3037 M     M A N U E L CHRÉTIEN.   MANUEL CHRETIEN o u REFLEXIONS S A I N T E S POÜR TOÜS LES JOÜRS du Mors, TIRÉES DES CEUVRES SPIRITUELLES DE FEU MONSEIGNEUR FRANCOIS DE SAL1GNAC DE LA MOTHE-FÉNÉLON, Prêcetiteur de Mejfeigneurs les Enfant de France, £f depuis Archevêque Duc de Cambrai, Trines du St. Empire, 6pc. i y i ■ ■ A LA H A Y E, Cfaez P. F. G O S S E, Libraire & Imprimeur de la Cour. M. DCC. LXXXVIL   J^j'èditeur.y quoique Membre lui* même ffune Eglife qui difière en plujieurs points. de celle dans laquelle M. De Fenelon a tenu un rang Ji éminent <5-? Ji dijtingaè a trouvê , pendant une longue fuite ffannées, tant de fatisfaftion dans Vufage quil a fait de ces admirables Reflexions , qu'il croït rendre un fervice réel au public en lui prêfentant ces précieufes reliques de eet Homme A 3 itlujlre.  fous une ferme prepre (felon qiCil Je flatte ) a engagcr VaUmtion de leaucoup de per/onnes a qui les excellents ouvrages, d'oü cette petite partie ejl tirée, refteraient peut - tin tntierement inconnüs. On a preferé ne pas rifquer de gdier ets extraits en les mutilant, par Vexclufim de ces peu de paffages qui ent quefque legere allv.fion a laforme 01 ciilte de PEgHfe Romaine; furtout cefiJtdSrvm Ces f&ffagts cemme ÏÏiïnï na'v.re ü ne pouvoir Heffer la déiicatejfe d'auciir.e pcrfonne^fnfeé & rcifonnable. D'ailleurs fous ceux qui font infiruils delafapon libérale tolérante 'de pen/er de ce vertueux Arcbevë- quet  que, parcFonneront facilement a VEdïteur cette marqué de refpect pour la memoire d'un caractère, qui doit être k jamais cber a tout vr.ai difciple du Seigneur - Jehovah - Jesus ; rfimporte de quelle dénomination. En.unmot, la fubjiance de chacune de ces reflexions en particulier & de toutes en génêral, rikant puifee que dans l'Evangile même (quiejl nêtre regie commune de Foi & dg pratiqitv}. VEdiicur croit ne pcuvoip mieux jujlifür les mstifsqui l'ont porti a lesréimprimer dans cetteforme-, (ja en accompagnant ces Reflexions des obfervations fuivantes, quife trouvent dans les ecrits mémes de eet auteur rcfpetlable, A 4 „En  „ En fe les rendant familieres & „ intimes , on peut efpêrer la pan j, que le monde ne peut ni donner ni èter\ qui furpaffe tout fens humain. Car, comment (dit-il dans 5} un autre endroit) le monde la donne* s, rait-il? II ne peut la connoitre; il „ ne peut la croire dans ceux qui en si jcu'ijfent." Puiffent - elles produire, aitpres detcus ceux qui fe don~ neront la peine de les examiner èf de les adapter 9 les mêmes heureux effets qiïen a êprouvé, & quen éprouve journellement encore , celui qui les recommande aujourd'hui au public d"dpres fa propre expérience de leur tres grande utilité. Ce qui leur arrivera fans faute Ji le Seigneur daigne êcouter fes vceux. AME N..  RÉFLEXIONS S A I N T E S POUR TOUS LES JOURS DU M O I S. PREMIER JOUR. Sur le Peu de foi quHl y a dans le monde. I. CK'oyez - vous ("O 1™ ^ ^s de l'homme venanf Juf la teï~ re , y trwvera de la foi ? S'il y venoit malntenaDt, en trouveroit-il en nous? Oïi efl: notre foi?- Luc, iS» v. 8.  lo I Jour. Sur le peu de foi Oü en font les marqués ? Croyonsnous que cette vien'eftqu'un courtpaf fage a une meilleure? Penfons nous qu'il faut fouffrir avec Jesus - Christ, avant que de régner avec lui ? Regardons • nous Ie monde comme une iigure trompeufe , & la mort comme 1'entrée dans les véritables biecs? Vivon s - nous de la fni ? Nous anime t-elle ? Coutcns - nous les vérirés éternelles qu'elle nous préfente ? En nourriflbnsnous notre ame avec le même foin que nous nourriflbns notre corps des alimens qui lui conviennent ? Nous accoutumons- nous a ne regarder toutes chofes que felon la foi ? Corrigeonsbous fur elle tous nos jugemens ? Hélas! bien loin de vivrc de la foi , nous la faifons mourirdans notre efprit & dans notre coeur. Nous jugeons en Païens; nous agiffons de même. Qui croiroit ce qu'il faut croire, feroit-il ce que nous faifons? ï % Craignons que Ie Royaume de Dieu m nous foic öté, & ne foit donné è d'autres  fiïil y a dans le Monde. iï' d'autres qui en projuiront mieux les fruits. Ce Royaume de Dieu eft la foi, quand elle eft regrjante & dominante au milieu de nous. Heureux qui a des yeux pour voir ce Royaume! La chair & le fang n'cn ont point. La fagefle de 1'homme animal eft aveugle ladeirus, & veut 1'êtré. Ce que Dieu fait jEterieurement lui eft un fonSe. Pour voir les merveilles de ce Royaume intérieur , il faut renaïtre; &pcur renaïtre, ilfaut rnourir. C'eftèquoile monde ne peut confentir. Que le monde méprife donc, qu'il condamne, qu'il fe moque tant qu'il voudra; pour nou?;, mon Dieu, il nous eft ordonné de croire & de gouter le don célefte. Nous Youluns etrc üu uumbic dc voe élus , &. nous favons que perfonce ne peut en être, fans conformer fa vie a ce que vous enfeignez. A  ïi II. Jour. Sur Puniqus II. JOUR. Sur Vunique chemin du CieL T? Fforcez • vous (a) d'entrerpar la por-J-*J te étroite. Ce n'eft que par violence qu'on entre dans le Royaume de Dieu. 11 fautl'emporter d'aflaut, comme une place afliégée. La porte en eft étroite. II faut mettrea la gêne le corps du pêché; il faut s'abaifler , fe plier, fe. trainer. fe faire ppf - Ta arande porte ou paffe la foule, & qui fe préfente toute ouverte , mene k la perdition.. Tous les chemins larges & unis doivent nous faire peur. Tandis que le monde nous rit, & que notre voienous femble douce , malheura nous! Jamais nous ne fommes mieux pour 1'autre vie, que quand nous fommes mal pourcelleci. Gardons nous donc bien de fuivre la multitude, qui marche par une voie I. Mattb,. 7. v. 8.  chetnin dü del.' *B Urge & commode II faut chercher les traces du petit nombre, les pas des Saints, le fentier efcarpé de la pénitence, grimper fur les rochers, gagner les lieux fürs a la fueur de fon vifage, & s'attendre que le dernier pas de la vie fera encore un violent effort pour entrer dans la porte étroite n. Nous ne fommes prédeftioés de Dieu, que pour êtreconformes a 1'image de fon Fils, attachés comme lui fur une croix, renoncant comme lui au* plaifirs fenfibles, contens comme lui dans les douieurs. Maïs qucl eft notre aveuglement ? Nous voudrions nous detacher de cette croix qui nous unit a notre maitre. Nous ne pouvons quitter la croix, fans quitter jesusChr ist crucifié. La croix & lui font irjféparables, Vivocs donc & mourons avtc celui qui eft venu nous mon> trer le véritable chemin du Ciel; & ne craignons ricn, finon de ne pas finir notre facrifice fur le même autel, oü A.7 .  H II. Jour. Ckemin du del. il a confommé ie fien. Hélas.' tous les cfforts que nous tachons de faire en cette vie, nefont quepour nousmettre plus au large, & pour nous éloignerde 1'unique chemin du Gel! Nous ne favorjsce que nous faifons. Nousnecomprenons pas que le myftere de la grace joint la béatitude avec les larmes. Tout Chemin OUi mene h un tr&n* cft dóli- cieux, füt- il hériffé d'épines. Toutchemin quiconduit;a un précipice, efteffroyable, füt - il couvert de rofes. On foufFre dans la voie étroite , mais on efpere; on foufFre, mais on voit les cieux ouverts; on foufFre, mais on veut foufFrir ; on aime Dieu, & on en «ft aimé.  III. Jour. Véritable dèvotion. 15 III. JOUR. Sur la véritable dèvotion. L /^Elui ( a ) qui féduit lui- même fon *s cceurn'aqu'unevaine réligion. Que d'abus dans la dèvotion ! Les uns la font confifter uniquement dans la multiplicité des prieres; les autres dans le grand nombre des oeuvres extérieures, qui vont a la gloire de Dieu & aufoulagement du prochain. Quelques-uns la mcttcDt daus les üéfirs continuels de faire fon falut; quelques. autres, dans de grandes auftérités. Toutes ces chofes font bonnes; elles font même néceflaires jufqu'öun certain dégré. Mais on fe trompe, ü on y place le fondöt 1'eflentiel de la véritable piété. Cette piété qui nous fan&ifie & qui nous dévoue tout entier a Dieu, confifte è faire tout ce qu'il veut, & a accom-  l6 III. Jóur. Véritable dèvotim. plir précifement dans les temps, dans les lieux & dans les circonftances oiiil nous met, tout ce qu'il défire de nous. Tant de mouvemens que vous voudrez,tantd'oeuvres éclatantes qu'il vous plaira, vous ne ferez payé que pour avoir fait la volonté du fouverain Maï£re. Le domeftique qui vous fcrt, ferok des merveille» dans votre inaifon , que »'il ne faifoit pas ce que vous fouhaitez, vous ne lui tiendriez aucun eornpte de fes aólions, & vous vous plaindriez avec raifon de ce qu'il vous ferviroit mal. IL- dévouemcnt parfait d'o{i le terme de dèvotion a étê formé, n'exige pas feulement! que nous faflions la volonté de Dieu , mais que nous la faffions avec amour. Dieu ai me qu'on lui donne avec joie; & dans tout ce qu'il nous prefcrit , c'eft toujouri le [cceur qu'il demande. Un tel Maitre mérite bien qu'on s'eflime heureux d'être k lui. Jl faut que ce dévouement fe foutieane ègalement par-tout, dans ce qui nous  III. Jour. Véritable dèvotion. 