LEGAAT Mr. J. A. SILLEM 1912 81 1179 26+4 UB AMSTEWJAM  E S Q Ü I S S Ë d' ü n GRAND TABLEAU o u MEMOIRES POUR SERVIR A L' H I S T O I R E DES DES PAYS-BAS» ET PARTICULIERE MENT A CELLE Dfi QUXJLJLJLITMJE K Stadbov»**, Capitaxxe etAmiral-Ge- neral DE ces PrOVINCES, CapITAINE EV 4miral~Gene'ral de l'Union, etc. Depuis l'amie 1776. jus^o) ce jour. ■ P A r L'A U T E U r des XXX. ARTICLES, ou des conside'rations IfO welles suk l'Irre'ussite de l'Expe'dition de Brest. Première Partie. EN HOLLANDE, ^DCeLXXXVl.  Les Cars&eres fuivmts dêtutent les deux différente* Tar-> Sks, ö3 les trots différentes Editiens , que j'ai citêes du Mé moiré , que Morjeigneur le Frince Stadhouder, a remis aux Et sas - Gènéraux le y oüolire 1782. £f le 13 féwier 1783, &? qui contient un Expofé tlétaillè de Jon Ad. minijïration, en fa qualiti d'Amiral-Gèniral de l'Umon, depuis l'année 1766, jusqu'a la fin de 1782. A. éfigne Ia prem. Part. du Mé*i. Holl. in fel. g> , jd. ja $VOm C. . id. e;i Francois. D. • la feconde Part. du M é M. Holl. in fel E. id. in Svo- F. 1 — id. in Franfois.  A V I S. AU JL JE C T JE V \R< ~\Vut des Mmik de toute espece, que notre malhetireuje Patrie fovffre defuis Ion* gues années, & furtout, la vue de Vac* croifjement effraymt , oh ces Maux font farvenus depms Varmee 1776, r/iont engagé a reche?cher leurs vraies Cdufes. A eet effet, j'ai ramajje' totis les Documents néctffaires a mon plan; fai •vérijïé <, fai (tpprécié les Evenexients les plus importants , qui avotent eu htu depuis 30 ans dans notre RépubUque ; fai continue jusrqn' au jour a" hui de faire la mêmtchofe, & l force de travail & d'affiduiïé, je me ,fu}$ trouué'en e'tat de connoltre i fond la nature des Caufes fusdites-, & d'emrrprendre de donner au public tin Tableau fidele & • tres - dctaillé de leurs tffets. UEtenduc & la duree d'mie Entrcprife, que je frévis {faberd dev'oir aller a 12 $ gros  n AVrs au Lecteur. gros volumes in 8 °., ïes dégoüts & les dèsagréments que feffuyai des le commencement de mes recherches, les difficultês & les obftacles que je rencontrai enfuite , ö» tout que favois peut - être encore a atten* dre, ne me rebuterent pas. Ammépar la feule vue de l'utilité9 que mes Contemporains & la Pofiêritépourroient retirerde mon travail,. je refolus de facrifer mon temp ó* mon repos a Vexécution de mon deffem: Mais, j'avois a pdne donne' une espece de forme aux trots premiers Volumes de ce TaBLEAU, que destroubles funcstes vinrent augmenter nos malheurs. De nouveaux coups furent portés a notre Liberté expirante, les fondements de notre Conjiitution ejfuyerent de nouvelles fecoujfes, ces maux ajfrêax s'accrurent au lieu de diminuer, & s'ils continuent encore quelque temps, gen tji fait de JRepublique, A ce fpectacle déplorable, je fentis la né~ ceffité qtitl y avoit que les Caufes & les Auteurs de tant de Maux fujfent connus au plutot; —je fentis combien il importoit dJouvrirlesyeux a ceuxd'entre nos 'Concitoyens, qui fe font laijfés abufer par les Suppots d'u- ne  Avis au L]ecteu'r. m nt Cabale détefiable, pa peut tout parmi novs> & qui a juré notre perte ; —je vis qu'il impirtoit de venger les AffembléesSouver ames, & tous les honnêtes gens de notre Pays, fi indignement calomntés & out rages par les Scribes de cette Cabale; —je vis enfin qu'il étoit plus que temp de désabufer VEurofe des fauffes idéés, que Vimpofiure & la fcélérateffe ont pu lui avoir infpirees fur VélatacUel de notre malheureufePatrie, & fur les caufes qui Vont réduite en eet etat. Pour obttnir ces effets fi necejfaires, je ■ me fuis de'terminé a publier fans ancun délat L'Esquisse de mon Tableau, c'efi-k-dire , PAbregé d'un Ouvrage , dont Vimportance & Pêtendue demanaent encore quelques anne'es de travail, & que d'ailleurs la mort , ou d'autres acctdents auxquels la vie de Vbomme efi expofèt, peut m'empêcher de port er a fa perfeflto». Les deux Parties , que je fukh aujourd'hm de cette EsQUissa, committent particui:é>ement une üxpofition fidele de ce qui s efi pafje chez fious ciepms x77ó- jus\ mu*a laf* de 1781, relativement a Utat^ U le gouvernement de nos Provmces en paf.  iv Avis au Lecteür. tküi&r, ér telui "de la République en gé. riéral, fe font trouvés pendant cette épo* que; — relativemeni a nos premiers démê. lés avec r/Inglelerre ; — relativement aux obfiacles, que la Cabale Anglomane a app'orfës au Rétablifjement de notre marine; — relativement, enfin, a la funefie direBion de cette marine, & a VmaBiviiè honteufe de nos vaiJJ'eaux , pendant la première an~ n'êe de la guerre que nous avons m a fouten ir contreles Anglois. — L'on verra, par cette Expofition, a aftel point en ont impofé aux htats - Généraux, a la Nation, éra rt'.urope entier e, les Auteurs du fameux Me'moire, que notre Amirai - Général a remis a Leiirs Hautes PuiHances le 7, Qclobre 1782. Ces Auteurs nemanqueront pas de m'accufer daudace ér d'impofiure, ks Scribes & les antres Suppots de la Cabale répéter ont la même chofe, & ces cris retcntiront bientot d'un bbuf 'a. Vautre de VËufópe; mais des clameurs & des injures ne font pcint de raifons : Le moyen de me conjondrt', feroit de me rêfuter , ér c'efi jujiement ce que je /«-défie de faire. De Jimples raifonnements, quelques juf les qiiils foient .  Avis Au Lecteur. v jbient, font fouvent en but a la chicane ou a la contradittion; mais des Faits vrais, & prouvés de la maniere que je 1'ai fait, Jont d l'abri de toute contejtatiou. — Ce tCefi pas tont: fai joint d cette Expofitim le récit de 'diverfes chofcs intéreffantes, & irc:propres k faire connoitre de plus en plus la pervcrfitè des deffeins, & Vmfamie des mcnées de cette Cabale: & ce que fai dit dreh le,dans ces deux p"tits Volumes, fuffi' deft fov.r dé.nontrer q^Celle mérite toute l'exé:ration, que lui portent les perfonnes honnétes & éslairées, qui la connoiffent. La troïfieme Partie de mon £ squis se paroïtra dans peu de temp s, & contiendra Vhijióïre des Evènènieiïts polii:q::es , qui, pendant Vannèe 17Hz, ont eu ün rapport direc~t avcc notre Ré.ntblique. Cette Partie comprendra auffi tont ce qui pent contnbuer a faire coyinoiirc les Caufes de la continuation de 1'inacJiv'ité dè ?ios Farces navaks; & par confèyitent, Pon y irpuvera le refie de /^z Réfutation du M'emoire de V. A. S. — Ce nouveau Volume feta d'autant plus intéreffant, quon y verra comw>-it le Syftème iuique de nos ennemis intefil/is * 3 m*  vr Avis a ü Lecteur. infenfiblement développé;— lomment la Ka. tion a de plus en plus ouvert les yettx fur les Canfes prochaines & êloignées de totts ces malheurs ; — avec quel fondement, avec qucllc énergie elle a élevé fa voix; — & comment ces mêmes ennemis, voyant leurs trames perfides plus on moms connues, ónt commencé d'avoir recours d la vwlence ,pour éi oujf er nos jufiles plaintes, & pour achever de nous perdre. La quatrueme & la cinquieme Partie ne tarderont pas d fuivre la troifieme. Les Troïsbles furvenus dans la République deplus le 5 dècembre 1782* jusqu'd ce jour, — les diverjes Emeutes que la Cabale y a fufcitêi pendant la même époque, — les moyens qu'elle a employés pour exciter ces Troubles Ó" ces Emeutes, les vues qu'elle a eues en les excitant, — les obftacles qu'elle a fufcttés pour empêcher notre Alliance avec la France, — Vhifloire de nos dèmêlès avec VEmpereur^ •— le r'öle 'tndigne que cette Cabale a encore jou è en cette occafion, — fes rufes, pour neus ramener fous lejoug de VAngleterre, —c fes pratiques, four nous re. Hnlr dans les chaines oü elle nous a piongés ,  Avis au Lecteur. vu gj^ _ lts impoftures, qu'elle fait parvenir %ontre nous d Sa Majeftê Pruffienne, —Veffet & les fint es de ces impftures, — la naiffance d'une feconde Cabale non moins dangereufe pottt notre Libertê, — ltsmoyens que ces deux Cabales ont employés pour fe fupplanter mutuellement, - Uur rage de dominer exclufvement fur nous, — Vefclavcge, que nous avons d attendre dn triomphe de l'une ou de Vautre, - le même malheur , qui refulteroit de leur coalition, Vit at cffreux, oè tout cela nous a ré* duits, — les efforts que nous faf ons pour nous tirer de eet ét at, — lechoc, qui réftilte entre ces efforts & la rèfiftance qiCils éprouvent, beaucoup d'autres cho/es, qiiilferoit trop long de citer ici, jeront la matiere de ces deux Parties. Comme il n'eft pas douteux que, pendant Vimpre/Jïon de ces Volumes, tl n3 arrivéparmi nous des Evénements qui dêcideront du fort de notre malheuren je Fatrie, feft.d ■ di» re, que- danspeu de temps tl fera décidé fi nous fommes encore des hommes libres, oufl nous ferons les vils efclaves de la Cabale Jïnglo - Stadhouderienne, ou de qui que ce foit, qui a envie de nous affervir fous * 4 fon  vin Avis au Lecteur. fon despotisme, faurai foin de recueih lir ces Evénements, £5? fe» ferai la mattere de la fixteme 6? dermere Partie de mon Esquisse. Si fai fris la liberté d'adrejfer cette Esqu1sse d notre Stadhouder, Capitatne & Amtral-Général, c"efi que S. A. S. efi Vhommede la République, auquel tl importe le plus d'avoir une vraie & enticre connotffance des Chofes que fai rapportces, 6? de celles que je rapporter ai encore; — c'eji qü'tl importe de même a ce Pr mee, de favoir ce qu'il auroit pu faire de fon có:é, pour prévemr les malheurs qui nous accablent, ou du motns, pour cefjer d'éire Vaveugle inflrument de la Cabale qui legouverne, qui a juré notre per te; — c'eji, enfin, qtttl lui tmporte injimment de connoitre ce qu'il pourrott encore faire au* jourd'hui, pour fe délivrer du joug de eette Cabale, pour feconder nos eff orts contre ceux qui cherchent d nous opprwier, &? pour coopécer aurétablijfement de Vordre, de nion &? de la liberté, dans notre Pays. L'Errata eft a la fin du Second Volume. A  A §OAT A LTESSE SE RE NIS SIM Ë, 6r VIJL JL JIL U'JWJE V. PRINCE D'ORANGE et de NASSAU, STADHOUDER, CAPITAINE et AMIRAL-GENERAL des PROVINCES-ÜNIES d e s P A Y S - B. AS CAPITAINE et AMIRAL - GENERAL d e L? U N; I ' O N, etc. etc. etc. Monseigneur, (3omme notre République eft compofée de fept Provinces Souveraines, indépendantes, Sc qui ont chacunc une Conftitution, des Loix * ƒ &  Discours Preliminaire. xr' divers inconvénients préjudiciables tant au bien de Tune ou de 1'autre de ces Pro vinces, qu'a celui de leurs Citx yens, & même a celui de la Confédération générale, il paroit également ne'ccffkire, qu'il y ait dans chaque Province un Chef du Pouvoir exécutif, ou cel autrc Homme conftitué en üignité, dont la vigilante, les confeils, Tinfluence & 1'autorité aienc des efFets auffi falutaires, que ceux dont je viens de parler. Nos Ancêcres, Monfeigneur, ont fans doute eu ces efFets pour but, en élevant fucceffivement divers Princes de Votre Maifon aux Dignités éminentes, que Votre Altesfe réunit aujourd'hui en fa perfonne. Mais, fi, a quelques égards, 1'uTue a rempli 1'attente de nos braves Ancêtres, il s'en fallut beaucoup qu'elle 1'eüt rempli a d'autres égards. Ils éprouverent, en plufieurs cas, combien il eft dangereux d'accorder aux Stadhouders un pouvoir trop étendu, ou pas affez défini, c'eft-a-dire, de fe borner a leur donner une Commisfion, qui indique vaguement le bien qu'ils doivent faire, & ne prévient pas le mal qu'ils peuvent caufer en négligeant leurdevoir, ou cn outrepaffant les burnes naturelles de leur Autorité. Auffi, ce qui s'étoit paffe fous Maw rice, & ce qui s'efc enfuite paffe fous Guilia»* me II., fit juger qn'il étoit dangereux pour la mnquillité, 1'union & Ia liberté de 1'Ecat, ainü  xii Discours Preliminaire» ainfi que pour la fureté de fes fujets, qu'un homme y réunït un pouvoir auffi étendu, ausfi illimité, que celui dont ces deux Princes avoient abuféj êc après la mort de Guïllaume, arrivée en i6fo, la dignité de Stadhouder, cefla d'exifter dans cinq de nos Provinces (<*). L'' Atle d'Exclufwn, que les Etats de Hollande formerent en l6f4, YEdit Perpetuel, qu'ils formerent en 166y, .prouverent qu'on n'avoir, point oublié les actes de Defpotisme qui avoient eu lieu dans cette Province pendant leStadhouderat de ces deux Princes, & combien ces mêmes Etats craignoient d'y voir renouveller ces acces odieux, fi Pon y rétabliffoit une Dignité fi utile a plufieurs égards, mais fi dangei eufe, lorsqu'elle n'eft point contenue dans les hornes, que la prudence devroit lui prefcrire de la maniere la plus précife 6c la plus formelle. L'Expérience avoit donc appris ce qu'il feroit néceifaire de faire, fi Pon venoit a rétabiir le Stadhouderat dans ces cinq Provinces: Mais le pouvoir & les menées des Partifansjde Guilhume III., —— les divifiqns & les troubles qu'ils (a) Ces cinq Provinces étoient Ia Gueldre, la Hollande* Ia Zélande, Utrecht & Overysfel.- Quant a celles de frife & de Groeningue, elles avoient-leur Stadhouder particulier , dans des Deicendacts de Jean de Nasfau, frerc de Guitlaume I.  Discours Preliminait£. xiii qu'ils exciterent en divers tcmps ert faveur de ce Prince, — la guerre que la France & 1'Angleterredeclarerent ala Républiqueen 16*71,—" la méfiance, le mépris Sc la haine , que" ces Partifans, leurs Scribes, & les Prédicants fa.natiques infpirerent a la populace, contre la plupart des Régents,— les émeutes Sc les violences , auxquelles cette populace ie porta, furtout en Hdllande & en Zélandc, pour obte- nir le rétabliffement du Stadhouderat, les intrigues Sc les efforts de Quilhums même, —Sc beaucoup d'autres chofes qu'il ferbit trop long de rapporter ici, forcerent alors ces deux Provinces de rétablir cette Dignité, en la Perfonne de ce Prince, fur une Commiffion auffi vagtte, que celles que fes prédéceffeurs avoient eues} 8c la Charge de Cap'itaine - Général de 1'Union lui fut en même temps déféréc auffi vaguewent. Ores , Monfeigneur, fi 1'on joint a cela, qu'après que les' Francais eurent évacué les Provinces de .Gueldrc, d'Utrecht Sc d'Overysfe!, Sc que pour puft?? ces trois Provincqs, d'avoir eu le malheur d'être conquifes par la force, 1'on déféra a ce même Prince un empire presque abfolu fur elles,— fi 1'on y ajoute encore, que GuilÜu'nie étoit un des hommes les plus avides d'une Autorité fans bornes , il n'eff point étonnant-que,pendant toute fa vie, il ait gouvern.é la République, comme s'il en avoit été le fouverai» feigneur  xir Discours Preliminaire» feigncur & tnaïtre. Ceux, qui connoiflent notre Hiftoire, favent que fi la République dut beaucoup aux talents politiques & militaires de ce Prince, elle eut infiniment plus a fc plaindre des efFets d.e fon ambition infatiable, & de Pabus criant, qu'il fit fouvent du Pouvoir qu'on lui avoit confié. A la mort -de Guillawne UT., arrivée en 1702, la lignée de Guïllaume I. fut éteintej les cinq Provinces fusdites fe trouverent fans Stadhouder, & 1'Union fut fans Capitaine 6c Amiral-Général («). Mais lafunefix expérience, que 1'on venoit encore de faire, fit crahv dre que Ie rétabliffement de cette Dignité, & de ces Charges, ne portat un jour le coup mortel a la Liberté de la Nation, & il fe pasfa quarante cinq années avant qu'en ne les rétablit. Pendant cette époque, quelques uns des abus, qui fous le dernier Stadhouderat s'étoient gliffés dans diverfes parties de 1'Etat, continuerent de fubfifter} & a ces abus-la il s'en joignit d'autres d'une efpece différente, & qui curent les efFets les plus funeftes. Par exemple: dans beaucoup de nos villes, la Régence & le Pouvoir exécutif fe refferrerent plus que (a) Les Provinces de Frife & de Crecningue avoieut toujours leur Stadhouder particulier.  Discours Preliminaire. xv que jamais dans quelques Families ; Sc par ce moven-la, ces Families s'arrogerent, dans ces villes, le droit exclufif de députation aux Etats de leur Provincc, Sc par conféquent, aux Etats - Généraux j elles régarderent comme un patrimoine, toutes les charges, les emplois, les commifiions Sec., qui pouvoient convenir a leurs intéréts, ou fatisfaire leur ambition, & elles agirent en conféquence. Par ce même moyen, les villes fusdites, 6c des Provinces entieres, tomberent a la difcrétion d'un petit nombre deCitoyens, qui, partageant les droits Sc la dépouille du peuple, 6c dirigeant tout felon leurs defirs 6c leur volonté, pouvoient impunément éluder les plaintes de ce même peuple, ou lui impofer filence. Si Pon joint a cela tous les maux qui devoient réfulter, 6c réfultoient enefiét, de la toute- puiiTance d'une multitude de Régents, dont 1'égoïsme, Porgueil, 1'inapplication, Pignorance, la négligence, 1'infouciance pour le bien public , 6c le mépris des droits les plus facrés des Citoyens, ne pouvoient être réprimés , *— fi Pon y joint encore les inconve'nients toujours réfultants de la complication 6c de la défeccuofité de notre Conftitution générale 6c de nos Conftitutions particulieres, ou qui provenoient des abus qui s'y font infenfiblement glilfés, —fi Pon y joint, enfin,d'autres inconvénients provenants du défaut d'un Chef établi fur nos for- ces  XVI Discours Preliminaire.' ces de terre 6c de mer, il ne fera point étonnant que, pendant le cours des 45" années dont j'ai parlé plus haut, 1'on ait vu dans un grand nornbre de nos villes une infinité d'aétes arbitraires, une infinité d'injuttices, de vexations Sc de rapines impunémenc commifes, 6c les Droits des Citoyens indignement foulés aux piedsj— il ne fera point étonnant, dis^je, qu'a la fin 1'on ait encore vu la marine tota* • lcment déchue, les troupes fans difciplinc, le fervice militaire fans confidération, les frontiéres tombées en ruine, notre ancienne puisfance cvanouie, 6c la 'détreffe générale accrue i un de?,ré effrayant: de forte que nous ne fortimes de fous le joug de Guülaume III. que pour tomber de Charybe en Scylla. — Ce que j'avance ici, Menfeigmur, eft connu de tout le monde; 6c tous les égards que je puis devoir ix la mémoire des Régents, qui étoient plus ou " moins la caufe de tant de maux , ne peuvent m'obliger de taire, ou de trahir ici la vélité; je; fais que nos Corps municipaux, 6c nos AiTémblées Souveraines, font des objets dignes de la plus profonde vénération d'un Citoyen, maïs ia faine partie de ces Corps, de ces Affemblées , eft trop équitable , pour exiger que qui que ce foit n'ofe rappeler les abus 6c les maux, qui fe font quelquefois introduits dans 1'Adminiftration publique, par lepoids d'une Majorhé aveugle ou  Discours Preliminair!, xvii négligente, ou guidée par des motifs préjudiciables a la liberté civile Sc au bien général. Enfin, fi (furtout vers 1'année 1740. ) notre malheureufe Patrie étoit rcduite en eet étac par la conduite de tant de Kégents indignes de porter ce nom , il y avoit un grand nombre d'autres Régents , qui, voyant leurs louables efforts infructueux, gémiffoient, avec laNation, des Maux énormes dont ils étoient témoins. Ils n'ignoroient pas qu'il y avoit un Remede a ces Maux; mais que pouvoient leurs lumieres, leur zele & leurs vceux , contre des hommes tout-puiffants, qui trouvoient leur compte a laiffbr les cbofes commeelles étoient, Sc contre d'autres hommes , qui ne fondoient leur avancement, leur fortune Sc leur élévation, que fur le rétabliflement du Scadhouderat, tel qu'il avoit e'té auparavant? Selon un Me'moire manufcrit, compofé en 1740. par un homme trés-inftrüit, Sc dont j'ai un extrait fous les yeux, le Remede que ces dignes Régents defiroient de voir employer pour fauver 1'Erat, devoit confifter dans la Réforme de ce que la Conflitution générale Sc les Conftitutions particulieres peuvent avoir de défectueux , Sc dans 1'abolition des abus qui s'y font introduits. Les Villes pouvoient d'abord commencer chez elles cetre opération ; chaque Province auroit enfuite fait la même chofej Sc un Memblée générale dc Députés * * de  xvni Discours Preliminaire. de toutes les Provinces , auroit réglé ce qui concernoit 1'Union. Si 1'on venoit a faire une ,j telle Réforme, continue ce Me'moire, 1'on „ verroit la Nation rétablie dans fes droits Sc „ libertés} les nomminations des Régents fai„ tes univerfellement par le Peuple ; Sc les „ charges, emplois Sc commiffions, juftement réparties Sc dignement adminiftrées; — 1'on „ verroit, chez les Grands, la douce popula,, rité remplacer la morgue de 1'orgueil & du „ mépris j — 1'on verroit le Peuple attaché a „ ceux qui gouvernent, comme a fon propre ,-, ouvrage, Sc ceux -ci attachés au Peuple par „ tous les fentiments de 1'eftime Sc de la re„ connoiffance; — 1'autorité des Régents de„ viendroit plus falutaire, Sc par eonféquent, „ plus folide Sc plus refpeébable •, — Pon ver„ rolt renaitre , dans les différents crdres de „ 1'Etat, cette intelligence , cette intimité, „ cette confomce Sc cette cmulation générale, „ fans lesquelles, 1'ordre Sc 1'lurmonie ne peu„ vent exifter dans une République telle que la notrej — en un mot, le bien public de„ viendroit 1'uniquc objet de tous les vceux, „ Sc le but de tous les efforts. — Et après „ avoir ainfi aboli toutes les caufes des abus, „ des injuftices & du désordre , qui fe font „ introduits dans notre Adminiftration civile, „ après avoir ainfi levé tous les obftacles ca„ pables de déranger, de retarder, ou d'arrê- „ ter  Discocrs Prelim:ka:rk. xy.m Stadhouderat , & le demanderent a. 1'infi ant mémc; 6c coromc cette Régence étéu fans doutc prévenue de cette dcmar.de, elle y confentit fans difnculté dans la matinee (a). L/Incendie pafla, en peu d'heures, de Terveer e a Middetbourg 6c a Fltffiagite , oü cé jour-la même le Stadhouderat rut dcclaré rérahli: 6c les Etats de Zélande , raalgré les oppoiitions qui fe rencontrerent dans leur Asfemhlée, fuivirent le même exemple trois curs après. Le temps étoit venu, cü les Auteurs de cette Révolution, foutenus par la populace, 6c par les fupp'ts qu'ils s'étoien: frrr.es dar.s d'cutrcs claifes de citoyens, pouvoient ie vanter de donner la lei. Malheur a ceux qui s'y fer lient oppoiés. • Que 1'on en juge par ce qui eil alors arrivé a la Re'gerce de Zierïkzée, pour ne s'étre pas empreiTée a fuivrc 1'exernple de? -•;:-:= villes ce fa Piovince. La nouvelle ce ce qui venoit de fe palTer en Zélande fe répandit avec la rapidiré de 1'éclair dass les autres Provinces de la République: Et (a) C'eji esaSfWitr^ ie eet:: e.ime ma:i:re c-nc.-nr.tr.- rt. en cette viiie, la Rêvtiutim qui titva Ginüaume lil. au Stadhouderat en 1672. Et il tjï aertire, que t'il s'agisJoit un jour dt donmr un Sauverasn a la Rétublïque, ce fer*it dans U nté.T.t Corps - dt ■ guit que ie ^revier -as s'tn ftr.i:. »• 4  xxiv Discours Preliminaire, Et dès eet initant, les efforts rédoublés du Parti Stadhouderien, fon accroiffement fubit, renthoufiasme & les acclamations de la multitude, le nom d'Orange rétentiflant panout, les drapeaux de cette couleur arborés de toutes parts, les imprecations vomies contre Pancien gouvernement, les menaces & les déportcments de la populace, fes violences dans un grand nombre d'endroits, tout, en un mot, annonca dans les Provinces de Hollande, d'Utrecht & d'üverylTel, qu'il n'y avoit point d'autre parti a prendre, que de fuivre 1'exemple de la Zélande. AuiTï les Régents les plus éclairés, les plus zélés pour le bien public, & qui croyoient que 1'établiffement d'un Capitaine-Général auroit fuffi dans lacrife, oü les progrès de 1'ennemi avoient plongé notre Pays, ces Régents, dis-je, qui, voyant qu'on vouloit cependant avoir un Stadhouder, auroient defiré qu'on en remit 1'Eleétion a un temps, oü le calme de 1'efprit &C des pasfions permit qu'on rédigeat & limiut, dela maniere la plus prudente, la Commiifion & les Inftruétions qu'on pourroit luidonner, ces dignes Régents, enfin, furent entrainés par Ie tourbillon, tk confentirent, comme les autres, a tout ce que le Parti triomphant exigcoit. Une réfiftance opiniatre, de leur part, n'auroit pas eu d'autre efiet, que celui de les expofer a la fureur populaire, ou du moins, de leur faire per-  Discours Preliminaires. xxr perdre leurs Charges, Sc de les rendre ainfi hors d'état de s'oppofer par la fuite, autanc qu'il dépendroic d'eux , aux effets d'un Mal qu'ils n'avoient pu empêcher. Voila, Monfeigf.eur, comment le Rétablisfemenr du Stadhouderat fut mc-ir.s 1'effet de la néccflïté 8c de la prudcnce, que 1'ouvrage de 1'intérêt 8c de 1'ambition , de Tintrigue 8c de la féduction , de 1'avtug'ement 8c de la force. — Voila, dis-je, de qucile maniere cette Dignité fut rétablie le 3 mui par lés Etats de Hollande ,— lc même jour par k.c Etats d'U- trecht, 8c le 10 par.£euxd'Overyffcl. Dès le 4. la Charge de Capitaine 8c Amiral-général de 1'Union fut pare,11c muit ïerublie par les Etats-Généraux. Et toutcela, tant d'une part que de 1'autre, fur panden pitt; c'eita-dire, fans aucunes rnltruétiorts qui définisfenc 8c limitalTent chirement le Pouvoir trop étendu, ou trop vaguement exprimé par les Commifiions particuücres de la Dignité 8c de laCharge fusdites. — Enfin, comme Guillaume IV. étoit depuis long-temps Stadhouder de Frife, de Groeningue 8c de Gueldre, le Stadhouderat de toutes nos Provinces fe trouva ainfi réuni en fa Perfonne. Ce qui n'étoit arrivé a aucun de fes Prédécefleurs (*). " lm- Ca) Les deux Commiffions fuivnntes, qui ont été dresfces fur les anciennes en 1747, & qui onc été renou** f vri-  srxxiv Discours Preliminaire. Un grand nombrede ceux qui s'étoient oppofés a fon élévation, ou qui déplailoient a fes créatures , furent exclus des charges 6c des em- plois: ■ De forte que fi, dans tout cela, il y eut des aótes de néceffité 6c de jufiice, il s'y commit auffi des injuftices , des vengeances, 8c des act.es arbitraires, qui annoncerent a la Nation qu'un jour a venir elle verroit renaitre, chez elle, un despotisme non moins abfolu que celui de GuiUaume III. •— L'Histoire de 1747. a i7fo. nous fournit plufieurs exemples de ce que je ne fais qu'indiquer ici. Comme ceux qui avoient le plus eontribue a rétablir le Stadhouderat dans toute 1'étendue d'un tel pouvoir, recueillirent bientót les fruits de leurzele & de leurs peines, ils n'épargnerent rien pour mériter de plus en plus la reconnoilTance de GuiUaume, 8c par conféquent ^ pour achever d'a(Touvir la cupidité 8c 1'ambition qui les dévoroient: Ils eurent recours aux mêmcs moyens qu'ils avoient employés dans leur première entreprife, 6c parvinrent a faire déclarer le Stadhouderat, héréditaire, en faveur des Defcendants males 6c femelles de S. A. — Et comme fi ce nouvel événement n'eüt pas rendu le Gouvernement de la République affez dépendant de la volonté ou des caprices d'un Stadhouder, la majorité des Nobles 6c des Régents des Provinces d'Utrecht, d'Over-  Discours Preliminaire, xxxv d'Overysfel & de Gueldre formerent Podieux projet d'y récablir la même forme de Gouvernement, que 1'injuftice la plus criante, fecon: dée par la force, avoit introduite dans les deux premières de ces Provinces en 16-4. 6c dans la troifieme en ló/f. Et ce pro]et ayanc flatté Pambition de GuiUaume, ce Protedteur établi 6c fermenté pour maintenir les droits^ les privileges 6c libertés de nos Villes & de nos Provinces, ce Prince,qui palToit pourréuniren lui les principales vertus moralei, confentit a dépouiller ces trois malheureules Provinces de ce qu'elles avoient de plus facré, & finit par parcager ces dépouilles avec ceux qui 1'avoient rendu leur complice. Enfin, Alonfeigneur, auiourd'hui encore, il fe trouwe non feulement dans ces mêmes Provinces, une Majorité alTez perverfe, alfez dénature'e, pour vouloir y maintenir une forme de Gouvernement auffi inpaste, 6c auffi tyranniquement introduite, mais V. A. méme lbutient que cette forme de Gouvernement eft légitime, 6c que c'eft un objet facré, auquel on ne peut toucher 1... . Et pour cette raifon auffi injufte qu'abfurde, ceux des Régents 6c des habitants de ces Provinces, qui ofent réclarner contre ces horreurs,1 font régardés comme des infenfés, ou pour- fuivis comme des rebelles! Mais après ce qui s'eft paffe parmi nous depuis tant d'années^ §? lurtout pendant les derniers temps de 1'ad* * * z mi-  xxxvi Discours Preliminaire, miniftration de V. A., il ne peut plus nous arriver ricn, qui nous étonne. Indépendamment de 1'odieufe forme de Gouvernement, réintroduite en faveur de GuiUaume IV. dans les trois Provinces fusdites, ce Prince acquit encore, dans les Provinces de Frife 8c de Groningue, un pouvoir beaucoup plus étendu que celui que les précédcncs Stadhouders y avoienc eu. Outrecela, il réunit en fa perfonne un grand nombre de Titres, de Digrutés & d'avantages, que ces derniers n'avoienc point polTédés: car il fut déclaré Stadhouder 8c Capitaine - général héréditaire des pays 8c villes de Brabant, de Flandre, 8c du Haut - Quartier de Gueldre: Après qu'on lui eut accordé en propriété la 2$e. partie de toutes les Dividendes de la Compagnie des lades orientales, il fut nommé Directeur 6c Gouverneur-général de cette Compagnie, avec Pautoi ité la plus étendue qu'un homme y puisfe exercer: II fut pareilletnent nommé Directeur - général de la Compagnie des Indes - occidentales, 6c on lui accorda la quatrieme partie des Dividendes, qui s'y feroient. Que 1'on joigne a cela toutes les Charges, droits 6c privileges parriculiers que chaque Province s'emprflTa de lui conférer chez elle; que Pon y joigne encore les appointements, les émo« luments, les rétributions, 6c les exemptions en tout genre, que cela lui pnocuroitj. 6c que 1'on  Discours Prelim.inaie.es. xu être infultées, ou attaquees par 1'une ou 1'au- tre des Pwffances beiligérantes. Et qui étoient donc les Membres du Gouvernement, qui appuyoient ce préttxte auifi odieux qu'aè- furdel C'étok une Majorité toute-puis- fante dans les Etats de Gueidre, d'Utrecht, d'Overysfel & de Groningue, ainfi que d'autres Régents dévoués a la Cabale , lesquels fachant que nos trois Provinces markimes ne confentiroient jamais a une Augmentation de troupes, fi couteufe iSc fi inutile, s'autoriioienc déla a refufer de confentir au RétablilTement de la marine, & fervoient ainfi la Gouvernante, dans le parti qu'elle avok pris de n'accorder aucune proteciion a notre commerce. En un mot , il en fut alo;sv, ainfi qu'il en a été pendant les trois dernkres années, qui pre'céderent la derniere guerre : Nos intéréts les plus chers, & Phonneur de la République , furent indignement facrkés a nos ennemis naturel»; Sc cela, d'une maniere fi vifible, qu'il n'ya aucun homme raifonnable qui puilTe en douter. Pour de'montrer a quel exces de détrelTe notre commerce étoit réduit a la fin de I7f8, & le peu de cas que la Gouvernante avoit fait auparavant, & fit encore alors des Repréfentations de nos principaux Négociants, je placerai ici la fubliance de ctlles, qu'une Députation d'entre de ces Mtfiïeurs fit derechef a cette Princcfie le 7. décembre dc cette an* * * f néc-  xlh Discours Preliminaibe. née-Ja. C'étoit Ia quatrieme, que le Commerce lu:i envoyoit depuis le commencement de la guerre. Le« Députés ayant obtenu audience de Son Jlltetfe Royale, lui rappelerent avec autant de fermtaé que de refpecï:, tous les maux qui étoient réfultés, & qui pourroient encore provenir de la continuation des aftes de violenee & des déprédations commifes, tant par les vailTeaux de guerre Anglois, que par les Corfaires de la même nation : Ils fe plaignirenc enfuife des chicanes de toute espece, auxquelles le Miniftere d'Angleterre avoit recours , — pour s'autorifer a. ne faire aucun droit fur les plaintes portées par nos Négociants; — pour interrompre le cours naturel 8c légitime de notre commerce } — 8c pour éluder tout arrangement raifonnable, en faveur de notre Navigarion &c. — Après cela, celui de ces Députés qui portoit la parole, continua fon discours en ces termes: Que Votre Altefle Royale, Madame, ne regarde pas comme une importunité, fi les Négociants, contraints par les raiions fus„ dites , 8c réduits a la derniere extrémité, s'adreffent de nouveau a Elle, 8c lui réité,, rent leurs refpeclueufes inilances, pour obtenir fon fecours dans le danger prtlfant oü ils fe trouvent : Et qu'Elle permette, qu'a, eet effet , ils lui propofent deux „ moyens,,  xlvi Discours Preliminairs. i? plus forte fur 1'obtention d'une entiere ré- paration des dommages qu'ils ont foulferts. ,, Et s'ils ne croyoient pas que ce feroit, „ en quelque forte, prévenir les Délibérations „ de leur légitime Souverain , ils propofe- roient, qu'au même temps que l'on enver» ,, roit la Députation fusdite en Angleterrej „ l'on expediat diverfes Commiffions en Rus,, fie, en Efpagne, en Suede 8c en Dane„ mark, afin, qu'au cas d'un refus de la part „ de la Cour de Londres, l'on ptic s'aiïu„ rer de Palliance 8c du fecours desdites „ Cours, 8c qu'elles s'oppofaflent avec nous au Defpotisme, que les Anglois exercent ,, fur mer, &c. " A ces Repréfentations fi touehantes, fi énergiques, 8c fi fondées, Monfeigneur , S, A. Ri répondit froidement, ,, qu'Elle regardoit avec déflaifir 1'état aétuel du Commerce ^ 8c „ qu'Elle n'en étoit pas moins touche'e que ,, qui que ce füt d'entre les Négociants; mai'S „ que ce n'étoit point sa faute, fi le Co?ft- riteree n'étoit pas mieux protégé: que c'étoit ,, aux Régents de Dordrecht, Harlem, Am„ fier dam , Gouda, Rotterdam & la Brille $ j, qu'il falloit attribuer la caufe, pour laquelj, le les Forces de terre 8c de mer n'étoient „ pas en meillcur état: que de fon cdté, Elle n'avoit point discontinué de travailler „ afatisfaire les Négociants\ & qu'une Let-  Discours Preliminaire. xlviï 3, tre qu'Elle avoit regue du Roi, fon Pere, s, {Lettre, dont S. A. R. Uur remit une copie, 3, fc? »f fignifioit rien de pofitif) en rendoit „ témoignage ; qu'Elle avoit appris que le ,, Colonel Tor kt avoit demandé, dans la mati„ née du même jour, une audience de L. H. „ P. pour entrer en conférence fur cette af5, faire, & qu'Elle en efpéroit une heureux ,, fuccès. " Après ce discours, S. A. R. fe retira dans un autre appartement, en difant aces Meiiieurs que, s'iis le trouvoient apropos, ils pouvoient s'expliquer plus amplement avec fon Confeiller privé, Mr. de Larrey. Le ton, avec lequel ce discours avoit été prononcé, le reproche que S. A. R. y avoit fait aux Villes fusdites, d'être la caufe que les Forces de Terre & de Mer n'étoient point en meilleur état, Sc la certitude que ces Députés avoient du peu de fruit, qui réfulteroit des fuites de la Conférence de Mr. Torke, firent conclure a ces Meffieurs, qu'ils avoient derechef perdu leurs peines. — Malgré cela, ils fe rendirent chez Mr. de Larrey , oü, après quelques débats affez vifs fur le fujet qui les avoit amenés, eet homme coupa court, & leur dit nettement, ,, que Madame la Gouvernante ,, s'étoit fait un point cPbonneur de ne confen- tir i aucun Armement par mer, fans obte,, nir 1'Augmentation des troupesj Sc qu'il 3, n'ofoit flatter les Négociants, du recouvre- „ ment  £ Discours Preliminaire. eut encore après la mort de 5". A. R. , ont coüté prés de 20 millions de perte a notie Commerce, & ont caufé, a 1'honneur de la République , une tachc ineffacable. — L'on apprit auffi par-la, que puisqu'en déclarant héréditaires les Charges 6c Dignités, auxquelles GuiUaume IV. fut élevé , la prudence en avoit fait exclure ceux de fes Defcendants, qui feroient revêtus de la Dignité Royale ou Electorale, cette même prudence auroit du en faire exclure également ceux de ces Defcendants, qui épouferoient des Enfants de Roi, ou de tout autre Souverain, dont les intéréts pourroient être, ou devenir contraires a ceux de la République: Et peut-être n'auroit-on pas mal fait de pourvoir auffi aux inconvénients, qui, chez nous, néfulteront toujours de la Régence d'une Femme étrangere , qui peut parvenir a cette Régence fans avoir eu le temps, ou fans avoir pris la peine d'étudier notre Conftitution, nos Loix, la nature de notre Gouvernement, 6c bien d'autres chofes , dont la connoiffance eft indispenfable , pour exereer avec fruit les Charges 6c Dignités de Stadhouder 6cc., qu'un Enfant mineur doit remplir a fa majorité. Après la Mort de Madame la Gouvernante (a), une (a) Cette Princefle mourut le 12. janvier 1759. — Et le jeune Stadhouder n'avoit point encore il. ans.  Discours Preliminaire. lui Au même inltant que le Duc entra dans i'adminiftration de la tütelle de V. A., les Etats Généraux le déclarerent Votre Repréfentant , comme Capiiaine général de 1'Union. II paroit que L. H. P. prévirent des lors les abus , que eet homme pourroit faire du crédit & de 1'influence, qu'il avoit eu 1'art de fe procurer dans la République pen« dant la Vie de Madame votre Mere ; car 1'Article VII. des Inftructions qu'Elles lui donnerent, en la qualité fusdite, porte mot pour mot ce qui fuit: ,, Le Seigneur Duc ne fe mêlera abfolument d.'aucunes affaires con„ cernant la Religion, la Police, les Finan„ ces, ou la Juftice; ni d'autres affaires quel- conques qui font a la dispofition particuliere „ de L. H. P., ou qui regardent les Confé„ dérés, ou quelques uns de leurs Membres} 5, non plus que des affaires relatives a 1'Acte 5, d Union, formée entre les Confédérés: & „ encore moins pourra-t-il s'immifcer, foit direétement ou indirectement, dans les dis- cuffions ou différents , qui pourroient s'é„ lever entre les Confédérés en général, ou „ quelqu'uns d'iceux , ou entre les Membres ou Quartiers de quelque Province que ce „ foit, a moins que les Parties intéreffées ne „ le requierent d'y interpofer fes bons offices „ & fa médiation, ou qu'elles ne foumettent M 1'affaire a fon jugement & déciCon, " **** 3 Ce-  ii? DisgoJurs Preliminaire. Gependant, malgrélesfagesprécautions prifes ' dans cct Arcicle, malgré lackrté Sc la fermeté, avec lcsquelles L. H. P. y avoient déclaré leur volonté fuprême, le Duc trouva moyen d'éluder les défenfes qui lui étoient fakes. Unc multitude de Laches, connoiflant 1'étendu e de fon crédit, Sc prévoyant 1'influence toute - puiffante qu'il auroit fur Pefprit de V. A. lorsqu'elle auroit atteint fon age de majorité, trahirent les intéréts Sc la gloire de 1'Etat en le fervant dans fes menées ouvertes ou fecretes, Sc cela, dans la vue de fatisfaire, par fon moyen, leur cupidité Sc leur ambition : Et fans qu'il y parut beaucoup, il regna fi fouverainement, que tous ceux qui le fervoient étoient furs d'être récompenfés} Sc que ceux qui avoient le malheur de lui déplaire, éprouyoient direélement, ou indireétement, les plus grands effets de fon reiTentiment. En un mot, les injuftices, Sc les adres d'une autorité arbitraire ne lui coütoient rien, paree que perfonne ne s'y oppofoit. — Eh! que pouvoit - on faire, d'ailleurs, contre un homme, qui d'une main répandoit les faveurs, Sc qui de 1'autre tenoit la foudre, pour écrafer fes ennemis? — II ne fe comporta pas mieux en qualité de Repréfentant du Capitaine général: II remplit nos Troupes d'une multitude d'Etrangers, dont une partie étoit indigne de manger le pain de 1'Etat: nos Officiers nationaux fouf-  Discours Preliminaire. x,v fouffrirent les paffe - droits les plus injuftes: il introduifk dans le Service des maximes dangcreufes, des ufages intolérables, & des abus criants: 8c nous fommes encore bien éloignés d'en voir disparoitre les traces. — Si c'étoit ici le lieu de m'étendre fur tout cela, je rapporterois des chofes qui feroient horreur: Mais j'en réferve le détail pour un autre temps. Enfin, le 8. mars 1766, V. A. atteint Page de majorité, Sc le Duc ceffa d'être Votre Repréfentant , comme Capitaine - général; mais il ne ceffa point de jouir des 60 mille florins que 1'Etat lui donnoit annuellement, indépendamment du Gouvernement de Bois-leDuc, Sc du Commandement du Régiment des Gardes Hollandoifes, qu'il avoit. Outre les Remerciments folemnels 8c les plus flaneurs, qu'il recut de^ la part de L. H P. 8c de chaque Province en particulier, pour avoir adminiftré la tutelle de V. A. 8c pour avoir préfi. dé a fon Educatión, il obtint encore, en reconnoiflance de cela, la fomme de 611000 florins, tant de la part de V. A que de cellê des Provinces refpectives («). Mais, (a) La Gueldre donna pour fe part, . . 50000. fl. La Hollande, . . » . 200000. La Zélande, . . . 30020. Utrecht, . • . . 250c0. •*** 4 La  txii Discours Preliminaire. le garantiffoit pleinement de tout reproche, recherche £s? re/ponfabilité quelconque; qu'Elle ne vouiott pas qu'il rendit ducun compte, ou répondit a qui q.ue ce fut, autre qu'a Elle- même, Jur te fujet; 8c qu'au cas qu'Elle vint a mourir, Elle vouloit & defiroit qu'il put s'acquitter, en remettant, oufaijant dépojer a votre Secrétairiepri•üée les Pieces cj? Papiers relatifs a votre Adminiftration fans qu'il füt tenu de donner aucune ouverture, -a qui que ce füt des Hèritiers, Succejfeurs, ou Ayant - caufe de V. A.} beaucoup moins de leur rendre compte; 6c cela, fans qu'il y put être contraint d'aucune maniere. Mais, Monjeigneur , 1'événement montra que cette précaution avoit été inutile. Aufiitót que YAtle füt connu, 1'indignation qu'on avoit déja contrecet homme parvint a fon comble: des cris 6c des piaintes ameres s'éleverent de toutes parts: Ni Papologie que Vous entreprites de faire de fa conduite , par la Lettre que vous écrivites aux Etats Généraux le *4 du même mois , ni le Mémoire juilificatif, qu'il publia lui-même en après, ni les Ecrits fans nombre , produits en fa faveur par les Scribes de la Cabale , dont il étoit le Chef, ne purent étouffer ces piaintes 8c ces cris. L'expofition que l'on y faifoit de la bienveillance dont il avoit joui auprès de Guillaume IV. 8c de la PrinceiTe Gouvernante, l'expofition des marqués de confiance 8c d'appro- ba-  Discours Preliminaire, lxiix bation, dont les Etats Pavoient honoré autrefois, prouverent tout au plus, qu'il pouvoit avoir mérité tout cela, ou plutót, qu'on pouvoit s'être trompé en le lui accordant. Mais ni 1'un ni 1'autrc de ces deux cas ne pouvoit juilifier fa conduite adluellement connue, non plus que le parjure, & la furprife odieufe, dont il s'étoit rendu coupable par eet Acle. Des Provinces, enfin, demanderent fon éloignement de la République 5 tous les bons Patriotes le defirerent, comme une faveur du cielv & au mois d'oclobre fuivant, il trouva a propos d'abandonner ce pays - ci, pour êviter qu'on ne lui ordonnat de le quitter, ou qu'il ne lui arrivat quelque chofe de pis. Voila, Menfeigneur, voila. comment il fe trouve des Individus, qui, par Pinfamie de leurs aélions, déshonorent le Nom qu'ils portent, randis que d'autres illuftrent ce même Nom par 1'éclat de leurs vertus. L'Hiver dernier un Prince de la Maifon de Brunswick, animé par 1'amour de 1'humanité, s*expofaintrépidement fur les flots d'une riviere impétueufe & débordée , pour aller fecourir fes femblablcs, qui étoient en danger de périrj mais il fut englouti par les eaux avant d'avoir atteint 1'autre bord. Le fort de ce Prince généreux, qui touchoit a peine a la fleur de fon age, fut déploré de toute 1'Europe; fa Mé» moiré fera, en vénération auffi long • temps qu'il exiftc-  Discours Preliminaire, ixvii Mais ce n'étoit point afiez, pour eet homme dangereux, que V. A. réunit en Elle un Pouvoir qui offusquoit ii étrangement la Puisfance fouveraine de chaque Province, & par eonféquent, celle des Etats Généraux, il iraportoit encore a ce même homme que V. A. put ufer de ce Pouvoir, & 1'augmenter a discrétion, fans rencontrcr aucun obftacle, fans même éprouver de contradi&ion. Et a eet effet, il falloit établir dans les Régences de la plupart des villes de la République, dansles divers Colleges du Pouvoir exécutif, des Affi* dés qui furvcillalfent aux intéréts de V. A. en y trahilfant ceux de 1'Etat > —■ il falloit, disje, y établir des Affidés, qui y donnalTent le ton aux D^libérations, — qui y dirigeaffent les Réfolutions, ou les Opérations, felon vos vues ou felon celles de votre Confeil, •— qui y réglalTent tout felon leurs inftruótions fecretes,— & qui tinfient ces Régences & ces Colleges, ou du moins la majorité de leurs Membres, dans une dépendance abfolue: Et tout cela réuflir au dela de tout efpoir. Dans un Pays, oü 1'amour du luxe , oü 1'ambition de s'élever par quelques moyens que ce foit , oü 1'inditférence pour le bien publie, oü 1'avilisfement de 1'ame, Sc la dépravation de 1'efprit Sc du cceur font parvenus au point qu'ils le font parmi nous, il n'étoit pas difficile de trouVer des hommes qui fe cruffent tres - honorés ***** £ dg  i.xviu Discours Preliminair»: de remplir eet emploi honteux, 6r d'autres hommes, qui fe cruflent tres - heureux de ramper fous le joug de ces tyrans fubahernes, connus, dans quelques Villes, fous le nom de Lieutenant ■ Stadhouders, en d'autres endroits, fous le nom de Premiers, 8c ailleurs, feulement par 1'autorité qu'ils s'arrogcoient, 6c par les Actes arbitraires qu'on leur voyoit faire. Etablis pour efpionner ou faire elpionner la conduite d'un chacun, — établis pour féduire les ambitieux 6c les intéreffés, par Tappas des récompenfes , — pour contenir les foibles par la crainte de la vengeance, — 6c pour réfifter aux hommes courageux, par une oppofition victorieufe, il n'eft point étonnant qu'ils dirigeafL-nt tout, a leur gré, dans les Départcments qui leur étoient confiés. Avoir la faveur de ces vils Inftruments du defpotisme, c'étoit avoir la votre, Monfeigneur, c'étoit être fur de parvenir: encourir leur défiance ou leur haine, c'étoit encourir la défiance ou la haine de V, A. ou celle de votre Confeil, 8c par eonféquent, c'étoit être expolé a des pasfe-droits, a des injuftices 8c a des perfécutions de toute efpece. De cette Inftitution odieufe & tyrannique, dans diners endroits, 8c de Yexiftence d'un Parti nombrcux, aveuglement dévoué a V. A. 8c qu'on avoit foin d'entretenir dans presque tous les Corps municipaux, dans presque tous les  lxxii Discours Preliminaire. fer: il dévoila clairement les motifs qne PAngleterreavoit en cecas, & les vues particulieres que none Cabale Anglomane avoit de fon cóté, en y fervant cette PuilTance $ Amfierdam ouvrit enfuite les yeux, d'autres villes ouvrirent les leurs, 5c 1'accord de la demande n'eut aucun effet.— Mais, Mvnfeigneur, qu'arriva-t-il dela? — II en arriva que le Baron, le plus digne & le plus refpe&able Patriote qu'il y eut alors dans la République , encourut votre indignation , Sc qu'il efTuya, tant de votre part, que de celle de vos Panifans & de les Collegues d'OveryfTel, les efFets de la vengeance laplus lache 6c la plus indigne.— Qu'en arriva-t-il encore? — II en arriva que les Anglois outrès de dépit, jurerent de fevenger, d'une maniere fanglante, dece juüe refus: Et a eet efFet, ils commencerent dèslors, fur notre commerce, leurs déprédations connues j 6c lorsque la France eut rompu avec eux , ils porterent ces déprédations a un point qui fit horreur. Un feul moyen pouvoit réprimer 1'audace, les violences & lqs atrocités de ces Pirates auffi. cruels qu'infatiables } & ce moyen étoit de remettre notre marine fur un pied refpectable , 6c de protéger puiffamment notre commerce 6c notre navigation. Mais, Monfeigneur, V. A. , ou plutöt la Cabale odieufe qui 1'obfédoit, qui la dirigeoit, n'aVoit garde  Discours Preliminaire, lxxih de d'avoir recours a ce moyen faluraire ; au conrrairc, elle fittout ce qui dépendoit d'ellc pour empêcher le rétabliffement de cette marine , Sc par eonféquent, pour éviter d'accorder la proteótion néceffaire. Le but de cette Cabale étoit de laiffer a toujours notre marine dans 1'état de foibleffe , oü les Anglois avoient intérêc qu'elle reftat j ion but étoit de nous voir contraints d'abandonner un commerce légitime, dont les ennemis de 1'Anglcterretiroient quelqu'avantage, <&dont nous tiriens une grande partie de notre fubfiflance; fon but étoit de nous voir humiliés au point de n'ofer refufer les nouveaux fecours , que cette Puilfance nous demandoit fans aucun fondement} fon but étoit de fe venger de celles de nos villes commercantes, qui, dans tout ceci, s'étoient le plus oppofées a fes deffeins; en un mot, fon but étoit de favorifer de toute maniere les intéréts de nos ennemis naturels, en leur facrifiant ceux de la République. i— 11 n'y a point d'honnête homme , Monjeigneur, qui ne foit faifi d'indignation, lorsqu'il fe rappele le röle honteux, que Mr. Torke, le Duc, Scle refte de la Cabale Anglomane vous ont fait jouer en tout ceci, ainfi que dans les moyens que l'on vous fit employer pour empêcher la République d'accéder, a temps, a la Neutralité armée. Tant d'humiliations Sc d'outrages réveilla ***** ƒ ■une  Discours Preliminaire, lxxxi chofe arriva toutefois , Sc voici comment elle fe paffa. Au commencement d'aout 1781, ce miférable, qui de fa vie ne s'eft faic aucun fcrupule fur les moyens de fe procurer de 1'argent, écrivit au Secrétaire de Mr. le Duc de Brunswick une Lectre , d'une main Sc d'un flile déguife's, Sc par laquelle il annoncoit qu'il étoit un Libraire, qui avoit acquis d'un Particulier Hollandois , Sc moyennant unc Obligation de 400 ducats, un Manufcric tres* violent contre Mr. le Duc Sc autres Perfonnages refpectables, Sc de la publication duquel il avoit efpéré tirer un grand profit > mais qu'aprcs en avoir imprimé fix feuilles, la violence de 1'Ouvrage & les remords de fa confcience 1'avoient porté a abandonner 1'entreprifej Sc que pour éviter d'être ruiné paria, il prioit le Duc de vouloir bien lui faire remettre, au bureau de la Pofte, a Nymegue , les 400 ducats qu'il s'étoit obligé de payer ; Sc qu'après cela, il jeteroit le prétendu Manufcrit au feu Sec.; le tout , ainfi qu'on le peut voir par la lecture de la Lettre même, que j'ai fait imprimer a la fin demon fecond Volume, fur une Copie autentique, tirée de la Secrétairerie de la Cour de Juftice de la Province de Gueldrc. Comme de pareils tours de fripon font trop communs pour s'y laiffer prendre, Sc que 400  lxxxii Discours Preliminaire. ducats ne fe donnent point fi facilcment, Mr. le Duc fit commencer, par la dite Cour, les perquifitions néceflaires pour découvrir 1'Auteur de cette Lettre, & Ton ne tarda point a. apprendre que eet Auteur étoit Manzon. C'eft. ce qui fe pourra égaleraent voit par les Pieces autentiques de la procédure que l'on a faite a. ce fujet, & que j'ai auffi fait imprimer a la fin du même Volume. Tout autre que ce fcélérat auroit payé cher fa témérité : Un mot de la main de Mr. le Duc au Miniftere de Pritje, ou feulement au Magiftrat de Cleves, fufhïoic pour le perdre: Mais au lieu de le pourfuivre, Sc de lui faire fubir la punition qu'il méritoit, l'on fut enchanté, a la Haye, de cette découverte; Pon manda en Gueldre de ceffer les procédures, & l'on fe fut bon gré de pouvoir acquerir, au prix d'un pardon généreufement accordé, une plume de plus pour la défenfe de la Cabale. — Que eet homme écrive donc encore, ainfi qu'il Pa fait, Sc qu'on peut le lui prouver, que pour démasquer le Patriotisme hipocrite des Défenfeursde notre Caufe, il tient fa miffion ie fa Majeflé Prujienne , ci? n'éerit que fous la fanStion d'un Cenfeur Royall Enfin , comme cette affaire fit alors, & a encore fait depuis quelqu'éclat dans le Public, je pourrois m'étendre ici fur les menfonges de toute espece, fur les contradiéïions fans nom- brc,  Discours Preliminaire, lxxxiii bre , & fur 1'impudencc étrange, au moyen desquels il a taché d'atténuer la fcélérateife de fon action, vis a vis de ceux qui la lui ont reprochée; je pourrois m'étendre de même fur ce qu'il die, que Mr. le Duc a été fatisfait de ce qu'il lui a ailégué pour fa juftifïcation, (ce qui n'eft pas difficile a croire, pour ceux qui connoilfent les deux perfonnages;) mais comme tout cela eft étranger a mon Ouvruge , je me réferve, il le Sr. Manzon m'y force , a discuter plus amplement , dans un Ouvrage particulier, tout ce qui eft relatif a cette affaire, & de faire p;:rt a toute 1'Europe de cette difcuffion intéreffante. L'on y verra des Faits auffi avérés que celui dont je viens de parler; & quelques autres pteces autentiques, que ce leigneur-la ne foupconne pas que je puiffe avoir. — Je viens acluellemcnc a la maniere, dont il a expié fa faute , & par laquelle il eft parvenu a être le coryphee de fes collegues , & a être foldé auffi graffement qu'aucun d'eux 1'a jamais été, & a mériter, en fus , toute 1'exécration des gen« de bien de ce Pays - ci. Toutes les fois que eet homme s'eft borné a turlupiner , a bavardcr a fa maniere, ou a charger nos bons Patriotes de quelques épithetes abfurdes , ou de quelques febriquets ridicules, les geus fenfés ne 1'ont point écouté: — routes les fois que , cherchant a paffer pour un ****** j ties  lxxxiv Discours Preliminaire. des martyres de la caufe qu'il défend dépuis y ans, il eft venu nous dénombrer les Abon» ne's que fon zele pour cette caufe lui avoit fait perdre , Sc qu'en parlant des Lettres menacantes qu'il avoit regues , ou plut6t, qu'il avoit forgées lui-même, il nous a peint le danger qu'il couroit journellement d'être éreinté, ou aftbmmé par quelque fuppót du parti patriotique , on s'eft dit en foi-même, neus eonnoiffons l'homme , ei? U fait fon métier: ■ toutes les fois , qu'érigé en Jonas, il a die fur notre pays, encore quarante jours, & Ninive ne fera plus, ou que, jouant le Jérémie, il s'eft mis a gémir fur ce qu'il nomme les malheurs de la République, Sc s'eft écrié , il eft me juftice®divine, & tremblez, mes Voifins , qu'enfin elle ne fe deploye fur vous! F'jus avez eomblé, ou peu s'en faut, ld mefure de vos iniquités (a), on s'eft moquédes prophéties de 1'inspiré, Sc des admonitions de 1'hypocrite. — Mais lorsque fa bile enflammée 1'excita a prêcher la mcnfonge ou a combattre la vérité, a calomnier la juftice 6c la vertu, a manquer effrontément de bienféance 6c de refpeéf. envers des Citoyens diftingués & des Magiftrats vé- né- (a) Ce font les paroles dont ce fcélérat, qui ne craint ni Dieu ni les hommes, s'eft fervi dans fa Gazette dn 14 feptembre 1785.  Discours Preliminaire, ixxxv nérablcs, ou, enfin, a infulter avec une audace effrénée des AiTemblées Souveraines, telles que celle des Etats de Hollande, celle des Etats de Frife, d'Ucrecht, & autres, ou bien des Nations entieres, telles que la nötre&c. —■ lors , dis-je , qu'il en vint jusqu'a affirmer audacieufement avoir des preuves irrèfragables, qu'il y a ici un Projet rcel de changer la Conftitution , & d'anéantir le Stadhouderat, ou du moins fon pouvoir &c. (— Si, dis - je, quelque chofe a pu porter atteinte a votre réputation, c'eft que Vous n'avez pas formellement, ni dïreclemcnt réclamé lebras de la Juftice contre tant d'autres Ecrits, dont nous avons été inondés en ce Pays depuis le commcncement de la guerre jusqu'a cejour, & dans lesquels, fous prétexte d'expofer ou dc défendre vos Droits, Sc de juftifier votre Adminiftration, l'on a indignement offenfé, 8c outragé la partie la plus honorable de la Nation, nos Régens les plus fidels, 8c nos généreux Alliés,— Ecrits, oü Ton a hauternent approuvé les pratiques & les moyens infames, que la Cabale a employés pendant la guerre, pour fervir les Anglois, 8c nous précipiter dans un gouffre de malheur, — Ecrits, oü Pon a vu cent fois Tapologie des efforts que cette même Cabale a faits, Sc continue de faire, pour achever de renverfer notre Conftitution, pour étouffer nos piaintes, nos réclama- tiont,  Discours Preliminaire. xci tions, nos foupirs mêmes, & pour aggraver le poids des fers, fous lesquels nous gémiffons. üui, Monféigneur , bien loin d'avoir fait tout ce qui dependoit de vous , pour faire févir conrre ces Auteurs, ou contre ces Ecrits abominables ; bien loin d'avoir employé torn les moyens que votre devoir devoit Vous inipirer pour interdire le cours de ces deiniers , Vous n'avez méme fait aucuns efforts foutenus, & dignes de Vous, pour prévenir, ou arrêter les e ff ets funefles qui en font réfuitcs cbpuis prés de quatre ans jusqu'aujourd'hui, c'efr-a-dire, pour prévenir, ou pour arrêter les défordres & les Emeutes, dont s'eff jendue coupable en divers endroits une populace aveugle, Sc animée par la leclure de ces Libelles, ou par ceux qui les lifoient pour elle, ou par un tas de Prédicants aufii fourbes que fmatiques: Je dis, une populace aveugle, paree qu'elle prétend vengcr votre Caufe, qu'elle ne connoit pas, Sc vous rétablir dans vos Droits légitimes, qu'elle ne connoit pas mieux , Sc que perfonne n'a penfé a Vous ravir.— En un mot, Monféigneur, bien loin que F. Jl. eut fait, en tout ceci, ce que fon devoir, fes vrais intéréts, Sc propre gloire exigeoient qu'Elle y fit, Elle regarda comme fes ennemis déclarés ceux de nos Ecrivains, qui oferent entrer en lice contre les Scribcs Sc les Prédicants de la Cabale , Sc contre tous les autres calomniateurs Sc  Discours Preliminaire. ct Adminiftration ne méritoit aucur.e approbation, c'eft que la plupart des Provinces, é!everent leur voix, pour éloigner eet homme, non feulement de Votre Perfonne , rmis, de la République entiere , dont il avoit caufé les malheurs: Ce fait feul, Monféigneur, écrafe votre fameux MéMOiRE, Sc démontre avec combien peu de raifon, vous avez pretendu, par votre Lettre du i. novembre 1784 aux Etats Généraux, que le filence, que L> H. P. avoient tenu fur ce Mcmoire, vous autorifoit decroire, r\\i'Elles n'y avoient rien trouvé qui méritat leur mécóntentemtnt ou leur désapprobation a Végard de la conduite, que vous aviez tenue pendant ia guerre, en votre qualité oV Amiral Général. — Au refte, s'il étoit vrai que L. H. P. euffent été fatisfaites du compte rendu dans ce MéMoiRK, elles Vous auroient au moins fait la juftice de Vous le témoigner: & c'eft ce qu'E'les n'ont pas fair, Sc ne feront jamais. —■ Ordonner d'en faire un Examen formel, (Examen, que l'on n'a eu garde de vous confeillerde demander,) c'eft ce que L. H. P. ne feront pas non plus: car fi l'on en faifoit la Propofition dans leur Affemblée, la Cabale trouveroit bien moyen d'en empêcher l'effet. On voit encore aujourd'hui , qu'ellcs obftacles elle continue d'employer pour croifer 1'examen définitif de 1'Affaire de B -efi. — Mais, fuppofé que 1'r.n en v'nt a examiner 1c *•**•***• £ M &-  cu Discours Preliminaire. Mómoire de K A. , & que l'on y trouvut fon Adminiftration coupable Dans Pétat oii font ici les chofes, oferoit- on entreprendre de vous punir? ou même de vous re- prendre? Monféigneur! il n'y a pas de Pays policé, oü le Souverain même ne foit fujet aux Loix fondamentales de 1'Etat Ec il en eft toutefois, oü des individus puiflams fe croient être, 6c font en effet au deffus de toutes les Eoix! Quant a la confiance fans bornes, que cette populace prétendoit , 6c prétend encore que la Nation, (6c par eonféquent le Souverain aufTi, ) doit avoir en votre Perfonne, Monféigneur, c'eft une Maxime que la Cabale avoit dé ja, débitée, en diverfes occafions O), avant la publication de votre MéiwoiRE, 6c c'eft une Maxime que les Rédacteurs de eet Ecrit vous y ont fait répéter en ces termes: Pla„ cés a la tête des Régences de ces Pays, nous avons un droit incomefiable a une confiance Jans Ca) Par exemple, a l'occtfion des Avis vigoureux, que: les Villes de Zélande remirent aux Etats de cette ProTince en juin &c juitlet 1782 , fjr Ia néceflité indifpenfable qu'il y avoit de reche'cher les caufes de la mauvaife diredlion & de l'inaéhvité fatale de notre marine: a l'occafion dc la fameufe Lettre , que les Etats de cette Province éarivirent aux Etats Généraux, le 29 du méme tnois de juillet, fur Ia même nécetliïé: — a l'occtfion de la  Discours Preliminaire. en hornes , de la part d'une Nation , a la« „ queUe nous fommes attachés par la relation „ la plus intime Sc la plus tendre Sec. (a). " — Si cela étoit vrai, Monfe;gneur, Ton pourroit dirc chez nous, ce que difent les partifans de Tinfaillibilité du Pape, Succumbat ratio fidei, fj? captiv» quiefcat. Mais cela eft abfolument faux: Car, en fuppofant qu'un Stadhouder de ce Pays réunit constamment en lui Tamour de la juftice, les meilleures intentions, Sc les meilleures vues, ne feroit-il pas poffible qu'il errat dans fon Adminiftration, ou par ignorance, ou par incapacité, ou par négligence, ou par de mauvais confeils&c.?— Les bonnes qualités du cceur ne font pas toujours accompagnées de Tardeur néceflaire pour agir, ni des lumieres de Tespnt, Sc encore moins du privilege de n'être trom- ]a Propofition que Ia Ville de Leyde fit Ie 31. dudit mois, fur le même fujet.- al'occajion de la Conférence, que ces Etats ordonnerent è leurs CornmilTaires d'avoir avec V. A., auffi fur le même fuje:: & enfin, a l'occafion des Piaintes graves, qui, pendant PEté de la même an- née, furent faites par le Etats de Frife, & notam- mentdela fameufe Propofition faite par Ie Quartier d'Oostergoo a ces Etats , le 6 juillet de cette même année. Ca) A, p. 125. — B. p. 183- — Cp. 97.  civ Discours Preliminaire. trompé par perfonne. Ainfi, comme un Stadhouder eft un homme faillible comme un autre, & qu'indépendamment de cette faillibilité, il peut avoir tous les vices qui déiivent d'un ambition dc'me'.urée & d'ailleu'rs, la Nation, ainfi que le Souverain, a le dioit d'avoir • 1'ceil ouvert fur fa conduite, 8c de reprenJre cette conduite lorsqu'ellc le mérite. Si nous euflions toujours ufé de ce droit, Monféigneur, nous n'en ferions point oü nous en fommes. Si ce Discours préliminaire n'étoit déja trop long, j'entrerois ici dans une Discuffion fommaire des Objets, que je n'ai fait qu'indiquer dans mon Avis au Lctlenr : j'y donnerois le Plan de mon Grand Ta bleau: j'y déduirois les motifs qui m'en font publier I'EsqUiss e: Et j'y rappelerois les chofes étrangcs , qui, depuis la guerre, fe font encore patTées dans notre malheureux pays. — C'eft - a- dire, que je rapporterois comment la Cabale a continué d'y employer la féduiYion , la caiomnie, la violence, 8c tous les autres moyens que ik ficélératefTe pouvoit lui infpirer, pour fe maintenir fur le tróne : — comment, plus avcuglé que jamais par les preftiges de cette Cu!>ale, vous vous êtes oublié au point de contefter aux Etats de Hollande , les Droits .les plus clairs de leur Souveraineté "j cnmment , en conféquence du rcfus qu'ils ont fait d'^dmetue vos prétentions illé-  Discours Preliminaire. cy illégitimes , vous avez abandonné la Haye, vous avez couru nos Provinces avec votre Familie , Sc vous vous êtes montré partout Corame un Prince malheureux & injuftement perfécuté; — comment enfuite vous avez établi votre féjour dans votre. chateau de Loo, oü vous perdcz un temps précieux, au milieu d'une foule de laches adulateurs, Sc de quelques traitres , dont les Grgies fcandalifent la République entiere, &. dont les confeils Sc les iniïigations acheveront de vous perdre avec nous. Je rappelerois auffi, comment la vue de tous les maux, dont nous avons été fi longtemps accablés, Sela perfpective des maux plus aiTreux encore, Sc qui nous, menacent, ont porté une grande partie de7nos Concitoycns a s'armer, pour défendre le refte de nos droits Sc de notre Liberté , Sc pour revendiquer ce qui nous en a été ravi : — Je ferois voir a quel pqint ces Citoyens armés ont porté la prudence Sc la modération dans leur conduite a. eet égard : combien leur noble rcfolurion a effirouché la Cabale: combien de désagréments Sc d'obfïacles ces Citoyens, Sc des Bourgeoifies entieres, ont éprouvés dans leurs eilbrts légitimes, non feulement dc la part de cette Cabale, mais auffi de la part d'une Ariltocratie déteftable, qui a cru établir fon empire fur la ruine du vöcrc, Monféigneur, & dont des Scribes fcélérats ont foutenu les prétentions, ) en  2 L' E S Q.U ÏSSE t>' ü N iion des Tro.upes.de la République: Et après avoir fauflement infinué en divers endroits, que la Hollande, & fur tout la Ville d'Amfterdam, ont feules été la caufe.de Pirréuffite de ces deux objets, ils croient vóus avoir entiérement difculpé de la prédileótion, qu'on vous reproche d'avoir conftamment mdntrée pour le fecond de ces objets, au préjudice du pre^ mier («). 11 feroit trop long d'entrer ici dans une discuiTion, qui feroit voir combien cette Expofiiion eft imparfaite a plufieurs égards, fur-tout par le rapport, ou plutöt par une indication fuperficielle & embrouillée, que les Rédacteur» y dqnnent de plufieurs Faits, qui tiennent a d'autres Faits qu'ils ont eu foin de tairej par une faufle Expofttion ou par la réticence de beaucoup de circoriftances & de particularités néceiTairement liées au fujet, & dont une déduótion fidele & méthodique eut mis le Public en état de porter un jugement folide fur 1'affaire dont il s'agit. Mais ces Meflieurs fe font bien donné de garde de porter Pexaétitude fi loin: II eft des myfteres, qu'il feroit imprüdent d'expofer aux yeux du vulgaire: U importoit de faire envifager les chofes au travers d'un voile preftigieux j & ce voile ne pouvoit * . • être (a) A. p. g. a 20. .... B. p. x. a 24. — C. ƒ. I. & *7n (O» i]s renoU~ ■vellerent leurs Repréfentations ■ a eet égard, Sc déclai-ereht franchement j qu'une des caufes de la diminution de 1'opulence & de Ia puiffahce de la République, venoit de la décadence de fa Marine, Sc du peu de proteólion qu'on accordoit au Commerce. II eft également connu que, depuis Pannée Ï76Ö. (O En atteiKhnt que le loifir me permette de revenir fur cette matière, & de démontrer avec plus d'étendue, dans un Ouvrage particulier, 1'inexactitude & les autres défauts de 1'ExpoJltion, dont je viens de parler, le deffein qui y a donné lieu, & le but qu'on s'y eft propofé, je prie le Lefteur d'examiner lui même cette Expifition, d'en faifir 1'efprit , & de la comparér enfuite avec ce que je rapporterai ici, ainfi qu'avec quelques Pièces authentiques que l'on a publiées au mois de Déccmbre 1782, fous Ie' Titié de, Verzameling van Stukken, betreffende de A6g-' mutatie der Land- en Zee-Magt. (fc) 1 Juin. CO 28 Septmlrt. Ai  4 L'E S Q.U I S S E D'Üï3 1766. jusqu'au commencement des derniers troubles entre la France & 1'Angleterre, V.A. & le Confeil d'Etat ont fait plufieurs Propofitions pour le Rétabliffement de la Marine : Mais divers obftacles fe font oppofés a ce RétablilTement: Et ces obftacles furent: i°. Le manque d'une Somme fixe & affectce a la Marine, laquelle Somme auroit été portee annuellement fur 1'Etat de Guerre. 2°. La diminution du Revenu des Amirautés , occafionnée par la décadcnce du Commerce} & lesdettes, qu'elles ont contraétées, pour fuppléer au Contingent que quelques ProTinces négligeoient de fournir fur les Pétitions accordées. Ce qui avoit mis ces Colléges dans une forte d'impoffibilité, non feulement de conftruire de leurs propres fonds, mais encore d'entretenir, de ces mêmes fonds, les vieux VaiiTeaux, & de fournir les Equipements néceffaircs pour le fervice annuel ou cafuel. 30. Lesretards, même de plufieurs années, apportés a 1'accord définitif de certaines pétitions faites pour la Marine. 40. 1'Intérêt particulier, & d'autres raifons, que les Provinces de terre avoient, que l'on préférat 1'Augmentation des Troupes au RétablilTement de la Marine. f°. Le röle artificieux & fecret, que 1'AmbaiTadeur d'Angletcrre a joué dans ces circonftances, oü il importoit a ce Royaume que notre  Grand Tableau. 5 notre Marine reftat dans 1'impuiiTance de pro» téger un Commerce, que les menées de fes Suppöts, Sc les déprédations de fes Sujets avoient déja détruit en partie, Sc qu'il vouloit anéantir totalemcnt. Le motif des premières inftances, que V. A. fit pour 1'Augmentation des Troupes de la République, ne put être fondé que fur le goüt, que ceux, qui ont eu la dircétion de votre jeunefle , vous avoient infpiré de vous occuper infiniment plus de la difcipline Sc de la manoeuvre des Troupes, que d'affairesd'Etat. En effet, cette occupation, qui a des agréments dont la fombre & laborieufe application a 1'étudc du Gouvernement Sc des intéréts de la République n'eft pas fufceptible, devint votre palfion favorite. Alors 1'ambition dc vous voir le Chef d'une Armée nombreufe dut prévaloir, chez vous, fur celle de voir renaitre une Marine refpeétable, que vous ne pourriez faire manceuvrer vous - même , Sc que vous ne commanderiez jamais en perfonne: Et ceux, qui avoient intérêt dc profiter de cette inclination, n'ont pas.manqué dc vous perfuader, qu'au dedans de la République une Armée de ro a 60 mille Hommes étoit plus proprc a donner du reliëf Sc du nerf a votre autorité, que 100 Vaifleaux de ligne défarmés dans les Ports, ou croifant fur les mers; & qu'au dchors, Sc a 1'aide de telles Forces, vous poura j riea  0 L'E S Q.U I S S E D'UN riez un jour trouver 1'occafion d'acquérir une renommee égale a celle des Princes, qui ont précédé V. A. dans la Dignité éminente qu'elle poflede. Les raifons , que la plupart des Provinces pouvoient avoir, ou prétexter , pour infifter furl'Augraentation des Troupes par préférence au RétablilTement de la Marine, étoient 1'état de leurs finances, qu'elles fentoient ne pouvoir fubvenir que difficilement a ces deux objets a la fois; c'étoit le defir de voir chez elles les CJarnifons augmentées, la dépenfe multipliée, Ja circulation plus abondante, 8c peut- être cette fotte jaloufie, que les Contrées moins ïiches portent ordinairement aux Contrées puiiTantes} en un mot, c'étoit un intérêt jplus particulier que général & patriotique: Mais, ce qui n'étoit ni raifons, ni prétextes, étoit 1'empreiTement intime , que beaucoup de Perfonnes des ces Provinces avoient de complaire ia. V. A-, en favorifant le defir particulier qu'elles lui fuppofoient en ce cas; c'étoit cette influence étrangère & maudite , dont le foyer étoit a la Haye , 8c qui ne devoit pas vous être inconnue j influence, qui aveugloit une partie de nos Citoyens fur les vrais intéréts de la Patrie, qui fomentoit 8c animoit nos diflcnfions, 8c qui étoit parvenue a étouffer chez plufieurs Perfonnes de la République tout fen|iment d'honneur Sc de patriotisrae.  14 V E S Q_V 1 S S É LVüN" connoiffent les motifs & les refforts, qui faifoienc agir ces deux Provinces , ainfi que le defir de la plupart des autres pour 1'Augmentation favorite, ne furent point étonncs de cette réquifitioni & ils ne 1'ont point été non plus de 1'emprefiement, que V. A. Sc le Confeil d'Etat eurent de s'y conformer: II y avoit ici un cercle de caufes & d'effets, qui étoient fucceffivement 1'un & 1'aurre, & qui agiflbient les uns fur les autres dans une progrefiion con* tinue. Ce Plan fut donc préfenté aux EtatsGénéraux, le 29 Juin fuivant, par V. A. Sc le Confeil d'Etat. PAugmentatien, que l'on y propofa devoit être de 12707 Hommes, & de 1212 Chevaux: Mais on n'y fit pas la moindre mention de notre malheureufe Marine , finon pour y dire que, vu les circonftances d'alors, il étoit tres - abfolument néceffaire de porter les Forces de terre a. un meilleur état de défenfe, ainfi que la nêcefifitè Favoit fait pratiquer avec seaucoup de succes h Végard de la Marine, deipuis quelques années (a). Cette aflertion feule eft; capable dc faire frémir d'indignation le cceur le plus indifférent a nos malheurs. Je reviens au Plan. La principale raifon qu'on allégua, pour por- \a) Even zoo als zeden weinige jaar en ten aanzien 'van 'dtrzelver Zee-Magt, uit noofcaakelykbeid, is gefebied.  Grand Tableau. 15 porter a confentir a 1'exécution de ce Plan ceux qui demandoient , qu'on ne s'occapat uniquement que de la Marine, fut, que comme il paroiffoit que la Guerre furvenue entre la France & 1'Angleterre fe borneroit fur Mer, il étoit prudent de prévenir le danger que nos Frontieres pourroient courir, en cas que la Guerre, qui s'allumoit en Allemagne pour la Succeflion de Bavière, vïnt a s'étendre jusqu'a elles (<*). C'eft-a-dire qu'on jugea néceflaire de fe mettre en état de parer les effets d'une fofftbilité éloignée, d'un danger imaginaire, tandis qu'on négligeoit de s'oppofer aux effets d'un mal préfent-, effets, dont le poids commen, c,oit a nous accabler, Sc dont les fuites devoient être terribles j car chaque jour fourniflbit 1'hiftoire de quelqu'acte de violence ou de déprédation, commis par les Anglois envers nos Vaiffeaux marchands: Tous les coins de la République, Sc la Salie même ou s'afTemblent L, H. P., rétentiffoient des piaintes de nos Né- (a~) Lettre de L. H. P. aux Etats de Hollande, en date du 30 Janvier 1778. • Quant aux différents Avis, que la Propofition de ce Pldn a occafionnês parmi les Membres de ces Etats, voyez, l'Etai de leurs Délibérations du 8 Juillet & du 4 Septembre fuivant; La Rêfolution du Confeil de 1» Ville d'Amfterdam du 1 du même mois, communiquée a 1'AfTemblée dela dito Province le 8 fuivant; & 1'Avis que le Corp9 ies Nobles a produit 1« 17 dito contre'cette Rêfolution.  '16 L'ESQÜISSE D'ÜK | Négociants, ainfi que de leurs réclamationj ■pour obtenir au Commerce Ia proteétion, qu'il étoit indifpenfable de lui accorder. En un mot, notre fituation politique, notre pofition phyfique Sc celle de nos Pofleffions, la confervation de nos Droits, de nos Biens, de notre dignité, 1'incendie voifin , enfin , dont les étincelles rempliflbient 1'atmosphere qui nous couvre, exigeoient qu'on portat uniquement, Sc le plutót poffible , fes regards , fes foins , versie danger réel qui nous menacoit. Ainfi, .Monseigneur , perfonne ne devoit mieux favoir que vous, qu'un tel Plan ne pouvoit fervir qu'a renouveller dans 1'Etat des discuflions Sc des débats préjudiciables a nos intéréts, <]u'a détourner 1'attention de 1'objet unique, d'oü. dépendoit le bien-être Sc le falut de la Patrie. Donc on ne peut dire , qu'en ce cas vous ayez fait tout ce que vous auriez pu faire pour le Rétabliffement de la Marine. II feroit trop long de m'étendre ici fur tout ce qui s'eft: paffe dans la République, pendant le cours de la même année, au fujet de I'Augmentation des Troupes fi ardemment defirée , fi inftamment demandée, Sc touchant le RétablilTement de la Marine, fi honteufement négligé , auquel on n'acquicscoit en quelque forte que pour la forme, Sc dont tout ce qui nous eft arrivé depuis a démontré Ia nécejjïté abfelue, cn prouvant Vinutilité de Vobjèt chêri. Le Plan  Grand Tableau. 