MÉMOIRES SECRETS; XXXII Ie PART IE du Régne de Louis XIII, O u XL VI h PART IE des Règnes de Henri IV & Louis XIII,  Années oü commencent & finifTent Jes Parties de cec Ouvrage. Rsgne de Henri IV. Parties. commencent finijjent. I & 2 1601 d 1603. 3 6* 4 1603 a léof. S & 6 i6of d 1608. 7 6" 8 1608 3 1609. 9 & 10 1609 i 1610. ii & 12 ióio. 13 6- 14 1610 28 1617. iS & 16 oa 29 & 30 16)7 23 6- 24 ou 37 £• 38 1620 d iGzz. Zf & z6 ou 39 6- 40 1622 d 1623. 27 & 38 ou 41 & 42 1623 d 1624. 29 £• 30 ou 43 fi. 44 1624. 31 & 32 OU 4ƒ & 46 ÏÓ24 4 IÓ2J. 3 3 6- 34 ou 47 6- 4$ 162; i 1626.  MEMOIRES S E C R E TS, T I R É S DES ARCHIVES DES SOUVERAÏNS DE L'E U R O P E, Ouvrage traduit de l'ïtalien. XXXII Ie PART IE du Régne de Louis XIII y ■ ou XL VIIe PA R TIE des Régnes de Henri IV & Louis XIII, A AMSTERDAM; & fe trouve A PARIS, ChczNYON, 1'ainé , Libraire, rue du Jardinct, quartier Sc-André-des-Arcs. ^ggffiga^_! !« M. DCC. LXXXII1.   V T A B L E DES SOMMAIRES. Arrivée en France du Cardinal Francois Barberin , neveu du Pape venant avec Ia qualité de Légat, pour terminer les Affaires concernant la Valteline dc Gènes. Honneurs extraordinaires qu'on lui rend. Difficulcé entre lui & les Prélats de France, au fujec du Rochet & de la Mofette. Tumulte horrible , dangereux pour le Légat, & pour Mondeur , Frère unique du Roi , a 1'occafion de Tentrce du premier dans Paris. Cinq Audiences que celui-ci a du Monar-' que. Deux Conférences qu'il a avec les Miniftres. Exhortations & inftances qu'il fait a Tun , demandes qu'il fait aux autres, réponfes qu'il recoir. Ecrit de fa fagon, renfermant divers partis qu'il propofe pour 1'accommodement des Affaires de la Valteline , Sc qui tous font rejettés par les Miniftres, Ecrit par lequel ils y répondent.  vj T A B L E. Réplique du Légat, qui déplait fort au Roi. • page i. Atticles pour Paccommodement des Affaires de la Valteline. Ils font remis au Légat, qui les envoye fur le cbamp a Rome par un Courier. La france fe défifle de la demande qu'elle faifoit, que le Roi d'Efpagne envoyar a fon Ambaffadeur auprès d'elle le poiivoir nécelfaire pour trairer ; & elle fe contente de la parole que donneroit le Pape ou le Légat , fcavoir que ce Monarque approuveroit touc ce qui fe feroit. Raifon de cette conduite de la France. Combat rude & opiniatre donné fous Nove , entre PArmée de cette Couronne & celle d'Efpagne. Affreux .ravage que les maladies font dans la premiève. La dure réfiftance que les armes Francoifes avoient trouvée dans la Valteline & 1'Etat de Gènes, rendent meilleures les difpofitions a* Paccommodement. Le Légat redouble d'ardeur pour faire enforte qu'il foit terminé. Paix entre le Roi Sc les Huguenots. page 57. Mouvement de colère de Louis  T A B L E. vij XIII contre les Efpagnols , qui fe calme bientót , en conféquence des réflexions que ce Monarque fait, Le Duc de Savoie & le Connétable de Lefdi guières fe retirent de devanc Gènes. Prife de Bréda. Les Efpagnols s'approchent des Frohtières de la Picardie. Plaintes du Duc de Savoie contre le Connétable , 8c du Connétable contre lui. Des Pozzévérafques j tort qu'ils avoient fait a TArmée combinée de France & de Savoie ; belle retraite de cette' Armée. Les maux & dangers de Gènes ceffent ; fa caufe triomphe. Elle recouvre tour ce qu'elle avoit perdu. Nombieufes conférences entre les Comniilfaires du Roi & le Légat, pour 1'accommodement. Nouveaux Anicles que la France propofe , relatif*s a ceux qu'elle avoit déja fait remettre au Miniftre de Sa Sainteté. Conteftation qu'ils occafionnent ■> la difpute s'échaurfej & la Négociation fe rompr. page 108. Les Efpagnols entrent dans le Piémont. Maladie du Connétable de Lefdiguières. Décadence de 1'Efpa-  Viij T A B L E. gne. Affront que Ion Armee rec;oie ious Vérue. Succès du Connétable Sc du Duc de Savoie. Efpagnols err bute aux fatyres & aux pafquinades de toute 1'ltalie. Les Génois condamnent a mort Claude de Marini , Ambaffadeur extraordinaire de Louis XIII en Piémont, Sc mettent fa tête a prix. Ordonnance foudroyante du Monarque, a ce fujet. Plainte 'que le Marquis'De Caeuvres , Général des Troupes des Confédérés dans la Valreline, fait contre les Vénitiens. Difpofition des Parties pour la Paix , facilitées , & pour quelle raifon. Nouveaux efforts , mais inutiles , qu'employe le Légat, pour engager la France a acquiefcer aux demandes qu'il avoijdéja faites. La Négociation eft totalement rompue. Dépit & douleur extrêmes du Miniftre de Sa Sainteté. pageijó. Fin de la Table. MÉMOIRES  MÉMOIRES SECRETS. Arnvée en France du Cardinal Francois Barberin, neveu du Pape, venantavecla qualitè de. Légat, pour terminer les Affai* r« concernant la Valteline & Gènes. Honneurs extraordinaires au'on lui rend. Difficultè entre lui & les Prèlats de. France , au fujet du Rochet & de la Moutte. Tumultc horrible , dangereux pour le Légat, &pour Monfieur, frère unique du Roi, d ïoccafwn de l'entrée du premier dans Paris XinqAuditnces que celui- X.XXIII. Partie. A  16z j. 2 mémoires ■ ci a du Monarque. Deux Conférences qu'il a avec- les Miniflres. Exhortations & inflan- . ces qu'il fait d l'un, demandes qu'il fait aux autres réponfes qu'il recoit. Ecrit de Ja facon v renfermant divers part is qu'il propofe pour l'accommodement des Affaires de la Valteline, & qui tous font rejettés par les Miniflres. Ecrit par lequel ils y répondent. Réplique du Légat , qui déplait fort au Roi. Lor sque la Négociatibn pour le Mariage de Madame Henriette avec le nouveau Roi d'Angleterre finuToit, celle qui regardok la Valteline & Gènes comraencoit. Le Légat envoyé en France pour terminer les Affaires de ces deux Pays, étoit entré dans le Ro-  Secrets. $ 7aume.par.TouIon. Le Duc de Guife , Gouverneur de Ja Provence , ie recut avec toutes les marqués d'honneur qui convenoient a un L(gat, neveu du Pape. II alla entr'autres, avec touce Ja NobleiTe de Ja Provence, le recevoir a faGaJère* Ie conduifit a I'endroit oü ii devoit lager (a)$ & Je défraya avec touce fa fuite , jufques dans Je Comtat d'Avignon. — C'étoic par ordre du Roi, 'que ie Duc de Guife en ufoit ainfi. Tous les Gouverneurs des Provinces que le Légat devoit traverfer avoient un pareil ordre. Le Monarque envoya même des Maïtres d'Hötel & autres Officiers de cette forte pour le traite* clepuis -Lyon jufqu'a Paris 5 & 1'on faifoit monter a deux (<0 Le Légat étoit fous le Dais. A ij  J 62 J. {e) Jour 4e Ton dcpart. 4 MÉMOIRES ■mille cinq cents livres par jour la dépenfe qui fe fai/óit pour eet objet, & qui dura depuis le 10 d'Avril 1625 , jufqu'au 24 de Septembre de la même année (a). Le Légat partit de Lyon , le 3 de Mai. Le Marquis de Villeroy , Gouverneur de cette Ville , ayant avec foi beaucoup de NobleiTe du Pays, lui fit les honneurs julques a la BrelTe , oü le Légat étoit attendu par le Marquis de S. Chaumont, Chevalier des Ordres du Roi, qui étoit venu lui témoigner, au nom de Sa Majefté , la fatisfacl:ion qu'EUe avoit de la venue dans le Royaume. Depuis la. BrelTe , le Marquis 1'accornpagna toujours. Le Légat arriva, le 5 de Mai, en litière, a Rouane, d'oü il partit le Lundi fuivant, avec  Secrets. 5 cinquante bateaux , que les Officiers du Roi avoient fait préparer. Lorfqu'il fut arrivé a Défife , le Prince de Condé '. allant couchera une demi-lieue de Ia. fut le lendemain matin le vifiter avec un cortége d'environ deux-cents Gentils-hommes. Quoique ce Prince a Défife fe trouvat chez lui, le Légat ne lui donna point la droite 'j & il ne 1'accompagna que jufqu'a la cinquiéme ou fixiéme marche de Pefcalier, bien que d'ailleurs il lui eüt fait beaucoup de civilités. On obferva que le premier ne paria jamais au fecond qu'en préfence du monde & a voix haute. L'après-midi du 7 de Mai, le Légat. partit pour Nevers, ou on lui avoit préparé une entrée folemnelle. II la commen^a en carroiïb 5 & ce ne fut qu'a deux - cents pas de 1'Eglife , A jij  161 j. (a) C'étoit toujours Spada. 6 Mémoires qu'il fe mie fous le Dais, que les Echevins foutenoient, & qui étoit entouré de tout le Clergé. II recut les compliments dans la grande Salie du Palais Ducal. Le b' , jour de I'Afcen/ïon , il partit , 'après avoir communié. Le furiendemain, Ie Nonce a la Cour de France (a), qui étoic allé a fa rencontre, vint lui faire la révérence. Et le Sr de la Roche, Ecuyer ordinaire de ia perite Ecurie du Roi, envoyé. par le Monarque , le joignit avec vingt carroffes, tant pour fon fervice, que pour celui de fa Maifon. Le même jour , le Miniftre de Sa Sainteté fit fon entrée dans Orléans, au bruit du canon; & le foir, y arrivérent 1'Archevêque de Tours , TEvêque d'Auxerre 6c celui de  Secrets. 7 Nimes, le Sr Malefez, & Clermont , frère de Barada tous députés pour Ie vifiter au nom du Roi. Les Prélats renGontrërent de la difficulté dans leur vifïte. La raifon en eft cju'ils prétendoient paroitredevant le Légat en Rochet découvert, & avec la Mozette 5 marqués de Jurifdiction Eccléfiaftique , que le Miniftre de Sa Sainteté difoit ne pouvoir admettre en fa préfence, <]ui , felon lui, les faifoit toutes ceffer (b). Les Prélats fondoient leur prétention fur 1'ufage Sc les priviléges du Clergé de France. On propofa divers tempéraments, qui furent tous trouvés inefficaces pour mettre le Légat (a) Ce dernier étoit nouveau Favori de Louis XIII. — Voyez.ce qui en a été dit dans les deux Parties précédentes de eet Ouvrage. (£) Voyez auffi ce qui a été dit dans le deux Parties précédentes, au fujet de la vilïtc de ces Prélats. A iv 1625.  8 Mémoires & eux d'accord> enforte que ceux-ci s'en recournèrenc a Paris, fans 1'avoir vu. Charles Magalotti (a) s'y étoit rendu avant lui par fon ordre (b) , pour y commencer la Négociation d'une Tréve générale. II y trouva beaucoup de difficulté a caufe de 1'Affaire de Gènes> au fujet de laquelle on lui dit qu'on ne vouloit point mé co neen ter le Duc de Savoye , qu'elle regardoit encièrement. L'AmbalTadeifr de ce Prince dit au contraire au Prélat Panfile (c), qu'elle regardoit le Roi de France. Enforte qu'on voyoit que les Parties étoient convenues de fe renvoyer la balie de Pune a 1'au- (a) Onclc du Légat. (i) Lette de Gondi, Arobafladeur du Grand Duc a la Cour de France , écrite a Picchéna , principal Miniftre de ce Piince, le 6 dc Mai, iéif. (c) Qui étoit de la fuitc du Légat.  Sec r e t s. 9 tre, pour gagner du temps. Le" Cardinal de Richelieu , auquel les autres Miniftres déféroienc pleinemenc , paree qu'ils voyoient que le Roi Sc la ReineMère s'en rapportoient a lui pour touc, fe montroit oppofé a la Tréve, fur-cout pour" ce qui concernoic Gènes. Le Roi , dit - il i Magalotti, ne peut abfolument faire que cette République ait place dans une Tréve, non plus que dans un acCommodement , fans le confentement du Duc de Savoye, paree que l'intérêt qu'on a a démèler avec elle , le regarde lui feul, Sc qu'on ne veut pas le mécontenter. ^ On prévoyoit en conféquen-ce de ce qu'on vient de lire, que la Négociation du Légat feroit longue Sc difficile^a moins qu'une bonne réfiftance de la part des Génois, ou beaucoup Av 1625.  i I i S < J t 1 < I I i c p< *o Mémoires d'incommodité pour Ieurs agre/Teursne Ja facflitat; enforte que Ja.France fe contentat de Ja réputation que 1'entreprife auroit fait acquérir a fes armes. Cependant MagaJotti tomba maJade; & iJ faJIut attente que Je Légat fut arrivé pour reprendre la Négocïation. — 3omme l'Italie étoit plus trost 3lée par la Guerre de Gènes, ]ui étoit au milieu d'elle » que 3ar celle de la Valteline, qui ïtoit a fon extréraité- (a) es Miniftres du Pape n'éoient pas gens a confentir i 'accommodement de PAffaire èule du fecond de ces Pays , 1 moins importante des deux! Is n'étoient pas gens a y con-ntir, quoique l'intérêt 'partiuJier du Pape s'y trouvat (c), (a) Vu la fituation de Ia Valteline. Le Legat & le Nonce. V. a °.aU^ fe ra quaüté de Dépofitaire des 1 ts de la Valteline.  Secrets. ii que cette Affaire fut Porigine de 1'autre (a)s & que le brult courut que le Pontife pouvoit avóir en vue de. faire enforte que Paccommodement fe réduisït a ce- que les deux Couronnes (b). confentifTent que la Valteline fut inféodée a D Thadée, fon neveu , en dédom mageant les Grifons (c)., mo yennant une fomme payée er une fois , ou une redevancï annuelle. Mais revenons a ce qui re garde le Légat. II apprit le n de Mai, a Tours, que Charle: Magalotti, fon oncle (d), étoi (a) On a vu dans les deux Parties précé dentes de eet Ouvrage , que le principal mo tif de 1'entreprife de Gènes, du moins pou la France, avoit été de faciliter celle de 1 Valteline. (b) La France & 1'Efpagne. (c) A qui elle appartenoif. (d) Qui 1'avoit dévancé a Patis , pour en tamer la Négociation de l'accommodemer général, & qui étoit tombé maiade peu apre: — C'eft ce qu'on a dit. A vj 1625. 1 ■  14*2 j. j j 1 ( ] ** Mémoires a toute extrémité. II en refTerrtit Ia plus grande douleur, & vouioic fe rendre a Paris en diligence , incognito , pour lui donner fa bénédiction j maïs ©n I'en diiTuada. Le lendemain il fut i Erampes, ou 1'Abbê de Foix lui remit une lettre du Roi, pleine de civilités , par JaquelJe ce Monarque lui failoic compliment de condoléance fur la mort de fon oncle. Le ij, il arriva a Chanteleu. li avoit fencont-ré en chemin le Nonce de Flandre, puis ie * de Bréves, envoyé par la Keine-Mère. Le Roi vouloit le /enir voir a Chanteleu ; mais I en fut empêché par une ef)éce d'efquinancie, qui Ie retinc tu lit plus de huic jours , duant lefquels Üfut faigné & pur;é. Ce Monarque envoya le ïrand Prieur témoigner au tfiniftre de Sa Sainteté com>  S E C R E T S. 15 bien il étoit faché de ne pouvoir fatisfaire fon envie. Le SE de Ventiet, le Comte de Tillières & le Colonel d'Ornano furent le vifiter; Ie premier y au nom de la Reine de France régnante ; le fecond, en celui de la Reine d'Angleterre y belle -fceur de celle - ci 5 le troifiéme, au nom de Monteur (a). Le lendemain , arrivèrent les Cardinaux de Richelieu Sc de la Valette, avec lefquels il s'entretint longtemps. Et, tandis qu'en Italië il n'avoit pas voulu, chez lui, céder la place d'bonneur au Cardinal de Médicis , de Ci grande naifTance, il la céda en France aux Cardinaux de la Nation, quoiqu'ils témoignaffent fortement la refufer. Par une Lettre fïgnée du 20 00 Gafton d'Orléaus , frèrc uniquc duK01. l 62J„  i < j i i i (a) Accompagné de ce Seigneur , de S, Chaumont,& de Bohneuil, Introdudteur. ■ '14 Mémoires de Mai, & donc S.-Chaumont fut porteur, le Roi voulut marquer au Légat fon regret fur ce qu'il n'avoit pas pu exécuter Ie deffèin qu'il avoit de le vifitrer. Les Miniftres de la Légation ivoient demandé cette Lettre, ifin qu'elle tint lieu de vifïte ; :omme celle que Henri IV ivoic écrite au Cardinal de Vïédicis, lorfque celui-ci vint sn France avec la qualité de 1-égat, pour donner a ce Moïarque 1'abfolution. Le même our (2odu mois) le Légat dont 1 eft queftion maintenant, vint Imer au Bourg-la-Reine , oa e Duc de Nemours fe rendit} c le lendemain le Miniftre de ' pourvü que la ils puflent avoir le Rochet décoti- 1615.  j < ] («) Voyez. ci-devanr. *6 Mémoires -vert, comme ils 1'avoient dc' vant le Roi. Cette propofition, faite au Légat p^ la bouche du Nonce, ne fu^oint acceptée telle qu'on vient de h voir. On convint que les Evêques, en complimentant Je Miniitre de Sa Sainteté, de même qu'a la Cavalcade, auroient le Rochet couvert, 6c feroient fans Mozettejmais qu'a Notre-. Dame, comme iJs ne ieroient plus a fa vue, attendu qu'ils marcheroient derrière lui, ils découvriroient le Rochet, Sc mettroient Ja Mozette. Ainfi ceua ce difFérend entre le Légat 6c les Evêques de france, fur la ■narque de Jurifdidion Ecclélaftique (a). Cependant Je Miniftre de Sa Jainteté fut complimenté, jo Jar le Corps-de-ViJIe , le Pre-  S E C R E T S. 17 vöt des Marchands portah,t Ia parole, 20 Par leChatelet; 30 Par le Parlement; 40 Par la Chambre des Comptes, 50 F^ar la Cour des Aides; 6° Par la Cour des Monnoyes. — Le Parlement & la Chambre des Comptes Ie haranguèrent en latin. .Le Légat, reprenant, a cha-que compliment, ce que 1'Orateür lui avoit dit, faifoit admirer la vivacité de fon efprit, en répondant en tres-beau x termes , de très-bonne grace , & dans la même Langue dans laquelle on 1'avoit harangué. Quand Ie Parlement paria, il fe Ieva d'abord , puis s'affit, mais il fe tint découvert; Sc il en ufa de même , a peu de chofe pres, a 1'égard de la Chambre des Comptes & de la Cour des Aides. Vers les fept heures du foir , arrivèrent les Prélats Francais , 'au i6z 5.  