17 nous déplaft, dans ce qui nous choque, dans ce qui contrarie nos vues, nosinclinations, nos projets& qu'il nous tienne prêts è donner tout notre bicn , notre fortune, notre temps , notre liBertê, notre vie & notre reputation. Etre dans ces difpofitions, & en venir aux efFets, c'eft avoir une v éritable dèvotion. Mais comme la volonté de Dieu nous eft fouvent cachée, il y.a encore un pas de renoncement & de mort k faire; c'eft de 1'accomplir par obéilTance, & par une obéiflance aveugle, mais fage en fon aveuglemenr. Condition impofée h tou&les hommes. Le plus éclairé d'entr'eux , le plus propre a attirer les ames a Dieu & le plus capable de les y conduire , doit luimêmeêtre conduit.  ï8 IV. Jour. Connrfions Idches. IV. JOUR. Sur les Converfwns Idches impar* faites. i. LEs gens qui étoient éloignés de Dieufe croient bien prés de lui, dèi qu'ils commencent a faire quelquè pas pour s'en rapprocher. Les hommes les plus polis & les plus éciairés ontladeiïus la mème ignorance & h même groflléretê^ qu'un payfan qui croiroit être bien a Ia Cour, paree qu'il auroic vu le Roi. On qu;tte les vices qui font horreur; 0:1 fe retranche dans une vie mo.n^criminelle, mais toujours Jache, mondaine & diffipée ; on juge alors de foi, non par-J'Evangile, qai eft 1'unique régie qu'on doitprendre; mais par la comparaifon qu'on fait de la vie eü Pon eft , avec celle qu'on a menée autrefois. II n'en faut pas davantage pour fe canonifer foi-meme, & pour 8'endormir d'un profond fommeil fur tout  IV'. Jour. Cornerfions lades. i§ tout' ce qui refteroit a faire pour le fa» lut. Un tel état eft peut - être plus fus* pedt, qu'un défordre fcandaleux. Ce défordre troubleroit Ia confcience, réveilleroit la foi, & engageroit a faire quelque grand effbrt; au lieu que ce changement ne fert qu'a étcuffer les remords falutaires , qu'a étabür une fauiïe paix dans le tceur, & qu'a rendre les raaux irrémédiables. I I. Je me fuis conféfTé, d'tes-vous, a£ 'fez exaftement des foiblcflus de ma vie paffée; je lis de. bons livres; j'entends la Mtffe modeftemanr ; & jeprie Dieu , ce me femble, djaffc'z bon cceur. J'évkc au moins les grards pé'chés; msis j'avcue que je ne me fens pas affez touché pourvivre, comme fijeD'étois plus du monde., & pour ne plus garder de mefures avec lui. La Relïgion feroit trop rigoureufe/fi elle rejettoit de ii honnêtes tempéramens. Tous les rafünemens qu'on nous propofe au jour» d'hui fur la dèvotion, vont trop loin, & font plus propres a décourager qu'a fairs.  zo IV. Jour. Converfrons, Idches: faire aimer le bien. Ce difcours eft celui d'un Chrétien lache, qui voudroit avoir le Paradis è vil prix, & qui ne confidere pas ce qui eft dü a Diej, ni ce que fa pofleflion a couté a ceux qui 1'ont obtenue. Un homme de ce caradlère eft bien loin d'une entiere converfion. II ne contrcit, ni 1'étendue de la Loi de Dieu, ni Jes devoirs de la pénitence. On peut croire que fl Dieu lui avoit confié le foin de compofer 1'Èvangile, il nel'auroit pas fait tel qu'il eft, & nous aurions aflurément quelque chofe de plus doux pour 1'amour propre. Mais l'Evangile eft immuable, & c'eft fur lui qie nous devocs êtrejugés. Prenez au plutót un guide für, & ne craignez rlen tant que d'dcre flatté & trompé.  V. Jour. Sur le Ion Efprit. 2,1 V. JOU R. Sur le Ion Efprit. I. -TTOtre(a) Pere célefie donnera fon r bon efprit a ceux qui le lui deman. deront. U n'y a de bon efprit, que celui de Dieu. L'efprit qui nous èloigne du vrai bien, quelque pénétrant, quelque agréable, quelque habile qu'H foit pour nous procurer des biens cor. ruptibles, n'eft qu'un efprit d'illufion & d'égarement. Voudroit-on ecre porté fur un char brillant & masnifique , en.ent ce fux éclat de l'efprit, maisencor. la pruience humaine, qui paroïc la plus férieufe & lap!u»,utiJe poar entrer, comme de petits enfans dans la fimplicité de la foi, dans Ia candeur & dans 1'innocence des mceurs, dans  VI. Jour. Patience dans lespHnes. i % 1'horreur du pêché , dans 1'hunr.liation & dans Ia fainte folie de la croix. Sur la patience dans les peines. I. T7~Ous fa) pojféderez vos ames dans -V votre patience. L'ame s'éciiappe a elle même , quand elle s'impatiente; au lieu que quand elle fe foumet fans murmurer, elle fe poff.'de en paix & poflede Dieu S'impatienter • c'eft vouloir ce qu'on n 'a pas, ou ne pas vouloir ce qu'on a. Une ame impatiente eft une ame livrée a fa paffion, que Ia raifon, ni la foi ne retienc plas. Quelle foibleffe ! quel égarement! lart qu'on veut le mal qu'on foufFre, il n'eft poinc mal. Peurquoi en faire un vrai mal, en ceflantdele vouloir? Lap3ix intérieure réfide non dans Ie fens, mais dans la volonté. On la conferve au £ti~) Luc, 21, v. 19. VI. JOUR.  &4 VI- Jour. Patience dans lespeines. milieu de la douleur la plus amere: tandis que la volonté demeure ferme &foumife. La paix d'ici-bas eft dans 1'acreptation des chofes contraires., & non pas dans 1'exemption de les fouffrir. f I. A vous entendre gronder & mnrmurer, il femble que vous foyezl'ame la plus innocente qu'il y ait au monde; & que c'eft vous faire une injuftice criante que de ne pas vous laifler rentrer dans le Paradis Terreftre. Souvenez-vous de tout ce que vous avez fait contreDieu, &convenez qu'il araifon. Dites-lui avec la même humilité que 1'enfant prodigue: Mon Pere, ƒ'ai pêché contre le Ciel £P contre vous. Je fais ce que je dois k votre juftice; mais le ceeur me manque pour y fatisfaire. Si vous vous en remettiez k moi, je me fhtterois , je m'épargnerois & je me trahirois moi-même en me flattant.' Mais votre main miféricordieufe exécute elle-même ce que je n'aurois jamais eu le courage de ïaire. Eile me  VII. Jour. Soumijfton a Dieu. 25 frappe par bonté. Faites que je porte patiemment fes coups falutaires. C'eft le moins que puifle faire le pécheur, s'il eft véritablemsnt indigné contre luimême , que de recévoir la pénitence, qu'il n'auroit pas la force de choiflr. VII. JOUR. Sur la foumijjion & la conformité h la volonté de Dieu. i f^ïUe (n) votre volonté fe faffe fur li terre comme dans le Ciel. Rien ne fe fait ici - bas, non plus que dans Ie Ciel, que par la volonté, ouparlapermiflion de Dieu; mais les hommes n'aiment cette volonté, qu'autant qu'elle s'accorde avec leurs défirs. Aimonsla; n'aitnons qu'elle, & nous feroas de la terre un ciel. Nous remercierons Dieu de tout, des maux comme des biens, puifque les maux deviennenc (O Matt. 6, Vi 10. 9 bieas |  3.6 VIL Jour. Soumiffïon a Dieu. bien?, quand i! les donne. Nous ne murmurerons plus.de Ia conduite de fa provi lencc. Nous Ia trouverons fage, nous 1'adorerons. O Dieu! que vois-je dans le cours <3es aftres, dans 1'ordre des faifons , dans les événemens de Ia vie, finon votre volonté qui s'accomplit? Qu'elle s'accomplilie aufli en moi; que je 1'aime; qu'ellem'adoucisfe tout; que j'anéantiffe la mienn», pour faire regner la votre. Car enfin .c'eft & vous j Seigneur , de vouloir,, & c'eft a moi d'obéir. j r. Vous avez dit, n Seigneur Jïjsrs, en parlant de vous-meme, par rapport Ji votre Pere célefte, (a) que vousfailiez toujours ce qui lui plaiioït. Apprenez - nous jufqu'oii eet exemple* doit nous mener. Vous êtes notre modele. Vous n'avez rien fait fur la terre, que felon le bon plaifir de votre Pere , qui veut bien être nommé le nötre. Agiflez en nous comme envous-même, felon fön bon 'plaiïïr. Qu'urJis inféparable«  VII. Jour. Soumiffïcn a Dieu, 27 menc k vous, nous ne confultions plus que fes défirs. Nonfeulement prier, inftruire, foufFrir, édifïer, mais man. ger, dormir, converfer; que tout fe fafle par la feule vue de lui plaire. Alots tout fera fandtifié dans notre conduite. Alors tout fera en nous facrifice continucl, priere fansrelSche, amourfaBs interruption. Quand fera-ce, ó mon Dieu, que nous ferons dans cette fl. tuation? Daignez nous y conduirö' Daignez dompter & aflujettir par votre grace notre volonté rebelle; ellene fait pas ce qu'elle veut; il n'ya riende bon, que d'être comme vous voulez. ï | ~m*  28 VUL Jour. La Priere. VIII. JOUR. Sur les avantages de la Priere. I. PRiez (a)fans interruption. Telle eft notre dépendance è 1'égard de Dieu > que non-feulement nous devons tout faire pour lui 3 mais encote que nous devons lui demander les moyens de lui plaire: cette heureufe séceffité de recourir k lui pour tousnos befoins, bien loin dc dcvoir nous être jncommode, doit au contraire faire toute notre confolation. Quel bonheur de lui parler en confiance, de lui ouvrir tout notre cceur & d'être par Ia priere dans un commerce intime avec lui! II nous invite k Ie prier. Jugez , dit S. Cyprien, s'il ne nous accordera pas les biens qu'il nous follicite de lui demander. Prions donc avec foi, &ne perdons pas le fruit de nos pricres par  VIII. Jour. La Priere. 