A B R E G É D E L'HIST OIRE DES P A ï S-B A S, DEPUIS L'ARRIVEE DES BAÏAVES JUSQU'A NOS JOURS, Mis k la portée D E S E N F A N Sm PRE MIERE PARTIE. Avec de belles planches en taille doucs. A Amfteldaaj, chcz l* DE JONGHy MCCCJ Cr   PREMIÈRE PARTIE. S' Ie p'an que nous nous fommes formé nous tepermettoit, nous cotnmenéériohs iet pardonner en racourci & nos jcunes Lcdteurs Ja description Géographique de leur Patrte , & une idéé de Ia forme de Gouvernement qui y a Hen ; tnais nous devons nous borner uniquement a. 1'Hifionque, & fi nous réusfisfons par la k. exciter quelque envie de connoitre exr&e ment cePaïsfi fatneuxpar fes guerres, fesrévolutions , fon commerce , fes richesfes dont il n'y a point d'exemple, nous fommes asfu.es» que tout ce qui ne peut entrer dans les bornes êtroites de notreplan, fe trouvera traité trés au long dans d'autres ouvrages. Nous devons cependant obferver nne chofe -c'efl: que les Pais - bas , quoi qu'en gér.éral leur fituation foit fort basfe, ne font ni un féjour ausfi raaf.fcfo , niuneterre, aus. fi peu confidérabte par les produélions , cue SacJqiies Mistoriens ötrangers Ie fuppofent, fur A  C ft ) des inFoftnatiotis mal-fondées: il eft vrai que nous avons dans ces pais-bas nos mala* dies Spiaémiquts ,mais ces maladies font-elles inconnuea en d'autres Contiécs ? ne prolongcons-nous pas notie vie jusqu'a eet ftge oü par. vkimer.t d'autres peuples? n'avons • nous pas coir.me eux nos vieillards a cheveux blancs ? •n oi • n:êaie j-Yi vu des habitans de ces Provinccs» qui avoient 98 , 101, & même 103 ans; nous 1 c fiurions les compter par centaines, il eft !vrai; mais d'autres nations peuvent-clles le faifp? ne 1'annoncent-elles pas dans les pa|.lcrs publics comme un phénoméae, quand il y 3 patmi eiles un vieiilard qui k pousfé. fa •carrière au de lk de cent ans? li nous nous borji.rns k foixnne & dix, quatre • vingt, même k quatre • vingt ■ dix ans, nous pomons faire giüire d'avoir un grand nombre de vieillards de 1'un et de l'autre fexe qui fe chargent encore dn foin de leurs affaires 4ou des détails de leurs ir,én£iges; n'y k -1 il point parmi nous beaueoug de belles femmes , & même plus que cbez d'autres nations? ou bien la beauté peut • elle aller depnir avec une conftitution malfaine? Les bom» lp es font - ils raoins robustes dans Les pais .taS$ peuyent-üs tnoins s'epdiueifque IesEtrangers?  Cs ) * ne fsrt * rien de dire, que „ les Etrancers „ furtout fe resfentent dans ce païs de !a mmM vaifc Lfluecce du climat": car Ls babitans. des Puï^has peuvent dire Ia mëme chofe des autres païs; ce qu'ils éprouvcnt ici, n'est que ce qu'on dprouve en changeant de dimat & quoi ferviroit il d'en dire d'avantage ? . notre Patrie eft un féjour malfain, nous favons dit plus d'une fois, pour ceux qui prodiguent leur fanté, ce tréfor précieux ; mais pour ces gens la le globe enticr eft un iéjour malfain. Les tempêtes, les inondations caulent defréquens ravages dans les Païs-bas\ mais d'autres comréos, pJus dlevées, n'ont eües pas ausü les unes leurs débordemens, les autres leurs trctnw blemens detcrre, d'a-ures encore leurs mala. dies conragieuiès, d'autres enfin leurs oranes désastreux? , & none fol eft il moL confiderable que d'autres par rapport a fes producions? non fans doute; il eft vrai qu'il ne produit pas ssfez de grains pour nourrir fi£ habitans; mais n'a-t il point ce!a de comnmn avec d'autres piys? ne produit il pas en revanche des pommes de terr.e cc des légu^ A a *  C 4 ) fhcs en abondance? & les grains ne f-cttrrcïfn* ils p s y venir tout aurfi bien , fi i'on prenoit pour cela les mefures convenables ? • ■ ■ ■ que lïe pourrio.is • nous pas dire denos p&tur?ges? „ y a-t- ii" demandions-nous ailleurs „unfeul „ coin du globe , oü 1'on n'ak pas entendu ?, parler du bcune et des fromages de Hollandie ? alee menrcoit les habitans des Pais «bas de les noyer dans leur beurre et leur l2it." Qui ne fait pas qu'on traosporte annueüemenf chez nous environ vingt mille boeufs mai» gus, et qu'une anr.ée fufiit pour les crgraisl'er presque dans la feule province de Hollande ? quel haut rang les Païs-bas ne tiennent ils pss dans Ie regne des fleurs l et fi nous voulions oüviir h. nosjeunes Lecleurs le jardiu botani* que de notre païs , quel feroit leur lïanifcllernsnt trop religieus , que pour ne point écouter les ministres ds leurs Dieux; ausfi - tót ils conftruifirent des vaisfeaux ou des bateaux , qui confiftoient orJinairementer» ce teras - ld dans des troncs d'arbres creafés; y embarquerent leur bétail & tout ce qui pouvoit être transporté; dans eet état les braves Bataves descendirent le Rhin, & aborderent au Heü mirqué; c'est h dire» dans une ile, quifutappellée de leur nom rik des Bataves, & enfuire la Batavie. Cette arrivés des Bataves , a la quelle on peut dire que cotnraence 1'Histoire de notre Patrie , eft trop importante , que pour n'en point faire la description anosjeunesLec* teurs: ï,e B.itave chasfe' des cliamps de fesanc?treS, Vient ha'biter ces lieux fur 1'avis de fes Prêtres. Vlle des Bataves comprenoit une grande partie de ce qui fait aujourd'hui la Gueldre, de la ïhllande & de la piovinee d''Utrecht; & 1'on japporte leur arrïvée en ce lieu a iooans, ou environ, avant la naisfance de notre Seigneur. Ces Bataves , vos antiques ayeux , aimablc jeunesfe! étoient grands, gros & robustes dc    C 7 ) corps, endur'cis contre Jes injures de 1'air et desfaifons,& forrnés aux travaux de la guerre; ausfi longtems qu'ils étoient enfans, ilsalloitnc tout nuds} même dans lefroid Je plus piquant; dans un age plus avancé, ils fe vêtoient d'un habh de peaux de bêtes: qu'on pofe fur un corps fi robuste, une tête ornée de cbeveux blonds & pendant négligemment en boucles , terrible par deux yeux d'un azur éblcuisfant, vénérable par une longue barbe, et 1'on aura au vrai la figure d'un ancien Balave i unisfez enfuite ce corps a une ame honnête & courageufc, un coeur franc&fiJeJe, ami de 1'hospitalité ócde la chasteté,autant de;vernis, mes cliers Enfans 1 dont vousne pouvez jamais vous propofer asfez férieufement 1'exemple, & qU j ccpendant fout les vertus nationales de vosancêtres, de as hommes, qui, confiJérés avec la dernicre exictitude , ne peuvent être accufés que de trop de penchant pour le jeu,& pCutêtre pour la boisfon. Usavoientpeudeconnoisfances, ils n'étoient experts qu' a monter a cheval & a nager: En chasfant dans les bois, en nageant fur les cau^ ie Batave s'exerce aux plus rudes trayaax, A 4  [(8) Quand il s'a^i fok de combatré, Jouvent ils traverfoient avec leur chevaux de grandes ri« vieres a la nage, pour fe rapprocher de i'enneHii, & après une manche fi pénible, 1'attaquet avec ure nouvelle valeur: femmes & enfans les fuivoient fur le champ de bataille ; aiguillonnoient leur courage; recevoient les blesfés, en prenoient foin, & ne craignoient pas de fucer de leurs propres levres le venin de leurs plaies. On peut jager de fadresfe des Bataves de cetcms la k manier les arrnes , par ce qu'on rapporte, del'un d'eux, qu'il étoit tellement mattre de fon are, que quand il tirp.it en 1'airune fiêche, il favoit i'atteiBdre ea recombant avec une autre flêche, & cela, avec tant de juftesfe, qu'il la inettoit cn pieces. Cependanr ce peuple guenier étoit entiérement livré k 1'ldolatiie; ils rendoieat des honneurs divins entre autres au foleil, k la lunu &au feu, leur olTroient des facrificss dans des fcois et des forets facrés ; & dans ces facrifi; ces, ils immoloientnonfeulementdesanimaux, mais qnelquefois méme des hommes. (Jn faux culte endurcir le rr.eilleur cara&ere ; en frere » des faux dteux o£re le tos d'wa &C/e»    Or, mes chers Enfans , bien lom que cettè Nation refpeclable put refter dans la posfesfion tranquiiie & libre du pays qu'eüe avoit acquis-, les Romams, qui fous cajus jules cüs/.r, fai, foient la guerre fur fes frontieres, lui tendirent des embuchesj & j les Bataves ne fe trouvant P«s asfe* forcs pour leur refifter , conclureiu avec eux un traité, 50 ans avant la naisfarce decflRIsT:nous avons, exprimé i'esfentielde ce traité dans le distique fuivant: Trop foible pour braver les valnqueurs de la terre, •n divicnt leurami, mais non leur tributairc Lors qu'ils furent airfi devenurlesalliésdej Il'mxins, qu^ques unes de leurs meifieurcs tronpes pasftrent au fervice de cesar ; et ce fut ayec clles qu'i] rernporta fes plus grandes Vicloires ; nos ancêtres s'acquirentmême teliemcnt Testime des Romains par leur courage & leur vertu, que l Empereur augcjste en fit les Gardes 1'honneur eft la vraie récompenfe de la bravoure , & le moyen de laisfer a ia po* ftériréun nom a jamais bé'/mguste; en 1'année 28 ils aiderentè dompterles Frifons révoltés qui habitoient k 1'Estdu Zuiderzee i & treize ans apiês ils donnerent la marqué la plus éclatante de la fidéiité qui leur étoit naturelle, en vengeant le meurtre commis dans la perfonnede caligula, qui avoit été le fuccesfeur de tuiere k 1'Empire, qnoique ce caligula fut un prince extravagant, asfez infenfé pour dresfer contre la mer fes machines de guerre, & pourannoncer comme un butin un grand nora* bre d'écailles& de coquilles de mer: les braves. Bataves étoient fans dcute perfuadés qu'il n'y a point de fiogujarité de conduite qui puisfe dégagcr de la fktèlité qu'on aunefois jurde 1 quel excmple lublimel —— ils ne refufcrent pas même leurs fervices au cruel neron, quoiqu'ileut jetté dans les fèrs, & qu'il retint captif claudius civilis leur Chef, nonobftant fou innoncence & fon extraclion royale : galba , fuccesfeur du ciuelneron, rendit bien la liberté k ce heros, cependant la bonne intelligencé cesfa dés lors en partie, entre les Bataves & tesRomafas; ede fut enfuite rornpue entiérement, parceque Rome ne les traitoit plus en £cutfe libre, Comité dont ils furent toujours  C n } extrémement jaloux ) mais que, fous aültjsvj* Tellius , i!s vinrent leverde force des troupes dans leur 11e; ils en furent irrités, & voyanc tien que Rome tachoit de les réduire fous le joug, ils röfolurent de faire une vigoureufe ré« fiftance: Cifilis, dans ce beis, exhofte Ie Batave a braver le Romain qui vent le rcndre esdavc» Cela arriva Tan 69. Les Kanmefates, peuple femblahJe aux Ba* tavcs par fort origine, fa langue & fa bravoure, furent invités k entrer dans leur a!liance; ils y confemirent; ils avoient auparavant éré entiérementdéfaits partib ere, quoiqu'onignore ce qui leur avoit attiré la disgrace des Rorhaivs; on pouvoit p?r conléquent leur appliquer ccque dit ua Historiën : ta guerre et la viÊoïre fon as fez certains , qüöj que la caufe de h guerre fait in:ertaine * Oh ï mes Enfans; plüt k Dieu que cela nè pü. jamais fe dire des guer« res des Chrêtiens ' Les AUiés, aidés de quelquesT^Z/fw, feren» diieat dignes de 1'amitié des illustres Bataves; deux camps que tesRmains avoientformés pour  C 13 ) leurs qunrtiersd'Iiyver, furent biemöt iurpris> pillés & biülés; civins dut faire fercblaht au-* pres des Roipains d'être irrité de cette démarche, afin de pouvoir d'autant plus fürementat» teindre fon but; mais fa feinte fut bientót dè>couverte, & il fe vit obligé de fe déclarex otivertement 1'ennemi des Romeins, il put ausfi alors faire d*autant plus hardiment fes prépa. ïatifs,' qui furent fuivis d'une victoire éclatante qu'il reuiporta fur fes ennemis, & qui fitregsrder les Bataves par mi les Germains et les Gaulois, comme les auteurs de la Uh:rté: ce qu« Coutribuabeaucoup a cette vicioire,fut,qu'il y avoit encore des Bataves parmi les Romains, et que beaucoup d'entre eux avoient le coeur trop bien placé , que pour pouvoir combattre con* tre leurs freres qu'on opprimoit; au milieu de Vaction, ils montrerent qu'ils étoient de vrais Bataves, foit endéfertant, fuitentournantleurs armes contre leurs camarades, ce qui ne donna pas peu d'avantage a civilis. Doutez - vous peut-être, mes chers Enfans! qu'a. la rigueur cette conduite foit honnête? — confidérez que leurs freres n'étoient point des rebelles, «Wis des gens qu'on opprimoit; que toute do- jui.  