;l E POLITIQUE N°. LUI, LUNDI, ce u FEVRIER, 1782. CHAPITRE XLIV. Sur les intéréts aïïueh de Ia Rêpubliqae. La fituatjon critique & vraiment dangereufe oh . ie trouve la Pauie, eft tron connue, pour qu'il loit néceflaire d'en rapeler le trifte & dou'oureux tableau. La détermination & la conduite de ia Répubhque dans cetce Crife délicate, peuvent influer fur Ion exiltence même; & perfonne ne pouvant ignorer quelle influence Amfterdam a par Ja fupénorité de fa puiffance & de fes richelTes , fur les autres membres de la confédération, route lanation a naturtilement lesyeux fixés fur cette ville. Ce ne font 1 ome III. a ' uas  co pas feulement les regards féveres de la nition, paree qu'ejle eft malheureufe, inquiete & méconrente, qui s'arrétent fur elle ; mais la postérité, encore plus impartiale & plus courageufe, cherchera dans fa conduite avec une curiofité encore plus févere, les caufes des événemens préfens. Qui pourra jamais ignorer qu'Amfterdam a joué & doit joucr encore un róle frappant dans la fituation importante oü fe trouve la Képublique? Ainfi tous les traits de la conduite de ceux qui fe feronc trouves a la tête de cette grande viile dans ces anflées critiques, feront examinés, pefés & jugés. Uluftres membres du corps politique, on attend de vos vertus, de votre pam'otifme & de votre ardeur pour la liberté, que vous foutiendrez la gloire de vos prédeceiTeurs, qui fe font principalement fignalés, dans les circonliances embarralTantes oü fe troüvait ia Répubiique Les annales de IaPatrie transmettront a ia derniere poftérité tout ce que vous aura fait de mémorable dans ces conjonótures. Vos principes, votre courage, nous affurent que rien ne vous effrayera, dès qu'il s'agira de 1'avantage & de la gloire de 1'Etat. La ville, la Province , la République entiere efpere qu'une attente auffi iégitime ne fera pas vaine. Jamais des têtes profondes, fermes, vjgoureufes, n'ont été plus néceffaires a la Répubiique. Les corps politiquesreffemblent,a plufieurs égards, aux corps humains; les maladies des uns & des autres font fujettes a des crifes : ce moment terrible décide de la vie ou de la mort. La Répubiique eft aftuellement dans cette crife. Les aJTemblées d'Erat, les principaux Chefs, ne.cellent de faire retentir cette alar- mante  C3> mante vérité. Oo indique des 'refTources , des remedes: pourquoi ne foni-ils pas adoptés? II nous en refte trots entre les mains; & il n'en eft aucun, dont les effets ne foient iürs, avantageux, importaos, Le premier eft apelé a grands cris par les vceux de la nation. C'eft une alliance ofFenfive & défentive avec la France, & le concert des opérations militaires avec elle. Comme les deux autres paraiitent avoir moins exercé l'attcmion publique,nous les rapellerons avec plus d'étendue & de force; quoique nous les ayions déja indiqués. C'eft une vérité reconnue, que 1'Angleterre re fe foutient plus par fes reffources ordinaiies & anriüelles; mais qu'eüe eft obligée d'accumuler des einprunts énormes qui exeedent beaucoup fes facultés. C'eft une fjcoride vérité non moins incontes. tablc, qu'il ne tiendrak qu'aux Hollandais de ruirer ces reflources , en ftifaeC écrouler ce crédit. 11» n'ont qu'a ne plus verfer de capitaux dans les nouveaux emprunrs qui dnivent s'ouvrir en Angletcrre; i!s devrait méme fe faire quelque conjuration patriotique, fuivant laquelle tous les citoyens . foupconnés d'avoir des fonds è placer, s'engageraient a n'en pas envoyer en Angieterre. Heureux il le pian qui fj trouve dans les Réfolutions de la ville d'rtrnfterdam & dont Guillaume IV. d'heureufe niéraoire, avaft eu fidée, favoir , d'ériger un coile.-eouchambre de commerce ,eütréuiTi! Une pareiile fociété, chargée naturellement de propofer auSouverain& a la Nation, tout ce qui peut teniri des objets de cominerce & d'économie poütique, aurait expofé les meilleurs moyeHs d'efTe&uer une opération auffi falutaire a 1'Etat, A 2 Les  C4) Les Hollandais pourraient encore , a-t-on déja propofé, faire un pas de plus. Que deviendraiff le prix des fonds Angiais, fi nos capltaliftes fe déterminaient a en fortir? Comment la circulation annuelle fe ferait elle, li 1'Angleterre fe voyait privée de fon or par les remifes immenfes qu'il faudrait faire en Hollande pour payer le montant des capitaux que les Hollandais auraient vendus. Les effets de ces deux opérations parailTent infaillibles aux plus habiles fpéculateurs. Tout ce qui peut óter h 1'Ennemi les moyens de pourfuivre la guerre & le mettre dans la nëceflïté de faire une prompte paix, ne doit jamais échapper aux yeux de Souverains éclairés & patriotes. Le troifieme moyen eft une alliance avec cette nouvelle Répubiique, formée comme la nótre par 1'amour de la liberté. Le fort de rAmérique , flxé depuis le moment oü elle fe déclara indépendante, prend tous les jours une confiftance plus folide, un afpeéï plus impofant. Cette branche, arrachéepour toujours du trónc paternel, commence a devenir un arbre majeltueux. Tous les efforts de 1'Angleterre ne fervent qu'a augmenter fon développementct aaccélérer fagloi'e. Les avantages immenfes que 1'Angleterre tirait du droit exclufif dc s'approprier le fuc de cette branche, font ouverts a 1'univers entier. Quelle nation a plus d'efpoir d'y prétendre que celle qui, par 1 abondance de 1'argent, 1'intelligence de fes négocians, &'la grandeur de fa marine marchande, eft en état d'y faire le plus de fpéculations? C'eft ici que commence k fedcvelopper la conduite fublime de la France que des efprits de mauvaife humeur cherchaient a rabaifler & que les événemens femblaient auffi condamner. Actuellement le politique 1'admire, le Holiandais la  C5) la craint, Phomme fenfible defire qu'elle tourne au bien de l'humanité. Voyez-la depuis cinq ans foutenant, è peu prés feule , ces nouvelles Képubliques; croyez vous que la gloire brillante d'ètre la feule a défendre cette indépendance ne la flatte pas ? Croyez-vous qu'elle ne cherche pas a s'en faire un titrede reconnaiffancepourl'avenir ? La gloire, jointe a 1'intérét, n'eft-elle pas & ne doit-elle pas être le guide éternel des grandes Monarchies ? Sans prétendre b. la gloire de pénétrer dans les fecrets des Cabinets, ne pourrait-on pas foupconner qu'elle pourrait chercher a traverfer fourdement les iiaifons politiques de 1'Amérique avec d'autres Puiffances ; jufqu'a ce que fes relations politiques & mercantiles foient inébranlablement affermies dans cette partie du monde ? Puifqu'elle n'a pas enc/>ie déterminé 1'Efpagne a reconnaitre folemnellement cette indépendance , ne dirait-on pas qu'elle cherche a concentrer dans elle feule, la gloire la plus brillante qui fut jamais,& a raffembler pour elle tous les avantages de cette grande & mémorable révolution. Qu'on n'objedte donc plus aux Puiffances invitées k reconnaftre 1'indépendance de 1'Amérique, que 1'Efpagne, également en guerre avec 1'Angleterre , ne s'eft pas encore portée a cette grande démarche. Mais, puifque la France s'eft montrée plus hardie, quj óferait balancer entre la politique de Verfailles & celle de Madrid? Le motif de la circonfpeftion aftuelle de 1'Espagne fur eet article parait cependant fe dévoiler. Les Anglais viennent de publier des Lettres interceptées-d'un Ancien Membre du Congrès, de Silas Deane, un des Piénipotentiaires qui ont figné le Traité avec la France. Mr. Deane, n'ayant pas protefté contrc 1'authenticïté de ces lettres, quoique les affaires de 1'Amérique y foient repreienA 3 tées  C6) tées fous les traits les plus défavnntageux, quoïqu'il trahiffe aiofi la confiance publique , il n'eft aucune raifon d'en fufpe&er la vaüdité. II faut obferver, dit il, que 1'Efpagne a commence par ne vouloir rien favoir a notre fujet; afin de fe réferver la puiiTance de fe déclarer pour ou contre nous, ou d'exiger les conditions que fon intérêt pourrait lui diéter , quoique 1'Amérique fe foit en- fagée par un article fecret du Traité de Paris, 6 'evrier 1778, de faire un femblahle traité avec 1'EfpagBe, au cas qu'elle en foit requife-j Mr. Deane fait entendre qu'ainfi 1'Amérique eft liée a l'Es. pagne fans que 1'Efpagne foit liée a 1'Amérique, & qu'elle ne fe détenrmiem que fuivant ia politique qui pourra lui alTurer facquifition des deux Florides. Le même Auteur infinue que 1'objet de la France & de 1'Efpagne eft de confunier les forcesdela Grande-Bretagpe & de 1'Amériaue, & que la France ne donue a ce!le-ei qu'ail'ez d'affiftance pour 1'empécher de fuccomber ou de voler de 1'autre cóté; mais pas niïe?. pour la faire triompher. Quand la pr;f. de Cornwallis, ajoutée a bien d'autres démarches importants, ne prouverait pas que cette conjeclure eft faufte, elle n'eft aucunement analogue aux vues d'une Cour trop éclairéepour adopter une politique vifibiement fauflj écdangereufe. En effet, 1'idée de miner infenfibk'meut 1'Amérique ne produirait aucun effet qui fut falutaire pour la France. On infinuera, peut-être, que la France commence a fe repentir d'avoir foutenu les. Américains & qu'elle n'agit que pour éviter la honte de revenir fur fes pas: mais cette idéé contraire a tous les principes de la faine politique, n'eft mife en avant que pour éblouir les fots ou empêcher les autres de partager le même avantage. Cependant, après Ia terreur que fes flottes ont por-  C 7 ) portée aux Ang'ais en Amérique, Ja hdte avec 1«quelle ils ont a leur approche quitté 1'extérieur des terres pour fe réfngier dans les places maritïmes ifolées , & d'apiès la facilité avec laquelle leur.- armées Tont tombóes a leur approche, il femblcrait qu'il ne tient qu'a la France, par Ia fupériorité des forces navales , de détruire entierement la puiAance Anglaifc dans cette partic du monde, fans lui iuppofer e projet monftrueux de ruiner 1'Angleterre & 1'Amérique 1'une par 1'autre , celui de prolonger la guerre pour affermir fes relations & détruire celles que 1'analogie du langage, des mceurs & de 1'origine y a établie en faveur des Aaglais. Ces obfervations qui paraiffent donner 1'explication de fa conduite éoigmatique, devraient nous fervar a régler la nötre. Notre Répubiique, longtems arbitrede 1'cquilibre général, pourrait 1'étre encore, & fur un fondement plus folide. La plus grande partie de notre influence antérieure venait de nos liaifom avec des puiffances étrangeres , de la détmkm desquelles nous pouvions avoir beaucoup acraindre. Jetons nos regards en Amérique: nous y trouvons un allié vraiment naturel, puifque nous avons beaucoup a en attendre &rienaencraindre. Qui ne voit que ces deux pavs, réunis par unc alhance étroite que les intéréts réciproques tendront fans ceife a confolider pourraient devenir dans la fuite, les deux pivots 'fur lesquels rou'.eraienc tous les événemens politiques de 1'un & 1'autre hénnfpheve? Quine voit que les Puiffances Européennes qui ont des polTeffions en Amérique , feraient toujours obligées de ménager en Europe une puisfance alliée a la confédération Américaine ? De ce principe neut réfulter la confervation de notre. exiftence actuellemcnt chancelante. Chancelante ! tout ce qui fe paffe autour de nous A 4 n'en  08) n'en eft-il pas une preuve frappante! ia démoli, tion des barrières! Eil-il a préfumer que ï'Empe, Beur aurait hafardé cette démarche, fans avoir prévenu la France,qui devait naturellement s'y prêter ; puisque ces barrières avaient été élevées formelle-, ment contre elle. J'en appelle a ceux qui font k la téte du gouvernement; qu'ils difent fi la France nous a beaucoup preffés pour entrer en alliance avant eet événement? N'eft il pas éVïdenj que fi nous fuffions entrés en quelque alliance avec la France, elle n'auroit pu décernment permettre cette démolition; quand ce n'tüc été que pour ne pas encoarir le blame de trahir ceux qu'ellé aurait été chargée de defendre. C'eft 1'inaftion des autres Puiffances & furtout ce'le de la Pruffe qui devrait nous drer de notre léthargie. On a beau jeter les yeux ck & la; on ne voir pas que lafituation de la Répubiique differe de celle des Sarmates,il y a deux luftres. C'cft a voys, dignes & refpe&ables premiers Magiftrats d'un' membre puiffant de la confédération belgique , d'éclairir ces idéés, encore brutes & indigeP.es. Abandonnez tous les intéréts fubalternes: laiffez a des tems plus tranquilles la discuffion de petites querelles qui peuvent faire perdre de vue le grand intérêt de 1'Ecat. Examinez fans partiahté la pofltion de la Républiaue, & s'il eft d'autres moyens.de la tirer du danger, propofez-les avec le courage qui convient a des hommes libres, & cette affurance qui doit caraclérifer des membres de la Souveraine:é. Ainfi vous ferez, de plus en plus, dignes de commander k des hommes qui ne doivent pas eftimer la vie par les douceurs qu'elle erfre; mais par 1'mdépendance & la dignité de leur ^ondition, Un citoyen d'Amfterdam. f. S,  C£>) P. S. Pour prouver que l'Efpa^ne n'efi pas mal dispofée en faveur de 1'Amérique, j'ai cru devoir joindrela piece fuivante, traduite des papiers Anglais. ■ Pendant qu'on ne fe laiTe pas d'annoncer que les Américains & les Frangois font las de la guerre & dispofésa rompre leur alliance, que 1'Efpagne n'eft pas preiTée d'y accéder, que 1'on fe flatte de s'accommoder avéc les colonies, les nouvelles du nouveau monde démentent ces bruits; & on lic, dans le general Advertifer, 1'Article fuivant, qui peut faire voir le peu de fondement qu'ils ont a 1'égard de 1'Furope. On a fait 1'accueil le plus flatteur k M Adams & a fes compagnons de voyage lors de leur paflage fur les terres d'Efpagne. En voici une rélation, fur 1'authenticité de laquelle on peut compter. On y verra la preuve de 1'attachement cordial & fincere de la cour & de la nation tfpagnoles pour les Etats. Unis. MM. Adams, Dana, & Thaxer, mirent k la voile de Bolton, fur Ja frégate Francoife la Senfible. Ce baciment, peu de tems après fon départ, fit une voied'eau quimit dansla neceifité de faire jouer deux pompes jour & nuit, fans aucune interruption, & les paffagers y travai! 'rent ciacun è leur tour, malgré la force de 1'Equip. ge co ïpofé de 350 hommes. M. de Chavagne, commandant la Senfible, qui avoit pafle trois mois a Bofton, ou il a été parfaitement bien accueilli, dirigea fa route vers la première terre. Ayant reconnu le cap Finifterre, il ent'ra aü Ferro!, oü les Améj-icains furent regus avec toütes les marqués de la plus fincere amitié par le Comte de Sade, commandant 1'Escadre francoife, alors mouillée dans ce port. Les Officiers Francois A 5 &  Cio) & Efnagnols, Ie Conful & Ie Vice-Conful de France & notamment D- Jofeph St. Vincent, alors Commandant en Chef de la Marine d'Espagne au Ferrol. leur témoignerent la plus grande cordialité. Ms pafferent quelques jours, dans cette place, ou ils virent les chantiers. les arfenaux, & les fortiflca. tions, dont la force & la magnificence exeiterent leur admirarion. S'étant rendus de cette Vitle a la Corogne il y furent traités avec tous les égards irnagtóables pa* M. Lagoanere, Agent d'Amériaue; M. de Journelle, (■ onful de France; par tous les officiers, cn générai, & fur-tout par ceux des Régiments Irlandois; 1'Adminiftrateur des Finances, 1'AvocatGéné al, le Régent. ou Préfident de la grande Audience, le Gouverneur de la Corogne, & particuhérement par D. Pedrö MartinCermenio, Vice-Roi du Royauaic deGaüce; ce Grand Officier (qui en vertu ue fa pLce, réunit toute 1'autorité royale, civile politique & militaire) accompagné de fon Lieutenar.t ou ' -ouverneur de la Ville de Corogne, & de piufieurs autres officiers, alla en perfonne rendre vifite, a M. Adams dans fa m.iifon le lendemain du jour de fon arrivée , & le pria de demnnder tout ce dont il pourroit avoir befoin. U lui oifrit même des vivres avec des guides au fait des'routes & de lamamere devoyager, & qui encore favoient parler Anglois. II le pria d'accepter une garde de foldats pendant toute fa route fur les terres d'Efpagne; M. Adams s'excufa dVcepter ces offres obligeantes: 1'Aaenc Amencain ayant amplement pomvu a tous les befoms de cette efpece, M. Adams & fes Co'lé^ues répondirent qu'üs étoient bien fü's au'üs n'avoienc è craindre en Efpagne aucun ennerni ni aucun danger. Le Vicc-Ro! répüqua que dans tous les cas ilferoit aux ordres de M. Adams ; qu'a Ia vérité ces offres etoient venues de lui; mais qu-'rlles ne s'accordoient pas moins avec les devoirs de fa place, qu'a-  C ii ) qu'avec fes fentimens particuliers,& qu'il avoit regu du Roi des ordres pofitifs de traiter tous les Américains qui arriveroient dans fon .Gouvernement comme les me^lleurs amis de 1'Efpagne. M. Adams & fes C^llégöes ont diné une fois chez le Vice-Roi. Dans ces aitïerentes viiïres, D. Pedro leur fit avec tous les ménagemens de la politeffe,une infmitéde queftions furi'amërique, fur 1'union & la dispoiitondes peuples,fur leurs fentimens envers 1'Angleterre,1aFrance & 1'Efpagne, la nature de leurs re venus & la forme de leurs confédérations & de leurs nouveaux gouvernements. II en paria lui-möme, en homme inftruir, & qui avoit beaucoup réÏÏéchi fur eet objet, & il parut trés-rhtté de 1'occafion qui fe préfentoit de traiter a fond cette matiere avec des particuüers qui la poffédoient aum* parfaitement, & qui fe faiioient un plaifir de lui donner tous les éclairciilemens qu'il pouvoit defirer. 11 montra entr'autres Ia plus grande cnvie de connoftre la familie, Pa'e, le caractrere , & toutes les circonftances relatives a M. Jay £ Miniltre Plénipotenüaire des Etats-CJnis a la Cour de Madrid). M. Adams eft intimement lié avec ce Miniftre depuis 1'Année 1774; en conféqüence perfonne n'étoit plus en état que lui de fatisfaire la curiofité du Vice-Roi. H entra a ce fujet dans les plus grands détails en donnant, comme il le devoit, les plus grands é!o.;es aux vertus perfonnelles d^ M. Jay, a l'étendue de fes talens, & a toutes les qualités qu'il avoit déployées dans le premiers plans de l'Ecat & du congres. Les Américains eurent la fatisfaétion d'entendre dire partout, qu'un Am. baffideur des plus anciennes & des plus refpeétables Puiffances de 1'Europe, fans en excepter la France, n'a pu être traité avec plus de confidération, d'égard & d'affabilité, & que 1'objet d'un accueil auiïï diftingué, étoit de faire éclater aux yeux de 1'Amérique & de tout 1'Univers la bienveillance & l'affeftion de 1'Efpagne pour les Etats-Unis. Ils ont pris leur route par Bitanèos, Lugo, Aïtorga, Léoa  Léon & Burgos. On leur a prodïgué, partout, fes mêmes attentions & les mêmes égards; ils ont furtout inSniment a fe louer des differente* branches de la Maifon Guardoqui a-Bilbao. M. Adams a re. cu des Banquiers & d'autres perfonnes d'Aücante, d'Aftorga, de Biibao , de Madrid - de Bordeaux & de Bayonne, des lettres par lesquelles on lui offroit toutes les fommes d'argent dont il pourroit avoir befoin. La tournure de* ces offres ajoutoit encore a leur prix. Ou lui mandoit que dans la perfuafion qu'il avoit été jeté k 1'improvifte fur la có> te d'Efpagne, d'oü il avoit pns la route'de terrepour fe rendre a Paris, avec une nombreufe fuite, il pouvoit fe fake qu'il n'.üc pas de fonds avec lui. Mais dans ce cas même, non-feulement 1'Agent d'Amérique dit qu'il étoit en état defournirafescompatriotestous les fecours néceffaires, mais. qa'il trouveroit encore fort mauvais qu'ils euffent cette obligation k d'autres que lui. Les Américains n'en ont pas été moins fenfibles a 1'extrême honnêteté de ces offres qu'ils re. gardent comme une nouvelle preuve de 1'attention des Espagnols pour 1'honneur des Ecats-Unis, & de 1'amitié de cette nation dont ils confervent la plus vive & la plus jufle reconnoiffance. Voyez auffi le Mercure de France, Politique, Hiftorique, & Littéraire. Samedi. 27. Mai 178Q. Les rapports de tous les Américains qui ont voyagé enEfpagne . viennent encore a 1'appui de cette relation. Ils affurent unanimement que dans toutes les places qui dépendent de cette domination, on a donné les ordres les, plus précis & les plus formels de traiter tous les fujets des Etats- Unis comme amis. Une monarchie aum* abfolue que 1'Efpagne, accorderait-'elle cette qualification a des peuples qu'elle regarderait comme rébelles? On connaït d'ailleurs la magnanimité qui caraftérife la nation Efpagnole. Eft - il a croire qu'elle regarderait les Américains. Unis comme liés a elle par 1'Article fe- cret  C 13) cret du traité de Paris, fans fe croire de fon cóté liée avec eux ? N'eft il pas regu dans le droit des nations aulTi bien que dans le droit civil, qu'un contrat fuppofe néceffairement un engagement de la part des deux parties intéreffées? ]Veit-il pas évident que 1'indépendance de 1'Amérique étant devenue inébranlable, les Efpagnols font intéreffés a la xnénager pour la confervation de leurs propres Colonies? Déclarons 1'indépendance de 1'Amérique; & nous la verrons atiffitót pubüée a Madrid. La plupart des autres Puiffances paraiffcnt intéreffées i ce que nous ne procédions pas encore a cette démarche décifive Ofons la faire; cc dès-iors nous les verrons fe difputer a 1'envi a qui lareconnaitra le plutót. C'eft a cette démarche qü'eft attachée la fin de la guerre; elle confternera les Anglais; elle réveillera les autres nations; elle mettra dans 1'équilibre de 1'Empire maritime, un nouVeau poids qui balancera, ou arrêtera les projets des Etats dont les prétentions feraient trop étendues Toutes les grandes Puiffances de 1'Europe fe réuniront auffitót pour affermir cette balance; & la Répubiique, a&uellement le 'ouet des autres nations, aura la gloire d'avoir procuré la paix a 1'Univers : de recouvrer fon ancienne influence dans le fyftéme général & de devenir 1'arbitre des Empires. L'exagération qui femble au premier coup-d'ceil fe trouver dans ces idéés, difparaft devant un examen approfondi; & le tableau des érénemens anciens, compn-é a ceux que les événemensadtuels préparent,confiïmeratoujours ces brillantes fpéculations aux yeux des meilleurs politiques. II circule aftuellement 1'Extrait d'une lettre que les Etats - Généraux ont écrite aux Piovinces refpectives pour les engager a confentir le plutót poffiblé a Ia pétition que le Confeil d'Etat a faite pour les fubfides de cetre année. Elle eft trop propre a montrer foas quel point de vue L. H. P. envifa- gent  C 14 ) gent la fituation acluelle de la Répub'ique & a montrer que nous avons envifagé la démolition des barrières fous le même point de vue,pour être oaffée fous filcnce. Leurs Ilautcs Puifiances repréfentenc d'abord. Que S A S. & le Confeil d'Etat ayant montré la nécéflité que les Confé lérés donncne avec toute la promptude poffibie leur Confentement unanime al'Augmentation modérée, mais prompte, de la Solde des Troupes de 1'Etat, & ayant fait 1'ouverrure des Pétitions, tant Ordinaire q i'extraordinaire de 1'Etat de Guerre . repréfentent 1'état 011 fe trouve Ia Répubiique & qu'ils nepeuvent pas moins cacher que n'ont faitS. A. & le Confeil d'Etat, qu elle eft en effet dans une fituation dangereuie & même péril!eufe;attendu que la Répubiique , d'un cóté, eft enveloppée dans une Guerre trés difpendieufe & ruineufe avec le Royaume voifin de la Grande-Bretagns, dont la fituation & 1'étendue vis-a-vis nos Cótes & nos Bayes oppofent un obftacle naturel a la fortie de nos Flottes Marchandes, fans une grande & nombreufe Flotte de Vaiffcaux de Guerre, après avoir vécu plus d'un Siècle en Paix & même en Alliance avec ce Royaume, & il nous attaque d'une maniere trés imprévue contre la teneur des Traités,avant que nous foyons en état de faire une Guerre de Mer. D'un autre cóté,on demande a 1'Etat. de la part de 1'Empereur, la Démolition des Villes de Barrière, dont la première conféquence fera 1'évacuation de la plupart de ces Places qui, a 1'exception de Namur, ont toujours été regardées & entreténues comme la CIcf de la Men/e, mais qui maintcnant ne font d'aucun ufage par la décadence oh elles font tombées; mais la maniere dont cette Démolition a été demandée & la hate avec laquelle elle a été exécutée, i;ous donne roifon de craindreque le Traité des Barrières, avec tout ce qui y a donné lieu & en eft réfulté, ne foit détruit. Dans cette fituation des chofes, il elt certain & hors de doure, que la Répubiique doit d'abord fe mettre en Défeme du cóté de la Mer pour  C '5) pour procéder fur Mer non-feulement fur Ia D< ment; & pour nous en fermer le cbemin, nous a „ attaqué de la maniere la plus violente , nous a „ dóclaré la guerre , enlevé nos vaiffeaux & nos ,, Colonies contre la foi des Traités. II eft donc ,, évident que nous n'avons éprouvé depuis quel,, ques années que des marqués d'amitié de la „ France & des mauvais traitemens de l'Anglej, teire. L'Auteur finit en fommant tous les An„ glomanes d'affigner en quoi confiftent lesavan,, tages "que nous pouvons retirer de 1'Angleterre; „ au lieu de parler avec une emphafe vuide & ri» dicule de ces avantages." Ainfl parle une des meilleures Gazettes Hollandaifes de ce pays , a la compofition de laquelle un membre du gouvernement a,dit-on , quelquepart. Elle fervira de commentaire a une piece d'un autre genre émanée d'un membre refpeclable du gouvernement. Mr. Iddekinge , étant Préfident deg Etats-Genéraux^., dans le tems oh le Stadhouder, accompagné du Confeil d'Etat, fe rendit dans cette affemblée pour expofer 1'état des fubfides de cette*;année, fit la réponfe fuivante. Nous n'y chan-  C 21) changerons rien, pour montrer notre impartialité; nous nous bornerons a quelques remarques, propres a en développer les principales idéés. „ C'était dit(ce politique ottogénaire"") une fat isj, faclion particuliere pour L. H. P. de recevoir „ de nouveau la pédtion générale de 1'Etat de „ la guerre , foit paree qu'eïles avaient ainü une „ nouvelle confirmation du foin & du zele infa,» tigables , que fon Alteffe Royale & Leurs No„ bles Puiffances, ont toujours pourlaconfervation 5, & le Bien-Etre de eet Etat dans ces tems d'em,, barras & de crife ; foit paree que L. H. P. ne manquaient pas de raiforts pour craindre que S. A. „ & L. N. P. découragées a la fin pour avoir répété „ fi fouvent les mêmes propofitions, ne fe crufient 5, difpenfés d'expofer de nouveau 1'état du Pays & m d'indiquer les moyens de le conferver „ II défirait, en "conféquence , que S. A. & le Confeil d'Etat, fe'vifi'ent bientöc fecondéspar les „ réfolutions courageufes de tous les confédérés, 5, pour les chofes fur lesquelles on avait infillê de„ puis bien des années dans les Péutions générales. „ II jugeait que les détails de la Pétition étaient fi clairement expofés & preffés d'une maniere fifor„ te par le beau difcours du Préfident de Leurs No„ bles Puiflances, que ce ferait leur faire injurc è tous deux que d'exiger une explication ulté„ rieure. „ Que, puifque fon tour était venu, dans cette „ occafion folemnelle, de parler fuivant 1'ancienne & louable coutume , trop pew fuiviedans cestems„ Ci, occafion qui ne s'oftrirait jamais plus a lui, 3, il ne pouvait s'empêcher d'ouvrir fon cceur & de „ développer fes intentions. 11 paffait autrefois en Proverbe que d'aprës les „ Harangues du Roi d''Angleterre dans fon Parle., ment, la Pétitiondu Confeil d'Etat jointe a cequi fe trouvait dans les-lettres pour indiquer un jour de Jeüne &. de Priere, on pouvait fe former une B 3 „ idéa  ( 22 ) „ idéé de 1'Etat de i'Europe & des Puiffances qui s*y „ trouvent, rdativement aux Relations qu'eïles ont „ entre Elles; il demandait a cette occafion, qu'il lui füt permis d'ajouter encore quelque chofe fur „ 1'état du Pays; comme c'eft la coutume des veil- les Gens, il commencerait è parler de lui»même; ,, enfuïte du Pays. Au cas qu'il lui échapat de dire „ quelque chofe de trop, ou quelque chofe qui ne „ s'accordat pas avec lejugement de quelques Mem„ bres de PAlTemblée, il priait qu'on ne 1'attribuat ,, pas a fon cceur, mais au zele qu'un Vieillard a „ d'êrre utile & qu'on lecouvrit du manteau de 1'A„ mitié. II y avait, pourfuivit Mr. Iddclo'nge , plus de „ quarante ans , qu'il était membre de 1'Affem„ blée de leurs Hautes Puiffances; il avait, depuis „ ce tems, eu quelque part dans 1'Adminiftration des Affaires du Pays; il y avait connu trois grands hommes d'Etat, Rhoon, Francois Fagel & le „ Tréforier Hop ; il avait appris a leurs pieds ( & „ il ne fe croyait pas trop vieux pour apprendre „ encore), car c'étaient la des Hommes qu'on au,, rait beaucoup défirés dans ces tems - ci, des Hom„ mes , qui ne penfaienr pas toujours de la même „ facon, mais qui ne laiffaient pas d'avoir toujours 5) le même Syftême. „ II raconta fur cela, ce qu'il avait vu depuis 1'an ,t '740, jufqu'a ce que Guillaume IV. fut rétabli „ dans les Dignités de fes Ancêtres, en même tems „ tout ce qui était alors arrivé dans le Pays, a 1'oc„ cafion du Rétabliffement du St ut bowler at, que dans ce tems la & jufqu'a préfent, dans la Con„ viétion que le Stathouder était l'inftitution qui s'accorde le mieux avec la ConiTitution du Pays; „ qu'il avait eu 1'honneur de vivre en Amitié éi en bonne intelligence avec le Stathouder, & après la mort de Madame la Gouvernante; que 1'un & 1'aus, tre avaient beaucoup changé en mieux , & feraint tJ en.-  Os ) „ encore devcnus mcüleurs, s'ils avaicnt vécu plus „ long tems. >, Enfuite, leSieur Préfident raconta comment, „ pendant la minorité du Stathouder-Héréditaire „ aduel, la direction des Affaires de terre avait été „ confiée a Mgr. le Duc qui, pour s'être réglé „ exf.clement fur fes initruétions, avait eu la fatis„ faétion de conferver la Paix au dedans & au de* „ hors, ce dont les Réfolutions prifes par L. H. P. dans la Minorité de fon Alteffe étaient témoins, mais ce qui paraiffait adtuellement totalement ou,, blié; que maintenant on avait le plaifir d'avoir „ un Stathouder-Héréditaire de la Maifon d'Oran„ ge;que 1'Emploi de Stathouder était trés importanc „ & très-difficile ; comme tous les Stathouders 1'a* „ vaient éprouvé; mais que la difficulté de cette „ charge devenait encore plus grande par 1'envie „ qu'avait fon Alteffe de méttre k exécution le pou„ voir qu'on lui avait confié. II avait vu de prés „ tout ce qui s'était paflé depuis la Majorité de fon „ Alteffe ; mais le récit en ferait trop long k ra„ conter. II avait vu la guerre cntre la France & eet „ Etat; il avait vu comment 1'Ambaffadeur deFran„ ce, dans tout fon éclat, un plumet blanc & une „ cocarde blanche a fon chapeau était venu „ dans la méme falie, faire al. H. P. au nom de „ fa Majefté Très-Chrétienne,desproteil:ations d'a„ mitié & de bienveillance , dans le même tems „ que fa Majefté Très-Chrétienne faifait avan„ eer fes Troupes dans la Flandre- des -Etats. „ H (a) Admirez Ia mémoire heureufe de Mr. Iddekinge. I'Abhédela Ville, avec une cocarde & un plumet blanc a fon chapeau. Mais Mr. Iddekinge oublie aufli qu'avant ce tetns, doüs avions fourni des Troupes aux lïnnemis de la France, que notre partialité poureuxavait 6ié fi loin qn'a liataviaon avait laïflévendre deux vaifleaux Fran9ais amends par les Anglais,&fored en Zéelande uaArmaieui Fraiifjis de ïelicher une pufe Anglaife. B4  (24) ,, Tl fe rapelait une anecdote, arrivée a cette occa„ fion,de la vérité de laquelle il ófait proteller, 6c „ qui était revenue a fa memoire lors qu'il avait „ n'aguere ouï femer le bruit que nos officiers dc „ Marine n'avaient point d'ordre pour tirer fur les „ Anglais. Des Frangais s'approchant de nos vil„ le,, de Barrière & s'avancant a la portie du ca„ non , un de nos Capitaines qui commandait fuf ,, le rempart fit demanderau Commandant, fi l'm ,, pouvait tirer fur les Francais ,1'Os bons amis. Jinfuite „ les Francais entrerent 'dans notre pays, prirent „ Berg-op-Zoom, la clef de la Zéelande & de „ l'Escaut&firent undtgat terrible dans notre pays, „ jusqu'a la conclufion de la paix ou nous recumes „ beaucoup plus que nous n'aurions penfé." On avait depuis confervé cette paix ; mais nous „ venions d'être enveloppés dans une guerre dont „ les effets aéluels pour le pays & les fuites futures „ ont été fuffifamment repréfentées dans la pétition „ générale. Cette guerre dénaturée avec 1'Angleterre, que j, les Anglais nous ont déclarée contre la Lettre des Traités,.qu'ils ont coniinuée par des violences & „ qu'ils pourfuivent encore,était de 1'efpece la plus „ prcjudiciabie a ce pays. 11 avait entendu Fran„ cois Fagel, ce grand hommc, affis fur le même j, fiege(dit il,"en lp montrant) dire que nous étions j, foi t maltraités p;.r les Anglais & qu'ils nous a„ voicnt donné fouvent des motii's de plainte; mais „ qu ü ne jallait jumais en veinr aux extrémiiés avec; „ i''Angleterre; que nous devions confidérer nos ré„ lations avec ce Royaume & 1'importance de con„ ferver la paix avec"lui. de facon a éviter la guerre ,, avec elle, 11 ne lui apparteuait pss d'examiner „ a quel point les Anglais avaient agi contre la lettre & le fens des Traités; que fi Pon voulait porter ,, la deflus un ju'gement fain , il fallait fe rappeler qu'il ctt des Publicifixs qui foutiennent que, toute fbrte que juit la lettre d'un Traité, on devait ccpendant toujours, en 1'interprétant , pen- „ fer,  ,, penfer que les contradans, en formant un trai„ té, n'ont pas voulu mettre de cóté leur intérêt, „ ou plutót la néceffité de fe garantir dans un tems „ de néceffité, contre une ruine prochaine; que „ dans un tel cas une clau/e pareille ejt toujours fous* „ entendue-.h les Anglais s'étaient trouvés dans ce „ cas, c'eft ce dont il ne voulait pas difputer, en„ core moins examiner fi, dans un tems oh 1'Etat fe ., trouvait fans forces & fes Colonies fans défenfe, „ on n'aurait pu, afin de conferver ces établifle„ mens & de contribuer au bien-être de la plusgrandepartiedes Habitans,prévenir cette guerre avec „ les Anglais. Enfin, nous avions la guerre; & „ nous devions défirer d'obtenir bientót une paix j, honorable ; (car il n'ofait dire glorieufe, puis que „ nous ne combattions pas gloriéufement) , & tel ,., dcvait être le voeu de tous les Membres du gou„ verncment ainfi que des fimples particuliers. II „ ne croyait pas ce qu'il avait fouvent ouï dire dans „ cette circonllance; qu'jl y avait eu éts. Régens „ aflez téméraires pour avoir défiré la guerre avec „ les Anglais: un tel fouhait n'avait pu fortir du „ cceur d'un Beige: plufieurs des Régens s'étaient „ également trompés. en s'imaginant que les éib„ glais avaient les moins trop emburaffées, pour ófer ,, s'attirer un. nouvel Ennemi. „ Dans ces circonftanccs on n'avait rien pour fe s, repofer fur- foi - même ; nous n'avions aucunes ,, forces; & les traités avaient perdu la leur; car ces „.fortes d'engagemens, quand ils étaienc fondés fur 3, des fucceffions héréditaires, étaient oubliés aufiï„ tót que 1'héritier avait monté fur le tröne; alors 3, on ouvrait la digue & les eaux fuivaient leurs „ cours; il n'y avait pas de mcilleurs traités que ceux ,, dont les fondemens pofaient fur les intéréts réci> „ proques & le commerce des deux nations. „ 11 avait depuis peu entenduun Politique demander „ fi , au lieu de perdre tant d'argent, il n'aurait ,, pas mieux valu négocier, dans divers comptoirs, „ jusqu'ala concurrence de cinquante rnillions ? & B 5 fi  C 26 ) „ fi 1'onnepourrait,par ce moyen, mettre fin k la „ guerre entre les Puifl'ances de 1'Europe ? du „ moins, fi par cc moyen, nous n'aurions pu mettre „ nos poffeffions dans 'un état formidable de défen,, fe, conferver notre pays, conftruire desvaiffeaux, „ fe mettre en état, au moyen de eet argent, de dé„ fendre, en cas;- de guerre notre pays de tous les „ cótés ou il pourrait être attaqué. Mais a pré„ fent quel ufage pourrions - nous faire de nos ri5, cheffes., dont on fait tant de bruit ? Comme on „ ferait a préfent pourvu" de tout, oh il n'y avait „ rien a fe procurer ? Aétuellement tfe bois que nous „ avions fait palTerailleurs en fi grande quantité, au lieu de l'acoeter nous -mêmes, & faire ainfi difpa„ raïtre ia dangereufe difpute que nous avions, ü y „ B deux ans, ferait-i! facile de s'en procurer? Pour„ r_:t-on lever une aflez grande quantité de mon,, de & conftruire des vaifteaux? 11 craignait pour „ lanégative, & que nous n'éprouvions trop tard „ la pauvreté au fcinde toutes nos Tichelles, fedma„ mm de tabula. „ II avait néanmmoins encore un confeil a don» „ ner; c'eft que 1'unanimité put être confervée en„ tre les Provinces & les Provinces, les vil'es & ,, les villes: & que chacun maintfnt fes droits fans ., empiéter fur ceux d'un autre; chofe cependanc '„ dont le Confeil d'Etat n'avait jamais été foup"> Saus doute que les Anglais qui, dans un moment, ont perdu tout ce beau pays, fans qu'ils n'aient pu, depuis fept  C 37 ) „ 1'utilité des liaifons mercantiles , formées avec „ des hommes qui la rauagent par leurs extorfions 9, ÉS? la flé tri (Jent par leur despotisme (c) , pourra in„ térefier nos neveux. Mais il faut être terrible„ ment éloigné de 1'égoïsme, ou furieufement prés ,, de la cruautc , pour expofer fes contemporains „ & foi-méme aux hazards d'une guerre furieufe ,, en faveur de futurs contingens. „ J'ai," continue la Corre/pondance. „ fur leplai„ deur apoftat, M, Laurens, tantcéléb.é, il y a „ un an, aujourd'hui fi completement oublié, une „ piece que le public ne ferait furement pas faché ,, de connaftre. Mais elle elt trop longue pour én» „ trer dans ces feuilles. Si j'aimais a débasquer les ,j ufurpateurs des renommées de 1'autel oh ia con„ fidération publique les eontemple, je pourrais li,, vrer ce morceau a Fimpreifioh , & en faire une ,, brochure qui ne cóntribtterait peut-être pas peu „ a démasquer cecaffard politique. Mais a quoi bon 3, défabufer les dupes & facher les fripons (d)? 3, Cependant, lorsque je manquerai de matieres „ plus fept ans, fe tenir que dar.s quelques villes entourées de Ia mer, avec Ja fupériorité de leur marine, om repris des forces pour opérer bientór cette conquaie! Qaelle fublime prophétie ! Le Politique Hollandais ne ïtmrait jamais iaite ! CO Tel eft Ie langage rmphatique du Miniftere Britan. aique ; mais quand on réflécbit qu'il n'eft pas en Amérj- ' que uu feul membre du Gouvernement dont 1'd'ection ne dépende du peuple & dont la fon&ion (bit pour plus d'une aunée, ne voi:-on pas comment des chefs aulii dépendans & auffi précaires ne peu vent être des tyrar.s & des despores. On ne concau pas comm;nt une natipn qui n'a rerais ie dépót de falibenö qu'a fes propres arm?s que cha. cun d'eux porte, ne fe choific que des tyrans pour chefs, pour leur obéir fervilement. ( „ plus eflentielles, je pourrais bien rcvélerdans cct« „ te hebdomadairequelques traits du car-'Cterc, quel» „ ques anecdotes de la vie civüe de Mr. Laurens, „ feulement pour faire eonnanre le plu- vam , ie „ plus faux des hommes, qui a ruiné cent families de Charies-Tov. n , fa patne, par des proces odi,} eux, plus odieufement pourfuivis encore , qui ., s'eft élevé,è force d'hypocrifie, a latete da Congres, fi? a pad par le truOir, en vendam cy1 fa de„ uttion & les papera fles funeftes d'Amfterdam au „ Miniitere Brkaimique Et voüa legrand, fgxcellent homme, le zélé patriote, le profond po» litique dont d'imbécilles Gazetiers nous ontchanté les louanges, & dont ils ne parlenc plus ; de„ puis qu'avec le prix de la convcntion de fin „ apstlajïe, il donne a la Tour des fcftms a fes 3, convertifleurs & a fes condifeiples. „ II fembleque le röle de ce TartuiTe.qui ajoué „ tour a tour 1'oppofition , fes compatriotes & les étrangers, devrait rendre unpeu confus' les né&o„ ciateurs de l'Amftel,d'avoir mis leurconfiance en „ lui. Si 1'Expréfident du Sénat Américain était réellement chargé d'une miilion honorablc auprés des Provinces-Unies ; s'il avait 1'inrention de la remplir avec honneur & de fervir la caufe „ de fa patrie , pourquoi rempliflait-il fon porte-manteau de la correfpondance de la ville 3, d'Amfterdam qui en avait confervé des copies ,, authentiques. Et fi fes inftruttions poriaient qu'il „ düt étre muni de ces fatales paperafll-s, d'ouvjent 3, qu'a la rencontre de la Vejtak , il ne s'eft pas ,, défenduen héros, ou qu'il n'a pas abimé la malie „ dans les eaux, pour fouftraire cette malheureufe 3, boete de Pandore a 1'activité du CapitaineKeppel ? „ Mais vraiment, le marebê portait qu'on ne tirerait ,, point fur le Paquebot le Congrès, par ce qu'un „ Plénipotentiaire ultra - maritime eft trop poltron „ pour foutenir le feu,& qu'enretour de certe at„ tention prudente , il conferverait précieufement „ le dépót qui lui était confié; arrangement qui con- ci»  C 39 ) „ ciliaic tout a-la fois la vie , la honte & la fortune „ deMr. Laurens, qui. après avoir fait, dans fa jeu„ nefie, des harnois pour les chcvaux, a forgédans „ fa vieillellé, des ch mes de fer pour fes conci. toyens, & d'or pour lui " Je n'ai jamais vü Mr. Laurens, je ne le connaïs que par des fairs publiés, & coniiijnés dans des documens auchentiques Re quel front ne faut - il pas être armé pour öfer diftiler le poifon de la calomnie fur le plus refpeclable des caracteres? Oequel front peut-on avaucer que Mr. Laurens s'était vendu au Miniftere Arjglais, tandis que le Miniftere le faifait. paiTer par toute la rigueur des épreuves qu'on fait fubir aux accufés de haute-trahifon? De quel front Ïieut-on lui faire donner des feftins dans le tems oii e Miniftere Britannique fermait toutes les avenues pour lui parler & 1'avait même réduit a manquer du néceiTaire ? Voila des faits notoires , qu'un des oraclesde la chambre des Communes n'apascraintde produirc folemnellement dans cette augufte affemblée des Repréfentans de la nation. Ouelleamearroce que celle qui ófe infulter au malheur d'un vénérable vieillard fur le fort duquel les hommes fenfibles de tous les partis ont verfé des larmes ! Quoique, en Amérique encore plus que dans aucun autre pays, 1'homme foit tout & la naiffance rien, quelle confiance mérite fur ce dernier articie, relativement a Mr. Laurens, un Auteur fi peu délicat fur le choix des moyens, pour fatisfaire 1'affreux plaifir de calomnier? Quelle confiance méritent les pieces fecretes qu'il n'ofe produire ; reffource ordinaire de 1'impofture & de la méchanceté ? Je ne puis terminer cette apologie, fans attefter qu'on ne. trouve pas un Américain qui ne fe répande en éloges fur les vertus auffi bien que fur les talens de Mr. Laurens. II eft vrai que, pour avoir une connaisfance exaéle & fidele des affaires intéreffantes de 1'Amérique, le Politique Hollandais ne s'eft pas borné aux relations Anglaifes. II a confulté tous les Américains que fa pofltion 1'a-mis a portée de conC 4 'naï-  (40) naftre. II femble que 1'événement montre aflez qui des deux a fuivi de meilleurs guides. »' ,lAVJez i dit" °n danf 'a Corre/pondancepolitique, „ a 1 indignation des loix cc du public ces miféra' „ bles aralans de la calomnie & de 1'impofture • ces s, plumes mercenaires ,foudovées pour décHirèr ,ou „ trempees dans Icfiel peur exercer des vengeanees „ pnvées, ces faclieux impudens qui pom- amerer „ une révolution, dont peut-être ilsferontles vidtl„ mes, foufflent le feu de la diacorde, arment leurs „ concitoyens du poignard de la guerre civile Maïs ne ferez vous pas d'exceprion ?. Par „ exemple, mettrez-vous au rang des libfellëiou des „ ecritspitoyables, notre Politique titlïandaiï, ou„ yrage compofé dans les mémes principes, dans „ lesmémes vues, mais mieux fait que ies Lettres»'» Hoflanda/a que vous avez fi équitablement fla., gelleesy L'accuferez vous d'infipidité , ou Ie dé„ iwerez-vousau public, comme un brfilotlan„ ce dans Ia nation pour 1'embrafer? Refuferez„ vous a fon Auteur des connaiffances & du génie'? " c t paraft quc cette fcuil!e eft affez bien écrite " il \hcn™.m bavarde beaucoup , il raifonne auifi „ que;quefois. II eft fouvent fophiftiqué; mais ié le crois de bonne-foi. 11 eft admirateur fou „ éespoltrons del'Amir.que (e); & ccoendant je ne " Pff£Pasqui1 tot ftipendié par M. Adams ou " ^a^3,*"- 11 Plafde chaudement Ia caufe de »* ™M.d Amfterdam : mais il demeure dans leur ville „ •& mange leur pain. II déclame fans ceffe contre „ le L>uc; probablement il ne faime pas fj ) Tl 3, fatigue le Prince de barangues éloquentes a qui il ne manque rien que de la juftefle..... 'loutes „ ces ' f#) Je ne méprife pa? les An-lais, tant s'en faut; mais il faut qu i!s foient bien laches , pour s'ètre lailTer prendre, deux nrmées par ces poltrons iT Américains, événement jurqualors inouï dans 1'hiftoire des gueires, fans patiet de Benmngton, de Tremon, Prince- town, Stiil- water, Kings-mountain &c. &c. " (ƒ) Citez ces dédamationsj  C 41 ) 9, ees déclamations ampoulées, ces Catilinaires con- tre le Feld - Marechal, ces fermons au Stathou,, der, cesrépétitionséternellesfur 1'héroïsmeAmé„ ricain , fur lepatriptisme Amfterdammois, peuvenc être des défauts dans une feuille littéraire , mais „ ne font point des dólitsdans un ouvrage politique: „ on peut s'ennuyer d'une pródudtióri monotone; mais „ on n'eft pas en droit d'en faire un crime k ion Au„ teur. Prévenu contre le Prince d'Orange & fes „ amis fg), pour M M. d'Amfterdam & leur Syftê„ me , M. Cerifier (ƒ;_), avec beaucoup de cons, naiffanceséc les meilleurs vues, peut fe faire illu. „ fion a lui-même & tromper fes lecteurs,fans le „ vouloir. Son ouvrage, pour être partial, n'eft „ pas une production méprifable , ni peut-être un 3, tocfm féditieux. J'avoüe que mieux inftruit & }f moins forcené que les confrères, il peut faire „ auffi plus de mal: plus ilade génie & de droiture, „ plus il peut égarer le public, fi une fois il fe mé„ prend: s'il eft parti d'un principe faux, fes cpn„ féquences doivent être terriblement erronées. „ Mais c'eft ce dont tout le monde ne convient ,. pas, a beaucoup prés, êcc'eftce que je n'óferais „ prendre fur moi de décider. On grand nombre ,, de mes Compatriotes qui ne fe laiflent pas éblouir par des fophismes , ni entrafner par des menfon„ ges, prétendent que eet Ecriyajn eft dans la bon- ne-voie; qu'il combat pour la bonne caufe; qu'il „ la défend avec encore plus de ménagement que „ d'habileté ! L'air d'afiürance avec lequel il s'an- nonce au public , le ton d'impartialité avec le3, quel i! affecte de lui parler, font faits pour en „ impofer. La faciüté avec laquelle il traite fes ?) matieres; 1'abondance de raifpnnemens plus ou moins (g) Dites plutót contre les principes de l'Anglomanie. (b) Doucement Moniieur. Qui vous a dit le nora d? l'Auteur d'une i'tuille ananime ? Lifez la préface j vous ?errez votre méprife.  C 40 „ moins concluans, dont il étaye fon opinion. font „ préiumer qu'il a fouvent raifon - paree qu'il ne tant fur nen, & n'eft jamais en défaut. „ C'eft a vous a montrer qu'il a tort,fi vousêtes „ efiectivement dans cette idée. Je ne fuis ni fon ad„ mirateur , ni fon partifan; paree que je nefaurais „ letre d un Ecnvain, quelque diftingué qu'il foit, „ qui employé fes talens a chanter éternellement les „ lpuanges de la ville d'Amfterdam , & qui la dé" fcnd fur. tous les points (0, même par des per„ ionalitesindécentes contre tous ceux qui 1'attaquent. 3, (a\). Cette manie de rompre des lances contre " tout, }f m°nde, en 1'honneur de cette belle, eft „ un defaut infupportable dans un Ecrivain public, „ dont le premier caratteredoit être la véracité,&Ie „ iecond la juftice. Son acharnement a exagérer „ tout ce qui eft a la charge du parti Stathouderien, „ cl ion attention a pallier les reproches juftement. „ merites par le parti contraire, décele un vice ra„ dical, dans une feuille deftinée è éclairer la nation „ Hollandaife fur fes vrais intéréts. ,, Son écrit, fans être un libelle groilier & ca„ lomnieux, ne laiffe pas d'avoir jusqu'a un certain „ degre, a propriété d'enflammer la fédition, & „ daigrir la playe de notre patrie. II peut même „ y contribuer dautant plus, qu'il feint autant de „ modérat.on que de zele, & qu'il attaché par un „ étalage d erudition& de réflexionsfatyriques qu'on „ ne trouve pas toujours dans les autres ouvraees „ polémiques. La hardieffe avec bquelle le fien „ eft écrit ferait bien louable,fi elle ne fervait qu'a „ veneer la juft.ee outragée , & a démasquer les 5, fourbes & les prévaricateurs. „ II faudra voir, dit 1'Auteur en feienant de répondre aux paflages précédens , fi Mr. Cerifier „ au- (0 Pas tout a fait. 11 ne lui a pas épargré les reproches & meme de trés graves. w 5srf* h  (43) „ aura la hardieffe de déchirer le placard des Etats „ de Hollande , comme il a fait celui des Etats „ d'Utrecht; s'ir pouffera la liceuce jusqu'a contefler „ aux Souverains de fa Province, le droit de févir „ contre des ouvrages dangereux (/), comme il ,, 1'a fait aux Souverains d'une Province voifine; „ s'il ofera encore dévouer au ridicule un Sénat qui „ croit devoir prendre des mefures extrêmes, mais falutaires, dans des circonftances critiques, pour 5, arrêter des produétions pernicieufes, & réprimer leurs criminels Auteurs. „ Celui du Politique Hollandais, fans étre un li„ bellifte obfcur, un calomniateur ténébreux com„ me fon prédéceffeur de Bruxelles, un forcéné ,, comme les méprifables que Fautorité pourfuit en „ ce moment, ne m'en parait pas moins unJEcri3, vain dangereux & fon ouvrage un vrai tocnn de fédition & de révolte dans lesconjonéburespréfen„ tes, Vous avez beau entreprendre de 1'excufer ,■ ,, en voulant faire fon apologie , vous lui faites ,, fon proces, Jene le crois pas vil, non plus que „ vous; mais je le trouve très-répréhenfible, S'il ,, n'eft pas dévoué k un parti, il n'en eft que plus „ blamable de foulever le peuple contre 1'autre, „ pour la méprifable gloriole de débiter des para- doxes, appuyés par des fophismes;& d'aigrircon,, tre quelques adminiftrateurs outragés dans le pu„ blic, 1'efprit d'une nation qu'il aurait fallu cah mer & ramener k des fentimens plus modérés." „ Vous ne me dites pas, mais vous femblez me „ dire que je devrais faire une erkique de la feuil„ le de eet Ecrivain. Hé bien Monfieur, de tout „ mon cceur, je la ferai. Je ne fuis pas en peine „ de réfuter plufieurs de fes affertions. Sans m'at- (/) Lifez le No. XXXV... oü le PolitiqueHollandais, fans s'écarter de fes principes, jiifHfie les Etats de Hollande. Quant au placard de la Province d'Utrecht, un nouveau trait qui fait un honneur immonel aux premiers Magiftrats de cette vilJe & que nous rapporterons dans ces feuilles, montra as. fez, fous quel point de vue on y envifage ce placard.  (44) „ tacher au caradtere moral de 1'Auteur, je m'ao„ pliquerai h examiner 1'ouvrage, Je a'imiterai „ point fa conduite avec Mr. van Goens: je ne me „ lervirai point, pour lecombattre, des armes qu'il „ a employees contre fon adverfaire. II a déchi" rf J h?™™e > a" üeu d'apprécier le livre. II eft „ plus aife de repandre du ridicule fur la perfonne, „ que doppofer de bonnes raifons a des argumens. 5 J Jgnore, au refte, qui a tort ou droit de ces „ deux contendans(>0; je neme mêle point de leur „ difpute. Je -ne connais ni Mr. van Goens. ni „ ion livre. Je n'ai pas befoin de les connaitre pour „ dire mon avis du Politique Hollaniais, que je con" ™» fort b™. Dans 1'examen que j'en ferai, je „ diümgueraifoigneufementI'Ecrivaind'avec fes opi„ nions, Mais en prenant garde de féparer ces deux „ chofes, que 1'Auceur du Politique Hollandais n'a „ pas toujours féparées, avec fes antagoniftes, ie „ népargnerai point fa perfonne, quand c'eft fon „ cceur qui a failli. Je dirai franchement ce que je „ penle de 1 homme ' lorsqu'il fe permet d'induire ,, en erreur contre fa conviction; lorsque la paffion „ le rend 1 echo des calomnies qu'il devrait repous„ Ier ; lorsqu'une vengeance méprifable je porte k " ?uJIas" des hommes eftimables, qui n'ont rien „ a démeer avec lui ni avec fon ouvrage. 'i CuC jcrlvain tra"chant, plein de fuffifance & „ de hirdielTe, qui porte fouvent 1'audace jusqu'a ,, la teménté, prête le flanc de toutes parts. Scs „ eloges des Américains font dénués de fondement „ èc de verité ; ils portent fur des faits altérés, fur „ des fupppfmqns chimériques , fur des rapports " ■ « °U ÏY^rél> fur des ^lations plus que fus. " pe^~M' Cenfier aime 'es Américains, & fa „ prediledtion pour ces héros de la libertél'aveu fyjtême, deforce & de courage ; qui n'ont ni efpe„ ces, marmées, ni marine; qui éorouvent tous les „ inconvéniens de la défunion & toutes les calami„ tés de la guerre civile; qui voyent leur pays ra„ vagé tour a tour par fes ennemis & fes défen„ feurs? leur commerce tomber, leur population „ dimmuer, leurs campagnes dévaftées, leurs villes „ emportées par des conquérans , ou rendues par „ des laches; leurs habitans ruinés , & un peuple „ entier écrafé fous le poids d'une dettede plufieurs „ milliards,diffipés en folies, ou expohés par les Sé- nateurs & leurs fuppöts (q>. „ L'alliance avec les Américains ferait donc inu„ tile aux Hollandais : ils n'en retireraient ni fe„ cours , ni avantages. Des Révoltés qui ne peu„ vent pas défendre leurs propres foyers, iraient„ ils reprendre les pofleffions Hollandaifesenvahies ,, par les Anglais dans les Indes Occidentales ou „ pro- (ƒ>) Que's fecours direfls !'Efpagne a-'-elIe pretés aux Etats-Unis ? Dans les opérations de terre quels ferviees directs la France, leur a-:-elle rendus 1 Et fur mer a-t-elle arraché New-York,Charles-Town, le Long-Island &caux Anglais? (a) Airli les Anglais n'ont uefoin q-j? d'une poignée • d'horames pour fubjuguer ces miferable- Américains. C'efl fans doute , faöte d'inforr.ations auffi neuves, que touts leurs expéditions ce conquête .ont manqaé jusqu'a piéfent.  C 47 ) „ protéger celles qui ne le fmt pas encore? En„ verraient • ils des flottes, des armées, des muni„ tions, dans les établiffemens des Indes-Orienta„ les , eux a qui il faut que leurs amis d'Europe „ portent des habits, des fufils, de la poudre, des „ fouliers pour laurs foldats & jufqu'a de 1'argent „ pour les foudoyer ? Feraient ils la conquête des ,, étabiilTemens de la Grande - Bretagne , eux qui „ n'ont pas encore un feul vaiffeau de guerre, ni „ des troupes en état de conferver les Provinces „ foustraites a la domination Britannique? Enfin, „ verrait on Ie pavillon du Congrès s'unir au pavili „ Ion BeL'ique , pour chaffer les escadres Anglai„ fes des cótes de la Hollande , tandis que la Fran„ ce & 1'Sfpagne, armées jufqu'aux dents, laiffent, „Tune ravitailler Gibraltar a la barbe de 50 vais„ feaux de b'gne, & 1'autre bloquer les fiens dans „ fes ports (j ) ? „ II .faut ètre aveuglc pour ne pas voir 1'extrava}, gance d'une alhance queiconque entre la Républi„ que & les Américains dans la circonftanceacluelle. „ in oh feulctnent elle ferait inutile a la Hollande; ,, mais elle lui ferait onéreufe, & lui deviendrait „ infailliblement funefte. L'art d'embrouiller les ,, idéés les plus fimples & les plus claires que pos„ féde au fuprême dégré 1'Auteur que je combats, „ ne perfuadera qu'a ceux qui voudront s'abufer „ vo- (r) Ssns doute les Américains ne feront pas des miracles, ne changerónt pas la fituation de Ia Grande - Bre. tagne , le long des cótes de la Répubiique Bel^ique; ils ne feront pas fortir du néant une marine qu'ils n'ont pas encore? Ils fe borneront toujoué a la défenfive, jusqu'a ce qu'ils aient plus d'argent pour étendre leurs opératioas au dehors V Miis en fau-irait-il beaucop, a un peuple fi bien pourvu de munirions navales, pour avoir en peu de tems une marine, capable de porter des coups fenfibles a 1'An. gleterre. Eh! n'eft-il pas d'autres avantages a efpérer d'une alliance aetueile entre les deux Républiques ? Nous les avons déja fuffifamment développés.  (48 ) volontairement, qu'il ferait de 1'intérét des Pro,, vinces-Unies de s'allier avec un pays aulTi éloigné ,, d'elles, avec des hommes qui ne fauraient les ai„ der & qui leur devkndraient a charge (r% ,, Dans ia pofition oh el les fe crou vent aujourd'hui, ,, il n'eft pas prudent qu'eïles s'expofent è faire les facrifices que reclamerait une alliance offen„ live avec eux. Si elle exiftait une fois , cette alliance infenfée , il faudrait que les Hollandais volaiTent en Amérique pour y fecourir leurs alHés (■/). La France qui foutient li mollement „ leur caufe , la loutiendrait avec plus de molefte ,j encore Cu). Elle trouverait bien le fecret de fe j, repofer fur la Répubiique du foin de la défendre. Le Congrès abandonné ou mal fecouru par fon ancien ami,attendrait fon falut desnouvcaux(u)." La fuite au No. procbain. (V> La paix ne peut-être folide, a moins qn'elle ne foit appuyée fur 1'indépendance des Américains. 11 eft impoffible de contefker cette vérité. Ainfi , plutét nous ferons liés avec eux , plutót cette indépendance fera afifermie. (/) Fauffe fuppofition. C'efl ce que les Américains ne demanderont jamais. N'eft-ii pas une maniere de dreffer le Traité mutuel, defsc/on que chacune des parties enretire des avantages, fans nuire a 1'autre? (u~) Pour quelle raifon ? Vos principes montrent qua' vous n'en avez pas même !e moindre foupcon ? f» Une Répubiique militaire, telle que i'Amérique, n'attend fon falut que d'elle-même.  L E POLITIQUE N°. LVI. LUNDI,ce4 MARS, 1782. Suite du CHAPITRE XLVI. Examen des ajjertions de 1'Auteur de la Correspondance Politique. s> T 7otre pays eft-il dans une fituation k pou„ V voir contraéter des cngagemens, onéreux „ s'il voulait les remplir; fuperflus, s'il ne le vou. „ lait pas? Eft-il dans un état de défenfe qui lui „ permette de prodiguer des fecours & des foins k ., une nation éloignée, qui ne fera jamais è portée „ de lui en rendre («e)? Faut-il donc que la Hol„ lande foit liée par des traités avec I'Amérique fep« „ tentrionale, pour faire tête aux Anglais? Ehqu'ont „ de commun les prétentions des Américains k 1'in,, dépendance, avec le falut ou 1'honneur de votre „ patrie ? Tandis que vous n'avez ni troupes capa- ,', bles (w~) Eh Comptez vous pour ne» Ia fineuliere faciliiéavec laquelle ils pourront attaquer les Ennemis de la Répu lique dans les Indes, dès que la jouilfance tranquilie de leur in» dependarce les aura mis en état de créer un marine? Tome III. D  C5=> ) ,, bles d'en impofer aux PuiiTances de terre, niflot„ tes fuffifantes pour cotnbattre vos ennemis mari„ times, avez-vous befoïn de vous attirer fur les j, bras les embarras d'un Aliié incommode, compofé „ d'un peuple de Poltrons (x), tyrannifé par un fénac „ d'oppreffeurs ou de mandians? 11 n'y a que des s, enthoufiaftes de Ia liberté Amén'caine qui puifient „ vo'ir de la convenance ou de la néceffité dans des „ idéés auffi difparates, Puisque les Anglais vous 3, ont chercbé querelle, défendez-vous. Ils ont as« 3, fez compté fur leur bonne fortune, pour fe croire en état de braver trois PuiiTances refpeclables, „ pendant qu'ils étaient occupés a réduire leurs Co„ lonies foulevées. Ils ont eu Ia hardielTe ou, fi ,, vous voulez , i'imprudence de ne pas diffimuler ,, 1'affront qu'ils ont rccu d'une de vos cités „ Que vous font les Révoltés de PAtlantique qui n'ont eu ni le courage de porter le joug de leurs anciens dominateurs, ni celui de s'en afTranchir „ généreufement; qui, incapables de fervir la liberj, té, a la quelle ils öfent prétendre, vont mandier des défenfeurs dans coute 1'Europe? LesBnaves ,, vos ancêtres n'en agirent pas ainfi. Ils ne rejette,, rent pas par caprice Pautorité légitime d'un Sous, verain équitable & modéré. Quand il fallut bri„ fer les fers d'un Tyr.w fanguinaire, ils fur ent 1$ „faire eux.mêmes, D'une main ils renverferent la „ couronne du defpote; de 1'autre ils confommerent leur „ indèpendance Qy). „ Aban- f>> Témoins Trenton , Saratoga ,Kings-mounrain, Eutaws-Sprinjrs, York-town, Monmouth, &c. CO c',eft *Mfl • que faute d'avoir une connaiflhnce fuffifinte del'Hifioire, on s'expofe au délagrément d'être relevé fur des erreurs homeufes pour un écrivain public. Com. bien de fois les infurgens des Pays-bss n'ont ils pas eu recours aux PaifTances étrangeres. pour reclamer leur protection ? Ils deinanderenc, a la fois & tour a toar, le joug de la Fraa-  dn „ Abandonnez donc," continue Ie Periodïfte,lea „ Américains a leur deftinée. S'ils font dignes de la „ liberté, ils fauront bien lui élever un temple (z). j, S'ils ne le font pas, que vous importe qu'ils ren„ trent fous le joug d'un maitre couronné, ou qu'ils „ foient livrés a la rapacité de cent ambitieux, qui „ les dévorent, après leur avoir enlevé la fidélité & j, le bonheur (a >. „ Quoiqu'en dife Mr. Cerifier , ne faites póint „ d'alliance avec les Américains, qui ne font ni di,, gnes de votre appui, ni en état de vous fecourir. L'Angleterre ne renoncera jamais è fes Colonies tant qu'elle y conferveraun pouce de terrein (/>)♦ „ En vous alliant avec elles, vous vous feriez un „ ennemi éternel de leur métropole.... v Ne vous „ alliez point avec ces fujets révoltés; vous les ren„ drez eux-mêmes irréconciliables. ,, Voila, Mr., quelques-unes de mes idéés, fur Ia „ finguliere opinion du Politique Hollandais, qui „ veut unir deux peuples féparés par la politique en„ core plus que par des mers immenfes. Je ibis fa. „ ché de ne pouvoir être de 1'avis de eet Auteur. „ Cet« France & de 1'Angleterre pour fe dérober a celui de VEspagne. Jamais ils n'eufl'ent affermi leur indépendance, fans de puilfans fecours , furtout fans ceux de !a France. («) Penfée grande & vraie; mais par malheur elle ne fait rien è la queftion. («) II importe infinimfnt, non-feulement a la Hollande, mais encore a tous les Eiats maritimes, que 1'Angleterre ne forme plus, en recouvrant fes Colonies, un cololTe de puiflance qui les tiet drait dans 1'alarme & fous le joug. (é) Eft ildoncli difficüe de faire difparaitreladomination des Anglais de toute I'Amérique? lis n'y tieunent que dans quelques Kies ou fur de petits points de terre , prefque entourés de la mer. Les Américains,deftitués de marine, ne peuveutles en chafler. Mais une alliance avec d'autres Puisfances pourrait leur procurer le- moyciis d'avoir une floite qui ne tarderait pas a les affranchir. D 2  C50 „ Cette diverfité de fencimens ne lui óte rien de „ fon mérite. Je fuis fort éloigné d'en contefter a. ,, Mr. Cerifier. Je ne le regarde pas, non pluscom„ me un mauvais écrivain, ou comme un homme „ méprifable. Je crois comme vous qu'il eft de bon. „ ne-foi lorsméme qu'il fe trompe, & qu'il foutient „ des thefes ridicules, fans être gagé pour les fou,, tenir. Je fuis perfuadé qu'il efthonnête comme in„ dividu, & bien intentionné comme citoyen. 11 „ a époufé un parti qu'il cnrt fans doute le bon. II „ a entrepris la défenfe d'une caufe qu'il défend de „ fon mieux, fans qu'elle en foit meilleure pour cei> la (c). „ Ne pourriez-vous pas m'apprendre, ajoute le ,, correfpondant, pourquoi le Politique Hollandais „ eft fi faché contre le Libraire Gofle (d; ? pour„ quoi il a la cruauté d'infuker a 1'infortuné Lin- » guet (c) A ce langage mieüeux, on fourconnerait que Ie CV» refpondant Politique cherche des ménagemens , malgré la diflërence des opinions. Mais le venin qu'il a dans lecoeur, re tarde p«s a ie produire au dehors; il faifit 1'occafion d'une Itttre Hollandaife traduite dans notre No. XXXIV, pour nous accufer de répéter Ie langage des poiflardes & d'aimer a manier des ordures II fe permet feulement d'oublier que nous avons dit en rapportant cette lettre, que nous étions bien éloignés d'en adopier le ftile ni les asfertions & que nous ne 1'avions traduite que pour donner aux étraugers un échautillon de la maniere li'écrire & de penfer du parti oppofé au Ducj quoique nous foyons bien éloignés de confondre ce ftile avec le langage des Halles. {d) Le Politique Heilandais n'a jamais regardéle Libraire Gofle comme un perfonnage dont 1'importance put exciter fabile; quoique ce Libraire s'annoncat faftueufement pour 1'Editeur d'une feuille oü l'on vomiflait contre la perfonne du Politique des injures dont il ne s'eft vangé qn'en les rap. portaüt dans fon Chapiire XXXIII,- quoique ce même Li. braire qu'il n'a jamais vu ni connu, ait porié fa ridicule animofité jufqu'a des menaces, dans des lettres particulieres, dont la teneur eft bien différente de celle de favertilTèment cü il renencait a la continuadoii de fon libelle périodique.  C53) „ guet (e) & rimprudence d'outrager une portion „ nombreufe & reipeétable de fujets honnêces de /a „ Répubiique , connus fous le nom de Refugiés j, Francais (f).... 11 pourrait bienrencontrer dans ui les ™es d'Amfterdam, quelqu'un des defcendans „ de ces families Francaifes, forcies fans paffeport „ de leur patrie, qui, moins endurant qu'un Prince „ magnanime, qu'un Annalifteenfermé& un Librai„ re pacifique, ferait porté a le pouffer dans le caJ} nal? Ce ferait lui rendre Jirvice (g).. Je ne vou- „ drais CO Bien loin d'infulter a 1'infortune dufameuxLiaguet, nous répétons, ce que nous avons déja dit, No. I. p. 4. que nous admirons fes talens quoique nous ayons des principes difFérens des fiens, & qoe fon iufortune qui nous Pa rendu plus cher, eft préciferaent la caufe que nous n'avons pas combattu fes principej.regardant comme une lacheré d'attaquerun écrivain dont Ia perfonne & laplume font erchatnées. Nous nous fommesméme e'evés aflez vivement al'occalion de fa détention, contre les procédés arbitraires des eouvernemens defpotiques & nous avor.s déclaré combienil était odieux de jeter un homme dans les fers, fans lui faire fon procés dans les tormes, afin qu'il foit puni s'il eft coupable & relichés'il eft innocent. Un Prince peut être trompé; paree qu'il eft homme; mais il doit toujours mettre les loix entre 1'accufateur & l'accufé. (/) 11 n'y a pas une feule Jigne dans nos feuilles oü nous syions parlé des Réfugiés Francais. • On connait aflez noi principes fur 1'intoiérance reii5ieufe, pour favoir quefinous euflions parlé de ces refpeéhbles Emigrans, nous aurions été bien éloignés de prendre parti contre eux. II eft vrai que lorfqu'on nous accufa d'être un fugitif de France, nous par ames de ceux qui pouvaient être dans ce ca'. Mais le Correfpendznt politique ne fairil pas quelle différence il y a entre un ïugu\f de France & un Refugié Francais? (g) Attendez Mr. le Correfpondant ,je vous difpenfe de cette bonne volouté. Quelle reconnaiflance ne vous dois ja pour l'humauité que vous témoignez d'un cóté en m'avei t:flant de vos douces intentions & pour la grandeur d'aine avec laquejle vous commettez a d'autres le charitable foiii de ma conD 3 ver-  C 54 ) „ drais pas la mort du pécheur; c'efl: pourquoi je „ defire la converfion. Je fèrais mortifié d'appren„ dre qu'un Ecrivain , pour quelques" momens de „ faibleffe oud'oubli, füt expofé a boire de 1'eau „ faum&tre , pour éteindre fon feu, oh a recevoir quelques applications manuelles, enérgiques, pour le modérer. Toutes les aflertions du même Auteur furies Américains & fur I'Amérique. font d'une abfurdité qui ne mérite pas une réfutation férieufé. La piecefui. vante, dans le genre grotesque, fuffira pour le faire rentrer en lui-même; jufqu'a ce que le tems nous permette d'offrir a nos leéteurs les éclairciflêmens nouveaux & vraiment intéreffans que nous avons fur cette partie du monde. Après la découverte de Chriftophe Colomb, 1'événement le plus grand & le plus important des bedes modernes, eft la défeélion des Colonies de I'Amérique Septentrionale. Comme cette révolution ne peut manquer d'avoir la plus grande influence fur 1'état moral & politique de toutes les autres parties du globe, nous croirons fervir ceux qui cherchent a s'inftruire,' en leur offrant tout ce que nous pourrons découvrir pour les éclairer fur cette partie du monde, trop peu connue jufqu'a préfent. Mais comme 1'efprit eft fujet k s'appefantir, quand on nè lui offre que des objets graves , nous avons jugé la piece fuivaute trés propre a égayer; 1'utile s'y trouve réuni a' 1'agréable, Elle eft tirée des papiers Américains, avec undébut dont voicile précis. La prife du Lord Cornwalüs & de fon armée ne peut manquer de produire les plus heureux effets pour la nation Britannique, en accélérant la conclufion de la guerre & des plans du Miniftere , relativement a I'Amérique. Car ce revers intéreflera immanquablement unc multitude de Puiffances étrange- res verfion. Auriez-vons craint d'être prévenu en vous préfentaut voys méme? Que la prudence eft une belle chofe!'  (55) res en faveur des Anglais, après avoir fait difparaftre un homme, toujours ennemi de la gloire de Sir Henri Clinton, & toujours pret a traverfer fes opérations. £n un mot, il eft impoffible de dire ni de prévoir les conféquences heureufes de eet important événement. On a donc jugé que tous les livres capables de jeter du jour fur les affaires de I'Amérique, ne pouvaient manquer cTintéreffer dans les cir. conltances aétuelles." Un amateur, qui avait fait unc colleclion dans ce genre vient d'en publier une lifte dont les Américains fe font beaucoup amufés 6c qui plaira furement aux Européens qui ne font pas mi-' fantropes. Catalogue de Livres nouveaux fur ks cffaires dt i'Amérique. N. i. Hiftoire de Ia guerre Américaine;ou Exploits glorieux des Généraux Gage, Burgoyne,Howe, Cornwallis cc Clinton. 2. Manuel Royal, contenant un fyftême nouveau de Politique, fondée fur les régies déduites de la nature de 1'homme & confirmées parl'expérience; ou tout Prince peut apprendr/a fe faire abhorrer de fes fujets & détefter de tous les hommes de bien. 3. Syftéme complet & nouveau de cruauté; contenant les rafinemens inventés depuis peu dans eet art , embellis d'un frontispice élégant, repréfentant 1'intérieur d'une prifon de vaisfeau. 4. Fables choifies d'Efope, avec la morale & les applications convenables ; on y diftingue furtout le Cbien courant après fon ombre; rhomme & la poule aux ceufs d'or. 5. Les Droits de la Grande-Bretagne fur 1'Empire de la Mer: Fitlion Puëtique. 6. Etat de la Grande-Bretagne au mois d'Oélobre 1760 comparé avec fon état au mois d'Oétobre 1781. D 4 8. His-  7' Hiftoire Geographique,Hiftorique & Politique des Droits & Poffeffions de la Couronne Britannique dans I'Amérique Septentrionale. Cec ouvrage précieux confiftait en 13 volumes in folio ; mais une main Royale Pa réduit a un petit in douze pour fa commodité & celle de fes fujets. 8. Le Droit des Gens revu & corrigé ; Pon y a ajouté , par maniere d'Appendix , un recit de la prife de St.Eultachepar 1'AmiralRodney. 9. Recit fidele & complet de laconquête des quatre Colonies Rébelles du Sud:; avec des éclair» ciflemens & des notes critiques de la. main du Comte Cornwallis. , 10. Hiftoire du Naufrage du Lord Rawdon dans fon voyage de Charles-town a Londres 11. Les Miracies toujours fubfiftans: ou 1'interpofition remarquable de la Providence, en retardant le coucber de la Lune de deux heures; afin de favorifer la retraite d'un autre Jofué (Clinton) & de Partnée Britannique après la Bataille de Monmouth ia, Les larmes duRepentir; ou Etat préfent des Réfugiés Loyaux a New-York & ailleurs. 13. Weft-Point fauvé ; ou la conjuration découte T' agücomédie. 14. Mi ff Mac-Crea Tragêdie. 15. Addrefie de Burgoine. Le meffager fans manches ou les Commifiaires pour la paix. La marche a Valley-Forge L'entreprife malheureufe du Gouverneur Johnftone. Le heros amoureux , content & cocu, par le General Howe. Comédies. 16. Qui 1'aurait penfél ou les 14 Drapeaux Britanniques apportés au Congrès Rebelle. Procejjion.' Cortes  C 57 ) Cwtef EJtampes. 17-Üne magnifique Carte de 1'Empire Britannique en Amérique refferrée dans un cadre fort étroit. 38 Carte fidele des Cótes de I'Amérique Septentripnale, de New*J,lampshire a la Flondeavcc Jes fondes des Bayes, Havres Ports & Rivieres. Cet ouvrage, entrepris par le commandement particulier de fi Majefté, a été exécuté au dépens de plufieurs millions en argent, de bien des müüers ü'hommes, decent vaiiïeaux de ligne & de riches marchandifes. ip Plan de la Route du Lord Cornwallis k travers les Colonies Meridionales depuis Chariestown en Caroline jufqu'è Glocefter en Virginie. Comme la carte précédente donne une defcription exacfe des cótes de la mer, celleci devait offrir un tableau fidele des parties intérieures du pays; mais les habitans fauvages devinrent jaloux de cette opération & vinrent a bout d'arrétter les progrès ultérieurs de ce Seigneur. 20 Perfpeftive de 1'Amérique Septentrionale dans le lointain gravée avec goüt. 21. Vue du fiege d'York-Town pour fervir dependant a la bataille de Saratoga, 22. Repréfentations Britanniques des principaux engagemens livrés dans la guerre préfente, enluminées par des perfonages éminens. Les pieces font d'une fabrique fi ingénieufe, qu'en regardant au revers , on voit les mêmes actions fans enluminures , mais tracées par des Francais & des Américains 23. Repréfentation grotesque du Triomphe du Brigadier Général Arnold & de fon Ami & Confeiller a travers les rues de Philadelphie, en effigie. 24. Les Tems. Eftampe Satyrique, repréfentant le Léopard Britannique, aveugle, ayant treize D 5 dents  C J8) dents arrachées, les griffes coupées; le Lord Noren, dans le coftume d'un Maréchal • Ferrand, le faignant a la queue pour le guérir. ; lnftrumens Pbyfiques. aj. Une Lanteme magique' d'une nouvelle invention, très-utile pour les perfonnes qui font a la tête des affaires. C'eft 1'ouvrage d'un habile Artifte q»i a travaillé fous la direction immédiate du Lord North, pour le plaifirdubon peuple d'Angleterre ; les Spectateurs y font ravis par 1'éclat des objets fa&ices, qui s'y trouvent; mais les objets réels qui les entourent, font dans une obfeurité qui les dérobe h leurs yeux. 26. Verres groffiffans pour augmenter le nombre d'un ennemi , afin de couvrir la honte d'une défaite ou de relever 1'éclat d'une vióboire. 27. Appareil éleélrique, complet. Cette machine exige beaucoup de précaution pour s'en fervir : autrement la malheureufe expérience a montré que 1'opérateur eft fujet a recevoir le coup qu'il voulait donner. 28. Lunettes d'approche pour les Politiques a courte-vue &c, &c. Secreti de Médecine. 29. Or potable : on le regardait comme une remede infaillible dans tous les cas; mais n'ayant pu réuffir que fur le Général Arnold, on le regarde comme un remede qui n'eft, pas adapté au Climat.d'Amérique, 20. Baume reftauratif, excellent contri^la faiblesfedesnerfs, les palpitations du cceur, lamauvaife honte &ladéfiance. On enfaitüegrandes demandes pour 1'ufage de 1'arméeBritannique. Si.Gouttes cordiales pour les efprits abattus ; avec un Elixir Ancdin pour diffiper les crain- tes  CS9 ) tes & les alarmes; trés neceffaires pour les Torys de toutes les parties de i'Amérique. NB. Quiconque achettera pour la valeur de jr livres Sterling,,, recevra pour récompenfe une rame de papier-monnoye contrefait. En outre deux rames des proclamations de pardon pour les Rebelles. Que ceux qui ne comprendraient rien au fens du No. il., daignent fe rappeler la bataille de Monmouth dans le New - Jerfey, ou les intrépides Anglais f urent battus par ces Poltrens d' 4 nêrique. C'efl une allufjon trés ingénieufe au recit de Sir Henri Clinton qui parlant de cette défaite, dans fes dépêches a la cour, attribue a une certaine pofition de la lune la facilité avec laquelle les Bretons firent leur retraite. Au refte toute cette allégone, quoique 1'idéen'cn foit pas neuve, fe foutient avec beaucoup d'esprit. Dans les commenccmens de la guerre aéluelle un catalo^ue dans ie même goüt fut diltribué en Hollandais, avec des allufions également ingénieufes fur 1'Angleterre. Mais par malheur , ce qui s'y trouvait de piquant difparaiffait, paree que dans le tems même ou 1'on vendait allégoriquement les effets du Roi George en Hollande, les vaiffeaux, les marchandifes & les autres effets des Hollandais étaient vendus trés réellement en Angleterre. C H A P I T R E XLVH. Sur les Lettres de Silas Deane pubUées dans les papiers publics en Angleterre £f en Amérique. Mr. Silas Deane n'était pas Réfident du Congres Américain a Paris , lors qu'il écrivit ces Lettres deftinées vifiblement a décréditer la caufe Américaine en Europe. II y a plus de quatre ans que Mr. Silas Deane s'eft brouillé avec le Congrès, & qu'il n'eft  C 60) n'eft pluska fon fervice. Les difficultés'qu'il -a eues avec cette refpeclabie Affembiée fur des comptes k rendre, pont tout-a-fait détaché de la caufe de fa patrie, dont il était dans le commencement, undes plus zélés partifans. Nous fommes venus a bout dé nous procurer toutes fes lettres qui forment un recueil aflez épais. On y voit que le cceur de PEcrivain eft ulcéré; 'es papiers Américains font une peinture affez défavantageufe de fa perfonne: on 1'y repréfente comme un homme dévoré d'ambition, & peu délicac fur le choix des moyens pour la fatisfaire ; & par conféquent fujet a ces méprifes qui la font échouer ; paree qu'aux yeux d'un peuple libre & vertueux, Pintrigue & Partifice ne fauraient avoir un luccès conftant. Je tairai cependant des particularités fur les quelles je n'ai pas encore des informations aflez authentiques. Je ne rapelerai méme pas la querelle que ce Mn Deane fuscita è fon collegue Mr. Arthur Lee, querelle qui fit tant de bruit dans le tems. Je ne rappellerai qu'en paffant ■qu'il y a parmi les Refugiés Américains k Londres, des hommes doués d'auffi grands talents & d'un génie auffi profond. Je n'infinuerai point qu'il a certainement fallu les inüigationsde perfonnes trés inftruites & trés, judicieufes pour décider un Miniftere rempli de têtes auffi bonnes que celui de Londres, a pourfuivre une guerre accompagnée de fuites auffi funeftes pour la nation Britannique. Je me contenterai de faire remarquer que Mr Deane doit être un homme, fans mceurs, fans principes, & par conféquent, indigne de toute confiancc, pour avoir forfait fes fermens, & manqué è Phonncur & a la probité, en révélant les articles fecrets du Traité avec la France, dont il avait été un des principaux ïnftigateurs , & qu'il avait fisné en qualité de'Miniftre Plénipotentiaire avec Mr. Franklin. On n'a pas oublié quil a été Pami intime & particulier du traitre Arnold , qu'il a logé longtems dans la même maifon avec lui. On remarque encore que ces Lettres paraifiënt avoir été faites fous 1'Muence Bri.  C 61) Britannique; qu'on ne les a publieés a New York, comme trouvées dans une prife, que pour mieux donner Ie change ; puisque ce font les feules que Rivington ait publieés de trois ou quatre mille qu'il dit avoir été trouvées fur le batiment pris. On ne peut cependant disconvenir que leur publicité n'eüt pu décréditer la caufe Américaine aux yeux de bien des perfonnes , fi la prife de Cornwallis, la chute du papier-monnoye, fans la moindre convulfion & plufieurs autres événemens favorables aux Américains n'euflcnt montré , dans le tems même de cette publicité, le peu de confiance qu'eïles méritaient. „ Que les Lettres publieés a New-York, dit un ,, papier Américain , fous le nom de Silas Deane foient vraies ou fauffes; elles ne fauraient faire „ aucun mal, tant les raifonnemens en font faibles „ & ridicules. Si cependant elles font authenti» „ ques, graces foient rendues a nos ennemis, qui ,, nous ont fait connaftre un traftre. Si, pourtant „ ces lettres étaient authentiques, pour quoi les a„ t on publieés? Les Anglais auraient dÜ voir qu'un j, hommes capable d'écrire de la forte, peut leur „ être trop utile pour le comprometcre auffi for„ tement. Pourquoi n'ont-ils pas nommé le vais„ feau fur lequel on les a trouvées? II efi vrai que „ trois mois avant cette publicité, Rivington com„ menc,a par annoncer la prife d'un Lougre Franse qais oh fe trouvaient quatre mille lettres. . . . „ Nous ne voulons pas juftifier Mr. Deane On „ connait.aflez fes nouveaux principes par d'autres „ écrits & par fes converfations ordinaires, depuis qu'il eft méconrent duCongrès. Mais que nos En,, nemis & nos Amis en Europe fachent que nous ,, regardons avec un fouverain mépris des obfer- vations ou 1'on prétend nous faire croire, contre „ notre propre évidente & conviction, que nous fommes livrés au malheur & aux divifions. De „ pareils artifices peuvent avoir leurs effets en Angleterre; mais aucun dans d'autres pays. En effet  (62) „ effet, quelle nation, quel homme impartial peuc „ refufer fon admiration a un peuple qui , dès le „ berceau, s'eft vu en état de former une armée „ redoutable , de la difcipliner, de la mettre, par „ un fyftéme militaire qui fera 1'admiration des fie„ des futurs , en état de tenir tête aux meilleurs „ vétérans de la Grande-Bretagne & dont le Congrès „ a fu fe former un fyftéme de Politique qui n'a ,, jamais chancelé, ni dans fes espérances, ni dans fes vues, & dont le fuccès montre tous les jours la „ grandeur & la foliditc. Pourquoi n'a-t-on pas, dit la Gazette de Bos- ton, du 17 Décembre 1781 , arrêtté Mr. Deane „ en Amérique, jufqu'a ce qu'il eüt rendu fes comp}, tes? II ne fe ferait jamais vu dans la pofition d'é„ crire des lettres de trahifon en Amérique, pour „ faire diffoudre notre glorieufe alliance avec la ,, France & pour porter fa patrie a fe jeter aux pieds „ & a la merci de la Grande-Bretagne, „ Pourquoi eet homme & Arnold, fon infame ami, „ ont-ils eu des Avocats jufques dans le Congrès? Pour quoi ont-ils eu jufqu'a des Ecrivains a leurs m gages qui rempliffaient nos papierspublicsdedécla,, mations contre les honnêtes gens qui s'apperce., vaient de leurs defleins pervers & voulaient les „ traverfer?" C'eft ainfi que parient les papiers Américains fur Mr. Deane & fur fes écrits. Pour montrer cepen^ dant, que les raifonnemens avancés par eet ancien Agent du Congrès ne nous épouvantent pas , nous allons rapporter la première de fes Jettres aue le Gazetier du Bas-Rhin vient de publier ; & nous donnerons les autres dans la fuite, fuivant que les circonftances nous le permettront. Traduétion d'une Lettre de Mr. Süas Deane, Réfidentdu Congrès a Paris (a~) a Mr. Jérémie Wadsworth , a Herford de fa^ Nous avons déja rcmarqné que Mr. Deane loin d'être Réfl. dent du Congrès & Paiis. pourrai: depuis quttre ans. porter plus juftement le titte de Réjtdent contre le Cmgrès. AW du Politique.  C 63 ) dans le Connefticut, trouvée dans une malle de lettres Amé. ricaines, interceptée par les Anglais, & publiée dans la ga. zette de Rivington, du31 OcL 1781. Paris, ce 13 Juin 1781. Mr. „ La nomination d'un ambaffadeur en Ruftte m'a donné occafion de péfer avecmodération les idéés du Congrès , relativement au commerce & a la politique des EtatsUnis. Le Congrès femble s'imaginer que toutes les nations de 1'Europe, 1'Angleterre exceptée, font intéreffées a notre indépendance; & quoique, (it 1'exception de la France) toutes les Puiffances auxquelles il s'eft adreiTé, lui aient répété le contraire , il ne laiffe pas que de nourrtr cette préfomption, flatteuïe, a la vérité, mais très-mal fondée. C'efl: ce qui a fans doute déterminé le Congrès a faire paffer un envoyé extraordinaire en Ruflie. En attendant qu'on voye les effets de fa miffion, le fait eft qu'il n'y a pas une feule Puiflance en Europe , {Ja France toujours exceptée, (*) qui prenne un véritable intérêt a notre indépendance; & que 1'intérêt du plus grand noinbre eft même de s'y oppofer. (c) L'Empereur & quelques autres nations voifines n'étant point puiffances commercantes , notre indépendance doit leur être affez indifférente. L'intérêt de la Hollande & celui de toutes lts Puiffances du nord eftnaturellementcontre nous; leurs produftions & les nótres étant les mêmes a tous égards, fi 1'on en excepte le riz & 1'indigo. La Ruffie CA) Noui fouhaitons bien fincerement que 1'évcnemem démente notre prédiétion mais nous croyens ê>re fondés 4 prévoir, que la France fera la première afe repentir d'avoir élevé 1'Amérique-Septentrionate au rang des puifiances indépendantes. Ce ferait fansdoute Ie comble de 1'ingratitude; mais Ia reconnaiffimce, ceue vertu fi rare entre les particuliers, eft un être de raifon, elle eft même enviftgie comme une fottire dans 1'ordre de la polirique. On ne bjus forcera fans doute pas a prouver cette aflertion par les faits. Nole da Courier. CO Nous 1'avous dit, dès les premiers momens oü Ia déclaration de 1'indépendance des Etats-Unis a été connue en Europe: „ Cesnouveaux venus nous joueront un jour un mauvais tour;" & noug perfittons dans Ia même opinion. Dieu veuille que nos états maritimes ne deriennent pas , daus Ia fuccellion des tems, les colonies des Amêricaim, comme ceux-ci ont éié les nótres depuis environ 3 fiecles. ïftte du Ourier.  ( H ) Rufiie cultfve du tabac, non-feulement pour fa proprecon> fommarion; mais en débite encore beaucoup a 1'étrauger. Les deux grande.-' fources des rici (T s Hal anciaifes foit ia pêche & lecaboiage; dans 1'une & dans 1'autre PAméri. que doit biemói devenir leur émule. Les habitans de la Nouvelle Anületerre ont déja coinnrencé, mê ne avant les troubles, a s'y adonner." La fuite au No. procbain. Ces Feuilles périodiques paratlfent réeulierement, tous les Lundis a Amflerdam , chez J. A.Crajenfcbot; a Haarlem , chez Walree; a Leide , chez Luzac fi? van Damme , & Les Freres Murray ; a Is Haye , chez J. van Cleef, Detune ,van Drecbt fi? LaVeuve Staatman; a Gouda. chez Van der Klos; a Rotterdam, chezBennetCf Hake,tk jf Bronkbor/l; a Dordrecht, chez Bluffé; a Deventer chez Leemhorst; a Groningue , chez Huyzingb j a Nimegue , chez Van Goor; a Arnbem chez Troost; a Bois-.le Duc, chez^. H. Pallier , a Hambourg, chez J. G. Vircbaux & chez les principaux Libraires des Pays-Bas On trouve chez 1'Editeur de ces feuilles L Amériquiade Poëme ; 6 fois & Voltaire recu aux Cbatnps élifies par Henri quatre, Eftampe alltgorlque.  L E POLITIQUE N°. LVII.LUNDI, ce n MARS, 1782. Suite du CHAPITRE XLVII. Et des Lettres de Silas Deane puhliées dans les papiers publics en Angleierre £f en Anprique. » C' nous jetons les yeux du cóté du midi, le Portugal O doit fon indépendance & fa fuMiftance a l'Angleteire feule; & fi ce!Ie-cl fuccombe aux efïbrts réunis de la France & de 1'Efpagne , ce Royaume ne peut rmnquer de devenir tót ou tard la proye de cette derniere Puiflance. Enfin, la fource des richeiïes de 1'Efpsgne eft dans fes pofles. fions aux Indes Occidentales & fur la terre ferme en Amérique; comment pourra-t'elle par conféquent defirer devoic dans le voifinage de toutes fes richeiTes, une Puiffance indépendance? (d) II eft d'une abfurdité manifefte, de fup- pofer (URe bo,1De Paix lui Puifie prévenir notre ruïne nous garantir de 1'efclavage : &, quoique vous pu.ffiez préfumer de I'Amérique, je fuis perfuadé que es cond.ttons que 1'Angleterre vous a offertes, ne font nullement a rejeter, & fuffifent pour entrer en négociation Je fens bien que ce que je viens de vous dire ne plaira pas chez vous (b), mais le tems apprendra fi je mefui= trompe. Je vous ai dit naturellement mon fentiment- & quoique vous puiffiez être d'un avis contraire, -"e me flatte que vous ne condamnerez point les motifs qui me font parIer. Mes complimens a tous nos amis; & foyez peifuadé que je fuis &c." r^'u^e Silas Deane, Oa fJO Cela ne plaira pas méme chez nous atout!e monde" &no,.« fommes rerf».dé. que bien des perfonnes d é fJi^prouvero'nt la li? La vérité fort du choc des opimons, comme le feu du frottemem de deus ca, oux; & nous ne cherchons que a véri.é & 1' X? ma du public, Ompartiaip s'entend. nZ du Courlt ' E 3  C 70) On a Ëfft remarquer aifé/ncnt que Mr. Pcane & le, Courier du Üas-Rhin font d'un fentimt'Ht contraire fur les points les plus importans L'Anglo- Américain repréïente fa pan ie comme faite pour dcpendre neceffiirement de 1'Europe. L'Annalifte de Clcves au contraire, peint I'Amérique Septentrionale comme devant former bientöt un - Etat dont 1'énorme Puisfance caufera des alarmes &impofera lejoug a toute 1'Europe. II me femble que dans un pareil cas il faut toujours fuir les extrémes. Un homme de bon fens, en gardant le jufte milieu. jugera que le fyftéme de défenfive qu'ont fuivi conftamment les Américains, leur difcipline militaire, les occupations de 1'agriculture dans un fol immenfe , neuf & fécond, la forme Républicaine & fédérative de leur cor.ftitution, en rendaht les Américains invincibles chez eux, leur öteront 1'ambition & le pouvoir de tenter des expéditions éloignées. Des deux opinions que nous venons de mention» ner, il fuivrait, fuivantle Courier, que I'Amérique eft affez forte pour defier ac~f.uellem.ent toutes les Puisfances de 1'ünivers, &, fuivant Mr. Deane, qu'elle n'aurait pu, comme eüe a fait, tenir tête auxefforts redoutables de la puiffante Angleterre. Nous efpérons que tout ce que nous dirons dans la fuite fur cette matiere intéreffante, fervira a fixer la vraie opinionqueles événemens déterminent de plus en plus. Lettre de Silas Deane d l'Honorable Robert Morris d Pbiladelphie. Paris 10 Juin 178 f. La crife danpereufe oh fe précipitent nos affaires, m'affedfe grandement C«> Je ne faurais parler d'autre fujet, quand je fuis en compagnie. Je ne faurais me livrer a d'autres penfées quand je fuis feul. Nous avons (<) Quel intérêt peut prendre a I'Amérique un homme aflez vil pour lui confeiller de retourner homeufementfous le joug; lui qui s'eft engagé lolemnellemeuc a déclattr & ï foutenir fon indépendance ?  C 7i ) avons été trompés, & principalement par nous-mémes. Je veux méme croire que ce n'eft pas dans une rrauvaiie intencion que nous avons trompé les autres. La nation Britannique a donné dans des erreurs, également grofiïeres; falTe le ciel que cette grande tragédie d'erreurs ne fe termine pas par une malheureufe cataftrophe! II ferait fuperflu de blamer nos adminiftrateurs publics ; mais il eft de la prudence d'examiner notre fituation préfente & de baJancer la probabilité des conféquences futures. L'expérience nous a montré que la Francemanque, oude pauvoir ou de bonne-volonté, pour chaffer les forces Britanniques de notre pays; (k) a juger par les apparcnces je penferais que la France manque de bonne-volonté; mais quand la conduite'd'un particulier ou d'une nation peut étre envifagée fous deux afpeéls ditTérens, j'aime mieux me déclarer pour le plus favorable. D'après ce qu'on voit &ce qu'on entend , ils manqueraient plutót depouvoir que de bonne-volonté Je dois donc les croire; quoique je fache trés - certainement qu'il eft certainement contre leurs intéréts, contre la fureté de leurs polTeffions étran^eres, d'éloigner la guerre de notre continent ; (l) mais quelle que foit la caufe k la- (k) La Frartce ne manque pas de pouvoir pour faire disparaitre les forces Britanniques de tout le continent de 1'A. niérique ; c'eft ce dont il faut convenir, en fe rapelant la première arrivée du Comte d'Eftaing & 1'affaire d'York. town; on ne peut défavouer que, dans ces deuxoccafions & dans plufieurs autres, les flottes Francaifes n'aient rendu des fervices importans aux Etats-Unis; fans doute qu'il n'eft pas encore da la politique de la France de fe prêter alaconfommation rapide de cette révolution ; non pour miner peu a. peu les Américains; paree qu'un peuple nouveau s'exalte & fe renforee par fes obftacles; mais pour y aiferrair fes fiaifons de commerce & de politique, auxquelles une trop prompte paix avec 1'Angleterre cauferait certainement un grand préjudice, (0 II eft aflez naturel de voir que lts Anglais chaflés E 4 en-  k laquelle nous devons imputer la continuation de la guerre dans notre pays, les conféquences en feront également pernicieufes pour nous. La Grande-Bretagne eft déterminée a ne jamais fe préter a 1'indépendance Américaine; & tant que les deux parties refteront inflexibles, nous continuerons a nous affaiblir, a nous épuifer, a nous ruiner 1'un & 1'autre: qui des deux y gagnera ? II eft, je penfe, tems d'examiner quel proflt nous viendra finalement Que la difpute fe terminé comme onvoudra: une Souveraineté indépendante dans les mains d'une Démocratie, nous procurera-t-elle plus de füreté pour nos biens &nos perfonnes, que nous n'en avions avant que cette malheureufe difpute éciatat? Notre commerce florira-t-il davantage fous 1'indépendance, qu'il n'a fait dans le tems de notre jonction avec la Grande-Bretagne? C'eft ce qu'on croit généralement; onycompte même comme fu; une des principales fources ou nous puiferons pour acquitter nos dettes actuelles. Le fujet mérite cependant un examen. Les entraves mifes auparavant fur notre commerce étaient contre-balancées par la proteélion & 1'encouragement qu'il cn recevait. Si , dans un état d'indépendance, cette protedïion & eet encou» ragement doivent' néceffairementdisparaftre,& notre commerce avec la Grande-Bretagne & fes établifferuens feront fujets a tous les impöts & prohibitions, imaginés contre le commerce des autres étrangers. Si notre commerce avec la France & d'autres nations étran- entierement de tont 18 continent de I'Amérique,porteraient routes leurs forces vers les Ifles Antilies; & fuivant le fylléme de la bonne poiitique, il e(l également naturel de confulter fa propre défenfe, fa propre fureté , avant de penfer a fecourir autrui. Au moins a.t-on vu dans l'affaire ie Co'nwallis, que, lorfque la défenfe des deux nations pouvait fe concilier, la France, loin de manquer k sffifter fes alliés, a furpalfé leur attente. Ce ne font pas la des raifonnemens; ce font des faits, voyez le No. XXXVI de cette feuille.  C73) étrangeres dok être foumis aux conditions & aux entraves qu'eïles jugeront a propos de nousimpofer, comme la chofe arrivera, il eft dignê dexamen ft nous gagnerons ou perdrons dans notre commerce. J'ai examieé la queftion, auffi profondément qu'il m'était poffible; & je fuis convaincu que nous perdrons. Nous formions des plaintes contre 1'Angleterre, pour avoir renfermé I'Amérique dans 1'act'e de nayigation & dans les autres acf.es prohibitifs; mais fi la force navale de cette nation s'eft formée, a la fuite ce ces aétes, une Puiffance fuffifante pour prctéger le commerce de 1'Empire entier; fi le commerce de I'Amérique y a trouvé une proteétion, eüt-i! éte déraifonable que le commerce de I'Amérique f ut foumis a ces acles cc régiemens qui étaient la fource de fa protection & de fa fécurité. Nous faifions des plaintes que des aftes du Parlement nous empêchaffent de porter certains articles de nos produétions a des marchands étrangers, & qu'ils donnaffent a 1'Angleterre un monöpole avantageux pour elle & injurieux pour nous; mais il faut avouer en même tems qu'il était interdit aux fujets Britanniques d'acheter & d'importer les mêmes articles d'autres pays ; de forte que fi 1'Angleterre faifait un monopole de certains articles de nos producfions pour les Marchés étrangers, elle nous donnait en échange le monopole de fes marchés & la liberté de porter aifcurs nos produólions, s'il s'y trouvait un fneilleur marché; nous avions en cela un avantage évident; une grande partie ainfifoumifeau monopole de 1'Angleterre, étaient d'une nature è être fup. pléés par les étrangers a des prix égaux ou plus bas que nous r'aurions pu le faire: Mais le fyftéme de la Grande-Bretagne étant , comme vous"le favez, de favorifer le commerce de fon empire dans chaque partie; non-feulement des entraves & des impóts furent mis fur les importations étrangeres; il y euc encore des primes données pour encourager le cru & 1'importation de plufieurs de nos produftions qui, autrement, n'auraient jamais trouvé de débouché en E 5 Eu-  (74) Europe; une autre plainte était qu'on nous défendait d'e tirer -des étrangers des articles dont nous avions befoin; quoiqu'ils ne fuflent ni du crü m des' fabriques d'Anglcterre; mais il eft bien connu que ces articles, dont on a tant parlé. ne formaientqu'une partie peu confidérable de notre commerce. Quiconque sVft trouvé a même de comparer les manufaétures d'une nation Européenne avec les mani> factures d'une ature ou d'obiérvcr les différens moyens & principe» de négocier des affaires, donnera toujours la préférence a 1'Angleterfe & a fes marcbands. Tous les articles, les plus folides, les plus fubitantiels, & les plus utiles, font beaucoup nvilleurs, &a beaucoup meilieur mavchéaue nullepart aillturs, a 1'exception de ccrtaines to;!es de Ruffie & de Silefïc; & ces articles mèu.e, vu les lettres a tirer en Angleterre peur 1'cxpcrtation, nous venaient k peu pres ou méme a auffi bon marché que nous pomrions 1'avoir importé direclement. Mais il aété obje&é que les Étrangers n'avaient pas la permiffion d'a; porter leurs marchandifes & leurs produétions dans nos ports & de commercer avec nous; de toutes les plaintes que nous avons faites fur 1'article du commerce, cette derniere eft celle qui me para't la plus abfurde & ia plus dénuée de fondement. L'interdiction faite aux Étrangers de fervir de voituriersa 1'Angleterre eft la bafe fur laquelle fon commerce & fon pouvoir maritime fe font élevés & la caufe principale de raccroiffement de notre commerce & de notre navjgation ;&- fijamaisnous obtenions 1'indépendance & la paix & que nous négligions de pafler des aétes pour exciüre les Étrangers de voiturer pour nous, nous ne ferons jamais une nation maritime ou commercante. Les Réglemcns parlemenraires & les reftriclions fur notre commerce, furenr une des principales Caufes de la malheureufe querelle entre les deux pays, & nous ne les fouffriöns qu'avec impatience • paree que nous apprehendions qu'ils n'entraffent dans le fyftéme de nous réduire a 1'efclavage; & d'après ces i'dces il était na- tu-  (75) tnrel que nous en exagéraflïons le fardeau , & que dans toutes nos délibérations fur ce fujet, nous porta'fions nos regards fur ces entraves ml fes fur le commerce , fans confidérer 1'encouragement & la proteftion qu'il en recevaitj je ne prétends pas mettre en queftion les vues & les defleins de qui que ce foit a cette épouue. je crois que d'autres, auffi bien que moi-mémé, n'avaient dans ce tems-la , examiné le fujet que fous un feul pomt de vue; & nous favons a la vérité qu'un trop grand nombre de nos patriotes n'avaient que peu ou point de connaiffance du commerce, de fes intéréts, de ce qui en dépend. Je confeffe que, d'après une perfpeclive plus étendue & un examen impartial du fujet , il elt évident que les entraves mifes fur 'notre commerce avant cette difpute étaient plus que balancées par Ia protedtion & les divers encouragemens de la Grande-Bretagne. Mais fuppofons qu'a la fin de la guerre, 1'Aménque refte indépendante, quelle ferait alors la fituation de notre commerce? Au rétablifiement de la paix, 1'mdépendance donnera t-elie au commerce un effor, luiprocurera-t-elle de nouvelles fources & les encouragemens néceflaires, non-feulement pour lc faire fortir de la décadence oh il fe trouve aétuellement; mais encore pour 1'élever plus haut qu'il n'a jamais été dans aucun période antérieur ? Ou 1'mdépendance fera t-elie préjudiciable au commerce de 1Amérique? C'eft la une queftion férieufe; & limportance me fervira d'apologie pour la longueur de ma iettre. Je fais que j'écris a 1'une des principales têtes mercantiles en Amérique; mais ]e connais auffi votre candeur & votre amour pour lavénte; c'eft ce qui me fait hazarder de vous communiquer mes penfées fur ce fujet, que vous approuverez ü elles font juftes, & corrigerezfi elles font erronées. L'Amérique, abandonnée a fa liberté, tirera, j en fuis perftiadé, de la Grande-Bretagne, au moins les trois quarts des articles d'Europe dont elle a bc  lbin f>). La fupériorité des manufaöures Britanmques, leur conformité avec notre goü! & dos TeTs^lcLl^f * I,ef^>tudf°ponLDlïe ae ies marchands, & furtout ie crédit ou'ils rjeuvent donner & que nulle autre nation ne Deu^i " irDoitnnde' d°k Pr°CUrer k Ce"" te ia poition de notre commerce, dont i'ai Darlé Mais comment payerons-nous ces achats? Quand hvêiZlf), ' 1,fl»8l«erre d^nnaft ia prelercnce a notre fer, a nos munitions navales h nos femences de chanvre. k notre bois &c • elléen encourageait 1'importation par des primestpSvimpofition de taxes pefantes furie même article dSs nations étrangeres. Cela ne fera jamais pur nous n avons plus de raifon d'attendre que nous feront au nombre des nations étrangeres que Ta Grande! Bretagne favorifera le plus. Nous nous fo nnies imaginés que la Grande Bretagne ne foudendrait jamais ttonsTftnTn6 & feS ™™^<* fins nos proTc léur ctfr r mai:CheS ia co^ommation des ff; CeftUICe <"uon a affuré dans des haraneues & des pamphlets des milliers de fois depuis féot ans? ^avpue que jel'ai cru moi-même; maisTobfS S tLrtPé"enCe m ont convaincu que nous avrns été fvnn,?6"- "°^ De Cous & articles que nous deux iTlZc ï Grande-Bretagne, je n'cnVq J aeux, le tabac & Je ris, qu'on ne puiffe fe nroenrer auffi bons & è auffi bon marché desau trespavs La confommat on du ris dans la Grande- S etSe n eft pas confidérable; & celle du tabac n'cxcédeTas vmgt mille barrils par année, 1'une portam I?U£S II eft vrai que d'autres pays peuvent produ re ce5 wrrticles au,rae>c P™ ^rneSilnS Japréferenceque la Grande Bretagne a donnéea ceu" venus viennent lAngleterre, en établifTant leurs Hrirons, avec lei 2:S^S Ia fuue' les An«W«, *™ une urn*  C 77 ) venus de I'Amérique empêchait qu'on n'en augmentaf ia culture ailleurs. tl eft bien connu que 1'Isle de Cuba, la cóte de Bréfil & plufieurs autres pays produifent du tabac fupérieur au nótre, Que 1'U« kraine eft feule capable d'en fournir toute 1'Europe; il eft vrai que la cultur.e n'en eft pas encore poftée a la perfedtion; mais telle qu'elle eft, fa Ruffie ne laiffe pas d'exporter une quantité confidérable de tabac en France & dans d'autres pays. On en peut dire autant de plufieurs autres pays , relativement au ris, L'indigo de I'Amérique méridionale & des Isles, eft; fupérieur aux nótres. Les produétions de la Ruffie, du Danemarc, de la Suede, &c. font les mêmes que les nótres; & en échange, ces pays tirent de 1'Angleterfe les mêmes marchandifes que nous en tirions: au moins trouverons nous des rivaux dans les marchés Britanniques en y arrivant avec nos produclions, & des rivaux dans les achats que nous defirons y faire Mais on nous fuppofe indépendans; nous pouvons donc aller ou il nous plait; mais nous ne pouvons trouver des acheteurs oh ir*nous plait; & les nations chez lesquelles nous en trouvons peuvent mettre, fur nos marchandifes, telles impofitions qu'il leur plaira (n). Les Puiffances du iNord en Europe ne peuvent devenir acheteurs: elles ont lesmêmes articles a vendre. La France n'a befoin que d'une portion peu confidérable de nos productions; elle n'a befoin ni de notre fer, ni de notrechanvre, ni de poiffon,ni d'huile,ni en un mot de rien autre que de vingt quatre mille tonnes de notre tabac chaque année; quant k notre bois & a nos munitions navales, nous trouverons des rivaux dans les ports de France comme dans ceux d'Angleterre; & quant au tabac, le plus important de tous ces articles , la culture y fait tant de progrès en Flandre & dans l'U:ibn refpecïab'e & digne de la liberté qu'a votre exemple elle s'eft acquife, 1'épéeè ia mam. Son indépendance cft même plus fohde que la vóprè, paree qu'cn promenant les regaras fur lui & autour de lui , au beu des funeftes fuites de la décadence & des voiflnsdaneereux il ne voit qu'une perfpeélive de prógrès en tout genre au dedans &pas un feul voifin qui puifle 1'effraver au dehors. La Répubiique des Etats - Unis de i'Amérique, quoi qu'en difent fes dén-acteursi a tous les avantages-pour former dans peu un Empire puis. fant  C79) fant & florifiant, Vous ne devez pas douter que votre exemple ne 1'ait encouragée dans fon auda,cieufe démarche. Cette rclïemblance d'hiftoire & 1'analogie de gouvernement , de mceurs cc de reli* gion , a certainement infpiré a ces peuples un deiir particulier de s'unir avec vous. Ils vous tendent les bras. Cc n'eft même pas trop avancer, que de dire qu'ils feraient peut-être plus flattés de faire une alliance avec vous qu'avec le plus grand Potentat de rUnivers. Cette inclination, dérivée de caufes mc> rales , toujours préfentes a 1'efprit & f jutenue patjes puillans intéréts de commerce & de politique, vous promet des avantages infinis. & même des défcnfeurs dans des crifes dangereufes. Qui ne voit, je le repete eneore, que les Puiffances Européennes qui ont des poiléflïons en Amérique , feront toujours obligces de ménager une Répubiique alTiée, a a la confédération Américaine? Qui ne voit que la France èc 1'Efpagne. s'élevant attuellement. p ar Ia grandeur cc la rapidité de leurs fuccès, a une puisfance qui deviendrait effrayante, une alliance entre la Répubiique Belgique 6c "la Répubiique Américai ne , pourrait former un point intermediaire qui tiendrait les deux Royaumes dans 1'équiiibre? Qui ne voit que la reconnaiffance de 1'indépendance Américaine eft unc démarche qu'on ne peut plus différer? Les Bretons jufqu'a préfent inflexibies, aux membres même, de 1'oppofition, ne peuvent plus le refufer a 1'évidence qui les frappe de la maniere la plus terrible. Enfin, ils défesperent de ramener ce pays a "'ancien joug. Le mot, Indépendance Américaine, vient enfin de fe faire eotendre jusques dans 1'affimblée légiftative de la nation Britannique. Le fuccès de la motion du Général Conway , un des événemens les plus importans de cette guerre, n'a laiffé , après mille & mille chicanes. d'autre alternative que les mots de paix ou de trêve avec I'Amérique, mots qui impliquent déia une reconnaiffance d'indépendance Un des membres, Mr Rigby , ajouta qu'il ferait aulfi ridicule de parler de a fouverainété fur I'Amérique, qu'il 1'ctaitdéja d'ajouter le  ( 8o ) le titre de Roi de France k ceux que le Roi d'Angleterre portait. Un autre membre (Mr. Foxj ajouta qu'on ne pouvait gueres former avec 1'Amériqueque des liaifons femblables a celles qui fubfiftaient entre PAngleterre & le Portugal. Quelle fera leur confternation . lorsque le nouveau coup de foudre qui vientdeles frappera Minorque , aura retenti a leurs oreilles? Ainfi les Anglais, en renoncant a la fouveraineté fur I'Amérique, fe flattent encore de s'y former des avantages exclufifs fur les autres nations, comme ils en ont en Portugal Quelles alarmes ces mots ne doivent-ils pas nous infpirer? car il ne faut pas s'abufer; Ia nation Britannique décidée a terminer la guerre, tentera tous les moyens d'en obtenir la conclufion; & s'il faut renoncer a. 1'indépendance Américaine; au moins tentera-t-elle de fe dédommager en cherchant è s'y procurer les avantages de commerce que les rapports de langue de mceurs & d'origine paraiffeut lui promettre. ]1 eft donc tout k fait acraindre que nous n'arfivions trop tard, comme nous avons fait dans la neutralité-armée; & que les Anglais n'aient renoué leurs anciennes relations, avant que nous ayons eu le tems d'y établir folidement les nótres. Öue vous importe, fi ces Etats-nouveaux feront heureux ou malheureux : le grand point pour vous eft qu'ils ne forment plus par leur réunion avec 1'Angleterre, un , coloffe de puiffance redoutable a toutes les Puisfances maritimes. La fuite au No. procbain.  L E POLITIQUE N°. LVIII. LUNDI, ce 18 MARS ,1782. Suite du Difcows aux Citoyens g? Habitans des Pays'bas-Unis fur la kéconnaiffance de 1'indépendance Américaine. Les deux partis qui divifent notre Répubiique, font également intércffés a cette glorieufe démarche. II parait même que celui des deux aquii'on attribuait une opinion contraire, doit fentir, auffi bien que 1'autre, le véritable intérêt de 1'Etat è eet égard: on n'a pas vu qu'il ait formé la moindre oppofition aux démarches du Miniftre Américain. Ce parti, naturellement jaloux de la France, voit, lans doute, les avantages que 1'alliance Américaine procurerait contre les projets imaginaires' ou reéls qu'il ferait incliné a fuppofer a cette puisfance : il voit aufii que ion penchant a favorifer eet» te importante démarche eft le meilleur moyen de fe procurer cette popularité, que certaincs eircoaIranees auraient pu affaiblir. Vainement chercherait on a fe le diffimuler: 1'ar. deuravec laqueile la Nation eftportée a toutes lesinfinuations relatives a 1'alliance Américaine, le mépris poulfé jusqu'a 1'infulte , qu'elle a'marqué pour ceux qui produifaient des opinions contraires monTome III. F trsnc  ( 8a ) trent affez les efpérances qu'elle s'eft formécs de cette démarche pour fes avantages, foit de commerce , foit de politique. La Frife, celle de nos Provinces qui eft Ia plus libre & qui par fa conftitution populaire eft la plus indépendante des intéréts particuliers & des petites intrigues qui en font les fuites, ne fuivanc que l'impulfion du grand intérêt national , a déclaré formellement qu'il fallait reconnaitre 1'Indépendance Américaine (<0« II parait que la Hol- Les Etats de Frife ont pris la réfolution fuivante, & l'ont fait porter par Mrs. les Dépuiés a 1'alTemblée de leurs Hautes Puilfances. „ Ayant é:é ponée è faifemblée & mife en délibérationla demande de Mr. Adams, pour remettre fes lettres de créance des Etats-Unis de I'Amérique Septentrionale a L. H. P., comme aufii l'adiefle ultérieure a cette fin , avecpriere d'une réponfe cathégorique faite par le même, & plus amplement mentionnée dans les notules de L. H. P., du 4 Mai 1781 & du 9 Janvier J782. Sur quoi ayant été pris en confidé. ration, qua le fusdit Mr. Adams aurait vraifemblablement quelques propofitions è faire il L. H. I\ & a leur remettre de principaux articles & fondemens, fur lesquels le Congrès de leur cóté voudrait entrerdans un traité de Commerce & d'Amitié ou d'autres affaires a propofer a 1'égard desquelles la diligence était requife. II a été trouvé bon & arrêté, d'autorifer Mrs. les Députés de ceite Province è la généralité & de les charter de diriger les chofes è la Tabie de L. H. P. de maniere que le fusdit Mr. Adams foit admis au plurót comme Miniftre du Congrès de 1'Amérique Sjptentrionale , avec ordre uitérieur aux dits Députés que, s'il était encore fait quelques femblables propofitions par le méme, d'en informer au plutót L. N. P. & ü leur lèra envoyé extrait de Ia préfente pour informatiou . & pour fe conduire en confotmité. Ainfi réfolu 9 Ia maifon du Pays le 26 Fevrier 17S2, (Plus bas) d'accord avec Ie fusdit Livre de ma connaiilance. (Etait figné) A. J. v, Sminia."  ( 83) Hollande ne tardera pas h 1'imrter. La Cueldre a déja déclaré qu'elle n'actcndaic que 1'exemple des Provinces maritimes. Les autres Provinces fuivronc a 1'envi. Jetons les yeux fur 1'kurope ; voyons quel les feront les fuitei de cette démarche ? L'Efpagne que des intéréts politiques empêchaient de fe décider, fe hatéra de proclamer hautementune indépendance qu'elle a déja reconnue par f. conduite. Les Puiflancc neu-res nerefteront pasfpeétatricesindifFérentes: pour ne pas pcrdre les fruits de la révolution Américaine, elles reprendront naturellement le plan d'unCongièsfolemnel. inviteront les Américains avec les autres Etats a s'y rendre pour travaillera la pacificatiën générale. Cer.te invitation, équivalente a une reconnaiflance d'indépendance, fera perdre tout espoir a 1'Angleterre: i'um'vers combiné conrre elle lui ménagera le prétexte le plus plaufible & le plus décent pour fon orgueil; elle fe hatera de fceller une indépendance dorst il n'eft plus en fon pouvoir d'ébranler les fondemens Mais,dira t-on, ne vaudrait-il pas mieux que nous adoptior.s la conduite de 1'Efpagne, qui n'a pas encore reeonnu cette indépendance ? Ce n'eft pas, dit- on . dans le moment oh nous avons accepté la médiation d'une Puiffance refpeétable, pour 'nous reconcilier avec un autre Puiffance qui fe regarde encore comme la métropolc des colonies Américaines, qu'il nous conviendrait de reconnaftre 1'indépendance de ces dernieres; le teuips viéndra; mais il faut i'attcndre, & ne pas le prévenir inconfidérément. S'il fut un tems oh les efprits duffent fe porter k cette démarche, c'eft fans doute celui ou elle peut prévenir de grandes pertes, produire un grand bien, fans caufei aucun préjudice. On fait aflez combien les Anglais font impétueux dans leurs démarches; ils cherchent la paix; ils veulent, ils demandent la paix a grands cris ; il faudra bien qu'ils fe refolvent a renoncer a i'Amérique;ilss'y porteront avec F» * toute  C 84) toute 1'ardcur du cara&ere national & la diligence néccflaire, pour aller au devant des autres PuiiTances. Dans un tems oü nos manufacTures & notre navigation ont befoin de nouveaux débouchés, oh nulIe aurre nation ne pourrait nous rivalifer pour la Tichelle des fonds, & 1'inteiligence du commerce, qui ne voit que nous ne faurions trop tót étabhr nos liaifons de commerce cn Amérique, & que nous pouvons y efpérer'les plus grands avantages? On prétend que cette reconnaiffance pourrait empecher une paix particuliere avec 1'Angleterre, paix que la médiation de Ja Ruflie parait av oir pour objet. D'abord on ne voit pas qu'il foit poffible de fe procurer une bonne paix, une paix folide, fi elle n'eft générale. En fecond lieu, cette reconnaiflance ferait-elle plus de torf a 1'Angleterre qu'une conquête: or perfonne ne peut nier que tant qu'il n'y a pas de céflation d'hoftilités, tout eft permis contre un ennemi déclaré. D'ailleurs, de quelle maniere cette médiation a-t-clJe ete acceptée? U n'eft pas vraifemblable que ce ioit lans desconditions ; il eft ftipulé dans ces con ditions, cette médiation ne doit porter aucun préjudice aux liaifons qu'on pourrait former avec les ennemis de 1'Angleterre; il ne parait pas, non plus guere vraifemblable que, depuis que la reprife de St. Etiftache par les Francais, a fixé irrévocablement la Répubiique dans les intéréts de la France 1'Impérat-ncc continue a infifter fur i'offre de fa mé' diation ; dans ce cas on ne pourrait plus doutcr qu e:Ie ne foit un miirument, que la Grande-Brerasme fait jouer pour traverfer toutes les refolutions que Ion pourrait prendre contre 1'ennemi. On mfinue que nous ne pouvons hazardcr une pareüle démarche fans le confentement de la neutralite-armée. Quelle erreur? Sommes nous membres de cette rieutralité ? N'a-t elle pas refufé de nous adopter, ious prétexte que nous érions Puiffance belligérante? Peut-on être 3 la fois Puiiïance neutre &  C 85 O & belligérante? Ainfi, cette confédëration ayant refufé de nous admettre dans fon fein, quels autres égards lui devons-nous, que celui de nous conformer aux principes de liberté navale qu'elle a réclamés & annoncés a 1'Univers. La France, 1'Efpagne,ies EtatsUnis de I'Amérique ont avoué ces mêmes principes; fous quel autre titre ferions nous Hés a la neutralitéarmée ? Chacune des autres Puiffances Belligérantes aura, comme nous, le droit de participcr a tous ies avantages de cette confédëration , dés qu'elle ne fera plus belligérante. Qui peut dire qu'eïles n'ont pas le droit de caufer a leur ennemi tous les dommages qui font en leur pouvoir? S'il eft permis de leur enlever leurs polfelTions; a plus forte raifon le fera t-i! de recennakre 1'indépendance d'un membre déja détaché du corps de 1'Empire ? Cette reconnaiffance ne jetre dans les négbeiations qui peuvent s'ouvrir pour la paix, pas plus d'cbftacle, que ne peuvent en jeter denouvelles conquêtes; au contraiie; elle pourrait , ainfi qu'une conquête, accélércr la conclulion de la guerre. Quel homme fenfilile & ami de l'humanité , envifageant les chofes fous ce point de vue, .peut fe refufer a une démarche dont les conféquences feraient auffi falutaires? 11 eft vrai que 1'Efpagne, quoique Puiflancebelligérante, n'a pas encore reconnu formellement cette indépendance. Mais l'admifiion de Mr. Jay en qualité de Miniftre des Américains, 1'ordrè de les traiter comme de bons amis, nom qu'un Monarque ne pcutaecorder ades rebelies. ks fecours fecrets & publiés qu'il a donnés aux Etats-Unis, font au moins une reconnaiffance implicite. Qu ne voit d'ailleurs, foit par i'article fecret révélé par Mr. Deane , fok paria conduite évidente de 1'Efpagne quece Royaume veut auparavant ajouter Ia Floride Septentrionale a 1'Oricntale & Gibraltar a Minorque, & qu'elle craint fans doute qu'une pareilledéclaration n'amenat une pacification, avant qu'elle eüt obtenu ces grands objets? Amis, Fretcs,Concitoyens, que i'expérience nous F 3 ap-  C 8-5 ) „».t *•"$■/■• f-jl-'-' [jalaóo • y "j t}ölA-SaJriaiè ' apprehne a Ia fin a nc plus r.ous laiiïer tromper. De» mandez aux Anglomanes,fiIa Ruffie eft portee pour 1'Angeterre? lis vous diront qu'après le Portugal, 31 n'y a pas de Puiffince en Europe qui ait p'us d intérêt a la profpérité de 1'Angleterre que Ia Ruffie. Cette obfervation feule doit vousmontrerquclleconfiance vous devez mettre dans 1'offre d'une pareille médiation. Toute la conduite de la Ruffie a notre égard n'eft elle pas finguüere ? Nous nous préfentons pour entrer dans la confédëration armee, elle nous rejette fous prétexte que nousfommesen guerre; & lorfque nous voulons faire la guerre, elle trouve promptement Ie moyen d'interpofer fa médiation pour nous empêcher de la pourfuivre. Si, dit-on, nous avons des avantages aretirerdes Américains, ils ne pourront jamais fe paffer de nous; ils nous apelleront néceffairement a eux; actuelle. ment même, quoique nous n'ayious formé aucunes liaifons avec eux,ils nous ont montré tan t de confiance, que nos négocians y font déja, foit fecretement, foit publiquement, un commerce affez confidérable & y étcndent tous les jours leurs relations. Quelle néceffité engagerait donc les Souverains a déclarer une indépendance, qui n'oifre aucun avantage qu'on ne puifle fe procurer également fans la déclarer, & qui pourrait caufer de grands obltacles pour une pa x particuliere ou générale? D'ailleurs, les principaux avantages que nous aurons a retirer de ce commerce, ne viendront qu'après la paix. En un mot. tous Jes traités du monde ne peuvent rien contre 1'intérêt; ce mobile puiffant nous amcntra toujours les Américains, s'il doit jamais exifter des avantages ré. ciproques entre les deux nations. Qui croirait que ce puiffant raifonnement eft réfuté par 1'Anglomane Deane? II nous dit, en propres termes, que I'Amérique ne peut acquérir quelque degré de puiffance fans faire , a 1'exemple de Cromwel, un Edit de navigation . pour défendre k tous vaiffeaux de fabrique étrangere de lui apporter d'autresdenrées,que celles qui feraient erues ou fa- bri-  C 87) briquées chez la nation qui les apporte. Om ne voit qu'il eft également dans le fyftéme de la liberté du commerce, que I'Amérique laiffe fes ports ouverts aux importations de toutes les nations, fans 9'embaraffer de celle qui les fait ? Qui ne voit les avant ïges que nous retirerions de ce dernier choix & le préjudice que nous cauferait le premier? Qui peut nier que ces deux alternatives ne foient entre les mains des Américains P Qu'on ouvre les annales de la Répubiique, on verra qu'elle a toujours eu pour politique, de nenégliger aucune occafion de faire des traités de commerce. II eft certain que jamais 1 occafion ne s'eft montrée plus favorable; & qu'il n'y a jamais eu de pays qui nous offrït de plus grands avantages k eet égard. On prétend que les motifs de reconnaiffance & d'amitié ne font nen dans le monde politique; mais niera-t-on que les caufes morales ne puiffent tranfporter le commerce dun pays è un autre; que ce grand mobile de la politique aftuelle ne fuit pas toujours les routes les plus naturelles ; qu'il eft facile de 1 en detourner , furtout quand il n'a pas encore de direétion fixe; & que c'eft pour lui donner cette direótion en faveur de notre pays, que tous les bons patriotes apelent a grands cris 1'alhance avec I'Amérique (b). Les Américains s'apphqueront-ils moins O) Mr. van der Capellen fit éclater fon ardeur patriotique dans les demiers Etats deGueldre. C'eft ce qu'on voit dans 1'Extrait du Recès du Com'é de Zutpben, dms 1'Afiemblée Extraordinaire , du mois de Février 1782, tenue è Nimegue le 23 du même mois* il eft concu en ces termes. „ D'Après le Rapport des Committés de cette Province a la Généralité, exht'né aujourd'hui fur table, relatirement a ce qui s'eft paiTé dans 1'Aifemblée précédente,& «l'apiès 1'examen d'un Extrait du Régiftre des Réfolutions Fa  C 83 ) moins k donner de 1'extenfion k leur commerce & a miner celui de notre Répubiique, lorsque nous ne fe- de L. H. P. Ies Etats-Cénéraux des Pays-Bas.Unis du o du mois paffi , par rapport a 1'AdreiTe ultérieure de Mr. Adams au Préfident de L. H. P. fur la remife de fes Lettres de Créance a L. H. V. de la part des Etats Unis de lAmertque-teptentrhnale, pour & detnandant uneréponfe cathégoriqoe , dont Mrs. les Députés des Provinces refpcétives ont pris Copie, le Baron Robbert Jasper van der Capellen de Marlen a d'abord, de boache , enfuite par éent, propofé & infifté a 1'Afiémblée de ce Quartier qu aftuellement & fans délai on en faffe un point de Délibéiation & qu'on fade fur table, 1'ouverture nécelTaire conpue plus au long dans 1'Avis de ce Seigneur, inféré en ces termes;" NoBLES ET PüXSSANS SEIGNEURS! Le Soufligné juge fur de bons fondemens & fans crainre d etre coutredit, pouvoir alTurer qu'il eft plus que tems qu pu faire une attemion férieufe, a l'offre & a 1'invitation en tous fenshonorable & avantageufe pour cette Répubiique, d'Amitié & de Liaifons réciproques avec les 13 Pro. vinces Américaines, devenues libres a la pointe de 1'Epée • 1 ^°.n.5ue la rdP°nfe cathégorique , demandée pa'r leur Miniftre, le Sr. Adams, devienne un fujet des Délibérations de V. H. P., & qu'on Ie deelde au plutót fnr les Intéréts refpeclifs. II jugeait qu'il ne devait plus y avoir de fcrupule i eet égard; & que les fuites incertaines de la Médiation offerte par la Ruffie , ne pouvaient, quand il s«£Hait d Avantages certains pour cette Répubiique, em. pecher que, par égard pour un Ennemi avec lequel Nous (toutes falutaires que fuffent repréfentées les vues de S. M Jrnp ) re pouvions faire aucune Paix, aux dépens d'une' négligenee auffi irréparable. Qu'un plus long délai a Nous Wir a uue Nation déja fi puiffante, aura pour fuite que Nos  C 89 ) ferons rien pour nous concilier leur amitié, lorsque nous aurons pris, dans un traité de commerce, les pré- Nos Habitans perdront les moyens d'étendre de Ia maniere la plus avantageufe leur Commerce & leur Bien-être. Que par la prohibition rigoureufe d'imporrer des Manufsctures Anglaifes en Amérique, nos Fabriques, au moyen de précautions prifes a rems, fortiraient «ie leur état delangueur. Et qu'en différant plus longtems de fatisfaire aux voeux de la Nation, fes conducteurs s'attireraient le repro, cbe, comme s'ils avaient négligé & rejeté les offres favorables de la Providence: Qu'au contraire, en adoptant ces mefures, les Intéréts elfentiels de ce Peuple malheureux fe. ront pris a coeur. Déclaranr, en outre, le Soufligné, qu'il abandonnera cette négligence impardonnable d'une occafion favorable pour cette Répubiique, au compte de ceux que cela regarde: Proteftant contre toute« les conféquences fatales qu'im refus plus long de ces mefures néceflaires cauferait certainement; fur quoi il demandait que, pour fa décharge, cette Note für inférée dans les Régiflres du Quartier. (Signé.) R. J. van der Capellen. La lecture de eet Avis ayant été faite, Mr. Jacob Adoif "de Heeckeren d'Enghuizen, Confeiller & Premier Maitre des Comptes de la Gueldre, Préfident aftuel de 1'Affemblée dü Quartier, repréfenta audit Robbert Jafper van der Capellen de Marfch, que, „ bien qu'il dut convenir de la jufteffe de tout ce qu'il venait d'expofer, outre plufieurs autres Raifons également fortes qui fe préfentaient a fon efprit, la Délibération fur le Point en queftion lui paraiflait prématurée, vu que les Seigneurs Etats de Hollande, de Weftfrife & de Zélande , comme principales Provinces Commercantes, qui s'y trouvaient direcTement intéreffées, ne s'étaient cependant pas encore expliquées a eet égard; conféquernraent, qu'il ne ferait guere convenable pour les Etats de ces Duché & Comté, qui n'y étaient intéreifés F 5 que  (90 ) précautions convenables pour détourner les atteintes qu'il pourrait y esfuyer? Seront-ils moins portés a nous nuire par un commerce de contrebande dans nos établiffemen?, lorsque nous aurons refufé de reconnaitre leur indépendance, ou que nous ne 1'auronsreconnue qu'a la derniere extrémité , c'eft-a-dire lorsque 1'Angleterre nous en aura donné 1'exemple ? Quand toutes ces brillanres espérances qu'on fait concevoir de cette reconnaiffance,neferéaliferaient pas auffi fubitement qu'on 1'annonce, elle pourrait toujours ouvrir le chemin a une quadruple aKiance qui ne manquerait pas d'impofer a 1'Angleterre, au point de nous procurer une prompte paix. Paix! voila le moe que les Anglomanes ne celfent de faire retentir, comme fi leurs adverfaires ne la défiraiert pas autant qu'eux. Comme fi le meiileur moyen d'en que d'une maniere conféquente & indirecte, de vouloir néanmoins former les premiers leurs Réfolutions a ctt égard: C'eft pourquoi il donnait a confidérer s'il ne ferait pas plus a propos de renvoyer les Déliberations fur eet objet a une occafion poftériesre." „ Cependant, le fufmentionné Robbert Jasper van der Capellen de Matfch infiftant a ce que les Voix fuflent re. cueillies fur fes Propofition & Avis en queftion, & ce fa;fant y ayant été déféré , L. N. P. apiès en avoir delibéré, ont trouvé bon & ftatué que, quoique les naotifs allégués par ce Seigneur daus fon Avis paraiifent' mériter une Confidération férieufe, cependant, pour les raifons alléguées ci deflus, on juge devoir en fufpendre-la Décifion , jufqu'a que les Provinces Commercantes aient formé leurs Réfolutions la-deifus. „ Et que,fur la requifition de Robbert-Tafper van der Capelle de Marfch , il lui fera délivré un Extrait de la Préfente fur 1'un, auffi bien que fur 1'autre." Aecordè avec le Reces fufmentionné.. CSigtié.) Hebm. Schomaker.  (01 ) d'en occélerer la conclufion, n'était pas de porter i "1'Angletcrre quelque coup frappant qui ferait le réf iltat d'une alliance étroite entre les quatre Puiffances ennemies de 1'Angleterre. Quel autre moyen de maïnteniv Ia folidité des fonds Anglais auxquels un fi grand nómbre de nos concitoyens ont part ; & que la prolongation de la guerre ne peut manquer de renverfer entierement ? Et c'eft ici que fe développc le Syftême des Américains en nous invitant k nous unir a eux. lis cherchent vifiblement a mettre fin aux malheurs de 1'humanité, en terminant le plutót poffible cette guerre défaftreufe. Leur indépendance eft certaine; 1'hommage que nous y rendrons par une reconnaiffance folemnelle, n'ajoutera rien a fa folidité; mais il importe k tous les peuples que 1'effufion du fang humain foit arrêtée ; & cette maniere de répondre a leur invitation , ne peut manquer de frayer la route a des liaifons avantageufes de commerce. Répétons-le avec force & vigueur : il n'eft pas de paix folide k efpérer fans une paix générale. Une paix particuliere ne ferait qu'une paix platrée; notre commerce ferait toujours expofé a des avanies. II n'eft pas de remede pour guérir le mal jusqu'a la racine. qu'une paix générale. Qu'on montrefi jamais occafion a été plus favorable, pour bnfer è jamais les entraves que 1'Angleterre nousaimpofées, en la formant, par des efforts combinés, a fe foumettre ? , n , ~ Une grande erreur des Anglomanes, eft de luppofer toujours les afraires en balance entre 1'Angleterre & I'Amérique. 11 s'en faut cependant beaucoup que les progrès des Anglais y foient aufii avancés que ceux des Américains. Ces derniers font en poffeiTion de tout le pays , & les Anglais n'y ont que trois places. Si jamais 1'Angleterre efït pu les réduire, c'eüt été dans les commencemens de la guerre; ils étaient alors divifés, faibles & fans expérience dans les armes; mais attu-  ellement leurs milices valent les troupes réglées de 1 Europe; ils acquierent des forces & desrichesfes ; pendant que 1'Angleterre tombe de plus en plus dans la faibieffe & 1'épuifement. A quoi aboutiflent les raifbnnemèns les plus eblouiffans des Anglomanes contre I'Amérique, du Steur Deane par exemple? Qu'un pays ne RXtnn rnCe & aux entraves de la GrandeiJietagne. Car on ne peut disconvenir que tout ce qu il dit ne tombe également fur tous les Etats qui n ont pas de liaifons avec les Anglais. L'Amerique, en les rompant, fe trouve dans le cas de toutes les Puiffances indépendantes de 1'Angleter! ie; & il faut etre infatué de la manie des para. doxes pour foutemr que leur fort eft trés a piain«ÏÏlr 9Ue le.P?rtuSal ferait bien maiheureux, s U fecouait jamais Je joug que la Politique Anglaife a fu lui impofer. C'eft foutenir en propres termes iHiant, ü faut Ie foumettre aux entraves & au mod?fcdC la.Grandc ?'-e«gne. En un mot,laG ande-J3ietagne lerait un foleil dans ie monde politique, teiW & 'es rayons feraient néceffaires ?our la fécondation de chacune des autres partics Avant de fimr ces obfervarions fur la néceffité de reconnaitre 1 indépendance de I'Amérique, de faire une quadruple alliance & de nous défier de toüïe médiation pour une paix particuliere, il importe de is ^e-awr ,epérii que nous S luivant un fyftéme contraire. Aóluellement que les Anglaisinvoquent la paix a grands cris, & que, pour la conclure au plütöt & tirer des Américain'sT e a"S qu rkS^d°™maZ™ un Peu de fou! ve aineté üs fe déterm.neront probablement h ceaei ce quils ne peuvent plus recouvrer, & oour nelt.il pas a craindre qu'ils ne faffent une paixfé' parée  (93) paréc avec ces trois Puiffances, qui nous laifferont a fa difcrétion: ces quatre Puiffances y trouveraient également leurs intéréts; la France, 1'Espagne & I'Amérique,pour nous punir de notre indifférence; & 1'Angleterre, pour s'indemnifer a nos dépens. Jamais, depuis qu'il eft des guerres dans le monde, on n'a vu refufer, comme nous le faifons, de faire caufe commune avec des Puiffances qui ont le même ennemi. Quels ménagemens devons nous avoir en tems de guerre pour un peuple, qui n'en a jamais eu pour nous en tems de paix ? Le refus de reconnaftre 1'indépendance Américaine, ne ferait-il, pas croire qu'il y a dans ce pays des hommes plus portés pour 1'ennemi que pour leur Patri e ? Qu'il me foit permis encore de faire remarquer que cette alliance & la paix générale qui en ferait la fuite,paraiffent dépendre d'Amfterdam. Cette ville a la plus grande influence fur les déterminations de la Province; Ia Hollande entrainerait toute la Répubiique; & il parait trés vraifemblable que la conduite de la Répubiique infiuerait fur toutes les autres Puiffances de 1'Europe. Un Congres Général s'ouvrirait a 1'inftant pour une paix que tous les amis de 1'humanité & furtout les pays d'induftrie tels que le nótre, ne peuvent s'empêcher dc défircr. Extrait d'une Lettre de Mr. Robert Lix:ngjlon, Mini. Jire du Congrès pour les affaires Étrangeres, d 'une ies principales maifons de Commerce d'Amfterdam. Pbiladelpbie 27 Décembre 1781- II ne me refte qu'a reconnaitre la fatisfaction que le Congrès , en un mot, toute I'Amérique, a éprouvée a la nouvelle de 1'heureux événement que vous avez eu la bonté d'y faire paffer; ils font d'autant plus agréablement furpris que, quoiqu'ils eug.  (S>4 ) eulTent la plus grande confiance fur Ia bravoure d une Nation qui s'eft tellement diftinguée en diver. fes occafions, depuis le tems de Cefar jusqu'a la derniere guerre oü elle s'eft trouvce engagée, on ne laiffait pas d'appréhendcr que fon averfiSn pour la guerre & les effets d'une longue paix ne les eusient énervés & n'euifent affaibli cette vigueur d'esprit qui les avait jusqu'alors mis en état de fe foutenir au milieu des plus grandes difficultés L'Amiral Zoutman, les Officiers & les hommes fous fes ordres ont convaincu pleinement 1'univers que le courage ardent & ferme auquel les Hollandais font redivables de leur liberté, ne les abandonnera jamais, quand ils feront apelés pour la défendre Quoique les Réfolutions des Etats - Généraux & des Amirautés que vous avez eu la bonté de me faire palier, nous caufent de la joie , par ce quH'es portent avec elles des traits d'amitié & d'attention pour 1 Amérique , il faut encore d'autres preuves moins équivoques pour former & cimenter les liailons que tout arm' des deux pays defire de voir s'établir. Le tems préfent cft peut-étre le moment le plus cntique pour les nations qui jugent 1'alliance & le commerce de ce pays de quelque importance. Le iucces a couronné nos armes: & l'on vient de prononcer une mterdiétion contre les manufadtures Britanniques. Ceux qui fe tiennent a 1'écart pour nefe préfenter que lorsque les douceurs de la paix auront mis le dernier fceau k nos fuccès, n'auront,certainement, aucun titre a notre reconnaïfiance. Une Nation qui differe d'entrer en liaifon de commerce iusqua ce que Ie peuple, ayant perdu 1 habitude des manufaétures Britanniques, fe foit accoutumé è celles d autres pays, trouvera, pour établir fon commerce, a combattre de nouvelles habitudes & de nouveaux prejugés. Un gouvernement fage ne laiflerait pas échapper les avantages d'une occafion auffi favorable. 13  C 95 ) 11 tfeft tóeö arrivé d'important depuis la prife de Cornwallis, fi non la défaite d'un parti del ennerai fur les frontieres de New-York cc .1 évacuation de Wilmington , le feul pofte qui reftat 4 1'ennemi dans la Caroline Septentnonale. De toutes leurs conquêtes fi vantées, ü ne leur reft- plus aue New-Yor*, Charles-town & Savannah ; encore ae tiennent-ils cesplaces, que d'une maniere trésprécaire. Extrait d'une autre Lettre d'un Amiricain d fon Correjpondant en Hollande. Vous apprendrez avec plaifir que les armes Britanniques ont été vaincues & battue; de tous cótes dans cè oavs Un corps confidérable d'Anglais, avec un noEÏ d'IndiensP, qui avoient paffi les lacs du Canada dans le noble deffein de ravager le pays, de bruto des farmes, & d'efcalper les femmes & les enfans, a été rencontré & défait deux fois avec une perte confidérable en tués & en prifonniers par un Eombre inféiieur de milices. Le Congres eft occupé des préparatifs pour faire les eftorts les plus viSoureux aulft-tót que le printetns permettra les onéffins, & qui font tels que moyennant la bénéd.cSn de la Divine providence, nous avons les tncillèm-esraifons d'en attendre un bon fuccès, En un mot nos affaires font ici dans une te le fituation, que nos ènnemis ont renoncé a toute idéé de conquece, & qu'ils n'ont plus 1'efpoir le plus éloigné de notre réunion avec h Grande-Bretagne, dont ks procédis ont excité la haine la plus invétérée. C'eft peu êt?e a préfent le moment, oü d'autres nations pourraient far une conduite genéreufc & decj rgnplacer les Anglais dans notre affeél on, 6e 6.abI r Lr commerce avec nous fur les ruines de celui de la Grande-Bretagne , avant que notre goüMe  ( 96 ) ItLtiT^h qUC ,nous donnaffions Ja préférence aux manufaftures d'une de ces mt-ïn™ v r pere, pour J'amour de vous & de nnn, J ff* *w, chez Walree; a Leicle cb£r,ZJ£; £ Hmr' LeemblrftDlteCb-' Ch" Blu^ * Deventer , chez  a/jui JLa *a*/ix *ju y % N°. LIX. LUNDI, cc sj MARS , 1782. Suite du CHAPITRE XLVII- Et des Lettres de Silas Deane. '»,XTous avons protefté contre le commerce en AfriINI que; mais fi nous relachons ou rompons nos réfolutions fur eet objet, n'ayant aucune marine pour y protéger notre commerce & ni forts & faétories i'ur la cöte, nous ne faurions y avoir part. Nousnc faurions nous flatter d'étre en état de conquérir la Nouvelle-Écoffe, Terre-Neuve ou les Florides; & fi la Grande-Bretagne eft réduite a renoncer atreize Colonies, il eft naturel de fuppoferqu'elle cherchera tous les moyens de tirer p»rti de celles qui lui resteront. No'us n'avons ni ne defirons des établifiemens dans les Indes-Occidentales. Cinq ans auparavant nous élevions notre importance au point de croire qu'une fufpenfion de commerce avec nous, ex citeraitun foulevement général dans les villes fabricantes d'Angleterre, ou du moins ferait pouffer de vaines clameurs en notre faveur, en caufant un manque d'ouvrage; que 1'Irlande ferait rumée, faute de nos femences de chanvre, & les poffeffions britanniques aux Indes Occidentales, faute de nos produétions Mais une expérience de fix ans devrait cerTome III. G tai-  as et. ,0Jr, Jra, ftieterre. ne s'eft plaini^ détaut „. . lande s'eft procurée de la .fetnence de ci,u auffi bon marché, a même meilleur marche paravant; elle a trouvé affez de débouchés poui toiles. Les Indes-Occidentales n'auront donc épro. vé qu'une légere diminution. Ces faits doivent nous convaincre que le monde n'eft pas fi fort fous notre dépendance, que nous 1'avions imaginé; & fi nous pourfuivons nos recherches, nous verronsque nous dépendons autant & même plus denos voifins, que nos voifins ne dépendent de nous. Je n'écris pas a quelqu'un qui déclame contre le luxe, fans avoir aucune idéé de fes effets, ni a quelqu'un de ceux qui parient beaucoup du commerce , de fes avantages, de fes inconvéniens pour un pays, fans avoir la moindre idéé de fa nature ou de 1'étendue de fon influ nee & de fon pouvoir. Je puis donc, fans raifonner fur ce fujet, hazarder de dire que les producfions des Indes-Occidentales nous font effentiellement néceffaires, & que nous ne pouvons mieux faire, fans leur Sucre, leurCaffé, leur Cacao, leur Coton. qu'ils ne e peuvent fans notre farine* notre bceuf, notre bois &c. Auparavant, en qualité de fujets Britanniques nous avions le droit d'approvifionner les Ifles Britanniques de tout cedont elles avaient befoin; & dc prendre en échange tout ce qu'eïles avaient a diipofer. Nous ne payions pas d'impótsplus confidérables que les autres fujets Britanniques, foit pour l'importation,foit pour 1'exportation.Nousavions le droit de donnerè toutes les poffeffionsétrangeres, Frangaifes , Hollandaifes & autres des lndes Occi- den- («) II eft fort incertain que les Américains, en imerroropant tout commerce avec la Grande-Bretagne, aier.t jamais concu d'auffi brillantes efpérances.  C 99 dentales routes nos prod jcüoi, Tabac cc de recevoir en échangts pouvaient fournir , a 1'except'on du ku. ques autres articles. Geux que nous recevu,. retour étaient, a la vérité, foumis a de certains droj. pour limportation en Amérique. Maiscomment était alors, & comment fe trouve a préfent notre commerce avec les polfeffions étrangeres, Hollandaifes, Framjaifes & autres des Indes-Occidentales? II eft vrai que nous étions admis dans leurs ports; mais notre farine était un article prohibé , dont on ne permettait l'introduótion publique que dans les tems de difette. Plufieurs des principaux articles de nos produclions fe trouvaient dans le méme cas. La France, en interdifant 1'importation de notre farine dans fes Mes , montrait affez qu'elle ne craignait pas de les expofer a la difette, faute de nos approvifionnemens. Mais quels articles de leurs produftions nous a t-on permis d'acbeter & d'exporter publiquement en échange? La Mélaffe feule, ou la miférable liqueurqu'on en diftile; toutes les autres, 'comme le Caffé, le Coton , le Sucre , 1'Indigo, nous les enlevions comme des voleurs , & par la connivence de leurs officiers qu'il fallait acheter. La France s'eft-elle engagée par traité de nous accqrdcr une plus grande hberté'de commerce avec fes Iiïes qu'autrefois?Nullement. Nous nedevons être traités que comme une des Nations les plus favorifées;&elle n'a jamais traité la nation la plus favorifée autrement que je ne 1'ai déja dépeint. Cet article favori de mes compatriotes, les Mélaffes, le feul de conféouence qu'il nous fut permis d'importer des Ifles Frangaifes, attira 1'attention du Congrès, dans leurs premières propofitions d'un Traité avec la France. J'en vis 1'importance dans ce tems-la; & je me flattais que nous l'avions affuré , fans aucun facrifice réel de nocre part; mais le Congrès eut enfuite une opinion différente & 1'abandonna. Nous n'avons, en conféquence, jufqu'a préfent , aucune fécurité, pas même pour ce feul article. Toutes chofes ne G 2 pofent  C ico ) „<.ure que fur ces termes vagues & généraux traiter réciproquement, comme une nation des plus favorifées. Mais 1'on peut dire que le befoin oü font les Iftes, de nos produöions, les amenera toujours aux conditions que nous voucirons, ou du moins a des conditions juffes & raifonables. Examinons la chofe avec attention. Les Ifles Francaifes ne iauraient être dans la néceffité de la farine ni d'aucune forte de provifions falées: au contraire, il eft de la politique de la France de les empêcher de faire cela , fi elles y étaient difpofées: car en approvifionnant fes 'fles de fes propres farines & manufactures & de toutes fortes de provifions falées, achetées en Eui-ope, avec fes eaux de vie, & fes vins &c. jj elle cncourage 1'agriculture & le commerce de les l;qets en Europe, ce qui doit être le principal objet de toute nation lage; quant a des provifions fraiches, il n'y a que fes Ifles du vent qui peuvent en avoir befoin." • t ■■■ •• j ■ :•. 4 """ 'A i ' 1 Pour pouvóir apprécicr les principes de Mr. Dea* ne, il n'eft pas inutile d'examiner les réfiexions fuiyantes, tirées des papiers Américains. C'eft une oblervation très-remarquable qu'aucune des nombreufes Gaxettes, qui circulent dans les Etats Unis, n'a fait difficulté d'mférer ces lettres; & qu'au lieu d'avoir fait une impreffion funefte fur rèfnrit du peu. ple, elles n'Ont fait qu'exciter un mépris ouuneindignatioii générale dans toute I'Amérique. ily a.difent ces papiers, dans les lettres de Dea- ne,  (k ne, une idéé trop propre a n'étre pas relevée. II préteno. obligée de céder a 1'Angletenx 1'indépendance Américaine. Je penfe que tout ami de ce pays, toiu même, avouera que nous avons des obligations finies a la France, pour fes efforts genéreux, puis- . fans & falutaires en notre faveur ; cependant aucun , excepté Mr. Deane, n'ofera affirmer que nous ne fubfiftons que par le foufle de fes narines& qu'el" ]e feule foutient notre exiltence comme nation libre *i indépendante. Je me bornerai a une feule question. Pourquoi n'avons-nous pas été conquis & forcés de renoncer a notre indépendance, avant que nous euffions fait alliance avec cette Monarchie? dans un tems ou la Grande-Bretagne avait bien plus de pouyoir pour nous conq- érir, & nous, bien moins de forces pour lui réfifter. Nos ennemis favent, pour leur malheur, qu'il y a eu , & qu'il eft en. core dans cc pays, des, difpofitions qui porteront toujours les Américains a fe procurer 1'indépendance & a vanger leurs droits d'hommes libres, quoique abandonnés ou négligés de toutes les Puiffances de la terre. Tous les raifonnemens de Deane potent fur des fuppofitions. La patience de Job n'y tiendrait pas. Si nous devenons indépen lans, dit-ü, il nöus faudra entretenir des Ambalfadeurs , un gouvernemenc civil, des cours d'Arnirautés &c. ; mais ne vaut il pas mieux faire ces dépenfes, & cent autres fi elles font néceffaires ,. fous les aufpices de 1'indépendance, que ce que le Tyran Bnttannique apellerait Cour de Jufiicc , fi elles font dépendai> tes; tandis qu'il eft eert'in qu'il nous ferait'bientót payer les dépenfes des exécutions qu'il nous fera fubir pour 1'avoir fi longtems vexé , en défendant nos droits & nos libertés. Ne vaut-il pas mieux fupporter la dépenfe d'un établiffement civil fous les aï es de 1'indépendance , qu'un établiffement militaire fous 1'influence Britannique, que la propofition de cette dépendance nous attirerait? G 3 Ell«  ( 102 ) r plus abfurde & de plos ridicule que juloir foutenir que nous devons renoncer a indépendance , a caufe de la dépenfe que nous cauferait i'entrctien d'Ambaffadeurs & paree que nous ferions réduits a Ia condition des autres Etats indépendans de la protcclion & de la fervitude Britannique. II eft difficile de dire qui doit étonner le plus ; ou 1'efprit borné & 1'ignorance, ou 1'infame perverfité du falarié qui a écrit ces lettres. II fait entendre que fi Ia France triomphe, elle nous diclera telles conditions qu'elle voudra; c'eft a-dire, nous demandera auffi-tót de nous foumettre a fa domination. Mais, fans nousarrêter è 1'honneur , ala bonne-foi, a 1'intérêt méme, la France n'eft-elie pas déja en poffeffion d'une plus grande étendue de territoire étranger, qu'elle n'en a befoin? Ne voit-elle pas , d'après 1'exemple malheureux de la GrandeBretagne, qu'il faut plus encore, qu'une vaftc étendue de riche territoire, pour faire une nation grande, püiffante & refpectée? Voudrait-elle, a 1'exemple de la Grande-Bretagne, fe plongcr dans une guerre ruineufc, avec le peuple de ces Etats, pour un objet dont 1'nTue ferait des plus incertaines ? Si elle vient a bout d'affaib'ir 1'Angleterre, au lieude tourner fes armes contre fes arriis & fes alliés, la faine politique ne 1'engagera t-clle pas plutót, è pourfuivre le coup qu'elle a donné en cbaffant des terres & des mers, fes ennemis invérérés, les perfides Anglais? Ne ferait-il pas plus naturel qu'elle réduifit en Province 1'Angleterre qui, par fon voifinage, of. fre une conquête bien plus aifée ? Car je doute encore que les Etats Proteftans vouluflént s'interpofer pour fauver un pays qui ne deshonore pas feulement cette religion, mais encore 1'humanité. Mr. Deane ne peut écrire une lettre qu'elle ne roule fur la politique. C'efl dommage qu'il ne puiffe fervir le Miniftere Britannique fous une autre qualité que celle d'Ecrivain : je fuis fiché qu'un Miniftere auffi vertueux que celui de Londres perdeainfi fon argenti car je connais certainement divers Barbiers  (I°i biers k Londres, capables de plaufibles qu'aucun de ceux Deane, pour nous faire goüter ty tanniq'ue. Quel homme odieux, dit le Freeman's Jou-,,. Janvier, qu'un homme qui trahit auffi lÉchement ie„ premiers principes & la caufe de fon pays & qui s'efforce, par Ia plus noire ingratitude, de jeter ces foupgons fur la nation Frangaife, qui 1'a toujours traité avec une générofité, une affabilité une confiance pardculieres! II eft devenu k tous égards, femblable a fon ami de cceur, Arnold. Quelque partifan de la juftice & de la vertu prendra , fans doute, la plume pour faire rendre juftice k la réputationdeces perfonages, a qui Mr. Deane & fes amis ont fait tant de tort. C'eft ce que demandent la juftice & 1'honreur; telle eft la réparation qu'on dok faire pour 1'argent diffipé- les animofités enflamées & les maux qu'on a faits a notre pays par un attachement aveugle a un homme pervers, attachement qui doit tirer fa caufe de 1'intérêt & de la corruption mutuelle. Tous ces odieux procédés de Deane devraient être effacés de nos armales. II eft certain que depuis cette malheureufe époque, le Congrès n'a pu encore recouvrer ce degré d'eftime & de coniiance qu'il poffédait au commencement. Dites-moi, dit un autre papier Américain, ditesmoi, vous qui parlez en faveur de la dépendance Britannique , qui foutenez que le bonhcur, 1'intérêt & la gloire de ces Ktats font attachés k cette dépendance . ne regarderiez - vous pas comme infenfé celui qui, lorfque les vagues fe choqucnt par 1'impétuofité desvents, voudraitattacherenfemble deux grosvaiffeaux avec du ril ou de la foie, pour leur fureté réciproque ? II eft également jufte & raifonable de fuppofer que I'Amérique & la Grande-Bretagne pourraient être heureufes ibus un même fouverain. Quel fpeétacle de pitié doivent les infenfés Bretons donner è 1'univers, en penfant férieufement afubjuguer un pays que la nature fit pour être libre, G 4 &  C 104 ) a - '-'-diie feulefera toujours un obfbcle inoleè leurs fuccès! Une pctite Me, fituée aux extremités de 1'Ocean, embaraflée de montagncscscaipées, de collines arides. de terres coupées ■ un pays dont la force n'eft qu'artifkielle, faifmt fortir journellement des flottes & des armées pour desconquetes impraticables, perdanr la fleur de fes jeunes gens', les plus habiles de fes généraux qui atrirésdans Jadpherc de cette made énorme, I'Amérique. y font a Imftant dévorés. comme la pailie dans un tourbillon! Quelle multitude d'ouvriers ingénieux les Anglais ne hvraient pas, il v a dix Ü88H Lestoifonsdé leurs brebis couvraient les Habitans des deux Zones: ieuis iïnes toües étaient recberchées dans tous les climats: mais projeter de réduire a une obéisiance ilhmitée ou de ruiner un pays naturellevient ir.vincible, n'eft. ce pas vouloir arnicher le tisferand de fon métier, ou le fa veder de fa ftalc: le mendiant qmttc-fa beface,& le garc'on tailleur,qui gagnait honnêtement fa vie a couvrir les épaules de fon prochain fonétabiitilfecroit tout-a-couc un nouveau Cortes, un Aiexaridre,-altéré de gloire & courant apres des lauriers qui ne perdent famais leur fraicheu.r, & pour foutenirfa Koyauté fon idole, il traverte un Océan, dans 1'espoir de conquètes au-dela de 1'immenfe Atlanticue! _ II n'eft pas fatiiede détermincr, ouel fera la grandeur tl 1'tmportanCe de I'Amérique Seotentrionale ■dans un fiecle ou deux fi la fabrique'préfente eft ioutenue & fi le peuple eonferve ces fentimens de noblcfie & de courage qui le caraétérifent aótuellement. L'Agriculture, la bafe de la grandeur d'une *!a"on y fera fans doute portée a un dégré de perfeétton, & Ie commerce, qui en eft lafuite,offrira des occupations fi avantageufes & fi agréables, que les guerres feront oubliées & que les nations, par une correfpondance ouverte & iibre dans ce vafte &fertile continent, redeviendrontdes freres & nefetraiteront plus comme des fauvages & des monftres. Lesb;ecles de'fer difparajtront peua-peu; & nous ver-  verrons renaftre cesfiecles dor, dont les fages des anciens tems ont fait une defcription fi brillante. On a decouvert au dela de la charae des hautes montagnes, qui bordent les frontieres Occidentales de notre nouvelle Répubiique, de nouveauK pays d'une beauté, d'une fertilké dont iln'y a point d'idée. Les terrcs y font d'une qualité bien fupérieure aux nótres , fituées le iong des cótes de la mer; les arbres des furêts font hauts & droits; les prairies, les paturages y font immenfes; on y voit paitre de nombreux troupeaux, d'une efpece particuliere a ce pays; ils n'ont pas de maftres; ce n'eft pas la main des hommes qui les entretient. Le cümat eft extrêmement doux & mödéré; les rivieres n'y dirigent pas leur cours a 1'Eft vers 1'Atlantique ; mais elles coulent h 1'Oueft & au Sud, d'un cours agré'ablement doux, dans des lits que la nature leur a formés-, elles vont fe rendre dans ce grand refervoir de mille & mille ruiffeauxjle celebre fleuve du Mifïïfippi, qui, tirant fes eaux les plus lointaines de fources inconnues, roule a'travers les-pays glacés du Nord, & qui,dcployant fes bras a 1'Eft & a 1'Oueft, embraffe ces rédüits fauvages, que le voyageur n'a pas encore vus; que le poëte n'a pas encore chantés , & quele corapas du géometre n'a pas encore mefurés; jufqu'a ce que s'uniffant a 1'Ohio & fe tournant vers le Sud, recevant enfuite le MilTori & cent autres rivieres, ce Roi des fleuves , en comparaifon düquel le Nil n'eft qu'un ruiffeau & le Danube qu'un foffé , fe iette avec un volume immenfe, dans laMerduMexique, après avoir baigné les cótes d'une multitude de conti ées fertiles, habitces par des nations fauvages, jus. qu'alors inconnues & fans nom. C'eft un axiome de philofophie, que la nature ne fait1 rien en vain ; mais ft le nouveau monde ne devait pas être peuplé dtns tous fes points par des nations civilifées. pour quel deffein auraitelle creufé dans le fein d'un empire naifl'ant, cesvastes lacs qui jettent le voyageur dans la furprife & ï'étonnement, & qui. laiflant la Mer falée derrière eux' a Gj 1'Eft,  C 106.) 1'Eft, trouventde nouveauxOcéaïisd'une étendue rrodigieufe dans ces clitnats. oü 1'imagination n'amaic iuppolé que des collines fans fin, dcsdéfeus inhabitables & d'arides foréts. Ces Lacs, s'uniffant 1'un a 1'autre fe mêlant enfin a 1'Océan vers le Nord-Eft, s'approchant amfi beaucoup h 1'Oueft des diverfes branches navigables du Mifiiffipi, forment une correfpondance aifée pour une valle étendue de terrein, un lieu de communication entre les difterentes parties qui,dans ia fuite, auraient trouvé de grandes difficultés pour fe correfpondrc, fans cette variété de longues rivieres enchainées 1'une dans 1'autre, attendant depuis des fiecles a power les vehicules du commerce, a obéir aux impreflions de la voile ou aux coups de la rame; ainfi que les terres femblent atténdre avec impatience les coups puisfans du fcc Pendant une partie confidérable de 1'année , Je vent duSud-Mft foufiie conffamment fur 1'Ohio, qui coule en ferpentant; & dans d'autres tems le courant d'air domine dans cette direftion plus que dans aucune autre: cette direótion étant djamétrale'ment oppofée 3u cours dufleuve. qui coule dans Ia proportion d'un mille par heure, n'eft-il pas évident que la Providence ou. fi vous voulez, la nature a combiné les chofes-de faqon que les vaiffeaux commergan.sobligés de faire voile au Nord,aient des vents favorables pour remonter ces eaux, & que ces bornes au Sud aient le fecours des marées pour combattre les vents contraires avec plus d'avantage ? Quei réfultat tirer de ces obfervations ? Qu'une nation qui n'eft pas deftituée de bon fcns, conferve encore 1'idée de réduire par la for.ce des armes un pays auffi puiffant, un continent placé dans un autre hémifphere, peuplé d'une race d'hommes aftifs & laborieux; produifant toutes les chofes néceïlaires pour fon entretien & fa défenfe; un continent qui s'étend fur un fi grand nombre de degrés de latitude & de longitude , depuis les limites de la Zone torride, le cercle duTfopique Septentrional jus-  C 107 ) jufqu'a ces flcuves glacés, ces montagnes de glacé, oü engourdie par les rigueurs extrémes d'un hiver perpétuel , la nature femble expirer, faute de facultés végétatives, &oüle peu d'êtres humains qu'on trouve dans ces triftes climats , portent fi peu les traits que les nations civilifées attribuent a 1'efpece humaine, qu'on n'ofe leur donner le nora d'hommes. CHAPITRE XLVIII. Sur les Requêtes des Habitans de différentes villes pour obtenir la reconnaiffance de 1'indépendance Américaine. Nous voyons avec plaifir, que les principes que nous avons adoptés & les obfervations que nous avons expofées, deviennent Ia facon de penfer de toute la nation; il y a fans doute de la divifion parmi les membres du Gouvernement: paree que la maniere dont la plupart font admis dans les charges, les force a ménager certains intéréts particuliers: mais dans tous les endroits oü les éledtions font, ou tant foit peu populaires, ou indépendantes de 1'influence de la Cour, on voit les Régens fuivre les difpofitions générales de la nation. On peut dire que, dans ces occafions, ils n'ont qu'une voix. Qu'on demande a tous les individus de la nation, faut-il négliger un feul moyen de nuire a des ennemis qui n'ont jamais eu de ménagemens pour nous ? Faut-il les prévenir en hatant une alliance udle avec les Etats-Unis de I'Amérique? Entre cent, quatre vingt - dix - neuf répondront pour 1'affirmative. La maniere dont la Frife s'eft expliquée fur ces différens objets, en eft unepreuvefrappante. Dejk les Habitans des villes les plus confidérables de la Hollande s'empreffent de faire connaitre leurs dispofitions è eet égard. [Tous les bons citoyens voyent avec indignation qu'un Paul Wentworth, Emiffaire d'une Cour ennemie, foit rega avec une efpe-  C lot ) efpece d'empreffement chez plufieurs Membres du' Corps politique; pendant que 1'AmbalTadeur d'un nouvel Etat qui nous offre fon alliance, fon commerce & fon amitié, languit depuis pres d'un an dans 1 attente d une audience demandée II v a toute apparence que les vceux des citoyens.qui fe manifeftent fi fortement par d'éloquentes & vieoureules requetes, attireront enfin lesreeardsdu Gouvernement fuprême Les différentes Requêtes des villes, formant ainfi d'utiles documens pour conftater les principes du Politique Hollandais, il parait eflentiel de les inférer dans cette feuille. Requête des Marcbands, des Afrreurs cjf des Frtèeurs de Rotterdam d la Rêgence de cette ville. Donnent a connaitre de la maniere Ia plus refpectueu^e * qu il eft aflez noroire que les Habitans de cette Républiqu' ont, auili bien qu'aucune autre Nation, intérêt a ce qu'on eur donne occafion d'ouvrir une Correfpondauce libre avec les Habitans de 1 Amérique, en faifanr un Traité de Commerce, ainfi que Mr. Adams fa répréfènté dans fon MA moiré; & quoi ïls-ajourenc que les avantages qui doiventeu .rélulter, font abfolument Ie feul moyen , pour refiufciter le Commerce déchu de ce Pays; pour nftibUr' la Navieation & pour réparer les .grands Dommages que les procédés perfides des Anglais ont, depuis tant d'atmées, caufé a la partie Commercante de ce Pays. Qu'avec iput le refpeft dü, H5 repréfentent a la Vénérable-Régence, le danger que Pon court de proloneer Dlu< longtems les Déliberationj fur I'Article d'une Alliance de Commerce avec 1'AmériqucSeptentrionale ; étsntd'aüïeuri certain que 1 interpofitioi, de eet Etat ne peut ajouter rien de plus è la folidité, de fon Indépendance: & que Ie Mi niftere Anglais a même fait aux Députés du Congrès Amé. rica.n, des propofitions a quel point ils voudraient yéia. bhr une Correfpondanee a notre préjudice & par-la onver les _ Habitans de ce Pays des avantages certains qui réfulteraient de ce Commerce réciproque ; & qu'ainfi 0n ne faurau diffërer.dun jour, pas même d'une heure de temer tous les efforts.pour que 1'on pourfuive la Négo'cia. non offerte par Mr. Adams, & qu'on fe décidefinalement la  C 10» > la-deffus. Sur quoi, les Supplians repréfentent avec tout le refpect poflible, mais en même tems avec la plus forte confiance, a la Vénêrable Rêgence de cette Ville, de vouloir bien autorifer & qualifier Mrs. fes Députés a 1'Affemb'ée de L. N. & G. P. afin qu'au notn de cette Ville , on infilte de la maniere la plus é ïergique a 1'Aflemblée de L. N. & G. P. a ce que la Réfolution demandée foit prife fans le moindre délai, afin que, de la part de cette Province, il foit effeétué a 1'Alfemblée des Etats-Généraux, que Mr. le Miniftre Américain Adams fbit au plutót admis a 1'Audience qu'il a demandée & qu'on prenne avec lui les déterminations néceilaires pour rendre libre & ouverte aux Habitans réciproques, la Correfpondance demandée. La fuite au No. procbain. Lettre au Politique Hollandais. Votre malice, votre impudence excedent toutes les bornes. Les vrais patriotes avertiffent toutes le» femaines le Gouvernement de réprimer votre intolérable licence, en vous abandonnant a la honte de ces chatimens exemplaires que mille & dix mille ont éprouvés, fans les avoir mérités, autant que vous. Mais puisque la mollelTe du Gouvernement laiffe vos crimes impunis, & que 1'efprit de discorde & d'animofité, que vous ne ceffez de femer, fait des progrès dont les fuites menacent de devenir funes» tes, 1'amour de la purie me force a temer tous les moyens de la purger d'un monftre tel que vous. Oui: c'eft vous. qui ètes la caure que les malheurs publics font attribués a notre bon S. . . . & a' fon fidele Confeiller le O . Vous feul êtes la caufe de la guerre aétuelle avec nos amis, toujours fldeles, toujours bienfailans, les Anglais. Vous feul êtes la caufe que partout un peuple aveugle & infolent. demande a grands cris qu'on brife a jamais cette alliance, dont nou^ avonstiré de fi grands.avantages, & qu'on traite .vee leurs Colonies rebelles lorsque nous devrions aider a les ramener fous le joug. Oui: c'eft vous qui affaibliffez Ie p'éjugé fi utilemcnt entretenu contre les Francais, les plus pervers ; & les plus perfides de toas les peuples , ainfi qu'on 1'a prou-  ( no ) prouvé dans un écrit dont vous avez cité quelques traits. C'eft vous, qui jetez des doutes las ies qualités des Anglais, la première nation de 1'Univers., toujours généreufe, toujours triomphante, toujours invincible &c. Oui c'eft vous mais je n'aurais jamais fini, fi je voulais expo'fer'la lifte de tous les délits affreux & crimes de hautetrahifon, qui vous ont rendu digne des fupplices. qu'on inflige aux fcélérats de la' première c laffe. En conféquence , pour abréger cette discuffion & rendre un fervice éternel è la patrie, je vous fomme de vous trouver le 30 de ce mois, dans la forét de la Haye, fur les fix heures du foir, k 1'extrémité de la maifon du Bois , pour y foutenir un combat finguber èTépée ou au piftolet, afin que jepuiffevous punir d'avoir voulu rendre odieux ou ridicules les plus grands perfonages de 1'univers, & foulevé par vos artificieufes infinuations une nation inquietc & crédule. Si vous manquez de vous trouver au lieu indiqué , je déclaré k 1'univers que vous êtes .un poltron; & je chercherai tous lesmoyensdepénétrer jufqu'a votre caverne, vil repaire de bêtes féroces telles que vous , pour vous y faire porter la peine due aux laches fcélérats. Tel eft le précis de la Lettre bonnête tfpolie qu'on •Dient de nous écrire en Hollandais; nous en avons confervé fidelement le fens t? le fonds, 8 fi nous avons cru devoir y répondre c'efl pour fermer une fois pour toutes la boucbe d ceux, qui par Ier aient eniore de nous jetter dans les canaux, de nous pendre fcrc, MONSIEUR. J'ai beau mettre mon efprit k la torture • je ne puis voir k quoi votre généreux cartel pourrait fervir. II m'eft bien arrivé quelquefois d'en propofer ou d'en accepter; mais ce n'était pas pour des ob. jets de pure fpéculation, tel qu'une difpute de politique ; il fallait méme que la belle en valüt la peine. Le vainquaur n'aurait pas remporté une vic- toi-  C "i ) toire ftérile; il auraiteu, du moins,pendant quelque tems 1'avantage d'une jouiffance cranquille & fans nuage. Je fuis fur eet article femblable aux paladins du bon vieux tems; je n'ai jamais lu dans L'A.naiis &c. qu'il aient pourfendu quelque cheyalier malencontreux pour une difpure de politique. Raifonnons un moment de fang-froid Vous pouvez être tué auffi bien que moi Dans le premier cas, le projet que vous avez en vue, aura manqué; dans le fecond, qu'aura prouvé la mort que vous m'au* rez donnée? Elle n'aura prouvé ni pour vos principes ni pour les miens. Si le Politique Hoilandais a tort, le mal eft déja fait; & de fa cendre s'éléveront peut-être d'autres partifans de fes principes qui, animés par la vengcance, les développeront fans doute avec plus de force & de vigueur encore. D'ailleurs , 1'alternative ne me parait pas égale. Si je dirise 1'inftrument de la mort avec alfez d'habüeté pour jeter mon adverfaire fur 1'arene , 1'univers n'aura pas perdu grand, chofe. Mais s'il vient a m'óter la vie, la race préfente & future perdra 1'avantage & les charmes d'un gros livre que je prépare fur des fujets bien intéreifans; j'ai déja jeté le plan d'un ouvrage tout-a-fait neuf, puisqu'on y montrera, d'après lesfaits, i. que la meüleure maniere de prévenir les perverfes mtentions d'un mauvais voifin, eft de condescendre k tout ce qu'il demande; de ramener un ennemi injufte a fon dovoir,eftde refter fans défenfe, & de fe défier de tous ceux qui offriraient ourendraieac des fervices contre lui; 3. que le bonheur d'un petit peuple confifte a être foumis a un grand Empire ; 4. que le moyen de bien gouverner eft de traverfer fans ceffe la voix du peuple, de ne jamais croire aux intéréts évidens , d'en fuppofer toujours de cachés, de fe défier de tous ceux, qui paraiffent le plus animés contre les ennemis de la patrie, & de donner to'ate fa coufiance adesétnngers, qui leur feraient attachés par le fang&c.; & mille autres maximes de la politique moderne, inconnues aux Platons, aux Sydneys, aux Lockes, aux  C tI2 ) aux Pnces, aux Mablys; &c. Je prépare encore un abréaé de tous les gros volumes écrits contre Ié ville d'Amfterdam ; quoi qu'ils foient déja resferrés dans une page, j'efpere, en lamettant encore au creufet ,1a réduire,en derniere analyfe, a un efpace imperceptible. Qui ne voit, d'aprè* ces prómelfes, qu'il vaut bien mieux que cent, que mille pertonnes comme mon adverfaire disparailTent du globe, que fi fui.iveis peroait, par ma mort, une feule page de ce que je lui prom ts. Ainfi, mon adverfaire n'a p.is befoin, de m'attendre a i'endroit aflTgne* pour le Combat; mon tems eft trop précieux, mes occupations font trop importante*, pour que je fafle un pas dans le feu! delfein de mettre fin a 1'exittence d'un tel individu; pour qu'il foit dit qu'un homme comme moi.qui depuis prés de 80 ans court après la fcicnce "fans s'cmbarrafler ni des riQhefles pi des honneurs, ferait mort comme un foc par les mains d'un original, qui mettrait en vain toutes fes facultés a la torture pour emanter une feule page des ouvrages que je prépare. Si cependant,après mon refusd'accepter fon cartel, il venait a pénétrer dans mon antre Philofophique, je déclaré fur Ia foi&l'bonneur ü'un écrivain de feuilles hebdomadaires, que je prcndrais un gros baron hérifi'é de noeuds.que j'ai spporté ce la forêt oü j'ai repu leljour,en venant triftement mandier mon pain comme tout le monde, cu, ce qui revient au même, comme le Patriote de la vielle roche Ie fair. Je puis alTurer qua, malgré ies infirmiiés de 1'aVe & de-maladies,je faurais trouver encore aflez de force & de vigueur pour punir tel homme, rffez terréraire pour troubier mon repos. Je ne penfe point comme les difeipïes de George Fox qui portent 1'obéiflaucepr.ffi >e au point de vouloir, qu'on cede au coquin méme qui attcnterait fur notre vie. Je crois,an contraire.que c'eft un fuicïde que de ne pas mer, quand on le peut, celui qui vent nous hier. D'ailleurs, j'ai chez moi un gros chien, compagnon affidu de ma retraite, qui .quoique naturellement auffi doux aufli paeifique que fon m?iire, ne le lailferait pas maltraiter impunément: il pouirait vous chafl'er nor-feulement de ma caveine, mais peufêtre aufii de la focieté des vivans. La belle gloire que vous auriez alors, d'ètre enterré avec eette infcription fur votre tombe; Cv git qui fut tue'par. le dogue d'un vieux et pauvse auteur politique!  