2106 J   1 J       TRACES D U MAGNÉTISME. A LA H A Y E. 1784.  fommureN l «BUOTHEEK J  TRACES D u MAGNÉTISME. t La France atteint a la virilité; c'efl: 1'age de la force, de la raifon & des lumières : les ténèbres de 1'ignorance font d;Iïïpées; nos cercles ne font plus formés par des êtres légers & futiles, que des bagatelles entraihent, tranfportent & conduifent au délire. Une certaine maturité régie nos démarches. Si 1'enthoufiafme naït, même chez nos femmes, ce n'eft plus pour des Pantins, pour des Baladins 6c des Danfeurs : le Cabinet d'un Phyficien , les Fournaux d'un Chymifte , 1'Attelier même d'un Anatomifte, fonc les objets qui les appellent. Leurs tablettes , autrefois chargées des Madrigaux langoureux & fades de nos Poëtes, des noms vieillis des Chaulieu , des Chapelle &c des Sarazin, feparent deceuxdeMontgolfier,deS.3ge, dePrieftley, de Saulfure & d'Ingenaufen. Nous avons fait bien des progrès, & nous avangons a grands pas dans la carrière des vraies connoilfances. La Philofophie mathématique dont 1'efprit fee Sc rérreci ne calculc qu'avec pefanteur un petit nombre de vérités; A i  E4J qui, femblable au limacon, porte fes yeux fur tous les objets qui font a fix lignes a la ronde, capable de tiacer la marche d'une tortue, mais jamais de fuivre le vol d'un aigle; la Philofophie , dis-je , perd fon crédit. L'obfervation des phénomènes de la Nature, l'étude des agens qui la meuvent, un coup-d'ceil étendu fur les découvenes incroyables qui fe multiplient depuis dix ans; une revifion de ces opinions qu'on avoit cru bizarres, paree que des fages les avoient par prudence enfevelies dans de gros livres; 1'aótivité qui devoit fuivre un fiècle de repos & de ftupeur; les phénomènes de PElecPricité apptofondis, la transformation des élémens, les airs décompofés & connus, les rayons du Soleil condenfés, Pair que 1'audace huraaine ofe parcourir, mille autres phénomènes enfin ont prodigieufement étendu la fphère de nos connoiiTances. Qui fait jufqu'oü nous pouvons aller? quel mortel oferoit prefcrire des bornes a Pefprit humain, 8c déterminer quelles feront fes forces quand il aura rapproché tant de moyens épars? A 1'aide de la moindre étincelle 8c d'un conducteur , nous pouvons incendier le Palais du Grand-Seigneur, dans un inftant indivifible; nos paratonnerres rendent au réfervoir commun Pénorme quantité de matière électrique dont un nuage étoit chargé; des métamorphofes plus étonnantes que celles des anciens Magiciens s'opèrent fous nos yeux, & rendent vraifemblables celles que PAntiquité nous rapporte. Nous avons réalifé les prétendus menfonges des Architas, des Albert & des Archimède. Nous faifons voler des hommes, parler des têtes d'airain & brüler des corps par des miroirs a des diftances confidérables. Nous rendons la vie a des morts; la rage , la pefte , tous les fléaux morbifiques cèdent au fluide univerfel, & 1'ignorant ofe encore douter!  L J J Auras - tu donc toujours des yeux pour ne point vair > Peuple ingratl Puilfe la vérité fe faire entendre , puifle le rravail que je me propofe ramener les efprits; puifle la prodigieufe quancité d'autorités que je vais raflembler , difpofer le public a cette croyance bienveillante que le Mefmérifme a droit de prérendre; puifle-t-il enfin, par des éloges, par des pré fens , par des ftarues , encourager, récompenfer, porter au ciel celui par qui le monde va recevoir un nouvel être, 8c mériter que de nouveaux génies fe facrifient pour Féclairer. Je n'ai jamais vu M. Mefmer; mais fes fecrets me font connus. Ses Ecoliers Paiment &r le careifent : tel un enfant a qui fa mère donne la vie, efiaie de la payer par un fourire. Ses ennemis le dénigrent, le calomnient, le perfécutent; de prétendus Savans déclament contre lui dans tous les cercles, ignorans qui ne favent pas jufqu'ort peut aller la Nature 8c celui qui devine fes moyens. Si leurs cris pouvoient pénétrer jufquaux Grands du Royaume, fi leurs déclamations pouvoient s'élever jufqu'aux Miniftres , s'ils avoient le moindre crédit, on verroit fe renouveller les perfécutions qu'on a jadis fair efluyeir aux petis Prophêtes des Sévennes, aux adorateurs du bienheureux Paris; on verroit peut-être le grand Mefmer expirer comme le grand Douban. Le Roi de Zouman, dans la Perfe, étoit couvert d'une lèpre qui réliftoit a tous les efforrs des Médecins de fon Empire, 8c même aux docles d Ifpahan qu'il avoit fait appeller. Douban fe préfenre a la Cour, 8c promet au Roi de le guérir en lui faifant toucher le manche d'une raquetre. Le Roi fue, la lèpre difparoit; Douban eft cqmbjé de richelfes. Le Grand-Vifir, féduit par les Médecins de Zouman, perfuade a Sa Majefté que fa fanté A 3 ■  [6] apparcntc eft 1'effet d'un poifon lent. Sur cette accufation," on arrête le Médecin magnétique ; & fans écoutcr fa juftificition, on lui fait trancher la tête. L'art de M. Mefmer, connu dans tous les tems Sc dans tous les climats, mais toujours pratiqué dans le fdence & dans Pobfcurité, paree qu'il faut un fiècle de lumière pour ofer être inftruit fans fe cacher, n'a laiffé pour le vulgaire que de foibles ttaces de fon exiftence. On ne peut en parler que comme des myftères des Prêtres Egyptiens: quelques connoiffances que je puiffe en avoir, des raifons que je tairai, m'empêchent de le dévoiler, Cer art dans lequel M. Mefmer fait les premiers pas, eft loin du point qu'il doit atteindre. Celui qui fentit la première étincelle élechïque, ne devina pas ce qu'eft Sc fur-tout ce que doit être PEle&ricité. M. Mefmer connoir le magnérifme, comme le premier Patre qui fouffla dans un rofeau connut la Mufique. Ne doutez pas pourtant des prodiges qu'il peut opérer; c'eft dans Penfance de la Poéfie qu'Orphée, Linus & les Poètes Erfes produifirent les effets incroyables qu'on piête a leurs chanfons. On ne pourroit faifir les analogies que je vais offrir a 1'efprit de mes Lecteurs , fi je ne donnois quelques détails fur les pratiques extérieures & fur quelques principes de M. Mefmer. A 1'aide d'une verge de fer qui plonge dans un baquet, d'une corde qui lie diverfement les êrres qui Pentourent; a 1'aide des émanations magnétiques , foit du doigt, foit d'un baton de fer pointu, M. Mefmet dirige un fluide perceptible , au toucher , même a la vue: il fe manifefte par la chaleur ou par un léger friflonnement. Son effet eft nul fur certains êtres; il donne des convulfions a d'autres; il fait pleurer, rire, éclater, il tranfporte , il agite,  f *■] il renverfe , il égaie, il rcmue toutes les puilfances de 1'ame, dénoue le corps, 1'allège , détruit fes obftruétions , dégorge fes canaux , rétablit 1'équilibre de fes fluides, &c. La Mufique en général , 1'Harmonica fur-touc, dont les fons ont plus d'analogie avec nos nerfs qu'aucun autre inftrumenr, eft un des moyens de M. Mefmer. II magnétife le fiége que vo.us avez choifi, le vafc dans lequel vous buvez , 1'huibit que vous allez porrer, 1'arbre qui vous prête ion ombre 5 la fleur dont la couleur vous féduit. II vous caufe a volonté des émotions voluptueufes ou déchirantes; il pourroit fufpendre vos facultés, les multiplier ou les détruire. II fe pénètte de magnétifme, le communiqué a des barres méralliques , foit par frottement, foit par artradtion, & peut le tranfmettre fans un toucher immédiat. Il doit connoitre les rapports des parties correfpondantes de nos articulations 3 les effets des differens fons fur notre ame, êc s'aider même de 1'inconcevable puiffance de 1'imagination fur les fens. II connoit 1'exiftence d'un fluide univerfel, cinquième ou feul élément, puifqu'il modifie tout; il fait que tout eft hé, que tout fe tient dans la Nature, & que le plus foible infeéte touche a 1'étoile Sirius, puifqu'il a la perception phyfique de la lumière de eet aftre. Il fait que le plus ou moins de diftance du foyer commun change les qualités des différens corps céleftes ; que leurs émanations invifibles font perceptibles a 1'intelligence & même aux fens exercés, comme la lumière 1'eft a nos yeux; qu'on peut les rapprocher, les condenfer, & les fixer. II n'ignore pas (je le fuppofe) que la marche de ces aftres , leurs verras , leur éclat dépendent de ce fluïde A 4  [ 8 ] qu'il étudie, que cette chaleur, que 1'ignorant croit être le fruic d'un feu central qui ne pourroit fubfifter fans alimenc & fans air 3 n'eft que le réfultat d'un effet magnétique. Le mouvement, la lumière, 1'attraótion, la fympathie, 1'amour, la haine, la raifon, 1'efprit & le génie, la vie, tout enfin, eft, pour le Médecin magnétique, une combinaifon accidentelle de ce fluide , qu'on peut diriger 8c conduire. Eft-il dans 1'Univers un plus fublime emploi ? Que la foibleffe humaine n'effraie pas les imaginations froides ou timides; les étonnans effets que nous connoilfons, & qui fe paffent fous nos yeux, la rapidité incommenfurabie de la commotion éleóbrique, la force qui fair graviter les corps a des diftances infinies, la goutte imperceptible de venin qu'un ferpenr infinue dans nos veines x qui glacé notre fang, & nous décompofe dans un inftant. Les plus grands effets produits , par ce que les Anciens nommoient des qualités, mot par lequel ils vouloient defigner le point ou la matière eft rellement atténuée y qu'elle échappe a tous nos fens : tout doit nous conduire par analogie a la puiffance inconcevable que 1'homme inftruit peut acquérir fur les élémens 8c fur la Nature. Ce long préambule étoit néceffaire a mes Leéteurs, 8c peut-êrre a M. Mefmer lui-même; j'ai dit tout ce que la raifon me permer de dire fur le Magnétifme : mon Projet eft d'indiquer fes rraces chez les Anciens, chez tous les Peupies, 8c dans tous les climats. L'envie d'être utile a M. Mefmer, 8c de favorifer fes progrès, m'empêche de donner a eet Ouvrage toute 1'étendue que je pourrois lui donner. L'ignorance de la Phyfique a