LHISTOIRE DU R E G N E DE L'EMPEREUR CHARLES-QUINT.   L'HISTOIRE DU R E G N E DE LEMPEREUR CHARLESQUINT, ~Prlccd.it (Tun Tableau des pro gris de la So~ ciétê en Europe, depuis la dejlrucüon de tEmpire Romain jufqu'au commencement du fei^ieme Siècle. ParM. Robertson, Doöeitr en Théologie , Principal de 1'Univerlïté d'Edimbourg, & Hiftoriographe de Sa Majefié Britannique pour 1'Ecoffe. OVVRAGE TRADUIT DE L'ANGLOIS, TOME S I X I E M E, A MAE S T R I C H Ty Chez Jean-Edme Dufour. & Phil. Roux, Imprimeurs-Libraires, afTnciés. M. DCC. L X X XIII,   L'HISTOIRE DU R E G N E DE L'EMPEREUR CHARLES QUINT. L I V R E XI. S que le traité de Paffau fut figné , Maurice , pour remplir les en- ,5'2,A gagements qu'il avoit coatraöés avec e 3 Aout: Ferdinand , marcha vers la Hongrie Maurice a la tête de trente mille hommes, ™™h*een Mais les forces fupérieures desTurcs, COntre7ej les mutineries que lemanque de paye Turcs, occafionna parmi fes foldats Allemands Tornt VI. A  Le Landgiave de Heffe recouvre fa liberté. (d) Iftuanhaffi, Ai/?. Hvngar. «8. Thuan, /ii. 19, 371» % L' H I S T O I R I & Eipagnols , & fa méfintelligence avec Caftaldó qui ne lui cédoit qu'a regret le commandement général, 1'empêcherent de rien exécuter qui fut digne de fa renommee ou avantageux au Roi des Romains (a). A peine s'étoit-il mis en marche, que le Prirtce de Helle le quitta avec fes troupes pour aller recevoir le Landgrave fon pere, & lui remettre les rênes du gouvernement qu'il avoit pris depuis fon abfence. Mais la forti! ne n'étoit pas encore laffe de perfécuter ce Prince prifonnier. Reifenberg , homme entreprenant, qui de foldat étoit deventi colonei d'un bataillon de mercenaires a la folde de Heffe, les débaucha fecretement au jeune Prince pendant fa marche, & les conduifita Albert de Brandebourg, qui, ayant refufé d'accéder au traité de Paffau, continuóit fes höfiilités contre 1'Empereur. Malheureufe» ment pour le Landgrave, on apprit cette défertion au moment qu'a peine  DE CH ARl ES-QüINT. 3 forti de Ia citadelle de Malines oü il étóit détemi, il n'avoit point encore pafle les frontieres des Pays-Bas. La Reine de Hongrie qui y comman» doit au nom de fon frere, croyant ce Prince coupable de la violation d'un traité auquel il devoit fa liberté, le fit arrêter, & le remit une feconde fois entre les mains du même Capitaine Efpagnol qui 1'avoit gardé pendant cinq ans avec la plus févere vigilance» Ainfi Philippe, livré de nouveau k toutes les horreurs de la prifon, perdit bientöt le courage que lui avoit rendu le cóurt interralle de fa liberté, & tomba dansle défefpoir, fe croyant condamné k une captivité éternelle. Cependant 1'Empereur ayant appris que ïe Landgrave & fon fils n'avoient point de part a la défeöion des mercenaires de Reifenberg, donna des ordres pour retècher fon prifonnier, & Philippe fut enfin déliVré de la captivité oü il avoit langui li long-temps (a). Mais quoiqu'il fut rétabli dans fes Etats} fes fouffran- (4) Sleid. 572.. Belcarii, commtnt. £34. A ij 155a,  1552. L'Elefteur de Saxe eft atiffi rela-ché de fa prilbn. 4 L' HlSTOIRE ces paflees fembloient avoir éteint la vigueur & l'atlivité naturelle de fon efprit. Ce Prince, auparavant le plus hardi & le plus entreprenant des Souverains de 1'Empire, devint le plus timide & le plus circonfpecl:; il paffa le refte de fes jours dans le repos & Pindolence. L'Elefteur de Saxe, déchu de fes dignités, obtint auflï fa liberté par la paix de PalTau. L'Empereur, forcé d'abandonner le projet de détruire la religion Proteftante, n'ayoit plus de raifon pour le retenir prifonnier; d'ailleurs, pour regagner 1'attachement 8c la confiance des Allemands dont les fecours lui étoient néceffaires dans 1'entreprife qu'il méditoit contre la France , le meilleur moyen étoit de relacher un Prince qui ne s'étoit pas moins attiré d'eltime par fon mérite, que de compaiïïon par fes malheurs. Jean-Fréderic reprit donc pofJeffion de cette partie de fon territoire, qui lui avoit été réfervée lorfque Maurice s'empara de fon Eleöorat.Le changement de fortune n'affoiblit point cette grandeur d'ame qui avoit fait admirer Fréderic dans un état plus  de Charles-Quint. 5 brillant & plus heureux, & qu'il avoit fu conferver même dans fa prifon : & il vécut encore plufieurs années avec cette haute réputation qu'il s'étoit acquife a fi jufte titre. Cependant la perte de Metz, de Toul &c de Verdun, affligeoit vive- j ment 1'Empereur. Accoutumé a ter- ( miner k fon avantage toutes fes guer- , res contre la France, il crut qu*il y ] alloit de fa gloire k ne pas fuccomber dans celle-ci, & que ce feroit une tache flétriffante pour fon régne que de laiffer fans retour démembrer de 1'Empire un domaine de cette importance. Son intérêt n'y étoit pas moins engagé que fon honneur. Comme cette frontiere de la Champagne fe trouvoit plus ouverte qu'aucune autre Province de France, c'étoit par - la qu'il avoit toujours pénétré dans ce Royaume. Mais fi Henri venoit k garder fes dernieres conquêtes, la France gagnoit une barrière formidable du cöté oü elle avoit été jufqu'alors le plus foible. En mêmetemps, 1'Empereur y perdoit toute la fïïreté que ces trois villes donnoient ii fon ennemi; car auparavant elles A iij 1552. L'Empe- eur prend a réfoluion d'atta[uer Ia "rance.  Ses préps ratifs pou la guerre. 6 L'Hl STOIRE couvroient fon pays, & en les perdant, fes propres places, qui n'étoient que peu forrifiées, reltoient expofées a une invafion. C'eit ce qui détermina Charles a tenter de les recouvrer; & les préparatifs qu'il avoit faits contre Maurice & fes alliés , le mirent en état d'exécuter promptement fa réfolution. La paix de Paffau ne fut pas plur tót conclue, que, honteux de fa retraite k Villach, il s'avan^a vers Aufbourg, a la tête d'un corps confidérable d'Allemands a fa folde, & de toutes les troupes qu'il avoit tirées de fes Etats d'ltalie & d'Efpagne. Plulieurs des bataillons que les confédérés venoient de congédier, pafferent a fon fervice, & il engagea même quelques Princesde 1'Empire a fe joindre a lui avec leurs vaffaux. Pour mieux cacher la dellination d'un arniement li formidable qui pouvoit inquiéter la France, & la mettre fur fes gardes, il fit courir le bruit qu'il marchoit en Hongrie pour fecourir Maurice contre les infideles. Dès qu'il fe fut avancé versie Rhin, ce prétexte ne pouvant plus avoir lieu, il publia  DE CHARLE S-Q U I N T, f qu'en qualité de Chef de 1'Empire, obligé de réprimer les vexations d'un de les membres, il alloit chatier Albert de Brandebourg qui ravageok ce canton. Mais les Fran$ois avoient trop appris a leurs dépens a fe défier des artifices de Charles , pour ne pas épier avec foin tous. fes mouvements. Henri devina bientöt le véritable objet de ces grands préparatifs , &£ réfolut de défendre fes importantes conquêtes, avec autant de vigueur qu'on pouvoit en mettre a les lui arracher. Prévoyant que tout le poids de la guerre tomberoit d'abord fur Metz, Sc que du deftin de cette ville dépendroit celui de Toul & de Verdun, il nomma pour y commander durant le fiege, Francois de Lorraine, Duc de Guife , que la gloire 8c la füreté de fon propre pays engageoient a hien défendre cette place. On ne pouvoit pas mieux choifir. Le Duc joignoit a toutes les qualités qui tiennent au courage, cette fagacité 6c cette préfence d'efprit qui rendent un homme propre au commandement. C'étoit une de ces ames héroïques, qui n'aiA iv Précautions de la France pour dé-* fendre Metz, Francois da Lorraine , Duc de Guifë , eft nommé Gouverneur de 1% Ville.,  1551. II fe prépare a une vigoureufedéfenfe, 8 L'Histoirï mant que les grandes entreprifes, afpirent a la renommee par des aöions d'éclat. II fut charmé de trouver dans la commiffion périlleufe qu'on lui confïoit, une occalion de déployer fes rares talents aux yeux de fes propres compatriotes, bien difpofés a y applaudir. L'efprit belliqueux qui diftinguoit alors la Nobleffe Francoife, & qui lui faifoit regarder l'inaöion comme honteufe, toutes les fois qu'il y avoit de la gloire è acquérir; eet efprit d'émulation fitaccourir de toutes parts fous les drapeaux d'un chef ü propre a" fervir de modele & de guide dans le chemin de la vi&oire. Plulieurs Princes du fang , beaucoup de Gentilshommes du premier rang, & rous les jeunes Officiers qui purent en obtenir la permiffion du Roi, fe jetterent dans Metz en qualité de volontaires. Leur préfence donna un nouveau courage a la garnifon, & le Duc de Guife eut 1'avantage de n'avoir k commander qu'a des hommes emprelfés de fe fignaler. Mais quelle que fut fon ardeur k fe chargerde cette entreprife, il trouva Metz, k fon arrivée, dans une ü mau-  de Ch arlès-Quïnt. 9 m vaife fituation, qu'un courage moins " intrépide que le fien eüt défefpéré de la fauver; il trouva une ville d'une enceinte confidérable, de grands fauxbourgs, des murailles foibles & fans fortifications, des foffés étroits, de vieilles tours, au-lieu de baftions, trop éloignées entr'elles pour défendre le mur qui les féparoit; tous ces défauts furent réparés auffi-bien que le temps le permit. Le Duc fit rafer les fauxbourgs fans épargner les monafteres & les Eglifes, même celle de Saint-Arnulphe oü plufieurs Rois de France étoient enfevelis. Mais afin d'éviter les reproches d'impiété oii pouvoit 1'expofer la deftruftion de ces pieux édifices & la profanation des tombeaux, il fit tranfporter dans une Eglife de la ville , les vafes facrés, & les cendres des Rois, avec toutes les folemnités d'une proceffion, qu'il précéda lui-même tête nue & une torche a la main. II fit abattre aufli les maifons trop voifines des murs. Oa élargit, on nettoyales foffés; onrétablit les anciennes fortifications, & 1' on en conftruifit de nouvelles. Comme tous ces ouvrages exigeoient h A v,  IJS2. Charles s'avance vers (a) Thuan. n , 387. \0 L'HlSTOIRE plus grande célérité , le Duc y travailla de fes propres mains. Les Officiers & les volontaires fuivirent fon exemple; & les foldats voyant leurs chefs partager les travaux , fupporterent gayement les plus rudes fatigues. En même-temps on obligea routes les perfonnes inutiles a fortir de la place. On remplitles magafins de munitions de guerre & de bouche ; les moulins furent brülés, & 1'on détruifit les grains &c les fourrages a quelques milles aux environs. Les citoyens euxmêmes ne montrerent pas moins d'ardeur que les foldats, a feconder ce Général, tant fes manieres limples & populaires lui donnoient d'afcendant fur les efprits. Le zele qu'il avoit fu leur infpirer, 1'emportant fur 1'intérêt perfonnel, ils virent, fans témoigner le moindre regret, leurs biens , leurs maifons & les édifices publics facrifiés è la nécelfité de repouffer 1'ennemi (a), Cependant 1'Empereur, après avoir raffemblé toutes fes forces, continua  r>e Charles-Quint. n de marcher a Metz. En traverfant les villes du Rhin ; il vit les triftes marqués des ravages que les troupesd'Albert avoient faits dans cette contrée. A 1'approche de 1'Empereur , Albert fe retira dans la Lorraine, comme s'il eüt voulut fe joindre au Roi de France, dont il avoit déja mis les armes fur tous fes étendards. Quoiqu'il fut k la tête de vingt mille hommes , fa fituation ne lui permettoit pas d'en venir aux mains avec les Impériaux («), dont 1'armée étoit au moins de foixante mille hommes, & 1'une des plus belles que ce fiecle eüt vues dans les guerres d'Europe. La conduite du fiege fous les ordres de 1'Empereur fut confiée au Duc d'Albe, fecondé du Marquis de Marignan & des plus habiles Généraux d'Italie & d'Efpagne. Comme on étoit alors a la fin d'Oclobre, ils repréfenterent qu'il y avoit beaucoup de rifque k commencer dans une faifon fi avancée une expédition qui ne (.?) Natal. comitis, hij}. 117. A vj II Invefiiï la ville.  19 oa0 ine» Les deux partis s'eflorcent k 1'envi de gagner Albert de Bran debeu rg. 12 L'HlSTOIRÊ ' pouvoit manquer de trainer en Iongueur; mais Charles, trop obiliné pour abandonner fon opinion, d'ailleurs fe fiant, pour le fuccès de fon entreprife, a fes grands préparatifs, or■ donna qu'on invefiit la ville. Dès que k Duc d'Albe parut, un corps confidérable de Francois fit une fortie, attaqua fon avant-garde avec fureur, la mit en défordre , Sc tua ou fit prifonnier un grand nombre d'Impériaux. Ce début qui montroit & I'habileté des officiers & la valeur des troupes, fit fentir aux affiégeants a quels ennemis ils avoient affaire, & combien les moindres avantages pourroient leur coüter. La place fut eependant inveftie; on ouvrit des tranchées, & tous les travaux commencerent. Mais des deux cötés, 1'attention fe porta fur Albert de Brandebourg. Chaque parti tachoit de gagner ce Prince, qui fe tenoit dans le voifinage, avec 1'irréfblution d'un homme qui n'étant gouverné par aucun principe, flottoit entre des intéréts oppofés. La France lui faifoit des ofFres très-avantageufes, & les Impériaux  DE C H ARLES-QU IN T. 13 n'épargnoient aucune des promefles qu'ils croyoient propres a le tenter. Enfin, après avoir long-temps balancé , il fe décida pour Charles, doni la faveur pouvoit lui procurer des avantages plus immédiats & plus folides. Le Roi de France qui cornmencoit a s'en défier, avoit chargé le Duc d'Aumale, frere deGuife, de veiller de prés fur fes mouvements. Mais Albert tomba a 1'improvifte fur le corps de troupes qui 1'obfervoit, le mit en déroute, tua beaucoup d'officiers, blefla Aumale lui-mênie, Sc le fit prifonnier. Après cette viótoire, ce Prince marcha en triomphe vers Metz, 6c fe joignit a 1'Empereur avec fes troupes. Ce Monarque, en confidération de cette ad ion, 6c d'un renfort fi conliérable, lui pardonna le paffé , 6c lui garantit la poflëlfion des territoires qu'il avoit ufurpés pendant la guerre («). Le Duc de Guife, quoique profondément affligé du malheur de fon ("«! * la 5"arJ?e un corps de cavalerie qui avoit phe, recut dans le ventre une baü> dc piftolet, & mourut de cette blefüt* deux jours après la batailte, daas ia trente - deuxieme année de fon age * & fix ans après foo élévation a 1'Eleüorat. Maurice doit certainement occuper la place la plus diftinguée parmi les perfoanages qui figurentdans 1'hiftoire de ce fiecle guerrier, oh les grands évéaements 6c les révolutions foudaines faifoient éclore de grands talents, & leur ouvroient une vafte carrière. Si d'un cöté, ion exceffive ambition , la diffimulation profonde 8c Pinjufte ufurpation des titres 8c des Etats de fon parent., le priverent des éloges qu'on doit a la vertu , de 1'autre , fa prudence k concerter fes mefures , fa vigueur k les 6- Albert. Thom. Wmt{tn au&ore, apud. Scard, 11, 559. Sleid. 583. Rufcelli, èpitres aux Prlaces, 1 «4. Atnoldi, vita Maunt. utf. B iv Maurice eft mé dans la bataille. Scn carao ;ere.  3» L' H i s t o i r £ exécuter, & fon bonheur conftant dans toutes lés entreprifes, le mettent du moins au rang des grands Princes. Dans un age oü 1'impétuolite des paffions 1'emporte ordinairement fur la prudence, oii le plus grand effort d'un génie, même du premier ordre, fe borne a concevoir un projet hardi, & k 1'exécuter avec promptitude & avec courage, il fut former & fuivre un plan très-compli. que, qui trompa le Prince le plus artificieux de l'Europe. L'Empereur étoit prefque parvenu a un defpotifme illimité; ce fut dans ce moment que Maurice avecdesforcesqui fembloient bien au-deffous de tant d'audace, l'obligea de renoncer k fes ufurpations, & qu'il établit non-feulement la liberté de confcience , mais encore la liberté civile de 1'Allemagne, fur des fondements qui font reltés jufqu'ici mébranlables. Sa conduite, a la verité, excita quelque temps la défiance des Proteftants & le reffentiment des Catholiques; mais il fut enfuite ménager les uns & les autres avec tant d'adreffe, qu'aucun Prince de fes contemporains n'eut un credit égal dans  DE C HA RLES-QUINT. 33 les deux partis , & qu'il en fut regretté généralement, cómme le défenfeur le plus puiffant & le plus fidele de la conftitution & des loix de fon pays. La mort de Maurice ayant répandu < la confternation parmi fes troupes, 1 les empêcha de profiter de leur vic- 1 toire. Cependant Albert, que fon courage impétueux & fa prodigalité rendoient 1'idole d'un ramas d'aventuriers qui s'embarraffoient peu de la juftice de fa caufe, eut bientöt raffemblé fes forces difperfées; fe trouvant par de promptes recrues, a la tête de quinze mille hommes, il renouvella fes déprédations avec plus de fureur que jamais. Mais Henri de BrunrVick, qui avoit pris le commandement de l'armée des alliés , défit ce Prince dans une feconde bataille prefque auffi fanglante que la première. Malgré cette perte , le courage & les reffourc.ïs d'Albert n'étoient pas encore épuifés. II fit des efforts vigoureux pour rétabiir fes affaires. Mais fe voyant mis au ban de f Emp.:re par la chambre Impériale , dépoffcdé de fes domaines héréditaires 6c de ceux B v Ubert con* inue la ;uerre. 12 Septtffs fere.  11 eft forcé de fortir de 1'Alleraa- Sa mort. 12 Janvie! Augufte , frere de Maurice , lui fuccede dans fon éleftorat, (c I amour des foldats ; & eet art de ?agner les cceurs étoit accompagné ie tant de prudence , qu'il n'avoit amais caufé le moindre ombraee a bn pere. II étoit impoffible de 1'accufer d'au:un vice ni d'aucune faute qui put déruire Ia haute opinion que Soliman ivoit concue de lui; la méchanceté de  de charles-quin t. 47 = Roxelane étoit plus raffinée : elle: fit iervir les vertus mêmes de Muftapha, d'inftrument a fa perte, Elle affcfta de vanter plus d'une fois, en prefence du Sultan, les qualites brnlantes du jeune Prince , fon courage, fa libéralité & fes mameres populai* res. Ces éloges malicieufement exagérés & trop fouvent répétés , firent tout 1'effet qu'elle en attendoit; 1 eltime de Soliman pour fon fils ne put le earantir des plus cruels foupcons; il en vint enfin k ne plus pouvoir nenfer a Muftapha, fans jaloufie U fans crainte. Roxelane s'en appercut & en profita. Un jour étant avec le Sultan, elle fit, comme par hafard, tomber la converfation iur Ja douleur qu'avoit eue Bajazet de voir fon fils Selim fe révolter contre hu; enfuite elle paria de la bravoure des vieilles troupes que commandoit Multapha ; elle remarqua que le Diarbequir étoit limitrophe des Etats du Sophi de Perfe, mortel ennemi de Soliman. Les malignes infinuations de Roxelane prirent infenfiblement aux yeux de fon époux les couleurs de Ia vérité; & la fureur de la jaloufie acne-  48 L'Histoirè vad'éteindredans fon cceurun rcftede tendrefie paternelle. Une haine profonde fuccédant aux fentiments de Ia nature, Soliman mit des efpions aüprès de fon fils pour obferver toutes fes paroles & fes adlions, & il s'en défia comme de fon plus dangereux ennemi. Alors Roxelane crut pouvoir ha* farder encore un pas; ce fut de demander au Sultan, la permiffion pour fes fils de paroitre a la Cour. Elle èfpéra qu'en trouvant accès auprès de leur pere, ils pourroient, par une conduite foumife & des qualités aimables, remplacer Muftapha dans fon cceur. LeMönarque toujourscomplaifant, confentit encore a fe relacher, en cette occafion, des maximes de la familie Ottomane. Mais ce n'étoit pas affez; Ruftan, k ces intrigues de femme, joignit un artifice encore plus fubtil. Ce miniftre écrivit aux Pachas de Provinces voifines du Diarbéquir, d'entretenir une correfpondance réglée avec lui pour ï'informer de la conduite de Muftapha dans fon gouvernement. II les avertiffoit chacun en particulier ,com« me  de Charles-Qüint. 49 : me dans le deffein de les obliger, que : rien ne pouvoit être plus agréable au Sultan, que d'apprendre les belles actions d'un fils qu'il deftinoit k foutenir la gloire du lang Ottoman. Les Pachas qui ne connoiffoient pas les intentions perverfes du Vifir, fe croyant trop heureux de faire k ce prix la cour k leur Souverain, remplirent leurs lettres d'éloges étudiés, mais funeftes pour Muftapha, qu'ils peignoient comme un Prince digne de fuccéder a fon illuftre pere, doué de tous les talents néceffaires pour mar- cher fur fes traces, & peut-être pour égaler un jour fa renommée. Soliman vit toutes ces lettres , & 1'on avoit foin de choifir pour les lui montrer, le moment oü elles devoient faire la plus fatale impreffion. Chaque éloge de fon fils le bleflbit jufqu'au coeur. II en vint même a foup9onner les Pachas d'être prêts a favorifer les attentats d'un Prince qu'ils vantoient avec tant d'imprudence ; & croyant déja voir Muftapha, les armes k la main, 1'attaquer fur fon tróne, il prit la réfolution de préyenir le coup, 6c d'affermir la CouTome Vh C  1553- }0 L'HlSTOIRE ronne fur fa tête par la mort de fon fils. Sous prétexte de renouveller la guerre contre les Perfans, il ordonne k Ruftan de marcher vers le Diarbéquir avec une nombreufe armée, & de le délivrer d'un fils dont la perte importoit a fa füreté. Mais eet adroit Miniftre fe garda bien d'encourir la hame publique, en fe chargeant d'exécuter un ordre fi cruel. Dès qu'il fut arrivé en Syrië , il écrivit a Soliman que le danger étoit affez grand pour exiger au plutöt fa préfence. Muftapha , difoit-il, avoit déja rempli le camp de fes émiffaires; la plupart des foldats étoient gagnés , & il avoit 1'affection de toute 1'armée. On avoit découvert une négociation entamée avec le Sophi de Perfe, pour marier Muftapha avec une des filles de ce Monarque. Le Vifir ajoutoit que fon zele & fon crédit étoient infuffifants dans une conjoncture fi critique, & que le Sultan avoit feul affez de fagefte pour décider du meilleur parti qu'il y avoit k prendre, & affez d'autorité pour le mettre en exécution. Cette calomnieufe accufation de correfpondance avec le Sophi, étoit  de Charles-Quint. 51 le dernier coup que réfervoit a Muf- tapha le complot de la Sultane & du « Vifir. Elle eut tout 1'effet qu'on devoit attendre de la haine invétérée de Soliman contre les Perfans , & jetta ce Prince dans les tranfports de rage les plus violents. Auffi-töt il part pour la Syrië, & précipite fa marche avec toute 1'impatience de la crainte & de la vengeance. Dès qu'il eut joint fon armée prés d'Alep , & concerté fes mefures avec Ruftan, il envoya un chiaoux a fon fils pour lui ordonner de paroitre en fa préfence. ( Muftapha n'ignoroit pas les intrigues de fa belle-mere; il connoiffoit la malice du grand-Vifir, & la violence du caracfare du Sultan : mais efpérant que fon innocence & fa prompte foumiflion détruiroient fans peine les accufationstle fes ennemis, il obéit fans ) délai aux ordres de fon pere. Arrivé ) dans le camp , on 1'introduilit dans la i tente de Soliman. D'abord il n'y vit I rlen qui put lui caufer d'allarmes , ni 1 gardes armés, ni fuite nombreufe; en 1 unmotl'ordre&le filence accoutumés j y régnoient. Cependant des muets ne tarderent pas a paroiti-e. Muftapha , C ij  '5 53- 51 L'HlSTOlRE en les voyant, ne doute plus de fon fort; il s'écrie : » On en veut a ma » vie » &c tente de s'enfuir. Les muets s'élancent fur lui; il réfiile , fe débat, demande avec inftance a voir le Sultan. Enfin, tirant de nouvelles forces, ou de fon défefpoir ou de l'efpéra»ce d'être fecouru des foldats, s'il peut fortir de la tente , il arrête long-temps les efforts de fes bourreaux. Soliman entend les cris de fon fils, & le bruit qu'occafionne fa réfiftance. Impatient d'être vengé , & craignant que fa viöime ne lui échappe, il ouvre le rideau qui féparoit la tente; il avance la tête , jette un regard féroce fur les muets, & par fes geftes menacants, femble les accufer de lenteur & de timidité, A la vue d'un pere furieux & inflexible , la force manque k Muftapha; fon courage 1'abandonne ; les muets attachent le fatal cordon a fon cou, & dans 1'inftant mettent fin a fa vie. On expofa fon corps devant la tente du Sultan; les foldats furpris 1'entourerent; 8c contemplant ce trifte objet avec autant d'indignation que de douleur, ils étoient prêts a fe ré-  de Charles-Quint. 53 volter , fi quelqu'un fe fut mis a leur tête. Après ce premier témoignage de leur attachement, chacun fe renferma dans fa tente pour y pleurer en fecret le funefle fort de leur Prince chéri; aucun d'eux ne voulut prendre de nourriture, pas même de 1'eau, pendant le refte du jour. Le lendemain au matin, la folitude & le filence régnoient encore dans le camp. Soliman craignit que ce calme ténébreux ne préparat la tempête : pour appaifer les foldats , il öta les fceaux au grand-Vifir , lui enjoignit de quitter 1'armée , & donna fa place è Achmet, brave Officier, qui avoit la faveur des troupes. Mais la difgrace de Ruftan n'étoit qu'un jeu concerté; lui-même avoit fuggéré eet expédient, comme le feul qui put le fauver ainfi que fon maitre. Au bout de quelque temps, le reflentiment des troupes commencant a s'appaifer, & le nom de Muftapha a s'effacer des efprits, Achmet fut étranglé par 1'ordre de Soliman, & Ruftan rétabli dans fa dignité de Vifir. Avec fon premier pouvoir, il reprit ledeffein que lui avoit infpiré RoxeC iij 1553-  '553- Charles projette un mariage entre fon fils & Marie tTAngleterre. 54 L' H i s t o u i lane, d'exterminer la race de Muftapha. Cet infortuné lahToit un fils unique qui pouvoit Un jour venger la mort de fon pere. On excita de nouveau contre lui Ia jaloufie du Sultan, qui dupe encore des mêmes artifices, confentit a la mort de ce jeune Prince. Un eunuque député a Burfa, oii étoit cette innocente viótime , exécuta fa commiffion avec un zele barbare , & les fils de Roxelane n'eurent plus de rivaux fur Ie chemin du tröne On ne voit guere de fcenes fi tragiques , ni de fifuneftes catafirophes, que dans l'hiftoire des grandes Monarchies de 1'Orient, on 1'ardeur du climat femble exalter toutes les paffions, & ou celles du Souverain trouvent une libre carrière dans le defpotifme de fon autorité. Tandis que Soliman étoit ainfi livré tout entier a des intrigues de (a) Augerii Giffenii Busbequii, hgationis Turcïcce epifiolce 4. Franc. 1615 , p. 37. Thuan. lïb. 12, p. 432. Mém. de Ribier, 11, 457. Mauroceni, hiflar. Feneta , lib. 7, p. 60,  de Charles-Quint. 55 § Cour, Charles s'occupoit d'un nou- " veau deffein qu'il avoit formé pour 1'agrandiffement de fa familie. Les vertus d'Edouard VI, Roi d'Angleterre , avoient donné a fes fujets tant d'efpérance d'être heureux fous fon gouvernement, qu'ils fupportoient fans impatience tous les maux que les divifions de fes Miniftres ambitieuxleur faifoient éprouver pendant fa minorité. Mais ce Prince, après un regne très-court, fe trouva attaqué d'une maladie de langueur qui menacoit fa vie ; 1'Empereur «'en fut pas plutöt inftruit, que faifilfant 1'occafion d'augmenter la puiffance ou les domaines de fon fils, il imagina de joindrePAngleterre afes autresRoyaumes par le mariage de Philippe avec Marie, héritiere de la Couronne d'Edouard. Cependant comme il craignoit que fon fils, qui étoit .alors en Efpagne, ne refufat d'époufer une Princeffe, qui, agée de trente-huit ans, en avoit onze de plus que lui (a), Charles prit la réfolution, mal- (a) Palav. hijl. concil. Trid. 5, a , c, C iv  '553- Philippe y confent. Sentiments de Marie&i des Anglois fur ce manage. (a) Carte's, hifi. of Engeland, 3, 287» 56 L'HlSTOIRE gré fa vieilleffe & fes infirmités , de s'offrir lui-même pour époux k Marie qui étoit fa couiine. Quoique cette Princeffe n'eüt aucun de ces charmes qui furvivent a !a jeuneffe & infpirent 1'affection ou l'eftime, Philippe confentit a ce manage fans héfiter, &facrifia, felon Ia coutume des Princes, fon penchant k fon ambition. L'Empereur n'attendit pas la mort d'Edouard pour préparer d'avance le fuccès de cette alliance. Ainfi dès que le tröne fut vacant , les prétentions de Jeanne Gray , auffi malheureufe dans leur iffue, qu'elles étoient peu fondées, laifferent k Marie la poffeffion de tous fes droits (a) , & Charles envoya une pompeufe ambaffade k Londres pour féliciter la nouvelle Reine, & lui offrir Ia main de fon fils. Cette propofition fut re^ue très-favorablement. Sans parler de la gloire flatteufe d'époufer 1'héritier du plus grand Molarque de 1'Europe, cette Princeffe y trouvoit encore 1'avantage de s'u-  de Charles-Quint. 57 nir plus étroitement a la familie d'une w mere qu'elle avoit toujours tendre* ment aimée, & de s'affurer un puiffant fecours pour feconder fon projet chéri de rétablir la religion Catholique en Angleterre. Mais fes fujets ne penfoient pas ainfi. Les nombreux partifans de la réformation redoutoient ce mariage. Onfavoitque Philippe foutenoit tous les dogmes de 1'Eglife Romaine avec un zele fanguinaire , qui alloit même au-dela de la fuperftition Efpagnole. Le peuple Anglois, accoutumé a une forte de familiarité avec fes Souverains, qui quelquefois du rang de fujets avoient été élevés au tröne, étoit bien-loin de pouvoir endurer la hauteur & la morgue Caftillane. Un Prince étranger , devenu 1'époux de leur Reine, prendroit néceffairement une grande influence dans le confeil; on redoutoit le caractere impérieux de Philippe; on craignoit qu'imbu des maximes de la monarchie Efpagnole, fi contraires aux libertés nationales de 1'Angleterre, il ne fit adopter fapolitique k Marie, & ne lui fournit do Cv '553-  »553- La chambre des Communes fait des remontrancescontre cette alliance. I < j8 L'Histoiri 1'argent & des. troupes étrangeres coa» tre fes propres fu/ets. La chambre des Communes, quorqu'alors foumife a la volonté de fes Souverains, préfenta une requête trèsforte contre cette alliance. On publia un grand nombre de pamphlers, qui enrepréfentoient lés dangereufes conféquences , & peignoient des plus odiettfes couleurs la bigotterie &c 1'arrogance de Philippe. Mais Marie, inflexible dans toutes fes réfolutions, n'eutaucun égard, ni aux remontrances des communes, ni aux fentiments de fon peuple. Les miniftres en qui elle avoit le plus de confiance, étant déja fé.hiits par les artifices de 1'Empereur, qui leur avoit envoyé de groffes fommes pour gagner le refte du confeil, approuverent hautement le choix de leur Reine. Le Pape, auffi-tot après qu'elle fut montée fur le tröne r avoit dépêché le Cardinal de la Pole en Angleterre , en qualité de Légat, pour réconcilier fa patrie 3vec le faint Siege ; mais ce miniftre "ut retenu a Billinghen en Allemame , par 1'ordre de 1'Erapereur. On ;raignoit que fa préfence ne nutfit  de Charles-Quint. 59 ( aux prétentions de Philippe , & qu'il n'employat fon crédit en faveur de Courtenay fon parent, Comte de Devonshire, que les vceux de fa nation appelloient a 1'honneur d'époufer la Reine (a). Cependant les négociations furent ^ preflées avec la plus grande chaleur. j Charles acquiefca, fans balancer , k toutes les conditions que les miniftres de Marie lui propoferent, foit pour vaincre les répugnances du peuple Anglois, foit pour calmer leurs propres craintes & la défiance qu'ils avoient d'un maitre étranger. Les principaux articles du traité _ furent, que Philippe , pendant la vie de la Reine, porteroit le titre de Roi d'Angleterre; maisque cette Princeffe gouverneroit feule & difpoferoit entiérement de tous les revenus, offices & bénéfices du Royaume; que les enfantsqui naitroient de ce manage, hériteroient non-feulement du tróne de Marie, mais encore auroient Ia poffeffion du. Duché de Bourgogne & des Pays - Bas; que fi le Prince {a) Carte's, 3, 288. C vj Le traité Ie maiiage 'e condiit» 1554. 12 Janv.  *554- ( 66 L'Histotre de leurs perfécuteurs n'en fit changer de fentiment. Les juges chargés de faire le procés aux hérétiques, avoient chaque jour de nouvelles accufations a recevoir, & ne voyoient point de termes a leurs odieufesfonctions. Les plus habiles Miniftres de la Reine fentirent qu'il étoit imprudent & dangereux d'irriter le peuple par le fpectacle fréquent de ces exécutions qu'il trouvoit aufü barbares qu'injufres. Philippe même , voyant que Marie portoit Ia rigueur a 1'excès, lui confeilla , contre fon propre caracfere, la modération & la douceur (a). II effaya vainement par-la de Ie rendre agréable aux Anglois, qui mon« trerent toujours la même défiance fur fes intentions. Quelques membres des communes, féduits par la Cour, ayant ofé propofer a la chambre d'accorder des fecours a 1'Empereur contre la France, leur propofition fut  de Charles-Quint. 67 rejettée avec une défapprobation générale. Une démarche faite au Parlement pour 1'engager a confentir que Philippe fut couronné en qualité d'epoux de la Reine , eut fi peil de fuccès, que la Cour s'en défifla promptement (a). Cependant le Roi de France n avoit pas vu fans inquiétude les négociations de 1'Empereur en Angleterre. II fentoit combien le mariage de Philippe avec la Souveraine d'un Etat fi puiffant, pouvoit accroitre le crédit &c les forces d'un ennemi déja trop redoutable. 