C is ) «Unatïon forcée & déraifonnable étoiten horreur aux Bafavcs, comme eHe 1'cft encore a leurs descendass, toutdégéneVésqu'ils font -painoureufement —- d'aüleurs le coeur a'a t i! pas toujours de Ia foiblesfe pour un compatriote? quelque fois même cc penchanteft tel, que dans fa violent e il I'emporte fur 1'honneur. * T°US Ies Balavfs> fe trouvoientparmiles ne fecomporterentpourtantpasd'une mSBiere fi digne d'éloges; Ja raifon de ce'a etoit Ia desunion qui régnoit parmi hsliomalnscegalbA,que je vous ai appris a connoitre, sétantamré Je mépris du peuple , fut cré parlesfoldats; & un certain othon, qui avoit conduit l'entreprüe formée contte fa vie fut nommé fon fuccesfeur ; cependant AüLDS' v i te ll i us , dont nous avons dèja fait menton, & qui commandoit vers le Bas-rhln de la part de cal ba, avoit éréproclamé Empereur: les Bataves s'étoient déclaré pour ceder"«r, &ils fe diftinguerent par plufieurs aciions de valeur dans le fiege que fit othon,qui, découragé par une löfifhnce fi opiniaae, fepri. valmmèmedelaviecc céda ainfi 1'empire a vitellius: celui-cin'en demeura pourtant PMp«fibleP0sfesftur- caruucertamv.sPAB  C H ) s 11 n » qui faifoit la guérre en Pahstlne, y fut déciaré Empereur: il eftaiféde comprendreque cl au di us ex vil is dut feindre d'embrasfeï le psrti de cc dernier, p'out pouvoir avec plus d'apparence de raifon s'oppoferkviTELLius ou plutót, k tout le peuple Romein: et comme il arrivé dans routes les diviflohs, que les unS s'attachent k ceparti, d'autres k celui-lk quelque fois avec asfez peuderaifon, quelques/ïomains tenoient ausfi pour vitellius ; et ceux-lk traiterent claudius civilis eo traitre, comme il paroit par la réponfe k 1'invitation qu'il avoit faitek deuxlégions de/fofavM, de prêter ausfi kvESPASiENle ferment, par le. quel il avoit Hé tous les fiens dans la crainte dé la puisfance des Romains: ils r?avoient pas befoïn, difoient- ils, des confeUs d'un trrfcre nidi ceux de leurs ennemis; vitellius ctoit leur Prinee, & ils yquloient lui rester fideles jusqu*ait dernier Jcupir; un Barave transfuge »''avoit pas a fe mêler des af air es des Romaitts •, ma's il deyiik s'atteadre a la punition de fa fcélératesfe — Ces gens fe laisferent facilement éblouir par la perfpeftive" des récampenfes ou des eroplois — ö mes jeunes amisl ne fixez jamais ainfi ces as* w-es trompeurs ; fuivez plutot 1'inftincl: de vos  C 15 J coeurs •foruic's au jbien ; & fins doute a!ors vous ne vous déclarerez ni pour un vitellius, ni pour un vespasien; maïs vous prierez ic ciel pour le bien être de votre patrie. Une réponfe fi outrageante irrita tellement le brave civms, qu'il appella lousiesarmes tout ce qui étoit en état de fe défendre; i! fit j inipirer a fes aJIiés 1'amour de la gloire et ledé! üï du butin, en même tems que les Bmkterp { et les Tenkteres fe joignirent k lui; & fe héros | irrité tomba fur lesRomains avec une valeur in** croüble, & prit d'asfaut leur vieux camp (costra Petera)'t après cette vicïoire, les Romains tacherent de 1'engager k mettre bas les armes & k ne pas fccourir plus longtems vespasien; mais ce fut en vain , le héros cherchoitkfeveuger lui même, il vouioitêtrelibre, &longraud coeur n'étoit pas encore fatisfait k eet égard; il pousfadoncfesentreprifes, & fon zeleaugmenta encore, lors qu'en 1'année 70 vitellius étantmort, illeva le masqué & fe déclaia ouvertement 1'ennemi des Romains: cependantaprès une guerre de peud'anné^s, ilferéconciliaavec les Romains, & bientót les braves Bataves fe trouverent de nouveau parmi les troupes auxiliaires de ces anciens alliés, qu'ijs aiderent d'aB a  C -6 ) bord i prendre 1'ile Mona & a faire enfuke un deslente en &li'ag% en 1'annéc 86, fous le regne de do Mi Ti en, quïmonta fur le trone après la mort de vespasien fon pere &deï'iTUS fon frere , ifs aiderent a achever la défaite des B reionsi fous ulpius tra jan, qui régna après DOMiTiEN&ner ü A \ les Romains confervolent encore leur anciennë estime pournos foravcs'ancetres; & dés lorsle comme ree commencoit déja a fleurir dans Tlle des Bataves ,ce qui fit que 1'Empereur adrïe n, fuccesfeurde Trajan, établit unmarchéconfidérable:malgré les gueires continuelles, ce commerce alla toujours en augmentant fous les regnes desEmpereurs mauc*aurele.i.ucius-verus, d1di u s-j ul1 anüs.lüciu s an TONI u'S COM mo dus, pertin.\x & luc1us-sep- timiüS'Sevebus; fous ces deux dernkis, la garde Batave étcit en gtande cor.fidération ; ■ liur réputationunef-is établie , & acevant de jour en jour un nouvel accroi sic ment, jbihte a leur caractere estimable;- produifirent pour cux les plus beaux ffirits ; ces b aux arbres er; portent toujours de délicienx; celui dont lejardfn ell pianté de ces arbres, trcuveen etixun Eden poui fon coeur.  C 17 D severe ent pour fuccesfèurs antonin oubass1en& grta; & ceux- ci furent fui. vis d'alexandre severe, qui fut masfa« . crd; après lui vint maxi min, qui fut ausfi tué avec fon fils; pupien & bat,bi n foren* enfuite dlus Empereurs , & n'eurentpas un mei!leur fort; ils furent asfiiiilis, dépouillés &traf> nés au travers de la ville jusques dans le camp;, la feule caufe de ce meurtre fut, que ces Em. pereurs étant des Princes Germains , avoient ehoifi d'autres gardes, c'est h dire des gardes de ieur nation. Le meurtre des Empereurs par les foldats, & Téieclion d'autres Princes a-leurgré, devint de teins a autre fi en vogue, que les arméesparrf. cuüeres, qui fe trouvoient dans les diverfespar» ties de i'empire 6 ifoient Empereur fur Empereur t jusques-la que pendant le regnedeVALdftiSN & de GAiLiEN fon fils, plusdetrente dc ces Empereurs, connus fous le nom des trente Tyrans parurent,Tunplutót, 1'autre plus tard, et dis' parurent ausfi de même; cette anarchie Übtr blit tellement 1'Empire, & Je rendit fi méprifabie, qu'il fut attaqué non fans fuccéspar toutes fortes de peupJes étrangers , entre autres ausfi par les Francst qui vers la fin du troifierae fie. B 2  ( i» ) ele (car dans notre plan, nous fommes parvenus iusqu'acette époque) avoient déja leur* posfesfions dans ftie. posthume, qui régna enfuite le prémier, s'étoit rendupsr forcemaitre du gouvernement; fous fon regne, notre Païs étoit déja parvenu k ce point de grandeur, que les fabriques d'étoffes de laine y étoient fur un tres bon pié: c'eftbien dommage, mes enfans, qu'un défir mal entendu pour ce qui eft étranger ait fait entiérement d'sparottre de ce pais uh art fi ancien & qui ja. dis a nourri des centair.es d'honnêtes families; fi cependant ou vouloit mettre en oeuvre les moyens que nous avons encore enire lesmains, bientót le brnit agréable de mille navettes feferoient encore entendre dans toute la république —|- Ah! puisfe ce tems revenir un jour, alors nous reviendrions bientót ausfi a la fimplicité & a Téconomie nationale denos ancêtres. TEmpereur posthume oyant ausfi é;é asfasfiné, fut remplacé par lollianus, qui eutle mêmefort, &hquifuccédavicTORiNj qui pour lui avoit roasfacrê posthumus; après la, mort de victorin, 1'Empïre resta quelque tems entreles mains de plufieurs Prin* ces qui régnerent tous a la fois j a ur e h 1 e n d'a«  C to ; bordgénéral.&puisEmpereur, défitles fans doute avec Ie fecours des Bataves; 1'Env pereur probus conquitauxenvironsduflA/» au de Ia de foixante villes, dont des peuples étran.' gers s'étoient déja mis enposfesfion: quant aux Francs, on leur asfigra cependant des habitations le long du Rhin & dans Me des BatayesJls avoient fait un traité avec \es Romans, mais fe moquant de lafoi qu ils avoient jurée, ife ne laisferent pas longtems fubfifter ce traité- ils m'rent Ie feu a quelques vaisfeaux des Rcmains, et en prirent d'autres, avec les quels ils firent des courfea, après s'être pour cela aliiés avec les Saxons, , e" 2u' d10 c r'é t1e n fut élu Empereur par armée, & réprima les Francs ; ils furent en. fmte chasfés en grand partie du Païs; mais ou ne refta pas longtems a 1'abrideleursinvafions. cependant ils furent de nouveau battuspar co * stantin, fuccesfeurde DiocLéTiEN, & eet Empereur, fuivant Ia coutume barbare des Romains , n^expofcrauxbêresférocesles *w peuple.1" êUerre, P0U1' fCrVir de fpeéhcle *u lis recommencerent leurs incurfions fous CONSTANTlNj mais avec ]e fecours B4  C 2q ) ves Bataves, ils furent repousfös [jusqu'h deuxfois par ju hen, qui dans la fuite devintEm» pereur, & qui pour avoir renoncé h laRelig'oa Cluêtienne, futfurnommé l'Jpostat; pannices Francs fubjugués il y en avoit furtout deux fortes 1'une nominée des Saliens , 1'autre des Chamaves, & d'autres encore. Les braves Batav:s n'étoient pas encore chrêtiens; car on crok qu'ils virent avec peinejovian fuccéder a julien, paree qu'il avoit cirbrasfé la Rcüglon cbrêtienne; le foleil du faint Evangile, n'étoit encore en ce pais qu'a Ion aurore. jovie n ne rdgna que fept mois & eut pour fuccésfeur valektinien, qui avec le fecours des Batayes, réprima encore les Francs & les Saxons, qui continuoient leursbriganda* ges & leurs pirateries; fous valence, qui ïégnok en même tems que valentinibn les troupes auxiliaires des Bataves furent envoyées contre les Goihs en Thrace, oüelles don. „erent de nouvelles marqués de leur caractere national; cependant le bruit de leur renommée ne put empêcber plufieurs peuples étrangersde fe jetier dars le pays, fous le regne de t h é o» eq se le grand.  Tandis qbe valentinij? n troi s .on p*r>. tót fa merc fous fon nom, gouvernokl£mpiie d occident, on conciut encore un tnftd avecfcs Francs, après leur avoir fait h gucire avec vi< g"eur; a valentinien fuccéda fiMXjM!N quidéfk féparément ks Saxons jmu>k deux. «éles coeurs : écoutez ce qu on a rapporcé aüleurs k cefujet: „ au milieu du huitleme fiecle, le» J9 Chiétiens menoienten ce pays une vie fort déréglée; on trouvequ'ils vendoient leurs escla9, ves aux Idoldtrts pour les immoler,- q.u'ils ai. „ moientkfenourrirdelachairdes cbevauxfau. „ vages & domestiques, & de porc tou 1 cru j que „ leurs prêtrcs mêftfes vivoient dans le dérégle„ ment, qu'ils s'adonnoient a 1'impurété, kl'i. „ vrognerie, a la inédifance & k d'autres 0 „ chés ; qu'ik alloient k la chasfe , & mar, choient ouvtrrement k la guerre, foit cun, „ tre les C-rêtiens , fok conti e les n.fi,ielesr & coramettoient d,verfe> jtféguMrifë dans la duCttnne & |e baptéme " & cora- EientleCiirismnismeauroit il pu déa-Jorsre* . C 3  former les ceeurs , fi après tant de fiecles, ilfe touve en core des Chié'iens, de qui les discours & les aéilous prouvent qu'ils n'ont d'un véritable Chrétien que le nom - gardez-vous de leur resfembler. Aprés la mort de pip in &de fon fils ca ro« xqman, la couronne de Francs pasfa ï fon autre fils chaues, connu depuis fous le nom de charlemagne — vous aurez fans doute, mes Enfans, déja plufieurs fois entendu prononcer ce nom, & vous allez en conclurre que nous fommes déja parvenus dans notre plan fcune épcque plus généralementconnue; en effet, nous fommes arrivés au terme de la partie la plus ancienne de i'Histoire de notre Patrie, au bout des fentiers tortueux, hérisfés de ronces & d'épines ; & ceque je vous dirai dans la fuite fera de plus en plus a la portée de votre entendement. Les Saxons fe foulcverentde nouveau contre charlemagne & cela h plufieurs reprif.s; cependant ce Prince les presfa avec tant de vigueur, qu'ils accoururent k lui de tous cö és yar grandes troupes, criant qu'ils vouloient de▼enir Chrfttias & fe fpumettre a lui.  C 31 ) Aprés avoir pasfé 1'hiver en FraVcc i! JartW Panné fuivante, (777} pour fe rendre a AWjw, oü il avoit b|u un magnifique palais. Dans Nhrégue arrivé, Charles recoit 1'homrnagc Des Saxons fubjugués malgré leur fier courage, Les Saxons, après avoir de nouveau perfé. cuté ceux qui anuoncoient CEvangïle, furent' attaqués par Ie comte thierri, parent du Roi charles, & qu'on crojt avojr é[(j un ^% ancérres desCemtes deHolIande, de ce nom; cependant ia plupart des Francs périrent; mais * I'arrivée de charles, ils plkrent, &Ieur défaite fut fuivie de la mort de quatre mille cinq cent Saxons, qui furent décapités en un jour;" cette iigueur occsfionna plufieurs nouveau* foulevemens, dans les quels ils fcurent attirer ausfi une partie des Frifons; 1'ancienne anthipatie fubfiftoit encore dans ceux-ci, & un coeur mal fatisfait fe laisfe porter aifément a tl vengeance; tel eft 1'homme pour bien comprendre de quelle importance un tel foule. vement étoit alors, jlfaut iavoir qu'en fefousi traïant è la domination te* Francs, ces peuples tbandonnoient en même tems la Religion CürèC 4  C 52 ) tier.ne, apiès quoi les Eglifes nouvellemcnt bitjes étoient piijées, & ceux qui prCclioient la foi, chasfés du Païs; vous pouvez ajfément vous repréfenter le désordre du repos public qui accompagnoit tout cela ; eneffet, ce font-lk autant d'événemens, quiprouvcnt fans coutredit, que dès les tetns les plus anciens , notre Cnere Patrie a été le tbea'trë des troubles. LesFrancs vainquirent de nouveau, &après quelqucs comhats qui Te livrerent encore avec & coittre les Saxons & les' F tfons cuarlbs conclut avec eux un traité en 801. Les Saxons & laFrife a Ch*rleS jurent foi, comme a leur Défenfeur, Si non comme a leur Roi» Ils promirent d'embrasfer la Reliaion Chrê» tienne, & d'être foutnis aux Evêques qui feTOient établis lur eux; & les juges ou Comtes que les Rois dès Fnncs envenoient cbez eux* devoient gouverner chaque peuple fuivant les loix Je fes aucêtres; dvaïlleurs ils furent exemp» tés de toutes charges & impofnions, & ne torent aftreiius qu'k paycr les dixmes aux fccclé* fiastiqutb; on leur donna ou laisfa le titre de genslibresj& depuis eeue époque les    C 33 ) Frifons fcmblent avoir afFecld particuliérement Je nom de Lihres Frifons, qu'on retrouve flfcö* vent dans leurs anciens privileges & dans leurs chroniques , la Religion Cbrétienne fut ausfi déi Jors univerfdlement recue dans ce Païs je dois encore ajouter » ceci, que chaule. m a g n e , fous le regne du quel arriva eet événement important, prit k Rome le titre d'Empereur, & y fut reyu avec applaudisfement par les Eccléfiasciques & le peuple. Ce Prince, après avoir foumis toute Ia Frije h fon obeisfance, & lui avoir donné des loix, trouva bon de faire gouverner les Frifons par des officiers particubers, qui dépendoient de lm; ceux- ci, foit qu'on les nommat Ducs ouComtes, tïrtentServmm du Roi, jusqu'a ce qu'ds fe furent foustrait a toute dépendance réeile, & régnerent de leur propre chef. charlemagne mourut en 814, & eüt pour fuccesfeur fon Fils louis furnommé te Pieux, qui rendit aux Saxons Ie droit d'héritage paternel, dont ils avoient été déclarés déchus fous le regne de chakles fon Pere — Notie Patrie eut vers ce tems - la beaucoup a fouffiir de la part des Danois & des Nor mans; ils en ont fait trop fouvent le tuéatre de leurs  ( 34 ) violences & de leurs dévaftations ; cependant toutes leurs incurfionsont fervi a rendre lenom des Frifons plus célebre & a hnmortalif.r leur courage; plufieurs de leursComtes fe comporterent daiis ces occafions avec tant de valeur, que leSouverain leur fit grand nombre de dons confidérables, aux quels ne contribuoitpas peu le befoin oü le Souverain fe trouvoit fouvent du puisfant fecours des Comtes, ce qui rendk ces derniers fi fiers , qu'ils ne demandoient pas même la permisfion de faire pasfer la comiéde pere en fils, de forte que bientót cette dignlté devint héréditaire; & quoique les Comtes de #o/te/7 e nossu; danslafuitece godefroid fut «ïé en trahifonparundomeaiquedeROBEUT, ou du Comte thiekri: th.erri-cin« fucréubli dansfbédtagedefesperes. dema niere qu'il ofa fe nomuier: paria grace de D.eü Cotnie des llollandais* Lesguerres qui devaftoient notre