29 «ne incertitude fbttante , qui, con> rre dit S. Jacques, nous fait héfiter. Hcureufe 1'ame qui fe confole dans 1'oraifon par la préfence de few Bienaimé! Si quelqu'un d'entre vous, dit S. Jacques, eft dans la triftefle, qu'il prie pour fe confoler . Hélas! malheureux que nous fommes! nous ne trouvons que de 1'ennui dans cette célefte occupation. La tiedeur de nos prieres eft la fource de nos autres infidélités. I I. Ca) Demandez, £? il vous fera donfié. Cherchez, &vous trouverez. Frappez, ö3 l'on vous oavrira. Si nous n'avions qu'a demander les richcfles pour les obtenir , quel empreflcment, quelle affiduité, quelle perfévérance / Si nous n'avions qu'a cherchcr pour trouver un tréfor, quelle terre ne remueroit-on point? S'il n'y avoiï qu'a heurter peur entrer dans Ie confeil des Rois, & dacs les plus hautcs charges, quels coups redoublé3 n'entendroit - on pas? Mais que ne fait-on point pour trou ver un faux bonheur? Quels reB 3 buts, (<0 Matih. 7, v. 7.  30 IX. Jour. Voix de Dieu. buts, quelles traverfes n'endure-t-on pas pour un fantöme de gloire mondaine? Quelles peines pour de miférables plaifirs dont il ne refte que le remords! Le tréfor des graces eft le feul vrai bien & le feul qu'on ne daigrje pas demander, le feul qu'on fe rebute d'attendre. Cependant il faudroit frapper fans rel acne; car 'la parole de Jesds - Christ n'eft pas infidele; c'eft notre conduite qui 1'eft. IX. JOUR. Sm- l'attention k la voix de Dieu, I. OSigntur, (a~)dqui irons-nous ? vous avez les paroles de la vie éternelle. C'eft jesus - Ciirist qu'il faut écoutcr. Les hommes ne doivent étre. écoutés & crus, qu'autarjt qu'ils font pleins de Ja vérité & de 1'autorité de jesus- Christ. Les livrts ne font bons C«) Je.'in. 6, v. (9..  IX Jour. Voix de Dieu. 3* iboris, qu'autaot qu'ils nous apprennent i'Evangiir. Allons donc a cette fource facrée. jesus Christ D'a parlé, s'a agi, qu'afin queDous Fécoutaïïions, & que nous écudiaflions atLentivement le détail de fa vi?. Malheurcux que nous fommes! nous courons aprés nos propres penfées qui ne font que var rê5 & nous négligcons la viritó niém;, dont toutes les paroles font capables de nous faire vivre ètcrnellcment, Parlez, ó Verbe divin , 6 Parole incréée & incarnée pour moi! 'Faitesvousentendre a mon ame. Dites tout ce que vous voudrez; je veux tout ce qu'il vous plaic. Souvent on dit qu'on voudroit favoir ce qu'on a a faire pour s'avancer dans la vertu ; mais dès que l'efprit de Dieu nous 1'enfeigne , le courage nous manque pour Pexécuter Nous fentons bien que nous ne fommes pas ce que nous devrions être. Nous voyons nos miferes; elles fe renouvellent tous les jours. Cependant on croit faire beaacoup en difant qu'on veut fe B 4 fauver.  32 IX. Joür. Voix de Dieu. fauver. Comptons pour ricn toute volonté quine vapasjufqu'afacrifiercequi nous arrête dans la voie de Dieu; ne retenons plus la vérité captive dans nos injuftes Jacbetés. Ecoutons ce que Dieu nous infpire. Eprouvons l'efprit qui Bouspouffe, pourreconnoitre s'il vient de Dieu; & après que nous 1'aurons 'econnu. n'épargnons rien pour lecontenter. Le Prophete ne demande pas fimplement a Dieu qu'il.lui enfeigne fa volonté, mais qu'il lui enfeigne a la faire. X. JOUR.  X. Jour. UJage des Croix. 33 X. JOUR. Sur le bon ufage des Croix. I. CEux ( a ) qui font d jësus-Christ, ont crucifié leur chair avec kurs yices £? leurs convoitifes. Plus nous craignons les croix, plus il faut conclure que nous en avons befoin. Ne nous abattons pas, lorfque la main de Dieu nous en impofe de péfantes. Nous devocs juger de la grandeur de nos maux par la violence des remedes que le Médecin fpirituel y applique. 11 faut que nous foyons bien miféra. bles, & que Dieu foit bien miféri. cordieux, puifque, malgré la difficulté de notre converfion, il s'applique i nous guérir. Tirons de nos croix mê. mes une fource d'amour, de confola» tion & de confiance, difant avec PA. pötre: (&) Nos peinesqui font ficourB j te§ («) Gal. f. v. S4. (i>5 U. COT, 4.V. 1?,  34 X. Jour. Ufage des Croix. tes & 11 Jégeres, n'ont poiDt de proportions avec ce poids infini de gloire qui doit en être la récompenfe. Heureux ceux qui pleurent, Cc qui fement en vcrfaut des larmes, puifqu'ils recueilleront avec une joie ineffable, Ia moiffon d'une vie & d'une félicité éternel'iel I I Je fuif attaché a la Croix avec Jesus. Christ, difoit (a) faint Paul. C'eft avec- Ie Sauveur que nous fommes attachés k la Croix, & c'eft lui qui nous y attaché par fa grace. C'eft k caufe de Jesus que nous ne voulons point quitter Ia croix, paree qu'il eft inféparable d'elle. ö corps adorable & fouffrant, avec qui nous ne faifons plus qu'une feule & même vidti■me: En me donnant votre croix, donnez-moi votre efprit d'amour & d'abandon. Faites que je penfe moins k mes fouffrances, qu'au bonheur de •foufFrir avec vous. Qu'eft-ce que je foufFre que vous n'ayez foufFert? ou ^lutót, qu'eft-ce-que je foufFre, fij'ófe («) GaL 2. v. 19, Etc  M.JmK.ïDweur&'humUitê. 35 me comparer k vous? © homme che! tais toi, regarle ton maitre, & ïougis. Seigneur, faites que j'aime, & je ne craindrai plus la croix. Alors fi Je foufFre encore des chofes dures & d'ouloureufes, du moins je n'en fouf* frirai plus que je ne veuille bien fouffrir. XI. JOU R. Sur la douceur 6? l'h'umilitè, i ' APprenez (a) de moi que je Juk ^1 doux & humble de cosur. O Jesus c'eft vous qui me donnez cette lecjon de douceur & d'humilitê. Tout autre qui voudroit me 1'apprendre, me rèvolteroit. Je trouverois par-tout de rimperfe&ion, & nron orgueil ne manqueroit pas de s'en prévaloir. II faut donc que ce foit'vous. même qui m'infl truifiez. Mais que vois-je, ó moncher B 6 maïtrel (<0 Match. 11. v. 19.  3tfiXL Jour. Dmctur 6? humilitè. maitre! Vous daignez m'inftruire par votre exemple. Quelle autorité! je n'ai qu'a me taire, qu'è adorer, qu'è me confondre, qu'è imiter. Quoi, leFils de Dieu defcend du Ciel fur la terre, prend un corps de boue, expire fur Mne croix, pour me faire rougir de mon orgueil! Celui qui eft tout, s'anéantit, & moi que ne fuis rien, je veox être, ou du moins je veux qu'on me croie tout ce que je ne fuis pas! O menfonge 1 ó folie ! ó impudente vanité! ó diaboliqueprefomption 1 Seigneur, vous ne medites point, Soyez doux Sr humble; mais vous dites que vous êtes doux & humble. C'eft affez de fkvoir que vous I'êtes, pour conchire fur un tel exemple que nous devons 1'être. Qui ofera s'en difpenfer après vous ? Sera-ce Ie pécheur qui a aiérité tant de fois par fon ingratitude, d'être foudroyé par votre juftice? 11. Mon Dieu, vous êtes enfemble doux & humble, paree que Phumilité eft la fource de la véritable douceur L'or-  XL Jour. Douceur & humilitè 37 L'orgueil eft toujours hautain, impatient, prêt a s'aigrir. Celui qui fe méprife de bonne foi, veut bien être méprifé. Celui qui croit que rien ne lui eft du ne fe croit jamais maltraité. II n'y a point de douceur véritable par tempérament. Ce n'eft que molleffe, indolence, ou artifice. Pour écre doux aux autres, 11 faut rcuoutcr k fui-même. Vousajoutez , ó mon Sauveur, (a) doux fc? humble de cosur. Ce n'eft pas un abaiffement, qui ne foit que dans l'efprit par réflexion ; c'eft un gout du cceur; c'eft un abaiffement auquel la volonté confent, & qu'elle aime pour glorifier Dieu ; c'eft une vue paifible de fa mifere; pour s^néantir devant Dieu; c'eft une deftru&ion de toute confiance en fon courage natu* rel, afin de nedevoirfa guérifon qu'è Dieu feul. Voir fa mifere, & en être au deféfpoir; ce n'eft pas être humb'.e; c'eft au contraire un dépit cforgueil* qui eft pire que l'orgueil même. . El *3 («) Lw, 10, v. 41. B> XII. JOVS.J  38 XII. Joür. Défauts. d'autrui XII. JOUR. Sur les défauts d'autrui, pOrtez Ca) hs fardeaux les urn des ^ aulres> c'eft ainfi que vous accomplirezla loi de Jesus'Christ La charité ne va pas jusqu'a demander de nous que nous ne voyions jamais les défauts d'autrui. 