311 .vOCHURES N°. D 59      RECHERCHES PHYSIC O-C HYMIQÜES. PREMIER CAHIER. Quod, inquis, erit pretium operae? quo nullum majus est, nosfe naturam. s e n e c a. AMSTERDAM, 1792.   C 3 ) A. M. M. H E N R I HOPE, H E N RI M U I L M A N, P I E RRE MUILMAN, P IE RR E DE S METH, GUIILAUME SIX, E T THOMAS HOPE. Meffieurs ! Nous vous offrons les prémices d>un travail entre. pmjom vos aufpices, & foutenu par vos fecours.  C * ) cv; eo frRipouvoir contribuer en quelque chofe aux progrès des Sciences utiles, c'efi a votre ziïe pour ces Sciences qu'on en fera redevable. Nousfommes avec les [eminents les plus refpec tueux. Mejfieurs! Vos tres-humbles Serviteurs Amfterdam ce i dAvril 'y J. R. Deiman. A. Paets van Troostwyk. P. NlEUWLAND. N. BONDT.  M E M O I R E SUR LA NATURE DES SULFURES ALKALIN& o u FOIES de SOUFRE. On connolt depuis longtems les combinaifons du Soufre avec diverfes fubftances, qu'on efè convenu de défigner en général par le nom te Sulfures °° avec la feconde. • * * 4.'° Une autre fbü.h température étant plus froide, nous avons renfermé fur de 1'eau une certaine quanti2du même Sulfure, qui avait été confervé dans une Lteille bien fevmée. Comme a cette temperature 1'évaporation de 1'eau efi trop foible pour qu'elle puifle fournir au Sulfure 1'hurmdité dontd a bef,in, celui-cin'exerca d'abord aucune aöion fur Pair-, mais 1'ayant un peu humedé deau, H fit diminuer le volume d'air de la maniere ordinaire Nous avons pris du Sulfure de Baryte, qui avait été fait depuis deux ou trois jours; nous i'avons renfermé dans de 1'air atmosphèrique fur du  (9*0 mercnre. Après 1'y avoir laiffé pendant dix jours, non feulement 1'air n'avoit fubi aucune diminution fenfible; mais examiné eudiométriquement,il préfenta presque entierement les mêmesphénomenesque 1'air atmosphérique, pris au même inflant & confervé pendant le tems indiqué. Deux mefures d'air du Sulfure marquêrent avec la première mefure dé gaz nitreux. 2,10 avec la feconde. . . . 2 52 Deux mefures d'air atmosphérique marquêrent avec la première mefure. . I>91 avec la feconde. . II faut fans doute attribuer la petite différence qui a lieu ici, ï ce que le fulfure employé dans cette expérience n'avoit pas été fait fur le champ, ou a ce que 1'air tenoit un peu d'humidité en disfolution. En renfermant du Sulfure de Baryte fee, fait fur le champ, dans de 1'air atmosphérique fur 1'eau, cette circonftance fuffit pour que 1'air diminue de volume & perde tout fon oxygéne en peu de jours. L'attraétion, que le Sulfure de Baryte exerce fur 1'oxygéne de 1'air atmosphérique,eft beaucoup augmentée en humedant ce fulfure immédiatement. C'eft ce que nous avons conftaté en ajoutant un peu d'eau au Sulfure de Baryte fait fur le champ, & en le placant enfuite dans de 1'air renfermé fur de B 1'eau  ( io ) 1'eau. Au moment même, qu'il fe trouvoit en contaft avec 1'eau, nous obfervamesundégagement confidérable de calorique, qui chaffoit même un peu d'air hors de la cloche, pendant qu'on étoit occupé a y introduire ce fulfure. Dans peu d'heures il y avoit une différence eudiométrique trés confidérable, & un jour après, le refte ne fubisfoit plus aucune diminution de volume par le moyen du gaz nitreux. Afin de ne laiffer aucun doute fur ce que 1'attraction de 1'oxygéne fe fait par le moyen de 1'eau, qui fe trouve combinée avec les Sulfures dans les expériences mentionnées, nous avons pris lemême fulfure que nous avions employé pour la première expérience, nous y avons mêlé un peu d'eau , & nous 1'avons expofé de nouveau a 1'air atmosphérique. Ce fulfure, quiétant fee n'avoit eu aucune aétion fur 1'air pendant dix jours, le priva maintenant fi complétement de fon oxygéne dans 1'efpace de deux jours, que le refte n'était plus fufceptible d'aucune diminution. Nous n'avons pas cru néceffaire de répéter ces expériences fur les Sulfures fecs de Soude, de Chaux, & de Magnéfie:ils ne pourroient,a caufe de leur analogie avec ceux de Potaffe & de Baryte, qu'offtir les mèmes réfultats. Pour celui d'Ammoniaque, qu'on obtient ordinairement fous forme liquide, & pour les autres Sulfures, quand ils  C ii ) üs fe trouvent dans eet état, fl eft clair, mtfu ne peuvent pas fervir a des expériences pour confirrner la théorie en queftion. Nous ajouterons feulement aux expériences précédentes, qu'ayant expofé des Sulfures alkalins au gaz nitreux, nous avons trouvé que Ja dé corapofition de celui -ci eft analogue a celle de 1'air atmosphérique. Les fulfures fecs n'exercent aucune aeïion fenfible fur ce gaz; mais ü eft décompofé, dès qu'on ajoute de 1'eau au fulfure & le refte eft du gaz azote. ' Nous croyons pouvoir inférer de ces expériences la conclufionfuivante:favoir,quel'attraétion, que les Sulfures alkalins paraiifent exercer fur l oxygéne de 1'atmosphére, tient a la préfence de i eau qui s'y trouve plus ou moins mêlée. On fent d abord, combien cette réflexion étoitpropre a répandre du jour fur leur nature & leurs propriétés. II s'agiflbit donc d'examiner plus en détail quelle feroit 1'influence de 1'eau, & de quelle maniere 1'air atmosphérique auroit'été décompofé dans les expériences qUe nous avons déentes. I I. Si nous comparons les faits, que nous venons dmdiquer, & que nous croyons avoir