Patrie déja harasfée furent presque cor.tinuelles , tandis que les affaires de la Religion ne caufoient pas moins de mouvement; les pélérinagesalaterre fainte furent fuivis des croifades, qui fe firent pour arracher par force ce païs des mains des Irfideles, & propager ainfi la Religion par la vinlence; ou lefaifoitfttacherlurrépauledroite une croix blanche, rouge, ou de quelque autre couleur , & dans eet équipage on fe mettoiten marche, abandonnant par un zele mai-entend» fa femme & fes enfans. Dans l'antique Sion no$ fanaciques peres, Courant planter la croix dans le fang dc leurs freres. Le pouvoir des Eccleüaftiqaes augmenta coa-    ( Z9 J fiJéiablement par ces croifadcs dont i!s étosenï les fauteurs & les directeurs, jusqi'es la roêine que vers le milieu du douzieme ficcle une irc nace d' excornmunication de la part d'un Evê' que fuffifoit pour faire mettre bas les armes a un héros: on en voit un excmple dans ce qui eil repréfenté fur la planciie ci joiüte; Thierri fix, entourre* d'une troupe guerriere, fous Ie jong des Pre'lats baisfe fa tête altieïe. Le Comte avoit mis le fiege devant Utrecht, & TEvêque jugeant f>n épée trop foible, a recours aux foudres de TEglife; fert de la ville en habits pontificaux, & menaca de Texcommunication ce héros, qui maigré toutefs valeur, fut faifi d'une crainte fuperfiitieufe qui lui fit lever le fiege &le contraignit a. venir, latête & les pieds nuds, demander k genoux pardon k VEvêque. THiERRr-six, entreprit ausfi une croifade a la terre fainte, mais ni fa piétéprêtendue, ni celie de fes fuccesfeurs, ni celledeshabitansen général , n'avoit aucune influence fur'es coeurs; on faisoit partout Ia guerre, & on continua partout a h faire; la Religion n'étoit que la befogne de 1'esprir, tandis que 1'ambition dr.;s Da  C <• ) les Ecc'dfhfiVques, lahaine &la vengeancedans les gens du monde, dtoient i'affaire du coeur; ce qui fit que ce païs, qui en même tems a-zoit beaucoup fouffert par les orages & les dibordemens, devint la proie de toutes fortcs de nküx, L'ambition cependant gouvernoit ausfi les gens du monde, comme ilparoitparla conduite de guill aume, prdu;ier de ce nom, &oncle d'ada, fille du Comte thierri - sept; car aprés avoir vécu en ennemi avec fon frere, même jusqu'k lui faire laguerre, il enleva apiès fa mort fon héritage k fa fille, & lacontraignit, elle, fon epoux & famere, k febannirdupaïs. Cet ufurpateur , Ie Comte guillaume premie r , moufut en 1'année 1222, aprés avoir fait une croifade en Egypte, oü il n'acquit pas peu de gloire au fameux fiege de la villede D tmitte: il eut pour fucctsfeur fon fils fl orent qurts, & hëcesfa de les pourfuivre, que pour rendre les derniers devoirs aux trïftesres. tcs de fon Pere ; un vieillard qui fe trouvoit parmi fes prifönniers , les lui avoit montré a eofitJkion qu'il lui fit grace de la vie; airfi Pamour qu'il portoit k fon pere 1'emporta fur la haine qu'il avoit pour fes enriernls , & combien une pareille conduite ne merite t. elle pas d'être appellée généreufe! flore n t - cin^ eut un coeur brave, mais il fut trop luureux dans la guerre, il devenoit par-la trop formida* ble, pour "que les Nubïe's 'dé tlolïïBSe ,'de qui Ia confideration diminuoit par la même ralfon, n'eusfent point concu de haine contre lui; & quelle en fut la fuite? ó mes enfans! 1'envieufe haine est une pasfion fi .horribleï les Nobles 'jnécontens, qui inventoient toutes fortes de prétextes k leur nécontemement, (gïsXrecht van amstel étoitdecenombre,) formerent avec le Roi cP/lngleterre, irrité contre le Comte k caule d'un traité, fait avec la France, le perfide projet des'emparerdefaperfbnne & de le transporter en S-gleferre; le Kaihenxeus Comte fut en effet feit prifonnier &  C 43 ") conduit kPttijtfS Ui Mfihifj ptn de jours sprés, pommé on je transportoic'de la, ceux de Naariden marcherent a Ton fecours, ce qi i fit échouer le projet des tr-ahres; cependant ils ne iafcferent pas que d'asfouvir leur haine; VAN vet zen lui $atrit les deux bras, & Jes autres coujurés lui óterent la vie par plus de vingt coups; le cheval fur le qué\ il étoit ïié, avoit broncbé, & le malheureux Comte étoit tombé avec lui dans un fosfé; la planche ei - jointe répréfente ce meurtre détestabie dans toute fon horreur: Tel qu'un Loup ravisfeur dans Ie piege attiré par Vcizen•& fes gens f lorent eft masfacié.' Cette fin déplorable eut ausfi pour le Pus des fuit.es msfheureufes, puis qu'elie occafionna de nouveaux troubles; j E a n p r e m \ E R, fori fil-, encore mineur, étoit en ingiet ene ; jean, Comiede Nainavt, ik neveuduRoi güillaume, dont nous avons parlé, prit en main les rênes du gouvernement; mais il en futdépouillé par wolfert de borselen: après la mort de ce dernier, qui fut cruellement masfacré k Delft, & celle de jean premier, il fut cependant rétabli dans la digniü deDuc, D 4  C 44 ) (5: la gouvernement pasfa a'mfi dans Ia maifon de Haïnaut. Notre chere patrie continuoit a étre accablée de toutes fortes de maux, parmi les quels on peut donner le prémier rang a plufieurs guer« res; de ce nombre Furent (en 1315) la peste & la famine, mais une famiue fi extréme, qu'on mangeoit les grenouilles des marais; il n'y avoit pas m me asfer de perfonnes laines pour enterrer les morts; cependant le bon dieu prit alors pkié de ces Provinces, car peu de mois après ou vendoit pour quinze de« niers autant de feigle, qn'on eut pu en avoir •auparavant pour quinfe fous. Le comte guillaüme qoatre étant mort fans enfans, le gouvernement tomba entre les mains de marguerite fa foeur alnée, qui en céda la direction a fon fils güillaume - cinq ; cependant ceiui-ci, loin de remplir les conditions de ce traité , tache d'enlever par la force la fouverainité k fa Mere; de lh nkquit la dangereufe faclion des Haskfchen & des Cabbeliaatwfcïien, qui pendant cent & cinquante ans déchira cruellement Ie Païs: 1'origine de ces noms est Ia raillerie que fit 1'un des partis, en difant qu'il englouüroit 1'autre,    C 45 ) comme les gros poisfons englouiisfcnt le» pecits , * quoi fon répondit qu'on avoit encore des hami-pons pour prendre les gros poisfons, les deux partis fe diftinguoient, en portam 1'un des bonnets gris, & ]'autre des rcugeSj a Ia nianiere de ce tems la - ce qui fait horreur , eest que 1'ambitieux guuuume en viut jusqu'fc iivrer, en i35r, un combat nava, , ft nierei jefuis fur, mes enfans! quevousapprouverez les vers que j'.i mis aubasde la planche ou est réprdfentée cette horrible entreprue ; J'y dis : r * Un fi'S denanire' Ia guerre i ft mere ... tant ft f0lf de rc^Rer rejid 1)homme fangu.na.^ Ce fils dé iaturé, je ne puis vous le eacher, perdit 1'esprit & mourut; fort affreux! dans cetétat ...ij ne nous est pointpermis dejugerfT' mes j°unes ai»is I ne perde* jamais de' vue que dieu e^t équitablc. La malheurcufe mere avoit été forcée de céder Fautorité . fon cruelfi|s,parou lesc0ffltés pasferent dans la tóaifon de Baviere- de cette maifon fortit ausfi Hnfortunée Comteafe jaQueline, trop connue que pour nous érrêrér a fon maiheureux gouvernement: après avoir  C 45 ) lutté contre un grand nombre de revers elle fut cocuainte de remettre 1'aatorité a phi- lippe DE BOURGOGNE fon Oncle j & Crt Provinces paslerent ainfi dans la maifon des Comtes de ce nom; jaqubline pasfa les derniers jours de fa miférable vie, dans u» cbateau, oü elle s'occupoit a faire descrucbes de tene, connues lous le nom de truches de Jaqueline, Des guerres étrangeres, des querelles domeftiques, des incendies, des débordemens affreux & réitéres, la cbeité des denrées; teil font les maui qui fans cesie asfahioient r.otre païs; & malgré toutes ces calamités, ce qui est étonnant, fes forces & fes richesfes pnrent un accroisfement qu'on ne dolt attribuer qu'au commerce: a tous ces maux fe joignit encore h conduite féditieufe des Eccléfiaftiqu"; celle du Pere brugman en est un excmple; U ofoit, de desfus la chaire, exciter le peuple a )a révolte, en cela d'autant plus dangereux qu'il av0it plus d'éloquence, d'oü est venu le proverbe fi conuu : quand yvus parleriez comme Brugman: c'est ausfi pour ces raifons que nous avons dit de fa conduite condamnable a tous égards:  C A7 } Bes fertnons de Brugman, Ie ftyle furietfx,' allums dans les caeurs un feu fedicieux. De la maifon de Bourgogne, la Comté pasfa par alliance dans celle cP Autriche ; cac maximilien d'aütriche avoit époufé ma rib de BOURSOüNE, & par cette alliance notre chere patrie tomba entre les raains de l'E ne doit il pas avoir été aflligesnt pour le Fondateur de notre libenéi mais il étoit dans la main de dieu, & il fe réögna. Son adverfairc, le fliauduPays, le fierDuc d'albe s'éloigr.oit au contraite de plus en plus de dieu &de la vertu, fa méchanceté n'avoit plus de hornes: Dans Bruxelles on voit Albe entrer trïomphant, fier d'avoir fait couler tant de fang innocent. Oui, mes chers Enfans! & non content de cela, il porta 1'orgueil iufqu'a fe faire faire une Statue du canon qu'il avoit pris au Frere de güillaume premier; on y lifoit dans rinfcription: pour avoir appaifé les tnubtès, chcfféles mécontens, de'fendu Ia Religion, protégé la jujlice & pacifié les Provinces. Ce qui ne fervit pas peu a nourrir fon orgueil, fut le prefent que lui fit le Pape p i e u s V. d'un chapeau & d'une épée enrichie de pierreries- — On s'imagine aifément de quel teil cette Statue doit avoir été regardée par les citoyens, dont les fentimens étoient droits: requesens, qui fuccéda au Duc d'albe, comprit auffi qu'il n'y avoit tien de bon h attendre d'une paieille    C 65 ) conduite, car la première cbof. qu'il fit, fut d'abattre ce monument détettable. Suivant 1'infcription de la Statue, albe fe fhttoit d'avoir appaifé les troubles, fans doute par ce que o u a n g e étoit parti; il eft vraifemblable auffi que Ia même caufe impofa filence aux Nobles confédérés; mais quand on fe tair, quand on cede par crainte pour un tyran dont les forces font fupérieures, pour un monftre qui n'emprunte fon autorité que des tourmens, un tel homme peut il être cenfé arrêté dans fes progrès? non aflurément, s'il fe taït, c'eft pour pouvoir enfuite fe faire entendre avec une voix plus péndtrante; car s'il parle aétuellement, il y va de fa vie, & Ia bonne caufe y perdrott 1'efpérance de Ia vJ&ofre: orangb avoit a la verft! quitté le Pays, mais il n'avoit pas renoncé k Ia chofe qui devoit fauver le Pays;il tênta la fortune fur mer, il expédia des commifions pour armer en courfe, & ceux qui s'en chargerent furent appel lés Gueux-marins : ces héros firent beaucoup de prifes; entre autres peu de tems après avoir mis en mer, ils s'emparerent de deux Flottes EfpagnoUs, 1'une compofée de quarante voiles, & 1'autre de ioixante, F 4  C 65 ) Ces portes & d'autres encore engagerent philippe dans de grandes dépenlcs, & Toecafion des quelles les Provinces des Pays • bas furent opprimées de nouveau , par la levée des deniers que le Duc d'ALBE y établit de fa propre autorité; cependant il y rercontra de grands obflacles: orange, a qui 1'argent manqunit auffi, tachoit également d'en tirer de ce Pays; dans cette vue, & pour d'autres rai, fons encore, il entretenoit une correspordanee fecrete avec des perfonnes diftinguées, dans la quelle ce grand homme fut obligé d'ufer de tant de prudence, qu'on n'y nommoit pas même les cbofes par leurs noms; on s'étoit ac cordé a nommer la Ilollande, cuivre; la Gueldre, acier; YOveryfel, etain; AmfieU dam, saturne; hllaie, jupiter; Delft, a p o l l o n ; Lelde, M e r c u r e ; le Prince lutmêine, s'appelloit harten willemszoon; & le Duc d'albe y étoit déguifé fous le nom de paul van alblas. Cependant les affaires étoient dans un trifte état, quoiqu'ilne manquat pas d'hommes courageux parmi ceux qui étoit reftés fideles h la Patrie; par exerople herman de ruiter,  C 67 ) qui portoit le nom du plus brave Amiral qu'aient eu ces Provinces • aft'ubié d'un froc de moine, il emreprend avec trois de fes amis, de furprendre le cbaceau de Lcuveftein; ii réuffit k y pénétrer; aufilót il s'aiTure du conciërge, & avec Ie fecours d'envfron vingt - quatre hom. mes, qui enfuite fe joignirent a lui, ii s'y fortifie autar.t qu'il eft poffible: cependant albe, informé de cette aclion extraordinaire, y envoya trois cent de fes bourreaux fubalternes, pour reprendrt le chateau, ce qui fut effectué, car la partie étoit trop inégale, quoique os ruiter, refugié dans 1'inrérieur du chateau, & armé d'une épée, fit tomber plufieurs Efpa* nols k fes piés: enfin fe voyant accablé, il mit lui même le feu a Ia poudre,dont il avoit pour eet effet fait couvrir Ie plancher, & fe fit Huter en 1'air avec fes ennemis. — je vois avec plaifir, mes Enfans, que ce héros exciie votre admiration;pourmoi,je lejugedigne d'étre appellé le plus brave des Beiges: Un Batave, aux abois, prend la torche a la main; Ia falpètre enflammc' fait fautet. Louveftein. Quand vous etudierez plus k fond 1'hifloire  ( 63 ) de votre Fatrie, vous y trouverez plus d'un exemple de cette lotte; car fi fhabitant des Pays-bas mérite quelque gioire, c'eft fanscontredit celle d'avoir de la grandeur d'ame; en touttemps, dans les circonftances même les plus critiques, ces Provinces font en füreté entre les mains de leurs babitans, pourvu feulement qu'ils ne foient point maltraités. Le Princa d'orange chercha du fecours en Trance, mais ce fut envain; il refta feul pour faire tête a tout, ce qui le mettoit fouvent dans des circonftances embarraffantes, quoique lui & les fiens remportalTent de tems a autre des avantages plus confidérables : tandis qu'a lbe étoit encore \ Bruxelles occupé k contraindre les Magiftrats d'ordonner la levée du centieme denier, les Gueux-marins eurent le courage de s'emparer de la Brille, entreprife qui leur fit concevoir de grandes efpérances pourl'avenir; nous en avons fait mention dans les deux vers placés au deflbus de cette plancbe: Pat le plus grand exploit des braves gueux-marinS, Albe doit s'anêter j la Brille eft en leurs mains. Cela arriva en 1'année 1572.    