MACBEïH •T M -JL G JE JD J M E .N C I N Q ACTE S,  Cejfdusjt le kom dhtne Tragédie u4ng!oife&c>e(t9 hpeüprès, tout le rapport que les deux piêces ont etitr>elles. Qtfon en juge en les lifant. Si quelque poète Mm fait jamais paf er mon poëme dans fa langue9 on n>y reconnoitra pas plus le Macbeth de Shakespear que J'on ne reconnoh la Semiramis de Crèbillon Hans celh de Voltaire. B. Cette piéce eft partie pour être remifeauxCo médiens frangois le 20 Juillct 1783 &l'onenacommeneé Fimprcffion le 6 Aoüt de la même année.  318 MACBETS W JU JL G JE JD JU M E N C I N Q A C T È Se ET EN VERS p a r. IJS JB" JE JSV JUJË Baron de St. lldephont, i UTRECHT;, Chez BARTHELEMY WILD, i 7 8 ?r  Le Cofïmne eft celui du XÏeme Jtéc/e. éalcolm, fils du Roi. 77 garde le même habit dans tous lel aSès'. Macbeth, Thane ami & parent du Roï. En habit cuïrajfe: au cinqutlme uctc, // efl vétu d^une robe longue ditroajfee ,• mats qut n'eft point une robe de ckambre, pêtement indigne de la Tragédie. Lady Macbeth, Au cinquihne a£te, elle paroit yê-. tut de blanc, couleur affeSèe au deutl des Keines en Ecojfe & én Angleterre* Bainco, Lord ami de Macbeth. IIeft yetu de deuïl au cïnquiême acte. Maduff, Lord ami de Malcolm. En habit cuirajfê & en deuil au cinquihne acle. Un Lord. "4 Un Officier. j Les deux fils de Macbeth , en- ' Tous en noir au c/a- fans de dix & douze ans. Yquièms aSie. Lords. Gardes. J. Heraults de Cataphalque. La Scène est au Chateau d,Invemefs^ un Ecosfe.  JO M D X JÈ A SON ALTESSE ROYALE LE PRINCE ROYAL DE PRUSSE. MONSEIGNEUR JtCt m'eft bien cher d'orner mon ouprage du' nom de vttre ALTESSE ROTALE. Ma reconnoijfancs ne peut qu'ètre inférieure Ü m bo/ités, je me les rappélerai toujours. Vaccueil qWelle m'a fait eft ïepoque la plus heureufe de ma vie, ma gloire eft de la confacrer. Monfeigneur, le hut ordinaire des Dédicaces eft l'honneur de 1'attaché d'un grand nom. L'honnettr du yêtre eft fandoute innapréciable : mais mon premier motif eft mon dévouement, mon attachement particulier 'a vêtre ALTESSE ROTALE, a toute pÖtre Asgufte Familie. Hèritier des connoiffances, des qualités, des yertus du plus grand Mmarque du monde, du premier Héros du fiécle, déja connu par elles, grand auprés du trjinp , comment n'auriez - mts pas tous les cisur.s ?  Le grand comoijfèur des hommes voüi a nommi fon fils (f) & cette adoptlon Juffiroit a votre mérite, quani PEurope le connouroït meins. Que ne puls - je , par cent organes, publier Jar.cejfe que vous etes le plus grand Prince de la terre, le plus almable, que la nature vous a formê pour l'ètre &-que, dans un rang obfcur , on vous choïfiroit au milieu de tous les hommes? 'Mon Prince, 'tl ejl certainement grand nombre de performes quï vous cdmirent au tan t que mol; maïs il tien eft point 5 je le dis 3 qui puifint vous almer davantage. Ce femiment de mon cezur ne ceffera qtiavec ma vie & Pintention efttrop pure pour que vótre ALTESSE ROTALE . tie me pardonne pas la liberté de cette effufwn , ma première jouiffance. Je mets a vos piés le profond respeSi evec lequel je fuis , Monfeigneur, DE VOTRE ALTESSE ROTALE Le trés humble & trés obeïflant Serviteiar { LE Pr. Le Febure Baron de St. Ildephont. Amferdam le 10 Octobre (t) Dans 'f dernicre geerrc conti-e PEinpercur, le Prince Royal a ddploié des tnkns nnlitaires .qui out etonné le Roi même , & eefut, dins r.entlioufiasiiie du contenteraent, que S.i Majefté lui dit 1-uWiquement : Je ne doïs 'phs vous ye^ardir comr.ie mon Neyet!, taait eom'ms mon Fils. Elo^e don; on feut aiieiix touce la val*» qjond on connoit Ie Roi.  MACBETH T M JL Gr M jD X JE. ACTE PREMIER. [La Scène eft dans le vefiibule du Chat eau. SCÈNE PREMIÈRE. Lady (*) M a c b e t n. CElle tient une Lettre & parle a des Domefiques.') Cl^ui mon époux revient, oui Macbeth eft vainqueur., Annoncez fon retour, fa gloire, fa valeur Ec que, dans Invemefs, on célébre, on honore Un maïtre qui vous fauve, un héros quej'adore. (Les Domeftiques fe retirent, Lady avance.!), Triomphe glorieux a mon amour bien doux ! (*) On écrit Lady & 1'on prononce Lsidy. en Ajig!pis, Ce qui efi. bien plus doux que la proiionciation Francoifc qui parle comme il ea écrit. Je ferojs charmé que les adeurs adoptaffent la prononciatioj^, Aagloife. A 3  6 M A C B E T H Jarme (ans m'effraier & quitte mon époux. Le deftin, pour fes jours, ne veut pas que jetremble, II a pour lui le ciel & fon courage enfemble. L'inéxorable mort rcspecte fa valeur Et quand Macbeth combat jc fais qu'il eft vainqueur, II paroit & déja certain de fa conquête, Ce font des lauriers neufs qui vont ceindre fa tête. Que Duncan eft heureux! au fond de fon palais, Tranquille il jouïra du fruit de ces hauts faits. Au milieu des oififs qui 1'entourrent a Scone , Yvre de leur encens, endormi fur le tröne Dont le fardeau péfant rétombe fur Macbeth, Comme un fervile droit paié par un fujet, II recoit du vainqueur le prix de la victoire, En exigeant encor hommage de fa gloirc. Aveugle préjugé! groffiéreté des fens! Qui fait proftituer les respects & 1'encens Au miférable autel d'une idole impuifiante. Foibles adorateuis,' troupe vile & rampante, C'eft vötre foi ftupide & la crédulité Qui firent fon crédit & fon autorité. Si le peuple fe livre aux rois pour le defFendre, qui ne le deffend pas n'a plus rièn a prétendre. Son deffenfeur eft roi. ' Veuille 1'être, Macbeth, Et la terre & les cieux fécondent ton projet. Souvien toi d'avoir vu tes nobles defiinées Au temple des decrets a jamais enchainées.  TRAGEDIE. 7 Souvlen toi du mortel favorifé des cieux Qui, par Tart tout divifj des nombres précieux (a), A fuivi, fans errcr, dans la route infinie De Tavénir otscur, les traces de ta vie. Sept ans ont apporté fur la prcdiction L'irréfiftible poids de la conviftion. II a dit que deux fois , a ta haute vaiilance, Ton pais malheureux devroit fa délivrance. Deux fois, depuis ce tems, tes courageux efforts N'ont^ils pas repoufTé 1'ennemi de nos bords ? N'as-tu pas étouffé, n'as-tu pas fu detruire Les feux féditieux qui confummoient 1'empire ? Le titre glorieux de Thane (b) de Glamis, Dans fes prédiflions, te fut auffi promis; Tu m'apprends a Finftant que le Roi t'en hoiiore. Le titre de Cawdor CO « tes voeux i™nque encore, Et le Sceptre furtout.... tu 1'auras, crois ma foi, Crois en.... ah ! cher Macbeth, tule crois comme moi. f>) J'ai trouvé l'Aftrologie Jndiciaire a la quellc tous les homBies croiroicut «ncorc fi 1'on vouloit , préférable aux fordères de Shakespear qui jettent dans un Chaildpin des *és de juifs. & des ergots de cocbon potsr faire leurs foitiléges. (f) Tbane Étoit une qualité que Malcolm , un des pcrionnages dc cette piéce, a changé en celui de Comte a fon avéncmenr nu trónc. Pour prononcer agréablement le mot de Thane, it. faut dire comme s'11 dtoit écrit zant. Dans ce mot Ie tk anglois appreche de ccïïs prononciation. («} Qn doit prononcer comme s'il étoit ccrit Cador^ 4 4  MACBETH Tu vois que!tout prend foin de t'applanir la route Et la convi&ion eclate dans ton doate. Je le vois, je le lis „ que de biens a la fois.' „ Ah ! la fortune veut m'accabler fous fon poids „ Que je crains!.Cependant fi j'avois fait injure j, au favoir d'un mortel qui connut la nature „ s'il eut dit.... mais c'efl: trop accréditer Terreur. ;, excufe, chère époufe, & guide mieux mon cceur." Oui, je' ferai ton guide & tu pourras me fuivre. Mon ame, a fon espoir , fans referve fe livre, Et, de tous les cötés, je vois, pour un projet, Qu'il s'eh préfcnte cent. Tu regneras Macbeth, Mais je n'ai que roi feul, toi contre ta fortune. De ton apre vertu fi 1'idée importune, A i'inftant décifif, vient a nous traveifcr, C*en eft fait, tu péris pour craindre d'avancer. Le roi viellit. Malcolm (a), au tröne de fon père , Se voit bientót affis'; redoute fa colere. II croit, de fon himeh, que tu rompis les projets Et Tamour outragé ne pardonne jamais, falfi le tems, tout eft du plus heureux p'réfa^e» Feu d'amis fuppléront a fon jeune courage , Le fang t'appéle au tröne, on cbérit ton grand cceui-, On respeéte ton nom, on craindra ta valeur. 11) Ou pïpnonce Mtkom.  TRAGEDIE. a On ne prend plus confeil dans un moment extréme, Arrivé, exécutons — ah! le voici lui même. J'entcnds, des inftrumens, organes du trépas, Les accords martiaux — je vole fur fes pas. SCÈNE SECONDE. Lady Macbeth, Macbeth, Guèriert i Troupes, Mufiques, Lady Macbeth. Cher Glamis, cher époux, chaque jour a mes vceux, La fortune te rend plus grand & plus heureux. Macbeth. Madame, de vos voeux, 1'aflurance m'eft chère. Vótre époux, quitte encor des dangers de la guerre, Revient digne de vous. Le rébelle eft foumis Et TEcoue apréfent ne craint plus d'ennemis. Macdonall, aurrefois 1'honneur de Ia patrie, Aujourd'huy fon opprobre , a terminé fa vie Et trouvé, fous ma main, un glorieux trépas Que, pour fa trahifon, il ne méritoit pas. Mais fes membres épars reftent fans funéraillea Et tére placce au haut de nos murailles,  ia MACBETH ïntïmide 1'ingrat qui voudroit 1'imitcr. A mes braves guerriers rien n'a pu réfifter. Cette illuftre journée éternife leur gloire. Ils fe multiplioient, ils trainoient la vicloire, Et fi mon foible bras s'eft acquis quelque honneur,. Je le dois tout entier a leur haute valeur. Jamais la liberté ne fut fi bien fervie. Jamais plus vaillamment on ne livra fa vie. Ces guerriers, al'envi, fcrrés autour de moi, Se disputoient 1'honneur de mourir pour leur roi. La mort armoit leur main de fa faulx redoutable. J'ai vu'tomber vingt chefs & leur bras indomptable A bientöt diffipé eet infolent ramas De brigands, qui venoient infefter nos climats. Généreux Compagnons du deftin de mes armes, AUez gouter la paix a 1'abri des alarmes. De' vötre Suzerain vous afïïirez 1'honneur, II doit de fes vaflaux aflurer le bonheur. , Ma gloire eft vötre bien, & ma main doit vous rendre Ceux qu'un roi bienfaifant, fur moi, daigne rependre. (Lfj troupes fe retirent.") Voila tous mes enfans & je fens, auprès d'eux, Ce cceur chargé d'ennuis un peu moins malheureux. Lady Macbeth. Vous malheureux? ó ciel! & Macbeth 1'ofe dire-1  TRAGEDIE. lï Quand a combler vos voeux la fortune confpire, Fixe fon inconftance & paflè vötre espoir ; Quand 1'Etat, a vos piés, reconnoit vous devoir Son ialut, & bénit la main illuftre & chère Qui rend la joie a tous, h 1'orphélin un père, A 1'cpoufè un époux; quand*vous rendez, enfin, Et le fceptre & 1'honneur a vötre Souverain, Et que, paiant vos foins, d'une faveur trop jufte.... Macbeth. Et deft précifément" cette faveur auguftc Qui fait tant d'envieux & qu'on connoit fi mal Qui me caufe ce trouble a mon repos fatal. O Princes! vous pourriez n'avoir d'autre vengeance Que le funefte don de vötre confidence ? Cent Argus aux cent yeux fuivent inceflamment, Dans leur foijci jaloux , les pas d'un confident. Quelle vertu qu'il ait, quoiqu'il faffè de fage , Le bien demcure aux Roi, le mal eft fon ouvrage', Et fon dernier falaire eft, pour tant de dégouts, L'inconftance du maitre & la haine de tous. Helas! vous le favez, je respefte, j'cxcufe Les foibleflès du roi: mais que Macbeth 1'abufe Jusqu'a les carefier; un homme tel que moi Méconnoit les moiens d'un auffi vil aloi. J'ai fait ce que j'ai pu pour éteindre en fon' ame  12 MACBETH Les inutiles feux de fa nouvelle flamme. j'ai era que, fins effbrt & les laiflant au tf m., lis s'éteindroient bientöc fur les glacés des t.n;, Mais voiaot chaque jour augmenter fon caprice, j'ai fait parler enfin 1'Etat & la juftice. Et vous favez encor fon injufte mépris Pour fa foi, mes confeils & 1'amour de fon fils. Duncan cefiè a la fois d'être monarque & père, Le Prince, par fon ordre, a la cour d'Angleterrc, A pris pour Marguérite un légitime amour Et peut flatter fon coeur du plus tendre rétour. La fage politique approuve leur tendrcflè« Edward (a) voit a grands pas avancer la vielleffè, Atheling fon neveu, le dernier des Saxons A trpp fu merker le mépris des Bretons. Né loin d'eux, il n'a point ces glorieufes marqués, Ces vpttus, que le peuple exige a fes monarques. Marguérite fa foeur a donc de vaftes droits Dont pourroient quelque jours'enorgueillirnos rois('). Duncan le fait, 1'avoue, & fa folie tendreflè, Depuis que, dans fa cour, il a vu la princeflè Abforbe f.i raifon. II fe flatte qu'Edyvard, (_a~) On prononce Etouard. ( i ) On prononce Atetin. ( c ) E.i effet, los droits des Rois d'Ecofie a la couronne d'Angle» r;rre vieanent de Marguérite femme dc Maicphn Macmoor dont il eft iSi quefti&u.  