11 prévoyoit que , malgré leurs craintes & leurs précautions, les Anglois feroient bientót engagés dans les guerres du continent, &c forcés a fervir les ambitieux projets de 1'Empereur. Dans cette perfuafion , Henri avoit chargé fon Ambaffadeur k Londres , d'employer toute fon adreffe pour rompre ou retarder ce mariage ; & com me il n'y avoit point en France d( Prince du fang qu'on put donner i (a) Carte's, hifi. of EngUnd, 3 , 3M- 1554. Le Roi de France eft allarmé du mariage de ce Prince avec Marie.  Ses grands préparatifs pour la campagne. 68 L'Histoïre Philippe pour rival auprès de la Reine, le Miniftre eut ordre de feconder le vceu des Anglois, qui fouhaitoient que leur Reine époufat un de fesfujets. Mais la précipitation du choix de Marie ayant fait avorter toutes fes mefures, Henri eut la prudente de refufer des fecours a Wyat & aux autres chefs des mécontents, qui cherchoient a le tenter par des offres très-avantageufes pour la France; il chargea même Ion AmbaiTadeur de féliciter la Reine fur 1'extinction de la révolte. Mais ces démonfixations n'étoient qu'apparentes , & les fuites qu'il avoit a craindre d'une alliance qui dédommageoit 1'Empereur de fes pertes en Allemagne, le déterminerent a porter tout a la fois fes forces en Italië & dans les Pays-Bas. II lui étoit important d'amener Charles ades conditions équitables de paix, avant que Marie eüt pu gagner fur fes fujets de porter la guerre dans le continent, ou de donner a 1'Empereur des fecours de troupes & d'argent. Henri fit les derniers efforts pour affembler de bonne heure une armée nombreufe  be Charles-Quint. 69 fur les frontieres des Pays-Bas; Sc tandis qu'une partie s'en détacha pour ravager le pays ouvert de 1'Artois, le refte, fous les ordres du Connétable de Montmorency, s'avanca par la forêt des Ardennes, vers les Provinces de Liege Sc du Hainaut. Le fiege de Mariembourg ouvrit la campagne. La Reine de Hongrie, Gouvernante des Pays-Bas, avoit fortifié cette place a grands fraix ; mais comme il ne s'y trouvoit qu'une foible garnifon , la ville fe rendit au bout de fix jours. Henri, fier de ce fuccès, s'étant mis a la tête de fon armée , inveflit Bouvines qu'il prit d'affaut prefque fans réfiftance. Après s'être emparé de Dinant , avec la même faciüté, il tourna a gauche, Sc marcha vers 1'Artois. Cependant les groffes fommes que 1'Empereur avoit envoyées en Angleterre, rendoient fes préparatifs encore plus lents & plus difficiles. II n'avoit aucun corps de troupes pour arrêter les premières hoftilités des Francois; & quoiqu'il eüt raffemblé a la hate toutei fes forces, fon armée étoit encore bien inférieure k eelle des ennemis M54« Progrès de fes armes. a8 Juin; L'Empereur n'eft point en état de s'y oppofer.  '554. Les Francois font le 'fiege de Renti. 70 L'HïSTOlJlE Mais_ Emanuel-Philibert de Savoie ; a qui il en avoit donné le commandement, trouva dans fa conduite & fon aétivité des reffources pour fuppléer au nombre. II fut fi bien choifir fes poftes, & obferver, fans fe compromettre , tous les mouvements des Francois, qu'après les avoir mis hors d'état de 1'attaquer & de former aucun fiege de conféquence, il les obligea de retourner vers leurs frontieres , faute de moyens de fubfifter. Mais en chemin ils bmlerent toutes les places ouvertes, & pillerent le pays avec une cruauté & une licence , ' plus dignes d'un corps de troupes légeres, que d'une grande armée conduite par fon Roi. Cependant Henri, qui ne vouloit point congédier fes troupes, fans avoir fait quelque conquête qui répondit k Ia grandeur de fes projets & de fes préparatifs, invefHt Renti. Cette place étoit alors d'autant plus importante, que, fituée fur les confins de 1'Artois & du Boulonnois, elle couvroit la première de ces Provinces & protégeoit les incurfions que les Impériaux faifoient dans la derniere. La  de Charles-Qüint. 71 ville pourvue de bonnes fortifications & d'une garnifon nombreufe, fit une vigoureufe défenfe ; mais elle ne pouvoit tenir long-temps contre les vives attaques d'une puiffante armée. L'Empereur , a qui la goutte laiffoit en ce moment un peu de relache , avoit fi fort a cceur de fauver cette place, qu'a peine en état de fupporter le mouvement de la litiere, il fe mit a la tête de fon armée; & avec les renforts qu'elle venoit de recevoir , il étoit en état de paroitre devant 1'ennemi. Les Francois attendoient avec impatience 1'arrivée de Charles, dans 1'efpérance d'une bataille qui décideroit du fort de Renti. Mais 1'Empereur mit tous fes foins a éviter le combat; & ne voulant que délivrer la ville, il fe flatta d'y réufïir, fans s'expofer aux rifques d'une aéfion décifive. Malgré toutes fes précautions, la difpute d'un pofte dont on vouloit s'emparer de part &c d'autre , engagea une affaire prefque générale. Le Duc de Guife qui commandoit 1'aile des Frangois fur laquelle fe portoit le fort de 1'attaque, foutint le choc Les deux armées en viennent aux mains. 13 Aout,  *554- Les Impériaux dévaftent la Picardie. 7% L'HlSTOIRE m ~ avec une conduite & une valeur dzgnes du défenfeur de Metz. Après un combat opiniatre, les Impériaux furent repouffés, & les Francois demeurerent maïtres du pofte. Si le Connétable, retenu foit par fa Ienteur & fon irréfolution naturelle, foit par fa haine contre un rival, n'eut différé de faire avancer fon corps de réferve pour feconder les progrès du Duc de Guife, Ia déroute des ennemis auroit été complette. Cependant 1'Empereur, malgré les pertes qu'il avoit effuyées, refta dans fon camp, tandis que les Francois abandonnerent le leur, s'y trouvant forcés par le manque de provifions & par 1'impoffibilité d'entreprendre aucun fiege en préfence de 1'armée Impériale. Mais ils fe retirerent avec une contenance qui fembloit plutöt défier leurs ennemis, que les éviter. L'Empereur, qui avoit rempli fon principal objet, ne les inquiéta point dans leur marche. Arrivé aux confïns de fes Etats, Henri jetta des garnifons dans fes villes frontieres, & licencia le refte de fon armée. Cette précipitation encouragea les Impériaux  ©e Charles-Quint. 73 riaux a s'avancer avec un grand corps de troupes dans la Picardie, qu'ils mirent a feu & a fang, pour fe venger des ravages que les Francois avoient faits dans le Hainaut & dans 1'Artois (a). Mais n'étant pas affez forts pour s'emparer d'aucune place confidérable, ils ne tirerent pas plus de fruit que leurs ennemis, de cette maniere barbare & honteufe de faire la guerre. Cependant les affaires de Henri alloient de jour en jour plus mal en Italië. Cöme de Médicis, Prince habile & entreprenant, ne voyoit qu'avec beaucoup d'inquiétude les Francois s'établir dans Sienne. II craignoit avec raifon leur voifinage. Tout ce qui penchoit dans Florence pour 1'ancienne démocratie, trouvoit en eux des protefteurs naturels contre 1'autorité abfolue que 1'Empereur 1'avoit aidé a ufurper. Cöme d'ailleurs, n'ignoroit pas que fon attachement pour ce Monarque , le rendoit O) Thuan, 460, &c. Harsi, ann. Brat, 674. Tornt Vh D Affaires d'Italie.  DeiTeins de Cöme de Médicis fur ■la ville de Sienne, Ses négociations avec l'Emipereur. 74 1'HiSToiai odieux aux Francois; il prévoyoit que la Tófcane éprouveroit bientöt les effets de leur reffentiment, ft on leur laiffoit le loifir de fe fortifier dans Sienne. Le parti le plus fut étoit donc de les en chaffer, avant que la France eüt envoyé des fecours qui les rendiffent encore plus redoutables. Mais il y alloit de la gloire & de 1'intérêt de Charles, a les repouffer du cceur de fes Etats ; auffi Cöme ne travailla-t-il d'abord qua rejettef fur ce Prince tout le poids de cette guerre; & pendant la première campagne , il ne 1'aida que de quelqu'avance d'argent, pour la folde des troupes Impériales. L'Empereur, dont les tréfors s'étoient épuifés en Angleterre, d'ailleurs tout occupé de la défenfe des Pays-Bas, ne pouvoit agir que foiblement en Italië. Cöme fentit que les Francois alloient y devenir les maïtres, a moins qu'il ne fe chargeat lui-même d'y faire la guerre, & de la conduire avec vigueur; mais forcé par fa fituation a prendre ce parti 5 il voulut du moins qu'il lui «sn reftat quelqu'autre avantage que  »£ Charles-Quint. 75 celui de chaffer les Francois de fon voifinage. Dans ce deffein , il offrit a Charles, par un envoyé qu'il lui dépêcha, de déclarer la guerre aHenri, & de réduire Sienne a fes frais, a condition que jufqu'a 1'entier rembourfement de fes avances, ontlui abandonneroit toutes les conquêtes qu'il pourroit faire. L'Empereur, qui fe voyoit fans reffources pour foutenir tant de guerres a la fois, confentit volontiers a cette propofition ; & Cöme, qtïi connoiffoit le mauvais état des fïnances de ce Prince , efpéra que dans Fimpoffibilité de le payer, Charles le laifferoit tranquille polfeffeur des villes dont il fe feroit emparé (a). Dans cette confiance, il fit de grands préparatifs; & fachant que le Roi de France avoit porté toutes fes forces dans les Pays-Bas, il fe flatta de pouvoir raffembler affez de troupes pour lui faire tête en Italië. L'affiftance, ou du moins la neutralité du Pape (a) Adriani, ijlaria de fuoi ttm.fi, vol. 1 , 662. D ij 1554- II fe prépare a faire ia guerre a la France.  '554, Médecino eft chargé du commandementde fon armée9 ( L'HlSTOIRE Sienne, il alla pourtant inveftir PortoErcole, dont les fortifications étoient en fi mauvais état, que les citoyens lui ouvrirent leurs portes è fon arrivée. Ce fut-la fa derniere expédition ; un ordre imprévu de 1'Empereur le forca de détacher la plus grande partie de fes troupes vers le Piémont, & donna quelque relache aux réfugiés de Monte-Alcino. Cependant les malheureux habitants de Sienne n'étoient pas a la fin de leurs maux. Charles, loin de fe conformer aux articles de la capitulation , donna a Philippe fon fils l'inveftiture de cette ville & de fes dépendances. Fran5ois de Tolede , au nom de ce nouveau maitre , traita les Siennois comme un peuple conquis; & fans égard pour leurs privileges ou pour leur ancienne confHtution , il établit ehez eux le gouvernement civil & militaire de la Monarchie Efpagnole («)..  de Charles-Quint. 87 La foibleffe oh étoit 1'armée Impériale dans le Piémont, & 1'inadtion de fes officiers, en obligeant 1'Empereur de rappeller fes troupes de la Tofcane au milieu de leurs conquêtes, demandoient encore qu'il mit a la tête de fes forces un Général, dont la réputation & 1'habileté puffent contrebalancer les grands talents du Maréchal de Briffac qui commandoit les troupes Fran?oifes en Italië. Cependant le choix que 1'Empereur fit du Duc d'Albe, fut plutót 1'effet d'une intrigue de Cour que de 1'opinion qu'il avoit du mérite de ce Général. Le Duc , qui, depuis longtemps faifoit fa cour a Philippe avec Ja plus grande affiduité , s'étoit infinué dans fa confiance par toutes les foupleffes auxquelles un efprit inflexible & hautain avoit pu s'abaiffer. Les rapports de caraöere qu'il avoil avec ce Prince, lui donnoient déjz du crédit auprès de lui. Mais Ruy Gomez de Silva, favori de Philippe, craignant les progrès de ce rival fui 1'efprit de fon maitre , eut l'adreffi d'engager 1'Empereur a le nommei Opérations dans le Pié-; mont. Charles nomtne le Duc d'Albe pour fon Généraliffi.me.  1S 5 Ses premières opérations n'ont que peu de fuccès. tSS L'Histouï ' pour commander en Piémont. CUioique le Duc vit bien qu'il devoit cette diftinclion aux mauvais offices d'un ennemi qui n'avoit en vue que de 1'éloigner de la Cour, il étoit trop délicat fur le point d'honneur pour refufer une commiffion également périlleufe & difficile; maisauffi ne voulant 1'accepter qu'a des conditions flatteufes pour fa vanité, il infiffa auprès de 1'Empereur pour être nommé fon Vicaire-général en Italië, avec le titre de Généraliffime des armées Impériales & Efpagnoles. Charles confentit k tout, & le Duc d'Albe fut revêtu par ces dignités , d'une autorité prefque illimitée. Mais un fi grand pouvoir ne lui procura pas d'abord des fuccès qui répondiffent k la grande réputation & aux efpérances de 1'Empereur. L'armée que commandoit Briffac , pouvoit compenfer la fupériorité du nombre par ï'avantage que lui donnoient des troupes choifies, qui, accoutumées depuis long-temps k fervir dans un pays oii les villes & les chateaux étoient autant de fortereffes, avoient parfaitement appris 1'art  di Charles-Quint. 89 d'y faire la guerre. Par fa bonne conduite fecondée de leur valeur, nonfeulement il fit échouer toutes les tentatives des ennemis ; il ajouta encore de nouvelles conquêtes aux territoires dont il s'étoit déja emparé. Le Duc d'Albe, après s'être vanté avec fon arrogance ordinaire, qu'en peu de femaines, il chafferoit les Francois du Piémont, fut obligé de fe retirer dans fes quartiers d'hyver, n'emportant que la honte de n'avoir pu conferver toute entiere a 1'Empereur , cette partie du pays dont il 1'avoit trouvé en poffeffion (a). Les opérations de cette campagne ne furent pas plus décifives dans les Pays-Bas que dans le Piémont. UEmpereur & le Roi de France ^'étoient pas en état de mettre fur pied d'affez puiffantes armées pour former des entreprifes confidérables. Mais Charles voulut fuppléer a la force par un ftratagême hardi, dont le fuccès auroit pu lui valoir plufieurs vicfoi- (a) Thuan. lib. p. 15 , $2.9. Guichenon, kift. de Savoye , tom. 1, 670. Confpifation pour livrer Metz aux Impériaux.  1 90 L'HlSTOlRE res. Pendant le fiege de Metz, le Pere Léonard, Gardien d'un cpuvent de Francifcains de cette ville, avoit gagné 1'efiime & la faveur du Duc de Guife par fon attachement pour les Francois. Cet homme , d'un efprit intrigant & aöif , s'étoit rendu fort, utile, foit en foutenant par fes exhortations le courage & la confiance des citoyens, foit en procurant par fes intelligences fecretes, une connoiffance fuivie & fidelle des mouvements tk des deffeins de 1'ennemi. En confidération de fes fervices importants , le Duc de Guife , h fon départ de Metz, le recommanda fortement a Vieilleville qui venoit d'en être nommé Gouverneur. Celui-ci porta la confiance dans ce Religieux , jufqu'a lui permetöre de converfer & d'entretenir des correfpondances avec qui il vouloit, fans en concevoir le moindre foupcon. Mais Léonard, par une fuite de 1'audace & de la légéreté naturelles aux aventuriers, foit qu'il ne fe crüt pas affez récompenfé de la France, ou qu'il fut féduit par facilité même de tout ofer impunément, forma le projet de livrer Metz aux Impériaux,  de Charles-Quint. 91 II le communiqua k la Reine douairière de Hongrie, Gouvernante des Pays-Bas. Cette Princeffe, fans avoir aucun fcrupule fur un acfe de trahifon qui pouvoit être avantageux k 1'Empereur, aida le Gardien k concerter fon plan, de maniere 3 en affurer le fuccès. On convint que Léonard engageroit les Religieux de fon couvent a entrer dans le complot, 8c qu'il introduiroit dans cette maifon fous des habits de moines, un cert^in nombre de foldats choifis; que tout étant préparé pour 1'exécution , le Gouverneur de Thionville s'approcheroit de Metz pendant la nuit avec un corps de tronpes nombreux, tenteroit d'efcalader les murs; qu'en même-temps que la garnifon s'occuperoit k repouffer 1'ennemi, les moines mettroientle feu endifférents quartiers de la ville ; qu'enfin, les foldats cachés dans le couvent en fortiroient pour attaquer par - derrière ceux qui défendroient les remparts. On ne doutoit point qu'au milieu de la terreur 8c de la confufion que cauferoient des événements fi imprévus, les Impériaux ne fe rendiffent Plan de la confpira- tion.  Ses pro- grès. La confpiration eft découverte. 91 L'HlSTOIRE facilement les maïtres de la ville. 11 fut ftipulé qu'en reconnoiffance de ce fervice, Ie Pere Gardien feroit nommé a 1'Evêché de Metz, & qu'on donneroit de grandes recompenfes a tous les moines qui auroient fecondé fon deffein. Léonard prit des mefures promptes & fecretes. Son autorité, fes vives inftances, la perfpeclive des richefles & des honneurs qu'il fit entrevoir a fes Rel igieux, les déterminerent tous k s'engager dans la confpiration. II introduifitdans le couvent autant de foldats qu'il putle faire fans donner d'ombrage. On avertit a temps Ie Gouverneur de Thionville , qui déja prévenu de ce projet, tenoit fes troupes prêtes a marcher; & le moment approchoit oii Henri étoit menacé de perdre la plus importante de fes conquêtes. Heureufemeftt pour la France, le jour même qu'on avoit fixé pour 1'exécution du complot, Vieilleville, qui étoit un officier habile & vigiIant, eut avis par un efpion qu'il entretenoit k Thionville, que certains moines Francifcains y alloient fr«-  de Charles-Quint. 9J quemment; qu'on les admetroit k de* conférences fecrettes chez le Gouverneur, qui, de fon cöté, fe préparoit a quelqu'expédition avec le plus grand myftere. II n'en fallut pas davantage pour donner des foupcons a Vieilleville, Sans les communiquer a perfonne , il alla auffi-töt viiiter le couvent des Francifcains, découvrit les foldats qui y étoient cachés, & les forca de révéler tout ce qu'ils favoient de la confpiration, Le Gardien qui étoit allé k Thionville pour mettre la derniere main a fon ouvrage , fut arrêté aux portes de Metz a fon retour; & de lui-même, fans attendre la torture , il avoua toutes les circonftances d« fon projet. Mais il ne fuffifoit pas a Vieilleville de s'être faifi des traitres, & d'ayoir déconcerté leur complot; il réfolut de profiter de cette découverte pour fe venger des Impériaux. Dans ce deffein, il fortit de la ville avec les meilleurs foldats de fa garnifon; & fe mettant en embufcade prés du chemin par oü il favoit que le Gouverneur de Thionville devoit s'avancer, il tomba fur fes troupes Défaite d'un corps d'Impériaux.  »55 5- Ï5es auteurs de la conf piration font punis 94 L'Histoire qui marchoient dans une parfaiie fécurité. Les Impériaux, confondus de cette brufque attaque, de la part d'un ennemi qu'ils comptoient furprendre, ne firent que peu de réfif» tance. La plupart, parmi lefquels étoient beaucoup de gens de diftinction , furent tués ou faits prifonniers, & Vieilleville, avant le jour, retourna en triomphe a Metz. Cependant le fort du Gardien & des Moines qui avoient tramé cette dangereufe confpiration, refta quelque temps indécis. Sans doute les égards qu'on croyoit devoir a un corps auffi nombreux &c auffi refpectable que celui des Francifcains, & la crainte de donner un fujet de triomphe aux ennemis de 1'Eglife Romaine, furent caufe de ce délai. Mais comme on fentit enfin qu'il falloit iin exemple de févérité pour effrayef d'autres traitres, on ordonna d'inf'truire leur procés. Les preuves de leur crime étant bien avérées , on prononca la fentence de mort contre le Pere Léonard & vingt de fes Moines. Le foir qui précéda Ie jour üxé pour leur fupplice , le geolier  de Charles-Quïnt. 95 les tira des cachots oü jufqu'alors ils avoient été détenus féparément, & les renferma tous dans une grande chambre pour leur donner la facilité de fe confeffer les uns les autres, & de fe préparer k la mort. Dès qu'on les eut laiflés feids, les jeunes, aulieu d'employer le temps k s'acquitter des devoirs de leur religion, s'adreffant au Pere Gardien & a quatré autres vieux Moines, qui les avoient féduits, leur reprocherent une ambition qui étoit la caufe de leur perte „ Sc qui couvroit leur ordre d'une tache flétriffante. Des reproches, ils en vinrertt aux malédidfions; enfin , dans un tranfpört de rage & de défefpoir, ils fe j etterent fur les^vieillards avec fureut, maffacrerent lé Pere Gardien fur la place, & maltraiterent fi fort les quatre autres Religieux, qu'on fut obligé, le lendemain au matin, de les tranfporter dans une charette avec Ie corps mort de Léonard jufqu'au lieu de 1'exécution. On fit grace k fix des plus jeunes , & le refte fubit le chatiment qu'il avoit mérité (a). (ïj)Thuan, Ut. 15, p. 512, Belcar. torn.  Inutilité des négoclationspour la paix. 21 Mai. ter. gal. 866. Mémoires du Maréch. de Vie'üItville, par M. Charloix, tom. 3 , p. 149 > &«• P. 347» Par< *7Ï7' 91» L'HiSTOrnE Cependant 1'Empereur & le Roi de France, quoiqu'épuifés par une li longue guerre ,'ne montroient aucune difpolition k la paix. Le Cardinal de la Pole ne négligea, pour la rétablir entre ces Princes Chrétiens, rien de ce que pouvoit lui fuggérer le zele de la religion &C de 1'humanité. II engagea la Reine d'Angleterre a leur offrir fa médiation, & détermina même Charles 6c Henri a envoyer leurs plénipotentaires a un village entre Gravelines 6c Ardres. Lui-même s'y rendit avec Gardiner , Evêque de "Winchefter, 1'un 8c 1'autre pour préfider en qualité de médiateurs aux conférences oii 1'on devoit régler les articles conteflés. Mais quoique les deux Monarques euffent chargé de cette négociation les miniftres en qui ils mettoient le plus de confiance, il étoit aifé de voir qu'on n'avoit, de part ni d'autre, aucun defir fincere de faire la paix. Les conditions qu'on  de Charlês-QuIn ï. 97 qu'on propofa , étoient fi déraifonnabies, qu'il étoit impofïible de s'y prêter. La Pole, après avoir employé inutilement Ton zele &c fon habileté a leur perfuader de renoncer a des demandes extravagantes, & d'en fubftituer de plus équitables, voyant enfin qu'il perdoit fon temps a vouloir reconcilier des ennemis fi obftinés, rompit les conférences, &c s'en retourna en Angleterre (a). Au milieu de ces démêlés de 1'Europe , 1'Allemagne jouiffoit d'une profonde tranquillité; c'étoit-la le moment d'y tenir une diete, ou 1'on pourroit délibérer fur 1'objet le plus important au repos intérieur de 1'Empire. Par le^ traité de Paffau de Tan i y 5 2, on avoit renvoyé k cette affemblée le foin de confirmer & de perfedtionner le plan dont on étoit convenu pour la paix de la religion* Le trouble & la terreur que les hoftilités d'Albert de Brandebourg répandirent en Allemagne, & 1'atten- (a) Thuan. lil. 15 , p. $23. Mém, de Ribier, torn. 2, p. 613. Tomt Vh E *5 5 S- Affalres' d'Allemagne.  I5S5- La diete fe tient a Aufbourg.Difcours de Ferdinand i l'affemblée. 98 L'HlSTOIRE tion fuivie que Ferdinand fut obligé de donner aux affaires de la Hongrie, avoient jufqu'alors empêché de tenir la diete, quoiqu'elle eüt été indiquée a Ausbourg, auffi-töt après la conclufion du traité. Enfin, la néceffité de cette affemblée, engagea Ferdinand a fe rendre a Ausbourg, vers le commencement de cette année. Malgré Ie peu de Princes & de députés dont la diete étoit compofée, il 1'ouvrit en propofant de terminer les diffentions que les controverfes fur la religion avoient occafionnées. C'étoit-la, difoit-il, la première & la plus importante affaire, celle que 1'Empereur & lui - même avoient le plus a cceur. II rappella enfuite tous les obftacles que Charles avoit eus a furmonter pour obtenir la convocation d'un concile général , & les malheurs qui en avoient d'abord retardé & enfin fufpendu les opérations. II obferva que les temps étant a-peu-près Iesmêmes, on devoit s'attendre aux mêmes difficultés; qu'un concile général feroit toujours arrêté ou interrompu par les hoftilités des Princes  de Charles-Quint. 99 Chrétiens; qu'a 1'égard d'un concile national en Allemagne, oü 1'on avoit efpéré de trouver plus de facilité 8c de füreté dans les délibérations, ce feroit une affemblée dont il n'y avoit pas d'exemple, 8c dont la jurifdicïion ne comportoit ni des limites, ni des formes fixes 8c déterminées; qu'il ne voyoit qu'un moyen de mettre fin a ces malheureux différends; que li jufqu'alors on 1'avoit fouvent renté fans fuccès, on pouvoit efpérer d'y mieux réuffir en y apportant des intentions plus droites & plus pacifiques ; que pour cela, il falloit choifir un petit nombre d'hommes favants , judicieux Sc modérés, qui, dans des conférences a 1'amiable, difcuteroient les points de doctrine, de maniere a ramener les deux partis, finon al'unité de fentiments, du moins a la tolérance mutuelle dans la diverfité des opinions. Ce difcours qui fut imprimé felon 1'ufage, 8c répandu dans 1'Empire, fit renaitre toutes les craintes 8c les défiances des Protefiants. lis remarquerent avec fuprife que Ferdinand n'y avoit pas fait la moindre E ij Soupccms & craintes des Proteftants,  L'arrivée d'un Nonce envoyé par le Pape a Ja diete, contribue a les augrr.enter. ÏÖO L'HlSTÖÏRE mention du traité de Paffau, qu'ils regardoient pourtant comme le plus fur garant de la liberté de confcience. Leurs foupcons augmenterent encore par les nouvelles qu'ils recevoient tous les jours de Fextrême rigueur dont on ufoit envers les Réformés dans les Etats héréditaires du Roi des Romains. On jugea des intentions de ce Prince par fa conduite, 6c 1'on n'eut plus de confiance en des proteflations étudiées de modération 6c de zele qu'il démentoit a chaque inftant par fes actions. L'arrivée du Cardinal Mbron, que le Pape avoit nommé fon Nonce pour préfider a la diete, acheva de les convaincre qu'on ourdiffoit quelque trame contre la paix ou la füreté de 1'Eglife proteflante. Jules, tout fier du retour inattendu des Anglois fous le joug du faint Siege, fe flatta que 1'efpritde révolte ayant enfin épuifé toutes fes forces, 1'Eglife triomphante alloit recouvrer fes droits & fon autorité fur 1'obéiffance des peuples. Plein de ces efpérances , le Pontife envoya a Ausbourg Moron, chargé d-'^mployer toute fon éloquence pour  DE Ca ARLES-QUINT. 101 engager les Allemancls a fuivre 1'exemple de 1'Angleterre , & d'empêcher avec adreffe qu'aucun décret de la diete ne fut préjudiciable a la foi Catholique. Moron , qui avoit les talents du fameux Chancelier de Milan fon pere ,pour la négociation& pour 1'intrigue , n'auroit pas manqué de traverfer toutes les mefures des Pro» teftants. Mais un événement imprévu les garantit de tout ce qu'ils avoient k craindre de la préfence du Nonce. Jules, en fe livrant a des plaifirs & k des amufements qui ne convenoient pas plus è fon age , qu'a la dignité de la thiare, avoit fi bien contracfé 1'habitude de la diffipation, qu'il mon-* troit autant d'incapacité que d'éloi-i gnement pour toute affaire férieufe, Sollicité depuis long-temps par fon neveu de tenir un confifloire , il éludoit toujours fes inflances par la crainte de trouver dans cette aiTem." blée une forte oppofition aux projets qu'il avoit formés pour 1'élévation de ce jeune homme. Cependant après avoir épuifé tous les prétextes qu'il put imaginer, fon averfion pour E üj *SS5> Mort ds Jules UI.  '555- 13 Mars. Le Nonce retourne ï Rome, Motifs de Ferdinand pour favorifer les Proteftants. (a) Onuphr. Panvinius , de vuils Pontifitum, p. 320. Thuan, lib. 17, 517. 102 L'HlSTOlRE le travail croiflant de plus en plus, il feignit une indifpofition pour fedébarraffer despouriuites de fon neveu. Mais afin de donner a cette rufe une apparence de vérité, il fe renferma dans fon appartement , & changea entiérement fon régime & fa maniere de vivre. Sa perfévérance a jouer ce röle ridicule, lui fit contrafler une maladie réelle, dont il mourut en peu de jours , laiffant a fon infame favori, le Cardinal de Monte, un grand nom a foutenir & des dignités qu'il déshonoroit par fes vices (a). Dés que Moron eut appris la mort de Jules , il partit brufquement d'Aufbourg, oü il n'étoit que depuis peu de temps, pour fe trouver a 1'élection d'un nouveau Pontife. L'éloignement du Nonce raffura les Proteftants}qui s'appereurentbientöt que leurs allarmes étoient mal fondées , & que Ferdinand n'avoit pas 1'intention de violer a leurpréjudice, le traité de Paffau. Depuis que Mau-  de Ch arles-qui NT. IO3 rice avoit déconcerté tous les projets de 1'Empereur en Allemagne, & renverfé le defpotifme religieux &i civil qu'il étoit prés d'y établir, ce Monarque avoit abandonné a fon frere le foin de gouverner 1'intérieur de 1'Empire. Mais Ferdinand, dont 1'ambition étoit moins inquiete que celle de Charles, loin de reprendre un deffein que celui - ci n'avoit pu exécuter avec toute fa puiffance & fes reffources, ne fongea qu'a attacher les Princes d'Allemagne & fa familie par une adminiftration équitable & modérée. Cette conduite étoit d'autant plus fincere de fa part, qu'il avoit en ceonoment le plus grand intérêt a les ménager, pour s'affurer de leurs fuffrages. Charles defiroit toujours avec ardeur de laiffer la Couronne Impériale a Philippe fon fils. L'oppofition qui s'étoit d'abord élevée contre ce projet, 1'avoit forcé de le fufpendre, mais non de 1'abandonner. II preffa de nouveau fon frere de céder, pour quelque dédommagement, fon droit a la fucceffion de 1'Empire, & d'en faire a ce prix le facrifice a la granE iv i Charles rer prend fon projet de changer 1'ordre d2 la fucceffion au tione Impé-; rial.  Les Ture; fe préparent k envahir Ja Hongrie. Ferdinand eft allarmé de quelques démarches des Proteftaius. , ï©4 L'Histoire • deur de Ia Maifon d'Autriche. Ferdinand etoit auffi peu difpofé que jamais, a donner unepreuve fi extraorI dmairede defintéreffement; mais comme il fentit que toute fa fermeté ne ui fuffiroit pas , fi les princes de J Empire ne fe déclaroient ouvertement en fa faveur, il chercha è les prevemr par fa déférence è toutes leurs demandes. D'un autre cöté , il avoit befoin que Ja diete lui accordat des fecours prompts & puiffants pour faire tête aux Turcsqui, après 1'avoir dépouülé en Hongrie de la plupart de fes territoires, menacoient encore d'attaquer avec une armée formidable les Frovinces qm lui étoient reftées. Mais pour determiner les Proteftants a sengagerdans une guerre étrangere qm demandoit tout leur zele, il falloit affurer la paix intérieure del'Empire fur des fondements folides & inébranlables. Une démarche que firent les Réformes, peu de temps après 1'ouverture de la diete, devoit augmenter la arconfpeflion de Ferdinand. Dès jue Ia pubhcation de fon difcours  de Charles-Quint. ioj eut éveillé leurs craintes 6c leurs foupcons, les Ele&eurs de Saxe 6c de Brandebourg 6c le Landgrave de Heffe , fe rendirent a Naumbourg. La , renouvellant 1'ancien traité de confédération qui avoit long-temps uni leurs families , ils y ajouterent un nouvel article , par lequel ils s'engageoient a profeffer la confeffion d'Aufhourg, avec le ferment d'en maintenir la doctrine dans leurs Etats rek peftifs (ppofées, que le zele & 1'habilete :es théologiens exercés dans Ia difute, foutenoient de part & d'autre, vee des arguments fubtils, & avec 3ute 1'amertume du Iangage fcholafque. Ferdinand fit confentir cha-  de Charles-Quint. tcj que parti a. des concefïions: il don- ~ na une interprétation fovorable aux points équivoques, & tantöt repréiéntant la néceffité & les avantages de la concorde, tantöt menacant de rompre la diete , il vint enfin k bout d'amener les efprits k une conclufion qui fatisfït également les deux partis. En conféquence, on dreffa un re- 2 cës, qui fut approuvé & publié avec fc les formalités d'ufage. Les princlpaux l articles de cet afte furent : Que les T, Princes & les villes qui s'étoient déclarés pour la confeflion d'Ausbourg, feroient libres d'en profeffer la doctrine & le culte, fans être inquiétés par 1'Empereur, le Roi des Romains , ni perfonne; que les Proteftants de leur cöté ne troubleroient ni les Princes, ni les Etats cjui admettoient les dogmes & les ceremonies de 1'Eglife Catholique; qu'a Pavenir on ne tenteroit jamais de terminer les difputes de religion que par les voies pacifiques & perfuafives des conférences ; que le clergé Romain ne pourroit réclamer aucun droit de jurifdiction fpirituelle dans les Etats de E vj 1555- 16 Septem. bre. La paix de religion eft établie.  «in- Réflexion! W)r les progrès des principes de tolérance. = io$ L'Histoue Ia confeffion d'Ausbourg; que ceu« qm fe trouvoient en poffeffion des benences ou des revenus de 1'Eglife les garderoient, fans pouvoir être pourfuivis fur cet article par la chambre Impériale; que la puiffance civile auroit le droit d'établir dans chaque Etat Ia doftrine & le cuhe qu'elle jugeroit convenable; & que ceux des fujets qui refuferoient de Sy conformerf, auroient la liberté de ie retirer avec tous leurs effets par-tout oii il leur plairoit; que fi quelque Prélat ou Eccléfiaftique veooit a qmtter dans la fifite la religion Komaine, il renonceroit a fon diocefe ou a fon bénéfice, qui feroit, des-Iors réputé vacant comme par Ia tranflation ou la mort du bénéficier, & que le collateur auroit droit dy nommer un fucceffeur d'un attachement reconnu a 1'ancienne doctrine (a). Tels font les ftatuts de ce fameux reces, qui eft la bafe de la paix re- O) Sieid. 