examiné les premiers exaclement, avec un autre fait, B 2 con'  connu depuis longtems, favoir, que les fulfures don• nent dans d'autres circonftances un gaz inflammable, qui ne peut tirer fon origine que de 1'eau, il fe préfentait naturellement 1'idée, que 1'attraftion du fulfure fur 1'oxygéne s'exerce, non pas direflement, comme on l'a cru jufqu'a prefent, fur celui de fatmosphére ,mals fur celui del'eau, &que cette eau eft décompofée par les fulfures. II sagiffoit donc d'examiner oü fe porte eet oxygene, & ce que devient 1'autre principe, 1'hydrogéne. Pour nous éclaircir fur ce point, il était nécefTaire de préfenter 1'eau au fulfure au raonient oü il fe torme & fans qu'il fe trouve a même d'attirer 1'oxygéne de fatmosphére. Dans cette vue nous avons fait d'abord 1'expérience fuivante. Nous mime* un peu de foufre mêlé d'un peu de carbonate de potaffe dans un tube de verre, a 1'un des bouts du quel était attaché un petit matras de verre contenant de 1'eau, & 'a 1'autre un tuyau reconrbé, qui donnoit dans une cuve a eau Le tube fut placé fur des charbons, de forte que le mélange fe chauffa fortement, & que le foufre fe montra fous forme de vapeur dans le tube. En même teras, nous fimes paffcr a' travers du tube la vapeur de 1'eau, qui bouilloit dans le matras. Cette vapeur, en chaflant 1'air du tube, fe trouvoit donc a mên.e de fe décompofer par le contad du fulfure qui venoit de fe former  O 13 ) en même tems. Au coramencetrent de 1'opéra* tion il ne fe développoit que le gaz acide carbo nique du carbonate de potalTe, niais dans Ja fuite ce gaz fe trouvoit mêlé de plus en plusadugazliydrogéne fulfuré: h h fin nous n'obtinmes que ce dernier gaz. L'eau, fur la quelle nous le recueillimes, s'en chargea en partie & prit une couleur brune; il y nagea des parcelles de foufre; enfin elle avoit non feukment 1'extérieur mais encore Je gout d'eaux fulfureufes. Le mélange dans le tube avoit pris tous les caractéres d'un fulfure cauftique. Comme il était parfaitement fee, 1'eau ayant palfë fous forme de vapeur, il n'exhala aucune odeur fétide. Le gaz hydrogéne fulfure receuilli pendant 1'expérience indiqua qu'il y avoit eu décompofnion de l'eau. Pour examiner fi 1'oxygéne uni au foufre avoit formé avec la potaife un fulfate, nous diffolvames ce fulfure dans l'eau & nous y ajoutames de 1'acide murlatique (dont nous nous étions affurés, qu'il étoit bien pur & fans acide fuJfurique), afin de précipiter Je foufre & de faturer la potaffe. Ayant enfiute filtré Ja liqueur, nous y verfames' un peu de muriate de baryte; & en effet la Jiqueur fe troubla a 1'inftant «Sc donna unprécipitéabondant de fulfate de baryte. Nous aurions été trés contens de ce réfultat, fi nous n'avions pas eu quelque foupcon fur Ja pureté de notre potaffe, qui contient ordinairement B 3 un  W peu de fulfate. En effet, faturant un peu de ce carbonate d'acide muriatique, & y verfant du muriate de baryte, il y avoit également quelque précipité. II falloit donc tacher d'avoir un alkali ou une terre parfaitement libre de fulfate; & nous trouvames que notre foude n'en contenoit abfolument rien. De plus, pour rendre 1'expérience plus décifive, nous choifimes la voie hurnide pour préparer le fulfure. Nous fimes donc bouillir de la foude & du foufre avec de l'eau , dans un matras fertné d'un tube recourbé plongé fous le mercure, afin d'éviter tout contact de 1'air atmosphérique. Après que la liqueur avoit pris une couleur fon* cée & une odeur hépatique, nous féparames le foufre & faturames la foude par 1'acide muriatique, & nous filtrames enfuite la liqueur, qui devint paria parfaitement claire. Nous verfames enfuite du muriate de baryte & nous la vimes fe troubler & précipiter une quantité confidérable de fulfate de baryte. Nous avons fait pafler de la maniere indiquée ci delïus (p. 12, 13O 1'eau en vapeur a travers d'un mélange de foufre & de chaux vive; nous avons obtenu également du gaz hydrogéne fulfuré, mais nous n'avons pas examiné le réfidu. Nous avons encore opéré de la même maniere fur le foufie & la chaux, pris féparément, mais fans obtenir, fok de 1'une foit de 1'autre, aucun gaz; preu-  C is) preuve évidente de ce que nous avons avancé au commencement, que ,e fll,fure de celles dès corps, qui Ia compofent. 11 r. L'expérience a dboc demontré que loxygéne de leau fe portant fur le foufre Jforme //^ *o-vee 1 abafe du fulfure. En même t^ dan les expériences, oü nous avions donné une chaleur rouge au fulfure .en faifant pafler la vapeur d eau, on avoit obtenu un gaz inflammable, quon fa» etre une combinaifon d'hydrogéne & de foufre. Ce gaz ne peut devoir fon origine qu a 1 eau dont J'hydrogéne, degagé de fon oxygéne par lattraétion du foufre, fe combine avec une autre portion de foufre, & forme ain{. ce gaz. On fcait dailleurs, que le fulfure fee 2 fournit jamais de gaz hydrogéne fulfuré, mais que leau eft indifpenfablement requife pour eet Afin d'éclaircir Ia maniere dont le foufre fe combine avec fhydrogéne, nous avons effayé d^ruer l,nion du foufre a fhydrogéne tont forme; mais en vain. Car, ayant fait paiTer trés -rement du gaz hydrogéne par Un re  C 16 } re rougi, contenant du foufre bouillant & réduit en vapeur, ce gaz ne prit dans ce pasfage aucune