aMojtsieür Muxtek 'Bibliotheek Universiteit van Amsterdam 01 2813 8393 a mu'.n- VAN HEMMEN. ! \ )   L9H EUREUSE È R R EUR. C O M E D 1 E, EN UN ACTE ET EN PROSE. par J. P ATR AT. Rcpréfentée,pour la premièrefiis,par lesComéditns Italiens ordinaires du Rot, le 22 Juillet 1783. A AMSTERDAM, Chez CES AR NOËL GüERIN, Librairs M D C C t x X X v I.   A MADAME LA MARECHALE DUCHESSE DE RICHELIEU. MADAME, Vom avez daigné me permettre de vsus pré/enter publiquement ce foible tribui de mon zele: rien ne peut égaler ma vïve reconnoijjance, que le regret que fat de ne pouvoir la faire éclater. Eb ! pourquoi niim pofer un filence rigoureuxl Dans ce fiecle ou la bienfaifance eft la vertu favorite, ma A 2  voïx, en faifant votre éloge, auroit ètè /Vcho de tous les coeurs: je dois obèir, me taire, &> jouir, en rougijjant, d'un honneur que je n'ai pas encore mérité. Mais comme tin rayon de foleil fyffit quelquefois pour faire éclore une fleur qui ri'auroit pu naitre fans fon fecours, votre bonté bienfaifame va m'élever au-defus de mo%. mêmei & ft je parviens jamais a mettre a vos pieds un Ouvrage digne de vous être ofert, c'e/l h vous que je devrai ma gloire, elle en fera plus chere a mon cozur. Jefuis, avec le plus profond refpeft, MADAME, Votre trés humble & trés obéifiaiit ferviteur, J. P ATRAT.  A V ERTISSEMENT. Toutes les fituations font indiquées au commencement de chaque Scène : le perfonnage dont Ie nom fe trouve placé Ie premier, doie êcre du córé de la Loge acluelle de la Reine, c'eft-a-dire, a la droite des Afteurs, & les autres vont de fuke. Cette méthode, inventée par la Noüe, e(i la plus fimple pour indiquer, & Ia plus facile a fuivre.  P E R S O N tfA GES. LA COMTESSE DELFORT, riche veuve de Hst. huit ans, retiré du monde £? vivant dans jon chdteau. Elle efi en négligé galand. SOPHIE DELVAL , riekt héritiere , demeurant dans un chdteau voifin de celui de la Comtefe , habillét en payfanne. LISETTE, Femme - de - cbambre de Sophie Delval, placée par fon ordre chez la Comtefe, tn déshabillc. M. LUVILLE, frere de la Comtefe Delfort, jeune homme aimable, en frac trés - uni, M. DELVAL, frere cadet de Sophie, trés -jeune ; il parelt d'abord en furtout uniforme, enfuite richtment paré. DUBOIS, vieux Domejliqut de la maifon, mi; comme Dubois, de la Gageurt imprévue. ANDRE', Valet ingénu, en vefle de Courier. M. MINUTE, mis en Notoire de Fillage. La Scène fe paffe dans le fallon de la Comtefe Delfort.  Pag. ? VE E U R E U S E E R R E U R. COMEDIE EN UN ACTE ET EN PROSE. SCÈNE PREMIÈRE. Le Théatre reprifetite un fallon très-orné. L I S E T T E, (feule, fortant dt cabinet de fa Maltreffe süuelle,de laComteffe, avec fair le plus fatisfait.) Oh! pour Ie coup, ma reuffite efl certaine; me voila recue chez la jeune Comteffe, & déja dans fes bonnes graces: el!e a donné, tête baiffée, dans les piéges que je lui ai tendus; & au vif intérêc que ma maltreffe parolt prendre a ce badinage, je ne doute point que ma récompenfe ne foit proportionnée au plaifir que je vais lui faire. SCÈNE II. LISETTE, DUDOIS. D U B O I S. Maderaoifelle Lifette, il y a la une jeune payfanne qui vous demande. A 4  « L'HEUREUSE ERREUR. Moi? L I « E T T E. Vous-mé,,0 " B ° 1 S' L I S E T T E je ne connois perfonne dans ce Vuïaire D U B O I s E"e n'efl pas «j^ ^ e„e eft'b.en ^ EHe fe trompe peut-étre. T E' ^deSVai « ™^"e Lifetre, «le deVeU^EqrDUmJdem°ifeIle S°phie' fonner d'un moment a f.utre i I a e"e f61" me m'éloigne: & je n'ofe SSZ i^ïJ™ ^ f Pourquoi? ° ü B ° 1 S- ' n/r , LlSETTE Madame po^oit^ . ^ . ^, L I S E T T 77 M^d'oü Mvie-udonc^cettehainef Ah! «He n'a pas tout-a-fait ton.5* Commem? L 1 S E T T E. Tétch Domeftiqu^de^uVpaLepere, & jat  C O M E D I E. 3 vu tout cela; a quatorze ans elle eft devenue éperdument amoureufe d'un étourdi dont Ia fortune, ni Ie $ang, n'étoier.t pis dignes d'elle; Ie bon papa, qui 1'aimoit comme fes yeux, n'eut pas Ia force de réfifter a fes pritres: Ie mariage fe fit, & foa époux Ia rendit fi