C 69 ) La fortune parut dès- lors vouloir favorifer le Prince d'o range & fes partifans, ils firent plufieurs expéditions, qui eurent un heureux fuccès; albe échoua dans di verfes entreprifes, & plufieurs villes fe rangerent du parti de güillaume: tout cela cependant rendit l'état intérieur du Pays d'autant plus déplorable, que la fureur commengoit a s'allumer davantage depart & d'autre, & les etTets en furent d'autant plus terribles, que le Pays n'étoit pas tout entier porté contre YEfpaguol; il trouva, quelque indigne de fecours que le rendit fa conduite, encore des partifans; deux des plus fanguinaires deflrucleurs du plus beau Pays de la terre, & les déteflables opprefleurs du meiU leur, du plus brave des peuples, ayant poulTé leurs brigandages jufqu'k Veere, furent rcpouf. fés dans différentes forties que firent les bour» geois de cette ville; racharnement étoit tel en ce tems-Ik, que les prifonniers de part & d'autre étoient pendus fur le champ; on vit même un frere dans fa fureur attacher de fa propre main fon frere a la potence; dans une fortie,dit wagenaar, s,oü de ryk, „ h la tête de fa troupe, tua environ 100  C 7° ) ft EJpagnols, un chirurgien arracha le cceur „ d'un ETpagnol & fattacha a 1'éperon du na„ vire. oü plufieurs perlonnes vinrent y mor, dre; & depuis on ne manqua pas d'attacher k dos k dos les prifonniers EfpngvMs & de les jetter k la mer, cela s'appelloit leur baigner les pieds." Cequiengagea davantage les partifans duPrin» ce,fut qu'alota la neihetfAngleterreUuxfa parvenir quelque renfoit fous main, & que de tems k autre plufieurs villes encore embraflerent la bonue caufe; les Efpagnols tn furent plus aigris & ils faifircnt toutes les occafions d'en donnet des marqués;ils le firent, entre autres, paroitre k Naarden , qui fe rendit k eux par capitulation, & qui fut faccagée malgré le traité; les cruautés qu'ils commirent dans cette ville font horreur; ils y égorgeoient jufqu'k des vieillards décrépits, & buvoient leur fang avec avidité; on y accordoit la grace au pere, k condition qu'il vit maflacrer fon fils; un forgeron, tenant d'une main un escabeau, &de 1'autreune epée, défendit 1'entrée de fa maifon &en fit tomberun grand nombie; enfin accablé par le nombre & couvert de blelfures, iltomba fur 1'escabeau prêt  C 7i ) prêt k rendre l'ame, ü faific d'une main de fo«geron les épéesde deux Efpagnols, qui croyoient Ie pere er, comme il tenoit les lames, ceux-ii les retirerent & lui couperent tous les doigts; auffitót il fut percé de coups, & fi?3 bourreaux firent jaillir fon fang, tout fumant encore, dans le vifage de fa fille, qui étoit k genoux & vertok de prier qu'on accordak la vie k fon pere... mais maintenant j'epargnerai k vos cceurs fenfibles le récit des autres horreurs; je ne ferai dans Ia fuite que trop fouvent dans Ia nécefihé de raconter les horreurs par les quelles l'huraanité fut autrefois affligée dans les Pays - bas; de montrer qu'on y a vécu comme s'il n'y avoit point de dis u, dont les yeux éclairent tout & voyent auffi ce qui fe paffe dans ces Provinces: dulTé je, mes Enfans, faire frémif1 votre bon cceur, je dois pourtant vous faire ,part de ces événemens affreux , paree qu'ils font néceffaires pour vous donner une idéé générale de 1'état de votre Patrie & des époques les plus inrércffantes de fon hiftoire. Avant la fin de 1'année 1572 les Efpag. nols affiegerent Harletn; cette ville inclinoit bien k fe réconcilier avec le Duc d'albe; mais 1'cxempJe de Naarden lui avoit appris li G  ( 70' peu de fond qu'il y avoit I] faire fur un traité avec les Efpagnols; auffi fut-il réfolu qu'ött «réfifleroit courageufement k 1'ennetni de Ia Pa. trie; Ilarlem, cette ville ancienne, eut beaucoup k foufTrir; 1'acharnement étoit k fon comble; on envoya au Duc d'albe un tonneau, avec les tctes de onze prifonniers Efpagnols, en lui mandant que c'étoit la ie payement du dixieme denier, pour le quel il affiégeoit Harhm; la onzieme, ajoutoit-on, étoit pour les intéréts, afin qu'il n'eut pas k fe plaindre qu'on le payoit mal; les llarlemmoh fe defendirent avec bravoure; cependant ils furent k la fin obligés de fe rendre; ils étoient prefque confumés par la fairn; jettez les yeux, mes enfans, fur Ia planche ci« jointe; Wns Harlem , épróuvant de la faim les tourmens, le riche fc r.ounit dMnfeftes degoutans. Non feulement les infecles leur fervirent de nourriture, ce qui étoit du moins la cbair d'animaux vivans; mais on fut rrêaie réduit, après avoir confommé les berbes qui croilTent entre les pierres, a fe fuftemer en faifant bouillrr des peaux de bceuf & de cbeval, & k ronger jufqu'au cuir des fouillers. Ceux de Um furent plus heureox, quoique  C n) cette viile n'ait pas eu de moindres miux 'k fupporter; plus d'une fois elle fut affiégéo par les Efpagnols; mais je dois auparavant vous dire, mes enfans, que le fanguinaireDucd'At*e, devenu 1'objet de la haine univerfelle , & furchargé de dettes, craignit pour fa vie, quitte iecrettement Amjleldam, & fut remplacé par Dom louis de requesens: il mourutpeu d'am.ées après, ce monftre, qu'on allure a.voir fait mettre'a mort, en fix années de tems, dixhuit mille fis eens peifonnes pour caufe de religion & de foulevement. Requesens trouva tout en défordre, & les finances de 1'Etat épuifées; cependant il ne lailTa pas de procéder a 1'exécution du plan de fon cruel Maftre; Middelburg fe rendit a lui; orange cheroha du fecours en Angleierre & en Francs, mais avec peu ou point de fuccè?; requesens exigea des fommesexorbitantes, & mit pour la feconde fois Je fiege devant LeU &e\ Cï57%) foixante deux forts entouroient la ville, & il fut réfolu qu'on la reduiroit par la famine; aufiï une difette affreufe s'annor.cS bientót, & jetta les habitans dans Ie défefpoir; ils voulotent qu'on leur donnftt d.i pain, ils en G 2  exigeoïent de leurs Magiftrats; cependant m patriote, dont la mémoire mérite de vivre éternellement, les contraignit & fe retirer hon* teux de leur démarche; c'étoit le généreux van ee r we r ff, le pere du peuple, il lei r piêfenta fon prop&s corps; j'ai lait repréfenter & vos yeux ce glorieux dévouement, confidérez cette peinture avec toute i'attention &la véné« lation poffible. Voyant le peuple en proïe aux horreurs de la faïm, van der Werf vient i'offrir pour leut fervir de pain. La famine ne fut pas le fcul fléau qui défola la ville, on eut auffi a Jutter contre la pefte. O r a n g e ne voyoit plus jour a fauvcr Ia ville que par Ie moycn de 1'eau, c'étoit fans doute un parti défefpéré, puifque le fuccès dépendoit du tems & du vent; ctpendant il plut & 1'Etre éternel & bon de faire réuffir ce projet; après qu'on eut faciifié fix ou fept cent mille fiorins pour des digues &c., di e u ordon. na au vent, une tempête s'élcva du nord ouefl: avec un bruit épouvantable, 1'eau en fe groffiffant, chalTa les Efpagnols de leurs retranchemens, fit paiïhge a un Hotte chargée de vivres » & heide, fut fauvée.    (75 ) Le Clel, q-ii tant de fois fauva cette contr:'e, Commande a 1 0.:e'.in; & Leide eft dé'.ivrc'e. O repréfentez • vous 1'empreflement des habitans extenués par la faraine, qui fe tenam au bord de 1'eau, tendoient lturs mains décharnées pourrecevoir un pain, un hareng, du fromage, ou que'que autre nourriture qu'on leur jettoit: les plus emprelTés fe jettoient & 1'eau & nageotent vers les vaiiTeaux qui venoient les délivrér; quel n'aura pas écé dans cette occafion le zêle des peres pour leurs enfans f —— trop d'avidité en fit périr plufieurs —• mais je dois abréger -— il fuffit de dire que Leide fut fauvée, & on rendit graces k bieu de cc miracle, comme on le fait encore tous les ans { 3 Oct-obreO pour récompenfer la conftance fans exemple des habitans de Leide, on accorc'a a cette ville un o&roï pour 1'érecYion d'une Univerfité, qui devint en peu de tems cdlebre, & quï jouit encore aujourd'hui de tout Ion luftre——• mes chers enfans / s'il arrivé que vous y foyez auffi envoyés, pour étudier les langues & les fciences, rappellez-vous fouvent alors ce que cette ville a fouffert pour votre liberté; penfez k votre compatriote van der werff, & aux autres grands hommes que vous aprenO 3  Cf*) die* a connoitre de plus pres, & comportez^ vous d'une tnaniere digne d'eux. Apiès une expedition infrudueufe fur^n' Jes liollandols & les Zélandois firent un traité, par lequcl ils s'engageoient k s'aider & fe défendre mutuellement, fous la conduite du Piin. ce é'Orange, contre 1'ennemi commuu; ce traité fut ratifié en 1576: cependant on travailjoit k une pacification k Breda, mais fans fuccès, paree que les E/pagnols s'opiniatroient k vouloir le départ des non - Catholiques, ee qui eut été pour eux un triomphe, & auroit rendu inutile & de nulle valeur tout ce qu'on avoit déia fait; nos braves Ancêtres avoient encore «op de courage, mes chers enfans 1 que pour prè-er 1 oreille k un accotnmodement qui aurott fait tant d'infcrtunés; cependant s'ils fe maintintent, ce fut dans un état bien douloureux; car les aimes des Efpagnols étoient plus beuleufes que les leurs; dieu permit que la méchanceté trlottpbat P«ur ™ temps; die u en „fc quelquefois *ft cependant c'eft fans dou. te nour de fages raifons; ce qu'il y a de eer«£, c'eft que par Ik nos Ancétres ont acqms Wne gloire beaucoup plus folide * bande* Efpagnoles s'empa,erent de Bmren tt d'0«^^r,&ce qui fait horreur, les habx  C 77 ^ tans de ces deux villes furent maflacrés, fans diftinétion d'&ge ni defexe; pour des héros de cette efpece, ce n'étoit pas aflez de vaincre; les lauriers, pour leur plaire, devoient être arrofés de fang; les progrès des Efpagnols furent fi rapides, qu'orange, malgré fa valeur, ne trouvant nulle part des fecours fuffifans, perdit courage, & fans doute les larmes auxyeuxj propofa aux Beiges de mettre le feu aux mou« lins & de percer les digues, pour rendre le pays inhabitable aux ennemis, & d'aller avec fein* mes, enfans, & tout ce qu'on pouvoït trank porter de meilleur, chercher un afyle plus fik au dela des niers ■ ■ ■ — repréfentez-vous, mes Enfans, 1'abattement des Beiges, a une telle propofirion, de ia part de celui, en qui, après dieu, ils mettoient toute leur confian» ce! 1 11 ■■' cependant les affaires cbangerent bientót de face; requesens mourut & le Confeil d'Etat s'empara du gouvernement gé,néral; les Soldats Efpagnols fe mutinerent fante de paiement, & tout fut mis en défordre de leur cóté, ce qui rendit le courage aux nètres, & ne contribua pas peu h faire conclurre 1'al < liance dont nous avons parlé plus haut, & qui efl eonnue dans l'hiftoire fous le nom de PaeifiG4  C ;B ) tttion de Gand> paree qu'elle fut fignée dans cette ville. S'il n'y avoit pas eu alors des partifans de YEJpagne dans le Confeil - d'Etst, lesProviriCCS Belgiques n'auroient pas été arrofées de tant de fang humair.; philippe le prévit, & il écabüt Don jean d'autriche, fon frere naturel, en qualité de Gouverneur k la place de bequesens; ce nouveau Gouverneur contraignit quelques Provinces k rentrer fous l'obéiifance du Roi; mais Ia Hollande & la Zélan* de tinrent ferme; cependant fes fuccés furent de courte dusée; il devint fufpeét & odieux, & on rentra dans le parti d'oitANOs: Don jean fut déclaré ennemi de h Patrie, & la gouvernement des Provinces fut confié de la part des nötres k mathias, Archiduc d'Att. triche; Amfterdam même, qui jufqu'alors avoit été portée pour YEfpagne, fe rangea alors du coté des Etats, ce qui enhardit tellement les Proteftans, que le sódeMai, 1578, la popu* lace de cette ville enleva i'Officier de Police & les Magiftrats de l'hótel de ville, les fit conduire entre deux rangs de Soldats, jufqu'k 1'endroitsappelléV^^. les y fit embarquer,& tranfporter jufqu'au St. Anthouys Dyk, oü ils «Uvoient être débarqués; on ne fit que ener  M   ( 79) fur leur paffige, qu'il falloit les conduire h fa potence, a la quelle ils en avoient fait attaché? tant d'autres," cette démarche infenfée fe trouve repiéfentée en petit, dans la planche ci|öinte,fous la quelle j'ai mis ces deux vers pour Vous le rappeller plus prcmptement. Amfteldam fe de'clare; & tout le Magiftrat» Par le peuple en fureur eft chafle du Sénat, ' Peut-être, mes Enfans, êtes vous furpris, en y réfléchilTanr, que je traite cette démarche infenfée z écoutez ce que j'ai dit ailleurs fur cette matiere: „ Toute réforme qui ne peu? ?a s'opérer par la conviéHon, ne peut fe prévaw loir ni de fon autorité, bien moins encore d'un fecours furnaturel, ni par conféquent „ d'une approbation divine: toüte violence efl a, contraire \ 1'Evangile, qui ne refpireque la „ charité & la concorde: Allez prechez 5, Vévangiïe, dit jesus-christ a fes difci„ pies; mais il n'ajoute pas; vbtla une e péa, 9, fervez • vous en pour f o r c e r les incrédules & fe convertir. Cependant la réforme faifoit tous les jours de nouveaux progrès, les Etats regurent quelques fecours; le Duc 'd*J'njbu9 frere du Roi de France, fut déclaré protecieur des Pays-bas; fur ces eutrefaites, Don jean raburut, «  C 2o ) fa rn e se, Prince de Parms, Tut riommé de la part du Roi pour lui fuccéder dans le gouvernement; il rétablit l'autorité chancelante des Efpagnols dans les Pays.bas, & en détacha beaucoup de notre parti; ces circonftances & d'autres out certainement donné lieu au traité d'allianee oukl'union.qui fut conclue^Utrecht en 1'année 1579, & qu'on regarde avec raifon comme le fondement de la liberté des Pays bas nnis, Ütrecht volt dans fes murs fe former ce llen , De notre liberté Ie p!u3 ferme foutien, Ce traité fut d'abord fignl par les PlénipOi tentiaires de c'mq Provinces, favoir par ceux de Gueldre, de Hollan ie, de Zélande, d1'Utrecht, & de