COMMERCE DE LA MER NOIRE.  Noms des Libraires AJJociês. A AMSTERDAM. d. j. changuion. b. vlam. j. a. crayen schot. j. tan gul ik. c. n. guerin. t. van harrevelt. A LEIDE. les Fr er es mürray. A ROTTERDAM. L. bennet. A UTRECHT. 3. WILD.  OBSERVATIONS SUR L E COMMERCE DE LA MER NO I RE , ET DES PAYS Qül LA EORDENT; auxquelles on a joint .^f.DIfX mémoires süs'le cox" merce m mm it~bi, it/n,y '99' l'isle de candie. tC-JA Ourrages Ompsfés fur les lieux mtmes, éf daas lefquels on ttouvera amplement détaiïliis tattes les t.fptces dt wmthewUfu m finperwwi ffjiexpartatim , arte leurt " tmtitfr, UuTsz'quanti:és £f leurs-pnx, ainft qut Vécaluaticn de tcus les p:ids, rzefurts] ff wmmpes, fvr Ie piei de cewe de Fra-ice, d'après lefgals m pourraferigur. k AMSTERDAM,LEIDE,ROTTERDAM £? UTRECHT. ^i&jfc^LES LIBRAIRES ASSOCIÉS. .„ ^JkDCCLxxxviL   A VANT-PROPOS La Czartke Catherihe II, par droit de coru venance, bétont enfin emparée en 17S3.de la Crime e £f de tous les Etats du Khan des Tartares, £3* defirant , ainji que 1' Empereur Ioseph l\ ,tirer parti des avantages que pourrait procurer le Commerce de la Mer Noire, lequel était toujours 'refté concentré entre les mams des Turcs qui ne permettaier.t k aucune PuiJJance Européennt d'y nav'guer, les JPapiers publics annor.gant de toutes parts les dé. marches de différents Minijlres Etrangers, principalement de ceux de France £p de Hollande, onfris du Divan , pour obtenir, en vertu de leurs Capitulations aveeJa Porte, la navigation du PontEuxin, avee la même liberté que les Ruffes £ƒ let Jmpériaux, l'on croit que le Public verra avee intérét Iti Objervatioms fuivantes qui ont ité faitss pendant les années 1759 o 1762 , fur le Commerce immenfe £f lucratif que ten pourrait onvrir dant les pays qui bordent cette Mer, par laquelk on pourrait communiquer a la Georgië, è la Mer Cafpienne, a la Petfe même jujqu'au\ Mogcl fif i la Chine;Jans parler de l'avaw.nge trés effer.tiel que retireraient les Négocian; Europêens éiablis è Conjiantinopie, qui troaverahnt alors de quoi fermer leurs retours avee les prodttits de la Mer-Noire,. pour leurs h&timens qui prelque tous s'en réviennent en Chréiieneté fur leur Left , tu font obligés d^a lier faire Echelle a Smyrne, a Mep, ou dant 1'Archipel pour y faire des chargemtns; ce qui kt tinjlitue en frats 6? ne kur rètiffit pas toujours. Uk Francais, nommè Loujs Antoine Duvalï avait, il y a environ quinze a Jeize ans, projetti ,« Paris une Société, afin de former avee des MM* Moiuciif & mins un établijftment pour fqire Is * 3  VI AVANT-PROPOS. Commerce de la Mer-Noire ; mris, tnalgré des Lettres Patentes du Roi, que I on avait obtenues , cette Société fut réfiliée, & le projet manqua faute de connaijfances £f de renfeignemens; de forte que le Sr. Duvalz fut obligé de tout abandonner, après des dépenfes afjez confidérabks qui l'écraferent. 11 crut qu'avec Is peu de fortune qui lui reflait, ü pourrait réujfir en Russie , mais il y échoua pareillement: forcé de quitter encore ce pays-la, il mint a ,'lmflexdam en 1783 , dans l'efpérance de trouver des perjonnes qui aiopteraient Jon plan , fans autre examen £ƒ Jur fa parole. Plein de Jon idee, il préfenta Jon projet a plujieurs Nègocians de cstte mille, ainft qu'a quelques-uns des premiers MagiJlrats ,qui l'accueillirent tres favorablement fous les aufpices de M. l'Avocat. ..... iont je lui avais fait procurer la connaiffar.ee; mais comme il n'avait qu'me teinture trés imparfaite du Commerce £f que faute de pratique il ignorait totalement la marche du Négoce,de même que la quantité & la qualité des marchandifes d'importation d'exportation des pays qui bordent la Mer-Noire, ainfi que les prix, les mefures, les poids les monnoyes courantes, fon projet tout beau &f tout bon qu'U était, 11e pouvait gueres avoir lieu faute de renfeignemens fur tous ces oljets. Ayant appris par le Sr, Cérisier, alors Rédacteur de la Gazette Frar.gaife d'simflerdam, que j'étais pojfejjeur d'un manufcrit rclatif au Commerce ,de cette Mer, il l'engagea a me prier 'de lui en proturer la le&ure; il ne Vete pas plutit faite, qu'U fentit que eet ouvrage lui devenait abfolument néceffaire, afin de faire rèuffir fon Pi.an £p H me fit pendant longtems les inflances les plus fortes pour lui prêter mon manufcrit; ce que je fis fur fa. reconnaifjance en date typrimiw Awil 1784.  A V A N T-P R O P O S. VU Muhi de mm ouvrage , il iravailla vigcureufement a faire tèujftr fin projet &Jt denouvelks démarches auprès des Magijlrats ö> des Negocians chez lefquüs il s'était déjiï introduit; mats fis pr*. tentions fe trouw* peut-itre trop fortes pour un Essai en petit, ou pour d'auires raifons quej ignore il a pris le porti au mois ds fuilkt 1785 m«Jter furtiveraent Amflerdam, après avoir tente de venire a un Négociant Franpais de cette vtlle, mon manufcrit dont il je difatt fauteur. C'est déja Ie ficond ouvrage que Ion menkve & dont je fuis la viüime, fans pouvoir en tirer raifon; le premier a paffe a Paris , a mon tnfgu, Ra été attribuè a un Magipat trés conmi Vètabliffement qui a kè fabd'aptis mntravatla pris depuis 1777 u>u confiftance tres Inllante & trés folide: ft ce premier ouvrage que Ion naja-t que copier mot a mot tapés moi comme tlmejt factie de le prouver, n'a pas été fum dans tous fon contenu , il a toujours fervi a rctailflement dont j'avais donr.è h Plan tj drefje tous les artu cks t il embraiïait un plus gran.i timbre d objett qui lui aurakntdonnèplusd-extenfion,üjerait devmu plus utile a toutes les claffes des Citoyens mêms les plus élevées, ainfi qu'a beaucoup de Débiteurs malheureux que ïon ruine en pure pene fans ks foulager, l'Etat en ourait retiré un tres grand avantaire. ... ~ TalSux fitte utile & ce pays, ou dipuu neif ans je trouve un repos que le mi en me rejuje; flitté de lui donner cette marqué de mon atuichement, je ïhéfite pas un inftant de lui faire part de mon travail, afin que ceux rt''entte les Negocians Hollandais qui voudront entrepremtede cm. rir cette carrière pour fomer un Jtabliffement, juijfint profiter de mis lumierts £f laffiQir jur * 4  TUI AVANT-PROPOS. des fondemens Jolides , fans denner a l'avMure : je me ferai toujours un plaifir de donner tous les renfeignemens qui Vm dejïrera £p pi feront es mon pouvoir. ' Ce que je peux dirc au fujet de ces Obsekva» tioks , c'efl que plufieurs perfonnes trés infiruites a' qui j'en ai parlé c? qui les ont lues, m'ont dit qu'U n'avait encore paru aucun Ouvrage auffifuivini ttujji détaillé fur le Commerce de la Mer-Noire; que le peu de Notions qui fe trouvent jufqu'a préjént éparfes dans différens livres que beaucoup de gens font hors d'état de fe procurer, font trop vagues pour en titer le moindre avantage j que la plupart même de ces Notions font trés informes & trés etronnées £f quainfi je rendrais un trés grand fervice au Commerce de publier mes Obsekvatjons. D'ailleurs , voici la Czarine £f l'Empereur qui font naviguer leurs Idtimens Jur cette Mer; les Francais, les Anglais, les Hollandais, principahmerit par le canal de leurs Ambaffadeurs a Con~ Jlantinople, MM. de Choifeul- Oouffier, Ainflie ïf Dedem, follicitent aujourd'hui trés vivement la permijfion d'y trqfiquer, en vertu de leurs Capituiations avee la Porte; les Danois-, les Hambourgeois , les Suédois, les Polonais , les PruJJiens ,■ les Fenitiens, les Efpagnols, les Napolitains qui tommercent avee la Capitale de ïEmpite Ottoman viendront enfuite. Toutes ces Natirns £p principalement les Francais, &P les Hollandais leurs ' Alliés, font charmés d'avoir des éclahciffemens fur le Commerce trés étendu, mais encore peu connu, que l'on peut faire dans cette Partie du monde, dont le Turc interdifait la navigation a toutes les Puisfances Européennes, qui, comme je l'ai dit ei-deffus, poutraient, par cette voye, faite avee plus d'aifance 13 ie projit le Commsree d'AJiman, 4e f»  AVANT-PKÖPÖS, 13? Ceèrgie , de la Pcrfe £? même jufqu'au Itöogol (tf a la CMne , d'oü l'en pourrait tirtr dans Pafi térieu des tetres, diverfes fortes de marehandije; , nvec ien moins de frats , de dangers £ƒ de umA jiinfic et ouvrage, que l'on peut appelier ejjentielalfolument nècejfaire pour toutes les Netimi eommerpantes de l'Europe , ne peut manquer d'être lien accueilli pnr rapport aux détails intéreffans dans lefquels je fuis entré. En iivrant eet ouvrage au Public, je ne ptètenii pa! le donner comme un Proiet infaillible; cepen* dant je le crois bon , praticalle & avantagiuX peur ceux qui le vcudront exécuter, pourvu qu'U feit dirigé avee prudence £f économie: j'ai expofè les avantages qui en peuvent rêfnlter, mais ovjft j'ai préfenté les écueils que l'on devait éviter , les diffitultés qui fe rencontreraient, c.fin de n'mduire perfonne en erreur: c'ejl a ceux qui voudrmi tntreprendre eet ètablijfement, a Men prendre leurs tnefures: au refte, je laiffe a des gens plus »'# firuits que moi a pefer les raifons' que l'on peut alléguer pour ou contre eet Ètablijfement. Mon deffein n'était nullement de rendre publi' ques ces Observations , qui depuis plus de vingt ons repofaient avee d'autres papiers: je ne les avais rèdigées que pour mi fatisfaüion , afin de m'en vendre eompte a, moi ■ même; mais je m'y trouve forcé par les procédés du S'. Duvalz , fur le tempte duquel je ne métendrai point, fachant encore avoir des égards pour les malhtureux. D'aiU leurs la copie qu'U t:ent de moi n'ejl point complette, il mar.que beaucoup d'articles que j'ai retablis d'après mon criginal , principalement fur la parite de la Natolie qu'U ne connaït point, oü il n'a jamais été £f fur laquelle il n'avait aucune notion , ainfi qii'il en eonvient lui •mime par uns  X A V A N T-P R O P O S.' de fes Lettres, que je conferve avee teute fa correjpondance, qui prouve qu'U n'a fait que traver* fer le Budziac, la Valachie £f la Moldavië, ou il ■ n'a fait aucun féjour. Amftérdam. i Juillet 1785. ERRATA. Page 3, lignè 13, ainfi que de ^Encyclopédie, lifez ainfi que de celui de 1'Encyclopédie. Page' 10, ligne 14, Orbcy, lifez Or-Bey. Page 23, ligne 18, ufage, lifez triage. Page 26, lig. 2 & 3, pieds, lifez picsf Page 32,- ligne 11, du Khan, lifez d'un Khan. PaSe 33/ iigne 2, ona porté ,/«ƒ«; on appone. Page 34, ligne 5, c'its, lifez dites. Page 46, ligne 4, elles, lifez ils. Page 49, ligne i5,27pialtres, lifez2i piaftres. Page 51,ligne 9, d'or plan, lifez d'oripeau. Page 59, ligne 9, cerner, lifez cernir. Page 59 & 60, lig. 29 & 1. fupprimez de Conftantinople. Page 82, ligne 24, après abCurde, ajoutez ce. Page 82, ligne 25, qu'il, lifez fans qu'il. Page 116, ligne 8, coutins, lifez coutnis. Page U9, ligne 7, avee du, lifez autant de. OBSER-  OBSERVATIONS SUR L E COMMERCE DE LA MER N O 1 R E. INTRODUCTION. LEsNations Européennes n'ayant jamais pu obtenir du Grand - Seigneur Ia permisfion de faire le Commerce de la Mer Noire, il leur eft conféquemment refté inconnu. On peut cependant aflurer que le commerce y eft fufceptible d'une grande ctendue & que les établiffemens que l'on y formeraic, feraient dans le cas de devenir fort avantageux. Les Jéfukes qui ont été pendant quelque tems établis en Crimée, mais d'oü ils onc été chafles,& les autres moines établis en Georgië & en Armenië, Ia plu-! part trés ignorans, ne nous ont donné que des relations trés imparfaites despays qui bordent cette roer. Quelques perfonnes  ■COMMERCE DE LA . qui ont ofé y tenter le trafic, n'en .ont ^donnë également que des notions trés obfcures & trés fauuves. Me trouvant a Conftantinople, je me h'ai étroitement avee M, Broflard , Médecin qui pofledoit plufieurs langues, & ayant cherché par fon aide a meprocurer des renfeignemens fürs touchant le Commerce de la Mer Noire, je pus y parvenuen m'adreflanc a un Juif habitant de ;Caffa, lequel avait voyagé dans toute la Crimée, dans la Pologne, chez les Nogais, dans la Ruffie , & j'eus en outre le bonheur a force de recherches, de faire la connoiffance d'un Arménien qui avait parcouru le Couban,ainfi que le pays des Abazes, chez lefquels il avoit été efelave; également d'un Grec, qui avoit demeuré longtems a Trebifonde , a Rizé & a Sinope; ainfi que d'un Géorgien qui avait voyagé en Perfe, & de quelques Particuliers & Patrons Grecs qui avaient parcouru fes cötes du Pont Euxin. Je pafiai enfuite a la Canée dans 1'ifla de Candie avee M. P*** Conful de France, hornmc fort in (Ir uit, lequel avait demeuré cinq a Qx ans en Crimée en qualité de Réfident de France auprès du 3Shan des Tartares, &. ce fut d'après fes  MER N O I R E. 3 iïiftrüÊtions que je mis en ordre les diffé>rens matériaux que je m'étais procuré. De retour a Paris je les vérifiai avee quelques perfonnes qui avaient parcouru la Crimée, la Moldavië, la Valachie & partie de la Pologne; enforte que je puis fans préfomption dire, qu'aucun auteur avant moi n'efl; entré dans un détail aufli inftruétif, aufli certain, ni aufli lumineux que celui que je donne fur le Commerce de la Mer Noire, & je puis en dire tout autant du Grand Dictionnaire de Commerce , ainfi que del'EHcyclopédie, oü Ton chercherait en vain la majeure partie des articles dont je fais mention. Le terrein de Ja Crimée ferait extrêmement fertile, s'il était cultivé & ce ferait un pays abondant en toutes fort es de chofes ; mais la plupart des habiuns font trop peu foucians pour chercher k fe procurer par le labourage une fubfiftance afliirée, & ils préferent d'être valets chez les Mirzas, Gentilshommes Tartares, qui font trés orgueilleux & font confifter leur falie dans une fuite fort nombreufe. D'ailleurs 1'indolencedesTartares» ainfi que l'efpric de fainéantife & de pil» lage qui les domine, met obftaclé a la culturele mêmequ'a la Populacion. Oa fait A %  4 CDMMEiRCE BE LA pafier ces peup'es pour des brigands 5 mais ils ne font pas tels en tems de paix, car ils font alors fort hofpicaliers, foit dans leurs villages, foit dans les campemens des Hordes, oü celui qui eft le plus 3 fon aife, fournit la nourriture ainfi que le coucher aux voyageurs, fans en exiger le moindre payercent. II eft même arrivé qu'un voyageur ayant oublié chez eux quelqu'effet, ces Tartares ont fait courir après lui pour le lui rendre. Les Pays dont le Commerce eft du resfort direct de la Mer Noir.c ,. font, au £s!ord, la Crimée, les Noguis & la CircaJJïe; a 1'Örient, les Abazes, la Cö:é des Lazes Öc laProvincede Trebifonde, la Georgië Turque,z laquelle on joindra la Perfanne qui y commerce indireclement; au Midi, toute la Cöte de 1'Afie Mineure, qui contenait autrefois la .Paphlagonie, la Bithynie s le Royaume de Pont: & enfin au Couchant hRomélie, la Bulgarie,\e Dobroge\\z Valachie, la Moldavië, la Bcjjh/abie ou le Êuriziak. Les Etats du Khan des Tartares comprennent aujourd'hui tous les pays qui s'étendent au Nord de la Mer Noire, depuis le Danube jufqu'au Couban, c'eft-a dire, la Befiarabie ouleBud^iak; étendue de  MER NOIRE. S pays renfermée entre le Danube , le Niefter, la Mer Noire & la Moldavië; e'eft-la que fe trouve 1'Horde des Nogais du Budziak, tout 1'efpace qui eft entre le Niefter, le Boryfthêne, le Bag & les limites de la Pologne, oü eft 1'Horde des Nogais du Zedzan, les plaines qui font entre le Boryfthêne, le Don, & les limites de Ruffie, dont une petite partie eft cultivée par 1'Horde des Nogais de Djanbouilouk, la Presqu'ifle de Crimée, toute la Circaflie, depuis le Détroit de Yénikalé ou Bosphore Cymmérien, jufqu'au Cabarda, oü eft fituée 1'Horde des Nogais du Couban. La Crimée, autrefois la Chcrfonefe Tauride, eft une Prefqu'ifle d'environ 750 miles de circonférence: la partie méridionale eft extrêmement montagneufe; une chaine de montagnes entrecoupées de magnifiques vallées, s'étend depuis la pointe de Felenk - bournou , au midi de Chujlevé, jufqu'a Caffa: la partie fepten • trionale eft un pays de plaines, oü l'on ne trouve abfolument point de pierres. La partie montagneufe eft arrofée d'un grand nombre de petites Rivieres, qui font Je grand & le petit Carafou, YIndal, le Sa~ rifou, \e$alghir, YElma, le Kat (bi, leCa* A 3  é COMMERCE DE LA bar ia , le Kazikli- Euzem, & lesRuifleaux Boulganak, Bala-Salghir Daïr, Fondouklir, Afis & Boumdtcht, qui ne mentent aucune attention, paree qu'ils font a fee pendant 1'été : les plaines manquent d'eau courante, mais on y fupplée par des puits extrêmement profonds. L'air y eft bon partout; les paturages y font excellens & nourriffent une quantité innombrable deBeftiaux, dont on tire de la laine, des cuirs & du beurre, qui font les principaux articles du commerce de c$ pays. Les Haras y fontaffez nombreuxpoui fournir aux habitans tous les chevaux dont ils ont befoin: ces chevaux font petits, trés forts, & réfiftent beaucoup mieux que les nötres aux fatigues de la guerre. La Crimée eft divifée en 48 Kadilikr, ou Bailliages, dont 29 font dans la plaine & 19 dans les montagnes. Ils comprennent en tout 9 Villes & 1399 Bourgs ou Villages. Les Villes, qui font des places oü il fe fait du commercefom, Ba£lcheferai, qui eft la Capitale & la Réfidence du Khan; Caffa, Karafou, Ghujlevê, Orcapi ou Précop, Baliklava, Soudag, Kerche & Ténikalé. Baftcheferai eft la Capitale de toute Ia Petite Tartarie & oü réfident les Khans. Cette Ville, qui n'a gueres plus de 200 ans d'ancienneté > n'eft point fortifiée; elle  MER N O I R E. f contient 25000 habitans environ , parm". lefquels il y a beaucoup de Grecs, d'Arméniens & quelques Catholiques. Les Juifs n'y demeurent point; ils habitenc un vieux chateau a 1'Occident du vallon oü Baftcheferai eft: fitué: Ie Commerce y eft affez confidérable & l'on peut y, débiter une fuffifante quantité de marchandifes, Caffa eft la place de Commerce la plus confidérable de tous les Etats du Khan; c'eft 1'ancienne Théodofie, que les Génois ::onquirent fur les Empereurs Grecs & qui leur fut enlevée par Mahometll, en 1475. Cette Ville, qui eft fortifiée, dé-" pend du Grand Seigneur, ccmmc toutes celles de guerre fiuiées dans les Etats da Khan: elle eft entourée de muraiües"& de folies; \a citadelle qui eft dans la ville eft affez grande , mais el!e ne pourrait pas réfifter longtems, étant dominee par une éminence: elle eft moins faible du cöté de la mer. Trois mille Janiflaires en forment la garnifon avee d'autres milices. C'eft le Pacha de Yénikalé qui commande cette place. 11 y tient un MuJJè*' kim, ou Lieutenant. Le Khan, cepen• dant, y a une entiere liberté & le Pacha! même lui eft fubordonné. Cette Vil!e : eft: bien bacie & fort peuplée; les habi» h' i: ■  S COMMERCE DE LA tans y font au norabre de plus de quatrc* vingts mille , y comprenanc cinq a fis mille Raïas Grecs, Arméni.ns, Catholiques & Juifs. Les Jéfuices y avaient autrefois une Miffion, mais leur mai»vaife conduite les en a fait chaffer. La Kade de Caffa eft profonde, mais peu füre; le fond en eft de roche & elle eft extrémement décpuverte du cóté du Nord. On y voit aborder beaucoup de batimens d'Afie & d'Europe,. quelquafois même des caravelles dAlexandrie. On y débite une grande quantité de irarchandifes d'entrée, & l'on peut s'y pourvoir abondamment de celles defortie, qui y font cheres les unes & les autres:, y ayantun grand concours de marchand?. Karafou eft fitué au centre de la Crimée ; il n'eft pas bien bati & il eft malpropre: c'eft la première place de Commerce après Caffa : on y compte envi» ron quarante mille habitans: il y a beaucoup d'Arméniens & de Grecs, avee quelques families Juives de la fecle des Rabbiniftes. Le Commerce y eft trés floriffant par rapport a fa fkuation, On y porte des laines, des cuirs, des beurres, des bleds & du falpêtre, qui y eft en trtjs grande abondance. ' Gèuflevd  M" E' R' N* ó T R' E. Z p r Ghuflevè ëffc une Ville maritime a YOc* cident de la Crimée: elle étaic autrefoig entouréö de murailles, qui la garantiilaient des incurfions des Cofaqües, qui defcerH' daient dans la Mer Noire par le Boryfthêne, Les RufTeslontentiérement détruite;ony compte 15000 habitans. II y a un tres" grand nombre. de Chrétiens & de JuifS Caraïtes. Son Commerce eft confidérable par 1'abord des batimens de Romélie, de Natolie & de Conftantinople, & par le concours des marchands RiüTes qui viennent en tems de pabc y apporter leurs marchandifes. La Rade de cette ville n'eft pas fure, étant expofée au Sud - Oueft & découverte de tous cötés. Balikhvay au Midi, eft un Bourg d'environ" deux eens maifons, défendu par une vieille fortereffe batie par les Génois & qui tombe en ruine. Les habitans y fontprefque tous Chrétiens, Armériens& Grecs: le Port en eft trés beau & bon , étant a 1'abri de tous les vents; fon embouchure eft au Midi, & fi étroite que deux- navires ne fauraient y pafft-r enfemble fans courir rifque de fe choquer; mai* il y a affez de largeur & de fond dans le Port pour les vaiffeaux du premier rang.' C'eft dans fon terricoire que l'on A-S  $0 COMMERCE DE LA yecueille une affez grande quamité de Iaine, .la plus belle de toute la Crimée. Orcapi, que nous ne connoiffons en France que fous le nomde Précop,eïl une petite Ville de cinq a fix eens maifons, p.lacéefur 1'Ifthme qui joint la Crimée a Ia, Terre ferme & lui fert comme de porte. L'Ifthme eft coupé par unfoffé d'environ cinquante pieds de large , défendu par une fortereffe en affez bon état & une-garnifon d'environ mille Janiffaires, commandée par un Aga a la nomination de la.. Porte. Le Gouverneur de la place eft YOrbcy ^noramé par leKhan, choiil presque toujours parmi les premiers de fa m.dfon. Cette ville & fa citadelle furene prifes deux fois & détruites de fond en comble pat les Ruffes dans la derniere suerre. Cette place eft 1'entrepöt de toutes ies marebandifes qui entrent en Crimée & eg fortent par terre. Tous les marchands y tiennent des fa&eurs pour 1'expédition des. marchandifes de forde & pour 1'achas de. celles d'entrée. Soiulag eft un des Kadiliks de la Crimée, dont le Grand - Seigneur fe réferve la ;nomination.- Ce n'eft plus a préfent _ qu'un petit Bourg. II n'y a que le com= aieise..de vin, le^uel y eit abendant & -  IM E R N O I R E» li bon , qui le rende remarquable. Leg Ruffes viennent 1'acheter fur le lieu, pour le tranfporter chez eux. Son Port eft trés bon , extrêmement profond & affez vafte; 1'entrée en eft expofée au Midi. Kcrcbe eft une petite Ville fituée fur le bord de la mer, entre Caffa & Tónikalé» L'on y compte environ dis mille habitans: il n'y a point de Jaifs, ce ne foM: que des Mahométans, des Grecs & quelque peu d'Arméniens qui 1'occupent. Son Port eft extrêmement vafte, profond, & peut; contenir des vaiffeaux de toute portee: le fond en eft fablonneux. Les bad mens d'Adja, de Taman & de Yénihalé y vont hiverner. Cette place eft affez commercante; les habitans des villages voifinsy portent leur beurre, leurs laines & leurs cuirs, & trouvent a les vendre avee avantage. Tênikaló, petite Ville fur la rive occidentale du Bofphore Cymmérien, eft encore: un des Kadihks du Grand - Seigneur. Les Turcs y ontbati au commencementdece fiecle, (en 1705) une fortereffe pour Bé' fendre aux RuiTes 1'entrée de la Mer Neiïe, qn'ils venoient inféfter par Ja mer de Zabacke, dans le tems qu'ils étoient ffi&ïtres- tidfoph, Le poiffon falé eft le f £ A 6  1% COMMERCE'DE'LA article de commerce de cette place ; il n'y a point de Port: c'e'l-la" que le Pacha rende avee une garnifon de Janiffaires. 'La ville eft habite'e par des Mahométans; il n'y a point de Grecs, trés peu d'Arméniens, & 1'éntrée en eft abfölument défendue aux Juifs. Outre ces piaces > il y a encore en Crimée EsUkrhn & Mmtkqup, qui peuvent être mifes au rang.des villes ci- deffus. Eskihim%to\x. autrefois une ville trés confidérable ; c'eft 1'ancienne Cimmcrium, qui a donné fon nom au Bofpbore; dont les Turcs ont tiré par corruption 3e nom de Krim,& nous celui de Crimée, que nous donnons a la Presqu'jfle. Mankoup eft une vieille fortereffe , dont la jurisdiction s'étend fur foixante-quatorze villages: l'on en tire de la laine pélade en petite quantité. II y a encore d'autres Ports moins fréquentés que ceux ci • deffus : Knfrouf a 1'Oueft de Soudag; le Port eft affez praticable, mais peu fréquenté. La Rade de Talita a 1'Oueft de Kofrouf eft affez füre. Avlita, tres bon Port fitaé a 1'émbouchüre de la riviere Kafikli-Euzcm, auNordOtieil MBalikliva.  MER N O I R E '. ig Le Golphe de Felenk-bournou contient cinq Ports, oü les navires ne peuvent gueres aborder que dans le cas d'une né* cefïité abfolue, Les-Ports &'Akmefchid & de Tcherterlik au Nord de Gbu/levé ne font pas fürs, Sc l'on n'y doit aller que forcé paria tempète. COMMERCE D'ENTRÉF.. Draps. L'on peut vendre environ k 40 Balles de Draps de France dans toute Ja Crimée: les Londrins feconds de Languetloc font ceux dont on débice le plus. Caffa en confomme 25 a 30 Balles , BiiClcheferai 4 a 5 , & le refte de la Crimée le furplus. L'on en débiterait davantage, fans la modicité du prix des Bocasfjns, qui portent coup ï la confommation de nos Draps. Le prix des Londrins feconds eft de 2\ a 3 piaftresle PicdeTurquie & on les a vu quelquefois vendre jusqu'a 37 piafbres. On ne rifquerait rien denvo\er indifféremment des deux qualires de Londrin~. En obfervant que Faunage des Draps de France donne encore un bénéfice de 5 a 6 pour Cent, de jfoïte qu'il conviendrait plutot de vendre A 7  14 COMMERCE DE LA les Draps au Pic, fans s'en rapporter a J'aunage de France, qui fouvent eft bier* plus fort. Caffa eft Ia place oü l'on vend le mieus les Draps, & avee un terme moins long qu'ailleurs. II faut obferver qu'il ne conviendrait pas d'avoir des facfeurs ni des négocians Francais étabüs a Battcbeferai, vu qu'ils y feraient trés mal leurs affaires & s'y ruineraient, II leur conviendrak plutö: d'avoir des gens du pays, Arméniens ou Grecs, qui fe chargeaflènt parement & firnplemént de la vente des Draps, pour en remettre le montant, & leur faire effuyer tous les rifques de la anauvaife foi des débiteurs & principalement des Taraphanadjis, ou Intendans de Ia maifon du Khan , qui font chargés de tout le détail de 1'habiilement de fa maifon. II y a deux grands inconvéniens a faire des crédits de conféquence a ces Taraphanadjis: Ie premier, ia difficulté de fe faire payer de ces débiteurs, que Fon a beaucoup de peine a traduire en juftice; le fecond, le rifque de tout perdre fi Ie Khan eft dépofé. Ainfi il convient donc d'engager les marchands du Tchracbi, ou Marché, de fe charger de 'a. auantité de Draps que l'on fe propole de  MEK NOIRE. is vendre a Ba&cheferai, en les leurdonnant au plus bas prix & a un plus long terme & de leur laifler courir le rifque de les re« vendre aux Taraphanadjis, pours'en procurer le pay ement. Une autre raifon, c'eft que s'il y avait quelque Francais établi a Baóïcheferai, leConful, 1'Envoyéou le Réfident ne pourrait pas fuffire aux dernandes des Princes , des Grands de la Cour ,. des fimples Mirzas & même des Tchouadars, dont on aurait befoin pour faire réuflir quelqu'affaire; tous ces gens • la n'ayant pas honte de demander. L'affortiment des Draps pour la Crimée doit être le même a peu prés que pour la Turquie. Les gens du basétatdonnent dans les couleurs vives, telles que leverd, le bleu, le jaune 3 le rofe clair & foncé; ■ ceux de qualité aiment mieux les couieurs bizarres: il faut que dans chaque Balie de. Drap il y ait toujours plufieurs pieces de Draps rouges, pour les culottes: cette couleur fe vend toujours a plus haut prix: on doit fupprimer les pieces blanches. La confommation des Mahouts Holkndois & des Draps de Leipfik eft un trés petit objet,. paree qu'ils font trop chers:. ceux de Pologne fe vendent en i grande quauüté; ces Diaps font trés gros*  ï6 COMMERCE DE LA fiers. II y en a de diverfes qualités; les" plus fins reffemblent a nos Londrins larges: on'les vend depuis i piaftre jufqu'a 60 paras le Pic. Les couleurs les plus communes font, le verd. le bleu clair & foncé , le rouge de brique , le caffé brülé &c. II ferait trés facileaux Francais de s'emparer entiérement du Commerce des Draps de France dans ce pays-la, pouvant leg donner a bien pljjs bas prix que les marchands du pays, qui vont s'en fournir a Conftantinople de nos marchands Fran* eais, & plus fouvent chez les Sektes da Bezeftein , ou les acheter en gros de la feconde main de gens qui les apportent en Crimée, pour les revendre en détail. Serges Impériales. On en débïte quelque peu en Crimée s pour faire les fourreaux des couflins & les deflus des fophas: mais c'eft un trés petit objet. Camelots de France, Cahmndes & Etamines. Le Carnelot de France prendrait fa*'  MER NO I R E. 17 veur en Crimée, fi les Bours de Magrréfie & les Bocaflins n'étaient pas a trés vil prix ; néanmoins on pourrait en faire une affez grande confommation: cèux quien ont apporté, y ont trouvé leur compte. Les Camelots unis font recherchés en couleur écarlate pour les culottes; ce— pendant les rayés réuffiffent mieux: on en fait plufieurs pieces dei'habiilement des hommes & des ferames. Les plus effc;^ més font les jaunes &■ verds, rouges & bleus, rouges <& noirs, bleus célefte & violets: on les vendrait indiftinéïementds 35 a 40 paras le Pic, fuivant Ia qualité. L'article donnerait un bénéfice confidérable, même fur le prix de Conftantinople, oü l'on fe les procure a 25 paras. Cet objet n'eft pas anégliger: ilfaudrait les faire paffer a Caffa. Peut-être que nos Cilmandes & nos Etamines pourraient y réufiir: on pourrait toujours en faire un effai des rouges pour les culottes & ils s'yyendraient bien > attendu que ces dernieres étoffes font a meilleur marché que les Camelots.-  ig COMMERCE DE LA Camelots $ Angora , de Toffia c? du Caire. Les Féredjés, efpece de manteau que les femmes mettent, lorfqu'elles lortent de leurs maifons, confomment une grande quantité de ces Camelots: ceux d'Angora font les plus beaux; i! y en a de moirés & d'unis: ceux-ci font peu en ufage. On les vend de 60 paras a 2 piaftres. Ceux de Toffia forment la feconde qualité: ils ne font point moirés; leur prix eft de 35 a 50 paras. Ceux du Caire font extrêmement grosfiers & reffemblent au Baracan: les femmes du bas étage en font feules ufage. La confommation annuelle de ces trois qualités, forme une valeurde30 a 35,000 piaftres par année. Les deux feules couleurs pour les Féredjés font le noir & le violet de diverfes nuances. Etojfes de Soie de France. Pour pouvoir introduire ce Commerce en Crimée avee quelque folidité & détruire abfolument celui des Üibas & des Damasquettes de Veni'e & de Scio, il faudraït que les négoehns qui entrepreniraieni'  MER NOUE. 10 ee trafic, fiffent fabriquer a Lyon des écoffes trés légeres, que l'on püt donner a peu prés au même prix que les Dibas de Ventte: ce ferait un article de trés grande importance en Crimée , paree que ceux que la cherté du prix éloigne, ou qui ne les trouvent pas fous la main, favent s'en paffer ; au lieu qu'ayant chez eux ces étoffes plus belles & a meilleur marché que les étrangeres , ils s'en pourvoiraient plus facilement. Stoffes de Scio, de Fenife & de Ueffnel Le Commerce des EtofFes de Scio efb trés confidérable en Crimée. II confi£teen> Damafquettes fimples & en Damafquettes avee or & argent, en Beldaris, en Etoftes rayées en foie pure&enfoie&coton,en Sandals unis & rayés, en Satins légers ,ums & rayés,& enCeintures de foie de toute efpece. Les Damafquettes fimples & celles en or & en argent font un objet de 50 a 60 mille piaftres par an. La confommation des Sandals peut aller a environ 50 mille piaftres: Et celle des Beldaris, Satins & Ceintu» res de 15 a 20 mille,.  COMMERCE DÉ LA On débite en Crime'e des Brocards oü Dibas de Venife, depuis 6 jufqu'a iö piaftres lePic, & beaucoup de ces mê» mes étoffes en or & argent faux pour environ io mille piaftres. Les Damast quettes de Scio, dites leïïu- Hetaïs,leur ont porté coup. II ferait trés facile d'enlever aux Venz=< Hens & aux Sciotes: le commerce des Etoffes de foie; lorfque je paffai a L  rMER NOIR E. 41 cent, tous frais déduits, & quelquefois davantage, quand ils peuvent payer comptant en prélevant 1'escompte. Voici trois Fa&ures des couleurs les plus recherchées: No. t. i Piece Verd-clair. I Caijje de Bro< I dito Violet. cardsde Venife. i dito Jaune. I dito Rouge chargé i dito Bleu - célefie. ■ I dito Ecarlate. 4? 4e 4e s^o, 2. i ?iece Violet, i Caijje de DamaJ- i dito Rouge cramoifi. queit.es de Scio. i dito Bleu-céleite. i dito Verd d'Emeraude. i dito Jaune. i dito Verd foncé. 4e 4e 4e N. 3. i Piece couleur de feu, ï Caijje de Sen. jl dito Bleu-célefte. da\s fimples. i dito Jaune clair. i dito Cramoifi. i dito Verd-clair. i dito Verd de Perroquet. j dito Verd foncé.  22 COMMERCE DE LA Pour les Satins on doit choifir a pen prés les mêmes affortimens. Quant aux -rayés & fajonnés, le goüt & la fantaifie en décident: au rede, fi fans fe donner la peine d'imiter les étoffes de Scio, l'on voulait tout uniment en faire le commerce , il faudrait les faire acheter a Scio même & les payer argent comptant: alors on les auraït a trés grand marché & l'on y trouverait beaucoup de bénéfke. Haresou Tabis de Mejfine de Scw- Quand les femmes Mahométanes fortent de leurs maifons, el les mettent par- desfus leur habillement un féredjé ou manteau, qui ordinairement eft de iaine blanche. Ces féredjés font étroits & taillés comme ceux des femmes de Turquie; mais \ les Chrétiennes en portent de fort amples a larges manches de Camelots d'Angora&c. noirs, ou violets: les femmes riches font faire les leurs de Tabis de Meffine ou de Scio, dont la confommation eft un objet de 30 a 35 mille piaftres. La couleur la plus en ufage eft le violet de diverfes nuances. On les vend de 2\ a 3 piaftres le Pic ; de forte que l'on y trouve 20 piaftres de profit. • L'on pourrait  MER N O I R E. fabriquer en France des Moirés légeres, que l'on pourrait fubftituer aux Tabis de Meffine & de Scio: alors on y gagnerait davantage, en les ayant de la première main. Velours. Les femmes Chrétiennes, quand elles fortent de chez elles, chauflènt des bottines de velours cramoifi pour cacher les culottes; de forte qu'il ne faut pas d'autre couleur. Le velours a 2 poils fuffit: on en vend chaque année de 10 a 12 mille Pieces, a raifon de 7piaftres lePic. Coutnis de Broujfe & de Conjïantinopk. Efpece d'étoffes de foie ; c'eft un objet de 30 a 40 mille piaftres par an & il donne 20 a 25 pour Cent deprofit. Ceux du petit ufage fe vendent de 10 a 12 piaftres la Piece, & ceux du grand, de 14 a 15. Les couleurs les plus gaies <& les plus apparentes réufTiffent le mieux. Bours de Magnefie. Connus en France fous le nomdeBours de Marfeille; ce font des étofFes de co-  |4 COMMERCE DE LA ton rayés de differentes couleurs. La confommation en eft immenfe. On en vend annee commune 50000 Pieces par" an, depuis 70 jufqu'a 100 paras la Piece; ce qui peut faire un objet de 120 rnille piaftres. Nos Camelots de France & furtout nos Etoffes de coton a fleurs en laine de la manufaóture de Rouen, leur porteraient coup. En 1756 on en fit venir une Piece de Conftantinople, elle fut enlevée a 45 paras le Pic. Tout le monde en demandait, & l'on pourrait regarder eet article comme le feu] en état de rivalifer ks Bours &peut-êtrq les anëanür, Indienms ou Toiles peintes. On en apporte tous les ans une prodigieufe quantité de Tokat & de Ka/tamlol: les femmes s'en fervent pour faire des culottes, des couvertures de lit & des fourreaux d'oreiller: elles fe vendent en ditail au quarré, depuis 6 jufqu'a 15 paras , fuivant les qualités, & en gros la piece a raifon de 8 a 9 piaftres. La confornmation annuelle forme une valeur de plus de 200,000 piaftres. Toiles  MER KOU!, 2$ Toiles de Kédis. Ce font des toiles de lin blanches que l'on tiredeConftantinople;il en vient par an j a 6000 balles, qui portent <6 a 58 pieces, lesquelles font de 14. pieds de Crimée, qui font environ 20 Halebis de Conftantinople ou aunes d'Hollande: ls prix eft de 50 a 65 paras la piece. BocaJJins. Le commerce de ces toiles eft ïtnmenfe 8c peut monter par an a plus de 400,000 piaftres. Ce font d.s toiles de coton teintes & gommées, comme les 23ours. On les employé a plufieurs pieces de 1'habillement & elles font granJ torc a la confommation de nos draps. Ces Bocaffins fe vendent par pieces de dix picsdeConftantinople.de 235 piaftres, fuivant la qualité. Les couleurs foncées font les plus recherchées. AJlars ou Toiles de Coton. C'eft une toile de coton extrêmemene groffe & claire , qui fert de doublure. Oa en débite chaque année pour la ya» B  26 COMMERCE DE LA leur de 250,000 piaftres avee beaucoup de profk. Les pieces font de 14 pieds de Crimée ou 20 pieds de Conftantinople, & fe vendent de 40 a 80 paras fuivant la qualité. « ? Dulbents ou Moujfeline. Les Tacbemeh ou voiles dont les femmes fe couvrent le vifage, quand elles fortent de chez elles, font une mouffêline appellée Dulbent: il y en a de diverfes qualités , ornées de grandes bordüres d'or, & d'autres fans bordure: la corfommation de eet article forme par an une valeur de 10 a 12 mille piaftres. Tchmiberts. Toutes les femmes généralement quelcon jues en Crimée & dans prefque tout Je Levant,fe ccëfftnt avecdelongs mouchoirs de mouflèline imprimés, appelles Tchemberts, dont le fond eft pour 1'ordinaire brun, rouge ou jaune. On les vend au quarré. 11 y en a de douze difrérentes qualités qui fe vendent a divers prix. Cet objet peut aller par an a 250,000 piaftres & donne toujours , tous frais faits, 20 pour cent de bénéfice.  MER N O 1 R Ei 27. Chemifes de Soie. C'eft un'artkle peu effentiel enCrïme'e & peut aller par an de 4 a 5000 piaftres: il y en a de plufieurs prix & qualités, depuis 6 jufqu'a 11 piaftres & donne 20 pour cent de profit. Chemifes de Coton pour le Bain. Les femmes après s'être lavées au bain ont des chemifes de toile de coton faites exprès, qu'elles mettent fur le corps & qui s'imbibent de toute 1'eau qui y eft demeurée:ces chemifesont un affez grand débit; on en vend par an 4000. La qualité en détermine le prix: jl y en a depuis 2 | jufqu'a iopia^res,qui donnent 20 a 25 pour cent de bénéfke. Fez ou Bonnets. Ce font ces calottes rouges que les hommes portent par deffous leurs grands bonnets. Ils viennent de France & de Tunis: il n'en faut porter que de petits: ceux de France valent de 40 a 45 paras & ceux de Tunis de 60 a 75 para<. On peut en débiter aïfémenc chaque année B 2  COMMERCE DE LA 8 a 10,000, qui donnent un bénéfke affez ïionnête. Tarpoches. C'eft un grand bonnet de drap, fur lequel les femmes lient leurs mouchoirs appelles Tcbemberts ; ils viennent tout faits de Conftantinople: on les vend de 10 a 30 paras & la confommation en eft de 150 a 200,000. Biüik, Eft un Drap extrêmement groffïer de Salonique. On le débite en pieces de 18 pies, qui fe vendent 2 3 a 3 piaftres; ce qui revient de 6 a 7 paras le pic. Ce drap dans fon principe eft deftiné a faire le Dolama, ou habit d'ordonnance des JanilTaires ; mais ils le revendent pour s'en faire d'un drap plus fin : ce font ces 18 pies qui conftituent la piece fuffifante pour former ce Dolama. JDorures. C'eft un article de trés peu d'importance,dont le débit ne va gueres au-dela  MER NOIREs 2f «te 8 a ro,ooo piaftres par an. Les notres font d'un prix trop exceffif pour pouvoif efpérer de les vendre: fi l'on pouvait parvenir a en faire fabriquer de trés légeres & que l'on püt les donner a peu prés au même prix de celles de Conftantinople & de Pologne, alors on pourrait rifquer d'y en envoyer. Le prix des Dentelles de ces deux endroits fans foie, eft de 20 paras 3a dragme, & les autres efpeces de ij a 16: tous les galons fabriqués aConflantinople & en Pologne font de trés mauvaifè qualité: 1'or en eft fort pale & extrêmement chargé de foie. Le fil d'or & d'argent eft un article de plus d'importance que le précédent: il y en a de deux efpeces; le trait pur & fans foie, & le trait mêlé de foie: il fert a plufieurs ouvrages de broderie. Cette marchandife vient de Conftantinople & vaut en or de 20 a 22 paras la dragmeou le gros, & en argent de 18 a.20. Lavaleur de la confommation annuelle eft d'en» viron 1000 tchéquis (*): ce qui monte (*) Le tchéquis eft de 150 dragmes ou grosff ou 2 marcs 2 onces & 6 gros , poids de France. Voyez ci-après a 1'Article des Poids & Mefures. B 3  30 COMMERCE DE LA a prés de 60000 piaftres. La feconde qualité vient de Conftantinople & de Pologne ; elle vaut en or de 18 a 20 paras la dragme & en argent de 16 a 18. On en confomme environ 400 tchéquis. Le fil d'or e'r de trés mauvaife qualité: il ferait faci'e d'cffayer fi notre fil d'or & d'argent ne pourrait pas prendre le deffus. Un petit effai ne couterait pas beaucoup & au cas que Ia fupériorité de la qualité empêchat de la donner au même prix, on pourrait en fabriquer d'une qualité a pouvoir le donner a meilleur marché. Soies ieintes en laine , filées, & Cordonnets de foie. Les Soies teintes en laine ou plattes pour la broderie, fe vendent en Crimée avee avantage; on peut en débiter 200 ocques , chaque année, a Caffa feuleroent; & 50 a 60 dans le refte de la Crimée: il faut tacher d'avoir dans les affortiments le plus de couleurs qu'il eft poffible. Les Soies filées pour la couture font plus cheres; On les vend de 27 a 28 piaftres 1'ocque, & Ia confommation peu£ aller a environ 60 ocques.  MER NOIRE, 31 II y a une troifieme efpece de foie en laine blanche & luftrée, pour former les rayes des chemifes; on en débite environ 100 ocques de 29 a 30 piaftres 1'ocque. II fe confomme environ 250 ocques de cordonnet de foie, dit Gaétan, pour border tous les habillements de drap & de foie, pour les boutonnieres & autres cordons plats. Ce cordonnet vaut 29 a 30 piaftres 1'ocque. Coton en Laine. Les Kalpe&s ou bonnets a la Tartare en emploient beaucoup , ainfi que les Caftans: il en vient environ fept a buit eens balles tant a Caffa que dans les autres villes de Crimée. On n'y porte que de celui de Gallipoli, ou tout au plus de celui de CaJJaba, bien net & fin, épuré de fa graine: ce font les deux qualités fur lefquelles il y a le plus h gagner. Le prix courant du coton a Conftantinople regie ordinairement celui de Crimée, paree que les marchands vont s'en poarvoir dans cette capitale. Cet article donne 20 a 25 pour cent de profit.j B 4  JS COMMERCE DE LA Coton filé de diverfes couleurs. II y en a de rouges, de bleus, de violets & de blancs. Ils fe vendent depuis 2f jufqu'a 3 piaftres 1'ocque. La Crimée confomme environ 6000 ocques de coton filé teint, & 1500 de blanc pour les rayes des chemifes. CouJJins de Broujje* C'eft un article de trés peu d'importance: ils fe vendent bien dans le tems de la dépnfition du Khan, foit pour la maifon , foit pour les princip'iux Officiers de fon fucceifeur. On en peut vendre aufli quelques-unsdansle cours del'année. II y en a de trois fortes: de velours fimple avee les bordures chinées de plufietirs couleurs: de velours cifelé, dont les fieurs font en velours & le fond uni; c'eft ce que 1'onappelle velours fatiné; & a fond d'or & d'argent,avec les fieurs en velours cifelé de différentes couleurs. Le prix eft depuis 5 jufqu'a 15 piaftres, fuivant les qualités. Four-  MER NOIKE. %% Foumimens de Sopha, eiïts Chiadk* On a porté de Pologne en Crimée deï affortimens de Sopha avee des deffin'S appropriésen ferge de laine de toutes couleurs & de toutes grandeurs. Les Cous* fins fe vendent de 20 a 60 paras, fuivanE la grandeur & la qualité; on les vendj par pieces & par paires. Les Makats , ou couvertures de fopha, viennent er* grandes pieces: on les vend au pic de' Conftantinople de 30 a <5o paras. Le dé" bit en eft de 1500 a 2000 'paires d& couffins & les Makats a proportion, Tapis de Saknique r2? de RuJJte* Ceux de Salonique viennent en petite quantité & fe vendent avee profit; Ceux de Smyrne y font ineonnus, étanf trop chers; & ceux de Rutfie font èx&é* mement groffiers, rayés de diverfes cou>leurs, longs & étroits. 11 en vient environ un millier. II y en a de trois grandeurs différentes, du prix de 35; paras* jufqu'a 100.. II vient de petits Tapis de la Natolie, fabriqués a Gucuviès rQtisbaêêk Koula; ils fervent aux Mahométans pouf faire leurs prieres, pour s'affeoir & fe B 5  34- COMMERCE DE LA pofer après le bain: ils font du prix de 6" a 12 piaftres 1'un. On en peut vendre de 12 a 1500 par an , avee un benefice de 20325 pour cent. Couyertures de TamboU, dits Kebès. Ces Couvertures viennent de Tamboli & font de laine teinte en diverfes couleurs; il y en a avee la pluche & fans pluche, de cinq a fix grandeurs différentes: il , en vient environ 10 a 12000 chaque année. Celles fans pluche fe vendent de 60 paras a 6 piaftres, & celles a pluche de 2 a 8 piaftres. Pechtmaïs ou Seryieites de toutes, efpeces, L'on comprend fous ce nom diverfes fortes de ferviettes, propres a divers ufages. On en porte en Crimée de plufieurs qualités. Ceux appellés Fata, lont tous de foie eramoifie avee les bordures bleues, & de petits filets de diverfes couleurs: la confomm tion annuelle eft de 5 a 600, & ils fe vendent les grands de 8 a 10 piaftres & les petits de si a 6 piaftres. Ils fervent pour le bain. Cet article peut aller de 4 a 5poo piaibesi  MER N O I R E. 35 Ceux du Caire font de lin blanc, avee les bordures & les rayes de foie; üs fervent pour la barbe & 1'ablution avant la priere: il y en a de tant de fortes & de différentes grandeurs, que l'on ne peut gueres en évaluer la fomme, qui peuc monter a environ ioooo piaftres. _ Les Kerkkakm viennent de Salonique & de Conftantinople; on en débite 5 a óooo par an. Ils font de coton bleu avee les bordures & quelques petites rayes de foie cramoifie: les petits fe vendent de 70 paras a 2 piaftres: les moyens de af 4 a| piaftres; & les grands de 3 a §| piaftres: ils fervent pour le bain. Les Kalaboura font fort groffiers, mais trés en ufage parmi les gens du commun: il y en a de lin & de coton: ils font prefque tous bleus, fans foie, avee des bordures & des filets de coton rouge: leur prix eft de 40 a 50 paras & la confommation annuelle d'environ 1 oooo._ Les Ahaches font d'un bleu plus clair , avee des filets de coton blanc, & valent de 20 a 25 paras. La plus baffe qualité fert de ferviettes aux domeftiques; 8c chez les gens riches pour frotter dans les cuifines. Ils valent de 15 a 16 paras. On débke année commune environ 20000 B 6  3.6 COMMERCE DE LA Pechtmals de ces deux dernieres qualités. Outre ceux que l'on vient de détailIer , il y a encore les Pechtmals que Ton appelle Hazvlis. Ils fervent pour le bain öi fe vendent avee avantage. Les premiers font ornés de bordures de foie & fe vendent de 70 a 100 paras; les feconds font unis & fans bordure & fe vendent de 40 a 50 paras ; les troifiemes font petits & fervent pour effuyer le vifage: il y en a avee les bordures de foie du prix de 30 a 40 paras,& les derniers fans bordure depuis 18 jufqu'a 25 paras. La Crimée confomme pour environ 8 a 10000 piaftres de ces Hawlis, que l'on fabrique a Cerès & que l'on débite a Salonique. Bourfes pour le bain. L'ufage eft de fe faire frotter dans le bain avee des bourfes, efpece de facs extrêmement groffiers, faits de poil de chameau ou de laine: ces bourfes viennent toutes faites de Conftantinople, au nombre de plus de cent mille chaque année, & fe vendent de 3 a 4 paras Ja. piece..  