i 62 j. 18 MÉMOIRES •nombre de trente-fix , fcavoir quatre Archevêqucs 8c trentedeux Evêques. L'Archevêque de Tours fit le compliment , en Latin & en bons termes. Le Légat s'avanca quatre ou cinq pas hors du Dais; écouta , & répondit de bout & découvert; embralïa tous ces Prélats, Pun après Pautre 5 & , cela fait, il les mena dans une chambre ou étoit le Duc de Nemours, èc s'entretint avec eux avec beaucoup de bonté II attendit dans cette chambre Monfieur>, qui arriva accompagné de deux Pairs. Le Légat , qui s'étoit avancé fur le palier pour Ie recevoir, voulok a toute force Je faire entrer Ie premier, 5c lui donner' la droitej mais Je Prince ne voulut point le permettre. Cependant la Cavalcade fe mifen marche 5 Monfieur étoit fous le Dais, a la gauche du  S E CR ETS. 19 t Légat (a); Sc 1'on voyoit un peu I a cöté les Ducs Sc Pairs, le I Colonel d'Ornano , Sc les Sts I de Marfat Sc de S.-Chaumont. 1 Les Prélats Fran^ois étoient au ft milieu d'eux ; donnoient la droite a tous les Prélats, venus I avec le Légat; Sc les uns Sc les I autres avoient fur la tête le I chapeau Pontirical. — Depuis | la 'porte S. Jacques, les EcheI vins portèrent le Dais. La fouI Ie étoit li grande dans les mes I] par oü 1'on pafloit, qu'on avoit | de. la peine a fe'ndre la preflH, I Tout alla bien cependant juf I qu'a ce que le Légat fut arrivé (a) Qui cependant chez lui , dit le Texte, faifoit les honneurs a Monfieur. Celn avoit été convenu ainfi ; & , fans cette convention , le Prince ne fe fut point trouvé a la Rece- I ption du Miniftre de Sa Sainteté , & ne lui II eut pas fait vilïte. — Le Légat , ne cioyant I point devoir traiter les Cardinaux en général 1 moins bien que Monfieur , voulut en ufer I chez lui , a 1'égarddes Cardinaux Francors, I comme a 1'égard dc ce Prince ; mais il ne lts i i faifoit point couvrir. 161 y.  IÓ2J. < t 10 Mémoires a Ia rue Notre - Dame , qui va a la Métropole. La ie Peuple fit foule avec fi peu de ménagement , que le Légat fe vit ob'ligé de defcendre de fa muie 5 & ce fut avec beaucoup de peine que fes Gens le tirèrent de Ia prefle & du danger , en le portant entre leurs bras jufqu'a la porte de PEglife. Monfieur courut rifque auffi. Me pouvant venir a bout de manier fon cheval, il fe vit a fon tour forcé de defcendre. A.fin de fortir de la prelTe qu'on iaifoit, pour enlever la mule lu Légat, qui étoit blanche , 1 tira Pépée ■■, & fut avec >eaucoup de difficulté, fauvé lu péril, porté a bras dans une >outique voifine. Le Koi vouoit faire pendre fept ou huit les auteurs du défordre ; mais e Légat obtint grace pouY ;ux.  Secrets. IX Quoique Je Monarque ne . fut! pas cout a-fak guéri (a), & Iqu'il gardat encore Je iit, Je ' jMiniftre de Sa Sainteté ne laifjfa pas d'aller le vifiter (b); &, dans cette première Audience, qui fut fecrette, on ne pafTa i:pas les civilités ordinaires. Sitöt après , Je Miniftre de Sa :Sainteté aJla vifiter les Reines (c). — II eut fon logement a T'Archevêché , oü Monfieur fe rendit pourle faluer, & fut re^u I! par lui au bas del'efcalier.Le Léiigatlui donna toujours la droite, \&t 1'accompagna jufques a fon icarrofïè, qu'il vit partir, Toute la Cour alla faire Ia révérence lau premier , le Chancelier :entr'autres, a la têtedu#ConleiI. (a) Ona vu ci-devant qu'il étoit maladc d'une efpéce d'efquinancie. (é) Cette vifite eut lieu , Ie 14 de Mai. ' (c) La Reine regnante , la Reine-Mère & felle d'Angleterre. 1625.  IÓ2.J. (a) Autres que Monfieur; car qii vient de ij ▼oir deux fois, la feconde plus encore que la ll: première, le traitement diftingué qu'il faifoit j au frère uniqüe du Roi de France. (b) Elle eut lieu, le 2.8 de Mai. li MÉMOIRES Le Légat I'accornpagna jufqii'ai la cinquiéme ou fixiéme mar--ij che de 1'efcalier, ainfi qu'il eni uloit vis-a-vis des Princes duïj Sang (a). La feconde Audience que leij Légat eut du Roi, fut publi-ij que (£). On portoit devant luiil la Croix , qui refta dans 1'anti-f chambre. Le Duc de Nemours' conduifoit le Miniitre de Safl Sainteté vers le Monarque, quitj s'avanca jufques prés de la por-1 te, pour le recevoir,6c le me-| na en-dedans de la baluftrade de fon lit, oü tous les deux|; s'affirent fur des (léges pareils; celui du Roi , ayant le dos» tourné vers le lit, & celui dui Légat vers la muraille , pres: 1'entrée He la baluftrade. Lorf-1  Secrets. *3 : que le Miniftre de Sa Sainteté fe retira,Sa Majefté I'accornpagna jufques au milieu dö l'anci-chambre, oü il recut fa •Ibénediclion. Dans cette Audience , le Légat exhorta le Roi a la Paix; a remettre les affaires de la Valteline dans 1'ecat ou elies étoient avant les mouvements acluels.j Sc a corifencir a une Tréve générale pour 1'Tealiè. Le Roi répondit: — Je fuisSc je fcrai toujours porté a la Paix, pourvü qu'elle fok sure pour le Public, Sc honorable pour moi Sc pour mes Alliés. Je demande I'exécution du Traité de. Madrid , quant a ia Valteline ; 6c je ne puis, fans cela, preter 1'oreillea la Tréve, a caufe du préjudice que mes Alliés &* moi refTentirions du contraire. — Sur ce que le Légat prelToit Ie Monarque d'y Traké de. Madrid, ouant a ia. JValteline ; 6c je ne puis, fans 16 i 5.  %4 MÉMOIRES confencir pour 1'Etac de Gènes, » ce Prince répliqua: — Je fuis I engagé a affifter le Duc de Savoye dans cette caule; il ne li convient point en conféquence' i que je i'abandonne. Ce fut ainfi que le Roi paria ; au Légat. Quant au refte, il . lui donna tous les témoignages poffibles d'amitié pour la per- | ionne ; de refpect pour le S. I Siége ; de cordialité pour le ? Pape, fon oncle; offrant d'af- ! lifter Sa Sainteté avec toutes : les forces de fon Royaume, & t de paifer les Monts en Perfon- | ne, ü 1'occafion venoit d le demander. Phélippeaux (a) marqué aBé- : thune (b) tout ce qu'qn vient i ( du S. Siége. — La Lettre que d'Herbaut lui >. écrit eft du jour de 1'Audience dorit on vient i de rapporter le précis.. de  Secrets. IJ lire, & il ajoute: — Nous-nous plaignons de ce que les Miniftres du Légat fe lont efforcés d'iniinuer a 1'AmbalTadeur de Venife ici, des penfées tendantes a détacher Ja Republique, de la France; de ce qu'ils lui ont dit que les affaires de la Couronne étoient dans le plus facheux état 3 & que , pour rendre a 1'Italie Ja tftnquillité, ii falloit fomenter la rébellion des Huguenots. Nous difïimulons tout pour atteindre a notre but. — Le Roi a dit au Légat : — Je nommerai , Moniieur , quelques Membres de mon Confeil , pour conférer j avec vous, chez vous, & écouI ter ce que vous aurez a prppofer touchant les affaires courantes. Le Miniftre de Sa Sainteté au fortir de cette Audience, alla falner les Reines. — II eui- XXXIII. Partie. B 1625.  X ó 2 J. (a) Lettre de celui - ci a d'Herbaut, da premier de Juin, 162.5. 16 MÉMOIRES - Ia troifiéme, Ie dernier de Mai, Le Légat y réitéra fes inftances pour la Tréve , a laquelle le Roi refufa de confentir, ainfï qu'il Pavoit fait d'abord ; quoique le Légac déclarat que 1'Efpagne entreprendroit ouvertement la dérenfe des Génois. Je me fuis efForcé jufqu'a ce jour ,»dit le Monarque , d'éviter une ruprure ouverre avec les Efpagnols. Mais, s'ils font les premiers a metcre les armes en oeuvre , je ferai le dernier a les mettre bas. — Diverfes conférences eurent lieu entre le- Légat & les Miniftres du Roi. Le Pape paria a Béthune (a) de la prétention des Evêques de France, concernant Ie Ro-  S E C R E T S. 27 chet & la Mofette f4 II afsura qu'ils etoient mal-fondés a vouloir s'arroger aucune marqué de Jurifdiction en préfence du Légat*, eux qui n'en avoient pas la moindre hors de leurs Diocèies. Le feul Archevêque de Paris, dit-ii, pourrort être ronde quant i la prétention aduelle. — AuxnöcesdeHenri IV , a Lyon, les Evêques allerent vifiter ie Cardinal Aldobrandin fans Rochet. Le Maïtre des Cérémonies (ton jours vivant) qui étoit avec le Cardinal de Médicis (*), Jorfque ceiui-ci fut envoyé Lïgat en France ^afsure qu'a fon entrée, les Evêques ne parurent point en Rochet. -Béthunefoutintque lufage de la France étoit que dcStL^f ut?**'ÜS a,V°icnt ^paroïtre W Depuis Pape, fousle nom de Léonll Bij 1Ó2J.  1ÓZ5. (a) Il avoit fait le même refus par rapport aux Pouvoirs du Cardinal de Médicis, duquel nous parlions, il n'y a qu'tin moment. 28 MÉMOIRES fes Evêques, en pareilles occafions, portalïent le Rochet découvert, 6c la Mofette. Je fuis certain, ajouta-t-il, qua Lyon, au Mariage de Henri IV , célébré par le Cardinal Aldobrandin, la même difficulté que VotreSainteté fait aujourd'hui, ayant été faite par ce Cardinal, les Evêques fe maintinrent dans leur ancienne poiT'eiïion. Le Parlement refufoit, comme on l'a vu ci-devant, d'enregifter les Pouvoirs du Légat actuel, paree qu'ils ne renfermoient pas*le Titre de Roi de Navarre (a) 5 Sc ce Corps vouloit, ou que Ie Miniftre de Sa Sainteté remit un BrefduPape, qui expliquat ce Titre , ou  S E C R E T S. in d'autres Pouvoirs dans lefquels il fe trouvat nettement. Sur quoi Béthune die au S. Père , que le défir qu'avoit fon Maitre de complaire, autant qu'il le pouvoit, a Sa Sainteté , Ie portoit a être content que l'omiffion dont il s'agifToit, füt réparée par 1'un ou 1'autre tempérament. Le Pape appura Paffaire , en difant a Béthune : — Ce Titre, Monfieur, ne fe trou•voit, nidans les Pouvoirs du Cardinal Alclobrandin , ni dans ceux du Cardinal de Médicis. C'elt chöfe infolite a la Daterie & a la Chancellerie de Rome, d'infcrire d'autre Titre , que Ie plus éminent. Dans tous les Brefs que j'adrelfea Louis XIII, je ne mets que celui de Roi Tres - Chrctien ou de Roi de France-, comme je nt mets que celui de Roi Catholique ou de Roi d'Efpagne , a ceux ' que Biij 1625.  i6z les déclarations que Béthune (a) a faites au Pape , au nom du Roi j les divers partis qu'il a propofés a Sa Sainteté (b), immédiatement avant le foulévement des Grifons ( c) ; Pentrée des Efpagnols dans la Valteline . Oz) Toujours Ambafladear de France auprès du S. Siége. (b) Pour la difpofer, dit le Texte, a confentir , conformément aux conditions du Dépöt, que les Forts en queftion fuffent actuellement démolis ; reméde effeclif pour les troubles qui mena^oient 1'Itaüe. (c) Qu'on a vu que De Coeuvres avoit escité par ordre de la France. Bv  34 MÉMOIRES exécutée avant celle des Griibns, ou dans le même temps-, 1'égard que De Coeuvres a eu .pour les Enfeignes de 1'Eglife qui s'y trouvoienc , tour a fuffifamment juftirié aux yeux du Public , ce qu'il y a fait. Et néanmoins le refpect du Roi pour le Pape Ik. le S. Siége, ere fi grand , qu'il offre de fatisfaire pour fa part Sa Sainrteté, dans ce qu'Elle défirera de raifonnable dans la préfente Affaire. — Il eft diifïcile de parler des conditions de la Tréve;paree qu'elles ne feront pas les mêmes, li la Paix doit avoir lieu , ou fi la Guerre doit fe pourfuivre. Mais le Roi confentira a donner au Pape, par fon Ambafladeur ordinaire auprès de lui , des paroles qui, d'un commun avis, feront jugées convenables a la dignité des Parties. Et, quand la Paix.  Se c r e t s. 3j aura été réglée, il enverra or- dre a De Coeuvres, de remettre Cbiavenne entre les mains de Sa Sainteté (ar), a la même heure oü les Efpagnols rendront Rive (b); pour que le Fort que chacun a , foit rafé.— II en fera ainfi de tous les autres Forts de la Valteline. Dans la quatriéme Audience que le Légat eut du Roi, & dans deux conférences avec les Miniftres , il réitéra de nouveau fes initances pour Ia Tréve , & pour qu'il fut fait fatiffa&ion au Pape 5 ajoutant feulement a ces deux points, celui de la süreté de la ReligionCatholique dans la Valteline. — Jufqu'alors on n'avoit point demandé au Légat s'il avoit pou- (a) C'eft-a-dire de fes Officiers. . (b) A la défenfe de laquelle on a va qu'il» avoieiu été appelles, Bvj 162 j.  }6z5. ia) Celui de Légat. (i) Lefquels font piefque tous Hérétiques.. (c) Qui eft toute Catholique. 36 MÉMOIRES voir pour traiterj paree que^ pour propofer une Tréve, 6c requérir fatisfa&ion pour le Pape, il ne falloit d'autre ca^ ractère que celui donc il étoit revêtu (a). Mais la propoiltion qu'il faifoit aujourd'hui , de 1'établilfement de la sureté de la Religion Catholique dans la Valteline, étoit un point effendel de 1'Affaire ; comme fervant de prétexte pour modcrer la domination des Grifons (b) dans cette même Valteline (c). Avant donc de palTer outre, on jugea a propos de fcavoir poiitivement de lui s'il avoit pouvoir de traiter de 1'Affaire de ce Pays; 8c s'il reroit exécuter par Rome ce dont il feroit convenu pour elle. Le Légat répondit a cette queftion: — Je  Secrets. 37 n'ai d'autre pouvoir que celuique le Pape m'a donné, mais, dans le cas oü les affaires s'accommoderoient par mon entremife , ce que j'aurois fait,feroit approuvé. Cette réponfe vague mit les MiniTtres en Balance. Ils ne fcavoient s'ils devoient continuer ou celler de négocier avec le. Légat. Néanmoins 1'aflurance qu'il donnoit, que ce qu'il feroit, feroit approuvé [a), & 1'envie qu'avoit le Roi de montrer une confiance particuliere a la parole du Pape &: a celle du Légat, & de faire voir fes intentions droites pour Ie Public , furent caufê que le Monarque confentit a ce que la Négociation fe contïnuat. Les Miniïtres répondirent (a) Aflurance, dit le Texte , que le Pape ^vok confirme'e a Béthune. 1625,  i6z j. < I i K Lff , AmbaiTadeur ordinaire, 01 pa* Ho. Ambafladeur extraordinaire , dit k Textc 3 8 MÉMOIRES dabord a la demande d'une Tréve, & convinrent avec le Légat, qu'on laifTeroit ce point indécis. Quant a la demande de fatisfaction pour le Pape , Richelieu dit: — Le Roi écrira & fera parier 'a Sa Sainteté (a) de la manière convenable a fa dignité, & a 1'honneur du Souverain Pontife. Si la Paix s'établit, il enverra ordre aux Commandans aduels des Forts de la Valteline, d'y recevoir les Gouverneurs pour le Pape, qui s'y trouvoient cidevant, & de leur en céder le commandement > a condition que ces Forts feront démolïs oar les bras réunis des Troupes Prancoifes & Papales , afin ju'ils le foient plutót. Si Sa sainteté n'approuve point ce  S E C R E T S. 39 parti, Je Roi (quand Elle aura £sk abbattre le Fort de Rive) en fera remertre fans délai aux Troupes du S. Siége, un de ceux que les fiennes gardent:; lequel fera démoli, & tous les autres le feront fucceflivement. S'il fe trouvoit des difficultés a commencer par abbattre celui de Rive , Sa Majefté pourroit confentir que ce Fort & Ie premier qu'Elle remettroit, fuflènt démolis en même-temps. Le Légat ne voyoit pas une fatisfaction entière pour Ie Pape , dans cette livraifon conditionelle des Forts; mais il dit qu'il étoit aifë de convenir de la manière dont ia fatisfa&ion en queftion devoit s'exécuter, foit par la bouche de 1'Ambaffadeur de la.Couronne auprès du S. Siége , foit autrement; &c qu'il falloit chercher des tempéramens pour la démoHtioB 1615.  