Groningus avec les Ommelandes; cependant il fut enfuitfc figné par plufieurs villes. : Les grands fo.irevemens, 1'effufion de fang, la prife des villes, la deftru&ion des images hviToient encore notre cliere Patrie en proie aux plus grands maux; le Roi ne refpirant què vengeance contre o range, publia contre lui en 1580 un éüt de profcription, & mit fa tête a prix pour 253ooo écus d'or; oui, oui, mes Enfans, c'étoit la le fort deftiné au fondateuf de la liberté des Pays bas; & p'üt VDIEU    ( 30 que la vengeance s'en füt tenue a cette profcription! mais non! le prix exceffif, au quel on avoit mis le fang de ce Ptince, fufcita des alTaffins; (jufqu'oü 1'homme ne peut-il pas tomber hors de la grace de dieu!) plus d une fois on t&cha, mais inutilement, de le faire pé« rir; k la fin le traitre gehard réuffir; k finftant ou. le Prince, qui étoit k D. lftt fortoit de table, il lui tira au travers du corps un coup de piftolet chargé de trois balles — Vous pleurez, mes enfans! ó tournez ces yeux baignés de larmes vers la planche ou ce meurtre eft repréfenté, & fentez tout ce que des cccurs généreux peuvent fentir: trC.Tii i Batave! un mor.ftre immole en fa furie, Le Prince a qui tu dois ta liberté che'rie. 5, Dieu! aye p'tie de mot & de ton Qauvre „peuple!" s'ecria orange, fe fentant frappé; en effet ce pauvre peuple perdit beaucoup par fa mort —-- fon affaffin fut arrêté ■" le Clergé lui avoit promis le Ciel, s'il ótoit la vie au Prince d'Orange , & ce traitre difons miaux , eet aveugle, digne de compaffion,fe fioit tellement fur cette promeffe,qu'att milieu des plus affreux fupplices; (car on lui arrachoit les chairs avec des tenailles ardentes)  C 82 ) il dit encore: „Je rais monter au del, ë? feryi% „ aux hemmes ti'intercejfeur auprès de dieu." — En réfléchHïant fur ces paroles,n'y trouverons* nous pas fujet d'en conclurre que oer ar d fut plus fuperftitieux que méchant? n'en, foyez poirt furpris; la fuperfütion opère dans 1'homme les changemens les plus fürprenans* en avancant dans i'lfifloire de la Patrie, vous n'en trouverez que des preuves trop claires. Tiois ans avant ce déplorable événement, (1581 ) on avoit par un placard déclaré puilip te déchu de la Souveraineté; anjou avoit été fait Seigneur des Pays-bas; bientót il afpira a la fouveraineté & fit voir par )h qu'il n'étoit pas ï'homme après le quel les Beiges foupiroient: le Comte maürice prit la place de fon Pere, après qu'il eut été affaffiné, & fe comporta en tout, comme un guerrier plein de 'bravoure; cependant les circonftances étoient encore trop critiques, pour qu'on ofat efpérer de fe déüvrer par fes propres forces. On offrit la fouverainhé a la France, qui la refufa; VAngleterre en fit de même, cependant elle envoya ici leicester avec un fecours de 5000 hommes; mais qu'en réfulta- t il pour vos Ancêtres. mes Enfans ?. finon qu'ils appri- "... x» . rent  C *3 ) tent qu'en Angleterre il naiflbit aulfi de mécha-is enfans ■ bientót leicester fongea a augmentcr fon autorité, il tAcha de fe rendre maitre par trahifon des principales villes, entre autres d''/tmflerdam, oü il échoua; mais il n'en fut point rebuté: voyez fur la plancheci jointe Ce qu'il entreprit enfuite, & lifez quel en fut le füccès: Vers Enkhuifen Leicestre alloit porter fes pas , II re$oit un avis, & n'y pe'netre pas. Les Frifons, & qui il voulut enfuite rendre vifite, lui écrivirent pour lui faire rebrouffcr chetnin; il vit donc i'impofïïbilité de parvenir è fes vues, & craignant que les vertueux Bataves juftement indignés, n'en vouluflent b. fa vie, il retourna en Angïeterre, en Tan 1587. On voit par plufieurs circonftances que les Beiges commencoient dès-lors a devenir formidables aux Efpagnols, & que les pertes que ces derniers foufTroient de leur part, étoient beaucoup plus confidérables que celles qu'ils pouvoient eux-mêmes leur caufer; le Batave avoit déja des raifons de fe flatter, que la Providence approuvoitf fes démarches; 6 comment céa penfées doivent-elles avoir agi fur leur* H  C ?4 ) efprits! quelle douce efpérance ne doivent-elles pas leur avoir ir.fpiré! 1 1 En 1'année 1588» philippe ne refpirant que perfécution , équipa une flotte formidable, 1 Ia quelle il eut la vanité de donner le nom „ mine, par des humeurs putrides, & des dou„ leurs afïreufes dans fes membres & dans fes ,» reins; les médecins pyant ouvcrt fes uïce„ res, il n'en fortit que des poux, & une n puanteur que perfonne ne pouvoit fuppor„ ter" "■ „ ii dut refter cinquante trois jours couché fur le dos, & huit jours avant „ fa mort, on lui coupa le pouce de Ia main „ gauche, pour anêter les pro&rès de la gan« „ grcne." jt, Un hiftotien rappoi te (c'eft ce que je dois  C 87 ) encore ajouter) ,:que fentant approcher fa fin, ,, il fit venir fon fils, & lui dit: Voyez en ma perfonne ce que feil que la grandeur de ce „ monde ; voyez en moi un océan de miferes ;tout „ fecours de la part des hommes efl perdu pour „ wol;" alors il fouhaita „ de nVtre jamais né „ Roi,mais le m-dndre berger de 1'Efpagne, ou 9i d"avoir été étottfé h fa naiffanc-, Philippe-trois fuccéda a. fon Pere; non pour traiter les Pays bas avec plus de douceur, mais pour les attaquer avec des forces plus confidérables; cependant une affaire importante «néantit fes projets; di k u s" étoit déclaré pour les Bataves, & c'eft \h fans doure un obftacle au defpotifme le plus abfo'u; oui, tnes Enfans, fi dieu efl. pour nous. qui fera contre nous? les finances de YEJpagne étoient auffi épuifées; & 1'argent eft cependant le nerf de la guerre; les loldats Efpagnols fe mutinoient faute de paiement, & les Pays-bas fe fortifioient de plus en plus; ils avoient fait un traité avec la France & YAngleterre, & avoient par conféquent été reconnus comme un peuple libre par ces deux pu'flances; on avoit érigé une Compagnie gér.érale des Indes-Oriëntale* , & ctaaque )Ottt ils remportoient de nou* H 3  ( 88 ) veaux avantages; philippe trois craig«oit les defleins de la France; & le concours de toutes ces circonftances lui fit defirer la paix; cependant les Etsts voyant alors le cours favorable que prenoient leurs affaires, ne vou« loient entendre a aucune propofition de paix, que fous la condition exprefle que YEfpagne les ïeconnoitroit comme un peuple libre — quand on eut fatisfait k cette demande, on conclut d'abord une fufpenfion d'armes pourhuit mois, & peu de tems après une treve pour douze ans» Voila donc notre Patrie, après tant de calamités, devenue un fujet d'admiration pour tous les Potentats ; le Sultan de ce tems-lk, amuraxh trois, fut un de fes plus grands admirareurs: C'*/? oie u.s'écria-t ■ il,cV/Z dieu qui protégé a Pays. Cependant cette treve fut une des caufes qui firent que barneveld perdit fur l'écbaffaut une vie déja fi avancée; maurice, plein de courage, éioit porté contre la trêve, il aurolt roieux ?imé poufier la guerre ; barneveld au contraire étoit porté pour la treve; il fut sulS foupconné d'avoir »fU des préfents de la france: ce ne fut pas tout; k peine les Beiges ■Öuiiés avoient- & lepris ha-teine k reccafion de  I S9 ) 3a treve, que des diffërens au fujet de k ReH» gion, la Religion de je sus, une Religion de charité' & de pais, mirtnt tout en défordre; la doclrine d'ARMiNius intrigua le Clergé qui ne tarda pas & former deux partis; le premier .s'appllla celui des R inontrans, d'après une Re» montrance qu'ils préfenterent aux Etats de Hollande; & leurs adverfaires s'appellerentCowifr^remontrans; la querelle devint fi vive, qu'on pilla en plus d'un endroit les affemblées des Remontrans; leurs Prédicants furent eraprifon» nés; maurice, qui tenoit pour les Contreremonftrans, defiroit que les différends fuffent examinés & réglés par un Synode national, BARNEVEtD étoit conue le Synode, & vouloit qu'on fe fervit de moyens plus doux; cependant le defir de maurice fut accompli; le Synode s'affembia h Dort, & 'es Remontrans y furent condatnnés on a joint ici une re- préïentation de cette nombreufe affemblée;, vous ferez contrahits d'avouer dans la üiite, mes Enfans, que j'ai eu taifon de placet ces deux vers au deffous; Le Synode, afTembfe' pour finir les queretles, Escite dans Dotdtecbt des difpute* nwveUes» H 4  C 90 ) " L'inimitié fut portéetrès loin entre maurice & 1'avocat barneveld » & cequi 1'augmenta encore. fut la diveifiré de leurs fentimentsap fujet des milices (appellées Waardgelder*) a entretenir dans les villes de laRépublique: maurjce regardoit ces milices comme plus a craindre que les chd~ teaux SEfpagne; le tout fe tertnina, comme il a é é dit, par la mort de barneveld, qui fut condamné a. ptrdre la tête fur un échaffaut: quand vous ferez plus avancés en age, mes Enfans, je vous donnerai d'autres détails fur les circonftances dans les quelles fe trouvoit alors iiotre Pays; tout ce que je puis vous en dire a préfent, c'eft que jacobi, hiftorien moderne qui a écrit en Allemand, & qui a entrepris Pa, pologie de la Maifon d'Orattge, dit, en parlant de la conduite que le Prince maurice a tenue dans 1'affaire de barneveld, que Hmperf:èstnn humaine y eut quelque part. „Je „ voudrois du moins favoir pourquoi je dois „ perdre la vie;" écrivoit barneveld a fon Epoufe; & lorsqu'il fut monté fur féchafTaut, il s'adrtlTa au peuple , en difant: Citoyensl j, ne croyez pas'que je iois un traitre l la Pafi trie ; en événement; la ville pria fon Altesfe par la bouchede Mr.h uydecop e r van marseveen, de ne point approcher davantage , qu'autrement onfe feiviroit des armes qu'on tenoit de die u & de la Nature; en même tems on inonda une partie de la Campagne k une hauteur confidérable; le Prince fe trouva fort enibarrasfédu mauvaisfuccés de fon entreprife, car il ne fe propofoit pas de faire la guerre k cette ville, mais de la furprendre; l'afFdire fe termina cependant par un accommodement; & les freres BiCKER,dontPun étoit ancien Bourguamaltre & 1'autre Bourguemattre régent, eurent la générofité derenoncer, a. la demandedu Prince, volontairement & pour toujous, k la ré>gence; fon AUesfe fatisfaite de cette renonciation fe retira — eh bien, mes enfans! un tel événement, au centre de la République, n''étoit- il pas bien affligeant, après avoir acheté la liberté auprixdetantdefmg? dansunkge plus avancé, vous apprendrez k 1'aprécier — je quitte ce point d'hiftoire, pour pasfer a celle des troubles, qui après la mort de güillaume secon d, agiterent ces Provinces au fujet de fon Fils güillaume trois, qui étoit né huit jours après la mort de fon pere: les fentiments U  C 100 ) étoient partagés fur la fuccesfion; en même tems cromweli dont nous avons déja parlé, fit la guerre aux Etats, & ne leuraccordala paix, que fous promesfe, qu'ils n'éiiroient jamais le jeune Prince ni aucun de fes dcscendants pour Stadhouder de leur Provtnce ; cromwel, en qualité d'ufurpateur de la Couronne d''Angleterre, n'avoit rien de bon h attendre delamaifon tfOrange, en cas qu'elle devint puisfante, parceque la Princesfe tfOrange étoit Angloife: c'eft ce même adle (Texclufnn qui a été la première caufe du fort déplorable des freres de witt, fur qui on en rejctta 'a faate. Cromwel mourut, & fon fils lui fuccé da, tandisque les Etats, faifoient dans le Nord une guerre vigoureufe, ou nos M2rins combattirent en héros; cependant on ne pouvoit cesfer d'a voir en même tems les yeux fur l'dngleterreen proie aux rebellions; fur tout lorsqu'etj 1'année 1659, le Parlement fit remonter fur le thróne char* les second, dont le pere avoit été décapi« té — combien i'état des affaires, tant au riedans qu'audehors, peut- il devenir embarrasfant pour des Magiftrats qui ont a coeur le bien-être du Païs & de leurs Concitoyens! — que de reis Magiftrats vousfoient toujours chers, mes enfans 1  C 101 ) & s'il en efl de moins bien intentionés, priez pour eux; c'eft dieu qui les changek fon gré — fe révolter contre eux, c'eft expofer Ia Patrie. Charles second fe trouvoit k Breda, lorsqu'il fut appelié au tbróne d'Angleterre, & ce fuc la qu'il s'embarqua pour pasfer dans fon Royaume j il avoit iecu en Hollandc les tneillcurs traitemens, mais il fut asfez ingrat, non fenlement pour oublier le bien qu'on lui avoit fait, mais même pour rendre Ia mal pour Ie bien — VaSte a^èxcluflon fut de nouveau anéanti, tandis quelatranquülitérefla troublée aufujet de fédueation du jeune Prince, ce quicontribua knourrir la haine qu'on avoit concue pour les freres pe w itt — cependant les Etats obligésdans le même tems deréprimerlespirateriesdes Al gé* rlens , eurent lechagrin de voirl'Angleterres'attribuer 1'empire des mers, & refufer de faluer leur flotte en hbfant le pavillon: ce ne fut pas tout, les Anglois nous infulterent en mille manieres, & charles finit par déclarer la guerre k fes bienfaiteurs: les Frar.gms prorntrent du fecours auxErats, mais ils s'en linrent^ la promesfe : les Hollandois fe conduifirent néanmoins, d'une maniere digrc de leur origine, & charles vit bien qu'il avoit a faire a des héros , fur tout  C 102 ) dans un combat naval qui dura quatre jours entiers, & qui fit de la nier le théütre duplushorrible carnage: de ruiter, tromp & d'autres héros fameux y triompherent, mais ce triorcphe couta des flots de fang — la planche ci-jointe'pourra vous donner une idéé de ce combat terrible, qui fe donna en i'annéeiöööt Le Beige met un frein a 1'orgueil des Bretons, Et dans des flots de fang il venge fes affronts. Cependant les troubles intérieurs alloient toujours en augmentant, onpousfal'accufation portée contre ie Confeiiler Penfionnaire de witt, par ce qu'il pasfoit pour partifan de la France, & qu'on avoit alors des affaires avec ce ïtoyaume; particuüeiement au fujet des prdtenrions de Ia Cour de France fur les Païs- bas Efpagnols,foiidées fur ie mariage du Rei avec une Princesfe du fang tfEfpagns : de witt étoitdailleursfoupconné d'être 1'antagonifte de la maifon d"Orange, & le piincipal obftacle qui empöchoit qu'on n'élevAt güillaume trois aux dignités de fesprédécesfeurs: on ne tarda pas a corjfpirer contre fa vie :1e 21 de Juin de fan 1672, il Jut attaqué la nuit par quatre perfonnes, qui le blesferent au point, qu'il fut olligédegarderJelit pendant  C 103 } pluileurs feraaines; cependant, mes enfans 1 la haine atroce ne fe contenta pas de eet attentat; dès que le Prince fut en effet parvenenu aux dignités dont nous avons parléjl'averiïon qu'on avoit pour de witt alla en augmentant; & fon frere, le Ruwaard de Putten eut part k fon fort: le Confeiller Penfionnaire refutah lavérité les accufations qu'on accumuloit contre lui; il fut même déclaré innocent par fes juges; mais cela fuffit-ili quand 1'efprit de vengeance s'efl: emparé de la multicude? — non, fans doute; la populace aveugle méconnoit tous les droits ; nous ne favons que trop fouvent éprouvé, & notre fiecle en porte les marqués les plus triftes: corneille de witt, c'étoit le Ruwaard, fut accufé d'avoir atienté a la vie du Prince; il fut faifi & appliqué k la torture, mais fansrien avouer; après quoi il fut confiné dans la prifon de la Hdye: le Grand-Penlionaire, qui s'étoit déja démis de fes emplois, fe rendit unjour dans la prifon; on lui avoit dit que fon frere 1'avoit mandé; mais ce n'étoit Ik en effet que le fignal de la plus affreufe trahifon & du plusnoircom» plot; car k peine les deux freres étoient ilsenfemble, que la populace, femblable k la mer en courroux, fe précipite vers la prifon (le aoAoAt  'C 104 ) 1672) en criant: cuxarmss! au meurtre ! trahU font le géolier fut contrahit d'ouvrir la pone, & alors ó mes enfans! épargnez moi leiécit des horreurs qui furent commifes fur ces deux freres! 