailleuts des qoahtc. exceuente • Ala mo ^ ^ ? & a fes hénnets tout le bie q de dontildevoitjouu en propriete pa mariage. 11 eft auteur I.es Sultanes de Gu^arate;  des Auteurs; ftj Les Soirees Bretonnes ; Les Aventures merveilleufes du Mandarin Fum-oh- Ham, conté Chinois, i vol. in-ix • Des Memoires de Mademoifelle de Bontems. II a donné plufieurs Pièces au Théatre Italië* Les Comédiens par hafard, en trois adres & en profe; Arlequin Pluton ; Le Tréfor fuppofé; L'Amour - Précepteur ; L'Horofcope Accompli ; Cette dernière Pièce a eu beaucoup de fuccès i lAuteur^utabandonnoittouioursfapartaux Comédiens, la donna a MUe Süvla II a préfidé a l'édition de VBifiJe & chron} comte de Nevers;ila continué Ia traducrionde; Contes & Fables de Bidpal & de Lcckman \ il a donne 1 edition des (Suvres de Rabelais. GRAFFIGNY(W^d>Issembourg D APPO NCOURT D E *** * ) f^r-fiU j' ! , , 1 > et01t riile d un bomn.e delaplus hattte qualité qui defcendoit de Idluftre matfon d'Iflembourg. II s'étcit dif- tmgue au fervice de France, fous Ie commande- Hij  Notice TLTre & la majorité de fa Compagnie de f^Xy,cl-b=llanduDuc. Jamais maS fi rnalheureu* pour l'époufe Maƒ ZLv fur réduite, par les violences dame de GraMny» ^ ^ï1?^ iknèraeNaiiCy.CefuC Mademoifelle^O J , ^ ?° i s ceAs fata pon.donnerle 'V'T TL Madame d< 0^ nannonco* *" fo1 Son mainden éjoit férie»*.* P1S I fond de mélancolie larendou prefqne UngIM! ., „'eft poin. avec de faxeds dehors taciturne : ce n en y ^rrWient en fa faveur. , j fa fante deltinée. Nous avons patio aécda de fa fnmK-foas ,a dé. aePaffocut,o»d g^sdefp ^ ^ "^vt^onlamiaeomnbndon.  des Auteurs. 117 ileux de fa morale déplut a quelques Meffleurs , •qui ne dilTimulèrent pas qu'ils ne goütoient point fes prémices. Ce dédain la piqua, & c'eft a Pamour-propre bletfc qu'on dut les Lettres Péruviennes. Ainfi ces MeJJleurs, dont le Recueil qui parut en 1745 > n'eut que quelques années de cclébrité, nous om procuré un Ouvrage intéreflant. La charmante comédie de Cenie fuivit bientot les Lettres Péruviennes, & eut le plus grand fuccès. La comédie intitulée : la Fille d'Ariftide, ne réufïit pas. L'Auteur voulut tenter les hafards de I'impreffion ; & on allure qu'elle en corrigea la dernière épreuve, le joUr même de fa mort. Nous avons perdu , il j trois années, un Poëte aimable ( M. Dorat ) qui eut cette conformité avec Madame ie Graffigny. II corrigeoit une. épreuve , 6V il expiroit. On a encore d'elle un aéle de Féerie ( Agor ) •qui n'a été joué que dans fes appartemens. Son Théatre Moral, particuliérement deftinéd la familie impériale, n'a été repréfenté qua Vienne, & on ne Pa point connu en France. Elle a eu un commerce de lettres, très-réglé avec Leurs Majeftés impériales & avec le prince Charles & la princelTe Charlote deLorraine.Tant qu'elle avécu, elle n'a celFé de recevoir de leurs Majeftcs des témoignages conftans, d'eftime & d actachement. Nous ne dirons point qu'elle a joul de quelque H iij  Ilg Notice bonheur, car la tradition & rout ce qui nous a été laifté par la voie de 1'impreffion , nous allure qu'elle a toujours eu des peines ou pubhques ou fecrètes. Son amöur- propte, ou plutot fa fennbllité, étoit ingénieufe a lui en créer. La cntique a plus légère lui caufoit un véritable chagnn. Lüe étoit femme, elle n'étoit pas heureufe. On connoiflbit route fa fufceptibdité, Sc il fe trouvmt des Écrivaihs aftez bas Sc aftez méchans pour oier lableffer.Onla déchiroit: le poëre Roi, quiavoit des talens diftingués , Sc qui pouvon fe faire remarquer par d'autres moyens que la fatyre, ne rougit pas de dévouer une femme i 1'épigramn^ Ileutvodluen effacer le fouvenir, car elle lui incoutacher.Nous inliftoqs fur le chatiment, pour timider , s'il eft poffible, ceux qui pofsedent 1'odieufe facilité de déchirer des pecfonnes eftimables. Un Êcrivain, qui a trop écrit dans le genre fatyrique, a préiendu qu'elle n'eft nas 1 auteur des Lettres Péruviennes Sc de Cenie. Mais fon aftertion n'eft appuyée d'aucune preuve, Sc fe trouve démentie par rous les Contemporains ; d'ailleurs Zilia Sc Cenie ( pour nous fervir des expreflions des Auteurs du Dtclionnaire UforZue) font deux fceurs qui fe reftemblent trop , pour n'avoir pas été enfantées par la même mere, Nous favons qu'on a toujours contefté aux femmes la plupart de leurs Ouvrages : il femble quon.  des Auteurs. veut leur dénier le don de penfer &• le talent d'écrire. S'il y avoit quelque moyen pour dé* truire eet injofte préjugé, neus propoferions Jri Colleclion des Fées, qui prouve, par la quantité de femmes qui 1'ont enrichie de leurs produc-» tions, que le fexe fait ccrire avec agrément, & fe fervir de toutes les graces de fon imagination. Madame de Grafflgny mouruta Paris en 1758, rgée de foixante-quatre ans; elle légua fa bibliotheque a fen ami, M. Guimond de la Toucl* avantageufement connu dans la républiqne des lettres par fa Tragédie cYIphigéme en Tauride ; il ne jouit pas longtems de ce legs. Elle laiffa a «nautreami, homme de lettres, tous fes papiers avec la liberté d'en difpofer a fon gré, elle faifoit dit, l'auteur de Y hijloire littéraire des femmes-, le bienqu'elle pouvoit faire. Elle étoir n-.odefto, parloit rarement d'elle. Ceft dans fes malheurs qu'elle a puifé cette douce & fublime philofophie dn. cceur qui fera paffer fes ouvrages a la poftérité. Les Lettres Péruv/enes relTemblent pour la forme aux Lettres Perfmes, & fe font fuivies der prés. II étoit beau fans doute d'imiter Montefquieu , & glorieux de réufïlr. De toutes les imU tations, celle de Madame de Graffgny eft fa.' plus eftimable. On retrouve dans fon romah^ une critique fine de nos mceurs & de nos vkes ,> les amours de Zilia ont des momens de repos 9 H iv  li© Notice pendant lefquels 1'héroïne obferve avec adreffe Sc nous peint d'une manière trés-piquante. Le ftyle eft oriental, fleuri, rempli de grace & de douceur. Les Italiens s'enfontemparés pour le traduire dans leur langue fi douce Sc fi harmonieufe, ils 1'ont trouve analogue au génie de leur nation , & 1'ont réimprimé plufieurs fois.Le premierhvre qu'un maitre de langue italien mette dans les mains d'un élève francois qui veut apprendre la langue Italienne, c'eft le roman des Lettres Féruvienes. L'örgüeil national croit ne rien perdre en nous donnantunouvrageoriginairement francois. Nous nous difpenferons d'analyfer ce roman qui eft fi univerfe'ileraent conuu, Sc nous ïnviterons ceux qui voudroient avoir une notion fuffifante des mceurs, des coutumes Sc de la religion des Péruviens, a lire 1'introduótion hiftorique, qui annonce le roman, Sc ouvre pour ainfi dire une fcène intéreflante. G U 1S (Pïerre-Auguflin ), fecretaire du roi, né a Marfeille. Son Foyage Littéraire de la Grèce qui, dans 1'efpace de dix années, a eu trois éditions , jouit d'un fuccès mérité • on y retrouve 1'amateur de 1'antiquicé, le connoifteur des beaux-arts, 1'ami des mufes, Sc 1'imagination riante d'un poëte que le fol & le cud de la Grèce ont exalté. 11 peint  des Auteurs. i21 avec déUcatefle les mceurs, les coftumes & toutes les attitudes de ce peuple trop dégénéré. On a un recueil de Poefies & ^'Ouvrages dramatiques du même Auteur. La Baguette Myfténcufe, conté, in-1 z , , ?. g eft de lui, quoiqu'on 1'ait attribuée i un autre. '  I1S Notice H Hamilton (éto'xt de rancienne maifon de ce oom , en Éeofle. II naouit en Wande. 11 eut pont père le chevalier Georges Hamilton, petit-fils du duc i'Hamilton qni fur auffi duc de ChatclUrault en France Sa raère étoit Madame Marie Burlet, feut du duc A'Ormond, vice - roi d'Irlande, * grand - maitre de la maifon de Charles I". ■- Dans les tévolutions qui arrivèrent du tems * Grommel, ds fuivirent le roi Charles II, Sc le duc XYorck, fon frère, qui pafsèrent en France lis y amenèrent leur familie. Antoine ne farfoi.: a. peine que de naitre. Lorique le Roi fut c tablv fur le trone , d ramena en Angleterre les plaifirs & la magnificence. La curiofité y attira le comte * *JU ii? vit Madempifelle d'Wto», il Faima,en futaimé, &l'époufa:voia-de quelle maniète. Le comte de Grarrunont , apres avoit donné fa parole d'époufer fa maitreffie partit de Londres trop précipitamment, pour ne L Elle avoit deux frères , a qui 1. -au at foibleffe, lorfque le Comte fut ptfU. Tous deux  des Auteurs. 123 animés par le doublé motif du fang & de 1'honneur, volèrent fur les pas du parjure. L'ayant re-, joint a Douvres, ils lui demandèrent d'un ton fier 8c goguenard , s'il n'avoir rien oubüé a Londres. Vous me pardonnerez , Medieurs , leur dit-il, j'ai oublié d'époufer Mademoifelle votre fceur, & je retourne fur mes pas pour réparer eet oubli. Hamilton fit plufieurs voyages en France, pour y voir fa fceur; il y paffa même la plus grande partie de fa vie,paree qu'il étoit catholique, & que c'étoit un titre d'exclufion a tous les emplois en Angleterre. Le roi Jacques étant monté fur le trone, il lui donna un régiment d'infanterie en Irlande , Sc le gouvernement de Limmerick. Ce Monarque s'étant réfugié en France , Hamilton y fuivit la familie des Stuarts. C'eft alors qu'il compofa fes ouvrages quiontétérecueillis en fept volumes. Les Mémoires de Grammont font un badinage charmant qui a tout 1'agrément du roman , Sc le mérite de 1'hiftoire. La manière de raconter les événemens , eft fi ingénieufe Sc fi plaifante , qu'elle lui eft reftée en toute propriété : aucun Ecrivain n'en a hérité. Perfonne n'a mieux peint que lui, la cour galante de Charles II; chaque démarche ( dit M. de P ) du chevalier de Grammont, eft un trait de caracFère ; chacune de  ïi4 Notice fes réponfes eft une faillie, ou une fanglanre épigramme. Le Bélier eft un des contes qu'on entend le moins, fi on n'a une clef. Ce petit ouvrage fut fait dans la mafure de la comtefle de Grammont, fceur d'Hamilton, qui étoit appeléele Moulineau , & qui fut enfuite nommée Ponthalie. C'eft fur cette éthymologie qu'Hamilton compofa le Bélier. II y a mille petits faits déguifés dans eet ouvrage, qu'il faut démafquer. Les Quatre Facardins réuniflent a 1'imaginaticn la plus folie & la plus riante, des détails toujours piquans, toujours nouveau*, & 1'intrigue pofe fur cette charpente , moitié de chevalerie, moitié de féerie, qui donne un caraftère attachant a ces fortes d'ouvrages allégoriques. On eft étonné qu'un Étranger ait pu fi bien manier la langue francoife, & avoir, dans fes compofitions , le ton vif, léger & gracieux de la Nation chez laquelle il écrivoit. Le comte & Hamilton mourut a Sair.t - Gtrmain-en-Laye, le zi Avr.1 17*0, lg£ dWion foixante-quatorze ans 11 étoit, dit-on, trés fVrieux dans la fociété, & il ne pouvoit pas 1 cadans fes écrits. Quelque fujet qo*il traite ( dir lA.de P ), ü le toujours ducoic plaï' fant, & paroit aimer a le préfenter fous cette forme. Ii ne mourut pas dans 1'opulence. Qaélque  des Auteurs. tti fortune qu'on lui eut procurée, il n'auroit pas manqué de la difliper. D'ailleurs il n'avoit pas fu plaire i la cour du Regent; &, i cetre époque, Hamilton étoit ce qu'on appelle vieille cour. On trouve dans Ia colleótion de fes oeuvre» despocfies facilement verfifiées. Nous nepouvons diflimüler que le jugement rendu contre eet Auteur par les Édireurs du Biclionnaire Hijiorique, nous a un peu étonné. Sa rigueur eft peu motivée \ & Hamilton méritoit plus de juftice. L'abbé des Font ünes n'a pas toujours été un guide sür pour les cruiques. C'étoit 1'homme le moins propre i fensir & d deviner les graces du comte Hamilton, de 1'ami, de lelève, du compagnon de SaintEvremont. HAUTCfiAMP (5^7^-Marmont du), né a Orléans, ancien fermier des domaines du' roi. P-ketima, Mi^irida, Hiftoire oriëntale ; Hijloire du Syflême des Finances ; Hijloire du Vifa ; Rupia, Conté. HERBELOT (Barthelemi), né a Paris ; 'e 14 Decembre i6iS.,f mourut le 8 Décembre II eut i peiue fini fes humanités, qu'il fe  tz6 Notice livra tout entier a 1'étude des langues orientalesi Après avoir vaincu les difiicultés infèparables de ce travail, il épuifa toutes les redources que Paris pouvoit lui offrir, 6c fe détermina enfuite a voyager. L'Italie, par fa proxirnité & par fes relations avec les Orientaux, lui parut le pays le plus propre a perfedionner fes connoiffances, & a lui en procurer de nouvelles, par le commeree qu'd pourroit avoir avec les Arméniens qui y viennent en foule. Pendant fon féjour a Rome, il fut recherché par les Savans & par les Prélats les plus illuftres. De retour en France, le furintendant Fouquet fe Fattacha, &c lui fit une penfion de 1500 livres. Quelques années après, le roi le nomma fecretaire & interprète pour les langues orientales. II demanda alors & obtint la permiffion de faire un nouveau voyage en Italië. Étant a Livourne pendant que le Grand Duc de Tofcane y étoit, ce Prince , qui aimoit les fciences , & protégeoit les gens de lettres, eut plufieurs entretiens avec lui, & en fut fi fatisfait, qu'il lui fit promeme de palFer quelques tems a fa cour. D'Herbelot, flatté des marqués de bonté & d'eftime d'un Prince audi éclairé , s'emprefla de fe -rendre a Ilorence: il arriva le z Juillet \666. Le Grand Duc avoit donné ordre a fon Secretaire d'État de  des Auteurs. hj ierecevoir,&dele conduire dans u„e maifon magn.fiquemenc meublée qui étoit deftinée pour ^logement. Pendant fon féjour d Florence, d^eur une table fervie par les Officier duPnnce,&uncarro(reaveclaHvréedeS.As U Grand Duc ne horna pas fa générofité d ces egards 11 voulat lui donneruntémo.We en coreplus diftingué de fon eftime. Une bibhothèque fameufe qui contenoit une fioule de manufa-KsonentauxtutexpoféeenventedFIorence:Ie ^^pm4^a»«aminePces ^ cuts de mettrea part les meilleurs, & den fixer dontS. A. S I avoit chargé : fon choix fut dpeine w.royiacheterIejn; crus , & lui en fit préfent. ColUn ayant été iaftruif du pro/ec da Duc de retenird^W3écrivitd cedernier de revemrenFrance^lutmarquaquellRoTrÏ compenferoit fes talens. J>>Herielot ^ lordrequ Kwt recu,auCWZV, qui e ^-afeféparerdelmquWclepl^ ne fut pas pfctöt arrivé , p^ qud recut ord;e d aller d Ia cour. Louis X r sentretint plufieurs fois ave* lui acc^ unepenfiondei5ooliv. ld3 FiXédPariSjils,°CC«P-^sdmetcrcenordre  iz8 Notice les matériaux qu'il avoit recueillis dans fes voyages, & a rédiger fa Bïbliothèque Oriëntale. II mit a contribution les manufcrits de la bïbliothèque du roi, & ceux qu'il avoit apportés d'Itahe. 11 faifoit imprimer fon ouvrage lorfqu'une maladie termina fes jours. II étoit agé de foixantedix ans. M. Galand, qui étoit fon ami, & qui, pendant un long féjour qu'il avoit fait a Conftantinople, avoit acquis les plus grandes connoilfances dans la littérature, fe chargea de veiller a rirnpreffioflf du manufcrit de la Bïbliothèque Oriëntale. La vie privée de cYHerbelot, ofTre des traits de modeftie & de probité, & toutes les qualités qui caraclérifent le citoyen vertueux : aufli fut-il généralement regretté, fur-tout des gens de lettres qui connoiffoient 1'utilité de fes travaux & les fervices qu'il avoit rendus k la littérature francoife, en 1'enrichilfant des tréfors de la littérature oriëntale. 11 eft peu d'Auteurs qui n'aient puifé dans cette Bibliothèque , toutes les fois qu'ils ont voulu peindre les mceurs orientales, & établir la fcène de leurs contes. Nous avons déja eu plufieurs occafions d'apprendre a nos ledeurs , rout ce que les Auteurs de contes , doivent a d'Herbelot. Nous allons tranfcrire la courte préface qu'on a mife au commencement de cette Collec- tion ;  des Auteurs, ti0" •' d!e en fera mieux fentir tout Ie prix. La Bibhothèque Oriëntale de cYHerbelot eft une des produdrions du fiècle de Louis XIv] qui neut Un des premiers rangs parmi les Hiftoires etrangeres qui ont été pubJiée» dans ce fiècle fameux. Cet Ouvrage eft le fruit des recherches les plus penibles & du travail Ie plus opiniatre. LH^re de l'Orient n'étoit auparavant connue qne d une mamère imparfaite. &HerbtlQU après avoir employé toute fa vie i amafier les riche, ma*er.aux qu'il deftinoit pour élever le vafte monument dont il avoit concu le projet , eft parvenu a nous famiharifer avec les moeurs, les ufaoes les loix, & la religion des Peuples que nous c°onnoiflons a peine de non,. On fera étonné des pemes inféparables de la grande entreprife qu'il a exécutée, fi lo„ confidère qu'il a été obliaé dapprendre une foule de langues dont I'étude feule étoit capable de faire abandonner a un efprit moins courageux, un travail qui n offroit au premier afpect qu'une aridiré rehutante. La Bibliotkèque Oriëntale eft donc, fins contredit, un des Ouvrages qui a exigé ie plus de recherches & de connoidances fur les mceurs des Peuples de 1'Orient : auffi eut-elle, lorfqu'elle parut, ie plus grand fuccès. Tomé XXXVII. 1  tjo Notice L IjA MOTTE. Salmi Sc Garalde, conté oriental, in-\i. On peut voir dans les Mercures de 1'année 175 ^ 1'élogc de eet auteur écrit par la marquife de Lamben : elle a loué 1'académicien eftimable , d'une manié te digne de l'une Sc del'autre ; 1'amitié nel'a point aveuglée; une ptévention contraire ne l'a point empottée ; elle a gardé une mefure fage Sc délicate. Nous donnons la préférence a celui que M. d'Alembert a lu a 1'Académie Fran- coife, le 17 Avrd 1775- cc Antoine Houdart de la Motte, naquir a Paris, „ le 17 Janvier 167i j W fit fes premières études, „ (dit H.SAUmbert,) chez les Jéfuites, qui „ ont fi bien mérité de la littérature par leurs „ talens Sc leurs ouvrages. Heureufe fociete , fi „ elle avoit fu fe contenter de cette gloire » ! M. d'AUmbert luit le jeune la Mom depuis le college jufqu au barreau Sc fur le théatre. 11 nous apprend qu'une chdte au théatre Italien, qui n'étoit alors qu'un théatre de foire, 1'affllgea fi vivement qu'il alla s'enfermer a la Trape, ou il fe crut penitent paree qu'il étoit humïlié. C'eft dans cette retraite qu'il compofa le charmant Opéra de  JEuiope Galante, dont fic 1;t mufi ^ tapaftorale d'/fl? eüt le rnême fuccès : &\n «-accordace talent de la poëlle lyrique. II parut We de tout prés dönt n^J£ ioit peu de cas. * 1 Au milieu de ces triomphes accumulés, La- dO^ c-meurentdabordun grand nombre de panegynftes & quelques ceufeurs II donna enfin aux cbmédiens Francois la tra- •^.f ^-qui parut d de kreten us connorifeurs un ouvrage pofthume de ^ Paree que la Mout aVoic gardé lanonyme, & « e e finguherplaifir de les trouver Lrédules quand tl fe fit connoïtte. Le favanrüW fon ennem, „e put cependant s'empêcher de dire qeulltufembloitqu'dy avoit qudque chofe La Tragedie de Romulus eut un plus grand Ws qm ne fut point foutenu aux" repSf" ou elle eut d oruemrleparalléle avec lek, i ^Voka^lnisdeCaftro om 2 conftante&qu1 eft toujours plus briüante La comédie du Magnifiek be ' neurd la Motte, par la finefT^ j' •■ panon_ xnent du ftyle. P deSdmils& I>aS^ en^r?^'^ ^ en vets euffit encore ^ ^ M-a dl auteur le deftein de propofer OUveI lij  Notice "'M^TjJr & lom, l,s vers tUcrurc. Ses fab.cs lm ' f w. • j . .„„e, l „ui comme de mfoia " P ffa„ adil a été de méme l'amettt de plu„ enpairan.qt..l a is anto.ent 1 fa**; m, de ees hommes ccdamncs " tvTvre desg offietetéspédodiques qu ds ,m„ a vivte aes „ .voiiea la mal-adtolte. „ ptimoiemcomre Uu, avoiteu  des Auteurs." 135 » équité de louer beaucoup un écrir dont il ne » le croyoit pas l'auteur 5 & que détrompé bien» tót d'une méprife fi cruelle, il n'avoit pu » s'empêcher de s'écrier avec la bafiefle la plus » naïve : ah'. Jij e l'avois fu plutót. » Ce malheureux genre de Ia fatyre , dont » notre académicien avoit été fi fouvent 1'objet » eft prefque le feul oü il ne fe foit point exercé ; » la douceur&l'honnêteté de fon caraótère, luiin» terdirent conftammentcette reffource bannale » & odieufe de la médiocrité jaloufe. 11 n'auroit » pourtant tenu qu'a lui de fe la ménager avec » avantage;ii réfifta prefque toujours a la déman» geaifon de repouflerla critique. II penfoit avec » raifon qu'un filencenoble eft 1'arme la plus effi» cacequ'onpuifleoppofer aux traits de 1'envie». Cependant, fi la réputation dont il jouiflbic lui avoit fait des jaloux, 1'aménité de fon caraétcre lui avoit fait auffi un grand nombre de partifans. II oppofoit une douceur inalrérable , non-feulement aux injures littéraires, mais aux plus crueis outrages. Un jeune homme a qui par mégarde, il marcha fur le pied dans une foule lui ayant donné un foufflet, monfieur, lui dit-il5 vous allez être bien faché, je fuis aveugle. II fouffroit avec la méme patience les infirmités douloureufes dont il étoit accablé , & dans lefquelles d termina fa vie, le 16 Décembre 1731, i! avoit liij  134 Notice été recuaTacadémie francoife le 8 Fcvrier 1710, a la place de Thomas Corneilk. LAPORTE (l'Ahbé o e ) trouve place dans cette nomenclature, paree qu'il a donné une Bibliotheque des Génies & des Fées, 1 vol. in-11, Comme nous nous fommes impofés latachede ne prononcer qu'avec la circonfpeétion la plus grande fur les littérateurs; nous tranferivons (pourcaufe) la notice du Diclionnaire Hifioriquef On y lit : — Jofeph , abbé de Laporte, né a Befort en 1718, mort a Paris en Décembre 1779 : fut pendant quelque tems Jéfuite. Ayant quitté cette fociété, il vint a Paris, ou il publia YAntiquaire, comédie en vers en deux aétes, qui n'a jamais franchi 1'enceinte des colléges. La poéfie n'étoit point fon talent, il fe tourna du ebté de la profe. 11 commenca en 1749 des feuilles périodiques, intitulées Obfervations fur la Littérature moderne , dans lefquelles il louoit tout ce que Fréron critiquoit , & il déchiredt impitoyablement tout ce que celui ci exaltoit. Ce Journal finit au neuvicme - volume ; il offrit alors fa plume a Fréron, & eut part aux quarante pre^ miers volumes de l'Année Littéraire. II fit plus de la moitié de 1'Oavrage, & ne reent cepen-  des Auteurs. 135 dant.fuivam k traité, quelequart, paree que Fréron, meilleur Écrivain que lui , politic fon ftyle. Ces deux iuges du Parnafle s'étanr brouiliés, 1'abbé de Lapone publia fon Obfervateur littéraire. Ces nouvelle* feuilles périodiques , quoique taites avec aftez de fbin, & écrites d'un ftyle net & agréable , eurent peu de fuccès, malgré les éloges des Philofophes que Lapone louoit, paree que fon antagonifte les déprimoit. Les Journaux s etant multipliés a 1'infini, Lapone fut obligé d'abandonner le den, tandis que celui de Freron fubfiftoit avec éclar. C'eft alors qu'il forma un altelier littéraire dans lequel il fit fabriquer, par fes Copiftes, fon Ecole de Littérature, * vol. in-iz , 0u il n'y a de lui que Ie titre & la préface; VHijloire littéraire des Femmes francoifes, s vol. in-S0.- les Anecdotes Dramatiques, 3 vol. ia-$°.-y le Dickionnairt Dramatique, 3 vol. in-S%- ÏAmanaeh des Spectacles, & beaucoup cVAmanachs ; le Voyageur Frangois, en vingt-quatre volumes in-11, eft la plus connue de toutes fes compilations : il eft écrit avec plus de foin que les Ouvrages du même Auteur, qui, fuivant uncritique, étoit toujours predé de mal faire. —Nous n'adoptons ni ne rejetons ce jugement qui nous paroit prononcé un peu trop durement, quelque fondé qu'il puifle ene. Iiv  i)ê Notice L'abbé de Lapone mourut avec d« mille liv. de rente qu'il ne devoit qua fa manufadure. Ce maltotier littéraire (difent les mêmes Redaéteurs) étoit fi avide d'argent , que, cus qu'd paroiffoit un Ouvrage paiTable en Province, üfel'approprioit, quoique 1'Auteur fut vivant, & le publioit ï Paris. C'eft ce quil fit pour la Bibüotheque d'un homme de gout, ïmprimée a Avignon, en deux vol. in-\*\ il s'en empara, & en fit une compilation indigefte en quatre vol. in-xz , & mit mème a 1'alembic beaucoup d'Auteurs eftimés, pour en exttaire la fublrance. On lui doit les Penfées de Maffülon ; l'Efprit de J.-J. Roujfeau; l'Efprit du P. Cajlel; VEfprit des Monarques Philofophes ; l'Efprit de Bef fontaines. II a compofé, pendant vingt-huit ans, le Calendrier des Speclacles. - 11 a eu part a toutes les éditions de la France Littéraire. 11 adonné la dernière édition des (Euvres de Crébillon le père. Une édition des (Euvres de Saint-Foix. Un Viclionnaire Dramatique avec M. Ckampfon. Jnecdotes Dramatiques avec M. Clement. LEMARCH AND (Madame), auteur de Boca,  des" Auteurs. 137 elle éroit rille de Jofeph-Francois Duché', écuyer, fieur de Vancy, fils d'un fecretaire du roi, & luimême fecretaire genera! des Galères de France; elle époufa M. Lemarchand de la Mery, receveur général des domaines de Soidons. Sa maifon étoic ie rendez-vous des perfonnes célèbres dans tous les genres. On fait que c'eft chez elle que Coypel répétoit fes comédies , & qu'il y avoit toujours des fuccès. La leclure de chaque ouvrage de ce peintre attiroit la foule chez Madame Lemarchand, & d pandt que Madame de Tencin & Madame Geoffrm fe font contentées de fuivre fon plan. Perfonne ne craignoit autant qu'elle la réputation d'une femme bel-efprit. Sa modedie ne lui permettoit point de s'entendre louer. Vouloit-on lui plaire , c'étoit de faire 1 eloge de fes amis, & d'oublier le fien. Une dame jeune & folie ( Madame Hujfion) crut devoir s'attribuer le conté de Boca, dont Madame Lemarchand étoit auteur. CelJe-ci ne réclama point contre 1'ufurpation ; mais les Journaux décelèrent le larcin. Madame Hufon prit fon parti fort cavalièrement, & écrivit ellemême un défaveu formel aux Journafiftes. L'abbé de Lattaignant compofa a ce fujet la chanfon que nous tranferivons.  I3S Notice Sur i'air : De Grimaudin. U N jour Venus prit a Minerve , Sur fon bureau, Un petit roman de fa verve : Fruit peu nouveau; Et cette belle, fous fon nom, En fit faire 1'imprelTion. O n louoit au célefte empire , Dame Venus Sur fon talent de bien écrire; Lorfque Momus Dit aux dieux : c'eft un vrai larcin, Lifez-le dans le vieux bouquin. © P u i s q. u e Venus eft jeune & belle, Sans contredit, A tort pourquoi fe pique-t-elle De bel efprit ? Quand on fait plaire a mille amans , A-t-on befoin d'autres talens. © C e que Minerve peut écrire N'eft qn'ennuyeux : Au prix de ce qu'on aime a lire Dans deux beaux yeux,  des Auteurs.' i55> Trois graces, pour les connoifTetó, Valent mieux que les doctes fceurs. LEVE QUE ( Madame ), Louife Cavalier, dame Leveque, nee k Reuen le 23 Novembre 1703 , morte le 18 Mai i745 , étoit fille d'un Procureur au Parlement de Rouen, & fut mariée a M. Levêque, gendarme de la Garde. Elle étoit d'une trés belle figure, avoit un efprit vif & enjoué, & compofoit également bien en profe & en vers. On a d'elle deux Pocmes: le premier, inntulé : l'Augufiin, pièce grave; le fecond Minet, prèce comique & facétieufe, un Ouvrage inntulé : le Siècle, en 1737. Li/ia , Celenie. Elle a pubhé dans les Mercures du tems, des vers qui ont paru moins médiocres qu'ils ne font en effer. On en a inféré un grand nombre dans les amufernens du cceur & de 1'efprit. Nous avons inféré dans le Cablnct des Fées, fes deux contes : Le Prince des Aigues Marines • Ie Prince Invifible ; Elle a fait une Comédie intitulée : VAuteur Fortune. Nos leéteurs ont du diftirrguer le conté du Prince Invifible, dont les détails & la fable font agréables & ingénieux. Ils ont vu avec queile charmante facilité 1'Auteur unit Ie talent des vets  140 Notice & celui de la profe. Des penfées tendres font exprimées avec une forte de naï veté.Elles femblent s'échapper de fa plume. Sur la foi de 1'amour ne vous repofez guère, Amans, quelques pbifirs que vous puifliez avoir. De fes faveurs, au défefpoir , L'on n'a fouvent qu'un pas a faire ; Charmez du beau noeud qui les lie , Et chaque inftant plus amoureux , Ces amans patent la leur vie Dans les plaifirs & dans les jeux ; Mais leur fort n'a rien que j'envie, Et je me trouve plus heureux Quand je vois un moment Silvie. LHÉ RITIE R ( Mademoifeüe ). MarieJeanne Lhérider de FUlandon étoit fille de M. Lkérider, hiftoriographe de France , dont nous avons une traducFion des Annales des Pays-bas de Grodus, & deux Tragédies imprimées, quojque médiocres. Elle a compofé plufieurs morceaux de PoêJIe, dont quelques - ans font reftes nunufcrits. Elle a fait L'Apothéofe de Mademoifelle de Scudéry , en profe & en vers ; La Pompe Dauphins ; Le Tombeau de M. Ie duc de Bourgogne ;  des Auteurs.' j41 I'Hijloire de Jean de Ven, en profe & en vers; UneTraduclion d'une partie des Epttres héroïques d'Ovide ; Les Caprices du Dejlin : La Tour Ténébreufe ; Ric Die, Ric Don ; Marmoifan. , Elle fut recue a 1'Académie des Jeux Floraux , oü elle avoit obtenu des prix, & ï FAcadémie des Ricovrati de Padoue. Elle eft morte le 24 Février 1734, ^gée de foixante-dix ans. Elle avolt une fceur, Mlle de Nouvelon, qui a fait audi quelques Poefies. Le préfidenrA Veftron a adrefle a celle-ci ce madrigal: Pour ton bel-cfpdt, tu mérites , Comme ta fceur de Villandon, D'être 1'une des favorites Des dodes fceurs A'Apollon. ^ M1!e Lhéritier defcendoit, par femme , du cÉlèbre du Vair, garde des Sceaux, le feul miniftre peut être qui ait paru content quand on lm eut demandé fa démidion. Elle a fait un Sonnet au Roi pour le louer de la révocation de l'édit de Nantes. Soncaractère étoit poli, bienfaifant, fon humeur douce, affable : elle étoit amie folide Sc  i^i Notice généreufe. Sa modeftie & fa réferve fur fes talens, étoient outrées. Elle fembloit oublier qu'elle valoir mieux que beaucoup d'autres. Malgré la modicité de fa fortune, elle réunifioit chez elle tous les Dimanches & tous les Mercredis, une aflemblée de Littérateurs & de Gens de qualité qui aïment les lettres, auxquels elle donnoit un fouper frugal. Tant que la duchefle de Nemours , qui 1'eftimoit & 1 aimoit finguliément, avoit vécu, Müe Lhéritler avoit trouvé dans les bienfaits de 1'amitié, des relTources. A la mort de la duchefle, fa fituation devint gènée. C'eft alors que le garde des fceaux Chauvelin lui accorda en 1718 une penfion de 400 liv. La célèbre Lavigne, ou plutot Desforges Mailkrd compofa fon épitaphe. Les neuf favantes immortelle* La comblèrent de leurs faveurs; Mais, hélas 1 ó dons infidelles , Dont la poflefliOB fit languir maints Auteurs, Elle vécut, ó tems, ó mceurs 1 Dofte, vierge, Sc pauvre comme elles. Ce qui prouve du moins qu'elle eut des mceurs. LINTOT {Madame v>t),Catherine Caillot, dame de UntOt, a compofé YHiJloïre de mademoifelle de Salens; trois contes des Fées , en 173 $ , in-iz : ces contes font éciits avec beaucoup de  DEs Auteurs. h} naturel, & méritent d'être accueillis, celui de a Pnncejfe^changée en Êcre^e eft moral & rempli de defcriptions agréables. Hijloire de madame d'Aülly. Oncroirqueileeftencore vivante,&qu'eIre e ie écnvoit encore en ,76> E1Ie a fu ' -^pXr rpLE!S,CONVEL^-eurtrès-médiocredun ^ de contes en Io98, d'une nouvelle avantpour ntre ^? * «oaOBWB , d w ^ toire romanefque XAnnt de BreCagl\ & d l ro enduavolrfurpaffé]e uedJ P ofa cnttquer eet ouvrage immoreel, & 3 ! FaydlC' ^ a compofé la télémacomanie pour ramener les efprits engoués de * * de Feneion Lefconvel eft auteur de plufieurs Heft mort en 17*2, après avoir dépofé pen -plufieurs années fa p,TO & & ^ g ciut mortavant terme.  l44 Notice LO CKMAN étoit un fameux philofophe d'Ethi0pieoud-Atabie,lesunslefontPetitneveu Vjjarn,'les autres de M, _*ndq«H»*fc futentqVi^^^^ ou de charpenüerou de berger, 8c qud tut e" ;ve & vendu con,ne efclave ^ P« £ Zéts qui faifoient commerce des nèf es o» fon maitre 1'envoya avec d'autres efclaves chet ch r des fruits a la campagne» fes compagnons f pbfieurs autres ces deux fagesne font qL1'une même perfonne, tous deux ont fait des proverbes, il y a des paffages qu, font les mêmes prefque mot puur mor, d.edaprefumerqueZoc^,éIevédansIareli,ion des/^^,fitconnoitreauxPetfeslesproVerbes de Salomo» & les apologues de Vancien teftament, en les traduifant en leur langue. — P ^ / dit » M. le Prévóc d'Exmes dans /* vie des Ecrivains " «Wfl^rj ), qul parut a Ja Cour de c^ & » qu'on prétend être né en Phrygie, fut a ' ée - de connoïtre les ouvrages de Lockman écrits » dam ]a jangue des perfes ^ ^ " ^ les traduifit avec liberté, & ajouta peut-être - ^fables nouvelles aux anciennes. Tandis que - Iefabuhfte grec fatfoit connoïtre aux peuples » d Occident les fables du philofophe grec, Bid» ^ les traduifoit en langue indienne & felon Ia " mlmered« OHei^3 fervir aimf- " 1ÜniUnIndCS'en yi^gnantdenou» velles fiéhons propres i rendre les lecons plus » frappantes. Efope & ^ étoient contempo» ratns. C'eft ainfi que les proverbes & Ies autres " ™6S de Salom™. déja changés dans la tra* dud!°in Perfa"e' fur^ encore plus dénaturés « dans lesimitations indiennes & grecque, de - & o-^ej mais on voit que 1'écrivaiu TomeXXXm. K  MÓ Notice „ oviginal y eft fouvent déf.gné par cette «„ «e&n.kSage . ^. - D'autresauteursptetendeut, non fans beaucoup de fondement, que Lockman eft le même que Bidpaï Sc o^tfope, Sc que les Fables grecaues font dues aux Onentaux Lockman étoit un philofophe continuellement plongédans la méduation. Également mftruit Sc vettueux, .& plein de 1'amour du genre humain, il a compofé des Fables, des Apologues des 5«r««/& des Mi*»"*, donc chacune ddent ks Otientaux, eft plus efiimable que couc le monde encier. t i «bN* publia les F*W« de locW en arabe & en latin, a la tutte de fa Grammaire Arabe- en Z<6,leFeVre les mit en beaux vers arms. ^ M. Ie marquise ^■•sexpnme a.„fi fur la lifte de fes Ouvrages: - Les C«*„ qLle M"e de Luben ■ J -us pouvons parler d après elle, fonc 9u Sec & Noir ; ^cS- laprinceffcÉnncelante; La pnnceffe Camion ; * Z« taft qui forme feule un „ros V0lunie^I2'&^nciencdeuxHift01res.t> °N LUI ATTUBüï Laprincejfe Senféle & k prlnce 'T p£ la princefe Coq ue-D'osufs ; Blanche-Rofe ; Cornichon & Toupette ; Le Revenant; La princejfe Foiretce ; Et ^ÊpuufurlaPareffe. Kij  I48 Notice Elle est Auteur Dela Trapan des Amadis des ^«f* en quatre volumes, & mis en meftleur ftyl , UsJneeLesAfrlca^ouMouraa-Turau,, in-n, 17 5z- fut eUpunceffe changée en livre cond allegorie- i-a p fe„illeier a fon 'Tti^r r^ranre^aaen S'd ce Care. La princelTe . v „ons en avons fait nfage. ^nnntor^doi.^eln-.fon ^«aeionicde.oncela^pn.aüonnne fononvragelnUprocme demoifelle Comme 011 ignoion le lort Lale«efolvante,mfcree d-/ Jo Pari* ae la mème annee , N°. «? , a nel public.  