17 Plan feul, dont je viens de parler, occafionna* dans la Province de Hollande même, des dis» cuffions qui. ont duré des mois entiers: Le Corps des Nobles y appuya fortement fur fon exécution; 8c 1'une des raifons, que ce Corps apporta pour eela, étoit, „ que cemme dans „ ce Siècle, le droit de convenance avoit étê porté fi loin, que l'on avoit vu desPuiffanees s, partager amiealement entr'elles le Pays de „ leurs Voifins, il ne feroit point étonnantj „ que la Guerre de la Succeffion de Bavfere „ ne fe terminat auffi par uo arrangement a „ 1'égard de quelques Contrées, fur lesquelles „ la République a un droit acquis, Sc qui lui „ fervent de boulevart («) " Eb , Mes- fieurs les Nobles ! tandis que mus donniez un ft bel avis, le même droit de convenance portoit lei Anglois dviolcrles Traités, quil y avoit emr'eu* y nous, d infulttr notre pavillon , a s'emparer dei (a) Di Ridderfcbap vraagt, of men zïg bier omtrent zou: moeten verwonderen in een Eeuw , in welke 't Recbt vsrf Convenientie in de Staatkunde zoo jletk is doorgedrongen< dat men zelf by wege van Partnge beeft zien disponecren over de Landen der Nabuurén, by wege .van Vriend]cbap ; en zm zou ook de Öorlog over de Bcjerfcbe jutcejfié kunnen cejfeertn, door middel van een arrangement omtrent die Landen, op dewelke de Staat een gmcquiretrd Recbt heft , eft dié baar tot een voormuur Jlrekken. Etat des Déiiberatiou* dei Miats dt Hollande, en date iu 8. Juillet f778'. B  18 L* ESQUISSE D'UN de nos biens , & ils fe dispofoient h nous faire incore pis. Ces faits cruels nous touchoient de plus pres que la ridicule poflïbilité d'un arrangement U V égard de je ne fais quelles Contrées, fur lesquelles la République a un droit acquit : il falloit denc vous occuper uniquement de ces faits, £s? laifer la poiTibilité , du moins jusqu'a ce qu elle eut pris ■que'qu'apparence de fe réalifer. Mais il en efi chez vous comme ailleurs, le plus grand nombre y reffemble aux Satellites de J u p 1 t e p , il fuit inva~ riablement le Syftème de la Planete, d laquelle il efi attaché. . Enfin, a entendre les partifans de PAugmentation , il fembloit que quelque païlan de la Mairie étoit déja venu fe plaindre que les Pandoures Autrichiens, ou les Huffards Pruffiens, avoient enlevé fes poules & fes topinamboursj il fembloit, dis-je, que quelque Hi bereau de la Gueldre étoit accouru dire, que quelque Sous - Lieutenant de ces Troupes avoir tiré fur fes pigeons, & accolé fa Dindonniere. Le 29 Novembre de la même annéc.1778, Pon prit une Réfolution qui fit bien du plaifir aux Anglois, & qui n'enfit pas moins a nosAnglomanes: ce fut de ne point accorder de Cnnvois aux Vaiffeaux chargés de Bois de eonftruction, & autres matériaux ou munitions navales, que nous avions le droit de tranfporter & de vendre indifféremment a tout le monde; droit, fondé fur i'Art. IV. du Traité de 1674. que je cite ci-defibus, Sc que la Cour de Lon- dres  Grand tableau. i$ dres interprêtoit & V Angloife, c'eft toot dire (a). Voici, Monféigneur, en quels termes les Rédacteurs de Votre Mémoirè font parler V. A. fur ce fujet. „ Cependant la Cour de Londres donnoit chaque jour de nouveaux fujets de piaintes. Nous concourümes „ a la vérité , avec la pluralité des fiffrages, 3, a fufpendre pour quelque temps, en f ave uk „ de cette Puiffance (£) , les Convois accordés" „ aux Vaiffeaux chargés de Bois de conftrü„ étion. Cette démarche n'indiquoit pas de „ notre part qu'il falKit renoncer, pour 1'a- i» V2n" (o) Art. IV. l'On ne comprend point fous les mareban» difes de Contrebande les Cordages, Voiles, Ancres, Mdts, Planches, Madriers, Bois de toutes fortes d'arbres, (^toutes les autres chófes propres a la ConfiruBion £f a la Réparation des Vaiffeaux: au contraire, ils feront fenjis abjolument du nombre des marcbmdifis libres, de la même maniere que. toutes autres fortes de marebandifes fjf d'effets, non amphs dans I'Article précédent; de forte qu'ils pourront être transportés en toute liberté (liberriraè) par les Sujels de S, M.Jusdite a' des Endroits avec lesquels les Etats - Généraux feroient in guerre, & riciproquement par les Sujets des dits Etats K des Endroits ftümis aux Ennemis du Seigneur Roia l'exieption des Pltces qui fe trouveroient aftuellement ajjiigèes ^ Moquées, ou invejlies. (b) Je me fers ici des ternes du Mémoïrt Francois: te Mémoire Hollandois potte, ter contemplatie vau' het Hof van London, ce qui revient au mime- —■ O» ?. 7, — A. f, 16. — B. p. 19. b i  Grand Tableau. 23 fieurs autres inconvénients qui devoient réfulter de tout cela. Au refte, fi V A. douce encore de ce que je viens d'avancer fur ce point, elle peut jetter les yeux fur le Paflage que je cite ci deffbus, & que j'ai tiré du Manifefte que L H. P. publierent le 11 Mars 5781. en réfutation de celui de la Cour de Londres (a). II me femble au moins, que ce qui étoit vrai en Mirs 1781, devoit 1'être auffi au mois de Novembre 1778. Cependant , comme on 1'a vu ci-defliis, 1'op.monde V. A. étoit, qu'il falloit 'différer la proteftion d'une Branche de Commerce jufqu'd ce que nous fujjïons affez puiffamment armés fur Terre ci? fur Mer. —- C'eft-a-dire, que cette frotection n'étoit pas prête a veny-: & c'étoit le but, oü bien des gens vifoient. _. Sur Mer, paree que l'Angleterre, qui avoit une Marine puiffante, pouvoit ruiner entie'rement notre Commerce, & envabir nos Poffeffions en Oriënt & en (a) Cette Rénonciation (a« Drtit que le Traité de 1674 nous donnoit en ce cas - ci, de transporter dans lts Ports des Fui [Tantes Belligérantes toutts fort es de munitions navales,) turoit porti au Commerce & hla Navigation, principal appui de la République & fource de fa profpérité, an préjudice irïéparable; puisque les différentes Branches de Commerce, étrouement liées entre elles, foment un Tout, dont on ne fauroit retrancher une partie fi principale, Jans caufer néetjjuiremnt le dépériffement Êf la ruine du Corps entitr. B 4  *4 L' ESQTJISSE D' U N r» Occident, y? ** » a peinc a t'on daigné faire attention a quelques points des moins esfentiels des Répréfentations de Mr. du Moulin, Sc l'on s'eft bien gardé de s'occuper du refte. La même négligence, Monféigneur, eut lieu a 1'égard de 1'état de perfeéïion a donner au Corps de Génie: la même infouciance regna a 1'égard de 1'entretien 8c fournitures des Maga- Zins 8c des Arfenaux. Et pourquoi tout cela? Paree qu'après avoir perverti le cceur d'une partie de nos Citoyens, après avoir fubjugué, aveuglé, ou abruti la plupart du refte, il convenoit de laiiïer tomber la Marine • 8c les Frontieres dans 1'état lc plus déplorable, «fin que, fi quelques mains courageufes venoient a arracher le bandeau, qui couvroit les yeux de la Nation, ce fpectacle lamentable 1'étourdit 8c la désefpérat} - afin que 1'efFroi des menaces du premier Ennemi du dehors la pétrifmt, — 8c que, par-la, on la retint dans les chaincs, oü 1'infiuence oblique 8c la puiflanco ouverte de fes Tyrans 1'avoient plongée. De tout cela, Monféigneur, il réfulte que bien des gens n'ayoient garde d'infifter fur le Ré-  Grand Tableau. 29 RétablilTement & le Renforcement des Frontieres, avec autant de feu &t d'opinidtreté que fur 1'Augmentation des Troupes; ces mêmes gens favoient, qu'au moyen dc quelques efforts de la part des Provinces, ce Rétabliffement feroit exécuté fans préjudicier a celui de la Ma. rine, & c'eft ce qu'ils ne vouloient pasj ils favoient, enunmot, que pour parvenir a eerta>n but, l'on ne peut faire le même ufage de quelques Frontieres bien fortifiées, mais immobiles, que de cinquante mille JanilTaires ambulants, 8c toujours prêts a exécuter les ordres queiconques de ceux qui les commandent. Q,ie perfonne ne m'objecte ici, que Pon a toutefois infifté en différents temps pour mettre les Frontieres en état de défenfe, & notamment par la Pétition, que le Confeil d'Etat fit le 3. Juillet 1778. Sc même encore depuis cette époque} car je repondrois, — que fi ces inftances euflent été faites avec autant de zeis Sc de per(évfrance, que le Général du Moulin en employa auprès de ce Confeil, — que li l'on eut expofé pleinement, Sc avec la même farce, avec la même évidence qu'il Pa fait, la défectuofité frappante , 8c le délabrément effrayant dc ces Frontieres, ainfi que la nécefJité indispenfable d'y pourvoir fans délai, — que fi l'on eüt mis fous les yeux des Etats - Généraux , & SANS AÜCITNÏ EXCIÏTION , les plans, les projets, les raifons, les follicitationt pres*  SO L' ESQ.UISSE D' U N pnjfantes de ce Général, il eft certain que,' malgré les efforts de la Cabale, L. H. P. auroicnt fourni les moyens de commencer ce grand Ouvrage, & même de le pourfuivre. Dix a onze millions, 8c dix années de travail fuffiffoient pour cela: 8c fi l'on eüt mis la main a 1'ceuvre en 177/, lorsque Mr. du Moülin donna fon grand Projet fur hos Frontieres de Flandrc, tout feroit presque achevé préfentement, 6c nous ne craindrions aucunement les coups, dont une Puiffance formidable nous menace aujourd'hui («). Que, pour infirmer les raifons que je viens d'annoncer, l'on ne m'oppofe pas celles qui font alléguées dans laLettre, que le Confeil d'Etat remit a L. H. P. lc 16. Fevrier 1784, au fujet dc la Commiffion, que les Etats de Hollande avoient nommée le 24. Décembre précédent, pour faire les recherches fur 1'Etat aétuel des Frontieres, Magazins 6c Arfenaux, fur les caufes de leur dépériffement, 6c fur les moyens de les 1 établir 6c perfeélionner, car je renverrois ceux, qui meferoient cette oppofition, au Rapport que cette Commiffion a remis a L. N. (a) Jc parle en Décembre 1784; & tout ce que je dl» ici n'a aucun rapport aux changements arrivés depuis, tant a eet égard, qu'a celui du démêlé que la République a eu avec l'£mpereur.  GUND TABLEAU. 31 écGr. P. Ie aj.Juillet dela mêmeannée j — je les renverrois aux Mémoires, Plans, Projets & Déclarations des Généraux du Mottlin Sc Martfelt, annexés k ce Rapport, a ce Recueil fameux, dont chaque article pulvérife toutes les excufes, que l'on a alléguées jusqu'a cc jour, pour fe laver de tout blame a eet égard, & pulvérifer* de même toutes celles qu'on alléguera encore dans cette vue, foit de la part du Confeil d'Etat , foit de la part de F. A \ — je renverrois, dis-je, ces Raifonneürs a ce Recueil, a ce Témoignage éternel de négligence criminelle 8c d'iniquité odieufe, dont 1'Expofé a fouverainement indigné la Nation, Sc vous auroit du indigner de même, Monféigneur; car je' reux bien croire, que fi V. A. a eu quelque part a cette conduite, ce n'a été que par les confeils de fes perfides Confeillers, ce n'a été que comme 1'inftrument des menées fubtilcs Sc téncbreufes de la Cabale odieufe, dont ils étoient Sc font encore les Chefs. .En un mot, j'ofe affirmer ici, que la négligence d'inftjï'er, comme on l'eüt du faire, fur lé Rétabliffement des Frontieres, protjve seule, &? s*ns replique, les vues criminellts, Sc la' fcélétatefe des principaux Inftigateurs de toutes ces Demandes opinidtres pour Vaugmentation des Troupes: Et fi je diftingue ici, en caracteres particuliers, cette AfTertion, c'eft afin que tous ceux, qui la liront, U relifent encore, Stuc  3* L' ESQUISSE D' U N ne 1'oublient jamais. J'aurois a dir& li« deffus mille autres chofes, qui feroient horreur: mais comme cette digreffion eft déja trop longue, je retourne a mon Sujet principal. Sa Majefté Tres - Cbrétieme, peut - être moins alarmée de la fufpenfion des Convois illimités, que de la négligence affectie, que nous apportions a prendre des mefures juftcs 8c vigoureufes, pour nous affurer la liberté de Commerce9 que lc Droit des Gens & les Traités nous accordoient, révoqua le 14. Janvier 1775», a 1'égard des Sujets de la République, les avantages annoncés par VArt. I. de fon Réglement du z6. Juillet précédent , concernant le Commerce & la Navigation des Batiments neutres^ Elle ordonna par le même Arrêt que les Jrt.l^llj III, IV 8c V. du ii.Cclobre 1744, fuffent provijbirement exécutés a 1'égard des Batiments de ce Pais - ci} 8c qu'a dater du 26. dudit mois de Janvier , ces mêmes Batiments acquitteroient le Droit de Fret, tel qu'il fe trouvoit établt par les Ordonnances 8c Régléments, particuliérement par la Déclaration du 24. Novembre i7fo, 8c par 1'Arrêt de fon Confeil du 16. Juillet I7f7 8cc. Et comme la Ville d'Amfterdam avoit fait tous fes efforts pour déterminer la République a fe procurer de la part de l'Angleterre la liberté illimitée , qui appartenoit légitimement a notre Pavillon, S.M.  Ör and Tableau. 33 & M. ne comprit point dans fon nouvel Ariêc les Batiments appartenants aux habitahts de cette Ville. Faveur, qu'elle aecorda auffi enfuite a la Ville de Harlem, pour la rriême raifon (a). Ceci n'étoit point arrêter nos Vaifleaux, ni piller leurs cargaifons, ou s'cn emparer fous des prétextes abfurdes j ce n'étoit point non plus maltraiter nos Marins, encore moins les inutüer, ou les affaffinerj toutes choles que les Anglois faifoient impunément depuis quelquC temps, par les motifs les plus injuues: c'étoit fimplement une admonition bienmodèrée, qüe la France nous faifoit d'ufer dc nos Droits, de les révendiquer, & dc nous mettre fans aucun délai en état de les foutenir > c'étoit nous inviter a prendre garde de nous lailfer forcer d'abandonner la Neutralité, que nous avions adoptée J c'étoit d'aillcurs faire ufage dü Droit inconteitable que tout Souverain a de faire dans fes Etats telles dispofitions, qu'il trouve a propos, coneernant fes finances, fes revenus, ou le com* merce de fes Pons: Droit, que L. H. P. elles - mêmes ont hautement réclamé dans leur Manifelle contre la Cour de Londrss, ainut qu'on (a) Je ne parle point ici de trois autres Afrits, èwanis du Conjeil de S. M. T. C. fur le mêmejujet, aux mots vril, de Juin & de Septembïe juivants. G  '34 V E S Q_ U I S S E D'UN qu'on peut le voir par le paflage cicé ci - desfous (a). ~ Cependant eet Arrêt de S. M. T. C. fit jetter les hauts cris dans ce Païs-ci: Le 24. dudit mois de Janvier, Votre Alt'effe, écrivant a ce fujet aux Etats dc Frife, traita de distinction odieuse,ou d'injtjstice envers les autres Villes de la République, cette faveur que Louis XVI. avoit faite a la Ville d'Amfterdam (£): Vos Créatures crie- rent, («) Cefl en vain £5° contre toute vérité, qu'on a tdcbé de multiplier le nombre des griefs, en alléguant la Suppreflkm des Droits defortie, comme une mefure tendante a faciliter le tranfport des munitions navales en France: car, cutre que cette Suppreflïon forme un objet qui regarde la Diredio» imérieure du' Commerce, a laquelle tous les Souverains ont un Droit inconteftable, dont ils ne font tenus de rendre compte a perfonne, ce point a bien été mis en Délibération, mais n'a jamais été conclu. •— Manifeste de Z,. H. P., vers Ie milieu. (b) Wy houden ons verzekert, (difoit S. A. dans cetts Lettre,) dat Uwe Edele Mogende niet zonder bevreemding zullen hebben vernomen deze odieus e distinctie; en dat dezelve zullen begrypen, dat het aan geene vreemde Mogcntbeid, hoe groot, hoe aanzienlyk, en hoe formidabel zy ook moge zyn, vry ftaat, om die odieuse distinctie te maaken , ten aanzien van eenen independenten en vryen Staat, die niet anders gedaan heeft, dan liet geene aan Haar volkomen vryftaat, enz. -~ II ne faut pas être doui d'une grande pénitration d'ejprit, pow jentit qu'il- y a dms et p«J«gt, plus 4'bmtur que di  Grand f a b l è A ü. 35 rent, & leurs Suppöts répéterent $ que Ié Monarque Francois exigeoit la chofe la plus injufte Sc la plus revoltante: les anciens reproches de fourberie , de trahifon , de violence Sc d'atrocité, que nous avons tant de fois faits è la France, furent renouvellés, furent fedóublés, par nos Anglomanes. _ O! li L. H. P.euffent alors trouvé a propos de lacher nos dogues Anglois, contre cette Puiffance, on auroit vu beau jeu $ l'on auroit vu que nous avions parmi nous des gens plus prompts a venger leur Parti favori, d'une chiquenaude re» $ue de la part d'une Nation qu'ils déteffent $ qu'ils ne 1'ont été k venger leur Patrie dcë coups mortels, Sc des outrages fanglants, reC,us de la part d'une Nation qu'ils dié» nffent. Si donc , Monféigneur, Pon peut s'en rapporter a Votre dite Lettre aux Etats de Frilé, SC au fens du Préambule de la nouvelle Propofition, que V.A. fit a tous les Confédérés tri particulier le 10. Mars de la même année 177$,pour un Équipement de fo a 60 Vaiffeaux de guerre, & pour augmenter les Troupes de f o & «60 mille hommes, vous ne futes, vous - mêmcs pas peu affvcté de 1'Arrêt dont je viens de parler, 8c des efforts que PAmbafladeur de France" perfiftoit de faire pour obter.ir la Révocatiort de la Suppreflion des Convois; Sc il parok qfle Piffuc des üéübérations qui fe cominuojent ici  36 L' ESQUISSE U N fur cetobjet, vous inquiétoit beaucoup auffi Quoiqu'il en foit, voici ce Préambule. ,, Nous nous croyons obligés de communi- quer a Vos Nobles Puiffances nos fentiments, „ touchant un des plus importants objets de vos Délibérationsj favoir, que nous fom„ mes tres éloignés de juger, qu'il convien„ droit que cette République renongat aux 3, Droits légitimes, qui appartiennent a fes ha„ bitants, en vertu des Traités folemnels; „ Nous penfons, au contraire, qu'ils doivent „ être maintenus par tous les moyens, que la Providence a mis entre les mains de cette „ République; mais qu'il n'appartient a per' „ forme qu'a Vos Nobles Puiffances, & aux „ Nobles & PuilTants Seigneurs Etats des au3, tres Provinces, de décider quand tl eft temps „ que Leurs Hautes Puiffances deivent prendre „ la Réfolution d'accorder une Proteclion illimitée 3, & leurs habitants commergants j & que Leurs ,, Hautes Puiffances, ne s'étant engagées par au,, cun Traité quelconque avec une Puissance „ e'trangeke , h protjger toutes les Branches ,, de Commerce, fans diflintlion, Perfonne na le droit d'éxtger d'Elles, qu'en accordant pro„ tection, Elles doivent l'accorder d tous navires ,, fans diflinélion^ fans laiffer a leur prudence a 3, décider, fi Elles font en état dc protéger „ toutes les Branches dc Commerce, & fi El„ les peuvent le faire dans ce moment -ci, fans  Grand Tableau. 37 s, fans hazarder des intéréts importants, Sc „ s'expofer aux plus grands dangers. ,, Nous penfons donc, que dans ce cas il ,, conviendroir de n'avoir égard a rien, qu'aux „ vrais intéréts de la République; Sc c'elfc pourquoi, avant qu'il füt pris uneRéfolution finale, pour convoyer les navires chargés ,, de Bois, il faudroit examincr 1'état oü fe „ trouve la République, tant par Terre „ que par Mer: Suivant nous, rien ne con„ vierrc plus a, cette République qu'une exacte Sc ponétuelle Neutralité, fans préjudice aux „ Traités qu'elle a avec les Puiffances étrange- res; mais nous penfons que pour la mainte„ nir & foutenir efficacement, Sc non aujji „ lengtemps qu'ilplaife d une des Puiffances bel„ ligérantes d'exiger de la République d'une ma- ,, niere force'e fj? menacante qu'elle „ prenne parti, il conviendroit qu'elle füt mife „ dans un érat armé Sec. ". Ce Préambule, expofé de la maniere qu'on vient de le roir, ne demande point de commentaire; Sc les Endroits que j'y ai marqués en caraéteres particulicrs, indiquent affez la Puiffance qu'ils défignent. J'ajouferai feulement, que s'il n'avoit paru avant le fameux Mémoire que Sir Jofepb Yorke préfenta a L. H. P. le 9. Avril fuivant, contre la France, je foupconnerois qu'il auroit été formé en partie fur ce Mémoire, tant les deux Pieces ont de C 3 rap-  30 L'ES^UISSE B5Utf rapport a plufieurs égards. On a même débité que ce Préambule avoit été dreflé fous la dictie de Sir Jofeph, c'eft - a - dire, de ce ViceRoi que la République avoit alors, & qui, comme on le fait, 6c a 1'aide du vieux Mentor que Vous connoifiez, dirigeoit nos affaires avec plus de fuccès, que nos vrais intéréts 6c le falut de 1'Etat ne 1'exigeoient. Quoiqu'il en foit, fi Mr. Torke n'a point donné 1'idée de cc Préambule, il 1'a du moins imité en plufieurs endroits, pour foimer le Mémoire dont je viens de parler. Les deux Pièces font entre les mains du Public, 6c il peut les comparer. Enfin, après ce Début, V. 4. expofa les jnotifs qui la détermmoient a. faire la Propofition fusmentionnée, & conclut par déclarer aux Confédérés, que fon avis étoit qu'il füt ïéfolu que les navires chargés de Mats, de Courbes, de Poutres, & autres bois néceffaires a la conftruétion des Vaiffeaux de guerre, ne fuffent pas pris fous Convoi, avant d'avoir prêt un Équipement de fo a 6o Vaiffeaux de guerre, dont zo a 50 de Ligne, 6c d'avoir mgmenté les Ferces de Terre, jusau'a fo d 60 ffltlle hommes. Monféigneur.' lorsqu'au mois de Novembre précédent Vous concouiütes, avec la pluralitê des fuffrages, a la fupprefuon des Convois, on pe fut qu'étonné , mais dans cette occafion- ci, (6c vii }a conviclion intime, ou Vous deviez en-  GRAND TABLÏAÜ. 39 enfin être que 1'augmentation des Troupes empêcheroit abfolument le Rétabliffement de la Marine,) fi l'on n'avoit connu }es fentiments d'honneur Sc de patriotisme dont Vous êtes animé , l'on auroit dit que cette doublé Proposition n'étoit faite qu'a cfeflein d'étendre Sc d'animer nos diffenfions Sc nos débats fur ces deux objets, Sc de favorifer la guerre de l'Angleterre contre la France, en dépit de 1'équité Sc de notre état de neutralité, au préjudice de nos Droits les plus inconteftables, a la ruine d'une Branche eflentielle de notre Commerce, dc notre Navigation, de nos Impöts, Sc aux dépens du Commerce du Nord Sc d'ailleurs. Car , pour équiper fo a 60 Vaiffeaux de guerre, dont 20 ou 30 de Ligne, il falloit les avoir} Sc pour les avoir, on devoit commencer par accorder les 1800 mille fiorins de la Pétition faite en 1777, pour la réparation des vieux Vaiffeaux, Sc pour acheter des Matcriaux de conftruétion j alors il falloit fonger a une Pétition de quelques millions pour former l'Armeraent propofé; alors il falloit fe mettre a. réparer d'un cóté, tandis que l'on conftruiroit dc 1'autre; enfuite. il falloit des hommes pour équiper tous ces Vaiffeaux: Sc comme, felon le Mémoire même de V.A. («)» Sc («) A. p. 32, 36 6? fuivant. — B» h 4rt 4Ö & Juiv. —, C. p, »l> 25 tfjuiv. C 4  40 V E S Q_ TJ I S S E D1 TJ N 6c felon les Rapports faits par les Amirautés aux mois d'Aoüt 6c de Septembre 1781 ( H. P. aux moisjd'Aoüt & de Septembre 1781, ne'pNröWerbndjamais, qu'qutre eertaines caufes étrangeres, dont jc ne . parle point ici, il n'y ait' au moins cu, dans la Pircction de tout ce qui concerhoit notre Marine, une négligence hontcüfe, une imprudence marquee , & par eonféquent une conduite rcprochable. Tout ce que j'ai déja dit, & tout ' ce qui me refte aidirea eet égard dans le cours de eet Ouvrage, en faitfoi. — J'en t re en matiere. 'j'LA ■■■■■■ ! »i Par les circohffances cririques, oü nous nous j3v< iV9"i4.'-t tü sflu " ?■ «>.-«óf nouveau Plan, que V. A. & le Confeil d'Etat- rc- (a) V. /«Réfolution its Etats d& Frifc- du 13. Jawü,  , 8o L1 E S Q_ ü I S S E Ö'üN remircnt a L.H.P., & qui ne confiftoit pas moms qu'en une Augmentation, de zo mille hommes, dont 1 zoo feulement étoient deftinés a être repartis fur les Vaiffeaux, Augmentation, dont la levce auroit montc a t. 460. 6fz flor. 10 fois, Sc 1'entretien, a $. oro. 138 flor. 11 fois 6 dtniers! Dépcnfe énorme, inutile, ruineufe , & qui , vu les piaintes que nos Amirautés faifoient journellemcnt de manqüer de fonds, devoit rendre plus impoffibles que ja.mais le Rétabliffement de la Marine & 1 Équipement dts Vaiffeaux ! Preuve inconteftable, enfin, du defiëin horrible que la Cabale avoit formé de facrifier a Pennemi, la gloire & les intéréts de la République! Ce n'eft pas tout: En attendant que L. H P. communicaffent cette étrange Propofition aux Provinces reipeaives(«), l'on imagina un autré Plan, dont Pexécution, fi elle eüt eu lieu, devoit naturellement forcer tous les Confédérés a 'confentir fans aucun délai a PAugmentation projettée: Et l'on ne doute pas, Monféigneur, que ce fcco'ndP/a» ne foit forti du cerveau du Duc de Brunswick, c'eft-a-dire, de votre Mentor pcr- petuel, de votre Confeiller en titre d'office. Quoiqu'il en foit, le z%. Janvier lc Confeil d'Etat ia) Ce fut le 2, Fivrier, que L. H. P. cmnuniquerem cette Propofition a cbacune dis Provinces.  Grand Tableau.- 8r d'Etat écrivit aux Etats-Généraux ( 6c eet Officier ayant mis a la voile le 14., avec 2. vailleaux de ligne, une frégate 6c un fenau, il joignit le même jour le Capitaine van Kinsbergen. Par cette jonótion, le Vice- Amiral fe trouva a la tête d'une Efcadre compofée de 3. vaiffeaux de ligne, de f. frcgattcs, d'un cotter & d'un fenau} Efcadre, qui, comme on le croit bien, ne rencontra pas celle du Commodore Stewart; mais qui, après avoir [parade quelque temps a quelques millesde nos cötes, retourna le 24. au Texel, en rapportant, pour tout fruit, 1'intéreffanre & glorieufe nouvelle , qu'un brouillard avoic empêché de découvrir le Convoi du We- fcr(«)! Mais, felon le Verbal de Mr. Hart- ia) r?an den 24 's morgens rroeg , de Vice-Admiral Hirtfinck, met het geheel Esqüader voor de Wal gekomen, en 's anderendaags, na eenige fregatten voör het Vlie en voor Texel te hebben gelaaten, op de Rheede geretourneerd zynde , zonder , wegens het mistig -weder , dei Vyands Conto y te hebben Jtonnen aantreffen &c. <— j\t p. 55. •—15. p. 75* — C; p. 40. G  98 L'ESQUISSE D' UN Hm/mek, le brouillard eut lieu le if., cefta-dite, le lendemain du depart dc ce ViccArniral. Comment eft-il donc pofiible qu'un Convoi parti du Wcfer lc ix. («;, & avec le vent le plus favorable j qu'un Convoi , que l'on fait avoir presque continuellemcnt joui du même vent les jours fuivans, 5c qui des le 13. avoit déja doublé le Cap. de Flamborough, fe foit encore trouvé le if. affez pres de nos cótes, affez a portée de notre Efcadre, pour pouvoir être appergu par elle» s'il avoit fait un temps clair? Pour admettrc un tel fait, il faut préalablement croire qu'un corps peut fe trouver, en même temps, dans un endroit 5c a ico. lieues de la. Auffi, s'étoit - on douté, des avant lc retour du Vice - Amiral, qu'en auroit recours a une pareille défaitc: Car le Co ijbier du Bas-Rhin, du 23. Mai, Art. de la Haye du 18.. rapporta ce qui fuit: „ On eft „ forc impatient d'apprendre la mifiion de „ 1'Efcadre fortie en dernier lieu du Texel „ il eft des gens qui doutent qu'elle rencontre „ le Convoi des Troupes Allcmandes pour „ l'Angleterre, ou qu'elle Yapperfoive, fi elle „ le rencontre. " -—- Qu'auroit donc dit, 1'Auteur de cette Gazettc, s'il eut fu , qu'après les Nouveiles, qu'on avoit recues le 18. a Amfier. ia) Verbal de Mr. Hart/mek au 15 & au xö Mai.  ICO L' ESQUISSE D'UN 1'IUue de cette Expédition, non moins ridicule que honteufe, ne fit qu'accroitrc notre détreffe. Des le mois de mars on avoit appris la pcrtc de S. Euflacbe , ainfi que celle du vaiffeau de ligne le Mars , de la frégate du méme nom , & d'un grand nombre de navires richemenc chargés , qui s'étoient trouvés a cette Isle , ou qui venoient d'en partir: a cette nouvelle avoit fuccédé celle de la prife WIsftquebo, de Demerary, 6c de la Berbke: les nouvelles des pertes immenfes, que notre Commerce failbit dans toutes les mers, fe fuccédoient avec une rapidité étrange : l'on favoit que nos vaiffeaux de guerre, arrivés a Lisbonne, étoient dans un état a ne rendre aucun fervice , 6c que la Princeffe Marie Louife , qui devoit aller en Améiïque, étoit alors hors d'état de fortir jamais de Cadix; le Contre - Amiral Binkes, avec un vaiffeau de ligne 6c deux frégates, étoit dans la Méditerranée, oü il laisfoit tranquiliement enlever fous fes yeux nos plus riches navires de Commerce : l'on nc voyoit aucun de nos vaiffeaux de guerre croifer fur nos cötes; 6c ceux de nos navires marchands, qui avoient cu lc bonheur d'échappcr dans une longue traverfee, ou ceux qui vouloient paffer d'un de nos ports a 1'autre, étoient enlevés , pour ainfi dire, a. notre vuc. Que l'on joigne a cela la continuation du retard dans nos preparatifs , de la lentcur dans les rc-  Grand Tableau, ioi Tecrutements , dc la négligence dans les mcfures , & de la mauvaife volonté en tout, l'on ne fera point furpris, fi j'ofe affirmer aue dans les premiers mois de cette guerre , nos maux , notre hontc , touchoient déja a leur comble, 5c que la confternation étoit devenue générale. Auffi, des le commencement de cette Campagne , jusqu'a la fin de 1'année, les piaintes redoublces de nos Négociants, — la pcinture qu'ils firent dc leurs défaftres, — les requêtes preffantes, •— les fupplications touchantes , qu'ils adrcfTerent fi vainement, aux Etats de leurs Provinces, ou aux Etats-Généraux, pour obtenir de la Direction de la Mirine la proteéHon neccffaire a la confervation du refte de leur Commerce en Europe, ou k la confervation du refte dc nos Etabliffemcnts en Amériquc &c., ne démontrcrent pas fcules la fituation déplorable , oü nous étions réduits, Padminiftration vicieufe qui regnoit dans notre marine, & la néceffité indispenfabJe d'y remédier; mais les Villes, les Provinces mémes, éleverent également leur voix: Tlefiingue (a), Midddbourg (b)y Zierikzte (c) 6c Tergoes(d), tou- c«) Le 30. avril. (b) Le 14. mai. (f) Le 12. juin. id) Le p. juillet. G 3  I02 L'ESQ_UISSE D1 U N toutes Villes d'une Province , qui, après la Rupture de 1'Angletefrc avec nous, auroit voulu renouer des INégociations, qui, felon elle, cuffent pu nous éviter la guerre , furent des premières a fe récrier fur les maux qui nous accabloient, fur d'autres maux qui nous menagoient, fur 1'inaótivité défefpérante qui agravoit les premiers de ces maux , 6c qui alloit atcirer les feconds: ces Villes, dis-je, furent des premières a indiquer lc mal, 5c a prouver la nccefïïté d'en rechercher la caufe (*). Lc (a) Pour revenir aux Piaintes que nos Négociants ont faites, ainfi qu'aux Itequêtes qu'ils ont préfentées pendant 1'année 1781, & dont j'ai parlé au commencement de ce Paragraphe, je citerai ici celles qui fuivent: i°. La Requête ptéfentée dar.s les premiers jours de mars, aux Etats - Généraux, par les Direaeurs du Commerce de la Baltiquc ; Requère, dont j'ai déjh parlé, & dans laquelle ces Négociants expofoient l'urgente nicejfité de protéger une branche de Commerce, qui procuroit des graihs., du beis, du cbanvre , du fer, & autres matieres indifpenfables, tant aux habitans de ce pays-ci en général, qu'a ceux d'entr'eux, qui envoyóient de nos Pioduo tions en échange de ces denrées.: Que les navires chargés de ces mêmes denrées, ayant pêffi l'biver dans les pons de la Baltique , n'attendoient plus qu'une Efcorte pour les ramener ici: Que d'ailleurs le printemps étoit la feule faifon farorable pour expedier les échanges fusmentionnés: Qne pour prévenir la perte irréparable, que tout retardc, ment pourroit occafionner, les Requérants fupplioient l. H. P. de faire procurer lc plutót poffible, a ces na- yi*  Grand Tableau. 103 Lc 18 mai les Dcputées d' Jmfterditn , au nom dc leurs Commettans, remirent a 1'Aflem- bléc vires, une Efcorte fuffifante pour les défendre contre 1'ennemi: & Qu'enfiii, s'il plaifoit a L. H, P. de lever ['Embargo, qu'il y avoi: ici fur les navires deftinés pour la Mer Biltique, ces derniers pourroient profiter de la mème occafion pour s'y rendre. 2". Li Lettre remife le 23 avril 'a L. H. F., par les Députés de la Compagnie des Indes Orientaies, & dans laqucile, après une expofition de l'embarras extréme, ou les Directeurs de cette Compagnie alioient fe trou7er, s'ils ne pouvoient expédier a temps les vaiffeaux deftinés pour fes EtablifTements, — aorès une expofition du danger éminent qu'il y avoit que 1'ennemi n'attaquai quelques uns de ces Etabliffements, l'on fupplioit L. H. P de faire fournir a ces vaiffeaux une Efcorte convenable , tandis que d'ailleurs, Mrs. les Directeurs auroient foin de faire armer ces meines vaiffeaux, plus qu'a 1'ordinaire, tant pour pourvoir a leur proprc défenfe, qu'a celle des autres navires qui fe trouvoient dans les mers de 1'Inde ; Mais, que fi L. H. P. ne pouvoient prendre une Réfolution favorable a eet égard, eux, Mrs. les Directeurs, ne feroieijt point refponfables des Juiles qui pourroient en réfulter rjfc. ■ Qui croiroit que malgré toutes ces raifons, & d'autres que jc ne détaille;point ici, qui croiroit, dis-je, que malgré toutes les bonnes intentions de la pluralité des Régents, qui compofoient les Etats - Généraux , les vaiffeaux de la Compagnie, chargés de denrees qui fe rratérent infenfiblement, chargés d'Equipages , dont une partie mourut d'inaéhon & de défefpoir, r.ttendirent encore plus de 14 mois, pour obtenir 1'Efcorte demandée? 3°. & 40. Les deux Requêtes adreflees le 6. & ls 7. juin G 4 aux  Grand Tableau, ii? -„ cées, 6c que le danger étant a fon plus haut „ degré , il ne relioit plus d'autre parti a „ prendre , que celui de découvrir a V. A. la véritable caufe des chofes ; de la prier „ de la maniere la plus folemnelle d'y réflé„ chir férieufement ; & de ne plus écouter „ dorénavanr les Confeils 6c les Infinuations „ d'un Homme tellement furchargé de la hai„ ne des Grands Sc des Pétits, regardé com- me un Etranger dcnué d'une connoiffance ,, fuffiflante de la Forme de notre Gouvernc- ment, 6c qui- nc portoit point une vérita„ ble affection a notre Pays. _ Qu'ils étoient 5, bien éloignés de vouloir accuier ce Seigneur ,, de ce dont on ne le chargeoit que trop ou5, vertement , ou d'envifager comme fondés les foupcons , qu'on répandoit contre lui, fi d'un attacherncnt exceffii' eC■ iilicite pour la ,, Cour d'Angleterre , ou dc mauvaifc foi & de corruption: — Qu'ils croyoient qu'un „ Seigneur d'une fi haute fiaiflawec 6c d'un „ rang fi diitingué, étoit incapable de pareii,, les baffeffes, mais .qu'ils jugeoient, que les iJóes fucheufes, que l'on avoit malheurcule- ment congues fur l'on compte, 6c qui avoient ,, caufé une méfiance générale , le rendoienc totalcmcnt inutiie, 6c menie pernicicux au „ fervice de 1'Etat 6c de V. A. — Qu'il de- voit par eonféquent être éloigné de la di„ reótiou des affaires, 6c de la Perfonne 6c de li % ^ la  IIÖ L'E S QÜISSE D' UN „ la Cour de V. A., comme étant un obfiacle perpetuel au rétabliffement de la bonne „ intelligence, fi néceffaire entre V. A- 6c „ lesprincipaux Membres de 1'Etat , 6cc. " Après cetr.8 expofition, Monféigneur , les Députés revinrent derechef a la néccfTité qu'il y avoit de vous adjoindre , au moins pendant cette guerre, un CüMiïé compofé de Régens des Provinces refpeétives, pour aflïller F. A. de confeil 8c d'efiet , Sc pour coopérer au falut de la Patrie: Enfin, ils propolèrent encore divers autres moyens néceffaires a eet elfet, Sc qui fe trouvent détaillés plus au long dans leur Mémoire, dont je ne donne ici que la lub france. Tous les égards dós a votre Perfonne, Monféigneur , lc ton de fincérké & de modération, Pévidence & la folidité des raifons , 1'importance des vérités enfin, qui regnoient dans ces Reptéfentations , au lieu de vous toucher, comme vous auriez du 1'être, au lieu de vous faire ouvrir les yeux, 6c d'apporter quelque reméde a nos maux , eurent un effet tout contraire. Déja irritée de la Propofition d'un CoMiré, V. A. ne put s'empêcher dc témoigner aux Dcputés 1'indignation qu'elle resfentoit de cette nouvelle démarche : Elle regarda leurs Reptéfentations comme un manque d* confiance 6c de refpeft envers Elle, comme un affront audacieux, coramc un ati ten-  Grand Tableaü. 117 tentat contre fa dignité, & peut-être, comme un crime de Leze-Majefté : Elle regarda, dis-je, ces Repréfentations, comme une iniulte atroce , comme un outrage crirninel envers lc Duc, envers un homme que V. A. tenoit pour fon fecond Pere , pour oivprodige d'imelligence 6c dc lumieres, pour un oracle infaillibie, pour le plus utile fervitcur de 1'Etat, pour un homme, en un mot , dont le cceur étoit macccifibie a la lacheté, a la corruption, a la trahifonj dont Pcfprit étoit incapable dc rien concevoir de préjudiciable aux intéréts de la République j 6c par eonféquent, dont les fentimens, les vues, les defleins, les aeïions , ne pouvoient avoir d'autre but que la gloire 6c la félicité de 1'Etat, dont il mangeoit lc pain : En un mot, le Duc étoit aux yeux de V. A. ce que Minerve, fous la figure de Mentor , étoit envers Télemaquc. —Quel bonhcur pour Vous , Monféigneur.' 6c quel bonhcur pour nous ! s'il vous tüc été de la même Utilité, que Fi nhlon fuppofe que Mentor le fut au Pils ÜUlyJfe! («) Com- («) Qui croiroit que pendant tout le mois de mai, c'eft. a-dire, que tandis que la partie la plus éciairée de la na-' tion étoic convaincne qu'une des principales caufes de la mauvaife direction & de 1'inaftivit'é de notre marine, veaoic des confeils & des menées du Duc de Bhuns. .H 3 wtex-j  Grand Tableau. 119 tous nos Dogues Anglomanes fe déchaïnerent a 1'inftant; leurs hurlemencs retentirent d'un bout a 1'autre de la République; un dciuge de Sophismcs & d'Apologics, en faveur du Duc, inonda la Nation, Sc attira a ces Ecrits les Ripottes qu'ils méritoienr. D'un autre cöté, la Cabale conjurée, craignant que Vous ne réflechiiTiez fur ces Repréfentations, Sc que Vous ne reconnuffiez enfin les vérités qu'elies contenoient, renforca le bandeau qu'elle Vous tenoit fur les yeuxj elle redoubla partout fes menées tenébreufes; elle employa tout le pouvoir de fon influence , & bientót, les fehtiment fur cette affaire fe partagerent dans les Villes , Sc dans les Affemblées d'Etats $ des disputes Sc des débats interminables, qui n'étoient déja que trop communs parmi nous, réfulterent de tout cela ; tous lts efforts des vrais Patriotes , des Amis de la vcrité , de la juftice, Sc du bien-être de la Patrie, ne rurent étouffer cette nouvelle espece de divifions; Sc ceux qu'on accufoit d'être la caufe première de nos malheurs, triompherent alors la, oü ils devoient trouver leur défaitej ils eurent un motif de plus pour accroïtre ces malheurs} Sc ce motif fut une vengeance implacable, dont nous reffentirons long-temps les effets. • Ce n'eft point ici le lieu dé m'étendre d'avantage fur tóut ce qui fe paffa a 1'égard de 1'Affaire de Mr. le Duc, jus qu'au li 4 7 mars  I20 L' ESQ.UISSE D'UN 7 raars 1782, que les Etats dc Hollande déclarerent fur une pluralité de 4 voix, ( & cóütre la Proteftation provifoire de Dort, IJarlcm, Leyle , Amflerdam , Rotterdam Gorcum , £c Alkmaar,) que cette Afaire feroit mife de c'otif, abfnlument laiffée hors de dêlibération ultérieure : Jc ne m'étendrai pas non plus furies Démêlés qui continucrent encore pour cette même Affaire, entre les Etats de Frife & V. A.; ni fur fon renouvellement en 1784. apiès la découverte du fameux Acte de Consultationj ni enfin, fur tout ce qui s'eft paffe depuis cette époque, jusqu'a 1'heureufe & trèsheureufe Disparition du Feld - Marechal , de nos Provinces: Cela fait la matiere d'une Piece particuliere, que je fuis occupé a rédiger, & dont la Publication aura lieu en fon temps. L'on y verra fi la fincfic des fophismes, fi les déguiffements honteux, fi le clinquant de 1'éloquence des nouveaux Scribcs, que le Duc vient encore d'employer en 178^, pourronttenir contre des Faits inconteltablcment démons trés, öc dont on ne foup^onne pas que j'aie les prcuves. Votre Alteffe, Monféigneur , fatiguéc, alarmée , par tant de Piaintes & de Repréfentations, entreprit enfin de diffipcr les foupgons de négligence & d'inaéUvité , que la Nation pouvoit avoir envers Elle. Et i eet cffet, Elle adrefta.  Grand Tableau. 121 adreffa le 28 juin aux Etats-Généraux une Propofition, dont je parlerai après avoir ici expofé le reffentiment particulier, que lui cauibit alors la Propofition que la Ville d''Amfterdam avoit remife le 18 mai aux Etats de Hollande. ■—- Voici comment les Rédacteurs de Votre Mémoire font parler V. A, fur cc fujet O). „ Malgré notre fagon de penfer , (en fa3, veur de la protettion d auorder au commerce,} „ malgré les efforts les plus zélés, que nous nc ccffions de faire pour mettre la Marine „ en état d'agir, la Propofition de la Ville „ d''Amfterdam , 1'adhéfion dc quelques autres Villes de Hrff'lande a cette -Propofition , 1'ap- probation 6c 1'appui qu'elles lui accorde,, rent, firent voir elairement que l'on nc rc„ gardoit pas les difficultés dc toute espece, „ contre lesquelles nous avions a lutter, com„ me auffi grandes 6c auffi infurmontables, ,, qu'elles nous le paroiffbient journellement, 5, 6c qu'elles Pétoient en effct: En comparant „ ce qui fc faifoit, ou plutöt, ce que malgré „ nos foins ne pouvoit s'cxécutcr , avec ce, „ dont (a) A. p. 63 fc? 64. B. p. 97 £f 9S. C, p. 46 & 47. Comme le Tradu&eur Francois » de ce Mémoire , n'a point pris Ia peine de rendre avec toute Pexactitude requife ce que je cite ici, ü ne faut point s'étouner fi je ne le fuis pomt a la lcttre. H f  122 L' E S Q. U I S S E D'UN „ dont la poflibilité n'étoit pas moins 1'objet „ dc 'nos vocux, que des voeux de ces Mem„ bres de 1'Etat (a) , on nous attribuoit gra„ tuitement une négligence & une inaccivité, auxquelles on donnoit des eau fes tout-a-fait „ différentes de celles que nous avions le cha„ grin de trouverj. caujes, dont nous avions „ déja indiqué 1'exiitence, ainfi que 1'impos„ fibilité de les fupprimer auffi promptement qu'on le fouhaiteroit. , Quoique Nous fuffions intimément con,, vaincus que ces idéés, ces foupgons, ne provenoient que du peu de connoiffance, Sc d'une expofition imparfaite de toutes les chofes & circonftances relatives a 1'entiere conftitution d'une Marine totaiement déchue, & que peu de perfonnes connoiffoient avec „ Nous, — quoique Nous n'euflions jamais rien fait, ou négligé , qui put porter la moin„ dre atteinte au droit inconteftable, que Nous croyons avoir a la confiance de la Nation ,— cependant, pour prévenir la défiance, que ,, la-dite Propofition d'Amflerdam pouvoit fai„ re naïtre, nous jugeames a propos de conti' „ muniquer le 27 juin aux Etats de Hollan- >» de, (a) C*eft-a-dire> Amfterdam, & les autres Villes, telles que Dtrt, Harletn ccc. qui avoient accédé a fa iVe-  Grand Tableau. 127 adhéré a fa Propofition, avoient des Vues^ elles ne craignoient pas que ces Vues fuffent traverfées par aucune Recherche fur les caufes de la foiblefle & de 1'inacf ivité de notre Marine j & que fi ces Villes ne fe font prêtées que difficilement k celle que F. A. vouloit propofer aux Etats- Généraux , c'eft qu'elles voyoient quV// 1'Amérique feptentrionale , & par confé5, quent depuis la fin 1776. & le commence- ment de 1777, pour fe mettre en état, auJ5 tant qu'il étoit pofiïble, . & que cela dépen- doit d'eux, de protéger le commerce dc ce 5> Pays; — ce qu'ils ont fait, depuis que les J5 troubles ont éclaté en Europs & qu'il étoit 5, a craindre que la République ne füt obligée ,, d'y prendre part, pour la mettre en état, autant que cela dépendoit d'eux, non feulement „ de  Grand T a b l e a ü. 129 „ de protéger fon commerce , mais auffi de contribuer a. la défenfe de la Patrie Sc d'at„ taquer 1'ennemi j — s'ils ont été actifs a. „ exécutcr ce qui a été réfolu pour eet objet „ \mV.H.P., ou s'ils y ont manqué, Scpeur„ quoi — s'il a été en leur pouvoir de fournir les Vaiffeaux mis en commiffion, & dc „ les équiper: — Et cela, afin qu'on puiffe „ découvrir d'oü vient que cette République „ fe trouve dans un état fi déplorable de dé„ fenfe par mer : ce qui eft certainement 1'ob„ jet le plus intéreffant dans cette guerre, ht „ celui fur lequel tous les Habitans de cette ,, République fixent.leur attention. — Quoi„ que je ne faffc ici mention que de la défenfe „ par mer, je crois cependant néceffaire de re„ préfenter a V. II. F. que je fuis bien éloi„ gné d'avouer par-la, que les forces de ter* „ re de ce Pays foierrt fuffifantes, pour qu'on „ puiffe fe flatter qu'il fc trouve dans un état refpeétablc de défenfe par terre. " Fort bien, Monféigneur: Auffi les Colleges d'Amirauté dreflerent - ils les Rapports qu'on leur 01 donna, & il les remirent fucceflivement a L. H. P. dans le cours des deux mois fuivants (a). Mais ces Colleges, en déeouvrant par (a) Cos Rapports fe trouvent fous les Nó. 12. 13. 14. ij. & 16. de la Prenj. Part. des Pieces Juflificativis ütê MéM, de S, A i  130 V E S Q. ü I S S E D'u N par ces Rapports 3e trifte état cü étoit notre Marine en 1776,-7 en y expofant la modici%é des. moyens, dont ils avoient eu a dispofer pour la rétablir enfuite, — en y faifant connoitre la rareté , la cherté des matériaux de conftruclion , la difette d'ouvricrs, & autres obftacles du fecond ordre , qui avoient contribué a les empêcher de Paugmenter d'a- yantage qu'elle ne 1'étoit en 1781^ en s'y plaignant, enfin, de la difficulté des recrutements, 6c de 1'impuiffance oü ils avoient été d'équiper plus de vaiffeaux qu'ils ne 1'avoient fait au commencement de cette même année , ces Colleges, dis-je, prouverent tout au plus , & malgré ce qu'en dit Votre MéMOiRE (a), que, femblables aux Rcues fecondaires d'une Machine, ils n'avoient agi qu'en raifon de- l'impulfion recue du Premier Mobile: Ils avoient employés, (avec aétivité ou non,) les moyens qu'on leur avoit procurés, 6c rien deplus. Et ces raifons, fuffifantes, peut-être, pour juftifier leur zèle 6c leur conduite refpecf ive en ce cas, ou du moins la conduite de quelques uns de leurs Membres parriculiers, ne juftifierent aucunement Ceux, qui étoient la Principale Cause dc la modicité des moyens CO A. f. 64, -* B. p. os, «-< C. p. 47,  Grand Tableau, 135 „ ningue, Sc dont j'ai 1'honneur de remettre ,, une Copie a F. H. P. " Ce que j'ai dit quelques lignes plus haut, Monféigneur, Sc notamment ce que j'ai déduit depuis la page i. jusqu'a la page 62. de eet Ouvrage , prouve invinciplement , combien étoit ici déplacé eet étalage des foins, que Vous aviez tant de fois pris de joindre, a, la Bemande du RétablilTement de la marine , celle de 1'Augmentation des troupes de terre j Sc furtout, combien peu il convenoit ici d'expofer de nouveau a Pattentiori de L. H. P. votre famcufe Propofition du 10 mars 1779/ Propofition la plus abfurde , la plus perrticicufe, que la malicc de vos Confeilles eüt pu in venter dans les circonftances oü l'on étoit alors; Propofition , dont le rappel faifoit ici un fingulier contrarie avec les piaintes, que F, A.3 les Amirautés", & les Officiers de mer avoient tant de fois faitts, Sc faifoient encore journellement, de la difficulté de trouver non feulement des matelots , mais même des foldats , pour les vaiffeaux. **, Et nous devions fouffrir cela! .... Nous devions fouffrir que l'on nous accusat d'ignorance Sc d'aveuglement, toutes les fois que nous ouvrions la bouche pour répondre a cette imputation ! -in L'on nous croyoit apparemment auffi ftupides que des Esquimaux. Enfin, voici en quéls termes V. J. finit fa I 4 Pro:  L'ESQUISSE D' UN Propofition. — Je ne puis diflimuler „ que je fuis dans le fentiment, qu'il auroit été Ca) Ik kan niet ontveinftn van tordetl te zyn, dat bet te wcnfchen ware geweest , dat die Propofitie teen meer ingang ladde getenden, wyl ik my durve veizekert beuden, dat, zoo te dier tyd de Repubiicq bsdde goedgevonden, in gereedheid te doen brengen vyftig a zestig wel geëquipeerde , en van bel nedige voorziene Schepen, waar onder niet minder dan twintig a dertig van Linie, en de Lanimagt te augmenteeren tot vyftig ■a zestig duyzend (jfettivc Manfcbappe*, zy zig niet in deeze droevige omflandigbteden zoude bevonden hebben , maar als ten independant Gewest door alle Megentheden zoude zyn gerefpeüeert gebleeven , en deszelfs aangenomine fyfiema van neutraliteit bebben kennen behouden , eri> dat zy zig in flaat zoude hebben gezien , om , onder Godes zegen , redenen te lebben, te kennen vcrwtgten, dat zy zoo veel oveiwigt zoude gegeevcn bebben aan de zyde, daar zy zig by zoude gevoegt bebben, dat niet te vriezen was, dat, welke MtgentItid bet nok zy , dezelve zoude bebben , evervallen, maar dat zy van een ieder gememgeert zoude zyn geweest , en dat der zeiver vrietidfcbap doer een ieder gezogt zoude zy., en zy aan geene der Mtgentbeden wettige redenen van klagten geevende, verworven zoude bebben dt agtinge en het vertrouwen van alle Megintbeden, het welk van de beste uitwerking voor de ware belangens van deezen Staat zouden hebten kunnen zyn , immers dat in allen gevalle. 200 zy door ! een onregtvaardigen Oorlog was aangerand, waar aan men altoos geëxponeert is, ty zig in flaat zoude hebben gezien, em met boop van Jucces, bet hoofd te bieden, en den vyand te konnen noodzaaken, om wederom de vriendfihsp van deezen Staat te zo.eken op, voor dit Gemeenebest , iono'rabele voorgaarden. — Ce Paflage eft trop conforme a un autre Pas- fage  Grand Tableau. 137 a. fouhaiter que ma Propofition du 10 mars 5, 177p. eüt été plus goütée qu'elle ne le fage de la même nature, lequel fe trouve dans la Leurs que 5. A écrivit le 17 janvier 1785. aux Etats-Géne? raux, (&. don: j'ai parlé a la page 87. ci-defius,) pour que je n'y joigne poïrt ici ce dernier : le voici. — Indien bet Ons bad mogen gebeuren, Onze bedoelingen te bereiken, en Onze poogingun met den gewenscbten uitflag bekroond te zien , dit Ons Vaderkmi , iet welk Ons boven alles dierbaar is , aan geene buitenlandfcbe Oorlogen geëxponeerd , en door geen binnenlandfeben tweefpalt zoude Zyn beroerd geworden; dat bet by deszelfs Vrybeid, Freede, Onafbanglykbeid en Welvaaren geconferveerd , in alle gevallen in beboorlyken Haat van defenfie gehouden, en tot den boogJlen top van lutfler en voorfpoed gebragt zoude zyn, en by gevolg, dat alle die rampen, die aan de Republiek, feders weinige jaaren, zyn overgeiomen, en die genen, die baar noch verder te vreezen Jlaan, en die Ons voorkomen onvermydelyk te zyn, indien zy niet op nieuws , als door een wmdirwerk, gered werd, niet zonderde hoogjte onrechtvaardigheid , aan ons honnen worden ten lasten gelegd. ■— Si le Lecleur compare ces deux Palfages 1'un avec 1'autre , il jugera fi la raifon , fi 1'cquitc , fi la qualification d'inculper It conduite du Haut Gouvernement, que les Etats de Frife ont donnée au dernier de ces Paffages, dans leur Lettke addreffée.a S. A. le 25 février de la même année, il jugera, dis-je , fi la maniere dctaillée & vigoureufe, dont ces Etats ont relevé ce même Paffage , n'autorifent pas tout Citoyen libre, &jaloux de la gloire de fes Souveraïns, de réfuter le premier, ainfi que je fai fait a Ia fuite de la Citation que j'en donne ici dans le Texte de mon Ouvrage. If  138 L'ES CL UI S SE D'UN „ fut, puisque j'ose être ASSURé, que fi „ la République (a) avoit trouvé bon , en ce: temps-la. , de faire tenir frêts ro a 60. „ vaiffeaux bien équipés , Sc pourvus du né„ ccffaire , dont pas moins' de 20 ou 30 de c ligne, & d'augmenter les forces de terre jusqu'a ƒ0 ou 60. mille hommes, Elle ne fe„ roit point dans les triftes circonftances, ou „ Elle fe trouve achiellement; — mais Elle 5, auroit continué d'être refpeélée par tou» „ tes les Puiffances , comme un Etat indé„ pendant ; Elle auroit pu confervér le ,, fyffême de neutralité, qu'Elle avoit adop,, té > — & moyennant la Proteétion pivi„ ne-, Elle auroit pu fe promettre, qu'en donnant un grand poids au cóté , auquel Elle ,, fe feroit jointe, il n'auroir. pas été a crain3, dre qu'aucune Puiffance Pattaquat; au con„ traire, Elle auroit été ménagée par thacu„ ne de ces Puiffances; elles auroient recher- ,5 c'hé fon amitié: Et ne donnant a au1- .,, cune des fujetsiégitimes de piaintes , Elle auroit obtenu Peftime Sc la confiance dc „ toutes ; ce qui auroit produit les effets les ,, plus falutaires pour les vrais intéréts de eet „ Etat: — Du moins, fi Elle eüt été attaquée , » par ■ — r f (O C'tji-a-dire, lc Cnivcrnmsm,  Grand Tableau. 139 par une guerre injuftè, ce a quoil'on eft toujours expofé , Eile auroit été en état de fe défendre avec efpoir de fuccès , & de forcêr fon ennemi s. rechercher fon amitié,a ,, des conditions honorables pour Elle." C'eft- a - dire, Monféigneur, que tous les maux, dont nous avions été accablés depuis quelques années jusqu'aiors, provenoient de ce que le Ff uit Gouvernement, &C particuliércment les Membres les plus éelairés, ïes mieux intentionaés des Sept Provinces, s'étoient obftinés a ne point fuivre vos confeils, vos avisL vos propofitions; —->. c'eft-a-dire, que le Gouvernement Sc ces Membres refpectables avoient vu moins clair par leurs propres yeux, que vous ne le voyiez par les yeux de vos perfides Confeillcrs; — que pour ces raifons, c'étoit au Gouvernement, ainfi qu'a ces Mem» bres, Sc non pas a la Clique Anglomane qui vous aveugloit, qui vous gouvernoit, Sc qui mettoit obftacle a tout, que la Nation devoit s'enprendre, pour 1'état dc foiblefle oir notre marine s'étoit trouvée en 1779. Sc 1780. Sc furtout, quand il plut aux Anglois de nous déclarer la guerre; ■ que c'éroit au Gouvernement, a. ces Membres, Sc non pas a. cette Cliqut détestahle, que la Nation devoit attribuer la mauvaife direction de la marine, 1'inaétivité actuelle de nos vaiffeaux, ces vaines excufes, ces prétextes fiivoles, inventés pour privcrie com- mer-  140 L' ESQUISSE D' UN mercc 6c nos établiffements de toute pro- tection } que par eonféquent, c'étoit auffi au Gouvernement 6c a ces Membres, qu'on devoit reprocher les pertes énormes que nous avions déja, faites, 6c les outrages fanglans que nous ne ccffions d'effuycri que felon tout cela, cette même Clique fut également innocente dc 1'inaétiyité, qui continua de regner dans nos ports pendant le refte de la guerre, & qu'elle ne fut aucunement la caufe des nouvcllcs pertes 6c des. nouveaux malheurs, que nous effuyames jusqu'au moment fatal, oü nous nous vimes forcés de foufcrirc a la Paix la plus honteufe, la plus pernicicufe, que nous eusffons jamais faite: ;— En un mot, Monféigneur, felon le fens affez intclligible dc la conclufion de votre Propofition, cc ne pouvoit être qu'au Gouvernement 6c aux Membres fusdits, que la Nation devoit s'cn prendrc, non fculement pour tous les maux dont je viens de parlcr, mais auffi, pour la privation, oü la République fe trouvoit, des avantages, dont V. A. faifoit ici un iï grand étalage. : Jm- putation , qui , quoiqu' indirecte , n'en étoit pas moins claire, ni moins fauffe, ,ni moins fiétriffante, que celles dont j'ai parlé aux pages 8j. 6c 87. ci-deflüs} imputation indig- ne, 6c vraiment repréhenfible, furtout, ctant faite cn face du Souverain, par le Capitaine 6c Amiral - Général de la République, par le premier  Grand Tableau. 141 mier Membre du Confeil d'Etat, par le Stadhouder, Capiraine 8c Amiral-Général particulier de chaque Province, c'eft- a-dire, par rhomme qui devoit mieux connoitre, que tout autre, les vraies caufes de la foiblclfe de notie marine, de fa mauvaife direction, de l'inadtivité de nos vailfeaux, 6c des défaftres qui nous accabloient; ■ imputation, enfin, dont V. A. auroit fans doute eu horreur, fi ayantmoins de confiance cn ceux qui 1'ont rédigée, Elle favoit lue avec attention, 8c en avoit pefé les conféquenccs. Je dis, pefé les conjéquences, paree que les Scribes dévoués a la Cdbale, n'ont pas manqué» de tirer des imputations dc cette nature, 8c d'autres non moins fauffes 6c odieufes, la matierc de toutes les impoftures qu'ils ont repanducs parmi la populace 6c les efprits remuantsj c'eft- a- dire , parmi cette efpece de gens, que des Emilfaires hypocrites, ou fcélérats, féduifoient d'ailleurs par leurs discours, par leurs menées, 6c qu'ils animerent au point, que cette lie dc la nation en vint jusqu'a fouler aux pieds toute furbordination, a perdre la confiance, le refpecl:, 6c 1'obéifiance due au Souverain, 8c a fe porter a des Emeutes, qui ont ébranlé 1'Etat jusque dans fes fondements. Mais c'eft aftez parler de cela. Avant de revenir au Récit de ce qui fc pas- foit  téfl L' ESQUISSE D'Ü N foit ici dans nos Porrs j qu'il me foit permis de jetter un coup d'ceil fur ce que faifoient les Vailfeaux que nous avions alors aux Indes occidentales 8c a Lisbonne. ' Aux Indes oceidentales, nous avions a Curacao le Najfau de f5o canons, le NaJJau fFeilburg de f o, les frégates le Beverwyk 8c 1' Arend, 1'une 8c 1'autre de 2,4; a Surinam étoient le Valk 8c la ïhétis, auffi de 24. Mais, me dira 't-on, que faifoient alors ld ces vaisfeaux? 1 Rien. Et qWy ont -ils fait pendant le refte de la guerre} —— Rien: du moins a 1'égard de 1'Ennemi, que leurs Commandants eurent la précaution dc he pas trop inquiéter , foit dans fon commerce ou autre» ment; & cela, pour des raifons mieux con- nues a ces Meffieurs, qu'a moi. Je viens a Lisbonne. Le rz mars V. A. y avoit mandé au Contre-Amiral de Byland, d'aller croifer avec fon vaiffeau VAmfterdam, 8c avec la frégate le Dieren, a 20 ou 2y lieues a 1'Oueft des Ifles de Corvo 8c de Flores, qui font partie des Apores$ ou d'y envoyer la frégate feule, afin d'annoncer la rupture aux Navires de notre Compagnie des Indes Orientales, qui revenoient en Europe, & de les efcorter dans quelque Port Qa), Mais, («) Foyez la>defTus, A. f. 113. (f fuivant. B. p. tCS,  Grand t a b l è a ü. 143 Mais, ainfi que je Pai dit, page 77. ci-desfus, V Am/ïerdam ,■ délabré par fon fervice antérieur, éroit alors hors d'état d'entreprendre cette Croilïeie ; les réparations que le Contre-Amiral avoit commencé ii. lui faire faire, durerent jusqu'au commencement de juillet; & le Dieren, qui par fa vétufté tenoit a peine enfemble , & qui d'ailleurs étoit fort-mauvais voiher, ne pouvoit entreprendre feul cette Expédition. La vue du trifte état de ces deux vaiffeaux, & de la Princeffe Marie Louife, dont j'ai aufïï parlé a la même page, avoit d'abord cauié le plus grand étonnement aux habitants de Lisbonne ; ils ne pouvoient comprendre pourquoi, dans les circonftances oir la République fe trouvoit, l'on eut dépêché ces vaisfeaux de nos Portsj mais il en vinrent bientót a rirc de ce fpectacle, & a fe railier de ceux qui le leur avoient procuré: Et quant aux Anglois, qui fe trouvoient alors en cette ville, ou fur le Tage, ils tirerent de la un nouveau motif, pour infulter nos Marins: £>hte viennent donc faire ici, difoient-ils fans ceffe, ces Chiens de Hoilandois avec leurs vaiffeaux pourris ? « Et p. 168. id. ■ C. p. 88. id. Et fürtout, le Rap* fort que Mr. de Byland fit de fon Expédition de Lisbon. »«» & qu'il adrefla le 19 décembre a 5, A.  144 L' ESQUISSE D1 UN Et de tout cela, il réfultoit fouvent des corribats fanglants entre les matelots des deux nations. C'eft fur des Lettres venues de nos vaisfeaux meines, & que j'ai fous les yeux, que j'ai dreffé le rapport dc ces particularités. Voila, Monjeigneur, voila comment une partie dc nos braves Marins étoit en but aux railleries des Portugais, au mépris & aux infultes journalieres de nos Ennemis. Voila de quellc maniere les tréfors de 1'Etat étoient employés a des Armements infrüétueux, qu'une Adminiftration aveugle , ou mal confeillée, avoit expediés tant dans 1'Océan, qu'en Ame- rique. Si l'on eüt donné a Mr. de Byland des vaiffeaux en état de rendre les feivices, que fon Expédition a Lisbonne exigcoit, il feroit feut-être parti a temps pour la Croifiere que V. A. lui avoit ordonnéc; ik pour le peu de vigilanct Sc de bonne volonté qu'il eüt eu, (car il faut cela dans un Officier,) il auroit pu rencontrer, & prendre fous fon convoi les lix Navires de la Compagnie, que le Corfaire Anglois, lc Tartare, attaqua lc zo mai, & dont il coula un a fond : V. A. n'avoit pas tardé a apprendre dans quel état les trois vaiffeaux iufmentionnés étoient arrivés a Lisbonne: Et fur la fin du mois dc mars , Mr. SmïjTaert, Conful des Etats - Généraux cn cette vil .e, avoit écrit a X. H. J?.f qu'il y avoit apparence que dans peu  I52 L' ÈS'QUISSE D'UN 6 Vaiffeaux de . . . . 44 ou 40. ' 9 1 de .... 36. , 9 de .... 24. -— Et 31. tantCottcrs,Jagtsd'avis,qiröitleggers&c. Total, 67. ' - ..... • . Et cela, fans compter XtZiefikzce & le Prince Frederic de 60, non plus que lc Gots 8c lc Tromp, dc f o, qui, quoique déja en Commiffion, nc furent point cn état d'être. employés en 1'année 1781. Je ne comprerai pas auffi les deux Vailfeaux d'hopkal, ni les ,5» petites pinques ou chaloupes de la Zélande. Mais, on fc plaignoit qu'il manquoit encore beaucoup de monde fur les 67 vaiffeaux fusdits} Scqu'il écoit très-difficiledc trouverdesrecrues, tanten matelots qu'en foldats,pour les équiper. 'Eten effet, les matelots n'étoient point communs, paree qu« les Anglois en .avoient enlevé un trés-grand nombre avant -Sc depuis la guerre; 8c que.parmi ceux qui fe trouvoient daifs le pays, plufieurs ne s'empreffbient pas ii fervir fur nos Vaiffeaux de guerre. — Et de qui étoit-cela faute , que mus avions'tant 'de maïetyts.prijonnitrs.eti-.Atigltterre'? — de Ceux , qui, par leur opini&treié infléxible a vouloir une Augmentation de troupes, ou par d'autres motifs , avoient mis obftacle au Rétabiiife-ment dc la marine j de Ceux qüi", par"-la," avoient retenü certe 'marine dans 1'état de foi-' blcfie,  Grand Tableau. 153 biclis, oü elle fe trouvoit au commencement de la guerre ; du défaut de Proteftion accordée, avant & depuis la guerre, a nos navires de commerce. — Et a"ou venoit encore cette difficulté a trouver des matelots ? — De la négligence dc divers moyens propres a en trouver d'avantage, que l'on n'en trouvoit; de la négligence d'avoir recherché a temps le Convoi du Sund, qui en auroit fourni plufieurs; du traitement rude & fouvent injulïe, que nos Ma.rins éprouvoient fur un partie de nos vailfeaux; de la mauvaiie nourriturc , que l'on avoit fur quelques uns de ces vaiffeaux ; &, en un mot, du dégoüt de fervir, que l'inactivité dc nos Forces navales avoit infpiré a ceux qui en auroient eu envie. Quant aux Soldats, les trois dernicres raifons, que je viens d'expofer, 8c toutes celles que j'ai rapportées ci-devant, dans mon Discours préliminaire , démontrent plcinement que fi l'on n'en avoit point de reffe, cé n'étoit pas la faute de la Nation.— Cependant, Monféigneur, quoique, felon F Etat connu de nos Forces navales , nous fuffions bien éloignés de pouvoir conquerir l'Angleterre, nous avions pourtant été, depuis deux mois, affez forts dans la Mer du Nord, pour y eroifer les dcffeins dc 1'Ennemi, pour nous y oppofer a fes déprédations & x fes infultes, pour y porter quelques coups a fon commerce , pour 1'obliger de vciller a, ce que quelques K ƒ unes  154 L' ESQ.ÜISSE D'UN unes dc nos frégates, a 1'excmplc dc Paul John, & dc quelques Corfaires Francois, ne portasfent le dégat lc long de fes cötes; en un mot, au mois dc mai, & furtout au mois de juin, nous étions déja affez puiflants dans cette Mer, pour faire fentir a notre Ennemi , que nos Marins actuels, avec peu de vailfeaux, étoient capablcs de faire proportionément d'aulfi gloricufes aétions, que nos Marins du dernier ficcle en avoient faites avec de grandes flottcs. Mais bien loin dc tout cela, la Direction de notre marine avoit lailfé paffer ce temps - la fans cmployer feulemcnt unc feule chaloupe pour la Proteélion de notre commerce. — Notre marine eft depuis long-temps entiérement déchue; & malgré tous les efforts employés pour mettre enét at d'agir le peu de vaiffeaux que nous avons, elle ne peut pas encore accorder cette Protetlion. .-. Ainfi parloient Ceux, qui étoient la principale Caufe du délabrement de eette marine j Ceux, qui étoient également la caufe de la lenteur actuelle que l'on apportoit a la mettre au moins en état dc nous défendre; Ceux , enfin , qui avec leur zele apparent pour le bien public, reculoient autant qu'ils le pouvoient 1'aecord des Convois & la Proteétion demandée. Auffi, les Etats de Frifc , indignés de cette négligence trop palpable, de ces raifons futilcs, prirent - ils le 3 juillet, fur une Propofition faite lc 24 précédent par lc Quarticr d'Oofter- goo  Grand Tableau. 155 goo, une Réfolution digne de Régents vraiment zélés pour la gloire de la République, & 1'intérêt du commerce i Entre autres Objets, Leurs Nobles Puiffances y chargerent leurs Députés a la Généralité, d'infifter fortcment a 1'Affémblée des Etats Généraux, pour qu'il füt cnjoint aux Colleges d'Amirauté, de remettre par écrit, & fans aucun délai, fur la Table de Leurs Hautes Puiffances, {non pas Vhiftoire , trés - inutile dans les circsnfiances aïluel' les, de ce que ces Colleges avoient fait depuis 1776", & ainfi que V. A. r avoit de mandé le 28 juin,) mais bien le Rapport de ce qui fe paffbit actuellemcnt chez eux ou a leur égard, c'eft-adire, les Raifons, pourquoi il regnoit tant de lenteur dans les Equipemens j quelles étoient les Caufes dc cette lenteur j & qucls moyens ils croyoient être les plus propres pour la faire ccffer. Ces Etats chargerent en même temps leurs Députcs de déclarcr a. ladite Affcmblce , que Leurs Nobles Puiffances avoient réfolu de nc plus confentir a aucune Pétition, auffi longtemps que l'on n'auroit pas fatisfait, tant a ces Points • la, , qu'aux autres Points contenus dans leur Réfolution. Voila, comment parloient des Régents, qui, fans cherchcr de vains détours, vouloient qu'on en vïnt droit au Fait; voila de quelle maniere penfoient des hommes eclairés, qui ne fc laisfoient avcugler, ni par les fophismes, ni par les  156 L' ESQUISSE' D' UN lës impoftm-es des Dcfenfeurs de la lenteur oc de l'inactivité. qui regnoicnt dans nos Ports; yoila cn quels termes s'énoncoient ces Frifons courageux, cn dépit de la haine & du refientiment des Auteurs de nos maux. — Qui croiroit, cependant , que parmi dc tels hommes, il s'cn füt trouvé cc jour-la d'afTcz avcugles, ou d'aflez puffillanimcs, pour désaprouver un telle demarche ? . . . . 11 s'cn trouva pourtant. Trois Membres du Quartier dc Wcftergoo proteficrent dans le termes, que je citc ci-desibus (a), contre PAcceflïon dc cc Quartier a la Propofition fusdite du Quartier d'Óoftergoo: & cela, paree qu'ils jugeoient que cette Propofition contcnoit une défiancc contre la conduite que F. A. tenoit, & contre les me- fures (a) De Ondergefchreven Volmagten van Franckeradeel, Eemelummer - Oldepbaert en 't Mild , verklaren mits dezen geen deel te hebben in het by Pluraliteit uitgebragte Kamer-Advvs, op het 2ïjïe Tornt van deze Extra-ordinaris Landsdag, als na hun oordeel inhoudende een diffideucie omtrent de Conduite en Maatregelen by Zyn Doorl. Hoogheid, in Quaiiteit als A dm 1 r a a l Generaal van de Unie gehouden en beraamd, zonder hier door vërflaan te willen zyn eenige hoegenaamde Blaam of verkeerde Uitleg op en aan de Gevoelens hunner Medeleden te willen leggen, doch alleen vermeenen , dat HqogHdeszelfc Eminente Charge niet verpligt is rekenfcbap te geven van zyn beleid als Admiraal Gene- hul  Grand Tableau. 157 fur es qu'Elle employoit ,en fa Qualité d'Amiralr Général de 1'Union ; paree qu'ils penfoient, qu'en cette Qualité, V. A. n'étoit aucunement comptable de fon Adminiftration j 8c que l'on devoit s'en tenir a croire qu'Elle s'acquittoit de fon ferment & de fon devoir, au plus grand avantage du Pays. ,— Mais, qui ne voit qu'une telle Proteftation étoit abfurde, tant a 1'égard de fon objet,que dans fes principes? ... Si quelque motif de déiïancc avoit engagé le Quartier d'Ooftergoo a faire la Propofition fusdite, fi quelque motif femblablc avoit porté les Etats de Frife a la convertiren Réfolution, ce n'avoit certainement pas été celui d'une défiance directe envers V. A., mais bien, envers la Cabale perfide, qui , par fon autorité proprc, par fon influence peftilcntiellc dans toutes les Panics de 1'Etat, par fes pratiques fecretcs 8c infidieufes, 8c par Pespece d'en-* chan- kaal, maar gehouden moet worden zyn Eed en Pügc daar omtrent te betragten ten besten van den Lande. Aftum Lesuivardtn den 3. July 178., in de Kamer vac rVeftergoo, in kennisfe onzer handen. (W»s Geteiktnd) C. G. vam WASSENAAR. H. W. vak AYLVA. B. van deel HAAR.  Ï58 t'ESO.ÜISSE D'UN chantement, dans lequel elle avoit 1'art dc Vous retenir, eaufoit tous les maux dont on fe plaignoit , 8c erapêchoit tout le bien que l'on vouloit faire. D'ailleurs, comment putil tomber dans 1'esprit de trois perfonnes, cenfées avoir quelques idees de la nature de Gouvernement d'un Etat, qu'un Amiral-Général de notre République, n'eft, en cette qualité , aucunement comptable a fes Commettans, c'eft-a-dire, aux Etats Généraux, a fon lé« gitime Souverain $ 8c que l'on doit fc borner a tenir eet Officier comme s'acquittant de fon ferment 8c de fon devoir, au plus grand avantage de 1'Etat ? _ Quel eft donc lc Pays de 1'Univers, oü un premier Miniftre, oü un Général en chef des Forces de terre 8c de mer, eft formellement exempt de rendre compte de fon Adminiftration a fon Souverain ? Quel eft lc Pays , oü la Propofition de demander un compte de cette nature, eft illicite, fous prétextc que ce feroit unc marqué de défiance? —. Serions-nous donc la feule Nation deftinée a fournir au tel phénomenc? Ou bien nos Amiraux-Généraux auroient-ils re§u du Cicl lc don d'être infaillibles ou impeccables ? . . . Ils font hommes comme les autres, Monféigneur, 8c par eonféquent, Vous auffi. Si quelque Membre de la République jugeoit que Votre Conduite, en quelque qualité que ce füt dc vos éminentes Charges, méritat d'être recher- ehée,  Grand Tableau. 159 chée, il auroit le droit de le propofer; & fi après la Recherche que le Souverain en auroit ordonnée , cette Conduite étoit trouvée repréhcnfible ou criminelle, cc Souverain auroit le droit de Vous reprendre , ou de Vous punir. J'avancc ceci d'autant plus hardiment , que je préfume que V. A. eft trop jufte Sc trop éclairéc pour penfer autrement; quels que foient les principes contraires qu'on puisfe avoir taché de lui inculquer autrefois , ou que l'on tache encore de lui inculquer au- jourd'hui. Jc reviens au Héros de Lap- nienburg. Lc 3. juillet le Vicc-Amiral Hartfinck, chargé d'Inftrudtions de toute espece, arriva fain & fauf au Texel, après unc abfencc de trois femaines. Pour fc former une idéc d'unej partie des Inftructions qu'il rapporta, permettezmoi , Monféigneur, dc voir ici de quelle maniere les Rédacteurs de Votre Mémoire font parler V. A. des Délibérations, auxquellcs eet Officier avoit afïïfté a la Haye f». „ Dans nos Délibérations avec lc Vice„ Amiral Hartfinck Sc le Contre - Amiral van „ Kinsbergen, fur 1'emploi que l'on pourroit „ fai- (O Vtytz, A, p, 64, & fuivant. *- B, p. ÏOo. id. Jï c. p. 48. id.  l6o L'E S QUISSE D' U N „ faire des vaiffeaux de guerre pendant le refte „ de la Campagne de 1781, l'on s'étoit oc„ cupc du Plan de protéger le Convoi defti„ né pour la Baltique, contre les attaques de „ PEnnemi. Voici fommairemcnt en quoi .„ confiftoit ce Plan (a). " 1°. „ De faire raffembler la Flotte marchan„ de au Vlie." — Ce qui ne jut fait qu'en partie. 2°. „ De lui donner quelques frégates, & „ petits batimens armés. " — C'étoitpour la convoyer a fa deflination. 3°. „ De faire fortir (du Texel) les gros vais„ feaux , avec un nombre convenable „ de frégates, & d'en former une Efca„ dre détachée du Convoi {précédent); „ de forte, cependant, que cette groffe „ Efcadre put toujours intervenir , au „ cas que le Convoi füt attaqué. " —. L'on verra ci - après quel changement Pm apporta d cette dispcfition. 4°. „ D'envoyer au Texel les Vaiffeaux „ Gar- (a) J'avertis ici unc fois par toutes,- que comme Ie Tradufteur Francoïs du Mémiire de S. A. n'a pas toujours fuivi a Ia Icttre 1'Original HoIIandois , ou qu'il s'éloigne fouvent du vrai fens de fon modele, & que même il omet quelquefois des chofes eflentielles, mes Citations doivent être, a plufieurs égardi, diflerentcs de fon TcxtA  Grand Tableau. i$t 4, Garde - Cötes, & de les y laifler fous „ les o>dres d'un Officier fupérieur."— Sans doute, pour y garder les Per tuis de cette Rade, en l'abfence des Vaiffeaux, que fon devoit envoyer en mer. f°. „ De faire exécurer aux Troupes des „ mouveméns, qui ind'iquaffent quelque „ deffein dc faire une Defcentc cn Angletcrre. " — Kt Pon n'a rien fait de tela , pour la raifon finguliere que je rapport er ai ci • après. è°. ,, D'obliger ainfi 1'Ennemi a partager „ fes forces5' & par ce moyen, de fai„ re fortir les vailfeaux qui étoient en „ Zélande , fans cependant les expofer „ a être coupés. " — Les vaiffeaux, qu'il étoit alors qüefiion de faire fortir de Zélande , étoient le Zuidbeveland, ainfi qu'un ou deux autres vaiffeaux de guerre, £5? qïielques navires de commerce , qui les premiers devoient amener au Texel {j? au Vlie , en venbnt fe joindre d ld grande Efcadre de ci ■ deffus. Mais, pourquoi ne point parler ici du Prince Willem , in de la frégate la Bellone, ni du cotter lé Brak , {ff ni de la corveite le Kemphaan, qui fe trouvoient a la rade d'Helvoet , qui devoient auffi fe joindre d l'Efcddre fusdit e, & amener avec eux un vaiffeau de la Chantbre dè Delft , ainfi qué E quel-  l6S V E S Q_ U I S S E D' U N *7 du mois précédent, étoit dans la mer du riord avec des forces capablcs d'eniever Mr. Zout' ' en de Advis-Tagten de Kemphaan en Spion, beide van iS Stukken, en gevoerd door Lieutenant liye, en Uitlegger Capitein Stutzer. Gemelde Schout by Nagt fai na den 12. deezer, zoo dra hy door den ohdergeteekènde fai geinformeert zyif, dat de Koop*aardyerchepen na de Oostzee beftemd in het Vlie en Texel zyn met het fel e in Zee ïteeken. 'Voorts fai hy Schout by Nagt, foo dra hy in de Sond voor Elfeneur CA gekoomen zyn , aldaar ten Anker gaan leggen, en fig terftond by oen commisfaris van Haar Hoog Mog van Lieurs informeeren , of 'er ook aldaar eenige Koopvaardyefchepen van de' Republicq z.yn, die van he{-Convoy fouden willen profiteeren, in welk geval hy dezelve onder zyne Escorte fai neemen, en na dg Havens van de Republicq retourneeren. Ook fai hy, in gevalle hy een feeker nan'gt mogte fcekoomen, dat 'er Oostindifche Compagniefchepcn in eeiu'ge Havens v*n Noorweegen waren ingeloopen, de™ jelve afnaaien en herwaards cónvoyeeren. Aangefien door de Commercie nu de Oostzee te Amilerdam is. overgegeeven eene Lyste der -chepen, welke jn' de differeme Noordfche Havenen leggen en na een Convoy wagten , foo gelast de' ondergeteekende den. voornoemde Schout by Nagt, om defelvè, fo het mogelyk is af te haaien, of te laaten afnaaien , en daar tóe die midde;en te gebruiken, die hy Schout by Nsgl na gelang der omfiandigheeden ten meeflen. nutte van ae Commercie, en het minst' doenlyk' exponeeren van 's Lands Schepen dienflig fai oordeelen. De Noordiche Mogentheden aan de thans in Oorlog ïyndo Mogentheden hebbende gedeclareert, dat alle Koop-. j J vaai-  Grand Tableau. 