MER N O I R E. 3? Fil pour la couture. Le fil de couture eft de trois diffërentes qualités; le fil blanc pour le linge, lè fil teint pour les tailleurs, & le gros fil pour les cordonniers & les felliers. On vend les deux premières qualités par grofi'es, appel lees 7oKraj,,&par écheveaux, dont 60 font une griffe, qui vaut de 30 a 35 par.is, & les écheveauxa proportion. Le gros fil eft de deux d fférentes qualités: il en vient chaque année cinq a fix eens ocques, que l'on vend de 50 a 60 paras 1'ocque: les Rufles en apportent en outre 1500 a 2000 ocques, dont le prix eft de 30 a 40 paras. La confommation du fil des deux premières qualités, blanc & teint % eft de 16 a 18000 groffes. JLin Gris. Malgré le Lin qui croït en Crimée-, ït en vient encore d'Kgypte par Conftantinople 250 a 300 balles de 350 a 400 ocques 1'une: fon prix eft de 17 a 18 paras 1'ocque. Celui da pays eft eftimé' meilleur, & fe vend quelquefois jufqu'a; 32 paras. i*  38 com.merce.de la Teint ures. . L'on ne peut rien aflurer de pofitif fur la confommation des drogues & bois de^teinture que l'on peut employer en Crimée: Ja guerre qui regne parmi les Chrétiens (1761) empéche den favoir la quantité. Néanmoins elles s'y vendent avee avantage, & il faut attendre que la paix foit parfaitement rétablie pour favoir a peu prés quelle peut en étre la confommation. Café. II fe débite en Crimée environ 20000 ocques de Caffé Moka & d'Amérique: le prix en eft avantageux : le premier vaut jufqu'a deux piaftres & demie la livre, & celui d'Amérique 70 a 80 paras. On peut le frauder facilement dans le magafin , en mêlant moitié 1'un, moitié 1'autre : le Tartare n'eft pas trop connaisfeur; mais il faut pour cela choifir le Caffé d'Amérique qui a le plus petk grain. On trouve difficilement a vendre en Crimée de grolfes parties de Caffé: il faut néceffairement le détailier & avee  MEK N O I R E, $9 un long terme; obfervant de n'avoir rien a démëler avee le Douanier de Ghuslevé, qui a le détail des provifions de bouche de la maifon du Khan. II eft le feu! acheteur qui peut fe charger tout a la fois d'une trés grande quantité, & l'on eourt avee lui le même rifque qu'avec les Taraphanadjis, dont nous avons parlé a 1'Article des Draps, page 13 & fuiv. Sucres. C'eft un trés petït article; a peine vat-il a 2000 ocques par an; on 1'employe pour des conferves de fieurs. II ne faut que du fucre en pains, la caffonnade ne s'y vend pas. On. choifit ordinairement les plus petits pains, paree qu'ils fe débitent plus facilement: fon prix ordinaire en tems de paix eft de 35 a 40 paras, & en tems de guerre quelquefois on le vend jufqu'a 2 piaftres 1'ocque,& encore a-t-on de la peine a en trouver. Si la Ruffie n'avait pas fait un nouveau tarif fur les marchandifes qui entrent dans fes Etats par la voye de Crimée, peut-être les Ruffes viendraient ils fe pourvoir de caffé & de fucre. Refte a favoir s'ils y trouveraient leur compte.  $0 COMMERCE DE LA Epices Drogueries, C'eft encore un affez petit article era Crimée. Le poivre eft le feul objet qui mérite attention. La confommation peut aller a iooo ocques, dont le prix eft de 2f a 2| piaftres 1'ocque. Le débit du gingembreeft beaucoup moindreja peine va -1 - il au - dela de 500 ocques: les Ruffes en achetent quelquefois en troc: on le vend de 20 a 22 paras 1'ocque. Le Tartare emploie trés peu de drogues & pour mieux dire point du tout;ïl n'a ni Médecins,ni Chirurgiens,ni Apothicaires. Le Tartare eft d'une conftitution robufte, jamais en repos, toujours en mouvement; ii n'a pas le tems d'etre malade: quelques herbes, quelques plantes, qu'il connaït p ir routine de pere en füs, font leurs drogues & leurs médicamens. lis vivent longtems & jouiffent de méme d'une parfaite fanté. Cuivre. II vient tous les ans de Trébifonde environ 2500 quintaux de cuivre non travaillé & 5 a Coo quintaux de cuivre;. mis en oeuvre. Le premier fe vend de 30;  MER NOIRI. 41 a 40 paras 1'ocque, & Ie fecond de <5o a 65 paras, excepté les petits ouvrages qui fe vendent a piece. On trouve en Crimée une centaine de boutiques de chauderonniers, oü l'on fait des ouvrages de cuivre de toute efpece. Etain £? Sel Ammoniac. Ces deux articles ne vont jamais 1'un fans 1'autre; ils fervent pour 1'étamage de tous les uffenüles de cuifine & de table des Tartares, qui n'ont pas d'auire vaiffelle que du cuivre. On peut en débiter aifément 5 a 6000 ocques par an. On vend toujours 1'étain avee le fel ammoniac, a raifon de 100 dragmes de fel par chaque ocque d'étain, c'eft-a- dire un quart. Son prix ordinaire avee le fel eft de 2 a %\ piaftres, & féparément de 65 a 70 paras. On trouve difficilement a vendre le fel ammoniac a part; cependant lorfque l'on Ie vend de Ia forte , fon prix eft dé 2 a 2; piaftres;alors il aapeu prés la mëme valëur de 1'étain. Mercure. II en vient environ 500 ocques pour  42 COMMERCE DE LA la dorure & pour la vermine : on le vend 2 afpres de Turquie Ja dragme. Plomb. II en vient environ 10000 quintauxt y compris 3000 qui paiTent en Circaffie: il fe vend de 13 a 14 paras 1'ocque. Ader. La confonimation de 1'Acier eft tres confidérable en Crimée. On peut aifément en vendre chaque année 25 a 30 Caiffes, qu'il vaut mieux détailler que de vendre en gros; on y trouve plus de profit. Celui de Venife, qui vient de Fiume,eft le plus eftimé & le feul qui ait cours; fon prix eft de ao a 22 paras 1'ocque. Fer. II vient de ?a Romélie par Farm & par Bourgaz. La confommation annuelle eft d'environ 20000 quintaux. On le vend 13 a 14 paras 1'ocque. Les Cofaques en apportent aufli, mais de trés mauvaiie qualité, & il ne vaut que 637 paras 1'ocque,  MER N O I R E* 43 Chauderons de Fer. On en apporte 15 a 20000, extrêmement groffiers & fragiles, qui fe caffent comme le verre. Us viennent de chez les Kalmoüks: il y en a de différentes grandeurs & de divers prix, depuis une piaftre jufqu'a onze. Caffa eft la place oü il s'en vend le plus, & de-la ils fe répandent dans toute la Crimée, chez les Nogais, dans le Budziae, la Moldavië, la Vala.quie, & paffent encore plus loin. Encens. II en vient environ cent cinquante fardés de quatre eens ocques 1'une, & vaut de 50 a *s paras 1'ocque: c'eft unarticle d'un affez facile débk: fi l'on voulait le détailier, on le vendrait jufqu'a 60 paras. Savon. Celui qui fe fait dans le pays, eft déteftable: il eft compofé de graiffe de mouton & de bceuf, au lieu d'huile: il blanchit cependant aflèz bien , mais il laifie au linge une odeur infupportabla.  44 COMMERCE DE LA On en porte de Smyrne environ 3000 quintaux: il vaut de 13 a 14 paras 1'ocque : celui de Candie ne va pas au - dela de 2 a 300 quintaux,& vaut de 17 a 18 paras. Huik. L'huile que l'on vend en Crimée, vient prefque toute de Mételin par Conftantinople. Le débit en eft d'environ 2000 outres de 40 a 50 ocques chique; on la vend 9 a 12 paras 1'ocque: le pays a'en produit point. Finaigre. II vient de Moudania par Conftantinople 40 a 50 tonneaux de vinaigre, de' 450 ocques 1'un, & il fe vend en Crimée de 4 a 5 paras 1'ocque. Fromages. Malgré la quantité de fromages qui fe font en Crimée, il en vient encore du dehors : favoir de chez les Cofaques, environ 30 tonneaux de 4 a 500 ocques, & il fe vend en détail a 3 paras 1'ocque. J3  MER HOU!. eft d'affez mauvaife qualité. 11 en vient auffi de la Romélie en barriques de 80 a 100 ocques, & en outres de 35 a 40. Ceux - ci font meilleurs que ceux des Cofaques & fe vendent de 8 a 10 paras 1'ocque. Le débit annuel de ces derniers eft d'environ 500 barriques, & autant d'outres. Riz. L'on y en porte environ 1000 gouffes du poids de io ocques chaque, tant de celui du Caire que de celui dePhilippopoli. On le vend au quilot de 10 ocques. L'abondance ou la rareté en déterminent le prix. Celui du Caire fe vend commune"ment 2 piaftres le quilot, & celui de Philippopoli a xt piaftre. P eft a obferver de ne point faire aborder le Riz a 1'Echelle de Ghujlevé, paree que le douanier qui eft chargé du détail des provifions de la maifon du Khan, s'en empare pour 1'ordinaire, le taxe a bas prix Si paye quand il veut. Légumes. II n'y a que les pois chiches qui mau-  46 COMMERCE DE LA : quent en Crimée: Ie rede des légumes y ■ vient en trés grande abondance. II vient 12 a 15000 ocques de ces pois chaque année, & elles fe vendent 435 paras 1'ocque, Sacs. II vient de Ruffie 18 a 20,000 facs de groffe toile d'emballage, tout faits , qui fervent pour mettre toutes fortes de grains. Ils font de deus grandeurs 5 les premiers vafent de 16 a 17 paras öi les petits de 7 a 8 paras la piece. Fruits Secs. La confommation en eft immenfe en Crimée: les raifins Razah-uzum viennent de Smyrne; le débit en eft de 800 a iooo quintaux, du prix de 11 a 12 piaftres le quintal. La feconde efpece de ces raifins Ismir - Jiabi, eft fort inférieure & vaut de pa 10 piaftres le quintal; on en apporte 7 a 800 quintaux: la foifieme efpece, dite Mangalia ■ uzumi, n'eft pas mangeable; mais elle fert pour faire une efpece d'eau- de - vie qui eft beaucoup du goüt des Tartares: il en vient 2500 a 3000 quintaux, dont le prix eft de 7 a S piaftres.  tl ER N O I RE. 47 Les figues, Torba- Indjiri, valent de ii a 12 piaftres le quintal : celles dites Sapet- Indjiri, font de 8 a 9 piaftres; & les Taban • Indjiri, vont de 6 a 7 piaftres. La confommation de toutes ces figues eft de 15 a 20,000 quintaux. Les chataignes feches fe vendent 2 a 2f piaftres le quintal. II en vient 7 a 800 quintaux. Les poires feches, 900 a 1000 quintaux, & valent 2 a i\ piaftres le quintal. Les^noix feches, 7 a 8oooquilots, de 10 a 12 paras. Les noifettes de Trébifonde 5 a 600 quintaux, de 2 a 25 le quintal. Kara- Khmmna de Natolie, ou Dattes noires, 3 a 4000 quintaux, de 50 a 60 paras le quintal. Olives noires deMetelin, 1000 k 1200 barriques du poids de 300 a 350 ocques, de 8 a 9 paras 1'ocque. Limons & oranges de Scio : quand on peut les préferver de la pourriture, ils valent de demi a un para le limon, & x a 3 paras 1'orange. Nar denk de Trébifonde, fait avee toutes fortes de fruits, 7 a 8000 quintaux de 11 a 2 piaftres le quintal. Petmès, fe fait dans le pays avee des  43 COMMERCE DE LA raifins & des poires. C'eft une efpece de Raifinet; il fe vend de 2 a 3 paras 1'ocque. Pefiil de prunes, 7 a 800 quintaux, & vaut de 2 a 3 paras 1'ocque. Jus de limon, 150 barriques de 450 a 500 ocques, & fe vend de 9 a 10 paras 1'ocque, mais bien fraudé. En général, le commerce des fruits eft trés lucratif; on y gagne communément 100 pour 100. Ils viennent prefque tous a Caffa , paree que c'eft la plus grande ville de Crimée & la plus commercante. Fins & Eaux de vie. Le pays produit beaueoup de Vin , neanmoins il en vient encore de dehors, de Tripoli, de Mifèvria , que l'on vend avee avantage, paree qu'il eft rouge & trés fort. Le Tartare, quoique Mahométan , n'eft point aufli fcrupuleux que le Turc fur eet article , & il préfere ces vins étrangers a celui de fon pays, qui eft blanc & léger. Ces vins étrangers fe vendent de 4 a 5 paras 1'ocque, ou deux pintes environ de France. Voyezci-après a Partiele de Sortie, f* Outre 1'eau de vie qui fe fait en Crimée, les  MER NOIRE. 0 les Cofaques apportent 60 k 80 barriques de 50CO ocques d'eau de vie de bied brülée, extrêmement violente; elle fe vend de 6 a 7 paras 1'ocque. Ils apportent encore 30 a 40 barriques *de ratafia de cerifes & de griottes affez mauvais, que Fort vend de 13 a 14 paras 1'ocque. Tabac. Le Tartare ainfi que le Turc fument beaucoup plus que le Hollandais & la Venitien. II vient en Crimée plus de 150,000 ocques de tabacs,de toutes for£ tes d'efpeces différentes & de tout prix : il en y a depuis 5 a 6 paras jufqu'a 2 & 27 piaftres: c'eft un objet de 50 a 60,009 piaftres. Kénas. Eft une drogue dont les femmes fe fervent au bain pour fe décraffer & dégraiffer les cheveux, les teindre en rouge, ainfi que leurs ongles des pieds & des mains. La confommation annuelle eft d'environ 1500 facs de 150 ocques chacun, & vaut de ioa 12 paras 1'ocque. C  .Sf C O M MER C E r>£ L &■ Fard. Toutes les Mahométanes & Jes juïves fe fardent. La confommation du rouge & du blanc va paran de 5 a 600 ocquesj qui fe vendent indifféremment, 2 paras la dragme, dont 400 font 1'ocque ;ce qui revient a 20 piaftres 1'ocque. Les femmes Chrétiennes n'en font point ufage. Fierrerks, Perles Fijoux. C'eft un article de trés peu d'importance. On débite année commune 2 a 300 mifcals, d'une dragme & demie, de perles. 11 y en a de diverfes grandeurs depuis dix jufqu'a quarante piaftres le mifcal. Ceux qui veulent fe pourvoir de bijoux, les commandent a Conftantinople. fdrmes Caffa & a Ghuflevé, de toute la partie feptentrionale de la Crimée. Elle ne vaut que 7 a. 8 Becheliks, qui reviennent a 2 paras & 2 afpres: c'eft un ohjet de 9 a ioo,cco' cuintaux ; ces deux qualités de Iaines paffent a Conftantinople & en Romé» C 5  s$ ( COMMË'R-CE DJE LA lie, par les batiments de Varra & dei Bourgaz, Outre la laine pélade de toutes les villes oü 1'ön prépare les peaux pour iës manufaétures de maroquins & autres, Mankoup & le diftriót des Tats font les endroits d'oü il en fort le plus. C'efb cependant un petit article,qui peut aller par an de 5 a 6000 quintaux j elle eft aa même prix de la furge. Comme il y a un trés grand concours de marchands pour 1'aehac des Iaines, il faut être extrêmement diligent pour s'er; affurer de'fortes parties.- Pour eet effet il eft néceffaire d'avoir des facteurs fur les lieux; a Baliklava pour la laine-lavée; a Précop & a Ghuflevépour la laine furga Ces facteurs font des traités avee les Kirdjh, qui fohteeux qui vont ramaffer la laine de. la première main. On traite de deux fajonsayec eux. On fixe le prix de la laine-, ou, bïeü fon- convient de fe faire rendre compte óe-Turc* a-More: cette derniere maniere eft la plus mauvaife, La première eft meilleure, paree que fi l'on n'eft pas-content de la laine on la laiffe; au lieu que l'on eft obligé», dans le fecond tas, de courir tous les inconvéniens de kmauvaife foi de. ces Kirdjis^qm ne foat  M E R' N O 1 X EP pas des plus honnêtës gens. II faut auH s'alfurer des voitures, pour tranfportor les Iaines dans les ports de mer. La première toifon qui fe fait au printems eft '« plus eftimée, paree qüelle eft toujours plus longue que celle qui fe fait en au>tomne. Comme il eft impoffible de choifir la laine lavée a Baliklava & de la faire cerner, paree qu'il y a un trop grand nombre de concurrens; on pourrait effayer en offrant un prix convenable de la faire trier: mais pour eet effet il fau* drait être établi fur les lieux & y avoir 1'ceil pour la réuffite. - On emballe la lainé dans des 'Kctcbfo ou feutres, dont on fait des facs qui con» tiennent environ 500 ocques. Ces facs coütent ordinairement 10 piaftres dé Crimée; ce qui revient environ a 66 patras de Conftantinople, oü on les revend, ainfi qu'en Romélie, fans perte, -Outre cela, la piece Serkapan, qui couvre 1'ouverture du fac-, coüte 3 piaftres de Cri mée, ou 20 paras; le fil pour les coudre 1 piaftre de Crimée; la corde 1 piaftre; le rempliffage dü Kctcbé, y compris la nourriture de 1'ouvrier, 5 piaftres: deforte que 1'emballage d'un fac de laine mónte a 20 piaftres de Crimée, qui font d« C 6  6*o COMMERCE DE LA Conftantinople 3 piaftres 13 paras St 1 afpre de Turquie,6u 10 livres de France; la piaftre de Crimée évaluée 10 fols dé notre monnoye. II y a encore un inconvénient qu'il nelèrait pas bien difficile de lever. A Conftantinople, les Torganiljis ou fabricins de couvertures, ont le privilege exclufif de s'emparer de toüte la laine, & l'on ne peut en vendre ni en expédier ailleurs que lorfqu'ils font fournis & qu'ils n'en veulenc plus. Ils ne manqueraient point,, en vertu de leur privilege, de s'emparer p:r jaloufie de la laine; mais on leveraït eet obftacle, en s'accordant avee quelque marchand Turc qui prêtat fon nom a la réception de la laine & fe chargeat de lever toutes les difficultés, moyennant un puit bénéfke. Teftik ou Laine de chevron. II y a en Crimée du Teftik, que nousappellons laine de chevron & poil de chameau. II eft d'une qualité fort médiocre. C'eft un article bien ingrat 6c qu'il faut connaïtre a fond. Comme on 1'achete brut, on doit favoir évaluer le déchet qu'il peut y avoir en Ie netto;, ant..  :M E R N O I R E. dl Le poil de chameau fe vend brutde 6 a 7 paras 1'ocque. L'on trouve la laine de chevron travaillée & nette pour 14 a 15 paras 1'ocque, Crins de Chevaux & de Boeufs. Les crins de chevaux & de boeufs font un article de commerce en Crime'e; ceux de chevaux font les plus eftimép. Les vagabonds de Bohémiens établis en Crimée, achetent beaucoup de ces crins pour faire des tamis,des fics & plu— fieurs autres fortes d'ouvrages qui fortent de leurs mains. 11 en paffe beaucoup a Conftantinople. On les vend de 30 a 40 paras 1'ocque: peu de gens veulent ceux de boeufs, qui ne fervent qu'a frauder les autres. Cuirs de Boeufs , de Bujfies & de Cheyaux. . La Crimée fournit environ chaque année 250,000 cuirs de boeufs & de va* ches, tant de fon cru que de ceux qui y. viennent de chez les Nogais & les Ck? caftiensi Gr  & CDMMER'CE DE Uf Swóirï 80 >a 100,000 beaux cuirs males de bonne qualité: 150,000 petits enviroa nsales & femelles. Ces cuirs font de différens poids & de diverfes qualités. Les males pefent ordinairement de 18 a 22 ocques; on en trouve même de 28 a 30, mais ils font rares. Les petits péfent communément de 12 a 14. ocques. Tous les cuirs ont le poil plus ou moins long & fourni: on doit s'attacher a ceux dont le poil eft Je plus court & Je plus luifant; ils font plus nourris, plus nerveux & plus pefans que les autres. Les cuirs fe vendent en troc ou au comptant, a piece ou a ocque. On les schete toujours plus cher en troc & Ja facilité que 1'échange peut donner- de debiter quelque marchandife d'entrée , eft le feul motif qui doit déterminer le marchand a faire de pareils traités: indépendamment du desavantage du prix, on eft obligé de prendre la partie offerte en troc telle qu'eile eft T fans pouvoir choifir, & l'on n'a ordinairement que de ia.marchandife commune. La meilleure-  M E R,: NC* I R E;. 65- fa'con d'acheter les, cuirs eft d'avoir a Caffa, a Ghufkvé &-a Précop des fac* teurs entendus, qui aillent dans la faifon oü l'on tue les boeufs, depuis Décemhre jüfques en Mars, ramaffer les cuirs 1'argent a la»main, dans les villages de la Crimée & chez les Nogais: on les a par ce • moyen a meilleur compte qu'au marché de la feconde main, & Ton a 1'avamage de pouvoir - ehoifir & de rebuter ceux dont on neft pas content. Les. beaux cuirs males de 18 a- 22 ocques fe vendent. communément en troc de i\ a .3 piaftres & au comptant de 2 a 25 , fuivant la qualité 5. mais en les achetant, comme on vient de le dire, de la première main, on peut les avoir de i| a '2 piaftres.. Les petits cuirs males & femelles an deffous de -16 ocques valent 25 a 30 pour cent moins que les autres. II fort de la Crimée 3 a 4000 cuirs de buffles de différentes grandeurs, du poids de 25 a 50 ocques: Caffa eft la place ou l'on trouve plus n communément a les acheter: on les vend de 4 a 7; piaftres. L'on trouve encore 10 a 15000 cuirs de chevaux, dont le prix dans le pays eft dêLjj a 30.paras le cuir. Les Nogais es  $4. COMMERCE DE LA font des pellïfles avee le poil en dehors & la criniere pendante le long du dos; ce qui fait un habillement fingulier & leur donne une figure épouvantable. Maroquins ^ Peaux 6? Bazanes. 11 y a p'ufieurs Manufactures de cuirs en Crimée, mais les principales font a Ghufievé & a Karafou: le débit en eft prodigieux. II en fort ordinairement: ioooo touras de maroquins fahtiams. 5000 touras dits rouges, teints avee le bois de Fernambouc, ou de Sainte Marthe. On ne les fait qua Karafou. 500 touras teints en cochenille. 500 touras teints en noir. 300 touras blancs, que l'on fait a Caffa. Le toura de maroquins teints en cochenille eft de 5 pieces 5 & celui des autres eft de 10. Ceux-ci coütent de 50 a 60 paras Ia piece, & les autres de 2t a 2| piaftres. 2cooo touras de peaux de mouton appellées Mcchin & en francais Bazanes, teintes en jaune. icooo touras de rouges. 5000 touras de roires. 200CO touras de blanche*.  mer noire. 65 Ces touras font tous de 10 pieces, qui coütent de 20 a 25 paras Ia piece. 35 a 40000 cuirs fecs pour les femelles de fouliers, bottes &c. de différente» grandeurs, depuis 8 jufqu'a 32 paires de femelles. Les petits fe vendent de 50 a 55 paras, les moyens a proportion & les grands de 5 a si piaftres. 45 350000 cuirs, Keuffdês, en francais vaches liffées; ils fervent pour les harnois des felles & valent de 50 paras a 3 piaftres. 10 a 12000 peaux de chagrin appel- , léés Saghir, qui ne font faites qu'a Ghuskvé , pour les gaines des coóteaux & fcurreaux de fabres, Kantjiars, Tuta? gans &c. 5 a 6co,ooo Courroyes blanches de cuirs de bceuf & de buffle, pour les fangles des felles & les rennes des brides. 11 y en a de différentes grandeurs , longueurs & largeurs, depuis 2 paras jusqu'a 1 piaftre. Peïïeteries. Elles font de huit fortes: le Renard ou Tilkï ; le Loup ou Kourd; l'Ecureuil ou Cueudjeti}. le Lievre qu Tawcban; le Chat  eS COMMER'CE DE ÉA ou Kedi; le Teffbn ou Bowfouk ; VAg\eau eu Kouzr; le Mouton ou Kejous. Les Renards de Crimée font inférieurs a ceux de Rufiïe & de Pologne. On divife cette peau en fix' efpeces de fourrüres: du gofiér on tire le Boeaz, qui fert pour les parements & les bordures"; du deffus du col , on forme le DjUgava; qui eft" une fourrure fort eftimée; des flancs & du ventre on tire le Nafé, qui fert pour'1'intérieur des pelliffes; du dos, on compofe le Sirt, qui eft trés commun & a vil prix; On tire même parti des pieds & de la tête, dont on fait les pelliffes les plus viles. Les peaux entieres de renard flon travaillées fe vendent au marché de 30 paras a 2 piaftres. Les Bogaz fe vendent a piece d'un pan de löngueur fur de large, de 30 a 40 para» la paire. Si l'on en forme des tables entieres, c'eft la perfeclion de raffortiment qui en déterinine le prix, qui va de 60 a 200 piaftres. Le DjUgava fe vend en pieces & ea tables;la pelliffeentiere vaut de 50 ajoo ■ piaftres. Le Nafé ne fe vend qu'en tables: il y en a depuis 16 jufqu'a 200 piaftres. Le Sirt eft une fourrure commune, que l'on paye de -10 a 20 piaftres;  MER N O I R E. €7 hcs Patcbas & le Caffa, qui font les pieds & la tête, font les plus viles; les premières fe vendent de 6 a 10 piaftres, & les fecondes de 5 a 8 piaftres. Les queues ne fervent que pour rem> fcourrer les couffins & les matelas. Les peaux de loup fe vendent au marché,telles que l'on lesatirées de 1'animal & fe vendent de 1 a 2 piallres. Les peaux d'hiver peuvent-feules fervir pour les fourrures: celles d'été ne valent ne», le poil tombe & les peaux ne font pas affez fournies. Alors elles ne fe vendent qu* rp a 15 paras. II faut douze peaux pour une pelliffe: on en öte la tête, le dos & les pieds , dont- on fait les fourrures les plus communes. Les Ecureuils ou Gueudjens fe vendene préparés de 2 a 8 paras la piece. La fourrure entiere eft de 60 pieces environ & coöte de 3 a 12 piallres. Les peaux de lievre font en trés grande abondance,- on les vend a piece de 5 afpres a 2 paras; on en fait des fourrures appellées Korel- Kas, dont le prix eft de 50 paras a 2 piaftres: celles d'hiver Cbnt. les plus eftimées. Les fourrures de. Chat' font de cin^  63 COMMERCE DE LA efpeces différentes; les blancs, lesnoirs, les gris, les roux & les pies. Les blancs & les noirs fe vendent k piece de 203 25 paras & la fourrure entiere coüte de 8 a 9 piaftres. Les Chats gris, les roux & les pies valent 1 o a 12 paras la piece & le prix de la fourrure eft: de 4 a 44 piaftres. Les peaux deTeffon fe vendent de 15 a 20 paras la piece: il n'y a que les Nogais qui en faffent des peliftes. Les Tartares s'en fervent pour faire des étuis de fufil. Les Peliftes de peaux d'agneaux ap* pellées Beden, font fort en ufage en Crimée. U en paffe beaucoup a Conftantinople & dans la Natolie: il y en a de blanches, de noires , de griles & de rouffes; les grifes font les plus eftimées & valent de 10 a 13 piaftres la fourrure; enfuite viennent les noires & les rouffes , qui coötent de 8 a 10 piaftres: les blanches font la plus baffe qualité; on le» vend de 4 a 5 piaftres. 11 faut 14 a ió peaux pour faire une fourrure entiere. Les Peliftes de peaux de mouton font d'un ufage général: il y en a aufii de jaoires, de grifes, de rouffes & de blan-  MER NOIRÊ. 6) ches : leur prix eft de 30 paras a 2 piaftres Ia peliffe entiere. Le pays en confomme un nombre prodigieux. II n'y a point de Tartare riche ou pauvre, de Nogais ou étranger en Crimée, grand & petit, qui n'ait au moins fa peliife de mouton. Peaux cïAgneaux pour les Bonnets. La Crimée produit une quantité im-'< menfe de peaux d'agneaux , dont l'on borde les bonnets a la Tartare: outre la prodigieufe confommation qui s'en fait dans le pays, il en paffe annuellemenC pour Ia valeur de 250 a 300,000 piaftres en Rufïie, en Pologne, a Conftantinople , en Moldavië, en Valachie , en Romélie, en Natolie & chez toutes les nations oü l'on trouve des gens coiffés k la Tartare. Ces peaux font tirées des agneaux morts dans le ventre de la mere, ou qui ont vécu peu de jours. II y en a de trois couleurs, noires, grifes & blanches. Les grifes font les plus eliimées & font de deux efpeces; 1'une appellée Bakhtin, a le poil applati par malfes & trés court; 1'autie nommée Kivm'ji- tin , a le poil plus long öi extrêmement frifé ;  •/Ö COMMEU CE DE Li h qualité & la beauté en déterminent le prix; il y en a de 10 paras jufqu'a is & 15.piaftres.'Ghufievé eft la place oü s'en fait le plus grand débit. Les plus belles peaux grifes paffent en Pologne pour les bonnets a la Polonaife. Les Gentilshomines Sarmates en font des ameublemens & y dtpenfent des fommes énormes: les Vaiaques & les Moldaves en confomme-nt auffi beaucoup pour leurs bonnets. Les peaux noires ont plus de débit a Conftantinople pour les Kalpak des Grecs & des -Arméniens. II vient. auffi d'A/lrakan de ces peaux en mêmes couleurs, mais plus cheres paree qu'elles font mieux préparées; mais la quantité n'en eft pas confidérable. L'article des Peaux eft le plus folide & le plus lucratif du commerce de Sortie de fa Crimée. Salpêtrt. On en' exporte environ 40 a 50,00* ocques par an, malgré Ia confommation confidérable qui s'en fait dans le pays.: oa le vend au marché ai; piaftre de Crimée 1'ocque, qui font 10 paras de Turquie, ou 15 fols de France. E» É_J* Si J. Ó4C00 *. 4.  MER N © I R *E. Tachetant du vülageois de la première main, on peut 1'avoir £17 paras. On 1'embarque dans des tonneaux ou des barriques, que l'on remplit le plus exa&ement qu'il eft poffible: on a foin den'y point iaifter de vuide; le cahotage de la voiture & les fecouffes de 1'embarquement & du debarquement Ie mettent: en poufliere & ie font décheoir. La venta aux étrangers èn eft prohibée & il ne peut entrer a Conftan'inople qu'en contrebande; quand il eft découvert, le r ermier des poudres s'en faifit & le pa e après 1'avoir fait rafiner. 12 paras, prix fixé par la Porte. Ce prix eft trés ruineux; pour ie vendeur, paree que le déchet que le falpêtre éprouve a la rafinerie eft très_ confidérable; mais on peut parer k eet inconvénient, en gagnant Je Comm's du Fermier des poudres. qui fe tientordinairement a 1'un des chateaux du Canal de Conftantinople & qui , moyennanc quelques fequins, ferme les yeux & favorife même 1'entrée de la marchandife. Tous les marchands de Crimée qui portent du falpêtre dans cette capitale, ne font pas autrement. II y a un ufage dans le Levant, c'eft ?ue, quand on eft pris en fraude fur mar-  7a COMMERCE DE LA chandifes permifes, ou que l'on veut en faire entrer de prohibées; dans le premier cas on fait payer doublé douane, & dans le fecond, ceux qui ont le privilege exclufif de la marchandife, s'en emparent en payant le prix fixé, ou le prix courant de cette marchandife; de forte que l'on ne perd jamais le tout. Poudre a tirer. Quoique l'on fabrique beaucoup de poudre a tirer en Crimée & qu'il en paffe beaucoup chez fétranger, les Tartares font fort curieux de la poudre fine de France & encore plus de celle d'Angleterre, paree que celle que l'on fait dans lepays, eft affez inférieure. Couteaux. La renommee des couteaux Tartares s'eft répandue par un préjugé affez ordinaire dans tout 1'univers, paree qu'ils viennent d'un pays trés éloigné & tel que la Tarrarie, dont le nom feu! impole : quoiqüa Paris & a Londres on travaille mieux & avee plus de perfeclion qu'a Bactchtferai, oü fe tiennent les meilleurs ouvriers,  MER MOIRÉ. 73 ©uvriers, la Crimée fournit année commune environ 400,000 couteaux de toutes grandeurs, de tout prix & avee toutes fortes de manches, en argent, en cuivre, en corne de boeufs, de buffles, de moutons fauvages, d'ivoire, de dents de poiffon, garnis & non garnis, a la mode, fimples, ou damafquinés. On n'en peut déterminer le prix. Cornes de moutons fauvages, &C» II y a dans la partie méridionale de la Crimée & dans les plaines d'Oczakow & de Pf^ecop, des mourons fauvages dont la chair e!t beaucoup meilleure & plus délicaie que celle des moutons domeftiques lis funt extrêmement légers a Ia courfe & courent auffi vite que le chevreuil; ils vont par troupeaux : on les chaffe au fufil & a la fleche; on les prend avee des 'rappes & des lacqs Les cornes de ets animaux font un article de commerce: on en fait des manches & des gaines de couteaux , qui font d'une feule piece, ainfi que d'autres ouvrages d'une grande beauté & fort tranfparens. On les vend a Précop 334 paras la paire; mais a Baókheferai, elles valent jufqu'i D  74 COMMERCE DE LA 20. L'on débite aufli une grande quan» thé de cornes de buffles & de boeufs: les premières de 50 a 60 paras la paire, & les autres de 9 a 10. Fufiis. . Les fufiis de Crime'e font fort recherchés dans tout l'Empire Ottoman: on ne les travaille qua Eaclcheferai: il en fort 5 ,a 600 fufiis montés & environ 2000 canons de fufiis. Ces canons font fimples ou carabinés. Ces derniers réufliifent mieux que les autres. II eft impoflible d'en déterminer le prix: il y en a depuis 15 jufqu'a 200 piaftres. L'on en fait de communs pour le peuple. Selks de Chevaux. Ces felles font afiez commodes pour ceux qui y font faits: elles font extrêmement légeres, dégagées & a trés bon marché. II y en a a tout prix. L'on peut avoir un équipage de cheval complet, neuf 6 bien conditionné, pour 3f piaftres: elles feraient fort avantageufes pour notre cavalerie légere, & les chevaux n'en feraient pasblefies, non plus que les hommes.  MER N O I R E. 75 Ketchès ou Feutres. II s'en fabrique une prodigieufe quantité en Crimée; 1'emballage des Iaines, les maifons ambulantes des Nogais, les tentes des Tartares, les couvertures des ,;«■) voitures de voyage & de tranfport, les defTous des felles des chevaux en confomment une énorme quantité. Les feutres fimples, noirs, gris, coütent communément i piaftre de Crimée 1'ocque; ce qui revient a 6 paras 2 afpres de Turquie. Les feutres colorés en forme de tapis valent 120 afpres 1'ocque, qui font 8 paras: il en paffe beaucoup au dehors. Ouvrages grojfiers de Poil de Cheyre. II y en a de plufieurs efpeces: les facs dits Torbas pour donner a manger 1'orge aux chevaux, valent de 6 a 7 paras la piece: les facs pour mettre le bied, dits Seklem, fervent aufli pour tous les autres grains & légumes , & coütent depuis 12 paras jufqu'a 2 piaftres. Ces deux articles font un objet confi 'érable. L'on fait aufli beaucoup de fangles de cordes pour les Keu/Iets ou liens de chevaux, des bourfes pour les décraiTer. Les fanD 2 c is&ArJd* • ÏÜSUI.  *Wf COMMERCE DE LA gles coütent de 3 a 4 paras, les cordes fuivant la longueur & les bourfes d'un para & demi a 2 paras la piece. Cire. Le pays n'en produit pas une grande quantité. La récolte annuelle fe borne a 7 ou 8000 ocques: mais il en vient tous les ans.de Circaffiea Caffa par Taman de 50 a 60,000 ocques. C'eft le fermier des chandelles qui achete & revend celle du pays; chacun étant obligé de la lui porter, il la paye fuivant Je tarif. Celle de Circaffie eft libre. Le prix en eft de 38 a 40 paras 1'ocque, tam 1'une q«e 1'autre; il y a des années oü elle va jufqu'a 42. Miel. Le Miel de Crimée eft réputé le meilleur de tout 1'Empire Ottoman ; on le vend dans les marchés en gros de 13 a 14 paras 1'ocque, pur: mais quand on le fait ramaffer dans les villages & que l'on 1'achete a la ruche, on peut 1'avoir avee la cire a raifon de 11 paras: on y trouve mieux fon compte. On transvafe  MER, N O I R E. 77 re miel dans des cruches & des tonneaux de différentes grandeurs; mais il faut obferver toujours de laifTer un peu de vuide dans la cruche ou dans le tonneau, & d'y pratiquer un petit foupirail pour lui donner de 1 air, fans quoi il fermente & rompt tous les vafes & tous les vaiffeaux. Beurre. La Crimée produit environ 3000 quintaux de beurre ; il en vient a peu prés autant de chez les Nogais de Yamboilouk, par Précop-, & de ceux du Couban, par Taman. Ce beurre eflr de deux qualités différentes: le premier s'appelle Tcbitckifïagbi, extrêmement effo'mé; on le vnnd de 13 a 14 paras 1'ocque: 1'autre efl: ce que fon appelle Mantegue en Provence; i! efl; mêlé de graiffe de mouton, de bceuf clc même de chameau; fon prix ordinaire eft de 10 a 11 paras. Pour favoir k boa marché, tant 1'un que 1'autre, il faut le faire ramafier dans les villages. Les villageois vendent ce beurre dans des tripes de mouton , & les Nogais dans des boyaux de chevaux: il faut le faire fondre pour le bien épurer. Le déchet peut L> 3  78 COMMERCE DE LA aller de 5 a 6 pour cent,'quaiïd on lachete brut de la première main. Suif. La Crimée en produit beaucoup: il en vient auffi une grande quantité de chez les Nogais & les Cofaques. C'eft une marchandife de contrebande pour la fortie qui en eft défendue : néanmoins il en fort année commune environ 1000 quintaux , & 5 a 600 quintaux de cbandelles. Le fermier feul, a qui l'exportation en eft permife, n'ofe le faire qu'avec certaines précautions. pour éviter les murmures de la populace. Le prix de la chandelle eft toujours fixé, mais il differe dans chaque ville: le prix du fuif n'eft jamais taxé; on le vend communément de 7 a 8 paras 1'ocque. Viandes falées & Pafturmas. Ce commerce eft affez confidérable en Crimée; c'eft ordinairement des moutons que l'on fend en deux ou en quatre , & que l'on met dans des tonneaux avee une faumure. L'on vend cette viande a raifon de 4 paras 1'ocque: il en fort environ  MER NOIRE. 79 2000 quintaux. On prépare aufli de la viande de bceuf falée & fbmée, que l'on appelle Pafturmas; mais il n'en fort pas du pays. L'on vend auffi des moutons entiers, fendus feulement par le milieu & féchés au foleü. Poiffon fee £? filé. C'eft un objet fort confidérable du commerce de Crimée: il eft impoflïble d'en déterminer la quantité qui s'exporte, paree que cela dépend de 1'abondance ou ce la rareté de la pêche: il fe vend a raifon de 3; a 4 piaftres le millier. La pêche du gros poiffon fe fait a YcnikaU ik a Kerche. Les principaux poiffons font ia ■Moronne ,1''EJturgeon & le Suriik. Les deux dernïers fe coupent en aiguillettes que l'on fale&qu'enfuiteonfait fumer:ils font fort recherchés dans tout 1'Empire Ottoman & en Chrétienté. La pêche la plus abondante eft celle de la Moronne. Les aiguillettes de ce dernier poiffon fe vendent fur les lieux de io a 12 paras la paire; ceux d'Efturgeon a 6 paras; les Suruks fe vendent entiers fuivant la grandeur, depuis 6 jufqu'a 12 paras. Le commerce de ces Tcbilirnsy ou aigui'letD 4  8o COMMERCE DE L"A tes, efl un objet de 7 a 800 quintaux, chaque année. Outre ces Tchilims, on fale encore environ 5000 quintaux de Moronne & d'Efturgeon , que Ton coupe par tranches & que l'on met enfuite dans la faumure. La Moronne faiée fe vend 3 paras i ocque ; 1'Efturgeon eft un peu plus cher. Caviar, Boufargue, Huik & Colfe de Poiffon. Le Caviar n'eft autrechofequeles oeufs des gros poiffons dont on vient de parler, que l'on fkle& que l'on met dans des barriques ou dans des boites, après les avoir prépare's & falés. Les deux places de Kerche & de TcnikaU en fournilïent 1500 quintaux par an. Le Caviar noir eft le meilleur & vaut fur les lieux 10 paras, 1'ocque; Ja feconde qualité vaut 8 paras & le Caviar rouge eft a trés vil prix & ne vaut que 4 a 5 afpres 1'ocque. On trouve a Caffa de la Boutargue excellente, mais en petite quantité. Ce font auffi des oeufs de poiffons moyens que l'on fale & que l'on fait fécher & fumer. Son prix eft de 4 a 5 p'aftres 1'ocque. II fort de Kerche & de Tenikalé 5 a 600 quio-  M E R N O I R E. s r quintaux d'huile de poifiön, que l'on vend fur les lieux de 5 a 6 paras 1'ocque & 4© a troduire nos vins de Provence & de Lais» guedoc par la Mer Noire dans les pro» ' vinces méridionales de la Ruflie & de & Pologne. Cette branche de commerce donnerait a coup für un bénéficeimmerrfè. Un Francais nommé Rivier &z m. Genevois appellé Litour,en firent reflai^,  82 COMMERCE DE LA il y a 20 a 25 ans. (Cèci a été écrit en 1760) Ils firent a Conftantinople un chargeraent de vin: ma'gré leur inexpérience, les frais accumulés, les pertes qu'ils firent fur les marchandifès de retour qu'ils prirent en troc & plufieurs autres facheux événements, ik triplerent & quadruplerent leur capital. Lts gens du pays & les Ruffes furtout les leur enleverent a leur arrivée. Cet article n'efl; pas a négliger. La voye de Crimée pourrait réufïir; mais il ferait plus a propos de débarquer le vin a Tcherkerkoi ou a Tangareck par la mer d'/Jfopb. Tous ceux qui y portent des vins des iles de 1'Archipel, y font un profit imrnenfe. Crains. Si ce Commerce était libre, ce ferait ie plus important de ceux de la Crimée & de la Mer Noire; mais i! eft de contrebande & on ne peut 1'acheter que pour le tranfporter a Conftantinople, oü il efl fixé par une politique ablurde, qui fait que cette ville en manque fouvent, qu'il puiffe aller autre part, fous peine de la tête. Pour en porter dans la Natolie, il  MER N O I R E. faut des Firmans du Khan, qui n'en ac* corde que dans des tems oü 1'abondance eft extreme dans la Capitale de 1'Empire Ottoman. En 1745, Selbn-Gueraï-Khan fit couper Ia tête a fon Douanier de Ghulievé, pour en avoir fait tranfporter aTrébifonde, oü Ia famine était extréme;, ainfi qu'a Conftantinople; ce qui arrivé affez fouvent, paree- que la Porte ne fe défifte pas de 1'abfurde fyftëme de fixer le prix da bied. En 1757, la mauvaifë récolte & la prodigieufe entraclion des bledspour Conftantinople, eauferent une famine générale en Crimée. Le Khan fit ouvrir (es puits appellés Ourous, oü les Tartares confervent les grains; cela ne fuffit pas & occafionna la révolte des N< gais, qui a placé en 178 fur le tröne Kerim- Gucrai- Kh m, ltquel a abdiqué en 1783 en faveur de Catherine II, Souveraine de Ruffie. Outre beaucoup d'orge & de feigle quï viennent en Crimée il y croït encore une prodigieufe quantité de millet: e'èft la nourriture principale du Tartare &furtout' des Cslogais , qui ne vivent que de ce grain , qui eft pour tux d'une relfource in« finie: i!s te préparent de huit a dix fagons différente». Ils en font plufieurs boiffons, D 6  84 COMMERCE DE LA qui enivrent plus que Ie vin. Le pris ordinaire du bied en Crimée eft de 10 a 12 piaftres du pays, c'eft - a - dire de i] a 2 piaftres le Bejfiré ou Quilot du lieu, qui vaut quatre Quilcts de Turquie, & pefent de 88 a co ocques. L'orge & Ie fëigle fe vendent autant 1'un que 1'autre , de 6 a 7 piaftres le BfJJèré; ce qui reient de 40 a 43 paras. Le millet vaut un peu plus que l'orge & le feigle. Le Bejfiré des Nogais & celui de Pré» cop eft beaucoup plus fort que celui de "intérieur de la Prefqu'ifle, & va de 112 a 12© ocques. Qn peut néanmoins fpéculer fur cette marchan^ife par la comparaifon du prix courant du pays k celui de Conftantinople & y faire des envois en droiture, & non ailleurs, comme on vient de le dire. On trouve rarement a freter ou nolifer des batimens pourle tranfport desgrains: ces fortes de fpéculation fur cette marchandife fe font ordinairement a la part, Lorfque le grain eft vendu, on préleve toutes les dépenfes de J'entTeprife, & ce qui refte fe partage par égale portion entre celui qui fait les fonds, le propriétaire du navire & 1'équipage. On verra eet arrangement plus en détail au Commerce;  MER NOIRE, des Abazes, qui fe fait de la même maniere. Mais fi l'on voulait faire de fortes fpéculations fur "eet article, on pourrait trouver a nolifer des batimens a Conftantinople, & les expédier avee des efpeces» Sèt. ïl y a trois Salines dans la Prefqu'ifie. Celle de Ghuflevé, qui appartient au Khan , ainfi que celle de Précop, & celle de Kerche qui appartient au Kalga-Sultav, Celle de Ghuflevé eft toujours reünie a la Douane, & celle de Précop a la Monnoye. Le Sel de Ghuflevé n'efl pas fi eftimé que celui de Précop, ni fi abondant: on en forme 'des monceaux appelles Kebes. Le Kebé eft de 100 faps, le fap de 80 quilots & le quilot de 17 a 18 ocques. Le douanier le vend en gros pour les chargements k fap, de 4 a 5 & même 6 piaftres. On le vend auffi dans le pays a Battman de 6 ocques, & il vaut ordinairement 20 afpres de Crimée, qui font 1 para & x afpre de Turquie. La Saline de Précop eft imrnenfe; ëlle *ft formée par deux lacs, qui ont chacm environ trois lieues de circoaférence D 7  86 COMMERCE DE LA On ne tire le fel que de celui qui efl: vers le Couchant & qui feul fuffic: ces lacs ne fe d< fltchent jamais; le fel s'y forme .naturellerent comme une croflte,de 1'épaifièur de deux pouces entre deux eaux: il commence a fe coaguier au mois de Mai , & dés qu'il a pris une certaine confiflance, la pluie 1'engraifle, au lieu de le diflbudre. Mais s'il mrvient de fortes pluiet en Mars & en Avril, avant qu'il foit formé, il n'y a point de récolte pour I'année. Les Rulles & les Cofaques viennent acheter ce fel depuis Mai jufqu'en Juillet, que le fel alors ceffe de croïtre dans les lacs & fe diflbut entieremenr. Dans le cours de 1'annéc, on en vend aux habitans de Crimée & aux Nogais; les moutons en confomment une prodigieufe quantité qu'on leur donne tous les foirs, avant de les faire rentrer du paturage dan; leurs pares Les Rufles & les Cofaques ont un prix fixe pour Je fel depuis un tems imméaiorial. Ils payent quatre roubles pour un chariot d'environ i^oo ocques de portée, & un rouble de douane a la porte de Précop, qui f.rme 1'Ifthme. lis conduifent leurs chanots aux bords du lac & les chargent eux mê-  MER N0IRE, 8? mes; enfuite pour payer moins de douane, ils transvafent le contenu de ces chariots dans d'autres voitures e'normes de la portee de 8 a 10,000 ocques, auxquélles ils attelent 15 a 16 paires de boeufs: maïs fi la voiture rompt ou s'affaiffe avant que d'avoir pafie la porte , tous les droits font payés doublé. La Saline de Keiche appartient au Kalga-Sultan, qui en donne ordinairement la ferme a 1'entrepreneur des fournitures de fa maifon. Kik ou Argik pour le bain. L'on trouve dans le territoire de Baliklava 1 auprès d'une montagne appellée Tcberkès- Kir man ,une quantité inépuifable d'une terre ou .argile grifatre, de la couleur de nos pierres a öter les taches: elle fert aux femmes dans le bain pour fe décraffer les ch veux. Tous les batimens qui chargent a Baliklava pour Conflariti. nople,en forment leur lelt. L'on pourrait de cette argile faire de la porcelaine. Le prix de cette terre en détail efl; de deux ocques pour un para. ..JL,Oöo.. C. ü <£ « fC, XMJ* * 10, £.40 * /2,,8öé  SS COMMERCE DE LA Efclayes. Le Commerce des Efclaves eft cort* fidérable en Crimée : ceux. que l'on y mene, font de quatre nations différentes: les Circafjiens, les Géorgiens , les Kal' mouks & les Jbazes. Les Circaffiens font les plus eflimés & les plus recherchés: les femmes de ce pays - la font les plus belles & les plus féduifantes qu'il y ait peut-être au monde; elles ont les charmes de la figure & des graces naturelles qui enchantent ; les hommes font auffi prefque tous grands & bien faits. Les femmes Circafïïennes font les feules qui partagent la couche des fimpereurs Turcs, & des Princes Tartares, Les Gentilshommes de la Crimée n'ont que des Circaffiennes pour concubines. Les Géorgiens font la feconde clafle; les femmes en font belles, mais groffieres & fans graces; elles n'ont pas la délicateffe des Circaffiennes: les hommes font robuftes ik fains. Les Kalmouks font extrêmement laids & reffemblent aux Nogais, la face platte , les os des joues extrêmement faillans, les yeux petits & ronds, le nez éerafé & épaté: ils reffemblent beaucoup aux Ciilnois, leurs ancêtres.  MER NOIRE. 8? Les Abazes reffemblent beaucoup aux Géorgiens pour la taille & la figure. Les Circaffiens payent au Khan des Tartares, un tribut d'un certain nombre d'Efclaves, que ce Pnnce envoje a Conftantinople au Grand-Seigneur & aux Officiers de la Porte, & dont il gratifie auffi les perfonnesqui renvironnent,airli que les officiers Turcs qui viennent a fa cour avee des commiflions du Miniftere Ottoman. Les Efclaves font une marchandife dont il eft impoflible de déterminer le prix. II y en a de tout age, depuis 1'enfance jufqu'a la décrépitude. Les divers ufages auxquels on les deftine, le fexe, la beauté, Lage, les graces, les talens, la force, la fanté,la convenance , en re~ glent la valeur: il y en a depuis co jufqu'a 5 & 6000 piaftres. L'on doit obferver qu'il eft défendu aux Chrétiens & aux Juifs de quelque nation qu'ils foient, d'acheter des Efclaves Circaffiens ou Abazes, paree qu'ils font eenfés Mahométans. Chevaux Chameaux, Les chevaux Tartares ne font pas  po COMMERCE DE LA beaux: ils font ordinairement fort petits, comme nos bidets, mais d'une force extraordinaire; ils réfiftent parfaitement k la faim, a la foif & a la fatigue: on ne les couvre, on ne les étrille jamais; ils demeurent indifFéremment dans 1'écurie ou en pleine campagne, & font accoutumés a toutes les injures de 1'air; ils n'ont point de repas régies, ils mangent & boivent a toute heure indifféremment: ils s'accommodent de toutes fortes de fourrages: quand ils n'ont abfolument rien & qu'ils ne trouvent pas même de 1'herbe a manger, ils creufent la terre avee le pied 6c fe nourriffent des racines qu'ils peuvent arracher. L'on trouve fort peu de chevaux entiers, vu que l'on n'en garde que quelques-uns pour étalons. Les chameaux de Crimée font auffi fort bons & élevés dans leur efpece auffi durement que les chevaux. Ils font prefque tous a deux boffès. La fortie de ces animaux efl rigoureufement défendue en Crimée: cependant, moyennant des Firmans du Khan, trés difficiles a obtenir, l'on en tire chaque année environ 300 chevaux étalons, & 200 chameaux, qui pafient a Trébifonde, dans la Natolie, en Circaffie & chez les  mer n o i k e, 92 Kalmouks. Les Circaffiens ne recherchent que les jumens. Le prix ordinaire des chevaux en Crimée eft de 15 a 20 piaftres & celui des chameaux de 40 a 50 piaftres. Mardhandises de Russie que l'on trouve a acheter en crimée. Pelleteries. Les Rulles apportent en Crimée pour environ 150,000 piaftres de Pelleteries de leur pays, qu'ils vendent avee avantage en troc ou au comptant. Ces Pelleteries font le Samour, ou Martre - Zibeline; Ie Vacbak, ou Loup- Cervier ; le Karfak, efpece de Renard; le Sm-Sanwur, ou Martre aquatique; \eZerdawa, ou Martre ordinaire; le Kakoum, ou Hermine ; le Tilki, ou Renard, de toute efpece; le Sind-jab, ou Petit - gris; le Satrauèje, or. Petit-gris vairé; XAla-karin, qui eft a peu prés la même chofe que le Gueudjcn, ou Ecureuil; le Kedi^oM Chat;le Babak, ou Chien ; le Kondouz , ou Loutre, ou Caftor; le Tawcban, ou Lievre; le Kourd, cu Loup. Les Peliffes de Samour font les plus  €2 COMMERCE DE LA eftimées après le Renard noir, dont le prix eft exorbitant & qui ne peuvent êtrepor» tées que par des gens extrémen- ent riches. La nuance, Ia longueur& Ia foupleiTe da poil du Samour en déterminent le prix. 11 y en a depuis 400 jufqu'a 2000 piaftres. Le Vuhak, ou Loup - cervier, eft trés eftimé:. les peliftes font de 300 a iqoo piaftres Le Kar jak eft une efpece de Renard fort eftimé , dont le poil eft blanc & long. Les fourrures font de iooajoo piifttes. ' Le Sou - Samour vaut de 60 a 200 piaftres. Le Zerdaioa: il faut que la couleur foit foncée & le poil long&touffu: il vaut de 50 a 150 piaftres. Le Kakoum fe vend de 60 a j 00 piaftres la fourrure. L'on a donné ci - deffus , page 66, 1'article du Tïlki, ou Renard, en parlant de Ia Crimée; les fourrures de eet anima], qui viennent deRuffiei font plus eftimées. Les Sind-jabs: il y en a de diverfes qualités; les- peliftes coütent de 8 a 40 piaftres, fuivant les qualités. II y a de ces dernieres fourrures qui font parfaitemenc bien travaillées, & qui coütent jufqu'a 300 piaftres.  