été de tous tems une des principales caufes de la  [ 9 ] fuperftirion : qui doute que nos Pères n'aient imaginc les Dieux pour expliquer les effets de la Nature, dont ils ne pouvoient deviner la caufe. Les Indiens, les Nègres, une partie de la terre adore encore les vents, les trumbes, les ouragans &c les volcans : ce font ces accidcns que les Anciens adoroient fous les noms d'Eole, de Jupiter, de Vulcain, &c. Par une fuite de cette ignorance, ils ont du divinifer ceux auxquels ils ont vu produire des effets extraordinaires. Mais comme 1'idée des génies bienfaifans 6c malfaifans, naquit a-peu-près dans le même moment, tel homme inftruit fut placé fur PAutel, tel homme inftruit fut tramé fur 1'échafaud. Les Charlatans hardis réuffirent; les autres furent obligés de fe cachet, d'enfevelir leurs connoiffances fous des allégories , de les expliquer a leurs Difciples, ou dans des antres, ou dans le fond des forêts; c'eft ce que firenrles Brachmanes , les Gimnofophiftes, &c. Leslivres, ou la doctrine de ces Sages nous fonr prefqu'inconnus; quelques fragmens nous en ont été confervés dans les Philofophes Grecs & Latins: une centaine de leurs maximes 6c de leurs fecrets fe trouvent dans quelques livres infïniment rares. Mais peu de gens les reconnoiffenr a córé du bavardage myftique , des prariques enfantines des Alchind,des Geber, des Th. Bungey, des Georges Ripley, des Venius, & de tant d'autres. Je vais pourtant rapprocher quelques principes répandus dans leurs Ouvrages, & citer des faits dont ils appuient leurs fyftêmes. Les Brachmanes, du tems d'Apollonius , admettoient cinq élémens; la terre, l'eau , fair & le feu; le cinquième étoit une matière fubtile & déliée , de laquelle étoient faits les Dieux 6c les Génies. Les larves 6c les lémures  r io ] des Ëgyptiens, des Grecs & des Romains, 1'ame de 1'homme , fuivant leur fyftême , écoienr aullï compofés d'une fubftance matérielle, légere, impalpable, invifiblei mais fufceprible d'éprouver des fenfations. On connoit le fyftême de Pytagore, qui peuploit Pair de millions d'efprits, de la nature des larves, s'occupant a régir le monde & les corps céleftes; c'eft avec le fecours de ces êtres rapides comme la penfée, que les fages Anciens ont produit des effets incroyables a notre foibleiTe. Ce nombre infini d'agens , prêts a leur obéir , voiloient la clarté du foleil, faifoient palir la lune, écrivoient fur fon difque des caraótères qu'on vouloit faire lire d'un bout de la terre a 1'autre , dirigeoient les vents & la foudre, guidoient les corps céleftes, raifembloient leurs influences, Sc les ayant reünies dans des foyers, qu'on nommaTalifmans, Philactères, Sc Abraxas , ils préfervèrent de tout danger, chafsèrent la pefte, métamorphosèrenr les métaux, formèrent les cicognes de Virgile, le baton d'Abaris, Panneau de Giges, Sc tant d'autres merveilles que les découverres modernes commencent a rendre moins invraifemblables. Ces idees anciennes ne fe font pas entièrement perdues; dans les derniers fiècles elles exiftoient avec plus d'ordre 8c de recherche. Des gens inftruits ont pouffé les connoiffances de la Science occulte, jufqu'a déterminer les différentes qualités , la forme du gouvernement de ces démons, larves , efprits ou lémures. Jean Wier, dans fon Livre des preftiges , fait monter leur nombre a fept millions quatre cents cinq mille neuf cents vingt-fïx. Ils font commandés par foixanre Sc douze Princes, dont il donne les noms, les furnoms, & dont il fait connoitre les qualités 8c le caracPère. II me paroit évident que les Anciens appelloient efprit,  t" 1 ce que nous nommons Magnétifme. Les travaux de leurs Génies font les meines que ceux de notre fluide univerfel; & la fuite de eet Ouvrage le démontrera d'une manière invincible. Apollonius , voyageant chez les Brachmanes , étudia leur doctrine, & profita fur-tout des lecons d'Iarchas, leur Chef. Ce dernier lui fit voir un puits, large de quatre pas, fur lequel les Indiens craignoient de fe parjurer. Il étoit fermé de deux portes; en ouvranr 1'une, des vapeurs s'en élevoient, couvroienr le Ciel, fondoient en pluie, 6c ranimoient la terre defféchée; 1'autre laiflbit échapper des vents rapides, qui balayoient 1'atmofphère, & rendoient au Ciel fa férénité. Ces deux effets , atteftés par Damis 6c Philoftrate, ne peuvent guère être rejettés que par un Pyrrhonifme outré. Ce fut chez les Indiens célèbres, qu'Apollonius apprit qu'il exiftoit un cinquième élément, nommé l'/£ther, dont les Génies 6c les Divinités étoient formés, & que le monde eft un animal male & femelle, qui, par lui-même , enfante 8c produit tout. Il recut d'eux fept anneaux conftellés, fur lefquels étoient éciites des chofes merveilleufes} fur la puiffance des Aftres, 8c la combinaifon des élémens. Il eft conftant, dit Porphyre, (Lib. de refponjis.) que les Mages converfoient avec les Démons, & recevoient d'eux des confeils 8c des fecours. St. Cyprien, dans fon Livre fur les Idoles, écrit que les Démons fe plaifent dans les Statues 8c les Talifmans. C'eft de la, dit ce gtand Saint, qu'ils trompent nos efprits , troublent notre fommeil, s'emparent de nos corps, contractent nos membres, detrüifent notre fanté, engendrent les maladies, infpirent les Prophêtes, &c. Les tranfports au cerveau, la folie, le défordre de 1'efprit,  [ I*] de l'imaginarion, les paffions défordonnées, les convul-, lïons même de la Pithie, qu'une émanation terreftre déterminoic, ne font que ce que les Anciens nommoient poffeffions, 8c que nous devons nommer aberrations du fluide univerfel. Si 1'on avoit befoin de détails pout adopter cette facon de penfer, qu'on fuive les malades de M. Mefmer , on les verta comme la Prophétefie Delphique, s'agiter d'une manière convulfive. Ils font comme elle , tantót piongés dans un profond filence, tantöt comme elle, ils font entendre des cris 8c des hurlemens. Une certaine fympathie les attaché au baquet; la crainte d'une trop forte émotion les en éloigne : ainfi, ceux qu'un démon obsède, patiflenr fous la main du miniftre, ou fous 1'eau falutaite qui doit les délivrer. L'étude de la Nature Sc de fes fecrets, trop négligée eft la caufe de notre ignorance, Sc par conféquent de ce ton tranchant & leger, qui nous fait rejetter avec fuffifance 8c mépris les vérités qui fortent de notre petite fphère. Les Gimnofophiftes, les Brachmanes, les Mages, les Druides & les Prêtres Egyptiens , premiers contemplateurs de la Natute 8c de fes fectets, qui nous foient connus , avoient femé des vérités fur la terre. On fait que les Brames, entr'autres , furent tellement frappés des merveilles de 1'Univers, qu'ils négligèrent le foin de le peupler; Sc que pour les arracher a leur contemplation, Vichnou fut obligé de créer la concupifcence. On connoit les prodiges que l'étude de la Nature faifoit opérer aux Gimnofophiftes. On fe fouvient du fage Thefpion, qui fit incliner un arbre magnétifé devant Apollonius de Tyane, & lui fit même prononcer, d'une voix touchante, le nom de ce grand homme. Perfonne n'ignore les merveilles opérées par Zoroaftre, Othin, Trophoniusj Séra-  C '3 ] pis, Branchus, 8c par la belle Hirtia, fille de Séfoflxis, & par la Lemnienne Polixo. Les lumières raflemblées par ces Sages, furent apporrées dans la Grèce par Cadmus, Inachus 8c Pytagore; Orphée les répandit dans la Tracé; Mélampus a Argis; Trophonius en Béotie ; Minos en Crfte : les premiers Poètes Philofophes, en étoient pénérrés. Mais 1'efprit fyftématique qu'Ariftote 8c fes Difciples introduifirenr'dans la Grèce, fit abandonner 1'étudé de la Nature. Ils fubftituètent des raifonnemens fubtils a des expériences, les abftractions d'une métaphyfique obfcure, 8c les rêveries de la dialectique aux vérités que 1'étude de la matière avoit apprifes a leurs Prédécelfeurs. Quelques bons efprits, dans tous les tems, voulurent ramener leurs Compatriotes aux vrais ptincipes. Un grand Philofophe foutint que 1'homme n'étoit né que pour contempler 1'Univers 8c fa marche. Cicéron (Lib. i, de nat. Deor.) dit a Crifippe que le Philofophe doit obferver la Nature, comme le bceuf doit labourer, comme le chien doit garder 8c défendre fon Maitre, comme le courfier doit trainer un char. Dans les fiècles poftérieurs quelques Arabes, plufieurs Allemands, un grand nombre de Francois, s'occupèrent a 1'étude , qu'on appelle encore magie, fans uonner a ce mot fa véritable acception. Science, dit Pline, » qui fut fe prévaloir de ce que les ttois Sciences, « les plus ertimées dans le monde, ont de grand 8c de mer» veilleux. Née de la Médecine, elle s'en étoit fervi pour s'in'n finuer dans les efprirs, fous prétexte de donner des remedes » plus efficaces. L'Aftrologie lui fournit les moyens de faire » croire aux hommes curieux de 1'avenir, qu'elle voyoit » dans le Ciel tout ce qui leur devoit arrivcr, 8c pour » mieux captiver encore les efprirs, elle s'appropria ce que »la Théologie & la Religion om de fplendeur 8c d'auto-*  [ 14 1 »rité «. Dans les derniers tems de notre ère} on perfécuta ceux qui s'adonnèrenta la Science par excellence. Ils furent obligés de cachet leurs principes 8c leurs opérations; & comme le propre de 1'homme eft: d'abufer des chofes les plus facrées, par des fecrers dérobés, 8c des pratiques obfcures , des Charlatans trompèrent, féduifirent, commirent des atrocités , contre lefquelles la Rehgion 8c la Juftice févitent : on les pendit; on les brüla; ils furent fouettés , exilés , avec raifon, comme criminels; a tort comme magiciens. Defcartes , malgré fon imagination 8c fon génie, trompé par des êrres fubalternes 8c par des chimères qui le révoltèrent, alla trop loin; il frappa fur 1'innocent comme fur le coupable. Il ne fe contenta pas de profcrire ce que nous nommons Sorciers, il profcrivit aufti les Sages ; accidens , qualités , verrus occultes, attractions, fympathies, antiparhies , furent rejer.