620. Fr. Paok>, 36§. PalJav, P- 2 , 161.  de Charles-Quint. 109 ligieufe d'Allemagne, &c le lien d'union entre les Etats, dont les fentiments different fur les points les plus i nportants. Dans notre fiecle & chez une nation oii 1'on connoit la tolérance & fes heureux effets, on doit s'étonner que les deux partis n'ayent pas embraffé plutöt ces voies de conciliation , qui conviennent a la douceur & a la charité du Chriftianifme. Mais quelque naturel que fut un moyen fi falutaire, la pratique & 1'opinion y avoient été fi contraires jufqu'alors, qu'il ne fe préfentoit guere a 1'efprit. Si, parmi les Payens , la diverfité d'opinion fur la religion ne fut jamais une fource de querelles & de difcordes , c'eft que toutes leurs divinités étoient locales; la vénération que chaque peuple avoit pour un Dieu tutélaire , n'excluoit pas 1'exiflence ou le pouvoir des autre Dieux; & le culte établi dans un pays, n'étoit point incompatible avec celui des autres nations. Ainfi les erreurs dans leurs fyftêmes théologiques ne donnerent point d'atteinte a la paix des Etats ; & malgré le nombre prodigieux dp leurs divini-  1 1 I ( c t ^ 1'Hisioui tes & la variété infinie de leurs cérémonies religieufes, I'efprit de to|erance&de Tociabilité fubfifta toujours parmi eux. Mais lorfque la révélation Chrétienne eut annoncé qu'il n'y avoit dqL"n.eUlDr',&^feul culte dignede cet Etre fuprême, ceux qui en reconnurent Ia vérité, dürent regarder tout autre culte comme ablurde ou impie. De-la vient Ie zele des premiers Chrétiens pour la propagation de leur docfrine, & cette ardeurpour renverfer les autres cultes. Cependant ils n'employerent d'abord que des moyens conformes a efprit de la religion. Ils perfuadoient les efprits par la force du raifonnement; ds gagnoient les cceurs par le :harme d une vertu fublime. Enfin !a puiffance civile s'étant déclarée en aveur du Chriftianifme , quoique Ie ;rand nombre des payens, a 1'exem) e des chefs, fe foumït a 1'Eglife, >Iufieurs refterent attachés a leurs aniennes fuperftitions. Irrités de cette 'Mhnation , les miniftres de 1'Evan"e , dont Ie zele ne fe rallentit pas, leme après Ie relachement de Ia fer-  de Charles-Quint. iii veur , voulurent forcer les confciences; & paffant les bornes de leur miffion, ils armerent le pouvoir du tröne contre des infortunés qu'ils n'avoient pu convaincre. Cependant il s'éleva parmi les Chrétiens des difputes fur les articles de foi, & bientöt ils tournerent les uns contre les autres les mêmes armes dont ils avoient combattu les ennemis de la religion. Chaque théologien voulut intéreffer le magifirat dans fa caufe, & tour-a-tour ils employerent le glaive temporel pour réprbner ou pour exterminer leurs antagoniftes. Les Evêques de Rome ne tarderent pas a prétendre k 1'infaillibilité dans 1'explication dei dogmes & dans la décifion des point! de controverfe. A force d'artifices & de perfévérance , ils en impoferem a la crédulité des hommes, & d'un« prétention ils fïrent un droit. Dè: que ces juges dogmatiques avoien prononcé fur un point de doftrine s'y oppofer, ou même douter, c'étoi non-feulement réfifter k la vérité mais fe révolter contre leur autorit facrée; & pour venger 1'une & 1'au t > t »  «SST- ."2 L'HlSTOlRï *re; ils employoient fans ceffe Ie bras de Ia pmflance temporelle, dont ils avoient eu 1'art de s'emparer entiérement. L'Europe étoit donc accoutumée depuis plufieurs fiecles , è voir répandre ou foutenir par la force, des opinions de pure fpéculation. Cette in. dulger.ce & cette charité mutuelle , que Ie Chnfiianifme recommande avec tant de chaleur, étoient entiérement négligées; on ignoroit cette liberté de confcience qui permet è chacun de fuivre fon jugement en matiere de doctrine ; enfin , 1'idée de tolerance, ce mot même, dans le fens qu on y donne aujourd'hui, étoit inconnu. On penfoit alors qu'employer la violence contre 1'erreur, étoit une des prérogatives de ceux qui avoient la connoiffance de la vérité; & comr me chaque parti prétendoit pofféder ce trefor, ils exercoient tous, autant qu d etoit en leur pouvóir, les droits qu ils croyoient attachés a cette pofle/fiom LesCatholiques Romains, gui, des par les décifions d'un juge infail. 7* \ne doutant jamais que la vérité ne fïit de leur cöté, réclamerf nt hau-  de Charles-Quint. 113 ternent 1'autorité civile contre les novateurs. Les Proteftants, qui n'avoient pas moins de confiance dans la bonté de leur doftrine , folliciterent a leur tour les Princes de leur parti, de réprimer ceux qui ofoient la combattre ou s'y oppofer. Luther, Calvin , Cranmer, Knox , fondateurs de la réformation dans leurs pays, lorfqu'ils en eurent le pouvoir & 1'occafion, firent fubir a tous ceux qui doutoient de la vérité de leur croyance, les mêmes chatiments que 1'Eglife Romaine décernoit contre leurs difciples. On eüt cru parmi leurs partifans, & peut-être chez leurs adverfaires , qu'ils fe défioient de ia bonté de leur caufe, s'ils n'euffent pas employé les moyens violents qu'on jugeoit alors permis pour foutenir la vérité. Ce ne fut que vers la fin du dixfeptieme fiecle , que la tolérance fut admife dans la République des Provinces-Unies, d'oü elle paffa en Angleterre. Les maux occafionnés par les perfécutions ; 1'influence de la liberté du gouvernement; les fcien-. «es, qui, en éclairant les hommes t  >555' Avantages de la paix de religion pour les tuthériens. ÏI4 L'HlSTOIRE les rendirent plus humains; enfin, ia prudence & 1'autorité des Magiftrats: tout concourut a établir cette fage police, fi contraire au zele furieux que toutes les fecïes avoient puifé dans leurs faux principes fur la nature de la religion & les droits de la vérité , ou qu'elles avoient emprunté des maximes de 1'Eglife Romaine. ^ II eft aifé de voir que dans Ie récès d'Ausbourg, on n'avoit pas été conduit par des idéés fi juftes & fi étendues fur la liberté de confcience & fur la nature de la tolérance. Ce n'étoit qu'un plan de pacification, que des confidérations purement politiques avoient fuggéré aux deux partis , & que 1'intérêt de leur fürete & de leur tranquillité mutuelle rendoit également néceffaire a 1'un & è 1'autre. On en trouve une forte preuve dans un article de ce même récès, qui déclare que les avantages de la pacification ne pourront s'étendre que fur les Catholiques, & fur ceux qui profeffent la confeilion d'Ausbourg. Par cette reftricfion, les partifansde Zuingle & de Calvin fe trouverent abandonnés a la rigueur des peines  DE CH ARLES-QUINT. U5 portées contre les hérétiques. II s'écoula prés d'un liecle avant qu'ils obtinflent d'être protégés par les loix; & ce ne fut qu'au traité de Weftphalie, qu'on les admit a partager avec les Luthériens, tous les privileges de Ia paix de religion. . Mais fi les difciples de Luther virent avec joie leur doctrine tolérée par le recès d'Ausbourg, leurs adverfaires eurent tout lieu de fe féliciter de Partiele qui réfervoit au clergé Catholique la difpofition des bénéfices de tous ceux qui renonceroient par la fuite a la religion Romaine. Cet article , connu en Allemagne fous le nom de réfervc tcctiJiaJUqut, étoit conforme a 1'idée qu'on avoit des droits d'une Eglife établie, II parut jufte que des revenus appropriés dans 1'origine , a la fubfiftance de ceux qui profeiToient fa doclrine, ne changeaffent pas de deftination Les Proteftants eux-mêmes le fenti rent; & quelques fuites qu'ils puffen' prévoir, ils fe défifterent de 1'oppo fition qu'ils y avoient formée. Com me les Princes Catholiques de PEm pire firent obferver exactement cetti Les CatKoliques n'y . gagnent pas moins.  Marcel II eft élu Pape. 9 Avril, i ne> l' H i s t o i r ê convention dans toutes les occalïons, elle devint en Allemagne la plus forte barnere de 1'Eglife Romaine contre la reformation. Dès ce moment, les Eccléfiaiïiques n'étant plus follicités f)ar 1'appas de 1'intérêt pour renoncer a leur croyance , il ne s'en trouva que très-peu d'affez prévenus en faveur de la nouvelle doctrine, pour y facnfier les riches bénéfices dont ils étoient en poffefïïon. Pendant 1'affemblée de Ia diete; Marcel Cervino , Cardinal de SainteCroix, fut élu Pape après la mort de Jules. A 1'exemple d'Adrien, il ne changea point de nom. Avec des intentions auffi pures que celles de ce Pontife, il le furpaffoit dans la fcience du gouvernement, & plus encore dans la connoiffance du génie de la Cour Romaine. If connoiffoit toute la corruption de cette Cour & 1'efpece de réforme dont elle étoit fufceptible ; on attendoit de fa fageffe des régie' ments qui, en corrigeant les abus les plus fcandaleux, pourroient ramener lans le fein de 1'Eglife ceux qui nes ï'en étoient éloignés que par indiïnation contre les vices du clergé,  de Charles-Quint. ïij Mais ce refpecfable Pontife ne parut qu'un inftant fur la chaire de Saint Pierre. La rigoureufe clöture du com clave avoit déja commencé a altérer fa fanté; & la fatigue des longues cérémonies de fon exaltation, joints è la contention d'efprit quexigeoit le plan de réforme qu'il méditoit, épuifa tellement fa fbible confiitu* tion, qu'il tombamalade le douzieme jour de fon élecfion, & mourut le vingtieme (a). On mit en oeuvre tous les rafïinements de l'artirice & de 1'intrigue , fi familiers aux conclaves > pour donner un fucceffeur a Marcel. Les Cardinaux de la faftion Impériale & ceux de la fattion Francoife travaillerent d'une ardeur égale a gagner des fuf» frages , chacun pour un candidat de fon parti. Mais après des débats auffi vifs que 1'objet en étoit important , on fe réunit pour choifir Jean Pierre Caraffe, Doyen du facré College , & fils du Comte Montario, (a) Thuan. 520. F. Paoio, 365. Onuph; Panvin, 321, &c. ÈIe£tion d* Paul IV. 23 MaiJ  «Ï55- Caraftere de ce Pape. uS L' H i j t o u i d'une illuftre familie du Royaume de Naples. L'adreffe & 1'influence du Cardinal Farnefe , qui favorifoit les prëtentions de Caraffe, le mérite même de celui-ci, & peut-être fon grand age, qui adouciffoit le chagrin des prétendants, par 1'efpérance de voir bientöt vaquer la chaire pontificale, tout concourut a fon élecfion. Par refpect pour la mémoire de Paul III, qui 1'avoit fait Cardinal, & par reconnoiffance pour Ia familie des Farnefes, Caraffe prit le nom de Paul IV. Le choix d'un Prélat d'un caractere fi fingulier, & qui, depuis longtemps, fuivoit une carrière qui devoit 1'éloigner de la première dignité de 1'Eglife, donna de 1'inquiétude aux Italiens; ils avoient affez obfervé fes mceurs & fa conduite, pour être incertains fur ce qu'on devoit attendre de lui. Paul, quoique né dans un rang qui le difpenfoit du mérite pour parvenir aux plus hautes dignités eccléfiaftiques, s'étoit dés fa jeuneffe appliqué a 1'étude, en homme qui ne vouloit rien devoir qu'a fes qualité* perfonnelles, Verfé dans toute*  de Charles-Quint. 119 les fubtilités de la théologie fcholaftique, il y joignoit encore une grande connoilTance des langues favantes 6c des Belles-lettres, dont Pétude ayant depuis peu repris naiffance en Italië, étoit alors cultivée avec beaucoup d'ardeur. Cependant fon efprit naturellement fombre 8c févere, étoit plus porté è 1'aigreur des controverses , qu'a cette élégance 8c cette urbanité que donne la littérature. II avoit plutöt pris les idéés 8c les fentiments d'un Moine , que les talents néceffaires pour la conduite des grandes affaires. Pourvu de plufieurs riches bénéfices a fon entrée dans 1'Eglife , employé comme Nonce en différentes Cours, il fe dégoüta bientöt de cette carrière, 8c foupira après une vie plus convenable a fes goüts 8c a fon caraöere. Dans ce deffein, il réfigna tout a la fois fes«dignités eccléfiaftiques. Après avoir inftitué un ordre de Prêtres réguliers, qu'il nomma Théatins , du nom de 1'Archevêché qu'il avoit occupé, il s'affocia lui-même alacommunauté, 8c fe conforma a toutes les rigueurs des regies qu'il avoit prefcrites; il préféra  IiO L* H-1 S T O I R Ë la folitude de la vie monafHque, & Phonneur de fonder un nou vel ordre, aux grandes efpérances que la Cour de Rome offroit a fon ambition. II étoit depuis long-temps dans cette retraite, lorfque Paul III, fur la feule réputation de fa fainteté & de fa fcience, 1'appella a Rome pour Ie confulter fur les moyens de détruire 1'héréfie, & de rétablir 1'ancienne autorité de 1'Eglife. Après 1'avoir ainii tiré de la folitude , le Pape gagna fur lui, moitié par prieres, moitié par autorité, d'accepter le chapeau de Cardinal, de reprendre les bénéiices qu'il avoit réfignés, & de rentrer dans le chemin des honneurs auxquels il fembloit avoir renoncé. Mais pendant le regne de deux Pontifes, dont 1'un remplit la Cour de Rome de tous les artifices de 1'ambition , & 1'autre des plus fcaidaleufes débauches, Caraffe conferva toujours fon aufiérité monaftique. Ennemi déclaré de toute innovation en fait de doctrine , &c rigide k 1'excès fur 1'obfervation dw calte , ce fut lui qui contribua Ie plus a établir dans les Etats du Pape, le tribunal odieux & formidable de lïnquifition,  DE CHARLES-QUINT. 121 quifition. II foutint avec chaleur,en toute occafion, la jurifdidtion & la difcipline de 1'Eglife, 8c cenfura vivement toute démarche didtée par des vues de politique 8c d'intérêt, plutöt que par le zele pour Phonneur & la dignité du faint Siege. Sous un Pape de ce caradfere, les courtifans s'attendoient k un pontificat dur &C auftere, oii tous les principes de la faine politique feroient facrifiés aux préjugés étroits de Ia dévotion; 8c le peuple craignoit de voir la parcimonie Sc la rigidité des mceurs du cloïtre , remplacer la gayeté Sc la magnificence qui avoient régné depuis quelque temps k la Cour de Rome. Mais Paul s'empreffa de diffiper ces allarmes. Dès qu'il fut en poffeffion du gouvernement, il renonca tout d'un coup a cette auftérité qui avoit jufqu'alors diftingué fa perfonne 8c fa familie ; 8c lorfque le grand-Maïtre de fa maifon lui demanda de quelle maniere il vouloit vivre : „ Comme „ il convient k un grand Prince, " répondit - il fiérement. La cérémonie de fon couronnement fe fit avec la Tornt VI, F Sa conduite après fon exaltation.  Excès de fon attachement pour fes nevsux. (a) Platina, p. 327. Caftaldo , \ita de Paolo IV, Ram. 1615, p. 70. 111 L'HlSTOIRE plus grande pompe ; &c pour gagner 1'affection des habitants de Rome, il fignala fon avénement par plufieurs aöes de clémence & de libéralité (a). Cependant fa févérité naturelle auroit fans doute repris le deffus & juftine les conjettures des courtifans, ainfi que les craintes du peuple , fi, aulli-töt après fon élection , il n'eüt appellé auprès de lui deux de fes neveux, fils du Comte de Montorio fon frere. L'aïné fut nommé Gouverneur de Rome; le cadet, qui jufqu'alors avoit fervi comme volontaire dans les armées de France &z d'Efpagne, & dont le carattere & les mceurs convenoient plus a cette profeffion que 1'état eccléfiafiique, fut créé Cardinal, & enfuite Légat de Bologne ; c'étoit la feconde place , pour le rang &C Fautorité, dont un Pape put difpofer. Ce n'étoit pas affez de ces marqués extraordinaires de faveur; Paul y joignoit une confian.  de Charles-Quint. 123 ce & un attachement fans hornes. & il parut difpofé a tout facrifïer a 1'agrandiflëment de fes neveux. Mal heureufement pour ce Pontife, leui ambition ne connoifibit point de limites. Ils avoient vu les Medici: élevés en Tofcane a la puiffance fouveraine par les Papes de cette mai fon , & 1'habileté de Paul III, alTurer a la familie des Farnefes les Duchés de Parme & de Plaifance. D'a prés ces exemples, ils afpirerent è quelqu'établiffement qui les élevat i la même indépendance & au même pouvoif ; mais fachant que leur oncle ne porteroit pas la foibleffe juf qu'a fécularifer une partie du patrimoine de 1'Eglife, ils ne virent de moyen de parvenir k leur but que par le démembrement des domaines de 1'Empereur en Italië. Dans 1'efpérance d'en recueillir quelques débris, ce feul motif leur auroit fuffi pour les engager k fomenter la difcorde entre Charles ck le Pape. Mais le Cardinal Caraffe avoit en> core des raifons perfonnelles de haïr 1'Empereur. Lorfqu'il fervoit dans les troupes d'Efpagne, il n'y avoit pas Leurs pro■ jets d'am, bition. Motifs rle leur reffentiment contre 1'Empere«r.  *5 S 5- Ils s'efforcent d'aigrir le Pape contre ce Monar que. 124 L'HlSTOIRE été traité avec Fhonneur & Ia dif* tinction qu'il croyoit dus a fa naiffance & a fon mérite. Ces dégoüts lui avoient fait quitter brufquement le fervice de Charles pour s'attacher a celui de France, ou 1'accueil qu'il recut, flattant fa vanité , 1'engagea dans les intéréts de cette Monarchie. D'un autre cöté , s'étant lié d'une étroite amitié avec Strozzi, qui commandoit 1'armée des Francois en Tofcane, celui-ci lui infpira une mortelle antipathie contre 1'Empereur , qu'on regardoit comme le plus grand ennemi de 1'indépendance Sc de la liberté des Etats d'ltalie. Le Pape lui-même étoit fort difpofé a prendre des impreffions défavorables a ce Prince. L'oppofition que les Cardinaux de la faction Imperiale avoit mile a fon élection, lui étoit toujours préfente ; Sc fon reffentiment fe fortifioit encore par le fouvenir d'anciennes injures qu'il avoit regues de Charles, 011 de fes miniftres. Ses neveux profitant de ces difpofitions, employerent différents artifices pour le brouiller d'une ma, niere irréconciliable avec 1'Empereur.  de Charles-Quint. 125 Ils exagérerent tout ce qui pouvoit indiquer le mécontentement que ce Prince avoit eu de 1'exaltation de Caraffe : ils montrerent a leur oncle une lettre interceptée, dans laquelle Charles taxoit lés Cardinaux de fon parti, de négligence Sc d'incapacité pour n'avoir pas empêché cette élection. Ils prétendirent un jour avoir découvert une confpiration tramée contre fa vie par le Miniftre de 1'Empire Sc Cöme de Médicis. Une autre fois , ils 1'allarmerent par les détails d un complot formé , difoient - ils , pour les affaffiner euxmêmes. C'eft ainfi que tenant dans une continuelle perplexité fon efprit naturellement violent & devenu foupconneux par la vieilleffe , ils 1'entrainerent dans des démarches , qu'autrefois il auroit été le premier a condamner ( Sc il montroit même une forte d.e répugnance a les continuer , foit qu'il eüt réfléchi fur 1'incertitude des événements de la guerre , foit que le Miniftre de 1'Empereur eüt eu Padreffe de 1'adoucir. Pour le tirer de cette efpece d'irréfolution, Sc rallumer fon refientiment, fes neveux eurent encore recours aux expédients qui leur avoient déja fi bien réufïï. Ils réveillerent fes allarmes fur les intentions de 1'Empereur, parierent des menaces que faifoient fes Miniftres , & de nouvelles confpirations toutes prêtes a élater contre la vie du Pontife. Mais des artifices fi fouvent répétés n'avoient plus le même fuccès, Sc Pimpreflion en auroit été fans effet, fi 1'animofité de Paul n'eüt été réveillée par un nouveau fujet d'offenfe qu'il étoit incapable de pardonner. La nouvelle du recès de la diete d'Ausbourg, Sc de la tolérance que cet acte garantiffoit aux Proteftants, Ie jetta tout-a-coup dans des tranfports fi furieux de colere contre 1'Empereur Sc le Roi des Romains, qu'il  DE ClI ARLES-QülNT. 131 ( fe porta de lui-même aux démarches ' violentes que vouloient lui infpirer fes neveux. Plein d'une haute idee des prérogatives du Saint Siege, & emporté par un zele implacable contre 1'hérélie , il ne vit dans cette diete , compofée en partie de laïques qui s'arrogeoient le droit de décider des matieres de foi, qu'un attentat téméraire fur une jurifdiction qui n'appartenoit qu'a lui feul, & dans la liberté qu'on avoit accordée aux Proteftants, que 1'abus criminel d'un pouvoir ufurpé. II fe plaignit hautement de ces deux griefs a 1'Atnbaffadeur de 1'Empire. II demanda que le récès de la diete fut promptement déclaré nul & illégal. II menaca 1'Empereur & le Roi des Romains des plus terribles effets de fa vengeance , s'ils refufoient ou même tardoient de le fatisfaire fur cet article. Enfin, il prit le ton d'autorité de ces Pontifes du douzieme fiecle , qui d'un feul décret ébranloient ou renverfoient le tróne des plus grands Monarques. Mais ce ftyle n'étoit plus de faifon, fur-tout avec le Miniftre d'un Prince qui , plus d'une fois, avoit fait fentir tour le F vj  '555. 132 L'HlSTOIRE poids de fa puiffance a des Pontifes encore plus redoutables. Cependant rAmbaffadeur écouta avec beaucoup de patience fes propofitions & fes menaces extravagantes. II s'efforca de le calmer, en lui repréfentant 1'extrême embarras oii 1'Empereur s'étoit vu réduit a Infpruck, les engagements qu'il avoit été obligé de prendre avec les Proteftants pour en fortir; enfin , la nécefïité oü il fe trouvoit de remplir fes promeffes, & de conformer fa conduite a fa fituation. Mais quelques fortes que fuffent ces raifons , elles ne firent aucune impreffion fur 1'efprit d'un Pontife hautain & fanatique. II répondit que, par fon autorité apoftolique, il délioit 1'Empereur de toutes fes promeffes, & lui défendoit même de les accomplir ; que dés qu'il s'agiffoit de la caufe de Dieu & de 1'Eglife, on ne devoit plus avoir égard aux maximes de la politique & de la prudence humaine que 1'Empereur avoit été vifiblement puni du Ciel par fes mauvais fuccès en Allemagne , pour avoir con» fulté fon intérêt plus que celui de la Religion. Après ce difcours , il  de Charles-Qu in t. 133 quitta brufquement l'Ambaffadeur , fans attendre de réponfe. Ses neveux ne manquerent pas de lui appfaudir & de flatter les fentiments de cet efprit altier, qui toujours imbu des idees monaftiques fur 1'étendue de 1'autorité pontificale, ne cefföit de répéter qu'il étoit le fucceffeur de ceux qui avoient dépofé les Rois &c les Empereurs , & qu'élevé au-deffus de tous les potentats, il fouleroit aux pieds ceux qui oferoient lui réfifter. Telles étoient fes difpofitions k 1 egard de la Maifon d'Autriche, lorfque le Cardinal de Lorraine arriva. 11 ne fut pas difficile k ce négociateur d'engager le Pape k figner un traité, qui avoit pour objet la ruine d'un Prince qu'il haïflbit plus que jamais. Les conditions furent les mêmes qui avoient été propofées a Paris par 1'envoyé de Paul, & 1'on convint de tenir cette alliance fecrete jufqu'a ce que tout fut prêt de part & d'autre pour ouvrir la campagne («).. (a) Pallav. lib. 3 , p. 164. F. Paolo. M55- Ses neveux excitent encore (bn reffentimeat. II conclut fon traité avec la France.  L'Empereur prend la réfolution d'abdiquer fes Etats héréditaires. 134 L' H 1 s t o r r e Mais pendant Ja négociation de ce traité , les allarmes qui en étoient le prétexte, cefferenttout-a coup-par un événement qui devoit en rendre les mefures fuperflues. Ce fut la réiignation que fit 1'Empereur de fes Etats héréditaires a Philippe fon fils , & la réfolution de renoncer pour jamais aux foins du monde, &c de palfer le refte de fes jours dans la retraite & la folitude. On n'a pas befoin de profondes réflexions ni d'un grand difcernement pour fentir que la Royauté n'eft pas exempte de foucis & de peines, & que la plupart des hommes élevés au tröne, achetent chérement cette prééminence qu'on leur envie, par les inquiétudes, la fatiété & les dégoüts qui en font inféparables. Mais defcendre du rang fuprêrne a un état de fubordination, & renoncer au pouvoir pour chercher le bonheur , c'efi un effort qui n'en paroït pas'moins au-deffus de 1'efprit humain. L'hifioire offre ce- 365. Thuan. lib. 15, 525, lib. 16, 540. Mém. de Ribier , 2 , 609 , &c.  DE CH AR LE9-QUINT. IJJ pendant plus d'un exemple de Princes qui ont quitté le tröne pour finir leur vie dans la retraite ; mais ce furent ou des hommes foibles qui fe répentirent promptement d'une détermination prife a la légere, ou d'illuftres malheureux, qui, dépouillésdu fceptre par un rival, ne tomberent qu'a regret dans une condition privée. Dioclétien eft peut-être le feul Monarque digne de régner, qui ait abdiqué 1'Empire en philofophe , & paffe de longues années dans une retraite volontaire, fans jetter en-arriere un coup d'ceil ou un foupir de regret, vers la grandeur Sc Ie pouvoir qu'il avoit abandonnés. L'abdicaticn de Charles étonna toute 1'Europe. Ses contemporains ainfi que les hiftoriens de fon fiecle , s'épuiferent en conjectures pour en deviner les motifs. En effet, on ne pouvoit guere s'attendre a une réfolution, fi finguliere de la part d'un Monarque dont la paffion favorite avoit toujours été 1'amour de la domination, Sc qui n'ayant encore que cinquante-fix ans, étoit précifément dans 1'age ou fambition, moins dif- Motifs de cette abii". cation.  136 L'Histoire traite & plus forte , pourfuit fon objet avec le plus d'ardeur. Beaucoup d'auteurs ont imputé cette démarche a des caufes frivoles & bifarres qui ne peuvent influer fur le cceur humain; d'autres 1'ont regardée comme le réfultat de quelque profond myftere de politique. Mais des hiftoriens plus pénétrants & mieux informés , ont penfé qu'il étoit inutile de recourir a des caprices finguliers , ou a des fecrets d'Etat, quand des raifons fimples & fenfibles pouvoient expliquer la conduite de 1'Empereur. Charles avoit été attaqué de la goutte dés fa jeunelTe; & malgré les foins des plus habiles médecins, la violence de ce mal croiffant a mefure qu'il avancoit en age, les accès en devenoient chaque année plus fréquents & plus infupportables. Ses fouffrances, en détruifant la vigueur de fon tempérament, avoient altéré les facultés de fon ame. Incapable, dans fes attaques de goutte, de vaquer aux affaires , & n'ayant que des moments de relache qui ne lui laiffoient que de courts intervalles d'application férieufe, il paffoit le refte  DE CH ARLES-QUI NT. 137 du temps a des jeux ou des amufements propres a repofer fon efprit affoibli 6c comme épuifé par fes dou> loureufes infirmités. Dans cet état, le courant des affaires de fes Royaumes étoit un fardeau trop pénible pour lui ; encore moins pouvoit-il pourfuivre 1'exécution des vaffes projets qu'il avoit formés dans la vigueur de 1'age, ou foutenir ce grand fyftême politique, dont la chaine embraffoit toutes les nations de 1'Europe 6c les intéréts compliqués de tant de Cours différentes. Accoutumé depuis long-temps a porter fes regards vigilants fur toutes les branches de 1'adminiftration, 6c a décider lui feul de toutes les opérations, il voyoit avec chagrin que le' progrès de fes infirmités le forcoit de remettre a fes minifires la conduite des affaires; auffi. ne manquoit-il pas d'attribuer les malheurs ou les accidents qui lui furvenoient, quels qu'ils fuffent , k 1'impoffibilité oh il étoit de gouverner par lui-même. II fe plaignoit du fort, qui, fur le déclin de fa vie, lui oppofoit un rival dans la vigueur de 1'age, maitre de concerter 6c d'exé-  * Dom Levefque , dans fes mémoires du Cardinal de Granvelle , donne k 1'abdication de 1 Empereur une raifon dont je ne crois pas qu'aucun autre hiftorien ait fait mention. II dit que ce Monarque ayant cédé a fon fils , lors de fon mariage avec la Reine d'Angleterre , le Gouvernement de Naples & du Duché de Milan , Philippe, malgré les confeils & les prieres de fon pere , avoit exilé tous les anciens Miniftres & Officiers de ces deux Etats, pour mettre a leur place fes créatures; que ce Prince follicitoit ouvertement & fans retenue une part a 1'adminiftration des affaires dans les Pays-Bas; qu'il s'efforcoit de traverfer toutes les me(ures de 1'Empereur, & de mettre des hornes k fon autorité ; qu'enfln 3 Charles s'étant 138 L'HlSTOlRE cuter par lui-même fes projets, tandis qu'il fe voyoit réduit a fe repofer fur d'autres du foin de fes deffeins & de fes intéréts. Surpris avant 1'age par les incommodités de la vieilleffe , il crut qu'il devoit en homme fage, dérober fa foibleffe aux regards du public , & que ce feroit expofer fa gloire &c trahir fa renommée , que de s'obftiner a ne point quitter les rênesdu gouvernement, qu'il nepouvoit plus tenir avec fermeté ni manier avec adrefle *.  de Charle s-Quint. 139 Mais plufieurs raifons avoient jufqu'alors empêché 1'Empereur de fuivre fon projet, quoiqu'il s'enfutoccupé depuis plufieurs années, & qu'il 1'eüt communiqué afesfceurs, les Reines douairières de France &c de Hongrie, qui 1'approuverent, & qui lui offrirentmême de 1'accompagner dans le lieu de fa retraite. II ne pouvoit fe réfoudre a charger Philippe du gou- appercu qu'il falloit ou céder a fon fils, ou avoir recours a la force, & ne voulant pas en venir a des extrêmités douloureufes pour un pere, prit la réfolution de lui réfigner tous fes Etats, & de fe retirer du monde, vol. 1, p. 24 , &c. üom Levefque, en rapportant très-briévement ces faits finguliers, prétend les avoir tirés des manufcrits du Cardinal deGranvelle- Mais quoique cette nombreufe colleótion de papiers, confervée & mife en ordre par M. 1'Abbé Boizot deBefancon , foit un des monuments les plus précieux de 1'hiftoire dufeizieme fiecle, èkqu'elle doive répandre beaucoup de lumieres fur les événements du regne de Charles-Quint, cependant comme cet ouvrage M;matlrarp nnMU \c np nllU pni-ir»ripr VI.. wu.... r L -r, ... le degré de croyance que mérite letrait quon vient de lire; c'eft ce qui m'a empêché d'en faire ufage dans mon récit de 1'abdication de. Charles-Quint. «5 5 5- Circonftances qui en retarderent 1'exécution.  II5Ï- m 140 L'Histoire " vernement de fes Etats, avant qu'il eüt 1'age & 1'expérience néceffaires pour foutenir un li pelant fardeau. Mais comme ce Prince avoit atteint fa vingt-huitieme année, & qu'habitué de bonne heure au travail, il y montroit autant d'inclination que de talent, on n'auroit pu attribuer a la prévention de la tendreffe paternelle le parti qu'auroit pris Charles de réfigner dès-lors a fon fils un tröne qu'il vouloit quitter. Sa mere apportoit un obflacle plus réel a fon abdication. Quoique cette Princeffe vécut renfermée depuis prés de cinquante ans , dans le même état d'égarement d'efprit oü 1'avoit jettée la mort de fon mari, elle étoit toujours cenfée gouverner 1'Efpagne conjointement avec 1'Empereur. Son nom étoit inféré dans toutes les ordonnances k cöté de celui de fon fils; & fes fujets avoient un fi grand attachement pour elle, qu'ils fe feroient fait fcrupu.le de reconnoïtre Philippe pour leur Souverain, a moins qu'elle n'eüt confenti a 1'affocier au tröne. Mais dans 1'état oü elle étoit, comment obtenir ce confentement ? Sa  de Charles-Quint. 141 mort même, qui arriva dans cette année , leva toutes les difficultés, en laiffant Charles , feul maitre de la Couronne d'Efpagne, & libre d'en difpofer en faveur de fon fils. La guerre contre la France pouvoit encore retarder cette abdication. II devoit fouhaiter de terminer toutes les hofülités, pour remettre fes Etats en pleine paix, avant de quitter le tröne. Mais comme Henri ne fe montroit difpofé a aucun accommodement, & qu'il avoit même recu des propofitions de paix julfes & raifonnables, d'un ton qui annoncoit un deffein formé de continuer la guerre, Charles fentit qu'il feroit inutile d'attendre plus long - temps un événement trop incertain. Ainfi dés qu'il crut avoir trouvé le moment favorable pour 1'exécution de fon grand deffein, il voulut y mettre toute la folemnité convenable a 1'importance de cet événement, & fignaler fon dernier acte de fouveraineté par un éclat qui laiffat une profonde impreffion dans 1'a me de fes fujets & de fon fucceffeur, II rappella donc Philippe de 1'An- Formalité qu'il employé dans cette réfignation.  '55 5- Ï4^ L'HlSTOIRE • gleterre, oü le caratfere chagrin de la Reine, qui s'aigriffoit encore de fe voir fans poflérité , le rendoit trèsmalheureux; tandis que d'un autre cöté la jaloufie des Anglois ne lui laiffoit aucune efpérance de pouvoir les gouverner un jour. Après avoir convoqué les Etats des Pays - Bas k Bruxelles pour le % 5 d'üclobre, 1'Empereur vint y fiéger pour la derniere fois fur fon tröne, ayant k 1'un de fes cötés fon fils, k 1'autre fa fceur, Reine de Hongrie & Régente des PaysBas , & derrière lui un cortege briljant de Grands d'Efpagne & de Princes de 1'Empire. Le Préfident du confeil de Flandres expliqua en peu de mots 1'intention du Souverain, dans la convocation extraordinaire de cette affemblée. II lut enfuite 1'acfe de réfignation par lequel 1'Empereur abandonnoit k Philippe fon fils, tous fes domaines, fa jurifdicïion & fon autorité dans les Pays-Bas, déchargeant fes fujets de 1'obéiffance qu'ils lui devoient, pour la tranfporter k Philippe , fon iégitime héritier , afin qu'ils le ferviffent avec le zele &c la fidélité qu'ils lui avoient toujours mon;  de Charles-Quint. 