HER HOItl 55 Xe Satraudje vaut de 8 i 9 piaftres Ia fourrure. VAla-Karin: les tables font de 3 a 4 piaftres; il en faut deux & quelquefois trois pour une fourrure. Le Gucudjen eft de différens prix, depuis 4 jufqu'a 15 piaftres. Les fourrures de Kedi font de même qualité que celles de Crimée & fe vendent au même prix. Vo\ez page 68. Les Babaks, ou Chiens. On teint les peaux en noir pour les pauvres gens, qui en font des fourrures Les Kondouz fervent pour border les fourrures des Tartsres en forme de galon : le prix en efl: de 3 a 15 piaftres. Les Tawcbans viennent en tables; on les vend de do paras a 8 piaftres. Toutes les fourrures viennent en tables ou en peaux; les pea.ix fe vendent a proportion du prix des 'at'les Ce commerce donnerait beaucoup de bénéfice ; mais il faudrait le faire diriger par gens du métier , paree qu'il eft impoffible d'en déterminer la valeur: il en eft cornme des diamans, qu'il faut eonnoïcre pour en régler le prix.  04 COMMERCE DE LA Toiles. II en vient de Ruflie en Crimée une prodigieufe quantité qui paffe prefque toute a Conftantinople; elles font toutes étroites; les plus larges n'ont pas un pic de largeur: il y en a de toutes qualités, dont le prix eft de 5 a 10 paras. II en peut venir environ 5 a 600,000 pies. Outre cela les Ruffes en apportent de teintes en jaune, en bleu, de différentes nuances, au nombre de 5 a 600 pieces en rouleaux de 9 aio pies, qui fe vendent de 50 a 60 paras la piece. II y a encore les toiles d'emballage que les Rufles apportent au nombre d'environ 100,000 pies de 2 a 3 paras lé pic, fuivant la qualité. Laines d'Ukraine. Les Cofaques en apportaient autrefois beaucoup en Crimée, de lavée &de trés bonne qualité, mais la cour de Petersbourg en a déiendu 1'exportation fous les peines les plus rigoureufes.  MER N O I R E. 93 Cordages & Chanvre. II vient de Ruflie en Crime'e 2 a 300 quintaux de cordages de mauvaife qualité & dont les plus gros font d'un pouce & demi a 2 pouces de diametre: ils fe vendent a Caffa & a Ghuflevé. Leur prixeft de 5 a 57 piaftres le quintal. Les Rufles ne donnent cours a ces cordages que par le moyen des trocs, & trouvent peu a les vendre au comptant, cette marchandife n'étant pas trop recherchée. II vient a peu prés la même quantité de chanvre non travaillé, que l'on vend en détail de 50 a 60 afpres de Crimée 1'ocque ; ce qui revient de 4 piaftres a quatre piaftres & demie de Turquie le quintal. La fortie de cette marchandife eft libre en Ruflie, & l'on en pourrait tirer une quantité immenfè, Ia partie méridionale de eet Empire' en produifant beaucoup. Rendu franc de tous droits dans un des Ports de Crimée dépendants du Khan, comme Ghuflevé ou Baliklava, & non k Caffa, on pourrait favoir a 4 piaftres le quintal de Conftantinople de 44 ocques, qui font 1377 livres de France a 16 onces: en y ajoutant lesfrais de douane de Crimée a 3 pour cent; le nolis de Cri-  COMMERCE DE LA mee a Conftantinople, a raifon d'une piaftre le quintal; le nolis fur le pied de 2 piaftres le quintal, de Conftantinople a Marfeille ; les droits en France , la commiffion, 1'affurance & autres menus frais; il reviendrait dans les arfenaux da Roi a bien meilleur marché que celui que Ton tire du Nord & du Piemont. Le tranfit du chanvre de Ruftte a Conftantinople ne rencontrerait aucune difficulté en Crimée , paree que le Khan ferait toujours difpofé a le favorifer pour le profit de fes douanes, pourvu que ce fut par un de fes Ports, comme Ghuflevé ou Baliklava, ainfi que l'on vient de le dire & dont il eft le maïtre, & non pas par Caffa qui dépend du Grand - Seigneur; mais on rencontrerait peut-être des difficultés a Conftantinople de Ia part de 1'Intendant de la marine, qui pourrait s'emparer de la marchandife, ou s'oppofer a lembarquement & au pafrage, fous prétexte que eet article eft néceffaire aux arfénaux de fon Souvera n; néanmoins, comme ce n'eft point une maren mdife du cru de 1'Empire Ottoman, on pourrait peut-étre obvier a eet inconvénient, en faifant fentir 1'avantage qui en réfulterait pour la Douane & mettant Ie Grand-douanier de moitié dans  MER N O I R E. $f dans les repréfentations que l'on pourrait faire a eet égard. Si cela ne réufliflaic point, on pourrait trouver des Turcs puiffans, qui moyennant un petit bénéfi. ce prêteraient leur nom au débarquement & a 1'embarquement: mais avant que de tenter cette opération, il ferait néeelTaire d'examiner préalablement fi l'on trouverait de 1'avantage a le faire pafler avee bénéfice en France. Le fait éclairci, les moyens ne manqueraient pas de 1'y faire parvenir. Beurre de RuJJïe. II en vient de Ruflie en Crimée 30 a 40,000 ocques, lequel efl: inférieur a la Mantegue de la Prefqu'ifle: il fe vend a plus bas prix de 9 a 10 paras, fans être purifié ; & en troc de n a 12 paras 1 ocque. Cuirs Salês & Secs. Les Cofaques apportaient quelquefois en Crimée des cuirs falés, plus beaux que ceux du pays: on apporte aufli de 1'intérieur de la Ruflie des cuirs fecs & draE  $3 COiMME-RGE DE LA pcs (*). IJ en vient chaque année.a Caffa § a 4000 d'Aftrakan , de Kirman: on les vend depuis 3 jufqu'a 7 piaftres de ■turquie, fuivant la grandeur, & la qualité. Pelleteries de Pologne £? de Moldavië. Sept a huit Peliftes de Samour & quel. ques peaux de eet animal non travaillées. : 7 a 3 Peliftes de Vachak, plus eftimées ^ue celles de Ruflie. 4000 peaux environ de Tilkj. 4 a 500 Peliffes de Nafé de toutes efpeces & „de tout -prix, 5 a 6ocö peaux de Gueudjens noirs. 7 a 8000 peaux de Kedi. noirs. 6 a 7000 peaux de Kondouz: celjes de Pologne font plus eftimées que celles de Ruuiei Les mêmes obfervations faites pour les autres Pelleteries, page 91 & fuivantes & leurs divers prix, peuvent fervir ici. Monnoye de Crimée. Les iMonnoyes les plus courantes en (*) On entend en Tur<|uie par cuirs drapés, eeux auxquels on Iaiffe le poil dans leur apprêt.  .MER N O I R E. rp£ ' Crimée Tont celles du Khan & celles dit Grand Seigneur. -Les Khans, depuis plufieurs armées, n'ont fait frapper qu'une petite monnoye de cuivre, avee trés peu d'argent; on 1'appelle Béchelik, ou piece de.5, paree qu'elle vaut 5 afpres : 20 Becheliks ou 100 afpres font 1 piaftre de Crimée, (10 ibis de France) qui eft une monnoye idéale , comme la livre tournois. La monnoye du Khan a toujours une valeur relative a la monnoye de Turquie, dont le taux haufte & baifle fuivant fabondance des Becheliks, ou la rareté des pia'tres de Turquie (que l'on évalue ordinairement a 3 livres de France,) lefquelles tantöt ne valent que fix piaftres dc Crimée, tantèt au deflbus & quelquefois vont jufqu'a 7, &8 piaftres de Bécheliks. De forte qu'un agioteur entendu y gagnerait confidérablement en achetant & revendam a tems les féquins & les piaftres de Turquie. Le Khan d'aujourd'hui, Kerim Guerai Khan, a fait battre une monnoye d'argent appellée aufli Bèchelik , mais qui vaut 2 paras effeérifs. (3 fols de France) Le cours de ces Bécheliks ne varie point & 20 font une piaftre de Turquie. Outre ces monnoyesduKhan& du Grand - Seigneur, E %  IOO COMMERCE DE LA plufieurs autres monuoyes dont on va donner 1'évaluation en argent de France au pair, ont auffi cours en Crimée. Le Sequin Venicien vaut en Crimée, comme a Conftantinople, 3 piaftres & 35 paras. - - 11 livres 12 fo!s 6 deniers. La Sevillianne s'y venJ furie pied du titre de 1'argent, qui eft plus fin qu'en Turquie. Le Sequin ou Ducat d'or de 1 lollande y vaut 3 piaftres 26 paras & 2 afpres 11 livres. * * Les Ecus de Pologne 1 piaftre & 20 paras. ... 4 livres 10 fols. Lesquarts de ces Ecus, appelles Tinfs, valent 15 paras. - - 1 liv. 2 fols 6 den. Les Koubles de Ruflie n'y font pas monnoye courante; leur prix augmente ou diminue fuivant la demande; néanmoins au pair elle vaut 10 pieces de Bécheliks. 5 livres. On y trouve encore quelques Ecus de 1'Empire, mais ils n'y ont pas cours & font regardés comme marchandife C*) Voyez ci-après les Monnoyes de Tur« quie, a l'article du Commerce de Smyrne.  mer n o i r e. i©i Poids fi? Mefures, fi? leur évaluation avee ceux de France. Les Poids & les Mefures font en Crimée les mèmes qu'en Turquie. LeQuintal eft de44ocques--137^ liv» Le Battman de 6 ocques - - - i8| liv. L'ocque 400 dragm. ou gros. 3 liv.2 onc. Le Tchéquis 150 dragm. 11.2 onc. 6 gr. Les Mefures different fuivant les marchandifes. Les draps, les étoffes de foie & de laine de toute efpece fe vendent au Pic de Turquie, qui eft de deux grandeurs. Le Pic Halébi fert pour le drap & les étoffes de laine, & YEndagê qui eft un peu plus court que 1'Halébi, eft pour les étoffes de foie. Le premier a 25 pouces de France & le fecond 24. Toutes les toileries fe vendent au pic de Crimée, qui eft beaucoup plus long que celui de Turquie: il eft d'environ 4 pans, & 3 pies de Crimée font 4 halebis de Conftantinople, ou 2 aunes 12 pouces & ~ de France, 1'aune a 44 pouces environ: ainfi le pic halébi qui a prés de 25 pouces de France, équivaut èpeu prés a 1'aune d'Amfterddra E 3  Ü02 e-O'MMERCE DE LA & au Braccio de Venife: 4 aunes de Paris * font 7 aunes de Follande, ou 7 braüès de Venife, ou 7 pies de Conftantinople. Les Grains fe vendent au quilot de Crimée, excepté le Riz, qui fe débics au poids & dont le quilot eft idéal &.corriprend 10 ocques. Le quilot de Crimée varie en différentes places; a Battcheferai, il eft de 88 ocques, qui font 4 quilots.de Conftantinople de 22 ocques 1'un ; a Ghuflevé il eft de 85 ocques; a Karafou de 90 , & a Précop il va jufqu g 120. ocques. Les poids & les mefures viennent de Conftantinople , avëc le controle du Grand - Seigneur: le Khan ne met le fien que fur les poids & les mefures qui font propres a fes Etats, comme fur le quilojt ëi le pic de Crimée» Douanes. II y a quatre Douanes en Crimée; \% voir a Ghuflevé & a Baliklava qui en dépend ; a Karafou & a Précop : les deux premières appartiennent au Khan; celle de Karafou au Kalga-Sultar,, & celle de Précop eft partagte entre \e NoMaéüfbuhan & ÜÖr-Bcy.? On n'y com--,  KL E R N O I R É. je 3 ' prend pas celles de Caffa , de' Tarhan de Yenikalé qui dépendent du Grand1Seigneur. La Donatie de Ghuflevé efl; de 3 pöv* rent pour les Türcs & les Mahomécans & & de 5 pour cent pour les Chrétiens & les Juifs: elle fe regie fur la valeur courante des marchandrfes fur la place ; c* qui fait que les Douaniers exercent fon* vent des vexations fur les Chrétiens, • Les Mufulmans & les Fiuffes en font 'i 3'abri. Les Douaniers évaluent fouvent la marchandife au deffus de fa valeur coui rante & en monnoye de Turquie, qu'ils fönt payer en monnoye de'Crimée ; & comme la valeur de la piaftre de Turquie vafie journellement,ilsl'évaluent toujours k un prix plus haut que ceKii eóuransi Par exemple: lorfque le prix courant de la piaftre de Turquie eft de 6 piaftres de Crimée, une marchandife évaluée iocc* piaftres de Turquie devrait' payer Iadouane fur le pied de 6000 piaftre3 de* Becheliks: mais fi le Douanier évalue h: piaftre a 7, il percoit le droit fur 7000*' piaftres de Becheliks, au lieu de le perce*>'' Vöir fur 6000 j ce qui fait une differenv" ce fenfible. Outre la.Douane de mer, les maren E 4  J04 COMMERCE DE LA difes des Mahométans & des Chrétiens deftinées pour une autre place, payent a Ghuflevé le Kara - Gwnruk, ou la douane de terre qui fe réduit a peu de chofe, fi la marchandife n'a pas féjourné; mais fi elle a été mife en magafin & qu'elle en foit tirée pour la tranfporter ailleurs, elle paye en entier la douane de terre, qui eft: ordinairement de 2 pour cent. La Douane de Baliklava eft gérée par un Commis du Douanier de Ghuflevé, qui pereoit les droits fur le même pied, avee cette difterence que Baliklava n'étant pas une place de commerce, les marchandifes ne payent point de douane de terre. La Douane de Karafou eft de 3 pour cent fur les marchandifes d'entrée & de fortie. Le Nouradin-Sultan, qui fe partage avee L'Or - Bey Ia douane de Précop , outre lc droit d'entrée pergoit 60 afpres de Crimée par chaque chariot de fel qui lort, & L'Or-Bey retire les droits de fortie des autres marchandifes. Les articles qui viennent de Ruflie & de chez les Cofaques doivent payer 5 pour cent d'entrée & celles qui y vont 4 pour cent de fortie, excepté le vin & le fel. Les grains font  MER N O I R E. 105 font francs de tous droits; levin paye 5 afpres de Crimée par tonneau & le fel 1 rouble par chariot. Les marchandifes qui viennent de Ia Moldavië & de la Valachie par la route d'Oczakow, qui efl: aufli celle de Pologne , doivent 4 pour cent d'entrée ;& celles que l'on y porte 3 pour cent de fortie, a 1'exception des peaux d'agneaux, qui payent deux Becheliks la peau. Les Mufulmans ne payent que 3 pour cent d'entrée & 2 de fortie fur toutes leurs marchandifes: l'on n'exige point la douane a la rigueur & l'on peut s'abonner avee les Douaniers pour toute la portee d'un chariot. Les Rufles font traités avee plus de douceur que les gens du pays; leurs marchandifes ne payent une douane complette qu'a Précop: a Ghuflevé ils font francs de douane d'entrée & ne payent que 2 pour cent de fortie fur les marchandifes du crü du pays. Si les Frangais étaient établis en Crimée, ils feraient traités de même que les Rufles; & les Confuls de France qui réfident auprès du Khan, jouiflent fans aucune d fficulté du même privilege fur les effets fujets a la douane, qu'ils font venir. £ S  10Ó COMMERCE DE LA Les douanes de Caffa', de Taman & de Yénikalé dépendent du Grand-Seigneur & font fur le mêmepied des places de Turquie; on pourrait faire valoir nos Capitulations, furtout lorfque nos prérogatives feraient étayées de la proteftioa du Khan. OBSER VATIONS; _ Les frais a la re'ception & a 1'expédiiion des marchandifes en Crimée fe rédub fent a trés peu de chofe; ceux du transport par terre. d'une place a une autre ne font pas non plus fort confidérables 5 on en donnera une table ci-après. Les marchands .de Crimée réfidcnt ordinairement dans des Kans ou hotels publics, oü l'on trouve des .magafins a trés bon marché. Les plus grands ne coütent. pas plus de 3 Becheliks , ou 3 afpres de Turquie. par jour * (6 liards de France}. Le nolis ou fret des- marchandifes de Conftantinople en Crimée n'eft pas i un grand objet, paree que les batimens partent prefque toujours vuides de cette capitale, Ainfi 4'on peut les noliler en «ntier a trés bon marché, ou s'accorde;  M'E R N © I R E." ro-7: avee le Reis a un prix trés modéra pour les effets que l'on veut embarquer. 11 efl: impoflible de déterminer au jufte la nolis des marchandifes des-Etats du Khari a Conftantinople : on le regie fur les lieux, fuivant la faifon, 1'abondance oü la rareté des batimens qui font en charge , le nombre & le concours des étrangers;cependant l'on peut réduireles principaux articles a une évaluation commune. La laine coüte ordinairement 'de 5 a 6* piaftres la balie de 500 ocques. Le tiflik de- 3 a 4 piaftres la balie de 250 a 300 ocques. • Les crins de 2 a 2! piaftres le fac» - Les cuirs 1 piaftre la balie de 6 cuirs. La cire \ para 1'ocquece qui re vient de 20 a 22 paras le quintal. .-* Les autres marchandifes de poids } comme beurre , miei , falpêtre , fuif,, cordages, caviar &c. payent 2 piaftres. par quintal. Le change courant" de Targent eft de. 15 pour cent, même on n'en trouve pasr toujours a emprunter: il eft enco?e plus, difficile de trouver a tirer des lettrés de? change , paree jque les msrehands -qiïi veulent- faire paffer des fonds a Con.lan-* E ê"  IOS COMMERCE DE LA tinople pour 1'achat des marchandifes, préferent d'envoyer des fequins hongres, (ducats d'or de 1'Empire) qui ne valent en Crimée que 3 piaftres 26 paras & 2 afpres, & donnent du profit a Conftantinople, & l'on ne peut d'ailleurs tirer qu'avec perte. II conviendrait donc de faire venir les fonds dont on a befo.n en efpeces. La voyela plus füre eft celle des Tchoadars du Khan, que ce Prince expédie prefque toutes les femaines & qui fe chargeraient de remettre trés volontiers des Greupes au Conful, moyennant une petite récompenfe. On éviterait par-la le rifque de la Mer Noire, qui mérite attention. Les habi ans en Crimée font d'affez bonne foi, mais les termes des payemens font trés longs; de forte que pour bien faire le commerce de ce pays - la , on ne doit pas compter fur une prompte rentrée des fonds des marchandifes d'importation. Pour 1'achat de celles de fortie, chaque article a fa faifon & fon tems fixe, après lequel on ne trouve plus a fe pourvoir; de forte qu'il faut tacher de fe procurer au tems de la récolte de chaque marchandife , les fonds néceffaires pour la quantité de celles que l'on veut acheter j  MER N O I R E. iop fans cela on fe trouve expofé a ne pouvoir pas retirer le produit de Ja vente de fes marchandifes d'entrée, a manquer la récoltefaute d'argent,oua faire des trocs ruineux. II convient, pour tirer tout le parti poffible de ce commerce d'entrée, d'avoir dans chaque ville des magafins fournis de toutes les marchandifes qui exigentle détail & de les faire débiter, non pas au détail des boutiques, mais par petites parties pour la commodité des acheteurs & pour en faciliterle débouché. Les Francais qui voudront aller s'établir en Crimée , y feront toujours trés bien re^us ; le Gouvernement Tartare verrait même avee plaifir que des rnarchands s'y établilfent avee quelque folidité; cela répandrait 1'abondance dans le pays & ferait valoir les douanes du Khan. Le peuple y trouverait un grand avantage , paree que la France pourrait lui fournir plufieurs marchandifes a bien meilleur marché. Les marchands, qui font en poffeffion du commerce de la Crimée, n'aimeraient pas a nous avoir pour concurrens ; mais leur mauvaife humeur ferait un trés petït obftacle, Ia protection du Khan fufnfant pour faire fleurir ws établilfemens. II ferait inutile de fe  si o" COMMERCE DE LA pourvoir d'aucun commandement de !a Porte, ni d'aücune autré femblablë piece. La demande que l'on en ferait, donne--' rak a coup für des foupcens au Miniftere Ottöman & Ton' n'en retirerait 'aucurï avantage La protecliön du Grand ■ Seigneur ferait fuperflue dans ce pays - la <& l'on peut dire même qu'elle ferait peutêtre nuifiblè.' On a vu bien fouvent en Crimée , des ordres de la Porte gater les affaires,au lieu d'en faciliter la réuffite. II faüdrait fimplement que le Confut de France auprès du Khan füc chargé de protéger les négocians qui iraient y éxer leur réfidence & qu'i! eCit un ordre1 exprès de la cour de faire auprès de ce Prince toutes les démarches néceffaires pour procurer au commerce la füreté & la liberté dont il a befoin: Les Comman-»' demensquele Knan accorderait aux Francais , les mettraienn a 1'abri de tout dans les endroits de fes Etats, oii ils voudraientr s'étabür , même dans les places de la' Crimée .qui font dépendantes du GrandSergneur. II conviendrait que la principale mai-fon de commerce fixat fon féjour a Caffa, paree que cette ville efl la place la plus 'SQBÜdérable> .& i! ne conviendrait-ja*  M-E.R N O 1 R E. XII; mais d'avoir des magafins a Baéteheferai, a caufe des importunités des Suiians, des Princes, des gens de la Cour, des Mirzas'.auxquels on ferait obligé de faire des crédits & dont on aurait beaucoup de peine a tirer de l'argent. La maifbn de Caffa pourrait tenir des Commis a Ghuslevé, a Bncfcheferai & a Karafou, & leur fournir des marchandifes a proportion de ce qu'ils pourraient débiter. U ferait même néceffaire que les perfonnes auxquelles on confierait ces établiifemens, fcuflent bien la langue Turque & fuffent babillées a la maniere du pays: il faudrait encore avoir pour Commis dans les différentes villes des gens nés fur les lieux: les Arméniens font ceux que l'on pourrait employer avee le plus d'utilité dans ce pays-, tant pour Ja fidélité que pour 1'inteliigence. L'on doit en général exclure les Juifs de tout emploi, paree qu'ils font dans ce pays • Ik reputés pour «tre de mauvaife foi ; cependant on en pourrait trouver queiqbes - uns qui mériteraient quelque confiance & qui rendraient encore de trés grands fervices: 3 ne s'agirait que de les favoir choifir & afin d'ëtre plus für deux, il faudroit les ©bhger de fe rendre folidaires les uns  ttt COMMERCE DE LA envers les autres, pour être a 1'abri de tout événement II fuffirait que deux ou trois Francais fuflent a la tête de letablisfement, pour diriger les opérations , les écritures, h eorrefpondance , & ils devroient fe conduire avee la plus grande économie,  MEK NOIU 113 COMMERCE DE LA C1RCASS1E. La CircaJJie efl un Etat de la domination du Khan des Tartares: il efl borné au Nord par le mont Caucofe, a 1'Eft par le Cabarta, au Sud par Ie fleuve Couban & a J'Ouefl par le Détroit de Yémkalé. La Circaffie eft divifée eh un trés grand nombre de Tribus, qui chacune ont des Beys a leur tête. Les principales villes font tantin t Atcbou, Jgdja , Kemruk, Sooudjouk & Kaplou. Taman, petite ville fur le bord oriental du Détroit de Yénikalé, contienc environ 20,000 habitans, 12 mofquées, un bain & 100 boutiques: il y a 18 a 20 batimens dits Tombazes, de 500 jufqu'a 1000 quintaux de portée; fa Rade n'elt pas fdre: il y a une petite fortereffe avee 50 a 60 pieces de canon & une faible garnifon de Janiffaires. Kemrukfpeiite place fortifiee afixJieues  114 COMMERCE DE LA de Taman , contient 2000 habitans, £ mofquées, 12 a 15 boutiqu.es, 70 a $.0 pieces de canon & une garnifon de» Janis1 faires. Berber-Zemin dans la mer d'AÏbph, efl: 1'Echellede Kemruk, dontle Port ne vaut rien. Atebou- efl: un fort fitué fur 'une'des Embouchures du Couban; il y a 400 perfonnes, y compris les Janiflaires de la garnifon, Les fortiflcations font de bois, avee 26 a 30 pieces de canon. Les fofles font remplis d'eau, & les environs font marécageux; ce qui le rend prefqu'imprenable. II eff éloigné de 22 lieues de Ta* man: un Bey Tartare nommé par le Khan y commandei Jgdja, petite forterefle a 20 lieues de Taman: ü n'y a que 100 a150 habitans1 & 10 a 12 pieces de canon: un Mirza Tartare qui y commande, efl: nommé par le Seraskier du Couban. II y a peii de commerce, & tout ce qui efl; nécesfaire a la vie vient de Taman. Sooudjouk,. petit fort für le bord de la Mer Noire, vers les frontieres des Abazes. On y voit 200 maifons, 4 asoo habitans, 36 a 40 pieces de canon, une garnifon de Janiflaires commandée parijn Bey Tartare, nommé par le Seras---  MER N O I R E. Iï5 kier da Couban: il n'y a point de Com* merce. ! Kaplou efl: une ville dans les terres, a '22 lieues de Taman &deux du rivage du Couban : c'eft la réfidence du Seraskier ou Commandant de la province: on f compte environ 10,000 habitans, 5 mofquées, 5 kans ou hótels publics & 500 boutiques: il n'y a point de douane} 1'ón paye feuiement fur chaque charioc de marchandifes un droic au Seraskier, & a un autre Mifza du pays qui a un droit de redevance: le tout monte a_6o becheliks, ou 20 paras- par- chariot. Cette ville eft la véritabfé' place den», trepöt du commerce de la Circaflië; c'eft* Ik que i'on .apporte toutes les marchandifes d'entrée pour les répandre chez le* Circafliens & les Nogais du Coüban: ces peupleS de leür cöté viennent' vendre dans cette ville les marchandifes de forrie dé leur cru. taman eft la principale, ou pour mieux dire ia feule place de Tranfit de tout le commerce d'entrée & de fortie de la Circaflië; c'eft - la qu'abordent tou* tes les marchandifes que l'on y apporte, & oü l'on embarque toutes celles que l'on en retire; ainfi-le commerce d'entrée &  110 COMMERCE DE LA de fortie dont onvaparler, comprendra eelui de toute la Circaflië. COMMERCE D'ENTRÉE. 4 Ballots de Draps Londrins feconds & KifmeSjde 2\ a 3 piaftres le pic. 25 a 30,000 pieces de Sandals de Scio, de 30 a 35 paras. 200 pieces de Coutins de Broufle, de 17 a 18 paras la piece. 50000 pieces d'Indiennes groffieres de diverfes qualités, de 60 paras a 3 piaftres. 50000 pieces de Bocaffins de toutes couleurs, excepté le noir, de 2\ a 6 piaftres la piece. 150000 pieces de Toiles d'Aftar de toute efpece, de 60 a 90 paras la piece. 1000 pieces de Dulbents pour voiles k 1'ufage des femmes, depuis 20 paras jufqu'a 2 piaftres. 7 a 8000 pieces de Tchemberts , Kaim-Kané, de 18 a so paras le quarré. 3 a 4000 Fez ou bonnets de France 6c de Tunis; les premiers de 50 a 60 paras, & les autres de 70 a 80. 4 a 500 ocques de foie teinte en laine pour broderie, a 3 paras la dragme. 4 a 500 ocques de foie filée pour cou* dre, a4 paras la dragme.  MER N O I R E. 117 ïoo ocques decordonnet de foie. 3 a 400 balles de cocon en laine, le plus groffier. 11 fe vend 1 piaftre 1'ocque. 4 a 500 ocques de cocon filé, blanc, rouge, bleu , violet: il fe vend couram-. ment 2 piaftres l'ocque. 4 a 500 Kibès ou Couvertures de hine de Yamboli, de 2 a 7 piaitres lans pluche, & avee la pluche de 3 a 9 piaitres. 2 a 300 Pechtmals Kirhakm de Salonique, de %\ a 3 piaftres la piece. 1000 a 1500 Pechtmals du Caire, de 20 a 25 paras. 5 a 600 Hawlis ou ferviettes de bain , de 50 a 60 paras. 3 a 400 Ceintures de Gerbé blanches & rouges, de 60 a 70 paras la piece. 2 a 3000 paquets de fil de couture, de diverfes couleurs, de 50 a 60 paras roc-;que. 12 a 15 balles de lin gris du Caire; de 20 a 25 paras 1'ocque. A Taman, il y a douze bouuques de teinturiers, qui peuvent confommer environ : 500 ocques d'indigo & quelque peu de bois de teimure: j'un & 1'autre article s'y vendent avee avantage. 30 a 40 fardés de Caffé Moka, donf  Jlg COMMER.CE DE L A !e prix ordinaire efl de trois piaftres même quatre 1'ocque. Le Caffé d'Amérique s'y vend bien '& en plus grande quantité que le Moka. 4 a 500 ocques de Poivre3de 2\ k 2] piaftres 1'ocque. 2 a 300 ocques de Gingembre, dont les Tartares compofent une boiffon trés forte avee du miel; il fe vend de 25 a 30 paras 1'ocque. Quelque peu d'Epiceries fines, fhrtoat des noix mufcades,qui fe vendent 3 paras piece, un peu de canelle, & des clous de girofle. 5 a 6co ocques d'Etain , avee le fe! ammoniac, a aj piaftres 1'ocque. 100 ocques de Mercure, a 1 para Ia dragme, ou 20 piaftres 1'ocque. 3000 quintaux de Plomb pour les balles & les filets des pêcheurs, de 14 a 15 paras 1'ocque. 2000 ocques d'Acier, de 26 k 28 paras 1'ocque. 50 a 60 balles d'Enccns, k 70 paras Focque. 2 a 300 quintaux de Fer en barres, de 8 a lo paras l'ocque. 4 11500 quintaux deSavon de Smvrne, $g 20 a 25 paras l'ocque. II fè confomme  •MER K O I.-R 'E. zt§ fcn entier a Taman: les Circaffiens n'en font point ufage, mais ils fe fervent du leur, qui fe fait de grailTe de mouton. S k Coo couffes de Riz du Caire. & de Phiiippopoii, a 2 paras l'ocque. ,2 a 300 quintaux de Figues feches "de diverfes qualités, avee.du Raifin noir. Beaucoup de Noix & de Noifettes. 3 a 4000 ocques d'Olives noires, de.7 a 8 paras l'ocque. L'on n'y porte point d'huile; ils ont leur beurre, leur xnantegue & 1'huile de poiffon. 5 a 600 quintaux de Nardenk. 50 quintaux de Peftmès. 500 quintaux de Peftil. 4 ,at 5000 ocques de Tabac Kirdjali, de 25 k 30 paras l'ocque. 10000 ocques de Tabac de Ruflie, de 12 k 15 paras l'ocque. ,100 balles de kinas, de 5 a 16 paras l'ocque. 2 a 300 ocques de Fard , rouge öz blanc, a 2 paras la dragme: toutes les femmes du pays en ufent. 1000 touras deMarroquins de Crimée, rouges & jaunes; les premiers a èo paras & les feconds a 50. 3000 touras de Méchim, ou peaux tcintes en rouge' , jaune & noir; les  I2o COMMERCE DE LA rouges a 25 paras & les autres h 20 paras la piece. 435 000 paires de Bottes de Crimée : les rouges a 2 piaftres, lesjaunes de 40 a 50 paras & les noires a 60. 5000 paires de Caiirs rouges & noirs, ceux - ci a 25 paras & les autres a 30. 1000 Cuirs fecs, de 3 a 4 piaftres la piece. 2 a 3000 Bois de felle de chevaux,de Eacïchefërai & de Caffa , de 30 a 40 paras la piece. 2 a 3000 paires de Tébenguis de Karoufe , ^cette piece fert a couvrir les flancs du cheval) de 30 a 40 paras. 3000 paires d'Etriers de Baétchefëraï & d'Akmefchid, de 20 a 30 paras. 3 a 4000 Mords de chevaux, de 6 a 10 paras. 1000 Canons de fufil de Baftcheferai, dont la qualité détermine le prix. 2000 Arcs de tout prix, depuis 10 piaftres de Becheliks jufqu'a :oo. 40ooaffortimensdeFers a cheval avee les clous , a 20 paras. 5 a 6coo Couteaux de Crimée, de 15 k 16 paras. 20000 paquets d'Aiguilles, de 30 a 60 paras le paquet, fuivant la qualité. 1000  MER NOIRE. I2i iooo Peliftes de peaux d'agneau de Crimée, de 8 a 9 piaftres. 1000 a 1500 Peaux de Teflbn pour les étuis de fufil, a 40 paras Ia piece. 233 cailTes de Quincaillerie de toute efpece. 100 a 150,000 Peignes de buis & de corne; les premiers a 2 paras piece, & les autres a 4. 1000 couffes de Noix de Pipe de Conftantinople, de 5 a 600 Noix la couffe. Une grande quantité de poudre a tirer, 3a plus mauvaife a 20 paras l'ocque; celle de France a óo paras , & celle d'Angleterre un peu plus chere. 20 Ballons de papier de *4 , qui fe vend en détail jufqu'a un afpre Ia feuille. 30 a 35000 Faulx d'Allemagne,de 20 a 25 paras. 2 a 300 Chevaux de Crimée. Les Bois de conftrudtion & de batifle & le bois a brüler viennent a Taman de Sooudjouk, oü il eft a trés bon marché. Commerce de Sortie. 80 a 100,000 quintaux de laine touté lavée, d'aflez belle qualité; mais il n'y «  122 COMMERCE DE LA qu'un quart de blanc fur la totalité; elie coüte a Taman 3 paras l'ocque: il n'y a point de pélade. 100,000 pieces de Tcbekmen, efpece de Tlanelle ou Moleton: c'eft une efpece d'étofte de laine extrêmement groffiere,fort en ufage dans toute la Tartarie. L'on en fait quelquefois de trés fine ; mais il faut la commander. 50 a 60,000 pieces de Tchehnens , ou habits de 1'étoffe ci - deffus & qui en portent le nom. La première qualité fe vend de 10 a 11 piaftres la piece, la feconde de 4 a 5, & Ia troifieme de 60 paras a 2 piaftres. 11 y en a de blancs, de gris & de'noirs; on les vend tout faits & ils paffent en Crimée, ainfi que dans le refte de la Tartarie. 50 a 60,000 Chalvars, ou culottes de Tchekmen de trois qualités, de 20 paras a 3 piaftres. 200,000 Manteaux de feutre avee une longue pluche, appellés Tapendjis: il y en a de trois qualités depuis 1 piaftre jusqu'a 3 , outre une quatrieme qualité qui ne fe vend pas & qu'il faut commander exprès. 5 a óc-oo beaux Cuirs falés de 25 $ 30 ocques j on les vend jufqu'a 3 piaftres.  MER MOIRÉ. 123 5 a 6000 quintaux de Miel excellent & a fort bon compte. On Ie vend pur a Atchou & a Taman, a raifon de 7 paras l'ocque. 500 quintaux de Miel d'Abaza, qui ne vaut que 4 paras; il efl: de mauvaife qualité. 7 a 80,000 ocques de Cire, que l'on vend brute a Taman k raifon de 20 paras, & de 3o,quand elle eft bien nette & bien épurée. 50000 Peaux de Martre - Zerdava, de 40 a 50 paras la piece. 50,000 Peaux de Sangfar ou Fouine, de 25 a 30 paras la piece. 100,000 Peaux de Tilld ou Renard , de 25 a 30 paras. 100,000 Peaux de Kourdou Loup, de 50 a 60 paras. 3000 Peaux d'Ours,de 45 a 50 paras. 500,000 Peaux de Mouton, dont le prix d'un para la piece. Toutes ces Peaux viennent brutes k. Taman & telles qu'elles ont été levées de deflus 1'animal: c'eft aux marchands quï les achetent, a les faire travailler. 200,000 paires de Cornes de moutons fauvages, pour les manches & gaines, de coüteaux, a 2 paras la piece. F 2 1  124.' COMMERCE DE LA 200,000 paires de Cornes de bosufs f au même prix. 100,000 groiTes de Fleches , de 30 fleches Ja grolTe. II y en a de plufieurs qualités: les premières fe vendent de 3 a 4 piaftres la grofTe, & la derniere-qualité ne vaut que 60 paras. Les Efclaves font un des principauxarticles de commerce de la Circaflië. Les Chevaux Circaffiens fout grands, bien taillés , trés forts & propres a la courfe. Leur valeur efl indéterminée: il y en a de tout prix & jufqu'a 2000 piaflres: ilYen eft trouvé dans le pays, pour lesquels on a troqué jufques a 8 Efclaves. II fe fait a Atchou beaucoup de Caviar ; (oeufs d'Efturgeon préparés.) II en fort environ 3000 quintaux chaque année, que l'on vend fur les lieux 7 paras l'ocque: il en fort auffi beaucoup de Poiffon fee óe des aiguillettes d'Efturgeon, qui s'y vendent a 5 paras Ja piece: il en paffe 2000 quintaux au dehors, ainfi que du Suruk, autre forte de poiffon en aiguillettes plus petites , mais en plus grande quantité & au même prix: il y a encore beaucoup d'autres Poiffons falés , dont le détail eft inutile, & que l'on vend a trés bon compte. Cet article ne ferait pas a  MER NOIR E. 125 dëdaigner pour le tranfporter en. Italië & en Efpagne principalement, _& en u'autres pays Catholiques-Romains pour le« provifions de Carême. II fort auffi $ Atchou par an 2 a 3000 quintaux d'huile de poiffon , de 5 a 6 paras l'ocque ; avee 100 quintaux de colle de poiffon, de 10 a 12 paras l'ocque. La Monnoye du Grand • Seigneur & celle du Khan font les feules qui aient cours a Taman & a Kaplou: dans 1'intérieur de la Circaflië, 1'argent eft peu en ufage & l'on n'y fait le commerce qu'en itroc. Les Marchandifes d'Entre'e & de Sortie vont & viennent de Taman a Kaplou fur des chariots tirés par des chameaux, des chevaux & des boeufs. Ceux traïnés par les chameaux ne vont qu'en hïver: ils portent de 6 a 700 ocques & coütent 20 piaftres de Becheliks de louage. Ceux traïnés par les chevaux portent de 5 a 60© ocques & coütent 18 piaftres: cèux traïnés par les boeufs font de la même portée & du même prix. Pour tranfporter les marchandifes de Kaplou dans 1'intérieur de la Circaflië , on fe fert de chariots traïnés par des boeufs & des cheF 5  I2Ö Commerce de la vaux: c'eft 1'éloignement de la tribu dans laquelle on veut aller qui détermine le prix. Commerce de la place d'Oczakow. Oczakow eft une petite ville a 1'embouchure du Botijthene, aujourd'hui Dnieper ou Nieper; elle eft trés fortifiée & le Grand - Seigneur y tient garnïfon. Les Rufles Ja prirent dans la guerre de 1739, mais elle cftrevenue au Turc. La Rade n'en eft pas füre & les batimens n'y peuvent pas hiverner, parfe défaut d'abri & par rapport aux glacés confidérables que la riviere charrie & qui eft toujours prife depuis Décembrejusqu'en Avril; de forte que l'on eftobligé d'aller chercher un afile dans le Port de Codjia-Bey, a 12 lieues d'Oczakow. Indépendamment du commerce affeété a cette place , elle eft le lieu de tranfit du commerce d'entrée & de fortie des Cofaques: il y a dans la faifon un trés grand abord de batimens de Romélie, du Danube, de Conftantinople &de quelques  MER JSJ O I R E. 127 plaees de la Natolie : les Cofaques y defcendent avee leurs bateaux par le Boriflhene. II y a une Douane dépendante du Grand - Seigneur l'on y paye 3 pour Cent d'Entrée ik 3 pour Cent de Sortie. Le territoire de cette ville ne produit abfolument que du bied, de l'orge & du millet: ainfi le refte de ce qui eft: nécesfaire a la vie y vient de dehors. Les marchandifes que l'on confomme a Oczakow, font a peu prés les mêmes que celles que l'on confomme en Crimée, & c'eft même de-la que cette ville en tire la majeure partie. Les articles que l'on y porte de Crimée, donnent ordinairement 20 a 25 pour cent de profit, & ceux que l'on y envoye de Bender & de Conftantinople en donnent davantage, paree qu'ils font moins de frais. Les articles qui viennent par tranfit h Oczakow pour fe rendre de - la dans les provinces feptentrionales des Etats du Khan, ont été compris dans ce que l'on a dit des marchandifes qui viennent par terre en Crimée, de Pologne, de Moldavië , de Valachie & de Romélie. Le Commerce de Sortie de cette place fe réduit a fort peu de chofe, puifque F4  128 COMMERCE DE LA fon territoire ne produit que des grams, pour Ia fubfiftance des habitans. Les Iaines, les cuirs, Ie beurre, le miel & les autres articles que l'on y embarque pour Conftantinople & autres endroits , font du reffort des Nogais du Zcdzar. & de Tamboilouk, qui commercent avee cette ville. _ Les Cofaques d'Ukraine & les Zaporoviens viennent a Oczakow, porter de Ja Mantegue, des Cuirs, du Tabac , des Cordages , du Chanvre , des Toiles de Ruflie, du bois a brüïer, des pierres k aiguifer, du Charbon , des Poiffons fles & la colle de poitfon; & ils en retirent des vins de Triboli, de Mifevria & d'Mhrman, du fel, des fruits fecs de toute efpece, de 1'huile, du favon, de 1'encens, des bocafïins, des indiennes, des marroquins, des bazanes teintes, des felles, des étriers, des mords, des feutres, des tchekmens, des yapendjis, des pelilfes de mouton. Les mêmes détails que l'on a donnés a Partiele du Commerce de Crimée, peuvent fèrvir ici. L'on pourrait aifément profiter des avantages du Commerce d'Oczakow en y établiffant un faéteur qui correfpondrait avee !a maifon de Caffa. II pourrait y être  MER N O I R E. 129 y être a demeuré &-y commercer en toute füreté , moyennant des ordres & des lettres de recommandation pour Ie commerce de cette place, que le Conful de France auprès du Khan obtiendrak trés facilement de ce Prince. Commerce de la PftoviKCE du Dübossar. Le DuboiTar, que les Turcs appellent TombaJJar , eft une petite Province des Etats du Khan fituée dans 1'angle qu • forme le Niefter, avee les limites de ja Pologne. On y trouve les deux gros bourgs, de Dubojfar qui a donné le nom a la contrée, & celui de Balta ,dont la moitié appartient aux Polonais, & environ quarante villages fous la dépendance dn Khan. Cette Province eft habitée par des Arméniens & des Moldaves : e!Jt; eft commandée par un Hatman-^on Gouverneur Chrétien, nommé par Je Khan; c'eftordinairement un Armemsn ou un Grec. Le Prince lui donne 1'inveftiture de ce gouvernement, moyen • nant une fomme que 1'autre paye annut!lement au tréfordecelui-ci. Ceue.l'ic- rj  I30 COMMERCE DE LA vince efl borne'e au Nord & a 1'Ouefl paf Ia Pologne & le Niefter, au Sud par le Niefter même & a 1'Efl par Ie Territoire de Bender. Le Commerce d'Entre'e du DubofTar fera compris dans celui de Bender & du Budziac ci-après, d'oü les habitans tirent tout ce qui leur efl néceflaire, a caufe de la proximité. Kavcchan efl la place avee laquelle ils ont le plus de relation. Les principaux articles du Commerce de Sortie font: 7 k 8000 quintaux de Tabac: il n'y en a que d'une feule qualité. On peut 3'acheter fur le pied de 18 ocques pour i piaftre; environ un fols de France la Jivre. 1000 a 1500 Cuirs du poids de 16 k 25 ocques, de 25 jufqu'a 50 paras piece. 2000 ocques de Beurre appellé Tchitchek - ïaghi, de 6 k 7 paras l'ocque. 1500 a 2000 ocques de Fromage en formes , appellé DU- .Peinir , de 3 a 4 afpres l'ocque. 1500 a 2000 ocques d'un autre Fromage appellé Prinfa, a 2 ocques pour 1 para. 4000 ocques de Suif, de 3 a 4 paras l'ocque.  MER N O I R E. 131 2000 ocques de Caviar noir, d'oeufs de morone & d'efturgeon , de 4 a 5 paras l'ocque. 10,000 facs de Froment, de 48 a 50 ocques, & de 12 a 15 paras le fac. ■ 10,000 facs d'Orge de la même porte'e, & de 4 a 5 paras le fac. . 15,000 facs de Millet de la rnêmeportee, & de 9 a 10 paras le fac. Toutes ces denrées palTent a Kcmcban & a Bender. 3 a 400 Boeufs, de 5 a 6 piaftres chacun. 4 a 5000 Moutons, depuis 30 jufqu'a 60 paras chacun. 300 Chevaux, qui reftemblent a ceux des Tartares , mais aufti forts , quoique plus petits, depuis 4 jufqu'a 9 piaftres. Commerce de la Province du Budziak. La Beffarabie, aujourd'hui Ie Budziak, eft une grande Province des Etats du Khan, bornée au Nord par le Niefter, a 1'Eft par Ia Mer Noire, au Sud par le " Danube & a 1'Oueft par Ia Moldavië; les principales places de Commerce font F 6  132 COMMERCE DE LA Bender, Kawcban, Mkirman, Kily, Ismail & Kichela. Bender eft la place la plus importante de cette Province: elle eft fituée fur la rive méridionale du Niefter: elle eft grande, trés fortifiée & trés peuplée; on y compte environ 80,000 habitans: elle eft gardée par une nombreufe garnifon, commandée par un Pacha a trois queues; II y a dans cette ville un trés grand nombre de Raïas Moldaves, Grecs, Arméniens & Juifs, dont le nombre égale & peut-être furpafle celui des Mufulmans. On y débite une quantité prodigieufe de marchandifes d'Entrée & le voifinage des Nogais êaZedzan y rend le commerce de Sortie trés confidérable. Kaïvchan eft une ville fituee a 6 lieues au Sud de Bender: elle eft habitée par dés Tartares, des Moldaves, des Arméniens nés dansle pays, des Perfans & des juifs. II y a des mofquées, des égüfes Grecques & Arméniennes & des fynagogues: elle n'eft point fortifiée; on y compte 35 cailleries de toute efpece, fufiis, piftoIets, poignards dits Zindzials, & d'autres dus Amas, indiennes, toiles peintes, couvertures de Yamboli. La place de Sohaum efl la feule oü l'on confomme quelque peu de draps, d'étoffes de Scio, de favon & quelques autres articles qui s'y vendent avee grand avantage, mais en petite quintité. Commerce de Sortie. hé bois de Buis efl Partiele Ie plus confidérable du Commerce de Sortie: on le vend toujours en troc du fel, poids pour po:ds; de forte qu'un chirgement de fel donne toujours un chargement de buis. C'eft pour cela que l'on doit fe procurer pour faire ces voyages de gros batimens afin de pouvoir enlever la plus grande quantité de Buis qu'il eft poffible. Lorfque l'on fait le troc poar le vin, 1'échange ne fe fut plus au poids: l'on» marchande & l'on tache de faire le marehé Ie plus avantageux poffible. II fort de che; les Abazes beaucoup de cire que l'on obtient a trés bas prix & qua revient brute par i'av.intage du troc  MER NOIRE. 155 quelquefois a 20 paras l'ocque: i! faut compter fur 20 pour cent de décliec pour l'avoir pure. II y a auffi de diverfes fortes de pelleteries, comme Facbak yoi\ loup • cervier; Zerdavas, ou martres; Swgr far, ou fouine, & Gueudjens, ou écureuils. Le lard & le jambon y font en trés grande abondance: les cochons y font a trés bas prix. Si l'on pouvait y mener des gens entendus dans 1'art de faler cette chair & qui la préparaffent de faeon que l'on put la tranfporter en Chrétieneté, l'on gagnerait confidérablement a y faire des , chargemens. Le Commerce des Efclaves y eft trés avantageux; ce font des fujets que les Beys fe.prennent les uns fur les autres.. Ils ne valent que la moitié du prix des; Circaffiens. OBSERVATIONS. ïl eft impoffible de déterminer le prixf des marchandiles d'entrée & de fortiev paree que tout fe fait en troc. On fait feulement qu'il n'y a peut-être pas au- jourd'hui de Commerce, dans le monde cormu, qui donne plus de pvofic, L'o$  150 COMMERCE DE LA peut en juger aifément par 1'article du buis, puifque l'on a un chargement de ce bois qui vaut trois piaftres Ie quintal a Conftantinople, contre un chargement de fel qui ne revient pas en Crimée aio paras le quintal. Les batimens ne peuvent aller chez les Abazes, qu'avec un commandement de la Porte, trés facile a obtenir. Pour éviter les dangers auxquels on eft fouvent expofé en faifant ce Commerce, il faut prendre beaucoup de précautions. Quand on a abordé a uneEchelle,ondoit fe mettre fous la proteclion du Bey qui y commande, moyennant un petit préfent que l'on ne doit point manquer de lui faire accepter,pour fe captiver fes bonnes graces: alors on eft a 1'abri de toute infulte de la part de fes fujets & même des Beys du voifinage: quand on a terminé fes affaires & chargé le batiment, il faut avoir grand foin d'attendre pour mettre h la voile, un vent fait avee lequel on foit affuré de pouvoir fe tirer au moins dix a douze milles au large, paree que les Beys voifins font aux aguets & arment des bateaux pour donner l'abord?ge & piller le batiment: c'eft pour cela qu'il faut choifir pour ce voyage de gros  MER NOIRE. rs? navires bien armés,avec un bon & nom» breux équipage. D'ailleurs la nature de ce Commerce exige desforts batimens,comme on vient de le dire. Quand on a le malheur d'être pris, on eft dépouillé <5c fait efclave. Les Abazes pafTent une outre a la tête de chacun des prifonniers, qu'ils menent dans les montagnes par différens détours, afin qu'ils ne puiffent pas retrouver le chemin par lequel ils font venus: la on leur fait garder les cochons qui font trés nombreux dans le pays. Cependant il efl trés facile de fe tirer de eet efclavage. Les Abazes cherchent euxmêmes a s'en procurer le débouché, & viennent les offrir aux marchands qui abordent a leurs Echelles. L'on peut fe racheter facilement moyennant la valeur d'une centaine de piaftres en marchandifes. L'on ne trouve gueres de batimens a nolifer a fret pour faire ce commerce: les voyages fe font toujours a la part; celui qui fournit les fonds, a une part; le propriétaire du batiment une autre, & la troifieme fe repartit k 1'équipage: c'efl ainfi que l'on partage le profit qui en réfulte, après avoir prélevé tous les frais dont celui qui fournit les fonds doit faire les avances. La part de 1'équipage eft fubG ?  fcjS COMMERCE DE LA divifée; le Reïs ou Patron a trois poi> tions, le Nocher ou Pilote deux,l'Ecrrvain deux, le Patron de la Chaloupe ou fecond Pilote une & demie, chaque Matelot une , & le Moufle une demie. Les voyages chez les Abazes ne Te font gueres qu'une fois 1'année; on part ordinairement a 1'ouverture de la navigation de la Mer Noire; c'efl-a-dire vers le commencement d'Avril, & l'on en ra^ vient a h fin de 1'été; mais des Francois expérimentés fur cette mer & qui 1'auraient parcourue, pourraient au moina faire trois voyages.  MER NOIRE. 152 HES L A GEORGIË TURQUE. La Georgië Turque efl un pays chre* tien, qui comprend le Royaume d'Imerette & les Principautés de Mingrclie öz de Guriel. Ce pays efl borné au Nord par les Abazes, les Ahins & le mont Caucafe; a 1'Eft, par la Georgië Perfanne; au Sud, par YJrménie Turque & la Province de Trébifonde, & a 1'Oueft, par la Mer Noire. Le Grand - Seigneur a dans la Georgië qui lui appartient, plufieurs fortereffes ou il tient garnifon; les maritimes IbiitJnakria, Rouch, Soubmzir, Fache, Batoum, Gbemié: dans les terres font Akalzikê, Bagdadzik, Cotaiis,- Souskhet &. Cboraban-, Les Turcs ont détruit toutes les Places de la domination des Géorgiens, qui n'ont plus ni Villes ni Bourgs. Toutes les maiföns font'ilolées & fiéparées les unes des autres comme des métairies: il n'y a que les cbateaux d'Ijïit oü demeuré le Roi d'Imérttte, de Guriel ou le Prince d$  IfJo COMMERCE DE LA ce nom fait fa réfidence, & de Radzia vera les frontieres des OJJcs & de la Georgië Perfanne, oü Ie Dadïan de Mingrélie fait fon féjour. Ces chateaux ne font remarquables que par la demeuré de ces Princes. A 1'égard des autres endroits, on ne pariera que de ceux qui méritent attentïon. Batoum efl; la véritable Echelle d'Akalziké & de toute la Georgië Turque: fon Port n'eft gueres für; les batimens qui s'y trouvent en hiver.font obligésd'aller chercher un abri ailleurs: il n'y a pour toutes fortifications que quelques paliflades, cinq a fix pieces de canon & une compagnie de Janiflaires. On y compte environ 10,000 habitans; il y a un kan public, un marché & une grande mosquée. Son territoire & celui de Gheunié produifent une grande quantité de Riz qui fe confomme dans le pays. On donnera quelques détails relatifs a cette Echelle dans Partiele ci-après de la Georgië Perfanne. Entre Gheunié & Rizé, il y a un endroit appellé Kopa, oü les gens du pays difent que les poiffons viennent en pélé~ tinagc, vers le mois d'Avril. II fe rasfemble dans ce lieu une fi grande quan»  MER NOIRE. 