L E POLITIQUE N°. LX. LUNDI, ce i AVRIL, 1782. Suite du CHAPITRE XLVIII. Sur les Requétes des Habitans de différentes Villes de Holtande pour obtcrir la réconnaijjance de ïIndépendance Américaine. A leurs Hatjtes Puissances les Etats GiéNé/raux des Pkovinces-Unies. » T~\onnent refpectueufement a connaltre, les Soufïïgnés \_J Nét;ucians, Fabricans & autres Habitans vivans du Comnerce dans ces Pays. „ Que, quoique les Supplians fe foient toujours repofés avec une end ere confiance fur l'Admioiftration & les Réfolutions de V. H. %, & qu'il foit contre leur inclination d'interrompre Vos Délibérations importantes, ils croient ce. pendant devoir r.ctuellement prendre la liberté, & croient, en qira-iié d'Habi.aus bien intentionrjés, qu'il eft de leur devoi indiff Jn&bla, dans ce moment adtuel & des plus critiqiv.s pour ia RépibHque, de faire humblemeut a V. H. P. 1'expofuiüti de teüïs Intéréts. „ Que! bon Citoyen dans la Répubiique, ayant a cceur 1'imérét de la diere Patrie, peut fe diffimuler, ou fe repréfenter fans effroi la trifte fituation oü nous fommes ré. dui's p?r i'Attaque, auffi fubite qu'injufte & perfide , des Am glais? Q»i surait, il y a deux ans, ofé préfager, &, mal. Tom.. III. H ffé  c m) gré les Naages fombres qui dès-Iors commenaient & fe for- «Oire Jjavjattota avec les chofr, iinmenfes qui edijen, denr, le Soutien & la Profperié de cette Républiqu' fera, ent tombé* & reftés da. s une Décadence G terrK ? Qu'en 1780 plus de deux mille Na irês Be/giques ayant paffé le Ou nn "e S e" 1trOUVerait pas "nfeulfuNaliJen eni78i? Que \Ocean. ladis couvert denos VWeaux, n'en venair fvoi n^rrtlUaUCUOi &q»^o-^P»ffionsêtre rédïs 4 voi riotre Navigarion, auparavant fi fort refpeétée & pré. £££"pScS NatiorSj paflèr emieremem au p°uvoir ,. II ferait fupeiflu de vouloir détailkr au long les Dom- Nav re,, Défaft-es, qu. non-feulement tombent d.reftement fur Ie Negouant, ma.s qul ont auffi une influence générale fur le dernier des Art.fans ou Ouvrieispar ia langueur qu'ils occafionnent dans le Commerce. Mai,, fi gr!nds qu' Snelsêdee'V F**" * ™<° S" Paternel de V. H. P. & en oppofant une Réfiflance vigou- ' MCtP„erKS ^nsfaire mer.tion des Indemnifaiions) fi ce te ftagnat.on du Commerce n'était que momentanée & li 'e Commercant labor.eux ne voyab pas d'avance les Sources de fa Fé ic.te future , ,aries. C'eft cette prévoyance Snpphans, car ce ferait le-comble de 1'extravagance & de I mfoucance que de vouloir encore fe fktter & refter tranquille dans 1 attente qu'ap,ès la conclufion de la Paix , le Né?c/ce , acluellement détourné de fa direétion, revienne ernerement dans ce Pays* car 1'Expérience monue le conraire d une maniere convaincame , & il eft de la plus gran. e probabilité , que les mêmes Nations qui en font «ctuellement en poffeffion, en garderont alors auffi laplus grande partie. Les Supplians effrnyés jettent partout leur regacds pour decouvrir de nouvelles Sources, capables de Jeur procurer plus de fuccès a 1'avenir; ils fe flattent mê. me de les avoir trouvées fur le nouveau Tbéatre de Comrnerce que leur offrent les Etats-Unis de ÏAmériqut-Septcnmonale; Commerce dont, dan, ce moment, mais auffi aans ce moment unique, Us croient être en état de pou. vote  C HS ) voir s'aflurer une bonne Partie, & dont la grande importar.ce, joint a la crainte de voir échapper de leurs mains cette unique & derniere relïburce, leur a fait prendre la Réfoiutiou d'expofer refpectueufement leurs Obfervations concernant eet objet important a V, H. P. , avec ï'inftante priere qu'eïles veuiilent bien les confidérer avec une atterition férieufe, & ne pas imerprérer en mauvaife psrt la Démarche des Supplians, d'autant plus que leur Bien-ê:re futur, peut-être même celui delaRépublique entiere, dépend de la décifion de cette Affaire. „ Perfonne ne peut ré^oquer en doute, que VAngkterre n'ait tiré fes plus grandes Forces du Commerce avec XAmérique; les Tiéiörs immenfes qu'il a faitentrerdans les Coffres de 1'Etat; la Profpérité extraordinaire de plufieurs de fes Maifons de Commerce, 1'éciat extréme de fes Manufaéturesj dont ta confommation portée a 1'infini contribue efficxement a leur perfection ,en font des preuvesconvaincantes. Quoi qu'il en foit, & nonobftant ia fuppofitiob, trop' légerement adoptée , qu'on ne faurait imiter les Manufacturi-s Brifanniques, les Fabriques de Toile peinte de Reuen, celles de Laine ó'Amiens , ó'Allemagne, d'Overyfèl; lts Èpingles de Zwol, prouvent vifiaf ment que tour, ne doit pas être tiré de VAngleterre; qu'ailleurs on eft auffi bien en état, ou qu'on le ferait, de lts égaler, è plufieurs égards. „ Permettez-nous, Hauts & Put fans Seigneurs, afin d'éviter toute digreflion ultérieure.de réclamera eet égard 1'attention de V. H. P. fur la fituation du Commerce eu France, aucommencement de la Guerre; des Pertes continuel. les 1'avaient prefque ruiné, tou-comme le notre; plufieurs de fes Ké-ocians inanquaient de Fonds, d'autres de courage pour cpntjnuer Ie Commerce; fes Fabriques languilfaient; le Peuple gémiifait; en un mot, tout yreiracait les horreurs de la Guerre: Mais actueliement fesPlacesMaritimes, trop peupiées, ont befoin d'étre aggrandies; fes Fabriques parvenues a un degré de Débit inconnu auparavant, commencent ü fe perfectionner de plus en plus; tellement que lesfuites facheufes de la Guerre font a peine fenties dans ce Royaume. Or, puitqu'il eft inconteiïable que ce changemeut fi favorable réfulte prefqu'entierement de lbn Commerce avec 1'Amérique, que cela même a li°u en tems de Guerre, qui d'ailleurs eft toujours piéjudiciable; nous latif ns aux Lu« ïnieres fi éclairées de V. H. P. a décider ceè quoi nous pou> Vons nous auendre d'un Commerce de cette nature aêtueU H 2 Ié-  lement, mais particulierement en tems de Paix. En attera dant, nous avons eu le bonheur d'en faire une Epreuve a Ia vérité d'une courte durée, mais très-forta a proportion'de fa duree, aans notre Colonie de Sr. Euftache, de 1'importance du Commerce , (quoique pas méme direct, avec VAmértque-Septentrionale. Les Regiftres de la Compagnie des Jtides-Occtder.tales, pourraient en fournir des Preuves conyaircantes a V. H. P.; effectivement leurs Productions font infiniment propres ö nos Marchés, tandis que de notre cóté nous avons a leur renvoyer plufieurs Articles d'Agrément & de Befoin, foit de notre propre Pays, foit des Etats Voifins d Allemagne. En outre, plufieurs de nos Fabriques languiifantes, répandues dans les Sept-Provincez-Ünüs pourraient, peut-être, être remifes en leur première vf'gueur, moyeunant des Primes, ou la diminution des Impofitions. E importance des Fabriques pour un Pays eft fuffifamment prouvee Par les gratifieations confidérabfcs, promifes & payées paria Politique Britannique pourl'enccuiragementdes tabr.ques, K dont ce Royaume s'eft procuréau-dela de ce que 1 on en avait attendu. ,, Les Supplians connaifient a fond les obfiaeles presqutnfurmontables qui s'oppofent toujours a 1'Emploi habitué! des Nouveües Fabriques, quoique certainement meilleures en qualité; & ils ofent avancer, fans béfitcr, que plufieurs de nos Fabriques font fupérieures aux AnglaiJes: Et,^pour cette fin, jamais moment plus favorable ne pourra s oflhr , que ce moment, oü par une Réfolution du Congres , 1'importation de tous les Effets du produit de la Grande-Bretagne, & de fes Colonies, eft défendue ; ce qui réduit le Marchand & 1'Acheteur è la néceffité oe recourir a d'autres Marchandifes, & dont 1'ufage feivira a faire difparaitre la prévention corcue contre èlles. Ce ne font pas uniquement les Fabriques, Hauts & Puiifans Setgneurs, qui promettent un Avantage permanent a notre Répub'ique ; Ia Navigation en retirera auffi beaucoup davantages; car il eft bien élolgné, (comme Pluheurs veulentlefoutenir) que les Américains étant une fuis dans Ia pofleffion tranquille de leur Indépendance exerceraient eux-mêmes avec vigueur ces deux Branches, & qu enfuite nous en ferions fruftrés tout-a-fait. Quiconque a la moindre connaifl'ance du local de Y Amérique & oe fa vafte étendue , fait que Ie nombre de fes Habitans n y eft pas proportionné; que les deux Rives du MJijipi même,  C "7 ) méme, Ia p'us belle Contrée de cePays, d'ailleurs fi fertile, reftent encore en ffiche; & comme il y faut sant de bras, il n'eft gueres probable de préfumer qu'ils vouluflent, ou puffent s'occuper d'établir de Nouveües Fabriques', tant en conféquence des Nouvelles Charges qui s'v tioiivent attachées, que paree qu'eïles mettraienr des emraves al'Augmentation & a la Sortie de leurs Pro^nftions. C'eft donc pour ces mêmes raifons (le défaut de Posulntions,) qu'a, peine ils trouveront Ie monde néceflaire pour tirer parti des Pêches propres a leur Pays; ce qui les obligera certaine» ment a ,nous abandonner Ia Navigation de Fret. Aufli n'y a-t-il pas une feule de nos Provinces, encore moins aucune de nos Villes ifolées, qui ne puiffe jouir de 1'avantage de ce Commerce; non , Hauts & Puijfans Seigneurs, les Supplians font perfuadés que 1'Utilité & le Bénéfice s'en répandrpnt fur toutes les Provinces & Pays de la Généralité: La Cueiilre & VOvcryffel rie fauraient trop étendre leurs Fabriques de Laino, de Mouleton & autres; même les Cordonniers de la Mairie & du Lang-ftraat, trouveront un débou;hé confi Jérable : Presque toutes les Fabriques d'£/ivecht & celles de L^yde , fleuriront de nouveau; Har* lem verra revivre fes Fabriques d'Eioffes, de Dentellcs, de Rubans, de Cordons, aftuellement dans Ia derniere déca. dence: Delft verra prodigieufement augmenter le débit de fa Fayence, & Gouda celui de fes Pipes a fumer. Quelque grands que foient les Avantages envifagés par les öuppliaus d'un Commerce légtil & düment protégé avec 1''Amérique , leur crainte n'eft pas moindre, qu'on nelaifle échapper Ie moment heureux d'affurer a eux & a toute la Répubiique ces Avantages. Voici le moment qui doit décider de tout: La Nation Angluife fe laffe de la Guerre , & comme ce Peuple fe porte faciiement aux extrémes, les Supplianscraigneut, avec beaucoup d'apparence, qu'une reconnaiffance complette d'Indépendancen'aicbien. tót lieu, fi furtout les Anglais voient jour a, pouvoir encore retirer de 1''Amérique quelques Conditions favorables pour eux . ou du moins quelque chofe a notre Défavantage. Eh! Qu'eft-ce qui pourrait porter les Américains, en faifant la Paix & renouvelant 1'Amitié avec la GrandeBretagne , d'avoir des égards pour les Intéréts de notre Répubiique? Si 1'/Ingieterre pouvait feulement poferpour condition que nous fuflions obiigés de payer des Droits plus onéreux pour nos Vaiffeaux, ce ferait uos-feulement H 3 un  ( ii8 ) un préjudice comiouel & p rnment; cela Suffirait encore pour tranfmnrre a la Potlérité la p'us reculée une preuve douloureulè de notre exceflivc uéiérence pour des Ennemis effrénés „ Les Supplians ofent fe flarrer qu'une Démarche fi fran. che de la Répubiique, pourrait puiflamment fervir a 1'accélération d'une Paix générale. Une anteur générale de voir s'éteindre le flambeau de. la Guerre regne en Angleterre; une Conduite droice & vigoureufe de la part decette-République, contnbuera a accélérer 1'exécution duvceupour Ia Paix. „ Nous nous flattons, Hauts & Puissans Seigneurs, d'avoir a eet égard allégué des raifons fuffifantes pour une Décifion accélérée; & d'avoir fi vifiblement prouvé ledangerd'un retardement, que nous ofons elpérer de 1'Equité Paternelle de V. II, P., une attention raifonnable a la Propofition refpiélueufe que nous venons de faire; elle ne.provient d'au re motif que d'une affeétion fincere pour les précieux intéréts de notre chere Patrie; puisque nous regardons comme certaiti qii'aufiirót que la Démarche faite par nous fera connue par les Anglais , & qu'ils auront quelque efpoir de nous prévenir, üs ne roanqueront pas, dés qu'il fera poffible, de reconnaitre r'Indépendance Américaine. Appuyés fur toutes ces Raifons, les Supplians s'adreflertt a V. H, P., requérant humblement qu il plaife a V. H. P., d'après les occurrences & les Affaires mention. nées, de prendre , pour la plus grande utilité de es Pays, au p!u;óc, telie Rétblution, que leur Haute Sagefle tugera la plus convenable. Ce faifani, &c. &c. Requete que ks Négocians d'Amfterdam ont préfentée aux Bourguematti es cif Régens de cette ftile. „ Donnent, avec le Refpect dü, a connaitre les Sousfignés, rous Négocians & Fabricans de cette Ville. Que les DifFérends furvenus entre le Rovaume de la GrandeBretagne & les Etan-Unis de 1'' Amériqtii-SeptentrUnate ont non-feulement donné li .u a une longue & violente Guerre Civile, mais que les ArmesAméricainesfe font couvertes d'un fuccès fi heureux, que le Congrès, affifié par les Cours de France & üEfpagne, a fi bien affermi leur Liberté & leur Indépendance, & rédui' la Grande-Bretagne de? extrémités fi critiques, que Ja Charnbre des Communes  C 119 ) «es en Angkferre ,nonoMsr~iqitè~. „ Que cette heureufe révoltition dans 'es Efprits des Anglais en faveur de la Liberté & de VJn'dép*èn8ar,èe Américaine , a, felon toutes les apparencSs, contritiué bewxcoupè la Réf lution , prife par le Congrès vers la finde.l'at*. née derniere, d'interdir ■ dans toute 1'Amérique l'Imporration des Manufactures & !'roduftions Britannique,: —— Réfoluiion dont en Angieterre 1'on apptrcoic trop vilib'ement les fuites ruineufes aux Manufafture- ,aux Fabfiqu'es', au Commerce, & a la Navigation, pou»pouvoirréiïet-indifférent a eet égard; car toutes les a'ntrjs Nation? Commercantes qui prennent tant foit peu leur Frofpérité 2 cce ir, s'appliqueront ar.lemment a en cueillir tous les frufts pofïïbles. Qu'a c?t effet il ferait impardonnable pour le Nég >oa & le Commerce de cette Répuolique en aé:'éral, & pqi r ceux de cette Ville en particulier, de laiflet écb .pp-- ü ie occafion fi favorable a 1'encouragement de nos Fabriques fi déchues & fi languiffantes dans les Ville* de finté^eu , airrfi qu'a celui du Commerce & >Ie la Navi^ition dans les Villes Marifimes; ou de fouffrir qu- d'autres Kartons C til. merenntes, même avec une exclufion totale des In érêt* Mercantiles de cette Répubiique, en profitent. & cela iris une occurrence oü, par rapport a la Guerre auffi injufte que ruineufe , dans laquelle le Royaume de la Grande-Bretagne a imp'iqué cette Répubiique, nous ne pouvons ni ie devons avoir les moindres égards ou condefcen ianite - p iufcet Etat jaioux, pouvant même obliger eet arrogant Voifiti, da-is la jufte crainte des fuites qu'aura innub'tabf mant une con< nexion plus intime entre cette Répubiique & i'AmeriqueSeptentrienale, a pofer au plutót ies Arraes, pour rendre la Tranqaillité a toute VEurope. „ Que les Supplians, malgré 1'envie qu'ils en ont, ne doivent cependant s'exp'iquer davantage fir eet objet, ni faire une démonftration détaillée des Avantases impoit-ms que cette Répubiique peut fe procurer d'une Connexion & d'une Relation plus intimes avec ï'Amériqiie-Septentrionaie; tant, paree que Pertonne tant foit peu infrrujt ne faucait aifément révóquer la chofe en doute ni la contredire; H 4 mais  C iao > mais auffi, paree que les Etats de Frife eux.mêmos fe font tout récemment expliqués d'une maniere fi éclatant • è eet égard; &, ce qui eft encore plus remarquable, parceque dans des circonftances bien différente?, avec une prévoyan.' ce que Ia Poftéri é exaltera autant, & plus encore qu'elle ncfr attaquée par des Citoyens maf-intentionnés, Meffi urs Vos Prédéceff.urs penferent, déja il y , quatre ans, aux moyens d empêcher que cette Répubiique ne püt être excjue du Négoce avec le Nouveau-Monde, ni tember dans Ia fituation defagréable oü Ie Royaume de Portugal fe trou. ve aduellement; vu que, felon les Informations parvenues aux Suppiians , le Congrès a exclu ce Royaume de tout Commerce & Negoce avec ÏAmérique-ïeptentrionale, uniquement, paree qu il avait appercu qu'il (ë laiilait trop fpc tement diriger par.1 influeuce de la Cour Briranniaue. Or, eet «xemple fait craindre avec raifon que, fi les Propofitions fattes au nom de rAmérique, par Mr. Adams, a cette RépubJiqus, reftaient, comme elles le font encore, fans réponle, ou que fi , contre toute attente, elles étaient rejetees , alers la Répubiique ne doit pas s'attendre a un meilleur trarement. „ Que pour ces Raifons & plufieurs autres , les Sup. plians s éwien. fkues qoe l'on aurait depuis longtems pu entamer des Négoc.auons & une Comfpondance plus étroi. tes avec les Eta>.-UmsdeïAmé,ique-Septentriov,ak : mais que cette Oeuvre importante paral, rencontrer des difficu'tes chez que'ques-uns, comme incompaiibies avec i'Accesiion de cette Répubiique a ia Neutralité Armée & enfui te, avec la Médiation acaptée; tandis que d'autre-'ne peu vent être perfuadés a faire cette démarche fi néceflaire dans 1 opmion que nous ne powrions tirer aucun Avantage ou de peu^i importance, d'une liaifon plusétroite avec 1'Aménque: Raiions dom, ftuvant les Suppüans. ia frivolité faute aux yei* ce qt-icorqne n eft pas imbu de préjugés, fans avoir befoin dy employer beaucoup de parc/es: Car, quant au premier point,furpolé,pour unmomen,t,qu'on eurpumetire en queltion, fi la Répubiique, après fon Acceffion a la Neutraltte.Armée avant Ja Guerre avec 1'Angleterre, noavan )aire une Démaiche de cette nature, lans renoncer en meme tems aux Avantages de la Neutralité.Armée qu'elle avau embraflëe; il eft au moins très-certain , qJtovTe Difficulté fur la compétence de la Répubiique a faire une pareille démarche, s'évanouit & difparalt d'elle-même, a'  a i préfent- qu'elle fe trouve engagée eu Guerre avec la Grande-Bretagne, puifque dè's ce moment elle peut nonfeulement réclamer l'aflillance & le fecours de tous les Confédérés a la Neutraliti-Armée, mais que par-la felle fe trouve encore autorifée & légitimée, pour fa Défenfe propre, d'employer tous les moyens violens, ou autres, qu'elle nepou-'' vait auparavant adopter ni metrre en ufage, tant qu'eik- fe trouvair réeüement dans la pofition d'une PuifTance Neutra qui vouiait profiier des Avantages de XiNeutralité-Année. Ce Raifonneinent prouve donc évidemment que dans la fituation préfente des Affaires, la Répubiique pourrait reconnatire Vindépendance de 1''Amérique-Septentrionale, & ce nonobflant, réclamer a plein droit l'Afïï'.hnce des Alliés Neutres, a moins que fon ne voulüt foutenir 1'uns des deux Abfurdités fuivantes: Que, malgré la violente Agresfion de 1''Angleterre, en haine de notre Acceflion a la N.utralitè.Armée, nous n'ofons nous défendre , jufqu'a ce que nqs Confédérés jugent a propos de venir a notre Secuurs: Ou, autrement, qu'étant attaqués par les Anglais, il nous ferait permis, coni'ormétnent aux Droits de la Neutralité, de leur réfifler a main armée. foit fur le Doggersbank, foit ailleurs; mais non pas en contractant des Albanees, qui certainement ne portent aucun préjudice a Ia Convention ce la Neutralité- Armée, malgré même le peu d'efpoir que nous avons d'être fecourus par les Alliés de la Confédération-Armée'. l'Argument de la Médiation efi encore plus contraire au fens commun,en ce qu'il pourraitfuppoferque ia Répubiique, en acceptant la Médiation, aurait aufii re noncé a 1'emploi de tous les moyens hoftiles, des Aiüances ou autres, qu'elle pourrait juger utiles ou nécé&ires pour nuire a fonEnnemi: Suppofition qu; certainement pft defütuée de tout fondement & qui fe réduirait uniquement a une fufpenfion réelle d'hofiiiites de la part de la Répubiique feule ; a quoi la Répubiique ne peut jamais avoir confenti ni direétement, ni indiredtemenr. Outre ce deruier Argument, les Supplians doivent encore obferver, cn premier lieu,que d'une bonne Harmonie ck Amiiié avec les Etats Unis de )'Amérique-Septentrional», on verra jaillir non-feulement différentes Sources de Négoce pour cette Répubiique, uniquement fondée furie Commerce & la Navigation, mais en particulier les Manufaftures & Tralies reprendront une nouvelle aftivité dans les Villes de 1'intérieur; car on pourra confommer poiir des millions de H 5 nos  sos Manufactures dans ce Pays nouveau, d'une étendue il immenfe. En fecond lieu , qu'abftraction faite dt> tous les Intéréts de Comir.erce; 1'Amitié, ou I'Inimitié d'une Nalion, qui, après avoir fait prifonniers deux Armées Anglaifes, a feu fe rendre refpectable & formidable, ne füt-ce que nar rapport aux Poffeffions Occidentales de eet Etat , n'eft & ne faurait aucunement être indifférente i notre Répubiique. II faut qu'en dernier lieu les Supplians remnrquent encore a eet égard, que plufieurs Habitans de cette Répubiique, dans la pofition des Affaires adtuelles effuyent des Pertes & Dommages très-confidérables qui, du moins pour fa fuite, pourraient être prévenus tout-a-iait, ou en partie, au cas que 1'on fit avec les Etats de VAizérique-Septenuionale, par rapport aux Vaifieaux & Effets repris, une Convention iemblable a celle qui a été faite avec la Courorme de France? année paffée,- cr.r, Vk'ne'«ables Re'cens, il une Convention de cette nature (*) avait été feulement contracrée au commencement de cette Guerre, les Ha. bitans de Ia Répubiique en auraient déja retiré des Avantages importans, vu que différens Navires &Cargaifons, en. levés par les Anglais aux Habitans de eet Etat, font tombés entre les mains des Américains , entre autres deux Vaifieaux des Indes Occidentales, richementiChargés &faifant voile pour les Pons de la Répubiique, & tous les deux eftimés a plus d'un Miliion de florins de Hollande; lesquels, caprurés par les Anglais au commercement de 1'Année paifée, furent amenés dans 1''Amérique-Septentrio' nale, oü, après la Capirulation du Cér é'al Cornwallis, ils font paffés des mains des Ar.glais dans d'autres. Que, quoique les Supplians foiert pleinement convaincus que les In. térêts du Commerce de la Patrie commune &de cette Ville ont toujours, mais principalement dans ces derniere* Années, atthé & attirent encore cbaque jour une grande partie des foins de la Ve'ne'sable Re'gence; cependant, eu égard è 1'importance de 1'Affaire, les Supplians ont cru pouvoir & devoir prendre la liberté de s'adreffer par cette Requête a Vous, Ve'üe'pables Re'geks, & les in. former, fuivaut la vérité, que les momens font précieux, qu'on C*5 Jihs le cmtxentment de la Stiptere f eette me/ut e fafotaire fu% ftnfeillct far Pduteur du Politique Hollandais.  C 123 ) qu'on ne fau'ait perdre un feul moment fans contir le plas gpnd rii'que de tout perdre,- puisqu'm héfi.ant davantage, la Répii' Iiq ie, feion toutes les app?reices, n'en retirera aucun avsntage, auffi peu qu'elle n'en a retirés de fon Acceffion a la Nautr.aliU-Armie . paree que aans la crainte des menaces Britanniques , on ne s'y eft déterm'né que lorfque ('occaöbj d'en g ,ü,er-les itujts, étah déja paffee. „ A ces Caüsïïs les Supplians s'adrelfent a Vous, VVin>ï'rables Re'gÈns, follicitant refpècraéufement queVo r.'iufluence erïïcace, daigne . a 1'Aff.mb'ée de L N. & G. P. les Etats de certe Province, dirig-ir les Affai-es de maniere que, fur eet objet important, i! foit au p'iuót, & s'il eft poffiMe, pendant la durée même d? cette Affemblée, pris une Ré'b!u!toa finale ÓV décifive, telle que Vous , Wnerables Re-gens & L. N. & G. P. felor*leor'Haufe^ag^fle, jugeront la plus convenable. Et, fi contre toute attente catte Opération importante pouvait rencontrer quelqu'obflacle de la part de 1'un ou de plufieurs des Confédéiés, qu'alors- Vous, Ve'ne'mbles Re'uens, de concert avec la Pro.vince de Frife & celles des autres Provinces,qui ne font aucune difiiculté d'entamer une Négociation avec l'Awéri. que, daiguent avifer aux m»yens qui feront trouvés propres & couvenables pour faire euforie qua !e Commerce de cette Provinc?, ainfi que celui de la Frife & des autres Membres adopta-n la même opinion , ne foient p.éjudictés par aucunes Dé ibérations dilatoires ni q;'il foit trop tard Réfolua la conclufion d'une Démarche auffi importante que néceffaire." Ce faifant, &c. On voit évidemment parlesRéflexions Politiques, fondues avec autant d'éloquence que d'habüetédans cetD.: Requêce, que la Répubiique n'a pas un moment kperdre; la Révolution arrivée dans le Minifiere Britannique, en plagant k la tête de ce Royau» me, les principaux Membres de 1'ancienne ÖppoHtion, ceH-ii- iire, les Membres les mieux difpofés en faveur des Améric-ins & de leur Indêpehtfance\ montre fuffifarnment la tournure que vont prendre les Affaires. La Répubiique Behiqu? ne f mrait donc trop fe hater, pour prévénir les Angfaïs, & qui* conque oferait traverfer dans ce Pays une mefure auffi avantageufe, ne faurait palier qüepour unEn^ nsmi de la Patrie. Qui  C 124; : Q.ui P™t s'aveugler fur les fuites de cette révolunon arrivee dans Je Miniftere Britannique? Qui ne iait Ie cn de guerre du parti qui va gouverner aftuellement dans cette Me ? paix avec 1'Amérique & guerre avec tout l'Univers ; voila fon mot , gUuet: S°J] Pret"ier objet fera certainement de chercher 4 détacher I'Amérique des intéréts de la France; &, pour la gagner par les promeffes les plus féduilantes elle en ajoutera peut-être encore 4 celle de 1 indépendance. Pofons que I'Amérique, encore plus ferme & plus fidele que la Répubiique Belgique ne le fut 4 Ia paix de Munsfter, refte inébranlablement attachée 4 la France: ce parti, voyant 1 impoffibihté d'opérér une défeétion, cherchera naturellement a s'accorder avec ces deux Alliés Que deviendrons-nous alors, abandonnés par les autres Puiffances belligérantes , 4 la discrétion de 1 Angleterre? Qui ne voit qu'il ferait trés - poffible que nous fuffions alors facrifiés ;& les Indes-Orientalesfonrniraient une indemnifation qui fatisferait amplement les Anglais. Paree que la Ruffie parait aftuellcment s'interpofer pour les intéréts des Bretons, il en eft qui prétendent que 1'Europe s'intéreffe encore a leur bien-étre & qu'elle nepermettra jamais quelaMaifon de Bourbon étabhffe une puiffance formidable fur leurs ruines. Pour revenir d'une pareille erreur, ne jugeons que d apres ies fans. On voit échaper 4 l'Aneleterre toutle Contintnt de I'Amérique ;on luienlevefes Isles 1'une après 1'autre,- Port-Mahon tombe; Gibral. tar eft ménacé de fubir le méme fort; & dans ce moment les Puiffances neutres, jadis fi zélées pour la defenle de 1'Angleterre, ne font pas un pas pour la fauver de la ruïne; elles paraiffent infenfibles 4 1'ambition meme d'arracher quelques débris de ce vafte Colofle qui fe brife en éclats. Si cette inaftion s'appelle difpofition favorable pour 1'Angleterre, ie n envie pomt une pareille logique ; j'avoue que mes iaibles regards ne pénétreront jamais Ja fineffe de cette politique; je penferai toujours que nous de- vons  C 125 } vons profiter de eet abandon général oü fe trouve 1'Angleterre, pour recouvrer par de vigoureux efforts & d'importantes alliances notre ancienne puisfance & confidération. La Suite au No. Procbain. Le Nouveau Pardridge, ou prelive nouvelle que les morts ne refcujjitent plus. Un grand Perfonage, puisqu'il s'eft donné le titrc fublime de Sécrétaire du Grand Sultan Achmet IV, & deCharnbellan fecret de la Sultane Favorite, que nous avions cru mort & inhumé, puisque fes billets d'enterrement ont été diftribués dans toute la Répubiique, veutrescufciter 1'Hiftoirc de Pardridge d'heureufe mémoire. On fait qu'au mois de Décembre dernier des billets d'enterrement furent distribués dans toute la Répubiique; une invitation folemnelle fut publiée pour affifter au Convoi qui fe fit le 31 Décembre a 1'endroit indiqué. Mille & dix viüle furent témoins de cette cérémonie; & l'infcription qui fut' mife fur la pierre qui couvre le cadavre, fe Ut encore. Mais ne voila-t-il pas qu'un perfonage qui prend,ainfi que le défunt, le titre de Patriotede la Vieille-Roche , reparaït au grand jour & reproduit 1'avanture des faux Smerdis, des faux üemetrius, des faux Sebaftien de Portugal, des faux Pierre III & de tant d'illuftres impofteurs que 1'ambition excitait a ufurper des trónes. Encore cette derniere impoRure trouvait une efpece d'excufe dans la foif irréfifiible de jouer un róle brillant a la tête d'un Empire. Mais vouloir revêtir le perfonage & reproduire la reffemblance, d'un Etre publiquement diffamé, c'eft un phénomene impoffible a concevoir. II convient donc, pour 1'honneur des contemporains & 1'inftruftion de la poftérité, de montrer que ce phénomene ne faurait avoir lieu de nos jours. Le tems deslniracles eft paiTé avec celui des impoftures. La perfonne qui fe produit de nouveau fous le nom de Pa~ triote de la Vieille - Rocbe, ofe affurer dans fon No. XXII page 489, qu'il eft non Jeulement en vie è pré' Jent,  C IS6 ) feut; maïs qu'il l'êtait wème le <$i Dêcem^re ,tems wë* me fê on l'enterrait. Voi'a préciférnent 1'état de la queftion ,& j'ai réfolu de la traicer avec toute labriéveté, toute la clarté & toute Ia tranquillité poftible. Une tellc difpute eft trop intéreffante pour ne pas' attirer 1'attentiön non feulêment des Savans des Pays bas; mais encore de tous ceux des autres Nations. "Venons au fait. Sar.s vouloir entrer dans des particularités inutiles a 1. on ft'''et ni dans tous les détails du Convoi, telles qu'un favant du Pays !es a déja expoféés, fans bublier aucun les titres du défunt, jc me contenterai de montrer, par 1'autorité de tout le monde, par celle même de 1'impofteur, qu'il n'eft pas au nombre des vivans, D'abord les Biüets d'enterrement ont été diftribués généralement dans toutes les Provinces Perfonne ne s'eft inferit en faux, pas même h la Haye oü cette lugubre cérémonie a du fe pafler: & ne voila-t il pas que, plus d'un mois après, dans un tems oü le cadavre doit être défigurc par Ia terre qui le couvre; un perfonage, prenant le même nom & parlant un langage fi reffemblant que le plus habile s'y tromperait, parait dans le monde & vient nous dire que la fievre& les convulfions dont il avait été attaqué , ne 1'ont pas conduit au tombeau. Qu'on life cependant ces paroles qui lui échappent dans la même page , on verra s'il ne trahit pas fuffifamment fon impofture. La gloire la flus brillante que puiffe acquérirun bomme,eft d'enten. drc, avant de monter fur l'êcboffaut, crier dans les rites: réldtion exacte fc? fidele des dêlits éf forfaits qui ont fait condamner tel £? tel d être pencius jusqu'a ce que mort s'enfuive. Cet bonneur eft infinirnent préférable d tous ceux qu'on a rendus aux Sauveurs, aux Peres de la Patrie ? Voyez page490, 49-. Quel homme, entencant ces paioles peut s'empécher de s'écrier , avec indignation : jamais perfonne vivante n'écrivit de pareilles horreurs? Un tel langage ne peut fortir que de 1'enfer? Tout le monde fait que Ie Patriote de la VieilleRocbe avait trop de lumieres & de bonne-foi pour conv  C 127 ) commettre des erreurs ou des raeoifonges; Jamais tl ne lui ferait échapé, les abfurdités fuivantes, choilies entre mille autres de celui qui s'ett ëraparé de fon nom. v. Quiconque, a 1'exemple du Poft. der Neder-Rbyn & du Politique Hollmdais, porte un ml té nêrairs fur des affaires politiques, qui jont du re ffort des Souverains du pays, eft coupable du crime de baute-trabifon; mais s'il difent que ce n'eff pas la ville d'Amfterdam, mais l'acceffiondlaneutralité-armée qui eft la cau/e de la rup' ture avec 1'Angleterre £P qu'il faut covcerter les opéra,' tions militaires avec les perfides Frangiis, ces Souverains Jont les plus grands Ennemis de la Patrie. Voyez page 50/, 6 ?, 618 Le Gouvernement Frmgais étant despotique , tout Frangais qui parle ou écrit librement, un Mercier, un Raynal, un C... &c. &c. méritent d'être liü'és, pendw, ou du moins incarcerè<, vêcuffent-il en Hollande ou en AngleUrre; ce font des monflres qui, s'ds ne font étouffét, dévoreront la cbere Patrie. Voyez page 567, 635, 462,635,462. Eh ces mots, qu'il a rendus en Francais, pour montrer qu'il entend cette langue. O que je te bois Politique Hollandais! que je te bais pour ta méchan • ceté! Que je te bais pour ta mauvaïfe foit Que je te bais pour ton imprudence \ Que je le bais pour la faufje' té de tes principes! Et dans un autre endroit: Mille, oui dix mille malheur'eux dans ce pays libre &béni, ont été jacrifiés d la fur été publiqu- par les mains de la jujtice, qui ne l'avaient pas tant mérité! Oui c'eft rendre d la Patrie un fervice plus grand, que celui des plus Irillantes viftoires fur les Anglais, que de faire le métier de Délateur (*); les déiateurs jont les hommes les plus utiles & les plus nêceff Ares, qu'on puiffe avoir dans une Répubiique bien réglée. Je fVf) Le Correspondant Politique, quoïqu'il ait époufé Ia même caufe , s'éleve contre i'int&me uiage d'encotuagerou de ptatiquerladélaHon , nous croyonsdevoir Ieféliciter d'une opinien qui fait amant d'honneur a fon coeur qu'è fon efprft.  C 128"!) Je n'aurais jamais fini , fi je voulais extraire toutes les propofi• tions de cette nature, qui fe trouvent dans Ie nouveau Patriote ie la fieille-Roche. Je laifle aux perfonnes inteüigentes a juger ü ces pafliges peuvent venir d'ailleurs que de l'enfer,oune font pas les derniers foupirs d'un homme mourant,... dans la délire. On objeéte que le nouveau Patriote eft le même que 1'ancien, puisqu'il fon exemple , il n'a pas d'autre raifonnemenr que des injures, & que les mots de utonffres , de pefies, de fcélérats, qu'il faut pendre. exlerminer de la Répubiique , &c., lui font égalememfaculiers & coulent de fa plume avec la même facilfté ! Mais ceux qui forment cette objeciton , auraient-ils oublié qu'il n'y a rien de Ë facile a répéter que des injures ; & que le nouveau fe fera fans doute appiiqué a rtflèmblcr A Tanden par un cóté ii facile a copier. taD'ailleurs Mr. Ie nouveau Patriote de la Vieille-Roehe s'avife de vouloir prédire 1'avenir; il nous dit que les Francais qui nous rendent des fervices & les Américains qui nous offrent les leurs, chercheront dans peu notre deftruétion; & que les Anglais deviendront nos plus grands amis , comme ils 1'ont été déja. Oi , comment peut-on prédire 1'avenir, fi ce n'eft par le moyen du diable & des malins efprits qu'on ne faurait fréquenter de faveu de to«s les gens éclairés, que lors qu'on n'eft plus en vie? II nous dit, il eft vrai, qu'il n'eft pas feulement en vie a préfent; inais qu'il 1'était encore le 31 Décembre ,jour fixé pour fon cmerremenr. 1! fait donc entendre qu'un homme peut-être en vie a 1'heure qu'il efl , quoiqu'il aic été mort, un mois auparavant. Eh! voila précifément ce qu'il y a de fopbiftique dans fa, propofition. II n'ofe pas aflurer qu'il a été en vie depuis Ie 31 Décemfcre; il déclaré feulement qu'il vit & préfent & qu'il vivait ce jour 14. II eft efTe&ivement vrai qu'il ne fin pas enterré ce jour la; car Ie Convoi ne fut mandé que pour les fix heures da foir; on fait qu'è pareille heure il n'eft plus jour a la fin de Décembre ; en vérité c'eft Ia une pure chicane; & j'ai honte de m'y arrêter II y a des gens qui font une autre objetflion conrre la vérité de Ia mort du Patriote de la Vieille Rocbe; mais ils ne la propofcnt que d'une maniere timide. Ils s'imaginent qu'il doit-écre encore en vie , paree qu'il continue a infulter, périodiquement chaque fem'aine , tous les citoyens qui ne penfent pas comme lui. Mais il faut faire peu de réflexion fur ce qui fe paffe fous nos yeurc pour propnfer une difficulté pareille; n'eft-ce pas un privilege particulier auxfoHicuIairespériodiques, ainfi qu'aux faifeurs d'almanacs , de contiiiuer leuis ouvrages après leur mort Ainfi nous voyons dans ce pays , éclore depuis 150 ans des Almanachs fous le nom d'dtitmio liïagino. Matthieu Lansberg de Liege pourfim le fien depuis plus de deux fiecles; le Journal des Savans, le Mercure de France fe continuent également fous le même titre; quoique les premiers Auteurs foient morts depuis longtems. Voici la raifon véritable d'un phénomene qui parata d'abord furprenant. Tous les auteurs peuvent vivre après leur mort, exeepté les faifeurs de feuilles hebdomadaires ; leuis .-u/ragvs ne rouieric que fur des matieres qui n'üirércflent que pour 1'inli ,"iils deviennent abfolument inutiles quand l'imérêt de la nouveauté ne fe fait plus fentir: pour les en dédommagéi ;le tems, dont ces Vleslieurs racontent les révolutions , leur actorde la prérogauve de continuer leurs feuilles ap;ès la morr; c eft Uur lot comoiun ,• le Politi' que Hollandais ne fera problablemeut pns aifranchi du fort du Patri»* te de Ia Vieille-Reche,  L E POLITIQUE N°. LXI. LUNDI, ce 8 AVRIL, 1782. Suite du CHAEITRE XLVIII. Sur les Requétes des Habitans de diffêrentes Villes de Hollande pour obtenir la rèconnaijjance de V'Indépendance Américaine. Aux Nobles, Grands et Ve'ne'rablej Seigneurs , ceux du Grand-Conseil de la Ville de Leyde. Donnent très-refpeaueufement a connaftre les fouffignés, tous Fabricans, Négocians & autres Commercans, intéreffés aux Manufaaures & Fabriques de rcette Ville- combien c'efl: une vérité auffi trifte qu'univerfelle. ment reconnue, que la décadence desdites ManufaétHres & Fabriques, que tous les Citoyens bien-intentionnés ont remarquée avec la plus vive douleur des le commence. ment de ce fiecle, s'eft augmentée de plus en plus depuis plufieurs années ; & que cette branche principale de la fubfiftance de la bonne Bourgeoifie eft tombée dans un tel état de langueur, que notre Ville, jadis fi florillante, fi peuplée, fi célebre a caufe de fon Commerce & de fes Métiers, parolt être menacée d'une ruine totale: Que la dimiuution des Maifons négociantes d'un cóté , d autre part la perte abfolue ou le décroifiement fenfible de plufieurs branches de Commerce en fouruiflent une preuve Tome 111. I é¥l!  C i3°) évidente; ce que les Requérans pourraient démontrer par plufieurs exemples , s'il en était befoin pour convaincre vos Nobles & Grandes Seigneuries, anxquelles 1'accroisfement de la multitude indigente , Ia fituation déplorable de plufieurs Families jadis aifées, la dépopulation de Ia Wie, quon ne fcaurait obferver, fans en être ému dans les ruines de plufieurs Rues nagueres nettes & bien habi. tées , font pleinemerrt connus, & qu'eïles fe rappellerent fans doute en cette occafion avec douleur: Qu'en attendant rV m ! IanSueur doit Paraitre d'autant plus défefpéré, » V. N. & Gr. S. veuient bien prendre en confidération iavorable, que dans cette décadence des Fabriques & Manutaétures même J'on trouve une nouvelle raifon de leur chute ubérieure , attendu que, dès qu'il n'y a point d'ouvrage continuel & de débit afïïdu , les ouvriérs défertent; de iorte que , lorsqu'il vient enfuite des Commiffions confidérables, Ion ne fcaurait trouver des mains capables, & qu on fe voit entiereraent hors d'état d'exécuter ces Com- Que les Requérans, avec tous les vrais Amis de Ia Pame, extrêmeraent affeétés de cette fituation alarmante d'une fource fi nche de Ia profpérité publique. ont cherché ii la -vénte les moyens d'y remédier dans 1'amélioration de quelques aéfauts, d'oü elle femblait découler, du moins en partie: Maïs que les mefures prifes dans cette vue f ainfi qu.1 eft connu a V. N. & Gr. Seigneuries,) n'ont pas eu 1 eftet defiré; du moins qu'eïles n'ont pas produit un rétabliffement alfez efficace, pour qu'on eu ait pu remarquer mie influence fenfible dans 1'augmemarion du débit des Manufaéiures de Leide, ainfi qu'il apert de Ia maniere laplus évidente par la comparaifon des Pieces fabriquées ïci qui ont été portées auirefois aux diverfes Halles de cette Ville ou qui s'y portent aujourd'hui; comparaifon qu'un vrai Ci.' toyen ne fcaurait confidérer fans le plus imime chagrin. Que 1'expénence a appris ainfi aux Requérans, que Ia principale caufe de la décadence des Fabriques de Holhnue, particulierement de celles de Leyde, ne fe trouve pas tant dans un vice intérieur, foit du naturel des Habi. tans cu de 1 economie d'icelles, mais dans des circonftances qui leur furviennent du dehors, & auxquelles il efï par conféquent au-aefibs du pouvoirdes Requérans ou d'un Citoyen quelconque de porter remede : Qu'on peut citer pour exemple, le Commerce de nos Manufaclures avec Dant.  ( 13* ) fiamzig & par cette Ville marchande avec toute la Po. logne; Cwninerce, qui, fe faifant ci-devant aveciüccós & avantage dans notre Ville, eft abfolumeiu arrêtéaujourd'hUi & s'eft évanoui par la Révolution furvenue dans ce Royaume & par les Droits onéreux, auxquels la Navigation fur la Viltule a été aifiijettie.- Mais que, fans entrer dans le détail de femblables entraves particulieres, dont fon en pourrait compter un grand notnbre, la caufe principale de 1'état languitfant de hos Manufaftures confifte dans fémulation jaloufe des Nations voifines, ou plutöt de tous les Peuples , de 1'Europe, vu que dans le Siècle oü nous vivons au~ jourd'hui, les divers Princes & Gouvernemens.éclairésfur les fources réelles du bien-être public & fur les vrais intéréts de leurs fujets, s'attachent, pobr ainfi dire a 1'envi, a vivifier dans leurs Royaumes & Etats 1'induftrie nationale , le Commerce & la Navigation, a les encourager & a les avancer, même par des Privileges txclufifs ou de fortes impofiiions furies Marchandifes Étrangeres; Privileges & Impofitions, qui tendent pareillement au préjudice du Commerce & des Manufaftures de notre Patrie, ainfi que V. N. & Gr. Seigneuries s'en rappelleront aifément les exem. pies dans les Etats Autrichiens & ailleurs. Qu'au milieu de ces Nations & PuiiTances émules ou jaIoufes, il eft irnpoffible aux Citoyens de notre Répubiique, quelque fupérieures que leurs Manufaélures foient en qualité & en fintfle, de réfifter a une concurrence fi univerfef. le, vu fur-tout la cherté de la main-d'ceuvre , caurée par celle des moyens de fubfifter, qui a fon tour eft une fuite néceflaire des Taxes & des Impóis, que les Habitans de eet Etat payent en plus grand nombre &a un taux plus fort, que dans aucun autre Pays, a raifon de fa fituation nam. relle & de fes moyens de fe foutenir;de forteque, parl'opération continue de cette caufe principale , mais inéparable de décadence, il eft a craindre que, 1'appauvrifll-ment & la diminution de la bonne Bourgeoife s'accroifi'ant avec Ie manque de travail, la Nation Hollandaife, autrefoisla Pourvoyeufe de toute 1'Europe, devra fe contenter du débit de fes propres Produaions dans i'intérieur du Pays ( & combien ce débit ne fouftre-t-il pas encore par 1'importation de Fabriques & de Manufaaures Étrangeres) & que Leyde nagueres fi riche, fi floriffante, fournira dans fes Rues déchues, fes Quartiers déferts, & fa multitude fiétrie par 1'indigence & la mifere, une preuve défolante du prompt dé. Ia la-  ( 132 ) labrement de Contrées jadis comblées de bonheur. ' Que, fi Fon confidere duement ces motifs, aucun Citr> yen qui a le cceur bien-placé, (a ce que les Requérans s'afiurent,) beaucoup moins V. N. & Gr. Seigneuries , dont ils reconnajfTent les vues bien intentionnées avec gratiiude, ne prendra de mauvaife part, qu'ils aient fixé leurs regards fur la coiijonifture aétuelle des tems,- pour cbercher fi cette conjcnclure ne pouvait leur fournir quelque moyen de ranimer les Fabriques languifiantes de Leyde,- & qu'après une confidération bien réflécbie ils fe flattent del'efpoir, (efpoir que des Hommes fans préjugé ne regarderont certainement point comme une vaine chimère,) qu'effeftivement par les circonftances préfentes il s'ouvre en leur faveur une iflue pour parvenir k ce rétablifiement defiré: Que dès le commencement, que la rupture entre la Grande-Bretagne & fes Colonies fur le Continent del'Amérique-Septentrionale a paru être irréparable, tout Speétateur attentit de eet événement a fenti, ou s'eft même convaincu, que cette fcifiion, par laquelle il éiait né une Répubiique auffi puifiante qu'induftrieufe dans le Nouveau-Monde, aurait les fuites les plus importantes pour le Commerce & la Navigation , & que les autres Nations commercantes de 1'Europe partageraient bien-iót un Commerce trèsconfic'érable , dont le Royaume d'Angleterre s'était réfervé jufqu'ici la pofleffion exclufive par fon Acte de Navigation & par les Loix prefcrites aux Colonies: Qu'en ce tems cette réflexion n'eft pas échappée non plus aux Requérans, & qu'ils ont prévu dès-lors 1'avantage qui pourrait naitre dans la fuite d'une Révolution fi importante pour les Provinces-Unies en général, pour leur Ville natale en particulier: mais qu'ils auraient craint de mettre cette occafion favorable fous les yeux de V. N. & Gr. Seigneuries, a une époque ou les relations, qui liaient notre Répubiique avec la Grande-Bretagne, fa Voifine, femblaient défendre toutes démarches de cette nature, ou devaient du moins les faire regarder comme hors de faifon : Qu'en attendant,cetteraifon defilence aentierementceffé par les hoftilités que le fusdit Royaume a commencées contre notre Répubiique fous des prétextes & d'une facon, dont 1'injuftice a été démontrée par le Gouvernement-Suprême de 1'Etat avec une évidence irréfragable aux yeux de 1'Europe impartiaie; tandis que les Requérans eux-mêmes, par la prife illégale d'un fi grand nombre de Navires Hot  C 133 ) Hollandais, & enfuite par la ftagnation abfolue de la Navi. gation & des Expéditions pour 1'Etranger, ont éprouvé, de la maniere la plus douleureufe , les fuites de cette attaque hoftile & imprévue , & les fentent encore tous les jours, comme il eft abondamment connu a V. N. & Gr. Seigneuries , que depuis cette époque un nombre plus confidérable encore d'Ouvriers ont dü refter fans ouvrage, & que plufieurs Peres de Familie ont quitté la Ville, en abandonnant a la charge ultérieure de la CailTe des Pauvres leurs Femmes & leurs Enfans , piongés dans la mifere. Que, pendant cette rupture, qui fubfifte a préfent déja depuis quinze mois, il eft furvenu une nouvelle circonftance, qui a encouragé les Requérans encore davantage, & qui leut parait même être de nature qu'ils feraient coupables d'une indifférence exceflive ik d'une négligence impardonnable envers la Ville, envers la Clafle inférieure des Habitans, envers leurs propres Families,envers eux-mêmes, s'ils différaient plus longtems a expofer leurs intéréts a V. N.& Gr. Seigneuries de la facon la plus refpeétueufe, mais la plus énergique; fcavoir, que les Etats-Unis de l'Améri« „ que-Septentrionale ont ttês-vigoureufement défendu, par „ une Réfolution du Congrès agréé dans tous les Treize„ Etats, 1'importation de toutes Manufactures Anglaifes,& „ en général de toutes les Marchandifes fabriquées dansles ,, Domaines qui reftent encore a la Grande-Bretagne:" Que 1'efFet de cette prohibition doit néceflairement être un efprit d'émulation entre toutes les Nations commercantes, pour remplacer les Négocians & Fabricans Britanniques dans cette branche importante de débit, qui leur eft entierement coupée aujourd'hui: Que cependant entre toutesces Nations il n'en eft aucune qui puiiTe avoir un efpoir plus fondé & plus fur a eet égard que les Citoyens de cette Répubiique libre, foit a raifon de 1'identité de Religion, d$ facon de vivre & de meeurs, foit a caufe de 1'étendue de fon Commerce & de la commodité de fa Navigation, mais furtout a titre de Pactivité & de la bonne foi, qui diftinguent encore aujourd'hui (fans nous trop glorifier) la Nation Hollandaife par-deifus tous les autres Peuples; qualités, en confidération desquelles les Citoyens de PAmériqueUnie font enclins dès-a-préfent (ainü que les Requérans en font informés de bonne part) a préférer, a circonftances I 3 éS»'  £ 134 ) égales, ïes Citoyens de nos Etats libres a töute autre . Nation. Que néanmoins toutes relations & liaifons de Commerce entre les deux Peuples ne foauraient être qu'incertaines & •flottames, auffi longtems que leurs offres & leurs engage■mens réciproques ne font pas fixés & régies par un Traiié de Commerce: Qu'sujourdbui, fi jamaisr felon Popinion refpectueufe des Requérans, il exifte la néceffité la plus ab. folue pour la conclufion d'un pareil Traiié de Commerce., la oü 1'on peut dire avec vérité, qu'il eft né pour Ia Répubiique , pour notre Leyde fur-tout, un inftant, qui, Téchippé une fois, ne reviendra peut-être jamais-, puifque i'Afi'emblée-Nationaie de la Grande-Bretagne méme, con. vaincue par une expérience douloureufe & fatale de 1'abfolue impoffilrilité de r'attacher 1'Amérique-Unie a la Couronne Uritannique, a expofé aux pieds du Tróne fon defir de conc'ure une Paix néceffaire avec un Peuple , libre au. jouM'hui au prix de fon fang; de forte que, fi cette Paix était mie fois conclue, Ia Nation Hollandaife fe verrait peut-être exclue de tous avantages de Commerce avec cette nouvelle Répubiique, ou du moins ferait traiiée dans la fuite par elle avec une indifrérence, que Ie peu de prix, qu'on atfttfit mis a fon amitic dans des tems antérieurs, femv blera't mérfter. Que pofé pour un moment qu'une Paix entre 1'Angle. tériè & I'Amériquc-Unie ne füc pas fi prochaine, qu'on a lïëtPdè le préfumer, non fans vrailemblance, il fe trouvera encore alors affez de Nauons, qui feront jaloufes d'acquérir, a 1'exemple de la France, Ie plus ancien drt4s:au Commerce nvec un Pays qui , déja peuplé par plufieurs mi.lions d'Habitans, au-! men tant tous les jours -en population d'une rianiera incroyable , mais (comme un peuple nouveau) d-cpourvu encore de plufieurs objets réceilaires, procurera fin dér>cucbé riche. (immenfe même peur Ie préfent) aux P.I.-"'uf?c1:ures & Fabriques Européennes. Q ie, quelque marrite Me que foit 1'intérêt que les Requóri-ns & tous les Citoyens de Leyde auraient a la conclufion d'itn pareil Traité de Commerce, ils fe feraient pourrs:it feit fcrupule de mettre fous. les yeux paternels de V. N. & Gr. Seigneuries f utilité ou plutót Ia néceffité d'une parci'h démarche a leur égard, s'ils pouvaient croire que leur avantage particulier contrarife en quelque facon les in. lérêts plus univerfels de toute la Répubiique; Mais que, pour  C 135 ) pour amant que les Requérans peuvent juger, comme Citoyens , de la fituation & de 1'exiftence politique de leur Patrie, ilsignorent, qu'il y aic aucunes raifons de cette espece; mais qu'au contraire ils ofent en appeler a la voix unanime de leurs Concitoyens bien-intentionnés dansles autres Villes, & Provinces, oü même des Régens les plus diftingués, puisqu'il eft univerfellemeat connu que la Province de Frifè a déja dévancé les autres Confédérés par une Réfolution pour entamer des Négociations avec I'Amérique, & que dans d'autres Provinces, qui ont un intérêt moins direét au Commerce & aux Fabriques, des Régens notables paraifient attendre uniquement 1'exemple des Provinces commercantes pour prendre une Réfolution femb'able. Que les Requérans n'arrêteront pas 1'attention de V. N. & Gr. S. par un détail plus ample de leurs raifons & motifs; puisque,d'un cóté, ils s'aflurentque ces raifons &ces motifs n'échapperont point au jugement éclairé & attentif de V. N. & Gr. S. & que, d'autre part, ilsfcavent parexpérience, que V. N. & Gr. S. font portées a ne laiifer palfer aucune occafion pour relever Ie bien-être de leur Ville, pour avaticer la profpérité de leurs Bourgeois, pour faire chérir leurs Noms par les Contemporains & les faire bénir par la Poftérité. En laquelle ferme attente les Requérans s'adreflent a ce Grand-Confeil avec la priere refpecïueufe, mais férieufe, qu'il plaife a V. N. & Gr. Seigneuries de diriger par leur puiflante influence les chofes de facon que , dans 1'Asfemblée hautement refpeclée de L. N, & Gr. Puiffances, les Seigneurs Etats de Hollande & deWeft-Frife, il foit entamé des délibérations , ou fi elles font déja entamé2S,qu'ou les por., te, auffi proraptement que poffibie, a une conclufion efïïcace, telles qu'eïles trouveront les plus propres pour obtenir le but légitime & remolir les voeux des Requérans, ou qu'eïles jugeront convenir pour 1'intéiêt général. II ferait inutile de s'appefantir fur les différentes Requctes préfentées par d'autres villes particulieres, dans les Provinces deZéelande, d'Utrecht &d'Over« yffel, auffi bien qu'en Hollande. Celles que nous avons rapportées, contiennent tout ce qu'on pouvait dire d'intéreffant fur cette matiere; & ce n'eft fans doute pas une légere fatisfaclion pour le Politique Uollandais de voir fes principes confacrés éJcfesobferI 4 va-  vations adoptées& confignées dans cesdocumensauthentiques. La joie d'avoir été Ie précurfeur du vceu public dans une affaire auffi importante, joie que fes adverfaires ne goüteront jamais, doit amplement le confoler des épines qu'ils ont voulu femer dans fa carrière. Quoiqu'il n'ait eu que la gloire d'avoir mieux fu préfagcr 1'avenir, paree que fes informations étaient plus füres, il ne laiffe pas de triompher, paree qu'on ne fe bornait pas a attaquer fes principes ; mais qu'on lui conteftait jusqu'aux faits les plus évidens fur lesquels il appuyait fes obfervations. L'Amérique triomphe, même en Angleterre. Toutes nos Provinces paraiffent feróunir pour proclamer hautement & folemnellement 1'indépendance Américaine. La Hollande a fuivi 1'exemple de la Frife; & ce qui doit confondre tous les Ennemis de cette démarche falutaire dansl ce pays, c'eft que de dix-huit villes votantes de Hollande, il n'en eft aucune qui ne fe foit déclarée avec ardeur pour cette démarche. Comment! Deux ou trois Ecrivains qui re favent que dire des injures, feraient plus favans fur ce point, que tous les Régens du pays le plus éclairé qu'il y ait fur les vrais intéréts du commerce. Mais 1'ordre équeftre a, diton, formé des difficultés ? II n'a confenti que pour céder a la force, & ne pas caufer de fciffion. 11 eft d'abord certain que 1'ordre équeftre n'a pas protefté, & que fa condescendance équivaut a un confentement qu'aucun membre de la Répubiique ne faurait donner k une démarche qu'il jugeait dans fa confeience nuifible aux intéréts de fa patrie (a). Ap- ta) Le Stathouder, en qualité de premier noble de Ia Province, n'a ainfi opiné que confortnément a 1'avis de 1'ordre Equetire; c'efi-a-dire qu'il a, comme lui, lailTépaflér (aangezien.') la réfolution des Etats. Je fuis amant éloïjmé de faire parade d'une pénétration particuliere, que de ravaler le fénie des autres & furtout de perfonnesqui, par leur naiffance & leur rang, doivent avoir infiniment plus de connaiflance & d'expérience qu'un Ecrivain qui ne rai. fonne des chofes que d'après de pures fpéculations & une froi-  037) Apparemment que ia nobleffe, inftruite des éti queues, des convenances qu'il faut obferver, de bonne-heure envers les Cours & particulierement envers les grandes Souveraines, n'aura dit-on, infifté que fur les égards que 1'on devait a 1'Impératrice de Ruffie, dont cette démarche pouvait offenfer la médiation; mais les Régens de villes compofés, en grande partie,d'hommes de commerce ou de loi, auront fuivi brutalement 1'évidence des intéréts frappans, de 1'Etat, fans aucun égard pour les confidérations particulieres qui pourraient en retarder le fuccès: auffi, dit-on que 1'un d'eux qui s'eft le ep lusfignalé par fon zele dans cetteoccafion,Mr.Gyzelaar, Pen. froide théorie. II me femble, fauf meilleur avis, que notre Stathouder, voyant qu'il était impoffible & inutile defe roidir contre le torrent, aurait, bien loin de déclarer qu'il avait des fentimens contraires a ceux de Ia généralité de Ia 'nation , dü fe mettre lui-même a la tête de cette mefure, pour parattre feconder le vceu général. II ne pouvait rien faire de plus capable de confondre les Ennemis de fa perfonne & de fon autorité, II leur eüt óté Ia gloire d'avoir le plus contribué au fuccès de cette importante transacYion. Le peuple, toujours difpofé, au moindre trait de patriotisme, a idolatrer le Stathouder , 1'aurait élevé jafqu'aux cieux; & l'oppofition aurait, je penfe, perdu avec la gloire d'avoir avancé cette démarche, une grande partie de la faveur populaire. II eft vrai qu'il y a de la nobleflè a déclarer hardiment fon opinion; mais quand elle eft contraire au voau de tout un peuple, & qu'elle ne peut en empêcher 1'éxécution , peut-être ferait-il de la prudence, de 1'intérêt même d'un Adminiftrateur, de caclier fes fentimens; & même, dès qu'il ne peut avoir de raifons folides a oppofer, de fa politique de feconder ce qu'il fait devoir fhter la nation. Autrement, n'eft il pas a craindre qu'on fit ces queftions? Un feul eft-il pluséclairé que toute la nation, unie a fes Régens ? Ou bien ce feul aurait-il des intéréts difFérens du peuple F Qui rompt niaintenant 1'unanimité ? Parmi les Eetivains de 1'un ou de 1'au. tre parti, quels font les féditieux qui ont voulu foulever le peuple contre le fyftéme avoué de nos Régens, &c. &c. I 5  C 138 3 Penfionaire de Dort, voyant les Nobles chanceler a porté ce patriotisme ruftique jufqu'a leur dire en pleine aiTemblée, que, dans une affaire 0Ï1 les villes étaient unanimes, quoiqu'elles ne paruffent que nar députés, il était bien fingulier que 1'ordre équeftre qui paraiffait en corps, refufêt d'accéder a une réfolution auffi patriotique. On voit par ia que tous ces Régens populaires ont, dans le caraétere & la conduite, une rudefle qui ne fe plie pas aifément aux ménagemens ufités dans les Cours. Leurs yeux bornés ne voient pas au-dela du cercle étroit du bien publictout le refle cft au - deflus de leur fphere; ou n'eft pour eux que farces & impoftures. Ils ne s'en tiennent pas aux fimples apparences ; leurs cceurs farouches font infenfibles aux charmes de la plus .briljante éloquence; il faut des effets pour les perfuader. Par exemple, les Anglais ne ceiTaient pendant longtems de nous répéter que nous étions leurs alhes naturels, qu'ils étaient nos meilleurs amis; leur Ambaffadeur répandait des mémoires oh tous ces grands mots qui frappent 1'oreiile fans rien dire au coeur, étaient prodigués. Mais, comme dans le meme tems ils pillaient nos marchandifes, enlevaient nos navires, & violaient notre territoire & le pavillon de 1'Etat, nos Régens populaires, moins infenfibles aux belles paroles, qu'aux infultes & aux violences cnaient a la trahifon; & difaient avec le peuple : les Anglais font de faux Alliés &> de perfides Ennemis. Mais les politiques fublimes, les amis des Cours, les perfonnes initiées dans leurs mvfteres, par conféquent la partie la plus fubtile & la plus eclairée de la nation, voyaient dans les expreffions mmifterielles des Anglais plus encore qu'eïles ne iemblaient dire; & dans leursmauvaistraitemens, les corrections chantables d'un tendre pere qui veut ramener a fon devoir un fils égaré. Les anciens préjugés contre la France fubfiftaient encore au commencement des troubles préfens. Le Monarque Francais ne cherchait pas a les diffiper par dés ailurances pompeufes de bienveillance & d'amitié- II  C 139 3 II bornaic fa politique a exhorter, a preffcr méme la Répubiique a maintenir fes droits effentiels contre les aggreffions & les injuftices des Anglais. A 1'éruption de la guerre, il n'attendit pas méme qu'on follicitat fon fecours pour envover des ordres généraux afin de fauver les établiiïemeris & les navires qui pouvaient être attaqués, fans avoir ricn fu d'une rupture auffi injufte qu'imprévue. Les Régens populaires, comparant ces procédés a ceux des Anglais, s'imaginerent bonnemcnt qu'il y avait des intéréts réciproques entre la France & la Répubiique & qu'il fallait faire caufe commune avec unePuiffance intéreffée a notre bien-être: mais le parti contraire foutint & foutient encore que plus la France nous rend de fervices, plus nous devons nous en défier; éi qu'elle n'accourt a notre aide que pour nous entrainer plus furement dans le précipice & la ruine. Les Américains , connus a préfent fous Ie nom d'Etats-Unis, s'écrierént que la mere-patrie les opprimait & coururent aux armes pour avoir le redreffement de leurs griefs & maintenir leurs privileges. Le gros de notre nation crut bonnement qu'on ne pouvait avoir eu recours a des voies auffi violentes fans y avoir été forcés par des caufes bien graves : mais les grands politiques de la Cour déclarcrcnt fans héfiter que ces Américains étaient une poignée de rebelles, qui ne fe révoltaient que paree qu'on leur avait laiffé trop de liberté; qu'il convcnait de la reltrcindre & même de favorifer 1'Angleterre dans cette démarche falutaire. 'L'Angleterre était la Reine des Ifles, la Puiffance invincible, qui n'aurait befoin que de fouffier pour éteindre une fiammc qui n'était pour elle qu'une étincelle;& pour anéantir a la fois toutes les Puiffances qui oferaient fe préfenter pour attifer ce feu. Malheureufeinent les faits les ont démentis. Mais la fine politique eft encore au-deffus de 1'évidence qui n'eft faite que pour les fots (Jb). Mais La paftérité, fi toute - fois quelques Umbeaux pou. dteux  C r40 ) Mais il eft tems de revenir k nos obfervations fur 1'impétuofité qui fe manifefte en faveur de 1'indépendance Américaine N'oublions pas une remarqué que nous fuggerent les requêtes dont nous avons parlé. C'eft qu'eïles offrent une idéé bien digne d'attention, & bien capable en même tems d'intéreffer les Américains en notre faveur, préférablement k toutes les autres nations. Ces Requêtes prouvent que ce n'eft pas la volonté arbitraire d'unSouyerain abfolu qui, fans confulter les vceux ou 1'intérêt de fes fujets , a ordonné cette importante démarche. Le vceu unanime, les defirs ardens de la nation, fon inclination particuliere pour des peuples devenus, comme elle, libres k la pointe de 1'épée , fe déclarent de la maniere la plus énergique par 1'organe éloquent de ces requêtes. On dirait qu'une puiffance fupérieure 1'avait tenue en» dreux de eet ouvrage venaient a être deterrés par quelqu'un de nos favans neveux, croirait certainement que nous cherchons a ridiculifer nos antagoniftes en leur fuppofant des raifonemens auffi abfurdes. Mais on vient encore de nous transmettre une Lettre anoniine oü, après les complimens ordinaires de fcélératelTe & de trahifon, dont nous honorent regulierement nos amis, on nous (butient que JesFrancais nous rendant des fervices, on ne faurait trop fe défier d'eux & que nous n'avons de reffource que dans les Anglais. Une fois pour toutes, le titre de préconifeur perpétuel de la France ne convient point au Politique Hol. landais. II n'eft pas naturellement louangeur ; il n'eft gueres porté a flatter les Princes & furtout les Princes puiffans & despotês; il avoue que ces fentiraens découlent de fes principes républicains, comme ceux qui Pont lu avec quelque attention ne pourront s'empêcher d'en convenir. II s'éleve avec une hardiefie impartiale contre ces oppreffions particulieres que 1'on apelle coups d'état dans les grandes monarchies; & il n'épargne pas plus la France fur eet article que fur celui des entraves qu'elle met è la preffe. C'eft donc bien gratuitement que fes Antagoniftes affecten! de 1'appeler le próneur du grand Monarque.&c. &c. &c  ( »4t ) enchaïnée jusqu'a ce moment; & que, li la chofe n'efit dépendu que d'elle , elle ferait depuis longtems entrée en liaifons étroites avec les Etats-ünis de I'Amérique. C H A P I T R E XXXX. Sur la médiation de la Ruffie, pour une paix particuliere. Le Prince de Gallitzin & Mr. de Markof EnvoyésExtraordinaires de 1'Irnpératrice de Toutes les RuJJies, ont préfenté aujourd'hui aux Etats-Généraux le Mémoire fui. vant: Les Souffignés Miniftres de 1'Impératrice de Toutes les Ruftes, agiilant en vertu des ordres qu'ils ont d'accélérer autant qu'il dépendra d'eux, 1'ouvrage falutaire de la Médiation déférée a Sa Majefté Impériale, s'empreiïènt de comrauniquer ci-joint a Vos Hautes Puiffances, uneCopie de la Lettre écrite a Monfieur Simolin , Miniftre de leur Souveraine a la Cour de Londres par Monfieur Fox, Secrétaire d'Etat de Sa Majefté Britannique. Vos Hautes PuiiTances y reconnoicronc les intentions de Sa Majefté Britannique de fe réconcilier fincerement. avec la Répubiique fur la bafe établie par Elles-mêmes dans leur réfolution du 14 Mars dernier, & par laquelle Elles ont accepié de nouveau la médiation de 1'Impératrice. La conceffion Préliminaire faite de Ia part de {^Grande-Bretagne du point cardinal du Traité de 1674, ferable devoir applanir toutes les difficultés , qui fe font oppofées jufqu'a. préfent è 1'ouverture des Négociations pour une Paix définitive. Si, en attendant, la mefure d'une fuspenfiond'armes propofée dans cette même Lettre, étoit jugéeconforme aux intéréts de la Nation, rien ne le feroitdavantage>' aux vues d'humanité en général, qui animent 1'Impérairice, & a fes fentimens particuliers de bienveillance &d'affection envers eet Etat; cette mefure réuniflant le.doublé —avantage, & de prévenir une effufion inutile du fang, & de faire recouvrer a la Répubiique , dès ce moment, 1'exercice des droits de liberté de Navigation & de Commerce, dont jouiffent toutes les Nations Neutres, & furtout  C 142 3 tout celles qui ont accédé aux principes de Neutralité Armée. Pleins de confiance dans les difpofitions pacifiques & analogues au vrai bien de 1'Etat, que Vos Hautes PuiiTances n'ont cefle de manifefter de la maniere la plus folemnelle & la plus pofitive, les Souflignés fe flattent qu'eïles ne balanceront pas a profiter de la communication qu'ils ont 1'houneur de leur faire, pour prendre une réfolution prompte & déciilve, afin de té'ablir la Paix cSi la bonne harmonie avec leur ancienne Aliiée & Amie a des conditions oü Elles trouvent leur honneur & leurs avantages également afluré*. Fait a la Flaye Ie 3 Avril 1782. Copie de la Lettre, écrite a Monfieur Simolin, Miniftre de 1'Impératrice de Toutes les RuJJies a la Cour de Londres, par Monfieur Fox, Secrétaire d'Etat de Sa Majefté Britannique, dont il eft fait mention dans le Méinoire cideflus. Ayant mis fous les yeux du Roi 1'Extrait de la Lettre que vous m'avez fait 1'honneur, Monfieur, de me commumquer de Monfieur le Prince de Gallitzin & Monfieur de Markow, j'ai les ordres de Sa Majefté de vous informer que Ie Roi, defiranc donner les preuves de fes intentions' envers Leurs Hautes PuiiTances, & de renouveler 1'amitié qui a été fi ra2Ïbeureufement interrompue entre des anciens Alliés, qui devraient être unis par les liens de leurs intéréts mutuels, eft prêt d'entrer en négociation avec Leurs Hautes Puiflances, pour former un Traité de Paix fur le pied du Traité de 1(574 entre Sa Majefté & la Répubiique; & que pour faciliter l'exécution d'un objet que Sa Majefté a tant è cceur, le Roi eft prêt a donner des ordres immédiats pour un armiftice, fi, de leur cóté, les Seigneurs Etats-Généraux jugent une telle mefure convenable au but propofé. Sa Majefté m'ordonne de vous expliquer, Monfieur fes fentimens fur un objet fi important, & de vous prier de les faire parvenir aux Miniftres de Sa Majefté Impériale auprès de Leurs Hautes Puiffances, pour qu'ils foient communiqués, fans le moindre délai aux Miniftres de la Répubiique , jugeant cette mefure la plus convenable pour parvenir, avec la médiation & les bons Offices de Sa Majefté lm-  C 143 ) Impériale, a mettre fin au fléau de la guerre, qui malheureufement fubfifte entre les deux Nations. J'ai 1'honneur d'étre avec la confidération la plus parfaite, Monsieüb, Votre trës-humble & très-obéiflant Serviteur, C. T. Fox. Eft-ce la fuperbe Albion qui parle dans ces deux mémoires? Eft-ce la même Puiflance qui vers la fin de 1'année derniere répondait, par 1'organe de 1'orgueilleux Stormond, aux Ambaffadeurs de Suede & de Ruffie, que la Répubiique avait violé les engagemens les plus facrés , & qu'elle n'avait d'autre moyen de réconciliatioti que d'acceper un Syfiême d'union etroüe , d'alliance efficace rif de froteSlion mutuelle , c'eft-a-dire de faire caufe commune avec elle dans tous les projèts infenfés & dangereux qu'elle fe voit aftueilement obligée d'abandonner. Cette Babylone, dont la tête fe ,perdait dans la nue & bravait les cieux, eft donc renverfée dans la pouffiëre. Non-feulement elle va au devant d'un peuple qu'elle fou-lait aux pieds ; elle établic même pour bafe d'une réconciliation future, les mêmes articles dont le maintien de la part de la Répubiique avait occafionné 1'aggreffion des Anglais. Ce traité de 3674, cette liberté des mers, que nous ne ceffions de réclamer contre leurs déprédations, font a préfent des points qu'ils font difpofés a ériger ea loix facrées & in violables, fans doute, paree qu'ils ne peuvent les violer impunêmeni. A confidérer effectivement les chofes de fang-froid, on ne peut disconvenir que la rupture avec la Répubiique n'ait accéléré la chute de 1'Angleterre. La prife de St. Euftache & la bataille du Doggers-banc ont exigé des diverfions qui ont donné aux Frangais la facilité d'efFe&uer la défaite de 1'Amiral Hood & la • ' perte  C «44 ) perte décifive de Parmée de Cornwallis, & procuré aux Francais cette fupériorité qui les a mis en état d'enlever ! les Ifles Anglaifes , 1'une après 1'autre. Les Anglais ont fait, il eft vrai, un butin immenfe par la prife d'une multitude de navires, & par le pillage de St.Euftache; mais, outre que ce butin s'eft diflïpé entre les mains des particuliere; la France , en reprenant un grand nombre des navires & 1'Ifle même avec les établiftemens de Demerary & d'ElT^quebo, a non feulement óté aux raviffeurs le fruit de leurs rapines: mais s'eft encore élevée par ce moyen a un tel dégré de puiffance qu'on ne la braverait pas impunémenc & qu'elle tient la Répubiique comme enchaïnée. Les vues du nouveau Miniftre, du Renard Britannique, ne peuvent échapper aux yeux des clairvoyans. La modération qu'il affeéle cache des deffeins qu'il convient de chercher a pénétrer. La Répubiique étant fur le point d'entrer en liaifon avec I'Amérique, la paix particuliere fait échouer ce projet. Les Etats-Généraux trouvant naturellement des difficultés a rentrer dans leurs pofleftions occupées actuellement par la France , on pourra les engager peu-a-peu a s'unir a 1'Angleterre pour les recouvrer ; 1'Angleterre unie a la Répubiique tentera de nouveaux moyens de ramener les Américains, ou du moins de les détacher de la France; & s'il ne tient qu'a reconnaitre une indépendance dont ils font en poffeffion & fi jaloux, elle n'héfitera pas a accorder une faveur qui ne lui coüte rieu. Voila un des cötés de la médaille. Voyons le revers. La Suite au No. Procbairi.  L E POLITIQUE N°. LXII. LUNDI, ce 15 AVRIL, 1782. Suite du CHAPITRE XXXX. Sur la médiation de la RuJJie pour mênager une paix particuliere entre 1'Angleterre & la Répubiique. Lc Politique Hollandais, parlant de ]a médiation de la Ruffie,fit une remarque trés-fimple,mais tres-frappante par fa vérité. 11 dit qu'il était bien fingulier que cette puiffance, après avoir refufé de nous recevoir dans la Neutralité, fous prétexte que nous étionsPuiflance belligérante, cherchat a&uellement a nous lier les mains, dès que nous voulions agir en cette qualité, On peut afiurer que, quelque difpofée que foit naturellement cette Nation a la Paix, qui eft etfectivement la bafe de fa Profpétité, & quelque flatteufes que foient les avances aétuelles de la Cour Britannique, en comparaifon des prétentions injurieufes & tyranniques qu'elle exigeait auparavant; elle n'a vu dans les dernieres Propofitions du Miniftere Anglais qu'un pié^e tendu a fa crédulité. En comparant la Lettre de Mr. Fox, avec le Mémoire de Mrs. les Envoyés Rufles, on n'a pas vu, fans défiance, que ces derniers offrent beaucoup plus que le premier. Mr. Fox offre^ il eft vrai, pour entaXome III. K B?es  C 14« ) mer une Réconciliation folidc & fincere, le rétablisfement du Traité dc 1674, que la Grande-Bretagne n'avait ceffé devioler, dont le maintien de notre cóté avait occafionné fon injufte & perfide aggreffion, & qu'elle avait déclaré formellement annullé, avec tous fes autres Traités faits avec la Répubiique. Mais pourquoi Mr Fox ne parle-t-il, ni des Articles de la Neutrahté Armée, ni du Rétabliffement de tous les anciens Traités, ni de la Liberté de Ia Navigation, ni des Reftitutions & des Indemnifations requifes d'après une injufte Aggreffion; quatre points effentiels fur lesqucls les Etats-Généraux ont accepté la Médiation de la Rufiie; outre leur ftipulation qu'elle ne porterait aucun préjudice a la Réfolution de concerter les Opérations de cette année avec la France, Réfolution qui, acceptée des deux parties, ne peut fe concilier avec 1'acceptation d'un Armiftice ou Sufpenfion d'Armes ? On remarque furtout que 1'offre de 1'Angleterre vient dans un moment trop critique, pour qu'on puiffe douter qu'elle ne tend qu'a faire échouer les liaifons cffentielles que la Répubhque eft préte a former avec les Etats-Unis de I'Amérique. Qui ne voit en effet que le nouveau Miniftere Britannique ne cherche a fe réconciiier avec nous, que pour diriger tous ies efforts contre la Maifon de Bourbon; qu'il ne négligera n'en non plus pour détacher I'Amérique de cette Maifcn, pour tacher même de 1'attacher exclufivement, par Tappat des plus brillantes conceffions , aux intéréts de la Grande Bretagne; & pour recouvrer par cette habile Politique, cette Prépondérance maritime, a i'aide de laquelle il fera, comme auparavant, en état de nous impofer telle Loi qu'il voudra & d'interpréter les Traités a fon gré, c'eft.a.dire, fuivant fes Intéréts & fa Convenance. D'ailleurs, comment pourra.t-il nous rendre , finon les Vaifléaux & Marchandifes, du moins les Poffeflions territonales qui font paffées de nos mains dans ies Hennes , & des fiennes au pouvoir de la France? II n'eft donc pas vraifemblable, vu les Intéréts com. pli-  C 147) pliqués qui fe tro ivrnt acïueremcnt entre la Fran» ce , les Pays-Bas-Unis & l'Amérique-Unie, & les dangers que courraic toujours notre Navigation par une Paix particuliere , que la Répubiique puiffe accepter 1'uffre du Miniftere Britannique autremenc qu'en Jlipulmt l'Ou;>triure d'un Congrèi puur une Paix générale. Ainfi la Propoiltion du IViniftereac tuel de la Grande-Brct3gne peut étrc regardée comme Je dernier cffort de i'Anglomanie, expirante dans «e Pays. Oui, le contenu de ce Mémoire & de la lettre du Secrétaire d'Etat Britannique , qu'il accompagnait, nefauraitêtre agréable, qu'autant qu'il pourrait fervir d'acheminemcnt a une paix générale Quant a une pacification particuliere entre la Grande-Bretagne & notre Répubiique, qui en eft le but apparent , elle eft d'autant moins probable, qu'elle contrarierait les vues bienfaifantes de fa Majefté Imperiale même. Cette Souveraine a déja fait connaitre 1'année paffee fon defir de procurer une réconciliation univerfelle entre toutes les Puiffances bclligérantes. Cependant rien ne ferait plus propre a en retarder 1'accompliffement, qu'un accommodement particulitr entre la Cour de Londres & les Provinces.Unies. La démarche que les Miniftres de Ruffie, viennent de faire , eft une fuite de la médiation particuliere , dont ils ont été chargés, avant que la révolution arrivée dans le fyflême de la Cour de Londres , eut levé la principale pierre d'achopement. qui s'oppofait a une paciflcation générale. Cet obftacle invincible n'exifte plus, depuis que le Parlement Britannique a renoncé h la guerre Américaine, & a reconnu implicitement 1'indépendance des Etats-Unis. Tout accommodement particulier ferait moins préjudiciable encore aux intéréts permanens de notre pays, que contraire au voeuqu'oa doit fuppofer a 1'Impératrice dans les circonftancss récemment venues, & fatal au repos de 1'Europe. D'ailleurs, la derniere piopofltion du Miniftere de Ruffie ne parait guere s'accorder avec les nouvelK a les  C MS ) les venues de Petersbourg: elles marquent que 1'on n'y était guere content des procédés des Anglais & de 'eurs fubterfuges en refufant conftamment de s'expliqucr foimellement fur la liberté des mers & de donner les fatisfadlions convenables fur les plaintes que fa Majefté 1 Impératrice de Ruffie avait fait faire contre les infractions commifes par les vaiffeaux Anglais. Peut-ótre douterait-on des fentimens de la généralité de la nation, s'ils ne fe manifeftaient d'une maniere toute particuliere. Les Citoyens de la Ville de Rotterdam, après avoir remercié folemnellement laRégence de cette Ville, viennent de préfenter une requête , tend .nte a faire pourfuivre vivement lt guerre. 11 faut, difent-ils , „ employer efficace„ ment les Forces navales de ce Pays pour nuire a „ 1'Erinemi & proflter de 1'occafion pour rétablir fur les Mers le Pavillon h ollanda's qui en a été chalTé. „ Les Supplians n'ont pas befoin de dire è Vos No* „ bles Seigneur ie- dans quel éiat déplorabJe s'eft trou,, vée la Proteclion du Comerce& de la Navigation „ d<^ ce Pays & les fuites facheufes qui en font réful5, técs. La Pofférité ne pourrait manquer d'en éprou„ verautantd'étonnementque la Racepréfente, d'en „ reffentir delahonte&deladouleur Les Supplians auraient gardé le filer.ce, maintenant que la Sai» „ fon favorab'e eft venue 011 on leur a promis que „ les Forces Navales de ce Pays feraient employées „ d'une maniere plus énergique pour leur Protedtion & le Redreffement des torts qu'on leur a faits, „ s'ils n'avaient appris la Nouvelle tout4 fait inat„ tendue, que, fous la Médiation de S. M. Impé„ riale de Ruffie, il cft offert par nos Ennemis per- fides une Sufpenfion d'Armes, avec une Démon„ ftration d'inclination a faire la Paix avec notre „ Etat, après qu'ils ont pilié les Ftabliffemens & j, les Biens des Habitans de ce Pays autantqu'ils"ont „ pu; & lorsque ]e fort de la Guerre les a réduits k „ la derniere extrémité, & qu'ils ont tout a crain- dr* izt ürmes de eet Etat, combinées avec celles  C 149 ) „ les de leurs autres Ennemis. Les Supolians fe font ,, toujours fait une Loi de ne point fe mêler de la „ Politique ou d'outre-paffer le Cercle iie leur Com„ miffion, & fcferaient gardés de fatiguer Vos Nc„ bles Seigneuries de Réflexions fur eet Artifice odieux & fubtil de 1'Ennemi, dirigé vifibiement, pour amufer encore le Gouvernement decePays, „ & lui faire perdre l'occafion favonble de réparer fes pertes par la formation d'un Traité de Com. „ merce avec I'Amérique & par un concert d'Opé„ rations avec la France. Ce que le plus funple , peutremarquer, ne faurait échapper a lapénétra* tion de i ros A'obles >eigneuries & des autres Mem„ bres du Gouvernement, & nous fommes trop con,, vaincus que jamais les artifices d'un Ennemi infi- dieux ne pourront faire échouer ;es mefures qu'ils „ ont prifes pour le b;en être du pays Mais la ,, feule chofe qui les intéieffe cc qu'ils fe croient „ obligés de mettre fous les yeux de Vo; N„bles Sei,, gneuries. eft que 1'Armiftice propofé ne pourrait „ étre d'aucune utilite pour le Commerce 6l la Na- vigation de cette Ville; foit paree que les Vais„ feaux du Pays n'ont pu obtenir de convoj; foit „ pare.' que, s'il y avait encore quelques Vaifleaux ,, de prêts, ils font dépareil'és & non prêts, & qu'on ne pourrait avoir aucune envie de les envoyer en ,', mer, & de les abandonner une feconde fois a la „ rapacité d'un Ennemi aui veut aftuellement pofer „ pour fondement de la Paix ,un Traité qu'il arom- pu de Ia maniere la plus inique, qu'il n'a jamais „ obfervé, que lorsqu'ii s'accordait avec fes Inté„ rêts; un Ennemi, fur lequel on a remarqué avec „ raifon, qu'il avait montré moi='s de principes de „ bonne-foi, qu'on n'en trouve ordinairement chez „ les Corfaires de Barbarie " „ Quelque defir qu'aient les fupplians que Dieu „ Tout-puiffant les délivre & le refte du genre-hu„ main des calamités de la guerre, & répande ks „ bénédidlions d'une paix durable , néanmoins , dans „ la fituation attuelle oh ils fe trouvent avec 1'Ans, gleterre, quoiqu'ils foient même les principale* K 3 „ vie  C 150 > „ vidtimes de la guerre, ils ne défirent d'autre paix „ qu'une paix honorable & vraiment falutaire pour „ le pays; &nousprions en conféquence vos No» „ bles& GrarHes Seigneuries, d'avoir foin que, par „ leur puiffante influencc, on n'adoptc aucune otfre „ de 1'Ennemi qui tendrait uniquement a retarder „ ou faire échouer les mefures prifes pour lui nui- re &protéger les Colonies, le Commerce & la„ Navigation de ce pays , & pour faire perdre „ 1'occailon favorable qui s'offre aftueUement; mais 'f, au coutraire d'- idcr k diri.er les chofes dans la „ dite aff«mbiée, de forte qu'on mette en ceuvre , avfic tour le zele poffible les moyens qui, fous la bénédidrjon de la Providcnce , puiffent repa, rer les pertes effuyées par 1'Etat, & forcer nos '„ En.iemis k nous accorder une paix honorable & „ durable & a nous donner une indemnifation équi" table dos torts qu'ils n;>us ont caufés." Je ne m'étonrie pas, dit une Gazette Hollandaife, de la propofition fubite & imprévue des Anglais , quelque difrérence qu'il v ait entre leur conciuite adtuelle & celle qu'ils ont tenue auparavant. Sir Jofeoh Yorke les avait, fuivant le témoignage d'un Lo'rd du Parlement , affurés qu'ils n'avaient öu'a parler ferme, qu'a menacer, enlever ies vaisfeaux & déclarer k toute extrémité, la guerre aux Hoilandais Ce peuple, fuivant lui, n'avait d'autre mobile que la crainte; il était fans forces & fans arfnes, la terreur y ferait triompher le parti Anglo. manc; mais 1'iffue n'a pas répondu a cette attente. Yorke & tous ceux qui penfaient de la forte, neconnaiffaient pas le caradtere des Hollandais; ils ne favaient pas que 1'oppreffion révolte la fierté de leurs ames; & que quelque patience qu'on veuillc leur attribuer, dès qu'elle eft a bout, il eft impoffible d'arrêter leur impétuofité. Cette patience n'eft plus: le patriotifme le plus ardent anime & réunit actuellement toate la nation ; les Anglomanes euxmêmes font réduits ou a fuivre 1'impulfion geftérale ou a fe cacher de honte : cette révoluti; on a , probablement, plus contribué a changer  (IJl) les difpoütions des Anglais a notre égard que le changement arrivé dans leur Miniftere. Ils font les premiers a nous préfenter la paix. Ils nous offrent des conditions fi avantageufes, qu'ils n'ont pas douté qu'elle ne fut acceptée ï 1'inftant Heu- reufement que 1'affaire de la reconnaiffance Américaine eft fi fort avancée, qu'il n'y a plus a craindre que nos Régens s'en laiffent détourner. Quelque préjugé que Ton puiffe avoir contre la France, on ne peut s'empêcher d'admirer la politique do cette Cour. Plus eile fe développe, plus elle parait fous ce point de vue, qui montre laprofondeur & 1'habileté. L'Angleterre déclaré la guerre aux Provinces-Unies. De tous cotés leur navigation eft fans défenfe & leurs établiffemens défarmés Elle femble offrir une proie auffi riche que facile; ói 1'on ne peut douter que le defir de la dévorer, n'ait contribué beaucoup a porter les Anglais a leur audacieufe aggreffion. La France ayant exhorté longtems, mais inutilement, la Répubiique a fe mettre en état de défenfe, & la voyant attaquée fans avoir pu la perfuader. ïmagme de tourner cette circonftance même a fon avantage. Elle négocie avec la Compagnie des Indes; & fait auffitót pafler des Troupes au Cap de Bonne-Efpérance, &,a ce que 1'on affure, dans 1'Ifle de Ceylon, qu'il n'eót pas été facile d'enlcver aux Anglais, fi jamais ils s'en fuffent emparés. Les autres établiffemens, étant toujours ouverts au plus fort, elle femble attendre que 1'Anglais s'en foit emparé, pour y paraitre. Par cette habile politique, elle enieve des forces confidérables aux Anglais & He irrévocablement la Répubiique a fes intéréts. Ceux qui, dans ce pays, traitent cette politique de perfide, auraienc été les premiers a i'exalter jusqu'aux cieux, fi elle fót fortie des chefs de leur parti. Quoi qu'il cn foit, on ne peut disconvenir que la politique de la France & les progrès de 1'indépendance Américaine dans ce pays doivent nous óter toute idéé d'une paix particuliere. K 4 En  C ) En un mot', Paix générale eft Ie cri unanime de tous les citoyens, &j ne manquera pas d'étre celui des Kégens populaires qui commencent enfin a triompher. II ne ferait pas au-deffous d'un Hiftorien philofophe de remarquer que les deux oppofitions dans les Pays-bas-Unis ainfi qu'en Angleterre, femblenc par la fatalité la plus fmguliere, avoir éprouvé ia meme révolution, & a peu prés a la même époque. La notre tnomphe cependant, fans qu'il y ait eu, comme en Angleterre, befoin d'un changement Minifiériel. Les adminiftrateurs font reftés , quoique le fyftéme ait changé. Celui a qui 1'on attribuait toutes les mefures perverfes, tous les malheurs de la patrie , conferve , comme auparavant, la confiance du principa! Adrainiftrateur. Et méme les corps politiques qui fe font décidés en fa faveur, ne fe déclarent pas avec moins de chalcur pour 1'Indépendance Américaine, La Ville de Rotterdam n'eft pas la feule qui ait exprimé fon horreur pour une paix particuliere. Les Habitans de Schiedam ont a cette occafion, imité ceux de Rotterdam. Ils ont préfenté le 8 de ce mois une Requéte , ou ils fe plaignent vivement qu'on ait manquéa la promefte faite depuis fi longtems de mettre le Commerce & la Navigation de ce Pays dans un état refpeétable de défenfe. Ils remercient en même tems la Régence „ de la conduite „ qu'elle a tenue, relativement a leur Requête pour „ qu'on reconr.