143 trés a lui-même, depuis tant d'années qu'il les gouvernoit. Alors Charles s'appuyant fur 1'épaule du Prince d'Orange, k caufe de fa foibleffe, fe leva de fon fiege, & s'adrelTa lui-même k 1'affemblée, tenant un papier a la main pour foulager fa mémoire : il rappella avec dignité , mais fans oftentation, .tout ce qu'il avoit entrepris Sc fait de grand , depuis le commencement de fon regne. II dit que dés 1'age de dix-fept ans, s'étant dévoué tout entier au foin du gouvernement, il n'avoit donné que peu de temps au repos, encore moins aux plaifirs; que , foit en temps de paix, foit pour faire la guerre , il avoit paffe neuf fois en Allemagne , fix fois en Efpagne , quatre fois en France, fept fois en Italië, dix fois dans les Pays-Bas, deux fois en Angleterre, autant en Afrique , Sc qu'il avoit traverfé onze fois la mer; que tant que fa fanté lui avoit permis de remplir fes devoirs, Sc que fes forces avoient pu fuffire au pénible gouvernement de fes vaftes Etats, jamais il n'avoit craint le travail, ni ne s'étoit plaint  144 L'Histoire de la fatigue; mais que fa vigueur; épuifée par les crifes douloureufes d'une maladie incurable, & fes infirmités qui croiffoient de jour en jour, 1'avertiffoient de quitter le monde; qu'il n'étoit pas affez jaloux de régner, pourvouloir tenir le fceptre d'une maindébile, quand il ne pouvoit plus protéger fes fujets, ni veiller k leur bonheur; qu'au-lieu d'un Souverain fuccombant fous le mal, & qui n'avoit qu'un refte de vie, il leur donnoit un Prince qui joignoit k la force de la jeuneffe , 1'expérience 6c la maturité qu'amenoient les années ; que fi durant le cours d'une longue adminiftration, il avoit commis quelque faute, ou fi, dans 1'embarras 6c fous le fardeau des grandes affaires qui abforboient toute fon attention, il avoit fait injuftice k quelqu'un de fes fujets, il leur en demandoit pardon ; qu'il conferveroit a jamais une vive reconnoiffance de leur fidélité 8c de leur attachement; que ce fouvenir le fuivroit dans fa retraite comme fa plus douce confolation, & comme la plus flatteufe récompenfe de tous fes travaux, 6c  de Charles-Quint. 145 & que fes derniers vceux ne deman- 1 deroient au ToutPuiffant que la profpérité de fes peuples. Enfuite fe tournant vers Philippe ; qui s'étoit jetté a genoux & baifoit la main de fon pere: » Si je ne vous *> laiffois, dit-il, que par ma mort t> ce riche héritage que j'ai fi fort » accru, vous devriez quelque tri#» but k ma mémoire; mais lorfque » je vous réfigne ce que j'aurois pu » conferver encore, j'ai droit d'atten»> dre de vous la plus grande recon» noiffance. Je vous en difpenfe ce»> pendant , & je regarderai votre » amour pour vos fujets & vos foins » pour les rendre heureux, comme w les plus fortes preuves de votre re» connoiffance. C'eft a vous a jufti« fier la marqué extraordinaire que » je vous donne aujourd'hui de mon » affeöion paternelle, & a vous mon» trer digne de la confiance que je 9> mets en vous. Confervez un refj»> pecf inviolable pour la religion; « maintenez la foi Catholique dans w fa pureté; que les loix de votre » pays vous foient facrées; n'atten» tentez ni aux droits, ni aux privi- Tomt VI. G  ft" "mm 146 L' H IS T O IR Ê » leges de vos fujets ; & fi jamais il » vient un temps oii vous defiriez » de jouir, comme moi, de la tran» quillité d'une vie privée , puifiïez» vous avoir un fils qui mérite par » fes vertus que vous lui réfigniex *> le fceptre avec autant de fatif»> faction que j'en goüte a vous le cé» der ! " Dés que Charles eut fïni ces dif* cours, il fe jetta fur fon fiege, prés de tomber en foibleffe de la fatigue d'un fi grand effort. Pendant qu'il parloit, tout 1'auditoire fondoit en larmes , les uns d'admiration pour fa grandeur d'ame, les autres attendris par les vives expreffions de fon amour pour fon fils & pour fes peuples, tous avec un profond regret de perdre un Souverain qui avoit toujours diftingué fon pays natal par des marqués de bienveillance particuliere. Philippe, qui étoit encore aux pieds de fon pere , fe releva; & d'une voix baffe & foumife , lui rendit grace du don qu'il recevoit de fa bonté fans exemple; puis s'adreffant k 1'affemblée, & lui témoignant du regret de  de CH ARLES-QüI nt. Ï47 ne pouvoir parler le Flamand avec " affez de facilité pour exprimer dans une occalion li intéreffante tout ce qu'il croyoit devoir a fes fideles fujets des Pays-Bas, il pria qu'on permit k Granvelle , Evêque d'Arras, de parieren fon nom. Granvelle, dans un affez long difcours, vanta le zele de Philippe pour le bien de fes fujets , la réfolution oü il étoit de confacrer tout fon temps & fes talents k faire leur bonheur, & k imiter 1'exemple de fon pere , en traitant les Flamands avec des égards diftingués. Maës, homme de loi, fort éloquent, répondit au nom des Etats, par des proteftations de fidélité & d'attachement pour leur nouveau Souverain. Alors Marie, Reine douairière de Hongrie , réfigna la régence dont elle avoit été chargée par fon frere pendant 1'efpace de yingt-cinq ans. Le jour fuivant, Philippe , en préfence des Etats, fit le ferment accoutumé, de maintenir les droits & les privileges de fes fujets; &c tous les membres de 1'affemblée, foit en leur propre nom, foit au nom de ceux qu'ils G ij  1556. 6 Janviei (<») Godleveus, rclatio abdicationis C*r. V', ap. Goldajl. Polit. imper.p. 377. Strada, de Bello Belgico, lib. ï , p. 5. (i) On devroit s'attendre k la plus grande exaétitude de la part des hiftoriens , fur la date précife d'un événement auffi métnorable & auffi important que 1'abdication de 1'Empereur. Cependant ils different tous fur ce point d'une maniere inconcevable. Tous conviennent quel'aéte par lequel Charles tranfporta fes Etats des Pays-Bas k fon fils , eft daté de Bruxelles le 25 d'Oétobre. Sandoval, qui étoit préfent a la tranfaétion , prétend que la cérémonie de la réfignation fe fit le 28 du même mois, vol. 2, p. 592. Codleveus, qui apubliéun traité de 1'abdica- I4S L' HlSTOIRE repréfentoient, lui jurerent obéiffance (a). Quelques femaines après, dans une affemblée auffi folemnelle, Charles réfigna a fon fils les Couronnes d'Efpagne avec tous les territoires qui en dépendoit , foit dans 1'ancien ou dans le nouveau monde. De tant de vaftes poffefiions, il ne fe réferva qu'une penfion annuelle de cent mille écus pour les charges de fa maifon & pour des ceuvres de bienfaifance èc de charité (è).  DE CK ARLES-QUINT. 149 II avoit choifi 1'Efpagne pour le lieu de fa réfidence, fe flattant que le bon air & la chaleur du climat calmeroient fa goutte que 1'humidité & les rudes hyvers des Pays - Bas avoient beaucoup augmentée. II étoit d'autant plus impatient de s'embarquer, qu'il fentoit 1'impoffibilité de tion de Charles-Quint, én fixe Ia cérémonie publique , ainfi que la date de 1'acte de réfignation, au 25 d'Ottobre. Le Pere Barre, on ne fait fur quel fondement, la met au 24 Novembre. Hifl. £ Allemagne, 8,976. Herrera eft du même fentiment que Godleveus , torn. t , 15 f, ainfi que Pallavicini, dont 1'anlorité eft d'un grand poids fur les dates & fur toutes les chofes qui demandent une exaétitude fcrupuleufe, hift. lib. 16, p. 168. Le« Hiftoriens ne s'accordent pas mieux fur ls jour ou Charles réfigna la Coaronne d'Efpagne a fon fils. Selon M. de Thou, cefut ui* mois après qu'il lui eut cédé fes Etats des Pays-Bas, c'eft-a-dire vers le a Pape n'en prit aucune allarme. II comptoit trop fur 1'honneur de Henri, pour le croire capable de violer les engagements d'une alliance récente. D'ailleurs, 1'opinion qu'il avoit de la fageffe de 1'Empereur , ne lui permettoit pas d'imaginer qu'il put confentir a im traité fi défavantageux; &t il ne balanca pas a dire que ces négociations ainfi que les précédentes , n'aboutiroient k rien. Mais c'efl mal raifonner en politique, que de conclure de ce qu'un événement n'eft pas probable , qu'il n'arrivera pas. Le Pape en fut bientöt Gonvaincu ; il apprit, avec autapt de furprife que dés chagrin , la conclufion de la treve. Le Cardinal de Lorraine n'ofant foutenir Ie courroux d'un Pontife altier, qui avoit tant de fu/et de fe plaindre, partit brufquement de Rome^ laiffant au Cardinal de Tournon le foin d'appaifer cet orage. Le Pape & les neveux fentirent Ie péril qui les menacoit. Philippe avoit été très-irrité d'une ligue qui n'avoit pu Iongtemps refter fecrete; ils craignoient  de Charles-Quint. 155 la violence de Ion caraöere implaca- ■ ble. D'ailleurs, 4e.Duc d'Albe, qui, par fes talents & fa févérité naturelle , n'étoit que trop p>opre a exercer les vengeances de ce Prince, avoit marché de Milan a Naples, & commencoit a affembler des troupes fur les frontieres de 1'Etat eccléfiaftique. Dans cette fituation, s'ils étoient abandonnés de la France, il falloit renoncer a toutes les efpérances dont leur ambition s'étoit flattée, & refter expoféau reffentiment de Philippe, fans aucun allié qui vint a Fappui de leur foibleffe contre un ennemi li puiffant. Paul eut recours en cette occafion aux artifices & aux intrigues que la Cour de Rome fait toujours employer pour parer les coups dont elle eft menacée. II affecta d'approuver hautement la treve, comme un heureux moyen d'arrêter 1'effufion du fang Chrétien. II témoigna defirer ardemment qu'elle fut 1'avant-coureur d'une paix folide. II exhorta les Princes riraux a profiter de ce moment de reISche pour y travailler, & s'offrit, comme leur pere commun, poiur ferG vj 15 j6. [1 tente de rallumet la guene.  IJJ6. ïjó" L'Hijtoui • vir de médiateur entr'eux. Sous ea prétexte, il envoya en qualité de Nonces, le Cardinal Rebiba, k Ia Cour de Bruxelles, & fon neveu le Cardinal Caraffe a celle de Paris. Les inftructions publiques de ces deux miniftres furent les mêmes. II leur étoit enjoint de faire les plus grands efforts pour engager les deux Monarques a accepter la médiation du Pape , afin qu'après Ie rétabliffement de la paix, on put prendre des mefures pour la convocation d'un concile général. Mais ces démonftrations d'un zele qui convenoit fi bien k 1'importance du fujet des négociations , &c au caradere facré d'un Chef de 1'Eglife , ne fervoit qu'a cacher des intentions bien éloignées du but qui fervoit de prétexte a toutes ces démarches. Caraffe étoit chargé fecretement d'engager le Roi de France a renoncer a la treve, & de ne point épargner les prieres, les promeffes, les préfents mêmes, pour faire renoiiveller le traité avec le faint Siege. C'étoit-la le yéritable objet de 1'ambaffade, tandis que les apparences fervoient a amufer le vulgaire & a trom-  de Charles-Qüint. 157 p*er Charles & fon fils. Le Cardinal partit auffi-tót pour Paris, oh il arriva promptement. Mais Rebiba fut retenu k Rome pendant quelques fe-» maines. Lorfqu'on jugea convenable qu'il fe mit en route, il recut des ordres fecrets de trainer fon voyage en longueur, afin qu'on eüt le temps d'apprendre , avant fon arrivée a Bruxelles, 1'iffue de la négociation de Caraffe, & de lui didter le ton qu'il devoit prendre en traitant avec 1'Empereur & Philippe (a). Caraffe fit fon entree dans Paris avec unepompe extraordinaire. Après avoir préfenté une épée bénite a Henri , comme au défenfeur dont le Pape efpéroit de Paffiftance dans un preffantbefoin, il le conjura de ne point rejetter les prieres d'un pere dans la détreffe, & d'employer ce fer a le fecourir. C'étoit, dit-il, non-feulement un devoir de piété filiale, mais un acte de juftice. Si le Pape , par trop de confiance dans fon traité avee (a) Pallav. lib. 13 , p. 169. Burnet, Ai/?, of reform. 11, app. 309. 1556. 11 Mak Ses négt- ciations pour cé* objet.  15 56- 158 L'Histoiri ' Ie Roi, s'étoit engagé dans des démarches qui avoient attiré le reffentiment du Roi d'Efpagne fur Paul &C fes neveux, ils fupplioient Henri de ne pas fouffrir qu'ils devinffent les vicfimes de leur attachement a Ia France. A cet art d'intéreffer la générofité du Roi, Caraffe ajoute des motifs capables d'éveiller fon ambition. II 1'affura que le moment étoit favorable pour attaquer avec fuccès les Etats de Phili ppe en Italië j que 1'élite des vieilles bandes Efpagnoles avoit péri dans les guerres de Hongrie , d'Allemagne & des Pays-Bas; que 1'Empereur ne laiffoit k fon fils que des Royaumes épuifés d'hom- • mes & d'argent; enfin , qu'il ne sV !;iffoit plus de combattre 1'habileté, 'expérience & la fortune de Charles , mais un Prince a peine affis fur ion tröne, peu fait k commander, odieux k la plupart des Etats d'Italie y & redouté de tous. II ajouta que le Pape avoit déja levé affez de foldats pour mettre en campagne une armée confidérable, qui, avec un nombre fuffifant de troupes Francoifes, pouvoit, par un effort vigoureux, chaf-  DE CH ARLES-QUÏNf. ïf$ fer les Efpagnols de Naples, & livter au Roi de France une conquête qui avoit fait pendant un demi-fiecle % 1'ambition de fes prédéceffeurs, Sc le principal objet de toutes leurs expéditions en Italië. Chaque mot de Caraffe faifoit une profonde impreffion fur Henri. II fentoit que le Pape avoit droit de lui ïeprocher d'avoir manqué aux loix de Fhonneur & de la générofité, en renoncant a fon alliance pour confentir a la treve de Vaucelles; d'un autre cöté, il defiroit ardemment de fignaler fon regne par une conquête que trois Rois de France avoient tentée fans fuccès, & qui formeroit nn établiffement confidérable pour i'un de fes fils. Cependant il demeura quelque temps indécis ; le fouvenir du ferment qui venoit de confirmer fon dernier traité % la vieilleffe dit Pontife dont la mort pouvoit occalionner une révolution totale dans te fyftême politique de 1'Italie , enfin les nouvelles infiances de Montmorency, qui ne ceffoit de repréfenter les dangers de la ligue Sc les avantages de ia treve ,. toutes ces confidérations ba- Quel en eft 1'effet. 31 Juillefj  i6o L'Hpstoire lancerent puiffamment les propo& tions de Caraffe. Mais celui-ci, qui connoiffoit tous les détours 8c les replis des négociations, ne manqua pas d'expédients pour écarter ou furmonter tous les obflacles. II montra les pouvoirs qu'il tenoit du Pape pour abfoudre le Roi de fon ferment; 8c quant au danger qui pouvoit réfulter de la mort de fon oncle, ce Pontife y pourvoiroit lui-même par une nomination de Cardinaux, qui rendroit Henri maïtre abfolu des fuffrages dans la prochaine élecf ion, 6c le mettroit en état de faire un Pape entiérement dévoué a fes intéréts. Mais pour mieux balancer le poids & Pinfluence des confeils du Connétable, Caraffe employa Pacfivité du Duc de Guife , 1'éloquence du Cardinal de Lorraine , 8c Padreffe de Ia Reine, appuyée des artifïces plus puif fants encore de Diane de Poitiers, qui, malheureufement pour la France, fe trouva d'accord avec Catherine fur ce point, quoiqu'en toute autre occafion elle affedfat de la traverfer 8c de la mortifier. Les follicitations de cette cabale n'eurent pas  de Charles-Quint. 161 de peine k déterminer le Roi pour un parti vers lequel il penchoit déja fortement. On n'eut plus d'égards aux remontrances de Montmorency; & le Nonce , après avoir délié Henri de fon ferment, lui fit figner avec le Pape une nouvelle ligue qui ralluma la guerre en Italië & dans les Pays-Bas. Dès que Paul fut informé que fon neveu avoit les plus grandes efpérances de réuffir dans fa négociation, il dépêcha un exprès a Rebiba fur la route de Bruxelles, pour lui ordonner de retourner a Rome. Comme il n'avoit plus befoin de garder le ton de modération qu'il avoit affecfé fous le caracfere de médiateur, ni de contenir plus long-temps fon indignation contre Philippe, il leva hardiment Ie. mafque, & fe porta 4 des violences qui rendoient la rupture inévitable. II fit arrêter & emprifonner 1'Envoyé d'Efpagne. II excommunia les Colonnes ; & après avoir dépoffédé Marc-Antoine, chef de cette familie, du Duché de Paliana, il donna cette dignité & les terriroires qui en dépendoient, a (on 1556. 31 Juillet. Mefures violentes du Pape contre Phi« lippe.  *55. l6l L'HlSTOIRE neveu le Comte de Montorio. Enfuite il fit 'uitenter contre Philippe une accufation juridique en plein confiiloire. Elle portoit que ce Prince, au mépris de la fidélité & de Ia foumifïion qu'il avoit jurées au faint Siege , dont il tenoit 1'inveftiture du Royaume de Naples , non content d'avoir accordé une retraite dans les Etats aux Colonnes excommuniés & déclarés rebelles , leur fourniflbit encore des armes , & fe préparoit a fe joindre a eux pour envahir le patrimoine de Saint Pierre ; qu'une pareille conduite de la part d'un vaffal étoit une trahifon envers fon Seigneur fuzerain , & devoit être punie par la confifcation du fief. Sur ces griefs, 1'Avocat du confiftoire requit le Pape de prendre connoiffance de cette affaire , & de fixer un jour pour entendre les preuves de 1'accufation, efpérant que fa Sainteté feroit juftice , par une fentence proportionnée a l énormité du délit. Paul , dont 1'orgueil triomphoit de citer a fon tribunal un fi grand Roi, foufcrivit è la requête de 1'Avocat; & comme s'il lui eüt été auffi facile d'exécuter  de Charles-Quint. 163 une fentence pénale que de la prononcer, il déclara qu'il fe concerteroit avec les Cardinaux fur les formes requifes pour une procédure de cette importance (a). U Mais tandis que le Pape fe laiffoit aller a 1'impétuofité de fon reffentiment, Philippe montroit une modération extraordinaire. Elevé dans une profonde vénération pour le faint Siege, par les Eccléfiaftiques Efpagnols qui avoient été chargé de fon éducation , 1'age n'avoit fait qu'accroitre ce fentiment dans un efpril fombre , mélancolique, & porté naturellement a la fuperftition. Dès qu'il prévit fa rupture avec le Pape , 1'idée d'avoir a prendre les armes contre le Vicaire du Chrift, & le pere commun des fideles , lui donna de li violents fcrupules , qu'il confulta quelques cafuiftes d'Efpagne fur la legitimité de cette guerre. Ceux-ci, avec leur dextérite ordinaire, accommodant leur réponfe aux circonftances, 1'affurerent qu'après avoir em- (4 Février *557- L'Histoire ment fix chambres , dont quatre avoient Ia forme des cellides des, Moines, avec des murailles toutes mies; les deux autres, de vingtpieds en quarré, étoient tapiffées d'une étoffe brune , & meublées de la maniere la plus fimple. Ce petit batiment , de niveau avec le terrein ,. avoit d'un cöté une porte fur un jardin dont Charles avoit do.-né luimême le plan; & il 1'avoit rempli de différentes plantes qu'il vouloit eultiver de fes propres mains. II y avoit de 1'autre cöté une communication avec la chapelle du couvent, dans laquelle il fe propofoit de faire fes exercices de dévotion. Ce fut dans cette humble retraite , k peine fuffifante pour loger commodément un fimple particulier, que Charles entra , accompagné feulement de douze domeftiques. II y enfévelit dans la folitude & le filence fa grandeur, fon ambition & tous ces vaftes projets , qui, pendant la moitié d'un fiecle, avoient rempli 1'Europe d'allarmes & d'agitation, & infpiré fucceffivement a tous les peuples la terreur de fes arm es & la crai.ntg  DE CHARLES-QurNT. I79 de fe voir fubjugués par fa puiffance ( avec une pompe triomphale qui auroit été plus convenable au retour d'une campagne glorieufe, qu'au commencement d'une guerre dontlefuccès étoit très-douteux; mais ce Général ne trouva pas les préparatifs de guerre auffi avancés qu'il s'y attendoit, & que Caraffe le lui avoit promis. Les troupes du Pape étoient de beaucoup. inférieures en nombre a ce qui avoit été flipulé; il n'y avoit ni des ma- (a) Palav. lib. 13., 180. Mém. de Rilier , 1,1, 678,  M57- Opérations du Duc de Guife. 184 L'HlSTOXRE gafins fuffifants pour afïurer leur fubfiftance, ni 1'argent néceffaire pour payer leur folde. Les Vénitiens, fideles a la prudente maxime que les malheurs de leur république leur avoit fait anciennement adopter, 6c qui étoit devenue un principe fondamental de leur politique, déclarerent la réfolution ou ils étoient d'obferver une exacfe neutralité, & de ne prendre aucune part dans les querelles de Princes fi fupérieurs a eux en puiffance. Les autres Etats d'Italie, ou formerent une ligue ouverte en faveur de Philippe , ou s'intérefferent fecretement aux fuccès de fes armes contre un Pontife dont 1'ambition inconfidérée avoit fait encore une fois de 1'Italie le fiege de la guerre. Le Duc de Guife, voyant que tout le poids de la guerre alloit tomber fur lui, fentit, mais trop tard , combien il étoit imprudent de compter, pour 1'exécution des grandes entreprifes, fur le fecours de foibles alliés. Excité cependant par l'acfivité imp? tiente du Pape 6c par le defir d'exécuter  de Charles-QuiNt. lS  »557- II invefti SaintQuentin. I92 L'HlSTOIRE lippe, & montra une telle fupérlorité de talents fur les Généraux Francois, qu'on ne put guere douter de fes fuccès dans toutes fes opérations ultérieures. II indiqua le rendez-vous général de fes troupes a un endroit très-éloigné du pays oü il fe propofoit d'établir le fiege de la guerre ; après avoir tenu quelque temps fes ennemis incertains fur fes intentions, il les trompa a la fin fi complétement par la variété de fes marches & de fes contremarches , qu'ils jugerent que fon projet étoit de porter tous fes efforts contre la Province de Champagne, & de lacher de pénétrer dans le Royaume par ce cöté. En conféquence, ils dirigerent leurs forces vers cette Province; ils y renforcerent les garnifons, & dégarnirent les places des autres frontieres, au point de n'y pas laiffer affez de troupes pour les défendre. t Emmanuel, voyant le fuccès de fes manoeuvres, tourna tout-a-coup vers fa droite, s'avanca par des marches rapides en Picardie, envoya en-avant fa cavalerie qui étoit forte & nombreufe , & inveftit Saint - Quentin, Cette  DE C H ARLES-QÜINT. 193 Cette place qu'on regardoit comme très-forte , étoit d'une grande importance , paree qu'il n'y avoit que trèspeu de villes fortifïées entre celle-li &c Paris. Les fortifications en avoient cependant été fort négligées; la garnifon , dont une partie avoit été dé-, tachée pour être envoyée en Champagne , n'avoit pas la cinquieme partie des troupes néceffaires pour foutenir un fiege; & le Gouverneur, quöique brave & expérimenté, n'avoit ni le rang ni 1'aurorité qu'auroit exigé le commandement d'une ville fi importante, attaquée par une ar-, mée formidable. Quelques jours auroient fuffi au Duc de Savoye pour, fe rendre maitre de Saint-Quentin ,' fi 1'Amiral de Coligny, qui croyoit fon honneur intéreffé è tacher de conferver a fon pays une place de cette importance , fituée dans la Province dont il avoit le gouvernement n'eüt pris la courageufe réfolution de s'y jetter lui-même avec tout ce qu'il put raffembler de troupes : en effet, quoiqu'une partie de fon détachement eüt été intercepté, il paffa a travers 1'armée ennemie , & entra Tome VI. I  j#7' ' Les Francois viennent au fecours de SaintQuentin. ( (e Charles-Qu int. 133 le Roi de France fur un autre objet, qu'il avoit chargé fon Ambaffadeur de négocier. La jeune Reine d'Ecoffe avoit été fiancée au Dauphin en 1 548; & ayant été dès-lors élevée k la Cour de France , elle y étoit devenue la Princeffe la plus aimable & 1'une des plus accomplies de fonfiecle. Henri demanda le confentement des Ecoffois pour la célébration du mariage; on convoqua pour cet objet un Parlement, qui nomma huit commiffaires chargés de repréfenter a cette cérémonie tout le corps de Ia nation , avec pouvoir de figner tous les aft es qui feroient requis avant la conclufion du mariage. Dans la difpoiition des articles, les Ecoffois prirent toutes les précautions que Ia prudence put leur infpirer, afin de conferver la liberté & 1'indépendance de leur pays; tandis que les Francois, de leur cöté, eurent recours a toutes fortes de moyens pour affurer au Dauphin 1'adminiftration des affaires pendant la vie de la Reine, &c la fucceffion a la Couronne, fi elle venoit k mourir avant lui. Le mariage fut célé- 1558. Vlariage du Dauphin ivec la Reine d'Ecoffe> 14 Avrif,  Ouvertun de la campagne. (a) Keith, Hifi. of Scotland, p. 73. A$* pend. 13. Corps diplom, torn. 5 , p. 21. 134 L'HlSTOlRE bré avec toute la pompe qui convenoit au rang des époux, & a la magnificence d'une Cour, alors la plus brillante de 1'Europe (a). Ainfi, dans 1'efpace de quelques mois, Henri eut la gloire de recouvrer une polfeffion importante qui avoit anciennement appartenu a fa Couronne, & d'y réunir 1'acquifition d'un grand Royaume. Cet événement fervit auffi a donner au Duc de Guife plus de confidération & d'autorité; le mariage de fa niece avec 1'héritier préfomptif de la Couronne, en 1'élevant fort audeffus du rang d'un fimple fujet, fembloit donner au crédit que lui avoient acquis fes grandes actions, autant de folidité qu'il avoit déja d'étendue. ; La campagne ayant été ouverte peu de temps après le mariage du Dauphin, le Duc de Guife fut mis a la tête de 1'armée, muni de pouvoirs auffi illimités qu'auparavant; Henri avoit recu de fes fujets des  »e Charies-Quïnt. fubfides affez confidérables pour avoir a fes ordres une armée nombreufe 8t bien entretenue; tandis que Philippe, épuifé par les efforts extraordinaires qu'il avoit faits la campagne précédente, avoit été obligé de renvoyer pendant 1'hy ver une partie de fes troupes , & ne pouvoit pas avoir une armée en état de tenir la campagne contre celle des Francois. Le Duc de Guife ne laiffa pas échapper 1'occafion favorable que lui offroit fa fupériorité. II inveftit Thionville, dans le Duché de Luxembourg, place très-forte fur les frontieres des PaysBas, Sc trés-importante pour la France par fa proximité avec Metz; malgré la valeur opiniatre des affiégés, elle fut obligée de capituler après un fiege de trois femaines (a). Mais ce fuccès, qui fembloit devoir conduire a d'autres conquêtes, fut bientöt effacé par un événement qui fe paffa dans une autre partie des Pays-Bas. Le Maréchal de Termes, Gouverneur de Calais, ayant péné- (4) Thuan. lib. 20, p. 690. 22 Avril» l'armée Francoife eft battue i Gravelinssi  «55»- i$6 L'HlSTÖÏRE - tré dans la Flandre fans rrouver d'oppofition, inveftit Dunkerque avec une armée de quinze mille hommes, & la prit d'affaut le cinquieme jour du fiege. De-la il s'avanca vers Nieuport, dont il fe feroit bientót emparé, fi l'arrivée du Comte d'Egmont a la téte d'une armée fupérieure , ne 1'avoit obligé de fe retirer. Les troupes Francoifes,embarraffées du butin qu'elles avoient fait a Dunkerque , ou en ravageant le pays, ne pouvoient fë mouvoir que lentement; d'Egmont qui avoit laiffé derrière lui fon gros bagage & fon artillerie, marchoitau contraire avec tant de célérité, qu'il atteignit les Francois prés de Gravelines, & les attaqua avec la plus grande impétuofité. De Termes qui avoit eu le choix du terrein, avoit pofte avantageufement fes troupes dans 1'angle formé par la mer & 1'embouchure de la riviere d'Aa; il recut 1'ennemi avec beaucoup de vigueur. La vief oire refta quelque temps indécife. Les Francois prévoyant une deflruction inévitable s'ils étoient battus dans un pays ennemi, fe défendoient avec une bravoure défëfpérée  de Charles-Quint. 137 qui contrebalancoit la fupériorité cl« " nombre; mais un de ces accidents que ne peut prévenir la prudence humaine, décida enfin le fuccès en faveur des Flamands. Une efcadre de vaiffeauxde guerre Anglois qui croifoit fur la cóte , ayant été attirée par le bruit de la moufqueterie, vers le lieu de 1'aöion, jufques dans la riviere d'Aa , & dirigeant fa groffe artillerie fur 1'aile droite des Francois, la rompit bientöt, & porta la terreur & la confufion dans toute 1'armée. Les Flamands, animés encore par un fecours fi puiffant &c fi inattendu, redoublerent leurs efforts, pour ne pas perdre 1'avantage que leur offroit la fortune, & ne laifferent pas k 1'ennemi le temps de fe remettrede fa première confternatiön. La déroute des Francois fut bientöt générale; prés de deux mille hommes refterent fur le champ de bataille ; il en périt encore un plus grand nombre par la main des payfans, qui, pour fe venger des ravages exercés fur leur pays, pourfuivoient les fuyards, & les maffacrojent fans pitié. Tous ceux qui échapperent a ce  ^ «558. Le Duc de Guife marche contre 1'armée victorieuie. («) Thuan. lib, ao , p> 694, ÏJ5 L' H I S T o r R E carnage, furent faits prifonniers, avec de Termes leur Général, & plufieurs Officiers de diftincfion ( racer jufqu'aux refies de 1'ancienne affecfion que ce Prince avoit eue pour lui. Mais le Connétable ne voyoit aucun moyen de prévenir cet accident, k moins qu'il ne lui fut permis de retourner a la Cour , pour y effayer, fi, par fa préfence , il ne pourroit pas faire échouer tous les' projets de fes ennemis, & ranimer les tendres fentiments qui 1'avoient fi long-temps uni avec Henri, fentiments accompagnés d'une confiance fi entiere, qu'ils reffembloient beaucoup plus k 1'intimité d'une amitié priyée , qu'a ces liaifons froides & intéreffées qui s'établiffent quelquefois entre un Roi & un de fes courtifans. Tandis que Montmorency formoit des plans & des vceux pour fon retour en France , avec beaucoup d'inquiétude & d'activité , mais avec peu d'efpérance de fuccès , un incident imprévu vint feconder fes defirs & fes efforts. Le Cardinal de Lorraine, qui avoit partagé avec fon frere la faveur du Roi & 1'autorité qui en étoit Ie fruit, ne foutint pas la profL ij 1558.  244 L' HlSTOIRE périté avec autant de difcrétion que le Duc de Guife ; enivré de fa bonne fortune , il oublia combien fon frere &i tui étoient redevables de leur élévation a la Ducheffe de Valentinois; tC par une vanité ridicule, il ne parut 1'attribuer qu'a i'importance & aux fervices de fa maifon. II pouffa 1'ingratitude jufqu'a négliger non-feulement fa bienfaiftrice , mais encöre jufqu'a la traverfer dans fes projets, & a parler de fa perfonne & de foti caraftere avec la liberté la plus injurieufe. Cette femme extraordinaire, qui, fi nous en croyons fes contemporains, conferva jufqu'A 1'age de foixante ans, la beauté & les charmes de la jeuneffe, étoit toujours idolatrée par le Roi; elle reffentit vivement un femblable affront, & fe difpofa k en tirer une prompte vengeance. Comme elle ne vit pas de meilleur moyen pour fupplanter les Princes de Lorraine, que d'affocier fes intéréts avec ceux de Montmorency , elle propofa , pour gage de cette union, de donner une de^fes filles en mariage k un des filé du Connétable, qui accepta la pro-  BE C HARLES-QüINT. 24} p&fition avec empreffement. Après avoir ainfi cimenté cette alliance , la Ducheffe employa tout 1'empire qu'elle avoit fur Henri pour fortifier fes difpofitions. a la paix , 8c lui taire prendre les.mefures néceffaires pour 1'obtenir. Elle infinua qu'il feroit très-convenable que les ouvertures en fuffent faites par le Connétable , 8c que cette négociation confiée k fa prudence ne pouvoit manquer d'avoir le fuccès qu'on en der firoiü. Henri, accoutumé dès Iong-temps a confier aux talents du Connétable les affaires les plus importantes y n'avoit befoin que de cet eacouragement pour revenir a fes anciennes habitu,des; il lui écrivit fur. le champ avec fon ton ordinaire de familiarité 8c d'amitié, 6c 1'autorifaen même-temps a faifir la première occafion de fonr der les difpofitions de Philippe 8c de fes miniftres k 1'égard de la paix. Montmorency prit la voie la plus convenable pour réuffir ; il s'ouvrit au Duc de Savoie* Ce Prince, malgré les grands emplois auxquels il avoit été. élevé 6c la gloire militaire L iij 1558. Henri confie a Montmorencv !« négociation de ia paix.  '558. XJtfi L'HlSTOIRE qu'il avoit acquife au fervice d'Efpagne , étoit las de refter en exil, & brüloit de retourner dans fes Etats; & comme il n'avoit aucune efpérance de les recouvrer par la force des armes, il regardoit un traité définitif entre la France & 1'Efpagne, comme le feul événement qui püt le faire rentrer dans les domaines dont on 1'avoit dépouillé. II connoiffoit les fentiments particuliers qui faifoient pencher Philippe vers la paix; & il n'eut pas de peine k 1'engager non-feulement a écouter des propofitions d'accommodement, mais même a permettre au Connétable de retourner en France, fur fa parole, pour y fortifier les difpofitions pacifiques de fon Souverain. Honri recut Montmorency avec les marqués d'eftimeles plus flatteufes ; 1'abfence , au-lieu d'éteindre ou même d'affoiblir fon amitié, paroiffoit en avoir augmenté la vivacité; & dés le moment que le Connétable reparut è la Cour, il prit plus d'empire fur le cceur du Roi qu'il n'en avoit jamais eu. Le Cardinal de Lorraine & le Duc de Gtiife céderent prudemment  DE CH ARLES-QU I NT. 247 k ce torrent de faveur, auquel ils auroient vainement tenté de s'oppofer; ils fe bornerent aux objets de leur département, & laifferent le Connétable & la Ducheffe de Valentinois gouverner k leur gré les affaires du Royaume. Ces favoris déterminerent bientót Henri k nommer desplénipotentiaires pour traiter de la paix; Philippe en nomma de fon cöté. L'Abbaye de Cercamp fut indiquée pour le lieu du congrès; & 1'on convint auffi-töt de terminer par une fufpenfion d'armes toutes les opérations militaires. Tandis que ces mefures préliminaires préparoient la conclufion d'un traité qui rendit la tranquillité k toute PEurope, Charles-Quint, dont 1'ambition y avoit porté fi long-temps le trouble, termina fa carrière dans le monaftere de Saint-Juft. Charles, en entrant dans cette retraite, s'étoit foumis a un genre de vie qui auroit convenu a un fimple Gentilhomme d'une fortune modique. Sa table étoit fervie avec propreté, mais avec fimplicité ; il n'avoit qu'un petit nombre de domefiiques, & il vivoit faL iv »5S«. Mort de ChariesQuint.  1558. 148 L'HlSTOIRE miliérement avec eux. II aveit abfolument aboli, pour le fervice de fa perfonne, toute efpece d'étiquette & de cérémonie gênante, comme incompatibles avec 1'aifance & le repos oii il vouloit couler le refïe de fes jours. La douceur du climat, jointe a 1'éloignement des affaires & des foins du gouvernement , avoit calmé fenfiblement la violenee de fa goutte & fufpendu les douleurs aiguës dont il avoit été fi long-temps tourmenté; de forte que dans cette bumble folitude, il goüta peut-être Xine fatisfacf ion plus pure & plus parfaite que toutes fes grandeurs ne lui en avoient jamais procuré. Les penfées & les vues ambitieufes qui 1'avoient fi long-temps occupé & agité, étoient entiérement effacées de fon efprit; loin de reprendre aucune part aux événements politiques de 1'Europe , il n'avoit pas même la curiofité de s'en informer; il fembloit voir cette fcene tumultueufe, qu'il avoit quittée , avec tout le mépris & 1'indifférence d'un homme qui en avpit reconnu la frivolité, & qui  DE CH ARLES-Q'UrNT. 2,49- jeuilToit du plaiiir de s'être dégagé de fes Hens. D'autres amufements & d'autres objets 1'occuperent dans fa retraite. Quelquefois il cultivoit de fes pror pres mains les plantes de fon jardin ; quelquefois, fuivi d'un feul domeflique a pied, il alloit fe promener dans un bois voifin, monté fur ua petit cheval, le feul qu'il eüt conlervé. Souvent fes infirmités le rete,noient dans fon appartement, & le privoient de ces récréations aclives; alors. il recev.oit la. vifite de quelques Gentilshommes qui avoient leurs habitations prés du couvent, &c il les admettoit familiérement a fa table; ou bien il s'occupoit a faire quelqvie ouvrage curieux de mécha* nique, & a étudier les principes de cette fcience, pour laquelle il avoit toujours montré beaucoup de goüt & de difpofition. II avoit même engagé Turriano, un des plus ingénieux méchaniciens de fon fiecle, a 1'accompagner dans fa folitude; il travailloit avec lui h conftruire des mode,les .des machines les plus utiles, cx k. li v Ses amufements dans fa retraite.  i558. IJO L' HlSTOIRE faire des expériences fur leurs propriétés refpeöives; & il n'étoir pas rares que les idéés du Monarque ferviffent a perfecfionner les inventions de 1'artifte. II fe délaffoit quelquefois a des ouvrages de méchanique purement curieux Sc finguliers; il faifoit des figures qui, au moyen de refforts intérieurs, imitoient les mouvements Sc les gefies humains, au grand étonnement des Moines ignorants, qui, voyant des effets qu'ils ne pouvoient comprendre, tantöt fe défioient de leurs propres fens, tantöt foupconnoient Charles Sc Turriano d'être en commerce avec des puiffances invifibles. II prenoit un plaifir particulier a conftruire des horloges Sc des montres; ayant trouvé , après des effais multipliés, qu'il lui étoit impoffible d'en faire marcher deux exactement 1'une comme 1'autre, il ne put s'empêcher, dit-on, de réfléchir , avec un mélange de furprife Sc de regret, fur fa propre folie, en fe rappellant le temps Sc les foins qu'il avoit employés vainement pour infpirer aux hommes une rigoureufe uniformité de fentim-ent fur les do-  DE CMARLES-QUIN T. 151 gmes compliqués & myftérieux de la religion. Quelles que fuffent les autres 00 cupations qui rempliffoient le refte de fon temps, il eri réfervoit conftamment une grande partie pour des exercices de piété. Soir & matin, il afïiftoit régidiérement au fervice divin dans la chapelle du monaftere. II prenoit beaucoup de plaifir a lire des livres de dévotion, particuliérement les ouvrages de Saint Auguftin & de Saint Bemand ; & il avoit des converfations fréquentes fur des fujets de religion avec fon confeffeur & avec le Prieur du couvent. Le genre de vie que Charles avoit embraffé, étoit digne d'un homme parfaitement dégagé de tous les foins de ce monde , & préparé a paffer dans 1'autre; la première année de fa retraite s'écoula ou dans des amufements innocents qui adouciflbient fes peines, & délaffoient fon efprit fatigué par une longue & exceffive application aux affaires, ou dans des occupations pieufes qu'il regardoit comme effentieUes pour fe difpofer L vj i558. Ses occupationsplus férieufes.  •55*. Caufedel mort. a?2 L'Histoike a un autre état. Mais environ fix mois avant fa mort, Ia goutte, qui lui avoit laiffé un intervalle plus long que de eoutume, reparut avec un fürcroitde violence. Son tempérament épuifé eüt a peine affez de force pour foutenir une fi forte fecouffe, qui affoiblit fon ame ainfi que fon corps; dés ce moment, a" peine retrouvet-on quelques traces de cette raifonfaine & male qui avoit diffingué Charles de fes contemporains. Une fuperftition timide & fervile flétrit fon efprit. II perdit le goüt de toute efpece d'amufements, & tacha d'affüjettir fa vie a toute 1'auftérité de la regie monaftique. II ne defiroit phss d'autre fociété que celle des moines, & paffoit prefque tout fon temps k chanter avec eux les hymnes du miffel. Pour expier fes péchés , il fe donnoit en fecret Ia difcipline avec une rigueur fi exceffive, qu'après fa mort, on trouva le fouet de cordes dont il fe fervoit, teint de fon fang. Ce n'étoit pas encore affez de ces actes de mortification , qui, quoique féveres, n'étoient pas fans exemple. L'inquiétude, la déiïance & la crainte  i>e Charles-Quint. qui accompagnent toujours Ia fuperftition , troubloient de plus en plus fon efprit; & diminuant a fes yeux le mérite de ce qu'il avoit fait, le portoient a chercher quelqu'acte de piété extraordinaire & nouveau, qui püt fignaler fon zele, & attirer fur lui la faveur du Ciel. L'idée a laquelle il s'arrêta, elf une des plus bifarres & des plus étranges que la fuperfiition ait jamais enfantées dans tme imagination foible & déréglée. II réfolut de célébrer fes propres obfe» ques avant fa mort. En conféquence ^ il fe fit élever un tombeau dans la chapelle du Couvent. Ses domefliques y allerent en proceffion funéraire, tenant des cierges noirs dans leurs mains; & lui-même il füivoit enveloppé d'un linceul. On 1'étendit dans un cercueil avec beaucoup de folemnité. On chanta Poffice des morts; Charles joignoit fa voix aux prieres qu'on récita pour le repos de fon ame , & mêloit fes larmes avec celles que répandoient les affifiants, comme s'ils avoient célébré de véritables funérailles. La cérémonie fe lermina par jetter, fuivant 1'ufage,  i558. 2i Septembre 1558,. Son carac*ere. (» Strada , de bell. Belg. I. 1 , p 11. Thuan. 723. Sandov. /. 2 , p. 609, &c. Miniana , continuat. Marian. vol. 4, p. ai6. Vera y Zuniga , vida del Carlos , P- 3' 154 L' H I S T O I "R E de 1 eau bénite fur le cercueil, & tout le monde s'étant retiré , les portes de la chapelle furent fermées. Charles fortit alors du cercueil, & fe retira dans fon appartement, plein des idéés lugubres que cette folemnité ne pouvoit manquer d'infpirer (a). Soit que la longueur de la cérémonie 1'eüt fatigué , foit que cette image de mort eüt fait fur fon efprit une impreffion trop forte, il fut faifi de Ia fievre le lendemain. Son corps exténué ne put réfifler è la violence de Faccès , &c il expira le-vingt-un de Septembre, agé de cinquantehuit ans, fix mois & vingt-cinq jours. , Comme Charles fut par fon rang & fa dignité, le premier Souverain de fon fiecle, le röle qu'il joua fut auffi le plus brillant, foit que Yon confidere la grandeur, la variété ou le fuccès de fon entreprife. Ce n'eft qu'en obfervant avec attention fa con-  DE C H AR LES-Q U I NT. IJ 5 duite, non en confultant les louanges exagérées des Efpagnols 011 les critiques partialesdes Francois, qu'on peut fe former une jufte idéé du génie & des talents de ce Prince. II avoit des qualités particulieres , qui marquent fortement fon caractere, & qui non-feulement le diftinguent des autres Princes fes contemporains, mais encore expliquent cette fupériorité qu'il conferva fi long-temps fur eux. Dans tous les plans qu'il concerta, il porta toujours une prudence & une réferve qu'il tenoit de la nature autant que de 1'habitude. Né avec des talents qui fe développerent lentement &c ne parvinrent que tard a la maturité, il s'étoit accoutumé a pefer tous les objets qui 1'intéreffoient avec une attention exacte & réfléchie. II y portoit toute 1'activité de fon ame ; il s'y arrêtoit avec Papplication la plus férieufe, fans fe laiffer diftraire par le plaifir , ni refroidir par aucun amufement; &c il rouloit en fdence fon objet dans fon efprit. II communiquoit enfuite l'affaire a fes miniftres; & après avoir écouté leurs opinions, il pre- ,558.  1558. 2.56 L'Histotre ' noit fon parti avec une fermeté qui accompagne rarement cette lenteur dans les délibérations. Auffi toutes les opérations de Charles, bien différentes des faillies brufques & incenféquentes de Henri VIII & de Francois I, avoient l'air d'un fyflêrnelié, dont-toutes les parties étoient combinées, tous les effets prévus, & oh 1'on avoit même pourvu aux accidents. Sa célérité dans 1'exécution n'étoit pas moins remarquable que fa patience dans la délibération. II eonfultoit avec phlegme, mais il agifIbit avec attivité; & il ne montroit pas plus de fagacité dans le choix des mefures qu'il avoit è prendre, que de fécondité de génie dans 1'invention des moyens propres a en affurer le fuccès. II n'avoit pas recu de la nature 1'efprit guerrier, puifque dans 1'age oii le caractere a le plusd'ardeur & d'impétuofité, il refta dans 1'inaöion ; mais lorfque enfin il prit le parti de fe mettre a la tête de fes armées, fon génie fe trouva tellement fait pour s'exercer avec vigueur fur quelqu'objet qu'il embraffêt, que bientöt il acquit une coi>  be Charles-Quint. 257 noiffance de Part de la guerre & des talents pour le commandement, qui le rendirent Pégal des plus habiles Généraux de fon fiecle. Charles poffédoit fur-tout au plus haut degré, la fcience la plus importante pour un Roi, celle dé connoitre les hommes, & d'adopter leurs talents aux emplois divers qu'il leur confioit. Depuis la mort de Chievres jufqu'a la fin de fon regne, il n'employa aucun Général, aucun Miniftre, aucun Ambaffadeur, aucun Gouverneur da Province, dont les talents ne fuffent pas proportionnés au fervice qu'il en attendoit. Quoique dépourvu de cette féduifante aménité de mceurs, qui diftinguoit Francois I, & lui gagnoit les cceurs de tous ceux qui 1'approchoient, Charles n'étoit pas privé des vertus qui affurent la fidélité & 1'attachement. II avoit une confiance fans bornes dans fes Généraux ; il récompenfoit avec magnificence leurs fervices ; il n'envioit point leur gloire, & ne paroiffoit pas jaloux de leur pouvoir. Prefque tous les Généraux qui commanderent fes armées, peuvent être mis au rang des plus illuf-» 1558-  1558. 258 L' HlSTOIRE tres capitaines; les avantages qu'il rem» porta fur fes rivaux furent évidemment 1'effet des talents fupérieurs des officiers qu'il leur oppofa ; cette circonfiance pourroit, en quelque forte, diminuer fon mérite & fa gloire, fi i'art de démêler & d'employer les meilleurs inftruments, n'étoit pas la preuve la moins équivoque du talent de gouverner. On remarque cependant dans le caractere politique de Charles, des défauts qui doivent affoiblir beaucoup 1'admirationqu'excitentfes talents extraordinaires. II étoit dévoré d'une ambition infatiable : quoiqu'il y eüt peu de fondement a 1'opinion généralement répandue de fon temps,qu'il avoit formé le chimérique projet d'établir une monarchie univerfelle en Europe, il eft cependant certain que le defir de fe diftinguer comme conquérant, le précipita dans des guerres continuelles , qui épuiferent & écraferent fes fujets, & ne lui Iaifferent pas le temps de s'occuper a perfeclionner dans fes Etats la police inférieure & les arts, objets les plus dignes d'occuper un Prince qui fait  de Charles-Quint. 159 du bonheur de fes peuples le but de ' fon gouvernement. Charles ayant , dès fa jeuneffe, réuni la Couronne Impériale aux Royaumes d'Efpagne & aux domaines héréditaires des Maifons d'Autriche & de Bourgogne , tant de titres & de puiffance lui ouvrirent une fi vafie carrière de projets ambitieux, & 1'engagerent dans des entreprifes fi compliquées Sc fi épineufes, qu'il fentit fouvent que 1'exécution en furpaffoit fes forces; alors il eut recours a de bas artifices , indignes de la fupériorité de fon génie; quelquefois même il s'écarta des regies de la probité, d'une maniere déshonorante pour un grand Prince. Sa politique infidieufe Sc perfide étoit encore plus frappante & plus odieufe par le contrarie du caractere franc & ouvert de fes deux contemporains , Francois I & Henri VIII. Quoique cette différence fut particuliérement 1'effet de la diverfité dn caraélere de ces Princes, on doit auffi 1'attribuer en partie k une oppofition dans les principes de leur conduite politique , qui peut faire excufer k quelques égards ce vice de Charles,  ZOO L' H I S T O I R E fans cependant le juftinerentiéremenr. Francois & Henri, prefque toujours entraïnés par 1'impulfion de leurs paffio.ns, fe précipitoient avec violence vers le hut qu'ils avoient en vues. Les mefures de Charles étant le réfultat d'une réflexion froide & tranquille, étoient combinées avec art, &c formoient un fyltême régulier. Les hommes du caraéiere des premiers pourfuivent naturellement 1'objet de leurs deiirs , fans chercher de déguifement & fans employer d'adreffe : ceux du caractere de Charles font portés , foit en concertant, foit en exécutant leurs projets, k recourir a des fineifes qui conduilënt toujours k 1'artifice, &c dégénerent fouvent en fauffeté. La tradition nous a laifTé, fur le caradere privé & la conduite domeftique de Charles-Quint, des détails moins circonftanciés & moins intéreffants qu'on n'auroit dü 1'attendre, en conlidérant le grand nombre des auteurs qui ont entrepris 1'hifioire de fa vie ; mais ces particularités ne font point 1'objet de cet Ouvrage , ou je me fuis propofé de rapporter les évé  DE GH ARLES-Quï NT. l6l nements du regne de ce Prince, & non de peindre fes vertus ou fes défauts privés, Cependant les plénipotentiaires de i France , d'Efpagne & d'Angleterre 1 continuoient leurs conférences k Cer- ! camp ; chacun d'eux fit d'abord au nom de fa Cour des demandes exagérées, fuivant 1'ufage des négociateurs ; mais comme ils defiroient tous également la paix, ils étoient difpo-> fés a fe relacher mutnellement de leurs prétentions, pour lever tous les obftacles qui s'oppoferoient a un aecommodement. La mort de CharlesQuint étoit pour Philippe une nouvelle raifon de hater la conclufion d'un traité , paree qu'elle augmentok encore 1'impatience qu'il avoit de retourner en Ëfpagne, ou il n'y avoit plus perfonne au-deffus de lui. Cependant , malgré les defirs réunis de toutes les parties intéreffées k la paix t il furvint un événement qui occafionna un délai inévitable dans les négociations. Environ un mois après 1'ouverture des conférences a Cer^ camp , Marie d'Angleterre mourut après un regne court &c fans gloire 9 *559- ^onféren-* elative k a paix  «559- Mort de Marie, Reine d'Angleterre. Eüfabeth lui fuccede. 17 Novembre. Henri & Philippe tachent de gagner Eli— fabeth. 262 L'HlSTOIRE 6c Elifabeth ia fceur fut proclamée Reine avec une joie univerfelle. Comme les plénipotentiaires voyoient expirer leurs pouvoirs par la mort de Marie, ils ne purent continuer leurs négociations fans avoir une commiffion & des inftructions de leur nouvelle Souveraine. Henri & Philippe virent avec un égal degré d'inquiétude 1'élévation d'Elifabeth au tröne d'Angleterre. Comme pendant I'adminifirationfoupconneufe de Marie , Elifabeth s'étoit conduite , dans la fituation délicate & difficile ou elle fe trouvoit, avec une prudence & une adreffe fort audeffus de fon age , ces deux Princes avoient pris la plus haute idéé de fes talents, & s'attendoient déja a un regne bien différent de celui de fa fceur. Ils fentoient également combien il étoit important de fe la rendre favorable, & ils employerent a 1'envi les moyens les plus propres a fe concilier fa confiance. Chacun d'eux avoit, en fa faveur, une circonftance propre a intéreffer Elifabeth ; Henri lui avoit offert un afyle dans fes Etats, au cas que les violences de Marie la  de Charles-Quint. 263 milTent dans la néceffité de chercher fa füreté hors de 1'Angleterre. Philippe avoit, par fon crédit, empêché Marie de fe porter aux dernieres extrêmités contre fa fceur. Ils tacherent 1'un & 1'autre de faire valoir ces circonftances. Henri écrivit a Elifabeth, & lui rit les proteftations les plus vives d'eftime & d'attachement; il lui repréfenta la guerre qui s'étoit allumée entre les deux Royaumes, non comme une querelle nationale, mais comme 1'effet de 1'aveugle complaifance de Marie pour les defirs de fon mari; il la conjura de fe dégager d'une alliance qui avoit été ü funefte a 1'Angleterre, & k faire avec lui une paix particuliere, fans y meier fes intéréts avec ceux de 1'Efpagne, dont elle devoit abfolument fe féparer. Philippe, d'un autre cöté, craignant de voir finir fa liaifon avec 1'Angleterre, liaifon dont il avoit récemment reconnu toute 1'importance dans fa rupture avec la France, nonfeulement fit a Elifabeth les déclarations les plus pofitives de fon attachement pour elle , & de la réfolution ou il étoit d'entretenir avec elle  '559- Délibéra ïions d'Elifabeth fu la conduit' "qu'elle doi ïenir. i'&4 L' H 1 s t o i r e la plus étroite amitié; afin de cönfïrmer & de perpétuer leur union, il lui ofFrit même de 1'époufer, & s'engagea d'obtenir du Pape des difpenfes pour ce mariage. Elifabeth pefa les propofitions des deux Rois avec Pattention la plus fér rieufe, & avec ce difcernement de fes ! vrais intéréts, qu'on a toujours remarqué dans fes délibérations* Elle recut d'abord affez favorablement 1'ouverture que lui faifoit Henri d'une négociation féparée , paree que c'étoit un moyen d'ouvriravec la France une correfpondance dont elle pouvoit tirer beaucoup d'avantage ,fi Philippe ne montroit pas affez de zele & d'activité pour lui affurer les conditions qu'elle fe propofoit de tirer d'un traité commun. Cependant elle ne fe prêta a la propofition de Henri qu'avec beaucoup de réferve & de circönfpeflion, dans la crainte d'allarmer le caractere foupconneux de Philippe, & de perdre un allié en cherchant a gagner un ennemi (a). Henri lui-même {*) Forbes, t. t, p. 3.  de Charles-Quint. 165 me, par un trait impardonnable d'in- ~ difcrétion , empêcha Elifabeth de pouffer fa correfpondance avec lui auffi-loin qu'il 1'auroit fallu pour offenfer & aliéner Philippe. Dans Ie temps qu'il s'occupoit avec la plus grande affiduité , a gagner 1'amitié d'Elifabeth , il céda avec une imprudente facilité aux follicitations des Princes de Lorraine, Sc permit a fa belle-fille, la Reine d'Ecoffe, de prendre le titre & les armes de Reine d'Angleterre. Cette prétention déplacée, qui a été la fource des malheurs de Marie Stuard , éteignit tout d'un coup la confiance qui commencoit a s'établir entre Henri & Elifabeth , &C fit naitre a Ia place la défiance, le reffentiment & la haine. La Reined'Angleterrejugeadès-lors qu'elle devoit unir étroitement fes intéréts avec ceux de Philippe, & n'attendre la paix que des négociations qu'elle traiteroit conjointementavec lui (a). Comme immédiatement après fon (a) Strype , annales of the reformation t. 1, p. 11. Carte's , hifi, of England, t. } > Tome VI. M 559-  •559- Elle autorife fes Plénipotentiaires k traiter de la paix. l66 L'HlSTOIRE avénement, elle avoit donné des pouvoirs aux mêmes Ambaffadeurs qui avoient été nommés par fa fceur, elle leur enjoignit d'agir en tout de concert avec les Plénipotentiaires d'Efpagne, & de ne faire aucune démarche fans en avoir auparavant conféré avec eux. Mais. quoiqu'elle jugeat qu'il étoit de la prudence d'avoir cet air de confiance dans le Roi d'Efpagne, elle fut jufqu'ou elle devoit aller, & ne témoigna aucune inclination a accepter la propofition extraordinaire de mariage que Philippe lui avoit faite. Les Anglois avoient montré fi ouvertement combien ils déteftoient le choix que Marie avoit fait de ce Prince, qu'il y auroit eu de 1'imprudence a les irriter, en renouvellant une fi odieufe union. Elle connoiffoit d'ailleurs trop bien le caractere dur & impérieux de Philippe , pour fonger a en faire fon époux. Elle ne croyoit pas d'ailleurs qu'une difpenfe du Pape püt 1'autorifer a 1'époufer; elle eüt par-la condamné ellemême le divorce de fon pere avec Catherine d'Arragon, & reconnu que le mariage d'Anne de Boulen, fa met  de Charles-Qüint. 167 re, avec Henri VIII, étoit nul; & parconféquent, que fa naiffance étoit illégitime. Mais quoiqu'elle fut bien cléterminée a ne pas accéder a la propofition de Philippe, la fituation de fes affaires ne lui permettoit pas de la rejetter pofitivement. Elle fit donc une réponfe vague, mais oh il entroit tant d'eftime pour Philippe, que s'il ne pouvoit rien en conclure pour le fuccès de fes defirs , du moins elle ne lui ötoit pas Pefpérance. Cet artifice & la prudence avec laquelle Elifabeth fut pendant quelque temps cacher fes fentiments & fes intentions k 1'égard de la religion, féduifirent tellement Philippe, qu'il époufa avec la plus grande chaleur les intéréts de cette Reine dans les conférences qui fe renouvellerent a Cercamp, & fe continuerent enfuite a CÉteau - Cambrefis. Pour conclure un traité définitif qui devoit concilier les droits & les prétentions de tant de Princes, il y avoit tant de points obfcurs & embrouillés k éclaircir, tant de détails minucieux a difcuter , que la négociation paroiffoit devoir trainer en longueurj mais M i; •552' Négocïations a Cateau-Cambrefis. 6 Févrïer  •559' Difficultés relatives aux ptétentions de 1'Angleterre. 268 L'HlSTOIRE le Connétable de Montmorency, paffant alternativement aux Cours de Paris & de Bruxelles pour prévenir ou écarter toutes les difficultés, mit tant d'acïivité & d'adreffe dans fes démarches, que tous les objets de conteflation furent enfin conciliés d'une maniere très-fatisfaifante pour Henri & pour Philippe; & tout fut difpofé pour mettre la derniere main au traité qu'ils devoient conclure entr'eux. Le feul obftacle qui en retardat 1'exécution, venoit des prétentions de 1'Angleterre : Elifabeth demandoit du ton le plus abfolu, la reftitution de Calais comme une condition effentielle de fon confentement a la paix ; Henri refufoit de céder cette importante conquête ; & 1'un & 1'autre paroiffoient avoir pris, a cet égard, une réfolution que rien ne pouvoit changer. Philippe appuyoit vivement la demande d'Elifabeth; mais ce n'étoit point par un motif d'équité a 1'égard des Anglois, & pour contribuer k leur faire recouvrer ce qu'ils avoient perdu en époufant fa caufe; ce n'étoit pas non plus dans la feule vue de plaire a Elifabeth par ce  de Charles-Quint. 169 témoignage de zele pour fes intéréts : le but de ce Prince étoit de rendre la France moins formidable, en reftituant a fes anciens ennemis une place qui leur donnoit un accès facile dans le cceur du Royaume. Cependant 1'ardeur avec laquelle il appuyoit les inftances des Plénipotentiaires Anglois, commenca a fe rallentir. Elifabeth, fe fentant bien affermie fur fon tröne , avoit commencé, dans le cours de Ia négociation, a prendre ouvertement desmefures vigoureufes,nonfeulement pour détruire ce que fa fceur avoit fait en faveur du Papifme, mais même pour établir fur de folides fondements la religion Proteflante; Philippe fut dès-lors convaincu que fon projet d'époufer Elifabeth avoittoujours été chimérique, & qu'il ne devoit plus y penfer. Dés ce moment , fes inflances en faveur de cette Princeffe furent plns froides & plus vagues , & il ne les continua que par décence & par des confidérations politiques trés - éloignées. Elifabeth devoit s'attendre k ce changement de conduite, & le remarqua bientöt; mais comme rien n'étoit plus conM iij  (a) Forbes, /. i, p. 59. Ï7O L'HlSTOIRE traire aux interets de fon peuple 6c plus incompatible avec fes plans d'adminifèration intérieure, que la durée d'une guerre avec la France, elle fentit la néceffité de fe foumettre aux conditions que lui impofoit la fituation de fes affaires, & de fe préparer a fe voir abandonnée d'un allié qui ne tenoit plus a elle que par un foible lien , a moins qu'elle ne réduifït promptement fes prétentions a des demandes modérées & raifonnables. Elle donna en conféquence de nouvelles inftrucfions a fes Ambaffadeurs; & les Plénipotentiaires de Philippe agiffant comme médiateurs entre ceux de Ia France &c de 1'Angleterre (a) , on trouva un expédient qui fembloit autorifer Elifabeth a fe relacher de la hauteur de fes premières propofitions a 1'égard de Calais. Tous les articles moins importants furent arrangés fans difficulté & fans délai. Philippe , craignant de paroïtre avoir abandonné les Anglois, vou-  DE CHARLES-QUI NT. 171 lut que le traité de paix entre Henri & Elifabeth, fut conclu dans les formes, avant celui qu'il négocioit avec le même Monarque. Le premier fut ligné le deux d'Avril, & 1'autre le lendemain. Le traité entre la France & 1'Angleterre ne contenoit aucun article important que celui qui concernoit Calais. II fut ftipulé que Henri refteroit en polfeffion de cette place avec toutes fes dépendances pendant huit ans; &c qu'a 1'expiration de ce terme, il la rendroit a 1'Angleterre ; qu'en cas de refus de la rendre, il payeroitcinq cents mille couronnes, pour le payement defquelles, fept ou huit riches négociants qui ne feroient pas fes fujets, donneroientdes füretés fuffifantes; que cinq Francois de diftindtion feroient livrés comme ötages, jufqu'a ce que ces füretés fuffent fournies; que lors même que les cinq cents mille couronnes auroient été payées, le droit des Anglois fur Calais reiferoit toujours entier; que le Roi & la Reine d'Ecolfe feroient compris dans le traité; que li Henri ou fes alliés violoient la paix par M iy Artlcles du traité entre la France & TAngleterre.  Vues des deux partis dans ce traité. 272 L'HlSTOIRE quelqu'acte d'hofïilité , celui-ci feroit obligé de rendre a Pinifant Calais; Sc que d'un autre cöté , fi les infractions a la paix venoient d'Elifabeth, Henri, ainfi que le Roi & la Reine d'Ecoffe, feroient difpenfés de tous les engagements qu'ils contraöoient par le traité. Malgré Pattention recherchée qui femble avoir dicïé toutes ces précautions, il eft évident que Henri n'étoit pas dans Pintention de rendre Calais, Sc il n'efl pas probable qu'Elifabeth s'attendït a cette reftitution; il étoit bien difficile que, pendant le cours de huit ans, cette Reine vécüt dans une union affez parfaite avec la France Sc 1'Ecoffe, pour ne pas donner a Henri quelque prétexte d'alléguer qu'elle avoit yiolé le traité ; Sc en fuppofant même que cet efpace de temps s'écoulat fans qu'il y eüt de part ni d'autre aucun fujet de plainte, Henri avoit le choix de payer la fomme flipulée, Sc Elifabeth n'avoit d'autre moyen pour foutenir fon droit que la force des armes. Cependant en rédigeant dans cette forme les articles du traité qui  BE CH ARLES-QüINT. 273 ^ regardoient Calais, Elifabeth contentoit tous fes fujets; elle donnoit aux politiques éclairés une preuve de fon adreffe , en colorant ce qu'elle ne pouvoit empêcher; elle amufoit la multitude , par 1'efpérance de recouvrer bientöt cette place dont 1'abandon total auroit pu paroitre une honteufe lacheté. L'expédient que Montmorency mit en ceuvre pour faciliter Ia conclufion de la paix entre la France & 1'Efpagne, fut de négocier deux traités de mariage; Pun entre Elifabeth, fille aïnée de Henri, & Philippe, qui fupplanta 1'infortunéDom Carlos fon fils, a qui cette Princeffe avoit été promife dans les premières conférences de Cercamp ; 1'autre, entre Marguerite, fceur de Henri, avec le Duc de Savoye. Quelque foibles que foient les liens du fang parmi les Princes , & quelque peu d egard qu'ils puiffent y avoir lorfqu'ils font animés par des vues d'ambition , ils veulent cependant quelquefois paroitre déterminés par ces affections domefliques, & ils les alleguent pour juftirier des démarches qu'ils jugent néceffaires, mais M v '559'  *559- Art/des du traité de paix. 2.74 L'HlSTOIRE qu'ils reconnoiffent être contraires a la politique ou a 1'honneur. Tel fut 1'ufage que fit Henri des deux propofitions de mariage auxquelles il donna fon confentement. II affura un établiffement honorable pour fa fceur & fa fïlle; & en confidération de cet arrangement, il foufcrivit, en faveur de Philippe & du Duc de Savoye, k des conditions, que , fans ce prétexte, il n'eüt jamais ofé approuver. Les principaux articles du traité entre la France & 1'Efpagne furent, qu'il y auroit une amitié fincere & perpétuelle entre les deux Couronnes & leurs alliés refpectifs; que les deux Monarques travailleroient de concert a procurer la convocation d'un concile général , pour arrêter les progrès de 1'héréfie, & rétablir 1'unité & la concorde dans 1'Eglife Chrétienne ; que toutes les conquêtes faites en-deca des Alpes, par 1'un ou 1'autre parti, depuis le commencement de la guerre en 15 51, feroient réciproquement abandonnécs ; que le Duché de Savoye, la Principauté de Piémont, le pays de Breffe, & tous  de Charles-Quint. 275 les autres territoires précédemment foumis aux Ducs de Savoie , feroient rendus a Emmanuel-Philibert, immédiatement après la célébration de fon mariage avec Marguerite de France; k 1'exception cependant des villes de Turin, Quiers, Pignerol, Chivas Sc Villanova, dont Henri reif eroit en poffeffion jufqu'a ce que fes prétentions fur ces places, du chef de fa grand'mere, eulfentété jugées & décidées en juitice réglée; que tant que Henri retiendroit ces places , Philippe auroit la liberté de mettre des garnifons dans les villes de Verceil &C d'Aili; que le Roi de France évacueroit fur le champ toutes les places qu'il occupoit en Tofcane & dans le pays de Sienne, & renonceroit a toutes prétentions futures fur ces places ; qu'il rendroit le Marquifat de Montferrat au Duc de Mantoue ; qu'il pardonneroit aux Génois, & leur céderoit les villes qu'il avoit conquifes dans rille de Corfe ; que les Princes &c Etats auxquels ces ceffions feroient faites , ne demanderoient aucun compte a leurs fujets de la conduite qu'ils ont tenue fous la domiM vj  -Ï5Q. La tranquillité rétablie en Europe. (a) Recueil des traités ,1. i , p, 227. 276 L'Histoire nation d'une Puiffance étrangere, & que tout ce qui s'étoit paffé feroit enfeveli dans 1'oubli. Le Pape, 1'Empereur, les Rois de Danemarck, de Suede , de Pologne, de Portugal, le Roi & la Reine d'Ecoffe , & prefque tous les Princes & Etats de la Chrétienté, furent compris dans ce traité de paix, comme alliés ou de Henri ou de Philippe (a). On vit ainfi la tranquillité renaïtre dans 1'Empire. Toutes les caufes de difcorde qui avoient fi long-temps divifé les Monarques puiffants de France &c d'Efpagne , & tranfmis des querelles héréditaires de Charles a Philippe, & de Francois a Henri , parurent entiérement anéanties. Les Francois feuls fe plaignirent des conditions inégales d'un traité qu'avoit accepté leur Souverain trop facile, féduit par un Minifire ambitieux qui vouloit recouvrer fa liberté, & par une maïtreffe artificieufe qui cherchoit a fatisfaire fon reffentiment. Ils fe récrierent hautement contre la fo-  de Charles-Qüint. 