propriété du gaz hydrogéne fulfuré. II brula comme le gaz hydrogéne ordinaire, et n'eüt point du tout 1'odeur hépatique. II s'y manifefta, il eft vrai , une odeur fulfureufe , mais qui n'était autre que 1'odeur qu'exhale le foufre fondu. M. Gingembrt a eu un autre réfultat en fondant du foufre fous une cloche pleine de gaz hydrogéne par les rayons du foleil raffemblés au foyer d'une-lentille (*): la difFérence dépend peut-être du plus grand degré de chaleur, qu'il a pu obtenir de cette maniere. Quoiqu'il en foit, notre expérience nons fembla démontrer, que c'eft une circonftance, fi non nécelfaire, du moins trés favorable a la formation du gaz hydrogéne fulfuré , que le foufre foit prefenté a fhydrogéne au moment oü celui-ci devient libre. I V. Nous procédames enfuite a examiner les circonftances, fous lesquelles le gaz hydrogéne fulfuré fe dégage des fulfures. Nos expériences nous avoient appris, qu'a une chaleur rouge ce gaz échap- (*) Fourcroy , Elem. de Chyra. Tom. II. p. 375-  C 17 > échappe quand on fait paffer fur les fulfures la vapeur de 1'eau bouillante: mais de 1'autre cóté il était clair, que les fulfures humeclés & liquides renferment ce gaz. L'on fcait, qu'ordinairement on employé les acides pour le dégager de ces fulfures: nous crftmes devoir éclaircir toutes les circonflances de cette preduélion. Nous commencames k faire bouillir avec de l'eau les Sulfures Alkalins cauftiques, ceux de Chaux,de Baryte & deMagnefie-,mais nousfümes bientót convaincus , que la chaleur de l'eau bouillante ne fuffit pas pour en dégager la moindrebulle. de gaz. Les Sulfures des Carbonates de potaffe & de foude , traités de la même manière, en fournirent,mêlé a du gaz acide carboniquejmais pour ce' qui regarde ceux-ci, nous en parierons dans la fuite. En lailfant bouillir le fulfure jufqu"ale rendre parfaitement fee, le gaz hydrogéne fulfuré fe développeroit:car nous verrons,que dans eet état l* fulfure ne fcauroit plus le tenir en diffolution. En verfant un acide fur ces mêmes fulfures; cauftiques , qui avoient été tenus pendant quelque tems en ébullition fans donner du gaz, le dégagement du gaz eut lieu d'abord; il fut beaucoup favorifé par la chaleur. L'on fcait, qu'il convient pour eet effet d'employer un acide, qui ne céde pas facilement fon oxygène , & qu'il vaut mieux pour cette raifon d'étendre dans de l'eau. C Nous  'Nous ferons connoitre en paffant Ia méthode, dont nous nous fommes fervis pour avoir Ie gaz hydrogéne fulfuré parfaitement pur & avec facilité, Ayant rempli de mercure ure petite cloche,, nous y fimes pafler un peu de fulfure d'ammoniaque obtenu de deux parties de chaux vive ,deux de muriate d'ammoniaque, & une de foufre. Nous y ajoutames enfuite le doublé d'acide fulfurique étendu dans trois parties d'eau. A 1'inftant il fe dégagea beaucoup de calorique, & il yeutune production confidérable de gaz, qui était trés pur, &, comme on voit, fans aucun mélange d'air atmosphérique. On peut opérer de Ia même manièrefur les autres fulfures alkalins & terreux, & employer quelque autre acide; mais dans quelques uns de ces cas il faut employer un peu de chaleur. V. L'explication de cette production du gaz hydrogéne fulfuré, dontl'origine ne peut-être attribuéequ'a l'eau, & qui pourtant ne fe développe qu'au moyen des acides, a embarralfé les Chymiftes ; & on a été incertain, fi les acides contribuent k fa formation, oü s'ils fervent feulement a le déve* lopper. II eft vrai que le gaz hydrogéne fulfuré fe diifout dans 1'eau, & que c'eft en grande partie k lui, que les Eaux Minerales Sulfureufes doivent leur  C '9 ) leur gout & leurs propriétés tant extérieures qu*ins térieures. Mais cette diffolution fe fait en trop petite quantité, pour pouvoir fuppofer,que le gaz hydrogéne fulfuré n'exifte- tout formé que dans l'eau qui fe trouve dans les Sulfures. Mais en fuppofant même,que le gaz hydrogéne fulfuré effc dilfous dans l'eau des fulfures, cette néceffité d'ajouter un acide au fulfure, pour en dégager ce gaz, nous embarraffa d'autant plus, qu'il eft bien conftaté, que les eaux, qui tiennent ce gaz en diffolution, le laiffent échapper par la chaleur feule. Après avoir beaucoup réfléchi Ik-deffus, nous nous fommes avifés d'éprouv«r 1'adion des Alkalis fur ce gaz. Faifant donc paffer dans le gaz; hydrogéne fulfuré, renfermé fur du mercure, de 1'ammoniaque, de la potaffe , & de la foude, cauftiques & liquides, le volume du gaz a été diminut* a 1'inftant & -il a été bientöt abforbé entiérement. L'eau de chaux 1'abforba également, mais avec moins de rapidité & en moindre quantité. Ce réfultat nous frappa d'autant plus, qu'on lit dans les exceliens Elémens de Chymie de M. Fourcroy (*) „ que les Alkalis paraiiTent n'avoir aucune ad-ion fur le gaz hydrogéne fulfuré." La remarque, qu'on ne fcauroit attribuer a 1'Eau des O T. II. p. 356. C 2  ( 20 ) des Sulfures ni une abforption fi compléte & Ti rapide, nï la fixité du gaz quand on applique la chaleur, nous avoit engagé a éprouver l'a&ion des Alkalis. La reproduction du gaz abforbé, en verfant un acide dans la liqueur alkaline, qui le tenoit en diffolution, fut une preuve qui ne laiffa la-deffus aucun doute. En effet, nous avons obtenu par ce moyen a l'inftant le même volume de gaz hydrogéne fulfuré qui avoit été abforbé: d'ou il fuit encore,que ce gaz n'eft pas décompofé par les alkalis, qui le diffolvent. Ces expériences nous fournirent de nouvelles lumieres fur la manière dont les Acides agiffent en dégagant le gaz hydrogéne fulfuré des Sulfures Alkalins^ en gér.