des Auteurs; i49 L'Ombre de Mlu de LüBERT, a ïAuteur de /'Almanach des Dames J]Juftres. " Quoiqüe retirée dans un des fombres bofquets de KElifée, Monfieur, & très-peu occupée de ce qu, fe palTe fur la terre, je n'ai pas été moins fenfible ï la magnifique Oraifon Funèbre •cjue vous avez daigné faire de moi dans votre Almanach. Je ne m'attendois pas a être céiébrée après ma mort, moi, qui dans ma vie ne me fms jamais avifée de vouloir être célèbre. Les ouvrages que j'ai faits n'ont été que les amufemens de mes lecteurs, je ne prenois feulement paslapeinedelescorriger, encore moins de les relire; il n'y a rien qui n'y parodie. En un mor, monfieur, j'ai toujours penfé que ces ouvrages me précéderoient aux Champs Elifées, & qu'ayant pafte le deuve de 1'Oubli, je n'aurois pas i rougir ici de trouver quelqu'ombre qui fe fouvïnt de les avoir lus. Ce n'eft pas que toute ombre que je fuis, jene fois autant reconnoiftante qu'üne ombre peut I'être des louanges que vous voulez bien donner i ces bagatelles : je n'en ai cependant pris aucune vanité ; dans notre fombre royaume on n'y eft pas fujet. J'avois retenu de mon vivant que les a&ions des hommes étoient Kiij  ïjo Notice louées & blamées fort légèrement, & que {uttout les Oraifons funèbres n'étoient que de recueils de menfonges. Comme on fe défabufe ici de beaucoup d'erreurs , je penfe différemment, me fouvenant qu'un fage, dont j'ai oublie le nom , difoit fort prudemment qu'il faut attendre la mort des geus pour pouvoir les louer juftement. Ce fouvenir heureux va me faire quitter ma folitude , puifque je puis jouir de ma gloire & m'acofter de mefdemoifelles Mén» tier &c Scude'ri. N'étant qu'une ombre, je ne dois pas craindre quelles me faffent mourit d'ennui; ainfi je pourrai me vanter avec elles de n'ctre pas réduite , ainfi que je croyois, comme feu Aftrate, dont on a dit unanimement: Afiratus vixit. VoiU du latin quoique je ne 1'ai jamais fu; mais ayant ici Ovide, Horace &c Firgile, il feroit beau voir que je ne puffis les interroger ou leut répondre. J'attends auffi ici très-impatiemment un M. de Bajiide, qui, dans fes immenfes volumes de Contes Bleus, a dit, par deux fois, très-difctètement a 1'oreille du public , dans la crainte qu'il ne 1'oubliat, que j etois encore vivante i pour moi, qui ne fais qu'en dire après votre refpe&able témoighage, je ne me mêlerai point de décider entre vous deux; c'eft a vous , Meffieurs, k démêler la fufée , & i jnger qui a tort ou raifon j mais au moins que je fache i  des Auteurs. ïtr quoi m'en tenir. Votre fervanre de L u b e r t , au mille & unième bofquet des Champs Elifées ». — Cette lettre pouvoit être plus plai. fante, & ménager davantage Mademoifelle de Lubert; que 1'Auteur juge avec trop de rigueur, il avoit oublié qu'elle avoit mérité, dés fa plus tendre jeunefle, le furnom de mufe & de grace que M. de Fontenelle, Vokaire & les littérateurs les plus diftingués lui avoient donné. Voici les vers qu'elle adrelFa en 1772, \ M. de la Condamlne. On y retrouve cette facilité qu'on a toujours aimée dans fes ouvrages : elle avoit alors foixante-deux ans. D'Jjax impétueux & du fubtil Ulljfe , Vous avez chanté Jes débars : Ovide courut cette lice , Et de pres, vous luivez fes pas. Dans lage ou tout seteint, votre feu femblecroJtre : Homere, comme vous, brava le froid des ans. Le vrai génie a le droit de renaitre, Et pour lui, la vieillefTe eft un nouveau printems ; Mais quand vous rempliiTez fi bien tous vos momens Par les talens nouveaux que vous faites paroitre , Je vous trouve un défaut, vous 1'ignorez peut-être, Vous êtes par trop fourd aux applaudiffemens. Kiv  Notice R É p o N S E. O ui, je renais en ce moment , Mufe & grace (i) me rend la vie , Mon cceur s'ouvre a la mélodie De fon aimable compliment Sur la nouvelle rapfodie Qu'une vieille mufe engourdie Lut hier témérairement A la Francoife Académie Qui le rccut bénignement, Et le but jufques a la lie. On dit affex communément Que la pitié nous humilie , Et qu'il vaut bien mieux faire envie : J'ofe penfer différemment. Je dois a la pitié 1'indulgence publique, Et je me fens flatté de ce doux lentiment Qu'on s'avoue a foi-mêmë, & qui m'eft fympathiquc. VAlembert, élégant, non moins que pathérique , Ann*nca le vieux débutant. L'Auditeur fe difoit, peut-être en m'écoutant, Cela fe gagne en Amérique, II peut m'en arriver autant. Comme lui, d'un chef-d'ceuvre antiqse , Je traduirai les vers, füt-ce en ftyle gothique : Comme lui, je pourrai braver 1'événement, Je ferai fourd a lapplaudiflement, Et plus encore a la critiquc. < ,) Noms au« M. de Voltain a'donnés ï Mademoifelle de UUrt. i$i  DES A U T. E V R S." 15 J LUSSAN ( Mademoifelle de) , on la croit fille naturelle du célèbre prince Eugène de Savoye Sc d'une courtifane nommée Fleury ; fa mère répara du moins fon inconduire, en donnant a fa fille, une éducation trés-foignée. Elle avoit £ peine vingt-cinq ans qu'elle étoit liée d'amitié avec le favant Huet% évêquc d'Avranches, qui Pinvira a compofer des romans ; ce genre étoic analogue a fon caraótère & a fes penchans; car elle étoit laide, fenfible & gourmande ; on va loin avec ces trois qualités; elle ne fe compromitcependant point alfez pour celTer d'avoir des droits a 1'eftime publique; les princes de Condé & de Conti, eurent pour eile une forte d'attachement qui ne pouvoir être pris pour un fentiment de proteéiion ; elle étoit d'adleurs fe obligeante & fi afifable; elle nacquit en i6*xx & mourut le 31 Mai i758,agéedefoixants-quinze ans. On a foupconné l'abbé de Boi/morand, le romancier U Serre, Baudot de Juilly, d'avoir contribué effentiellement a fa réputation littéraire , & peutêtre a-t-on eu raifon de le croire 5 il eft certain qu'elle z montré au dernier, des fentimens de reconnoiffance très-caraétérifés, en lui cédant la moitié d'une penfion de deux mille livres que le roi lui avoit accordée, &en partageant avec lui le produit de la vente de fes manufcrits. On ne hi reproché dans fes ouvrages, que d'avoir mul-  154 Notice tiplié les volumes, paree qu'elle écrivoit pous vivre, dure néceffité pour elle & pour fes lecteurs. On peut voir la lifte de fes oeuvres dans le diótionnaire des perfonnes célèbres. Les Veillées ie Theffalie eurent un grand fuccès tous les Joumaux en firent des éloges, & les cditions en futent multipliées.  des Auteurs. i5j MAlLHOL(^W),néaCarcaIronne: il eft auteur Des Anedotes Oritntales, in-n , i vol. ,1752. Voyez la France Littéraire, pour fes Ouvrages. Nous ne nous permetrons point des jugemens&rb goureux • mais il paroit d'après la leéture des produclions de eet auteur, qu'il devoit vivre & mounr fans beaucoup de célébrité. II réuffit mieux dans les vers légers, quoiqu'il fut trés - fouvent un louangeur trés - afteóhieux & trop fade. 11 foupira pour la célèbre Puvigné, danfeufe de 1'Opéra, & la déifia dans fes vers du mieux qu'il put. Nous ignorons fi la Déeffe a fouri a fotl galant Apollon, elle qui fourioit fi volontiersd fesamrs. Nous diftinguerons cependant YÉpüre Hérotque du Comte de Fayel, a fon frère, qui a été imprimée, dans le Mercure. On y.trouve des vers heureux, de 1'énergie , & quelque connoiffance du fentiment de la jaloufie. MALFONTA1NE [Mademoljlllè RA1GNE de), eft auteur d'un conté qui apour titre : Aixahel, traduit d'un manuibrit arabe , imprimé dans le Mércure, i77j •  ij e s Auteurs. \Gi qn'un coup de m'axtèau. CM certainement aller nop loin de5 bomés, d'afiurer que M. de Marivaux a imité M. de Saint-Foix, & que la mufe de ce dernier écoir une grace, & celle de fon copideune précieufe.M.^e Marivauxcopi&e ! Eh! qu'ïmporre que routes fes pièces foient des furpnfes de 1'anipur, fi, dans ce cadre , il a l'att de tout peindre & de s'y métamorphofer fans cefTe. Ce n'eft pas la le genre de Molière .- mais n'y avoit-il qu'un genre pour la Comédie ? Beftouches & Regnard doivent-ils être auffi rejetés ? On lui fair un reproché d'avoir été recu de l'Académie Francoife , avant M. de Voltaire ? Sans doute ce dernier mcritoit la préférence. Mais ne fait-on pas a combien de petires confidérations , tous les corps tiennent ? M. de Voltaire avoit de' puiffans ennemis , M. de Marivaux n'en avoit point : il fut recu, Crébillon Imvitoit, & le Public applaudidoit a cette invitation. Comment les Aureurs du Nécrologe , qui ont parlé de Pejfelier , au point de le prcférer ï plufieurs 1 égards, a Lamotte, ont-ils pu placer M. de Marivaux dans un rang auffi bas ? Queües réflexions ne feroit-on point en droit de faire fur les jugemens des critiques ? M. de Marivaux s'eft peint dans fes Ouvrages. Avec un caradtère tranquille, quoique fenfible : il poffédoit toutes les qualités fociales; d une proTome XXXVII. L  bité exaöe, a un noble défintérelFement il réunilToit une candeur aimable , une ame bienfaifante, une modeftie fans fard & fans pretenrion, uneaffabdité pleine de fentiment, & 1'attention la plus fcrupuleufe a éviter tout ce qui pouvoit offenfer ou déplaire. 11 portoit dans l-amitié, la délicatefle & la fincérité. 11 décidoit peu, conlultoit volontiers, & naimoit point a contefter ni a ptouvec qu'il avoit raifon. Jamais il ne répondoit a la ctitique. — J'mm mon repos, difoit-il un jour a Madame de Tencin , & je ne veux point troubkr celui des autres. " 11 fut recu a l'Académie Francoife au mots de Février 1743. Le duc d'Orléans, entr'autres témoi-nages de la bienvedlance dont il Fhonoroit, dota°fa fille i 1'Abbaye du Tréfor, & fournit les f rais de fa profeffion religieufe. 11 ne follicita jamais rien pour fa fortune, mais jl ne refufa point les dons de 1'amitié. Sa recon„oitTance eut voalune laiffer ignorer a perfonne ni les attentions généteufes que lui prodiguoit Madame de Tencin, ni celles de Mademodelle Saint-Jean , qui, en acceptant le titre de fa lcgataire univeïfelle, a continué fi noblement d etre fa biénfaitrice, même après fa mort. M. de Marivaux jouilFoit d'ailleurs d'une penfion fur la caffette du Roi, & d'une autre plus confidérable que lui faifoit payer j fans que peut-.  des Auteurs. 16$ être il le fut lui - même, une dame de la cour, que les lettres, les arts, les fciences ont reconnu long tems pour leur amie généreufe & leur protectrice éclairée. Avec ces reflburces, M. de Marivaux fe feroit fait une fituation heureufe; mais il étoit trop fenfible. On 1'a vu plus d'une fois facrifier jufqu a fon nécedaire , pour rendre la liberté & même la vie a des infortunés qu'il connoiflbit a peine. Il avoit la même attention a recommanderle fecret a ceux qu'il obligeoit, qua cacher a fes plus intimes amis fes chagrins domeftiques & fes propres befoius. II mourut le 11 Février 176$. II a compofé un conté de Fées intitulé : Fe'licie , qui eft coupé en dialogue, Sc en eft plus ingénieux fous cette forme. MAZARELLI (Claire... Marquife de LA VlEUVILLE DE S A I N T - C H A M O N D ) eft nee a Paris, en 1731. Comme eet auteur vit encore , Sc qu'il eft poflïble de Ia juger mieux que nous ne le ferions, nous nous abftiendrons de prononcer fur fa perfonne, & fur fes Ouvrages qui nous onr paru écrits avec autant de grace que d'énergie : elle eft auteur Des Éloges de Sulli & de Defcarces ; De Camedris, Conté, ï/z-12, 1765. Lij  164 Notice MAYER (M. Charles-Jofrph , Chevalier de ), né en 175 1, eft vivant; il a fini le roman du Prince Tui de Saint - Hyaanthe : ce qui nous oblige d'en faire mention ici. if a coopéré avec le comte de Treffan, M. le marquis de P , M. 1'abbé C , a la Bibiiochèque des Romans. Le Recueil de ceux qu il a inférés dans cette Colleclion, va bientbt paroitre s il eft auteur Du roman intitulé : Genevieve de Cornouaillcs & le Damoifel fans Nom, 2 vol. in*Ij Du roman intitulé : Charles-le-Bon , Sire d:'Armagnac , 3 vol. in-\U Ces deux romans retracent 1'ancienne chevalerie, oppofée a nos mceurs aétuelles. 1L EiT AUTEUR XyAfgiU, anecdore intéreffante \ De la Galerie Philofophique du fei-filme fiècle , 2 vol. i«-8°- > Du Voyage de la Suffe, X vol. Ha inféré dans le Mercure, des Viffertations favantes fur différente? matières. On lui attribue dans la France Litteraire des Ouvrages dont il n'eft point auteur, & on 1'a confondu probablement avec un autre.  des Auteurs. \6j II ne nous eft pas permis de rien dire de plus fur eet Auteur jeune encore , & eftimable a tant d'cgards. MELON ( Jean-Francols ), né a Tulle en i(588 il s'eft principalement exetcé dans la partie des Finances , & y a excellé. II a du a ce genre d'érudirion , a la profondeur de fes vues 8c a la pureté de fes principes, une réputation d'eftime qui lui procura une prépondérance parmi les Financiers. Le regent duc d'Oiléans 1'appeloit fouvent dans fon cabinet 8c le confultoit durant des heures entières. Melon difcutoit avec ce prince tous les principes de Fadminiftration, 8c étoit prefque toujours approuvé par la Bliniere, qui dirigea toutes les opérations de la Régence avant que Fon vint les gater. Après qu'il les eut abandonnées le Maréchal de Noailles , chef du Confeil des finances, eftima fingulièrement M. Melon. Son roman de Mahmoud le Gafnevide 3 conet Orïental, n'eft que 1'hiftoire aUégorique de la régence , mais non pas févèrement jugée. Le cardinal de Richelieu , lifoit fouvent YArgetüs de Barclai, paree qu'il croyoit y trouver les principes d'un bon gouvernement. Nous propoferons avec plus de fondement a ceux qui s'occupent de 1'adminiftation publiq ie de lire le roman de M. Melon j ils y trouveront en effet des vues ex-, L iij  U}6 N O T I C B cellentes, une bonne morale & de bons principes. On y retrouve toures les maximes que Voltaire a rendues fi piquantes dans le mondain, qui n'eft que lcloge du luxe; M. Melon avoit dit en profe ce que Voltaire difoit en vets. Et fongez bien que le luxe enfichit Un grand état, s'il en perd un petit. . . . j Le pauvre vit des vanités des grands , Et le travail gage par la mollefle, S'ouvre a pas lents la route a la richefle. Monrefquieu avoit parlé dans fes lettres perfanes a peu prés comme M. Melon; mais il devint plusauftèredans 1'efprit des loix,ilprononca cette effrayante vérité le luxe change les républiques en monarchies & les monarchies en defpotifme. Helvetius a fuivi a peu de chofe prés les principes de Melon. Jean-Jacques Roujjeau a été le feul qui ait été indigné de voir mettre en problême 1'influence du luxe fur les nations. Toutes les fois qu'il en parle, on voit le phifophe devenir orateur, & s'exprimer avec un fier courroux, malgré cette colère, il n'eft pas moins vrai que M. Melon a pris le jufte milieu d'une queftion qu'on ne peutguères réfoudre en entier dans une vieille monarchie qui fe foutient par les arts d'agrément autant que par fon heureufe ficuation. M. Melon eft mort en i7?8.  des Auteurs» MIRABEAUD [Jean-Baptifie d e) , Secretaire perpétuel de 1'Académie Francoife, mort le 24 Juin 1760, agé de quatre-vingt fix ans; il étoit né en Provence, Sc on peut dire que fa vie n'a éré remplie que parlesmufes & pat 1'exercice des devoirs de la plus rigoureufe probité. M. de Buffon qui lui a fuccedé a 1'Académie Francoife en. parle de la forte •, — le grand age ne l'avoit point affaiflé; il n'avoit altéré ni fes fens, ni fes facultés intérieures, les triftes, impredions du tems ne s'étoient marquées que par le défléchement da corps. A quatre-vingt-dx ans M. de Mirabeaud avoit encore le feu de la jeunefle, Sc la sève de Fagë mui: une gaieté vive Sc douce , une férénité d'ame, une aménité de mceurs qui faifoient difparoirre la vieillefle,ou nela laiflbit voir qu'avec cette efpèce d'artendriflement qui fuppofe bien plus que du refpect; libre de paflions Sc fans autres liens que ceux de Famitié, il étoit plus a fes amis qu'a lui-même. Il a paflé fa vie da»s une fociété dont il faifoit les délices: fociété douce quoiqn'intime, que la mort feule a pu diflbudre. Ses ouvrages portent Fempreinte de fon caractère; plus un homme eft honnête, plus fes ccrits lui reflemblent. M. de Mirabeaudjo'ignoit toujours le fentiment a 1'efprit, Sc nous aimons a le lire , comme nous aimions a Fentendte; mais il avoit fi peu d'attachement pour fes producFions, il L iv  i CT3 Notice craignoir li fort & le bruit & 1'éclat, qu'il a facrifié celles qui pouvoient le plus contribuer a fa gloire; nulle prétention malgré fon mérite éminent; nul empredement a fe faire valoir , nul penchant a narler de foi, nul defir ni apparent, ni caché de fe mettre audeftus des autres, fes propres talens n'étoient a fes yeux que des droits qu'il avoit acquis pour être plus modefte. C'eft ainfi que M. de Buffon a honorél'homme eftimable qu'il remplacoit, puifte-t-on retracer fouvent un pareil portrait! La traduétion de la Jérufalem délivrée du Taffe parM de Miraheaud, a été fouvent réimprimée, elle eft ( dit M. Panckoucké), contre 1'ordinaire, moins longue que Poriginal, & ne peut dans plufieurs endroits être regardéeque comme un Abrégé du Taffe , mais eet Abrégé eft 1'ouvrage d'un homme d'efprit, qui écrivoit parfaitement fa langue; qui la manioit avec élégance , & qni perfuadé que dans un pocme, le principal but eft de plaire, & que 1'agrément en eft le mérite effentiel, a tout facrifié a eet objet : & en effet cette traduétion féparée de Poriginal, fe fait lire de fuite & avec le plus grand plaifir.Rien n'y fent l'affiijettiftement ni la fervitude, on croit lire un ouvrage national, un roman du premier ordre, dont le fond feroit très-piquant; & fi comme Pa dit un homme d'efprit, il faut qu'an traducteur  des Auteurs.' i 69 fache cacher fes fers, & s'il le peut, qu'il les, oeuvre de fleurs, il faut convenii que Muabeaui a été ün peu au-dela du bur. On peut reprocher les mêmes défauts a fa ttaduétion de RolandFurieux, pocme del'Ariojtes M. de Voltaire prétend queM. Mirabeaudriz. ni fenti, ni rendu les plaifanteries de 1'original. M. de Mirabeaud compofa en 1734, un Alphabet de la fée Gracieufe, in-\ z * ce fut un Ouvrage de complaifance , auquel il n'a certiinement attaché aucune prétention. MONBRON. Le Sopha Couleur - de - Rofe , in- 1 2. La Voix des Perfécutés, in-iz , 1754. MONCRIF {Frangois-Augufte Paradis de) i fecrétaire des commandemens de M. le comte de Clermont, lecteur de la reine , t'un des Quarante de Facadémie francoife , né a Paris en II étoit fils du nommé Paradis, procureur. Sa mère avoit de 1'efprit & fut le mettre a profit, auffi-tót qu'elle fe trouva veuve. Son mari lui avoit laifle deux dis, l'un eft devenu commandant d'une petite place , par la protedion de M. le comte d'Argenfon.  ï»7ó Notice L'autre, qui eft l'auteur dont nous parions » étoit chéri de fa mère. Toujours proprement vêtu, & toujours aftez en fonds pour aller au Speclacle, il y fit connoiflance avec M. d'Argenfon , il en fut le complaifant , enfuite Ie fecrétaire, & de la il fut placé auprès de M. le comte de Clermont en qualité de fecrétaire des commandemens. Il eut même Ia feuille des bénéfices de ce prince abbé; mais il avoit la délicatelTe de ne propofer aucun prêtre que de 1'aveu des demoif.lies de 1'Opéra. Une aventure 1'éloigna de ce miniftère, & le comte d'Argenfon le fit ledeur de la Reine, & fecrétaire général des Poftes. Dans fa première jeunefle , il s'étoit fait recevoir maitre d'efcrime. Etant devenu lecTeur de la reine , il fut un jour queftion de Ion age , & pour prouver qu'il étoit plus vieux qu'on ne croyoit, on allégua la date de fa réception dans le corps des mam-es en fait d'armes. Louis XV en rit beaucoup & dit a Moncrif: II y a des geus qui vous donnent quatre vingt-ans. — O ui, reprit Moncrif, mais je ne les prends pas. II avoit confervé a eet age tous les gouts d'un jeune homme. Aufli-tót qu'il enrendolt parler d'une demoifelle a la mode , il lui écrivoit le billet fuivant : Si vous e'tie^ curieufe, mademoifclle j de faire connoijfance avec un yieillard ai-  des Auteurs.' 171 malle & bien propet, il vous attendra a fouper, après lequel vous trouvere^ quatre louis. II faut convenir qu'on trouveroit peu de vieillards auffi gais & auffi aimables. Sa mère s'étoit procuré un revenu par les reffources de fon efprit & par la tournure des caraétcres de fon tems. Sur la fin du regne de Louis XIV, on faifoit des déclarations d'amour par lettres. La réponfe arrivoit fous la même forme. C'étoit une marche & une contremarche en règle. On faifoit adaut d'efptit. Peu de femmes, & s'il faut le dire peu d'hommes , étoient affez forts pour ce genre d'efcrime. On alloit au foufleur, & on trouvoit dans Paris des Écrivains de billets galans, comme on en trouve maintenant pour les placets. Quand on avoit le malheur de perdre le bon faifeur, on perdoit auffi-tot fa réputation de bel efprit & tous lés frais de la correfpondance. Madame Paradis étoit connue par fon habileté a roumer une réponfe galante, & onl'employoit. Moncrif fit pendant quelque tems le même métier-, peut-être dut-ila ce talent 1'amitié de M. d'Argenfon. II avoit beaucoup concoutu ï l'établiflement de la Comédie-Parade, quiprit naidauce dans le temple au milieu de la meilieure compagnie. Son efpric foutint ce genre & lui procuta des {acchs. Quelques années aptès on lui attribua la Comédie de  I72- N O T I C E rOracle de De/pkes , qui fut arrêtée a Ia qnatrième repréfentation , a caufe des impiétés qu'on crue y trouver. Sa Comédie des Abdérites, jouce a Fonrainebleau, ne fur point repréfentée a Paris, ainfi que ba Faujfe Magie dont on ne connoit que le titre. YJEJJaifur l.i nécfjfué & les moyens de plaire , jouit d'une réputation qui ne s'eft pas foutenue. Quelques Journaliftes ont alTuré que eet ouvrage étoit un excellent traité de morale ; nous n'infirmerons point ce jugement, & nous laiderons d nos leéteurs une entière liberté. L'Hijloire des Chats attira fur l'auteur, des libelles & des fatyres, dont il eut le bon efprit de fe confoler; il plaifanta fur les eftampes dont Coypel avoit defliné les figures, & que le comte de Caylus avoit gravées. II difoit qu'il avoit cru pouvoir fe fauver a 1'aide des planches. Quand il demanda la place d'hiftoriographe de France après le départ de M. de Voltaire , M. le comte d'Argenfon qui le protégeoit, lui répondit : tu veux dire kiftoriogriffe, par allufion a i Hijloire des Chats. Le Rajeunijfement Inutile, pièce charmante, lui ramena le public. Les Ames Rivales furent lues avec plaifir; Crébillon le fils en tira parti pour le perfonnage de Mafulhim. Perfonne ne lui difputera le talent d'exceller  des Auteurs. 173 dans ie genre des Romances. Chacun chante les fiennes, & elles tiennent dans les cabinets des amateurs une place diftinguée ; on lui doit un grand nombre de Romances du Comte de Champagne, l'édition defquelles trop circonfcrite n'a pas été aftez répandue. La défunte reine Marie Lec\inska , honora Moncrif', qui étoit devenu fon lecieur , de fa confiance 6V de fon amitié; il dut aux bontés de cette reiiTe fa réception a 1'Académie Francoife. Celle de Berlin l'avoit déja adopré. II nous rede a parler de fon cceur. II renouvela le perfonnage de Pelifon, qui fe dévoua fi tendrement au fort du furintendant Fouquet. Moncrif voulut fuivre fon protecteuc; le comte d'Argenfon, &renoncerala cour, a fes places, pour vivre avec lui. Il lui fut permis d'aller tous les ans rendre une vifite a un exilé illuftre que * Feftime publique n'avoit jamais délaide. Moncrif étoit généreux, bienfaifant. Son ame, pour nous fervir de Pexprcflïön de Montaigne , étoit la. meilleure des pièces de fa condiuon. Son plus grand bonheur étoit d'obliger. Ce qui achève fon éloge, c'eft qu'il avoit un domeftique d bien élevé a fa manière bicnfaifante , qu'il lui épargnoit les foins de découvrir les indigens , & qui diftribuoit avec défintéredement les fommes qua fon maitre lui laidbit en dépot. Moncrif mouruc  i74 Notice en 1770. M. de la Place lui a fait cette épitaphe: Des mceurs dignes de 1'Age d'Or, Ami sür, Auteur agréable , Ci git qui, vieux comme Neftor, Tut moins bavard & plus ainiablc, Ou peut voir dans le Dicljonnairc Niflorique fon éloge, & la notice de fes ouvrages. Peutêtre eft 011 déja convaincu qu'il a jout d'une réputation qui ne fera pas de longue durée. Nous avons fait ufage du Róman d'Aman\arifdine , paree qu'il en eft auteur, fans nous diffimuler que c'eft un ouvrage de début. MO NET {Madame), Mademoifelle Moreau; aujourd'nui madame , eft née a Bordeaux; venue a Paris, elle n'a pas tardé de s'annoncer dans la carrière des lettres avec diftinéHon, & de donnet de fon cceur, de fes mceurs & de fon efprit, 1'opinion la plus avantageufe ; comme nous O avons rien a rabattre des éloges qu'elle a recus dans le Journal de Paris, lors de la publication de fon roman, intitulé : Contes Orientaux, ou les recits du Sages Caleb, voyageur perfan, nous rapporterons la Notice des Journalifles ; elle ne nous paroit pas trop longue. Ceux qui aiment les contes, ( difent-ils), & qui aiment auffi la morale, mais la morale  des Auteurs. 175 fenfible, mife en action , parée des graces les plus féduifantes du ftyle, doivenr lire les Rècits du Sage Caleh. Ces contes ne font aiïurément traduits ni du Perfan ni de 1'Arabe. L'auteur a feulement eu 1'adreffe d'imiter la dicïion pleine de couleur & d'images qui nous charme dans les ouvrages dei Qrientaux; mais ce qu'on aime le plus, c'eft d'y retrouver a chaque page , un mélange heureux de fi&ion & de philofophie ; c'eft une raifon éloquente, douce, perfuafivej un tiftu d'évériemens vraifemblables, quoiqu'un peu exnaordinaires queiqutfois & liés avec art, pour faire gouter des vérités utiies. Dans le premier conté intitulé : les Aventures deDalime.k, ou la BUnfaifanct\une mèreveiile huk & jout fur fes enfans, leur prcdigue les plus tendres foins; tous les événemens, tous lesobjets amènés, choifis, arrangés nar elle deviennent des lecons ou des amufemens puur fes élèves; les promenades & 1'ctude, les récréations&le travail fervent a leur inftruction , les difcours & les actionsordinairesdelavie,cequi frappe leur fens& leur efprit, tout dans la maifon de cette tendre mère, foumis a fa raifon éclairée ou dirigée par fon amour ingénieux , confpire a rendre fa fille & fon fils bons & fages, afin de les rendre parfaitement heureux; fi le bonheur eft fur la terre, e'eftaufein d'une telle familie. Nulle peut être  i76" Notice n'offre une image auffi touchanre du bcnbeur & de la verca réunis. Dalmuck parle rarement de la bienfaifance a fes enfans, mais la leur mfpire fans cefte \ eed prefque un traité tfédticatkm, qu un pareil conté. Nous avons lu avec plus de plaifu encore celui qui a pour titre : la Femme bien corrigée ; il a plus d'intérét & plus daclion. La fable nous en a para auffi ingenieufe qu'attachanre & quelquèfois pathéticjde, cafaótères, incidehs, difcours, lécits, rédexions, tout eft imaginé, combiné pour nous tenir en garde contre la féduftion des apparences & 1'ilkfion des premiers jugemens. On en voit ici deseftets cruels. Peut-être après cette lecture aimeroit-on mieux donner dans un exces contraire, & ne plus former au rifque de fe, trompet aftez fouvent, que des jugemens lavorables , tant 1'imagination eft effrayée des fuites funeftesdeces jugemens faux & précipités qu'on fe permet tous les jours, non feutement d'après defimples conjectures, & eet intérêr d'amour propre , qui égare, même 1'homme qui fe rriéfie d'une idéé piquante & dramatique,^ c'eft que leperfonnage le plus penétré de cette vcrité, ou'on ne fauroit trop fe tenir en garde contre les apparences , eft comme forcé jufques dans les momens oii il fe la répète a lui-même , de juger fur des apparences qui le trompent , & de compromettre  des Auteurs." i7? compromettre malgré fes principes, fon repos • 7 hounneUr i Vh01™™ & le repos de ce qu'il a de Plus cher au monde, de fa femme, de fon ami ce caradtère vraiment comique manque a notre fcene :d pourroir ce femble produire le plus grand edet; linvention comme on fait, eft un préfent celefte qm a manqué, même a des hommes de geme, &ily adel'invention dans ces contes L=s morceaux que nous allons citer, donneronc" une rdee du ftyle de l'auteur, &ce n'eft pas fur "otre parole, qu'on va lui croire un ftyle h„mo. -eux,brdlant,facile&p,einde/haJersm° « Dahmeck uniquement fenfible a ia perre de »fonepoUfe,nesappercoit pas qu'elle a cefté " detre belle; fes efelaves demandent de la " fVtQ da»s^-traite, dyvivreavec elle & fortages; plufieurs ,ui Jevenoient inutiies • "-se le ,es garda tous. je n ai pas befoh "deux^tfott-elleifafille,^^ om ^ j' de moi. " D;limeck &fes ^ promenoient leurs re« gardsattendtis fur les campagnes verdoyante, 2 aPPercure»c ^ns la vallée de Nozakim " d6UX 7a§eurs de fatigue. La nuit ; ]^lchoi;^ ^ucen efifuyant leurs vifages -Vovez-vous, mes enfans, ces hommes qui Tornt XXXFII. M q U  ^tademlWechemmde „ humides foM btulcs dufolol, & ' P „„fe au midi, « OM prefeves °e " P J A ptéfeM ees fatalere ' ;rtave=foma«^da«cu»denoUsiome . , elle re-arde le chemin S „ n ofe repond de fes FourI>^5^eft e J ^mamtrèsh Pieds feulement touche la te^,i * J fl dan* ma iermede in.errogé te " „efonrpU,., zeelui qmerameneore „Wit & fe perdre avec CM. qm lom pre " r- d^cLfeSfomf»rla.erre 1. I^^averr^favorruferdelaforrmre^ „ favoir s'en paW«¥.  D *S A v x E v R s; * H°m»^s avides, ambitieux, friV0IeS, vous » pourauvezpéniblernenc la fortone, la gloire, - de va,ns honneurs, vous conté* après de » plaifirs difficiles & faux „. Volei une defcription de la Georgië, cette be le^éefi Wifée de la nature n a ^ee parun peuple efclave. - La GconJ ■ ^ 3U Pieddu Monr-Caucafe, qui \ " defend des froides haleines du Nord A fa » gauche un foleil toujours fans nuages, dore » de fes premiers rayons les eaux de la mer Gaf " PleMe;afadroite,lamerréfléchitIedifque " himinei,X de cec ^e fur fon déclin. Elle » ouvre fon fèln tranfparent : il s abailTe sV " 5l0"Sef «^Pfroir.il eftnuit pour I. moitié » du monde, mais la furface mobile de ces eaux " fel, de fouffre & de bitume, étin- » ede de feux, & le jour dure encore pour les /' hablCans de ces bordsfortunés. C'eft Ieclimatle * plusdouxleplustémpérédelafertileAfie Mais » la nature en fouriant, y déploye enfin fa ma» gmficence; le defporifme que d'éternels W » cons agirent au fein de la mollede, & que » fapropre terreur rend cruel, défole ces belles » contrées. La tous les hommesnaiflent efclaves " CS femmes dorit Je fort eft d'être en tous » beux plus malheurenfes que leurs tyrans , M ij  t|é Notice w y fonti lafoisefclaves du prince, de , pères, de leurs maris & vi&rnes oes InXs^-Quececonu-ade d'un des plus beauxpays do monde, ™^ par 1'efclavage , eft touchante & bien Ptéle fexe de l'auteur a rendu fufpetts nos éloges,nousvoilasürernenrjudifiés,&noslec. Js viennent d'apprendre a ne pas ]f ger anfll fur les apparences. Us trouveront menie dans mot vraiment fubhme. Le prompt débir d.lapremièreédmou aprouve „,,0 l s élone, étoient mérité,. L'auteur a a,ou.e une feconde partie a fes contes. EUe n eft iu 2* imé.effanre, ni moins eftrmable que la ^erminerons cette notice en difanr que l-aureur » peint fon ame dans fon ou.rage K ' dl. aconfervé avec M. Tto»« tant qrnU X, „o. correfpoudanee qui fa* 1. garant a'une eftime mérirée. jl,TNBUVrrOOBl.néiSangaft. pres CdL.eu.Tor.morreu.,",— *ff ^1 cömpagme de baS • ofics.s urvabdes . 1'Orient.  dis Auteurs.' iSt ïl a compofé des Lettres fur les romans en générai, anglois & francois, in-11, 1742. I L EST AUTEUR D'un roman ayant pour titre : les Soeurs Rivales "t même année ; La Pudeur, hiftoire allégorique, in-ix , 1739; La Familie Infortunée , in-12 , 1737; ia Comédienne , Comédie en un acte &C en profe l imprimée en 1740; Les Confejjlons de la Baronne de * * *, 2 vol., in-12, 1749; La Petite Nièce d'Efchyle, hiftoire athénienne, in-$°., 1761. On trouve dans /ej ^ mufèmens du Carnr & de VFfprit, de jolis vers du même Auteur qui a été pröné par les Journaliftes, & qui malheureufement a trop éparpillé fon efprit, en le répandant far de trop minces objets. Voyez la France Littéraire, pour la notice de fes autres Ouytages. MONTDORGE^ömcGautierde), Maitre de la Chambre aux deniers du Roi, étoit né a Lyon en 1727; iicultiva les lettres par gout & faas auire prétention que celle que peut y mettre un homme riche, aimable & jeté dans la M Lij  jgi Notice bonne fociété. II écrivoit facilement Sc agréablement, fa pobïie manquoit peut-être de caradère & d energie; mais livté au genre lyrique, d crut que pour imiter Quinauk, il fuffifoit d'être doux & tendre comme fon modèle; fon opéra intitulé : les Talens lyriques, dut k la mufiqne de Kameau & k Mademoifelle Camargo, la moitié de fes fuccès; cette célèbre danfeufe montra dans eet atte, une nouveauté piquante; elle chanta & danfa avec un égal fuccès. Elle protiva qu'elle favoit réunir de jolis fons, la juftefle de la voix k fes talens fupérieurs pour la danfe; il eft cependant vrai que le fujet étoit bien choifi, & que les détails répondent fouvent au fujet. M. de Momdorge eft le premier auteur lyrique qui fe foit affranchi dans la compolition des caradères de fes perfonnages , de la manière de Quinauk. L'acte de Tyrtée ne roule point fur des lieux communs de morale lubrique. La harangue de ce libérateur des Spartiates , eft du ton le plus noble; c'eft une harangue militaire. On a fu gre a M. de Montdorge de cette innovation qui a éte heureufement imitée dans la fuite. M. Pfflder a été le premier muficien qui ait demandé aux auteurs lyriques de la force , des caradères & des fcènes. On a vu de quelle manière il a traité le fujet d'Ernelinde. M. de Montdorge fut critiqué & même charT  des Auteurs'. i S 5 fonné; on fe fouvient encore de ce couplet qui commence ainfi : Garguille Gauthicr , Laiflez-la vos talens lyriques. UOpéra de Société dont il eft l'auteur, n'eut aucun fuccès, & il renonca a 1'Opéra. II a publié les Ouvrages fuivans: Réflexions d'un Peintre fur VOpéra ; L'arc d'imprimer les Tableaux en trois couleurs ; Les Lettres d'une jeune Veuve au Chevalier de Lu■fmeourt qu'on attribue a une autre plume. Un conre oriental intitulé : Nadir. Ce conté eft facilement écrit, la fable n'eft point compliquée : ce font deux jeunes amans qui ne peuvent être unis, que quand le Peuple 1'aura defiré unanimement.cefuffragen'eft pas longtems attendu. I L EST AUTEUR D'un conté intitulé : \\lfle de Paphos fin-11. II n'a. point fait imprimer les ouvrages de fociété qu'il avoit dans fon porte-feuilie & qu'il lifoit en comité a fes amis ou dans les petits foupers. Une de fes plus eftimables qualités fut la proteétion décidée qu'il accordoit auxartiftes, M iv  184 Notice aux nnificiens, aux poé'tes. Il favoit faire un ufago honorable de fa Fortune. II n'a tenu qu'a lui de fe faire un nom célèbre dans la carrière des lettres. II avoit de 1'efprit, de la facilité, des connoidances, il ne lui a manqué que le travail, il mourut le 24 Oétobre 1768.. MONTESQUIEU. Les Lettres Perfanes, nous obligent de donner place dans notre notice des Fées 8c des contes Orientaux, a un écrivain qui fembloit ne devoir fe trouver que parmi les auteurs nés pour les grands apper$us 8c pour les plus hautes conceptions. Mais J. J. Rouffiau, Voltaire, ont audi écrit dans ce genre léger. Pourquoi Montefquieu, qui fe déladoit en compofant le Temple charmant de Gnide, n'auroit-il pas fair ufage du cadre oriental, fi propte a la conir pofition des tableaux, de tous les tons &c de tous les fujet ? Son nom & celui des deux littérateurs célèbres que nous venons de citer, infirmeront du moins les adertions des abbés de Villiers 8c Jacquin qui ont trop décrié la féerie 8c les romans. Cette dernière branche de la littérature deurira toujours chez toutes les nations, & fur-tout en France. On peut tout peindre dans un roman; la galanterie, 1'amour n'en ont point fait leur domaine exclufif; la politique,la critique, la mdrale, vignnent faire 8c donner des lecons intérefl~antest  des Auteurs. ^5 Toutes les verrits s'y font aitnerj on na qui choifir fes romans, comme un favant choifit fes livres & fa bibliothèque J il y a par tout bonne & mauvaife compagnie. Les Lettres Perfanes font un roman oriental divifée en Lettres, dont une partie eft deftinée a peindre nos ridicules &nos vices, fouvent avec le ton, la manière & le ftyle des Orientaux. Montefquieu qui étoit né pour fe frayer dans chaque genre une route nëuve & particulière a lui feul, fut créateur dans les Lettres Perfanes ; car c'eft le premier ouvrage ou le ftyle oriental alt ére appliqué i une peinture forte des mceurs & a des vérités philofophiques, auffi neuves que profondes. Nous ne citerons qu'une léttre, c'eft la ttentediuitiéme, qui regarde notie prétendue fupcriorité furies femmes, & nos lecteurs verront fi les idéés de l'auteur ne font pas de celles qu'on n'avoit point encore trouvées dans les romans C'eft une grande queftion parmi ces hommes, de favoir s'il eft plus avantageux d'öter aux femmes Ia liberté, que de la leur laifler, il me femble qu'il y a bien des raifons pour & contre; fi les européens difent qu'il n'y a pas de générofité i rendre malheureufes les perfonnes que Pon aime, nos afiatiques repondene qu'il y a de la badefte aux hommes de rènoncer k 1'empire que la nature leur a donné fur les femmes.  