177 lie de céder aux ennemis de la France cent quatre-vingt-neuf villes fortifiées tant dans les Pays-Bas qu'en Italië, en échange des trois petites villes de Saint-Quentin, de Ham & du Catelet. Ils regardoient comme une tache ineffacable a la gloire de la nation, de renoncer a de valïes territoires, fi aifés a défendre , que Ï'ennemi, même après plufieurs années de vicfoires, n'auroit ofé efpérer de les arracher de leurs mains. Mais Henri, fans être touché des fentiments de fon peuple, ni ébranlé par les repréfentations de fon confeil, ratifia le traité, &c remplitavec la plus grande fidélité tous les engagements qu'il avoit pris. Le Duc de Savoye fe rendit a Paris avec un cortege nombreux, pour y célébrer fon mariage avec la fceur de Henri. Le Duc d'Albe fut envoyé è la même Cour, a la tête d'une fuperbe ambaffade, pour époufer Elifabeth au nom de fon maitre. Ils furent recus 1'tin & 1'autre avec la plus grande magnificence; au milieu des réjouiffances & des fêtes qui fe donnerent a cette occafion, Henri perdit la vie *55> Ratification de ls paix entre ia France & 1'Efpagne.  *5ï9Mort de Henri. 10 Juillei *55918 Aoüt. Revue générale du regne de 178 L'Histoire par un accident extraordinaire & affez connu. Francois II, fon fils, Prince encore enfant, d'une conftitution foible, d'un efprit plus foible encore, monta fur le tröne. Bientöt après , Paul termina fon regne impérieux &z violent, en guerre avec tout le monde & mécontent de fes propres neveux. Ceux-ci, perfécutés par Philippe , Sc abandonnés du fucceffeur de Paul, qu'ils avoient eux-mêmes élevé par leur crédit fur le tröne Papal, furent condamnés au fupplice que leur ambition & leurs forfaits avoient mérité ; & leur mort fut auffi infame que leur vie avoit été criminelle. On vit ainfi difparoitre prefqu'en même-temps tous les perfonnages qui avoient joué les röles principaux fur le grand théatre de PEurope. Un nouveau période d'hiftoire s'ouvre a cette époque; d'autres acteurs paroiffent fur la fcene,animés par d'autres vues & d'autres paffions. De nouvelles querelles s'élevent entre les Princes, & de nouveaux plans d'ambitionvont occuper & troubler le monde. En réfléchiffant fur les époques de Phiftoire, les plus fécondes en révo-  DE CHARLES-Q V IN T. 1JC, ïutions, on voit qu'il y a une grande difproportion entre les changements qui fe font opérés & les efforts qui ont été faits. Les conquêtes ne font jamais étendues ni rapides, que parmi des nations dont les progrès dans 1'art du gouvernement font très-inégaux. Lorfqu'Alexandre le Grand , a la tête d'un peuple brave, de mceurs iïmples, formé a la guerre par des inftitutions admirables , fubjugua un Etat énervé par les excès du luxe & de la molleffe ; lorfque Gengiskan &c Tamerlan, conduifant des armées de barbares robuiïes, fondirent fur des nations affoiblies par le climat , Ie commerce & les arts, femblables a des torrents rapides, ces conquérants détruifirent tout devant eux y fubjuguant les Royaumes & les Provinces dans 1'efpace de temps qu'il falloit pour les traverfer. Mais les peuples, qui font a-peu-près également civilifés & inftruits, ne font pas expofés aux calamités d'une conquête foudaine. Leurs connoiffances, leurs progrès dans 1'art de la guerre , leur habileté en politique, font prefque au même degré. Alors le defün des Etats CharlesQuint,  '559- 1S0 L'HlSTOIRE - ne dépend pas d'une feule bataille. Ils ont dans leur confiitution intérieure des reffources nombreufes. Un Etat même n'eft pas feul intéreffé k fa défenfe Sc k fa confervation. D'autres Puiffances interviennent dans fes querelles, Sc balancent, par leurs fecours , les avantages momentanés qu'un des deux partis peut avoir obtenus. Après des guerres longues Sc meurtrieres, toutes les nations rivales fe trouvent épuifées ; aucune n'eft vaincue. Enfin, on eft forcé de conclure une paix qui laiffe k chacune a-peu-près la même puiffance Sc le même territoire. Tel fut 1'état de 1'Europe pendant le regne de Charles-Quint. Aucun Prince n'avoit fur les autres affez de fupériorité de forces, pour ne trouver aucune réfiftance a fes efforts > aucun obflacle a fes conquêtes. Aucune nation ne furpaffoit les autres dans la fcience du gouvernement , au point d'avoir acquis fur elles une prééminence marquée. Chaque Etat avoit, par fa fituation & fon climat, des avantages Sc des inconvénients; & ils étoient tous diftingués par quel-  DE Ch arles-Quint. i8i qué caractere particulier, foit par 1'efprit du peuple, foit par la forme de la confiitution. Mais les avantages que 1'un poffédoit, étoient balancés par des circonftances favorables a d'autres ; & de cette combinaifon, il réfultoit qu'aucun n'avoit une fupériorité qui püt devenir funefle a tous. Dans ce fiecle, ainfi qu'aujourd'hui, les nations de l'Europe étoient comme une grande familie; elles avoient des traits , communs a toutes, qui formoient une reffemblance , Sc il y avoit dans chacune des différences fenfibles qui les diftinguoient; mais on ne voyoit pas entr'elles cette grande diverfité de caractere & de génie, qui, dans prefque tous les périodes de 1'hiftoire , a mis les Européens au-deffus de tous les autres habitants du globe, Sc femble avoir deftiné les uns a commander , les autres a obéir. Mais quoique cette reffemblance, cette égalité prefqu'entiere dans 1'état des différentes nations de l'Europe, eüt empêché le regne de Charles-Quint d'être diftingué par des conquêtes auffi étendues Sc auffi rapides M59' Changement remarquabledans 1'état de l'Europe fous le regne de CharlesQuint.  IS s> 282 L'HlSTOIRE qu'on en trouve des exemples dans d'autres époques de 1'hifioire, cependant tous les grands Royaumes de cette partie du monde ont fubi, pendant le cours de fon adminiflration , un changement trés remarquable dans leur état politique , & ont été foumis a 1'influence de certains événements qui n'ont pas même aujourd'hui perdu toute leur atfivité , & qui continuent d'exercer encore leur action avec plus ou moins de force. Ce fut pendant le regne de Charles , Sc par une fuite des continuels efforts que fon ambition audacieufe fit faire aux différents Royaumes de 1'Europe, qu'ils acquirent plus de vigueur dans leur conftitution intérieure , qu'ils apprirent a connoitre leurs reffources, a fentir leur force, & a fe rendre formidables aux autres. Ce fut auffi pendant ce regne que les divers Etats de 1'Europe , auparavant ifolés Sc défunis, s'unirent fi intimement les uns aux autres, qu'ils ne formerent plus qu'un grand fyftême politique, Sc chacun d'eux y prit un rang , oü il s'eft maintenu depuis avec une confiance a laquelle ou n'auroit pas dü  de Charles-Quint. 283 s'attendre , après les événements multipliés de deux fiecles très-agités. Cependant les progrès 6e les acquifitions que fit la Maifon d'Autriche furent plus confidérables, &c en même-temps plus fenfibles & plus frappants que ceux des autres Puiffances. J'ai fait ailleurs 1'énumération des vaftes domaines dont CharlesQuint hérita de fes ancêtres, tant Autrichiens que Bourguignons & Efpagnols ; il y ajouta lui-même la Couronne Impériale; & comme fi c'eüt été encore trop peu, les hornes de 1'univers furent reculées, & un nouveau monde fut foumis a fon autorité. Par fon abdication, les Provinces de la Bourgogne & les Royaumes d'Efpagne, avec toutes leurs dépendances dans le nouveau & dans 1'ancien monde, pafferent a Philippe ; mais Charles tranfmit ces Etats a fon fils, dans une condition bien différente de celle oü il les avoit recus; ils étoient augmentés par 1'acquifition de nouvelles Provinces; ils avoient pris 1'habitude d'obéir a une adminifiration ferme & vigoureufe; ils étoient accoutumés a des efforts auffi -559- Progrès de la maifon d'Autriche.  -559- Particuliérement en Efpagne. 1%4 L'HïSTOIRE difpendieux que continus, peu connus en Europe avant le feizieme fiecle, quoiqu'ils fuffent néceffaires pour foutenir la guerre entre des nations civilifées. Les Provinces de Frife, d'Utrecht & d'Overyffel, qu'il avoit achetées de leurs anciens propriétaires, & le Duché de Gueldres dont il s'étoit rendu maitre, en partie par la force des armes, en partie par les artifices de la négociation, formoient des accroiffements trés-importants aux domaines de la Maifon de Bourgogne. Ferdinand & Ifabelle lui avoient lailfé toutes les Provinces d'Efpagne, depuis le fond des Pyrénées jufqu'aux frontieres de Portugal; mais comme il refta confiammenf en paix avec ce Royaume, il ne fit aucune acquifition de ce cöté. Charles n'avoit cependant pas laiffé d'étendre fa puiffance dans cette partie de fes Etats. Par le fuccès de la guerre qu'il eut a foutenir avec les communes de Caftille , il éleva fa prérogative royale fur les ruines des privileges du peuple. II laiffa fubfifter le nom de Cortès & la formalité de leurs affemblées; mais il anéantit  de Charles-Quint. 185 prefqu'entiérement leur autorité & leur jurifcliction, & il leur donna une nouvelle forme qui en rit un confeil de ferviteurs de la Couronne, plutot qu'une affemblée des repréfentants du peuple. Un des membres de la conftitution ayant été ainfi mutilé , il étoit impolïible que 1'autre ne fut pas affeclé du même coup, & n'y perdit quelque chofe. L'anéantiffement du pouvoir populaire rendit la force arifiocratique moins formidable. Les Grands, entrainés par 1'efprit guerrier de leur fiecle, ou féduits par les honneurs qu'ils obtinrent a la Cour, épuiferent leur fortune dans le fervice militaire, ou en s'attachant a la perfonne du Souverain. Ils ne redouterent point, peut-être même n'obferverent-ils pas les progrès dangereux de 1'autorité royale , qui, en leur laiffant la vaine diflinftion de fe couvrir en préfence de leur maitre, les dépouilloit par degrés de la puiffance réelle dont ils jouiffoient lorfqu'ils formoient un corps & agiffoient de concert avec Ie peuple. Le fuccès avec lequel Charles étoit parvenu k abolir les privileges des communes -559-  '559- Et dansles autres Provinces de 1'Europe. 286 L'HlSTOIRE & k réprimer le pouvoir des Nobles de Caftille , encouragea Philippe è attaquer les droits plus étendus encore du Royaume d'Arragon. Les Caftillans, déja accoutumés k la foumiilion, preferent leur fecours pour impofer le même joug a leurs voifms plus heureux & plus indépendants. La volonté du Souverain devint la loi fuprême dans tous les Royaumes d'Efpagne ; alors des Princes qui n'étoient plus arrêtés dans la combinaifon de leurs plans par la jaloufie du peuple, ni contrariés dans 1'exécution par le pouvoir des Nobles , furent en état de tendre k de grands objets, & de réunir toutes les forces de 1'Etat pour atteindre a leur but. En même-temps que Charles, par 1'extenfion de Ia prérogative royale , travailloit a rendre les Rois d'Efpagne maïtres dans 1'intérieur, il augmentoit la dignité & la puiffance de fa Couronne par fes acquifitions audehors. II affuroit k 1'Efpagne la paifible poffefiion du Royaume de Naples , que Ferdinand avoit ufurpé par artifice , & qu'il confervoit avec pei-  de Charles-Quint. 28; ne. 11 réunit a la Couronne d'Efpagne le Duché de Milan , une des Provinces les plus fertiles & les plus peuplees de 1'Italie; & il laiiTa fes fucceffeurs , indépendamment de leur; autres dorhaines , les Princes les plus puiffants de cette contrée, qui avoil été fi long-temps le théatre oü le« grandes Puiflances de 1'Europe fe difputoient a 1'envi la fupériorité. Lorf que les Francois, par une fuite du traité de Cateau-Cambrefis , eurent retiré leurs troupes de 1'Italie , & totalement renoncé a leurs plans de conquête au-dela des Alpes, les Efpagnols y devinrent plus puiffants, & leurs Souverains furent en état, tant que la monarchie conferva quelque degré de vigueur, d'avoir la principale influence fur tous les événements qui fe paflërent dans cette partie de 1'Europe. Mais tous ces accroiffements d'autorité au-dedans & de domaines au-dehors, dont les Rois d'Efpagne ont été redevables a CharlesQuint , font peu confidérables en comparaifon de fes acquifitions dans le nouveau monde. Ce ne furent pas des Provinces, mais des Empires qu'il r • -559-  "559- Progrès de la branche Allemande de la Maifon d'Autriche. 288 L'HlSTOIRE réunit a fa Couronne. Les immenfes territoires qu'il y conquit, les fources inépuifables de richeffes qu'il y découvrit, & les perfpectives fans hornes qu'offroit dans tous les genres cette grande découverte , ne pouvoient manquer d'exciter 1'activité de fon fucceffeur, eut-il été moins ambitieux que Philippe , & de le rendre non-feulement entreprenant, mais encore formidable. Tandis que la branche ainée de la Maifon d'Autriche s'éievoit a ce degré de fupériorité en- Efpagne , la branche cadette, dont Ferdinand étoit le chef, devenoit auffi trés-puiffante en Allemagne. Les domaines héréditaires que cette Maifon poffédoit depuis long-temps en Allemagne , réunis aux Royaumes de Hongrie & de Bohème que Ferdinand avoit acquis par fon mariage , formoient une puiffance refpeclable ; & ce Prince y ayant ajouté la Couronne Impériale , fe trouva maïtre d'Etats plus étendus qu'aucun des Empereurs précédents , a 1'exception de Charles-Quint, n'en avoit poffédé depuis plufieurs fiecles. Heureufement pour 1'Europe, le mécontentement  de Charles-Quint. 189 Contentement de Philippe a 1'occafion du refus que fit fon oncle de lui céder la Couronne Impériale, empêcha pendant quelque temps les Princes de la Maifon d'Autriche d'agir de concert, &c produifit même entr'eux une jaloufie &c une animofité fenfible. Cependant 1'intérêt mutuel de ces Princes éteignit par degrés une rivalité fi peu politique ; la confiance fe rétabüt entr'eux , & 1'agrandiffement de leur Maifon devint 1'objet commun de toutes leurs démarches; ils donnerent & recurent alternativement les fecours dont ils avoient befoin pour 1'exécution de leurs plans, & les fuccès de chacun ajouterent k la confidération & k 1'importance de tous. Une familie fi puiffante & fi ambitieufe devint un objet général de jaloufie & de crainte; pendant tout un fiecle , toutes les forces, ainfi que la politique de 1'Europe , eurent pour hut de 1'abaiffer &c de la traverfer. Rien n'eft plus propre k don* ner une idéé frappante de 1'afcendant que la Maifon d'Autriche avoit pris en Europe, & de la terreur qu'elle infpiroit, que de confidérer combien Tomt VI. N  'Acquifitions des Rois de France pendant le re gne de CharlesQuint. 290 L'HlSTOIRE elle étoit encore formidable, lors même qu'après avoir épuifé les forces par des efforts extraordinaires & excelïifs , 1'Efpagne ne fut plus que 1'ombre d'un grand nom , & que fes Rois furent tombés dans un état de foibleffe & d'imbécillité. Les nations Européennes avoient li fouvent éprouvé Ia fupériorité de fes forces, & avoient été fi conftamment occupées a fe tenir en garde contre elle, que la crainte de cette Puiffance étoit devenue une efpece de fentiment habituel, dont Pinfluence fe confervoit encore , quand les caufes qui 1'avoient fait naitre ne fubfiftoient plus. Tandis que la Maifon d'Autriche s'occupoit avec tant de fuccès a étendre fes. domaines, la France faifoit peu d'acquilitions de territoire ; tous fes projets de conquêtes en Italië avoient échoué ; elle n'avoit encore formé aucun établiffement confidérable dans le nouveau monde ; & après' les efforts vigoureux & continus de quatre regnes fuccelïifs , les limites du Royaume étoient a-peuprès telles que Louis XI les avoit laiffées. Mais fi les progrès de la Fran-  de Charles-Quint. 291 ce, dans 1'augmentation de fon territoire , n'étoient pas auffi rapides que ceux de la Maifon d'Autriche , ils étoient peut-être plus fürs, paree qu'ils étoient moins brufques & moins fenfibles. La conquête de Calais öta aux Anglois le pouvoir de faire des invalions en France fans s'expofer au plus grand danger, & ' délivra les Fancois de la crainte d'un ancien ennemi, qui jufqu'alors pouvoit pénétrer en tout temps dans le Royaume, & retarder ou faire échouer 1'exécution de leurs entreprifes même les mieux concertées contre d'autres Puiffances. L'importante acquifition de Metz couvroit cette partie de leur frontiere , qui auparavant étoit trèsfoible & la plus expofée a une infulte. Ainfi la France , dés le moment oü elle obtint ces nouvelles füretés contre les attaques du dehors,' a dü être regardé comme le plus puiffant Royaume de 1'Europe. C'efè en effet de tous les Etats du Continent le plus heureufement fitué, foit pour faire des conquêtes , foit pour fe défendre. Des extrêmités de 1'Artois jufqu'au fond des Pyrénées, & du N ij  ±92 L'HlSTOIRE canal Britannique jufqu'aux frontieres de la Savoie &c aux cötes de la Médiierranée, fes domaines font contigus , & ne fe pénetrent avec ceux d'aucune autre Puiffance, Plufieurs des Provinces les plus cönfidérables , lefquelles étoient foumifes ade grands Vaffaux de la Couronne fonvent en guerre avec leur Suzerain , étoient alors accoutumées a reconnoitre 1'autorité du Roi & a lui obéir; & en devenant membres de Ia même monarchie , les habitants de ces Provinces avoient pris les fentiments de la nation a laquelle ils s'étoient incorporés, & concouroient avec zele a tout ce qui pouvoit intéreffer fon honneur & fon avantage. Le pouvoir , le crédit dont on dépouilla les Nobles , paffa tout entier a la Couronne. Le peuple ne fut pas admis a partager leurs dépouilles; il n'obtint aucun privilege nouveau-; il n'acquit pas une portion plus étendue dans la iégiflation. Les Rois de France , en travaillant a abaiffer leurs grands Vaffaux, n'avoient pas coniulté 1'intérêt du peuple ; ils n'avoient fongé qu'a étendre leur pré»  r>e Charles-Quint. 293 rogative ; contents de les avoir entiérement foumis a 1'autorité de la Couronne , ils s'embarraffoient peu de délivrer les communes de 1'ancienne dépendance ou les tendenties Nobles de qui elles relevoient. Un Monarque , k la tête d'un peuples ainfi uni au-dedans &c a 1'abri des entreprifes du dehors , avoit le droit de former de grandes entreprifes, Sc le pouvoir de les exécuter. Les guerres étrangeres, qui avoient duré pref* que fans interruption depuis 1'avénement de Charles VIII au tröne, avoient non-feulement entretenu Sc fortifïé 1'efprit belliqueux de la nation , en. accoutumant les troupes aux fatigues du fervice militaire, & en les formant en même-temps k 1'obéiffance ; elles avoient encore ajouté a leur ardeur naturelle , la vigueur de la difcipline. Une NoblelTe brave Sc aöive, qui fe regardoit comme oifivs Sc inutile lorfqu'elle n'étoit pas en campagne, qui ne connoiffoit guere d'autres amufements que les exercices & les jeux militaires , qui ne voyoit d'autres route a la puiffance , a la renomraée ou a 1'opulence, que la guerN iij  l559- 194 L'HlSTOIRE ■ re, ne pouvoit pas fouffrir que fon Souverain reftat long - temps dans 1'inacfion. Le peuple , étranger aux arts de la paix , étoit toujours prêt a prendre les armes au commandement de fes fupérieurs; les dépenfes des guerres longues foutenues dans des pays éloignés , 1'avoient accoutumé a iüpporter des impofitions qui pcuvent paroitre légeres , en les comparant au poids énorme des taxes modernes, mais qui paroïtront exorbitantes, fi on les compare a celles qui étoient levées en France , ou dans tout autre Etat de 1'Europe , avant le regne de Louis XI. Ainfi tous les membres dont le Royaume étoit compofé, étant également impatients d'exercer leur adfivité , Sc en état de faire de grands efforts, les entreprifes & les opérations de la France ne durent pas être moins formidables en Europe que celles de 1'Efpagne. Les avantages fupérieurs de fa fituation , Ia contiguité Sc la maffe de fon territoire , Sc 1'état particulier de fa conftitution politique, concouroient a rendre fes entreprifes encore plus allarmantes Sc plus décifives. Le Roi  de Charles-Quint. 195 exercoit une autorité abfolue fur fes fujets; le peuple ne connoiffoit ni les occupations ni les habitudes qui donnent de 1'éloignement oude 1'inaptitude pour la guerre; les Nobles, quoique foumis au degré de fubordination taéceffaire dans un gouvernement régulier, confervoient encore la fierté & le courage, effet de leur ancienne indépendance. La vigueur des temps de la féodalité fubfiftöit encore, mais fans Panarchie qui en étoit la fuite; & les Rois de France pouvoientemployer avec avantage 1'ardeur belliqueufe que cette ancienne & finguliere infiitution avoit allumée ou entretenoit encore, fans être expofés a aucun des dangers ou des inconvénients, inféparables de ce fyfiême politique lorfqu'il étoit dans toute fa force. Un Royaume, dans 1'état qu'on vient de décrire, eft peut-être capable de plus grands efforts militaires que dans un période même oü il auroit fait plus de progrès ; mais quelque redoutable , quelque funefte même aux autres nations que püt être une femblable Puiffance , les guerres N iv IS59- Circonftahces qui ar- rêtent les efifets immédiats du pouvoir de la France.  3 553- k 296 L'Histoire civiles qui s'éleverent alors dans cette monarchie, préferverent 1'Europe des mites qu'elle en auroit pu craindre. Pendant la moitié d'un fiecle, la France fut occupée & troublée par ces querelles inteftines, dont la religion fut le prétexte, & Fambition la caufe, ou les chefs des différentes faflions déployerent a 1'envi de grands talents , niais oü le gouvernement, fous une fuite de regnes foibles, ne montra ni vigueur ni habileté. Ces troubles épuiferent Ia force intérieure du Royaume ; 1'efprit d'anarchie fe répandit a tel point parmi les Nobles, a qui Ia rébellion étoit familiere, &c la contrainte des loix étrangere, qu'il fallut enfuite un long intervalle, nonfeulement pour rétablir la vigueur de la nation , mais encore pour raffermir 1'autorité du Prince ; de forte qu'il s'écoula encore bien du temps avant que la France püt'tourner toute fon attention vers les affaires du debors, & foutenir une guerre étrangere avec toutes fes reffources. Elle étoit encore bien loin de reprendre en Europe cet afcendant qu'elle a obtenu depuis 1'adminifiration du  be Charles-Quint. 197 Cardinal de Richelieu , & que la fituation ainfi que 1'étendue de fes domaines, la nature de fon gouvernement , Sc le caractere de fon peuple, la mettent en état de conferver. Tandis que les Etats du Continent étendoient leur pouvoir Sc leur infhience, 1'Angleterre de fon cöté traVailloit avec le même fuccès a augmenter fa force intérieure, Sc a perfectionner fon gouvernement. Henri VIII, peut-être fans en avoir Tinten» tion, mais certainement fous un plan fixe Sc fuivi, pourfuivit le projet d'abaiffer laNobleffe, que la politique de fon pere Henri VII avoit commencé. L'orgueil & le caprice, qui dominoient dans fon caradere , lui firent employer de préférence dans 1'adminiilration des affaires politiques, des hommes nouveaux, paree qu'il les trouvoit plus fouples ou moins fcrupuleux ; il leur confia 1'autorité la plus étendue , Sc les éleva même aux places les plus difïinguées par la dignité ; ce qui ne pouvoit manquer d'avilir Sc de bleffer 1'anciènne Noblefle. En aliénant ou en faifant venN. v. •559- Vtopks Ja 1'Angleterre relativement a fa fituation intérieurs  MS9f 2,98 L'HlSTOIRÈ dre les biens eccléfiaftiques, dont le produit fut dilfipé avec une profufion égale a la rapacité qui les avoit envahis, & en accordant aux anciens propriétaires de terres le privilege de vendre leurs biens , & d'en dilpofer par teflament, il mit en circulation un fonds de richeffes immenfes, auparavant fans adtivité ; par ce moyen, il excita 1'efprit d'induftrie & de com> merce , & lui donna du mouvement & de 1'énergie. La route du crédit & de 1'opulence , fe trouva ouverte aux perionnes de tous les états. L'accroiflement iubit & exceffif de la malfe d'argent, qu'occafionna en Efpagne la découverte de 1'Amérique, fut funefte a l'induftrie de ce Royaume ; au-lieu que 1'augmentation modérée de la maffe des richeffes qui eirculoient en Angleterre, y donna la vie au commerce , éveilla rinduftrie de la nation, & 1'encouragea k des entreprifes utiles. En France , la Couronne gagna ce que perdit la Nobleffe; en Angleterre, les communes partagerent avec le Roi la dépouille des Nobles ; en acquérant des propriété.s, elles acquirent en même-  be Charles-Quint. 299 temps du pouvoir & de la confidé- " ration ; elles commencerent a fentir leur propre importance; elles étendirent par degrés leur influence dans le corps légiflatif; 6c fans qu'on prévit ni qu'elles prévilTent peut-être elles-mêmes 1'effet de leurs prétentions, elles obtinrent a la fin cette autorité puiffante , a laquelle la conftitution Britannique eft redevable de fon exiftence, 6c devra Ia confervation de fa liberté. En même-temps que le gouvernement Anglois avancoit vers fa perfeclion , plufieurs circonftances concouroient a changer Pancien fyftême politique, relativementaux Puiffances étrangeres, & a en introduire un autre plus avantageux a PEtat. En rejettant la fuprémaiie 6c la jurifdiction du fiege de Rome, la nationépargna des fommes confidérables , qu'on faifoit paffer tous les ans k Rome, foit pour des difpenfes 8c des indulgences , foit pour fubvenir aux fraix des pélerinages dans les pays étrangers ("a), foit pour payer les anna- («) La pette évidente que ces différen- N vj -559'  tes dépenfes occaflonnoiént a la- natïon; doit avoir été très-confidérable. Les pélerrhages feuh étóienr un objet de conféquence. Eh 141.8, il y eut neuf cents feize perforines qui demanrlerent des permiffions pour aller vifiter lEglife de Saint-Jacques de Cornpoftelle en Elpagne. Rymer >vol. X. Eij 1434, le nombre des pélerins pour le rrilme lieu inonta a deux mille quatre cents ibixante : en 1445 , i! ft* & deux mille cent. Rymcr, vol, XL JOO L'HlSTOïRE tes, les premiers fruits , & mille autres taxes que cette Cour avide & artificieufe levoit fur la crédulité des peuples. L'idée d'une jurifdittion différente de la puilfance civile, & qui prétendoit non-feulement en être indépendante , mais y être même fupérieure, étoit urte étrange abfurdité en matiere de gouvernement, propre a donner de 1'inquiétude aux efprits foibles, & tendantdirectement a troubler la fociété ; cette abfurdité fut entiérement abolie. Le gouvernement devint plus fimple a la fois & plus refpedlable , lorfqu'il n'y eut plus de rang, ni d'état , qui püt exempter quelques citoyens d'être cités aux mêmes tribunaux , & jugés  t>E CH ARIES-QüïNT. }0ï par les mêmes loix que tous les autres citoyens. Les Anglois en perdant Calais, furent exclus du Continent. Tous les projets d'invafion en France , devinrent alors auffi chimériques qu'ils avoient été auparavant nuifibles. Les vues des Anglois fe bornerent, d'abord par néceffité , enfuite par ehoi x , a leur propre ifle. Cette fureur de conquête, qui, pendant plufieurs fiecles, avoit agité la nation , & épuifé fes forces en guerres continuelles Sc infrucfueufes , fe diffipa enfin. Ces efprits acfifs, qui n'avoient jufqu'alors connu & fuivi d'autre profeffion que la guerre, apprirent a chercher de 1'occupation dans les arts de la paix, & 1'Etat y gngna. La nation affoiblie par fes fréquentes expéditions fur le Continent , reprit de nouvelles forces; Sc lorfque des circonftances extraordinaires la forcerent dans la fuite de prendre part a des guerres étrangeres, la vigueur de fes efforts en fut d'autant plus grande que ces efforts n'étoient qu'accidentels & de courte durée. Le même principe qui avoit en- Relativement aux affaires du Contiaenta  Relativemsnt a 1'Ecoffe. 301 L' HlSTOIRE gagé les Anglois a adopter ce nouveau fyftême relativement aux Puiffances du Continent, leur fit auffi changer leur plan de conduite a 1'égard de 1'Ecoffe , le feul Etat étranger qui, par fa fituation locale, avoit avec les Anglois une liaifon affez intime pour exiger de leur part une attention continuelle. Ils renoncerent a leur ancien fyftême, c'eft-a-dire a Ia conquête de ce Royaume, paree que la nature du pays, jointe a la bravoure de fes robuftes habitants, rendoit ce projet , finon impraticable, au moins fort dangereux; il parut préférable de travailler a s'affurer en Ecoffe affez d'influence pour mettre 1'Angleterre a Pabri de tout danger & de toute inquiétude de ce cöté. La pauvreté nationale des Ecoffois & la violence de leurs faclions rendoientPexécution de ce plan, facile pour un peuple fi fupérieur a eux du cöté des richeffes. Leurs chefs plus populaires furent féduits; les Minifires 8c les favoris de la Couronne furent corrompus ; & 1'on prit un afcendant fi abfolu dans leurs confeils, que les opérations de PEcoffe furent bientöt fu-  »e Gharles-Quint, 303 bordonnées en grande partie aux intéréts de 1'Angleterre. Une lecurité fi parfaite a 1'égard des Puiflances étrangeres ajoutée aux avantages intérieurs dont 1'Angleterre jouiflbit déja, ne put manquer d'augmenter fa confidération & fon crédit. Le long regne d'Elifabeth, qui fut également diftingué par la fagefle, la fermeté & la vigueur, accéléra les progrès de cette PuiiTance, & 1'éleva avec rapidité è ce degré de fupériorité qu'elle a confervé depuis parmi les Etats de 1'Europe. Pendant le période dans lequel la fituation politique des grandes monarchies fubit ces révolutions , il fe fit auffi dans les Etats inférieurs des changementstrès-importants: ceux qui arriverent a la Cour de Rome font les plus frappants, & ils ont eu les fuites les plus férieufesöclesplus étendues. J'ai expofé dans mon Introduciion la naiffance de cette jurifdietion fpirituelle que les Papes fe font arrogée comme Vicaires de J. C., & j'ai fuivi les progrès de 1'autorité qu'ils ont poffédée comme Princes temporels. Avant Changements dans la fituation politique des Puiffances inférieures de 1'Europe. La révolution la plus conti dé rabi e du quinzieme fiecle a la Cour de Roi^c,  IJ59- Révolte générale contre la doctrine de 1'Eglife Romaine & contre la puiffance des Pspes. 304 L' H I S T O I R E ' le regne de Charles-Quint, rien ne fendit k circonfcrire ou a modérer leur puiffance, que les lettres & la philofophiequi commencoient a fe ranimer Sc k être cnltivées. Les progrès de Ia fcience n'étoient pas encore Bien confidérables; fa marche eft toujours lente; il faut laiffer écouler bien du temps avant que fon influence s'étende fur le peuple , Sc produife fur lui des effets fenfibles. Peut-être que les Iumieres peuvent par degrés Sc après une longue fucceffion de temps ébranler un fyftême de fauffe Religion; mais il n'y a pas d'exemple qu'elle en ayent entiérement détruit Un feul. Ce font des inftruments trop foibles pour démolir ces grands édifices, que la fuperifition éleve fur des fondements profonds , Sc qu'elle fait fortifier avec 1'art le plus confommé. Luther avoit attaqué la fuprématie du Pape avec d'autres armes & avec une impétuöfité plus formidable. Le temos Sc la forme de fon attaque, une foule de circonffances qui ont déja été expofées, concoururent au fuccès de fon entreprife. Le charme qui aveugloit les hommes depuis tant  de Charles-Quint. 305 de fiecles,fe diffipa tout-a-coup. L'efprit humain, qui, pendant fi longtemps , étoit refté auffi aveuglément foumis que s'il n'eüt été formé que pour croire ce qu'on lui enfeignoit &c pour faire ce qu'on lui prefcrivoit, fortit foudainement de fa léthargie; il voulut connoitre avant de croire; il fentit le poids de fes fers, & brifa bientót le joug qu'il avoit porté jufqu'alors. Cette fermentation, cette inquiétude extraordinaire des efprits, qui, appercue dansd'éloignernent des temps , paroit inexplicable ou extravagante , étoit fi générale, qu'elle doit avoir été produite par des caufes naturelles & d'une activité bien puiffante. Les Royaumes de Danemarck, deSuede, d'Anglerre &d'Ecoffe, & prefquela moitié de 1'Allemagne fecouerent le joug de la domination des Papes, abolirent leur jurifdiction dans leurs domaines , & donnerent force de loi a des formes de culte & a des fyftêmes de doctrine , non-feulement indépendants de 1'Eglife Romaine, mais abfolument oppofés a fes dogmes. Cet efprit d'innovation ne fe borna.  