169 Zoutman & fon Convoi. N'écoit ce point -1» livrer, de pippos délibéré, & nos vaiffeaux de g ierre, & nos navües marchands, a la merci de i'ennemi? Mais, felon lc Mémoire de V. A., & felon le Verbal de Mr Hartfinck, les vents contraires empêcherent le Cap. van Kinsbergen de fortir de la Rade du Texel, pour exécurer fa commiffion; & les vaiflcaux de guerre, ainfi que les navires de commerce, qui étoient a Helvoet, a Goerée & en Zélande, refterentla, ou ils étoient. Cependant, malgré ia certkud.e, oü l'on continuoit d'être, qu'il y avoit dans la mer du nord une Escadre enricmie, pon feulement cn état de détruire 1'Escadre du vaardyefchepen in de Oostzee de nodige feekerheid zouden hebben, en dienvblgende geer.e hostiliteiten in da voornoemde Zee door Oorloxfchepen of Kapers fouden mogen werden gepleegt, foo fai hy Schout by Nagt fig hier na in alles fliptelyk hebben te reguleeren, en wel obferveeren de Traetaaten, die den Staat met de Noordfche Mogentheeden heeft. Eindclyk fai hy Schout by Nagt in alles obferveeren behoorlyk Soldaat- en Zeemanfchap. Gedaan aan boord van 'sLands Schip van Oorlog &'Admiraal- Generaal ter Reede van Texel, den 6. july 1781. Geteekent, ANDRIES HARTSINCK.  I70 L'E S Q.U I S S E D' U N du Contre • Amiral Zoutman, mais même dc battrc nos deux Escadrcs reünies, & privées, comme elles 1'étoient, des renforts d'Helvoet 8c de Zélande; malgré cette certitude, dis-je, on perfilta dans le deifein de faire partir le Convoi, foit qu'il füt complet, ou non. Et dans cette vue, ces deux Escadres partirent le 20. du Texel, & allerent fe potter en avant du Vlie, pour y attendre un vent favorable au débouquement du Convoi. Le même jour, 20., V. A. écrivit au ViceAmiral, fur cette Expédition, une Lettre, qui doit contenir des chofes tres-important es, mais dont eet Officier ne nous a donné aucun détail dans fon Verbal, Sc dont les Rédacteurs de Votre Mémoire n'ont pas fait la moindre mention. L'on a craint, fans doute, que la leéture du contenu de cette Lettre ne nous fit mal aux yeux : Et il en a été de même de plufieurs autres Pieces non moins important es, dont on a trouvé bon de nous óter la connoiifance \ Sc que, cependant, l'on auroit mieux fait de joindre aux Pieces Juflificatives du Verbal Sc du Mémoire, que de groflir cette Colleótion, par les longues Sc infipides Inftruétions de quelques Particuliers obfeurs, que l'on plaga avec leurs Uitleggers, le long de quelques unes dc nos Cótes. Enfin, pour que le Vice-Amiral fut apparemment plus d portée de diriger les arrange- ments  Grand Tableau. 171 menrs pris a 1'égard de la deftination refpeéti've de nos deux Jiscadres, il regut ordre de F. A. de revenir du Texel a Amfterdam, oü il arriva le 23., & oü il demeura jusqu'au 7. aoüt. Ce qui ne 1'empêcha point d'y conti» nuer, ou, du moins, de faire paroïtre qu'il y eontinua fon Ferbal avec exacfkudc; car pour rcmplir la date du 2., oü il n'avoit fans doute rien de mieux a mettre, il nota gravemcnt qu'il venoit d'apprendre, que le Dominé du Capitaine van Braam étoit devenu fou. —■ Mais, dira-t-pn, pendant fon féjour a Amfterdam , 13 vu ies circonflances alarmantts, ou nos Forces navales alloient fe trouver, n"a-t ■ il refu de S. A. aucunes nouvelles Injlrultions pour nos deux Escadres? Ne leur a- t-il lui-même envoyé aucun avis particulier! — C'eft ce qu'il nous a laiffé a deviner. —< Eb pourquoi donc S. A. P'avoit - Elle fait venir en cette Ville 1 —— Dieu le fait. Au refte, le Vice-Amiral nc nous dit pas non plus pourquoi, deux jours après la rentrée des Vailfeaux qui s'étoient trouvés au Combat du Doggersbnnk, dont je parlerai a. 1'inftant, il prit encore if jours de vacanccs. —• Peut - être fit-il cn cc cas comme les Caraïbcs, qui fe mettent au lir quand leurs femmes viennent d'accouchcr — Quoiqu'il en foit, il eft certain que depuis le 1} juin, jusqu'au 31. aoüt, ce Commandant cn chef dc notre Flotte palfa fo, jouts a latiaye, a Amfier-  176" L'E S Q^UI S SE D'UN , En fuppofant même que 1'Amiral Parhr | n'efit point rencontré le Contre Amiral Zoutman après la féparation du Capitaine, feroitil par la devenu ifnpoffible, qu'il ne rencontrat ce dernicr lc jour - même, ou le lendemain de cette féparation? Sc e» ce cas, n'étoit-cc point encore - la une de nos Efcadre perdue ?—ï Et qut fal.oit- il , donc faket me dirat-on: Car, avoir ordonné aux deux Escadres d'aller en. femble jusqu'au Sund , cela auroit eu fes insonvêniens: Les avoir fait refter dans nos Ports, cela auroit fait redoubler les piaintes des Négociants, ies cris de la Nation. — Je réponds a ces óbjcébons , que fi , lorsque la mer du Nord , nom étoit libre, l'on eüt expédié le Convoi du Vlie, tel qu'il étoit, l'on ne fe feroit point trouvé dans les circonftances critiques , ou 1'ort s'eft vu au commencement d'a'oüt: 11 ne nous falloit point alors de grandes forces pouf cela. Je réponds encore, que fi l'on eüt mi« d'abord plus dc vigueur dans les Equipe» ments, & furtout, fi l'on n'eüt pas continué de négliger divers moyens propres a fe procurer des hommes poür les vaiffeaux, 1'Escorte du Convoi auroit pu fe voir augmentée au commencement d'aout, de la Princeffe Royaie Sc du Glindborfl, 1'un Sc 1'autrc dc f4 canons, du Pbénix de 44, du J&jon de 36, Sc dela JVaakz tamheid de 24 j & qu'alors, indépendamment des renforts attendus de Zélande Sc  Grand Tableau. 177 & d'Helvoet, l'on auroit pu parcourir la mer du nord, non pas en y évitant 1'Amiral Parker, mais pour 1'y chercher, 6c pour lc combattre avec un fuccès affuré , 11 on Favoit rencontré. — Et qui auroit alors pourvu a la fw reté des pertuis du Zuiderzee! Lc peu de vaiffeaux qui feroient reftés au Texel & au Vlie auroient fuffi pour cela. L'approche de la Flotte combinée donnoit aux Anglois toute aucre chofe a penfer, qu'a venir nous attaquer de ce cóté-la. Et fi l'on n'avoit pas rencontré 1'Amiral Parker , (ff qu'il füt venu pour franchir ces pertuis.... ? Si le Ciel tom- boic , dit le Proverbe , il y auroit bien des Alouettes prifes. Avec des fi, Sc autres Chicanes fembiables , le Comte de By'and s'eft cru autorifé, en 1781, d'éludér Jes Ordres du Souverain 6c de ne point entrcpiendre Ie Voyage de Brefi; ÖC l'on fait cc qui eft arrivé de ces fi, 6c de ces Chicanes-Ta. La prudence qu'exige le métier de la guerre , n'cmpêche pas de donner en certains cas quelque chofe au hazard. L'on n'a point été fi circonfpect a la fin de 1780, oü l'on expofa d'une maniere inconcevablc le Rotterdam , la Princeffe Caroline, 6c un vaiffeau de la Compagnie des Indes;, a être pris par les Anglois, ainfi qu'ils le furent en effet. D'ailleurs , il conviendroit bien de venir ici nous parler de prévoyance, apres avoir fait les Dispofitions que l'on a vues ci- < M des-  178 V E S Q. U I S S E r>' U N deffus, touchant deux foibles Efcadres , qui devoient fe féparer, malgré la rencontre trèsapparente d'un Ennemi capable de les écrafer Tune après 1'autre. Enfin la rencontre de eet Ennemi fe fit le f, ainfi que je 1'ai dit ci-devant: Et voici la Balance des Forces refpeétives des deux Commandants, Vaiffeaux Hollandois Vaiffeaux Anglois qui qui ont combattu en ont combattu en ligne (a). ligne. Can. Hom. Can. Hom. L'Am. Géréral. 74 . 550 —LaPr. Amclie 80. 700. L'Am. de Ruyter 64 . 450 La Forti tude ' 74 . 600 La Hollande . 6+ .45° —Le Berwick . 74.600 L'Am. (a) Quant au refte des Forces de Mr. Zoutman, £ƒ de l'Amiral Anglois, elles confiftoient en ce qui fuif. Vaiffeaux couvrant notre Convoi, ou différemment poflés, pendant' le Combat. Can. Can. L'Eertseezindheid . . 36 La Belle Poule . 34 L'Amphi.ritc . . . 36 La Cleopatre . . 32 Le A/iedenblik . . . 36 —* La Surprife . . 16 Le Zephir . , . . 36 j La Vaiffeaux ennemis placés d portee du Combat.  Grand Tableau. 179 L Am. Piet Mem 54 . 300 —Le Bienfaifant 64. 500 Le batave . . 54 . 300 Lc Buftalo . 60 . 500 LL-rr-Pnns .54.300 Le Preitori .50.400 L Argo . . . 44 . £70 — Le Dauphin . 44. 300 Vaiffeaux hors de ligne, Vaiffeaux hors de ligne, Ö' qui ont eu -pan &qui onteu beaucoup d l'Adion. depart d PAclion. La Belione .' 76 . 230 — L'Artois . 44 . 300 Le Dauphin . 34 . 156 —La Latone . 38 . 280 Tut:l1 468 ■ 3006 • Total 52.8 .4180 — [ , ! Ce fut donc avec une fupériorité de 60 pieces de canon d'un calibre bien iupérieur a celui des nóncs, ce fut avec une fupériorité de 1174. hommes d'équipages , & avec tout 1'avantage du vent, que 1'Amiral Parker attaqua Mr. Zoutman vers le 8 heures du matin. Le Combat dura avec acharnement pendant plus de La Venus , . . . )4,i rr.~ , , ~ L'Ajax. ... Vaiffeaux couvrant Ie Con- LTspion '. . , . j2 voiennemi, ou quicroi- Le Zwaluive . * . 10 foient d fa rencontre. —— L'A polion . . 32 ■ Le Tartare . . 38 ■ Lc Mirmiüon. . 24 • Le Leith . . . 20 L'Alerte. . . 14 Le Bufy ... 14 -— Le Sprigthly , . 14 M i  l8o L'ESQUISSE D1 U N de trois heures. Abrs 1'Escadre Angloife, fe trouvant cxtrémement rnaltraitée, reprit lc large, & alla fc mettre cn panne pour fe réparer. La notre, qui n'avoit pas moins fouffert, fe trouvoit hors d état de la pourfuivre: C'eft pourquoi Mr. Zoutman ordonna de retourner dans nos pórts, oü il arriva quelques jours après, ainfi que le Convoi, que eet événement avoit empêché de fc rendre a fa deftination. ' Par tout ce que je viens dc dire, Monféigneur , l'on peut. voir a. quel danger l'on avoit expofé nos Forces navales en cette occafion > l'on peut juger du malheur qui nous feroit arrivé, fi la rencontre s'étoit faite après la féparation de nos deux Escadres. Si Pon eüt tiré d'Hclvoet & de Zélande, le Prince Willem dc 74, & le Zuidbcveland dc Ó4, fi l'on eüt joint ces vaiffeaux a ces Escadres réuniei, cela auroit procuré a celles ci une telle fupériorité, que 1'ennemi, qui avoit 1'avantagc du vent, auroit profité dc eet avantage pour les éviter: Et en ce cas, notre Convoi auroit tranquillcment été conduit- a. fa deftination. Si au contraire , ce renfbrt n'aVoit point empêché PAmiral Anglois d'engager le combat ) fa témérité lui auroit coüté cherj nous aunöns infaüliblcment remporté , fur lui, une viéloire éclatante; la prile, ou la dcftruclion dt quelques uns dc fes va ffeaux, lc libre pasfagc dé uotre Convoi au Sund, le libre retour des  Grand Tableau, i8i • des navires de commerce qui étoient en eet endroit & en Norvegc, auroient été les fruits de cette victoire. Ce' nc fut donc qu'a une grace particuliere du Ciel , ce ne fur qu'a j'intelligencc & a 1'intrépidité' de nos Marins , que nous dfimes , en cette occafion , ia confervation de bos Escadres & du Convoi. Ces braves Marins y apprirent a l'Angleterre ce qu'ils valent ; ils apprirent a leur Patrie, ce qu'elle pouvoit atrendre d'eux , fi déibrmais on ne vouloit pas les laiflci' oiiifs. En-tin mot, 1'iifue de ce Combat rabailfa beaucoup i'orgueil de nos ennemis du dehors, & neconfterna pas moins nos ennemis intérieurs. Ces derniers s'attendoient a un fuccès bien différent: Enfuppofant la rencontre de 1'Amiral Parker, ils tenoient Mr. Zoutman pour complettement battu, 6c fon Convoi, pour diffipé Sc pris en partie. Et eri cc cas, ils n'auroient point manqué de s'écrier, ~ Votld ce que c'eft, que de s'être tant de fois plaint de t'inattivïté de nos Forces navales ! — Foild.ce que c'eft, que d'avoir tant preffé l'accord des Escortes aux Cpn* vois / — Fdia ce que c'eft , que d'avoir voulu qu'on exposdt le peu de vaiffeaux que nous avions!^, Fnld notre foible marine dêlabrée, dimïnuêe, fjj" plus que jamais hors d'e'tat de rendre aucun fervice! Foild , enfin , ce que nous. avions fi fouvent prédit, fj? ce qu'une Nation ignorante, Cjf inconfidérée n'a point voulu croirel M 3 Ce-  128 L7ESQ.UISSE D'UN Cependant, les différents effets, que la nouvelle,de cette Aólion avoit d'abord faits furies efpritsdecepays - ci, celferent bientöt. La Nation, revenue dc la joie que 1'événcment lui avoit caufée, vit qu'elle avoit inüniment plus pcrdu, que gagné, en cette occafion; & nos dignes Anglornancs fe confolerent de la gloire, que nos'Marins s'étoient acquife, en efpérant que la perte du vaiffeau , la Hollande-, (qui coula bas la nuit du r. au 6.) que le délabrement dc tous les autres, que la perte de prés de 570 hommes, tant tués que bleffés, & que le retour de la Flotte dans nos ports, apporteroient de nouveaux délais a 1'Expédition projettée, & par eonféquent, de no.uvelles cxcufes,.de nouveaux prétextes, pour ne point la faire exécuter. Et cn effet, l'on verra ci-après, que tout rentra dans un aflbupiffement étrange, & dans 1'inaction honteufc, oü l'on avoit été auparavant; l'on y vcrra, que la réparation des vaiffeaux endommagés fe fit avec unc lenteurextraordinaire, ou plutót, avec unc négligence inconcevable a ceux qui n'en connoisfoient ni.les caufes, ni les motifs; l'on y verra ' v n GRAND TABLEAU o u ME'M0IR.E3 POUR SERVIR A L'HISTOIRE des PI OVIWCES-UNIES des PAYS-BAS, et ïaaticulierement a celle de Stadhouder, Capitaine et Amiral-G eneral de ces Provinces, Capitaine et Amiral-Ge'ne'ral de l'Union, etc. Depuis 1'année 1776. jusqu'a ce jour. par. l'Auteur. des XXX. ARTICLES, t>u des Conside'rations nouvelle s sur l Irreussite DE l' E xp E dit,i o n de BrEST. Seconde Partie. EN HOLLAN DE, m pcclxxxvl   Grand Tableau. 191 cette fortie, a. 1'occafion des piaintes qu'on auroit: faites , fi le vaiffeau étoit parti feul, cu accompagné des navires marchands? ne défignet-elle pas un fond d'aigreur, 8c une envie d'offenfer gratuiternent la Nation Sc les malheureux Négociants , qui s'étoient plaints tant de fois, 6c avec tant de fondement, de 1'inaétivité de nos Forces navales? —— Quant a ce het fchip Zuidbeveland nueindelyk, uit noodzaaklykheid, ordrs gekregen hebben {in de maand Augustus) om uit te loopen, waarfchynlyk in 's Vyands handen zoude gevallen zyn, indien het niet verzeld geweest ws van twee Oost-Indifche Schepen j waar onder een ten Oorloge toegerust. Boven dien was het ligtelyk te fcegrypen , dat de Hce, ren Staaten, en de Inwoonders van Zeeland het gemelde Schip Zuidbeveland, niet gaarne zouden zien vertrekken, ia de bekommering, waarin men was voor de kruisfende vyandelyke Schepen. Weinige dagen voor het uitioppen , van het Esquader uit Texel, hadden Hunne Ed. Mog. de Heeren Staaten van Zeeland een nieuw Addres aap. Zyn^ Hoogheid gemaakt, om zich te beklaagen over het gemis van de Manfcfappen van de Land - Troupes, beliaande in vier man per Compagnie, die met verlof van Zyne Hooigheid, op Recruteering gezonden waren, ten einde de Compagnien te completeeren, met verzoek, dat doch dat gemis mogt vergoed worden door andere Troupes, Eene demarche , waar aan al we J erom door Zyne Hoogheid voldaan is, en die ten bewyze kan ltrekken , dat alle de Leden der Regeeringe in Zeeland hunne Provincie niet zo wel beveiligd rekenen , enz.  192 L' ES CiUISSE D' U N a ce que les Rédacteurs du Mémoire dc V. A. avancent dans le même paffage, que l'on ne cessoit, en Zélande, de V ral n'eft plus en fon entier. Comme vous pour„ riez croire, qu1 ayant recu le Livre des Signaux, „ vous êtes tenus de partir avec ce Convoi-ci „ ( celui du Cap. de Bruyn), je vous avertis „ que non. Vous êtes tous libres, &pouvez faire 91 cornme il vous plaira: Ceux qui voudront me „ fuivre , peuvent le faire j ci? ceux qui ne le Q 3 ?, votti  214 L' K S Q. ü I S 8 E D? U N 3, voudront pas, pcwoent demeurir, en remettant ,, tOMUfuis leur Livre des Signaux au Vaiffeau de, ,, gat de. Je mets a la voile a la première occa* fiou j & peur r Information d'un ckacun, je fe„ rui alors le Signal accoutumé. — Que fur ce „ propos quelques uns de ces Capitaines direnc ,, qu'ils en écnroient a leurs M'4tres; d'au- tres, quMs refufoient de profiter de ce Con„ voi, attendu qu'il étoit trop tard, qu?jls en,? pourreroient des préjudices, & paree qu'ils étoient en |efte (a) ; d'autres, enfin, dé- clarerent qu'ils étoient aflrétps, & devoient „ vraiment partir j mais que dans cc cas - ci ils „ ne favoient quel parti prendre. " „ De plus, que le Capitaine de Bruyn a dit f, a ces Capitaines, — Vous êtes tous Marins; }J fi (étant en mer) le vent du Nord-Eft vient „ a foujfter, il faudra jetter l'ancre-, c'eji d qno\ 5, je vous prie de vous préparer ,— Et ils „ jugererent tous que cela feroit efFectivement nécefiairej mais un d'emr'eux dit qu'il n'a- „ voit (a) C''étoient fans doute ceux qui devoient aller charger dans les Ports de la Baltique, &? qui devoient tetoumer avvit l'Hiver. (&) Sans doute, que cette nèceffitc de jetter 1'ancre, vsmit de ce que par le vent du Nord - EU, il auroit faliu lou'joyer fort au large, peur avancer; £p que par-la, on au. roit couru risque d'(tre attaqué par les Jnglois: Ce dont notts Capitaine avoit une peur tcrribls>  I Grand Tableau. 215 „ voit qu'un Cable fur fon vaiffeau , 8c fit ,, quelques difficultésj reconnoilfant d'ailleurs la nécefllté d'avanqer plutöt que dc retour„ ner avec la marée, lorsqu'on feroit hors des „ Pertuis. Sur quoi le Capitaine répondit, }ï qu'il n'y [auroit qne faire, £i? qu'on eüt du fe mettre en meilleur état. " „ Enfin les Sousfignés déclarent que ledit Ca- pitaine n'a rien avancé qui put faire crain„ dre a ces gens • la de fe ranger fous le Con,, voij qu'au contraire, il les a encouragés, „ 8c leur a dit, — que s'ils avoient befoin de „ monde pour lever l'ancre , // les aideroit. —. „ Qu'alors ces Capitaines quitterent le Bord ; ,, 8c par tout ce que nous avons pu reoiarquer, ,, ils parurent trés • fatisfaits. " ,, Donnant pour raifon , que la chofe s'efl ,, ainfi pafféc en notre préfence: Etant prêts „ de le vérifier au befoin, 8c lorsque nous cn ,, ferons requis. " Fait a bord du Vaiffeau de guerre (le Prini ce fVillem) ce (Etoit figné) J. W. van Oldenbarneveld, furttommt T ullin g, Capitaine. J.j C. van Overvelt, Luitenant. P. P. Frydland, Lieutenant. Je au Wetman s, premier Ecrivain. O 4 Si  J2l6 L' E S QÜISSE D- U N Si l'on compare ce Certificat avec 1'Article 10. de la Requête des Négociants de Rotter* dam, l'on trouveraque ce qui eft rapporté dans Pun, différe, en bien des cholès, de ce qui eft expbfé dans 1'autre, furtout, a 1'égard de la fatisfaction, que ces Capitaines auroient tcmoignéea leurdépart du VaifTeau de Mr. Dc Bruyn; laquelle fatisfaction ne fut certainement pas fi grande, ou du moins, fi univerfelle, qu'il le parut aux Auteurs du Certificat. Cependant je crois fort que ces Meflieurs ont cru bien voir & bien eritendre cn ce cas} mais ce que ces honnêtes & malhcureux Négociants ont avancé la-deffus dans leur Requête, eft auffi croyable que ce qui eft alléguc dans le Certificat : _ Quoiqu'il en foit, le Cap. De Bruyn • ne fe contenta point d'avoir envoyé au College dc PAmirauté de la Meufe, & fa Lettre fusdite, & ce Certificat. L rité du bruit qui couroit toujours, que les ordres qu'il avoit recus dc mettre en mer avoient été contremandés , & que fi cela, n'étoit pas , il avoit du moins négligé diverfes occafions de partir, il dreffa le 2i. uneJuftification fignée de fa main, & la Êt inferer dans divers Papiers publics. Pour donner plus de poids a. cette piece, il y joignit un Témoignage de fon digne Pilote, Jean Ctcki par leqnel ce dernier confirmoit tout ce que le Capitaine ayancoir. ici; enfuite il fit confj-mer ce Témoignage par les Signants du Certificat  Grand Tableau. 117 tificat fusdit; & pour 'couronner 1'ceuvre, il ipignic a ces trois Pieces un nouveau Certificat, figné du Z4, &" qu'il avoit rnendié de quelques uns des Capitaines fusmentionnés, lesquels, fans doute, ne fe reffouvenoient plus de la peur, qu'ils pouvoient avoir eue le 7. de jetter l'ancre après la fortie des Pertuis d'Helvoet (a). En un mot, le Capitaine de Bruyn fit alors fon poffible, pour fe juftifier des inculpations perfoqnelles, qui lui étoient faites parmi (a) Ces 4. Pieces fe trouvent dans plufieurs Gizettes ds te temps- la , &? noiamment. dans celle de la Haye du %.[ep- teml!re, Mais la demiere de ces Pieces efi la feule que le Cap. De Bruyn ait jwèe digne de placer dans fa Dóf ensi; y ü eft étonnant qu'il n'ait point fait dreffer cette Piece dhs le 19 , pour la joindre au Certificat, qu'il envoya cejour. li a l'Amirauté de la Meufe, ainfi qu'il efi dit ei-deffus: Cela ne pouvoit que doubler l'efet qu'il attendoit de ce der. nier. i Q-iant a fa Juflification du 21 , fcf au Tómoi. gn'age que le Pilote Cock a donné pour la confirmer , il efi apparent que notre aüif rjf vaillant Capitaine en a trop fenü l'incompétence , pour les inferer dans cette Oef en se. - • Cependant, elles n'y auroient pa! plus mal figuré que les Témoignages de toute espece, qu'il y a placés, fcf gu'il avoit ramaffés dans les trois mois, qui fuivirent le t. novembre, afin de diérèakst la juftice de la Sentence qu'un Confeil de gnerre avoit prononcée ce jour - la contre lui fjf fon coquin de Pilote, pour lts riifons que je rapporterai ci - après; Senten' ce, oü la vigilance, les talents, l'aiïivité fc? le' intentions de ces deux Mejfieurs, furent appréciés d'une maniere alesdésfyonorer a jamais Q f  220 L' ESQ.UISSE D'UN ètre prêts, pour convoyer lesdits navires, il avoit aufïitöt pris tous les foinsnéccffaires, pour que le vaiffeau du Cap. de Bruyn, la Bek lom, le Brak, Sc le Kemphaan, tuffent duns peu de jours en état d'être employés. " 40. „ Qu'au commencement de juillet, le Secrétaire du College avoit communiqué a 1'Asfemblée une Lettre, par laquelle le Vice- Amiral Hartfinck annoncoit a ce Secrétaire, ,, qu'il „ jugeoit néceffiire que le Cap. de Bruyn par„ tit le plutöt poffible avec les navires, qu'il „ auroit fous fon convoi; avec priere de com„ muniquer cela a ce Capitaine, 6c aux Nér „ gociants intéreffés: Mais que fi, contre tou„ te attente, ce Capitaine ne pouvoit pas „ mettre cn mer avec fon vaiffeau , lui, Vi„ ce-Amiral , ordonneroit aux vaiffeaux de „ guerre du Texel, de paroitre, a leur re„ tour de Zélande, devant Goerée, afin que „ tous les navires qui fe trouveroient- la, pus„ ient profiter de 1'occafion, pour fe rendre „ au Vlie ou au Texel (a). " Qu'enfin ledit Secrétaire avoit communiqué cela, en obfervant toutefois tout le ménagement nécejjaire , a quelques' uns (a) Ceci a rapport a l'Expédition de Mr. van Kinsbergen, de laquelle il efi parié, page 164. ci-dejhts, & a la Lettre] dont il efi fait mention d la page 194, £? que le Fice-Jniral Hartfinck ierivit le t'. juillet au Cap. de JJruyn,  Grand Tableau, 221: uns des Négociants, afin que les autres Intéreffés en fuflent informés ; & que c'étoit,; fans doute, de cette communication, dont il étoit parlé dans la Requête de ces Négociants (a). " f°. Que 1'Avocat Fifcal du College avoit exhibé a 1'Affemblée diverfes Lettres écrites au Capitaine de Bruyn, ou écrites par eet Officier; & que par ces Lettres il conlloit, que le 4. juillet S. A. lui avoit non feulement ordonné de mettre a la voile a la première oc-i cafion, pour convoyer au Tiïxel les navires marchands fufmentionnés, mais que, bien loin que eet ordre eüt été révoqué, il lui avoit enfuite été plufieurs fois recommandé de s'y conformer j & que depuis la mi juillet il avoit Biême fait diverfes tentatives a eet effet; Qae toutefois, ft, malgré eet ordre, ledit Capitaine avoit (a) C'eft ainfi que, par de; ménagements au£] affiSét que mal phcés, l'on avoit retenu dés le commencement, &f que l'on retenoit encore alors les Négociants de Rotterdam dans le doute, la Crainte & la perpisxhé; &? que par la, on Uur avoit Occafiionné des frais' conjïdérables & fupcflus; tandis que dés le mois de juin, les Négociants d'Amjlerdam, envers qui l'on n'avoit point ujé de ces ïnénagements 'ou réticences, avoient été fotmellement £? clairen.er.t avertis du temps, ou ci peu prés, auquel le Convoi partirott du ITxt. Que le Lecleur revoye les Articles 2. 3'; & 4. de hdite Requête, qu'il ks pefe, & qu'il en Jttgtf  222 L' ES QUISSE U N avoit rêellemtnt négligé quelque occafion favorable de mettre en mer, /'/ fe feroit rendu Coupablc d'une faute, qui, étant prouvée, ne lui feroit pas faci~ lement par donné e, Sec. " 6o. „ Qu'enfin, immédiatement après la reception de la Lcrtre de L. N. & Gr. P., cn date du 17. du courant, touchant le Discours que ee Capitaine avoit tenu (le7.) aux Capitaines des navires marchands, eet Officier avoit été requis de faire au College le rapport de cc Discours ; & que s'il avoit alors fait ou dit quelque chofe de plus, que ce qui lui étoit present par les ordres qu'il avoit regus, il en feroit également refponfable, Sec. Sec. " Lemême jour (iï.), Mr. Ie Grand Pcnfionnaire fit aux Etats de Hollande le Rapport de h Commiffion, dont L. N. & Gr. P. Favoient chargé lc 17. envers Vous, Monféigneur; Sc il rapporta, que V. A. lui avoit répondu, qu'è la première nouvelle du retour de la Flotte aü Texel, Elle avoit envoyé les ordres néceffaires, pour réparer fans aucun délai les vaiffeaux de guerre, qui avoient confidérablement fouffert au fameuss Combat du f, & pour les rendre Ie plutót poffible en état de remettre en mer, tant pour protéger généralement le Commerce de tous les Négociants du Pays, que pour porter dommage h l'Ennemi'. Que d'ailleurs, V. A. étoit aéluellement occupée h raffembler une Efcadre fujpffante, &? qui feroit prète  Grand Tableau, 223 firêtê au plutót, pour convcysr a leur deftination les navires marchands du rcjjbrt de la Meufe &? ^'Amfterdam , qui devoient fe rendre dans la Baltique. Meffieurs les Etats, ayant délibéré fur cc Rapport, lc tintent pour notifié. Mais les Députés de Dort & A'AmJlerdam 'déclarerent fe réferver, a eet égard, telle Obfervation qu'ils jugeroient convenir. Quant aux ordres que V. A. dit ici avoir donnés de.réparer au plutót poffible les vailfeaux endommagés, l'Amirauté d''Amflerdarn, ayant recu ces ordres,' envoya a eet effet au Texel, un I~Ieu9 ti? cinquaHe Cbzrpentiers, accompagnés d'un habile Maitre • Gargon Ce qui, en répartisfant ces hommes entre les 7 vaiffeaux, qui avoient le plus foufïert, auroit fait 7 ouvriers par vaiffeauj ou bien, en les employarft aiternativement tous a la fois h chaque vaiffeau, la réparation générale n'en devenoit pas moins longue j & dans 1'un ou 1'autre cas, l'on pouvoit s'attendre que la prompte protection pour le Commerce, & 1'emploi contre 1'Ennemi, que F. A. en avoit promis, feroient remis a une autre année: Et c'eft ce qui eft e&ctivement arrivé. Lc (o) A. p. co. — B. p. »é. rt, & h SS»  jc Discours Preliminaire. & des Ufages particuliers, £c fouvent des Intéréts plus ou moins oppofés a 1'Intérêc général, Sc que dela il peut réfulter dans 1'Etac des discuffions facheufes , des débats, des divifions, des lenteurs, des obftacles, 6c autres inconvénients préjudiciables au bien commun, ïXparok qu'il eit néceflaire qu'elle air non feulcment un Chef du Pouvoir exe'cutif, maïs que ce Chef, ou tout autre Homme conftitué cn Dignicé, ait aficz d'influencc dans 1'adminhèration intérieure de 1'Ecat, pour yrefferrer les noeuds qui uniflent les Membres de la Coi> fédération ; — pour y prévenir les divifions, —• pour accélérer les Délibérations dans les périls prcflants, pour donner de la fermeté aux Réfolutions, de 1'effet aux mefures, de 1'acti- vité dans les opérations, & pour diriger tous les efforts vers Ia défenfe Sc la confcrvation des vrais intéréts, de la gloire & du bonheur de la République en géncral, & de chaque Province en particulier. Comme chacune de nos Provinces forme un Corps fédératif particulier, & que, quoique plus ou moins dépendams, les Membres qui eompofent les Etats refpedtifs de ces Provinces, ont aufii une Conftitution, des Loix 6c des Ufages différents, 6c fouvent des Intéréts oppoies, que d'ailleurs , il eft poffible que / quelqu'un y empiéte fur les droits 6c la liberté des Citoyens, 6c que dela il peut réfulter di-  Discours Preliminaire. xir ter la marchc de notre Machine politique, chaque Ville, chaqueFrovince, fe trouveroic délivrée de la cruelle akernative, de gétnir ,, fous le joug d'une Oligarchie odieufe, ou „ fous le despotisme, non moins funelte, d'un Stsdhouderat abfolu. 1 Mais,com- „ me le maintien de Pordrc, de la difcipline & de 1'émulation, dans nos Armées de terrc „ & de mer, efi: une chofe e'galement néces„ faire , il importeroit encore de rétablir la ,, Charge cc Capitaine & Amiral-général, Sc de définir Sc limirer fon Pouvoir de ma» „ niere, que 1'on ne püc qu'attendre le plus „ grasd bien de 1'exercice de cette Charge, ., Sc aucun des inconvénier.ts, aucun des dan» ,, gers, qui pourroient réfulter de Pabus que ,, ce Chef militaire viendroit a en faire. Quant ,, au rétablifTement du Stadhouderac, c'elt-a,, dire, d'une Dignité , dont 1'exercice con„ fiite a furveiiler a 1'adminifiraticn de la jus- tice Sc de la poüce , amh". qu'a la confer„ vation de 1'ordre Sc de Pharrmonie dans ,, chacune de nos Provinces, Sc qui cociifte en 5, méme temps, dans une certaine influencc „ dans le Gouvernement gcnéral de la Répu„ bhque, il femble, qu'après la Réforme fus„ mentionné, un tel rérabliflement deviendroit ,, inutile. Mais, li apres une experience de ,, quclques anne'es, le rétabiiffernent de cette Uiguitc paroilibit néceifaire, le Pouvoir de • * 4 „ ce-  xx Discours Preliminaire. „ celui qui en feroit revêtu, ne devroit pas „ être moins clairement défini, ni moins fage„ ment limité , que le pouvoir du Capitaine „ & Amiral- général. Enfin, comme un grand „ pouvoir civil, réuni a la force militaire , „ peut devenir un inftrument d'oppreffion , „ la Dignité' 6c la Charge fusdites ne devroient „ jamais être re'unies dans un feul homme, Sc „ encore moins, héréditairement: n'yeut-il, „ en ce dernier cas,que 1'inconvénientdes Mi- „ nori t és Scc.&c." Voila, Monfeigneur, de quelle maniere s'exprimoit un homme, qui connoiffbit notre Conftitution, notre gouvernement civil 6c politique, ainfi que les abus Sc les maux qui s'y étoient gliflesj voila comment penfoient un grand nombre de Régents vraiment patriotes; voila, enfin , ce qu'afpiroient de voir les Citoyens les plus éclairés de la République. Cette Réforme fi néceifaire, au moins dans les points les plus eiTentiels, n'étoit point impofilble par elle même j mais elle n'étoit pas 1'ouvrage d'un moment, ni de quelques Réfolutions précipitées : Elle demandoit de grandes recherches, un examen réfiechi, de fages délibérations, Scfurtout, le facrifice de toute ambition, de tout intérêc perfonnel, Sc un zeIe unanime pour le falut de PEtat. Mais comme Pon ne pouvoit espérer un désintéreflement li généreux, un zele fi noble , de la part de la ma-  Discours Preliminaire. txi majorité des Régents de la plüpart de nos Villes, ni même de la part de la pluralité des Membres des différents Corps des Nobks, Sc que le Peuple , accablé fous le poids de fes chaines, n'auroit alors ofé joindre fa voix a celle des Régents bien intentionnés, la Réforme n'eut pas lieu : le> chcfes continuerent d'aller leur train, c'eft- a- dire, de mal en pis : Sc pendant ce temps-la, le Parti, qui afpiroit de voir rctablir le Stadhouderat dans toute Pétendue de PAutorité . dont les S:adhouders avoient joui ci-devant, ne négligea rien pour obtenir ce rétabliffement a la prémière occaffon, qui s'en préfer.teroit. Cette occailon vint enfin. La part indirecte que nous avions prife a la Guerre de 1741. nous attira d'abord des démêlés facheux avec la France : infenfiblement le feu de cette guerre s'étendit jusqu'a nos frontieres: & en 1746". nous vimes ces frontieres attaquées par les ArHiées de cette Puiffance. Cette Attaque, & Papparence des progrès ukérieurs que ces Armées pourroient faire dans notre Pays la campagne fuivante , répandirent la confternationuans toute la Répubüque. II s'y élevadesmurmures, dcsplaintes, desclameurs, Sc des imprécations de toute efpecc : une multitude de hbelles Sc de prédications féditieufes acheverent d'alarmer Sc d'animer les efprits : les partifans du Stadhouderat, profitant de cette * * j oc-  %yn Discours Preliminaire. occafion, répandirent, que puisque la Re'publique ie retrouvoit dans le même danger, oü elle avoit été en 1671, le feul remede qu'il y avo'c a nos maux étoit de rétablir cette Dignité de la mankre qu'elle avsit exiflê auparavant: beaucoup de gens, & furtout la populace, in.capables de réiléchir que, fi un RétabHjJermnt femblable étoit un remede a bien des maux, il ne pouvoit en être un pour beaucoup d'autres maux ,— qu'il pouvoit même en empirer quelques uos, 8c en caufer de nouveaux, — ces gensla, dis-je, & cette populace, s'imaginerent que ce remede étoit erFectivement miiver/el, 8c ils commencerent il crier hautement, qu'il hous falloit un Stadhouder, 8c que Guillaume IV. 1,'illuftre Pere de V. A. , Monfeigneur, .fut rétabli dans toutes les DignitésSc Charges, "dont les précédents Princes d'Orange avoient été revêtus dans cette Répub'ique. —- Ainfi, comme les Mines, qu'on avoit préparées d'avance dans un grand nombred'endroits de nos Provinces, fe communiquoient par differents rameaux, il ne s'agiffcit plus que de mettre le feu a la meche, pour leur faire faire 1'explofion fubite Sc générale, qu'on en attendoit. Et cela arriva ainfi qu'il avoit été piémédité: c'eft-a-dire, que quelques Bourgeois de TerVeere, lesquels avoient la garde la nuit du 2.4. au Zf. avril 1747-, réfulurent de demander a la Régence de cette villc le rétabliffement du Stad-  xxvi . Discours Préliminaire. Imme'diarement après cette Opération , les Etats Généraux Sc les quatre Provinces fusdi- tes ve'lées en 1766. pour Gmllanme V. actuellement vivant', fuffiront pour domer, a mesLeéteurs, quelqu' idéé de ce., en quoi svoient confifié ci-devant, & confiltent er.cors aujourdhui Ie Pouvoir du Stadhouder, Capitairïè & Amixal- Général de nos Provinces refpeélives , & le Pouvoir de Capitaine & Amiral-Général de 1'Union. Infërer du contenu de ces deux Pieces, que ces Fouvoirs y font fuffïffamment définis & limités, c'efi ne poi.u connoicre les Conftitutions particuliere» de nos Villes & de nos Provinces, ni notre Conftitution générale; c'eflj ne point connoitie les abus & les maux, qui, depuis deux cen-s ans, font réfultés du defaitt d'une telle défïnition & limitation. Les Etiargers ignorent d'ailleurs, qu'indépendamtnent des moyens que ce défaut a Iaiffés auxStadhouders pour accroi:re leur autorité a pluèeurs égards, 1'imprudence, ou la fiatterie, leur a encore concédé, ou laiffé ufurper en différents temps, divers droits & prérogatives, nun fpécifies dans lesdites Commiffions. Ce qui, joint & ririfhence toute - puiff.inte que ces Chefs du Pouvoir exécutif ont trouvé moyen de fe procurer dans toutes les parties de 1'Adminiflration civ;!e & politique de nos Provinces, & de la Rèpublique entiere, les a fouvent reridus lts fouverains arbitres de cette Adminiftration: Et c'eft dela que font réfultés les effets funeftes, dont la Nation fe plaint fi juftement, & dont je parleiai très-amplement dans Ie cours de eet Ouvrage. Les Chiffres que 1'on trouvera dans ces deux Commis. lions, ne font point dans les Originaux. Je ne les y ai placés que pour y diftinguer les Artkles particuliers, fur lesquels j'aurai occafion de revenir par la fuite.  Discours Preliminaire. xxvti tcs cn donnerenr. connoiflance a Giiïihumz IV. qui faifoir. fa réiidence a Lteu-jjirdc; £c S. A. par- ■Commijjicn de Stadhoudert Cap:ji"te 3°. comme auffi pour la confervation de Ia vraie Re„ ligion Rér'ormée, de Ia maniere qu'elle eit a préfent ,, exercée fous 1'Autorité publique dans les Provinces, „ Pays, & Viiies aflbciées, 40. & pour Ie main- „ tien du préfent Gouvernement; le tout avec l'autorité, „ les droits, honneurs & préeminences y ancexèes: — ,. 5). Nous avons en outre couferé au même Prince, „ coir.me nous conférons par les Préfentes, jusqu'a ce „ que nous en dispoCons cotoirement autrement, le „ même plein pouvoir, relativement aux Patentes (*) „ & aux autres chofes qui con:ernent ies Troupcs, que „ celui qu'ont escrcé les Seigneurs Princes d'Orange, „ glorieus Ancètres de 5. ^f. S., comme Stadhouders ,, icCspitaines - Ger.éraux, a 1'égarddeces rnêmes Trou- ,, pes. 6°. C'ef: pourquoi nous ccmciandons &. or- „ donncns bien esprefiément a tous & un chacun, fpé„ cialement aux Officiers militaires, Coloneis, Cap'uat„ nes de Cavalerie cc d'Infanterie, cc autres Gcns de ,, guerre a notre fervice & folde, de reconnoïtre & res„ peéierS. A S. cc de lui obéir en cette qualité, !ui con„ cant tout fecours, faveur & affifïance, dar.s i'exécution„ de fa Charge: — 70. 5. A. lervant 1'Etit comme Ca- pi- Par le mot de Patentes, ron enteni ici les OrJres qui s'envyyent aux Troupes , paar fe mettre en marcbe , ou psur cbanger dt garnifon, SV.  xxxii Discours Preliminaire. dulation & d'aviliiTcment purent fe porter envers un Homme , qui ne devoit être que le Chef du pouvoir exécutif, des esprits aveuglés par de faux préjugés , par la féduction, ou par 1'enthoufiasme du moment} 1'on vit alors a quel exces de cette espece purent fe porter , envers le même Homme, des ames dévorées par la foif de 1'or, par la rage de s'élever, ou de fe maintenir en puiffance 8c en crédit; 1'on y vit ces Régents, ci-devant fi fuperbes 8c fi abfolus, ramper a leur tour aux pieds de eet Homme , afin de conferver les Charges que leur conduite indigne avoit déshonorées} 1'on y vit, enfin, qu'il n'exiftoit plus aucun fentiment d'honneur 8c de patriotisme, dans la majeure partie des Grands 8c des Régents de notie malheureufe Patrie. II n'y eut que quelques Citoyens honnêtes 8c éclairés, il n'y eut que les Régents vraiment patriotes, 8c chez qui la gloire öt le falut de la Patrie 1'emportoient fur tout intérêt perfonnel, qui déplorerent en eux-mêmcs le funefte fort de cette Patrie, en voyant que 1'on s'étoit plutót don- né „ pitaine-Général, en fera le ferment prefcrit entre nos „ mains, ou entre celles de ceux que nous comrnettrons „ a eet eflet, & fur telles Liftructions que nous drefle„ rons 'a eet égard. Fait dans notre AfTemblée a La „ Haye, fous notre grand Sceau, Paraphe & Signaturc m de notre premier Greffier, le 4, mai 1747."  Discours Préliminaire, xxxiii né un Maitre qu'un premier Miniitre de la juftice, 6c qu'un Chef militaire, dont les fervices auroient pu être généralement utiles, il fon autorité eut été renfermée dans des bornes convenables. En un mot, comme j'ai déja dit, qu'aprcs êcre fortis de fous le joug de GuiUaume III., nous étions tombés de L'harybde en Scylla, j'ofe affirmer ici que, par cette nouvelle Révolution, nous retombames de Scylla en Charybde. II n'y avoit point d'autre remede a nos maux, qu'un RétablilTement Conftitutionnel, exécuté de la maniere que je Pai indiqué ci-deflus, 6c cc RétablilTement n'eut point lieu. AulTi, des eet inftant, c'eft - a- dire , par Pinterpofition d'un pouvoir fi indéfini, fi étendu , entre les yeux de la multitude 8c la Puisfance fouveraine , cette PuilTance fe trouva éclipfe'e. GuiUaume IV. commenca biencót a regner de fait, 6c toutes fes créatures regnerent avec lüi, ou par lui. Tous les regards fe fixerent fur fa PuilTance: — Il devint 1'unique objet de la confiance 6c de 1'espoir d'une infinité de gens: — Ce fut a lui que s'adresferent toutes les Plaintes 6c Requêres fondées, ou non fondées : — Ce fut lui, ou ceux qu'il commit a eet erTet, qui fir droit fur ces Plaintes 6c ces Requêtes, ou qui les rejeta: — En venudefes Pojavoirs, ildémit les Régences de la plupart des Villes, 6c les rctablit afongré:— * * * Un  Discours Preliminaire, xxxvu 1'on;uge dela, fi GuiUaume IV. n'a point réuni en la perfonne une autorité prodigisuie, 6c toui les moyens po.Hblcs de fe faire des créacures, & d'acquérir une influence irréiïltibledans tous les Ordres de 1'Etat: que 1'on uge, enfin, s'il n'eft pas a craindre, que qutlqu'un de fes Defcencants n'ufe de cette autorité, de ces moyens 8c de cette influence, héréditaires, pour réduire a jamais, fous4e joug d*une Scuveraineté abfoiue, la Nation, aux dépens de laquelle la lachété êc la démence ont fait de fi grands facrihces. En^n , GuiUaum; mourut en ir ri, fans avoir fait le Bien, ou plut't, les Miracles, que les Artifans de fon élevation avoient promis de fon adminiftration, & que 1'aveugle crédubté en attendoit. D'abord ce Prince, qui, fe- lon ces Artifans-la, alloit devenir la terreur de la France, 8c préferver nos frontieres de toute entreprile ulterieure des Armées de cette PuilTance, fe tint a La Hiye1 tandis que Bergopzcom Sc d'autres Places importantes nous furent enle\ées:— fcn crédit, non plus que fes exploits, n'accéléra point la Paix, qui fe fit en 1-48. — Pendant ie cours de fon Stadhouderat, la plupart des Régents, des Migiltrats, 8c d'autres gens en place, entiéremenc dévoués a fa perfonr.e, 8c par coniéquent, asfure's d'étre maintenus dans leurs poites, ou *** 3 d'cn  xjxvih Discours Preliminaire. d'en acquérir de plus importants, par le moven de fon autorité, ou de fon inrluence, refterent auffi inapliqués, auffi négligents, auffi intérefe*, 8c auffi orgueilleux qu'auparavant: —d'autres, allures de parvenir par le même moyen , fe contenterenc de reiïembler a ces gens-la:— la diminution des Impöts, dont on avoit bercé le Peuple, n'eut point lieu: — les finances de 1'Erat ne furent pas mieux adminiftrées: — la mifere générale continua de regner dans le pays. — notre marine & nos frontieres demeurerent comme elles étoient: —■ de nouveaux abus furent ajoutés a ceux qui exjftoient déja dans la Conftitution générale, 8c dans les Conftitutions particulieres; ■— la même chofe eut lieu dans toutes les parties de 1'Adminiftration civile & politique: — le poids de 1'oppreffion , au lieu de diminuer, fut aggravé partout: — 8c les caufes de tant de maux ayant fubfifté jusqu'a ce jour , il n'eft point étonnant que nous continuions d'en resientir les mêmes effets. Immédiatement après la mort de GuiUaume, la PrincelTe fon Epoufe, Mere de V. A., Monfeigneur, entra, en qualité de Gouvernante, dans 1'exercice de toutes les Charges 8c Dignités, dont fon Epoux avoit été revêtu: & le Duc Louis de Brunswick, Parent de cette PrincelTe , & qui, pour notre malheur,, étoit  Discours Preliminaire, xxxix étoit entré au fervice de la République cn ijfo, eut le commandement général desTroupes, pour le temps qui reftoit a s'écouler jusqu'a Votre Majorké. Ce n'eft point ici le lieu de m'e'tendre fur la maniere dont les chofes allerent fous le gouvernement de cette même PrincelTe : mais je ne puis m'empêcher de dire, qu'elle nous fit fouvent fentir combien elle e'toit entiere dans fes fentiments; a quel point elle vouloit être obéie, & combien fon attachement aux intéréts de fa Nation 1'emportoit fur celui, que fon devcir lui impofoit k 1'égard des inte'rêts Sc du bonheur de !a République. Tout le mende connoit la maniere injufte Sc arbitraire dont elle mena quelques unes de nos Régences, & notamment celle de Harkm, dans les cas, oü elles pre'tendoient maintenir leurs droits légitimes. L'on connoit également les menées , qu'Elle, le Duc, Sc fes autres partifans ont employees au commencement de i'fó, pour porter les Etats Généraux a accorder leSecours de 6oco hommes, que 1'Angleterre nous demandoit alors fans aucun fondement , & dans le feul deffein de nous entrainer fubtilement dans la guerre, qui venoit d'éclater entre cette PuilTance Sc la France. L'on fait encore que les Anglois dcutoient fi peu de 1'efTet favorable , qu'auroit eu, en ce cas, 1'infiuence de notre Cabale Anglomane, que les vaifieaux * * * 4 des»  %u Discours Preliminaire. deftinés a tranfporter le Secours en Angleterre, arriverent a Helvoet auflïót que Mr.Torke eut re^u ordre d'en faire la demandc $ 6c que ce fut en partie aux vigoureufcs Réfolutions, que les Etats de Frife prirent alors fur ce fujet, 6c aux Mémoires que i'AmbaiTadeur de France préfenta en même temps a L. II. P. , que nous du mes le bonheur de n'avoir pas donné dans le piége qui nous étoit tendu. L'on fait encore que les Anglois fe vengerent cruellement du jufte refus de ce Secours, par les dépre'dations inouies , que leurs Pirates flrent dès eet inftant, 6c jusqu'a la mort de la Gouvernante , fur notre Commerce. L'on fait, enfin, que cette Princeflë, malgré toutes fes proteftations du contraire, fe mit peu en peine de procurer les moyens qu'on lui dcmandoit, pour re'primer ces déprédations. En effet, ni la vue de ce commerce de'folé 6c perdu, nilavuedenos fabriques anéanties, ni la confidëration de tant de families ruinées par ces elïets, ni les plaintes, ni les réclamations réuére'es des principaux Intéreffe's, ne purenc la toucher: toute proteótion fut refufe'e de fa part, fous prétexte que notre marine étoit trop foible, & qu'on ne pouvoit la rétablir , fans augmenter en même temps les troupes de terre; attendu que felon elle 6c fes partifans, ie théatre de la guerre s'étendant jusqu'au voifinage de nos frontieres , celles-ci pouvoient être  Discours Preliminaire, xlhj ,j moyens, que l'on peutcroire, avecraifon, „ devoir être de la plus grande utilité, 8c qui „ font, —■ de faire tous les efforts polfibles, ,, pour obtenir de 1'Angleterre la reftitution „ des tréfors 11 importants, qui y font rete„ nus contre tout droit & raifon: —• Er d'ac„ corder une proteftion fuffilfante a la Naviga„ tion, dans toutes les parties du monde. " ,, Les Négociants croyent que ces deux chofes font de la plus grande & de la plus „ prelTante nécefllté , pour récouvrer cette maffe de richefles, qui fe trouve en ce „ Royaume, & qui s'y accroit journelle„ ment, 8c afin , qu'avec 1'aide du Dieu ,, Tout • puiifant, l'on prévienne la ruine de tant de braves gens , qui font 1'appui du commerce, & a qui 1'honneur eft aufii cher „ que la vie. Leur chüte ne peut qu'entraï„ ner la perte de toutes nos fabriques, manu- faftures 6c main-d'ceuvres; 8c 1'hiver, ou nous entrons, réduira les moins moyennes, „ d'entre lesouvriers, a fouffrir la famine & „ la mifere la plus cruelle. ,, Les premiers effets de cette détreffe, „ Madame, ne peuvent fe faire remarquer a „ la Cour de V. A. R.; mais nous autres, nous nous en appercevons déja: 8c jusqu'oü ce„ laira-t-il par la fuite? Croyez-nous Ma- dame , le danger eft extreme j la Vnifere ?, s'accroit chaque jour 3 & dans peude temps , „ quel?  Xliv Discours Preliminaire. „ quelque bonne volonté que l'on ait, il fera „ impoffible de tendre aux malheureux une ,, main fecourable. n Quelque nécefiaire, 6c quelqu'important „ que foit, pour le commerce, le fuccès du „ premier point fusdit, celui du fecond point, c'eft-a-dire , d'accorder aux N.'gociants ,, une protection fuffilfante», dans toutes les par„ ties du monde, ne 1'eft pas moins. „ Ce font des Vailfeaux de guerre, Mada„ me, qu'il faut pour foutenir ces Négociants i „ pour prévenir toute ruïne ultérieure dans le „ pays, 6c afin que, fi les Négociations amia„ bles 8c les belles promefTes ne répondent „ point a 1'attente que l'on en a encore, la „ République foit en état de fe repofer fur fes „ propres forces > & que fi les biens , que „ nous avons en Angleterre, fe trouvent per„ dus pour nous, nous puiinonsnous aider nous„ mêmes, 6c tirer vengeance de 1'injuftice „ que l'on nous aura faite. „ Permettez donc , Madame , que les Né„ gociants requiercnt pour eux, & pour tous „ ceux qui doivent vivre du commerce, cette „ attention de V. A. R. — Metiez - les en état, par un fecours de Vaiffeaux de guerre, d'exer„ eer leurnavigation 6c leur commerce: faites „ en forte qu'ils puiffent fe fier la-deffus: & „ que V. A, R., qui a la principale direftion ,j des mefures que 1'Etat prend, ne les renvoye „ plus  Discours Preliminaire. xlv plus de chez Elle, a d'autres perfonnes. Nous „ fommes certains qu'il ne dépend que d'Elle dt „ les fécourir: un feul mot de fa bouche fuffit, pour faire ordonner l'Armement formidable qui „ eft nêcejfaire. Aucun de ceux qui ont xccroché „ eet Ar mement a l'Augmentation des troupes, ,, ou d autre chofe, ne s'y oppofera plus: Et cela „ d'autant moins, qui l'on peut s'ajjurer qu'au,, cun des Membres du ha ut Gouvernement ne dou- te pas de la nécejfitê de cette Proteclion fur mer „ Les Négociants font bien éloignés de vou„ loir engagcr la République dans une guerre „ avec un puilfant Royaume; au contraire, „ ils ne defirent pas autre chofe, que de jouir „ d'une neutralité affurée, 6c du bonheur de la paix Et pour montrer combien, „ d'un cóté, ils font éloignés de vouloir une „ guerre avec leurs Oppreffeurs , 6c com„ bien d'ailleurs ils fouhaitent que la Répu,, blique , au moyen de fes propres forces 6c par de nouvelles Alliances, le mette en état de prévenir leur ruine entiere , ils pren,, nent la liberté de rappeler derechef ce qu'ils ,, ont déja. avancé tant de fois, c'eft- a- dire, „ qu'il importe de dépêcher, du fein de 1'As,, femblee de L. H. P., une Diputation pour „ folliciter auprès de fa Majelté Bntannique, „ un prompt 6c entier rédreffement de leurs }t griefs, 6c pour y infilter de la maniere la „ plus  xlvui Discours Preliminaire. ment des navires Sc des effets, que les An„ glois leur avoient enleVés, " Je ne m'arréterai poinc ici fur la nouvelle Propofition , que Madame la Gouvernante, toujours appuyée par les quatre Provinces fusdites, alla faire le 11. fuivant aux Etats Généraux, pour obtenir 1'Augmentation des troupes en même temps que 1'Armement par mer, tandis que S. A. R favoit dans le fond de fon ame, que nos trois Provinces maritimes ne confentiroient jamais au premier de ces objets:.—. Je ne m'étendrai pas non plus fur les Requêtes que les Négociants ó."Amflerdam & de Rotterdam , préfenterent immédiatement après a leur Régence relpective, Sc aux Etats de Hollande, a 1'effet d'obtenir au Commerce la Proteétion néceffaire, Sc pour montrer le peu d'efpoir que la Réponfe de la Princeffe leur avoit lailfé d'obtenir cette Proteétion: •—• En un mot, je ne rappelerai point que, felon quelques cxpreffions notées ci-dtiTus, dans le Discours des Députés, S. A. R. pouvoit facilement, par fon influence toute - puiffante dans 1'AiTemblée des Etats-Généraux, fatisfaire a la jufte réquifition de ces De'putésj — Je dirai feulement ici, que la Réponfe faite a ces Mefïïeurs, par le Confeiller de Larrey, indigna toute la Nation. ■— Ce n'étoit donc point alfez de leur avoir fait fentir, d'une maniere vague, qu'ils n'avoient rien a efpérerj Af  Discours Preliminaire.' xlix- il falloit y joindre 1'impudence & 1'infulte, ou plutöt, la cruauté. — Quoi! déclarer nettement, que S. A. R. s'étoit fait un poinc „ d'honneur d-e ne confentir a aucun Armement „ par mer, fans obtenir VAujmentatïon des trou' „ pes! " .... C'étoit-la enfoncer le poig- nard auffi avanr qu'il pouvoit entier Si cela fut ainfi, Monfeignsur , quel trifie point d'honneur , que celui, qui 1'emportoit fur lajuftice, fur les devoirs les plus facré*, 8c fur les ferments folemnels faits a chaque Province en particulier, & aux Etats-Généraux! —■ Je ne puis croire qu'un motif aufli odieux ait guidé la PrinceiTe Votre Mere, dans fon refus d'aecorder la Protection fi insramment demandée pour le Commerce: Je crois plutót que guidée par de faux préjugés, qu'aveugléepar fon attachement pour fa Nation, que trompée par de perfides confeillers, qu'envifageant mal 1'écat des chofes, & qu'enhardie par 1'appui d'une mukitude de Régents dénaturés , qui vouloient lui plaire , Sc qui connoiffoient mieux qu'Elle, ce qu'Elle avoir. a faire dans un pareil cas , S. A. R. s'eft comportée de la maniere qu'Elle 1'a fait dans ces circonftances. Enfin, quoiqu'il en foit, il eft certain que 1'obftination que la PrincefTe Gouvernante eut de-ne pas fe rendre aux juftes inftances des Négociants, & que les fuitesque cette obftin.ation *•* * eus  Discours Preliminaires. lt une autre fcene s'cuvrit aux yeux de la Nation. — Par une dispofition particuliere, S. A. R. avoit chargé le trop fameux Duc de Brunsivick de l'adminiftraUon de la tutelle de V. A., Monfeigncur , Sc par conlequent des foins de votre Education : 6: pour votre malheur, autant que pour celui de la République, cette confiance ne pouvoit éne plus mal placée. Cet homme rule , adroit , dilïlmulé Sc ambitieux a 1'excès, dévoué , d'ailleurs, aux intéréts de 1'Angleterre , & mépnfant la Nation dont il mangeoit le pain, ne né« gligea rien, dans 1'exercice de ce pofte, pour regner Ibverainement fur votre esprit pendant le refte de votre minorité, 6c aprcs votre majorité. Ayant fu captivcr tout votre attachement, toute votre confiance, il lui fut facile de Vous inculquer les préjugés , les principes & les maximes, qu'il jugeoit favorables a fes defieins. II ne Vous cacha que ce qu'il étoit néceflaire que Vous fuffiez, tant pour votre bien, que pour celui de 1'Etat: en un mot, il ne lui manqua que de réuihr a pervertir les excellentes qualités, dont la nature avoit doué votre cceur. Mais que fervent ces qualités, fans les vraies lumieres de 1'esprit! — Lorsqu'un jeune Prince a le malheur d'être élevé dans des principes plus favorables aux vues particulieres de ceux , qui pvéfident a fon éducation , que falutaires pour 1'Etat qu'il doit ***** gou-  lh Discours Preliminaire, gouverner par lui-même, ou dans lequel il ne doic devenir que le Chef du Pouvoir exécutif, lors qu'en même temps la flatterie des Courtifans, & les applaudiffements d'une, multitude aveugle viennent a confirmer ce Prince dans la confiance qu'il a en ceux qui le gouvernent, & dans les fauffes idéés que ceux-ei lui donnent de fes droits, de fon autorité future , & de la faine politique, un tel Prince eft vraiment a plaindre : il n'eft rien par luimême: il n'eft, 8c ne fera jamais, que ce qu'un aura woulu qu'il fut} il n'eft enfin qu'un être faétice. Enveloppé , toute favie dans un nuage de préjugés 8c derreurs, entrainé dans un tourbillon formé par 1'impofture 8c 1'adulation, il ne verra que par les yeux de ceux qui 1'auront formé tel, ou de ceux qui 1'environneront} il n'agira jamais que par Pimpulfion qu'ils fauront lui donner, °: ne foupgonnera pas qu'il n'eft que, le trifte jouet de la volonté ou des caprices d'autrui: Enfin , ee fera unmiracle, fi la vérité parvient un jour jusqu'a lui; 8c fi elle y parvient en effet, ce fera un plus grand miracle encore, s'il la reconnoit. — Telle eft , Monfeigneur , la vraie & trifte idéé qu'on doit fe forraer de 1'Education que Vous avez regue, 8c des efFets que cette Education a produits enfuite , 8c produit encore journellement en Vous. Au  k tvi Discours Preliminaire. Mais, Mmfeigneur, que fit le Duc pour reconnoitre tant de marqués de confidération, & rant de bienfaits de la part de L. H. P., de la part de chaque Province en particulier, ainfi que de celle de F. A.? H fongea a prendre fes mefures pour s'aflurer un empire f ntier 8c durable fur votre Perfonne, 6c pour trahir la gioire & les intéréts de 1'Etat, fans le compromettre. Et a eet efTec, abufant de votre jeunefle, de votre inexpérience, & d* la confiance fans bornes que Vous aviez en lui, il engagea V. A. a former le fameux Acle de Conjultation, qui fut figné entre Elle & lui le 3. mai de ladite année 1766, & qui fut tenu dans les plus grand fecret pendant 18. ans, c'eft-a-dire, jusqu'en 1784, que la Providence permit qu'il fut découvert. — Quoique Pon ait beaucoup parlé de eet Acle, 6c que de£ Copies ert aient été répandues dans toute 1'Europe, je ne puis m'empêcher d'en don- ^ LaFrife, .... . 40000. fi. Overysfet, . ♦ . • 36000. Groeninrrue, 25000. Le Pays de Drenthe, . . • 5000. Total . . . 4110CO Xc Prince Stadhouder, . . gococo. Total . , . 61100&.  Discours Preliminairs. ivij donner encore ici la partie principale, pour fervir a juftifier V. A. de la conduite étrange, qu'Elle a tenue dans Padminiftration de fes Charges 8c Dignités, depuis fa majorité jusqu'au départ du Duc; conduite, qu'Elle tient encore aujourd'hui, foit par les confeils que eet homme dangereux lui fait parvenir, foit en conféquence des principes funeites qu'il a fu lui inculquer. Après un alfez long Préambule, oü font rappélées 1'arrivée du Duc en ce Pays, Peftime 8c la confiance dont il avoit joui auprès des Illuftres Pere 8c Mere de V. A. 8c auprès des Etats Généraux , après 1'expofition des foins qu'il avoit eus de votre Education &c., ledit Atle fait parler V. A. en ces termes: „ A ces caufes , Nous fommes convenus „ réciproquement avec Mr. le Prince de „ Brunswick, 8c nous nous fommes accordés de la maniere que voici, fur les points fui„ vants: " „ I. Mr. le Prince de Brunswick s'engage„ ra & s'obligera envers nous, comme il s'en„ gage & s'oblige par la Préfente, de nous „ affifter de confeil & d'effet dans Ia direclion „ des affaires, qui appartiennent, tant aü Dé„ partement militaire, qu'a tous les autres Dé,, partemens quelconques, qui font du rejfort de „ notre Autorité', & de nous feconder en tou„ tes chofes, dans tous les temps, 6c aufli *»** j» fou-  tvin Discours Preliminaire. „ fouvent que nous Pen requerrons, 8c que nous le jugerons utile & néceifaire pour nous. IL Mr. le Prince fusdit fera tenu de nous „ fervir fidelement, de fon confeil 6c a/is, dans toutes les affaires que nous lui rernet„ trons entre les mains, 6c en avifant 6c agis„ fant ainll qu'en bonne confcience il croira „ convenir pour la confervation de notre Dig„ nité, de nos Prérogatives 8c de nos Droits, „ ainfi qu'au plus grand fervice 8c bien - être ,, de PEtat des Provinces - Unies des Pays„ Bas, fans s'en écarter par faveur ni parin„ clination contraire a 1'égard de quelques „ Provinces particulieres, Villes, Colleges, „ ou Membres d'iceux , ou envers quelques Perfonnes particulieres, qui foient, ou non, „ Membres du Gouvernement, ou par quel„ ques autres raifons quelconques; n'ayant en „ tout, devant les yeux, d'autre but que ce qui pourra fervir au bien-être commun, 8c „ a Pavancement du plus grand avantage de „ ces Pays. ,, III. A cette fin Mr. le Prince de Brunswick fe tiendra affidument auprès de notre Per„ fonnej 8c fera particuliércment obligé de „ nous accompagner dans le Voyage que nous „ nous propofons de faire bientöt par les Pro- vinces, Villes, 6c Places du relfort de no„ tre Stadhouderat-Héréditaire. „ IV. En retour de quoi nous nous cnga- „ geons  Discours Preliminaire. iix „ geons 8c nous obligeons, de la maniere „ la plus efficace, envers ce Prince, de Pin-, 5, demnifer a 1'égard de tout ce qu'il pour,, ra faire 8c exécuter pour remplir le pré,, fent Engagement, & pour nous donner „ les confeils 8c PaiTiftance requife j ainll ,, que de le garantir pleinement 8c parfaite- ment de tout reproche, recherche, 8c res,, ponfabilité quelconque, comme nous Pin„ demnifons 8c le garantiffons par la Préfente } „ ne voulant pas qu'a ce fujet, ledit Prince „ rende aucun compte ni réponde a qui que ,, ce foit, autre qu'a. nous même. Et au ,, cas qu'il nous arrivat, pendant la durée de „ eet Engagement, de fubir le fort de la mor,, talité, nous voulons 8c defirons, qu'il puis- fe s'acquitter, en remettant 8c en faifant ,, dépofer a notre Secrétairerie privée les Pieces 8c Papiers relatifs a notre Adminis„ tration, 8c qui pourroient alors fe trouver ,, entre fes mainsj fans qu'il foit tenu de don„ ner aucune ouverture a qui que ce foit de „ nos Héritiers , Succeffeurs , ou Ayants„ caufe i beaucoup moins de leur rendre auj, cun compte} 8c fans qu'il y puifTe être ,, contraint en aucune maniere: Et cela, pro,, vifoirement, ckjusqu'ace quel'un ou 1'autre „ de nous »faffe connoitre fa volonté conss traire. " Ainfi  Xrx Discours Preliminaire. ,, Ainfi convenu & arrêté mutuellement entre Nous fouffignés, 6c confirmé de notre Signa„ ture réciproque, & du Sceau de nos Armes. Fait a la Haye le 3. mai 1766." ifignê) G. P. d'Orange (L. S.) L. Duc de Brunswick (L.S.) Voila, Monfeigneur , de quelle maniere un homme faux, rufé, 6c avide de dominer en ce Pays, parvint a abufer de votre facilité, 6c de votre attachement pour lui, au moment que vous fortiez de votre minorité. Voila comment il parvint a s'immifcer plus qu'il n'avoit jamais fait, dans les affaires de tous les Départementsdépendants de votre Adminiftration, & même dans les affaires les plus fecrete3 de 1'Etat, puisqu'elles ne vous font point cachées. Et cela, malgré le ferment folemnel, qu'il avoit fait aux Etats -Généraux, de fe conformer aux défenfes de 1'Article VII. de fes lnftrublions, lequel j'ai rapporté ci-delTus; 6c cela, malgré tout fentiment d'honneur 6c d'équité; 6c malgré la pitié , que devoit lui infpirer la feule idéé de féduire, de la forte, un jeune Prince plein de candeur 6c fans expérience. En un mot, fi l'on compare le premier Article de eet ASte funefte, avec votre Commiffion de Capi- tai-  Discours Preliminaire^ vet taine & Amiral - général, avec les Commisiions que Vous tenez de chaque Province, en qualité de leur Stadhouder , Capitaine 8c Amiral-général particulier, Sc fi l'on confidére en même temps 1'afcendant invincible que le Duc avoit fur votre esprit, l'on peut dire avec fondement que , par eet Aele , il devint ici 1'unique Chef du Pouvoir exécutif, Sc que dés cetinftant, V. A. ne fut réellemant que fon Repréfentant, 8c 1'aveugle inftrument de tous les maux qu'il nous a caufés jusqu'a ce jour.— En iïn, en confidérant eet événement, il n'eft plus étonnant que V. A. ait reeu fi mal la - Propofition que les Députés ü Amfterdam lui firent, au mois de mai 1781, de lui adjoindre un Comit'3, compofé des Régents des Provinces refpeétives, pour 1'aflifter de confeil Sc d'effet, & coopérer avec Elle au falut de la Patrie. V. A. avoit auprès d'Elle un homme, qui n'avoit point envie de fe voir ainfi débusquéj & qui, pour cette raifon, favoit Vous infpirer de quoi répondre a de telles Propofitions. Comme la méchanceté n'exclut pas une certaine prudence, le Duc prévit a quels désagréments, a quelles pourfuites .même, il fe trouveroit expofé , fi un jour eet Atle venoit a. être découvert. C'eft pourquoi, 8c ainfi qu'il eft rapporté ci-defius, il eut foin d'y faire ftipuler dans le quatrieme Article, que V. A. U  ixnr Discours Preliminaire^ exiftera, dans ce monde, des ames honnétes & fenfibles. Et fon vieil Oncle, réunilfant cn lui tous les viccs d'un efprit pervers & d'un cceur corrompu, fit pendant 34 ans le malheur d'une Nation libre, a laquelle il devint un objet d'exécration!..... La Providencc rétira de ce monde un jeune Prince, dont les vertus honoroient Phumanité, tandis qu'Elle prolonge les jours d'un Vieillard indigne d'avoir exifté!. . . . Peut-être veut-Elle nous confoler par le fpeótacle qu'il donne, en trainant fon ignominie de retraite en retraite. Je ne rappelerai point ici, Monfeigneur, les honneurs inouis que V. Ith recut, a 1'oecafion de fon avénement a 1'age de majorité, foit de la part de L. H. , foit de la part des Etats de chaque Province, foit, enfin, de celle des différents Colleges de pouvoir exécutif, tant dans le cérémonial des compliments, que dans votre introduétion dans les AlTemblées particulieres de ces Corps; je ne rappelerai point non plus avec quel pompe, avec quel éclat, eet evenement futcélébré, ni a quels exces d'allegresfe Sc d'adulation une partie de la nation fe livra derechef en cette occafion. LcsHiftoires de ce temps-la prouvent affez quel Parti y regnoit encore, & que le délire Sc 1'illufion de 1747. n'étoient point encore diffipés de Pesprit de la populace, non plus que de celui de ces ci- toyens  Discours Preliminaire. lx? toyens, que la fortune, ou un rang plusou moins diftingué, n'exempte pas d'avoir tous les préjugés, toute 1'ignorance, ou toute la baffefie de fentiments de la lie du Peuple: C'efl: pourquoi, je me contcnterai, ici, d'expofer en peu de mots, commcnt dès-lors les chofes allerent de mal en pis dans la République, & de quelle maniere elles font parvenues a la crife efFrayante, oü nous les voycns aujourd'hui. Et a eet efFct, ce qui fuit mérite attention. Comme fi le Pouvoir, dont V. A. fe trouva revétue a votre M.ijorité, n'avoit poinc été affez grand, Pon faifit 1'occafion de eet événement pour 1'augmenter encore 3 c'eft - a-' dire, que Padulation, ou la folie, Vous y fit de nouveaux facrifices, & que même des hommes, indignes de porter le nom de citoyens, Vous y déférerent une partie de ce qu'ils ne tenoient du Souverain, que comme un dépot facré, dont ils ne pouvoient dispofer: témoins les Membres qui compofoient alors le College des Coafeillers-Députés des Etats de Hollande , & qui, fur la propofition du Comte de Bentinck, Seigneur de Rhuon, & fans y être aucunement autorifés par ces Etats , Vous abandonnerent alors la dispofilion des Emplois civils & militaires, dont la collation étoit confiée a ce College. — Voila comment après avoir facrifié tout fentiment d'honneur, on fa***** cri-  ixvi Discours Preliminairs. crifioit encore ce qu'on ne pofledoit pas! —-i Voila comment dans 1'Affemblée de ces mêmes Etats, une Majoriié dévouée a 1'Idole du jour fouffroit qu'un College, qui lui étoit fubordonné, fit fous les yeux de cette AiTerablée un pareil facrifice! — Tout Stadhouder mieux confeillé, que V. A ne 1'étoit, auroit dit a ces Laches5 je fuis êtabli pour maintenir &? déhndre les droits, privileges & libertés de ce Pas, de fes membres, colleges, villes & habitants; par eonféquent, je regarde comme un crime onvers 1'Etat la Nation, je regarde comme une injure faite a ma Perfonne, non feulement tout facrifice injufte, mats encore toute offre préjudiciable a ces droits, d ces privileges, a ces libertés, & partieuliérement toute offre quelconque faite par des gens, qui n'ont pas le droit d'en faire aucune. — Mais, bien loin de tcnir un langage fi généreux , V. A., lemblablc a fon Pere, acceptoit tout, foit qu'on le lui offrit légitimement , ou non. Confeillée Sc aveuglée, comme Elle 1'étoit, Elle auroit, je crois, acccpié le fceptre de la Souveraineté, fi fes flateurs euffent ofé le lui offrir: Et en ce cas, l'on feroii parvenu d'un plein faut au but, oü votie Mentor étoit cenfé viferj car fi l'on réfléchit fur tout ce qu'il a fait & fait faire jusqu'a fa disparition d'entre nous, il y a lieu d'en conclure que fon Plan a été de transférer infenfiblement, a Votre Maifon, la Souveraineté réelle de ce Pays. M«?  Discours Preliminaire, lxix les Colleges de jufticc, de police, & autres Départements civils ou militaires, oü une telle Inftitution n'exiftoit pas, provinrent les Recommandations qui Vous étoient faites, ou que F. A. taifoit Elle-même a qui Elle trouvoit bon d'en faire, pour placer ou favorifcr ceux que l'on croyoit propres aux vues que l'on avoit:—■ de cette même Inftitution, 8c de Yexiftence de tels Partis, provinrent également les Improbations faites de la même maniere, Sc pour un effet contraire a celui des Rkcommanua iions: — Dela, tant de perfonncs indignes, introduites dans les Régences, dans les différents Colleges des Villes, dans les divers Départements de 1'Etat, ainfi que dans les charges, les emplois & les commifïïons honorables ou lucrativesj — dela, tant d'honnêtcs citoyens exrlus des Régences, des Colleges Sc Dipartements fusdits, ainfi que de toute charges & emplois quelconques&c — dela, le moyen d'étoufTer, en tout lieu, la voix de quicorvque eut ofé s'élever contre les abus qu'il voyoit, ou c@ntre les Réfojutions Sc les Entreprifes que Ton formoit au prejudice des intéréts de TEtat, & de la liberté nationale j — dela, enfin, ce furcroit de moyens Sc de pouvoir, que V. A. acquit pour regmr fouverainement par Elle même, ou par d'autres, dans la plupart des Régences, dans la plupart des Colleges de juftice, Sc des autres % % ifc & ♦ » Dc**  lxx Discours Preliminaire. Départements civils ou müitaires de 1'Etat, & par eonféquent, fur la République entiere. — Oui, Monfeigneur, j'ofe dire, fur la République entiere: J'en appelle a ce qui s'eft pafte, depuis votre Majoriié, dans les Départements des Forêts &de la Chaffe,— dans celui des Postes, — dans plufieurs Affaires eccléfiaftiques ,— dans nos Univcrfités, — dans les Affemblées de nos deux Compagnies des Indes, — dans les Régences denos Villes, — dans les Colleges d'Echevins — dans les Chambres des Comptes,— dans les Cours Provinciales, — dans votre Adminiftration militaire , — dans le haut Confeil de guerre, — dans les Colleges de PAmirauté, — dans les Affemblées Provinciales, — dans les Commiffions particulieres , — dans les Befognes fecretes, _ dans le Confeil d'Etat, — & dans PAflemtdée des Etats Généraux, — j'en appelle, dis - je, a tout ce qui s'eft pafte depuis votre Majorité dans ces parties- 'la, ainfi que dans bien d'autres que je ne cite poinr ici; & j'en conclus hardiment, que V. A. y a le plus fouvent regné fouverainement, foit par fes créatures, foit par 1'Autorité directe & toute puisfante qu'Elle y avoit acquife. Autorité, qui ne pouvoit être mo'mdre ; puisque (comme je 1'ai dit) après avoir d'abord êté trop étendue, ou trop vaguement dëfinie par fon Inftitution , après avoir enfuite été accrue a un de-  Discours Preliminaire. lxxi dcgrc inoui, par cent conccffions fuccefflvcs & injultes, par des ufurpations de toute efpece, elle fe trouva pariout appuyée 6c maintenue par les mêmes moyens, qui avoient fervi a 1'établir 6c a Taccroitre, c'cit a- dire, par Pintrigue, par la fédudtion, 6c par la prépondérance d'un Parti compofé d'adulateurs, de laches, 6c d'autres mauvais citoytns, plus attachés a votre élevation, Monjeigneur, qu'aux intéréts & a la gloire de leur Patrie. Dans les quatre Volumes, qui luivront les deux que je publie aujourd'hui, j'aurai occafion de prouver en détail ce que je ne fais qu'indiquer ici} 6c, a eet égard, j'y rapporterai des faits, qui pétrifieront d'étonnement ceux qui les liront. La guerre , qui furvint entre les Anglois Sc une partie de leurs Colonies d'Amérique, occafionna dans notre malheureux pays un accroiflement affreux d'humiliations 6c de maux. Ces infulaires infidieux, fe confiant dans le Parti qui dominoit parmi nous , 8c qui leur étoit entiérement dévoué, tenterent d'abord de nous entrainer dans leur querelle, en nous demandant les Régiments Ecoffois, que la République avoit dans fon fervice} 6c toutes les Provinces confentirent aveuglement a cette demande. Un feul homme, le brave Baron de Capellen de Poll, membre du Corps des Nobles d'Overyflèl, eut le courage de s'y oppo***** 4 fer:  txxiv Discours Preliminaire. une partie de la Nation de la létargie, oü rhabkude de vivre fous un joug odieux Tavoit plongée } des Régents ci-devant aveugles, ou timides, fejoignirent a ceux de leurs Collegues qui n'attendoient que d'être fecondés, pour oier parler; des Provinces mêmes éleverent leur voix contre tout ce qui le pasfoit, & demanderent que l'on employat enfin tous les moyens que Dieu 8c la nature nous avoient donnés , pour défendre nos biens 8c 'conferver notre honneur; Ton fit même femfclant d'écouter cette voix : mais en même temps Ton employa tous les moyens poffibles pour en empêcher les efiets, 8c les choles res■terent dans Te'tat oü elles fe trouvoient. A la fin, les Anglois, toujours alTurés d'être fervis parmi nous, de la maniere qu'ils le de■firoient, rompirent ouveitement avec la République ; 8c le fruit, qu'ils rei irerent de cette rupture , fut d'abord lVnlcvement labit d'un nombre prodigieux de nos navires de commerce, de quelques uns de rsos vaiffeaux de guerre , 8c- enfuire Tenvahifïiment d'une partie de nos Poflefïions d'Amérique 8c d'A- lie. Etp.ur comble d'inf munes, nous eu- mes la douleur de voir , dans notre marine, ia-direccion la plus repréhentible, 8c nos vaisfeaux pourrir dans une inactivité honteufe; & toute cela en dépit des piaintes touchantes j£c fuccefüves de nos Négociants i en dépit des  Discours Preliminaire, lxxv des fréquentes repréfentations de nos principales villes, & de la plupart de nos Provinces; Sc malgré les cris de la plus faine partie de la Nation. Les deux Volumes que je puSlie aujourd'hui, Sc celui qui les fuivra inceflarnment, offrent, de toures ces cfiofês, un tableau affreus , Sc qui n'eft malheureufement que trop vrai. Pour pouvoir favorifer auffi impunément les intéréts de PAngleterre en trahiffant les nötres, pour pouvoir méprifer auffi impunément les piaintes d'une partie de nos villes Sc de nos Provinces , Sc pour pouvoir méprifer dc même les cris de douleur Sc dc défefpoir, qu'une détreffe extréme faifoit pouffer a la partie la plus refpectable de nos Concitoyens, il ne fuffifoit pas a notre Cabale Anglomane que F~. A. jouit généraiement de Tautorité Sc de 1'influence exorbitante , dont j'ai tant parlé , mais il étoit encore néceffaire, a cette Cabale, d'avoir a fa dispofition des Prédicants indignes d'exercer le Saint Miniftere, Sc des Scribes dénués de tous fentiments de probité Sc de pudeur, qui en impofaffent aux efprits foibles, Sc lui formaffënt, furtout parmi le commun peuple, un Parti puiffant, Sc capable de la défendre enters tout Sc contre tout, füt - ce même contre le Souverain, fi 1'occaGon s'en préfentoit. Lorsque , dans un Etat, l'on a de fon cöté l'autorité Sc la for-  ï.xxvr Discours Preliminaire. force, on peut commettre le mal avec plus d'audace 8c de fécurité. Auffi n'eft-il point étonnant-, Monfeigneur , que durant cette guerre malheureulc , il ie foit trouvé parmi nous des gens, qui fe livraiTent par goüt ou par intérêt, a 1'indigne métier d'impolleurs 8c de détracteurs, & qui s'empreiTaffent a fervir la Cabale ainfi qu'elle le defiroit} mais ce qui furprend , & furprcndra toujours, eft que les plus coupables de ces gens - la étoient univeriellement connus pour travailler fous les aufpices immédiats , finon de V, A., du moins, fous ceux du Duc de Brunswick. Les Auteurs du Tableau Politique (a), des Sept Villages en feu (Jj) , des Letiyes de Reynier Vryaart (<:) , 8c d^ tant d'autres Ecrits femblables, parmi lesquels on distinguoit particuliérement le fameux Patriote de la vielle Roche (d), dont j'ai très-amplement parlé, page 311. 