ées par cc grand homme. Il nous éloigna pour quelque tems du vrai chemin, que les Mathématiciens modernes anéantirent. Le fage Freret, qui prévoyoit les révolutions que ces derniers alloient opérer , difoit, en 1724 : » Je connois en quoi » confifte 1'excellence des Mathématiques, mais je ne fais » par quelle faralité ces Sciences, fi utiles & fi nécelfaires » pour régler nos connoiffances, non-feulement ne font » d'aucun ufage pour les étendre & pour diriger notre con« duire dans les occafions pratiques , mais peuvent même » quelquefois devenir dangereufes, lorfque des efprirs trop » ardens les veulent appliquer aux matières qui n'y font point » affujetties —Enfinj 1'effet des efprits froids qui détruifirent fans élever, qui refroidirent nos ames & ralentirent les travaux de 1'imagination, commence ï fe détruire. L'étude de 1'Hiftoire Naturelle, de la Phyfique, de la Chymie , fe fuit avec ardeur, & des Sages plus  r x/1 fubtils travaillent dans le fïlence. Norre hecle va marquer par une révolution d'autant plus avantageufe , que lc repos des Nations & 1'Imprimerie, nous mettent a même de conferver & d'augmenter le dépöt facré de nos lumières & de nos connoiffances. Les décifïons tranchanres de notre prétendue raifon, anéanties par certains faits inconteftables, qui ne font pas au-delTus de fa foible portee, n'arrêteront plus les efforts du Génie; 8c nous dirons avec le favanr Evêque d'Avranches. (Trait. phil. de la foib. de Vefprit humain). •» Quelque raifonnement que 1'on puifle » faire pour défendre la raifon, c'eft une production de » la raifon : or, la raifon ne peut rien produire qui foic » entièrement certain; donc quelques preuves que nous » puiffions inventer pour défendre la certitude de la raifon , » elle fera incertaine Ce fage principe oublié, détruit, pour ainfï dire , par la Science Mathématique, qui, faite afes eerritudes , n'admet que ce qu'on lui démontre, fut la bafe de la Philofophie de tous les Savans du monde, depuis Anacharfis jufqu'a Carnéade; Anaxarque 8c Pyrron le puisèrent chez les Mages 8c les Gymnofophiftes, au rapporr de Diogène Lae'rce. (In Pyrrhon). On le retrouve en Turquie, chez la Seóte qu'on nomme Haïretis (les Etonnés ). Les Efleniens , les Saboréens , chez les Juifs , foutiennent que tous les hommes réunis ne peuvent parvenir a la connoifTance de la vérité. Et ces Arabes, que les Juifs nomment Médabbérims ( c'eft-a-dire Logiciens) rejettoient même la vérité des démonftrations Géométriques. Les petits Déclamateurs qui déchirent M. Mefmer & ceux qui comme lui travaillent a connoitre la Nature fous fes grands rapports; minces Obfervateurs d'une mouche ou d'une pierre, qui s'extafient fur 1'aile d'un  [te] papilion & Te pament devant une coquille , comme Blondel devant la colonne de Jean Gougeon ; reffemblent a ce Peuple Juif, qui , malgré le ferpent d'airain, la baguette de Moyfe, la colonne de feu qui les guidoit la nuit ne croyoit point aux miracles de leur Légiflateur. En vain élevoit-il les bras au Ciel pour appelier l'influence Viclorieuje ; en vain faifoit-il couler dans des déferts arides les flots d'une eau fraïche Sc limpide; en vain le fon des trompettes faifoit-il romber les murs de Jéricho , rien ne pouvoit convaincre & corriger le Peuple ingrat Sc ftupide qu'il conduifoit. Ceux que des faits ne perfuadent pas font difficilement féduits par des raifonnemens. Je prévois donc que ce petit Ouvrage ne produira pas de grands effets fur les incrédules, puiffe-t-il être utile a ceux qui croient! C'eft le feul but que je me ptopofe, le feul qui me foutienne Sc qui fomente mon zèle, car ma tête fe charge Sc ma mémoire co'mmence a ne plus me fournir les faits que je lui demande. Il faut n'avoir jamais ouvert les yeux fur la Narure pour nier les influences des différens corps. Tout eft émiffion , tranfpiration , refpiration, exhalaifon, preflion dans la Nature. Le Père Lana compare le monde a un alambic; la Nature en habile Chymifte tire tout de fón fein; 1'homme eft lié a toute la Nature; il touche au foleil, aux étoiles les plus éloignées, foit par leurs émanations directes, foit par les corps intermédiaires qui nous les tranfmettent. Elles fe rafTemblent fur des foyers fous un point imperceptible, Sc fou 'ent fans changer de nature. Le Père Lana pour prouver ce dernier fait fe fervit d'une expérience ingénieufe. » J'ai pris} dit-il, un aimant fort Sc vigoureux, j'ai » brülé  [ 17 ] » brulc prés de lui des paftilles odoriférantes ; j'y ai ajouté « un corps éleétrique, j'ai brülé encore de 1'encens , & » fur tout cela je pofois a une diftance convenable une n lame de cuivre ronde & percée au milieu , arm que les t> divers écoulemens de ces corps puiTent monter par ce » trou. Tout cela étant fait j'ai vu avec plaifir que tous ces » diftérens corpufcules, quoique mêlés a 1'entrée du trou , « produifoient fuivant leur genre des effets conformes a « leur nature •, les paftilles exhaloient une odeur agréable; » 1'aimant faifoit mouvoir un aimant de bouilole , 1'ambre » tenoit fufpendu un brin de paille, & vers ce trou je » voyois un mélange charmant de diverfes couleurs qui » brilloient très-fenfiblement «. La rapidité des émanations nous eft démontrée par des analogies irréfutables , par la viteffe de la lumière, par celle de notre volonté qui meut 1'extrémité de notre corps dans un inftant indivifible , par celle des corps célcftes qui, s'ils roulent autour d'un centre commun, comme on lc croit, qui, fi la matière eft fans bornes , fe meuvent avec une vitefte infinie dans un tems borné. Leur puilfance nous eft prouvée par les effets du tonnerre , par ceux de la poudre fulminante fur I'air qui 1'environne, par les coins chargés de vapeurs qui brifent un rocher , par les émanations du foleil qui vivinent la Nature. Leur tenuité 1'eft pat mille expériences ingénieufes. « M. Boylepritun grain de cochenille qu'il fit difloudre » dans une médiocre quantité d'cfprit d'urine, & cette « diflolution teignit de couleur rouge 264 onces d'er.u » rres-claire; ainfi en comptant que chaque once pèfe » grains, voila 1 ƒ2,064 grains d'eau inpndés de cor»puf.ules fubftantiels qui fe font féparés d'un gram de » cochenille B  [ i8 1 Selon le Père Bofcovich » la denfiré de la lumière dü „ foleil eft a celle de 1'eau, dans le rapport de la feule » unité a 1'uniié fuivie, de 7j zeros. La lumière qui eft „ répandue aurour du foleil a une diftance de trente-quatre » millions de lieues au moins, fe renouvelle, felon » Newton , environ a chaque demi-quart-d'heure : fi on „ réuniftoit cette lumière ainfi renouvellée pendant un „ million d'années , cette efrrayante multitude de parti» cules lumineufes, rapprochée par la feule diminution *> des pores, & fans aucune compenfation , occuperoit » un million de millions de fois moins d'efpace qu'un » grain de fable ordinaire. Er felon M. Bouguer la lumière » de la lune eft 300,000 fois plus poreufe que celle » du foleil, & peut être par conféquent renfermée-dans 33 un efpace 300,000 fois moindre. » Newton difoit que fil'on rapprochoit toute la matière » de 1'univers en excluant tous les pores, on n'eft pas » afluré qu'elle occupat un pouce d'étendue. » Le Père Bofcovich foutient que les atomes ou pre» miers élémens du corps n'ont aucune dimenfion, que » ce font des points rigoureufement mathématiques ". Réduifez le point de Newton a 1'atome du P. Bofcovich, & concluez. On a détruit toutes les objeclions qu'on pouvoit faire contre la marche non interrompue de ces émanations, &c fur les obftacles que les milieux peuvent leur oppofer. Les Doreurs difenr qu'il s'exhale des parties fi fubtiles du mercure qu'elles blanchilfent les pièces de monnoie qu'ils mettent dans leur bouche. L'aimant fait mouvoir des aiguilles de fer a travers des corps compacte •, 1'agitation la plus forte des airs ne dévie pas les rayons du foled , Sec. D'après ces raifonnemens Sc ces preuves incontefta- AUIp rvrrlinnirp. Er lelon M. Boueuer la lumière e  t*i ] bies, citons qiielques exemples, quelqnes autorités qui les éclairciiïent Sc les démontrent a Phomme qui Veut des fiits. Dieu fe voyant feul (difent les Livres Indiens) , Sc vouiant manifeftera des créarures & fon pouvoir &'fon exceilence , tira du cahos les quatre élémens, créa le foleil &.la lune, &c... ordonna a la terre de prcduire Phomme, lui donna une compagne qu'il nomina Parcoutée. Le premier homme s'appelloit Pourous. Ces deux êtres vécurent de fruits. Ils eurent quatre fils. Le premier Brammon , fecond Cutter* , trcifième Shüddery , quatrième Wyfe. Chaque élément influa fur ees enfant Brammon tenoit de la terre fon caractère ffi&anch^ique Sc fon efprit fpéculatif; Dieu lui fic connoirre fes k>ix Sc fon culte, & lui fit préfent d'un livre facré. Cutrcry recutdu feu un tempérament martial, un efprit guerrierDieu lui deftina le commandemcnt des armées , le tróne & Panna d'une épée , figne de fa puifTmce. Shuddery d'un efprit doux préfidoit au commerce; Dieu mit une balance entre fes mains & toutes fortes de poids a fa ceinture. Wyfe, dont les conceptions étoient ingénieufes Sc fubtiles, inventa les arts méchaniques 3 Sec.; Dieu lui donna un fac plein d'inftrumens propres a fervir fon imagination. L'air & Peau influèrent fur les derniers enfans de Pourous & de Parcoutée Cette croyance de Pinfluence des élémens Sc des aftres fe trouve chez rous les Peuples du monde , ea Afrique comme dans les Ifles du Japon, chez les Poères comme chez les Hiftoriens. Les remarques qu'on a fti-es Sc fur la manière dont ils opèrent & fur celle de les détourner ou de fe les approprier , fur les moyens d'en conuoitre les effets, eft connue de fort peu de Sages. B z  [ io] Lc refte fe laiffè entraïner a des calculs , a des combinaifons matérielies, Sc