161 tité de poifluns de toutes les efpeces & de toutes grandeurs, que la mer a pene de vue en efl; couverte: ils ne fe font aucun mal, ils paffent & repaffent devant la roche & viennent s'y frotter. On ne prend pas de ces poiffons & les gens du pays fe feraient un trés grand fcrupule d'y toucher. Akalzikè efl la plus grande ville de la Georgië Turque; elle efl: la réfidence du Pacha qui commande la Province. Les haSitans, tous Turcs, Géorgiens & Arméniens y font au nombre de 3^,000. Les fortifications font en trés mauvais état: il y a environ 120 pieces de canon & une compagnie de Janiflaires. Les Capucins Italiens des miffions de Georgië y ont un couvent. Le Commerce y eft affez confidérable. Anakria, Roucb, Soubmzir, Fache, Bagdadzik, Souskhet font trés peu ou point de commerce; il n'y a que Cotatis & Cbora. ban qui en faffent un de quelqu'importance. Commerce d'Entree. Quarante a 50 Ballots de Draps Londrins feconds de France, as piaftres lepic.  102 COMMERCE DE LA II y va auffi quelque peu de Draps de Hollande, appelles Chalis Hollandais: ils s'y vendent a proportion du prix des autres. L'on y voit auffi quelques gros draps de Pologne pour les couvertures des fbphas & 1'habillement des domeftiques, a Co paras le pic. Camelots d'Angora & Camelots en ferge, mais de bafTe qualité, de 30 a 40 paras le pic. Une aflez grande quantité d'étoffes de Venife & de Scio, que l'on y vend avee un trés grand avantage. Les notres auraient peine a y avoir cours, paree qu'elles font trop cheres, a moins que l'on n'en fabriquat de trés légeres pour entrer en concurrence. Le débit des bocaffins, toiles de coton & indiennes efl: imrnenfe. 10 a 12 caiffes de bonnets ou fez de France de 40 paras; il n'en faut que de petits. Ceux de Tunis y ont trés peu de cours. Le fil d'or & d'argent & le trait tout pur s'y vendent avee bénéfke & en aflez grande quantité. Le prix ordinaire du premier efl; de 19 a 20 paras, & le fecond de 25 a 26 paras la dragme.  MER. NOIRE. 163 Les Bours de foie de Damas s'y vendent trés bien. Les Coutnis de Bronffe & de Conftantinople y font en ufage; les bons valent de 40 a 45 paras le pic, & les communs depuis 12 jufqu'a 15 piaftres la piece; l'on n'y porte que de ceux - ci. icoo a 1500 Couvertures de Yatnboli, avee la pluche & fans pluche, depuis 4 jufqu'a 10 piaftres. 15 a 20,000 ocques d'Indigo, autantde Cochenille, & une affez grande quantité de bois de Campeche , Fernanbouk, Brefil, Ste. Marthe. Tous cès divers articles donnent un trés grand profit. Le Caffé de France réuflirait en Georgië , fi la Porte abandonnait fon fyftême & que l'on put parvenir a 1'imroduire par la Mer Noire. Celui de Moka vient par les Caravannes de Perfe, de même que les Epiceries. Une affez grande quantité de Sucre en petits pains, que l'on vend en détail jusques a 20 paras; ce qui revient a 2; piastres l'ocque. Beaucoup de Cuivre en lingot & travaillé. L'Etain eft un objrtaffez confidérable: il vaut de 80 a 90 paras 1'ocque, avee le fel ammoniac.  ï6*4 COMMERCE DE LA 30 a 40 caifles d'acier, que l'on vend en morceaux. La longueur du morceau détermine le prix: il ne fe vend pas au poids. Le fer y vient en trés grande quantité & vaut 10 paras l'ocque. Le Kénas dont il fe fait une trés grande confommation s'y vend de 12 a 13 paras l'ocque. 5 a óooo quintaux de favon de Smyrne & 1000 a 1500 quintaux de celui de Candie; le premier de 18 a 20 uaras, & 1'autre jufqu'a 30 l'ocque. Le tabac & les fruits fecs v viennent de Perfe & de la Georgië Perfanne , de même que le coton. Les quincailleries de toute efpece s'y vendent avee beaucoup d'avantage. Commerce de Sortie. Les principaux articles du Commerce de Sortie de la Georgië Turque font, la Soie qui y eft en trés grande quantité, mais inférieure a celle de Perfe: elle revient dans 'e pays de 3 a 4 piaftres l'ocque par le moyen du troc & du bénéfice que l'on trouve fur les marchandifes que l'on donne en échange.  MER NOIRE. ïöj 100,000 ocques de Cire; elle revient nette a Cotatis & a Akalziké, a 30 paras, & a 25 brute. La quantité de Miel y efl imrnenfe • fon prix ordinaire a Cotatis efl de 15 a* 16 paras le batman de fix ocques. On peut favoir a meilleur marché, ainfi que la cire, en le faifant ramaffer dans les campagnes. Les Pelleteries du pays font affez eftimées : les deux principales font Ie Vachak qui fe vend de 15 a 20 piaftres Ia-peau, & les Zerdava qui ne valent gueres plus de is a 16 paras chacun. On les vend telles que l'on les a tirées de 1'animal • le bénéfke en eft imrnenfe. A Akalziké on trouve a acheter de Ia laine, du teftik & du coton. Le Commerce des Efclaves males & femelles efl trés confidérable; ils Tont moins eftimés que les Circaffiens ; leur prix efl indeterminé. observations. Les monnoyes Turques d'or & d'argent de toute efpece ont cours dans Ja Georgië Turque au même taux de Conftantinople. Les fequins Vénitiens n'ont cours  t66 COMMERCE DE LA qu'a Jkalziké & a Cotatis, & même avee quelque peine: ils valent le même prix qu'en Turquie. Quelques monnoyes de Perfe dont on verra la valeur dans Partiele fuivant, y ont cours: toutes les autres monnoyes étrangeres n'y font point reeues. Les poids & les mefures font lts mêmes qu'en Turquie. Le tranfport des marchandifes fe fait fur des chevaux; les chariots n'y font point en ulage. En hiver les crevaux ne marchent point: on fe fert des hommes qui ne portent gueres plus de 8 a 10 batmans (160 a 180 livres de France). On pariera du louage des hommes & des chevaux dans Partiele fuivant. Pour faire le Commerce de la Georgië Turque, il faudrait établir la maifon & les magafins a Akalziké, ou a Cotatis, pour répandre de-la, les marchandifes d'entrée dans 1'intérieur du pays & y acheter celles de fortie dans les marchés publics, ou par le canal des facteurs ambulans qui courent la campagne & vont acheter de la première main. Dans les villes le commerce fe fait indifféremment au comptant ou en troc; mais dans la campagne on ne connait que le commerce d'échange.  MER NOIRE. 167 L A GEORGIË PERSANNE. Le rapport de la Gcergie Perfanne avee la Georgië Turque & la Mer Noire fait penfer que fon Commerce ne fera pas étranger a eet Ouvrage, & l'on crok devoir en donner ici tous les détails qu'il a été poffible de ramaffer. Cet Etat efl gouverné de tout tems par des Princes Chrétiens, qui dépendaient autrefoisdes Rois de Perfe,& qui font devenus indépendants depuis que le tröne des Sophis a été renverfé. La Georgië Perfanne efl bornée an Nord par Je Cabarta & une partie de Ja Circaffie; au Levant par le Daghcflan , les Kalmouks & le Shirvan; au Midi par YArménie Perfanne, & au Couchant par Je Royaume d'Imerette. II n'y a a proprement parler dans ce pays-la que deux villes, qui font 'lifflis & Gori. Tifflis, efl la'capitale, Ja métropole , la principale & même Ja feule place de commerce de tout le pays: le Prince y fait fa réiïdence : elle n'a gueres que trois m.lles ou une lieue de circuit & ne  168 COMMERCE DE LA ccntient que 40,000 habitans, Georgiens, Arméniens, Catholiques Latins, & Mahométans. Les Géorgiens y ont trois églifes , les Arméniens fix & les Latins une feule, qui eft deflervie par les Capucins ltaliens avee toute la liberté d'exercice de rit dont on jouit en Chrétienté: leur églife a un cloeher fort élevé & trois cloches. Les Mahométans n'y ont point de mofquée publique & y font en trés petit nombre. Cette ville eft fituée au Couchant du fleuve Kur; elle eft entourée de murailles & défendue par une citadelle la plus forte qu'il y ait dans toute la Georgië: il y a dans la ville un Gouverneur Arménien appellé le Maliki. Gori eft une petite ville fur la frontiere des Ojjes, nation idolatre qui habite vers les montagnes au Midi de la Circaflië, & des Tufces, peuples qui fe prétendent defcendus des Tofcans & des Génois & ont confervé la douceur des roceurs Européennes & un grand nombre d'ufages & de coutumes dans la facon de s'afteoir, de manger, de fe coucher & de traiter dans le commerce de la vie civile. Commerce d'Entree. . L'on peut débiter une aflez grande quantité  MER NOIRE. 1Ê9 quantité de Draps de France dans la Georgië Perfanne.- le Londrin francais appellé Uskuntur, fe vend a 44 Nadiris le pic; le Londre large 3= Nadiris; le drap d'Hollande dit Pangrafl 8 Urubiès le pic, pourvu qu'il ne foit pas verdni couleur d'olive, & le Londre ordinaire de 3* nadiris. Les Draps Cbalis rouges, verds, violets ou bruns y ont cours auffi: ils viennent de Hollande: la piece de 21 pies fe vend de 60 a 70 abaffts. Le Satin de toutes couleurs vaut de 4 a \\ nadiris le pic. Les Étoffes de foie de Venife & de Scio, fimples ou brochées. en or & argent, s'y vendent avee avantage: il ne ferait pas impoffible d'y introd u're même des Étoffes de Lyon, fi l'on voulait en faire un effai. Le Galon & les Dorures de p'ufieurs efpeces y donnent beaucoup de profit z il efl impoffible d'en fixer le prix. paree que c'eft la qualité qui en décide." il fauc feulement obferver de n'y por^r que des galons légers, a moins qi?<; l'on ne parvienne a étendre cette branche de Commerce dans la Perfe. oü tout ce qu'il y a de plus beau & de plus cher fe vendraie également bien. H  170 COMMERCE DE LA / Le trait pur, & Ie fi! d'or & d'argent mé!é de foie y ont un grand débit: il en vient de Hollands. Le trait pur vaut demi ■na lin & un chabi le mi/cal (36 fols le gros & demi). Le fil mélé de foie s'y vend demi nadiri (30 fols). La Cochenille s'y vend communément 28 nadiris l'ocque de Turquie. L'Indigo s'y débite fur le pied de 40 a 42 nadiris le batman. Ces deux articles font affez importans: on n'indique que le prix courant en tems de paix, les objets étant renchéris depuis la guerre. Le Caffé de France ou plutöt d'Amérique s'y débite avee affez de facilité: fon prix ordinaire efl de 10 a 12 abaflis le batman. Le Sucre y valaitdéja en 1754, quinze a feize nadiris le batman: il efl renchéri encore bien plus depuis la guerre. Le Corail efl un article qui réuffit quelquefois; les Arméniens y en portent de Genes & de Livourne. COMMERCE DE SORTIE. Marchatidifes du cru du Pays. Les deux Articles qui conftituent prin-  MER NOIRE. 171 cipalement le Commerce de Sortie de Ia Georgië Perfanne, fonc Ia Cire , les Cuirs de boeufs & ceux de buffle-. La Cire y efl: en trés grande abondance: les villages du territoire de Tifllis en produifent une énorme quantité: fon prix ordinaire efl: de | nadiri jufqu'a i nadiri : c'efl: a - dire de 30 kq.o paras l'ocque de Turquie. Les Cuirs de boeufs & de buffles font aHfli fort abondans: on les vend au poids ëepuis x nadiri jufqu'a 15 le batman. Marchandifes de Perfe. On trouve quelquefois a fe pourvolr a Tifflis de toutes fortes de marchandifes de Perfe qui y viennent de Guendjé , Cbabmaké, Tauris, Erivan & Erzerum. La foie fine de la plus haute qualité, appelle'e Cbcrbab & Cherbaffi par nos négocians, vaut a Tifflis de 24 a 32 nadiris le batman, fuivant la vaciation du prix; celle de Chahmaké coüte toujours 3 ou 4 nadiris de plus que ce'le de Guendjé. La grofle foie écrue de bonne qualité s'y vend communément de 20 a 20 nadiris le batman, & la fok teinte vauc 3 urubiés & 2 chahis (9 livres 12 fols} H. 2  172 COMMERCE DE LA les 100 mifcals, ou 150 dragmes. (2 marcs 2 onces 6 gros). Le Teftik ou laine de chevron noire vient de Mafcbat. Son prix ordinaire eft de 150 a ióo nadiris les 50 batmans, ou 300 ocques. Le Teftik rouge vaut de ioan piaftres le batman; il vient de Kirman. LaRhubarbe vient du pays des Usbeks: fon prix en Georgië eft de 50 a óp piaftres le batman j ce qui revient a 3 piaftres & quelques paras l'ocque. Le Kazni ou Galbanum y coüte de 10 a 11 abaffis le batman. Le Ladzi verd, ou Lapis lazuli fort du ChoraiTan; il vaut communément de 100 a 110 nadiris le batman. Le Bézoard vient de Shiras, & fe vend de 18 a 22 abaffis le mifcal. U/lJJafcetida fe vend de 10 a 11 abaffis le batman. Le Vicbey fe vend le même prix. Le Tiramina vient du Choraffan& coüte de 100 a 11 o nadiris les 50 batmans. La Tutie de Kirman vaut de 5 a 6 abaffis le batman. Le Semen ■ contra , appellé Dermaniturki, vaut 19 a 20 abaffis le batman.  MER NOIRE. *73 Le Semen - contra , appellé Dermani* fhirazi, ne coüte que 4^5 abaffis. Monnoyes. Les Monnoyes les plus communes a Tifflis y comme dans les autres villes de .a domination Perfanne, font celles du Mogol & de Perfe. Les Sequins Vénitiens, les Zermabboubs de Turquie, y onf cours auffi & les Sevillanes y paffent au poids & au titre de 1'argent. Le Touinan, ou Tornan efl; une monnoye de compte, ou idéale,qui vaut 20 piaftres de Turquie, & de France livres 60. * * • Le Sequin Venitien paffe pour 4 nadiris - - liv. 12, # # Le Zermabboub de Turquie, 3 nadiris - - üv. p > * Le M'«eft une valeur idéale de la valeur de 2 nadiris - - liv. 6. * * UUmbié efl; une piece d'argent du Mogol, qui vaut 1 nadiri ou 1 piaftre de Turquie - - liv. 3,^ Le Nadiri, monnoye que ThamasKouli - Khan a fait battre, eft de Ia même valeur que l'Urubié, ou la piaftre de Turquie - . liv. 3. # «* H 3  174- COMMERCE DE LA L' Abafli vaut'précifément 24 fols de notre monnoye: 2] abaffis font 1 nadiri. VUzal-tun efl notre piece de 12 fols; 5 font 1 nadiri , & 2 un abafïi. Le Cbahi revient a notre piece de 6* fols: c'efl la moitié de l'Uzal-tun & le quart de XAbajfr. 10 valent un nadiri. Le Pon! efl une petite monnoye, qui répond au grand afpre de Turquie: 100 valent un nadiri. Le Poul vaut 7 deniers 6 un cinquieme de notre monnoye. Poids & Mefures. Les Poids & les Mefures dont on fe fert dans la Georgië Perfanne pour 1'achat & pour la vente des marchandifes, font Le batman de 6 ocques - -18 liv. 12 onc. La livre de 2 l ocq. ^ou 20 jiils --7-13. Le tchirck de 5 Jtih, ou 250 dragmes. il 15. 2 gros. Le Jlil de 50 dragmes - 6. 2. Le mi/cal de dragme - 1. liv. onc. La feuie mefure pour 1'aunage dont on fe fert dans la Georgië & dans toute la P^rfe, s'appelle en Georgien /idli, en Arménien Gaz, & en TarcArchin: 70 Adlis, font ico Halèb'u de Conflantinople.  MER NOIRE. 175 Cependant la mefure de Tauris efl plus grande, & les 70 Adlis font 106 HaUbis. OBSERVATIONS. Le Commerce de la Georgië Perfanne ferait tres avantageux par lui-même & faciie a faire, en ttabliffant a Dateum fur la Mer Noire, un Comptoir, & fefant prendre aux marchandifes la route $ Akalziké , qui efl la plus belle, la plus courte & la plus füre pour aller a Tifflis; mais un objet encore plus important a faiE jetter les yeux fur ce pays • la & exige plufieurs Réflexions. Les Francais établis k Conftantinople, s Smyrne, a Alep, font indireclement le Commerce de Perfe par le moyen des Caravanrfes qui apportent dans ces diverfes Echelles les marchandifes de Perfe & enlevent celles d'Europe. Nos négocians en fefant ce trafic feulement de ia feconde main, ne fauraient jamais profiter des premiers prix pour 1'achat des marchandifes du pays, ni pour la vente des leurs. L'on a cherché inutilement jusqu'aujourd'hui tous les expédiens imagïnables & toutes les routes poffibles pour parvenir a cornmercer direéteraent avee H 4  276 COMMERCE DE LA les Perfans & l'on n'a jamais peut-être penfé a celle qui ferait la plus praticable. Si l'on examine 1'état de la Georgië Perfanne , le caratlere de fes peuples & la fituation de la ville de Tifflis, on trouvera que c'eft peut-être le feu le plus proprea établir une maifon de commerce, pour faire celui de la Perfe par la Mer .Noire qui offre la voye la plus courte & la moins difpendieufe. La Georgië , comme on 1'a dit cidelfus, eft un pays Chre'tien, gouverné par un Prince chrétien, & habité par un peuple trés doux, trés poli & le plus ami des étrangers, qu'il y ait dans toute Ia Perfe. Les Européens & furtout les Catholiques-Romains y font vüs de trés bon teil & y jouiffent d'une pleine & entiere liberté. Dans le cours des guerres inteftiïies qui ont ravagé la Perfe depuis tant d'années, la Georgië s'eft toujours foutenue a peu prés dans le même état & s'eft moins reflentie qu'aucune autre province de eet Empire, de la calamitó des tems: elle tft en effet moins expofée que toute autre aux incurfions des ennemis. Tifflis eft une ville bien policée, ou 1'air eft excellent j qualité qui en rend le féjour  MER NOIR E. 177 féjour préférable a beaucoup d'autres: on peut y tranfporter par Ia Mer Noire , en prenant la route ci'Akalziké, les mard) Wdifes d'Europe & ks rcpindre de- ia dans toute la Perfe avee une extréme faciIjté , & l'on efl; égatcmenr. 3 mc;r,c de s'y pourvoir des marchandifes de Perfe & des Indes & de leur donner cours par le Pont - Euxin, en fuivant la même route : fa pofition la met a portee de toutes les villes de Perfe, oü le Commerce s'eft encore foutenu, malgré le malheur des tems. Guendjé n'eft éloigné que de fixjournées de Tifflis : le territoire de cette ville produit une trés grande quantité de foié; on pourrait en acheter aifémenc chaque 3nnée pour ia valeur de 150,000 piaflres: en tems de paix, le débouché des marchandifes d'Europe y efl: aflez confidérable. Chahmaké n'eft qu'a huit journéesrla foie de cette ville eft de meiileure qualité & en plus grande abondance que celle de Guendjé, öc l'on troüve a y débiter une plus forte quantité de marchandifes d'entrée. Erivan qui fe trouve a la même diftance, offre en tems de paix des relfources H 5  i7S COMMERCE DE LA' ïmménfes pour le commerce d'entrée 6z de fortie; mais la guerre a réduit cette place dans 1'état Je plus de'plorable. En dis • huft journées, on fe rend a Tauris, une des plus importantes villes de Perfe, oü l'on trouve a acheter abondamment toutes fortes de marchandifes de Terfe & des Indes & a débiter une quantité prodigieufe de celles d'Europe de toute efpece, comme draps, étoffes d'or & d'argent, fatins, velours, or trait, fil d'or & galons, cochenille, indigo , bois de teinture & quincailleries. La route iïErzerum enfin n'eft que de douze journées: chacun fait que cette place efl 1'entrepöt de toutes les marchandifes que les Caravannes portent dë Perfe a Conftantinople , a Smyrne & a Alep, & de celles qu'elles en rapportenr. L'on jugera aïfément par ce qui vierrc d'être dit, que Tifflis eft en effet le lieu lepluspropre que l'on puilTe choifir pour y faire le Commerce de Per/S: le caraclere du Prince Héracliusqui regne aujourd'hui dans la Georgië doit faire efpérer toutes les facilités poffibles pour le fuccès de. cette entreprife. Si que'que PuifTance en> Europe adoptait le projet qui„vient d'être  MER NOÏRE. 17? propofé,elle pourrait envoyer a ce Prince des perfonne* entcndues & capables de traiter cette négociation , qui obtiendnient aifément de lui la permifïiort d'établir le principal comptoir dans la Capitale. Le Prince de Georgië efl aidé dans le gouvernement par douze a quinze Sénateurs, choilis entre les plus nobles, les plus riches & les plus favans perfonnages du pays, & dont 1'Envoyé Europeen chargé de traiter avee ce Prince pourrait facilement captiver les bonnes graces. Les Géorgiens aujourd'hui trés dépourvus d'argent, verraient avee un plaifir extréme i'établiflement d'un Commerce qui en ferait circuler dans le pays une trés grande quantité,& les marchands de toutes les villes voifines dont on a parlé, apprendraient a peine la venue des Européens a Tifflis, que 1'appat du gain, & la nouveauté les engageraient a leur porter avee emprefiement toutes les marchandifes du pays & a venir ache:er celles des Européens. Quand on aurait obtenu du Prince la permiffion de réfider a Tifflis 8c que l'on aurait pris avee lui toutes les mefures uécclTaires pour la füreté, la iiberté 8z 11 6  l8o COMMERCE DE LA la proteètion de ce commerce, on pourrait établir le chef - lieu dans cette Capitale: le Directeur y réfiderait avee le tïtre d'Envoyé ou de Conful & y ferait une figure convenable a fon état: il aurait fous lui desNégocians entendus pour gérer les affaires, & ceux - ci pourraient entretenir dans les diverfes villes, oü l'on voudrait étendre le commerce, des Facteurs pour y vendre les marchandifes d'Europe, acheter les retours & avoir foin de les faire tranfporter a Batoum qui efl: 1'échelle la plus convenable. II faudraitque le Faóteur établi a Batoum, für. muni de quelque commandement de la Forte, qui le mït a 1'abri des infultes & des avanies des Officiers Turcs, & a la faveur duquel il put veiller librement a 1'embarquemeBt & au débarquement des marchandifes, fans être inquiété. II ferait auffi a propos que ces Facteurs fusfent des gens du pays, ou des Européens qui pofledaflent parfaitement la langue Si qui puflent tenir lieu des gens du pays. Les Nations qui trafiquent a Tifflis, font les Géorgiens, les Arméniens & les Perfans. La maniere de traiter avee ces derniers eft a peu prés la même qu'avec les Turcs. Les Arméniens & les Géorgiens  MER NOIRE. ïgi font d'un commerce un peu difficile; ils font fcrupuleux, fuperftitieux & fe fcandalifent trés facilement. On ne doit pas oublier de dire que pour bien débuter dans ce pay-la & commencer d'accréditer Ia nation, il faudrait que les négocians que l'on mettrait a la tête de ce Commerce, fuiTent des gens d'une probité reconnue, riches & en outre coulans dans les affaires, qu'ils euffent de bonnes mceurs & remplilfent avee la plus fcrupi leufe exacbitude les devoirs de la religion romaine: ce dernier article furtout efl ii> difpenfablepour réuffir auprès d'un peuple religieux, extrêmement attaché a la religion chrétienne, méprifant fouverainement tous ceux qui paraiffent en négliger tant foit peu 1'obfervance & les traitant de Luthériens & de Calviniftes , fans comprendre le fens^ de ce qu'ils difent, mais uniquement paree que leurs prêtres & les moines Italiens ne leur en parient qu'avec horreur. Pour donner des idéés encore plus précifes & mettre le Miniüere a même de calculer ce projet avee plus de folidité, on finira eet article par un détail des Douanes, & autres droits & des frais de tranfport. HZ  •ï8a COMMERCE DE LA A Batoum, il n'y a point de Douanes d'enirée ni dé fortie par mer, mais feulement un Droit de 2 piaftres par chaque charge de cheval fur toutes les marchandifes qui entrent & qui fortent par terre: a Akalziké la Douane d'entrée & de fortie eft de 5 pour cent & de 6 a Trébifnde: a Erzerum les /irméniens & tous les llaïas payent égakment 6 peur cent: mais on croit que dans toutes ces places qui appartiennent aux Turcs, on pourrait fe prévaloir des privileges accordés aux Franeois & aux autres nations Européennes par le Grand-Seigneur & réduire la douane a 3 pour cent en vertu des Capitulations. A Tauris, a Erivan, a Guendjé, 3 Cbabmakê & dans toutes les places de la domination des Perfans, on paye la douane fur le pied de 5 abaffis (6 livres) par charge de cheval: a Tifflis, il n'y a que le droit de Badge, a raifon de 2 pour cent. Lorfque l'on achete de la foie des Perfans & autres fujets de Perfe, on paye le droit de Mizan; favoir, a Guendjé 3 abaffis C3 nv- 13 f°'s) Par üVfe C7 ® 13 onc.); a Chahmaké i\abaffis (3 livres) & a Tifflis 5 chahis, (1 liv. 10 fols) par batman de 6 ocques (18 ©12 onc).  MER NOIRE. 183 Lorfque la foie fort da pays, elle n'eft plus fujette au droit de Badge; mais celle qui y entre, paye ce droic fur le pied de 3 nadiris (9 livres) par chaque 24 batmans , (450 f£.) L'on peut éviter cette dépenfe en faifant paffer la foie dire&ement de Guendjé Sc de Chabmaké oü on fachette, en droiture a Akalziké, Sc de-la a B.uoum, fans la faire paffer a Tifflis. Mais lorfque ce plan ferait bien digéré & que l'on voudrait le mettre a exécution, la perfonne chargée de cette négociation. pourrait traiter pour tous ces Droits, Sc prendre les arrangemens nécelTaires pour régler Jes dépenfes de negoce & diminuer les frais aut^nt qu'il ferait pofïnle. De Batnum a Akalziké, on tranfporte les marchandifes fur des chevaux: la charga de .ch aque cheval eft de 20 batmins (375 fê) & coüte 10 ifelotfes, qui font 7t piiftres de Turquie (22 livr. 10 fols). On en trouve fouvent de retour a mei!Ieur marché. D'Akalziké a Tifflis, le chemin étant beaucoup p'us beau, fe cheval porte 24 batmans (450 f8) Sc coüte-la 7 ifelofes, fefant si piaftres (15 livres i$ fols) Sc même beaucoup moins, lorfque l'on peut profker des chevaux de. retour. A Tifflis l'on voic  i84 commerce de la journellernent arriver des Caravannes de Guendjé, de Cbahmaké, d'Erivan, de Tauris & d'Erzerum: on y trouve beaucoup de chevaux & de chariots a trés bon compte, & tous les mois il part 150 a 200 bonnes voitures pour Erivan, Tauris & Erzerum, que l'on peut louer pour trés peu de chofe. La Province de Trébisonde, 0 u La Cöte des Lazes. La Cöte des Lazes s'étend le long de fa Mer Noire, depuis Rizé jufqu'a Kirrifoun, anciennement Cérifonte, inclufivement, Ses Places maritimes font Trébifonde, Rizé, Hafpiè,. Triboli & Kirrifoun. Dans les terres font les villes d'O/, Sutminé, Gumuche - Khana , & le bourg de Khuré, auprès duquel on trouve les mines inépuifables de cuivre, qui fourniiTent de ce métal a tout 1'Empire Ottoman. Les troubles continuels qui regnent a  MER NOIRE. 185 Trébifonde depuis tant d'années, ont rendu infenfiblement Rizé, la plus florifTante ville de commerce de cette province: ainfi c'eft par elle que l'on commencera eet article. Rizé. Cette ville eft fituée a trois milles d'un Port forain, dont 1'entrée eft expofée au Nord-Eft; il eft large & profond & peut contenir de trés gros navires & même des vaifieaux de guerre: les batimens y fouffrent un peu , lorfque le vent d'Eft regne, parceque le Port eft découvert du cöté du Levant: le fonds en eft de fable: la ville n'eft pas grande, mais contient au moins 30,000 habitans, parmi lefquels 3 a 4000 Raïas: il n'y a point de Juifs. Le Commerce maritime de Trébifonde fe fait fouvent par Rizé, lorfque la guerre inteftine qui ravage la première de ces villes, empêche les batimens d'y aborder; alors ils apportent leurs marchandifes a Rizé:celles qui ont payéla douane dans celle-ci ne payent rien a Trébifonde, de même que celles qui ont acquitté les droits a Trébifonde en font affranchies a Rizé.  I8<5 COMMERCE DE LA Commerce cïEntrée. 20 Ballots de Draps Londrins feconds de %\ a 3 piaftres le pic: quelque peu de Nifmes. Les Draps Anglais & Hollandais y onc peu de cours. io a 12000 pies de Serges impériales, de 30 paras le pic. 8 k 10,000 pieces de Bours deMagnéfie, de 60 a 90 paras la piece. 1000 a 1200 pieces de Coutnis de Brouffe, de 14 a 15 piaftres la piece; & autant de ceux de Conftantinople, de 10* air piaftres. 500 pieces de Dulbents ou Mouffelines appellées Dévé-taban>dQ 18 &19 piaftres la piece. Le commerce des Toileries, comme Bocaffins, Aftars, Indiennes eft imrnenfe. 1000 a 1200 Turbans noirs, appelles Poches; ils viennent de Brouffe & fe vendent de 20 a 22 piaftres. 1000 Bonnets de Tunis; 500 de grapds, de 80 a 90 paras, & autant de petits, de 55 a 60 paras. 15 a 20000 Bonnets de France; il faut en porter plus de grands que de petits: les premiers de 50 a 60 paras, & les autres de 35 a 40.  MER NOIRE. l8Z 3 a 4000 Ceintures de laine rouge de Gerbé, de 55 a 60 paras. 1000 Chdls blancs de ferge de laine de Gerbé, pour envelopper la tête, de 65 a 70 paras. , 5 a 6000 Cbdls rouges pour le même ufage, qui viennent du Caire, de45 a 50 paras. 1500 Cabans de laine, de Salonique, dont 500 grands de 11 a 12 piaftres & même de 14, avee la pluche; 500 Sauteen-barque, a 6 piaftres & autant de petits, fans manche, en forme de camifolle, de 2 a 2| piaftres la piece. 2000 paires de Baboucbes jaunes, avee les chauffons appelles mefls, de 70 a 80 paras; un pareil nombre avee d'autres chauffons appellés Terlik, de 60 a 6*5 paras 1'affbrtiment; & 5 a 6000 paires de Bottes noires de 2*- a 3 piaftres Ia paire. 1000 Couvertures deYamboli, de 4 piaftres la piece. 20 Balles de Pechtmals ou ferviettes bleues du Caire: la balie de 500 de 15 a 20 paras la piece,fuivant la qualité. 5 aócoo quintaux deLind'Egypte .de 23 a 24 piaftres le quintal: il fert a la fabrication de ces fameufes toiles de Tré-  183 COMMERCE DE LA tdfonde. dont nous parierons a Partiele de Sortie. 7 a 8000 quilots de graine de Lin, de S2 ocques 1'un, de 80 a 90 paras le quilot. Quelque peu dTndigo & d'autres teintures. 25 a 30 quintaux de Poivre , de 80 a 90 paras l'ocque. 5 a 600 quintaux de Gingembre, de, 20 a 25 paras l'ocque. Les Epiceries fines y ont peu de débit. 50 a ób fardés de Caffé Moka, il n'y en vient point de celui de France; tout le Caffé pafTe en contrebande. II vaut de 2\ a 3 piaftres l'ocque. 3° a 40 quintaux de Sucre en petits pains: eet article donne un bénéfke de 25 a 30 pour cent fur le prix de Conftantinople. 200 a 250 quintaux d'Etain, de i\ k 2i piaftres l'ocque: le Sel ammoniac pour 1'étamage s'y vend en proportion comme en Crimée. 3 a 400 quintaux de Plomb, de 10 a 12 piaftres le quintal. 10 a 12 barrils de Mercure, pour plufieurs ufages & furtout pour la dorure,  MER NOIRE. i8p 50 h 60 caiffes d'Acier, qui s'y vend avee un tres grand avantage. 1500 a 2000 quintaux de Fer en barre de Romelie, de 13 a 14 paras l'ocque. 8 a 10,000 fers de cheval avee les clouds: ils viennent de Romelie en gros a 35 paras, & en détail 45 1'alfortiment: ceux du pays ne valent rien. La Poudre a tirer vient en contrebande de Conftantinople. Si l'on pouvait y en porter, le débit irait a 200 quintaux: la bonne poudre de France s'y vendrait 2 piaftres l'ocque. 100 a 150 quintaux d'Encens, de 60 a 65 paras l'ocque. 5 a 600 caiffes deSavon deCandie,de 18 a 20 paras, & autant de celui de Smyrne de 12 a 13 paras l'ocque. 1500 a 2000 quintaux d'huile de Metelin, de 12 a 13 paras l'ocque. 25 a 30,000 ocques de Tabac de §a\onique, de 20 a 22 paras & jufqu'a 24 l'ocque. 5 a 6000 ocques de Tabac de Ruflie, de ut a 12 paras & jufqu'a 15. 5 a óoo couffes de Riz du poids de 110 a 120 ocques; 200 du Caire & 400 de Philippopoli; le premier de 60 paras  ÏQO COMMERCE DE LA le quilot de 10 ocques, & le fecond de 40 a 42. 150 facs de Kenas , de 120 ocques 1'un, de 10 a 12 paras l'ocque. 50 a 60 ballons de Papier de 24 pour les fenêtres. Cet article donne un grand benefice; il fe vend en détail jufqu'a 5 paras la main. Les Pelleteries font un article aflez confidérable; on y débite chaque année environ 1000 pellifles de Nafé,de 30 a 40 piaftres; autant de Gueudjen de diverfes qualités, de 16 a 22 piaftres; 7 a 800 Pellifles de chat, de 8 a 9 piaftres, & environ 1500 Pellifles de moutons, de 6 a 7 piaftres. La plupart de cet Pelleteries viennent de Crimée. Les maifons Européennes établies a Caffa pourraient lpéculer fur cet article. 4 a 500 quintaux de Pafturmas, ou viande falée, qui vient de Caffa & de Kily, de 6 a 7 paras l'ocque, en gros; & de 10 en détail. Le Commerce des fruits fecs, figues & raifins y eft trés confidérable: il en vient 7 a 8 chargemens de Conftantinople & fe vendent comme en Crimée. Des Olives noires, dont le débit eft  mer noire. ioï d'environ iooo quintaux, de 4 a 5 paras l'ocque. 100 a 150 barrils d'Olives vertes, confervées dans 1'huile, de 13 a 14 paras l'ocque. 2 a 300 quintaux d'Eau ou Jus de limon : cet article donne un profit imrnenfe. Quelques chargemens de limons & d'oranges; les premiers fe vendent de 12 a 13 piaftres le millier & les oranges de 2 a 3 paras la piece. 8 a 10,000 ocques de Beurre de deux qualités, la première de 20 a 22 paras, & la feconde de 15 a 16. 5 a 6coo ocques de Miel , de 10 k 12 paras l'ocque. Ces deux derniers articles viennent des Etats du Khan. Le pays ne produit point fuffifamment de Grainspourla fubfiftance des habitans; il vient dedehors chaque année 12 a 15 chargemens de bied ,d'orge & de millet j les deux premiers articles viennent des environs du Danube & le millet de Crimée , d'oü il s'expédie auffi quelques chargemens de bied en contiebar.de. (Voyez a 1'artide de Crimée , pag. 82 & fuivantes).  102 COMMERCE DE LA Le dernier voyage que font les batimens de Rizé avant ia clóture de ia navigation, c'eft-a-dire en Ocbobre & Novembre, eft pour 1'achat des denrées & des provifions d'hiver. On peut y comprendre troi ou quatre chargemens de fel de Crimée & de Valachie. Commerce de Sortie. Les Toiles font le principal article de fortie de Rizé: c'eft un objet de plus de 500.000 piaftres : elles font oonnues fous le nom de Toiles de Trébifonde & fe répindent dans tout 1'Empire Ottoman. Elles font de trois qualités différentes; la plus haute paffe en Egypte pour les voiles des femmes; la feconde paffe a Conftantinople & a Alep , & la derniere fe débite a Bagdad, dans la Syrië & au Caire pour les chemifes groffieres des Arabes. Le prix de ces toiles fur le lieu eft de 10 a 30 paras le pic: a Conftantinople elles valent de 18 a 50 paras fuivant la qualité; elles fe vendent a proportion dans les pays plus éloignés. II fort de Rizé une quantité prodigieufe de Cuivre ouvré & en lingots, dont  MER NOIRE, 193 dont toute la Province de Trébifonde eft une fource intariffable. 40 a 50,000 ocques de cire, moins belle & moins nette que celle de Crimée: on 1'achete brute fur le lieu de 28 a 30 paras l'ocque; mais le déchet eft confidérable: elle paye 20 paras de Nolis par quintal pour Conftantinople, oü elle pafte. 5 -a-6ooo beaux cuirs de boeufs & 1000 3 1500 cuirs de bufiles, dont la qualité & le poids déterminent le prix, qui eft k peu prés le même qu'en Crimée. Le chanvre eft un article confidérable: il en paffe chaque année 12000 quintaux de non travaillé a Conftantinople, de 4 piaftres le quintal , & 3 a 4000 quintaux en filaffe, de 6 piaftres le quintal. 10 a 12 chargemens de noifettes & de noix; les noifettes de 90 a 100 paras le quintal & les noix de 10 a 12 paras le millier. 30 a 40,000 quintaux de Nardenk de deux fortes, de 6 a 7 paras l'ocque. O F. C'eft une ville dans les terres a 6 lieues de Rizé & a 3 ou 4 de Trébifonde: elle  104 COMMERCE DE LA contient 50,000 habitans, parmi lesquels jl y a beaucoup de gens de Loi. S ü R m I n é. Petite ville aflez éloignée de Ia mer, a 3 lieues de.Rizé:on y compte 10 a 12000 habitans. 0 Ces-deux villes tirent tous les articles dont ils ont befoin dé Rizé, oü elles énvoient les marchandifes de leur crtö. La confommation de celles d'entrée dans ces deux places doublé aypeuprès la quantité qüe l'on a déterminée en parlant du Gommerce de Rizé. Entre Rizé & Surminé, il y a un petic Port appellé Efpet ,- qui ne peut contenir que des petits batimens. Les gros ne peuvent pas'y demeurer en hiver: ils n'y entrent pas même en été fans une néces» fité abfolue: le fond efl de roche. T r é 3 1 s 0 n D E. x C'eft la ville la plus confidérable qu'il y ait fur les bords de la Mer Noire: on y compte environ 100,000 habitans, parmi lefquels prés de 10000 Raïas. II n'y % point de Juifs: elle eft fituée dans une (1j SW* Wc^yi l. ilx-  MER NOIRE. i$s Rade qui n'eft pas du tout füre: aux environs font trois petits Ports dont lemeilleur eft celui que l'on appellé Platana. Cette ville était autrefois plus florïsfante qu'elle ne 1'eft aujourd'hui: les guerres inteftines que 1'ancienne querelle de la XXVe & de la LXIVe Compagnie des Janiflaires a occafionnées, out réduic cette ville dans 1'état le plus déplorable. Utchendji - Oglou - Omer - Pacha & Hekim • Oglou-Ali- Pacha étaient fucceflivement parvenus a appaifer les troubles par les exemples les plus effïayans des exéeutions fanguinaires & la dilcipline la plus févere; mais en 1758 & 1759, le desordre s'eft renouvellé plus que jamais, au point que le Commerce de cette Place a été totalement interrompu. Les habitans n'ofaient fortir de leurs mailbus; 1'herbe croiffait dans les nies, dansles marchés, & un trés grand nombre d'habitans, furtout les Raïas, ont été forcés d'abandonner la ville & d'aller chercher leur repos & leur füreté a Caffa, a Rizé & dajn« d'autres places. Commerce (f Entree. * Trébifonde efl: de toutes les villes de I z  Jpö COMMERCE DE LA la Mer Noire celle dont le Commerce efl le plus étendu & le plus avantageux dans les tems de tranquilité. II n'y a aucune forte de marchandife que l'on ne trouve a y vendre avee benefice: fon Commerce efl le même que celui de Rizé, avee cette difFérence que Trébifonde confomme une plus grande quantité de tous les articles que l'on a indiqués: on peut donc s'en rapporter a ce qui a été dit ci-desfus. On fe borne a ajouter ici un détail des marchandifes propres a Trébifonde & qui n'ont que peu ou point de cours a Rizé. Les Étoffes de foie de Scio & de Venife y ont un débit trés confidérable; elles s'y vendent avee bénéfice & donnent le même profit qu'en Crimée: on pourrait y introduire nos étoffes & nos dorures de Lyon; la ville efl affez riche pour efpérer d'en débiter une affez grande quantité. On fe contente d'exhorter ceux qui entreprendront le Commerce de la Mer Noire a en faire au moins un petit effai. Les Epiceries fines, comme Canelle, Geroffles,Mufcade y ont un grand débit; il ferait plus avantageux de les vendre en détail qu'en gros. On pourrait avoir des  MER NOIRE. 197 facteurs en boutique pour vendre h petites partjes toutes les marchandifes qui exigent du détail. Comme la Porte Ottomanne a défendu 1'exportation du Caffé dans la Mer Noire; on pourrait le faire venir a Trébifonde & a Rizé en tems de tranquilité par les Caravannes de Smyrne, öc une de ces deux villes fervirait de place d'entrepöt pour le répandre de-la dans toute 1'étendue de la Mer Noire, & en verfer une grande quantité a Batoum pour 1'expédier dans la Mingrelie, les deux Georgies & de - la en Perfe. L'on pourrait encore le mettre dans des tonneaux a deux fonds, qui feraient remplis d'autres marchandifes aux extrêmités. II s'y vend auffi une grande quantité d'Indigo, de Cochenille & de Bois de teinture, qui y viennent de Smyrne,ainfi que les Épiceries par les Caravannes, & que l'on pourrait y porter direcbement de Conftantinople par la Mer Noire avee moins de frais & plus d'avantage. Les Quincailleries y réuffiffent affez bien: on ne rifquerait rien d'y en porter tous les ans 7 a 8 caiffes, compofées des mêmes articles indiqués pour la Crimée. I 3  108 COMMERCE DE LA L'horlogerie pourrait y prendre faveur j on. y vendrait aifément & avee benefice 5 a 600 montres d'argent de 45 a 50 piaftres, & ico a 150 montres d'or de 100 a 12c piaftres fuivant les occafions: mais il faudrait obferver de n'y en porter qu'un petit nombre a la fois, avee les cadrans d'émail, dont les heures foient en chiffres arabes, & quelques autres avee les caracberes Arméniens. On ne comprend dans cet article da Commerce d'Entrée de Trébifonde que ce qui vient par la Mer Noire. Le tralie de cette Place avee Ia Natolie & la Perfe eft imrnenfe. Les Caravannes de Smyrne, d'Alep, de Damas, de Diarbekir, deTokat, d'Erzerum, de Van, de Kars, deTauris & de Tifflis y portent une quantité prodigieufe de toutes fortes de marchandifes, que l'on ne regarde point comme du reflbrt de la Mer Noire, mais qui feraient pour nous des articles de fortie dont on pourrait faire des retours. Commerce de Sortie. Le Cuivre eft 3e principal article de >- forde de Trébifonde: les marchands de cette ville fe le procurent aux Mines a  MER N O I R,E. IQ/gr raifon de z\ piaftres le batman de 6 -ogques. Us le raffinent & le vendent 3 ' piastres, ce qui revient a 11 fols 8 deniers de France la livre de notre poids. On eo fait des envois dans 1'étranger. Le cuivre ouvré dont 'ón débite auffi une quantité énorme, fe vend a raifon de 30 paras l'ocque, ou 15 fols de France la livre, pour lesgrands ouvrages comme chaudieres, chauderons, marmites, cafleroles, poè'lon?, baffins, cuvettes &c. Les petits fe vendent a piece. Tous les ans un vailleau de guerre du Grand-Seigneur vient a Trébifonde charger du Cuivre en lingots ou en pains; il en enleve pour leBeïlik 12000 quintaux, qui font le produit de la dixme des Mines. Le refte du ehargement fe fait pour le compte des particuliers. II fort de Trébifonde & de fon terrïtoire une prodigieufe quantité de ces toiles dont on a parlé a 1'article de Rizé 2 elles font du même prix. Une plus grande quantité de cire qu*s Rizé, le prix en efl le même. L'article des cuirs de bosufs & de buffles efl trés confidérable. 11 fort encore de cette ville 15 k 20 I4  2go COMMERCE DE LA chargements de noix & de noifettes, poires feches, dattes noires & nardenk. Gümuche-Khana Eft une petite ville a 18 lieues de Trébifonde , qui s'eft formée peu a peu par le concours des gens qui font venus travailler aux Mines du voifinage. Toutes les montagnes qui font autour de cette ville renferment des Mines d'or & d'argent. 1! y en a trois d'or pur, & plufieurs autres qui donnent de 1'argent mélé de quelque peu d'or. Tout homme arrivant-la, peut travailler a ces Mines, & en obtient facilement la permiffion de rofficier de la Porte qui en a la direétion; mais on ne peut vendre qu'au Min ou au Fifc: toute la matiere que l'on retire, doit être portee chez le Directeur, qui nepaye 1'argent coupelé fur le lieu qu'a raifon de 19 afpres, ou 6 paras 1 afpre la dragme (9 fols 6 den. le gros,ou 3 liv. 1 o fols 1'once) & 1'or pur en poudre fur le pied de 3 piastres le mifcal d'une dragme & demie: ce qui revient a 6 livres de France Ie gros. C'elt-la Ie droit que le Grand-Seigneur fe réferve; il monte a environ 30 pour cent en évaluant ces roétaux a leur prix ordinaire.  MER NOIRE. 201 naire. Cependant il pafte beaucoup d'or & d'argent en contrebande, & le Direcbeur lui-même ferme les yeux, moyennanc une petite retribution. Tous les trois mois il y a une Caravanne pour Conftantinople, qui part pour porter au GrandSeigneur le produit des Mines qui entre dans le tréfor & n'en fort que pour aller a la monnoye. Ces Mines commencenï a s'épuifer; il n'y a plus aujourd'hui que 18 fourneaux qui travaillent. La petite ville de Gumucbe- Kbana fituée a la fource de toutes ces richefles, s'agrandit tous les jours & devient floriffante. L'opulence des mineurs en a fait un féjouragréable: a mefure qu'ils s'enrichiflent, ils cherchent a fe procurer toutes fortes de commodités & de plaifirs ; le luxe même a commencé de s'y introduire: plufi :urs mineurs même s'y établiflent après avoir fait fortune & d'autres y diflipent tout le profit qu'ils y ont fait. L'on peut débiter a Gumucbe - Kbana une certaine quantité de marchandifes d'entrée dont on a parlé a 1'article de Rizé, & qui s'y vendent avee avantage. Le territoire de cette ville produit beaucoup de cire & de miel, que l'on porte a Trébifonde. 15  2-02 COMMERCE DE LA. K II U R É Eft un bourg de 4 a 500 maifons, éloigné de quatre journées de Trébifonde. C'eft dans fon territoireque font les Mines inépuifables dont on tire tout le cuivre qui va a Trébifonde, a Rizé, a Hafpiè & a Iriboli. II eft de même permis a chacun de travailler a ces Mines, moyennant ia dixme des métaux en nature que l'on paye au Grand-Seigneur. On trouve fouvent avee le cuivre de 1'or & de 1'argentdont on fait la féparation a 1'ordinaire : on eft obligé de vendre les métaux précieux au Miri, au taux ci-deffus; c'eft le Directeur de Gumucbe-Kbana qui a 1'adminiftration générale de toutes les Mines, de la province. II n'y a a Khuré aucune efpece de commerce. H A S P I É Eft un petit village habité par les plussméchants habitans de toute la Cöte: aufli les- Capitaines 1'évitent-ils autant qu'il 3eur eft poflible, d'autant que la rade n'èft pas füre. C'eft pendant 1'été Je lieu d'èntrepót du cuivre de Khuré, paree%tfön. le. sranfporte. de-Ja h Haffié, qui  M E' R NO I R E. 2031 n'en efl éloigné que de deux journées, & de - la par mer a Trébifonde ; les fraw font peu de chofe. II y a trés peu- de; commerce. Tribois Que l'on appellé auffi Tripoli, efl uw bourg a 8 lieues Sud-Eft de Trébifonde,. dans une rade peu füre, oü les batimensne peuvent pas hiverner. On y débite quelques marchandifes d'entrée. Le principal Commerce de fortie efl 3e vin rouge que produit fon territoire 3 il a du corps & de la force & vaut fur les lieux de 3 a 4 paras l'ocque (4 fols Ja pinte). Le cuivre y efl en trés grande abondance. 3 a 400 ocques de cire affez bonne ,d&.' 38 a 40 paras l'ocque Quelque peu de foie 1 fine de $j a piaftres l'ocque. Plufieurs chargemens de fruits feess* K I r r I s ö ïï Ni Autrefois Cerifmte, ville du Rbyaumede Pont, d'oü Lucuflus apporta les pra; miers cerifiers en Italië, qui de - la- fe l~mv, 16  / 204 COMMERCE DE LA répandus dans toute 1'Europe, comme les abricots qui viennent d'Armenie, & les pêches de Perfe. C'eft une ville affez grande a 8 lieues a 1'Ouefl de TriMi. Son Port eft bon pour les petits batimens; mais les gros ne peuvent gueres y aborder, Cette ville contient 25,000 habitans. Les marchandifes d'entrée dont on a parlé a Partiele de Rizé, y ont cours; le débouché en eft affez confidérable & le prix a p;u prés le même. Le territoire de cette ville fournit une grande quantité de foie de la même qualité & du même prix que celle de Triboli. Le Commerce des fruits fecs y eft imrnenfe; les cerifes croiflent en grande abondance dans Iesenvirons:on croitque le nom de ce fruit tire fon origine de celui de cette ville, fi même il ne lui a pas donné fon nom. OBSERVATIONS. Les Poids & les Mefures font les mêmes dans cette province que dans le refte de la Turquie. La Monnoye la plus commune eft celle du Grand Seigneur, de toute efpece & au  MER NOIRE. 205 même prix que dans la Capitale de 1'Empire Ottoman ,• la monnoye de Perfe y a cours auffi, mais elle y efl: plus rare. Les fequins Venitiens y paflent aflei couramment & la fevillanne s'y vend au poids de la matiere. Toutes les autres monnoyes n'y font point connues. II y a environ 30 ou 35 ans, en 1725 ou 1730,que l'on avait imaginé d'établir des Franjais a Trébifonde & d'y faire venir des marchandifes de Perfe par Erzerum, pour les tranfporter de-la par la Mer Noire a Conftantinople. On aurait par ce moyen épargné des grands frais, lefquels font inévitables, quand ce Commerce fe fait par Smyrne & par Alep. Plufieurs difficultés empêcherent alors 'exécution de ce projet & Ja difcorde civile qui regnedans cette ville depuis tant d'années le rend aujourd'hui abfolument imprafkable; les Négocians n'y trouveraient ni lïïreté, ni liberté, ni protection, trois points fans lefquels aucune forte de Commerce ne peut fe foutenir. L'expédient propofé de faire le Commerce de Perfe par la Georgië, leve tous les obflacles & parait préférable a tous égards: il ferait imprudent de tenter le moindre tralie a Trébifonde avant que la tranquilI 7 j/itathst-i fYèJ—ll^GS *. - ïf!}Jl  206" COMMERCE DE LA lité y foit parfaitement rétablie. II y » deuxans, en i7ó"o, les troubles duraient encore; la guerre s'y était rallumée avee plus de fureur que jamais & le Commerce y était prefqu'entierement anéanti. II eft par conféquent impoffible dans ces tems de calamité , d'avoir des avis certains du prix aeluel de marchandifes ni de la quantité que l'on doit y emporter. Ce qua l'on vient de dire du Commerce de TréV bifonde fuppofe des tems plus heureux & des circonftances plus favorables; on a voulu feulement donner une idéé de ce que l'on pourrait entreprendre fi le Minrftere Ottoman parvenait quelque jour a y rétabür le bon ordre. C'eft pour cela: que l'on s'eft beaucoup plus étendu fur Rizé, qui eft aujourd'hui 1'échelle la plus fréquentée de cette Cóte, dont le commerce eft de la même nature que celui de Trébifonde, & la feule oü l'on pourrait former un établiftement Européen ayec quelqué folidité. Les batimens aftecbés a la Cöte des Lazes font trois gros navires a trois mSts appellés Sambéquins de 10 a 12000 quilots de portée de 22 ocques chaque, (Environ 400 tonneaux); 22 Saïquss, de 5 a <5ooo qailots, & a peu prés 40 petits. batimens appellés Melexès.  