1'humanitéen frémit, & je ne puis que verfer des hrmes, en fongeant k quelles horreurs peut s'abandonner Phomme dailleurs fi noble & fi grand — les deux cadavres furent pendus a une potence, & on porta les mauvais traitemens jusqu'k les mettre en pieces. Le meurtre des de witt nous montrc les horreurs Dont eft capable un peuple aveugle en fes fureurs. Cependant la haine qui ne s'exhale point au dehors,va plusloin encore; finous encroyons certain écrivain, un Prédicant, appellé simoNiDES,prêchantle lendemain de cemasfacre, dit, que c'étoit un coup de la vengeance du Ciel, & que, loin de punir ceux qui y avoient eu part, on devoit plu tót les récompenfer—quel affreux discours! quel monftrueux attributprêté k un dieu de charité & de clémencel — auriez» vouscru, mes enfans, que votre Patrie , que vous chérisfez tant, & pour la quelle jevoudrois vous infpirer encore plusd'amour,aitnourri depareils monftres dans fon fein? — 6 que je voudrois s'avoir a vous peindre que des braves — des    C 105 ) Bataves dignes de porter ce noml — mais je dois rendre hommage k la vérité — quel'exetnple de ces raéchants ferve a éclairer votre enfance; plus vous vous attacherez k la vertut plus vous vous rendrez dignes de votre patrie; k cóté de ce fombre tableau, votre droiture & Phonnêteté de vos moeurs frapperont les yeur d'un éclat plus vif. Ces Provinces encore ébranlées au dedans par les fuites d'un attentat fi horrible, avoient k foutenir au dehors la guerre contre la France & VAnghterre. (dieu fit furvenir tout k coup un dégel, qui forca 14,000 Frangais prets k tomber en Hollande k rebrousfer chemin): on conclut en 16741a paix avec 1'ingrat charles; mais la guerre contre louis fut contiuuée, jusqu'en 1673, que la paix fut conclue. Cependant les Pays bas n'eurent point de repos: en 1684 , Ie Roi tfAngleterre fe déclara ou* vertement pour la Religion Catholique, démarche dont les fuites parurent effrayantes aux Protestans de ce Royaume; ils appellerent h leur fecours güillaume trois, qui avoic époufé une- Princes fe dyAngleterre; & fon Altesfe fe rendit. k leurs prieres, du corfentement des Etats; il pasfa en Angleterre en Pannés K  C 106 ) 1688, avec une flotte formidable, cotnpofde de 61 vaisfeaux de guerre, 100 flutes, óopingues, 10 btülots, & ai,coo hommes, outre quelques millions d'argent; ce qui prouve asfez que cette expédition n'eut lieu que du confentement des Etats: Güillaume aprés avoir confulté les Etats, Va foustraire VJnglois au joug de fesPrélats, Cet événement, quelque glorieux qu'il fut pour la maifon dCOrange, ne laisfa pasd'être unefource de troubles pour notre Pays; cepay^ presque toujours impliqué dans les événemens du monde entier, parceque, comme une Répu. blique, dont il n'y 3i point d'exemple , il a affaire avec toute la Terre : le Roi d1'dngieteire occupoit parmi nous des charges trop importantes, pour pouvoir rester indifférent de part & d'autre:les Hollandois qui fe trouvoient cn Angleterre fe plaignoient même d'être traités plus durement qu'ils ne 1'avoient jamais été, ce qui ne caufa pas peu de mécontentement ici: la guerre avec la France duroit encore; on étoit engagé dans d'autres différents; & ces Provinces confervoient leur formeaccoutumée, celle d'un Etat en proyeaux troubles, jusqu'en 1'année 1697, quela paix avec la France fut  C 107 ) concluc a Ryswyk, aprés qu'on eut livié un grand nombre de combats'fur terre & farmer, & fait coaler des ruisfeaux de fang humain; cependant cette paix ne dura que quatre ans; encore nos ancêues fa virênt ils troublée par un foulevement des «anfpreekers, au fujet de quelqje arrangement fait pour les enrerremens; & par un froid excesfif qui fit hausfer le prix des vivres q.ioique cette difette fut fuivie peu de tems aprés des bénédicl'ons du ciel, de forte qu'en 1700 , on prit en un jour i6o,ooj merlaus k Hatwyi, & qüi pour 20 fous da poisfon on ragala un jour entier 150 enfans dans la maifon des orphelins a Leide, Les opérations militaires, ravagerent encor* le Pays, jusqu' en 1713, que la paix fut de nouveau conclue a Utrecht, Cependant gui llaume trois étant mort, cinq Provinces, lavoir: la Gueldre, la Holiande, la Zeelande, YUtrcchf, et VOverys'el prirent le parti de fe pasfer de Stadhouder; les Provinces de Frife % Groningue & Drenthe, élu.-ent en cette qualité jsan güillaume Fitiso, héritier de güillaume trois: friso fe noya mal» beureufement au Moerdyk, & laisfa futi Epoufe enceinte; elle accoucha huit femaines ap;és de K. 2  C 108 ) cuillaüme quatre, qui devint en Stadhouder de toutes les Provinces Unies» Vous vous attendez fans doute; mes er fans I que je vous dirai, qu'au moins jusqu.es h ceite époque votre Patrie a joui d'un douxr pos! — ahl que ne puis-je en effet le direl mais bien loin de la; elle comïnua d'être un théètre de divifions quoiqu' elle jouit alors pour la première fois d'une paix qui dura vingt cinq ans; mais de quelles cahmkés ne fut - elie pas accah'iée au dedans? — des inondations ; cn 1715 une épidémie parmi k béiaii; en 17201a peste qui fe fit fentii a AnfteVam pendant plufieurs femaines de fuite, & qui enleva fix k fept cent habitans; en 1717 un fuiieux ouragahfitperdre la vie k plus de a,coo perfonnes; en 1732 nos digucs furent entamées par des veis deftruéteurs, qui en pe votre bonheur ne fera point troublé. Le 8 de Mars 1748 nftquic güillaume piNQ, &pe« «Prés fa naisfance le PeuPlef    C ui ) fouleva en Fnfe au fujet des fermitrs, & le Feu de la discorde , comme il arrivé toujours dans les mouvemens popuiaires, fe répandit ausfi daas d'autres provinces: le peuple exigeoitouvertement deux cbofes, 1'abolition desfermes& la révocation du droit de fuccesfion au Stadboudérat: dans les villes de Hurlingen, Groningtte, Leyde, la Hnye, timfietiahi &ailleurs, cesprétentions furent appuyées par le pillage ; & la crainte qu'on eut des fuites (car quel Régent ne craindroit les ordres de la populace, étnanés d'un déüre fougueux & dont la publication est accompagnée de coups depoing, de batons & de pierres) fit qu'on accorda cette doublé demande — de nouveaux mouvemens eurent lieu au fujet des emplois & de la cesfion du produit des postes au Tays: ce tems- lk fut 1'époque des reclamations féditieufes : raap & fes adhérans f'asfemblerent k Amfteldarn dans le Kolveniers D9slens pour opérerun changement dans la Régence, k quoi ils parvinrent en effet; en un mot ce fut un tems de discorde & de trouble, quoique dans le cours de la même année on conclut avec la France, un traité de paixqu. tout d'un coup priva loüis de toutes fes fanglantes conquête». Le Stadhouder déclaré hé» K4  C m ) réditaire n'eut pas reu de part k tous ces démêlés; cependant il ne furvêcut pas longtems J Ia pac'.fïcation qui les avoit termirés; car il fut retiré de ce monde le 22 Octobre 1751, HA de 40 ans & 52 jours: a pcine fut• il moit, qu'en fuite du nouvel arrangement fait en faveur de fa postériié, fon Epoufe fut admife a prêter le ferment en qualbé de Gouvernante de la Répubüque & de Dépofuaire de Ia tutelie du jeune Stadhouder, güillaume cin q; cette cérémonie est reprefentée fur la planche cijointe. Après avoir promis & fes foins & fa foi, Anne fie^e au confeil, & fait régnerlaloi. . L'Etat ne jouit pas de beaucoup de prospéri. té fous la régerce de la Gouvernante; en 1755 nous eumes a esfuyer les fureurs de la mer, notre ennemie naturelle; & cette inondation fut fuivie d'un froid ïigomeux: 1'Eglife n'étoit pas non plus exempïe de iroubles; en 1756 un prédicant, apellé j u n g 1 u s, qui avoit 1'efprit troublé , voulut fe faire pasier pour leMesfie; la même année fut enccre marquée par une inondation, par ia rigueur de l hyver, par la cherté excesfive des vivres, & 1'épidémie parmi lei  C "3 ) bestiaux: le penchant des AngloU a la pinrerie porta des coups fenfibles k notre commerce , en 1758 le bras de dieu, s'appefantit encore fur nous par une maladie qui enleva beaucoup de monde; h toutes ces calamhés je pourrois en ajouter encore beaucoup d'autres, qui, qucique moindres en apparance, ne laisferent pas d'être bien fer.fibles k ceux qui en furentatteinis; mais je les pasferai fous filence, mes chers enfans! pour ne pas tróp vous afihger, d'autant plus qu'il me reste encore a vous retracer un fpectacle douloureux — dieu fembloit avoir abandonné ce Pays, & peut- être pourrions • nous découvrir les caufes de fon courroux; cependant j'aime mieux vous exhorter a le prier fincéreroent de ne pas nous abss* donner plus longtems; les prieres, avotrekge, font finceres, & elles Lui font toujours sgréab es, Son Altesfe Royale Madame la Princesfe tfürange mourut le 12 Janvier de Pan 1759, aprés quoi le Duc louis brunswyk wol* Fünkuttel, Feld-Matécbal de la Républtque, fut admis è prêter le ferment, comme repréfentatit fon Altesfe Sérénisfime, le jeune Prince güillaume cinq, Stadhouder héréditaire t riontil étoit Gouverneur: j'aurai encore  C h'4 "> Keu de vous parler deee Duc, & ceneferapas, héias! pour vous faire !e récit de circonftances favorables au Pays que nous habitons. Quoique depuis cette époque i! fe foit pasfé quelques années, fans que ce L-ays eut 3 Uuter contre des calatniiés publiques, ii ne (ut pourtant pas tout a fait exempt de ces maux, qui peuvent être placés dans un degré inferieur, paree qu'ils fe font plutftt fentir ï des villes psrticulieres, qu'au Pays en générai; il faut ceptir dant excepter de cette clasfe le détriment porté aux forces de 1'Etar par les Corfaires de France & d'Efpagne, par les Pirates de Barbarie , & furtout par les violences qu'exercerent les An. glois, & dont les événemens de 176a ne nous effrent que trop de preuves. Güillaume cinq ayant atteint en 1763 fa quinzieme année, obtint feance dans Pasfemblée des Etats Généraux; en 1766, 1'époque de fa majorité fut célébrée par une joie univerftlle; 1'année fuivante, fon Altesfe fé è. nisfimeépoufa fre der iqur sophie gUillel mine, Princesfe de Prusfe, alliancc au fujet de ia quelle j'ai cru devoir dire : En époufant Orange, une iiluftr: Pfmeësfe, Au Batave né libte, engage fa tendresfe.    