fuit la marche pefante de ces Chymiftes Sc de ces Phyficiens, qui pour connoitre 1'homme étudient d'abord la forme, la couleur de fes ongles & de fes cheveux , & n'arriveront jamais aux grandes connoiflances. Je conviens que la marche de 1'éléphant qui fonde le tetrain a chaque pas qu'il fait eft plus sure que celle de 1'élan & du renne. Mais s'agit-il de réfléchir , d'examiner quand on veur parcourir en peu de tems un vafte efpace. Imitons les Sages qui nous ont précédé, Sc laiflant les Euclide Sc les pefans calculs de la raifon, fuivons Mofchus, Jamblique , Artephius & le vol rapide de 1'imagination. Dépouillons-nous de 1'homme phyfique de Paracelfe , qui felon ce grand Philofophe tire fon origine d'Adam , pour n'obéir qu'a 1'homme invifible Sc célefte qui tire fon origine des aftres. Suivant Ptolémée les intluences du Ciel dérerminent le tempérament, non qu'elles agiffent immédiatement fur le corps des enfans, mais elles donnent des qualités a 1'air qu'ds refpirent a 1'inftant de leur naiflance. Hippocrate & Galien fon Difciple foutiennent que la lune Sc la matière élémentaire influent fur 1'elprit, fur la fanté, Sc difpofent des jours heureux Sc malheureux. Les gens inftruits ont découvert la qualité de ces influences Sc les propriétés du foyer dont elles émanenr. Celles du foleil font toujours favorables par elles-mêmes , mais érant regues par un aftre trop fee ; u rrop froid , ce qui eft un prin ipe de vie devienr, par le melange qui s'opère alors, un principe mal failant. Saturne eft reconnu pour la plus dangereufe des planètes, Vénui eft moins biehfaifante que Jupiter , Mercure eft variabie, Mars aride Sc brülant •, mais tous ces corps  t*1 J difteremment frappés du foleil dans leur périgée ou leur apogée, ont des influences accidentelies favorables ou dangereufes. On fait que fuivant les Arabes le Soleil préfide &u cerveau , ( V. Agrp. Phil. Occul. L. I. C. ix.) au cceur , a la moëlle des os , a 1'ceil droit Mercure a la langue, aux nerfs , a 1'imagination ; la Lune a 1'ceil gmchc, &c. Hermès démontre que les fept trous de la tête font prélidés par les fept pl inètes. Buxtorf ( Lexic. Talmud) nous apprend la manière dont les aftres forment le caractère de chaque homme. Les planètes prélïdent aux Provinces, aux Empires , aux couleur?. (V. Agrip. Phil. Occul. L. I. C. 31.) Mars avec le Bélier gouverne la France, la couleur d'or eft au Soleil, le verd a Vénus , le blanc a la Lune , &cc. Pour peu qu'on foit verfé dans 1'étude de la Science, on connoit les verrus des douze maifons du foleil; on entend cette lingue divine que les Rr.bbins ont tant approfondie, & dont les caraótères font formés d'étoiles briüanres fur le grand livre du firmament. (V. Canard Curiof. Innou. C. 12 & 13.) Laiftons la calomnie qui s'égaye raconter, que de favans hommes prédirent qu'un nouveau-né feroit Pape, quoiqü'on les confultat fur le fort d'un mulet fans les avoir provenu. LailTons-la créer des fables ou placer dans la vie des Sages les anecdotes de quelques charlatans , Sc foyons convaincus avec tant de grands hommes que nous avons une immenfe étendue a parcourir ; ne décourageons pas eet honnête M. Mefmer dès fon début dans la carrière. Croyons aux martyrs du Magnétifme, Sc que les retraébations même qu'on doit ï la foiblefte humaine n'ébranlent pas notre fci. Galilée perfécuré fut forcé d'avouer que .  L« J lc monde n'a point d'antipodes. Le grand Agrippa > cef Apócre de la véricé , a dit :. » J'ai grand regrer d'avoir » perdu tant de tems Sc de travail a ces vanités aux» quelfcs j'aurois renonce il y a long tems, fi je n'avois » été lollicité par le bcfoin de tirer quelquefois du profit » de la folie dés Grands , Sc de fournir aboniamment des » ilhifions a ceux qui en font fi friands «. Hobbes- appelle les Sciences fecrettes ( V. Hob. de Homins. » un ftratagême pour fe garantir de la faim aux » dépëh's des fots ". Mais ce dernier étoit d'autant moins fondé a trancher fur ce grand objet, qu'il croyoit aux démons , aux fantómes, quoiqu'il fut accufé d'être athée. Je ne pcux m'empêcher de citer ici la manière dont cette efpèce de ccntradiétion eft expliquée par le plus grand r ifonneur , par Bayle (art. Hobbes.). Elle n'eft pas étrangère a mon fujet. » Il n'y a point de Philofophes qui » foient moins en droit de rejeuer la Magie & les Sciences » fecrettes que ceux qui nient 1'exiftence de Dieu. " Hobbes croyoit qu'il n'y a pas de fubftances diftincles de 53 la matière; or, comme cela ne 1'empéchoit pas de 33 croire qu'il y eflt beaucoup de fubftances , qui veulent 33 du bien Sc du mal aux autres Sc qui leur en font, il 33 pouvoit Sc il devoit ctoire qu'il y a des êtres dans Pair 33 ou ailleurs tout auffi capables de méchanceté, que les 3> corpufcules , qui forment, difoit-il, toutes nos pen33 fées dans norre cerveau. Pourquoi ces corpufcules au'3 roient-ils plus de connoiftance des moyens de nuire que »3 les autresï Er quelle raifcn y a-t-il qui prouve que ces 33 autres êtres ignorent la manière dont il faut agir fur 33 notre cerveau pour nous faire voir un fpecPre, par 33 exemple «; En admettant le fyftême de Hobbes que tout bon Chretien doit condamner3 il feroit évident,  C $ 1 comme los Anciens l'ont penfé , que les efprits qui rempliffent Pair font d'une mattere impalpable Sc fubtile , de la nature de nos émanatiops ou de notre fluide nniverfel, qu'on ne s'éconne donc pas de certains rapprochemens que je hafarde , Sc que tout être qui n'eft pas initié doit trouver incohérens. Si les larves , les efprits, Sc le fluide Magnétique étoient de la même nature , ils obéiroient aux mcmes loix, feroient foumis aux mêmes expériences, &c.&c. &c. Je promets des faits, & je m'égare dans des diftertations interminables. Je reviens a mon fujer. On a cru que les influences céleftes s'étendoient jufque fur les chofes que nous nommons morales 5 on donne a Jupiter Tintcndance des Rcligions 5 il a produit 3 dit-on , avec Saturne, la Religion Judaïque, la Caldéenne avec Mars, la Catholique avec Mercure. V. ( Albuma^ de Magn. coniunclio. Lib. 1 , Traici. 1.) L'homme né fous le figne des Gémaux , lorfque Saturne Sc Mercure font conjoints fous le figne du Verfeau en la neuvième Maifon , fera prophéte , dit un Sage. Il ajoute : Celui qui a Mars heureufement logé en la neuvième Maifon , chaffera le diabSe c!u corps des pofledés, par fa feule préfence. Je ne finirois pas, fi je voulois rapprocher toutes les opinions , citer tous les faits qui confirment 1'influence Sc le pouvoir des aftres. Si je faifois intervenirles comètes Sc les aurores - boréales dans leurs rravaux ; fi je voulois expliquer les fyftêmes philofophiques fur les corpufcules que.Mofchus le Phénicien connur Sc développa dans fon (exeacirfanis) longtemps avant Leucippe, Démocrite , Epicure, & fi je voulois citer ceux qu'on fuppofe être les Inventeurs de la fcience; les Zoroaftre, les Oftanés i les Chüons, Abraham, Adam qui, dk-©n, pré- ' B 4  [ M ] dit le déluge, les Ange-s qui 1'apprirent de Dieu même; & qui le communiquèrent aux Patriarches, & cette doublé loi , que Moïfe recut au fommet du Mont-Sinaï , Pune, fuivant la lettre qu'il fit connoitre au Peuple, Pautre , felon 1'efprit qu'il ne communiqua qu'aux foixantedix Sages d'Ifrael. Si mon but étoit de publier ce que je peux favoir fur le Magnétifme ou fur la fcience en géneral ; fi je n'avois pas le deffein pur & fimple de prouver qu'on doit, loin de le conrrarier , laiffer agir M. Mefmer, & favonfer les découvertes qu'il commence a faire, je m'étendrois encore fur les nombres & les fymboles , fur les rapports des lettres & des voix , fur les moyens terraqués , aqueux, ignés, aériens, qu'on a nommés gnomes , ondins, falamandres , fylphes, fur le fel célefte, . fur Pamianthe, Sec. &c. Je ne fais quels objets faifir; mille faits , mille raifonnemens fe préfentent a mon imagination , il femble qu'un miliier d'efprirs m'infpirent, m'agkent, & m'aident dans montravail; 1'ordre que j'ai fuivime gêne & me contrahit, tous les tems, les lieux , & les efpaces, fe rapprochent; reus les fyftêmes des Philofophes font fous mes yeux; j'entens Pharmonic de Pytagore , je vois les rnalfes parrjc'ulières réunies par une force fecrette, que les anciens nommoient ame du monde ; les Stoïciens foupgonnent un feu penetrant, qui forme les liens de 1'Univers : Platon Pappelle une fubftance qui fe remue par elle - même; Epicure lui donne le nom de Dieux, Pyragore celui d'un nombre. Les Prêtres du Temple de Saïs en Egypte difoient de ce feu, fous le nom d'Ifis, je fuis tout ce qui a été, ce qui ejl & ce qui fera, perfonne encore ne ma connu. Protagoras » lui fuppofoir deux fortes de mouvemens , Pun » a<2if, Parure pafïif, tous deux infinis en quantité , &  » qui ptoduifoient a chaque inftant, par leur choc 8c par » leur rencontre, les fenfations & les objets fenfibles. Il » alléguoit fur cela 1'exemple de la vue : la couleur n'eft , » difoit-il, ni dans les yeux ni hors des yeux; mais elle »fe forme dans 1'inftanr ou 1'ceil fe meut a 1'occafion » d'un mouvemenr qui vient de le frapper; du concours » de ces deux mouvemens nait la couleur qui ne peut être » ni ce qui frappe , ni 1'ceil qui eft frappé; mais quelque » chofe qui eft le milieu, 8c qui réfulre de deux mouvej> mens oppofés. Il ajoutoit qu'il ne falloit employer les « mots d'êtres 8c d'exiftence que pour s'accommoder a la » foiblelfe humaine, & qu'il n'y a poinr d'exiftence réelle 8c » abfolue". Ce que 1'imaginationdeProtagoras enfanre,eftle réfultat des calculs de Newton & du P. Bofcovich: concluez. Les Philofophes Chinois, dit M. Freret , ne mettent aucune diftinction réelle entre les différentes fubftances, dont 1'affemblage compofe 1'Univers : ainfi, a prendre ce mot de fubftance a la rigueur, 8c au fens que lui donne notre philofophie , ils ne reconnoiffenr aucune fubftance : felon eux, rous les êtres particuliers n'ont qu'une même exiftence , a laquelle ils participent tous également, & qui eft incapable d'augmenrarion & de diminution , c'eft adire, infinie 8c inaltérable. La force par laquelle chaque être exifte ne lui eft point propre; il n'eft point indépendamment des autres : mais fon exiftence eft néceffaire; il ne peut jamais être ni produit ni détruir. Dans le fyftême Chinois tout eft éternel; rien ne commence ni ne ceffe d'exifter. Ce que nous appellons générations Sc deftructions , ne font pour ces Philofophes que des changemens de modifications 8c de rapports , ou plutot ce n'eft autre chofe que la manifeftation, le développement de quelques propriétés de Pêtre qui fe découvrent a nous , ou cefTent de nous  [ »f ] êrre connues. Lorfque les propriétcs nous deviennent fenfibles, nous difons qu'elles font produires, qu'elles commencent d'exifter. Lorfque nous ne pouvons plus les appercevoir, nous difons qu'elles font détruites : cependmt' felon h philofophic des Chinois, il ne leur arrivé d'amre changement dans ces occafions, que celui qui fu: vient a un objet, lorfque nous tournons les yeux fur lui, & que nous Penvifageons: il fe produit a la vériré une nouvelle perceprion denotre efpric; mais ilnefepafïe aucun changement réel dans 1'objet ; feulement de non appecu qu'il étoit, il devient appercu. 