MER NOIRE. 20? Le Nolis des diverfes marchandifes efl a peu prés le même qu'en Crimée & fe foutient prefque toujours au même taux.. Quand on nolife un batiment en entier „ c'eft la rareté ou 1'abondance de ces batir mens qui détermine le prix du fret. Cöte de Natolie jus que s A. CONSTANTTNOPLE. Toutes les villes qui bordent cette Cöte depuis Kirrifpun jufqu'a Conftantinople, a 1'exception de quelques * unes , font aflez peu de Commerce d'Entrée, lequel eft le même que celui de Rizé. Celui de Sortie ne confifte qu'en fruitS; fecs & frais, en bois de conftruóbion 6e: de batiffe. Nous ne ferons ici mention que des villes qui méritent quelque attention. Ounia. Cette place eft la principale Schelle du Commerce de tr art fit de Tocat; on y embarque la majeure partie des Bocafrlns qui s'y fabriquent. lï en fort, $5 a 40,000 quintaux de  208 COMMERCE DE LA chanvre dont le prix efl de 4 k 4^ piaftres le quintal non travaillé, & de 6 piaftres en filaffe Une affëz grande quantité de foie, la qualité en eft bonne, depuis 5; a <5 piastres l'ocque. Une grande quantité de cuirs de boeufs & de buffles de trés bonne qualité, dont la grandeur regie le prix. Samfoum; cette place n'a rien de remarquable qu'une tour célebre qui eft ordinairement le tombeau de ceux que l'on veut faire périr fans les condamner a mort. 11 n'y a d'autre Commerce d'Entrée que quelque peu de denrées, & celui de Sortie eft le même que celui d'Ounia. C'eft la place d'entrepöt des toileries d'AmaJïa. Keupru - Aghzi. Son principal commerce eft avee Sinople: on y porte quelque peu de denrées. II en fort une trentaine de chargemens de fruits frais & fecs, comme pommes, poires, chataignes, noix, cerifes & prunes feches. 5 a 6 chargemens d'ouvrages de bois de toute efpece. Cette place eft 1'entrepöt d'une partie des toileries de Kajlambol. II n'y a point de Douane.  MER NOIRE. 2,09 Guerzé eft une petite ville de 5 a Öooo habitans: 011 y peut débiter avee avan•tage une petite quantité de marchandifes d'entrée: favoir; 2 Balles de Draps. . 1 Caiffë de Fez ou Bonnets. 500 Ceintures de laine de Gerbé. 500 Chals. Quelques Turbans de foie, appellés Pücbes. 150 a 200 Pelliffes de Gueudjen. 4 a 500 ocques de Caffé. Ces marchandifes viennent de Sinople. ' 435 chargemens de millet. 2 chargemens de Pafturmas. 2 chargemens de fel, 1 a 2 chargemens de tabac groffier de Romelie & de Rulfie. 1 chargement de noifettes, olives noires , figues & raifins fecs des plus baffes qualités. Ces marchandifes y valent comme a Rizé. Le Commerce de Sortie de cette place font les fruits & les bois de conftruótion & de batiffe, qui y font a bon prix, Sinople Eft une grande ville bien peuplée d'ea«  Sï« COMMERCE DE LA viron <5o,ooo habitans, parmi lefquels on compte 3 a 4000 Ra'ias Chrétiens: il n'y a point de Juifs. Son port efl; fur & fpacieux, & les vaiffeaux de guerre du premier rang peuvent y entrer & hiverner. Son commerce efl: confidérable. Commerce d'Entrêe. 20 Ballots de Draps Londrins feconds3 de 2| a 3 piaftres le pic. 5° a 60 pieces de Camelots de France anis & rayés, de 35 a 36 paras le pic. 12 a 15000 piaftres d'Etoffes de foie de Venife & de Scio de diverfes efpeces. 4 a 5000 piaftres de Satin de Venife. La même obfervation pour nos Étoffes öc i-rance. 2 a 3000 pies de"Serges impériales, de 31 a 35 paras le pic. 1000 Bours de Damas, de 87 a 9 piaftres la piece. . 1000 Coutnis de Brouffe, de 14 a 15 piaftres la piece. 4, a 5000 Anterists ou Veftes de deffous, de Magnéfie trés groffieres, tout fil, rembourrées de coton, longues & courtes, de 90 a 100 & de 55 a 60 paras lapiece.  MER NOIRE. 21 X icoo pieces de Hajfê-Dulbents, de 14 i 15 piaftres la piece de 24 pies. 2*3 caiffes de Bonnets de Tunis de bafle qualité; les grands de 70 a 75 paras, les petits de 45 a 50 paras. 4 caiffes de Bonnets de France, les grands de 00 a 65, les petits de 35 a 40 paras. „ 4 a 5000 Ceintures de Gerbs rouges 05 vertes de 50 i\ 55 paras 1'une. 30,Balles de Pechtmals bleus du Caire, de 500 pieces chaque balie, & de 15 a 20 paras la piece. * 5 a 5000 Chdls rouges du Caire, de45 a 50 paras. 1 R a 10000 piaftres de galons légers & de dentelies d'or. La même obfervation pour nos dorures de France. 5 a 6000 piaftres de fil d'or & d'argent ; le premier de 24 a 25 paras le mifcal d'une dragme & demie. 2000 Couvertures de laine de Yamboh, des plus communes, depuis 3 jufqu'a 5 piaftres. 2 a 300 Cabans ou Capotes de Salonique, de 10 a 11 piaftres les fimples, & ceux avee Ia pluche jufqu'a 13. Autant de Saut - en • barques, a 6 piaftres.  212 COMMERCE DE LA _ Autant de petits fans manches, a 2 piaftres. e 1500 a 2oco Culottes iï/lbas de Salonique, depuis 51 jufqu'a 60 paras, fuivant la qualité. 4 a 5000 pieces de toiles des Darddnelles, dom on fait des voiles & que les payfans emploient pour faire des culottes, de 70 a 75 paras la piece. 5 a 600 Couvertures d'indienne, de Smyrne , rembourrées de coton, des plus communes , a 4 piaitres la piece. icoo Feutres de Crimée appellés Ketcbès, de bafle qualité, de 55 a 60 paras 1'un. 2000 paires de Babcucbes, dont iogo avee les Mests de 70 a 80 paras, & icoo avee les Tcrliks, de 55 a 60 paras la paire. 2000 paires de Bottines noires avee les fers, a 3 piaftres. 1000 paires de Bottines jaunes fans fers, de 110 paras a 3 piaftres. 2500 a 3000 piaftres de foyeteinte en laine de diverfes couleurs pour la broderie & autant de blanche pour les rayes des chemifes, de 8 a 9 afpres la dragme en détaiL Autant de foye filée de toutes couleurs  MER NOIRE. jrg pour la couture, de 9 a 10 afpres li dragme. Cordonnets de foie pour border les habillemens, de 22 a 23 paras le paquet. 150 a 200 balles de coton de Smyrne.1 100 a 150 quintaux de Lin gris du Caire , de 9 a 10 paras l'ocque. 2 a 3 petits chargemens de graine de Lin, de 80 a 90 paras le quilot. Les Teintures font un petit objet: 11 fon pouvait fournir par Sinople les villes de Kaflambol. Amafia & Tokat qui en emploient beaucoup, cet objet devien» drait important. 5 a 6000 piaftres d'Epiceries de toute efpece qui s'y vendent avee bénéfice. 50 a 40 fardés de Caffé-Moka, de 90 a 100 paras l'ocque. 50 3 60 quintaux de Sucre de France en petits pains. Beaucoup de Sucre d'Egypte: il efl: d'un jaune doré &vaut de 40 a 45 paras l'ocque. 3 a 400 quintaux d'Etain, de 80 a 90 paras l'ocque. 5 a 6 caiffes d'Acier. 5 a fiooo quintaux de Fer, de 10 a 11 paras l'ocque, 1000 aflbrtimens de Fers a cheval, 9  si4 Commerce de la 35 parasTafibrtiment de 4 fers avee les clouds, & jufqu'a 45 paras en détail. 1500 facs de favon de Smyrne, a 12 paras l'ocque. 5 a 600 facs de favon de Candie, de 15 a 26 paras l'ocque. 1500 a 2000 quintaux d'huile de Mé' ttlitiy depuis 11 jufqu'a 13 paras l'ocque. 70 a 80 balles de Tabac de Kirdjali, de 22 paras l'ocque. 4 h 5000 quilots de Riz d'Egypte, de 55 a 60 paras le quilot & 2 a 3000 qui lots de celui de Philippopoli, de 38 a 40 paras le quilot de 10 ocques. 5 a 60© facs de fromages dits KacbeKavalt de Romélie, de 9 a 10 paras l'ocque. 50 a 60 gouffes de lentilles, de i<5 a 17 paras l'ocque; autant de feves blanches, a 4 paras l'ocque. 1000 quilots de pois chiches, a 3 paras l'ocque. roo a 150 facs de Kénas, a 10 paras l'ocque- 8 a 10 chargemens de fruits fecs, comme raifins, figues, de la même qua« lité de ceux que l'on porte en Crimée & au même prix. , 5 chargemens de noifettes, a4ïpi3stres le quintal.  MER NOIRE. £15* : 3 4 4 charge-mens de Limons & d'Oranges; les premiers de 6 a 7 piaftres le millier, & les autres de p a 10 piaftres. 25 a 30,000 ocques d'olives noires, de 10 a 12 paras l'ocque. 2 a 3 chargemens de fuif de Moldavië & de Romelie, de 15 a' 16 paras l'ocque. Cet article eft prefqu'employé pour les batimens. 10 chargemens de Millet, a 50 paras le quilot de Conftantinople. 4*5 chargemens de feigle, de 55 k Co paras le quilot. 2 a 300 montres d'argent & 40 a 50 montres d'or, au même prix qu'a Trébifonde. 5 a 6 caiffes de quincailleries de toute efpece. 7 a 8 caiffes de vitres de Venife, de 4 a 5 paras la piece. 4 a 5 caiffes de vftres a caboebon de Conftantinople pour les bains. 100 a 150 ballons de papier de 24, ie 4 a 5 paras la main en détail, & un peu moins en gros. 200 Peliftes de Renard de baffe qualité, de 25 a 26" piaftres. 100 Peliftes de Renard de médiocre qualité, de 35 a 40 piaftres.  210* COMMERCE DE LA 50 a 60 Pelifles de petit gris commun, de 22 a 24 piaftres. 20 a 25 Pelifles de Sou-Jamsur, de 100 a 120 piaftres. 3 a 400 Pelifles de Gueudjen, de 16* a 22 piaftres fuivant la qualité. 50 a 60 Pelifles de mouton noir, de 6 a 10 piaftres. Toutes ces Pelleteries viennent de Crimée & dé Moldavië. Commerce de Sortie. Le fil de Lin gris eft un des principaux articles de Commerce de Sortie de Sinople. C'eft de ce fil que l'on fabrique les toiles crues d'Aftar, pour les turbans d'ordonnance des Janiflaires: la quantité qui en fort, eft imrnenfe. Ce fil fe vend fur les lieux en maffes d'un pied de longueur. La maffe eft compofée de 13 écheveaux & coüte 4 paras. On le revend a Conftantinople de 65 a 70 paras l'ocque: il faut environ 11 a 12 maflês pour une ocque. 5 a óooo ocques de cire affez nette. Elle eft toute blanche: il n'y en a point de jaune. Elle vaut de 39 .a 40 paras & paffe toute a Conftantinople. Beau-  MER NOIRE. 217 Beaucoup de bois de conftrucuon & de batiffe. Le territoire de Sinople fournk tout le goudron néceflaire pour les batimens qui s'y conftruifent: il en paffe encore outre cela 3 a 4000 quintaux a Conftantinople pour 1'arfenal du Grand-Seigneur. 150 chargemens de fruits frais & fecs, dont le détail efl inutüe. Les Perfans font un grand commerce a Sinople en Étoffes de foie, Indiennes , Cambrefines.Lizats, Tapis & autres articles qui paffent de - la a Conftantinople & ailleurs. On y trouve auffi des toiles de Trébifonde, Aftars, Bocaffins, Indiennes ou Toiles peintes de T'ht, d'Anwjict, de Kajlambol & beaucoup de marchandifes de Natolie qui peuvent être comprifes dans le Commerce de Sortie de cette place. OBSERVATIONS. Les Monnoyes de Turquie font celles qui bnt le plus de cpurs a Sinople: cependant les Sequins Vénitiens, les Caragrouchs & les Sevillanes y paffent avtc affez de facilké & donnent mime quelK  2rg COMMERCE DE LA quefois du benefice fur le prix de Conftantinople. C'eft a Sinople' que l'on conftruit Ia majeure partie des vaifleaux de guerre du Grand-Seigneur. l\ y a douze Chantiers oti l'on peut travailler douze vaifteaux a la fois: on peut y conftruire en même tems jufqu'a 50 batimens marchands de diverfes portées, pour la navigation de Ia Mer Noire. Les douze Chantiers des vaifleaux de guerre appartiennent au Miri: cependant quand ils font vuides, les particuliers peuvent les louer & y faire conftruire pour leur compte. Les Chantiers des bdtimens marchands appartiennent a divers particuliers. La fortie de tous les bois qui peuvent fervir a la conftruótion des vaifleaux de guerre eft prohibée fous des peines trés rïgoureufes: il y a un Officier de la Porte prépofé pour faire couper & travailler ces bois. Les frais de la coupe & du tranfport font régies par un Tarif qui ne varie point. _ II refte a parler du prix de la conftruction des divers batimens que l'on fabrique a Sinople. Un vaiflbau de guerre de deux pon:s percé pour 70 pieces de canon ne  il El NOIRE. 2££ coüte au Grand - Seigneur ,lancé a 1'eau, avee fa raature, fans cordages, voiles ni batterie, que 15 a 16000 piaftres. Les batimens -marchands a trois mats avee 1'entrepont de 23 a 24 pies de Iongueur, reviennent de 17 a 1800 piastres, & les Saïques a cailfe de 22 pies de longueur coütent de 12 a 1300 piaftres. Quel avantage ne feroit - ce pas pour nous, s'il était poffible d'obtenir de la Porte la permiffion de conftruire des vaifleaux "de guerre dans ce Port! II naït quelquefois des circon'tances dans lesquelles on pourrait peut - être faire accepter une pareille propofition au Miniftere Ottoman , & 1'exécution d'un femblable projet ne ferait peut-être pas impoffible a un Ambaffadeur habile qui faurait choiflr & profiter de certains momens heureux & préfenter adroitement les objets du cöté le plus favorable. Akliman eft un village fitué fur le bord de la Mer Noire. Son Port eft petit & excellent pour les petits batimens ; les gros ne peuvent pas y aborder: il n'y a aucun Commerce d'entrée: il en fort feulement 5 a 6 chargemens de divers fruits', comme poires, pommes, chacaignes, K 2  220 COMMERCE DE LA' &c. & 15 a 20 Chargemens des mêmes bois de conftruébion & de batifle qu'a Sinople & du même prix. Knéboli ou Néapolis eft un bourg de 5 a 600 maifons, fitué fur le bord de la mer: il y a une Douane; 4 a 5000 habitans, parmi lefquels 200 Chrétiens & point de Juifs. La Rade n'eft pas füre: il y a 4 chantiers oü l'on conftruit des Saiques de 16 a 18 pies de longueur, qui reviennenc lancées a 1'eau de 1000 a 1100 piaftres. On y débite : Commerce d'Entree. 2000 Saut - en • barques d'Abas deSalonique, de 45 a 50 paras. 2000 Culottes de la même étoffe, de 60 a 65 paras. 2 a 3000 paires de Bottines noires avee les fers, de 11 o paras a 3 piaftres. 8 a 10,000 pieces de toiles d'Aftar pour les Turbans des Janiffaires, (cet article eft de tranfü) du prix de 40 a 50 paras la piece. 5 a öooo quintaux de fer pour les clouds, chivilles, crampons, & autres pieces aéteèflairei pour la conftrucïion des batimens que l'on fabrique dans cette  MER NOIRE. 2-21 place & dans fon voifinage, du prix de 10 a 11 paras l'ocque. 120 a 150 quintaux de lin gris, du Caire, de 9 a 10 paras l'ocque. 2 chargemens de Noifettes de Rüé, de 4 a 5 piaftres le quintal. 50 balles de Tabac deKirdjali, a 22 paras l'ocque. 15 chargemens de fruits fecs de Smyrne, comme raifins & figues, de 16 a 20 afpres l'ocque. 5 chargemens de graine de Lin, de 80 a 90 paras le quilot. 5 a 6 chargemens de millet , a 50 paras le quilot de Conftantinople. 5 chargemens de feigle, de 55 a Co paras le quilot. Commerce de Sortie. 20,000 quintaux de chanvre pour Ie Grand-Seigneur & environ 10,000 pour les particuliers, de 4$ a 4f non travaillé, & de 6 piaftres en filalfe. Quand ily a des vaiffèaux de guerre fur le chantier a Sinople , on fait faire les cables & les cordages kEnéboli: ontreed on en fait fabriquer auffi pour les batimens marchands & pour le compte de K 3  222 COMMERCE DE LA divers particuliers: & i! en fort en commerce de 7 a"8oo quintaux de différentes groffeurs, de 7 a 11 piaftres Je quintal. 40 chargemens de bois de conftruction, au même prix qu'a Sinople, excepté le fapin, qui efl p!us eflimé : on prétend que les vers & les punaifes ne s'y mettent point. 5 a Ö chargemens de poires & pommes fraiches & feches, noix, chataignes, peflil, &c. Enéboli efl 1'Entrepöt de Ka Aanhol, 8z 1'ony embarque ordinairement les marchandifes de tranjtt de cette place. Ahana efl un village a cinq lieues d'ETiéboli, fituédans une Radedécouverte oü il n'y a aucun abri: on y conflruit 3 a 4 Saïques de 18 a 20 pies de longueur pour le compte de divers particuliers; le prix de conftruction efl le même qu'a Eneboli; il n'y a point de Douane. Ce Canton tire de Sinople tout fon néceiTaire, lequel confifle en 2 chargemens de millet, a 50 paras Ie quilot. 1 chargement de feigle, a 60 paras Ie quilot. 2 chargemens de fel, a 3 paras le ïchini, mefure de 4 ocques. II en fort tous les ans 5 chargemens  MER N O I R Ë. 223 de fruits de la même efpece que ceux d'Enéboli & au même prix. 20 a 25 chargemens de bois de conftruétion des trois efpeces différentes. Kaïran eft un village è cinq lieues 8 Abana. II y a fur le bord de la mer des magafins pour les marchandifes &les attirails des vaiffeaux. La Rade n'eft pas före & les batimens ne peuvent pas y hiverner: on n'y porte que quelques denrées, confiftant en 2 chargemens de millet, r de feigle f 1 de fel & quelque peu de pafturmas. 11 en fort 1500 ocques de foie trés groffiere, qui n'eft bonne que pour faire des cordonnets: elle coüte 5 piaftres l'ocque. 12 chargemens de bois de. conftruc» tTon des trois mêmes qualités qu'a Abana êc au même prix. 25 chargemens de fruits. Fakas eft un village fitué a une demilieue d'éloignement d'une Rade qui n'eft pas fure, oü l'on a bari quelques magafins. II y vient x chargement de millet, 1 de feigle & 1 de fel. 11 en fort 12 chargemens de mêmes bois de conftruction qu'a Abana, & trois ebargemens de fruits & aux mêmes prix. K 4  i224 COMMERCE DE L& Kara - Agadje eft un grand village fitué dans un Pent paftable en été pour les petits batimens, mais peu fur en hiver: il y a trois chantiers pour les va'fteaux de guerre, fur lefquels on conftruit ordinairement de gros vaifleaux percés pour foixante canons, appellés /llexandr'ms, qui font les voyages d'Egypte: outre cela, il y a encore de la place pour conftruire 55 batimens marchands a lafois: cependant l'on n'y en conftruit que 15 ou 20 chaque année: ce font de gros Foliks, de 15 a j8 pies de longueur, & des batimens a trois mats, de 22 a 24 pies. Les cordages & les voiles pour les batimens que l'on conftruit a Kara-dgadjc, y viennent d'Enébuli. 11 n'y a point de Douane. Commerce d'Entrée. 2000 faut - en - barques d'Jbas deSzlO' nique, de 65 a 70 paras. 2000 culottes de la même étoffe, de 4J a 50 paras. 4000 Ancérists de Bours deMagnéfiè, tout  mer n u i s 1. 22£ fout faits, de 60 a 90 paras fuivant la qualité, 4©co paires de bottines noires avee . les fers , a 3 piaitres au comptant: on peut les vendre' jufqu'a 5 en troc des bois de conftrucfion. 1000 quintaux de fer, au même prix qu'a Enéboli. rooo balles de tabac de Kirdjali, a22 paras Toque. 50 couffes de riz de Damietter de 60 a 65 paras le quilot de 10 ocques. 50 couffes de lentilles, a 60 paras le quilot de 24. ocques. 50 couffes de haricots blancs d'Egyp-te, a 50 paras le quilot de 24 ocques. 10 chargemens-de millet, 5 de feigle,, 2 de fel, aux prix inJiqués ci deffus. 3 chargemens de mekxès, de noifet*$es, de 4| a 5 piaftres le quintal. Commerce de Sortie-; ■ 5 a 6000 ocques de bon vin rouge., de 3 a 4 afpres l'ocque, j 00 chargemens de bois de conftrue^'tion en commerce pour Conftantinople.. Outre cela le Grand - Seigneur fait én*" lever continueüemenf pour fes. arfenaus^ K 5  S2fJ COMMERCE DE LA «ne quantité imrnenfe de matures pour fes vaiffeaux de guerre, des grandes poutres de chantier & d'autres grandes pieces de conftru&ion qui ne font pas en commerce, & dont ]a vente eft prohibée aux particuliers, qui ne peuvent en acheter qu'en vertu d'un Commandement du Grand - Seigneur. Jl fort de Kara-Agadje une quantité prodigieufe d'ouvrages de bois trés grosiiers: 5 gros navires a trois mats viennent tous les ans charger de ces bagatelles pour Alexandrie; 3 autres pour Damiette & un autre pour les Echelles de Barbarie: ces 9 batimens prennent ordi • nairement pour left, des Chevaïs, dont ils enlevent plus de 100,000 pieces. Ils ne peuvent venir fe fournir de cette marchandife qu'avec une permiftion de la Porte. Les environs de Kara - Agadjc fournisfenp tout le goudron nécelfaire pour les batimens que l'on y conftruit & que l'on y radoube; on en exporte encore 3 a 4000 quintaux a Conftantinople pourl'arffenal du Grand - Seigneur 1 la vente en eft prohibée aux particuliers. üuidoros eft un village a une lieue de Kara-Agadje: il n'y entre rienj mais il  MER NOIRE. 2'27 cn fort 12 a 13 ehargemens de bois dé chauffage pour les maifons & les bains publics de Conftantinople. La charge de cheval de 90 ocques coüte 3 paras, & celle d'ane de 70 ocques revient a 2 paras. Jmasra eft une petite ville batie en pierres & entourée de murailles; on y compte 3000 habitans. II y a deux petits Ports, oü les batimens de médiocre grandeur peuvent entrer; mais non pas les vaifleaux de guerre. II n'eft pas poffible aux navires d'y derceurer en hiver , ils n'y font a 1'abri que pendant 1'été. II n'y a point de Douane. On y porte chaque année: 2 chargemens de millet, 1 de feigle, 1 de fel & quelque peu de pafturmas, aux prix ci-deffus indiqués. 200 quintaux de beurre, appellé Kevrkhe ■ ïaghi, fait de moëlle d'os de bceuf,; Si 16 paras l'ocque. Les ouvrages & colifichets de bels font le principal article du Commerce de Sortie: il en paffe 20 chargemens a Conftantinople & deux a Trébifonde. Ü a 10 chargemens de chanvre pour les cordages, a 4; piaftres non travailié & a 6 piaftres en filaffë. Entre Jmasra & Bartin, a 3 lieues dn K 6  228 COMMERCE DE LÉ premier & a 5 de 1'autre, il y a uri petit Marché appellé Wak- Bazari, oa fe fait le Commerce entre ces deux pla> ces, qui fe fournilfent reciproquemenc ce dont elles ont befoin. Bartin eft ure afle?. grande ville batie en pierres & ceinte de murailles en trés mauvais état. II y a 18 a 20,000 habitans, 12 mofquées, 5 kans & 4 bains publics; elié efl élnignée de cinq lieues de la mer & fituée fur une riviere qui porte des mei&xès, des tombazcs & des faïques Son Port de mer a environ une lieue de profondeur; les batimens s'enfournent de-Ia dans la riviere, pour venir a la ville. Les vaifleaux de guerre ni même les navires a trois macs ne peuvent entrer ni datrs 1'un ni dans 1'autre. Commerce tfEntrie* 2 h 3 ballons de Draps Londrins feconds, de 110 paras a 3 piaftres, Ie pic. 5 a öooo Cabans de Zagnra de laine noire fans capuchon, de 11 a 12 piaitres,.  MER NOIRE. ZZ& j. a 4x00 demi-cabans fans manches, en forme de Djubbès, de {Jj a 90 paras* 6000 Abas de Salon ique d'une qualité fupérieure, de 90 a 110 paras. 5 a 6000 Cbdls du Caire, de 50 a 55 paras, 5 a 6000 grandes ceintures de laine dè Gcrhê , de diverfes couleurs & de 3 braffes de longueur , de 100 a 110 paras. 3000 petites ceintures de 'aine de Gerbé, colorées, d'une bralle & demie de long, de 30 a 35 paras. 7 a 8000 Pechtmals ou ferviettes du Caire, de 11 a12 paras. 2.000 pieces de toiles des Dardanelles, de 60 a 65 paras la piece. 3 caiffes de bonnets de Tunis appelles Orta fez, de 60 a 65 paras. 5 a 6000 paires de bottines noires, avee les fers, de 110 paras a 3 piaftres. 6 a 700 couvertures do laine des plus communes, de 100 a 11 o paras. 3 a 400 feutres, ou Kctchès de Crimée, de 55 a 60 paras. 100 quintaux de lin gris d'Egyptej. dè 9 aio paras l'ocque. K 7  3v3 gées fur le bord de la men la fupc-rftiiioa  MER NOIRE. 233 des gens du pavs leur a fait imaginer Sc croire que ce font des Géans que Dien a pétrifiés pour les punir des défordres qu'ils commettaienc dans toute 1'étendue de la Mer Noire. Hèracïèe efl: une petite ville ceinte de murailles a demi-ruinées: il y a 5 mosquées, 2 kans, 2 bains, 200 boutiques & environ 6000 habitans; elle eft fituée dans une trés bonne Rade, couverte dü cóté de 1'Eft, & dans laquelle les batimens de toute portee, même les vaisfeaux de guerre, peuvent hiverner. II y a une Douane. Li Commerce $ Entree eft le même que celui de Bartin, & les marchandifes s'y vendent au même prix. Le Commerce de Sortie conflfte en 1500 3 2oco ocques de foie, de 5 a 57 piaftres l'ocque. 2 a 3000 ocques de cire, de 42 a 45 paras l'ocque. 1000 quintaux de fin lin gris, a 4 paras le paquet de 13 écheveaux d'un pic de longueur: il fert pour faire les toiles des Turbans d'ordonnance des Janisfaires. 80 chargemens de fruits} poires , pommes, noix, peftil &c.  SJJf COMMERCE DE LA Les bois de conftruélion d'Hèrartèe viennent d'Alaplu. Alaplu efl: un Bourg auprès SHèraclèe, dans le fond du même Golphe: les batimens de toute portee peuvent y aborder & y féjourner dans toutes les faifons: il tire d'Héraclêe toutes les marchandifes qui liii font néceiïaires. Le bois efl: le feul article de fortie; il €n fort anne'e commune 50 ehargemens. Melen efl: un village a 5 lieues d'Héraclêe : SI fournit a Conftantinople & a la Mer Noire environ 150,000 quintaux d'oignons, de 45 a 50 paras les 100 ocques. Aktchechar eft un village a une lieue & demie de Melen: il fort de ce village plus de 100 chargemens des mêmes bois de conftruclion qua Alaplu & au même prix. Sakaria eft un village h 6 lieues d'Aktchechar fur une trés mauvaife Rade. Ce eanton fournit Conftantinople d'une quantité prodigieufe de charbon de chêne: vingt gros Sambcquins viennent y charger tous les ans & en enlevent environ 400,000 quin'aux: on le vend de 45 a 50 paras la charge de chariot que l'on nomme Kanlu- araba & qui porte un peu plus de 4 quintaux. Outre ce charbon  MER NOIH, qui eft en commerce, dix Sambèquins y ehargent chaque année 200 h 250,000 quintaux de charbon de pin, pour la Monnoye du Grand - Seigneur. Tchiiê eft un gros Bourg a I2heu®s= de Scutari: il y a 4 a 5000 habitans, 2 mofquées, 30 a 40 boutiques: il n'y a au'un trés petït nombre de Mahométans t il n'y a point de Port, mais une Rade trés découverte. II fort de cet endroit 30 a 40 chargemens d'oignons de 45 ® 50 paras les 100 ocques, & environ 50 ehargemens de charbon de chêne, au même prix qu'a Sakaria.. OBSERVATIONS. L'on a indiqué, en parlant des prineipales places de la Cöte de Natolie , les diverfes Monnoyes qui y ont cours. Dans les petits endroits, on ne connaït gueres que celles de Turquie : il convient même d'y. porter de la monnoye, plutot que de 1'or. Les Poids & les Mefures fur toute cette Cöte font les rnêmes qu'a Conftantinople. . On n'a point donné le détail des fruits s|ui fortent en abondance de toute cette  £%6 COMMERCE DE LA Cöte, & qui donnent un benefice énorme a Conftantinople , oü l'on gagne au moins 200 pour cent. Pour faire voir d'un coup d'oeil Ia quantité & fe prix des bois que l'on enleye de cette Cöte, on les a renvoyés aci pour la commodité & l'on indiquera les endroits d'oü les qualités fortent; obfervant que le pic avee lequel on les mefure , efl de 25 pouces de France, 23 pouces de Hollande, ou 27 pouces d'Angleterre environ. De Cueurzè, 5 a 6" chargemens de Mats de vaifleaux de bois de pin, depuis 8 jufqu'a 25 pies de longueur, dont le prix efl; de 12 jusqu'a 110 paras. Ces chargemens fe font de h maniere fuivante; on forme avee ces Mats ben liés les uns aux autres, des Radeaux, qui font ordinairement de 800 pieces: on met a ce Radeau une grande voile; on y embarque 4 ou 5 hommes d'équipage pour Ie conduire a Conftantinople: ils partent au commencement de la belle faiïbn. Ceux qui font ce commerce, ont foin de ne pas mettre dans leurs Radeaux-  MER NOIRE. 237 des Mats qui puiflent fervir pour ies vaislèaux de guerre du Grand-Seigneur, de peur que les Officiers de 1'arfenal ne s'en emparent pour le Sulian. Ces mats fervent quelquefois de poutres pour les édifices; on les fcie auffi pour en faire des planches. 2 a 3000 Djevifi- tahtajfi, ou planches de Noyer, de 7 a 8 pieds de long fur 2j de large & de 6 pouces d'épaifleur, de 25 a 30 paras piece. 3 a 4000 Kara-agadji-tahtajfi, ou planches de Plane ou Platane, a peu prés de la même grandeur, de 15 a .6 paras. 10 chargemens de Tcham ■ tahtajfi, ou planches de Sapin , de 8 a 10 pies de longueur & de 1 \ pouce d'épaifleur, de 6 a 7 paras la piece. j a 5 chargemens, de Teni-tchapoti , ou folives de Chêne, de 8 pies de longueur & de 3 pouces de diametre, de 3 34 paras la piece. 14 a 15 chargemens de Canaux dp gouttiere, de bois de fapin, depuis 8 jufqu'a 12 pies de longueur, de 8 a 12 paras la piece. 11 a 12 chargemens de Tavan-tahtajfi, ou planches minces & étroites pour les plafonds des maifons, de 50 a 55 paras le 100.  2,3$ COMMERCE DE LA On peut aifément juger par le prix de paras a 3 piaftres Ie pic. 20 fardés de Caffé MoLt, de 90 a 100 paras l'ocque. 10 quintaux de Sucre de France. 2Coo pies de Chalis d'Angora. Pour 5000 piaftres environ de atin§; de Venifè. 6 caiffes de Quincaillerie de toute; efpece. Pour 5000 piaftres environ de fil d'or L 5  250 COMMERCE DE LA & d'argent, a raifon de 2 4 a 25 paras le nrifcal d'une dragme & demie. Pour 2000 piaitres environ de Galons. 2000 ocques d'Etain , a raifon de 80 a 90 paras l'ocque. Pour 4000 piaftres environ d'Epiceries, comme poivre, canelle, muscade & geroffles. 1000 ocques d'Acier. 20 balles de Coton. 4 caiffes de Bonnets de France & de Tunis, grands & petits. 2000 Ceintures de Gerbé de différentes couleurs , mais de médiocre grandeur, de 30 a 40 paras. 2000 Chdls du Caire de 45 a 50 paras. 10 balles de Pechtmals du Caire, de 12 a 15 paras 1'un. 500 facs deSavon de Smyrne, de 12 paras l'ocque. 1000 paires de Bottines noires avee les fers,de 110 paras a 3 piaftres. icoo Turbans de toile,de 100 a 130 paras. 50 a 60 quintaux de Lin gris du Caire, a 20 paras l'ocque. 60 quintaux de Lin gris, a 10 paras l'ocque.  MER NOIRE. 25£ 50 quintaux de Kenas, a 10 paras l'ocque, 50 couffes de Riz de Damiette, de 55 a 60 paras !e quilot. 10 caiffes de Vitres, de 4 a 5 paras Ja piece. icoo Mas ou Culottes de SaJonique, de 54 a 60 paras Tune. 30 a 40 balles de Papier de 24, a 4 paras la main. 4 chargemens de Sel. Quelques chargemens de fruits fecs, comme raifins, figues, &c. a 7 afpres l'ocque. 5 chargemens de Noifettes , de 5 a S\ piaftres le quintal. Un chargement de noix & de peftil: celui - ci a 6 paras l'ocque, & les noix a 20 paras Ie millier. Commerce de Sortie. Le Commerce de Sortie propre a Varna ne confifte qu'en grains & en bois de conftruótion: ion territoire en pro* duit une grande quantité. Bata-Ora entre Varna & Bah fik eft un petit village dont Ie port eft trés mauvais. L 6  2J2 COMMERCE DE Li Balt fik, eft un grand bourg: il y a un Douanier. Le Port eft excellent, le fond en eft de vafe & toutes fortes de batimens peuvent y féjourner en tout tems. II fe fait dans ce bourg quelque Commerce ; on y porte a peu prés les mêmes articles qu'a Varna, mais en plus petite quantité. Les articles du Commerce de Sortie , font lebled, l'orge, le feigle, le millet,, le pafturma, les fromages & les chandelles. Kavarna eft un gros bourg a peu prés de la même étendue que Baltfik & dont le Commerce d'entrée & de fortie efl le même. Ghélégra eft un endroit défert oü il y a cependant un trés bon Port, dont le fonds eft de fable & oü toutes fortes de batimens peuvent aborder & y féjourner. Chanlar efl un endroit quin'efl point ha» bité. On y trouve un Port affez bon, propre a recevoir toutes fortes de batimens. Mangalia efl un grand bourg, dont le Port efl affez fpacieux, & peut recevoir des batimens de toute portée, maiV il n'eft pas abfolument fur en hiver. On apporte a Mangnlia une petite quantité des articles d'Eitrée qui fe débitent a Varna.  MER NOIRE. 253 Les Marchandifes de fortie, font le bied, l'orge, le feigle, le millet, le fromage & les raifins fecs qui y font en aflez grande abondance. Toufia - Bournou , entre Mangalia <& Keuflengé, eft un endroit défert, oü il y a une Rade découverte & peu füre. Keufiengé eft un gros bourg, commandé par un Aga qui eft prépofe' pour faire pifler a Conftantinople le bied que l'on y recueilleen trés grande abondance; Le Port n'en eft pas für, & quand le vent eft un peu fort, les batimens ont beaucoup de peine a y deneurer. Le Commerce d'Entrée & de Sortie eft a peu prés le même que celui des endroits donc on vient de parler. Sud- Gheulu eft un lieu défert & une mauvaife Rade, oü les batimens vont quelquefois mouiller en été, mais ne peuvent pas aborder en hiver. Kara - Kirman eft un aflez grand village , oü il y a plufieurs magafins pour le bied. On y fait beaucoup de chargemens de grains. Les principales Places du Dobragé, font Siliflrie, Babadag, Toultcha, Ijacktcka, & Timar-ova. Les Places les p'us confidérables de la L 7  254 COMMERCE DE LA Bulgarie Danubienne font Viddin, Cifiow, NicopoH , Rousdjiouk, Orfova, Toutvaka. L'on trouve dans h Bulgarie Méditerranéene , Sophie , Philippopoli , Ternova , Tamboli, Bajardzik, Prévat, dïdos , Karnabat, Cboumla , Rasgrad, P'eviè, Plevna, Kizanlik, Tchirpan, Niéboli, Samakow, Keuftendil & Sclimna. La defcription de toutes ces villes fe» rait fuperflue, on s'eft borné a parler en d'tail des places maritimes a caufe de 1'utüité que l'on peut en tirer pour la Navigation. COMMERCE GENERAL D' E NT R É E DE LA BULGARIE. Le Commerce d'Entrée efl imrnenfe dans la Bulgarie: il n'y a point de marchandifes des Pays étrangers que l'on ne trouve a y débiter avee avantage: mais comme tous les marchands des villes vont fe fournir a Conftantinople & aux célebresfoires deSelimnaSc d'Ouzoundjora, on neparlerapas de ce Commerce d'Entrée,  MER NOIRE. 255^ vu que ceh nous écarterait de nocre fujet principal & d'ailleurs nous entraïnenait dans de trop grands détails. Le Commerce üAndrinople & celui qui fe fait dans ces deux foires efl: fi connu , qu'il ferait inutile d'en parler. On fe bornera donc au Commerce ^e Sortie, paree que le principal débouché s'en fait par la Mer Noire. COMMERCE GENERAL DE SORTIE DE LA BULGARIE. Jl fort de la Romélie une quantité imrnenfe de Cire, d'excellente qualité , que l'on vend pure & fans tare de 38 a 42 paras l'ocque. La Soie efl: extrêmement abondante en Romélie, d'aflez belle qualité & prefque toute blanche; elle approche beau» coup de celle de Brouffe en Natolie, & fe vend de 8 a 10 piaftres fuivant la qualité. Une quantité imrnenfe de Laine furge  'ïtf COMMERCE DE LA de deux qualités: la laine frifée efl de 8 k 10 paras l'ocque & la platte de 5 a 6. II y a peu de noire 5 a peine en trouve -ton un quart fur la totalité: les marchands qui la vendent, la féparent volontiers. Ces Iaines fervent a la fabrique de toutes fortes d'ouvrages & peuvent même fervir aux manufaclures de Draps. Ceux qui ont fuivi cet article avee attention , prétendent qu'en faifant un fcrupuleux Cettiijjage on pourrait en tirer une qualité fupérieure , capable de fuppléer a la laine d'Efpagne. C'efl un objet qui mérite attention. II ne ferait pas difficile de faire venir a peu de frais ces Iaines a. Conftantinople par le Danube & la Mer Noire, en prenant les précautions indiquées a 1'article de la Crimée; (page 60).. On pourrait par la même voie tirer des Iaines de Bosnië qui font d'une trés belle qualité & en trés grande abondance. On prétend qu'elles approchent de cellesd'F.fpagne. Une quantité confidérab'e de Cuirs de boeufs & de buffles de diverfes qualités;. ceux-ei pefent depuis 18 ju'qu'a 70 ocques & fe vendent de 2313 piaftres la piece fuivant la grandeur; les autres pefent de 12 a 25 ocques & coütent de it k3i piaftres.  MER NOIRE. 257 Le Miel qui fort de la Romélie efl de meilleure qualité que celui que l'on tire de la Valaehie & de la Moldavië: il eft trés abondant; fon prix efl de 7 a 8 paras l'ocque. Le Beurre eflafTez abondant en Romélie, il fe ramaffe en grande partie fur les bords du Danube & vaut de 13 a 14 paras l'ocque. La quantité de Suifqw. fèrecueille,eft imrnenfe; il vaut de 8 a 9 paras l'ocque^ Cet article & le précédent font de contrebande. II y a plufieurs fortes de Tabacs; & cet article elt extrêmement abondant ; il y en a depuis 8 paras jufqu'a une piaftre l'ocque. Les principales manufactures de Maroquins , font a Rousdjiouk fur le Danube & dms plufieurs autres endroits de la Romélie , & il en fort une quantité imrnenfe. II y a des Mines de Fer, en Bulgarie,. a Samakow & a Keujïendil, qui en fournisfent une trés grande quantité; il fe vend de 4^ a 5 piaftres l'ocque. Le Salpêtre que l'on recueille a Philippopoli, efl tout deftiné pour le Miri; les particuliers ne peuvent en acheter qu'en contrebande.  253 COMMERCE DE LA Le Commerce des Viandes falies, efl trés confidérable; il y en a un débouché imrnenfe par la Mer Noire. Les Chevaux Bulgsres, furtout ceux du Dobrogê, font fort eflimés; ils font petits & forts, comme les chevaux Tartares, mais mieux taillés & fins; la beauté & la bonté en déterminent le prix. La Bulgarie efl une fource inépuifable de Grains: la fortie en efl défendue fous des peines trés rigoureufes: ils ne peuvent paffer qu'a Conftantinople. Le Bied - fe vend ordinairement 35 a 36 paras le quilot de 48 ocques, dans la Bulgarie Méridionale; mais dans la partie Septentrionale le quilot eft de 120 ocques & vaut 60 paras: le prix de YOrge eft de 18 a 20 paras le petit quilot, & le grand a proportion; le Millet. eft au même prix. Le Séfame, de la graine duquel on tire une huile bonne a brüler, vaut 65 a 70 paras le qui'lot. Le territoire de Philippopoli produit une quantité imrnenfe de Riz de bonne qualité; il fe vend fur les lieux de 35 a 56 paras Ie quilot de io ocques. La Bulgarie & le Dobrogé produifent une affez grande quantité de Vin rouge, mais médiocre: il vieac tous les ans 5 3  MER NOIRE. 259 tfooo chariots de Ruflie & de Pologne, charger de ces vins qui coütent fur les lieux 50 paras le quintal. OBSERVATIONS. La Monnoye de Turquie, les fequins Vénitiens, ceux de Holiande & d'Empire; les écus d'Allemagne, ceux de Ragufe, les pieces d'Efpagne appellées Pktines & en général toutes les monnoyes qui paffent a Conftantinople, ont cours en Bulgarie, au même taux que dans la capitale. Ces monnoyes ont quelques variations dans les foires pour favorifer le commerce. La Sevillane n'y eft gueres connue. L'on trouve dans toutes les Places fituées fur le bord du Danube des batimens conftruits exprès pour h navigation de ce fleuve, depuis 150 jufqu'a 4000 quintaux de portee. On peut les nolifer en entier,' ou fimplement payer le nolis des marchandifes que l'on y charge. Les petits batimens conviennent mieux que les grands & font plus leftes: ils marchent Buit & jour avee toutes fortes de tems & abordent partout. Les gros batimens ne marchent que le jour, craignenc extréme-  &6o COMMERCE DE LA ment la tempéte, paree qu'ils ne peuvent pas aborder dans toutes fortes d'endroits: on ne les employé gueres que pour le commerce des grains. Les nolis font plus chers en remontant , qu'en defcendant le fleuve, paree que lorfque le vent eft contraire, les équipages fouffrent beaucoup & font obligés de tirer le batiment a la remorque. De Viddin a Rousdj'wuk, le? batimens de 200 quintaux deportée que l'on nolife exprès, coütent de 14 a 15 piaftres; ceux de retour qui cherchent a fe nolifer pour redefcendre de Viddin a Rut isjwuk re coütent que 6 a 7 piaftres. Si l'on nolife exprès ces mêmes batimens, lorsque l'on veut remonter de Rousajiouk k Viddin , alors ils coütent de 12 a 15 pia'lres & l'on peut avoir ceux de retour pour 9 aio piaftres. De Vlidm a Galaz il faut prendre des batimens exprès; les nolis font ordinairement de 28 a 30 piastres & de Rmsdjïouk a Galaz de 15 a 20. De Viddin a Sunié qui eft une des bouches du Danube, l'on paye 50 a 55 piaftres. De Galaz a la Mer Noire, on ne trouve pas communément des batimens d'eau douce, fi ce n'eft ceux de retour deRous-, êjiouk ou de Viddin, que l'on peut avoir  M EU NOIRE. 2f5* a meilleur marché. On ne parle que des batimens d'environ 200 quintaux de portée; les autres Nolis font en proportion de la grolTeur des batimens & de l'éloignemenc des divers lieux. Les marchandifes de la Bulgarie Danubiene & même de la Méditerranéene, prennent ordinairement la route de Varna par terre & on les embarque de-la fur la Mer Noire pour Conftantinople, & pour les divers endroits de leur deftination. Les tranfports fe font fur des chariots tirés par des boeufs, des buffles ou des chevaux. Les chariots de boeufs & de buffles portent communément de 7 a 800 ocques; ceux de chevaux de 6 a 1500 ocques fuivant le nombre de chevaux que l'on y attele. De Rousdjiouk a Varna, on paye les chariots de chevaux de 34 a 35 paras les cent ocques & jufques a une piaftre en hiver. Ceux de boeufs & de buffles font k meilleur marché, paree qu'ils vont plus lenteraent. Le louage pour les autres endroits eft en proportion de 1'éloignement. Les Ragufais ont jouï pendant longtems prefque feuls du commerce de J3 Bulgarie: ils avaient fondé des établiflê;  2Ó2 COMMERCE-DE LA mens confidérables a Rousdjiouk, a Sophk & dans divers autres endroits; mais ces établiiTemens font aujourd'hui entierement tombés: il n'y a plus perfonne a Sophie, & il ne refle plus que trois ou quatre maifons Ragufaifes a Rousdjiouk, qui vivent affez mefquinement & ne paraiffent plus faire un grand commerce. Comme les Turcs regardent les Ragufais comme des fujets & des Rayas, les Pachas & les Commandans des lieux leur ont fait effuyer nombre de vexations qui les ont écrafé & obligé de quitter la partie. II en ferait tout autrement des francais, qui en vertu de leurs Capitulations & des Firmatis du Grand-Seigneur fe trouveraient a 1'abri des avanies que les Officiers Turcs pourraient être tentés de leur faire. , un, La Vaiachie Efl une Province Chrétienne gouvernée par un Hospodar ou Vaïvode Chrétien, auquel on donne le titre de Prince. Ce Pays efl borné au Nord par la Moldavië , a 1'Efl par la Beffarabie, au Sud par le Danube & au Couchant par la Hongrie & la Tranfylvanie.  MER NOIRE. £63 Les principales Places de la Vahchie font Bukureft, Fokchian, dont la moitié efl du reffort de la Moldavië; Kraton, eheflieu du diftriót de ce nom, oü le VaïVode de Valachie tient un Gouverneur avee le titre de Ban; Reinnik, Bouzeiv, Zemitcbe, Chorcfcbe, Guirghitza, Coullé, Hocba, Kimen, Kahfap, Gungbow & Laun. Bukmrjï efl la Capita'e de la Valachie ' & la réfidence du Vaïvode; c'eft une grande & belle ville, extrêmement peuplée: on y compte plus de 120,000 habitans : il y a de trés beaux édifices publiés & furtoüt de magnifiques Kans, ou Hotels publics habités par de riches marchands, chez lefquels on trouve tou es fortes de marchandifes de tous les pays du monde commer§ant. Gungbow efl la principale Echelle de la Valachie; c'eft une affez grande ville fituée fur le Danube a 12 lieues au Midi de Bukureft, & prefque vis- a- vis de Rousdjiouk ; c'eft - la oü l'on embarque toutes les marchandifes de la Valachie qui vont dans la Mer Noire par le Danube, ou en Allemagne en remontant le fleuve: on y apporte auffi toutes celles qui doivent paffer a Varna, pour y être de-la iranfportées a Conftantinople.  264 COMMERCE DE LA Comme toutes les marchandifes de Turquie & des pays étrangers qui viennent de Conftantinople, d'Andrinople & des foires de Selimna & d'Ouzoundjova par Rousdjiouk & toutes celles qui viennent d'Allemagne par le Danube . abordent pour la majeure partie a Gungbow, la defcription des autres places de la Valachie ferait aflez fuperflue & nous allons donner fommairement une notice des articles d'importation & d'exportation de cette Province. Commerce d'Entrée. On peut débiter en Valachie toutes fortes de marchandifes avee bénéfice; mais les marchands Européens ne s'y font jamais établis par les raifons que nous déduirons ci-après. Les marchands de Rousdjiouk fe font prefqu'emparés de tout le commerce de ce pays: ils vont fe pourvoir a Conjlantinople, a Andrinople & aux foires de Selimna & d'Ouzoundjova de tous les articles qui y ont cours. Quelques marchands du pays vont aufli acheter des marchandifes d'Europe a la foire de Leypfik, a Dantzik & a Vienne. Nos Draps Londrins feconds ont cours en  MER NOIRE. 265 en Valachie, mais le débit n'y efl pas confidérable; les Draps de Leypfik & de Pologne & ceux que l'on fabrique dans je pays même leur portent coup: ils s'y vendent communément de 100 a 110 paras le pic. Les Draps les plus eflimés font ceux que l'on appellé Draps de Leypfik, qui y viennent de la foire de cette ville & qui ne font autre chofe que des Mabouts de Hollande: il y en a de diverfes qualités & de divers prix, depuis 3^ jusqu'a 5 & même 6 piaftres le pic, pour les couleurs en Cochenille. Les Draps de Pologne font de trois qualités différentes, de 30 a 80 paras le pic. On fabrique auffi en Valachie une grande quantité de Draps de trés mauvaife qualité, a peu prés femblables a nos Pinchinats^; ïls font fort étroits & n'ont pas un pic de largeur; le prix en eft de 20 a 26 paras Ie pic. On pourrait introduïre en Valachie nos Draps d'Elbcuf, de Sedan & d'/Jbbeville: il y a tout lieu de croire qu'ils y réuffiraient & qu'ils y ruineraient ptu'être entierement les Draps de Leypfik, fi l'on parvenait a établir folidement des Francais dans ce pays-la. Nos Étoffes de Lyon fe vendent en Valachie avee beaucoup de benefice & en affez grande M  266 COMMERCE DE LA quantité: il y en a cfe fuperbes & de trés riches a Bukureft dans les kans publiés & dans plufieurs boutiques: les prix en font exorbitans , paree qu'ils viennent par Leypfik & que les frais de Tranfport, d'Entrée & de Sortie qu'ils doivent payer dans 1'Alleroagne, avant que d'arriver a Bukureft, font immenfes. Des Francais établis dans cette Capitale de la Valachie pourraient s'emparer abfolument de cette branche de Commerce : enfaifantvenir ces étoffes par Conftantinople & par la Mer Noire en droiture de Marfeille, ils pourraient les donner a des prix bien inférieurs ; ce qui en augmenterait peut • ê'.re la confommation. On débite en Valachie une quantité d'étoffes de Venife appellées dans le pays Bella Cofès; ce font des étoffes de foie a fieurs nuancées avee quelque peu d'or Si d'argent. Les Damasquettes y ont cours auffi & l'on y vend beaucoup d'étoffes de Scio de toute efpece. Les Galons qui ont le plus de cours en Valachie, font ceux de Pologne, a caufe de la douceur du prix: la plupart de ces galons font unis, fans chevrons, ni festons , en forme de moufquetaires travaillés; ils font légers & de mauvaife qua-  MER N ü I R E. 267 Hté. On vend communément en gros ceux d'argent 180 piaftres l'ocque, ce qui revient a 3 piaftres & 24 paras (10 liv. i<5 fols) 1'once; & en or, 200 piastres, c'eft-a-dire 4 piaftres (12 liv.) 1'once. Nos Dorures y viennent auffi., mais par la foire de Leypfik & conféquemment elles y font d'une cherté extréme : auffi n'y en débite -1 • on qu'une trés petite quantité: on en reconnaït cependant la fupériorité par 1'éclat & 1'ufage. Elles y feraient préférées, fi les Fran§ais pouvaient les y porter eux - mêmes; ils y trouveraient encore leur compte en les donnant même au prix des Galons de Pologne & ils feraient infailliblemenc tomber tout a fait le Commerce de ceuxci, L'on y vend auffi une grande quantité de Fil d'or & d'argent de Pologne,de 12 a 13 paras la dragme. Nos Camelots y ont affez de faveur, on y vend indifféremment les unis & les rayés de 30 a 35 paras le pic: on les y porte de Conftantinople. Les Teinturcs viennent en Valachie, de Conftantinople, d'Andrinople & des foires de Romélie, quelquefois auffi de Dantzik. La confommation n'en eft pas M 2  2Ó8 COMMERCE DE LA fort confidérable, mais elles s'y vendent avee avantage. Les Epiceries, comme Canelle, Geroffles, Mufcddes, Poivre, Gingembre, viennent par Danuik & s'y vendent avee un grand bénéfke. Les Epiceries fines dans les tems de rareté font pouflees a des prix exceififs. Le prix courant du Poivre eft de 60 paras & celui du Gingembre de 40 paras l'ocque. On porte en Valachie YEtain & le Plomb de Conftantinople, d'Andrinople & de la foire de Sélimna; le prix ordinaire de 1'Etain eft de 90 paras l'ocque avee le fel ammoniac; celui du Plomb de 13 a 14 paras. Le Mercurc & Y Mier viennent d'Allemagne par le Danube; le premier s'y vend 15 piaftres l'ocque & 1'autre 20 piaftres le quintal. Les Faulx d'Allemagne font aufli un article d'Entrée trés confidérable en ce pays-la. Commerce de Sortie. La Cire efl le plus confidérable article de Sortie de la Valachie; elle eft d'une belle qualité & la quantité y eft immen-  MER NOIRE. 