i8(j Notice Si on leur dit que le grand nombre des femmes eft embatradant, ils répondent que dix femmes, qui obéident, embarraftent moins qu'une qui n'obéitpas; que s'ils objeftent a leur tour, que' les europcens ne fauroient être heureux avec des femmes qui ne leur font pas fidèles, on leur répond que cette fidélité, qu'ils vantent tant, n'empêche point le dégout qui fuit toujours les padions fatisfaites,que nos femmes font trop a nous; qu'unepodeffion d tranquille ne nous laiile rien a défirer , ni a craindre; qu'un peu de coquettterie eft un fel qui piqué Sc prévient la corruption. Peut-être qu'un homme plus fage que moi feroit embarrafte de décider : car fi les Aliatiques font biendechercher des moyens .propres a calmer leurs inquiétudes, les Européens font fort bien auffi de n'en point avoir. Après tout, difent-ils, quand nous ferions • malheureux en qualité de maris, nous trouvenons toujours moyen de nous dédommager en qualité d'amans.Pour qu'un homme put fe plaindre avec raifon de 1'infidélité de fa femme , il faudroit qu'il n'y eut que trois petfonnes dans le monde ; ils feront toujours a but, quand il y en aura quatre. C'eft une autre queftion de favoir fi la loi naturelle foumet les femmes aux hommes. Non, me difoit 1'autre jour un philofophe très-galant,  des Auteurs. 187 la nature n'a jamais diere une tellê loi. L'empire que nous avons fur elles eft une véritable tyrannie ; elles ne nous 1'out laifle prendre que paree qu'elles ont plus de douceur que nous , & par confequent plus d'humanité & de raifon. Ces avantages qui devoienr, fans doute , leur donner la fupériorité, fi nous avions été raifonnables, la leur ont fait perdre paree que nous ne le fommes point. Or s'il eft vrai que nous n'avons fur les femmes qu'un pouvoir tyrannique, il ne 1'eft pas moins qu'elles ont fur nous un empire narurel : celui de la beautéi qui rien ne rédde, la notre n'eft pas de tous les païs, mais celui de la beauté eft univerfel. Pourquoi aurions-nous donc un privilege ? Eft-ce paree nous fommes les plus forts ? Mais c'eft une véritable injuftice, nous employons routes fortes de moyens pour leur abattre le courage; les forces feroient égales, fi 1'éducation letoit auffi j éprouvonsdes dans les talens que 1'éducation n'a point aftbiblis; & nous verrons fi nous fommes fi forrs. II faut I'avouer , quoique cela choque nos mceurs,chezles peuples lesplus polis, les femmes ont toujours eu de 1'autorité fur leur maris; elle futétablieparune loi chezlesÉgyptiensen 1'hon«eur d'/Jïs, chez les Babylouiens en 1'honneur de Scmiramis. Qn difoit des Romains qu'ils  iSS Notice commandoient a toutes les nations , & quils obéifïbient ï leurs femmes ; je ne parle point des Sauromates qui étoient vérirablement dans la fervitude de ce fexe} ils étoient trop barbares pour que leur exemple puifle être cité. Tu vois moncher Ibben, que j'ai pris le gout de ce pays-ci, oü 1'on aime ï foutenir des opinions extraordinaires & a réduire tout en paradoxe. Le prophéte a décidé la queftion, & a re-lé les droits de 1'un &z de lauwe fexe. Les femmes, dit-il, doivent honorer leurs mans, leurs maris les doivent honorer; mais ils ont 1'avantage d'un degré fur elles. — C eft ainfi que Montefquieu favoit aggrandir fes fujets, & qu'Ü indruifoit fans cefle, en mettant a toutes fes produdions le cachet de l'homme profond & du génie; l'auteur avoit vingt-einqans, il étoit.encore dans fa pro vince quand il écrivoit les Lettres Perfanes. C'étoit affurément débuter avec vigueur, & du premier pas aller fort lom. Son introdudion eft ronde, Si il paroit que J.-J. Roujfeau s'eft modelé fur la manière de Montefquieu pour 1'annonce, ou comme on dit vulgairement, pour la préface de fes ouvrages. — Je ne fais point, ( dit Montefquieu ), d'épitre dédicatoire, & je ne demandé point de protedion pour ce livre; on le lira, s'il eft bon , & s'il eft mauvais, je ne me foucie pas qu'on le lifei J'ai détaché ces premières.  des Auteurs." 189 lettres pour effayer le gout du public, j'en ai un grand nombre dans mon porte-feuille que je pourrailui donner dans la fuite. Mais c'eft a condition que je ne ferai pas connu ; car d 1'on vient a favoir mon nom , dès ce moment, je me tais. Je connois une femme qui marche aftez bien, mais qui boïte dès qu'on la regarde; c'eft adez qu'on blame les défauts de 1'ouvrage, fans que je préfente encore a lacritiqueceux de ma perfonne. Si 1'on favoit qui je fuis: 011 diroir: fon livre jure avec fon caractère; il devroit employer fon tems a quelque chofe de mieux. — On ne peut être ni plus ferme ni plus concis. Les Lettres Perfanes eurent un débit fi prodigieux que les Libraires mirent tout en ufage pour en avoir des fuites. Monfieur, difoient-ils a un auteur qui leur propofoit un manufcrit, faites-nous des Lettres Perfanes, & nous vous acheterons vos manufcrits. Nous ne parierons point de la foule d'imitateuts qu'eurent les Lettres Perfanes. Le feal marquis d'Argens s'eft diftingué dans cette imitation. Ses Lettres Juives font fortes de penfées & de faits; malheureufement pour lui, le ftyle n'eft pas celui de Montefquieu. II n'a point les graces de fon prédécedeur il eftnud, dur, impérieux. II dit tout& dit trop. L'hiftorien , le romancier, le philofophe difparoiffent trop fouvent pour ne laider appercevoir  irio Notice qu'un ccrivain qui livre des farcafmes a la malignité publique, St qui a moins intention de réformernos mceurs, que d'invecriver la Religion & les Prêtres. Nous avons regreté de voir un ouvrage •qui pouvoir être fupérieur, fouillé de toutes ces taches. M. cYArgens avoit tout ce qu'il faut a un écrivain pour fe diftinguer & pour mériter 1'eftime de la poftérité. 11 ne lui a manqué qu'un éditeur honnête qui 1'eüt dépouillé de fes défauts & Fauroit produit dans fon beau jour. On auroit eu peu de travail a faire, pour le purifier. La hardiede qu'on reproché a Montefquieu dans les Lettres Perfanes, a peut être poude trop loin les imitateurs, & M. cYArgens eft celui qui a franchi les bornes. M. de Voltalretiiononce. fur le mérite des Lettres Perfanesily en a dit-il, de très-jolies, d'autres v trcs-hardies, d'autres médiocres , d'autres frii, voles •, les détails de ce qui fe pafte dans le férail cYUfbeck a Ifpahan, n'intéredent que foible» ment les Auteurs Francois ». — Quant a la hardiede que Voltaire reprochoit a Montefquieu, il nous femble que fon éditeur a répondu d'une manière convaincante. ■— Les Perfans qui devoient jouer un fi grand rble dans les lettres fe trouvoiertt tout-a-coup tranfplantés en Europe, c'eft-a-dire, dans un autre univers. Il y avoit un tems oü il falloit nécedairement les repré-  des Auteurs. 151 fenter pleins d'ignorance & deprcjugés.On n'ëtoit at'tenrlf qu'a faire voir lagénéracion & le procrès de leurs idéés. Leurs premières penfées devoient être finguüères! 11 fembloit qu'on n'avoit rien a faire qu'a leur donner 1'efpèce de dngularité qui peut compatir avec de 1'efprit. On n'avoit a peindre que le fentiment qu'ils avoient eu a chaque chofe qui leur avoit paru extraordinaire. Bien loin qu'on penfaca intérefler quelque principe de notre religion, on ne le foupconnoit pas même d'imprudence. Ces trairs fe rrouvent toujours lies avec Ie fentiment de furprife & d etonnement Sc point avec 1'idée d'examen & encore moins avec celle de critique. En parlant de notre reli gion, ces Perfans ne devoient pas paroitre plus inftruits que lorfqu'ils parloient de nos coutumes Sc de nos ufages; Sc s'ils rrouvent quelquefois nos dogmes finguliers, cette fïngularité eft toujours marquée au coin de la parfaite ignorance desliaifons qu'il y a entre ces dogmes & nos vérités. — On ne peut s'empêcher de trouver cette défenfe rrès-ingénieufe & fondée jufqüa un certain point au-dela duquel on deviendroitle fcrutateur indifcret des motifs cachés de l'auteur. M. de Voltaire ne fut pas toujours équitable dans fes jugemens. L'intérêt perfonne! y avoit trop de part; Montefquieu s'étoit permis de dire un peu haut, que Voltaire ne feroit jamais  192 Notice qu'un bel efprit. Cette opinion dut paroitre rigoureufe a Voltaire; & il 1'étoit en effet, fi' Montefquieu avoit vécu quelques amices de plus, il feroit revenu de cette fentence hafardée. Mais Voltaire fe croyoit offenfé, on pouvoit dire de lui; Manet aha mente repoftum Judicium "Paridis fpret&que injuria forms.. II jugea afon io\xx Montefquieu,'\\ 1'attaqua dans les détails & fe fervit précifément du genre d'attaque , dont l'auteur vouloit qu'on ne fit point ufage a fon égard; il demandoit d'être jugé par 1'enfemble de fon ouvrage; & il n'y avoit pas d'autres moyens pour le connoitre, le fentir & le juger avec connoiftance de caufe. Valtaire auroit perdu la moitié de fes redburces en le predant dans La cotalité, il mit en avant 1'expédient dont les Journaliftes fe fervent le plus fouvent. II tronqua, il dépega, il détachades propofitions & jugea legrand homme.Tous ceux qui après lui, ontréfuté Montefquieu , n'ont pas eu d'autre fecret. Chacun a foutiréun chapitre,une ciration,unfait,& on s'eft cru fort, quand le philofophe faifoit un léger faux pas, ou didimuloit dans fa marche. Mais Voltaire n'a pas tardé a lui rendre une juftice éclatante, il écrivoit: Le genre humain avoit perdu fes droits, Montefquieu les a trouve's & les lui a rendus. C'eft  »es Auteurs. 193 Ceft aux fuccès des Lettres Perfanes, que Montefquieu dut fa nomination a une place de 1'Académie Francoife. II n'y vint point comme la médiocrité, fans rencontrer 1'envie fur fes pas. II furarrêté dans fes prérentions; des délateurs 1'avoient peint aux yeux du Cardinal de Fleury, comme 1'ennemi des dogmes, de la difcipline & du facerdoce. II n en falioit pas davantage pour allarmer le cardinal de Fleury, les eccléfiaftiques & même le roi. Louis XIF~ne s'arrêta pas longtems a leurs clameurs ; mais les ennemis étoient puiffans & tinrent bon. Cependant il y avoit dans les Lettres Perfanes , une quantité de morceaux capables de racheter 1'intention équivoque qu'on avoit pu remarquer dans quelquesuns , & certes on n'a pas mieux annoncé le dévouement pour fes maitres. On lit dans la lettre foixante dix-feptième du fecond volume « le miniftre (de Suède) étoit accufé d'un grand » ciime : c'étoit d'avoir calomnié la nation, & » de lui avoir fait perdre la confiance de 'fon » roi, forfait qui, felon moi, mérite mille morts. » Car enfin fi c'ed une mauvaife aclion de » noircir dans 1'efprit du prince le dernier de » fes fujets , qu'eft-ce lorfque Fon noircit la » nation entière, & qu'on lui óte la bienveiU » lance de celui que la Providence a établi pour » faire fon bonheur ! Tome XXXFII. N  T.?4 Notice » Je voudrois que les hommes parlalTent aux ,» roi», comme les anges parient a notre faint i» prophéte. » Je ne fais comment il arrivé qu'il n'y a » prefque jamais de prince fi méchant , que » fon miniftre ne le foit encore davantage. S'il » fait quelque aftion mauvaife , elle a prelque » toujours été fuggérée \ de manière que 1'ambition des ptinces n'eft jamais fi dangereufe que la baftede d'ame de fes confeillers. Mais » comprends-tu qu'un homme qui n'eft que „ d'hier dans le miniftère , qui peut-être n'y » fera plus demain , puifte devenir dans un mo5> ment 1'ennemi de lui-même, de fa familie, » de fa patrie, du peuple qui naïtra a jamais de » celui qu'il veut faire opprimer. „ Un prince a des padions, le miniftre les * remue : c'eft de ce cbtéda qu'il dirige fon ,> miniftère ; il n'a point d'autre but, ni n'en » veut connoitre. Les courtifans le féduifent par „ leurs louanges, & lui le datte plus dangereufement par fes confeils, par les defteins qu'il „ lui infpire & par les maximes qu'il lui propofe». On ne pouvoir mieux juftifier les rois qui , par une fatalité attaché* a leur grandeur, ne peuvent tout voir & tout connoitre par eux mèmes, qui font fi fouvent ttompés. On ne tint point compte a Montefquieu de ces penfées , &c ou le perfécuta fourdement.  D * I A Ö t E U R Si lp( Cette obftination nous rappelle la perfécution que M. Duleroc eduya a foccafion de ÏEncyclopédn? &dont ö ne pur venir, boi «nalgrc Ia faveur la plus éclatante. Madame Ia Alarqmfe^p^^^,^ écri vu: Monfieur je »e puis nen dans laffaire du föS^^^ ^ae} on dit quil y , dans ce livre, des ma«mesco„trairMa la Religion & d 1 autoriré du rouSi cela eft, il fauc brfller Ie ,ivre. fi ^ ^ Pas, .1 faut bröler les calomniateurs. Mais malbeureufemenr ce font les eccléfiaftiques qui vous •ccufent&ils „e veulent pas avoir rort; & font trop.dangereux, &c. &c; &cc. M™fl*«* Paffer Potage , & quelque tems apres, par le crédit du Maréchal cVEfllcs fon arm , d fut rec^ a 1'Académie Francoife. On Im at^bde d'avoir encouragé par le ton de fa crmque ce délugedecrits qui onr paru contre Ie Chriftianifme* contre le gouvernement: on seft ^pe.Ceft au^qu'H^i ? "f, de h d'écrire & de penfer. Hrendit la prede libre, il n'aimoit pas les prêtrequi avoient fatigué la vieillede de Louis XIV & d les vit avec plaifir tourner en ridicule. Les jarcafmes prévinrentheureufementles fuites que es troubles de la conftitution auroient eues fi Jes e prus avoient été foumis & dociles comme ious leregne précédent. La révocation de 1'édit Ni/  Notice de Nantes, étoit une plaie encore fraiche fous le ^W:eh!quenécrivoit-onPas!Cornbien d'idées germèrcntfur lesptincipesd'unbon gouvernement! Telles font les caufes de la hcence des écrivains. Montefquieu qui, comme Voltaire naquit a cette époque, penfa, paria, eeuvit, X fut un bonheur pour nous. Ces caufes tiennent moins a eux qu aux circonftances qui dérivent de 1 opinion qui amene dans nos principes des variantes auffi peu durables qüeL Le tableau de ces diftemblances feroit ttès-piquant, Sc jeteroit peut-etre un grand iourfur ces époques de 1'hiftoire quon juge Sc qu'on condamneleplus fouvent fusies connoitre 4 On pouvoir ajouter que la facihre don les écrivains jouiffoienr fous le miniftère indu gent quifuivitla régence, de produue leurs eens Sc d'écrire avec liberté, ne fervoit qua multiplier les auteurs philofophe, D'adleurs fous un gouvernement auffi doux que le notie , d eft toujours permis de prcfenter la vente pourvu qu'elle ne ,ienne ni du farcafme ni de la malignité. Ceft a cette bonte quil leroit plus naturel d'atttibuer le ton de quelques écrivains que 1'amour du bien etnporte au dela des bornes recues , Sc qui norit jamais eu les motifs dangereux de braver le prince Sc les oix Montefquieu a donné des preuves de ce refpeét  des Auteurs. 197 & de ve dévouement, en même tems qu'il fe plaignoit des abus. Nous n'oferons point donner une notice des autres ouvrages de Montefquieu; ce n'elt point ici la place, & nous n'avons pas aflez de témérité pour apprécier ce grand écrivain qui fat accufc d'être athée par le gazetier eccléfiaftique, & enfuite d'être déifte.Un Abbé débonnaire avoit commencé les hioftilités. Montefquieu eut en ce point, un. rapprochement avec Fénelon qui fut pareillement attaqué par un abbé Faydit; nous parlerions plus volontiers des heureux qu'il afaits, Si le nombre en eft grand ; mais le public en eft inftruit, 1'ame &Ie genie de Montefquieu fontégalement eftimés. Sa bienfaifance nous infpire une réfiexion honorable a la littérature. C'eft qu'en général,les Écrivains célèbres, font bons, humains Sc bienfaifans. C'eft une clafle d'hommes a part, qui pratique les vertus fans oftentation & fans bruit. On n'a point a leur reprocher de fcandale , ni de vices bas. Pour peu qu'on veuille les confidérer, on fentira la juftefte de notre obfervation. Charles de Secondat, baron de la Brede Sc de Montefquieu, d'üne familie diftinguée de la Guyenne, naquit au chateau de la Brede prés de Bordeaux Ie 18 Janvier KJ89. II mourut le io Févtier 1755, d'une duxion de poitrine. On fait combien fon illuftre amie Ia duchefle &Ai- Nii]  i in-iz; Vefprit des loix , 3 vol. f/2-80, 1748 ; Le Temple de Gnide, 1 vol. in-iz\ Arface, roman , in-1i ; Ses Lettres Familières , in-\% 1767; MORELL. Les Contes des Génies, deux vol. in-d, ^766^  des Auteurs. 1^9 Ils ont été éci-its en anglois, langue maternelle de l'auteur. Nous voyons par la préface de fon rraducteur, que dr Charles Morell a été ambafladeur de Londres a Conftantinople , Sc qu'il a négocié aux Indes. On a de lui une Relation de l'lnde. Les Contes des Cénles font trés - eftimés dans l'lnde, ou ils amufent, dit le traducceur, & infrtuifent la jeunefte des deux fexes. L'auteuc s'exprime aind. — cc Pendant ma longue & pénible réfidence dans différentes parties de I'Ane, tant fous la domination du Mogol , que dans les érats de 1'empire Ottoman , j'eus occadon de connoitre un ouvrage perfan, intitulé : les Charmantes Legons d'Horam, fils d'Afmar, livre fort eftimé a Hifpahan Sc a Condantinople; Les doéteurs de la loi de Mahomet le lifent fouvent a leurs difciples pour les excitet a la pratique de la vertu Sc a 1'amour de la religion ». Sir Morell aflure avoir connu au fort SaintGeorge, Horam, 1'aureur du livre, que les Mabométans regardoient comme un faint. M. Robinet, né a Rennes en Bretagne , le Juin 17? 5 , a traduiten frangois cette tradudion angloife. Ce tradudeur eft cité dans la France Littérairs. Ces Contes avoient été publiés en détail dans les écrits pcriodiques de Londres. L'accueil que Niv  200 Notice le public leur avoit fait, dérèrmina l'auteur a dcnner la colledion enticre. Ceux qui aiment la bonne morale, mife en action par des ètres imaginaires , y trouveront de quoi fatisfaire leur gout. MORLIERE\jacques-Augufte de), Chevalier de ï'Ördre du Chrift en Portugal, né a Grenoble en ifo'i, mort en 1782. II s'eft/fait une efpèce de célébrité, moins par fes ouvrages que par la dictature qüil s'étoit arrogée fur toutes les nouveautés qui paroiffoient fur le rhéatre francois. II établdloit fon camp dans le parterre & s'entouroit de jeunes gens qui lui étoient dévoués, & felon les fignes convenus au premier mouvement, il faifoit fiffler impitoyabiement une pièce , ou la portoït aux nues. Afteurs, danfeurs, debutans, auteurs, tous dépendoient de fes manoeuvres. On le craignoit & on ie courtifoit, on 1'accueilloit, on le recherchoit. Mais ayant voulu, a fon tour, fe produire au grand jour , fon crédit bailTa tk alfa toujours en déclinant, jufques-la qu'il fut abandonné & prefque oublié. On 1'accufa de recevoir de 1'argent Sc de vendre fes fufTrages Sc fes cenfures. 11 avoit fuccédé dans ce fingulier tribunal a un comte cle Fontenac qui vivoit en 1720, mais qui plus mefuté, Sc fe refpectant, s'étoit réelle-  des Auteurs.' zoi ment attiré Ia confidération des auteurs. Sans avoir jamais rien écrit, il reffembloit a Conrard, Académicien dont parle Defpreaux, qui avoir le jugemenc fi pur tk des counoidances dont il ne faifoit part qüaux écrivains qui le confulroienr, Le Comte de Fohteriac dccidoit du forc des Pièces, non point en cabalant, mais paree qu'on favoit qu'il les avoit approuvées. Son fuffrage étoit la regie de celui du public. Le Chevalier de la Morliere débuta comme lui, & perdit bien vite fon modèle de vue. Il avoit jugé a propos d'entrer en lice contre M. Frercn, & cecoit faire preuve de maladrefle. Il crut dans fa Jettre adreftee a ce journalide, avoir donnc le véritable contrepoifon des feuilles de l'Année Litteraire. Cette lettre parut en 1754 , iri-ii. On trouve dans la France Littéraire la notice dé fes comédies & de fes autres ouvrages; nous ne lui avons dbnrié place dans cette nomenclature, que pour le roman cYAngola , qui eut plus de fiuvcs qu'il n'en méritoit. La première édition ed de 1741J, z vol. In-11. Ses Contes offrenr cependant des fituations intéredantes. Le genre fombre paroidoit lui convenu, & s'il l'avoit cultivé, peut-être qüily auroit obtenu une forte de diftinction. MORTEMAR(Madame de), vit; elle eft dans la fleur de 1'age , & on s'en appercoit a la  202 Notice lecture de fes ouvrages. Ceux qui ont le bonheur de la connoitre , la jugent avec la même complaifance dont les Journaliftes lui ont donnc des preuves. EtLE EST AUTEUR Des Amufemens du Jour , ou Recueil de petits Contes dédiés a la Reine. Cette brochure contient le Songe, conté allégorique; TOracle, conté oriental; Luerdab , conté perfan ; Oka & Crinkavel, contes de fées; les deux Amis, conté indien; Jujline, ou les Egaremens d'un cceur fenjible , anecdoéte francoife ; Zoé, anecdote allemande. Ce font autant de petits ouvrages qui plaifent par des defcriptions agréables, par une morale fagement diftribuée, &: par la variété Sc 1'agrément des portraits. Si j'ai pu efquiiTer quelques aimables portraits, dit l'auteur dans fon cpitre dédicatoire a la reine , 1'on pourra reconnoitre que j'avois choifi le plus beau modèle, mais qüil faudroit un autre pinceau pour rendre fes traits chéris de bienfaifance , s'ils n'étoient gravés dans rous les cceurs. MORVILLE {Martine de). Nous navons pu nous procurer une notice fatisfaifante fur Mademoifelle Martine de Morville qui, depuis 1'année 1768, a fait inférer dans les Mercures.  des Auteurs. 203 des tradu&ions de Contes Allemands dans le) genre orienral & de féerie. Nous avons remarqué beaucoup de ralent dans eet auteur , foie qu'elle traduife en effet, ou qu'elle publie fes ouvrages fous le titre modefte d'une traduétion. Sou ftyle eft naturel Sc fans prétention, & die avec facilité ck agrémenr ce qu'elle veut dire. Nous invitons nos lecteurs a fe procurer la lecture de Mirloh, conté oriental qui a été imprimé en 1769 ; Ladila, anecdote turque, publiée dans le courant de la même année; Mes Foiblejjis, cön-re ; A\en, ou l'Heureux Soi-difant qui ont été inférés dans les Mercures de 1770, Elle a traduit la Nuk de Gejpier. L'Ouvrage le plus confidérable que nous ayons d'elie, a pour titre ; Les Egaremens réparés, roman en 1 vol. i/2-n, 1773. II eft écrit avec fagefte & dans un ftyle attachant, O N C O N N O I T I>' ELLE U Hiftoire de Zen^i; O/man ■ Le Rependr Tardif; Jupiter jujiifié, ^ MOUHY (Charles de Fieux , Chevalier de ), né a Merz , en 1701, eft mort a Paris , en 1784. Sa carrière a été longue, & employee d'une ma-  io4 Notice nière qui marquoit continuellement & journellement fon exiftence. On peut dire de lui : d vécut, & il écrivit • car il travailla fans relache. Ce n'eft pas qu'il fut jaloux de penfer, de chercher des fujets, de créer enfin. Le rems de la méditation lui auroit enlevé trop de momens : d'ailleurs fa confcience 1'avertiffbit de ne pas rechercher la gloire d'être un auteur original, & perfonne n'a été auffi docile que lui aux avis de fa confcience. Voici a - peu - prés quelle étoit la manière de vivre du Chevalier de Mouhy. 11 fréquentoit les cafés : ce font des afyles ou des défceuvrés qui ont de 1'efprit, fe retranchent contre 1'ennui de végéter feuls dans leurs logis. On y parle de beaucoup de chofes , on y plaifante , on y juge auteurs, acteurs, avocats , miniftres : on déraifonne tant que 1'on veut, & on y raifonne auffi. Le Chevalier de Mouhy alloit aux opinions , recueilloit les fuffrages; & rentré le foir chez lui, il compofoit un roman dans lequel les aventures du jour , celles qu'on lui avoit racontées, trouvoient place. Paroiflbit-il un Ouvrage nouveau , que le Public s'emprefsat d'accueillir, bonne aubaine pour M. de Mouhy. 11 compofoit un roman qui faifoit auffi-tót le pendant de 1'autre, & qui fe vendoit. Ainfi le Payfan Parvenu donna naiffance a la Payfanne Parvenue, les Mille & une Nuits , aux Mille & une Faveurs. Y avoit - il une querelle littéraire? M. de Mouhy compofoit un  des Auteurs." 205 livre fur Pévénement ou fur la querelle. Ne fair-onpas quel eft le Mafque de Ter ? Ilfe hate bientót d'imaginer les avenrures de ce prifonnier célèbre. Rien, en un mor, ne lui étoit indifférent. Son heureux caractère s'intéredbit a tout, & fon efprit peignoit tout jufqüau danger des Spectacles. Son amour pour les collections lui avoit fait tirer parti de tous les rebus des foyers dont il entreprit la nombreufe édition. II importoir, fans doute, au Public, de favoir ce qu'on avoit dit en 1740, au foyer, fur une Pièce tombée & non imprimée, & fur un Débutant qu'on avoit liftlé. Ces précieufes anecdotes eurent pendant vingt ans , pour le Chevalier de Mouhy, un piquant que fes leéteurs n'y ont point trouvé. En vain entreprit-il de mettre quelque méthode a fa collecrion. Le Public ne lui tint compte de rien. Voici cependant 1'ordre de fon Ouvrage : le premier volume contient un état des Myjïères, Mo~ ralités, Farces, Soties, repréfentés par les Confrères de la Pardon. Cet état étoit tiré de la Biblioihèque du Théatre Francois par M. le Duc de la Valiere. Aind on étoit difpenfé de reconnoiffance envers le Chevalier. Cette lifte étoit terminée par une courte notice fur les Drames nouveaux, fur les Pièces anonymes & par un Dictionnaire de tous les Ouvrages repréfentés fur le Théatre Francois, depuis 1552 jufqu'en 1780. -— Le fecond volume contenoic deus Diclion-  ior> Notice naires f 1'un regardoit les Auteurs depuis Porigine L'Amante Anonyme ,in-\x; Lc Financier ,in-n, 5 parties. II a travaillé a la rédaótion de la Castte de France, depuis le 18 Mai i749 jufclu'aU Pre" mier Juin 1751. » » .-• La quantité de volumes que M. de Mouhy a compofés,  des Auteurs. i09 eömpofés, n'eft pas ce qu'il y a de plus étonnanc, c'eft qu'il ait pu, dans 1'annce 1735 , tonner au' Public Lamékis, 2 vol. is- m; /« Mémoires de Fieux , 4 vol.; Paris , ou le Mentor d la Mode, 2 vol.; les Mémoires Pofihumes du Comte de *** ' 2 vol. • la Payfanne Parvenue, 4 vol. II a donc • imprimé dans une annéë, quatorze volumes. C'eft , pour Ie coup , un prodige! On ponrroit répondre qu'il n'eft pas impoffibie de multiplier Ie» mauvais volumes, fi les productions du Chevalier de Mouhy étoient de ce mauvais qui fait tombetIe livre des mains. On ne lui contefte point Ie mérite rare de 1'invention, & de favoir filer les fituations. II intrigue & dénoue quelquefois heureufement fes fujets. II écrit mal en général, mais il ne fait point dcraifonner fes perfonnages! Sa faclure, enOn, n'eft ni ridicule, ni extraordinaire, ni trop fimple. Comment faifoit - il ? Nous 1'avonsdit, en commencant cette Notice. li ccrivoit touiours, il écrivoit fans cefTe. Toute fa fortune étoir dans fa plume , il l'a faifoit valoir par un exercice continuel. Nul Auteur n'a fu titer un audi bon parti de fes livres que lui • il en avoit lespoches de fon habit, toujours rem ' plies; il les préfentoit d fes amis, a fes connoiffances, d fes protecteurs , aux cafés. Benevole ou non , il falloit achéter, pour fe débarrafTer de fes inftances. Les placards de fes Ouvrages étoient Tome XXXVII. q  210 N o t i c e affichés dans tous les coins des mes. U s'y prenoif de tant de maniètes, qu'il vendok fes édiuons. Voltaire difoit qu'on n'artivoit point a la pofterité avec un gros bagage. Le Chevalier de Mouhy n'eft point enrièrement dans cette humdtante exclufion. Son roman de Bigam pourra hu procurer une réputation de quelque durée. Au tefte, ceux qui ont connu l'auteur , aflurent qu d ne fe repaiflbit guères de cette fumée. H vouloit vivre, le foin de fa renommée ne le tourmenta , „i nelaiguillona jamais. 11 ne fut point jaloux d'auementer le nombre des romanciers onginaux. Avec plus de talens, difons mieux, avec ün peu d'èmulation il auroit matque fa place parmi les écrivains diftingués qui écnvoient des romans , ft fe feroit créé un véritable genre L'abbé Prevot avoit attendri fes leéteurs , le Sage les avoit attirés par le fel de fes critiquesy Mamaas par ladrefte avec laquelle d devodoK les replis de nos cceurs , & par la vet.ee de jfe* obfervations-, Voltaire, par fa philofophe & fa e,'ieté • Crébillon le hls , en fuivant les traces de Pc-rone. Le Chevalier de Mouhy , comme on voit, pouvoit fe claffer i fon tour, & il ne la pas fait. MURAT {la Comtejfe oe). Henrieae-Julir deCajielnau,^ en y.670, mourut i Paris en  des Auteurs; irl *7»V--t.publié fon DiableBoaeux, d 1 de Murat fe fervit de fon idee pour ^«i t alors. La ville de Locbes eft d^ epatlenomdeSegovieenEfpagne.  oes Auteurs! 215 On croit que les Mémoires de fa V~ie lui ont été attribués.' M. le M. de P pofsède un manufcrit des Lettres de cette dame, écrites a des amies auxquelles elle adreda. des Nouvelles , des Contes de Fées, de petits Romans. On y trouve un Roman intitulé le Sopha Amoureux qui n'a jamais été imptimé. Elle a compofé plufieurs Chanfons; elle en a fait une fur l'Hiver de 1709 , que nous tranfcrivons telle que nous la trouvons dans 1'analyfe que M. le M. de P a faite des ceuvres de cette dame. Le tendre Amour, foupirant Hier, difoit a fa mère : Je ne fais quel accident A fait geler ma terre y Mais il fait bien mauvais tems Dans l'ile de Cythère. © Les Amoureux font tranfis Auprès de leurs Bergères ; Dans fes doigts on voit Tircis Souffler, & ne rien faire : Ah ! que de cceurs engourdis Dans 1'ile de Cythère l m I l nous faudroit des Amans Difcrets, mais tcméraires, Qui nc fruTent point tremblans, Oii;  £14 N O T 1 C ï Mais ardens 8c fincèrcs : Tels ne font pas ceux du tems, Qui règne dans Cythère. o Après le froid, c'eft la foim Qui nous livre la guerre > On appauvrit le terrain D'amour & de fa mère : On n'a que du mauvais grai» Au marché de Cythère. © 3 a d i s 1'on alloit femant Le grain en bonne terre ; On faifoit facilement Une récolte entière : Que de déchet a préfent Aux greniers de Cythère 1 L'o N apportoit a foifon Farine aux Boulangeres: Dans cette morte faifon , A peine les Meünières Retirent-elles du fon Des moulins de Cythère. En général les penfées de madame de Murat ont de 1'efprit & de la facilité. Ses Romans ont plus de réputation. Ony voit (dit M. le M. de p ) le merveilleux racheté pat la purete du gout" pat la fagefte des idéés, pat 1'honnèteté des tableaux, pat tme certaine pkilofephie de  des Auteurs. 115 mceurs qui cara&érife le fiècle ou ils ont été éctits. II y a deux eens ans tout cela n'exiftoit pas en France; il regnoit au contraire une crédulité fotte, une barbarie de mceurs , une grofliéreté d'efprit qu'on a de la peine a concevoir aujourd'hui. Audi le Roman de Mélufine &c tant d'autres de ce tems , peuvent être regardés, a quelques égards , comme des chefs-d'ceuvres d'ineprie & des monumens du plus mauvais gour. Dans un fiècle mieux inftruit, plus poli, plus fage, les idéés en fe peifeótionnant, ont ennobli, pour ainfi dire, les plaifirs de Fimagination, II a fallu que la raifon put approuver ce que le délire même paroidoit enfanter. Les tableaux les plus extravagans fe font fait eftimer par une ordonnance & un coloris imités, pour ainfi dire , de la délicatefle des efprits de ceux qui devoient les juger. Les Contes de madame de Murat, de mademoifelle de la Force^de mefdames d'Aulnoy, d'Auneuil, font en quelque facoa les premiers qui marquent la révolution. Vers a Madame de MuRAT. L e beau partage que 1'efprit! Et que Murat en eft pourvue ! On ne 1'a pourtant jamais vue 5e vanter de ce qu'elle écrit. J^wM. siz Vertrok. O iv  %\S Notice N NoBLE {Eujldehcii) naquit a Troyes en Champagne en 16)43; fa f"amiiie éc°u lïluf~ tree par plufieurs emplois confidérables dans la magiftrature. Son père & fon grand père avoient été lieutenans-généraux au bailliage de Troyes, & confeillers au grand confeü. 