306 L'HlSTOïRE pas aux peuples qui s'étoient révoltés ouvertement contre le Pape; il fe répandit dans route 1'Europe , & éclata dans tous les pays avec différents degrés de violence. II pénétra de bonne heure en France, & y fit des progrès rapides. Le nombre de ceux qui embrafferent les opinions des réformateurs y étoit fi grand , le zele avoit tant d'ardeur, & les talents de leurs chefs étoient fi diftingués, que bientöt ils oferent difputer la fupériorité al'Eglife établie, & qu'ils furent quelquefois fur le point de remporter la viöoire. Dans toutes les Provinces d'Allemagne qui continuerent a reconnoïtre la furprématie papale , ainfi que dans les Pays - Bas, la doctrine du proteftantifme étoit enfeignée fecretement; & elle avoit fait tant de profélytes, qu'ils étoient prêts è fe révolter, & que la crainte feule de la févérité du Gouvernement les empêcha de fuivre 1'exemple de leurs voifins, & de fe rendre indépendants, En Efpagne & en Italië , la même difpofition a fecouer le joug fe fit appercevoir. Plufieurs perfonnes difiinguées par leur favoir & leurs talents,  de Charles-Quint. 307 attaquerent avec tant de force, &trai* terent avec tant de mépris les prétentions du Pape a Pinfaillibilité 8c au pouvoir fuprême, qu'il fallut toute la vigilance du Magiftrat civil, tout 1'appareil de 1'autorité pontificale, & toute la rigueur du tribunal de 1'inquifition , pour réprimer & éteindre ces difpofitions. La défection de tant d'Etats riches & puiffants porta un coup funefte a la grandeur & a la force du fiege de Rome ; les Papes en perdant une partie de leurs domaines & de leurs revenus, eurent par-la moins de récompenfes a difiribuer aux Eccléfiaftiques des différentes dénominations, qui leur étoient attachés par des vceux d'obéiflance auffi-bien que par les liens de 1'intérêts , & qu'ils employoient comme des inftruments propres a établir ou a foutenir leurs ufuupations dans toutes les parties de 1'Europe. Ces mêmes contrées qui défavouoient alors la jurifdiclion des Papes, étoient celles qui anciennement leur avoient été le plus dévouées. L'empire de la fuperftition differe de toute autre efpece de do» •559- Dimi nation des domaines du Pape,.  .•559- jog L'HlSTOïRE mination ; ion pouvoir fouvent eft plus grand , & frouve une obéifTance plus aveugle dans les pays éloignés du fiege du gouvernement ; tandis que ceux qui en font plus voifins , font auffi plus a portee d'appercevoir les impoftures fur lefquelles il eft fbndé , & les artifices dont on fe fert pour le foutenir. Les vices ou les défauts perfonnels des Papes, les fautes & la corruption de leur adminifiration, 1'ambition , la vénalité & la fauffeté qui régnoient k leurs Cours , ne pouvoient échapper aux Italiens , & affoibliffoient néceffairement ce degré de refpect qui fait naitre la foumiffion. Mais en Allemagne , en Angleterre, & dans les pays plus difïants de Rome , toutes ces chofes étoient abfolument ignorees; ou n'étant connues que par tradition, elles ne faifoient que des impreffions légeres. La vénérationpour la dignité papale augmentoit donc en. raifon de la diftance ; & cette confidération , fbrtifiée par une ignoranee groffiere , rendoit les peu • pies également crédules & obéiffanrs. En fuivant les progrès de la domi-  de Charles-Quint. 309 nation des Papes, on voitque ce fut en Allemagne & dans les autres pays éloignés de 1'Italie, qu'ils tenterent avec le plus de fuccès les entreprifes les plus hafdies ; qu'ils impoferent les taxes les plus pefantes, & qu'ils exercerent les vexations les plus odieufes : de forte que pour eftimer la fomme de pouvoir que la Cour de Rome a perdue par les fuites de la réformation, il faut tenir comptè non-feulement du nombre , mais encore du caractere des peuples qui ont fecoué le joug> il faut confidércfj non-feulement la grande étendue de territoire dont elle a été dépouillée, mais encore la foumifiion extraordinaire des fujets qu'elle a perdus. Ce ne fut pas feulement paf la dé-fection de tant d'Etats & de Royaumes, que la réformation contribua k diminuer la puiffance des Pontifes Romains; elle les obligea de fuivre Un nouveau plan de conduite même k 1'égard des nations qui continuerent de reconnoitre leur jurifdicf ion ; ils les gouvernerent avec plus de douceur; &c par des maximes nou» Ils foftt obligés de changer 1'efprit de ■ leur gouvernement.  •559- 3io L'HlSTOIRE velles. La réformation leur apprit, par un exemple funefte , ce qu'ils fembloient avoir ignoré jufqu'alors , qu'on peut épuifer a la fin & pouffer a bout la patience & la crédulité des hommes. Ils craignirent de faire un nouvel ufage de leur autorité qui püt allarmer ou aigrir les fujets qui leur reftoient, & les exciter k la révolte ; ils virent s'établir dans plufieurs contrées de 1'Europe une Egiife rivale , attentive k épier toutes les fautes qui leur échapperoient dans leur adminiffration , & ardente a les relever. Ils favoient que les opinions oppofées a leur puiffance &C k leurs ufurpations , n'étoient pas uniquement celles de leurs ennemis, mais qu'elles étoient répandues même parmi les peuples qui leur reftoient encore attachés. D'après toutes ces confidérations , il n'étoit plus poffible aux Pontifes de Rome de conduire & de gouverner leurs fedtateurs comme ils l'avoient fait dans des temps de paix & de ténebres, oü la foi étoit aveugle & la foumiffion fans bornes, oü les peuples, en troupeaux dociles, obéiffoient fans réfiftance a  T) E CHAI! LËS-QU INT. 3 I I Ia voix du pafteur. Depuis Pépoque de la réformation , les Papes ont gouverné par adreffe & par intrigue plutöt que par autorité; le ftyle de leurs décrets eft refté le même, mais Peffet en a été bien différent. Ces bulles & ces interdits qui, avant la révolution, faifoient trembler les plus grands Monarques , ont été depuis ce période méprifés par les plus petits Princes. Ces décifions hardies , ces acres de jurifdidtion , qui, pendant plufieurs fiecles, étoient non-feulement recus fans contradiöion, mais encore révérés comme les arrêts d'un tribunal facré, auroient été , après la révolte de Luther, méprifés par une partie de 1'Europe , comme Peffet de la fottife Sc de 1'arrogance , Sc déteftés par Pautre partie , comme des excès d'impiété Sc d'injuftice. Les Papes ont été obligés dans leur adminiffration de fe conformer aux principes de leurs adhérents, & même d'avoir égard aux préjugés de leurs adverfaires. Ils fe hafardent rarement a s'arroger de nouveaux droits, 011 même a défendre avec trop d'ohftination leurs anciens privileges, de  '559- 311 L'HïSTOIRE crainte d'irriter leurs amis ; & ils évitent avec foin toutes les démarches qui pourroient foulever Pindignation ou exciter la dérifion de leurs ennemis. La politique de la Cour de Rome eft devenue précautionnée , circonfpecte & timide, autant qu'elle étoit autrefois téméraire & violente ; & quoique les prétentions a 1'infaillibilité , prétentions fur lefquelles repofe toute 1'autorité des Papes, ne leur permettent pas de fe défifter jamais d'une jurifdiction qu'ils ont une fois réclamée & exercée , ils ont la prudence de laiiTer dans 1'inacf ion plufieurs de leurs privileges , dans Ia crainte que des tentatives hors de faifon pour les faire revivre, ne leur falfent perdre le reu e de pouvoir dont ils jouiflent encore. Avant le feizietre fiecle, il ne fe formoit aucune entreprife confidérable dont les Papes ne fuiTent les moteurs &c les chefs; ils dirigeoient toutes les grandes alliances; ils étoient regardés comme les arbitres des affaires de la Chrétienté; & la Cour de Rome étoit le centre des intrigues & des négociations politiques. Mais depuis cette époque ,  de Charles-Quint. 313 epoque, les plus grandes opéïations ont été conduites fans l'intervention des Papes, qui font tombés prefqu'au niveau des autres petits Princes d'Italie ; ils continuent de s'arroger la même étendue de jurifdiction fpirituelle, mais ils n'ofent pas 1'exercer , & ils confervent a peine 1'ombre de la puiffance temporelle qu'ils avoient anciennement. Quelque fatale que la réformation eüt été a la puiffance des Papes, elle fervit du moins a introduire dans 1'Eglife Romaine 1'étude des lettres & de la morale. Les Eccléfiaftiques Romains, animés par le defir d'égaler les réformateurs dans les talents qui avoient mérité k ceux-ci 1'eftime des hommes, par la nécefïité d'acquérir les connoiffances néceffaires pour fe mettre en état de défendre leurs propres opinions ou de réfuter les objeftions de leurs adverfaires, Sc par 1'émulation naturelle entre deux Eglifes rivales, s'appliquerent k 1'étude des fciences utiles, & les cultiverent avec tant d'affiduité & de fuccès, qu'ils parvinrent par degrés k fe rendre auffi célebres par leurs progrès Tornt VI, O !5 59- La réformation contribne a perfeétionnertlans 1'Eglife la morale & les fciences.  »559- 314 L'HlSTOIRE dans la littérature , qu'ils avoient été pendant long - temps diftingués par leur ignorance. Le même principe 00 cafionna une révolution non moins remarquabledans la conduite du clergé de 1'Eglife Romaine. D.'fférentes caufes , dont on a fait plus haut 1'énumération, avoient concouru k introduire parmi ces- Eccléfiaftiques une irrégularité ou plutöt une diffolu» tion de mceurs fcandaleufe. Luther &c fes adhérents commencerent leur attaque contre 1'Eglife Romaine par les inveöives les plus violentes contre ce fcandale; de forte que pouf faire ceffer ces déclamations, le clergé fut obligé de mettre dans fa conduite plus de décence &c de réferve. Les réformateurs eux - mêmes fe diftinguoient non-feulement par Ia pureté , mais encore par 1'auftérité de leurs mceurs; 8c ils avoient k cet égard une réputation fi bien établie dans Popinion publique, que les Eccléfiaftiques Romains auroient bientöt perdu toute efpece de crédit, s'ils n'avoient pas taché de fe conformer, du. moins en partie , k cet exemple. Ils favoient que toutes leurs aclions  de Charles-Quint. 315 trouveroient dans les Proteftants, que " 1'inimitié & la rivalité animoient également, des obfervateurs attentifs & féveres, è qui aucune de leurs fautes n'échapperoit, qui les jugeroient fans indulgence, öc les releveroient fans ménagement. Cette confidération rendit les Eccléfiaftiques trèsfoigneux, non-feulement d'éviter tous les excès qui pouvoient mériter le blame, mais encore d'acquérir des vertus dignes d'eftime & d'éloge. En Efpagne & en Portugal, oü la jurifdidïion tyrannique de Pinquifition étouffa la doctrine proteflante dés fa naiffance , 1'efprit du Papifme a été invariable ; la littérature y a fait peu de progrès, &c le caractere des Eccléfiaftiques y eft prefque le même. Mais dans les pays oü les partifans des deux doctrines ont vécu les uns avec les autres , oü ils ont entretenu entr'eux une communication libre &c fuivie , pour des objets de commerce ou de littérature , on voit clairement qu'il s'eft fait une grande révolution dans les idéés comme dans la conduite des Eccléfiaftiques Papiftes. Les mceurs du haut Clergé & des EccléO ij '559-  •559- Effets de la réformation fur le caraétere des Papes, 316 L' HlSTOIRE fialtiques féculiers de France font devenus d'une décence exemplaire, & plufieurs d'entr'eux fe font diftingués par les vertus 8e les talents qui peuvent honorer leur état. L'influence de la réformation ne s'eft pas fait fentir feulement aux membres inférieurs de 1'Eglife Romaine; elle s'eft étendu jufqu'au fiege de Rome, jufqu'aux fouverains Pontifes eux-mêmes. Dans un temps oü la puiffance de ces Pontifes , & la vénération des peuples pour leur caractere , n'avoient point de bornes, oü ils n'avoient point d'adverfaires attentifs a obferver leurs mceurs 8c ardents a les relever, on avoit vu des Papes outrager la décence 8e la morale même , fans que la voix publique ofat s'élever contre eux ; mais ces mêmes excès feroient aujourd'hui cenfurés avec la plus grande févérité , & exciteroient 1'horreur 8e 1'indignation univerfelle. Au-lieu de chercher a imiter 1'élégance 6c la gayeté des Cours des Princes temporels, 8e a les furpaffer en licence, les Papes fe font attachés a prendre des mceurs aufteres 6c convenables a leur carac-  de Charles-Quint. 317 tere facerdotal. La chaire de Saint- ' Pierre n'a été, depuis deux fiecles., fouillée par aucun Pontife qui reffemblat a 1'infame Alexandre VI, ou a plufieurs de fes prédécelfeurs, qui ont déshonoré par leurs vices la religion & la nature humaine. Dans cette longue fucceffion de Papes, on a vu régner a la Cour de Rome une décence & une gravité de mceurs , inconnues dans les fiecles précédents. Plufieurs d'entre ces Pontifes ont été recommandables par les vertus convenables a leur état, &c quelques-uns ont fait par leur bienfaifance, leurmodération & leur goüt pour les lettres , une forte de réparation k 1'humanité pour les crimes de leurs prédécefleurs. Ainfi les avantages qu'a produits la réformation, ont été plus étendus qu'on ne Ie croiroit, en ne portant fur cet objet qu'un coup d'ceil fuperficiel; cette grande révolution dans 1'Eglife Chrétienne a fervi, en grande partie, k épurer les mceurs, a répandre le goüt de 1'étude , k infpirer 1'amour de 1'humanité. L'hiftoire a confervé la mémoire d'un li grand nombre d'évéO ii> 1S S9-  •559' Etat de la République de Venife» 318 L' H I S T O I R E nements revoltants occafionnés par des querelles religieufes, qu'on ne peut s'empêcher d'éprouver un fentiment agréable, en voyant naitre quelques effets utiles & falutaires d'une fource d'oü font forties tant d'horribles calamités. La République de Venife, qui, au commencement du feizieme fiecle, avoit paru fi formidable , que prefque tous les Potentats de 1'Europe s'éroient ligués pour concourir a fa deftruction , voyoit de jour en jour s'affoiblir fa fplendeur & fa puiffance. Elle perdit- non-fèulement une grande partie de fon territoire par la guerre qu'occafionna la ligue de Cambray ; fes revenus & fes reffources avoient été épuifés par les efforts extraordinaires &c long-temps continués qu'elle avoit été obligée de faire pour fe défendre : & d'ailleurs le commerce qui avoit été la fource de fa richeffe & de fa puiffance, commencoit a dé» croitre, fans laiffer 1'efpérance de Ie relever jamais. Toutes les conféquences funefles qui devoient réfulter pour la République de la découverte d'un paffage aux Indes orientales par le  de Charles-Quint. 319 eap de Bonne-Efpérance , n'échapperent pas a la fagacité du Sénat de Venife ; mais en les prévoyant, il ne put les prévenir. Dans la vue d'empêcher les Portugais de former des établilTements dans les Indes , non-feulement cette République fouleva les Soudans d'Egypte & les Empereurs Ottomans contre ces dangereux aventuriers; elle (a) fournit même en fecret du fecours aux infideles pour favorifer leur entreprife; mais tous ces efforts furent fans fuccès. L'activité & la va* leur des Portugais furmonferênt tous les obflacles; ils s'établirent folidenient dans les fertiles contrées de Pinde , & y acquirent avec de valies territoires, un crédit encore plus étendu. Lisbonne devint, a la place de Venife , le marché desprécieufes produétions de POrient. Les Vénitiens, après avoir exercé pendant une longue fuite d'années le monopole de ce riche trafic, s'en virent tout-a-coup prefqu'entiérement exclus. Lesdécou- (4) Freher. fpript. rer. Germanic. vol. 2 , O iv >559-  *5 59- J10 L'HlSTOIRH vertes des Efpagnols dans Ie monde Occidental, ne furent pas moins funefies aux branches inférieures du eommerce de Venife. Les défauts primitifs de Ia conltitution de cette République , défauts qui ont été obfervés plus haut , n'avoient point été corrigés; & les défavantages qu'elle avoit a vaincre, dans toutes les grandes entreprifes qu'elle formoit, loin de diminuer, augmentoient tous les jours. Les fources d'oii elle avoit tiré fes tréfors & fa puiifance fe trouvant épuifées , 1'Etat perdit de fa force inlérieure, & fes opérations au-dehors devinrent par conféquent moins formidables. Long-temps avant Ie milieu du feizieme fiecle , Venife avoit ceffé d'être une des principales Puilfances de 1'Europe , & n'étoit plus qu'un Etat fubalterne : mais comme le Sénat eut 1'adreffe de cacher, fous une apparence de prudence & de précauiion , cette diminution de pouvoir ; comme il ne fit aucune tentative téméraire qui püt manifefler fon impuiffance ; comme les fignes de la décadence politique d'un Etat ne fe remarquent que lentement, &C font  de Charles-Quint. 311 rarement affez-töt appercues par le^ Etats voifins pour occafionner un changement foudain dans leur conduite a fon égard, Venife continua long-temps d'être confidérée & refpecfée. On la traitoit encore , non felon fa fituation acfuelle, mais felon le rang qu'elle avoit tenu autrefois. Charles-Quint & les Rois de France fes rivaux follicitoient avec foin & avec ardeur dans toutes leurs entreprifes, l'affiffance de cette République; & jufqu'a la fin du même fiecle, elle fut non-feulement un objet d'attention, mais encore un descentres principaux des négociations & des intrigues politiques. L'autorité que le premier Cöme de Médicis & Laurent fon petit - fils , s'étoient acquife dans la République de Florence , par leur magnificence & leurs talents, infpira a le\irs defcendants 1'ambition d'ufurper la fouveraineté de leur patrie , & en mêmetemps leur en fraya le chemin. Charles ayant placé Alexandre de Médicis a la tête de la République, les intéréts & le pouvoir de cette familie fe trouverent fortifiés du poids & du crédit de la protecfion impériale.Cöme, fon O v De la Tofcane.  Des Ducs ie Savoye, 312 L'HlSTOlRE fuccefleur , furnommé le Grand, fut profïter de ces avantages; il établit fon autorité fuprême fur les ruines de 1'ancienne conftitution républicaine , & la tranfmit a fes defcendants avec Ie titre de grands-Ducs de Tofcane; leurs domaines furent compofés des territoires qui avoient appartenu aux trois communautés de Florence , Pife & Sienne, & ils formerent un des Etats les plus refpecfables de 1'Italie. Les Ducs de Savoy e, au commer.cement du feizieme liecle , poffédoient des territoires qui n'étoient confidérables ni par leur étendue , ni par leur importance; les Francois en ayantpris une partie , obligerent le Duc régnant a chercher un afyle dans la fortereffe de Nice, ou il refta renfermé pendant plufieurs années; tandis que fon fils le Prince de Piémont cherchoit a\ améliorer fa fortune, en fervant, comme volontaire , dans les armées d'Efpagne. Le traité de Cateau-Cambrelis lui rendit fes Etats paternels. Ces Etats font environnés de tous cötés par de puiflants voifins, dont les Ducs de Savoyedoivertobferver, avec la plus  de Charles-Quint. 323grande attention , tous les mouve- ments, non-feulement pour éviter le danger d'être furpris ou accablés par quelqu'un d'entr'eux , mais encore pour être en état de choilir avec difcernement le parti qu'il leur convient de prendre dans les querelles oü il leur eft impoffible de ne pas s'engager. Cette fituation iinguliere femble avoir eu une grande influence fur le caractere des Ducs de Savoie. La néceffité oü ils fefont trouvés de veilIer fans ceffe autour d'eux, de tenir tendus tous les refforts de leur puiffance , Sc de refter dans une activité continuelle , en a fait de tous les Princes connus dans 1'hiftoire , ceux qui ont montré le plus de fagacité pour démêler leurs véritables intéréts , le plus de fermeté dans leurs réfolutions , Sc le plus d'adreffe a profiter de toutes les circonftances. Ces Princes ont fu, par des acquifitions fuccefïives, étendre leurs domaines Sc augmenter leur puiffance ; afpirant, a la fin , au titre de Roi, ils 1'ont obtenu il y a environ un demi-fiecle, Sc ils tiennent aujourd'hui un rang diftingué parmi les Souverains de 1'Europe. O vj '559-  M59Des ProvincesUnies. 324 L'HlSTOIRE Les territoires qui forment la République des Provinces-Unies, étoient confondus , pendant la première partie du feizieme fiecle , parmi les nombreufes Provinces foumifes a la Maifon d'Autriche; c'étoit un objet li peu confidérable , qu'è peine s'eft-il préfenté une feule occafion d'en faire mention dans tout le période actif qui fait le fujet de cette hilïoire. Mais bientöt après le traité de CateauCambrefis , les maximes violentes & fuperftitieufes de 1'adminiltration de Philippe , ayant été mifes en exécution avec une rigueur impitoyable par le Duc d' Albe, fouleverent a tel point les peuples libres des Pays-Bas, qu'ils fecouerent le joug Efpagnol , & rétablirent les loix & la liberté dont ils jouilfoient anciennement; ils les défendirent avec une valeur infatigable, qui, après avoir occupé les armes d'Efpagne pendant un demiflecle, épuifa les forces & flétrit Ia gloire de cette monarchie , & ils contraignirent k la fin leurs anciens maitres k les reconnoitre & k les traiter comme une nation libre & indépendante, Cet Etat, fondé fur la li-  de Charles-Quint. 315 berté, fe foutenant par finduftrie & 1'économie, augmentoit fa réputation, dans le temps même qu'il luttoit pour fon exiftence. Mais lorfque la paix & la fécurité lui eurent permi d'agrandir fes vues & d'étendre fon commerce , il devint une des Puiffances les plus refpectables & les plus entreprenantes de 1'Europe. Les événements qui appartiennent aux Royaumes du Nord de 1'Europe ont tenu peu de place dans le cours de cette hiftoire. La Ruiïie étoit encore enfevelie dans la barbarie & Pobfcurité, d'oü elle n'a été tirée que vers le commencement du fiecle préfent, par le génie créateur de Pierre le Grand, qui a fait connoitre & redouter fon pays au refte de 1'Europe. Le Danemarck & la Suede fubirent, pendant Ie regne de CharlesQuint, de grandes révolutions dans la conftitution civile & eccléfiaftique de leur gouvernement. En Danemarck , un tyran fut détröné & chalfé du Royaume , & un nouveau Prince fut appellé au tröne par la De'laRuffie. Du Dane» ma rek & de la Suede.  1559- yi6 V H I S T O I R E voix du peuple. On vit en Suedé l un peuple belliqueux excité a prendre les armes par la cruauté & 1'oppreffion, fecouer le joug des Danois, & conférer la dignité royale a fon libérateur Guftave Ericfon, qui avoit toutes les vertus d'un héros & d'un citoyen. Le Danemarck, épuifé par des guerres étrangeres, affoibli par les diflentions qui s'étoient élevées entre le Roi &c les Nobles , eft devenu incapable de faire les efforts néceffaires pour recouvrer 1'afcendant qu'il a eu long-temps dans le nord de 1'Europe. La Suede n'a pas plu tot été délivrée d'une domination étrangere , qu'elle a commencé a réparer fes forces; & en peu de temps, elle a acquis tant de vigueur dans fa conftitution intérieure, qu'elle eft devenue le premier Etat du Nord. Dès le commencement du dix-feptieme fiecle, elle s'eft élevée a un des premiers rangs parmi les Puiflances de 1'Europe , & elle a eu la principale part dans la formation & la conduite de cette puiffante ligue, qui a protégé non-feulement la Religion proteflante, mais encore la liberté de  DE ClI ARLES-QüïNT. 327 rAüemagne, contre la fuper/tition & Pambition de la Maifon d'Autriche. Fin du fixiemt & cUrnier Volume,   ( 3*9 ) T A B L E DES MATIERES Contenues dans les Tomes III' IV, V & VI. A. bsolvtion\ forme d'abfolution employee par le Pere Tetzel en Allemagne, tom. III, pmge 155. Adornï (lafa&ion des) donne a Colonne. Général de 1'Empereur, des fecours pour la réduéfion de Gênes , III, 291. Adrien d'Utrecht fait précepteur de CharlesQuint fous Guillaume deCroy , Seigneur de ChievreSj 111, 39. fon caradtare, id, 40. envoyé par Charles-Quint en Efpagne, avec pouvoir d'y prendre la régence de Caftille, après la mort de fon grand-pere, id. 50. fes droits admis par le Cardinal Ximenès, qui agit de concert avec lui pour les faire exécuter, ibid. autorifé pur Charles a tenir les Etats ou Cortes de Valence, qui refufent de s'aifembler devant lui, id. 121. créé vice-Roi de Caftille au départ de Charles pourl'Allemagne, id, 117. les Caftillans font des  330 T A B L E remontrances contre fon éle&ion , id. iiS. élu Pape, id. 285. réflexions fur fa conduite en Efpagne pendant 1'abfence de Charles-Quint, id. 305. envoye Ronquillo contre les habitants de Ségovie qui le repouffent, id. 306. envoye Fonfeca pour afïiéger la ville , lequel eft repoufle par les habitants de Médina-del-Campo, id. 307. encourage le peuple en blamant la conduite de Fonfeca, id. 312. rappelle Fonfeca & licencie fes troupes , ibid. fon autorité défavouée par la Sainte-Junte, id. 314. deftitué de fon office par cetie confédération, id. 318. mauvaife réception qu'on lui fait a fon arrivée a Rome , lorfqu'il eft élu Pape , iü. 364. reftitue les territoires acquis par fes prédécefleurs, id. 366. tache de pacifier 1'Europe, id. 367. publie une bulle pour trois ans de treve en Europe , id. 369. donne fon ac•effion a la ligue contre le Roi de France, ibid. fa mort, id. 383. fentiments 5c conduite du peuple a cette occafion, ibid. réflexions fur fa conduite a 1'égard des auteurs de la réforme , id. 400. fon brefpour Ia diete de Nuremberg, id. 402. recoit une lifte pleine de griefs de la part de la diete, id. 406. ce qu'on penfa a Rome de fa conduite a 1'égard des réformateurs, id. 409. Afrique: défaite des troupes Efpagnoles envoyées en Afrique contre Barberoufle, par le Cardinal Ximenès , III, 68. 'Aigues - Mortes ; entrevue de 1'Empereur Charles Sc de Francois premier dans cette ville, IV, 377,  DES M A T I E R E S. 331 Aix-la-Chapelle ; couronnement de Charles-Quint dans cette ville, III, 148. Ferdinand fon frere y eft couronné Roi des Romains, 226. Alarcon ; ( Dom Ferdinand d' ) Francois premier, fait prifonnier a la bataille de Pavie , eft commis a fa garde , IV , 29. il le conduit en Efpagne, id. 47. U le remet en liberté, en conféquence du traité de Madrid, id. 75. envoyé Ambaffadeur en France pour faire accomplir le traité, id. 103. le Pape Clément VII, fait prifonnier par les Impériaux, eft confié a fa garde , id. 139. Albanië (Jean Stuatt, Duc d' ) commande 1'armée Francoife envoyée par Francois I pour s'emparer de Naples , IV, 19. Albe , (le Duc d') adhere a Ferdinand d'Arragon dans fa difpute contre 1'Archiduc Philippe touchant la régence de Caftille, III, 15. force le Dauphin de lever Ie fiege de Perpignan , V, 11. préfide au confeil de guerre qui condamne a mort 1'Eleéteur de Saxe , 242. Retient priibn* nier le Landgrave par ordre de 1'Empereur, 259. commande fous 1'Empereur 1'armée deftinée contre la France, VI, 12, nommé Commandant en chef dans le Pié-. mont, 97. entre dans les terres du Pape &C s'empare de la campagne de Rome, 164. conclut une treve avec le Pape, 165. négocie la paix avec le Cardinal Caraffe entre Philippe & le Pape, 210. va a Rome demander pardon de fes hoftilités , a 11. envoyé a Paris pour demander en mariage au nom de Philippe, la Princeffe Elifabeth, 377.  33* TABLE Alben de Brandebourg, grand-Maitre de 1'ordre Teutonique, devient fedtateur de la doctrine de Luther, IV, 94. obtient de Sigifmond, Roi de Pologne, 1'invefHture de la PruiTe Ducale, 95. mis au ban de 1'Empire , ibid. tranfmet la - Pruffe dans fa Maifon , ibid. commande un corps de troupes en faveur de Maurice , Duc de Saxe , mais fait tous fes efforts pour établir fon indépendance, V , 435. défait & prend prifonnier le Duc d'Aümale , & joint 1'Empereur devant Metz , VI, 13. condamné par la Chambre Impériale pour avoir demandé les Evêques de Bamberg & de Wurtzbourg, id. 28. ligue formée contre lui, 29. battu par Maurice. 30. défait une feconde fois par Henri de Brunfwick. 33. il el! chaffé de 1'Allemagne & meurt en exil, 34. fes Etats font rendus a fes héritiers collatéraux, ibid. Albert, Eleéteur de Mayence, chargé de la publication des indulgences en Allemagne , III, 154. Alexandre VI, Pape : remarques fur fon Pontificat, III, 198. Alexandre de Médicis; voyez Médicis. sllgcr ; comment cette ville fut prife par Barberouffe , IV, 286. un frere du même nom s'en ernpare après la mort de celuici , id. 287. la Porte prend Alger fous fa proteóf ion, id. 288. gouvernée per Hafcen Aga pendant 1'abfence de Barberouffe, id. 482. affiégée par Charles-Quint, id. 487. le mauvais temps force 1'Empereur de lever le fiege, id. 492.  Des MATiER.Es.33j Allemagne : état de l'AIlemagne a la mort de 1'Empereur Maximilien ,111, 91. Charles V , Roi d'Efpagne, & Francois I , Roi de France, fe déclarent afpirants a la Couronne Impériale, III, 94.raifons qu'ils donnent en faveur de leurs prétentions, ibid. vues & intéréts des autres Etats de 1'Europe relativement aux compétiteurs, id. 100. Henri VIII, Roi d'Angleterre, forme une prétention, id. 102. mais il 1'abandonne enfin , ib. le Pape s'intéreffe auffi dans le choix de 1'Empereur, id. 103. avis de Léon Xaux Princesd'Allemagne, id. 104. ouverture de la diete a Francfort, id. 106. a -qui appartient le droit d'élire 1 Empereur , ib. motifs des Elefteurs , ib. ils offrent 1'Empire a Fréderic de Saxe, id. 108. Fréderic refufe, & pourquoi, ib. Charles eft élu, id. 113. il confirme la capitulation des privileges germaniques, id. 114. Charles part pour l'AIlemagne, id. 128. il eft couronné a Aix-la-Chapelle, id. 148. Martin Luther commence la réforme en Allemagne , id. 150. comment fut recue Ia bulle d'excommunication lancée contre lui, id. 186. ufurpations du Clergé en Allemagne pendant les difputes touchant les inveftitures, id. 206. le Clergé d^Allemagne n'eft prefque compofé que d'étrangers, id. 216. le Papeynommea. tous les bénéfkes , id. 217. expédient infruclueux de la part des Empereurs pour reftreindre cette puiffance du Pape, id. 219. grands progrès de Ia doétrine de Luther, id. 440. griefs despayfans de l'AIlemagne, IV, 78. fédition en Souabe,i<&  j34 T A B L E 80. mémoire 011 ils expofent leurs grieft s id. 82. la fédition eft appaifée, id. 8y autre fédition élevée dans laThuringe, id. 84. comment la Maifon d'Autriche fe rendit fi formidable en Allemagne , id. 143. procédés a 1'égard de la réformation , id. 144. grands progrès de la réformation , id. 208. Ferdinand , Roi de Hongrie & de Bohème, élu Roi des Romains, id. 226. la religion Proteflante s'établit en Saxe, id. 398. & cians le Palatinat, V, 90. la ligue de Smalkalde leve une armée contre 1'Empereur, /V» 139. les chefs mis au ban de 1'Empire, id. 145. difperfion de 1'armée proteftame, id. 175. 1'Empereur fait recevoir VInterim , id. 308. Maurice de Saxe leve une armée , &. fe déclare pour les Proteftants, 310» il eft favotifé dans ion entreprife, même par les Princes Catholiques, & pourquoi, 440. traité de Paffau entre 1'Empereur & Maurice de Saxe, 452. treve entre 1'Empereur & Henri II, Roi de France, 453. Charles remet la Couronne Impériale a fon frere Ferdinand , VI > *7*ï Al-Rafchild, frere du Muley Hafcen,Rot de Tunis , follicite contre lui la protection de Barberoufle , IV , 289. comment il fut trahi par Barberoufle, id. 290. Amerflorf, Gentilhomme Hollandois, donné pour collegue par Charles V au Cardinal Ximenès dans la régence de Caftille, III, 65. Anabaptips : origine de cette fefte, IV , 253 , 255. fes dogmes pnncipaux , 256. elle s'étafolit a Munfter, 258. caraftere de  DES MATIÉRES. 3 3 ^ fes chefs , 257. ils s'emparent de Munfter, 259. ils y établiffent une nouvelle forme de gouvernement, 260. choififfent Bocold pour Roi, 264. leurs pratiques licencieufes, 266. confédération des Princes d'Allemagne formée contre eux, 268. bloqués dans Munfter par 1'Evêque de cette ville, 269. grand carnage de ces Seétaires a la pnfe de Munfter, 270. leur Roi mis a mort, 273. caraétere de cette fecie depuis ce période , ibid. Voyez Mathias, Bocold. Angleria : fon autorité citée en preuve des extorfions faites en FlandresparlesMiniftres de Charles V, 111,8?, Angleterre : par quels moyens ce Roya'umê futaffranchi de la fuprématie des Papes, & recut ladoörine des Réformés, IV, 250. la Reine Marie époufe le Prince Philippe , fils de 1'Empereur Charles, contre le fentiment de la nation , VI, 58. Ie mariage eft ratifié par le Parlement, 63.1'Angleterre eft engagée malgré elle par Philippe , devenu Roi d'Efpagne , dans la guerre contre Ia France , 190. Marie leve de 1'argent en vertu de fa prérogative pour faire la guerre , 191. prife de Calais par le Duc de Guife, 225. prife de GuinesSc de Ham, ibid. mort de Marie, & acceffion d'Elifabeth , 262. traité de Cateau-Cambrefis, 267 Ia Religion Proteflante eft etab ie par Elifabeth, 269. combien la conduite de Henri VIII accrut les forces inteneures de 1'Angleterre, 297, fa puiffance ne refte pas long-temps fans être refpeétee fur le continent, 301. changement de fa conduite envers 1'Eïoffe, 301.  