11 faudroit nous ere ver les yeux; mais elle demande que nous évkions d'y être attentifs volontairement fans néceffité, & que nous ne foyonspas aveugles furie bon, pendant que nous fommes fi éclairés fur le rnauvais. II faut toujours nous foavenir de ce que Dieu peut faire de moment 4 autre, de la plus vile & de la plus indigns créature; rappeller les fujets que nous avons de nous méprifer nousmêmes; & enfin cortffdérer quelacha. rité embrafle même ce qu'il yade plus bas, 'W e«i; 5. v. 84.  XII. Jour. Défauts iauttui. 351 bas. Elle voit par Ia vue de Dieu, que le mépris qu'on a pour les autres, a quelque chofe de dur & de hautain, qui éteint l'efprit de J esus-Christ. La grace ne s'aveugle pas fur ce qui eft méprifable; mais elle le fupporte, pour entrer dans les fecrets deffeins de Dieu. Elle nefelaifle aller , mauxdégouts dédaigneux , ni aux impatiences naturelles. Nulle corruption ne 1'êtorine ; nulle impuiffance ne la rebute, paree qu'elle ne compte que fur Dieu , & qu'elle ne voit par-tout, hors de lui, que néant & que pêché. ï I. De ce quê les aHtres font foibles, eft ce une bonne raifon pour garder moins de mefures avec eux ? Vous qui vous plaignez qu'on vous fait fouffrir, croyez-vous ne faire fouffrir perfonne? Vous qui êtes fi choqué des défauts du prochain, vous imaginez- vous être parfait? Que vous feriez étonné, fi tous ceux è que vous pefez, venoient touta-coup s'appéfantir fur vous! Mais quand vous trouveriez votre juftifica- tioa  40 XII. Jour. Défauts d'autrui. tion fur la terre, Dieu qui fait tout & qui a tant de chofes k vous repro* cher, ne peut-il pas d'un feul mot vous confondre? & ne vous vient-il jamais dans l'efprit de cramdre qu'i De vous demande pour quoi vous n'exercez pas envers votre frere un peu de Hu'féricorde, que lui, qui eft votre maftre , exerce fi abondamment envers vous ? xin. J*ÜRS  XIII. Jour. Vunique nécejfaire.' 4.1 XIII. JOUR. Sur t unique nécejfaire. L ■ rous (a) vous tmprtffez, 8" Vea* vowx troublez de beaucoup de cho* fes ; une feuie eft nécejfaire. Nous croyons avoir mille affaires, & nous n'en avons qu'une. Si celle-lafe fait, toutes les autres fe trouveront faites: fi elle manque . toutes les autres, quelque fucces qu'elles femblent avoir, tomberont en ruine. Pourquoi donc tant partager fon cceur & fes foins? O unique affaire que j'aiefur la terre, vous aurez dêformais mon unique attention ! Au rayon de la lumiere de Dieu, je ferai k chaque moment fans inquiêtude , felon les forces qu'il me donnera, ce que fa providence mc préfentera a faire. J'abandonnerai le refte, paree que le refte n'eft pas mon oeuvre. ftn C O Luc. 10. v. 41 j 42.  4-4 XIII Joür. Luw"que nécejfaire. Pere (a^ céiejie, j'ai achevé Vouvragè que vous m'aviez donné a faire. Chacun de eous- uoit iè mettrü eri- état d'en dire autant, au jour oüi] faudra rendre compte. Je dois ïêgarder ce qui fe pré fent- & faire chaque jour felon 1'ordre ■de Dhu, comfne i'ouvragerriont Dieu me charge , & m'y appjiquer i d'une •Bjaniere digne de Deu, cVft* a-dire, avec exaétitudë & avec pa x. Je ne négligerai rien; je ne me paffionnerai fur .rien; car il eft daDgereux, oude faire J'osuvre de Dieu avec négligence, ou fde, &i 1'approprier par amour propre & par un faux zslc. Alors ,00 fait üs actions' par fon efprit particulier; on les .fait maly on fe piqué, on s'échatfFe, on veut réufllr-. La gloke de Dieu eft le prétéxtc qui cache 1'illuflon. L'a. mour propre déguifé en zele., fe cobtrifte & fe dépite, s'il ne peut réuffir. O Dieu, donnez- moi la grace d'être fidele dans l'aclïion & indifférent dans ie.fuccès. Mon unique affaire qft de vouloir CO Jast). 10, v. 14.  XIV. Jour. Prêparation hla mort 43 vouloir votre volonté, & de me recueillir èn vous, au milieu même de ee que je fais. Li vötre eft de donner & mes foibles efforts tel fruit qu'il' vous plaira; aucun, fi vous ne voulez. XIV. JOUR. Sur la prêparation a la mort. I. Tnfcnfê, (a) cette nuit on va te rei 'demander ton ame. Pour qui fera ce que tu as amafjè ? Rien n'eft fi terrible que la mort pour ceux qui font attachés k la vie. II eft étrange que tant de fiecles paflés ne nous faffent pas jueer folidement du préfent & de 1'avenir, &ne nous défabufent pas. Nous fommes infatuès du monde , comme s'il ne devoit jamais finir. La mêmoire de ceux qui jouent aujourd'hui les plus grands róles fur la fcene., périra avec eux. Dieu permet que tout fe perde C<0 Luc., iï, v. se.  44 XIV. Jovr. Prêparation hla mort. perde dans Pabyme d'un profond oub!i, & Jes hommes plus que tout le refte. Les pyramides d'E^ypte fe voient encore, fans qu'on fache le nom de celui que les a faites. Que faifons-nous donc fur la terre? a quoi fervira la plus douce vie, fi par des mefures fages & chrétiennes, elle ne nous conduit pas è une plus douce & plus heureufe mort? II. Soyez (a) prêts, paree qu'a l'heure 'que vous n'y penfez pas, le Fils de Vhomme viendra. Cette parole nous eft adreffée perfonnellement, en quelque 2ge &en quelque rang que nous foyons. Cependant, jufqu'aux gens de bien, tous font des projets, que fuppofent une longue vie, lors même qu'elle va finir. Si dans I'extrêmité d'une maladie incurable , on efpere encore la guerifon, quelles efpérances n'a-t-on pas en pleine fanté? Mais d'oü vient qu'on efpere fi opiniètrémene la vie? C'eft qu'on Matth, 24, v. 44.  XV. Jour. Efpèrances ètemelles. 45 qu'on 1'aime avec paffion. Et d'oüvient qu'on veut tant élolgnerla mort? C'eft qu'on n'aime point le Royaume de Dieu, ni les grandeurs du fieclefutur. O hommes pefans de cceur, qui ne peuvent s'elever au-deflus de la terre, oh de leur propre aveu, ils font miférables! La véritable maniere de^ fe tenir prêt pour ledernier moment , c'eft de bien employer tous les autres, & d'attendre toujours celui-la. XV. JOU R. Sur les efpèrances ètemelles. X T 'ceil (a) rta point vu, ni VoreilleenJ-J tendu, ni le cceur de l'homme con~ gu c« que Dieu a préparé d ceux qui l'aiment. Quelle proportion entre ce que nous faifons fur la terre, & ce que nous efpérons dans Ie Ciel! Les premiers Chrétieas fc réjouïflbient fans ceffe, 001. Cor. s, v. 9-  46" XV. Jour. Efpèrances ètemelles. ceflè, k la vue de leur efpérance. A tous momens ils croyoient voir le Ciel ouvert. Les croix, les infamies, les fupplices, les morts cruelles, rien n'étoit capable de les rebuter. Ils connoiffoient la Iibéralité infinie qui doit payer de telles douleurs ; ils ne croyoient jamais aflez foufFrir ; ils étoient traDsportés de joie , lorfqu'ils étoient jugés dignes de quelque profonde humiliation; & nous, ames Idches, nous ne favons point foufFrir, paree que nous ne favons pas efpérer. Nous fommes accablés par les moindres croix, & fouvent même par celles qui nous viennent de notre orgucil, de notre imprudence & de notre dólicateffc 11. (a") Ceux qui fement dans les larmes, recueilleront dans la joie. Ilfautfemer pour recueillir. Cette vie eft deftinée pour Temet. Nous jouirons dans 1'autre du fruit de nos travaux. L'hom«ie terreftre, Mche & impatient, von«droit recueillir arant que d'avoir femé. , Nous €«J Pf« 124- V. 5»  IV.ijrftftl Efpèrances êternelles. 47 JSfous voulons que Dieu nous confole, &" qu'il applamïïe les voies pour nous mener k lui. Nous veudrocs le feivir, pourvu qu'il nous encoutlt peu. Efpérer beau coup, & ne foufFrir guere, c'eft k quoi tend 1'anïour propre. Aveugles que nous fommes, ne verronsnous jamais que-{a) le Royaume du Ciel foufFre violence , & qu'il n'y a que les atnes viclentes & courageufes pour fe vaincre, qui foient dignes deleconquérir? Pleurons donc ici-bas, puifque ( b ) bienheureux ceux qui pleurent, & malheureux ceux qui rient! Malheur a ceux qui ont leur confolation en ce mondei Viendra le temps oü ces vaines joies feront confondues. Le monde pleurera k fon tour. ( c ) Dieu effuiera toutes les larmes de nos yeux. Matth. 11. v. 12. (J) Matth. y. v. j. Luc, 6. v. 2 5, 'CO ApOCi 2i. v. 4. XVI. JOU»,  48 XVI. Jour. Pain quttidien. XVI." j o p é ' i s& n°tre Pain 'quofi^èn. JT\onnez -nous ( a) aujourd'hui notre pain quotidien. Quei eft - il ce pain, ó .non Dieu? Cc n'eft pasfeulesment Ie foucien que votre providence nous donne pour Jes néctffités de Ia vie', c'eft encore cette nourriture de vérité que vous donnez chaque jour k 1'ame; c'eft un pain qui nourrit pour la vie éternelle; qui fait croïtre, & qui rend I'ame robufte dans les épreuves de la foi. Vous Ie renouvellez cbaque jour. Vous donnez au dedans & au-dehors précifement ce qu'il faut h 1'ame, pour s'avancer dans la vie de la foi & dans le renoncement k elle-même. Je n'ai donc qu'a manger ce pain, & qu'a recevoir en efprit de facrifice tout ce que voua me donne- rez  XVI. Jour. Pain quotidien. 