TRAGEDIE. f% A fon roial amour, aiant un jufte égard, Approuvera fon choix, &, qu'au joug de fa flammé5 II eft capable encor d'aflèrvir une femme. Mais ö comble de maux! de tous cötés preflë Par d'injuftcs fureurs, je fuis embaraflë Et des transports du fils & des amours du pèrc. Juftement irrité, Malcolm, en fa colère, Croiant quand on perd tout que 1'on peut couc ofer j Prétend , de fes malheurs , hautement m'accufer. Et, dans 1'aveuglement de fa jaloufe audace, II ofe s'oublier jusques a la ménace. Au point. que, plaignant mo'ns fes deplaifirs fecrets, Avec plus de chagrin je les fupporterois. Lady Macbeth. Et c'eft de tant de maux dont le danger s'apprête, Qu'il vous faut, fins tarder, garantir vötre tête. Attendre, c'eft vous pcrdre, & vous fercz toujours La première viétime ofFerce a leurs amours. Qu'enfin le roi vous croie, k vos voeux qu'il fe rende, Qu'aux plaintes de fon fils fa bonté condescende, Qu'il rénonce, en un mot, a 1'objetadoré ; L'oublicra -1 - il ? fon coeur, a eet objet livré , Nouriflant chaque jour fes feux par fa prefence, Dévorant fon amour dans 1'horreur du filence , Dans 1'étemel combat de fes défirs contraints,  i4 MACBETH Ne maudira-t-il pas I'auteur de fes chagrins? Mais je veux apréfent qu'a vos defirs contraire,' Même vous impofant le devoir de les taire, Et, de fa pafllon, s'abandonnant au cours, II vienne k confommer fes fatales amours; Qu'en arrivera-t-ü ? le tems & fa foiblefie, Le dégout d'une époufe uferont fa tendreflb; Ët, dans le calme affreux d'un réveil plein d'horreifiV Venant a mefurer le vuide de fon cceur, Et n'y retrouvant plus que désordre & qu'orage, Des regrets impuillans, 1'infuportable image D'une femme parjure & d'un fils criminel, Des ferpens dévorans: prelTé du trait mortel,*; De fes peines alors il vous rendra comptable .,' Son erreur fera vötre, & vous ferez coupable Et de fa réfiftance & de tous fes oublis. Accufé par le père , aux vengeances du fils, Après lui, réfervé, pourfuivi par 1'envie D'une foule inconftante ivre de calomnie, Mari, femme, fils, peuple, en ce'.commun malheur, Vous vouront tous leurs maux, leur haine & leurhor- ( reur. M A C B E T H. Cette peinture aflreufe eft peutêtre tropvraie, ' Mais ici ce n'eft point un malheur qu'on diftraie/ mns le rang oü je fuis, je ne fuis plus h moi,  TRAGEDIË. 15 Je me dois tout entier a 1'Etat, h mon Roi. Et, dans tous les emplois oü 1'on fert la patrie, Le plus haut pöint de gloire eft de perdre la vié; Je fuis foldat enfin & mon plus cher espoir Eft, s'il faut, de périr en faifant mon dévoir, La prudence au furplus Lady Macbeth. II n'eft point de prudence' Qui vous puiflè fervir en femblable ocurrence. De périls trop preflans on eft envelopé. C'eft le noeud d'Alexandre, il doit être coupé. Macbeth. Que faut - il donc ... ? Lady Macbeth. Regner — la foibleflè autorife Ét Ton n'obeït plus au maïtre qu'on meprife. Söuvien toi du deftin. Souvien toi du mortel Qui perca fes decrets par fon art immortel. Appren que, ce matin, au léver de 1'aurore, Ce fage, dans ces lieux, vient de s'offrir encor*. j'ignorois du combat les fuccès glorieux,  £ü* MACBETH „ Tuvasvoir, rrTa-t-il dit, ton époux généreux „ Le front ceint des lauriers qu'arrache la viétoire, „ Plus grand par fes vertus encor que par fa gloire. „ Lady, voici Finfiant que je t'avois promis* „ C'eft peu detre Cawdor, c'eft peu d'être Glamis, „ Tu peux tout, ofe tout. L'aftre qui nous éclaire „ N'aura point parcouru fa briliante carrière, „ Deraain, fans que Macbeth ne cefle de fervir, „ Et ton épöux eft roi, s'il 1'ofe devenir. II dit & disparoit mon ame rafiurée S'abandonne a 1'espoir dont ellc eft énivrée0 Te vois déja briller.... Macbeth, N egarez point mon coeuf Et jusques a ce point n'embrafiez pas 1'erreur. De 1'orgueil des humains la ftupide croiance Donne ün crédit honteux a la fauflè fcience Qui careflè vos fens & féduit vos esprits. Croire que nos defiins dans le ciel font ecrits Et qu'il eft des mortels qui puiflênt les y lire, Etre homme, homme comme eux & fe laiflèr féduire^ C'eft de toute raifon perdre le fènriment. Lady M a c b e t h. Vous ne le penfez pas & vötre cceur dément  TRAGEDIE. if Ce quenvairïvous voülez vous efforcer de croire, Macbeth , & • vötre esprit fert mieux vötre mémoirc. Avez-vous oublié que 1'on voit des favans Qui, dans uri long travail, ont cönfiimé lcurs aas A fuivrc, étudier, ehércher, furprcndre mêmef, Dans fes moindres détails, 1'ouvrière fupréinc? Et qui, de la nature, ont appris des fecrets Que 1'homnie fage admire avec des yeux discrets: M.is que, d'un pcuple épais, 1'ignorante maiico N'ofe voir qu'en fuiant & traite d'artifice. Dans fa marche rapide on divife le teius, On peut faifir, du ciel, les divers mouvemens, De fes aflxcs brillans reconnoïtre les traces} Et, d'un compas hardi, méfurer fes espaces, Et vous ne voulez pas.... Macbeth. Je vcux & je confens Que 1'esprit puifle tout avec le fil des lens, Mais qu'il ailic, a plaifir, fans rapports cc fans guidj , A pas mal afiurés, s'égarer dans le vuide; Qu'il puilTe y découvrir, y voir un lenderüain Qui dépend d'un vouloir non pas moins incertain Que cent fois, dans un jour, le hazardpeut confondre. Lady Macbeth. Le hazard eft un mot qui quitte de répondre. B  té MACBETH L'incrédule Fa fait. A pas toujours égaux, L'uniforme nature avrr.ee en fes travaux. Elle gouverne tout fans efForts & fins peine , Et Ie premier anneau de i'invifible chaine Qui comprend 1'univers, repofe dans fes mams* Tout le- lie &, du ciel, aux affreux fouterrekis De 1'abirrjie profond, urie pente facile Conduit 1'obfervateur dans fa recherche utile. —* Vous defnandez en quoi le deffin d'un mortel Tient a Faftre élpïgné qui brille dans le ciel? Et vous voiez régner fur la nature entière Celui qui, "dans la nuk, nous prête fa lumière. II ramene , en fon cours, les faifons & les mois II épand & les biens & les maux a la fois, L'être vivant, furcout, recoit fon influence Et 1'Océan prclïe mugit fous fa puiflance. Et vous ne croiez pas, qu"avcc"quelques efForts.,On puifle ealculer & fuivre fes rapports ? Vous doutez! Ah ! voiez les falies de la terre Atelier quon a lu dans Ia nuit du miftère. Tous les pcuples dü monde ont vu la vérité Sur 1'avenir obscur repandrc fa clarté. La Science des tefns n'eft point urie chimère* L'Egipre, la première,en honneur fur la terre, A fes Mages longtems confulta fes deftins. Après elle, les Grecs, le flambeau des humains Au ternplc d'Apollon, prodigues de richeflès,  TRAGEDIE. t$ Atcendoient, en tremblant, la voix de fes prëcrefièsi Èc ces Romains fa:neux, de qui 1'urbanité Surpafia faccicisme en Gréce fi vanté , Vainqueurs & beaux esprits, confultoierk des augure. Et Rome, en fon berceau, vit fes races futures. Mais fans aller chercher chez des dieux etrangars Des exemples, peutëtre, a vos yeux rrienfdagers j Du vrai Dieu d'Israel ouvrez les tabernodes Et voiez 1'arche fairite y rendre des oracles, Des Prophètes facrés l'augufte vérité Transmife jusqu a nous dans toute fa purété. Ces tems heureux font prêts a reparoure encore* D'Edw^d (a), du jullc Edward que le Bréton horioré| Placé par fes vertus au rang des plus grands roix, L'espritpurn'a-t-ilpas fanftifié Ia voix? Et, de fon toucher faint, la faveur bienfaifante Ranime, en fes douleurs, 1'humanité fouffrante^ Macbeth, Jefais, ainfi que vous, honorer des vertus Dont tous les Souverains ne font point revétus. Je fais que cè monarque a le don des mirades , Que fon organe pur a rendu des oracles. {«) C'eft Edward dit le Confefleur. On fijt que les Roi; S"Ajt. gleterre tiennenc de lui le privilége de Guérir les Ecrouelles ixi le joucliant, cómme le-s Rois de Frauce tiennent le Jeur de St. Lu»>s. B *  so MACBETH Mais ne confondez pas une prédictiori Qne cenfurent les loix & la religion. Et quand la vérité luk de telles promefies, Pvapportez en Feffet aux humaines foibleflès. Dcvant un bel espoir le crédule placé Penfe , dans Favenir, voir fon chemin tracé, Ricn ne coüte a fon cceur, rii les foins,- ni le cnmê ; Mais lorsquc, du bonheur, il croit toucher la cime, II meurt en embrafiant Fombre qui 1'a décu. Ah !1 croiez que s'il efl: en efFet réfolu Que mon front doive un jour ceindre le diadême, Si telle eft des deftins la volonté fuprême, Immuables aififi que leurs commandemens, Us ont dé'ccrminé les moiens & le tems, Tout efl: fixé par eux.-— Mais fi, de tant de gloire j L'espoif* qu'on ma donné fe grave en ma mémoire, Avant que de r'egner, il Fautj je crois, encor Que je fois honoré du titre de Cawdor. SCÈNE TROISIEME. Les mêmes. Bainco(£). B a i n c o. Salut au grand*Cavvdor. Ami, le Roi m'ordonne (J) II eft écrit èn Angiui5 B.mco & rronoiisé comme neus I*ecrt vons. 11 fe-roit tiop dur de cfi'e Tanec.  TRAGEDIE. $i D'apporcer a Macbeth ce titre qu'il lui dpnnc Que mes embraflemens ... Macbeth. Bainco, vousfavcz peu Ménager un ami. Vous vous faites un jeu..., Bainco. Comment! vous m'étohnez & que voulcz - vors dire ?■ Macbeth. Le Thane de Cawdot & prospcre & rcspire Et vous me couaoiiïèz afiez bien.... Bainco. II cd mort Et fur un échaffaud a terminé fon fort. Aprenez fes forfaits lorsque vötre vaillanco, De traitre Macdonall chatioit 1'infolence, Le Thane de Cawdor couroit a fon malheur. L'infidéle Swéno (a), ce roi lache & trompeur Sur nos bords étonnés prépare une descente. On oourt, on fuit, au loin on féme lepouvante, Les païfans furpris a Cawdor ont recours; Mais loin de leur précer fon bras & fes fecours, {e) On proaonce Suém.  %% MACBETH Le traitre, a 1'ennemi, va porter alMance : Envain contrc Macduff ils ont fait réfiftance , Macduff,; dans un inftant, les a tous fait plier Et le Thane , en fes mains, eft tombé prifonnier. Pour le roi de Norvvay (£), dans une fuite prompte% ]I cherche fon falut & va cacher fa honte. Ami, c'eft pour Bainco la plus douce faveur De pouvoir aujourd'hui vour deploïer fon coeur, Son amitié, fa joie & fa reconnoillance , —« Mais que vois-je, Seigneur? vous gardez lefilence.1 Vötre front ombragé de foucis eft couvert. Duncan altend de vous un accueil plus ouvert, Macbeth. Ce n'eft rien — (*) pardannez èi ma furprife eÉrêrnjt Si j'ofl'enfe un ami que j'eftime et que j'aime. r Fartons, volons aux piés d'un Prince généreux, Porter mon coeur, ma foi, mes respecFs et mes veux.> Bainco. II \ jent les recevoir & vous pouvez 1'attendre. ( Norouai. Ce feroit en Francais Nórwége: mais ce mot n'eft pas fi propre aux vers que le premier: j'aurais pu mettre le Roi des Normans ; mais je n'aime point il parler mal de cette natiOD,&pouf caufes. £' \ En SBibraffant Bainco.  CRAGEDIE. 23 Lady Macbeth, avec um farfrife qiïelle contrahit. & Roi vient ? Bainco. Ce foir même. II vouloit vous furprendre £t s'ell|de m'envoier très-longcems defFendu. Au! nom de 1'amicié pourtant il s'eft rendu. |e partois quand fon fils.... Lady Macbeth, avec plus d^e~ tonnement encore, qitoiqu'elk cherche ct le caeher% vint auli \ Bainco.. Madame j, }e vois que fa préfence emeut un peu vötre ame.,.. Lady Macbeth. Je ne le cache pas que-je la clién* Si je puis aujouri'huy réunir les esprits, Concilier les ceeurs]& noier dans la joie Les chagrins , oü je^vois que la Cour* of! en prcie.  s4 MACBETH Bainco. Madame , que vos veux font loin detre rempüs! Chaque heure éloigne e'ncor le père de 'fón fils.: Soit que d'un fort amour fon ame foit eprife, Soit qu'il trouve a céder fa gloire compromife,. On ne peut, fur ce point , eclairer fa railbn. ' Malcolm peutêtre, hélas, plus digne de pardon , jeune, préfomptueux, aimant avec furie, 1 Ne voit plus qu'un rival dans 1'auteur de la vie. Ce matin, a Duncan , il ofoit demander , Avec cette fierté qui femble commander, Que MacdufF fon ami, pour prix de fon courage Et des foins qu'il lui rend, eut Cawdor en partagij. Peutêtre qu'a Macduff le Roi 1'auroit donné, Si dèslors a Macbeth il n'étoit deftiné , Et n'eut craint, en pliaht, de nourrir tant d'audace. Fifè (a) eft fa récompenfe, & la nouvelle grace fv>ue le Roi fe complait a repandre fur vous, ! )u jeune Prince encor irrite le courroux. 11 crok qu'a vötre gré vous dispofez fon père Ét vous dit hautemeut 1'auteur dc fa mifère. Enfin j'allois part'r, il approche de moi. "■ „ Dcmandez, m'a-t-il dit, pour Je fils de fon Roi, „ .ATu Thane de Cawdor, une courte audicnce. „ Sur mon père, a 1'inftant, je vais prendre 1'avance. C s j Prononcer faïfe.  