raalheureufe que ce digne pere en mourut de clia^rin. L I S E T T E. Ah! bon Dieu! D U B O I S. Ce monftre d'ingratitude, ne lui furvécut pas longtemps, & notre jeune Maitrefle fe trouvant libre, s'eft retirée dans ce chateau, en promettant de n'y jamais recevoir aucun homme. L I S E T T E. Y a-t-il long-temps que cela dure? D U B O I S. Elle n'a vdcu que deux ans avec fon mari, & il y a plus de dix-huk mois qu'elle efl veuve. L I S E T T Ë. Dix-huit mois! Er. cette haine contre les hommes, ne s'affoiblit point? D U B O I S. Au contraire; elle ne voit abfolument que fon frere ; nous n'ofons pas même la fervir a table, &' fi une de fes femmes nous parle deux fois. A la porte. L I S E T T E. Voici donc notre derniere converfation. — Faltes entrer cette fille. D U B O I S. Ie vais vous 1'amener mademoifelle Liferte. ( // fort.) A 5  io L'HEUREUSE ERREUR. SCÈNE III LISETTE, (feule ) Perfonne ne fair que je Tuis UilK Oue pent me ter! üft-ce que Je ne vais pag ie favoir? SCÈNE IV. LïSE TTE MademoifeJIe S OP HIE, DELVAL, DUBOIS. . DUBOIS, Ca Lifette.) La voila, mademoifelle Lifetre LISETTE, (très-furprife \ . C'efi vous, Mad.... J"r>fje.) SOPHIE, {i-interromptm & rembraff,«nt enfuite ) Oui, ma chere coufine! c'eft moi «V««"'J lui » * DUBOIS, Ah! cefl votre coufine? Prends-bien garde! Tont eaLlöilETTZ>(^*W>-e.) DUBOIS Elle efl b?en jolie, oui» Ta-rr LISETTE, ( Amerveüle! g Q p H ! E. Tant mieus! j s E T T E. • Te me fuU préfentée chez la Comteffe, qni cherchoit en effet une femme-de-chambre adroite, inteltente; car le projet de la retraite n'óte jamats , a une jolie femme, le|o^dep!atparure.E> HébiCn! LISETTE. Hébien! je n'ai pas eude peine a rénfljr; & dès le premIr jour, un coup de peigne, donné avec éé «mee, une fleur placée avec grace. II nen a pas fallu davantage pour me meur e en faveur. Comment, elle aime encore la parure? Et elle ne recoit que des femmes 1  W L'HEÜREUSE ERREUR. r i L 1 S E T T E Cela vous étonne 1 A]]P7 n/r.j flammer le cceur des hoW.',ïr me' 'e pIaifir d'«des belles, que ceL dTUmi)t79'nS vif'Pour ^ieri femme, "nummer l auiour propre des A merveilie» S 0 p « i E( Ellera'ademandé d'oü ia ?nJL Hé bien? s 0 p H i E. Alors ^ I S E T T E c™P*Vauxque^ queftions votre conventies J"'reponducomrne nous en étions zj . ■ s ° P H I f Hoijeveuxfavoirtous les dét.ib. , S O p H I c Quas-tu répondu? '  C O M E D I E. 13 durée. — Elle fe crompe,ma haine fera e'ternelle. —* Eternelle? Bon, s'il n'v avoit point deMaJemoifelle Sophie au monde.— Que veux-tu dire ? — Ilien. -r-— Parle.— Je n'ofe. — D'oü vient? C'eft un fecret qu'e.le m'a confié. —— Tu n'es plus a elle. II eft vrai; mais.... —» Quui? — — Le fecret vous regarde uniquement.... Moi ? Vous-même. —— Raifon de plus ponr m'en inlïruire. —— En effet, je fuis a vous, & mon zele doit étouffer mes fcrupules. — Dis donc, dis donc. ( A Sophie.) —— Vous voyez que peu a peu je la conduifois a defirer vivement de favoir ce que je mou. rois d'envie de lui apprendre. SOPHIE. A merveille! Après? LISETTE. Mademoifelle Sophie, ai je ajouté avec un air de confidence, a le plus grand mépris pour fon fexe; elle regrette de ne pas ê;re homme, elle foutient que routes les femtnes font folies, extravagantes, préfomptueufes, fans tenues dans leurs projets, fans f'oiidité dans leurs réfoiutions; &, pour vous prouver que vous êtes vous-même au nombre de ces femneletr.es, qui fe propofent tout & n'exécutent rien, elie a réfolu de venir ici fous ie nom de fon frere. — Eli-il pos- fible? Et elle a méme gagé, que (i cl.'e parvient a vous voir, elle fe fera atmer de vouï, & jouira enfuite du plaifir de vous faire rougir rfawoir eu l'orgueil téinéraire de vous croire capable de tenir un fer. ment. SOPHIE. Hé bien? LISETTE. — Ah! Lifette, m'a-t-el!e dit, en m'embralTanr, je reconnoltrai le fervice que tu viens de me rondre;  14 L'HEUREUSE ERREUR. je Ia recevrai & je la badinerai fi bien, que les rieurs ne feront pas de fon cótd. sophie. i le »Im i°"C a me