49 rez d'amer dans les chofes extréieures & dans le fond de mon cceur; cartout ce qui m'arrivera dans le cours de la journée eft mon pain quotidien, pourvu que je ne refuie pas de le prendre de votre main & de m'en nourrir. I T. La fairn eft ce qui donne Ie gout aux ali.ïiens, & ce qui nous les rend utiles. Qje n'avons-nous faim & foif de la juftice? Pourquoi uos aroes ne fontelles pas affamées & alterées comme nos-corps? Un hommequi eft dégoutê &qui ne peut recevoirles alimens,eft malade. C'eft aioli que notre ame languit en ne recherchant, ni leraffafiement, ni la nourriture qui vient de Dieu. L'aliment de 1'ame eft la vérité & la juftice. Connoftre Ie bien, s'en remplir, s'y fortifier; voilé le pain fpilituel, le pain célefte qu'il faut manger. Mangeons - en donc ; ayons-en faim. Soyons devant Dieu comme des pauvres qui mendient & qui attendent un peu de pain. Sentons notre foibleffe & notre dèfaillance: malC l»reut  5» XVI. Jour Pain quotidien. heureux, fi nous eD perdons Ie fentiment! Lifons, prions avec cette faim de nourrir nos ames, avec cette foif arden te de nous defaltérer de 1'eau qui rejaillit jusques dans le Ciel. il n'y a qu'urr grand & continuel défir de 1'mftruftion qui nous rend dignes de découvrir les merveilles de la loi de Dieu. Chacun recoit ce pain facré, feloiala rnefure de fon defir; & par-laon fe difpofe k recevoir fouvent & faintement le pain fubftantiel de I'Eucba. riftie, non - feulement corporellement, comme font plufieurs, mais avec l'efprit qui conferve & qui augraente la vie. XVII. JOUR,  XVII Joür. Paix de Vame. 51 XVII. JOUR. » Sur la paix de Vame. V 72 (a) vous laijfe ma paix; je vous donne ma paix , non comme le monde la donne. Tous les hommes cherchent la paix; mais ils ne la cherchent pas oü elle eft. La paix que fait efpérer le monde eft aufli différente & auffi éloignée de celle qui vient de Dieu, que Dieu lui-même eft différent & éloigné du monde; ou plutót le monde promet la paix; mais il ne peut la donner. II préfente des plaifirsquipaffentj mais ces plaiürs ne valent pas c« qu'ils coutent. JesusChrist feul peut mettre 1'homme en paix. II nous met d'accord avec nous-mêmes, guérit nos paffions & regie nos défirs. Il confole par 1'efpérance des biens éternels; il donne la joie du Saint-Efprit, C 2 J (*) Jean, 14, v. 27-  5 2 XVII Jour. Paix de Vame. il fait gouter cette joie intérieure dans la peine même; & comme la fource qui la produit eft intarjfiable, & que le fond de 1'ame oü elle réfide, efl: inaccrfiible a toute la malignité des hommes, elle deviect pour le jufte un tréfor que pcrfonne ne peut lui ravïr. La vraie paix n'eft que dans la poffeffion de Dieu , & la poffcffion de Dieu ici bas ne fe trouvc que dans la foumiffion a la foi & l'obéifTance k fa loi. Elles entretienncnt au fond du cosur un amour pur & fans mélange. Eloignez de vous tous les objets défendus. Retranchez tous les défirs fans rapport a Dieu. BanniiTez tout empreffemenr & tout inquiétude ; re défirez que Dieu; ne cherchez que Dieu , & vous gouterez la paix; vous la gouterez malgré le monde. Que efl-ce qui vous trouble? La pauvreté, les mé. pris, les mauvais fuccès, les croix in. térieures & extérieures ? Regardez tout cela dans la main de Dieu comm* de véritables faveurs qu'il diftribue a fes  XV]II. Jour. Joies trompeufes. 53 fes amis, & dont i! daigne voos faire part. Alors le monde changera de face pour vous, & rien ne vous ótera votre paix. XVIII. JOUR. Sur les joies trompeufes. J. 7Ai («) regardé les ris comme anfonge, é? j' ai dit dia joie; pourquoi me trompez-vous ? Le monde fe réjou:t comme les maladcs qui font en déüre, ou comme ceux qui rêvent agrcab'einent en dormant. Oa n'a garde de trouver de la foliditê, quand on nes'attache qu'è une peinture vame, a une image creufe, è uce ombre qui fuit, è une figure qui paffe. Onnefc réjouit qu'a caufe qu'on fe trompe; qu'ècaufe qu'on croit pofféder beaucoup, lors même qu'on nepoffede rien. Aurev-ilds la mort, on fe trouvera les mains vuiC 3 des (<0 Ectl. 2. v. 2.  54 XVIII. Jour. Joies trompeufes. des, & on fera horiteux de fa joie. Malhcur donc h ceux qui ont en ce monde une fdufle confolation, qui les exclut de la véritable! Difons fans cefTe h Ja joie vaine & évaporée que le' fiecle infpire ; Pmrquvi me trompez-vous fi grofliérement ? Rien n'eft digne de nous donner la joie, qae notre bienbeureufe efpêrance. Xout Je refte qui n'eft pas fondé la-deffus, n'eft qu'un fonge. I I. Celui (a~) qui boira de cette eau, aura encore foif. Pius on boit des eaux corrompues du fiedc, plus on eft altéré. A mefure qu'on fe plonge dans le mal, a mefure il cait des défirs inquiets dans le cceur. La pofieffion des richeffts ne fait qu'irriter la foif. L'avarice& 1'ambition font plus mécontentes dece qu'elles n'ont pas encore, qu'elles ne font fatisfaites de tout ce qu'elles poffedent. La jouifiance desplaifirs ne fait qu'amollir 1'ame ; elle la corrompt; elle la rend infatiable. Plus on fe reiÉU che, [>) Jean. 4. v. 13.  XIX Jour. Saintes larmes. 55 che, plus on veut fe relacher. II eft plus facile de retenir fon cceur dans un état de ferveur & de pénitence, que de le ramener, ou de leconcenir, lorfqu'il eft une fois dans la pente du plair fir & du relachement. Veillons donc fur nous-mêmes. Gardons. neus de boire d'une eau qui augmenteroit notre foif. Confervons notre cceur avec précaution, de peur que le monde & fes vaines confolations ne le féduifenr, & ne lui laiflent k la fin, que Ie dél'ef poir de s'être trompé. XIX. JOUR. Sur les faintes larmes. i "Qienheureux (a) ceux qui pleurent, JLJ paree qu'ils feront confolés. Quej nouveau genre de larmes, dit S. Au. guftin ! elles rendent heureux ceux qui les verfeut. Leur bonheur confiite C 4 « (*) Matth. s. v.  56 XIX Jour. Saintes larmes. a s'affigcr, a gémir de Ia corruption du monde qui nous environne, des pieges dont nous fommes entourés , du fond inépuifable de corruption qui eft au milieu de rotre ccejr. C'eft uo grand don de Dieu, que de craindre de pcrdre fon amour , que de craindre des'écarter de la voieétroite. C'eft le fujet des larmes des Saintf. Quand on eft cn dangrr de perdre ceque 1'onpoffede de plus précieux, & de fe perdre foi-rrême, il eft difücile de fe réjouir. Quand on ne voit que vanité, qu'égaremenr, quefcandale, qu'oubli & que mêpr's cu Dieu qu'on rime, il eft im. pc iTible de ne pas s'afSiger. Pleuron» donc a la vue de tant de fujets de lar» mes. Nctre trifttffe réjouira Dieu. C'eft Dieu lui-même qui eous 1'icfpire; c'eft fon amour qui fait couler nos larmes. II viendra lui - même les efluyer. i i. On ertend Jesus Christ qui dir: (a) malheurd vousquiriez; &m vrut lire. On Temend dire : Malheurd vous riches, (<0 Luc, 6. si, v. 24. as.  XIX. Jour. Saintes larmes. 57 riches, qui avez votre confolation en ce monde; &on recherche toujours les richefles. II dit: Heureux ceux qui pleit, rent', & on ne craint' rien tant que de pleurer. II faut pleurer ici-bas, nonfeulement les dangers de notre condition, mais tout ce que eft vain &deréglé. Pleurons fur nous & fur le prochain. Tout ce que nous voyons au" dedans & au dehors n'eft qu'afflidtion d'efpritj que tentation & que pêché. Tout mérite des larmes. Le vrai malheur eft d'aimer ces chofes fi peu dignes d'être aimées. Que de raifons de pleurer! C'eft le mieux qu'on puifle faire. Heureufes larmes que la grace opere, qui nous dégoutent des chofes paflageres, & qui font naitre en nous le délir des biens éternels! c y XX JOU*-  $% XX. JorjR. Prudence du fluit. Ji a fja) prudencedela chair eft lamort **—'des ames. La prudence des enfans du fiecle eft grande, puifque JesusChrist nous en afïure dans 1'Evangile, & elle eft même ibuvent plut grande ique celle des enfans de Dieu; mais il fe trouve en elle, malgré tout ce qu'elle a d'éclatant & de fpécieux , un effroyable défaut; c'eft qu'elle don. ne la mort è tous ceux qui la prennent pour la regie de leur vie. Cette pru. dence tortucufe & féconde en fubtilités, eft ennemie de celle de Dieu, qui marche toujours dar» la droiture & dans la fimplicité. Mais que fervent aux prudens du fiecle tous leurs talens, puisqu'a la fin ils fe trouvent pris dans leurs proprespieges? L'Apótre S. Jacques XX. J O U R. Sur la prudence du Jïecle. 1 '4><0 Rom. 8. v. 6.  