TRAGEDIE. Macbeth. Heïas, qiVil eft injufte, ami, dans fes chagrins! Quand, de tout mon pouvoir, jelefers,jeleplains.. Et voila ce crédit que fi fort on révère! Ah! dans 1'éloignement, que de prix il acquère ! Mais que ces déplaifirs s'enferment dans mon fein Et n'obscurcilïbns point un jour pur & ferein. Allons les recevoir. Madame, je vous laiflè Le foin de nos plaifirs & de nótre allégreffe.' Lady Macbeth. Oui j'aurai löin de tout, Seigneur, & vous verrez Que je dépalïèrai ce que vous espér'ez. QFaulJé fort ie de tous.') SCÈNE QÜATIEME. Les mêmcs. M a l c o l m. Mal c o l m , & Macbeth. Seigneur, de vótre grace (a), ai-je ledroitd'attendre3 Qu'un inftant, en fecret, vous daignerez m'entendre. Macbeth. Prince, vous ordonnez & je fuis trop heureux tOTournur; Ecoffoife comme Angloife, qui répond a vótre £elIencc, votre grandeur, &c. ■ iA- B 5  %6 MACBETH Si je puis {aujourd'huy fatisfaïre k vos veux. (Lady & Bainco fo/tent.) M a l c o l m. Puisqn'en vous feul, mon pene a mis fa conflance , Puisqne vous feul avez de la prépondérance Dans les confeils du Roi 3 puisque vous les donnez, Puisqu'en EcofTe, enfin, c'ell vous qui gouvernez, II faut bien qu'a vos piés, Malcolm cherche une grac^ On peut tout hazarder quand on eft a ma place. Mon père veut encor ferrer de nouveaux nceuds Et vous prenez le foin d'dimenter fes feux Qa). Oui vous. II veut m'öter la main d'une Princefic Pour qui 1'Ecofie & vous connoiflèz ma rendreflè , Amour, dont en mon ame il a foufflé le fei^ Et que je n'eufie ofé nourrir lans fon aveu. Je connois fur un fils 1'autoricé d'un père , Le dcvoir filial & mon coeur le révère. Mais en donnant la vie, un père a-t-il le droit De la tirannifer, parcequ'on la lui doit ? Ah! qu'il reprenne donc un préfent fi funelte, S'il n'eft qu'un don cruel qu'il faille qu'on détefte. II m'eft couteux fans doute & dur de laiflèr voir Ma mifère a Macbeth & tout mon défespoir. Mais enfin, il Fa fait, lui feul peut le défaire. (_ti) lei Macbeth fait un mouvement.  TRAGEDIE. j-aime, j'aime & jamais rien ne m'en peut distraire. Rendez moi Marguérite ou, de ma propre main > Mon père ya me voir terminer mon deltiii, Macbeth. Prince, je puis, je fais bien moins que 1'on ne penft» Le fort de vótre amour n'est point en ma puifiance, Le Roi regne avec gloire & regne fans appui. Je ne gouverne point, mais j'obcïs fous lui. D'une etroite amitié vötre père m'honore, J'ea fais gloire, il est vrai, le fang nous lie encoae. Mais je n'ai que le droit de risquer des avis Qu'on écoute et, fouvent, qui ne font pas fuivis. Pour vous, fans recourir a des voix etrangères , Prince, vous pouvez feu! adoucir vos miiéres. Duncan est père encor bien plus qu'il n'est amant. Dcpofez, d'un rival, le courroux menacant Ne 1'attaquez qu'en fils, vous reverrez un père Et, d'un majtre irrité, tomber le front férère. M a l c o l m. NVt-il pas aiïèz vu mes foupirs & mes pleurs? Macbeth. Mais n'a-t-il a foigner, feigneur, que vos douleurs? Par vous même jugez du poids du facrifice. Laiflèz du moius au tems. a faire cicatrice.  s8 MACBETH Vous êtes fils d@ Roi, mais vous êtes fujet. Dans un rang inférieur, dérogeant au respect., Un fils peut de fon père obtcnir indulgence. ••: Mais un Roi qui, partouï, ne voit qu'obeïfïance Traite un fils indocüe en fujet révolté. Ainfi, faifant vertu de la néceflité, Dq la foumifijon tirant des avantages ' ■< Et, de ia politique, adoptant les ufages..,0 M A L C O L M. Ehl vötre politique est la home des rois Et viétime aujourd'hui trois êtres a la fois. Courtifhns vénéneux, fon code abominable, De vos perfides mains est 1'oeuvre puniflable. Vous avez ravalé, dans vos foins criminels, Les Princes , audeffous des derniers des mortels. Par vötre art importeur , les plus énormes crimes , Panout fancljfiés, font réduits en maximes , Et, fur tous vos forfaits, le mot mirtérieux De la raifon d'êtat doit fermer tous les yeux. Mais moi, je fais vous fuivre en vötre marche oblique Et per-eer les fecrets de vötre politique, Vous cherchez, d'un viellard, en careflant les veux % En livrant Marguérite a fes ftériles feux, Qye mon amour produife un excès comdamnable, Que j'attente a mes jours, ou me rende coupable, Et profitant alors des droits de vótre fang.  TRAGEDÏÈ. Pouvoir adroitement vous placer a mon rang. Macbeth. Prince , vcus n'avez pas la licence cruelle D'infulter a pla'fir un ferviteur fidelle. Qui, trente ans, a conduic la vicloire après (bi. Qui, de fon bras, foutient la couronne d'un Roi; Sans une ambition, hors de place ou trop forte j Peut fe ciroire auffi grand M a t, c O L M. Que celui qui la porie, ^ar plus d'audace enfin peut-on fe fignaler? Un fujet, a fon Roi, prétendre s'égaler J Devant fon maitre même ! Macbeth. II faut encor attendre. M A L C O L M. Infolent! voi le titre auquel j'ofe prétendre Dans ce fer.... {a) Macbeth, tirant aujfilajiemie. Vous ofez —■ rendez grace au respect C«) ii tire fon epée.  gó M A C 13 E T H Sais le..«. & fouvenez vou? d'avoir forcé Macbetrï A brifer une cpie (a), a la quelle peutêtre Vous devez le moment de me parler en maitre. SCÈNE CINQUIEME. Les mêmcs. Bainco, M AcbüFFj phfieuirs Lords. Bainco, cl Macbeth. Seigneur, Duncan arrivé.... helas ! que faites-vous? Oü vous cmporte, Prince (£), un aveugle courroux? Malcölm,^ Macbeth en fortanti Allez, Monfieur le Thane, allez tout lui redire» En letat oü je fuis, on ne peut plus me nuire» Bainco. AUons, allons plutöt, par un accord heureux^ Réunir, s'il fe peut, deux Princes généreux. (a) II caflc fon epce. (£) A Malcolm qu'il S'oit 1'epde nu*.  TRAGEDIE*-. *t ACTE S E C O N D. (*) ^^«0 ty? éclairèe par un reperUre. SCÈNE PREMIÈRE. Lady Macbeth. JEnfin, ^ans Ie Chateau, tout garde le filence Et voici Ie moment opportun qui s'avance. Je vais 1'attendre ici d oü j'obferverai mienx S'il eft quelqu'un encor qui veille dans ces lïeüx. Le vin, dans les transports d'une faufiè aiiégreflè, A plongé les esprits dans une heureufe ivrelïè Et mêle fes vapeurs aux pavots dt. fomeil. Duncan ! Malcolm! pour vous il n'eft plus de réveil. Je m'en vais, fur lepère, accomplir les augures, Me venger, fur Ie fils, de toutes fes iujuses. Et j'ai fu m'afliirer , pour remplir mon projet, Au défaut de fon coeur, de la main de Macbetfc, Infenfible, il rejette, en fafroideconftan.ee, Et les attraits du tröne & ceux de la vengeance. O) C'eft eet «fte qui doit le plus au Poëte Anglois. Ou y retrouve quelqnes tfhes de fes poStion* : Mais i! u'a jsiaajs prafè a le faire avec dei;- acteurs.  $ft MACBETH Mais je ne lc crains plus. Un breuvage trompeur AUume, dans fes fhncs, une aveugle fureur Et le foumet au joug d'un charme irréfiftible. Déformais, en mes mains, automate paifible, Je puis, fans réfiftance* en monter les refforts, .Au gré de mes dcfirs, diriger fesefforts. Que ne puis-je fans lui, fans tromper fon courage, Confommer du deftin le redoutable ouvrage ? Je 1'ai penfé. Mais fi , de fa froide raifon, Je n'eus furpris 1'ufage & la réfiexion, Si fon propre interêt ne lui fermoit la bouche , J'aurois k craindre tout & fa vertu farouche Se livrant, fans mefure,. k fes foins indiscrcts, Pourroit aller plus loin que je ne le voudrois. Et fans voir s'il nie perd &: s'il fe perd foi -rnême, Déteftant hautement un fanglant diadême , Dans la première ardeur de fes renentimens, li nous facrifiroit k fes emportemcns. J'entends quelqu'un — c'eft lui — fon ame eft libre Frapons les derniers coups. ( encom , SCÈNE SECONDE. Lady Macbeth, Macbeth,. Macbeth. Quel fouci me dévore f Be ma paupière aridc éloigne le repos? Q  Tragedie. & li d'éléve, en mon cceur, des mouvemeris nouveau*.. .'.(a) Lady Macbeth. Seigneur , approchez Vous & fouffrea qu'en vótre amd Apportant quelque calme.... Macbeth. Hé quoi! c'eft vous, madam?? Je croiois qu'a cette heure, en vötre appartement * Vous goütiez, du fomeil, le repos blenfaifanï. Lady M a c b e t Ht. J'ai des' foins plus preflans, Seigneur. M a c b e t u. Én peut- il dtre ? . Avant Faube du jour vous favez que mon maitré. .., Lady Macbeth. Qui? M a c b é t fit. Le Roi. Lady M a c b é t rt. Quoi ! le Roi ? (fï) Il appercoic Lady, . c  te M A C B E T ft M a c b e t h. Part. Lady M ac b è t h» Jamaii. Macbeth. Que dis - tu ? Ctffiimeift? Lady Macbeth. Vous frémiflèz. Vous m'avez enfend'i. Macbeth. Oui je t'entends trop bien : mais penfes-tu, barbare , Me faire partager la fureur qui t'égare ? Penfes-tu...? Lady M a c b e t h. Finiflöns de longs raifonnemens Ët p'ouf perdre le tems, fachez quel eft le terns* Tu voudrois être grand & ta vertu perfide' Combat fervilement a 1'inftant qui déeide A jamais de ton fort. La cöüronne eft a foi , La fortune fappelle & tu crains d'ctre Roi. Tu vois leclat du tröne & le vois fans envie.  ï li A G Ë D I Ê. g$ Va, ton ainbition eft fans nerf & fans vie. Ma c b e t a. Je vous 1.01 déja dit, ne m'en parlez jamais. Je fouillerois ma main du plus noir des forfaits! Lady Macbeth. Il n'eft point de forfaits quand il s'agit du tróne. Le crime eft au deftin quand c'eft lui qui l'ordonn.\ L'heure preffe, agi, frappe au lieu de déeidec. Tu ferviras demain oü tu dóis commander. Le moment eft venu. Mais fi ton.coeur baflcé , Si tu ne la faifis , la fortune te quitte Et quitte pour jamais. Nous avons, en nos mams j Et Duncan & fon fils, terminons leurs dcftins. J'eloigne les foupcons, j'ai déja mes vichmes Sur qui retomberoht le malheur & les crimes; Et les cachant k tous..., Macbeth. Vous les cacherez-vous ? Fuirez-vous ie remord & le ciel en courroux? Penfez- vous éluder la divine.juflice? Pouvoir impunément vous fouflraire au fupplice, Au repentir afFreux qui fuit le criminel Et chaffer de vötre ame un fouvenir mortel ? Ab fond de nótre cceur eft un juge fuprême C 3  36- M A C B E T Ui Et fon ne peut jamais echapper a Ibi-merrie.' Lady Macbeth. Regnèz & Vtfus fcrez aüez jüftifié. Macbefb , je le vois bien, n'eft point initic Dans les fecrets des cours & fa vertu fauvagc N'a point pris, dans les camps, leur ton & leur ufagew Autres tteux, autres moeurs. Les vertus d'un fóldat Ne feroient que foiblefïè en un homme d'Etatv Apprenez-en, enfin, la jufte différente. Du tröne a Fechafaud favez-vousla diftance? Le fuccè-s feul eft entre & le fuccès est tel Que qui peut réuffir n'est jamais criminel, M a c b e t. ïl faut donc, poUr régner, abjurer la nartiré? Lady Macbeth. Mais il faut étouffer fon importun murmure.- Macbeth* Ün mürmurer! unmurmuref ah'! le cri de ïïiórreuïf Afïïiffincr un maitre, un Roi, fon bienfaiteur, Dans fa propre maifon oü, pourfauver fa vie y Ou devroit expofer..,,  TRAGEDIE. %7 Lady Macbeth. Entend la voix qui crie % „ Sois aveugle, Macbeth, laifïè guider ta main, „ Ton bras eft rinfhaiment, le chef eft le dcftin, M a c b e t h. Que du deitin cruel je devienne viólime Plutót que d'acheter le fceptre par un crime j Lady M a c b e t m, N'eft tu pas Cawdor ? Macbeth. Ciel ! Lady Macbeth. Tu n'as plus qu'a regnei', Regne donc. M a c b. e t h,. Ah Iwcuillez, ah! daignéz m'cpargncr —* Faut-il faire 1'aveu de toute ma foiblefïè? Peutêtre j'en crois trop la fatale promeflè. Peutêtre je me crois au tróne defliné. Mais, enfin, un forfait ne peut être ordonné JParle ciel,non. Le ciel, alors,qu'il me cous;orm2 9 4  38 MACBETH Ne veut point que fouille un bandeau qu'il me donne, Et j'attepds..,. Lady M a c b e t h, Attend donc qu'on te pcrce Ie flanc, Que I'orgueilleux Malcolm fe baigne dans ton fang, Tu 1'as vu te traitant en ferf que Pon chatie, Prodiguer les mépris & menacer ta vie. Tu 1'as vu, quand fon père a fait tonner fa voix, Dédaigner le pardon que tu follicitois. Et quand,mes foins adroits viennent ale contraindre,-^ L'obligent a flechir ou du moins a le feindre; J Quand je Fcngage, enfin, a dcmeurerici, | ^ 5 Seul objct de mes foins & mon premierfouci. J Tu 1'as vu, dans tes bras, trompant ta confiance^ Ofer, en murmurant, fe prometre vengeance. M a c b e t h, Je fais cc qui m'attend, je connois fes fureurs. Je mefure, en tremblant , 1'abime des malheurs.,., Et j'en vois plus encor que vous nc pouvez dire, Lady M a c b e t h. Et tu peux vivre en paix quand eet homme rsspire} (*) On doit faire pa-rticulkrement fentir ces quatre vers. Ilsdon jient la raifon penrquoi Malcolm couche dans le cliatcau , aiant na,-. U/tHtaent &  