5 Amii' Parmi un nombre infini de propriétés contenues egalement dans 1'êrre, tantot nous fommes affeélés par fonétendue, par fa mobilité, fa folidité, fa couleur & ia fi^ure, alors nous 1'appellons corps & marière; tantot nous y mettons une force motrice , & c'eft ce que nous nommons un être vivanr ; tantöt enfin , nous croyons y appercevoir du fentiment, de la volonté, de la pcnfce , alors nous lui prétons une ame & un efprit. Dans le fyftême Chinois, ces diverfes propriétés , quoique difttnguées entr'elles par 1'idée que nous en avons, & par 1'impreffion qu'elles nous caufent, ne le font nullement quant a la réalicé de leur être, puifqu'elles exiftent néceflairement avec une infinité d'autres , & qu'elles participent toures également a une feule & même exiftence infinie & inaltcrable. Anaximandre , Difciple de Thalès , foutenoit que 1'infini, caufe de la génération & de la corruption de toute chofe , produifoit, détruifoit, reproduifoit les mondes dans un travail éternel : qui peut nier que 1'exiftence abfoiue des Chinois & l'infini d'Anaximandre ne foient notre fluide univerfel.  r Plutarque parle d'un Vieillard Indien , qui paffcit touc fon temps a la conteraplarion de 1'univers, Sc qui après avoir demeuré dans la compagnie des Nymphes & des Génies, fe trouvoit un feul jour de 1'année fur les bords de la merErythréene, ou les Princes & les Rois venoient le confulter. » Il enfeignoit, comme Perron d'Himere en w Sicile , qu'il y avoit cent quatre-vingt trois mondes; que les mondes éroient rangés en forme de triangle; » de forte que foixante mondes occupoient chaque cöté; il » y en avoit un a chaque angle •, ils tournoient tous en » rond. L'aire du triangle étoit le foyer commun de toutes » chofes, Sc la demeure de la vérité : la étoient aufli les » raifons, les idéés Sc les exemplaires de tout ce qui a été » fait & de tout ce qui fe fera. Ce Philofophe ne don» noit aucune preuve,- aucune raifon de ce qu'il avancoit: » on 1'écoutoit , dit Plutarque , comme les Prêtres qui « expliquent les myftères Sc les cérémonies des facrifices. Après avoir montré les traces du Magnétifme dans le Ciel, dans PUnivers , chez rous les Peuples & chez les plus grands Philofophes, iuivons les exemples particuliers qui peuvent nous le faire voir fur la terre , dans les plantes , les animaux , les métaux, & chez quelques Individus peu connus. Je ne parlerai pas des Dieux & des Oracles du Paganifme , les faits qui les concernent font trop connus. Je ne ferois que répéter ce qu'on nous a dit des 1'enfance; je les cite feulement pour qu'on fe rappclle combien de trairs on pourroit raifembler, tous a Pappui du Magnétisme. Les Pfylles (felon Strabon) habitoient au midi de la Cyrénaïque, clans les climats brülans, qui ne produifent que des ferpens. Au milieu de ces monftres, les Pfylles, s'il en faut croire prefque tous les Anciens, vivoient fans  [ zS ] alarme & fans dangers; » ils n'avoient rien a craindre des » céraftes même , c'eft-a-dire, des ferpens les plus dan» gereux; foit fcience naturelle , foit fympathie ; ils en » étoient feuls refpectés. Tel étoit leur afcendant fur tous ff les reptiles , que ceux-ci ne pouvoient pas même foute»> nirleur préfence. On les voyoit tout-a-coup tomber dans « unafFoupiirement mortel ou s'affoiblir peu-a-peu jufqu'au « moment ou les Pfylles difparoilfoient ; ils gucriflbient » les morfures de ferpens avec leur falive ou même par un » fimple attouchement ( Foye^ Plin. Lib. 7. c. 2. ) Telles étoient les connoiffancesde ces Peuples du Magné" tifme,du fluile univerfel, 8c de l'art de les diriger, conduire ou repoufler; qu'au rapport d'Hérodote ( Lib. 4.) , indignés de voir leurs fources deuechées, ils réfolurent dans uu confe l général de la Nation , de faire la guerre au vent du Midi \ ils matchèrent en effet pour 1'attaquer. » L'écriture nous fournit des preuves inconteftables, dit » M. 1'Abbé Souchet, qu'il y avoit des hommes qui charta moient les ferpens; c'eft fur cela, comme le remarque » M. Dacier , qu'ett fondée la menace que Dieu fait a fon •> peuple, de lui envoyer une forte de ferpens qui n'obéi» roient point aux enchanreurs. Mais que penfer, ajoute le « même Abbé Souchet, du bois de couleuvre dont parle » Scylax, & qui, fuivancles relations modernes, préferve « de la morfure des fvpens les Infulaires, qui en portent »les morceaux? du Mufc qui, felon les Auteurs des Let« tres édiflantes, produit le même effet k 1'égard des Chi» nois; du Dief me de Virginie , qui tue les ferpens k » fonnettes del'Amérique; de 1'herbe que Luddphe appelle >• dans fon Hifi. d'Jithiopie ATazoë, dont il fufhr de » manger la racine pour inarcher fans pénl au milieu » des hydres & des cherfydres, pour les toucher impu-  [ 29 ] » nément, & s'en faire même des colliers; & de la Vi» perine ou fcorfonère, dont le fuc guérit la morfure des w ferpens. Les Marfes qui habitoi;nt cette partie de 1'Iralie qu'on appelloit Ducato di Marfi, s'attribuoient les mêrnes vertus que les Pfylles , & pratiquoient auffi les mêmes cérémonies ; ils employoient, comme eux, des fignes & des paroles dans leurs conjurations. Les Tentyrites, Peuples de trés-petite ftructure , mais très-adroits , étoient aux crocodiles ce que les Pfylles étoient aux ferpens ; ils n'en étoient jamais bleffés. Sur la cote d'Afrique , dans Pinde & dans PAmérique , j'ai vu des hommes fe vanter d'avoir eet empire fur les animaux. Suivant Agrippa ( Philof. occult. Lib. i. ch. 13. le foie d'un caméléon brülé par les exnémités, excite les pluies & les tonnerres. Le même Auteur aflure que la peau de Phyene rend invulnérable. Pline < Lib. 31. c. $.), dit: Hatuniine transfixa naturü per os , fi furculus in menfiruis defigatur a. marito, adulteriorum totdium fieri. Un cceur de taupe mangé tout crud & encore palpitanr , donne le don de prophétie & la faculté d'opérer des prodiges. (Voye\ Plin. L 30, c. 3.1 Un anneau dans lequel on fait enchaiTer 1'ceil droit d'une belette, empêche le nouement de Paiguillette. ( Voye-$ folid. Thre. p. 14.) On nous a dernièrement donné dans tous les Journaux des diflertations très-bien faites; le réfultat d'obfervations ingénieufes fur 1'arrêt du chien de cliafle, fur celui d'une couleuvre fur un crapaud , de la vipère fur le pingon s fur la fouris; de celui du brochet fur le brocheton , qui démontrent, fans que je mukiplie les exemples s  [ 30 ] 1'influence , la fympathie, 1'anthipathie, Ie magnétifme enfin fur les animaux. Mais les Anciens plus inftruits fur cetre matière, ont prodigieufement étendu leurs facultés réfultantes du Magnétifme. Une troupe de corbeaux fervirent de guide aux Ma» cédoniens, pour traverfer, fans s'égarer, les fables de la Lybie. Califthènc rapporte qu'ils les rappeloient la nuit par leurs croalfemens , quand ils s'arrêtoienr. SuivantTite-Live {Lib. 3j.)J un bceuf a Rome, prononga diftinctement. Roma, cave ribt. Suetone 1 in Domit.) rapporte qu'une corneille prédit dans le Capitole la mort de Domuien. La révolution de Tarquin & le changement de I'état Monarchique de Rome en République, furent pronoftiqués par un chien qui paria, & par un ferpenc qui aboya. ( Voyc^ Pline, l. 8. cap. 41. ) Am na lan Marcellin (lib. 27, c. 3.) raconte que dans la viile de Piftoie, a la troifieme heure du jour , un ane monta dans la Tribune aux harangues. Il fe mit a braire, les habitans effrayés, conclurent qu'ils étoient menacés de quelques funeftes cvènemens. Je ne m'appuierai pas de 1'autorité d'Homere qui fait parler des chevaux; les Poètes font fufpects, je n'ai recours qu'a des Hiftoriens. Je ne cite que des Philofophes. On pourroit m'objeóter ici que les faits que je rapporte ont été produits par Ie démon qui vouloit répandre Pidolatrie chez les anciens; mais cette opinion a trop bien été renverfée par Vandale, par Baile, & M. de Fontenelle pour qu'on en falfe mention & qu'on s'arrête a la combattrc de nouveau. D'ailleurs, il eft prouvé, je crois , que les démons larves, efprirs de 1'antiquité , n'étoient que les opérarions du Magnétifme} auxquels on prêtoit les noras de Mars, de  [ J< ] .Vénus, de Jupiter, Sc fur-tout de Pluton. Je ne peus achever ce Paragraphe fans faire voir jufqu'oïi des Sages ont porté 1'intclligence Magnétique des animaux. Ponrus de Thiard, Evêqnede Chalons , dans fes Difcours Philofophiques en i ƒ87, dit »le formis fe repofe au defFaulc de la lune,. m de laquelle fentant le