ij.0 MÉMOIRES ' des Forts. Pour ce qui étoit d'établir la süreté de la Religion Catholique dans la Valteline , le Légat déclara que cela appartenoit au Pape feut} & qu'afin que cette sureté fut plus grande, ainfi que celle des biens & des perfonnes des Valéfans, il falloit chercher auffi des moyens pour afFranchir ces IJeuples, de Ia domination des Griions. — On répondit au Miniftre de Sa Sainteté : — Le Roi confentira volontiers a ce qui ferapropofé pour la garantie de Ia Religion Catholique dans la Valteline, & pour le repos des Valéfans. Mais on ne doit pas confondre l'intérêt politiqjue avec celui de la Religion, & faire du fecond un intérêt d'Etat. Notre Monarque déclare nettement qu'il ne confentira jamais a rien qui foit capable de porter atteinre a la  S E C R E T 41 fouveraineté des Grifons (a) dans Ja Valteline, qu'il veut maintenir en entier. Tel fut le réfultat de la première conférence que le Légat eut avec les Miniftres. Dans la feconde (b), I'article concernant la sureté de la Religion fut débattu auffi , mais plus férieufement qu'il ne 1'avoit été dans 1'autre. Le Légat foutenoit que cette sureté ne pouvoit s'établir d'une manière folide, li Ton ne modéroit la fouveraineté des Grifons. Les Miniftres difoient au contraire : — Les Loix Divines & humaines veulent qu'on rende au Souverain ce qui lui appartient de Droit^ Perfonne ne peut nier que Ja domination fur la Valteline 11'appartienne aux Grifons j & ( le faire obferver ; 1'obligation avec ferment de la part des Grifons, de confentir a perdre leur fouveraineté fur la Valteline , en cas de prévarication contre les Articles concernant la Religion (b) ou bien 1'obligation de Ia part de Sa (a) Et dans lequel celui de Madrid fe trou•vera renfermé. (£) Laquelle prévarication , dit le Texte , feroit reconnue & déclarée par le Pape & stre Monarque conjointement. 1625,  x6i j. (u) 19 de Juin , jour auquel avoit eu lieu , comme 1'on vient de voir . la feconde conférence du Légat avec les Miniftres du Roi. 44 MÉMOIRES Majefté de faire que les Valéfans ne puhTent, quoi qu'il arrivé, contracter d'Alliance avec d'aucres qu'avec la France. — Le Légat répondit a ce que les Miniftres venoient de dire : — II fauc,.Meffieurs, pour afsürer la Religion, trouver un expédient plus fort qu'aucun de ceux que le Roi ofFre. L'après - fouper du même jour (ö) , le Miniftre de Sa Sainteté eut Audience du Monarque fur deux points; 1'un , concernant les Vailfeaux que 1'Angleterre armoit, & qu'il croyoit deftinés pour paiTer en Italië ( chofe pernicieufe a la Religion Catholique.) — Le Légat fupplioit le Roi de ne point les recevoir dans fesPorts. — L'autre point regardoit les efFets  S E C R E T S. 4y faifis, foit en France, foit en ^ ' Efpagne, aux Sujets refpectifs 1 des deux Rois \a). Le Miniftre de Sa Sainteté prioit Ie Monarque d'arrêter 1& cours des inconvéniens, en faifant rendre les Barques &c les Patacons pris par le Duc de Guife , & rel-acher les VahTeaux arrêtés a Calais. — Le Roi répondit ' quant au premier Chef: — J'ignore quel elt 1'objet de l'armement de 1'Angleterre. Je me garderai bien de confeiller qu'il fe falfe au préjudice de la Religion Catholique. — Je ne puis, fans fujet légitime, refufer mes Ports aux VailTeaux de cette Couronne. Le Roi répondit au fecond Chefr- Les Barques que le Duc de Guife a prifes, font (a) Aux Sujets de Louis XIII, par les Efpagnols j a ceux de Philippe IV , par les fian-, cois,  46 MÉMOIRES — Génoifes. Le Roi d'Efpagne n'a 1 donc aucun droit de fe plaindre a ce fujet. — Je ferai relacher les Vaifieaux retenus a Caiais, quand on me donnera main-levée pour les biens faifïs dans les Etars de ce Monarque fur mes Sujets. Et au refte la violence dont on y a ufé , en faifant ces faifies jufques fur les Officiers de la Reine d'Efpagne , ma focur, me paroit érrange. Le lendemain (a), le Légat envoya au Cardinal de Richelieu un Ecritde fafacon, parlequel il croyoit que la Religion Catholique étoit mife en sureté dans la Valteline, II déclaroit néanmoins,a.la fin de eet Ecrit, qu'il n'entendoit pas propofer les diverspartis qu'il renfermoit, autrement qu'en les foumettant (a) ;o de Juin.  S E C R E T S. 47 i 1'examen du Pape Sc du S. Sic- ■ ge. Vcici quels étoient ces partis (a); r i° De joindre la Valteline 8c les Comtés de Chiavenne Sc de Bormio, a 1'Evêché de Colre, ficge qui prétendoit y avoir de grands droits. Moyennant j quoi, 1'Evêque feroit avec la France la même Alliance que E cella qu'avoient les Grifons. Et on auroit 1'attention d'élire un Evcque, Sujet du Roi, 6c ayant fa confiauce. 2° De faire de la Valteline Sc des deux Comtés, une qua.triéme Ligue; qui auroit un Gouvernement a part pour la | Religion 8c la Juftice 5 Sc Ie même Gouvernement que les trois autres Ligues, pour les intéréts publics j Sc qui s'allieroit, comme elles , avec Ia IjFrance. (s) Dout il donnoit lq choiï. 1 62 J.  1Ó25- j.8 Mémoires 3° De faire de Ia Valteline k des deux Comtés, un nouveau Canton SuilTe, qu'on joindroit aux Treize autres , ou lux Sept Catholiques feulement; qui auroit la même communion que ceux - ci ; & qui s'allieroit avec Ia France, conpintement avec tout le Corps Helvétique. 40 Pour donner , dans Ia Rhétie, la fupériorité au Parti Catholique fur I'Hérétique , former de ceux qui compofent le premier, un Corps 3 y johidre la Valteline &: les deux Comtés; & que le tout enfemble s'allie avec les CantonsSuiffes Catholiques. 5° Si les Grifons confentoient a chaffer de leur Pays tous les Prédicans, avec promefle süre d'embrafter la Religion Catholique , la Valteline & les deux Comtés feroient remis fans délai fous  S E C R E T S. 49 fous leur domination, avec Ia garantie' nécelTaire pour cette même Religion. 6° Inféoder Ia Valteline & les deux Comtés a une Puiiïance tieixe, Carbolique, tels que font les Cantons Suilfes de cette Communion , ou a un Seigneur particulier de chez eux, qui continuat lJAHiance qu'ils' ont avec Ia France. 7° Inveftir les Valéfans, en les^ rendant Feudataires des Grifbns, des Droits que ceuxci percoivent dans le Pays de ceux-Ia ; fans néanmoins obliger ces mêmes Valéfans a aucun fervice perfonnel , mais feulement a une redevance pécuniaire; Sc pourvoir a ce que les Grifons ne les pulTent molefter , fous prétexe de Félonie. So N'établir dans Ia Valteline .& les deux Comtés, que des XXXIII. Panie. C  I 6 i j. jO MÉMOIRES Gouverneurs Grifons, Catholiques ; remettant au S. Siége le foto de juger fi les Communes dont ils feront tirés, font Catholiques ou non. Chacun de ces partis, pris féparément , pourroit être agréé, moyennant une redevance en argent a 1'égard des Grifons , égale au revenu qu'ils étöient dans l'ufage de tirer des tïois Pays en queftion. Les Miniftres de France rejettèrent tous ces partis , comme tres - déraifonnables , & y répondirent par un Ecrit, dont voici la fubftance : —■ Les expédiens propofés par le Légat font de deux fortes. Les uns privent enttèrement les Grifons de la fouveraineté fur la Valteline &c les Comtés de Chiavenne & Bormio; les autres ieur en lailfent fimple-  SECRETS. yi ment quelqu'ombre. Ceux-ci ne lont pas plus admiffibles que ceux W; attendu que J'honneui & Tequité de notre Monarque «e lm permettent pas de faire aucun Traité qui öte aux Griions (a) Ia fouveraineté , ou qui ff Ieur e» iaifTe que laplusfoibJe apparence. II fauc donc s'en tenir aux propofïtions qui ont ete faites de fa part; Iefquelles, en laiflant aux Grifons ce qui leur appartient, pourvoient fuffiiamment a Ia süreté de la Re< i'g'on (b). Outre ces propofïtions Sa Majefté promet au Pape de faire peu-a-peu (quand on aura traité ) confentir les Grifons a ce que les Valéfans foient établis d'une manière (") Ses Alliés. que le Roi faifoit offnr au Légat par f« Miniftres pour plus grande süreté'de e tc «erae Relig.on Sans la Valteline Cij  ï6z j. fa) Voyez ce qui eft dit a la fin de 1 Are cl-, qui renferme le huitiéme des partis | qiteftion, 'j3t MÉMOIRES plus avantageufe, fans néanmoins qu'il fok porté atteinte a Ia fouveraineté des premiers a 1'égard des feconds. Le Légat répliqua a ce que eet Ecrit des Miniftres renfermoit, par un nouvel Ecrit de fa facon , oü il difoit: — Des huk partis' que j'ai propofés , les uns femblent priver les Grifons, de la fouveraineté directe fur la Valteline, les autres, de la fouveraineté ütfle ; mais ni I ceux-ci ni ceux-la ne les en privent. Car chacun de ces partis leur accorde un dédommagement égal a ce qu'ils abandonnent (a). Le Roi donc ne fait ni violence ni tort aux Grifons , en en admettantun.il préjudicie moins encore a fa répuj tation 5 attendü que Ia Valtèline  S È C R E T S. H èft en fon pouvoir, & que fon • crédit fera 1'accommodement. Sa gloire même éclatera dautant plus qu'il ne fe fera proj pofé dans cette Affaire, que la Religion Catholique. L'inféodation entre Souverains (a) n'eft pas une chófe nouvelle. Eilé fe fait pour des motifs moindres que celui de la Religion. D'ailleurs , outre la. redevance que les Grifons retireroient de celui ou de ceux a qui ils inféoderoient la Valteline, ils demeüreroient toujours maïtres des Paffages.Pour la sureté de ces Paffages, il eft néceffaire de fëparer les intéréts de ces mêmes Grifons , d'avec ceux des Valéfans ; car h* le (a) Telle que feroit celle que les Grifons feroient de la Valteline, aux Sept-Canrons Suiffes , Catholiques, ou a quelque Seigneur particulier , établi dans ces Canons. — Voyez 1'Article renferraaut le fixiéme parti, propofé par le Légat. Ciij i6z5.  JÓ2J. 54 Mém oi r.e s premier de ces deux Peu pips continuoit d'avoir la domination fur le fecond , le dano-er de ruprure entr'eux continueroir auffij paree que celui-ia voudroir gouverner avec violence , & celui - ci fe venger. Maïs, féparés d'intérèts , ils pöurrolenc fe maintenir tranquilles., paree qu'ils n'auroient rien a démêler enfemble. Ec les Grifons n'oferoient pas maltraiter les Valéfans, fans être .sür.s'de 1'a/iïltance du Roi de France, qui leur feroit toujours refufée. Ce 11'eft pas chófe égale de contenter les uns & de contenter les auüres. Souftraire les Valéfans a Ia domination des Grifons , eft utile a la Religion; les laiffer'fous cette domination, lui eft nuifible. Cette Réplique du Légat déplut fort au Roi. Le Monarque rrouva les raifons du Miniftre  S E C R E T S. de Sa Sainteté, plus métaphy-fïques, que fondées fur la juftice. II lui paroifïbit étrange que le Légat voulüt priver les Grifons , de la fouveraineté , pour un prétendu dédommagement en argent. C'efl: un tort infigne , difoit-il, qu'on leur fait5 attendü qu'il n'y a aucune proportion entre 1'abandon de la fouveraineté & une recpnnoiffance pécuniaire , quand il s'agit de différend entre Souverain & .Souverain ;& qu'il y a moins de proportion eiïcore, quand le différend a liéu entre le Souverain &c le Vaffal (a).— On prétend de plus, ajoutoit leRoi, que je ne ferois ancun tort a ma réputation , en admettant un des partis propofes ; & ceia , (a> Et qu'il faut que ce foit le premier qui fafTe 1'abandon dont il s'agit. C'efl: le erf, ou ï'oi a vu que le Légat mcttoit les Griions par les partis qu'il propofoit. Civ 162 j.  (a) C'eft ce que le Légat difoit, U n'y & fu'un moment, 56 MÉMOIRES paree que la Valteline eft en mon potfvoir , Sc que mon crédit fera 1'accommodement (a).—Je fuis au contraire , pour cette raifon, plus obligé I remettre les Grifons en pofleffion de la Valteline. Je le dois par l'intérêt de mon Alliance , qui ne fcauroit être maintenue au Ui entière avec d'autres qu'avec ces Peupjes; je le dois encore plus par honneur Sc par réputation.  S E C R E T S. 57 Artichs pour taccommodement des Affaires de la Valteline. lis font remis au Légat, qui les envoje fur le ckamp d Rome par un Courier. La France Je déjifle de la demande qu'elle faifoit, que le Roi d'Efpagne envoydt djbn Amhaffadeur auprès d'elle le pouvoir néceffaire pour traiter j & elle fe contente de la parole que donneroit le Pape ou le Légatifcavoir que ce Monarque approuveroit tout ce qui feferoit. Raifon de cette conduite de la France. Combat rude & opinidtre donnéfous Nove, entre l'Armée de cette Couronne & celle d'Efpagne. Affreux ravage que Les maladies font dans la première. La dure réfïflance que les Armes Francoifes avoient trouvée dans la Valteline & l'Etat de Gènes , rendent meilUufes les difpofiC v  58 Mémoires . tions a Paccommodement. Le Légat redouble d'ardeur pour faire enjorte qu'il foit tsrminé. Paix entre le Roi & les Huguenots. ■ i6zy Le 7 de Juil/et, Ie Cardinal de Richëlieü , Ie Maréchal de Schomberg & d'Herbaut (a) eurent uri long entretien avec Ie Légat fur les partis toujours en queftion, mais fans rien conclure. Seulement le Cardinal die au Miniftre de Sa Sainteté : — Le Roi , Monfieur , veut, a i'exemple des Princes généreux, donner en une fois tout ce qu'il peut donner. II a réfolu de vous &|re préfenter un plan d'Articles , tant de Police que de Religion , pour 1'accommodement des öiFaires de la Valteline. Vous y verrez, Monfieur, (a) Tous les trois Miniftres.  S E C R E T S. 59 que Sa Majefté fe relache beaucoup quant a fes intéréts & ceux .de fes Alliés (a) \ &c cela, pour la sureté de la Religion Catholique , pour le repos Public, & paree qu'Elle a ia fatiffacèion de voir les chofes fe terminer par votre entremife. Le i o de Juillet, les Articles furent portés au Légat. Voici quels ilsétoient enfubfeance. ARTICLES DE POLICE. i° Les Forts conftruits par les Efpagnols dans la Valteline & les Comtés de Chiavenne & Bormio feront démolis, fans qu'ils puilTent être rétablis, ni d'autres élévés a leur place. 20 L'AIliance de Ia France avec les Grifons demeurera en (a) Les Grifons. • Cvj 162,5.  ia) Pour Ia rébellion de ceux-ci a 1'égard 4es Grifons, leuis Maitres. 60 Mémoires fon entier 5 fans que ceux - cï puhTent en contracter avec aucun Prince polTédant des Etats en Italië, finon du confentement du Roi. Et tous les Traités faits par d'autres avec eux depuis 1'année mil lix-centvingt, feront nuls. 3e Aqcun Prince polTédant des Etats en Italië , ne pourra prendre palfage par la Valteline & la Rhétie , qu'avec le confentement aufli de Sa Majefté. 40 Oubli général du palfé pour les Valéfans (a). 5® Dans le cas oü les Grifons contreviendroient a ce qui concerne la -Religion dans le préfent Traité , les Valéfans ( la contravention juridiquement prouvée) feront affran-  S E C R E T S. 6t chh de leur domination , fans■ néanmoins pouvoir fe donner a un autre Prince ou République, ni fe mercre fous une autre protection , que celle fous laquelle les Grifons font maintenant (a). Et Ie Roi promet a ceux-ci d'approuver par une Déclaration , qu'ils obfervent les Articles du préfent Traité , qui regardent la Religion. Mais Sa Majefté promet en mêmetemps de s'obliger a déféndre lés Valéfans, dans le cas de ia contravention en queftion } youlant que fon Alliance ferve a confolider 1'établiiTement de la Religion Catholique chez eux. 6° Les Grifons continueront d'envoyer des Gouverneurs , élus par leurs Communes % dans tous les endroits de la Valteline 00 C'eft-a-dirc celle de la france. iGiy  (a) Tant de ceux qu'on vient de voir, H..e de ceux qu'on va lire. '£Tz MÉMOIRES .& des Comtés de Chiavenne & Bormio, ainfi qu'ils étoient dans 1'ufage de faire; a condition que ces Gouverneurs feront Catholiques , Sc non autres 3 Sc qu'ils n'adminiftreront la Jufticte , foit dans le civil, foit dans le criminel , qu'avec 1'affiftance des Lieutenants des lieux ou ils exerceront leur Office. Et, en cas d'appel, chofe alfez ordinaire aux Grifons, les Proces feront revus par des Juges Catholiques, élus aufli par les Communes. ART IC LES concernant la Religion. i° Le Roi fe rendra garant pour les Grifons, de 1'obfervation exacte des uns Sc des autres Articles (a) } particuliere-  S E C R ETS. 63 ment de ce qui concerne la sü- 1 reté de la Religion Catholique dans la Valteline , &c dans les Comtés de Chiavenne & Bor- 1 mio. 20 Les Gouverneurs qui feront envoyés dans ces trois Cantons, feront profeffion de Ja Religion Catholique , entre les mains du Nonce (a) ou de PEvêque de Coire ,, avant de prendre poiTeffion de leurs Em~ ; plois. 3° Dans ces mèmes Cantons, comme a Grufcio & Pofchiavo au-dela des Monts, il n'y aura d'autre exercice de Religion que celui de la Catholique. j ^ 40 Nul Hérétique ou fauteur : d'Héréfie ne pourra y acquérir de domicile ; & ceux qui fe trouveront en avoir , ainü que des biens-fonds, ne pourront (a) Auprès des Cantons SuuTcs , de mcme croyance. 