reeevoir fous ie nom de mon dere? LISETTE. Oui, Madame. SOPHIE, (trh-fyfhfalt^ Voila touc ce que je voulois. LISETTE. fion. ?a' JG m° fuis bl t0mb° £ur un vil objet> lej le corrompent, ie Cfleur fe déprave, & Jes PiaifirS  CQMEDIE. IS honnêtes font perdas fans reflburce, maïs s'il fe fixe furune femme eftimable, 1'amour n'eft connu que fous ;es traits de 1'innocence & de la fagelTe, 1'ame ferem. plic d'une volupté pure, & 1'on refte vertueux toute la vie. LISETTE. Mais, votre frere aimera-t-il a commandement ? SOPHIE. Mon frere eft charmant, la ComteiTe eft pleine de mérite, elle lui plaira, j'en fuis fure, & je ne douce pas qu'il ne faffe auffi Ia plus vive impreffion fur ton coeur; le plus difficile éroit de leur procurer !es mo. yens de fe voir, ton adrefie a fu lever eet obfhcle, c'eft a 1'amour a faire le refte. LISETTE. Comment, a 1'amour? SOPHIE. Sans doute. LISETTE. Mais, quand fous des habits d'hommes vous gagnetiez le coeur de la ComteiTe, votre frere n'en feroit pas plus avaucé, quoiqu'il vous reffemble infiniment, il n'eft pas poffible de s'y méprend'e. SOPHIE. Auffi n'eft-ce pas moi qui vais me préfenter ici. LISETTE. Comment ? SOPHIE. J'ai écrit a Delval d'obtenir une lettre de recommendation, du Commandeur Delbon, pour Monfteuc Luville, fon ueveu & frere de la ComteiT;. I! doic arriver aujourd'hui; la ComteiTe, qui va le prendre pour une femme, ne s'en défiera pas, & les agaceries qu'elle lui fera, ferviront a développer avec plus de facilité, tous les fentimens qu'ils pourront mutuellement s'infpirer.  Ï6- L'HEUREUSE ERREUR. lisette. Et votre frere eft inrtruit de ia rufe? t , sophie. Je men ferois bieu jrardée! n .„ lisette Pourquoi ? - , sophie. lu ne Ie connois pts; ennemi dp i* ,j Percherie, U »*fU^&\^%fc+ lisette, * j9c- t-eia peut devenir trés-plaifant. SOPhie. U faut fur-tout qu'il ienore aiif i» r.,:„ ■ - . ra. dans Ie village, & iu v?énd,« J f *5 ,e ^ ce qui fe paiiéra. S ra,nf°™er de tout lisette Hé, 11 votre frere VieDt a me rencontrer? sophie. Qu importe, pourvu qu'il n'v ait odnt a<*~ i- • devant la ComteiTe. Et c'ettTK ^5?"' lisette. LaiiTez-moi faire, me voiia bien inflrufte... &,.. SCÈNE VI. LISETTE, LUVILLE, SOPHIE. lu v i L l e. JLuette, eft.il jour chez ma feur/5 lisette. ü y a Iong-temps, Monfieur. f)„'«ft luville, („pperuvrn S,j>ii,.) eftce que c'eft que cette ch3mmQ pay(. ^  C O JU E D IE. i7 LISETTE, emèarraffée. Morfienr,... c'eft... LUVILLE. < C'eft!.., LISETTE. Je vous demande pardon, Monlïeur, C'aft ma coufine* LUVILLE. Pourquoi me demandes tu pardon ? LISETTE. Monfieur... c'eft que... dans les maifons.... on n'eft pas content, quelquefois, que les domeftiques foient fi prés de leur pays; les vifites des parens ennuyent les maitres... &c.., LUVILLE. Mais, point du tout; elle eft charmante la petite coufine! {Sophie fait la révérence.') CA part.) Qu'elle a de grace! (haut.) D'ou étesvous, ma belle enfant? SOPHIE. Monfieur, je fuis d'un village qui eft a fix üeux d'ici. LUVILLE, avec intérêt. Et, oü allez-vous? Q ie faites vous.? SOPHIE. J'aüois au chateau voifin, retrouver ma coufine. LUVILLE. Pourquoi faire? SOPHIE. Comme mademoifelle Sophie Delval a eu bien des bontés pour inoi.., LUVILLE. Vous connoiiTez mademoiP.lle Delval? SOPHIE. J'ai eu le bonheur d'étre élevée avec elle, je ne l'ai qnittée que pour fecourir mes parens, je viens de les ptrdre , & j'allois réclamer fes bontés, quand j'ai ap. pris que ma coufine n'étoit plus a fon fervice; n'o> B  18 L'HEUREUSE ERREUR. fant me préfenter ao chateau, je fuis venue la trouver ici; &, quand Monfieur eft entré, elle me difoit qu'il n'y avoit rien è efpérer pour moi. LUVILLE, vivement. Hé, pourquoi donc, Lifette? Hé, mais vous avez rort; il ne faut poinc abandonner cette jeune perfon* ne, cela feroit sffreux! II faut qu'elle refte ici. SOPHIE. Ah! Moufieur! qn'eile bonté! LISETTE. Monfieur, étant moi-même nouvellement recne dans Ia tnaifon, je n'aurois jamais eu la hardiefle de vous en faire Ia