11 fuivit leurs traces, & ayant montré de 1'efprit Sc des talens, il fut (nous ne pouvons pas bien dire en quelle année) revêtu de la charge de procureur-général au parlement de Metz. Pendant quëlqües années , il exerca cette place avec éclat : il fe tróuvl dans des circonftances propres a prouver qu'il étoit habile politique, adroit courtifan Sc jurifconfulte trés-inftru.it. Mais enfin il abufa des taleUs que 1'on reconnoilToit en lui; il fur foupconné de vexation Sc de malverfation. L'accroidement de fa fortune auroit dépofé contre lui, d un gout exceflif pour la dépenfe , ne Peut encore plus dérangé que fon habileté fufpeéte ne pouvoit Penrichir. Non content des tours qu'il jouoit impunément dans le refTort de fon parlement , il voulut exercer fon favoir faire dans Paris même. (1) On découvrit qu'il avoit (0 Cette Notice ed dc M. Ie Marquis de P  des Auteurs. 217 fait a fon profit de faux acces : la cour, comme de raifon, 1'abandonna a la juftice régulière Sc ordinaire. Forcé de fe défaire de fa charge , il fut décreté Sc mis en prifon au chatelet, Sc au bout de quelque tems condamné, comme fauffaire, a faire amende honorable, Sc a un bannidèment de neuf ans. II en appela au parlement de Paris , & fut rransféré a la conciergerie, ou il demeura pendant plufieurs années, trouvant moyen de prolonger la décifion de fon affaire, par la profonde connoidance qu'il avoit des formes Sc de la chicane. II profita du loifir de fa prifon pour faire une partie des ouvrages dont nous allons parler; mais ce ne fut pas la fa feule Sc fa plus mauvaife occupation. Il fit connoidance avec une femme que Fon appeloit la Belle Epicière , a qui fon mari avoit déja intenté des procés fort défagréables. Réunis dans la même prifon, & affortis par la figure & par le cara&ère, car le Noble étoit aimable «Sr libertin, & l'Epiclere jolie Sc coquette; ils vécurenr enfemble dans la plus grande intimité. \\ fut I' amant & Favocat de cette femme , dont le procés même fervit a rendre le den plus «üfficde. Des enfans fairs dans la prifon, une évafion dont il fut complice, multiplièrent les accufations, & embrouillèrent 1'affaire. Enfin, «n itfpS la fencence dn chatelet fut confirmce,  2iS Notice & le Noble fut banni 5 mais il obtint fon rappel d'une manière cependant fort humiliante, cat il fut déclaré incapable de pofleder jamais aucun office de judicature. II vécut encore douze ou treize ans dans eet état déshonorant. 11 continuoit d'éctite &de flatter même baflement ceux qui 1'avoient abandonné ou puni, proteftant cependant toujours de fon innocence, a laquelle perfonne n'ajoutoit foi. 11 mourut enfin en 1711, fi pauvre , qu'il fur enterré par la charité de fa paroifle (Saint - Severin). On remarqua alors qu'il avoit fait gagnet cent mille écus a fon libraire , lequel s'étoit trouvé opulent^ dans le même tems oü l'auteur mouroit, pour ainfi dire, de fekoj mais il faut compter fa mauvaife conduite pour quelque chofe & même pour beaucoup , dans le peu de part a une fortune dont il avoit fait les premiers frais par la compofition de fes ouvrages. Le premier ouvrage que nous trouvons dans le recueil de fes CEuvres en vingt volumes, eft une Nouvelle Hijlorique intitulée : Zulima.^ Le fujet en eft tiré d'une aventure fort fingulière, qu'on lit dans Y Hiftoire d'Allemagne. Zulimafüt imprimé pour la première fois en i395 , fcl'année fuivante parut un autre ouvrage de M. le Noble, qui eft le fecond qui nous tombe fous b inain. 11 eut beaucoup de fuccès, fans doute;  des Auteurs. zi par Ie mérite du fujet; car il eft intitulé: Milord Courtenai, ou les premières Jmours d'Elifabeth, reine d'Angleterre. Un pareil fujet étoit fait pour intérefler; mais le Noble n'en dra, felqn nous, qu'un trés-médiocre parti. Le troifième ouvrage que nous trouvons dans les CEuvres de M. le Noble, n'eft point un roman, mais une efpèce de cours de morale, inritulé : VEcole du Monde. Ce livre a eu, dans fon tems, du fuccès, & a été eftimé comme utile pour le fond, Sc affez piquant, paree que 1'on y rrouvoit quelques portraits Sc quelques trairs de fatyre. On n'y trouveroit aujourd'hui rien que ce que tout le monde fait, ou eft fuppofé favoir. L'Ecole du Monde eft divifée en ving-quatre entretiens : il en publioit un tous les mois. Ainfi il inftruifit ou amufa le public pendant deux années qu'il pafia au chatelet & a la conciergerie. Le quatrième morceau confidérable des ^^ongieSRogz C eft une fatvre contre un Aporfuealre non^mé hadm. On ne peut pas s'embarrafler de cela Dans le fetzième & le dix-feptième volume ' »vres, fulvls d une ö#fMtów| hifwri "o f * Pubhe ce long morceau comme un giand ouvrage de fcience & d'érudirion. U° 6ft Cout éto»"é de trouver enfuite deux -nesentièrement remPlis par une Zj^ Pij  4i8 Notice L David, avec des réflexions pteufes: & mo rales, indtulées: Qfrft * ZW, d^re^c. Ledernier ouvrage de M. le Noble, eft «n fur les nouvelles d'Efpagne, atnvces a la fin de 17NÓus navons pu recouvrer les faclums que Ze Noble avoir compofés, ranr dans fa propte caufe, & pour fe juftider du crime de faux dont ft etoit «café qu'en faveur de la Belle Epicïère zc- qui l'avoit connue en prifon, tachoitde ,uftifi« en public, tandis qu'en pamculier il travadloit Aasraverfon crime. ; ■' . |ousdeuxperdirentleurProcès,doncdsetoient coupablesimais on feroit bien aife de favoir commentilsprétendoientprouverleurinnocence Tour ce que nous favons, c'eft que la Belle ^,produifoitunécritdefonman qm J donnoic plein pouvoit & hbertc entiete de fe conduite a fa fantaide, prometrant de ne lui en de nulle valeur. On ne forca pas meme le man freconnoïtreles enfans que fa femme avoit faits étant en prifon, quoique certainement ils fuflent nés le mariage fubfiftant. Nousn'avons pas Pu auffi nous procurer une  des Auteurs. iiy dijfertation de M. le Noble fur la monnoie de Metz, qui peut être remplie d'excellentes recherches. II eft certain que , jufqu'au feizième fiècle, les évêques Sc la ville de Metz ont également fait battre des monnoies, dont on trouve encore des pièces dans les cabinets des curieux. On attribue affez généralement a M. le Noble un livre que 1'on peut placer indifTéremment parmi ceux de théologie, de jutifprudence 8C d'hiftoire eccléfiaftique, intitulé : le Bouclier de la France contre les excommunications, ou l'ejpric de Gerfon. C'eft un ouvrage vraiment curieux Sc mtereffant. On y établit avec beaucoup de hardiede, mais avec autant de force & de clarté, les maximes & les libertés de 1'Eglife Gallicane contre les entreprifes des Papes fur le temporel des rois , Sc contre celles du haut Clergé , fur la juridiótion royale Sc féculière. D'autres ouvrages moins intéreffans, Sc que Moreri met fur le compte de le Noble, font les Dancourades ou crïtique de différentes pièces de Théatre de Dancourt. Le Diable Borgne & le Dlable Bojfu : ce font deux ctitiques & imitations du fameux roman le Diable Boiteux de le Sage, & de la même pièce , que fit paroitre Dancourt. Le Voyage de Chaudray ; petit morceau romanefque, dans le gout du Voyage de Falaife. 11 Piij  23» N O T I C t y avoir, du tems de M. te Noble, a Chaudray, village a quelques lieues de Paris, fur le chemin de Rouen, une efpèce de payfan qui s'étoir érigé en médecin. Les Mémoires de mademoifelle des Fojfes, ou le Chevalier Balea^ar, font généralement attribués a M. le Noble, il y a deux éditions, ou, fi 1'on veut, deux livres fur ce fujet, lepremier porte Ie titre que 1'on vient de lire, Sc a été imprimé a Paris en \G<)6. Le fecond eft intitulé : Hiftoire de la Dragone, contenant les actions militaires Si les aventures de Genevieve Prémoi, fous le nom de Chevalier Balta^ar, Paris 1703. Comme le Noble n'eft mort qu'en 1711, il peut ctre l'auteur de 1'un Sc de 1'autre ouvrage. Enfin , le Gage Touché, recueil d'hiftoires galantes Sc comiques, eft le dernier ouvrage de M. le Noble, ou qui lui foit attribué. Cette Notice ne nous appartient point, Sc nous nous fommes fait un devoir de n'y rien changer. Le Noble j eft jugé avec févérité. N O D O T ( Antoine ), a traduitt en francois moderne le roman de Mélufine. II eft traduéteur des fragmens de Petrone. II eft auteur Du Munitionnalre des Années ; Et de la Contre-Critique de Petrone ;  des Auteurs." i 3 i F II écoit Officier de Cavalerie, & fe trouva au fiege de Belgrade. II paroir, qu'il a vécu depuis 1650 jufqu'en 1701. Si jamais un traduóteur a faitpreuvede fidéliré& d'exaóritude, c'eft: Nodot, dans fa tradu&ion de Pétrone qui lui mérjta le titre de auclorpurijjimtz impuritatis.  231 Notice P Pa JON ( Henri ), Avocat en Parlement, more en 1776"; il avoit été Prêtre de POratoire. Il eft auteur de Contes nouveaux & Nouvelles nouvelles , 175 3 , i/2-80; Hijloire du prince Soly, i vol. in-11, 1740; Hijloire des Fils d'Hali Bajja, in-11, 1761; Hijloire du roi Splendide ; Effai de Poëme fur l'Efprit. Nous avons inféré dans notre collection, Nourjahad, conté oriental. Ce dernier ouvrage eft une traduction du roman anglois qui avoit fetvi de canevas au conté des Epreuves qui a été inféré dans le mercure du mois de Janvier 1769, ce conté qui n'a que z 50 pages, paroit encore trop long ; on Patttribuo a un autre auteur, & il eft vrai qu'il a été imprimé prefque toujours fous Panonyme; ainfi nos leefteurs ne doivent point prendre nos conjectures pour des certitudes. L'Hiftoire du roi Splendide Sc de la princefle Hétéroclite eft peut-être un des plus gais de tous les contes de fées & un des mieux écrits, & ou la plaifanterie foit le plus adroitement employée. L'ouvrage eft rempli de faillies Sc d'efprit j les  des Auteurs. 233 avantures qui s'y fuccèdenr font piquantes. Uri peu trop de nudité dans certains tableaux neus a empêchés d'égayer nos leóteurs par l'infertion de ce joli conre, ou le Ieóteur peut rire, & faire une foule d'applicationsfur bien des claftes d'hommes, & furrout fut la miüique, fur 1'opéra Sc fur les femmes. PAPE LI ER ( M.), eet auteur, dont nous ignorons lëtat & 1'origine, vit encore, & doit être jeune. Nous ne connoidons de lui, qu'un c?ntf p"entaU qui a pour titre : Balkin, & qui n'a été imprimé que dans le Mercure de Janvier de 1'année 1777. On trouve dans ce conté qui eft fimplement narré, une fée grondeufe qui a prefque toujours tort de grondef, carfonrble n'eft pas abfolument important. P H I LI P S : il a traduit les Mille & un Jours, h-iir, 173S. D'après la traduétion de M. Petie de la Croix, qui avoit fait connoitre eet ouvrage, le livre de M.Philips eft imprimé Sc traduit dans la langue de l'auteur qui étoit Anglois.Nous trouvons fous le même nom une tragédie Angloife , intitulée: la Mere Infartunée, Sc le Virgïie Travefli. ■ PERRAULT(Charles),né a Paris en 1 £33 , étoit frère de Claude Perrault, qui d'abord médecm aftez médiocre ,deyint excellent architecre a qui nous devons la traduétion de Vitruve, ia belle facade dfc Louvre, 1'Obfervatoire Sc 1'Are  2j4 N O T I G E de Triomphe, ( maintenant détruit) de la Porte du Fauxbourgs Saint Antoine; & a qui 1'hiftoire naturelle a quelques obbligations. Charles Perrault, mérica non feulement pat fes travaux, mais par les reftburces de fon efprit, 1'amitié de Colbert Sc la place de Contrbleut Général des Batimens. II étoit le proteófceur né de quiconque avoit des befoins & des talens. Trop patriote peut-être, il voyoit avec peine les fuccès d'un étranger ; il n'aima point Bernin ou le Chevalier Bernin, que Voltaire a tant loué & qui étoit au-deflbus de la réputation que lepoëte a voulu lui faire. On fait qu'il eut beaucoup trop d'amour propre, & qu'il n'ofa point fe garantir du ridicule dont Chapelain s'étoit couvert en publiant fon po'ême de la Pucelle. Eh! comment Chapelain ne fe feroit-il pas laifle prendre a 1'écueil des louanges de fociéré! fon pocme qu'il lifoit partout Sc depuis plufieurs années, proné a la Cour, vanté a Paris, admiré même par des académiciens, étoit une de ces merveilles que la poëfie n'avoit point reproduir depuis le Taffe. Le pocme parut & tomba; la chüte fut univerfelle. Cet exemple devroit rendre les auteurs qui colportent leurs manufcrits dans les cercles, plus défians fur les éloges qu'on leur prodigue par complaifance , par amitié, Sc paree qu'enfin, il faut favoir quelque gré a un auteur qui a le defir d'amufer.  des Auteurs. 235 Quel róle! eh! quel fuccès! Charles Perrault publia fon poëme de Louis-le-Grand. Je ne fais, fi ce roi, malgré fon amour exceflïf pour la ftatterie, fur content: les bornes étoient outre-paflees. Le pocme neut point de fuccès 2c n'en méritoit hi par la charpente épique ni par la poëfie; mais les favans furent étonnés de la préférence qu'il accordoit au fiècle de Louis XIV fur les fiècles palTés. II voulut foutenir fon opinion, & de la naquit le parallèle des anciens & des modernes. L'ouvrage fur critiqué , la plaifanterie s'en mêla, Racine fit des couplets,5oi/t?<3«des épigrames,Ies reflexions furLongin parurent, mais2?oi/ agé de 75 ans ; il étoit d'une familie originaire d'Angleterre , Sc a laidé plufieurs enfans, 1'ainé defqueis lui a fuccédé dans la place dé fecrétaire dnterprète du roi dans les langues arabe Sc turque. II a traduit. VHifloire de la Sultane de Perfe & des Vifirs, contes tures, dont C'aec^adé eft auteur. Ca  24o Notice Chec\adé étoit précepteur A'Amurat II, empereur, Sc compofa ce livre autant pour 1'amufement du prince, que pour lui rendre les femmes fufpe&es. Cet ouvrage n'a point été achevé. M. Peut a traduit les Mille & un Jours.^ Le célèbre Dervis Moclès en eft auteur. H étoit chef des Sofis d'Ifpahan , Sc il avoit douze dif ciples. Le peuple Sc les grands avoient pour lal une vénération fmgulière, a caufe qu'il étoit de la race de Mahomet, Sc ils le craignoieut, paree qu'ils favoient qu'il paftoit pour un favant cabalifte. Le roi Schah Soliman le refpeétoit au point, que, 6 par bafard il le rencontroit fur fon paftage , ce prince defcendoit aufti toe de fon cheval & alloit baifer fes étriers. Moclès étant fort jeune , s'avifa de traduire en Perfan des Comédies Indiennes qui ont été traduites en toutes les langues orientales, & dont pn voit a la bibliothèque du roi une traduétion turque, fous le titre de Alfaraga Badal Schidda, ce qui fignide la joie après 1'afiliction. Mais le traduéteur perfan, pour donner a fon ouvrage un air orig'mal, mit ces comédies en contes, qu'il appela : Ne^en-Vous , c'eft-i-dire , Mille & un Jours. 11 conda fon manufcrit au fieur Peut de la Croix qui étoit en liaiftm d'amitié avec lui a lfpahan en 1Ó75 , Sc même il lui permit d'en prendre une copie.  ö e s Auteurs. '24 r II fernble que les Mille & un Jour ne foient qu'une imitation des Mille & une Nuii-; mais comme il n'y a point d epoque aux Contes Arabes, on ne fauroit dire s'ils ont été fairs avant ou après les Contes Perfans. II paroit que M. Petit de la Croix fe mé.fioic de fon ralent pour écrire , puifqu'il a emprunté la plume de M. le Sage , pour la traduétion des Contes Perfans. Cet auteur a fu profiter des richedes que fon ami lui confioit, 8c a tranfporté prefque tous les Contes a 1'opéra-comique dont il étoit l'auteur en titre. Ceux qui lifent les Mille & un Jour 3 8c les neuf tomes du Théatre de la Foire, y trouvent Ie même fond employé" différemmenr. Les Auteurs du Diclionnaire Hifïorique des Hommes célèbres , attribuenr a M. Petit , fiIS) les tradudions que le père avoit faites. Celui-ci podedoit parfaitement les langues arabe , perfane , turque , tartare , éthiopienne , arméïuenne. Louis XIV 1'employa dans plufieurs négociations , defquelles il fe tira avec 1'edime des Turcs, des Francois & des Impériaux. II fe vit le juge d'un traité de; commerce entre trois puidances. Un moment dë foiblefle de fa part, otoit a 1'une ou a 1'autre des droits 8c des facilités. On lui offrit une fomme confidérable ; il fut refufer, refter dans un état de médiocrité 8c digne Tom: XXXVII. Q  fc4* Notice del'eftime publique. Il interpréta le bk* pour le mot, fans disjonction ni conjonéhon etcanr eète, 8c laifTa a Cefar ce qui appartenoit a Cejar. Louis XIV, qui técompenfoit fi maninquement les ^ens de lettres , parut avoir oublié M. Petit, qui°ne jouidbit que des appointemens bornes de fa place , & qu'il ne faut point regarder comme une gratificatiën, puifqu'il travadloit. Cet auteur avoit plus fait, peut-ètre, pour la oloire & pour 1'orgueil de fon roi, que tous ces fades panégyriftes qui étoutdidbient leur monarque au milieu de fa cour. II avoit traduit en langue petfane, Wijloire de Louis XIVpar les médailles , & on fait combien cette maxime d'écrire 1'hiftoire d'un roi eft fedmfante 6c flatteufe. Tout fe rapporte a lui umquement, onne voit que lui, & on le voit entoure de toutes les illufions de la plus ingénieufe allegorie. On ne peut pas croire qu'un roi, qu'une nation éclairée& penfante, qui n'eft pas tout-a-fait avilie, puide pouffer 1'adulation a ce degre de baffefte On croit volontiers que le monarque , ainfi préfenté , eft ou Alexandre ou Sefojlru. M Petit, en traduifant cette hiftoire, donna a Louis XIV une nouvelle renommée dans un pays oü celle qu'il avoit feroit lentement parve- Le, & aveC C6tte WAhntS™Ve Pexp icacion des-médailles venoit dy ajoute,  d e s Auteurs.' 143 Nons 1'avons dit, M. Petit refta fans récompenfe , tandis que le Panégyrijle Calliere étoit comblé de Kenfairs. C'eft que M. Petit n'alloit point a Verfailles, & qu'il habitoit aux environs du collége royal. II nous a fait connoitre la Turquie & la Perfe par les ouvrages fuivans: L'Hijloire de Maroc ; L'Hijloire des Monarchies Mahomkanes; Etat général de VEmpire Ottoman ; E'Hijloire de Tamerlan; L'Hijloire de Louis XIV qu'il a écrite & traduite du francois en arabe. POÜPELINIERE {Alcxandre-Jean-Jofcpk le Riche de la), fermier général, mort Ie 5 Décembre 176-1 , agé de foixante-dix ans. il cidtivoit les lettres autant par goütque par air : il fervit de Mécène d de jeunes littérateurs qui ne manquèrent pas de le célébrer. Son opulence 6 fon amour pour Ie fafte , attiroit dans fa maifon lelite des beaux efprits de la cour & de la ville. M. le maréchal de Richelieu 1'honora d'une amitié conftante & aflidue. La beauté de fon époufe ne contribuoit pas peu a tendre fa fociété précieufe. Madame de la Poupeliniere^ la beauté, joignoit des graces & des talens; elle cultivoit tous les arts agréables.  144 .N o t i c ï Son mari, avec du gout, de la facilité, 8c la connoidance des bons auteurs, crut devoir écrire en vers 8c en profe. Ses edais ne furent point malheureux. L'anonyme nous a dérobé la plupart de fes produétions. 11 n'a avoué que le roman de Daïra, hiftoire oriëntale, in-\i, ij6i. PRESCH AC (de). Ce gentilhomme, né a Vic-Fezenfac en 1676, s'adonna entièrement a la littérature, ainfi que la quantité de fes pro'dudions femble 1'annoncer. 11 eft impoftible qu'il ait pu croifer fes travaux par des devoirs d'état. Nous ne trouvons rien dans les journaux & dans les diétionnaires qui puifle nous donner des renfeignemens fur fon compte. Sa vie a échappé aux faifeurs de Notkes ; fa fécondité devoir cependanr le préfetver de eet oubli. Il n'en feroit pas arrivé de même aujourd'hui, ou tout eft recueilli. Quel eft maintenant le dictionnaire qui oublie de parler du chevalier de Mouhy? Lefieur de Prefchac jouhToit dans fon tems de la même célébrité. La le&ure des Romans du premier, prouve que 1'aureur avoit des connoiftances étendues fur beaucoup de matières , fur 1'htftoire principalement , 8c qu'il iefpeftoit les coftumes nariowaux. Son ftyle a de la force; le Roman du cqnte de Tekeli eft  des Auteurs; 245 écm avec alTez de noblefle. Le chevalier de Mouhy, au contraire, étoit ignorant; il imaginoit & il écrivoit fans obferver les bienféances, & fans s'aflpjetrir aux tems, aux lieux, aux perfonnes. Le deur de Faumoriere pourroit être comparé avec plus d'équité au fieur de Prefchac ; ils étoient tous les deux égaux en naiflance, en érudition & en fécondité. Vaumoriere 1 'emporroit feulement par les graces 8c par 1'art de bien narrer. Le deur de Prefchac eft auteur Des Intrigues Découvertes, 1 vol. in- 12, imprimé en 16 8 6. II publia en 1718 , les Contes de Fées fuivans : La Reine de l'ile des Fleurs ; La Petite Grenouille verte, qui eft Ie meilleur des Contes qui compofent le volume dans lequel on le trouve. On a voulu le lui enlever, 8c on 1'a attribué a Beugnié, Libraire, par la raifon qu'il l'avoit peut-êcte vendu. On voit dans le même volume, Les Perroquets ; Le Navire Volant; Le Prince Périnet, ou FOrigine des Pagodes ; Le Buijfon d'Êpines fleuries.  14$ Notice Le Conté de Kadour a fourni une Comédie a Romagnefi, qui a été repréfentée fut le Théatre Italien , fous le titre des Fées. Un enchanteur oflre a une princefle narurellement forte, de lui donner de 1'efprit, pourvu qu'elle 1'aime, & qu'elle prononce ces quatre vers: O toi 1 qui peux tout animer, Amour , fi, pour n'être plus béte, II ne faut que favoir aimer, Je fuis prête. Sans Parangon, ou la Reine des Fées. Il a composé les Romans suivans : La Querelle des Dieux fur la naijfance de Mon- feigneur le Dauphin; La Cour; L'Héroïne Moufquetaire ; L'illuflre Parijienne ; Voyage de la Reine d'Efpagnc ; Le Bdtard de Navarre ; La Ducheffe de Milan ; Tolande de Sicile ; Le Comte de Tekely ; Le Beau Polonois ; Le Seraskier ; Cara Muftapha ; La Princeffe d'Éphèfe ;  des Auteurs» 247 La Valife ouverte j Le Voyage de Fontainebleau ; La Noble Vénüïenne ; Le Prince Efclave ; Le Trlomphe de l'Amitié ; Gris de Lin ; Le Secret ; Le Fameux Voyageur ; Nouvelles Galantes du tems & d la model PREVOST (Antoine-Francois d'Exiles); naquit a Hesdin, ville forte du comté d'Artois , le premier d'Avtil 1697 , de Levin Prevqft; procureur du roi du bailliage, 8c de Marie Duclair. Hesdin avoit un collége oü il fit de borme heute fes humanités. Le jeune Prevod après avoir doublé fa rérhorique au collége d'Harcourt a Paris, n'en fortit que pour paflêr au noviciat des Jéfuites, II étoit le fecond de cinq frères, fa familie ne s'oppofa point a fa vocation. II quitta , par une révolution fubire , 1'habit de noviciat, pour prendre celui de volontaire; il avoit feize ans; la vivacité impatiente du jeune Prevod, ne lui permit pas de s'en accommoder long-tems. II reprit du gout pour le noviciat, & dans la première chaleur de fon zèlé, il compofa une Ode en 1'honneur de Saint-Francois. Un befoin impérieux devant lequel tout autre Qiv  i48 N O T I C 8 fe tait, même celui de la gloire , commencoit l le dommer , il reviitt au métier de la guerre 5c ne parur plus dans fa familie. II fe livra au plaifir avec ronr 1'emportement de fon age. 11 connut en Hollande une jeune filie dont il fe dégouta bientót, courut s'enfevelir dans l'Ordre des Bénédiétins de SaintMaur : a vingt deux ans, il fe voyoit fous funiforme de Saïnt-Benoü, après avoir deux fois porté les armes , & deux fois la robe de jéfuite. Le noviciat dure une année-, il ne fe préfenta \ fon efprit aucunes des réflexions utiles qui 1'euffent fauvé a tems , d'une imprudence audeffus de toutes celles qu'il avoit commifes. La fatale formule fut proférée ; elle renferme le ttiple vceu de chafteté, de pauvreté & d'obéiffance. Perfonne de fa familie ni de fes amis ne fut ou il étoit, 8c il leut en déroba la connoidance , auffi long-tems qu'il put. Il fut envoyé a 1'abbaye de Saint-Ouen de Rouen, ou un père le Brun jéfuite, dont la fociété avoit commandé le reffentiment, lui fufcita une difpute qui donna lieu de part 8c d'autre a divers écrits. Dans la chaleur d'un premier mouvement , il avoit fait une réponfe très-vive ; il la retira des mains de fon libraire. De Saint-Omer, il fut a 1'abbaye du Bec , rour y faire un cours de théologie". On l'envoya  des Auteurs. 249 enfuite profeiTer les humanités au collége de Saint-Germer; il avoit recu 1'ordre de la prêtrife des rpains de 1 'évêque d'Amiens. 11 étoic a Snint-Germer, lorfque la ville d'Evreux, ayant befoin d'un prédicateur , s'adrefla aux Bénédiólins. Ils donnèrent dom Prevod. Ce premier edai de fes talens fut très-heureux, Sc comme le prélude de la célébtité qu'il devoit obtenir, dans un genre qui n'a guères de rapport avec la chaire. Son carême prêché, dom Prevod paffa aux Blanc Manteaux de Paris , Sc des Blanc-Manteaux a 1'abbaye Saint-Germain-des-Prés , ou tous les favans Bénédiétins le recherchèrent; ils lui drent même 1'honneur de 1'employer a 1'énorme collection de la Gaule Chrétienne , dont le mérite eft rout en érudition & en recherches. Un immenfe volume prefque entier de ce recueil lui appartient. Son gout ne fut pas confulté; il favoit fe dédommaget de cette contrainte, Sc il pade pour conftant que les deux premiers volumes des Mémoires d'un Homme de Qualité', furent écrits a Saint-Germain des-Prés. Quand la communauté 1'auroit foup^onné , il ne paroït pas qu'elle s'en füt fort allarmée. C'eft une chofe connue qu'il lui arrivoit fouvent de fe radembler & de 1'appeler pour charmer 1'ennui des longues foirées d'hiver. Lui, fans autre  2J<5 N O T I C 1 fecours que fon talent d'imaginer , fans être préparé, s'engageoit dans des récirs , dont la. fingularité, foutenue des charmes d'une expreffion pure & facile , lui obtenoit toute 1'attention qu'auroient exigce des matières plus férieufes ; Sc 1'on raconte que ces bons pères en perdirent une fois tellement le gout du fommeil, que le jour vint les futprendre a écouterdom Prevqfi. II auroit été rrop heureux , s'il eut retiré du commerce de ces moines , tout l'agrément que le den leur procuroit. Né franc, généreux , fenfible , il fentit enfin qu'il n'étoit point a fa place. Dom Prevoft étoit trop bon obfervateur , pour qu'il lui eut échappé que 1'intérêt perfonnel étoit la , audi-bien qu'ailleurs , le mobile des aórions humaines. Il s'étoit conduit fur cette découverte, Sc ne vivoit depuis long tems ptefque plus que dans la compagnie de fes livres, morts comme lui, fuivant fon expreflion. De plus , fes anciens attachemens commencant a revivte au fond de fon cceur, contribuèrent a fortifier fes regrets; il s'en ouvrit a quelques amis. La conjonélure étoit délicate; le moyen de revenir contte des vceux, dont aucune formalité n'avoit été oubliée ! On examina, on fe confulta. Le feul adouciflement qu'on fut ttouver, fut d'obtenir pour lui une permiffion de pader a Cluni , ou la règle eft moins auftère  des Auteurs. 2^1 qua Saint-Maur. C'étoir une foible redource. Toucefois il fe livra a 1'efpérance de fe voir foulagé d'une partie du poids de fes feis, s'ils ne pouvoient être rompus. II ne s'agidbit que d'avoir un bref de trandation. Rome l'acccrda , fur la demande qu'on en fit fecretrement. Dom Prevojl ne crut pas que 1'évêque d'Amiens, a qui il fut envoyé pour être fulminé , fe montrat plus diflicile que le pape. II venoit de recevoir du prélat une lettre ou étoient confirmées toutes fes efpérances ; il ne doutoit pas de fa fincérité; mais fon mauvais génie travailloit contre lui. Un jour le pénitencier d'Amiens, étant entré dans le cabinet de 1'Evêque, fes yeux s'arrêtèrent fur la table oü étoit le bref, Sc il le lut, fans qu'on en apporte d'autre motif qu'un mouvement de curiofité. Elle fur fatale a celui que lo bref touchoit. Quand 1'indifcret pénitencier fe fut fait expliquer par le Prélat qu'il dominoit, tout ce qui avoit rapport a cette pièce , il en prit occafion de s'échaufièrbeaucoup.Rome, alentendre, étoit prodigue de ces graces; le monde feroit rempli de Moines dégoütés de leur état, pour peu que 1'on confentit a les écouter; le gout de dom Prevojl, pour 1'indépendance, Sc fa frivohte , étoient connus ; s'il avoit de meilleures raifons a alléguer, on 1'entendroit; mais on ne pouvoitrien réfoudre auparavant. Le foible Prélat  ÏC2 N O T I C H fe Iaiflanr perfiiaderla fulmination fut différée; fans que dom Prevoft en fut feulement informé. Toujours fort tranquille du cöté d'Amiens, il faifoit gaiment les préparatifs de forr départ. Dès qu'il crut que 1'aftaire du bref étoit réglée, il fortit de Saint-Germain. Ses amis 1'attendoient au jardin du Luxembourg, oü ils le dépouillèrent de fes habits monaftiques, qui furent renvoyés i 1'abbaye. En partant il avoit laiffe trois lettres dans fa celluie; une pour le P. Général, une autre pour le P. Prieur, latroifième adredée a un autre Religieux. Dans ces ttois lettres il leur donnoit avis de fa retraite, Sc il en difoit les raifons. II pafla le refte de la journée Sc une partie de la nuit a fe réjouit avec fes amis, de 1'heureux dénouement de fon aventure ; il ne prévoyoit guère que le jour fuivantdüt lui apporter d'autres lumières. S'étant renduchez l'Evêque d'Amiens , le Prélat lui dit avec un air d'embarras, qu'il s'eftorcoit de réparer par beaucoup de politefle, qu'il autoit bien voulu fe prèter a fes vues; que la chofe avoir éprouvé de trop grandes difficultés; qu'on parloit par tout de fon humeur légère; qu'il feroit fagement de retourner a fa maifon , & quen s'obfervant mieux a 1'avenir , il parviendroit a faire taire les bruits. Prevoft demeura pétrifié a ce difcours; il fe rétira pour délibérer fur le parti qu'il lui conveiioit de prendre. II s'en  des Auteurs; 253 tint a la réfolution de fe retirer en Hollande, d'oü il pafla en Angleterre. Après y avoir féjourné quelque tems, il revint fur fes pas, ScVétablir en Hollande. II fijt obligé d'avoir recours a la bourfe de fes amis, les reflources qu'il en obtint n'alloient pas au-dela des befoins urgens; il mit alors ladernière main a fes mémoires d'un homme de qualité. Ils parurent en 1729. Le grand fuccès de fon premier ouvrage ne le confola pas des chagrins qu'il eut ï dévorer; il y avoit a la Haye, pendant le féjour qu'il y fit, une demoifelle proteftante, très-bien née, en qui la beaucé, 1'efprit, toutes les graces formoient un ademblage charmant, & très-malheureufe; Elle vivoit d'une modique penfion, dont une partie lui fut retranchée, lorfque Prevojï lia connoilTance avec elle parunpur hafard. Elle fe feroit bien gardée de lui témoigner quelque chofe de fon embarras; mais il l'avoit déja appris, & fa générofité l'avoit fait voler auprès d'elle. Ses orfres furent celles d'un homme qui craignoit fur-tout d'être refufé. II les accompagna de tant d'honnêteté, de délicateffe, de réferve, qu'il y auroit eu une forte de dureté a ne point fe laiiTer vaincre; elle n'étoit pas moins fenfible qu'infortunée; fon bienfaiteur étoit aimable, 8c 1'amour fe glilfa dans le cceur de la jeune proteftante avec Ia reconnoiffance. Dans fes idéés conformes a fes principes de religion, les  i54 Notice vceux do fon amant n'étoient point un obftacle a ce qu'elle 1 cpoufat, auflï ne balanca t-elle pas de lui en faire la propofuion, qu'il ne lui étoit guère facile d'accepter. Ses vceux, 1'ordre de prêtnfe par lequel il étoit lié, ravettidoient qu'd lui reftoit quelques melures a garder. De plus, dans fa pofition, cpotifer une proteftante, en pays proteftant, c'étoit rendre impoflible fon retour dans fa patrie, vers laquelle fes yeux fe tournoiént fouvent. Reglant fa réponfe fur ces réflexions, il s'ouvtit a elle de fa réfolution , avec Ja franchife dont elle lui avoit donné 1'exemple. II étoit bien aimé, puifque les fentimens de fon amante réfiftèrent a cette épreuve, & qu'elle n'en «ut pas plus la force de foutenir la penfée d'être féparée de lui. Ainfi lorfqu'il alla de la Haye s'établir en Angleterre, elle 1'y fuivit. Une tendrede défintéreffée dut ajouter au charme de leur liaifon , fi cependant il pouvoit y être ajouté. L'abbé Langlet Dufrenoi contribua de tout fon pouvoir a donner de 1'éclat a cette aventure. 11 imprima dans fon livre de la Bibliothèque des ■Romans que Dom Prevoft s'étoit laifle enlevet pat une fille ou par une femme. Dans la fuite du même ouvrage , il ne tint pas a lui qu'on ne prït une auffi mauvaife opinion de la probité cV de la croyance da Prevoft , que celle qu'il donnoit de fes mceurs. II étoit a Londres,  des Auteurs. 255 lorfque eet écrit diffamatoire lui parvint. Sa réponfe offre 1'exemple d'une modération dont il eft peut-être impoffible qu'un homme auffi indignement attaqué dans fes mceurs, dans fa religion, dans fon honneur, ait jamais été capable. C'eft a 1'année 1733 ou 1734 , qu'il faut rapporter cette querelle. 11 avoit mis au jour, 1'année précédente, fon Hiftoire de Cleveland, le premier des Romans dans le genre terrible, qui fut fuivi de celle du Chevalier des Grïeux & de Manon Lefcaut, d'un ton différent, & de laquelle on a tant de fois répété 1'éloge. Après avoir déployé dans ces trois productions toutes les richeffes de fon imagination, il prouva 1'étendue de fes connoiffances & 1'infailJibilité de fon gout, dans un ouvmge périodique qu'il donna fous le titre du Pour & Contre. La première feuille parut en 173 j ; il étoit fur un plan qui n'avoir nulle reffemblance avec les Journaux d'alors; il fut recu trés- favorablemenr. Mais l'auteur étoit trop ennemi de toute contrainte, pour que cette occupation qui 1'affujettiffoit beaucoup, püt long-tems lui convenir, il 1'abandonna entièrement au vingtième volume. Quelques jouiffances qu'il fut en droit d'attendre de fes talens dans eet afyle, il fentoit quelles n'auroient nulle part le même chatme  Notice pour lui qu'au milieu de fa patrie , il prit Ie parti de folliciter ouverrement fon retour en France. Le cardinal de BiJJy, & feu M. le Prince de Conti, Fappuyèrenr. II fut petmis a Prevoft de reparoitre fous Fhabit eccléfiaftique fcculier j c'étoit a quoi fes vceux fe bornoient; fon Alteffe le nomma fon aumonier. II publia en 1736' un quatrième Roman, fous le titre du Doyen de Killerine, &c continua fur fon premier plan le Pour & Contre a Faide de fes correfpondans anglois. Tranquille déformais en France , le cceur libre , il vit plus que jamais fe multiplier fes produdions. VHiftoire de Marguerite d'Anjou , celle d'une Grecque Moderne, les Campagnes Philofophiques de Moncal, ['Hiftoire de la Jeunejfe du Commandeur de ***, celle de Guillaume le Conquérant, la vie & les Lettres de Ciceron , les Voyages de Robert Lade , les Mémoires d'un Honnête Homme , virent le jour fucceffivement. Je ne m'arrête a aucun de ces ouvrages de l'abbé Prevoft; on alfure que fa facilité étoit li grande, qu'il pouvoit dans le feu du travail, fe meier a une converfation fur quelque matiète que ce fut , & y faire remarquer encore fa grace X s'exprimer. II n'avoit pu être corrigé de la bienfaifance par tous les ingrats qu'il avoit faits : un Ecrivain de  6 l 5 AUTEÜRS. 