éral fur la nature des Sulfures humides. La diffolubilité de ce gaz dans les alkalis , propriété que nous croyons avoir découverte les premiers, demontra, que les acides, par leur plus grande affinité avec les alkalis & les bafes terreufes des fulfures, ne font autre cbofe que déplacer Ie gaz hydrogéne fulfuré de la combinaifon oü il fe trouve fixé. Voici donc 1'explication viaie & comp éte de cette action des acides, qu'on avoit. tenté envain d'expliquer exactement en la comparant a celle, que 1'acide fulfurique étendu dans de l'eau exeice fur le fer (*). Cet- (*) FoURCBoy Jiiémens de Cbymie ï. 11. p. 356.  V L Cette adtion des alkalis fur le gaz hydrogéne fulfuré parut alfez intéreifante, pour 1'examiner dans différentes circonftances. Nous avons employé dans les expériences décrites les alkalis cauftiques; le gaz eft également abforbé par la folution des carbonates dans 1'eau, fans doute en raifon de Falkali pur, que ces carbonates contiennent toujours plus ou moins. L'eau ne laiffe pas cependant de favorifer cette folution, & d'y fervir d'interméde ; de même qu'elle fiit dans beaucoup de cas. En effet, ayant renfermé quelques parcelles de foude cauftique féche dans du gaz hydrogéne fulfuré pendant plufieurs jours, nous n'obfervames aucune diminution de volume; mais y ayant fait pafler un peu d'eau, 1'abforption eut lieu a l'inftant. De même, ayant fait pafler d'abord un peu d'eau dans du gaz hydrogéne fulfuré renfermé fur du mercure,il n'y avoit qu'une trés petite abforption de gaz; mais en y faifant monter enfuite un petit morceau de foude, le gaz fut abforbé complctement. Dans 1'un & 1'autre cas le gaz reparut a l'inftant, dés que nous y ajoutions quelque acide. Cette néceöké d'ajouter de l'eau aux alkalis, pour les mettre en état de diflbudre le gaz, nous explique pourquoi dans une expérience précédente (p. 12, 13.) nous C 3 avions  C 22 3 avions obtenu ce gaz en faifant paFer fur Ie fulfure, tenu a une chaleur rouge, la vapeur d'eau. L'alkaü du fulfure refta fee dans ce cas, & ne put par conféquent abforber aucun gaz. Ces expériences nous fourniffent un moyen de réconnoitre Ie gaz hydrogéne fulfuré , & de le distinguer des autres efpeces de gaz inflammable, telles que Ie gaz hydrogéne carboné & phosphoré, qui ne font pas abforbé-; par les alk al is; & furtout de le féparer, lorsqu'il fe trouve mêlé a quelque &utre efpëce de gaz. VII. La remarque, que les alkalis fixes ne dilTolvent Je gaz hydrogéne fulfuré, qu'entant qu'ils font euxmêmes diifous dans f eau, nous fit naitre 1'idéê de comparer k 1'action de 1'ammoniaqne liquide fur ce gaz, dont nous avons rendu compte, celle qu'auroit fur lui 1'ammoniaque gazeux oü gaz ammoniaque. Un verre, dont la capacité était divifée en deux parties égales, fut rempli a. moitié de gaz ammoniaque ; nous y f ïmes pafler enfuite une quantité égale de gaz hydrogéne fulfuré, de forte que le volume des deux gaz auroit rempli tout le verre s'ils n'avoient éprouvé aucune diminution. Mais a Tinfiant même de leur contact ils fubirent une di- mi-  C n ) minution confidérable, il fe forma une vapeur Manche femblabJe a celle qu'exhale le fu'furë d'ammoniaque, on obferva un dépot de poudre nohitre fur la furface du mercure, & le volume du mélange des gaz n'occupa que \ de la capacité du verre. En répétant plufieurs fois cette expérience, nous avons trouvé,qu'en général deux volumes égaux de gaz ammoniaque & de gaz hydrogéne fulfuré,combinés enfemble,fe réduifentaun refiant de gaz, qui eft la quatrieme partie de la fomme de ces volumes. II s'agifloit de connoitre la nature de ce refte, qu'on auroit pu foupgonner être le produit même de la combinaifon des deux gaz, lui-même dans un état gazeux. Dans la première des expériences que nous avons faites k eet égard, nous laiflames le réfidu du mélange de deux parties égales de gaz hydrogéne fulfuré & de gaz ammoniaque, jusqu'a ce que toute la vapeur fe fut dépofée aux parois du verre, oü plutöt fur la furface du mercure: pour plus de précaution, nous fïmes encore pafier le gaz dans une autre cloche remplie de mercure bien net, de forte que le gaz fê trouvoit trés pur, comme aufli le verre qui le contenoit. Nous y ajoutames enfuite du gaz acide muriatique, qui, en même tems qu'il eft trés propre pour fe combiner avec 1'ammoniaque, n'a aucune aftion fur le gaz hydrogéne fulfuré, paree qu'il retient fon oxygène avec beau-  C *4 ) beaucoup de force. Le volume des gaz diminua d'abord & en même tems il s'y éleva de vapeurs blanches. Nous continuames de faire pafler du gaz acide muriatique, jusqu'au point que le volume recommenca ï augmenter, & qu'ainfl nous étions furs d'avoir un excès d'acide. Pour le féparer, nous fimes pafler un peu d'eau; celIe -.ci abforba a rinftant tout le gaz a une petite bulle prés, qui était de 1'air commun. II paroit donc ccrtain, que le gaz reftant dans les expériences précédentes, n'eft que du gaz ammoniaque: & que les vapeurs blanchatres qu'on voit naitre dans cette expérience, en ajoutant du gaz acide muriatique, ne font que du muriate d'amrnoniaque (fel ammoniac). Ayant fait de nouveau un mélange de parties .