priere. LUVILLE, trés - vivement, Mais, pourquoi donc? J'airne a rendre fervice, moi! — Cette jeune perfonne n'a plus de parens; elle n'a point alfez d'expérience pour étre abandonnée a elle-même. II faut, Lifette, que vous en ayez foin, comme fi elle étoit votre fille. LISETTE. Oui, Monfieur. LUVILLE, vivement. Qu'elle demeure avec vous. LISETTE. Oui, Monfieur. LUVILLE. Et moi, je vous promets de reconnoitre les foins que vous prendrez d'elle. SOPHIE. Croyez, Monfieur, que je fuis vivement touchée de vos bontés. LUVILLE, trés - vivement. Hé, mais cela n'en vaut pas la peine; ce que je fais eft tout fimple; il n'y a pas de fpeétacle plus attendriffant pour une ame fenfible, que la beauté dans 1'indigence. Lifette.')  C O M E D I E. 19 Allez, Lifette, allez vi te donnerordre,demapart, qu'ori lui prépare une cbambre voifine de la vótre; il faudra qu'elle s'occupe, fans quelle foit obligé de fortir, •& vous anrez grand foin , fur.tout, de ne ' Ia charger jamais que d'ouvrages qui la diffippe, fans la fatigucr. LISETTE, paffant a la gauche de Sophie. Repofez-vous fur moi. — Allons, ma coufine, remerciez monfieur, & fuivez-moi. (Sophie fait une prtfonde révérence veut fortir, & Li/ette, en s'en allant dit: II eft pris), SOPHIE, bas a Lifétte. II eft bien aimable! LUVILLE, a Sophie. Que dit.es• vous, tout bas, a votre coufinef SOPHIE. Que je n'oublierai jamais le fervice que vous me rendez. , , LUVILLE, avec thaleur Je ne me bornerai pas a cela; mais, c'eft que vous m'intéreflez infiniment! LISETTE, a Sophie. Allons, encore une révérence, & partons. LUVILLE, la retenant. Un moment. — Comment vous nomme-t-on? SOPHIE, embarraffée. Te rat... J LUVILLE. Vous n'ofêz dire votte nom? SOPHIE, fe remettant. Pardonnez-moi, Monfieur, je m'appelle Mariane. LUVILLE; avec tendreffe. Eh bien, belle Mariane, croyez que je ferai mon poflible pour que vous puifliez vous rappeller avec plaifir 1'inftant oü le hazard vous a conduit dans ce chateau, B 2  so L'HEÜREUSE ERREUR. m Ah! Monfieur! ,e crois que je ne Toublierai ja- L UVILLE, (nès-vivement.) • ^ue voulez vous dire? .,. S„0P,HIE' (voulant s'en aller.) Adieu, Monfieur. ; LUVILLE, (ia retenant.) ■fc-ncore un moment. _ Lifette -nin* S O P II I E. mmettez que je me retire avec elle. r»h- iwL-ü V1L L E' ("vee k„a - n?aria1e' V0US P°uvez re^5 on doit étre Air dimpr.merle refpeft, quand on porte fur e front lemprewte de rhonnêtetd. y 'urieironr SOPHIE. Je me plais a ne pas douter de la vótre- mak M* debielle Sophie qui ma in/pfré 1 amour de" ag^" fe, m a toujoura dit, que la retenue dans leadiïcoure & la décence dans les .frons, étoient edeuspre! mieres qualités d'une fille honuête. — P^gt .„ . LUVILLE. Allez-donc, charmante Mariane, Tout me oaroft en vous au-defius de votre érat, & je7oh lZ t plus vive fatuftflion, que vous inipi ez autantdU* miration que d'eltime. loaa SOPHIE. t» nJfT r°U! 3Pi,rendra q«e' caa je fais de la vóf^,pa es ,f0,?8J.(lne le P™drai pour la mérlter. (hlle Jaluc). Adieu, Monfieur. L, IS E TTE, bas a Sophie, en s'en aüanu Hé bien! qu'en dites-vous?  KOMEDIE. 21 SOPHIE, (de mém';. > Qu'un homme aimable, dont 1'ame eft honnête, eft bien dangereux pour une femme fenfible. fortent.) SCÈNE VIL LUVILLE, (/*«/.) Quelle figure intéreflante! quel feu dans Ie regard! & quelle modeftie repandue dans toute fa perfonne! En vérité , j'avois entendu dire beaucoup de bien de Sophie üelval, mais fa petite éleve m'en donne la plns haute opinion! Non, jamais femme n'a fait une telle impreflion fur mon coeur j Ce qu'elle m'a dit en s'éloignant, m'a fait treiTailiir. Qu'il feroit doux de s'en faire aimer! Mais fi fon ame répoad a fon exiérieur, qu'il feroit affreux d'en. abufer! SCÈNE VIII. andre', luville. andre', (cherckant des yeux. Dam! je ne trouve perfonne, moi! l u v i l l; Eï Que voulez - vous, mon ami ? A N D R E'. Etes-vous de la maifon, vous? l u v i l l e. II y a quelqu'apparence. ANDRE'. Hé bien, allez annoncer que ma rnaitrefle eft la. 3 