257 de feuilles a Ia raain le paya du plas hórriblê retour. Cet homme qui avoit bun de la peine a faire fubdftar fa familie du produit de fon travail, courut lui expofer fa misèreavec plug de chaleüf qu'il n'en étoit befoïn pjur toucher l'abbé Prevoft. Le fuccès de fa première vidte les lui dt fouvent répéter. II lui arrivoit quelquefois de lui demander des confeils pour fes feuilles. II avoit imaginé qu'un moyen sur de répandre fa gazette , & den accróftre les profits , étoit de s'expliquer fur tout librement, & fans aucun égard, ni pour les circonftances, ni pour les lieux, ni pour les perfonnes. L'abbé Prevoft ne celfoit de marquer une èiitière repugnance a entrer dans fes vues. Peu de tems aptès le nouvelifte fut enfermé, & Ces papiers faifis, II eut foin d'abord de dénbneer celui qui fourniffbit fi généreufement a fa fubfiftance. Ce dernier avoit eu 1'imprudefttc facilité de corriger de fa main une de fes feuilles. Sa liberté fut menacée , & il fallut s'éloigner de Paris, oü il n'y avoit plus de siueté pour lui. M. Ie prince de Conti facilita fa retraite a. Bruxelles. Cette difgrace ne fut pas de longue durée. 11 attachoit aitffi peu d'importance a fes intéiêts, qu'il fe portoit facilemenc a fe charger de ceux d'autrui. Un fermier général lui offroit de prendre fur lui tous les frais d'impredion de la Tornt XXXVIL r  2?8 Notice grande Hiftoire des Voyages. C'étoit pour le financier une dépenfe de plus de quatre mille louis d'or, & pour l'auteur un bénéfice d'autant. 11 ne voulut pas le recevoir. S'il y avoit quelque orgueil a refufer, il étoit mieux placé au moins que celui qui poudoit le financier a s'attribuer toute cette fupcriorité. Le même fermier général avoit voulu audi inutilement lui faire accepter une penfion viagère. Il ne devoit pas s'attendre , en effet, a trouver fur ce point beaucoup de complaifance dans un homme qui avoit coutume de dire qu'un jardin, une vache & deux poules lui fuffifoienr. Audi-tot qu'il fe vit une feconde fois rétabli dans les dtoits de fa patrie , il commenca , a la prière de 1'illuftre chancelier d'Agueftèau , cette Hiftoire générale des Voyages, entreprife immenfe &c nécedaire. VHiftoire des Voyages fut portee au quinzième^olume i/2-4. 11 fe déladbit des recherches laborieufes qu'elle lui coütoit, en accommodant au génie de notre langue, les beaux Romans de Rlchardfon. Ils firent en France plus pour la gloire du traducleur, qu'ils n'avoient fait en Angleterre pour celle de l'auteur. L'abbé Prevoft, parvenu a fa foixante-troifième année, publia en i7ó°> deux volumes du Monde Moral; ces deux voliimes devoient faire partie d'un cuvrage confidérable j il fut  n e s Auteurs. z$9 Forcéde rinterromprepourfe rendre auX defirs de M. Ie prince de Conde, qui W demmdoit 1 hiftoire de fa maifon. Si cette hiftoire a été ecnte, elle eft reftée fecrète.. Dam IWe Ü ^ le Monde Moral, & y ajouta deux ^ mes. Ils W publiés après fa mort ,& ils n empechent pas que fouvrage ne ftfe refté incomplet. Trois traductions de lAnglois , fftgltfk A f" • * JW, & /„ w« ^ AW * «« ,W terminèrent fa vafte carrière litteraire: Les deux prenuers portent la datede ^ , fannée qui précède celle de fa mort; le troifième ne parut qu'après lui en 1764. 1 II n'avok pas attent au dernier moment, pour fonger A fe donner une retraite ; une maifon fimple & ifolée a Saint-Firmin , prés de Chantdly lul ayant paru propre a le fixer, il e„ fit acquifition II crut que dans n , vieiUere .pprochoit.il étoit tems de rompre avec la foaete, & d'exécuter autant qu'il feroit en lm fes fermens du cloïtre. Un écrit qu'on a trouvé au nombre de fes papiers, annonce qu'il alloit s>occuper de trois grands ouvrages. Le premier, de pur raifonnement, devoic avoir pour titre, la ReligionprouV" par ce au'il y a de plus certain dans les con- Rij  i6o Notice noljfances humaines; 1'autre hiftorique auroit été ■une expofttion de la conduite dc Dieu pour le foutien de la foi , depuis l'origine du chriftianifme ; & ie troifième , de la plus fublime morale, YEfpritde la Reügion dans l'ordre de la fociété. C 'étoit st ces trois grands ouvrages qu'il donnoit fa vieillefle. La mort empêcha 1'effet de fes pieufes intencions. Commeils'enretournoit feul a Saint-Firmin, le 25 Novembre 1763 , paria forêtde Channlly; il fut frappé d'une apoplexie fubite, & demeura fur la place. Des payfansquifurvinrentpar hafard, ayant appercu fon corps étendu au pied d'un arbre, le portèrent au Curé du village le plus prochain. Le Curé le fit dépofer dans fon églife, en attendantla juftice, qui fut appelée, comme c'eft 1'ufage lorfqu'un cadavrea été trouvé. Elle fe raffembla avec précipitation , & fit procéder fur le champ par le chirurgien, a 1'ouverture. Un cri du malheureux, qui n'étoit pas mort, fit juger la vérité a celui qui dirigeoit 1'inftrument, & glaca d'effroi les affiftans. Le chirurgien s'arrètaj il étoit trop tard, le coup porté étoit mortel. L'abbé Prevoft ne r'ouvnt les yeux que pour voir 1'appareil cruel qui 1'environnoit, & de quelle manière horrible on lui arrachoit la vie. II expira fous Ie fcalpel au même inftant, agé de foixante-fix ans ic huit rnois moins quelques jours.  bes Auteurs." 1G1 II eft affreux qu'on ne puiffe pas clouter de c« genre de mort inouï, trop attefté malheureufe* fement par un écrivain connu (M. de la Place), qui confulté au bout de quelques jours, par M. l'abbé de Blanchelande, frère du mort, fur ce qu'on pouvoit faire, ne lui répondir que cos quarre mots : Gémir & fe taire (i). Vers fur la mort de ïAbbê Pr é vo t. Doué de talens enchanteurs', Frévól ne tarda point a briller dans le monde : La France a produit peu d'Auteurs, Dont la plume élégante ait été fi féconde. Clio lui prêta fon pin^eau , L'Amour lui confia fon carquois & fes graces, Et la critique fon flambeau. II éclaire, il inftruit, il plalt! & fur fes traces, Nous voyagions dans 1'univers. A cette perte, Anglois, vous donnerez des larmes. II a, de vos écrits divers A notre Nation, exprimé tous.les charmes Mais s'il s'éclipfe dans les Cieux , Il darde fes rayons a travers les nuages; Et lorfqu'on 1'a perdu des yeux , Son éclat immortel renait dans fes Ouvrages. (i) Cette notice eft a la tête de l'édition des (Euvres dés l'abbé Prévót. Nous avons cru bien faire, en la placanc ki, R üj,  a6z Notice PR INGY ( Madame de) née en 1^4; auteur de 1''Amour hiftorique du caraclère des femmes de ce fiècle ; De la Loterie Galante. Elle avoit commencé fes débuts dans la littérature fous le nom de la comtefle cYAntralgues , de fon premier mari. Sa mufe étoit devenue célèbre fous ce premier nom. Elle abandonna la poëfie durant fon fecond mariage, & compofa des ouvrages plus férieux, Sc d'une plus longue haleine. On peur la placer parmi le petit nombre de femmes de qualité, qui honorèrent les lettres par leur nom, par leur amour pour elles, & par la protection qu'elles accordèrent a ceux qui les cultivent. Madame de Pringy fit tout pour les lirtérateurs eftimables quelle connoifToit. II paroie quelle eft morte en 1720. RICHEBOURG(/  zyS Notice cents aucats. Deux eens ducats ? répliqua-t-il avec émotion, malpejle ! tu nas qua me les donner cl moi, je t'époufe , & nous voila quitte, 11 fut pris au mot, & fa blanchifeufe eft devenue fa femme. Et quand, dis-je, on kit eet alinea, & qu'on fe fouvint que c'étok précifément, ainfi que le dilTipateur du Frefny, qui venoit de mourk, avoit payé fa blanchiffeufe, la chofe dut paroitre auffi piquante, quelle eft plaifante en elle-même. Onlk dans les lettres de Jean Baprifte Rouffeau que Boileau voyant un jour le Diable Boiteux entre les mains de fon valet, le menaca de Ie chaffer de chez lui, fi ce livre couchok dans fa maifon , quelques circonftances particulières, ou bien 1'état de maladie dans lequel Defpréaux languiffok depuis 1706, lui auront peut-êtte donné ce moment d'humeur qui dok être la véritable caufe d'un propos fi vifibiement injufte, fuppofé, qu'il l'ait tenu. L'année 1707 procura encore un triomphe a le Sage; mais il ne fut pas auffi complet. Don Céfar Urftn, comédie en cinq ades & en profe , titée de Calderon, un des meilleurs poé'tes dramatiques efpagnols, fut jouée Sc fidée a la ville, au refte ,on accueillit Cri/pin, Rivaldefon Makte, iepréfeiné après Don Cefar Urftn. Le Sage racontoit que Don Céfar Urftn Sc Qiffln Rival,dyMV été joués a la Cour, prefqu'en.  des Auteurs. 279 même tems qua la ville, y avoient éprouvé un fort entièrement oppofé. On applaudir beaucoup iDon Ctf/irjckl'onhuaimpitoyablement Crlfpin. Ce n'eft pas 1'unique exemple de la bifarrerie 011 de Ia contradiótion des arrêts des fpeétateurs en fait de pièces de théatre. Le tems a confirmé celui des citadins & ca de celui des courtifans.. II compofa tout de fake fon Turcaret qu'il fut plus aifé de faire recevoir que de faire repréfenter. II avoit eu la facilité de divulguer fon deftein & de fe livrer dans des maifens particulières a ces lechires, fi fort a la mode, qui font autant de facrifices fairs, moins encore & la curiofité des auditeurs, qua I'orgueil de l'auteur , & qui entrainent toujours après elles de grands inconvéniens. Les financiers , les gens d'affaires, qui ont toujours du crédit dans les fpectacles, éveillés paria rumeur que ces Iectures produidrent, firent cabale parnd les actrices, &c il nefallut pas moins qu'un ordre de Monfeigneur pour lever 1'obftaclequi tenoit lapièce en fufpens„ Le 14 Février i7o9 , elle parut enfin fur le théatre ou les battemens de mains percant a travers les murrnures, déconcertèrent la brigue des intétéreflés.. Le Sage avoir joint a fa pièce, Ia Critlque de la CoTiédie de Turcaret par le Diable Boiteux, c'étok un colloque entre Don Cléophas & Afmodée. S t»  iSo Notice Jamais lafinance n'a été baffouée, confpuée, vilipendée comme dans cette pièce, 1'acreté de fes farcafmes, l'animofité avec laquelle le Sage a livré la maltote au mépris public, 1'on fait foupconner d'un fecret motif de vengeance. On conté qu'un fermier général lui ayant oté un emploi, Turcaret fut 1'enfant du dépir, je ne le crois pas. Celui qui difoit: « les faveurs des grands ne v s'obtiennent que par les foins,les intrigues „ qu'on appelle démarches & qui font de véritables „ haffeffes », & qui ajoutoit a fes amis \ j'ai rejeté des pofies ou d'autres fe feroient enrkhis, mais ou je n'aurois rien fait pour ma fortune ; j'étois trop honnête homme (i) : celui, dis-je , qui parle ainfi, quand furtout c'eft un littérateur, n'a pa être ni bien empreffé d'avoir un emploi, ni bien faché de ne pas le conferver. 11 eft certain que U.otre auteur n'étoit pas couttifan; prié de faire la leclure de Turcaret a. 1'hotel de Bouillon; jour, heure , pris; 1'inftant du jugement du procés qui intéreftbit le bonheur de fa vie , concourt par un casforruit, avec 1'inftant promis a la ducheffe. Le Sage préfère le palais a Tbatel, oü, au lieu d'être a midi, il ne parok qu'a deux heures; il raconte fon hiftoire, fe confond en excufes,, que la duchelTe recoit avec humeur. Elle lui re- (i^ Lcttre dj» M. le Sugs k rils.  * des Auteurs. 281 proche dédaigneufement d'être caufe que la compagnie a perdu deux heures al'attendre. Madame, rcpondit il, ft je les lui ai fait perdre, rien n'eft plus fimple que de les lui faire regagner\ je ne vous Uraipas ma pièce. En effet, quoiqu'on le prefte, -quoiqu'on s'efforce de le retenir, il s'en va, & depuis, quelques inftances qu'on lui ait faites, il ne remit pas les pieds chez elle, On ne peut s'empêcher, quand on a vu ce que le Sage avoit fait pour le théatre francois, de regreter qu'il nelui ait pas entièrement confacré fes talens. Le retard de la Tontine^ petite pièce da moment, en un aéte, affez bien intriguée, gaiment dialoguée , recue en 1708 , & jouée feulement en 1732, joint aux railleries qu'il s'eft permifes d ans rous fes écrits, fur les comédiens fembleroient annoncer qu'il eut a s'en plaindre. II peut fort bien être arrivé que quelques auteurs, quelques décifions hafardées du fanhédrin comique 1'aient dégouté de Ia fcène. Ceux qui courent cette carrière font adbz expofés a ces fones de défagrémens, fuite ordinaire d'un combar de deux vanités intraitables \ car la modeftie n'cit ni le foible des acteurs, ni le fort des auteurs. Quoi qu'il en foir, le Sage revinr aux romans. Gil Bias de Santïllane, mit le fceau a üx réputaiion; c'eft un charmant ouvrage, fait pour plaire  ^gl N O T IC E aux ignoranSj aux érudits, aux gens du monde, & aux hommes de tout étage ; outre un nombre infini d'éditions en francois, il a été traduit dans prefque routes les langues. Le Sage qui le donna premicrement en trois volumes, en ajouta un quatrième : « ce quatrième volume de Gil Bias,, » ( dir l'auteur de 1'elfai fur le gout ), moins » travaillé que les premiers , a recu du public , » le même accueil qu'une femme qui a été extrê« mement jolie, & a qui lage vient relacher les » traits ». Peut-être ces mêmes reflentimens contre les comédiens , qui avoient ramené le Sage aux romans, le jetèrent dans un genre pour lequel il montroit dans le principe une alfez forte répugnance. Je veux parler de ce qu'il a fait pour la foise : dans fa critique de Turcaret par le Diable Boiteux; don Cle'ophas dit a Jfmodée : « la belle « affemblée! que de dames! » Afmodée répond : =7 il y en auroit encore davantage, fans les fpec« tacles de la foire, la plupart des femmes y » courent avec fureur. Je fuis ravi de les voir » dans le gout de leurs laquais & de leurs co» chers » ; qui diroit qu'après s'être exprimé de la forte , un auteur va s'occuper pendant vingtcinq a vingt-fix ans de fa vie a travailler pour nn théatre, dont les fpeftateurs ne feront que  DES A U T E UR S. 285 des laquais, des cochers ou des belles dames qui auront le même goüc! C'eft pourtant ce qui eft arrivé, foit que 1'attraic de la pecite fatisfaétion qu'il rrouvoit a houfpiller les Romains, ( c'eft le nom de guerre des comédiens francois dans les pièces foraines), lui fit palier fur toutes les autres confidérations, foie encore que le profit, ( car quand un auteur eft devenu père de familie, il ne lui eft plus permis de négliger eet article ), foit, dis-je , que Ie profit, après 1'avoir alléché , le fixat enfuite, il fe voua pour ainfi dire a Ia foire -y & comme J'homme d'efprit ne fe mêle de rien , quil n'y fafte remarquer que fa tracé, s'il. ne fut pas touta-fait 1'inventeur, il fut au moins lecréateur d'une troifième efpèce de drame mixte, fi connti de nos jours fous la dénomination d'opéra comique: en voici 1'hiftoire en deux mors : H fe tient a Paris deux foires (i), 1'une dans un enclos a peu prés au cceur de la ville, on 1'appellefoireSaint-Germain,& 1'autre, dans Jefauxbourg Saint-Laurent, dont on lui a donné le nom. Pendant longtems, les marchands feuls pour qui (1) La Foire Saint-Germain commence en Février, & dure tout le Carême jufqua la Semaine - Sainte; Ia Foire Saint-Laurent commence en Juin, & finit a Ia fin de Seprembre^  2$4 N O T I G E elles étoient fakes, en profitèrent, mais comme le concours du peuple augmenta avec la ville, Sc que comme elle devint immenfe, on imagina d'y montrer des animaux rares', enfuite des aidmaux inftruits. La réuflite y fit joindre des fauteurs, des voltigeurs, qui mêlèrent aux danfes Sc auxfauts quelques mauvaifes fcènesen profe, d'abotd auffi mal rendues qu'elles étoient mal compofées. Peu a peu les acteurs devinrent meilleurs ; les fauteurs furent mieux choifis, & tout Paris y courur; les comédiens francois a-u lieu d'ufer, pour retenir du monde, du privilege de fe furpaffer dans leur jeu, Sc de donner d'excellentes pièces, trouvèrent plus commode de faire valoir celui que leuE accordoient- les lettres patentes de leur établiffement; ils plaidèrent; los entrepreneurs des fpectacles forains, obtinrent diverfes fentences Sc arrcts qui changèrent fingulièrement la forme des pièces; cbaque décifion faifoit éclorre une variation,.au moyen delaqueUe on éludoit les difpofitions du jugement; Sc le public curieux de favoir comment on s'y prendrok, fe portoit en foule a la foire; les forains condamnés, Sc défenfes a eux faires, de jouer des dialogues, ils eurent recours fucceffivemenf aux monologues, au début dans les coulifles,.a la pantomime , aux marionnettes, aux écntearu, Cette dernière manière qui offre 1'opéracomique  des Auteurs. aS 5 dans fon berceau, mérite d'être expliquée. Les acteurs paroiftant fur la fcène, defcendoient dn cintre deux amours qui dérouloient une cartouche fur laquelle on lifoit un couplet & Ie nom de facteur qui devoit le chanter (1), 1'orcheftre jouoitl'air, les fpeébteurs ayant le ton, chantoient le couplet, & facteur faifoit des geft.es analoguesj au milieu d'un peuple chantant, cn penfe bien que cette invention fut parfaitemenc xecue. Les Mémoires pour fervir a 1'Hiftoire des SpectacZes de la Foire, 1'attribuent a MM. Chaillot & Remy , l'un officier mouleur de bois, 1'autre greffier a 1'Hötel-de-Ville, « c'étoient », difent» ils, « deux philofophes inconnus », inconnus ou non, fi 1'idée eft a eux , on leur en doit 1'hommage (a). Le Sage la perfectionna, Arlequin, ( r ) On ne commenca pas par-la , en premier lïeu : chaque Adeur fe préfenta avec un écriteau a la main, ou fon röle fe lifoit en gros caractères; d'abord ce fut ea profe, enfuite en couplets. Ces cartons, cmbarralTant fur la fcène, on prit le parti de les faire defcendre du cintre. (1) Difons tout pourtant, 1'Auteur de ces Mémoires pour appuyer fon fentiment, n'attribue a MM. Chaillot & Remy <\\iArlequin, empereur de la Lune, joué en 17113 & dans le même Ouvrage, on trouve un catalogue des Pièces « : Arlequin , baron allemand, ou le Triomphe de » la Folie, en trois actes, en vaudevilles & par écri-  z$6 Notice roi de Serendib , fujet tiré des contes arabes , eut un fuccès étonnant (i), qui ne fut démenti ni par Arlequin Thais, ni par Arlequin Invifible -y mais il n'en demeura pas la; du plaifir qu'on prenoit a chanter des couplers fur des écriteaux , en s'entendant écorcher les oreiües, fans autre dédommagement que d'écorcher a fon tour celles de fes voifins, il n'étoit pas difncite de conclure qu'on en auroit bien davantage a les entendre chanter avec gout, avec intelligence, avec juftedb , par 1'adeur auquel il appartenoit de les dire; les entrepreneurs de la foire firent donc un marché avec 1'Opéia qui leur accorda la permiffion de chanter , en vertu du droit exclufif qu'il en a ; & dès ce moment, le théatre & les pieces n'eurent plus d'autre titre que celui d'Opéra Comiques. La Foire de Guibray , prologue, fuivi d'Arlequin Mahomet, & du Tombeau de Noftradamus, par ou débuta/e Sage, remplirent 1'attente du public, & même des intérelTés. Arlequin Maho- » teaux, douteufe entre MM. Fufdier, le Sage & Do» minique » : ainfi les titres paroifTent égaux. (i) On trouvera cette Pièce'dans ce Recueil, pour ne pas laiffer perdre la mémoire du premier pas que 1'OpéraComique a fait fur la fcène.  des Auteurs. 287 met eft tiré des contes arabes (1), c'eft un magafin dans lequel notre auteur s'eft fourni plus d'une foisj il ne faut pas s'en étonner : en 1710, M. Petit de la. Croix avoit traduit les Mille & un Jour; il pria le Sage de revoir fon ftyle, & celuici le corrigea, ou pour mieux dire, redt le livre, Le Tombeau de Noflradamus commence par une réminifcence de Roland F Amoureux ; mais le cadre eft heureux, & les fcènes auffi bien que les conplets en font piquaus. La Ceinture de Vénus, Télémaque , parodie de 1'opéra de ce nom, & le Tcmple du Deflin accrurent encore fopinion qu'on avoit de fa fupérioritédans ce nouveau geare ; Télémaque furtout engoua la capitale. C'eft en effet une très-plaifante Pièce, & qui fut auffi plaifammenr jouée. Je ne fuivrai point le Sage dans le détail des pièces qu'il a donnés a ce Théatre, depuis 1712 ou 17 ij , jufqu'en 1738 : on en compte qtiatrevingt-huit, dont vingt-neuf feul, vingt trois avec d'Orneval, rrente-deux avec d'Omeval &Fufelier, une avec d'Omeval & Autreau ; une autre avec d'Omeval & Piron; une autre avec ZajWj & enfin une autre avec Fromaget. II fuffira de dire (1) M. de Cailkava en a feit fon Cabriolet-Volant.  288 Notice qu'il avoit tellement faifi le gout du Public i qu'aucune de fes Pièces ni de celles auxquelles il mit la main, n'efliiyèrent d echec; que plufieurs furent incroyablement fuivies ; qu'on y voyoir toujours briller une forte de fleur d'efprir, d'enjouement, qui fouvent lestira des tréteaux de lafoire pour les faire palier furleThéatre duPalais Royal, ou Madame & Monfeigneur le Régent, par le plaifir qu'ils y prirent, lui prouvèrent qu'il avoit trouvé le fecret rare d'être piquant fans manquer au naturel, facétieux fans donnet dans la baffefle, & gai fans cefTer d'être décent. Ila pris par tout des motifs de pièces ,1a Société des Aventures du Jour, la Fable , la Féerie, il mertoit tout a contribution; il paroit avoir fingulièrement connu 1'art de les compofer. 11 choifit toujours un fujet fimple qui s'expofe en deux mots; fupprime avec adrefle toutes les fcènes de liaifon; met, autant qu'il le peut, les afteurs, en lituation, &c fuit la fcène comme la pièce, c'efla-dire, qu'il ne la file point; qu'il projete les couleurs principales, & négligé abfolument les nuances. Ses couplets font d'une toutnure facile, d'une chute heureufe, leur originalité n'a rien de bifarre ; d abonde en contraftes, en faillies; je ne puis m'empècher de remarquer que dans la Foire des Fées, M. Chevillard, poëte extravagant, annonce le deflein « de metwe en vers les Lettres „ Portugaifes »,  des Auteurs. 289 »5 Portugal/es » , deiTein qu'a de nos jours exécucé M. Dorat, d'après le bon M. Chevillard: ce qui démorm e bien que le ridicule n'eft pas le même ni pour rons les tems, ni pour tous les efprits. Le Sage jouant fouvent ceux qui jouent les autres, eut des prifes avec les trois fpeétacles; 1'Opéra foutint mal la foire ; les Comédies Francoife & Italienne 1'attaquèient avec fureur, & le pauvre Opéra comique fut obligé de céder a fes ders ennemis. Ses auteurs ne furentpas fi dociles j ayant acheté de grandes marionnettes, ils leur firentrepréfcnter VOmbre du Cocher Poëte, le Rémouleur d'Amour, & le Raviffeur Poli, parodie de Romulus de la Motte ; ils cherchèrent dans ces pièces a fe venger par d'excellentes épigrammes qui furent écoutées avec avidité. Le comédien le Grand répondit aux forties que faifoient ces acteurs d'une nouvelle ftruóture contre les francois, par ce couplet qui courut dans le tems, fur 1'air : la beauté, la rarcté, la curiofué. Le Sage &: Fujllier dédaignent du haut ftyle, La beauté : Pour le Polichinelle ont abandonné Gile, La rarcté : 11 ne leur mar.quc plus qu'a crier par la Ville , La curioiïté. La Comédie Italienne fut celle qui conferva Tomé XXXVII. T  290 Notice le moins fa rancune ; il y eur même une réconciliation en règlc enrre elle & les acteurs de 1'opéra comique, ils firent pour elle le Jeune Vieillard, la Force de l'Amour & la Foire des Fées qui furenc recues avec une froideur, que la feconde furtour, chaudement conduite, bien dénouée, dialoguée avec intérêt, auroit dü changer en empredemenc. Après deux ans , 1'opéra comique reprit naiffance, & le Sage, avec fes deux collègues, continuèrent d'y attirer la foule. Le Temple de Mémoire ,XObftacle Favorable, Achmet& Almanyne, le Corfaire de Salé, la Reine de Baroflan, les Routes du Monde, l'' Efpérance,Sophie & Sigifmond, & les Mariages de Canada, &c, y parurentavec un fuccès d'autant plus étonnant, qu'il ne fe démentit pas. Si ce que dit une fotte de préface hiftorique , placée a la tète d'une édition en 3 volumes petit fotmat, du Bachelier de Salamanque, « queM. de » Voltaire affeéloitpeu d'eftime pour le Sage » , eft audi vrai que vraifemblable , la raifon ne feroit pas difiicile a en donner. Dans le Temple de Mémoire, le Sage, introduit un partifan fanatique de eet écrivain célèbre, qui vient abfolument cpoufer, au nom de fon idole, la Folie qui fe fait piendre pour la Gloire ; or, comme en fait de plaifanterie, le philofophe de Ferney étoit tout  des Auteurs. 291 épiderme, il eft aftez fimple qu'il n'aic jamais rien goiué de ce qui partoit de la plume d'un homme qui avoic eu la hardiede de rire un peu de lui & de fes adminateurs outrés. L'opéra comique n'occupa pas rellementles loifirs de notre auteur, qu'il n'en trouvat pour d'autres ouvrages. II rraduifit de 1'italien du Boyardo ÏOrlando inamoracoy fous le titre de Roland l''Amoureux (1), & il le fitparoïtre vers 1717 ; fon projet qui n'eut pas lieu , étoit de traduire audi 1'Ariofte; & il crue avec raifon devoir commencer par le conre Scandiano, car on ne peut avoir une entière fatisfaction a lire le Roland Furieux, fi 1'on n'a la d'abord l'Amoureux; la plupart des aventures de celui-la n'étant que continuées de celui-ci; ce poëme, dont le mérite edentiel confifte dans une imagination grande, vafte, inépuifable, a peut¬ en 1 ) On dit Roland 1' Amoureux, Roland le Furieux, on devroit dire Roland Amoureux , Roland Furieux, felon 1'Italien. Je penfe que la grande célébrité de ces deux Poé'mes aura fait employer 1'arricle défini pour les diftinguer , & que eet article fe fcra tellement amalgamé a leur nom, qu'il n'aura plus été polfible de 1'en féparer enfuite. Le Sage paroit croire qu'il n'y a eu qu'une feule traduction de eet Ouvrage, celle de Rojfet j mais il y en a une antérieure de Jacquer Fincent , dédiée a tres-haute & vertueufe Dame, Madame Diane de Poitiers, Duckejfe de Var. lentinois , dont il s'eft fait trois éditions. Tij  2g2 Notice être gagné en paffant par les mains de le Sage. Les extravagances géographiques , y font corrigces, le gigantefque des caractères y eft adouci, les convenances y font un peu plus obfervées. Charlemagne eft moins petit, Ferragus moins brutal, Renaud moins malhonnête, Roland moins butor, &c. ,ileft vrai, qu'djlolphe eft plus gafcon, Fleur de Lys plus hardie, &c. Au refte, les chaos, k groflièreté, le mauvais gout du ftyle de Poriginal difparoident dans cette traduction fans verve , fans élan, mais égale, mais foignée , mais agréable. Si le Sage, qui travailloit beaucoup tout ce qu'il écrivoir, a pourtant fait un aflez grand nombre d'ouvrages, c'eft qu'il étoit heuteux dans fa maifon, il avoiteude fa femme, trois garcons & une filie; fa femme pleine d'attention pour lui,& de tendrelfe pour fes enfans, partageoit les foins de leur éducation, rien ne 1'éloignoit de chez lui, il n'y rentroit pas fans plaifir; mais quel être vivant peut fe flatter d'enchainer le bonheur! Son fils aïné qu'il deftinoit au barreau, lui caufa le plus vif chagrin •, il embrada la profeffion du théatre, c'éroit peut-être celle pour laquelle le père avoit le plus d'averfion, quoiqu'elle ne laifle pas de tenir a 1'autre par un de fes beaux cötés. Le 8 Mai 1726, le jeune le Sage débuta fur la fcène francoife, par le rble de Mafcarille dans  des Auteurs. 293 l'Etourdi.On appercut chez lui le germe d'un grand talenr, mais il n'en donnoit que 1'efpcrance, Sc dans la capitale, on veut que les talens foient formés.' Le jeune acteur alla courir la province pendant deux ans fous le nom de Montménil : au bout de ce tems, ilrevint a Paris, débuta une fecondefois,le 1 8 Mai 1728 , fe fit admirer,& fut recu le 7 Juin fuivant. Long-tems fon père ne put lui pardonner le parti qu'il avoit pris : on ne lui vantoit ni fon jeu, ni les applaudidemens qu'il s'attiroit, ni même la bonté de fón caractère, ou 1'honnêteté de fes mceurs, fans lui faire une peine fenfible. L'exemple influe, Sc quelquefois 1'exemple corrige; c'eft ce qu'on vit dans la familie de le Sage. Son fecond fils, loin de fuivre les ttaces de fon frère ainé, fe fit eccléfiaftique, Sc fe rendit recommandable par la pratique de toutes les vertus de fon état; il obtint un canonicat a Boulogne fur Mer ou, dès qu'on le connut, il fut généralement aimé Sc refpecté. Le troifième au contraire ne fut pas plutot en age de fongerafe faire une exiftence, que, féduit par la confidération & les autres avantages dont Montménil lui parut jouir , U monta fut les planches, prit le nom de Pitenec, Sc fut jouer en Province. Il paroït qu'il revint a Paris en 1734. L'hiftorien du théatre de la foire nous apprend Tiij  194 Notice que cette annce on donna a la foire Saint-Germaïrï le Miroir Véridique, pièce qui n'eft autre chofe que la Statue Merveilleufe, réduite en un ade, par Pitenec, comédien de campagne; mais comme auteur ni comme acteur, fon nom ne feroit pas forti de 1'obfcuritc, s'il avoit été chargé leul de fon illuftration. ; La filIe de k Sage > par un attachernent qui ne s'eft pas démenti, confola fon père de tous les défagrémens qu'il avoit puéprouverdela conduite de fes dis. Dès fa jeuneffe , le Sage avoit reffenti les avant coureurs de la furdité. Déji en 1705?, cette incommodité étoit fort augmentée : il en fait mention dans le prologue de Turcaret (1 ) Dom Cléofas. ( 1 ) « L'Auteur & les Comédiens fe flattent, fans doute, qu'elle réuffira ». A s m o r> é r. « Pardonnez-moi, les Comédiens n'en ont pas bonnc » opinion, & leurs preffentimens, quoiqu'ils ne foient pas " inf"illib!«, ne laiffent^pas d'efFrayer 1'Auteur qui s'eft » allé cacher aux troifémes loges, oü, pour furcroït de » chagrin, il vient d'arriver auprès de lui un caifller & un ■« agent-de-change, qui difent avoir ouï parler de la Piéce, » & qui la déchirent impitoyablement : par bonheur pour *> lui, il eflfifourd, qu'il n'entend pas la moitié de leurs * parohs ».  des Auteurs. 295 elle vint au point qu'il tui fut impodible d'entendre fans 1'aide d'un cornet acouftique. II fallut que les lettres le dédommageadent des jouiffances qu'il ne pouvoit plus chercher dans la fociété. M. de Bremont avoiftraduit le Gu\man d'Alfaraehe, de 1'Éfpagnol. Aux fréquentes moralités de 1'original, il en avoit encore ajouté de fon cru, & les faits noyés dans une mer de réflexions, forcoient les mains des plus opiniatres lecteurs a laiffer tomber le livre. Notre auteur entreprit la refonte de ce roman ; il le publia en 1731 en deux volumes, & dans fa nouvelle forme , il devint très-amufant. La même année il fir paroitre les Aventures du Chevalier de Beauchefne, dans lefquelles il a confervé le coftume avec tant de foin, & fi bien exprimé les mceurs , qu'on ne fait s'il s'agit d'une fiction ou d'une hiftoire. Il y a des inftans d'un vifintérêt dans ces aventures. Le catacftère du Chevalier y eft fottement deftiné , il attaché toujours; audi les épifodes impatient-ils. On n'aime pas a être diftrait de la féerie des évènemens dont le héros vous infpire de 1'afTeaion. Le Sage prétend avoir écrit d'après les Mémoires de 'M. de Beauchefne que lui a remis fa veuve. A la rigueur cela fe pourroit. II fe mit enfuite a compofet fon Bachelier de T iv  Notice Salamanque qui commence a fqjblir. L'abbé des Fontaines lui donna de grands éloges , mais c'étoit pour avoir le plaifir de critiquer , en Ie louant, Marivaux & l'abbé Prevoft. Ce n'eft pas cependant que famarche ne foit franche, dégagée de fentences fuperflues , de réflexioas alambiquées, de tournures a prétentions , mais il eft commun d'ordonnance , pauvre d'invention. Ce n'étoit pas la peine de tranfporter fon lecteur au nouveau Mexique , pour ne le rendre témoin que de ce qu'il auroit vu pattour ailkurs. On peur douter de ce qu'ofj lit dans cette prcface hiftorique dont j'ai paflé, « que le Sage regar» don comme fon chef-d'ceuvre le Bacheüer de j) Sdïamanque ». Le gout furvit au génie ; le Sage a toujours confervé le premier dans la dccroidance du fecond, & il n'eft güères probable que les preftiges de Tamour paternel pour fes dernières produétions, aveuglent un auteur au point que Péditéur voudroit le perfuader. Corneille penfoit infailliblement qu''Agejïlas & Pulchcrie avoient des beautés; mais lorfqu"~i! s'agit de décider entre fes meilleures tragédies , il Domme Rodogune ou Clnna. J'ai oublié de parler, a lepoque de 1704, de fa traduction en deux volumes, des nouvelles Aventures de don Quichoue d'Avel Lanida. J'auïois pu 1'oublier exprès, comme je pourrots me  des Auteurs.' 297 difpenfer de parler de fon Eflevanille qui me femble fait, s'il eft permis de fe fervir d'une exprefllon aufli triviale, avec les retailles de fon imagination. Après ce dernier ouvrage , le Sage ne s'occupa plus qua vivre 11 regut en grace fon fds ame qui fe montra le fils le plus rendre & le plus complaifanr. Un premier voyage qu'il avoit fait a Boulogne-fur- Mer , l'avoit ramenc auprès de hri;*'& eet acteur aimable, fe concentrant dans fa familie , n'avoit point d'ami plus intime que fon père, ni de fociété plus particuliere que celle de fa mère & de fa fceur. Le Sage ne le quittoit point. Quand le fils étoit au théatre 1'après-midi, 1'unique amufement du père étoit d'aller dans un café rue Saint-Jacques , oü il venoit une infinité de gens pour Pécouter. On faifoit cercle autour de lui; on montoit fur les chaifes, fur les tables, afin de mieux 1'entendre: Avec des idees juftes , une élocution claire , brillante, relevée par unorgane fonore, fléxible, il excitoit la même attention , & quelquefois les mêmes applaudiftemens parmi cette affemblée particuliere , que Montménil dans fes róles de Valets ou de Païfans qu'il rendoit avec une fupériorité dont on fe fouvient encore. Ce fils fi chéri, le fondement fur lequel portoit la félicité du refte des vieux jours de fon  ij>3 N O T I C B père, étant allé faire une partie de chalfe , fut attaqué d'un mal violent dont il mourut fubitement a la Villette, le 8 Septembre 1743. Sa mort fut un coup de foudre pour fon père qui en demeura inconfolable. Il retourna définitivement avec fa femme & fa filie chez fon fils le chanoine, oü il vécut jufqu'au dix-fept Novembre 1747 dans un état d'affaidement affez trifte. II avoit prés de quatre-vingt ans , lors de fon décès. On lui fit 1'épitaphe fuivante que je rapporte faute d'autre : Sous ce tombeau gït le Sage abatm Par le cifeau de la paiquc importune. S'il ne fut pas ami de la fortune , II fut toujours ami de la vertu. Cette Notice fe trouve a la tête de l'édition de le Sage, donnée par Cachet, Libraire. A Paris „ ce 10 Janvier 1783. \^ o u s m'avez prié, Monfieur, de vous donner quelques notions fur les derniers jours du célèbre auteur de Gil Bias , & de plufieurs ouvrages eftimés: voici, Monfieur, les feules quej# puiflevous donner.  