6c fuiv. de mon fecöüd Volume; ces Auteurs, dis-je, fe fentant fi fortement protégés, tintent audacieufement le masqué levé, & répandirent. impu- né- f '(O Het Politiek Vertoog. (b) De zeven Dorpen in brand. (c) Reinier Fryaarts Brieven. (d) De Ouderwetfe Nederlandfcbe Patriot tous Ecritï publiés en langue Hollandoife.  Discours Preliminaire, lxxviï nément, dans toute la République, tout ce que 1'adulation la plus impudente, tóut ;ce que ia. rage de mentir, de calomnier & de détraéter, pouvoient leur infpirer j c'eft - a - dire , que dans leurs Produótions infames, l'on voyoit tantck les éloges de votre Perfonne, Monseigneur , ou les éloges de votre adminiftration , joints aux louanges de 1'ennemi qui avoit juré notre perte; öc que tantöt, on y voyoit ces éloges confondus parmi les criminelles Sc fréquentes apologies des injuftices , des violences , & des atrocités que eet ennemi avoit commifes, ou commettoit encore envers nous: Et cela, comme fi V. A. eut fait caufe commune avec lui; — Sc cela , tandis que dans ces mêmes Ecrits , l'on peignoit des traits les plus noirs, la conduite irréprochable de la Nation, Sc celie du Souverain même, envers eet Ennemi; — tandis que l'on y accabloit d'inveétives Sc de farcasmes, des Régens refpeétables, les modeles du vrai Patriotisme, les défenfeurs de nos Droits, 5c les colonnes de notre Conftitution — tandis qu'on y dcclamoit avec fureur contre la France , qui faifoit caufe commune avec nous; — tandis, enfin, qu'on ofoit y manquer infolcmment a. la Majefté de Louis XVI., y lancer des fatyres atroces contre les Miniftres de ce Prince, y de'primer les fervices qu'il nous rendoit, y faire föupgonner fa bonne foi envers nous, y ca-  txxviii Discours Preliminaire. calomnier fes vues, s'affliger du fuccès de fes armes, 8c fe réjouir de leurs revers! Comme fi, pour attirer a la Cabale un Parti putjfant parmi les ignorants Sc la populace, ce n'eüt point été aiTez de leur infpirer ainfi un mépris criminel pour le Souverain , une dérlance infenfée, une haine implacable contre la France, contre nos 'plus dignes Régents, & contre les honnêtes Citoyens de ce Pais-ci,— comme fi, pour parveniraee but, ce n'eüt pas été aflez de juftificr les cruels procédés de 1'Angleterre envers nous , de faire Papoiogie de la mauvaife direélion Sc du mauvais emploi de notre marine, plufieurs de ces Ecrivains , des Prédicateurs fanatiques , ou foldés par le Parti, alarmerent 6c irriterent encore cette populace, ces ignorants, 6c même des perfonnes honnêtes, mais fimples, en publiant que la Religion de TEtat étoit en danger; — qu'une Faélion exiftante parmi nous, & dévouée a la France, avoit deifein d'abolir cette Religion, 6c de lui fubftituer le Rémonftrantisme} — que les Catholiques 6c les Mcnnonites de cc Pais devoient appuyer cette entreprife, fous condition d'avoir dorénavant part aux Charges 6c Emplois des Villes & des Provinces; — en un mot, ils publiercnt qu'on cherchoit a abolir le Stadhoudérat, paree que le Stadhouder étoit le principal foutien & le défenfeur de la Religion Réformée, Mais,  Discours Preliminaire, lxxix Mais. Monfeigneur, cette horrible Conjuration exiftoit, ou n'exiftoit pas. Si elle existoit, ainfi. que ces Prédicateurs 6c ces Ecrivains le publioient, F. A. le favoit auffi bien que ces gens-la, 8c en ce cas, en vertu du ferment qu'Elle a fait a chacune de nos Provinces , de défendre, d'avancer & conferver la vraie Religion Chrétienne - Réformée, telle qu?'tilt efi exercèe fout VAutorité publique dans ces Provinces, Elle devoit dénoncer cette Conjuration a L. H. P., Sc faire tous fes efforts pour 1'étouffer: fi au contraire, F. A. favoit qu'une telle Conjuration n'exifloit pas, pourquoi, en fa qualité de premier Magiftrat de chaque Province,fouffroit-Elle , fans diremot ,que Ton débitat publiquement une impofture fi capable d'armer les Citoycns les uns contre les autres? 8c que Ton en fit un des principaux motifs , pour porter le peuple a la défenfe de votre Dignité fuppofée en danger?.... Hélas! le bandeau qu'on vous tenoit fur les yeux, & les chaines oü Vous étiez rétenu vous empêchoient de voir 8c d'agir! Pendant que notre malheureufe Patrie étoit ainfi livrée aux déprédations 8c aux violences de nos ennemis du dchors, — a Tambition, a la tyrannie, Sc a la trahifon de nos ennemis inteftins , — aux divifions 8c aux troubles, qu'excitoienc les Auteurs 6c les Prédicants SaS*  txxx Disours Preliminaire. gagnés , ou foldés par ces differents ennemis , — il nemanquoic plus, ala Cabale, que de trouver quelque Gazettier , qui, écrivant dans une langue univerfellement entendue, en imposat a 1'Europe entiere, ainfi que l'on en impofoit parmi nous j c'eft - a. - dire, un Gazettier, qui démentit , ou juftifiat aux yeux des Etrangers ces horreurs incroyables , & qui calomr.iat Sc déchirat de toute maniere ceux qui s'en plaignoient. Le nommé, Manzon, Rédacteur de la Gazette intitulée, le Courier du Bas-Rhyn, & laquelle s'imprime a Cleves, étoit bien 1'homme qu'il falloit pour cela: car l'on fait a quel poiut il fe diftingue, lorsqu'il efl: gagné par quelque Parti: Mais, foit qu'il eut mis fes fenvices a trop haut prix, ou qu'aucune propofition ne lui eüt encore été faite a eet égard, al employa les huit premiers mois de la guerTefusdite, a envifager , dans leur vrai point de vue, les chofes qui fe paffoient chez nous, Sc a en juger comme il falloit en juger. Quelques traits tirés de fa Gazette, Sc que j'ai placés dans mon premier Volume, en font la preuve. Or, qui croiroit que eet homme, fi avide d'argent, Sc qui fait fi bien payer fes fervices, devint tout a coup le plus intrépide Défenfeur de notre Cabale Anti - patriotique , fans que , pour lors, il cn coutat un fou a cette Cabale ? — La cho^  ixxxvi Discours Preliminaire.1 acaufé tous les malheurs du Duc de Brunswick, & a faic tomber ce Pays d'abïme en abime, jusqu'a celui oü on le voir. aujourd'hui (a),-— lors qu'il fit clairemcnt entendre a toute notre Nation, qu'elle avoit acquis deux nouveaux Stadhouders en Mr. le Comte de Vergennes, 8c en Mr. le Marquis de Verac (£), — lorsque non content de rempli r fa Gazette de tout ce que fa propre fcélérateffe 8c celle de fes Inüigateurs pouvoient lui infpirer, cette Gazette devint encore le canal, par lequel les plus infames Productions contre la france , contre Mr. le Duc de la Vauguyon, 8c contre les plus honnêtes gens de ce Pays - ci, fe font répandues dans tous les Pays de PEurope, Sc telles, parexemple, qu'une partie du trop fameux Catalogue des Tableaux, que ce malheureux publia vers le r. janvier 1785. telles que les Couplets qu'il pubiia vers le commencement de 1'année 1784. Sec. ■ lors, disje , que l'on vint a confidérer tout cela , on s'eft dit: eet homme eft un furieux a lier; c'ejiune héte féroce dons il faut réprimer la r'age, ou qu'on doit bannir de la fociété humainc: — Et lorsqu'enhardi par 1'impunité de tels exces, ou qu'incité par nos ennemis du dedans ou du de- (a) la. du 23 ottobre, de la même annét. (i) ld. du 21 janvier 1786".  Discours Preliminaire, lxxxvii dehors , il porta 1'audace au point d'exciter le Peuple de ce Pays a la fédirion, & a fe faire raifon des Monflres qui, felon lui , y fomentent les disputes, fj? qui mettent Vexifler.ce de la République d deux doigis de la perte (<*), c'eft a-dire, a fe faire raifon des Citoyens fidels, & des dignes Magiftrats, qui réclament avec le plus de zele & d'énergie nos droits, 6c le maituien de notre vraie Conllitution, lors qu'il défigna . par les Lettres initiales de leurs noms (b) , les viétimes qu'il voudroit qu'on égorgeat, a qui il faudroit arracher les entrailles 6c fendre le cceur, pour y exterminer jusqu'au dernier germe de la Liberté, il n'y eut point d'honnête homme , qui, faifi d'horreur 6c d'cffroi, ne s'écriat, que Yamede ce monfire ne pouvoit élre que celle d'un Tichelaer, d'un Ve r r o e f , ou de tel autre T'rattre exécrable, de tel autre Afjafin féroce , qui ont jadis déshonoré leur fiecle & notre nation ! II n'y eut pas d'honnête homme, qui ne füt pétrirté detonnement, en confidérant comment il étoit posfible qu'un Ecrit rempli de tant d'audace & d'infamics, qu'un Ecrit, qu'on peut nommer le flambeau de Tifiphone, le tocfin de malTacre , 6c dont on a fi long - temps traduit parmi nous (a) ld. du 30 juillet 1783. (i) Ibidem.  txxxvm Disoürs Preliminaire. nous les pafTages les plus féditieux, n'excltat point en ce pays - ci 1'attention des gardiens de la fureté publique , n'émeüt pas le courroux des vengeurs des loix, des défenfeurs du repos, des biens Sc de la vie des Citoyens, & n'attirat pas fur lui les foudres de la profcription, ou la flêtriffure de feu, qu'il méritoit, 8c qu'il continue de mériier. Voila, Monfeigneur, voila de quels gens, Ceux, qui ont juré la pcrte de ce malheureux Pays, fe font fervis, Sc fe fervent encore, pour parvenir a leurs fins. Voila particuliérement le portrait d'un homme, qui, dans fa Gazette, s'eft dit cent fois le défenfeur de la vérité, de la juftice Sc de 1'humanité, le vengeur de 1'innocenee Sc de la liberté, le fléau de 1'intolérance, de la perfécution Sc de la tyrannie! — Voila Te portrait d'un homme , qui, malgré ces belles proteftations, a fait tout ce que je viens d'expofer ci-deffus , Sc qui s'eft aveuglement dévoué a une Cabale odieufe, laquelle ofe fe vanter de vous avoir pour Chef! — Voila enfin le portrait d'un homme, ou plutöt d'un fcélérat déteftable, qui, pour fervir plus impunément cette Cabale, 8c pour mieux en impofer a toute 1'Europe, fe donne depuis cinq ans pour 1'avocat de votre Caufe 8c le proteéteur de vos Droits, pour le confeiller de la Nation & le défenfeur ét notre Cohftitution! Ce  Discours Preliminaire, lxxxus Ce ne furent point, Monféigneur, quelques Libelles attribués a des Ecrivains du Parti patriotique, & oü l'on Vous a accufé d'être la caufe première 8c principale de tous nos malheurs, ainfi que de vouloir Vous élever un tróne fur les débris de celui de notre liberté j ce ne furent pas ces mêmes Libelles, oü l'on tachoit d'obfcurcir vos vertus, en Vous reprochant des défauts de conduite, vrais ou fuppofés, mais'indignes d'un Grand Prince tel que Vous êtes; Ce ne furent point, dis-je, ces Satyres, (contre lêsquelles Vous avez eu grand foin d'implorer la rigueur des Loix,) qui ont pu ternir votre honneur aux yeux de la Nation. Les traits qu'on y a lancés contre Votre Perfonne, font retombés fur leurs Auteurs ; & ces Auteurs fe font rrouvés écrafés fous le poids de la haine 8c de 1'approbre, dont ils avoient voulu Vous couvrir. Mais, Monféigneur, fi quelque chofe a pu vraiment porter atteinte a. votre réputation, c'eft qu'en qualité de premier Magiftrat de chaque Province, — c'eft qu'en qualité d'un honnête Homme, qui doit la confervation de fa gloire, 6c a lui même, 6c a une Nation qui 1'a élevé au Pofte le plus éminent qu'il y eut parmi elle, —■ c'eft qu'en qualité de Pere de familie, qui doit a. fes Enfants des exemples d'un cceur fenfible, d'un cceur jufte 6c noble, & furtout, de ce courage généreux qui **•«** e fait  xcu Discours Preliminaire. & boute - feux du même parti. Lever les yeux fur ies Droits dont nous avions été dépouillés, furies chaïnes dont nous 'étions chargés, fur 1'état de détreffe oü nous étions réduits, Sc juftifier notre Nation des Calomnies qu'on repandoit contre - elle dans toute 1'Europe, fut regardé par V. A. comme une audace puniffable: Elle prit nos juftes alarmes pour des vilions, nos piaintes pour de vaines clameurs, nos réclamations pour 1'effet d'un elprit de mutinerie: Ellecrut, paree qu'on le lui failbit accroire ainfi, que les efforts de nos refpectables Régents, pour rétablir la Liberté expirante, pour discuter divers points de votre Adminiftration , pour examiner la conduite de vos créatures, pour réprimer les abus dont j'ai tant parlé , étoient autant d'entreprifes pour troubler Tordre dans la République j — étoient autant d'effets d'un deflëin formé pour Vous perfécuter, pour Vous ravir votre Autorité légitime, pour anéantir votre Dignité, 6c pour renverfer la Conftitution, afin d'élever fur fes ruines, un nouvel Etat, oü des Démagogues auffi ambitieux que rufés puffent cxercer a leur aife un Despotisme, que rien ne pourroit troubler. — De telles préventions, Monféigneur, étoient peu propres a Vous porter a faire profcrire, en ce pays-ci, le Courier du Bas-Rhyn, le Patriote de la vieille Rocbe, & tant d'autres Ecrits auffi infamants que féditieux, dont ces Pro-  Discours Preliminaire, xciii Provinces ont été, & font encore inondées : Ec c'eft, fans doute, dans la certitu.de que de telles préventions exiftent encore dans votre efprit, & dans celui de la Police de La Haye, que le Gazettier GoJJe furpaffe aujourd'hui en audace 8c en fcélératefte, tous ceux de fes femblables, qui l'ont devancé, ou qui courent encore la même lice. — Mais il eft temps de finir cette disgreftion fur les Libelles antipatriotiques j & je retourne a mon fujet principal. Les Piaintes 8c les Réclamations, qui, pendant la guerre, continuoient a s'élever de toutes parts contre la funefte Direction de notre Marine, contre l'inaétivité honteufe qui en réfultoit, irriterent V. A. — Elle crut voir dans quelques unes de ces Pieces, ainfi que parmi les cris de détrclfe, qui retentiflbient d'un bout a 1'autre des fept Provinces, fon honneur 8c la fidélité qu'Elle doit a 1'Etat, griévement léfés. C'eft pourquoi, après s'être très-fortement plaintea eet égard, dans une Déclaration qu'Elle fit le 14. aoüt 1781. au Comité fecret de L.H. P., Elle y annonca, que pour faire cefler tousfoupcons, 8c tous bruits calomnieux, Elle avoit réfolu de donner une Ouverture détaillée de la Conduite qu'Elle avoit tenue durant cette même guerre, en fa qualité d'Amiral Général de 1'Union. Et cette Ouverture vint enfin: c'eft - a - dire, que le 7. odobre fui» vant,  xciv Discours Preliminaire. vant, V. A. remit aux Etats Généraux la première partie de ion fameux MéMOiRE jufiificatif ainiï qu'une Lettre dont le début étoit congu en ces termes. Hauts et Puissants Seigneurs! ,, Nous nous trouvons aótuellement en état „ de fatisfaire a 1'engagement que nous avons „ pris fur nous, il y a quelque temps, de met„ tre fous les yeux de Vos Hautes Puiflances, „ & par la même voie, fous ceux des Hauts „ Alliés, un Taeleau suivi , de nos ef„ forts 6c de nos aclions avant 8c durant ks „ troubles domeftiques 6c extérieurs, qui me„ nacent la République d'une ruine irrépara„ ble ; — 6c d'ériger, par-la, un Monu„ ment düraele de nos ve'ritailes vues, 6c „ de notre fineer e amour pour la Patrie, ainfi „ que de la faujjeté des fouppns 6c de la défian„ ce, que l'on a taché depuis un aifez long„ temps, (avec trop de fuccès pour les inté,, rêts de la République) d'infpirer contre „ nous (a) La feconde Partie de ce volumineux Mómoire fut remife è L. H. P. le 13. février 1783. Le grand nombre d'Exemplaires que l'on a fait imptimer de ce Mé moiré, & la très-fauffe Traduclion Francoife, qua Pon en a fuite, Pont aflez fait connoitre.  Discours Preliminaire. clv „ nous a une Nation, dans le fein de laquelle s, nous fommes nés Sc avons été élevés; donc ,, les intéréts font les nötres; Sc dont la pros„ périté & le bien - être font inféparablement liés aux nótres Sc a ceux de notre Maifon, „ Sc font par eonféquent une partie efientiel,, le, Sc même, la plus grande partie de no„ tre bonheur. " Monféigneur! je laifle ici, pour ce qu'ils ont pu être, les foupcons Sc la défiance, que V. A. dit que l'on a taché d'infpirer contre Elle. —< Aucun de nos Négociants, aucune de nos Villes oude nos Provinces, aucun de nos bons Citoyens, fe font oubliés a ce point-laj Sc j'ai déja dit que Vous méritiez plus d'être plaint que d'être foupgonné -y Sc que c'étoit a la perverlïté de votre Confeil qu'il falloit attribuer les fautes Sc les écarts que l'on a remarqués dans votre Adminiftration, concernant notre marine.— Mais, quant a ce Tableau suivi, de vos efforts Sc de vos aclions, avanc Sc durant les troubles qui exiftoien: alors, — quant a ce Monument» durable de vos véritables vues, Sc de votre fineer e amour pour la Patrie, c'eft-a-dire, quant au MéMOiRE, que Vons avez remis a L. H. P., j'ofe affirmer ici., Sc je le démontrerai dans les trois premiers volumes de mon üuvrage, queceMémoire n'eft qu'une compilationartificieufe, Sc faite plutöt pour embrouiller la jufte idéé que  xcvi Discours Preliminaire.' que Pon auroit pu fe former de 1'Etat des chofes, que pour 1'éclaircir. Quel eft 1'homme capable de débrouiller la vérité dans un Ecrit rempli de réticenccs, de déguifements, & d'affertions obfcures ,douteufes, ou faufles? — dans un Ecrit, oü les Faits vrais font noyés dans une infinité de détails minutieux, ou confondus parmi de récits d'allées 8c de venues quine finiflent pas, de confeils tenus fans néceflité, de formalités inutiles, de confidences affectées, de petits ordres donnés, de petits avis recus 8c de cent autres futilités, qui feroient presque croire, qu'un Amiral-Général dela République a euplus de befogne 8c d'embarras , pour tenir une poignée de vailfeaux dans une inaétivité continuelle, que n'en avoit alors le premier Lord de 1'Amirauté Angloife, c'eft-a-dire, un Miniilre, dont 1'attention 8c les foins devoient s'étendre fur 1'état, 1'emploi Sc les opérations de foo vailfeaux de guerre répandus dans les quatre parties du monde ? — Les Rédacteurs de ce MéMOiuE, Monféigneur, ou plutöt, de cette congeftion informe, ont été, ou des fourbes, ou des ignorants, qui ont trompé F. A., dont le vrai but étoit bien de fe juftifier de tout ce que l'on pouvoit foupconner contne fes propres vues 8c fa conduite, & non pas, de mettre L. H. P. Sc la Nation dans le cas dene pouvoir démêler les moyens Sc les rnenées infames, que votre Con* kil  Discours Preliminaire, xcvii feil Sc fes fuppöts ont employés avant & durant la guerre, pour parvenir a leur but déteftable, Sc pour vous entrainer, fans que vous vous en appercuffiez, a feconder leurs deiTeins. — Si Vous euffiez lu ce MéMOiRE avec une attentipn fuivie, Sc avec des yeux moins fafcinés que n'étoient les vótres , Vous 1'aurieZ apprécié a fa jufte valeur } Sc au lieu de le pröner comme un Monumknt auffi glorieux pour 1'Adminiftration de V. A., que honteux pour les prétendus Détracïeurs de cette Adminiftration , Vous Tauriez regardé comme un Monument éternel de la fcélératefTe Sc de 1'opprobre de la Cabale, qui vous avoit porté a vous juftifier de cette maniere, pour fe juftifier elle-même, —— Vous auriez , dis-je, j-éjeté avec indignation ce MéMOiRE ; — V. A. fe feroic empreiTée d'aller avouer, en pleine Aflemblée des Etats Généraux, qu'Elle avoit enfin découvert que la conduite qu'elle avoit tenue jusqu'alors, tant en fa qualité d'Amiral-Général, qucn fes autres qualités relatives aux Charges éminentes qu'elle remplit dans la République, n'avoit malheureufemenc été dirigée que par un Confeil dc féducteurs Sc dc traxtres, iccondés d'une multitude de fuppóts , qui leur étoient devoués: — Elle auroit gemi fur le fort infortuné oü elle s'étoit trouvée réduite pendant tant d'années; & elle auroitfupplié JL. H. P. de lui nommcr, ******* ' fans.  xcyiii Discours Preliminaire. fans aucun délai, un Confeil de Perfonnes integres, Se capables de la diriger, de la feconder, dans les efforts qu'elle auroit dorénavant a employer, pour maintenir & défendre, d'une maniere digne d'elle, les intéréts Se la gloire de la Patrie. — Toute la Nation , Monféigneur, auroit béni 1'heureux moment, oü vos ycux fe feroient trouvés deffdlés, ainfi que celui, oü vous auriez eu le courage d'en faire 1'aveu, Se de faire a L. H. P. la demande dont je viens de parler. — En un mot, eet événement auroit prévenu tout ce que nous avons vu arriver depuis parmi nous , êc la République ne fe trouveroit pas aujourd'hui dans 1'état affreux, oü elle fe trouve. Mais, bien loin de la, V. A. crut que fon MéMOiRE étoit un chef-d'ceuvre de raifonnement 6c de bonne föi : & avant que L. H. P. lui cuffent témoigné qu'EUes étoient fatisfaites, ou non, de eet Ecrit, Elle permit qu'une partie de la Bourgeoifie de la Haye lui offritune Adkesse de Remercïment fur cé fujet; c'eft - a - dire, une Adresse, qui avoit été motivée par des perfonnes connues par leur dévouement aux Chefs de la Cabale, une Adresse, concue dans les termes les plus repréhenfibles, 6c vraiment imaginée pour faire accroire au Public que les piaintes, ci-devant portées par les Régences de plutieurs Villes, Sc par des Provinces ent ieres contre  Discours Preliminaire. xcis trc la mauvaife direcTion & la funefte inactivité de notre Marine, étoient les plusinjuft.es,—. Sc-pour inciter les iuppöts de cette Cabale, a former des AdreiTes femblables dans les autres Villes, afin de parvenir par cette voie, a forcer le Souverain a npprouver lui même lc MéïioiRE, & a Vous en remercier, Monfeigfieur, fansexaminer la validité des raifons qui y étoient contenues. — Les Désordres criminels, qu'une troupe de forcenés cxcita impunément kla Hayeen cette occafion, (<*),pouentrainer le refte du peuple de cette place a cor.fommer le projet que Ton avoit en vue, n'étant point affez connus des Etrangers, j'en donnerai Thiftoire entiere a la fin de mon troificme volume: j'y démontrerai que ces Désordres ont écé la fource & la caufe de toutes les Emeutes, que nous avons vues depuis en ce pays-ci} — Emeutes, qui ont ébranlé la République jusque dans fes fondements , £c que toutefois, F, A. a cru, & a voulu nous faire croirc de même , que ce n'étoient que des fimples démonftrations d'attachement pour" fa pcilonne! Ce qui porta une partie de la Populace, non Ja) Ce fut jé 5 décembre 1782. que ces Déjordres fom ici connus f0l,s ,e ^d£ 1>E-i* ******* n  c Discours Preliminaire. non fculement de La Hayet mais de plufieurs autres endroits, a croire que le contenu du MéMOiRE de V. A. devoit être formcllenv.nt approuvé du Souverain, fut non fculement Vopinion, que l'on avoit inculquée a cetre populace, que votre Adminiftration, relativement a 1'emploi de notre Marine, étoit irréprochable, mais encore celle, que l'on devoit avoir la confiance la plus illimitée en votre Perfonne.— Cepeüdant, rien n'étoit plus faux que cela: Les efFets de cette Adminiftration avoient fuffiffamment prouvé combien elle étoit défeétueufc , alarmante, & préjudiciable aux intéréts du commerce 6c a ceux de TEtat, 6c par eonféquent, combien peu elle étoit digne d'approbation. S'il y avoit en Vous, Monféigneur, quelque chofe qu'on ne put blameravec autant fondement, c'étoient les motifs qui vous guidoient, & 1'intention que Vous aviez de bien faire, en faifant mal. Une autre preuve que cette Adminiftration n'étoit rien moins que digne d'approbation, furent les cris légitimes, qui, dans toute la République , s'éleverent contre le Duc, contre votre Mentor, contre le Chef de la Cabale Anglomane 6c anti-patriotique, contre un homme, en un mot, par les confeils duquel V. A. s' igaroit fi éirangement dans Texercice de toutes les Charges 6c Dignités, dont elle eft revêtue. Une autre preuve, enfin, que cette Ad-  cvi Discours Preliminaire. cn réduifant presqu'a. rien le Droit , qu'un Peuple libre a de faire des Rcpréfehtations fur les maux ou les injuflices qu'il foufFie, c'efta-dire, en établiffant que le premier des devoirs d'un tel Peuple ieroit de ibufi'nr & de fe taire : doctrine digne des Ecoles d'Alger & de Tripoli , Sc qui a produk la Publication tyrannique , qu'une Majorité, dans les Etats de Gueldre , a ordonné de faire au mois de mai dernier, 6c qui caufe aujourd'hui les malheurs que la ville cVElburg éprouve , pour avoir refufé qu'une telle Publication füt faite chez elle. ■— En un mot, Monféigneur, li ce Discours préliminaire n'étoit déja trop long, j'ajouterois ici, comment une Coaiition odieufe s'eft enfin formée entre les Ariftocratcs 6c la Cabale: 6c que celle-ci, fiere de ce renfort, aportéle mépris, pour la Nation, au point de Vous engager a nommcr Echevin de la Ville de Haiiem , un de vos Gardes-du-Corps, un homme qui n'avoit point d'autre rang que celui de fimplefoldat, 6c qui, en cette qualité, a ofé fe préfenter a 1'Hötel de Ville de eet Endroit, pour y faire fon ferment d'Echevin. Nomination odieufe ! que les braves Hattewois n'ont pas reconnue , 6c que v. j4. irritée, a, dit-on, juré de faire reconnoitre par force. — Si cette affaire réuffit au gré de la Cabale, Monféigneur, nous ne tarderons pas a voir les palefreniers de vos écuries, fiéger dans les  Discours Preliminaire. cv:i les Colleges municipaux. Ce qui fera bien loin de voir, ainfi que nous le voyons fouvent, vos Chambcllans aller préfider a l'Affemblée des Etats Géne'ranx, au fortir du fervice devotie Antichambre. Cependant, malgré tant de chofes étranges, que j'ai rapportées dans ce Discours prêliminahe, ainfi que dans le corps de mon Ouvrage, l'on a ofé, (furtout depuis quatre ans) calomnier notre malheureufe Nation auprès de Feue Sa Majefté Pruffienne: l'on a repréienté diverfes fois au Grand Frederic, que l'on travailloit ici a anéantir votre Autorité légitime, & peut-être, qu'on y vouloit vous dépouiller des Charges éminentes , que la Nation a rendues héréditaires dans votre Maifon. 1'Attachement que ce Monarque avoit pour cette Maifon, la part qu'il prenoit a la confervation de notre Conftitution actuelle, ont alarmé fon cceur jufte & généreux: Sa Majefté a fait faire, a eet égard, diverfes Repréfentations, tant aux Etats de Hollande, qu'aux Etats Généraux : Mais qui que ce füt n'a été en état de prouver un Fait, qui étoit abfolument faux, & qui n'avoit été inventé que par la calomnie la plus atroce. — Auffi, Monféigneur, la Na» tion efpere-t-elle que le digne SucceiTeur de Frederic fera fourd a de telles impoftures j 6c que Sa Majefté, inftruite de Tetat des chofes, aar» pitié du fort de cette Nation, aura pitic  erin Discours Preliminaire. pitié de Vou', de fon Augufte Sceur, votre Epoufe, 8c de vos Enfantsj & qu'en confcquence, Elle daignera Vous confeiller d'éloigner, de votre perfonne, les fcélérats qui 1'ob» fédent, 5c de faire vos efforts pour regagner 1'amour 5c la confiance d'un peuple, qui vous a tant-aimé, 5c qui, a eet égard, mérite le plusjufte retour. La liberté que je prènds, Monféigneur, d'adrefler encore cette Es qu is se a V. A-, après lui avoir adreffé les XXX. Articles, ou Lei Nowjelles Confidéralions fur P'Irréuffite de FExpédition de Brest (a), doit moins être regardée comme une impnnunité de ma part, que comme un nouveau témoignage de mon attachement refpectueux pour Votre Perfonne. Si, en compofant cette Esquisse, mon but a été de faire connoirre les Caufes 8c les Auteurs des maux affreux, qui accablenr la République, — fi ce but a été de juftifier aux yeux Ca) Si si Ia page 276 de mon feeond Volume , j'ai pariéde 1'Auteur des XXX Articles, comme d'u11e autre perfonne que moi, c'eft que je croyois aflez inutile de m'y attribuer ce petit Ouvrage: Mais comme mes Amis m'ont paru cefirer que le Public füt inftruit que j'en fuis 1'Auteur, ainfi que de cette Esquisse, je me fuis rendu a leur defir.  Discours Preliminaire. crx yeux de 1'Europe, & a ceux de laPoftérité, nos vénérables Régents fi hornblement calornniés, — Öc la plupart de nos Affemblées municipales, nos Affemblées fouveraines, même, également calomniées, offenfées, outragées, toutes les fois que la Cabale anti- patriotique n'y a pu trouver une Majorité dévouée a fes vues, — fi ce but, dis-je, a été de juftifier notre Nation entiere, il a également été de juftifier F. A. de tout foupcon dffeüfant; & de toute imputation faufle: j'ai taché de démontrer que les fautes les plus graves de votre Adminiftration, que les abus les plus énormes de votre Autorité, n'ont été que les effets des mauvais principes que l'on Vous a inculqués dans votre jcuneffe, de 1'aveuglemenE oü l'on vous a retenu toute votre vie, de la trop grande facilité de votre caraétere, & non pas ceux d'un cceur naturellement mauvais, ou qui s'eft lücceflivement corrompu. Si F. A. daigne lire mon Ouvrage, Elle verraque, quotque j'y ayc conliamment parlé avec. la noble fermeté, qui convient fi bien a un vrai Républicain, je n'y ai jamais fait panoitre que je penfois autrement a votre égard. — Mais, Monféigneur, jusqu'a quand eet aveuglement durera-t-il encore? — 1'augufte Ve'rité ne diffipera- t elle jamais ce preftige odieux ? —. 1'homme de la République le plus a portée de jeter fes regards fur les caufes de fon igare- ment,  cx Discours Preliminaire. ment, Sc fur la fource de nos maux, en fcrat- il le dernier a connoitrc ces caufes Sc cette fource? Mais, qu'entends-je? j'e'cris ceci le 4. feptembre de cette année 1785, Sc le bruit fe répand de toutes parts, qu'a la réquifition de deux Quartiers de la Province dc Gueldre, un Corps de troupes s'affemble par votre ordre, pour aller e'touiTer la voix des Villes (YElburg Sc de Hattem, qui ofent réclamer ou maintenir leurs droits légitimes,— pour forcer ces Villes afe remettre dansles chalnesodieufes, qu'ils vouloient fecouer, — ou pour égorger leurs malheureux habitants, s'il réfufent de fe foumettre. — . Ce bruit, Monféigneur, allume dans tous les cceurs une indignation inexprimable: II ne va plus vous refter aucun ami, parmi nos bons Citoyens: la plupart des bouches, qui vous plaignoient ci-devant, ne s'ouvrent déja plus que pour maudire le jour oü vous êtes né, que pour maudire la Cabale qui vous perd, & que pour maudire tous fes fuppöts, tant grands que petits. Déja l'on fe prépare a une défenfedéfefpérée} déj& une partie denos Corps armés vole au fecours de-nos Freres menacési & fi l'on en vienc aux mains, une guerre civile, horrible, s'en- fuivera, des flots de fang feront répan- ■dus, Sc pourquoi ?....« c Jc  Discours Preliminaire. cxt Je tremble d'en dire d'avantage, Monftigtieur, paree que je luis encore dans Topinion que la feule idéé des fcenes terribles, qui s'ouvriroient par-la, Vous .fera rentrer en vous même, & occafionnera, en vous, 1'heureufe Métamorphofe, que la Nation defire depuis fi long-temps ..... Cependant, fi contre tout efpoir, le dontraire arrivoit, fi Vous abufiez ainfi de 1'Autorité, que votre Cornmiflion de Capitaine Général de 1'Union vous donne fur nós troupës, je ne dirois plus que c'éfi foibleffe-de caractere, Sc que c'eft aveugiementd'efprit:— maisje dirois que votre cceur feroit enfin devenu auffi pervers, auffi dénaturé , auffi barbare , que celui des fcélérats qui vous ont fervi fi long-temps de confeil; — je dirois plus, Mvnjeigneur, car je dirois que vous fenez cent fois plus méchant qu'eux, puisqu'a. votre méchanceté, vous auriez jornt une diflimulation perfide, qu'ils n'onc point eue: En" un mot, je me reprocherois a jamais d'avoir cru en votre bonne foij de vous avoir aimé; Sc de vous avoir plaint, ainfi que je 1'ai fait dans mes XXX. Articles, Sc dans les deux Volumes que je publie. — Enfin, je bénirois le moment oü la Nation, juflement irritée, vous arracheroit un Pouvoir, dont vous ne vous feriez fervi que pour Popprimer. — Mais , encore un coup, je ne  exit Discours Preliminaire. ne puis croire que Vous foyez capablc d'en venir-la. Leéteur honnéte Sc impartial, Citoyen ou Etranger!.... lis avec atiention eet Ouvrage, qui, comme tu le crois bien, a été compofé avant ce Discours préliminaire. Compare ce que j'y ai rapporté, avec ce qui va fe paiTer parmi nous; Compare, Sc juge. — Voila tout ce que je tc demande. D E  DE LA DECADENCE DE LA MARINE Et des Causes, qui en ont Rètaede' le Re'tablissement. Epoque de 1766 a 1778. Monseigne ür! I-Jes Rédacteurs dc votre Mimoirè apologétique (tt) commencent eet Ouvrage par VExpofition des foins* que V. A.S. a pris depuis 1'année 1766, jusqu'au commencement dela Guerre d'oü nous fortons, pour obtenir de L. H. P. le RétablilTement de la Marine Sc 1'Augmenta- tion C<Ü La Première Partie de ce Mêmoire a été préfentée, par S. A. \ L. H. P. le 7 Oftobre 1782; & la feconde, le fut le 13 Fevrier 1782. A  Grand Tableau. 7 La Hollande, & Amfterdam fur-tout, dont 1'intérêt particulier ne pouvoit être ici que 1'intéret général, infiftoient fpécialement fur le RétablilTement de 'la Marine, paree que, fans Marine, le Commerce 8c la Navigation demeurent fans protection , 8c que fans proteótion ces deux grands objets doivent périr. Cependant, durant les longs 8c fucceffifs débats, qui réfulterent de cette contrariété d'opinions 8c d'intérêts, le 18 Avril 1771, il fut fait une Pétition pour conftruire 14. VailTeaux de Guerre: Mais cette Pétition n'a été arrêtée que le zi Mai 1778. 11 fut encore propo- fé en différents temps par la Hollande, 8c plus ou moins convenu , qu'il füt procédé fur le même pied (pari pajfu) tant au Rétabliffement de la Marine qu'a 1'Augmentation des Troupes: Mais la préférence, que la plupart des Provinces s'opiniatrèrent a donner a ce dernier objet, 8c les menées ordinaires, firent que 1'expédient n'eut point lieu. Bien plus , en i77f. la Gueldre, la Frife, Overyffel 8c Groningue, crurent faire un grand facrifice, en confentant que la Somme de plus de ifoo. mille Florins, qu'exigeoit le Plan formé en 1773. Par ^- -d' ^ *e C00^ d'Etat , pour une Augmentation particuliere de Troupes, füt réduite a poo mille , 8c que le refte füt affefté ala Marine, comme un fond fixe, qui feroit annueliement porté fur 1'état de Guerre. A 4 C'eft-  8 L' esquisse t>' u n C'eft-a-dire, qae la Somme, deftinéc a 1'objet le plus fort & le moins prefïant, auroit furpafle d'un tien celle que l'on vouloit bien accorder pour 1'objet le pkis foible & le feul nécefTaire. Mais la Hollande perfiftant a demander, ainfi qu'elle 1'avoit fait en 1774, que le fonds, qui feroit affecté a la Marine, füt de 780 mille Florins, le modique excédent qui fe trouvoitici, & dont même cette Province devoit elle feule fournir plus des cinq neuviemes, fit échouer le projet. C'eft pour cela, Monseigneur, que les Rédafteurs de votre Mêmoire ont eu le front de rejetter fur cette Province 1'irréuffite de 1'affaire (a): Mais 1'examen des Pièccs citéesci-deffous mettra les Curieux a même de juger de l'exaótitude & de la fincérité de ces Meffieurs (b). — Enfin lea Mai 1777 '1 & fit une Pétition pour la Réparation des vieux Vaiffeaux, & pour un Achat de matériaux de conftruction: Mais elle n'a été accordce que le zj April 1781 } de forte que pendant Pépoque de 1765 a 1778 , il n'y eut rien de formellement arrêté fur les deux ojets en queftion } Douze ans de débats, d'intrigues & de tracas- fe- (O A.p, 10. fj? ir.' B.p. 10. £? 11.. c.p.2.&s, (&) V. Le Confentement des Etats de Hollande donné 1<» 8i Mars j?7o cour 1'Etat de Guerre. —. La Vkhmim faltc  Grand Tableau. $ feries, n'ajoutèrent pas une cheville a nos Vaisfeaux; Nos diflènfions Sc nos inéfolurioni augmentèrent; nos Anglomanes s'en réjouïrcnt, 6c 1'Angleterre en profita. Les Provinces de terre n'ignoroient pourtant pas, que dans les circonftances oü l'on étoit, le RétablilTement dc la Marine devoit être le principal objet des foins de la République; paree que la Marine eft le foutien du Commerce 6c de la Navigation, 6c que ces deux chofes font les piliers de 1'Etat: Elles n'ignoroient pas, qu'elles ne font rien fans les Provinces maritimes, fur-tout fans la Hollande, Sc que celle-ci ne feroit rien elle-même fans Navigation 6c fans Commerce: Elles favoient, que les richelfes que ces deux objets attirent particulièrement dans la Hollande , fe répandent chez elles par 1'intérêt, que quelques uns de leurs Citoyens prennent au Commerce même, par faite ala Généralitépar leurs Députés le 24 Avril 1771. ■ La Réfolution des mêraes Etats en date du 21 Avril 1774. -—Le Rapport de laGénéralité au fujet de ladite Réfoiution, in- féré dans les Notules de Hollande le 25 janvier 1775- > 1'Etat des Déliberations des Etats de Hollande en date du 8 Juillet & du 4 Septembre 1778. La Réjolution du Confeil de la Ville d'Amfterdam du 1 du même mois de Septembre, communiquée a 1'AiTemblée de la Province le 8 ïuivant &c. &c. dans la Colleftion, imitulée Verzameling fan Stukken, citée ci-dcflus.  ÏO L' ESQUISSE LV U N par Poccupation qu'un grand nombre de leurs Habitants trouvent dans les Villes, dans les Campagnes, & fur les Vailfeaux de cette Province, ainfi que par le débit avantageux qu'elles y font de leurs Denrées & de leurs Produóïions: Elles favoient que la mifère, oü des milliers de Families étoient réduits par la décadence du Commerce & de la Navigation, ne tarderoit pas a devenir extréme, fi Pon ne fe mettoit en état de protéger, contre les entreprifes des Anglois, ce qui nous reftoit de ces deux fources de notre bien ■ être , de notre puiffance, & de notre félicité: Elles favoient, que pendant la Guerre, qui s'eft allumée en ijf6, une Marine refptélable nous eut préfervés des pertes inmenfes & des humiliations honteufes, que nous avons efluyées alors: Elles favoient, que nous touchions au moment de nous retrouver dans le même cas; & qu'une Armée de 100 mille Hommes ne pouvoit empêcher la prife ou le pillage d'une Barque de pêcheur: Elles favoient, enfin, que le Commerce , puiflamment protégé , & une fois rétabli, ne tarderoit point a procurer les moyens d'augmenter les Troupes, & de mettre les Frontieres dans Pétat de défenfe, oü il feroic néceffaire qu'elles fuflent, fi un jour a venir quelque Puiffance du Continent entreprenoit de les attaquer. -— Pourquoi donc ces Provinces n'ont-elles point pefé toutes ces chofes?.... Paree  Grand Tableau, ii Paree que la,oü parient 1'intérêt 6cl'ambition, la jaloufie Sc la haine, la foibleffe 6c la fiatterie, la raifon n'eft pas écoutée; paree que 1'influence peftilentielle, dont il eft parlé ci-desfus,dirigeoit 1'esprit Sc les démarches de ceux, qui s'étoient arrogé 1'autorité de donner le ton aux Délibérations, 8c de diéier les Réfolutions de la plupart de nos Villes 6c de nos Provinces. - - - - C'étoit donc a. vous, Monseigneur , a tacher d'éteindre ces paffions, de réunir les fentiments, d'étouffer cette influence, en ufant de votre crédit, de votre autorité j en ceffant, du moins pour un temps, d'infifter fur 1'Augmentation des Troupes; 6c en vous attachant a demander avec inftance le Rétabliffement de la Marine. J'ofe aflurer , que le fuccès auroit courronné vos efforts. Mais vous ne 1'avez pas fait Pourquoi? paree que, pour facrifier une inclination favorite , pour déchirer le voile que 1'impofture 6c la flatterie tenoient devant vos yeux, il vous falloit une force d'esprit, une énergie d'ame , que vous pouviez avoir, mais que vous n'avez pas eues. S ü I-  14 L1 ESQ.UISSE D1 U N SUITE PES CaüSES, qui ONT r'ETAR- de' le Re'tablissement de la Marine. Epoque du i Janvier 1778. au 31 Décembre 1780. Au commencement de 1'année 1778. les motifs pour le RétablilTement exclufifde la Marine redoublerent. La fameufc Déclaration , que 1'Ambaffadeur de France i la Cour de Londrcs remit le 13 Mars au Vicomte JVeymoutb, Secrétaire d'Etat , le reficntiment que 1'Angleterre concut de cette démarche , les préparatifs immenfes, faits de part & d'autre, ne lailfoient plus douter, qu'une guerre ouverte & fanglante ne s'allumat entre les deux Nations , avant même qu'ellcs euffent entrepris d'expofer leurs griefs' réciproques aux yeux dc 1'Europe. 1'Effet vérifia la conjeéture} & les hoftilités commencerent au mois de juin. Ces Circonftances, Monseigneur, rendoient notre fituation tres - critique du cotc de la Mer:  Grand Tableau. 13 Mer: elles fourniflbient aux Anglois dc nouveaux prétextes de piller nos Vaiffeaux , de confisquer nos EfFets, ou de fe les approprier de toute autre maniere: Elles nous faifoienc prefTentir la demande fondée , ou non fondée, que nos opprefTeurs pourroient un jour nous faire du fecours ftipulé par les Traités, qui nous foumettoient a leur difcrétion. 11 n'y avoit donc pas d'autre parti a prendre que celui de rétablir notre Marine, foit pour réprimer leurs violences, leurs déprédations} foit pour les fecourir, fi le cas y échéoit} foit pour nous mettre en état de leur refufer tout fecours, s'ils s'avifoient d'entreprendre de nous forcer * leuren fournir contre toute raifon. II parut enfin, que notre trifte fituation feroit quelqu'impreffion fur les esprits. Le zt Mai l'on arrêta (fans doutc pour la forme, car l'on ne remarqua enfuite guèrc plus d'aélivicé dans nos Chantiers,) l'on arrêta, dis-je, la Pétition faite en 1771. pour la Conftruétion dc 24 Vaiffeaux de guerre} mais on fe garda bien d'accorder en même temps la Pétition de 1777. poiïr la Réparation des Vaiffeaux, 6c pour un Achat de matériaux de conft.ruct.ion. Au contraire, le jour même de eet Arrêté, L. H. P. d'après une Propofition faite par les Provinces de Gueldre 6c de Groningue, réquirent V. A. 6c le Confeil d'Etat de former un Plan pour une Augoaentation de Troupes. Ceux qui con-  20 L'ESQ.uïSSE D'UN ,, vantage dc l'Angleterre, a. un droit que les „ Traités afluroient aux habitants de ce Pais: „ mais vu 1'impuiffance, oü la République fc „ trouvoit par Terre 5c par Mer, état déplorable , dont nous avions vainement taché de la retirer, nous étions perfuadés qu'il ,, étoit plus prudent de fufpendre 1'exercice „ de ce droit, que de s'expofer, pour mainte,, nir un objet unique de Commerce, qui n'intéreflbit pas d'ailleurs la maffe générale du Négoce, aux pertes énormes que la Réj, qublique a faites depuis. Notre opinion étoit qu'il falloit différer la prottélion d'une Bran„ che de Commerce qu'on nous disputoit, jusqu'au moment oü 1'Etat feroit affl-z puis„ famment armé pour fc défendre fur Terre „ & fur Mer. Sur Mer, paree que l'Angle„ terre ayant depuis tant d'années une marine écablie, 8c armée alors encore plus que jamais, pouvoit ruiner entiérement notre „ Commerce, & envahir nos PofTeffions en „ Oriënt 8c en Occident, finous ne nous met„ tions pas en polture de les défendre par des j, forces fufhffantes. Sur Terre, paree que ,, nous craignions que s'il falloit en vcnir aux „ mains avec cette Puiffance, elle ne trouvat peut'être les moyens de nous attaquer fur le „ Continent, ou du moins de nous y fufciter „ de nouveaux ennemis. " Selon 1'aveu tout a fait ingénu, que V. A. nous fait ici, nous  Grand Tableau. 21 nous avions donc plus a craindre du courroux aveugle Sc illégitime dc l'Angleterre, que du jufte rtflentiment de la France} c'eft - a- dire, que nous rifquions moins a arrêter, en faveur de la première de ces Puiiftnces, le cours d'une partie effentielle Sc licite de notre Commerce, a renoncer de fait aux principes de la ncutralité que nous avions adoptés, qu'a continuer cette Branche de Négoce, que le Droit des Gens & les Traités nous autorifoient de faire, & qu'a refter dans les bornes, que la juftice & cette neutralité nous prefcrivoient. V. A. ne pouvoit, en vérité, nous donner une idéé plus parfaite de Pinjuftice de 1'une des deux Nations, Sc de la modération de 1'autre. ii eft fort étrange qu'après cela on fc foit plus appliqué, parmi nous, a favorifer la guerre cruelle que notre Ennemi mortel nous a faite, qu'a répondre aux vues falutaires d'une Nation amie, qui fit tout fon poffible pour nous défendre Mais je brife la-deffus} & je paffe a la discuffion du Palfage que je viens dc citer. . Sans examiner fi ce fut V. A. qui concourut avec la pluralité des fuffrages, ou fi ce fut cette fluralité, qui concourut avec V. A. a fufpendre les Convois fusdits, je commence par affirmer que fi quelqu' impuiffance a été le motif, qui occafionna cette Sufpenfion, ce n'a point été Firopuifiance oü la République fe trouvoit en B 5 même  22 L' ISQ.ÜÏSSE D' TJN même temps par Mer 8c par Terre, mais bien la feule impuiflance oü elle étoit par Mer; 8c eet impuiflance venoit de 1'ob.ftination que V. A. 8c fes partifans ont conftamment eue de youloir augmenter les Troupes j elle venoit de 1'averfion intime que d'autres avoient de coneourir au Rétabliffement de la Marine. La nature de la difcufïïon oü je fuis entré, m'oblige de revenir a chaque inftant fur ce point, 8c de répéter fans ceffe la même chofe ; mais il le faut". ■ D'ailieurs Ia Branche de Commerce, que la Sufpenfion des Convois nous forcoit de facrifier pour un temps a la Convenance des Anglois,. intérefloit bien plus la maffe générale du Négoce que Vous ne le croyiez: tous les Bois 8c autres matériaux ou munitions navales que nous transportions en France, étoient autant pour 1'ufage dc h Marine marchande, .que pour celui de la Marine Royale. Cette fufpenilon interrempoit donc une grande partie des achats 8c des échanges, que nous fommes accoutumés de faire des denrées 8c des produfïions Francoifes, pour les irnporter ici, ou pour lesexporter ailleurs* elle croifoit les fpéculations de nos Négocians; elle arrêtoit leurs correspondances tant en France, que dans le Nord Sc d'autres endroits * elle les forcoit enfin d'abaodonner d'autres parfies de Commerce, flui tenoient elles-memes a d'autres, qu'il falloit abandonner aulfi. Je ne paile pas de plufieurs  Grand Tableau. 43 nent, ou qu'ils ne fifient une defcente fur nos cötes? j'ai déja répondu a ces deux points. Qu'étoit-ce donc? Monféigneur, qu'étoit-ce donc, qui perpétuoic cette obftination 6c chez Vous, 6c chez la majeure partie des Confédérés ?... i... Rien autre, hélas! que les foibles raifons, les prétextes frivoles, 6c les motifs publics ou fecrets, dont j'ai parlé tant de fois. Ainfi, la doublé Proposition de V. A., «n mettant un obftacle a. 1'Armement des Vaisfeaux nécefiaires a la proteélion de toutes les parties de notre Commerce, ne pouvoit que favorifer le deffein que les Anglois avoient de nous ruiner, 6c leur defir de voir notre Marine refter dans 1'ctat déplorable cu elle fe trouvoit: en un mot, fi le Transport légitime des Bois de conftruction, en France, exigeoit un, fort Convoi, ainfi que V. A. le difoit, 6c que tout le monde en conva#oit, il falloit faciliter, il falloit prefler 1'Armement de ce Convoi, 6c non pas y mettre obftacle. Donc , Monfeigneur, on ne peut dire que vous ayez encore fait ici tout ce que vous auriez pu faire, pour le Rétabliffement de la Marine. Cependant, comme a la fuite dela doublé Proposition, dont je viens de parler, V. A. expofa aux Confédérés que, pour que toutes les Branches de Commerce ne demeuraffent point fans proteétion, il conviendroit de four»ir les Convois nécefLHires aux Navires^, qui ne fe-  44 V e s dv i s s e r>' un feroient point chargés dc Contrcbande, durant le temps qu'on délibéreroit fur la proteétion a donner aux Vaiffeaux chargés de bois de conftruction, L H. P. arrêterent, le zó. du mois d'Avnl, k Pétition dc 3. 900. 680 florins, faite le 3. Novembre précédent i & Elles ordonneren! en même temps, qu'il feroit équipe, pour la fervice de 1'année 1779, 3*Vaisfeaux de guerre, confiftants en 14 Vaiffeaux de hgne , 17 Fregates 6c un Senauj 6c qu'a eet eftet, „les Départements refpeftifs dc 1'Ami„ rauté feroient tenus, fur leur ferment prêté „ au Souverain, dc fe conformer exadement „ aux points mentionnés dans la Réfolution; „ qu'ils feroient avertis d'avoir loin que la le„ vée des matelots füt ouverte furlechampi „ 6c que les Vaiffeaux mêmes fuflent mis „ en état, pour être fucceffivement prêts a „ mettre a la voile, d'abofd qu'il feroit néces„ faire de les employer aux Escortes, qu'on „ fe propofoit d'accorder pour la proteftion „ de Commerce 6c de la Navigation de la Ré„ publique: Que de plus il en feroit donné „ connoiffance a S, A. S. Monféigneur le „ Prince d'Orange 6c de Naffau, le requérant „ de prêter la main, afin que les Equipements „ en quelhon fe filfent réguliérement; de propo„ fer lucceffivement les Officiers qui devoient » commander ces Vaiffeaux j de mettre ordre a la » diftibuuon dcsConvois, ajniiquc des Navires „ defti-  Grand Tableau. 45 3, deftinés a. les protégcr; d'avoir foin autant ,, quil feroit poffible, que tous les mois il füt accordé des Efcortes pour les Ports de Franj, ce & d'Anglcterte, ainfi que, felon 1'exi3, gence des cas, pour Lisbonne 8c la Médi- terranéej 8c enfin, au moins deux fois par „ an, pour les Colonies de la République, aux Indes occidentales ". Les Rédacteurs de votre Mémoire, Monféigneur , en parlant de cette fage fic néceffure Réfolution, nous difent, „ que F A. étoit „ trés-dispofée a remplir les intentions de L. „ //. P. a eet égard} mais que les difficultés ,, qui s'éleverent au fujet des Convois deftinés „ pour les Vaiffeaux chargés de bois de con,, ftruétion, Sc les Déhbérations des Etats Pen „ etnpêcherent («) ". Et malheureufe- ment, elle ne fit aucun efiort pour s'oppofer a ces Empêchements. Car indépendamment des débats au fujet des Convois, la Gueldre, par fa Réfolution du 29. du même mois d'Avril, approuva pleincment la Demande que F. A. avoit faite, le 10. Mars, de 1'Augmentation des troupes au nombre de f 0 a 60 mille hommes j 8c déclara nettement, que fi l'on négligeoit ce dernier objet, elle confidéreroit les affaires de la Marins, avec la même indifférence. OverylTel dit enfuite a peu pres la mê- (a) A. p. IS. — B. p. 82. W C. p 0.  46 L*ESQ_UISSE D'UfJ même chofe: Utrecht, la Frife & Gronin» gue infifterentégalement furie même objet (*).Monféigneur! fi vos yeux s'étoient enfin ouverts fur les befoins les plus prefiants de la République , furies maux qu'elle fouffroit déja, fur les dangers les plus prochains qui la menacoient, vous aurieZ dit a ceux qui donnoient le ton aux Délibérations de ces Provinces, ou qui en dirigeoient les Réfolutions: Au nom de Dieu! Mtffieurs, tandis qu'on déliberera fur lei maniere d'accorder des Convois illimités, ainfi que fur la Propofition que j'ai faite d'armer fo d co Vaiffeaux de guerre, d'augmenter les Troupes jusqu'd fo a 60 mille hommes, ne tardons point un inftant a former 1'Équipement, que L. tit P. viennent d'ordonntr. Le temps preffe, on nous tient le pouce fur la gorge; rj? c'eft fait de nous, fi nous ne commenpons par remplir l'objet le plus ■prefifant. Jrente deux Vaiffeaux de guerre bien ar més, la ferme réfolution d'en armer d'avantage, celle de nous vtnger d un* maniere éclatante de quiconque ofera désormais mfulter notre pavillon £if violer nos droits, ou qui entreprendra de nous f oreer h fortir des hornes de la jufitce, &f de la neutralité que nous avons adoptée, en impoferont a ceux qui infultent aujourd'hui impunément a notre foibleffe, & quiprofitent de nos dijfenfwns, ou de A. p. 10, — B. p. 33. — C. p. 0.  Grand Tableau. 47 de hbs irréfólutions. Ceffuns donc d'être les objets de la, rifée des Etrangers; cejjons d'être la dupe de deux Projets, dont les effets deviennent impoffbles, ft l'on veut exécuter l'un & l''autre h la fois. Peutêtre y a t'il parmi vous quelques perfonnes, qui, pour des raifons particulieres, refuferont de fe rendre d ce que je propofe ici, ou plutót, d la nécejfité:, mais, moi, en qualité de Capitaine & cl'Amiral- Général de la Républiqwe, je n'ai d'autres raifons que celles qui concourent au bien - être & au falut de la Patrie. J'avoue que j'ai d cceur l'Augmentation des troupes; mais je vois enfin que trop preffer eet Article , empêchera l'Équipement erdonné: Et ft je préfume des demain, que cette Augmentation devienne un obftacle abfolu au Rétabliffement entier & indispenfable de la Marine, & par eonféquent h la furetê publique, ainfi qm bien des gens l'affirment, j'y renoncerai a l'infiant% Ci? je vous conjurerai tous, p.tr ce qu'il y a dc plus facré, de fuivre mon exemple. — De telles repréfentations, Monféigneur , euffent été la preuve la plus convaincante de cette grande dispofition a remplir les intentions de L, H P. a 1'égard de PEquipement fusmentionné; les plus raifonnables d 'entre les Membres de la Noblefle Sc des Villes des cinq Provinces, fe fi«fent rendus a vos raifons; ceux, qui, feulement pour vous complaire , infiftoient fur I'Augmentation favorite, fe feroient empresfés a fuivre votre avis, & les ennemis fecrêts' de  4.8 L'es quisse d' u n de notre gloire 6c de notre félicité, ces monlires odieux enfin , confternés, atterrés , n'eüiTenr. plus ofe ouvrir la bouche, ni leves les yeux. Mais, bien loin de faire une telle propofition, F. A. perfifta a defirer, a presfer 1'Augmentation des troupes; elle ne ceffa de croire que ce feroit fait du falut de 1'Etat, fi l'on ns joignoit cette Augmentation au Rétabliffement de la Marine} ainfi, les diffenfions & les débats, fur ces deux objets, continueren t comme auparavant , 6c V Ar mement de l <. Faiffeaux, que L. H, P. avoient fi fagement ordonné, fi initamment recornmandé, pour le fervice de 1'année 1779, n'eut point lieu: 6c l'on yerra ci, apres que celui de ƒ2 Vaiffeaux , qu'Klles ordonneren pour le fervice de 1'année 1780, manqua par les mêmes raifons:. II n'eft. donc pas furprenant que lorsque les Anglois nous déclarcrent la guerre, nous eufTions été pris au dépcurvu. Après cela, quelle idéé peut-on fe former de cette Affertion, tant- de fois répctée dans le émoire de F. A. 6c ailleurs, qut ft nous avions eu un Armement de fo a 60 Fais-. feaux de guerre^ fi nous avions en même temps. pprté nas tfi uoes au nombre de fo a 60 mille homMes, on nous auroit refpetlé, & 'nous aurions évité la malheurs qui nous font arrivés?.... t J'ai déja démo'ntré ernt fois que la feule impoffibilné de trouver a temps des hommes, pour cette Augmentation 6c pour 1'Equipement des Vais-  GrAnd Tableau. 49 Vaiffeaux, devoit faire cchouer 1'un & 1'autrc de ces deux objets ,• , Sc particuliérement le dernier. J'ai presque honte de me répéter fi fouvent: fed nunquam nimïum dicitür, quod nunquant fatis difcitur, dit S ene que («): Sc Sine que a raifon. ii ne manquoit a notre fituatioft qu'un genre d'importunité, que les Anglois nous avoient épargné jusqu'alors, & cette irnportuhité eut enfin lieu. Le 22. Juillet St le 25. Novembre dela même ahnée 1779, le Chevalier Totke nous demanda formellerrient les Secours ftipulés par les Traités j entre l'Angleterre & nous: Sc pour dönner plus de poids a cette Réqüifition, les Vaiifcaux de cette Puiffance continuoient k piller les rtótres, & fon Amirauté s'emparoit k fon gré de nos biens. Dans tout ceci l'Angleterre n'avoit cn vue que fon inté- rét Sc notre ruine. - „ Si je puis, fe difoit- „ eïle, faire réfoudre ces Hollandois a me four„ nir fans raifon, le Secours que je leur dé„ tnande, je les brouille avec" la France Se „ 1'Efpagnej Sc tout 1'aVantage qui cn réful- tera fera pöur moi. S'ils s'opiniatrent k ne A point m'accorder ce Secours, paree que le ,, Cafus Fcederis n'a pas lieu, alors mes bravcs }, marins continucront k piller leurs Navires, »> * («) Spijt, LXXr'i. D  50 L'E S Q_Ü ï S S E D' u N „ a voler, a maltraiter, a mutilcr Sc a aflas„ finer leurs gens; & mon Amirauté ne ceffera de s'approprier, moyennant une rétribution arbitraire, ou autrement, de tous les bois „ de conftruction, ancres , voiles, cordages, „ Sec, qu'ils croient que l'équité publique Sc „ la ftipulation expreffe de VArt. IV. du Traité i, 1574 leur permettent de vendre a qui bon leur femble. Et lorsqu'ils s'aviferont de me „ faire des Repréfentations fur ces deux ob,, jets, je ferai fourde fur le premier: quant „ au fecond, je leur ferai voir que le fens lit„ teral Sc formel des Traités ceffc d'être tel quand il s'agit de mon intérêt "i C'eft ainfi que les liens, qui s'étoient formés autrefois entre l'Angleterre 6c la République, pour la furêté 6c le bien - être réciproques des deux PuiiTances, étoient devenus a notre égard les fers du plus honteux efclavage. Or, pour brifer ces fers odieux, il nous falloit une Marine; 6c pour en avoir une, il falloit que 1'amour Sc 1'intérêt de la Patrie, que fon honneur, que fa dignité, remportaflent chez nos Récalcitrants fur des intéréts particuliers, fur la vile ambition de dominer, fur le laehe defir de plaire, fur la bafle jaloufie, fur la fauffe politique , Sc fur la déteftable Anglomanie, dont plufieurs étoient épris j il falloit, enfin, que V. A. pcnfat Sc agït dc la maniere que je 1'ai dit dans 1'avant dernier Paragraphe. Les  Grand Tabéeaü. $f Les chofes feftèreht fur ce pied jusqu'au i£i Décembre de la même année, qu'arriva la Rencontre entre le Comte de Byland & le Commodore Fielding. L'infulte fanglante faite en cette occafion au Pavillon de la République, fut une nouvelle preuve que les Anglois croyoient avoir le droit d'exercer fur nous le même despotisme qu'un despote de 1'Afie exerce fur fes efclaves. Par cct attentat a la Liberté publique, ces Infulaires audacieux manquerent a toutes les PuiffanCes maritimes de 1'Europe: notre caufe deviht celle de ces Puisfances, & leur intérêt, leur dignité, exigcoient d'Elles d'en tircr vengeance. — Cependant,' hous fïmes a la Cour de Londrcs quelques Repréfentations fur eet oütrage j mais elles furent méprifées: le Fort coupable récrimina contre le Foible innocent, & ce demier dut fe taire. Pour comble d'humiliation, le jli. Mars 1780 le Chevalicr Torke remit aux Etats - Généraux un Mémoire, dans lequel, après une longue expofitiori des griefs, que S. M. Britannique prétendoit avoir contre la République, il étoit dit: „ Que fi contre la jufte attente dc 5. M„ ii Leurs H. P. ne lui donnoient pas, dans le 3, tertne de trois ftmaints, une Réponfe fatisfai„ fante touchant les Secours réclamés depuis 3, huit mois, S. M.-> regardant cette conduite „ comme un abandon de 1'Alliance de la part 9i de Li Ü. P. n'envifageroit plus les Provind % h  52 V £ S Q_ U t S S E Ü N ,, ces-Unies, que fur le pied des autres Püisfances ncutres non privilégices par les Trai„ tés, & par eonféquent feroit fans délai fuspendre provifionellemcnt, & jusqu'a nouvel ordrc, a 1'égard dc leurs fujets, tou„ les les ftipulations particulieres des Trai,, tés encre les deux Nations , nommément „ celles du Traité dc 1674, & s'en tiendroit „ uniquement aux principes généraux du „ Droit des gens , qui doit fervir de regie entre les Puiffances neutres non privilé- „ giées ". Ceci n'étoit que la répétition d'une Déclaration verbale que Mylord Stormont, Secrétaire d'Etat, avoit faite a 1'Envoyé Extraordinaire des Etats, le 28. Janvier précédent. Trois jours après L. H. P. firene prcfenter a Mr. Tirke, par leur Agent, Mr. van der Burcb dc Spieringsbotk, une Réponfe qui portoit en fubftance, „ qu'Elles avoient réfolu de faire repréfenter a S. M. Britannique, par le „ Comtc de Weideren, leur Envoyé Extraor„ dinairc, qu'elles fouhaitoient de fatisfaire le plutöt pofïïblc aux dcfirs dc 5. M.t „ cn lui donnant une Réponfe pofitive: „ que le Mémoire de Mr. rAmbaffadeur étoit devenu 1'objet des Délibérations des Provincesmais que L. H. P. prévoyoient que la „ forme du Gouvernement, inhérente a la Conftitution de la République, ne leur pcr,', mettroit pas d'effeftuer cette Réponfe dans 1 » le  Grand Tableau. 53 „ le délai fixé ". — Elles prioient au refte Son Excellence d'appuycr de fes bons offices cette Repréfentation auprès du Roi. — Mais Mr. Yorke refufa d'accepter cette Réponfe, & d'employer fes bons offices en cette occafion. — Enfin le Comte de helderen dreffa de fon cöté, & fur le même objet, un Mémoire qu'il communiqua a Mylord Stormont, avec priere dc le remettre devant S. M.j mais Mylord , après avoir pris les ordres de fon Souverain, répondit: „que le Mémoire du zi. Mars, ne „ contenant que la Réfolution du Roi, expri- mée dans la Déclaration verbale qu'il avoit „ faite lui-même au Comte le 28. Janvier, „ S. M. ne pouvoit apporter aucun changc- ment au délai qu'Elle avoit fixé ". Voila. la maftiere, dont nos Allics agiflbient avec nousj voila de quel ton ils requéroient le Secours qu'ils prétendoient leur être dü par nous & nous avions parmi nous une ca¬ bale aveuglcment dévouée a de telles gens!.... Enfin, l'on apprit bientöt qu'on ne retarde pas impunément a obtempérer aux volontés, ou plutót, aux ordres de la Cour de Londres: le 17. Avril George III. ordonna que les menaces du 21. Mars fuffent exécutées dans toute leur étendue. Tant d'outrages & de prétentions étranges dc la part de l'Angleterre, tant d'humiliations d 2 hon-  54 V E SO.ÜISSE UN honteufes, forcerent enfin les Etats'Généraux a prendre un parti digne d'Eux. Le 25% Avril L. H. P. réfolurent de faire déclarer a la Cour de Londres, ainfi que le Comte de Weideren le déclara en effet le 4. Mai fuivant, que le Ca/us Feeder is n'étant point applicable k la guerre préfente, Elles s'étoient déterminées a ne point accorder le Secours qui leur étoit dcmandé: Elles déciderent en même temps de donner des Convois k tous Navires marchands, qui ne feroient point chargés d'effets exprelfément déclarés de Contrebande par les Traités, Sc d'armer zi Vaiffeaux de ligne, Sc 31 Fregates, pour fubvcnir a ces Convois, Sc pour garder nos cötes. La première de ces Réfolutions acheva d'irriter les Anglois. La feconde ranima le courage de nos Négociants j Sc 1'Europe étonnée de notre longue Sc honteufe indifférence fur la ruine de notre Commerce Sc de notre Naviga* tion, s'attendit qu'au dehors nous protégerions efficacement 1'un Sc 1'autre, tandis qu'au dedans, nous nous mettrions en état de foutenir 1'effet des deux Réfolutions. Mais 1'Europe fe trompa dans fon attente; 8c nos malheureux Négociants, malgré le doublé Droit de Fret & de Vente qu'on leur faifoit payer, pour fournir aux frais des Equipements deftinés a protéger leur Commerce, malgré leurs refpeólueufes Sc pres-  50 L' ESQUISSE P'UN batimens Américains dans Ie havre de Plfle de S. Martin (a)-, leurs déprédations a 1'égard de nos Vaiffeaux continueren; leurs violences, leurs cruauté» envers nos gens de Mer redou-? bierent} & les honnêtes & malheureux Citoyens de ce Pais, réduits a gémir fur notre deftinéc, devoient voir les fuppóts de la Cabale triomphante applaudir a ces forfaits; ils der voient entendrc dire que nous nicritions de tels traitements $ que nos fiers & cruels oppresfeurs étoient nos Amis, nos Fr er es, que nous avions irrités injuftement! Monféigneur/ ces Amis, ces Freres, étoient des Parricides déteftables (b) j & ceux qui profanoient ainfi ces noms facrés de Frerts & d'Amis, étoient les plus laches de tous les hommes; e'ctoient des traitres indignes de respirer 1'air du pais, qui les a vus naitre. Les chofes en étoient - la, lorsque Mr. Laurens, ancien Préfident du Congres Amcricain, tomba entre les mains des Anglois. Parmi les ÏPapiers, qu'on luifaifit,fetrouva le fameux Traité Eventuel & quatre autres Picces, que Ia Cour de Londres envoya au Chevalier Tgrke, 6c (a) Lt 9. Aoüt. (b) At amici fuerunt neflri, to majora meruerunt fupplU ei». Nam qui igtutos leedie, latr» appellatur, qui amices, fullominüs quam patricida, —- Petron, Arbit.  Grand Tableau. 57 & que V. A. voulut bien fe chargcr de remettre le 20. Octobre a 1'Aflemblée des Etats de Hollande. En cette occafion , Monféigneur, vous vous êtes acquité a merveillc de Ia charge eTAvocat - Général j vous mites tant de zéle $c de chaleur dans votre Réquifitoire, que l'on débita que vous ne témoigniex jamais tant d'ardeur, que lorsque vous entrepreniez d'appuyer les intéréts de l'Angleterre, ou que vous propofiez des Augmentations de troupes: ce qui donna lieu de rappeller 1'affaire de la Brigade Ecoflbife, 1'hiftoire des Convois, oc bien d'autres hiftoires, que jc ne prendrai point la peine de nommer. Les Anglois furent enchantés de la découverte de ce Traité Eventuel, paree qu'elle alloit leur procurer le dernier prétexce de rompre ouvertement avec nous} d'envahir impunément nos polfemons} de faifir indifféremment tous nos navires marchands, & de donner le dernier coup de grace a notre Marine, en enlevant ceux de nos vaiffeaux de guerre, qu'ils pourroient rencontrer en mer Et notre clique Anglomane fouhaitoit de tout fon cceur, que cela arrivat. Enfin, l'on connoit les deux Mémoires que le Chevalier Torke préfenta aux Etats - Généraux, aux fujet de ce Traité, le 10 Novembre, Scle 12. Öécembre: l'on connoït également les Réponfes fages, prudentes ÊC honncD s «s,  58 L'ESCIUISSÏ D'UN tes, que L. H. P. firent a ces Mémoires, ainfi que les autres démarches pacifiques, qu'elles firent en cette occafion: mais la maniere impérieufe, arbitraire Sc déraifonnablc, dont la Cour de Löndres fe conduifit dans toute cette affaire, ne permit plus de douter que cette Cour n'eüt abfolument réfolu de nous attaquer ouvertement. En effet, le 20. fuivant S. M. Brittannique figna fon fameux Manifeste, ainfi que 1'ürdre de délivrer des Lettres de Repréfailles contre tous les Navires, Effets, ScSujets de la République. Hé bien! Monféigneur, croyez - vous que f o a 60 mille hommes auroient pu réfuter ce Manifeste, Sc faire révoquer POrdre? C'étoit une bonne Marine, qu'il nous falloit pour cela, Sc nous ne 1'avions pas | Pour cette fois, il étoit naturel de penfer qu'au moment, oü l'on venoit d'être ouvertement attaqué par Mer, fans qu'il y eüt aucune crainte de 1'être par terre , on défifteroit de toute inftance ultérieure pour 1'Augmentation des troupes; il étoit a croire qu'on fe prefferoit d'arrêter la Pétition de 1777, pour la Réparation des Vaiflëaux, Sc pour un Achat desMatériaux de conflruction; & qu'on accorderoit en même temps la Pétition faite le 19. Avril 1779, pour 1'Approvifionnement des Magafins. Mais on n'abandonnoit pas ainfi 1'Objetchéri; le z$. Décembre, deux jours après qu'on  Grand Tableau. 59 qu'on eut recu a la Haye la nouvelle du M anxfeste Sc de 1'Ordre du Roi d'Angleterre, V. A., en répréfentant a L. E. P. la néeefiité de pouffer vigoureufement la conftru&ion de Vaiffeaux propofée, ainfi que les arrnemens deftinés pour 1'année 1781, fit une nouvelle peinture du prétendu danger, qu'il y avoit d'être attaqué par Terre ; Sc infifta derechef avec ardeur, z ce RétablifTement, 8c par eonféquent , une des principalcs caufes des malheur» qui nous font arrivés depuis* DE  Grand Tableau. 63 DELA DIRECTION et de l'EMPLOI DE NOS FORCES NAVALES, depuis le c om.me ncement des hostili-' te's entre l'Angleterre et la Re'pUBLIQUE. Epoque du 10. Décembre 1780. au l. Janvier I782. Monseigneur! j\ la fuite du Chapitre précédent, j'eufle pu rapporrer les Demnndts, qui ont encore été réïtérées plufieurs fois, & fous différentes formcs, jusqu'a la fin de la guerre, pour obtcnir 1'Augmentation des troupes; Mais, après avoir déja. démontré auffi clairement, que je crois 1'avoir fait, 1'abfurdité de ces Demandes, la nature de leurs motifs, & les effets funeftes qui en font réfultés, il fuffira de renvoyer cette matiere dans le cours de eet Ouvrage, 8c de n'cn parler que lorsque 1'occafion s'en préfentera. En attendant, j'entreprendrai dc donner une idéé de la maniere, dont notre Marine a . été  64 V E S Q_ u I S S E D1Ü t« été dirigée & employee pendant cette guerre* que nous avons fi honteufement foutcnuc j & avant d'cntrer en rpatiere, je donnerai ici la Liste des Forces Navales, que la République avoit au mois dc Décembre 1780, 8c telle qu'ef» le fe trouve dans la Première Partie des Piètes Juftificativts du Mémoire de V. A. ETAT GÉNÉRAL DE LA MARINE De la Re'publique au mois de de'cembre 1780. NB. J'ai ici retranché la PrincelTe Royale dt 70 canons, paree que ce Vaijfeau étoit déja réformé, ci? j'y, ai ajouté le Zeebaars, de I tz , que Pon avoit omis. Meufe Le Maas 70 1728. 1 •' Le Prince Willem. 1748. Amftsrdam . . . L'Amiral Général. 1763. Meufe LeMars 60 1765. —■ ■ * Le Prince Frederic. Ï778. ———» ' '■ L'Arnir. Kortenaar. 1780. Amfterdam ... Le Nafl'au .... —- 1759. . ■ ■ »■ La Hollande . . . 1761. 1 11 1 L'Amfterdam . • . i?6g. > 1 ■ 1 n 1 i-.iii L'Amiral de Ruyter. —— 1780. Zé-  GrAnd Tableau. 65 Refforts. Vaiffeaux. Can. Aj£%£^ ZJande Le Zierikzee . . . 60 1733. ■ ■■ .. ■ ..i Le Zuidbevcland. ^— . 1746. M .ufo . . . Le Schiedam ... ge 1745. *—•—1—i La Prinfc. Caroline. —-— 1748. , , Lfi Rotterdam . . ——. 1.760. ' L'Amiral Tromp. —— 1780. Anur. cjfvm . . Lc Rhynland . . . 1753. 1 1 Le Glindhorft . . 1754- 1— Le Schieland . . —tySS* — LcNafiaa Walburg.' 1760. - — La Pr. R. Fr. Sopbie Wilhelmine . . ' 1768. 1 La Priiiceiïe Louife. ;• i 1769. : • L'Erf-Prins . . . 1 177°- ~ L'Amiral Piet Hein.1 < 1774- Le Bataye . . . . 1779- Frife .... La Pr. Marie Louife. - 1760. 1 La Pr. Fr. Louife I Wilhelmiiie . . —J - 1779. Amfterdam .: . Le Loo i . . I 4.0 . 1749. ü—~ Le Poénix .... '——1 tf$n Le Zuiicveld . . . . 1753. 1 Le Bluis . . . - 1754. — L \ Landskroon .. —— i?55- 1 Lc S wieten . . . —— 1759. ' L'Argo .... 1772. Meufe . . . Le Caftor . . • 3Ö 1758. . —1—— 1 La Thetis . . . 1766. ———1 Le Talon . . . 1770. . : 1 La'Brille . . . 1775. A'ad.rdar. . . . Le Hof Souburg . 1761. ~r—i Le Beverwyk . . ^ 1767,' *- Le Zeptat . ■ . — 176-7. La Bellone . . . 1768. E Anr  66 v ESQ.UISSE D'UN, Rejbrts, Vaiffeaux. Can. ^"-^Con- firuclion. Amff/'rdam . . . L'Amphitrite . . . 36 J770. 1 — Le Jalbn . . . j . 1772. Zélarde . . . Le Brunswyk . . . 1761! Quartier duNord. Le Dieren .... 1757. — Le Medenblik . . 1780! Frife .... L'Eensgezindheid. - , 1780. Meufe L'Oranje-Zaal . . 04 175a." ■ La Beilone . . - 1763. — L'Arend . . . . Ï769. Amfterdam . . Le Triton . . *753- - Le Boreas . . . 1754. — . Le Zeepaard . . , - 17$$. • Le Weftellingwerf. . 1755. ——- La Thetis . . , ï?68. —————— La Waakzaamheid. , 1769. ■ ■ . La Vernis . . . ^ -1768. ■ •—1 ■ Le Valk . . • . 1770. - L'Alarmé . . . ». J-774- Zélande . . . LeS. Martensdyk. . 17^3. ■ * ■ Le Walcheren . . . 1767" QuartierduNord. Le Hoorn . „ 1780. <———L'Enkhuyfen . . 1780. Frife .... L'Eendragt . . m 1769. Meufe . , . Le Zephir . . i2 1760! Amfterdam . . Le Zeebaars . - . —— * - ■ " ■ 1 ■ Le Zwaluvve. j io 177a; @r •' &7 Vaiffeaux de Iigne. """ — 39 Fregates. —— — 3 Sloops ou Senaux: Ce qui fait en tout 69 Vaiffeaux de guerre, fan* compter ceux qui étoient alors en conftruction.' ETAT  Grand Table a-u* 67 ET AT öes VA IS SE AUX PE LA LlSTE TRE'CE,DENTE, LESQTJELS E'TOIEfïT EN 'CoMMISSIONiAU MÊME MOIS J5.E DE'CEMBRE 1780. NB. Cet Et at "eft également drefie fur celui qui / fe troüve. dans la première Partie des Piè~ ces■ Jufiificatives du Me'MOIR^ de S. A, S.; •mais j'ai trouvé borï de 'lui dörin'er ici ürt ordre plus naturel & plus. dfar , qjaë '-cefai qu'il avoit, Endroits. Vaiffeaux. jCar. j Commandant!, Hëlvoet-Sluys.' Ltf^aas, Vaiffeau . • 1 ' ' I de Garde .... 70 jSonnemar.s» ' Le Prinu'e Willem. p)e Bruyiv' Lc Schiedam ... 50 RaWys. Le jiaipn 36- Van-Ginnep. » L'Öianje-Zaal ... 24 VoschvanAv* ' ' \ ^ Amfterdam .. * 'Lf Amiral de Kuyter. 60 Contre > .ArnH. ral Zoutman. Le Glindhorft; cfoiiMfe Van Vlierden, ; J^PrinteffeRovak. —• Kaders. L'Erf-Prins . . . pedel. L'Amiral Piet Hem. —*— W., van -Braam.' |.Le Phénix .... 40 Van Som £ 2 Ara-  68 L'esq.uisse d'un Endroits. Vaiffeaux. Can. Commandant*. Amfterdam. . "Le Zuyleveld . . 40 Van Lno Le Blois ■ ... . Van WÓenfel. Le Landskroon . . Mauregnault. t e «£hir • • • • 36 Wiert. La uellone .... -—- Dekker L'Amphitrite . . . Braak. ' Le Jaton Sds. • r £?UI?hm • • • Mulder. La Waakzaamheid. —— Overmeer. Texel .... L'Alarme. —— Mulder. Au Veer . . . L'Amiral Général. 70 Vice - Amiral T Hartfinck. Le Batave .... 50 Bentin'ck. Le Zwieten ... 40 Nauwman, Le Medenbhk . . 36 Ryneveld Le Hoorn ... 24 Hékkers. LEnkhuyfen . . Frykeniuj. rAu Cartnage La Princeffe Fr. L. dWïeringen . Wilhelmine . . 50 Idfinga. ' " Vlie ..... L'Eensgezindheid. 36 Bouritius. Zuidwal . . L'Argo 40 E. C. StaringB. La Venus .... 24 'f. Comte de Rechteren. Zélande 1 . . Le Zuidbeveland. 60 Van Kinkel. LeS. Martensdyk. 24 Stavorinus. Le Walcheren . . ——- 1 Haringsman. Le Brünswyk . . 36 1 Pruyft. Mediterranée. La Princeffe Louife. 50 j c. Atn.Binkes. Mt-  74 VE'S q U I S S E " i>* U N nous tendoient de toutes parts, Ie gouffrè de malheurs qu'ils crcufoient devant nos pied?, & ou^ils cherchoient a nous précipiteri tant de chofe reünies, enfin, préfageoient clairement l écldt fi'nnp frw *ri~»u:.>. v. i . — r"""zLll,te» «- nont ie de*but- feroit 1'enlévement fubit de ceux de nos Vaffeaux de guerre, qu'ils rencontreroienr, la pnfe de tous ceux de nos Navires marchands, quWe trouveroient dans les Ports d\4ngleterre, ou-en mer, & la perre d'une partie de nol Etabhnemcns d'Amérique ou d'ailleurs 4UUiliuu' uonc n avoir pas prévenu eet êclat vers les mois d'Aout ou de Septembre, par des moyens femblables a ceux qu'on tenta d'employer fur la fin de 1'année, c'eft-a-dire lorsgu'il n'étoit plus temps?...... Qu'étoit uuuc ucvenu ïe.tjonleil d'Etat? qu'étoit de- ^u^iu» uc ia iviariney qu'étoit deyenu notre Capitaine & Amiral - Général? oü étoient, ea un mot, ceux que le Souverain a conftitués pour pourvoir de confeil & d'eflet a la fureté de nos biens & de nos pofleflions ?... Une apathie fatalp sVrnif. «.li» a— _ ' ' / * » . - w". uutic enjparee de toutes lcs:ames ? ou étoit-on plongé dans le fommeil tVEpimênïdu ? jvjon : eet état d'inaftion n'étoit qu'un engourdiffement caufé par quelques torpilks, & ces HrpïlUs étoient le Chevalicr Yerke &• — ~» vy^t,v/ia, «ni vjranas que Petits.  Grand Tableau. 