égales de gaz hydrogéne fulfuré & de gaz ammoniaque, nous laiflames le réfidu dans la même cloche & fur la même furface de mercure, oü Jes gaz avoient été mêlés, & nous fimes pafler un peu d'acide fulfurique étendu. Le volume de gaz augmenta jusqu'a remplir la moitié du verre; étant examiné il fe trouva être du gaz hydrogéne fulfuré. L'acide fulfurique dans ce cas s'était combiné avec tout le gaz am moniaque employé, tant avec celui qui reftait, qu'avec celui,qui était entré en combinaifon avec le gaz hydrogéne fulfuré. .Celui-ci devoit donc reparoicre en conféquence. Cet-  ( *5 3 Cette différence, qu'i! y a par rapport a la disparition & k la réproduction du gaz hydrogéne fulfuré, dans le cas, oü on fait palfer le réfidu des gaz dans un autre verre fur du mercure pur, & dans celui, oü on le laiife dans lamêmecloche oü on les a mêlés, fut rendue encore plus fenfible par 1'expérience fuivante. Ayant fait palfer le réfidu du mélange de deux parties égales de gaz .hydrogéne fulfuré & de gaz ammoniaque dans un autre verre & 1'ayant nettoyé trés exaéiement, nous fimes pafler un peu d'acide fulfurique étendu,tant dans le verre qui contenoit le gaz purifié que dans 1'autre qui ne contenoit que les dépots formés fur les parois du verre & fur la furface du mercure. Le gaz du premier fut abforbé complétement; il était donc du gaz ammoniaque ; dans 1'autre il fe développa un volume de gaz égal a. celui du gaz hydrogéne fulfuré employé , & qui en effet n'était autre chofe que ce gaz même. Ce dernier réfultat prouve de la maniere Ia plus évidente que le gaz ammoniaque & le gaz hydrogéne fulfuré, en fe combinant enfemble, quittent 1'état gazeuxj & que les dépots qu'on obferve font en effet le produit de cette combinaifon. Dans les expériences rapportées jusqu'ici, nous avons fait pafler dans le verre tout a la fois un volume de gaz ammoniaque égal a celui du gaz D hy-  Qi6 ) hydrogéne fulfuré employé; dans la fuivante nous Vavons fait palfer bulle a bulle d'un petit flacon de verre a mefure qu'il s'y produifoit. Au commencement on ne voyoit aucun changement dans le volume de gaz, mais il fe formoit un dépot de poudre noiratre fur la furface du mercure , & l'on voyoit naitre une vapeur blanche & des enduits fur les parois du vafe comme dans Ie« expériences précédentes. On s'attendroit naturellement a voir dinrinuer le volume de ces gaz a mefure que ces dépots fe forment; «Sc il eft difficile d'expliquer cette circonftance (*); mais elle n'eft pas particuliere a cette combinaifon; on obferve un phénomene analogue dans la combinaifon du gaz oxygène & du gaz nitreux. En tout cas, eet état ftationaire du volume des gaz mêlés n'a lieu que pour un certain tems: & en continuant de faire palfer du gaz ammoniaque, nous vimes bientöt diminuer le gaz, de forte que Ie verre qui en avoit été rempli n'en contenoit plus que pour | de fa capacité: enfuite il recommencoit a aug- (*) On pourroit 1'expiïquer peutère de la maniere fuivante. Le calorique, dégagé de la ponion des gaz qui fe fixe, augmente le volume du gaz reftant, dont par conféquent la quantité ne paroitra pas diminuer a 1'oeil; mais qui en effet aura moin* de denfué qu'il n'avait auparavant.  ) aagmenter. Pendant ce procédé il fe fornia des enduits d'une vapeur ou plutöt d'une fumée blauchatre comrne a 1'ordinaire. Le reftant de gaz, que nous n'eflayames qu'après en avoir vu augmenter de nouveau le volume, fut trouvé con. ftarament dans plufieurs expériences être du gaz ammoniaque. II était abforbé a l'inftant par 1'eau; après 1'abforption nous y fimes monter un peu d'acide fulfurique étendu, toujours dans la même cloche, dont les parois & le mercure étaient enduits des dépots formés pendant 1'opération. Cet acide, en s'emparant de 1'ammoniaque, tant de celui qui était en combinaifon avec le gaz hydrogéne fulfuré, que de celui qui était abforbé dans l'eau, fit reparoitre le gaz hydrogéne fulfuré dans fa quantité originaire. De toutes nos expériences de ce genre aucune ne nous a fourni* de réfultats fi complets que la fuivante. Ayant nettoyé & féché avec beaucoup de précaution une certaine quantité de gaz hydrogéne fulfuré, nous y fimes palfer peu a peu du gaz ammoniaque produit d'un flacon entiérement rempli d'ammoniaque, afin d'en exclure tout air commun. Comme a 1'ordinaire, il fe forma d'abord de la vapeur blanche & du dépót, mais il fe paffa quelque tems avant qu'il y eüt du changement dans le volume du g?.z; enfuite Ia diminution eut lieu, jusqu'a faire disparoitre tout le gaz a ta.-ès D 2 peu  ( *3 ) peu de chofe prés. La produéfcion rapide & abondante du gaz ammoniaque nous ayant empêché de faiïir précifement eet infrant pour la faire celfer, nous eümes par conféquent un excès d'ammoniaque. Nous y fimes palfer un peu d'eau, qui 1'abforba complétement a une trés petite bulle prés. Ayant fait palfer enfuite dans cette liqueur un peu d'acide fulfurique concentré, il n'y eut d'abord aucune produétion; mais ayant faturé d'acide 1'excès d'ammoniaque, le gaz hydrogéne fulfuré fe développa & reparut comme a 1'ordinaire dans fa quantité originaire. Cette expérience a donc fait voir que le gaz hydrogéne fulfuré & le gaz ammoniaque en fe combinant enfemble quittent 1'un & 1'autre. 