des Auteurs. 299 Après la bataille de Fontenoy, a la fin de 1745 , le feu roim'ayant nommé pour fervirfous les ordres de M. le Maréchal de Richelieu, les événemens Sc de nouveaux ordres m'artêtèrent a Boulogne fur Mer, oü je redai commandant en Boulomiois, Ponthieu & Picardie. Ayant fu que M. le Sage, agé d'environ quatrevingt ans, Sc fon époufe a peu prés du mème age, habitoienta Boulogne, un de mes premiers foins fut de les aller voir , &de m'aflarer par mormême de leur état préfent; je les trouvai logés chez leur fils chanoine de la cathcdrale de Boulogne, & jamais la picté filiale ne s'eft occupéö avec plus d'amour i foigner Sc embellir les derniers jours d'un père Sc d'une mère qui n'avoient prefque aucune autre reflöurce que les médiocres revenus de ce fils. M. l'abbé le Sage jouifibit a Baulogne d'une haute confidération. Son efprit,fes vertus, fon dévouementa fervirfes prodhes.le rendirentcher a monfeigneur de Predy fon digne cvcque, a fes confrères, a la fociété. J'ai vu peu de reflemblance aufli frappante que celle de l'abbé le Sage, avec le fieur Montménil, fon.frère ; il avoit même une pattie de fes talens Sc de fes dons les plus aimables ; perfonne ne lifoit des vers avec plus d'agrément; il polfcdoit 1'art fi rare de ces toni variés, de ces courts repos, quifiwis être une dé-  }oo Notice clamation, impriment aux auditeurs le fentiment & les beautés qui caractérifent un Ouvrage Je regrettois & j'avois connu Ie fieur Montménil, je me pris d'eftime & d'amitié pour fon frère, & la feue reine, fur le compte que j'eus 1'honneur de lui rendre de fa pofition & de fon peu de fortune, lui fit accorder une penfion fur un bénéfice. On m'avoit averti de n'aller voir M. le Sage que vers le milieu du jour ; & ce vieillard me donna 1'occafiond'obferver, pour la feconde fois, 1'efTet que 1'état acluel de Fatmofphère peut faire fur nos organes dans les triftes jours de la caducité. M. le Sage fe réveillant le mat in , dès que le foleil paroiftbit élevé de quelques degrès fur 1'horizon , s'animoit & prenoit du fentiment & de la force, a mefure que eet aftre approchoit du méridien ,mais lorfqu'il commencoit a pencher vers fon déelin, la fenfibilité du vieillard , la lumière de fon efprit & 1'aétivité de fes fens diminuoient aproportion ; & dès que le foleil paroiftbit plongé de quelques degrès fous I'horifon, M. le Sage tomboit dans une forte de léthargie, dont on n'eftayoit pas même de le tirer. J'eus 1'attention de ne 1'aller voir que dans les tems de la journée, oü fon intelligence étoit la plus lucide, & c'étoit a 1'heure qui fuccédoit a fon diné, je ne pouvois voir fans attendridement ce  des Auteurs. 301 vieillard eftimable qui confervoit la gaieté, 1'urbanité de fes beaux ans, quelquefois même 1'imao-ination du Diable Boiteux Sc de 'Turcaret; mais un jour étant arrivé plus rard qu'a 1'ordinaire, je vis avec douleur que la converfation commencoit a redembler a la demière homélie de 1'archevèque de Grenade, & je me retirai. M. le Sage étoit devenu très-fourd: je le trouvois toujours adis prés d'une table 011 repofoir un grand cornet •, ce cornet, faifi quelquefois par fa main avec vivacité, demeuroit immobile fur fa table lorfquel'efpèce de vidte qu'il recevoit ne lui donnoit pas 1'efpérance d'une converfation agréable : comme commandant dans la province, j'eus le plaifir de le voir s'en fervir toujours avec moi, Sc cette lecon me préparoit a foutenir bientót la pétulante aétivité du cornet de mon chef Sc illuftre confrère & ami de M. de la Condamine. M. le Sage mourut dans 1'hiver de 1746 a 1747, je me fis un honneur & un devoir d'affifter a fes obfèques avec les principaux officiers fous mes ordres. Sa veuve lui furvécut peu de tems; l'abbé le Sage fut regretté quelques années après par fon chapitre, Sc la fociété éclairée dont il avoit fait 1'admiration par fes vertus. J'ai, &c. Le Comte de Txsssan, Lieutenant- Général des Arroées da Roi, de 1'Académie Francoife & des Sciences.  301 Notice S AIN T-F OIX [Germain-Francois PouixAin de) né a Vannes en Bretagne , Ie 25 Février 1698 , mort a Paris Ie 25 Aoüt 1776. II étoit ilTu de parens nobles, qui du collége le firent paflfer dans la feconde Compagnie des Moufquetaires, dont il fortit pour prendre une Lieutenance de Cavalerie dans le Régiment de la CotnetteBlanche. Le befoin d'écrire , ou plutot le germe de talent qu'il avoit appotté en naiffant, ne lui permit point d'attendre un age mur pour compofer. II fe hata d'écrire fa Comédie de Pandorc. On eut égard a la jeunefle d'un Moufquetaire, & la pièce réudit. Ce fuccès 1'engagea a multiplier fes elfais, qui furent adlz bien accueillis du public. La guerre ayant été déciarée a 1'Empereüt par la France, Saint-Foix fufpehdit les travaux li c ré— raires, & fuivit M. le Maréchal de Brcgiie, en qualité d'Aide de Camp. II s'acquitta avec diftinction des fonctions pénibles & périlleufes de cette place. II crut avoir mérité une Compagnie de Cavalerie, qu'il demanda fans pouvoir lobtenir. Ce rcfus le détermina a quitter ie fervice. La réforme dans laquelie fon Régiment fut compris, lui fournit 1'occafion d'une retraite honnête. Revenu dans fa Patrie, il y acheta ia charge de Maitre Particulier des Eaux & Forêts, qu'il conferva depuis iyj^jufqu'en 1740. C'eftacette époque qu'il s'étabiit a Paris.  des Auteurs. 30} Nous allons prendre dans le Nécrologe la peinture de fon caraétère.— « Son caraétère (dit-on) » inquiet, impatient, contrariant, &nepouvant » fouffrirla contradiétion, emporté, &necédant » jamais , auroic du 1'ifoler, le féqueftrer de » tout commerce, dans une ville oü la politeffe » eft la bafe de toute fociabilité. Cependant il » eut des amis, il fut admis dans les meilleures n compagnies; c'eft qu'a des talens aimables il n joignit un cceur jufte Sc droit, une ame ferme » Sc franche , ennemie de la datterie Sc de 1'or» gueil : il eut part aux penfions deftinées aux »> Gens de Lettres; mais il n'eut jamais 1'injufte " dureté d'employet le crédit des grands qui » 1'eftimoient, a fe faire accorder ces bienfaits, » au préjudice de ceux qui les avoient mérités n par de longs travaux, ou qui en avoient plus » befoift que lui. » Ce que M. de Saïnt-Foix avoit une fois » avancé il le fcutenoit au péril de fa vie. Cette » inflexibilité lui attira plufieurs affaires ». Dans 1'hiftoire de fes querelles, nous donnons la préférence a ceUe-ci, paree qu'elle eft plaifante. « M. de Saint-Foix fe prit un jour de querelle au foyer de 1'Opéra , avec un Provincial qu'il ne connoiffbit point, Sc qui ne voulut point céder. M. de Saint-Foix fe crut cffenfé, & lui donna un rendez-vous. — Monfieur, lui dit le Provin-  304 Notice cial, quand on a affaire a moi, on vient ma trouver, ceft ma coutume; je demeure a 1'hötel de Je vous attendrai.—-M. de Saint-Foix ne manqua pas le lendemain d'aller chercher l'inconnu , qui le recoit très-poliment, & lui orTre a déjeuner. — 11 eft bien queftion de cela, dit M. de Saint-Foix. Sortons. — Non, repond tranquillement le Provincial, je ne fors jamais fans avoir déjeuné , c'eft ma coutume. II déjeuna a fon aife, en invitant toujours M. de Saint-Foix d'en faire autant. Le déjeuné fini, ils fortent & M. de Saint-Foix refpire \ mais en padant devant un café, l'inconnu 1'arrête. — Monfieur, lui dit-il, après mon déjeuné, je joue toujours une partie de dames ou d'échccs,c'c/? m'a coutume, chacun a la fienne, & vous ne voudriez pas.... Hé, Monfieur! reprend M. de Saint-Foix, vous prenez bien votre tems pour jouer aux échecs. — Cela ne fera paslong lui dit l'inconnu, après quoi je fuis a vous. Ils entrent dans le café . finconnu joue avec le plus grand flegme , gagne la partie, fe léve, fait figne a M. de Saint-Foix, qui juroit entre fes dents, lui fait mille excufes, & ajoute:—Si vous voulez , Monfieur, nous irons aux Tuileries, & nous ferons deux tours de promenade \ après avoir joué une partie je ne manque jamais d'aller me promener , c'eft encore ma coutume.Comme lesTuileries font voifines des Champs-Elifées i  DES AuTEWRS. J05 Champs-Elifées, M. de Saint-Foix qui crut quef l'inconnu avoit fixé la, le lieu du combat, accepte. On fe promène;- l'inconnu fait fes deux tours. M. de Saint-Foix lui propofe de pader aux Champs-Elifées.—Pourquoi faire, lui clin l'inconnu? Belle demande, repond Saint-Foix , parbleu! Pour nous battre , eft-ce que vous 1'avez oublié. —- Nous battre! Y penfez-vous, Monlieur? Que diroit-on de moi? convient il a un Tréforier de France, a un Magiftrat, de mettre 1'épée a la main? On nous ptendroit pour des fots. M. de Saint-Foix refta comme anéami, & quitta le Tréforier, qui fut le premier k publier fon aventure 33. II femble prefqu'impodible qu'avec ce caractère M. de Saint Foix ait pu écrire dans des genres légers & agréables. TVut ce qu'il avoit d'aimable dans 1'efprit & dans le cceur, fe répandoit fur fon papier. Ce n'étoit plus le même homme dans le monde. Sa brufquerie, fes boutades, fes humeurs, lui donnoient un vernis de groffiereté bien difparate avec la délicatefle de fes fentimens & de fon imagination. II étoit cependant modede, & fe vantoit aufti peu, qu'il fe plaignoir peu des critiques dont on 1'honoroit; car on lui fit les honneurs de la fatire. II ne s'abaida jamais a répondre aux Journaliftes; mais quand les trairsétoient envenimés, il s'adrefloit au Magiftrat qui Tome XXXFIL \f  306 Notice le vengeoit. II fe plaignoit auffi , par la même voie miniftérielle, des plagiats qu'on fe permettoir de fes ouvrages, il appeloit cela pillacerun auteur, & il ne fouffroit pas volontiers que l'abbé de la Porte le pillaqat. On dira en 1'honneur de fa mémoire qu'il n'écrivit rien qui ne fut digne d'être confervé , 8c qui ne put fervir de lecon. II fe fit un genre a lui,& c'eft ainfi qu'il s'exprime lui-même: —• Nous avons d'excellentes Comédies de caratlère (dans la préface de la Comédie des Graces) nous avons quelques bormes pièces d'intrigues \ pourquoi n'admettroit-on pas au théatre un troifième genre de Comédie, dont les fujets moins étendus, plus unis, toujours dans le gracieux, ne préfenteroientuniquementque la fimple nature 8c le fentiment. N'a-t-on pas toujours dit que la po'éfie 8c la peinrure étoient keurs; 8c dans la peinture n'y a-t-il pasle payfage; je fuis perfuadé que ce nouveau genre de Comédie plairoit beaucoup par la naïveté de fes tableaux, s'ils étoient travaillés avec eet art, cette élégance, ce naturel, qu'un habile pinceau pourroit leur donner. II fautun talent peut-être plus marqué qu'on ne penfe, pour ces fortes de petits ouvrages, dont les couleurs doivent-être fi bien ménagées, qu'une teinte trop vive ou trop foible, peur en rendre tout le coloris défagréable. 11 faut être doué d'une imagination tendre, qui n'admette pour ainfi dire  des Auteurs. 307 que les objets que le cceur lui préfente, 8c il dok régner dans le tour, un air fi aifé, une expreflion fi naturelle, qu'il femble aufpedateur qu'on a écrit fans peine, ce qu'on a penfé fans application . On fent k merveille que l'auteur s'eft fait une poëtique a fa manière, ainfi que 1'ont ofé tous ceux qui fe font écartés des genres connus. II eft cependant vrai, que le fyftême de M. de SaintFoix, peut être très-ingénieux, 8c très-admiffible. II a prouvé par des eftets, qu'il n'hafardok nen, & que ce nouveau genre pouvoit réuflïr. Nous fommes fichés de ne point trouvet fur la lifte des Académiciens Francois , M. de SaintFoix , qui pouvoit y figurer avec une forte de diftindion. Peut-être ne demanda-t-il point une place, qu'un ufage fingulier veut qu'on demande, comme fi on devoit folliciter une diftindion quelconque! Dansles corps milkaires, c'eft landenneté qui élève aux grades fupérieurs , ou Ia réputation. Pourquoi n'en eft-il pas de même a 1'Académie? Paree qu'elle eflivya un refus, a-telle lieu de craindre d'être de nouveau compromife ? Nous pourrions 1'adiirer que cette crainte n'eft pas fondée. Quoi qu'il en foit, SaintFoix ne fut point Académicien , & n'en murmura point, il crut même qu'il n'étoit pas digne de eet honneur. Parvenu a un age oü le repos eft Punique bien Vij  3«.8 Notice qui puiffe encore mettre un prix a Ia vie, il fe rerira dans un des fauxbourgs de Paris, ou il étoit prefque ignoré. Quelques amis venoient le vifiter, & lui rappeler d'anciens fouvenirs. Il nomma quelques jours avant fa mort, l'abbé de Very, fon ami, pour fon exécuteur teftamentaire. Les fcpultures dans les églifes produifoient dans les têtes une forte de fermentation, & on les regardoient comme elles auroient du toujours 1'ctre, c'eft-a-dite, très-peftilentielles. M. de Saint-Foix voulut être enterré dans le cimetière. Nous allons donner une courte analyfe de fes ouvrages, Ejfais Hiftoriques fur Paris. L'objet de l'auteur a été de faire connoitre le génie, le caradère de la Nation, la fource, 1'origine de nosloix, ufages & coutumes. On trouve fans cede un efprit favant, profond, judicieux, un philofophe agréable, un honnête homme, un bon citoyen. Son hiftoire des anciennes guerres avec les Anglois, eft remplie d'érudition, & forme un morceau hiftorique d'un trés-grand mérite. Il nous a rendu la gloire qui nous étoit due, & que nos Hiftoriens nous avoient laiffe perdre par parede ou indifférence. Il venge par tout la France, & combat avec fuccès Rapin, Larrey, & les hiftoriens Anglois. H  des Auteurs. 509 n'eft pas 'moins attentif a recueillir les traits qui font honneur aux dames. IS Oracle, Comédie en un acte, eft un chefd'ceuvre dans fon genre; toujours applaudi; rien de fi fimple que le fujet, de fiagréable, de fi fpirituellement naturel. Deucalion & Pirrha, attaché par un intérêt foutenu. Les Veuves Turques, Comédie, qui a été repréfentée en fociété, le 12 Mai 1741, dédiée a Sald Effendi, Ambaffadeur de la Porte, en France. Cette Comédie fut compofée a l'occafion d'une fête que Madame la Duchefte de *** donnoit a. 1'Ambaftadeur. Elle a été traduite en langue Turque par le fils de Sald Effendi. C'eft peut - être 1'unique ouvrage dramatique que les Turcs ayent traduit. Le Silphe eut le plus grand fuccès. L'IJle Sauvage, en trois adtes,d'un genre trèsneuf. C'eft un développement ingénu de ces fentimens innés d'un fexe envers 1'autre. Nommer les Graces, c'eft rappeler Pidée chi ehef - d'oeuvre le plus agréable. de notre Vüj  3 io Notice théatre, dans le genre des peintures ingénieufes, naïves & délicates : les images y font féduifantes. VHeureufe Épreuve produit un dénoument qut fatisfait également le cceur & 1'efprit,lenoeud en eft d'une invention neuve j Egerie en un acte; Le dialogue des Doublés De'guifemens eft vif 5£ foutenu. 11 y a une force dans les caractères qui en donne beaucoup a la morale de cette Comédie; Zélóide fournit un exemple rare de fuccès pour les Tragédies en profe; une fingularité de plus s'y rencontre , c'eft que cètte Tragédie n'a qu'un acte ; Arlequin au Sérail; Le Rival Suppofé; La Colonie fut fufpendue par ordre des Magiftrats : oh crur y trouver des traits licencieux; Les Parfaits Amans, ou, les Métamorphofes;  bis Auteurs. ju Comédie en quatre adres, fut faite fur des machines, comme Duclos avoit écrit Acajou fur des eftampes; II y a dans Ia Cabale, Comédie en un acte, des fcènes d'un ton d'imagination, auquel on ne s'jttend point,.d'autant que les caractères font abfolument neufs pour le théatre & pour les mceurs. Les ridicules vus fous un afpect lï nouveau, fans en être moins vrais, font d'autant plus piquans que rien n'y redemble a la formule ufée des pièces a riroirs, dans le genre defquelles, il faut cependant placet celle-ci; Alcefie eft un divertidement compofé a l'occafion de la Convalefcence de Monfeigneur le Dauphin. Cette pièce exprimoit naturellement les fentimens des Erancois. Le Roi Louis XV ert fut touché ; Les Hommes eft une Comédie remplie de philofophie & d'imagination;.. Le Derviche eft traité d'une manière piquanre; II a encore donné le Financier y Pandore, la Veuve d la mode , le Contrafie , l'Amour & 1'Hu* men ; Y iv  sjït Notice Dans fes Lettres Turques on reconnoit la peinture de nos ridicules faite fans malignité ni myfan- ïhropie ; Sa Lettre fur 1'Homme au mafque ie fer, n'a rien éclairci; le iecret refte encore tout entier, &C nous croyons qn'il Jmporte peu de le dévoiler; L'Hiftoire de l'Qrdre du Saint-Efprit fit beaucpup d'honneur a l'auteur, & eft un ouyrage qui reftera, par ce caradtère de vérité & par la concifion dans le ftyle, qu'il a fu y imprimer. SAINT HYACINTHE ( Thémisseul de ), dont le vrai nom étoit Hyacinthe Cordonnier, naquit a Orléans, le 27 Septembre 1684, de Jean Jacques Cordonnier, fieur^e Belain &c d'AnneMarie Mathè\ fa mère étant veuve, fe retira a Troyes, avec fon fils. Elle y donnoit des lecons de guittare, ck fon fils en donnoit d'italien. Celuiei avoit pour élève une penfionnaite de Pabbaye de Notre-Dame; & fes lecons ayant eu les memes fuites que celles d'' Abailardk Héloïfe,'\\ futforcéde qujtter Troyes, ou M. Bofjuet, évêque de cette ville, 1'accueilloit trés-bien; il s'occupoit peu a détromper le public qui lui donnoit le grand Bojfuet pour père ; opiniqu qu'autorifoit fes liaifons avec le prélat, neveu de ce grand homme, &  bes Auteurs. 513 Ia multïtude de noms fous lefquels il mafquoit le fien. Après avoir parcouru une partie del'Europe, il fe fixa a Bréda, oü il époufa une demoifelle de condition, il mourut dans cette ville en 1746; nous ignorons les autres aventures de fa vie ; Voltaire, fon ennemi, dit qu'il avoit été moine, foldat, libraire, marchand de café, & qu'il vivoit du projet du Biribi, (lettres fecrètes, lettre soe). ïl n'a guères vécu a Londres, dit-il ailleurs, que de mes aumones & de fes libelles. Voici ( fuivant M. de Burigni), ce qui avoit attiré h. Saint-Hyacinthe ces injures & ces calomnies. Cet écrivain fitun voyageaParis versl'an 17 ig.Ily futtrès-bien accueilli des gens de lettres, & fit connoidance avec Voltaire, qui commencoit déja fa brillante carrière. On repréfentoit alors (Edipe, oü toute la ville accouroit, «je me fouviens, ( dit M. de » Burigni), que M. de Saint-Hyacinthe fe trouj) vant a une de ces nombreufes repréfentations 35 prés de l'auteur, lui dir, en lui montrantla mul» titude des fpeétateurs : voilA un éloge bien » complet de votre tragédie ; a quoi M. de Vols5 iaire tépondit trèsdionnêtement : votre fu/a> frage , Monfieur , me datte plus que celui de 53 toute cette aflemblée. Ces deux écrivains fe » voyoient quelquefois, mais fans être fort liés. as Peu d'années après, ils fe trouvèrent en An33 gleterre, & ce fut alors que leur haine com-  Ji4 Notice » menga. pour durer le refte de leur vie. M, der 3> Saint-Hyacinthe , (difent les auteurs du Journal 33 Encyclopédique ), a dit & répété plufieurs fois s3 a M. dt Burigni, que M. de Voltaire fe con»» duifit très-irrégulièrement en Angleterre, qu'il 33 s'y fit beaucoup d'ennemis par des procédés 33 qui ne s'accordoient pas avec les principes 33 d'une morale exacte. II eft même èntré avec 3J moi, ( ajoute M. de Burigni), dans des dc33 tails que je ne rapporterai peint, paree qu'ils 33 peuvent avoir été exagérés. Qnoi qu'il en foit, 33 Saint-Hyacinthe fit dire a M. de Voltaire, que 33 s'il ne changeoit de conduite, il ne pourrok 33 s'empècher d,e témoigner publiqr.ement qu'il 33 le défaprouvoit: ce qu'il :royoit devoir faire 33 pour 1'honneur de la Natkn Francoife, afin 3» que les anglois ne s'imaginaffent pas que les> 33 francois étoient fes complices & dignes du 33 blame qu'il méritoit. On peut bien s'imaginet 33 que M. de Voltaire fut très-mécontent d'une 3> pareille correétion. II ne fit réponfe a M. de 33 Saint-Hyacinthe que par des mépris : & celui>3 ci de fon coté blama publiqnement & fans 33 aucun ménagement la conduite de M. de »3 Voltaire ». Ce poëte, depuis cette époque, ne cefta de marquer fa haine a Saint-Hyacinthe, la bile de celui-ci s'enflamma, & il réfolut de fe venger par un trait qui oftanferok vivement fon.  des Auteurs. 315 adverfaire, il faifoit dans ce tems-la une nouvelle édition de Mathanajlus, a laquelle il joignit l'apcthéofe ou la déidcation du docteur Maflb. II y inféra la relation d'une facheufe aventure de Ivf. de Voltaire, qui avoit été ttès-indignement traité pat un officier francois nommé Beauregard. Cette édition de Mathanajlus, augraentée de 1'apothéofe, ne fit pas grande fenfation a Paris, ou elle n'avoit pas été imptimée. Mais l'abbé des Fontaines ayant fait imprimer dans fa Vdltairomanie 1'extrait qui regardoit M. de Voltaire, on recommencaa parler beaucoup de fa ttifte aventure , qui étoit prefque oubliée. M. de Voltaire fe plaignir vivement a M. deBüngni, qui engagea M. de Saint-Hyacinthe a écrire au poc'te, pour défavouer le procédé de l'abbé des Fontaines; mais cette lettre ne lefatisfit nullement ,(voyezla lettre de M. de Burigni, {ar les démêlés de M. de Voltaire avec M. de Saint-Hyacinthe, in-%°. 1780; Sc 1'extrait qui en a été donné dans le Journal Encyclope'dique, du premier Juin 1780. Nous avons de lui le chef d'ceuvre d'un inconnu, Laufanne, 1754, en 2 vo\.in-%° &ciniz, c'eft une critique aftez fine des commentateursqui prodiguentl'érudition Sc 1'ennui, mais elle eft trop longue pour une plaifanterie, la déification du dodteur Ariftarchus Majjb qui eft dans le deuxième volume, mérite encore plus cette cenfure, quoiquelle foit  5 if> Notice du même auteur, a"1'exception de la tirade contre Voltaire, qui eft aftez plaifamment tournee, Sc de quelques morceaux ou il y a de la gaieté , le refte eft affez mauffade. D'ailleurs fon héros, qui éroit un pédant de Hollande, eft inconnu a prefque tous fes leéteurs; &la plupart des traits qu'il dirige contre lui, font perdus pour eux. z°. Matkanajiana, a la Haye, 1740» 2 vol. in-8°. Ce font des mémoires littéraires , hiftoriques & critiques. M. l'abbé cVArtigny prétend que SaintHyacinthe autoit pu nous donner quelque chofe de meilleur; -?0. plufieurs romans dans lefquels on diftingue Melytene ou 1'illuftre Perfan, trèsmédiocres, celui du Prince Titi eft le feul qu'on life avec intérèt, & oü il y ait de 1'efprit. II eft auteur d'un roman intitulé : la Conformite' des Definées, in-11, 174°» Cette notice efttitée du DiclionnaireHifloriqtte, dont les éditeurs pourront a leur tour prendre les notices des auteurs dont ils n'ont point parlé, dans notre colleétion , SAINT-LAMBERT(db) meftre de camp de cavalerie, ancien major des gardes du roi Staniflas, duc de Lorraine, membre de 1'académie francoife , né a Nancy en 1717. Un de fes premiers ouvrages fut une ode fur 1'eucha-  des Auteurs. 3.17 tiftie , imprimée en 1732 ; il a prononcé a 1'académie de Nancy , pludeurs difcours remplis de gout & écrits avec fagede. Lerecueil de fes poëfieslégères annonca de bonne heure Pagréable facilité de l'auteur & le fit diftinguer parmi ceux qui couroient la même carrière, tels que M. l'abbé de Bernis, M. deBoufflers, Bernard. Son pocme des Saifons lui procura une gloire nouvelle, 1'étendue du poëme, la variété des détails, 1'intérêt de la matière, le talent du poëte & la fenfibilité qu'il y décèle, & qui a multiplié ces vers heureux qui font les Proverbes du Cceur, ouvrirent a 1'Auteur les portes de 1'Académie. II s'étoit déja annoncé pour un moralifte tendre & ami des hommes. Qui n'a été trompé en lifant les Fables de Sadil On croit entendre le vertueux Sadi. Ce fage, c'eft M. de Saint Lambert qui a imité le ton & la manière afiatique. C'eft un des meilleurs ouvrages de ce genre. La philofophieen eft pure , & eft préfentée d'une manière piquante, perfonne n'a peut-être mieux imité les formes du ftyle oriental, le choix d'images' & des maximes qui lui eft propre, 1'union fréquenre des idéés religieufes & des idéés morales, enfin une eerraine gravité majeftueufe qui tient a la fois a Ia fimpUcité des mceurs & a la pompe de 1'imagination , deux caraétères dominans des orientaux fe retrouvent dans 1'ouvrage de M. de Saint-Lam-  3I§ Notice htrt, nous n avons pas befoin de dire que l'auteur a fu, i la palme des ralens , unir les rributs d'une eftime journalière. Puifle t-il en jouir longtems & contribuer toujours au bonheut de fes amis qui ne poutroient fe pader de fa préfence. S AU RIN ( Bernard-Jofeph ) , né a Paris,' avocat, de 1'Académie Francoife,mort en 1782. II étoit dis de Jofeph Saurïn de 1'académie des fciences de Paris, qui fut accufé Par Jcan-Bapüflt Rouffeau , d'être l'auteur des Fameux Couplet* qui firent exiler ou plutót bannir le poëte lyrique. Benard Saurïn vivoit dans legrand monde, & favoit s'y faire eftimer : fes vertus, (ditM. de Nivernois ) , étoient fans fade, fon commerce étoit fans épines, une certaine pétulance dans la difpute, donnoit a fa fociété quelque chofe de piquant, fansy rien mêler de facheux : c'étoit de la véracité & non pas de 1'orgueil; on dit que dans la jeunelfe de M. Saurin, cette effervefcence alloit jufqul une efpèce d'emportement ; mais la raifon 1'avoir réduite a n'èrte que de la vivacité, &, fous cette forme plus douce, ü 1'a confervée jufqu'a fon dernier jour. M. Saurin jouidbit toujours d'une belle mémoire , d'une imagination féconde, étudioit, compofoit avec fuccès a la fin de fa vie, comme on voit quelque chcne antique & courbé par les orages, poufler  des Auteurs. jij, des rejetons vigoureux & verdoyans , fon efprit & fon caradtère n ont jamais rien perdu de leur énergie, & fachant allier a 1'énergie la circonfpe&ion & la mefure, ce qui eft fi rare & fi digne d'éloges, il n'a jamais rien outré, rien exagéré, même dans la culture de la fagefte & de la°philofophie. Une lettre de madame Saurin qui eft a Ia tête du Recueil des (Euvres de fon mari, nous apprend qu'il a exercé pendant quinze ans la profedion d'avocat, qu'il avoit plus de quarante ans lorfqu'il lui fut loifible de fe livrer a fon goftt pour les lettres, qu'ilpoudbitfi loin la modeftie, que dans la confiance la plus iutime, & pendant une longue fuite d'années, perfonne ne lui a jamais entendu parler de lui-même, qu'il étoit vrai, jutte, bienfaifanr,induIgent,quoiqu'auteur; aflez' ga!, malgré 1'apparence, & qu'il n'avoit jamais pu vaincre la terreur que lui infpiroit la feule idéé de la mort, je me trouve bien ici, difoit-il pourquoi ne puis-je y refter encore quarante ans! On peut ajouter qu'il eut des amis, & qu'il les aima,nous fumestous attendris jufqu'aux larmes quand nous entendïmes ce vieillard réciter dans une féance de 1'académie francoife, ces vers l 1 ombre de Foltaire, de fon ami.  $10 K O T I C Ê VERS A L'OMBRE DE VOLTAIRË PAR M. SAURIN, RÉClTÉs a. la Séance de 1'Académie Francoife i 1779. O toil dont la Mufe immortelle , Nous laiflant un long fouvenir, Sera des ages a venrr, Le défefpoir & le modèle ; Toi, qui nous privas fi long-tems Du plaifir de te voir, du charme de t'entendre,; Hélasl de ce bonheur a peine jouufans , Nous te perdons : tu nieurs, & de cris impuilfans , Nous fatiguons le Ciel, fans réveillet ta cendfe. Ah 1 trop préfent a mes regrets, De ce Grand Homme, encor tout m'offre ici les traitS' Dans ce bufte : ceft lui tout entier qui refpire j- Je cröis entendte encor fa voix. Oui, tu me parles , je te vois : C'eft avec cette grace , avec ce fin fourire , Qu'affis a nos cótés pour la dernière fois, De 1'art de penfer & d'écrire »■ Tu mettois fous nos yeux & 1'exemple & les loisY Dans nn refpedueux filence , Notre ame fufpendue a tes moindres difeours , Du Dieu qui t'agitoit relfentoit la préfencc; Mais, hélas l tu toushois aft terme de tes jours , Quand ,  dés Auteurs. 3 2.1 Quand , lurpris , échauffes du feu de ton vieil age, Nous nous plaifïons a t'admirer. C'étoit notre dernicr hommaee ; Nous allions bientót te pleurer, Eh ! que ma Mufe rajeunie N'a-t-elle ces vives couleurs Er cette puifl'ante harmonie öont te douèrent les neuf Sccufs. Que n'ai-je un moment ton génie ! J'°feroisVai" C°^™! je n'ai que ma douletrr. Chargé d'ans, & voifin d:s bornes de Ia vie, Tout mon talent eft dans mon cceur. Mais quand toute 1'Europe avec refpect te nommc , Mes regrets, qu'en ces vers je cherche a foulager, N'ont pas lcrgueil de croire honorer un Grand Homme. Eh! qu'rmporte a ta gioire un tribut pafl'agér ! Zaïre , Mahomet, Stmiramis, Altirt, Chefs-d'ceuvres que le tems ne peut défavouer, Oii tout Paris accourt, pleure , ftcmit, admir'e Mieux que nous favent te Iouer. Que tu fais a ton gré faire couler des larmes Aux mortcls qu'endurcit 1 eclat de ra grandeur, OfFrir, dans leurs pareils, la lecon du malheur! A la tcndre pitié prête encore des charmes; Et mêlaut a fa voix le cri de Ia douleur, Réveille 1'homme en eux, & leur redonne un cceur. Si quelque chofe nous confole, Et nous peut, de ta perte, adoucir les douleürs : Plus heureux que le Taffe, aux moins du Capitole , Le deftin ne t*a point envié les honneurs. Ce grand jour a jamais vivra dans la mémoire, Oü de tous les travaux oue ta coüté Ia gioire , Tomc XXXril. X  }Zi Notice Un moment te paya le ptix. Ce jour ou A'Appollon on a traité le fils Comme le fut Maurke, enfant de la vidoirc , Ou mélant a la joie & nos pleurs & nos cris , Du laurier triomphant, la main de Melpomine Couronna tes cheveux blanchis. Cet hommage éclatant, cette touchante fcène , Tous ces autres lauriers fur ton front amaffés, Qu'en fe jouant, ta Mufe a moifTonnés fans peinc , Suftïfent a ta cendre & t'honorent alfez. On croyoit entendre le vieux Phikmon regretfarit Beaucis.ou Nefior pleurant fur Ia tombe de fon ami, le fouvenir de cette féance ne s'effacera pas de notre mémoire; on y écoutoit M. Ducis, louant avec génie le poëte célèbre qu'il remplacoit, on y entendit 1'épitre de M. Marmontel fur 1'efpoit de fe furvivre , dans laquelle le fentiment a infpiré le poëte & accru 1'iüuuon par les peintures les plus attachantes, c'eft ainfi qu'il paria de Voltaire après que'M.Saurin eut fini. & toi, dont les travaux divers Ont durant foixante ans étonné 1'univers , L'aurois-tu dépofée au terme de la vie, ^ Cette gioire qui fit le tourment de lenvie, Et d'un monde pat toi fi long-tems éclairé , Ton indiane tombeau t'auroit-il féparé ? Quoi 1 tandis que tes vers enchantent nos oreillcs , Que nos plus doux plaifirs font le fruit de tes veilles  des Auteurs. 323 Que, d'une voix enfin tous les cceurs attendris , Du grand art d'émouvoir te décernent le prix ; Qu'inftruits par tes lceons, des rois couverts de gioire , Taccompagnent en pompe au Temple de mémoire, Et fur un monument a jamais affermi, Vont graver de leur main le nom de leur ami : Tu ne 1'entendrois pas ce concert de louange , Ce cri des Nations qui t'honore & te vange ! Vous qui deviez former des accens fi touchans, Sufpendez votre lyre, interrompez vos chants', Enfans du Pinde , au fein d'une nuit vafte & fombre t Vos fons perdus, jamais n'iront llatter fon ombre : Aux pleurs des malheureux, aux éloges des rois , Voltaire eft infenfible : il n'entend plus nos voix • Elle fut donc bien vaine , hélas ! cette efpérance' De confoler fon ombre & d'acquitter la France , Lorfque par 1'univers notre zèle avoué Promet la palme i qui Fauroit le mieux loué. M. Saurin, il (l'a dit Iui-même) —au-deffous de nos grands maitres, iJ y a des places qu'on peut honorablement.occuper. — H fe placoir fans s'en douter, car Spartacus, Blanche & Guifcard, Beverley, font des ouvrages généralement efhmés, fur lefquels la critique n'a ofé sappefantir, les Mozurs du Tems, 1'Anglomanie font, dit un Journalifte, deux chafmans acres de comédie , qui feront toujours également plaifir è la repréfentation & a Ia Ieélure. l'auteur eft dans la comédie des Maurs du Tems X ij  324 N O T I G E partout élégant & la finefle ne nuir jamais a la clarté. Blanche & Guifcard eft une Tragédie -écrite purement & avec une énergie philofophique : la Tragédie de Spartacus eft remplie de beautés du premier ordre. Le Conté de M'u\a & Fatme', eft abfolument dans le genie indien, & fe fait lire avec le plus doux intérèt. Parmi les Po'èfies fugitives qu'on trouve dans les (Euvres deM. Saurin,on doit diftinguer YÉpüre de la Vieillejfe & celle fur la Vériü, 1'Auteur perfonnifie aind la Vérité. D i s qu'il n'appartient pas au néant de notre être D'ofer de la nature interroger le makre , Dis qu'on doit refpecter ces fentimens fi doux , Que le tems développe & fait croïtre avec nous Les droits facrés du fang, 1'amitié , la patrie, Et dans le fond des coeurs, la pitié qui nous crie : Aidt les malkeureureux, Né comme eux pour fouffrix, Tout mortel eft leur frère & doit les fecourir : Ah 1 ne combattons point par d'odieux fyftêmes , L'amour d'autrui fondé fur 1'amour de nous-mêmes : Hobbes, qui, des humains, fais des lóups dévorans, Qui détruit les vertus & foutient les tyrans,  D E S A 17 T E D- R s.' 325 A-t-il peint ïhomme 2 Non : Hobbes le défigurc. A tous fes argumens oppofons la nature j Lotfquc I'enfant forti du fein qui laporté Foible, & par Ia douleur de toutes parts heurté Mêle aux cris du befoin les pleurs de l'imguiflince , Peu d'inftans détruiroient fa fragile exiftence, Si 1'Amour ne veilloit au foutien de fes jours\ Mais éprouvant d'abord les plus tendres fecours, Bientöt avec plainr pre/Tant une mamelle , U foulage fa mère; & foulagé par elle, En commencanta vivre, il commence d'aimer Ce hen mutuel qui vient de fe former, Tout I'accBoit chaque jour & tout le fortifie; Des êtres que le Ciel a doués de Ia vie, L'homme en fon premier age eft le plus'dépcndant, Le plus foible de tous, le plus long-tems enfant: Tendre objet de nos foins aflldus & durables, Ce font fes bienfaiteurs qu'il voit dans fes fem'blables 3 C'eft pour fon premier bien qu'il fut ainn formé : Qui n'aime que foi feul, de foi feul eft aimé ; Eh ! qui voudroit du jour , fi quelque main chérie N'aidoit a fupporter Ie fardeau de Ia vie ? C'eft en Ie partageant qu'on goute Ie bonheur. Malheur a qui ne fcnt que fa propre douleur ! U vit dans un défert : jamais d'un cceur aride La foule des plaifirs n'a pu remplir le vide. L'homme a , pour être heureux, befoin de fentimens Et les jours font bien longs pour qui n'a que des fens.' On trouve des Chanfons , des Contes & des Epigrammes qui font marqués au mème de^ué de talent Sc de mérite. X iij  it<5 Notice SAUVIGNY (de). Apologues Orientaux, in-12 , 17 ^4- C'eft a 1'occafion de ces apologues que nous placons l'auteur dans cette notice; leut fuccès nous difpenfe d'en rendre compte , nous nous bornerons a parler de l'auteur qui eft vivanr. RilleEdmc de Sauvigny, Officier de Cavalerie , Chevalier de 1'Ordre Royal & Militaire de SaintLouis, Cenfeur Royal & de la Police, eft né en Bourgogne, il a compofé pendant qu'il fervoit dans les Gardes du Roi Staniflas , Duc de Pologne: les ouvrages fuivans. La France Vengée, poëme \ La Religion Re'vélée , poëme; Réfiexionsfur 1'Origine , épitre ; Voyage de madame Adelaïde & de madame Victoire. Odes Anacréontiques. Tous ces fujets ou pieux , ou a la louange des princedes auguftes , annoncèrent le patnotifme, la faine morale & les talens de l'auteur , qui ne fe démentit point dans fon épitre des Lettres Philofophiques, ni dans fon livre intitulé l'Une & l'Autre , ou la Nobleffe Ommergante & Militaire.. On écrivoit beaucoup alors fur les.  des Auteurs. 