SS MACBETH M a c d w f f. Quoi, Seigneur ! En ces lieux.. .1 Mal c o l Mi lei, vous dis-je, ici. Je les prends a vos yeux. Le repos me fuiant, dans ma douleur amère , Cette nuit, dans les bois, j'ai porté ma mifère. Je rentre, a eet intant, vous attendre en ce lieu Et faire a ce chateau mon éternel adieu, J'y trouve...! jufte ciel! détourne ta colère, Macduff, mon cher Macduff, va-t en trouver mon père, Je crains de m'affurer. Il s'éléve, en mon coeur, D'affreux preflèntimens de quelque grand malheur. Macduff. A des ir.aux gratuits, denués d'apparence, L'excès de vos douleurs donne trop de eroiance. Qui, Seigneur, en ces lieux, oferoit attenter...? M a l c o l m. Ah ! va. Les malhei r:ux or.t tout a redouter. {Macduff fort.) Non, ce n'efl point 1'effet d'une ame qui s'afflige, Des maux que je reflèns. Ce n'eft point un preftigCo C'eft le prefTèntimcnt eet inftinct protecleur, Que la fage nature a mis dans nötre coeur, Lui refufant des tems Finquiéte feience  TRAGEDIE. sl Qui trouble le repos & detruic 1'espérance. C'eft lui de qui la voix me parle. en ee moment Et le preflèntiment nous trompe rarement. SCÈNE TROIS1EME. Malcolm, Bainco, plufieurs Lords. Bainco. Horreur! horreur.' horreur ! trahifon inouie .' Ah J le ciel, trop d'un jour, a prolongé ma vie» M a l c o l m. Achevez. Ah ! Bainco! Mon père.... infortuné! B a i n c 0. Vótre père.... M a L c O l Mi Mon père..! B a i n c 6, II eft aHaffiné. (a) SCÈNE QUATRIEME. Les mêmes, Lady Macbeth. Lady M a' c b e t h. Ah! Mylords, eft - ïl vrai?.. que vient-on de m'ap. Duncan..,. (prendi-e.l.v O) Malcolnj towbe appuie contre ubi colonne. D 3  54 MACBETH SCÈNE CINQUIEME* Bainco. Ah ! Mylady, redoutez de 1'entendre. Par un forfait atroce, un infame aflaffin, De trois coups de poignard, a dechiré fon fein. Lady Macbeth. O mon Roi ! mon cher maitre! ö Laches parricides ( Quoi! fur fon fils aufli, portant leurs mains perfides, Jls ont tari des Rois Bainco, montrant Makolm, Le ciel 1'a préfervé. Voici Malcolm. (a) SENE SIXIEME. Les mêmes, Macduff, d''autres Lords encore. ' Macduff. Prince! ah! Si vous etes fauvé, Rendons en grace au fort foigneux de vötre viè , Qui, .pour vous, a voulu tromper la perfidie. C <0 Ce moment eft terrible pour Lady qui croh le Prince mort $r voit fes espéïances detruites. Elle doit fans doute avoir dé 3a furpvife ; mais elle la déguife promptement pour 1* danser qu'elle cou^reroit en lg laiffant trop :p;rccvoir.  TRAGEDIE. 55 Les monffres des forets, le tonnère eclatant Que vous avez bravé fous un ciel ménacant, Etoient moins dangereux que le deftin perfide Qu'ici vous préparoit une main homicide, Si 1'invifible bras d'un dieu confervateur Ne vous eut arraché de res lieux de fureur. Si vous eufliez dormi dans ce féjour de crime, C'en étoit fait de vous, vous etiez leur viclime , Leur fureur s'eft meprife. Un de vos officiers Eft tombé fous le fer des cruels mcurtriers. Lady M a c b e t h. jippercevant les poignards dam lesmains deMalcclm. Ah! Prince ! de quel fer vötre main eft armée ? Macduff. Ces fers dont vötre vue a lieu d'ëtre alarmée Ont fans dpute fervi le bras de 1'aflaffïn 'Etfok que de les perdre il ait eule deffêin, Ou qu ils foient echapés de fa main egarée , Que fon ame déja fut aux remors livrée ; Malcolm les a trouvés dans ces funeftes lieux* Lady Macbeth. Ces aflaffins, Mylords, femblent ingénieux, Savent experts en Part, batir avec adreflè , Surtout^ fe ménager, dans les cas de detreflè^  M A C B E T H Des fbrts oü s'abriter, fi / preflès de trop prés/ On vient a les forcer dans leurs détours fecrets. Sandoute ils^ont de loin préparé leur deffenfe. Mais vous favez', Mylord, que la toute puifTauce Confond presque toujours de femblables projets Et laiüe rarcment prospérer les forfaits. On nous vient d'enlevcr nötre roi, n^tre père, Ah ! mes' pleurs honorez une pert fi chère-! Vous tous, illuflres Lords, i'Etat, 1'Empi're entier Doit, au fang. de Duncan ,1e fang du meurtrier. Ses manes en courroux vous demandent vengeance; Et moi, furtout, chez qui, presque daris mapréfence, Avec réiïéxion, un facrilége affreux A fouillé les foiers d'un crime monflrueux, Je la leur dois, Seigneurs, il' y va de ma gloire. Je Ie dois a moi même autantqua fa mémoire. Macduff. Oui, nous devons descendrè en la nuit des forfaits ,De ce crime odieux léver le voile épais, De fes auteurs décus, confondre 1'artifice Et, fureux, excrcer une illuftre juftiee.■ Sans tarder plus longtems ,Mylords,aflèmblons nous. Suivons 1'objci; facré d'un fi noble courroux. Au génie infcrnal de ces monftres fauvagesQue nous ailons pourfuivre, empêchons les paflages,/ De leurdédale óbfcur fermons leur les détours,. Qu'ils n'y retrouvent plus de perfides feeours.  TRAGEDIE. 57 Et pour donner aux lieux, au rang, k la naiüance, Au Thane de Cawdor lailTöns Ia préfidence. — Mais je ne le vois point & lui feul eft abfent. Dans le commun effroi de eet afFreux moment, Sans me rendre indiscret, ofé-je bien, Madame, Demander oü Macbeth... ? Lady Mac be t h, un peu embardljét. Ménagéons de fon ame Les fenfibles reflbrts par tant de maux preffés. Ne batons pas fes pleurs, ils couleront atTez. Dévancant fa faifon, la hative vielleflè Lui fait de fes douleurs eprouver la rudeflc. II goute maintenant un inftant de répos. Hélas!. •. (a) On peut, Mylord, après tant de travaux , Dont 1'Econe fe plait k garder la mémoire, Repofer un inftant k 1'abri de fa gloire. Pour le rang qu'au confeil lui donne vötre voix , II ne peut 1'accepter, faites un autre choix. Bainco, par fes talens, fon age, fa prudence, A le droit de prétendre k vötre conflancc. Macbeth, ici, ne peut, après ce coup fatal,Que demander juftice k vötre tribunal Et s'y laver avant que d'accufer perfonne. Non, Mylords, que je croie ici qu'on Ie foupconne 7 Mais, dans un cas pareil,. 1'innocent le prémier S O) Plus feirirsttieiu s'adreflant it Manluff. D 5  58 MACBETH S'accufe & ne craint pas de fe juftifier. Je commcnce & Macduff verra, par fa deffenfe, Si Macbeth doit, d'un juge, éviterla préfence. Mylords, vous, fes témoins auxplaines de 1'honneur, Vous qui, dans tous les tems, eprouvates fon coeur, Vous a qui, tant de fois, fon amitié fincère, Sans la folliciter, fut profkable & chère, Jugcz entre un héros quarante ans vertueux Et lautcur exercé d'un forfait monftrueux. L'ambition fandoute a fuggéré des crimes Et Fhiftcire des tems en nomme les victimes. L'eclat du diadème eblouit aifément, C'efl: un bien qu'on jaloufe & ce defir, fouventjj A mis, au rang des Rois, des fujets parricides. Mais fuivez, avec moi, leurs trames homicides. Vous leur verrez fémer des troubles dansl'Etat, Se préparcr de loin a ce grand attentat, Du tfbrfi de 1 equité masquer leur perfidie , Ofer faire aux loix même adopter leur furie , Armer le fanatisme , au nom d'un dieu de paix, Porter partout la mort, 1'horreur & les forfaits, Mettre des fers cruels en des mains égarées, A tenir 1'encenfoir feulement confacrées, Faire & fouffler 1'erreur, compromettre le ciel Et du fang de leurs Rois enfanglanter 1'autel. —. Vous en verrez encor qui, dans la nuit obscure , Ont leur marche cachée 6\, fouvent j aufii füre»  TRAGEDIE. 53 Le poifon, fans eclar, féconde leurs transport,, On impofe aux foupcons & le tort eft aux m :>rts. Seigneurs, voila du crime & la marche & 1'ufage. Mais celui qui revient d'eploier fon courage Contre les ennemis de f'Etat & du Roi, .Celui qui, tant de fois , lui dévoua fa foi, . Qui lui fut attaché dès la plus tendre enfancc, Dont ia pure amitié gagna fa confiance, Celui qui, mille fois, le maicre de fes jours Pouvoit, fans nul foupcon, en terminer le cours, Qui feut fait, quand fon Roi, fans licn, fans lignée5 N'avoit point étendu fes droits par Fhimenée, Celui qui compte enfin un regne de vertu, A commettre le crime auroit moins attendu. Iroit-on commencer par un coup exécrable, Oü la moindre imprudence accufe le coupable ? Devant toute la cour, en fa propre maifon , Quand, fur foi le premier, doit tomber le foupcon...! II faudroit d'un bourreau la froide barbarie Et porter, au plus haut, le crime & la folie. Vous frémiflèz, Mylords, & je lis, dans vos yeux, Que le feul doute offenfe un héros vertueux. L'horrible vérité devant vous fe préfente, Vous craignez de trop voir. Helas! ma main tremblante Souléve le rideau qui dérobe au grand jour Le fujet parricide..,. Amour! fimefte amour....!  66 MACBETH M a l c o l ai. Sortant deVaccablement oü il eft toujours re/ie. Arrêtez. A ce traic d'un artifice infigne Es-ce moi, qu'en ces mots, vötre fureur défigne? Lady M a c b e t ri. Mon coeur avec effort, mon coeur avec douleur, Contre uri parent chéri fe rend accufateur. Mais 1'hospitalité, dans ma maifon trahie j Exige , malgré möi, que je me juftifie; A la barre, Seigneur, de la froide Thémis i Les fiers emportemcns font rarement admis. La timide innocende, au maintieh hümble & fage / A bien plus d'éloquence & gaghé davantagé. Mais, Prince, vous aimez &, dans le défespoir , On peut facilement oublier fon devoir. Non ,'que j'entende ici comdamner vötre flamme, J'ai plain même, en mori coeur, les douleurs de vötre ame Et, dans un autre temscomblant tous les égards , Je fourois oublier jusques a vos écarts, Ingénieüx Anglois! Voifin que je déteftes.' On rctrouve ta haine en tes préfens funeftes; Du jour oü ta princelïè eft venue a la cour, v Ses yeux ont apporté la discorde &' 1'amour. O Duncan! fans ces yeux,' fans eet amour, peutêtre, . Neus n'aurions point encor a pleurer nötre maitre.  TRAGEDIE. f$ Pourquoi le déguifer fi vos foins indiscrets Ont trop fait préfentir vos finiftres.projets? Prince, de ce moment d'amour & de foiblefïè , Oü le Roi vötre père avoua fit tendrefiè , Trainant, en furieux , partout, le trait fatal, Ne montrates vous pas le courroux d'un rival? D'un père, meprifant le facré caraclère , Ofant braver, d'un Roi, la jaloufe colère , Dans vos emportemcns , jusques a Ia mcnace, A la ville, a la cour, vous portates 1'audace. Souvenez vous, Seigneur, de ces cruels momens, D'hier, oü tout entier a vos reflèntimens, Sur le fein de Macbeth, vöcre epce arrêtée S'y plongeoit, fi ces Lords ne 1'euflènt ecartce. De vötre fang bouillant, 1'impétueufe ardeur, Alors, malgré vousmême, épancha vótre coeur. Rappelez vous ces mots: „ Même devant ton maitre." Si vous ne 1'etiez pas, vous comptiez bientöt 1'ctre. Tout répond a ce plan que vous avez formé, Cette nuk, fous ces toits, vos yeux n ont point ferme, Vous avez prudemment banni vótre préfence , Pour , a tems, appeler, a témoin, vötre abience. Plus prudemment encor , la main du meurtrier S'efl allée.égarer au fein de 1'officier. Prés du Roi le frapper, h la place oü fon maitre, Avec moins de bonheur, ou moins d'art, devoitêtrc: C étok awx vils dépens des jours d'un malheureux  6 2 MACBETH1 Songer a détourner les regards foupconneux. En un mot, ces poignards, en vos mains, qui fe crouvent ?: Hazard, art, ouremord, quoiquecefoit, ilsprouvent. Et Macduff, jusqu'ici, de fa gloire foigneux , Devroit modérer plus fes foins officieux. On fe commet fouvert par d'indiscrets fervices* 11 faut plus que des mots contre de tels indices. Prince, quoique ces faits, a de juftes foupcons j Accordent quclque poids. Cependant, vos raifons Pourront peutêtre mieux prouver vötre innocence. J'ai dit ce que j'ai du pour ma propre deffenfe Et le ciel fait qu'ailleurs il m'eut été plus doux De vous plaindfe, Seigneur, & de parler pour vous.' M A L C O L M. Je respire avec peine & mon ame opprefïëe A rétenu ina langue en ma bouche glacée. Je n'ai pu 1'interrompre. Ah! quand mon coeur navré, Par les rigeurs du fort, fe voit défespéré; Quand il m'cnléve un père, un dernier coup m'accable, On 1'égorge & 1'on veut que je fois le coupable. Moi fon fils & j'aurois...! Vous ne le croiez pas Et vous me connoifTez. Vous favez mieux le bras.... Les voila ces poignards & voila la vidime Qui manque a vötre rage, achevez vötre crime. Frapez — Mais fans fouffrir qu'un bourreau tel que vous Me fouille, en m'approchant,voiez mespropres coups...  TRAGEDIE. 