XX Jour* Pmfcm dujiede* $9 oues donne è cette prudence le non* dc (aïterreftre, d'animale fytoM<$T que.; terrejtre, paree qu'elle borneU* foins a 1'acquifuion & i la poffuffioB des biens de la terre; animale, p«cfc qu'elle n'afpire qu'a fournir aux hommes tout ce qui flat te leurs pafllons, « k les plonger dans les plaifirs des lens; diabvlique , paree qu'ayant tout 1 elpnc & route la péoétration du Demon, elle en a toute la malice. Avec elle, on fl'imagine tromper tous ks autres & on ne trompe que foi-mètne. I I. Aveugles donc tous ceux qui fe croient fages, & qui ne le font pas de lafagelTe de j es os - Christ, feule dignedu nom de fageiTc! lis courent dans une profonde nuit, après des fantömes. Ils font comme ceux qui, dans un fonge, psnfentêtreéveillés, & qui s'imagineDt que tous les objets du ionge font réels. Ainfi font abufés tous Jes grands de la terre» tous les fages du fiecle, tous les hommes enchantés par C 6  6*0 xx. Jour. Prudence dufiecU. les faux plaifirs. II n'y a que les enfans de Dieu qui marchenc aux rayons de la pure vérité. Qu'eftce qu'ont devant eux les hommes pleins de leurs penfées vaincs & ambicieufts ? Souvent la dif. grace; toujours la mort, Ie jugement de Dieu & 1'éternité. Voila les grands objets qui s'avancent & qui viennent au-devant de ces hommes profanes. Cependant ils ne les voient pas. Leur politique prévoit tout, exceptélachute & 1'anéantilTement itévitable de tout ce qu'ils cherchent. o infenfés! quand ouvrirez vous les yeux è la lumierede Jesus-Christ, qui vous découvriroit le néant de toutes les grandeurs d'icibas? xxi. jour.  XXI. Jour. Confiance en Dieu. 61 Jl (a) vaut mieux mettre fa confiance dans le Seigneur, que de la mettre dans Vhomme. Vous vous coDfiez tous les jours a des amisfoibles, è des hommes inccarjus, a des domeftiques irjfi. deles; & vous craignez de vous fier è Dieu. La fignature d'un homme public vous met en repus fur votre bien; & !'EvangiIe éternel ne vous raflure pas. Le monde vows promet, & vous le croyez: Dieu vous jure, & vous avez de la peine k Ie croire. Quelle honte pour lui ! Quel malheur pour vous! Rétablifibrs tout dans I'ordre. Faifons avec moderation ce qui dépend de nous. Attendons fans bornes ce qui dépend de Dieu. Réprimons tout empreflement, toute inquiétude déguiC 7 ïèe <<0 Pf. 117. v.8. XXI. JOUR. Sur la confiance en Dieu. I.  62 XXL Jour. Confiance en Dieu. fée fous le nom de raifon, ou de zele. Celui qui en ufe ainfi , s'établit en Dieu, & devient immobile , comme la montagne de SioD. 1 fi La CoDfiance pour Ie falut doit être encore plus élevée& plus ferme. (a~)Je puistouten celui qui me fortifie. Quaad je croyois tout pouvoir, je ne pouvok rien ; & maintenant qu'il me fembie que je ne puis rien, je commence a pouvoir tout. Heunufe impuuTance qui me fait trouver en vous, ö mon Dieu , tour ce qui me manquoit en ÏEO'-même! Je me gWifip dans mon jnfirmité & dans les maux de la vie, puifqu'üs .me défabufent du monde entier & de moi-même. Je dois m'ef. timer heureux d'être écrafé par une main fi miféricordieufe, puifque c'eïl dans eet anéantiiTement que je ferai revêtu de votre force, caché fous vos alles, & environné de cette prötection fpéciale que vous ëtendez fur vos enfans humbles , qui tfattendent rien aue de vous. * XXII. JOUR, (O Fhilf 4. V. ï3»  XKU.JwR.MifêricorieleBieu. 63 XXII. JOUR. Sur la profondeur de la mifêricorde de Dieu. f~\u'elle (a) eft grande la mi/êricordt %S du Seigneur ! C'eft un afyle eertain pour tous ceux qui je tournentvers die. Ojje tardonsnotis a nous jettet dans Ia profondeur de eet abyme'? Pfus nous nous y perdrorrs avecune confiance pleine d'amour, plus nous ferons en état de nous fauver. Donnons nous è Dieu fans réferve, & ne craignons rien. II nous aimera, & nous Taimerons. Son amourcroiffancchaque jour, nous tïendra lieu de tout le refte.. II remplita !ui feul .tout notre xceur qüe le monde avoit enivrê, agité, troublé, fans pouvoir jamais le remplir. .11 ce nous ótera que ee qui nous rend malheureux; il ne nous tera méprifer que I. (<0 Eed. 17. v. H.  64 XXII, Jour. Miféricorde de Dieu. que Ie monde que nous méprifons peut être déja. II ne nous fera faire que Ia plupart des chofes qöe nous faifons, mais que nous faifons mal j auJieu que nous les ferons bien, en les rapportant a lui. Tous, jufqu'aux moindres aftions d'une vie fimple & commune, fe tournera en confolation, en mérite & en récompenfe. Nousver-* rons en paix venir la mort; elle fera changée pour nous en un commencement de vie immortelle. Bien loin de nous dépouiller, elle nous revêtira de tout, comme ( a) dit S. Paul; & alors nous verrons la profondeur des miféricordes que Dieu a exercées fur notre ame. I I Penfez devant Dieu aux effets de cette miféricorde infinie, k ceux que vous avez déja éprouvés, aux lumieres que Jïsüs-Christ vous a données» aux bons fentimens qu'il vous a infpirés aux pêchés qu'il vous a pardonnés , aux pièges du fiecle dont il vous a (O ïl- Cor. s> V. 4,  XXII. Jour. Miféricorde de Dieu. 65 agaranti, aux fecours extraordinaires qu'il vous a ménagés. Tachez de vous atte'ndrir , par le fouvenir de toutes ces marqués précicufes de fa bonté. Ajoutezy la penfée des croix, dontilvous a chargé pour vous fanftifier, car ce font encore des richefles qu'il a tirées de la profondeur de fes trêfors, & vous devez les regarder comme des témoignages fignalés de fon amour. Que la reconnoiflance du paffé vous infpire de la confiance pour 1'avenir. Soyez perfuadée, ame timide, qu'il vous a trop aimée pour ne pas vous aimer encore. Ne vous défiez pas de lui, mais feulement de vous-même. Souvenez-vous qu'il eft, cuimuc die l'Apètre, ( o) le Pere des mijéricordes, ff? le Dieu de toute confolation. II fépare quelquefois ces deux chofes; la confolation feretire, mais la miféricorde demcure toujours; il vous a óté ce qu'il y avoitde doux & de fenfible dans fa grace, paree que vous aviez befoin d'être humiliée, & d'être punie d'avoir cherché ailleurs de vaines copfolations, ■ Ce criti¬ ci* ) n. Cor. 1. v. j,  f56 XXIII. Jour. La douceur du jong cMtiment eft encore une nouvelle profondeur de fa divine miféricorde. XXIII. JOUR. Sur la douceur du joug de Jesus- CjiRIST. r, jV/Ton O) jong eft doux £? mon far*Lr-* deau eft léger. Que Ie nom de joug ne nous efFraie | point. Nous en portons le poid*; mais Dieu le porte avec nous. & plus qur» nnns , paree que c'eft un joug qui dok être porté par deux, & que c'eft le fien, & non pasle DÓcre. jesus-Christ fait aime, ce joug. II 1'adoucit par le charme in. térieur de la juftice & de la vérité. II répand fes chaftes délices fur les vertus, & dégoute des faux plaifirs. Ilfoutient l'nomme contre lui même, 1'arrache a fa corruption originelle, & Ie rend fort, malgré fa foibkfle. O homme de peu de foi, que craignez-vous? LailTez C«) Matth. ir. v. 30.  XXIÏÏ. Jour. La douceur du joug. 67 Laiffez faire Dieö. Abandonnez-vous è iui. Vous fouffrirez; mais vous fouffrirez avec amour & avec paix. Vous combattrez; mais vous remporteroz Ia vi&oire; & Dieu lui-même, après avoir combattu en votre faveur, vous couronnera de fa propre main. Vous pleurerez; mais vos larmes feront douees, & Dieu lui-même viendra avec complaifapce les eiTuyer. Vous n'aurez plus la permiffion de vous abandonner a vospaffiorrs tyracniques; mais en facrifiant librement votre liberté, vous en retrouvcrez une autre inconnue au monde, & plus précieuiè que toute la puiffance des Rois. I I. Quel aveuglement de craindre de trop s'engager avec Dieu! Plongeonsnous dans fon fein. Plusonl'aime, plus ©n aime auffi tout ce qu'il nous fait faire. C'eft eet amour qui nous confole de cos p.rtes, qui adoucit nos croix, qui nous détache de tout ce qu'il eft dan. gereux d'aimer, qui nous préferve de mille poifons, qui nous montre une miféri»  .68 XXIV. Jour. Sur la faujje liberté. tous les maux que nous fouffrons, qui nous découvre dans la mort même une gloire & une félicité éternelle. Comment pouvocs nous craindre de nous remplir trop de lui? Eft-ce un malheur d'être déchargé du joug pefant du monde, & de porter le fardeau léger dejEsus-CHRisT? Craignons-nous d'être trop heureux, trop délivrés de nous-memes, des caprices de notre orgueil, de la violence de nospaffions, & de la tyrannie du fiecle trompeur? XXIV JOUR. Sur la fauffe liberté. I. f~\a (a) eft l'efprit du Seigneur, ld ^ eft aujji la liberté. L'amour de la liberté eft une des plus dangereufcs pafiions du cceur humain; & il arrivé de cette paflion , comme de toutes les autres j C« J t Cor 3, v. 17. nrféricorde bier.faifante au travers de  XXIV. Jour. Sur Ta faujfe liberté. 