317 imoyens d'engager la noble (Te a commetcer. L'abbé Coyer & tant d'autres s'étoient élevés avec force contre le ptéjugé qui claffe les négocians a une énorme diftance de la noblede. Mais il faut que ce préjugé foit inné parmi nous, puifque les meilleurs ouvrages n'ont rien détruit, rien innové. M. de Sauvigny a donné au Théatre Francois, Socrate, tragédie en trois actes , dans laquelle le plus fage des philofophes eft peint avec force & vérité. Hlr\a ou les Illinois, tragédie en cinq actes, qu'on regrette de ne pas voir plus fouvent. Gabrielle d'EJlrées, tragédie ou on aime a revoir des perfonnages certainement bien chers a la Nation. Abdir, drame, qui eft le fujet fi touchant du jeune Arglll, tranfporté fur la fcène , & dont le roman fi intéredant de M. de Mayer a fourni le canevas. On a trouvé dans la comédie du Perflffleur, de la facilité, une poëfie légère, & des dérails très-in|énieux, cette comédie n'a pas été a'Jez bien accueillie.  3ïS N o t i c s M. de Sauvigny a commence le recueil du Par-* najfe des Dames, il a publié un joli recueil intitulé les Après Soupers de Société. II traduit maintenant Grégoire de Tours, c'étoit a lui a qui cette tache fembloit particulièrement convenir, lui qui eft fi familier avec les mceurs des francois des deux premières races. L'HiJioire Amoureufe de Pierre le Long & de Blanche Ba-ru , a rendu ce vieux ftyle précieux, & a préfque fait aimer les mceurs de ce bon tems, on ne pouvoit imiter plus heureufement &c avec tant de gtaces. Profe , poëfie, caractères, intrigues, tout convient au tems , tout eft peint avec fidélité & intérêtj qui ne lira avec plaifir les morceaux fuivans: COMPLAINTE De Pierre-le-Lon 6. O mes ennuis 1 ó mes ennuis! Baillez-moi trève vous en pric Sans en mourir, du tout ne puis Vous endurer loin de ma mie ; Baillez-moi ttève vous en pric. © Non crue me plaigne de fouiFrir: C'eft douceur de fouffrir pour elle ; Mais las! II me faites mourir, J'ai peur que chagriniez ma belle, J'ai peur que chagriniez ma belle.  des Auteurs.' 325 CHANSON JOYEUSE. TT Xi eur ou malheur qu'amant puilïe endurer , II n'en eft onc dellus la terre Qui puiiTc a moi fe comparer : Merci, Amour, j'ai mon falaire. @ Amans, aimez, après mes longs foupirs., N'ai, comme. vous, les graces de ma Dame 3 Et fi pourtant n'avez tous mes plaifirs , Faudroit encor avoir mon ame. IA NOUVELLETÉ, CHANSON. J L eft certain qu'un jour de 1'autre mois, M'eft advenu très-mcrveilleufe chofe , Toute feulette étois au fond du bois , Vint mon ami, plus beau qne n'eft la rofe j II me baifa d'un baifer fage & doux, Et puis après il me fit chofe amère : Si que je dis, avec un grand courroux , Tenez vous coi, j'appellerai ma mère. I l eft certain qu'il devint tout tranfi, Voyant courir larmes fur mon vifage j A jointes mains, il me cria merci , Et cela fit que je fu« moins fauvage:  jjo Notice Quand il me vit que je parlois fi doux , L'ami s'y prit de tant belle manière , Que je lui dis, fans avoir de courroux, Tenez-vous coi, j'appellerai ma mère. I l eft cettain que lors il m'arriva Chofe nouvelle, a quoi n'étois pas faite, Et quafi morte, un baifer m'acheva , Qui me rendit les yeux clos & muette ; Puis m'éveillai, mais d'un réveil fi doux, Que remourus, tant il me fit grand-chcre; Enfin befoin ne fut d'être en counoux : II devint coi-, faire qu'appcllai ma mère. SENEC^AI ( Antoine Bauderon de Senecai ou Senecé ), né a Macon en i on lifoit des ouvrages deux fois par femaine, on y jouidbit de cette liberté de pluire & de gaité trop rare, & malheureufement trop neeedaite a 1'homme de génie; 1'abbé de Voifenon y paruttout ce qu'il étoit, vif, briilant & plein de graces, original &c piquant. C'eft fur l'invitation preftante de mademoifelle Quinaut, & d'après le plan qu'elle lui en traca que Pabbé de Voifenon écrivit la comédie intitulée : la Coquette Fixée, qui eut un tiès-grand fuccès au Théatre Italien, & oü on trouva de la facilité, des tirades heureufes, une peintura vraie,(dit un journalifte ), « des mceurs du jour, des „ nuances de caradtère bien faifies, un dialogue „ facile & fphimel, on fait par cceur ce morceau. Je ne vei» point avoir une maifon bruyante , Ou Patis en détail s'amène & fe préfente >  des Auteurs. 341 Oü Pon trouve Officiers, Magiftrats , Beaux-Efprits, Toute efpèce en un mot, excepté des amis; Une maifon enfin oü, loin dc fe voir maitre, Le mari fubjugué n'a pas droit de paroitre , Et fans ce/fc entend dire avec un ris moqueur, Que Ton va chez Madame & jamais chez Monfieur. Oai, fans doutc, a préfent, par un abus.extréme , Le foir, fi par hafard, quant il vient de rentrer, Chez fa femme , un moment il ofe fe montrer, On demande tout bas quel homme ce peut être 2 S'il fe trouve quelqu'un qui ie fa/Te connoitre, On fe léve, & Madame avec un air tranfi, Dit : ne vous levez pas; Monfieur, c'elt mon mari : II s'en ira bientót : car jamais il ne foupe. Alors le férieux gagne toute la troupe , Tous, d'un ennui. marqué, femblcnt enveloppés: Le filence eft rompu pat quelques mots coupés. L'Homme qui voit le froid que fa préfence infpire, Et qui juge aifément qu'on vent qu'il fe retire, S'efquive , ouvre Ia porte en déplorant fon fort, Et 1'on voit la gaité qui rentre quand il fort. II donna fuccefïivement le Réveil de Thalie, comédie en un aéte & en vers, les Mariages Jijfortis comédie, la Jeune Grecque, qui fputinrent fa première réputation. Dans le même tems, il s'en faifoir une dansles fociétés de Paris , par de jolis vers & par d'autres ouvrages , c'eft la auffi qu'il fe rapetida , & qu'il émoullale defir de tentet deplus durablcs f uctès,d Y iij  54». Notice „•écdvit plus rien dans un genre éleve, & ne compofa plus des ouvrages de chevalet VHifioire de la Félicïtc, les pocn.es des l,raelitcs, fur le Monr Oreb, & des fureurs de-. Soul, fonr des produdions médiocres, malgre 1 efprit Sc les vers heureux dont ils font templis. Nous ne parierons point de ZelrnU b Zelmaiade ^ Sultan Mis-d-Pouf, ni du Recueil de ces Meffteurs, pour lequel il étoit en foaete avec e Chauffee, Duclos, Moncrif, Crebdlon le fils, c JauilcCrandFrieurdOrléansle marquis XJrmenonvMcSc ceux quiétoient desfoupersde mademoifelle Quinaut, & qui favoient rediger les plaifanteries qu'on s'y permettc.it Le duc de Choifeul ofTrit ï l'abbé de Vofenon , u„e place de Miniftre, chargé des affaires de France dans une cour étrangère, mais celui qui avoit refufé par amour de la liberté , un cveche , devoir refufer un miniftère, ce qui ne manqua point: le duc de Choifeul xécxm^z fon reru d'une penfion de 6000 livres, i condition qu il rravailleroit 4 des eftais hiftoriques a 1 ufage des princes de la familie royale. Son travail s eft réduit d des Fragmens Rïforiaues. On n y trouve rien d'utile ( felon un joumalifte ), ik■ fourmillent de calembours, de pafquinades de ,eux de'mots. Ce qu'on eft convenu d appeler efput  des Auteurs. 343 de fociété, ne peut s'allier long-tems avec la gra- vité néccffaire a 1'hiftoire Le feul morceau d'une cerraine étendue, a pour objet les négociarions entre la France , la Hollande & 1'Angleterre, pour la paix d'Utrecht, pendant les années 1713, 1714. On rrouve encote dans les ceuvres de l'abbé de Voifenon, des anecdoteslittéraires fur un grand 'nombre de gens de lertres, & fur quelques autres perfonnes connues : la plupart de ces anecdores décèlent la légèreté, la prévention , Finjuftice même la plus choquante. Les cohbets, les turlupinades tk le néologifme y reviennent a chaque page, le joumalifte juftifie fonjugement en citant des actieles qui en effet font finguliers. Nous ne rapporterons que celui qui regarde le préfident Hainaut; la reine honoroit le préfdent Rainaut de fes bonte's : la pene de cette Princefjcfut en lui la première époque de l'hiverde fon ame!Qae\jargon ! a coup fur, celui qui écrivoit ainfi, n'avoir ni le véritable, nile bon efprit ni fenfibilité. Ces yets ne font pas exempts des memes taches,ou plutór des mêmes lïngularités. Y iv  344 N o t i c s A MADEMOISELLE DE G ***. C' e s t crécr, charmante Jeunefle, Que d'imaginer des p'.aifirs ; L'Amour les voit naitre fans ccflc Dans le vide de vos loifirs, Et les modèle avec adrcffe Sur le deffin de vos defirs. Des plai/ïrs modelésfurie deffin des defirs ! a-t-on jamais rien écrit de pareil! AUTRE. Tous les jours feront fêtes doublés, Et les defirs feront le plan des Oremus : C'eft dans tes yeux qu'on lira fon rofairc, Les amours répondront en chceur, La relique fera ton cceur, Le mien fera le reliquaire. Encore des defirs qui font un plan cYOremus, un cceur qui eft relique, un cceur qui eft reliquaire. Dans quel tems écrrivoit-il donc? Demanderat on un jour? Si Chaulieu revenoit, que diroitdl?On prétend que Voltaire a fon retour a Paris, fut bien furpris du jargon qu'il trouva dans la fociété , du calembour dont cn abufoit en fa préfgnce, il le regardoit comme 1 eteignoir  bes Auteurs- 545 ae 1'efprit, il avoit engagé Madame da De'fant a fe liguer ave. lui, Sc a ne pas foufFrir qu'un tyran Ji bete ufurpat 1'empire du grand monde; prefque feuls ils étoient reftés d'un fiècle plein de po» lireffe. II écrivit : O n dit qu'aujourd'hui la Jeunefle A fait a la délicatefle Succédcr la groffiéreté La débauche a la voluptc , Et la vaine & lache parefle A cette fage oifiveté Que 1'étude occupoit fans ccflc. Et Voltaire difoit vrai. Pour revenir a l'abbé de Voifenon, c'eft moins a lui qu'il faut s'en prendre qu'aux libraires, qui vont feuilletant tous les porte-feuilles, Sc en tirent des morceaux que 1'aureur n'avoit confiés qu'a Tamme indulgente, pourenformer des volumes. Cinq volumes in- 8°. pour le Recueil des (Euvres de 1'Abbé de Voifenon, c'eft une de ces entreprifes de librairie aufli ridicule qu'il foit poffible. C'étoit le feul moyen d'étouffer 1'efprit de l'auteur fous un tas de puérilités Sc d'inepties. Sou gout étoit délicat Sc fur, & jamais on neut a 1'accufer d'avoir porté u« mauvais jugement fur les manufcrits qu'on lui cor.Scir. II fut comme tous les gens de lettres, en butte a la fatyre Sc la méprifa.  .ï477 5 »hé de f°ix?-nte -huk ans-Nous tranfr trivons VÉpüre remplie de gaieté , qu'il adrefta a Ttornhin fon médecin, peu de jours avant fa mort. Grand Médecin, de mes fottifes, Vous caufez ma fécurité. Comptant fur votre habileté , Sans cefte je m'expofe aux crifes. Je fuis sur de i'impnnité. Oui, mes fautes font votre ouvrage, Je n'en accrois la quantité Que pour vous devoir davantage. Je vis en les multipliant, Vous me guériiïez, eu riant. I>*une morale repou (Tante, Attribut de qui ne fait ric- , Vous fuycz la marche pefantc.  des AuteUrs. 3*7- L'amitié douce & confolantc Dont le coloris fait du bien, Et me perfuade & m'enchante, Vous êtes un Magicien. Le fentiment eft 1'interprète Des avis que vous me donnez. Votre cceur eft votre baguette , Et moi - même vous m'étonnez. Je me ttouve méconnoilTable.- Je fais voeu de docilité, Et je vais être raifonnable : Divin docteur, en vérité, C'eft me jouer un tour pendable ; Doéteur célèbre , a fi bon droit, Vous voulez, fans aucune grace, Qu'on boive & qu'on mange tout froid: Croit-on que cela m'embarralTeï Par un régime fi nouveau Vous favez me marquer ma place. Mettre un des quarante a la glacé, C'eft mettre le poilTon dans I'eau. Il poufTa cette gaieté jufqu'aux derniers mornens, s'étant fait apporter, avant de mourir fon cercueil de plpmb, il s'adreda a fon laquais. Voila ma dernière redingote, lui dit-il, j'efpère que tu ne me voleras pas celle-la. H fut recu a 1'Académie Francoife , le n Janvier i76} , a la place de Crébillon le tragique, fon Difcours de réception eft rempli de poclie &  34* Notice d'imagination. L'invention des deux Temples de la faujje Gioire, 8c de la Gioire véritable eft ingénieufe. II avoit une qualité précieufe pour 1'amitié, c'eft qu'il étoit vrai, 8c qu'on pouvoit le confultet avec fécurité; il corrigeoit volontiers les ouvrages de fes amis. Voltaire ne dédaignoit point de le confulter. VOLTAIRE (Frangois-Marie Arovet de), né a Paris le 20 Novembre 1694; mort a Paris le 30 Mai 1778. M. de Vauvenargues a fait fon portrait, auffi fidèlement qu'on puiffe le défirer, & qui ne reftemble ni a ces fades éloges, ni a c^s fatyres indécentes dont Voltaire a été accablé. Je me fens forcé (dit-il) de refpeéler un génie hardi & fecond, chéri, pénétrant, facile, infatigable, auffi ingénieux & auffi aimable dans les ouvrages de pur agrément, que vrai 8c pathéthique dans les autres: d'une vafte imagination qui a embrafté 8c pénétré rapidement toute 1'économie des chofes humaines, a qui ni les fciences abftraites, ni les arts, ni la politique, ni les mceurs des peuples , ni les opinions , ni leurs hiftoires, ni leurs langues même n'ont pu échapper ; illuftre en fortant de 1'enfance , par la grandeur & la force de fa pocfie féconde en pen- ées, & biemót après par les charmes 8c par le  O E S A V T E V R. S. J49 caradère orignial & plein de raifon de fa profe, philofophe & peintre fublime, qui a femé avec' éelat dans fes écrits tout ce qu'il y a de grand dans 1'efprit des hommes, qui a repréfenté les paJüons avec des traits de feu & de lumière, & enrichi le théatre de nouvelles graces; favant d imiter le caraélère & i faifir 1'efprit des bons ouvrages de chaque Nation, par 1'extrême étendue de fon génie, mais ne mettant rien d'ordinaire, qu'il ne I'embellifle; éclatant jufques dans les fiutes qu'on a cru remarquer dans fes écrits, & tel q„e malgré leurs défauts, &, malgré les' efforts de la critique d a occupé fans relache de fes veilles, fes amis & fes ennemis, & a porté chez les étrangers , dès fa jeuneffe, Ia réputation de nos lettres, dont il a reculé les bornes. II nous fieroit mal de prononcer fur le génie de eet Ecrivain célèbre, & qui eft digne de toute la célébrité dont il jouit. Nous n'avons cettainement point acquis le dtoit de le juger. Ce que nous favons bien, c'eft qu'il peut fervir de modèle dans plus d'un gente. Babouc, Zadig, la Princeffe de Babylane, font dans le genre Oriental, & c'eft Ia raifon qui nous a obligé d'inférer cette notice. Ces romans font fupérieurs d prefque tous ceux du même genre. C'eft le merveilleux dun Philofophe; ils 0nc  , jO N O T t C 8 ptutöt les fotmes Oriëntale*, que le ton Sc h couleur des Orientaux. 11 nous feroit plus facile de prononcer fur le cceur de Voltaire , qui fut, quoiqu'on en dife , •hamain, fenfible Sc bienfaifant perfonne n'eutautfntl feplaindrequelui,deslittérateurs, &dei'inffafticë des fedtaires. En débutant il fut lavi&ime d'un fcélérat nommé Bauregard, qui tui attr.bua des vers qu'il n'avoit point faits. II futenferme a la Baftille. On fait qu'il y compofa de mémoire plufieurs chants de la Henriade. Roy étant i la baftille en 17x5> Y comPofa également un Poeme de fept mille vers dont le fujet eft la Conquête du -Mexique. On ne croiroit pas ce lieu fi proplee * la poëfie. Au fortir de fa captivité, il fut menacé d'être aftaftïné par le même, & les libellides dans le même tems, vouloient 1'affaffiner d'une autre manière< il a tout furmonté, Sc il a fait du bien. - J'ai fait un peu de bien, c'eft mon medleur ouvrage, difoit- il, Sc il le dfoit avec fenfibibilité.ÖQu'on relife fa lettre iM. le Brun ï 1'occafion de la nièce du grand Corneille. Dans nos loifirs nous lui apprendrons d broder les fujets du Cid&deCinna.Kom allons tranfcrire une lettre tkée du voyage de M. de May er, en Snifte,- dans laquelle il peint dans Voltaire, \e feigneur bienfaifant. Ceft" la lettre vingt fixième du fecond  DES AuTEORS. JJI volume. L/auteur après avoir peint la défolation dans laquelle la fcVocation de 1'édit de Nantes avoit jeté Ferney & Sergy, dit : —Tel étoit' 1'état de Ferney a 1'époque ou Voltaire en fic 1'acquihtion. 11 voulut en rammer les redes, & il s'y prir de la meilleure manière. A Marfeille Ie fleur Roux de Corfe, avoir fondé une ville (Brue) fur un terrein aride. Voltaire fuivit eet exemple; H appela des Colons; aux laboureurs, il donnoit des fermes a bad, des avances pécuniaires, & des inftrumens de labour; aux artifans , une maifon, moyennant un eens, & un pret dargent. II obrint du fifc, des adoaciuemsns confidérables, cm abonnement avec les fermes, lerablifTement de !a pofre , & Ia diftribution du rabac. Soixante ménages montèrent a (lx eens; des horlogers s'y établirent, on y veie encore Ia manufaéture deRomilli. Tous les mois Voltaire batidoit une maifon, & accueilloit im CÖión". Tandis que des journaliftes foupconnoient fon cceur, il leur donnoit par fes bienfaits, un terrible démenti ; c'étoient de ces bienfaits obfeurs dont la vanité n'a pas même la faculté de fe targuer, & dont une ame fupérieure eft feule rapable. Cette main occupée a fuivre une correfpondance multipliers avec des Souvenins , de* Miniftres , des Savans, dredbit des phcers pour des payfans, fa renommee lui attiroit des vijires  J51 N O T i C E nombreufes' on n'étoit point un homme de qö* Hté bel efprit 8c connoifteur, Ci on n'avoit fait aU moins une fois j le voyage de Ferney, pour y v otr Un vieillard, très-peu jaloux des cadlettes titrees qui.closdansfachambre a coucto^affbrtdaosfa bibliothèque,&parune trape , dans fa falie des bains on avoit fait fouvent un voyage mutüe ; on s'étoit promené fous fon allée de marroniers, Sc on avoit regardé le globe ou méridien de fa terraflb : cependant on venoit habiter a fon vodlfi,ce ; on afrermoit, on achetoit des hcntages , fic onvetfoitdel'argent dans le pays. Quand il „artr il lailTa doiue eens Habitans dans la conlLnation", vous n'y en trouveriez plus fix eens. Un feul homme. un bon feigneur, eft difficdea remplacer. 11 vint chereber a Paris , des launers, & il trouva la mort. ' M 'de May er, continue ainfi, — on a laifté dans la falie a manger, un tableau fatynque & kn ne peut guère pardonner,c eft < Indult au Temple de Mémoire , devance par la Renommée, & applaudi par laFrance, la Ruïne * la Prufte ; I fes pieds & pèle-mele , jetes 1 un ^desSatyriquesvivans qu'il neme convrentpoint ae nommer. C'eft apparemment a table que  des Auteurs. 3jj Voltair, s'égayoit i leurs dépens, avec le farcafme ataer dont il étoit capable. Je ne puis vous diflïmuler qu'il poufla trop loinfa haïne contre ceux qui le critiquoient ; c'eft un tort qu'il eft difficile de pallier; il avoit aftez de renoramée pour fupporter les morfures. de 1'envie , ou plutót les déchirures d'un parti qui 1'attaquoit tout haut, en 1'adrniranttout bas. On voit dans le même tableau des images plus confolantes , & dontil eut raifon de garder un touchant fouvenir ; les Ca/as, les Sirven , Madame Dupuy , qui habite encore au voifinage , & qui tourne fans cefle des yeux de douleur fur ce ch3teau oü la bienfaifance & le génie 1'avoient atcirée , & maintenant muet & déferr. Sur la facade de 1'Églife , on lit : Deo eréxU Voltarius. II batidbit ce Temple pendant que des journaux 1'accufoient- d'impiété, & il alloit aflifter a la mede de minuit, avec Ia familie qu'il s'étoit faite par fes bienfaits. II écrivoit au Roi de Pologne : - II faut que ehacun dans fa chaumiere faffe autant de bien que Votre Majefté en fes Etats: Elle bdtït de belles Eglifes Royales ,fédifie des Eglifes de village. Diogène remuoitfon tonneau, quand les Athéniens conftruifoient des flottes. Si vousfoulagei mille malheureux, il faut que nous Tome XXXVII. 2  354 Notice autres petits , nous en foulagions dix ; le devoir des Princes & des Particuliers eft dejaire chacun dans fon état tout le bien qu'il peut faire. Voulez vous favoir s'il eft regretté , venez : le filence de ces maifons défeites vous 1'apprendra: elles étoient habitées quand il vivoit. Heureux celui dont 1'éloge , a-t-on dit, part de l'ennchambre ! a plus forte raifon quand il part d'une bouche libre , qui vient gémir fur une tombe.— Veut-on voir Foitaire hcnorerla Philofophie , en fe peignant lui-même, il fuffit de lire une lettre qu'il écrivoit au même Rc i. 11 «y» point en France de mei'Ieurs citoyens que les Philofopbes iik aiment 1'Etat Sc le Monarqr.e} ils font founns aux loix; ils condamnent Sc ds couvrent de lionteces feftipns pédantefques & furieufes également ennemies de 1'autontc Roy aie & du repos des fajecs, il n'eft aucuu d'eux qui 110 contribue avec jcie, de la moidcd, fon revenu, aifoütien du Royaume. Contmuez, Sire, a ies fcconder de votre autorité Sc de votre éloquenee ; continue* ifaire voir que les hommes ne peuvent etre heureux que quand les Rois font Phikfophes , Sc quand ils ont beaucoup de fujets l lulofoohes. Encoutagez de votre voix puiftantc eitóyens qui n'enfeigncnt dans leurs écrirs Sc dans leurs difcours, que 1'amour de Dieu,«u Marqué & de 1'Etat.-U n'a eeftc de reg.cr  des Auteurs. jjf «oate fa vie, fa conduite , fur ces principes refpecfables. L VERS FA I T S A SELLIÈRES, SUR SON TOMBEAU, M. le Ma hqujs db Kllette. L E voila ce Grand Homme accablé par la gioire • Les Mufes font en pkars, tous ,« AftJ ^ ^ ^ Dans Ic Nord, on éiève un Temple a fa mémoire , Au fond de ces déferts, il n'a pas un cercueil. © O tombe que j'embraffe ! ö vénérable terreï Terre qui, fous mes pas, as femblé tre/TailIir * Ouvre toi , qu'en men fein je pui/Te recueillir Les reftes précieux qu'enferme cette pierre. © Dans Heux dont trente ans il fut le bienfaiteur Que ne pms-je emporter fon génie & fa cendre ■ ' Privé de ces devoirs que je „e puis Jui rendr£ ^ Je vais les confoler en y pottant fon cceur. 2 0  i5 La Re/igion naturelle , Poëme ; La deftruclion de Lisbone ; Supplément d ï'Hijloire de Louis XIV; Apologie de Bolingbroke ; Lettres Philojophiques ; Effai d'Hijloire générale ; Candide ; Précis de TEccléfiafte & du Cantiquedes Cantiques; Hijloire de l'Empire de Ruffie ; Contes de Guillaume Vade ; Recueil des Poëfies Fugitives ; Réponfs d fes Critiques :  des Auteurs. 359 Lettres fur divers fujets de Littérature; Mémoires pour les Calas j L'Ingénu j L'Apötre ; La princeffe de Babylone; La guerre de Genève ; L'homme aux quarante Ecus j Le Cathécumënc ; Le diner de M. de Boulainvilliers ; Son Théatre.  jêTo Notice u Uncy ( Mademoifelle'), a inféré dans fon Recueil, des Contes quiappartenoientaux auteurs qui fe trouvoient avec elle, chez mademoifelle Quinaut, Sc qui formoient la fociété de ces Meffïeurs. On en a recueilli 44, tous Moraux , en 176"3,, un feul volume in-iz. L'auteut eft encore vivant, fes Contes refpirent une raifon fage, une morale pure; Sc il paroic qu'elle a facrifié 1'invention a ces deux qualités précieufes.  des Auteurs. 361 D D u S S I E U X ( Madame), nous avons déjl parlé de cecre dame dans le courant des Notices, on fait qu'elle a traduit Ie roman de Don Silvio de Rofalva, par Vieland. Elle a donné au public deux volumes de NouVdles Interejfantes. Son ftyle eft toujours animé par le ton du fentiment, ou le cri des padions, h nouvelle qui a pour titre les Princes d'Arménie, nous a infiniment intéreftés. POSTSCRIPTUM, Nous ne nous dattons point de n'avoir omis petfonne dans cette Notice, malgré 1'envie que nous avons eue d'être exaéts, & les foins que nous nous fommes donnés. Une nomenclature de ce genre étoit plus difEcile, qu'on ne penfe, 011 n'a qu'd ouvrir la Bibliothèqae des Romans de l'abbé Lenglet, on verr^mbien eft réduitle nombre des ouvrages & des auteurs; qu'on life nos Notices, on fera convaincu de nos efforts par Ia quantité de Contes & d'Auteurs que nous avons indiqués.  3 V\nf , i Le fixième veftibule refpiroit Ia Volupté ■ hs ^ages nen font point fi pures. L'auteur fa concentededirequelesmurLff^^ mdle amans fortunés. a^yeux Le fan&uaire du Temple étoit \\C,U A u Les J0^„ étoient dans une cavernP lom de file de P.VI a i. cavei*e , non e ne de Urherej 1'amant de la prinrefT. Zophire veur fP 1»„ j fr"iceUe \ vcuc le Jes rendre prooi^c ■ l' pnncfft I nctoupaspoffible qu'une femme Pourfiuv.e le jour par fon amant, & Ja nu " des ^ qd Ie luirappelo,;^ ; : longte,nsfo„ mdrfférence. DailieuTs iW pourattendtefamaïtrede. Le leéteur peut moer fi r^ # ^ fo/w; c'eft „„ p[iace qiiemre f"»;'? Pl» Zïwïc XXXVII. a  57® Notice.' APRÈS SOUPERS DE LA CAMPAGNE, i volume in. - t * > 17 5 9- Cest un Recueil de plufieurs contes affez agréablement nartés , mais dont la plupart font trèspeu intéreffans \ le Conté de Zoroé & Philaminte , ou la fidéüté conjugale , eft dans le genre de la Féerie. Zoroé eft un époux qui, après trois années de mariage doit mourir ; mais qui doit renairre fifonépoufeP/Wö/ninre , lui refte fidéle durant fon veuvage , malgré les inftances de plufieurs amans: fon ame durant ces épreuves devoit être autödt d'elle , épier routes fes aótions Sc fuivre fon époufe. Quelle t&che pour fame d'un époux 1 Eh'. combien en eft-il qui huir jours après leur mort perdroient entièrement 1'efpérance de reTivre. Mais Philaminte , en longs habits de demi, les cheveux épars, embraffoit nuit & jourle tombeau de Zoroé; quelle joie pour fon époux! Six mois s'étoient écoulés, Sc Philaminte parloit toujours  '11 na p„ hniZ Z'~q h ' éC"*iaveuve. ^ co„rat e„,brairer ft ™ „ & jours d'un époux ,le te„„ie„r cm'd «„, ' F» * femraes Fe„dr„ienru e ™ r&U7" Aa jj  ?71 N O T I C *ï BROCHURE NOUVELLE, Par M. M A N D A. Cet^É Brochure n'eft a proprement parler, que la cnri'que des Romans de Féerie , fous la forme d'un Roman. Les perfonnages y font ridicules , les avenvures font extravagantes j mais tout y eft froid , & a force de vouloit mettre du piquant , on eft plat} on ne fait pu 1'on va, & le Roman finit mal. CONTES TRÈS-MOGOLS, 7 vo'ume in - /2. 11 s renferment quatre Conres, l'Appétitvient en mongeant: les neuf infqrtunes de Tourfe Nou-* radin Grand Barbier de Calan-Calafiè : d quelque chofe malheur eft bon : Zirphe , ou Hmagination. On a prétendu faire la faryre des gens du boa  N O T I c H. ?7J ton; on n'y dit rien de neuf: il T a ^„dant de *a gaieté, de 1'imagination, un emploi heureux feene le mérite eft plutot dans lexpreftion, que dans le fond qui eft une débauche d'efprit CONTES DE FÉES NOUVELLES, Par M. D. F.3 z parties., in- / 2 4 Eaftien , 1776. O N y trouve pludeurs Contes , parmi (L ~ra7qué U Chane mmilk^ & iOurs &tc Chajfeur; „ous ne parierons que du dermer dans le Conté de ïOurs: c'éft un |^ botumenommé r^, qui s'endort fatig.é JaCha^aprésaVoirinucilemenCpourfuivi^ Ours.L Ours eft un enchanteur „ommé Kako- «qic réduita cette métamorphofe pat la lor que J(11 avok impof ,fi ^ ^ ^ teur; d tranfporteT^£pe„dantfonfommeil, dansUedesChi^s, dont il étoit fouverain Pour lui apprendre d vaincre fes'préjugés ; enfin «P« des épreuves multipliées Aa i ij  374 Notice. vainqueur , dèveloppe toutes les qualités néceffaires , fuivant 1'oracle au défenchantement de Kakobraovfs , qui lui donne la main de fa filie. CONTES PER SA NS > i volume in - n , PARINATULA DELHI, Traduit en anglois , et ensuite en francois. Paris3 1769 Vincent, Libraire. (j es Contes font remplis de Philofophie , mais les détails font un peu hoirs : nous n'en tranferirons qu'un Chapitte pour en donner une idée. CHAPITRE VIL Hiftoire de Buchtear. Un des Médecins de l'Efprit ayant chercfié dans les archives de 1'Hiftoire, un remède propre & guérir 1'imagination des furprifes de 1'amour, paria le premier en ces termes : un jeune homme avoit héuité de fon père, de tréfors immenfes. La rofée du bonheur ranimoit chaque jour les fleurs de fes plaifirs. Un jour qu'il traverfort la ville , fes oreilles furent frappées par des cris de douleur. 11 regarde antour de lui, & voit un  Notice.' j7c vieil ufuner au cocur de bronze qui avec des fatellitesimpitoyables vouloientarracher une filie des bras de fon père, dont la voix cadée invoquoit la pitié du ciel & de la terre au fecours de fa malheureufe vieilleffe. Touché de ce tableau de la misère , il acquitra ladette du vieillard , rendit la liberté a la filie ; mais dans un cceur fenfible la commifération pour 1'mfortune eft fouvent un germe de 1'amour. Buchtear , dans les vifites oii le conduifoir la pmé , fut vivement touché de la beauté de la filie; elle étoit d fes yeux enchantés, telle que le météore qui brille dans un ciel ténébreux. Ii Pourfuivit cette belle illufion , jufqu'd ce qu'enfin il tombadans un abïmede repentir& de malheur. II s'engageaparla chaïne indiftbiuble dumariagel Loin d'être ingrate , fon époufe lui rendoic fes careffes avec une ardeurqui les faifoit redoubler; engagée par fes bienfaits , & plus éprife encore' Par les graces répandues fur fa perfonne , elle étoit la difpenfatrice de fes plaifirs, & faifiifoit le defir naiftant dans fes regards amoureux. Buchtear avoit une violente paftion pour k chafle: le hazard lui fit connoitre le frère du Gouverneur de la ville. Bientbt le burin de ia chafle fut partagé entr'eux ; ils buvoient enfemble le vin de la même coupe, fous le toit de 1 hofpitalité.TJn jour Iesregards du jeune homme A a iv  Notice tombant fur 1'époufe de Buchtear , il rencoutra les yeux de cette beauté fixés fur lui. C'en fut affez ; il oublia les droits facrés de 1'amitié ; de retour a fa maifon , il appela une de fes hideufes filie de la proftitution,accoutumée comme lecruel oifeau des rénèbres , a ravager le nid facré de la chafte colombe. Cette corruptrice jeta fes perfides gluaux fut les branches deuries de 1'heureux mirthe. Après avoir long tems fermé 1'oreille & les yeux a la féduction ; enfin, 1'époufe imprudente, fe familiarifant avec 1'appat du danger , tomba fans retour dans fes filets. Quelques jours s'ctant écoulés dans des plaifirs achetés fi cher ; un murmure fourd fe répandit parmi les voifins , fur le deshonneur de cette maifon ; ce bruit s'accrut, tónna dans 1'oreille des coupables & retentit dans le fond de leur cceur edrayé. Un complot infernal fut bientbt trouvé , ils n'attendirent que 1'occafion de 1'exécuter. A 1'heure des plus épaifles ténèbres de la nuit, la femme s'échappe du lit de fon époux , coutt a la porte embraffer fon amant, & tous deux mettent le feu aux quatre coins de la maifon ; enfuite ils montent fur des chevaux déja chargés d'or 8c d'effets ptécieux & prennent la fuite. Dès. qu'ils, s'appercurent que la fureur des dammes défioit ^oris les efforts humains, ils s'arrêtère.nt a une  N O T I c E. ville éloignée: ou, fanstrouble, ils jouirent 7e Jeurs plaifirs adultères. Cependant le malheureux époux, éveillé par lalueur de «ncendie & par le bruit des domef"ques ep ^ fautade fonIit&n> trouvant poinfa femme chérie.couruc la chercher d travers les dammes ondoyantes.1 La maifon étoit entièrement confumée & fa femmenefe trouvoit point :alorsnedoutan Ins fe defoloKM fitchercher enfin dans les débris a; " ?a;f°n' deS reftes P*««« de fa bien aimée ahn de lm rendre les derniers devoirs. Quel fut fon étonnement de nedécouvrir nulle tracé de lepoufe qu'il avoit perdue! audï-tóriï foupconna quelque perfidie , court chez fon ami • d ecoir abfent depuis 1'heure de minuit; toujours' fuPe^caredesdefonépoufe,ilctutqaeZ Ietrouble&,aconfudondel'mCendieelleav ere la proie d'un ravideur. II ^abilla d>tinfacpoudreuXj couvrit ;ifag! de Cendre > & «Kh, -e courte épée fous fonvetement.Ainfidéguiféenfaquir,tmpaquet ^ plumes de Paon d la main, il ],a de porte& de ville en ville pour tacher A. I 1'afiledefonépoufe. P°Ur ^ de d—r Après bien des recherches inutiles , mis fur la KV des fug.nfs,,! vint frapper d la porte de  378 Notice. leur maifon : Une vieille femme s'érant préfentée , il lui demanda des nouvelles de celle qu'il cherchoic, la réponfe fut qu'elle étoit au logis. Buchtear rempli de joie rira cette femme a 1'ccart, & croyant acheter fa fidélité par une bourfe dargent qu'il mit dans fes mains , il 1 a pria d'avertir fa maitrefle que fon mari déguifé étoit a laporte, & que fi elle vouloit faifir l'occafion de s'échapper , il éroit ptêt a la défendre contre la brutalité de mille fcélérats. La perfide confidente ne rendit pas ainfi fon melfage; 1'époufe de Buchtear ne douta point que ce ne fut fon époux lui-même , elle fe difpofa a prendre la fuite avec fon amant par une portede derrière: Buchtear impatienté d'attendre , fe precipite dans la maifon ; le hazard le conduit a la faulfe porte , il arrète fa femme, fon lache amant prit la fuite. La chute du jour approchoit quand Buchtear fut aux portes de la ville ; mais pour éviter les traits du ridicule , il s'arrêta dans un bois écarté, jufqu'ace que le voile de la nuit put cacher 1'infame objet de fon deshonneur , & il fit prendre les devans a fes domeftiques pour préparer fa maifon. Le fommeil le furprit fur 1'herbe ou il étoit aflis , 1'amant qui avoit fuivi de loin fes pas , atriva dans ce moment fatal; il vit 1'époux dot-  mant avec Ia vipère de fon fein d fes cótés. II riie öh poignard; mais fa maïtrede arrête fa main & hl dit tout bas : —cette mort feroit trop doucecommencons d lui lier les pieds & les mains ■ enfuite nous détetminerons le genre de fon tréP« , quand les yeux de la vengeance feront rafla/ies de fes tourmens. Cette affreufe propofition fut acceptée • ils garo.tèrent Buchtear qui fut ainfi tiré de fon profond fommeil, & lehifsèrent en fair par les pieds: alors fa coupable époufe s'adit fur Pherbe avec fon amant, percant 1'ame de fon mari des traits de Ia radletie amère : elle déploya devant fon amant tous fes charmes dans les attitudes les plus Iafcives } Ie miférable époux fut témoin de fon propre deshonneur. Comme elle croyoit que fa proie ne pouvoit lui echapper, elle s endormit des fuites d'unedouble ^irinfortanè^W.voubrtproficerdelenr repos, mais fa frayeur redoubla lorfqu'élevant Ies_ yeux vers le ciel, il vit fur Ia branche ou i! etoit fufpendu, un énorme ferpent qui savari- ^Kdroitalm^efcendoitlelongdelacorde: dsentortdla en plufieurs replis autour du corps de ^, -s redredantfoncou noueux , & brandidant fa langue fourchue il p0llfla d longfifflemensauvifagedu malheureux, pW^ fincor^e fa W que de fes tourmei s.  38e Notice; Mais le ferpent dénoue les nombreux replw dont il l'avoit embraflé , defcendit a tette , &c développant fon énorme longueur , s'approcha des coupables endormis. II fe glifla d'abord fur Ie vifage de 1'amant: celai-ci voulut y poften la main , & le ferpent qui fe fentit touché le mordit a la lèvre , bienrót 1'ame du fcélérat expuant, s'enfuit dans le monde inconnu des ténèbres. Cependant le ferpent attiré par les fumées du vin , trempa fa langue dans la coupe, & 1'ayant bue a moitié , il y laiffa quelques goutes noires de fon vénin mortel, & s'alla cacher dans le creux d'un arbre. Alors Buchtear ne put s'empccher d'admirer les voies étranges & inexplicables de la providence , fans ofer prévoir a quel degré du cercle. des maux & des biens s'arrêteroit pour lui la roue de la deftinée. Sa femme enfin fe réveille , & altérée des fuites de la débauche , elle porta avidement le refte du vin a fes lèvres, elle but la mort; mais lorfqu'elle voulut appelet fon amant, elle s'appercut qu'il dotmoit de fon dernier fommeil. La vengeance devient alors la feule padion de fon cceur :. elle prend le poignard de fon amant & courant, en forcenée, elle le levoit déja fur le fein de foa. mari. Le malheureux, livréfans défenfe aux grifras.  