1'état gazeux, & forment une efpece de fulfure ammoniacal, ou au moins une combinaifon de Ia quelle on peut produire du gaz hydrogéne fulfuré, de même que des fulfuresj, en ajoutant un acide. II reftait donc encore a examiner, fi peutêtre la chaleur feule, & fans le moyen d'un acide , pourroit dégager du fulfure d'ammoniaque le gaz hydrogéne fulfuré, qui s'y trouve. Pour eet effet nous fimes bouillir un peu de fulfure ordinaire d'ammoniaque, & nous receuillimes le produit fur du mercure. Ce produit était gazeux, mais troublé & rempli d'une vapeur parfairement analogue a celle qu'exhale ordinairement ce ful- fu-  C 29 ) {ure , & qui 1'a fait nommer Liqueur fumante dt Boyle. Nous le partagames en deux parties, dont nous rendimes Tune parfaitement claire, au moyen d'un papier a filtrer, qui abforboit les vapeurs : cette partie diminua ainii k peuprès de \. Enfuite nous fimes palfer dans ce gaz, de même que dans 1'autre ou l'on avait lailfé la vapeur qui le troubloit, des quantités égales d'acide fulfurique; celui-ci ne de'veloppa aucun gaz hydrogéne fulfuré du gaz transparent; mais il en fit reparoitre une quantité confidérable de 1'autre, ou plutöt des vapeurs qui s'y trouvoient. Ce réfultat nous montra donc que la vapeur, ou plutöt la fumée blanchatre, qu'on voit s'exhaler du fulfure d'ammoniaque, ne provient que de runion du gaz ammoniaque avec le gaz hydrogéne fulfuré qu'il entraine en fe volatilifant. Cette expérience nous fit voirenmêmetems, pourquoi la chaleur feule ne fufïït pas pour dégager le gaz hydrogéne fulfuré du fulfure d'ammoniaque, quoique celui-ci en contient en grande quantité. La même expérience nous apprend encore pourquoi dans tous les cas, oü s'eft formée cette fumée, dont nous parions, & qu'elle eft reftée dépofée aux parois du vafe & a la furface du mercure, on obtient, en ajoutant un acide, une quantité de gaz hydrogéne fulfuré égale k celle qui avoit disparu. Enfin la grande quantité de gaz D 3 hy-  C s° ) hydrogéne fulfuré que contient la Liqueur famante de Boyle, la rapidité de fa production, qui eft presque momentanée, & le dégagement confidérable de calórique, qui 1'accompagne, peuvent fervir a expliquer 1'efpece de détonation, qu'a obfervée M. Fourcroy en verfant fur cette liqueur de 1'aciJe fulfurique très-concentré (*_). VIII Nous avons dit ci-deffus, & nous venons de le prouver encore par 1'exemple du fulfure d'ammoniaque, que les Sulfures Cauftiques ne donnent pas de gaz hydrogéne fulfuré par la chaleur feule; qu'il faut au moins, pour 1'obtenir, une chaleur beaucoup fupérieure a cel'e de l'eau bouillante. Mais le cas eft tout a fait différent pour les Sulfures de Carbonate de potaffe, de foude &c. Ayant préparé ceux-ci par la voieféche, & les ayant hume&é d'un peu d'eau, nous les avons chauffé, & nous en avons obtenu une quantité affez confidérable de gaz; mais ce gaz éteignit la lumiere, troubla l'eau de chaux, fut abforbé par 1'ammoniaque & ne parut être d'abord que du gaz acide carbonique. La même chofe arrivé, quand on O Elém. de Chymis T. II. p. 358.  C 31 ) on verfe fur ces fulfures un acide un peu étendn d'eau: on en obtient dans ce cas un gaz, qui eft doué des mêmes propriétés. Au commencement de ces recherches nous ne fimes abforber, par l'eau de chaux ou par l'ammo. niaque, que la plus grande partie de ce gaz; croyant pouvoir féparer de cette manière le gaz acide carbonique du gaz hydrogéne fulfuré, qui y feroit mêlé, & d'obtenir celui-ci pour refte. Mais le réfultat n'ayant pas répondu ï notre attente k eet égard, puisque la lumiere s'éteignoit dans le réfidu tout comme auparavant, nous nous propofames d'elfayer avant tout,li une certaine quantité de gaz hydrogéne fulfuré pourroit être tellement masquée par le gaz acide carbonique, qu'on ne fauroitplus le reconnoitre par les raoyens ordinaires. Nous fimes pour eet effet un mélange artificiel de parties égales de gaz acide carbonique & de gaz hydrogéne fulfuré. Nous 1'expofames a l'eau de chaux, & nous enlaiffames abforber une quantité beaucoup plus confidérable que celle du gaz acide carbonique employé: cependant le réfidu éteignoit la lumiere comme auparavant, & ne donnoit aucun indice d'être du gaz hydrogéne fulfuré. Nous eümes donc recours a un autre moyen pour reconnoitre la préfence du gaz hydrogéne fulfuré dans le gaz obtenu des fulfures des carbonates j & pour le diftinguer du gaz acide carbo- ni-  C 3* ) fiique , auquel il eft mêlé: ce moyen eft celui de fa décompofition par 1'acide nitrique , connue généralement (*) & confirmée par nos expériences. Ayant fait bouillir du fulfure de carbonate de foude & en ayant recueilli le gaz fur du mercure, nous le transportames du mercure fur de 1'eau. Ayant enfuite plongé 1'ouverture de la cloche dans 1'acide nitrique il y eut a l'inftant diminution de gaz & formation de dépots de foufre. Le gaz reftant, étant examiné, fe trouva être du gaz acide carbonique. Nous croyons que cette produ&ion de gaz des fulfures non cauftiques, & les foupcons trés fondés qu'on avoit, que ce produit doit contenir du gaz hydrogéne fulfuré, a induit en erreur les Chymiftes, qui ont avancé, qu'on peut obtenir le gaz hydrogéne fulfuré des fulfures en général par la chaleur feule. Ayant fans doute obtenu le même produit que nous pour les fulfures des carbonates, ils ont cru, qu'en continuant le procédé, & en féparant le gaz acide carbonique (ce qui ne fe fait que difficilement, & point de tout, comme on 1'a avancé, par 1'ammoniaque ou par l'eau de chaux) on obtiendroit du gaz hydrogéne fulfuré fans mélange, 6c qu'ainfi on obtiendroit également (*) Four.cr.oy Elém. de Chyraie T. II. p, 357.  ( 33 ) ment des fulfures d'alkalis cauftiques, par la chaleur feule, du gaz hydrogéne fulfuré qui ne feroit pas mêlé de gaz acide carbonique. Mais on s'eft trompé dans cette idéé; le gaz acide carbonique-, étant combiné avec la potaffe ou avec la foude, affoiblit 1'affinité de celles-ci pour le gaz hydrogéne fulfuré; & foh a&ion a eet égard, quoi■que trés foible, n'en eft pas moins analogue a celle des acides en général, qui, en s'emparant de 1'alkali des fulfures, détruifent leur i.ffinité pour le gaz hydrogéne fulfuré. Un acide plus fort, en chaffant le gaz acide carbonique, développe en même tems le gaz hydrogéne fulfuré : la chaleur feule les développe tous les deux en même tems; mais il n'en fuit pas, que le même effet aura lieu pour les fulfures cauftiques, auxquels le gaz hydrogéne fulfuré tient avec plus de force. T i*P ' 1 Jl. 11 nous refte encore a éclaircir le phénomene intéreffant de la- décompofition de 1'Air atmosphdrique & de 1'abforption du gaz oxygène par les fulfures humides. Nous favons maintenant que c'eft l'eau qui eft décompofée dans ce cas; que fon oxygène fe porte fur le foufre du fulfure, & que fon hydrogéne uni k un peu de foufre refte diffous dans 1'alkali du fulfure, dont il eft dégagé E par  C34) par les acides. Nous favons également que Ie foufre & 1'alkali n'ont, ni feuls, ni combinés dans 1'état de fulfure fee ou de fulfate, Ia propriété d'attirer 1'oxygène, foit pur, foit de 1'air atmosphérique. Enfin il eft connu, & nos expériences l'ont confirmé , que le gaz hydrogéne fulfuré & le gaz oxygène, étant mêlés enfemble dans une certaine proportion, quittent fun & 1'autre 1'état gazeux, de forte que tout le gaz oxygène fe trouve detruit. Ces réflexions nous ont engagé a rechercher, fi le gaz hydrogéne fulfuré conferveroit cette même faculté, pendant qu'il eft difibus dans 1'alkali, & fi la propriété, qu'ont les fulfures humectés, d'attirer 1'oxygène de Fatmosphére, ne dépendroit pas de cette aétion du gaz hydrogéne fulfuré, que leur alkali tient en diflblution. Pour eet effet nous faturames un peu de potafle liquide de gaz hydrogéne fulfuré : & nous renfermames cette liqueur dans de 1'air atmosphérique fur du mercure. Dans peu de jours il fe manifefta une diminution dans le volume du gaz, que nous trouvames après quelques jours avoir perdu tout fon oxygène, & n'être plus que du gaz azote. Nous obtinmes le même réfultat en renfermant la liqueur alkaline faturée de gaz hydrogéne fulfuré dans du gaz oxygène pur. Dans deux  C 35 ) deux jours 1'abforption de ce gaz fut compléte. C'eft au moyen de ces expériences, combinées avec les réfultats précédens, que nous croyons être en état d'expliquer d'une maniere compléte & exacte faction réciproque des fulfures, de l'eau, & de 1'air atmosphérique, & les décompoütions & combinaifons qui en réfultent. Nous allons conclure en préfentant un réfumé général des différens points théoriques , indiqués dans le cours de ce mémoire, & en faifant fur chaque point les réflexions, que nous croirons propres a 1'éclaircir & a Ie conftater. X. CONCLUSIONS GENERALES. i. Le Soufre, s'uniifant aux Alkalis, z la Chaux, k la Baryte & a la Magnéfie, forme avec-ces fubftances des combinaifons chymiques, qui ont des propriétés & des loix d'affinité différentes de celles de leurs compofans. ' 2. Une des propriétés les plus remarquables, que le foufre acquiert dans eet état, c'eft 1'intenfion de la faculté d'attirer 1'oxygène. La raifbn de cette attra&ion plus active femble être, que 1'alkali préfente k la combinaifon du fouE 2 fre  (36- y fre & de 1'oxygène, k mefure qu'èlJe fe forme-, une bafe, k la quelle cette combinaifon fe joint avec la plus grande avidité pour conftituer un fulfate. La formation du fulfate fera donc dans ce cas 1'effet de deux affinités, de celle que Ie foufre a par lui-même pour 1'oxygène , maisqu'il n'exerce qu'a une température trés élevée; & de celle que la bafe alkaline a pour la combinaifon du foufre & de 1'oxygène, c'eft a dire, pour 1'acide fulfurique; de forte que la derniere, donne a Ja première un plus grand degré d'in-tenfiré. 3. Toutefois cette faculté d'attirer 1'oxygène; n'eft pas augmentée dans le foufre par fa combinaifon avec les alkalis jusqu'au point de pouvoir faire quitter k 1'oxygène 1'état gazeux, pas même quand il fe trouve combine avec le gaz.azote dans 1'état de gaz nitreux. Ces fulfures exercent leur attraction pour 1'oxygène en décompofant l'eau.