3  is L'HEUREUSE ERREUR. LUVILLE. Ah! ah! & qui eft votre rnaitrefle? A N D R E'. Non, non, c'eft mon maitre que je veux dire: que je fuis donc béte, moi! LUVILLE. Hé bien, qui eft votre maitre ? ANDRE'. Dam! c'eft Monfieur Delval! LUVILLE. M. Delval eft ici? ANDRE'. Dam, oui. LUVILLE. Etil n'y a aucun de mes gens dans 1'antichambre? ANDRE', ( itant fon chapeau.) Vos gens? Eft-ce que vous étes le maiire, vous? LUVILLE. A peu-prés. ANDRE*. Dam! je ne favois pas cela, moi. LUVILLE. Je vais au-devant de lui. ANDRE'. C'eft inutiïe, LUVILLE. Comment ?' A N D R E'. II eft Ia. LUVILLE. Qu'il entre donc. ANDRE'. . Entrez, Monfieur, Monfieur.  C O M E D I E. 23 SCÈNE IX. ANDRE', LUVILLE , DELVAL. LUVILLE. Te dois, fans doute, tendre grace au hafard,MüiiGeur, car lui feul peut vous avoir conduit dans notre folitude. DELVAL. Vous êtes dans Terreur, Monfieur, mon voyage eft prémédité, & j'aurois été défefpéré de ne pas vous trouver ici. LUVILLE. Serois-je affez heureux pour pouvoir vous être utile? DELVAL, icherchant I* lettre.-) Te fuis chargé de vous remettre une lettre. LUVILLE, De quelque part qu'elle vienne, je dois avoir beaucoup d'obligations a celui qui me 1'écrit,puifqu'elle me procure le plaifir de faire votre connoiflance. DELVAL. C'eft le! Commandeur d'Elbon qui a bien voulu me la confier, & j'ai recu cette faveur avec toute la reconnoüTance qu'elle mérite. LUVILLE. C'eft de notre chet oncle! Hé! comment fe porte- DELVAL. A merveille!... & vous aimant toujours avec ten- dreffe! . LUVILLE. Ma foi, nous lui rendons bien! (// Ut.) „ Je vous „ reeommande vivement la perfonne qui vous remet- B 4  =4 L'HEUREUSE ERREUR. „ vez combien Je vous ai„,e tous es& ï né bügaiions de vous Jol enlZ .'b"^C0Up d °crains bien que vous ,e ui ' ,C'' m!"s ie moi. en avez Pas au'a"t que Doü vient? LUVILLE. tfeSmffeur^ewf n"yM * Pén'r: Cediateau »PP«lës a S t'h'oJéur." ' re9J,S JamaiS «««•^i Ah ! c eft plaifant fa.' HeimiDELVAI" (/' LUVILLE, (,5 Andrê.~) ^ Queft-ce que tu trouves donc de fi pi,|ftnt aCe- ANDRE', Cr,«« ) C eft que la Daaie que ie Tervnic i*c • • tant, tafic... J lervois les aimoit tant, DELVAL, O Andrê.) elle^ffil-; SlntS MaiS mte *™C™ e«' L U V I L L E. . C'eft au-déla de toute exorefïïnn i cspreiijon; au point que je  C O M E D I E. ss doute fort que malgré la priere de mon oncle, vous puifliez obtenir la permifïïon de la voir un feut innam. ANDRE'. (aP*rt, en riant.) Ah! Madeinoifelle Delval, je vous poutferai a bout. (Uti moment de fiknee.)  C O M E D I E. 45 delval. Qu'avez - vous donc? vous avez 1'aiï bien férieux! luville, ( d'im air fsmbre.) Vous étes Gentilhomme? delval, ( avecfang-jrotd.) Te ne penfe pas qu'on en doute. 3 luville. En connoiffez-votrs tous les devoks? delval. A quel propos me faites-vous cette queftion? luville. C'eft que vous êtes jeune encore. delval. Te le fais. luville. Et qu'on pourroit vous les apprendre. delval. Te ne vous entends pas. _ luville, (s'apprtchant de kit., Je vais m'expliquer mieux. delval. Earlez. luville. Vous avez vu ma fceur? delval. Avec le plus grand plaifir. luville. Vous 1'avez trouvée?... delval. Charmante! l u v x l l e. Vous lui avez dit?... delval, Que 1'amour... luville, (fme»x.J L'amour!  46 L'HEUREUSE ERREUR. delval. Qu'a donc ce mot de fi revoltant? luville, (Je prenant par la mainS Ecoutez moi. ' delval. J'écoute. luville. Vous connoiiïèz les loix de 1'honneur? delval. J'en fais gloire! luville, (mettant fon ckapéauA II faut me faire raifon. d t l v a l. Raifon! luville. Tous m'avez manqué. delval, Moi? luville. Vous. delval, En quoi? luville. Vous avez palTé les bornes que je vous avois prefen tes. Vous avez violé les droits de 1'hofpitalité. delval. Je n'ai pas cru pouvoir vous offenfer, en declarant 4 votre fceur, les feminiens qu'elle m'inlpire. l u v i l l k. Vous 1'avezjfait: & j'en demande raifon. delval. Non, je ne me battrai point contre le frere de celle que j'adore! luville, r a part, en riant.)