75 , ppnAnnr les ttenx dcrnicrs mois dc cette mê¬ me smnée les fujets de défiance Sc de crainte redoublerenr, êc les motits puiiiants, ïes raifons preffantcs, qu'on avoit d'ufer de toute la célérité, de toute la prudence poffible, dans 1'emploi ÖC 1'expédition de nos Vaiffeaux, redoublerent de même. II falloit manquer dc fens' comraun, ou être affecté de la plus hon- teufe indifférence, pour ne pas le fentir. En cffet, la dccouvertc du Traité Evtntuel, les menaces contenues dans les Mémoires, que Mr. Yerke prcfenta a L. % P. lc 10. Novembre, Sc le 12. Décembre} les mêmes menaces réitcrées vcrbalement par eet Ambaffadcur lc r.wiMnr 1^ r^rrri/- rnnrr & inmffiffant. orc- *vy . , ; 1 - fcritpar la Cour de Londres, pour obtenir des Etats une réponfe immédiate 8c fatisfaifan- tc l 'ces' Mémoires, la nature des avis qu'on devoit. recevoir du Comte de Weideren, les avis particuliers qu'on recevoit d'ailleurs Sc coup fur coup, la crife extreme, enfin, ou. les chofes étoient parvenues, n'annongoienc quertrop la certitude Sc 1'approchc du moment terrible,- óü il nc devoit nous refter que le re- pentir Sc la honte d'avoir laiffé nos Etabliffe- mcn'ts fans défenfe, Sc notre Commerce fans protection; uc 11 avun yvuu. - tw„.r. un féulvaiffeau de nos ports, Sc d'avoir négligé d'armer 8c d'équiper plutót les autres. Ce fut toutefois et moment, qu'on choifit pour faire SB9n  76 L'E'S Q. u ï S S E D' U N faire partir d'ici , & avec autant d'affurance qu'en plcine Paix, les Vaiffeaux fuppofés deftinés a protéger notre Commerce & nos Colonies, Ce qui fit dire aux Anglois mêmes, que fi ce n'étoit point-1* un acit de démence, c'étoit quelqut chofe de pis. Le Rotterdam & la Princeffe Caroline, accompagnés d'un Vaiflêau de la Compagnie des Indes Orientalcs, partirent donc'de la rade d'Helvoet le if. Décembre de grand matin, lc premier, pour fe rendrc en Amérique, le fccond a Lisbonne, & ils tomberent tous les trois entre les mains des Anglois avant d'avoir palTé la Manche, paree que 1'Exprcs, (qui, felon Ie Mémoire de F. A , avoit été dépêché dela Haye le 24. pour leur porter contre-ordre,) n'arriva a Helvoet que le lendemain entre Jo. óf 11, heuresdu matin, temps vraiment bien employé* pour un trajet de y. heures; ces Vaisfeaux, disje, tomberent entre les mains de 1'ennemi, par, ce qu'on n'avoit point eu la précaution de charger 1'Expres d'un Ordre de leur envoyer une chaloupe, ou de leur faire le fignal de rentrcr en rade, au cas, qu'ctant partij, ils fulfent encore peu éloignés a 1'arrivée dc eet Expres: Et cn effet, ils étojent alors fi ppu éloignés qu'il eüt été très-facile de les rappeler, c'eft dont Helvoet entier peut rendre témoignagc Du refte des Vaiffeaux qui étoient partis quelques jours auparavant, & qui curent le bon- hcur  Grand T a b l e a u. 77 heur d'échapper aux Anglois, X Amflerdam, commandé par le Comte de Byland, & déja délabré par trois ou quatre années de commisfion, alla fe faire radouber a. Lisbbnne: la Princeffe Marie Louife, qui par fon extréme caducitc ne tenoit plus enfemble, 6c qui étoit toutefois deftiné pour Curacjao, ne put aller plus loin que Cadix, oü il fut vendu: F. A. envoya aufïï, au Comte ie Byland, ordre de vendre la Frégate le Dieren, qu'il avoit amenée avec lui , & qui ne valoit pas micux que la Princeffe Marie Louife De forte qu'il fembloit que tous ces Vailfeaux , deftinés a protéger notre Comoierce & nos Etabliffements, n'étoient partis d'ici que pour fe faire prendre, ou fe faire radouber , ou fe faire vendre: Ce n'eft pas tout; le Naffau 8c le Na£du Weillurg, partis de ce pais - ci en même tempt que Mr. de Byland, ne gagnerent les Indes Occidentale* que pour y pour pourrir dans une inact-ivité honteufe, & y devenir hors d'état dc jamais regagner 1'Europe. Lc même genre de DireéKon regna dans les mefures que l'on prit pour fauver 1'Isle de St. Èuftachei Au lieu d'a- (a) A. p. 115. B. p. 171. C p. 90. Mr. le Comte de Byland n'ayant point trouvé a vendre cette Frégate, il la ramena e:i Hollande. oü elle fut condamnée ii ne fervir déformais qoe de VailTcau de garde ' eu d'Höpital. . ,- ' • I  Grand Tableau, n'offusque déja que trop la Puiffance du Souve* rain, & fait trembler la Nation. Mais cePlan, Monfeigntur, dont les Rédacteurs de votre Mémoire n'ont point trouvé a. propos de parler $ acheva d'ouvrir les yeux a bien des gensj d'autres en furent indignés ; 8c il n'y eüt que la Gueldre qui y confentit, encore fut-ce conditionnellement. Malgré cette irréuffite, 1'ardcur pour 1'Augmentation des Troupes ne fe ralentit pas: ellefe reproduifit fous diverfes formes, 8c en différents temps, jusqu'a la fin de la guerre: 8c U ce fujet, je ne citerai ici que trois Propofitions de cette nature, qui furent encore faites cette même année 1781, 8c que voici: — i°. Le nouveau Plan que V. A. 8c le Confeil d'Etat préfenterent le 18 Avril a L. H. P., pour^ne Augmentation de 5)36 chevaux 8c de 17, 686. fantaffinsj mais (8c fans doute pour adoucir la pilule), du nombre dcsqucls, 6 mille hommes devoient former un Corps de mariniers, eompofé de trois Régiments de 16 compagnies chacun ; Corps, qui feul auroit ici fuffi, mais fur un pied différent que V. A. ne 1'entendoit; Corps, dont les Redacteurs de Votre Me'moire font mention («), mais fans dire un feul mos («) A. p. 41. — B. p. 55- — C, p. 28 £? 2>' «• F 2,  84 L' ESQ.UISSE D1 U N mot de la queut qui y étoit attachée, c'eft-aidire, des 026 chevaux, & des 11 , 686. autres hommes de pied , qui devoient être levés en même temps. — 20. La Réitération, faite le 2Z. Oclobre, de la même demandc des 6 mille mariniers: demande ici modifiée , il eft vrai, mais fous condition que ce feroit fans préjudicitr a la continuation des Délibérations pour 1'Augmentation favorite. *— 30. Les Nouvelles Repréfentations , faites par V. A. & le Confeil d'Etat, ("tant au fujet dc ladite Augmentation, qu'a celui de mettre les troupes en état d'entrer en campagne,) dans la Pétition dc YEtat de guerre, remife a L. H.P. le 28 décembre, Sc dans laquellc V. ji. Sc ledit Confeil, entr'autres expreflions choquantes Sc repréhenfibles, oferent avancer, „ Qu'ils n'avoient point d'au,, tre fatisfaétion des Avis, qu'ils avoient don,, nés, finon , qu'// conftera par-ld, que la ft,, tuation aSluelle de la Patrie ne pourra être im,, putêe d S. A. rj? au Confeil d'Etat (<*)." — Exprcffion de la dernicre abfurdité, fi l'on confidere que ces Avis étoient toujours accom- pagnés (a) Dat zylieden geene andere SatisfaBie van Hoogstde* zeiver •waarfebouwingen hebben, dan dat daaR-uit zoude blyken, dat de prïsenten toestand van het vader i, a n'd , is buiten schuld va» Z. D. H. en den Raap van Staaten.  Grand Tableau. 85 pagncs de la Démande d'augmenter les troupes, & que Ceux qui faifoicnt cette Dcmande favoient mieux que tout autre, qu'elle ne pouvoit que mettre obftacle au rétabliffement de h marine : „ Expreffion, (difent les Etats de Frife, dans leurhcnre (#) du n Avril 1781 aux Etats-Généraux) qui, felon nous, ne peut jamais convcnir, & ne convient ccr- „ tai- (a) Eer.e Uitdrukking, welkt enzes eragtens nooit, en zeker thavds geheel niet, kan te pasft ktmen, in de critique mnjlandigbedtn, waarin de Republiek zig bevind: éehe Uitdrukking , welke by een minder op hunne Regenten vertrouwend Folk, dan o-ize Ingezetenen, gehruikt door dtn mond Van het Eminente Hoofd, en een illuster Collegie van deze Republiek, van de allefnadeelig/le gevolgen voor den [laat van het Land had kunnen zyn: eene Uitdrukking, wette H. Ed. Mog. derbalven niet kunnen nalaten te rtmarqueeren, en over dezelve, als een gevaarlyken flat), haare uit erJle gevoelt fbeld te toonen , in verwagtinge, dat H. II- Mog. wel met II Ed. Mog. zullen willen coopereeren, ten einde zulke verregavide demarches by vervolg geene plaats nngen lebben; vooral, indien H. H. Mog. zullen gelieven te rejiectceren, dat de zoo herhaalde voorflagen tot verjierking der Republiek ter Zee (waar zy alleen zich ooit met vrucht kan flrskken) altyd zyn geir.nexeert geweest, (zelf nog ten tyde dat de Republiek reeds in haare Scheepvaart zoo wreed als wetteloos door Engeland benadeelt wierd,) om eene kostbaar: en nuttelonze augmênthtie der Landmagt, ten welken opzigte H. Ed. Mog. zig geëxpliceerd, en alle óhjeQien gefolveerd lebben, by Refolutie dezer Frovintie, in dato den 13. Jeu. uuary 1781, enz. F3  B6 V E S Q.U I S S E D' UN „ tainement pas dans les Circonftances critiques , oü la République fe trouve : Ex„ preffion , qui fortie de la bouche du Chef „ Eminent & d'un Illuftre College de la Ré- publique , pouvoit entraincr les fuites les „ plus funeff.es, pour la tranquillité du Pays, „ chez un Peuple qui auroit moins de con- fiance en fes Regens, que n'en ont nos ha„ bitans : Ex preffion , que L. N. P. ne fauroient manquer de remarquer, ni d'en „ témoigner leur extréme reffentiment, com9, me d'-une démarche dangcreufe , dans 1'at3, tente que L. PI. P. voudront bien coöpérer „ avec L.N.P., afin qu'a 1'avenir des dé3, marches aulfi étranges ccflent d'avoir lieu 5 „ furtout, fi L. H. P. vculent bien réflechir, „ que ces Propofitions , fi fouvent rcitcrccs pour augmenter les Forces Navales de la „République, ( le feul objet, qu'elle puisfe 3, remplir avec fruit,) ont toujours été accro„ chées, ainfi qu'clles le furent lorsque 1'Anj, gleterrc caufoit déja, a notre Navigation des 3, dommages fi crucls & fi injuftes,a uneAug9, mentation coüteufe & inutile des Forces de „ terre : Sur quoi L. N. P. fe font déja ex„ pliquees & ont réfous toute objeétion, par 3, leur Réfolution du 13 Janvier 1781. &c. " Si c'étoit ici le lieu, Monfgigneur, je démontrerois que ces juff.es piaintes n'ont pas rendu A> plus circonfpc6tc dans fes expreffions} je  Grand Tableau, 87 rapporterois tout au long, comment, dans la fammfeLettre, qu'Elle adreffa lc 17Janvier 1785*. aux Etats-Généraux , Elle eur 1'indifcrétion d'inculper la . Conduite de la Haute Souver aineté («), a 1'egard des mefurcs, que, felon Elle , on avoit négligé de prcndre, pour cpargner a la République les maux qui lui étoient arrivés depuis quelques années , ainfi que ceux dont 1'Etat étoit encore menacé , & qui pa» roilfoient inévitables ; je rapporterois, dis-je, a quel point tous les braves Régens, tous les honnêtes Citoyens de la République , furent indigncs des Alfertions hazardées , fauffes ou oflenfantes , que cette Lettre contientj & j'y ajouterois la Réponfe foudroyante que les Etats de Frife ne tarderent point de faire a ces Affertions, & de vous cnvoyer (£). Mais en at. tendant que je m'étcndeplus amplement la-desfus , je reviens a ces éternelles Demandes de 1'Augmentation des troupes; & j'ofe dire que, (abitraótion faite des vues & du but de ceux qui en étoient les inftigateurs) ces Demandes jnfidieufes, 8c préfentées fous tant de formes, caufoient par elles mêmes des maux affreux dans (a) Cejl ici la prspre Expreffien, rapportéc dans la Lettre, que les Etats de Frife écrivirent a S. A. S, le 25. Fe' wier de la même année. (b) Tout cela efi cmttnu dans la même Lettre des Etats de Frife. f4  SB L'ESQUISSE ï>' U N dans toutes les Affemblées, tant Municipales, que Provinciales & Générales. Car, tandis que quelques Membres voués a la Cabale, ou craignants fon reffentiment, confentoient a tout ce qu'elle exigeoit, d'autres dcmeuroient indétermincs , ou fc bornoient a des repréfentations; d'autres confentoient a demi, ou a un accord conditionnelj 8c d'autres refufoient de rien accorder: Et de ces divers eiTets de iacheté & de foiblesfe, d'inéfolutions 8c de velléités, dc condefcendance 8c de refus, il ne pouvoit que réfulter dans chaque Ville, dans chaque Province, 8c enfuite entre les Provinces mêmcs, un conflit perpétuel de fentiments & dopinionsj 8c par eonféquent des conteftations, des eebats, 8c une dcfunion générale, la, oü il n'eüt du ïegner que la concorde, 8c un concours unanimc aux vrais 8c uniques moyens de fauver la République. Enfin, cette fukeüu d'augmenter les Troupes, pour garantir nos Frontieres dc terre d'un danger imaginaire, comparée avec les menées fecretes qu'on a comployces en 1783 & 1784, pour retarder de conclure avec la France une Alliance, qui nous auroit préfervés dc la querelle qu'on a porté 1'Empereur a nous chercher, cette fureur rsouiE, dis-je, comparée avec les menées de cette efpece , qu'on a employees fur la fin de 1784 8c au commencement de 1785", pour croifer 1'Augjnentation fusditc, 8c pour empêcher nos Habi-  Grand Tableau. 89 bitants de s'armer dans le danger Ie plus évident, oü ces mcmes Frontieres étoient d'être attaquécs par des forces redoutables , prouve seuie, & saus replique, le defl'ein qu'une Affociation de fcclérats a ici formé d'alfouvir fon ambition ou fa vengeance, paria ruine de fa propre Patrie. — Je reviens au Récit de nos défaflres, 6c au peu de foin que l'on a pris de les prévenir, ou d'y remédicr. Si la longue négligence, apportée dans le rétablilfement de la Marine, fi la lenteur exceffive dans les armements, avoient excité des craintes fondées 8c des murmures univerfcls, la prife des deux Vaileaux de ligne, 8c du Navire de la Compagnie des Indes, dont il eft parlé plus haut, celle de tou3 nos Navires de Commerce, que les Anglois rencontrerent en mer, ou qui fe trouverent dans leurs Ports au momen de la Rupture, la vue, enfin, de cette obftiuation immuablc a'augmenter les Troupes aux dépens des intéréts 6c du falut de 1'Etat, plongcrent la Nation dans une afHiélion difficile a exprimer. Rien donc ne pouvoir ranimer fon courage 6c fon efpoir, qu'un défiflement abfehi a 1'égard de cette Augmentation5 que plus d'aclivïté dans nos Ports; qu'un emploi prompt & bien dtrigé du peu de forces que nous avions en main j que des effierts prudents 6c vigourtux, pour rabaiflër autant que poffible 1'orgueil de nos ennemis, pour réprimer leurs F s dé-  tp L'ESQ_UISSE D' UN déprédations, pour protéger nos Convois, & pour parer, finon tous, du moins une partie des coups que ces ennemis pourroient nous porter. Mais, comme je 1'ai déja dit, tout le contraire arriva. Des lc mois dc décembre 1780, 5c felon la Lifte donnée par V. A, El- l lc-même («) 6c rapportée ci-devant, l'on avoit en commiffion a Amfterdam., au Texel, & autres Endroits du Zuider - Zet, fculs, 8 vaisfeaux de ligne 6c 18 frégates; 6c au mois de Mars fuivant, l'on commenga par fc dcclarer hors d'état d'enlever un Convoi Anglois, forti de 1'Elbe, fous 1'Efcorte d'une feule frégate & d'un cutter. — La dcmande d'une Efcorte, faite vers le 6. du même mois, par les Directeurs du Commerce dans la mer Baltique, la Réquifition que L. H. P. firent le 16. fuivant a V. A. pour procurer cette Efcorte, 1'attcnte de tous les Négociants, enfin, furent éludées, fous prétexte du défaut de forces fuffisfantcs pour accordcr la moindre proteótion, 6c du danger qu'il y avoit alors de s'éloigncr de nos Cótes. Au ton de candeur 6c dc fincérité, avec lequel les Rédacteurs de Votre Mémoire expofent ces prétextes, on feróit presque tentéde les croire (b). Sedcredat JudaeusApella. Ce- ia) Piècis Juflif. au Mint' de S. A. prém.Part. N. 10. (b) Voyez fur cela & fur ce qui fuit; — A. p. 48 4 14. — B. p. 63 a 72. — C. 3s è 32.  Grand Tablea u. 91 Cependant le Vicc- Amiral Hart/mek partit de la Haye vers le 5. Avril, pour fc rendre a fon bord, 8t y commenccr la brillante carrière qu'il a parcourue pendant toute la Guerre. Et le Sr. Manzon, qui ne laiffoit alors échapper aucune occafion dc fc railltr des Directeurs 6c de la Direétion de notre Marine, 6c qui du. train dont alloient déja les affaires, jugeoit de celui dont elles continucroient d'aller par la fuite, dit, au fujet de ce départ, dans fa Gazette du 11. fuivant: „ Lc Vice-Amiral „ Hartftnck eft cependant parti pour fe rendre a „ bord de fon Vaiffeau, après avoir pris con- gé du Prince, ainfi que Mr. van Kinsber„ gin, fon Capitaine de Pavillon. Le Secré„ taire de la Flotte eft auffi parti pour fe rendre „ abord du vaiffeau - amiral j de forte qu'après „ Varrivêe Al'Aümonieh, la Flotte fera com, plette, 6c pour ra mettre d la veile au premier " fignal. " Ce que je vais rapporter jufti- fiera 1'ironie du Nouvellifte, Vers la fin du mois d'Avril, il s'eft agi d'aller interceptor un Convoi Anglois, pret a fortir du Wefer avec 2800 Recrues deftinées pour 1'Amérique O), Sc fous la foible efcorte d'une frégate de 32, de deux petits floops, 6c de deux (4 L' E S Q. U I S S E DTUN blée des Ftats de Hollande & de Weft-Friie, une Propofition , oü l'on entroit dans de plus grands détails , qu'on ne Favoit encore fait , fur les funeftes effets de 1'inaótion dq notre marine ; on y infiftoit de la maniere la plus forte fur la nécefilté d'approfcmdir les motifs & les caufes de cette inaétion , fur les mefures a prendre, fur les moyens a employer, fur aux Efats de Hollande & aux Etats Généraux, par les Négociants de Dort , Harlem , Amfterdam &c Rotterdam, jntéreffés au Commerce de Surinam: Requètes , fur lesquelles j'aurai ci-après occafion de rrfétendre , ainfi que fur les fuivantes. 5°. La Requêtepréfentée vers le même temps aux Etats êc Zélande par les Négociants.de cette Province, intéres.fés au même Commerce. 6°. Les Piaintes particulieres portées le 14 Aout a la Régence de Rotterdam, par les Négociants de cette Ville, intéreffés au Commerce de la Baltique. 7°. La prelfante Recommandation des Intéréts de ces Négociants, faite Ie 17 fuivant p3r les Dcputés de ladiie Ville, en remettant aux Etats de Hollande les Piaintes dont je viens de parler. 8°. La Requête itérative , que les Directeurs du Commerce de Ia Baltique & de Moscovie , adreffercut Ie 23 aou: aux Etats Généraux. go. La Requête itérative, que les ïntérefles au Commerce de Surinam préfenterent le 29 feptembre a L. H. P- io°. Les Repréfentations, faites le 7. décembre a Son Alteffe , par les Négociants d' Amfterdam , 'intéreffés a,H Commerce des Indes Occidentale?,  Grand Tableau. 105 fur les efforts a faire pour préferver la République d'une ruine totale j 6c l'on y finiffoit par propofer la formation d'un Comitc, pour foulager V. A. dans l'Adminiftration de fa charge d'Amiral - Général; c'eft - a - dire, pour faciliter ces effets, ces moyens, ces mefures, dont je viens de parler, 6c pour effeétuer fans délai les Réfolutions que L. H. P. pourroient prendre, afin de rétablir les affaires, de conferver nos biens, 6c de venger notre honncur. l'EtablilTement d'un tel CoMiTé, pris dans le fcns que cette Ville 1'entendoit ici, 6c qu'elle lui a encore donné- dans la Déclaration que fes Députés rémirent a 1'A ffemblée de la Province au mois de janvier 178?, n'auroit porté atteinte ni a 1'autorité de V. A. , ni aux fonctions du Confeil d'Etat, ni a. celles des Colleges de 1'Amirauté } mais il auroit déconcerté les deffeins de nos ennemis du dehors, il auroit rompu la trame de nos ennemis du dedans, il auroit éclairé la conduite de votre Mentor; 6c par eonféquent, il vous auroit épargné les chagrins que vous avez effuyés enfuitc , 6c nous auroit préfervé des malheurs 6c de la honte, dont nous fumes accablés j ou du moins, ce CoMiTé, étant i même de voir les chofes de pres, nous auroit évité la peine de demander pendant deux annécs entieres , quelles étoient les caufes de l'ina CTiviTé inconce vable , qui nous allarmoit, qui nous défefperoit, 6c G ƒ que  ÏOÓ L' ESQ_UI SSE D' U N que rien ne pouvoit faire ceffer? Et après tout cela , fi V. A. avoit encore jugé a propos de faire drefler un Mémoire jujlificatif de fa Conduite , en qualité d'Amiral Général, les Rédacteurs de ce MéMOiRE n'auroicnt pas fi impunément ofé y employer les fophismes £c 1'impofture , qu'ils Pont fait dans celui que je fuis occupé a analyfer , & que je ne fais ici que parcourir. Enfin , Dort , Harlem, & d'autres Villes adopterent la Propofition £ Amfterdam , Sc tous les vrais Patriotes, y applaudirent ; mais les chofes n'en allerent pas moins leur trainc'eft - a - dire, que la Clique Anglomane intriguaj que 1'affaire traïna en longueur \ êc qu'elle finit fans que Pon prk de Réfolution conforme a cette digne & falutaire Propofition. Le Parti iniêrtjfé d faire écheuer cette Démarche vigoureufe , difoic Manzon, en prévoyant 1'iffue qü'elie auroit, a tout le temps d'intriguer pour parvenir d fon but , ci? felon toute apparince il y parviendra (a ). Le 30. mai, V. A. manda au Vice- Amiral Hartfinck de venir pour deux jours a la liayt avec Mr. van Kinsbergen, afin de concerter le Plan des Opérations maritimes pour cette Campagne. (&) Mais la nouvelle qu'une Efcade Arï- gloi- (») Courier du Bas-Ruin du 16 juin 1781. • (&) A. p. 60. —— B. p. to. -— C. p. 44, fcf fuivant.  Grand Tableau. 107 gloife, aux ordres dc 1'Amiral Parker, étoit dcftinée a quelque Expédition fur les cötcs de cc Païs-ci, rétarda la venuc de ces Mefficurs. Cependant, cette nouvelle nc s'étant point corfirmée, V. jl. écrivit dérechcf le 11. juin; Mrs. Hartfinck Sc v«n Kinsbergen partirent du Texel le 1 f ; & au lieu dc demeurer deux jours a la Haye, comme il eft dit ci-deffus, nos Mesfieurs en rnirent 20 dans leur voyage. . . i . Mais falloit-il tant de temps, pour conférer fur ces Opérations? .... Apparemment que non; car on fait que ces Mejjieurs employercnt une partie de ces 20 jours a fe pavaner a la Hayt, Sc qu'enfin, Je 1. juillet, le Vice- Amiral donnoit relache a fes travaux a Lapinien1/urg , maifon dc plaifanee fituce a Hillegom. Un homme , qui dans cette Campagne avoit déja palfé cinq femaines fur fon vaiffeau-, un homme, qui avoit fait la brillantc Croifiere dont il eft parlé ci - devant, & qui avoit affifté a une Conférence a la Haye, méritoit bien de prendre quelque repos {a) ! !! Mais, («) Rien nepeut donner une idéé plus jufle dela Négligence alfeétée, qui regnoit déjh, en ce temps-la, dans 1'Adminiftration de nos affaires de guerre, que le paiïage fuivant, extrait du Courier du Bas Rhin du 13 juin, Art. de la Haye dtr 7 du même mois. // eft bien iicidi jue nous ne voulons pas gutrroyer, ni par mer, ni  Io8 L' E S Q_ U I S S E DVU N Mais , que faisoient alors les Anglois? •—- Les Anglois ne fe repofoient pas: le 2i mai 1'Amiral Parker étoit parti de Ste IJelenenvec 4 vaiffeaux de ligne, pour ramafler le long descötes d'autres vaiffeaux de guerre, Sc fe rendre enfuite a Leith , d'oü il devoit efcorter plus de 400 navires marchands, deftinés pour, la Baltique; Ce que la Direction de notre marine eüt pu favoir , fi l'on avoit eu une bonne coirespondance en Angleterre, ou plutót, c'eft ce qu'elle favoit bien. Et partout ailleurs, nos fiers eimnmis continuoient impunément a nous faire tout le mal j offible. Et que faisoit on chez nou,? Chez nous, les Négociants de Dort, llarlem , jimflerdam Sc Rotterdam, intéreffés au commerce de Surinam , dreffbient la Requête , que leurs Députés préfenterent le 7 juin aux Etats Généraux, apres en avoir remis une autre aux Etats de Hollande , Sc s'être adreffés verba.lement a vous, Monféigneur, pour que ces Etats & F. A. vouluffent bien appuyer la première. Mais, h£ par terre. Les Capitaines de nos vaiffeaux de guerre viennent jouvent ici as sist er a la Comcdie Francoise; £? ce n'efl pas pour alltr faire des Recrues, comme ok le TRéTEXTE, qu'on a donné des Congés de fémeflre a 10 lommes par Compagnie, les daa Régiment de Mariniers exceptés.  Grand Tableau. 109 Mais, malgré lc taMeau auffi touchant que véritable, que ces Négociants y faifoient du danger de perdre cette Colonie, fi L. H. P. n'avoient point la bonté de leur faire donner quelqu' Efcorte, Sc de. leur fournir quelques primes néceffaires pour aider a. équiper Sc ar» mer les navires deftinés a y tranfporter des vivres, Sc autres denrées de la première nécesfité, — malgré 1'expofition de la ruine prochaine de la Compagnie même, Sc de plufieurs milliers d'autres citoyens , dont 1'unique resfource dépendoit d'une navigation non interrompue, tant avec eet Etablilfemcnt, qu'avec Curagao, — malgré la promeffe verbale de V. A., —- malgré la Réfolution fivorable que les Etats Généraux prirent a. cc fujet le 14 fuivant, —' malgré 1'itérative Requête , remife le 29 feptembrc par ces Négociants a L. //. P.,—. malgré une feconde Réfolution, non moins favorable que la première , Sc que L. H. Pm prirent fur lc même fujet le iy oétobre, — ■malgré les nouvelles inftances que les Intéreffés d''Amfterdam firent auprès de Vous le 7 décembre, — malgré, enfin les frais prodigicux faits par la Compagnie, Sc la perte irréparable que tant de pauvres families fouffroienc par ce retardement, la foible Eicorre promife fut refufée cette année par la Direftion de la marine i Sc les Négocians, indigncment trompés dans leur efpoir, obligés de faire déchar- ges  HO L* ESQ.UISSE U N gcr leurs navires, Sc d'en congédier les équipages, durent attendre jusqu'au mois d'avril 1782. pour exécuter leur entreprife. Je rapporterai ci - apres les prétextes qu'on allegua pour juftifier un tel refus ; prétextcs fi frivoles et fi honteux, que l'on ne fait qui ont ici affiché le plus d'impudcncc, ou Ceux qui les imaginerent, ou les Rédaótcurs du Mémoire de V. A., qui les ont rapportés. ET que faisoit-on au TeXEL, pendant le mois du mai? L'on y tra- vailloit piane piane a faire les préparatifs pour conduire notre flotte marchande au Sund, Sc en ramencr celle qui y étoit: Expédition , qui auroit déja du être faite, Sc qu'on auroit pu faire fans forces nombreufes, puisque pendant tout ce mois la mer du nord nous avoir. conftamment été ouverte. Mais des vengeances perfonnelles, le plaifir d'humilier les grandes villes de la Hollande , Sc un dévouement abfolu aux intéréts dc l'Angleterre , 1'emporterent fur tout, comme ils 1'emporteront auffi longtemps qu'il y aura parmi nous des laches Sc des traitres, c'eft-a-dirc, fi l'on n'y met ordre, jusqu'a la confommation des liecles. Et que disoient, sur tout cela, nos dignes Anglomanes? ils con- tinuoient a fe plaindrc de la foibleffe de notre marine, tandis que par leurs ctcrnclles inftan- ces,  Grand Tableau, m ces, pour 1'Augmentation des troupes de terre , ils avoient abfolument fait leur poffible pour cn empêcher le RétablilTement: ils lc plaignoient toujours de la rareté des hommes, après avoir fait tous leurs efforts pour augmenter la difficultc d'en trouver : Ils parloicnt fins ccffc de précaution 6c de prudence, c'efta-dire, du danger d'cxpofcr nos vaiffeaux dc guerre lorsqu'on pouvoit les.employcr avec lureté, tandis que fur la fin dc 1'année 1780, ou il y avoit tout a craindre , l'on avoit ofé en expofer . plufieurs, dont quelques uns ont été pris: au défaut de toutes ces raifons, ils avoient recours a 1'inconftance des vents, aux mauvais temps , ou a d'autres obftacles vrais ou fuppofés : Et lorsque quelque Ecrivain public s'avifoit de rapporter dans fes feuilles les juftes piaintes de la Nation , ou d'y faire quelque réflexionfur tout cc que l'on voyoit, 6c qu'on devoit fouffrir, ils crioient, ï-Vimpoflun! a la calomnie ! 6c s'ils en avoient eu le pouvoir, ils auroient fait pendre celui qui avoit écrit la vérité. Enfin , la vue de tant de chofes étranges, £c le defir ardent d'y voir remédier, firent résoudre a la Régence d1'Amfttriam dc faire un nouvel effort a eet effet. Le 8. juin les Députés de cette Ville repréfenterent par écrit a. V.  112 V E S Q_U I S S E t>rUN V. A. (a): Que quoique depuis plufieurs années, l'on n'tüt éprouvé de la part de l'Angleterre que du mépris, des affronts , des infultes, on avoit toutefois négligé de rétablir, notre marine, c'eft-a-dire , de fe procurer les moyens d'éviter ou de parer ces injuftiftices,de protéger nos Droits légitimes, notre Navigation, notre Commerce. — Que depuis que cette Puiffance nous avoit déclaré la guerre & avoit envahi plufieurs de nos Poffeffions, une inaclivité inconcevable & funejïe avoit regné dans la Direblion & rEmphi de nos Furces navahs: — Qu'il étoit du devoir de Braves Régents de rechercher les caufes de cette négligence inexcufable, & les moyens d'y apporter reméde: — Qu'un de ces moyens étoit la Propofition , que la Ville d'Amfterdam avoit faite le 18 mai précédent, d'adjoindre un CoMiTé a F. A.; — Que cette Propofition ne provenoit pas d'une méfiance des bonnes intentions & des deffeins de F. A.; ,, mais qu'une „ telle defiance tomboit fur Celui, dont 1'in„ fluence fur votre Efprit, étoit regardéecomme la caufe première de la leriteur £c de 1'indolence qui regnoient dans les affai- „ res. (a) Ce Mémoire, ou ces Repréfentntions dc la Régencï d'Amfterdam a S A., fut remis le 6. juillet fuivant aux Etats de Hollande & dc West-Frife.  Gr and Tableau. 113 ^ rcs. (a). — Que c'étoit donc avec tout le „ refpeót que la Régence d'Amfterdana devoit „ a V. A., mais en même temps avec la can„ deur Sc 1'honnête franchife , qu'exigeoit 1'importancc de la chofe, qu'elle lui repréfentoit & déclaroit cxprelfément , que feIon 1'opinion générale, le Feld-Marechal Duc de Brunsivick étoit regardé comme la première caufe du déplorable état de foiblcfle, oü la République fe trouvoit alors; de toute la négligence qui avoit eu lieuj de toutes les faulfes mefures que l'on avoit ,, prifes depuis fi longterm; Sc de toutes les fuites fatales qu'elles avoient entraïnées. — Que l'on pouvoit affurcr V. A. que 1'averfion& la haine de la Nation , contre la Per,, fonne & 1'Adminiflration du Duc , étoient „ montées a un tel degré , que l'on devoit „ en redouter 1'évenement le plus fachcux & „ le plus désagréable pour la tranquillité pu„ blique. — Qu'on ne doutoit point , que V. A. n'eüt déja été informée par d'autres de toutes ces chofes ; ou , fi elle les ,, ignoroit, il falloit 1'attribuer uniquement a la crainte que l'on avoit eue des effets du i, mécontentement du Duc. _. Cu'on ofoit „ ce- (a) Tous les'Paragraphes que je diftingue ici par des güillemits, (out les propres termes , dont en s'eft fervi «n divers endroits do ces Rtpréfintaiions. H  114 L'B stuurs S E D''U N cependant en appeller avec confiance a tout „ cc qui venoit d'être dit, Sc aü témoignagc de tous les honnêtes Sc fineeres Membres ,, de la Régence , que V. A. daigncroit in„ terroger, en leur accordant la pleine Uber5, té dc parler, Sc en les fommant de rópon3, dre felon leur devoir Sc leur confeience. — 3, Qu'eux , Mrs. les Députés, avoient entendu plufieurs fois , avec beaucoup de déplai* fir, Mr. le Confeiller-Pcnfionnaire fc plain„ dre, en préfencc de divers Membres de la 5, Province de Hollande, dc la méfinteliigen3, ce qui regnoit entre lui Sc le Seigneur Duc; .,, de Pafcendant que lc dit Seigneur avoit 3, fur Pcfprit de V. A., & qui faifp.it échouer 5i tous fes efforts pour lc bien de la Patrie. • 3, Que cette défunion Sc cette diverfité dc 3, fentiments Sc de vues , entre le principal „ Confeiller de V. A. Sc le premier Miniftre 3, de cette Province, devoient non feulement 3, avoir les fuites les plus funefi.es, mais qu'el„ les foumiflbient encore un moüf fuffiifant pour faire les plus fortes inftances, afin de 3, détrmre la fource de cette défiance, de cette difcorde, Sec. ■ Que, fi l'on avoit „ pu concevoir quelque efpoir d'améliora3, tion Sc de changement , l'on auroir préfé„ ré de s'abftenir de la préfente démarche; „ mais puisque l'on ne pouvoit pas s'en „ flatter, peur les raifons ci-defius énon- „ cées,  Il8 L' ESQ_UISSE "D1 U N Comme on connoit affez la valeur de^ raifons Sc des moyens , que le Duc employa dans ce temps-la pour conjurer 1'orage qui lui pendoit fur la tête , je ne m'y arrêterai point'ici. Je ne contentcrai de rapporter qne la nouvelle de ces Repréfentations s'étant répandue, tous wick; que tandis que Ia Rcpence A'\Atnfle*dam dreflbït les jufr.es Repréfentations dort je parle ici, l'on vir a la Haye, en face de la Porte de la Cour, un Mai planté a 1'honreur de ce Duc, & orné d'un F.mblême représentant un' Héros triomphant a la vue d'une arniée en fuite, & avec cette Devife, IIostium ter rob? ■— Emblême, qu'on auroit pris pour une raillerie, & la Devife, pour hm fobriquet, fi l'on n'avoit fu que tout ceia ïf étoit que PetTat de la ville adulation de h Pour^eoifie arniée de cette Réfidence , & notamment de Ia Compagnie de drapeau bleu, dont le tour avoit été de planter les Mais cette année-ih. — Qui croiroit en'core, qu'après avoir fi honteufement próné le Duc , comme la Terreur de nos Ennemis en 1781, l'on eüt porté 1'impudence en 5782. au point cTelever fon Nom jusqu'au ctel, ainfi que le fit la Compagnie du drapeau verd, en ornant le Mai de ce Prince, d'une Renommée qui tenoit les Armes du Héros, & s'élevoit vers la voute célefie, avec la'Devife, Virtute rjf Meritis ad Sydera tollo? — Un homme fi fameux fur la terre , A\ox\Q.(d'Amfterdam) 36 • H. K. Dekker. Lc Zephir . 36 Wiertz. Le Medenblik ... 36 ■ Ryneveld. L'Eensgefindheid . . 36 ——— Bouritius. Le Jafon (d'Amft.) . . 36 Se/s. ' La Venus . . . . 24 Le Cte.de Reek' teren. Lc Dauphin ... 24 Mulder. La Waakzaamheid . . 24 —— VanOrermeer. Le Hoorn. . . .24 f/e'kkers. L'Enchuyfen ... 24 Frykenius. L'Ajax. . . .24 , Le Cte. de Weideren. La Marie Jeanne. . . 20 Groot. L'Expcdition ... 20 Meedendorp. Le Jager 14 Blois dcTreshng. Le Zeebaars . . . . 12 Van Meurs. L'Espion {d"Amfterdam.) 10 Stutzer. Le Zwaluw . . . . 10 Botger. .Le Vos .... 8 Van-derMey. Le Zeemeeuw ... 8 Slok. Le Zeepost ... . 6 » De Leeuw. Les Drie Gezusters . . * Davids. L;JongPieter . . . * , Duinker. La Margucrite. . . * 1 Broedt. Vaisseaux de Garde. Le Zwieten . . > . J 40 | Nauman. Le Zuileveld . . | 40 [ ■—— Van Loo. Va is-  Grand Tableau. 151 Vaisseaux d' H o p i t a l. L'Alarrrie . . . 1 24 ] * Le Boreas . . . | 24 1 * —_ L'Amirauté d'Amfterdam avoit alors encore VUnion de 60 , que l'on achevoitj le Rhynland de 50, & V Hof Souburg dc 2.6, qui n'étoicnt point encore en commiffion , mais qui lc furent au mois d'octobrej Sc le Scbieland de fo, vieux vaiffeau, qui ne fervit point dc toute la guerre. Vaisseaux en Station sur les Cótes de Frise et de Groeningue. Le Meeuw . . .14. CorneUs. Le Faam . . .10 V.Uelander. Le Brak ... 6 Roefces. Le Windhond. : . .6 De Bok. L'espion ( de Frife. ) . 6 Stoef. ' Ilréfulte donc de eet Etat, qu'au mois de juillet 1781. notre Marine avoit ici en Commiffion, dans les Ports de la République, —— 3 Vaiffeaux de .... 70. 1 3 d; . . . . 60. K 4 ' »"* è  IÖ2 L'ES QUISSE D'üN quelques navires marchands , deftinés pour la Baltique &c. ?... Je crois fort que dans les Délibérations Pon n'oublia point eet Article important; rjf que ce fera ici une omisfion des Rédaüeurs du Mcmoire. 70. „ De faire fortir (du Texel) les gros vais„ feaux de guerre, quelques jours avant que la Flotte marchande ne fortit du Flie. " — C'eft ce que Pon fit le zo Juillet , ainft que je le rapporterai en fon lieu. 8°. De détaeher une des plus lcgeres fré„ gates vers les Cötes d'Angleterre, „ pour yexécuter quelques mouvements qui indiqualfent une intention de reconnoitre ces Cótes. " Ceci paroit être une conféquence de la feinte projettée en P Art. 4. ci-deffus. „ Mais la foibleffe de notre marine nous „ empêcha de remplir ce Plan dans toute fon „ étenduej paree que nous nc pümes dégar« ,, nir la Zélande, & que de tous les vailfeaux ,, qui fe trouvoient dans les rades de cette Pro,, vince, nous ne pouvions employcr que celui „ du Capitaine van Kinckel: " (C'eft ee qui n'eji pas prouvé; £5? je le ferai voir ci - après: ) „ Par„ ce que le petit nombre de nos troupes de „ terre ne nous permettoit pas qu'on leur fit „ exécuter des mouvements propres a faire 9, croire a 1'Ennemi, qu'on méditoit férieufe- ment  Grand Tableau. 163 3, ment dc faire une Defcente &c. " —. Ainfi, Monféigneur, entre le ir & le lo juin, que les Délibérations fusdit es ont eu lieu, Ceux qui étoient d la tête de notre marine ignoroient ce qu'ils n'apprirent que dans les premiers jours de juillet \ c'efth-dire, qu'ils ne /avoient point alors que nous n'avions pas affez de troupes de terre, pour faire faire a ces troupes les mouvements dont je viens de par* Ier.... Monféigneur! fi l'on n'étoit pas accoutumé d'entendre les Rédatleurs de Votre MéMOiRE, débiter de pareilles abfurdités, l'on croiroit que tous ceux qui ont affiflé d ces Délibérations , tenues en Votre préfence , n'avoient pas le fens commun en cette occafion. — Mais c'eft affez parlé de cela. II eft temps de voir quelles mefures furent employees, pour tirer de Zélande fjf d'Helvoet , les vaiffeaux de guerre £5? de la Compagnie des Indes, deftinés d fe rendre au Texel; & pour raffcmbler au Vlie les navires de commerce, qui devoient faire partie de la Flotte deftinée pour la Baltique. Le 4i du même mois de juillet F. A. ordonna au Capitaine de Bruyn, de partir le 8. d'Helvoet pour lc Texel, avec le Prince Willem , la Bellone , lc Brak, le Kemphaan, Sc d'emmener avec lui ceux des navires marchands,deftinés pour la Baltique, qui voudroiènt profiter de fon Convoi pour fc rendre au Vlie. Lc 9i le Vice-Amiral Hartfinck lui réitéra le mé> L % ïftg'  164 L'ESCLUISSI fi'UK me ordre: Mais divers obftacles, dont je par» lerai amplement ci-après, 1'empêcherent, diton, d'obtempérer a ces ordres avant lc mois1 de feptembre. Lc 6. lc Vicc-Amiral ordonna a Mr. van Kinsbergen de metrreen mer après le 8, avec quelques vaiffeaux } de cherchcr cn Zélande le Zuidbeveland, 8c d'y prendre , ainfi qu'a la Rade de Goerée , les navires marchands deftinés pour la Baltique ; 8c après avoir ramené ces vaisfeaux au Texel ou au Vlie, Sc fon Escadre fe trouvant alors, par la jonétion de Zuidbeveland, compofée de 4 vaiffeaux de ligne, 3 frégates 8c un cotter, d, établir Ja croifiere dans ün endroit propre d couvrir le Convoi général, qui devoit partir pour lc Sund, — a couvrir nos Cotes, — 8c d obferver VEnnemi: -~ Ce qui étoitfaire bien des choses a. la fois(«). Lc même jour le Vicc Amiral ordonna au Contre-Amiral Zoutman de partir du Texel lc plutót poffible après le 12, avec 4 vaiffeaux de ligne, (dont un auroit été le Prince JPiïhm, qu'on attendoitinceffamment,)6 frégates, un cotter 8c deux goëlettes, pour escorter lc' Convoi fusdit jusqu'a Elfeneur, oü il devoit jet- (A^ A. p- 66 6f fuiv. — B. p. 10a. id. — C p. 4%»ii — Et le Verbal de Mr.Hartfinck, p. 113 6f K4-  Grand Tableau. 165 jetter 1'ancre, pour y demander au Commisfaire Van Deurs , s'il y avoit la quelques navires qui vouluffcnt profiter du retour de fon Escadre au Texel. Après cela , le ContreAmiral devoit faire en forte de ramener aufli les $ vailfeaux dc la Compagnie, revenus des Indes Orientales par le Nord de 1'Ecofle, & qui n'ayant pu gagner nos cötes , s'étoient refugiés en Norvege ; & enfin , de ramener les autres navires de commerce, qui pouvoient être dans les Ports de cc Pays-la (a). Par ( * ) Omme les Rédatteurs liaMéMOUE de S. A. ent fans doute eu leurs raifons pour ne point inférer parmi les Piéces Juflificatives de ce MéMoiiRE, kt InftruQions qui furent aonnées en cette occafion a Mrs. Zoutman van Kinsbergen, jc placerai ici ces InfiruUions telles qu'elles Uur ont été retnifes en original. Ordre voor den Capitein J. H. van Kinsbergen. De Schout by Nagt Zoutman gelast zynde een Convoy na de Oostzee te efconeeren, en de ondergeteekende tot meerder feekerheid van het felve , en tot veiligheid onfer Kusten nodig oordeelende, dat 'er een apart Esquadsr in de Noordzee blyve kruisfen, om op de bewcegiiiT gen van den Vyand acht te fl?an, foo gelast de onderge, teekende den Capitein van Kinsbergen,. om na den 8. deer L 3 fer  166 V ESQUISSE D' UN Par eet arrangement infenfê', nos forces ailoient fe trouver parragées en deux Escadres, qui fcr maand in Zïe te flecken , en de volgende Schepen onder fyne order te nee men. Admiraal - Generaul, van . 74. ■ • Cap. van Kinsbergen. Batavier 50. Bentink. Zwdbeveland . . . . (54. Kinckel. Erfprins ...... 54. ■ Braak, M et de Fregatten. Arga 40. ■ - Staring. Bellona 36. Dekker. Dolpbyn. ...... 24. ■ Mulder. En de Kotter. rfjax 24. ■ Gr. van Weideren. Gemelde Capitein fai fig in de eerfte plaats na de Zeeuwfche Kust, en wel op de hoogte van Westcapel begeeven, en alsdan een Fregat affenden, om den Capitein van Kinckel met 's Lands Schip Zuidbeveland en de Koopvaarders, welke na de Oostzee mogten gedestineert zyn, by zig te doen komen, en onder fyne ordres te neemen- Voorts fai gemelde Capitein voor de Goede Reede fig vertoonen, en verheemen of daar ook Koopvaardyefchepen, mede na de Oostzee gefchikt, leggen, en foo ja, lil hy defelve insgelyks onder fyn Convoy neemen, en dan die gefamentlyke Koopvaardyefchepen, het zy in Texel, het zy in het Vlie na gelang der omftandigheden, binnen brengen, waar na hy fyne Kruistogt fai beginnen, defelve op die plaats etablisfeerende, welke hy tot dekking van het Convoy, ea onfe Kusten, en om de mouvementea van den Vyand te obferveeren, best fai ooideelen. Ver-  Grand Tableau. 167 qui devoient fe féparer a une certaine hauteur, tandis que 1'Amiral Parker, parti de Leith lc 2-7 Verders fai hy in alles gebruiken behoorlyke Soldaaten Zeemanfchap. Gedaan aan boord van 's Lands Schip van Oorlog den Admiraal-Generaal ter Reede van Texel, den 6 july 1781. (Geteekent) AN DRIES HARTSINCK,; Instructie voor den Schout bï Nagt Zoutman. De ondergeteekende Vice-Admiraal van Holland en Westfriesland gelast hier meede den Schout by Nagt Zoutman, om het aanftaande Convoy na de Oostzee te efcorteeren, en foo veel mogelyk is, tegens alle vyandelyke aanvallen te dekken. Ten dien einde fai gemelde Schout by Nagt onder zy. ne ordres hebben, de Admiraal de Ruyter. , . 64. —— S. B. N. Zoutman, Prins Willem 70. C de Bruyn. Holland 64. C Dedel. Admiraal Piet Hein. . . 56. —— L. van Braam. Benevens de Fregatten. Medenblik 36. C. Reyneveld. Zepbir 36- Wiens Eensgezintbtid .... 36. Bouritius. Venus 24' Gr. van Reebtcren. Bellona . ..... 24 ■ • Lt. Keoy. jDc Kotter dt Brak. . . 18. Lt, Bank- L 4 en  172 Uesq.ui.sse d'un Jlerdam, ou ailleurs; c'eft- z - dire, que des 7f. jours les plus favorables de la Campagne, il n'en pajfa que Zf a fon Bord. Le Public ignoroic la plüpart de toutes ces chofes, Monféigneur, 6c les Rédacteurs du Mémoiré de V. A. ont cu leurs raifons pour ne point entrcr dans de trop grands détails a ces égard. Ils ont prcféré de nous faire un long cxpofé des peines que Ton s'étoit données pour tirerde Zélande, d'Helvoet & de Goerée, les vaiffeaux de guerre 5c les navires marchands qui s'y trouvoient; ils ont mieux aimé nous étaler les obftacles de toute efpece, que Pon dit avoir empêché la fortie de ces vajffeaux. — Comme le Public a douté de la fuffiffincc dc ces obftacles, 6c que beaucoup de bons Patriotcs ont cru, & croient encore, qu'il y eut en cette occafion des nouveaux maneges de la pare de notre Cabale Anglomane, jc difcuterai fommairement, quelques pages ci-api és , ce Point important. En attendant, jé reviens a nos Escadres, 6c au Convoi dc la Baltique, que 1'une d'elles devoit escorter jusqu'au Sund. De'PART DE NOS DEUX EsCADR.ES, ET CoMBAT DU DoGGERSBANK, ARRIvé LE5. AOUT. Le 1. aoöt Mrs. Zoutman 6c van Kinsbergen partirent de devant lc Vlie avec le Convoi fusdit, lequel confiftoitcn 71. navires marchands,  Grand Tableau. 173 & étoit forti du Vlie ce jour-la. Selen les Inftruétions données le 6. juillet au Capitaine van Kinsbergen, fon Escadre, que le Zuidbtveland n'avoit pas joint, étoit compofée des Vaisfeaux fuivants. 1. V Amiral-Général. . . . . de 74. canons, 2. L'Erf-Prins 54. 3. Le Batave. . < . . . . . 50. 4. L'Argo 40. 5. La Bellone (d''Amfterdam _). . . 36. 6. Le Dauphin 24. 7. Le Brak (Cotter) 18. C'eft avec ces Vaiffeaux, que le Capitaine devoit, felon les mêmes Inftructions, établir fa Croifiere de facon qu'il le jugeroit a propos, pour couvrir en mime- temps ce Convoi Sc nos Cótcs, Sc obferver les mouvements de 1'Enncmi. C'eft-a-dire, qu'il ne devoit point afTez s'éloigner de nos Cötes, pour être hors d'êtat de pourvoir a leur défenfe, Sc que par confé» quent, il devoit quittcr Mr. Zoutman Sc le Convoi, a une certaine hauteur. FAmiralP 12. L'Apollon. . , 32. 13. Le Tartare . . 2SL 14. Le Mirmidon. . . 24. 15. Le Leüb . . 20. 16. La Surprife . . 16. 17. L'Alerte. ... 14. 18. Le Bufy. ... 14. 19 Le Sprigtbly . . 14. Total 744. L'on volt par cc Tableau, que 1'Ennemi, par le nombre & la force dc fes vaiiTaux, Sc par 4Z6 pieces de canon, qu'il avoit de plus que Mr. Zoutman, auroit infailliblement écrafé ce dernier, Sc enlevé la plus grande partie de fon Convoi, s'il avoit rencontre eet Officier abandonné par Mr. van Kinsbergen. ■» En (a) L'on a vu que felon les Infiruftions , que Mr. Zoutman avoit recues le 6 juillet, fon Escadre auroit da être renforcée du Prince Willem de 74 canons, du Brak de 18, & du Kemphaan de 12. Mais, a la place de ces trois vaiffeaux , je lui donne ici l'Amphrhhe & le Zitijluwe, que je fuppofe avoir eu ordre de faire partie de fon Escadre, & non pas, de celle de Mr. van Kinsbergen : Car, ni le Mémoire ni le Verbal, ne nous difent rien de pofitif la-deflus La fameufe Let the du 20 juillet, ou quequ'.utre de la même espece, nous auroit peut-être inftriüti de cela.  DIRECTION et de l'EMPLOI DE NOS FORCES NAVALES DEPUIS L E COMMENCEMENT DE s HOSTILITES ENTRE L'ANGLETERRE ET U RÉPUBLIQUE. Continuation de l> Epoque du ao. décembre i7So au i. janvier 1782. ExPOSITION S O MM AIR E DES CAUSES, ous LOM A UIT AVOIR EMPECHe' LES t*k. fS EAU X DE GUER RE DE ZÉLANDE, D>HVLVOET ET DE GOEREE , d'ALLER SE joINDRE A NOS DEUX ESCADRES , AVANT LEUR DEPART AVEC LE CONVOI DU VLIE. Votre Alteflc Monféigneur, n'ignore pas que le defaut de la jonction des vaiffeaux de Zétl A, * Helvoet & de Goerée, avec les deux Escadres qui combattirent au Doggersbank, « -ufe, dans la République un méco^encemenr. M 4 gé-  i§4 L'ESfiüISSE d'un général, des piaintes amercs, Sc des imputa* tions de toute efpece. Quant aux mécontenternents Sc aux piaintes, ce que j'ai rapporté ci-devant démontre clairernent qu'ils étoient fondésj car, il eft naturel d'être mécontent Sc de fe plaindre, lorsque quelques obftacles , tels qu'ils fuflent, ont empêché un effet de la plus grande importance Sc ardemment defiré. Quant aux imputations, l'on jugera de leur fondement, ou de leur illégitimité, par ce que je vais rapporter. J'ai déja dit que le vaiffeau de guerre, qu'il étoit queftion de tirer de Zélande, pour le joindre aux deux Efcadres, étoit de Zuidbeveland, commandé par le Cap. van Kinckel; Sc que quelques navires de commerce devoient proficer de fon départ pour fe rendre au Vlie. j'ai également dit que les vaiffeaux de guerre, qu'il étoit queftion de tirer d'Helvoet, pour le même effet, étoient le Prince Willem , commandé par le Cap. de Bruyn, la frégate la Bellune, le cotter le Brak, Sc le jagt-d'avis lc Kemphaan, qui auroient amené les navires de commerce, qui fe feroient trouvés en cette rade, ou a celle de Goerée. J'ai auffi rapporté que le 6. juillet le Cap. van Kinsbergen avoit ré§u ordre de mettre a la voile après le 8. pour aller chercher en Zélande le Cap. van Kinckel, Sc que les vents contraires i'en avoient empêché. —— Ores, Mon-  Grand Tabl eau. 185 Monféigneur, voici en quels termes les Rédacteurs de votre Mémoire font parler V. A. fur 1'irréulfite de cette expédition , Sc fur les luites qu'elle eut alors (a). ,, Les Ordres que nous avions donnés, pour qu'un Detachement, commandé par Te Cap. ,, van Kinsbergen, ailAt chercher en Zélande le Gap. van Kinckel, ne purent être exécu„ tés; paree que le premier, quoique prêt a ,, mettre a la voile dès le 8,, fut retenu par les „ vents contraires jusqu'au 20 , Sc qu'alors les „ Officiers fupérieurs & les Capitaincs (da „ Texel) jugerent que le faifon étoit trop avancée , pour faire cette expédition. V „ Nous n'ofames faire fortir le Cap. van „ Kinckel feul, ainfi que le Vice - Amiral Hartfinck nous l'avoit puopofé: i°. paree qu'entre-temps, le bruit de 1'apparition d'une „ Efcadre ennemie , dans la mer du nord; „ s'étoit répandu; ce qui n'avoit pas caufe „ peu d'inquiétude dans la Zélande; Sc ce qui, „ toutefois, ne nous parut pas devoir empê„ cher la fortie de 1'Efcadre (du Texel): ** ,, 2°. paree que Mr. van Lynden dc Blitterswyk, ,, notre Repréfentant comme premier Noble ,, de Zélande, éïoiT dans la penscie que (0) A. p. 07. £ƒ 68. — B. p. 103. £ƒ 104. — C. p. 50. M y  1S6 V E S Q_U I S S E D' U N „ lc .depart du Zuidbeveland, feul, ou accom„ pagné de deux ou trois navires marchands „ deftinés pour la Baltique, & qui attendoient ,, fon convoi, feroit une fenfation défagrcable „ dans cette Province , oü d'ailleurs, l'on „ ne ceifoit dc nous demander de plus grands moyens de défenfe, vu que li ce vaiffeau ,, fe mettoit en mer, fans les navires marchands, qui, peut-être, n'étoient point encore „ prêts, l'on feplaindroit d'être privé de con,, voi; ou que s'il venoit a partir feul avec ces „ navires, l'on fe plaindroit également.de ce „ qu'ils auroient été confiés a laproteétion d'un „ feul vaiffeau, tandis qu'il étoit connu, qu'u- ne Efcadre Ennemie croifoit dans . la mer du nord. " Je réponds a. tout cela, Monféigneur, ip. qu'il eft pofiiblc que les vents aient empêché Mr. van Kinsbergen de fe rendre cn Zélande entre le 8. & le 20. Mais j'ignore fur quel fondement Mrs. les Officiers du Texel ont jugé qu'après le zo. la faifon étoit devenue trop avancée, pour faire cette Expédition; puisque fi elle füt devenue praticable dans les 8. ou io. jours qui fuivirent cette époque, cela n'auroit pas fort retardé le depart du Convoi duFlie-, & que ce retardement, quand même il eüt été de if. jours, n'auroit point rendu ce départ impoffibje, vu qu'a la find'Aoüt & dans la première quinzaine de feptembre, l'on entre-  Gr and Tableau. 187 trepric encore de lui donner lieu, ainfi qu'on le verra ci-après: D'ailleurs, fachant au 20. juillet, comme on le favoit en effet, que l'on pouvoit rencontrer 1'Amiral Parker fur la rou* te du Sund, l'on ne devoit abfolument négliger aucun moyen de renforcer nos deux Efcadrcs: Ce dont j'ai affez dérnontré la convenance cc la néceffité. 2°. Quant a 1'apparition de cette Escadre ennemie dans la mer du nord, Sc qui caufa de 1'inquiétude en Zélande, il eft vrai que Mylord Mulgrave, forti des Dunes vers le ir. du mois , fit une croifiere de quelques jours} & que vers le 8, le bruit fe répandit a FleJJtngtie, que fon Escadre étoit deftinée a attaquer cette ville. Mais les Anglois, qui connoiffent les difiïcultés d'entrer dans cette rade, ainfi que les difficultés que le vent apportc fouvent pour en fortir, St qui ne connoiffoient pas moins 1'état de défenfe oü étoit Fleffingue, ne fongerent pas plus alors a cette entreprife, qu'ils n'y ont fongé depuis. Auffi n'a -1 - on point tardé d'apprendrc que cette Croifiere de Mulgrave n'avoit été qu'une feinte, pour nous inquiéter, Sc pour nous obliger de retenir nos vailfeaux de Zélande & d'Helvoet dans les endroits oü ils étoient. — II réfulre dela, Monféigneur , que F. A. agit prudemment, en ne permettant point au Cap. van Kinckel de fortir feul, pendant la Croifiere de Mylord Mulgrave: Mais l'on  l88 L'ESQUISSE D' U N 1'on ne voit pas qu'Elle eut risqué beaucoup av lui ordonner dc mettre Cn mer dans les 10 ou i z derniers jours du même mois. Une bonne correspondar.ee cn Angleterre auroit appris tjue les Anglois avoient alors d'autres chofes a faire, qu'a venir ernployer leur temps a épicr la fort ie de nos vaiffeaux dc Zélande ou d'Helvoer. '30. Cependant', indépendamment de 1'apparition de Mulgrave , V. A. fut encore retenue, par'Mr. de Lynden van Biitierswyk, de faire fortir lc Cap. van Kinckel ieul; paree que, comme il eft dit ci-deffus, cè Seigneur éto 1t dans la PENséE, que cela cau/eroit une fenfation désagréable dam cette Province, ou d'ailleurs l'on ne ceffoit de Vous demander de nouveaux moyens de défenfe ; vu que, ft ce vaiffeau entroit en mer fans les navires marchands, l'on fe plaindroit d'être privé de convoi; ou que s'il venoit h partir feul avec ces navires, l'on fe plaindroit également de ce qu'ils auroient. été confiés a la proteclion d'un feul vaiffeau , tandié qu'il étoit connu , qu'une Escadre ennemie étoit dans la mer du nord Qd). _, Mais, («) Toutle PaiTagequej'aiiciextraitduMfmeiVfdeS,^., n'eft qVöh réch niffë de ce qui fe trouve da'ns Ia Gazette de la Haye du r. Oclobre r 81 , & 08 il elf dit, que ce fut en conféquence de la connoi/Tai.ee , que quelques unsdes principaux Membres de Ia Régence de Zélande avoient  Grand Tableau. 189 Mais, Monféigneur, il me fcmble, quefi/7. A. avoit trouve bon d'ordonner au Gap. van Kinckel de fortir, la P en s é e, oii étoit votre Rcprcfentant, que cnte fort ie feroit une fenfaiion désagréable en Zélande, ne devoit point être capable de Vous cn empêcher. Quant même quelques Co-Régens de ce Seigneur, ainfi que la Gazcttc de la, Haye, que j'ai citce, lc donne a entendrc, eulfcnt été de fon fentiment a eet égard, cela nc devoit point encore Vous retenir. Si le fervice du Zuidbeveland étoit alors néceffaire en Zélande , c'étoit aux Etats de cette Province a Vous en avertir : Mais ils nc Pon point fait, & ils n'ont pas chargé Mr. de Lynclen de le faire. — II n'appartient a aucun Régent de la République, ni même a plufieurs, d'entreprendrCjfansle confentementdes Etats de fa Province, dc Vous donncr des Coufeils dans des affaires d'une importance , telle qu'étoit celle -la. Je dis, donner des eonfils, paree que, malgré 1'expreffion adoucie, qui fc trouve dans le Paflage cité, l'on y découvre cla£« rement, Monféigneur, que Mr. de Lynden, Vous a donné celui de ne point faire fortir le Zuid' avoient des fentimens de leurs Co-Régens, & des habftams de cette Province, qu'ils confei.lerent a 5. A- de ne point faire fortir feul le Zuidbeveland; & cela, pour Jes mêmes raifons que je rapporté ici.  190 L'EsrjUi sse d'un Zuidbeveland feul; & cela fous deux préfextes frivolcs, qu'il a coufus ala nouvelle de 1'apparition d'une Escadre Angloife dans la mer du nord; d'ailleurs, la Piece qui fe trouve dans la Gazette de la Haye, parle formellement de Confeils, & il efi: connu de quelle part cette Piece y a été inferée (<«).— Au refte, a quoi bon cet- (a) Pour juftifier ce que j''avar.ee ici, & pour faire voir le rapport qu'il y a entre le Paffag» que fai cité du Mémoire de S. A £ƒ la Piece de la Gazette de la Haye, je placerai ici un Extrait de cette même Piece. —- Wel is waar dat het, geen objeft van deliberatie geweest is, van de Keeren Staaten van Zeeland, of men het Schip Zuidbeveland alleen zoude laaten uitloopen of niet, om het Esquader op te zoeken;,maar door aanzieulyke Leden van dc Regeering der Provincie, en in fpecie door zulken , die van de gedachten van hunne Mede-Regenten, en van het pubücq in Zeeland de beste informatie konden hebben, is aan Zyne Hoogheid apgeraaden, om den Heer van Kinckel alleen te doen uitzeilen, in een tyd, dat men in Zeeland geweldig bekommerd was, voor eene attaque van de Engelfche Schepen , die daar omftreeks iruitfen. .Die Heeren begreepen , dat zo de Heer van Kinckel uitliep zonder de Koopvaardyfchepen , die op zyn Convoi wachtten , zulks ongenoegen geeven zoude aan de daar by geïnteresfeerde Kooplieden; en dat, zo men cie Schepen waagde aan het Convoi van een enkel fchip,' het aan den Admiraal -Generaal zoude ge weeten worden , indien zy ongelukkiglyk in hauden van den vyand vervielen ; gelyk trouwens de uitkomst getoond heeft, dat de bekommering daar voor niet ongegrond was; naardien het  I f>4 L' E S Q. U I S S E D' U. N Mais les menées ordinaires, 6c 1'influence funefte des ennemis de notre gloire 6c de notre bonheur , mirent de tels obftacles aux effets que ces Propofitions devoient naturellement avoir, que le Rapport, remis le 2$ dudit mois fur la Table de L. N. P., par la Commiffion qui avoit été dénommée pour examiner ces Pieces, refta un an entier fans être mis cn délibération. — Je finis cette digreffion , 6c je paffe a 1'expofition des caufes, qui peuvent avoir retenu le Cap. de Bruyn a Helvoet, pendant tout le mois dc juillet. Si pendant le cours de ce mois, eet Officier n'eft point forti d'Helvoet, pour aller joindre les deux Escadres, ce n'a pas été faute d'ordres recus a eet effet. Quoique j'aie déja fait mention de quelques uns dc ces ordres, a la page 165, je les rappellerai ici tous a la mémoire de ceux qui ont foupconné , ou avancé, qu'indépendamment de ces ordres connus , il en avoit recu fecrétement d'autres, pour nc point partir. Dès le ir. juillet le Viee - Amiral Hartfinsk lui 'écrivit de fe préparer a partir d'Helvoet pour le Texel; 6c avant d'entrer dans cette rade, de convoycr jusqu'au Vlie, (oü le rendez-vous général étoit fixé au 12 fuivant) les navires marchands deftinés pour la Baltique, & qui voudroient profiter de fon convoi.. Le Vicc-Amiral lui manda en même temps, que lc  Grand Tableau. 195 le 7 ou le 8 fuivant, il enverroit quelques vailfeaux de guerre en Zélande, pour y prendre le Cap. van Kinckel; Sc qu'a leur retour, ün de ces vailfeaux pafottroit devant Ooerée, St y feroit le fignal convenu (a). Le 4, Monféigneur , Votre Alteffe ordonna a Mr. De Bruyn de mettre en mer le dimanche fuivant., 8; Sc de prendre avec lui la frégate la Bsllone, le Brak Sc lc Kemphaan , ainfi que les navires de commerce, qui étoient a Helvoet j d'accompagner ces dcrnicrs jusqu'aa Vire, Sc de fe rendre enfuite au Texel (b). Le p, le Vice- Amiral Hartfinck , lui réitéra' les ordres de partir a la première occafion, avec les vaiffeaux Sc navires fpécifiés en 1'Article précédent (c). Le 14, le Cap. De Bruyn écrivit in ViceAmiral, qu'il étoit prêt a profiterdu vent, pour partir avec fes 4 vailfeaux de guerre Sc 6 navires marchands j mais que les Capitaines du refte de ces navires ne s'étoient point encore fait inferire, pour être du Voyage (cl). Lc 12 , F. A. lui ordonna de ne, plus fe rendre au Texel, mais d'aller droit au Vlie, pour (0) DéFENSE du Cap. de Bruyn, page 2 & 26. (b) Ibid. p. 2. — A.p. 67.—B. p. 102. — C. p.$4. Cc) Verbal de Mrs. Hartfinck , p. 44. (4) Ibid f. 45,  196* V E S Cl Ü I S S E D1 U N pour y chercher les deux Escadres, Scdcfe joindre a celle du Contre-Amiral Zoutman (a). Lc 27, il fit part au Yice-Amiral Hartfinck , des ordres qu'il avoit regus de V. A. Ie 22 j il lui manda en même temps que fon vaiffeau étoit cn bon état, & qu'il détachoit journellement des petits batiments, pour rencontrer le vaiffeau que le Vice-Amiral devoit lui envoyer (b). Enfin lc 31, V. A. lui réitéra les ordres qu'Elle lui avoit cnvoyés le 22. (c). Voila donc, Monféigneur, tout ce que lc Mémoire de F. A., Sc le Verbal dc Mr. Hartfmek nous apprennent des ordres envoyés pendant le mois de juillet au Cap. De Bruyn, pour qu'il allat joindre nos deux Escadres, Sc convoyer au, Vlie les navires de commerce, qui auroient voulu profiter dc fon convoi. — Mais a-t-il regu feerctement des ordres contraire a ceux-la? C'eft ce que j'ignorc, ou plutót, c'eft cc qui n'eft ni prouvé, ni guerc apparent: Du moins, s'il en a recu de tels, tous les bons Citoyens font perfuadés , que cc n'a point été de ia part de F. A. Au refte,, j'aurai encore ci-après occafion de parler dc cela. — (a) A. pl 67. — B. p. 104. — C. p. jo. O) Verbal fusdit, p. 48. (O A. p. 67. -- B. p. 104. — C. p. 50*  Grand Tableau. 197 cela. — Quant aux tentatives réitérées, qu'il dir avoir faites jusqu'au premier aoüt , pour mettre ala voile, il a rapporté qu'elles échouerent toutes, tantöt par la foiblclfe ou Pinconftance du vent , tantót faute d'eau fuffiffante , & tanlót par d'autres obftacles. Des témoignages de toutes espece , & dont je parlcrai plus au long , appuyerent fes rapports j mais ces témoignages n'ont pas fatisfait tout le monde: car beaucoup de perfonnes prétendent encore, qu'il a négligé plus d'une occafion favorable de mettre en mer; & que fi ce ne fut point 1'effet d'une mauvaifc volonté de fa part, ce füt celui de fa négligence, ou de fon incapacité, qui le retint a Helvoet. Pour moi, je laiffe aux gens du métier a. juger de cette poffibilité de fortir: Quant k la diligence & a la bonne volonté de eet Officier , c'eft toute autre chofe.—. Si l'on pouvoit s'cnrapporter a 1'ordre que V. A. lui donna le 4, de mettre en mer le 8 fuivant , temps , auquel 011 croyoitque Mr. van Kinsbergen feroit prét (a), Pon pourroit en conclurc qu'il lui étoit poffi-ble de fortir d'Helvoet, a volonté: car V. A., ou, plutót, celui qui a dreffé eet ordre pour Elle (a) Cet Ordre je trouve tout au long a la page 2 de te D éFEN se du Cap. dc Bruyn. — Foyez aujji, A. p. 66.— B. p. 102, — C. p. 40, ' N 3  ïöB L'ESQ.UISSE D' U N Elle, ignorant quel vent il feroit ce jour-la, devoit fuppofer que tout vent étoit bon, pour mettre a la voile de cette rade. Mais qui ne voit que 1'ordre prefent pour ce jour prefix, eft encore une de ces abfurdités, que l'on ne rencontre que trop fouvent dans les ordres, que la Direction de notre Marine a donnés pendant toute la guerre ? Le Capitaine De Bruyn refta donc durant lc mois de juillet a Helvoet, paree que, felon lui 8c fes témoins, le vent, la marée 8cc. lui ont conftamment été défavorables. Mais, cela, fuppofé vrai, ce vent 8c cette marée pouvoientils apporter les mêmes obftacles a la fortie des trois petits vaiffeaux de guerre, 8c des navires marchands, qu'il devoit emmener avec lui? Non, fans doute. Mais les premiers n'eurent point d'ordre de partir feuls, 8c les feconds n'auroient ofé fe bazarder fous cette Escorte. .— Si Mr. van Kinsbergen , qui fortit le zo du Texel , avec le Contre - Amiral Zoutman, au lieu de lui vre ce dernier, 8c d'aller pafler io ai2 jours a ne rien faire, devant leVlie, avoit recu ordre de chercher en Ze'lande le Cap. van Kinckel, 8c de favorifer , a fon retour , la fortie dc eeux des vaiffeaux d'Helvoet 8c de Goerée, qui auroient alors pu mettre a la voile, il auroit euachevé cette Expédition, avant le dé«? part du Convoi du Vlie ; les deux Efcadres gurojent alors été renforcées d'au moins un vais- feau  202 l' e s q. u i s s e d'un "vues a indiquer? Car jc ne puis m'empêcher decroire, qu'il y avoit dans tout ceci une main fccrete & deftructive, qui dirigeoit les cbofes a notre grand dommagej finon, il eft donca croire que Dieu avoit frappé d'aveuglemcnt la Direétion, & 1'Adminiftration entiere de notre Marine. Mais le complétemcnt de 1'Equipage de la Princeffe Royale éprouva d'abord des obftacles, que l'on n'avoit point prévus, paree que l'on étoit accomumé dc ne rien prévoir: C'eft-adire, que ce complétement devoit fe faire aux dépens d'un Equipage, qui avoit déja fervi a compléter la frégate VAmphitrite, avant le 20 ' de juillet, jour, auquel elle étoit partie du Texel avec Mr. Zoutman. Ce que notre Vice-Amiral avoit fans doute oublié; car cela s'étoit fait de fon fu> ou bien l'on avoit négligé d'en faire relfouvcnir a V. A., lorsqu'Elle donna 1'ordre fusdit. II fallut donc fonger a compléter la Princeffe Royale par des hommes tirés dc différents Vaiffeaux, 6c lui deftiner pour compagnon, 1'Uitlegger {'Expédition, a la place du jfafon, que l'on ne fe mit pas trop en peinc de compléter; car il y avoit moyen de le faire, fi l'on s'en étoit donné la peine. —, Le deffein d'aller cherchcr les vaiffeaux de la Meufe, 6c de paffcr dc la droit au Sund, n'eüt cependant point lieu: le retour de nos deux Efcadres, avec le Convoi du Vlie, remit les Cho-  204 L'E S Q. U I S S E D' U N ville, qu'au mois de mars dernier, L. H. P. ayant révoqué en partie le Placart du zó. janvier, (en vertu duquel la Navigation de ce Pays - ci avoit été dcfendue Sec.) celle pour la Baltique a été rouvcrte pour tous les Sujets de 1'Etat, & il a été promis des Convois pour eet effet." — 2» „ Que les Suppliants ayant atteodu avec impatience & pendant quelques mois la réalifation de cette promeffe, avoient enfin appris au mois de juin, par leur Correlpondants d'Amfterdam, que ces Convois partiroient au mois de juillet} qu'en confe'qucnce l'on cquipoit les navires'marchands de cette derniere ville, Sc que plufieurs de ces navires avoient déja leur cargaifon. " 3°. „ Quc ]es Sup. pliahts très-furpris de ne recevoir a ce fujet, dans leur propre ville, aucune information légale, Sc craignant que les navires de la Meufe ScdeGocrée ne fufient privcs de la protecfion de ces Convois, quelques uns d'entr'eux s'adrefferent a la Chambre dc Mrs. les Bourgmaitresj Sc d'autres, aux Membres du College ó'Amirauté réfidant en cette ville, pour prendre des informations fur ce point; mais ils furent renvoyés, tant d'une part que de 1'autre, avpc la réponfe, que Von ne favoit rien. " 40. „ Que ce ne fut que lorsque la plupart des navires & Amfterdam étoient déja équipés Sc chargés, que quelques uns d'entre les Suppliants furent avertis par lc Secrétaire dcl'Ami- rau-  Grand Tableau. 20$ ratité de la Meufè (a), que l'on ev.t h faire partir le plutót poflible pour Hclvoetfluys, les navires que l'on voudroit envoyer dans la Baltique; que ces navires y feroient re pus fous le Convoi y mais que les circonflances critiques, abluelles, ne permetteient pas de s'ouvrir fur la maniere dont cela feroit executé, ni fur le nombre de vaiffeaux de guerre, qui feroient employés pour le Convoi " 5°. n Q»e eet Avis, donné-aufli précipitamment, ne permettant pas aux Suppliants d'équiper 8c de charger leurs navires avec autant d'épargne que cela s'étoit fait a Amfterdam, ou l'on avoit été averti d temps-, ils n'ont ménagé aucuus frais pour équiper, charger, & faire aflurer ces navires. —-■ Qu'en conféquence (du même Avis) ils fefontr^ofés entiérement fur les foins de Ceux, qui étoient chargés de régler les Convois, & ont attendu avec impatience 1'occafion favorable, pour faire partir, vers la Baltique, leurs batiments fous la protecfion des vailfeaux de guerre de 1'Etat j 8c que cette impatience, füt d'autant plus vive, que la faifon de 1'année étoit déja. avancée au point, que l'on commencoit a craindre qu'il ne lüt trop tard , pour ramener avant; 1'hiver les navires marchands, qui étoient en ces («) Le Boutgitematirt van der Heim,  2o6 L'ESQÜISSE U N ces parages. " 6°. „ Qu'enfin, le 3. dti courant, les Suppliants recurent Ia nouvelle inatendue, que le Convoi étoit parti le 1. du Texel 8c du Vlie: que le jour fuivant, le Secrétaire de PAmirauté de la Meufe, avertit par une Lettre, Mrs. Franco Sc Adrien Dubbeldemuts, que puisqüe ce Convoi étoit parti fans que telui de Goerée eüt pu fortir, & qtj' i l é t 011 a craindre que le vaiffeau de guerre le Prince Willem n'eüt point de fuót l''oecafion. de mettre en mer, les Suppliants auroient a déclarer positivemen t, s'ils vouloient faire partir leurs navires fous VFscorte d'une fimple frégate de 20 canons, d'un cotter de 18, £5? d'un jagt-d'avis de 14. (a). " . 70. 3j les Suppliants étrangement furpris du contenu de cette Lettre, (qui leur apprenoit qu'après que l'on eüt trainé plufieurs mois a régler Sc mettre en ordre le Convoi (du Vlie), on avoit fi peu égard a leurs intéréts, qu'on n'avoit d'autre Efcorte a propofer a leurs navires, que trois pétits batiments d'aucune défenfe, Sc un gros vaiffeau, que tout le monde favoit nc pouvoir fortir de Goerée, qu'a la faveur du folcil, dc la lune & des vents réunis,) n'ont pas été moins étonnés, qu'après que 1'occafion de profiter du O) LaBellone, U Braferjf is Kemphaan.  Grand Tableau, 209 leurs navires de Goerée, que par rapport aux frais, aujourd'hui inutiles, qu'ils ont fairs pour équiper tous ces navires, pour lè cha'rgcment de quelques uns,' & pour le fret des autres. "—12°. ,, C'eft pourquoi les Suppliants ont recours a Vous, Nobles & Vén. Seigneurs", comme Proteéteurs des droits 8c priviléges des habitans de cette Ville, & Vous prient tièshumblemenc,, de vouloir bien faire parvenir leurs juftes piaintes a Leurs Nobles& Gr. Puiffdn* bes, ainfi qu'a Son Altejj'e SêréniJJime j 8c de les appuyer de toutes matüeres, afin que le plutót poifible, il foit pris 8c employé toutes les melures convenables au redreffement de leurs griefs. Cc faifant, 8cc. " —— Ei oït Sïgn é, —. Van Vollenhoven van Hoogftraaten & Comp. —- Van de Sande. Gmlhcmanfon , Rappard 8c Comp. — Gilles Groenevelt. — P. T. van der Veur. — A.& Z7. Ci? C. Dutilh. — Jean tf D. Jongeneel. Jfaak Calis qq. Gerrit Groenevelt , junior. -—- F. cj? Al Dubbeldemuts, qq. (.«'). La (a) A la nouvelle de cette Requête, le biüit qui s'étoit déja répandu touchant les ordres jecms , qu'on préïendoic. avöir été donnés aóx vailfeaux de güerr'e de Zélande & de la Meufe, de ne point forti'.-, fe renouvella! £t line Lettré éerite le ii. a bord du navire de commerce l'Ev.rcpe, atomenta ce bruit au point, que Qw.lpi'un sVmÖ pretij  2IO V E S Q_ U ï S S E D1 Ü N ê La Régence de Rotterdam prit d'abord h réfolution d'appuyer , auprès des Etats de Hollande, les piaintes fondées & les demandes légitimes, exprimées dans cette Requête. , Le 17. les Députés de cette ville remirent cette Piece a L. N. ö" Gr. P., 8c y joignirent une Déclaration, oü lesgriefsdes plaignans étoient aulfi prefia de le detruire par un Avertifiement, qu'il fit inferer dans divers Papiers publics. Mais, foit paree que ce' Qjieliu'un-la ne s'étoit point fait connoltre au Public, foit paree qu'il n'avoit pas défigné l'Autorit é Supébubre , dont il s'autorifoit dans fon AvertifTement, foit enfin pour d'autres raifons , le même bruit continu»' de fe répandre, & il fe foutint. Celui, (difoit-on, n Iifant 1'AvertilTenient,) qui Je éroit ici fondé de démertfir un bruit fi injurieux a la DircÜion de notre marine, éf fi capable d'augmenter la dèfiance les piaintes, quiregnent a tant d'égards dans la République , devroit fe faire gloire de fe nommer publiquernent: la vêrité feroit garant, L'A ut o r 1 t é dont il s'appuye feroit bouclier , &? la rsconnoisfance des honnêtes gens feroit fa rkompenfe. Mais, lequetf doit-on croire ici, eu l'Auteur de la Lettre, ou l'Amnyme' qui le démint ? Le premier a du moins, pour lui, la vraifembhnct, & l'opinion, oü beautoup de gens font depuis qitelqms temps, que les conir'-ordres fusdits ont vraiment été donnés; le fecond dit avoir pour garant une'AuTORlTé svpé'. v. 1 eu r e, qui fans doute, a intérêt que le public foit défabufé , mais il ne nomme point cotte Autorité. A-t-il donc voulu qu'on la devineï Üon efi en ce pays, fi accoutumé d'entendre prodiguer les mot f d'A OTosiTé S u p ériEure, que l'on ne fait quelle eft celle qu'il allégite ici. M-ce l'Autorit6 du Souverain ? Eft-te celle dt f Amiral-  G-R A N D TABLÈAÜ. 2ïf auffi clairement ,que forrement expofés ; Scout la protecr.ion du Souverain étoit réclamée d'une maniere k en attendre tout Peffct defiré. Auffi, L. N. & Gr. P. ordonnefent-elles le même jour, que ladite Déclaration iüc remife au Confeil de la Province , & aux Miniftres de 1'Amirauté de la Meufe, afin d'en faire leurs Rapports Ie plutót poffible, £c au plus tard, dans le cours de la femaine füivante; Les Seigneurs Etats chargerent en même temps le Grand Penfionnaire , de fe rendre auprès de V. A., Sc de lui faire connoltre que leur defir étoit, qu'Elle envoyat au plutót en mer, tine Escadre fuffiffante,' pour protéger avec la flus ml-Génêrall Efi-ce telle de l''Amirautè de la Meufe oude Éélande'i Efi-ce celle de quelques Membres partieultèrs de Vune oude l'autre de ces Amirautésl Car il y a de ces MemIres qui s'arrogent quelqüefois auffi uné AuTORlTé Supésieure: En un mot, efl7ce in? A u t o r ( t é imagikaire , dont il s'agit ici 7 L'on ne nous dit rien de cela. D'ailleurs, s'il efi vrai que ce Qu'elqu'un je foit fait connoüre aux Gnzettiers, auquels il a envoyé fon Avertifjement, ■pourquoi n'a-t'-il pas eu la même confiance &? les mêmes égtrds tr.vers li refte de la Nation'? PÖbjet en vtloit bien la peine ; & Une puivoit attendre d'Elk que desfentimens df gratitude, pour le degré de véracité, qu'il autoit donné, par' -. la. afon Avertiffeimnt. ■ Voyez eet Avertifjement dans ia Gazette Hollandoife dc la Haye da 15 & du 2o.aout; dans la Gaïettc I'ianroife dc Leydt dirifi ou dans dJau» K-es Papiers de ce temps - la. O 2.  2Ï2 L'ES Q.ÜISSE D' U ft plus grande efficacité la navigation & le commerce des Sujets de 1'Etat en général; 8c fpé°* eialement, qu'Elle accordat , le plutöt poiïH ble, un Convoi aux navires marchands de la Meufe 8c cTAmfterdam, deftinés pour la Bal-* tique («). Auffitöt après que le College de 1'Amirauté de la Meufe eut recu la Réfolution que les Etats de Hollande avoient prife le 17. il ordonna au Capitaine De Bruyn de lui fpécifier les Caufes qui l'avoient empêché, depuis le 4. juillet, de mettre en mer avec les navires marchands qu'il devoit prendre fous fon convoi, 8c de lui rendre compte da Discours qu'ii avoit tenu le 7. aoüt aux Capitaines de ces navires (£). Le 19. ce Capitaine envoya a ce College une Réponfe , oü, après y avoir détaillé tous les ordres de partir, qu'il avoit recus depuis le 4. juillet jusqu'au iy. aoüt , tant de la part de' (a) Sur tout et que je rtpporte ici, fc? fur ce que je rap^ portirai ci-après , jus ju'aux premiers jours de feptembte'? voyez. — A. p. 6.0. a 73. — B. p. 106. a 111.— C. p. 50; a 55. — Les Pieces- Jus tip. de la prem Part. du Mém» dt S> A., p. r48; a 173* —• Verbal de Mr. Hartfinck, p. 50. a 62 i (6) Voyez fur ce Discours', page aoo. ei.deffut, iicle 10. de la Requête fusdile.  2l8 L' ESQ.UISSE D' UN mi le Public ; Mais, malgré les efforts qu'il fit lui-mêrttjp a ce fujet, malgré les peines que ceux, qu'il avoit intéreffés en fa faveur, prirent de leur cóté , le bruit qui le chagrinoit ü fort, & qui en chagrinoit tant d'autres, nc s'éteignit aueunement. Le College de l'Amirauté de la Meufe, dans le Rapport dont je parlerai a Finlhnt, n'ofa même le disculper en rien de ce qui le regardoit. L'Opinion , dans laquelle on étoit, ou qu'il avoit rcfu contre - ordre de fortir, ou qu'il avoit négligé ïoccafon de le faire, Vaparence, enfin , que l'un ou l'autre de ces cas avoit eu lieu, fe foutinrent au point, que la Ville de Leyde, dans la fameufe Propofition qu'eb leenvoyaaux Etats de Hollande le 31. juillet 1782, infilla tres - fortement fur la néceffité de rechercher les caufes ou les motifs qui avoient empêché , que les vaiffeaux de guerre de la Meufe & de Zélande ne miflent cn mer affez a temps, pour fe joindre a ceux du Texel, qui devoient escorter le Convoi du Sund. J3 reviens a mon fujet principal. Le 21. du même mois d'aout, le Rapport que les Etats de Hollande avoient demandé le 17. précédent aux Mmiflres de l'Amirauté de la Meufe, fut remis a L. N. Ci? Gr. P. — Le College de cette Amirauié y expofoit en général: i°. „ Qu'auffitöt après la Réfolution de L. H. P, du zó. mars, pour la levée dc \'~p.mbar-  Grand Tableau. 219 go, qui avoit été mis fur les navires marchands deilinés pour la Baltique, il avoic été notifié, qu'il feroit accordé un Convoi a ces navires. "• z°. „ Que depuis ce temps-la, ayant parfois été demande', par maniere de converfatton, a 1'un ou 1'autre des Membres de ce College, fi les navires de Goerée pourroient profitcr dc ce Convoi, il avoit été répondu, qu'il n'en falloit point douter: Mais, que fur la demande que l'on fit a 1'égard du temps précis, & de la maniere dont cc même Convoi feroit accordé , il avoit écé dit, que comme il étoit vraifemblable que Son Alteffe pourroit tout a coup donner des ordres a eet efret, l'on eüt a préparer en diligence les navires qui voudroient partir avec le Convoi (#)." 