> 11 paroit que lbxygène de l'eau eft attiré dansce cas par préférence k celui qui fe trouve dans1'état gazeux, paree que dans ce dernier cas il fe trouve uni k beaucoup de calorique. Au refte v c'eft le même phénomene, qu'on obferve ,par exemple, dans lè fer, qui ne s'altére pas fenfiblement foit dans 1'atmosphere, foit même dans le gaz. oxygène pur, tandis qu'il attire avidement 1'oxygène de l'eau. 4. En  C 37' ) 4. En . esaroinant donc un fulfure humecté. d'eau ou préparé par la voic huraide, on trouve que 1'oxygène de l'eau, uni a une partie de foufre, eft converti en acide fulfurique; & que eet acide a forraé avec la bafe du, fulfure un. fulfate. 5. L'hydrogène de l'eau,dés qu'ildevientlibre, s'unit de fon cöté avec une. autre partie du foufre, & conftitue la combinaifon connue fous le nom de Gaz Hydrogéne Sulfuré ou hépatique. Pour que cette union du foufre & de l'hydrogène fe faffe, il convient que ces deux fubftances fe rencontrent au moment oü l'hydrogène de-vient libre, & avant qu'il ait pris la forme de, gaz. 6. Ce gaz, après avoir été formé, ne quitte pas la folution des fulfures, mais y refte combine, a la bafe alkaline ou terreufe, pourvu que cette. bafe foit diffoute dans 1'eau, qui favorifc cette folution comme plufieurs autres. Comme le gaz .hydrogéne pur n'eft pas foluble dans les alkalis, 1'affinité de ceux-ci pour le gaz hydrogéne fulfuré paroit dépendre de leur afïi nité pour le foufre. 7. Le gaz hydrogéne fulfuré diffout dans les alkalis y eft affez fixé pour refifter k la chaleur de l'eau bouillante, fans les quitter; il faut pour eet effet un acide, qui par une plus grande affinité s'env E 3 pa..  C 33 ) pare de 1'alkali, le fature, & en dégage ainfi le gaz. 11 faut employer pour eet effet des acides qui ne cédent pas facilement leur oxygène, pour qu'ils ne foient pas décompofés euxmêmes par le gaz hydrogéne fulfuré, qui s'enrpareroit de leur oxy géne. On peut quelquefois prévenir cette décompofition des acides & du gaz en les étendant d'eau. Nous nous réfervons de donner aune autre occafion un plus ample détail de l'aétion mutuelle des acides & du gaz hydrogéne fulfuré. 8. Ce gaz enfin retient dans la diflblution alkaline fes propriétés; & furtout celle d'attirer le gaz oxygène, & de former avec lui de l'eau en abandonnant le foufre. 9. Un fulfure alkalin, diffout dans l'eau, contient donc i°. le fulfure proprement dit, ou Ia combinaifon du foufre avec ralkali; 20. le fulfate qui s'eft formé par Ia décompofition de l'eau, dont 1'oxygène s'eft uni a une portion de foufre j & 3°- gaz hydrogéne fulfuré difibut dans la bafe alkaline du fulfure. Reuniffons ces faits, & la maniere, dont les fulfures agiffent en décompofant 1'air atmosphérique & en abforbant le gaz oxygène, deviendra évidente. Les fulfures fecs n'ont aucune aétion fur Ie gaz oxygène; or,dans les fulfures liquides on a , outre ce fulfure diffout dans l'eau, le fulfate qui s'eft for-  C 39 ) formé; mais celui-ci n'exerce non plus aucune attraélion fur 1'oxygène. II ne refte donc que le gaz hydrogéne fulfuré diffout dans 1'alkali; & eu effet, c'eft a cette derrière portion du fulfure liquide feule, qu'il faut attribuer 1'abforption du gaz oxygène. Les expériences rapporties dans ce mémoire ne laiffent aucun doute a eet egard. En diifolvant un fulfure alkalin dans l'eau, la décompofition de l'eau, (pourvu que 1'opérationfe faffe dans des vaiffeaux bien bouchés,) continuera jusqu'a ce que Ia bafe alkaline foit faturée de gaz hydrogéne fulfuré : ce terme paffé, il y aura équi. libre, & l'eau ne fera plus décompofée. Auffi, c'eft une circonftance bien connue, que les fulfures fe" confervent trés bien, c'eft-a-dire ne fe changent pas entiérement en fulfates,quand on les conferve dans des bouteilles exaclement bouchées. D'ou il paroït réfultcr encore, que la décompofition de l'eau par les fulfures,- caufée en partie par -l'attraction de 1'aikali fur la combinaifon de 1'une des parties conftituantes de 1'eau avec le foufre, c'eft a dire fur 1'acide fulfurique, eft favorifée en même tems par l'attraction de ce même alkali fur la combinaifon du foufre avec 1'autre partie conftituante de l'eau, c'eft a dire fur le gaz hydrogéne fulfuré. C'eft encore une des raifons peut-être, pourquoi le fulfure décompofe l'eau plutöt que 1'air atmosphérique. Au  C 4° ) Au contraire, fi on laiffe expofé ï 1'air atmofphérique un fulfure liquide , l'hydrogène cherche a reprendre fon oxygène, & 1'eau eft reproduite ; tandis que le foufre, qui avoit été unia l'hydrogène-, refte diffous dans 1'alkali. Mais cette eau eft encore décompofée a fon tour & reproduite de nouveau: & ces opérarions continuent alternativenient, jusqu'a ce qu'enfin tout le fulfure, particule a particule, foit changé en fulfate. Ce font la les réfultats des recherches que nous avons entreprifes'fur la combinaifon du Soufre avec les fubftances Alkalines. Nous nous'flattons d'avoir éclairci, par un examen fuivi & par 1'obfervation de quelques propriétés inconnues ou peu conftatées, fhiftoire de ces fulfures, & d'avoir lié, par une théorie qui eft le réfultat de faits bien conftatés, leur maniere d'agir fur l'eau & fur 1'air atmosphérique avec la Théorie générale Phyficochymique. Nous nous propofons de publier de tems en tems les recherches, qui nous paroitront fournir de nouvelles lumieres pour les progrès de ia Phyüque & de la Chymie,