üt 1'indépendance de l'Amérique-Sep„ tentrionale , qui promet d'étre fi falut air e, efpérant 3, qu'un Traité avantageux det'ommerce, fi vive- ment défiré, au cas qu'un délai inattendu ouquel„ que Avis déclinatoire de la part des autres Hauts,, Confédérés,en arrêtat Ja conclufion,fera conclu par „ les Etats décette Province, de concert avec ceux „ deFrife&Ies autres qui voudront imiter 1'exemple ,j donnéle cjOftobre 1649 par les Provinces de Guel„ dre.de Hollande &de Frife,quifirent alors avec „ leDannemarc un Traité d'AUiance défenfive & de w Commerce, relativement au Péage du Sund." Ils  053) lis ajoutent, „ qu'ils feraient injure ala Politique „ profonde&au jugement éclairé de leurRégence, s'ils fuppofaient qu'elle püt avoir 1'idée 'd'écou„ ter les intrigues artificieujes ö" les Propofitions fu~ „ rement ennemies de la Grande-Bretagne par la Mé- diation d'une isouveraine , qui depuis trop longtems, „ amufe & berce ce Pays depromeffes; efpérant qu'elle „ ne perdra aucuns momens qui deviennent tous les „ jours plus précieux, pour faire avec la France & 5, 1'Amérique, devenuelibre,unTraitéd'Affiftance, d'Amitié & de Commerce, qui, dans la deftina„ tion favorable de la Providence qui s'offre, ferait ,, defiïné a obtenir par le tems une Paix qui, aux yeux &pour le repos de 1'Europe, fut humilian„ te pour 1'injufte Breton, & honorable & avanta,, geufe pour ces Pays. Aucun de nos zélés & bien* intentionnés Concitoyens ne balancera pas un mo- ment de défavouer, une Réconciliation Jur la Bafe „ d'un Traité foulé trop fcandaleufement aux pieds par „ les Bretons cjf d'une fufpenfion d'Armes qui, dans „ ces circonfiances ne ferait favorable qu'a nos injuftes. 3» Aggreffeurs, qui ne ferait pas de la moindre utilité d notre chere Patrie, pour fon Commerce, fes Navires ,, iSfes Établiffemens,& dont 1'ofTre qui ne vient que de „ 1'épuifement oii la Juftice Divine a déjè réduit 1'An„ gleterre & de la crainte que notre Union avec Ia „ France, 1'Efpagne & I'Amérique, nous mette en „ état de nous indemnifer a uotre tour a leurs dé» „ pens, &c. &c." Les Villes de Rotterdam & de Schiedam ne font pas les feules qui développent leur averfion pour une Paix particuliere avec 1'Angleterre. Les Citoyens de cette Ville voulant préfentera leurRégence une Adreffe de Remerciment pour le zele & 1'unanimité qu'elle a fait éclater en faveur de 1'indépendance Américaine, ont faifi cette occafion, pour montrer quels font leurs fentimens fur la derniere offre du Miniftere Britannique. La Piece, adreffée aux Bourguemaftres, eft congue en ces termes. K 5 Nobles  C 154) Nobles, Grasds & Wne'rables Seigneurs! C'eft pour nous une fatisfa&ion particuliere de pouvoir offrir a f os Nobles & Grandes Seigneuries, comme Chefs de la Régence de cette Ville, cette Requête bien-imentionnée, qu'une multitude de nos Conciroyens les plus refpectables ont fignée. Elle était déja prête & déja flgnée par plufieurs, lorfque nous apprimes, foit par les Papiers pu. blies, foit d'ailleurs , les Propofitions d'un Paix particuliere avec 1'ofFie dnne Sufpenfion immédiate d'Hofliiités de la part de Ia Grande-Bretague, faites 4 eet Etat par la Médiation de 1'Ambafladeur RufTe. Voilit la feule caufe qu'il n'en eft fait aucune mention expreffe dans rAdrefTe-même : ce n'eft nullement 1'idée que ces cflres autaient fait aucune imprefïïon fur les Marchands, puifque nous pouvons, au contraire, aflurer, fur la vérité, Fos Nobles & Grmides Seigneuries, qu'a peu-près le fentimentunaniaie de la Bourfe d'Amfterdam, du moins, autant que cela 1'intérefTe, eft entierement conforme a celui que les Marchands de Rotterdam ont fait connaitre d'uti maniere fi énergique. Que 1'on a en conféquence la plus grande averfion pour de pareilles offres, auffi artificieufes que dangereufes, qui, étant adoptées, jetteraient très-vraiiemblablement cette Répubiique dans d'autres fituations, tcut-a-fait embaraflantes, dont les fuites immédiates feraient de la ruiner de fond en cemble: Attendu que , d'un autre cóté, ces oifres montrenr que nous n'avons plus a faire qu'a un Ennemi épuifé, que nous pouvons en conféquence for. eer a une Faix générale & durable, a ne fuivre que 1'exemple de la France, de 1'Efpagne, & de i'Amérique-Septenirionale & en mettam en oeuvre les moyens qui font entre nos mains. II ne nous convient cependant pas denousétendreplusau lorg fur ce Projet, tout important qu'il foit, étant bien asfurés queues Nobles &GrandesSeigneuries voient ces f3cheufes conféquences, plus clairement encore que nous ne pourrions les retracer. Les Marchands continuent a recommander le Commerce & la Navigation au foin & a la Protection Cónflantes de Pos Nobles & Grandes Seigneuries & d'iniïfter uniquement qu'au cas que ces offres de la Cour d'Angleterre fuflent quel. quelois caufe que 1'Affaire de i'admiffion de Mr. Adams en qualité de Miniftre PIénipotetitiaire des Etats-Unis de 1'Amérique-Septentrionale renconriat quelque difficufté ou délai de la part des autres Confédérés, que V. N. &G.S.conformément au fecond Article de notre Réquifition inférée dans eet-  C i55) cette R-ouête, aient la bonté de penfer aux metare» qui garan- dralen c eeu» Province des fuites ruineufes d'un tel/procédé. A cetre Requête était jointe 1'AdreiTe dont on y fait menA fan adreffée aux BoürgübmaItres & au Consul. En voici la teneur: Nobles, Grands, V-ene.rables, & Nobles & V*« ne'rables Seigneurs! Les Soufilgnés.Marchands, Bourgeois & Habitans de Ia V(H* d'Amfterdam ont appris avec une loiemexpnmable. Ja nouvelle de la Réfolution prife le «8 Mars paiTé par I N & G. P. les Seigneurs Etats de Hollande & de Weftfrife. L. N. & G. P. ont par la,non feulement fansfait aux vceux généraux de la plus grande & de la me.Ileure partie des Habitans de cette: Province; mais Eles ont encore ieté les fomlemens d'Alliances & de CorresJöudance^uSieures d'Amitié & de bonne- nte.bgence avec les Etats-Unis de rAmérique-Septentrionaie, qui promettent une nouvelle vie a Véto langu.iTant de notre Com. merce, de notre Navigation & de nos babnques. L,ü«nimité avec laquelle on s'eft décidé pour cette Réloludon dans 1'Aïïemblée de Hollande, nous donne uneefpérance fondée, que les Etats des autres Provinces ne tarderom-ïas l prendre une Réfolution femblable; tand.s que fa même Unanimité remplic de la joie la plu. éclat™« l« Habitans foien-intentiornés de cette Ville. & lans doute auffi ceux de tout le Pays; en les convainquant ple.uem nt que 1'Union fait de plus en plus des progrès parmi Ss Sage ' & Vénérables Peres de la Patrie* pendant que la promptitude & l'aSivité avec lcsqaelles e le a étéconclue Ton efpérer avec raifon que nous cueiHors a tems. tfüne démarche auffi importante & auffi néeeffaire pour cete Répubiique, les fruits défirés. Qui peut donc ré; voau-ren doute ou défavouer , que le moment parait I-Xocher de pl s en plus oü cette Répubiique entrera dans de nouvelles relations avec un Peuple qu. fe trouve dans de.drconft.nce, qui ne diftereni ,B-«.de cejesoü no ancêtres fe trouverent, il y a deux fiecle<; avec un leixpia qu oncilie de plus en plus fafteftion & ^«Êfcïï La conformité de Religion & de Gouvernement qui re ren cont 'en re nous & 1'Amérique ,jointeaux ^«quesmdub.tables qu'elle a déja données depuis longtems de la préfé ence au'elle feni pour Ure Amitié, ne fait pas ft«le™«™ f»P1£ £ aux fou&nés, mais leur infpire encore laconfiance que  C 155) nös Iiaifon* avec elle feront auffi folides qu'avamageufes & falutaires aux Interêrs des deux Nations. Le Bien-êrre & Ia Profpériré qui doivent en réfulter trés probablement; la pact que V. N. & G. S. ont eue a la Conclulion d'une Réfolutïon fi remarquable; la Conviftion que le VénérableConfeil de, cette Ville y avait déja, fur la Propofiticn des Nobles Grands & fénérables Bourguemalires, apeup ès confenti avant que la Requête relativement a ce Projet, préfntée de', puis peu, a fous Nobles Grands & fénérables Bourgue. maitres, eüt pu parvenir a Ia connoiflance du Confeil; enfin la Mémoire de ce qui s'eft déja fait a cette occafion 1'an 1778 avec les meilleures intentions & les vues les plusiouables & qui fe trouve sctuellement couronné d'une Approba tion auffi publique que générale, mettent les Souffignésdans 1 obligation inévitable de s'approcher de Vos Nobles. Grandes Fénérables & Nobles & fénérables Seigneuries avec cette Adteffe, non-feulement pour les féliciter d'un Evénementfi remarquable , mais encore pour les remercier en même tems avec autant de zele que de folemnité, pour tous ces foins bien-intentionnés & ces mefures bien concerté^; pour eet attachement inébranlable & cette fidele adhéfion aux vrais Intéréts de la Patrie en général & de cette Ville en particulier, qui fe manifeftent d'une maniere fi éclatante dans tous les Procédés & Réfolutions de fos Nobles , Fénérables c}f Grandes Seigneuries & du Vénérable Confeil de cette fille, & qui certainement attireront 1'eftime & la Vénération dè la poftérité la plus reculée, dés que comparant les Annalesóc les Evénemens de ce tems avec ceux de- tems antérieurs ils découvriront qu'Amfterdam peut encore fe glorifier de' pofléder des Patriotes quiofentfacrifier généreufement toutes vues d'Intérêt propre, de grandeur & de confidération particuliere aux obligations facrées que la Patrie exiged'eux. Nous nous flattons, Nobles & Grand, fénérables, & Nobles fénérables Seigneurs , que ce témoignage public de notre eftime & affeftion fe*a d'autant plus agréable qu'il eft plus rare dans cette Répubiique, méme prefque fansexeinple, & qu'il eft plus propre a faire difparai.re toutes ces infinuations odieufes que la Calomnie Sr la Méchanceté du Miniftere Britannique, auparavantfihautement préconifé par plufieurs, mais aétuellement anéanti, cherchait a répandre principalemenr, peu avant & depuis le commenceineut de cette Guerre: Infinuations qui depuis ont trouvé des Panifans dans les Pays-Bas Unis, parmi ceux qui, ne craignant pas de repréfenter la Bourfe d'Amfterdam (c'eft-a dire la partie la  OJ7) Ja plus refpeétable, la plus utile de la Bourgeoifie de cette Ville, ainfi que la Colonne fondamentaledela ProfpéritéNationale,) comme compofée en grande partie d'une multitude méprifable d'Ames bafTes & avides degain , ne s'appliquant, en fraude des Revenus publiés, par le TranfportdeContrebandes, contre la Foi des Traités, qu'a fatisfaireamplemenc leur avidité & leur avarice; ont en même tems été aflez téméraires , & le font ercore au point d'infulter en face la Régence la plus patriotique de la plus confi iérable Ville des Provinces-Unis, & de 1'expofer au mépris général, comme participant, par connivence ou autrement, a ce pareil Commerce deshonorant. -— Infinuarions& Accufations répandues avec autant de faulfeté que de maligmté&qui doivent exciter d'autant plus l'in ügnation de toute ame fenfible que (1 fon y réfléchit, non-feulement les 1\ égocians de cette Ville, mais ceux de toute ia Répubiique, ont confervé la Foi des Traité* fi faintement & fi inviolablement, qu'a 1'étonnement de quicorque n'eft pas imbu de préjugés, il n'exifts aucune preuve, du moins aucune qui foit valable, d'un Tranfport de Marchandifës deContrebande. Tandis que la circon- ftance oü ces Infinuations. ou d'autres de la même nature, font répandues ,rend cette maniere d'agir encore plus odieufe, vu que cela a été fait dans un tems oü le Commerce & la Navigation d'Amfterdam & de la Répubiique entiereontdüfuöir la première & prefque 1'unique A'taque d'un AHlé injufte & perfide, faute de la Proteétion requife, quoique Fos Nobles {fürandes Seigueuries l'aient réclamée tant de fois & fi férieufement, même avant 1'eruption des mefintelligences furvenues .entre la Grande-Bretagne & les Etats-Unis de l'AménqueSeptentrionale : — Dans un tems, oü le Négociant, formé pour les Entreprifes, fut obligé de voir ravir le Fruit de fes travaux & de fes foins, le Salaire de fon Affidüité infatigable, 1'Héritage deftiné a fes Enfans,par une Violenceétrangere, par une Rapacité fans bornes; & les Politiques fages & prévoyans, qui s'étaient épuifés fans craindre aucunes difficultés , pour la confervation des faveurs de la Paix, virent avec une douleur des plus profondes, s'évanouir tous leurs Projets & toutes leurs Vues patiïotiques. Recevez donc, Nobles, Grands & lénérables Seigneurs, Ê? Nobles & Fénérables Seigneurs, cette preuvefolemnelle de notre affeftu. ufe Reconnailfance , aufii lavorablf-ment qu'elle eft préfentée avec une bonne intention : Accep. tez-la comme une marqué d'attacb :ment a ^"os Peuonjies i elle n'eft pas fanüée fur la ctainte ni fur ia ré  ( ijs ) repréfentadon extérieure d'Autorité & de Grandeur, mais fondement établie fur des principes beaucoup plus relevés &p!us in variables', fur ceux d'Eftime & de Refpeft, réfultnnt de laconviaiondelaGrandeür&dela Générofuéréelles. Soyez perfuadés que, puifquela Difcorde méprifable, avec fes Compagnes odieufes, 1'Artifice & 1'lmpofture, aucommencement de cette Guerre , n'ont rien pu effecïuer, ahfolument rien, pour altérer la Fidélité de la Bourgeoifie d'Amfterdam , pu fébranler dans fon devoir; les inconvéniens & les défaftres , fuites indifpenfables d'une Rupture, n'opéreront pas davantage; que nous fommes même prêis a les fupporter volontiers, voyant que les Moyens que Dieu & la Nature ont mis entre nos mains, fe trouvent employés pour le préjudice & 1'humiliation d'un infolent Ennemi. Pourfuivez donc vigoareufement, Nobles & Grands Seigneurs, dans la même carrière, la feule qui, felon nous, peut, fous la Bénédiaion-divine.conduire la Patrie a fon Salut. Que rien nepuiil'e vous en détour. ner ni vousintimider! Les plus grandes peines & follicicudes font déja furmontées. Uue perfpective agréable s'offre déja. La Grande-Bretagne, naguere fi fiere de fes Forces, qu'elle ofa déclarer la Guerre a un Ancien & Fidele Allié,fê répent de cette démarche injufte & téméraire, & , fuccom. bant fous le fardeau de plus en plus aggravantdelaGuerre, foupire aprésla Paix, tandis que la Concorde parmi les Mem. bres du Gouvernement Suprème de ces Pays,ainfi que nos Armes.va toujours en augmentant, a mefure que Votre Conduite & Vos Mefures politiques, dont la néceffité & fïnfluence falutaire étaient auparavant moins reconnues, acquierent de plus en plus des imhateurs qui en reconnaiflent la folidité falutaire. La Réfolution fcrmée depuis peu par les Etats de la Frife, ckadoptée avec tant d'unanimité par cette Province en peut, entre plufieurs autres, fervir de preu ve inconteftable; tandis qne la Bataille navale, donnée FAn pafle fur Ie Dog. gerbank, prouva a 1'Europe étonnée qu'une Paix auffi longue n'avait pas fait oublierl'ufage des Armes; mais, au contraire, que cette Répubiique nourriflait encore daos fon fein des Héros qui fuivent les traces des Tromps & des Ruiter , & donc Conduite & Ia Bravoure, aptès un prélude aufii brillant, font efpérer les Aóh'ons les plus héroïques; que même leur Valeur invincible, réfiftant a toute fupérioriié, precurera en fon tems a la Patrie une Paix fi honorable, fi permanente, qu'elle éternifera leur Gloire héroïque, & ferabénir la fage Politique de Vos Nobles & Grandes Seigneuries par Ia Poflérité Ia plus ieculée. On  C 159) On voit par ces pieces, organes fideles de 1'opinion nationale, combien eft profond le reffentiment contre ks Anglais. On voit par la crainte que la propofidon du Miniftere Britannique ne portat quelque obftacle a la Reconnaiffance de 1'Indépendance Américaine, k quel point la nation eft portée pour cette démarche. Auparavant on aurait pu dire que la Frife méritait feule la reconnaiffance des Etats Américains; paree qu'elle avait reconnu leur Indépendance s avant que la révolution arrivée dans le Miniftere Anglais eut montré la néceffité de fcelkr au plutót cette démarche. La fuite ci- après. C H A P I T R E XLI. Lettre au Politique Hollandais fur la premier origine de 1'Indépendance Américaine & particulierement fur Mr. Adams, aüuellement Miniftre Plenipotentiaire des Etats- Unis de I'Amérique auprès des EtatsGénéraux des Pays-bas. 1 Je fuis (*) Citoyen des Etats-Unis de I'Amérique. J'ai vu 1'origine de nos premiers troubks ; j'en ai fuivi les progrès avec une affiduité particuliere; j'ai furtout eu 1'attention de ne jamais perdre de vue la conduite des principaux Auteurs de cette mémo. rable révolution; & je n'ai pas vu fans intérêt & fans ia plus vive fatbfaétion , que vous mettez dans leur nombre, fon Excellence John Adams, que 1'on peut a&uelkment nommer Miniftre-Pienipotcntiaire du Congrès auprès des Etats Généraux, puisque les Sept-Provinces 1'ont presque toutes reconnu. Je puis aflurer quevous n'avez rien dit fur eet illuftre perfonnagequine foit dans la plus exacte vérité; je n'ai jamais vu perfonne ni dans 1'endroit oü ilné, ni a Bofton ohil a vécü ,ni au Congrès oh il a longtems joué un róle brillant, qui n'en parle avec éloge; je puis même affurer que j'ai vu les perfonnts de toutes les opinions & de tous ks partis , fe réunir pour faire 1'éloge de fon caraétere & de fes mceurs. Nous pouvons défier (*) Effeftivement, nous n'avons guere fait que traduire cettepiece,que nous tenonsd'uue voie süre & authentique.  C 160) défier les Réfugiés de Londres de nous démentir fur ce point, puisque le théatre ou il s'eft fignalé, eft trop éloigné pour qu'on puiffe s'en procurer facilement des informations ; puisqu'il attire aftuellement 1'attention de toute la Répubiique, j'ai cru devoir yous développer plufieurs autres particularités qui répandront un nouveau jour, foit fur eet illuftre perfonage, foit fur la Révolution Américaine. L'Année 1754, les Colonies Anglaifes en Amérique commengant a craindre qu'une guerre ri'éclatat avec les Francais, imaginerent de former un Congrès, afin de s'unir pour la défenfe commune. Telle fut la première ébauche de leur confédëration actuelle, Le réfultat de leurs délibérations fut un plan pour unir les confeils, les armes, & les revenus de toutes pour leur défenfe & fureté mutuellesencasde guerre, de la maniere la moins difpendieufe pour ia Grande-Bretagne. Ce projet fit ouvrir les yeux au Cabinet de St. James. II ne put le goüter. Il prétendit qu'il-n'y avait pas un centre d'autorité qui dirigent les forces de toute la circonférence & qui impolat des taxes pour payer les dépenfes. On vit dèslors affez clairement que les progrès du pouvoir & de 1'opulence de I'Amérique avaient excité des ombrages dont on avait déja laiflé percer trop de preuves, pour qu'eïles échapaffent aux yeux pénétrans d'un peuple altier & libre. II y eut même, furtout dans la Penfylvanie & ie Maffachufet, des perfonnes du premier rang & de la plus longue expérience, qui, dès la conquête du Canada fur les Francais, ne déguiferent pas leur crainte que la nation Britannique, dès lors aftranchie de toute crainte des Francais'n'empiétat fur les libertés des Colonies, & ne s'efforcat de lesamener a fefoumettreabfolumentaune légiflation étrangere, qui était bien loin de fe fignaier par fa fageffe, par fa modération ou par fon défintéreffement. A peine les Bretons fe virentdanslapoffeffiontranquille du Canada, que, danslesdiverfesProvinces, le Miniftere laifta tranfpirer de violens fymptómes de mauvaife volonté pour I'Amérique. La Suite au No. Procbain.  L E POLITIQUE N°. LXIII. LUNDI, ce 22 AVRIL, 1782. Suite du CHAPITRE XXXXI. Sur 1'indépendance Américaine fif fur Mr. Adams, aSluellement reconnu £f fecu pnir Miniftre-Plénipotentiaire des Ètats-Ufiis de I'Amérique aU' prés des Etals-Gér.éraux. Les Anglais fe virerit a peine trariquilles potlesfeurs du Canada, que Ié Miniftere développa, p;ir des traits frappnns , les deffeins pervers qu'il avait projetés cóntrc I'Amérique. Je m'étendrai fur quelques particularités,puisque les moindres qui ont fervi afai* re éclore la grande révolution, doivent intéréffer. Les maifons des Douanes furent aütorifées a s'adresfer aux Cours de Judicature, pour ouvrir de force les maifons, les magazins, les caves, les boutiques, les vaiffeaux, les malles, les balots, les paquets &c. &c. & chercher & faifir le« effets qui n'avaient pas payé les droits. Bernard, Gouverneur du Masfachufet, avait pour inftrUment & créature, uh nömmé Cockle, Officier des Douanes a Salem. Codkle imagina de demander cette permiffion aux Jüges dé la C our fuprême. C'était au mois de NovembreS 1760. Le Chef de cette Cour,nommé Sewal, homïome III. L ÖM»  me ardent & jaloux des libertés de fa Patrie, fitnaftre des doutes fur la légalité de ces fortes de permiffions ; mais il mourut avant d'avoir pourfuivi cette affaire. Hutchinfon , Lieutenant-Gouverneur, entreprit d'affermir 1'ouvrage entamé par le Gouverneur Bernard. 11 était chef-Juftice; & 1'affaire étant portéedevant lui,Mr. Gridley, qu'i] avait choifi pour foutenir la caufe des- Oouanes, trouva une forte oppofition dans les Avocats du parti des Marchands, MM. Otis & Thatcher. Ces derniers prouverent, avec éloquence , qu'une telle pratique était contraire non feulement aux principes de la conftitution Britannique, mais encore aux droits effentiels de la liberté civile. Ce fut è 1'occafion de ce procés que Mr. Adams , jeune encore, attentif a ce qui fe paffait devant fes yeux, jeta fur 1'événement du jour quelques idéés qui furent publiées,&qui pourront ferviraux Hiftoriens de cette révolution, a pénétrer les vues &les paffions qui agitaient alors le Gouvernement Britannique d'un cóté, & le peuple de 1'Amériaue de 1'aure. II repréfenta'fous unjour li défavorable, &les conduite de Bernard, de Hutchinfon, d'Olivier, de Payton & des autres Officiers Britanniques, & leurs infraétions aux maximes les plus facrées de la liberté, que depuis il n'a jamais pu leur accorder fa confiance. II dédiiigna, fierement & conftamment, de leur avoir aucune obligation. Toutes les efpérances que les amis du Gouvernement purent faire briller a fes yeux, toutes les menaces qu'ils purent lui faire, ne firent aucune impreffion fur fon efprit. Mais ce qui m'eft le plus connu, & qui ne 1'eft guere en Europe. du moins hors de 1'Angleterre, ce font les écrits fords de fa plume. II commenca fa carrière littéraire dans les années 1762,1763, par différentes pieces fugitives, fur les affaires du tems; mais les titres me font échappés. En 176^,1!écrivit quelques Lettres, fous le nom de Clarendon a Pym; elles furent réimprimées dans éivers endroits & même a Londres. L'au-  C 163 3 L'ao 1765 , la ville de Braintrée, fa patrie, le char« gea de dreffer les inftructions pour leur Répréfentant, relativement au rappel de l'A&e du Timbre; ces inftructions frapperent ü fort les Américains, qu'eïles furent adoptécs , mots pour mots, parquarante autres diftriéts de la Province. La méme année, il fut choifi par les Habitans de Bolton, conjointementavec MM. Otis & Cridley afin de défendre leur pétition au Gouverneur Bernard & au Confeil. pour ouvrir lesCoursde juftice, fans papier timbré, Vous avez déja parlé de la differtationfur le droit canon & féodal, qu'il fit paraitre dans le méme tems. En 1768 & 1769, la .ville de Bofton le nomma pour rédiger les inrtruftions dont elle voulait charger fes Repréfentans. Enfin, en 1770, il ouvrit une carrière plus brillante. II fut choifi Repréfentant de la ville deB-.fton. Ce fut lui qu'elle chargea de prefque tous fes meflages pour le Gouverneur Hutchinfon Mais n'étant pas efclave du parti du peuple jufqu'a lui facrifier 1'équité, il fut le premier a défendre la caufe du Capitain Prefton & de quelques Soldats Bretons qui, piovoqués par la populace, avaient fait feu fur elle. Jamais fon caraétere integre , plein de courage & d'humanité, ne fe développa d'une maniere plusintéreffante. II défendit vivement la liberté du Barreau & la rigueur des loix contre des orages populaires, auffi vioiens qu'on peut les fuppofer, lorsqu'ils ne vont pas jufques a éclater en émeures ouvertes.^ En 1772 ,on imprima de lui huit lettres au Général Brottle , fur 1'indépendance des Juges , fujet qui intéreffe tous les pays & toutes les nations On n'a rien fur cette matiere qui lbit auffi favant, auffi profond, dans aucun langage. La grande queftion de la Suprématic du Parlement Britannique fur les Colonies fut vivement agitéedans ce tems-la. jamais il ne s'éleva de quel'ion plus délicate & plus épineufe.' Mr. Adams, confulté de L 2 tous  C 164 ) tous cótes, fur cette grande affaire, n'eut pas peu de part a la réfolution qui fut prife la-deffus dans toutes les Colonies. Leur droit fut préfenté fi clairement d'après la raifon & les faits, que rien ne contribua plus a introduire dans les diverfes Colonies cette harmonie & cette union de fentimens qui ne tarderent pas a produire de grands effets. En 1773 > Mr. Adams fut élu par les deux Chambres pour entrer dans le Confeil de fa Majefté; mais il eut, ainfi que plufieurs autresPatriotes, 1'honneur d'en être exclu par la glorieufe négative du Gouverneur Hutchinfon. En 1774 >le Gouverneur Gage 1'exclut de la méme for étion a laquelle les fuffrages de fes concitoyens faviient encore appelé. La même année, il fut élu membre du Congrès qui s'ouvrit a Philadelphie le 5 Septembre 1774. ün fait que 1'année fuivante fut mémorable par 1'éruption des troubles en violences ouvertes. On vit alors paraitre des lettres fous le nom de Novanglus, qui furent attribuées aMr. Adams; paree qu'on y reconnut fon ftile & fes principes. On peut regarder ces iettres comme ce qu'il y a de plus fatisfaifant fur la fuprématie du Parlement Britannique. Mr. Adams ne ie borna pas k exLtniner les chofes en Juriscnnfulte; mais portant, fuivant fa coutume.fur les affaires, cette politique pergante qui 1'a rendu fi celebre depuis; il prédit toute 'la révolution qui allait éclore. Heurcufe 1'Angleterre fi, au lieu de rejetcr ou de perfécuter ces courageux Américains, elle eut prêté plus d'attention a leurs fentimens & a leurs avis! Depuis ce tems-la, Mr. Adams afiifta conftamment dans le Congiès. On ferit ce qu'un homme de ce caraaere & de ce génie, dut faire dans ces premières années, dont le prélude devait décider de la grande révolution Les journaux imprimés du Congrès, quoique fecs & fuccinfts peuvent montrer quelle part il eut aux plus importanr.es transaclions, puis- qu'on  qu'on le voit prefque toujours appelé dans les Com- mjttés qui devaient les décider. J'étais a Philadelphie au commencement de 1'année 177Ö. Je le vis alors confulté folemnellement par les Députés de la Caroline-Septentrionale pour une affaire qui montrait déjè. la haute eftime que fes talens lui avaient acquife dans toutes les Colonies. Ces Députés vinrent, par ordre de leurs Conftituans, lui demanderjbn avis fur la forme de gouvernement que cette Colonie pourrait adopter. Cette honorable confiance lui donna occafion de développer les premiers germes de ces idéés de gouvernement qu'il rédigea enfuite en un fyftéme complet pour 1'Etat de MalTachufet. Les Uéputés de la Caroline - Septentrionale envoverent cette première efquiffe a leurs Conftituans. Elle fut communiquée a plufieurs membres. Mr. Adams en étendit encore les idéés dans une lettre a Mr. VVyth, qui fut imprimée fous le titre de Penjées ftw le Gouvernement dans une lettre d'un GentiUhomme d Jon and. Cette publication fit éclore une multitude d'idées nouvelles fur les formes du gouvernement qu'on pourrait adapter' a chaque Colonie. De-la toutes ces loix conftitutives que ia plupart de ces Etats naiffans ont dé'a adoptées ; on remarque furtout, qu'après celle de MalTachufet, ce font les conftitutions de NewYork & de New-Jerfey qui approchent le plus des principes développés & répandus par Mr. Adams. On fait que,quoiqu'ilait été confulté par les pcrfonnes chargécs de rédiger la Conftitution de Penlylvanie, il fit plufieurs objeclions contre certains araclcs effentiels qu'eïles avaient adoptés. Auffi, a-t-on obfervé que, dans cette conftitution , les pouvoirs de la fociété ne fe balancent pas aflez pour affurer 1'exécution ferme des loix, ou pour avoir une longue durée. Auiïï, certe forme de gouvernement n'a pas eté auffi goütée du peuple que les autres; les remarques que Air. Adams a laiflées, pourront fervir a la' perfeöionner, „ L 3 On  C I6<5 ) On fait que Mr. Adams a déja débuté dans Ia carrière diplomatique, fur un théatre briilant. II fut envoyé k la Cóur de France oü il arriva en 1778, & il y fut regu en qualké de Miniftre - Plémpotentiaire, conjointemenc avec MM. Franklin & Lée. Vous avez repréfenté Mr Adams comme 1'Auteur de la conftitution de MalTachufet; mais vous n'avez pas fu tout ce qu'il a fait pour engager Ie peuple a 1'adopter. A fon retour k Bofton en 1779, ïl fut choifi membre de la Convention deftinée a former une conftitution nouvelle. On peut dire qu'il fut alors dans fon élément. Cette Convention était compofée de 400 membres, qui, après plufieu-sdébats , laifferent le foin de cette affaire a un Committé de crente-une perfonnes, dont Mr.. Adams fut du nombre. Ce fut lui qui dreffa la Déclaration des Droits, ou le préliminaire contenant les principes de la Conftitution future. Le plan de gouvernement qu'il mit alors fous les yeux de fes concitoyens, fut examiné, paragraphe par paragraphe, par leCommitté. Malgré la confiance au'on pouvait avoir dans fes talens & dans ceux de MM. Bowdoin & Samuel Adams, qui furent fes adjoints, le Committéfe trouvait compofé de perfonnes dè principes & de goüts bien différens. Les uns étaient prévenus pour les pouvoirs ariftocratiques, fi dangereux aux droits du peuple; les autres ne refpiraient que la démocratie qui, portée k l'excès, ébranle 1'autoritédu gouvernement dont dépend 1'obfervation des loix. Ces deux partis étaient également jaloux du pouvoir d'un Gouverneur. Mais !a confiance que Mr. Adams s'était acquife par fes talens, par fes fervices, par fon défintéreffement & par les dangers qu'il avait courus pour fervir fa patrie,fit qu'on prêta toujours la plus férieufe attention a tous fes difcours. II eut la gloire de perfuader tous les partis. Les grands propriétaires furent gagnés par la perfpeclive des charges que la nouvelle Conftitution offrait k leur ambition; les pauvres fe laifferent féduire, en voyant qu'on ne  C i«7 ) se les avait pas oubliés; & leur ambition fut auffi flattée par le droit de fuffrages & les grandes efpórances, données a tous ceux qui avaient des talens, de s'élever au niveau des plus puiffans. La forme de la Conftitution diftribuée dans toute la Colonie, réunit tous les efprits; 1'unanimité fut d'autant plus elorieufe, que de tous les Américains, on fait que ceux de Maffachufet font les plus ardens', les plus fiers, les plus jaloux de leurs libertés; & par conféquent les plus difficiles a perfuader- Son plan de gouvernement fut adopté, a quelques changemens prés, mais de peu de conféquence. La Pdvidence femblait 1'avoir envoyé en Amérique, pour eet important ouvrage; car a peine fut-ü confommé, que le Congrès le fit repartii une feconde fois pour 1'Europe. lei fin.it le manufcrit de VAméricain ; nous avons cru pouvoir y ajouter les détails Jüivans que nos obfervations fur les évènemens publics nous ont mis et portée de faire. Depuis que Mr. Adams fe trouve en Europe , ff conduite publique , fans avoir paru dans un jour aufii frappant, a peut-être eu des fuites plus ïntéresfantes que lors de fon féjour en Amérique. On doit nréfumer qu'il a entretenu une correspondance habituelle & réguliere avec le Cabinet de Verfailles; auffi,depuis fon retour en Europe,a-t-on remarqué quece Cabinet a, relativement a 1'Amérique,adopté un fyftéme d'aétivité & d'affiltance navale, marqué par 1'envoi d'une fiotte a Rhode-Ifland, qui, tenant en échec celle des Anglais a New-York, a facilué le commerce; & furtout par 1'envoi de Mr. de GrasTe a laChefapeak, qu'on peut regarder comme 1'expédition uécifive pour 1'Indépendance Américaine. On fait trop, par fes converfations particuheres, combien il était épris de ce fyftéme d'opéracions, oour douter qu'il n'ait beaucoup contnbué a le faire v L 4 adoP"  ( 168 ) ïdoptcr. Pour afïïgner Ia part qu'il a eue a ces me. lures, il faudrait avoir eu accès è des documens fe, crets, qui ne verront peut-ètrejamais ie grand jourou qui du moins ne feront publiés .. que dans bien des annees_; Jorsque les événemens préfens feront dans le lomtain , & dans la perfpective , propre aux Hiftonens qui voudront en tracer le tableau, Si, cependant, 1'on fait bien attention a ia conduite pubbque de Mr. Adams, dans cette Répubiique; on ne peut s'empêcher de le regardcr corurna un politique profond, fage & heureux. L'indignation & le relTentiment repandu généralement, contre les Anglais , ne put échapper a fon ccil pénétrant. 11 en concut de favorables augures j &, malgré les cns furieux des Anglomanes , il crut touiours qu'u» neoccauon favorabiene tarderait pas a s'ofFrir. Conriaiffant a fond le grand art de profiter des circonftances,dont tam de Miniftres, regardés de nos jours comme de grands hommes d'Etat, n'ont jamais fu le iecret, il laifit habilement le moment de lafermenta. tion caufce par la démarche de la Ville d'Amfterdam contre Ie üucde Brunswyk, pourinftruire les Etats. Généraux du caraciere qu'il était chargé de déployer devant eux. fi-en perfuadé en même tems TLl K3"5 UD P?ys,Jibre > 1'opinion du peuple mflue beaucoup fur les déterminations du Gouver- ■^niA?-qre'-p0Ur,gaSner cette opinian, il confnr,trU11'Cr' üf* foifl de 'épandre, dans ÊiMemr0,re Prcftnté aux Etats-Généraux , toutes ies raifons les plus frappantes & les plt^ pr0preS fDJ/^«. Ewts de PArnénque & les Pays.bas.Unis. Les partifanst de 1'Angleterre & les créatures du ffis 1?ftfH,l1EnDe,?i' Crouve^ ce Mémoire diftuo & fafbdieux; mais, aveuglés par Ja paffion, fts ne sappercevajent pas que tous les détails qu'i Jjsagiffaitde proppler desliaifons nouvelle*, & que tes particulantes, qu'jis traitaient de pédantesques, étaiem  C 1Ö9) étaient analogues au goüt de la nation, & faifaient la plus vive impreffion fur toutes les claffes des citoyens. Aufii, leur impatiente ardeur ne tarda pas a fe développer dans toutes les converfations particulieres ; tous les Ecrivains avoués, non d'un parti fufpect, mais du corps de la nation, étendirent encore ces idéés, & familiariferent fi bien les efprits avec 1'idée d'une alliance avec I'Amérique, qu'a la fcconde démarche de Mr. Adams, on demandait a grands cris; pourquoi une affaire aufii intérelTante n'était pas prife plus a cceur par les corps politiques du Gouvernement. Auffi, la Province de Frife,qui, dans les tems prélens, s'eft fingulierement diftinguée par fes vues & fes propofitions patriotiques, fut la première a fe décider en faveur de 1'Indépendance Américaine & de l'admifiion de Mr. Adams, Cette démarche fit d'autant plus d'honneur aux Frifons, qu'on ne peut la regarder comme une fuite du changement de Miniftere en Angleterre. L'ardeur & 1'unanimité qui fe font développées fur le même fujet dansles autres Provinces,préfentent une époque dont les annales de notre patrie n'offrent aucun autre exemple (a). L.'avantage & la bonté de cette dé- (a) Les ctn/tdêrations contre le Mèmoire deMr. Adams, aorès avoir été fouvent annoncées dans les papiers publiés par Bennet & Hake, libraires de Rotterdam, le font préfentement par Ten Bojcb, Libraire a Utrecht; avec les interrogatoires du Traitre Galloway ; un de ces Réfugiés Américains , dont les favantes lnibrmations ont fervi de bafe ala politique fi profonde du miniftere Anglais, de bien. heureufe mémoire. Mais on n'a pas , comme auparayant, eu 1'impudence d'annoncer qu'il fe trouvait dans ees interrogatoires, des particularités fur le caraétere de Mr. Adams ; depuis que nous avons relevé 1'ignorance ou la mauvaife-foi de 1'Ecrivain de ce pamphlet , qui, pour mieux donner le change, fupprime les noms de baptême, & ne fait qu'un feul individu de tous cenx qui ponent le nom d'Adams en Amérique. Au refte, ce Mémoire, digne de tout le mépris qu'ilaeiruytf, L 5 cft  C 170) démarche ont paru d'une maniere fi frappante que, malgré 1 animcfité des partis qui déchiraient , dit! on, le fem de eet Etat, tous fe fontréunis pour la faire reuffir. Ony procédé même avec une majcftueufefolemnité,qui fait è I'Amérique un honneur qu elle ■ ne peut attendre d'aucun autre Etat, En *nie, ou le gouvernement eft en grande partie démocratique le peuple s'eft expliqué, avec fa promp. Hp,UCt:>?/0n^mpét,Uofité ordinaires,parla Réfolution des Etats. Dans les autres Provinces oh le gouvernement eft en grande partie Ariftocratique, les difierens corps de citoyens ont fait entendre leurs defirs par les Députations ou par les Requêtes. Les Régens , paraiflant ne fuivre que 1'impulfion & le vceu du peuple, ont décidé les affemblées desEtats. Un peut dire que cette Indépendance a été proclamee, non-feulement par les Souverains mais enrZlJar tous les ,'ndividus de la nation. II me iemble, en voyant les Provinces, fe déclarer toura-.our, iurce fujet, entendre chacune faire une i2epCLd^°mraage a ^érique. II me femble ,les entendre prononcer ces mots: „ Américains : 3' rpnn.ïfCZ, k notre- exemPIe > P™ les armes pour " KÜ?er-Ia ^'Tal\me' Vüus ™ez comme fious „ brilé le joug. Comme nous, vous avez affefmi " Wune^ rPeHdaDCe ? fuCCès' Puis^ „ fortune a fi bien couronné votre courage, nous „ vous reconnaiffons dignes de figurer è cóté de „ nous, parmi les nations indépendantes. A la vue " in"' ré,yolutions . Enclaves efpérez! Tv„ rans tremblez!" y eft fuffifainment réfuté par les Requêtes des dalles diféP J l t queSo; dont tous les «nembrrs, quoiou'ils fi\rP fi épend8nce Amérlcsine, comme une me- d'eux n>a wa™nt avramaëeufe & néceiTaire , qu'aucun et eux na olé s y oppofer. P. S.  C 171 ) P S. Tl eft encore des gens que l'évidence «e peut ' perfuader ; ils veulent to .jours dnuter que l'Angleterre puiffe renoncer d 1'Amérique : les deux pieces fuivuntes noui ont paru aufti frappant es que propres d convaincre les plus incrêdules. Lorsque les Généraux Howe & Burgoine furent revenus d'Amérique , la chambre des Pairs refta affemblée jufqu'a minuit pour examiner leur conduite A la premièreinterrogation qu'on leur fit, ils i-Tondirent: „ A chaque pas qu'on fait dans le oavs on y trouve des pofles fortifiés par la na" ture • les Troupes des Infurgens bien difcipli" nées ' entendant' parfaitement la petite guerre, " & la fortification de campagne. Le pays eft disDofé de maniere qu'il eft presque impoffible de " s'v faire des intelligences, coupé par des Rivieres " larges , profondes, rapides , par des torrents; " couvert de bois, de marais, il eft impoffible d'y " faire ia guerre avec quelque apparence de fuc " cès avec toutes les forces qu'on pourroit y enI vover" Un long filence régna dans toute la falie. Un des membres 1'interrompit en difant que cela'était connu. Si on le favait dit le Général Howe il était inutile d'y envoyer des troupes; fi on l'ienorait, c'était plus qu'imprudence. Tout le monde fe tait, fe regarde, & fe leve. L'examen ftnit la. Voyez les défenfes de Howe rjf de Burgoine. Lettre de Mr Y-a-t-il rien de plus extravagant que de voir 1'Aneleterre prétendre encore foumettre un pays trente fois grand comme elle-même? La population s'augmente en Amérique par les Francais, par les Anglais mécontens, par les Allemands: la population diminue en Angleterre par les flottes qui dévorent  C 172 ) refpece humaine , par les Indes qu'il f3ut peupler. par les Armées qu'il faut envoyer au dehors. fJhaque année ajoute un degré de plus a 1'indépendance Américaine. Ce n'eft pas quelques petits avantages dans des rencontres, quelques fortsi pris & rendus, quelques frégates brulées ou dématées qui peuvent relever 1'efpérance des Anglais Ce ^hn f/Ui^'n.C'eft TQ \e C?ongrès Prend Plus de itabiké; c eft que les Américains s'accoutument i exilter lans la maratre-patrie; c'eft qu'on a le temps de remédier aux inconvéniens quifuivent les premiers inftans d'une révolution ; c'eft que les peuples fe forment en corps d'Etat , reconnaisient des Legiftateurs, & perdent toute efpece deconiidération pour des Généraux qui viennent proooïer un joug. r ^ Ce n'eft ni une poignée de Francais, ni les mi.« d,^ .Etats-unis qui affureront 1'indépendanceceft léioignemént des Isies Britanniques; c'eft lè cours des Evénemens; c'eft ce fentiment fecret qui perluade a chaque homme que la liberté eft le premier des biens , & .un droit de la cordition humaine qu'on fait valoir dès que les.circonftances le permettent. C H A P I T R E XXXXI. Sur Mr.de .CapelleJe Poll & fur les Redevances ou Servitudes feodales. La fermentation caufée par les délibérations provinciales fur 1'indépendance Américaine, ont fait reparaitre fur la fcene un Homme d'Etat de cette Képublique que fon courage, fes talens & les periécutions quil a effuyées, ont illuftré dans ies circonftances préfentes. II paraiflait condamné au malheur qui naéte que trop fouvent le lot des patriotes affez courageux pour préferer leur devoir aux digmtés ; maïs tout a coup paraiffent au grand jour deux pieces qm momrenc; 1'une, que dans 1'ob, • feu-  ( 173 ) fcurké même oh une cabale puiffante femblait le tenir relégué, il avait jcté les germes des liaifons actuelles avec I'Amérique; & 1'autre, que la nation dont il a défendu les droits, faifit avidement cec te circonftance qu'il a fait naitre, pour reconnaitre les fervices qu'elle a recus de lui. Extrait d'une lettre de Mr. Ie Baron de Capalle de Pol H S. Ex. Mr. Livingfton &c. En date d'Amfterdam, le 6 Juillet 1779. Heft facheux qu'au moment oü 1'Efpagne fe déclaré, il n'y ait aucune Négociation d'entamée. Les efprus font dans une fermentation qui ceffera peut-être, ou d elle-même, ou par quelque léger avantage des Anglois, ou même paree qu'ils n'opéreront rien. Dans 1'efprit de bien des Gens, le crédit de 1'Angleterre chancelle & celui de 1'Amerique fe fortifie: d'oü il réfulte que le temps d'entamer une Négociation eft arrivé. A peine une Brebis a.t-elle pafje le Pont, dit le Provcrbe Hollandois, que les autres futvent. Tout 1'art conöfte a le lui faire paifer. „ S'il m'eft permis de dire mon avis ( fauf correclion ), le Congrès ferait bien d'envoyer ici, .& plutót que plus tard, un Homme diftingué & d'intelligence qui veiüat a fes Affaires. II n'eft pas encore temps d'accueilhr un Miniftre Public des Treize-Etats-Unis. La Répubiique, & ce que je crois, ne le fera jamais, a moins quelle ne foit en guerre avec la Grande Bretagne, ou que cette Puiffance, pour obtenir la Paix, ne reconnaifle 1'indépendance de I'Amérique. Toutefois , il eft. néceffaire, ce me femble, que la Perfonne, que le Congrès deftine ou deftinera a devenir un jour fon Miniftre dans ces Provinces , s'y rende d'abord, y garde /''incognito, &, féjournant comme particulier, s'inftruüe de la Langue & des Ufages du Pays &, ce qui eft de la plus.grande importance, fafl'e, fc 1'exemple du Chevalier Yorke, des connaiffances, des Maifons, fans perdre un moment de vue les Affaires de 1'Améiique, jufqu'a ce que le temps foit venu de déployer fon caraftere pubtic: époque qui ne peut abfolument pas être fort eloignée, puifqu'il n'eft pas concevable que la Grande Btetagne puiffe fbutenir long-temps la n guer-  c 174 y guerre. Un tel Perfbnnage rendraic un grand fervice i I'Amérique." Extrait fle Ia Réponfe de 5. Ex. Mr. Living/Jon a Mn le Baron de Capelle de Poll. De Trenton, le 15 Mars 1780. J'ai traduit en Angtais votre J>ttre & en ai envoyé Ia Cópie au Congrès qui Ta recue avec joie. II y a apparence que c'efl: en conféquence que Mr. Laurens, ancien Préfident de Congrès , a été envoyé en Hollande pour y négocier un Emprunt; fans doute qu'il eft mum' d'au res pouvbirs, ignorés du Public. C'efl un excellent Homme , avec qui j'ai tenu une correfpondance fuivie, tant qu'il a été a Ia tête du Congrès. (Sign'é) Livingflon. Jamais , dit la Gazette de Leide depuis la fondaiion de Ia Répubiique, Ia Nation n'a montré plus unanimement qu'aujourd'hui fon atnour pour les principes qui font la bafe de fa Conftitution, ainfi que pour les Régens,généreux & éclairés, qui s'en font montrés les coura'geux Défenfeurs. Préalablement è la déterminaiion des Etats, les Communes de Zwoll avoient pris une Réfolution, par laquelle, e» confentant alacontinuationdetousles Impótsde 1'année derniere, ainfi qu'a 1'augmentation de la Taxe des Terres pour un quart, elles ont déclaré s'attendre, „ qu'avant de demander un nouveau Confentement pour les Taxes, les Services Féodaux , [que les Grands-Baillis exigent des Cultivateurs dans la Province,) feraient fupprimés; & que Ie Haron der Cappelle , Seigneur de Pol, (qui , ayant démontré I injuftice de ces Services, anciennement rédimés par une Contribution aftuellement exiftante, avoit été privé de 1'exercice de fon droit de comparaitre a 1'Asfemblée ) feroit réadmis aux Séances de 1'Ordre Équeftre & des Villes; que de plus, les trois Villes (de Deventer, Campen, & Zwolle") en général, ceüe de Zwolle en particulier, fe. roient maintenues dans le droit de former la pïuralité avec un feul des Membres de 1'Ordre de Ia NoblefTe, conformément a la Déclaration de 1'Ordre Équeftre & des Villes en date du 4. Avril 1507, afin que dans Ia fuite, au cas que cette attente fut fruftrée, les Communes ne fe voient pas  r 475 ) pas ebligées de fufpenire leur Confentement aux Impofttions puhliques." „ Après s'être expfiquées enfuite fur plufieurs autres Points relatifs aux Fmances de la Province, les Communes de notre Ville ajoutent dans leur Réfolution: „ qu'el» les fe prétetit a tous ces arrangemens, dans 1'attente que 1'Ordre Équeftre & les Villes confentiront auffi fur le même pié dans tous les dits Impöts, fans aucune exemtion ; vu que, faute d'un pareil Confentement, les Communes fufpendroieut le leur a toutes Charges extraordinaires, comme fi jamais eïles n'y eufl'ent confenti: enfin, elles terminent leur Réfolution par les paragraphes fuivans." ., Et, attendu que plufieurs des fus-dites Pétitions ont 'été occafionnées par des engagemens contractés a 1'infcu & fans le confentement des Communes-Jurées, qui font néanmoins d'avis qu'eïles ont non-feulement droit de concourir aux délibérations fur les moyens de fatisfaire a ces engagemens, mais auffi a celles pour juger fi de tels engagemens font réellemeiit utiles & nécelfaires, les Communes perfiftent par la Préfente dans la Déclaration qu'elles ont faite en date du ao" Mars 1781, & ce avec d'au. tant plus d'inftance aujourd'hui, qu'i leur grande dou. leur elles ont vu jusqu'ici fi peu de fruit dei Somma immenfes déja accordéis pour le jalut de la Patrie affligée." * „ Les Communes, ouvaincues avec les Habitans de cette Ville, & ceux de toutes les Pro vinces-Unies, de la néceffié de reconnoitre 1'Indépendance des Etats-Unis d'Amérique , d'admettre leur Miniftre en fa qualité, & d'entamer les Conférences qu'il a offertes pour la conclu. fion d'un Traité de Commerce & de Navigation, &concevant que,pour plufieurs raifons, il convient de ne pas ufer de plus longs délais a eet égard, s'aflürent & s'attendent, que les Echevins & le Confeil s'accorderont nonfeulement avec elles a eet égard , mais qu'ils porteront aufii une Réfolution de la part de cette Ville audit effet, le plus prompte ment pofTible,en 1'Aflerabléede 1'Ordre Équeftre & des Villes, & qu'ils feront tous les efforts en leur pouvoir, afin que cette affaire foit conduite a conclufion durant la ptéfente Séance , pour amant que cela concerne cette Province , recommandant en conféquence la Requête ci-jointe des Négocians de la maniere E* plus favorable," „ Les  C 176) „ Les Communes de la Ville de Deventer ont pris ég&* lement une Réfolution des plus vigoureufes, annoncanc les mefures qu'eïles fe propofent d'exécuter, au cas que les Etats de la Province ne fuppriment avant la fin de 1'année les Services féodaux, que les Grands-Baillis exigent des Cultivateurs avec 1'injuiiice la plus évidente. La Suite au No, Procbain. Extrait d'une Lettre de la Haye 10 Avril 1781. Voici 1'aurore d'un jour plus brillant pour Ia Répubiique. L'époque eft enfin arrivée oü elle renonce a jamais k fes anciennes liaifons, pour en former de nouvelles, qui donneront une bafe néceiTaire a fon exiftence politique, & lui'procureront les moyens, de devemr aufii riche, aufii puiflante, aufii refpectee, que jamais. Aujourd'hui les Députés aux Etats-Généraux des Pays-bas-Unis ont, d'après les ordres unanimes de leurs conftituans refpeftifs , keconnu l'Inde'pendance des Etats-Uwis de l'Ame'rique. Ces Feuilles périodiques parainent régulierement, tous les Lundis a Amfterdam , chez J. A.Crajenfchot; a tiaarlem, chezIFalree; aLeide, chez Luzac & van Damnte. & Les Fr er es Murray ; fr laHaye , chez J. van Ckef, De tune ,van Drecbt & LaFeuve Staatman; a Gouda. chez Fan der Klos; a Rotterdam, chez Bennet CfHaie, & D. Fis; d Dordrecht, chez Blufé; H Deventer, chez Leemhorst; a Groningue, chez Huyzingh ; a Nimegue , chez Fan Goor; a Arnhem, chez Troost ;a Bois-le Duc , chez 7. H. Pallier , atlambourg, chez J. G. Firebaux & chez les principaux Libraires des Pays-Bas.  L E POLITIQUE N°. LXIV. LUNDI, ce 29 AVPJL, 1782. Suite du CHAPITRE XXXXL Sur Mr. de Capelle, Seigneur de Poll, & fur ies Jervitudes féodales. Lorsque la Commune Jurée de la Ville 'de Zwol euc préfenré au Vénérable Magiftrat de la méme Ville, fa Réfolution du 5 de ce mois, concernant 1'abolition des Servitudes féodales & le rétabliffement de Mr. van der Capellen , &c. ce Seigneur trouva bon de faire remettre le 10 du même mois au Corps de la Commune 1'AdreiTe fuivante: Nobles ët Ve'ne'kables Seigneurs , Messiïurs les Jure's de la Commune de Zwol, La maniere également noble & décente dont, par vetre Réfolution du 5 de ce mois, vous avez trouvé convenable de fontenir le Soufligné dans fa pofition facheufe, lui infpire ces fentimens de reconnaiffance & de vénéra. tion que Ton doit naturellement attendre de la part d'un Régent & d'un Habitant qui, privé de tour autre fecours efficace, s'eft vu, depuis environ quatre ans, privé de la Proteétion des Loix de fon Pays. II fe trouve donc obligé de témoigner fa plus vive Reconnaiffance a Fes Nobles & Fénérables pour les efforts qu'ds ont bien voulu Tomb III. M ten-  C 178 ) renrer en faveur de fon rétabliffemenr, dont, a Ia vérité, il n'apr*rcoit juf'iu'a préfent aucun effet ni ne geiue aucun fruit ; mais dont il craint même de ne pouvoir obtenir 1'avantage, du moins pendant les fix premiers mois qui vonjt fuivre; par rapport a la diffolution apparente & procnaine de cette AfTemb.ée Provinciale; a 1'exemple de ce q-:'a Ik grande niornfic,rion , il tut oubiigé dMl'cyer par le patié, étant onftainment rer.voyé, fans qu'il iüt rienftatué, d'une Diete a 1'autre. Le Söufïïgiié prend donc la liberté de s'adreffer defectief k.fos Nobles & féuétables , dans la ferme confiance & perfuafion qae /'os Nobles £? fénérables continuerontd'agireu cela d'une maniere conforme a Ce que la Jullice de la Caufe du SoufTigné, la Digniié du Gf-uvernement, les lutététs & la Stifté des Habitans parattronnuërltera fis Noties & fénérables. Ce faifant, &c. (Signé) j. D. van der Capellen tot den Poll. D'ailleurs, Ia Commune renouvelle encore une fois fa Réfolution prife fur le Point des Services.de Bailliaqe, fur le rétabliffement de Mr. de Capellen dé Pol, la Décilion * la Piuralité a 1'Afiemblée de 1'Ordre Équeftre & des Villes; dans 1'attentc que Mrs. Ies Magiftrats voudront bien, pendant ce Recés même, en faire prévenir, par Mrs. leurs Députés a PAflemblée de 1'Ordre Équeftre & des Villes. Quant a la derniere Période de cette"Propofition , avancée par la Commune, Ie Magiftrat y répliqueen fubftance: Que Mrs. de la Régence avaient déja chargé leurs Commiués a 1'Affembiée-Provinciale d'agir, a cct égard, de concert avec les autres Villes. Mais, comme les Cominittés des deux autres Villes ne fe trouvaient pas pourvus d'Infliuctions relatives a eet objet, que d'ailleurs ils adhéraient au fenriment de la Noblefie- touchant les Services de Bailliage & i'Expuffiqp. de Mr. van der Capellen de l'Aflèrabléc, "il ne fut rien décidé. Ce qui obiigea la Commune a'prendre le 13 du même mois la Réfolution fuivante: „La Ccmmu„ ne perfiftè dans fes Réfolutions antérieures concernant ,, PImpofitiori fur fes Bfeéx & fe refte:" Tnfiftant de nouveau fur fa Réfolution prife toi'cbant le Point des Services de Bailliage, la R'éadmiffion de Mr. van der Capelle de Poll, & i'Articie de Ia Pluraütd de Voix : elle s'attend en- ' core  C 179 ) core que Mrs. de la Régcnce vcudront bien chsrger leurt Cömmittés a la Dieie , d'en donner Renoailfar.ee a 1'Ordre Équeftre & aux Villes, même durant la tenue de cette Asfimblée. Sars répondre a cette Inftance réirérée, Mrs.de la Régence ont trouvé bon de dhToudre 1'Alfemblée de la Commune Jurée jufqu'a une Convocation uhérieure. Ceux qui fe rappellen!: encore avec enthoufiafme les amples privileges donc jouiiTaient nos peres avant & dans le tems de la révolution, & qui laven- que 1'idée de ces privileges a entretenu dans la nation eet efprit dc liberté qui océra la prife d'armes contre PniTippe, contemplent avec plaifïr, dans ces Réfolutions des Communes, quelques reftes de 1'ancienne démocratie Belgique. En voyant avec quelle ardeur elles fe déclarenc pour Mr. de Capelle, plufieurs demandent encore ce qu'a fait ce courageux citoyen, pour avoir éprouvé une exclufion rigoureufe" des Affemblées d'Etat,& méme des animadverfions publiques qui, dans des tems plus tranquilles,auraient peut-être été portées plus ioin. II eft bon de favoir que les Etats d'Overyffel font compofés dc la Nobleffe & des trcis villes'principales, Deventer, Campen & Zwol. Ces trois villes forment une efpece de Souveraincté particuliere. Elles ne font foumifes aux Etats que pour les impofi. tions auxquelles elles ont' confenti. Le plat pays eft divifé en cinq bailliages, appelés Drolierjes, favoir Saland , Twente, Vollenhoven , Yflei-muiden & JHaksberg , outre le grand Bailiage de HalTelt. Le pouvoir des Baillis, Nobles ou Droits, eft nés-grand d rns les chofes civiles; auffi les procédures judicisi res n'ont pas été inutiles pour la reflreindre. Mais leurs prétentions fur la liberté civile des payfans, refpirent encore 1'ancienne fervitude féodale. Us pretendent avoir droit d'en exiger annueliement eertaines redevances qu'il faut racheter en payanr deux florins pour^ chaque feu. Ce joug, quoique léger, a teHetnerjÉ révolté ceux qui s'v trouvaiem foumis, qu'ils ont tout fait pour'le faire "lever. En 1631, eette rcdevar.ee annueüefut rachciée mr une com penM 2 * r fi.  ( i8o ) fation; & elle fut totalement abolic par uneDéelaration, confirmée en 1637. Cependant, 1'année 1776, Miffieurs les Drofts ima» ginerent d'aCquérir par une Réfolution des Etats, le droit de percevoir ces redevances. Comme 1 Is forment les cinq premiers membres de la Nobleffe, ils gagntrent facilement 1'Crdre équeftre dans les Etats; le Baron de Capelle était alors abfent; & les villes de Ueventer & de Caropen, ayant coDftnti volontiers, 1'affaire paffa avec le fuccès défiré. Zwol opina qu'elle voula t bien , par condefcendance , permettre que ces fervitudes fuffent rachetées , mais non par chaque payfan, téte par tête, ce qu: femblait retracer une fervitude odieufe dans un pays libre; mais par chaque village qui fe cottiferait lurmême en offrant une certaine fomme. Les Dnfts qui ne voyaient pas dans Ia fervitude par tête, 1'esclavage de leurs femblables , mais une mine d'or plus abondante que la cottifation, pvopcfée par la ville de Zwol, puisqu'on dit que la capitation vaut au Droft de Twente feul, jufqu'a milleducats, combattirent la propofidon de Zwol. Ils fïrent paffer la propofition qui flattait a la fois leur ambition cc leurs intéréts. Mais Zwol protefta formelicment contre cette démarche. Cette proteftation donna lieu d'examiner ces fingulieres prétentions. Elles parurent d'autant plus révokantes ,que les Diofis percevaient tncore faugmentation affignée a leurs honoraires, lorsqu'en 1631 , on avait aboli les redevanccs. Les affaiies fe trouvaient en eet état, lorfque de eer ordie même de citoyens qui jadis regardaient comme un appanage de ]t ur dignité, de tyrannifer leurs femblables comme des étres d'une efpece inférieure, s'élevaundéfenfeur de la liberté & des droits inhérens a tous les individus de 1'efpcce humaine. Le Baron d Capelle, Seigneur du Poll, plein de eet enthoufiafmequ'infpire la vertu dans les cceurs juftes,altiers, nourrsdcfeuumtns républicains tels qu'il s'en trcuve, dans  C 181 ) dans les tems les plns malheuveux, fe préfenta pour foutenirla caufe des payfaDsopprimés. Ce jeune Régent, enentranc dans l'adminittration s'était,dit on, propofé de ne jamais nccepter aucun emploi; auffi luivait - il par fa conduite un chemin tout opofé a celui que prefinent ceux qui af.'irent aux honneurs.. Dós 1'an 1773, il s'étnit déclaré vivement, en préfcnce même du .Stathouder, contre faugmentation des troupes de terre ; il (avait prouvé 1'inutilité, le danger méme de cette augmcntation; indiquant la marine comme le point oh devaient fe porter les cfforts de 1'Etat pour tirer cette fource elléntielle de notre profperité ,de 1'état de décadence ou elle fe trouvait, 11 ne déguifa pas fes feminiens fur d'autres fujets , non moins délicats II infifta, dans le même difcours, furie danger d'admettre ks étrangers dans les emplo?s auxquels les nationaux,a raifon de*irnppfiöons qu'ils payent, ont le premier & le plus jufte droit. Lorfque le tems arriva de renouveler les cominiflions en Overyflél, il écrivit une lettre au Prince, pour montrcr que les loix exigeaient que ces commiffions fuffent remplies d'aptès une nomination de quelques perfonnes. II rapelait au Prince,qu'il avait, ainfi que tous les autres Adminiltrateurs , juré 1'obfervation de ces loix. II reprófentait, avec courage & décence, les fuites dangereufes qui devaient réfulter de leur inobl'ervation. Mais cette lettre refta fins réponfe. Le Baron fit alors dans les Etats d'Overyffel, une propofition par écrit, oü il foutenait les mêmes principes. Mais la plus grande partie des membres, attachés au PrinCe, comme le font la plupart des Nobles des Provinces de terre, mépriferent les obfervations d'un Patriote ardent. Le Baron tenta vainement de s'oppofer a cette démarche par une proteftation. Le Prince remplit les Commiffions, lans attendre aucune nominatiou. l.'ès le commencement des troubles entre 1'Anglere & I'Amérique, le Cabinet de Londres avait formé le projet d'envclopper cette Répubiique dans fa M 3 1 que-  C ïS2 ) querelle. De la toutes les manoeuvres du Chevalier Yorke, pour répandre 1'idée que cette nation n'avait qu'un même intérêt avec 1'Angleterre ; que nous étions-même intéreffés a 1'aider a conferver les Colonies qui échappaient de fes mains; fous prétexte que la préponoérance Britannique était Ie fondement de notre exiftence cc la fource de notre profpérité. De Ia ces infinuations malignes contre la France, que les Anglomanes repréfentaient toujours comme l'Ennemie naturelle de notre commerce , de notre liberté , de notre religion ; de la enfin, tant d'efforts pour empêcherquele foulevement des Américains nè füt comparé a notre infurreélion contre PEfpagne;de peur que cette conformité d'hiftoirene déterminat nos difpofitions pour un peuple que notre exemple avait certainement encouragé a prendre les armes pour repoufier la tyrannie. En conféquence, le Roi d'Angleterre, pour commencer a enchafner ce pays a fes intéréts, envoya unc lettre preffante, pour obtenir ies Régimens Ecoffais qui font au fervice & a la folde de cette Répubiique. Le Prince d'Orange fe chargea d'en faire la demande. Üans toutes les Provinces, cette affaire fe concluait en faveur de 1'Angleterre avec une précipitation extraordinaire, Iorique le Baron de Capelle fe préfenta dans les Etats, pour s'y oppofer avecchaleur& fermeté. II montra tous' les dangers de cette démarche qui n'allait a rien moins qu'a nous enchafner a 1'Angleterre, & peut-être, d'après les événemens qu'on pouvait preffentir, a nous précipiter dans une guerre femblable a celle de 1742. La ville d'Amflerdam fit une oppofition femblable ; mais d'une maniere plus modérée & plus politique , ainfi qu'il convient a un Corps, qui ne marche jamais avec la chaleur & 1'impétuofité d'un feul individu. Le Bnron, toujours conduit par fa jaloufie pour la liberté, vit encore, dit-on, dans la propofition du Prince, un projet caché pour faire augmenter le nombre de fes'Régimens; en cherchant a faire remplacer les Ecoffais qu'on aurait envoyés au Roi Bri- tan-  C !$3 ) tannique; ainfi qu'il nrriva, lors qu'on fit partir des Troupes pour nos étab ïffemens dans les Indes-Occidentales. i ' . IL:fu[fit de jeter un coup-d'ceil fur notre conlhtuti-on pour . appercevoir ce que peut le caractcreardent & intrépide d'un Adrainifirateur eclairé, n'aimant que.ia Pauie, inaccefiibiea 1'intérêt. Ainfi le Baron devait embaraffer ilngulierement ceux qui étaient jnclinés a procurer 1'augmentation périlleufe de la pui flancc militaire, & a faire goftter les mefures dangercufes du Miniltere Britannique. On épiait 1'occaüon de 1'humilier; mais peu-apeu, fans recourir a des remedes. violens. On commenca par effacer des Regiftres toutes les Proteftations du Baron contre 1'avis du Prince. Enfin, arriva la querelle fur les Servitudes Baillivales. Le Baron, croyant, conformément aux principes qu'il avait adoptés , qu'cp quaüté d'Adminiftrateur, il était obligé, par fon devoir & par fon ferment, de s'oppofer a 1'injufiice & de prendre la défenfe des citoyens opprimés dans leurs droits & leurs libertés, entra dans 1'aréne contre les oppreffeurs des payfans. II fit parraitre, le 13 Avril i;78,un discours,adrefle a 1'Asfcmblée des Etats, en faveur des payfans d'Overyflel. II commenca par montrer que 1'établiffement primitif des fervitudes auxquelles on voulait lesaffujettir, s'était fait d'une maniere illégale. II prouva, par des documens authentiques , qu'eïles avaient été.abolies depuis plus de trois eens ans; que Pbiliope même le Tyran, s'y était oppofé. II n'oublia pas de rapeler la réfolution par laquelle les Etats avaient augmenté ies appointemens des Drosts en 1631 . a condition qu'ils n'exigeraient plus ces redevances odieufes. Cependant, pour indemnifer, en quelque facon, les Drosts acruels qui le.s avaient percues de bonne-foi, le Baron propofa de leur donner une fois pour toutes une fomme tirée de la caiffe de la Province & de prendre une réfolution formelle & folemnelle, par laquelle ces pratiques M 4 odi*  C 184 ) odieufes dans un pays libre, fulTent fuppri méés fans retour. Mais la générofité de cette indemnifation. fut rejetée. Loiii qu'on prêtat uneoreille favo* rable a 1'ardeur & a l'hofmilité des fuppliques que les payfans apporterent de tous cótés, a la leéturè de la propofition du Baron , fes adverfaires proflterent de cette occafion pour le perdre. Ce vertueux Adnnniftrateur , pour avoir eu le courage d'inftruire une portion opprimée de fes Concitoyens, des vrais fondemens de ia liberté, des droits & des intéréts de la foriété, fut dépeint comme un artifan de révolte & de fédition. On faifit cette occafion pour prendre contre lui des mefures violentes Pour fatisfaire a la fois le reffentiment que fon oppofition faifait naitre & le mettre hors d'état d'en faire encore ufage, il fut, le 23 Oétobre 1778 , par une Réfolution des Etats d'Overyffei, condamné, pour caufe de Séduétion du Peuple, de Calomnie, de mauvaife Intcntion &c. &c a retirer fon discours, d temoigner Jon repentir pour les expre/Jions injurieufes qui s'y trouvaienl , aiijï que pour l'avoir imprimê tif répandu & en promettant de fe mieux comporterd Vavenir. Vainement Zwol & ie Bourguemai'tre Greven de cette ville protefterenc contre cette Declaration, k la fois atroce & grotesque. Elie paffa a la pluralité; mais le cceur altier & généreux du Baron ne put fe foumettrea cette lache humiliation. Un Fiscalfutaulütót nommé pour le pourfuivre en juftice Mais avant qu'il eftt commencé les procédures, les Etats fïrent, au mépris des proteftations antérieures , paraitre une publication oh ils déclaraient vouloir bien, pour cette fois, pardonner mij'éricordieujement aux payfans qui avaient en 1'audace de leur préfenter des Requêtes; voyant bien, difaient-ils, qu'ils s'étaient laiffés égarer par Mr. de Capelle, a;outant en même tems que c'était la plus infigne des fauffetés, que d'avoir avancé qu'aucun Habitant eut jamais payé un liard pour le rachat des ferviiudes Baillivales. Cet arrêt fut affiché dans toute la Province & a la porte de tou-  ( isy ) toutes les églifes. Le Baron, voyant fes efforts patriotiques repréfentés dans un jour fi flétriftant pour fon hbnneur, eut recours au Stathouder, dans fa qualité de Chef de la juftice. II commenga par lui rappeler que fon ferment de Stathouder lui impofait 1'obligation de défendre les droits, les libertés & les privileges , non-feulement des corps politiques ; mais encore de chaque individu. Jl fe répandit en plaintes touchantes fur 1'injuftice exercée envers fa perfonne. II s'éteodit même fur des particularités qui prouvaient la juftice de la caufe qu'il avait défendue. II réclamait vivement rinterpofition conftitutionelle du Stathouder ; demandant ou d'étre rétabli dans fon droit d'affifter aux aflemblées d'Etat , ou d'étre jugé par un tribunal impartial. Mais le Prince, tenant le Baron pour coupable, regarda cette affaire fous un autre point de vue. II crut même que les Etats avaient droit d'exiger de lui une fatisfaction, 11 fut d'avis que la cour Provinciale de Gueldre, quoique remplie de membres unis par le fang, aux parties du Baron, fut autorifée, non a rendre juftice a Mr. de Capelle, mais a déterminer 1'efpece de fatisfaction que eet infortuné citoyen pourrait donner, afin d'ê re rétabli dans fon droit d'affifter aux Etats. On fent combien ce procédé dut irriter une ame aulli fiere. Le Baron envoya une feconde Réquifition au Prince Stathouder; proteftant fortement contre une décifion aufii finguliere, qu'il n'avait, difait-il, aucuncment follicitëe. II foutint que fon prétendu crime & fa disgrace certaine ne devaient pas dépendre d'une déclaration arbitraire ; mais d'une décifion prononcée par un arbitrage impartial qu'il accepterait , & qui connaïtrait les loix & coutumes d'Overyflel. Enfin , il répéta , ce qu'il avait déja prouvé, par des chartes émanées depuis 1'an 1336: que les Redevances Baillivales n'avaient jamais été percues légalement; qu'on ae les avait levées que par adreflè ou extorfion; fans M j ou- J  C i8ö ) oublier que les anciens Souverains, qu'un Charles» Quinc, qu'un Philippe qui avait fait abjurer fon autorite par fa tyrannie, avaient eu 1'ceii contre cette ufurpation, toujours renaiffante, au point d'affigner une amende au Drost qui .pcrcevrait une de ces Redevances cV au payfan même qui 1'aurait payée. II comparait fon hiftbire avec celle de Rutger deHaerfotte, Drost de S3land, qui, quoique appclé dcvant le même tribunal en 1Ó68 pour baute-lrahifon, conferva. pendantje cours des procédures, fa pij. Ce dans i'Affembiée des Etats- II annongait la réfolution au'il avait prife, au cas d'un plus long déni de juftice ou d'accomodement amiable, de recourir, quoiqu'a legret, aux voies judiciaires. Enfin, ja néceffité le forca è une démarche d'éclat. En témoignant combien il fouffrait do cette jufte néceffité, en fe montranr. toujours. prêt a accepter un accomodement a Tamiable, en ibllicitant, a eet effet i 1'interpofinon & les bons offices des Député.s Ordinaires ; enfin , en proteftant, folemnellement & fous ferment, de la pureté de fes intentions, il demanda une citation contre les Etats pour caufe de diffamation ; requérant qu'ils fuffent condamnés ou, a fuivre, dans peu, 1'éxécution de leur aclion de menaces, ou a 1'enfevelir pour toujours dans 1'oubli , & a lui donner la fatisfaction réellc qu'il avait droit d'exiger, en qualité d'Adminiftrateur, comme eux, & d'innocent perfécuté. Mais après les traitemens que Mr de Capelle avait éprouvés, i! devait s'attendre h tout: fa citation fut rejetée. L'Ordre équeftre déclara, fans détour, qu'il ne voulait paraitre en juftice avec lui que fur (e pied propofé par ,1e Prince-Stathouder. Les villes garderent le filence. Ainfi, par une fatalité bien revoltante dans un pays libre, la juftice fe trouva fermée a celui qui ava'it voulu la faire rendre aux au-, tres. Ainfi, un Citoyen, un Adminiffrateur qui a montré fon patriotisme par fa conduite .fa vertu par fon défintéreflement, & fes lumieres par fes écrits, fe  ( '87 ) fe trouve non feulement depuis trois ans hors d'état d'emploidans fa patrie . que fes principes fur la Neutralité, fur 1'amélioration de la Marine, fur la proteétion du Commerce, fur le maintien des Loix fondamentales auraient pu fervir fi utilement; mais il fe voit encore flctri par une déclaration pubüque. 11 eft vrai qu'on ne 1'a pas abfolument dépofé, comme vingt-neuf membres du Confeil de Campen avec le Bourguemaitre Roldanus , le furent pour s'être oppofés, fous la minorité du Prince a un Reglement qui leur paraiffait contraire aux Privileges des villes. II eft encore membre de 1'Etat. On lui donne entrée libre aux documens de I'Afiemblée: fes honoraires de cent florins par an, en qualité de Noble infcrit dans 1'ordre équeftre, lui font payés régulieremcnt; mais tout acces aux Affemblées lui eft fermé; le placard oh il eft déclaré caloraniateur & féduóteur du peuple fublïfte encore ; non-feuLment on ne penft' pas a lui faire réparation d'honneur; dans une des.dernieres Affemblées provinciales , la Nobleffe, fur fes follicitations preffantes d'un arrangement a l'amiable, fit méme une déclaration finguliere. Elle répondit qu'une celle démarche biefferait 1'honneur & la confidération des Etats: qu'ils en feraient refponfables a la poftérité; que leur dignité exigeait au contraire que le Seigneur de Poll , leur fit une fatisfadlion judiciaire de 1'atteinte qu'i! avait porté a leur honneur; expresfions d'autant plus ridicuies, que non feulement la juftice n'a jamais été fermée ala Nobleffe, mais que le Seigneur du Poll a, depuis le mois de Novembre 1779 > faiC tOLls i~es efforts pour amener fes parties devant fon tribunal. En lifant ce régie, qui, quoique partial, paree qu'on doit 1'être pour une caufe jufte, ne contient cependant que la plus exacte vérité, on fe demande quel intérêt pouvait avoir le Baron de Capelle, endéfendantune portion d'hommesopprimés? Les payfans d'Overyffel ne pouvaient lui ouvrir la porte ni des hon-  ( 188 ) honneurs, ni des richefies. Attaquant les prétentions d'un ordre diftingué d'hommes, dont il était membre par fa naiffance , il attaquait fes oropres intéréts. II devait s'attendre au reffentiment des autres Nobles, a la disgrace des difpenfateurs d'emplois, aux perfécutions des uns& des autres, & peut être, comme il n'arrive que trop fouvent, k 1'indifférence de ceux qu'il voulait fervir; mais qui, ayant des ménagemens a prendre envers leurs oppreffeurs, auraient pu lui répliquer : nous vouions porter ce joug;que vous importe, fi uous ne te fentez pas! Hélas ce langage n'a été que trop fouvent celui des peuples familiarifés a 1'esclavage , comme les Compagnons d'Ulilïe s'habituerent a leur métamorphofe. L'homme eft fait pour étre libre; la liberté eft un appanage eflentiel de fon être; fon cceur fent un penchant naturel a fe révolter contre le joug; mais 1'éducation ne change que trop fouvent ie fonds des inclinations; 1'habitude devient une feconde nature; & des peuples entiers fe glorifient tous les jours de faire partie d'un grand empire, foumisèunjoug de fer. Mais les *payfans d'Overyffel n'ont pu s'empêcher, dans un pays oh tout retrace les monumensde la liberté, de fentir réveil Ier dans leurs cceurs, le penchant naturel qui dit: je fuis libre. Us ont élevéla voix: dans un tems ou les fentimens changent tous les jours en mieux; elle ne fe perdra pas fans doute dans les airs. A n'envifager même la queftion que fous le point de vue des droits de 1'humanité & de la nature, ces prétentions font odieufes& révoltantes. Comment ! une Province entiere doit-elle être réduite a 1'esclavage pour fatisfaire Parflbitieufe cupidité de cinq individus? Dans une Répubiique bien gouvernée, n'eft-ce pas a 1'Etat & non è des individus que 1'on doit p'ayer les impótsV Touteimpofition par tête ne renferme-t-elle pas quelque chofe d'odieux qui révolte des ames libres ? Indépendament de 1'abolition prononcée formellement contre ces fervitudes, 1'offre de les fupprimer fans retour en ©f-  C «89 ) offrant une efpece d'indemnifation aux intéreffés, dcvrait-elle rencontrer des oppoütions? Ce n'eft pas , comme on voit , par les pieces inférées a la tête de ce Chapicre , feulement la ville de Zwoll, qui femble comparaicre en faveur de ce Patriote courageux. Les Communes de Deventer, conjointement avec celles de Zwoll, viennent de faire un pas éclatant en fa faveur. Mais ces Communes ne pouvant plus fe faire entendre, a caufe du filence qu'on vient 'de leur impofer, quand ce digne citoyen aura-t-il recouvré fes droits? Les liaifons avec 1'Angleterre font rompues è jamais. Les nouvelles relations, oü la Répubiique eft fur le point d'entrer avec I'Amérique, promettent des avantages confidérables a ce pays. Onne peut n'er que cette alliance prochaine ne foit un coup d'état pour la Répubiique. Dans un tems oü les principes adoptés par ce Seigneur patriote, deviennent le fyftéme de 1'Etat, le laiffera t on languir dans 1'obfcurité , privé des fervices qu'il peut rendre. • Ce n'eft que depuis peu que nous avons eu 1'oc • cafion & 1'honneur de lier connaiffance avec Mr. le Baron de Capelle de Poll; d'après ce que nous avons vu & d'après cc que nous favons, nous pourrions tracer fon caraclere ; comme nous n'y mettrions que les traits avoués par fes adverfaires, mais fous un autre point de vue,& que nous anticiperions fur notre plan de tracer 1'hiftoire des affaires préfentes, nous laifferous aux lecleurs a 1'apprécier & a le pemdre, d'après les faits que nous venons d'expofer. - Nous ne fommes point du fentiment de ceux qui, de cette hiftoire lamentable , ont tiré des conféquences odieufes contre le caracfere de notre Prince-Stadhouder. On fait que la multiplicité de fes occupations 1'a empêché de s'inftruire du fonds de cette" affaire ; on fait, a n'en puuvoir douter, qu'il a  C 190 ) a fouvent défiré qu'elle eüt pris un tour bien différent; &que, fur les infortnations u'térieurcs qu'ila regues, il s'eft trouvé to.it-a-fait diipofé a faire rendre juftice au Gentil-homme' opprimé. Qu'on ne dife donc pas qu'il a été 1'Auteur de. tous ces troubles en Overyffel, & que les Nobles n'ont été que les inftrumens de fon resfendment particulier contre le Seigneur du Poll. Auffi a-t-on lieu d'espérer que le Stathouder cédanc, ainfi que le Roi d'Angleterre , a la néceffité d époufer un nouveau fyftéme fur les ruines de celui qui a porté les deux Etats fur le bord de leur ruine, faura faire rendre juftice aux bons citoyens perfécutós. SyJMme politique de la Répubiique d'après des documens publiés. Un des partifa'ns aveugles des Anglais, perfides du Stathouder , & conféquemment détra&eur de tous les bons patriotes, continue toujours a défendre nos ennemis, a répandre des infinuations malignes cpntre nos nouveaux alliés, II ferait inutile de répondre férieufement ace méprifable Ecrivain. II fuffira d'inférer ici les pieces publiques qui peuvent montrer qui des Ecrivains des deux partis fuivent le fyftéme du gouvernement, ou qui font ceux qui voudraient foulever la nation contre les principes & la conduite de 1'adminiftration actuelle. Le 5 de ce mois, è Enkluüfen, dans une AfTemblée de la Régence, Mr. Augufiin Hendrik Duyvens2 , Bourguémaitre-Régnant, ne s'eft pas contenté d'exprimer fon sverfion pour une Paix particuliere: mais, voyant la pluralité l't: déclarer contre lui, il demanda que fon Avis (üt inférédans les Notules; ce qui lui ayant é'é refufé, en vertu,dit-on d'une certaine Réfolution , donton ne put aCigner la date' ce couragcux Régent fe rélerva, pour fa décnarge, de rel cou-  courir a un autre Tribunai, celui du Public & de la Poj. térité. II y avait, tlit-if, un Serpent cacrhé fous les offres da 1'Angleterre. I Les Anglais étaient, il el! vrai, ros anciens Alliés, nos Freres de ReHgion; mais de tels Alliés, itetels ïreres avaient, par .leur injufte'Aggreffion; perdu toutes leurs relations avec nous. lis n'avaient pis feulement fou* Ié aux' pieds'lï'fainteté des Engagemens ;' ils avaient commencé par violer le'Traité dt? Breda par le tfrigandage & lï Piraterie; ils a/aient pris par una Violence fcandaltu è nos Colonies & rumé iaehenient les (hbitans. Enfm, voyant aftuellement que notre Marine eft furun meilleur pied;que la France a repris tous les Établiffemens qu'ils nous avaient voléi& que, par les précautions qu'elle a prifes pour fauver notre Cap & nos Iudes-Orientales & par d'autres Services encore, elle eft devenue notre Alliée, au point que nous fommes prêts de concener les Opérations avec elle, pour porter un plus grand préjudice a 1'Ënnemi; & furtout qua cette Province a déja reconnu 1'Indépendance de 1'Améri» que & Mr. Adams pour Miniftre de ce nou vel Etat, les Anglais coramencent a nous offrir 1'OlivedelaPaix. Mais,en acceptant cette offe,, fur la Bafe du Traité de 1674 & 1'Armiftice propofë /nous reconnaiffons de nouveau ce fatal Traité; & dans le même tems le ruineux Acte de Navigajjon de Cromwel en 1654; ... cc nous rentrons, comma auparavant & p m' toujours, fous les Liens de 1'Angleterre. Ainfi, ce Royaume conferverait par 1'un ou 1'autre cóté cette puiffmte influence fur notre Conftitution, qui nous a portés fur le bord du précipice; fur quoi, nous ferons toujours expofés a fes coups, a fesviolations, comme nous 1'avons éprouvé avant cette Guerre. Voila donc toute 1'indemniiation que nousretirerions des Pertes énormes que nous avons eifiiyées? Nous aurions été outragés & pillés;&l'oa nous rendrait comme une faveur le Droit que nous avions déja avant la Guerre! Non ! i'Angleterre eji épuifée; quant a nous, la plus grande perte que nous pouvions faire, eft faite; les Vaiffeaux qui pouvaient mettre en Mer cette Année font, ou vendus ou non-prêts, & nous avons une occafion qui ne s'offrira peut-être jamais plus, d'abjurer a jamais tout Traité & conféquemeut toute Dépendance avec 1'Angleterre. Paisque les Dépenfes font faites, nous divons en tirer parti; nous n'avons a faire qu'a un Ennemi épui- fé,  ( '92 ) fé, & c!eft le moyen d'obtenir une Paix-Générale. En un mot, nous ne pouvons faire une Paix particuliere avec 1'Angleterre, fans le Confentsment de la France & fans la Stipulation exprefle de pouvoir commercer Iibrement dans V Amérique-Septentrionale. En conféquence , je fuis d'Avis que nos Députés aux Etats foient chargés fpécialement de rejeter les Préliminaires ofFerts par 1'Angleterre, jufqu'a ce qu'on fache s'ils font du goüt de la France, & que par la Paix qui fe ferait , tous les anciens Traités entre cette Répubiique & 1'Angleterre foient déclarés annullés & la Liberté entiere de la Navigation flipulée. La Suite au N'. Procbain. Ces Feuilles périodiques parailTert régulierement, tous lei Lundis a Amfterdam , chez J. A.Crajenfcbot; a Haat' lem, chez IValree; ei Leide, chez Luzeic & van Damme, & Les Freres Murray ; a la Haye , chez J. van Cleef, Detune,van Drecbt & LaFeuve Staatman; a Gouda, chez Fan der Klos; a Rotterdam, chez Bennet &Hake, & D. Fis; a Dordrecht, chez Blujfè; a Deventer, chez Leemhorst; (i Groningue, chez Huyzingb; H Nimegue , chez Fan Goor; a Arnhem, chez Troost; ü Bois-le Duc , chezj. H. Pallier , a Hambourg, chez j. G. Fircbaux & chez les principaux Libraires des Pays-Bas.  t L E POLITIQUE N°. LXV. LUNDI, ce 6 MAI, 1782. Suite du CHAPITRE %LÏ. Sur te fyftéme de la Répubiique d'après des documens publiés, De tous les Documens qui ont paru, fur les citcon^ ftances dans laquelle fe trouve cette Répubiique, on n'a rien vu de plus fort que la Requétepréfentée par les Habitans / d'Enkhuifen. Ils ont trancbé le mot. Ils appellent formellement les Anglais, nos Ennemis Naturels. Aptèsavoir remercié Ia Regence d'avoir pris une Réfolution favorable aTad. miffion de Mr. Adams, eu quali.é de Miniftre-Plénipotentiaire des Etats-Unis de I'Amérique, ils ajoutent, que le nom de ceux qui ont contribué a ce grand ouvrage fera erf Bénédiaion chez la Poirérité la plus reculée. Ils repréfentent 1'Union entre les deux Républiques comme la plus Naturelle qui pouvait fe former, foit par la conformité d'Histoire & de Conftitution, foit par les intéréts réciproques de Commerce. lis exhortent leurs Régens a rejeter 1'offre d'une Paix particuliere, que 1'Angleterre ne leur offre que par la crainte des fuites facbeufes qu'elle doit éorouver d'une Alliance entre I'Amérique & les Pays-Bas-Uuis. Dans ces circonftances critiques, ils ne peuvent s'empêcher de' repréfenter avec cette refpeftueufe liberté qui caradéiife" les libres Weft-Frifons, combien ils font prévenus contre ces offres artificieufes; quoique la Guerre foit le plus graiirï .ToMElIf. r fiéW  C m ) Hém pour la Pêche, qui forme une portion de leur fuhfi. ftance; mais qu'eile eft encore piéferabie a une Paix équivo» que & défhonorante. Un Lord ofa dire en plein Parlement, en psrlant de la Hollande en 167J, qu'il fallait détruire Canhage; nousdifons a notre tour ;& tout le Peuple répond Amen) que Torgueilleufe Albion doir éire humiüée, li nous voulons goiïter les douceurs de la Paix. Jaimis Royaume fous le Ciel ifégala 1'Angleterre en perfidie, ingratitude , cruauté, in- folence & tyrannie. A ne commencer que par Ie Regne d'Elifabeth, a quel point cette Reine n'a-t-elle pas porté Ia diiTïmuIation , finfidélité, 1'ambition envers cette Répubiique naiflante F— L'odieux Tyran Cromwell , avec quelie indignité n a-t-il pas rompu les Traités les plus factés? Son Acte de Navigation, fes Barbaries contre nou* dans toutes les Parties du Monde, fes perfécutions contre le Reftaurateur de notre Liberté, Gnillaume III, en font des preuves' convaiucarttef. Rappellerons-nous la funefte Paix de 1713, oü,parla corruption du Miniftere Anglais & la Mcheté de ta Reine Anne,nous perdimestous les fruits d'une Guerre longue & fangiante? Les Supplians, après avoir rappelé , fous les traits les plvs odieux, les Pirateries des Anglais fous le Regne actuel, n'oublient pas cette Réponfe infolente du Lord Suffolk a Mr. de Welderen; que; quoique le Commerce en queftion ne fut pas prohibé par les Traités, „ il n'entrait pas dans la corvenance du Miniftere Anglais," de s'en tenir aux Trcités dans les circonftances préfentes. ■ Ils n'oublient par les cruautés commifes par Rodney. Ils finiffent par aflurer que 1'Angleterre ne faurait ê;re notre Aiüée naturelle, ni notre Sceur de Religion; car fa conduite & des preuves authentiques peuvent monrrer que la plus grande partie de cette Nation eft infectie d'Impïété & de Déifme. En conféquence , ils deirandent qu'on agifte au plutót de concert avec la France ; qu'on fe lie des Nceud? les plus érroit.