63 Bainco, ïarrêtant. Seigneur, a quel excès le défespoir vous livre....! M a l c o l m. Vous m'arrachez 1'honneur & me forcez de vivre? Pourquoi m'arrêrez-vous? Vos barbares fecours Sont-ils ingénieux a courmenrer mes jours? Amis cruels (a)! C'eft vous, de qui 1'ame indignée Croit, qu'au fein parernel, cette main s'elt baignée! Bainco. On ne croit rien, Seigneur, & vous nous voiez préts D'en croire, avec ardeur, vos pleurs & vos regrets. Surtout, ne craignez rien. Sur des preuves légères, On ne formera point de foupcons téméraires. Mais, Prince, vous devez n'en favorifer pas, En paroiflant chercher le fecours du trépas. C'eft du crime aux abois le dernier ardfice, Pour décevoir les loix & pour fuir le fuppüce. Vivez, Prince, 1'honneur vous en fait une loi, Vous avez a vanger un père & nötre Roi. Son bandeau vous attend, nötre voeu vous Tadrefle 5 Mais portez le aulfi pur que Duncan vous le laiflè. Venez, Seigneur, Venez. Prouvez a tous les yeux (<0 Aux Lords.  64 MACBETH Que Malcolm eft, en tout, digne de fes ayeux. En honorant les loix & vótre gloire enfemble t A la postérité, laiflèz un grand exemple. Sévére envers les Rois , prompte a les accufer, On ne peut, devant elle, a demi s'excufer. C'eft envain qu'une main une fois criminelle, Ufurpe des vertus la couronne immortelle. Eblouiflant les yeux du fafte des grandeurs, Va, du Nord au Midi, ralliant les flatteurs , Achétc 1'ame vile au prix des récompenfes, Retient la vérité fous le frein des vengeances Et croit, quand tout paroit perdre le fouvenir, Du poids de fa puifiance accabler. 1'avenir. Le tems vient & confond tant de fcélérateflê» L'idole s'ufe, tombe & 1'oppreffion ceflè, La parole eft rendue; alors 1'homme eft jugé, La vérité triomphe & le crime eft vangé. Les momens nous font chers, vous favezquel'Empire, . Mylords, ne peut refter, fens chef, pour le conduire , Dans un lieu plus propice aflèmblons le confeil. Faifons ce que 1'honneur nous dicte en cas pareil. SCÈNE S É T I É M E. Malcolm, Macduff. Macduff, rêtenant Malcolm. Seigneur, écoutez moi. Je vois, fur vötre tête , S'élêV,  TRAGEDIE. % S'éléver & grohder une hörribïê tempêtè. Dans ce dédale afFreux j'égare ma raifon. J'ai cru tenir le fil de cette trahifon , je 1'ai perdu foudain. Un funefie nuagë M'entourre; a chaque pas, je me pecds daVSmtagéi Enfin , pour en fortir, je n'ai plus de nioien. A force de penfef , je né penfe plus rien. Malcolm. Quoi! tu croirois aufli.., ? M a c d u f f. De ce crime exécrable , Non, Princé, je ne puis vous foupconncr coupab'e. Mais on cherche a vous perdre & 1'on y parvièndn, II faut une vielime, on vous facrifira, Vous les avez arme par vótre ihconféquence, Et comment voülez-vóus prouver vötre innócenee? Malcolm. Prouver que jë fuis homme encor ! que je n'ai pas Commis le plus affreüx de tous les attentats ! Barbare ! ah! dis: le tigfé eft - il aufli férOce ? Connoi rriieux les reflorts de ce complot atroce, Repren le fil fatalque tu croiois pefdü, Descen dans un fentier qui t'étoit inconnu. Vois une femme infame, en foh crime trompée j E  66 Macbeth Pourfuivant une proie a fa rage echapée. Macduff. Je 1'ai penfé, Seigneur. J'ai cru, méme, un inftant Surprendre fon fecret fur fon front paiiflant. Mais, de fon embarras, Éirant fon afliirance , Eile a fu m'impofer par fa vive éloquence, M'entrainer , malgré moi, dans fon rapide cours f Me forcer d'écouter un perfide discours Et me faire oublier que fon doublé artifice Avoic vculu, fur moi, détourner quelqtfindice j H n'cn faut point douter. C'eft ce monftre infernal Qui, dans ce jour d'horreur, porte le coup fatal. Elle a franéhi fon féxe & peut f de la nature, Violer, lans effortj tous les droits qu'elle abjure. O fureur de regner! cruelle ambition ! Ne voiant point Macbeth, j'ai pris quelque foupcon. Poureatit, comment penfer que ce projet infame, Auffi fubitement,- foitentré dans fon ame? On ne peut fi longtems affedler la vertu Et le fentier du crime eft, je crois, moins battu. Enfin, quoiqu'il en foit de ce fecret horrible, Mon Prince, je vous vois dans un danger terrible. Ces fers que le hazard ou d'adroits aflaffins, Dans ces perfides lieux, font tomber en vos mains, Vont' être contre vous de funeiles indices. Ah 1 fi le eiel permet de telles injufüces,  TRAGEDIE. $? Que ne dois-je pas craindre, en ces momens cruels , Oü mis au jugeraent des aveugles moreels, Unmot, de vótre honneur, de vótre fang, decide? Je redoüte, Seigneur, unfecond régicide. Malcolm. Mon fang! ah ! ne crain rien. C'eft moi qui veux leur fci ig, C'eft moi qui tarirai leur déteftable flanc. Je veux une vérigeance & je la veux Lnglante. Macduff. Seigneur, oü vous emporte une ardeür impui"aue? • Hé! ne favez - vous pas que le glaive des loix Est ici fuspendu fur la tête des Rois ? Le peuple a fait fes loix f>), le prince les confefve Et, leur premier fujet, lui même les obferve. Elles vous citeroient, ceint du bandeau roial, Qu'il vous faudroit flechir devant leur tribunal. Et c'eft ce tribunal, ce privilége augufte, Si facré ;usqu'k nous & jusqu'a neus fi juffe, («) Ancienncroent, routes les loix fe faifoient dans les affeuMlées du peuple ou dans celles des chefs qui Ie reprcfentoient. Ce font li les loix, légitlmement, coercitives. Elles obligent tous,puisque tous s'en ont impofés le libre joug. Dans toute 1'Europc, lfArigletefre & 1'Ecolle font les feuls pays oii cette coutume n'ait point vielli. L'Europe, au dix - huitième fiècle, au milieu de fes lumicres & de fes favans' pronant bien baut fii liberte, eft certainemenr moins libre que fe» 1m fiscles qu'eUe nowme «Tignerance & de barbarie. ë 9>  6S MACBETH Abri des droirs de 1'homrae & de la libercé , Par un coup inoui de la fatalité, Dont mon coeur aujourd'huy redoute la licence. J'y vois Ie criminel accufer 1'innocence Et la prévention , ce tiran fuborneur, Sémer, dansles esprits, finjuftice & Terreur. Prince, de vos malheurs, les finiftres préfages^ Quand on vous accufoit, étoient fur les vifagcs. A Ia cour, je 1'ai vu? vous avez peu d'amis Et vötre pétulance a fait vos enncmis. Macbeth, par'fa faveur, par fa munificence, A rangé' tous les coeurs fous fon obeïflance, lis lui font dévouésj il a furpris leur foi, II fe pourroit, Seigneur, qu'il fut proclamé Roi. Des ordres de 1'Etat, la majeure partie, Pour coiuble de malheur, en ces lieux réunie } Entrainera le rcfle &, d'un peuple inconllant, GrolTier, toujours trompé, féduira Ie ferment. Je vois, de tous cötés, groffir fes créatures Et cent orgaucs préts a dévenir parjures. M A L C O L M» Tous les esprits encor ne font point aflèrvis Et Malcolm , en ces lieux, trouvera des amis, La naémoire du roi fera plus longtems chère. Tu crains & le linceul ne couvre pas mon père. Lcnex, Murray, Berwick, RofTe, Hamilton, Angus  TRAGEDIE, 63 ïainco fon ami même..., Macduff. Ils lui font tous vendus Et, faifant a leur Roi voeu d'un fbüvenir tendre, Du pur fang de fon fils, ils tremperont fa cendre, Vous voulez que Bainco foit vötre deffenfeur ? II tient tout de Macbeth, fon rang & fa grandeur, Je lui fais des vertus &, de vötre innocence , S'il étoit cónvaincu; fur fa rcconnoilïïmce, L'honneur 1'emporteroit, il feroit vötre appui. Mais a foupcons égaux , il penchera pour lui. Malcolm. Laiffè les tous agir. Quoiqu'on ofe entrcprendie.j N'importe. Contre tous, je faurai me delfendre a Je ne rédoute rien & ne faurols trembler. Le fort peut me pourfuivre & non pas m'accableii Macduff. Avec ravifïèment, j'adrnire ce courage, Des Princes vos ayeux, glorieux héricage, Mais que peut-il fervir en un detroit pareil? Je m'en vais les rejoindre a leur fatal confeii Et, de mon amitié, j'enflammerai leur ame. S'ils font froids, fi, plutöt, ils fuivent, d'une femme3 L'appas trompeurj je fais ce qy'éxige Fhonneur,,, ^ 3}  X© MACBETH Je fais 1'espoir encor qu'il promet. a mon coeur, (Hfort) CENE HUITIEME* Malcolm, Un Lord. Le Lord. Mon Prince, Ie confeil, avec impatience, Attendjque vous veniez prouver vötre inhocenc* Malcolm. Vötre 'confeil devoit vous épargner ce foin. Moi] me julh'fier. Je n'en ai pas befoin. • Vous pouvez retourner de ma part & lui rendre Que fon Roi, devant lui, ne doit pas fe defièndre«. Le Lord. Avez-vous oublié, Prince, que de fes Rois, La libre nation a confervé le choix (a), Qu'elle feule les fait & que vötre naiflance Ne vous donne qu'un titre a nötre prélërenee, Malcolm. Enl quels font donc ces droits, ces loix, ces libertis,, (fi) Les trönes font hérédiwires en Ecefle & en Ansleterrc. Cependant ces peuples out montó, différente* fois, que ]a naiOanceék; la jouiffance même du tróne ne font plus des.droits, tiès que les Reis ■ yculent en abuicr. Le contract ceffe 11'iufraaien.  TRAGEDIE. f} Qu'avec cette arrogance ici vous me vantez? Lorsque le Serf (a) gémit fous vötre tirannie, De quelle liberté vantez^vous 1'harmonie ? Vous avez vos vaflaux & vous êtes les ïriiens Et je dois vous compter au nombre de mes biena, P'eft loiti de disputer, je crois, mon héritaga Et d'aller, entre vous, baioter un füffrage Pont le fils de Duncan n'aura jamais befoin. Lc Lor p, Prince, vötre chaleur vous emporte trop loin Et vous connoifïèz mieux nos loix & nos ufages, A Rome un Plebéien, libre dans fes fuffrages, N'etoit chez fon patron qu'un fervile cliënt. Et s'il &ut un exemple & plus grand & préfent, Voyez les Empereurs. Le droit de les élire N'eft-il pas un de ceux des vaffaux de 1'Empire? Vos Pairs, nous defirons pouvoir vous couronner : Mais nous pourrions aufli, Seigneur, vouscomdamner» C«) Le Rois n'ont jamais été moins mattres que dans les tems du vafielage le plus dur. Les Seigneurs leur livroient la guorre ót les faiibient trembler. C'eft en dénsuant le lien de la fervitude du peuple que les Rois ont opéré la dispeifion utile a leur autoritd. Les peuples pourtaut, pour n'être plus ferfs, n'en font pas plus libres & les grands en font plus csclaves. Pour les Ecosfois , malgré qu'ils portaffent le jong univcrfel de l'esdavage, ils étoient plus libres dans leurs montagnes, qu'un Baron I.nre de 1'Empire ne 1'eft dans fon chateau. Ce font euK qui, un beau jour, mepacoient Diefl de quitter fa caufe, s'il ne les faifoit pas, vallis^ Vejez Robertfon fur 1'Hiftoire de Ja Maifon St«ard. E 4  f2 M A C B E T lï Malcolm. Que dites-voqs, mes Pairs ? Vous etes tous de traitrés Aitérés de'mon fang, les bourreaux de vos maitres. Le Lord. Seigneur, ecoutez moins un i'ndiscret courroux, Dont les fuites pourroient être a craindre pour vous. Croicz vous réfutcr les foupcons par 1'injure ? Croiez - vous vous lavcr , en traitant d'imposture Charge, accufation, preuves Scjugemensf Et croiez-vous... ? Malcolm. Jé crois que vous perdez le tems. Le Lord. Hclas! en 'quel danger, Seigneur, vous précipite, De vötre fermcté, Finfructueux mérite ! Je vais rendre au confl-il cornpte de mon cirploi Et n'imputez qu'a vous les maux que j'encrevoi. (Ü fort') SCÈNE N E U V I E M E. Malcolm, Ma c d uff. Fuiez, fuiez, Seigneur, le péril eft extréme. M a l c o l m. Laiflè moi. Je nc prends confeil que de mpi-méme,,  TRAGEDIE. *« Je ne t'écouce plus. Mon guide eft ma fureur. Je brule , tout mon fang bouillonne dans mon coeur. C'eft avec eet acier que je vais leur réponire, C'eft le fer, a la main, que je vais les confondrc, Leur Chatiment fera, pour la posteritc, Un éxemple frapant de ma- févérité Et, fur des echafauds, ils apprendront aux traitres Si c'eft impunément qu'on infulce fes maitres. Macduff. J'ai vu que Ton médite, Seigneur, ici vötre trépas. Je viens de les entendre, ils vont fuivre mes pas, A des tems plus heureux remettez la vengcance , Mes amis raflèmblés prendront vötre deffenfe. Mais, vous, dérobez leur des jours fi précieux , Cherchez une retraite & fortez de ces lieux, Fu:ez vos ennemis, fuyez 1'ignominic , Ou vous perdrez, Seigneur, & 1'honneur & la vie. Malcolm. Moi! fuir? & eet honncur que tu veux conferver, La fuite me 1'enléve & fert a m'accufer. Je fuiróis de ces lieux pour afiürer ma vie! Mes ennemis y font & tu veux que je fuiol Macduff. Prince, ne perdez point, en eclats fuperflus E 5  74 MACBETH Des momens que, plus tard, vous ne trouveriez plus. Ce n'eft point la le crime echapant au fupplice, C'eft 1'heureufe vertu fauvant une injuftice. Vous mourriez aujourd'huy vidtime de 1'erreuir Et vos juges, demain, mourroient de leur douleur» Au nom du ciel, helas! au nom de vötre père, Dérobez a leurs coups une tête fi chère. Confervez a 1'Etat, le dernier de nos Roix. Vötre père, Seigneur, vous parle par ma voix. Malcolm. Et c'eft ce père, ami, que tu veux que je quitte { Quelques foient les périls oü je me précipite, A fes reftes fanglans je ne puis m'arracher. Sur fon cadavre froid je vole m'attacher. Qu'ils viennent afiouvir leur rage fanguinaire, Qu'ils immolent le fils fur la cendre du père. Ah! trop cruel ami, pourquoi m'arrêtez-vous?. Macduff. Mon prince, écoutez moi, j'embrafïè vos genoux. Malcolm, tombe dans un fauteuil, 11 eft mort & fon fils avoit pu lui déplaire, Son fils, avant fa mort, mérita fa colère. C'eft, pour moi, cher Macduff, un fouvenir mortel Peuijêtre il me mau dit du fcjour éterncl.  