69 autres; elie trompe ceux qui Ia fuivent; & au lieu de Ia liberté véritable, elle leur fait trouver Ie plus dur «Sc Ie plus honteux efclavage. CommeBtnommezvouscequi fe paffe dans le monde ? Que n'avez-vous point a fouffrir pour ménager 1'eftime de ces hommes que vous meprifez ? Que ne vous en coute t-il pas pour maUrifer vos paflions, quand elles vont trop loin , pour contenter celles è qui vous voulez céder, pour cacher vos peines , pourfauver desapparences embarraffantes & importuncs? Eft-ce donc la cette liberté que vous aimez tant, & que vous avez tant de peine k facrifkr k Dieu? Oh eftelle? Montrez-la moi. Je ne vols par tout que gêne, que fervitude baffe & indignc, que néceflité déplorable de fe déguifer. On fe refufe a Dieu, qui ne nous veut que pour nous fauver; & on fe livre au monde, qui ne nous veut que pour nous tyrannifer & pour nous perdre. Cf  70 XXIV. Jour. Sur la fauffe liberté. II. On s'imagine qu'on ne fait dans le monde que ce qu'on veut, paree qu'on fent le gout de fes paffions par lef. quelles on eft entrainé ; mais comptet-on les dégouts affreux , les ennuis mortels, les mécomptes inféparables des plaifirs, les humiliations qu'on a è effuyer dansles places les plus élévées? Au dehors tout eft riant. Au • dedans tout eft plein de chagrin & d'inquiétude. On croit être libre, quand onne dépend plus que de foi-même. Folie erreur! Y en a-t-il unétatoü 1'onne dépende pas d'autant de maïtres qu'il y a de perfonnes k qui 1'on a relation ? Y en a-t-il un oü Ton ne dépende pas encore devantage des fantaifies d'autrui, que des fiennes propres ? Tout le commerce de la vie n'eft que gêne par la captivité des bienféances & par la néceflité de plaire aux autres. D'ailleurs nos paffions font pires que les plus cruels tyrans. Si on ne les fuit qu'è demi, il faut k toute heure être aux prifes avec elles, & ne refpirer  XXV. Jour. Détermimt. kDieu. 71 refpirer jamais un feul moment. Elles fe trahiffent; elles déchirent le cceur; elles foulent aux pieds les loix de 1'hon» neur & de la raifon, & ne difent jamais, c'eft aflez. Si on s'y abandonne tout-èfait; oü ce torrent menera-t-il? J'ai horreur de le penfer. O mon Dieu , preférvez-moi de ce funefte efclavage que 1'infolence humaine n'a pas dé honte de nommer une liberté. C'eft en vous feul qu'on eft libre. C'eft votre vérité qui nous délivrera, & qui nous fera éprouver que vous fervir, c'eft regner. XXV. JOUR. Sur la détermination entière h être h Dim. r. Oeigneur, (a) que vóulez*vouf que & jefaffe? C'eft ce que difoit S. Paul, renverfé miraculeufement & converti par la grace du Sauveur qu'il perfécu- toit 00 Acl. 9. v. «  7 a XXV. Jour. Déterminat. "h Dieu. toit. Hélas / combien 1'avons • nous perfécuté par nos infidélités, par nos humeurs , par nos paffions qui ont troublè 1'cuvrage de fa miféricorde dans notre cceur ? Enfin il nous a renverfés par la tribulation; il a ècrafé notre orgueil; il a confondu notre prudence charnelle; il a confteïnê nolre amour propre. Difons-lui docc avt c un acquieicemerit entkr: Seigneur, que voulez-vous que je fajje? Juiqu'ici je ne rn'étuis tourLé vers vous qu'imparfaitement; j'avois ufé de mille remifes, & j'avois taché de fauver & d'empcrter du débris de ma convcrfion tout ce qu'il m'avoit étépoffible, mais préfentement je fuis prêt è tout, & tous allez dcvenir le maitre abfolu de mon cceur & de ma conduite. I l II ne fuffit pas que 1'ofFre foit univerfelle. Ce ne feroit rien faire, fi elle demeuroit vague & incertaiue, fans defcendre au détail & a la pratique. IIy a trop long temps , dit S. Auguftin, que nous trainonf une voloiiié vague & languiflante pour Ie bien. 11 ne coute  XXVI. Jour. Capitul. anc ï)ieu. 73 rien de vouloir être parfait, fi on ne fait rien pour la perfeftion. II faut Ia vouloir plus que toutes les chofes temporelies les plus cheres & les plus vivement pourfuivies, & il ne faut pas vouloir faire moins pour Dieu, que 1'on n'a fait pour Ie monde. Sondons notre cceur. Suis-je déterminé a facrifler è Dieu mes amitiés les plus fortes, mes habitudes les plus enracinées, mes inclinations dominantes , mes plus agréables amufemens? XXVI. JOUR. Sur la Capitulation qu'on vouiroit faire avec Dieu. I de deux cótés ? (fc) Nul nepeutJer~ vir deux maitres. On fait bien qu'il faut fervir Dieu & 1'aimer, fi on veut être fauvé j mais on voudroit Wen oiw de D f„£ 03 »• Rois, 18, v. ai> (*) Matth. 6, v, ï4.  74 XXVI. Jour. Capitul. avec Dieu, fon fcrvice & de fon amour, tout ce qu'il ya d'onéreux, & n'y laiflVr que ce qu'il y a d'agréable. On voudroit le fcrvir, k condition de ne lui donner que des paroles & des cérémonies, & encore des cérémonies courtes, dont on eft bien-töt laffé& ennuyé. On vou. droit 1'aimer, k condition qu'on aimeroit avec lui & peut - être plus que lui , tout ce qu'il n'aime point, & qu'il condamne dans les vanités mondaines. On voudroit 1'aimer , k condition de ne diminuer en rien eet aveugle amour de nous-mêmes, qui va jöfqu'a Tido. Iêtrie, & qui fait qu'au lieu de nous ïapportcr k Dieu, comme è celui pour qui nOUS fommca faïta od veut aU contraire rapporter Dieu k foi, & ne le rechercher, que comme une reflburcequi nous confole, quand les créatures nous manqueront. On voudroit le fervir & 1'aimer, a condition qu'il fera permts davoir honte de fon amour, de 5*en cacher comme d'une foibleffe, de jougir de lui comme d'un ami indigne d'êrre aimé, de ne lui donner que quel. que extérieur de Religion pour évïter le fcandale, & de vivre k la merci du monde a  XXV. Jour. Capitul.ayec Dieu. 75" monde, pour ne rien donner k Dieu, qu'avec la permiffion du monde même. Quel fervice & quel amour J I I. Dieu n'admet point d'autre pafte avec nous, que celui qui a rapporc è notre première alliance dans le Baptê. me, oü nous avo-is promis de renoncer k tout pour êrre è lui, & au premier commandement de fa loi, oü il exige fans referve tout notre cceur, tout notre efprit & toutes nos forces* Peut on en efFet aimer Dieu de bonne foi, & avoir taotd'égardepour le monde , fonennemi, auquelil a donnéde ü ternbles malédiftions? Peut on aimec Dieu, & craindre de trop le connoirre de peur d'avoir trop de chofes è lm fa! crifLr? Peut-on aimer Dieu, &fecontenter de ne pas 1'outrager , fans fe mettre en peine de lui plaire, de Je glorifier & de lui témoigner courageufem nt, dans les occafïons qui fe pré. fentent tous les jours, Pardeur & |a fincérité de fon amour? Dieu nemef ai bornes, ni réferves, ea fc donnant  j6 XXVII. Joor. Emploi du temps, h nous, & nous voudrions en apporter mille avec lui. Elt-il fur la terre des créatures affez viles, pour fe contenter d'être aimées de nous, comme nous n'avons pas honte de vouloir que Dieu fe contcntat d'être aimê? XXVII. JOUR. i Sur le bon emploi du temps. Faifons (a) l» hU*, pendant que nous en avons le temps. Une nuit viendra, pendant laquelle perfonne ne peut agir. Le temps eft précieux; mais on n'en connoit pas le prix. On le connoïtra, quand il n'y aura plus lieu d'en profiter. Nos amis nous ledemandent, comme fi ce n'étoit rien, & nous le donnons de même. Souvent il nous eft a charge; nous ne favons qu'en faire, & nous en fommes embarraffés. Un jour viendra qu'un quart-d'heure nous pa- roitra V (a) Cal. 6, V. *. Jean- 9> * 4>,  XXVII. Jour. Emploi du temps. ?j roitra pJus eftimable & plus défirable que toutes les fortunes de PUnivers. Dit u libéral & magnifique dans tout le refte, nous apprend, paria fagc économie de fa Providence, combien nous devrions être circonfpccls fur Ie bon ufage du temps, puifqu'il ne nous en donne jamais .deux infhns enfemble , & qu'il ne nous accordele fecond qu'en retirant le premier, & qu'en retenant le troifieme dans fa main, avec une entiere incertkude finous 1'aurons. Le temps nous eft donné pour ménager l'éternité; & 1'éternité ne fera pas trop ongue pour regretter Ia perte du temps, fi nous en avons abufé. Toute notre vie eft a D'eu, aufiibien que tout notre cceur. L'un & ï'cutre ne font pas trop pour lui. I! nenous U-s a donnés que pour 1'aimer & Dour lelervir. N:: lui en aérobocs rien, Nous ne pouvons pas a tous momens fau'cde grandes chofes; mais nous pouvons toujours en faire de convenables- a notre état. Se tairc , fouffrir , prier, D 3 quand  78 XXVII. Jour. Emploi du temps. quand nous ne fommes pas obligés d'agir extérieuremeut, c'eft beaucoup offrir k Dieu. On coutre-temps, une contradiction , un murmure, une itnpormnité, une parole injufte recue & fourFerte dans la vue de Dieu, valent bien une demi-heure d'oraifon; & on ne perd pas le temps, quand, en le perdant, on pratique la douceur & li patience. Mais pour cela il faut que cette perte foit inévitable, & que nous ae nous la procurions pas par notre faute. Aicllréglezvos jours, &rachetezle temps, (a) comme dit S. Paul, en fuyant le monde, & en abandonnant au monde des biens qui nevalent pas le temps qu'ils nous ötent. Quittez les amulemens, les correfpondances inutiies» les épaüchemens du cceur qui flattent 1'amour propre, les converfations qui ('illipent l'efprit & qui ne conduifent h rien. Vous trouverez du temps pour Dieu, & il n'y en a de bien employé que celui qui eft employé pour lui. XXVIII. JOUR. (_a ) Ephef. $ , v. iö.  