- La voila bien embaraiTée. (Haut. \ Mauvais pré. texte. Allons, allons.  C O M E D l E. 47 delval. Ecoutez-moL... . luville, (Fépée a la mam.) Rien, rien. . delval. Un mot. luville. Allons, allons, défendez-vous. delval, (mettant fon chapeau.) ^ Vous le voulez, Monfieur? II faut vons fatisfaire. luville, (apart, furpris.) Comment, diable! delval, ifongant fur lui.) C'eft vous qui m'y forcez. (Luville voyant Delval foncer fw lui', rompt précipitamment, dam la crainte de le bief er, Delval faute au défarmement, & lui óte fon épée.) SCÈNE XXIII. LUVILLE, LA COMTESSE, DELVAL. la comtesse. Quel bruit' que vois-je? De l val, (lui préfentant F épée de Luville.) Venez, Madame, venez appaifer 1'injufte colere da votre frere; il vouloit percer le cceur de fon ami'. la comtksse, (rendant Pépée.) Quoi! mon frere!... luville, ( bas a la Comtefe. ) C'eft un diable!  48 L'HEUREUSE ERREUR. l a comtesse. Et, d oü nak le fiijet de votre querelle? luville. I! ofe vous dire qu'il vous aime, & ne fonge point a vous epoufer. 6 F delval. Et vous 1'avez pu croire! La pafïïon... la comtesse, (riant.') La paffion!... v J rr . , delval, loujours de 1'ironnie! LA comtesse. He bien, Monfieur, je vais vous parler férieufement: maimez-vous? delval. Avec Ia plus vive tendreffe! la comtesse. A quoi cela nous menera t il? delval. A tour, fi vous voulez. la comtesse, (fouriant.) Ce tout la ce reduit a bien peu de chofe. delval. Envifagez vous comme une bagatelle, une alliance ailortie, dont 1 amour auroit formé les nceuds? luville. ƒ Une alliance aiïbrtie! _, delval. Jofe le croire. la comtesse. En bonne foi, eft ce que vous y penfez? „. d e l v a l. Si ] y penfe! „ , luville. Parions net. delval. Soit.  CO M E D I E. 43 luville. Votre intemion eft-elie de vons marier? - delval. ( Saus doute! luville. Avec qui? delval. *" Avec votre fosur. luville. Bah! delval. Comment, bah? la comtesse. Le moyen de vous croire? delval. Eft tout firnple;' que le Notaire vienne, que votre frere difte Ie contrat, & je figne aveuglément. la comtesse, (riant noncbalamneut.') Vous badinez! delval, (.avec f,u.) \ Mais quelle horrible opinion avez-vous donc concue de moi ? Ah ! banniffez cette méfiance injurieufe. Croyez que mon bonheur eft de vous aimer, de pas. Jer mes jours auprés de vous, & de répsrer, par les >p!us tendres foins.tous les chagrins cruels querhimen vous a fait éprouver. la comtesse, (bas A Lnvillt.-) Ah! mon frere! luville, (bas a la Comtefe.) II faut Ia mettre au pied du mur. (Haut.) Hé-bien, Monfieur, je me rends & je vous accorde ma fceur. delval. Ah! quel comble de joie! luville. Mais il faut que tout fe termine a 1'inftant méme. D  50 L'HEUREUSE ERREUR. DELVAL. Vouloir pater l'inftant de mon bonheur, c'eft re« doubler ma félicité. LA COMTESSE, (_evec tendrijfn.) Delval, cher Delval ne me forcez pas a vous haïr. Je vous aime plus que vous necroyez, & je défire avec une extréme ardeur que vous m'autorifiez k vous aimer toujours de méme. DELVAL. Ah ! mon bonheur paffe mon efpérance, & je cours chez le Notaire. LA COMTESSE. Delval... vous levoulez? DELVAL. II va mettre Ie comble a ma gloire. LA COMTESSE. A votre gloire! DELVAL. Et quel plus beau trioinphe que le don de votre cceur & Ie titre de votre époux? LA COMTESSE, (trés -féverement.) Hé bien, Monfbur, allez donc chez le Notaire, faites dreffer le conirat, tl vous 1'ofez , mais fongez bien que ma haine fera le prix de vorre perfidie. ' DELVAL. Mon cceur eft trop pur, pour redouter cette menace. (// appelle André.) André?  