- avec nis Freres les Américains-Scptentrionaux; que 1'on ujette avec une noble fiené les offres de la Cour Anglaife & qtt'on n'ait aucune confiance dans tio.re Ennemi naturel , le Roi d'Angleterre , &C. &C. &c. Les Habitans de Schiedam ont préfenté Ie 8 d'Avril une Requête, oü i's fe plaignent vivement qu'on aitmanqué a laPromeste faite depuis fi longtems de mettre le Commerce  merce & Ia Navigation de ce Pays dans un état refpeftable-, de défenfe. Ils remercient en même teinsla Régence „ de la conduite qu'elle a tenue, relativement a leur Requêta pour qu'on reconntit 1'indépendance de I'Amérique Septentrionale , qui pr.omet d'étre jifalutaire, eff é^ant qu'un Traité avantageux de Commerce, fi vivem nt défi.é, au cas d'un délai inattendu ou de quelque Avis declinatoire de Ia part' des autres Hauts-Confédérés,, (era cui>clu par les Etats de cette Province , de concert avec ceux de Frife & les autres * qui voudront imiter 1'exemple donné le 9 oanhre 1640 par les Province de Gueidre, de Hollande & de Frife, quifirent alors avec le Dannemarc un Traité d'Alliauce Défenfive&de Commerce, relativement au Péage du Sund." Ilsajoutent, „qu'ils feraient injure a la Politique profonde, au Jugement éclairé de leur Régence. s'ils fuppofaient que Ia crainte ou-quelque autre idéé püt leur faire écouter les Intrigues artificieufes & les Propofitions furement Enneniies de la Grande-Bretagne, par la iviédiation d'une Souveraine, qui depuis trop longtems amufe & beice ce Payf de Promesfes; & qu'Elle ne perdra aucuns momens qui déviennent tous les jours plus précieux, pour faire avec la France & I'Amérique dévenue libre un Traité d'Aiïiftance, d'Amitié & de Commerce, qui, dans la dtftination favorable de la ProviJence qui s'off e , ferait deftiné a obtenir par le tems une Paix qui, aux yeux & pour le Repos de 1'Europe , füt humiliante pour 1'injufte Breton & honorabie & avantageufe pour ces Pays. Aucun de nos Zèlés & Bien Intentionnés Concitoyens nebalancera pas un moment de convenir qu'une Réconciliaiion fur la Basfed'un Traité foulé trop fcandaleuf.-ment aux pieds par les Bretons & d'une Suspenfion d'Armes qui, dans ces circonfiauces,' ne ferait favorable qu'a nos injuftes rtggresfenrs, & ne ferait pas de la moindie utilité a notre cm re Patrie, pourfon Commerce, fes Navires & fes Etabüsfemens; Irurs offres ne venant que de 1'épuifemerit oü la Juftice Divine a déji réduit I'Anglettre & de la crainte que notre Union avec la France, 1'Efpagne & I'Amérique. nous mette.en état de nous indeminifer a notre tour a leurs dépends, &c. &c." La Proclamation de flnciépendauce-Américaine & la Réfolution de concerter Ia Guerre avec ia France, don. iieront , a ce qu'on efpere , une nouvelle énergie a nos Opérations publiques. La maniere tont on s'eft défidé pour ce deruier Point, i,e p^ut être bien faife Na qua  C 196 ) que par 1'Extrait fuivant des Réfolutions de L. H. P. Ies Seigneurs Etats-Généraux des Provinces Unies des Pays-Bas. Lurdi le 25 Mars 1782. Oui le Rapport de Mr. de Lynden de Hemmen & autres Députés de Leurs Hautes Puisfances pour les Affaires Etran. geres, en conféquence de la Réfolution Commisfonaie du 12 de ce mois, étant examiné le Mémoire de Mr. le Duc de la Vauguvon, Ambasfadeur de Sa Majefté le Roi de France auprès de la Répubiique, pour établir avec cette Cour la maniere dont on pourrait arranger enfemble pour la Campagne prochaiue , les Opérations fur Mer contre t'En" rtemi Commun. Sur quoi ayant été délibéré, ilaéié trouvé bon & arrété qu'il fera répondu a Mr. le Duc de la Vauguyon , Amba.-fadeur de Sa Majefté le Roi de France, fur fon dit Mémoire. „ Que c'eft avec bien du contentement & de la fatisfaction que L. H. P. ont recul'asfurancedela Continuation de 1'Affeaion de S. M envers la Répubiique, de fon defir de favorifèr leurs vues; ainfi que de la difpofition favorable de S. M. de lui donner des preuves réelies, tant car.s la Conjorfture piéfente, que dans toutes les autres cü le Repos & Ie Uien - Etre de la Répubiique feraient intéreflesj que L. H. P. ayant déja dans cette Guerre rrcu des preuves de 1'Amitié de S. M. è l'égard de leurs Posftflioiis dans les Indes Orientales & Occidentales, & particulierement a 1'occafión de Ia Conquête de 1'lfie de St. Euftache, con. quife par fes Armes, en font pénéttées de Reconnaisfance, & que n'ayant rien plus a Cceur que d'ertretenir & decultiver par tous les moyens convenables 1'Afftftion de S. M. pour cette Répubiique (Affeaion que L. H. P. mettentau plus haut prix,) & d'en agir a eet égard avec foute laCandeur cc la Droiture les plus parfaites, Elle? en avaient pris en coméquence leurs Réfolutions du 4 du courant, dont Elles avaient donné coni.aiffarcea Sa ftlajePé," „ Qu'a l'égard de la Réfolution, par laquelle S. A. le Prince d'Orange & de Nasfau eft prié, dans fa qualité d'Amiral Général de l'Union , d'arrangcr peur Ia Campagne prochaine avec Ia Cour de France, un Concert convenable d'Opétations Navales contre rEnnemi commun, L. H. P, »yant fait attention au defir de S. M., contenu dans ledk Mémoire, tendant a ce que L. H. P. annoresffent ultétreu- re-  ( 197) rement leur intemion fur un fujet fi important par une Déclaration amicale & précife; Elles ne font point de difficulté de déclarer ouvertement d és-a-préfent, que lorfque le Pl?n des Mefures communes fur Mer contre 1'Ennemi commun fera arrêié, L. H. P. ne s'écarteront réciproquement cn aucune maniere, ni pour quelque raifun que ce foit, de 1'exécution du Concert d'Opérations navales arrêtées pour la Campagne pmchaine, & qu'EIIes ne s'en lailferontdétourner que d'un Confentement réciproque. Et fera remis Extrait de la prefente Réfolution de Leurs Hautes Puisfances par le Directeur Tinne, dans 1'abfence de 1'Agent van den Burch de Spieriugshoek, a Mr. le Duc de la Vauguyon, , r rr n -a Accordè avec le fujdit Regtjtrt. On fait que le Plan dont il eft queftion, eft enfin arréié & conclu, & qu'en conféquence SVTr. le Duc de la Vauguyon tient des Conférences avec S. A. S., conjointement avec un Committé. Cette maniere de procéder doit fingulierement étonner les Bretons qui, a la Nouvelle de la Pro., pofition d'une Paix particuliere, faite par le nouveau Miniftre Anglais, ne fuivant que 1'opinion défavorable qu'ils avaient concue du courage & de la fiterté de notre Nation. annortcsient emphatiquement que neus nous empreflerjons de courir au devant de cette offre. Que le mépris & 1'indignation avec lefquels cette offie a été rejettée, leur apprennent enfin que la Nation Bel^ique, d'abord difficile 4 fe déterminer, ne revient pas aifément des imprefiions qu'elle a recue?. Auffi Mr. Wentworth , a fon retour en Angleterre, n'a pu s'empêcher d'avouer qu'il n'y avait aucune efpéran'ceque 1'offre d'une Paix particuliere put réufilr, vu les difpofitions des Hollandais; il parle av.c le dernier étonnement de la chaleur & de 1'aftiviré avec lefquelles tous les Difttifts des Provinces Unies pousfaient i'Affaire de laRcconuaifiance de 1'Indépendance Américaine. Extrait du Regiftre des Réfolutions de L. H. P. les Etats-Généraux des Provinces-Uuics. Lundi 22 Avril 1782. MonfiVur Boreel, qui a préfiié a l'Aflemblée Ia Semaine N 3 det-  C 198 ) 'derniere, a rapporté a Leurs Hautes PuiiTances & leur a norifié, que Mr. John Adam-;, Envové des Etats Unisde l"\mérquj, s'érait rendu Si ne i demier chez lui & lui avait r-tnis u' e Lnrre ;fe 1'AflTërhbTèe du Congrès, éciite 'a Philadelphie le ter Janvier 1781 & conrenant une Créatie: p jur Ie fufdit Mr. Adanrn, afin de réfider en qualité de .on Miniftre-Plénipotentiaire prés de L. H P.: Sut quoi dénbiéré', il a è'é tro.ivé bon Sr arré.é de déclarer par la Préfeme, que le fufdit Mr. ^darhs eft sgréable a L. H. P.; qu'il fera reconnu en qu.ilité de Minitlre - Piénipoteutaire , & qu'il lui fera aecordé Au ^ence ou üffigné des Coiinri if'ires, lorfq.i'il le deraandera. Et fera donnë connaiffttr.c*: de ce que defïus au fusdit Mr. Adams par 1'Agent van der Buren de Spieringshoek. W, van CtTTERS, vr. H. Fa gel, Toutes les pieces que nous venons de rapporter fervent è confacrer les principes du Politique'/iolltnda-s. Ceux qui s'efForcent de Ie faire paffer pour un b ü «,un ■ 'émagogue . qui a précip té la nation dans 'la démarche qu'elle vient de faire, avec tant d'éclar en faveur des Etats-Unis de I'Amérique, lui •font un honneur qu'il ne croit pas mériter II aurait affez d'amour-propre pour fe faire gloire d'un événement aufii brillant; s'il avait contribué pour quelque. chofe a fa réuffite. Mais il a trop de bonne foi pour facrifïer l'intérêt de la vérité a celui de fa gloire perfo' elle C'efl; la démarche infenfée de 4'ancien Miniftere Anglaisen rompant avec la Répubiique; c'eft la politique fublime de MM. de Vergennes, Franklin & J. Adams; c'eft ia reprife de St. Euftache, de !>emeraiy, d'EfTequebo, des Berbices par les Fnngais: c'efl le tonnerre de 1'artillerie, rqui fit a York.town tomber une armée Antjlaife aux pieds des Francais & des Américains; c'eft le fuccès de la propofit'on extraordinaire du GénéralConwa'y; c'eft la chute de 1'anci n Miniftere Anglais, voila ,ce "quia fené les liafons decepaysavec )aFrance& I'Amérique Le Poltiq'}> en expofer le tableau fidele, qu'en Rhéteur qui cherche è remuer les efprits. 11 ierait finguher que e -Politique Uollandais & con^rs euffent determmé une deiwrche oh toute la narion s'eft cmpreffee de le porter. II aurait, avec fes confors, une gloire donc peu d'Orateurs.dansaucune Répubiique,ayeot jamais pu fe flatter Cette gloire ferait d'autant plus fingufiere qu'n écrit d ns une iangue qui n'eft pas la 1 ationale, & qui n'eft guere entendue que des perfonnes d'un certain rang. Au reüe, ceux du parti contraire ont eu toute liberté de publier auffi leurs fentimens k les entendre, leurs produftions étaienc autant de chefs d'ceuvres; il faut aufii leur accorder la gloire d'avoir défendu leur caufe avec toute l adrefie, toute 1'érudition, & toute i'habiiete qu on pouvait v mettre. Mais pourquoi les événemens fontfis venus* a 1'appuy des Sopbvmes Ff faux raifonnemem du Politique-UuHandais tjf Confors ; lorfque le fentiment contraire écaitfibienprouvédansdeschefsd'ocuvrc .publiés la p'üpart,non par lambeaux, mais en entier; non dans une feuille obfeure , ma! écr te & méprifée; mais dans ie célebre Courier] du Baskbtn, qui plaifante fi finement &qui fefait lire avec tant d'intérêt de ceux même qui ne penfent pas comme lui9 Mais pourquoi la nation Hollandaifeeft-elle dépourvue de goftt, de jugement & de lumieres, au noint de préférer des Raifonneurs Sophiftiques qui ont ourCi fa perte a des Ecrivains qui briilent k la fois par la jufteffe des raifonnemens , par la déheateffe des penfées & par la nobleffe des fentimens ? II eft vrai que 1'idée d'envoyer un Miniftre Américain de la part du Congés parate avoir été infpirée par le courageux Baron de Capelle , un des plus intrépides membres de 1'ancienne oppofition Mais combien d'événemen -étaient néceffaires pour la faire réusfir? Ilafallu que Mr Laurens fut pris. II a rallu que la corde qui tenait la caifte de fes papiers, n'ait pas été cou'xte aflez promptement. II a fallu que fes papiers aient fervi de prétexte aux Anglais qui, cherchaient a rompre en guerre ouverte avec cepays dans 1'idée , fuivant les Lord ISorth & Stormond, N 4 q« m  C ) 9u'uri Ennemi déclaré eft préférable k ün faux ami. ?iC* Aqu'en con{~équence le Congrès ait nomme Mr. Aaams pour remplaccr leur Envoyé tiétenu 3 ja Tour de Londres. II a fallu que les Anglais aient pris St. Éuftache & les établiffemens de la Guyane Hollandaiie. Jl a fallu que tous ces établiilemens aient été repris par les Francais. En un mot il a fallu la prife de Cornwallis, éi d'après ceia, la réfolution de fe borner a une guerre défcnfive , de faire une paix ou une trêve avec 1 Amenque : aaand on raffemble tous ces é-vénemens , qu'on dife fi ce n'eft pas leur éioquence ioudroyante plutöt que les raifonnemens de tel ou tel Auteur politique qui ont déterminé cette nation a déclarer hautement & folemnellement 1'indépendance de I'Amérique , & a s'unir étroitement avec la France? Ne femble-t-il pas ,encontemplant 1'enchainement de tous ces faits, qu'il y avait une providence, fatiguée des crimes des Bretons, &lespréparant, par toutes ces épreuves douloureufes a la derniere humiliaticin qu'ils vienncnt d'effuyer de la Répubiique. En effet, la maniere dont 1'indépendance Américaine vient d'y étre reconnue, & 1'offre d'une paix particuliere rejetée, font les fouffiets les plus fanglants que 1'hngleterre pouvait ia* maisrecevoir. Ce ne font pas Ia, il faut 1'avouer, des vaiffeaux de 70 canons; mais de pareilles réfolutions annoncent dans la nation une énergie, un enthouüasme, qu'on aurait cherchés vainement auparavant; & de cette énergie & enthoufiasme, de la part d'une nation, encore riche & puilfante, on ne peut s'empêcher d'attendre de grands efforts & de v-igourcufes opérations. R S. II nous eft échappé dans la feuille pénaltieme, page 168, un anachronisme d'autant plus effentiel, qu'il fert de bafe a un raifonnement en faveur de Mr. Adams. Le mémoire de ce Miniftre Américain aux Etats-Généraux ne vint point, comme nous rayons dit, alafuitede la démarche de la ville d'Am-  ( 201 ) fterdam , contre Mgr. le Feld Maréchal , Duc de Brunswich; puisque ce mémoire eftdacédu 19Avril & celui de MM. Temminck & Rendorp du 8 Juin. Nous n'avions confulté que notre mémoire pour travailler ce morceau; & malheureufement elle nous a été infidele Ainfi 1'on pourrait faire difparaïtre 1'erreur de la période en queftion,- en la redtifiant de la forte: ,, Connaiffant a fond Ie grand art de pro„ fiter des circonftanccs dont tant de Miniftres, re» gardés de nos jours comme de grands hommes ,, dEtat, n'ont jamais fu le fecret, il faifit le tems „ de cette fermentation , pour inflruire les Etats,, Généraux du caractere qu'il était chargé de dé- ployer auprès d'eux Ses lettres de créance, da„ tées du ïer Janvier 1781 , arriverent a propos„ Le démarche qu'il fit pour inftruire les Etats Gé. „ néraux, fut comme un fignal pour la ville d'Am- fterdam. Peu de tems après elle préfenta au Prin- ce-Stathouder fon fameux mémoire contre le Duc „ de Brunswich." Bien perfuadé &c. Ce paftage ainfi rcétifié , n'offre plus de prife a la cenfure. A cette occafion, il n'eft pas inutile de finir ce chapitre par les paffages fuivans tirés de la Révolution de 1'Amérique par le fameux Abbé Raynal. „ Si 1'Apotliéofe eft due a 1'Homme, c'eft a celui,fans doute, qui combat pour fon Pays. Mettez fon Image dans vos Temples. Ce fera le Culte de la Patrie. ■ La Poftérité dira : Voila ceux qui ont afFranchi la moitié d'un Monde, & qui , travaillant & notre bonheur, quand nous n'étions pas encore, ont empéché qu'a notre Naiflance nous n'entendiiïions des Chaines reteutir fur notre Berceau. Que n'ai-je ncu 'e Génie & 1'Eloquencedes célebres Orateurs d'Aibents & de Rome! Avec quelle Grnndeur, avec quel Enthcfufiafme, ne parierais - je pas des Hommes généreux, qui,par leur Patience, leurSagefle & leur Courage, éleverent ce grand Edifice .' Hancock, Franklin, les deux Adams furent les plus grands Acteurs dans cette Scène Mémorable. La Poftérité les con- paitra tous. ■ . Le Marbre & le Bronze lesmontre"N 5 tont  C 202 ) tont aux fiecies les plus reculés. En leg voyant, 1'Ami cie ':. Liberté lentira fes yeux fe rempltr de iaimes déücieufes, fon Coeur crefTUiliir de joie." CHAPITRE XLII. • Sur ii Conjiüution £f les Troubles de la Répubiique de Geneve. Lettre au Politique Hollandais. Quoique j'habite depuis longues années, le territoir' des Provinces Unies, je me fais gloire d'étre citoyen de Geneve. Quoique j'ayevifité bien des pays étrangers', j'ai toujours porté ma patrie dans le cceur: •tout 'cc qui pouvait 1'intéreffer , m'a toujours inté•reffé ; & je n'ai jamais négligé de reeueillir toutes ■ks pieces qui Ja regardent: j'y ai ajouté quelquefovs mes propres obfervations; & voyant le public jaloux d'avoir des infoimations fideies fur 1'origine •de nos troubles & fur les principes de notre conftitution, j'ai cru qu'il ne verrait pas avec indifférents les fruits de mon zele patriotique. j'ai choifi pour leur donner une publicité , votre feuille, préférablement a toutes celles qui paraiffent pcriodiquement fur les événemens ou fur les affaires politiques ; paree que tous vos principes refpirent 1c même efprit de liberté qui biüle mon cceur, & qu'ils s'accordent avec les principes que mon efprit a adoptés. Quand j'ignorerais que vous êtes presque notre compatriote; ie fais que vous devez être le concitoyen de tous les vraisKépublicains. Jefuisloin de croire que les troubles civils d'un Etat doivent être tournés en ridicule;« paree que eet Etat n'embrafferait qu'un cerclc fort étroit ;& que les citoyens .doivent en être comparés k des enfansfous laférule, ;parcequ'ils ne fe heurtent pasen maffe de dix-a-vingc miiiions. Je fuis encore moins de ceux qui s'extafient en voyant de grands Etats promener chez leurs voi- fius  X 203 ) Ai i~ „««mo^« Xr ia H^vaflnfion: & ierent un re- sÖU-d dédaieneux fur un petit peuple qui a agite cs: fe sLoaü rinniipr nrir- forme de gouverne¬ ment. C'eft encore un prob'.ême fi le fu;c:de eft défendu par il tói naturelle; mais perfonne n'a ja-mais ofé fou-rnir 1'homicide. Geneve n'eft pas une ville indifférente dans le fyftéme de 1'Euvope Elle eft fituée pres des défilés du Fort des Ciufes dans le mont Jura Elle importe d'autant plus a fes voifins, qu'étant fortifiée . elle pourrait devenir une place d'armes. De Hunmgue a Lvon ia France n'a pas une fortereffe confidérable. Sa-fituation, fes aiiiances, fon commerce étendu, les arts & lesfciences qui floriffcnt dans fonfem, les hommes iüuftres qu'elle a produits , 1'affluence des 'étranacs qui fe font un plaifir de lavifiter, touc concOurt a lui donner autant de célébrité que d'importance II n'eft donc pas étonnant fi les troubles dont elle eft atrjtée, attirent la cunofité générale. Ouoique te fonds de notre conftitution ait exilté dalles tems les plus anciens,Geneve ne peut giiere dater fa liberté que de 1'an ijfcjr. Cette année fut lépocue de la réformedans cette ville & de 1 expulGon totale de 1'Evêque Pierre de la Beaume qui avait abandonné la ville deux ans auparavant Ce n eft pas que la liberté n'eüt pouffé des germe, longtems auparavant ; mais ce n'étaient que des rejettons ebauchés • 1'efprit de liberté s'était même developpé par des éclat's affez violens; mais, comme il n'y avait mordre, ni fyftéme fuivi, on peut comparer notre état avant cette époque a 1'Etat de la ville d'Utrecht fous '%Eu'iiqmeS*foit permis de remarquer a cette occafioSue, dans la Répubiique des Provmces-Umes, m n2 foupconne presque pas la nature de la liberté Politmue Dans quelques campagnes , comme en Erfe& dan les Ommelandes, le peuple peut encore êtr?aPelé du titre de citoyen; mais dans toutes ies villes P& dans tout le refte de la Répubiique ft  C 204 ) ne regne qu'une Ariftocratie, proprement dite ou 1'Anfto ■ Monarchie la plus indépendance. Ce pays a paffé pour [étre gouverné démocratiquement. Cependanc le peuple des villes, les Bourgeois n'ont pas la moindre autorité ni dans 1'adminiftration des affaires politiques, ni même dans la nomination des Adminiftrateurs En Gueldre ilnerefte plus aux Corporations ou Confréries qu'un fquelette d'autorité, En Overvifel le college des Communes n'eft qu'un corps d;Ariftocrates; puifque la nomination n'en dépend .point de la Bourgeoifie. Ils ne fubfiftent 'que pour la forme & pour faire croire au peuple qu'il a confenti aux impöts; quand fi a recu la fanétion de ces corps. Je crois que Groningue & Dort font les feules,villes, oü la Bourgeoifle puiffe fe flatter d'avoir quelque part au gouvernement , uoiquement par fon influence dans la nomination de quelque -uns des Magiftrats. Mais,pour revenir a.Geneve , ce fut a un Francais qu'elle düt le fyftéme politique qui, depuis, a été la bafe de fa conftitution. Jean Calvin, génie ardent. efprit fêroce, employa 1'autorité religieufe que fes écrits contre la funerftition Romaine lui avaient acquife pour jouer le róle d'un Légiflateur, 11 fut un des plus grands hommes de fon fiecle. Sans autre titre que celui de premier Miniftre de la parole de Dieu, il fut confulté comme un oracle par les Magiftrats, auffi bien que par les Théologiens; il dh-igea les délibérations de cous les Confeils, ainfi que la police de toutes les Eglifes; il rendic en un mot Geneve le modele des petites Républiques & la Métropolc de tout 1'Univers Proteftant. Auftere, appüqué au travail, il écrivait avêc méthode, avec profondeur, avecgofit; tandisqueLuther,qui lui avait frayé la route,fe livrait a la bonne chere, aux plaifirs de la fociété, ne laiflait tranfpirer dans fes ouvrages qu'une imagination ardente ccdéréglée, qui fe reffentait de la précipitation & de la colere, qui 1'avaienc jeté dans le courbillou de la * dif-  ( 20$ ) difoute. En un mot c'eft k un Picaf d, fils d'un Tonnelier de Noyon, que nous devons notre conftimtion civile & politique. On a dit que jamais homme ne «^^^ÊL^ffS te décifif, Plus divinement infaillible alon gre, que Caïv ra' que la moindre oppofition a fes volontéa étaï un qceuvre de Satan/un crime digne du feu ; mais, fansle difculper pour fon intolérance qui co( STa vie a bien d'autres qu'a Servet, peut-être s U ifeut pas eu cette ame farouche, cette tete defpoSqu', jamais il n'eut acquis 1'afcendant neceflaire Dom les réformes dont il fut 1'auteur. II eft des ?ems oh la liberté même a befoin d'étre étabhepar Se forte de defpotisme ; c'eft fans doute lorsque •enthoufiasme de religion a «alté les efprits en faveur d'un perfonnage que fes talens fupéneurs font raarder comme 1'organc de la Divmité. L'epoque de la réforme eft dans nos annales politiques, 1 nis toire des prodiges. Onne concoit pas comment notre S é püt alors léfifterala fois aux faétions qui la déchiraPient, au Duc de Savoye qui lui faifait a guerre a l'Evêque qui fomentait les intngues dans fon fei'n En un mot Tyrans, Voifins, Ennemis, Anus, SuTets, Citoyens, Guerre, Pefte ,Fam.ne,tout fem. blaft concourir a la perte de cette malheureufe ville Ce fut pendant ces tems-la que s'etabht dans fon fem la liberté évangelique & politique: que fa Conftitution prit de la confiftance ; que e fyftéme de fon Gouvernement fe forma. Ce fut alors que les Confefisiénéraux ou I'Affemblée générale de tous es C ovens, convoqués .fréquemment. «produifivenna forcé&ladignitédes anciennes Repubhques,& la Maiefté&laSouveraineté réfidantes dans le peuple. Les loix, tant civiles, politiques, qu'ecclefiafttques, toufes les opérations' publiques, tous les moyensde défenfe & de fureté , émanerenc de ces Afiemblees ou Confeils généraux. En buit mois on en compta jusqu'a dix huit. Quoiqu'on ait accufé ce Affemblées populaires d^ former des cokes  C 206 y bruyantes, fans orcire, ni décencc, en un mot de» pecaudieres , on aremarqué que tous ces ConfeiLs^éïieraux n'oftnrent aucun exemple dc défordie dV régularité, d'indécence; & que Ja voix des Citove- s" éclairés entendue en toute liberté y faifaic la plusVive1 impresfion: de la fortirent des réfolutions dont la' iageffe eft encore admirée de nos jours. r .f'Aflemblée générale ayant alors autórifé ie Tonfeil des deux-cens a avifer aux moyens d'augmenter les reyenus de la Répubiique, pour libére,- les detres de l Etat, fournir a fes charges, cette commiffion qui n avait en vue que la circonilance prefente, fu'; prife dans la fuue pour un droit d'établir les impóts& pendant plus d'un Üecle on n'v fit aucune oppofiuon, La con-ocation des Affemblées eénéra'es s oublie en même tems; & le peuple fe trouve, lans y penfer, reduitau droit unique d'éhre fes principaux Mapfom Encore, le Gouvernement; prófitant de celle longue léchargic, avait eu foiri de confolider fon autorité, en la rendam indépendance 11 avait,établi ure garmfnr, qui, en Un peuple , aflez aveugle pour confier fa fure* té a des mercenaires , touche è la fervitude I< imprudence du Gouvernement réveilla 1'efnrit de hberte qui n'était pas encore eteint I es mécontentemens des impofitions arbitraires , fans le con Confeil-general avniert déja éclaté , mais fans V!0. lence fcandaleufe. En i7c4, on fit des repréfen aations; le Procureur-Général que nouspouvvn nommer le Tribun i'homme du peuple, quSffiK le foit pas toujour, les pr.éfenta a % tête des (To ens & des Bourgeois; cette démarche eut le fucc^dê toé: les arrêts burfaux furent caffés , Ce.H.em,er afie de vigütur fut fuivï d'un autre dont 1'iflue ne fut pas fi heufeufe. Depuis longtems les Secrétaires d'Etat s'étaient charges de recueillir les fuffeges. Chaque EleS vo-  C *°7 3 votait ai'oreil'teduSecréraire o.ui marqna't d'unrrsio de plume, le fuft'rage au-deffous du no u qu'un lu> indiquaic. Ce Sécrétaire, abufont de Ui ftrrictioftij pour infulter un peuple libre , regtintok efl flHB chaque E'eéteur , le rendait timide & irréfohi, de concert avec le Magiftrat, qui avait intérêt a troubler la liberté des deiibérations La Généralité des. Citovens fut choquée de ces procédés & demanda un changement dans la maniere de recuciiiir ld fuffragc-. Cette demande excita des diffeniions ; fc» efpritsfe panagerent; les louables Cantons de Zurich & de Berne envoyercnt des médiaceurs pour ramener 1'union ; des mal-entendus cauferent du défordre entre les deux partis ; les Magiftrats en prirent occafion de faire arrêter les Citoyens hè plus vertueux ; le fang innocent coula dans les prifons;&la vengeanee arbitraire leva hautement la tête iur les débris des loix outragées. Un obftacle cependant empéchait 1'établiffemenc du pouvoir abfolu, c'était 1'établiffement periodique des Confeiis-Généraux tous les cinq ans. Dans ces Affemblées publiques, le peuple rentrant dans tout, Pexercice &la plénitude de fa Souveraineté ,était a même de fe plaindre des transgreffions , deredrefler les abus introduits,de propofer ce qu'il croyaitconvenable pour le bien de 1'Etat, de forcer les Magiftrats & tous les ordres de fe conrenir dans les bornes de leurs devoirs & de leurs droits; c'était la loi vivante & fondamentale qui donnait la vie & la force k tout le refte: c'était. 1'état même. Les Magiftrats, pour fe former une autorité indépendante, avaient donc befoin de 1'abolir. Voyons comme ils s'y prirent. , • ■ „ ,,r Ils commencerent par inviter le Corps Eccléhadique. fous le fceau d'un feeret iuviolable , a employer 1'autorité de la religion fur les efprics; Toccafion paraiffait favorable. Le peuple effrayé par les exécutions & les profcriptions récentes, n'avait ni liberté ei fureté. II ne pouvait plus comp- -  C 208 ), compter fur rien, venant de voir ces horreursexé* cutées , après une déclaration folemnelle d'amnistie. I! croyait a chaque inftant, dit \. J. Rouffeau, revoir a (es portes les SuilTes qui ïervirent d'Archers a ces fanglantes exécutions. On commenca par aliéguer en faveur de cette abolition, les dangers de la pefte, de la famine , de ia guerre. On dit que les Affemblées étaient des innovations, des infraétions aux loix. Le peuple qui n'était pas prévenu & a qui on ni laiffait pas le loifir de déliberer, fe laiffa tromper par les artifices révoltans de la terreur . de la furprife & de ia fraude, Ainfi fut renverfé le plus ferme rempart de la liberté Oenevoife. On a dit que les Confeils périodiques étaient une fource de confufion. Mais la ville étant divifée en quartiers., & ces quartiers fubdivifés en Dixaires ou Compagnies, chacune d'elles pouvait nommer des Repréfentans qui feuls auraienc eu droit de parler. La Suite au N>. Procbain. Ces Feuilles périodiques parament régulierement, tous \et Lun&is a Amjlerdam, chez J. A.Crajenfchot; a Haarkm chez Walree ; a Leide, chez Luzac & vanDamma , & Les Freres Murray ; a la Haye , chez J. van Cleef Detune , van Drecht & La Feuve Staalman; a Gouda' chez Fan der Klos; d Rotterdam, chez Bennet CfHaxe & D. Fis; d Dordrecht, chez Blufé; a Deventer, chez; Leemborst; a Groningue chez Huyzingh;a Nimegue , chez ^«C^r; a Arnhem, chezJroest}dBois.kDuC chez j. H. Pallier , aHambourg, chez J. G. Fircbaux & chez les principaux Libraires des Pays-Bas  POLITIQUE N°. LXVI. LUNDI, ce 13 MAI, 1782. CHAPITRE XLIIL Sur 1'Etat préfent de la Répubiique. (*). De méprifables folliculaires ont ofé publier qu'il n'appartenait qu'a des Adminiftrateurs, a des Régens, de s'exprimer librement fur les affaires du gouvernement. Les deux pieces fuivantes écrites d'un ftile male & vigoureux, ferviront a développer encore nos principes. Dans la derniere affemblée des Etats de Nimegue , Mr. Capellen de Marfch fit entendre le difcours fuivant, dont il eft bien difficile de faire pafler la force & 1'énergie dans la langue Frangaile. NoBLSS ET PUISSANS SEIGNEURS! Le tems eft donc arrivé oü nous rendons hommage a la Liberté, aux Privileges & a la Dignité de la Nation Batave, en prêtant 1'oreille a fa voix, qui a demandé avec tant d'éner- (*•) Des raifons particulieres nous obligent de renvoyer i f ordinaire prochain le Manufcrit du Genevois fur Ier troubles de fa patrie,. TOMB III. O  ( 210 ) (F^nergie & qui demande encore que cette Répubiique reConnaifT l'In fépendance de nos Freres les Américains deTenus libre* a la pointe del'Epée, & que nous prenions avec eux des merures pour favorifer notre Profpéritéréciproque, & pour aflurer une Liberté affermie des deux cótés par le courage & l'intrépirtité a 1'effroi de tous les Tyrans qui foulent aux pieds t s Droits les plus Sacré.»- des Nations. Je meréiouis, Nobles cjf Pui fans Seigneurs, de eet heureux Evenement, avec tous les Beiges bi-r-intenn'onrés & j'admire en même tems dans le cours de cesEvéneme^s,comment Ie Dieu de nos Peres, a qui la Tyrannie eft en horreur, a daigné jeter un ce 1 favorable fur les Pays-Bas-Unis, fur toute l'i lunnnité, loifque nous, lor'que tous les Peuples de VUnivets étaient nagueres menacés d'étre obligés de plier pat tout fous le Defpotifme un 'verfel des Mers de la part des infolens Breton» ; Defpotifme p!u< a redouter qu"aucun autre qui jamais ait eu lieu: mais dans ce moment, nous voyons avec étonnemerrr, après avoir déja éprou^é les fuites les plus douloureufes de ce Projet,qu'une Nation qui fe regarde comme fi fort élevée au-deflug des autres Humains , que les orgueilieux Bretons font, a l'égard d'une Nation qu'ils ont fi fott haïe, fi fouvent maudite & opprimée depuis plus de di ux Siecles; a l'égard de ces Beiges qu'ils s'imaginaient pouvoir impunément, dans toutes les óccafiuns, par la bouche méme d'un Ambaffadeur qu'ils nous avaient envoyé pour rotre perte, noui outrager par le langage le plus amer & Ie plus infultant, qui eft encore dans le fouvenir de nous tous; qu'eux, dis-je , apès nous avoir attaqués & pillés de la maniere la plus perfide, font actuellement les premiers a ofFrir la Paix a cette Répubiique, dans la crainte d'une jufte vengeance, nous voyant, contre leur attente, en état de leur faire, dós que nous aurons pris férieufement les Artnes que la Providence nous offre, éprouver de la maniere la plus fen* fible. II nous faut, Nobles £? Pui fans Seigneurs, il nous faut rendre un nouvél Hommage a la voix du Peuple. Elle nous crie: Point de Paix par iculiere! Point de Sufpei fion d'Armes! Point de Rétabliffement d'anciens Traités avec un Ennemi qui ne les a jam.,is refp:ctés, & qui les a toujours enfreints & violés de la maniere la plus arbiira;re! Tel eft le lanjjage de nos Concitoyens bien-intendonnés. La propofiticin, faite depuis peu a eet Etat par ks Miniftres de S.  C 211 ) S. M. Impériale de Pvuilie, conformément a la Déclaration du Miniftere actuel d'Angleterre, pour nous engager aétuellement dans une Réconciiiation particuliere avec nofre Ennemi, ou pour nous porter a uneCeflation d IToftilités avec lui, n'eft pas recevable: 1'un & 1'autre doivent étre rejetés d'une maniere convenable a ia Dignité de la Répubiique. Le nouveau Cabinet du Roi d'Angleterre eft trop éclairé pour s'être imaginé que cette Nation aurait lafottife de fe lahTer prendre a ce Piége; je ferais plutót incliné a penfer qu'il n'a fait ces avances que pour fe méüager une route a la i'aix générale. C'eft cependant une chofe intoïérable.que notre Ennemi, au milieu de fa détrefle, aitofé nous préfenter la Paix en nous offrant la jouiflance d'une Navigation libre; comme s'il dépendait de lui de donner ou d'óter un avantage dont Ia Poffeffion nous apparrient, auflibien qu'a tous les Peuples du Monde. La Répubiique eft en état de faire éprouver a eet infraéleur des Traités qu'elle peut maintenir fes Droits par la force de fes Armes: ce ne ferait pas la première fois que le Breton aurait tremblé devant le Pavillon de eet Etat. Les Intéréts de la Patrie, de toute 1'Europe, exigent donc que nous tach'or"; de nous venger, au moius uurant la Campagne prochaine, & ie faire éprouver a notre Ennemi-Hérédiraire qu'on nenous outrage pas impunément. La Nation eft donc autorilée a rompre k jamais tout Traité avec un tel peuple. E'le eft trop bien inftruire pour e pas fe ir que le Re'abliflèment des Traités de 1074 & de 1*78 était fnutile & préjudiciable. Le ten s eft venu, Nobles & Pui fans Seigneurs, de tenter, par des Mefure* & des Reoréfailles convenables, d'abolir le jong de ce Traité de Navigaxión, fi odieux & fifa» tal au Commerce & aux Fabriques de eet Etat. Outre ces motits, il en eft encore d'autres quinousobligent de rejeter les Propofitions Anglaifes & «ie ne point faire de Paix particuliere avec le Royaume de la GrandeBretagne. Vos Nobles Puiffances fentent déja que je veux parler des\iarques éclaianres d'inciication que cette Répubiique a éprouvées, de ia maniere la plus noble,de Sa Majefté Très-Cbréiienne. A préfent que nous avons réfolu de nous concerter avec les Ennemis de notre Ennemi pour 1'humilier encore davantage , pouvons.nous confentir a la Paix que conjointement avec notre Allié-Naturel & non avant qu'il paraifle qu'ils font hors d'état de fe conduire dorénavant O 2 d'une  ( 212 ) d'une maniere arbitraire avec nous & les autres Peuples.' Que nous ayions été fauvés du bord du précipice oü nous avaient conduit les artifices employés, foit au dedai-is foit /au-dehors , par eet Ennemi odieux, c'eft, après Dieu, non k uous-mêmes, mais au Rei de France que nous en fommes redevables. Que la conduite de eet Etat ait donc pour guides , les principes de la reconnaiirance & de la gratitude. Grandes font les obligations de cette Répubiique envers ce Monarque , Ami de 1'Humanitél Que feraient devenues nos Colonies, que ferait de venu eet Etat, fans le Secours des Francais? C'eft , Nol/les & Pui fans Seigneurs, le même Voifin puiifant qui, dans le tems que i:os Peres combattaient pour fecouer le joug Efpagnol, aida k nous en délivrer; qui,dans ces tems, a affranchinos têtes de celui des Bretons, dont nous ne paraiffions pas au commencement sppercevoirledanger. Ainfi , pétiéirés des fentimens de la plus vive recennsuffance, nos Concitoyens attendent que cette Répubiique fe lie selueUement des nceuds les plus étroit* avec une Nation généreufe qui prend a cceur nos Intéréts & notre Profperité,' avec unePuiflance qui a plus de foin de nous, que nous n'en avons nous-mêmes; avec un Allié-Naturel qui , dans ces jours, n'a exigé de nous que ce qui devait fervir a notre confervation & a notre avantsge. C'eft Ia voix de Ia Nation entiere, c'eft le cri, c'eft le vceu d'une Commune bien inüruite, qui, graces k Dieu! a des idéés faines de fa pofition i qui defire ardtmmentde voir que, fans délai ultérieur, la combinaifon promife de3 Mefures avec le Roi de France pour la Campagne prochai- r.e, toir, de notre cóté, vigoureufementexécutée: Elle fe flatte, elle eft enchantée d'avoir vu dans ce moment une preuve de bonne intention , d'appercevoir enfin , & comme il faut, que des Biens & du Sang qu'elle a ptodigués fi continueliement, avec tant d'emprelfement peur la confervation de la chere Patrie & qu'elle ofFre encore avec tant de patience; que des uns & de 1'autre,^is-je, il fe fait enfin un emploi expéditif, bon ócutile: par.la feul cette Répubiique doit fubfifter cu tomber. Sans Commerce^ fans Navigation, fans Pêches, fans Colonies, avec la Protection convenable, bientót c'en eft fait de nous. Des Vadfeaux de Guerre , des Fiottes bien éuuipéts peuvent nous conferver; voila 1'unique moyen de faire revivre la Profpétité Belgique & fa Gloire prefqu'éteinte. Dèsqu'u. ne aclivité bien dirigée, bien intentiontiée dans la prife des Me.  ( 213 ) Mefures offenfives & défenfives contre notre Ennemi fe développer», on verra renaltre le doux Contente.nent, la Toie & la Profpérité parmi nous. ; Ainfi, les Grieft fondés, les Plaintes juftes d'un Peuple fi fortement injune oourront être redreifés. . u- Des Hommes Libres défavouent une Admmiftration arbi- traire. . Un Joug onéreux eft toujours ïniupporta- ble aux têtes devenues libres a la pointe de t'épée ; la confervation de la Patrie ne peut ni ne doit leur etre indifté- \ * Jamais le cri, non pas d'une Populace fu- rieufë & féduite, mais d'une Nation libre oui la Voix de la melfieüre partie de la Nation n'a S^ais demandé nuelque chofe qui ne füt pas raifonnable. La, Nobles & PmsJans Seigneurs, portons notre attention; <^ons Paree moven de fatisfaire nos Habitans qui ont corfié leur Caufe a nos foins. Pour y fatisfaire, ,e fuis d'op.mon que les Committés de Vos Nobles Puiffances a la Générahté foient autorifés pour. au nom de cette Proymce, déclarer a: la Table de Leurs Hautes Puijjances, qu'en vertu des raifons, alléguées ci-deiTui, cette Répubiique ne peut accepter au. cune Sufpenfion d'Armes, aucune Paix léparée, offerte par fAnaleterre; cependant avec une Déclaration polie pour S. ïf SipSric? de Ruffie, que la Répubiique eft prête de coopérer au RétabliiTement de la Trar.qu.lité en Europe, dès qu'ülie fera convaincue de la poffibilité de pouvo.r obtenir de fon Ennemi la réparation de tant d outrages & lm- demnifation de tant de pertes: Qu elle ne peut ac- cem d'autre Paix, que celle qui fe concilie avec fes In.érJr* véritables, &, en même tems, avec ceux de fes AlVé' avec le^quels elle a contrafté des Engagemens folemne'^' pour réduire d'une maniere glorieufe f Ennemi cora- mUÈ\ifuiter,al£te ê? Puifans Seigneurs, il faudrait que dès a préfent fa Répubiique fe précautionnat contre tout ce ou , dans lecas d'une Pacificadon générale, pourrait fervir au RétabliiTement d'Albanees antérieures avec le Royau. me de la Grande-Bretagne, Royaume qui jamais ne fit de Traités avec nous que pour fe ménager des prétextes pour omrager ■ Tandis qu'il cft d une néceffité m. difpenfable que cette Répubiique doit tache-r de profiter de töut s manieres, ces bonnes difpofitions du Rot de France pour affermir fur les principes les mieux mtentionnés , SèAmitié toujours permanente, une Corteipondance finO 3 certs  C *-4 ) e'ere avec eet Empire, comme le moyen onique d'aflureï notre Conftitution, notre Liberté, notre Confidéra.ion & notre Bien-Etre contre tous les dcifeins cacbés < Forces de Terre, dont la Dircction principale fe trouve corfiée plutót a des Étrangers qu'a des Na* tionaux, n'eft qu'onéreufe, que dangereule pour cette Répubiique ; eet incident eft un nouveau Motif pour agirfincerement de concert ave c ia France* avec un Empire qui, aufïïtót qu'il verra des pieuves de notre bonne-foi, de notre fincere Reconnaiffance, ira iudubitablement au devant de eet Etat, & Ie traitera de la maniere la plus généreufe. Tout ce que je viens de dire a Vos Nobles Puiffances, s'accorde avec Ia voix du Peuple; mais avant de terminer mon Difcours, je ne puis m'abftenir d'y ajouter que nos Habilans s'attendent toujours a ce qu'enfin il foit conftaté a quoi & a qui doivent être attribuées la nonchalance, 1'inaftioa permanentes, lefquelles, malgré toutes les apparences d'activité qu'on a voulu développer, ont, a latonte éternelle de cette Répubiique, eu lieu danslaDélibération & 1'Exécution des Mefures néceflaires pour s'oppofer k tems & vi. goureufement a un Ennemi furieux, & détouruer fon En. treprife déjè trop bien exécmée. Ln Nation eft en droit d'exiger qu'a 1'avenir fes Biens & fon Sang ne foient plus inutilement prodigués. C'eft aboa droit, Nobles & Puiffans Seigneurs, que la Nation de. mande que les peiquifitions les plus rigoureufes foient falies avec févérité fur les Caufes du malheur de Ia Patrie, afin  Ou) afin de découvrir par Ia les Confeils de perverfité, de trahifon, & de manvaife foi donnés, ainfi que les Malverfations exerc-ées par nos Ennemis au-dedans; afin que leurs influence & progrès foient empêchés, rendus inutiles; que même ceuX qui ont cherché è ruiner ce Pays & qui, pour cette caufe, étant accablés du poids de la jufte Haine nationale , n'ont pu fe purger devant le Tribunal de la nation, puiffcnt êire punis fans égard des Perfonnes, ou du moins expulfés du milieu de est Etat. Au contraire, Vos Nobles Puifances conviendrout volontiers avec moi, qu'il ferait a fouhaiter que, pour fathfaire è l'Equité, è la jufte attente de toutes les Provinces Confédérées, des Membres du Gouvernement, honnêtes, bien intentionnés, mais outragés, fuffent rétablis pour le Service de la Patrie. Vos Nobles Puiffances eoncoivent que par-la j'ai princi* palement en vue un Evenement criant , arrivé dans une Province limitrophe ; Evéiement fans exemple dans un Pays, oü le Droit & la Juftice devaient avoir lieu, & auquel, Nobles & Puiffans Seigneurs, nous devons nous intértfler p-r rapport aux fuites : c'eft la i'épofition criminelle d'un Membre de 1'Ordre Équeftre dans la Province d'Overyffel, (qui n'a pu fouffrir l'Oppreflion de la portion la plus unie de la Société) par une pluralité de Voix, faut forme de Procés, &, a la face de la Juftice, fans étre coupable d'aucun • ptévarication. J'ai 1'hotineur de fouraettre mon Avis aux Confidérations bien-intentionnées & Patriotiques de Vos Nobles Puifances, avec la réquifition que, vu 1'importance ces Affaires qui y font expofées & pour ma [uftification auprès d'une Nation dont je veux toujours foutenir les Droits, il puiffe être inféré dans le Recès de ce Quartier. Le Difcours que Mr. Zuylen de Nyevelt fit en. tendre dans l'Afiemblée des Etats de Gueldre, méritait tout 1'mtérét qu'il a fait naitre. On ne peut effeclivement s'empêcher d'étre touché, en entendant ce zélé Citoyen expofer ainfi les dingers de Botre Patrie, pour nous engager a les prévenir. O 4. No*  ( 216 ) Nobles & Puissans Seigneurs! Toute déplorable que nous puiffions repréfenter la fituation de cette Répubiique & en déduire "la nécefliié dlune Paix; toutes les caufes de ces malheureufès fuites & calamités doivent cependant étre cherchées au milieu de nous; & tant qu'on ne met pas tout en osuvre pour améliorer & guérir la partie de la Répubiique gatée intérieurement, tous les autres moyens, tout bien combinés qu'on les repréfeme &tel éloge qu'on en faffe,font ftériles&inutiles, pour rendre eet Etat plus refpeétable & plus puiffant, & le Peuple plus heureux. Arrêtons un moment ros regards fur la fituation intérieure de cette Répubiique; nous trouverons effectlvement & découvrirons les vraies caufes dont toute la Nation s'eft déja plainte depuis fi longtems, & fur lefquelles elle fe montrera de plus en plus (enfible, fans cependant découvrir les moyens de les réparer. Nous avons éprouvé une inconcevable lenteur & inaiftion pendant tout le cours de cette guerre, dans tous les moyens & mefures fi fort defirés que nous aurions pu employer pour prévenir ou pour écarter la violence de notre Ennemi; inaaion dont nous ne pouvons nous empêcher d'étre éconnés & de rougir. Des Sommes prefque innombrables accordées volontairement pour une bonne fin, dont cependant on n'a vu aucun effet , conforme a 1'attente générale : Un état impardonnable d'indéfenfe oü fe trouve le Commerce fi important & fi avantageux, d'oü dépend la Profpérité de ce Pays & le Bien-Etre des Habitans, quoique déja accablés fous le poids d'énormes Impöts, mais volontaires: Une exceffive Défiance & Divifion entre l»s Membres de la Confédération , luttant contre la Vérité & contre la Devife adoptée par eet Etat: La décadence de nos bonnes Loix; racéantiflement des meilleurs Régiemens de Police; 'la diminution des Privileges des Membres de 1'Adminiftration & des Privileges des Bourgeois-, des Querelles entre les Régens 'des diverfes Provinces; des traitemens rigoureux & inouïs, fans forme de Procés, & par conféquent fans Loix dans une Province voifine,exercés fur tels qui,pour avoir agi fuivant leur Confcience, ont été expulfés des AlTembléess Traitemenc vtaiment qui échappe au jour, qui tient ia Li- berté  C 217 ) berté dans les chalnes ; & que 1'on peut remarquer comme une des premières marchés par laquelle ce Defpotifme violent veut s'élever pour faire éprouver le même fort a d'autres braves Régens. Oui, nous devons encore remercier le Ciel que cela n'ait pas encore été fcellé du Sang de 1'Innocent. Ajoutez è cela , les Animofités extrêmes dont plufieurs font enflammés; les Confeils des mal-intentiopnés; 1'Opprefiion, & d'après cela, la préférence donnés a des Étrangers au préjudice des braves Conciroyens & Nationaux ; incident qui , combiné avèc la Puiifnce militaire dans un Pays libre , doit être regardé comme Texpédient le plus dangereux; & par deflus tout cela, une Nation généralement mécontente, Qu'avons-nous , Nobles PuiJJüns Seigneurs, befoin de déduire de ce mal intérieur la malheureufe pofition de la Répuslique ? Oü trouverons-nous dans les Annales Hiftoiiques un plus grand nombre de ces Cakmités que 1'on doit regarder comme les Caufes de la Deftiuction des plus florilTantes Républiques? eet Etat n'éprouvera-t-il pas un fort pareil? Que 1'on fe bate donc de guérir ces maux intérieurs qui s'enracinent de plus en plus; & que 1'on prite 1'oreille aux Propofitions les plus raifoonabiès, demandées par la voix du Peuple qui fe fait entendre; non par les attroupemens d'unePopulace, femblables a ceux qui ci-devaut ont déchiré cette Répubiique,- mais par la buuche de la plus faine partie de la Nation, qui fait accorder 1'expérience avec la raifon; d'un Peuplequi connoit la Liberté, cc qui ,plus que jamais , porte les regards fur nos actions ou omiflions; c'eft lui, dis-je, qui demande 1'é'oignemen: du mal le plus frappant. Alors on veria que ce n'eft ni cette Guerre ni d'autres Calamités du dehors que 1'on doit regarder comme les vraies Caufes de la Ruine prochaine de eet Etat. 11 eft vrai que nous avons aufii des raifons du debors pour étre affligés , foit des innombrables & execflwes hutuiliations & pertes que nous avons elïüyées : de 1'exiréme perfidie avec laquelle on a violé les Traités les pms facrés fur lefquels nous penlions pouvoir nous repofer ; du langage intolé'able §c des rcfus infolens du Miniftere Anglais. & desArnirautés fur ks plaintes les phis juftes; foit aufii de 1'inique Déclaration de Guerre qui lui vit , des Traitemens barbares §t eftienés des Commandans les plus inhumains ; du gang répandu de bos Freres maffacrés contre le Droit de O 5 la  ( «i8 ) U Guerre; nos Etahliflemens non-feulement enlevés, maïs detru'ts; caufes fufH'antes pour faire détefter a jamais de chaque Beigeme Nation qu - fon nomne fl mal-a-proros noire Alnée-Narureiie. pour ia faire dé'efter, a möndée d'htrargers , ne pas être rejetée , mais agrée comme trés acceptable, afin , s'il était poffible.de parvenir a ecarter les Rétolutions pröjetées & , par des Négociad'ons tirées en longueur , a ralemir loutes les bonnes Mefures que, fur les fondement d'une offciife impardonnabie , nous pourrions réaliler pöiir en tirer venKeance;anous jeterdanj de nouveaux embarras, fi nous piêtions l'oreille a ces Artifjces , & 4 rompre tous les Engagémehs tels faints qu'ils lullent , contraétés depuis peu avec laF-ance. & irriter cette Puiflance contre un Etat fi peu reconnaiffant. Mais! 1'Honneur, i'Jmérét de ces Pays, la Nation en Corps mterviennent ici & s'écricnt d'ure voix nnïni'me: Point de Paix! mais un refus altier, proportionné a tous les Traitemens efjuyés. Malgré la préférei ce qu'a la vérité, on doit accorder a la Paix fur ia Guerre, il faut que les Oftres foient d'une natm\ que nous pu ffions en obtenir une Paix permanente,& qu'avaat tout, 1'extenliou, &nul- le-  lement la reftriaion Ju Commerce, foit 1'objet d'une Négochtion II eft impoffible de s'attendre a 1'un ni a 1'autre, au'e le Traité de 1Ó74 fervirait de baie, non-feulement aux Négociations, mais a la Paix même. Un Traité tel qua r .iui de 1674 , malgré tous les changemens qu on pourrait v faire envelopperait eet Etat dans toutes les Guerres qua cette Puiffance entreprendrait; nous n'en avons que trop de preuves; ainfi nous ferions erTeftivement privés de tous les avantages qui probablement en pourraient réfulter. Ou'011 reiette donc cette Propofition, conformeraent a la Voix unanime de la Nation, fans faire aucune réilexton fur 1'Article fi dangereux d'un Armiftice qui s'y trouve annex*; nn'on einoloie, au contraire, les moyens les plus efficaces, ^fin que ,de concert avec la France les Mefures; defir es foient mifes en exécution pour 1'acquifition d une Paix plus honorable, qui puiffe au moins nous procurer la Liberté de Navigation, fuivant le Droit des Gens; la diffolution de ces Liens oui nous précipjterent tant de fois fur le bord de notre Ruïne; Pende* fuppreffion de 1'afte de Navigation, fi deftruaeur pour notre Commerce; la révocition ft» Soumiffions forcées dans la Mer du Nord; 1 mdemmfation des Dommages que nous avons foufferts, & la reftuuuon de nos poffeflions enlevées. Cela feul doit former les Pomts de Négociation, qui -peuvent fe concil.er ayec 1 Honneur violé des Provinces-Unies, avec fes véntables Intéréts & la voix du Peuple. . O i'a eet effet, lesCommittés de cette Province a la Généraïité, devtaient être autonfés a exhiber cette Réfolution a Leurs Hautes. Puifances; qu'il ferait néceflaire de faire connaitre en termes polis au Miniftre Ruffe 1 averfion de la Nation & de eet Etat contre 1'offre en queftion : Que, quoique Leu s Hautes Puifances puifle.it attefter qu Elles donnent a la Paix une préférence marqtiee lur la Guerre , &, que pour parvenir ace bat falutaire, Elles exiffent bien youlu accemer la Médiation de S. M. Imp. de Ruflie, Elles fe feraient cependant flattéas qu'on fe fut abftenu de faire • eet Etat des Propofitions que ni 1'Honneur ui 1 Iméret de ces Pavs ne permettaient d'admettre; que néanmoins Leurs Hautes Puifances étaient intimement convaincuesjde l.nclination de S. M. pour effeftuer une RW defirable ; mats aue c-tte conviaion devrait diminuer beaucoup, u b. BB. par la fuite, dans fa Médiation digne de louange , ne vou. % pas réfléchir aux Engagemens que cetie République^a  ( 200 ) contraclés avec la France & qu'elle tenait pour très-facrés, ou a ce qui pourrait traverfer la reconnaiffance des Colonies Amérieaines , ou leurs Navigation & Commerce: QuY«crs,su lieu d'avancer, cela fervirait plutót a reculer la Tranquilité générale defirée, & ne pourrait jamais fatisfaire ni répondre au but, au deffein li humain de S. M.: Que Leurs Hautes Puiffances fe voyaient obligés de déclarer fraucbement, qu'aüflï longtems qu'on fe fonderait fur le Traité fata! ce 1674 comme devant fervir de bafe, Elles feraient réduites a rejeter toutes ces Propofitions, jufqu'a ce que la Cour Britannique, infraftxice de la Paix, en expofat d'autres qui, a la face de 1'Univers, puffent le concilier avec 1'Honneur blefié , les Pertes immenfes & principalement avec IaNeutralité Armée. Au rede, je me trouve obligé de requérir uu Droit qui m'appartient comme Membre de cette Affemblée, favoir... de faire enregiftrer la Préfente mot a mot dans le Recès du Quartier, pour pouvoir en tout tems rapeler ii une Nation qui, aélueilement pius que jamais, tient les yeux fixés fur les Aétlous de fes Régens, que je n'ai jamais été indifférent a tous les Intéréts de la Patrie & a la Voix d'une Nation devenue Libre a Ia Pointe de 1'Epée." Avons-nous rien expofé dans nos feuilles qui fut plushardi que les principes expofés dans les difcours que nous venons de rapporter ? On y trouve même, fur plufieurs points, particulierement fur nos liaifons politiques avec la France , des idees que nous n'avons jamais ófé adopter. Nous ne fommes pas, il eft, vrai, de ceux qui ont 1'audace , même dans les tems préfens, de foutenir que nous avons plus de raifons de nous attacher a 1'Angleterre qu'a la France; mais nous n'en avons pasconciu que la France fut notre alliée naturelle. Qu'on life les obfervations que nous avons expofées iur les alliances naturelles ; jamais nous ne pourrons nous pf rfuadér que nous ayions plus d'intérét a cultiver Famitié de 1'Angleterre que ct;lle de la France. L'Angleterre n'eft pas, il eft vrai, en état de nous fub.juguer par terre; mais n'avons-nous pas des intéréts eflentiels fur mer ? Notre navigation , notre commerce , nos établiffemens dans les deux Indes, ne font-ils pas les principes de notre profpérité, de notre  C 2a1 ) tre exiftence même? Ces avantages importans, esfentiels. fans lesquelsnous ne fommes rien, ne fontils pas a la merci des Anglais, dès qu on leur taille le fceptre des mers? N'avons-nous pas vu non leulement dans des jours orageux , mais generalemenc dans tous les tems, que ces avantages ont eté expofés a leurs attaques, a leurs ïniultes ; pendant auele danger que nous avons a craindre des fcrani cais fur terre ne s'eft manifefté que dans des occaftons extraordinaires, concre lesquelles le nouveau fyftéme politique de 1'Europe parait nous avoir garantis pour le préfent? Les Francais font certainement nos alliés naturels, quand nous lommes en guerre avec les Anglais; comme les Anglais le font k leur tour, quand nous fommes attaques par les Francais. Mais ce que 1'on ne doit ]amais perdre de vue dans 1'examen de nos querelles avec ces deux nations, c'eft que nous n'avons jamais eu la guerre avec les Francais que pour des intéréts étrangers ; & p3r conféquent en fuivant un faux fyftéme pour un pays commercant comme le notre; au lieu que nos guerres avec les Anglais ont toujours eu pour but la défenfe de nos intéréts propres, de nos avantages eflentiels., Cette idee montre fans réplique, que quand même la France ne ferait pas notre alliée naturelle, nous aunons plus d intérêt a cultiver fon amitié que celle de 1'Angleterre. Ces obfervations , dont la conduite des Anglais dans ces derniers tems n'a que trop bien prouvé la vérité, expofées avec force aux yeux dun peuple diftingué généralement par les qualités fohdesdujueement & du bon fens, peuvent étre regardees comme le fyftéme adopté préfentement par la nation. Auffi les Partifans de 1'Angleterre, redcutant lesiuites de cette impreffion générale, ont employé toutes fortes de moyens pour les arrêter. Ces ïntrépides partifans d'une nation ob regne la liberté Ulixnitée de la prefle , ont pouffé la contradiction & 1'abfuidité au point de foutenir qu'il n'appartenait pas  C 2Ü2 ) pas a de fimples particulier* de raifonncr fur les maneres du gouvernement L'Auteur du Politiek Vertoog n'a pas cramt d'infulter publiquement aux droits de la liberté & de 1'humanité, au point d'infinuer dans une annonce inférée dans la Gazette de SudHollande, ,-No. 50) qu'il n'était permis qu'ades Admimitrateurs ou Régens de s'expliquer fur les affaires politiques & que publier fes idéés fur eet article était un appel au jugement du peuple & une attemte aux loix de la Conftitution (H Le Périodifte foi-difant de la vieille-rocbe, pouffe le crime de lefe-humanité plus loin. II öfe loutenir qu'on peut outrager impunément tout autre'qu'un Régent qui fe méle d'ecrire des affaires politiques. Cette idéé auffi odieufe qu'abfurde, n'eft fans doute pas celle de 1.Auteur d'une nouvelle brochure Hoilandaife fur hLiberte de la preffe. On y foutient fur eet article les memes principes que nous avons expofés dans les premières parties de cette feuille; cette pro', dudhon parait méme fortir des mains d'un Régent 11 répete en propres termes ce que nous avon^dit^ quil ne doit y avoir d'autre entrave a la liberté de la Preffe que le droit a chaque citoyen qui fe trouve outrage perfonnellement dans un livre. den pourfuivre 1'Auteur ou 1'Editeur par la voie judiciaire. II foutient, avec raifon que tout effort pour arréter les libelles anonimes & calomnieux ne fait qu'irriter la malice des Auteurs, 1'avidité des Libraires & la curiofité des Ledteurs. II remarque avec nous, qu'il aurait beaucoup mieux valu mbher une bonne réfutation du libelle adrelfé au peuple des Fays-Bas, que de mettre è prix la tête de 1'Au- (*) Pour fe juftifier lui-même d'après cette finguliere aflert.on , ü ofe avaDCer que fon propre ouvrage n'éwft deftiné que pour 1'ufage des Régens; ce qui ne s'accorde gueres avec la première annonce des Libraires Bennet & Hake qm 1 offraient a trois florins inditlinclement tous ft ceux qui auraient foufcrit avant un certain terme.  C 2»3 3 f Auteur ou de 1'Imprimeur; & que 1'éclat occafion« Dé par cette prohibition n'a fait qu'en rendre la leéture plus générale & plus piquante. Cet Auteur démontre que la liberté de la preffe eft inféparable de la liberté civile. I'entends quelqu'un me demander a cette occafion , fi ie vois avec plaifir les libel'les publiés auffi bien contre la perfonne que contre les écrits du PoLtique HoMtkIM. Je fuis bien éloigné d'étre de 1 avis de ceux qui opinaient a ce qu'on empêch^tces bouches jmpures de diftilér le poifon de la calomme. Je mets trop d'importance è la liberté illimitée de la preffe, pour penfer qu'on doive y pofer des bornes, pareeque d'honnêtes gen-; font attaqués dans de miferab'es feuilles telles que le Politiek Vertoog, i'Ouderwet/e Nederiand/cbe Pairiut ,&c &c La liberté de la preffe a des inconvén ens; mais elle oorte 1'antidote avec le poifon. Si'la Calomnie entre dans ce champ ouvert&vafte pour lancer fes traits acérés, 1'entrée en eft également ouverte a 1'innocenc- pour les repouüer. Par exemple la Calomnie a inflnué que les projets infemaux & diaboliques da Politique Hollandau étaient connus j quoique la conduite particuliere d'un Auteur ne faffe rien a fes fentimens; quoi que les écrits doivent être toujours confidérés independamment du caraétere de 1'Ecrivain : que d'honnêtes gens aient quelquefois écrit des livres très-dangereux & des hommes fans mceurs, des livres très-moraux; le Politique Hollandais eft descendu jufqu'a provoquer fes détrafteurs de rien produire contre fonhonDeur: lk deffus ils ont ramaffé des contes ridicu es qui ne prouveraient rien contre 1'honneur, quand ils ne tomberaient pas par leur abfurdité ! mais leur grande raifon eft que le Politique HolUndav ne compte pas par tonnes d'or. Un de ces milérables écrivailleurs a pouffé cette imputation au point de dire qu'il fe croirait déshonoré fi comme Je Politique Hollandais &c. il retirait quelque gvn de fon libraire. Sachez donc, ames de boue, que, quand  ( 2S4 ) quand même Ie Politique Hollandais ne eompteraft Pa? CO?n?S.d'or' ^ quoi fans doute vous avez la haffelle de faire confifter tout le mérite d'un hom.me; ila plus de grandeur d'ame que vous. Sachez quil eft en etat de prouver que s'il avait voulu renoncer a fes principes ou les enfouir fous le boisleau,.. . fachez qu'il n'eft jamais venu dans ce pavs èlapourfuite ae !a fortune; & que, fi des circonftances auxquelies il ne s'attendait pas n'euflent pas changé Ion projet d'une courtevifite en une longue réfidence; u aurait trouvé partout ailleurs des encouragemens plus grands &c.. Mais j'aurai occafion d'étendre cette idéé en parlant de ia confidération qu'on a pour les Iettres & pour ceux qui les cultivcnt dans ce pays. Ces Feuilles périodiques parailTent régulierement, tous les Lundis,a Amjlerdam chez J. A.Crajenfchot; a Haar. lem, chez Walree; a Lelde , chez Luzae & van Damme , & Les Freres Murray ; a la Haye , chez J. van Cleef Detune ,van Drecht & La Feuve Staalman; ü Gouda* chez Fan der Klos; a Rotterdam, chez Bennet &Hake & D. Fis; a Dordrecht, chez Blujfê; a Deventer, chez Leemhorst; d Groningue, chez Huyzingh ; a Nimegue , chez Fan Goor; a Arnhem, chez 7roost ;d Bois-le Duc efaez J. H. Pallier . dHambourg, chez J. G. Firchaux ot chez les principaux Libraires des Pays-Bas.  l E POLITIQUE MOILXJLjWIJïJLIS. N°. LXVII. LUNDI, ce ao MM, 1782. Suite duCHAPITRE XLI. Sur la Conftitution &? les Troubles de la Répubiique de Geneve. Aux yeux du Philofophe, dit Mr. d'Alembert en parlant de Geneve la Répubiique des abeilles n'eft pas moins intéreftante que 1'Hiftoire des grands Empires; & ce n'eft peut-être que dans les petits Etats qu'on peur trouver le modele d'une parfaite adminiftration politique II eft vrai que ces petits Etats font fujets auxorages populaires. quand le peuple a quelque part au gouvernement; mais les autres Etats oh le peuple n'eft compté pour rien , font-ils plus tranquilles ou plus heureux? Pour éclaircircette queftion, on n'a 3u'a jeter les yeux fur les Républiques de Venife & es Pays-bas, Dans la première le peuple eft nonfeulement privé de toute liberté politique ; il ne jouit pas même de ia liberté civile. Un écrit. une parole , un geile , un rien fuffit pour expofer ia vie du plus honnête des habitans. Le Sénateur de Venife caché derrière une grille, dit a fon fujet :qui es.tu pour ofer approuvtr notre conuuite ? Un rideau Tome III. P fe  ( 226 ) fe leve; le malheureux fujet, tremblant, roit un cadavre attaché a une potence, & entend une voix redoutable qui lui crie de derrière la grille : C'eft ainfi que nous traitons notre apologifie ; retourne-t en dans ta maifon if tais-toi. Un peuple que des loix aufii féveres doivent tenir dans des tranfes perpétuelles peut bien jouir de la tranquillité extérieure; mais eftil tranquille intérieurement ? Goüte.t-il cette fécurité, ce bonheur qui fait 1 agrément de la vie & qui doit étre le but de tous les gouvernemens? La petite ville de Ragufe, obligée, comme on fait, par fa pofition, de fe rendre 1'efclave de tout le monde pour fe maintenir libre, pouffe cette politique fervile au degré le plus humiliant. Le Sénat de cette Répubiique , fi patiënte è l'égard des étrangers, vient de défendre a fes Habitans de s'exprimer en aucune facon fur les affaires politiques de 1'Europe & fur la conduite des Souverains. II n'a pas tenu aux Anglomanes, dans la Répubiique des Pays-bas, qu'on n'y ait foumis la liberté de penfer & d'écrire aux mémes entraves. Mais la Répubiique eft fi fingulierement conftituée, les privileges civils des Habitans font appuyés fur des bafes fi lolides, & refpeclés fi fort, que ces prohibitions expofées a être éludées ou violées impunément, n'auraient pas les effets qu'on s'en promettrait. Ce Gouvernement fédératif, étant compofé de cinquante a foixante Répubfqucs, par le droit inhérent a chaque ville de fe gouverner h fon gré, & les partis fermentant naturellement & fins ceffe dans une conftitution aufii compiiquée, la probibition particuliere d'une ville , d'une Province, nefoumettantpas les autres; & dans une ville particuliere même, plufieurs Régens ayant des intéréts fecrets a favorifer la diffémination d'opinions qu'ils défavouent quelquefois en public ; dans un pareil état des chofes, il ferait bien difficile, pour ne pas dire impoffible de pofer a la liberté de la preffe, des bornes qui fuffent refpeétées. Le Prince Maurice, le plus impérieux, le plus arbitraire & Ie plus abfolu des Stathouders, ne fut jamais en état d'arrê- tcr  C 2*7 ) ter la diffimination des libelles publiés contre' lui. Dans un temsou fa volonté était.la loi fuprème dans ]es opérations pubiiques, ou 1'on ne le confultait qu'en iremblant, on ie peignait uans des écrits ré pandus partout & lus avec avidité, corame le plus cruel & le plus l&che des Tyrans. Mais, pour revenir a la tranquillité des ProvincesUnies, confidérées comme un pays oti Ie peuple ne jouitquede la liberté civile(*J,il s'en faut beaucoup qu'on puiffe offrir eet Etat comme un modele de tranquillité, Depuis la naiffance de la Répubiique, il eft peu d'années oü quelque partie, n'ait été agitée par des orages plus ou moins grands: d'oti venaient ces orages ? Presque toujours du mécontentement des fujets contre l'adminiftration. Lorsqu'il n'y avait pas de Stathouder, ou lorfque leur puisfance était fort bornée, on attribuait ces mécontentemens populaires aux fuites de 1'adminiflration arbitraire des Ariftocrates ; & le peuple créait tu.multuairement des Stathouders, ou faifait augmenter leur autorité. Si le Stathouder eüt été comme le Tribun d'un peuple libre., peut-être aurait-il mis quelque équilibre dans le choc des intéréts; il eft vrai que fon autorité n'eft pas inutilepour mettre unfrein è 1'indépendancc des Ariftocrates qui pourrait dégénerer en pouvoir arbitraire; mais comme le peuple retombe dans fon néant après avoir créé un Stathouder, fon pouvoir ne repofant plus que fur Tas- een- (*) Mr. le Citoyen de Geneve oublie fans doute l'aff*ire de Mr. de Capelle da Poll, que des Membres du Gouvernement (voyez cidev.p. 215) n'ont pu s'empêcher de regarder comme contraire au droit & è la juftice: il n'envifage fans doute eet exemple & quelques autres, qui ne font 'que particuliers, que comme des exceptions ft la regie générale. En effet, quelques traits que nous expoferons Claprès, arrivés a Utrecht , a Leiden & a Woerden, montrent que les citoyens, peuvent fe flatter en général de jouir ici de li liberté civile. P *  ( 218 ) cendant qu'on lui donne furies Ariftocrates; fon au« torité leur pefe naturellement; les moins dépendans épient ies circonftancas pour lui réfifter en face; & tous, ennemis fecrets ou publics du Stathouder, font intéreffés a fomenter les mécontentemens populaires contre un chef éminent,dont la préponderanceleur fait ombrage. On a vu un exemple furprenant de ces difpofitions dans 1'affaire de la reconnaiffance de 1'Indépendance Américaine. Le parti oppofé a la Cour a pouflé cette démarche avec une vigueur, une enthoufiafme particuliers. On s'attendait que les Régens, qui paffaient pour être du parti contraire , traverferaient cette démarche, fachant qu'elle n'entrait pas dans le fyftéme du Stadhouder. Point du tout. Cette mefure ne paraiffant pas direélement oppofée a fes intéréts. ils en ont favorifé le fuccès avec la même ardeur; charmés, a ce qu'on peut fuppofer, de pouvoir traverfer le Stathouder, mais fans paraitre le contredire direftement. De la ces orages perpétuels qui ne cefferont de mettre deux intéréts, qui s'entre-choqueront fans ceffe, dans la Répubiique; & les deux fvftêmes politiques, 1'alliance Anglaife & 1'alliance Francaife, les forces navales &les forces de terre, feront toujours les fignes de ralliement, pour diftinguer les deux partis, & la pomme de tfcorde, pour les brouiller. Je ne vois aucune fin ècesquereiles que, lorfque 1'un des deux partis aurait écrafé 1'autre; c'eft-a-dire lorfque 1'Etat ferait mort parle triomphe complet de 1'Ariftocratie ou du Stathouderat. II ferait un moyen de concilier cesdifférends, de ramener tous les intéréts a un feul, de diriger toutes les paffions vers un feul & même but; ce ferait de changcr 1'unanimité en pluralité ; mais pour que Popinion du peuple fe fit écouter dans le* déhbérations. il faudrait que ies Adminiftrateursfusfent de fon choix; alors le Stathouder ferait vraiment 1'Homme & le Chef de la nation ; 1'exécuteur en chef de fes volontés, & le premier Magiftrat de la Répubiique. Cette éminente dignité deviendi ait alors efientielle. non-feulement pour donner dans  C 229 ) dans mille occafions plus de vigueur & de rapidité aux opérations,mais encore pour encrecenir par fon influen■ ce & fon crédit, l'harmonie dans les diverfes &nombreufes partiesde la confédération; car 1'on fentcombien dans un Gouvernement pareil le Stadhouder pourrait avoir de brillantes prérogatives, qui feraient avan tageufes a 1'Etat, fans menacer fa liberté, Cette dignité ferait alors d'autant plus refpeftée, qu'elle tiendraic toute la machine dans un jufte équilibre, & que les Beiges n'ont pas eet efprit d'effervefcence & d'inquiétude qui caraftérife plus particulierement les peuples du midi. Ces derniers portent tout k 1'extrême; il n'y a, chez eux, gueres de milieu entre 1'excès de la fervitude ou 1'exccs de la liberté ;leclimat du Nord donnant au fang une chaleur plus tempérée, rend le peuple plus facilement content & naturellement ennemi des éclats violens. Après cette digreifion qui ne déplaira pas, j'efpere, aux habitans de cette Répubiique, je reviens a celle de Geneve. Par la conftitution fondamentale de cette ville, trois corps ont part a la légiflation. Le petit-Con* feil, compofé de vingt Confeillers, d'un Tréfoner & de deux Secrétaires d'Etat ; c'eft ce corps qui propofe le premier. Le grand-Confeil eft compofé de deux eens cinauante Citoyens ouB-urgeois; il délibere fur les propofitions du petit-Confeil, qui doivent être portées au Confeil-Général. Entre autres préroaatives, il juge les grandes caufes civiles, il fait grace, il bat monnOye, il élit les membres du petit-Ccnfeil. Le Confeil-Général n'eft rien autre quel'Affemblée générale des citoyens ; c'eft a elle qu'appartiennent le pouvoir légiflatif, le droit de la guerre & de la paix, les alliances, les impöts & 1'ékftion des principaux Magiftrats qui fe fait chaque année, avec beaucoup d'ordre & de décence ; quoique le Bombre des votans foit d'environ ijco perfonnes. A la tête de la Répubiique font quatre Sindics qui font les principaux Magiftrats que le peuple ©u Confeil-Général élit & choifit annuellement, nonP 3  C 230 ) feulement pour être fes ju-ges avec le petit-Confeil; mais pour ê:re fes proteéteurs au befoin contre les membres perpétuels des Confeils qu'il n'élit pas. D'après eet exoofé,tout eft fous la diredlion des Sinuics; tout émane du petit-Confeil pour la déliberation & tout retourne au peup'e pour la décifion; on dirait que la ville de Geneve a pris pour mo» dele cette loi que f acite attribue aux Anciens Gerrriains: de vünoribus rebus principes con/ultant , de majoribus ornnes; ita tarnen ut ea, quorum penes plebera arbUrimn ejt, apud principes pertracientur. Ga diftingue a Geneve quatre ordres de perfonnes. les Citoy m qui fon: rils de Bourgeois & nés dans la ville: les Jiour^eois qui font üls de Bourgeois ou de Citoyens, mais nés en pays étranger, ou qui étant étrangers ont acquis le droit de Bourgeoilie que le Magiftrat peut conférer. Les Habitans font des étrangers qui ont permiflion du Magiftrat de refter dans la ville & qui n'y font rien autre chofe Enfin , les Natifs font les fils des Habitans; ils ont quelques privileges de plus que leurs peres. Le droit naturel qu'ont les hommes de faire des repréfentations a ceux qui les gouvernent, eft une prérogative légale des Bourgeois ; ils font même tenus par leur ferment de bientf hyallement confeiller. u'après la forme de cette conftitution, il n'eft pas étonnant fi les ufurpations ne peuvent s'établir fur des bafes folides; il faudrait détruire toute la fabrique de ce gouvernement, dépouiller les citoyens de toutes leurs prérogatives; ainfi les coups portés a la liberté ne font qu'éphemeres; ainfi les fcenes douloureufes, arrivées, comme nous 1'avons dit, en 1707 & 17^8, n'éteignirent pas 1'efprit de liberté: comme une ufurpation en attire une autre , on imagina de lever des impots fans confulter le Confeil-Général; ils devaient fervir a la dépenfe de nouvelles fortifications, qui rendaient néceffaire une grofle garnifon; on forgeait ainfi aux dépens du peuple, les fers dont on voulait Ie charger; rout fe fit fans formaHtés, ni oppofition; comme lesimpóts ne fuffifaient pas  C 231 ) pas encore, on eut également, fans confulter lepeuple, recours k la voie dangereufe desemprunts: ces innovations exciterent des plaintes de tems a autre; enfin,en 1718 parurent des ktiw anommes, en forme de Mémoire, pour réveiller le peuple de fon asfoupiffement. L'Auteur, plein de lumieres & de fagacité, examina la conftitution par ies principes. Comme il fe fondait fur des autorités quilétayait nar la raifon , on fut frappé d'une citation qu H avait tirée d'un difcours de M. Jean Robert Cboiiet dans rsiffemblèc générale de 1707 I-e fouveratn Conleil, dit-il, en créant des Magiftrats, n'a point abandon, né fon droit; il ne s'en eft point dépoufilé; il le conferve toujours tout entier ; mais H a cree des Magiftrats pour en faire feulement les fon&ions en ion nom, & fous fon autorité, ne pouvant les exercer facilement par lui-même. Lors donc que MM. les Sindics&les autres Confeils font exécuter les Ldits; lorfqu'ils font des Régiemens pour le bien du public , lorsqu'ils créent des Magiftrats fubalternes, lorfqu'ils prennent des réfolutions , pour la paix ou la guerre, pour mettre des impóts, rour battre monnoye & pour exercer d'autres femblables aües de fouveraineté, ils ne le font que paree qu'ils en ont recu 1'ordre de ce fouverain Confeil, & paree qu ils le repréfentent, de forte que 1'on peut dire que c'eft ce Confeil-Général fuprême qui exeroe lui-mems tous ces aftes de fouveraineté, mais qui les exerce par le Miniftere des Officiers & des Magiftrats, qu'il a étabüs a ces fins, & qui n'agiffent qu'en fon nom & en vertu de fes ordres. En vertu de ces principes, difait 1'Auteur des lettres un Souverain, un Mattre qui établit des Officiers til èn droit d'exiger d'eux ce qu'il veut; de retirer de leurs mains 1'aur.orité qu'il leur a confiée;fi cela n.'étak pas, il ne ferait pas vrai de dire que les Confeils font les Officiers du Souverain & qu'ils n'agisfent qu'en fon nom & en vertu de fes ordres, au droit.d'étabiir des impóts. ft eft donc toujours vrai P 4 ieu du redreffementdesgriefs qu'on dcmandait, on traita les Repréfentans de novata.rs , d'mgrais , de boutefeux, de parjures , de JéMieux, de brouiiiovs &c. Ces mots furannés font les armcs ordinairés de 1'ambition contredite. Elle ce s'en tint pas aux paroles. On n'ófait févir contre tout un peuple; on machina le projet de 1'enctufner a jamais. On diftribua d'abord de la poudre & des balles a la garnifon Le jour fuivant on augmerita ia garde de 1'Hótel-de-Ville. Qcelques jours après on furprii un chariot couvert • qui conduifait deux pieces de canon dans le buut de la ville: Ces faits & d'autres repandirtnt 1'alarme ; le peuple courut aux armes; il demanda la garde des portes , que le Magiftrat n'ofa lui refufer. En conféquence 1'Afiemblée générale  C 233 ) rale fut ouvcrte Ie 8 Juillet; on y porta la propofition du plan des fortifications & des impóts, qui y avait donné lieu; le plan fut approuvé; mais les impóts ne furent arrètés que pour dix ans; cependant, comme des indices frappans montraient que les Adrniniftrateurs avaient eu un deffein marqué contre les privileges des citoyens, la confiance ne put fe rétablir; le peuple fit ouvrir un Confeil-Général le 20 Décembre de la même année 1734; & plufieurs des Magiftrats les plus fufpecls furent dépofés de leurs emplois. Le Gouvernement, inftruit par ce coup d'éclat, chercha dans les Natifs & les Habitans des fecours pour les employer au befoin; on emóla ceux que des engagemens mercenaires flattaient plus que ies fruits d'une honnête & Jaborieufe induftrie; enfin, quatre prifonniers d'Etat devant recevoir leur punition, on fit coutir le bruit que ies citoyens voulaient les en lever; les foi-difant protedeurs, aidés de leurs viis ftipendiés, fe repandiient dans la ville, pour femer 1'épouvante; les Citoyens coururent aux armes :, cette fcene terrible ne fe pafia pas fans effufion de fang ; mais enfin les Citoyens & les Bourgeois triomphertnt ; & Ia faóiion contraire fut réduite a acceptcr un pardon, ou a s'exiIer elle méme. Pour mettre une fin a ces troubles, fa* Majefté tiès-Chrétienne forma une médiation avec les Cantons de Zurich & de Berne. Le traité que ces trois Puiffances ménagerent, rétablit en effet le repos pendant bien des années; il y eut quelques kgeis nuages ; mais 1'amcur du repos engagea 1'un & 1'autre parti k des condefcendances ; le 15 Fevrier 1765 , Ie Confeil des deux eens , fur la requifition des Citoyens & des Bourgeois, ééclara même qu'une augmentation d'impót fur 1'entrée des vins étrangeis ne pouvait être perijue, & continuce, fans le confentement du maenifique & fouverain Confeil Général. Ce fut un Citoyen expatrié qui, fans ypenfer, fit nakre les premkrs germes de la fermentation. Si P j Cc-  C *34 3 Geneve n'avait pas eula gloire de donner naiiTance k 1'un des plus grands génies de notre fiecle, il eft apparent qu'elle ferait reftée tranquille. Mais Jean Jaques Roufteau fe décorant avec fa fierté ordinaire, du titre de Citoyen de Geneve, les Magiftrats de cette ville crurent que 1'abfence d'un de leurs Citoyens ne leur ótait pas le droit de prendre fait & caufe de fes adlions & de fes écrjts. Quoiqu'un Ecrivain ne foit refponfable qu'au Gouvernement fous lequel il vit,& que le Contrat Social & 1'Emile euffent vu le jour ailleurs qu'è Geneve, non feulement ces deux ouvrages, mais encore la perfonne de 1'Auteur, furent profcrits. C'était, ditRouffeau, renverfer tout ordre judiciairc; c'était précifément paree que j'étais décrété a Paris que je ne pouvate 1'étre a Geneve. Le délit d'un criminel a certainement un lieu & un lieu unique; il ne peut pas plus étre coupable a la fois du même délit en deux Etats, qu'il ne peut étre en deux lieux dans le même tems. Une femblable profcription contre un homme qui honorait & illuftrait fa patrie, qui exaltait jusqu'aux cieux fon Gouvernement & fes Magiftrats, indigna fes concitoyens. Ses parens étonnés réclamcrent, mais vainement. Un Citoyen prit fa défenfe, mais fut puni. Roufteau voyant que perfonne ne proteftait, prit un parti analogue a 1'impétuofité de fon caradtere; il abdiqua folemnellement fa qualité de Citoyen de la ville & cité de Geneve. Cet éclat jnattendu ralluma tout le feu d'un peuple facile k s'enflammer. On ne vit dans Roufteau qu'une victime de la haine perfonnelle. Un grand nombre de Citoyens & Bourgeois remirent le )8 Juin 1763 une repr'éfentation; cette affaire traitée par les tête's les plus éciairées & les plus éloquentes, donna lieu a la difcuffion des principes du gouvernement, non-feulement d'après les citations antérieures, mais furtout d'après les principes de la Démocratie; le peuple fut alors éclairé plus que jamais fur fes droits; & depuis cette époque le parti déinocratique s'eft toujours agité pour les établir fur un fondement folide. Pour  C 235 ) Pour bien entendre le fonds des troubles de Geneve il convienc de repréfenter 1'état oü 1'avait mis 1'Edit de la médiation. 