neuvicme jour , être malheureux, s) ce jour ne fort jamais hors de fa formilière. Le fcarabée » ou efcargot ayant donné forme a fes petites boules, 33 compofées de fiente de bceuf ou d'afne , les entcrre j. par 1'efpace de 28 jours, rerme que la lune prend a j3 courir les douze fignes du Zodiaque , & le vingt-neuf 33 fort de fon nid, & les roulant leur fait repréfenter 33 le mouvement du Ciel, les tournant d'Orient en Oc>»cident, puis a 1'imitation des planettes, les retourne 3j de 1'Occident contre 1'Orienr, & ce avec trente petirs 33 pieds, defquels il eft armé pour nombre pareil aux trente 33 degrés de chacun des douze llgnes, &c. Si nous cherchons le Magnétifme dans les plantes, des milliers de faits fe préfentent a la mémoire. Démocrite dit qu'il y a des plantes d'une telle force, d'une telle vertu, qu'elles fervent a 1'évocation des Dieux, & a faire confcfler aux coupables, ce que la queftion la plus rigoureufe ne leur feroit pas avouer. ( V. PI in. lib. 23 , c. 17 ). Juba, Roi de Mauritanië, afTure que cerraines plantes ont la vertu de relTufciter des morts. C'eft la croyance d'Agrippa. Phil. Occult, (lib. 1 , c. 38'. On attribne plulieurs vertus magiques a la mandragore. Un des chefs d'accufition contre la Pucelle d'Orléans , fut de porter cette plante fur elle. (V. du Haillant, Proc. de la Puc. d'Orl. Hifi. de Carlcs VU.) On connoit les effets que le felage produifoit fur nos  [3*3 pères, on fait avec quel foin les Druides le cueilloient en croifant les bras , de peur de nuire a la vertu de cette plante. Qui ne fait les effets du nephentés qui chaflbit 1'ennui, portoir a la gaité, rendoit heureux ceux qui buvoienc fon fuc. L'occimum ou bafilic rend fou, 1'hellébore eft fon antidote. L'opium des Afiatiques produit 1'effet que Pline accorde a 1'herbe nommée doricnium. Si vous en prenez une dofe médiocre, vous jouiiTez d'un bonheur complet, eft-elle trop forte, vous devenez furieux. Les Chinois & les Japonois , les Nègres & les Tartares, les Sauvages du Nord de 1'Amérique & les Ethiopiens, croient a la vertu Magnétique & Médicale des plantes. La buglofe, furnommée euphrofine , mêlée au vin, accrok la vivacité de 1'efprit. L'hierre , la jufquiame & 1'hiene magique, troublent 1'entendement, &c. Cherche-t-on le Magnétifme dans les pierres? Avicenne vous apprendra que la pierre galériate qui fe trouve en Lybie &c dans la Bretagne, a la faculté de faire connoitre la chafteté d'une femme; coupable, fon influence lui donne la mort. Glycas, rapporte (part. 2.) que Simon le Magicien changeoit les pierres en pain. On dit Qu'Appollon donna au Troyen Hélenus, le vrai fiderites e«Ai«« que d'autres appellenr ophitès, pierre qui a le don de la parole ; quand Hélenus vouloit employer la vertu de cette pierre, il s'abftenoit pendant vingt-un jours du lit conjugal. Il fe purifioit. 1'enveloppoit, la portoit fur ion fem. Il 1'en arrachoit, 3c faifoit femblant de la jetter, la pierre alors faifoit entendre une voix d'enfant , & répondoit a fes deiuandes ; elle ptédit les malheurs de Troie. je  f 33 ] Je ne parjerai pas de 1'aimant, tout le monde en connoïr les propriétcs annoncées par les Phyiiciéns , le refte de fes propriétcs fera plus connu dans la fuïté. Je rapporrerai feulemeAt que Jean-Frédéric Herward, ne voyoit qu'aimant dans toute la nature, & ne regardoit toutes les fables de la Mythologie que comme autaut de fymboles, fous lefquels la boutfble étoit déguifée. Les bcetyles qu'Ifidore, Afclépiade & le Médecin Eufebe difent avoir vues, étoient des pierres de ngure ronde d'une grolfeur médiocre. Elles avoient des ligne's gravées fur leurs furfaces, que D imafcras appelle des lettres, elles répondoienr a ceux qui les interrogeoient par un léger fifflement qu'Eufebe 8c les initics favoient interpréter. Quelques Ecrivains ont foutenu que les bcetyles n'étoient que de 1'aimant. Damafcius , cité par Photius , dit qu'on trouvoit ces pierres fur le Mont Liban , elles voltigeoient dans 1'air & delcendoient enflammées fur h terre. Illdorc apprit a fes Difciples que les bcetyles qu'ils croyoient être 1'organe des difFérehtes Divinités, n'étoient animées que par certains genres mitoyens entre les bons & les mauvais. Comme la fable & Pimagination des Poètes fe mêle a tout, Sanchoniaton prétend que le Dieu Cslus inventa les bcetyles. D'autres onr cru que cette pierre étoit celle que Saturne avala croyant avaler Jupiter. Bochard cherche un rapporr entre les bcetyles 8c la. pierre de Jacob. Le nom bethel que Jacob donne a la pierre fur laquelle il rit fon fameux fonge, & qu'a fon réveil il arrofa d'huile, fert fon opinion. On pourroit ranger dans la clafTé des bcetyles, les pierres de Vénus Paphienne , d'Appollon Carinus, de C  t 34 J Juplrer Milichius, la pierre deCibele, le Jupiter Lapis, prefque tout.es tombées du Ciel. Je ne dirai rien de Purim thummim, pour ne pas mêler le facré au profane. Alexandre de Mynde foutient que les Gorgones n'étoient point des femmes, mais des monftres, qui, par leurs regards métamorphofoienr les hommes en pierre; »on découvrit un de ces animaux dans le temps que » Marius faifoir la gucrre en Afrique. Quelques foldats » Romains ayant appercu une Gorgone, & 1'ayant prife * pour une brebis fauvage, fondirent fur elle-, elle releva 55 fon énorme crinicrej & d'un fcul regard elle les tua 35 tous ". Pindare, f Odes pythiques io.) dir .5 Perfée revint en 5, tenant a la main la tête horrible de Médufe, d'ou >5 pendoient de longues boucles de ferpent, & portant 53 dans tous les lieux ou il paifoir une mort de pierre». Ovide aflure que le corail eft une production du fang de Médufe; je n'ai pas vu d'enfant ou de Négrelfe a 1'Amérique qui ne portat comme préfervatif, comme la caufe d'uneémanation falutaire, dei morceaux de corail au col. Je n'entrerai pas ici dans le détail que je pourrois me permettre fur la compofirion des ouinga des Nègres. C'eft une efpècede fachet talifmanique, dms lequcl entrent les trois règnes de la nature le végétal, le minéral & 1'animal. lis préfèrrent la chair humaine , le fang de b.-uquetin, la limaille de fer, les feuilles de camaiin, ils y joignenr des pierres concalfées & rur-tou: du corail. Ils fe fervent pour guérir les héinorrho'iJes d-ne gnine que nous portons a nos montres en France, fort rellèmblantc  [ 3; ] aux fèves de pytagore, fans que nous en foupconnions la vertu. Le P. Labat rapporre, d'après Paul Lucas, que des femmes de Monefta , pres de Tunis, pourfuivent les lions avec des batons & des pierres & leur font lacher leur proie. Croit-on que fans Magnétifme, une femme timide Sc fes pierres produifïflent eet effet fur le plus terrible Sc le plus courageux des animaux. Nyendal (pag. 46;.) dit que la plus grande fête du Benin eft celle du corail, mais on ne lui en expliqua jamais la myftérieufe origine. Les Nègres de Loango, quand ils voyagent, fe chargent d'une douzaine de livres de petites pierres, Sc croyent diminuer par-la le poids de leurs armes Sc de leurs provifions. Le P. Lecomte qui foutient que les Chinois font Athées, dït qu'ils ont un te! refpeót pour la pierre d'aimant qu'ils 1'encenlent continuellement, & lui offrent des viandes & des fruirs dont les émanations fans doute entretiennent fa vertu. Nous favons fur le témoignage d'Ariftote, (de anima, l. 1 , c. 1.) que Thalès, le plus ancien Philofophe de la Grèce, a parlé de 1'aimant. Onomacrite qui vivoit dans la foixantième olimpiade, duquel il nous refte, dir-on , quelques Poéfies fous le nom d'Orphée , parle de 1'aimant fous le nom de ( Ma yinT'i.) Magnejlès. Kircher trouve dans le Talmud, que les veaux de Jéroboam étoient fufpendus par les forces combinées de différens aimans. Je me rappelle le conté de eet homme, qui voulant renouveller les rêveries anciennes , foutint qu'il croyoit a la métempficofeSc qu'il fe rappelloit C x  [ ^ 1 d'avoir écé le veau d'or: une Dame lui dit, & fon mot pourroit s'appliquer aujourd'hui, M. n'a perdu que fa dorure. — On fe fouvient du tombeau de Mahomet; de la Statue du Soleil; du Temple de Sérapis; du Bellerophon a cheval , quatrième des merveilles du monde felon Beda; du Mercure de Trèves; de PUrne de SaintPaulin , fur lefquels le même effet avoit lieu. Marbodasus alTure qu'une pierre d'aimant , place'e fous le chevet d'une femme par fon mari, 1'en fait fortir avec violence quoiqu'endormie, li elle a forfait a la foi conjugale. Les Caciques avoient trois pierres qu'ils confervoient foigneufement, Pune faifoit crokre les grains, Pautre procuroit aux femmes une heureufe délivrance, la troilïème produifoit le beau temps 8c la pluie. Je pourrois parler du caaba, des gamahès, & de cette - fameufe pierre blanche de PAlcoran, fur laquelle un bceuf foutient le globe de la terre, la tête conftamment tournee a POrient & la queue a POccident. Mais quelques faits bien conftatés prouvent autant une vérité que tous les exemples entalfés, fouvenc pour faire parade de fon érudition, & dont la chaïne 8c les rapports ne font pas clairs pour tous les efprits. C'efl: fur-tout dans les métaux, qu'éclate la puiiTance du Magnétifme; ils ont la faculté d'attirer , de réunir , d'accumuler, de répandre le fluide univerfel : auffi, quoique d'autres fubftances foient propres a eet ufage , quoique les batons de Pan, de Jacob, la verge d'Aaron , le lituus Augural , les crolfes Egyptiennes , la baguette divinatoke , la verge ardente , la verge fupérieure , la verge tranfeendante, &c. foient employés par des hommes inftruits , les pointes métalliques font d'un ufage plus général : rappellez-vous', pour ea ccre convaincii, le  I 37 ] ïceptre de Jupiter, le trident de Neptune, la fourche de Pluton, le marreau de Vulcain , les pointes figurées en armes , dont tons les Dieux Tartares , Arabes , Indiens Sc Japonois font armés; fouvenez-vous du croiuant