30. „ Que leaS. ou }e 20. juin, le College ayant appris le defir que S. 4- avoit de favoir, quels vajifeaux de guerre de Goerée pourroient être (3) Si ceci eft vrai, les Négociants de Rotterdam fe font non feulement rendus coupables d'une réticence blamable, dans les Art. 2. 3. 'de leur Requête, mais ils en ont aufti impofé ( l'exaétitude Sc la fidélité, que je me fuis prefcrites en prenant la plume, ne me permettent pas de paffer outre, fans expo- fer ici ce qui refte a dire fur cette fortie. • . Je recommence donc par les vailfeaux de Zélande. P 4 Les  ft 3 2 L'ESQUISSE D' U N Les Rédacteurs de Votre Mintoife rapportent (a), qu'afln de profiterde 1'occafion procurée par 1'abfence de 1'Enncmi, F. A. ordonna le 10 aoüt au Cap. van Kinckel, de faifir le premier bon vent, foit lc ly, ou après cette date, pour fe rendre au Texel; 8c de prendre fous fon escorte les deux Vailfeaux de la Compagnie des Indes, ainfi que les navires de commerce deftinés pour la Baltique ou pour ailleurs: deplus, de croiler auffi long-temps ■qu'il lefaudroit, a la hauteur de Goerée, pour y apprendre s'il y avoit en cette rade quelques navires marchands,(6c fpécialemcnt celui de la chambre dc Delft,) qui vouluflent auffi profiter de fon convoi, 6tc. Selon les mêmes Réd:;éT:curs , V. A- autorifa en même temps le College de l'Amirauté de Zélande, ([autant que ce füt fans expofer la Province a un danger éminent, danger, qui paroisfoit cependant moins a craindre depuis FA bi ion du f.) V. A., dis-je autorifa ce College de faire partir pourle Te^el Mr. van Kinckel&vcc fon vaiffeau, ainfi que le Schiedam, commandé par le Cap. Rauws, ou, a la place de ce dernier , une frégate de 3) Commandant la 'PrinceJJe Royale Fréd. Soph. Wil' belm. de 50 canons.  Grand Tableau. 235 une Efcorte particuliere, pour conduire droit au Sund, les navires marchands de Rotterdam. Mais au lieu de cela, V. A. a trouvé bon d'attendre jusqu'au io. pour ordonner au Cap. van Kinckel de partir, foit le iy. foit après cette date, pour fc rendre au Texel: Et paree que les vailfeaux de la Compagnie des Indes n'étoient point encore tous prêts, voila que eet Officier fe crut obligé de profiter de cette occafion, pour vous demander s'il devoit fortir, ou non, avec un vent du Nord-Eft?—Mais, Monféigneur, eet homme ne connoisfoit-il donc pas fon métier? ou plutót, fi l'on trouvoit du danger qu'il fortït a 1'aide d'un tel vent, n'auroit - on pas lui avoir ordonné depuis fix femaines ce qu'il avoit a faire dans un tel cas? II femble, en vérité, que dans toute cette guerre nos Officiers de mer n'ofoientfaire un pas, fans être menés par les lifieres. Le Mémoire de V. A. fourr.it mille exempies de pareilles minuties & de pareilles inutilités, ou du moins, de femblables démarches,, faites hors du temps. — Bravcs Officiers Anglois 8c Francois! Qu'auriez- vous dit, fi Vous aviez été aflujettis a une Direction fi ve'tilleufe, ft exigeante, ou fi peu prévoyante! Et en ce cas, combien d'Expéditions importantes n'auriez-vous pas manquées! Que de Couriers! que de Poftillons auroient inutilement troté entre les Ports d'Angleterre Sc Londres, ainfi qu'en-  236 L' E S CL U I S S E D\U N qu'entrc les Pons de France & Paris, tandis que vous auriez maudit cent fois par jour, Sc le fort oü vous étiez réduits, & ceux qui en étoient les Auteurs ! — Quant aux vailfeaux de la Compagnie des Indes, qui ri'étoient point encore prêts au 10. aoüt, que penfer de cette affertion? Les Directeurs dc cecte Compagnie, dans leur Requête du 23. avril aux Etats Généraux, avoient avancé qu'ils avoient alors déja 7. vaiffeaux prêts (a): Et dans la Lettre que les mêmes Directeurs remirent a L. H. P. le 3. juin 1783. ils affirmerent que les 8. vaiffeaux de cette Compagnie, partis du Texel le 7. juillet 1781. étoient prêts depuis plus de ii. mois (£). ■ Qui croire de ces Meflieurs, ou des Rédacteurs du Mémoire de V. A., lesquels nous racontent non feulemcnt que les vaiffeaux de la Compagnie n'étoient point encore tous prêts le 10. aoüt 1781. mais que (a) J'ai fait mention du Contenu de cette Requête, dans la Note de la page 103. ci-deffus. (b) Maar wie boort r.iet tevens met ontroering de febade, die bet overlyden van ongeveer duizend man op de agt geivapende Schepen , tusfeben Nederland en de Kaap, aan de Cor» pagnie beeft veroorzaakt, welke febade grooter word na maate die Schepen langer in de Nederlandfcbe Havenen zyn moeten llyvsn liggen, alwaar zy meer dan 13 maanden gereed zyn geweest. . Ce font la les propres teimes de eette Lettre.  Grand Tableau, t^y que celui dc la Chambrc de Delft ne 1'étoit que depuis lc 2j\ juillet précédent («)? » Sans rien prononcer fur deux Contradiétions fi manifeftes, je m'en rapporté au Fait, Sc je reviens au Cap. de Bruyn. J'ai déja tant patlé de eet homme, que je prends le parti de n'en dire ici que cc qui fuit, en attendant le dénouement de fa glorieufc Hifloire.— L'on a vu ci-deflus, que malgré tous les ordres, qui lui avoient été donnés de mettre a la voile, le ciel Sc la terre, conjurés contre lui , l'avoient confiamment empêché d'obéir: du moins Pa-t-il rapporté ainfi , Sc il s'eft trouvé des Tcmoins qui ont confirmé fon rapport. Sans doute-, qu'il n'eüt point été difficile de trouver d'autres Témoins, qui auroient affirmé le contraire j mais perfonne ne s'eft donné la pcine d'en chercher: Et quant aux contre-ordres fecrets, que l'on foutient encore lui avoir été donnés, -c'eüt été peine perdue de faire des recherches a eet égardj puisque fi le fait avoit été tel, lui, Sc les Auteurs de ces contre-ordres, fe feroient bien gardé de s'en vanter. Quoiqu'il foit de tout cela, le 18. aoüt, en conféquence des deux Lettres du Vice-Amiral Hjrtfmck, ainfi qu'en (0) A. p. 72. — B. p. in. —. C p. 54.  23S L* E S Q_ U ï SSE D* Ü N qu'en conféquence d'un avis de l'Amirauté d'Amfterdam, du 14. & notamment, de la Réfolution des Etats de Hollande du 17, V. A. manda au dit Capitaine, que fon intention étoit de faire mettre en mer avec lui, auffitót que le vaiffeau de la Chambre de Delft feroit prêt («), les frégates la Théth 8c la Bellone, le cotter le Brak, la corvette le Kemphaan, 8c tous les navires marchands, qui voudroient profiter de ce Convoi pour fe rendre au Texel. Que même, a la première oecafion qui fe préfenteroit, il devoit fortir feul, foit que cette ©ccafion vïnt avant ou après la fortie de ce Convoi (b). Mais on verra ci-deffous qu'il ne fortit pas encore de fitöt: 8c que lorsque cela arriva , ce fut un malheur de plus pour la République. En (a) J'ai déja dit, d'après Ie Mémoire même de S. A., que ce vaiffeau ce la Chambre de Delft étoit prêt depuis le 25. juillet. Et voila comment 5. A. étoit inftruite de ce qui fe paflbit! (b) Voyez fur tout cela, — A. p. 7©. a 73. — B. p. 108. a m. ~ C. p. 53. a 54.— D'ailleurs, l'on s'eft fans doute déja appercuque, dans ma Narration, je ne fuis point Pordre de celle du Mémoire. La raifon que j'ai d'en ufer ainfi, eft, que le tout eft quelquefois 11 mal dispofé, ou fi einbrouillé, dans ce Mémoire, qu'en ce cas je fuis obligé de fuivre une méthode contraire, pour me rendre intelligible.  Grand Tableau. 239 En attendant que tous les vaiUeaux de la Meufe & de Zélande arrivaflent au Texel, V. A. s'occupa des dispofitions nécelfaires pour y raflembler un nombre de vailfeaux de guerre, qui, joints par ceux qu'on attendoit des deux endroits lusdits, devoient fervir d'efcorte au Convoi général du Sund, ainfi que L. H, P. Vous en avoient requis, & que F. A. favoit promis. -— Voici en quels termes, Monféigneur , les Rédacteurs de Votre Mémoire font parler V. A. fur ce fujet. „ Peu de temps après (ce fut le 23 , ) Nous „ ordonnames au Contre - Amiral van Braam (d) de fe rendre fans délai a bord du vaiffeau. ,, (la Princeffe Royale) commandé par le Cap. ,j Raders, cc de prendre fur lui le Comman„ dement du Convoi. Nous ordonnames en „ même temps au Vice - Amiral Hartfinck, de ,, partir au plu:ót poffible pour la Rade du Te„ xel, & d'avoir foin que l'on expédiat avec „ la plus grande diligence tout ce qui étoit „ né- (a) Ubi Süp. — Et Ie Verbal de Mr. Hartfinck, au 23. aoüt & fuivant. — Comme peu de temps après Ie Combat du Doggersbank, il y eüt une promotion, par laquelle le Contre-Amiral Zoutman fut nommé ViceAmiral, & les Capitaines Dedel, van Braam & van Kinsbergen, Contre-Amiraux, je défignerai dorénavant ces Meffieurs par ces 'litres.  240 L1 ESQUISSE D' UN .„ nécesfaire pour préparer le Convoi. Fort bien, Monféigneur, mais le Ftce - Amiral, qui jouiffoit alors du repos dont il avoit befoin, & que lui procuroitnt les nouvelles vacances qu'il avoit prifes le 15. ne fe preffd gusre d'ebéir d ces ordres, puisqu'il ne fe rendit que le 21. d fon bord. „ Lc 16. Nous lui propofamcs dc faire par- tir auffi le vaifTeau (le Glintkorfi) comman,, dé par le Cap. van F lier den, lequel avoit ,, dépafie le Flieler; Sc de compiécer , s'il „ étoit poffible, fon Equipage aux dépens des ,, vaiffeaux qui reftoient : recommandant en ,, outre audit Vice-Amiral, de faire mettre „ en mer autant de vaiffeaux qu'il le pourroit, „ Sc lui faifant connoitre, que fi 1'Efcadre 5, étoit affez forte, pour ne pas craindre que „ le Pavillon du Vice-Amiral de 1'Etat füt „ expoféaun affront, il Nous feroit agréable ,, qu'il la commandat cn perfonne. " — Quant d ceci, Monféigneur., ou il ne rendit pas ceite Efcadre auffi forte qu'il le falloit pour parcr eet affront, ou fi elle fut telle, il eft apparent qu'il craignit plus pour fa peau que pour le pavillon, puisqu'il ne bcugea point du Texel, lorsque l'Escadrt leva l'ancre. ,, Enfin, Nous lui recommandames dere„ chef d'accélerer les chofes autant que pofïï„ ble, afin que lc Convoi füt furement con„ duit dans la Baltique, Sc que les vaiffeaux de la Compagnie, (qui étoient alors en Norit vege)  Grand Tableau. 541 5» vege) ainfi que les Navires du Sund, qui 3, attendoient après une Elcorte, fuflent ra- menés dans nos Ports. " Mais, me dira-t-on, que répondit donc le Vice- Amiral Hartfinck heette Lettre que S. A, lui avoit écrite le 26. ? —■ II répondit le 28 3, que, felon lui , la laifon étoit déja trop ,, avancée pour chercher les navires de la Com3, pagnie, qui étoient a Drontheim , paree que 3, cela ne pouvoit fe faire fans expofer nos „ vailfeaux de guerre a un danger XNévi3, table (a). "—- Ainfi parloit le 28. aoüt 1781 un homme, que l'on a vu le 8* & le 9. Oclobre 1782, s'emprejjcr a faire exécuter les ordres que V. A. venoit de donner a Mr. van Kinsbergen, d'aller en effet recherchcr ces mêmes navires, qu'on avoit indignement laiffé pourrir pendant 16. mois en 1'éndroic cü ils s'étoient réfugiés ! Ainfi parloit le 2S. aoüt 1781. a. 1'égard d'un fimple voyage de Norvege, un homme cenfé éclairé & bien in- (<0 Doch In antwoord op deezen Brief, gaf de gemelde Vice-Admiraal ons den 28. der zelfde maand te kennen, dat, zyn-'s oordeels, het faifoen reeds te ver ver- ■ loopen was, om de Schepen van Drontheim te haaien, en dat zulks -, niet zoude konnen gefchièden , zonder 'sLands Schepen aan een owvirmïdsu'ic 6eïaa* bloot te ftellen. Q  242 L'E S Q.Ü I S S E tfüH intentionné, tandis que f. jours auparavant nos Négociants de la Baltique ne défefperoient point encore, que, moycnnant un prompt Convoi, leurs navires, qui devoient partir pour Petersbourg, ne puflent être de retour avant 1'hiver (a ) ! ——■ J'aurai ci-après une nouvelle occafion de parler de cela: En attendant, j'obferverai ici, que cette Réponfe (dont le Vice-Amiral a fans doute rougi de parler dans fon Verbal) ne tarda point a être connue du Public, Sc qu'elle fut regardée comme le premier coup de cloche, qui annoncoit Pintention ou, malgré les promeffes nouvellement réitérées par Vetre Altejfe, l'on étoit vraiment alors de ne pas plus accorder d'Efcorte pendant le refte de 1'année 1781 , que l'on n'en avoit accordé auparavant. II falloit ici de nouveaux prétextes pour cela; & cette Réponfe en étoit déja un, qui fut bientót fuivi par d'autres. Cependant , indépendamment de la facon particuliere de penfer dc ce prudent Sc Daillant Officier, a 1'égard de la recherche des navires de Drontheim, les Rédacteurs du Mémoire de V. A. Ka) Voytz, page 426". ci-dejfus, les ttmes 4e la Requête , qus ets Négociants {ré/mUrmt 1» 23« dudit wit d'êtto sax Etats Généraux.  Grand f A Ö t ë A ti. 243 fc. A. nous raconterit qu'il fit fes efforts poür préparer le plus grand nombre poffible de vaiffeaux de guerre, afin de convoyer au Sund les navires marchands deftinés pour la Baltique j mais, que malgré toutes fes peines, il ne parvint a raffembler (indépendamment des autres vaiffeaux de cette efpece, que Port attendoit de Zélande Sc de la Meufe) qué les vaiffeaux fuivants: La Princeffe Royale. 2 : . de 54. canons.} Le Glindhorft 54- Le Phénix. . ; •44- Le Medemblik. ....... 36. La Bellone 30"- L'Amphitrite. . . . , ... 36. L1 Eensgezindheid. 3^* Le Jafon. . . ...... 36. Le Zephir. . . i ..... 36- La Fenus 24. La Waakzaamheid. 24. Et la Corveue ?Expédition. . . i3. (a) A. f. 73. — B« h — C' t' 5*« Q * Tandis que le Vicè - Amiral fe donnoit tarii defoins, le Cap. van Kinckel, qui étoit enfin parti de Zélande le fi. aoüt, étoit arrivé au Texel avec le Zuidbeveland qu'il montoit, avec deux navires de la Compagnie des Indes, Sc le  244 L' E S Q.ÜI SS E VU N le Schooner le Dauphin, — Mais, dira-t-on," eet Officier, en pdjfant h fa: hauteur de Goerée, avoit-il exécuté l'ordre que V. A. lui avoit donné le 10. de s'informer s'il avoit - ld quelques vaisfeaux qui vouluffent. profiter de fon Escorte (a)? C'eft-ce que l'on ne nous-dit pas. — Quelques obflacles l''auroient-ils empêché d'exécuter eet erdrel C'eft ce que l'on nous dit pas non plus. — Le vent, qui avoit favorifé le Départ de eet Officier, ne pouvoit-il pas favorifer également le Départ du .Cap. de Bruyn ? Je 1'ignore: Mais s'il eft vrai que le même vent, qui avoit favorifé le premier de ces Meftieurs pouvoit auffi 'favorifer lefecond, il faut croire que le i. aoüt il venta' autrement a 1'embouchure de la Meufe qu'il ne lit le même jour en Zélande. Et en ce cas, il ne feroit point étonnant que le refte des vaiffeaux de guerre dela Meufe, auxquels il étoit libre de partir, fans le Cap. de Bruyn (b), avec les deux navires de la Compagnie des Indes, Sc les autres navires. de Commerce qui étoient cn eet endroit, fuffent auffi reftés-la. Lorsquc le ciel, la terre & Ja mer font conjurés contre la fortie de quelques vaiffeaux, il arrivé des mira- cles (a) Voyez page 232. ci-deffus. (k) Voyez ci-deffus, page 23S,  Grand Tableau. 245- clcs incompréhenfibles aux gens qui ne connoiffènt pas la vraie caufe des chofes. En attendant donc que le Cap. de 'Bruyn & les vailfeaux de la Meufe trouvaffent l'occaiïon de fe rendre au Texel, le ViccAmiral Hartfinck s'occupa a. dreffer 1'Inftrucf ion, qu'il remit le 4 feptembre au ContreAmiral van Braam; Inftruction, que les Rédacteurs du Mémoire dc V. A. ne fe fonc point donné la peine de nous faire connoitre en entier, & qui contcnoit en fubltance. 10. )j Que le Contre - Amiral étoit chargé d'efcorter le Convoi qui devoit fe rendre dans la Baltique, 6c de le couvrir, autant que poslïble, contre toutes les attaques de 1'Ennemi." 20. ,, Qu'a eet effet, il auroit fous fon commandement: La Princeffe Royale. . . . de 54. canons. (/?) * Le Prince IFillem 70. Le Zuidbeveland. 60. Le Gl'mdhorft 54. Le Phénix 44. Le Medemblik 36. La Bellone, ( d'Amftcrdam ). . . 36. • Le jfafon, (d'Amfterdam). . . 36. Le («) Les 4. vaiffeaux ici marqués d'une *, font par&ie 4es 5, que l'on attendok èe la Meufe,  ■2$6 L* ESQUISSE D' y ï$ Le Zèpliir de 36. canons, UEensgezintheid. 36. La Waakzaamheid. 24. *La Thétis, ( de Ia Meufe.,). . . 36. tLa Bellone, (de la Meufe). . .24. La Corvette, VExpédition. . .18. *La Corvette, le Kemphaan. . .12. Et le Schooner, le Dauphin. . 16. 3°- ï» Qu?il devoit immédiatement détacher 6c la Bellone d'Amfterdam ? pour prendre pofte a. 1'entrée du Pertuis. " 4°. „ Qu'auffitöt après qu'il auroit recu le dernier ordre dudit Vice- Amiral, il profiteroit (ia premier bon vent, pour mettre a k voile avec les vaiffeaux de guerre qui étoient prêts au Texel: mais qu'il ne pourfuivroit pas fon chemin avec le Convoi du Vlie, avant qu'un vent du Zud-Eft n'eüt foufflé pendant Z4. heures, 6c que, par-la, les vaiffeaux attendus de la Meufe n'euffept eu k temps de fe joindre a lui. *' f°. „ Qu'entre - temps il devoit former, pour couvrir le Convoi, une Efcadre conapofée des vaiffeaux de ligne, le Zuidbeveland, la Princeffe Royale Sc le Glindhorft, des Frégates le Phénix, le Zéphir 6c la Waakzaamheid\ & du Schooner le Dauphin. — Qu'il joindroit au Convoi les Frégates le Medemhlik, le Jafoti £c la Bellone d'Amfterdam, VEensgezindheid, la corvette Y Expédition, ainfi qu'un ou plufieurs au-  Grand Tableau. 24? autres petits batimens, que l'on pourroit tirer du Vlie fans dégarnir entiérement cc Pertuis Et que fi le bonheur vouloit que les vailfeaux de la Meufe joigniffent le Convoi, ledit Contre - Amiral renforceroit fon Efcadre, de la Bellone 8c du Jafon d'Amfterdam, 8c renforceroit en même temps le Convoi, par ls Prince Willem, par les Frégates la tbêtis 8c le Jafon de la Meufe, 8c par la Corvette le Kempbaan. " 6°. „ Que dans Pun 8c Pautre cas, 8c la chofe étant arrangée ainfi qu'il eft dit, le Contre-Amiral partiroit pour le Sund avec le Convoi. 7°. „ Qu'étant arrivé au Sund, il devroit jetter l'ancre devant Elfeneur, 8c fe rendre au plutöt chez le Commiflaire de L. H. P., van JDeurs, pour apprendre de lui s'il y avoit - la quelques navires de commerce, qui vouluffent profiter de fon Convoi; 8c en ce cas, qu'il auroit a. prendre ces navires fous fon efcorte, & a les ramener dans les Ports de la République. " 8°. „ Que comme le Commerce de la Baltique, d'Amfterdam, avoit donné une Lifte de ceux de fes navires qui étoient dans divers Ports du Nord, 8c qui attendoient après un Convoi, ledit Contre-Amiral étoit chargé de les chercher, fi les circonftances le lui permettoient, 8c de prendre, a eet égard, telles meQ 4  248 L'ES QUISSE D1 U N fures qu'il jugeroit propres au plus grand avantagedu Commerce, h la fureté des vaiffeaux de guerre de 1'Etat, Sc pour rctoumer en ce pais-ci, felon 1'ordre prefcric ci-defiüs Sec. &c. " Tout cela auroit été admirable, Monféigneur, fi par eet enchaïnement de caufes Sc d'effets funeftes, dont j'ai tant parlé ci-devant, & li pour les raifons que je rapporterai ei-après l'on n'eüt point attendu fi long-temps.—.D'ailleurs , pourquoi , en ordonnant au ContreAmiral -van Braam d'aller chercher dans divers Ports du Nord les navires du Commerce de la Baltique, ne lui a-t-on pas auffi ordonné de rechercher , ou de faire rechercher les trois vailfeaux de la Compagnie qui étoient a Drontheim ? Fut-ce paree que le Vicc-Amiral Ihrtfinek avoit jugé le 28 aoüt , qu'alors la -faifon étoit déja trop avancée pour cela ? Le fingulier homme que ce Vicc - Amiral! La ünguliere Direction, que celle de notre marine! Ne croiroit-on pas que felon le fyftême de eet Officier Sc de cette Dircaion , il valoit mieux laifier encore ces vaiffeaux pourrir un année entiere- en Norvege, Sc laiffer leurs Equipages périr de makdie & de defcipoir, qut d'ejfayer au moins, d'épargner quelques tonnes dor a la Compagnie, de fauver la vie a tant de malheureux, Sc de donner quelque  Grand Tableau. 249 que relache aux piaintes Sc aux cris de toute la Nation ? Cependant , Monfeigmur , Votre Altefle fe rendit le 8. du même mois de feptembrc au Texel, oü dans une Conférence qui s'y tint cn votre préfence, l'Inftruélion que le ViceAmiral Hartfinck avoit donnée au Contre-Amiral van Braam fut approuvée dans tous fes points, quant a 1'arrangcment des vaiffeaux de guerre qu'il devoit commanderj l'on yajouta feulement, que le Cotter lc Brak Sc le Schooner le Dauphin feroient d'abord envoyés a la découverte (a). Mais les Rédacteurs de Votre Mémoire, qui ont cu foin de rappeller tout au long eet arrangement, ne parient nullement de ce que le Contre-Amiral avoit a faire, étant arrivé a Elfeneurj Sc cela, fans doute, pour cacher au Public, que eet Officier n'avoit pas recu d'ordre de ramener les navires de la Compagnie qui étoient en Norvege. En cc cas il ne faut point s'étonner de ce qu'ils n'ont pas inféré dans les Pieces juftifieai.ves dudit Mémoire , l'Inftruclion du ContreAmiral. ' Le li. Mr. van Braam alla jetter l'ancre a. Pentrée du Pertuis, avec fon Escadre, Sc avec 7. vais- («) a. p. 74, — b. p. 115. — c. p. 55. q s  25© L' ESQUISSE U N 7. vaiffeaux de la Compagnie des Indes orientales, parmi lesquels étoient compris les deux que le Cap. van Kinckel avoit amenés de Zélande (a). Le même jour V» A. repartit pour;fo Haye-, & Ton appercut du Texel quatre vaiffeaux de guerre ennemis, occupés a. reconnoitre notre Escadre. C'étoit apparemment ceux que l'on avoit vus de Kykduin le jour auparavant (b). Enfin il paroit que, pour partir , le ContreAmiral n'attcndoit plus que le Cap. de Bruyn, qui devoit arriver d'Helvoet avec les vaiffeaux de guerre ordonnés pour 1'accompagner, ainfi qu'avec le 8C, vaiffeau de la Compagnie des Indes , 6c les navires marchands deftinés pour la Baltique, qui Pauroient voulu fuivre. Mais ü l'on vit le Sieur De Bruyn, ce fut fans fon vaiffeau. — Qu'il me foit permis d'interrompre pour un moment-le récit des fuites de 1'Expedition de Mr. van Braam, pour donner celui du dernier Exploit de notre brave Sc vigilant Capitaine. Le (a) Ces fept vaiffeaux de la Compagnie étoient trés-' fortement armés en guerre. Ils devoient quitter lc Contre-Amiral è certaine hauteur, & continuer leur route avec le navire de la Chambre de Delft, que l'on attendoit d'Helvoet. (b) Ver»al de Mr. Hartfinck, au 10. feptembre 8? fuivant,  Grand Tableau. 25? Le 10. du même mois le Sr. De Bruyn partit pour le Texel avec fon vaiffeau le Prince Willem, avec la ïbétis, la Bellone , le Kemphaan , ainfi qu'avec le vaiffeau de la Compagnie des Indes, & 7. navires feulement, des 16 ou 17, que les Négociants de Rotterdam avoient dcftipés-pour la Baltique. Fruit bien digne du féjour obftiné de eet Officier, tant a Helvoet qu'a Goerée. Au moment de fon départ, un de nos cerveaux poétiques s'exalta, & enfanta les Vers que je cite ci-deffous («). Dans fon enthoufiasme infenfé, le Poëte commenca par prodiguer 1'augufte Nom de Héros au Capitaine, qui, de fa vie , n'avoit vu de Pavillon ennemi} & il finit par espérer qu'on le reverroit bientót triomphant dés Anglois, Sc qu'alors on chanteroit fes hauts Faits. Le Héros continua donc fon voyage fous les aufpices de Bellone & de Mars, & dans 1'attente , fans doute , d'être chanté a fon retour , ain- (fO Verlaat Ge S Held! der Mars de Goede Reê, Steekt Gy manmoedig met uw Heldenfloet in Zei, Om op bet febuimend Zout den Britten te bejlryden ? Dat's braaf, De Brujn! God zeile met U meêl Celyk by kortlings, met den traaven Zoutman dei, £n ter lang moogtn we U ook Zegezangen viydenl N. J.  252 V E S Q_ U I S S E U N ainfi qu'il 1'avoit été a fon départ: Mais le premier Exploit qu'il fit, fut celui dc perdre bêtement fon vailfeau fur le Zuyderbaaks ia): Et cela cn plein jour, par le plus beau temps du monde, 6c fur un Banc fi facile a éviter, que le moindre de nos Pilotes le cotoycroit, pour ainfi dire, a yeux fermés. Et ce qui ne peut qu'augmenter la jufte indignation dc tout honnctc homme qui lira ceci , eft que , lorsque •ie vaiffeau fut échoué , lc Héros nc prit pas plus de foin pour le tirer de la, qu'il n'en avoit pris pour le préferver de ce malheur. Tandis que le Sots admiioient les Vers fusdits, que lc Gazetier de Ja Hiye avoit inférés dans fa Fcuille, la nouvelle de ccitc perte fe répandit, Sc fit redoubler les piaintes Sc les cris de la Nation contre De Bruyn. Les uns crurent que ce Capitaine, ou fon Pilote, gagné par les Anglois , ou incité par nos Anglomanes, avoit fait échouer a deffein ce vaiffeau: D'autres fc bornerent a lui prodiguer toutes les épithetes, Sc a le charger de toutes les imprécations qu'il méritoit: D'autres débiterent que de toute fa vie il n'avoit fait une belle aétion; Sc a ce fujet, ils rappellerent Yaventure, qui lui étoit arrivéc en 1763. fur les Cótes de Bar- :: ba- (a) Ba?c de fobie", peu éloipié du Texel. Et quant i eet accident, ii arriva lc 14. ctu mêrae rnois.  Grand Tableau. ^53 bar ie; Yaventure, qui, en 1777 cu 78, 1'avoit obligé d'aband'onner fon vaiffeau dans un Port de France, & de revenir par terre cn ce pays-cii &, enfin, d'autres aventures lingulieres , qu'il feroit trop dc long de rappor* ter icf (0). Sans entrcr dans lc détail des foins que l'on prit pour fauver les principaux effets du vaifTcau péri, jc me contenterai de dire , que l'on commencja par mettre aux fers fon Pilote , Jean Cock, ( H. P. les Seigneurs États - Généraux des Provia. „ ces unies, ainfi que de S. A, S. Monféigneur Ie Prince „ d'Orange & de Najjau , Stadhouder Héréditaire, Ca- pitaine & Amiral - Général Héréditaire desdites Pro„ vinees, dómet le fusnommé André de Bruyn du Ser„ vice militaire de ce pays; d é b o u t e . l'Avocat-Fifcat „ de fa demande ultérieure formée contre le Comparant» „ &condamne cependant ce dernier aux frais de ce ,. Haut Confeil de guerre, ainfi qu'aux dépens du Procés." Fait a bord du Senau de guerre de la République, le  L' E S Q. U I S S E Ü N de De Bruyn, & il fut également condamnc aux fraix de fon Proces. A la nouvelle du jugement de notre Capitaine , la Cabale Anglomane Sc fes Suppóts en- tre- ,, Zwaluw, a l'ancre dans le Nieuw-Diep, ce i. novem„ bre 1781." (S1 g n é) André Hartfinck, Daniël Picbot, J. van Kruyi ne, S. Dedel, W. van Braam, J. E. van Kaders, C. van Vlierden, J. P. R. van Loo, Jean Seis. . (Plus Bas) Par ordonnanccdu Haut Confeil de guerre maritime, . ( S 1G n é) P. Aardenburg, faifant les fonflions ; de Secrétaire. S. A. ayant vu & examini la Sentence ci-jointe, déclare l'approuver par la préfenti. (SiGNé) G. Prince d'Orange. (Plus bas) par Ordonnance de S. A. ( Contre-srGNe) T. J. de Larrey. Sentence du Pilote Jean Kocic „ Attendu que le 14 feptembre i78r, Jean Koek, Pilo,i, te-cötier demeurant au Texel, & aécuellement détenu p dans les fers fur le vaiiTeau de guerre de 1'Etat, la „ Princeffe Royale Fréderique - Sopbie - Wilbelmine , a, par „ unc négligence inconcevable & une inattentïon impar- s, don-  Grand Tableau. 257 trerent cn fureur, & criercnt, a Yinju/licef & Yatrocité! Et l'on eongoit bien que le Condamné cria auffi haut qu'eüx: De forte qu'aujourd'hui encore, Monféigneur, les Scribes foldés depuis fi longtcrnps par la Clique, & autorifés par la Declahahon , que V. A. a faite dans (on Mémoire , que la Perte du Prince Willem étoit autant un malheur peur de Bruyn, que pour le Pays (a) , ne laiffent pafler aucune occafion fans répéter que eet Officier a ici été la victi- me „ donnablej fans pouvoir allégucr les moindres obftacles „ de temps, de veins & d'autres accidents, fait échouer „ fur le Zuiderbaaks !e vaiffeau de guerre de la Ré uhli„ que, nommé Ie Prince Willem, & par-lè catifé au payj une trés • grande perte; & comme il importe que d'aufiï „ grandes fautes ne reftent pas fans punition, mais qu'cL „ les foient rigoureufement punies pour 1'exemple des „ autres, A ces causes, Ie Haut Confeil de guerre „ ayant eluendu, vu& examiné la Demande&Conclufions „ formées & pfifespar, & au nom de Mr J. Reigersmars &c ecnciamne ledit Pilote Jean Cuck a fubir trois „ fois 1'Eftrapade, du haut dela grande vergue; a être „ eiifuite rigoureufement fouetté oe la eerde, & a la 1, difcrétion des Commiffaires tirés de ce'n^ême Confeil; „ déboute l'Avoe'at-F>'scal de fa Demande uhérieure con,, tre Ie prifonnier; dépofe cependant ce dertjier de fort „ emploi de Pilote cötier, & Ie condamne aux fraix de ,» ce Haut Confeil de guerre , aixifi qu'aux dépens da „ Procés. " Fait,figni contre• figné comme dejjiii^ O) A. f. li- — B. p ut. — G.f. 55. l\  258 L' ESQUISSE ïfUN me de Pinjuftice laplus noire. De clarattok, li étonnante, Monféigneur, que l'on nepeut concevoir comment elle a pu Vous échapper, ou du moins, comment Vous ne 1'ayez point rayée du Mémoire, avant de le figner. Car fi la Perte du vaiffeau n'a été qu'un Malheur pour De Bruyn, pourquoi V. A. a -1 - elle mis au bas de la Sentence , qu'après avoir vu & examinê cette Sentence, Ette Vapprouvottï Et fi eet Officier avoit réellement mérité d'être puni, pour fervir d'exemple et d''autres, comment avez Vous pu regarder, comme un Malheur pour un homme , une Perte, qui étoit due en partie a Vimpmdence, a Vinattentïón, Sc au dé fuut d'ordre de eet homme? — Monféigneur \ tout Délit volontaire, tel qu'il foit, ne peut être cenfé un malheur pour celui qui 1'a perpétré, mais c'en efi; un pour celui envers lequel ce délit a été commis , Sc qui en fouffre le dommage.. Si la vue d'un- Coupable , qui fubit la peine due a fes forfaits, excite généralement la pitte,, ce n'eft pas que l'on regarde ces forfaits, en cux-mêmes, comme des malheurs pour lui,, mais c'eft paree qu'il eft de la nature de Phomrae de fouffrir, quand il voit fouffrir fon femblable, eoupable ou non* c'eft paree que tout homme raifonnable Sc fenfible, ne peut être que tres - affcété, en confidérant a quelles fautes, a quels délits, a quels crimes, 1'incondur%e oü la fcéleratefiè peuvent conduire un autre  Grand Taèleaü. 259 tre homme. Enfin, fi l'on en venoit a regarder toute aftion vrairbent coupable, comme un malheur pour celui qui f auroit commife, on parviendroit a juftifier les forfaits les plus atroces. — Ce ne fut point ainfi, Monféigneur, que la Nation en général penfa fur la conduite du Cap. de Bruyn en cette occafion : Elle regarda eet Officier comme vraiment coupable, comme indigne de demeurer au Service dc 1'Etat } elle le tint pour heureux de n'avoit' point fubi une punition plus rigoureufe que celle qui lui avoit été infligée pour le Confeil de guerre. Ce qui, pendant 1'Inftruction du Procés de ce Capitaine , fervit encore a indifpofer les esprits contre lui & contre 1'Admimftration particuliere de notre Marine, fut la eonnöiflance que le Public eut d'une Lettre adrefiée Veis ce temps-la par le Lieutenant Koelberg a Mr. le Baron de Lynden, ci - devant Envoyé Extraordinaire des Etats - Généraux a la Cour de Suede, Sc remplilfant aujourd'hui le même Pofte a la Cour de Londres. Ce Seigneur, connu par les belles qualités de fon cceur Sc de fon esprit, par fon attachement inébranlable aux intéréts Sc a la gloire de fa Patrie, par le re-* fus généreux qu'il fit en juillet 1781. d'accepter aucune Miflion dans les Cours étrange» res, auffi long-temps que le Duc de Bruns%mk conferveroic quelque influence dans Je* R % Mé*  2ÓO L'ESQUISSE D' U N Affaires policiques de la République («), ce Seigneur, dis-je, connu encore, par les efforts fecrets que la Cabale Anglomane fit pour empêcher qu'il ne füt envoyé a Londres, & pour lui en fubftituer quclqu'autre, qui püt y aller trahir les intéréts de la Patrie, au lieu de les y foutenir , ce Seigneur, enfin, comme bon Citoyen, fe crut obligé , le 16 feptembre, de communiquer a V. A. & a l'Amirauté de la Meufe la Lettre du Lieutenant, afin que les griefs qui y étoient contenus fusfent examinés, & que fi le cas le requéroit, Pon y apportat remede. — Voici cette Lettre. Tres-Excellent et Tres-IllustreSeigneur Baron et Envoye'? „- En conformité de ma promeffe faite k '„ Votre Excellence , a mon engagement 3 ,, Stockholm, pour lui mander comment j'étois „ employé au fervice de la République , par ,, le College d'Amirauté dc Rotterdam , je dois par la préfente informer Votre Excel„ lence, qu'arrivé au mois de mai paffe , j'ai „ amené (.«) Cette Excufe daccepter aucune MiJJien dans lts Paysitrangers , eut lieu a ïtccajim du cboix que les Etats Généraux avoient fait de Mr. de Lynden, pour leur Envoyé Ex. traordinaire a la Cour dt Vitme. L'on ctnnoit la Lettre rtnarquable qut ce Seigneur tcrivit Jur te fujtt 4 L. H. l\  Grand Tableau. 261 \, amcné pour cc College $f Hommes, tant .,, Bas - Officiers , Matelots que Soldats, que j'avois levés cn route, foit en Snede ou en „ Danemarc ; 6c qui, après leur prélêntaa, tion , ont été répartis fur les vaiffeaux de guerre de la même Amirauté. '* „ Quant a moi, j'ai été placé cn qualité dc „ Premier Lieutenant fur le vaiffeau le Prince „ Willem , commandé par le Capitaine De „ Bruyn. A mon arrivée a bord de cc vais„ feau, le Capitaine m'ordonna d'y faire une „ vifite exacte, pour voir s'il y manquoit quel„ que chofe, &dansce cas, d'y pourvoir. En executant eet ordre, je trouvai 1'Artillerie „ dans un mauvais état , 6c non telle qu'elle „ auroit dü 1'être dans un vaiffeau qui étoit n en commiffion depuis plus d'un an. Les canons 6c leurs affuts n'y étoient pas dans „ un état convcnable. " „ i°. Les canons de iz étoient placés fur „ des affuts propres a porter des canons dc 18 i „ 6c ceux dc 6. fur le chateau de poupc, dc même que ceux de chateau d'avant, fe trou„ voient auffi mal dispofés, 6ctellement, mê„ mc , qu'en faifant un feu continu, ces ca„ nons devoient fortir de leurs places & les af* ,, futs fe renverfer. Ce qui m'engagea a ordon,, ncraux Charpentiers de clouer des planches „ de chênc entre les affuts óc les canons, pour „ pouvoir nous en fervir, faute d'autres affuts."  26*2 L' ESQUISSE D1 U N „ 2°. Nos pieces de 24. entre les ponts, „ ne font pas dans le meilleur état poffible j „ les mêches a tampon font trop larges & mal „ lacjonnées. Lorsque je donnai au Capitai- ne connoiffmee de ce que j'avois obiervé, j, au lieu d'un ordre convenable , fa réponfe peu fatisfaifante fut, je ne peux y remèdier, 9, nous n'ohtenons du Pays que les chofes de dernie„ re nécejfitê. " „ Je trouvaidonc plufieurs objets a reétifierj ,, mais, comme Officier fubalterne, je me vis „ réduit a. paffer pour ignorant dans ces forres „ de chofes. II eft extrêmement chagrinant dc voir a la fois & qu'il manque quelque cho- fe, Sc qu'on n'ofe ni ne peut y remédier. " j, Qye femble a Votre Excellence de la 9, fituation oü fc trouvoit notre navire, qui dc„ puis plus d'un an eft fous les commandement de notre Capitaine De Bruyn! Lorsque nous regumes 1'ordre de fon Alteffe de mettre a la voile, le Capitaine m'ordonna de charger „ nos canons de 24 d'un boulet rond & d'un boulet ramé} j'inftruifis le Capitaine que „ la pefanteur de boulet rond e'toit de if li- vres & celle de boulet ramé de presque le ,, doublé, & par eonféquent trop pefans, a. ,, 8 livres de poudre , pour en attendre le le moindre effet. Cc qui porta le Capitai1, nc k m'ordonner de ne charger qu'a boulets ft ronds, o\X comme je le ttouverois a propos.  Grand Tableau. 263 „ Je partis donc avec le Maitre Canonier pour ,, faire charger les canons: Arrivés au premier ,, de tribord, Sc prêts a placer le boulet dans la piece, il ne put y entrer du tout ; au „ deuxieme canon le boulet s*arrêtaa la diftan- ce de deux pieds j a la dixieme piece du 5, même bord le boulet refta a deux pieds Sc ,, demi: Quant au babord, le boulet s'anêta s, a trois pieds dans le canon du milieu ; mais ,, dans les autres pieces il ne rencontta aucun - obltacle. Ces canons font cn dedans rabo„ teux 8c moins larges qu'a leur embouchus, re-, 1'intérieur de plufieurs de ces pieces a même été rouillé au point que je pouvois en arracher les morceaux j Sc la plupart des lus, mieres dc ces canons ont dc trop grands con,, duéteurs. Le lendemain , le boulet refta 5, avancé , & le Capitaine envoya demander au Maitre d'Equipage, a Helvoet, une par„ ne de boulets de 18 , pour en faire uïage aux 4. pieces en queftion; & ces boulets „ nous furent envoyés. Mais je fis obferver „ au Capitaine qu'ils n'étoient point faits pour lc calibre de ces pieces: il fit donc que nous „ obtinmes quatre autres canons pour rempla,, eer ceux qui manquoient: cependant, dans „ ces canons de remplacement les conducteurs „ des lumieres fe tröuvoient a deux doigts de 9, la ligne centrale. J'en fis mon rapport au Js Capitaine, qui jugea que cela ne tiroit pas £ 4 acon-  204 L' ESQUISSE D' U N s, a conféquence j quoique je tacbafle de lui ,, faire comprendre qu'd étoit impolfible de ti- rer droit avec des pieces femblablef. " ,, 40. J'aurai l'fionneur d'informer Votre Ex5, cellence, fur ce qui concerne les provifions, „ Cha que femaine 1'Equipage a, par tête, une „ demi-Üvre de beurre & une livre de fro„ mage, poids leger. Le poids confifte en vieux morceaux de fer non étalonnés j ce qui me fait craindre qu'il na foit de beaucoup trop leger, & moindre qu'il ne devroit être, ,, d'autant plus, qu'ayant une fois rcpefé, en préfence du Capitaine, la ration de fromage „ deftinée a deux Ordinaires, j'en trouvai la „ quantjté beaucoup moindre qu'elle ne de- voit 1'être. Sur quoi le Capitaine m'ordon„ na de faire mettre aux fers le Dépenfier; ce t, qui me fit croire fermement que celui - ci fe„ roit mis au Confeil de guerre. Mais, a „ mon grand étonnement, ce même Dépen,, fier a obtenu un brevet de Licotenant fur le cutter de la République, nommé le Brak, j, Deux fois par femaine on donne a 1'Equipa- ge dulard, dont la mauvaife odeur s'exbale dans tout le vaiffeau , &c des pois gris accom» „ modés avec la graiffe de ce lard, que chez „ d'autres Nations les matelots n'oferoient man.j> ger: ie$ autres jours de la femaine, du iiokv „ vis nagrant dans une fauce de moutarde & -p d'une eau, qui a, fervi 3. faire cuire les pois: „ urn  Grand Tableau. 265 „ tous les foirs , des pois feuls: jamais de vians, de fralche pour 1'Equipage, a i'exception „ d'une feule fois pendant mon iejour a bord, 3, oii l'on donna de la foupe Sc de la viande „ fraiche aux matelots. Quant a 1'eau, elle t, eft fi mauvaile qu'elle fait foulever le cceur; „ les gens de 1'Equipage n'ofent en faire bouil„ lir pour prendre du thé. Outre cela, il leur „ eft défendu d'aller tour-a- tour a terre, ainfi „ que cela fe pratique chez les autres Nations, „ pour fe rafraichir & refpirer Fair; mais on „ les force de refter i bord comme des pri „ fonniers j Sc leurs coffres, leurs habillemens &c., font mal arranges Sc mal entre* „ tenus. " » S°' Jc viens maintenant au traitement des „ malades, dont chacun recoit par femaine une „ demi-livre de beurre, Sc par-deffus feule» ment des alimens de malades, confiftant en „ bierre de navire, avec de 1'orge qui refte du „ déjeüné, des miettes de pain bouillics avec „ un peu de firop, quelquefois dc la bouillic „ dc farinc cuite a 1'eau; jamais de la foupe „ fraiche, ou d'autres alimens propres a rendre „ aux malades les forces ncceffaires. Les mak* „ des font gardés a bord auffi longtcmps qu'il „ eft poffible, avant qu'on ne les tranfportc a „ 1'Hópital de Goerée. 11 faut chercher la p vraic caufe de eek dans le profit que tirc lc Rf Ca*  $66 V E S Q_ ü I S S E D"* U N „ Capitaine , auffi longtemps que les malades ,, reftent fur le vaiffeau, pui^que, k ce qu'on m'a afu-té, la République donne par jour „ une indemnifation de o fois pour chacun d'eux , ,, & que le Capitaine en eft privé quand les ma„ lades font a PHöpital Lorsque ets pauvres „ gens y arrivent, on les trouve en li mauvais „ état que peu en réchappent. Ceux qui y „ meurent font mis a terre fans brancard, 8c fans avoir feulement le vifage couvert, on ne faic „ que les jetter dans la folfe 8c les couvrir. „ Moi-même, étant tombé malade, 8c ayant „ été tranfporté a 1'Hópital, j'appris du Mé„ decin du vaiffeau qu'il avoit fur fa lifte 40 _ malades, non compris ceux qui fe trouvoient „ encore a. eet Hópital, 8c qui s'étoient blcffés a en tombant dans le fond de cale } entr'autres p un matelot, quis'étoitcafle laclavicule, a été fi mal panlë qu'il refte eftropié du bras, par- ce que 1'un des morceaux de cette clavicule „ dé paffe 1'autre. Au dhe dc quelques gens de V Equipage qui depuis 14 Mois ont fervi fur „ ce navire, pres de 300 hommes y font morts „ dans eet intervalle, y compris un Premier „ Lieutenant, auquel j'ai fuccédé. Les mala„ dies qui ont défolé 8c défolent encore ce vais„ feau, font des fievres malignes, la gale, le „ fcorbut, 8c des ulceres aux jambes fi dan„ gereux, qu'on a été obligé de faire a plu- „ fieurs  Grand Tableau. 267 fieurs ramputation des doigts des pieds« „ Sc même des jambes : je crois que 1'E„ quipage a presqu'entiérement été renou„ vellé. " „ 6°. C'eft une choie étrange, que des que „ les convalefcens de 1'Hopital apprennent ,, qu'ils doivent retourner a bord fous les or„ dres du Capitaine dd Bruyn, ils s'imaginent „ qu'on les envoye au fupplicej telle eft la terreur qu'il infpire! " „ 70. Le vaiffeau eft trop étroit Sc pas affez 91 l°ng P°ur les canons. Lorsque nous eümes 4fo ou 460 hommes a bord , ils furent obligés de fufpendre leurs branies fous le chateau d'arriere, fous celui d'avant, & fous le pont aux vaches. Comment feroit-on en hiver, ou dans un climat chaud, avec un Equipage de yro hommes? " „ Je Crois , Noble & Puiffant Seigneur, „ avoir fatisfait par cette relation. II faut pourtant ajouter que, fi je n'étois étranger & „ retenu par cette confidération , je ferois porté a. mettre fur un meilleur pied les manceu» „ vres de 1'artillerie, Sc a placer les effets des 5, matelots fans caiffes, dansles vaiffeaux reffbrtiffans de l'Amirauté de la Meufe. Ce dernier point me paroit très-néceflaire. " ,, En finiffant, j'ai 1'honneur de me recommandcr avec une liberté honnête a la pro- 35 t«-  268 L* ES QUI S S E D1 U N „ tcction de Votre Excellence, rne nommant ,, avec le refpeét. le plus profond, " Tres-Excellent Sc Tres - Illuftre Seigneur , Baron Sc Envoyé, De Votre Excellente le trèsobéijfant Serviteur, NICOLAS KOELBERG. La Publication de cette Lettre, dans quelque Papiers püblics, ne put manquer dc déplairc a quelques perfonnes; car fi tout ce qui y étoit rapporté étoit vrai, il achevoit de déshonorer le Cap. de Bruyn , Sc prouvoit la négligence punifiable du Maicre d'Equipage de l'Amirauté de la Meufe, Sc d'autres Prépofés a l'armernent des vaifléaux de ce département: fi de tout cela il n'y avoit qu'une partie dc vrai, c'étoit déja trop pour 1'honneur de ces Melfieurs; En un mot, foit que le tout füt vrai ou faux, la Publication de la Lettre ne pouvoit qu'étrangement décrier le fervice maritime dc 1'Etat, dans un temps oü l'on ne ccsfoit de fe plaindre de la rareté des hommes pour équiper nos vailfeaux. Pour donc cffacer 1'effet que cette Publica» tion avoit d'abord fait fur 1'cfprit de la Nation,  Grand Tableau. 209 8c pour empêcher celui qu'elle feroit encore en s'étendant jusque dans les pays étrangers, il convenoit d'examiner fans aucun délai la dénonciation de Koelberg, d'en détailier toutes les faulfetés, fi l'on y en trouvoit, 8c de publier ce détail entier dans tous nos Papiers publiés, cn quelque Langue qu'ils fuflent écrits. Mais au lieu de cela, 1'affaire traina tellemcnt en longueur, qu'il fc pafiatrois mois avant que 1'Avocat-Fifcal remit fon Rapport au Confeil de l'Amirauté, 8c qu'enfuite ce dcrnicr tarda encore prés d'un mois, avant de prononccr fur ce Rapport. — Sans entrer dans 1'expofition des caufes & des motifs , qui purent avoir occafionnó ce retardement, je placerai ici ce que le Public apprit de 1'iflue de cette affaire. La Gazette Francjoife de Leyde du ip. janvier 1781. n'en dit que ce qui fuit: „ Le College dc l'Amirauté de Rotterdam , a terminc Paf„ faire du Lieutenant Kotlberg, qui avoit avaneé plufieurs chefs d'accufation, pour mal„ verfation 8c négligence de devoir, contre le ci-devant Capitaine André de Bruyn. La Réfolution prife par cc College le 14 de ce „ mois, fur le Rapporr fait lc 18. décembre par Mr.PAvocat-Fifcal PFyckerbeld Bisdom, porte en fubftance, que, vu ce qui s''étoit ,, pajfé d 1'égard du Capitaine de Bruyn, depuis „ Vaccufation du Lieutenant Koelbcrg, il n'é„ toit plus a PRoros de fousser l'af- „ ÏAl-  270 L'E S Q.Ü I S S E D*UN faire pöur ce qui recardoit ce ca» 3, pitainej mais que ne pouvant conniver h let „ conduite du Sr. Koolberg envers fes Supérieurs, le College le feroit réprimander par l'AvocatFifcal, Cs? lui retireroit fa Commiffion de Lieu„ tenant, ainfi que celle de Recruteur, en lui 3, payant fes gages jusqu'd la date de la Réfolution „ &c. " — Quant a d'autres particularités dudit Rapport & de ce qui s'enfuivit, voici ce qu'on a fait inferer dans la Gazette de Rotterdam du 16 dudit mois de janvier, & dans celle de la Haye du i. février fuivant: —1 ,, II parolt par le Rapport de 1'Avocat- Fifcal & felon les déclarations y jointes, que le Lieutenant Koelberg n'avoit aucunement eu dejfein de refpeïïer la vérité dans fa Lettre; mais que bien loin de cela, il avoit grandement léfé, tant en ce paysei qu'ailleurs, la réputation du Service de la République ; c'efi pourquoi l'Jvicat - Fifcal, fans con* Jidérer que Von devroit procéder avec plus de rigueur contre ledit Lieutenant, qui pendant Jon court fervice, avoit éprouvé plus d'une fois la douceur du Confeil (de cette Amirauté), propofa que ce dernier lui fit encore reffentir, fous Vapprobation de S- A., la même clétnence, en lui mettant fous les yeux ce qu'il y avoit d'inconficbérê, d'abufif& d'injurieux dans fa Lettre, en le reprimandantfiévérement, en lui retirant enfuite fon Brevet de Lieutenant, fa Commiffion de Recruteur, & toute autre chofe qui pouvoit lui ateir été accordée. Que : : eet-  Grand Tableau, vjt cette Propofitionayanr été recue,8c enfuite approuvée pai1 5 A., le Con/eil lui repréfenta la faute qu'il avoit cemmife, ci? le mauvais defjein qu'il avoit eu en la commettant; £s? après l'avett qu'il fit derechif de cette faute , après en avoir témoigné fon repentir, ci? demanclé excufe, en ajotitant qu'il avoit été induit tn erreur par d'autres, & ayant promis de s'abflenir dorénavant de décrier d'aucune maniere le Service du Pays &c., il fut déclaré demis dudit Service, avec liberté', cependant, de demander l'argent qui pouvoit lui revenir, après avoir préalablement remis fon Brevet de Lieutenant." II s'cn fallut beaucoup, Monféigneur, que la Leéture dc tout cela fatisfit le Public, auquel la longue durée de cette Procédure avoit de plus en plus fait croire que la Lettre de Koolberg ne contenoit que la vérité, fur-tout, a. 1'egard de beaucoup de chofes: ,, Car, difoit-on, il n'eft pas croyable que ce Lieutenant en ait impofé dans: ce qu'il a avancé, 8c fi clairement particularifé, touchant la mauvaife qualité de quelques canons, des affuts, 6c de la groffeur des boulets: ce n'étoit point-la un fïmple ouï-dire. " Quant a la nature 6c a la ration de la Nourriture de 1'Equipage du Prince Willem, fi l'on y afoute le gruau, dont il n'a point parlé, elles étoient les mêmes que fur les autres vailfeaux de guerre de la République, Sc Pon vit fort bien avec cela* mais *  *72 L'ES^ÜI SSÏ D'UN z 1'égard de la mnuvtife qualité de la Nourriture de ce vaiffeau, c'eft toute autre chofe. du moins, l'on fait de bonne part que le Cap* de Bruyn ne pafloit point pour être du nombre de ceux de nos Officiers, qui n'épargnent rien pour procurer des alimens fains a leur gens, & qui favent bien empêcher que l'on ne rognd la ration de ces derniersj qu'au contraire, il eft connu qu'il y a fouvent eu fur fon vaisfeau des murmures 6t des piaintes fur la qualité de la nourritüïe 6c fur le poids de la ration. «J— „ Quant au traitement des malades, Koclberg n'affirme dans fa Lettre que ce qu'il a vu j Sc quant au refte de eet article , il ne parle que fur le dire des autres D'ailleurs, il eft a croire qu'a eet égard Mr. le Fiscal de l'Amirauté aura recju des Déclarations autenti* ques 6c fufhïantes-, car on ne pouvoit regarder pour être d'aucune valeur, celle d'unhamme tel que de Bruyn, 6c celles de gens femblables a. quelques uns d'cntre ceux, qui, arant 6c après le Jugement qu'il a fubi a 1'occafion de la perte de fon vaisfeau, lui ont fourni des témoignages pour prouver fa grande diligence en cette occafion, Sc pour infirmer ce Jugement. " Pour ce qui eft des 300 mort» que le Cap. de Bruyn a eu parmi fon Equipage, il eft notoire que 1'exagération ne pouvoit guere être ici de plus d'un tiersSc cette cxagé-* ration de ioo ou de 12,0 hommes n'étoit pas nou  6r and Tableau. 273 non plus de 1'invemion de Koelberg, puisqu'il die l'avoir entenrht dire. V -— „ Quant au re* proche d'avoir léfé tant en ce pays • ci qu'ailleurs la réputatiön du Service de la République, ce reprochc eft in jufte , puisque le conrenu de la Lettre n'étoit qu'une conndence faite a Mr, le Baron de Lynden, & qu'il n'a point été prouvé que ce füt Koelberg qui eut publié eet Lettre. " — ,, La maniere vague, dont-il a été inculpé dans ce que les Gazettes de Rotterdam êc de la Haye ont donné du Rapport du Fiscal j & de la réprimande du Confeil , la maniere dont on a fait fonner dans cette réprimande 1'aveu , le repentir , 8c les cxcüfes de ce Lieutenant , feroit croire que fa Lettre n'étoit qu'un tiflu de fauffetés & de calomnies inventées par lui , tandis que dans cette Lettre , il n'y a tout au plus qüc quelques eXagérations de fa part, 6c que ce qu'il peut y avoir de contraire a la vérité , comme la retention des malades fur le vaiffeau j afin de profiter des p fous que 1'Etat accorde journellement a chacun d'eux, n'eft auffi rapporté que d'après un èut ■ dire " — „ Ce qui feroit encore croire que Koelte-g n'eft point auffi coupa»' ble qu'on a voulu le faire paroitre, eft le pasfage que le Gazetier Francois de Leydt a tiré' du Rapport de l'Avocat-Fiscal, 6c qui porte, que vu ce qui s'étoit paffé d 1'égard du Capi* taine De Bruyn, il n'étoit plus d propros de pnmS jet  274 L' ESQ.ÜISSE UN fer ï'affaire plus loin pour ce qui regardoit ce Ca" pitaïne : Et en effet, fi l'on croyoit vraiment Koelberg coupable, pourquoi s'arrêter dans la pourfuite de cette affaire a 1'égard dc De Bruyn"? ignoroit-on que c'étoit de la parfaite convi&ion de 1'innocence ou des malverlations de ce Capitaine , que devoit réfulter 1'entiere conviélion du délit ou de 1'innocence de Koelberg! „ Mais, ajoutoit -1>- on, fuppofons pour un inftant que ce dernier étoit vraiment auffi coupable que la réprimande qu'il a fubie le fait entendre, pourquoi s'être borné a cette réprimande, & a lui retirer fon Brevet de Lieutenant? Un homme, qui avoitindignement compromis 1'Adminiflration d'un de nos Golleges d'Amirauté , qui avoit cruellement calomnié fon Capitaine, & qui, fur-tout, avoit décrié en ce pays - ci & ailleurs le Service de 1'Etat dans* un temps, oü un tel décri pouvoit rendre plus difïïcile que jamais le recrutement d'hommes' pour nos vaiffeaux, un homme, dis-je, qui dans le peu de temps qu'il avoit été au Service du Pays, avoit été diverfes fois dans lé cas* d'éprourer la clémence du Confeil de l'Amirauté d'oü il reffortiffoit, un homme, enfin, tel que celui - la, au lieu de perdre fimplement fa place de Lieutenant, méritoit d'être caffé avec ignominier & d'être condamné a tous les* fraix de la procédure faite contre lui. Que yisquoit-on en cela , finon de le faire fervir d'exem-  Grand Tableau. 27 s d'exemple a ceux qui voudroient Pimiter, 8c de convaincre la Nation 8c 1'Europe entiere, que s'il y avoit fur quelques uns de nos vaisfeaux une artillerie mal affortié, des rapines, des injuftices , de 1'inhumanité, de la barbarie, ce n'étoit point fur celui du Capitaine De Bruyn} Mais on ne 1'a pas feit! L'on a accordë au délinquant fes gages 8c fes prétentions , jusqu'a la date de fa démiiïïon! Et bientöt après il obtint la Commiffion de Capitaine de Corfaire ! — Donc il eft a conjecturer que eet homme étoit moins coupable, qu'on nc nous 1'a voulu faire croire; — donc il étoit peut-être entiérement innocent-, —— donc, en ce cas, on ne devoit pas le démer> tre du Service, 8cc. 8cc. " Voila, Monféigneur , te réfumé de ce que beaucoup de perfonnes ont dit fur cette linguliere Affaire. Pour rrioi, qui cohno'rs auffi bien que tout autre le tort ou le droit de 1'Sx - capitaine De Bruyn 8c de fon Accufateür, je me tais; 8c je refpefte, comme je ledbis, les lumieres 8c 1'intégrité du Confeil qui a prononcé en ce cas. Mais comme le droit,' qu'a tout Citoyen libre , d'indiquer les abus criants qui fe remarquent dans tel Département que ce foit, je ne puis killer paffer cette occafion- ci, fans rappeler a V. A. qu'il n'y a malheureufement que trop d'abus femblables dans 1'aVictuailïement de nos vaiffeaux de guerre, ê£ dans la S 2 ma-  27Ó L1 ESQUISSE D' U N maniere de nourrir leurs Equipages: a eet effet , je me fervirai ici des propres paroles de P Auteur des XXX. Articles, ou Confidérations timvelles fur V brtuffite de l'Expédition de Brefl. Chez nous, dit eet Auteur, ce font les Ca3, pitaines ou Commandants des Vaiffeaux, qui „ font les approvifionnements de bouchejee ils favent ce qu'ils tirent de 1'Etat pour cehu „ Or, en ce cas , combien d'abus 1'avidité j, degagner, ou la rage de s'enrichir ,- n'occa5, fionne-t-elle pas? Je rends ici juftice a „ 1'humaniré , au noble défintéreffement de' ceux de nos Officiers, qui n'épargnent rien 5, pour procurer a leur Equipage des Aliments y, fains, & qui ne favent ce que c'eft que de „ rogncr le poids 8c la mefure de la Ration do „ leurs gens: Mais d'autres, non contents de cette léfine injufte 8c honteulê, portent 1'aji varice 8c la dureté au point de n'ac:heter j-, que des Provifions de rébut, que des Pro„ vifions corrompues, ou dispofées a 1'être in* „ ceffament. " „ Pour en juger, il faudroit fe rrouver au» Diftributions qui fe font fur leurs vaiffeaux: „ Souvent, lors qu'on y rompt le Biscuit^ „ qui eft fait de mauvais feigle, 8c mal féché, il file comme des étoupes: Le Gruau, échauf„ fé, moifi, comme je 1'ai déja, dit ci-des-< '„ fus, n'eft plus que par maffe, & fe trouve 5, farci d'infectes: II en eft de même des Pois: » L'o-  Grand Tableau. 277 „ L'odeur du Beurrey prend ala gorge : L'ou9, verture d'un tonncau de Lard y irifi óte lc „ Batiment d'un bouc a 1'autrti êc la ieule vue de ce Lard & des Vers, dont il four9. mille, fait foulever le cceur: Le Stokvis „ n'eit fouvent pas meilleur Et de tels „ Officiers, ou plutöt ces Bourreaux , qui trouvent d'autant mieux leur compte dans un pareil manege , que leur Equipage a plus ,i d'averlion pour de tels aliments, ou qu'ils ,, ont plus de MUades a bord, voient encore „ avec une infenfibilité barbare expirer les malheureux , que leur avarice infame fait ,, périr. Que l'on ne dife pas, que de telles ,, chofes ne peuvent avoir lieu que dans des ,, Croifïeres de long cours, car il eft prouvé que pendant la dernierc guerre, cela eft ar,, rivé un grand nombre de fois dans nos Ra,, des, & fur plufieurs de nos Vailfeaux: J'en „ appelle a tous ceux qui ont furvécu a un tel traitcment} j'en appelle aux honnêtes Of„ ficicrs, qui ont horreur de telles énormitési ,, j'en appelle en'>n a tous ceux qui favent, ,, que c'eft la une des principales caufes de la „ difficulté, qu'il y a dans ce Pays - ci - a trou,, ver des Hommes pour le fervice de Mer: „ Et je déclare publiquemcnt, qu'il eft de la s, dkrnierr 1mp 0 kt .n c e pour le fervice de la Marine £5? Pbonneur de PEtat, que L. H, iv P. abolilfent eet abus criant, foit en char«; S 3 » geani  278 L'E S Q.UI S SE D' U N „ geant les Amirautés du ravitaillement imméj, diat des Vaiffeaux , foit par d'autres moyens, ,, que leur amour pour le bien du Pays, ou „ leur bumanité pour les malheureufes Victimes de cette pratique , pourra leur infpi,, rer. " L'Amour de Phumanité, Monféigneur, un £ele ardent pour la gloire du Service de la Patrie , 1'horreur qu'infpirent a toute honnêtc homme des abus Sc des malverfations de cette espece, font les feuls motifs qui m'ont portc a m'arrêter ici fur eet objet , & a citer le Paffage fusdit, qui conrient des vérités que perfonne ne peut contefter, Vous êtes 1'Amiral Général de la République, Monféigneur, Sc par eonféquent , il n'eft pas croyable que V. A. ignore de tels abus: Sc fi cela eft ainfi, pourquoi n'avez - vous pas encore porté le Souverain a abolir le caufe que les occafionne? . Uu long ufagt , me dira-t-on, 6? la difficuUé de Vabolir, font qu'a eet égard on laiffe les chofes lomme elles font. — Mauvaife raifon, que cela: Qu'on mette la main a 1'ceuvre, & qu'on agiffe avec zele Sc prudence , 1'ón éprouvera qu'a eet égard , ainfi qu'a bien d'autres, il n'eft pas fi difficile de faire le bien, qu'on voudroit nous le faire accroire. Enfin, Sc pour finir une fois pour toutes de parler du Capitaine De Bruyn , je dirai que touc  Grand Tableau. 279 tout ce que j'ai rapporté de lui, indique affez quelle idee l'on peut fc former dc fa fcience, de fa vigilance, de fa bonne volonté & de fa conduite, en qualité d'Officier de mer, & ce qu'on peut penfer des Obftacles vrais ou fuppofés, que l'on a allégués pour juftifier la funeflre durée de fon féjour a 1'embouchure de la Meufe. En effet, fi ces Obftacles n'ont abfolument point exifté, quelles font donc les caufes ou les motifs fecrets, qui, jusqu'au 10 feptembre, font retenu d'obéir aux différens ordres qu'il avoit recus de partir pour le Texel ?,.... Si, au contraire, ces Obftacles ont vraiment eu lieu, Sc qu'il foit vrai qu'un vaiffeau de la force de celui qu'il montoit, doive quelquefois refter des mois entiers fans pouvoir partir des Rades d'Helvoet & de Goerée, pourquoi la Direélion de notre Marine n'a-t elle point envoyé a temps ce vaiffeau dans un endroit, d'ou il put plus facilement fortir? Pourquoi, par excmple , ne 1'a-t- on pas envoyé en Zélande au commencement de mai, c'eft-a-dire, lorsque les Capitaines Ratms , Sonnemans Sc Story font partis de la Meufe pour s'y rendre? La Zélande étoitelle fi éloignée de Rotterdam & d'Helvoet, pour qu'il lui füt impoffible d'y tirer les hommes Sc les munitions qu'il avoit a recevoir de ces deux endroits? D'ailleurs, étant cn Zélande, n'y auroit il pas fervi de renfort au Capitaine van Kinckel, qu'on n'ofoit d'abord faire S 4 par-  2Eo L?escluïsse d^jjn partir feul pour le Texel, & qui toutefois y arriva feul enfuiie, 6c dans un temps, oü De Bruyn n'avoit encore bougé de 1'endrott oü il étoii? D'ailleurs fi Mr. van Kinsbergen, qui, au commencement de juillet avoit recu ordre d'aüer en Zélande chercher le Cap. van Kinckel (a) , avoit exécuté fa commiffion , Mr. De Bruyn n'auroit - il pas auffi bien pu fe joindre a lui en eet endroit, qu'étant a Helvoet ou a Goerée? D'ailleurs, dis-je, Mr. van, Kinsbergen en auroit - il moins pu prendre, a fon retour , les deux frégates , le cutter, la corvette & les navires de commerce qui feroient reftés a 1'cmbouchure de la Meufe ? Et enfin, au défaut de Mr. van Kinsbergen, les Capitaines van Kinckel &C De Eruyn réunis, & fe ïendant au Texel, n'auroient - ils pas également pu prendre en paffant ces vaiffeaux de la Meufe ? Monféigneur ! de quelle maniere que l'on envifage 1'hiftoire entiere de 1'éternel féjour De Bruyn a Helvoet ou a Goerée, il y a eu en cela, ou unc négligence, ou une désobéiffance formelle de fa part, ou une Direction tres- défeótueufe d'une autre part. Si l'on me demande préfentement , fi le Cap. De Bruyn 8c tout ce qui a pu avoir rapport a lui pendant la Compagne de 1781, va- loient fa) v. page \6\. ci-deffus.  GRAND TABLEAU. 281 foient bien la reine que jc m'étendilfe fi au long, 6c fur fa propre conduite 6c fur ce qui le regardoit? je répondrai que tout homme, qui aura vu combien fonretarda fe rendre au Texel, & combien le retard de tous les vailfeaux de la Meufe a fe rendre au même endroit, ont influé fur nos plus importantes Opérations maritimes de cette Campagne,combien cesretards ont occafionné de faux prétextes 6c d'excufes friyoles d'un có'té, combien, d?un autre cóté, ils ont occafionné de penes 6c de piaintes a nos Négociants, de murmures 6c dc clameurs parmi Ia Nation, de befogne aux Etats de Hollande 6c aux Etats - Généraux , je répondrai, dis-jc, que tout homme, qui aura vu cela, 6c qui aura encore vu , quelles nouvelles piaintes, quelles nouvelles alarmes, quelle nouvelle befogne, la perte du vaiffeau de ce Capitaine & 1'Accufation de Koolberg ont caufées a leur tour, je répondrai, enfin, que tout homme, qui aura vu ces différentes chofes, ainfi que fa D é f h n s e 6c les autres Ecrits que De Bruyn a produits pour fa juftification particuliere, ne me fera point une telle queftion. —. Le Récit que j'ai fait de toutes ces chofes eft long en effet; & par cela même, il pourra paroitre infipide, ennuyeux ou fuperflu, a ceux qui lifent moins pour s'inftruire des Faits, que pour s'en amufer. Mais, peu m'importe : 1'importance du fujet 6c 1'exaftitude hiftorique n'étoient point S f i"  282 L'ES Q.UISSE D' U N ici des objets a facrifier au goüt particulier dc pareils Cenfeurs: Mon Hiftoire n'eft: ni un Roman, ni un Discours d'apparat : Ainfi, ceux auxquels fa lecture déplaira, feront libres de fermer le Livre & de le lailfer • la. Je reviens au Contre ■ Amiraal van Braam. # Ayant dit (page 24P. ci-deffus) que le 1 r, fcptembre eet Officier avoit jetté l'ancre a 1'entrée du Texel avec fon Efcadre, & avec fept Vailfeaux de la Compagnie des Indes, j'ajouterai ici que comme le 14, le huitieme vaiffeau de cette Compagnie 8c fept navires du commerce de la Meufe étoient arrivés vis - a vis le Texel avec la Bellone 8c la ïbétis, il fembloit que ce Contre - Amiral n'avoit plus qu'a mettre a. la voile avec le Convoi du Sund, 8c que les 8. vaiffeaux des Indes pouvoient également fe mettre cn route. Mais il en arriva, tout autrement: le 12 on avoit fignalé de Kykduin («) ip vaiffeaux ennemis j 8c un navire marchand Suedois vint affïrmer que c'étoient autant de vaiffeaux de guerre ; car faute de vaiffeaux legers pour aller a la découverte, ou fau- (a) Kykduin eft un Amas de dunes élevits ftuées vers l'exnémité de la Nord- Hollande, & d'oit l'on découyrt qffez loin en mer.  Grand Tableau. 283 faute d'employer a propos le peu de vaiffeaux que nous avions de ce genre - la , il falloit bien s'en rapporter aux lunettes de Kykduin, Sc aux rapports des Etrangers , qui pouvoient avoir eu la berlue, ou avoir été gagnés pour nous en impofer. II eft étonnant que Ton ne s'en rapportoit pas plutöt aux Pêcheurs Sc aux Pilote? de Petten qui étoient accoutumés de vendre du poiffon Sc des viótuailles a tous les vaisfeaux de guerre Anglois, qui paroiffoient fur nos cöces : L'on craignoit apparemmenc que ces honnêtes gens , qui, avec leurs vivres Sc leur poisfon, portoient fi bien des nouvelles véritables a Pennemi, ne nous en rapportaffent de fauffes.—• Le if. V. A. apprit la retraite de la FlotteCombinée, & Elle inftruifit d'abord de cette nouvelle, 1'Amiral Hartfinck, pour que Mr, van Braam en füt averti, Sc qu'il prït fes mefures en conféquence. Enfin, le 16 cedernier rentra au Texel avec fon Escadre, avec les vaisfeaux de la Compagnie Sc les 7 autres navires de commerce: Et immédiatement après cette rentree, Mrs. Hartfinck , van Kinsbergen, van Braam , Sc la plüpart des Capitaines de vaisfeau , jugerent que la fiaifon étoit trop avancêe pour efcorter un Convei au Sund: Sc cela, tandis que le 11 1'Escadre étoit fortie pour eet effet l (a) Petten efi un VMage fittii mt desa dt KykduiE.  284 L' E S d U I S S E D' UN effet l — Le coup de cloche, que Mr. Hartfinck avoit fonné le 28 aoüt, devoit naturelle-' ment être fuivi de ce fecond coup - la (a). Ainfi finit cette Famluse- ExpéülTioN, qui confifta, ct avoir été quatre jours a l'ancre a ïentrée du Texel. Et voila derechéf comment furent renduts vaines, les inltances réitérées • de nos Négociants 6c la jufte attente de la Kation! Voila le fruit de 1'intention formelle & des ordres du Souverain! Voila, en un mot, la glorieufe iffue de ce zele, de ces foms & de ces promcffcs, que V. A. avoit fait fonner fi haut!.... Ce fut bien la le cas de s'écrier, Parturient montes, nafcetur ridiculus mus\ A cette nouvelle, Monféigneur, un filence fombre regna d'abord parmi tous nos Citoyens} mais les cris de la plus vive iudignation, fuccóderent bientót a ce filence. Les plus animés chargerent, non pas V. A., mais bien la Cabale Anglomane, de toutes les Imprécations que leur infpiroit la rage de voir la Nation fi cruellemcnt décue, 6c le Commerce fi indignement abandonné a fon trifte fort.-—\',, Voila, „ di- (a) Voyez fur tout cela le Ve r b al de Mr. Hartfinck du 12 fej.tembre fuivant ~ Item, A. p. 75. & futv. <— B- p- 115- id. — C. p. 56. id.  Grand Tableau. 285 „ difoient d'autres, comment, par cent delais a fucceflifs} par cent détours captieux, & a 5, 1'ombre dc mille vaines excufes, on par„ vient a gagner du temps, & a faifir le premier prétextó qui fe préfente, pour jufti„ fier Veffet naturel de cette étonnantc fuccesllon de négligences & de mauvaifes mefu„ rcs, que l'on a remarquées depuis 8 mois dans l'Adminiftration tant générale que par,., ticuliere de notre Marine: Voila commenG on a recours a des obltaeles qu'on avoit pré„ vus, & qu'on a attendus avec impatience, pour couvrir le deflein, qu'une Cabale déteftable a d'anéantir notre Commerce, Sc de facrifier a. notre ennemi mortel la gloire „ & les intéréts de PEtat. La Flotte- „ Combinée s'eft retire'e, nous dit-on, les An* f, gleis paroiffènt en farce dans la mer du nordj ,-, la laifun avancée ne permet plus d'accorder ,-, d'Escorte au Convoi du Sund Hclas! „ nous ne le favons que trop: Noüs favons que c'étoit-la, oü l'on nous attendoit,' ,, pour nous dire clairement, mais d'une maniere indirecte, Le Confeil fecret qui dirige' le Prince, & qui dirige tout ici, n'a jamais ,-, eu envie que l'on accorddt de proieclion au Ccm,, merpants; rjf voila, enfin, qu'ils n'en obtien- dront pas. O! que notre Amiral-Gé- néral cit a plaindre, de ne pas mieux con* noitre la fcéiératefle de fes Confeillersl.... Ae  286 1'ESQ.UI SSE D'UN j, de nc pas voir par fes propres yeux 1'e'tat j, des chofes!.... 8c d'être, en tout ceci, le ,, déplorablc inftrument des defleins & des; j, menées de ces gens-la! " Voila cn fubftance, Monféigneur, ce que mille autres, comme moi, ont entendu de leurs propres orcilles; voila cn fubftance cé qu'on lut dans divers bons Ouvrages qu'on publia dans Cé temps-laj 8c voila, enfin, ce que jc ne puis contredire, fans démentir les vérités inconteftables, qui réfultent de eet enchaïnement de caufes Sc d'effets, que j'ai expofé dans le cours de cct Ouvrage. Cependant, comme malgré la Déclaratton que Mrs. Hartfinck, van Kinsbergen, van Braam, & la plupart des Capitaines de vailfeaux avoient faite le iö, les Négociants de la Baltique pouvoient revenir a la charge, Sc que les Intéresfés a la Navigation de Sürinam prefibient dc nouveau V. A., & comme, en même temps, l'on auroit voulu avoir un fürcroit d'autorités, pour fonder la - deflus le refus qu'on avoit desïein de faire aüx nouvelles inftances des uns 8c des autres de ces Meflïeurs, l'on porta d'abord V. A. a confulter les Députés des cinq Colleges d'Amirautéj mais ces Députés ayant demandé, avant de s'expliquer, d'avoir connoisfance des confidérations que le Vice- Amiral 8c les autres Officiers fupérieurs pourroient dorincr k  Grand TAbleaü. 287 a eet égard, il fallut commencer par ailleurs. En conféquence de cela, V. A. écrivit le zo. a Mr. Hirtfinck pour avoir fon avis & celui des autres Officiers füpérieurs, qui étoient a la rade du Texel, fur les deux points fuivants. i°. ,, S'il étoit expédient de faire fortir „ 1'Efcadrej ou bien fi la faifon étoit trop avancée, pour risquer de fe ren,, dre avec le Convoi dans la Baltique, 8c d'en revenir, quant bien méme orï ,, n'auroit rien acraindre de 1'Ennemi?" X°. ,, Si après le i. ocfobre il étoit poffible ,, de pasfer en forme d'Efcadre par le 5, Nord (de 1'Ecosfe); 8c fi vers ce „ temps*la l'on pouvoit aecorder avec ,, confiance Je Convoi demandé?" Si, comme je 1'ai dit , l'on n'avoit poinÉ cü befoin d'un furcroit d'autorités a oppofer aux nouvelles inftances des Négociants, il auroit été inutile de faire ces deux Qwellions, paree que l'on étoit très-aj/uré que 1'Avis de ces Meffieurs feroit pour refter. Et en effet, le it le Contre-Amiral van Braam ayant rasfemblé fur fon vaiffeau dix Capitaines de soïf escadre, il fut unanimement déclaré par eux 8c par leur Commandant, ,, qu'a 1'égard „ du premier des deux Points fusdits, 8c que vu le danger des courants, que vu les temps „ orageux 8c les longues nuits que l'on avoit a „ attendre, le voyage pouvoit bien être fai- , , fa-  288 L'ESQUISSE D' U N ,, fable pour un vaiffeau feul, mais nullement 5, pour une Flotte: Ce que la plupart des Of„ ficiers 8c Pilotes, qui étoient aéliiellement a bord dudit vaiffeau, 8c qui connoiffbient ,, ces parages, avoient éprouvé. " Que pour ce qui regardoit le fecond point, c'eft -a-due, pour paffer avec un Convoi par le Nord (de 1'Ecoffe), tous les fentimens furent, ,, que Ja „ faifon étoit trop avancée pour cela: puisj, qu'en croifant dans ces endroits en cette fai- fon-la, on avoit fouvent rencontré des brouillarde? de ij" jours, 8c fi épais, que ,, l'on ne fc voyoit pas les uns les autres} Sc ff que d'ailleurs, il y avoit alors de tres - forres j, tempétes a. attendre O). " — Cet avis figné des dix Capitaines fufdits, 8c de leur Commandant, fut envoyé kV. J. Le lendemain le Contre-Amiral Hért* ftnek écrivit la même chofe a V. — II femblc que cet Officier avoit affifté a l'Alf:mblée qui s'étoit faite la veille fur lc vaiffeau du Contre-Amiral van Braam, tant fon avis, avoit de conformité avec celui qui avoit été formé fur ce vaisfeau. Mais pour rie point dire que le réfultat de cette conférence lui avoit été communiqué, je dirai que les gens qui ont les (a) Pieces Jüstif. a la prem. part- du Mcm'. dé S. A. N°. 28.'  Grand Tableau". 289 les mêmes principes 8c les mêmes Vues, önt ördinairement les mêmes idéés (a). Le zf les Vice-Amiraux Rèynft 8c Zout* ttian 8c les Contre - Amiraux DedelSc van Kinsbergen, qui étoient tous les quatrc a la Haye, conSrmcrenc par écrit la même chofe, 6c y ajoüterent que la retraite de la Flotte Frangoife 8c Efpagnole ayant laisfé les mains libres aux Anglois, ceüx-ci pouvoient envöyer autant dé vaisfeaux qu'il leur plairoir,1 pour enlever notre Convoi; 8c que même il y avoit déja un certain nombre de ces vaisfeaux dans la' mer du Nord 8cc. Que d'ailleurs il jugeoient que dans les circonltances acfuciles il ne feroit point prudent de trop dégarnir les pertuis du Texel & du Vlie: raifon qu'on n'oublia pas, 8c que l'on fut bien faire vaioir dans les premiers' jours d'octobre. (b) Si tout ces Obltacle's étoient tels, Mohfeigf neur, l'on ne pouvoit répondre aux èxcu/eï qu'on en tiioit, qu'en leuroppofant de nouveau eette fuite de négligénces, de f duffe s me fur es 8c è'inaclivité antériettte, dont j'ai parlé tant de fois, 8c que je ne rappellerai point ici. - « Qu'il me foit cependant permis de diré, que' lors- («) Id. No. 29*. {b) la, No. %*t T  290 L' E S Q, U I S S E D' V N lorsque vers le 10. oélobre 1782. l'on déts-^ cha le Contre - Amiral van Kinsbergcü, pouü? aller au devant des Navires de Norvege, ou, comme quelques uns difent, pour éluder lesnouveaux ordres que I. H. P. pouvoient encore donner pour partir pour Brest, lors , dis-je, que Mr. van Kinsbergen entreprit cette croifiere, on ne regardapas fi les Courants, fi les Brouillards, fi les longues nuits Sc les tempêtes, pouvoient devenir fatales a fon Efcadre. > Qu'il me foit encore permis d'ajouter que le 14. oétobre 1781, c'eft-s-dire, après que notre Flotte marchande eut vu qu'il n'y avoit plus d'efpoir d'obtenir d'Efcorte pour la Baltique, Sc qu'il ne lui reftoit d'autre recours que celui de s'abandonner a la fauvc-garde du Pavillon étranger, cette Flotte, fans s'embarasfer de ces Courants Sc de tous ces autres danger $ qu'on faifoit fonner fi haut, partit hardiment pour le Sund fous 1'Efcorte de la frégate Suédoife, le Jeramas;—* Sc qu'au mois de novembre de la même année les Anglois, moins* timides que nous, Sc chez qui aucune Cabale n'avoit juré de trahir leur gloire Sc les intéréts de leur Commerce , envoyerent une Escadre rechercher au Sund une Flotte confidérable de navires marchands, qu'aucun des dan* gers ou des obftacles fusdits n'empêcba d'arriver heureufement en Angleterre. Quant aux 19 vailfeaux de guerre ennemis que  Grand Tableau. i§i que les lunettes de Kykduin avoient fait découvrir le iz. feptembre, c'eft un fait faüx: j'en dis autant du rapport que quelques navires marchands étrangers firent vers le 15 au Cap; Brunet de Rochcbrune , qui commandoit a la R; Hartfinck depuis le 30 oöi" bre jusqu'au 1 décembre.  Grand Taèlêaü. pi voi des Indes occidentales. — J'ignore, Molt* feigneur, ce qui fut réfolu dans cette conférence: mais je fais que le i. décembre V. A. annonga au Vice - Amiral que le Batave ne pouvoit être prêt, Sc qu'on eüt k fubffituer a cé Vaiffeau la frégate le Pbénix. — Si ce n'eft. point la. une preuve évidente de 1'Adminiftration infenfée de notre marine, ou plutót, dü deflein qu'on avoit vraiment de trainer les chofrs en longueur, & de ne point accorder le' Convoi demande , je ne fais ce que c'eft. II feroit difficile d'exprimer ici la douleur Sc le délefpoir que nos malheureux Négociants reffentirent a lavue de toutes ces chofes. Mal* gré cela, ils réfolurent de faire un dernier effort. Ceux d'entr'eux, qui demeuroient a Amfterdam, fe rendirent le 7 décembre auprès de F.A., Sc lui réitérerent dans les termes les plus touchants les inftances antérieures: Mais tout fut inutile. V. A. ayant pris en leurpréfence 1'avis de» Vice-Amiraux de WaJJenaar , Hartftnek, Reynst, Byland Sc Zoutman , leur annonca, qu'il étoit impoffible de leur accorder de Convoi avant le printemps fuivant. Cette cruelle décifion renverfa donc entiérement les efpéraqces de ces infortunés j Sc il ne leur refta , plus qu'a faire décharger leurs navires , Sc a gémir, avec le refte de la Nation, fur la maniere indigne, dont on régloit ici les opérations maritimes, öï dont on négligeois» dont  g02 L' ESQUISSE D1 U N donc on vilipendoit les intéréts du commerce. J'ajouterai ici que Vexcufe de la faifon trop ftvmcée , n'étoit point la feule, a laquelle oö avoit recours pour priver la Flotte fusdite du Convoi li inftamment demandé par les Négociants, & ordonné par le Souverain ; car il y en avoit encore deux autres a peu prés de la même valeur, & qui provenoient de la mauvaije volonté de quelques uns de nos Officiers de mer, cc du prétexte de trop affoiblir les Equipages de nos vaiffeaux dc guerre. Voici, Monféigneur , en quels termes les Rédacteurs de Votre Mémoire font parler V. A. fur ces deux derniers point («). „ Outre cela, nous devons encore obferver touchant le Convoi des Indes Occidentales," j°. „ Que les Négociants, par les Requêtes „ qu'ils préfenterent dans 1'Eté de cette „ année (b), avoient feulement fixé cc Convoi a une ou deux frégates ; mais ,, convaincus enfuite, qu~ dans la maniere actuelle de faire la guerre, leur 5, Armement n'étoit pas bien puiffant 4 s, Sc s'étant appergus que les Capitaines ,-, de (o) A. p 76. c«f 77. — B p 116. £? 