'Les Médiateurs trouverent une ville en proie a la fureur des armes & au défordrede 1'anarchie; ils percerent jufqu'a 1'qrigme de la Conftitution; pour la remonter, il aurait fallu la refondre; cette refonte offrant des difficultés ïnfurmontables, ils fe contenterent de corriger divers points: ilsóterent, il eft vrai, au peuple tout exercice du pouvoir exécutif; mais en fe ren dar. t garans de fes droits, ils le difpenfeieot de les défendre lui-même. Ils avaient a cocciher des choles prefque incompafibles, les droits du peuple & les prétentions du Confeil, 1'empire des loix & la puisfance des hommes. II n'eft donc pas étonnant ft leur reglement manque cn plufieurs points. L article XLIV laiffant au Confeil-Général legitmement oiïemblé, les droits d'v faire les changemens qui paraitront néceffaires, la volonté'générale eft donc au-deftus de tout; la médiation n'intervient donc que dans le cas d'une divifion. La conftitution üémocranque, dit Roufteau, na pas été bien examinée. II faut diftinguer le fouverain du gouvernement, la puiflance légiflative de 1'exécutive. Les uns .s'imaginent qu'une Démocratie eft un gouvernement oü tout le peuple eft magiftrat & iuge7 D'autres ne voient la liberté que dans le droit d'élire fes chefs, & croyent que celui qui commande eft toujours le Souverain, Dès que la convocation du Confeil-General dépenddu petit - Confeil, dès qu'on ne peut y faire de propofitionCelle n'eft approuvée du petit-Confeil, dès que les membres de ce petit - Confeil exercent une autorité perpétuelle & mdépendante, aesquil a le droit négalif, c'eft-a-dire de rejeter toutes les Repréfentations qui ne lui plaifmt pas de la part des Citoyens & bourgeois, le Gouvernement & la Souveraiheté font abfolument ariftocratiques; ma* comme le peuple joaic de prérogatives trop conüdérables, pour fouffrir patiemment les fuites d un pou-  C 230) voir fi étendu , il réfulte qu'il y a è'Geneve deur p.uuis luttant fans cefle & violemment 1'un contre 1'autie. Pour faire disparaitre ce dangereux choc, Mr. le 'Comte de Vergennes, un des plus grands hommes d'Etat que la France ait employés,a propofé un moyen, 'dès qu'il y aurait conflit entre des Citoyensrepréfentans, cc le petit-Confeil fe réfufant aux repréfenta'tions. II a propofé un Tribunal momentané qui déciderait entre ies deux parties. Pour rendre ce tribunal impartial , il propofait de le compofer du Confeil des deux Cens & d'un nombreégal de Ci' toyehs tirés au fort d'entre ceux qui auraient paflë 'quarante ans. Mais comme dans 1'idée primitive il s'agiffait d'un Confeilélu comme il s'élifait en 1768, C'eft-a- dire par le petit-Confeil feul, les Citoyens 'n'y ont pas vu affez de fureté; & c'eft fans doute jpour cela qu'il n'a pas fixé leur attention. II s'agit de faire treffer Ie* conflits entre 1'Arifto» cratie & la Démocratie, qmfjnt dans un état de guerre perpétuefie, ie tout pour' la défenfe des loix. "Le Confeil-Général coniervait dans 1'édit de 1738 un moyen de défenfe, provenant des loix fonda» mentales , celui de refujer d'élire des Magiftrats. C'eft de ce pouvoir que le petit-Confeil tenta de lé dépouiller. Depuis cette époque il en exerce un autre , celui d'exclure des membres des Confeils; ainfi les citoyens ont acfuellement 1'occafion de faire pancher la balance de leur cóté; il n'y a donc plus d'équilibre; il faudrait donc un corps intermédiaire pour balancer les deux partrs ou une refonte générale de la conftitution pour maintenir ce repos. II eft impoffible de maintenir dans un Etat re* publicain le repos & la liberté civile, a moins que tous les mouvemens de la machine politique ne tendent au bien commun; ce qui ne peut fe faire a moins que le peuple & le fouverain ne foient une même perfonne. On regarde Geneve comme un Etat détourné, par une heureufe impuifianee, du féroce ansour des con«  C 23? ) conquêtes, & ga? anti par une pofition non rnoïns heureufe, dc devenir la conquête d'un autre Etat ; comme une ville libre, placée entre plufieurs peuples, dont aucun n'a intérêt il 1'envahir & dont chacun eft intéreffé a empêeher les autres dc 1'envahir eux-mêmes. Ces obfervauons paraiflent montrer que les Puiffances appelées pour calmer les troubles, en qualité de médiatrices , ne fauraienc tntretenir 1'idée de ia fubjuguer, On attribue ce projee a la France, a la Suifl'e & a la Savoyc Mais ou ces trois Etats pamgeraient cette dépouille, ou deux d'entr'eux la céderaient au troifieme. Dans le premier cas, cette acquifition rendrait les tfois meüiateurs odieux, fans rien ajouter a leur puiflance; dans le fecond cas , chacune des trois puiffances cft également intéreffée è ce que Geneve n'aggrandiffe pas le territoire des deux autres. Pour bien entendre la caufe des troubles adtuels de Geneve, il faut fe rappeler riniurreftion de l'année derniere, 1781 au mois de Févner II y eut alors, fous 1'influence des Puiffances médiatrices, un réglement, fuivant lequel tous ies Natifs de la cité dont les Peres & Grands-Peres avaient été natifs feraient admis au privilege de Citoyens; mais le parti Ariftocratique vovant dans cette admilfion, une augmentation d'advei faires, traverfait conftamment 1'exécution de eet Edit; fous prétexte qu'ayant été fait dans le tumulte des armes , il ne pouvait avoir force de loi- Les Natifs fe virent avec mdignation privés du privilege fiatteur d'entrer en quaüté de Citoyens,dans le Corps politique de 1 Etat oh ils avaient regu le jour., lis fe regardaient comme méprifés par les Adminiftrateurs & comme trahis par les Citoyens, dont leur acccfiion augment-it naturellement la puiffance. Les Citoyens n'étaient cependant pas -infenfib'es aux mauvms traitemens qu'on faifait éprouver aux Natifs; mais, quoiqu'on dife de 1'humeur inquiéte des Genevois, il eft certain qu'ils craignaient de troubler le repos pubjic , mt dans 1'appréhenfion que caufent  C 238 ) toujours des voifins puiffans dont on redoute la médiation , foit par la tranquillité naturelle a un peuple qui ne tiré fes reffources que de fon induftrie. Enfin, voyant qu'en abandonnant les Natifs, ces derniers feraient contraints de fe ranger, comme auparavant, fous les étendarts de 1'adminiff.ration, ils formerent une repréfentation pour demander 1'exécution complette de 1'Edit de 178.T. La Réponfe faite aux Repréfentans fut un déni formel & peremptoire, le 7 Avril. Les Natifs &les Citoyens fe trouvaient alors raffemblés dans ces cotteries, fi fréquentes chez les peuples libres; échauffés par le vin & outrés de ce refus, leur indignation s'allume. Ils déclament vivement contre la tyranniedes Adminiftrateurs; la paflion de chacun ü'eux paffe dans le cceur de tous; la fermentation devient générale; & les efprits s'exaltent au plus haut degré. Les Natifs le répandent dans les rues, en demandant fatisfaclion ; quelques - uns des principaux Citoyens s'interpofent pour éteindre ce feu; le Sénat fait auffi plufieurs efforts; mais tout fut inutile. Quelques-uns des mal-intentionnés, ayant alors crié au feu, on courut aux armes, conformément au réglement établi dans ces fortes de cas. Les principaux Citoyens voulurent arréter le peuple; mais il était trop tard. Le peuple armé s'empara de 1'Hótel-de-ville, desportes de la ville, fans trouver de réfiftance qu'a 1'une des deux portes , dont ils s'emparerent k la fin; mais non fans effufion defang. Que n'a-t-on pas k craindre d'un peuple prêt k facrifierfaviepourla liberté ? L'idée de retenir en otage les principaux Membres du parti des Natifs ou Ariftocrates, montre cependant la crainte qu'ont hs Citoyens de leurs voifins. On fait que depuis eet éclat,les Citoyens qui n'avaient jamais approuvé les demandes des Natifs & que certaines circonftances fuites malheureufes de l'infurredion .avaient afgris^ fe font trouvés dans la néceffité d'entrer dans tous les procédés des autre1;; car refter fpeófateur oifif eut été abandonner 1'adminiftration a la populace, & «'ex-  ( 239 ) s'exiler da la ville eut été fournir un prétexte aux voifins médiateurs , dont la fermencation adtuelle ne peut manquer de rendre les vues fufpedt.es. Enfin, 1'Affemblée du Confeil-Général viene d'exereer touce la plenitudede fa fouveraineté. Elle a déclaré les grand & petit Confeils difious. Mats comme il convient d'affurer les circonftances & les fuites d'une révolution auffi importance, il n'eft pas inutile d'inférer deux pieces tirées des papiers publiés les plus accrédités '& les mieux inftruits, „ Outre les Citoyens & Bourgeois de Geneve, cette VUle renferme un Ordre de gens beaucoup plus nombreux, connus fous le nom de Natifs, mais dont les Droits & Privileges font trés-inférieurs a ceux des Citoyens. Leur grand nombre, & par conféquent leur force, leur a fait jouer dans les diflenflons de ces dernieres années un röle trésimportant: Les Partifans de l'Ariftocratie, connus fous le nom de Négatifs, ont travaillé a fe les attacher, foit en leur promettant les Droits utiles de la Bourgeoifie, foit en mettant en oeuvre plufieurs autres moyens, que la droiture & 1'honneur desavouent: Argent, repas, véteraens, careifes, toutes ces amorces ont été employées de leur part. Les Citoyens Repréfentans, convaincus que, fi leurs Ad. verfalres réuiïilfaient dans leurs vues a l'égard des Natifs, leur Parti feroit infailliblement miné, ont été forcés de faire a ceux-ci des olfies plus avantagjufes encore. Ainfi les Natifs ont été mis en quelque forte a 1'enchere, &font devenus le butin du plus offrant & dernier enchériffeur. L'année derniere, au mois de Février, lorsque la Bourgeoifie fe vit concrainte a prendre lesarmes, elle ne profita de fes avantages que pour faire palier un Edit, qui eut fa fanction en Confeil-Général le 10 dud t mois, & qui accordait la Bourgeoifie a un trés-grand nombre de ces gens-lii. Lorsque le caltne a été rétabli, le Magiftrat s'eft iiivinciblement refufé a mettre en exécution eet Edit. Les Citoyens Repréfentans ont été forcés de faire au Confeil diverfes repréfentaiions pour 1'y engager, mais en vain. Le Lundi 8 Avril 1782, en particulier, le Confeil rendit une Réponfe fur eet objet, fi décifive, fi tranchante, & fi imprudente, que les Natifs, ralfemblés dans les Places publiques, n'écoutant plus ni les vives infiances des Citoyens  C 240 ) yenj fages & modërés, ni 1'intérêt majeur de Ia Patrie, prirent les armes tumultueufement fur les 9 heures du foir & fe feraient portés a toute extrémité, fi les Citoyens Repréfentans, obligés de céder a une force irréfiftible, ne ï'étoient joints a eux pour éviter de plus grands malheurs. Alors les Natifs & les Citoyens en armes alIerentdépc-iTóder la Garnifon des Portes de Ia Ville & de tous les Potles militaires , non fans effufion de fang , puisque 3 ou 4 Perfonnes ont été tuées & environ 25 blelfées. L'intérêc de leur fureté les obligea enfuite a prendre & a garder en Otage quatorze des Chefs du Parti Ariilocratique, partni lesquels fe trouvent fept Membres du Petit-Confeil, auxquels on attribue avec fondement cette derniere Réponfe, qui a mis Ie feu aux poudres. Ces Otages ont été transférés dans 1'Auberge des Balances, oü aucune des commodités de la vie ne leur eft refufée, mais ofj ils font gardés avec Ie plus grand foin. Les Citoyens, Natifs & Habitans, perfuadés qu'aufli longtems que le Petit-Confeil fjrait compofé comme il 1'a été jusqu'ici , il n'y aurait nulle Paix folide a attendre, ont fait i ce même Confeil une Réquifition , a laquelle il a été ofcfifgé de confentir , & qui a eu fa fanftion Mercredi 10 Avril an Confeil-Général. En vertu de cette Réquifition, le Petit-Confeil & celui des Deux-Cent font diilbus: Un Collége, compofé des Syndics ou Chefs actuels de ia Répubiique, qu'on ne deftitue point, de dix autres Confeillers qui ont palfé par Ie Syndicat, & que fon fe propofé de conferver encore dans Ie nouveau Confeil, des fix Auditeurs ou Aflefleurs de la Juftice, du Procureur-Général, & de donze Citoyens d'une prudence & probité reconnues, a été chargé de former de nouveau les Petit- & Grand-Confeils. II a rendu les deftitutions le moins nombreufes qu'il 1'a cru posfible. Son ouvrage fut porté, Vendredi ia en Confeil-Général, oü il recut 1'approbation du Souverain de la Répubiique." La Suite au N'. Procbain.  L E POLITIQUE N°. LXVIII. LUNDI, ce 27 MAI, 1782. Suite JaCHAPITRE XLI. Sur te Conftitution & les Troubles de la Répubiique de Geneve. Trè<-humble & trèf-rrfpeétaenfe Re'quisitioiï des Citoyens, Bourgeois, Natifs-, & Habitans de la Répubiique, rcmij'e aux Seigneurs Syndics, le 9. Avril 1782. LE jnfte mécontemement du Peuple contre les Auteurs des maux de la Patrie a été porté a fon comble par la Réponfe que le Magoifiqne Petii-Confeil a faite, le 5 du couranr, a la Repréfentation d. s Citoyen? & Bourgeois du 18 du mois dernier. Le refus ablblu du magntfique Confeil d'exécuter un Edit, auquel ia Nation entiere attaché la plus grande importance, & qu'elle envifage comme 1'uniqu.ï moyen d'y fixer a jamais l'harmonie, Ie bou-oMre & la paix; la témér.té inoui'e, avec laquelle il s'eft porté, a con. tefter, dans eet Ecrit, au Confeil-Général cette Souveraineté de la Répubiique , qui lui apparifent dès fon inftituti- , on , que tous les Confeils & Magiftrats de 1'Etat & nos Alliés eux-mêmes ont conftamnaent reconnüe, &a laquelle ce Souverain-Confeil n'a jamais renoncé; tels font, Magnifiques & Très-Honorés Seigneurs, les motifs, qui nous ont enfin forcés a prendre le» Armes. Nous uéplorons cette Tüme Ui. q  C 2+2 ) fatale néceiïité; & les effets de notre légitime indignation contre les Auteurs^ de tous nos maux ne peuvent étre arrêtés que par la confidération de ce que nous devons a cette Patrie, dont le falut & le bonheur ont été conftamment 1'objet de nos voeux & de nos travaux. La maniere, dont le Petit-Confeil a été recruté depuis quelques années ;l'entrée qu'on y adonnée, contre les vrais intérêt! de la Répubiique , a une Jeuneffe ,qui s'était furtout diftinguée par fon acharnement a faire triompher la conjuration formée contre 1'Indépendance de Ia Répubiique, nos Loix & notre Liberté,- fafcendant, que les nouveaux Confeillers ont , dés-lors , pris dans les délibérations; & 1'appui qu'ils ont conllamment trouvé dans la pluraiité du Confeil des Deux-Cent, de ce Corps qui, par fa malheureufe infurrection contre i'ouvrage fi falutaire & fi défiré du Code, a donné naiffance aux troubles , qui, dès-lors, ont travaillc Ia Répubiique : Voila , Magnifiques Seigneurs, les véritables & uniques csufes de tous ies maux de la Nation. C'eft pour y appitquer le feul rernede, qui s'offre a nous pour Ia fauver , que nous venons requérir de Vos Seigneuries, qu'il leur plaife porter inceffamment & fucceffivement aux Petit & Grand- Confeils, & immédiatement après au Souverair-Confeil, i'Avis d'nboiir dès-a-préfent les l'etit & Grand-Confei's aftuels , & de donner piovifijruiellement auxSyndies & aux Confeillers, qui ont été honorés de cette Charge ou de celle de Lieutenant, joints a eux Mrs. les Auditeurs & Mr. le Procureur-Général , & quelques Citoyens notables, que nous nommerons a eet effet, la puisfance nécefiaire pour créer incefiamment de nouveaux Confeils, a la charge de raporter fans délai su Confeil-Général la Lifte des Membres qui devront compofer lesdits Confeils, pour y recevoir fon approbaiion; Déclarant, que notre intention eft, qu'immédiatement après cetre opération , il fera procédé par le Petii-Confeil, qui aura é;é nouvelleinent étahli, a 1'exécution pleiue & entiere de fEdit du 10 Février 1781. Extrait des Regi.'res du Confeil. Du 9 Jvril 1782. Le Conf. ü délibérant fur Ia Réquifition remife ce jour a Mrs. les Syndics par les Ciioyers , Bourgeois, Natifs, & Habitans de la Répubiique, I'Avis en deux tours a été, qu'il n'y a point d'autre parti a prendre , vu les circon- lian-  ( 243 ) flanees oü fe trouve la Répubiique , que d'approuver les Concluflons de la dite Réquifi ion, & d'affembler le Mignifique-Confeil des Deux- Cent damain a 8 heures ,pour lui porter eet Avi«. (Slgné) de RoCHEMOKT. A ces Piece* , nous ajouterons les Réfolutions prif's le to Avril par le Confeil des Deux-Cent & par le Confeil-Général, cjnformément a la Réquifition di s Citoyens. Du 10 Avril 1782. Au Magnifique Confeil dis Deux-Cent, Etant opiné fur I'Avis du Magnlflque Petir-Confeil du 9 de ce mois, I'Avis en deux tours a été de 1'approuver & de le porter au Magnifique & Souverain Confeil - Gé:ié'al aujourd'hui a 2 heures ap-ès-m-di , pour (cwo'r s'il 1'sp» prouve & y donne fon Confenteme: t. (SignéJ de Rochemont. Du 10 Avril 1782. En Confeil-Général. Letfure faite de I'Avis de Meffeigneurs les Syndics, Petit- & Grand- Confeils , des o & 10 de ce mois; chaque Citoyeu & Bourgeois ayant donné fon fuffraee a l'oreiüe de 1'un des quatre Secrétaires ad ailum ,noromés pour re. cueillir les ft#ag«f fur 1'approbation ou fur la réjeetion du. dit Avis, il a été approuvé par la piuralité; & cette Réfolution a été a 1'inllant publiée. (Signé) Dentand, Tréforier, pour les Secrétairef-d'Etat. Extrait des Regitres du Magnifique Petit- Gonfeil, du 15 Avril 1782. Messeigneurs, Pénètrés depuis longtems de la nécefïïté de ramener dans notre Patrie la tranquillité, 1'Ordre & la Sureté, & sya'.t pris en férieufe Confi.lération les moyens indiqués pour parvenir a ce but, par les Citoyens & Bourgeois oans leut Propofition , remife le jout d'hier a Mrs. les Syndics, on eftime qu'il y a lieu de propofer au Magnifique- Confeil des Déux-Cent, les Articles fuivans, pour, s'il les appiouve, Q a êtra  ( 244 ) être portés au Souverain-Conreil le 16 de cemois, pour favoir s'il lui plait de les approuver. „ A u t. Ier. Il fera formé une Commiflion de fureté, compofée de quatre Membres du Magnifique Petit-Confeil, de deux Auditeurs & cinq Citoyens ou Bourgeois, Membres du Confeil des Ueux-Cent. Cette Commiflion fe choifi:a des Secrétaires & autres Aides, néceflaires a ftxercice dts foncïions, lefquels n'auront point voix délibérative dans la Commiflion. II. Cette Commiflion aura pendant deux mois, 1'autorité néceflaire pour prendre provjfionnellement toutes les mefures néceflaires a la fureté de 1'Etat, & procurer ainfi le rétabliflément du bon ordre & de Ia tranquillité. III. Elle feta particulierement cbargée de difpofer felon fa prudence, de tous les Corps mi'itaires de la Bourgeoi» fie, des Milices du dehors & de Ia Garnifon, pour la garde üe la Ville, la fureté publique & le foutien de la Police; de faire obferver dans ces divers Corps Ia fubordination & la difcipline Militaire; de faire commander tous les dix Corps lans exception par des Officiers de la Bourgeoifie, de fubftiiuer a ceux defdits Officiers qui ne pourraient pas laire leur fervice, & de faire prêter aux Compagnies de la Garnifon le ferment de fidélité a 1'Etat & d'obéifiance aux Officiers qui les corrmanderont & aux autres Supérieurs. - Cette Commiflion fera de plus chargée de réprimer avec promptitude , tout Auteur de provocatian ou infolence , tout tumulte , tout défordre & tout mouvement contraire & Ia tranquillité ou a la fureté publique , de méme que toutes les conttaventions & la difcipline militaire; & la charge par elle de rapporter au Petit-Confeil, pour êtte jugts lèlon la forme & la rigueur des Loix, tous les cas qu'elle eftimeia mériter une peine plus grave que Ia Prifon de 15 jours en Chambre clofe." Dudit Jour après-midi. Au Magnifique Confeil des Deux-Cent, Leéture faite de 1'avis de Mejfeigneurs du Petit-Confeil & du Programme ci-deflus, 1'avis en deux tours a été de les approuver & de les porter demain marin a neuf heures au Magnifique & Souverain-Confeil-Général. (Signéj Dentand, Tréforier-Géréral peur les Seigneurs Sécrétaires d'Etat. L'Avis ci-deflus a enfuite paifé en Confeil-Général a Ia piuralité de fix eens quatrfc-virigt-douze voix contre dix-neuf. D'après  C =45) D'après ces docamens & d'après les autres informations venues de Geneve, les chofes confidérées fous un point de vue impartial , il parare que les Citoyens de cette ville agitée , ont également tort , foit en prenant les armes pour des intéréts étrangers, foit, après les avoir prifes, en bornanc leurs demandes a 1'exécution de 1'Edit du 10 Février 1781. lis ne voient donc pas qu'i! s'agit moins, pour calmer les troubles, de changer d'Adminiftrateurs que d'adminiftration, & que le maintien de la même forme d'adminiftration , leur donnera toujours des Adminiftrateurs qui leur déplairont ? Ne vo:entils pas que dès que les membres des Confeils feront indépendans du peuple, eès que dans 1'Affemblée annuelle du Confeil-Général le peuple ne pourra faire paffer, a la pluralité des voix, finon le renouvcllement de tous les membres des Confeils, du moins la dépofition de quiconque ne lui fera pas agréable, & tant qu'un Citoyen ne pourra propofer également a la pluralité tout ce qu'il juge pouvoir intéreffer la Répubiique, cette paix ne fera qu'éphémere & plÉtrée. Les nouveaux Adminiftrateurs ayant, ainfi que les précédens, Ie mê.ne intérêt a fe former un pouvoir arbitraire & indépendant, reviendront toujours fur les traces des anciens. Ces idees rameneraient non-feulement les chofes a I'effence de la Démocratie, qui conftitue le Gouvernement de Geneve ; puisque la Souveraineté refide dans le peuple ou 1'Affemblée générale des Citoyens; mais on en verrait auifi renaitre 1'obfervation des principes énoncés dans les occafions & les.déclarations les plus folemneües. Suivant 1'Ëdit ménagé par les trois Puiffances médiatrices en 1738, le Confeil. Général conferve le pouvoir, non-feulement de refufer tous les fujets qui ne lui feraient pas agréables pour Ia charge de Sindic, mais encore celui de refufer d'élire des Magiftrats. Dans la première inftitution les quatre Sindics nouvellement élus, & les quatre anciens sindics, rejetaient tous les ans huit membres des feize reftant du petit-Confeil, &enpropofaient huit nouveaux, lesquels paffaient enfuite aur Q 3 fuf-  ( 2»Ö ) fuffragcs des dtaks Cens pour étre admis ou rejetés. Le petit-Confeii dans fon origine n'était qu'un choix fait entre le peuple par les Sindics, de quelques Notablos ou Prud-hornmespour leur fervir d'Afiefleurs. Tvin advent ive content, dit l'Eiit de 1555, en dégrê ie Citoyens & Bourgeois, fans fe vouloir préférer £? s'attnbner quelque autorité & Seigneurie par deslus ks autres. Et dans 1'Edit de ij68 , ml ne doit étre en iffice, qui ne foit agréable au peuple. Dans la difpute encore fraiche de 1768, il fut adjugé folemne'.icment au Confeil-Général, le droit deiire la rnoiué des membres du Confeil des deux Ccnt& de deïtituef chaque année quatre membres du Confeil des vingt-Cinq. En 5 735 le Confeil envoya un mémoire a la Cour de Londres oü il dif.it queduConfcil-Genéialémanaienttouslcs pouvoirs. & qu'il avait le droit de les reprendre lorfque ies Confeils inférieurs en abufaient. Ainfi Ia Conftitution eft entierement démocratique. Or.dans une démocratie le peuple eft la puiffance fuprême,!eccntreoütout fe rapporte, le principe d'oü tout dérive , le Souverain qui r-amene tout a lui (*). Mais il eft abfurde, dirait-on ,en donnant au peuple une fi grande autorité, qu'on lui fuppofe celle de faire des repréfentations. Les Adminiftrateurs n'étant plas que icsOSckrs& les Serviteursdu peuple, il eft contre 1'ovdre que le maitre faffe a fon ferviteur des repréfentations, qui fuppofent infériorité dans celui qui repréfente, & fupcrioritc dans celui auquel on s'adreffe. On pourrait i-éfuter cette objeéfron . en difant que les repréfentations font moins des demandes d'un fujet a un fupérieur qu'une remonte*) On eft étonn'é, en voyant dans la conftitutio'i de Geneve, ainfi que dans celle de 'plufieurs villes des Payshas-Unis, antérienrement a la Réfolution qui leurprocura la libcté po'idque, des franchifes qu'eïles ont perdues depui?. Comment! vous vous'aifT'ez a>racher, étant libres, des droits. dont vous iouifliez étant fujets? Vos Magiftrats vous dépouiilentde ceux, que vous accor ierent vos Princes! Sï telleeft la liberré,que vous ont acquis vos peres.vous avez de quoi regretter le fang qu'ils verfcreiu pour elie.  C 247 ) montrance pour rappeler un fervitcur en charge a fon devoir. Mais il femble qu'en ramenant tous les pouvoirs de l'adminiftration , a la Démocratie, le droit des repréfentations devient presque inutile; & que ce droit que 1'on peut regnrdcr comme unéqui. valent de ceux örés a ia Bourgeoifie, n'étant plus employé, par le renvoi cle toutes les maticres de difculiion a 1'AlTemb ée -'Générale, alors dtfparaft tout conflift naturel entre les Adminiftrateurs & les Repréfentans. Eit-il d'auire moyen de ramener la paix, 1'harmonie & la confiance dans la Répubiique & de lui rendre cette fpleBdeuï & cette copfidération qu'eiie ne doit qu'a la liberté? C'eft a eet efprit de liberté que Geneve, ce point qui échappe a 1'ceil même des Géognphes, doit une population, dont autrement la fixiemc partie n'y trouverait pas fa fubfiftance. 11 n'y a point de" patriciens a Geneve : on y connaït encore moins les distinftions odieufes de nobleffe & de roture ; mais 1'inégalité des fortunes, fuite néceflaire de ['industrie, y tend fans ceffe a dénaiurer la conftitution. Les loix qui étabiiftent t'égatité politique, & les mecurs qui la font r«fpe&er,ont eu jufqu'ici befoin de toute la vigilance des Citoyens, pour réfifter a 1'afcendant impérieux de la ligue des nches; iigue d'autant plus dangereufe, que les Citoyens, occupés journeilement du commeice & des arts,pc font gueres en état d'arrêter fes progvès lents & infenfibles. Pour empêcher Phérédité dans les charges que 1'independance des Adminidratcurs établit toujours, fi non de droit, du moins de fait & pour maintenir faas ceffe cette circulation perpétuelle dans les fortunes que la nature femble avoir établie. en difpenfin-, indiftinctement le mérite & les talens, il n'eft donc pas néceffaire de recourir a la communauté desbiens, qui maintine pendant fept eens ans !a Répubiique de Licurgue; il futfit. de combiner les chofes de fatzon que l'adminiftration foitariftocratique, oudans iesjmamsdu petit nombie; & la Souveraineté, démocratique , c'efl a-dire que tout 1'autorité des adminiftrateurs foitdépendante dupeuple. Tout corps interQ 4 mé-  C 248 ) méciaire, tout tribunal médiateur amené entre les deux parties, ne ferait que perpétuer les diiputes & les faclions, qu'on ne peut détruire que par un ieul 62 méme intérêt, en établiffant la néceifité de dépendre toujours de ia volonté généraie, rcfidant dans ia plurahté des Citoyens & Bourgeois Voila le principe que les Rédacteurs d'un nouveau code politique pour cette ville, doivent toujours avoir devant ies yeux, & dont ils doivent chercher les meilleurs modelés dans ies inftitutions. que fe torment adtueüement ces Républiques qui s'élevent avec tant d'eciat dans le Nord de I'Amérique. C'eft une très-grande erreur en politique, d'imagincr que la féquence des Affemblées de la nation peut nuire au bon ordre dans une Répubiique. Rien au contraire n'atrache surant le Citoyen & fa Patrie, que 1'babitude de soceuper desintèrêts publiés; rien n'éleve autant les anies; & ne les empéchc de fe concentrer baffement dans le tracas des affaires particulieres, que eet efprit de dignité qu'occafionne ie Speétacie majeftueux du Corps légiflytif, a la i-ouveraincté duquel chaque merabre fe fent participer; rien enfin nerelïerre autanc ks liens qui doivent unir les Citoyens entre eux, comme de fe trouver fouvent rafièmb'és pour discuter leurs intéréts coma uns Cette erreur prend fa fource dans la confufion qu'ont fait les politiques des objets de Légiflation & des objets de Gouvernement. Ils n'ont pas vu que les premiers, emhrafl'ant généralement & abftraitcment les intéréts de tous les membres de 1'Etat, ne peuvent êtrelégkimement réglés q"e par la colleéiion de fes membres, & que les autres n'étant jamais que des applications des premiers, & étant purement individucis, re pouvaient être du reffort de la volonté générale, & que par cette raifon,il eft è propos que la décifion en foit commife a des Magiftrats. Cette diftinétion , qui fait la baie du droit public, a été ignorée ou négiigée par tous les auteurs, qui ont écrit fur cette matiere; elle a été mife dans le plus beau jour par ün homme de génie qui a dé- ve-  C 249 ) veloppé depuis peu ces idéés, qui avaient été fi longtems dans la plus profonde obfcurité. Conformémenta ces obfervations, quoiqu'il foit vrai que la discuffion des affaires particulieres attribuées au peuple, ne pourrait que mettre de la lenteur ck de 1'embarras dans le jeu de la machine politique: il ne s'enfuit pas qu'il ne doive avoir toujours 1'ceil fur les intéréts généraux & veiller au maintien de la Légiflation, dont il eft legardien fuprême. Au milieu des convuifions qui agitent la Répubiique de Geneve, elle n'a pas feulement des combinaifons è prendre fur fon état intérieur; s'il en faut croire desNouvelliftes, qui paflent pour avoir de la pénétration & des Iumieres; la liberté politique de Geneve court les plus grands risques. ,, II eft facile, difent-ils, de voir dans Paccord formé entre les deux Cours de France & de Sardaigne, de faire ,, avancer des troupes vers Geneve, le projet de ,, mettre fin aux troubles interminables des Géné„ vois, en les mettant fous la dépendance de ia „ France Selon le plan qu'on fuppofe arrêté, cet- te derniere Puiffance s'emparerait de Geneve, oh „ elle tiendrait une forte garnifon. On conferve„ roit aux habitans leurs principaux privileges. ex„ cepté celui d'abufer de tous les autres & de fe ,, nuire a 'eux mêmes; & furtout on leur laifferait „ la liberté de confcience, a peu prés comme aux „ Stra;-bourgeois. On donneroit au Roi de Sardaigne „ une partie du païs de Gex qui eft a fa convenan- ce, & a la répubiique de Bernc, Verfoy & fon „ territoire , qu'elle defire depuis longtems. La „ difficulté ferait de contenter Zurich; il n'y a a fa bienféance qu'une partie du territoire de Berne, & 1'on.travaüle a faire confentir cette derniere Ré„ publique a le lui céder. Cet arrangement eftd'au- tant plus croyable, que les gensaccoutumés afui„ vre la marche des événemens humains & de la politique, en voyant tant de Puiflances s'ébranler pour une miférable querelle d'horlogers, ont Q 5 „ foup-  C 250 ) „ foupconné aifément que ce n'était pas unique5, ment pour avoir 1'honneur de les pacifier , qu'elles déployaienc leurs étendarts cc faifaienc mettre leur canon en mouvement. On lit dans la Gazette ,, d'Amfterdam , art. Geneve, la fingulicre phrafe qui fuit: II vxudrait heaucotip mieux qu'on nous iaxQat le „ foin de vuider nk propt es dtfférends: Peut-êire Jbmmes nous cette fois entréi dans Zorbite politique, „ qui doit affurer la régularilé de nos mouvemens \nous „ errions peut- être auparavant pour chercher cette som* „ binoifon; 1'avenir momrtra fi nous avons été trom„ pés. „ Quelle étrange opmion ce peuple doit avoir de „ lui méme & dc 1'importance de fon Eut, bien ,0 auffi étendu, Tawim quantum poffent circumdare tergo ? ,, II eft a préfumcr en effet qu'il va entrer dans „ ce qu'on appeile l'orbite politique qui Ooit affurer la „ régularilé de fes mouvemens ; mais non a ia maniere „ dont .les aftrologues Génevois 1'entendent. Quel,3 ques aftronomes de Verfailles & de Turin auront ,, prévu que cette cometc.s'écartcrait encore de fon orbite, par la force centrifuge trop violente, qui „ réfide en elle; & ils auront pris la l?ge réfolution „ d'affujetir eet aftre errant & vagabond a la marche ,, & aux mouvemens d'un aftre plus régulier. Du ,. refte , fi eet événement arrivé il y aura lieud'ad„ mirer encore 1'étonnante bizarrerië des chofes de „ ce monde puisqu'en moins de 11 ans, la France „ aura foumis au pouvoir monarchique 3 republi5> ques de notre continent, (Ja Corfe, la Suede & „ Geneve,) & en sura créé 13 dans 1'autre hémis„ phere. C'eft toujours une chance de 10 contre 3 „ dans la lutterie poiitique, en faveur de la forme républicaine & de fes partifans; mais cela eft ce., pendant finguher! En tout cas, fi les Génévois fe „ plaignent de eet arrangement, ou pourra leur ré- pondre, & même faire graver au-deffus de cha„ que porte de leur ville:" Quia noluijtis veftrum ferre bonum, Malutn perferte. II  C 251 ) Tl faut avouer qu'en mettant de cóté le ton perfifïleur & les plaifanteries indécentes, q ie 1'Auteur fe permet, furtout a l'égard des petits litats, les malheurs qu'il annonce a Geneve ne fonc pas fans vraifemblance. Les infargens eux-mêmes paraiffeno nourrir ces conjeclures finiftres en gardant étroite.nent leurs principaux adverfaires , qu'ils fembleht avoir arrêtés pour ieur fervir d'otagcs & de garans contre les entreprifes que les voifins médiateurs formeraient, non-feulement fur leurs perfonnes, mais encore fur la liberté de 1'Etat. On remarque en effet que Ie parti des Négatifs ou Ariftocrates a toujours eu foin de ménager les Puiffances étrangeres, dont 1'afliftance pouvait effrayer les partifans dc la liberté. On ne faurait cependant jamais fe perfuader que la France qui, 1'année derniere, renonca ainfi que Zurich & Beme,a la médiation de 1738 » eüt utftuellement des vues de conquête fur Geneve. II ne peut eritrer dans fes plans de perdre par cette politique oppofée a fon fyltême aöuel de magnanimité , la gloire qu'elle s'eft acquife, en montrant en différentes rencontres ion défintéreffement & fes foins pour écaj-ter tout foupc^on de vouloir attenter a la liberté de cette petite Répubiique. Un üon ne cherche pas a dévorer une mouche» C'eft paree qu'eïles peuvent écrafer que les grandes Puiffances ne doivent jamais s'abaiffer a faire du mal. A 1'exemple du fupiême Ordonnateur desmondes, elles doivent tenir la balance de la juftice, avertir les coupables & jamais les anéantir. L'ufurpation d'une petite viiie, queique avantageufe qu'on püc repréfenter fa fituation , ne faurait entrer dans ies dtffeins de la France. El ie eft la prottótrice de la liberté des petites Républiques Euronéennes , dont la plupart fe font formées ou fe maintiennent fous fes aufpices Voila le róle qu'elle doit remplir fur le vafte théatrc des affaires générales La Suiffe 1'a éprouvée plus d'une fois Des guerres longueS & fréquentes n'ont pu faire oublier aux Pays-bas- Unis qu'ils font redevables alabrance de leur exiftence politique. Les mers & les plai»  C*50 pla'nes de I'Amérique font teintes du fang Francais qui a cimenté fa liberté. N'eft-ce pas la France qui pofa des bornes a 1'ambition de Charles-Quint & initfin aux proiets funeftes de fon fils? N'eit-ce pas elle, qui appela les armes du Grand Guftave & jeta les fondemens du droit public de 1'fimpire & de 1'Europe ? Convaincus de ces vérités, les Suiffes ni les Gé* nevois n'ont jamais pris ombrage de 1'intervention de cette Puiflance dans les troubles de cette Ville. Depuis que laiédaclïon des Loix les a fait renaftre, M- le Comte de Vergennes a fait des déciarations réitérées, conformes au fentimens de fes Prédécesfeurs en office. Quand on voit le Roi de France arracher d'une main le Sceptre de 1 Océan au Roi de la Grande Bretagne, & de 1'autre rappeler les factions de Geneve a 1'ordre &k latranquilité,onferap. pelle ces antiques Héros qui furent a la fois la terreur del'Afie, & les pacificateursdésintereffés desimprudentes diffenfions des villes Grecques. Depuis que la Suiffea étéplacée entre deux grands Monarques, elle n'a jamais figuré, par ia feule raifon quelle n'avait aucune maxime fondamentale applicable a toutes les circonftances. Si elle avait .fuivi un plan de conduite au milieu des révolutions des autres Etats, fon pays était affez difficile pour les opérations des armes,"& le peuple aftéz guerrier pour que la Répubiique eüt pu s'affurer une liberté perpetuelle , & tenir une place plus confidérable parmi les Etats d'Europe. Rien de plus rare qu'un traité bien concu , qu'un traité qui n'allume pas de nouvelles guerres. Les termes abftraits' fe mélent toujours dans les dénomir nations qui défignent les faits. Deux faclions ne fervent gueres ce qui eft légitime. Les auteurs du Traité de 1733 n'avaient aparemment point de pasfions; ils auraient connu les tours qu'eïles jouent a Ia raifon qui eft toujours réduite a trouver jufte, bon, beau, décent, charmant, glorieux, tout ce que ces maitreffes capricieufes lui ordonnent de prendre poür tel. Nous  C 2?3 ) Nous profeftbns d'ignorer ce que deviendra Geneve; nous croyons auflï que le plus grand nombiedes Citoyens n'en eft gueres mieux inftruit ; & c'eft beaucoup ft les PuiiTances alliées cn favent quelque chofe. Nous voudrions que la Répubiique voulüt prendre le parti d'étre heureufe; puisque le Ciel & la Terre veulent qu'elle le foit. Pendant que cette ftttille était dans les mains de Vimprimeur , f Auteur du Manufcrit vient de nous adrejjer les additions Juivantes , qu'il nous prie injlamment de mettre d la fin de fa dijfertatton ; fi quelque Négatif juge d propos de nous communiquer des idéés contraires , nous fommes prêts d les publier avec la néme impartalité; car trop éloignés du tbéatre de ces dijjcifions, nous ne pouvons que nous en rappurter aux yeux &ƒ aux rélations d'autrui, Lettre de Son Excellence Monfieur le Comte de Ver- gcnnes a Monfieur l' Ambaffadeur de France d Sokure. Cette Lettre a été communiquée le 7 Mai 1782 a ,, Leurs Excellences de Berrie, de la part de Son Excellen„ ce Monfieur 1'Ambaffadeur de France, par Monfieur Ba„ cher, Secrétaire ci'Ambaiïade; & adreffée par Copie a „ Leurs Exc. de Zuricb." La Roi a été trê'-fpnfible, Monfieur, a Pattention que les Cantons de Zurich & Berne ont eue de vous faire part de Ia Lettie qu'iis ont écrite le a3me du tuois dernier aux Sindics de Geneve. Le motif de cette communication eft fait pour être, ii tous égards, sgréable a S. M,: Certainement Elle n'a pas ceffé de prendre un iuté.ét véritable au fort de Geneve» &, dans le moment oü cette Répubiique gémit fous foppreffion de quelques-uns de fes Citoyens ca) , S. M. devait voir avec piaifir les deux louables Cantons partager fou indignaiion de eet attentat [b, Qj) & lè bornera a appuyer le cours de ce fiecle! Ces frequentes agitations ne montreraiem-elles pas plutót, que le repos ne peut revemr que par le triomphe & l'établiflementde la Democratie ? (ƒ) Que vous importe la conduite d'un Etat a qui vous avez retiré votte médiation? Sous quel rapport des événemens relatifs A Ton Gouvernement intérieur, peuvent-i!s étre icffeSlueux pour vous? Cg ) Quel langage dc Ia part d'une Cour qui vient de jouer un róle fi brillant daas Ia création des Républiques Américaines ? En France Ia Sonverainité réfide, dit-on, efTentielietnent dans Ie Monarqtte. L'autorué exercée par les Parlemeos émane encierement de lui. Lorsque Louis XV leur retira cette autorité , pour former d'autres corps exécurifs, fe rei>dif-il coupable de révolte? [e ne connais pas affez la conlliiution Francaife pour juitiöer ou cundamyet fa démarche. Mais il me temble que l'Empire, la Suiffe, ou qae!qu'autre Puiflance alliée aurait bien étonné Louis XV, en intervenant dans cttie querelle domeftique, fous pré-exre qu'il introduifak des dogmes dangereux. Si quelque artentar d'ua peuplo v min a jamais pu effrayer une monarchie , ce fut, fans doute, le Rdi;icide des Anglais du tems de Cromwel. Qui ne fait qu'alors leDespote Riciielieu lui-méme échaufait les Anti-royaültc-s , qui firenc tomber la tête de Charles I fur un échaSiiut ? ti) Puisqu'on ne faurait dourer de la üncérité de ces fentimens gêné-  C 25O le Gouvernement légitimé, dès qu'une fois i! lura rpcouvré 1'autorité dont il a ëté dépouilié & 1'abandonnera a fes propres forces, lorsqu'il en aura de fuffifantes. Pour convaincre davantage les Cantons de cette facon de penfer, vous leur ferez connaïtre, Monfieur, le defir qu'a S. M. de les voir concourir avec Elle k confolider la Paix de Geneve, lorsque cette Affaire fera a fon point de maturité. Pacifier Geneve, y rétablir le Gouvememenr, le mettre k 1'abri des chocs qu'il a éprouvés lept fois dans ce Siècle, faire Ie bonheur de ceux-méme, qui ont caufé tant de maux (t -, tel eft le but de S. M.: Elle ne regrettera ni les foins, ni les dépenfes pour l'aiteindre; mais auflï, rien ne la détournera de cette falutaire entreprife: Et Elle efl bien perfuadée quaucunes des Puifances voifines, qui ne voudront ou ne pourront pas y coopérer , ne cbercheront & y mettre objlacle: Elle en a pour Garants leur Prudence S? leur Intérêt, fans parler des autres moyens par lesquels Elle s'efi afmêe de leur confiance c'eft fur quoi vous ne pouvez trop infifter auprès des deux louables Cantons. Verfailles le 2 Mai 1732. généreux, que foit a la France, que Geneve foit indcpendante fous 1'influence d'un Gouvernement ariftocratique ou fous ceile d'un Gouvernemtnt populaire f (?) Républicains de Zuiich & de Berne, écoutez ce que dit Guillaume Thomas Rayna!, Francais de Nation, mais Cosmopolire de profcflïon, dont vous n'avez profcrit ni le livre,ni la perfonne; „i! n'eft jamais, dit ce Philofophe, permis a un homme. quel qu'il foit, de traiter fes commettans comme un Trotipeau de Bê es: on force celles-ei a quitter un mauvais pttutrage pour paffe'r dans un plus gras: mais ce ferait une tyrannie d'employer Ia même violeiica aTec une fociété d'hommes: s'ils'rtifent: nous fommes bien ici; s'ils difenc mt 1 e d'accord: nous y fommes mal, mais nous voulons y refter,il fautiacher de les amener a des vues faines par la voie de Ia perfuaEon; mais jamais par eelle de la force. Le meilleur des Princes qui aurait fait le bien contre la volonté générale, ferait criminel par la feule raifon qu'il aurait outre-paffé fes droits. " Au refte qui peut mieux favoir ce qui ferait avantageux a Geneve que les Genevois eux-mêmes? (*) Ces dernieres paroles font d'autant plus remarquables, qu'en général les grandes Puiflaaces afleftent , ordinairement, dans ces' fortes d'occafions, & vis-a-vis des petits Etats , de prendre Ie ton de la douceur & de Ia modération, pour ne pas effkrnucher des esprits inquiets ,& réveiller la jaloufle naturelle aux petits Etats a l'égard des grands,  L E POLITIQUE N°. LXIX. LUNDI, ce 3 JUIN, 1782. C H A P I T R E XLII. Lettre d'un Américain au Politique Hollandais, principalement fur les produtlions de I'Amérique , qui peuvent étre des objets de commerce pour la Hoflande. Paree que 1'Indépenlance de I'Amérique eft reconnue dans ies Pays-bas-Unis, croyez • vous avoir fourni votre carrière ? Votre tache eftelle achevée? Eft-ce qu'il ne vous refte pas encore bien des points fur lesquels vous devez inftruire vos concitoyens fur les affaires de I'Amérique & fur les intéréts qui doivent réunir ces deux pays? Je pourrai m'étendre au long fur un ü vafte champ; mais 1'objet le plus ellén tiel dans 1'état préfent des chofes, eft de favoir quelles font le; produclions des Etats-Unis des I'Amérique qui peuvent fervir de fondement &d'attrait au commerce qui peut s'établir entre les deux nations. Et comme votre feuille eft fort répandue, furtout parmi ceux qui prennent quelque intérêt a ce qui concerne I'Amérique, je ferais extrêmeinent flatté fi vous vouhez, par fon eanal, donner le jour & la Tome III. R pu-  C *58 ) publicité aux obfervations fuivantes. Je ne les ai pas puifées dans les livres écrits fur cette matiere, qui m'ont tous paru fautifs & defecïueux. C'eft le fruit de longues années d'une expérience & d'une pratique , qui ont fait affez d'éclat pour avoir engagé le Congrès a m'honorer d'un emploi, qui exige les connailfanccs le plus étendues relativement au commerce. Vous ne trouverez point de phrafes travaillées avec art; je n'ai jamais pali fur les ouvrages des maitres en 1'art d'écrire; je ne connais que les termes techniques du commerce; & je ne cherche que la précifion & la clarté. Les exportations des quatre Etats fitués a 1'Eft de I'Amérique Septentrionale, favoir, New-Hampshire, Maffaehufet, Rhode-lfland & Conneéticut confiftent principalement en pieces de bois de toutes les fortes pour la batiffe des maifons , de planches de pin, d'ais. & en douves. en cerceaux & cercles & enfin en bois de merrain, pour les tonneaux , barrils, futailles, ainfi que pour des mats, des antennes . des vergues , avirons, rames & d'autres pour les vaiffeaux. Avant la guerre, on en exportait encore des quantités très-confidérables de poiffon de mer , fee & mariné, d'huile de balcine, des cótes, des fanons, de la graiffe de baleine , de la potaffc,& des fourrures. Enfin, 1'on y conftruifait des vaiffeaux entiers qu'on envoyait en Europe. Les principaux Havres fontFalmouth danslaBaye Cafco & Portsmouth dans le New-Hampshire, Bos ton . Marble-head. Salem & Newburry Port, dans la Baye de Maffachu fet, New-Port dans le Rhode-Island & New • London dans le Connecfticut. Une grande partie des articles du commerce de ces endroits fe tranfporte dans les Ifies 'ê ncilles. k Surinam, a Curagao, d'oh 1'on tire en échange du Sucre, des Melaffes, du Caffé, du Cacao & du Coton ; & comme peu des articles produits par ces Etats font propres a être confommés en Hollande , ceux qui veulent envoyer dans ces quatre Etats  ( 259 ) Etats des articles de manufaólare HoIIandaife poüf* ront, prendre enéchange les articles qui fe confom* ment aux Ifles Antiiles, oir ils font alors a portee de les tranfporter. . Les exportations de la ville de New-York . la Capitale de 1'Etat qui porte ce nom, confiftaient en ais & planches de toutes lorres, cn graines dechanvre, en farine de froment, en froment & en patio* fe; mais cette ville qui eft le feul port de 1'Etat de New York, étant encore rntre les matös des Anglais , n'a a&uellement d'autres articles d'exportation que les effets trouvés dans les prifes, & ne recoit d'importation que de la Grande Brttagne. Les Productions des deux Jerfcys font les mêmes que celles de New-York ; mais les Habitans n'ayant aucun commerce direét avec 1'Etranger, tranfportent leurs Producftiors a NeW-York'& a Philadelphie, & furtout dans cette derniere ville par !e moyen de la Delaware qui fépare 1c Jerfey de la Penfylvanie. Philadelphie eft fkuée fur Ia rive Occidentale de la Delaware a environ '.20 miiles de la mer. C'eft la Capitale de ia Penfylvanie. Cette viüe fournit aux Etats de la Delaware, du Jerfey & du NewYork, presque tout ce, dont elles ont befoin de manufaétures Éuropéennes. Le tranfport entre lc Maryland & ia Virginie fe fait a peu de frais par les Bayes de la Delaware & du Chefapeak, qui ne font divifées que par uiie'langue de terre. qui s'étend environ dix milles Angiaifes du Pont de Chriftiana h la tête de la rivicre d'Elk: de forte qu'a 1'exception de cette langue de terre, tous les transports fe font par eau. Les exportations de Philadelphie en Europe font du tabac, du froment, de la fleur de froment, des douves de chêne rouge pour les barrils, des douves de chêne blanc & rouge pour les tonneaux, de la potaffe & des fourrures. Elle exporte en outre dans les Indes Occidentales du maïs, des planches & d'autres pieces de bois: avant la guerre, elle exportait  C 2Ö0 ) encore des douves de tonneaux pour fatisfaire aux demandes qu'on iui faii'ait de Madere, de Teneriffe & de Fyal; Philadelphie tire tous ces articles des pays qui 1'environnent a 1'Oueft & au Nord, des Jerfeys. du Maryiand & de la Virginie. Les Productions de 1'Etat de la Delaware font du froment, du maïs, de la farine & des pieces de bois. Wilmington eft une ville avantageufement fituée pour le commerce; mais il ne fe fait pas beaucoup d'affaires avec 1'étranger, daus ce pays-la; & il ne s'en fait aucune a préfent a New-Caftle. Les exportations de Maryiand & de Virginie font confidérable* & confiftent principalement en tabac, bied, maft, fleur de farine , graines de chanvre & douves de toutes les fortes. La plus grande partie des affaires dans le Maryiand fe fait a Baltimore, & a Chefter-Tovvn, & dans les places de débarquement le long des diftérentes rivieres. Dans la Virginie les exportations fe font a Alexandrie fur la riviere de Potowmack, Rappahanack & Frederiksburg fur la Potowmack dans les autres parties du pays particulierement par les rivieres de James & d'York. Les exportations de la Caroline Septentrionale font du goudron, de la poix, de la térébenthine, des peaux de daims, de groffes pieces de bois de toutes fortes , un peu de tabac & de graines de chanvre; un peu de ris & d'indigo Les principaux Ports font NewBern, Wilmington & Edington. La Caroline Méridionale produit du ris en grande quantité; de 1 indigo, de groffes pieces de bois, des peaux de daims & d'autres pelleteries. Mais Charles -town la Capitale étant au pouvoir des Bretons & le pays dans celui des Américains qui ont coupé toute communication, les exportations de eet Etat font entierement fufpendues. Aufli-tót que ce Port fera évacué, le commerce de la Caroline Méridionale deviendra un objet intéreffant pour la Hollande & pour 1'Allemagne. La Georgië produit du ris. del'indigo, des fourrures & de groffes pieces de bois; mais les Anglais étant  étant encore en poiïeffion de Savannab, fur Ia ri« viere.de ce nom, le commerce de eet Etat eft in» terrompu pour le préfent. L'étendue des cótes maritimes depuis la nouvelleEcofl'e jusqu'a la Floride eft d'envifon 1500 milles; toutes ces cótes, a 1'exception de la ville de New York & de la petite Ifle de Mahanatam oti elle eft fltuée, de deux autres 1'ifle-Longue & 1'Ifledes-Etats, & d'environ quatre milles dans la SudCaroline & la Georgië que les Bretons occupent encore; toutes ces cótes, dis-je, font au pouvoir des Américains. Le nombre des Habitans eft d'environ quatre millions. .Des calcuiateurs ont montré que le pays pouvait contenir cinquantc fois le même nombre. Ce pays eft dans une difette totale de manufacluresEuropéennes; & aucune de bonne qualité&abonmarché ne peut manquer d'y trouver du débit. Cet état des cbofes durera tant que les Fermiers ou Cultivateurs pourront gagner par la culture, plus que par la voit des manüfacmres; ce qui, fuivant toutes les probabilités, durera encore bien des fiecles. II n'eft pas inutile d'obïerver qu'en 1771 les exportations que 1'Angleterre feule, non compris 1'Ecoffe & 1'Irlande, envoyaiten Amérique, formaient la fomme de 4706, 768 livres fterlings, ce qui revient a peu prè-. a cinquante deux millions de Florins de Hollande. N.B. Heft bien d'autres articles qui auraientpuentrer dans ce conp-d'ceil; mais comme 1'Auteur du Manufcrit nous avait priés de nous borner k fa notice, nous les réfervons pour un autre fois , avec bien d'autres articles qu'il nous refte encore a éclaircir fur I'Amérique. R 3 CHA-  C 56a ) C H A P I T R E XLIII. Sur VAffaire de Mr van Berckel Ar le vxu public, . pour q-iil réparajje dans les Affemblées d'Etat en • quakté de Penfionaire de la ViVA a'Arhfterdam. C'eft ainfi que s'exprime a cette occafion le Courier du Bas - Ilbin que nous continuerons a com> mester, avec la même liberté qu'il ne fait aucune difficulté de prendre avec nous , mais toujours fans üch fans injure, & avec tous ies égards dus aun adverfaire , qui croit fuivre Ie bon anti & qui ne manque pas de talens pour étaycr fon opinion. Les Négociaieurs trop précipités d'Amjlerdim ont caufé tous les maux dont ia Répubiique fe plaint, en fuumiffant d la Grande-Bretagne un prétexte plaufible de lui déclarer la guerre : au lieu que fans ce fatal traité préparatoire nous aurions encore la paix au ttbms ty au dedans, fc? les lünjons dèfirées avec I'Amérique n*en auraient pas moins élê formées, lorfque le moment de Les former fans rifques, ferait arrivé. Quoiqu'd en foit Mr. van Berckel fe tr ouve fortifié par la cé narcbe mi'iie de L. II. P.: & 1'on cmit qu'il ne tardera pas d reparcitre d l'Affembiêi de Hol'.ande dont il avait protefié qu'il s'abfmier ait auffi longtems que fa conduite ne ferait pas jul/ifiée, Avant de relever les crreurs répandues dans cepas» fage furtout dans ces dernieres lignes, nous donnelions ici une efpcce du Requête qui a circulé dans cette ville, fur le rappel de Mr. van Berckel dans les Etats. „ Refpeftables Régens! ., Quelle vive fatisfaélion pour nous, Bourgeois & Habitans d'Amfterdam, de voir 1'honneurde votre vénérable Régence, fi violemment attaqué par ce Miniftere Anglais, que la nation Britannique vient de rejetter ignominieufement, triompher avec éclae dans toute 1'étendue de la Répubiique". „ Quelaffreux avenir ne nous préparait pasunMonarque fi fcandaleufemenf aveuglé par fes déteftables Mi-  C S63 ) Miniflres pour ófer nous demander la punition exemplnire, foit de ceux que nous regardons comme les ornemens & les guides de notre Bourgeoifie , foit de celui qui en eft 1'orgahc, & qui par fes connoisfances & fes talens, a rendu de fi grands fervices a cette ville, du Penfionaire van Berckel, ce Patriote fi diftingué par fon habileté & par fon zele pour les intéréts & Ia liberté de cette ville puiffante, de laquelle dépend la profpérité ou la ruine de toute la Répubiique! Qui d'entre nous n'aurait pas facrifié fa vie, plütöt que de permettre 1'exécution de cette exécrable demande dont 1'affront retombe fur chacun de nous?" „ Votre deffein, Refpeétables Chefs des citoyens, de maintenir les intéréts de votre ville * de toute la Répubiique; 1'Angleterre en a formé un prétexte pour exercer fur nous la rapine & le brigandage. Pour quelle raifcyi votre conduite fage & uniforme a-t-elle trouvé quelques désapprobateurs dms la Répubiique, c'eft unproblême que le tems fans doute devoilera; il eft maimenant évident que la plus grande partie des Habitans de la Répubiique avousnt votre conduite & reconnaiftent qu'ils vous font redevables qu'on ne leur ait pas enlevé une reftource qui, fous la faveur divine, leur promet, ainfi qu'è leurs defcendans, une multiatde d'avantages." Quel creve-cceur pour 1'Angleterre, qu'après avoir cherché la ruine de cette cité, & par cette ruine ceile de toute la Répubiique, de vous voir, Respe&ablesChefs de la Bourgeoifie, jufb'Sés dans toute la Répubiique contre 1'infamie de fes ac ufations de voir que ce qu'elle avait imaginé pour caufer votre pene & lanótre, ait eu un effet tout oppofé ! Ainfi la Providence divine fait fortir la iumiere des téncbres & anéantit les confeils des impies Ne devonsnous pas attendre un autre triotnphe fur notre ennemi qui nous a fait perdre un inftrurnent unie pour notre ville, le boulevard de la liberté? Que n'at-elle pas retiré des fages confeils & des repréfenR 4 ta-  ( 264 ) tations couragcufes du Penfionaire? Que né lui doit pas le commerce, le nerf de 1'Etat? fon éloge eft fur toutes les lévres des marchands. C'eft un "homme qui a rempli fon devoir avec honneur. L'envie peut-eile lui faire un feul reproche ? la Bourgeoifie d'Amfterdam, après avoir vu fes biens pillés & ravagés, éprouvant encore une perte précieufe dans fon Penfionaire, efpere, défire, attend que dans un tems ou 1'honneur de fes Magiftrats eft rétabli avec celui de fon Penfionaire, par la voix de toute la nation , que ce dernier lui foit rendu, qu'il reparaiffe dans les Aflemblées des Etats de Hollande: elle fe flatte, Trés-Refpeclables Régens, que vous porterez tous vos efiorts vers eet objet, pour la douleur de notre Ennemi & 1'utilité de cette ville." Cette piece a paru, pour fonder & animer les esprits & non comme une requéte formée & préfentée avec les formalités ordinaires ; peu de perfonnes ont bien entendu 1'affaire de Mr. van Berckel. II pluta Geotge III, Roi d'Angleterre, d'Ecoffe, d'Irlande , & fi 1'on veut de France, d'Amérique &c. de choifir Mr. van Berckel entre mille autre Hollandais, pour demander qu'il füt puni exemplairement. Son fidel Ambaffadeur, le Chevalier York, peignit Mr. van Berckel, comme le Chef d'une faEtion & d'une eetbak dominante, qui avait trou* Hé la paix publique violê le droit des nations, Les Etats-Généraux, faibles & défarmés ayant befoin de menager un Monarque, dont ils éprouvaient déja la funefte puiflance & redoutaient les mauvaifes dispofitions, confentirent a aéfavouer & a défapprouver publiquement tout ce qui s'était fait fur leTraité préparatoire entre "I'Amérique & les Provinces-Unies. George ne fut pas fatisfait de cette condefcendance. II voulait que les Etats-Généraux, qui font bien loin d'étre les maitres abfolus des perfonnes & des biens des fujets de 1'Ftat, fiffent une punition exemplaire, analogue a 1'injure qu'il difait-avoir recu. On fait que lcrfqu'un Etat éprouve un déni contre quelque fujet  C 265 ) fujet d'un Souverain auquel il aurait demandé juftice, il peut avoir recours a des moyens violens, ainfi Cromwell fit arrêter des vaiffeaux & vendre des effets Efpagnols, jufqu'a la concurrence d'une fomme réclamée par des fujets Britanniques. Les EtatsGénéraux eux-mêmes viennent acfuellement de rapeler leur Ambaffadeur de Venife ; paree qu'ils avaient interpofé leur réciamation pour une affaire décidée contre un de leurs fujets (*). D'a- (*) II convient de voir comment les Etats-Généraux euxmêmes fe font expiiqués a 1'occafion de 1'affaire de Mr. van Berckel. „ Quant a ce qui concerne Ie Projet d'un Traité de Commerce éventuel avec l'Amérlque-SeptentrionalejConcu par un Membre du Gouvernement de la Province de Hollande, fans aucune autorité publique, & les Mémoires préfentés a ce fujet par Mr. le Chevalier Yorke, 1'Affaire s'eft paiiée de Ia maniere fuivante : Dés que eet Ambaffadeur eut préfenié le Mémoire du 10 Novembre de 1'année pasfée, L. H. P., fans s'arrêter aux exprefiions peu conve«ables entre Souverains, dont ce Mémoire était rempli, ne tarderent pas d'entamer Ia Délibération la plus férieufe a ce fujet; & ce fut par leur Réfolution du 27 du méme mois, qu'EHes n'héfiterent pas de défavouer & de défapprouver publiquement tout ce qui avoit été fait a eet égard; après quoi Elles avoient tout lieu de s'attendre , que S. M. Britannique auroit acquiefcé a cette Déclaration , puisqu'Elle ne pouvoit ignorer, que L. H. P. n'exercent aucune Jurifdiction dans les Provinces refpeérlves, & que c'étoit aux Etats de la Province de Hollande, auxquels, comme revétus , de méme que les Etats' des auties Provinces , d'une Autorité Souveraine & exchifive fur leurs Sujets, devoit être remife une Affaire relativement a laquelle L. H. P. n'avoient aucun lieu de douter, que les Etats de ladite Province agiroient fuivant 1'exigence du cas, & conformément aux Loix de 1'Etat, & les regies de 1'équité ; i'empreffement, avec lequel Mr. le Chevalier Yorke infifta par un fecond Mémoire fur 1'Article de la Punition, ne püt donc que paroftre fort étrange è L. H. P., & leur K5  ( s6ó- } leur fnrprife augmenta encore plus , lorfque treis jours après, eet Ambaffadeur déclara de bouche au Préfident de L. H. P., que , s'il ne recevoit ce mime jour une Répor.fe entieretnent fatisfaifante d fon Mémoire , il feroit obligé d'en informer fa Cour par un Courier extraordinaire: L. H. P. , inftruir.es de cette Deciaration, en pénétrerent l'iuipoftar.ce, comme rr.anifeflant vifiblement la démarche déjè anêtée dans le Confeil du Roi; & quoique les coutunies établies n'admettent point de Délibération fur des Déclarations verbales des Miniftres Étrangers, Elles jugerent cependant a propos de s'en écarter dans cette occafion , & d'ordonner i leur Greffier de fe rendre chez Mr. le Che valier Yorke, & de lui donner a connoltre, que fon Méveiie avoit été pris ad referendum par les Députés des Provinces refpe&tve:, conjormément aux ufages refi/s c? i) la Conftitution du Gouvernement; en ajoutant (ce qui paroic avoir été omis 2 deffeln dans le Manifefte) qu' Elles tachtroient d'effeüuer une Réponfe è fon Mémoire le plutót pofftbk, &. dès que la Confiirution du Gouvernement le permettroit. Auffi, peu de jours après, les Députés de la Hollande notiSerent è l'Affemblée de L. H. P., que ks Etats de leur Province avoient unanimement réftlu, de requérir F Avis de leur Cour de Juftice, au fujet de la demande de Punition , en cbargeara ladite Cour de donner fon Avis le plus pronptement lofftbk , toutes autres Affaires ceffantes. L. H. P. ne manquerent pas de faire parvenir tout d'abord cette Réfolution a Mr. ie Chevalier Yorke , mais quelie ne fut pas leur fnrprife & leur étonnement, lorsqu'Eües apprirent, que eet Ambaffadeur, après avoir revu fes Inftructions, avoit sd»..lfé un Billet au Greffier, par le. quel, en taxant cette Réfoiution ri'illufoire, il refufoit de la tranfmettre a fa Cour! ce qui obligea L. H. P. d'envover ladite Réfolution au Comte de Weideren, leur Miniftre a Londres, avec ordre de la remettre le putót prffible au Miniftere de Sa Majefté Britannique; mais le refus de ce Miniftere a mis obflacle a Pexécution de ces Ordres." „ D'après eet Expofé de toutes les cireonftances de cette Affaire,.le Pubiic impartial fera en état d'apprécier le principal mo;if, ou plutót ie prétexte , dont S M. Britannïque s'eft fervi, peur lacher la bride è fes deffeins contre la Répubiique ; PAffaire lè réduit a ceci : S.M.fut informée lTu:,c Négtciation, qui aurêit eu lieu en f année 1778 , tntre un Membre du Gouvernement tTune des Pt ovinces, &  C*57 ) un Reprcfentant du Congrès Américain; laquelle Nég», ciation auroit eu pour but de profeter un Traité de Com. tnerce, d conclure entre la Répubiique ei? les fufdites Colanies cafu quo, favoir, dans le cas ou /'Indépendance de ces Colonies awoitêté reconnue par la Couronne i/'Angleterre: Cette Négociation , quoique conditionnelle, & tenant & une condition , qui dépendoit d'un Aéte antérieuc de S. M. Ellt'-même; cette Négociation, qui, fans eet Acte ou cette Déclaration antérieure, ne pouvoit fortir Ie moindre effet, fut prife de fi mauvaife part par S. M,, & parut exciter fon mécontentement a tel dégré, qu'Elle trouva bon d'exiger de 1'Etat un defaveu & uue défapprobation publique, ainfi qu'une punition & une fatisfaction conipiette. Ce fut tout de fuite & fans le moindre délai, que L. H P. accorderent Ia première Partie de Ia Réquifition ; mais la Punition exigée n'é;oit pas de leur Reffort, & Elles ne pouvoient y déférer, fans heurter de front la Conftitution fondamen. tale de 1'Etat: Les Etats de la Province de Hollande étoient les feuls , auxquels il appartenoit d'en connoltre légitimement, & d'y pourvoir par les voies ordinaires & réglées; ce Souverain. conftamment attac'.-é aux Maximes, qui 1'obligent de refpcdler 1'Autotïré des Loix, & pleinemem convaincu , que le maintien du Département de la Juilice dans toutè 1'intégrité & 1'itnpartialité, qui en font ïnféparables, doit former un des pius ïerroes appuis du Pouvoir Suprème,- ce Souverain., aftreint par tout ce qu'il y a de plus Sacré a défendre & a protéger les Droits & le» Privileges de ft* Sujets, ne pouvoit s'oublier au point de foufcrire aux volontés de Sa Majefté Britannique, en portant atteinte a ces Droits & a ces Privileges, & en forcant les bornes prefcrites par les Loix fondamentales du'Gouvernement: Ces Loix. exigeoient 1'interventioti du Département judiciaire; & ce fut aufii ce moyen que les fufdits Etats réfolurent d'employer, en requérant fur eet objet, I'Avis de la Cour de juftice, établie dans leur Province. C'eft en fuivant cette route,qu'on a développéaux yeux de S. M. Britannique, de la Nation Angloife & de 1'Europe entiere, les principes inaltérables de Juftice & d'Equité , qui caraélérifent la Conftitucion Batave , & qui dans une partie aulli importante de l'Adminiftration publique , que 1'eft celle , qui regarde 1'exercice du Pouvoii Judiciaire, devront a jamais fervir de Bottelier & de Rempart contre tout ce qui pourroit nuire a la Sureté & a Mn-  C 2(53 ) rindipendance d'une Nation Libre : Ce fut anfïï p»r ce moyen, & en fuivant cette route, que bien ioin de fermer la c'nemin de la Juftice, ou d'éluder la demande de h Punidon. on a au contraire laiffé un cours libre a la voie d'une Procédure réguliere, & conforme aux principe» Confiiïutionnels de la Répubiique} & c'eft par-la mê. me enfi?, qu'en ótant a la Cour de Londres, tout prétexte de pouvoir fe plaindre d'un déni de Juftice, on a prévenu jufques a Ia moindre ombre ou apparence de raifon, qui aufoit pü autorifer cette Cour a uier de Repréfailles; aux. quelles néanraoins Elle n'a pas fait fcrupule de recourir tf'üne msniere aufii odieufe qu'injuft:." D'après ce* principes & ces exemples, le défaveu & la defiiprrobation des Etats Généraux devaient fuffire au Roi d'Angleterre. Mais comme il infistait pour une punition & une fatisfacftion conformes k riöjuré qu'il difait avoir regue, cette affaire devait être foumife aux formules judiciaires, ufitées dans le pays: George III ne pouvait ignorer que L. H. P. n'exercént aucune jurisdiclion dans aucune des fept Provinces. En un mot le Miniftere Anglais, qui s'était fait un code particulier, demandait un bouleverfement total dans rotre conftitution; dan< cette occafion . les Etats de Hollande, qui font les feuls Souverains de la Province, réfolurent unanimement de requérir I'Avis de leur Cour de Juftice, lui enjoignant même de fuspendre toute autre affaire pour s'expliquer fur celle1& Ainfi, bien loin d'éluder la demande d'une punition , un libre cours fut ouvert a ia pourfuite d'une procédure réguliere, & conforme aux principes conftitutifs de Ja Répubiique. Bien loin d'étre fatisfait d'une marqué auffi évidente du défir de conferver la bonne-intelligence, la Cour d'Angleterre prétendit avoir effuyé de la Répubiique un deni de juftice, & lui déclara aufiitót la guerre fur ce prétexte. Ainfi ce Monarque fe rendant a lui-même Ia fatis. faftion qu'il demandait, ilne convenait piusdepourfuivre par égard pour un Ennemi un examen. qu'on n'avait entamé que pour ménagerun ancien alliéf*;. Qui (*) Comment a-t-on infinuédans une brochure Holian- daifa  ( 269 ) - Qui ne voit qu'une Cour capabled'alléguer de pareiB"prétextes pour faire la guerre, n'écait pas délicate fur ie choix des moyens? Qui ne voit qu'elle en aurait facilement trouvé un autre a la place, ou qu'elie fe ferait contentée des autres allégués dans fon manifefte, fi celui-ik ne lui avait paru propre a fomenter la difcorde dans un pays oti ejle favait ne pas manquer d'aveugles partifans? Toute la conduite du Miniftere Anpfiais a l'égard de eet Etat montre qu'il n'avait pas d'autre regie de conduite que celle de ce Prince qui difait: quand on eft aflez fort pour faire la guerre , on ne donnerdit pu un Hard des prétextes les plus plaufibles. D'après les principes que nous avons énonccs, ia Cour de juftice ayant infinué le 30 Mars de 1'année derniere 1'abfurdité d'entamer 1'examen qu'elle n'a par conféquent pas encore commencé, il fe répandit auffuót une multitude de bruits dans le public, au défavantage de Mr. van Berckel. Ces bruits s'accréditerent d'autant plus que MM les Bourguemaitres d'Amfterdam affeeïerent de prendre avec eux un autre Penfionaire pour les accompagner, pu» vant !a coutume,dans 1'Aflemblée des Etats de Hollande. Ce fut fans doute, pour réfuter ces bruits accrédités par 1'abandon des Bourguemaïtres, que Mr. van Berckel préfenta fa fameufe requéte qui fut lue daife qui vient de pa;aitre, que I'Avis de la Cour de Juftice n'aurait gueres différé de celui du Politiek l ersoog , qui foutient qu'on a donné fur ce point des raifons légitirnes de plainte & de mécontentement a 1 Angleterre, fi eet avis eut éré rendu public? Au moins 1'Angleierre auraite!le du attencire Hffne des procédures ? De ce que eet Avis'n'a pas vu le jout-, conrient-il d'en rien interer au weiadice de Mr. van Berckel ? A 1'éruption des hoftilués convenait-il de publier un pareil Avis? Défavorable a M . van Berckel, les Anglais s'en feraient authorifés pour legttim*r leur conduite: favorable, ils en auraient lormé ua prétexte plaufible puur fe plaindre d'un deai de juftice.  ( *7° ) le 4 Mai de l'annce derniere dans 1'Affemblée des Etats de Hollande: cette adreffe tendait moins k provoquer une procédure réguliere, pour 1'inftruction de laquelle ilfavait bien, qu'on ne pouvait fournir aucun document; que pour expofer a tout 1'univers 1'innocence de fa conduite & faire triompher fon honneur, indignement attaqué, par le filence au. quel il forcait fes Ennemis. Depuis cette époque, il s'eft paffé dans les affemblées politiques de la Ville & de la Province bien des chofes qui ont donné iieu a des interprétations diverfes, . fuivant ia diverfité des opinions & des vues. Peut-être ceux qui triomphaient alors de fon éloignement, a raient-ils adluellement a s'applaudir s'il fut toujours refté en foncfion; car quoiqu'il ne foit que 1'Officier & 1'éxécuteur des volontés de fes principaux. les Régens; fon expérience, fes lumieres & fes talens auraieot pu les guider dans bien des démarches, qui n'ont pas eu le fuccès & la gloire qu'eïles annoncaient d'abord. Ainfi Mr. van Berckel n'a jamais protefté qu'il s'abfenterait des Etats de Hollande aufii longtems que fa conduite ne ferait pas jufiifiée. On fait que fon abfence ou fa préfencc dans les Etats de Hollande dépend des Bourguemaitres, Députés ordinaires dans cette Afiemblée Enfin, les Etats-Unis de I'Amérique ont été reconnus indépendans avec, cette ardeur, cette unanimité , eet éclat dont les annales de ce pays n'offrent aucun autre exemple. Cette demarche qi*i ouvre naturellement le chemin a Ia formation d'un Traité de commerce fur le plan de celui, qui faifait le fujet du délit de Mr van Berckel, a fait naturellement demander. pourquoi ce digne citoyen ne reparaiffait plus dans les Etats de Hollande. Qui peut s'oppofer a cette réadmilfion ? Eft-ce 1'Angleterre? Son Miniftere acïuel vientde déclarer qu'après un examen refléchi des papiers relatifs a cette affaire , on n'avait rien trouvé qui püc  C 271 ) put avoir donné lieu a 1'accufation contre Mr van Berckel, & fourni un prétexte a la rupture ? Serait - ce le parti de la Cour? Mr. van Berckel n'a eu aucune part a la fameufe démarche contre le Duc de Brunswich; il était facrifié avant qu'elle éciatit. II n'eft pas für qu'elle aurait eu lieu, s'il fi.it refté en fonction. Serait-ce le parti populaire ? Mais fi ce parti veutconferver fa popularité, peutil s'oppofer au triomphe d'un perfonage connu pour avoir le plus contribué aux événemens qui ont relevé ce parti ? Les adverfaires de Mr. van Berckel ne voient-ils pas que fon éloignement des affaires parait fournir une efpece d'autorifation au prétexte de 1'Ennemi. Ne voyent-ils pas que eet éloignément même eft un affront pour eux, comme s'ils reconnaiffaient n'avoir en effet été que d'aveugles inftrumens fous fes mains & voulaient montrer qu'ils pouvaient agir fans l'avoir pour leur guide. Cette reintégration n'eft pas feulement le voeu ardent de la Généralité de la nation. On dit qu'elle a été 1'objetdes plus vives, des plus férieufes déliberations dans le Confeil d'Amfterdam. On dit que Mr, le Bourguemaitre Hooft a beaucoup infisté pour le prendre avec lui; mais qu'il a rencontré une forte oppofition. On ne fait pas encore quel Ie fera 1'iffue de cette affaire ; mais il ferait fingulier que les Anglais pusfent fe vanter d'avoir eu , dans le plus fort de la guerre, affez d'influence dans ce pays, pour enlever a fes fonctions un honnête citoyen, qui ne leur etait pas agréable & que dans le même tems le Duc de Brunswich ait bravé le cri populaire & les efforts d'un parti puiffant &nombreux. qui febornaita demander fon éloignement des Confeils du Stathouder. Rèftexions fur les derniers avantages des Anglais. Rienne montre plus Ia bizarrerie de Ia fortune & cem-  C 2:2 ) combien il faut fe défier de fes faveurs, que les avantages qui viennent d'arriver aux Anglais. La deltrucfion du Convoi Francais dé 1'Inde par 1'Amiral Barrington, les conquêtes de Negapatnam fur la cóte deCoromandel & des fous Trincamale & d'Ostenburg dans 1'Ifle de Ceylon, & furtout ia défaite & la prife de Mr. de Grafie par 1'Amiral Rodney, font des fuccès brillans. Auffi la nation Anglaife, toujours prompte a fe livrer a 1'orgueil & a la préfomption, fe regarde aétuellement comme maicreife abfolue des événemens de la guerre. Hollandais, quelques revers doivent-ils 3battre votre courage? N'êtes-vous plus les enfans de ces héros que les obfiaclesne faifaient qu'irriter? N'avezvous plus de reffources ? Vos alliances avec les Ennemis de votre Ennemi n'acquicrent-elles pas de la force & de la folidité? Comptez les vaiffeaux qui font dans vos ports! Rappellez-vous le courage que vos marins firent éclater 1'année derniere! Combinez vos opérations avec la France, & vous verrez que le triomphe de votre Ennemi ne fera pas long! La fortune eft une Déeffe capricieufe; c'eft au développement de tous vos efforts, c'eft a votre prudencê, a la fixer. Ces Feuilles périodiques paraiffent régulierernenr, tous les Lundis è Amflerdam, cbez J. A.Crajenfcbot; a Haar. km, chez IValree; d Leide, chez Luzac ij? van Damme, & LesFreres Murraj ; a iaHaye , chez J. van Ckef, Detune,van Drecbt & LaFeuve Staalman; a Gouda, chez Fan der Klos; a Rotterdam, chez Bennet ffHake, & D. Fis; a Dordrecht, chez Blufé; a Deventer, chez Leemhorst; a Groningue, chez Huyzingb; a Nimegue, Chez Fan Goor; a Arnhem, chez Troost; d Bois-le Duc, chezj. H. Pallier , aHambourg, chez j. G. Fircbaux & chez les principaux Labraires des Pays-Bas.  L E POLITIQUE N°. LXX. LUNDI, ce ioJUIN, 173:. C H A P I T R E XLIV. Réponfe d une Lettre icrite de la Haye, avee quelques remarques fur Vétat aclucl des affaires itairieures de la Répubiique des Pa-ys-bas-Unis. Vous avez deviné jufte, Monfieur. La perfonne a qui vous avez adrefie votre Lettre(+), n'eft pas 1'unique Auteur du Politique flollandais. Auffi ne croitildevoir répondreque pour les pieces qu'il a fournies aux Editeurs de cette feuille; il ne les défavouera jamais: quoiqu'il foit bien éioigné de prétendre a 1'infaillibilité; quoiqu'il appereoive quelques-unesdes crreurs qui lui font échappées; qu'il ne doute pas que Elle eft datée du 5 May, avec ces vers pour üg. nature: Mon efprit peu jaloux de vivre en la mémoire, Ne confidere point le reproche ou la gloire, Toujours indépendant & toujours citoyen , Mon devoir fait le tout & le refte n'eft rien. Cette Lettre mérite d'étre diftinguée de la foule de celles qu'on a voulu faire parvenir a ceux qui paflent pour avoir part au Politique Hollanditis. TOMB III. S  ( *74 ) que d'autres n'en voyent bien d'avantage; il peur. affurer qu'il n'a rren écrit dont il ne fut perfuadé; il a pu fe trómper lui-même; mais non chercher a tromper les autres ; on peut lui imputer des erreurs, mais non de la mauvaife foi: le courage avec lequel il a parlé de ceux dont on 1'accufait d'étre 1'émisfaire, prcuve fuffilamment qu'il ne fuit queues mouvemens de fa confcience; & qu'il n'a d'autre objet que de rcpandre les principes dont il( eft imbu, dans la feule idéé d'étre utile'au pays oü il jouit des douceurs d'un Gouvernement libre. Ceux qui ne iilént que pour trouver des alimens de facftion, pourraient même 1'accufer de défendre le pour & fe contre; mais ceux quincTontattachés qu'a 1'expofition des vérités utiles & aux grands principes de la liberté, ont déCöuvett,a travers bien des fujets & des pieces difparates, un fyftéme fuivi, un but invariable, fondé fur Ie defir d'éclairer les hommes fur leurs droits, les Gouvernemens fur leurs intéréts, & les Adminiftrateurs fur leurs devoirs, en un mot, de répandre les opinions qui pouvaient fervir le plus a rendre la Répubiique fioriiTante au dedans, & rtfpeftée au dehors, a cemcilier lï'nrérêt de 1'Etat avec le benheur des Individus. il a pu étre induit cn erreur fur des faits; fes raifons n'ont pas toujours été fans réplique; mais il fe rend letémoignage qu'il n'a jamais eu que des vues pures. Eh J qui peut penfer autrement d'un Auteur qui écrit toujours contre fes intéréts? Dès qu'un homme eft connu pour produre librement fes idéés fur les affaires publiques, en faut-il davantage pour qu'il perde fon repos & fa réputation, & qu'il foit 'décredité aux yeux même de ceux qui lui auraknt voulu du bien 9 Combien peu d'hommes font en état de paraitre aux yeux de celui qui paffe pour lire, dans la phifionomie des perfonnes publiques , les talens ou les vertus , 1'incapacité ou les défauts ? Combicn n'eft pas odieux un homme que 1'on foupconne arracher le voile dont 1'impéritie vu 1'ambition particuliere cherchent a fe couvrir. Si quelquefois on ne dé«  C275) deklaigne pas de converfer avec un Romancier, de Miller avec un Erudit,on évite 1'Hiftorien du tems préfent Pracul ejto, babet fcenum in cormi. C'eft bien pis quand, fur des points en litige, il ofe fe déclarer en faveur d'une opinion conteftée, & prononcer. Un tel homme, quand il a la mal-adrefle de fe laiffer deviner, eft mr d'étre évité; fi la fortunene 1'a pas carefié, il eft für de 1'avoiraliénéefans retour. Si 1'Auteur de la Lettre peut nous communiquer des preuves qui découvrent des erreurs importantes dans cette feuille; nous nous emprefferons d'autant plus a les relever , que nous pouvons protefter n'être enchainés a aucun parti, & n'avoir d'autre objet que la découverte de la vérité & le bonheur de 1'Etat. Avant d'entrer encore plus avant enmatiere, qu'il nous foit permis d'indiquer le point de vue,fous lequel nous avons envifagé plufieurs des événemens acluels, qui ont fervi de matiere aux obfervations politiques. Nous avons dit aflez hautement & répété affez fouvent, que nous ne penfions pas que Mgr. le Duc de Brunswich eüt jamais donné lieu aux bruits femés contre fon honneur ; cette déclaration fuffit pour montrer 1'opinion que nous avons des libelles publiés contre eet illuftre perfonage. Lié par le fang a la maifon Royale d'Angieterre, accoutumédepuis longtems k regarder 1'union de la Répubiique avec ce Royaume comme effentielle a 1'cxiftence de eet Etat, il aura, conformément a ce fyftéme, qui eft encore celui de bien d'autres perfonnages que Mr. Iddekinge, infpiré les mêmes idéés a fon Augufte Eleve, qui, ayant fucé ces principes avec le laTt, aura de la peine afe perfuader que cette Répubiique puiffe regarder 1'Angleterre autrement que comme une alliée nécelfaire, & la France, comme une ennemie naturelle; je n'aifarerai cependant pas, que le génie du Stathouder ne fe foit déja élevé au-deflus de ces notions étroites fcfuperftitieufestauflile/^o/ir^t/e Hollandais s'eft principalement attaché k combattre les écrits qui, fous prétexte que ces maximes étaient S a cel-  celles de la Cour Stathouderienne, n'ont ceffé de les défendre, & par la ont fait plus de tort encore a fon Alteffe, que les calomnies méprifabies & les déclamations infolentes de fes Ennemis, n'auraitnt jamais pu lui en caufer. II s'en faut beaucoup que nous ayions cherché 2 rendre le Stathouder odieux ou ridicule; nous aimons a répéter que nous avons la plus favorable opinion de fon cceur; nous fouscrivons volontiers a eet éioge qu'en fait 1'Auteur de la Lettre: un caractere ouveri, incapable de feindre, un efprit droit & jutte, un cceur paffionnê pour le bonltur de ces Répuilicains libres dont il eft le Cbef, ne connaiff ,nt pas Vejprit de vengeance, pardonnant les injures. No s penfons même que la conduite tenue par fon Alteffe dans 1'afraire de Mgr. le üuc , fera repréfentée avec éloge par nos derniers neveux. Ce beau fentiment, qu'un de plus grands génies de ce fiecle appelle: Don du Ciei, que les Rois, ces illuflres ingrats Ont helss le malheur de ne connsltre pas. L'amitié, ce fentiment des ames vertueufes & fenfibies , honore donc 1'ame de eet illuftre Prince. Un homme , qui connait le cceur humain, ne fe perfuadera jamais qu'un fi beau fentiment puiffe exifter dans un cceur faux ou dépravé. Aufii avorsnous remarqué, dans la vie de Guiilaume V. des traits qui peignent la franchife & la droiture. Nous n'avons pas déguifé nos fentimens a eet égard, nous penfors méme avoir lu ces qualités fur fon front ouvert & fe*ein; & nous aimons a nous attribuer ies rrorcecux du Politique Hollandais, ou 1'on rend juftice aux qualités de fon ame, k la droiture de fes intentions. Nous ófons affurer que, c'eft d'après les fentimens d'eftime que ce? quaiiré1-- rares parmi les adminiftrateurs d;ms in Gouvemerrent auffi compliqué, nous ent rfrirés, que nous avons cru fervir le Prince. tn i'avertiifant dê facheufes conféquences qu'une partiaüté trop marquee pour des perfonnes  C 277 ) nes & des fyftêmcs actuellement fufpettsi la nation, pourraiect lui attirer. On ne peut s'empècher de trembler en lifant dans le plus grand des Hiftoriens de ce pays , qui s'était vu a portee de connsltre a fond le caraétere de fes compatriotes, ces paroles que les véritables Amis du Stathouder ne devraient ceffer de méditer : Belgarum eft par ere 6? imperare cummodo, nee gens ulla fidelius amat eminentts, aut iiiaem , fi contempras adfit, implacabilius irafcitur. Grotii Annales Lib. V. Dès le commencement des troubles préfens & furtout depuis 1'éruption de la guerre, nous avons fuivi avec attention les difpoütions du peuple; & nous ne pouvons nous einpêch-r d'avoir remarqué qu'en s'obftinant a traverfer fes defirs on a tout a craindre de fes difpofifions. On a vu dans bien des occafjons que ce peuple, quoique généralement excius de toute infiuence directe dans le Gouvernement, peut cependant beaucoup, foit, en exprimant, fuivant Tanden privilége qu'il a confervé, fes vceux par le moyen des requêtes; foit même, ce qu'il plaife a Dieu de détourner, en recourant aux mefures d'éclat. Ce qui fe paffe en Frife, la démarche éclatante de la ville de Schoonhoven, imitee, dit-on, par celle de Schiedam, {*) ne font pas des événemens m- dif- (*) On mande de Schoonhoven que les Elecleurs & lts Confeiiiers de cette ville, ne pouvant plus voir d'un ceil indifférent les abus réfultant depuis fix ou fept ans de 1'ardeur, avec laquelle quelques Membres de laRtgence cherchent a fe procurer des Lettres de recommandation de Ion Alteffe Sérémffime, pour les poïles de la Régence qui font en commiflion , fe font réunis pour concerter lesmuyens de maintenir les privi'eges dé la viile & le droit de juffrage libre pour !i nomination des Bourguemaitrcs & Ecbesini, & la libre Election des Eiecteurs, Confeillers & Commisfaires des différent emploisdela ville, qui leurappartiennsn' S 3 ea  C 278) différens. Nous ne fommes cepencUnt pas du fentiment de Mrs. de Frife relativement a 1'éloignement du Duc de Brunswich; nous penfons qu'il n'a plus dans les affaires cette influence dangereufe qu'on lui attribue & qu'un certain éloignement le mettra toujours h portée de s'attribuer la gloire des fuccès, ou dc reieter fur d'autres le bldme des revers- Bois-le-Duc ou fi 1'on veut, Brunswich ne font pas a une diftance fi grande, pour qu'une correfpondance réguliere ne puiffe être entretenue facilement entre le Tuceur & t'Eleve. Nous aurons occafion de nóus exprimer plus au long fur cette affaire, en rapportant&jugeant les pieces qui paraiffent pour & contre le Duc; nous tdcherons de nous mettre dans une perfpeclive qui nous mette a portée de deviner le jugement qu'en portera la postérité: en attendant nous ne voyons pas que le fort de ce Prince foit en venu des privileges mentionnés; & qu'en conféquence ós eet iiccord. ils ont, pour empêcher qu'a 1'avenir fon Akelfe SérénifTime ne foit plus' indnlte a conférer des Let. tre» de recommandation, nommé trois de leur corps pour donner connaiflance de eet avis a fon Alteffe; & les trois Députés envoyés a la pluralité par les Electeurs & les Confeillers, ont le Jeudi 16 May, eu audlence de fon Alteffe envers tequsl ils fe font acquittés de leur Commiflion. La Re5gence municipale, furtout celle des villes votantes , dont 1'inBuence eft fi grande dans l'Adminiflration politique, eft bien loin d'étre la mént;, nou feulement dans les diverfes Provinces, mais méme dans les villes d'une feule Province: les Elecleurs a Schoonhoven forment un Corps ou Collége compofé des plus notables Bourgeois de la ville, avec le privilege de fe perpétuer eux mêmes & lc droit plus flatteur encore de nommer la Magiftrature. Ceux qui favent combien l'influence laiflëe ou conférée au Stathouder dans les nominations, donne du reliëf a fon autorité , fentiront toutes les conféquences de cette demarche dont le courage peut ga^ner d'autres villes; comme on 1'a vu dans tous les tems, & comme le dernier réta. biiffrment du Stathouder, en ofFie uu exeniple, dont la date n'eft pas bien ancienne.  ( 279 ) foit auifi k plaindre que celui de \"M de Capelle & vamBerckél; & qu'on puiffe taxer d'acharnement & de perfécucion ia conduite de ceux qui fe hornet a demander fon éloignement des Confeils du Stathouder , uniquement, paree que 1'éclat de ia Baifjanée qui le He au fang de Hanovre, 1'a rendu fulpeét k la nation. pa demande d'un tel éloignement, dans uu tems de guerre avec les Anglais, eft-il une periécution affreufe , une démarche révoltante? Cet éloignement même eft-il un malheur fi gtand pour un Prince qui a t?nt d'autres reffources pour vivreavec éclat & fplendeur ? .Sa retraite volontaire & momen ■ tanée n'eüt-elle pas été la meilleure preuve qu'il pouvait donner de fon amour défintereffé pour le pays? Au refte. nous aimons a pub!i?r que nous avons pour la conduite du Stadhouder bien plus d'eltime que pour celle de ces perfonnes qui ayant entrep'ris de faire triompher un fyllême avoué par la «énéralité de la nation, n'ont pas fu perfifter dans leur projet. La fermeté, dans ces fortes de cas, eft la pierre de tc-jche du caraeftere. L'inconftance ou la faibieffe trahiffent les motifs des acteur* Nous ne croyons pas avoir jamais répandu des in. finuntims particuliere! de perfidie, d'impéritie, de faibieffe contre aucun de ceux qui tiennent le timon des affaires; les plus grands génies peuvent s'égarer dans des cccaflons particulieres ; fi la décifion •nVoh en porte eft jufte, elle peut leur étre util«; fi elle eftfaufie, comment égarerait-elle ies Regens, la p'ü iart aflez éclairés pour fentir lc faible d'up raifonnement? Ou comment feduirait elle un peuple qui n'entend pas la langue que le PUitique Hollandais employé pour parler au public (*). JNous (*) L'Auteur nous confeille delévelopner dans uns de ces feuilles ces maximes tirées d'un Hiftorien de ce pays: , Quand un peuple fe croit libre, paree qu il jouitdes pre„ rogatives de la liberté civile, malheur & ceux qui, dans une grande comité imprévue, ont attiré 4 eux toure „ 1'autorité politique! Ce font, afentendre, oudes traltres " S 4 »  ( 280 ) Nous avons lu avec attention les différens rappens ties Amirautés; nous ne voyons pas, d'après ces documens authentiques, qu'il foit poflibie d'imputer a 1'Amirai-Général le blame dc la lenteur cc uei'inacbon quedes Corps entiers du Gouvernement fe font plaints d'avoir remarquées dans ce département. Mais, puifque nous fommes fur ce rapp:>rt, qu'il nous foit permis de publier des obfervations qu'eïles firent naitre dans ce tems. Pourquoi n'a-t-on répondu a la requête des Négocians dc Rotterdam qu'en pubiiant que Mr. Bisdom, Secrétaire de 1'Amirauté, avait donné avis a quelques Négocians feulement que 1'Eicadre du Texel viendrait prendre leurs Vaiifeaux ,, devant laMeufepour les efcorter^ quoique cette eicsdre promife n'a:t jamais paru a 1'endroit éi au tems indiqués? Pourquoi, avant le commencement de ces troubles; n'a-t-iljamais été queftion d'augmenter les forces navales, cc n'a-t'on jamais propofé autre chofe que de rempiacer les vaiffeaux qui périffaient de vétu:lé ? Peut-on dire après cela , qu'il a été toujours queftion d'augmenter a la fois les forces de terre & de mer? Les Amirautés fe plaignent de Ia difette des mate- „qui vendent 1'Etat, ou cïes- laches qui 1'abandonnent, „ cu des conducteurs inbabiles qui ne font pas en état d'en ., tenir les rê::es." Je ne fens pis trop fi ces maximes trèsappiicablrsauxtemsde 1'invaOon impré^ue ècrapidede Louis XIV, c;u ée par la perfidie de Charles II envers le vertueux De Witt, peuvent être appüquées a des tems oü l'orage a éé prédii depuis longtems, & les moyens de l'écarter propofés plufleurs acneés avant qu'il crevat. Ce qui eft vrai, c'eft que, s'il n'y a eu ni trahifon, ni lacheté, ni incapacité; il y a du moins eu une défunion que nous caercherons toujiurs a faire difparaitre, en tachant de ramener toutes les opiniocs au feul fyftéme qni peut fauver 1'Etat. Eft-il un autre moyen de ritabtir la confiance entre les divers Membres du Gouvernement par con/equent la eencorüe-fi hecefaire pour a^ir avec vigueur ?  ( 28i ) telots. II leur en fallait encore 1500, pour remplir la pétition du 25 Janvier 1781. Et dans un tems pareil , on perfiliait a demander une augmentation dc troupes de terre! Nous admettons vclontiers , d'après 1'avis de Ia Lettre a laquelle nous répondons, que le Grand Kindsbergen étant introduit dans la direclion des affaires mantim.es, il n'y a plus lieu a ces foupcons fur la mauvaife adminiltration. Aufii voyons-nous s'approcher Ie jour brillant ou nous ferons en état de braver a notre tour un fuperbe ennemi, & peut-être de lui porter des coups fenübies. D'après 1'activité qui regne aétuellement dans nos chantiers, on ne faurait douter que notre Stathouder, ainfi que tous les Adminiftrateurs, neprennent vivement a cceur de mettre la Répubiique dans un état refpectable fur mer. Auffi toute la nation a les yeux fixés fur ks effets qui réfulteront de ces grands efforts ; & nous ns • pouvons douter que, s'ils répondenta 1'efpoir qu'on s'en eft formée,ou que les opérations foient combinées avec autant de fageffe qu'eïles font préparées avec vigueur, notre Stathouder ne recouvre bientót cette popularité, qui ce peut échapper que peur un moment aux cceurs droits & bien inteotionnés. Oui nous avons eu & nous aurons principalement pour"objet de ramener 1'union; mais quelle union peut opérer le falut & rétabiir la gloire de la patrie ? n'eft-ce pas celle qui a pour principal objet de nuire a 1'ennemi , foit par des opérations grandes & vigoureufes, foit par la formation d'alliances au moins momentanées avec les ennemis de i'Angleterre? Puifque 1'union ne peut revenir que par Je triomphe de cette opinion , n'eft-ce pas, celle qu'il faut chercher a propager & a perfuadcr ? L'Auteur de la Lettre convient auffi que les Régens qui pencbaient póur l'Angleterre avant la rupiure,paree que c'était notre Jyfiéme, en font devenus lts p.us ardens ennemis, depuis que cette puijjance a foulé aux pieds les drdts Us pius facrés c5* rompu les traités les plus j'olemnels: 3:outacc (ce qui fait herkeur a fes lumieS 5 res)  C s8s ) rcs) que ce cbsr.gerr.ent n'efl pi; le fruit d'un! ivconfimce légere, mais un effet du changement de> circonftances externes, c# part a'ur, but louable degouverntr la nation felon fon propre pencba.ni. C'eft donc en rendanr ce fyftéme dominant qu'on peut rétablir 1'harTnonie néceffaire pour tirer la Répubiique de la cnfe violente ou elle fe trouve. N'eft-ce pas la un des buts marqués du Politique Holltmdnis? Les opinions politiques qu'il a artaquées , n'avaient-el'es pas au contraire pour objet de décourager Ia nation, foit en lui peignaDt les Anglais comme un peuple invincible, & fe reffentiment de ces infolem voifins comme la ruine de la Répubiique; foit en femant des foupcons contre la Fr,mee cc rww.4«-:g!»*,dont, dans les circonftances préfentes, nous étions plus intéreffés a cultiver 1'amitié, que ces deux Etats ne le font a rechercher la nötre ? Fn un mot, je crois pouvoir m'appliquer ces pa. roles qui font la peroraifon de la fameufe harangue de Démófthcnes pour la Couronne. ,, Deux chofes, Athéniens, diftinjruent effentiel,, lement le Citoyen vertueux; & je puls medonr.er ,, ce nom fans craindre 1'envie. La première, c'eft „ de maintenir toujours, quand il eft en fon pou„ voir, la gloire & la prééminecce de la Républi„ que; la feconde, de conferver pour elle , dans ,, toutes ies conjonélures, dans toutes les aclions de '., fa vie. un zele invariable. L'autorité & le pou„ voir dépendtnt de la fortune: le zele de la vo„ lonté & de la nature. Le mien ne fe ralentit ja„ mais;/ma conduite en r-nd témoign'^ge Quand „ on demandait mon fupplice, quand on me citait „ devant les Amphiéiions (*_), quand on employait ,, & menaces & promeffes, pour m'ebranIer, quand -„ on lachait contre rooi ces furieux cemme autant „ de (*) Voyez les 1'belles ou 1'on dénorce au bres féculier les perfornes fourconr.ées d'avoir part au peliiique; oül'on invite le Gouvernement a ies pendre, a les bannir, &c. &c.  C 2S3 ) de bêtes feroces, mes fentimens envers vous fu« '-' rent les mêmes. Je demearai fidele au devoir que " ie m'étais d'abord impofé, de foutenir les préro" gatives, la puiflance & la gloire de Ja patrie; de f' ]er cas, fes troupes augmentées a foixante mille hommes la garantiraient-ellesdu malheur d'étre partagée comme la Pologne ? Dans les deux premiers cas, elle a fuffifamment de troupes pour, de concert avec la Puisfance ou les Puiffances qui deviendraient fes alliées, repouffer les attaques d'un voiiin ambitieux. C'eft encore même trop avancer que d'accorder le titre dangereux de voifin a Ia trance, de 1'accorder furtout depuis que les Pays bas Autrichiens font devenus une barrière fi refpecfable par la puiflance & 1'ascendant du Prince qui ies poftéde. D'ailleurs 1'augmentation des Troupes, portée jusqu'a 60 mille hommes bien armés, n'aurait-slle pas oppofé un obftacle naturel a une augmentation de 60 vaiffeaux bien èquippis'1 Dans un tems oh ladifcrte d'hommes fe fait fentir d'une maniere ii aéplorable, les recrues pour les troupes de terre n'auraient-elles pas nui aux recrues pour les armemens de mer? Encore paffé-je fous filence la difticulté de porter a la fois le fardeau dc cette doublé augmentation. IIeft certainement dur d'étre mflute nous en fommes auffi convenus, Mais vouloir en tirer des infinuations contre la France qui foutient depuis fi longtems la Répubiique, fans qu'on puiffe lui fuppofer un objet d'interêt vifible, c'eft lê comble dc la partiaüté, pour ne rien dire de pis: fuppofant même que la Répubiique füt réduite è 1'humiliation d'étre tiraillée, balottée, a recevoir des infinuations qui équivalent a  C *S8 ) a des ordres, aurait-elle été dans eet état, au cas que , fans penfer a augmenter fes troupes de terre , elle fe füt bornée a 6o vaiffeaux dc ligne bien équippés? Cette augmentation de puiffance fur un clément ou la France avait alors tout a craindre, n'aurait-elle pas fuffi pour rendre la Répubiique également refpeétable a 1'Angleterre & a la France ? le penfe même qu'au moyen du refpeci, qu'elle fe ferait procuré par fa p'uiffance maritime; elle aurait acquis affez de crédit & d'afcendant, foit auprès de la France, foit dans d'autres Cours, nonfeulement pour prévenir la funefterupture avec 1'Angleterre; mais encore pour prévenir le coup que l'Empereur lui a porté par le rerkverfement de fes barrières. Quand on examine tout cela, quand on fe rappele que le parti, a qui 1'on reproche , d'avoir caufé les malheurs de 1'Etat en traverfant le projet d'une doublé augmentation, ne s'eft pas oppofé a celle de terre , qu'il y a même confenti ; demandant feulement qu'on commencat a s'armer fur mer oh le danger était non-feulement preffant, mais i'attaque réelle ; a qui peut on attribuer ces paroles fi mens non Imva fwjfet ? Les Hollandais aïment un bon mot; mais c'eft quand il vient a 1'appui d'un bon raifonnement. En voilé fans douu' affez pour donner une idéé de nos lumieres & de nos opinions: fi 1'Auteur de la Lettre peut nous fournir d'autres éclairciffemens, nous les recevrons avec d'autant plus d'ardeur & de reconnaiffance que fa Lettre parait être d'un homme également diftingué par 'e'zele patnotique, la nobleffe des fentimens, la fagicité des vues, la pureté des motifs, & 1'étendue des lumieres. Aux Adrejfss ordinair es.  L E POLITIQUE N°.LXXI.LUNDI, ec 17 JUIN, 1782. Suite iaCHAPITRE XLII. Lettre au Politique Hollandais, fur la Conftitution & les Troubles de Geneve. MONSIEUR* J'ai vu, avec attention, cè que vous avez écrit fur les Troubles de Geneve. II ne parait pas que vos informations. Soient venues du Canal d un Négatif. Ce ri'eft pas que je n'aie lu ce que vöus avez inféré dans vos feuilles avec plaifir, d'autant plus que vous avez eu 1'art d'y mêler plufieurs particularités qui imérefient ma patrie: car je ne fuis pas Citoyea de Geneve; je fuis Hollandais. J'ai fait un long féjour dans cette ville qui attirerait encore plus 1'attention générale, fi el'e n'était partagée par la guerre des Puiflances marhimes. Je me fuis même trouvé a l'éruption de ces derniers troubles. Ainfi j'en fais aflez pour avoir appercu plufieurs erreurs dans les obfervations que vous avez publiées fur cett» affaire. Vous parailfcz avoir fulpc&é vous-même la fourced'oii elles vous venaient, en ouvrant 1'entrée de votre feuille a torn Nêgat f qui vous commu. niquerait des obfervations. Je ne fuis ni JSégatif j ni Tome III. T Affir-  C 290 ) Affirmatif, ni Conflitutionaire, ni anti-ConJlitutionalre, ni Rêpréfentant, ni anti-Répréjentant; je n'ai été que fimple fpeclateur; en cette qualité je crois devoir vous recommander les pieces fuivantes, comme les plus füres fur le fujet en queftion. LETTRE fur les Caufes des Troubles aüuc.'s de Geneve, Mon sieur , Vous me demandez, par votre derniere Lettre, ee que Tont ces Natifs contre qui nous primes les armes en 1770 & en faveur de qui nous les avons reprifes 1'année derniere & celle-ci; je vais vous 1'expliquer Ie plus fuccinctement qu'il me fera poflïble. Les Natifs font iffus d'Etrangers aggrégés è Ia Répubiique fous la dénomination d'Habitants; c'étoit autrefois 1'unique dénomination fous laquelle 1'Etranger étoit namralifé dans Geneve. Le Fils de 1'Habitant né dans la Viile étoit qualifié du titre de Citoyen & pouvoit parvenir a toutes les charges: mais le Fils de 1'Habitant ou du Citoyen qui naiffait hors de Ia Ville étoit réputé Etranger. En 1'année 1409, Ie Petit Confeil, ponr procurer des revenus a 1'Etat, réfolut de recevoir des Bourgeois a 1'inftar de plLfieurs Villes d'Allemagne. II falloit joindre de nouveaux droits a ce nouveau titre. On inféra dans la Lettre de Bourgeoifie la claufe fuivante: Que V Acquéreur & les fins riès £? a naitre dans la Ville & au.dehors, pis natureh & légitimes, jufqu'a l'infni, fertient Bourgeois de Geneve. Ce fut-la Ia feule claufe qui Ia difttngua de la Lettre d'Habitation & qui engagea a J'acquérir bien ces Citoyens qui palfoient une partie de 1'année a h Campagne. Le Petit Confeil, fe trouvant bien de ce revenu, chercha a 1'augmenter, en réfervant aux Bourgeois des droits qui appartenoient a 1'Habitant &a fa poftérité. Au coremencemenr du XVIlme. Siccie, ceux qui n'éroient pas Bou'geois furent exclus du Petit Confeil, puis de celui des Deux Cents, puis enfin du Confeil Général: auffi cette Bourgeoifie qui ne cotitoit que 6 écus, aa coramencement du Siècle deruier, monta a' 400 avant la fin du Siècle & fut portee depuis jufqu'a 1000 écus. Vou< penfez bien. que tous ces changements ne s'opéterent pas fans plaintes de  C 201 ) de Ia part des IntérefTés. On intimida les uns par des mafisces; on recut Bourgeois gratis ceux qu'ellts ne purenÉ indmider. La Révocarion de 1'Edit de Nantes, qui attira dans Geneve une multitude de Réfugiés Francois, favorifa cette fé. paration. Les Riches d'entr'eux acquirent Ia Bourgeoife; le^plus grand nombre acquir 1'Habitation. Ce fut alors qu'on donna aux Defcendants de ces derniers le noin de Naiifs, qu'on refufa toute Requête oü ils fe qualifioient Citoyens &c. &c. Plufieurs d'entr'eux perfifierent a aller en Confeil Généra! jufqu'a 1'année 1707, année de troubles, oü Ie Petit Confeil, a 1'aide de quelques Troupes étrangeres qu'il introduifit fectétement dans la Ville, psrvint & répandre Ia confternation & 1'effroi parmi le Peuple. Bépouillés par le Petit Confeil, les Natifs le Krent encore par les Bourgeois qui, jaloux du grand nombre d'Etrau. gers qui s'établiffoient dans Geneve, tacberent de fe réferver les meilleures Vocations. Ils obtinrent, en 1740, que les Natifs & Habitans ne pourraient commereer, &, en 1720, qu'ils feroient exclus des Méaers d'Horlöger, d'Orfevre, de Faifeur de Boetes a Montres & de Graveur! exclufion odieufe qui fut levée en 1738. Mais, en 1730, ils avaient été exclus de tout Grade militaire dans la Bourgeoifie; & cette exclufion ne fut point levée, quoiqu'eile füt aufii injufte que 1'autre. Les Natifs avoient entierement perdu de vue leur état paflé. On étoit parvenu a leur faire croire qu'ils n'étoient que des Étrangers privilégiés, lorfque, pendant les troubles qui fe font élevés en 1763, entre les Bourgeois & les Magiftrats, un de ces deruiers s'avlfa de reprocher aux Repréfentans, dars un Ecrit public, comme une imprudence, d'avoir cité un Afte de 1420 „ oü les Natifs „ £? Habitants marebent d'un pas égal avec les Citoyens „ tjf Bourgeois; & il demandoit ft les Citoyens & Bourgeois trouveroieut bon que les Natifs & Habitans Je „ prévalafent de eet ASte pour rentrer dans les Droits „ dont ils jottiffAent alors" Ce reproche réveilla les Na. tifs. Ils lurent eet Acte auquel iis n'avoient pas fait attention. Ils n'y trouverent pas le nom de Natif: mais jls y lurent que 1'Iiabitant étoit Membre du Confeil Général. Ils lurent les anciens Traités avec Be-ne & Zuiich, celui avec le Duc de Savoie en «604; & ils yire'rit que le Bourgeois & 1'Habitant y marchoignt u'un pas égal. Ta Hg  C 292 ) Jls ne borrerent pas Ia leurs recherches. Ils parvinrent a fe procurer des Documents par lefquels i!s furent convaincus que les Fils d'Habitants avoient éte Citoyens comme les Fi's de Bourgeois; & les Edits de 171?, les premiers qui falïent mention de Natifs, leur prouverent que ce noin efl nouveau dans Geneve. Leurs découvertes furent annoncées dans des Brochures. Ils parurent décidés è réclamer leurs Droits. Les deux Partis Bourgeois en prirent de 1'ombrage,- le préjugé feul, Ia crainte d'avoir pour égaux des Hommes qu'ils regardoient comme leurs inférieurs, indifpofoient les Repréfentants comr'eux. Quant aux Négatifs, Ia réut'ion du Peuple anéantiifoit leurs projets, & ils avoient lieu de Ia redouter.mais i's eurent I'adrefl'e de femer Ia difcorde entre les Natifs & les Repréfentants, au point que, le 15 Février 1770, ces derniers lolliciterent le Petit Cotfeil & en ob« tinrent une Prife d'armes contre les Natifs. On en banint buit. On reftitua aux autres une petite parcelle de leur» Droits; & on leur défendit toute autre prétention. Cette conduite leur infpira un vif reflèntiment contre les Repréfentants: mais, afièz éciairés pourfentir que, s'ils embras. foient le Parti des Négatifs, ce feroit fe rendre borgne pour aveugler leur Ennemi, ils fe contenterent d'obferver une exacte neutralité fur les troubles qui agitoient les deux Partis bourgeois; & c'efl; ce qu'ils déclarerent publiquement en 1772. Les Négatifs, fatisfaits de cette déclaration, réfolurent de fe les attacher en leur donnant des Droits. Dès que les Repréfentants en furent inftruits, ils fe déciderent promptement a drefler un Projet par lequel ils accordoient beaucoup plus de Droits aux Natifs qu'il ne leur en étoit accordé par celui de leurs Adverfaires; ils Ie porterent a Mrs. lts Syndics, folliciterent qu'il füt lu en Petit Confeil , en Deux Certs & en Confeil Général, pour avoir force de Loi; &, fur le retus formel qui leur en fut fait, prirent les armes pour 1'obtenir par la force. II en ré" fulta un Edit favorable aux Natifs, lequel eut toute la fanction convenable; mais, apiès que la Bourgeoifie eut mis bas les. armes, la Petit Confeil refufa conflamment de le mettre en exécution. Les Natifs & les Repréfentants en furent également indignés: ceux-ci voyotent le Confeil Sou«erain méprifé jufqu'a laiffcr fes Arrêrs fans exécution. II falloit dès.lors ou renoncer a la Souveraineté,ou forcer lei  C 2«3 ) les Confeils inférieurs a la refpeéter; & c'efï ce qui a oblyé les Repréfentants & les Natifs a prendre les armes, le 8 Avril dei nier. Suivant 1'Eiit, 100 Natifs de la p-em'ere & de la feconde Générations ont éé recus Bourgeois gratis & 8 d'entr'eax doivent t'être, chaquj année; & tous ceux de la troifieme Génératiovt & des Géuéradons fuivantes le font de druit & gratis, dès 1'a je de as ans. Ou par^e d'ajouter aux Articles de eet Edit un autre A'ticle,portant qu'a 1'avenir on n'aggrégera d'Etranger que fous la qualité de Bourgeois; par ce moyen, toutes ces diftinctions, fource de difcorde, feront bannies de notre Répubiique. La faite dans une feuülle procbaine. Suite du CHAPITRE XL Sur la médiation de la Ruffu pour une paix particuliere entre l''Angleterre cf les Pays-has-Unis. Nous avons parlé,(voyez culevant piges r^-t jo) des efforts tentés au commencement du mois d'Avril par le nouveau Miniftere Anglais |oui fa;re u,,e paix particuliere avec la Hollanüe. Dans la feuille précédente {page 23j) nous avons fait mention d'une nouvelle démarche faite le 17 Mars par les M niftres de 1'lmpérarrice pour la pourfuite de cette oeuvre falutaire. Ces pieces jettent quelque jour fur lesdispofitions & les opérations des Etats-Génénux relativement a cette affaire. La piece fuivante montre auffi qu'ils otit paru difpofés a recevoir !a paix d'aprés .les piéüminaires offerts par le nouveau Miniltere Britannique. LeComted'Ofterman,V":ce-ChRnceiierde Ruffie remit derniere-nent la note fuivante au IJ;ron de Waffenaar-Mahrenben», AinbaffadeurExtiaordinaire des Etats-Généraux aupièsdeiaCour de Pétersbourg. Levrs Hautes-Puifances ks Etats-Généraux des Prtvinces • Unies font déja inftruites par les Miniftres de l'Ifflr T 3 pé-  C 29+) pérarrice, accrédités auprès d'E'les, de ia réfolution qu'a prife Ie Roi de la Grande-Bretagne, relativement a la Pro* pofition mife en avant par Leurs dites PuiiTances, comme la baf; fur laquelle devait repofer tout 1'Ouvrage de la Pacification, entrepris fous les aufpices de S. M. Impériale. C'eft bien Ia plus douce récompenfe, que 1'Impératrice pouvoit fe prometrre de tant d'elForts & de tant de foins defmtéraifés, que le fuccès dont fes bons offices ont été fuivis. Elle ne peut que fe féliciter d'avoir complettement réufli auprès de S. M. Brittannique, ét d'avoir ménagé par fon entremife Ie Préliminaire tant defiré par L. H. P. pour le rétabliflement d'un Traité qu'EUes regardent a jufte titre comme Ie gage le plus effende! de liberté du Commerce de la Répubiique. Si donc, a eet égard, Elle a rempli tous fes engagemens, en fa doubléqualité d'Amie fincere & affeétionnée de la Répubiique, ik de Médiatrice impartiale entre Elle & la Grande-Bretagne, Elle ne peut qu'attendre avec une confiance entiere, que Li H. P. s'occuperont, avec des fentimens dignes de leur zele & leur Patriotisme pour 1'Etat qu'Elies gouvernent, de 1'objet Ie plus intéreffmt, qui fe foit jamais préfenté a leuts délibérations. L'Impératrice, fe repofant fur leur pénétration & fur leur grande fagefie, eft intimement convaincue qu'Elies faifiront Ie moment actuel fi favorable pour étoutFer la haine & 1'asimofité, qui ont entretenu jufqu'ici les troubles entre les deux Puiffances niaritimes,- & que, pour hater la conclufion de eet important Ouvrage, Elles conviendront inceflamment avec S. M. le Roi de la Grande - Bretagne d'une Trêve, qui réunira le doublé avantage d'affranchir imméJiatement le Commerce de la Répubiique des entraves, dont il a foufT^rt jufqu'ici, & de laifler le tems néeefi'aire de s'occuper des arrangemens pour une ouverture formelle de la Négociation de Paix; que, pour eet effet, Elles délibérerom, comme Elles ont expreffément déclaré en avoir fintention , tant par leur Réfolution du 4. Mars , que P'.r le Mémoire qu'a remis leur Ambaffadeur Ie 17 du même mois v. ft. au Miniftere de S. M. Impériale, fur la détermittatioh du lieu oü les Conférences pourront s'ouvrir; qu'en procédan: a la nomination elFective des Plénipotentiaires,pouraflifteraux-fes Conférence', Ellearrêteront les conditions auxquelles Elles font portées a rétablirla Pa x avec la Grande- Bietagne; & qu'Elies y mettront enfin toa-  C 295 ) toutes fes facilités poflibles, comme Elles 1'ont formelle* ment promis, dés que la condition maintenant accordée fur la liberté du Commerce auroit été préalableraent ad- Le Miniftere Irapérial de Ruffie, en inftruifant Son Ex?. M. 1'Ambaffadeur, pour la connoiffance de fes Maitres, des fentimens de S. M. Impériale, épouve la fatisfaction laplus complette d'avoir été mis en état de donner fipromptement de la valeur aux aflurances préalables qu il lui a faites, des'difpofitions finceres de 1'Impératrice a rempl.r tout ce que la Répub'ique devoit atteudre de fon amitié cc de fon affcction véritable pour Elle. Les dernieres Dépêches, apportées par le Couner arrivé de Péfersbourg, font d'une telle importance, qu'il a éié envoyé un autre Courier i 1'Ambaffadeur de Ruffie en France, oü celui - ci doit, dit-on, communiquer „ que S. M. Impériale de Ruffie fait infinuer a la Cour de France, qu'Elle ferait bien charmée que cette Cour eut la bonté de ne plus apporter d'obftacles pour raleutir la Médiation que S. M. Impériale de Ruffie tftche d'employer entre KAngleterr3 & la Répubiique öelgique; & combien S. M. Impériale eft d'opinion qu'une Paix particuliere entre les deux Nations ferait du plus grand avantage, principaiement pour la Républicme, dont les Intéréts lui tiennent extremement a cceur; les Intéréts même des Négocians de France demandant que cette Paix fe faffe le plutót posfible." Ce n'eft pas tout. Les Etats de Hollande & de Weitfrife qui devaient rompre leur AiTemblée le 6 ]uin pour quelques femaines, ont continué leurs délibérations: on croit que les dépêches venucs de Petersbourg ort donné lieu k cette prolongation; car-Mr de Markow, Miniftre-Adjoint du Prir.ce de Gallitzin , ünvoyé-Extraordinaire de la Ruffie auauprès de Leurs Hautes Puiffances,communiqua ces dépêches importantes, le i de ce mois. 11 parait que 1'affaire eft de Ia derniere conféquence. Elle mérite ainfi d'étre examinée avec la plusférieufe attention & fous toutes les faces. Pour un tel examen, il ne faut pas employer les yeux de la pasfion & de la partialité. Afin de prouver aux perT 4 fon-  fpnnes raifonnables que dous n'avons a cceur que 1'iütcrét de lYtat, nous ailons rapporter ies raifcns que 1'on peut a'léguer pour & con re la pa;x p:rtiom:% °n ven'a' Par ^sdeux Piaidoyers, fi nous afiaib iiions ies r; ifnnneaiens de ceux qui lont iiicline? è te que la nv.-diation foit acceptée L'tnpératrice ue Ruffie s'intéreffe vivement & ieneuiemrnt, pour nous procurer au plutót une pasx feparée avec 1'Ar gieterre. On objerfte que les Anglais .font une nation inconltante,perfide;qu'on ne peut faire aucun fonds fur leurs promefies;que leur intérêt eft la feule regie de leur conduite. Quelle fureré dit-on, aurons-nous qu'ils oblerveront un Traité fondé fur des bafes qu'ils n'ont jamais fu refpecter?Leurs forces veulent tout fubjuguer, leur cupidité tout envahir;ils veulent être de force oir de gré le centre du commerce, 1'entrepót univerfel, le rendez-vous général des befoins du globe. A peine veulent-iis laiffer glaner oh ils ont moiffonné. Jls veulent régner en defpotes, fans concurrence, fans contradiébon, fans partage. Des infraftions audacieufes de traités , des invafions fabites en pieine paix, iont le feul genre de manifeftes h leur ufage. Amis, Alliés, Ennemis, ils nediftinguent perfonne, quand il s'agit de leur intérêt, de leur aggrandisfement. Quel fonds d'ailleurs faire fur un Miniftere auffi changeant? Les Miniftres a&uels font bien dispofes pour la paix ; peut-être par efprit d'oppofition au iyfteme de leurs prédéceffeurs: qui nous affurera que ce Miniftere, qui commence d'ailleurs a éprouver des contradicfions, pourra fe foutenir? _ Qui prouve trop. ne prouve rien. Si cette objection était valable, il s"enfuivrait que nous devrions avoir une guerre éternelle avec les Anglais. Ainfi raifonnaient du tems de Maurice ceux qui ne voulatent pas qu'on fit la paix avec 1'Efpagnol. Ainfi raifornerent Heinfius cc les autres têtes de 1'admimftration qui laifferent échapper les offres avantageufes qu'on nous offrait a Geertruidenberg, pour conclui e enfuite a Utrecht une paix qui nous fit perdre tout'  C 297 ) tout le fruit de douze armées de viftoires & d'épuifement. Que les fautes du palfé fervent a nous diriger pour j'avenir! Rien n'eft plus incertain que la fortune de Bellone, Les Francaf, naguere triomphans partout, vtennent d'en fournirun exemple terrible. II eft vrai que l'ftngleterre pourra rompre le traité que nous aurons conclu. Eh! quel Traité fut jamais éternel ? 11 réfulterait de cette objeótion, non pas que nous devions repouffer la paix; mais qu'il faut toujours nous maintenir dans un état res. pecfable pour öter i'envie a nos voifins de la rompre. D'ailleurs, n'eft-il pas vraifemblable que les Pui 'ances médiatrices deviendront garantes des articles ? Dans tous les cas, que rifquons nous a entrer en négociation, fous la médiation refpeciable qui nous eft offerte? furtout fi nous ne ralentiffons rien du zele qui-fe manifefie pour les armemens; fi 1'on redoublefmême d'ardeur dans nos chanriers & dans nos ports; pour donner un plus grand poids aux négociations. Tel parait être en effet 1'objet de notre digne Stathouder. Pour faciliter a la marine lss moyens de fe procurer des équipages, il vient d'ouvrir une propofition qui fait honneur a fon patriotifme. 11 a propofé qu'on naturalifit ia brigade Ecoffaife & qu'on prit dans certains Régimens les hommes néceflaires pour fuppléer ceux qui manquent fur les vaiffeaux. Ne fera-t-il pas toujours en notre pouvoir de continuer ou de rompre les négociations, au cas que les conditions ne paraiffent ni honorables ni avantageufes , & ia paix précaire & peu füre ? Et, s'il était vrai, comme on nous le dit, que 1'épuifement de 1'Ennemi 1'a engagé a nous faire les premières ouvertures de paix , n'eft-il pas probable que nous en obtiendrons des conditions favorables ? ' 11 y a plus: 1'Angleterre & la Ruffie n'ignorent point la démarche que nous avons faite en reconnaisfant 1'indépendance de I'Amérique;& , ce qui eft encoreplus important, nos délibérations acluelles pour confommer un Traité de commerce & d'amitié avec T j cette  ( 298 ) cette nouvelle Répubiique. II ne parait donc pas que ces deux Puiffances veuiilent exiger que nous renoncions a ces liaifons- Cette condition n'entre pas d'ailleurs dans les préliminaires qu'eïles nous ont propofés. Quant aux déclamations contre 1'Angleterre il peut y avoir du vrai. Mais qui ne fait qu'une Puisfance prépondérante abufe toujours de fa fupériorité? Eh.'qui ne voit en même tems que 1'Angleterre, ayant perdu fes plus puiffantes Colonies, ne fera plus en état de détruire 1'équfibre fur les mers? Helt certain que, quelque détermination qii'on puiffe prendre dans les circonff ances préfentes, il ne faut pas perdre de vue les armemens de mer; il ne faut pas fe borner a créer une marine refpeétable qui n'ait qu'une exiftenceéphemere; maisii fauc prendre des précautions pourla maintenir fur le même pied. Qu'on ait pour maxime' fondarrentale que Ia puiffance maritime doit affurer non-feulement la profpérité du commerce & la confervation des établiffemens lointains de Ja Répubiique; mais la rendre encore refpeclable aux PuiiTances de terre (*) Quand nous entrerions dans les négociations qui nous font offertes, fommes-nous fürs qu'eïles réuffiront, qu'aucun accident imprévu n'en rompra le fil? D'ailleurs, on obiientdes conditions de paix d'autant plus favorables, que 1'on parait avoir moins a craindre de la guerre. Pour C*) II n'eft que trop vrai qu? 1'Einpereur a faifi, p0Ur renvetfer nos barrières, Ie moment oü 1'Angleterre de venue notre Ennemie, ne pouvait pius ssi' en quaüté de* garante de ces barrières. Ainfi a été perdu tout !e fruit d'une guerre glorieufe de douze ans. Mais fi nous eusfions eu une marine refpearble, 1'Angleterre nous auraitelle attaqués? Eu pa* avec elle, n'aurait elle pas interpofé fa médiation pour nous conferver ce quelle nous avait garand? Au moins au moment de Ia rupture au rions.nous dü faire alliance avec Ia France qui fe ferait trouvée dés lors engagée a prendre notre défmfe.  C 299 ) Pour reieter une démarche fi avantageufe & fi défirable, il faut d'autres raifons que celles del'accroisfement de nos forces, du déclin prétendu de cells des Ennemis, de leur mauvaife foi & des avantages Qu'une alliance prochaine avec I'Amérique Septentrionale prépare au Commerce & aux Fabriques de "il^en faut beaucoup que 1'Angleterre foit épuifée Les établiffemens difperfés qu'elle a perdus lui fourniffent même de nouvelles forces a notre égard, en la forcant è les raffembler autour d'elle. La facilité de fortir de fes ports en tout tems & de tenir fes efcadres en exercice perpétuel remplace les forces qui lui manquent, multiplie fes opérations & lui forme une pépiniere inépuifable de marms. Que n'avons-nous pas a craindreen Afie, oh nous poffédonsdes établiffemens d'une importance & d'une richeffe qui excitent 1'envie de toutes les Puiffances de 1'Europe? La perte de tous nos établiffemens iur le Continent de 1'Afie, montre que les Anglais dominent dans cette partie du monde. Déja ils fe lont vus en état de fe porter jufqu'a Ceyion ; & les forts de Trincamale & d'Oftenburg leur ouvrent la conquète d'une Me fi importante par la produftion importante dont nous avons le débit exclufif dans VUnivers. Maftre de toute 1'Inde,maitre de Ceyion, qui pourra arrêter ce peuple entreprenant & ambitieux, de porter fes conquêtes fur 1'Archinel des Molucques fi tentatif? Les Anglais ont déja dans cette partie du monde plus de forces de terre & de mer qu'aucunePuiflance Européenne n'en a jamais eu. La Préfidence de Bombay vient d'être renforcée de deux Régimens Européens arrivés fous 1'efcorte de deux vaiffeaux de ligne , d'un navire de 30 canons & de quelques Frégates. Sir RichartBickerton,plus heureux a échapper a Mr.de Guichen que les convois Francais ne l'ont été devant Kempenfeld & Barrington, va porter les forces Anglaifes dans 1'Inde a 49 vaiffeaux; & qua-  c 30° > qintorze font prêts a mettre h Ia voile pour ia même deitination. Mfis nos ^ établiffemens occapés par les Francais que beviendraient-jls? je réponds que d'abord ils n'óferaient rous garder le Cap de Bonne-Efpérance qu'us n'ont qu'en depö;. Ils font: trop bons politiques pour fe desAonorer par une trahifon qui ligüej ait Ja race pré. lente & fouleverait la race future contre eux Qua-it a St Euftache, Uemerary , fiffequebo ies Berbices, d'abord nous pourrions obtenir des Anglais qu'ils ne feraient la paix avec la France qu'en fbpulant que ces établiffemens nous feraient reftitués. Le nouveau Miniftere Anglais ferait d'autant plus porté a cette demarche qu'avouant l'injuftice de 1'a?. greflion faite contre nous, il eft temt de nous réparer oude nous indemnifer de cette perte Ce n'eft pasencore tour: la France elle-méme n'a pas dïntérét a garder ces polfeffions.Elle en a de plus intéreffantes que celles de la Guiane Hollandaife. Et St Euftache redevenant un port libre, lui procure, en tems desue-re . des averages plus grands è 1'abn de la neutrahté, qu'elle ne peut efpérer d'en recueillir en la retenant fous fa domination. 11 yaplus: les négocians Francais (oupirent pour rotre réconciliation avec 1'Angleterr.-; on rapporte méme que les princip.ux Hommes d'Etat en France font tout-a-fait portés pour notre paix particuliere avefe-1'Angleterre. La France ófèrait-elle refufcr de nous rendre nos pofleffions? Ne ferait-elle pas voir qu'elle n'aurait cherché è rendre fervice a la Répubiique, qUe pour la fa;rifier a fes intéréts? Ne montrerait-elle pas qu'en nous excitant è défendre nos droits contre 1'Angleterre, elle chercherait moins a maintenir 1'honneur & 1'indéper dance de la Répubiique qu'a nous faire fervir a des vues obliques & ambitieufes? Que pouvons-nous gagner par les opérations miü. taires que naus préparons fur mer; de tous les arinemens qui fe font dans nos chantiers? Arriverons ■ pous.dans les mers de 1'lnde a tems pour fauver nos  C 3°l ) établiffemens que nous avons laiiïés a Ennemis.qui,peut-étre,enontdé]afaitleurpro!e(N^s forces feraient, ou fupérieures, ou égales', ou inferieures. Dans le premier cas, fommes- nous lurs de rencontrer les Anglais? N'auront-ils pas 1 adreife de^ nous échapper comme ils ont échappé jufqu a préfentaux Frangais & aux Efpagnols, quand ils etaicnt dans ce cas?^Quand, a forces égales, nous pourSons efpérer une iifuc auffi glor.eufe que celle de ïl fameufe journé. du 5 Aoüt 1781 ; quelles en feraient les fuites, finon d'étouffer une feconde fois notre marine naiffante, delarédmreaferéfuger dans fes pons & de tóffer toujours notre navigation marchande a la merci des Ennemis? On a beau fe couvrir de la livrée honteufe dun pavillon étranger; on a beau avoir des correfpondans a Embdef, a Ottende, a Htfj^g-gg^ a doubler les écritures & payes pour f^e ferment en cas de befoin-, toutes ces reffources obliques, ces manoeuvres cnminelles, ne font qu un bien.pasfaecr; il nous faut un commerce ouvert & libie, U faut qu'il nous foit rendu le plutot poffible. D'ailleurs, la reconnaiffance de 1'indépendance Américaine ne peut porter aucun obftacle a la paix ftmrée. Dans aucun code des nations il n'eft de: fendu de reconnaitre 1'lndépendance d'un pays qui ouit de fon propre gouvernement Sfegouvernepar 3fes propres loix. L'Amérique eft, a notre egard un pays que 1'Angleterre veut iubjuguer. S ooint de vue, nous avons le même droit d avoir Se correfpondances d'ambftfade & de pohtique avec eïe, que 1'Empire, la Ruffie, ou tel autre Etac nemre ceVi d'entrete'nir un Ambaffadeur ;en F. ance fans commettre hoftilité contre 1 Angletene Au contraire une paix particuliere avec 1 An. gtëferre nous mettra plutót en état de tirertejymraces aue n--us cfpérons des liaifons Ameiicaires, cu'on lui fait, quel danger ne court-el.c pas de U |afd!un ennernï qui, par les nouveaux fuccès quft  c 30° y qunorze font prêts k mettre a la voile pour la mé- me deitination. Miis nos^ établiftemens occupés par les Francais que aevsendra^nt-jls? * ^ je réponds que d'abord ils n'öfer.iient nous garoer le Gap de Bonnc-Efpérance qu'us n'ont qu'en depó;„ Ils font-trop bons politiques puur fe deshonorer par une trahifon qui ligüej ait Ja race pré. lente & fouleverait la race future contre eux Quant a St Euftache, Jjemerary , Effequebo les' Berbices, d'abord nous pourrions obtenir des Anglais qu'ils ne feraient la paix avec la France qu'' n lbpulant que ces établiffemens nous feraient reftitués. Le nouveau Miniftere Anglais ferait d'aucant plus porté a cette demarche qu'avouant i'injuftice de fa?, greffion faite contre nous, ilefttenude nous réparer oude nous indemnifer de cette perte Ce n'eft pasencore tout: la France elle-mêmen'a pas d'mterêt a garderces poffeffions.Elle en a deplus intereifantes que celles de Ja Guiane Hollandaife. Et St Euftache redevenant un port libre, lui procure, entems de guerre . des avantages plus grands è 1'abri de la heutrahté, qu'elle ne peut efpérer d'en recueillir en la retenant fous fa domination. 11 y a plus: les négocians Francais loupirent pour rotre réconciliauon avec 1'Angleterr.-; on rapporte méme que les principaux Hommes d'Etat en France font tout-a-fait portés pour notre paix particuliere avefc-1'Angleterre. La France óftrait-elle refufcr de nous rendre nos pofleffions? Ne ferait-elle pas voir qu'elle n'aurait cherché k rendre fervice a la Répubiique, qUe pour la fa;rifier a fes intéréts? Ne montrerait-elle pas qu'en nous excitant k défendre nos droits contre 1'Angleterre. elle chercherait moins a maintenir 1'honneur & 1'indéper dance de la Répubiique qu'a nous faire fervir a des vues obliques & ambitieufes ? Que pouvons-nous gagner par les opérations militaires que ntous préparons fur mer; de tous les armemens qui fe font dans nos chantiers? Arriveronsnous.dans les mers de 1'lnde a tems pour iauver nos éta-  ( 3°l ) établiffemens que nous avons laiffés a Ennemis.qui,peut-étre,enontdé]afaitleurproie(Nl;s forces feraient, ou fupérieures, ou égales, ou. inferieures. Dans le premier cas, fommes- nous iurs de rencontrcr les Anglais? N'auront-ils pas 1 adreffe deP// nous échapper comme ils ont échappé jufqua préfenta£Francais «Sc aux Efpagnols, quand lis étaient dans ce cas?>and, a forces égales, nous pourSons efpérer une iffuc auffi gloneufe que celle de li fameufe journé. du 5 Aoüt 1781 ; quelles en feraient les fuites, finon d'étouffer une feconde fois nötre marine naiffante, delaréduireaferéfuger dans fes pons & de laiffer toujours notre navigation maichande è la merci des Ennemis? On a beau fe couvrir de la livrée honteufe dun pavillon étranger; on a beau avoir des correfpondans èEmbden, k Ottende, k Hambourg,employés fSoub Ier les écritures & payés pour faire £ment en cas de befoin; toutes ces reffources obliques, ces manoeuvres criminelles, ne font qu un b:en pasfagcr; il nous faut un commerce ouvert & libie, ü faut qu'il nous foit rendu le plutot poffible. D'ailleurs, la reconnaiffance de 1'indépendance Américaine ne peut porter aucun obftacle a la paix féparée. Dans aucun code des nations il n'eft defendu de reconnaitre 1'lndépendance d un pays qui iouit de fon propre gouvernement fciegouvernepar 3fes propres loix. I'Amérique eft, a notre egard un pays que 1'Angleterre veut lubjuguer. Sous ce point de vue, nous avons le même droit davor de correfpondances d'ambaffade & de pohtique avec eïe, que 1'Empire, la Ruffie, ou tel autre Etat nemre celi d'entrete'nir un Ambaffadeur en F ce fans commettre hoftilité contre 1 Angleterie. Au contraire une paix particuliere avec 1 An. gkterre n >us méttra plutót en état de urer te avantaecs aue nöus efpérons des baifons Ameiicaires, cu'on lui fait, quel danger ne court-eU pas de u gfd'un ennemi qui, par les nouveaux fucces qu ft  ( 302 ) yient de remporter &fous des miniftres jeunes, ac tifs, entreprenans,eft encore cn état de ruinerentie. rement notre marine ? Qui fait même fi lerefus outrageant de la médiation de 1'Impératrice n'irritera pas cette puiflance au point ;de 1'engager a offrir des fecours h 1'Angleterre? Combien cêt fncident n'augmenterait - il pas 1'état malheureux de notre fituation * JL>e quelle utilité nous feraient alors ces Américains dont nous avons préféré les offres a celles d'une des premières,puiffances de 1'univers? D'ailleurs, ne devons nous pas des égards h une puis2?* T,teoré- tant d'inclination pour les interêts de la Répubiique & qui joue unröle fi refpectacle en Europe? Eh.» que fait -on? Peut étre aaitfit f. C7?Cr*C ave5 £autres P^ces qui s'intéresde rlngleSr??311 " de * RéPubli^e& * ce^ Nous ne croyons pas que les plus zélés partifans de cette opinion er.aient allégué de plus féduifantes n même d auffi fortes. Puisque plufieurs membres politiques de la Répubiique, non-feulement des Regences, mais même les Etats entiers de quelques Provinces, fe font déja déciarés contre la négociation, pour une fuspenfion aftuelle d'armes & une paix particuliere; il faut donc qu'il y ait auffi de rortes raifons qui militent contre cette acceptation. ^mje calculais froidement & métbodiquement les naiix ty ks dangersde la guerre préfente; un politique pbilolophe a quijelespropojais, me répondit en ces termes Un a beau mettre fon efprit a Ia torture; on nê voit pas quels motifs peuvent fi fort intéreffer 1'Impératrice en faveur de la Répubiique. Puisqu'elleapour e e une affeécion fi tendre & fi vive, ne laferviraitelle pas mieux en cimentant Ja paix avec 1'Angleterre fur la bafe d'une paix générale. On a beau vanter les reffources de la France & de 1'Angleterre: ïl eft certain que ces deux Royaumes foupirent également pour la fin d'une guerredont, ils ne peu. vent plus efpérer des avantages affez importants pour com-  C 3°3 ) compenfer les dépenfes. Le grand objet de la France était de procurer 1'indépendance k I'Amérique; on peut affurer qu'elle a obtenu ce point. L'objet de 1'Angleterre était deramener I'Amérique fous le joug. Elle ne peut plus fe diffimulcr que 1'exécution de ce projet eft impoffible. Ainfi donc les principales Puiffances engagées dans cette guerre n'ont piusd'otfjet réel qui les engagc a promener encore fur terre& fur mer les ïnftrumens de ladeftruétion & du carnage; elles n'ont a régler que le fort de quelques Ifles que 1'Angleterre n'a pas vu palfer d'un ceil indifférent au pouvoir de la France. Mais que 1'Angleterre confidere que la France a pour gardcr la Grenade, St. Vincent, Tabago, le même droit que firent valoir les Anglais quand ils curent le bonheur de s'en emparer dans la derniere guerre. Que les Anglais'confiderent que la perte de I'Amérique - Septentrionale n'eft pas une conquête pour leurs Ennemis. Ils auront dans ce pays, les mêmes droits que les autres nations; fi 1'on n'a pu s'empêcher de remarquer que les Américains avaient une prédileclion particuliere pour tous les objets de fabrique, de manufaclure, ou de produclion Britannique ; on ne peut s'empêcher aufii de convenir qu'il ne peut rien arriver dc plus heureux aux Anglais, que la paix la plus prompte avec I'Amérique avant que la néceffité de fe pourvoir aiüeurs l'ait accoutumée a fe pafier des objets d'agrément ou de commodité qu'elle aurait a tirer de la mere-patrie. Combien toutes ces confidérations & quantité d'autres encore ne faciliteraient pas une médiation pour une paix générale? Pourquoi la Ruffie s'obftine-t-elie è n'intirpofer fa médiation que pour une paix particuliere? En qualité de Puiflance neutre, craindrait-elle que 1'oppofition obftinée de la Répubiique a une paix particuliere, ne fray&t aulfi-töt la route a une paix générale qui ferait perdre aux Membres de la neutralité-armée les immenfes avantages qu'ils retirent de la guerre ? On nous menace du courroux de la Ruffie. Les pa.  C 304 ) papiers Anglais parient même d'une flotte de dix« huit navires RuiTes, prêce a venir donner du poids a cette médiation ou a fe ranger du cóté des Anglais, au cas qu'elle foit rejetée. 11 ferait bien fingulier que la Ruffie, qui nous a repouifés, lorfque nous venions k fon invitation pour entrer dans la Neutralité armée , trouvat aftuellement dix-huit beaux navires pour aider les Anglais a nous forcer a la paix. II femblerait, plutót, qu'un cceur'auffi magnanime que celui de la Semiramis du Nord, ne devrait pas borner fes vues a rendre la paix a une petite Nation telle que la Hollande. Sa politique fublime & fon amour pour 1'humanité font faits pour embraffer tous les peuples, tous les humains. D'ailleurs, on nous demande une fufpenfion d'armes. C'eft auffi un préliminaire néceffaire dans ces fortes de négociations. Mais nous fommes déja engagés a concerter les opérations de cette campagne,, avec la France? Liés par eet engagement, pouvons-nous en contra&er un autre d'une nature diamétralement oppofée ? Refterait k favoir fi la France voudrait nous délier de nos engagemens. Dans ce cas , pourquoi ne pas changer cette né* gociation en une autre, tendante k une paix nénérale ? La fuite au N,. procbain. Ces Feuilles périodiques paraiflent régulierement, tous le« Lundis a Amfterdam , chez J. A, Crajenfchot; d Haarlem , chez Walree; a Lelde, chez Luzac & van Damme, & Les Freres Murray ; cl la Haye , chez J. van Cleef, Detune, van Drecht & La Veuve Staalman; a Gouda, chez Fan derKtos; d Rotterdam, chez Bennet &Hake, & D. Fis; a Dordrecht, chez Blujfé; d Deventer, chez Leemhorst; d Groningue , chez Huyzingh ; d Nimegue , chez Van Goor; d Arnhem, chez Troost; d Bois-le Duc, chez J. H. Pallier , aHambourg, chez J, G. Fircbaus & chez les principaux Libraires des Pays-Bas.  L E POLITIQUE N°. LXXII. LUNDI, ce 24 JUIN, 1782. Suite du C H A P I T R E XL. Sur la médiation de la Ruffie pour une paix particuliere entre 1'Angleterre cjf les Pays-basUnis (*).* J'avais bien raifon de vous dire, continua le Philo* fophe-Politique, qu'il était fort douteux,fi la France (*") La dénomination dê Provinces-Unies ou de Provim ces-Unies des Pays-bas, n'aurait jamais dü s'employer, notl pas feulement par ce qu'elle eft infulHfante ècinfidelle; mais paree que ce mot Provinces implique une fubjection , una dépendance, qui ne convient pas a un Etat libre & Indé-1 pendant. Les Américains font fi délicats fur eet article qu'ils ne veulent pas même faire utitge du mot Colonie. Celui de Provinces-Unies s'eft perpétué depuis 1'Union d'Utrecht qui fut formée 1'an 1579, avant que' 1'on eüt abjuré folemnellement le Roi d'Efpagne , abjuration qui n'arriva qu'eit 1581. Ce mot Pays-bas-Unis qui rend fort bien celui de Vereenigde Nederlanden, me parait non-feulement réunir la préeilion a 1'exaftitude; mais les Chefs du Gouverne. ment ne devraient pmais permettre qu'il en füt adopté d'autres dans les documens Francais qui les intérelfent. La Politique Hollandais n'en employera pas d'autre; tl eft pres* Tome ui. v que  C 30Ö ) ce nous délierait dc nos engagemens. Et tirant de fa poche la Ga-rtte ne Lelde, qu'il me Vanra comme la mieux faite de celles qui fe font en Hollande, il lut ces mots dans le Supplément du No, XLIX. Les fats de Hollande & de IVeil Frife, qui fe font féparés le 13 de ce mois, avaient arrêté la veille leur Présvis. concernant Ia Réponfe a dotirer a la Cour de Ruffie. Ce Pré avis tend a déclarer, .. que 1'Angleterre a tardétrop louptems a fe décider fur Ia condition préliminaire, qui , devait fen-ir de bafe a ure Paix particuliere i qu'on a '.. dó prendre airfi la Réfolution d'agtr de concert avec la ', France ; oue par-la la póffibilité d'une Pacification parti- cuiiere s'eft abfolument éwanouie; & que Ia Répubiique ., n'eft a même que de concourir a une Paix générale." La Cour de Verfailles a fait, a ce que 1'on apprend, ure Réponfe a peu prés pareille a la Note Miniftérie'le, par laeuelieelle avait été requife, au nom de 1'Impératrice, dene ene auffi court que celui de Hollande fou? lequel la plupart des Étrangers défienent ordinairemert la Répubiique enti> re, au point que dans le Traité de Dresde , drelfé 1'an 1750 cn'Francais, entre le Roi de Po'.ogne, Eleéïeur de Saxe, & les- Etats, on s'é'.ait fervi de ce terme Répubiique de Hollande , dénomination qui choqua fi fort les Etats de Zée« lande, qu'ils en firent fubfthuer un autre,moins erroné , celui de Répubiique des Provinces-Unies des Peys-bas: Le mot Répubiique corrige au moins ce qu'il y a de défectueux drns le mot Provinces. Mais, en ce cas, dira-t-on, fau. dra t-il changer la dénomination non moins errenée, lafource de toutes les autres, celle de Prtvince de Gueldre, Pre. vince de Hollande, Province de Zéelande&c. &c. ? Enco. re paffe pour les membres de l'Heptarcbie, qui comptent pour rien 1'abandon de leurs privileges les plus précieux.., . Mais la Frife qui formait autrefois un Royaume, mais les Frifons qui fe fignalent aftueliement fi glorieufementldans la caufe de la liberté, ne devraient-ils pas encore donner 1'excmple & iraiter les Américains en n'adoptant plus d'autre dénomination que celle d"Etat de Frife f Je prévois toutes les obje&kms qu'on va me faire; je me tais; je croyais parler a des hommes libres & non a des chicanes:», a des Sophift.es &c.  ( 3°7) pas mettre olflacle d une Paix particuliere entre ia Cran. de-Bretagne & la Répubiique. „ Sa Maj. Très-Cbrétienne „ a repondu en fubrtance, que le Roi n'a chercné ni ne „ cherche a avoir aucune influence fur les Réfolutions des „ Etats Généraux: Mais que, comme L. H. P. font con„ venues d'agir de concert avec la France, f concert que „ Ia fitnanon naturelle des affaires exigeait,)Sa Maj Imp „ femble ne pouvoir s'attendre que L. H. P. abandonnel „ ront Ie Plan qu elles ont adopté ; Pian, d'ailleurs qui „ doit fervir a accélérer une Paix générale." Ainfi parient les juges les plus refpectables que ie pouyais invoquer en faveur de mon opinion. Ainfi finit notre premier entretien avec Ie politique Philofophe, ou plutót Philantrope, comme Ia iuite de eet entretien le prouvera fuffifamment. II profata des beaux jours que 1'approche de 1'été nous a erfin ramenés. II me conduifit fur une de ces barrières naturelles dont 1'Eternel femble avoir vouJu ceindre le fem des roers qui nous environnent, pour Jes empêcher de fe déborder. en nous abïmant une fois pour toutes dans un délu^e univerfel La mer venait mouilier le piedde ladune. Les rayons réfléchis du foleil dans 1'immenfe liquide ou'un fouffle léger agitair, formaientunfpeótacleravi'ffant. J'avaisvu Ion cceur palpiter en traverfant les campagnes oue le printems a reflufcitées & embeliies: il ne fut plus maftre de fon enthoufiafme, lorfque ce fneétacle toujours nouveau, frappa fes yeux. Son ame était exaltee , en m'exhortant, par ies paroles & par les geftes, è Dromener ma vue dans le lointain. „Béni foit,dit-il,le Grand-Ordonnateur des mondes, qui, pour réunir tous les humains par lesneeuds des befoins réciproques & de 1'intérêt, forma cette furface mobile & propre a les porter rapidement avec Ies- maffes les plus pefantes d'une extrémité du globe a 1 autre! Béni foit 1'Eternel, qui n'a pas voulu que cette furface mobile gardat la tracé des na. vires, qui les premiers traverferent telle ou telleplage, afin qu il n'y tut la aucun tvran, & qu'elle fftt pour tous les peuples auffi libre quél'airqu'ils respirent'" Pendant que le Philofophe prononcait ces mots V 2 lé  C 308 3 le vent s'éleva, les vagues s'enflerent, une tempête horrible vinc jeter a nos pieds quelques débris de miférables bateaux de pêcheurs, les leuis qui, dans cette ftagnation générale de la navigation, s'avtnturent encore a s'éloigner de nos cótes. Lé teint du Philofophe fe rembrunit alors; il interrompit touta-coup fon difcours: _ Hélas, dit-il, eet élément qui nous procure de ft stands avantages, & qui a porté ce pays de la détresté, de la pauvreté, de 1'efclavage a un état prospere, opulent, indépendant, menace a tout moment de 1'engloutir & a déja envahi une partie de fon terr.itoire! Pourquoi eet élément a-t-il des écueils, des gouffres,des tempêtes, pour dévorer tant de victimes2 Hélas! puifque nous achetonsfi cher fes bienfaits,'pourquoi faut-il que les hommes s'arment encore pour fournir de nouveaux moyens a fon infatiable avidité, dans la coupable idéé d'arracher les avantages qu'il prodigue a ceux qui ofent s'expofer a fes dangers?" . Oh font ces jours ou nous avions, en tems de paix, des'flottes guerrieres afiéz formidables, non-feulement pour défendre nos flottes marchandes, mais encore pour forcer a la paix les Puiffances maritimes du Nordqui s'imaginaient, pour leur caprice ou leur intérêt pouvoir troubler la liberté générale de la navigation & des mers ? Que j'aimecestemsoh un Penfionaire d'Amfterdam, envoyé dans le Nord pour ménager une réconciliation entre les Rois de Suede & de Danemare, leur impofait, de concert avec un An baffadeur de la Répubiique Britannique , les conditions de paix. Ce dernier était le fameux Républicain AVernoon Sydney , auffi admirable par fa vie que par fes écrits. Lé Hoüandais, Mr. Vogelfang,paria d'un ton ü menagant au Roi de Danemarc qui fe refufait a la paix, que le Monarque frémir. De Witt était alors 'a la tête du Gouvernement. II cft vrai qu'il ne put empécher que la Répubiique ne füt enveloppée dans des guerres; ma:s li, dans ces tems ' modernes, nous euiïions feulement pris les précau- trons  C 3CS> ) «ons que prit alors De Witt, n'aurions-nous pas «évité cette guerre malheureufe? Les Anglais auraientils penfé de s'attirer un quatrieme Ennemi, fi eet Ennemi leur eüc préfenté un front menacant & non une proie attrayante & facile ? „ Cette guerre eft donc un mal néceffaire auquel nous devons nous foumettre. Nous ne pouvons donc plus écouter de paix qui ne foit pofée fur la bafe folide d'une paix générale. Nous devons donc profiter de ce moment pour reprendre cette énergie dont nous avions befoin , & même notre ansienne confidération, fi nous favons profiter des circonftances. Le moment eft critique & déücat. Le peuple eft dans les meilleures difpofitions. Un peuple de trois millions d'bommes dans un efpace reflerré, dans une fituation favorifëe par la nature & par 1'art, forme une nation refpeccable: elle eft fur le point de de devenir autant qu'elle apu 1'être jadis, fi nos Adminiftrateurs favent profiter des circonfiances póur faire de vigoureux efforts,& fe rendre refpeclables & a la France & a 1'Angleterre." „ Quoique la guerre foit un fléau terrible, abominable, la faiblefié dans une attaque injufte a des con. féquences encore plus funeftes. Un peuple qui fupporte impunément de longs & perpétuels outrages, eft ie rebut de tous les peuples ; & la pene de fa confidération politique ne tarde pas d'entraïner celle de fon exifience politique. C'eft dans des momens pa. reils a celui-ci, que tous les citoyens doivent fentir & agir pour la patrie. S'üs ne développent alors toutes leurs reffources pour la faire triompher, ils retombentdans un mépris qui ne tarde pas a être fuivi de la perte de leur indépendance." Le Philofophe, d3ns fon enthoufiafme philantrop;que, fit alors 1'exclamation fuivante: „ Maudit foit le premier qui accoutuma les hutnains ö s'entre-détruire pour de futiles intéréts! Quel fpectatie! Deux a trois cent mille hommes enrölés, disperfés fur les plaines & fur les mers n'attendent qu'un V 3 fignal  C 310 ) fignal pour s'entrégorger! Ils fe maffacrent, ala face du foleil, fur les fleurs du printe s. fur L'écume des flots. Ce n'eft point la haine qui les anime, ce font des Souverains qui leur ordunnent de mourir;." aucun d'eux nefgait même fi la querelle de I'Amérique eft la caufe de 1'humanitc; la moitié decesforcenés cgorge 1'autre, pour q ie le nouvel hémifphere foit foumis a une Ifle Européenne qu'on diftingue a peine fur la carte Puifque c'eft fous ce point de vue que nous devons examiner le ft au terrible de la guerre, quel titre refpeétable augujte , ne donnerait-on pas k un Souverain . qui faifirait 1'occafion préfente, oh tous les peuples foup.rent pour la paix , I'invoquent a grands cris , ne peuvent plus avoir aucun motif , même aucun prétexte raifonnable, de promener le carnage & la destruétion, qui profiterait, dis- je, de ce moment unique, pour leur faire goütera tous eet avantage eflentiel ; paree que ne la propofant qu'a un feul, il ne ferait que prolonger la durée de ce malheur affreux." „ Si jamais guerre füt un outrage k 1'humanité, ce font les guerres de mer. Tout peuple qui commence les hoftilités fur eet élément, pour y domi« ner feul, eft 1'ennemi de 1'humanité. II eft bien trifte pour nous, qui fommes par état amis de la paix & du bonheur univerfel, de nous voir attaqués, dépouillée , fans la moindre caufe d'aggrelfion Que 1'on cite en effet, depuis fix ans que 1'Anglais nous outrage dans toutes les mers, un feul aéte d'hoftilité que nous agions commis fur eux, ou fur aucun autre peuple, Nous penfions même fi peu a leur nuire, que nos navires couvraient les mers fans aucune efcorte, que nos établiffemens lointains étaient fans défenfe. Aufii leur premier manifefte fut de fondre a 1'improvifte fur nos vaiffeaux & nos colonies défarmées." Les Anglais ont allégué plufieurs raifons pour avoir fait cette guerre ; fi la négociation de Mr. Berckel leur eüt manqué, ils auraient allégué les munitions navales portées a 1'Ennemi; fi ce prétexte leur eüt manqué, ils auraient allégué St, Euftache; c'était ^ ' ua  C itt ) un port libre & ouvert; ils auraient fourenu que ce port ne devait refter Hbre & ouvert que pour eux : s'ils euffent gagné ce point. ils auraient aftTiré que nous devions faire caufe commune avec eux contre la France & l'Arr.érique. Ah! ah! voiiè donc !e non plus ultra; le point de la querelle, le grand objet qui a coüté tant de fueurs, de veilles, de flatteries, de menaces, au Chevalier York. Puisqu'ii nous fallait une guerre; refte a examiner s'il eüt mieux valu la faire a la France, qui nous rticnageait qu'a 1'Angleterre, qui nous diclait impérieuièment la loi: dans ce cas, il fallait calculer fi nous euffions couru des rifques plus grands de la part de la France ou de la part de 1'Angleterre." „ Q.unevoit, par lemanifefte même des Anglais,que la feule raifon de Ia rupture eft un faux calcul de politique. I!s s'imaginaient, d'ap'ès Stormond ; d'après North, d'après Rodney, que 1'Ifle St. Euftache était 1'a! ment de la rébellion Américaine. L'accesfion a la neutralité-armée, allait affurer la liberté de ce port; pour prévenir ce coup , les Anglais fe haterent de combler la mefure de leurs mauvais procédés en nous déclarant la guerre : voila le feul point de vue oh la poftérité pourra regarder cette oeuvre d'iniquité: quand elle feretracera lep'lhgede cette !fle infortunée. qui loin de hater la réduélion de I'Amérique, a été fuivie de la prife de Gbrnwallis&ci ellefaura fans doute apprécier lapolitiquedu Miniftere Anglais, le génie des Stormonüs, desNorths, des Rodney &s &c. „ II eft vrai qu'alors on n'envifageait pasl'augmentation de la marine comme une affaire de conféquence; on voulait nous accoutumer a regarder !es Anglais, c'eft-a-dire les roaftres fouverains des flrts, comme nos alliés. comme des voifins, dont nous n'avions rien a craindre? fous les aufpices desquels nous pouvion» ftlloner impunément ia iurface de toutes les méts: ainfi toute augmentation dans ia marine était une dépenfe inutile ; deux ou trois frégates pouvaient nous fuftue contre les Puiffances barbaresques: mais 1'effentiel était d'étre fur un pied refperftable fur terV 4 re:  C 312 ) re LaFrarce,toujoursregardée comme notre ennemie naturelle . était un voifin dont il fallait fe défier, foupconer même les bienfaits & les careffes: tout cela formaitun fyftéme en regie, tranfmis par Guillaume lil; nous nepouvions avoir trop de forces pour être toujours en garde contre un tel Ennemi. Sa conduite, toute pacifique qu'elle paraifle , devait toujours être éauivoque " . . N'eft-il eft pas bien finguberquele Minifiere Bntannique noue a Paris des négociations pour une paix générale avec toutes les PuiiTances belligerantes, dans le même tams qu'il intrigue a la Cour de Pétersbourg pour fe ménager une pa;x particuliere avec la Réi ublique? Cette politique eit-elle droite, franche, honnête? La France n'a & ne peut avoir d'autre but que de cimenter 1'indépendance de I'Amérique. Tout fe difpofe en Angleterre pour la confommation de ce grand ouvrage. II fc fait, nonfeulement dans les Affemblées des corps légiflatifs, mais encore dans le fein du Miniftere, des propofitions qui démontrent les bonnes difpofitions oii 1'on e(t a eet égard. Quel motif donc ( porterait le Miniftere Britannique a entreprendre a la fois deux négociations différentes, 1'une pour unepaix particuliere, 1'autre pour une paix générale?" „ II eft vrai qu'on obtient ordinairement de meilleures conditions en fe prêtant aux offres d'une paix féparée ; nous n'avons pas oublié - ce que nous avons a.rgné par cette politique a Munftcr, ce que gagne. rent les Anglais du tems des nég ciations d'Utrecht par une politique femblable. Cette maxime ne faurait étre trop méuitée: il ne faut pas la perdre de vue Mais ces mêmes maximes ne font pas applicables a toutes les circonftances ; ce que nous avons a attendre des Anglais n'eft que la reftitut-ion de cequ'ilsnousont envahi dansles Indes; ilne faut plus penfer a la reftitution ouindemnifation des richeffesmobiles; il n'eft guere apparent que les autres Puiffances permettront que 1'Angleterre augmentedansl'Inde une Puiffance qui ferait trop redoutable par 1'acquifition de nos établiffemens. D'ailleurs, qui ~ nous,  C 313 ) nous empéche de nous lier avec les Ennemis de 1'Angleterre en ftipulant Ja garantie de ces poffeslions envahies ou expofées a 1'être ? " „ Quine voit Ja politique barbare de 1'Anglcterre ? Ames étroites, cceurs traitres, qui ofez encore foutenir qu'elle eft notre allïée naturelle, citez-nous un Traité avantageux de Commerce, que nous ayions fait avec elle depuis le fameux acte de Navigation. Le Commerce n'eft-il pas la bafe de notre profpérité, de notre exiftence? Cependant, combien, depuis cette époque, n'avons-nous pas fait de ces fortes de Traités avec la France, fans parler des autres peuples ? Dans Ja fameufe affaire des Barrières, en 1712 , les Anglais ne fe font-ils pas oppofés a ce qu'on nous cédaqles places des Pays bas Autrichiens les mieux fituées pour le Commerce ? Dans le tems qu'ils fe faifaient affurer a eux feuJs. par les intrigues traitreufes d'une négociation particuliere, les conquêtes de Minorque & de Gibraltar , faites avec les forces combinées de J'Angleterre & des Etats, ils s'oppoferent a ce que ces places nous fuffent cédées ; avouant audacieufement que ce feraient des barrières contre eux & non contre la France. Que j'aime le fage, 1'éloquent Burke déclarant francbement, depuis qu'il eft admis dansle miniftere, qu'il fallait abolir facie de navigation! Cet acle, qui porfe 1'empreinte du defpotifme cc de la tyrannie, en un mot du cceur & de 1'ame de celui qui 1'a inventé, doit être aboli. 11 faut mettre des bornes folides au defpotifme arbitraire , aux démarches hardies , aux entreprifes injuftes , aux difcours hautains, aux déclamations infolentes de ce peuple qui fe croit Ie Hoi des peuples. J] ne faut plus qu'il dife : „ notre pavillon eft un pavillon „ exclufif; nous ne fouffrirons pas qu'aucune Puis. „ fance commercante ofe, fans notre aveu, fe laver „ les mains dans les mers de Tanden & du nou„ veau monde: que fans notre permiffion on tire „ un coup de canon dans aucune des parties.du „ globe." La fuite au N». procbain. V j Suite  C 3T4 ) Suite du CHAPITRE XLII. Sur la Conftitution des Troubles de Geneve. Ce n'eft ni dans le Précis Hijlorique, ni dans Ia BtiaVon ae la Cimjuration de Gtneve, qu'il fautchercher óe° notions v/aies fur 'e1- troubles préfens. La partia lité éOïftfte la .vérité dans 1'un & 1'autre de ces écrits. Les raifonnemens faux, les réticences afféctées doiverjt les rendre également fufpedls aux per fonnes impartialcs La piece fuivante , qui viert de la même main qui nous a fourni celle inféréedans la derniere feuiiie, nous a paru préférable a toutes les autres. Je fuis charmé, Monfieur, que vous foyezfatisfaitde mon détail de la caufe dts troubles occafioniés par les Natifs de Geneve. Vous dtfirez que je vous inlirude de méme de celle des diviüons de la Bourgeoifie: je vais lacher de vous comemer. „ Les Loix fondamentales de notre Républ que en donnent la Souveraineté au Peuple. C'eft fous ce nom génélique qu'eft défigné le Confeil Généra! dans les Edits autérieurs a 1'année 1713; celui de cette année-Ü le défigne fous les noms de Citoyens & Bourgeois. C'eft au ConfeilGénéral qu'appartient lé droit d'approuver ou de r^jerer les nouvelles Loix, les Impóts, les Traités, celui ö'élire ies principaux Magiftrats, de déclarer la Guerre, de conclure la Paix. „ EnL'année 1570, le Petit-Confeil profita de ce que la Pefte régnoit dans Geneve pour tranfporter en Confeil des Deux-Cems le droit d'étahiir des impóts. Pour eet effet, jl convoqua le Confeii-Cétiéral, lui expo'a que 1'Etat étoit chargé de dettes; que les revenus ne fuffifoient pas pour les acquiter; que les AiTeinblées nombreufes étaient dangereufes dans ce temps decontagion; qu'en conféquence il » prioit le Souverain Confeil-Général c'accorder au Confeil des Deux-Cents le pouvoir de procurer des revenus a 1'Etat,- cette Ptopofition fut approuyée k la pluralité dts fuffraees. Le Confeil des Dtux-Cents fit dés-lors ufage dece drcit. II s'en eft fervi du depuis tiès-fréquemment. Les Ci'nvens s'en font fouvent plaints, enir'iuttes, dans les années' 16C4, 1658 & 1704: mais, n'étant pas alors biea« Knis, on méprifa leurs plaintes. Cependant, le Gouvernement, qui avoit été démo. ciati-  C 315 ) cratique jufqu'è 1'année 1570, fe trouva étre Séiênétê, ao commencement de ce Siècle, en une Ariftoeracie r. fferrée en 5 ou 6 Faraiiles, laquelle, comrnericant a devenir dure & pefantc, lira le Peuple de fon indolence. ,, F.n 1707, les Citoyens & Bourgeois porrerent au Pe. tit-Cu.fi.il une tlepvduntation dans laquelle ds demandoient qu'il ne put y avoir, dans ce Confeil, que deux Perfonnes de même nom; que Pere & Fils, ni Oncle & Is'eveu, n'y pufrem ëts; euieml.de. Ils demandoient enCore,qu'au lieu de la méf-ode vicieufe dont les fuffrages fe donnoient en Confeil-Gér.éral 1 qui étoit telk qu'on /avoit publiquement a qui cbacun donnoit fa voix), on püt s'y fervir d» ceile dont les Deux-Cents fefervoient depuis peu, par le moyen de laquelle les fuffrages fe donnent fous le voile du fecrer. Ces demandes furent refufées; & le Petit-Confeil, voulant faire pafler en Confeil-Général un Edit qu'il fentoit bien devoir être refufé, fit avertir en feeet fes Partifants de s'y trouver une heure plutót. On fe lata de paifer aux voix; &, lorfqu'a 9 heures, le gros des Bourgeois y vint, comme de coutume, on lui dit que tout était fait, & 1'Edit approuvé. Ils répondirent qu'ils voulaient donner leurs fuffrages. On leur répliqua qu'il étoit trop tard, qu'ils devoient fe retirer, & le PetitCoufeil fortit du Temple, fuivi de fes Partifants. Les Bourgeois s'obftinerent d'y refter; & le SynJic de la Garde eut 1'imprudence d'ordonner a un Capitaine de la Garnifon d'aller, avec fa Compagnie, bayonnette au fufil, les forcer d'en fprtir. Beaucoup de monde qui étoit autour du Temple virent avancer ces Soldats & coururent, en criant: aux Armes, aux Armes, on égorge les Bourgeois dans St Pierre, Dans un moment, la Ville fut en armes & tout le Corps de la Bourgeoifie vainquenr, II fallut reporter le nouvel Edit en Confeil-Général & il y fut rejeté. Les Articles, demandés par les Bourgeois,y furenc aufii portés cc approuvés: mais, fur la fin de cette même année, le Petit-Confeil, ayant trouvé moyen d'introduire fecrettement dans la Ville des Troupes de Berne, s'en fervit pour répandre 1'effroi parmi le Peuple par des exécutions , ou infamantes, ou meurtrieres. Environ 70 Families furenr flétries, s'il eft poflible de 1'être fans crime. „ En 1714, le Petit-Confeil, de concert avec celui des Deux-Cents, réfolut de renverfer les Fortifications pour les refaire. Cette année la & jufqu'en 1733, il n'y ent aucun nouvel attentat contre la liberté: mais, en 1734,  Cr*) 1734, les Citoyens & Bourgeois réunis réclamerent déci* dément ie droit d'écablir les Impóis ou de les rejetet. Leurs Adverfai-es crierent & 1'injuftice : le Confeil des Deux-Cmts, riifoient-ils, pod'édoit ce droit depuis 150 ans & la prefeription le lui afluroit. On répondit qu'elle n'avoit pas lieu contre les droits d'un Peuple qui, étant toujours mineur, peut toujours y rentrer. Le Petit Confeil voulut faire un Afte de vigueur. II fit empriTonner 3 Citoyens, fous prétexte de difcou's féditieux; & il fe difpofait k les punir féverement. lis voulurent pLider: aucun Avocat ne voulut les fervir. Ils demanderent d'en faire venir du dehors, a. leurs frais: on le leur refoifa. ' Enfin, le jour qu'ils durent être jugés un grand concours de Peuple, Hommes èVFemmes, s'afTeiabla devant la Maifon de Ville. Les efpriis étoient échauffé-i, on parloit librement, & fur-tout les Femnies. Deux Fils de Magillrars en ayant entendu deux ou trois, qui tenoient des difcours que ces jeunes Ecerve'és trouverent infolents , quoiqu'üs ne fuirent qas pairiotiques, s'aviferent de les ehargër de coups de cautie. Celles-ci & toutes les Femmes , a leur exeraple, fe répandirent par la Ville, eu criant aux armes; &, dans un moment, tout fut armé. II failut reftituer le droit d'Impóts au Confeil-Général. II y fut ftaiué que tous ceux qui avoient éié établis, depuis i7i4vferoient confirmés pjur dixans, pour achever les Fortifiéatrohs.: inais qu'après ce temps-la iis 11e pourroient être continués ni, a 1'avenir, aucun autre étab'.i fans le confentement du Confeil Général. „ La paix était faite-; mais les Magiftrats en étaient mécontents & ils cberclierent a la rompre; ils femerent 1'argent psrmi les plus pauvres d'entre le Peuple, pour fe les attacher. Quand ce Parti fe crut aflèz fort, il dit hautement que la Paix de 1735 avait été arrackée par force £=? qu'elle feroif bientót rompue. Enfin, au mois d'Aoüt 1737, les petits canons des remparts furent tranfportés de nuit & les gros furent temponné-'. Cela ne put pas fe faire fans bruit. Ceux qui ï'entendirent fe leverent, a la pointe du jour, & viient emmener le refte des petitespieces. Ils forcerent ces manceuvres a les rameuer fur les remparts. lis virent que la lumiere des gros canons étoit bouchée; ils les cruretit encloués. L'allarme fut bientót dans toute la Ville. L?s deux Partis s'armerent. Celui des Magiftrats étoit aux envirous de 1'Hótel de Ville. Les Bourgeois fe divifeiein en 3 colonnes, pour y parvenir par  C3'7) par s difFérentes rues. Dans deux, il fallut combatrre & les Bourgeois triompherent; la 3me colonne trouva touc le Petit-Confeil feul & a, découvert. On fit prifonniers 2 de fes Membres; &, dès le même jour, il falluc figner une Capitulation par laquelle tous les Potles & les Arfenaux furent remis a la Bourgeoifie. La Garnifon, ainfi que le Parti contraire, fut défarmée. A fept Membres du Petit - Confeil qu'on dépofa on en fubftitua 7 autres. Les Magiftrats & leurs Partifants déferterent la Ville: ce qui jeta les Bourgeois dans 1'embarras, ne facbant commenc terminer leurs difienfions; car les Loix ordonnent qu'avanc d'étre portées en Confeil Général toutes Jes Affaires foient portées en Pt tit Ó£ en Grand-Confeil. ,, Ce fut dans ces circonftances que Mr. le Réfident de France offrit a la Bourgeoifie la Médiation du Roi fon Maïtre, corjointement avec celle des Cantons de Zuricfi & de B^rne. Leurs Députés compilerent le Reglement de 1738 , qui fut approuvé en Confeil-Général, fans avoir été préalabLment imprimé, felon 1'ufaxe, paree que Mr. Conre de Lautrec, Ambafïadeur de France, étoit preffé de partir & voulait voir le fuccès de fon travail avant fon' départ; il fallut, par complaifance, fe comenter d'en entendre chez lui la leéture. ., II n'y a point, dans Geneve, de Loix pé'ales, les Sentences y font prefque toutos è la difcréiion des Magi. flrats. Les Bourgeois firent inférer, dans ce Réglemenr, un Article portsnt qu'il ferait fait le plutót pofïïble un Co ■ de de Loix: mais, depuis 44 ans, il n'a pas éié pofiiüc? de 1'obteidr. La demande de ce Code, jointe a. quelques plaintes contre des emprifonnements illégals, quelques Ju. gements contraires aux Ordonnances Eccléfiaftiques, occafionnerent les troubles qui ont pris nailfance en 1763 ; & ces troubles mirent en évidence les contiadiciious que reuferme le Béglement de 1738- ,, Un Article confirme aux Bourgeois le droit de faire telles Repréfomations qu'ils croironc ctmfo-mes au bien de 1'Etat; & un amre parofr rendre ce droit cbirnér que, en donnant au Petit-Confeil le droit üe les déf'pprouver. „ Un sutre Article répete une ancienne Loi qui dit: les Syndici jut ont élus par le Peuple , 17?.'/' aura le droit l e refit/er le tout ou la partie de ceux qui J'eront mis en élée> tion, & il /era pourvu d nbüv'itlè ïli'ctton , pour le nom' bre refufe, en forte que nul r.e foit élu qu'il' nej'oita^rêa. ble au Peuple. Mais 1'Article fuivam dit que les Synuicg de.  C 318 ) drvrint être pris dans le Confeil des Vingt-Cinq. C'était la marcbe qu'on avait toujours fuiyie. En 1766, les Re. 1 éi'entants, voyant que leurs Repréfentations étaient inutiles, réfolurent de s'en venger, en rejetant tous ceux qui lêar futent préfentés pour Syndics. Alors, le Petit-Confeil prétendit qu'on étoit obligé de prendrè les Syndics dans fon, Corps, agréables eu non. Les Repréfentants oppoferent l'Atticle précédent, & les Magiftrats invoquerent les PuiiTances garames du Réglement de 1738 , comme fi les Repréfentants 1'emTent violé. II revint a, Geneve des Dépurés ae la part des 3 Puiilances Médiatrices; 11s ne trouveient poini de violation, & fentirent bien qu'ils n'étoient pas en droit d'expliquer les contradictlons du Réglement d- 1738. Ils compiletent un autre Projet qui fut rejeté en Confeil Général, le 15 Décembre 1766, a la pluralité de 1095 contre 505. Alors ces Députés partirent , en diftni qu'ils alloient ufer de leurs droits de Garants pour prononcer défiuitivement fur les Articles en litige. „ Quelque temps après, parut ce Prononcé dans lequel les contradiélions furent toutes expliquées en faveur du Petit-Confeil. Les Repréfentants foutiurent que le Confeü Général étaix feul en droit d'expliquer les Loix; & le Petit-Confeil fut obligé de porter en Deux-Cents, puis en Confeil Général, 1'Edit du n Mars 1768, psr kquel, en échange du droit illimité de refufer d'élire, le Petit Confeil accorde au Confeil Général le pouvoir de dépofer 4 de fes Membres par année. Cela fe nomme rééleclion. „ Un Atticle de eet Edit potte qu'il fera inceflammenc nommé une Commiflion pour travailler au Code: mais, en 1777, les Repréfentants, voyant qu'on n'y travailloit point, demanderent & obtinrent un Confeil Général, 011 il iutftatué qu'une partie de ce Code devroit être faite pour le mois de Septembre 1779 & le tout avant 5 ans: mais, lorfque le temps, oü Ia première partie du Code devoit être faite, fut arrivé, il n'y avoit encore rien de fait; &, quand les Repréfentants s'en plaignirent, le Confeil des Deux-Cents prit Ie parti de dilfoudre, de fa propre autorité, la Commiflion qui avoit été nommée pour y tra. vailler, & de déclarer par-lè qu'il ne voulait point de Code. „ Les Repréfentants avaient été noircis, dans 1'Etran. ger. par leurs Adverfaires. Déja, eu 1767, on les dépeignait comme étant compofés, pour la plupart, de Mal- beu.  ( 3*9 ) heureux perdus de dettes, & qui ne demandaient qu'tltï prétexte de prendre les arrnes pour püler les Maifons des Négatifs, qu'on fuppofait tous riches: quoique ce Parti, qui n'a jamais furpaffé le nombre de 180 Bourgeois, fans y comprendre le Petit & le Grand Confeil, foit compofé de riches, d'aifés & de pauvres. comme celui des Repréfentants. La prife d'armes de 1'année paffee & de celle-ci a affez démenti ces calomnies qui, ayant cppendant pris faveur a la Cour de France, en attirerent une Lettre 'menacante, laquelle forca les Repréfentants a. tempo ifer: mais, voyant que leurs Adverfaires cberchoient è s'attacher les Narifs, ce qui aurait été pour eux d'une dangereufe conféquence, ils prirent Ie parti dont j'ai parlé dans ma Lettre précedente. „ Le Roi de France déclara, 1'année derniere, qu'il re. noncait a fa qualité de Médiateur & a 1'Acte de Garantie du Réglement de 1738. Les Seigneurs de Berne & de Zurich en firent autant. II eft étunnant, après cela. que ces Puiffances, coajointement avec la Sardaigne, envoient des Troupes pour rétablir dans Ie Petit Confeil de G«neve des Bourgeois que d'autres Bourgeois y remplacent au gré du Confeil-Général , c'elt-a-dire du Peuple affemblé en Corps , de 1'unique Souverain de 1'Etat. On aurait cru qu'il eut été indifférent a 1'Europe entiere par qui la petite Répubiique de Geneve feroit ou ne ferait pas gouvernée: mais ce Siècle, en nous prouvant le contraire, attaché a notre exifte^ce politique un poids que les Siecles précé. dents ne lui croyoient pas." Déclaration que les C'toyens fj? Bourgeois Repréfentants ont remife le 31 du mois de Mai aux Supérieurs, Sja. ' dies & d Mr. le Procureur - Général, Magnifiques & tr'es-honore's Seigneurs. „ Dans Ia Lettre que nous eïimes 1'honneur d'adrelTer aux Magnifiques , Puijjans & trés - Honorés Seigneurs , les Seigneurs Bourguemaltrts, Petit & Grand Confeils de la Ville & Répubiique de Zurich , & aux Magnifiques, Pui fans & ttès-Honorés Seigneurs, les Seigneurs Advoyers, Peiit c?* Grand-Confeils de la Fille & République de B.rne, que ces Anciens Alliés de notre Répubiique n'ont pas voulu recevoir, & dont nous remlmes  C 320 ) Ie même jout une Copie a Vos Seigneuries; nous exprJm mes les fentimens qu'a fait naftre en nous la fituation de la Répubiique; nous ditnes, que les murs de notre Patrie feront pour nos Adverfaires un afyle inviolable, aujft long* tems que 1'Etat n'aura rien a craindre; que nous attendons d'eux l'abandon de leurs deffeins funefles; que nous fte dematidons que la Paix, une Paix qui affure la Liberté , la Profpérité & l'Indépendance de la Répubiique; & que fi cette Paix peut leur être honorable comme d nous, elle ne nous en paraitra que plus heureufe, Nous vous en prenons a Témoins, Magnifiques Seigneurs; il n'eft aucune de nes démarches qui n'ait attefté que ce vee li a toujours été dans nos Cceurs ; il n'en eft aucune qui n'ait prouvé combien il eüt é é facile de prévenir les douleureufes circonllances qui affligent notre Patrie, fi les Négatifs avaient fenti comme nous, que les changemens qu'ils voulaient opérer dans la Conttitmion, ne pouvaient être vraiment utiles, vraiment honorables pour la Répubiique, vraiment folides, qu'autant qu'ils feraient 1'efret d'un arrangement libre entre tous les Ordres du Gouvernement. C'eft a regret, Magni* ftques Seigmurs , que nous nous voyons forcés de revenir fur le pafte, dans un moment oü il importerait fi fort de ne s'occuper que du préfent; mais, en voyant s'accréJiter fopinion qu'il eft impoflible de ramener la Paix dans la Ré« publique , par les voies de la perfuafion, pouvons-nou» taire que jamais ces fages voies ne furent tentées, & qu'elle» n'entrerent jamais dans le Syftême de nos Adverfaires? Pouvons-nous taire que, dans les Diflenfions qifils ont fait naitre, ils n'eurent jamais pour vrai but les objets fur lesquels elles femblaient porter, mais le renverfement de 1'Edit de 1768; que ce but, longtems caché par desProteftations réhérées & folemnelles d'attachement & eet Edit, fe manifefta enfin par une attaque ouverte contre fa Légalité? Pouvons-nous taire, que ne fe fiattant pas de nous le faire abandonner fans équivalent par la perfuafion, nos Adverfaires ont fans celfe dirigé leur Politique fut les moyens de nous y forcer tót ou tard par la crainte ? Pouvons-nous taire, que c'eft dans eet unique but qu'ils ont acheminé ces facheux incidens qui font aujourd'hui les feuls motifs fur lefquels on fe fonde pour établir, par la contrainte, les changemens que les Négatifs mé litaient depuis longtems dans la Conftitution de la Répubiique." La fuite au K*. procbain.  L E POLITIQUE N°. LXXIII. LUNDI, ce i JUILLET, Ï782. Suite du CHAPITRE XL. Sur la médiation de la Ruffie pour une paix particuliere entre 1'Angleterre & les Pays-basUnis, Le philofophe philantrope n'avait pas coutume de fe jeter dans la déclamation; voyant que le ton emphatique qu'il avait pris contre les Anglais , m'étonnait beaucoup ; ce ne font point de vaines déclamations, dit il, c'eft 1'interêt de la patrie, 1'interêt de 1'humanité qui m'anime, & me guide. La multitude & la continuité des outages Britanniques, doivent nous perfuader qu'il faut y mettre des bornes foliJes. Qu'importe aux Anglais, fi les marchandifes du Nord ou du Midi, leur font portées par des Vaiffeaux Danois, Francais, Efpagnols , &c. ou par des Hollandais. Peut-ótre i'Acfte de Navigation pouvait donner un ellor prodigieux k la navigation Anglaife, dans un tems oh plufieurs nations n'avaient aucune marine pour exporter leurs produclions. Mais actuellement que toutes les nations fe piquent de navjguer & de commercer , k quoi fert facie de navigation, finon a nous faire Tomj* III- X sn»  Cs") envïfager fans celfe les Anglais comme nos Ennemis naturels? Je 1'interrompis alors pour lui montrer une lettre oh 1'on prelfait encore en faveur d'une paix particuliere fur les raifons que je lui avais propofées. Nous ne devons pas, difait-on, laiffer échapper 1'occaflon de faire une paix qui foit honorable & füre. Honorablel dit - il. Eh! quel honneur de faire Ia paix , fans avoir tiré la moirdre vengeance des outrages cruels que nous avons efluyés, au moins fans avoir recouvré les richeffes qu'on nous a ravis parle plus révoltant des brigandages ? Süre! Quelle fureté nous donneraient les Anglais d'obfei ver ce Traité mieux qu'ils n'ont obfervé les autres ? D'ailleurs, ne ferions nous pas a leur égard & a l'égard de la France dans la même pofition? Les mêni' s circonftauces fubfi(leront pour les rivalités des deuxPuisfances belligérantes, éntrelefquelles nous nous trouvons preffés. iVl ais, dit-on, une paix féparée avec 1'Angleterre nous ferait plus avantageufe; paree que les Anglais font intcreffés a nout avoir pour amis, tandis qu'ils.ont les Francais contre eux. Ainfi nous obtiendrions de mcilleures conditions par une paix particuliere que par une paix générale. D'ailleurs, nos voifins fentent le befoin de notre commerce; & leurs divifions font pour nous une fource inépuifable de richeffes. je crois, répondit Ie philofophe, qu'il importe a tous les Etats que la paix regne chez nous avec la liberté de commerce. Mais cette maxime n'a pas' arrété les Anglais. La derniere déclaration de-la France móntrc auffi qu'elle ne verrait pis dc bon ceil , que nous fiffions une paix particuliere avec 1'Angleterre. Que deviendraient dors les conquêtes de nos établiffemens qu'ils ont repris fur ies Anglais? Comme Ia derniere déclaration des Etats de Hollande vienc a 1'appui de cette aii'ertion, il n'eil pas inutile de la rapporter ici. Ex-  C 323 3 ExtraitV« Regt lires des Réfolutions de leurs Nobles & Grandes Puiffances les ttats de Hollande & de Weftfrife. Mercredi 12 Juin 1782. „ // a été trouvé bon £? arréti, que les Affaires feront dirigées d la Ginérattti de la part de cette Province de maniere qu'il foit fait aux infinuations & ' eommunications des Miniftres de Ruffie la Réponfe fuivante." Que depuis 1'origine des liaifons réfultantes de l'Aflbc'ation Maritime, L. H. P., n'ont ceffé de donner a S. M. Imp. des preuves de ia confiance qu'eïles metterk en fes bonnes intentions & de leur emprefferaent a condure fous fa Médiation- une Paix heureufe & folide 2vec 1'Angleterre; que L. H. P, continuent d'attacher le plus grand prix aux aifpofitions favorables de S. M. Imp., en efpérant qu'Elle adhérera fermement aux principes éiablis par la Neutraliré-Armée,fans pcrmettre qu'il y foit porté aucun changement ou attemte par une pacific.tion entre la Répubiique k S. M. Britannique; que dans cette oerfuafion, & animés de leur cóté du c'éfir de voir terminer fous la Médiation de S. M. Imp. par une Paix honorable & avantageufe la Guerre dans fsqueife la Répubiique a été enveloppée malgré elle par l'aggrefTïon de la Cour de Londres, L. H. P. ont pris en confidération la Lettre du Sr.. Fox, Sécrétaire d'Etat de S. M. Britannique,, datée du 29" Mars 178a, qui leur a été communiqués par le Mémoire des Miniftres de S. M. Imp le Prince'de Galüizic & de MarcofF, de même que la Lettre explicatie du lbfd.it Sécrétaire_ d'Etat en date du 4 Maf; qu'F.