269 fe; on la vend purgée & parfaitemens nette de 40 a 45 paras l'ocque. On tire de la Valachie un grand nombre de Cuirs de boeufs & de buffles, qui font plus petits & moins eftimés que ceux de Moldavië. Ceux de boeufs pefent communément de 25 a 30 ocques & fe vendent de 2 \ a 4 piaftres la piece; ceux da buffles fe vendent en proportion. La Laine de la Valachie efl alfez recherchée; elle efl: a peu prés de la même qualité que celle de la Bulgarie Danubiene, & elle eft préférée a celle de Moldavië; fon prix eft de 9 a 10 paras l'ocque. La plus grande partie paffe en Alle» magne: la noire que l'on en fépare ordinairement, fe vend en Romélie. Le Miel de la Valachie eft d'une qualité inférieure a celui de la Moldavië; Ia couleur en eft plus chargée & il eft plus difficile a travailler; fon prix ordinaire eft de 5 piaftres le quintal. Le Beurre y eft extrêmement abondant ; il eft d'une qualité inférieure a celui de la Moldavië; on le vend dany les villages a 8 paras l'ocque & i 10 dans les marchés publics. Le Suif y eft un objet trés important; ©n en tire de la Valachie une prodigieufe; M 3  270 COMMERCE DE LA quantité; la graiffe de chevreen fait ia bafe, on y ajoute auffi de la graiffe de bcsuf & de mouton: on le vend communément de 7 a 8 paras l'ocque. La Valachie produit une grande quantité de Lin, de plus baffe qualité que celui de la Moldavië, & il ne devient jamais fi blanc: le brin en efl; extrêmement court, On le vend de 7 a 8 paras l'ocque & il fe débite prefque tout en Romélie. Le Chanvre y eft aufli fort abondant & propre a faire toutes fortes de cordages j fon prix eft de 4 a 5 paras l'ocque. H fort de la Valachie quelque peu de Pelleteries, a peu prés' de la même efpece <[ue celles que l'on tire de la Moldavië, mais fort inférieures en qualité: l'on en pariera dans 3'article fuivant. La Valachie eft une fource inépuifable de Grains; le bied, l'orge & le feigle y abondent. Le quilot & le prix font les mêmes qu'en Bulgarie. La fortie en eft défendue & on les fait tous paffer a Conftantinople. La Valachie produit une quantité énorme de Tabac. de trés mauvaife qualité, que l'on vend a 8 afpres l'ocque. 11 y a en Valachie des MineS de Se!  MER NOIRE. 271 extrêmement abondantes, ficuées dans 1'endroit que l'on appeüe Hocna: ce fel fe vend fur les lieux, a raifon de 40 afpres le Monceau de 100 a 110 ocques. Dans les Echelles du Danube, oü on le iranfporte de la Mine, fon prix ordinaire eft de 40 a 45 paras les 100 ocques. On en tire une prodigieufe quantité , quï paffe a Conftantinople & dans divers lieux de 1'Empire Ottoman. ObSEI? VATIONS pARTI CULIEJRES. La Monnoye de Turquie eft celle qui a le plus de cours en Valachie & même Ja ihiuB en ufage dans ie même détail; néanmoins les Sequins Venitiens & Hollandais, les Ecus de 1'Empire, ceux de Pologne, les Roubles de Ruflie & les Réaks de deux d'Efpagne, les Ecus. de Ragufe y paffent dans le Commerce & font fujets a des variations dans le cours du Négoce. Le tranfport des marchandifes n'eft pas fort cher en Valachie : on fe fert de chariots attelés de boeufs, de buffles & de chevaux, qui portent jufqu'a 2000 ocques: ils coütent ordinairement de Bukureft a Cungbow de 3 a 3; piaftres, & on les M 4  272 COMMERCE DE LA paye dans la même proportion fuivant l'éloignement des divers lieux. II y a en Valachie déust Douanes; une a Gurighow & 1'autre a Laun, qui efl: une petite ville fituée a 1'Orient de la première fur Ie Danube, vis-a-vis de Silijirie. II y a dans chacune de ces Douanes, deux. Douaniers , 1'un Turc & 1'autre Valaque. Les Douaniers Turcs dépendent de celui de Rousdjiouk, oü l'on paye ordinairement; & comme l'on prènd un pajjavant pour Gungboiv & Laun , la Douane de Valachie fe réduit a trés peu de chofe & l'on s'aecommode a fort bon marché avee le Douanier. La Douane Turque eft de 3 pour cent pour les Turcs? «Sc de 4. pour cent pour les Rajas: le3 Francs pa\ent fur le pied réglé par les Capitulations. ^ 11 y a en Valachie des Mines d'or qui ne font pas ouvertes 3c auxquelles le gouvernement ne permet pas que l'on travaille, de peur des avanies du Turc; La Riviere de Bmzew & quelques autres charrient des paillettes d'or en affez grande abondance; on les ramaffe pub'iquement. C'eft une Ferme qui fait partie des Revenus du Vaïvode; Oi de laquelle les Bohc-  MER NOIRE.- 273 Bohémiens de- la Valachie font en posfetfjon depuis un tems i nraér^órial. On trouve auffi en Valachie des Perles• que l'on pêche dans un petit lac, qui eft ai quelqu'éloignement de Bukurffl vers le diftria de Campo- Lon?o; mais ces Perles font trés inférieures a celles qui nous viennent des Indes Orientales. LA MOLDAV1 E.,, a. %£i La Moldavië-, ainfi que la Valachie, eft une Province Chrétienne de TEmpire; Turc :■ elle eft bornée au Nord par le: Niefter, a 1'Eft par la Beflarabie, ou Ie' Budziak, au Midi- par la' Valachie & at f.Queft par la Tranfylvanie & la Hongrie. C'eft un Vaïvode Chrétien a lai nomination de la Porte qui y commande,. & fon gouvernement eft' le même qu'en' Valachie. La-Moldavië a-moins d'étendue & rend beaucoup moins que 1'autre 'fe. fon Vaïvodemais Ie pays eft beaucoup» plus fertile; & le Vaïvode de Moldavië a* le pas a la Porte fur celui dé Valachie. . Les principales places ■ de Ia: Moldavië font T•• aj' iia i'J*. ' —  274 ' COMMERCE DE LA Targoimtz, Thès, Falkcbhn , Kamanka, Orheï, Bakowo, Sokzow, Bourlat, Pouteken, Ibraïl, Galaz, &c. TaJJi eft la Gapitale de la Moldavië ;le Vaïvode y fixe fon féjour: cette ville eft aflez grande & bien peuplée; on y compte environ 50,000 habitans. II n'y a point de kans publics comme a Bukurefi: les marchands font établis dans des boutiques particulieres & le commerce y eft beaucoup moins floriffant. Galaz eft la principale Echelle de Ia Moldavië; elle eft fituée fur la rivefeptentrionale du Danube a 40,ou 45 lieues de fon embouchure. Cette ville eft commandée par un Officier Moldave établi par Ie Vaïvode fous le titre de Procalamo: il y a aufli comme dans toutes les villes de Moldavië un Officier Turc appellé Becbelu-dgajfi, qui commande aux Mufulmans qui y font établis ou qui y viennent pour leurs affaires. La plupart des marchandifes deftinées pour la Moldavië abordent a Galaz 81 l'on y embafque également celles qui en viennent. Les vaifleaux n'hivernent gueres i Galaz, mais ils vont a Suniè, 1'une des bouches du Danube, oü il y a un bon Port.  MER NOIRE. 275 Commerce d'Entrée. Le Commerce d'Entrée de la Moldavië eft le même que celui de Ja Valachie: les marchandifes y viennent par Jes mêmes voyes, mais en beaucoup moindre quantité ; ainfi il eft inutile d'entrer dans des répétitionsqui ne feraient d'aucune utilité. Commerce de Sortie. La Laine eft fort inférieure a celle de la Valachie; elle eft plus groffiere & plus chargée de noire: elle ne paffe point en Allemagne; on 1'employe dans le pays Sc dans Ia Romélie pour Jes manufactures d'Abas de Salonique, de Cabans & de Couvertures. Les Cuirs de bceufs & de buffles font plus recherchés que ceux de la Valachie; jes premiers pefent jufqu'a 40 ocques & fe vendent de 3! 34 piaftres; ceux de buffles en proportion. La Cire eft 1'artïcle le plus important du Commerce de la Moldavië; elle eft de trés belle qualité , & plus belle encore que celle de la Valachie: on la vend au même prix, c'eft-a-dire de 40 a 45 paras l'ocque. M 6  GOMM ER'CE DE LA Le Miel eft plus eftimé que celui de Ia. Valachie; il tft d'une couleur plus claire, plus nee & plus facile a travailler; il eft auffi plus cher & fe vend de 5ï a 6 piaftres le quintal. Le Beurre de la Moldavië paffe pour le plus délieat de tout, 1'Empire Ouoman: iJ efl cependant a meilleur marché que celui de la Valachie dont la qualité efl inférieure.* on le vend»ic ico iaUMi, ae raire mounrjes-coupables & de s'e.nparerde ]Jurs Ylen?- Ces ordres; furent exécutés & même outrepafles. Cette perfécution fut une image des Vêpres Siciliennes\ on les maffacra de tcus les cötés & l'on confifqua leurs biens pour le Min. On allure qu'en Moldavië l'on en fit périr piüs de dix ïwJle. Ce terrible chatiment les a depuis ce tems contenus dans les termes du devoir. Ceux qui étaient établis dans le pays & qui ont échappé au carnage font devenus fouples & foumis, & les autres ont continué de commercer honnêtement, farfs s'écarter des regies qui leur ont été prefcrites.  MER NOIRE. 283 OBSERVATIONS, Relatives ü la Valachie & è la Mol- . davie en général. Des Marchands Francais ^ pourront jamais s'établir folidement en Moldavië ni en Valachie, tant qu'il n'y aura point de Confuls pour les protéger: ils y demeureront toujours a la difcrétion du Vaïvode qui abufe de la néceffité oü ils font dele ménager, & les force fouvent de Sui vendre des marchandifes a crédit, dont ils courent grand rifque de perdre la valeur dans le cas de fa dépofition. Si ces marchands parviennent a captiver fes bonnes graces & qu'ils lui paraiflent attachés, ils deviennent fufpeéls a toutes les autres families qui vifent a la même Principauté, & lorfque le Vaïvode dont ils s'étaient attiré 1'amitié , eft changé , celui qui le remplace, regarde ces Négocians comme des gens qui peuvent lui nuire , & cherche a s'en débarralfer par toutes les voies imaginables. D'ailleurs pour s'alfurer d'une forte partie des marchandifes de Sortie, comme Cire, Cuirs,  284- Commerce de la Laines, &c. Jes Négocians font obfgés de donner de 1'argent en avance aux 6Ya. roftes des villages & a certains Boyarês qui resoi vent des dixmes & d'autres droits en marchandifes. Quelquefois ils font . de femblables avances au Vaïvode: ils Jui fourniflent des Lettres de change fur Conftantinfjrie, dont il a fouvent befoin, a condition d'en reeevoir le montant en certaines marchandifes au tems de la récolte. Ce genre de Commerce eft trés avantageux, paree qu'outre le change de 1'argent de i% Ge 20 pour cent qu'ils retirent, ils obtiennent toujours les marchandifes a meilleur marché, ayant foia d'en fixer le prix par anticipation; mais fi le Vaïvode vient a être dépofé,. ils fè trouvent expofés a perdre les avances qu'ils lui ont faites & tout au moins a attendre longtems leur payement jufqu'a ce qu'il foit remis en place, Tous les Boyards qui lui étaient attachés, fuivent fon fort, perdent leurs places & ne payent plus,. quand même ils en auraient la faculté: on les pourfuit inutilement, & l'on n'obtient point de juftice, paree que l'on n'a point de protectiom Les Sieurs Linchou ont fait une funefte expérience de ce que l'on vient de dire. L'ainé de&  MER NOIRE. 285 ireres jouifTait de la confiance entiere du Vaïvode Conftantin Rakowitza; il le fuivit en Moldavië en qualité de fon Kamaracbe, ou Tréforier privé , & établit h Galaz une maifon de Commerce, dont il donna la direótion a fon pere & a fes freres. Cet établiflement fleurit tant que Conftantin fut en place: Alexandre Gika qui lui fuccéda, regarda les Sieurs Linchou, comme des gens fufpeéts & desquels il avait tout a craindre, a caufe xle leur attachement a fon prédéceffeur; il exerca contre eux toutes fortes de vexations, les obligea d'abandonner leur maifon de Commerce & les forca de partir fans leur donner le tems de liquider leurs affaires; il poulTa même les chofesjufques a 1'inhumanité par les mauvais traitemens qu'il fit endurer au Sr. Linchou pere, vieillard, dont lage méritait an moins quelque compaflion. Ces Négocians furent obligés de vendre a tout prix les marchandifes qui leur reftaient pour fe débarrafflr; ils perdirent beaucoup d'eflets, dans 1'abandon fubit qu'ils firenc de leur maifon; ils laiflerent fur le pays plufieurs créances & efluyerent, tout compte fait, une perte de plus de 15000 piafires dont ils n'ont jamais pu obtenir  286 COMMERCE DE LA ie moindre dédommagement. Les fuites de toutes ces affaires plongerent enfin le Sr. Linchou 1'alné dans un labyrinthe d'intrigues qui ont abouti a lui faire couper la tête en 1760. L'on peut juger aifément par ce que l'on vient d'expofer combien il ferait néceffaire d'avoir en Moldavië & en Valachie des Confuls ou des Réfidents pour protéger le Commerce que l'on voudrait y introduire. Mais 1'établiffement de ces Confuls rencontrerait de grands obftacles vis • a • vis des Vaïvodes, quoique la 'Porte n'eut peut - être pas une répugnance extréme a s'y prêter. Ces deux Principautés font la proye de trois ou quatre families Grecques, dont les membres font fans ceffe occupés a fe les arracher mutuellement. Ces families fe portent réciproquement une haine irréconciliable, & les individus de chacune en particulier font toujours divifés entre eux. Leur jaloufie eft extréme; ils verraient tous avee beaucoup de peine dans leur pays, leféjour d'un Officier d'une Puiffance étrangere, lequel ferait un honorable efpion capable d'éclaircir leur conduite & d'en rendre compte a fa Cour. Comme ces Vaïvodes font quelquefois mêlés dans les affaires po-  MER NOIRE. 287 liuques de 1'Europe & qu'ils prennent fouventacoeurles intéréts d'une Puiffance au préjudicedes autres, ils craindraient la vigilance d'un Conful qui venant a découvrir des menées contraïres aux intéréts de fon Souverain, pourrait les manifefter & faire jouer des relTorts puiffantspour faire déplacer le Vaïvode dont il auroit lieu de fe plaindre & le faire remplacer par quelqu'autre , auquel on connfit des difpofitions plus favorables. Toutes ces families fe réuniraient infailliblement & employeraient tous les moyens imaginables pour détonrner le GouvernementTurc de permettre un pareil étabünement. II conviendraitdeprofiter du regne de quelques Vaïvodes attachés au parti de la France pour jetter les fondemens d'un Confulat,&fices Vaïvodes venaient aêtre remplacés par d'autres mal - intentionnés, il faudrait protéger & étayer fortement les Confuls contre toutes les tentatives que ces petits Princes pourraient faire" pour les expulfer; & dés que ces Confuls auroient pris racine dans ces Pays-la, & s'y feraient fait craindre, de même que refpeêter, on pourrait alors y établir un commerce floriffant & lucratif, en fixant les maifons de  a88 COMMERCE DE LA Commerce a Ta/ft, & a Bukureft , & plagant dans les Echelles de Galaz, de Gungbow & de Varna des Facteurs pour recevoir les marchandifes d'Entrée & expédier celles de Sortie. CONCLUSION. Obfervations Générales fur le Codmerce ê? la Nayigation de la Mer Noire. L'on peut juger par tous les de'tails que l'on vient de donner fur le Commerce de la Mer Noire, de 1'avantage que l'on pourrait trouver a 1'entreprendre & a le füivre. Ce Commerce fait avee prudence, économie & intelligence, doit procurer d'immenfes pronts; puifque les Turcs & les Grecs qui le font trés mal, y gagnent encore beaucoup, malgré le change exorbitant qu'ils payent fur 1'argent , qu'ils empruntent ordinairement i la groffe aventure pour fe procurer des fonds. Le moyen qui paraïtrait lc plus convenable  MER NOIRE. 230 nable pour tirer le meilleur parti poffible du Commerce de la Mer Noire, & de lui donner toute 1'étendue dont il eft; fufceptible, ferait de former une Compagnie par Acbions, dont le Comptoir principal ferait a Conftantinople, & a laquelle tous les Négocians du Levant, & même de France, pourraiem prendre part. Avant que d'établir cette Compagnie & d'envoyer dans les diverfes Echelles de la Mer Noire les Facteurs nécesfaires ; il conviendrait de choifir une perfonne entendue , accompagnée d'un Ingénieur- Géographe pour lever jes Plans, rectifier les Cartes & la pofition des Lieux; d'un ou de deux Négocians au fait du Commerce & ayant connaisfance des marchandifes ; avee deux Drogmans qui pofledaffent bien les Langues Francaife , Italienne , Grecque, Turque, Perfanne & Arabe; auxquels on joindrait deux Janiflaires fideles de Ia fuite de 1'Ambafladeur pour efcorte , afin de faire le tour de cette Mer dans la belle faifon, examiner encore plus a fond les diverfes Echelles, la nature du Commerce en général, le Commerce N  jp» COMMERCE DE LA refpe&if des Echelles entre elles; celui qu'y font les diverfes Nations voifines; les Marchandifes que l'on peut y vendre & acheter avee avantage; les prix des unes & des autres qui peuvent varier ; les differens frais de Commerce & autres de'penfes y relatives; les facilités & les obflacles que l'on pourrait trouver dans les EtablilTemens; pour s'affurer en un mot, plus parfaitement que l'on n'a pu faire jufqu'a préfent, de tout ce qui peut être relatif a cet objet, & fe convaincre par 1'expérience de la vérité des chofes. La perfonne choille pour cette commiflion devrait nolifer a Conftantinople un gros bitiment Turc de 5 a 6000 quintaux ou 300 tonneaux, qui coüterait 300 piaftres par mois; 1'Equipage de ce batiment devrait être compofé de trois ou quatre Matelots francais , capables & gens déterminés , ainfi que d'un Pilote expert & d'un Ecrivain en étac de tenir un Journal exaét; indépendamment d'un Reïs ou Patron Turc & d'un nombre néceflaire de Matelots Turcs & Grecsdont on ferait für. Ce batiment porterait quelques pieces de canon & des pierriers, avee d'autres armes.  MER NOIRE. 291 L'on porterait dans chaque Echelle un. eflai de toutes fortes -de marchandifes d'Entrée, & on acheterait un peu de toutes celles de Sortie: l'on pourrait également dans le cours de ce voyage faire 1'épreuve nécelfaire du Commerce d'une Echelle a 1'autre. Peut - être même les pronts que l'on ferait dans cette tournee en payeraient - ils toutes les dépenfes, ainfi que les Préfents qu'il faudrait faire aux Pacbas, Cadis, Mu/Jèleims, Gouverneurs, Commandans dans les divers lieux oü l'on paflêrait. Le Commiiïaire chargé de cette Expédition devrait être muni de Fermans ou Commandemens du Grand - Seigneur, enjoignant a tous les Gouverneurs & Officiers de Juftice de lui donner toute la proteftion néceflaire pour 1'établiflèment de ce Commerce. Oh pourrait même pour plus grande füreté le faire accompagner par un Chiaoux, ou tout autre Officier de la Porte, qui ferait exécuter les ordres de fon Souverain , en cas de refus & de défobéiflance. Une pareille grace ne ferait peut - être pas difficile aobtenir du Miniftere Ottoman, & un AmbaiTadeur habile pourrait lui N 2  292 COMMERCE DE LA faire envifager plufieurs avantages capables de le déterminer a 1'accorder. Ce CommilTaire aidéde ces Négocians, d'un Ingénieur- Géographe & d un Pilote ex* périmenté, inuni de bonnes Cartes marines de la Mer Noire, de Boiiifoles éprouvées & d'inftrumens, ferait en étac en faifant un pareil voyagé, de donner fur le Commerce de la Mer Noire des lumieres plus étendues, & des connaisfances encore plus précifes que celles que l'on a pu fournir ici. Alors, avee de pareilles Inftructions,. on pourrait proeéder a 1 etablifiement des Facteurs & travailler a leur procurer la proteétion & la liberté qui font ie fondement & la bafe de tout Commerce; & l'on ne ferait pas dans le cas de fe laifiêr abufer par les difcours de quelques avanturiers , dont les rapports inexacts ne peuvent qu'induire en erreur d'après leurs faibles lumieres. Dans les Echelles oü l'on ne pourrait pas établir des Facteurs a demeuré, comme chez les Abazes, & ailleurs , on fe contenterait de faire naviguer des Facteurs ambubins & des Subrecargues. Si ce CommiiLiire était obügé fuivant  MER NOIRE, 293 les occurrences de paffer en Georgb conjointement avee les Négocians don: il ferait accompagné & d'aller jufqu'a Tifflis auprès du Prince Hóraclius, aini qu'auprès du Khan & des Vaïvodes de Valachie & de Moldavië , il faudraic qu'il foit muni de Lettres de Créance & de recommandation du Roi auprès 'de ces Princes , dont il ferait ufage fuivant les circonflances & avee toute la prudence poffible ; il conviendrait de plus qu'il ait un ordre du GrandSeigneur aux deux Vaïvodes afin de lui faciüter 1'objet de fa miffion. Les périls de la navigation de la Mer Noire ont toujours épouvanté , avee quelque rairon , ia plupart de nos Négocians: il efl; vrai que cette Mer eft fort orageufe, que les Ports y font rares & que ne trouvant pas a fe faire aff.irer , on eft obligé de courir tous les rifques: mais l'on peut en même tems avancer que les plus grands dmgers font caufés par 1'ignorance & 1'inexpérience des navigateurs & leur maladreffe dans la maniere de charg:r les navires. Les Patrons des vaifleaux; a'ont point de Cartes marines & n'ont N 3 ~  204 COMMERCE DE LA que de trés mauvaifes Bouflbles; i!s ne favent ni louvoyer ni fe tenir a la cape: de quelque cöté que le vent tourne, ils metcent tout de fuite en poupe & vont oü le vent les conduit: dés qu'ils perdent la terre de vue, ils ne havent plus calculer leur route, connaitre le chemin que peut faire le batiment , ni trouver le Port, a moins que le hazard ou leur routine ne les y conduife ; fans cela ils vont échouer infailiiblement. Lorfqu'ils partent d'un endroit pour aller a un autre , ils ont coutume d'attendre un vent fait, qu'ils jugent d'une maniere fort incertaine, devoir leur faire faire tant de lieues par heure : ils calculent de fajon a pouvoir fe trouver de jour devant le Port qu'ils veulent aborder; fi par hazard le vent renforce ou diminue & que Ja nuit les furprenne a 1'attérage , ils vont a coup fur naufrager a la Cöte. L'entsée du Canal de Conftantinople ou du Bofphore de Thrace eft furtout pour eux un écueil dangereux, oü il en périt un grand nombre. La facon de charger les navires eft de même un grand ineonvénient qui  MER NOIRE. 29JT fait périr plufieurs batimens & caufe de grandes pertes. Quand le Navire efl en charge , alors faute de connaïtre 1'eftivage des marchandifes de volume, ils accumulent fans ordre & fans ménagement tout ce que les chargeurs apportent , & pour gagner un fort Nolis , on charge fouvent le batiment outre mefure & même prefque jufqu'au milieu du mat des marchandifes légeres ; de forte que le vaifleau feurchargé perd fon affiette & fon équiiibre & par conféquent fe trouve fouvent expofé a fe renverfer & a périr au milieu de la Mer, mais trés communément furtouc a faire Jet. Dans le dernier cas , il n'y a ni avarie ni répartition a efpérer & les propriétaires des marchandifes qui fe font trouvées a portée d'être jettées a la mer, efliiyent toute la perte fans aucun efpoir de dédommagement. L'on pourrait remédier aux mconveniens qui procedent de 1'ignorance des navigateurs, en donnant aux Re'fs ou Patrons des batimens que l'on noliferait, desPilotes Frangais, que ces PaN 4  2p5* COMMERCE DE LA trons accepteraient avee grand plaifir; alors ces Piloces prendraienc biencöc une connaifiance exacte de la Mer Noire, découvriraient certainemenc bien des Porcs , des Plages ou des Rades qui fonc peut-êcre excellens & inconnus aux gens du pays ; ils éviteraient par de» meilleures manoeuvres un nombre infini de dangers; ils prendraienc auffi pour charger les batimens, les précautions & les mefures convenables, 3c il ne feraic peut* être pas impoffible d'enfeigner aux Patrons Turcs la maniere de bien arrimer les marchandifes. L'on s'eft donné des mouvemens infinis dans difterens cems pour obtenir de la Porce la libercé de la navigation dans la Mer Noire. M. le Marquis de Ville-neuve avait eu la permiffion d'y faire naviguer deux tartanes ; permisfion donc on n'a jamais pu profiter, paree qu'elle fut immédiacemenc révoquée. Pendant qviJli - Pacha • Hekim - Oglou était Gouverneur a Trébifonde, les Ragufais engagerent ce Pacha , par le canal de fon Médecin, a demander pour eux ce privilege au Miniftere Ottoman , qui était fur le point de le leur  MER NOIRE. 29?- leur accorder ; maïs ils furent découverts & croifés par des Miniftres Étrangers, _ qui firent bientöt échouer leur négociation. On ne voudrait pas affurer que nous trouvaffions grand avantage a introduire nos batimens dans la Mer Noire.'C'eft un point qui parait mén ter d'être bien réfléchi. On ofe croire qu'il vaudrait mieux fe ftrvir des batimens du pays, tant, paree qu'ils navigueraient k meilleur marché que les nótres, que paree que cela ne ferait pas un trop gr.nd écht. L'apparition d'un Pavillon Chrétien dans cette mer & la concurrence des autres Étrangers qui ne manqueraient pas de folücirer , & mime s'il fal!att,,d'acheter a grands frais le même privilege, ferait augmenter «-tout d'un? coup le prix des marchandifes de Sortie & tomber celui des marchandifes d'Entrée -y & l'on ferait bien rót privé der tous les profits de ce Commerce. D'après tout ceci Ton doit préfu* mer que la France, pour conferver fora Commerce du Levant «Si pour l'augmei> ter par celui de la Mer Noire, ne peraatttra jamais que 1'Empire Turc lefc N 5  3q8 commerce de la &c. envahi ni démembré , ni que _ Ton chafle les Princes Ottomans de leur tróne, paree qu'alors notre Commerce du Levant ferait entierement ruiné, ou tout au moins réduic a trés peu de chofe. FIN.  MÉMOIRE SUR LE COMMERCE D E SMYRNE. N «5  AVERTISSEMENT. Le Mêmoire fuivant fur le Commerce de Smyrne n''efl point de moi, je ïai feulemmt retouche en quelques endroits d'après les Olfervaüons que j'ai faites pendant mon fèjour a Smyrne. Je ne l'aurais jamais donné a l'imprejfion du vivant de ï'auteur; mais comme on m'a marqué qu'il était mort, je vie me fais plus acltiellement de fcrupule d'en faire part au Public, avant que le Sr. Duvalz qui en a la Copie a la fuite des Obfèrvations fur la Mer Noire, s'avifs de les publier.  M É M O I R E SUR LE COMMERCE D E SMYRNE. («■■■MnmBMMaMnnnBanHi Smvrne , ancienne ville de 1'Afie Mineure dans la Natolie, au pays de Sarchan ou ancienne Jonie, de la domination du Turc, efl une des plus riches, des plus floriflantes & des plus marchandes du Levant; la füreté & 1'étendue de fa Rade, (car fon Port efl comblé) les nombreufes Caravanes qui lui arrivent de 1'Afie 3i de la Perfe, lui attirentun concoursprodigieux de marchands de toutes les partjes du mon le. Cette ville efl fituée au fond d'unGolphe ou grande Baye,furles bords de laquel'e étaient fituées 1'ancienne Fhucea & Clazommes qui font ruinées: elle efl éloignée d'environ 70 a 72 lieues de Conflantinople: fes fortifications font N7  302 COMMERCE DE LA peu de chofe; elles confiftent en un Fort & un Chateau fur une éminence, avee une Citadelle& une garnifon de Janiflaires: au bas efl un ancien Amphithéatre. Elle efl; commandée par un Officier Turc que l'on nomme MuJJekim: elle eft fort fujette a la pefte, aux incendies & aux tremblemens de terre. En 1688 elle en effuya un fi terrible, que tous les habitans auroient abandonné la ville fi la Porte ne leur avoit pas accordé plufieurs Privileges. On y compte aujourd'hui r 0,000 Grecs, 200 Arméniens, 300 Francs, qui y ontchacun leur Evêque & libre exercie de leur Religionj 15 a 16,000 Turcs & 2000 Juifs. Toutes les Nations Européennes y ontdesétabliflements& des Confuls,dont les principaux font ceux de France, de Hollande & d'Angleterre. Le Commerce des Francais eft le plus confidérable dans cette Echelle: les Draps font plus du tiers des marchandifes d'envoi, & les Londrins feconds les trois quarts de la partie des Draps dont la confommation montaitjdit-on, avant 1740a plus de 5000 ballots* mais elle eft bien tombée depuis: le furplus de nos envois a Smyrne confifte en Camelots, Quincailleries, Étoffes, Dorures, Indigo, Caffé,  MER NOIRE. 303 Sucre, &c, dont nousallons donner le détail. Les Retours font en Soyes, Cotons, Laines, Cire, Huiles, &c.f Les Hollandais y font fort occupes: ils y font palTer tous les ans 10 a 12 batimens, qui y portent environ 500 balles de Draps affez reflemblants a ceux d'Abbeville. ? Les Anglais y font palier environ 5 a éoo balles de Draps. Les Venitiens y portent a peu pres 150 ballots de Draps, dont une forte de Londrins feconds qu'ils ont imité des nötres, & des Sayes, efpece de Draps extrêmement forts , dont les Turcs fe font des manteaux & les payfans des Robes. COMMERCE D'ENTRÉE. Draps. L'article des Draps efl comme l'on voit aflez confidérable a Smyrne: mais il s'eft élevé parmi nos Francais plulieurs difficultés ace fujet:on les réduit a quatre Queftions. Première Quejlion. „ S'il convient de rétablir la liberté  3C4 COMMERCE DE LA '„ ou maintenir les arrangerrens ? Les „ Négocians Franc-ais de Conftantinople „ parient en faveur des arrangemens, & „ ceux de Smyrne pour la liberté du „ Commerce." L'on a repréfenté qu'il fallaït plutöt s'attacher au maintien du prix de la Draperie qu'a la confommation; que 1'Etat trouve plus d'avantage a vendre ie Hrap a un piix mode ré, que d'en vendre moins a un prix exorbitant; qu'il ne fallaït pas accorder une abfolue liberté, & qu'il fallaït affigner aux deux Echelles de Conftantinople & de Smyrne la qualité des Draps qui leur font propres; c'eft-a-dire les Draps des Manufaclures Royales a: Conftantinople, lefquels ne pourraient aller a Smyrne que par trdtijk , & a Smyrne les Londrins feconds & les Londres larges des bafles M mufact'res, paree que ces qualités ne peuvent palTer a Conftantinople avee avantage; que 1'm pourrait r médier a Smyrne aux inconvénkns que produit la liberté &. a l'accumulation des Draps & l'inégalité du travail entre les Négocians par )a répartïtion générale des adreffès a 'aquelle on pourrait [oindre une Caifle f)!idaire d'Emprunt pour rendre les Négocians-  MER NOIRE. 305 moins dépendans des Juifs dans les trocs par anticipation ; qu'il faliaic permettre de fabriquer en France un tiers en fus de la confommation annuelle, ce qui modérerait le concours des marchands dont les envois étant réglés influeraient héceflairement fur le prix des Draps en France & empêcheraient le monopole des fabricans du Languedoc qui ne font paraitre que la quantité de Draps qu'ils veulent, pour en faire augmenter le prix. II faut obferver qu'a Conftantinople les Draps de* haute qualité fe vendent mieux, paree que c'eft. une ville riehe., & que ceux de bafle qualité y ont peu de débit; au lieu que Smyrne ne peut vendre que dans les petits endroits a des gens pauvres Sc accablés de vexations; ainfi il n'y faut que les Draps de balles qualités. On peut au refte fixer a 1'une & a 1'autre Echelle une quantité de certains Draps de haute & de bafle qualité, dont elles puiflent fe procurer une confommation directe fans fe nuire, & empêcher les Négocians de Conftantinople de forcer les Marchands Drapiers du Bézcflein d'acheter les Draps de bafles qualités mêlés avee les hautes par forme d'aflbrtiment. On joint a cet effet un Etat de la qon-  $00 COMMERCE DE LA fommation des Londrins premiers &. Londrins feconds des hautes manufaóbures,que 1'Echelle de Smyrne peut vendre direclement fans faire tort a Conftantinople : C a Smyrne ■ • Ballots 60 a 80. 7 < a Scio - - - 15 a 20. V 150 Ballots. L & Btmjfe - - 40 a 50. j Deuxieme Queftion. _ ,i S'il convient de vendre les Draps en r, troc par anticipation, & s'il ferait poffi* „ ble de fe paffër de cette méthode?" La confommation des Draps qui viennent a Smyrne fe fait dans la ville même par le Bézeftein , ou dans les villes de 1'Afie Mineure, ou en Perfe par les Caravanes. Les ventes s'y font par 1'entremife des Juifs qui ont impofé un joug extrêmement dur aux Francais, de forte que l'on ne peut plus rien faire fans eux. Les acheteurs font de trois fortes; ceux du Bézeftein ou du marché pubüc, qui vendent & qui font quelquefois des envois au dehors; les étrangers qui viennent avee les Caravanes ; & les trr> queurs qui font tous Juifs. Les trocs fe font de deux manieresjde  MER NOIRE* 507 la main a la main, & par anticipation; ces derniers n étaient pas fi fréquens au* trefois qu'a préfent, paree qu'il y avait des Négocians dont la Caiiïë était forte & qui faifaient circuler plus de 300,000 piaitres: mais la difette d'argent qui regns depuis longtems dans le pays a réduit les Négocians a la dure néceffité d'avoir recours a cette facon de vendre, laquelle les a rendu efclaves des Juifs. Chaque Maifon Francjüfe a fon Cenfal, ou Courtier, quelquefois deux ou trois, tous Juifs; & l'on peut faire compte fur une centaine d'Israéiites au fervice feul des Francais. Ces Juifs uniquement^ encalculant fur 300 piaitres par an qu'ils retirent de bénéfke qu'ils font pour leur courtage , forment une trentaine de mille piaftresprifes fur le profit des Négocians: on ne parle pas d'une centaine d'autres juifs qui n'étant attachés a aucune Maifon en particulier, retire encore fes 300 piaftres; cela fait en total une fomme de 60,000 piaftres que les Francois payent pour fe faire voler. Tous ces Courtiers attachés aux Maifons, font en fociété avee les troqueurs qui revendent en détail les effets qu'ils achetent en gros du Négociant» qui  308 COMMERCE DE LA tranquile dans fa maifon ne vend de cette maniere que par 1'entremife de ces Juife: le Négociant ignorant ordinairement la langue du pays, ne recoit d'avis que par fon Courtier,ne fait, ne voit, n'agit & ne fait rien que par lui, ne profite que des occafrons que celui - ci fait naïrre & n'en profite encore qu'aux conditions qu'il plait au Courtier de déterminer; au lieu que les marchands du pays établis dans les Kans, les Bêzefleins, ou les Bazards, font a portée de faifir les bonnes occafions, de favoir toutes les nouvelle.'. & de profiter des haulfes & des baiffes des marchandifes. Enfin ces Juifs tyrannifent fi fort Ie Nég®ciant, & proportionnent la dureté de leurs condrions dans les trocs &Jes ventes au befoin plus ou moins fréquent dans lequel il fe trouve, paree que_ ces Juifs ont les fecrets de toutes les Maifons, font dépofitaires ces Fonds du gociant & favent tout 1'intérieurde fe3 affaires, qu'ils fe communiquent les uns aux autres; & fouvent le Négociant ne peut vendre fes Draps qui lui reftent en magafin, qu'après que les Juifs ont vendu ceux qu'ils ont pris en troc, foit de la main a la main, foit par anticipation: de forte que les Juifs étant maitres de  MER NOIRE. go£ tout, on vend les Draps a bon marché & l'on achete les marchandifes de retour trés cher, encore les a-ton de mauvaife quali é; & pour comble de difgrace, fi quelqu'un des Juifs maïtre de la caiffe'du Négociant vient a faire banqueroute, il entraïne néceffiuremenc celle du Négociant (*). La fuppreffion des trocs anticipe'3 parait impolfible; elle ferait même dangereufe a 1'Êtat & nuirait peut-être a la confommation. Le Commerce des Echelles de Conftantinople & de Smyrne eft différent 1'un de 1'autre: dans la première, la con- (*) Voyez ce que je dis ci-après au fujet des Juirs dans me.- Ohftrvatians fur le Commirce de l'JJl' de Candie, pour fe mettre a 1'abri des Vexations & des Banqueroutes des Juifs,& pour les tenirenrefpeél. On pourrait,quoiqu'en dife l'auteur de ce Mémoire, avee lequel je ne fuis pas d'accord fur ce point, leur oppofer les Arméniens établis a Smyrne, qui font auffi entendus, aufli inteiligens & auffi adifs que les Juifs, mais moins fattueux, plus fobres, plus économes, & paffent pour plus honnêres gens. C'eft ^ce que j'obfervai a MM. P, M , A , R, Sc autres Négocians de Smyrne, lors de mon féjour en céftê ville , & ils convinrent de la jufteffe de mes obfervations.  flle COMMERCE Dg LA fommacion eft fixe & réglée; dans la feconde , elle dépend de la faveur & de 1'induftrie des Juifs & le troc feul les mee 3l portée de la faire valoir. Smyrne eft .dans une difette perpétuelle d'argent, foit le Négociant, foit même le Juif. Celuici recoit la marchandife d'entrée en anticipation ; il fe fait des fonds a 1'avance avee un art dont le Négociant n'eft pas capable , & il fe met en état de fournir au tems de la récolte, les marchandifes de retour, dont il eft convenu avee le Négociant, fuivant le prix fixé par le confentement unanime des Nations: ainfi il n'eft gueres poffible de fe paffer des Juifs a Smyrne, ils ont 1'art d'endormir leur Chalands & de leur faire acheter ou vendre la marchandife dans le tems même que l'on en a le moins d'envie. Si l'on veut fe foustraire au Defpotifme des Juifs: vers qui fe tournera-t-on? Vers les Grecs, tout auffi fripons qu'eux; ou vers les Arméniens, qui font trés ombra» geux & moins coulans. Les Juifs fe voyant privés de faire notre Commerce & étant les maïtres de celui de Smyrne, fe vengeraient, en fe tournant vers les Étrangers dont ils faciliteraient la vente des Draps a notre préjudiee Sc en faifant tomber abfolument les nótres.  MER NOIRE. 3 n Peut - être que fi l'on faifait une re'partition générale des adrefles, diminuerakon en quelque maniere 1'inconvénient des trocs ? Alors les maifons n'ayant plus que le même nombre de ballots a vendre, & 1'émulation ceffant, les Négocians réfi* dans agiraient de concert & ne feraient plus dins le cas d'appréhender que les Draps des trocs revendus a meilleur marché ne retinffent les leurs en magafin: ils s'entendraient même pour n'en faire venir qu'a mefurede la confommation, &prendraient par la même raifon des mefures pour 1'arrivée fuccelfive des batimens. Par ce moyen & par le Coupement du prix ils priveraient les Juifs de 1'avantage, que leur donne la néceflité d'expédier des batimens envoyés fouvent hors de propos. Mais il ne fera jamais poffible de voir cela a Smyrne ; la jaloufie & la diffention y regnent trop entre les Négocians pour efpérer qu'ils veuillent fe réunir pour cet eftet, & certains Confuls pour fe faire valoir davantage a la Cour, fomentent fous main ces diffentions, afin de fe rendre néceflaires parmi les Négocians & même pour s'en faire craindre. Si l'on pouvait rendre les Courtiers publiés & obliger les Négocians de n'en  3i2 COMMERCE DE LA point avoir de particuliers, on pourrait alors abaiffer la frépotence des Juifs, laquelle elt monte'e a un affez haut dégré; comme auffi de propofer aux Courtiersde fe rendre folidaires les uns enversles autres, pour mettre la Nation Francoife a 1'abri des banqueroutes qui furviennent quelquefois chezeux. Mais tant que la Nation aura toujours fes fonds qui font affez eonfidérables entre les mains des Juifs. on nepourra jamais parvemr a les réduire, paree que ceux-ci n'étant plus maïtres de la Caiffe, feront, obligé^ de venir prier le "Négociant; ce qui eft le contraire a préfent. Al'égard de 1'établiffement d'une Caiffe folidaire d'Eroprunt , ielle qu'elle eft a Conftantinople; elle pourrait produire de trés bons effets, fi les Négociany de Smyrne étaient auffi unis qu'a Conftantinople. II faut rendre juftice a la générofité des Négocians de cette Capitale, & on leur doit même des éloges pour avoir offert a ceux de Smyrne de les faire participer au Crédit de la leur. Un pareil projet rabattrait encore beaucoup ia fierté des Juifs. Troi-  MER ft O I R E. 313 Treifieme Queftion. '„ Les Étrangers pourraient • ils imiter '„ nos Draps, & comment pourrait-on „ empêcher leurs fuccès k cet egard?" Les Anglais & les Venitiens font les feuls qui ont pris fur notre Commerce de Draps: les Anglais par fubftitution & les Venitiens par imita ion. Les Anglais n'ont pas réulfi; les Venitiens , au contraire , fe font foutenus par la médïocrité du prix & la parfaite imitation des nötres, Jbit clans la qualité, la couleur, la lifiere, la toilette ou enveloppe de chaque piece, &c. Ces Draps font vendus a Venife a tres bon marché, & ils peuvent convenir aux gens du pays pour les retours des marchandifes qu'ils ont la liberté d'y envoyer. Ainfi , en jugeant des effets des Anglais & des Venitiens pour la vente de leurs Draps par- fubfiitution & • par imitation; on doit conclure qu'il n'y a pas d'autre moyen que de diminuer le ptas qu'il fera poffible le prix de notre Draperie, en faifant fabriquer un tiers en fus de ce qui fe fait dans les Manufactures. O  314 COMMERCE DE LA Quatrieme Queftion. „ Si nous ne pourrions pas imiter les „ Draps des Étrangers, & quels feraient „ les moyens que l'on pourrait employer „ pour furpalTer leur Draperie ? " La Draperie moyenne du Languedoc efl: 1'article le plus important pour la Nation Frangaife : cette Draperie a fon caraclere particulier, procédant du fyftême de fabrication, établi par les Régiemens & notamment par celui de 1708. Les Anglais ont. leur attribution particuliere, confiftant en Mahouts& en Lnndns: envain tenterions-nous d'imiter ces derniers Draps qui font forts & groffiers, n'ayant pas les matériaux que les Anglais trouvent chez eux & qui leur donnent un avantage auquel il'ne nous efl pas permis d'afpirer. Si nous pouvions tenter de furpafler la Draperie Anglaife, ou venir a 1'imïter, ce ferait a 1'égard des Mahouts: ces Draps font de la plus belle qua-, lité & ne fe vendent point a Smyrne, ou du moins y en débite t-onune trop petite quantité: ainfi le projet de les imiter ne regarde gueres que Conftantinople , 011 s'en fait la plus grande confommation. II vaudrait mieux aufli fuivre le fyftême de  MER NOIRE. 315 la Nation Franjaife de Conftantinople , qui eft de perfecbionner les Draps de Languedoc au point de pouvoir les donner pour Anglais, en imitant pour cela leur lifiere, leur toilette & généralemenc tout ce qui eft capable de donner le change aux acheteurs. Cependant il conviendrait davantage de fe contenter de la fubftitution de nos Draps de Picardie & de Normandie, qui ont beaucoup plus d'analogie avee ceux d'Angleterre que ceux de Languedoc qui font d'une qualité toute différente. Quant aux Draps Hollandais on a repréfenté que ce qui procurait aux Amfterdamois h plus grande confommation de leurs Draps, était la néceffité oü fe trouvaient les gens du pays qui ont la liberté du Commerce direct en Hollande, de con> pofer les retours des marchandifes qu'ils y envoyent pour leur compte; puifqu'ils achetent ces Draps de la première main , & qu'ils y font de trés grands profits; au lieu que nos Draps Francais (outre le gain que le Négociant de Smyrne veut faire fur 1'homme du pays) fupportent encore celui que le Fabriquant de Languedoc a déja fait fur le Négociant de Marfeille. Peutêtre porterait- on un terrible coup a la Dra • O 2  3<ö COMMERCE DE LA perie Hollandaife, fi l'on fefait trouver au moins pendant quelques années, aux gens du pays, ces deux avantages, en leur permettant de fe pourvoir en France de nos Draps de Rouffèau, de Sedan & d'Elbeuf, qui font ceux que l'on peut a peu prés oppofer a ceux des Hollandais, en retours de leurs marchandifes d'envoï en Hollande, dont ils feraient paffer le produit en France en lettres de change, ou par telle autre circulation de fonds qu'ils jugeraient a propos. 11 parait que dans 1'exécution de ce projet, fi les habitans de Picardie donnaient aux Smyrniotes les Draps de la première mairi a un prix modéré, & que l'on en permït le tranfport en droiture du Ponent, notre Draperie prendrait peu a peu une entiere préférence fur celle des Hollandais; 1'Etat y gagnerait un furcroïc d'induffrie & la Navigation une augraentation confidérable de fret, & en diminuant ainfi a proportion Ja Draperie des Étrangers, ceuxci auraient moins de marchandifes de retour a demander au Levant, & leur concurrence nous y deviendrait a cet égard moins préjudiciable.  MER NOIRE. 317 Serges Impériales. Cette marchandife efl: prefque fombée h Smyrne: les Anglais & les Livournais nous ont porté coup, en faifant fabriquer de pareilles étoffes bien meilleures & plus belles; elles font a la vérité plus cheres, mais bien plus fines, plus ferrées & de* bien plus de durée que les nötres. Les ferges fe vendent a piece, dont chacune efl; de 32 a 34 pies: le nombre des pieces qui cömpofent la balie, efl arbitraire , mais la quantité de celles qui cömpofent l'affortiment efl; fixé. L'JJJbrtiment de celles de Franse] eji de 40 Pieces. Savoir: Ecarlate 7 Pïecei Piftache 6 Citr.on ....... 6 Ecarlate foncée ou Incarnat - 6 Verd Clair 5 Bleu Clair 5 Bleu de Roi 4 Noir - 1 40 Pu ces. O 3  31-8 COMMERCE DE LA' L'JJJbrtiment ie celles de Livourne eft de 30 Pieces. Ecarlate 10 Pieces. Fiftache ...... 3 Bleu Clair ..... 4 Verd Clair 2 Bleu de Roi .... 2 Citron ... - 4 Ecarlate foncée ... 5 30 Pieces. L'Affortiment de celles d'Angleterre efl de25Pieces, & compofé comme celui de Livourne, a 1'exception des cinq derrières pieces, d'Incarnat, paree qu'ils ne réuffiftent point dans cette couleur. Les rouges font cheres a caufe de la Cochenille que l'on y employé, & dans la vente en détail, elles différent des autres d'environ 3 piaftres par piece: les couleurs bizarres ne réufliftènt point. Le prix de celles de France eft de 12 piaftres la-piece, celles de Livourne de i<5 k 17 & celles d'Angleterre de 20 a 22: les Francais en débitent de 15 a 20 balles; les Livournais de 10 k 15 & les Anglais autant. Camelots cle France. Les Camelots de France réuffiffent  MER NOIRE. 319 affez bien; il y en a d'unis & de raye's: ces derniers fe vendent mieux que les autres. On en peut vendre 2 a 300 Pieces: rAffbrtiment des unis efl: compofé de rouge, ecarlate, blanc, bleu de Roï, bleu de ciel, rofe-clair, & foncé, violet, jaune, canarie, canelle & caffé. Les autres couleurs s'y vendent peu. Les rayés font les blancs & bleu-clairs, rouges & violets, piftaches & verds, jaunes & une petite raye noire; celles-ci réuffiflent mieux que toute autre. , Fez ou Bonnets. D en vient beaucoup de France & de Tunis: on a même contrefait en France ces derniers qui réellement font les meilleurs: ils fe vendent communément de 8 a 9 piaftres la douzaine. Ceux de Tunis les plus fins & les grands fe vendent depuis 6 jufqu'a 20 piaftres; les petits de 3; a 10 piaftres. Les Bonnets qui viennent de Tunis font plus eftimés que ceux de France, ou l'on n'a jamais pu atteindre au même dcgré de perfeóbion. La Laine de ceux de Tunis eft mieux préparée; ils font mieux travaillés, plus fins & plus ferrés: 04  §2o COMMERCE DE LA d'ailleurs nous n'avons jamais pu en attraper la forme. Papier. II en vient beaucoup plus de France que d'ailleurs. Celui de France efl de trois fortes: celui de 24; Papier - raifin;. & Papier de 14. Le premier fe vend de 15 a 17 piaftres la balie; le fecond vient en caiffe, on le vend par Rames de 1003 105 paras; & le traifieme fert pour les enveloppes & pour les épiceries &fe vend de 13 a 15 piaflres Ia balie. Amandes,. II ne vient des Amaades que de France en facs & en barils; il s'en confomme une trés grande quantité. Quincailleries. " On apporte a Smyrne des Quincaille» ries de France, d'Angleterre, nnis princïpalement de Venife qui les tire d'Allemagne: il efl inutile d'en faire ici le détail qui efl affez connu. Celles de Venife font les plus imparfaites Si a aJTez bon compte; celles de France  M E R NOIRE. 321 France font plus cheres, paree qu'elles font plus fines, & celles d'Angleterre qui font d'une extreme perfeftion, fe vendent hors de prix: il n'y a que les gens qui veulent avoir du bon & du parfait, fans s'embarraffer du prix, qui en achetent. Dorures £? Étoffes. 11 ferait a fouhaiter que l'on permk i tel marchand Francais que la Cour jugerait a propos de nommer pour venir s'établir a Smyrne, d'avoir une boutique oa un magafin,dans lequel il put vendre publiquement & en détail & en gros les Dorures, Galons Si Étoffes de foie, d'or & d'argent avee privilege exclufif, Sc qui retirerait tout le profit que font fur nos Négocians, les Juifs, les Grecs, les Arméniens & autres; auxquels nos Francais s'adrefient pour vendre leurs dorures & leurs étoffes. Un homme du métier qui travaillerait pour fon compte-, pourrait Faire ce que ne peut pas le Négociant, Le Commiffionnaire qui vend pour le compte d'autres n'a pas le même intérêt è fe donner la peine de bien vendre;. ce' lui qui ferait feul chargé de ce détail ap> grofondirait ce commerce & recherche?  .322 COMMERCE DE LA rait foigneufement tous les moyens d'en augmenter la confommation & les profits, & alors tout le benefice qui en réfulterait, reviendrait a 1'Ftat. Les Dorures viennent a Smyrne, de France, de Conftantinople & de Venife: ces_ deux dernieres font trés imparfaites; mais le bon marché fait que bien des gens en achetent & elles nuifent beaucoup a la confommation des nótres. On apporte de France, en Dorures, la valeur d'environ 10000 piaftres & prefqu'autant de Venife. II ne faut que des dentelles, de petits agrémens, & des franges de toute efpece. Les grands galons ne réuflifient point. II vient de Conftantinople une quantité confidérable de galons de trés bafle qualité en %on de Syflême, ou plutöt de rubans d'or & d'argent,qui fervent aux gens du baspeuple pour garnir de petites veftes extrêmement courtes , & aux femmes qui n'ont pas le moyen de fe fournir de beaux galons. Quant aux Étoffes de France, la confommation en eft trés peu de chofe; a peine en débite-t-on 30 a 40 pieces dans le cours de 1'année: il ne faut que des Étoffes ex'rêraernent légeres. II ferait  MER NOIRE- 323 a defirer que l'on put venir a bout de fabriquer des Étoffes pour les fubftituer a celles de Venife, dont la confommation efl: trés confidérable a Smyrne. Ces Étoffes font de trois fortes, des Damafquettes en foie & or, Dïbans & Draps d'or. Le débit des premiers efl un petit objet, on n'en vend gueres chaque année que 18 a, 20 pieces ; mais Ia confommation des autres eft de 1060 pieces dans le cours de "'année. On les vend au pic depuis 7 jufqu'a 9 piaftres & celles en foie de 3 k 7: la ville ri'en confomme qu'environ un fixieme, lè refte paffe dans les autres villes de Natolie. Florence &Meffine-font un commerce confidérable en étoffes de foie , tabis unis, a fieurs, & fatins. Les tabis a fieurs font un article de peu d'importance, mais les unis en revanche font un objet effentiel: il en viens de Florence environ 2 a 300 pieces par an & 3000' de Mefline; ces tabis viennent en caisfes. Les Affortiments les plus recherchés font: O 6  §24 COMMERCE DE LA De Florence. Incarnat 3 Piecss, BleudeRoi .... 2 Couleur de feu - - - 2 Bleu de ciel - - . 1 Citron - - . 2 Cramoifi r - - 2 12 Pieces. De MeJJine. Verd - 7 Pieces» Bleu de Roi - - - - 2 Citron .... 3 Verd clair - - - - % Piftache - - - - 1 Cramoifi .... 3 Noir - - - - r Bleu de ciel - - - - 1 Violet .... 2 22 Hieces. Le nombre des pieces qui eompofenc Ia caiüe n'eft pas fixé: il y ena dans lesquelles les aiTortïmens fjnt doublés &. triples: .ils fe vendent a. tant la veile de. cinq pies: ceux de Florence font pluseftimés, le prix en eft de 15 piaftres la vefte, & de ceux de Meffine de ia piaftres. Quant aux fauns il en vient 2 a 30a pieces de Florence, que l'on vendprefque toutes dans la yille; les couleurs les plus  MES NOIRE. S2J reeherchées font le blanc, Je bleu, le rofe clair, le cramoifi, le jaune & k violet. II paffe encore a Smyrne de ces petites étoffes de Scio, que l'on fabrique dans cette ifle. Indigo-, L'Indigo vient a Smyrne, de France, £T*Angleterre, de Hollande & de Livourne. Les Francais lont ceux qui en recoivent le plus. C'eft une marchandife bien fujette a la fraude. Les envois de cette marchandife ne font pas fixés & ne fe font que fuivant les fpéculations des Négocians. II eft des tems oü il en viendra 4 a 500 barriques par an; d'autres fois a peine en viendra-t-il 20 & quelquefois point du tout. Le prix en baiffe & haulfe fuivant la rareté ou 1'abondance & fuivant les révolutions qui arrivent en Perfe oü il en paffe une trés grande quantité, quand cet Empire eft en paix. La confommation de cet article qui fe vend de 5 a 8 piaftres l'ocque fuivant la qualité, ftrait affez abondante, 11 nos Négocians n'avajtnt pas 1'efprit de jalouiie & de diffention qui les defunit car fouvent lorfqu'ils ont fait un acte O 7  326 COMMERCE D E LA d'affemblée, cm ils auront juré de maintenir tel ou tel arrangement, ils y manquent fur le champ au préjudice des autres, fi cela leur con vient. Cette marchandife devrait être vendue au comptant, comme elle 1'était autrefois; mais la rareté de 1'argent oblige les Négocians de la donner en troc contre des marchandifes dont ilsorit befoin pour faire leurs retours. II n'eft gueres poffible de prendre des arrangemens fixes pour cette marchandife, fi les contrevenans reftent impunis, & tant que 1'union ne regnera pas entre les Négocians de Smyrne, comme a Conftantinople, oü la préfenee de i'Ambaffadeur contient le monde dans le devoir; cela provient de ce qu'a Smyrne un Conful eft fouvent baffbué, ou méprifé, ou partial, & foutient Jes uns contre les autres pour fe faire valoir, dè forte que les Négocians agiflent comme ils 1'entendent. Pour éviter tous les abus il faudrait que la Cour ordonnat que Ja vente de 1'Indigo fe faffë par une répartition en commun fuivant 1'ordre des envois: c'eft-adire que l'on ne puifle vendre 1'Indigo venu par un batiment, qu'après que celui  MER NOIRE. $27 du navire qui aurait précédé, aurait été entierement débité, & qu'a chaque vente on donnat a chacun fon contingent au pro rata de ce qu'il avait dans le chargement, & qu'en cas que quelque Capitaine Pacotilleur eöt de 1'Indigo, les Députés de la Nationa Smyrne s'en chargeraient & le leur payeraient au prix courant de la Place: que s'il n'y avait qu'une feule forte d'Indigo reftante en magafin, l'on entamerait 1'envoi ultérieur, pour pou» voir contenter les acheteurs & l'on ne pourrait vendre de 1'lndigo femblable du nouveau chargement a celui qui ferait refté;ouque l'on vendrait les deuxprincipales qualités d'Indigo bleu & violet indépendamment 1'un de 1'autre: & pour empêcher les contraventions des Négocians de France qui voudraient faire pasfer par main tiercé de 1'Indigo a Smyrne, afin d'empêcher qu'il n'entre en contribution , il faudrait leur infliger une amende & confifquer la marchandife au profit de la Chambre; enfin fuivant les occurrences on hauffërait & l'on baiffërait le prix de 1'Indigo pour empêcher que !es Étrangers ne profitent de 1'occafion de vendre le leur a un plus bas prix que le notre pour le faire tomber; ou l'on  3*8 COMMERCE DE LA acheterait le leur, lorfqu'ils en mettraiertt le prix au ■ deffous de fa valeur afin de fe rendre maïtre de cette marchandife, & que le profit de cette vente retourne en commun au profit des Négocians qui auraient de 1'Indigo en, magafin. II en vient de deux fortes; celui dè Moka, & celui des Golonies. Le Moka efl: de trois efpeces différentes, dont la première efl: réfervée pour le Graad-Seigneur,. & des deux autres l'on fait un Commerce confidérable. Ce Caffé vient d'Alexandrie, & il efl: difficüe de favoir pur: on le fraude au Caire & a Alexandrie, en le mêlant avee celui des Colonies dont 'es Marfeillois font paffes une trés grande quantité en Egypte.. Ce* lui d'Amérique fe vend parfabement bien dans les Etats du Grand-Seigneur, oü cette branche de commerce efl: trés confidérable. Sucre. Le Sucre qui vient a Smyrne efl de deux fortes, la Caflbnade & le Sucre ere pains:, l'on en porte beaucoup en Perfe  M-EB. NOIRE. 329 quand le Commerce eft libre: il ne vient de la Caffbnade que celle de la. première qualité, que Pon appellé Mofcovade, ïl faut obferver de ne porter du fucre en pains que de ceux qui font petits -T les gens dn pays les préferent aux gros, paree quand ils en achetent pour faire des Préfents, ils aiment a préfenter un plus grand^ nombre de pains & les donner plus petits , afin que le Préfent ait plus d'apparence. La majeure partie du Sucre vient de Marfeille: il en vient auffi de Livourne & de Venife, peu d'Angleterre & point d'Hollande: il en vient aufli d'Egypte, qui ne laifle pas que de faire tort au notre. Si l'on pouvait faire pour Ie Sucre ce que l'on a dit pour 1'Indigo, c'eft-a dire de le vendre en commun, on y trouve- * rait un bénéfke fenfible; cela empêcherait la difette & la trop grande abondance , qui nuifent toujours au débit d'un article. Cochenille. II y en a de deux fortes a Smyrne ; une de couleur foncée, ou de lie de vin, & 1'autre couverte de paillettes blanchitres, ou couleur de chaux..  33© COMMERCE DE LA La première efl: plas eftimée: elle fe vend bien quand elle eft parfaitement criblée & nettoyée, & vaut de 14 a 15 piaftres l'ocque. Les Francais, les HolJandais & les Anglais en font des envois confidérabJes; les premiers font ceux qui y en portent le plus; les feconds environ 4000 ocques & les derniers beaucoup moins: il en vient auffi de Livourne & de Genes en aflez grande quantité. La Cochenille a toujours été vendue fans être afiujettie a aucun arrangement. Bois de Teintures. II en vient de cinq fortes, le Fernan. buck, le Campêche, le Sainte Marthe, le BrafilJet & Ie Sapan. Toutes les Nations en recoivent, mais les Hollandais lont ceux qui en font le plus grand Commerce. Verdet. L'on n'en apporte que d'une efpece dans des facs de peau que l'on met enfuite dans des barils: il faut qu'il foit extrêmement fee pour être bon: il eft encore humide quand on Ie met dans les barils; mais cette humidité ne s'évapore point, tant que le baril demeuré ferme & les  M E R NOIRE. 331 facs bien ferrés & entalfés les uns fur les autres. II ne vient du Verdet que de Marfeille & de Venife, mais de ce dernier endroit en trés petite quantité. II fert pour lespeintures des maifons des Turcs; les Chrétiens ne pouvant employer cette couleur qui eft réfervée pour les feuls Mufulmans. Cinabre. II vient ordinairement de Hollande & de Venife environ 7 a 8000 ocques de Cinabre, que l'on vend communément de 4-4 a 4t piaftres l'ocque. Cérufe. II en vient beaucoup de Hollande Sc de Venife; celle - ci eft plus eftimée que 1'autre: la quantité que l'on y en porte va ordinairement a 1000 quintaux chaque année & fe vend de 8 a 10 piaftres le quintal, Sc quelquefois plus. Tartre. La majeurepartie du Tartre & la meilleure qualité vient de France, on en apporte aufli de Hollande & de Venife, mais fort peu Sc de mauvaife qualité :  fe» COMMERCE trE LA le débit en peut monter de 100 a 150 quintaux. Huik iïAfpk. Cette marchandife venait autrefois de Franceen aflez grande quantité & cela pouvait aller a environ 3000 ocques: on la vendait de 20 a 30 paras l'ocque^ mais il y a longtemsqo'iJ n'en vient plus; les Turcs la tirent de Negrepont & elle ne~ faut que 6 paras l'ocque, Camphre.. La plus grande partie du CamphY* vient de Hollande & quelque peu de Venife; le débit en eft de 1000 a 1500 ocques, & fe vend ordinairement de 3 4 4 piaftres l'ocque. Sublimè. II en vient de Hollande, de Venife & de Conftantinople; celui de Venife eft le plus eftimé: fa quantité eft d'environ 4 a 500 ocques: celui de Conftantinople eft vendu ordinairement un quare moins que celui de Venife & de Hollande.  MER NOIRE. 333 Arferiic. II en vient plus de Hollande que de tout autre endroit; on en apporte environ 4 a 500 quintaux par an: il y en a de blanc & de jaune; le prix en efl le même ; mais la confommation du blanc eft prefque le doublé du jaune. Ader, On en apporte de Suede, de Hollande, de Venife, de Triefte & d'Ancone: il en vient de 2 a 300 barils. Celui de Venife, d'Ancone & de Triefte eft de la même efpece & beaucoup plus recherché ; il vient en caiffes de 4 a 5 (fuintaux, en faisceaux. On en apporte année commune de ces trois places de 2 a 3000 quintaux. Etain. Celtu d'Angleterre eft plus eftimé que tout autre ; il en vient auffi de Hollande, tle France & de Livourne. Chaque vaiffeau Anglais en apporte 80 k ico barils; les Hollandais jufqu'a 6co barils par an ; les Francais peu; quant a celui de Livourne il eft tiré d'Angleterre.  3^4 COMMERCE DE L&< Plomb. Les Anglais. & les Hollandais en font un grand commerce,- c'eft un de leurs pnncipaux articles: il en vient quelquefois 8 a i oöoo pains de Hollande feulement; & 4 a 500 d'Angleterre: les Francais en apportent rarement & il n'en vient de Livourne qu'une trés petite quantité. Fer - blanc. 11 en vient d'Angleterre, de Hollande & de Livourne & quelquefois de France, mais trés rarement: cette marchandife eft en barils de 450 a 600 feuilles. Poivre* Tout Ie Poivre qui vient a Smyrne eft noir; quand les Turcs en veulent du blanc pour leurs confitures & opiats corroboratifs, ils font obligés d'aller chez 1'Epicier choiftr fur une certaine quantité de noir, les grains blancs que le hazard y a mêlés. Les Francais en apportent fort peu; cette marchandife eft un des principaux articles du commerce de Hollande & d'Angleterre, qui en débitent tous les ans environ 5 a 600 balles qui font de diffé-  m er noir e. 333 rentes grandeurs. Les grands pefent 335 ' livres, ce qui revient a peu prés a.3 quintaux de Smyrne: les petits font de 90 a 100 ocques. Gingenibre. Le Gingembre efl un affez petit objet; on n'en fait venir que par fpéculation: toutes les Nations en rejoivent, & les gens du pays qui ont la liberté du commerce en Hollande & en Italië, vont eux-mêmes s'en pourvoir. Le prix en varie beaucoup, La confommation peut monter a environ 300 quintaux. Les Hollandais ne font venir que du Gingembre eonfic, environ 40 petits barils. Giroffle. Les Hollandais en apportent environ 4 a 5000 ocques. II en vient peu des autres pays qui le tirent de Ja Hollande. Qn Je fraude ordinairement en mêlant le bon avee le mauvais, qui a déja paffé par 1'alembic & qui n'a pJus de fub- ■ ftance. Mufcade. Cette marchandife vient auffi de Hol-  33<5 COMMERCE DE LA lande , & Ton en apporte environ 3000 ocques chaque année. Canelk. Elle vient prefque toute de Hollande, s'entend la véritable de Ceylan. Les Hollandais 1'apportent en buftes ou fardés d'environ 30 ocques, & a peu prés 2500 a 3000 ocques par an. II vient auffi de la Canelle de Ia Chine & de la CaJJia lignea dont on mêle quelques parties avee celle de Ceylan. Salfeparéilk. II en vient de France, d'Angleterre, de Hollande, de Venife & de Livourne, mais beaucoup plus de Hollande que d'ailleurs. Pierredes. La confommation en efl: de trés peu de conféquence a Smyrne, qui efb plutöt le lieu de tranfit pour la Perfe, le Mogol & les Indes. Alep efl: a préfent 1'EchelIe oü elles viennent en plus grande quantité. Ce commerce eft entre les mains des Juifs & de quelques Genevois établis a Smyrne, fous la prótedbion de différentes PuiiTances. La confommation peut aller dans  MER NOIRE. 337 dans cette ville a environ 3 ou 4000 piaftres. On n'y débite gueres des pierres de 6a 7 au karat & par hazird quelques pierres d'une cenaine valeur. Seyillanes. C'eft une monnoye d'Efpagne qui eft marchandife; leur poids doit .être de 147 Dragmes ou Gros , les dix fept, c'eft-a-dire 2Marcs, 2Önces& 3Gros, Ón les vend a tant le Cent. Le prix en haufle & baiffë fuivant la'demandé; elles viennent en entieres, en derries,.en quart & en demi-quart. Plus il y en a de menues, moins elles font recherchtes: fi dans un fac de 500 Sevillanes, il y a la moitié de menue monnoye , le prix diminue de 1 & 2 pour cent, & fur un fac tout de menues pieces, la perte irait a 5 pour cent. Toutes les fevillanes paffent a Alexandrie; les Turca les acht tent des Francs, & les énvoyent en Egypte pour acheter le Caffé, le Riz, le Saffranum, le Lin. le Quina,&c. La faifon dans laquelle cn les vend le mieux, eft 1'été. Les Pélerir.s de la Mecque en apportent quelquefois a Akxandrie, qu'ils changent avee benefice.  33S COMMERCE DE LA Sequins Vénitkns. Ceft encore une marchandife: leur poids doit être de no Dragmes , ou Gros, le Cent, c'eft - a - dire 13 onces & 6 gros, ou 1 mare 5 onces & 6 gros; & chacun en particulier, 1 dragme ou gros & 6 grains. Ces fequins circulent dans tout 1'Empire Ottoman; partout ils pasfent fur le pied de 3 piaftres & 35 paras. A Smyrne, les Francs qui les recoivent en payement de leurs marchandifes, les prennent pour 3 piaftres & 38 paras & dans la ville ils paffent a 4 piaftres. A la Mecque ils font évalués a 5 piaftres; mais il n'y a pas pour cela de benefice pour ceux qui y en portent, paree que toutes les autres monnoyes y ont a proportion la même évaluation. COMMERCE DE SORTIE. Soyes. II y a plufieurs fortes de Soyes qui viennent a Smyrne de différéns pays. La première eft le Scherbafp, ou Bourme, que l'on recueille dans la Province de Guilan; c'eft la plus belle & la plus re-  MER NOIRE. 339 cherchée: fon prix ordinaire était autrefois de 50 piaftres le Batman de 6 ocques ; mais depuis la guerre de Perfe, elle efl montée a 64 & 05 piaftres. bi la Perfe recouvrait fa première tranquillité,on pourrait efpérerde la voir baiffer. La Soye Ardaffme vient de la Province de Guendjé; elle équivaut a peu prés a la Bourme, mais elle eft plus fraudée & le brin en eft plus lache: fon prix était autrefois de 35 a 40 piaftres le batman & aujourd'hui de jo a 55 piaftres. VArdaffe vient de la même Province, que celle ci - deffus, mais elle eft bien inférieure; on la vendait de 20 a 25 piaftres, & a préfent de 30 a 32. La Soye de Brouffe eft affez belle, mais inférieure au Scberbaffi. Depuis 1'interruption du commerce de Perfe, toutes les nations fe font jettées fur la foye de Brouffe, & 1'ontfait augmenter de 9 jufqu'a 22 piaftres le Teffé, qui eft un poids d'une ocque & 210 dragmes. (4 t$ ia onces). II vient auffi des foyes des Ifles de 1'Archipel, mais elles font pen recherchées; on les vend de 8 a 10 piastres le Batman. Les Francais & les Anglais fe rivaliP 2  g4© COMMERCE DE LA fènt pour 1'achat des foyes, & font ceux qui en achetent le plus. Le Francais achete toutes fortes de foyes, mais il préfere le i>cberbaffi & a fon défaut l'Ardajjine, & ne pouvant avoir ni 1'une ni 1'autre, il prend celle de BrouJJe. Les Anglais n'achetent que le Scberbaffi & la tirouflè, ils ne veulent point &Arda/fine. Les Tunifiens & les Alge'riens achetent beaucoup de foyes pour leurs manufaclures; ils apportent des fequins & payent comptant: ils pref-rent ï'ArdaJfine; mais depuis qu'il n'en vient plus, ils fe font jettés fur la Brcujje. Coton. On le diflingue en deux fortes; celui de terre & celui de mer: celui de terre fe recueilie en plufieurs endro'ts de la Natolie; mais celui de Kirkagadje eft le plus eftimé de tous. Celui de mer vient de Salonique, des If]es de 1'Arehipel, des Dardanelles, de Giüipoli, d'Enos & de divers autres endroits ; mais il n'eft pas fi eftimé que celui de terre. Le coton pour être bon doit être bien blanc, bien net & dépouilléde fa coque & de fes noyaux.  MER NOIR E'. 34,'ï Tout>es les Nations Europe'ennes achetent du Koton; les Francais en enlevene ' le plus; mais ils le veulent bien blanc 6\ bien net: les Hollandais le veulent au ïï bien blanc, mais non battu: les AngI lis en achetent de toutes les qualités , mus beaucoup moins que les Francais: les Venitiens le recherchent a peu prés de la même qualité que les Hollandais: il en paffe auffi beaucoup a Livourne, aGenes, a Ancone & a Triefte. Les Manufacbures de coton filé de plufieurs places de Turquie en font auffi une grande confommation: il eft vrai qu'unepartie de ce coton filé paffe en Chrétieneté; On évalue la récolte dü coton a 100,000 balles, dont la Chrétieneté en enleve 12000; favoir, les Francais 4000, les Hollandais 4000, les Anglais 2000, öt les Italiens 2000 : les 88000 balles de furplus font confommées tant par les Manufacbures de Turquie , que pour les couffins & matelas a la Turque, de même que pour les habillemens & pour d'autres ufages:le coton valait, il y a quelques années, de 16 a 18 piaitres le quintal; apréfent il eft monté jufqu'a 40 & audela.. La concurrence des étrangers, des P3 '  542 COMMERCE DE LA gens du pays & des marufaéburcs a été Ia caufe de cette révolution de prix: 1'imprudence de plufieurs de nos Négocians qui laiflaient accumuJer les batimens fur 1'EcheIIe & Ia ntceffité oü ils étaient de faire leurs chargemens a tout prix, a beaucoup gaté cette branche de Commerce. La France feule confomme 25 a 30000 quintaux de Coton; elle en tire 32000 de Smyrne, 12000 de Salonique & Je refte de la Syrië. II femble que cette quantité ne ferait pas difficile a trouver a un prix raifonnable, fi ce n'étak la concürrence des étrangers & Ia rivalité qui regne entre nos propres Négocians qui, s'ils voulaient agir de concert & fans émulation , trouveraient audela de leur nécelfaire en ne faifant venir 3eurs batimens que dans des tems opporluns. Ce qui nous nuit encore beaucoup dans Je Commerce, ce font Jes Juifs qui fe font abfolument emparés du Commerce des Cotons de Ja première main, lefquels ils ne tèchenc qu'au prix qu'ils veulent. Ce nefera donc jamais que par un concert unanime de tous les membres de Ja natjon francaife, fprojetbien diffici'e a exécuter, pour ne pas dire impoffible) que I on pourra faire Ja loi aux Juifs. Si 1'é-  MER NOIRE. 342 mulatïon celTajc entre les Francais, & qu'ils la fiffent naïtre an contraire chez les Juifs, les premiers rendraient ceux-ci leurs efclaves & les réduiraient a des profits plus bornés. Si l'on pouvait encore faire une répartitioti générale des adreflès, l'on établirait peut-être parmi les Négocians le concert qui eft abfola-, ment néceflaire. Coton filé. . II en vient beaucoup de difterens endroits : on le divife en Coton de Montagne & celui des Ifles de ï'Archipel. Celui de Mazti eft réputé le meiileur, & fè vend de 65 a 70 piaftres le quintal; celui de Guzel-hiJJar eft inférieur, mais fin & plus blanc & vaut fuivant i'afibrtiment de 58 a 70piaftres: celui de Montagne eft inférieur aux deux premiers, mais fupérieur a celui des Ifles & vaut de 42, a 50 piaftres; celui des Ifles eft de différentes qualités: il trompe beaucoup, fi l'on n'y fait attention. II vaut de 16 a so piaftres. Ce Coton filé paffe en FJollande, a Venife, a Livourne, & a Ancone.' ?4  g44 COMMERCE DE LA Coton filé Rouge. Cet article a eu un tems aflez favora» ble , mais il efl: tombé abfolument en France & il n'en eft plus queftion. Cependant il a fon mérite; fa couleur eft tenace & ne fe déteint jamais. Laines. La Laine eft un des principaux articles de Sortie de 1'Echelle de Smyrne: ileneft de trois efpeces: la furge eft celle qui eft tondue fur 1'animal vivant; la pélade eft celle que l'on fépare de la peau de 1'animal après qu'il a été écorché, öc la benarde eft celle qui tombe d'elle-même de 1'animal vivant. La furge eft la plus belle & la rneilleure, étant la plus fine; la pelade eft ordinairement chargée de chaux, & la batarde eft trop graisfeufe, mal propre & eft la moins eftimée. La Laine eft blanche ou noire;la b!an« che eft beaucoup plus fine & plus chere que 1'autre & la nouvelle eft toujours préférée, paree que plus elle vieillit, plus elle jaunit & devient huileufe. Les Francais achetent la Laine furge, & quelquefois  MER NOIR E; 345 quefois les Livournais: on en expédig beaucoup pour France de blanche & en* viron ioa 12 pour cent de noirë,fuivant les traités que l'on fait en 1'achetant. Les Floliandais en achetent aufli, mais n'en font point de commerce réglé. Les Anglais n'en achetent point du tout: les Vénitiens en - emportent quelques balles» La laine pélade refte en Turquie pour la fabrication des tapis-, des ferges, &c Les Francais n'en veulent point., paree qu'elle efl trés. chere a Sm\rne & que lx fortie d'une grande quantité ne ferait pas> permife: les Turcs la confervent pour' leurs manufaétures; mais il en va beaucoup en France de Conftantinople , ou* les Francais font leurs traités avee les; Courtiers qui vont la ramaffer dans les villages. La batarde efl achetée tant par les: Francais que par les gens du pays qui négocient en Icalie, pour 1'envoyer a Li-vourne: il en va trés peu en France. La noire efl achetée par les Barbare*ques pour leurs manufaclures; les Francais en achetent aulfi pour faciliter k; traite de la blanche. L'ufage efl d'enace pter 5 pour cent, Ge font toujours les Juifs qui 1'achetent: 'E 5  S4Ó* COMMERCE DE LA de la première main & en revendent enfuite aux marchands francs en troc ou par traités a 1'avance avee un bénéfice confidérable, paree que les Courtiers des itJaifons s'en fourniflent de ces Juifs brocanteurs, &que le Négociant penfe avoir meilleur marché & être mieux fervi de fon Courtier que des autres Juifs. Cette marchandife ainfi que beaucoup d'autres fouffre fon inconvénient dans 1'achat: on y a voulu pourvoir par des Régiemens qui font tous tombés & auxquels l'on n'a eu aucun égard au bout d'un certain tems; certaines circonftances feules pourraient décider s'il eft avantageux de 1'acheter en commun , ou de kiffer liberté entiere k ce fujet. Laine de Chevron. La meilleure vient de Mefchat en Perfe .* il en vient auffi de plufieurs endroits de la Natolie & de 1'Afie. Elle fe divife en rouge, en noire, & en grife: la noire efl la plus recherchée , la rouge vaut un tiers de moins que la noire, & la grife ne vaut que la moitié de la rouge. La noire fert a faire des chapeaux &  MER NOIRE. 347 conferve toujours la couleur, au lieu que Ton efl: obligé de teindre la rouge & la grife, quelqu'emploi que Ton veuille en faire. La rouge prend beaucoup mieux la couleur que la grife, c'eftpourquoi on la préfere. Toutes ces Iaines valent depuis 2 jufqu'a 5 piaitres le Tchéquis de 2 ocques: a 1'égard de celle de Perfe, elle vaut de 5 a 8 piaftres. Toutes les nations Européennes en achetent; Ja francaife plus que toute autre, elle recherclie Ia noire & n'eft point fl délicate fur Ja perfeébion du travail. L'Anglais ne prend abfolument que de la noire & la veut nettoyée: il en enleve par année § a óooo Tchéquis. Le Hollandais prend de toutes les qualités, mais en achete peu; cependant il en pafte beaucoup en Hollande par le moyen des gens du pays qui y ont Ia liberté du commerce. Le Vénitien nes'y attaché gueres; mais il en paffe autant a Vénife qu'en Hollande par les envois que les Smyrniotes y font. II en paffe a Livourne une grande quantité, plus de rouge que des autres: Ancone en confomme environ icoo Tchéquis. Cette marchandife vient en facs de 50 a 55 ocques par les caravannes de jnulets j & par celles de chameaux, en P 6  34B COMMERCE DÊ LA facs de 90 a 100 ocques, dont deux font la. charge. Poil de Qïevre. II y en a de deux fortes ; celui d''Angora & celui de Beï- Bazar. C'eft de toutes les marchandifes la plus difficile k, connaïtre & la plus fufceptible de fraude: celui d'Angora, en général, efl: plus eftimé que celui de Beï- Bazar: Ia laine en eft plus fine & plus facile a travailler-; cependant 1'autre eft plus blanc, paree qu'avant de le filer, on le lave au favon pour Ie dépouiller de fa craffe: il y en a de toutes fortes & les différentes qualités font en grand nombre. On avait propofé pour couper court aux malverfations & aux concuffions qui fe commettaient, que les Facteurs établis a Angora fe pouvoiraient de poils de chevre au meilleur marché poffible , moyennant une bonne Commiflion de 5 pour cent, & qu'ils les enverraïent tels qu'ils les auraient achetés en maffe; que Ie cerniffage fe ferait a Smyrne pour le compte de la Nation, ainfi que le partage; ou ce qui 'ferait moins fujet aux inconveniens, que l'on ferait paffer pour le  MER NOIRE. 340 compte commun, ces diverfes qualités h Marlèiile, felon la demande : mais ce projet qui avait paru d'abord plaire a nos Négocians, s'évanouit bientöt par cet efprit particulier & ifolé qui regne depuis fi longtems a Smyrne, chacun defirant, a 1'inftigation des Courtiers Jüifs qui fomentent fous main la divifion, prendre pour Marfeille ce qui parait leur convenir le mieux. Les Négocians de Smyrne fe plaignent de ceux de Conftantinople, paree que ■ceux-ci ont fait'des établiifemens a Ai> gora, auxquels ils ne participent point & leur enlevent leurs profits. Ils difent encore que c'était les Arméniens qui achetaient ces poils a Angora, qu'ils apportaient enfuite a Smyrne, & que les Francs les tenaïent comme fubjugués, paree que la néceffité oü fe trouvaient ces Arméniens de finir leurs affaires pour retourner dans leur pays , les forgait de vendre a tout prix, de confentir a des traités en troc dans lefquels le Négociant de Smyrne trouvait le moyen de s'avantager en fe débarraffant de tous los Cabas de fes magafins, dont il n'avait pu fe défaire aib leurs. L'on voit dans un pareil difcours une jaloufie. extreme envers 1'Echelle de iJ 7  35'0 COMMERCE DE LA Conftantinople, & un penchant excefllf pour la liberté & le fyftéme des troes. Le mal général eft dans 1'artifiee des Faóbeurs qui , après le cerniffage des poils & des qualités, font fouvent augmenter le prix courant de celles qui; font demandées, afin de gagner fur celles qu'ils ont en magafin. On remédieraita cet inconvénient par Ie fyftême de 1'achat en commun, qui ferait avoir a 1'Etat lespoils de chevre au prix fe plus rnodéré qu'il ferait poflible, en bornant le gain des Fa&eurs a une honnête Commiffion, Peaux de Buffles en Poil. Les Peaux de Buffles font un fort bon article de Sortie; elles viennent de plufieurs endroits de Ia Natolie & de la Ra» mélie ; elles font de diverfes grandeurs. Cel!e3 des males font plus eftimées; elles pefent de 45 a öo ocques & leur prix eft de 8 a n piaftres fuivant les différentes qualités. Gn les apporte a Smyrne telles qu'eiles ont été tirées de 1'animal avee le poil: on les fale feulement pour les confervcr & les préferver de la pourriture.  MER NOIRE. 351 Maroquins» II y en a de diverfes couleurs qui fe confomment dans )e pays; il en paffe en France 1500 a 2000 de jannes; prefqu'aulant en Angleterre: en Hollande il n'y en va que des bleus, & peu a Venife & a Ancone. Les Maroquins font de fix qualités différentes. Six peaux font un aiffortiment; on les vend 1'une dans 1'autre de 40 a 50 paras la peau. Cire. Plufieurs endroits de la Natolie fburniflent de la Cire; elle eft fort fujette a la fraude, de forte qu'il faut cafler les pairs, pour voir s'il n'y a pas dedans des corps étrangers. II en paffe a Livourne environ 1500 quintaux, a Marfeille de 7 a 800, a Venife de 3 a 400, a Genes de 6 a 700, en Angleterre & en Hollande 100 a 200, année commune. Le prix de la Cire eft ordinairement de 57 piaftres le quintal. Fruits Secs. C'eft un article aflez eflêntiel du Commerce de Sortie de Smyrne: il conüfte  gjfe COMMERCE DE LA en figues & en raifins; il en paffe beaci* coup en France, mais'bien davantage en Angleterre qui prend plus de raifins que de figues. Les Hollandais prennent indifférement des uns & des autres: il en va auffi a Livourne, a Ancone, a Venife & a Triefte. N-oix de Gatte. Les Anglais font ces 8c des mouchoirs de Moufleline peints qui ïont trés jolis que l'on tire d'Alep 8c de Smyrne.  ggf COMMERCE DE LA Camelots de 56 pies. On fabriquait autrefois ces Camelots qui étaient un peu groffiers, a Angora, & ils étaient achetés a Smyrne par tous les Européens, excepté les Anglais: ils fe vendaient de 22 a 25 piaftres la piece de 56 pies; mais depuis longtems il n'en parait plus a Smyrne, paree que l'on en fabrique par toute 1'Europe, de meilleurs. Èours de Magnéjte. Ce font ces étoffes connues en France fous le nom de Bours de Marfeille que l'on fabrique a Magnéfie: elles font de cotön, rayées de différentes couleurs & affez groffieres. Leur prix en eft depuis une piaftre jufqu'a 2j, la piece de 7 pies de long fur un de large. Les Francais en envoyent a Marfeille de 8 a 10000 pieces; les Anglais & les Hollandais,autant & plus; car quelquefois il en paffe fetilementen Hollande de 20 a 30,000 pieces: a Venife & a Livourne de 4 a 5000. Demittes êP Efcamittes. Ce font des étoffes de coton que nous appellons Futaine a Paris. La différence  MES.- NOIRE. 359 de ces deux étoffes efl: que 1'Efcamitte efl: fimple & la- Deraitte efl: croifée. Ces étoffes font fabriquées a Ménémen & k Scio; mais les premières ont le plus grand débit, bien que celles de Scio joient plus belles. Celles de Ménémen coütent environ 1 piaftre la piece d'environ 20 pies fur | de large. Toutes les Nations franques, furtout les Hollandais, en achetent une aflez grande quantité. Tapis de Turquie & de Perfe. , Lorfque la Perfe était tranquille , il en venait de magnifiques dont les Anglais & les Hollandais achetaient un trés grand nombre; mais les révoJutions de ce pays - la en empêchent la fabrication & le tranfport. II y en a d'autres que l'on fait dans plufieurs villes de Turquie & principalement a Salonique. Les Anglais öt les Hollandais font ceux qui en achetent Je plus, les Francais fort peu & ils ne Je font que quand ils font commandés par quelques particuliers riches. Bied. Le Commerce du Bied était autrefois bien plus confidérable qu'a préfent; les  36o COMMERCE DE LA Frangais en enlevaient jufqu'a 300 charcemt-ns dar s le cours-de i'année; mais apréfem il diminue beaucoup: en voici les raifons. ic. Avant le regne du Sultan Mahmout mort en 1754 & fous Achmet fon prédéceffeur, & 'furtout pendant le Miniftere du fameux Vifir Ibrabim - Pacha, quoique la Porte eüt défendu de tout tems 1'expurtation du bied hors de fes ttats, les contraventions étaient fréquentes & les Francais pouvaient aifément faire des chai gemens. paree que le Caphan - Pacha qui avait ure jurisdi&ion fouveraine dans tout 1'Archipel & fur toutes lesCötes maritimes de l'Emp:re üttoman, ne fortaic que trés rarement de Conftantinople avee la flotte. Tous les Agas & Vaïvodes permettaient en conféquence 1'exportation dub!ed,ma'gré les punitions de quelquesuns d'entre eux qui étaient vendus & trahis: mais a prélent que le CapitanPacha fort chaque année, il n'eft plus fi facile de faire ce manege, & les Officiers Turcs font plus fur leurs gardes, de peur de sVxpofer aux avanies que cet Amiral recherche avee emprefiement les occafions de leur faire tndurer, afin de pouvoir fournir aux Préfents immenfes qu'il eft obligé  MEK. NOIRE. 361 öbiigé de faire pour fe foutenir dans fon pofte. 2 \ Les forties fréquentes du Capitan* Pacha , ont ruiné la plupart des la» boureurs qui cukivaient les Ifles, ainfi* que les Cotes Maritimes; ce qui a obligé plufieurs de ces cultivateurs de fe retirer, & en a fait diminuer le nombre,de même que la quantité de grains. 3?. Le Grand-Seigneur a entrepris Ie commerce de bied pour le compte du tréfor impérial, & fait faire un nombre infini de chargemens pour être vendus a Conftantinople, a Scio, a Smyrne & dans les lieux principaux de fadomination. 4?, Le peu de numéraire qu'il y a fur Ia place de Smyrne, eft encore une raifon que l'on peut alléguer de la diminution du commerce de bied que l'on ne peut plus acheter qu'au comptant. Néanmoins cela n'empêche pas que l'on nefaffe encore quelques chargemens, mais ils font a préfent bien moindres que par le paffe. II y a trois endroits auprès de Smyrne oü l'on va faire des chargemens de bied : le principal eft Tchandavli, les deux autres font Menemtn & Guzelbiffart outre d'autres petits endroits dont on tire le bied par le moyen des bateaux du pays qui le portent oü on le défire.  C0MM2RCE DÊ LA Quand un batiment part de Smyrne rjpour aller charger dans quelqu'un des endroits ci-deffus, le Capitaine traite du ^chargement avee un de ces Agas qui a ,du bied en magafin , & qui envoye a Smyrne pour chercher a le vendre. Le marché fe conclud a Smyrne & le Capitaine n'a que la peine d'aller 1'embarquer. Le prix du bied efl; ordinairement de i J piaftre le quilot de Conftantinople, de 2 a ocques. Huik. . C'eft de Mételin que l'on tire 1'huile qui paffe en France: il y a dans cette me un Négociant établi qui y fait les foncbions da Vice-Confalpour les intéréts de la Nation & eft en même tems Commiflionnaire & Facteur de la plupart des Négocians dë Smyrne. La bonne huile fe confomme dans la Turquie. L'huile a favon paffe a Marfeille & fait un des principcux articles du Commerce de Sortie de Smyrne. L'Ifle de Mételin peut fournir aujourd'hui 55 a 60,000 quintaux d'huile commune. C'eft 1'abondance , ou la difette d huile a Gênes,en Candie & en Morée, qui détermine la quantité que les fabricants de Marfeille tirent de Mételin j Bocaflins bleus de Magnéfie, * piaftre ld. Buis, 2 piaftres le quinltal.' j Buffles (peaux de) les 10 payent - 1 p"f Cambrefine eftimée, 5 piaftres lal piece. ï ^ ditaManneri, 8 piaftres ld. \ 5 dito grofliere, i\ piaftres ld» J Camelots obfcurs de 32 pies payent la table 4 P7S- Caffé d'Alexandrie, de 6 afpres l'ocque , de 80.------- - 1 p1 Cire jaune Ie quintal jopao Coton en laine, la balie ■- - - - - 3op~*ri Coton filé de toutes fortes, le quintal aoparï Cordouan & Maroquins eftimés, = piaftre la piece - ^3 pfl Cuirs falés, 5 afpres la piece de 80 afpres - 1 p'41 Q.5  370 COMMERCE DE LA Tarif: Marchandifes d'Entree. Gouds, évalués 10 piaftres lel quintal 'i Cotonine de France, 25 piaftres | 3 Ia piece J Draps Londrins feconds & Lon- dreslarges, 3 piaftres la piece, c'eft 15 piaftres le ballot de iel pieces. La piece pa'.e - - 3 pr< Draps de toutes qualités facon d'Angleterre, la piece - - - - 3 p < Draps de Carcaftbnne, St. Pons, & Paris, la piece - - pre Draps Pinchinats, la piece - - - * p:e Itain en verge, évalué 1 piaftre 1 le quintal. Geroffles, 5 piaftres l'ocque. Gingembre, 12 piaftres le quintal. Gomme laqué, 75 afpres l'ocque. dito Carachatis, 4 piaftres ld. dito Gumbut, 24 piaftres ld. , Huile d'afpic, 33 afpres l'ocque. 3 Pï Indigo de St. Domingue, 2^ piastres l'ocque* slito de Guatimala, 3 piaftres ld. Noix mufcades, 3f piaftres ld. Papier de i4&de 24.J io piaftres le ballon* }  MER NOIR E. Tarif: Marchandifes de Sortie. Demites de Menemen, \ piaftre. la piece 3 1& Encens, évalué 22 piaftres iequinO Efcamite, 1 piaftre la piece. ' dito de 20 pies, 30 paras la piece. ^ * Eponges, 20 piaftres le millier. J Fil de chevre,5 afpres l'ocque, c'eft-a-dire 20 ocques payent 1 pre^ Galbanum, 1 piaftre l'ocque - - % p^ Galles de toute efpece, 15 afpres le quintal de 80 afpres a la piaftre Gommes de toutes fortes\ piaftre^ l'ocque. Indiennes & Bocaftins | piaftre la \ 3 p;.^ piece. . ) dito de Perfe 3 piaftres ld. j, Laine de mouton tant fine que grofïiere, 12J afpres le quintal de 100 afpres a la piaftre. Laine de chevron , 25 paras le~j quintal. dito rouffes, 7 piaftre ld. Maftic, 3 piaftres la caifiê. ,. "Moncayats, 4,piaftres la table de 3 F*° • 40 pies. dito bleus, 4 piaftres la table de 20 pies. Q,<5  372 COMMERCE DE LA Tarif: Marchandifes d'Enlréé. Perpetuanes, i piaftre la piece. t , Plomb, 4 piaftres le quintal. i 3 P«5 Poivre, 3 piaftres le fac gros &1 petic. Quina, 1 piaftre l'ocque,. Soufre, 5 piaftres le quintal. Sublimé, 3 piaftres ld. Salfepareille, 3 piaftres ld. Sucre en pain , 25 piaftres ld. ' Tartre, 5 piaftres ld. ^ 3 P-° Toile de trois, 1 o piaftres la piece. Verdet, 1 piaftre l'ocque. Vitriol, 7 piaftres le quintal. Caffé d'Amérique. 3I- piaftres les 100 ocques. Manne, 2 piaftres l'ocque. j Outrg ces Droits, le Douanier exige encore comme on 1'a dit ci-deffus, uo Agio de 2| pour cent. au - dela la douane. t|ue l'on a.payée.  MER NOIRE. 373 Tarif: Marchandifes de Sortie. dito de Terfin, 4 piaftres la table"! de 60 pies. 't o Opium, 60 paras l'ocque. \ Rhuba'be, 4 piaftres ld. J Scamonée, 37 piaftres l'ocque. ï Saffiran, 5 piaftres ld. Salpetre, * piaftre ld. Storax liquide, 10 paras ld. Sérnencine, 1 piaftre ld. i> g-p?, Sené, 1 piaftre ld. Tutie, 1 piafire ld. Turbit, 1 piaftre ld. Thérébentine, 1 piaftre ld. J Les Vaquettes payent 1 afpre de 80 a la piaftre. Les Soyes quelconques ne payent point de doua»ne de Sortie, 0. . 7  3.74 COMMERCE DE LA E T A T Des Droits qui fepergoivent a Smyrne temt pour la Chambre de Commerce de Marfeille, que pour l'Echelle. La Ciiambre. Les batimens qui chargent des marehandifes pour Marfeille, ne payer £ rien a Smyrne; la Chambre exige fes Droits a Marfeille. Les batimens qui chargent des marchandifes pour fltalie a Smyrne, pour Ié droit de Ia Chambre de Marfeille; favoir j Le Droit de Confulat a %\ pour cent fuivant I'eftimation du Tarif ci - deffus. Le Droit de Cottimo. Les Vaifleaux - - P«, 133: Les Corvettes & Pohcres - 128: 33. Les Keichs, Barques ou Pinq. 91: 67. Les Brigantins ou Tartan. 45: 83*. Les batimens qui vont charger des denrées dans 1'étendue du Confulat ,s ne  mer noire, 375 E T A T Des Droits qui fepergoivent h. Smyrnz tant pour la Chambre de Commerce. de Marfeille, que pour VEchelle.. L'E c bl e l l e. Les batimens qui chargent pour Marfeille , payent k Smyrne 1'avarie de l'Echelle a li pour cent fur I'eftimation d'un Tarif que l'on a exprès pour cela, dans lequel I'eftimation eft beaucoup moindre que ce que les marchïndi'es coütent réellement, afin de favorifer le Commerce. Les batimens qui chargent des marchandifes pour 1'Italie, payent 1'avarie de l'Echelle comme ci-deffus. Les batimens qui vont charger des denrées dans les dépendances du Confii-  37<5 COMMERCE DE LA La Chambre. payent rien k Smyrne pour la Chambre; qui en exige les Droits k Marfeille. Les batimens en Caravane payent » Smyrne pour la Chambre 2 pour cent de» Confulat fur le Nolis qu'ils font, & lorsqu'ils font noiifés d'entrée & de fortie l'on n'exige que 1 pour cent a cette Echelle, & a celle pour laquelle ils font deftinés, on leur fait payer 1'autre,. Autrefois le Vice-Conful a Scio rendait compte des 2 pour cent de Confulat qu'il exigeait ftfr les Nolifemens qui s'y faifaient: mais depuis quelque tems il jouit de ce Droit: les autres lui ont toujoursappartenus en propre. NB. Les chofes font changées, il rfa plus rien que 1500 livres de fixe.  MER NOIRE. 577 L'E C H E E L E. Jat de Smyrne,payent a l'Echelle i j pour cent de Droits fur le fonds, eftimé beaucoup moins afin de favorifer ce Commerce : ck lorfqu'ils vont charger hors des dépendances de ce Confulat, ils m payent que la demitaxe du batiment, comme il fera expliqué ci • deflbus a 1'article de la, Caravane. Les badmens en Caravane payent a l'Echelle le Droit que l'on appellé ra demi ■ taxe; favoir: Les Vaifleaux - - - P s. 25 * Les Corvettes, Polacres & Keichs 20 f Les Barques, Pinques, Brigant. öf. Tartanes - - 15 * L'Echelle n'a jamais exigé de Droits a Scio, a moins que l'on ait impofé des avaries extraordinaires: en ce cas le ViceConful en rend compte aux Députés de la Natipn a Smyrne.  37? COMMERCE DE LA Droits que le Commijfwimaire ck° Smyrne exige du Commetiant ds Marfeille. Le Réfident fur l'Echelle paffe h Douane fans s'avantager de rien. Les Droirs de Cenferie ou Courtage font palfés par la Réfident dans les eomptes qu'il envoye de même qu'il les paye; favoir: ( Sur la vente de toutes les marchandifes d'entrée i pour cent. Sur les achats de celles de Sortie | pour cent. Sur les achats de celles qui viennent de Perfe i pour ceni. Quand il fait en troc, marchandifes contre marchandifes, - pour cent fur celles _q.nl donne & ^ pour cent fur celles qu'il recoit. Sur 1'argent qu'il emprunte j pour cent. Le Réfident ne profite de rien; i! donne au propriétaire le bon poids qui fe trouve, & lui bonifie auffi les tares d'ufage. fes tares d'ufage fur les marchandifes d Entrée & de Sortie n'ont lieu que fur les articles fuivans; favoir:  MER NOIRE. 375 Sur- les Soyes, le vendeur bonifie pour les ligatures des maffes , 20 dragmes par chaque batman, qui efl compote de. 2400 dragmes; la tare de la chemife du ballot de 12 batmans, 1200 dragmes , fuivant 1'ufage, quoiqu'elle n'aille qu'a 105a ou 1100 dragmes, ce qui eft un profit. S'il fe trouve dans les foyes des fourrures, ou des foyes tachées, il y a une. feconde tare réglée par les Experts. Sur la Sémencine 10 pour cent pour la tare & la pouffiere. Sur la Rhubarbe 4 a 6 pour cent pour la tare, qui va même jufqu'a. 8, quand elle efl chargée. Sur la Gomme Ammoniac, on convient d'une tare qui eft arbitraire fuivant la qualité. Sur le Galbanum, on convient auffi d'une tare. Sur la Tude de même, pour la pousfiere. Sur laScammonée 300 i 550 dragmes de tare pour un pain de 15 a-16 ocques de 400 dragmes chaque. Quant aux autres Drogues, on fait une tare nette des facs & des caiffes. A 1'égard des Laines de mouton , quoiqu'elles foïent cern'es, on les paffe-  S§Q COMMERCE DE E A encore par la main, en les metcant dans les facs; il en eft de même des noix de galle & des poils de chevre : pour ce dernier article, quand il n'eft: pas bien travaillé & bien ner, on oblige le vendeur de Je faire palier par Ja main une Jèconde fois. Pour ce qui regarde !es autres articles qui ne font point fujets a être cernis, il n'y a point de tare; on les achete a vne& fi la qualité eft-belle & bonue, on Ia rejoit; fi elle ne vaut rien, on la laifle. Sur le Poivre, \ pour cent de tare pour la pouffiere* Sur le Sucre en pain, 2 pour cent de tare pour le papier & la ficelle. Sur la Cochenille & 1'Indigo, il n'y apoint de tare; ils viennent grabellés de Marfeille; on ne fait de tare que pour Ia barrique. La tare des tonneaux de Sucre blanc eft réglée a io pour cent. II y a une forte de bonne mefure fur les Toileries, Indiennes. Demittes , Efcamittes & Bours: on les achete toutes a. ptieces. f Les Draps fe vendent fur les Eehantillons: la regie fe fait fur 1'aunage de la liaébure:. fi Tacheteur enfuite trouve du,  MEK NOIRE. gSl taanque dans 1'aunage, le vendeur le lui bonifie. Le Réfident prend fes Droits de Ccrnmijjim tant d'Entrée que de Sortie -; favoir: Sur la vente des marchandifes d'Entrée 2 pour cent. Sur les Ltttres de change tirées de Marfeille & qu'il paye, 2 pour cent. Sur la vente des piaftres fe villanes 1 poureent. Sur les Lettres de change tirées de Conftantinople, de la Cannée <& autres Echelles , d'ordre & pour compte da Commettant de Marfeille fur les fonds que le Réfident a en caiffe provenant de la vente des effëts du Commettant, 2 pour cent. Si la Lettre eft tirée de la Cannée ou autre Echelle pour en prendre le rembourfement fur Conftantinople, 1 pour cent. Sur les fonds complets pour les chargemens de bied 2 pour cent. Sur les chargemens d'huile 4 pour cent, dont le .Réfident en donne un a celui qui eft commis pour les recevoir au lieu da •hargemeat: il en refte 3 pour lui.  fgftt COMMERCE DE LI Sur les achats des tnareharidifes de fortie 4 pour cent. Aü moyen des ufages ci • deffus le Réfident eff obligé de ne paffer dans les comptes de vente & d'achat que les mêmes frais qu'il a débourfés. Monnoyes d'or, avee leur évaluation an pair en argent de France. Séquins Fondouküs valent 440 afpres qui, a raifon de 120 afpres pour 1 piaftre, font 3 piaftres & |, lefquelles évaluées a 3 Livres de France font - L. 11. <= j NB AuJyuriïhui ils zakte 465 Demi-féquins Fondouküs, 220, afpres - - p 5.10.* Séquins Zingerlis de Conftantinople valent42o afpres. « 10.15. f Séquins Zingerlis du Caire valent 330 afpres. - * 8. 5, * Séquins Zermabbouts, la même chofe que ceux du Caire. « 8, 5. # Demi - féquins Zermabbouts, j 6j afpres - - « 4.2.6. Séquins Touralis de Conftantinople, 390 afpres * 9. 15. « Séquins ÏWa/wdu Caire, 315 afpres - - - 7.17.6.  MEI 'NOUE. 3$$ Séquins de Tunis, Tripoli, Alger öc autres lieux de la Barbarie, 300 afpres. - L. 9. 15. » Demi-féquins Barbarefques, 195 afpres - - 4. 17. f5. Quarts de ces féquins a 971 afpres. - - * 2. 8. 9. Monnoyes d'Argent. La piaftre de 120 afpres ou .40 paras évaluée - L. 3. « „ Jfelottes 90 afpres - - #2. 5. * Demi-piaftres, 60 afpres- » i. 10. * Demi - Ifelottes, 45 afpres - 1. 2. 6. Quarts de piaftre, 30 afpres » s 15. Huitiemes de piaftres , 15 afpres - - , * 7. 6. Paras, 3 afpres - - » - 1. 