XXVIII. Jour. Préfence Dieu. 7Sf XXVIII. JOUR. Sur la préfence de Dieu. I. "Jl/ftrchez en ma préfence, Ca) 6? ^ f°yez parfait. Voila, Seigneur, ce que vous difiez au fidele Abraham; & en effet, qui marche en votre préfence eft dans la voie de la perfeftion. On ne s'écarte de cette voie fainte, qu'en vous perdant de vue, & qu'en ctflTaut ae vuus voir en tout. Hélas • oii vais-je , lorfque je ne vous vois plus, vous qui êtes ma lumiere & le terme unique oü doivent tendre tous mes pas? Vous regarder dans toutes les demarches que 1'on fait, c'eft le mnyen de ne s'égarer jamais. O foi lu. mineufe, au milieu des ténebres qui nous environnent! O regard plein de confiance & d'amour , qui conduifez 1'homme a la perfeótioa ! O Dieu, je D ( JJ2 00 Gen. i?, v. i.  «o XXVIII. Jour. Préfence de Dieu. ne vois que vous, c'eft vous feul que je cherche & que jeconfideredans tout ce que mes yeux femblent regarder. L'ordre de votre providence eft ce qui attire mon attention. Mon cceur ne veille que pour vous dans la multitude des aiFaires, des devoirs & des penfées qui m'occupent; paree qu'elles ne m'oceupent que pour cbéir h vos ordres: ainfi je tdche de réunir teute mon attention en vous, ö fouverain & unique objet de mon cceur, lors même que je fuis obligé de partager mes foins, felon les loix de votre divine volonté. Hé! que pourrois-je regarder dans ces viles créatures, fi vous ceffiez de m'y appliquer, « 11 je cenojsae vous y voir? I I. Je tiendrai (a) mes yeux levês vers les montagnes faintes , d'oè j'attends tnute ma force £? tout mon fecours. C'eft en vain que je m'appliquerois unique< ment a regarder a mes pieds, pour me délivrer des pieges innombrables qui m'environnent. Le danger vient d'en* bas» («) Pf. I20a V. I. .  XXIX. Jour. Amour de Dieu. 81 bas; mais Ia délivrance ne peut venir que d'en-haur. C'eft Ia que mes yeux s'élevent pour vous voir. Tout eftpiège pour moi fur la terre, le dedans & Ie dehors. Tout eft piège, Seigneur, fans vous. C'eft vers vous feul que fe por. tent mes yeux & mon cceur. Je ne veux voir que vous; je n'tfpere qu'en vous. Mes ennemis m'afliegent fans celle ; ma propre foiblefle m'effraie. Mais vous avez vaincu le monde pour vous & pour moi, & votreforce toutepuiffante foutiendra mon infirmité. AA1A. j w u k.. Sur Vamour que Dieu a pour noui. t 7? ( a) vöiu ai aimi d'un amour tt.er~ nel. Dieu n'a p;:s atten.m que nou» fuflions quelque chofe pour nous ai" mer. Avant tous les fiecles, & avanc même que nous euffions 1'étre que nous D y poffé, &) Jerem. 31, v. 3.  8» XXIX. Jour. Amour k Dieu. poffédons, il penfoi k nous, & il n'y penfoit que pour nous faire du bier. Ce qu'il avoit méditê dans Pé'ernité, ill'a exécuté dans le temps. Sa main bienfaifante a répancu fur nous toutes fortes de biens. Nos infiJelités né-nes, ni nos ingrartudcs , prtfque auffi nnmbreufosque fes faveurs, n'ontpuenco» re tarir la fource de fes dons, ni arrêter le cours de fes graces. O amour fins commencement, qui m'avrz aimé duTant des fiecles infinis, & lors même que je ne pouvois Ie refftntir, ni le re* connokre/ O amour fans mefure, qui m'avez fait ce que je fuis, qui m'avez donud W vjUfc J-ol , a. .jUI lil ti. r.nm(>t- tcz encore infiniment davantage! O amour fans interruption & fans inconftance, qüe toutes les eaux ameres de mes iniquités n'orjt pu éteindrc! Ai je un cceur, ö mon Dku, fijenefuispas pén ét é de reconnoiffance &■ de tendtcflTt. pour yous ? I I. " Mais que vols-je ? ün Dieu qui fe donne lui-même, aprés même avoir teut  XXIX. Jour. Amour ie Dieu. 83 tout donné. Un Dieu qui vient me chercher jufqu'oü. mon pêché m'a fait defcendrc. Un Dk-u qui prend la forme d'un efclave, pour me délivrer de 1'efclavage de mes ennemis. Un Dieu qui fe fait pauvre pour m'eurichir. Ua Dieu qui m'appulle & qui court aprés moi, quand je Ie fuis. Un Dieu qui expire dans les tourmens, pur m'arracher des bras de la mort, & pour me rendre une vie heureufe; & je ne veux fouvent, ni de lui, ni de Ia vie qu'il me préfente ! Pour qui prendroit-on un homme qui aimeroit un autre homme, comme Dieu nous aime ? & de quels anathêmpe 00 °« fe fndpoe digne aprés cela celui qui n'aimera pas le Seigneur Jesus ? C<0 !• Cor' ii, v. aa. D 6 XXX. JOUR»  84 XXX. Jour. Amour pour Dieu. XXX JOUR. Sur Vamour que nous devons avvir pour Dieu. t f)u'ai-je (a) d dêfirer dans le Ciel, & que puis-je aimer fur la terre , fi ce n'ejt vous, 6 mon Dieu? Souvent quand nous difons è Dieu que r.ous 1'aimons de tout notre cceur, c'eü un bagage, c'eft un difcours fans réalité; on nous a appris a parler ainli dans notie cufance, & nous continuons quand nous fommes grands, fans fa voir bien Pmvent ce que nous difons. Aimer Dieu t c'eft n'avoir point d'autre volonté que la lienne; c'eft obf.rver fi élement fa fainte Loi; c'eft avoir horreur cu pé. ché. Aimer Dieu, c'eft aimer ce qu» Jesus Christ a aimé , la pauvreté, les bumiliations, les fouffrances; c'eft haïr ce que jesus-Obrist a haï, le C<0 pr, i». v.ss.  XXX. Jour. Amour put Dieu. 8$ Ie monde , la vanité, nos paffions. Peut-on croire qu'on aime un objec auquel on ne voudroit pas reflembler? Aimer Dieu, c'eft s'entretenir volontiers avec lui, c'eft defirer d'aller a lui, c'eft foupirer & languir après lui. O le faux amour que celui qui ne fe foucie pas de voir ce qu'il aime ! I I. Le Sauveur O) eft venu apporter un feu divin fur la terre, & fon défir eft que ce feu brule & confume tout. Cependant les hommes vivent dans une froideur mortelle. Ils aiment un peu de méuil, une maifuu, ui*-num, un tïtre en 1'air, une chimère qu'ils appellent réputation. Ils aiment une conver* fation, un amufement qui leur êchappe. II n'y a que Dieu pour qui il ne leur refte point d'amour; tout s'êpuife pour les créatures les plus méprifables. Ne voudrons nous jamais gouter le bonheur de 1'amour divin ? Jufqu'è. quand prêférerons-nous d'aimer les créatures les plus empoifonnées ? O D 7 Dieui C») Luc. li, V. 49' .c.  26 XXXI Jour. Amour divin. p.~u\ ré^nez fur nous, malgré nos -nfidéütéy. Que le feu de votre amour êteigne tout autre feu. Que pouvonsnous voir d'aimable hors de vous, que nous rje trouvions parfaitetnent en vous qui êtes Ja fource de tout bien ? Accordez - nous la grace de vous aimer» & nous n'aimerons plus que vous, Sc nous vous aimerons éternellement. XXXI. JOUR Sur lesfentimens de Pamtur divin. 1. f~\Dieu(ff) demon cceur, 6 Dieu mn partage pour jamais ! Pm . on vous connoïtre, 6 monD;;u, &nepas vous aimer, vous qui furpplPz en beauté, envertu, en grandeur, en pouvoir, en bonté, en libéralité, en msgnificence, en toutes forr.es de perfect, ons; & ce qui m'eft plus prnche en amour pour moi, tout ce que les efpritscrées , peuveni  XXXI. Jour. Amour divin. 87 peuvcr.t comprecdre ? Vous me per* mettez, c'eft ;rop puidire, vousm'ordonnez de vous «traer. Après cjla, Seigneur, je ne me connois plus, & je n^ me poflede plus. O amour facré, qui avez bleffé mon amour, & qui de vos propres traits , vous êtes vous-meme blcflé pour moi; venez me guérir, ou plutóc venez rendre la bleflure que vous m'avez faite, encore plus proton de & plus vive. Séparez-moi de toutes les créamres; elles m'incommo. dent; elle m'importunent; vous feul me fuffifez, & je ne veux plus que vous. I I. Quoi! il fera dit que les amans infenfés de la terre porteront, jufqu'è un excés de délicatcffe & d'ardeur, leurs folies paffions; & on ne vous airneroit que foib'ement & avec mefure! Ndib, non, mon Dieu , il ne faut pas que 1'amour profane 1'emporte fur 1'amour divin. Fa'tes voir ce que vous pouvez fur un cceur qui eft tout a vous. L'accès vous en eft ouvert; les refforts vous en font connus. Vous favez ce que votre  88 XXXI. Jour. Amour divin. tre grace eft capable d'y exciter. Vous n'attendez que mon confentement & que 1'acquiefcement de ma liberté. Je vous donne mille & mille fois 1'un & 1'autre. Prenez tout; agiffez en Dieu; embrafez-moi; confumez - moi. Foible & impuilTante créamre que je fuis, je n'ai rien a vous donner que mon amour. Augmentez■ le, Seigneur, & rendez-le digne de vous. O fi j'étois capable de faire pour vous de grandes chofes! O fi j'avois beaucoup a vous facrifier! Mais tout ce que je puis n'eft rien. Soupirer, languir, aimer & mou. rir, pour aimer encore davantage, c'eft déformais tout ce que je veux. F I W.