C O M E D I E, 51 SCÈNE XXI F. Les A&eurs précédents & ANDRE'. ANDRE', (acnurttnt ) Me vla Madame. DELVAL. Hé bien, encore? ANDRE'. Dam! c'eft 1'habitude. (La Cemteffe & Luville éclatent de rire.) DELVAL. Qu'avez-vous donc? LA COMTESSE, & LUVILLE. Rien, rien. DELVAL, O Jndri.) Vas t'informer oü loge le Notaire du lieu, & viens e prendre pour m'y conduire. ANDRE'. nHé pardi! il loge la, tout vis - a ■ vis la porte du mali. DELVAL, (vovlaat firtir.) J'y vole; & ce jour fortuné va m'aflurer a jamais ie époufe adorée! & un ami refpeétable. ( // fort avec André.) D 2  52 L'HEUREUSE ERREUR. SCÈNE XXV. LUVILLE, LA COMTESSE. LA COMTESSE, (/« regardanl Jirtir.) Ah! c'eft poulTer trop loin 1'impudence! LUVILLE. Oh! qnelle femme! LA COMTESSE. Hé! vous n'avez pu I'effrayer? LUVILLE. Leffrayer? Bien au contraire. LA COMTESSE, (f«»(,) Comment donc, au contraire? LUVILLE. . Oui parbleu; quand je me fuis préfenté pour 1'intimider, elle a foncé fur moi comme un lion: j'avois une peur horrible de la bleiTer, je me tenois fur la défenfive. Quand elle n'auroit jamais fait autrechofe^ elle n'en fauroit pas davantage. LA COMTESSE. Ah, mon frere! LUVILLE. Quoi? LA COMTESSE. Je ne puis vous exprimer ce qui fe paffe dans mon ame! LUVILLE. La mienne eft plus agitée que Ia vótrej LA COMTESSE. Mon frere, fi vous aimez Sophie, il faut tout] lui pardonner, qu'elle devienne ma fceur, qu'elle par-  C O M E D 1 E. 53 :age, avec vous, toute ma tendrefle, que nous ne ïous quittions de la vie. LUVILLE. .11 n'eft plus temps. LA COMTESSE. D'oü vient? SCÈNE XXVII. LUVILLE, (feul.) Cette plaifanterie m'éloigne de ma chere Mariane. Jeureufemem elle va bientöt finir. D 3 v SCÈNE XXVI. LUVILLE, LA COMTESSE, LISETTE. LISETTE ,(accourant.~) Voici Mademoifelle Sophie qui revient avec le Jotaire. LA COMTESSE. Je vous laiffe avec eux. —— J'écoute & je pa. oi'.rai quand il en fera temps. (Elle entre dans fon cabinet.) LISETTE, ia part.) Moi, je cours chercher ma maitreffe. 11 eft temps ■-t'elle fe découvre. " (lik fort.)  54 L'HEUREUSE ERREUR. SCÈNE XXV11L LE NOTAIRE, LUVILLE, DELVAL. LUVILLE. Comment donc, le contrat eft déja drelTé? LE NOTAIRE. Monfieur ne m'en a pas donné le temp?. II a faicj mettre les noms des futurs époux, la notedefesbiensj les articles font reftés en blanc, & vous êtes chargé,! Monfieur, de les remplir comme vous le jugerez al propos. LUVILLE. Rien de plus honnête! LE NOTAIRE, gallaat AU table ) Et fi Madame la ComteiTe jouit d'une haute fortune, Monfieur, affurément, ne lui céde en rien. L U V i L L E. Delval ? DELVAL. Monfieur? LUVILLE. C'eft donc tont de bon? DELVAL, Quoi! vous en doutez encore? LUVILLE. Vous fentez-vous capable de rendre ma fceur beureufe ? DELVAL, Monfieur, en partageant mon fort, on n'aura ja-i mais a fe plaindre ni de mon cceur, ni de mon caractere, ni de ma conduite.  , C ÓM E D I E. 55 LUVILLE. Cette réponfe-la eft rout-a-fait équivoque. DELVAL. Équivoque? LUVILLE. Oui, oui; ne biaifons pas, — êtes-vous bien dé:idé a vous marier? DELVAL. Sans doute. LUVILLE. Avec une femme? DELVAL. Comment avec une femme? LUVILLE. Oui, oui. Je m'entends. DELVAL. Mais, moi, je ne vous entends pas du tout. LU VILLE. (lui montrat le ceatmt.') Qu'eft-ce que cela? DELVAL. Hé! vous le favez bien, c'eft mon contrat de manage. 6 LUVILLE. Avec qui? DELVAL. Mais, avec votre fceur. LUVILLE. Et vous le fignerez? DELVAL. Si je le fignerai! LUVILLE. Sans faute d'orthographe ? DELVAL. Belle queftion! D 4  50* L'HEUREUSE ERREUR, LUVILLE. La, ce qu'on appeile figner! DELVAL, (trés - viiiment.) Hé oui, oui, homme cruel que vous êtes, je Ie iignerai, & de mon fang s'il le faut. LUVILLE. Dois-je faire appelier ma fceur? DELVAL. Sans doute, LUVILLE. Prenez garde, n'aliez pas me faire faire une fauiTe démarche! DELVAL. Hé, ne craignez rien! LUVILLE. Allons-donc: — (il appeile Lifette.) SCÈNE XXIX. Les précédent, LISETTE. LISETTE, (accourant.) Monfieur? (faifant fctonnée en voyant Delval). Ah! Ciel! DELVAL, (la reconnoiffant.) Hé, que fais-tu ici? LISETTE, (d Delval d demie ■ voix. Soyez tranquille, je n'ai rien dit. DELVAL, étonné. Comment rien dit? LISETTE, (fortanten voyant entrer Is Comtefe.') Non, detnandez plutót a Madame. (Elle rentre vtie.)  C O M E D J E. 57 SCÈNE XXX. LE NOTAIRE, LA COMTESSE, LUVILLE, DELVAL. LA COMTESSE. Sa préfence vous incerdit? DELVAL. Moi, pourquoi donc ? LA COMTESSE, (bas a Luville.) Quelle audace! LUVILLE, (bas a la Comtefe.) Voyons jufqu'oii cela ira. (Au Notaire.") Allons Monfieur, approcbez, & fignons. LE NOTAIRE, (prófentant la plume a Delval.) A vous, Monfieur. DELVAL. Monfieur, je fais qu'il eft dans 1'ordre que je fi0rne le premier.