NoTlCË. j8i de ce démon , recueillit le rede de fes forces & s ecna : — ó femme trop chérie ! eft-ce '& le prix que vous réferviez a ma cönftance , d famour le Plus ardent ? Ecoutez un mot, un feul:—parle donc, parlé que peux tu dire? —Hélas 'en moment rna b>en aimee, que je puide refpirer! oui, je le vois, le deftm entr,me toutes les actions des hommes. Une chadetéfi pure, un amour fi vrai, tant de bndanres perfeftions ne pouvoient ètre ^effacées desfafles de l'honneur,que paria maincruelle de lafatalue. Quereuton dire, finon que lWe interprete, avoit ecri: la funefte fentencedu malheur danslejotnnal de notre vie? Qti'oppofer au deftm? rien. Cequon ne peutréparer, il fauc 1 oubher. Sice cceur n'eöt pas brdlé d'amour , s'il eut moins écouré la pitié Je fil de vos jours feroit de,a tranche; mais, hélas! paree que mon ame eft douce Sc tendrement padionnée , ne dois - je trouver la paix que dans le tombeau! h mort elevera-t-ehe un mur de féparanon enrre nous > Je ,ure aujourd'hui par le Saint Prophéte de Immortelle vér ré, que mama«; fivcus^moez mes chaines, ne profaner, poinr lesgraces de ces beaux cheveux , & nofcra fiérrir de la moindre inïulte aucun de fes charmes adorés. Tandis que dans la torture de 1'effroi, Ie miférableépoux tentoit dereculerlamortqtulemena-  33t Notice. coit, le poifon commenca d'embrafer les entrallles impitoyables de fon époufe; des convulfions défigtuèrent fon vifage , elle fe roula fur la terre, Sc la bouche écumante elle expira biencbc dans 1'agonie de la rage. Pendant que Buchtear rendoit graces au ciel de fa juftice , un de fes domeftiques inquiet de fon retour revint fur fes pas & le délivra. Daigne m'écouter , b fublime Prince ! fe padionnerpour lescharmes padagers de la beauté, Sc s'égarer dans les labyrinthes d'une folie paffion ,c'eft oublier la noblefle de ron origine; c'eft tromper 1'attente de la renommee. Lorfque le deftin éciivit le chapitre des vertus de la femme , une tache tomba de fa plume fur le mot reconnoijjance. — Ce chapitre compofé feul une hiftoire, d'ou ■ la morale fort d'elle-même Sc d'une manière frappante. Le traduéteur Anglois a fait obferver d fes ledeurs , qu'en général les femmes font maltraitées par l'auteur Perfan , Sc ce conté en eft une preuve. Quant aux fautes de ftyle , il fuffit de répéter ce que le traduéteur Francois a dit lui-même , en lui reprochant d'avoir eu rort de refpeéter trop icrupuleufement les défauts de 1'original; il fait également connoitre le plan de 1'ouvrage Sc le but moral de Delhi, — On fentirale vice Sc 1'en-  N o x i c s. 5?; •flure du langage Oriental dans ces contes, dont on voudroit peut-être qu'ils fuffent bannis : il y avoit un doublé écueil a éviterdans cette traduc«on ; c'étoit ou de défigurer Ie tour original des Perfans , ou de révolter Ie gout national des Francois. Si 1'on pa (Te au fond de 1'ouvrage, il faut convenir que ces contes ne font pas également intéredans par eux-mêmes, ni tous abfoJument nouveaux : il y a de quoi s'étonner, fans doute, de trouver dansles lecons des fix commères,a la fin de la première partie, un conté de l'amandier , prefque entièrement femblabie au conté du Poirier , qui ed dans la Gageure des trois commeres de la Fontaine ; mais notre poëte l'avoit emprunté dv«Bocace , & eet Italien avoit peutêtre tiré de 1'orient quelques-uns des fiens. On fait que vers la naiffance des lettres , il s'eft trouvé de grands rapports entre la littérature Italienne & celle des Orientaux. Les Croifades avoient , fans doute , fait palfer en Europe beaucoup d'idées & peut-être d'ouvrages de 1'Orient. Les Arabes en ont pu répandre par 1'Efpagne.' Après la prife de Conftantinople , la littérature" Grecque vint en Italië avec celle de 1'Afie moderne : les Iraliens prirent ces deux goürs d Ia fois ; ils adoptèrent l'un, dans les écoles & dans les hvres d'érudition grammaticale; 1'autre, dans leur pocfie. Le Taffe & TAriofle n'oat-ils pas  ?B4 Notice emprunté de 1'Orient le fujet local , les tours figurés , quelques perfonnages & les idéés même romanefques de leurs pocmes. Les contes Efpagnols de Cervantes, fe reffentent uii peu du ftyle & des mceurs des Maures. Les anciens romans Erancois & tous ceux de la Chevalerie , ont beaucoup retenudes féeries des Orientaux : tout nous porte donc a conjeéturer que le conté Italien du Poirier, vient originairement du conté Indien de l'Amandier; cette feule découverte en littérature, fi c'en eft une , devient une excufe pour le ton de liberté qui règne dans ces petits contes des fix Commeres \ mais la licence de ces épifodes eft en quelque facon juftifiée par le but moral de 1'hiftoire principale : il s'agit de guérir un Prince , despeines & des folies de 1'amour, l'auteur Indien a cru que rien n'étoit plus propre que 1'hiftoire de quelques méchantes femmes , telles que 1'imagination même n'en trouve point en Europe. FOKA,  Notice. jgj F O K A , o u LES MÉTAMORPKOSES, CONTÉ CHINOIS, DHROBÉ A M. D E V***: / vol. ih-/2j 1777. XjA Preface de 1'Aüreur annonce dans quel efprit ce roman a été écrit. Chlng Han, dit-il après avoir fait les plus gros volumes fur les plus graves matières , finit par fe perfuadér qu'il n y avoit rien de fut : on prétend même qu'il ofa croire que la plupart des fciences , n étoient que conjectures : ce fut dans eet état de délire ou de raifon , je ne fais lequel , qu'il compofa ces métamorphofes ; route la cabde littéraire fe déchainaconrre lui, paree qu'il n'avoit point fait un fyftême d'éducation romartefque: on le trouva trop furile , paree qu'il n'avoit pas afEché la philofophie : on lui reprocha fur-tout de n'avoir pas critiqué & pédantifé dans une preface hijtciTome XXXVII. B>  38i N o T I C E. '4rique & doctorale; mais il amufales élégansil plüc a une petite maïtrefle & fe moqua des critlques. . Le roman eft légérement écrit, la fatyre eft remplie de graces & de finede : nous allons en tranferire quelques chapittes. LA F Riv o li t i. Cétoit une fée nommée Frivolite', a qui ce pays s'éroit voué depuis plus de deux fiecles, & qui venoit fuivant un ancien ufage , recevoir les hommages de ces peuples & répandre fes faveurs fur eux. Les femmes a fon arrivée fc pamèrent de plaifir : elle leur apportoit les modes des Grccques, des Monte-au-ciel, des Poufs. Les hommes s'extafièrent de joie en voyant les Parafois a la Chinoife , leslorgnettes a prétention Sc les gans couleur de rofe : les uns & les autres luifuent un gté inhni des Cabriolets volans, des Traïneaux bruyans. Les peintres vim-ent prendre de fes lecons, 6c elle leur montra i imager leurs tableaux , a jeter une lumière éblouiftante fur les chairs , i préférer le luxe des draperies, 1'afféterie des artitudes, a fexaófitude du dedin , d 1'expredion des figures , le paftel poudreux a la folide peinture, le croquis de la miniature au fini de la grande manière.  Nonet, $83 Les Poëres lui durent 1'art d'écrite a la condition , c'eft-a-dire , de faire des vers mufqués , pleins de penfées recherchées & d'expreflions précieufes. Elle répandit une pluie de romans, qui ne captivoient ni par la force des caractères , ni par 1'intérêt des intrigues , & qui, au lieu d'avoir une critique moralet n'avoient que des portraits fatyriques , elle enfeigna fur-tout a certains conteurs , a donner l'air & le ton de petit maicre , de leurs compatriotes, & de leur tems, a tous les tems & a tous les fiecles ; d'autres tinrent d'elle 1'art de traiter des fujets fuperficiels dune manière froidement philofophique. Elle rendit les Médecins petits maures , & les jolies femmes philofophes. Je laifle a penfer combien la philofophie produidt de droles, de tragédies , & quel fut 1'effet de fa magie fur 1'opéra bouffom Les Hommes Singes. Foka , facliant que les fophas avoient alors le privilège de faire dire de jolies impertinences a 1'efpèce fémelle, placa ft guenuche fur le plus beau de ceux du Caravenfera ou ii logeolt, s'adit devant elle, baifa fa menotte , & la pria de lui apprendre quelle étoit la caufe de 1'inimitié que les Microfcomes portoient a fes femblables- Bbij  384 Notice. Elle eft bien fimple , lui dit-elle , ils font du même genre que nous; mais la différence d'efpe.ce excite la rivaliré & la haine. Ces peuples n'étant que des imitateurs comme nous , font jaloux de voir que nous furpaffions nos modèles tartdis qu'ds ne peuvent atteindre les leurs. lis veulent faire de la mufique &c des vers a 1'exemple deceitains peuples du Midi; ils veulent phiiofepher comme certains autres peuples du Nord , & n'y réufdflent point; ce qu'ils ont le mieux attrappé eft de fe contrefaire lesuns & les autres. Le pattifan a des chateaux &c des petites maifons, des maitreftes & des valets comme le grand Seigneur ; en un mot ils font tous Singes, & de degré en degté le commis eft le finge du Miniftre, le yalet eft le finge du commis , & le valet a encore fon finge qui le fert; la filie entretenue contrefait la femme de qualité ; la grifette contrefait la filie entretenue , & la grifette a aufli une fubalterne. lis ontété indignés devoir qu'un finge contrefade mieux 1'imporrant qu'un maltotier, & que les efpicgleries des Sapajoux fuftent plus agréabies aux jolies femmes, que les fingeries de leurs Petits-Maïtres. Ce Roman foutient toujours le mêrne ton, & on lit toujours avec plaifir.  Notice. 3S5 LE GÉNIE, OMBRE: Conté de quarante-huit pages, in n , 17+6. ïl< A date de 1'impreffion eft fauffe ; ce roman n'eft qu'une allegorie tres foible des commentaires de Newton, par Madame du Chatelet Sc Voltaire : on fait qui l'auteur a voulu peindre par le Génie ombre; 1'EnchantereJJe eft de Madame Chatelet : Nous allons tranfcrire ce qu'il dit du temple de mémoire ; VEnchanterejfe au lieu de répondre au génie , lanca contre lui des dards, qui le pénétrèrent fans qu'il s'en appercut : elle fe fépara en deux, jeta une moitié d'elle-mêmea travers les airs*, qui attirant 1'autre , la fit patvenir jufqi'a elle; en fe poudant Sc s'attirant aind fucceflivement , elle parvint en très-peu de tems au temple de mémoire , ou fon amant fe trouva tranfporté fans croire avoir été touché. Le temple de mémoire eft foutenu fur des ftatues difpofées en colonades; fes mursfontcompo- B b iij  |8 Notice fés d'autant de têtes qu'il y en a dans Punivets, & fon toit eft couvert de médailles. L intérieur eft orné de tableaux , de livtes , de tables dor & d'argent , d'airain , de plomb, de cire , fur lefquelles font des cifeaux , des burins , des pinceaux , des plumes & tous les outils qui repréfentent nous ou nos actions. Ce tempie en perfpective a tous les humains, change de forme & s'embellit plus ou moins, felon les yeux qui le regardent. Les uns le voyent tel qu'un vafte arfenal rempli detrophées d'armes fur lefquelles font gravés les noms des Héros qui les ont portées , & brülent du defit d'y placet les leurs. D'autres , fe le repréfentent comme une immenfe bibliothèque , & veulent y ranger leurs ouvrages : beaucoup le prennent pour 1'Olimpe , & croient en y montant fe placer au rang des Dieux, Enfin, il.eft vu des infenfés mortels , fous autant d'afpeéts que 1'ambition a de faces différentes. Je ne patlerai point de ce que j'ai vu dans ce temole , qui n'a point de liaifon avec mon fujet j le maitre des cérémonies du temple du gout, m'a appris a fes dcpens , a ne point fixer les places dans celui de mémoire ; je dirai feulement que les comédies larmoyantes n'y font pas; les titres feuls en font écrits fur les tables de cire; le Génie Ombre y fit voir fon nom grayé fur les.  Notice. 387 tables d'argent, entre celui du Taffe & du Catnoens; YEnchantereJfeóitaaGénie,'\lfmt demander a Apollon même fa lyre , pour me chanter dans une épitre de moi & de lui, que vous adtefferez a une S'dphide mon amie , pour ne rien Iaitfèr foupconner de notre liaifon. Ce Génie obtint la lyre d'Apollon; l'Enchantereffê fufpendit fa vertu dans le mont 3 le Génie chanta: Ce refTort fi puiflant, 1'ame de la Nature, Éteit enfeveli dans une nuit obfcure , Le compas de Newton mefurant 1'univers , Cette citation fuffit pour donner une idee da Roman, des motifs de PAuteur, & pour rappeller a nos Lecteurs une Épitre qu'ils n'ont cesïainement point oubliée. Sr>ir  j8S Notice. L ES HOMMES COMME IL Y EN A PEU, LES GÉN1ES COMME IL N'Y EN A POINT, 3 vol. in-8°, Jyyé.- (^es trois vclumes font un Recueil de Contes de différéns genres. L'auteur a varié les formes & ie ron. Tous les contes ne font pas également agréables, mais ils font en général au dedus de la médioctité , 1'invention n'eft pas ce qui les caraétérife, leur mérite eft plutot dans les détails. Car la morale eft fouvent (i fu'orile , qu'on ne 1'appercoit point. Le ftyle eft léger, quelquefois piquant. Chaqne conté n'excède pas la mefure ordinaire , la plupart font rrès-cpurts, &c n'offrent qu'une fituation , & qu tift proverbe mis en aébion. Ils avoient été inférés dans les Mercures, & quelques uns ont été lus avec plaifir,  Notice. 389 MA HU LE M, HISTOIRE ORIËNTALE, In-1 z, 1 vpl.^ 1776. I a ~ •S-jA teinte rembrume qui règne dans plufieurs morceauxde ce roman philofophique , ne font pas du gout de bien des perfonnes ( dit 1'éditeur), & des femmes furrout; la morale doit être revêroe de couletrs plus amies de la délicatede de cerrainsorganes. Cette confidération m'aurokdiffuadé de le publier fi je n'avois en vifage Mahulem fous un autre pointde vue.La foif du.bonheur, voila le veen de la nature; mais il ed fi facile de fe ■méprendrefur les moyens d'y parvenir, qu'un livre qui indique la fource de ces méprifes m'a pmi de la plus grande importante ; le tableau des Mifatiables defirs de Mahukm t doit offrir aux yeux de'toute perfonne qui voudra rcfléchir le meilleur plan de modérarion qu'on puifte expofer. Lenergie des firuations, la morale fublime du puifiaftt génie qUi les permet & les repare! Le chaos des pafiïons dont le développement eft fi bien ménagé, quelques peintures volup-  ?o Notice: meutes, femées ci& li comme de belles rofes pomréciéerl'ceildu voyageur, voilafuffifamment dequoi faire palter les beautés lugubres du manufcrit oriental. Partout les vertus y font image,, la vertu y revêt les traits du fentiment, & le vice s'y perfonnifie dans toute fa difformité. Nous ajouterons, que le roman eft en effet tel que 1'éditeur 1'annonce. La morale fort & petce au travers d'une croute monftrueufe. Les événemens font bifarres , les rencontres font fingulières, & cependanton s'attache, paree que la morale eft toujours fondue parmi tous ces traits d'extravagances. L'auteur eft aflurément très-philofophe, & on ne rejetera point fon livre dans la clalTe des produdtions purement oifeufes. Tout y eft fortement penfé & encore plus fortemenc exprimé. LES MILLE ETUNEHEURE, CONTES PÉRUVLENS, 4 vol. in-12. , 1733'  Notice. i9i M Y SÉ IS, O u LE VISAGE QUI PRÉDIT; In-7 2 * / vö/.j 77^ ƒ. C E Roman eft dédié i Madame Ia Préfidente de Mefmes. MIKOU ET MEZI, CONTÉ JVIORAL, 1 vol. in-S^ 176 s. C E Conté a été placé mal-dpropos, dans'Ia claffe des romans orientaux. II eft parement moral& crmque, d peint les moines & un bon gouvernement qui les réforme. C'eft 1'ouvrage d'un homme de beaucoup d'efprit, & il eft rem H dalluuons fin.es qui portent fur les baies, effen*  594 Notice. tielles du bonheur de la fociété. Qui ne fent tout le piquant de la promotion d'un lazarifte a la place d'ingénieur du chef des fortifications, lequel pour avoir dirigé des maifons de force, devoit fe connoitre en fortification! Onpardonne i l'auteur le ton du calembour, en faveur de la beauté de fa morale. NÉRAÏR ET MELHOÉ J CONTÉ, In-~ïz, z vol. 17s°-  Notice. 393* N O C R I O N, CONTÉ ALLOBROGE, Petit in-1 z. N \ j- ' o u s ne parierons point de celui-ci, il eft trop libre & paroït avoir donné i Diderot 1'idée des Bijoux Indlfcrets J mais l'auteur de Nocrion a paru vouloir ménager la pudeur, en fe fervant de Panelen ftyle qui, par fa naïveté, adoucit tous les traits, & en émouftè les pointes.  t96 Notice HISTOIRE DE KHEDY, HERMITE DU MONT ARARAT , CONTÉ ORIENTAL, Traduit de l'anglois, in-i% , 1777- CjE conté eft intéreffanr, le ton en eft doux, le ftyle eft concis J tous les événemens reviennent a ce point de morale qu'on ne doit guères perdre devue.— Pronte deslecons que mon hiftoire te donne, que ton ame, dit 1'hermite , les recueille avec la même avidité que les fleuts böivent la rofée du ciel. Souffrir & mourir , voila le fort de 1'homme. Souffrons donc , mais avec courage, & dans un efprit de foumiflion. Nos murmures feroient une révolte contre Dieu même, fouvienstoi que ce moment fi court, fi léger , que nous avons a fouffrir, peut produire en nous un poids éternel de gioire, & que routes les joies, toutes les affliaions humaines, comparés a cette éternité de joie, qui doit fuccéder a cette viemortelle font comme une goutte d'eau comparée au Gange,  N o t i c e. 397 qui roule avec majefté fes flots dorés a travers les plaines del'Indoftan, ou comme un foible ruiffeau, rafraichic une prairie, comparé d 1'Océan, qui fixe tes iimites des empires, & qui environne le monde habitable. ROMAN ORIENTAL, i vol. 'm-12, i7S3 9 Paris. Ce roman eft d coup fur, 1'ouvrage d'une plume trés exercée. Nous avons éri rentés de l'attribuer d M. Crébilhn le fils, c'eft fon ftyle les tournures de fes penfées font piquantes, une concifion ferre fes tableau*; & le ton eft en général épigrammatique. La métamorphofe du prince en perroquet eft jolie, &o„ regrette qu'ell9 foit d une trop courte durée. Cet ouvrage eft le meilleur desromansqu'on ait publiédanste -enre oriental. L'auteur n'en fort point, fes dctions ly ramenent fans ceffe, 1'ufage de la féerie eft modéré, point d'extravagance & rien de trivial dans les difterentes aventures qui croifent 1'ac non principale. Nous allons donner une idéé de la manière de l'auteur, en tranfcrivant ce qu'il dit  ,P8 N o T i c t de la calomnie. - Ma fin, le pA«ft «oh** dans le milieu d'un carrefout immenfe, M»* par un peuplefainéant, mais vorace j qui toujours labouche béante.regardoit en 1'air. Ce peupi. qui ne fe nourrifloit que d une foite devolaille, efpècerare 8c fort fuj^tte a corruption, fe vopnt forcé a des jeunes fréquens, étoit pi e K defut Sous des arbres touffus dont tout le .ar fou étoit planté ,onvoyoitfe promener a la file de baies vierges,dont les vêtemens étoient d un ÏÏS-t ebbuiOante. dubruitd'un fot vaudeville. les robes des V erge. nLdeftesfecouvroientauffi-tbcdetaches,opour L n'eft ^nA.<êa^~*^*~ les habits fales Sc tombant par lambeaux, uai noient dans la fange. N'ofantpoirerlesregardsfurlesbelIesVierge fansfefennrdévorerdenvie&de douleur, elles répétoient le couplet^ ^foie« d^ ^1 nLs enttemêlés de critiques, fur la beauté de celles-ci. Saus doute;, ftri a&*n , s'ecnoient a pünUfonles vieUles furies, un tas d'imbecihes qui lenr fervoient d'écho , & le couplet chante a grand ehceut rempldToit la promenade. Les taches fiutes aUx robes des Vierges s'aggrandidoient pour lor. A vue d'eeil, Sc les victos infortunces dujo*-  N o t r e e- '°b7 ^"^"'J^P^ierecU C'eft E "oyoltpilSj&enreïandi n 'e. Cu; «! ™ve,ne„s de J On doit lire ce roman „„; e(l rempli d'efprir &q» prerenrtmi,le;l,»Com ^ ^ Tome XXXVU. C c  400 N O T I C I., KEINSAULT ET SAPHIRA, AVEC LES QUATRE-FLEURS, CONTÉ, In - i x , i 7 3 Ij N Prir.ce, deftiné par la m'chante Je'tf a être malheureux durant toute fa vie, fut tranfporré dans un palds, fur la fenêtre duquel la Fée fit naitre quatre Fleurs, douées du don de la parole & de la facilité des voyages. La Rofe parloit francois, la Jonquilk , efpagnol, V(Eïllet, latin, le Ja/min , italien. Le prince les envoie dans les quatre parties du monde, chercher la plus belle princelfe, & leur ordonne de lui en rapporterdes nouvelles. Ce cadre ainfi pofé , il étoit facile d'y placer tous les portraits , & d'y peindre les allégories les plus ingénieufes. L'auteur pouvoit nous préfenter, ou la galerie galante de tous les pays, ou la critique des mceurs des quatre parties du monde; mais il ne voit rien-, il ne peitn rien. Les Fleurs vont & vien-  Notice. 401 nent & ne difent que des chofes trés-communes^ Le prince refte toujours malheureux & s'en confoie en voyant des hannetons , des papillons audi malheureux que lui. Nous nc parions point de Rhinfauh & Saphira qui eft une hiftoire tragique, & qui, par cette raifon, n'eft pas du reflort de cette notice.  401 N o t i c i. LES SAMIENS, CONTÉ, TRADUIT DE L'ANGLOIS; LE PHCENIX, APOLOGUE ARABE; CALISTE ET PHILETOR, TRADUIT DE L'ITALIEN: Paris , i 7 8 i. I_iE fujet des Samkns eft Pamitié cVEvandre & Euriale; Pintere: en eft médiocre. Nous avons inféré en entier le conté du Phénix dans notre Colleclion. Califte & Ph'detor eft une allégorie d'amour ou plutot les épreuves de deux amans. La fiction eft agréable, mais elle n'eft point aftez développée, & rien n'intérede paree qu'il n'y a ni forte  Notice." 405 paffion, ni danger, ni defir violent. Ce font des amans curieux. L'amour qui les inftruit n'en fait pas bien long. SENSIBLE ET CONSTANT, O u IE VÉRITABLE AMOUR, 1 vol. \n-12 , ij6j*. JL/'Intrigue de ce Roman eft fimple. Un prince & une princeffe obligés par des malheurs de déguifer leur état, font bergers. Senfibk garde fon troupeau, Conjlant garde le fien. Ils s'aiment, s'en font 1'aveu, fe voyent tous les jours. Un Parvenu en devient jaloux, il veut enlever Senfibk. Conjlant la délivre , terrajfe fon rival qui meurt. Il eft emporté lui-même , bleffé : mais un Confident du roi fon père qui lui apprend la mort du roi, & 1'invite a venir regner , il retourne dans fes états & il place Senfibk fu* fon trone. Mais avec auffi peu d'action , l'auteur remplit deux cent vingt-quatre pages , &c intérede fes le&eurs jufqua la fin. Le ton eft doux, les defcriptions font brillantes, le por- C c iij  404 Notice. trait de Senfibk eft frais, & d'un coloris agréable. La première enttevue des deux amans, eft pleine de naturel. L'auteur fe laifte cepenclant emporter i la déclamation , & il eft trop oriental dans fes comparaifuiis. On eft fatigué de voir Cephak , Ticon , l'Amour; toutes ces divinités mythologiques font releguées dans les magadns de 1'opéra. Elles ne font bien que la; la féerie elle-même deviendioit faftidieufe , d les auteurs n'avoient le talent de mettre dans la bouche des fées , la morale qui convient au jeune age, a 1'adolefcence.  Notice.' 4*5 HISTOIRE DU ROI SPLENDIDE E T DE LA PRINCESSE HÉTÉROCLITE: 1747» I volume , \n-lz. (^E Conté eft trés ingénieux, & rempli de details de la plus aimable originalité. On ne peut s'empêcher de rire aux éclats; certainement ce n'eft point par la grouiéreté des charges, qüoique les peintures foient outtées. Les calembours font rachetés paf Ta-propos , & on pardonne tout au cuifinier du prince. Le caractère de la princede Hétéhclite eft piquant dans fa bifarrerie, ainfi que Yautre qui n'eft qu'une criCc iv  *°6 N O T I c ï. «que des muficiens, de notre mufique & de 1'opéra, On ne pouvoit tournet la plaifanrerïe avec plus de finede. La liberté qui règne dans ce conté nous a empêché den faire ufage. II eft attribué a M. Pajon, & c'eft le meilleur de fes Romans. ZA M B E D DIN , HISTOIRE ORIËNTALE, In-/i, i vol., i7(J8. La Notice que nous en donnerons fera courte: nous y avons rrouvé beaucoup de gaieté & beaucoup d'imagination.  Notice. 407 ZULMIS ET ZELMAÏDE, E T TURLUBLEU, jfo-ix. i747. Ces deux Romans, quoique fous 1'anonyme, font de l'abbé de Voifenon. Le premier eft établi fur un fond licencieux, mais qui n'a rien d'indécent. Les gafes viennent toujours a propos, &c dérobent a 1'efprit des nudités qui deviendroient trop fortes. II eft narré aves facilité, & il petille de traits d'efprit. Zulmis, métamorphofé en Chien , devient joli & piquant; le dénouement eft comique \ le prince Epaïs y joue un róle très-gai , 8c le cri de ce prince qui voit fon rival dans le Chien , 8c s'enfuit en criant : Ahl Chien, Zelmaïde qui époufe Zulmis & qui s'écrie, mais d'un ton différent, ahl Chien, ne pouvoit manquer de faire rire le lecfteur un peu aux dépens, il eft vrai, de la décence. Turlubleu eft un médiocre ouvrage qui n'exprime rien , n'aboutit a rien & ne rachette rien par aucun détail. Touc eft commun , ou pour  408 Notice. mieux dire, tout eft d'une médiocrité , d'un vide qui fait tomber le livre des mdns. C'eft un philofophe qui fe dégoüte de fa femme , & dans la fuite de toutes fes maitreftès dont il fait une revue qui n'eft pas neuve. M. l'abbé de Voifenon écrivoit avec trop de hate ■> fes ouvrages étoient prefque toujours des aéfces de complaifance, Sc il falloit avoir broché un livre a la minure indiquée. L'abbé aimoit mieux arriver a point noramé, n'importe dans quelle négligence de parure, que de ven'.r plus tard avec plus d'élégance & de recherche. Nous 1'avons dit, les complaifances de fociété, rappetifteront les gens de letties qui feront cas de la fociété. Nos boudoirs font trop bas pour de grands tableaux, on n'y met plus que des eftampes ou des portraits. Combien de fuccès de fociétés ont été démentis par le public ! L'abbé de Voifenon en aft une preuve. 11 fut dans fon tems 1'oracle des coteries; il jouiftoit de la plus kante réputation. A-t-il le même rang dans la littérature ? Nous n'ofons point trancher la qqeftion. Si eet exemple pouvoit être utile 1 Fin de la Notice.  Lifle des Ouvrages qui compofent le Cabinet des Fées (i) en trente-fept volumes , tant in - 8°. qu'm - i z 3 avec figures & fans figures. C o n t e s des Fées, par Charles Perrault, de 1'Académie Francoife, contenant: Le Chaperon rouge. Les Fées. La Barbe bleue. La Belle au bois dormant. Le Cliac botté. Cendrilion. Riquet a la houpe. Le petit Poucet. L'adroite Princeflc Crifclidis. Peau-d'Ane. Les Souhaits ridicules. Nouveaux Contes de Fées, par Madame la Comtefle de Murat, contenant: Le Parfait Amour. Anguillette. Jeune & Belle. Le Palais de la Vengeance. Le Prince des Feuilles. L'Heureufe Peine. Les Contes des Fées & les Fées a la mode, par Madame la Comtefle d'Aulnoy 5 contenant: Gracieufc & Perfinet. La Belle aux cheveux d'or. L'Oifeau (i) La lifte que nous avons irnprimée a la tête du premier volume de cette Collection , ne contenant pas les fix derniers volumes donnés par fuite, nous y fuppléons par celle-ci qui renfermetout ce quieftcontenu dans les trenteiepr volumes.  IIO bleu Le Prince Lutin La Princeffe Printannière. La Princeffe Rofette. Le Rameau d'or. L'Öranger & 1'Abeille. La bonne petite Souris. Don Gabriel Ponce de Léon. Le Mouton. Finette. Cendron. Fortune. Babiole. Don Fetnand de TolCde. Le Nain Jaune. Suite de Don Fernand de Tolède. Serpentin vert. La Princeffe Carpillon. La Grenouille bienfaifante. La Bichc au beis. La nouveau Gentilhomme Bourgeois. La Chatte blanche. Belle-Belle , ou 'le Chevallier fortune. Suite du Gentilhomme Bourgeois. LePigeon & la Colombe. Suite du Gentilhomme Bourgeoie. La Prirceffe Belle-Étoi'e & lc Prince chéri. Suite du Gentilhomme Bourgeois. Lc Prince Marcaffin. Suite du Gentilhomme Bourgeois. Le Dauphin. Conclufion du Gentilhomme Bourgeois. lüuftres Fées, contenant: Blanche Belle. Le Roi Magieicn. Le Prince Roger. Fortunio. Le Prince Guerini. La Reine de 1'Ifle des Fleurs. Le Favori des Fées. Le Bienfaifant, ou Quiribirini. La Princeffe courpnnée par les Fées. La Supercherie malheureufe. L'Ifle inaccertiblc. La Tyrannie des Fées dérruite, par Madame la Comtefle d'Auneuil. Contes moins Contes que les autres, par le fieucPrefchac , contenant: Sans Parangon. La Reine des Fées.  111 Fées, Contes des Contes, par Mademoifelle de Laforce, contenant: Plus belle que Fée. Perfinette. L'Enchanteur. Tourbillon. Verc & Bleu. Le Pays des Délices. La PuLfance d'Amour. La Bonne Femme. Le; Chevaliers errans & le Génie familier, pat Madame la Cumtede d'Aulnoy. Mille & une Nuit. La Tour ténébreufe & les Jours lumineux, par Mademoifelle Lhéritier, contenant: Ricdin-Ricdon. La Robe de Sincérité. Les Aventures dAbdalla. Mille & un Jour. Hiftoire de la Sultane de Perfe & des Vifirs, Contes Turcs. Les Voyages de Zulma dans le pays des Fées. Contes & Fables lnd;ennes, de Bidpaï & de Lokman, traduits d'Ali-Tche'.ebi-ben-Saleh, Auteur Turc • par M. Galland. Fables & Conres des Fées, compofés pour 1'éducation de feu Mgr. le Duc de Bourgogne,'  ut par Meflire Francois de Salignac de la Motteïénélon. Boca , ou la Vsrtu técompenfée, par Madame HulTon. Contes Chinois, ou les Aventures du Mandarin Fum-Hoam. Floiine , ou la Belle Italienne. Le Bélier , Fleur-d'Épine. Les quatre Facardins; Contes, par M. le comte Hamilton. Les Mille Sc un Quart d'Heure, Contes Tartares. Les Sultanes de Gtizaratte , ou les Songes des hommes éveillés i Contes Mogols , par M. Gueulette. Le Ptince des Aigues-marines, Sc le Prince invifible, par Madame Lévêque. Féeries nouvelles, par M. le Comte de Caylus, contenant: Lc Prince Courte-Botte & la Princeffe Zibcline. Rozanie, i Le Prince Muguet & la Princeffe Zaza. Tourlou SC  4'3 Rirctte. La Princeffe Pimprcnelle & le Prince Romarin Les Dons. Nonchalante & Papitlon. Le Palais des Idéés. La Princeffe LuminctUe. Blenette Sc Coquelicor. Mignonette. L'Echantement impofïïble. La PrincefTe Mirmtie & le Roi Floridor. La Belle Herminc Ei le Prince Colibri. Contes Orientaux, par M. le Comtede Caylu& Cadkhon & Jeannette, par le même. La Reine Fantafque , par J. J. RoulTeau. La Belle Sc Ia Béte, par Madame de Tillenenve. Contes des Fées , par M. de Moncrif, de 1'Académie Francpife, contenant : Les Dons des Fées, ou !e pouvoir de 1'EJucation; L'Ifle de la Liberté. Les Aïeux, ou lc mérite perfonneL Alido. & Therfandre. Les Voyageufes. Les Aroea Rivales, hiftoire fabuleute. Les Veillées de Theflalie, par Mademoifelle de Lulfan. Hiftoire du Prince Titi, par S. Hyacinthe.  4H Contes des Génies, ou les charmantes Lecons d'Horam, fils d'Afmar. Funefiine, Conté par Beauchamp. Nouveau Recueil de Contes de Fées, contenant : La petice Grenouille verte. Les Perroquets. Le Navire volant. Le Prince Perrinct ou 1'Origine des Pagodes. Incatnat blanc & noir. Le Buiffon d'épines fleuries, Alphinge ou le Singe vert. Kad»er. Lc Médecin dc fatin. Le Prince Arc-en-Ciel. Le Loup galeux & la Jeune Vieille. Les Soirées Bretonnes, par Gueulette. Contes de Madame de Lintot, contenant: Timandre & Bleuette. Le Prince Sincer. Tcndrebrun SC Conftance. Les Aventures de Zéloïde & d'Amanfarifdine, Conté indien, par M. de Moncrif. Contes choifis de Mademoifelle de Lubert, favoir : Lionnette & Coquerico. Le Prince glacé & la Princefte étincejante. La Princefle Camion. Nourjahad ,  4^ Nourjahad , Conté oriental. Contes choifis de M. Pajon, favoir: Eritziiie & Parelin. L'Enchanteur ou Ia Baguc de PuUfancc. L'Hiftoire des trois Fils d'AK Batfa de la mer, & des Filles de Siroco, Gouverneur d'Alexandrie. Bibliothèque des Fées & des Génies, contenant o oo ■ "' 'sMssofi .nfiftokiA LaPrinccfTe Minon Minette& le Prince Souci. ^ffiranór & Bellanif e. McrveiHeufe & Charmante. Grifdeün Sc Charmante. Cörnichon& Toupctte. Le Prince Ananas & la Prinecffe Moufteilc. Minet bleu Sc Louvette, par Madame Fagnatr. Acajou Sc Zirphile, Conté, par feu M. Duclos, Secrétaire de 1'Académie'Francolfe. Aglaé & Nabotine, Conté, par feu M. Coypel, Peintre du Roi. Contes des Fées , par Madame le Prince de Beaumont, contenant: Le Prince Chéri. Fatal & Fortune. Le Prince Charmant. La Veuve & fes deux Filfcs. Le Prince Deiir. AllroN Sc Aimée. Le Péchcur Sc le Voyagcur. Joliette. Prince fpirituel. Bcllotte & Laidronette. Tornt XXXVIL D d  4i£ Le Prince Défiré , par M. Selis; PtofeflTeuï d'Eloquence au College de Louis-le-grand , Cenfeur Royal, &c. Contes choifis, tircs de différens Recueils ; favoir : Les trois Épreuves. Les Souhaits. Roiane. Mirzaho Ardoflan. Bozaldab. Nahamir ou la Providence juftifice. L'Aveugle & fon Chien. Jupiter juftifié. Les Ames. Féradir. Ameyde.' Les- Aventures metveilleufes de Don Sylvio de Rofalva. Un Volume de Difcours, contenant 1'Origine des Contes des Fées, & les Noticesfurles Auteuss des Ouvrages ci deflus. F I NL