161 j*  i6i j. 64 MÉMOIRES faire leur demeure ordinaire dans les Cantons dont il s'agit toujours j ni jouir de leurs biens, que par la voie de Catholiques; ni aller dans le Pays, pour faire valoir ces biens, que deux fois 1'année , en deux mois différens , 1'ün pour les cultures , 1'autre pour les récoltes. Et, en cas qu'ils fiiTënt quelque chofe contre la Religion Orthodoxe , en faveur de leur croyance , ils feront déchus du privilege d'y aller, ces deux mois, Sc ne pourront recevoir leurs revenus, que par la voie de perfonnes Catholiques. 5o Tous Eccléfiaftiques,tant Séculiers que Réguliers, Sc tous Vifiteurs pourront entrer librement dans la Valteline Sc les Comtés de Chiavenne [Sc Bormio , pour y faire leurs fonctions felon 1'ufage de 1'Eglife,  S E C R E T S. 65 6° Tous les biens ufurpés a ces mêmes EcclefiafHques depuis quarante airs, dans 1'étendue des trois Ligues , feront rendus; Sc 1'Action contre les ufurpateurs ou leurs héritiers fera permife. 70 Le Roi fe rendra garant du pardon qui fera accordé aux Valéfans par les Grifons (a). 8° Les doutes fur Pintelligence ou contravention des préfens Articles feront réfous par le Pape , avec Pavis du Roi. 90 Les Grifons feront ferment dans la forme la meilleure, pour 1'obfervation de ces Articles 3 Sc les Suifles feront garans de ce ferment, fur ia demande qu'en fera le Roi. (a) Et qui eft 1'objet du quatriéme Atticle £e Police . qu'on a vu ci devant avec ks autres Articles de ce genre. 1625.  JÓ25. [ (a) Ce même Légat. 66 MÉMOIRES Le Légat envoya fur le champ | a Rome , par un courier, les] Articles en queftion , afin del fcavoir le fentiment du Pape. I Car le neveu de Sa Sainteté (a), | agé feulement de vingt-quatre ans, n'avoit pas affez d'expé- : rience des affaires pour juger de leur valeur ; fans compter qu'il étoit naturellerrnent timide & irréfolu , & qu'il avoit des pouvoirs limités. Le Comte de Gondemar augmentoit encore j fes irréfolutions. Ce Seigneur repaffanten Efpagne, d'Angle- 1 terre ou il avoit été AmbafTa- deur extraordinaire de Sa Majefté Catholique, s'arrêta quel- j que tempsa Fontainebleau,oüil épioit la Négociation du Légat; a laquelie il difoit que fon Roi lui avoit défendu d'inrervenir, paree que ce Monarque ne I  S E C R E T S. 6j vouloit poinc traiter de Paffuire " de Ja Valteline, que le Dépot des Piaces de ce Pays, óté au Pape, n'etit été rendu a Sa Sainteté, & qu'on ne Peilt tetasfaite. Les Miniftres qui étoient auprès de la Perfonne de Louis Xlir inltruifirent Béthune (a), de la Né gociation. Ce fut avec des couleurs propres a la lui faire voir conduite par eux fageme.nt. Si le Légat, lui marqué 1'un de ces Miniftres (b), n'eiit pas changé de fa^o.n de traker, le Roi eut joué au plus sur. C'eut été en faifant la Paix \ aveclesHuguenots.Et peut-être j que s'il 1'eüt fallu, il fe feroit ; joint avec PAngleterre , pour j entreprendre avec elle une (<2)Toujours AmbafTadeur de France auprès du S. Siége. (b) C'étoit d'Hcrbaut. La Lettre eft du 4 dejuillet, iér;. 1625.  (a) Dont 1'objet cüt été le rétablilfement de 1'Eledteur Palatin, beau-frère du nouveau Roid'ADgletetrc. 68 Mémoirês grande Guerre au dehors (a),— Le Légat procédoit lentement, en traitant. Dans les Audiences qu'il avoit du Roi , dans fes conférences avec les Miniftres, il répétoit toujours les mêmes chofes, 8c recevoit les njêmes réponfes, auxquelles il fallüt a la fin qu'il acquiefcat. Jufqu'alors tout s'étoit négocié de vive voix, fans qu'on eut rien couché par écrit. LeRoi entendoit afsürer dans la Valteline la liberté de la Religion Catholique, mais non de maniere que les Grifons fes Alliés perdilïent la fouveraineté qu'ils ont. fur ce Pays; enforte que PEfpagne put s'en emparer tout a fon aife. Le Légat difoitque, pour y établir folidement la sureté de la Relï-  S E C R E T S. (><) glon Catholique , ij falloit en " oter la fouveraineté aux Gri■ fons, ou la leur diminuer (a). Le Roi ofFroit, pour Pétablirfement de cette sureté , d'intervenir avec les SuifTes au Traité qui fe feroit; ie pouvo'ir de fes armes pour le faire obfe.rver; 1'obliga1 tion avec ferment de la part 1 des Grifons , de confentir a perdre leur fouveraineté fur la Valteline, en cas de prévarication contre les Articles concernant la Religion (laquelle prévarication feroit reconnue &c déclarée par le Pape & Ie Monarque conjointement) 5 ou \ bien 1'obligation de la part de 1 Sa Majefcé-, de faire que les Valéfans ne puffent, quoiqu'il arrivat, contracfer d'Alliance (d) C'efl: ce qu'on a vu , foit par I'Ecric qu'il avoit envoyé au Cardinal de Richelieu f [oit par le fecond entretien qu'il avoit eii ^cc lui Sc les autres Miniftres, 1615.  i < j j ■ i c s £ c é f 70 ^Mémoires avec d'autres qu'avec la France (a). — Maïs ni le Roi ne pouvoit perfuader le Légat, ni Ie Légat ne pouvoit perfuader Ie Roi. La-delTus on mit par écritdiver/ès Confidérations(^). — Le Monarque oppofoit a ce jus le Légat difoit, la raifon k la juftice , qui ne permet:oient pas qu'on portat la moinire atteinte a la fouveraineté les Grifons fur la Valteline. Ir )ppofoit auffi fon honneur, qui 'obligeoit a remettre ces Griöns, fes Alliés, en pofTellion (a) Toutcs piopofitions qu'on a vues cievant , & donc d'Herbaut a dü inftruirc lethune dans Ia préfente Lettre; afin de faire oir la fage conduite de fes Collégues &. de in, dans leur Négociation avec Ie Légat. WPar le mot vsgue de Cortfidérations,il faut ntendre 1'Ecrit que le Légat avoit envoyc u Cardinal de Richelieu , & par lequel il royoit mettre la Religion Catholique ea irete dans Ia Valteline ; la réponfe des Mi-. iftics a eet Ecrit ; la réplique du Légat h zuc réponfe ; & les Articles que ceux-li rentportet a celui- ci, lciode Juillet,toutCS oofes qu'on a vues auifi ci-devant.  S E Ó R E T S. 71 I du Pays dont il s'agit; Ie Traité i de Madrid , qui Ie prefcrit ainft, Ja confirmation de ce Traité par Ia décifion des Théologiens du Pape en faveur de la reiHtutlon , conlêntie par les premier & fecond Articles , exa-minés par eux Sc approuvés. | : Dans la cinquiéme Audience Jqüe le Légat a eue du Röi, il Ilui a fait des repréfentations fur Sla jufte crainte que lui donnoic, Ipour la Religion Catholique, |Irarrnement naval de 1'Angleterre , Sc fur les faifies faites en iFrance Sc en Efpagne aux Sujets refpectifs des deux Rois (a). Le Pape étoit fort flatté de 1'honneur que Louis XIII avoic fait a fon Légat, eh lui donnanc da première Audience , tout (.a) Ceux de ces deux Etats. — Nous avons .rapporté un peu plus liaut lesRepiéfentacions> ■ 4u Légat & ia Réponfe du Roi. 1625,  1615. Jl MÉMOIRES malade qu'il étoit, &. dans fon lit. Mais le S. Père étoit faché du peu de fucces qu'avoit la Négociation de ce même Légat; de j ce qu'il avoit efluyé un refus ab- [ fblu , tant fur .la demande de la Tréve, que fur celle de la reftitution des Places de la Valteline. Pourvü cependant, difoit le Pape a Bétbune [a], que le fond de 1'Affaire fe traite, &c promptement, je ne vois pas un grand inconvénient au refus de j la Tréve. Je ne vois pas non plus de néceffité pour le Roi, , d'attendre que 1'Ambaffadeur i d'Efpagne auprès de fa Perfon- l ne(/>) recoive pouvoir pour trai- | ter de cette même Affaire , j quand je donne sureté a ce ! Monarque, pour Papprobation | de la part du Roi Catholique, (a) Toujours Ambafladeur de France auprès j siu S. Siége. (A) Le Marquis de Mirabel. dq i  S E C R E T S. 75 de tout ce que mon Légat feroit en mon nom. Je ne fuis pas il léger pour rien propofer au Roi Très-Chrétien, qui I'expofe a la honte du refus. Quant aux Places de la Valteline, il fuffit de 1' aveu que la France a fait du tort qu'elle a de s'en être omparée. Pour éviter de faire éclater aux yeux du Public eet acte d'irrévérence a 1'égard du S. Siége, il faut quelle fe difpenfe d'en rétablir entre mes mains le Dépot. C'elt a mon avis, écrit Bétbune a d'Herbaut (a), une tournure adroite dela part du Pape, pour fe fouftraire a la néceffité de pourfuivre ce rétabliiïement. Je n'ai dit autre chofe au S. Père (a) L'un des trois Secrétaires d'Etat , qui avoient remplaeé Puylieulx. — La Lettre(dans laquelle le premier rend compte au fecond , de tout ce langagc que le Pape venoit de lui tenir ) eft du ij de Juin , ióiy, XXXIII Partit. d IÓ 2 J.  1625. (a) Voyez quelques lignes plus haut.^ (b > SCavoir que , pour cvuci ut nia ter aux yeux du Public , &c. Voyez aufli quelques ligues plus haut. 74 MÉMOIRES la-detfus, finon que, de I'aveu ingénu que la France faifoit de Ion tort [a), il pouvoit aifément conclure que notre Monarque avoit eu des intentions droites & refpe&ueufes a fon égard , par rapport a tout ce qui s'étoit fait dans la Valteline j & que les raifons fur lefquelles il s'étoit fondé pour en ordonner Pexécution, le juftifioient alfez contre toute incuipation d'offenfeenvers Sa Sainteté.—Voulaut cependant faifir l'occafion d'en ufer vis-a-vis du S. Père avec toute forte de civilité, je me fuis rendu a fon avis {b). — Le Pontife s'eft facilement contenté des raifons que la France donne pour refufer la Tréve > mais il fent vivement la dépenfe  S E C R E T S. 75 » qu'il eft obligé de faire pour fe tenir armé ; & die qu'en attendant, les affaires trameront en longueur. Quant a^ce qu'il a déclaré, qu'il ne voyoit pas de néceffité pour notre Monarque d'attendre que 1'AmbafTadeur d'Efpagne auprès de fa Perfonne reak pouvoir pour traiter de 1'AfFaire de la Valteline , &c. (a), je lui ai répondu : — Votre Sainteté doit fe reflbuyenir de ce que je lui ai toujours repréfenté 5 fcavoir que je penfois qu'on ne pouvoit travaiiler a un Traité, fans qu'on vit le pouvoir en queftion; paree qu'autrement la conclufion de Ja Paix & fa rupture dépendroient du vouloir du Roi d'Ef- ,a) Voyez encore quelques lignes plup Dij 1625.  J 625. 00 La conclufion de la Paix, paree que ce pouvoir eft nécefTaite ponr la faire en régie ; fa rupture , paree que, fans ce pouvoir, Sa Majefté Catholique, n'étant point interventie au Traité , ne feroit point. obligée de s'y tenir. (b) C'efl: toujours le pouvoir qu'on atten» doit d'Efpagne pour 1'AmbalTadeur de cette Couronne auprès de Louis XIII, afin qu'il put traiter. j6 MÉMOIRES pagne (a).Votre Sainteté, comme un Père bon , qui fouffre quelquemanquement de la part de fes enfans, diffimuleroit le refus du Roi Catholique par rapport a ce pouvoir. Mais notre Monarque , qui n'a aucun fujet de contefter avec lui, par conféquent de difïïmuler, ne veut point que le Public voye que 1'acquiefeement ou le refus pour ce que Votre Sainteté juge raifonnable (b), dépende de ce Prince. Le Pape a répliqué: — II n'y a nulle apparence que 1'attente  S E C R E T S. 77 jdu pouvoir dont il s'agit, ar-' ; rête le cours de la Négociation; puifque je promets a votre Maïtre que le Roi d'Efpagne tiendra pour conclu Sc arrêté tout ce dont mon neveu(a) fera convenu avec la France (b). — Jai foutenu conftammentauS.Père, continue Bétliune dans fa Lëttre, qu'on ne pouvoit rien faire de sur dans la Négociation, fi le Roi d'Efpagne n'y intervenoit; 6c qu'il falloit par conféquent que ce Monarque envoyat pouvoir a. fon AmbaiTadeur auprès du nötre. S'il avoit a traiter avec un inférireur a lui, ai-je dit a Sa Sainteté, comme le feu Roi fon Père eut a traiter avec le Duc de Savoye dans ia Paix (a) Le Légat. {b) On a déja vu 1'équïvalent de ccla ci- Diij i6z 5.  1625. (a) A laquelle, ajoute Béthune , il ne voulut point intervenir; content d'avoir la parole de notrc Monarque , par moi, fon Repréfentant. — Cette fameufe Paii fut conclue moyennant le Traité d'Afti, qui termina le long différend qui avoit eu licu entre Philippe III Sc Charles Emanuel : affaire détaillée d'unc facon fi étendue dans les Parties precédentes de ces Mémoires , & qui en eft un des Articles les plus curieux. (b) Attcndü que 1'AfFaire eft de Roi * Roi. 78 Mémoires de Lombardie (a) , il y auroit quelque apparence de raifon dans Je refus de ce pouvoir. Mais Ie cas préfent n'eft pas le même (b) •■> Sc, fi le Roi d'Efpagne perfifte dans le refus en queftion , on peut 1'accufer juItemenc d'avoir del'éloignement pour la Paix. II vous prend pour encremeteur 6cnon pour garant* afin d'écarter tout fujet qu'on pourroit avoir de recourir a Votre Sainteté dans le cas de manquement , atfez ordinaire aux Efpagnols.  S E C R E T S. 79 Béthune finic fa Lettre ad'Herbaut, de Ia facon fuivante : —- Le Roi Catholique ne veut point paroitre dans la Négociation , Sc demande qu'elle ait lieu entre la France Sc le Pape feul. C'efl: afin de donner a entendre qu'il ne prend d'autre intérêt dans cette Affaire, que celui de la ReI ligion ;Sc qu'il n'a pris les annes i que pour la défendre. — Je luis | perfuadé que fi nous tenons I ferme, il mollira, Sc qu'il eni verra a fon Ambafladeur a Paris , le pouvoir nécelfaire pour traiter. Quant a 1'ofFre que notre Monarque a faite au Légat, d'allifler le Pape, je crois qu'il a excédé en cela. Le S. Père aura penfé que la France craint les Efpagnols; car il me dit que, pour ce qui étoit des ofFres de Ia Couronne, qui le regardoient, il ne vbyoit pas qu'il Div 1615.  (d) D'oü Béthune veut conclure que Louis XIII, en offranr fon aififtance au Pape , Sc bravant par conféquent les Efpagnols, contre lefquels feuls lePontife pourroit en avoir befoin, Louis XïII, dis-je , s'eft montré femblable a ceui qui ont le défaut de trop craindte, & s'eft manqué a lui-même. So MÉMOIRES - en eut aucun befoin 5 attendu qu'il n'appréhendoit de la part de perfonne, Sc qu'il n'etoit point timide. — Ceux , ajoute ici Béthune, qui font notés du vice de craindre plus qu'on ne doit , font vivement piqués qu'on leur falfe voir qu'on le reconnoit dans eux; Sc, pour le cacher autant qu'ils peuvent, ils bravent Sc menacent plus que les autres (a). L'Ambaffadeur de Venife eft venu me voir de la part de fa République , pour me prier d'engager notre Monarque a. donner fes ordres pour de nouvelles levées > afin ( m'a dit rAmbaffadeur ) que 1'Armée  Secrets. 8i iqui eft dans 1'Etac de Gènes," ine fe réduife pas a rien ; car on apprend qu'elle eft fort afilfoiblie, a caufe du trop de faicilité du Connétable a accorllder des Pafte-ports aux Soldats ||qui lui en demandent. Les forI ces qu'a le Roi d'Efpagne dans ce même Etat de Gènes, croifij fent chaque jour ; ex il faut I être attentif a ce qu'elles n'y I deviennent pas fupérieures a celles de la France. Le Cardinal Rivarola propofa a Béthune qu'on rit entrer dans Gènes fix mille hommes des Troupes du Pape, & qu'on y arborat fes Enfeignes ■■, afin de mettre la Ville a 1'abri du danger de tornier au pouvoir des Efpagnols Louis XIII marqué ces chófes a fon ConnetaDv 1625.  iÓ2J. 82 MÉMOIRES bJe (a), & il pourfuit de cette forte: — Je trouve fort obfcur ce que propofe le Cardinal Ri~ varola ; paree que cette Éminence n'indique point les moyens de le faire réuffir, &. qu'il feroit difBcile de les trouver. Sa propolition fait foupconner que , fous prétexte de fauver Gènes du joug Efpagnoi, fon defTein eft d'engager le Pape a fe déclarer pour cette Répubüque, contre les armes de la France. II peut fè faire cependant que la crainte de voir Gènes devenirfujettede PEfpagne, ait pouflè le Cardinal a propofer qu'on y fit entrer fix mille hommes des Troupes du Pape. ( ce dont De Cceuvres s'etoit plaint amèrement a leur Ambalïadeur auprès des Treize - Cantons. II foupconnoit fort que leur réferve venoit de la lenteur& de la vartation qu'ils remarquoient dans les Confeils de la France. Quoi qu'il en foit, comme le long repos pouvoit avoir diminué la réputation de fes armes, il réfolut d'attaquer Nove , dont la conquête lui eüt beaucoup fervi a ferrer Rive; il ordonna les préparatifs pofl&r cette entreprife. Ce fut en faifant venir de Bergame deux groiTes piéces de canon de batterie , & en renforcant le Régiment de Berne, qui gardoic Chiavenne. L'arrivée du canon tar- da long-temps * mais ce temps  S E C R E T S. 8? fut employé a faire palier fur le Lac de Chiavenne deux Barques Vénitiennes , armées j avancage qui ne répondoit pas a 1'efpérance qu'on avoit de fermer le pallage des vivres a Rive par eau. Car les Efpagnols , avec des Barques 6c des Brigantins qu'ils mirent fur le i même Lac, 6c quelques canons, i placés dans des endroits favorables, le nettoyèrent bientöt des Batiments qui l'infeftoient, : 8c rendirenc Ia communication avec Rive , libre comme aupa; ravant. Cependant De Cceuvres affïgna Campo pour le rendezvous général de fes Troupes. Son deffein étoit de mettre fon I canon en batterie durant Ia ï nuit, pour battre Nove en bré1 che , le lendemain. Mats, l.oin qu'il fe fit une attaque feule , conformément a ce qui avoit 1615.  ] 1 ( 1 I t i 90 Mémoires ' été arrangé, Vaubecourt ayane logé crois Compagnies du Régiment de Normandie pres du folie de Codaire , & ne fe trouvanc plus entre les deux partis que ce petit Canal5le voifinage occafionna une furieufe efcarmouche , qui engagea au combat Ie refte du Régiment puis toute 1'Armée. II fut rade & opiniatre, & dura jufqu'a Ia deuxiéme heure de Ia nuit. Les Francois eurent environ deuxcents hommes tués dans cette ïction ; fans compter quancité ie bleffés, parmi lefquels étoient ept a huit Officiers. Les Réginens qui fe diltinguèrent Je >Ius , furent ceux de Norman[ie , de Vaubecourt & de Saice , dont Ie premier répara , >ar fa valeur & fon intrépidié, la faute qu'il avoit faite en e prelTanr trop. — Moyennant e qui venoit de fe pafier ,1'en-  S E C R E T S. 91 l treprife de Nove demeura in: terrompue > 6c elle ne fut plus =.| tencée, paree que les paflages ; ayant été mieux reconnus, la ij difficulté de faire avancer du canon («) parut plus grande qu'auparavant. Les maladies Ij d'ailieurs, qui infectèrent 1'Ari mée aux mois de Juin, Juillet I êc Aoiit , la diminuèrent li : confidérablement (b) , que tel • Régiment qui avoit mille Soli dats , fut réduit a moins de 3 cent, 6c toute 1'Armée a trois •\ mille hommes au plus; ayant ^ la plus grande partie de fes Officiers malades. Celle d'EfpaSj gne ne fut pas épargnée, mais (a) Pour le cas ou 1'on en auroit encore i beibin. | - (i) C'efl;, dit 1'Auteur de ces Mémoires, i ce qui arrivé d'ordinairc aux Armées Fran- joifes ; attendü que les corps délicats de ceux I ce la Nation réfiftent mal aux chaleurs ex- ecfïïves dH climat dc 1'Italie , * a 1'ufage. inisiodéré dts fruits non encore mürs»  l6l j. 1 ] (a) L'Archidue d'lnfpruck , qui joue toujours un G grand röle daus 1'Affaire aftuellc. {o) Miron. 9* Mémoires le voifinage du Milanez, d'oh elle tirok touces fes commodités, étoic d'un grand foulagemenc pour elle 5 les malades étoienc foignés dans de bons Höpkaux ; 8c leur remplacement en hommes fains rendok le fleau moins fenfible pour cette Armee. L'Archidue Léopold (a) menacok la Rhétie; encourageanc les partifans qu'il y avoit. De Cceuvres preiTok en conféquence pour qu'on lui envoyat des fecours d'hommes Sc d'argent. Louis Xiïl fit demander aux suiffes , par la bouche de fon Ambafladeur auprès d'eux(£), ine levée de deux mille homnes; mais ce ne fut qu'au mois  S E C R E T S. 95 cFOctobre , que ceux-ci paru-rent a 1'Armée de De Cceuvres, diminuée de pres de la moitié. II fe fit une levée chez les Grifons pour neuf-cents hommes, qui en réalité fe réduifirent a deux-cents cinquante Francois du Régiment de Candale , 6c trois-cents quatre-vingts Allemans , en pluileurs Compagnies. De Cceuvres (a) menaca les Vénitiens de fe retirer a Sondrio ou a Tirano , 6c de les abandonner par conféquent (/>), s'ils ne le fecouroient. Mais ni fes menaces, ni la honte 8c le préjudice qui pouvoient fuivre leur refus, ne les émouvoient point. Le Marquis (c) étoit hors ia) Lcttre de ce Seigneur au Roi, du n d'Aoüt , itfif. {b) De laifler leur Etat expofé aux entreprifes des Efpagnols. (#) Le même Pe Cceuvres. » 1625.  I 6 2 94 MÉMOIRES de lui-même, en voyant qu'il faifoit des efforts in u til es pour tirer d'eux un bon Corps de Troupes, dont il fe fut fervi a chalfer les Efpagnols de Rive(a), dans des circonftances auffi favorables que celles oü 1'on fe trouvoit. Le Comre de Schomberg fut fait Maréchal de France, par ia mort de Roquelaure; & De Cceuvres fupplia le Roi (b) de faire revivre en fa faveur le Baton du feu Maréchal de Bouillon , & de le lui afsurer par un Brevet. Mais on lui répondit que le Roi ne s'enga- (a) Dont on a vu qu'ils étoint redevenus maltres, appelles par le Marquis de Bagno*, pour fecourir cette Place , oü il n'y avoit plus aétuellement qu'une poignée de Soldats du S. Siége. * Général des Troupes du Pape dans la Valteline. (£) Par une Lettie dmj d'Aoüt, !*»ƒ.  Secrets. 9J geoit plus pour de pareilles fa-' veurs par des Brevets. II vaut mieux, lui écrivit Je Cardinal de Richelieu fa), que vous laifiïez a Sa Majelté la gloire de vous donner de fon propre mouvement ce que vous délirez, que li vous le lui arrachiez par vos importunités. — Le plus fort obftacle au défir de De Cceuvres étoit la demande que faifok Ie Duc d'Anjou [b), du Baton de Maréchal , pour le Colonei d'Ornano (c). Les armes Fran<;oifes ayant trouvé une forte réllltance , tant dans Ia Valteline que dans I'Etat de Gènes, les difpolitions a 1'accommodement en (a) La Lettre eft du ?i d'Aoüt , ifiif. (i) Gafton d'Orléans, frère unique du Roi. (e) A qui il devoit reconnoiffance, comme ayant été fon Gouverneur , Sr qu'il eftimoit beaucoup avec taifon. — C'eft ce qu'on a vu ei-devant, & que tout Ie monde fcait. IÓ2 J.  IÓ2J. » 00 C'étoit toujours SpaJa. — Lettre de celui-ci au Pape , du 16 de Juillet, i6if. (b) Toujours AmbalTadeur de France auprèss du S. Siége. (c) Et Béthune aroit lans doute marqué que le Pape agréoit cette réduction , ou le Cardinai le fuppofoit ainfi au Noncc. fur-tout t>6 MÉMOIRES devenoient tneilleures; & le I Léo-at redoubloic d'ardeur pour 1 amener fa Négociation autermc défiré. II envoya en conféquence le Nonce [a] pour conférer avec le Cardinal de Richelieu, fur ceux des Articles pour 1'ac-, commodement de 1'AiTaire de la Valteline , qui regardoient j la Police. Béthune recedentcs de eet Ouvrage. XXXIII. PartU. E 1625  JÓ2 j. (a) En quelque Catholique que ce foit. (£) Ce font ceux qu'indiquoit 1'Ecrit que le Légat avoit envoyé au Cardinal de Riche-, lieu , le 50 de Juin, Sc qu'on a lu tt- gevaat. 98 MÉMOIRES que ce foit (a), & la décence dans un Légat permettent difficilement de continuer la Négociation. Le Pape i Rome & le Légat ici ont donné cette difficulté a examiner , depuis que, contre toute attente de leur part, ils ont éprouvé tant de dureté par rapport aux partis qu'ils propofoient (£), quoi qu'également convenables a la piétë , a la réputation & a l'intérêt du Roi. Je ne puis rien pronoftiquer de certain ^ fur 1'examen en queftion ; mais je tiens pour indubitable que, de quelque facon que le cas foit décidé, 1'Affaire ne fe terminera jamais,-fi 1'on ne met a couvert trois points, qui font: — L'avan-  S E C R E T S. 99 tage de la Religion Catholique dans la Valteline, autant qu'il eft moralement poffible; la réputation du S. Siége, & celle de 1'Efpagne.—On ne peut trouver i redire aux Articles jadis établis a Rome (a), par lefquels I'avantage de la Religion fe trouve fi bien afsüré dans la Valteline. On ne peut trouver a reprendre a ces Articles 5 nonfeulement paree que le Pape a qui 1'on doit, en cette matiève, une déférence totale, les a jugés & juge nécelfaires; mais , paree que, s'en étant une fois expliqué, cela rend toute cenfure hors de faifon. Les Miniftres de la France ont toujours publié que, dans 1'Affaire de la Religion, ils fe conformeroient refpeétueufement aux fenti- (a) Entre le Pape & le Commandeur de SilJery & defquels il a été fait mention tant de fois. Eij i6z j.  i 615. (/} Qu'avoit fait le Marquis de Cgeuvre.t, ÏOO MÉMOIRES mens de Sa Sainteté. — 11-eft certainement difficile de réparer 1'honneur du S. Siége (bleue par 1'invafion (a) des Forts de la Valteline ), autrement que par le rétablufement réel & libre du Dépot de ces Forts entre les mains d'Urbain VIII. Et, quand ce Pontife fe réfoudroit a facrifier au bien commun , fa ïatisfadion fur eet objet, il ne pourroit le faire , vü qu'il eft obligé de ménager 1'opinion publique, & de lauver les apparences. II eft donc néceftaire ( quelque foit 1'accord qu'on falie pour le temps oü le rétablitTement du Dépöt aura eu lieu) que eet accord foit tenu totalement fecret , & que le rétabliftement s'exécute de telle facon qu'il éloigne tout fujet de foupconner qu'il n'eft pas  SecREÏS. lor pleinement libre; qu'il écarté ce foupcon principalement de ceux qui ne 1'ont eu que trop. Le Légat étoit extrcmement mortifié (a) de voir, fous fes yeux les Députés du Duc de Rohan & du Prince de Soubife , traiter avec leRoi, de Taccommodement de leur Parti (b). Le Légat regardoit cela comme un affront énorme qu'on lui faifoit j non qu'il prétendit empêcher le Monarque de faire la Paix avec les Huguenots , s'il le jugeoit néceiTaire pour le bien de fon fervice; mais paree (d) lettre de d'Herbaut * a Béthune f , du de Juillet, 162.5. * L'un des trois Secrétaires d'Etat pour les AfFaires Etrangères , qui'avoieut remplacé Puyfieulx. 4 Toujours AmbalTadeur de France auprès du S. Siege. . t (b) Celui des Haguenots , dont Rohan Sc Soubife fon frère étoient les Chefs. EÜj  i6iy 191 MÉMOIRES que le Miniftre de Sa Sainteté eut voulu qu'auparavant Sa Majefté eut déterminé avec lui, par rapport a cette Paix, Vmclu/ïon ou 1'exclufïon de celle qui regardoit le dehors. II fut percé jufqu'au cceur, lorfquil entendit publier la première , paree qu'il prévoyoit qu'elle rendroit fa Négociation plus difficile. Mais la Cour étoic emprelTee d'éteindre ies.troubles ci'vils , qui tniverfoient 1'arrangêmenc des autres aiTAlres. S'il. y eut eu cjuei^n'efpérance d'acconv.nodernent avec I'Efpagne pour cclle de Gènes Sc ceile de la Valteline , le Cardinal de Richelieu eut concouru au vceu du Légat, qui étoit de les accommoder toutes les deux a la fois, pour employer après cela toutes les forces du Royaume a la deftru-  S E C R É ï S. lê$ I cVion des Huguenots, a laquelle ' le Roi paroilfoit porté. Ce Monarque étoit penfif, : en confidérant que Pentreprife | "de la levée du fiégé de Bréda (a), celle de la conquête de Gènes, 1' & la sureté qu'on lui donnoit I que les Huguenots n'apporte| roient aucun obftacle a fes defI feins ( toutes chofes qu'on lui I avoit repréfentées comme ai| lees) fe trouvoient, par' I'évé1 nement, tout-a-fait contraires. 1 Ce n'étoit' pas un petit embarI ras pour lui, que celui d'avoir I maintenant a lutter avec I'Efpagne ; &i de ne pouvoir pas employer contr'elle toutes les forces de fon Royaume, paree que les Huguenots ne les laif foient pas entièrement li- (a) Place appartenant aux Hollandois , Alliés de la France, & que les Efpagntls affiégcoient. E iv 16x5.  iGiy 104 Mémoires • bres (a). On blimoit avec ratfon ceux qui avoient jetté le Roi dans ce labyrinthe. Le Cardinal de Richelieu cependant avoit remontré au Roi, que, tant qu'il y auroit dans fon Royaume un Parti formé (b), Sa Majefté ne pourroit rien entreprendre de nou- I veau au-dehors; qu'il falloit qu'Elle fongeat a détruire ce Parti* avant que de s'occuper j d'aurres delfeins; qu'il conve- | noit qu'Elle finit la Guer.re qu'Elle faifoit pour la reftitu- ' tion de la Valteline (c); mais qu'Elle devoit fe garder d'en commencer une contre 1'Efpagne; que, puifque fon Armée étoit paffée en Italië, Sa Majefté (0) Attendü qu'on étoit obligé d'en employer une partie a les contenir. (1) Celui des Huguenots, (c) Par les Efpagnols aux Grifons, a qui cc Pays appartenoit.  S E C R E T S. 105 s'en fervït a aider le Duc de Savoye conrre les Génois; mais qu'Elle s'abftinc de toute hoftilité contre le Milanez. Telles étoient les remontrances que le Cardinal de Richelieu avoit faites au Roi. Aujourd'hui la prife de Bréda par les Efpagnols étoit ie plus grand déplaifir de Ia France ; 1'efpérance de la conquête de Gènes s'éloignoit rapidement d'elle ? & la zizanie & la confufion commencoient a paroitre fur fon théatre; les Miniftres en étant venus a des reproches réciproques, & luttant les uns contre les autres. Cela faifoit craindre du changement dans le Gouvernement. Mais ce grand génie (a) , qui tenoit le gouvernail, apportoit reméde a tout fans Te déconcerter. L'un de ces («) Richelieu. Ev 1625  106 MÉMOIRES - remédes fut d'engager Ie Roi I^15' & s'accommoder avec les Huguenots. Les principales condïtions de la Paix etoient:— que le Fort de'la Rochelle fubfifteroit encore fix mois, après lefquels il feroit démoli; que les Huguenots polféderoient encore trois ans les Places de sureté qu'ils avoient; que la conftrudion des Forts qu'on élévoit devant Montauban , cetTeroit. — On donnoit a.Rohan &; a Soubife de 1'argent, tant pour leurs anciennes prétentions, que par de nouvelles conditions qu'on établilfoit par laPaix.Moyennantquoi Soubife rendoit les Vailfeaux qu'il avoit pris au Roi. La France avoit tant de défir de cette Paix, qu'elle la termina ; quoique , deux jours avant la fignature des Articles, elle eut eu avis que Soubife avoit fait mettre le feu a di-  S E C R E T S. 107 vers Vaiflèaux de Ia Flotte Royale, donc deux, qui étoient 162 Hollandois, 8c 1'un de ces deux TAmiral , furenc brülés entièrement. Cécoit par ia trahifon de certains Hommes de la Flotte de Soubife, que les Capitaines du Roi avoient fouvent recus dans leurs bords fur la bonne foi 5 8c qui y étoient venus, fous prétexte de difcuter avec ceux-ci les points qu'on devoit faire palier a la Cour pour la Paix. Evj  xoS MÉMOIRES Mouvement de colère de Louis XIII contre les Efpagnols , qui fe calme bientót, en conféquence des rêflexions que ce Monarque fait. 'Le Duc de Savoye & le Connétable de Lejdiguières fe retirent de devant Gènes. Prife de Bréda.. Les Efpagnols s'approchent ' des Frontières de la Picardie. Plaintes du Duc de Savoye contre le Connétable , & du Connétable contre lui. Des Po^évèrafques; tort qu'ils avoient fait a l'Armée combinèe de France & de Savoye ; belle retraite de- cette Armèe. Les maux & dangers de Gènes ceffent ; fa caufe triomphe. 'Èlle recouvre tout ce qu'elle avoit perdu. Nombreufes conférences entre les' Commiffaires du Roi & le Légat , pour l'accommodement. Nouveaux  S E C R E T S. I05> TArticles que la France propofe, relatifs a ceux qu'elle avoit déjd fait remettre au Minijlre de Sa Sainteté. Contejlation qu'ils occafionnent; la difpute s'échauffe, & la Négociation fe rompt. TYloYENNANT Ia Paix quiyenoit d'êcre établie avec les Huguenots, les troubles du dedans duRoyaume étoient calmés; 8c le Roi fe trouvoit en état d'employer toutes fes forces a. la Guerre du dehors, ou pour la faire avec toute Ja vigueur poflïble, ou pour obtenir, par la crainte du poids de fes armes,des conditions de Paix plus avantageufes.Onfongea en conféquence auffi-töta envoyer enltalie,au Connétable, de nouvelles Troupes, afin dele rendre Ci fort, qu'il réufslt contre les Génois •> 8c 1625.  (a) On a vu dans les deux Parties précédentes de eet Ouvrage , que , fitöt après la prife dn Chateau de Gavi, le Duc de Savoye mit dans ce Chateau , une Garnifon toute compofée de fes Troupes; mais que le Connétable Sc le Maréchal de Créquy parlèrent haut, qu'ils 1'obligèrent a la retirer, Sc fubltituèrent une Garnifon compofée de Troupes toutes Francoifcs. (i) D'Herbaut-Phélippeaux , 1'un des trois Secrétaires d'Etat pour les Affaires étrangèies. («) Qui fe trouvoit a 1'Armée d'Itafie, avec le Connétable , fon ami particulier , & le Maréchal de Créquy. (d) LaLettre cd du 12. deMai , 1615, 110 MÉMOÏRÈS qu'il foucint vis-a-vis du Duc: de Savoye , avec la dignlté 1 convenable, le rang de premier 1 Officier de la Couronne. Depuis le différend qui avoit ij eu lieu entr'eux au fujec du I Gouvernement de Gavi (a), la I Cour de France donnoic raifon 1 au Connétable. Le Roi, écrivic I Phélippeaux (b) a Bullion (c).,l par ordre de ce Monarque (d), I a approuvé le commandement I qu'a donné fon premier Officier 1  Secrets. lil pour la Garde du Chateau de Gavi} &l la fermeté en mêmetemps, que lui , le Maréchal de Créquy & vous avez montrée dans cette facheufe occurrence [a). Sa Majefté défire que la Place foit maintenue dans 1'état oü elle Te trouve a préfent. Quant au fiége de Gènes, il importe, avant que de le tenter , de prendre toutes les précautions néceflaires, afin d'en afsurer le fuccès.Nous-nous repofons fur la longue prudence du Connétable &Tdu Maréchal de Créquy , du foin de faire enforte que les armes du Roi ne perdent pas mal-a-propos , dans ce fiége , la réputation qu'elles ont acquife dans tant d'autres occafions. Quant aux (a) Dans fa conteftation avec le Duc de »Savoye pour cette Garde; chofe facheufe 3> : comme le font tous les clifFérends qui fu». i vennen: eutre les Chefs.  Ili MÉMOIRES profits de la Guerre , on remet au Connétable 5c au Duc de Savoye, la décifion de ce qui les concerne; 6c 1'on vous envoye, Monfieur, le plan pour les régler, que Sa Majefté défire qu'on fuive, 6c dont 1'efquifte avoit été montrée au Maréchal de Créquy. On y ajoutera peut être que le Lieutenant qui commandera a Gènes, quand on 1'aura prife, fera a la nomination de Sa Majefté. — Si le plan que le Maréchal a porti en Italië, n'a point encore été vu, retirez-le, Monfieur; propofez, a fa place , ce dernier, comme ayant été fait, au temps oü le Maréchal partit de la Cour ; 8c dites de votre chef a ce Seigneur, que s'il n'ohtient pas 1'acquiefcement du Duc & ce qu'il renferme, il fade enforte que le Connétable le lui propofe fous le bon plaifir du  Secrets. i r 3 URoi, fans rien conclure. Pour' ice qui eft de remettre au Duc pNovi, Gavi 8c* toutes ies au; tres Places qui ont été ou qui , feront prifes dans PEtat de la | République de Gènes ( au cas que ce Prince voulut laifTer d I la France, la Capitale); c'eft un excédent des conditions de PEcrit (a) concernant les profits de la Guerre> conditions que Sa Majefté a intention de tenir a Son Altefle, confbrmément a eet Ecrit • car le Roi ne veut rien oublier pour contenter le Duc ■ afin qu'il n'y ait aucune aigreur entre lui 6c le Connétable. Quand ils feront couvenus par rapport au différend concernant le Gouvernement de (a) Paffe entre ce même Prince & le Roi, & qu'on a vu dans les deux Parties précédentes de eet Oitvrage. lózj.  i6i 5. (a)Scavoir, lï la Lieutenance de ce Gouvernement devoit être ala nomination du Roi de France, ou a celle de la Princefle de Piémont fa feeur. 114. Memoires Gènes (a), Sa Majefté agréera; que la Lieutenance en foit donnée au Maréchal de Créquy , comme ayant toutes les qualités néceftaires pour bien rernplir eet emploi. Deux chofes déplurent a la Cour de France , f^avoir les reftentimens entre le Duc de Savoye Sc le Connétable, lefquels étoient un retard aux progrès des armes de la Couronne • & les bruits infïniment préjudiciables a la réputarion du fecond , qui portoicne qu'il s'étoit lauïe corrompre par les Génois, Sc qu'il avoit eu des intelligences fecretes avec Etienne Spinola. La Cour étoit  Secrets. 115 1 ravie que Ie Duc tichat de i furmonter les obftacles [a) par I une fage diffimulation; attendu i qu'elle ne fcavoit quel reméde japporcer au mal, s'il étoit dans 1 les principaux Chefs; comme 3 les indices qu'elle avoic, fai, foient craindre que cela ne fut, |On accufoit le fils de Doria 1 d'avoir été , fans la participaftion de fon père, le principal complice des incelligences pré- tendues. Le Maréchal de Créquy fe t montroit fort fenfible a 1'idée que pouvoit avoir- ITtalie ,. j qu'un Chef de la qualité du I Connétable de France fik en1 taché d'un déshonneur auflï (a) A 1'exécution du projet de la conquête de Gènes.—'Ces obftacles étoient fans doute très-erands, fi le Connétable , qui avoit ou alloit avoir "des forces équivalentes a celle» ie ce Prince , loin de le fcconder, 1c traverfoit par des intelligences criminelles avec 1'En» nemi. ï 6 z 5.  j j i i ] < < i < 1 ] (a) Dont il étoit toujours 1'AmbafTadeur 3 la Courdc France. — La Lettrc eft du zo de Mai, 162,5. n6 Mémoires *rand que l'étoit une trahifom' L'Abbé de Scaglia marqué toii:es ces chofes au Duc de Safoye (a), 6c il pourfuit de cette orte : — Je crois donc qu'il :ft a propos que Votre AltelTe ie difpute en aucune forte fur es ditHcultés qui naiffent; mais ju'Elle Facilite tout, paree que a Cour Tent que rien n'importe "dus au Roi, que de la tenir Contente > enforte • qu'a la fin 311e recevra toute fatisfailion. _a Cour eft déja convaincue ]ue ce n'eft qu'avec 1'affiftance le Votre AltelTe, qu'elle doit e promettre des effets non :ommuns des armes du Roi; •u le grand age du Connéta>le, 1'avarice de Buliion, 6c le >eu d'application de Créquy  S E C R E T S. 117 aux grandes chofes. On a fait —7 r r ö- ^ 1 • / c 1625. 'jcavoir a tous les trois ( ann J •d'avoir leur avis) la demande que j'ai formée par rapport au Chateau de Gavi. Mais on leur marqué en même-temps d'avoir foin de traiter avec Votre Al- telïe, de telle manière qu'Elle foit contente de leur procédé; &, quant au Gouvernement de Gènes, de prendre garde a ce dont ils font convenus avec Elle fur eet objet; fe condui- fant a fon égard de facon qu'Elle n'ait fujet ni de s'en aigrir, ni d'en avoir de 1'om- brage. Louis XIII étoit piqué de ce que fes armes, loin d'être vadorieufes en Italië, commencoient a y perdre leur réputation, 8c de ce que ce Pays étoit (comme 51 eft ordinaire pour les Fran' cois) le tpmbeau de fes Soldats,  ï IS MÉMOIRES ' 1^1c Mais ce Monarque étoit plus piqué encore de ce que les Efpagnols , prenant ouvertement la défenfe des Génois, entreprenoient contre fon Armée. II écrivit en conféquence au Connétable (a): — J'ai recu votre lettre du iy du préfent mois, qui m'a été apportée par le S1 de Réaux, lequel m'a expofé de vive voix vos vues, comme auili la réfolution que vous avez prife avec le Duc de Savoye, de faire rafraichir les Troupes pendant quelques jours , èc d'épier les occafibns d'entreprendre quelque chofe de mémorable. Je fens les néceffités oü vous-vous trouvez , & le befoin d'y pourvoir felon les occurrences. Ayant un jufte reffentiment des tentatives des (a) Qui la commandoit. — La Lettre döt &oi eft du de Juiüet, i6i§.  S E C R E T S. I I «5 'Efpagnols contre mon Armée , I(j ' 'je fonge a la renforcer promptement , 8c a conférer avec TAmbaiTadeur de Venife 5c celui de Savoye, fur les moyens de faire la Guerre avec plus de vigueur. La République m'a offert, par Ia bouche du fien, de faire (au moindre figne de ma part) attaquer le Milanez par dix-huit mille Fantallins 8c deux mille cinq-cents Chevaux. Mon delfein eft de rendre complets les onze Régimens d'Infanterie que vous avez arec vous, 8c d'augmenter jufqu'a foixante hommes toutes les CompagniesdeChevaux-Légers; de joindre a ces Troupes les fïx mille Fantafflns 8c les trois-cents Chevaux que je fournis au Duc de Savoye; de raüembler deuxmille Soldats de la première de ces deux efpéces, 8c deux-cents de la feconde, fous le Duc de  ÏIO MÉMOIRES —}— Rohan, qui eft fur le point de 1625. r r ' \- , K, J le loumettre a ma clemence avec fon Parti (a) 5 &, au lieu de ce que je paye au Duc de Savoye pour i'Artillerie qu'il fburnit,d'entretenir huif canons & deux coulevrines avec 1'attirail nécelfaire. Je verrai avec 1'Ambaftadeur de ce Prince, ce que fon Maitre peut fournir 5 &, d'après cela , je traiterai de nouveau avec mes Confédérés (/>). Quant a ce qui regarde la Mer, mon intention eft de faire palfer en Italië, outre les Galions du Duc de Guife, les Vaifteaux de la Flotte de Hollande, & les dix de Soubife. Je crois qu'il faut attaquer les Adverfaires ( c), a (a) Celui des Huguenots, dont il étoit le principal Chef. (&) Scavoir ce même Prince & Ia République de Vcnife , liés a la France pa| le Traité de Lyon, dont il a été tant paflé, (c)Les Efpagnols. 1'endroit  Secrets. ut 1'endroit oü il eft le plus a propos que cela fe fafle, même dans le Milanez; mais attendre a 1'exécuter, que les forces dont j'ai parlé ci-devant, foient arrivées 5 afin de ne rien entreprendre foiblement. Et cependant s'appliquer a conferver 1'Armée, en la faifant rafraichir. Ce premier mouvement de colère de Louis XIII contre les Efpagnols fe calma bientót fa) II confidéra qu'on ne devoit point s'engager actuellement dans une longe & pénible Guer re; qu'il ne falloit point pat conféquent attaquer le Milanez, mais attendre des circon ftances plus favorables, & qu'or fut mieux préparé j tandis que (a) Lettre de d'Herbaut a Béthune, d» premier d'Aoüt, 1615. XX XII LP unie. F 1625.  FÓ2J. , } € 1 r r o r 6 n c ri v n $ (a) Qu'on a vues ci-deiTus. (b) Le 51 de Juillet. [22 Mémoires 'Armée ennemie , affoible par es maladies , donneroic moyen te fe procurer des avanrages >Ius fignalés. Déja cependanc es nouvelles difpofitions du loi (a) pour la Guerre avoient té mifes (b) fous les yeux des Lmbaffadeurs de Venïfe 6c de avoye,qui les avoient pleinelent goutées. Le fecond néanïoins demanda du temps pour épêcher a fon Maïrre , par ipport aux fix mille Fantaflins : aux trois-cents Chevaux , de ïême que quant a ce qui con:rnoit la dépenfe de l'Artillee : trois Articles que le Roi ouloit fe réferver entiérelent. Les armes Francoifes ne fe lifoient plus fuivre comme au-  S E C R E T S. I2J paravant par la vi&oire. Elles ■ commeiKjoient au contraire a avoir beaucoup de défavantage. La crainte des Troupes de 1'Ef pagne, arrivées a Alexandrie , &c celle de fes forces maritimes avoit obligé le Duc de Savoye &: le Connétable a fe retirer de devant Gènes, en prenantpour prétexte qu'ils vouloient aller attaquer Savone. Dansle même temps les Efpagnols, libres en Flandre par la prife de Bréda (a), s'approchoient des Frontières de la Picardie, qu'il fallut que le Roi munit, moyennant dix Régimens dTnfantefie , de mille hommes chacun. Enforte que les affaires (b) com- {£) Qu'ils venoicnt de faire fur les Holi landois, & dont il a déja été queftion. ! (b) Celles dc la France & celles de 1'Ef! pagne. F ij Ai I625.  i6x y. (ü) Se tronvnnt a.no.t n-.1.,. J i_ a , • - ^^v.-4,n.3 ualls ie merrie Tpvf-o 4 >ugniioic cnaque jour. dit Ie I24 MÉMOIRES mèncant a fe balancer (a), s'acteminotént a 1'accommodemenr. La France y étoit portée , attendü 1'armement conlldérable du Milanez; la méfiance qui s'étoit mife entre le Duc de Savoye & le Connétable (b) h' ce que ïouffroit 1'Armée de la Coüröhne, & 1'impatience naturelle aux Francois ; deux caufes qui leur faifoient abandonner les Enfeignes , pour s'en retourner chez eux. Le Duc fe plaignoit de Pavarice du Connétable & de ceux qui étoient avec lui. II feur^ attribuoit le manque del fuccèspar rapport a 1'entreprife i de^ Gènes; & les accufok d'a- ] voir , non-feulement retenu '  Sec r e t s; nf pour eux la plus grande partiede 1'argent deftiné pour la paye de leurs Soldats (ce qui en avoic forcé grand nombrea s'en aller), mais de s'être jaiffés corrompre par les Génois mêmes (a). Le Connétable Te plaignoit d'une injure Ci atroce , & déclamoic fort contre le Duc; difant entr'autres qu'il avoit entrepris la G&erre de Gènes témérairement- atcendü qu'il n'avoit pas des forces qui répondhTent a fes promeffes. Ils s'imputoient donc réciproquement le manque de 1'entreprife > Sc le Duc en vint jufqu'a demander que le Connétable fut rappellé, Sc qu'on donnat le commandement de 1'Armée au Duc de Guife. Ce Seigneur, après avok mis fa Flotte dans le Port dc (a) C'efl le bruit qui couroit fur le comptte du Connétable. — Voyez ci-4evant. XXXIII. Partit. *Fiij 1625,  i 625. I I < (a) Dont il étoit Gouverneur. (b) On a vu que la France Ini en fourniffoit déja autant , avec trois-cents Chevaux; Troupes que le Roi vouloit reprendre , pour les joindre aux Hennes , dans fon premier mouvement de colcre contre les Efpagnols , qui , par leurs entreprifes contre fon Armée , lui avoient fait formcr la réfolution biufquc ae les attaquer ouvertcment. Monarque Mémoires Ville-Franche \ avoir été trois jours en étrokes Négociations avec le Prince de Piémont, 8c avoir recu des honneurs extraordinaires de fa part, s'en retourna en Provence (a), oü il alloit lever en diligence encore lïx mille Fantaffins pour le père (b). Louis XIII étoit très-éloigné de confentir a rappeller Ie Connétable, paree qu'il voyoit que ie Duc de Savoie, qui demandoit ce rappel, vouloit fe dif:ulper vis-a-vis du Public, du uccès que 1'entreprife de Gènes ivoiteu jufqu'alors, 8c qui étoit :ontraire a 1'attente commune. 3fc peut-être que le refus du  Secrets. 127 Monarque venoic de ce qu'il ~ ^ voyoit 1'entreprife en queftion prés de manquer , moyennanc les forces du Milanez (a). Enforte que tout paroiffoit concourir a la Paix; & qu'elle ne pouvoit manquer de fe" faire, a moins que les Efpagnols (b) n'attaqualTent le Piémont. Or ceux- , ci voulant venger fans aucune diffimulation les injures qu'ils (a) Les Troupes de ce Duché, qui alloicnt au fecours de Gènes, & qui bien concertécs avec celles qui fe trouvoient dedans en grande quantité , en eufient infailiiblemcnt fait lever le fiége. — Cela étant , il étoit indifférent pour le Roi, quant a 1'état aétuel des chofes, que fon Armée continuat d'ctre commardéc par le Connétable , foit que celui-ci eut , foit qu'il n'eüt pas des inteliigences avec une Villc, du fiége de laquelfe il n'alloit bientöt plus être queftion. Mais il n'étoit pas indifférent pour ie Roi d'ent.icher la réputation du premier Officier de fa Couronne , en Ie rappellant , uniquenient pour complaire au Duc de Savoye, qui vouloit abfolument qu'il fut coupable de traliifon. {/>) Sous la conduite du Duc de Fétia, Gouverneur de ce Duché. F iv  n8 Mémoires ——* avoienc recues, fe difpofoient 1 ^' a y tranfporter le théatre de la Guerre; & Ie Roi, réfolu de défendre leDuc de Savoye par toutes fortes de moyens, préparoit contre les Efpagnols, Ia réilitance convenable. II donnoit fes ordres pour faire palfer les Monts a huit mille Fantafiins &c trois mille Chevaux. Et fon deflein étoit de mettre les armes en oeuvre , même ouvertement, s'il le falloit. Conformément a cela , les Vénitiens, qui regardoient la Guerre comme Ie moyen le plus propre pour procurer Ia Paix, preffoient vivement le Monarque de faire les plus grands préparati fs. Revenons un moment au fiége de Gènes. — Les Payfans de Pozzévéra nuifirent beaucoup aux Troupes Francoifes & Savoyardes. Pozzevera efl  S E C R E T S. Ï19 une Vallée de 1'Ëtat de Gènes, ' , ' ikuéeducócédu Coüchant, peii 1 2j* diftante de la Capitale , trèspeuplée , &c donc la fituation / dans 1'endroic de 1'Appennin le plus haut & plus rokte, donne a fes Habicans, 1'afTurance a la . fois &c la férocké. Revenus de la frayeur que 1'arrivée de 1'Ennemi leur avoir d'abord caufée, fournis de bonnes armes offeniives& défenlives,£c au moyen de la connoilïance qu'ils avoienc des fentiers & des réduks du cancon qu'ils habicoient, faifant avec une égale prompcirude les coups, &feretirant , ils tuoient ou prenoienc autanc de Francois êcdeSavoyards qu'ils pouvoient en joindre. Cela avoit donné tant de terreur aux Troupes , qu'aucun Soldat n'ofoit plus s'ecarter des logemens, oü elles fe trouvoienr comme affiégées. Ce n'eft pas tout : les Habitans Tv  130 Mémoires du Montferrat leur enlevoient ou coupoient les vivres, outrés des mauvais traitemens qu'ils avoient recu d'elles, a leur paflage,^ du dégat qu'elles avoient fait a leur Pays. Ils étoient excités fecréremenc a Ia vengeance par le Duc de Mantoue, leur Souverain. Le Pays oü les Troupes en queftion faifbient actuellement la Guerre, ne fourniffant aucun fecours , a caufe de fa ftérilité • les convois n'arrivant au Camp qu'avec beaucoup de peine, paree que ceux qui les efcortoient étoient fouvent attaqués , & défaits ou pris j les maladies y faifant du ravage; & les défertions des Soldats, impatiens de tant de maux , étant fréquentes ; on fe trouvoit réduit a penfer plutöt afe retirer , qu'a tenter de nouveaux fucccs , rendus même  Secrets. 