—— Mais.... LA COMTESSE. La main vous tremWe, n'eft-ce pas? LUVILLE. ]e le favois bien! DELVAL. Un moment, s'il vous plaic, point de faulTes inter- prétations. Vos foupcons doivent juftifier les miens. On connol: 1'averfion que Madame a témoigné pour un fecond engagement; & après qua j'aurai figné, eile pourroit tourner tout ceci en piaifanterie. LA CGMTESSE. Ah! fort bien, c'ett vous qui me fuppofez le d.'sfein de vous perfiffl-'r. D 5  58 LTIEUREUSE ERREUR. DELVAL. Parrlpn, mais je Ie crains. LA COMTESSE. Comme onjuge d'aprè» foi-mêrae! DELVAL. Ah! Madame LA COMTESSE. Votre embarras eft naturel, mais fi vous craignezla plaifanterie, pourquoi 1'avez vous poulTée fi loin? DELVAL, Hé bien, faites-moi voir que ce n'en n'eft pas une • raflurez mon cceuj aiarmé, fignez Ia première * LA COMTESSE. Eft ce la ce que vous defirez? DELVAL. Oui. LA COMTESSE, (&w.) Soyez content. DELVAL, (tranfporté.) Ah! je fuis au comble de mes vceuxl Allons, a vous mon cher frere. LUVILLE, (Jgnant.) Je le veux bien, ma chere iceur! DELVAL. Ma fceur.? LUVILLE. Oh! ma foi, il n'y a plus de milieu, il faut quitter le bal ou lever le marqué. Voüa !a piume. DELVAL, (fignantl) Ah! je n'ai jamais rien figné de fi bon cceur. —Vous êies a moi ma belle ComteiTe, mon triomphe eft parfait. LA COMTESSE. Pas tout-a-fait Madame. iD E L V A L. Que dites-vous donc?  CO M E D I E. 59 LA COMTESSE. Que lorfqu'on veut badiner les gens, on doit bien prendre garde de ne pas donner foi - merae dans les piéaes qu'on leur a tendus. F DE L VA L. Te rette confondu. J LACOMTESSE. Je le crois; j'étois inftruite de tout, & j'ai voulu voir iufqu'oü vous poufferiez la faufleté. DELVAL. Moi, daignez m'expliquer. LA COMTESSE. Eloignez-vous de mes yeux. — Vous n'avez pai voulu être mon amie, Sophie? Et je vais faire mon poffible pour vous haïr! SCÈNE XXXI, & derniere. tisette, LUVILLE,SOPHIE, LACOMTESSE, Delval, andre', le notaire,(*m«.) SOPHIE, (a la Comtefe.) Pour me haïr? Ehi qu'ai je donc fait pour mériter un fentiment fi cruel? LA COMTESSE. Qui êtes-vous? Que'voulez • vous? DELVAL, (la reconnoifjant.) Hé! c'eft ma fceur! LA COMTESSE & LUVILLE Sa fceur! m LISETTE. Elle-même. SOPHIE. Pardomiez. moi, Madame, 1'heureux artifice dont  60 L'IIEUREUSE ERREUR. je me fuis fervi pour rendre votre cceur a 1'amour Moi feule je vous ai trompé, & je m-en féli. ate. Je fuis la vérirable Sophie, & votlaie Marquis De val mon frere. Vous n'auriez jamais confenti a Je voir, fi fon fexe avoit éré connu de vous; mais i'ai dü lui cacher ma rufe & je I'ai fait; il De feroit pas digne de fon bonheur, s'il avoit aidé a tromper ce qu il aime. r DELVAL. Ma chere dpoufe! LA COMTESSE. Quoi réellement vous n'êtes pas Sophie? DELVAL. Votre cceur a-t-il pu s'y me'prendre? LA COMTESSE, (après un moment detflence fe jette dam les bras de Sophie A= dit:) ' Ah! Sophie, que je vous aime! (E/les s"embraiïeut.) LUVILLE, (Ji Sophie.) J Ah? Mariane! Mariane! SOPHIE. Etes-vous faché de Ia méprife? LUVILLE. Non; mais je voudrois que mon erreur eüt été plus longue! e SOPHIE. Pourquoi ? LUVILLE. Pou' jeuir du plaifir de vous donner la marqué la plns eclatante de mon amour. SOPHIE. Et m'accabler du poids de la reconnoifiance 1 Non pas, s il vous plèit; il ftat que tout foit'éral. Vous mavez protégé fans me connoitre; je vous clire ma main, fommes-nous quitte? L U V I L L ' E. Ah ! c'eft moi qui vous doit tout.  C O M E D I E. €i LA COMTESSE. Et ma promelTe ?\ LUVILLE. Vas ma fceur, 1'amour t'en dégage; aime bien Delval, il le mérite, c'eft un brave garcon; qu'il m'accorde fa fceur, & que cette doublé union uous reuniffe a jamais. DELVAL. Je lui dois tout mon bonheur; il eft bien jufte que j'aflure le fi?n. SOPHIE. Aflons, & que nos cceurs foienc a jamais partagés entre 1'amour & famitié. FIN.