C *Ï5 ) Quelque tems après la conclufion de ce manage, les Illustres Epoux firent le tour des Provinces, & dans cette occafion villes & villages fe disputerent k 1'envi la gloire d'avoir célébré leur arrivée par des rejouhfances &des marqués d'honneur — mes enfans! repréfentezvous ces témoignages d'une joie univerfelle, que vous n'avez point vus, k cóté de tout ce qui vient d'arriver k ces illustres perfonnages, & dont vous avez été les témoins; & ce fera pour vous la preuve la plus fenfible del'inconftance des chofes d'ici - bas; apprenez de lk kne point mettre votre efpoir dans ce monde, mais k le corifidérer toujours comme fujet au chan» gement: DiEufeul est immuable; remettezvous entre fes mains; alors vousbkurez fur un rccher inébranlable; car lifaitfervir jusqu'k Fin* ftabilité des chofes de ce monde au profit des hommes. La planche ci - jointe vous repréfente 1'événeraent funeste, qui en 1775 affligea notre chere Patrie. La mer s'enfle : je vois nos digues entraine'eS, Nos cite's en dangcr, nos moisfons ruïnceS. Quatre ans après ce debordemem(i779)rannée futfi favorable, que quelques arbres pocte*»  C Ut* ) rent des fleurs jusqu'fc deux fois; cependant les grandes chaleurs & la longue féeheresfe qui furvinrent en méme tems, occafionnerentbeaucoup de maladies: ,, C'est ainfi," avons-nous dit ailleurs, „ que la fagesfe divine tempere tou~ ,, jours f» bonté inappréciable par quelque légere calamité , pour empèeber les hommes trop j, facile a fe laisfer féduhe, de s,écarterentiére• ,, ment de Lui & de devenir ainfi la proie de la j, corruption." L'année fuivante vit s'allumer la première étincelle de tous les troubles déplorables, qui n'agueres ébranioient encore notre Pays ; & certes,les pistes qu'ils lui ont faites ne fontpns encore entiérement guéries. Leurs Hautes Puisfances., ayant en vuëlebien du Pays, confentirent a une neutrajité armée, dont catherine, Impératrice de toutes les Rusfes, avoit formé le projet; cette démarche aïgrit tellement les Anglois, qui n'étoient pas bien intentionnés pour la République, qu'ils iui déclarerent la guerre, fons prétexte qu jls avoient été infultés par un Plan préliminaire d'aliiance avec les Colonies de V Ameri que fep tent rïonala, quis'étoitfoulevées contre les Anglois leurs op-, presfeurs, ce pïan ayant été dresfé par la ville ÜAm-  C n7 ) tfAmfteldam: tandis que les Chefs de cette République préparoient un contre-manifeste, les Anglois fe hè terent d'enlever & de piller nos navires marchands , qui n'étoient pas encora inftruits de ces demêlés , au nombre de plus de deux cent, dont ia perte fut évaluée k quinze millions: repréfentez vous, mes enfans! les fuites que dut avoir cette conduite; plufieurs bons nêgociants furent ruïaés d'une maniére criante; il n'y eut point de vrai Batave qui ne fe fentitanimé d'un noble defir de vengeance, qu'aiguillona encore la nouvelle, que Ie fameux nfuipateur Anglois, PAralral rod ney, avoit envahi les iles de St. Euftache, de St. Martin.' & de Seba% & enlevé fur nier au dela de 150 büLimens: ce qui infpira encore plus d'horreuc au Bataves, dont Ia droiture est connue, fut, que les Anglois s'étoient mis d'avance en érat de commettre ces pirateries ; car au moment oü rodney les comtnenca , on ne pouvoit pas encore être informé de la déclaration de guerre. Comment le mal caufé par une fi noire peifidie , fut réparé, c'est ce que j'ai ex* priraé dans les deux vers au bas de la planche ou ce fait est repréfenté, L  C "3 ) Saint Enfiocbe, force dc céder mxAnglah, Nous eft bientö: après rendu par les Francais Oui, mes chers enfans! telle fut la conduite digne d'éloges que tintent les Praneois — combien cette conduite est différente de celle des Anglois! comparez, & choifisfez; 1'honnêteté, la générofité conviennent furtout a votre charaaere national, &, graces a dieu! 1'expérience me prouve de plus en plus que tel es* ausfi le penchant de vos jeunes coeurs. La perte de ces colonies jointes aux autres uïurpations que firent les Anglois, ne tarderent pas * exitcr des murmures; on fe plaignit de négligence & d'inaaion de la part du Stadhou» der, &l'ou en rejettoit la faute fur 1'influence pernicieufe du Duc de wolfenbuttel, dont je vous ai déja parlé; Amjleldam adresfa 3i ce fujet un mémoire au Stadhouder, 6: le Due s'en plaignit aux Etats Généraux; leurs Hautes Puisfunces le déclarerent innocent, & délibérerent fur les moyens de réprimer les auteurs d'une infinité de libelles & de diatribes qu'on lancoit de toutes parts contre le Duc; mais celuici ne fe contenta point d'une pareille décla, radon, paree qu'elle n'avoit point été précédée des recherches convenables - cette affaire fit  C ti9 3 iiaftre encore plufieurs autres ircidents j on produifit ent;e autres un acte (ie confultation, pasfé entre la Stadhouder & le Duc, & Fon feut faire enforte que ce dernier fe vit obligé' de fe retirer ailleurs; cette retraite excita des Cris de joie, & les auteurs des,^ pamphlets s*en attribuerent Fhonneur — mais ils fe tLOJxupoient, mes enfans ; & qaand ils ne fe feroient pas trompés, nous aurions encore raifon de nous écrier: Sa'et de home, plutót que de gloirel — peut on appeller honnête homme, celui qui est asfez inique, asfez méchant, pour forcer quelqu'un par des reproches & des injures, h quit. ter le pays ou il & établi fa demeure? — ah mes jeunes amisl comportez- vöus toujours raifonnablement, n'accufez jamais peifonne fans fondement, & ne le faites même alors qu' avec décence. Cepemiant leurs Hautes Puisfances fe mirent en état de défenfe; la Compagnie des Indes Orientales fut priée de s'armer, & leChef d'esquadre,zouTMAN,entra en mer avec une flotte de fept gros vaisfeaux de guerre, un pareil nombre de fregattes , & un Coiter; les Anglois vinrent au devant de cette flotte avec autant d'aslurance & de fiertë, que s'ils avoient h 2  C 12© ) été asfurés de la vi&oire; mais cette fierté fat humiiiée: Sur VAnglois lc Batave emporte la vi&oke, JEt feit du Doggersbank un trophée a fa g!oire. La bataille fe donna le 5 Aout 1781 — les |iéros de notre Patrie recurent des honneurs & des iécompenfes, pour s'.être compoités avec tant de valeur; ceux qui avaient été blesfés furent foignés avec zele; mais leur courage & leur triomphe ne rétablirent pas la tranquillité^ Tandis que les Etats étoient engagés dans cette guerre, joseph second continuoit \ iaire rafer les barrières , qui étoient fous la gua. rantie de fAngleierre ^alors 1'ennemie de ce ïays) & qu'il foutenoit n'être d'aucune utilité:Leurs Haute s Puisfances choifirent en cette occafion la voie la plus longue, mais ausfi la plus prudente, & ce ne fut pas fans raifon; tandis qu'on faifoit la guerre, au dehors, la discorde régnoit au dedans; on voulait plus d'acYivitét & plufieurs perfonnes furent foupeonnees de trahifon, foup?ons qui s'étendirent même jusques fur la perfonne de Son Altesfe Séiénisfi. me: fur ces entrefaites, fAmérique fut déclalée libre par les Etats , tandis que d'ua auue   L  C Ï2I ) cócé les Anglois continuoient a fe comporter avec la même injustice, fur tout h 1'égard des Franpois: on exigea du Stadhouder des ouvertures par rapport & 1'inaclion dont on fe plaignoit, & les murmures k ce fujet ne s'accrurent pas peu» lorsque Ia France (avec Ia quelle on devoit agir de concert, contre 1'ennemi comniun) ent demandé dix vaisfeaux de Jigne pour Brest, & que ces vaisfeaux ne furent pas expédlés, paree qu'on y trouvoit trop de difficultés & d'obiïariesr rette ofKiire augmenta beaucoup le trouble; les fujets de plainte allerent en c'roisfant; on fit voir qu'nne jurisdlction militaire étoit peu convenable; les recommandations du Stadhouder (car fa perfonne êtoit le but oü tendoient tous les projets) furent déclarées illégales; Dokkum fut la premiere h. fe réfoudre h nommer elle même aux em> plois de ville, & d'autres fuivirent peu a peu fon exemple ; les imputations faites au Stadhouder réjaillirent fur Ia Princesfe fon Epoufe, ce qui engagea fa Majeflé Ie Hoi daPmsfe, k livrer un mémoire h ce fujet; mais on s'étoïr, mis au desftts de la crainte & de 1'autorité. Ou travailloit cependant a conclurre la paix a«ec f Angleterre, ce qui n'empêcha pas qu'on no L 3  C i" ) regardat comme récesfaire d'armer Ia bourgeoifie; on forma même kLeideQi^B^ un corpsfranc , tandis que la bourgeoifie continuoit k s'exercer dans le maniement des armes — autant de fymptomes des troubles qui alioicnt éclater. Un nouveau différent avec 1'Empereur joseph second éclata dans le même tems; ce qui y donna lieu, fut 1'enterrement d'un Soldat dans le clmetiere du Doel, en vertu d'un ufage ancien: l'Empcreur avoit ordonné qu'aucun militaire étranger ne mit le pied fur fon tertitoire, & en corféquence de eet ordre , tous ceux qui asfifterent k 1'enterrement furent arrêtés ; ceux ei, malgré 1'arrêt, fe remitent en marcbe, ce qui fut fuivi de la prife de trois Frsts Jlollandots par les AutricMsnsles plaintes contre leurs Hautcs Puisfances fe multiplioient de jour en jour, & tandis qu'on étoit occupé au dedans k brouiller de plus en plus les affaires domeftiques, on nomma des Ambasfadeurs pour traiter avec 1'Empereur; on mit en même tems fur le tapit un projet d'alliance avec la France, quifutvivementfoutenu par la plupart des Regens &des habitans; on espéroit de recevoir des fecours de ce cóté dans les circonftances    C 123 } qu'on prévoyoit devoir arriver. Les partifans du Stadhouder firent au commencement de 1'année 1784, k Zutphen fir enfuite dans d'autres villes , des mouveraens tumultuetix ; k Rotterdam la populace infulta la bourgeoifie; on exigea 1'abolition des compagnies franches, de. venues déja trés nombreufes; on commenca h porter des cocardes , a donner des furnoms: mes chers enfans 1 quel est 1'homme qui penfe bien,le vrai pntriotc, que les fuites n'aient déslors faitfrémirl — cependant la paix fut fignée avec VAngleterre; mais d'un autre cóte 1'Empereur faifoit des prétentions fur la République» dans les quelles étoit compris le pasfage libre de PEscaut; cette prétention, fut pousfée au point qu'un bdtiment Autrichien fe montroit déja fur cette riviere ; le vaisfeau de garde des Etats, aprés 1'avolr averti plufieurs fois de fe retirer, tira fur lui un feul coup, qui fut pris pour une déclaration de guerre ; de forte que ce n'est pas fans raifon , que j'ai cru, pouvoir dire: Un coup tfré pour infpïrér la peur, Rompt la paix, qui nous tient unis k rErapereur. Les Etats rejetterent, quoi qu'avec ménagé  C 1«4 ) ment, les préte tions de l'Ëmpereur , ce qui donna er.core Kea a plufieurs incidens, tandis que les troubles domestiques augmentoient de jour en jour, de maniere, que la tranquilüté femblolt de plus en plas s'eloigner de notre patrie;le Stadhouder répondit a. la véfité aux sccufations portées contre lui, mais fes \épon» fes n'arrêterent aucunement ni le cours de ces i:nputations9 ni les progrés des efforts que 1'on fa'sfoit pour ciiconscrir© fon amorité: en vain le grand frederic renouvella fes plaintes avec plus d'inftance; fes menaces mêmes furent inutües : tel est 1'hcmme , mes enfans ! quand une fois fes defirs out pris i'esfor , il est imposfible de les réprimer. On avoit fait avancerdes troupes vers Amersfoort > pour intimider le peuple, mais cette démarche ne fit qu'aigrir les esprits, on en corclut qu'on vouloit fe fervir de la force militaire pour étoufter la voix du peuple, & partout on protesta fortement, tandis qu'elle eflfaca de plus en plus le peu d'estirae qu'on avoit coniervé pour le Stadhouder. & que les bourgeois des autres villes prenant plaifir a braver le brits militaire dont on les menacoit, contiuuoient a exiger & \ faire toutes forces de changements,  C 125 ) iurtout dans les charges de la Magifïrature 5 1'Evêché ^Utrecht s'est furtout diftingué, dans ces circonftances. Au milieu de ces troubles, lapais futconclu? avec 1'Empereur, & Falliance avec te France, fut ratifiée la même année (1785) 5 nous avons taché d'exprimer, au bas delaplanchequtrepiéfente eet événement, 1'allégresfe générale .qu-'U caufa dans ce Pays; Le Batave applaudït'a l'heurettfe alliancc, Par la quelle ioüis l'unifc^yec la France, En réfléchisfant fur les circonftances sclueïlef & fur 1'ufage auquel les forces militaires pour*» roient être employées, le peuple qui avoit les yeux 'attachés fur le Stadhouder, penfa aucommandement de Ja garnifon de La Haie, oü Ia rebellion s'étoit ausfi manifestée, & oü les Sieurs gevaarts & gyselaar avoient failli perdre la vie; il s'y étoit formé une Compagnie d'Orange qui fut anéantie; des Magiflrat* qui aimoient Ia Patrie fe réunirent, & les Compagnies bourgeoifes de toute la République en firent de même: peu de tems aprés, le coramandement de Ia Haie fat óté au Stadhouder, on Ie dépouilla ausfi peu k peu de fes autres  éïgriitési i ces cïangemensenfuccéderertd'aiï. tres, qui étoient autant de preuves de la haine qu'on portoit ïi guiuaumk cinq; landis que ce Prince de fon cóté, las de toutes les contradiftions, qu'on lui faifoit esfuyer, quitta la Haye, & alla avec toute fa familie flxer fon féjour a Nimégue4 Pendant ces mouvemens, ce qui étoit arrivé a Hattem & k Elburg, avoit engagé les Etats de Gueldre k y envoyer ausfi Uca troupes, ce qui révolta généraïement les efprits, & fut caufe que quelques Compagnies franches marcherent au fecours de Hattem: ce fut lk fe commencement d'une guerre civile ouverte, & le coup fatal pour le bonheur de la République: c'est ce que j'ai exprimé dans les deux vers fuivants: Dans Hanem éclatta la première étincelle* De ces feitx qu'ailuma la discorde ciuelle. Ceux qui avoient pris les armes, fentirent alors redoubler leurardent, & 1'on ne craignit pas d'appeller les Etats de Gueldre & le Stadhouder k leur tête, les metirtriers de leurs concitoyens; les Etats de Hollande prirent fous leur protcélion les fociétés, qui s'étoient formées pour s'exercer dans le maniement des armes.    