131 difïïciles par 1'entreprife hardie — & heureufe des Pozzevérafques• 1 Z'' Jefquels enlevèrent a 1'Armée cinq-cents boeufs qui paiifoienc prés de fes Quartiers, de qui fervoient au train de fon Artillerie , devenue par la comme inutile fa). Tout cela lui donna une horreur extréme pour une Guerre oü 1'image de la mort s'offroit au Soldat a chaque pas. Cependant arrivée a Aiquy T fans avoir recu des Efpagnols d'autre dommage, que celui qu'éprouva fon Arrière-Garde, comme nous avons raconté ailleurs , elle dirigea fa marche vers Savone • formant Cairo a fe rendre a compofition. En conféquence le Duc de Féria (b)> (lus jufle que celle de ceux quf 'ouloientleur perre, triompha. ^uand 1'Armée d'Alliés formilables, fondant a I'improviile ur leur Etat, leur avoit fait entir fes plus terribles coups, n les batrant par - tout , ils voient a la verité tremblé j'  S E C R E T S. i 57 mais ils ne s'éroient pas pourcela abandonnés au- défefpoir. Tous s'afFermirent dans la réfolution de repouifer 1'injure 5 de défendre la Capitale Sc Savonne , du deltin defquelles dépendoit celui du refte; Sc de s'enfevelir lous les ruines de leur Patrie , plutóc que de la pleurer efclave.-Ils furenc merveilleufement' fecondés dans cette réfokition par 1'Efpagne, qui, dans une occafion oü il s'agiffok du falut ou de la perre d'une Puilfance fon Alliée , le moncrant auffi ardente que pour fes affaires les plus férieufes, Sc n'ayant nullement deffein de donner atteinte a la liberté de Gènes , la fecourut promptement avec de groffes fommes d'argenc , Sc avec de fortes Armées de terre Sc de mer. Elle attaqua le Piémonc avec une égale céléricé j afin de XXXIII. Partic. *Fix 162 5  i 625. 13Ï M/L MOI R E S ■ faire éprouver au Duc de Savoie', AlÜé de ia France, les numas maux que ce Prince {£ artirés a fes Alliés a eifl (a). Ce trophée de 1'Efpagt e lui valut les applaudilfemens de ITtalie & j'employerai toute ma puilfance pour venger les torts qui m'onc été faits (c). Louis XIII étoit ferme auffi dans la réfolution de faire rendre la Valteline aux Grifons; avec les conditions néanmoins qui feroient jugées jultes pour Ia sureté de la Religion Catholique. II vouloit que 1'ancienne Alliance de la France avec ces Peuples füt niaintenue en fon entier; que les Efpagnols & üi? CCttC m£me Républi(llJe & « même ÖJ les tröis PuilTances étoient déja liées M Pat les tfpaguols.  i6i qu'il ne me demande une Tréve pour la Valteline , qu'afin de donner le temps aux Efpagnols (a) de s'y fortifier. Que je feraitout ce que je pourrai pour la sureté de la Religion dans ce Pays. Que la reftitution de la Valteline aux Grifons ne nuira point z ma réputation ; puilque 1'AiTemblée des Théologiens, ordonnée par Sa Sainteté , a décidé que j'étois obligé en confcience a. procurer cette reftitution jd'autant mieux <) Elle eft du 17 d'Aout, 1615. Gv 162. j.  IÓ25' ï J4 MÉMOIRES lok qu'il feut que les affaires de la France font en très-bon étac. Urbain s'excufe de ne pouvoir procurer la reftitution de la Valteline aux Grifons, fur ce qu'il ne fcauroit trouver , pour le faire , des raifons oudes exemples, fur lefquels il puifle fe fonder. Je lui ai repréfenté que lePape JeanI voulut empêcher une cruelle perfécution , dont Théodoric, Roi d'Italie, Arien, menacok les Catholiques de ce Pays, pour fe venger de celle qui fe faifoit en Oriënt a ceux de fa Se&e. Qu'en conféquencc le Pontife alla a Conftantinople, a la perfuafion de Théodoric,prier 1'Empereur Juftinien de rendre aux Ariens Jeur*s Eglifes & leur culte ; afin d'afsurer i'un & 1'autre aux Catholiques en Italië. Tout au contraire doncdece que Votre Sainteté m'allégue, ai-je dit a Urbain,  Secrets. r 5 j on peut, en certaines occurren- ■ ces , faire des aclions qui ont I'apparence du mal, afin d'en empccher un plus grand. Malgré tout ce que j'ai repréfenté au Pape, continue Béthune dans la préfente Lettre a d'Herbaut, je ne crois pas que Sa Sainteté confente a Ja reftitution que notre Monarque défire pour les Grifons (a); a moins que les Efpagnols n'entrent dans la Négociationj & ii n'y a que deux moyens pour engager Je S. Père a donner fon confentement , indépendamment de ceJa. Ces deux moyens font, ou que je lui dife que je ne penfe pas que le Roi agrée que la Négociation foit tranfportée en Efpagne (b) 5 ou que la réfolution que notre Monar- (a) C'eft toujours celle de la Valteline. (b) Qu'on négocie ayec cette Cour. Gvj 162 j.  Ij6 MÉMOIRES •que a prife d'employer la force , s'il le faut, pour venir a. bout d'engager le Pape a ce confentement , s'exécute. Ec alors il faut que cela s'effectue av.ec toute la vigueur poffible, & promptement, c'ett-a-dire en Hiver ; temps oü les Troupes du Duc de- Féria (a) feront diminuées par le^ maladies. Ainfi les fcrupules & la peur qui tourmentent aétuellement (b), s'évanouiront ou diminueront. Tout Ie mois de Juillet fe palTa, fans que le Légat répondit aux^ Articles rapportés cidevant (c). Le Miniftre de Sa (a) Gouverneur du Milanez, qui , comme ©n a vu , étoit defcenda dans la Valteline avec des forces confidérables , pour empëcher De Coruvres d'achever la conquête de ce Pays. (b) Le Pape. (c) Que le Roi lui avoit fait remettre, &C qu'il ayoit aufli-tot envoyés a Rome.  S E C R E T S. IJ7 Sainteté fe contentoit de fe répandre en plaintes amères; menacant fans celle de quitter ia France. Le Roi en étoit bien aife 5 8c il cherchoit a découvrir fi cela venoit de ia timi^ dité naturelle du Légat, ou de fon ConfeiJ, ou d'ordres de la part de Rome; 8c fi par hazard le Pape ne fe réfoudroit pas plus hardiment.que lui, a conclure définitivement. — Au mois d'Aoüt, on fe remit a négocier 5 on le fit avec plus de chaleur qu'auparavant;8c, quoi qu'il n'y eüt pas la moindre efpérance de bon fuccës , la France ne laifToit pas de rendre au Légat tous les honneurs poffibles; afin que le Pape vit Ie cas qu'elle faifoit de fa Maifon, 8c de la perfonne de fon Neveu en particulier. Le jour de l'Aflomption , celui-ci die  ia) La Reine régnante, & la Reine-Mère. (i) Voyez ci-deftus. — Enforte , dit maintenant le Teite, qu'ils ne le faluèrent plus, depuis , qu'en habits ordinaires. — Et ils eufTent voulu , dit le Traduéteur de eet Ouvrage , affifter a fa première Meife avec leurs habits de dignité, qui étoient le Rochet & laMofette. I58 MÉMOIRES "fa première Melfe, qu'il célébra pour prier Dieu d'infpirer la Paix. Ce fut dans Ia grande Chapelie de Fonrainebleau ; toute Ia Cour y affifta ; êc le Roi Sc les deux Reines [a) communièrent de fa main. Les Evêques de France n'y parurent point 3 a caufe de la difficulté qui avoit eu lieu au fujet du Rochet Sc de la Mofette, entre le Légat Sc ceux d'entre eux qui étoient allés le faluer a Orléans (b). Le 19 d'Aout, le Légat dina avec le Roi dans la grande Salie de Fontainebleau. Ils étoient a(Tis a table du même  S E C R E T S. ï 59 coté, le Roi a droite, Ie Légat ■ a gauche , & deux places audeffous. Sa Majefté fut fervie par fon premier Maitre d'Hötelj & le Gentilhomme Servant avoit , felon 1'ufage , la têce couverte devant lui. Le Controleur-Général de la bouche fervoit le Légat, tête couverte auffi. Les mets pour le Monarque & le Miniftre de Sa Sainteté étoient parfaitement égaux; & il n'y avoit qu'environ un pied de diftance entre les plats de 1'un & ceux de 1'autre. Le Roi, par complaifance , refta a table plus qu'a fon ordinaire- — Les Reines donnèrent Ia collation au Légat & a fa fuite. Le zyd'Aout, Ie Monarque, accompagné de plufieurs Princes & Grands , alla vifiter Ie ! Miniftre de Sa Sainteté dans Ion appartement j & 1'en ne 1625.  (a) Sur les Articles qu'il y avoit envoyés, & que nous venons de rappeller, il n'y a qu'un moment. (A) Tant pour la Valteline , que pour Gènes. lóO MÉMOIRES park pojnt'd'affaire. Le dernier, ayant enfuite recu réponfe de Rome (a), dit qu'il avoit: ordre précis d'infifter fermement fur les premières demandes qu'il avoit faites, particuüèrement fur ce qui concernoit la sureté de la Religion Catholique dans la Valteline. Dans 1'Audience qu'il eut , le 24 d'Aoüt , il paria d'une facon plus ouverte , &L du ton qu'on va voir. — J'ai employé beaucoup de temps auprès de Votre Majefté , dit - il au Roi, fans utilité pour 1'objet de ma Légation. La demande que je faifois de la Tréve (b), moyen le plus propre &c le plus prompt pour afsürer une bonne Paix ,  S E C R E T S; 161 m'a été refufée. On m'a donné quelqu'efpérance , mais ftérile, quant a la fatisfaclion que le Pape requéroit (a) ; êc divers partis, propofés par moi, ont été rejettés. Toute la Chrétienté a les yeux fixés fur ma perfonne; elle épie 1'iiTue de ma Légation 5 êc chacun commen-. ce a me blamer d'un féjour [b) li long & fï infrucfueux. Le Pape le fouffre avec peine; êc je fens que je fuis a charge a Votre Majefté êc a la Couronne. J'ai déja fait fcavoir 1'ordre précis que j'ai de prefter la conclufïon des Affaires. Je fupplie Votre Majefté de commander a fes Miniftres d'y travailler inceftamment, afin que je puilfe U) Pour 1'afFront qae [e Marquis De Cceuvres lm avoit fait, en attaquant & prenant fans menagement les Forts de la Valteline, mis en Dépot entre fes mains, & gardés pal fes Troupes. 0?) En France. I 625.  IÓ2 J. () Ce fut le dernier de Juiljet.  S E C R E T S. 179 néraux en Efpagne (a), & h mauvaife adminiltration des Finances, que les penfions, les profits immodérés & les rapines épuifoient (£), furent les deux caufes qui, dans ie cours le plus rapide de fes fuccès, &. lorfquelle projettoit la Monarchie univerfelle, 1'arrêtèrent, puis la firent rérrograder. Et tandis qu'aucune autre Puilfance n'étoit venue a bout, en moins de temps qu'elle, de dominer une grande partie du monde, & de tenir le,reite en refped; déchue enfuite avec autant de rapidité qu'elle s'étoit élévée , elle fe (a) A laquelle elle refiifoit de fuppléer. dit le Texte , par des Hommes excellens en ce genre, qu'elle pouvoit trouver parmi les Nations qui lui étoient fujettes ; ce qui pmvcnoit, & de 1'envie , & de cette vanité naturelle qui lui faifoit regarder les Etran"ers avec mépris. (b) Ce qui faifoit, dit encore le Texte que les Soldats n'étant point payés, fe mutinoient.& fe débaudoient. Hvj i6z j„  iSo M É M O I R E S trouvoit fi foible (quoiqu'ayant fous fes Loix. tant de Peuples guerriers )• qu'elle eut a peine ioutenu le plus petit choc des armes Francoifes. Mais fa foibleffe paroilfoit fur - tout en ce qu'elle n'étoit pas en état de mettre en Campagne la moindre Armée , pour tacher de fe garantir des pertes qu'elle faifoit tous les ans ; ce qui venoit de ce qu'elle étoit fans argent, fans Soldats, fans Confeil & fans Capiraines. Enforte qu'elle ne fubfiftoit plus qu'a 1'aide du fecours des Puiffances, qui trouvoient leur sureté dans 1'équilibre des prin-. cipales d'entr'elles. Gonzales (a) , plus Soldat que Capitaine , commandoit (a) Que Ie Roi d'Efpagne avoit fait venic de Flandre, ainfi que .nous difions , il n'y a. qu'un moment.  S E C R E T S. l8l en fecond dans 1'Armée du Duc de Féria ; & il fut d'avis, comme lui, qu'on s'approchat d'Afti. Ils y furent invités par le rapport qu'on leur fit, que la Place étoit dépourvue de ce qui étoit nécelïaire pour foutenir le fiége. Mais, ayant reconnu la difficulté de 1'entreprife, ils fe retirèrent, le 3 d'Aoüt. Leur Arrière-Garde fut harcelée; & il y eut entre les deux Partis une groife efcarmoche , a laquelle le Maréchal de Créquy fe trouva , mais non le Connétable. Celui-ci étant un peu mieux (a) s'étoit fait porter a Turin, & de la tranfportera Chaumont en Dauphiné. Le Duc de Féria avoit ordre de 1'Efpagne de tacher de s'emparer de quelque portion ( & ils furent ( ainfi que Ie Fort conftruit a 1'entrée du Pont ) toujours gardés par les Troupes Fran^oifes. La Place ne pouvant fe maintenir que par le moyen de ce pofte, les plus violens efforts des Efpagnols fe portèrent contre. Le Pont fut cinq fois rompu , quatre fois par Ie canon, une fois par les eaux du Pö ; & toujours rérabli. La cinquiéme de fes chütes offroit au Duc de Féria une occafion avantageufe pour nuire au Camp Francois; mais il la laiffa échapper, ou paree qu'il ne la connut pas, ou paree qu'il n'eut pas le courage d'en profiter. — II y eut aufli diverfes efcarmouches a 1625.  IÓ2J. lS8 MÉMOIRÈS 1'occafion de ce même pofte ; 6c celle du 17 d'Aoüt fut la plus fanglante. — Les Efpagnols avancèrent leurs rerranchemens fi pres de ceux de 1'Ennemï, que les Soldats de pare SC d'autre pouvoient fe parler. L'arme dont les Francois firent le plus d'ufage , dans ce fiége, fut 1'épée. Sitöt que les Efpagnols fortoient de leurs lignes , ils fondoient fur eux , avec cette arme & la main ■■, frappant , bleflant êc tuant. Cette manière hardie de combattre imprima tant de terreur dans 1'ame des Efpagnols, 6c les rebuta fi fort, qu'ils ne purent jamais gagner un pouce de terrein, du coté du Pont. Ils ne réuflirent guères non plus a 1'attaque de la demi-lune, qui étoit a la tête du Faux - Bourg de la VTIle. Mais, comme le dedans 6c le dehors de ce pofte étoient com-  S E C R E T S. 189 mandés (a), après que les Efpa- • gnols eurenc fait divers efforts pour s'en emparer , les deux | Partis 1'abandonnèrent (b). Le Duc de Savoye réfolut de faire une fortie fur le quartier de Serbellon (c), pour s'emparer dun grand retranchement , couvert d'une batterie de deux piéces de canon, pointées contre 1'extrémité du Pont, du cöté de Crefcentin , & qui incommodoient fort le PaiTage (d). Le Maréchal de Créquy n'étoit point d'avis que cette fortie s'exécutit ; il vouloit GO Le dedans par Ia Ville , Ie dehors paf les alentours. (b) Attendü 1'inutilité qu'il y avoit pour ehacun d'eux d'en être Je maitre. 0) L'un des Chefs de 1'Armée Efpagnole. (d) De cette Ville a Vérue , que les Efpagnols afliégeoienr. — On a vu plus haut que ces deux Places fonr vis - a - vis Tune de 1'autre, feulement féparées par le Pö; c'étoit fur ce fleuve , que le Prince de Piémont avou fait conftruire fe Pont en queftion , afin qu'elles puifent fe fecourir réciproquement. 162 J.  (a) Oii 1'on fe battit avec la piqué & l'arm« bjanche en général. 