117- — C p. 56. (b) Les Requêtes, dont S A porie ici , font celles du jUin fjf du 29 feptmbre : Car let Intéreffés au Commerce dc Sufinam n'enpréfenterent point d'autres aux Etats -Ginéiaux.  grand Tableau. 30$ de mer »'y aveient aucune confiance , (ff ,, «''étoient aucunement dispofés a le con„ voyeroudle commander, ils défifterent de leur première demande, Sc requi„ rent en après un Convoi fuffiffant, qui, „ felon leur opinion, auroit au moins du ,, confifter en deux ou trois vaiffeaux de „ ligne. " z°. Que fi l'on accordoit dans 1'arricre„ faifon de 1781. un Convoi auffi con„ fidérable, il falloit fe priver des meil„ leurs Equipages deftinés a fervir 1'année fuivante fur les grands vaiffeaux.'* Ces deux Paragraphes méritent quelques réflexions, Sc voici celles que j'ai a faire fur le premier. — i°. Les Négociants, par les deux Requêtes fusdites, n'ont aucunement fixé le Convoi a une ou deux frégates ; & il falloit avoir 1'impudence de Mrs. les Rédaóteurs pouravancerle contraire: car dans la première de ces Requêtes la demande de ces Négociants eft exprimée par les termes indéfinis dc Convoi fuffiffant , Sc d'autant de vaiffeaux, dont on pourroit Je paffer (a). Dans la feconde, la demande confïfte dans les feuls mots de Convoi convena- bli (a) Een fufficlent Convoy .... zoodanige van's Lands Otrfagfcbepen, als daar toe kunnen gemist worden.  $55$ L' È S Q, U I S S É D'UN Bk («). z». S'il eft vrai que ces mêmes Négociants étoient Convaïncus de Pimpuiflance de leur Armement, ce n'étoit que dans le cas auquel le Convoi fuffiffant, ou du moins t les vaiffeaux dönt aüroit pu fe poffer, ne leur auroit point été accordé. 30. Quant au peu öu point de confiance , que quelques uns de nos Officiers avoient en cet Armement, c'eft - adirc', a un Armement qui étoit pourtant compofé de 17 vaiffeaux équipés de 1200 hommes Cc de 400 pieces de canon, 8e qui le feroit encore trouvé renforeé par le Convoi, tel qu'il fut, qu'on leur auroit procuré, c'étoit - U moins une excufe frivole, de la part de ces Officiers, qu'une marqué de leur mauvaife volonté cn ce cas , & de la maniere arbitraire dont plufieurs d'entr'eux ont agi pendant toute la guerre, 8c notamment, a 1'égard du Voyage de Br eft. II eft aifé de raifonner, 6c de raifonner infolemment, lorsqu'on fait qu'on le peut faire impunément. <—> 40. Quant au Convoi fi'ffiffant, qu'on nous dit que les Négociants ont requis après avoir défifté de leur' demande, 6c qui, felon leur opinion , auroit au moins du confiftcr en datx ou trois vaiJJ'eaux de ligne, il paroit, Monféigneur, que V. A. leur cn Ca) Een bekwaam Cmwy*  Grand Tableau. 305 cn fit enfin espérer 1'équivalent, pat 1'ordre qu'Elle donna le ay oótobre de préparer ie Batave & quatre groflcs frégates pourformer le Convoi fusmentionné. Mais on x vu ci-desfus, a quoi cette préparation aboutit. Quant au fecond Pajagraphe cité,- ou plutót, quant a ce qu'il y efi dit, „ que par Paccord d'un tel. Convoi, èn 1'arriere- failon, il auroit fatlu fc priver des meillems Equipages deftinés d fervir Vannèe fuivant e fur. nos grands vaiffeaux, " l'on eüt mieux fait de dire, des meilleurs Equipages, déftinés h paf er cette année - ld dans ViéaSio» ordinaire: car la Campagne de 1781. nc fut pas moins honteufepour la Direclion de notre Marine, ni' moins fatale a notre gloire 5c a nos intéiéts, que.ne 1'avóit été celle de 178 r D'ailleurs ce-ne fut point la ffeule fóis. qu'on apporta cette excufe pour fc disculper de la mauvaife volonté qu'on avoit 4'agir, car on ld renouvella encore pour juftifier 1'irréuflite du Voyage de Brtft. Ceux de mes Leéteurs, qui en douteron't ' pouriont voir la Lettre que V. A. écrivit; a ce luj.r, Je tp. oétobre 1782, aux Etats de Frife, & le Mémoire que le Comte de( Byland publia au commencement de 1'année fuivante , dans la vue de pallier fa désobéiffance criminelle aux ordres du Souverain, cn cette ocftafion. Cependant, ajoute V. A-> ou ceux fat V par*  305 V E S Q_ U I S S E Ü N „ parloient ici pour Èlle (a), pour prou«< ver que les difficultés, que les Officiers„ trouvoient unanimement a expédier en„ hiver, &même en automne,une Efca3J dre par le Nord de 1'Ecoffe, ne regardoient pas un vaiffeau feul, Nous ne „ trouvames aucun inconvénient a faire' „ partir en décembre, 6c a faire approvifionner pour fix mois la Corvette le „ Kemphaan, commandée par le Lieute„ nant Jean Jantzen Eye 3- lequel partir „ au mois de janvier fuivant,. porta nos „ ordres a Surinam 6c a Curacao, 6c retourna heureufement iei dans les pre„ miers jours d'aoüt. " Si, envérké, je n'avois déja cité le Vers latin fur la Montagne qui enfante une Souris, cc feroit bien lc cas de le placer ici. Ne voilat-il pas un grand effort, que de fe déterminer a dépêcher a nos deux Etabliffements un Batelet de 12 canons, 6c chargé de quelques Lettres? Qu'auront donc dit, a la vue de ce Batclet , nos Colons 6c nos Marins , qu'ori avoit flattés de 1'cspoir de la prochaine arrivée d'un Convoi, qui étoient dans un extréme befoin des chofes les plus néceffaires , 6c qui ü cba- (•) A.p. n-.cy 119. — B. p. 175. — Cp.9*>  Grand Tableaü. 307 chaque inftant atteridoient ce Convoi? .... Un Batelet! .... Sc quelques Lettres!...i. C'étoit une abondance de provifions de bouche j Monféigneur, c'étoit des vêtements de toute espece, c'étoit d'autres denrées ^ c'étoit de Phuile, du goudron, des cordagcs, du fer Sc autres objets néceffaires a 1'entretieii Sc a la réparation de nos vaiffeaux de guerre Sc autres navires, que nous avions en ce pays-la; c'étoit, enfin, des munitions de guerre de toute espece qu'il falloit y envoyer; Sc cela, non pas «n décembre itjftvi ou. én janvier 1782, mais dès les mois de feptembre ou d'oébobre précédent. Des Lettres autentiques que j'ai cn ce moment fous les yeux , Sc venues de nos deux frégates qui étoient alors a Surinam, portent qu'au commencement de cette derniere année, une livre de clous y coütoit if fois; une paire de fouliers, 10 florins; une livre de bcurre f florins} un petit tonneau de fel, 80 florins' Sec. — Que ces frégates y étoient rongées des vers par le bas, Sc powrries par le haut, par Feffet fucceffif du foleil Sc de la pluie : *s que Ces vaiffeaux, ainfi que les navires particuliers, manquoient abfolument de cordages, d'lïuile,, de goudron Sec.. .. Mais que vais- je ici rappeler i...;. Hélas! je ne me fouvenois -plus óeé brouil'lards Sc des tempetes du Nord de 1'Ë- cosfe! ó Officiers!'...;, ê Dire&iori de notre Marine!.... v 2 ■ Ci-  303 L' E ? Q. O* I S S E D' U N" Citons enfin pour la derniere fois le fameus Mémoire. „ Ainfi finit, a notre plus grand rc„ gret, cette première Campagne, oü „ pour accomplir nos voeux, oü, mal„ gré nos plus vifs eff uts , qü'un concours de circonftances arrêta chaque fois, Nous ne pümes parvenir a > xé}i euter autre chofe, que ce que Nous „ avons rapporté ci-devant O); " Hélas! oui, Monfcigneur , ainfi finit cette Campagne, ou plutöt cette première anUe de la guerre, oü la home & les défaltres, que nous y avons effuyés, onteu pour Cause pr.nciPale, le pouvoir funefte qu'avoit parmi nous une Cabale de fcélérats, entiérement devouée & l'Angleterre;-— oü-cettc honte & ces désastres ont eu pour Cause seconde, 6c fans cefle pour Excuse, la foibhflè de notre Marine , que 1'obltination déplorable oü Pon Vous a entretenu a demander 1'Augmentation des troupes de terre, avoit empêché dc réta- folir: Ainfi finit cette Campagne ,. oü nous avons premiérement vu unc pame dc nos vaisfeaux de guerre , imprudemment expofée a la difcrétion de Tennemi, une par ie de no< Posfcffions cnlcvée, Sc nos maiheurcux Goncitoyens cruel- {») A. t> 77. — B- ?• "7« C. p. 58.  Grand Tableau. 309 cruellement pillés 6t dépouillés dc leurs biens: _ Ainfi finit cette Campagne , oü par une négligence coupable dans 1'équipement & 1'armement du peut nombre de nos vaiffeaux , oü par la diit-ction la plus défeétueufé a Fégard de 1'emploi de ces vaiffeaux, les Convois ennemis, de 1'Elbe & du Wefer, ont tranquillement pasfé a notre'barbe, pour fe rendre a leur defii- cstion : Ainfi finÜ cette Campagne, i ü le Convoi de la Baltiqu-, 6c ceux des deux Indes, tant de fois demandes, 6c tant de fois promis, furent fans ceffe remis, 6c enfn rcfu'és, fous des prétextcs que j'ai bonte de rappeler: —- Ainfi finit cette Campagne, oü les piaintes de nos Négociants 6c les cris de la Nation furent indignement méprifés ; oü Fintcntion du Souverain fut trompée , 6c fes ordres pofitifs impunément éludés: — Ainfi finit cette Campagne, '. il nos ennemis inteftins ont pleinement réuffi a trahir nos intéréts, notre gloire, 6c a a fivorifer de toute maniere nos ennemi du dehors •, oü, dis-je, cette Cabale déteftable, qui V\ us oblédoit , qui Vous aveugloit, qui croifoit de toutes manieres les effets de vos meilleures intentions, Monféigneur, réuffit plus que jamais a Vous rendre le jouet de fes menées ténébreufes, 6c le déplorable inftrument de fes deffems perfides: — Enfin, ainfi finit cette Campagne, que nous pouvons noter dans notre His«oirc , comme unc Epoque d' humiliations Sc V 5 ds  giQ L' ESQUISSE D' U N dedétrefies jusqu'alors inouieschez nousj comme une époque a jamais mémorablc, Sc dont nous aurinns cru impolïïble de revoir de femblable, fi la Campagne de 1782. ne nous tCjt prouvé le contraire. Après 1'Expofition que je viens de faire de tant de chofes étranges , ce feroit ici le liet? de m'étendre fur les refforts de toute espece que l'Angleterre a fait jouer pendant cette année, pour nous amener a conclure avec elle la, paix la plus honteufe, Sc a nous replonger dans les fers ou elle nous avoit tenus fi long - temps; Ce feroit ici le lieu de m'étendre fur toutes les pratiques ouvertes ou feerctes, que notre Cabale Anglomane employa parmi nous, pour fervir a cet égard les vues de cette Puiffance; pour faire échouer toute Alliance avec la France j Sc pour nous empêcher de reconnoitre Mr. Adams, en qualité d'Envoyé des Etats unis d'Amerique ; Mais comme ce récit me meneroit actuellement trop loin , je remets a traiter cette matiere , au commencement du Volume fuivant, Cependant, Monféigneur, je ne puis finir ce volume-ci, fans expofer a 1'Europe entiere, \ quels Moyens abominables on avoit ici recours, pon,r  Grand Tableau. 311 pour rendre ridicules , méprifables & déteftables, aux yeux de notre Nation, la France 5c fon Gouvernement; c'eft-a-dire, pour aveugler, pour irritcr les esprits contre nos Alliés naturels Sc nos Bienfaiteurs j — pour diftraire, par ce moyen-ia, 1'attention que le Public pouvoit porter fur la maniere honteufe dont on pouffoit ici la guerre; — pour nous faire con.cevoir une averfion décidée pour tout Traité d'amitié ou d'alliance avec la France; _ Sc pour nous ramener fous le joug de cette Angleterre,que l'on avoit encouragée, excitée Sc aidée a nous infulter, ü nous outrager, Sc a s'enrichir de nos dépouilles. Ces Moyens, que je nomme avec raifon, abom'mables, furent d'abord les prédicarions de quelques Energumenes éccléfiaftiques; ce furent, ainfi qu'on Pa vu ci-deffus, les railleries, les farcasmes, les fatyres & les calomnies verbaks, ou imprimées, d'autres Suppdts de la Clique Anglomane. Mais ce n'étoit pas encore affez, Monféigneur, il falloit ajouter a cela un nouveau Libelle, qui 1'emportat fur tous les autres en impudence & en abominations de toutoute espece: .— II falloit, dis-je, y ajouter un Libelle , qui jouit d'une Protedfion puis» fantej un Libelle, dont le Libraire ou Diftributeur principalfüt connu,Sc aqui 1'onpütim* punément envoyer tout ce qu'on y vouloit faite inférerj un Libelle, en un mot, qui par le V 4 prix  3Ï2 V ESQ.UISSE tfUN prix modique pour lequel on le vendoit, & par la diftribution gratuite qu'on en faifoit, put fe répandre avec une proiüfion extraordinaire, & devenir, paT-la, le Manuel journalier de cette espece de Canaille, qu^on tenoic en haleine/w«r raifon, ainfi que de cette espece de gens, qui dans toures les Conditions, efi: cent fois plus déteftablc qncoreque ne 1'eft cette Canaille : — Enfin, ce Libelle, fut le fameux Ouderwetse Patriot, fur lequel j'ai promis, dans mon Discours préliminaire, de revenir a la fin de ce Volume. Et qui étoit donc, me demandera-1-on, Ie Protecleur connu de ce nouveau LibeHe? — C'étoit le Duc de Brunswick, le Mentor perpétuci de notre Stadhouder . & fon Cortfeiller en titre d'Office j car le fameux Atle de Confultation lui avoit afiuré cette qualité. — Et qui étoit le Diftributeur principalde cette produtlion? — Je Fai -déja dit: c'étoit Pierre Fredéric Gqffe, Librairé du Prince Stadhouder (a), & lefilsde cet autre fa* (a) Voi.ci ce qu'on lifoit de temps a autre, au bas des Peuilles de ce" Recueil. —— Tb«? teux qui auront quelque cbofe a faire pirvenir aux Auteurs de 1'Oudervvetfe Nederlandfche Patriote, font fries de l'adreffer fous couvert a P. F Gaffe , Libraire de Son Altesse Serenissimé, <ï la Haye, cbez lequel cette Feuille fe dijiribue claque femaine. - D'autres fois c'étoit: Imprimé a la Haye chez P. F. Cofje, Libraire de S. A. S. le Prince Stad- kov-  Grand Tableau. 313 fanatique, dont la Gazette a fouvent été aufli fcandaleufe & auffi feditieufe que le Past aioT (a). — Et les Auteurs de ce nouveau Libelle? - Ces Auteurs étoient des gens déja trop Connus par leur Anglomanie, & qui acheverent de déshonorer leur condition , leur état & leur nom, en employant leur plume a traeer ces infamies» Mais, ajoutera-t-on , d'ou favez-vous qus le Duc de Brunswick étoit le Protecleur princi- pal de ce Libelle? Si je ne craignois de trop compromettre deux Noms infiniment plus refpe&abies que celui du Duc, je i épondrois a. cette queftion en placant ici les prcuves autentiques que j'en ai. Mais je me contenterai de dire, que perfonne n'ignoroit a la Haye, qu'il ne s'inféroit rien de piquant, rien d'extraordinaire, dans cette Feuilie, fans avoir été approuvé par le Duc, ou du moins, fans lui avoir été communiqué; je dirai encore, Monfeigneur, que fans la proteétion que le Duc accordoit a cette Produótion , ou plutót, fans Fespece d'enchantement oü cet homme rete- noit- Hoodej; &enfuite, étoit 1'Adreffe de tous les Librai' res de la République , chtz qui ladite Feuilie étoit k trouver. < a) Pierre Cojfe Juniot, Propriétaire de la Gazette Hollandoife de la Haye, & celle dons je fais ici mention. V 5  314 L'ESQUISSE D'UN noic V. A., Vous n'auriez jamais fouffert que dc pareilles horreurs fuffent publiquemment débitées par Votre Libraire 6c cela, fous les yeux du Souverain, Sc dans un lieu, ou PAmbaffadeur de France faifoit fa réfidence ; je dirai que, fans cette espece d'enchantement, Vous auriez rougi de voir mêlés, parmi ces horreurs, les éloges 6c la défenfe de Votre Perfonne cc de Votre conduite -f j''ajouterai, que vous auriez également rougi d'approuver Vous-même, ainfi, que Vous Pavez fait, Pinfenion de quelques pieces, mêmes les plus innocentes , dans un tel Recueil (a) \ 6c que Vous n'auriez jamais permis que les Auteurs de ce Recueil menacaflent d'une vengeance, qu'ils défignoient affez clairement être la Vótre ou celle du Duc, les Ecrivains patriotiques, qui avoient le courage de les attaquer; cn un mot jefinirai par affirmer, que, fans cet enchantement ou Vous étiez retenu, Vous n'auricz jamais fouffert que Pon envoyat chaque femaine, a. votre Palais, plufieurs exemplaires de cette Produétion ; ni que les plus inconfidérés de vos Courtifans fiffent fi fouvent retentir les lambris de ce Palais, par les éclats de joye ou l(a) Tcmoin Ia fameufe Lettre du Profefleur Hof (lede k fon Confrère Baruetb, laquelle a été dépofée dans la Secrétairerie de la Ville de Dort. ■  Grand Tableau. 315 pu d'adrniration, qu'excitoit parmi eux la lecïures des endroits les plus repréhenfibles de cette même Product-ion. Mais enfin, me dira -1 - on encore , un Li. helle de cette nature, ou de tout autre genre que ce füt, méritoit -il la mention expreffe que vous en faites ici ? —— Oui, fans doute: les Souverains eux - mêmes attachent quelquefois affez d'importance aux Libelles , & aux Gazettcs mémes, pour fe plaindre , par la bouche de leurs Miniftres, des expreifions injurieufes ou calomnieufes, ou feulement hazardées , qui s'y trouvent contre leur Perfonne ou leur Gouvernement , & pour en faire punir ou retraéter les Auteurs. D'ailleurs il importe a 1'honneur de notre Nation, qu'un de fes Citoyens venge ici 1'honneur de la France, fi indignement outragé, & qu'il faffe connoïtre a 1'Europe entiere, quels hommes étoient les Auteurs Sc les Fauteurs de tels outrages, & avec combien de raifon les honnêtes gens les regardoient ici comme des monftres dignes de 1'exécration de tout 1'Univers. Mais c'eft affez parlé de cela: je paffe aux ïïxtraits que j'ai deifein dc donner de cette Feuilie. Des le premier No., qui parut le 18 aoüt de ladite année 1781, l'on remarqua que cet-' teProduótion ne feroit qu'une eongeftion mon-^ $rueufc de boiiffonneries, d'impudences, de  gl6 L' E S Q. V I S S E U N calomnies & d'atrocités. — Après y avoir inftjfKié que des 1'année 1770 Por de Louis XVI. avoit feduit. les Régences d'Amfterdam, de Harlem & de Dor/ (a), après s'êtrc mdignexnent railié de la féparation de la Flotte combinée, au com mencement dc feptembre (£), après avoir ajouté a cela que le fruit, que nous ré.irerions des apparitions de cette Flotte dans la Manche, ne feroit que des Rubans a la Zout* man, & des chaines pour nous gairorter.. ue torn cet appareil n'étoit que trompens & tref* bi fon, & que d'ailleurs les Frangois & les JLfpagnols n'étoient que des p"itrons , en comparailon de nos Marins, qui étoient d.s Ltons rugiffdnts , ti? qut, avec leurs dents, déebtroient leurs ennemis ( ), en un niot, après avoir tsfayé par ces divers préludes, comment feroient généralement recues de telles forties contre les Puiffances relpeétables, qui iaifoient caufe commune avec nous, les Auteurs de cette Feuilie trouverent a propos, malgré la haute Protecïion dont ils jouiffbient, de ne point fe Jiazarder ultérieurement, fans s'être affurés du yisqueou de la fureié qu'il y auroit pour eux, s'ils venoient a prendre dans leurs Ncs. fuivants un ton plus audacieux: Et dans cette vue, ils ré- O) No. I. P. 5. tb) No- VI. p 117. {e) Ibid. No. Vil. p. 133- & No. IX. p. 176.  Grand Tableau. $ty réfolürent de publier une R'ochure détachée, eu la rage contre la France dt portee a un Tel point, que, fi ce livre v< noit a le débrer fans oppofitron, Fon pourroit dorénavanc fe permettre toutes les horreurs pofiibles contre cette Puiffance La Réfolution étant prife, le nouveau Libelle fut publié vers le if oélobre fous le titre de, Lïtre écrite de Paris par un Amfterdamois, d un de fes Amis d' Am fier* dam , & le Gazetier dé la Haye 1'annonca en trés-gros tarablires, dans fa Feuilie du 19. tui— vant. Comme ce n'eft point ici le luu de m'étendre fur cette nouvelle Produótion, je me contenterai de dire qu'elle coruenoit en fubftunce, Que les Fran§ois étoirni les-hommes les plus abominables qu'il y eüi fur la ter^ re, cVft-a-d.ire, qu'ils étoient encore aufïï acharnés, qu'il y avoit cent ans, a faire mourir par' des fupplices hornbles les Protcftants de leur Royaume; qu'ils n'avoient d'autre ambition que celle d'exterminer tous les Peuples du Globe; que leur plus grande fatisfaétion étoit de plonger un Etat dans une détrefie a le ruincr de fond en comble; que felon eux la vraie piété n'étoit qu'une vertu puifillanime qui cbranloit les Trónes, & que les Trónes ne fe foutenoient que par la terreur; que Féquité n'étoit qu'un fantóme, la bonne foi une erreur, & la rufe le vrai moyen de négocier; que les ferments étoient des jeux d'enfants, • • la  318 V E S Q. Ü i s S E d'ün la mauvaife foi la vertu d'un Prince; qu'ainfi Pamitié des Francois n'étoit qu'artifice; qu'ils n'embraffoient les gens que pour leur plonger le poignard dans le fein $ que leur plus grand plaifir étoit de tenir la Nation Hollandoife dans des craintes continuelles, & qu'enfin, leur Monarque» au lieu d'avoir aucune- affectidn pour notre Nation, n'avoit pour elle que le mépris qu'un Defpote a pour fes Efclavcs. Encouragés par 1'cffet prodigieux que ce9 calomnies déteftables avoient fait fur 1'efprit de tout le Parti Anglomane, c'eft-a-dire, parrni les Grands, la Claffe moyenne & la Canaille de ce Parti, (car il n'y apoint d'abfurdité fi révoltante, ou fi atroce, qui ne fifit bien recuic par des efprits ignorants oü prévcnus,) enhardis, d'ailleurs, par le fouverain mépris que PAmbafladcur de France failbit dc ces horreurs, nos Auteurs crurent, dans leur N0. XL, que rien nc pouvoit mieux entretenir Peffet fufmentionné, qu'en renvoyant la Canaille a la leéture du Libelle intitulé, Dé Fransche Tïranny, ou de ce Ramas d'impoftures & d'abominationsde touteefp- ce, pubfécontre les Francois en 1673, & qui fert encore aujourd'hui, dans la pluparede nosEcoles , dc Livre d'Inftitution pour la Jeunefie (a). Quant (a) Ce Livre a été imprimé en Frangois en 1673, &  Grand Tableau, 319 Quant aux Perfonnes d'un état plus rélevé, ils les régalerent, dans lc même N°., d'un autre plat de leur métier j c'efb-a-dire, que dans le cours d'une trés-longue 6c trés mordante Ironie fur les mceurs, les ufages, les manieres &c le goüt particulier des Frangois, 6c que parmi une infinité de ridicules jetés , dans la même Ironie, fur 1'état des arts, des fciences , de la littérature en France, 6c même fur le Gouvernement de cette Puiffance, ils* rappelerent, a dejfein, des Faits, que les vrais. Francois ont eux-mêmes déteftés en tout temps, tels que le Maffacre de la S. Barthekmi, VEntreprife du Duc d'Alengon Jur Jnvers &c.i comme li l'on pouvoit reprocher a une Nation entiere les Forfaits de quelques Particuliers, ou de quelque Parti qu'elle a eu parmi elk} comme fi chaque Nation n'avoit pas fourni des Faits de cette nature j ne fut-ce, par cxemple chez nous , les Actes dc violcnce 6c de cruauté, que quelques uns de nos premiers Navigatcurs, dans les grandes Indes, ont com- mis il Ie fut encore depuis ce temps-Ia, fous le Titre, tfAvis fidele aux véritables Hollandais, fur ce qui s'efl paffe i Bodegrave « Swarmnerdam, les cruautés inouies que les Francois y ont exercées. Ce fut d'après cette Edition qu'ou fit l'Edition Hollandoife, qu'on a imprimée uae'irifinrié de fois, ■ ■ *'" • '' unfij t.  g20 L' ESQUISSE D' U N mis contre les Portugais Sc les Naturels dc ces pays-la; ne fut-ce encore que le Maffacre de Batavia Sec. Mais n'importe;. cc mélange d'ironies abfurdes Sc de méchancetés atroces eut 1'effet que nos Auteurs Sc leurs Fauteurs en attendoienty Sc c'étoit -la tout ce qu'on demandoit. Enfin, comme vers ce tempsla quelques Suppöts de la Cabale avoient répandu parmi le Public, que Mr. de Suffren ne s'étoit refugié dans la Baye Fais (en Affrique), que pour laiffer, au Commodore JohnJlone, 1'occafion d'enlever dans la Baye de Suldanlia les vaiffeaux de notre Compagnie des Indes , ils entreprirent, fans cependant trop fe compromettre , de fóutenir Ce bruit, en plagant yers la fin du N°. fusdit, Sc avec leur ton d'i- ronie accoutumé, la tirade fuivante: „ Si „ les Francois accordent aujoud'hui quelque „ fecours, c'eft de bonne foi, c'eft avec vi„ gueur, c'eft avec fruit. , Doivent • ils com„ battre pour leurs Amis? ils volent, ils s'ex„ pofent, on les. Voit partout ou 1'ennemj fe ra trouve, ou du moins, aux environs dc ld. „ Qui cn peut douter, après les dernieres nou„ velles recucs du Cap? ...... Orcja, moia* „ cher Omikrotij que non feulement vous Sc „ moi, mais que tous les habkans de notre Pays rempliffent les plus grandes couppes, „ Sc boivenc a la fanté du Roi Sc de fon Dau- phin nouveau-né! Imprimons au fond dc nog  Grand Tableau. 321 nos cceurs les trois Fleurs de Lys! Ornons de cocardes blanches nos chapeaux, nos précieux chapeaux de la Liberté! Jetons les „ en 1'air, &C auffi haut qü'il efi poffible! „ Crions a. gorge déployée, répétons cent ,, fois, Sc jusqu'a ce que 1'air en rétentiffe Sc ,, que les nues en frémiflent, g)u'il aille comme il pourra avec notre Patrie ci? avec le Prin„ cel mais, Vive le Roil Vïve la „ France! " Voila, Monféigneur, voila comment la fcélerateffe la plus déteftable calomnioit un Général, qui venoit de fauver le Cap, Sc dont la Miffion étoit autant pour aller défendre nos EtablilTements des grandes Indes, que pour y recouvrer ceux que la France y avoit perdus! ...... Voila de quelle maniere le Nom de la France & le Nom de fon Roi faifoient ici le fujet des railleries infultantcs, ou plutot , des acces de fureur d'une Cabale , que , pour cela feul, Monféigneur, Vous auriez du abhorrer Sc pourfuivre aoutrance, au lieu de Vous en laifficr mener , ainfi que Vous en étiez mené! Cependant, comme Ces Ecrivains & leurs Fauteurs s'attcndoient que FAuteur du Politique Hollandois (#) ne manqueroit pas de rclec. . si ver («) Mr. Ccrifier. X  322 V E S Q_ U I S S E U N ver ces infamies, de la maniere qu'elles le méritoient, ils crurent 1'intimider, en terminant le même N°. XI. par les menaces que voici: — P nies tu, Monltre, Penfes tu qu'on n'ob,, ferve & qu'on ne connoifle pas tes allées 6c venues, tes démarches, tes deffeins, tes delTeins maudits, & toutce tracas inferna!?..» „ Continue, vomis ton venin, mais vomis-lc „ avec circonfpeótion Le Proveibe ,, Hollandois dit que les Rois ont les bras „ longs; mais IL Y A DES PERSON„ NES QUI NE PORTE-NT POINT „ DE COURONNE, ET QUI N'ONT „ PAS AUSSI LES BRAS COURTS." — Mais, quoique ces derniers mots fuffent imprimés en Lettres Capitales, comme ici, notre intrépide Défenfeur de la vérité, de la juftice & de nos droits légitimes, ne laiffa pas d'aller fon train, ni d'expofcr, toutes les fois que 1'occafion le requéroit, la conduite de ces fcélerats a 1'exécration publique. La menace de la vengeance du Duc, & même de celle de V. A., que l'on défignoit fans doute ici, étoient incapables d'épouvantcr un homme 5 qui peut dire avec Horace, Juftum ö* tenacem propojiti virum, Non civiam ar dor prava jubentium , Non vultus inftantis Tyranni i Mcnte quatit folidd.«< < « Je  Grand Tableau. 32$ Je revicns a. 1'Ouderwetse Patriot. — La Fête, que 1'Ambaffadeur de France avoit donnée le p. novembre a Poccafion de la Naiffance du Dauphin, & celle que les Francois établis a Amfterdam donnerent le zf fuivant, a la même occafion, fournirent aux Auteurs du Pamphlet un nouveau fujet d'exercer leur rage contre la France & fon Roi, & contre touc ce qui y avoit rapport. Pour abréger, je pafferai ici fur le ridicule odieux qu'ils jetterent fur la première de ces Fêtes, dans un Supplément a. leur N°. 'XIII.; Supplément compofé expres, publié le 16 du même mois, & annoncé avec une affectation indigne , par la Gazette Hollandoife de La Haye du même jourj je palferai, dis-je, la-deffus, & je me contenterai de citer ici ce qu'ils débiterent le I. décembre, dans leur N°. XVI., fur la Fête du zf, que Mr. PAmbaffadeur, & un grand nombre de Perfonnes diftinguées par leur rang, ou par leurs dignités, avoient hooorée de leur préfence. „ Le Te Deum folemnel, qui a été chan„ té la femaine derniere a Amfterdam, a Poe„ cafion de la Naiffance du Dauphin, le Ser„ mon du Chryfoftome moderne (0), lesFeflins , „ les (fl) Prêlri dt l'Eglije Gttbolique Francoife d'AmlterdaiB,, x 2  324 L'ESQ_UISSE Ö' U N „ les Bals & les Fêtes qui fe font donnés au „ Doelen ( a ), & dont le bruit rétentit encore „ d'un bout a 1'autre de la République, éton„ nent & fcandalifent beaucoup de perfonnes; „ mais Moi, Patriotede la Vieille Roche, je ne „ fuis point de ces gens qui fe trouvent fi fa„ cilement choqués 6c fcandalifés. Mrs. les „ Auteurs 6c Soufcripteurs de ces joyeufes Cé„ rémonies, ainfi que ceux qui y ont aflifté, „ foit Magiflrats ou autres, ne recevront de „ moi que des louanges 6c des applaudiffe„ ments. Qu'il fuffifle a des ames étroites Sc „ refferrées de ne prendre part qu'aux Evéne„ ments joyeux ou triftes, qui touchent immé„ diatement leurs perfonnes, leurs amis, le „ cercle étroit qui les environne, ou tout au „ plus leur ville natale, ou leur Patrie} des „ Philantropes, des Cosmopolites, tels que „ les Soufcripteurs d''Amfterdam 6c leurs fem„ blables paroiffent être, ne renferment pas „ leurs fentiments dans des bornes fi étroites. „ Leur cceur capable d'affections plus éten„ dues, plus générales, fe dilate, Sc palpite „ d'amour pour tout le genre humain; 8c quoi„ que Monféigneur le Dauphin Sc Madame „ fa Soeur ne les touchent qu'en qualité d'in„ dividus de leur efpece, il ne prennent pas „ moins (a) Grande Aulergt a Amfterdam.  Grand Tableau. 325 „ moins d'intérêt a ce qui regarde ces Perfon„ nes, qu'a la profpérité des jeunes Princes 6c „ de la jeune Princeffe d'Örange , a qui eux, „ Hollandois adoptifs, ou Hollandois a demi, „ ou même d'un quart, font fi étroitement „ attachés. " „Cela eft donc louable, cela eft noble , „ cela eft au dcflus de notre admiration, 6c fur„ paffj tous les ellens que nous pourrions faire „ pour 1'imiter. Mais, Moi, je ne puis le „ ceder a ces Meflieurs dans cette maniere de penfer: Oui, je 1'ofe dire fans vanité, mes „ affections s'étendent encore plus loin. Placé „ fur les ailes de la célefte Philantropie, je „ prends mon cflbr vers la Turquie , 6c je pas„ fe les frontieres de la Chrétienté. Au Dé„ troit des Dardanelles, 6c a i'embouchure de „ la Mer noire, habite mon Bien-airr.é Acb„ met IV. Et j'ai desfein de témoigner publi„ quement, dans une occafion qui paroït pro„ chaine, mon refpectueux attachement pour „ Sa Majefté Ottomane, 6c pour la Sublimc „ Porte. — Quoi que je fache que Mr. le „ Baron van Haeften n'ait rien écrit de cela „ aux Etats, ou aux Miniftres de ce Pays - ci, „ les dernieres nouvelles authentiques, recues „ de Conftantinople , annoncent qu'il y a préi, fentement dix-neuf Sultanes enceintes, fans „ compter une vingtieme , dont la groffeffe X 5 „eft  32Ö U ESQUISSE U N „ eft encore douteufe : ce qui ne fait pas peu „ d'honneur aux vieil & infaügable Monarque, „ que j'aime tant. La Sultane favorite, Fa„ time - Begum, c'eft- a- dire, Muscadc odoran„ te, étant heureufement entree dans le neu„ vieme mois de fa groflefle, il eft apparent „ que la première Lettre parfumée, vinaigrée & piquée, qui nousarrivera de ces quartiers- la, „ nous annoncera une joyeufe nouvelle: ores, „ mes chers Leéteurs, vous devez concevoir ?, combien, dans cette attente, mon coeur „ palpite d'impatience. Que le nouveau né foit un fils ou une fille, auffuót que j'aurai „ appris cette nouvelle, & que je croirai avoir „ entendu le canon du Sérail & des Sept Tours, „je ferai préparerune Fête briilantc: & aux cris répétés de, Hou la ba, ba la chou, ba la „ ba, ba la da, ainfi qu'au bruit d'autres cris „ de joie, je ferai illuminer mon antique De., meure, de dix mille lampcs £c lampions de „ toutes couleurs, & furtout de couleur verte, „ a 1'honneur du Grand-Turc. Au deffus de „ la porte principale de mon Hotel, les doux „ rayons d'un Croiflant brillant attireront les 4, yeux des Speótateurs, & fa lumiere blanehe „ ÖC argentine les flattera infinimcnt. Pour „ prévenir le défordre & les malheurs, je ne „ laifferai diftribuer aucun rafraichilfement au „ Peuple, ainfi que je m'étois propofé de le » fai-  Grand Tableau. 327 „ faire (*): Mais le foir du jour fuivant, Ia „ diftribution que je ferai faire de lïx ton„ neaux de vin, de iauciffes a proportion, Sc „ d'un bceuf roti Sc farci, a la populace des „ environs de ma demeure, lui le> * ira de té„ moignage de ma *oye. & de l'pffeótion que „ je lui porre. Ladite P'ê.e principale con„ fiftera en un grand Souper Sc un Bal. Mes „ laquais feront coiffés de turbans; le deffert „ repréfentera le Paradis de Mahomet, Sc fera compofé de petits Mufulmans Sc d'Houris „ de porcelaine de Saxe. Heureufement ma „ Maifon n'eft ni incommode ni étroite; car „ autrement je ne pourrois accomplir mes grands „ deffeins. Tous les Soufcripteurs de 1'un Sc de „ 1'autrefexe, dont j'ai déja fait la lifte, doivent „ dés a prefent fe tenir pour invités: Sc le jour „ de la Fete fera annoncé par les Gazettes, par „ des Affiches, ou d'une autre maniere. Les „ Seigneurs & les Dames, qui honoreront de „ leur préfence le Patriot e de la Vieille Roche, auront la bonté de paroitre avec les habits, le coliet , le rabat de dentelles, le pourpoint, la frifure, les fontanges, les vertugadins Sec., qui étoient en ufage dans le „ dernier fiecle; Sc s'ils veulent me faire plai- 3» fir» (a-) Ce dernier trait eft une allufioa a la Fête de La Haye, X 4  328 l' ESQUISSE D1 U N „ fir , ils s'abftiendront de fe parer d'aucune „ Modes Frangoifes modernes. Ces couieurs de Paris 6c a la nouvelle mode, qui portent „ des noms li bizarres qu'on a honte de les ,, nommer, déplaifent a mes yeux (a) Moi, qui fuis né en 1704, le jour de la Bataille ,, de Hochftet, 6c au moment que le Maré,, chal de Tallard rendoit fon épée au Duc dc „ Marleborough, j'ai deffein d'ouvrir mon Bal ,, Turc avec Madame la Veuve aux chevaux j> $>ris j qui recut la lumiere en 1706, le „ jour de la Bataille de Ramillies, 6c• a. 1'in„ llant oü le Maréchal de -Villeroi tourna le dos 6c s'enfuit. Et quoique chez cette Dame ,, 6c chez moi, la fleur dc la jcuneffe fe fane „ infenfiblement, nous espérons nous acquit' „ ter tellement de Hotre devoir, que les Spec„ tateurs en,feront fatisfaits.... Mais, ó Leeteuts! Lecleurs! il ne m'eft plus poffible de ,, continuer fur ce ton 5 la plume m'échappe .,, des doigts } je voudrois te faire rire , je „ feins de rire moi-même, mais je ne puis feindre d'avantagej je ris des levres, 6c non pas de cceur; je gémis en moi-même, & je ,, fuis pénétré de trifteffe. A la vue dégouM tante de cc ïe heum d'Amfterdam, a la vue „ de Ca) Rubsris a'la Zoutman, &s.  Grand Tableau. 329 „ de ces trois eens Carofles impudenis (a ) , dc ces Feces fcandaleufes , de ce Doelen Fran„ gois, Sc furtout d'une infinité de chofes pi„ res encore, qui arrivent journellement en ce Pays - ci, Sc y étonnent les grands Sc petits, a la vue, dis-je, de tout cela, quel ,, eft le cceur qui n'eft point pénétré de com, palfion pour notre chere Patrie ? quel eft le ,, cceur, qui n'eft point rempli d'indignation, , qui ne faigne par de fi profondes bleifures, ,, Sc qui ne créve de douleur Sc de dépit? , Chaque jour, que le Ciel couroucé nous en,, voye, nous approchons d'un pas vers 1'escla, vage de la France. Notre Pays, (ö chofe , déteftable Sc maudite!) notre Pays, ci-de, vant heureux Sc libre, devient une Provin, ce Francoife. Si ce malheur arrivé, ainfi , qu'il n'eft que trop a. craindre, je piains du , profond de mon cceur ceux de mes Conci, toyens, qui, attachés a leurs foyers par des , liens trop nombreux ou trop puiffants, ne , pourront fuir, ni fe fouftraire au joug qui , les menace. Quant a ceux qui fe foumet, tront volontairement , librement, Sc avec , joye a ce joug odieux, je me dispenfe de , dire ma penfée a leur égard j mais je mc gar, derai bien d'imiter ou d'envier leur Kiche- » té» («) Paüezl'expreifiorj; elle eft ainfi dans Ie Hollandois» x s  330 L* ESQUISSE D'UN „té, & leur dévouement honteux. Que les „ chofes aillent encore quelque temps comme „ elles vont, mon parti elf pns, Sc le parti de mille autres eft pris de même. Le Roi Louis „ n'eft pas notre Roi, Sc nous ne voulons pas „ qu'il le foit. Nous refpcétons fa Perfonne, ,, Sc le Caraétere que fon Sacre lui a imprimé, „ mais nous abhorrons fon joug. L'ambitïeu„ fe France ne commandera pas a nos ames li- bres j Verfailles pourra établir ici Sc ailleurs „ fa tyrannie ; mais ce ne fera pas fur nous. „ Les honnêtes gens, les perfonnes qui fe con- fient en üieu, trouvent partout une Patrie. ,, Dieu fera notre recours, Sc le vafte Univers, „ notre refugt. Un Exil volontaire eft pour „ nous un moindre mal qu'une lache fervitu- ,, de Mais, que dis-je? un Exil! „ De vrais Bataves préférent la mort a 1'Efcla„ vage: Dans le cas d'une détreffe extréme, fi la Réligion ne leur retient le bras, ils perce,, ront leur cceur libre, Sc mourront, plutöt „ que d'obéir a un Roi étranger. " Et cet étrange, cet abominable galimatias étoit 1'ouvrage d'une Affociation de fcéiérats, ouvenement dirigés Sc protégés par un Homme , qui, ainfi que Vous Sc votre Familie, Monfeigneur, avoit aflïfté a la première de ces Fêtes! Sc qui fous le masqué dela fincérité la plus ouverte, avoit complimenté le Miniftre de France fur 1'heureux Evénément qui avoit oc- ca-  Grand Tableau. 331 cafionné ces Fêtes! Et ces horreurs , ou plutót, ce fruit d'un délire frénétique, étoient publiquemcnt annoncées et débitées par Votre Libraire Gofef...» Elles étoient répandues, avec une profufion fans exemple, dans tous les endroits de la République!... Elles étoient distribuées gratis a la Canaille, & aux gens qui ne vouloient point dpnncr les z fous que chaque Feuilie coütoitb ... Et la Puiffance généreufe, dont les Forces étoient alors employés a nous protéger, a nous dérendre dans toutes les parties du monde, fouffroit ces Abominations fans s'en plaindre! ou plutöt, Elle portoit la grandeur d'ame au point de les méprifer.' — C'eft ce que la Poftérité ne croira jamais: Et cependant ce n'eft point encore tout. Après avoir employé les Mcyens qu'on vient de voir, pour animer ici les esprits contre la France & fon Roi, ces mêmes Auteurs réfolurent d'achever leur ouvrage, en y joignant celui qu'une politique auffi impie que fcélérate a employé autrefois avec trop de fuccès, mais qu'on nes'attendoit gueresa. voir renouvellé en 1781, c'eft • a - dire, dans les temps éclairés ou nous vivons: — Voici le Fait. Un des Suppóts de la Clique, lequel faifoit fa demeure a. la Haye, confia a un de fes Amis, qu'il poffédoit une Lettre originale, qui y avoit été jetée le 31 décembre 1688. dans la Boire aux Lettres, pour avertir le Sr. Borre- bacb,  332 L'ESQUISSE D' U N lach , alors Maïtre de Pofte de cet endroit, que Louis XIV. avoit entrepris de faire égorger par les Catholiques du Pays, 6c dans un feul jour, tous leurs Concitoyens Poteftants. L'Ami de cet homme, enchanté de la découverte, prit Copie de la Lettre, 6c s'empreffa de Penvoyer aux Auteurs du Patriot: 6c ceux-ci ne manquerent pas d'en publier le contenu a la fin du N°. XVI. fusmentionné, en y joignant la Lettre particuliere que cet Ami leur avoit adreffée en même temps. — Or voici cette prétendue Lettre de ió88. Monfieur, une grande triftefj'e approche , & furprendra la Hollande, fi le Seigneur Dieu ne l'empêche. L'Esprit de Dieu me freffe teüement de découvrir le dejfein que la France a projetté, que je nerepofe ni jour ni nuit. Elle veut nous f oreer, nous autres Catholiques, d raider dans ce dejfein: Elle neut qu'auffitót que nous aurons appris fon arrivée, nous ajfdfinions dans un feul jour tous ceux qui ne font pas de notre croyance; & fi nous ne voulons pas le faire, elle ne nous épargnera pas ncn plus ; elle Stera même la vie d nos enfants qui font au berceau. Ne prenez point ceci pour un menfonge, muis bien pour ve'ritable; car je fuis moi même Catholique'. mais ce qui eft contre Dieu fjf fon honneur ne me plait pas. C'eft pourquoi ne ne'gligez point ceci; & rende* - le public, afin que le grand malheur foit prtvénu. II y cn a beaucoup entre - nous, qui  Grand Tableau. 33$' qui ne veulent pas fe pré ter a cela, (3 qui feroient bien aifes qu'on l'empêchdt. Dans le plat - pays, on eft plus porté d aider la France. Dans peu, 13 h notre grande douleur, nous recevrons des armcs: */ n'y a point d attendre: fon Alteffe le Prince d'O* range doit auffi étre inflruite de cela. jf'aurois pu mettre ici non nom: mais s'il étoit connu, jc ferois un homme mort. Fotre tres - affeélionné & fickl ami j' dia Haye ce 31 décembre ió88. Tout homme éclairé, & non prévenu, s'appcrcevra au premier coup d'ceilque cette Lettre eft, ou une Piece fuppofée, ou du moins, que ce qu'elle contient eft une impofture abfurde : Car, fi la France eüt été capable de concevoir le Projet horrible, qu'on lui fuppofoit dans cetre Lettre, ce Projet n'auroit point été auffi généralement connu des Catholiques, qu'on 1'y faifoit entendrej fj? cela furtout, a la fin du mois de Décembre, & par eonféquent dans un temps , oü cette Puiffance avoit encore 1'hiver a paffer, <& enfuite mille obftacles a. vaincre, avant de fe trouver a portée de foutenir fon entreprife; 13 cela dans un pays oü les Catholiques, en général, étoient alors, comme ils le font encore aujourd'hui, des Citoyens fideles, & fipeu portés a la rebellion, & conféquemment fi peu propres a te- nir  334 L'ESQUISSE D'UN mr entr'cux un pareil fecret 9 Sc enfin, fi peu capables de commettre une action fi abominable , qu'en 1672, 8c 7?, lorsque Louis XIV. envahit trois de nos Provinces, le Miniftere de France n'eüt feulement pas la penfée de les faire foulever > ce qui eft bien éloigné de lesengager par promejfes, ou de les forcer par mencs' ces, d'égorger en une feule nuit tous leurs Concitoyens Proteftants. < Celui qui avoit envoyé la Copie de cette Lettre aux Auteurs du Patriot, presfentit ces objeclions, & bien d'autres encore, que l'on pouvoit faire a ce fujet. C'eft pourquoi , après avoir affirmé dans fa Lettre particuliere a ces Auteurs, que le papier 8c 1'écriture de la Lettre de it>88. prouvoient 1'autenticité de cette Piece, il ajouta, qu'il étoit poffible que fon contenu ne füt pas véritable, puisque la Conjuration n'avoit point eu d'effet, 8c que d'ailleurs aucun Auteur, aucuns Archives, a lui connus, ne rapportotent rien de femblable. Mais en difant cela, il infinua adroitement qu'il étoit pourtant a préfümer qu'il y avoit alors eu, en ce pays-ci, des menées de cette espece} 8c que fi elles n'avoient point eu 1'effet qu'on s'en étoit promis, cela pouvoit être provenu de la découverte que la Lettre fusdite en avoit faite, ou de toute autre caufe. Et pour faire accroire cela aux gens fimples que la Clique vouloit alarmer, & aux  Grand Tableau. 335 aux esprits fanatiques, qu'elle vouloit achever d'animer, (car a quel autre delfein cc Scélérat 6t fes Gonfors auroient ils publié cette impofture ancienne , ou nouvellement controuvée?) voici en quels termes il continua fa Lettre. — „ II eft conftant qu'en ce temps-la, „ & peu avant le paifage de GuiUaume III. „ en Angleterre (a), on parloit, & l'on s'in„ quiétoit beaucoup du dejfein fecret que k „ Cour de France avoit d'abolir en ce pays-ci „ la Religion Protefiante, & d'y anèantir le Par„ ti du Prince; & de cela dépendoit le fort „ des Affaires de l'Angleterre, oü le Roi Jac„ ques, qui étoit foutenu par la France, au„ roit également détruit cette Religion, fi „ GuiUaume, a 1'aide des Troupes des Etats , „ n'eüt chaffé ce Prince de fon Royaume, & „ n'y eüt maintenu cette Religion. " „ Selon quelques Perfonnes, dit Wa gewaar,' „ (c'eft toujours le même homme qui parle) „ le Marquis de Caftelmaine porta le Cardinal Cu „ bo d confeiller au Pape de cboiftr Jacques II. „ pour Mêdiateur entre la France & le S. Sieget „ après cela, les deux Rois devoient former en„ tr'eux une êtroite Alltance pour avancer les in- tér ets de VEgltfe , & puur entreprend/e d'a- „ NéANTlü CETTE RépUBLIQUE. Mais „ le ia) CtpaJJage de GuiUaume lil, eut lieu tn oiïolre 1688.  33ö L'esq_üisse rf u k „ le Pape ayant déjouvert ce projet a VEmpereur, „ ce dernier le découvrit cï fon tour au Prince d'O„ range («)• — D'ailleurs l'on voit par les re- marqués du même Wagbnaar, dans quel „ danger le Penfionnaire Fagel croyoit que la République étoit alors Enfin au moi3 „ d'o&obrede la même année 1688, les Etats„ Généraux déclarerent aux Miniftres Etran„ gers, pour la Juftification dc 1'Entreprife du „ Prince, qu'ayant appris 1'étroitc amicié qui regnoit entre les Cours de France Sc d'An„ gleterre, ils avoient craint que des raifons „ politiques, &? la haine que ces Cours avoient „ contre la Religion Proteflante , ne les portas„ fent a. remversie la Républichje de fond en c ome le (f). „ Je confefTe, que ces expreffons me parois„ fent extraordinairement fortes. Mais ne fe„ roit- il pas poffible que l'on eüt en ce- temps„ la plus des preuves 8c de prefomptions, a cet égard, que nous n'en trouvons dans les Hiftoriens? feroit • il abfolument impoffible ,5 qu'immédiatement après 1'heureufe Defcente „ de GuiUaume en Angleterre, Sc qu'après la „ fui- (a) Wagen aar Hifi:, de la Patrie, T. Xv. p. 469. Xb) Ibid. p. 467. (O Réfol. Génér. du 28. ofif. 1688. — Wasïmaak, Ibid. p. 468 & 469.  Grand Tableau. 337 fuite du Roi Jacquet, la France, outrée de „ dépit Sc de rage contre les Etats, ne con„ eüt 1'horrible Sc furieux projet de tout boule- verfer en ce pays-ci, en y armant les Ca* „ tholiques contre les Proteftants, en excitant, „ en forgant les premiers a tremper leurs „ mains dans le fang de leurs Concitoyens, Ss „ a renouveller parmi nous 1'horrible Fêce „ de la S. Barthélemi? II eft certain que le 1, zele , que cette Cour avoit alors pour la „ deft.rutt.ion du Proteftantisme, étoit monté a» „ fon comble : Les Perfécutions qu'elle fit 5, fouffrir aux Réformés, après la Révocation) „ de 1'Edit de Nantcs, n'eurent point de bor3, nes dans ce Royaume; Louis XIV. fe faifoir, gloire d'exterminer les Proteftants; il tenoic „ non feulemerrt pour légitimes,mais pour/«*«* „ bles Sc me'ritoires , tous les moyens qu'il pou- voit employer a cet effet. Et quelqu'hor* „ rible que paroifle la feule idéejd'excker dans „ un Etat étranger le plus effroyable maffa„ ere , l'on ne connoit point la Cour de Fran- ce , fi l'on s'imagine qu'une idëe de cette s, nature pouvoit lui inipirer de 1'horreur pour „ quelque chofe que ce. füt, Sc qui convenoit „ furtout a fes vues politiques* La Révolte Sc les maffacres inhumains, dont les Catholiques „ Rqmains fe font rendus coupables en Irlarv », de en 1641, Sc qui ont coüté la vieJt plus 2, de yo mille Proteftants, avoient été iüscïtós  338 L'ESQ.ÜISSE D1 V N par le Gardinal de Rkbelieu; & ce dernier „ avoit fecrctement fourni des armes pour cet effet, ainfi que, felon lecontenu de la Let„ tre ci-jointe, on avoit defiein den fournir en ce Tais - ci. " La lecture de ceci , Sc celle de Ia Lettre adreffée au Sr. Borrebach fuffiffoient déja pour réveiller les préjugés odieux, Sc la haine injufte, qu'on nous infpire dés notre jcuneffe contre la France; mais ce n'étoit point encore aflèz: des Prédications féditieufes faites a ce fujet , & le bruit qu'on fema fecrétement qu'il n'étoit point impoflible, que Mr. le Comte de Vergennes n'eüt congu le même Projet que celui de 1688, vinrent a 1'appui des effets, que faifoit cette lecture: Et a. 1'aide dc ces divers moyens, 1'horïeur 8c 1'effroi faifirent les ames ïimples, une rage fanatiquc s'empara de nos Piétiftes, denos Enthoufiaftes & de nos Régénéres , c'eft - a - dire , dc cette espece de géris-qüi font eonfifter 1'effence de la Religion dans leurs fpéculations abfurdes , Sc fa pratique dans des minuties qui la déshonorent; 5c la Canaille, enfin, qui eft toujours prête a venger la Religion, qu'elle ne connoit ni ne pratique, devint, ainfi que ceux que je viens de nommer, plus attachéc que jamais a nos Freres en Chrifi, les Anglois i Sc fa fureur contre la France, contre'nos dignes Régens, Sc contre ceux d'entre nous qui rendoient juftice i cette Puiffance  Grand Tableau. 339 ce, fut portée a fon comble: d'honnêtes per« fonnes, en un mot, a qui les déprédations, les outrages 6c les cruautés de ces Anglois, ainfi que les bienfaits dc la France & la néceflité de ménager cette Puiffance , avoient fait ouvrir les yeux, les refermerent, 6c la plupart d'entr'elles ne les a point rouverts depuis. Voila, Monféigneur, voila comment par de telles impoltures, par de telles imprelfions faites fur 1'efprit d'une infinité de gens, une Cabale dc Scélérats pouvoit impunément continuer d'outrager la France, — Voila comment, a la faveur de telles impreffions, Po» pouvoit ici s'oppofer aux vues du Souverain, croifer fes deffeins, & éluder fes ordres, en retenant nos Forces navales dans une inaébivité honteufe, ■ Voila comment, a 1'aide de telles pratiques, 8c de telles illufions répandues dans les efprits, l'on pouvoit hardimcnt favorifer les intéréts de l'Angleterre, trahir les nötres , 6c braver les piaintes 6c les repréfentations de nos Négociants, ainfi que les cris de douleur 6c de défefpoir , qu'une détresfe inouie faifoit pouffer a la partie la plus fai- ne de nos Citoyens. Et c'étoit encore, Monféigneur , par ces moyens abominables, qu'on fe formoit ici parmi les Fanatiques, parmi les Perfonnes fimples, parmi un tas de Miférables perdus de débauches 6c de crimes, & furtout parmi la Canaille , un Parti reJoutaY x fo,  34° L'e s au i s s e d'un ble, un Parti, qui s'ofe dire être le Votre , & que Vous fouffrez qu'il fe dife tel; — un Parti, qui, pour Signal de fes fureurs, a pris la couleur de Votre Nom, Sc ce Nom même, pour fon Cri de guerre ; —— qui depuis quatrc ans, a non feulement troublé diverfes fois le repos public, mais qui a tenté de renverfer 1'Etat de fond en comble, Sc d'élever fur les ruines de notre Conftitution, le thröne odieux du defpotisme, — un Parti, enfin, qui feroit parvenu a exécuter les des* feins de ceux qui Pont forme, Sc qui le foutiennent encore, fi la vigilance du Souverain, li la fidélité de la meilleure partie de nos Citoyens, Sc la contenance impofante de nos Corps-armés, ne 1'en avoient empêché. Tant d'Abominations répandues dans cette Produéfion infernale, dont on inondoit le Public chaque femaine, révolterent enfin 1'efprit de tous les honnêtes gens: Sc l'on a débité, Monféigneur, que ce fut par ordre de V. A. que Votre Libraire Goffe fufpendit le débit de cette Feuilie, après le N°. XVII. qui parut le 8. décembre de ladite année 1781- — Quant a moi, j'ignore fi cet ordre a eu lieu: tout ce que je fais, eft, que le f. janvier fuivant le Libelle reparut fous le même Titre, fous la même Proteótion, Sc qu'il continua d'être écrit avec la même méchanceté, Sc dans les mêmes vues qu'auparavant: Et que comme il  grand Tableau. 341 II nc pouvoit contenir la multitude d'horreurs qu'on envoyoit de toutes parrs a fes Auteurs, ces derniers y fiient un Supplément, qu'ils intitulerent, Port e - feuille de l'Ouberwetse Nedeklandschi Patriotj Supplément, qu'on débita par volumes & gratis, ou pour de Vargent, ainfi que 1'Ouvragc principal avoit été débité, & 1'étoit encore. Le Libraire de V. A. celfa cependant de fe dire ledifiributeur principal de ce Po rte -fi vilde & de la Continuation du Patriot, quoiqu'il ne ceffat point d'en débiter une partie; c'étoit - la une de ces rufes grofïïeres, qui ne peuvent en impofer. Mais pour inftruire le Public fur ce qu'il devoit favoir a 1'égard de ce renouveïlement du Patriot, l'on y placa a la fin du N°. XX. PAvprtiffement que voici: 'tous les Caftés & toutes les Sociétês, auxquelles on a envoyé gratis l'Ouderwetse Nederlandsche Patriot, cjf toutes les Perfonnes qui voudront continuer de le recevoir fur le même pied que ci - devant , c'eft ■ b- dire, fans rien payer, font priées de faire favoir leur Adreffe a J. P. Kraefft Libraire d Rotterdam, ou au Sr, Conltantin de la Vieille - Roche, Pofte restante, d Delft, fous VAdreffe duquel on pourra envoyer tout ce quel Ton voudra faire tenir au* Auteurs 'de ladite Feuilie. Y 3 Jc  342 L'ES Q.U I S S E D' U N Je demande préfentemeiit, s'il eft un MiniJtere en Europe, excepté celui de France, qui eüt fouffert patiemment tant d'infukes, tant d'outrages 8c de calomnies, c'eft - a - dire, un tel débordement d'horreurs de toute efpece? . , . .. horreurs, d'autant moins méprifables , que leur effet influoit fouverainerr.ent fur les intéréts politiques de la Puiffance, contre laquelle elles étoient vomies; 8c que ce même effet contribuoit a favorifer les menées, qu'on employoit parmi nous, pour y teriir le Souverain dans 1'impuiflance dc feconder les efforts dc nos Amis, contre PEnnemi comrnun. Je demande, dis-je, s'il fe trouve en Europe un Mini (tere, qui aux dépens dc fes intéréts les plus importants, eüt porté la patience a. ce point la? Je crois que non: Et fi cela eft ainfi, il étoit donc rélérvé a la France, a cette Dèteflable France, de donner un tel exemple de modération. Cette Puiffance vouloit fans doute faire voir, par la continuation de fon afliftance généreufe envers nous, par des bienfaits fans nombre, par le facrifice d'une partie de fes intéréts, 8c par celui du refTentiment le plus légitime, qu'Elle méritoit, de notre part, une reconnoiffance 8c un attachement fans bornes. En un mot, Elle vouloit confondre, par cette conduite noblc Sc fans exemple, la Cabale infame qui protégeoit, qui foldoit Sc animoic fes Détracteurs. Mais  Grand Tableau. 343 Mais c'étoit peine perdue, a ce dernier égard : des hommes fans cceur, fans honneur , 6c confommés dans toutes fortes de crimes, ne font fufceptibles, ni de honte, ni dc remords. Tandis que les Auteurs de l'Ouderwetse Patriot & de fon Porte-feuille alloient leur train, d'autres Ecrivains non moins protégés, non moins excités par la Cabale, fe déchainoient également contre la France; les Emiffaires de cette Cabale faifoient la même chofe; &, aujourd'hui, cette fureur n'eft point encore aflbuvie. Après avoir publié en 1781. qu'ils (avoient de bonne part que cette Pmftance ne nous rendrbrt jamais le Cap de BonneEfpérance, 6c-que 1'emprunt de cinq millions, qu'elle avoit négocié en ce pays-ci, fous la garantie des Etats- Généraux, ne ferviroit qu'a ftipendier les Traitres qu'elle avoit chez nous, ils failirent 1'occafion de tous les Evénements du refte de la guerre, 6c dont nous avions lieu de nous réjouir, pour répandre parmi nous les plus faufles alarmes, 6c pour augmenter la défiance 6c la haine contre la France. La reprife de S. Euftache, celle de Demerari, des Berbices, de 'trinconomalo, de Negapainam* &c.9 étoient, felon eux, autant de malheurs pour nous: Si les Franpois, difoient - ils , ne retienitent pis ces Etablijfements, comme des conquêtes, ils les feront entrer dans la Balance des refiitutioni &? des compenfations qu'ils pourront offrir d VAnY 4 gh-  344 L* ESQUISSE D1 U N gleterre, lorsqu'on négociera la Paix: fi l'une oti Vautre de ces deux chofes arrivé pas, ils ne nou? les rendront point, fans avoir tiri de nous plufieurs fnillions. — Et tout cela étoit cru par les Suppóts de la Clique! .... Et tout cela augmentoit journellement le nombre de ces Suppóts, & par eonféquent le Parti, qui devoir. fervir aux vues ultérieures qu'on avoit dés - lors! \ La Déclaration que Mr. le Comte de Vergennes fit a ce fu'et, le 2. décembre 1782, aux Miniftres des Etats Généraux, décrédita pour un temps ce bruit calomnieux: Mais au mois de janvier fuivant, lorsque les Préliminaires de la Paix, entre la France, PEfpagne & l'Angleterre, eurent été fignés fans nous, paree que, par Peffet de nos lenteurs 8c de nos indécifions, ou plutót, par 1'effet des machinations ordinaires, nos Ambaffadeurs manquoient alors de pouvoirs fuffirfants pour accéder a cette fignature, lors, dis-je, que ces Préliminaires eurent été fignés fans nous, les cris de la Cabale redoublerent contre la France. ■—- Cette Puiffance maudite , s'écria - t-elle, neus a enfin trahi j elle a fauffé fes promeffes , elle a indignemenl facrifié nos intéréts £sf notre gloire d l'Angleterre. Voila ce que nous avions prédit .■ Voilk ce que n'a pas voulu croire notre Nation aveugle9 notre Natiop ingrate envers notre Prince, envers ee bon Prince, qui avoit prévu tout cela, & qui, pour cette raifon, a fait fon poffible pour nous en*-  Grand Tableau. 345 pècber de nous brouilïtr avec les Jnglois\ avec nos 'anciens Ailiés, avec nos F.reres en Chrift, lesquels ne neus ont fi maltraités depuis quatre ens9 que paree que nous Vavons mérité. On avoit beau objecber a ces Clamcurs, -, ,, que 1'Indépendance des Américains, aótuelv ,, lement reconnue Sc confirmée, étoit leprin,, cipal but auquel la France avoit vifé en fai» farit la guerre; que 1'état de fes finances 8c ,, de fa marine ne lui permettoit pas de con5, tinuer la guerre, fans risquer de perdre les avantages qu'elle en avoit retirés-, que 1'in,, action honteufe, ou l'on avoit retenu notre „ marine en 1781. Sc 1782, que les maneges employés pour faire échouer le Voyage de Biest, Sc que la dispofition ou étoit ici, a „ fon égard, une Clique toure- puilfante, & „ dévouée a l'Angleterre, lui avoient appris „ ce qu'elle auroit a attendre de notre part, „ 11 elle continuoit la guerre en notre fa- veur: "—■ on avoit beau, dis-je, faire ces objeétions, Sc y ajouter, — „ que fi la France „ avoit figné les Préliminaires de la paix fans „ nous, ce n'avoit point été faute de nous avnir accordé aifez de temps pour nous dé- terminer a accéder a cette Signature Sec. „ Sec, " — rien n'y faifoit ; la Cabale Sc fes Suppóts , jusqu'au dernier crocheteur du pays, ne ceifoient de crier, „ que de toutes „ les Puijfances de l'Univers, il n'y avoit que ia Y y „ Fray  S4<5 V ESQUISSE D'UN France, qui füt capable d'une telle trahifon, ,, d'un tel trait de feêlêratejfe j & que de teut „ temps, ceux qui s'étoient fié en fes promefes, „ avoient été dupés: di? que c'étoit ce queSon Al„ teffe ci? les honnêtes gens qui penfoient comme „ Elle, avoient prévu, " Ces Clameurs continuées pendant quelque temps, 8c accompagnées de tous les commentaires, dont elles étoient fufceptibles, firent un tel effet fur beaucoup d'honnêtes gens , qu'ils s'en laifferent aveugler. Bientot , il ne s'eft plus agi que de pouffer Nous Jeuls la guerre contre les Anglois $ que de courir les attaquer dans toutes les parties du monde , 8c cela.,Nous feuls, oui, Nous feuls, a qui pendant les deux années précédentes on s'étoit efforcé de faire accroire, que nous n'étions feulemeut pas en état d'escorter un Convoi du Texel au Sund. — Et tandis qu'on entretenoit le public dans ces dispofitions infenfées, tandis que ce projet étoit devenu un objet de délibérations, tandis, enfin, que par notre obftination nous pouvionsrester feuls ï la merci de l'Angleterre, V. A., Monféigneur , trouva bon de demander la fuppreffion des Primes deftinées pour les Enrölements ; 8c par une imprudence inconcevable, ou plutot, par un trait de la conduite la plus arbitraire, Elle permit, de fon propre chef, & avant la fignature de nos Préliminaires, la réforme de 1200 denos meilleurs matelots5 & deux Confeillers &  Grand Tableau. 347 & le Fiscal d'une de nos Amirautés, firent exécuter cette réforme, fans en rien communiquer aux Députés Provinciaux. C'étoit bien-la. rengainer fon épée, pendant qu'un ennemi furieux nous tenoit encore la iienne fur le cceur: Et lors qu'on detmnda la raifon de cette réforme prématurée, l'on y fit une réponfe fi frivole , que je ne prends pas la peine de la rapporter ici. (fl)-Ea un mot,les principaux Auteurs de tous ces maneges contradiétoires avoient des Vues, que j'expoferai plus au long dans la fuite de mon Esquip: mon delfein n'étant ici que de donner une idéé de la maniene dont la Cabale , fes Scnbes & fes autres Suppóts ont traité la France ou fes Miniftres, depuis le commencement de la guerre jusqu'aujourd'hui. Par exemple: Voici comment une de leurs plumes dépeignit Mr. le Duc de la Vauguyon , alors Ambaffadeur de cette Puiffance d la Haye, dans le fameux Catalogue de Tab le aux, brochure in 40. qui parut vers ce temps - la. — a la page 7. ce Seigneur, accufé d'être la premiere (O Je donnerai en fon temps les Eclairciflenients néceffaires fur tout cela. En attendant, ceüx-qui poffédent les Pieces qui ont paru alors fur ce fujet, & telles qu'uneLETTREde Mr.de Capellen de Schoonaauwen; la Lettre des Etats de Frife a l'Amirauté d'Amfterdam, — laRépoNSE de cette Amirauté a ladite Lettre, &c, &c. pouuoat les confulter.  348 L'ESQUISSE D' Ü N re caufe de tous nos malheurs, & de s'être raif« lé de la République après 1'avoir plongée dans ïa détrefle oü elle fe trouvoit, étoit dépeint fous Pemblême du Renard, qui s'étoit moqué du Bouc, après avoir attiré ce dernier dans le Puits: — a lap, 8. il étoit défigné comme le Chef d'une Confpiration formée en ce pays - ci, Sc non moins horrible, que celle que le Marquis de Bedmar a été accufé d'avoir tramé contre Venife: — a la p. 51. il étoit défigné comme refTemblant a 1'AmbafFadeur Arttns, qui feconda les Fils de Brutus a livrer Rome a Ptr- fenna: Dans le Tableau de la p. 13. l'on avoit repréfentéla France accompagnée del'Envie, de la Haine & de la Flatterie, Sc répandant 1'or a pleines mains, pour animer la Calomnie a furprendrc la crédulité de notre Nation, Sc a déchirer notre malheureux Pays, Sec Sec- Ceci n'eft qu'une legere idéé de ces 4. Tableaux: II faudroit lire leurs Articles en entier , pour juger a quel degré la fureur y étoit portée contre cette Puiffance Sc fon, digne Miniftre. Après la Signaturedes Préliminaires de notre Paix avec l'Angleterre («), c'eft-a-dire, après que (O Ces Priliminairet furent Jignfs i Paris le 3. ƒ«$* timbre 1783-  Grand Tableau. 34$ que l'on eut appris que nous devions abfolu* ment céder aux Anglois Négapatnam, & la libre Navigation dans les Moluques, les clameurs fusdites Sc d'autres du même genre furent portées a leur comble. A enrendre nos Criards,—.„ les Minifteres de France Scd'Efpagne étoient indignes de femêler d'avantage de «ette Négociation: Nous devions envoyer un „ Députation particuliere en Angleterre, pour „ y traiter direclement de nos Intéréts, pour ob,, ten>r de cette Puiffance 1'oubli desoffenfesque „ nous lui avions faites, & par eonféquent pour en obtenir des Conditions moins défavantageu* „ fes 6c moins dures, que celles dont je viens de „ parler. " — Auffi,, Monféigneur, ne manquat-on pas ici de profiter de ces dispofitions, oü la Cabale avoit mis une partie de la Nation, pour propofer en effet la Députation fusmentionnée, c'eft-a-dire, pour aller faire Amende honorable a nos Freres en Cbrifi, 6c baifer humblement les nouvelles chaines, dont ils auroient trouvé bon de nous charger, en nous gratifiant de la reddition de Nagaputnam Sec. Et tandis qu'on travailloir. a faire réuffir cc projet, on continuoit de faire accroire au Public, que, malgré toutes les Affurances de la France, cette Puiffance étoit fermement réfolue de garder le Cap, 6c ceux de nos Etablisfements d'Amérique, qu'elle avoit repris aux Anglois. La Déclaration, que Mr. le Comte de  V ESQUISSE D' UN de Vergennes avoit fait miniftériellement le 23 feptembre a nos Ambafladeurs , „ que le Roi „ fon Maitre étoit prêt de rendre aux Etats tou- tes les Polfeflions, que fes Forces avoient re,, conqui/es Jur les Anglois , ou gardées pour la „ République, fans exiger ni compenfation ni in* „ demnité quelconque, " cette Déclaration, disje, fut traiiée, par les Ecrivains de la Clique, de Franfeh Compliment, ou de Compliment a la Frangoife, auquel on ne devoit pas fe fier. Des Personnes mêmes, qui, par état, étoient mieux inftruites que toute autre, de 1'autenticité de cette Déclaration, porterent la fcélérateffe au point de débiter, dans les Sociétés, qu'elle n'avoit point été faite', Et que L. H. P. trembloient jur le fort desdites PoffesJions: Ce que les autres Suppóts de la Cabale répéterent, & tant de gens y ajouterent foi, qu'on regarda ces Poffeflions comme pcrdues. —. Enfin, la Cour de France, inftruite de la dé* fiance & de la crainte qui continuoient de regner ici a. cet égard, fit remettre le 22. oéfoJbre a. L. EI. P., par fon Chargé d'Affaires, un Mémoire, dont voici la principale partie: „ Quoique le Roi ne doute pas que V.H. P. ,, n'aient été informées par Mrs. de Berkenrode „ & de Brantfen, de la réfolution oü II a tou„ jours été, & oü II eft encore de reftituer a ,, la République gratuitement, 5c fans aucu- ne compeafation, tous les EtabliffemensHol- „ lan-  GRAND TABLEAU. 351 ,, landois, que fes Armes ont reeonquis fur la „ Gr. Bretagne , cependant S. M. croit de„ voir en renouveller 1'affurance dire&ement a „ V. H. P.i Sc Elle fe flatte que ce procédé leurfervira a apprécier fes fentiments magna„ nimes pour la République, fentiments, que „ S. M. n'a jamais démentis , quoique des ,, circonftances , qu'il feroit inutile de rap„ peller , eulfent du lui infpirer quelque dé„ fiance par rapport a 1'Energie, & mê,, me aux Dispofitions des Provincies-Unies, „ &c." J'ignore fi quelqne fuppót de la Cabale regarda encore ce Mémoire , pour uh Franfch Compliment j mais je fais que des ScéLér at's de haut parage , ou él'vés en charge, ne s'aviferent point d'en' nier 1'authenticité, ainfi qu'ils avoient nié celle de la Déclaration dc Mr. le Comte de Vergennes. Pendant ce temps-Pa fe continuoient les menées fecretes, qui avoient déja eu lieu entre l'Angleterre Sc fes Affidés de ce Pays-ci,-pour faire traiter féparément notre Paix déünitivé avec cette Puiffance. Entr'autres vues, Monféigneur, Nos Anglomancs avoient celle d'employer en cette Affaire lé crédit, que Vous pouviez avoir auprès de George III. pour obte* nir la reddition de Nagapatnam, èc quelqu'autres avantages joint* a celui -la; espérant'qu'en ce cas, toute Pobligation en feroit due a P~. A.;  352 Uesq_uis.se d'ük & que l'on pourroit non feulement faire retentir d'un bout a 1'autre de la République, que GuiUaume V. kous avoit obtenu des Anglois, ce que Louis XVI. n'avoit pu, ou n'avoit pas voulu en obtenir, mais que par-la, on mettroit a couvert de tout blame ultérieur, la Conduite inconcevable, que V. A. avoit tenue depuis f ans, & pamculiérement pendant la guerre, en fa qualité d'Amiral - Général. Cependant, toutes ces menées, 5c la Décla-' yation même que leDuc de Mancbefler fit le ip. novembre a nos Ambalfadeurs a Paris, que Sa Majefté Britanique propofoit a L. H. P. de eonclure le Traité définitif a la Haye ou a Londres, n'aboutirent a rien : la Signature de la Paix tralna en longueur , il eft vrai, mais cette Signature fe fit a Paris même, le zo mai de J'année fuivante. — Par-la nous avons du faire les facrifices ftipulés par le Traité Préliminaire , mais, quelques cruels que fuffent ces facrifices, ils n'étoient point comparables aux cntravcs odieufes, oü nous nous ferions trouvés replongés , fi la Cabale füt parvenue i fon but en cette occafion. Comme ce n'eft point ici le lieu de rappeler toutes les abominations, que les Suppóts de la Cabale ont renouvellées contre la France pendant le cours du Différent, qui s'éleva en 1784. entre 1'Empereur 8c la République, je me bor- pe-  Grand Tableau. 353 nerai a. dire , en attendant que je fois parvenu a cette époque, que , felon eux, la France joua enccre, dans fa Médiation d ce fujet, le 16lt le plus indigne; qu'Elle fut l'unique caufe de la longue durée de ce Différent', qu'Elle y trabit vifiblèment nos intéréts, notre confiance-} qu'Elle y fa* vorifa l'obfiïnation que l'Empereur apporta dans fes prétentions; que nous n'avons dü qua Elle les facrifices que nous fümes enfin contrainis de faire a S. M. Impériale, tffc. &c Tout cela, dis- jé, fut débité par les Scribes & les Emilfaires de cette Cabale, c'eft-a-dire, de Ceux qui des la fin de 1783. avoient malicieufement provoqué cette Querelle; — de Ceux qui, dans le fond de leur ame, étoient enchantés qu'elle durat; — de Ceux qui 1'animoient par tous les moyens poflibles; — de Ceux qui defiroienc ardemment qu'elle dégénérat en une guerre ouverte; — & cela tandis, qu'après avoir été la caufe du mauvais état oü fe trouvoient alors nos Frontieres , ils apportoient actuellement tous les obftacles polïibles a 1'augmentation de nos troupes, Sc a 1'armement de nos habitants. Conduite , qui auroit paru incomprébenfible , fi l'on n'avoit fu , qu'en foufflant ainfi le feu de la guerre, Sc qu'en nous retenant en même temps dans un état de foiblcsfe , ces Peftes publiques espéroient, que la vue de cette foiblefle exciteroit rEmpereur a nous attaquef förmellemént, Sc qu'après cette atta-' Z que»  354 UE S Q.U I S S E D' U N que , la durée de la guerre, qui auroit ici été menée de la maniere que 1'avoit été la guerre précédente, leur auroit donné le temps de croifer les moyens que l'on commencoit a employer contre leurs machinations intérieures, 8c de fortifier leur Parti fcélérat, afin de nous arranger a leur tour , après que 1'Empereur nous auroit mis d Ja raifon: Car cette derniere expreslion, étoit leur expreffion favorite. Quelques menées que la Cabale eüt employees pendant notre guerre avec l'Angleterre , quelqu'adroitement qu'elle eüt enfuite profité de nos lentcurs ordinaires, pour empêcher tout Traité d'Alliance avec la France, on étoit pourtant parvenu vers le milieu de 1'Eté de 1784. a dreficr le Projet de ce Traité: Mais les nouvelles prétentions que 1'Empereur fit quelque temps après contre nous, ayant augmenté le Différent qui fubfiftoit entre ce Monarque & la République , la Conclufion de 1'A1 liance fe trouva encore fufpendue. Et ce fut dans ces circonftances, Monféigneur , oü nous avions fi grand befoin de 1'amitié, de la médiation 8c de la proteélion de la France, qu'un Peintre de la Haye, nommé Bolomey, le gendre du Gazetier Gotfe, le beau-frere du Libraire de V. A., c'eft-a-dire, du premier imprimeur 8c diftributeur de l'Oud erwetse Patriot, ce fut, dis-je, dans ces circonftances  Grand Tableau. 355 ces, que cet homme auffi aveuglement devoué a la Cabale, que 1'étoient alors, 8c le font encore ces deux miférables ,ofa publier une Eflam* pe auffi injurieufe a la France, que le plus infame Libelle qu'on eüt imprimé jusqu'alors contre cette Puiffances Efiampe, qui fut annoncée avec emphafe dans la Gazette de Goffe ; qui fut expofée 8c vendue pubhquement, ainfi qu'elle continue encore de 1'être; 8c dont V.A. n'a pas rougi d'accepcer 1'Epreuve qu'on lui en préfenta. ■ Comme j'ai fous les yeux cette Eftampe, j'en donnerai ici ra Defcription. Au milieu de la Compofitipn eft un Piédeftal, fur lequel eft placée la figure de la République, qui, foutenuepar celle de Votre Perfonne , Monféigneur, eft unie a. celle-ci par dne chalne de Laurier, que tient le Génie du bien public* A la droite du Spectateur eft la Difcorde, qui s'efforce de renverfer ce Piédeftal, 8c par eonféquent, la Perfonne de V. A. & la République en même temps. La Religion, plaC'ée a la gauche, fe foutient encore auprès de la baze du Monument, rilais la Liberté eftrayée, femble prendre la fuite. Dü même cóte' eft 1'Aigle Impérial , 8c de 1'autre, le Léopard Anglois, qui obfervent ce qui fe paffe. Enfin , la Concorde, qui deicend du Ciel, lancc la foudre?, 8c les deux Z 2, 1 feuls  356 L1 esquisse d'un feuls traits qui en partent, font dirigés fur la Difeorde, 5c furie Goq Francois, qui animoit celle- ci, & qui paroit effrayé a la vue del'AiglePruffien, qui s'élance vers lui 8c vers la Difeorde. Lorsque cette Eftampe parut, il n'y euE perfonne, qui, au premier coup d'ceil, ne faisit le fens de PAllegorie. D'ailleurs les Vers Hollandois, que l'on avoit placés au bas, dénotoient clairement quelle étoit la Puiffance, a qui l'on en vouloit ici. Auffi, le Peintre, ou ceux qui avoient fufcité cette nouvelle Produóbion, avoit-il pré vu cela. C'eft pourquoi l'on fit diftribuer aux Acheteurs une Explication particuliere du fujet, 6c dans laquelle l'on entreprit de faire entendre que le Coq Francois n'étoit placé - la que comme fpeótateur , ainfi que 1'étoient 1'Aigle Impérial 6c le Léopard Anglois. que ce n'étoit que fur la Difeorde que la foudre étoit lancée, 6c que 1'Aigle Pruffien s'élancoit: mais ce biais futile n'aveugla perfonne 6c pour preuve de la juftefle de la defcription que je viens de donner, j'en appelle au témoignage de tous les honnêtes gens qui ont vu cette Ejlampe, ou qui Pont encore fous les yeux. Enfin l'on a débité que Yidée du fujet étoit due au principal Auteur de 1'Ouderwetse Patriot, c'eft-adire, a un homme, qui, ayant prévu il y a 3 ans qu'on l'alloit renvoyer du College de Régence dons  Grand Tableau. 