C 127 ) La marche des corps - francs au fecours de ces villes de Gueldre, ne leur avoit été d'aucune utilité; il en étoit ausfi parti d'Amfteldam pour Naarden, mais qui n'opérerent rieo; ces mau> vais fuccés n'empêcherent pas cependant qu'on n'allkt au fecours d'Uirecht, lorsque les affaires de cette ville exigerent le fecours des citoyens : cJest le fujet de la planche fuivante; A'mfi le citoyen, au mépris de fes jours, k fon frere en dariger va porter du fecours. Un nombre infini de Requêtes & d'Adresfes de remerciment fut préfenté; partout on removoit des confeillers Öc on lesremplacoitpas d'autres: H est imposfible de décrire tous les mouvemens qui eurent lieu; ils fe préfentent tous k Ia fois k mon esprit, mes enfans! & je fuis asfüré qu'un détail plus circonftancié attireroit votre attention; mais le plan que j'ai embrasfé, ne s'étend pas ausfi loin; mon desfein estfeulement de vous en faire connoitre asfez, pour vous infpirer le defir de faire des recherches ulterieu» res; vous trouverez des ouvrages plus volumineux, ou ce récit fera plus étendu, & vos coeürs fenfibles resfentiront tour k tour 1'hor^ peur, la fetisfacliion Öc une tristesfe profondg,  C ia» ) L'étst des chofes de ven oir de jour en jour plus déplorable; une partie des troupes de la République fut envoyée dans quelques villages fur le territoire de Sticht; on envoya quelques ■bourgeois pour les repousfer; & le Sieur visscher ayant été tué d'une tnaniere qui ne fait gueres honneur a Tauteur de cette mort, on en vint aux mains, & les Bourgeois triompherent; le lieu appejlé. Kaart, fut le théktre de cette vieloire, comme il paroit par les vers {uivants: O Vaart! tu fus témoin de ce fanglant combat, Ou le Bourgeois arme' combattoit le foldat. Ce qui augmenta ausfi confuïérablement la haine réciproque, & lui prèta plus de vivap cité, fut iacovitraiiétéd'opiniOTis furlamédiation Ji demander a la France; & la République en'tiere;offiït Tftffreux fptdacle ides.desordres le$ •plns dangereux, & même en plufieurs endroits on vit le courage dégénérer en fureur; fon Altesfe invita ouvertement le peuple a. travailler avec lui au rétablislement de 1'ordre — mais ce fut envain, on refufa entierement de prêter forcille a cela. A Amfterdam la rebellion futportéekfon com- bles    C 129 ) ble: Ie 29 May 1787, vers Ie foir, on en vint aux mains fur le Reguliersgracht, au fujet d'une requête k leurs N. & G. Puisfances, en faveur du Stadhouder, qu'on avoit dépofée, pour la faire figner, dans un cabaret appellé,'* LandsWeU yaaren: je me promenois Ie foir, le cceur ferré, lorsque pasfant de 1'autre cóté du canal, je me trouvai par hazard au moment du pillage; 6 mes enfans i que ce premier orage, fi longtems redouté, me fembla être pour Pavenir un friste préfase ! mes craintes fe réaliferent en effet: après quelques coups, on en étoit venu au pillage de la maifon', & dela on avoit paffS a plufieurs autres, aux quelles on fit éprouver le même fort: cependant le bruit s'en étant répandu dans le quartier appellé Kattenburg^ leg partifans du Prince qui s'y trouvoient, réfolu-' rent de venger le malheur de leurs amis fur lef Patriotesqui habitoient dans ce quartier; pour exécuter ce desfein fans obfhcle, ils leverent Ie pont qui joint cette ile a la Ville: mais cette action ne fervit qu'k mettre le comble a 1'animofité des habitans de la Ville; ausfi-tót on court aux armes, le canon est pointé contre Kattenburg, les habitans de 1'ile ripoflent avec 4u canon, & Pon voit, hélasl les citoyens . M  C 130 ) acharnés eentre les cüoycns, & la terre arrofée du fang des blesfés & des morts; c'est k ce trifte événement, que fe rapportent ces deux vers: ^mflerdam! dans tes murs,. des fureuts meurtriercs, Contre tes habitans armenc leurs propres freres. Plüt k Dieu , mes enfans! que vous & vos derniers neveux ne foyez jamais les témoins de, pareils désordres pubJicsl Les fuites des ces désordres furent des plu* déplorables; cependant elles ne mirent pas fin aux troubles de la République; au contraire, on leva alors des milices pour être jointes aux corps-francs qui devoient défendre Utrecht — le peuple d'Amflerdam démit Ms. dedel & Ijeels de leurs charges de Confeillers, dé* marche qui dut faire frémir les Patriotes bien intentionés — cependant ce n'étoit pas encore lk le comble des désordres oü 1'onfepotta — vers la fin du mois de Juin, 1'Epoufe du Stadhouder, prit Ie parti de retourner k la Haye t dans la vuë (comme 1'a têmoigné Son Altesfe) d'entrer en négociation avec les Etats, au fujet de quelques moyens tendant k remédier *ux maux de la République: j'ai dit que    C 131 ) Son Altesfe têmoigna que tel étoit 1'ob'et de fon voyage; car eette Princesfe fut accufée de vouloir fe rendre a la Haye póur y foulever le peuple, & opérer,par ce moyen, un changement dans les affaires; mon but n'ctant que de vous faire le récit des événemens, je ne m'érigerai pas en juge : ce qu'i! y adecertain,c'eft qu'en conféquence de ce foupcnn, les citoyens armés empêcberent Son Altesfe d'achever fon voyage ; c'est cette arreftation , qui fait le fujet de Ja planche ci-jointe, & que j'ai exprimée dans ces deux vers: La Princesfe k la /%e'atfoit potter fes pas; Des citoyens armés ne le permettsnt pas. Cet événement opéra un changement total* Vous comprenez aifément, mes enfans! que cette démarche ne fut confidé'ée que comme un affront public, fait | i'Epoufe du Stadhouder; & vous comprendrez ausfi aifément que le Roi de Prusfe, frere de Son Altesfe , faifit cette occafion de donner plus de poids & de force ktoutes les follicitations qu'il avoit fakes en faveur de la maifon d'Orange , en exigeant alors réparation d'honneur pour fa Seeur, a qui on avoit fait cet affront, qui en M 2  C ) tombant fur fa perfonne, réjaillisfoit fur toute fa maifon; cependant on fut fourd & tout ce qu'exigeoit le Roi de Prusfe — plut' a pieu, mes enfans! que ceux qui avoient alors en mains la direction des affaires, eusfent compris que les Rois ont lebras long, & qu'il est dangereux de contester avec eux— quelles quefoient les circonftances oü le cours des chofes humaines vous engagera dans la fuke, ne perdez jamais de vuë ceux avec qui vouc avez affaire, & quelle est votre pcfition envets eux; nevous fiez pas toujours fur la juftice de votre caufe; dans les entreprifes les plus juftes, on a bientót fait un pas, dont on fe repent toute la vie — ö la prudence est un gtiide fi airaable & fi fi. dele! L'orage, qui menacoit de loin nos heureufes Provinces, grosfisfoit fenfiblement; mais il paroit qu'on s'aveugloit volontairement fur le ! danger, on .... que dirai - je ? telle est fouvent la volonté de la Providence, que foibles mor* tels que nous fommes, nous nous écartions.du droit chemin, malgré le flambeau de Jaiaifon qui nous fait voir notre égarement — piufieurs membres de la Magiftrature animoient encore leurs concitoyens, en leur faifant entendre que  C 103 3 le Roi de Prusfe n'oferoit s'approcher de nos frontieres, ou que s'il le faifbit, il meneroic infailliblement fon monde k la boucherie ; & comment ces Magiftrais auroïent-ils pu tenir un autre langste? le peuple qui les avoit élus, n'auroit pas manqué de les immoler a fa fureur: — mais faire croire au peuple que Ie Roi de France combattroit pour eux,c'étoit fans doute pousfer l'encouragement trop Ioin >— tout cela ne produifit cependant 'qu'tine opiniatreté invincible; on ne vouloit entendre parler que de Pimposfibillté de 1'apparition des Prusfiens, oir d'un fecours certain," qui nous feroit triompher — & 1'on tint ce langage, jusqu'a ce que Ie ronflement du canon Prusfien vin? fermer la bouche a plufieurs de ceux qui Ie tenofent* Les troupes Prusfiennes fe mofctrêrent en eflL>t, après qu'on eut fait plufieurs mouve* ments dans le Pays pour fortifier les frontieres & d'autres places : des milliers de bras travalloient aux bateries, ausfi furent elles établies asfez tót," mais les milliers de béros qui devoient les faire jouer, étoient en trop petit nombre; on manquoient de forces, quoi qu'on grand nombre d'entre eux ait montré,quele pur fang des Bataves eouloit encore dans leurs veine». M 3  C 134 } Un coup terrible vint jetter la confternation dans tous les esprits — la Ville d'Uireckt faifoit 1'espoir de tous les Patriotes — on s'étoit furtout appliqué a fortifier cette Ville ; le Rbingrave de salm y tenoit garnifon avec fes troupes, öutre un grand nombre de bourgeois ar« més & de volontaires tirés des corps francs — XJtrecht étoit le foyer du Patriotisme — & au bruit de la marche des Prusfiens, Utrecht fut abandonné — la plupart fiémisfoient d'horreur, tandis que la frayeur avoit faisi les autres —ii peine la ville fut elle abandonnée, que les troupes de Gueldre y entrerent, tandis que les habitans tuyoient ailleirs avec tout ce qu'ils avoient pu emporter —«=• Cependant les Prusfiens s'avangoient toujours , ils s'ouvrirent un pasfage partout, & Amjleldam devint leur principal objet ; néanmoins on ne vouloit pas encore dans cette Ville entendre parler de foumisfion, pas même de médfcation: AmfteMam tint bon, même après la reddition de Haarlem; mais Hés qwAmfteldam eut fléchi, tout fut terminé ; mais, mes enfans, ce dénouement ne fe fit pas fans etfufion de far,g. Les campagnes furent mifes fous eau, fpectacle touchant, dont 1'image ne s'effucera jamais  C 135 ) de mon louvenir; on prk la réfolution de tenïr ferme jusqu'au dernier homme , de percer les digues du cöté de la mer, & de faire ainfi tout périr fons les eaux — Voyez a quelle extrémité on fe portoit; fi vous avez asfez d'imagination pour vous la répréfenter vivement, vous frémi- rez ■ mais vous frémiiiez bien plus, fi je pouvois vous répréfenter le bruit terrible qui me tira de fommeils ainfi que plufieurs milliers de mes conckoyens, le matin de ce jour fa al, au quel les Bourgeois armés combattirent a Ouderkerk contre les troupes de Prusfe, commandées par le Duc de b u u n s w y k — chaque coup que j'entendois me caufoit un frémisfement intérieur — Ciel [ m'écriai - je, que veux - tu que nous devenions? —— des Jarmes coulerent de de mesyeux —' voyez, mes enfans, l'esquifc, que j'ai fait tracer de ce combat, & vous approuverez mes larmes: Sur les bords de 1'Amftel, dans un aflïeux carnage , Le Bourgeois au Prusfiea dispute le pasfage. Je fuis contraint d'abtéger, mes chers enfans ! & pourquoi étendrois je le récit de ces horreurs? —— Vous en entendrez parier ausfi longtems que vous vivrez je toe con- M 4  C 136 ) tenterai de vous dire que les Prusfiens triomphe* rent, & que s'étant approchés des murs d'/?/«ftcldam ,\\s s'emparerent de la Porie de Leyden. Un grand nombre de Patriotes prirent alors la fuite, mais le nombre des affligés furpasfa de beaucoup celui des fugitifs — cependant ni la fuite, ni la doulenr n'étoient capables d'artêter le cours préfent des affaires; pour tout dire en un mot, tout fut remis fur Tanden pied; &la bourgeoifie fut desatmée — on voyoit dans les rues le monde décoré de couleur orange, & quiconque refufoit de s'en décorer, étoit expofé ï la fureur de la populace, ce qui fit réfoudre plufieurs Magiftrats h ordonner, on du moins a recommander qu'un chacun poitat cette couleur, & même au tems oü j'écrls ceci, fort peu de gens ont ofé s'émariciper jusqu'a paroitre fans orange dans les rues* t Vous verrez dans la planche ci jointe quelle fuite immédiate eut cette contre révolution par rapport & létat de la Republique en général ; car pour les événemens particuliers qui concernent cbaque ville, je fuis obligé dè les pas« fer fous filence: CtiiLLAüME dans fon droit eft enfin re'taSlf, Par Lan&rt Sc par Berlin cc dreit eft guaranti.    ( 137 J Quant aux fuites ultêrieures de ce chaiigev? ment fubit, vous les avez eues fous les yeux; on mit dans les principales Villes des garnifons compofées de troupes du Pays; & il est certainque fans cette précaution la tranquüité n'auroit pas été de longue durée, aprés le départ des Pruspens; quoique plufieurs villes ayent éprouyé dans cette occafion, que les militaires font de mauvais gardiens,furtout dans de telles circonftances, car le repos n'étoit rien moins que rétabli, lors du départ des Prusfiens; la ville de Bots le Duc en est un exemple: Dans Bois-le Duc, en proie aux fureurs dujfoldat» On voit encor les maux qui dcchirent 1'ctat. Le defir de piller, reduit en pratique, fous je pc fals quel Pr<£ccxte, & par les Patrïoies & par leurs adverfaires, détruifit tout ce qui fe trouva lous la main d'une populace on d'une foldatesque fans-frein — cependant,& la longue, 1'ordre s'est rétabli, au point, que la perfonne des ciroyens est en fureté, & qu'ils n'ont plus a craindre pour leurs propriétés — puisfele ciel bénir dans la fuite notre patrie. De tout ce que nous venons de rapporter, vouspouvezaifément conclure,mes enfans! qu'il  C 138 ) s'esttrouvé un grand nombre de coupables; cependantlechacimentde tous ces réfraftaires n'étoit pas compris dans la latisfaction dont je vous ai parlé ; dailleurs leur nombre étoit tel, qu'on auroit dó punir les trois quarts de la République — on publia donc une amnestie générale k 1'exclufion de quelques perionnes , qui cependant pouvoient, k certaines conditions, fe foustraire k toutes pourfuitcs ultérieures ; il n'y eut qu'un petit nombre de ces derniers, qui perfifta; ils furent cités, & k défaut de comparottre, ils furent bannis fous différentes formules; quelques-uns, mais en petit nombre, furent appréhendés & durent fubir la peï< ne, k 1'exemple de ce qui est repréfenté dans cette planche r Que vakdbr bur<5 aprenne au Hollandais docile, A craindre les malheurs de la guerre civile, Ce van oer burg étoit Bourguemairre régent de Boltvard en Fnf'.; on le fit pasfer fous le glaive du Bourreau k Lccuwarde, & ii fut enfuite hanni de la Fiife pour fespace de so ans — triste récompenfe! Voila ma tkche remplie, mes enfans llifez& relifcz mon récit;gravez le dans votre mémoire,    C 139 ) & rendez-vous ainfi capabies de lire avec fruit des descriptions plus étendues de votre Pays: aimez toujours votre Patrie, elle est digne de votre attachement; fi presque toujours elle fut un tht&tre de troubles & de divifions, fongez que le mal est toujours accompagné de bien; dans nos demiers troubles, on a vu du moins ■'immortel van de capellen faire abolir dans la Province A'Overysfel, le droit révoltant des corvées ; & puis tous les états font fujets & des disfenfions politiques: notre fiecle en est une preuve inconieftable; taehez de former vos coeurs fur le caraétete naturel des Bataves , ce fera le moyen de plaire Ji dieu & aux hommes — car jamais le vrai Batave n'eut d'autres vues que celles qui tendent a fon propre bonheur & & celui de fes concitoyens toujours la Religion fut fon appui, toujours elle lui infpira ce courage qui le rendit inébranlable dans fes desfeins, nar ce qu'il n'en forma jamais qu'aprés avoir confulté fa Religion & fon devoir — dela cette droiture qui fait qu'aucun peuple qui a eu affaire avec les Hollandois n'eut jamais k fe plaindre de leur conduite — un oui ou un non, dans la bouche d'un Hollandois, fut tou« jours un ferment, comme il devroit toujours  C Ho ) iêtre dans Ia bouche d'un chrétien pendant Ia paix ils refpe&erent toujours les droits de Thorame & 1'empire des loix, &même dans Ia guerre ils fe comporterent toujours en êtres raifonnables — jamais dans les combats ils ne fe font rendus coupables de trahifon, de meurtre on de I&cheté — ils ont toujours vu des hommes dans leurs ennemis, & leur gér.érofité jointe h leur valeur en 3 fait plus que des héros _ en un mot 9 mes enfans ! devenez de vrais Hollandois & vous ferez, comme je vous 1'ai dit, agréables aux yeux de die ü & deshom* mes.