des Druides 3 de la houlette des Bergers , & tant d'auues pointes Magnétiques qu'il eft inutile de nommer ici. Les tarifmans , abrakas, Sc philactères , étoient en génétal méralliques, la fufion d'un métal permet de le combiner avec des fubftances qu'il s'approprie, 1'univers entier peut nous en fournir des exemples. Nous n'examinerons pas ici (1 les' métaux font le produit de vapeurs condenfées , s'ils font le fruit du foufre père Sc du vif^argent mère, s'ils font le fmiple produit du feu élémentaire , je deviendrois Chymifte, Phdofophe ou Sage , Sc je ne veux être qu'Hiftorien ou Compilateur : farïiflons donc les traces de nos émanations, influences y öcc. chez tous les peuples Sc dans tous les climats. Jacchis , dit-on, fut 1'Inventeur des talifmans , des remèdes cachés contre les douleurs & contre les maladies occafionnées par le défordre des élémens. Il vivoir, au rapport dc Suidas, fous Sennyes, Roi d'Egypte, très-longtemps avant Salomon. On fent que je ne rapporte ces prétendues origines que pour m'accommoder aux opinions communes. ïfaïê paroit avoir eu en vue les philactères, quand il reproche aux Caldéens, la confiance qu'ils avoient en leurs enchanreurs. Théophrafte, au r-pportde Plutarque, dans la vie de Périclès , aflure que ce grand Capitaine avoit un talifman fufpendu au cou. Püne dit que tout 1'Orient regardoit comme tel, le jafpe verd. L'opinion commune , étoit , dit-il ailleuis , que C 3  r 381 Milon de Crotone ne devoit fes victoires qu'a des pierres qu'il portoit dans les combars. Le même Ecrivain prête une puiffance bien vafte a éercains philaótètesi il dit qu'on fe fcrvoit de Phématite pour détruire les piéges des Barbares. Les gens de guerre en Egypte , au rapport d'Elian, fe fervoient de figures de fcarabées pour aug;nenter leur courage & braxer les dangers. On a cru que ceux qui portoient la tête d'Alexandte en or ou en argent, n'avoient rien a redouter. Prefque tous les talifmans étoient fabriqués fuivant les myftères de 1'Ifle de Samothrace. On fait que le cafque de Pluton & Panneau de Gigès, rendoient invifibles. Lorfqu'un Tartare de la petitc Bukkarie tombe malade, le Mullah lui vient lire un palfage de quelques livresj fourfle fur lui plufieurs fois, & lui fait voltigcr un couteau fort tranchant autour des joues. Plan Carpin rapporte que le Prête - Jean vainquit Jenghiz-Khan a la tête de foldats de cuivre qui fouffioient du feu. Les habitans du Royaume de Loango , prêtent de grandes vertus a leurs MokifTos ou Dieux, repréfentés par un baion ferré. Le Dieu du mariage chcz les Japonnois eft atmé d'ua lil de laiton, fymbo'.e des émanations produ&ives. L'Oifeau merveilleux , Phénix de PAmérique, qui prédit a Montézuma la deftru&ion de fon Empire, avoit fur la tête une lame luifante 3 fut laquellr étoit reprcfentce une nuit avec des ctoiles, des foldats inconnus & bien armcs , s'avangoient du cotc de 1'Orient en faifant un carnage affreux de fes fujets.  [ 39 1 Tefcatüputza , idole du Mexique, tenoit quatre flèches a la main , fur fa poitrine étoit un miroir de rnétal. Deux enfans du Solcil, au Pérou, recurcnt de leur père un lingoc d'.or qui les guidoit dans leur marchc; ils fixèrent leur demeure dans 1'endrok oü le lingoc s'enfonca dans la terre. Malgré le témoignage des Ecrivains les plus graves fur les Philadèrcs, il eft cncorc des incrédules : il en exifta de tous tems. Scaliger rapporte qu'un Aftrologue fit un talifman contre les muuches, fous les afpeóts les plus favorables.il y grava les caradères les plus forts, ceux qu'on fuppofe les plus puiflans fur les enfers. Il n'eur pas plutót pofé cette figure fur la fenetre, qu'une mouche vim s'y placer & la falir de fes ordures. ( Foyei Scallg. ad Card.) Scaliger n'écoir pas impartial quand il inventa ce trait plaifant j il vouloit faire un livre contre Cardan : fon imagination féconde & favante 1'aida fcule dans ce travail. Queï homme de bonne roi pourroir réfifter a eet affentiment de tous les peuples, a cette multitude d'exemples que je viens d'alléguer , & que je pourrois multiplier a 1'infini, fi je ne me prefcrivqis pas des b mes. Que diroit-il fi I on retracqit a fa mémdre ce que 1'Afie nous rapporte de l anneau de Salómon, de la larrjpe merveiüeufe, du chanielier des Derviehes , & ce que les Nonvègiens, les Danois & les Sauvages du Nord de l'Amédque rapporten* de leurs Prêtrcs ? Que dhvit-il en Afiique, a 1'afpecl du dieu L-goye qui porte au fommer de fa tcte une pointe de fer & ce myftérieux croidanr qu'on vcit par-tout? C'eft a 1'aide de ces inftrumens magnétiques cue cette divinité féconde la terre & préferve fes adorateurs de rout danger. Ne feroit-il pas obligé de fe rendre, fi 1'on metroit a fon doigt une de ces bagues de cuivre rouge que les Malayens, C 4  [ 40 ] habitans de PAfrique, apportent a Juida; elles procurent dans la nuit la plus fombre Péclat de deux flambeaux de cire. Mais hélas ! entouré de merveilles, Phomme s'obitine a pe pas croire. Ménandre avoit r ïiion de s'écrier : Pignorance ne voit pas mém? ce qui frappe fes regards. Faudra-t-il mettreau rang des fables ces talifmans qu'on fufpendoir au col des Rois d'Egypte, & qui les éloignoient de toute injuftice? Ne trouverez- vous pas affreux de ne plus cempter fur ce bel ouvrage de 1'art ? Ne croirez-vous pas Sr. Jéróme (dans la vle de St, Hilarlon,c. 16)) il raconte qu'un jeune homme amoureux alfa s'inftruire k Memphis; qu'a fon retour il mie fous la porte de fa maitfefle un talifman qui produifit chez elle un amour fprcerié. Charlemagne ne pouvoit s'éloigner du corps de fa maitfefle morte. L'Archevêqnc Turpin enleva Panneau qu'elle avoit fous la langue : Pamour du Prince s'évanouir; mais il ne pur quitter PArchevcque. Celui-ci jetta dans un lac Panneau talifmanique ; le mêmc charme opéra : FEmpereur ne put abandonner les rives de Pétang. Il y flnit fes jours, & voulut que fes fuccefTeurs fufTent facrés dans eet endroit, a Aix-la-Chapelle. Suppofera-t-ton que ce fait hiftorique foit controuvé ? Un homme qui ne connóitroit pas Phomme & les caufes qui déterminent fes erreurs, devroir, d'après ces faits , s'étonner de voir rejetter les idéés douces & confolantes de ces ecres errans fur nos rêtes qui nous foulagent & nous protègent. II ne pourroit concevoir commenr , entouré d'efFets dont il ignore les caufes, de métamorphofes Sc de merveilles, le malheureux renonce a Pefpoir de pofTéder un jour Ia mbnnoie de Pafés, le mouchoir magique, les tréfors d'Aboulcalfem , la ceinture, le cor &la bourfe de fangutj Ie chapeau d'Eric, &c.  [ 4i 1 'uJ'écris depuis long-tems, fans fonger que lamultitude de fiics que je ralTemble doit fariguer ceux qui lifent cette Brochure. Je fens que tout efprit futile doit la condamner; elle ne doit pas plaire aux initiés que jc ne peux iïiftrufre : puiiTe-t-elle fcrvir les difpofitions favorables que je vois germer en France depuis quelques temsj c'eft Ie feul fuccès que ie puifTe me promettre. J'ai parle du Magnétifme chez les animaux, dans les plantes, dans les métaux; voyons-le dans les effets de la Mufique «. On connoït les idéés de Pyragore, fur la Mufique en général : on fait que fuivant fon fyftcme , des accords' parfaits réfultoient de la marche des aftres : or, comme il eft prouvé que les aftres influent fur Pefpèce humaine, la Mufique règle nos aótions fur la terre. Elle peut, par fes fons, donnet du ton a nos nerfs, rétablir Péquilibre dans nos fluides, défopiler la rate , détruire les aliénations de Pefprir, Sc préparer nos corps aux influences bienfaifantcs qui foutiennent notre exiftence. Les Anciens étoient convaincus qu'elle adouciftbit les rnceurs , humanifoit les Peuples fauvages. Ils la croyoienc propre a excirer ou a. réprimer les paffions, Sc même a guérir plufieurs maladies. Les Légiflateurs, dit Polybe, voulant amollir & tem-' pérer la férocité des Arcadiens, les forcèrent a célébrer des Fêtes , dont la Danfe Sc la Mufique étoient la bafe. Par leur moyen, malgré leur travail manuel, 1'auftérirc de leurs rnceurs Sc la froideur de leur climar, ces Peuples fe polirent infenfiblement, & facrifièrent aux Graces, comme tous les Peuples de la Grèce. Les Cynaïthiens, feuls, ayant négligé la Mufique , devinrent fi barbares, qu'il n'y eut pas de Ville en Grèce ou les grands crimes  [ 4* 1 fufTent aufll communs. Ce Peuple malheureux, forcc d'cnvoyer des AmbaiTadeurs a Lacédémone} fut maltraité par tous les Grecs. Les Habitans de Mantinée purifièrent leur Vüle après leur palfage. Il feroit inuüle de répéter ici ce qu'on voit pat-tour fur li Mufique , chez les Peuples fenfibles de la Grèce. i>i ies Amphions, les ürphées , les Linus , produiiuent de s effers fi furprenans , a 1'aide de leurs lyres, montées d i uis ou quatre cordes, tendues a vuide, que ne pouvons* nous pas opérer, a 1'aide de nos inflrumens perfectionnés. Si Ierpandre appaif Lt une fedirion a Lacédémone 5 fi Pytagore éteignit 1'amour d'un jeune hemme 3 Sc le templaca par la b;.ine ; fi Damon, Muficien de Milet, arrcra les fureurs d'un fils pret a commettre un parricide , que ne pourroient pas opérer nos grands Muficiens, fur des organes bien difpofés, & fur des imaginations fenfibles ? On fait qu'un joueur de barpe, a la Cour d'Eric II, Roi de Danemarck, conduifok infenfiblement fes Auditeurs du calrne des feftins 2 la fureur des combats. Marrien Cagella allure qu'on peur guétir la fièvre par le chant d une voix mélodieufe, Sc qu'Afclépiade remédioir a h furditc par le fon de la trompette. Piutarque (De Mufiea..p. 1099, Edïc. Steph. Gr.) dit que le Crétois Th létas , délivra les LacóJcmqniens de la pefle , par la douceur de fa lyre. Il parle auffi de Maniaques & de Furieux , guéri- par lt rnême moyen : Saül doit nous fervir dc preu/e dans ce fait. ApoUonijiS, furnVmmé Dyfcolus, ou le Difficile, dit que h Mufique guérit Ta défaillance de cceur & 1'aliénation .1 efprit Sc ^,ue le fon de la (lute eft un bon remède eoutix i'épilepfie j & pour la goutte fcyatique.  [43 1 Les Sauvages du Canada, les Lapons, les Nègres du Congo, & de prefque toute la cote d'A&ique, guérillent chez eux pluiieurs maux par ccrcaines fymphonies, dignes de la groflïèreté de ces Peuples. Toute la Nature s'ébranlc aux fons harmonicux des voix ou des inftrurnens. Sans déclamer avec les Poctes, fans faire mouvoir !es pierres d'Amphion , rendre fenfibles le Dauphin d'Arion & les bêtes d'Orphée, nous voyons dans les Philofophes , & les plus graves Hiftoriens , des preuves de ce que j'avance. Un Plutarque (qui n'eft pas celui que nous connoiffons), parle de certaines pierres f ites en forme de cafque , & qu'on portoit en prcfenr dans le Temple de Minerve Chalcidique a Sparte ; elles s'élevoient a la furface du fleuve Eurotas au fon de la trompette, & s'y replongeoient dès qu'on prononcoit le nom des Athéniens. ( Plut. de Fluv. ) Le Mudden Eunome étoit repréfenté dans le Céramique avec une cigale fur fa harpe, en mémoire de celle qui fuppléa dans les jeuxa la note qu'il ne put tirer d'une corde qui venoir de fe rompre. Elian cite 1'amour d'un bélier pour une Muiicienne; Pline (lib. lo, c. 11.) raconte les amours d'un oifon pour la joueufe de guitare Glaucé , qui par fes talens pour la mufique, avoit encore fu féduire le cceur d'un beau bé'.ier. Arrian (Hifi. indic.) parle d'un éléphant qui faifdt danfer en mefure une troupe d'éléphans au fon des timbales qu'il frappoit. Arrian fe cite comme témoin oculaire de ce fait, auquel nos concerts de chats & tant d'autres donnent de la vraifemblance. Photius a écric que 1'ane d'Ammonius avoit un goar.  t 44 ] merveillcux pour la mufique & pour la poene , & qa'il lailToit les chardons pour un poëme ou pour un air de bravoure. Ce faic fe répète encore tous les jours. (Bi~ bLioth. j cod. 242.) De gros finges en Egypte ( V. Elian , de anima , lib. 6 ; c. 10.) étoient inftruits dts lettres, favoient danfer., jouer de hflute; ils compofoient une troupe de Comédiens, faileient payer a 1'éntrée, & portoient une bourfe a leur fcoté. pour recevoir 1'argent. Trop d'exemples nous attcftent ce fiit pour qu'on en doute. Le Peré. Pafdies ( de la connoiffance des bêtes, p. 129.) raconte que des chiens ont appris la mufique, & qu'un d'eux enne autres faif it fa partie avec fon maïtre , 8c parvenöit fouvent a 1'ég.der. Q;>el prodigicux ébr.nlement lo fon ne donne-t-il pas a 1'air qui 1'environne; j1 divife les nuages, pénèrre dans les cavernes, agite li furfice de> eaux, émeur les corps a l unilfon. La cloche d'Erfurr en Allemagne, s'entend , dir-on, a 24 nulles ; le bruit du bombardement de Gênes fe répandit prés de Livourne , éloigné de 50 milles. Dans les guerres de 1672 , des coups de canon futent entendus, dit-on, a plus de deux cents milles de diftancc. CaiTIoJore cbferve que lorfqu'on chante fur les bords de la fontaine Aiéthufe , en Calabre, fes eaux murmurent & bcuiilcnnent. {Vatiar. Led:., lib. 8, c. 32.) Solin ( c. j.) tapporte qu'une fontaine de Sicile étoit émue par le fon des flutés . au point de fe déborder. Mdheureux celui qui n'a i tinais fenti les douces influencs de la Mufiqu'e ! Sou arriè cd nulle fans doute: il ne fourit pas a fes enfans, a fa mairreflè , a des amis ; toute la nature eft morte pour lui; le ioleil commence Sc  I 4J 1 finir fa carrière , féconde la terre , fait exhaler dans 1'air 1c parfum des lilas & des rofes, fans qu'il foit ému jufqu'aux larmes. Le calme & la fraicheur des mins, le criant du roffignol, les doux fouvenirs des rêveries du matin & des plaifirs du foir ne ie bjrcent pas avant fon fommeil. Jamais il ne s'attendrit aux accens des humbles prières. Etre ifoléj féparé de 1'harmonie générale, il ne participe pas au mouvement qu'elle donne a 1'univers; Sc les atomes qui le compofent attendent une combinaifon nouvelle pour s'unir fans contrainte au fentiment qu'elle communiqué a tour. J'ai voulu vingt fois quitter la plume ; mais entrainé par la fécondité de mon fujetj je la laifle courir malgré moi. De nouveaux rapports , de nouveaux effets du Huide univerfel ou du Magnétifme s'orlrent en foule a ma mcmoire. Jc n'ai rien dit de 1'influence phyfique des mots, des nombres & des caraélères dont les rapports trop fubdls paroiffent s'écarter du Magnétifme. II feroit peut-être nécelfaire pour contenter tous les efprits & montrer tous les chemins que nous devons parcourir un jour, de s'étendre fur 1'Art d'interroger les mortSj fur la Catoptromancie qui n'employctit que les miroirs, fur la Cofcinomancie qui fufpendoit un criLle fur le doigt, fur la Cephalaïónomancie qui connoifloit les influences a 1'aide d'une tê:e d'ane grillée. Je ne devrois pas rejetter ce que je pourrois dire furl'infpedion du creux de la main & fur fes direótions correfpondantes } &c même fur la Métopofcopie. Mais on a tant écrit fur ces maticres que les êtres les plus ignorans conncifTent & pratiquent aujounf hui tous ces grands moyens du Magnétiime. Je regvette de ne pouvoir traiter de la f mpathie & de 1'antipathie fi bien démontrtes par des raifonnemens Sc  ] des exemples dans 1'Encyclopédie Sc que 1'univers entier nous attefte. Théocrite s'écrie , ' Idil. j.) je fens le treflaillement de mon ceil droit, je verrai bientör ma Bergère. Qui doute que cette émorion qui nous fait deviner 1'approche de nos amis ou de nos ennemis, ne foit le fruit des ëmanatiohs fympathiques ou antipathiques des corps. On a vu des frères jumeaux mourir a la mort de leurs Frères éloig lés , fentir leur1; bleflures, parriciper a leurs Jouiflaaces , éprouver leurs maladies ; on a vu des Amans prendre la lune pour foyer de leurs émotions réciproques ik de leurs échanges amoureux & magnétiques, Des hommes pleins de force n'ont pu foufFrir 1'odeur d'une rofe ou le voifïnage d'un chat fans tomber en foib.'efTe \ la Vénus de Médicis produifoir eet effet fur un jeune Efpagnol. Les abeilles, dir-on, fuienr leur ruche, les fleurs fe flétriflênt a la mort de leur Maltre. Camerarius 3 Fr, man , Pline Sc tam d'autres difent que les plaies d'un homme aiTaftïné fe rouvrenr dans la préfence du meurtrier. Rappellons-nous le frémiflemenr des cendres d'Abailard a 1'approche de celles d Héloïfe Sc reconnoiflons dans tous les genres , dans tous les tems les rraces de ce fluide qui meur Sc dirige 1'univers dans fes grandes mafles cornme dans fes atomes , dans les êtres que nous nommons animés comme dans la matière que nous nommons inerte ; la plus petite combinaifon !e meut Sc Ie dirige; il ébranlc les montagnes, rcule les flors de Pimmenfc océan , produir les volcans, dirige les aftres comme i! fait errcr dans I atmofphère 1'atome invifible ou le papiüon léger. Bdancanr routes les fphèies Sc tous les cercies il eft au centre . a la furface , il eft par-toutj nos combinaifons de dureté . d'impénétrabilité, de mefures font i;uiies pour iui; il ne connoit point d'obftacle &  [47] de durée; il eft le rayon folaire qui divinifa Fora 4 le Li des Chinois, le Lengue Cherire des Indiens , le BarhalaMay-Capal des Ifles Philippines j il éroir ce beau jeune homme qui defcendit du Ciel tour rayonnant de lumière , Sc chafla. les géans de Puerto-Viejo avec des flèches de feu; cette étincelle que les Lapons croient myftérieufe Sc remb'ême du mariage;cette vapeurignée a 1'aide de iaquelie Oul^fat fe ïéunira fon Père Célefte, comme le difent les Sages des Ifles Palaos. On le reconnok dans les vafes de Siam , qui marquent le flux & le reflux de la mer avec exactirude : dans les fept fois trois pointes, par le. moyen dtfquelles les Ombiafles de Madagafcar commandoient aux cïérnens. Et dans ces ballïns remplis d'eau , oü les Sages de 1'Ifïe de Sokotra vircnt trois vaiflèaux de Vafco de Gama pénétrans dans les Ihdes. Il eft cette roféequi s'clrve de Ia montagne de Niemi, & fait le bonheur de fes hibitans. II enfanra par 1'union des verrus vivifiantes de la terre & du ciel le divin Lan-Tfé , prés de la Ville de Lin-Pan ; il féconde les Vierges de Nyu-Jin en s'élevant fur les vapeurs du puits qu'on y révcre. II croife les efpèces & rapproche les règnes; il produit les plantes animales, végétantes & métalliques qu'ona trouvées dans les Ifles du Cap verd ; ces vignes chargées de grappes d'or; & les plantes de Goa , des Ifles Célèbes & de Bornéo , dont les racines & les feuilles font le produit de cornes d'animaux enterrées. II crée a la voix du Sage .^cs fleurs au milieu dc 1'hiver, des man^ues, des fipotilles & des palmiers dans les dimats de la Siberië , & les produfcions du Groenland dans les plaines bmlantes du Mexique.  [43 ] C'efl: par'fon fecours que Pyrrhus en promenant foi doigt fuc les malades, avoit la faculcé de les guérir. Par lui la main feule d'Achille pur fermer la blefiure qu'i avoit faire a Thélephe. Par lui le grand Appollo'nius refufcita des morts, Ephef tion fit fes miracles. II agifToic dans les doigts de Vefpafien quand il guérir un aveugle aux yeux du Peuple Romain. I ctoit dans la liqueur , a 1'aide de laquelle Alcibiade'fut rappeler un jeune homme a la vie. Les Fakirs & les Floridiens , les bras tendus au ciel s'en pénétrent au lever du foleil, &c. Tout 1'Univers eit plein de fes ceuvres & de fes mei-veilles il eft par-rout; mais il préfère les heureux climats dj J'Ü:''enr des fages , les plaines fécondes & riantes qu'on £ déguifées fous cant de noms, que les Alchimiftes, les Cabaliftes & tant d'infenfés ont placés dans les déferrs dc 1'Afrique , a 1'Ifle de Ceilan, au midi du Pérou, dans h Fioride , qu'ils ónt défig'urés fous ranr d'emblêmes &r dt contes merveilleux , & que M. Mefmer , jeune & fagc Ecolier pourra connoïtre un jour , s'il parvienr a lever le voile qui lui cache encore la vcrité. F I N.