6. Afpre - - * " 6. Le Thémin eft une petite Monnoye d'Allemagne & vaut 10 afpres ou 5 fols de France. Mefures. La Mefure de toutes les EtofFes es Turquie s'appelle Pic; le Pic fe divife an Archin, 6t en £.ndazè; celui-ci fert  ^24 COMMERCE DE LA de mefure k toutes les étoffes de coton , & 1'autre a celles de laine & des foies. II faut a peu de chofe prés un pic trois quarts pour faire 1'aune de France: le pic étant de 25 pouces. Le quilot de grains pefe 22 ocques. Poids. Le Quintal efl de 100 Rottes & la Ror.e de 180 dragmes; ainfi le quintal de Turquie pefe 1377 ffide France poids de mare; la livre de 16 onces & 1'once de 8 dragmes ou gros. Le Batman , eft le poids dont on fe fert pour pefer Ls Soies de Perfe: il eft de 6ocques, ou 2400 dragmes, qui fonjt de France 18 ft 12 onces. Le Tcffé eft le poids pour pgfer les Soies de Brouffe; il eft de 610 dragmes, qui font 4 tê 12 onces. Les Tchéquis de Iaines de chevron font de^ 800 dragmes chaque, ou 2 ocques, qui font 12^4 onces. Le Tchéquis d'Opiunr eft de 250 dragmes, qui font 2 f8 5 onces 2 gros. Le Tchéquis de Corail efl de 100 dragmes , qui font 12 onces 4 gros. L'ocque rc^rini. HZ 4u ffeti t fCC Poir-^n.-. = /3 g J$ i - = Asa 3,iït)Z!Ji - y*!*-* - 4 Sc -. t.ytxo. - ■/->a.M.sh.a.lii/& - ó vie* . J8P3ÏZ. - Kwm.-. 4S eti Ui,7,S.  MER NOIRE. 385 Vocque efl de 400 dragmes, qui font 3 ffi 2 onces. La Zioïïe efl de 180 dragmes,qui font 1 $ 6 onces 4 gros. F I N.  S8Ó COMMERCE OBSERVATIONS SUR LE COMMERCE D E L'JSLE DE CANDIE, EN MDCCLXIV. Si l'on confidere 1'état aétuel du Commerce de Mie de Candie, il paraït défefpéré fans aucune apparence de retour: mais effcce par des moyens auffi violens que ceux que l'on a propofés, que l'on prétend le rétablir? Au lieu de guéfir le mal & d'y appüquer des remedes, on veut 1'empirer totalement par la iuppreffion des deux Confulats de 1'Ifle, des Officiers & la rédu&ion des Maifons Francaifes a la Cannée. Je ne parlerai point ici du Commerce de la ville de Candie, oü il n'y a gueres d'apparence pour le préfent de rétablir les chofes fur 1'ancien pied, & je parlerai  DE CANDIE. 387 encore moins de Rélimo, oü n'abordenc point depuis trés longtems de batimens Francais. Je conviens que la crife oü fe trouve le Commerce de cette Ifle, efl a fon dernier période; mais on peut par une conduite toute différente de celle qu'ont tenue les Confuls de ce Royaume, parvenir a rétablir un Commerce qui par luimême efl affez avantageux, & qui pourra le redevenir confidérablement par lafuite, & enfin guérir des playes qui ne font pas incurables. Je penfe qu'il n'efi pas jufle que pour une interruption momentanée, comme Fa trés bien obfervé M . Berryer (*) en réponfe ala Lettre du Conful a Ia Cannée du mois de Mai 1761, ort abandonne fi facilement cette partie sd'oü l'on peut tirer encore de trés grands avantages. Car tant que l'on voudra toujours fuivre le même Syflême, je prévois qu'avant qu'il foit deux ans, tout fera fini pour nous dans cette Ifle fans jamais pouvoir nous relever. Le Commerce d'Entrée & de Sortie (*) Alors Miniftre de Ia Marine. R 2  383 COMMERCE de ce Royaume efl trop connti pour en parler> Je n'entrerai point dans des répétitions inuiles, mais je vais effleurer quelques points relatifs a cet objet. Le Commerce d'Entrée & de Sortie de cette Iile peut aller en bonnes & mauvaifes années de 250 a 300,000 Ecus, avee un bénéfice courant de 20 pour cent & même de 40 a 45 fur nos Draps & le re!"fe a proportion, & peut par conféquent entretenir cinq afix Maifóns * majs faute de connaïtre la valeur du Commerce & le caractere des gens du pays, on s'y efl ruiné & l'on s'y ruinera toujours: c'eft ce dont MM. de la Chambre du Commerce de Marfeille fe font toujours plaints & avee jufte raifon. Plufieurs chofes ont concouru au dépériflement de notre Commerce dans cette Ifle: d'un coté la trop grande avidité des Négocians Francais, 1'imprudence de plufieurs d'entre eux , Ie fafte & la mauvaife conduite de quelques autres & la condefcendance trop facile de certains Confuls; d'un autre cöté, les Grecs & les Turcs de cette Ifle qui ont conftruit plufieurs batimens appellés Londres qui vont a voile & a rame, qu'ils font conftruire a la Sfachie fur la Cöte rnéri-  DE CANDIE. 380 dionale de 1'Ifle; & de plus les permisfions que l'on a accordé a plufieurs Capitaines Francais de vendre leurs batimens aux gens du pays, dont ceux-ci fe fervent pour faire la Caravane & même li courfe contre nous; d'oü il,eft a craindre que les Turcs ayant une fi grande fa:ilité pour conftruire des batimens, & en acheter d'affëz gros, ne s'en fervent pour prendre 'e parti d'étre corfaires & s'ériger en République , comme a Tunis , a Alger & a Tripoli;c'eft aquoi ils vifent: la faeilité de MM. de Ia Religion de Makhe a accorder des fauve - gardes & des permifïions de naviguer, moyennart un certain tribut que lts Turcs appellent pubüquement le Droit de St. Jeance qui les met en état de faire en toute fureté les voyages a Malthe même, de toute la Grece, de Conftantinople, de Smyrne, de Syrië, d'Egypte, de Barbarie, de Triefte, de Venife , d'Ancone & de Livourne, & fait qu'ils vont fe pourvoir eux-mêmes dans ces derniers endroits, de draps, de ferges impériales, de tein; tures ik d'autres marchandifes de notre cru & de celui des autres pays, que nous ne pouvons plus leur fournir, & qu'ils y portent en retour leurs huiles, leur favon, R 3  390 COMMERCE leur cire, leurs foyes; &c. ce qui nous porte un préjudiee confidérable, foit pour notre propre commerce, foit pour notre Caravane qui n'eft plus employée; tandis qu'autrefois ils n'ofaient point s'éloigner de la Cöte. A quoi il faut encore joindre 1'abondance extraordinaire des batimens Ragufais qui nous rivalifent& ont gaté la Caravane par le bas prix du Nolis: enfin ce qui nous fait tort, ainfi qu'a la Marine du Roi, c'eft la quantité de nos Matelots , Pilotes & Capitaines démonfés qui fervent furies batimens étrangers, tels que les Impériaux, Ragufais & autres; même certains Francais mariés & établis dans les Ifles de 1'Archipel qui font Patrons de Barques Grecques, ou Turques, fans être Rénégats. Tous ces objets réunis ont abïmé totalement notre Commerce, & fi ]'on ne prend pas des précautions convenables pour y porter remede, il eft a craindre •qu'avant deux ans, comme je 1'ai dit cideflus, nous ne foyons totalement écrafés & ne puiflions jamais nous relever. Les moyens pour parvenir au rétabliffement de notre Commerce ne font pas bien difficiles a exécuter & ne font nullement onéreux. Si les Confuls de France avaient tenu  DE d A N D I E. S9E la main pour empêcher nos Négocians de prêter fi aveuglemerit leur argent aux Turcs du pays, qui s'en font fervi a notre préiudice,pour acheter des brens-fonds, élever des favoneries, conftruire des batimens & faire le négoce fur nos bnfees; 51 n'en refulteroit pas que cet argent qai a fervi a nous nuire dans notre commerce , demeuré encore pour la plus grande partie entre leurs mams, & w eit brefqu'impoffible de le retirer , meme avee perte des deux tiers du Capital & quelquefois des trois quarts, malgré les Fermans & les ordres de la Porte que 1'Ambaffadeur de Sa Majefté a obtenus: & lorfqu'il s'eft agi d'en faire le recouvrement, quefle fermentation cela n'a-t-il pas occafionné dans le Pays? Ceux que l'on a forcé de payer en partie, ont ete nos premiers adverfaires & a nous jetter la pierre, comme a fait le Muphti de la Cannée qui eft encore débiteur & qui profita des brouilleries du Conful aftuel avee le Pacha, lors de la malheureufe affaire du Brigantin Francais,le Canaiy ,& de la Bombarde Danoife,pour faire foulever tous les autres débiteurs, en les excitant ainfi que la populace, a nous maffacrer, ou tout au moins a nous expulfer; ce qui a occaR 4  392 COMMERCE fionné a la Nation Franjaife une avanie trés confidérable qu'il a fallu payer. Malgré les ordres du Grand - Seigneur, il ne paraït gueres poffible de retirer lerefle, fi l'on ne veut voir renouveller les fermentations & peut-être des Vêpres Siciliennes. D'ailleurs je doute trés fort que l'on puifle jamais parvenir a une liquidation parfaite, qui ne pourra fe faire qu'avec une peine infinie. C'eft pourtant une chofe a laquelle il faudrait donner une fin, pour recommencer un nouveau Commerce & 1'établir fur des fondemens plus fofides. Si les Confuls avaient encore tenu Ia main a ce que nos Négocians ne fiflent point de monopole & des amas trop confidérables d'huiles au préjudice les uns des autres, en la faifant renchérir; s'ils n'avaient pas témoigné de la partialité pour 1'un plutöt que pour 1'autre, ce qui a augmenté la ja'oufie de Commerce a laquelle ils ne font malheureufement que trop portés; & enfin qu'ils euflent empêché le mariage de certains d'entre eux avee des filles du pays, qui ne leur apportent qu'un grand fonds d'orgueil, de fafte & beaucoup de mifere, avee toute la parente qu'il faut encore entretenir; ce qui  de candie; 393 qui les jette dans des de'penfes au • defius de leurs facultés; alors on ne verrait pas ' les Francais fi écrafés qu'ils le font dans cette Ifle & ailleurs, & ils feraient plus refpeclés, L'on ne voit que trop de ces mariages clandefiins & de confcience, furtout a Smyrne, oü prefque tous nos Négocians font mariés de la forte par 1'entremife & a 1'infligation des RR. PP. Capucins,qui fe mettent au-defliis des regies. II ferait trés uti'e d'agir comme les Hol'andais de Smyrne, d'ordonner de faire publier les Bans en Chancellerie pour la validité des mariages, & d'empêcher que les moines & les prêtres du Levant qui font tous fous la proteóbion de la France ne marient les Francais fans 1'intervention des Confuls & fans la publication des Bans en Chancellerie; que les Ordonnances du Roi de tö"20, 1039, Arrêts de Mars 1684, Juin 1691,& notamment 1'Ordonnance du mois de Mars 1697 fur 'e fok des mariages foient en vigueur dans leLevant, & que ces mariages faits ainfï clande-inemc nt foient déclarés nuls de plein droit, foit-la, foit en France. Je trouverais encore moins d'inconveniens a permettre aux Négocians Francais R 5  394 COMMERCE qui feraient marie's en France de mener leurs femmes avee eux dans le Levant, que de tolérer qu'ils fe marient avee des Grecques:les Francaifes font plus économes, plus attachées a leur ménage que les Grecques, qui aiment beaucoup le luxe & le falie, fe ruinent en habillements fomptueux & en bijoux, & reftent toute la journée affifes fur leurs fophas, fans s'embarraiTer du foin de leur maifon: par ce moyen on couperait court a beaucoup de libertinage & a des dépenfes inutiles. II faudrait encore pour la bonne regie & le bon ordre foumettre tous les moir.cs établis dans le Levant a la difcipline de l'Eglifc Gallicane, fans leur permettre de dependre de Rome dont ils reconn iiflent plutót 1'autorité que celle duRoi, quand ils croient que cela convient a leurs intéréts , & il conviendrait de les obliger a prendre leurs Pouvoirs de 1'Evêque dc Marfeille. Enfin il faudrait fairé revenïr ceux c'emre les Négocians qui, ayant fini leur tems, ou ne faiï'antplus rien fur l'Echelle, foit par 1'expiration de leurs permisfions, foit par la diffolution de leur Société, ou la faillite de leurs Majeurs ou  DE CANDIE. 395 Commanditaires, ne font que de la dépenfe dans ce pays - la & s'y ruinent de plus en plus, en faifant tous les jours de mauvaifes affaires, ou qui, fous prétexte de ne pouvoir trouver d'embarquement, re Rent encore malgré le Conful & le Mini ftre & coniinuent le Commerce au préjudice de ceux qui viennent les remplacer ; fauf a prolonger les congés pour ceux qui fe conduiraient avee plus de prudence & qui feraient en état de faire fleurir Ie Commerce & de Ie foutenir: enfin il faudrait abolir entiérement lespermilïions que l'on donne a certains Commis foic-difant fondés de Procurations, d'aller au Levant fous prétexte de recueillir les Effets des Négocians décédés ou faillis , Öl dont on devrait charger ceux qui ont droit de réfidence. Pour ceteffet,il ne ferait pas hors de propos que les Confuls envoyaffent. tous les ans un Mémoire détaillé des opérations & de Ia conduite des Négocians, avee leurs réflexions fur la nature du Commerce de leur Echelle & fur tout ce qui fe paffe, afin de mettre tout d'un coup la Cour en état de décider des partis que l'on doit prendre , des arrangemens & des mutations qui devraient s'enfuivre. R 6  39Ö COMMERCE D'ailleurs , il eft inouï que MM. de Ia Religion de Malthe aecordent des fauvegardes & des permiffions aux Grecs & aux Turcs défignés fous le nom de Grecs & de Mainottes, foie direclement en leur nom , foit fous celui du Prince deM >naco & le'galifées par le Grand -Maïtre, moyennant un modique tribut de cinquante pia'lres par batiment, payables en cire ou en argent: on en a envoyé les preuves a la Cour: tribut bien modique & bien moindre que celui qu'ils retireraient de la prife de ces batimens qui font eux-mêmes notre Commerce & Ie rument, ainfi que notre Caravane. Un feul mot de la Cour remédierait a cet inconvénient. D'un autre cö*.é encore, on efl furpri3 que l'on ne falfe point contenir les Ragufais dans les bornes de leurs Capitulations avee la Porte, qui ne leur a permis qu'une einquantaine de batimens en tout pour faire le Commerce des Etats du GrandSeigneur; tandis que dans un an de tems, dans le feul Port de Ia Cannée j'en ai vu aborder prés de cent. Que ne doit-ce pas être dans les Echelles plus confidérables ?■ De tous les Étrangers qui fe font effbrcés de traverfer notre Commerce & notre Caravane, les feufe Ragufais y ont plus  DE CANDIE. 397 contribué que tous les autres. On en a vu 1'exemple du tems de 3VI-. de Villeneuve, notre Ambafladeur a Conftantinople ,• ils empêcherent 1'exécution de la permiffion que nous avions obtenuedu Minit'iere Ot« toman de faire naviguer deux Tartanes francaifes que nous voulions envo\er dans la Mer Noire , tandis qu'Hali-Pacha Héchim • Oglou était Pacha a Trébifonde, par le canal de fon Médecin qui étaic Ragufais. II efl vrai que Ie Confulat de Candie pnraït aflez inutile: il n'y a plus qu'un feul Francais appellé Jean - Louis Clcrgle , déja fur 1'age, qui s'y efl marié avee une fiile du pays & qui ne fait plus, rien, notre Commerce y étant abfolumenc ruiné. II ne ferait befoin dans cet endroit que d'un feul Francais établi pour recevoir lesDroi.sdes batimens,vifer le» Patentes des Capitaines, & qui pourrait y"travailier pour fon compte & être Ie Correfpondant des Négocians de la Can-. née pour la traite des huiles & autres marchandifes de Sortie & pour la vente de nos Draps & autres chofes de notre crü; fauf a éiabiir deux Maifons fi lecas 1'exigeait: a«'ec ce moven on épargnsrait la dépenfe de trois Oificiers,Qui font le Vi-  393 COMMERCE ce - Conful, le Chancelier & le Drogman , tous trois pour le préfent trés inutiles & trés a charge a la Chambre qui ferait fort aife d'en être débarraffée. S'il était nécelTaire d'établir un Drogman, on prendrait un homme du pays qui, pour cent piaftres, remplirait ce pofte. Alors ce ferait le Conful de la Cannée qui ferait chargé des affaires de Candie & donnerait fes ordres au Négociant qui y ferait lafigurede Vice-Conful. Mais fi la Cour juge plus a propos de laiffer fubfifter le Vice-Confulat de Candie, on pourrait y envoyer annuellement un des Négocians de la Cannée, que l'on renouvellerait tous les ans; il logerait chez le Conful & y aurait Ia table & Je logement a la place du Chancelier quei'on peutabolir fans aucun inconvénient & dont la place ferait remplie par le premier Drogman de cette Echelle fans honoraires, attendu que les Polices, les Patentes des Capitaines & autres menusDroits leur en tiendraient lieu. Le Négociant qui fera établi a Candie, y ferales fonóbions deDéputé.de Receveur & de Commiffionnaire de ceux de la Cannée. Quant k Rétimo, c'eft un Juif que Ie Confu! de Ia Cannée y 3 établi fous 1'a-  DE CANDIE. 39$ grément de la Cour, pour y faire la figure de Vice - Conful & y vifer les Parentes des batimens francais qui pourraient y aborder (ce qui eft aflez rare) & recevoir les Droits du Confulat. Jl faudrait en faire autant a la Sfacbie, oü nos batimens abordent quelquefois. 11 n'en eft pas de même de la Canne'a qui fe trouve fur le paffage de France a Smyrne & a Conftantinople, a 1'entrée de 1'Archipel & voifine du Golphe de la Sude. Notre Commerce y eft plus confidérable, & il eft abfolument néceflaire qu'il y ait toujours un Conful pour plufieurs raifons trés eflentielles. Primo, pour contenir le nombre des Frangais qui y demeurent, & qui, s'ils n'y ont point de Supérieur qui les retienne da'ns le devoir, s'y ruineront les uns_ les autres: 2°. & cette raifon eft aflez importante ; les vaifleaux du Roi qui relachent affez fréquemment a la Sude , ont befoin d'un Officier établi par Sa Majefté & reconnu pour tel par le Grand-Seigneur & les Puiffancesdu Pays,tel qu'un Conful de France, pour leur faire donner tous les rafraichiffemens néceffaires; chofe que les Négocians ne feront pas auffi bien, paree que la jaloufie fe met-  4-0O COMMERCE trait entre ces Négocians &que celui qui ferait alors le Député acbuel & repréfenterait conféquemment le Conful voudrait feul retirer le bénéfke qu'il ferait fur les provifions deftinées a 1'Efcadre; ce qui porterait les autres a le traverfer fous main pour les lui faire acheter plus cher, comme le cas efl quelquefois arrivé; ce qui caufe un préjudice confidérable aux vaiffeaux du Roi & fait fouvent manquer les approvifionnemens: les Négocians par une fuite de leur jaloufie ne voudraient peut - être pas fournir les fonds nécelfaires pour cet effet,, n'étantpas poffible qu'un feul Négociant de la Cannée ait les facultés affiz fortes ni peut-être affez de crédit pour fe charger feul de cette dépenfe: au lieu que le Conful par fon^autorité retient ces Meffieurs dans le devoir, les oblige de fe foumettre pour le fervice de Sa Majefte & peut obtenir plus facilement un crédit au nom de la nation: en6n cette jaloufie regnerait fi fort entre les Négociants qui refteraient & celui d'entre eux qui ferait la figure de Conful, qu'il ne leur ferait plus posfible de vivre en paix & ils feraient obligés de tout abandonner, paree qu'or.linairement les Capitaines francais & prin-  DE CANDIE. 401 cipalement les Caravaneurs donneront toujours plus volontiers la préférence a celui qui fait la figure de Protecleur. II n'y a point de comparaifon a faire du Royaume de Morée a celui de Candie. Dans celui - la les Francais fe font mieux comportés & y font aimés & regardés : dans celui - ci, nos Négociants ont agi différernrnent; ils ont prêté leur argent & l'on fe moque d'eux. En Morée il n'y a gueres d'Officiers Turcs fupérieurs dans les villes de Coron, Modon, Napoü de Romanie, oü réfident nos Confuls, qui y ont bien plus d'agréments, ainfi que les Francais, que l'on y regarde de meilleur ceil. Les Turcs fe tiennent éloignés de ces villes; au lieu qu'a la Cannée c'eft un Pacha a trois queues qui y gouverne; c'eft un Officier fupérieur qui, accoutumé a un Pouvoir defpotique, croit que tout doit plier fous fa loi, & qui fouvent s'embarrafle fort peu des ordres de fon Souverain. D'ailleurs le peuple y eft trés mutin, peu porté pour nous & vendu aux Anglais, qui dans cette derniere guerre (terminée en 1764) nous ont pris beaucoup de batimens qu'ils font venus vendre a la Sfachie & dans d'autres endroits de 1'Ifle, ainfi que les.  4&i COMMERCE Cargaifons, a un pris tres modique & fur iefquelies les gens du pays ont fait des profits immenfes. Combien de traeaöeries na-t-on pas efluyé lorfqu'il s été queftion de fournir en 1760 le biscuit a 1'Efcadre de M. de Pannat, qui fe trouvait bloquée par les Anglais dans le Goiphe de la Sude; on a penfé voir une rébellion & le peuple criait déja que l'on voulait I'affamer. Un Négociant qui quelquefois eft en compte courant avee hs Puiflances du pays & qui craint de perdre fes avances, ferait • il en état & en droit de tenir tête comme un Conful a un Pacha & a une populace effrénée? II arrivé auffi que lorfqu'il n'y a pas de Conful dans l'Echelle, & que Ie Deputé eft chargé feul de la dépenfe, il enfie fes Mémoires, qu'un Conful fur les lieux eft plus en état d'approfondir: mais s'il veut être honnête homme, les autres Négocians qui font chargés de revifer les Comptes & qui n'ont pu 1'engager a groffir les dépenfes pour en profiter, par jaloufie biffent fans miféricorde des articles qui font dans l'exacle vérité, comme cela eft arrivé au Sr. Iieybaud, Négociant, dans 1'intervalle du départ de M. M.... & de 1'arrivée de M'. P... Les  DE CANDIE. *©3 vérificateurs s'étaient récriés fur la dépenfe & avaient rayé deux articles que le Mi ■ niftre & la Chambre du Commerce de Marfeille ont reconnus pour véritables & qu'ils lui ont alloués. D'après cela l'on voit que s'il n'y a point de Supérieur qui maintienne la fubordination parmi les Nationaux , ceuxci ne pourront jamais fe foutenir & le fervicedu Roi en fouffrirait. D'ailleurs il y a plufieurs gens a la Cannée qui font fous la proteétion de France & qui font corps vis-a-vis d^s Turcs: ces gens-la n'ayant plus de Protecleur en la perfonne d'un Conful de France, ne voudront point reconnaïtre un Négociant qui fe trouve, ainfi qu'eux , expofé aux avanies d'un Pacha & des autres Puifiances; alors ils iront groflir le parti & fe mettront fous la proteótion du Conful d'Angleterre, qui 1'eft en même tems de 1'Empereur , du Roi des Deux Siciles & des Républiques de Venife & de Hollande. Je ne parle point du Conful de Ragufe, Jean-Marie Stuly, fujet de cette petite Répubüque, que les Turcs regardent comme un Raya; ni de celui de Dannemarc , Angclo Sponti, Grec de Candie; non plus que d'un Juif, Conful de  40+ commerce Suede. Le Conful d'Angleterre ManolacM Michieli eft unGrec des environs de Smyrne ; c'eft tout d;re: depuis qu'il eft a la Cannée, i! n'a laifJe paffer aucune occafïon fans faire de la peine a nos Confuls & a nos Nationaux: l'on en a vu des preuves non équivoques dans la malheureufe affaire de la Bombarde Danoife qui ne ie rcgardan en rien; affaire que j'ai fuivie depuis le commencement jufqu'a la fin öi dont certaines circonftances, fi elles eusfent été connues, auroient mis quelques perfonnes dans 1'embarras. II engageait fous main' le miférable Palas, Agent des Anglais d'Alep, Subrecargue de ce batiment, & le Kiaïa du Pacha, fon com* patriote , a pouffér les chofes a la derniere extrêmité & a nous faire maffacrer tous par la populace de la Cannée. Si les Protégés & les Baratairesde. France venaient a groffir le cortege du Conful d'Angleterre qui ne demanderait pas mieux, les Turcs ne manqueraient pas de nous méprifer , quand ils verraient que nous ne pouvcns plus protéger perfonne: alors il ferait inutile aux Francais de venir s'établir a la Cannée, paree que fDrement ils n'y feraient plus rien. Comme on peut facilement en impofer aux Turcs par le fafte  DE CANDIE. 405 & la hardiefle , il faut que le cortege d'un Conful foit nombreux, lorfqu'il rend des vifites de cérémonie. Le feul moyen que l'on voye pour remettre le Commerce fur un bon pied dans 1'Ifle de Candie, ferait avant toutes chofes de faire liquider au plutot & même avee perte, (car on ne pourra 1'éviter) toutes les Dettes aclives & paffives, & enfuiie de renouvelJer toutes les Maifons & de n'en établir d'abord que trois ou quatre tout au plus de nouvelles, fans lailTer aucune des anciennes, a I'exoeption du Sr. Couloumb qui efl au« jourd'hui Ie feul en pied, pour inftruire fes nouveaux venus. II ne refle p'us avee lui que les Sieurs Dulac & /lbtille qui n'ont point de Mayeurs; les Srs. Carejje, Sibou ; les freres Reybaud ayant manqué; le Sr. Bcraud eft mort infolvuble; le S'". Ricard efl parti poar St. Jean d'Acre: s'il refte encore lors de ce re* nouvellement quelque chofe a liquider , il en faudra faire charger les nouveaux employés. Par la fuite on pourra augmenter Ie nombre des Maifons, & plus il y en aura de bien montées, plus elles feront en état de fe cottifer pour les befoins de l'Echelle, du Confulat & des  4üü C O M M ö R C E Efcadres, fans avoir befoin de recourir k des Emprunts qui emportent toujours une ufure trés forte , Jaquelie monte aujourd'hui a i3 pour cent; ce qui ruine lEchelle. Quant aux mefures a prendre pour Ie Commerce de Ia Cannée, qui a toujours été & fera toujours Ie plus confidérable de 1'ifie, chacun des Négociants Ie fera en fon particulier pour fon compte propre & celui de fes Mayeurs, lorfqu'il s'agira de la France; mais a 1'égard de celui avee Fétranger, on penfe qu'il ferait avantageux pour les Négocians qu'ils le falTent en commun, afin de fe rendre maitres du Commerce de 1'lfle, en la fourniffant de tout ce dont elle aurait befoin, par le moyen de nos Caravaneurs qui exporteraient les marchandifes du crö du pays dans les Etats du Grand-Seigneur & y apporteraient d'autres marchandifes ncceflaires, comme coton, lin, cuivre, riz, legumes , poiffons fecs & falés , beurre, grains, bois; &c. fans parler de celles de notre crü, furtout les Draps qui viendraient a chacun de {nos Négocians par envois réglés & repartis: c'efl: fur quoi l'on infifte. A 1'égard des marchandifes du crü du  DE CANDIE. 4pjr pays propres pour nous, 1'huile eft le plus important article. Serait-il a propos que les Négociants en faflent 1'achat eij commun ou chacun en particulier ? Ce ne feront que les circonftances & le tétabliflement de notre Commerce qui pourront décider cette queftion. Si nos Négocians 1'achetent en commun, il n'y a point de rifque qu'ils en coupent le prix par anticipation, pour 1'enlever aux marchands Turcs & Grecs, & en faire de plus grands amas. Si cette huile ne pafte pas toute en France, elle fera exportée pour le général a Livourne , a Triefte, a Ragufe, &c. dans lefquels lieux nos Négocians auraient attention d'entretenir des correfpondances en droiture; mais fi chaque particulier fait 1'achat pour fon compte propre, il faudra défendre févérement le monopole, (ce qui fera bien difficile a empêcher) afin que chacun puifie favoir au meilleur marché. Voila pourquoi 1'achat en commun ferait préférable. Pour ce qui regarde les autres marchandifes, comme Ia cire, la foye, la laine &c. il faut laifler liberté entiere. L'on confidere encore une chofe dans Fachat des huiles en commun. (Mais i]  4oS COMMERCE faudrait que le Conful fftt trés impartial entre les Négocians ik qu'il procurat entre eux 1'union & la concorde fans y femer la divifion comme font quelquesuns de ces Officiers, foit pour fe faire valoir davantage, foit pour fe rendre redoutables) C'eft que chaque Négociant trouverait a point nommé au rriagafin général de quoi remplir fur le champ la commiffon de fon Majeur, & il ne fe trouverait pas expófé a garder longtems dans le Port un batiment qui lui aurait été expédié , ou a le renvoyer a vuide , comme je 1'ai vu arriver; ce qui fouvent entraine la failüte & du Mayeur & du Correfpondant. L'union qui regnerait entre tous les Négociants de l'Echelle, leur procureraït 1'avantage de fe rendre maïtres des huiles, auxquelles ils mettraient leprix, & lorfqu'il arriverait que les gens du pays auraient befoin de cette marchandife pour remplir fur le champ une Commiflion , ils feraient cbligés de recourir aux Francais qui y mettraient le taux le plus avantageux pour eux, & ce qui ne manquerait pas d'arrï ver, c'eft que nos Négocians étant les maitres des huiles, ils deviendraient les correfpondans de tous les étrangers,  D E G A N D I E. 40$ gers, Trieftins, Livournais, Ragufais Öz autres, & feraient de trés belles affaires , paree qu'infailliblemenc on leur adreflerait tous les batimens de ces paysla pour avoir les huiles a meilleur marché & pour ainfi dire de la première main. L'abondance des affaires furvenant, les Maifons Franeaifes ne manqueraient pas de fe multiplier & cela influerait fur le commerce de Candie, qui alors pourrait fe relever & entretenir fes Officiers & des Maifons. II efl: bon d'obferver que le commerce des huiles va rede venir trés floriflant a la Cannée;les manufacbures de favon commencent a tomber& a diminuerconfidérablement, paree qu'a Athenes, dans la Morée & a Mételin, on fait a préfenc du favon presqu'aufli beau & aufli bon que celui de 1'Ifle de Candie & que l'on donne même a meilleur marché. Ces nouvelles manufaflures ne manqueront pas de ruiner les autres. Cette branche de Commerce des Turcs & des Grecs qui nous portait un préjudice notable, va enfin s'anéantir, & fera par conféquent tomber le prix des huiles; alors nos négociants pourront fe remettre & fe trouver les maïtres abfolus du commerce de S  4IO COMMERCE cette Ifle, qui n'efl pas a dédaigner, ers prenant, comme on le propofe, les mefures convenables pour leur en aflurer la poflefflon. L'on obfervera encore que fi. k Porte vient a rompre avee 1'AIlemagne & principakment avee la Ruflie; le commerce de favon tombera totalement en Candie, attendu que le plus grand débouché de cet e marchandife fe fait par la Mer Noire. A 1'égard de notre Caravane, elle ne pourra que gagner & devenir floriflante, étant für & certain que les gens du pays qui ne pourront plus faire le commerce du pays par eux-mêmes, nous donneront toujours lapréférence pour nos batimens, fur les Étrangers , comme il efl: conftamment arrivé;on 1'a vu encore en 1761, k 1'occafion du tranfport des munitions de guerre pour cette ifle: le Capitaine Saillant & deux autres Capitaines francais dont je ne me reflbuviens plus du nom, ont été préférés a Conftantinople a des Capitaines Impériaux & Ragufais, bien que les batimens deceux-ci fuflent francs, hors d'infulte de la part des Anglais & d'un plus grand volume que les nötres & qu'ils demandaflent un prix au deflbus de celui de nos Capitaines, Les Turcs étant per-  DE CANDIE. 411 fuadés &ayant toujours éprouvéque nous entendons mieux la marine que tous les autres Étrangers & même mieux que les Anglais, pour lefquels ils font plus portés que pour nous, vu qu'ils rifquent trop ; alors notre Caravane prendra abfolument Je deffus fur toutes les autres, & l'on pourra par ce moyen acquitter les dettes du Confulat & celles de la Nation qui font aflezconfidérables, & donner enfindu benefice a la Chambre du Commerce de Marfeille, qui eft fort gênée dans ces tems malheureux pour 1'entretien pur & fimple des Officiers de cette Echelle. Je ne parle point des Corfaires de Tripoli, Dukigno, Maina & autres qui traverfent beaucoup nos navigateurs,en leur enlevant leurs provifions, cordages, bouflbles, &c. & qui quelquefois même ehlevent des Francais qui s'embarquentimprudemment fur des barques du pays;_ ces gens ne refpeótant ni paffe - ports, ni pa« tentes, comme il efl arrivé 1'année derniera 1762 au pauvre Etienne Touramede Martigues, qui paffait fur une barque de la Cannée pour la Morée, que ces bandits ont maffacré inhumainement & enfuite jetté a la mer; ce dont on doit rejetter la faute fur le Pacha attuel de la Cannée & fur le S a  412 COMMERC E Liman-Reïs, ou Capitaine de Port, Jtgent des Tripolins qui n'en feront jamais panis. Ces brigands enlevent même des batimens francais, comme a fait encore demierement le fameux Reïs Skard de la Seine en Provence, Rénégat francais, commandant une frégate de 36 a 40 pieces de canon &d environ 200 hommes «équipage; lequel a pris un batiment francais commande par le Capitaine Bu ■ èon, Provencal, venant d'Alexandrette, qo'il a envoyé a Tripoli en Barbarie, fous prétexte qu'il était Génois, quoiqu'il eut Patente de France. L'on pourïait contenir tous ces bandits dans le devoïr, en nepermettant plus que MM. de Malthe donnent a 1'avenir desPatentes & des Sauvegardes. Mais le plus trifte pour nous eft.qu'on ne punit pas des Grecs & des Turcs, qui arment en courfe contre nous fous Pavillon Anglais, fouvent même fans aucune Patente, & principalement les Sfachwtcs , redes de ces anciens Crèuds r qui font les plus méchants de cette Ifle & qui ne font aimés ni des Grecs (quoiquedelamêmereligion)nides Turcs, qui n'ont jamais pu les réduire a I'obéilfance;. 1 kur Canton efl un pays hériifé de monlagnes & deprécipices, oü cinquante hora-  DE CANDIE. 413 mes peuvent facüementendétruire mille, & chez lefquels tous les mauvais fujets de 1'Ifle, tant Grecs,Turcs qu'étrangers, vont fe refugié r, lorfqu'ils font pourfuivis par la Juflice. Comme il n'efl gueres poffible de f» paffer de Cenfaux ou Courtiers , & que les Juifs font en poffeffion de cet emploi; on les fait courir pour ramaffer les huiles de cöté 6c d'autre jufques a Rét'mto, & dans les montagnes; on efl par conféquent obligé de leur confier des fonds pour faire les achats, ainfi que nos marchandifes, pour en procurer unplus grand débouché. Pour être a couvert desbanqueroutes qu'ils peuvent faire & occafionner, ii faudrait faire en forte lors du renouvellement de toutes les Maifons francaifes de Ia Cannée, que le Corps de la Nation Juïve s'engageat folidairement les uns pour les autres a remplir le vuideque quelques-uns d'entre eux pourraient faire vis - a- vis de nos Négocians; la chofe ne ferait peutêtre pas difficle a exécuter & l'on croit que les Juifs ne s'y refuferaient point, pour ne pas être frufirés du gain qu'ils peuvent faire avee la jN atinn Frangaife qui feule fait Corps a la Cannée, n'y a\ant point d'autre Nation. Si nos Négociants S 3  4J4 COMMERCE- voulaient s'appiiquer a la langue grecque vulgaire, qui eft fort douce & n'eft pas abfolument diffieile a apprendre öi qui eft la feule en ufage parmi les Turcs & les gens du pays, alors ils pourraient fe pasfer de Cenfaux , & faire toutes leurs affaires eux - mêmes: ils ne feraient plus par eonféquent expofés aux fubtilités des Juifs & ils profiteraient du gain que ces Cenfaux font fur eux. Heft encore d'autres mefures a prendre vis • a - vis des Turcs & des Grecs du pays. Dans le courant de 1'année derniere 1762, il s'eft élevé a la Cannée une queftion affez confidérable. Le» Turcs ne veulent plus payer le droit de Confulat fur les marchandifes d'Entrée & de Sortie. Le Conful Anglais & Impérial è qui le cas eft arrivé, a réclamé inutitement Ijl'autorité de la Porte & quoiqu'il ait même obtenu un Fer man pour faire payer ces Droits, les Turcs & les Grecs s'en font moqués & n'ont rien voulu enlendre pour le payement. Le Conful de Ragufe acbuel, Jean - Marie Stuly , s'eft auffi trouvé dans le même cas, & il a eu la lacheté de ne point foutenir .fes droits: fi pareille chofe paffe, il eft k craindre que les Francais ne perdent auffi leais droits & que 1$ Chambre de Com-  D E C A N' D I E;. merce de Marfeille ne s'en trouve privéc Au refle, l'on pourrait s'acconamoder au tems & fi abfolument on perdce droit & que les Turcs ne veuillentplus le payer, on peut le reprendre fur les nolifemens 6$ alors les Capitaines francais payeraient ce droit qu'ils exigeraient en fus des nolis jj paree moyen,ia Chambre n'en ftrait pas privée; Mr. le Conful P. a dü écrire pour cela a la Cour & aMr. D. V. notre Am= balTadeur a Conftantinople. H a propofé qu'on lui envoyat un Ordre du Roi a cet efFet, pour empêcher les Capitaines Francais: de débarquer les marchandifes d'Entrée „ öc de fortir du Port chargés de celles de' Sortie, fans que ces Droits ne fuflent pa» yés- Cemoyen m'a paru un peu violent & j'y vois un inconvénïent.. Les Turcs fe voyant pris de la forte, ne voudront plu» nolifer nos batimens & fe ferviront des Impériaux 6c des Ragufus qui ne font pas fi fermes. Pour obvier a cela,. je crois qu'il n'y aurait pas d'inconvénient,, (en cela je foumets mes lumieres a celles de la Cour ,) a faire réunir au Confulat de France, ala Cannée, tous les Confu.lats étrangers, Livourne, Triefte,, Ra** gufe , Hollande , Venife , Damnemare, fuede x Naples j &c. al'exception de celui S 4r  4(6* COMMERCE d'Angleterre , qui ferait incompatible , attendu les trop fréquentes ruptures; cela ferait un trés bon effet: alors il y aurait une uniformité dans les opérations, & les Grecs, comme les Turcs, feraient obligés d'en paffer par - la. On ne ferait aucun tort aux Livournais ni aux Impériaux , dont il ne vient fur KIfle que dix a douze navires au plus par an: i! n'efi point queftion de batimens Hollandais, Venitiens, Suédois, Napolitains & Danois, dont a peine il en vient un par an. Je ne vois plus que les feuls Ragufais qui, comme je 1'ai dit ci - deffus, nous rivalifent & nous fónt un tort infini. S'il parak des batimens Anglais, ce n'efi qu'en tems de rupture que l'on en voit quelquefois relacher a la Sude; ce qui nuit beaucoup a notre Caravane en interceptant & ranconnant nos batimens qui n'ofent gueres fe rifquer. Enfin la fuppreflion du Confulat de la Cannée, quoiqu'en dife M. P .., fera toujours un trés mauvais effet dans 1'efprit des Turcs & achevera de ruiner totalement notre Commerce fans aucune efpérance de retour & alors il faudra que nos Francais abandonnent tout a-fait ce Rojaume , paree que n'ayant plus per-  B E CANDIE. 0f forme qui les protege< les Turcs finironï par malfacrer le peu qui refiera* Une-' guerre malheureufe que nous avons eue? pendant plufieurs années, nous a fait uis tort confidérable. La retraite trop précis pitée de quelques Négocians; la faillitc la mort de plufieurs autres qui font décédés infolvables; la mauvaife conduite, la* jaloufie & la méchanceté de certains ir*r dividus que je ne veux pas nommer, & les autres raifons que je viens d'aüéguer, f ont auffi beaucoup contribué. Si après urn tems auffi orageux le commerce reprenaift faveur, comme il y a lieu de 1'efpérer v il ferait (impoffible d'y rétablir le Confulat, ou trés difficilement: ce qui rainerait ne fe ferait pas fans rumeur; car, comme' les Turcs prennent facilement ombrage & qu'ils verraient bien que ce rétabliffemenC' les ruinerait & porterait un préjudice notable a leur Commerce, ils s'y oppofe» raient de toutes leurs forces & nous feraient peut - être échouer. Je finirai ces Réflexions particulieren par quelques Obfervations générales. La Cour a fouvent été étourdie des querelles entre les Confuls & les Capitaines dè vaiffeaux du Roi, au fujet des Pavillons, II ferait a propos qu'elle déddac  418 COMMERCE* fur cet objet, & fi les Confuls ont droit de mettre dans les Ports de leurs départemens les Pav.illons a la Poupe ou a la Proue, lorfqu'il fe trouve des vaifleaux de^ Roi, & fi les Capitaines doivent 1'avoir a la Poupe ou a la Proue. Ces querelles font indécentes, retardent le fervice du Roi & font que les Turcs qui en font témoins, prennent un motif de plus de fe moquer & d'inveftiver contre nous fur de pareilles difputes. Souvent il arrivé que les Rangs font auffi difputés dans les Echelles entre les Chanceliers, les De'putés & les Drogmans: je penfeque pour couper court a cela, il faudrait qu'après le Conful ou a fa droite, döt aller le Chancelier qui efl: un Officier bréveté, & après le Chancelier ou a la gauche du Conful, le De'puté de la Nation ; que les Drogmans duffënt marcher immédiatement devant le Conful, lorfqu'il forten ceremonie, & horsce tems comme bon leur femblera après Ie Chancelier & Ie Député; en cas d'abfence ou de maladie du Conful, le Chancelier en ferait les fonétions, puifqu'ordinairement il devient Conful lui - même. Comme tous les Confuls de France font Francais, ou réputés tels, & qu'ils ont  DE CANDIE» 419 Fhonneur de leur Nation afoutenir, foit visa-vis du Turc, foit vis a-vis des étrangers, ils fe trouvent quelquefois compromis visa-vis les autres Confuls qui font fujets du. Grand-Seigneur & reconnus comme tels, quoique leur Ferman ou Barat leur donne la qualité de Gentilshommes Anglais, ou Allemands &c. II ferait trés a propos que la Cour empêchatun pareil abus; & fi les autres Nations veulent avoir un Conful, il faudrait qu'il foit leur fujet & non point Raya du Grand-Seigneur. II arrivé fort fouvent que ces fortes de Confuls, qui font des Grecs, xles Arméniens & quelquefois des Juifs, font d'une impertinence& d'une infolence extréme vis-a-vis des Confuls Nationauxóc d'une baflefle & d'un avilisfement inconcevable vis-a-yis du Turc, auquel ils n'ofent point réfifter dans la crainte de recevoir des coups de baton, ou tout au moins fans efluyer quelques avanies. Les Turcs fe font un droit des mauvais traitemens qu'ils font efluyer a ceux-ci, pour infulter impunément les Confuls Francais & autres Confuls étrangers: on éviterait toutes ces algaradesen réuniflant, comme je 1'ai dit,lesConfulats étrangers a celui de France. II eft vrai que les Confuls étrangers qu|  430 (COMMERCE font Rayas, ne jouiiTent point chez les "Turcs de la même efHme ni du même crédit qu'un Conful Francais qui a le pas fur eux, même fur celui de 1'Empereur; mais cela n'empêche point que je n'infifle fur la réunion des Confulats exercés par les fujets du Grand Seigneur. II faut de plus que nos Confuls s'attachent invariablement a foutenir leurs prérogatives & celles de leur Nation & qu'ils foient foutenus a leur tour avee efficacité par les AmbaffadeursdeSa Majeflé a la Porte. Comme Ia Cour a limité Ie nombre des Drogmans attache's aux Echelles du Levant; la quantité fixée dans certains endroits n'efi pas fuffifante & il-arrivé que les Confuls font néceffités d employer des Grecs, des Arméniens & fouvent des Juifs, qui nous trahiffent & nous vendent. U vaudrait mieux pour le fervice du Roi que tous les Drogmans fulfent Franjais ou fils de Francais & reconnus pour tels, fans employer des gens du pays qui deshonorent la Nation qui les employé par Jes baffeffes qu'ils font. Pour encourager & augmenter le nombre des jeunes gens deflinés a être Drogmans, il faudrait leur promettre 1'expeclative des places de Chan-  DE CANDIE. 421 Chanceliers & de Confuls au bout d'un certain nombre d'années de fervice & fuivant leur capacité, nous aurions alors une pépiniere de gens propres a diriger les Confulats mieux que ceux que l'on nomme a ces places, qui ne feront jamais mieux remplies que par des gens qui aurontdéja demeuré longtems dans le pays, étudié le génie & les moeurs des habitans & principalement quifaurontla langue & feront conféquemment plus en état de déduire leurs raifons qu'un jeune Drogman qui fouvent ne fait pas faifir le fens du discours qu'il doit répéter. II ferait bon d'augmenter de quelque chofe les appointemens des Confuls & qu'ils ayent un Aumónier feculier chez eux, fans paffer par les mains des moines qui fe raêlent & fe fourrent partout, élevent des difficultés & des querelles, qu'il efl quelquefois difficile d'appaifer & qui, quand leur tête fe monte, ne veulent pas reconnaïtre 1'autorité du Roi; en forte que l'on efl; fouvent obligé de les faire embarquer pour les renvoyer en France, comme fit M. Defalkurs a un certain Pere Jofepb, & comme 1'aurait mérité un Pere Michel qui écrivit mille horreurs öt mille faulTetcs contre M. D. V T  422. COMMERCE au Duc de Choijeul, qui méprifa & Je Capucin & la lettre, qu'il renvoya a M. 1'Ambaffadeur. II faudrait dans Jes Echelles oü il fe trouve un certain nombre de nos Natiorsaux, entretenir un Chirurgien Francais qui ne manquerait pas de pratiques dans fendroit ; ce qui ferait que l'on ne ferait pas obligé de recourir a des Docteurs Grecs & a des Chimrgiens du pays, qui font prefque tous de parfaits ignorants & envoyent leftement leurs malades en 1'autre monde. Je dois encore repréfenter qu'au lieu de faire perdre inutilement leur tems dans 1'étude de la langue Iatine aux jeunes gens que Sa Majefté entretient pour remplir les places de Drogmans, il vaudrait mieux pour eux & pour le fervice du Roi, leur faire apprendre la médecine, la chirurgie, .'anatomie & la botanique, Sciences plus eftimées des Turcs &plus néceffaires pour s'introduire en Turquie auprès des Grands,qu'une langue qui leur eft parfaitement inutile dans ce pays.la: il faudrait les prendre dés 1'age de fix a fept ans & non au deffus, ni au deflbus, pour leur bien apprendre le Francais & 1'écrire correébement j c'eft en quoi manquent beaucoup  Ö E C A M DIE. 4,23. de nos Drogmans, & a bien prononeer Ia Turc, car quand ils arrivent a Conftantinople a 1'age de 17 a 18 ans au fortir du College de Louis le Grand, perfonne n'entend & ne comprend ce qu'ils veulenc dire, & plufieurs Drogmans aujourd'huï dans le Levant prononcent trés mal cette langue qu'ils ont apprife trop tard & quï demande beaucoup de pratique. 11 faudrait encore qu'on leur donnat quelque teinture de Géographie, de Phyfique, de Mathematiques,d'Hiftoire Naturelle, de Politique, d'Hiftoire & principalement de celle des Turcs & des Perfans: qu'on le3 inftruifït des intéréts desPrinces, qu'on leur donnit quelques connaiffances de Commerce , ainfi que des différentes fortes de Religieus & de Secbes qui font répandues fur la terre; car la plupart font d'une ignorance totale fur tous ces objets & reftent courts vis-a-vis des Turcs, qui ne font pas fi barbares ni fi ignorans qu'on veut les faire paffer. Toutes ces utiles connaiffances reünies dans un même fujet, pourraient germer chez quelques-uns de ces jeunes Drogmans & les rendraient recommandables aus Turcs, qui les rechercheraient avee empreffement, & leur accorderaient toutes T 2  424 COMMERCÉ les graces qu'ils feraient dans le cas dé demander ,• & même il pourrait arriver que quelques-uns de ces Grands parvenant au rang de Vifir, de Muphti, de Capi»an-Facha, &c, ayant pris en amitié quelques-uns de ces heureux génies, le propoferaient au Grand-Seigneur pour être employé a fon fervice & par ce moyen occafionner quelqu'heureufe révolution qui tirat Ie beau pays de la Turquie, de 1'abrutiffement & de la léthargie funefte oü il eft plongé faute d'être éclairé; ce qui nous mettrait a portee de nous y faire aimer & eftimer, & d'en tirer des avantages infiniment précieux. Quatre ans dedenaeure dans le Levant, m'ont mis a portée d'obferver bien des abus que l'on pourrait corriger par une meilleure adminiftration & je fuis intimément perfuadé que fi l'on voulait approfondir la nature du Commerce mieux qu'on ne 1'a fait jufqu'a préfent, on ne perdrait point fes peines. L'on a obfervé que la plupart des Confuls qui ne connaiflent ni les mceurs ni les ufages du pays & que l'on envoye dansle Levant, ont un certain préjugé contre les Turcs, qu'ils ne veulent pas fréquenter par une haine qu'ils prennent, ou une peur  DE CANDIE. 425 ridicule contre tout ce qui porte un habit long. lis les traitent indifféremment les uns comme les autres, fans confidérer les lieux ni les perfonnes. II arrivé de-la que ces Confuls attrabilaires fe trompent & prennent des mefures qui pour la plupart du tems échouent: les uns ont une morgue infoutenable, d'autres affeóbent trop de politeffe ou trop d'égards, & la plupart témoignent une peur hors de raifon qui leur devient d'autant plus nuifible que les Turcs qui voyent alors leur fupériorité, en prennent droit d'être encore plus infölens & de prendre un ton de hauteur qui fe rabat quand ils ont affaire a un Conful ferme, froid & flegmatique , qui fait fe contenir & ne s'émeut pas du bruit. F I N. t 3  T A B L E des Articles contenus dans cet ouyrage* Avant-Propos. Page v Commf.rce de la Mïr Noirs. IwroduBion. i Commerce d' Entrée. Draps. 13 Serges Impériales. Camelots de France ,Ca!emandes Etamines. ibid. Camelots d'Angora, de Ttffia £f du Caire. 18 Étoffes de Joie de France. ibid. Étoffes de Scio, de Venife £f de Me fine. jp Harès ou Tabis de Meffme & de Scio. 22 Velours. 2^ Ciutnis de Brouffe de Conftantinople. ibid. Bours de Magnefie. ibid. Indiennes ou Toiles peintes. 24 Toiles de Kedis. 2j Bocajfms. ifoid, jtftars ou Toiles de Coton. 25 Dulbents oü Mouffeline. 2r> Tcbemberts pour coiffure des fnmts. ibid. Chemifes de Joie. Zj Cbemfes de coton pour le bain, ibid. Fez ou Bonnets. ibid". Tarpocbes, ou Bonnets de femmes. 28 Heilik, ou Drap de Salonique. ibid. Dorures. ibicjJ Soyes teintes en laine, filits cordonnets dt foie. 30 Coton en laine. gt Coton filé de diverfes couleurs. 32 Couffms de Brouffe. ibid. Cbiaaks, cu fournimens de fopba. 33 Tapis de Salonique de RuJJie. ibid. Kelès, ou couvertures de Tamboli. ' 34, Pechsmals, ouferviMts te mm efpeces, ibid.  TABLE, Bourfes pour le bain. 3