357 dont il étoit Membre , 8c qu'il déshonoroit , prit le parti de prévenir le coup, en donnanc fa démiffion. Si cela eft ainfi , cette idéé étoit bien digne de 1'Auteur du Catalogue de Ta el e a u x , dont j 'ai parlé ci - devant. LorSque vers la fin d'o&obre 178^, l'on eüt appris que notre Accommodement avec 1'Empéreur étoit prêt a fe conclure définitivement, & qu'il étoit apparent que la fignature de notre Aliiance avec la France fuivroit immédiatement cet Accommodement, l'Angleterre mie tout en ceuvre, chez nous, pour retarder cette fignature, Sc pour parvenir fans doute, par ce moyen -la, a faire entiérement échouer 1'Alliance. Perfonne ne fait mieux que Vous, Monféigneur, avec quel zele, avec quels efforts, notre Cabale feconda , a cet égard, les vues de cette derniere Puiffance. II falloit trouver des gens affez dévoués aux volontés de cette Cabale, ou du moins affez aveugles fur les intéréts généraux de la République, pour entreprendre, dans quelqu'une de nos Provinces, a faire réuffir cette entreprife; 8c de tels gens fe font trouvés. Sur la Propofition qu'en fit un Mr. van Citters, la Régence de Middelbourg écrivit le y novembre au Confeil-Comité de la Province de Zélande, unc Lettre, par laquelle, après une longue déduélion de raifons les plus frivoles, 8c qui fentoient la fource d'cu Z 3 elles  353 L'es auissE d' u n elles étoient vetmes , cette Régence déclaroit H. N. P. que fon Avis étost, que nos Amhaffadeurs, a Paris, fuffent chargés de la MaNïeRE la plus secrhte, de ne pas accélêrer ia conclufioh 'le V Alliar.ce avec la France, quelque nécefaire , d'ailleurs, £s? quelque agréable que cette Alliance fut, (ff ni de F arrêter définitivetnent (a) , fans en donner préalabkrnent avis d L. N. P.y afin que la chofe étant communifuée aux Provinces refpeblives , U y eut lieu d'arrê,ter, pour ces Meffieurs, une Infiru&ion finale, {ff telle que les circonflanees Vettiger oient alors. —! Je ne rapporterni point ici, Monféigneur, quelle part eut en tout ceci Votre Repréfentant, comme Premier Noble de la Provmct;; ni comment le Confeil - Comité , par une conduite conféquente a cette Lettre , auroit mis les Députés de la Province a la Généralité*, dans Ie cas de ne point exécuter les ordres, qui leur avoient écé donnés le 6 feptembre & le 18 oefcobre précédent^, d'aUer pari piffu avec les Députés de Hollande, en tout ce qui regardoic cette Alliance •, enfin, je ne rapporterai point non plus , a quel point le Mémoire, que Mr; Plarris remit a L. PI. P. le 22. novcmbre, ou- vrit (a) Ces mots,. 6f quelque néceffaire, d'ailleurs, £ƒ quelque agréable que cette Alliance fut, n'étoient ici que pour Ia fpime.  Grand Tableau. 359 vrit les yeux de la Nation , fur ce manege étrange , puisque la nouvelle , que 1'Alliance avoic été fignée a Paris le 10 dudit mois de novembre , mit fin a tout ce manege; je dirai feulement que cette nouvelle fut un coup de foudre pour la Cabale & pour fon Parti. Elle maudit mille fois le moment ou la fignature de ce Traité avoit été faite, fes Suppóts redoublerent leurs imprécations contre la France, 8c contre les dignes Régens qui avoient le plus coöpéréa cet heureux Événement. En écrivant ceci, Monféigneur, j'ai fous les yeux une partie des horreurs que ces Suppóts débiterent a cette occafion, 8c entr'autres, les Vers abominables qu'un Energumene dc leur bande compofa au mois de février dernier , 8c que l'on afficha dans divers endroits de la Haye, quelques jours avant que l'on y trouvat fur la porte des Ecuries de Mr. 1'Ambafiadeur de France, ces Defleins horribles, dont on a-tant parlé, 8c qu'une main, conduite par toutes les Furies de 1'Enfer, avoit crayonnés. Tandis que la Cabale 8c fon Parti fe déchalnoient fi cruellement contre cette Alliance , tous les bons Citoyens bériiflbient le Ciel fur cet heureux Événement, 8c plufieurs Sociétés Pont célébré par des Fêtes auffi brillantcs que paifibles, tant a Amfterdam, que dans d'autres villes de la République. Quoique ce ne foit pas ici le lieu dc m'étendre fur ces Fêtes,'je Z 4 ne  3ÓO L'ES QUISSE D? U N ne puis m'empêcher de dire un mot de celle qui a eu lieu a Rotterdam le 24 avril de cette préfente année 17$6. Cette Fête de Rotterdam s'efl faite aux fraix d'une Société de Perfonnes, auffi connues par le zele qu'elles ont pour tout cc qui peut contribuer a. la gloire & a la félicité de leur Patrie, que par le rang diftingué qu'elles tiennent dans cette ville. Les décorations, les emblêmes & les infcriptions du Salon, dan$ lequel cette Fête s'eft donnée, n'offroient ni laches flatteries, ni allufions malignes , ni fatyres indécentes ou injuricufes} mais ces objets étoient fimplement relatifs au fujet, & au motifs louables qui avoient donné lieu a la Fête. Une mufique excellente s'eft fait entendre pendant le repas fomptueux, dont on a régalé les Convives: êc a la tête de ces Conyiyes, étoit Mr. 1'Ambaffadcur de France. Les Conditions des Santés, qui y ont été portées, furent, — Louis XVI., — Ia France, — les Elats de Hollande , — V Alliance, — le Com- merce, Mr. I'Ambajfadeur, — les Etats- Généraux, — la République, — la Projpérité, 'des deux Alliés, — la Ville de Rotterdam, — fc? /* Liberté Enfin 1'ordre, la décence, Ja cordialité la plus parfaite , & une allégrefie générale y regnerent depuis le commencement de la Fête , jusqu'au moment oü chacun fe retira pleinemc.nt fatisfait. ' '  Grand Tableau. 361 Quel contraire , Monféigneur / quel étrange contrafte ! entre cette Fête honnête & paifible , & les pre'tendues Réjouiflances qui ont eu lieu en cette même ville le 8 mars 1782, 4 1'occafion de 1'anniverfaire de Votre Naiffance S.... La célébration de cet anniverfaire avoit été infpirée, non point par 1'amour du vrai Patriotisme, mais par des boute • f'eux puijfants 6c f eer ets , dont je tais aujourd'hui les noms, & dont le but étoit moins de faire célébrer cette Fête, que d'allumer une fédition, dont lesétincelles puffent incendier la République entiere. Les Arcs de Triomphe , que l'on y voyoit, avoient été élevés par les mains d'une troupe de forcénés , compoféc de la plus vile populace. Ces Arcs, Sc les Rues ou ils, étoient érigés, étoient ornés d'emblêmes & d'infcriptions les plus outrageufes a la Liberté, de la Nation & a la Dignité du Souverain. La joie de cette populace n'étoit pas une joie, mais c'étoit une fureur infpirée par les boute-, feux fusdits ,6c fous prétéxte , qu'en célébrant ainfi cet anniverfaire, c'étoit venger V. J. de je ne fais quels torts , qu'on ne Vous avoit point faits 6c cette fureur étoit encore aniroée par les liqueurs fortes , qu'on verfoit a grands flots a'cette multitude, ou qu'une partie d'entr'elle s'étoit procurées par 1'argent, que fes menaces ou fes violences avoient extorqué des bons Citoyens.... En un mgt, la fureur 6c z f n-  362 L' ESQUISSE D' UN Fivreffe, dont je parle ici, furent ce jour-Pa portées au póint, que bierttöt les déportemens de cette canaille abominable , devinrcnt des convulfions de Démoniaques , & fes cris, des hurlements horribles, parmi lesquels on ne distinguoit plus que les mots, Orange au deffus de toutl & que Ie tonner e écraje les Patriotes! Ce jour-la, dis-jc, fut un jour, qui répandit 1'effroi dans tous les coeurs honnêtes & paifibles, & qui fit craindre un maffa'cre général des meilleurs Patriotes de Rotterdam , ou, du moins, le pillage ou Pincendie de leurs biens: Ce jour fut encore une des principales caufes des horreurs qui s'y rcnouvellerent en Pannëe 1784, & notamment le 3 avril de cette même année: horreurs, que le College'de Juftice de cette ville auroit prevénues , fi quelques Membres de ce College, Sc peut-être de la Régence même , n'cufferit pas plus cherché a juftifier les coupables, qu'a les punir: mais la Conduite de ces Meflieurs, tant en ce cas, qu'en bien d'autres, ne tardera pas a être expofée au grand jour. Enfin , Monfigncur , ces deux journëes funeftes de 1785 Sc 84 , ont appris dans Rotterdam feul, ce dont eft, Sc feroit encore Capable un Parti* abominable, qui, comme je Pai déja rapporté, ofe fe dire être Votre Parti, Sc que V. A. continue de fouffrir qu'il fe dife tel. 1 • Et vous, mes chers Lec- teurs, comparez une telle conduite avec la Fête  Grand Tableau. 363 Fête du 24 avril, & dont j'ai parle plus haut; Comparez, dis-je, les motifs, les Hioyens, le but, 6c les perfonnages de part 6c d'autre,.... & jugez. CONCLUSION. ^Monféigneur! li V. A. daigne prendre la peine de lire cet Ouvrage, s'il lui refte encore ce cceur fenfible que je lui ai connu, ainfi que cet arribuf de la juftice, cet attachement aux intéréts & a la globe de la Nation, a qui Elle doit tout ce qu'Elle eft en ce pays - ci , les Vèrités terribles, que j'y ai expofées, doivent lui arrachcr des larmes, 6c la vue d'avoir été fi long-temps aveuglée par une Cabale de fcélérats, la vue d'avoir été, Sc d'être encore le déplorable inftrument de leurs deffeins, de leurs menées, doit la faire fiétnir d'indignation. Mais ce n'eft point encore affez, Mon* fcigneur; une énergie héroïque doit's'emparer de toutes les facultés de votre ame. Vous derez avoir le courage de rougir de cet efclavage odieux Vous devez brifer les chaines, dans ïesquelles Vous êtes retenu, 6c dévouer cette Cabale maudire a la vengeance Sc a 1'exécration publique. Alors, maitre de Vous-même, il Vous fera facile de Vous défaire des préjugés faux, des principes dangereux, de cette ambition' immodérée, qu'on a eu la fcé- lc-  $64 L'E S Q.Ü I S SE D' UN lératefie de Vous infpirer: Alors le voile funefte, qui Vous courre les yeux , étant déchiré, Vous verrcz quels font vos droits légitimes, & oü fe borne lc pouvoir que nous Vous avons confié, Vous connoitrez cc que Vous êtes, Sc ce que nous fommes: Vous n'attendrez pas que la Nation juftcment alarmée, ou enfin irritée, revendique, ou Vous arrache des Droits qui ne Vous appartiennenc pas, ,mais que la lachcté Vous a abandonnés, pu que Vous Vous êtes injuftement arrogés, £c de 1'exercice desquels il eft refulté tant de maux. Borné a 1'exercice d'une Autorité légitime, aidé d'un Confeil compofé d'hornmes éclairés , prudents Sc fideles, d'un Confeil que le Souverain a lc droit de Vous donner, Sc qui, vu 1'importance Sc 1'étendue des Charges éminentes dont Vous êtes revêtu, Vous eft d'une néceffïté abfolue, Vous ferez parmi nous ce que Vous devez être, Sc Vous n'y ferez que ce que Vous devez faire, c'eji - a-elite, que Vous y ferez le Chef du pouvoir exécutif» & le premier Confeiller- de 1'Etat , & par eonféquent, un Chef, un Confeiller , fubordpnné en tout au Souverain , ainfi que leSouverain eft fubordonné aux Loix, par lesquelles il gouverne j c'eji - ci - dire, que dans cet êtat de fubordination, votre devoir confistera a. donner, autant que cela Vous appartiendra, de rharmonie aux confeils, de la con- fiftan-.  Grand Tableau. 36 j' fiftance aux projets, de 1'effet aux réfolutions, Sc de 1'acïivité dans les opérations: Et qu'alors, nous ne verrons plus en Vous ces prétentions alarmantes, que l'on Vous a infpirées, ni ces écarts , ni ces fautes graves, ni cette opiniatreté, ni ces aéles arbitraires que l'on Vous a tant de fois porté a faire. Votre Autorité paroïtra moins grande, il eft vrai j mais elle fera plus grande en effet, paree qu'elle ne fera plus que légitime, Sc que n'étant que légitime, elle fera plus iolide, plus refpeétée Sc n'aura plus que des effets falutaires. En un mot, dans cet état honorabk Sc digne d'envie, dans cet état, auquel toute votre ambition doit fe borner, Monféigneur, Votre Alteffè fera plus a portée, plus dispofée, a coopérer aux efforts que la Nation Sc le Souverain ne doivent ceffer de faire, pour extirper les abus qui fe font gliffés dans notre Conftitution, 8c dans différentes parties de 1'Adminiftration tant générale que particuliere j pour rétablir la confiance , 1'harmonie Sc la paix dans tous les Ordres de 1'Etat, & par eonféquent, dans la République entiere. La Paix que nous avons a&uellement avec nos Voifins, Sc que notre Alliance avec la France femble nous affurer pour long-temps, nous laiffe le loifir d'employer tous les moyens , qui peuvent nous conduire a cebut dcfirable. & fi nous avons le bonbeur d'y parvenir, 1'abondance, la félicité, no-  366 V e s Cl u i s s e d1 u n notre ancienne puiffance, ne tarderont pas a renattre parmi nous. Mais, Monféigneur f fi contre mon efpoir 6c mes vceux les plus finceres, fi contre les vceux de la Nation entiere, Vous perfifttz dans votre aveuglement pour la Cabale déteftable, qui Vous féduit Sc Vous gouverne, j'ofe affirmer, que V. A. perdra 1'attachement qu'un grand nombre de braves Citoyens lui portent encore." j'oi'e afiurer que 1'Europe, dont la partie la plus fame ne s'en eft pas laiffé impofer par les Scribes de cette Cabale , ni par les clameurs du Parti odieux qu'elle a formé parmi nous, ceffera d'avoir pour Vous les fentiments de confidération, que votre Naiffance Sc vos Qualités perfonnelles lui infpirent j Sc que , fi , (ce dont le Ciel nous préferve, Sc ce dont je ne Vous crois pas capable,) fi, dis-je, les fcélérats qui Vous environnent, venoient jamais a porter V. A. a quelqu'aéte de violence con' tre nous , Elle trouveroit, dans ceux qui 1'auroient le plus aimée, fes plus implacables ennemis. Elle y trouveroit des hommes intrépides dans la défenfe de leur_;ufte caufe, Sc auxquels on ne pourroit ravir leurs droits Sc leur liberté , qu'en leur arrachant la vie. Quant a moi, quelque chofe'qu'il arrivé, je fuis réfolu de continuer 1'Hiftoire, que j'ai commencée. Je dois ce Monument de mes re-  Grand Tableau. 367 recherches 6c de mes foibles talents a la Vérité, que tant d'Ecrivains dévoués aux Auteurs de nos maux, ont déguifée ou trahie $ je lc dois a 1'Europe qui a, les yeux ouverts fur nous, 6c furtout a nos Defcendants, qui doivent être inftruits des Evénements que je décris, 6c qui, par cette ïnftruclion, pourront prévenir, parmi eux , le renouveliement des malheurs qu$ nous n'avons pu éviter. Et Vous, mes Cbers Concitoyens! demandez au Ciel le retour de 1'union 6c dela félicité, qui ont difparu de notre malheureufe Patrie. Refpecïez Ceux qui vous gouvernent, Scobéisfez • leur en tout ce qui eft jufte 6c raifonnable. JVlais n'oubliez jamais que vous êtes des Hom-, mes Libres. N'oubliez jamais que cette Liberté, que vos Ancêtres vous ont procurée au prix de leur fang, eft un dépot facré, que vous devez transmettre a vos Defcendants. Souvenez - vous que qui que ce foit ne peut porter atteinte au moindre de vos Droits, fans commettre un attentat facrilege contre cette Liberté; 6c que ces atteintes multipliées, a un certain point, peuvent eniïn lui donner let coup de mort. Jettez la vue fur vous mêmes, fur votre fituation, fur tout ce qui vous environne, Sc vous de'couvrirex des maux affreux; vous trou-< verez que plufteurs de ces maux font provenus de  368 L'E s aui S SÉ t>' U N de la perte que vous avez faite de quelques" «ns de vos Droits, ou de la léfion que quelques autres de ces Droits ont fouffërte. vous trouverez qu'une autre partié de ces maux elf. I'effet des abus qui fe font infenfiblement introduits dans différentes parties du Gouvernement tant général que particulier. & que lc fellé a pour Caufe, 1'influence peftiléntielle, 8c les pratiques fcélérates de la Cabale dont j'ai tant parlé dans cet Ouvrage. Ces maux, enfin , vous effrayeront: mais ne Croyez pas pour cela, qu'ils foient incurables. Expofez, aveC autant de refpeóf. qué de dignité, vos griefs aux Gardiens & aux Prote&curs des Loix, c'eft - a - dire , a vos Régents ou aü Souverain & obfervez dans vos démarches, a cet égard, toute la fcrmeté, toute la prudence 8c la confiance qui Conviennent a un Peuple libre 8c éclairé, qui fent ce qu'il eft, qui connoit ce qui lui revient, 8c ce qu'il doit a Ceux qui lc gouvernent. Ne vous laiflez pas éblouir par les fophismes de ceux qui vous diront que vous n'avez rien a reclamer, ni par les exagérationS de ceux qui vous prêcheront que vous avez mille chofes a redemander. Les premiers de ces raifonneurs ne peuvent étre que des fots,' oü des fcélérats qui trahiflent vos intéréts. 8c les feconds, ne terönt que des ignorants oü des inconfidérés. Les remedes aux maux, dont je vous parle ici, ne doivent pas êtré aufli  Grand Tableau. 369 auffi nombreux que ces maux le font, eux - mêmes: car un de ces maux, guéri, pnxiuira.U guerifon de plufieurs autres, 8c ainfi du reste. N'exigez donc pa's des chofes inuuies ou fuperflues: Mais, ie'vous le recommande encore, apportez dans vos demandes 8c vos démarches toute 1'activité 8c la perfévérance requifesj car la maladie. dont notre Patrie eft. attaquée, empire chaque jour; car Ceux,. qui des abus dont nous gémiflbns, 8c des maux que nous fouffrons, tirent les moyens de faiisfaire leurs intéréts ou léür ambition, ne feront pas les premiers a propofer 1'extirpation de ces abus, 8c la guérifon de ces maux: A\t contraire; fachant que 1'oecafion, qui fe pré-* fente aujourd'hui, étant unè fois paffée, ne reviendrajamais plus, ils s'efforceront de vous empêcher de demander cette extinpation, cette guérifon, 8c d'indiquer les moyens d'obtenir 1'une 8c 1'autre. Tenez-vous donc.en garde contre les rufes de telles Gens; m.épfifezleurs menaces, bravez leur réfiffance, &.fui-i vez, entout, les confeils 8c 1'exemple de ces Régents éclairés, de ces Régents prudents:. 8c courageux, dont le vrai'. Pacriotisme vousr ell: connu, 8c'qui ne defircnrJ quq de voir lesr abus extirpés, 8c de vous voir rétablis' :dany vos Droits légitimes. Vos foins 8c«vos efforts*; réunis a ceux de ces dignes Régents,'viendront a bout de tout cela. Mais , mes Ckers~ h a Gors-*  370 L'esq.uisse d'un Concitoyens, pour parvenir a cc point défilé, il faut préalablement que vous banniffiez d'entre vous toute méfiance, toutes vaines chicanes, tout fujet de divifion, 8c que vous regardiez furtout, comme indignes de vous, ces laches ot pernicieux reffentimcnts, qu'enfantent fouvent quelques mÜ'érables contradictions, 8c qui n'affeétxnt que des efprits vains 8c des ames foibles. Comme j'ai parlé ci - devant de 1'Alliance de la République avec la France,permettez-moi mes Concitoyens, de vous démontrer que cette Alliance peut, 8c doit même êrre la principale caufe de notre fureté 8c de;notre bonheur. ~* Je fais que les préjugés que plufieurs d'entre vous ont fucés avec le lait, ou qu'ils om puifés dans le Franfcbe Tiranny, dont j'ai déja parlé, p. 119. ci-deffus, ie fais, dis-jc, que ces préjugés aveugles peuvent faire regardcr, a plufieurs d'entre vous, toute Alliance avec la France, comme une Alliance dangereufe. Jc fais encore que la Cabale & fes Suppóts s'efforcent journellement a entretenir cette erreur funeftc, ectte averfion injufte, en ne cefiant de répéter que la France eft notre ennemie naturelle, 8c que c'eft une Puiffance , a qui tous moyens fon propres pour fatisfaire fes vues, 8c furtout fon ambition. Mais 1'impofture ne ceflèra-1- elle jamais de trouver croy- an-  Grand tableau. 371 ahce parmi nous, c'eft-a-dire, parmi une Nation qui paffe poiir douce, 8c pour au (Ti jufte quefênfée? Je conviens que les Francois nous ont quelquefois fait du mal} mais n'en n'avonsnous jamais fait a, perfonne?—- Soyons donc Une fois juftes 8e raifonnables envers la France j 8c difons que, fi les Francois nous ont fait quelque mal, il nous ont fait cent fois plus de bien ; 8c que fans eux, notre République n'auroit jamais exifté. -—- Enfin, permetteZ- moi devous rappeler ici quelques Evénements, dont lc fouvenir pourra défabufer ceux d'entre vous, qui ont befoin de F être. — Cette Disgrefiior» ëft étrangere au Plan de mon Hiftoire; mais elle éft abfolument néceffaivc dans les circonftanees axtuelles. jusqu'au Regne d'Henri IV, la France fut bors d'étaf de fournir direclement, a nos fept Provinces, aucun fecours particulier contre les Efpagnols : Un grand nombre dc Francois étoient venus d'eux - mêmes foutenir rtotre caufe , mais voila tout. Ce Royaume décbiré par des guerres civiles, qu'anima de plus en plus unc Ligue puiffante, formée par 1'ambition de quelques Grands, & foutenue par route 1'influcnce du Pape, par le fanatisme religieux,8c par les tréfors & lés troupes de Philippe II,, Ce Rnyaume, dis-je, avoit encore le malheur d'être gouverné par un Roi, en qüj toutes Aj ? les  37» L'e s q_ü i s s e r>'u k les qualités guerrieres & politiques avoient été étouffées par ïa moleffe, les débauches, Sc la fuperftition. Notre courage Sc notre conftance, réunis au fecours que la Reine d'Angleterre vint a nous envoyer après la mort de GuiUaume I. auroient peut - être triomphé de la ryrannie Efpagnole, fi ce fecours même ne füt de/enu auffi dangereux pour notre Liberté, que 1'étoienc les efforts de nos ennemis naturels. En effet, en nous fourniffant ce fecours, le but d'Elifabeth, qui venoit de refufer publiquement une Souveraineté Umitèe fur nos Provinces, étoit de s'en rendre, fans trop fe compromettre, la Maitrejfe abfolue, ou du moins,. de s'appropricr celles d'entre ces Provinces, qui étoient le plus a portée de fon Royaume. C'eft un Eait fuffiffamment indiqué par les conditions fous lesquelles elle nous accordoit ce fecours 3 c'eft un Fait prouvé par lés Inftruétions fecretes données au Comte de Leicefter, Sc que Bar* neveldt eut Part de découvrirj Sc cette preuve eft entiérement confirmce par Pabus criant, que ce Comte fit de la Charge de GouverneurGénéral, dont il avoit été revêtu en ce paysci, c'eft - a dire, par les trames fcélérates qu'il ourdit dans la République, par les entrepri.es odieufes qu'il y fit, par les adtes de violence Sc de defpotisme qu'il y commit, Sc par cent autres moyens, qui tendoient tous au même but j  Grand Tableau. 373. but, mais d'une maniere fi vifible, -fi alarmante 6c fi déteftable, que chargé del'exécration de tous les honnêtes gens, il fut enfin obligé de quitter ces Provinces 6c de retour- ner en Angleterre. Cependant, malgré ce qui s'étoit paffé , 6c ce qu'on favoit des deffeins fécrets (PElifabetb, — malgré les troubles, que la Faction de Leicejler 6c quelques Prédicants fanatiques fufciterent encore en ce paysci après fon départ, — malgré la part plus ou moins vifible que cette Reine prenoit elle - même a ces troubles, — malgré le peu de confiance que nous devions alors avoir aux troupes Angloifes , que le tyran avoit laiffées parmi nous, cette même Princeflb ne laiflbit paffer aucune occafion fans nous reprocher que nous lui devions tout, fans nous fufciter toutes les tracafferies que fes caprices lui infpiroient, 6c fans prétendre de nous eonduire, pour ainfi dire, par les lifieres. Dans les circonftances alarmantes, cii nous nous trouvions alors, Henri III. vint a mourir, 6c Henri IV. lui fuccéda Mais ce grand Prince eut encore a combattre pendant quelques années, avant de fe trouver en état de nous procurer directement toute 1'afljftan- ce, la) En 1589. Aa 1  374 l* esquisse p'u h ce, qu'il avoit deffein de nous donner, & que les cffres, qu'il avoit faites diverfes fois n'étanr, encore que Roi de Navarre, fembloicnt nous affurer, Aufli le Etats - Généraux reconnurentils 1'attachement que ce Monarque avoit pour nous, en lui prêtant , au commencement de fon Regne, la fomme de 30 mille éoisj en, lui permettant de faire acheter chez nous le§ provifions de guerre Sc de bouche, dont il auroit befoin; cn armant cinq vaifTeaux de guerre pour protéger les cótes de Bretagne & de J^ormandie, alors ménacées par les Eipagnols_ Sc enfin, en lui envoyant encore enfuite quel* tjues autres fecours. La République ne tarda point a éprouver quel Ami elle avoit dans la Perfonne Ól Henri. Ce Prince tint tête a 1'hydre qu'il avoit a, combattre , Sc parvint a donner tant de befogne ii Pennemi commun, qu'il en réfulta les diverfions les plus heureufes en notre faveur: Sc pendant ce teaips-Ia, nous réprïmcs haleine, & nos armes eurent des fuccès quelles n'auroient pas eus fans cela, quelqu' afliitance d'ailleurs.. que nous recufiions alors d''Elifabsth, qui ne nous accordoit rien qu'en fe plaignant, OU qu'en nous faifan| mille reproches. J'en appelle, a cet égard, au témoignage de no$ meilleurs Hilloricns. L'année iy«?f5. nous offrit nor» feulement cette Ligue ofFenfive 2£ défenfive, contraétée en-  Grand Tableau. 375 entre la France, l'Angleterre & la République, & de laquelle nous avions a attendre les plus heureux effets, mais cette même année vit encore conclure entre la France Sc nous, cette fameufe Alliance particuliere, oü, malgré les efforts d''EHJubetb, Henri permit aux Etats-Généraux de traiter avec lui comme de Souverain a Souverain. Cette orgueilleufe Princeffe auroit voulu que nous ne traitafïïons avec elle Sc avec ce bon Roi, que comme des malheureux qui leur devoient la confervation de leur exiüence. 11 eft inutile de rappeler ici ce qui fe paffa de part Sc d'autre jusqu'en ifp8, oü le fpecracle déplorable qu'offroit la France entiérement ruinée Sc dépeuplée par4oannées de guerre, oü la crainte de nouvelles Faéhons qui menacoient de renaitre dans ce Royaume, oü 1'occafion de rentrer dans la plüpart des Conquêtes que les Efpagnols avoient faites fur cette Puiffance, déterminerent Haart a conclure, avec 1'Efpagne, la Paix qui fut fignée a Ver•vim le 12 juin de la même année, après que l'Angleterre Sc la République eurent été diverfes fois invitées d'y accéder. Mais, mes Chers Concitoyens, ne croyez pas que ce digne Monarque nous eüt abandonnés pour cela. Après avoir pris foin que , dans ce Traité de Paix, il ne füt rien ftatué contre les intéréts de la République, cet Ami fidele A a 4 con-  0?6 L' E S Q. ü I S S E D' U N continua dc nous être aufli finccrement attaché qu'auparavar.r. 11 ne tarda pas, dit Grotius, a nousenvoyer des fecours, que les autres Princes n'cnvoyent aux Peuples Libres que pour les cor-rompre. ïl déclara a Barneveiclt, qui étoit alors un dc. nos Députés a Paris, que, pendant 4 ans, iï fecort rcmettre aux Etats deux millions neuf eens mille florins, fous préiexte de leur rembourfer les fommes qu'il avoit empruntées d'eux j il promit de ne jamais leur redemander ce qui lui reviendroit au deffus de ce rembourfement; & il ajouta, qu'ils pour? roient prendre a leurfolde fes 'meilleurs troupes. Ces généreufes promeffes $ Henri t jointes a la nouvelle Alliance que la République vint a contraéter avec l'Angleterre deux mois après la Paix de Vervins , & 1'attente des nouvelles Levées qui devoient nousarriver de France & d'AUemagne, nous encouragerent a continuer la guerre. Mais 1'année fuivante, di? verfes caufes plongerent la République dans un embarras difficile a exprimer. La jaloufie dc fix de nos Provinces, contre celle de Hollande, les porta a refufer de contribuer, proportionément autant que celle-ci, aux fraix de la guerre; le Roi d'Efpagne fit faifir tous nos navires marchands, qui fe trouvoient dans les Ports dc fes Etats; 1'Infante Ifabeüe défendit a fes fujets de commercer d'avantagc avec nous; la Reine d'Anglcterre nous menaca de nou-  Grand Tableau. 37/ nouveau dc fc reconcilier avec 1'Efpagne, fi nous ne lui rembourfions pas ce que nous lui devions. & de crainte qu'en ce cas, la Répu? biique ne tombat fous le pouvoir de 1'Efpagne ou de la France , cette Princeffe excita les Etats a nommer le Prince Maurice pour Souverain. Dans cette détreffe extréme, il ne nous restoit plus qu'Henri IF., & ce bon Prince ne nous abandonna pas. II fit notifier aux Négociants de fon Royaume, que 11 pendant les fix premiers mois a venir, ils contiiluoient de commercer avec 1'Efpagne , ce leroit a leur risque & péril. outre les deux mille Frangois, que le jeune La Noue nous avoit amenés, il nous envoya encore mille Suiffes, qu'il avoit a fa folde; il permit au Comte Fréderic Henri de N^Jfau, de lever en France un Régiment de Cavalerie. & il fit paffer, fous main, deux cents mille écus aux Etats - Généraux.-— Queb le conduite! en comparaifon de celle è'Elifa* ietb! C'étoit-la faire pour nous bien autre chofe, que ne faifoét cette inquiéte 8c impérieufe Princeffe, qui malgré trois de nos Places , qu'elle tenoit pour fureté depuis i f 8f ,— qui malgré les divers Traités contraéiés avec nous, Sc notamment celui de i f 98, oü le rembourfement de ce qui lui étoit du, & les fecours reciproques avoient été défmitivement xeglés, — qui après avoir taché de nous rcA a y «tui*  378 L* ESQUISSE UN duire fous fon joug, par les menées, les entreprifes cc les violences de Lekefter, n'avoir cefie de nous inquiéter par fes caprices, de nous ïntimider par fes menaces, Sc, enfin, de nous faire trouver bien ameres, les fecours qu'elle nous donnoit! Si Jacquesl., qui fuccédaa Elifabetb en 1603. & qui nous regarda d'abord comme des Rebelles, avoit été auffi grand Politique, qu'Amateur de controverfes eccléfiaftiques, Sc qu'il èüt rempli les conditions du Traité que Roswj (a) & Barneveldt étoient parvenu , cette même année, a lui faire contracter avec la France en faveur de la République, il eft a croire que nous aurions alors eu la paix ; mais au lieu de cela , il commenga auffitöt a traiter avec Philippe III.; & en 1004, il fit avec ce Monarque une Paix fi préjudiciable a nos intéréts, que, quoiqu'en difent Rapin, Hume, Sc autres Hiftoriens, on auroit presque pu regarder cette Paix comme une Alliance offenfive contractée contre nous. Ce n'étoit pas de la forte qu'//*8ri IV. en avoit agi k Vervins. Cette défettion de Jacques étonna la République , mais elle n'abattit pas fon courage: Elle perdoit un Allié puffiUanime, mais il lui reftoit Henri , qui, fans être en guerre avec PEs- ( a) Depuis, Duc de Sully  GRAND TABLEAU. 379 PEfpagme, n'abandonnoit point ainfi fes Amis. Ce grand Roi continua de nous fecourir de confeil Sc d'effet? la NoblelTe de fon Royaume accourut, de plus en plus, combattre fous nos drapeaux, 8c l'on fait de quelle muniere glorieufe elle s'y diftingua. Enfin , 1'Efpagne, épuifée par fes longues guerres, l'Infante Ifabelle, qui ne defiroit que la Paix , 8c fachant 1'une 8c 1'autre que, de quelque maniere que ce füt, la France continueroit de fournir des fecours a la République, nous propoferent cette Paix: Sc peu après cet-? te propofition 1'Independance de nos Provinces fut reconnue par les Archidues. D'un autre cöté , lhnri IV. defiroit plus que tout autre de nous voir faire une Paix honorable 8c avantageufe: Sc pour nous y porter, Sc pour être enfin déchargé des fommes énormes que notre guerre lui coütoit, il mit la continuation Sc le renfort de fon afiiftance, a de telles conditions, qu'on 1'accufa de vifer a la Souveraineté dc ces Pays-ci. Mais la fauffeté de cette accufation ne tarda pas a être démontrée par la continuation des procédés généreux de ce bon Prince , envers nous. Sc notamment, par le Traité qu'il conclut avec nous le 2,7 janvier $608. Traité, qui raffermit les Etats- Généraux contre la crainte d'être encore trompés par 1'Efpagne en cette occafion, puisque ,pour parvenir a nous procurer une Paix gloricufc Sc r foli-  g8o V ESQUISSE D' UN folide, Henri s'engageoit de nous fecourir dc dix .mille hommes a fes fraix, & même d'un plus grand nombre, fi le cas 1'exigeoit. fous condition, cependant, que s'il avoit befoin dc n< re fecours, nous lui fouinirions cinq mil? le hommes, ou un nombre de vaiffeaux équi* Valent a ce fecours, Dans ces circonflances, il ne nous reftoit plus qu'a ramener Jacques dans nos intéréts. Mais la Nation Angjoile paroiffoit formcr une Liguc contre nous, le Roi par fon indolence, les Grands par corruption , & le peuple par jaloufie de commerce & de pêche, jaloufie, qui nous caufoit journellement des démê« lés disgracieux avec cette Nation j jaloufie, que nous devions d'autant plus craindre d'irriter, que Jacques retenoit encore, pour places de fureté, la Brille, Flejfingue, & Jrmuyden, & que d'ailleurs les Troupes qu'il nous avoit laiffées', lorsqu'il traita avec 1'Espagne, auroient pu, d'une maniere ou de 1'autre, nou s caufer beaucoup de mal. Cependant les follicitations des Etats Généraux, réuniesa celles d'Henri, déterminerent Jacques a conclure a fon tour une Nouvelle Alliance avec la République; &c dès cet inftant, les Ambaffadeurs des deux Rois, & furtout celui d''Henri, firent tous leurs efforts pour nous faire obtenir une Paix, qui nous affurat pour toujours notre Indépendance & la poffeffion de nos Conquêtes: mais 1'opii nia-  Grand Tableau, niatreté de Philippe UI. d'une part, & les menées de Maurice 8c de nos autres partifans de la guerre, d'une autre part, apporterent tanc de difficukés dans les N égociations, que Tori ne put obtenir cet objet defiré'. L'on nc finit pourtant pas ces Négociations fans rien faire: puisqu'une Treve de 12 ans, conclue a Anvcrs au mois de juin ióop, vint nous procurer un relache , dont nous avions grandement befoin; car la fortune commengoit a nous abandonner , 8s nos finances étoient dans un étac atfreux. Cette Treve nous devint crtcore d'autaftt plus nécelfaire, que 1'année fuivante une more déplorable enleva a la France le meilleur des Rois, & a la République, fon puiffant & fidele Protefteur. Cette Treve, dis-je, nous devint encore d'autant plus nécelfaire, que fi la guerre eüt continué, 1'inconftance de Jticquesl. oa fon inclination pour 1'Efpagne, n'auroit pas tardé a lui faire abandonner dc nouveau nos intéréts, D'ailleurs, la jaloufie de fes fujets augmentoit de je»ur en jour contre nous, 8c leurs violences contre nos pêcheurs augmen* toient de même: d'un autre cöté, des troubles funeftes ne tarderent pas a s'élever dans différente» villes de nos Provinces; 8c enfin, les Opinions de Gomart & d'Arminius vinrent incendier les esprits. 8c partager la Républi¬ que  g§2 L' ESQUISSE D'üN que en deux Fa£f,ions furieufes, qui la déchire-" terent de la"maniere la plus déplorable. Rappelez-vouS ici,mesCbers Concitoyens, qucï parti 1'ambition politique, la nöire jaloufie, & d'injuftes refféntiments ont fu tirer de ces fureurs religieufes. Barneveldt, Pimmortel Bartieveldt, étoit un obftacle trop puiflant au3ê deffeins despotiques de Maurice : la conduice «rréprochable de ce fidele Miniftre,fes longs 8c importants fervices, & toute la reconnoiflancé que la République lui devoit, ne purent le fauver du fort funefte, que fon ennemi lui deftinoit. 11 falloit, pour le perdre, de faux prétextes Sc de faux Accufateurs , il y falloit encore des Juges aflez fcélérats Sc aflez devoués a fon ennemi implacablei il falloit d'ailleurs des Régents aflez dénaturés pour conniver a toutes ces horreurs , ou aflez laches pour les permettre Et tout cela s'eft trouvé!.... Ün Jacques I.,ce Controverfifte fanatique, plus digne d'exercer 1'emploi de Catéchifte , que d'occuper un Tröne, s'empreffa a contribuer a-la perte de ce grand Homme! Et Carleton, alors Ambafladeur de ce Prince d, la Haye, Sc auffi méchant que fon Maitre étoit foible Sc borné, fit en ce cas beaucoup plus qu'il ne lui avoit été ordonné!.... Enfin, après les procédures les plus injuftes, les plus abominables, & malgré 1'interceffion de Louis XIIf. dont la dignité, 8c les fervices irmombrables recus de fofS  Grand Tableau. 383 fon Pere mériroient quelques égards, malgré,} dis-je, toutes les inftances du Roi de Suede, de la Princeffe Douairière d'Orange , Sc du Stadhouder de Frife, malgré la vengeance dc Dieu & 1'exécration de la poftérité, que Maé* rice Sc fes créatures avoient a attendrc, le rcfpectable Viellard fut condamné . la Vertumême fut trainee fur Péchafaud , pour y fubir le fort qui n'eft dü qu'aux plus grands crimes; Barneveldt, en un mot , fut e'gorgé fous les yeux du Tyran , Sc 1'acharnement de cet ennemi du vrai Patriotisme ne fut affouvi, que par la condemnation de Grotius Sc d? Eogtrbeets z une prifon perpetuelle, Sc par le banniffemenc de quelques autres amis de fa viétime infortunéc... ó Mes Concituyens! fi Henri avoit en» corc vecu dans ces temps déplorables, il n'etï feroit fans doute point arrivé ainfi: Pon auroit plus refpeété fon interecffion que celle de fort Fils. Et fi Pon eüt affez méprifé cette interceffion fi jufte^ fi refpectable, pour affafiner de la forte lc Citoyen le plus vertueux de la République , ce Monarque auroit tiré une vengeance éclatante, Sc de ce mépris, Sc de cette aéfion abominable. —~ Mais tirons le rideau fur toutes ces horreurs , & revenons au renouvellement de notre guerre avec 1'Efpagne, ent I6iï. A ce renoüvellement de guerre nous avions  384 L* E SQUISSE D' ü N dcrechef befoin du fecours de la France j mais les nouveaux troubles qui s'étoient élevés dans ce Royaume, &c plus encore, le reffentiment du mépris ofienfant qu'on avoit fait dë f interceffion du Roi en faveur de Barneveldt, firent que cette Puiffance ne s'empreffa point a nous fecourir. Cependant, a la follicitation des Etats - Généraux , Louis XIII. confentit a un Traité, qui fut conclut a Campiegne en 1624^ & par lequel ce Monarque s'engagea de prêtcr cette année -la 1200 mille livres a la République, & un million, a cbacune des deux années fuivantes, fóus condition que les Etats lui fourniroient la moitié de la même fomme, ou des hommes, ou des vaiffeaux a proportiony au cas qu'il vïnt a avoir la guerre. Ce qui joint au Traité de Southampton, que nous conclümes 1'année fuivanteavec l'Angleterre, nous rendit plus en état de nous défendre, & de pouffer nos opérations contre les Efpagnols. Comme il feroit trop long de m'étendre .ici fur le fecours éphémere que les Etats donnerenta la France en 1627. contre les Rochelois, & fur la lacheté avec laquelle Charles I. O) rompit le Traité de Sèuthampton , en faifant en 1630. la Paix avec 1'Efpagne, fans iious y avoir compris, ainfi qu'il s'y étoit obligé, je dirai — — 'Ca) Charles avoit fuccédé i jacques t cn i6i5-  Grand Tableau. 385 dirai feulement que cette année-la nous fimcs avec la France un nouveau Traité, par lequel cette PuüTance s'engageok de nous fournir annuellement, pendant 7 ans, un million de livies, a ccnd tion que yo mille en feroient employés pour payer les troupes Frangoifes qui étoient a notie fervice, êc que nous ne ferions ni Paix ni Treve avec nos ennemis, fans en donner Avis au Roi. C'étoit déja beaucoup: maisce n'étoit encore que le prélude de cette fameufe Alliance , qui fut contractie en I62f entre la France & la République, & en conféquence de laquelle, cette PuilTance déclara la guerre a 1'Efpagne, êc la fit avec de tels fuccès a tous nos ennemis, que ces fuccès réunis aux nötres, nous mirent en état d'obtenir les avantages inefpérés, que nous obtïnmes par la Paix de Munfter, conclue en 1648. Mais, mes Chers Concitoyens l cette époque de notre grandeur & de notre félicité , cette époque , ou notre Liberté fut reconnue pour jamais par ceux-la mêmes qui avoient tant combattu pour nous la ravir , cette époque mémorable, en un mot, fut atifiicelle da notie ingratitude envers la France. Depuis ft ans cette PuilTance avoir. épuifé fes tréfors pour nous fecourir; le fang de fes fujets répandu en ce Pays - ci, ou dans les autres lieux témoins de leurs viéfcoires & de leurs conquêtes, ce fang, ïttclé avec le notre, & verfé pour la caufe coraB b rnu-  386 V E S Q_ U I S S E U N muné, avoit cimenté 1'Edifice de notre Liberté}.... Et nous, Mes Concitoyens, nous payames tant de bienfaits, en fignant cette Paix, après avoir abandonné les intéréts de notre Bienfaitrice, c'eft-a-dire, en empêchant, par cet abandon, que la France n'obtint alors, non pas ce qui avoit été ftipnlé cn ifj3f. par le Traité de Partage, car il n'étoit plus queftion de cela, mais, au moins, des avantages qu'elle auroit pu obtenir, fi nous euffions porté la reconnoiffancé jusqu'a refufer abfolument de figner fans elle. — Et qu'eft - ce qui nous avoit inci- tés a cela? des fentiments de jaloufie & de^méfiance, 1'orgueil de la profpérité, 8c en même temps, les rufcs de 1'Efpagne. Mes Cbers Concitoyens! en rapportant ces chofes, auxquelles j'en pourrois ajouter bien d'autres , je ne prétends pas juftifier les motifs inexcufables, qui porterent Louis XIV. a nous attaquer en 1672. 8c a envahir trois de nos Provinces de la maniere qu'il 1'a fait alors. Je ne veux point non plus juftifier les exactions que les Généraux ou les Intendants de ce Monarque ont faites dans ces mêmes Provinces} ni les déréglements de fes troupes } & encore moins, leur conduite cruelle dans le pillage 8c Pincendie de Bodegraven & de Sivammerdam. Je détefte tous les effets de la vengeance 6c d'une ambition démefurée; j'abhorre toutes vexa- tions <  Grand Tableau. 387 tions quelconques, 8c tous les exces d'une foldatesque elfrénée. Mais, avouons-le de bonne-foi, ne nous fommes-nous pas alfez vengés de cette Invafion de Louis XIV, & des maux que fes troupes nous y ont caufés, par les fatyres atroces que nos Ecrivains n'ont celfé de lancer contre ce Monarque, pendant tout le refte de ion regne? par 1'exagération iiiouie que nous avons faite de ce maux? — par les calomnies horribles , dont nous avons noirct leurs auteurs? — par ia haine implacablc que nous avons portée pendant plus de cent ans contre la France? — 6c furtout, par 1'acharnement que nous avons apporté dans toutes les guerres , eü nous fommes entrés contre elle jusqu'en 1713? — acharnement , qui, dans la guerre de Succefïion, furpaffa de beaucoup celui de la Maifon d'Autriche, qui étoit ia partie la plus intéreftee dans cette guerre. Mes Concitoyens , j'avoue que 1'ambition de Louis XIV. devoit être réprimée, que fes entreprifes devoient être répoufTées , 6c que fa PuilTance excefïive devoit être bornée : mais dans les dernieres années de cette même guerre, devions-nous agir comme li la confervation de notre exiftence eüt dépèndu de 1'anéantiffement ênder de la France, c'eft -a- dire, de notre andenne Bienfaitrice? — C'eft touïefois ce q^? nous avons fait: — En 17006c Ijio. nous 4evitiwes une des principales-caufes Bb s que  3c?cS V ESQ.ÜISSE D* U N que la Paix ne fe fit pas avec les avantages, que cette Puiffance offroit alors a les ennemis; — neus prétendimes avec autant d'ardeur, qu'aucun de nos Alhés, que Louis employax fes propres forces pour détröncr fon petit - fils; — nous ne nous appereümes pas qu'a la fin, nous n'étions plus que les inftruments de 1'ambition 8c de 1'avarice du Duc de Marlborougb; — nous ne fentïrnes pas qu'a la fin, nous facrifiions gratuitement aux feuls intéréts de la Maifon d'Autriche & de l'Angleterre, les tréfors, la puiffance, & le bonheur de notre malheureufe Patrie, >~ nous ne confidérames point ce que le temps, les circonftances 8c la fortune pouvoient opérer en faveur d'une Nation , qui, ayant perdu fes forces , n'avoit point encore perdu fon courage , 8c ni 1'espoir de fe relever; — nous ne prevlmcs pas, enfin, que la Paix de 1713 8c de 1714. démontreroit cette poflibilité, en nous forcant, avec ce qui nous reftoit alors d'Alliés, a laiffer Philippe V. paifible poffefleurdu Royaume d'Efpagnc, 8c a. laisfer a. Louis XIV. la plupart des conquetes qu'il avoit faites dans le fiecle précédent ; 8c cela, tandis que les Anglois, plus prudents ou plus fubtils que nous , retirerent en cette occafion des avantages «ès-préjudiciables a nos intéréts j 8c qu'il ne nous refta pour partage, qu'un épuiment fatal, dont nous ne nous fommes point eq-, core relevés. Pa^  Grand Tableau. 389 Par tout ce que je viens d'expofer, 8c dont on peut trouver la confirmation dans les Mémoires du Temps, ainli que dans no? meilleurs Hiftoriens, il eft donc prouvé que nous avons regu de la France les plus grands bienfaits fans les reconnoitre, & que nous nous fommes très-amplement vengés de tour le mal que cette Puiffance nous a fait. — Mais, mes Chers Concitoyens, en avons-nous agi de même avec- les Anglois? Ce que vous allez lire vous- 1'apprtndra. Vous avez - vu de quelle maniere, 6c a quel prix Elifabetb, Jacques I. 6c Charles I. nous ont fecourus dans notre guerre contre 1'Efpagne : Vous avez vu que malgré leur aftiftance, la jaloufie du commerce 8c de la pêche porta leurs fujets a des violences odieufes contre nos marins 6c nos pêcheurs: Vous avez encore vu avec quelle lacheté Charles abandonna notre caufe en 1630. Ores, depuis ce temps-la, jusqu'a la Paix de Munfler, nous ne recümes plus aucun fecours de ce Monarque j 6c les violences, dont je viens de parler, augmenterent au point que nous fümesobligésd'employer nos vaiffeaux de guerre pour les réprimer. En iófi. cette même jaloufie fit éclore Ie fameux Acle de Navigation, lequel fut la première 8c une des principales caufes de la decadence , ou tomberent infenfiblement notne commerce 8c notre navigation, Non contents Bb 3 dc  290 L' E S Q Üfrl S S E D' ü » de cela, 6c fous divers pre'textes abiurdes , les Anglois exigerent de nous des indemnités lï prodigieufes, que celle pour les pertes, qu'il nous accufoient de leur avoir caufées dans lqs Indes, montok a plus de 17 millions de flo-. rins; —r ils nous déclarerent, en même temps, que la fouvcraineté des mers leur appartenoit j —. ils prétendirent que nous renongas- fions a tout commerce avec leur Coloniesj ils exigerent le dixieme du produit de la.pêche , que nous fJrions fur leurs cqtes y — ils_ appuyerent ces prétentions par des déprédations infames } — leur Amiral Blake attaqua notre Amiral Tromp' avant aucune déclaration de guerre j — tous nos elforss; öc 1'jntrépidité de nos marins qe purerit réprimer 1'orgueil Sc la fcrociié de ces tyrans de la mer; — leur inhumanité fit périr dans les chaines un grand nombre des prifonniers qu'ils avoient faits Cur npus; — ils portercnt mêmq la barbarie jusqu'a défendre aux Eglifes Hoüandoifes de Lonches, d'asfifter ces malheureux. —— Enfin , bien loin que la Paix, que nous fimes avec eux en io"f4 , nous procurüt la révccation de Vjble de Navigation , nous y fümes obligés de leur payer des fommes énormes , Sc dont h plus grande partie n'étoit qu'une exaction odjeufe. Et cetoit-la nos Freres é»,Christ! Et malgré tous les maux qu'ils n'ont ceffé dc nous faire depuis, beaucoup d'entre nous les  Grand Tableau. 591 les regardent encore tres - refpeétueufement pour tels!' La nouvelle Alliance que nous cohtracMrhcs en 1662. avec l'Angleterre, n'óta point a cette Puiffance le deffein qu'elle avoit d'établir fa grandeur fur notre ruine: en. 1664. Rotert Holmes, muni• d'ordrcs fecrets de Charles ii., enleva d'abord un grand nombre de nos navires marchandsi enfuite il s'empara des Etablis* fements que nous avions fur la cóte d'Afrique j. déla , il lè rendit en Amérique, ou il finit fe* exploits par la prife de la Nouvdle Belgique, qui nous appartenoit, & qu'il nomma la Nouvelle Tork. J'ai déja parlé de cela, page 72. ci-! deffus, Sc j'y ai ajouté, que lorsque nous nous plaignimes a Charles, de cet attentat odieus, ce Prince eüt 1'impudence de protefter qu'il ignoroit cela. Mais, ce que je n'ai point dit,' eft que, tandis que Charles avoit recours a cette excufe indigne, il traitoit avec VEvêqun de Munfter, pour nous attaquer par terre, Sc que7 1'année fuivante ce dernier nous attaqua en ef- ■ fet, après que fon lache iüftigateur nous eut déclaré la guerre. Cependant, renforcés par quelques mille hommes, que les Francois nous avoient envoyés, nous ne tardames point a réduire cet Evêque a demander la Paix: Ce qui: n'empêcha pas que la guerre ne continuat fur mer, Sc que malgré trois combats furieux , malgré toute notre réfiftance, nos impiaeablesf Bb 4 en-  392 1'esq.uisse r>' u k ennemis nc vinffent ert i666. brüler 140 navires marchands dans la Vlie, Sc faire une defcente d.;ns notre Lle de Schelling, oü ils réduilirent en cendre jyo. maifons. Enfin, en 16Ó7. la mémorable Expédition de Chatam nous vengea de tant d'outrages, Sc forca nos ennemis a confentir a une Paix qui nous apporta plufieurs avantages; mais nous ne pümes y obtenir celui de leur faire révoquer le fatal Acle de Navigation. Charles fe reconcilia donc avec nous, mais . ce ne fut qu'en apparence. Ni lui, ni la Nation Angioife, ne purent nous pardonner da leur avoir tenu tête aufli glorieufcment, que nous 1'avions fait dans cette guerre : Sc ce resfentiment porta a leur comble, Sc la jaloufie que ce Prince avoit de notre grandeur, Sc la jaloufie que notre pêche Sc notre commeice infpiroient a fes Sujets. La Triple Alliance, que ce Monarque contracta eu i6ó8. avec la Suede Sc notre République, au lieu d'être la bafe de notre furcté, ainli qu'elle le devoit être, donna lieu a tous les malheurs,qui nous arriverenttrois ans aprcs. Louis XIV. irrité de voir que cette Alliance arrêtoit les Conquêtes qu'il faifoit alors dans les Pays-Bas Efpagnols, jura de s'en venger fur nous: Et ce füt Charles, qui, par des motifs particuliers, qu'il feroit trop long de détailler ici, <-> cc fut Charles, qui paf les follicitations Sc  Grand Tableau. 393 & les promeffès de Louis , — & qui, en rompant indignement 1'Alliance dont je viens de parler, concourut le premier a favorifer cette vengeance. Le Projet, que ces deux Rois avoient formé, ne tendoit pas a moins qu'a la ruine entiere de la République ; mais il étoit d'une abfurdité évidente: car fa pleine exécution étoit impoffible, Sc par elle-même, Sc par les oppofitions qu'elle devoit rencontrer de la part des principales Puiffances de 1'Europe. Auffi t d'habiles Polkiques ont-ils démontré depuis, que ce Projet n'avoit été inventé par la France , que pour attirer plus facilement Charles dans le parti de cette Puiffance} Sc que dans toute cette entreprife, Louis n'avoit eu d'autre but, que celui de fe venger de nous, que de faire un coup d'éclat, qui flattat fon ambition, — Sc de nous réduire a fouffrir, fans nous remuer, qu'il conquüt les Pays - Bas Efpagnols, qu'il avoit envie de s'appropricr. Enfin Charles commenca la querelle: c'efla-dire, qu'en conféquence des ordres fecrets, qu'il avoit donnés a Robert Holmes, ce dernier attaqua notre Flotte de $mirne, de la maniere que je 1'ai rapporté page 72. ci - deffus. A cela fuccéderent 1'invafion de Louis XIV., la bataille navale de Solsbay, les conquêtes des Evêques de Culogne &c dc Munfier , Sc les autres effets. d'une guerre cruelle, qui nous confierna d'aBb f bord,  394 L' ESQ.UISSE UN bord, mais que notre courage" & nos efforts, réunis aux fecours de nos Alliés, éloignefent enfin dc nos frontieres. La Paix que la République conclut avec l'Angleterre , au commencement de 1674. fut un nouveau bonheur pour nous. Mais, mes ConciteyenSy ne croyez pas, ainfi que quelques Historiens Ie rapportent, que la Nation Angloife d'efira cette Paix , par un par Jcntirnent dc pitié envers nous, ni que ce furent les remords, qui CKciterent Charles a y confentir: D'autres motifs guiderent, en cette occafion, & ce Mo- narque 8c fes Sujets. ) . i°. Ceux - ci s'é- toient infenfiblement appercus, que leur Roi étoit entré dans cette guerre , pour couvrir le mauvais empioi qu'il avoit fait de quelques fub-fides, qu'ils lui avoient accordés antérieurement. —— z°. lis s'étoient auffi appercus qu'il étoit entré dans cette guerre, pour avoir occafion d'augmenter fa Puiffance en fon Royaume, 8c d'y regner avec plus d'indépendance. —-—> 30. D'ailleurs, la rapidité des Conquêtes dc Louis XIV. les alarma: ils craignirent que fi ce Prince venoit a fubjuguer nos fept Provinces, il ne s'emparat du refte des Pays-Bas; & qu'alors, maitre de notre commerce 8c de nos forces navales, il ne parvïnt a détruire le commerce 8c la marine de l'Angleterre. En un mot , les Anglois, dont lc but étoit de fonder-un jour leur puiffance fur les  Grand T A b l e a u. 395 les ruines de la notre, craignoient que nos dépouflles ne ferviffent a accroitre la puiffance' Francoife , cc que celle - ci ne parvint enfuite a anéantir la leur. Voila donc une partie des motifs, qui porterent la Nation Angloife a defirer de faire la Paix avec nous. Et Charles , s'appercevant des dispofitions de fon peuple, Sc craignant que ce peuple ne lui refusat les fubfides néceffaires, ou qü'il ne le forcat a fe déelarer contre la France, confentit facilement a. cette Paix. Mais cela n'empêche pas que l'on ne réproche éternellement a ce Prince, d'avoir indignement rompu une Alliance , a laquelle d'autres Puiffances fe dispofoient aaccédprj une Alliance, qui, en formant une digue puifTante contre les deffcins ambitieux de Louis XIV., auroit affuré le repos de 1'Europe , Sc nous auroit préfervé de 1'Invafion qui nous a caufé tant de maux, Sc dont eff réfulté cette longue & cruelle guerre-, qui ne finit qu'a la Paix de Nymegue, conclue en 1Ó78. A cette époque, mes Chers Cvncitoyens, notre commerce & notre navigation fe foutenoient encore; mais notre pêche étoit fort déchue, Sc nos manufachires avoient déja regu quelqu' atteinte par 1'accumulation nécelfaire des impöts, par le renchériffement des denrées, par celui des objets de confommation, par celui de la main-d'ceuvre, Sc par 1'émigration de plufieurs de nos ouvriers , que les Anglois avoient  396 L'E S Q.U I S S E D' U N avoient attirés cliez eux. Le fyflême de 1'Agiotage, que GuiUaume lil. introduilir enfuite parmi nous, Sc Ia guerre funefte, oü ce Prince nous entraïna en ió88, augmcnterent les caufes fusdices de la décadence de nos manufaetures, Sc en accélérerent la ruine: la guerre de Succeffion vint ajouter a ces malheurs ; le découragement Sc la dépopulation s'introduifirent de plus en plus dans nos villes fabriquantes, Sc l'Angleterre en profita au point que tout le monde fait. Enfin, cette quantité de maifons , qui depuis iójo. ou 1640. avoit agrandi Sc embelli ces villes 9 n'offe plus aujourd'hui qu'un fpectacle déplorable : un grand non.bre de ces maifons eft fans habitants, d'autres menacent de s'écrouler, d'autres font tombées en ruine, Sc il ne nous refte plus d'efpoir de les voir reiever. Voila , mes Concitoyens, voila comment, par un enchainement fatal, de caufes Si d'eftets, nous avons perdu une dss principales frurces de nos richeffes Sc de notre puiffance, tandis que nos Imputs Sc notre Dette nationale fe font accrus a un degré effrayant. — Je reviens a de la décadence de notre commerce Sc de notre navigation. II n'y a aucun homme verfé dans notre Hiiioire, qui ne fache que nous devons cette décadence a la jaloufie, que les Anglois ont eue de tout tfcmns contre nous. De deux Na-  Grand Tableau. 397 Nations, dont les intéréts particuliers font fondés fur une rivalité de commerce Sc de navigation , la plus rufée, la plus injulle Sc la plus violente, manquera rarcment de s'élever fur les ruines de 1'autre. L'expérience nc hóus 1'a que trop appris Nous ne fommes point dans cette pofition vis- a- vis la France. Cette Puiffance n'a jamais fait ÜAcle de Navigation, dans la vue de nous ruinerr au contraire , elle a toujours favorifé notre commerce & notre cabotagc dans fes ports, paree qu'aucune rivalité ne féparc fes intéréts des nótres, Sc que cette faveur lui api porte autant d'avantages qu'a nous-mêmes^ „ En 1697. dit Mr. Cèrifier (aj, la Répu-; „ blique fit avec la France un Traité des plus „ avantageux, foit a fon commerce dans ce „ Royaume, foit a celui qu'elle faifoit dans „ les diverfes Echelles du Levant. Des traits „ irréfragables montrent a cette occafïon la „ réciprocité des intéréts communs entre la „ France Sc la République, Sc roppolition „ des mêmes intéréts avec l'Angleterre'. C'eft „ dans le plus grand feu des guerres contre „ les Francois, que ces derniers excitoient „ par tous les appats Sc par la fureté des pasfe- (a) Tableau de l'lliftoire des Provinces-Unies des Pais. Sas, T. IX. p. 545. ™  393 L' ESQUISSE UN ,, paffe-ports, les marchands dc la République a, a continuer leur Commerce dans ce Royau5, me. Les Anglois, au contraire, s'oppo- ferent vivement a ce commerce, qu'ils trair „ toient d'illicite, Sc de contraire aux intéréts „ de la caufe commune; ils firent même agir „ des follicitations fi puifTantes, que les Etats- Généraux, vaincus par leurs importunités, 9, rendirent en 1703. un édit qui prohiboit tout commerce avec la France. Mais ces fages Administrateurs ne tarderent pas a „ s'appercevoir du dommage que leur caufoit „ cette défenfe. Ils la leverent 1'année fui5, vantc, 8c ils expoferent a la Reine Anne, ,, dans un Mémoire, les raifons preflantes 8c ,, péremptoires qui les forcoient a cette dé,, marche. Mais quelques importantes que „ fuffent ces raifons, elles ne perfuaderent pas ,, les Anglois, qui s'embaraffbient peu des in„ térêts effentiels de leurs Alliés. Ils enleve„ rent Sc déclarerent de bonne prife un grand „ nombre de navires, munis de paffe-ports „ Francois, mais appartenans a des Habitans „ de la République. " — > GuiUaume III. même 5 qui nous a coüté tant de tréfors 8c de fang pour le maintenir fur le Tróne d'Angleterre, oü nous 1'avions élevé, GuiUaume, dont le despotisme odieux, qu'il exerga fur nous, a flètri la gloire qu'il s'eft acquife en nous défendant, ce Prince, a qui nous devions tant, 8c  Grand Tableau. 299 Sc qui nous devoit tout, facnfia lui-même les intéréts de notre commerce, a ceux de fes Sujets Anglois. Bien loin de faire révoquer le fameux Acle de Navigation, les ordres qu'il devoit donner, en qualité d'Amiral Général de la République, pour 1'équipement des Convois, arrivoient quelquefois fi tard, que nos flottes marchandes ne pouvoient profiter de ces Convois, que plus d'un mois après le départ. des flottes Angloifes > Sc par ce moyen , nos rivaux, arrivant les premiers aux ports affignés, déb>itoient leurs marchandifes a grand profit, tandis que nous, trouvant les marchés pourvus, y faifions des pertes, qui réfultoient de cette concurence anticipée («). Ce n'eft point ainfi que la France en agifibit envers nous. Toujours dispofée a nous favorifer, «& a nous faire fentir que les intéréts de notre commerce Sc du fien doivent être inféparables, elle accorda en 1730. a tous nos négociants Sc navigateurs, exclufivement a toute autre Nation, le même droit, dont jouiffënc les Francois naturels dans tous les ports du Royaume. Et par un contrafte fingulier, les Anglois, profitant de la rupture qui éclata alors entr' eux Sc les Efpagnols, enleverent tout O) Qndtrzttk van 't Gedrag der Engelfcben, &c.  '400 L'ES QüISSE D' Ü N tout cc qu'ils rencontrerent de nos vaiffeaux , fous prétexte qu'ils portoient de la contrebande: Et ces déprédations infames, qui durcrent autant que la guerre générale qui s'enfuivit, montcrenc jusqu'a plus de 18 millions de florins, dont il n'y en eut peut-être pas trois dc reftkués j encore fut - ce après des procédures auffi longues que coüteufes. Enfin, 6c pour couronner 1'ceuvre, ces ennemis de notre bonheur contribuerent alors, plus que perfonne, a nous faire brouiller tout-a-fait avec la France; 8c ils devinrent, par- la, une des principaïes caufes des maux affreux , que cette guerre nous a caufés. La guerre, qui s'alluma en xjfó, donna lieu au renouvellement de leurs déprédations atroces fur notre Commerce: 6c ils les commirent avec d'autant plus d'audace , qu'il y avoit alors parmi nous un Parti, qui les favorifoit ouvertemenr. Ni les inftances rédoublées dc nos malheureux négociants, ni les piaintes dc nos principales villes, ni la vue de notre détreffc , ne purent obtenir de la Gouvernante la protcction, qui étoit due au commerce. La foiblefle de notre marine, 6c cent autres prétextes frivoles, étoient les raifons qu'on apportoit pour juftifier lc refus que l'on faifoit. Lorsqu'il fut propolé de mettre la marine en état -de protéger notre navigation , la Clique Anglomane prctendk que les troupes de terre fus- fene  Grand Tableau. 401 fent augmentées en même temps: 8c comme elle favoit que ce dernier point ne feroit point accordé , il lui reftoit les mêmes prétextes pour refufer la proteétion demandée. En un mot, il en fut alors comme .jl en a été avant la dêrniere guerre; la gloire de 1'Etat Sc les intéréts de fes iüjets y furent facriflés, d'une maniere indigne , aux plus mortels ennemis que nous ayons fur la terre. Mes chefs C5* dignes Concitoyens! le peu què je viens de vous expofer, fuffit pour vous faire comprendre laquelle des deux Puiffances; la France ou l'Angleterre, eft celle, qui, depuis 1'exiftence de la République; nóus a fait le plus de bien, & qüelle éft celle qui nous a caufé le plus de mal depuis la même époque. —— Je 'crois qu'il n'y a point d'homme raifonnable 8c 'de bonne foi, qui n'avoue que c'eft a la France, que nous avons le plus d'obligations; 8c que, relativement a nós intéréts poliriques 8c de commerce; la France eft de toütes les Puiffances de 1'Europe, celle j dorit 1'Alliance noüs eft la plus convenable 8c la plus avarttageufe. En effet, la fituatiori de ce Royaume , fon voifinage avec notre République, la grandeur de fes forces de terre 8c de mer, les reffburces immenfes qu'il peut tirer de fon proprefein, la eonformité de nds intéréts avec les flens ? tout j en un mor; é c nous1  402 V ESQ.UISSE Ü N nous invite a nous féliciter de 1'avoir pour Aliié. — Souvenez - vous, enfin, de ce que la France eft capable de faire pour nous, & furtout, de ce qu'elle a fait pendant la derniere guerre. Mais aulïï long-temps qu'il exiftera parmi nous une Cabale puiffante, dévouée a l'Angleterre, & que 1'intérêt, ou 1'ambition perfbnnelle, continuera de porter une multitude de Laches a facrifier les intéréts de leur Patrie aux vues de cette Cabale, nous ne retirerons aucun fruit de cette Alliance falutaire. Cette Engeance maudite, fecondée par fes Suppóts, croifera tous les moyens, que la France & la République employeront pour pourvoir a leur foreté, & a leur bonheur réciproque. Scs reiïourccsfontla rufe & la violence* fon appuieft dans le nombre des Trattres qu'elle a parmi nous; fon efpoir eft dans la défiance & la difeorde qu'elle a foin d'y entretenir. Habile a profiter de ces moyens, de ces circonftances, elle continue de nous retenir fous fon joug odieux, & ne défefpére pas de nous replonger fous celui dc l'Angleterre. L'accroiflement de fon audacc nous annonce les fuccès auxquels elle s'attendi elle nous brave plus ouvertement que jamais; elle prévoit une iflue prochaine & favorable a fes deffeins } & fi nous ne prévenons pas le coup qu'elle nous prépare, le dernier effet de fes efforts fera un coup de foudre, qui enfevelira la République fous les ruines de notre Liberté. Dïg-  Grand Tableau. 403 DlGN;es, ET VenERABLES R fc- gents! Vous, qui faites 1'ornement des Affemblées Souveraines, ou des Colleges municipaux de nos Provinces! ,. Vous, en qui font notre efpoir Sc notre appui! . . . . Daignez vous reffouvcnir des maux affreux que cette Cabale abominable a caufés dans notre République — daignez vous rappeler des effets funeltes, que fon infludnce a fi fouvent eus dans les Affemblées, dont vous êtes Membresj ■ rappelez - vous par quels moyens odieux elle a croifé vos vues falutairesj avec quelle audace elle a éludé, ou fait éluder les ordres les plus abfolus du Souverain) avec quelle impudence, avec quels fuccès fes Suppóts ont lbutenu fes intéréts, Sc trahi ceux de 1'Etat, dans ces mêmes Affemblées j » confidérez ce que cette Cabale fait encore journellement, ce qu'elle eft capable de faire dans la fuite, Sc le fort déplorable qu'elle nous prépare;— confidérez, dis- je, toutes ces chofes, Sc permettez qu'un Citoven refpectueux Sc fidele déclare ici, que le falut de la Patrie exige, non feulement que la conduite d'une telle Cabale foit foignetifeme.if. éclairée, que fes deffeins foient confondus, que fes entreprifes foient réprimées ou punies* mais qu'elle foit elle-même difperfée Sc anéantie. — Des milliers de Citoyens fideles applaudiront a vos efforts} ils les ïeconderont; Sc Cc2 s'il  404 L'esQuisse d'ün Grand etc. s'il le faut, il vous défendront aux dépens de leur fang. — Ce Monftre, quelque redoutaJ ble qu'il foit, n'eft pas auffi fi difficile a vaincre, qu'il le parolt; 1'union entre vous, 1'uniformité des vues, un heureux choix dans les moyens, de la vigucur & de la confiance dans vos efforts, fuffiront pour parvenir a ce but. Et lorsque vous y ferez parvenus, notre Alliance avec la France aura tout 1'effet que nous avons lieu d'en attendrej c'eft-a-dire, que notre furcté étant écablie au dehors, ainfi que nos droits 8c notre liberté auront été rétablis au dedans, notre commerce 8c notre navigation feront délivrés des entraves que nos ennemis leur ont mis} ces deux objets fi précieux, fi nécesfaires, reprendront leur ancienne vigueur j 1'abondancc 8c la prospérité renaltront parmi nous, notre Puiffance rcprendrafon ancien luftre Stfon ancienne confidération ; 8c les Auteurs de tant de Biens, mériteront a jamais la reconnoisfance de tous les cceurs honnêtes 8c fenfibks* Fin de la feconde Partit. P I E-  PIECES AUTHENTIQUES, Servant de Preuves d ce qui a été avancé dans te Discours Préliminaire de cet Ouvrage, contre le Nommé Manzon, Rédacleur de ta Gazette intitulée , leCouk.iek.du BasRhtn, ö* imprimée d Cléves. Lettre de Manzon d Mr. de Heinichen , Secrétaire privé de S. A. S. Ie Duc de Brunswick, Feld-Maréchal au fervice des Provinces-Unies Ca), Monsieur, Te fuis un Libraire étranger , pas loin des frontieres de la République, 8c chez qui un Particulier Hollandois étant venu, m'a vendu un Manufcrit , devant former vingt feuilles d'imprefïion in 11°. contre Son Alteffê Monféigneur le Duc de Bronswick, 8c autres Perfonnages refpectables. Apiès m'avoir lu eet Ouvrage, que j'ai trouve très-fort, 8c propre a avoir un bon débit, attendu la proxi- mité («) Cette Lettre eft fans nom de lieu & fans date; mais l'on verra ci-après qu'elle a été écrite a Cléves au commencement d'aoüt 1781. & qu'elle a été mife a la Poste - Nymegue. Cc 3  4od Pieces Authentiques. mité du pays. Sela facilité de lc faire entrer, je me fuis laiffé féduire a lui faire une Obligationde40o. Ducats, payable, la moitié quand 1'Ouvrage paroitra au jour , 1'autre moitié trois mois après- Mais quand j'ai eu imprimé 6 feuilles, le rémord de confeience m'a pris, at tendu la violence de 1'Ouvrage contre un fi grand Prince, & les risques que je courois pour ma tranquillké, 6c pour mes avances, fï la fource étoit découverte. • C'eft pourquoi, Mnnfieur, ap:ès avoir bien eonfidéré en moi - même, que je devrois pourtant tenir mon Contrat, 6c que je ferois ruiné fi j'abandonnois le travail déja fi avancé, j'ai pris le parti, Monfieur, de vous faire la confidence du tout, 6c de vous prier en grace, fi vous nepourriez pas obtenir, que Monféigneur voudroit me fai'e payer les 400 Ducats d'Hollande, pour me tenir quitte avec 1'Auteur. Si alors vous vouhez, y ajouter quelque chofe pour mes frais déja faits , je vous en aurois d'autant plus d'ob'igation: Car pour le profitque j'efpérois fur la vente , j'y renonce de bon cceur, pourvu que jc iois quitte de cette malheureufe affaire , oii je me fuis engagé par imprudence, 8c ayant été aveuglé par 1'espérance de faire un bon profic, dans un moment ou tout ce qui eft contre la Cour fe vend fi bien, & 1'Auteurm'avant promis de placer tout de fuite mille Exemplaires a un Ecu deZelande* Mayess-  Pieces Authentiques. 407 Moyennant cela, je prends Dieu a témoin, 8c je jure fur ma part de Paradis, que je brüleraide bon cceur, 8c fidélement le Manufgrit, 8c lesó". feuilles imprimées, fans qu'il en refte jamais aucune tracé ; 8c je payerai 1'Auteur, qui m'a trompé, en lui proteftant, (ce que je fuis homme a faire,) que je vous donnerois , ou a Monféigneur, un mot d'avis contre lui, s'il étoit homme a faire imprimer , dans un autre endroit, fon Ouvrage fi bien payé. Mais je fuis fur qu'il fera bien content, 8c craindra mes menaces, de facjon qu'il n'en paroitra jamais rien. Je vous envoyé feulement le Titre de 1'Ouvrage, par oü vous pourrez juger du refte. II y a en effet des chofes trop fortes, 8c a peu prés dans le goüt d'un autre Livre abominable, qui s'intitule le Procés des trots Rois. Ne me demandez pas le Manufcrit, car je neveux pas me perdre, ni perdre perfonne, pour toutes chofes au monde; attendu que je n'aurois jamais plus de repos. Qu'il vous fuffifle que je fuis un honnête homme , qui a été trompé, 8c qui ne veut pas fervir a répandre un Livre, qui feroit trop de peine a beaucoup de gens refpectables, contre qui je n'ai rien. Si vous pouvez faire, que Son Alteffe veuille étouffer ce Livre fcandaleux, en me dédommageant de mes avances, vous lui rendrez un vrai fervice: mais il faut agir avec moi de bonCc 4 n«  408 P ï E C E S ACTHEKTIQVES. pe foi, comme j'agis de même. Je fuis venu, a Nymegue Pour affaires , oü je mets cette Lettre a la Pofte. Je vous prie, au cas d'acceptation de mes offres, de m'envoyer la fomme, que votre générofité trouverabon, audit Nymegue, Pofte reftante , a 1'adreffe de Mr. Devis Négociant. Je joins ici un Cachet (a) que je vous prie de renvoyer au Maitre de la Pofte aux Lettres, afin qu'il remette ie paquet en or a celui qui pr£fentera un Cachet tout de même que je fais, & que je garde pour cet effet. Je penfe bien que vous chercherez a me faire arrêter, pour découvrir ce que vous voulez favoir. Mais, outre que cela feroit bien dur, de payer ainfi un homme qui a de bonnes intentions, c'eft que j'ai fi bien pris mes raefures , que vous n'arriveriez pas a votre but :. car, pour vous le montrer, voici comment je ferai. D'abord , demain, quand ma Lettre arrivera a la Haye, je me retire fur un territoire etranger. Enfuite , j'envoie un Expres, qui ne me connoitra pas, chercher le paquet a Nymegue, avec le fusdit Cachet. Celui-la vous pouvez le faire arrêter: mais c'eft tout,» & il faudra bien ie laiffer aller, car il ne faura rien, Si vous faites aller avec lui des. gens C«) Ca Cachet repréfentoit un J. & un C. fioples.  Pieces Authentiq.ues. 4051 gens pour me découvrir, cela ne fervira encore a rien j car je ne ferai plus dans 1'endroir, oü je lui aurai dit de m'apporter le paquet: mais j'aurai tout auprès un ami de confiance, qui verra un peu ce qui fe paffe, St qui fe retirera doucement, s'il voit le danger} au contraire , il préfentera a 1'Exprès un Cachet a comme celui qu'il a eu, pour avoir le paquet, 8c il me 1'apportera dans une ville plus loin de la. De cette facori, 1'Expres ne me verra qu'une fois; 8c il ne pourra plus me trahir, s'il y étoit forcé o,u gagné. Vous ne prendrez pas mauvais, Monfieur, fi j'ai pris toutes ces précautions, car je ne puis pas favoir ce que vous penfez. Si vous avez la bontéde m'accorder ma demande, (ce qui n'eft pas grand chofe pour un grand Prince,) je fais encore ferment fur mon ame, que jamais il ne paroltra rien de ce Manufcrit: mais dans le refus, je ferai bienobligé, atout risque, d'achever 1'impreffion , car je ferois ruiné , cn perdant mes avances. C'eft le famedi, 11. de ce mois, que j'enYerrai 1'Exprès a Nymegue. Mais refufez- moi, plutöt que de chercher a chagriner ce pauvre homme, qui ne feroit jamais capable de vous fatisfaire. Recommandez plutót au Maitre de Pofte de donner le paquet, fi vous en envoyez un, a celui qui lui pr*éfentera un CaCc y chctjp.  410 Pieces Authenti ques, chec, comme il eft dit, fans s'informer d'avaniage. En attendant, je demeure avec beaucoup de refpeft, M o n s i i u r, (figné) (*). Si ce que je fouhaitq eft accompli , je ne manquerai pas d'avoir 1'honneur de vous écrire pour vous remercier j Sc je promets bien a Dieu, de ne jamais plus acheter des Manuscrits défendus. Voici le Titre du Livre. La Loüiso-Bronswigko-Wolffenbuteiape, mise en Capilotade, OU HISTOIRE digne a, jamais de mémoire, du Duc Louis de Wolffenbuffle, Maréchal - ferrant au fervice de la (a) Le Nom, qui fe trouve. au bas de fa Lettre, eft défiguré de maniere, qu'on n'a pu le rendre ici a Hmpreffion.  PlÉCES AtJTHENT IQTJES. 4H la République , depuis qu'il eft venu nous faire la niqus, en nous ir.enant comme des Bouriques, jusqu'au jour rant defiré, qui n'eft pas éiü gné, oü nous aurons le plaifir fortuné, de lui donner les érr':vieres, fur fon gros vilain derrière, & a Monfieur fon gros Pupille aufti, fi, comme nous il ne dit pas, Oui. Ouvrage admirable, qui pofféde la vertu de chaffer le Diable, oü l'on trouvera au plus juste certaines dróles d'Anecdores, qui ne font pasfottes, que Mjnfieur le Grefïïer a oublié de mettre dans fes notes, 8c qui feront graisfer les bottes de Monféigneur, pour partir leste, lans - demander fon refte. En Enfer, dans la forge de Lucifer: Et fe trouve en Hollande, chez tous les Libraires , 1'an de notre délivrance, 178X, Lettte du Duc de Brunswick h Mr. G. Brantfen , alors Député a la Cènéraltté, éi? aujourd'hui Ambajfadeur Extraordinaire & Plgnipotentiahe de L. H. P. a la Cour de Franse. M O N S I E V R, Permettez que je vous envoyé ci-joint une Lettre, qui eft venue aujourd'hui par la Pofte de Gueldre a PAdreffe de mon Secrétaire Hei- niche».  41? Pieces Autentiqües, nichen. Je la confidére comme une piece pour extorquer de 1'argent, ou imaginée par quelqu'un de Nymegue-même, pour taeher a me faire de la peine. Je ne faurois faire un meilleur ufage de cette Lettre , que de vous 1'envoyer , Monfieur , & de vous prier , que comme Melfieurs les Etats de Gueldre ont jugé a propos de faire émaner un Placard contre de pareils Libelles, de vouloir bien en fai1'ufage que vous trouvcrez le plus convenable, pour faire parvenir cette Lettre a la Cour ou au Momboir (a) de Gueldre, pour tacher de découwrir le dcffous des cartes de cette affaire: 6c peut-être pourroit-on découvrir 1'Auteur, 6c de la Lettre, 6c de 1'Ouvrage qu'il annonce. Excufez, je vous prie, Monfieur, mon importunité ; 6c foyez perfuadé de la parfaite confidération avec laquelle j'ai 1'honneur d'être, Monfieur, Votre très-humble 6c très-obéisfant ferviteur, ( Signé) L. de BRUNSWIC. i la Haye ce 5 aeét 1781. (a) Moroboir fignifie , Ie Procureur Général de Ia Cour de Juftice de Gueldre. Tra-  Pieces Authentiques. 413 Traiutlion de la Lettre de Mr. Brantfen h Mr. Engelen, Premier Confeiller & Stadhouder des Fiefs du Gueldre fj? du Comté de Zutpben , a Arnhem. Monsieur, J'ai recu hier au foir, de Mr. le Duc de ÈruHSwic , la Lettre ci-jointe, adreffée par un Ecrivain anönyme aü Secrétaire de S. J. S. i avec priere que, comme les Seigneurs Etats de Gueldre ont jugé a propos de prohiber, par un Placard , 1'impreffion 8c la publication de toute Libelle diffamatoire, je vouluffe en donner connoiffance, de la maniere Ia plus convenable, a la Cour ou au Momboir de Gueldre, afin de découvrir, s'il eft poffible, 1'Auteur de la Lettre & de 1'Ouvrage dont il y eft fait mention. J'ai donc fhonneur de fatisfaire par celle-ci a la réquifition, 8c de vous prier, Monfieur, de vouloir bien faire en forte, que l'on faflé le plus feerétement des Recherches a cet égard, 8c que l'on prenne les mefures nécefiaires pour parvenir au but fusdit. J'ai l'honneur d'être aVec la confidération la plus parfaite, Monsieur, Votre tres - humble & trés* ebéisfant jerviteur, G. BRANTSENi La Haye le 6. atüt 1781. tra*  414 Piêces Authentiques» fradublion de la Réfolution de la Ceur de Gueldre, touchant la Réquifition du Duc de Brunswick. Du Mercrédi 8. aoüt 17S1. Mr. le premier Confeiller Engelen a expofé & fait connoitre a i'AflVmblée, qu'il avoit re