190 MÉMOIRES qu'on épargnat, pour les óccafions imporcantes, le peu de Troupes qu'on avoir; outre qu'il jugeoit très-fort le retranchemenc dont il s'agit. Mais le Duc , ferme dans fon opinion, le fit attaq'uer par mille hommes, le 5 de Septembre , avant 1'aurore. Ces Troupes étoient fous les ordres du Commandeur de Valence , qui fit attaquer avec fureur , tandis que le Colonel Vernatel faifoit la même chofe de fon cöté. Les premières lignes furent tout d'un coup emportées. Mais Valence ,. s'étant avancé plus que les autres, recut deux eftocades a la cuhTe ; Brignac en eut autant a la tête; 6c tous les deux furent faits prifonniers. Vernatel fe retira en bon ordre, Le combat (a) fut très-rnde,  S E C R E T S. 191 & dura deux heures. Les travaux donc les agrelfeurs s'étoient emparés, furent reperdus> & il y eut de part & d'autre grand nombre de morts & de bleflës. Deux Capitaines EfpagnolsTombèrent au pouvoir de 1'Armée confédérée. Brignac fut échangé pour 1'un d'eux (a), & Valence pour 1'autre (b). Les Efpagnols, voulant fe venger de 1'attaque de leurs lignes, donnèrent trois alfauts a la tour du Faux-Bourg; mais ils furent repoulTés avec beaucoup de perre. lis s'emparèrent néanmoins de la moitié de cette tour, a 1'aide des mines. — Du cöté de Mondovi, ils tentèrent quelques diverfions avec honte pour eux ; car elles fe réduifirent a des pillages & fa- (a) L'Auteur ne le nomme point. , (A) C'étoit Caracciolo, qui ayoit été pris a Ottagio. r IÓ2J.  i6z<). * 15>t MÉMOIRES cagemens. Enforte que, voyant tous leurs efforts inutiles; que les acTions fréquentes 6c les maladies avoient détruit plus des deux tiers de leurs Troupes ; que, dans le Pays gras 6c marécageux oü ils fe tró%voient, les pluies commencoient a tomben qu'il n'y avoit nulle apparence qu'ils puffent palTer 1'Hiver au fiége de Vérue j fcachant enfin que les Francois attendoient un renfort confidérable, ils fe déterminèrent a fe retirer; ne 1'exécutèrent néanmoins que tard 5 6c, dans 1'intervalle, s'appliquèrent a garder leurs lignes, 6c a garantir les Soldats des maladies. — Elles fe firent lentir au Duc de Féria , a D. Philippe Spinola, 6c a d'autres Officiers. Cependant le Connétable de Lefdiguières, s'étant rendu de Chaumonn  S E C R E T S. 193 Chaumont (a) a Chivas, s'aboucha avec le Duc de Savoye; Sc ils réfolurent enfemble de couper Jes vivres aux Efpagnols, afin de les engager au combat, Le 17 de Novembre, le premier ayant paffé a Vérue avec Vignoles, qui lui avoit amend de France un renfort de Troupes confidérable, jugea a propos d'attaquer les Forts que les Efpagnols avoient élévés dam la Plaine , Sc les emporta tous d'emblée. Le Duc fe tranfporta alors a Vérue. Quant aux Efpa, gnols, ayant forrné trois gros bataillons Sc deux efcadrons, ils marchèrent en bel ordre contre les Francois pour recouvrer les Forts qu'ils avoient perdus. Mais de cinq , ils n'en reprirent qu'un , c'étoit le plus (<) Oii 1'on a vu ci-devant qu'il s'étoic fait tranfporter. XXXIII, Partie. I - 1625  162.5. 1^4 Mémoires voiiin cle la Colline. La nuit mit rin au combac, lequel avoir. duré quatre heures; Sc 1'on fe fépara avec perte a - peu-prés égale. Parmi les blelTés, ducöté cles Francois, on comptoit le Maréchal de Créquy , qui recut un léger coup de moufqueta la cuilfe. Cette acTion mie le comble a la gloire que les Confédérés (a) s'étoient acquife au fiége de Vérue (b). Les Francois s'étoient montrés aufli induftrieux, laborieux 6c patiens dans la garde de leurs lignes, que vaillans courageux dans les acfions. — L'Efpagne confuma fous cette bicoque une Armée de quarante (a) La France Sc la Savoye, qui s'étoient iiguées pour 1'entreprife de Gènes , féparément de Venife avec laquelle elles étoient unies par le Traité de Lyon : toutes chofes dont il a déja été fait mention nombre dc fois. (/>) Lequel D. Gonzales de Cordoue avoit levé fur le minuit, avec beaucoup de pre» cipitation.  S E C R E T S. 195 mille hommes, donc les Chefsfirent banqueroute a 1'honneur Militaire. Ils furent en bute de diverfes facons, aux fatyres & aux pafquinades de toute 1'Italie. Les langues & les plumes desPoëtes & des Critiques les traitoient de laches, d'ignorans dans Part de la Guerre , & d'hommes fans coeur. — La France fut charmée d'avoir fauvé fon Client fa), & d'avoir fait réjaillir fur 1'Elpagne Ie deshonneur & lc préjudice qu'elle avoit éprouvés dans 1'attaque brufque du Génovéfat {b). Le Duc de Savoie , non conrent de la joie que lui caufoit une defenfe aulfi glorieufe qu'avoit été celle de Vérue (a) Le Duc de Savoie , dont on vient de oir que les Efpagnols avoient déja entaraé :s Etats. (b) L'Etat de Gènes. XXXIII. Partie. *I ij 16 2).  196 Mémoires brüloic d'envie de fe porter dB nouveau fous les murs de Gènes. Mals 1'expérience faifoit voir. que 1'entreprife éroic téméraire , li 1'on n'avoit une Flotte plus forte que celle de 1'Ennemi. — Venife, qui avoit contribué aux frais de la Guerre de la Valteline , &: refufé de participer a la diverfion d'Italie, ne fut pas fachée que 1'attaque du Génovéfat, tentée a fon infcu, & qu'elle défapprouva toujours , eüt échoué. Elle vit en conféquence d'un oejl fee les Etats d'Emanuel fa), faccagés & pillés (b), & fe tint fans rien faire, pour ne pas rompre la première ouvertement avec 1'Efpagne. Son fecours même pour la Guerrede la Valteline avoit toujours été (a) Ceux du Duc de Savoie. (b) Par les Troupes du Duc de Féria.—C'efl: ce qu'ou a vu. ibible  S E C It E T S. 197 foible & incertain, Elle fatisfif néanmoins a une bonne partie de fes obligations quant a cette Guerre. Charles-Emanuel, enflé d'un fuccès auffi heureux qu'étoit la levée du fiége de Vérue, vouloit attaquer le Camp Efpagnol a Pontelture, & pénétrer dans le Milanez; tout appliqué a brouiller les deux Couronnes (a), & a les engager dans une longue Guerre , afin de pêcher en eau trouble. Le Connétable & le Maréchal de Créquy, quoique brülant de défir de fe venger des Efpagnols (h), ne vouloient employer les armes de leur Roi, que bien a propos , & qu'autant qu'ils feroient sürs de rapporter (a) La France & 1'Efpagne , a la feconde defquelles le Milanez appartcnoit alors. (b) Qui avoient fait manquer 1'entreprife de Gèucs. Tiij 1625.  i6zy {a) Dans lequel elle fe nouvoit, 198 MÉMOIRES ie J'lionneur & de 1'avanta5e 5 les préjudices qu'elles ivoient elïuyés dans Ja Guerre ie Gènes, n'étoient que trop -écents. Le Connétable & le Vlaréchal difoient donc qu'ils ie voyoient aucun moyen d'ataquer, dans Pontelture, 1'Arnée Efpagnole , qui s'y étoit •etirée avec quatorze mille 7antaffins effe&ifs, Sc du caionj Sc qui étoit en état de fe léfendre dans une Ville , la]uelle, lituée fur le Pö, pouvoit ie procurer aifément des /ivres du Milanez (a). Que ni ;a faifon ni la foiblelïe de leurs rorces ne permettok qu'on at:aquat une Place de ce DucJié. ^u'entrer dans le Milanez , aniquement pour étabiir aux Troupes, des logemens clans les Hamaux Sc dans les Bourgs,  Secrets. 199 ne feroit point honorable pour ^ les armes du Roi. La-delTus ie Duc de Savoye propofa le fiége de Novare. Le Connétable & le Maréchal lui repréfentèrent d'abord les difficultés qui s'y trouvoient; puis ils lui offrirent des Troupes pour le tenter. Le Duc les accepta , &c marqua le temps pour 1'exécution 5 mais le déluge d'eau qui vint a tomber, 1'ohligea de la retarder >.& it y renonca enfuite tout-a-fait, paree que les Efpagnols pourvurent a propos a la défenfe de Novare. Ce projec manqué, le Duc vouloit qu'on en wat dans le Milanez d'un autre cöté. Le Connétable & le Maréchal opposèrent a fa demande deux raifons , outre celles que nous avons rapporties ci-devant. L'une étoit, lui dirent-ils, que les Troupes du Roi ne doivent point mettre Iiv  200 Mémoires TóTjTJe pied dans ce Duché, ü celles des Véniciens n'y entrent en même - temps ; &. cependann ceux-ci refuient de le faire, a moins que Sa Majefté n'ait fous fes Enfeignes vingt mille Fantaffins effeftifs, & deux mille Chevaux, & Votre Alteffe, la quantité qu'Elle eft tenue d'en fournir, par le Traité de Confédération (a). Le Connétable èc le Maréchal oppofoient au Duc de Savoye , pour feconde raifon, qu'ils ne jugeoient pas devoir commencer la rupture avec 1'Efpagne (b) , en Hiver, fans canon & fans attirail. Le Duc répondoit que , quand le Roi n'auroit dans Je Milanez, que huit mille hommes, les Troupes Vénitiennes ne laifle- (a) Entre Elle , la France & Venife. — C'efl: toujours celui de Lyon. (b) A qui appartenoit le Milanez , ou Charles-Emanuel vouloit qu'on pénétrat.  S E C R E T 8. 101 roient pas d'y entrer; voyant les —z—— profos confidérables & sürs qu'il 1 2 ^* y avoit en cela pour leur République. Que, pour ce qui le regardoit, ü auroit prètes toutes les Troupes qu'il étoit obligé de fournir par la Confédération 5 & que , quand aux Soldats qu'il avoit déja , feroient joints ceux que le Duc de Longueville levoit pour lui, il en auroit de refte. L'avis néanmoins du Connétable tk du Maréchal prévaJut, fortifïé par les ordres du Roi; enforte que les Troupes furent reparties, & mi fes en Garnifon dans diverfes Places. Cela accrut Ia mélintelligence (a) entre le Duc & les deux Généraux Francois •■> & ces derniers fe retirèrent a Grenoble, au mois de Décembre. — Mais (ü) Qu'on a vae antérkurcment. Iv  16z j. (a) Sans qu'il eüt attaqué les leurs, en pénétrant dans le Milanez ; ainiï que fon delfein étoit de faire, avec fes Troupes Sc celles de la France , réunies. 202 MÉMOIRES ■ ce qui aigriffok le plus Ie Duc, étoic le voyage de Créquy a Ia Cour. Le Duc craignoic que Ie Roi, informé par celui-ci de l'etat des Affaires, ne fe laifsat engager légèrement a faire la Paix, & a rappeller fes Troupes dTcalie. C'efT ce que le Duc apprehendoic comme le plus grand de fes malheurs > car il ne pouvoir fe réfoudre a foufFrir qu'une Guerre dans laquelle il avoit énormément dépenle , fïnk fans qu'il en tirat quelque profïtj il pouvoit moins foufFrir encore , que les Efpagnols eufïenr attaqué fes Etats, fans qu'il eüt pris fa revanche (a). Afin donc de donner quelque contrepoids a. ce que le Maréchal de Créquy dirok  S E C R Ë T S. 203 dia Cour, Emanüel y ehvoya■ en diligence le Prince de Piémont fon rils, qui y arriva, le 10 de Février de la nouvelle année (a), quelques jours aprcs le Maréchal. Ils donnèrent , comme nous dirons en fon lieu, leur avis 1'un &c 1'autre pour la Guerre d'Italie. La-deiTus on délibéra, & 1'on prit des réfolutions vigoureufes, a la fatiffaclión du Prince de Piémont auquel on avoit deiTein de donner le commandement général des Troupes du Roi. Mais la Négociation inopinée de De Fargis a la Cour d'Efpagne (/>), fuivie du Traité de Monfon (c), érrïpêeha que cela ne s'exécutat. f» i6%6. (b) De Fargis d'An^ennes , Comte de Rochcpot , toujours Ambaffadei'r de France a cette Cour. (c) Qui eut lieu au mois de Mars de Pannéc ou L'on ve.ioit d'entrer. Ivj  16 z 51 (a) Extraordinaire en Piémont. (£) Ils avoient commencé 1'exécution d'une Sentence fi téméraire , par faire rafer fa maifon. — Celle qu'il avoit a Gènes. (c) Qui étoit toujours ion Ambafladeur auprès au S. Siége. — La Lettre du Roi a ce Seigneur eft'du 14 de M rs. U) Le 4 d'Oétobre , 104 MÉMOIRES Louis XIII fut irrité a 1'excès, en apprenanc que les Génois avoient ofé faire le proces a Claude de Marini, fon AmbalTadeur (a) ; le condamner a mort, connYquer fes biens, 6c mettre fa tête a prix (b). Je m'en fouviendrai long-temps, marqué-t-il a Béthune (c); 8c je ferai chatier ces petits Républicains, felon que mérite leur infolence. — Le Monarque , voulant commencer a fe venger, rit publier (d) 1'Ordonnance luivante. — La République de Gènes, avec une audace 6c une témérité extraordinaires, a fait publier une Sentence du 3©  S E C R E T S. 205 d'Aoüt dernier, contre Marini, " AmbalTadeur extraordinaire du Roi en Piémont,; Iaquelie le déclare rébelle, & le condamne a mort; confifque tous fes biens; dit que fa maifon fera ra fee; met la tête a prix pour dix-huit mille écus. — Sa Majefté , voulant avoir réparation du tort fait a fa dignité, & de la vio'Iatioh du Droit des Gens dans fa perfonne, ordonne que les effets, marchandifès, biens, livres de commerce des Génois qui fe trouvent dans fon Royaume (les Naturalifés exceptés) feront faifïs; qu'il en fera fait un ïnventaire ; &. que ceux a qui ils appartiennent feront reflèrrés; le tout pour caution de Ja perfonne & des biens de Marini. Elle promet en mêmetemps une récompenfe de foixante mille livres a quiconque prouvera qu'il a tué quelqu'un 1625.  i6zy 106 MÉMOIRES de ceux qui ont affifté au Jugement rendu contre ledit Marini. Les Francois, au temps dont il s'agit actuellement , n'avoient, dans la Valteline, des fuccès guères plusheureux, que ceux qu'ils avoient eus dans 1'Etat de Gènes. Leurs Soldats (a), rebutés des fatigues &c des incommodirés qu'ils elfuyoient dans un Pays li ingrat, déchus de 1'efpérance de forcer Rive (b), & de faire encore du butin, fe débandoient. Ils commen^oient a craindre la rencontre des Allemands, qui, fous la conduite du Cofonel Pappenheim (c), étoient venus pour (a) Comme il arrivé d'oriinaire, dit le Texte , a ceux de cette Nation , que les longues Guerres laiïent. (b) Qu'ils afliégeoient, & qui étoit la feule Place qui leur reftoit a prendre dans la Valteline , comme nous avons déja dit tant de fois. (c) Dont il a écé parlé ci-devant.  S E C R E T S. 207 défendre cette Place; & qui , voulant profiter de 1'oifiveté de De Cceuvres, fe difposèrent a s'emparer des poftes de Vercei, Vico & Corbé , qui n'étoient fortiriés que du cóté du Lac de Cöme. Ils les attaquèrenta j'irnprovifte , en gagnant le haut des Montagnes par derrière ; & les Francois les abandonnèrent lachement, avec 1'Artilierie, les vivres, & les munitions qui s'y trouvoient. Mais le Colonel Pappenheim ne s'y tint pas long-temps, a" caufe de 1'ordre qu'il reent du Duc de Féria, de n'être attentif a autre chofe qu'a la confervation de Rive, éc de ne point la perdre de vue, attendü fa grande importance. Le Marquis De Cceuvres (a) (a) Deux Lettres de celui-ci au Roi, 1'une du 8 de Septcmbre 1615 , 1'autre du 18 du même mois» IÖ2 J.  i6i j. (a* Ou juftement ou injuftemen: , dit 1'Au eur de ces Mémoires. Que ce foit Votre Majefté. ïoS MÉMOIRES imputoit (a) a la République de Venife fes mauvais fuccès; il difoit qu'elle ne 1'avok pas fuffifamment alTifté dans la défenfe de la Valteline. Et, quant a cette grande ardeur, marquet-il au Roi, qu'elle avoit d'abord montrée pour 1'attaque du Milanez, elle s'eft depuis refroidie. Si donc le peu de fuccès que les armes Efpagnoles ont eu contre le Piémont, venoit a remettre en elle le premier délir de Guerre, il faudroit le rechaufFer ; mais je crois qu'elle nous échappera. Venife veut abfolument que ce foit le Roi de France (£), qui commence la rupture avec 1'Efpagne, 6c dit qu'elle le fecondera. Mais quejque bonne difpolltion que Venife montre  S E C R E T S. 20? pour eek, par Ia bouche de " fon AmbalTadeur, elle ne refpire que la Paix. — Mefmin m'a apporté {a) Ia Patente de Général de Votre Majelté , avec les pouvoirs nécèflaires pour entreprendre tout ce que 1'occalion me permettra. Les fuccès tantöt heureux tantötmalheureux, que les Parties éprouvèrent dans cette Campagne, & qui les firent alternativement efpérer & craindre , balancèrent leurs forces & leurs delfeins, & facilitèrent fans peine leurs difpofitions pour la Paix , nées de diverfes confidérations qui leur palfoient dans Pefprit. Quoique le Cardinal Légat (b), rebuté des diffi- (a) Lettre de De Ccruvrcs au Roi , du premier da Décembre, ióij. (b) _ Francois Barberin , neveu du Pape Urbain VIII , qu'on a vu que ce Pontife avoit envoyé eu France pour négocier t'accommodement déjinitif des affaires. i 62 J.  i6is;. (ö) Le Marquis de Mirabel. 210 Mémoires culcés qu'il avoic rencontrées dans fa Négociation, y eüt renoncé pour s'en retourner a Rome i faché néanmoins d'y reparoitre avec la honte de voir que non - feulement il n'avoit pu rien obtenir de la France, mais que la Guerre entre elle & 1'Efpagne étoit toujours plus allumée , continua de négocier par la voie de fes Prélats & celle du Nonce. Lui-même eut avec les Miniltres de Louis XIII, des entretiens particuliers; fe contsnrant de s'abftenir des conférences en forme. Mais il ne gagna pas plus qu'il n'avoit fait d'abord. Et cependant fes démarches en général donncrent a 1'Ambaiiadeur d'Efpagne (a) fujet de fe plaindre a lui, de ce que, tandis que lePape difoit qu'il travailloit a  Secrets. Hl une Paix, a laquelle il fallok que Ie Roi Catholique intervint comme une des Parties principales, le Miniftre de Sa Sainteté n'avoit fait aucune part a celui de ce Monarque (a), de fes Négociations. Le Légat répondoit que , les Efpagnols ayant déclaré qu'ils ne vouloient point venir traiter a la Cour de France , ils n'étoit point ohligé de communiquer a leurs Miniftres a Paris fes Négociations 5 vu furtout qu'il ne laifloit pas d'inftruire lui AmbalTadeur, par ia vöie du Nonce, de tout ce que le bien commun exigeoit. — Cette réponfe du Légat ne fatif faifoit pas PAmbalfadeur d'Ef pagne. Les Miniftres de France fe plaignoient de la lenteur du (