TRAGEDIE. 7:5 Macduff. Avec tant de vertu, peut-on être coupable ? Non, le dpute eft un crime, il en eft incapable6 Digne fils de mon Roi, calmez vötre douleur, Duncan, du haut des cie-ux, eft vötre proteéteur. Ne perdez point le tems, fuiez ces lieux horribles, II eft, n'en doutons point, dfs coeurs incorruptibles» Paroiflèz- Vötre aspect vous fera des foldats, J'ai déja mes vafiaux prêts a fuivre vos pas. Mais ne differez point. Le tems fuit, 1'heure preflè, L'honneur comdamne ici vötre délicatefTe, Eh! ne fuirie'z-vous pas des lions furieux Prêts a vous dechirer...? Malcolm, fe léve. Tu le veux, tu le veux. Hé bien, oui, je me rends. Ami tendre & fidéle, C'ep eft fait, je te fuis & me livre h ton zéle. SCÈNE DIXIEME. Les mêmes, Bainco, Lords, Gardes. Bainco. Prince, tout le confeil eft juftement furpris Que vous aiez, pour lui, marqué tant de mépris. Vous lavez ce qu'aux Joix on doit de defFérence  7-6 M A. C B E ï H Et qu'on s'honore ici par fon obJillance. Les Pairs qui m'ont choifi pour préfider fur eux t M'ordonnent d'apporter ieurs ordres 'rigoureux. Sur vos réfus, Seigneur, fur les béfoins du tróne, Au Thane dc Cawdor, ils donnent la cóüronnc. Vous ftvez, qu'après vous, légiriine Kéritier , Ses vertus,% cé rang, 1'appélent le prémier.' Et vous, Prince , dechu? pour vótre réfiftance, Pour vos mepris altiers, des droits de lanaifTance-; Nous ne voions en vous qu'un fujet accufé , ' Au tribunal des'loix fornuis & dépofé, Dont Fextrêraé douceur Vous remet fon offe'nfe Pour ne plus s'occuper que de vótre deffenfe. Jusqucs la Ie confeil vous retient prifonnier. Un Officie r. Seigneur, encre mes mains, rémettcz vötre ader Et..... •• v' o M a i c o l ii, tirant fon epée. r Situ Tofes, prend-le. Infame! mon epée! Dans vötre fang, a tous, elle fera trempée Avant que je Ia rende. Honïbles afKtfïins! ReconnoilTez en moi le fils des fouverains, Je porte leur valedr. Tremblez, indignes traitres, En épuifant vos flancs, je vais vanger vos maitres. Approchez dong , ofez, laches, unüTez vous,  TRA GËDÏE. Tous contre mol, venez & , moi feul, contre tous. Le pur fang des héros" dans mes veines circule. Que le deftin jaloux, fur ma tête accumule Tous les maux a la fois & je puis les braver. Hé bien! vous commencez & n'ofez actiever! Öü donc eft maintenant cette fuperbe audace , Ces ordres du confeil, cette altière menace? Allez; dans vótre fang, je fouillerois mes mains Et je laifiè} atrx bourreaux, a finirvos deltins. (jï fort) B A I fj C O, Gardes, fuivez fes pas, allez, qu'on s'en empare Et respeclez, furtout, le malheur qui 1'égare. {Les Gardes fortent. j Nous, allons, nobles Lords, a nótre nouveau Roi, Apprendre nos malheurs & jurer nótre foi. Ponons lui, de fon rang , la majefté fuprême Et que fon front facré ibir ceint du diadême* Puis tournons fur Duncan nosyeuxbaignésdepleurs, Que fa cendre s'apaife, en voiant nos douleurs! Et rcprenant après les foins de la vengeance, Pour pcrccr, s'il fe peut, dans la nuit du filence , Pour découvrir, enfin, la main de fon bourreau , Vérité! prête nous ton célelte flambeau.  78 MACBETH ACTE QUATRIEME. La Scène reprefente Pintèrieur els la chambre de Macbeth. SCÈNE PREMIÈRE. Macbeth. C Couché fur le parquet feveïlle en fur faut.) H.. — ha! Réveil afFreux & dont I'horreur me Oü fuis - je ? ai - je paffe la nuit k cette place ? (glacé. Dans mon appartement, couché fur le carreau.... Sur mon vifage froid je fens ruifièler Peau. J'ai peur— Mon coeur eprouve un trouble qu'il ignore. De fonges odieux, 1'effroi me fuit encore. J'en cherche k raffcmbler les horribles .debris, Envain. Dans un cahos, épuifant mes esprits , Ils ne m'ont préfenté qu'une changeante image De meurtres, d'affaffiiis, de mort & de carnage. Faut-il que tant d'erreur abufe le fomeil ? Mais, las' elle nous fuit même après le réveil. Un fang épais & lent charge encor ma paupière } Elle femble éviter & craindre la lumière — Comment! aurois-je donc perdu le fouvenir? Mes fens, fur le paffe, ne peuvent révenir.  TRAGEDIE. 79 Helas! je 1'ai perdu — Ma mémoire applanie N'a plus aucun ufage en ma tête affoiblie. Quel éconnant effec! — Je fuis pourtant chez moi, Et, dans Scone, demain, je fais ma cour au Roi. Duncan ! ah! je frémis. Je 1'ai vu, dans mes fonges, Sous trois coups meurtriers.... Fuiez grolfiers menfonges, Fuiez, ne venez point empoifonner mon coeur. II eft: aflèz chargé. —• Sortons. Voions. (*/ fe leve) SCÈNE SECONDE. Macbeth, Bainco, Lords, Suite. Bainco, & les Lords portam les attributs de la roiautè. Seigneur, Chargé des veux des Lords, d'un peuple qui s'eiriprefïè De venir, en ces lieux, vous prouver fa tendreflè: Parle droit éternel, naturel aux humains, De pouvoir, a leur gré, faire leurs fouverains, D'une unanirne voix, tout 1'Empire m'ordonne, D'apporter a vos piés le fceptre & la couronne. Vous êtes Roi. Macbeth. VejUé-je? ou fomeillé-je?  Sö MACBETH B a i n c o. Mais Le ciel qui rarem?nt accorde fes bienfaïts Purs & fa.is les m Her de foins & d'amertume , Veut que ce jour heureux dans les pleurs fe confurrme; Macbeth. Es-ce vous, cher Bainco? parlez-vous, eUeffet? Bainco. C'eft moi-même, Seigneur, je fuis vötre fujet Et chargé du dévoir honorable & fenfible De percer vótre coeur du trait le plus terrible. Nötre Roi, vötre ami, Duncan, dans ce chateau, Cètte nuit, dans un traitre, a trouvé fon bourreau. M a c b e t. Quoi! Duncan!... SCÈNE TROISIEMË. Les mêmes, Lady Macbeth. Macbeth, (apenevant fon épouje, court au devant d'elle & j continue.} Ah! Madame, es-ce encore, d'un fonge ; La pourfüite pénible & 1'importuntmenfor^e? Le-  TRAGEDIE. 81 Le Roi dans mon chateau!.., Lady Macbeth. : Ne vous 1'a-t-qn pas die? De fon funefte fort n'êtes-vous pas ihftruit? Macbeth. Coment enfin....? Lady M a c b è t h. La main facrilége & perfid'e ■ D'un fils a confommé eet afFreux parricide. 0 Macbeth. Malcolm.....' Lady Macbeth. ■ • ' :\ fait le crime. Macbeth. II ne Fa point commis. Non. Ce "crime n'eft point 1'ouvrage de fon fik; Lady Macbeth. Seigneur , vötre vertu doit vous rendre incroiable Des forfaits, le forfait le plus abominable. Mais des témoins frapans qu'on ne peut rêcufer* F  8* M A C B E T II L'accufent devant qui voudroii plus Encor fumans de fang, lcs glaives homicides Ont été reconnus dans fes mams paitjcides. Tous les Lords les ont vu. M a c 13 e t h. Se peut - il ? Bainco. Furieux/ Contre tous il echte en mots injurieux, Meprife fiërement' le foin de k dcffenfe, Ofe menaeer mémc & parler de vengeance. Macbeth. • ' : ' Ah ! que cette fiérté fied bien -a 1'innocent! C'eft le crime inquiet & bas qui fe deffend. Non, je ne puis, Mylords, le foupcooner coupable;De vos? foins géncreux, je vous fuis rédevable Et je dois refufer le préfent d'une foi Que vous devez jurer au fils de vötre Roi. J'aurois trop a rougir qu'on m'imputat Ie crime D'avoir ravi les droits d'un prince légitime. * I B a i n c o. f "' ' Son crime le degradc, il ne 1'eft pks, Seigneur.La naiTance & le choix vous font Ion fucceflèur  TRAGEDIE. |g Er. Malcolm n'attend plus que i'aulïère juflice, Dans un dernier confeil, décide fonfuplice. SCÈNE QUATRIEME, Les mêmes, Un O f f i c i e r. L'Offic ier. Dans lafale prochaine, oü fe doit du.confeil Tenir le redoutable & fangiarit appareil, Tout eft pret Ck le peuple, avec impatience, Y demande, Seigneur, vótre augufte préfence; Bainco. Rendez-vöus a fes veux, venez prendre le rang Oü vous placenc, Seigneur., fon choix & vötre fang. • Qu'on amène le Prince. (VOffieier fort) (Le fond du théatre fe léve & laiffe voir une file omee d'un fiége êlevé deun Finfornement & de deux rangées de banquettes. Les Lords feplacent fur deux files & reftent debout.) Macbeth, volant eet appareil. Hé quoi! par ma préfence, De cette' pompe affreufe, approuvartt 1'ordonnance, J'irois autorifer 1'injuftice & vós coups! —• Amis, vous, de ma gloire, autrefois fi jaloux, Vous, que j'ai vu jadis en faire vötre idole, La YÖU'e propre, vous, vous voülez quej'immele F 2  84 IVÏ A C B E T H Un prince malheureux, le fils de tant de Rois, Dont, fans crime, on ne peut mécormoitre les droits* Bainco. On ne 1'immole point, mais la loi Ie comdamne' Et vousnetes ici, Seigneur, que fon organe. Comme a vous, la pitié parle au fond de nos crjeurs. Nous plaighons de Malcolm le fort & les malheurs. H fut, a nötre amour, d'une esprcance chère. Mais, aujourd'huy, forcés au malheur néceJIaire De le juger, le juge aveugle & fans regrets, Entend le criminel & ne le vo>"t jamais. Banifïèz donc, Seigneur, un fcrupule futile Qui jette, dans vötre ame, une alarme inutile, Rempliflèz vötre tröne. En ce lieu réunis, Les Lords n'attendent plus que de vous voir afïïs. Macduff nous manque feul. Moins effi-me du crime, II garde au Prince encor fon zéle & fon eftime Ils paroiflènt eufémble. SCÈNE CINQU, IEME. Les mêmesj Malcolm, Macduff, un Officier, deux portes-hache. Le tranchant de leurs haches doit être toürnê endehors. Macbeth, allarit au devant de Malcolm. O Prince malheureux!  TRAGEDIE. 85 Hélas! en quel état nous voions-nous tous deux? On vous charge de fers & moi d'une couronne Dont le poids accablant m'épouvante & m'étonne. Ah! ne croiez jamais qu'au prix de vótre fang, Je prétende ufurper vos droits & vótre ran *. Vótre tróne eft vacant &, pour purger le crime, Je n'irai point, chaflant un Prince légitime, Le commettrc moi-même & couvrir de la loi Des defirs criminels ? "Mylords, laiüons au peuple a confirmer i'arrèt.... Lady Macbeth. Au peuple? je ne veux.... que fa voir. Toiït aft pret? Dans une heure on radmat a ce lic funeraire Oü vos perfides coups ont couché vötre père. 'Qu'il lui foit préfenté, Mylords, &, par fa voix ^ <")u'il s'entende juger une feconde. foi?, Mais ne retardanc plus une jufte vengeaice., Au tombeau de Duncan expiant fon offonfe, II n'eft plus de. rétour ét vous devcz après, Des hommes & du ciel confommer les decrers , , (Elk va pour fortlr & les Lords ai jfi) ! ' Macduff. Permettez. Tout le peuple eft-il dans inveroefie? Après que vos vaflaux auront, a leur tendrelic, A leurs pleurs, en ces lieux, donné le libre cours; Avantqu'en fon cercueil, enfermé pour toujours, Aux tombeaux de Colmkill dépot de fes ancerres, On dépolè le corps dn plus grand de nos maitres}'  TRAGEDIE. 105 Ne doit-il pas, k Scone, (a) avec mêmés honneurs, Récevoir, de fon peuple, au moins, autant depleurs? Pourquoi donc fi Malcolm, d'un arrêt populaire, Doit éprouver, enfin, le hazard arbitraire, Ne le remettre pas aux vrais fujets du roi, Au peuple qui n'a point ailleurs donné fa foi ? Et, pour un tel forfait, c'eft, dans la capitale Que 1'on doit féparer la baguette fatale. Mylords, j'ofe le dire, ailleurs le tribunal, Hors des formes, ne peut rendrc un arrêt légal. Et le crime, après tout, n'eft pas, quoiqu'on en dife, Encor afrèz prouvé, pour qu'ainfi 1'on meprife Formes, refléxions & braver froidemcnt E'opptobre et le regret d'un affrcux jugcment, Lady.M a c b e t ii. C'eft tr-aiter, je 1'avoue, avec peu d'artifice De tant de nobles Lords, 1'honneur et la juflice. ]e leur laifïè k leur gré, refientir eet affront..Mais vous, dont la vertu, 1'esprit eft fans fécond, Ou bien vous affecTez une feinte furprife, Ou, quoique femme, il faut qu'ici je vous inftruif . Quand ce Confeil, k Scone , auroit étc tenu , Qu'auroit- il eu de plus en membres, en vertu ? U) J'ai toujours oublié de diré que- Sctne eft sujoud'huy Edimfywrg. wais je fuppofe roes lecTreurs inftiuits. G 5  io6 MACBETH Et, depuis quand, voit-on', hors de la capitale, La pourfuite du crime être informe, illégale ? Partout, les criminels ne font-ils pas remis A 1'exemple des lieux oü le crime eft commis? Leur mort eft une dette a la crainte commune, A i'horreiir, & pas un ne plaint leur infortunc* Mais s'il n'eft plus d'horreur, fi la pidé rénait, L'homme alors reftc feul, le crime disparoit, L'cchaffaud eft horrible, afFreux & le fupplice Un froid aflafllnat, un honteux facrifice. Ainfi, quand un forfait, tel enfin que celui Que vos foiqs raifonnés deffendent aujourd'huy, Commis avec eclat, eft fuivi de fa preuve, Sans qu'en délais perdus , 1'humanité s'émeuve^ Elle même commande a la févériré, Et fait punir le crime avec céléricé. Et ne feroit que foible ou bien plutót barbare, Qui, d'un fang crimincl, oferoit être avare. Enfin , c'eft, dans ces lieux-, que le crime eft conv Dans ces lieux, fon auteur en récevra le prix. (mis, Au peuple, a vous, a tous, cette vengeance importe* Mylords, vous repofiez, tandis qu'a vótre porte, Le crime menacoit vótre honneur & vos jours, Si le ciel n'eut permis de détoumer fon cours. Et moi, dans ce chateau, la première offenleey Qu'on fait, a fe vengcr, laplus intérelTée....  ? r A g E 0 i e. *«7 Macduff. Vous le moptrez alfez & mon feul défespoir C'eft qu'on neveuillepas, malgré vos foins, le voir—» Mylords, il eft honteux, enfin, je dois le dire , Qu'une femme, a ce point, aïcl'art de vous féduire. Vous êtes aveuglés & vous ne voiez pas L'abime des malheurs qu'elle ouvre fous vos pas Mais le tems eft trop cher pour le perdre en paro, Que 1'on n'écoute plus, en reproches ft voles. ((les Discourir plus longtems, Prince , c'eft vous traÏÏr. II faut d'autres moiens fi 1'on veut vous fervir, Puisque, dans leurs cceurs froids, s'eteint toute tëndres» Abar-donné, trahi de toute la nobleffe, |' Dans vos autres fujets, je vais la rcchercher. II eft des coeurs encor aux quels vous êtes cher, Et les cceurs vertueux qui, dans cette detreffe , Sécourcront leur roi, font ceux de la nobleffe. Oui leur Roi, feul, ici, vous êtes nótre Roi — Et je jure , a vys piés, mon hommage & ma foi. ( il fe relève ) Mon prince! mon ami! que Macduff vous embrafie \ Mon faqg eft chaud encor. II faudra qu'il fe glacé Avanc qu'ici Malcolm recoive le trépas. Te vops quitte, je vais & revicns fur mes pas, (i/ va pour fortiO Bainco. Qu'on 1'arrête,  ,ig| MACBETHMacduff.Qui? moi! D'oü vous vient la licence •p'arrêcer... ? B a i n c q. Tout fu;et dont ici l'infolence Ofera s'echaper en transports indiscrets. ( aux gardes ) Emrnenez les tous deux. M a c p u f f. Je vois tous tes projets . Tu gagnés a fervir 1'hydre qui nous dé vore, Mais crain-le le premier Prince, il nous refte encore Le ciel & le bon droit. {on les emmene) Bainco,. Allons, Nobles Seigneurs j Allohs, au lit funébre, epancher nos douleurs. Qu'intlruit de nótre arrêt, le peuple le confirme Et, fans tarder après, faifons punir le- crime.  TRAGEDIE. io$ ACTE C I N QJJ I E M E. La Scène reprèfsnte une Chambre funéraire. Le cercueil de Duncan eft exptfé fur un ïtt de parade. SCÈNE PREMIÈRE. Lady Macbeth, a un garde. j^llez dïre a Bainco que je l'actends ici. {le garde fort) (Aux Herauhs& Gardes du Cataphalque) Et qu'aucun n'ofe entrer fans en être averti, Sortez tousi — Je prendrai !e rênes de 1'empire, Macbeth, dans fon etatr ne fauroit le conduire Et je ne puis, enfin, vivre & trerabler toujours. C'en eft trop, a la fin, la fortune irritéeRetircroir la main quelle nous a prctée. QueL empire funefte ont donc pris, fur fes fensf Du breuvage trompeur les fucs affoupifians ? Leur effet ra'inquiére & me fuis-je frompée? —. II raourroit & des jours de Malcolm occupóe, La forrune.... Ah ! l'idée en jette dans mon coeur La mfteue, 1'effroi, les regrets, ia fureur. Je rötnprai fes defTeins &du poids qui m'opprime Je prétends m'affranchir. Le crime aidc du crime  ,io Macbeth Doit conduire au bonheur. Afiurons nótre fort Et rendons une proie echapée a la mort. Que tardé-je ? Pourquoi rcmettre ma vengeance Et de la mukitüde effaier 1'inconftance , Couirir févénement} douter, craindre toujours? N'.d-'e pas , en mes mains, la vengeance des cours? Qu'un chyle émpoifofiné, dans fes veines 5 charie a la fois & la fource & la fin de la vie; Et qu'après, fi 1'on veut j il fe trouve innocent. Il eft eii mon pouvoir (a) ^— D'un transport imprüdént, Ecou-ons moins fardeur — II faut... i tarder encore* Un fecond crime eclaire un premier qu'on ignore. SCÈNE SECONDE. Lady Macbeth, Bainco. Lady Macbeth» Bainco, je vous attends. Accablé de fes maux » Macbeth ne peut gouter un inflant de repos. Sa douleur eft affreufe & fon ame fuccombe. Je crains qu'avec Duncan il n'entre dans la tombe, Dcpais 1'inftant affreux de ce fata! confeil, Ses fens font travaillés d'un pénible (bmeil. Ce chagrin dechirant 1'épuife & le dévore. Mais, hélas! le réveil eft plus a craindre encore. O) itfttf fait mi uiouviHisat qui défg'.ie le lieu o* tlle U' Ucn: Maltalin enfrrmé  t R A G È D 1 Ë. Ut Bainco* Que fon erat me touche! helas! fi jepouvois, Au prix de tout mon fang, je le rachéterois. O célefte amitié! jouis de ton empire. Mais, de tant de vertu, le ferois - tu maftyre? Lady , le croirez- vous ? le trouble de Macbeth A quelques uns des Lords eft devenu fuspect. Leur ferme té s'ébranle & leur vaine inconftance Prétexte de Macduff la frivole éloquence. 1 Lady Macbeth. Etfvous, térhoin tranquile, objet de fes mépris, Voüs le laiflèz encor débaucher les esprits, Et vous n'ofez fermer fon importune bouche. Pourquoi n'avez-vous pas , a ce monftre farouchej Donné des fers ? pourquoi-n'en eft - il pas chargé ? Mais vous ne croiez pas être affez outragé; Bainco; Je ferois h nos loix un bien plus grand outrage j Et de la liberté, vous favez mieux 1'ufage. De le charger de fers, je n'ai pas le pouvoiig J'aurois, en le faifimt, dépaffé mon devoir. Sur l*s.iatentior.s, la Iti rfa point d'empirer  na M A C B E T H Maisrompre leur effct, les ercpêcher de'nuirej Voüa ce quelle peut. Voila ce que je fais. Du violent Macduff, je décois les projets. On le garde, on 1'obfervc & je puis en répondre. Mais tout cequc je crains, ce qui peut nous confondre, C'eft 1'inftabilké de ces gens char.ceians Qu; mar.dient chezautrui leurs ames & leurs fens, Toujours paffionnés fans amour. & lans haine, Etres vils & palïifs que le dernier entraine, Cent fois plus dangereux que ne 1'eft un mechant Appliqué fans réferve a fon propre pcnchant. Il fe peut, qu'oubliant le coupable & le crime, Changeant fubitement d'objet & de viétimej La vertu de Macbeth s'eclipfe devant eux, Que Malcolm ne foit plus qu'innocent, malheureux^ Et, dans le zéle outré d'une nouvelle caulè, Qu'ils ofent 1'arracher.... Lady Macbeth, avec yrgacitê» L'arracher? j'en dispofe. A cette trahifon, il falloit moins d'eclat Et j'ai fu prévenir leur perfide attentat — Je vous parois cruelle & ma vengeance affreufe. Bainco , vous le favez, je fuis plus généreufe. Eh! puis-je Fetre ici? Lorsqu'en un méme jour On va perdre 1'honneur fans espoir dc ivtour, Quand  T R A G E D I E. u£ f Quand on voit, a jamais, fa mémoire flétrie, • ■ ■ Son nom. un étcrncl monument d'infamie : Eft - il cruel alors de rendre a fon auteur • Le crime, dont on n'a partagé que Fhorrcur? . Le tems prcfïè, Seigneur, voici Fheure' pcutttre Oü la vertu fuccombq, ou triomphe le traitrt« Je remets vötre ami, vötre Kol dans vos mains, Fixcz, par vötre poids, ics c. prits incertaü». Que vötre caraérere impofe a la cabale. La domtc & la ramène a la voix générale. Ufez, enfin , Seigneur, de tout vötre pouvoir. Vötre Roi, fur ce lit^ vous dit vötre devoir. . Je m'eloigne un inftant. En fon état funefte, Je dois a mon époux le moment qui me refte. ; • Je viens de le laiflèr aux foins de fes gardiens, II eft fenl, je crains trop.... Je vais & je revicris. Bainco, veillez a tout & que , dans mon abfeence, Perfonne, de ces lieux , ne trouble le filence. Je m'en remets a vous du foin de mon honneur. Seigneur , vötre ccil a vu clans le fond de mon ccevr. SCÈNE TROISlEME/ ■ . .*• • 'h .:::j:v 1: ,7JJoab nom orfDTOth 'J Bainco,>// . (... Non. Le ciel ne veut point le bonhcur de la terreLebien eft un éclair, le mal feul perfévèrcH  M A C B fi T H Jeblasphème. Ah! pardon. Pardonne a mes doulcttrs. Mais fut-il, dans un jour, jamais plus de malheurs?' Vertu! Lorsque Duncan périt d'un coup rbtfefte" > Puis-je te croire un droit a la faveur céiefte ? SCÈNE QÜATRIEME, Lady Macbeth, Bainco, Lady Macbeth.- • Bainco ! mon cber Bainco! dilfipez mon effroi. En ces funeftes lieux, avez-vous vu le Roi* Eft - il ici, Seigneur...? Bainco. Madame... f Lady M a c b e t h. Oü peut-il êtrer Je cherche mon époux, il vient de disparoitrc. 11 parle, il marche, il dort &, quoique fes esprits, Par un fomeil profond fe trouvent entrepris, ïl a de fes Gardiens trem >é la vigüaace. Que je crains les dangers d'une fi longue ablancé*  a TRAGÉDIE. Hg S'il s'éveilloit...! volons. Ne pet-dons pas Ie tems. II fe perd. Ah ! que vont dévenir fes enfans ? Macbeth! ce malheureux, helas! nous oefépère-8 Bainco reftez encor. SCÈNE C I N Q U I E M E, % Bainco, feul 6 deftin trop fèvère! As - tu donc reTervé cë prix h 1'amitié ? Ah! pren, de fes douleurs, aü moins queique pitié. Et, moi j je fuis oifif quand mon ami peutêtre.... SCÈNE SIXIEME. B A i m c Oj Macbeth, (a), Bainco* Qui s'avarice en ces lieux? — Mais que vois-je pa* roitre? — C'eft lui, c'eft mon ami i juftes cieüx! c'eft Macbeth. C«) 11 eft fomnanbult. Je Ie voudrois vétu d'ane robe longue ^ui ue fut ni habit romain , ni robe - de - chambre , pour donne jlus de dcfl'ein & d'cflet. 11 tient tin flarabesu duns fa nuain ga* •Jie rju'il fretje doufsintnt »ycc Ia droice. Ha  ïl6' M A C B' E T H Défiguré, liyide, -il fomeille en effer. Soii ceil ouvert, fixé, ne voit point k lumière Etdu flambeau qu'il tient on dirois qu'il s'eclaire.' Eveillons-le. Mais non. II feroit dangereux.... O Giel! pren foin de lui. M a c b e' t h, fe froiant fa mam* Va. Va-1- en. Sang affreuxv Va-t-en. Une autre tachc. Une autre. Une autre' Va-t-ck encore' / tS a I n c o Effct crael du chagrin qui dévore! Pour une- amë occupée, il n'eft plus de repos Et le fomeil ne fait que varier fes maux. Sahèeflc fes douleiirs', fur- la mort attachées*, Lui préfentent, de fang , fes mains toutes tachéesv M a c b e t h. Du fang. Du fang. Ma main en a tari fon flanc.'Eut- on dit qu'un viellard auroit ea tant de fang? Bainco. | fuit encor Terreur du fonge qui 1'agite.  T II A G E DIE. 117 ^ Macbeth. Un fonge! Non. Nón, non. Femme horrible! maudite! ■Tu m'as condui le, bras. Ecoute. Une. Deux, Trojgj L'heure vicne de fonner le trépas de nos Rois. La tache s'agrandit. Bainco- II a nommé fa femme, Macbeth. Ma femme! ho! ho! ho! 00 Bainco. Quel foupir, de fon ame j! Exprime 1'angoïrfè & mefure les maux! —. De la feuje douleur, ce j&ft point les langlots. Ses eclatsfont plus vifs, fa tracé eft plus legére Et n'a point du remord cc profond caraflère Affreufe vérité, que je n'ofe entrevoir! Mais non. C'eft blasphémer d'ofer le concevoii\ O) Ce foupir eft tird dü fond de la poitrine. Madcmoifeüe Young le fait d'une maniere qui jette 1'eflroi & !a tristefiè einnv1'ame des fpeétateurs. Schakcrpcar , dans fa pidce , fait Lady Macbeth fomnanbulc & lui donr? des remordj. fep; annécj après avoi» commis le crime. Elle meurt folie.  jict MACBETH Par la feule amitié, fon ame eft déchirée. Macbeth. Oh! par mille fcrpens, mon ame eft dévorée! Bainco.; Mais il femble répondre h tout ce que je dis. Interrogeons, Voions. Non, de fes fensfurpris, Ce feroit abufer. Abufer! Eh! peutêtre, Je fuis, fans le favoir, le complice d'un traitre. Ah ! tfrons un fecret qui me rend criminel. Profitons des inftans. — Seigneur, il eft cruel, Lorsque Duncan n'eft plus, que vótre ame fuccombe... Macbeth. Que Duncan eft heureux! Tranquille, dans la tombe, II ne redoute plus le coup qui Fa pcrdu. , Eh! fandoute, fur moi, ce.'coup eft fuspendu. Bainco. Pourquoi t Que craignez-vous quand Malcolm eft coupable? Macbeth, avec plus de vhacitè* Malcolm! Non. Arrêtez. 11 en eft incapable. C'eft raoj qui, fur ma main, ai répandu ce fang.  TRAGEDIE. Bainco De Duncan, vótre main auroic p:rcé le flanc? Macbeth. Oui. J'ai pereé fon flanc. Voiez-vous? II cxpire, Bainco. En douter un Inftant efl un plus grand délire. De penfers mcertains il peut rcmpre- le cours; Mais aux mé mes objcts quand on revient toujours, C'eft de L'etat de 1'amc me preuve trop (ure. Et ce feroit lui Non. Non , je lui fais injure — Encor — Quoi! vousfericz, vous, l^lfaGTiriduRoi? Macbeth. Voi, Voi ces deux poignards. Bainco. II me glacé d'effroi. J'en ai trop entendu. — Jour affreux qui m'cclaire 1 O criminei Bainco! qu'as-tu fait & que faire? Macbeth. Bainco? vien, mon ami. Bainco.' Ton «»W Je Ie fife-, 1 «1  m MACBETH' Je le füs quand mon cecuf te croioit des vertus. E , de cette amitic, tu me fais la viétime. Malheureux ! Eh! pöur prix, tu m'unis a ton crime; M' a c b e t g. Ecrivoiis lui. Bainco ! j'aide ton amitié, Grand befoin. , B a i n c o. Tc doit-il même de lapitié? il s%Üal eveillons - 1c ( a ). En eet affreux miftère, Voions, enfin, voions ce qui nous reftea faire. Macbeth! Macbeth! Macbeth! Les inftans^font ■■■ - r-: '■' .'