336 T A B L E Anhalt (le Prince d') fuit la doctrine de Luther , UI, 400. Annates de la Cour de Rome; ce que c eft, I, 222. Arragon : comment Ferdinand prit poffeflïon de ce Royaume, III, 3. les Etats d'Arragon reconnoiffent le titre que 1'Archiduc Philippe avoit a la Couronne, 4. ancienne inimitié entre ce Royaume & la Caftille , 11. la Navarre ajoutée a cette Couronne par 1'adreffe de Ferdinand, 33. arrivée de Charles-Quint, 86. les Etats s'affemblent au nom &\x Jufiïia , & non pas au nom de Charles, 87. conduite refractaire des Arragonois, 88. ils refufent de rendre la Navarre, 89. Don Jean Lanuza nommé Régent au départ de Charles pour 1*Allemagne, 117. par qui les troubles furent élevés en Arragon, 360. moderation de Charles envers les féditieux a fon arnvée en Efpagne, 363. voyez Efpagne. ^ Ardres : entrevue de Francois 1 & de Henri VIII dans cette ville, IH> I45- Afhiriu : Charles, fils de Philippe & de Jeanne , reconnu Prince des Aftunes par les Cours de Caftille, III, 2 262, Maru de Bourgogne, promife a Louis XII, Roi de France, mais mariée a 1'Empereur Maximilien, JI[, a. Marie Stuart, fille de Jaeques V, Roi d'Ecoffe, fuccede a la Couronne , n'étant encore qu'enfant, V, 18. promife au Dauphin de France, 284. élevée a la Cour de France, 364. célébration du manage , VI, 233. prend les armes & le titre dé Reine d'Angleterre a la mort de Marie , Marignan: (Jean-JacquesMédecino, Marquis de) Commandant de 1'armée Florentine oppofée aux Francois, VI, 76. défait 1'armée de France aux ordres de Pierre Strozzi, 80. met le fiege devant Sienne, ibid. convertit le fiege en blocus, 82. redTome FI. $  4io T A B L E dition de Sienne, 83. réduétion de PortoErcole, 86. 1'Empereur ordonne aux troupes commandées par Marignan , de marcher dans le Piémont, ibid. Mark, (Robert de la) Seigneur de Bouillon , déclare la guerre a 1'Empereur Charles-Quint, III, 262. ravage le Luxembourg, a la tête des troupes de France , ibid. recoit ordre de Frangois I de licencier fes troupes , 263. fes territoires réduits fous PobéhTance de 1'Empereur, 264. Marfeille: fiege de cette Ville par les Impériaux , IV , 4. fauvée par Francois premier, 5. entrevue & traité du Pape avec Francois dans cette Ville ,'246. autre fiege de cette Ville par Charles, 351. Martinu^ri, Evêque de Waradin , nommé tuteur d'Etienne, Roi de Hongrie, IV, 437. fon caraétere, 474. follicite 1'alTiftance de Soliman contre Ferdinand, 476. Soliman s'empare du Royaume, 477. chargé du Gouvernement de la Tranfylvanie & de 1'éducation du jeune Roi, conjointement avec la Reine, V, 386. négocie avec Ferdinand , 387. gagne la Reine pour lui faire réfigner la Tranfylvanie a Ferdinand, 390. nommé Gouverneur de la Tranfylvanie , & créé Cardinal , 391. affaffmé par les ordres de Ferdinand, 395. Martyr: (Pierre) fon autorité citée en preuves des extorfions des Miniftres Flamands de Charles-Quint , III, 85. Mathias, (Jean) bonlanger, devenu chef des Anabaptiftes a Munfter,IV, 258. s'em-  DES MATIERES. 411 pare de la Ville, & y établit une nouvelle forme de Gouvernement, 260. repoufle 1'Evêque de Munfter, 262. tué, 263. Voyez Bocold & Anabaptijles. Maurice , Duc de Saxe : fes motifs pour refufer fon acceffion a la ligue de Smalkalde , V, 31. marche en Hongrie au fecours de Ferdinand, 32. différend entre lui & fon coufin 1'Eleéteur, 33. fa conduite a la diete de Worms, 81. fe joint a 1'Empereur contre les Proteftants, 14». motifs de fon procédé, 164. fa conduite pleine d'artifice envers PEIeéteur, 166, s'empare de 1'Eleétorat de Saxe, 170.1'Eleéteur recouvre fon pays, 181. fes efforts infruétueux pour foumettre Wittemberg a 1'Empereur, 239. obtient Ia poffeflïon de 1'Eleétorat, 248. il en eft invefti dans toutes les formes a la diete d'Ausbourg , 298. fe dégoüte de 1'Empereur, 333. fes motifs de mécontentement expliqués ,335. adreffe & prudence dans fa conduite 338. fait recevoir Xinterim dans fes Etats \ 339. fait cependant profeflïon de fon attachement a la réformation, 341. entreprend de réduire la Ville de Magdebourg pour lui faire accepter 1 'interim, 342. protefte contre le concile de Trente , 343. nommé par 1'Empereur pour faire le fiege de Magdebourg , 347. joint Georges de Mecklembourg devant Magdebourg, 376; la ville capitule, 374. fes conférences, avec le Comte de Mansfeldt, 377. élu Burgrave de Magdebourg, 378. congédie fes troupes, 381. fon adreffe a amufer 1'Empereur, 383. fait une alliance avec S ij  4ii TABLE Henri II, Roi de France , contre 1'Empereur, 397. 1'üllicite des fecours en Angleterre, 401. requiert expreffément que le Landgrave foit mis en liberté, 402. joint fes troupes &L publie un manifefte , 411, 413. prend Ausbourg & d'autres villes, 415. négocie infruélueufement avec Charles , 42O. défait un corps de troupes de 1'Empereur, 422. prend Ie chateau d'Ehrenbourg, ibid. retardé paria mutinerie de fes troupes, 424. entre dans Infpruck , &c manque de prendre 1'Empereur , 426. négociation entre lui & Ferdinand , 439. affiege Francfort-fur-leMein , 448. fes motifs pour un accommodement, 450. figne un traité avec 1'En «j pereur a Paffau , 452. réflexions fur fa conduite dans cette guerre , ibid. march* en Hongrie pour s'oppofer aux Turcs , VI, t. nommé chef de la ligue contre Albert de Brandebourg , 29. défait Alhert , mais il eft tué dans la bataille , 30. fon caraftere, 31. fon frere Augufte lui fuccede, 34' Maximilien , Empereur d'AUemagne , réclame la Régence de Caftille, après la mort de Philippe fon fils, III, 28. appuyé dans fes prétentions par Dom Jean Maniiel, 29. manque la Régence de Caftille , ibid. obtient le Gouvernement des PaysBas , 38. défigne Guillaume de Croy, Seigneur de Chievres , en qualité de furIntendant de 1'éducation de Charles fort petit-fils, ibid. fait fa paix avec la France & Venife , 72. meurt, 91. état de I'Eittope a ce période, ibid. fes efforts pour  DES MATIERES. 413 aiTurer la Couronne Impériale fur la tète de Charles fon petit-ftls, 93. obftacles qu'il rencontre dans cette entreprile , ibid. Mayence , (i'Archevêque de) déclare artificieufement devant 1'Empereur que la diete d'Ausbourg acceptoit Yinterim , quoiqu'il n'y fut point autorifé , V, 296. Mechlembourg\Gmtgti de) s'empare au nom de 1'Empereur des territoires de Magdebourg , V, 373. défait les Magdebourgeois dans une fortie qu'ils font, joint par Maurice de Saxe qui prend le titre de Commandant en chef, 374. Médecino , (Jean-Jacques) voyez Marignan. Médicis , (Alexandre de) rétabli dans fes domaines de Flotence par Charles-Quint, IV, 421. affaiïiné , 205. Médicis, (le Cardinal de) , élu Pape, prend le titre de Clément fept, III, 384. voyez Clément Vil. Médicis, (Catherine de) mariée au Duc d'Orléans , IV, 245. foupconnée par Charles - Quint d'avoir empoifonné le Dauphin, . 361» Médicis , (Cofme de) créé Duc de Florence , IV, 381. foutenu par 1'Empereur, 384. défait les partifans de Laurent, ib. allure fon indépendance contre 1'Empereur, VI, 19. offre a 1'Empereur de lui foumettre Sienne , 74. entre en guerre avec la France , 75. voyez Marignan, fon adreffe a fe procurer de Philippe II 1'inveftirure de Sienne, 212. en obtient 1'inveftiture , 216. Médicis, (Laurent de) affaffine Alexandre S üj  414 TABLE fon parent, IV , 379. prend la fuite , 3$a tente de s'oppofer a Cofme, mais il eft mis en déroute, 382. Medina-del-Campo : les habitants de cette vdle refufent des provifions militaires a Fonfeca, dont il avoit befoin pour affiégerles rebelles deSégovie, III, 307-prefqu'entiérement réduite en cendre par Fonfeca , 308. les habitants repouffent Fonfeca , ibid. réduétion de cette ville après la bataille de Villalar, & la diffolution de la Sainte-Junte, 350. 'Mèlantlhonadopte les opinions de Luther, III, 189. nommé pour rédiger Ja confeffion de foi des Princes Proteftants a la diete d'Ausbourg, IV, 217. découTagé par le décret de 1'Empereur contre les Proteftants, mais ranimé par Luther r 221. invité de fe rendre a Paris par Francais, 314. fa conférence avec Eckius , 463. gagné pour favorifer Yinterim, V, 341. Mélito, (le Comte de) créé vice-Roi de Valence au dépatt de Charles pour l'AIlemagne , III, 127. défigné Commandant des troupes des Nobles contre la Germariada, 358. défait par les confédérés en plufieurs aétions, 359. détruit cette affociation, ^6o. 'Merveille, Gentilhomme Milanois, employé comme envoyé de Francois I a Francois Sforce , Duc de Milan ; quel fut fon deftin> IV, 311. Meti ; Montmorency , Général de 1'armée Francoife , s'empare de cette ville, V, 419- !e Duc de Guife en eft fait Gou-  DES MATIERES. 415 verneur, VI, 7. affiégée par 1'Empereur, 12. les Impériaux levent le fiege, & fe retirent fort maltraités, 18. projet formé par le Pere Léonard , pour livrer la Ville aux ennemis , 90. le Gouverneur découvre la confpiration , 92. les jeunes Moines maflacrent le Pere Léonard, 8c les vieux font exécutés, 95- Meurtre , 'prix que le Clergé Romain mettoit a la compofition desmeurtres, III, 205. 'Mêrieres, fiege de cette ville de France par les Impériaux , III, 264. belle défenfe par le Chevalier Bayard, 265. levée du fiege , ibid. 'Milan, le Milanès , les Milanois : le Maréchal de Foix nommé pour la France Gouverneur de Milan , III , 273. caractere de ce Gouverneur, ibid. les Milanois aliénés par fes opprelTions, ibid. les troupes du Pape commandées par Profper Colonne , s'emparent de cette ville , 276. les Francois chaffés du Milanès, 281. Milan opprimé par les Impériaux, 368. envahi par les Francois qui en font chafles par Colonne, 381. mutinerie élevée parmi les Impériaux au fujet de la paye , mais diflipée par Moron , 393, la ville abandonnée par les Francois, ibid. reprife par Frangois premier, IV, 112. défertée par les Francois, fur la nouvelle de la bataille de Pavie, 28. Sforce obtient 1'inveftiture du Duché , 49. êtée a Sforce & accordée au Duc de Bourbon, 64. Défordres commis par les S iy  4»6 TABLE Impériaux dans cette ville, 98. mefures pleines d'oppreflion prifes par Bourbon pour fuppléer a la fubfiftance de fes trou. pes mutinées, 117. défaite des troupes de France dans le Milanès par Antoine de Leve, 184. accordée une feconde fois. a Sforce par 1'Empereur, 104. mort de Sforce, 329. prétentions de Francois I au Milanès, 328. invafions de 1'Empereur dans ce Duché, 330. le Marquis de Guaft nommé Gouverneur de Milan, 357- Mehoci : lieu d'une bataille entre Soliman-le-Magniüque & les Hongrois, IV, 141, Monaflïques : ( ordres) recherches fur ks principes fondamentaux des ordres mcnaftiques, IV, 433. vceu particulier a 1'ordre des Jéfuites , ïbid* Moncade, (Dom Hugues de) Ambaffadeur de 1'Empereur a Rome; fes intrigues avec le Cardinal Colonne contre le Pape Clément , IV, 113. réduit le Pape a un accommodement, 114. Défait Sc wé par André Doria dans un combat naYal donné devant le port de Naples, 171. Monluc , envoyé par le Comte d'Enguien vers Francois I, pour lui demander la permiflion de livrer bataille au Marquis de Guaft, V, 49. 1'emporte par la force de fes raifons, 56. commande dans Sienne , qui eft affiégé par le Marquis de Marignan , VI, 80. défenfe vigoureufe tle la place, 81« la famine 1'oblige de eapituler^ • 83.  DES M A T I E R E S. 417 Monte-Albina , lieu oü fe retirent plufieurs citoyens de Sienne , après la réduétion de cette ville par les Florentins , & oü ils établirent un gouvernement libre, VI, Montecuculli, (le Comte de) accufé d'avoir empoifonné le Dauphin , & mis a la torture ; déclare 1'avoir fait a 1'inftigation de 1'Empereur, IV, 359. Montmorency : ( le Maréchal de ) fon caraétere, IV, 347. Francois I adopte for» plan de défenfive contre 1'Empereur, & lui en confie 1'exécution , ibid. fes précautions , ibid. fes troupes méprifent fes mefores, 352. obfervations fur fes opérations, 353. fa difgrace, V , 9. marche a la tête de 1'armée de Henri II pour joindre Maurice de Saxe , & s'empare de Metz, 419. diffuade Henri d'accep•ter 1'alliance offerte par Paul quatre, iV, 127. commande 1'armée de France contre le Duc de Savoye, 105. détache d'Andelot pour fecourir Saint-Quentin , 196. s'expofe lui-même imprudeminent a une aélion, & eft battu , 197. fait prifonnier , 198. négocie la paix entre Henri & Philippe, 245. retourneen France & recoit de grands honneurs de la part de Henri, 246. fon affiduité a pouffer une négociation , 267. fes expédients pour avancer la paix de Cateau-Cambréfis , 273. Montpeüiet, conférence infruétueufe tenue dans cette ville pour la reflitution de la Navarre , III; 89. Moron , ( Jéröme ) Chancelier de Milan , S v  4i8 TABLE fon caraétere, III, 273. fe retire vers Francois Sforce , voyant les exaétions coinmifes dans Milan par les Frangois, 278. comment il échoue dans fes intrigues, ibid. appaife la mutinerie des. Impériaux dans Milan, 393. mécontent de la conduite de Charles, IV, 48. confpire contre 1'Empereur avec Pefcaire , 50. arrêté lorfqu'il alloit voir Pefcaire, 55. mis en liberté par le Duc de Bourbon , & devenu fon confident, 118. Moufon, ville de France prife par les Impériaux , III, 264. reprife par Francois premier, 265. Mulhaufen ; lieo d'une bataille entre Charles - Quint 6c 1'Eleéteur de Saxe, V , 234. 'Muley-Affan , Roi de Tunis , traite fon pere & fes freres avec inhumanité, IV, 289. frahi par BarberouiTe , 291. engage 1'Empereur Charles-Quint a le rétablir fur le tröne , 293. rentre dans Tunis par la reddition de cette ville, 302, fon traité avec Charles - Quint, 3°5- Muncer, (Thomas) difciple de Luther , s'oppofe a fon maitre , & s'abandonne a des idéés fanatiques, IV, 86. fe met a la tête de Ia fédition des payfans de la Thuringe,89. fes projets extravagants , ibid. défait &. mis a mort, 91. 'Munfter : premier établiiTement des Ana- ' baptiftes dans la ville, IV, 258. ils s'emparent de cette ville, 259. y établilTent une nouvelle forme de gouvernement,  DES MATIERES. 419 260. l'appellent Montagne de Sion , 262repouflent 1'Evêque , 263. blocus de cette ville par 1'Evêque, 269. pnfe de Munfter, 271. voyez Anabaptiftes. 'Muftapha, invefti, comme héritier déclare de Soliman-le-Magnifique, de 1'adminiftration du Diarbéquir, IV , 46. fon pere devient jaloux de fon affabiüté envers le peuple , par 1'art & les intrigues de Roxelane, 49. étranglé par ordre de fon pere, 52. fon fils unique mis a mort, 54N. . s : revenus de Naples engagés par Lannoy pour fubvenir aux befoins de 1'Empereur, IV, 13. faifi par les Francois aux ordres dn Duc d'Albanië, 19. pris par Clément VII, 120. traité entre le Pape & le vice-Roi, 124. le Prince d'Orange fuyant devant Lautrec , fe retire en cette ville , 169. blocus de Naples par Lautrec, 170. combat naval dans le port de Naples entre André Doria & Moncade , 171. les opérations de la France contre cette ville, 172. Doria fe révolte & r'ouvre la communication par mer, 174. Naples opprimée par le vice-Roi Efpagnol, Dom Pedro de Tolede ; perd fon affection pour 1'Empereur, IV, 23. écrafée par la flotte Turque, 24 'Najfau ( le Comte de) prend Bouillon a la tête des Impériaux , III, 263. fait une invafion en France, prend Mouten* affiege Mez,i«res; il eft repoufle, 264. S vj  410 TABLE Navarre , (le Royaume de) injuftement acqws par Ferdinand d'Arragon, III, 33. d'Albret y fait une invafion , mais il eft bami par Ie Cardinal Ximenès, 66. fes forterefl.es font demantelées, excepté Panu pelune que Ximenès fait rérablir, 67. Francois I s'en empare au nom de Henri d'Albret , 257. réduit fous fon obéiflance par 1'Efparre fon Général, 258. les Efpagnols en chaffent les Francois, & font 1'Efparre prifonnier, ^u Nice, tieve de dix ans conclue en cette ville , entre TEmpereurckla France, IV, 374- afliégée par les Francois & par les Turcs, V , 29. tyoyon, traité fait en cette ville entre Charles-Quint 8c Francois premier, III, 73. Charles négligé d'en remplir les conditions, jjr^ Nuremberg (la ville de) embraffe Ia Religion réformée, III, 400. diete de Nuremberg , & particulatités du bref d'Adrien touchant les Réformés , 401. réplique au bref du Pape , 403. elle demande un concile général , 404. préfente au Pape la lifte de fes griefs, 406. recès ou édit de la diete, 407. combien cette diete fut ayantageufe pour les Réformés, 408.procédés de la feconde diete tenue en cette ville , 412. recès de la diete ,413. accommodement dont on convient en cette .ifille entre 1'Empereur & les Proteftants, IV, 23 j.  DES MA TIER ES. 4ai O. ^^ra Ar & autres places en Barbarie, an« nexées a la Couronne de Caftille , par Ximenès, III, 32. Orange, ( Philibert de Chalons, Prince d') Général de 1'armée de 1'Empereur , après la mort du Duc de Bourbon, prend le ohateau Saint-Ange, & fait le Pape Clément VII prifonnier, IV, 138. fe retire a Naples a 1'approche de Lautrec, 169. fait prifonnier le Marquis deSaluces, fucceffeur de Lautrec dans la ville d'Averfa , . 180. Orleans : (le Duc d') donné en ötage avec le Dauphin a 1'Empereur CharlesQuint pour 1'accompliffement du traité de Madrid, IV, 76. fe marie a Catherine de Médicis , 144. devient Dauphin par la mort de fon frere, 361. Voyez Dauphin. Orleans , ( le Due d') frere du précédent, commande 1'armée deftinée par Francois I , pour 1'invafion du Luxembourg , V , 11. on lui fuggere d'abandonner fes* conquêtes , & de joindre fon frere le Dauphin dans le Rouflillon, 13, meurt P. P jl a che co, ( Dona Maria) femme de Don Juan de Padilla, concoit un projet adroit pour lever de 1'argent, afin de fubvenir a la fubfiftance de 1'armée de la Sainte-Junte, III, 336. fon mari feit  4n T A B L E prifonnier & exécuté, 346. lettre qu'il écrit a fa femme , 347. leve des foldats afin de venger la mort de fon mari, 351. forcée d'abandonner fon entreprife, & de fe retirer en Portugal, 354. Padilla : (Don Juan de) fa familie & fon caraétere , III, 303. fe met a la tête de la fédition de Tolede, ibid. met en déroute les troupes aux ordres de Ronquillo, 307. convoque une affemblée de mécontents k Avili, 313. forme la confédération appellée la Sainte-Junte, 314. réclame contre 1'autorité d'Adrien , ibid. prend Sc fardé la Reine Jeanne, ibid. fait venir la ainte-Junte a Tordéfillas , lieu de la réfidence de Jeanne, 316. envoyé avec des troupes a Valladolid ou il dépouille Adrien de toute autorité, 318. privé du commandement de 1'armée de la Junte par Don Pedre de Giron, 3 31. nommé Commandant par la démiffion de Giron, 335. fon armée recoit un fubfide d'argent par un expédient fuggéré par fa femme, 337. affiege Torrelobaton , 342. prend & pille cette ville, ibid. conclut une treve avec les Nobles, 344. bleffé Sc fait prifonnier dans une aéfion oü le Comte de Haro eft vainqueur, 345. mis h mort, 346. fa lettre a fa femme , 347. fa lettre a la ville de Tolede , 348. Palatinat : la réformation y eft établie par l'Eleéteur Fréderic, V, 91. Palatin , (le Comte) Ambafladeur de la diete a Francfort , offre la Couronne Impériale a Charles-Quint qui 1'accepte, * ^ III, 118.  DES M AT I E R E S. 423 Pampelune, (le chateau de) dans la Navarre , fes fortifications font aügmentées par Ie Cardinal Ximenès , III, 67. pris par 1'Efparre, Général Francois, pour Henri d'Albret, 259. repris par les Efpagnols fur les Francois , 267. 'Papes : combien le choix d'un Empereur les intérefle vivement, III, 115. Paraguay, les Jéfuites y établilfent une fouveraineté indépendante, IV, 454. ils civilifent les habitants , 45 5. précautions qu'ils prennent pour maintenir 1'indépendance de leur empire, 456. Paris, décret de 1'Univerfité de Paris contre Luther, III, 244. décret du Parlement de Paris contre Charles-Quint, IV, 362. Parme, (le Duché de) confirmé a Oélave Farnefe par le Pape Jules III, V. 326. 362. attaqué St pris par les Impériaux, défendu Sc repris tour -a- tour par les Francois, 366. 'Pajfau (traité de) conclu entre CharlesQuint & Maurice de Saxe, V, 452. réflexions fur cette paix Sc fur la conduite de Maurice , 453* Pavie, affiégée par Francois premier, IV, 14. défendue avec vigueur par Antoine de Leve, 16. bataille de Pavie entre Francois & le Duc de Bourbon, 24. mutinerie des troupes Impériales dans cette ville, 40. Paul 111, Pape : Ion éleétion, IV, 2J3. fon caraétere , ibid. propofe la tenue d'un concile général a Mantoue, 277. négocie en perfonne avec 1'Empereur Sc Fraa-  424 TABLE cois premier, 372. donne une bulle pour 1'alTemblée d'un Concile a Mantoue , 390. le proroge & le transfere a Vienne, 392. ne réforme qu'une partie des abus , 393. convoque le Concile a Trente, V, 55. le protégé , 40. le convoque de nouveau , 75. donne les Duchés de Parme Sc de Plaifance a fon fils naturel, 87, excommunié Sc óte les pouvoirs a 1'Evêque Eleéteur de Cologne, 117. preffe 1'Empereur de fe déclarer contre les Proteftants, 118. conclut une alliance avec lui contre les Proteftants, 127. publie indifcretement ce traité, 131. fes troupes joignent 1'Empereur ,152. il les rappelle , 182. transfere a Bologne le Concile de Trente, 277. refufe a 1'Empereur de laiffer retourner le Concile a Trente, 278. fon reffentiment contre 1'Empereur, relativement au meurtre de fon fils Pierre-Louis Farnefe, 283. follicité par la Diete d'Ausbourg de laiffer retourner le Concile a Trente, 286. élude d'accorder cette demande, 289. fes fentiments fur Yinterim publié par Charles , 300. diffout le Concile de Bologne, 312. annexe Parme & Plaifance au St. Siege , 321. meurt, 322. recherches fur la maniere dont il eft mort, note, ibid. Paul IV, Pape : fon éleélion , VI, 117. fon caraétere Sc hiftoire, n8. fonde 1'Ordre desThéatins, 119. devient 1'occafion principale de 1'établiffement de 1'Inquifition dans les terres du Saint-Siege, 121. renonce a 1'aufiérité dont il ayoit toujours fait profeflïon jufqu'au töos  DES MATIERES. 425 ment de fon éleétion, Md. fa partialité pour fes neveux, 122. aigri contre 1'Empereur par fes neveux, 124. fait des ouvertures pour s'allier avec la France, 126. irrité du fuccès de la diete d'Aufbourg , 130. figne un traité avec la France , 133. compris dans la treve de cinq ans entre 1'Empereur & Henri, 153. fes artifices infidieux pour rompre la treve, 155. abfout Henri de fon ferment, & conclut un traité avec lui, 161. fes procédés violents a 1'égard de Philippe , pour lors Roi d'Efpagne , Md. le Duc d'Albe s'empare de la campagne de Rome , 164. conclut une treve avec le Duc d'Albe, 165. contrafte entre fa conduite & celle de Charles , 170. renouvelle les hoftilités contre Philippe . 18 Ia manque de provifions pour fés^f; f, .iQns militaires, 183. réduit a faire fa paix avec Philippe , par le rappel du Duc de Guif* après la bataille de St. Quentin, 210. recoit un Ambaffadeur de la part de Ferdinand pour lui notifier fon éleétion a 1'Empire; mais il refufe de le voir&c de reconnoitre 1'Empereur, 228. fa mort, 278. Paulin, Officier Francois, nommé Ambaffadeur de Francois I auprès de Soliman , V, 22. fuccès de fes négociations a la Po»sï, i^d, Payens : pourqnoi les anciens Payens admettoient généralement parmi eux les principes d'une tolérance mutuelle, VI, 109. Pays-Bas : Charles-Quint s'arroge le premier le gouvernement des Pays-Bas, IH,  426 T A B L E 42. averfion des Flamands pour le voyage de Charles en Efpagne , 74. Francois I y fait une invafion , 266. treve entre Henri VIII & les Pays-Bas, IV, 173. Francois I y fait une feconde invafion, 363. révolte des Gantois; voyez Gand, 407. autre invafion de Francois premier, V, 23. 1'Empereur s'en démet en faveur de Philippe fon fils, VI, 142. examen des révolutions qu'a fubi ce pays pendant le feizieme fiecle, 324. Pembrock (le Comte de) envoyé par la Reine Marie avec un corps de troupes , pour joindre 1'armée Efpagnole dans les PaysBas, VI, 191. Perpignan, Capitale du RoufTilIon, affiégée par le Dauphin de France, V, 11. levée du fiege , 13. Pefcairt \\Z$~ f^** de) prend Milan d'affaut, III, 2ëi. force Bonnivet de fe retirer en France, 394. loins généreux qu'il prend du Chevalier Bayard , 395. commande dans 1'invafion de la Provence, IV, 4. affiege Marfeille, 6. fon armée fe retire vers 1'Italie fur 1'avis de l'arrivée' des Francois , ibid. remet Milan a la France , 12. empêché les troupes Efpagnoles de murmurer, quoiqu'aéfuellement elles manquaffent de paye, 13. contribue a la défaite de Francois I a la bataille de Pavie, 26. mécontent de ce qu'on emmene Francois en Efpagne fans 1'avoir confulté, 50. excité par Moron dans fon reffentiment, 51. trahit Moron en découvrant fes deffeins a 1'Empereur, 55. arrête Moron, 57, meurt, 63.  DES MATIERES. 417 Philippe, Archiduc d'Autriche & pere de Charles-Quint, fe rend en Efpagne avec fa femme la Reine Jeanne , III , 4. fait hommage, dans fa route , a Louis XII pour le Comté de Flandres, ibid. fon titre a la Couronne reconnu par les Cortes, 5. dégoüté de 1'étiquette de la Cour d'Efpagne, ibid. Ferdinand devient jaloux de Ion pouvoir, ibid. marqué peu d'attachement pour fa femme , ibid. fon départ précipité d'Efpagne, 6. traverfe la France & fait un traité avec Louis, 8. fes fentiments en apprenant que Ferdinand avoit obtenu la Régence de Caftille, 13. exige tle Ferdinand qu'il fe retire en Arragon , & qu'il lui remette la Régence de Caftille, 14. invefti de la régence conjointement avec Ferdinand & la Reine Jeanne par le traité de Salamanque, 19. part pour 1'Efpagne,& eftjetté fur les cötes d'Angleterre ou il eft retenu trois mois par Henri VII, 20. arrivé a la Corogne, 21. la Nobleffe Caftillanefe déclare ouvertement pourlui, ibid. Ferdinand lui réfigne la Ré- fence de Caftille, 22. fon entrevue avec 'erdinand , 23. reconnu Roi de Caftille par les Cortes, 24. meurt, 25. conduite extraordinaire de Jeanne a la mort de fon mari, 26. voyez Jeanne. Philippe 11, Roi d'Efpagne, fi's de 1'Empereur Charles-Quint; fon droit de fucceffion reconnu par les Cortes ou Etats d'Arragon & de Valence, V, 15. reconnu par les Etats de Flandres, 315. la févérité de fon caraétere & fa partialité pour  4i8 TABLE les Efpagnols, mécontentent les Flamands 316. fon caractere, 357. fon mariage avec Marie d'Angleterre, VI, 59. le Parlement d'Angleterre fe défie de lui, 87. fon pere lui réfigne fes domaines héréditaires, 134. rappellé d'Angleterre par fon pere, 141. cérémonie de fon inveftiture, i42.difcours que lui adreffe publiquement fon pere , 145. ordonne au Cardinal de Granvelle de harangutr 1'affemblée en fon nom, 147. Marie, Reine douairière de Hongrie, réfigne fa Régence, ibid. les domaines d'Efpagne lui font remis, 148. fon impoliteffe envers Coligny, Ambaffadeur de France, 153 , note. procédés violents que le Pape tient a fon égard, 161. fes fcrupnles fur le commencement de fes hoftilités envers le Pape, 163. négligence pleine d'ingratitude a payer la penfion de fon pere, 175. Hoftilités du Pape renouvellées contre ce Prince, 181. affemble une "armée dans les Pays-Bas pour agir contre la France, 188. paffe en Angleterre pour engager cette Cour dans la guerre contre la France, 1S9. vifite le camp après la viétoire de Saint-Quentin, 201. s'oppofe au projet de pénétrerjufqu'a Paris, ck fait pourfnivre le fiege de St. Quentin, 202. Saint-Quentin pris d'affaut, 205. légers avantages qu'il recueille de ces fuccès , 207. batit I'Efcurial en mémoire de la bataille de Saint-Quentin , 208. conclut la paix avec le Pape, 210. rend Plaifance a Öétave Farnefe, 212. accorde 1'inveftiture de Sienne a Cofme de Médicis, 213.  DES MATIERES. 419 entre en négociation pour la paix avec Montmorency fon prifonnier, 245. mort de la Reine Marie fa femme , 262. propofe a Elifabeth , qui fuccede a la Couronne , de fe marier avec elle, 266. motifs .d'Elifabeth pour rejetter cette alliance , ibid. réponfe ambigue d'Elifabeth, 267. trompe fon fils Don Carlos, & demande pour lui Elifabeth de France, fille de Henri, 273. articlesdu traité de Cateau-Cambrefis , ' 374» Pïnlibe.i-Emmanuel, Duc de Savoye, voye* Savoye. Philiviao , neveu d'André Doria , défait Moncade dans un coinbat naval donné d?vant le port de Naples, IV, 171. Piadena, (Caftaldo, Marquis de) s'empare de ia Tranfylvanie pour Ferdinand, V, 389. donne a Ferdinand une fauffe idéé du caraétere du Cardinal Martinuzzi, &C obtient 1'ordre de 1'affaiTiner , 293. forcé d'abandonner Ia Tranfylvanie , VI, 41. Picardk : Henri VIII y fait une invafion, III, 293. Ie Duc de Vendome 1'oblige de fe retirer, 294. le Duc de SurFolk y fait une feconde invafion 389. il pénetre prefque jufqu'a Paris, mais il eft repoiuïé, ibid. les Impériaux y font une invafion fans fuccès, IV, 358. Plaifance ( Ie Duché de ) accordé avec le Duché de Parme par Ie Pape Paul III a fon fils naturel le Cardinal Farnefe , V, 87. Farnefe y eft affaffiné, 280. les troupes Impériales en prennent pofTeflion, 282. rendu a OéUve Farnefe par Philippe li, yi, 212.'  430 T A B L E Polus ou la Pok, Cardinal : arrivé en Angleterre avec commiffion de Légat, VI, 64. fe rend médiateur de la paix entre 1'Ernpereur & le Roi de France, mais fans fuccès, 96. rappellé de Ia Cour d'Angleterre par le Pape Paul IV, 182. Prague : atteinte donnée a fes privileges par Ferdinand , Roi de Bohème, V, 272. Proteftants , origine de cette dénomination, IV , 213. de qui les Proteftants étoient compofés dans 1'origine, Md. décret févere publié contre eux par 1'Empereur, 219. ils forment une ligue, 221. voyez Smalkalde. renouvellent leur ligue, & s'adrefient a Francois I & a Henri VIII pour avoir leur proteétion , 227 , 229. encouragés fecretement par Francois 1, 228. regoivent de Henri un fubïide en argent , 230. termes de la pacification faite entr'eux & 1'Empereur a Nuremberg, 232. affiftent 1'Empereur contre les Turcs, 233. leurs négociations avec le Pape relativement au Concile général, 237. renouvellent pour dix ans la ligue de Smalkalde, 280. leurs motifs pour refufer de fe joindre au Roi de France contre 1'Empereur, 317. ne veulent point reconnoitre le Concile convoqué par le Pape a Mantoue, 391. conférence entre leurs principaux Théologiens & une députation des Catholiques a Ratisbonne, 463. comment cette conférence eft infructueufe, 466. obtiennent de Charles une charte particuliere en leur faveur, 470.  DES MATIERES. 431 chaffent le Duc de BrunfVick de fes domaines, V, 37. tous les édits rigoureux contre eux reftent fufpendus par un recès de la diete de Spire , 43. leurs remontrances a Ferdinand lors de la diete de Worms , 78. leur attachement invariable au recès de la diete de Spire, 79. défavouent toute connexion avec le Concile de Trente, 81. devenus plus forts par l'accefiion de Fréderic , Eleéteur Païatin, 90. allarmés des procédés de 1'Empereur, 96. 1'Empereur fe ligue avec le Pape contre eux , 127. fe préparent a réfifter a 1'Empereur, 133. levent une armée , 139. les opérations de 1'armée font interrompues par lajonétiondes Commandants, 150. leur armée eft difperfée, 175. l'Eleéteur de Saxe obligé de fe foumertre, 237. le Landgrave eft trompé par un traité , & on le retient prifonnier, 259. 1'Empereur le traite avec dureté , 266. Yinterim , fyftême de doéf.rine, recommandé par 1'Èmpereur a la diete d'Aufbourg, 295. 1'Empereur leur promet fa proteéfion au Concile de Trente, 349; procédés rigoureux que 1'Empereur exerce k leur égard, 369. leurs députés obtiennent un fauf-conduit de 1'Empereur, mais le Concile refufe de 1'accorder, 384. Mau-. rice de Saxe leve une armée pour foutenir leur caufe, 413. voyez Maurice. traité de Paffau , 45 2. les Princes Proteftants s'uniflent pour fortifier leur parti, VI, 105. recès de la diete d'Aufbourg au fujet de la religion, 107. raifon pour laquelle ils s'oppofoient origi-  432 TABLE nairement aux principes de la tolérance, M3- Provence ; première invafion de la Provence par 1'Empereur,IV, 5. fiege de Marfeille, ibid. retraite des Impériaux, 6. dévaftée par le Maréchal de Montmorency a 1'approche de 1'armée de Charles-Quint, 349. 1'Empereur y fait une feconde invafion , 350. retraite malheureufe de 1'Empereur, 354- Priiffe, quand elle fut conquife par 1'Or* dre Teutonique, IV, 93. érigée en Duché , enfin en Royaume , ik poffédée . par la Maifon de Brandebourg , 95. R. iR-ATisBONKE ; conférence tenue dans cette Ville entre les Théologiens députés des Proteftants & des Catholiques , d«vant 1'Empereur ik la diete, IV, 463. pourquoi cette conférence ne produifit aucun fruit, 466. diete convoquée par 1'Empereur, V, 12a. les membres du parti Catholique y foutiennent 1'autorité du Concile de Trente, 124. les Proteftants préfentent un mémoire contre ce Concile, ibid. les députés des Proteftants fe retirent, 116. Réformation, naiflance de la Religion Réformée , III, 150. diete de Worms convoquée par Charles-Quint pour arrêter fes progrès, ibid. détail fur Martin Luther le réformateur, 158. elle commence a s'établir en Suifle p