- preflans.' Sortez de ce fomeil -r-. D,e feindre, il n'eft plus tems. Malcolm eft innocent. Macbeth. (Z>) Et, de fon innocence, Vous doutiez, vous ofiez méprifer ia deffenfe. («) ïiïacbcth nwrche de cótê & va s'afl'c'oir fur un fauteuil qui fe trouve a quelque diftance. 11 va pour pofcr fon fiambeau fur une tab Ie qu'il croit Être devanir'lui, Bainco le prend & le met fur la table. 1! agite Macbeti) pour. rcveillcr. ■ < ■ " ( h ) Si ma tragédie ne dcvoit'etre jouéc 'qüTen Province , je niertrois ici la maoière dont ua lljmiiar.bulcjdoit s'eveiller. Mais , comme on calqueta M. de la llive dons ce réveil , je n'ai rie» a öue & •« dkois Wen aja.fleüup» de c» qu'il fera»j  TRAGEDIE* fft ' B a i n c u. Et par qui , jufteciel! etoit- il dcffendu? — Mais quand Malcolm eft pur, le coupable eft connu. M a c b e t h. Hé bien! quel eft le traitre.. • ? Bainco. Et Macbeth le dcmandc! Macbeth. Sandoutte & pourquoi donc... ? Bainco. Craignez qué 1 'on entende* De tels débats pourroient vous, être dangereux. Macbeth. Comment? Bainco. Quoi! vous ofez.... Macbeth. Si j'ofe.... HJ5  ?a« macbeth ■ SCÈNE SÉTIEME, Les meines, Lady Macbeth. {Elk entre, entend & ?arrêt e dam le fond du thèatré) Bainco. Malheureux! Dans vos rèVes affreux, que venez-vous de dire? Feignez, quand vous venez vous meme de m'inftruire. Le fomeii a crahi vos horribles fecrets. Me faut - il, plus longteras , partager vos forfaits ? N'avez-vous pas affez abufé ma croiance? Cruel! vous mavez fait comdanmer Finnocence. Ah! qui n'auroit été dupe de fa vertu ? Par plus de feinte & d'art, peut - on être décu? Je i'admirois, Fuimcis ! •— Et mon coeur s'en abhorre , Dans ces momens affreus--, il<' Smt qu'il 1 aime eneor-e. Non , pour le crime, non, Macbeth ne fut point né.- Par fa perfide femmê il y fut entrainé. E:, cependant, Malcolm en réroit la vi&ime | Grand Dïeu ! délivrez moj de ce poids qui m'opprime. Vous voiez mon dé voir terrible, rigoureux. Eh! quepeuvent,pourliUrraoncGeaF%»us mes veux? Macbeth. Si tout ce que je vois tenoit moins au pro.dige., Si j'etoisis afliiré de veiller fans prettige >  TRAGEDIE» i»$ Si, fur mes fens, enfin, j'avois plus de pouvoir, D'un fi rare discours, je pourrois m'émouvoir, Mais, je vous 1'avourai, je n'y puis rien comprendre. En grace, dice moi ceque je dois entendre. Je frémis cependanr.... B a i n c 0. Ah ! c'en eft trop enfir» Lorsque, de vótre roi, je vous fais l'dlaflin. Macbeth. Moi! Bainco» Vous. Lady M a c b e t h , avanct. Vous. Oui, je fuis cette femme perfide (.?) C'eft moi qui dans vos mains (b) mit le fer homicide, Par un filtre enivrant que vos levrcs ont pris ^ Je me fuis aflèrvi vótre bras, vos esprits Et ne vous ai laifie qu'un aveugle courage. De vótre fouvenir, il trouble encor 1'ufage. Pénétré de mes fens, n'entendant que ma'voix, Furieux, hors de vous, fans dcflèin & fans choix, J'ai montré la victime & vous 1'avez frappée. Mais mon ambition alloit être trompéc, [a) En regardjmt Bainco. W a Macbr.ch.  ptf m uöc b e t nm Mes projets étoientvajns, Ie tröne m'éc'iapok' Et d'un-crime fans fruit' le fardeau me reftoit. "1 ,'colm étoit proscrit & , de la nuk entière, . N'a point,- fous ces lambris, repofé fa paupière,i La prudence a manqué, le hazard a fervi. Des poignards égarés, le prince s'eft faifi. ]'arrive, il les tenoit^' le trouble etok extréme, ]e 1'accufc, on croit tout, il perd le diadême, On vous le donne. . Mais,- vous etiez, a mes veux. De tous, le plus contraire & 'le plus dangereux. Vous feul avez, le plus, exercé mon adreiïè, Partout, il m'a fallu vousprendrede vitelTe. Bdnco le luit, hélas! qu'euffé -je fait fans lui? Sa générofité m'a prété fon appui. Tout 'eft vain. ' De Malcolm, vous prenez la defFenfe Et le hazard encor fupplée a la prudence, Une lettre concuc en termes indiscrets, Sert même malgré vous, pérd ie prince a jamais. A de nouveaux transports, vötre ame s'eft livrée Et 1'hcure de fa mort eft encor diflérée. Macduff parle et chacun penche diverfement, Emfin, un long fomeil, a vötre épuifement, Succéde & vous trahit. Alors vötre mémoire Vous pcint ceque, veillant, vous n'auriez ofé croire., Vous voiez vötre crime & c'eft, dans les efForts De vötre ame agitée, en proie a fes remors, Que promenant ici,' parlant vötre fouHrance,  TRAGEDIE. ^If5 Vous venez a Bainco d'en faire confidence. Mais il ne connoit pas encor, denos forfaits, L'hiftoirc toiit entière & les détours fccrets. Je veux qu'il fache tout. — Bainco penfe faridoute Que mon ame s'effraie & qu'enfin je redoute. 11 ne me connoit pas. J'ai fu tout prévenir Et ne dépendre point d'un dóutéüx avénir. Malcolm eft en mes mains. Sancefie, fous ma vue Saprifon, heette heure, eft, de tous, inconnue. II n'eft plus a la tour &, dans mon foin discret, Seule, j'en porte encor les clés & le fecret. Je le dirai pourtant. — Dans cette architecture, Une porte dcnt Fart cache , aux yeux, la ftruclure, Ferme un cachot obscur ou, tant que je voudrai, Le prince reftera, dans fes murs, ignoré, Et des moiens certains, fi 1'on veut rüy contraindre, Sauront bien m'en répondre —Eh!qu'ai-je donqa ^érainctre? Bainco? de fes discours, les indiscretséclats? Non, non. Bainco fait tout & ne pariera pas (a). Nous fomraes fculs encor dans nötre confidence,' Macbeth. Aih! ^i iirMCtsai^aiiaa M (a) Elle !c frappe d'un coup de poignard. li va tomber, en airii re, a quelquc dittance & meurt.  Ué M A C B E T È Lady M A c fi ê f h. Reprenez vos fens, im'tcz ma prudence» Vous favez nos fecrets. C'elc a vous de faifif Maintenant. . . . Macbeth. je les fais, mais pour vous en punir. Ah! quel comble d'horreur! Veillé-jebien? oüfuis-je? D'un fonge affreüx, encor, n'es- ce point le prestige?' Onc - ils bien vu mes yeux aflaffincr Bainco ? (d) Ah! ce n'est que trop vrai — Déteftable bourreau, ïl faut que dans ton fang.. .t Lady Macbeth Laiflê la ta furie Êt fonge a préferver ton honneur & ta vie» 3 Macbeth. Moi vivre! vivre encor! je n'ai que trop véeü Depuis que tu m'as fait furvivre k ma vertu. Eut-on dit que Macbeth connoitroit l'infamie ? Ah! par ma main, ma tête en fera garantie. Ma main va me fournir 1'honorable fecours (a) Il fait nn pas ,yei3 le cadavre de gaine*.  TRAGEDIE. Hf Des hommes malheureux. Je Ms trancher des jours...; Donne moi ce poignard qui n'a fervi qu'au crime. Que j'en falie ur.e fois un croploi légitime* Lady Macbeth. Macbeth ! au nom du ciel, modcrez ces eclatg. On pcutvenir, entendre. Ah! ne vous perdcz pas' 4 Me perdez pas, d'un mot, vötre familie entière, Vos fils n'ont point de part au crime de leur mère, Vous meme, vötre honneur n'en peut jamais fouffrny Póur être criminel, il y faut coufentir. Choïlii'07. donc-, intact, ou de jouir du crime, Ou bien deshonoré, d'en étre la victime. Vos plaintes, vos regrets, vos futiles remors Ne peuvent, du tombeau, refiusciter les morts» Macbeth.- Tu pslrlcs er-cor, crain la fureur qui m'égare, Crain moi. Tu m'as appris a dévenir barbare. Je voudrois, dans ron cceur, enfoncer un poignard, L'y rctcurner. Sur toi, raffincr, ufer 1'arr Dëtre cruel, eet art, pour toi, fi plein de charmes, Mais tu fais prudemment éloigner toutcs armes. Ne crois pas, cependant, éviter ma fureur, Te fousffaire a mes coups. Mon bras, cebrasvengeur.*-» Tu fuis envaiu. Partouc te pourjuivra ma rage,  i28 M A C B E T II Barbare ! a mes transports, rcconnoi ton ouvrage, Jé te fuis & je veux que de tes flancs taris.... SCÈNE HUITIEME, Macbeth, Lady Macbeth (a), fes deux fils. Lady M a e b e t h,' tenant fes fils dans chacune de fes ma'ins & les pousfarit avée une certalne Vwlence. Avant, abreuve toi du fang de tes deux fils. Tien, voila le poignard {b). Ont - ils bcfoin de vivre* Pour être , a ton fupplice, obligésdete fuivre (/)•? Macbeth. Mes fils! mes fils! O terre! ouvre ton fein, recoi Un malheureux qui fuit & le foleil & foi. — Jamais, a tant d'horreur, mêla-t-on la nature? — Efl-il d'autres tourmens? eft-il d'autre torture? De grace, Ah! laifTez moi, laiflez moi (d). Je ne puis... j Révenez, révenez. Savez-vous qui je fuis? Un homme ? Non. Oh ! non. Je fuis un miférablc, . Un Ca) Dmant 'es tvois dernicvs vers, elle cil allé ehcrehcr fes enfons. (*/ Elle lfe lui jêtte. (c) Elle ie rciiie & obfcrve. (■<<) 11 les repouffe.  TRAGEDIE. 129 Ünmonflre, mais, de tous, le plus; abominable. Vötremère...! Otezvous, jenevcuxpfusvousv'irgnéz m?s enfans, cornpariflcz aux leurs. De Macbeth expirant, c'eft la frule prière Et, de leur mèrè , aüffi, ce fera la dernière Pour moi (a), prenant le foin d'expicr mes forfaits, Aux déperids de mes jours cue j'achéte leur paix! Ah ! li le chatiment ne furvit point au crime, S'il ne vous faut, Seigneur, qu'une feule viéHrne, \ La voila. Dieu "cngcur féconde mes efforts \ Et ce poignard, énfia, va fervir mes transports. {Elle ramajfe le poignard qui fe trouve, environ% au (a) KUc fe reléVe.  TRAGEDIE. 137 mïlieu du t Mat re, elle le* traver fe & va pour [rapper Malcolm) Tombe donc mes a piés. Macduff, ? arrêt ant. Arrête, monftre, arrête... Seigneur, en quel péril— C'en eft trop & la tête...! (II ine fon epèe^) Lady Macbeth. Je fuis encor a craindre (a) er. je brave tes coups — Prince, un otage cher me répondra de vous — Et, fi ce fer raai fur trompe mon espérance, J'ai fu me réferver, une promte vengeance. Dans un cachot fecret oü, moi, j'ai, feule, accès, Ta chère Marguérite épuife fes regrets. Frape apréfent. (a Macduff.) Malcolm. Cruelle ! ah! rend nous Marguérite Que ta fureur, plutöt, far moi, fe précipite. Vien, refourni tes coups. — Que faut - il te donnar ? Parle. Hébien, je le veux, je vais te pard nner, Je vais plus faire encor. Réden mon diadême, 00 il Macduff,  133 M A C B E T H Porte le: mais rend moi, rend moi tout ce que j'aime. Voi moi même a tes piés (a). Malcolm, a eet excès, N'auroit ofé, pour lui, fe ravaler jamais. Macduff. Prince, que faitcs- vous ? Lady M a c b e t ii. De ton lit funéraire, Voi ton fils aux génoux du bourreau de fon père. Que ma haihe jouit! — Va, je méprife autant Toi, ton pardon, ton tröne & ton ravalemenc —* Et fas-tii donc encor fi bien cette couronne Dont tu veux dispofer, que ta Grace me donne? L'as-tu? -— Je ne fuis pas fi bas que tu le crois,. Et mes vailaux font la pour foutenir mes droits? Macduff. Des valfaux! Des droits! Ah! L'horreur que tu m'im- primes! Sur les fronts paliflans, lis 1'elfet de tes crimes, Enten ces cris. Ce font tes vaffaux furieux Qui demandent ta mort & viennent, en ces lieux, Accufer de nos lords la juitice trop lente. Va, ton régne elt pafie. Ta haine elt impuifiante. (a) ll va pour Te jetter aax piés de LaJy, Macduff 1'arréte.  TRAGEDIE. 139 Et fi tu ne nous rends la princefïè a i'mftant, A des tourmens afFreux, je vais, en te livrant... Lady Macbeth. Voi comment je la rends. ( Elk fe tue. ) Malcolm. Macduff! elle fe tue, Cen eft fait, malheureux! Marguérite eft perduc. SCÈNE ONZIEME & DERNIERE. Les mêmes, Un O f f i c i e r. L'0 f f i c i e r. Seigneur, un peuple entier de différens vaflaux Demande, de fon roi, les infames bourreaux, Et vient, en même tems, vous rendre la princefïè Qu'un fidéle foldat fauve a vötre tendreflè. Le hazard le plus rare a fervi fa valeur. D'un affreux foutérein , exhalant fa douleur, II vous dira comment cette augufte princeflè... Lady Macbeth, Tu triomphes, je meurs. Tu vas voir ta maitrefTè.... Que 1'enfer qui m'attend vomifiè, dans vos cceurs, Tous les poifons du mien, ma haine & mes fureurs. £ La toile tombe. )  ERRATA; Les vers a corriger doiyènt être lus comme il fuit. Page 23 , vers [wieme Je ne le cache pas. Mais que je Ia'chéris Pège 55 j vers dixhuitieme Ces alfasfins, Mylord, femblent ingenteux, Page 73, vers neuvième J'ai vu que 1'on médite ici vötre trépas. Je viens de les entendre, ils vönt iuivre mes pas. Page 78, vers premier Ha! ha! — Réveil affreux & dont 1'horreur me glacé. t Page 81, vers dnquieme Macbeth. Malcolm. . . . Lady Macbeth;' A fait le crime Page 82, vers fixieme Méprife fiérement le foin de fa deffenfe