Ües ont vu avec fatisfadion par la contenu de cette derniere, que S, M. Eritannique admet pour bafe d'une Paix particuliere avec eet Etst, Ia liberté de ia Navigation-étabtie par les principes de la Déclaration émanée fous les Sufpices d» S. M. Imp. le 28 Février 1780, moyennant quoi, le point qui avait é;é exigé comme ptéliminaire par la Réfolution du j. Mars, femble avoir été accordé; que L,- H. P. reconi-aisl fent avec les fentimens de la plus vive gratitude, qu'une pareille difpofition de la part de la Cour de Londres doic étre envifagée comme une fuite des efTorts non interrom. pus, que S. M. Imp. a daigné employer en faveur de eet X 2 Etai,  ( 324 ) Etat, & fur-tout, comme un effet des bons offices qu'Ella a fait valoir avec tant de zele, d'après le difpofuif de la Réfolution du 4 Mars. Que 1'objet principal qui devroit fervir de fondement aux Négociations de Paix étant ainü éclairci, L. H. P. fi elles ne confultaient que leur Intérêt particulier, n'héfiteraient point de concerter inceffamment les mefures néceflaires, qui pourraient amener 1'ouverture formelle des Conférences fous la Médiation de S. M. Imp. Que, quelque difpofées qu'Elies foient a perfévérer dans leurs Réfolutions précédentes, L. H. P. ne fauraient difïimuler cependant a S. M. Imp.; que la conduite conflante de la Cour de Londres, fur-tout fous 1'Adminiftration de Tanden Miniftere, les a mifes dans 1'obligation de veiller de plus en plus a leur propre fureté, & en fuivant les fa. ges Confeils que S. M. Imp. Elle-même leur a données dans le courant de 1'année paffé, de fbnger a des moyens de défenfe efficaces. Que, pour eet effet, elles ont négocié avec la Cour de France un Plan d'opérations réciproque, contre 1'Ennemi commun, lequel étant une fois adopté, elles fe voient hors d'état d'agréer pendant Ia Campagne ac tuelle, ni un Armiftice, ni la conclufion d'une Paix particuliere fans la concurrence de S. M. Très-Chrétienne. Que cette Alliance fi néceffaire, la confidération queleura poffefïions conquifes par 1'Ennemi aux Indes-Occidentales ont été reconquifes par les Armées de la France, & enfin, les fortes apparences du prompt retour de la tranquillité génétale paraiflent è L. H. P. autant de circonftances qui rendent une pacification générale tant en Europe qu'au dehors infiniment préférable a une Paix feparée, & pour leur Intérêt particulier & pour 1'Intérêt général. Qu'Elies croient donc devoir repréfenter a S. M. Imp. fi, en adoptant un tel principe, Ia Répubiique ne pourrait avancer le rétablisfement de la Paix entre toutes les Puiffances Belligérantes, & concourir au Plan glorieux que S. M. Imp. s'eft propofée de concert avec 1'Empereur: Que dans la fituation aftuelle des Affaires, Elles ne doutent point que S. M. Imp. ne compte de fuivre ce grand but de préférence, en faifant parvenir pour cette fin des propofitions réiiérées aux autres Puiffances actuellement en Guerre, & en défignant le lieu du Congrès, L. H. P. étant prêtes a nommer fans délai des Plénipotentiaires pour afliller de leur part aux Con. férences. Que la préfente Réfolution avec le Mémoire des Miniftres de Ruffie & la Lettre du Sr. Fox, dont il était  C 325 ) était aecompagné, ainfi que la Lettre explicative de ceSécrétaire d'Etat, feront Envoyées au Sr. de WafTenaar-Starrenbourg, avec ordre de faire en conféquence les Repréfentations néceflaires a la Cour de St. Pétersbourg; que les mêmes Copies feront adrelfées au Sr. de Berkenrode, en lui injoignanc de faire Communication de Ia préfente Réfolution a la Cour oü il réfide, & d'aflurer S. M. Très-Cbrétienne, que Leurs Hautes PuiiTances ayant formellement déclaré qu'Elies font fermement intentionnées de fuivre avec tout le zele & la fidélité poflïble le Concert d'Opératlons adopté contre 1'Ennemi commun pendant la Campagne prochaine, Elles ne s'en laiflèront détourner par aucune propofitiou quelconque; mais, d'un autre cóté, Elles fe perfuadent auffi, qu'au retour de la Paix générale Sa Majefté Très-Chrétienne ne perdra point de vue 1'Intérét de la Répubiique, qu'Elle continuera de Ie prendre a cceur, comme Elle a daigné le faire pendant tout le cours de la Guerre, & qu'elle ne fera point de difficulté de donner a eet égard des alTurances propres è les tranquillifer. Qu'enfin Copie des pieces fufdites fera remife a Mr. le Duc de la Vauguyon avec réquifition de feconder ef. ficacement par fes bons Offices les inftances & repréfentations que le Sr, de Berkenrode eft chargé de faire parvenir a la Cour de Verfailles. Après avoir lu cette piece importante^ au refte. dit le philofophe , fi les armemens qui fe préparent dans nos ports ne font jamais en état de nous faire refpeéler de 1'Angleterre, indépendammentdes fecours d'aucune autre Puiflance, ce que les Chefs du Gouvernement doivent favoir, je ne vois pas qu'on puiffe refufer une paix particuliere. Mais il faut penfer que nos Adminiftrateurs n'auraient pas pris la réfolution de rejeter 1'offre d'une paix particuliere, s'ils ne favaient que la Répubiique pourra bientót faire parafcre des forces refpec tables. Danscecas,cependant, il parait qu'un concert momentané d'opérations avec la France ne fiiffit pas a fa fureté; elle devrait, ce femble, entrer en des liaifons plus étroites avec la Cour de Verfailles & demander qu'elle fe rende garante de nos établifieX 3 mensj  C 326 5 mens, & n'accede a aucune paix, que nous ne re. couvrions routes les pofiéfiïons que nous pourrions avoir perdues par fa guerre. La France ne faurait nous refufer une demande auffi légitime. C'eft la moindre récompenfe qu'elle peut nous accorder pour le refus d'une paix particuliere qu'on n usoffre k des 'conditions vraiment éblouifi'antes. Qui ne voit en effet que 1'objet du Miniftere Anglais eft de fe débaraffer de tous fes autres Ennemis, pour avoir les mains libres contre la France? Q.ii connaft, qui étudielanation Anglaife, ne doutera pas qu'elle conferve aux Francais un resfentiment profond, implacable. L'ardeur avec laquelle elle épie fes flottes, expofe même les fiennes, pour enlever fes convois, les cherche, quand elle fe fent des forces tant foit peu fupérieures, 1'acharnement des combattans de tous les rangs dans 1'acftion , font des preuves frappantes de 1'efprit de vengeance qui anime cette nation. Les Anglais ont cherché a fe réconcilier avecdes Etats; i!s font jouer mille refforts pour faire également la paix avec les Américains; les négociations pour une pacification générale, qu'üs ont ouvertes a Paris, dans un tems oh ils travaillent ailleurs pour fe réconcilier en detail avec leurs autres Ennemis, montrent qu'ils n'ont en vue que d'endormir le Cabinet de France, s'il eft en leur pouvoir;bien perfuadés que,dans 1'occafion, les prétextes de rupturc ne manqueront pas, lorfqu'il s'agira de porter a Ia marine de la Maifon de Bourbon des coups qui. la faifant rentrer pour toujours dans le néant, rendent a 1'Angleterre fon ancienne prépondérance fur les mers. Le Miniftere Francais eft trop éclairé pour n'avoir pas vu ce projet effrayant; ce n'eft pas fans raifon qu'il aura porté fes vues fur les conquêtes faites fur nous par les Anglais , afin de nous tenir enchainés. D'après ces réfiexions, d'après la derniere déclaration rendue par la Cour de France, de quel front peut-on avancer qu'elle verrait de bon ceil une pax particuliere entre 1'Angleterre & les Etats? Et comment  C 3*7 ) ment pouvons-nous conferver 1'efpoir d'une paix particuliere contre 1'aveu de la France ? Non. généreüx defcendans des vainque irs 'de Phiiippe , cette paix particuliere n'eft plus dans 1'ordre de la politique, de la fageffe. Elle ne ferait, ni fftre, ni honorable, ni'avantageufe. Prencz i>ne réf'lution digne de vous; digne de vos ancêtres. Puisque vous êtesengagés trop avant pour reculer, puisque vos intéréts fe trouvent abfolument compliqués avec ceux des autres ennemis de 1'Aniletene; cherchez a vous tirer avec honneur de ce pas gliffant. Déployez tous vos efforts; portez-les fur eet élément' qui a toujours été la Jburce de votre gloire, de votre profpérité, de votre exiftence. iViontrez de 1'ardcur, del'harmonie, de 1'énergie Souvenez-vous que de ce moment parait dépcridre votre fort futur. Que craignez - vous ? Les arrremens préparés pour la guerre r.e feront p ^ perdus en tems de paix. La marine guerriere que Vous aurez reffufcitée & que vous faiirez entretenir , fera refpefter en tous tems votre m:irine marchande. Efientiellement 'amis & partifans de la paix, vous ferez, 1'ayant acquife, plus en état que jamais . de vous garantir des guerres qui pourraient furvenir entre des voifins turbulens, & même de profiter de leurs diviiions. En un mot, ce n'eft pns par les négocations fourdes d'une paix particuliere, mais par 1'appareil impo'fant d'armemens refpeclables, que vous pourrez vous procurer une paix folide & glorieufe, appuyée fur la bafe d'une pacification générale. Ainfi vous affurerez votre bonheur, avec celui de 1'humanité, dont il eft inféparable. II eft vrai que les divifions' de nos voifins proenrent quelquefois des avantagesa quelquesnégocians; mais cette guerre, ainfi que celle de 1'année 1755 nGUS a trop infiruits que nous payons ces avantages plus cherqu'ilsnevalent;que 1'honneur précieux de 1'Etat eft ordinairement compromis dans ces qucrelles, & fon intérêt toujours facrifié a celui de quelques particuliers dont la multirude & 1'amertuine des plaintes ont prouvé , d'ailleurs, combien la guerre X 4 de  C 328 ) de nos voifins porte préjudice è leur commerce. II fauc ayouer a cette occafion que les Anglomanes font des raifonnemens finguliers. Dans les tems oli notre navigation maltraitée par les Anglais, réclamait la proteftion des convois pour les munitions navales, ils foutenaient que le profit de cette branche dc commerce ne valait pas les frais d'une défenfe , furtout en nous expofant aux risques d'une rupture avec 1'Angleterre. Et maintenant qu'il s'agit d'une paix particuliere avec 1'Angleterre, ils repréfentent cette méme branche comme d'une importance affez grande pour nous engager a renouer avec 1'Angleterre, aux risques de rompre avec la France. Auparavant, cette branche de commerce devait être abandonnée aux Puiffances du Nord. Adtuellement nous ne faurions prendre trop de précautions, pour qu'eïles ne s'habituent pas è la fournir au Midi, fans notre concurrence. Au moins, avant de raifonner, ces Meffieurs devraient s'accorder avec eux ■ mêmes. Mais comment ne pas fe contredire, avec une auffi rnauvaife caufe a défendre. Au moins, ne devraientils pas chercher par leurs réflexions infidieufes ou décourageantes a ralentir 1'ardeur de la nation, dans un tems qu'elle a befoin de tout fon courage & d'une plus grande activité. Citoyens de tous les partis, perfuadez-vous une bonne fois que, pour avoir une bonne paix, il n'y a pas de meilleurs Négociateurs a choiiir que les Héros du Doggers-Banc. Auparavant, cependant, il convient d'examiner fi la paix générale eft fi difficile qu'on fe 1'imagine. Préfentons d'abord les plans que des faifeurs de projets •nt donnés fur eet objet. Plan d'une paeification générale par le Doyen Tucker. I. Que tous les pays & places qui ont été pris du. rant Ia guerre, feront réciproquement rendus, &, autant que faire fe pourra, dans le même état oh ils étaient  C 329 ) étaient avant le commencement de la guerïe. Ce reglement doit être général pour toutes les p'arties du globe, a 1'exception des places & pays dont il ferait autrement difpofé dans les articles fuivans II. Tous les pays, villes & provinces fitués entre les rivieres de Penobfcot & de Conneélicut, oir font fitués prefque en entier les Etats de NewHampshire, de Maffachufet, de Rhode-Island & de Connecficut, feront cédés en toute Souveraineté aux Républicains de I'Amérique. . III. Les Américains loyaIiit.es feront maftres du diftricl qui confine d'un cóté a la riviere de Conneélicut & de 1'autre a ceile de Hudfon, & on leur laiffera Long.Island, & Staten-Island. IV. Tout le pays depuis la riviere de Hudfon jufqu'a la frontiere feptentrionale de la Caroline du Nord,contenant partie de 1'Etat deNew-Yorck tous les Jerfeis, toute la Penfilvanie, les trois Comtés fur la Delaware, tout le Maryiand . & la Virginie entiere, feront auffi cédés en toute Souveraineté è la Répubiique confédérée de I'Amérique. V. Les Loyaliftes garderont, ou feront mis en pleine & entiere poffeffion de la Caroline Septentrionale, de la Caroline Méridionale & de la Georgië. VI. Comme les Provinces de New-Yorck, les deux Carolines & la Georgië, feraient pour lors des afiles ou places de fureté pour les Loyaliftes réfugiés, que le Gouvernement royal & mixte ferait rétabli dans chacune tel qu'il y était autrefois, il fera ftipulé que ce Gouvernement ne durera que dix ans a dater du jour de la fignature du Traité; & qu'è 1'expiration de ce terme , 1'Aifemblée dè chaque Province aura pleine liberté de choifir telle forme de Gouvernement qu'elle jugera luiconvenir. VII. La Floride Oriëntale fera cédée avec la fortereife de Gibraltar a 1'Efpagne, moyennant que fa Majefté Catholique donnera en échange 1'Ifle de Porro-Rico, place auffi peu utile pour elle, que Gibraltar 1'eft a 1'Angleterre. X 5 VIII,  C 33°0 VIII. L'Me deMinorque fera cédée en entier a la Maifon Impériale de Lorraine, comme un dépót intermédiaire entre le port de Triefte en Dalmatie, & celui d'Oftende en Flandre. Mais toute 1'Ifte, \ avec les ports & fortercflès qui eu dépcndent, feront confidérés comme francs, ou magafins communs, oü 1'on ne paiera aucun impót ni pour 1'importation. ni pour 1'exportation; & oh les vaiffer.ux de toutes lesnations, tant de guerre, que marchands, feront en fureté, & libres.d'entrer & de fortir, de charger & de décharger, de fe caréner & de fe radouber fans vexation quelcónque , en payant feulement les frais néceffaires aux ouvriers &c &c. &c. L'Empereur d'rtilcmngne invitera les, P;;ftances belligérantes a envoyer des Députés ou Miniftres Plénipotentiaires a Bruxelies, ou dans quelque autre vilie des Pays-Bas Autrichierrs pour y traiter des moyens de parvenir a tme paciiication générale. St 1'on peut conclure la paix aux conditions énoncées ci-deffus, ou a quelques autres plus agréables aux Puiffances aétuellement en guerre, — ies Souverains de 1'AHemagne, 1'Impératrice de toures les Buffies, les Roïs de Suede & de Dannemarc s'en rcndront foiemnellerhent garants. Plan de pacification adreffé aux Puijfjances Belligèrati' tes,par un citoyen des Pays-bas Autricbkns. - Les Américains, en prétendant a 1'indépendance , & en fecouant le joug de 1'Angleterre, ont arboré 1'étendard de la guerre; & 1'Angleterre, en refufant de leur accorder !a liberté, en.'anglante encore les mers & prolonge les maux de 1'humanité. II eft un moyen de ramerer le calme, & de fatisfaire toutes les Puiffances armées, de faire jouir I'Amérique de 1'indépendance qu'elle ambkionnc, de fauver 1'honneur de la Graüde-Breragne, de prèferver fon commerce des plaies que pourrait lui caufer cette émancipation, & de biffer jouir la France & i'Espagne des avamatits qu'eïles attendent de leurs liaifons avec les Etats-Unis, Pour  ( 33* ) Pour remplir • tous ces objets, il ,-iuffit d'une opératibn bien fimple, la yoici; Que-les Etats Américains détacbés a jamais du Domaine Britannique, ie forment en Monarchie, a laquelle le Roi d'Angleterre nommera un de ies Freres ou un de fes Fils. Par eet expédient les Américains ne feront plus fous 1'autorité d'une nation qu'ils déteftent: au lieu d'obéir a une foule de Rois fous le nom de Congrès, ils ne reccvront des ordres que d'un feul homme, & Join des divifions continuelles dont.la fermentation agite fans ceffe nos Etats prétendus libres , ils jouiront de la douce tranquilité, partage ordinaire de la Monarchie. Quelle diiférence y a-t'il entre payer les impóts au; Congrès, ou fes verfer dans ies eoffres d'un Roi? La diftérence n'eft que dan< les mots. Les Généraux commandent les armées; ils ne les commanderont pas moins. Membres du Con' grès, vous formez un Sénat; vous deviendrez le Confeil du Prince, & ferez fes Miniftres. L'intérêt perfonnel fera donc le même a l'égard de chaque individu; & la nation, confidérée en corps, ne perdra rien au change. Le Roi de i'Amérique ne fera point un Defpote, il jurera en montant fur le tröne d'obferver des loix fondamentales, qui enchaineront le caprice de fes volontés; & la iiberté du commerce ferait une de ces loix facrées. C'en ferait affez pour affurer les nations alliées fur la crainte qu'eïles pourraient avoir, que le nouveau Monarque ne les exclüt du commerce de fon Royaume. L'Angleterre fait le'plus grand facrifice ; elle le doit aux circonftances: mais fon honneur eft a couvert par ce plan, c'eft beaucoup, Elle ne fe. ra plus la Souveraine de 1'Amérique, mais elle aura la gloire de lui avoir donné un Maïtre de fon fiPg ; & le fceptre ne fortira pas de la Maifon d'Hanovre. George III rappellera 1'idée de ces Rois des fiecles anciens qui partageaient leurs Etats entre leurs Enfans, en réfervant la portion la plus confidérable a 1'afné de leur familie, & ce que la Nature elle-méme avait comme détuché de la Métropole, deviendra 1'héritage du plus jeune Prince  C 33O ce de la Maifon Royale. L'orgueil des Anglais ferak encor flatté par le plaifir d'avoir eux-mêmes procuré 1'indépendance aux Américains, puifque e'eft eux qui lui donneroient un Maitre. Les chaines donc 1'Angleterre embaraiTait le commerce de I'Amérique feront a jamais brifées: le Monopole qu'elle exercait dans ces valles contrées fera anéanti, cela eft encor vrai: mais les Anglais auront dans ces parages pleine & entiere liberté de commerce, & la reconnoiffance & 1'attachement que le nouveau Roi aurait fans doute pour fa patrie, la feront jouir de bien des avantages que d'autres nations n'obtiendront pas fi facilement. D'ailleurs, toute i'Amérique n'eft pas perduepour les Anglais: ils y confervent encor la Jamaïque & plufieurs des Antilles. Dans le Continent même ils ont encore quelques Cantons, comme CharlesTown, New-Yorck, Savannah dont ils peuvent tirer parti. Au fond, cette pacification ne leur óte que des contrées qu'ils n'ont déja plus. Enfin , les Cours de France & d'Efpagneontcomplettcment rempli leur but. Elles vouiaient détacher I'Amérique de 1'Angleterre. Elle en eft indépendante. ils ont conclu des Traités d'AHiance avec les Etats-ünis: eh bien, qu'ils foient les alliés de cette nouvelle Monarchie. Que tous fes ports foient ouverts a leurs vaiffeaux, & qu'ils y partagent des fruits qui ci-devant ne pouvaient'être cueillis que par des mains Bretonnes. Suite du CHAPITRE XLII. Sur les Troubles de Geneve. Tout prend autour de cette cité courageufe un appareil militaire, propre a impofer a des ames moins altieres & morns exaltées. La France, la Savoye &, qui le croirait? les Képubliques même de Berne & de Zurich, font avancer plus de troupes & dé ployent plus de préparatifs qu'il n'en faudrait, pour abimer fous fes ruines une place dix fois plus forte & plus peuplée La conduite du Duc de Savoye ne doit pas étonner. II a d'anciens droits fur cette vil-  C 333 ) ville & même de vieilles injures a vanger. La nobleffe de fes Etats n'a peut-être pas encore oublié la fameufe efcalade de 1602. Mais la France qui s'eft préfentée avec tant de chaleur pour foutenir la Démocratie Américaine, contre des prétentions bien plus éblouiftantes encore que celle des Négatifs Genevois : mais la France qui renongant & fa garantie a l'égard de cette Répubiique, femblait l*avoir abandonnée a elle même.... Héla;! Maudit intérêt, funefte convenance, vous êtes donc les feules regies de la conduite des Etats. Mais les Républicains de Zurich & de Berne, quel exemple offrentils a 1'univers, en s'armant contre la liberté de leurs freres, de leurs amis! Que diraient ieurs ancêtres , que diraient les vainqueurs de Morat , s'ils voyaient les étendards Helvétiques dépioyés pour détruire la courageufe Geneve, paree qu'elle ne veut pas fe foumettre au Gouvernement que des Étrangers veulent lui impofer ? notre fiecle voic des crimes plus affreux encore. Manes illtfftres paraiflez ; que vos ombresfanglantes pourfüivent ces enfansdénaturésde Geneve, qui non contents d'abandonner leur patrie dans un temsd'alarme & de danger,cherchent a la fietrir dans toute l'Europe,infultenU fon courage,& invitent par leurs vceux & leurs difcours publics , 1'étranger a la reduire a 1'esclavage ou k 1'enfevelir fous fes ruines. Que cette conduite eft affreufe aux yeux du philofophe ami de la liberté, de 1'humanité. Qui ne vo.t dans les dispofitions aétuelles des Genevois, ce reffentiment, cette fïerté, eet enthojfiafme de liberté qui produifit les défenfes héroïques, mais malheureufes, de Sagonte , de Haarlem , de Barcelone. Un cceur fenfible n'a qu'è jeier les yeux lur les pieces fuivantes, dont nous avons donné le commenccment, pour concevoir les plus vives alarmes^*;. * r „ Quant (*) Le Courier du Das-Rhin croit déja voir les Genevois aux pieds de leurs Médiatcurs,armés de la fou.lre. II fait a cette occafion plufieursréflexions, trés plaifante-y-mifuppofenc un fonds inépuifable de gaité, qu'il comm.nque qu.lque- lois  f 334 ) „ Quant a nous , Trés-Honorés Seigneurs, attachés a cette Conftitution, convaincus, comme 1'dtait ie Magni. fique Petit Confeil en 1776, que rinfiabilité des Loix,. fource funefle des Difenfions , ne pourrait qu'entrainer la perte de la Répubiique, tout ce qu'on pouvait attendre de notre Pairiotiliue , était que nous ne refufcffions pas d'examiner les changemens qui nous feraient propofés; & non-feulement nous n'avons jamais fait de pareils refus, mais encore nous avons fouvent preifé nos Adverfaires de nous ouvrir leurs Coeurs-, de nous indiquer les arrangemens qu'ils voudraient-fubftituer aux Loix qui leur déplaifent, nous avons fouvent invité, conjuré même Ie Magnifique - Confeil de s'en occuper (*). Que les Négatifs renoncent enfin a leur Politique! Les maux qu'elle nous a déjè caufés, ne doivent-ils pas les con vaincre qu'elle finirair par perdre 1'Etat ? Peuvent-ils douter que fon Saiut ne doive être I'effet d'une réunion fincere & libre entre tous les Ordres qui le compofent? Peuvent-ils douter que ce fera:t-Ia le feul moyen de rendre a Geneve fa profpérité & fon luftre? Et pourquoi , avant que d'avoir cherché de bonne foi, par des voies amiables , les arran, gemens néceflaires a_un but patriotique, s'obftineraient. ils a faire envifager cette tentative comme ne pouvant avoir aucun fuccès? „ Qu'ils ne nous oppofent point qn'ils ne font pas libres, & que, dans eet état, ils ne fauraient concourir a aucune conciliation. Nous ne demandons point ag. 20 & fuivantes.  ( 335 ) le de la Répubüuue ; nous déclarons même que nous fommes prêts a rendre a tous nos Advertaite"; une entiere Liberté, du moment-qua nous ferons raifurés ctmtre toute contrainte extéiieure. Tout ce que nous dtfirons j c'eft qu'i's ne chercheat pas a devenir eux-rriémes plus libres que nous , a nous latffer feuls expofés aux oragas qu'ils ont attirés fur Ia .Patrie; car, p;r quslle regie de Juttica pourraient-ils exiger que la Liberté leur fut rendue, tandis que ia nötre refterait en danger? „ Rcuniifoni-nous donc tóus, Magiftrats, Citoyens, Individus de tous les Orires, de tous les Partis., pour met. tre notre Patrie en état de teiminsr par des vofes douces & amiables nos longues & malheureufes Diflènfions. Réuniftons. nous pour repréfenter refpectueufemenc aux Auguftes PuiiTances qui s'occupent de nous, combien tout apv pareil menscant ferait propre è éloigner eet heureux accord de vues & de volontés, fi néce'ïaire au retour de' i'harmonie, & feul capable de détruire pour jamais lout.germa de haine & de défiance. „ Notre bonheur intérieur eft Ie feul defir que ces Puis. fances magnanimes puiiï'ent former a l'égard de ta Répubiique, le feul qui foit digne d'Elles. Sa Profpérité , fruit de la Liberté dont nous avons jouï, fait Heurir tou. tes celles de leurs Poff'ciTïons qui nous avoifinent. Leurs Sujets n'ont avec nous que des relations d'utilité & de hieaveillance réciproques. Elles ne veulent point changer eet heureux état de chofes; pouvons-nous donc ■ craindre qu'Elies u'agréent pas que nous preniuns les moyens les plus fürs pour Ie conferver, pour concilier parmi nous les eibrits, réunir les cceurs, &-honorer ainfi également 1'Etat & (és Citoyens ? Les Negatiis periift-jrabut-üs a ce&feb leur concours au feul moyen d'aiï'urer le bonheur de leur Patrie, & de lui rendre une Paix véritsble? Oui, Magni. fiques Seigneurs, unc Paix véritable! Cavpeut-on fe didimuler que des arrangemens , diclés &. maintenus par la force, ne nous donneraient pas uneP.iix digne de ce nom ? Peut-on fe diffituuler que, s'ils produifaient des jours de calme, ce calme ne ferait jamais que Ie figne de ia Servt» tude, d'une Servitude qui concentreraii la haine dansles coeurs, & qui, brifant tous les ïeflbrts de l'Induftrie & des Talens, chaflerait de nos Murs le Commerce & les Arts, & porterait enfin Ie coup mortel a notre Patrie ? „ Et dans la fuppofition que les Loix qu'on pourrait vouloir nous donuer par la force, ne feraient pas coriuai- rei  C 33<5 ) res aux principes de notre Conftitution, & deftruftives de notre Liberté, peut-on préfumer qu'eïles ne feraient pis agréées par des Citoyens éclairés & fages , fi elles leur étaient préfentées fans aucune contrainte ? Que les Négatifs pefent enfin bien les confidérations que nous n'avons cefï'é de leur préfenter, dans le cours de nos malheureufes querelles ; & nous ne doutons pas qu'ils ne fe harent d'éloigner, par les démarches les plus preffantes auprè? de nos Auguftes Voifins, les dangers qui msnacenr la Répubiique , & de lui rendre ainfi Ie caline & la fécurité. „\Vvec quelle fatisfaction ne nous emprefferons-nous pas alors de rendre la Liberté è ces perfonnes, qui nous ont trop allarmés fur notre fort, pour qu'eïles puiffent fe plaindre que nous le leur faffions partager! Avec quel plaifir ne concourrons-nous pas a des arrangemens qui aillent véritablement au bien de la Répubiique! Telles font, Magnifiques & tres-lionorés Seigneurs, lesfinceresdifpofitions de nos Coeurs. Le bien de la Patrie voulait que nous en filiions une profellion authentique: mais il nous preffe aufii de déclarer unanimement a Vos Seigneuries, qu'après avoir rempli eet Office de Paix envers elle , fi les Négatifs perfiftent a ne compter pour rien ia Nation , dont ils ne forment que la plus petite partie, il ne nous rede plus qu'a nous humilier devant VEtre Suprème, qu'a implorer fon appui, & a faire tout ce qui eft en nous pour repoufier le fort dont nous fommes menacés. II ne nous rede plus qu'è protefter , comme nous le faifons , a la face de VEurope, que nous n'avons k nous reprocher aucune des calamités auxquelles notre Patrie pourra être expofée; que ce font nos Adverfaires qui, malgré leSyftème de prudence & de modération que nous avions conltamment fuivi, ont forcé, par leurs intrigues, ces deux prifes d'armes, dont ils fe fervent pour nous peindre comme des Oppreffeurs; que notre Etat n'ayant Jamais cefTé d'étre Libre, Indépendant & Souverain, Ie Droit des Nations doit nous mettre a i'abri de toute contrainte de Ia part de noi Auguftes Voifins; que plus ces Puiffances veulent Ie bien de la Répubiique, & plus Eiles doivent confidérer fa foibleflê; que fi, rrompées par d'infideles expofésj Elles paraiffent en ce moment ne penfer qu'a leur Force, nous ne nous en confions pas moins en leur Juftice; que nous ne cefferons de la réclamer qu'è notre dèraier foupir; & que fi la Providence veut que nous périfiions, ce fera en Hommes libres & en Citoyens vertueux." La Juite au N'., procbain.  L E POLITIQUE MOJUÜtJlWJD^ilN* N°.LXXIV.LUNDI, ce 8 JUILLET, 1782. CHAPITRE XLV. Sur une pacification générale pour fervir de commentaire aux projets injérés dans le A». dernier. Mr. Jofias Tucker, Doyen de Glocefler, n'eft pas un Ecrivain d'une Clafle ordinaire. S'é'evant au-deflus des fonclions obfcures de 1'Etat Eccléfiaftique, il a voulu fervir 1'Etat par fes écrits. On die '.néme que, s'il fe füt conforme davantage au fyftéme de 1'aneien Miniftere, il aurait pu s'ouvrir la route a 1'Epifeopat. Ses idéés fur 1'abfurdité des jaloufies nationales en fait de commerce & fur la néceftité d'abandonner les Américains è eux-mêmes, font d'un efprit iufte & pénétrant. II fut Ie premier è disfuader le Miniftere de rctenir le Canada, lors des négociations pour la paix de Paris en 176:. II avait très-mauvaife opinion du caraftere des Américains. II prévoyait dès lors, qu'aifranchis de la crainte des Francais dans levoifinage du Canada, ils ne tourneraient plus avec la même confiance & la même fubordination, leurs regards vers la Mere-Patrie, Politique vraie, que les Anglais fe repentent, aétueliement, mais trop tard , de n'avoir pas fuivie. Tome III, Y Ce  C 338 ) Ce n'eft pas que le Doyen Tucker, emporté par un atnour ardent pour Ia liberté, & pour 1'humanité en général , regarde ks Américains comme le modele d'un peuple courageux & 1'efpérance du genre humain. II parait au .contraire s'être imbu de préjugés violens contre eux. II les dépeint comme des efprits ingrats, atrabilaires, turbulens, parjures, qui fe déchireront eux mêmes , après avoir déchiré les entrailles d'une mere dont ils ont toujours méconnu Ia tendreffe. Auffi confeillait-il au Miniftere de les abandonner, comme des enfans indociles & pervers, qui coüteraient, a retenir dans le devoir, unedépenfe qui cxcéderait beaucoup les fervice.* qu'on pour» rait en efpérer. On croit même qu'il entrait dans cette idéé un peu de reffentiment perfonnel. II avait, jadis, propofé un plan fingulier pour délivrer les Américains des incurfions des fauvages. II avait imaginé de tirer parti des vaftes & épaiffes forêts qui ceignent 1'enceinte immenfe de 1'intérieur de 1'Amérique-Septentrionale. On aurait jeté par terre ces arbres, auffi vieux que le monde. On les aurait amon • celés k une hauteur convenable, dans route 1'étendue des Colonies Anglaifes. A de certaines diftances on aurait pofé des fentinelles,qui auraienc donné 1'alarme au premier danger d'une attaque. Le Doyen i'imaginant que ce plan n'olfrait pas plus de difficulté dans f exécution que fur le papier , 1'envifageait avec une complaifance finguliere. Malherüeeuiement le Docleur Benjamin Franklin qui connaiffak un peu mieux le terrein que le Docteur jofias Tucker qui n'eft jamais forti de fon Ifie, s'avifa de troubler la fatisfaction intérieure qu'éprouvent tous les créateurs de projets. II fe contenta de lui faire quelques queftions; fuppofons entr'autres, difait'-il, qu'il yait en Amérique, le jour & la nuit, comme en Europe: fi les fauvages s'avifent de profiter des ténebres, pour efcaiader les barrières d'avbres que vous voulez oppofer a leurs irruptions; comment les fentinelles feront-eües en état de donner 1'alarme, fans voir 1'Ennemi? Oa die que ces queftionsafiiigerent. • ( ff  C 339 ) fi fort 1'amour propre du T'oéïéur, qu'il n'a, jamais» depuis ce cems la. pardenné fincerement aux Amé« rieains II les a regardés comme indignes de la pro» teüion & de la faveur de la Grande-Bretagne; &, pour les punir, il n'a pas i'T and ce pays infortuné était fins la protefiion de V'Angleterre, proteElion hélas que nous n'obt'endronsja. mais plus, nos gouvernemens étaient avffi libres que Us nature de fbomme & notre fituation par ticuliere pouvaient l'admettre. Nous ne parions ces faveurs que par des entraves, qni n'étaient qu'idéalcs; puifque nous f avions toujours k< éluder & cette mere indulgentefermait toujours ies yeux fur nos infraëtions Cette maniere d'envifager les chofes, montre fuffifamment le fyftéme de 1'Auteur. O 1'indulgcnte more, qui, non "contente de ces entraves du commer» ce exclufif, veut encore impofer des tributs arbitraires! O 1'indulgente mere qui porte la tendreffe jufqu'a envoyer des troupes contre fesenfans, b'oquer 1 urs ports, les dévouer a la profcription, brüler leurs villes & leurs habitations, enfin leur plonger le poignard dans le fein , pour les forcer a payer ces tributs! ^wfïi le dernier ouvage du Dr. Tucker eft bien au-deffous de la réputation de 1'Auteur par la fingulariré des idéés, la faufllté des points de vue & 1'abfurdité des raifonnemens Son plan furtout de pacification générale en porte des Y 2 preu-  C 340 ) preuves frappantes. L'idée de ne céder qu'une partie de fept è huit Colonies a la Répubiique Américaine , eft unique. La diviüon qu'il fait du territoire prouve l'eiprit géométrique. ün arpenteur juré n'aurait pas mieux tiré fes alignemens & fes divifions. Relte a favoir fi les Républicains de I'Amérique voudront céder aux Loyaliftes , la Caroline- Septentrionale , la Caroline Méridionale & la Georgië. Le trifte fuccès de la marche de Cornwallis paraft cependant montrer deux chofes , 1. qu'il ne ferait pas facile d'arracher ces trois Etats aux Américains-Indépendans; 2. qu'on trouvcraitdifficilement un affez grand nombre de Loyaliftes pour peup'.er ces trois Pays. D'ailleurs 1'Auteur ne demande ces pays poür les Loyaliftes, que par un fentiment de pitié. II parait craindre qu'a la déclaration de 1'Indépendance, ils ne deviennent les victimesde la fureur des Républieains: mais pourquoi ces hommes, avides defang,altérés!de vengeance, fuivant le Docfeur, n'affouviraient-ils pas acftuellement leur fureur? pourquoi ne fontils aucune moleftation a ceux qui penfent en '/oryx, k moins qu'ils ne machinent contre le gouvernement établi? Eft il a préfumer que des gens qui traitent avec tant de douceur leurs concitoyens mal-intentionnés, les Anglais même faits prifonniers, dans un tems oh leur reilèntiment eft provoqué par les outrages ies plus fanguinaires, ie porteront contre eux a des attentats violens, quand ils n'auront aucun grief des uns, ni aucune crainte des autres? Mais, puifjue ce gouvernement Loyaliite n'eft établi que pour dix ans, pourquoi ne p3s abandonner généreufement toutes ces prétentions? Pourquoi infpirer ues foupgons & des jaloufies a un peuple dont il conviendrait de gagner la confiance & l'amitié ? Ce n'eft pas tout. Eft-il a préfumer que les Américains fe croient en fureté contre les prétentions & 1'ambition des Anglais, tant que ces derniers polféderont un pouce de terre dans leur voifinage? Q\u ne voit qu'il ferait méme de la plus mauvaife politique a i . 1'An-  C 341 ) 1'Angleterre, de conferver le Canada. Elle deviendrait par la 1'ennemie naturelle des Républicains de I'Amérique, les attacherait irrévocablement è 1'Alliance de la France, vers laquelle ils tourneraient naturellement leurs regards. II faut donc que toute I'Amérique Septentrionale foit admife dans la Confédération. C'eft 1'intérét de I'Amérique, 1'intérêtde 1'Angleterre, 1'intérét de 1'humanité. Le fyftéme de 1'Auteur fur 1'Isle deMinorque n'eft pas moins fingulier. Quelques Anglais voulaienc auparavant qu'on en fit préfent a 1'Impératrice'de Ruslie. Mais 1'Efpagne verrait-elle de bon ceil 1'aliéna. tion d'un pays fi fort a fa bienféance, fur lequel même les Anglais n'ont que des droits qu'elle peut lui contefter? Elle a reconquis cette Ifle. Sa pofition la met en état de la conferver. C'eft un ancien appanage de la M onarchie Efpagnole, Eft-il a préfumer, q u'étant rentrée par une conquête légitime dans fes anciens droits, il foit facile de 1'engager a y renoncer ? Ce n'eft, cependant pas , qu'un politique ami de 1'humanité, veuille jamais foutenir qu'il convienne que Minorque foit un fleuron inféparable de la couronne d'Efpagne, plutót que d'offrir un porc ouvert & libre a toutes les nations fous la dépendance de l'Empereur,trop éloigné ,pour abufer de fon heureufe pofition. Mais que diraient les autres Puiffances neuti es a qui cette poffeffion conviendrait aulfi bien, & qui regardent déja d'un ceil jaloux les efforts de 1'Empereur pour créer une puiflance navale V Le fecond projet de donnera I'Amérique un Roi de la Maifon de Hanovre , eft bien plus abfurde encore que le plan du Docleur Tucker. Cette revêrie politique n'eft pas une idéé neuve; elle fut propofée dès les commencemens de la guerre; on I'avue depuis renouvelée & préfentée fous diverfes faces dans les Gazettes de Co'ogne & du Bas-Rhin. La prévention finguliere de certains efprits en faveur de la dignité Royale, a donné, relativement a I'Amérique, lieu aux fcenes les plus plaifantes. La Y 3 Fran.  C 342 > France , la Pruffe, la Ruffie, font des Etats puisfans, redoutables; cette idéé infpire naturellement wne haute opinion pour les Monarchies : on perd toujours de vue que les peuples fo ic bien loin d'étre heureux a proportion que lV.mpire eft vafte &c formidable. Les fujets femblent fe faire une jouisfance de la grandeur de 1'Etat auquel ils appartienncnt; ils ma'nquent de pain & font dans 1'enthoufiasme en s'écriant: Notre (Irand Monarque! ,, Mr. Franklin recut, il y a quelque tems, une lettre d'un Gentilhomme d'une Province de Fran- ce. Le Gentilhomme cherchait d'abord a 1'inté„ reffer par un tableau trifte & pathétique de fa fi- tuation Le Miniftere, oubliant fes fervices,fes „ talens & ceux de fes ancêtres, le laiftait languir „ dans une indigne obfcurité avec une familie de „ douze enfans, la plupart garcons, tous en état de faire revivre , avec fplendeur , le nom de „ leurs ayeux & de fixer dans ces momens cri,, tiques, ie caprice de la fortune en faveur de la „ France. Tout en lifant les papiers publics, il ,, n'avait pas vu fans étonnement qu'il n'y avait dans „ la nouvelle Confédération Américaine ni Rois ni „ Nobleffe. II déplorait, avec 1'intcrêt le plus tou. ,, chant, le malheur de cette pofition. Il ne croyait ,, pas que I'Amérique put fubfifter longtems dans eet état. Cette obfervation lui avait fait r.aitre „ des idéés. II avait concu le projet de facrifier ,, les douceurs du foi natal au defir de n.ndre fervN ,, vice aux Américains. Pour parvenir a cebut, il ,, s'ofïra'.t de leur fervir de Roi, efpérant que ce „ dévouement héroïque pour leurs intéréts ,neman- querait pas de les déterminer a rendre la dignité „ héréditaire dans fa familie. Tous fes enfans, nour„ ris a la Campagne. étaient jeunes & d'une fanté „ robufte. Ils ne manqueraient pas de laiffer en peu „ de tems a I'Amérique, une pepiniere abondante, „ de la plus pure & de la plus antique Nobleffe. „ L'idée la plus fenfée de ce Chevalier errant, „ amoureux de la Royauté, était qu'il valait tout „ au.  ( 243 ) „ autre pour la remplir; mais Ie meilleur de fes ar' pumens n'était gueres propre a féduire les Arné" ricains, puisqu'it n'était appuyé que fur 1'ancienneté de fon arbre généalogique, dont il offrait " de montrertoutes les preuves & lesdocumens. Le ,1 Gentilhomme finiffak 1'expofition de ces idéos brillantes & le tableau des avantages, que fa préfence procurerait a I'Amérique, en demandant a '-' Mr. Franklin quelque argent pour faire le voyage „ de Paris, afin d'étre plus a portée de lui déve„ lopper les idéés politiques qu'il avait enfantées relativement a la nation qu'il allait gouverner." _ La folie de ce Gentilhomme a fans doute produit celle de tous les autres Faifeurs dc projets, qui veulent donner un Roi aux Américains. Encore cft-elle plus praticable que celle de propofer, pour eet objet, un Prince d'une race que les Américains onc tant de raifon de haïr. de détefter? Comment tout le fang qu'ils ont verfé, toute la gloke qu'ils ont acquife fi cherement, pour brifer un joug oiieux, n'aurait abouti qu'a leur faire changer de joug? Qjie dis-je ? Un joug établi dans leur territoire ne feraitil pas mille fois plus pefant encore, que celui, qui n'existerait qu'a une difiance de mille lieues? Ce peuple, fimple jufqu'a la groffiereté, franc jusqu'a la brusquerie, ennemi de la pompe, & profondément animé contre toute fupériorké perfonnelle, fe foumer» trait, aétucliement qu'il efi fon propre Souverain , a ébranler la folidité des excellentes Conffitutions qu'il vientd'établir,a prendre des leconsde flatterie, a payer les dépenfes d'une Cour ? & ks Rois ne vent pas de peu, dit Rabelais ; quclle abfurdité! Sans doute cette idéé plairak beaucoup au Roi d'Angleterre;il concourrait avec p'aifir a former un établifiement pour quelqu'un de fa familie nonbrcufe, dont i'entretien épouvanre dé}4 la nation Anglaife. II le verrak avec joie devenir Souverain d'un pays dont 1'étendue eft beaucoup plus confidérable que celle de fes trois Royaumes, & qui dans peu les furpafiera en population ,- mais la maniere donc ce 1 Y 4 Mo.  C 344 ) Monarque a abufé de fon pouvoir envers les Américains, eft. elle un titre bien propre a intéreffer ce peuple fier, beliiqueux, jaloux de fes droits .en faveur d'un Prince de la Maifon de Hanovre ? ' O'ailleurs , il s'en faut beaucoup que la trance & 1'Efpagne voient d'un ceil indifferent un Prince Anglais fur le tróue Américain, Ces deux Puiffances ont pour principal objet, dans cette guerre , d'affaiblir 1c corps politique de 1'Angleterre: ce but ne fera jamais rempli, qu'il n'y ait une fciifion complette entre la Grande-Bretagne & I'Amérique. L'union de deux Princes du même fang, jointe a la conformite du langage, des mceurs & du caracftere des deux nations, oftrirait toujours une alliance fprmidable, plus effrayante même, que fi les deux pays reftaient foumis au même Souverain. :: jDuilieurs, ii ne parait pas que les Anglais, plus mtéreffés qu'aucun autre peuple dans les plans relatifs aux Américains, aient penfée è leur donner un Roi particulier du fang de Hanovre. Ce projet. eft une producfion dc quelques imbéciiles du Continent; les infulaircs de la Grande-Bretagne ont encore trop de bon fens pour en avoir nourri fespoir on concu 1'idée. Ainfi paffons a d'autres matiercs, en attendant que les négociations entamées poaf une paix générale prennent une confiftance plus folide pour attirer notre attention. CHAPIT.RE XLVI. Leitre a:c Politique Hollandais fur le caraSlere fingulier d'un Anglomane tfc. Monsieur, J'ai dans mon voifina^e un homme dont le caractere & les opinions ne font pas indignes de figurer dans votre feuille. il eft courtier de profeflion. A le voir vous croiriez qu'il eft furchargé d'affaires. Jamais on n'a vu d'homme plus matinal; il eft tou. jours levé & fouvent hors de la maifon, deux ou trois heures avant aucun de fes voifins, On croirait, % l . >, u . ■ 4'  C 345 ) i la maniere donc il fronce les fourcils & è 1'impatience qu'il fait paraïtre dans toutes fes démarches, que tout le fardeau du gouvernement repofe fur fes épaules. II eft de la Religion dominante ; il fe ferait brüler pour le Synode de Dort. II nourriffait auparavant unehaine profonde contre la Maifon d'Aucriche, paree qu'elle s'eft toujours diftingaée par fon zéle pour le Catholicisme. Mais depuis que 1'Empereur a ouvert fes Etats a la Religion Proteftante, il eft devenu le défenfeur ardent de ce Monarque; il ne doute pas qu'il ne foit Proteftant dans le cceur; car il ne croit pas qu'un bon Catholique puiffe être tolérant. Quoiqu'il tfnt auparavant avec toute la tiercé d'un hoilandais de Guillaume III, au fyftéme des barrières, & que le voifinagede 1'enfer lui parüc préférable a celui des Francais; il n'ofe dire un mot contre le fils de Marie-1 herefe. S'il fallait choifir entre 1'alternative de devenir Turc ou Frangnis; il ne balancerait pas a fe faire circoncire. Aufii eft-il devenu d'une férocité fombre, d'un abord farouche . d'une humeur intolérable, depuis que les circonftances acftuelles nous ont éloignés de 1'Angleterre & rapprochés de la France. Avant la rupture , il parlait des événemens politiques d'un ton fi myftérieux, qu'on eut dit que lui feul avait le fecret des Cabinets; il afiurait furtout que le brigandage exercé fur nos navires marchand.! par les Anglais, leurs violations du pavillon & du territoire de 1'Etat, avaient des caufes fecretes qui devaient produire le plus grand bien pour cette nation; il y voyait furtout l'humiliation de ces Citoyens audacieux qui favorifaient par leur commerce les intéréts de la' France. Quand la rupture éclata, il ne crut pas qu'elle put avoir des conféquences durables; aufii, depuis qu'il voit toutes fes idéés renverfées, notre Stathouder lui-même, déclarer, malgré fes liaifons de fang avec la maifon de Hanovre , que 1'Anglais nous fait la guerre la plus inique; il ne manque pas de dire que tout eft perdu , Etat & Religion ; puisque nous avons perdu celui de nos alY j liés  C 346 ) liés qm' nous était ie plus utile & le plus néceffaire. J'ai voulu m'informcr quelles affaires importantes J'cngageaient è abandonner de fi bonne heure tous les rnatins, aux vifites de quelques jeunes voifins, une femme affezjolie ; onmerépondit qu'il fortaitpourattendte,a la première ii vrai fon, les Gazettes & autres papiers qui parailfcnt fur ies affaires du tems. II lit, ou plutót il devore tout; le pour & le contre. Mais il n'elt pas de nom odieux qu'il ne donne aux Gazettes Hollandaifes de Water Gr~fsmeer, de Zuidholland, au poft. van den Neder-Rbyn au Politique 1 ,oU iatulais & a tous ceux qui fuivent les principes de ces Ecrivains; quoiqu'ils foient plus ou moins modérés, & qu'ils re foient pas toujours d'accord fur tous les points. Rien furtout ne 1'inquiéte plus que 1'arrivée tardive des paquebots Anglais; auffi !e voit-on, fans ceffe,dans ces momens critiques, 1'ceil inquiet & hagard, obfer ver le vent, &, dès qu'il parait tantfo't peu favorable , courir a 1'extrémité de la ville pour voir arriver le poffillon ; il s'embaraffe fort peu, fi fa femme eft courtiféepar des gaians, & fi fes enfans ont du pain; i! eft beaucoup plus inquiet fur ce qui fe paffe en Amérique ,que de ce qui fe fait dan* fa propre familie; les intéréts de George III le touchent'bien autrement que ceux de fes parensiesp'us proches. On connait les revers des Anglais é la paleur de fon vifage; il ce faut qu'un vent d'! ft pour le coucher dans le lit, II re manque jamais dc fe trouver un des premiers a la Bourfe; mais il y va plutót pour apprendre desnouvelles que pour y entamer des affaires; aufii cette manie fmguliere a t-elie fait une vide affreux dans fa fertune: quoique fes parens lui aient laiffé un fond affez confidérable, il a fait plufieurs trous k la lune; on a cependant rem rqué que fes faillites 'ne font vernies que de fes fpéculations extravagantes fur les fonds Anglais. II y avait déja quelque tems que j'avais perdu de vue eet homme & fes affaires, lorfque me promenant 1'autre jour dans le Plantage , j'emendis quelqu'un der-  C 347 ) derrière moi qui m'appelait; je me retourne; & je vois mon voifin 1'Angiomane Courtier. Son accoütrement n'annonqait pas 1'opulence; quelques pieces recoufues ca & la formaient un trifte contrafte avec 1'équipage brillant oh je 1'avais vu au decès de fon pere. j'allais lui faire des queftions fur les circonftances malheureufes oh la fortune 1'avait réduit; il me prévint en me demandant avec myftere, ft les dernieres lettresapportaient quelque circonftance ultérieure fur laquelle on püt faire foi par rapport a la vicfoire navale remportée le douze Avril par le Lord Rodney? Je lui dis que je n'en avais appris aucune, & lui demandai s'il avait trouvé quelque moyen pour fatisfaire le boulanger qui venait tous les jours a fa portefolliciterlepayement d'unevieilledette? Non, dit-illaconiquement. Mais quélle eft,ajouta-t il, dans le fond , votre opinion fur les fuites de ce combat? Ne voyez-vous pas que les Anglais vont cha^er les Francais de toutes les Antilies, qu'après avoir rumé leur puiflance dans cette partie du monde, ils fe verjont en état de retomber avec de nouvelles forces fur les Rebelles de i'Amérique & de les faire rentrer dans le devoir ? Ce Fox ne valait pas grand' chofe, avant qu'il füt élevé au .Miniftere ; mais,puisqu'il a fu précipiter fes prédéceifeurs du tróne pour s'y placer lui-mème; il faura bien jouer le tour a la France & a 1'Efpagne: ainfi nous ne pouvions mieux faire que d'accepter la paix particuliere qu'il nous offrait. Mais je ne 1'anprouve pas dans fon entêtement a rappeler le Vainqueur du Comte de Graffe. Croyezvous, dit-il, que la éparation du Zélé ait été la vraie caufe du combat ? Rodney eft un marin qui avait fi bien fait fes combinaifons, que la Fiotte Francaife n'aurait jamais pu lui échapper. J'allais interrompre cette converfttion , pour recommander a eet homme de moins s'occuper des affaires des Antilles, & un peu plus» des fiennes pro-. pres; mais il ne m'en donna pas le tems. Que penfez-vous, dit-il , de la Neutralité armée? Iltcontinua en faifant un éloge pompeus de la Sémiramis du  C 348) duNord, de fes vertus, de fes talens politiques» de les tendres foins pour fes peuples, de fon zele pour notre pavs, C'était la, difait-il, 1'oiacie auquel nous devions mettre toute notre confiance. Je fuis feulement en peine , comment concilier certain morceau que j'ai lu dans un papier public: la Gazetsede Cologne, dit-il, enmemontrant Je papier & l'endiou ,dit, que probablement l'lmperatrue de RuJJit u'a^it pas feule dans l'offre de fa médiation pour une paix part.culiere ; ceci n'eft-il nas myliericux ? Mais la Gazette d'Utrecht nous laifie encore plus dans 1'ignorance. II fe fait, dit elle fous main, ae ia part d'un certain Prince, des infinuations dom te tems ne tardera pas d faire éclore lef eer et Les Gazettes d'Amfterdam & de la Haye ne s'ava'ncenc pasauumi fur eet article: mais ce Prince qu'eïles fe gardent fi bien de nommer, qui croyez vous que ce pourrait être? 11 approche alors fa bouche de men oreille & me dit en grand fecret, qu'il voulait perdre mille ducais fi ce Prince n'était pas 1'Emrjereur ? ^ j'admirais 1'audace de ce parieur de mille Ducats qui n'avait pas le fol; nous prolongions la promenade en portant nos pas vers 1'Amirauté , lorsque nous rencontrames trois a quatre vieillards dont les manieres, les gestes & le ton étaient trop exprefiifs pour qu'on pü. fe méprendre fur leur caraftere. C'étaient des Politiques. Par 1'accueil qu'il firent a mon compagnon de promenule, je connus d'abord qu'ils étaient de f n opinion Le plus ancien d'entr'eux n'était pas le plus refervécn fait de paradoxes, II nrms dit,affeftant ie ton plaintif deladouleur,qu'il s'élevait ai'Occident tnetempête affreufe qui devait abfmer levailfeau de laRépublique & 1'enfevelir fou<= les flots. Quant è lui dit-il, il ne défiraitpas de voir les Anglais chaffés de I'Amérique: rien ne pouvait être plus préjudiciable a nos manufacfures; il ajouta que 1'Indépendance Américaine porterait lecoup mor-  C 349 ) mortel k la branche économïque. je ne pouvais comprendre comment I'Amérique, affranchie du joug Anglais, ayant befoin des produétions Européennes , pouvant les tirer de tel marché qui lui plaira; les recevant en plus grande quantité de nos vaiffeaux qui naviguent plus & a pius bas frét que ceux des autres nations, pouvait réduire nos manufadtures a un état inférieur a celui oh elies étaient avant cette époque; mais il me furprit bien plus en nous apprenant que cette grande révolution était due aunecaufeque perfonne n'avait encore foupconnée. II nous paria d'un marchand de fromages d'amfierdam & d'une fille de joie de la Haye; & nous aifura que I'Amérique n'aurait jamais pris les armes contre la Mere-Patrie, fi le Stadhouder avait eu foin de livrer ces deux perfonnes pieds & poings liés a 1'Angleterre. Le discours tomba finalement fur un fujet qui échappe rarement a nos Réformésde la Vieüte-rocbe. lis fe demanderenr fi la Religion dominante n'était pas en danger, vu que 1'Angleterre était attaquée par deux Rois Papifi.es ; que la licence des pamphlets publics allait jusqu'a aflurer qu'on pouvait être Catholique-Romain & bon Ho'landais; qu'ua d'entr'eux avait ofé iniinuer que les Etats devraient les afibcier aux autres Citoyens dans la p escription des prieres pub'iques,& que le t'iAiüqne Hoilahdais avait levé le masqué en traitant de loix tyranniques lesédits,ou 1'on fe borne a défendre acesmaudits idolatres de mèler leur fang impur avec celui des Elus de Dieu, ou 1'on gêne leurs déteftables conventicules &c. Un d'eux, prenant la parole, dit qu'il fallait couper le mal par la racine, & propofa fi , au lieu d'attaquer les Anglais nos freres tn Religion , il ne vaudrait pas mieux employernos escadres contre le Pape. II ne doutait pas que la defiruélion de 1'Antechrift ne nous mie en état de détruire tous fes partifans, 11 allait débiter une mul-  C 3J° ) mukitude d'autres obfervations non moins fublimes qu'il nous affura avoir puifées dans V Ouderwetje l\ederlandfcbe Patriot, ainfi que dans les ouvrages immortels des Barf uth & des Hofstede; mais mon ami le Courtier,impatient de montrer fa fagacité politique, ne lui laiffa pas finir fes croifades contre le Papisme. II tomba iur les négociations qui viennent des'ouvrir fur la paix. II goütait furtout Ie projet de placet un Prince Hanovrien fur le tróne de I'Amérique, au cas qu'on ne püt étouffer autrcment I'hidre de la Rébellion, 11 ne craignait rien tant que de voir Ia France & 1'Efpagne fe partager en totalité les deux Amériques Le feul moyen d'arrêter ces deux Puiffances, était d'y maintenir de facon ou d'autre le fceptre Britannique. Quand il eut achevé eet arrangement, dont toute la compagnie parut extrêmement contente, il revint en Europe, dépofa plufieurs Princes qui lui déplaifaient, mit de nouvelles bornes k certains Royaumesdontl'étenduei'effrayait, & placa 1'Europe dans le véritable équilibre, propre & maintenir fon repos, & furtout la fureté du Proteftantisme. Je pris enfin consé de la Compagnie; je partis feul; mais je n'avais pas fait trente pas que mon Courtier ruiné courut après moi. II sfavancait vers mon oreille pour me chuchotter quelque chofe; je crus qu'il m'allait annonter quelque nouvelle fecrete qu'il aurait appris dans le grouppe facré; mais il me demanda une piecè de trente fois. Quoique je diffcraffe avec lui d'opinion , if nfavait caufé plus de pitié que de colere; je gémiffais de voir un homme que la fublimité de fon efprit avait réduit a eet état; je lui propofai cinq Ducats , a condition qu'il me rendrait cent Florins quand le fils du Roi d'Angleterre ferait proclamé Roi de I'Amérique. II n'eft pas a douter, dis-je, que ce Prince, inftruit de vos  C350 vos talens politiques, ne vous donne une place honorable pour vous fïxer auprès de lui, afin d'apprendre de vous le grand art de régner. 11 accepta la propofition ; mais il me fit fentir en même tems que , pour parvenir a. ce but louabie , les Etats-Généraux devraient bien changer de Syftêrne; & qu'alors il ne doutait pius du fuccès. (*) (*) Nous recommandons a 1'Auteur de l'Ouderwet'fcb* Nederlandfche Patriot qui s'eft dontié pour un homme fi riche tz fi iibéral pour la propagation de la bonne caule Aoglicane. de ne pas laifiec écfonpper ceue occafion de donner 1'eflbr a fa bienfaifance, a fa masnauimité. Lui qui loin de tirer aucun profit de fe» intéreflantes product'ons, fait lui feul les fraïs de fa fueiüe hebdoraadaire, en dftite graiis de quoi faire un volume einicr par femaine au nombre de fes Iedeurs qu'ils nous aifure étre prodigieux, un homme pareil, dis je , aura bien en réferve une (omme légere pour foulager la détrefle d'un de fes plus ardens admirateurs. Quand elle ne ferait que de deux a trois mille florins ils viendraient fort a propos au fecours d'un dbciple qui s'eft ruiné en fuivant fes opinions. S'il ignore 1'adrcfle de ce Martyr de 1'Angloniame, il cönnatc fort bien celle du Politique Hollandais; il n'a qu'a les faire paiTer a celui • ci en droiture; il a, fans doute, raifon de douter de la bonne-foi d'un homme qu'il a dépeint comme profcrit de fon pays naial pour fes crimes; mats comme il n'a pas articulé les preuves, étant foramé de le faire, voici 1'occafion unique de constaier le caraétere de ce monftre, en mettant fa ftdëliié a l'épreuve. Quelle occafion favorable pour dévouer eet homme .sangereux a 1'exécration de fes concitoyens! pour parvenir a ce but, il n'a qu'a annoncer fon bienfait dans fa prochaine feuille; il va bien configné d'autres particularités relatives a la ma. gnificence de fa maifon ; aufii ne doutons nous pas de recevoir a la première pafte, cette fomme légere pour un homme de ce rang & peut-ê:re d'avantago; & nous aurotis foin d'en avertir nos lefteurs. Le dénouemenc nous montrera fi i'Oudet wetfebe Patriot écrit, ainfi qu'il 1'a du a  C 3J2 ) Tunivers , en homme riche ,ou, ce qui revient è peu pré» au mèrae, fous 1'influence de quelque perfönnage puifl'anr Cet appel fervira encore a inftruire les curieux fi le Pa', triote dc la vielle roche eft mort tout de bon; vu qu'on ne 1'a pas entendu aboyer depuis plufieurs femaines. Ces Feuilles périodiques paraiflenc régulierement, tous les Lundis d AmUerdam, chez J. A.Crajenfchot; d Haar. lem, chez Walree; d Lelde, chez Luzac & van Damme & LesFreres Murray ; d laHaye , chez 3". van Cleef Detune,van Drecbt & La Feuve Staalman; a Gouda' chez Fan der Klos; d Rotterdam, chez Bennet &Rake & D. Fis; d Dordrecht, chez Blufé; d Deventer, chez Leemhorst; d Groningue, chez Huyzingh; d Nime'ue chez Fan Goor; d Arnhem, chez Troost; d Bois-le Duc' chez^. H. Pallier , dHamhourg, chez J. G. Fircbaux & chez les principaux Libraires des Pays-Bas.  L E POLITIQUE N°. LXXV. LUNDI, ee 15JÜTLLET, 1782. CHAPITRE XLVII. Sur les affaires intérieures de la Confédëration Amé. ricaine. Depuis la prife de Cornwaliis on n'a prefque pas entendu parler des Américains. Ils femblenc croire avoir tout fait & ne penfer qu'a fe rcpofer fur leurs lauriers. Nous avons fuffifamment exaltó leurs vertus , leurs qualités, leurs exblöits. Voyons ce que difent de leur état aétuel, ceux qi i font le plus a la portée d'en juger. La piece fuiv:inte adreffée le 4 Avril de cette année, au peuple de I'Amérique, & imprimée a Philadelphie,fous le titre de Sens commun , jette un jour étonnant fur un peuple dont 1'Indépendancereconnue dans cepays,attire plus que jamais notre attention. L'Auteur eft d'autanc plusdigne de confiance qu'il nefiattegueres, & femble avoir quelque part au gouvernement. II développe auffi quelles font les caufes de cette étonnante inacftion qu'on a vu conftamment fuecéder chez les Américains aux fcenes les plus aétives, aux campagnes les plus brillantes. Si I'Amérique," dit-i! , „ eüt pourfuivi fes „ avantages, avec la moitié de la valeur qu'elle a mon„ trée en fe roidiffant contre les revers; elle aürait, Tome III, Z „ ac-  (354 ) „ adtuellement affuré fa tranquillité par la voie des „ conquêtes; mais s'abandonnant aux charmes d'une „ douce tranquillité, elle j'eft repofée fur un avenir ,. flatteur; & il faut que 1'infortuhe la tire de fon „ affoupiffement, & la force d'agir. „ Tel a été le caractere de I'Amérique dans tou„ tes les pofitions & les circonftances de la querelle „ préfente. (*) Echauffés de 1'amour de la liberté, „ cc provoqués par des outrages , les Américains „ font allés au devant des dangers, fans les craindre, „ & des revers, fans fe décourager; mais a pei„ ne étaient-ils parvenus a leur but, au'ils revo,, laient au fein du repos, & femblaient attendre dc „ nouveaux défaftres pour s'arracher de fes bras. II „ y a dans ce caraétere & cette conduite, une preu,, ve frappante , qu'ils agiffentb, finon d'après la „ fhabile politique, du moins d'après les bons prin- „ ei- . (*) Voila Je peuple que des Ecrivains. auffi pnrtiaux qu'ignorans , après avoir repréfentés corome des hommes fans courage & fans énergie, ont, enfuite, pour effrayer ceux qui feraient tentés d'accourir a leur fecours, peints comme devant former dans peu une nation redoutable par l'efprit da conquêtes, & contre les entreprifes & 1'adtivité de laquelle l'kurope ne pouvait trop fe précautionner. Tel eil le raifonnement qui forme la bafe de je ne fais quelle feuille qui a paru fous le titre de Correfpondar.ee Folitique. Cette maniere de raifonner n'eft pas neuve. C'eft celle de tous les efprits qui , imbus d'un enthoufiafme inconcevable pour 1'Angleterre, ont voulu prévenir 1'Europe contre les Américains. II parait cependant, d'après leur conduite uni. forme dans cette guerre, qu'ils ont plus de courage pour Ia défenfe que d'ardeur pour 1'attsque ; que jaloux, ainfi que tous les peupies cultivateurs, du repos & de la liberté , ils s'endorment fscileinent a I'apparsnce du premier avantage & font tout de feu, quand ie iécond eftménacé. C'etl vouloir s'aveugler, pour abufer les autres, que de foutenir que 1'Indépendance d'une pareille nation dans un pays, qui demande encore des liecles 'pourê're pviiplé,puiffe cauferdes alarmes a un peupleindullrieux, maritime, CSc naviga•teur, tels que les Beiges.  C 355 ) cipes. L'inforturtc eft la pierre de touche qui di„ vife toujours ceux qui fuivent une mauvaife caufe „ & qui rèunit ceux qui ont époufé la bonne. Les pre,, miers font pleins de reffources dans la profpéricé, „ les derniers . dansl'adveriïté. L^saMsagiffenCpaiinf „ ftinct, les autres par combinaifon ;& leur maniere „ d'agir, ainfi que leur , tems de repos ou d'aclion, „ forment exactement 1'oppofé. Mais, comme nous avons pris des infiruftions „ dans 1'infortune, tirons aufii des lecons de nos fau,, tes;avons,une fois pour toutes, rafagcifed'ajouter „ 1'ardeur de 1'adverficé a la force de la vitïoire. „ Combinons la gloire d'une refiftance intrépide „ avec les avantages qui réfukent de la vicloirc; „ fignalons nous, cette année, par la fupériorité du „ fyftéme politique, comme nous avons brillé 1'an„ née précédente par 1'éclat des fuccès mihtaires „ Les progrès & la révolution denos affaires do„ meftiques font auffi extraordinaires que la Révolu,, tion eile-même. Nous avons commencé avec du pa„ pier ö5 nous finiJJo:is avec de l'or 6f de i'argent La for„ ce, la convenance &, fi 1'on veut , l'habicude, „ font acfuellement unies pour la défenfe du , pays. Ainfi qu'un jeune homme parvenu en ', force & en fanté , I'Amérique s'avance en vi- gueur , frafcheur, bien éloignée encore des glacés de 1'hiver. En fouffrant des calamités, el" le a appris ü les fupporter & même a les préve„ pir ; et fexpérience journaliere, déduite de Ia ' bonne ou de la mauvaiiè fortune, des mefures " fiiges ou des fautes, a beaucoup ajouté a notre caufe, & plus encore a notre jugement. ' „ De ce coup d'ceil général, paffons a des circon„ ftances particulieres. „ J'ai déja fixé les dépenfes annuelles de la guejr„ re a huit millions de dollars j'ai développé la (*) Le Dollar fait environ deux florins & demi de Hollande ou cinq livres de France. Z i  ( 35 de  C 3öo ) » de 'a Hberté, font de vains fons, a moins qu'ils i, ne foyenr accompagnés de fecours réels pour la „ foutenir. Ces acclamations ne ferviront ni a rem- plir le vemre du fo'dat, ni a couvrir fes épaules, „ m è payer les créanciers du public, ni a acheter „ les objets de nos befoins. Elles font a leur pla„ ce; ce font, il eft vrai. des effufions de cceur„ mais elles n'ont rien de fubftantiel ,. L'Affemblée de eet Etat, la Penfylvanie, a con„ lenti unammement au bi 11 pour lever la fomme de i, i;0,000 dollars qui font ra quote-part de cette annee; & ce qui eftun exempie admirable, digne „ de fervir de modele; c'eft que 1'Etat de la Sud, Caroline qui a éprouvé tant de détreffe & de fouf- frances, a fait la même chofe. C'eft qu'ils connais„ fent par une trifte expérience, le prix de la dé„ fenfe; ils favent que 1'inconvénient de fournirune taxe pour laprotecfion du pays, n'eft rien en com. „ paraifon des pertes qu'ils ont effuyés & des maux „ qu'ils ont foufferts. Idute onéreufe que puiffe être une taxe, nous „ favons qu'elle ne peut durer qu'un tems. Nos „ üepenfes cefferont avec la guerre ; & les taxes „ avec les dépenfes. Mais tant que la guerre continue „ & que !a fureté de nos biens les plus précieux dépend „ d un revenu folide, la taxe doit étre confidérée ,, comme un objet patriotique. Quand la guerre fej, ra fime, le cas fera tout-a-fait différent; auffi ne , parlerai-je pas le même langage, s'il m'eft enco* re donnéde parler a cette heureufe époque L'A- mérique eft un phénomene particulier dans Ie s, monde politique. Elle s'eft produite, défendant „ unecaufe julte dans les décrets divins; elle a tout „ a coup afpiré au plus grand, au plus précieux des „ biens. Elle s'eft fait dans le monde une haute „ réputation par fon intégrité politique, par fa per„ févérance, par fon courage & par toutes les qualités magnanimes ; avec un prélude auffi „ briljant, eiie ferait inexcufabJe, fi elle fouf. 1 „ frait  ( 361 ) „ frak la moindre tache è fa réputation. Qu'il „ ne foit jamais dit qu'un pays, capable de faire ce ,, que I'Amérique afait, ait privé les veuves&les or„ phelins de leurs propriétés & les Soldats de leur payel „ La taxe eli fans doute accompagnée de quel„ ques inconvéniens; mais que font ces inconvé„ ment comparés a la détreife, a la ruine, a la dé„ vastation de 1'Ennemi ? Combien I'Amérique n'a„ t-elie pas déja éprouvé de chofes bien plus doulou„ reufes encore? elle a même fleuri au milieu des ca„ lamités qu'elle croyaitau-deffus de fes forces. Jere„ garde une taxe affignée pour fa défenfe & fon ,, avantage, comme une des peines les plus lége„ res, comparée a celles qui 1'accableraient fans la ,, taxe.' Nous nous fommes trouvés fur le bord de „ la ruine, par 1'infuffifance des revenus publics; „ & le'cceur des Américains fe ferait fendu de dou„ leur, s'ils avaient connu dans tous les tems IVtat „ réel de leur fituation. C'eft aótuellement le feul objet qui doit nous intéreffer; rempliffons le & „ le rede luivra de lui-même; & la confulation „ qu'éprouve chaque homme en penfant qu'il y a „ dans letréfor public pour faire face a la défenfe du „ pays, compenfera amplement les embarras éi les " peinesqu'il doit fubir pour fatisfaire a fa quote-part. " Nous n'avons dès lors plus la douleur d'entendre ^' les juftes plaintes du foldat fouifrant; nos yeux & nos oreilles ne feront plus affligés du fpeétacle '* ou de 1'hiftoire de la foi chancelante ou du cré|' dit équivoque. Nos affaires publiques, & confé. ' quemment nos affaires particulieres, prendront un \ afpeéf riant & flatteur. L'idée que ce pays eft hors d'état de fupporter ce fardeau, eft un r'eproche a * fon honneur, k fa fermeté. II a fouffert dix fois autant. Son courage & fes principes ont ' été éprouvés dans mille occaüons ou la fortune " était bien, plus dure & ce ferait un problême inex'*9 plicable qu'un peuple inaceffible a la violence , ' a 1'infortune, & aux careffes plus dangereufes enZ 5 3) co-  C 3Ö2 ) S, eore, parvenu au faite du bónheur , préparat „ fa ruine par une avarice aufii fordide que funefte, „ Monti ons-nous donc, a tous égards, teis que „ nous devons être; faifons voir a 1'Ennemi qu'il „ n'eft pas plus en fon pouvoir de nous conquérir „ par fyftéme que par les armes La bourfe de 1'A„ mérique ménagée avec économie, eft plus forte „ que celle de 1'Angleterre, toujours en proie a ia déprédation. Les Américains ne font pas une na,, don pauvre; pourquoi pafleraient-ils pour tels? „ Nous attaquons notre crédit, notre honneur, noM tre réputation dans le monde, en nousdonnant pour „ autres que nous fommes ; nous encourageons „ 1'Fnnemi a prolonger la guerre en lui faifant croi3) re que nous manquons d'argent pour la continuer. „ II eft aifé de voir par les expreffions desGa-ettes „ de New.York, que leseffons courageux que nous venons de faire afin de pourvoir le tréfor public, ont ébranlé les dernieres efpérances de 1'Ënnemi. C'eft „ un coup auquel il ne s'attendait pas de la part de ,, I'Amérique, & fbn défefpoir eft égal a fon éton. j, nement. „ C'eft une chofe remarquable que le peuple a „ toujours été plus loin que fes Repréfentans. Le „ pays n'a jamais reculé dans les payemens, quand „ il a bien fu & compris le röle qu'il devait jouer. „ Ordinairement les affaires relatives aux finances* „ publiques fontfujettes adescombinaifonstellement „ obfcures & compliquées , qu'il n'eft pas facile „ d'en débrouiller le fil. Celles de I'Amérique, a „ 1'occafion de 1'état chancelant de fon ancien pa. „ pier-monnate, heureufement fupprimé, ont été „ enveloppées dans des difficultés nouveiles & „ originales; il faut beaucoup d'adrefte pour les „ mettre en ordre, & de vigoureux efforts dans Ie ,7 pays pour les y maintenir. fi L'état de nos affaires de finances, d'après le ta„ bleau le plus concis, peut être expofé de ia ma. niere fuivante. i, Oü  t". „ On doit une fomme confidérable &ax perfonnes '„ qui ont pré é leur argent au Bureau d'emprunt, ainfi qu'a celles qui ont fait d'autres avances au ■L public. Les dettes doivent être aifuree> & prou11 vées; & 1'argenc qu'on doit retirer du cinq pour „ cent de toutes les marchandifes importeés, doit ', fervir de fonds pour le payement de 1'intérêt & ,', du principal, jufqu'a 1'entiere liquidation du tout. „ C'eft ainfi qu'on a pourvu a la detre que nous „ avons contractée jufqu'a préfent; & lorfque 1 in„ térêt fera tiré régulierement, & qu'on aura pris les „ arrangemens pour payer le principal, les billets feront des effets auffi précieux que des obligatious. ' „ La fomme de huit millions de dollars qu'on doit „ lever dans les Etats-Unis, doit fervir au maintien „ & aux autres dépenfes de 1'armée, ainfi qu'a dé- frayer les charges du Gouvernement dans 1'éten„ duè du Continent, „ Si 1'on compare cette fomme avec les dépenfes „ immenfes qui furchargeut la Grande Bretagne, le ,, coup d'ceil offrira la différence la plus f appante. „ La Grande-Bretagne eft obligée de lever plus de „ quatre vingt-dix millions de dollars chaque année, „ foit en taxes foit,en emprunts; feulement, pour „ faire ce qui ne nous coüce, avec des especes „ & de I'économie, que huit millions. „ Tant eft grand le contrafte entre un pays aban- donné a lafpoliation &a la corruption, & un pays „ dont la conduite eft fondée fur de bons principes & des plans adminiftrés avec fageffe. „ Mais la différence eft bien plus encore k notre „ avantage. Qaand la guerre ceifera chez nous, les taxes qu'elle a occafiortées, cefleront en mê„ me tems. Nous favons ainfi qu'eïles ne peuvent „ durer longtems; mais les taxes de la Grande-Bre„ Bretagne <*) n'étant percues que pour hquider des ,, ïn- C*) Cette obfervation appuyée fur utie vérité qui fitire aux yeux, fuffit pour montrer combien le crédit de I'Amérique "ferait préférable a celui de 1'Angleterre.  intéréts, & non pour payer Ie capitaï de Ia dette „ offre un avenir effrayanc dont on ne peut asfteuer „ le terme. L'expofition publique des fommes recuesde cha„ que état, & dépenfées pour 1'avantage général, j, doit produire d'excellens effets, Elle caufera une „ grande fatisfa&ion, ce qui eft un point impor„ tant dans les affaires d'une nation. Elle excitera „ 1'émulation ; elle dévoilera les manquemens. Plus les affaires publiques fe font avec publicité, plus elles réuffiffent. Quand on n'a pas intention „ de tromper, on ne cramt pas la lumiere du|grand 3, jour; il n'eft pas feulement néceffaire que des „ mefures foient juftes, mais que tout le monde „ fache qu'eïles font telles". „ Encore quelques jours, & nous verrons le ter„ me de fept années de guerre. Notre fituation eft „ fi finguliere, que ce fleau terrible,au lieu de nous „ avoir appauvris & épuifés, a fait couler parmi „ nous les richeffes & Pabondance. (*) Nous avons „ éprouvé un deftin fingulier dans tous nos befoins; „ car toutes ies fois que nous avons craint d'é„ tre ruinés, paree que nous manquions de quel„ que objet néceffaire, il eft toujours furvenu des „ circonftances qui nous ont fauvés. Le dernier „ exemple remarquable eft 1'influence des efpeces „ cou- (*) Cela n'eft pas étonnant; tout peuple qui fe borne a Ia défenfive, s'enrichit nécefLircment aux dépens de celui qui lui porte la guerre; & Ton fent combien les Anglais, a une diftance fi grande de leur patrie, ont befoin dans leurs garnifons de tirer de chofes de rAmérique fur le tranfport desquelles on a eu dès le commenceraent Ia fage politique de fermer les yeux, pour attirer I'argent dont on avait befoin dans le pays. La folde des troupes prifonnieres, celle des troupes Francaifes a Rhode-Island, un commerce avant8geux avec lef établilfemens Espagnols , joints a la quantité deprifes, les marchés & invafions même de Anglais dans le pays, y ont néceflairement fait couler des fommes immenfes.  ,j- courantes; a peu prés k rinftant du discrédit & „ de la décadence totale du papier • monnaie: cette „ circonftance a opéré un changement 11 heureux dans les fortunes particulieres ainfi que dans les effets „ publics, que les chofes ne peuvent plus aller que „ de bien en mieux. Ainfi parle un témoin oculaire, d'autant plus digne de confiance qu'il ne deguife rien. II n'eft pas inutile k cette occafion d'ajouter quelques obfervations qui peuvent jeter un nouveau jour fur le fyftéme des finances en Amérique. Au mois de Mai 1775, lorsque Ie Congrès ouvrit fa première affemblée, après les batailles de Lexington & de Concord, il jugea néceffaire de lever une armée, ou plutót d'cntretenir 1'armée déja levée a Cambridge , afin qu'elle fit face aux troupes Britanniques, & les tint renfermécs dans Bolton, comme dans une prifon. Mais il t^ouva que les Colonies venaient d'achever de payer leurs dettcs contrafftées dans la derniere guerre avec la France. Dans le tréfor des diverfes Colonies, on ne trouva que peu d'argent. Pour furcroii de malheur, le blocus de tous leurs ports & 1'interruption générale du commerce par la fupériorité des Anglais fur mer, leur offraient un avenir effrayant. Les embarras d'un nouveau gouvernement k former, ajoutaient encore a cette perplexité. II avait des armées & des Flottes a créer, de nouvelles conftitution k combiner. II avait a négocier avec vingt tribus d'Indiens. II avait a veiller fur une multitude de Negres. II avait a fb procurer toutes fortes d'armes, de munitions, d'artillerie , de linge , d'habillemens, enfin toutes les chofes néceffaires a 1'entretien d'une armée. II avait des négociations a nouer en Europe, des traités d'alliance & de commerce k prépa; er. Dans cctie fituation critique , au milieu de tant d'embarras & de befoins , fans argent ni revenus, le Congrès n'imagina pas d'autre rellburce qu'un expédient fouvent pratiqué en Amérique. I! créa du papier-monnaie. Le  C 360 ) Le papiér-nionnaie de I'Amérique confifieen biüets de crédit par lesquels le public & Ja fociété promettent de payer dans un tems fixé , une ccrtame fomme a celui qui fe trouver.a nanti de ce papier. Dan« un pays qui manque d'efpeces ou qui n'en a pa,s beaucoup en circulation, on peut multiplier ces bilIets jusqu'a une certaine quantité. Mais dès que Ia quantité excéde ie degré des affaires ordinaires. ces papiers tombent en dücr-ed t; ils continucnt a perdre de leur valeur a meture qu'on en fait parai'tre une plus grande quantité. Cette dépvéciation fut fi rapide & fi grande qu'au mois de Mars 1780, Ie Congrès crut devoir la fixer a 40 pour un, au-deffous de la valeurprimitivc. Depuis ce tems-Ja, on n'en a plus créé; au contraire le miifon & un quart de Livres Sterlings è quoi fe trouvait réduite la fomme de ces billets ou la pr;ncipale dette du Congrès,fe trouvent orcsque ertierement éteint athieilement, par les moyens adoptés par le gouvernement, pour détruire ce papier a mefure qu'il entrait dans ies fonds publics. Le Congrès fe trouve par cette opération , n'avoir gueres' de créancïers qu'en France. en Efpagne & en Hollande; mais, quoique ces dettes contraöées en efpeces ne puiffent être liquidées que par des valeurs réelles, elles ne font pas aflez confidérables pour gëner les Américams; & leur conduite uniforme a i'égard dc ces fortes ci'emprunts, montrent que ces dettes f crées & font a I'abridc toute réduétion arbitraire Les Américains feront toujours er état d'y faire honneur; quand ils devraient reco.urir aux marchandifes de leur cru, dont il fe fait une importation continuelle en Europe. L'Arrérique n'a, a proprement parler, aucun revenu annuel, a 1'exception du cinq pour cent dernierement impofé fur les in portations. Le revenu de la confédëration n'eft formé que des conceil ons faites annuedement par les Etats relpeclifs Ces fubfides font proportionnés aux biens récls & perfo- nels  C 3^7 ) reis des communautés; & 1'argcnt en eft porté dans le tréfor public. C'eft aux corps légiflatifs des divers Etats a lever ces fommes; & 1'on confuke toujours les facukés; ainfi que les befoins, pour en régler les contingens. II eft même étonnant que la ftagnation arrivés dans le commerce , les quatre premières années de la guer-> re, n'ait pas occafionné deplus grands embarras dans la perception de ces taxes. Elles ont augmenté toutes les années; preuve fenfible & convaincante de 1'amélioration arrivée dans les facultés du peuple. Ces facultés augmenteront bien plus encore , fi 1'on confidere les progrès de la population , de la culture, du commerce même, au milieu de la guerre, & les avantages immenfes que la proximké de la paix dok procurer a 1'Amérique. Afin de juger du fardeau d'une dette, il ne faut pas perdre de vue ces avantages, & furtout cox de la population. La Giande-Bretagne doit deux eens miilions de livres Scerlings & n'a pas huit millions de fujets. A plus forte rt.ifon, 1'Amériquequi compte déja plus de trois millions d'habitans, pourraitelle porter une dette de dix millions de livres Ster lings, fomme encore bien éloignée.de fes engagemens adfuels. Encore faut-il confidérer que fi on lui donne vingt ans pour payer cette dette, elle aura alors plus que doublé fa population. Tel eft 1'avantagc des nations haiffantes. Le nombre des Habitans dans les difteentes contrées de 1'Europe, refte a peu prés Ie méme d'un Sièclea Tautre. La aucun pays ne produit plus d'habitans qu'il n'en peut maintenir; mais tout pays libre, oh 1'induftrie n'eft pas gênée , ne manque pas d'en produire autant qu'il en peut maintenir. Oe la, qu'on fe forme une idéé de la population future des Etats de 1'A» mérique. Des déferts immenfés, dont k peine 1'ceil humain a pu mefurer 1'étendue, font ene re en friche ; de valleslacs, de grandes rivieres, dont les eaux font , depuis des fiecles, venues dans le  ( 368 ) le lilence & 1'obfcuricé, fe décharger dans 1'Océan n'atteno-ent que des bras pour devenir le féiour du commerce, pour être bordées de campagnes délicieufts, & de grandes & fuperbes cités. La fuite au N: procbain. Ces Feuilles périodiques paraiflent régulierement, tous les Lundis a Am/lerdam , chez J. A.Crajenfchot; d Haarlem , chez IValree; li heide , chez Luzac & van Damme & Les Freres Murray ; d la Haye , chez j, van Cleef Detune,van Drecbt & La Feuve Staalman ; d Gouda' chez Fan der Klos; d Rotterdam, chez Bennet &'Hake & D. Fis; d Dordrecht, chez Blujfê; d Deventer, chez Leemhorst; d Groningue, chez Huyzingh j d Nimegue chez Fan Goor ; d Arnhem, chez7roost; d Bois-le Duc* Chez J. H. Pallier , dHambourg, chez J. G. Firchaux & chez les principaux Libraires des Pays-Bas.  L E POLITIQUE N°. LXXVI. LUNDI, ce 22 JUILLET,I782. Réfléxions générales fur VIndépendance de l'Amérique pour fervir de Suite au C H A P I T R E XLVII. Quand des Citoyens éclairés commencerent k repréfenter les avantages d'une alliance avec I'Amérique Septentrionale, on s'effbrca de les peindre des traits ies plus odieux; on pouifa la partiaüté pour 1'Angleterre & la fureur contre ces Confeillers patriotes, jufqu'a les accufer de crime de Jeze-majefté; on prétendit que c'était attenter au droit des Adminiftrateurs que de prouver aux ftupides adorateurs du Cabinet de .St. James, que I'Amérique ne pouvant être fubjuguée , il tonvenait de s'al» lier avec elle contre un Ennemi commun, & de s'y préparer des avantages de commerce , pour fe procurer quelque dédommagement des pertes de cette guerre fatale. Lorsque la prife de Cornwallis donna un nouveau poids a ces raifonnemens, les Adverfaires de 1'Alliance Américaine , les An. glomanes Hollandais, aflurerent en propres termes, que la courageufe Angleterre ne fuccomberait pas fous ce coup porté par les perfides Frargais; qu'on ne ia forcerait jamais k reconnaïtre Tindépendance de fes fujets rebelles, & qu'il fallait punir en Hollande tout Tome III, A a hom-  C 370 3 homme aflez audacieux pour parler en faveur d'une alliance avec ces miférabks révoltés. CesEcrivains,aveuglés par leur partiaüté pour les Ennemis de la patrie, ne louvaients'appercevoirqu'iln'yavaitpasde milieu pour les Anglais entre réduire complettement I'Amérique , ou reconnaicre hautement fon Indépendance. II était cependant aifé de prévoir que la réducfion devenant impoffible, ii importait a 1'Angleterre d'abandonner, par une déclaration publique, aux Américains un avantage qu'elle était hors d'état de leur óter; pour recouvrer au moins par cette apparente générofité, les avantages de commerce que 1'identité du fang, de la religion , du langage. desmceurs, &c. femblait lui promettre au-deflus de toutes les autres Nations. Cette néceflité devenait d'autanc plus preflante,que toutes les Pmflances maritime^ portent un ceil avide fur un commerce qui ne peut manquer d'augmenter les progrès de 1'i-nduftric & de la marine dans les pays qui Te font? L'Efpagne, il eft vrai, combattit plus de foixante ans, avtmt de reconnaftreformellement l'Indépend nee des Pays-basUnis, elle aurait bien voulu imiter 1'Autricbe qui n'a reconnu 1'Indépendance de la Confédération Helvétique qu'a la paix de Munfter, plufieurs fiecles après fon établisfement; mais 1'Efpagne fe trouva, vers les époques de la tréve d'Anvers& de la paix de Munfter, a l'égard des Pays-bas-Unis & 1'Angleterre fe trouve acftueüement a l'égard de 1'Amérique-Septentrionale, dans un état oh les motifs de politique, d'intérèt, de néceffité même fe font entendre trop puiffamment pour attendreun pareil délai. L'Efpagne fe vit dans le cas de trembler pour toutes fes pofleffions dans les deux Indes.dont plufieurs tomberent au pouvoir des Paysbas-Unis. L'Angleterre ne voit pas non plus fansalarmes I'Amérique .femblableè un jeune athlete, acquérir des forces dans cette lice guerriere; furtout, elle eft dans le cas deconcevoirdescrainteslégitimes, en prévoyant que les autres Nations pourraient être favorifées a fon préjudice dans ce commerce avantageux;qu'enfin les Américains feprévaudraient de leurs nouvelles for- ces,  (37» ) ces, & dü bonheur de leur pofition , pour alarmerles pofleffiont. Anglaifes des Indes Occidentales qui font a leur bienféance. Voila, fans doute, les raifons qui ont fbrraé dans la Grande-Bretagne un parti qui demande vivement que 1'indépendance Américaine fok reconnue, fans équivaque & fans conditions. Quoi qu'il foit échappé au Comte Sheiburne de dire que la reconnais» fance de: 1'Indépendance Américaine éteindrait le foleil de la Grande-Bretagne, cette figure brillante n'a pas ébloui ceux du narti oppofé. Ils fe rapellent toujours que 1'Angleterre peut exifter& même conferver une grande puiflance fans fes Colonies. Henri VIII, qui n'en poffédak aucune, fa vantait d'avoir dans fes mains Téquilibre de 1'Europe. L'Angleterre n'aura pas perdu les ( oionies pour les avoir cédées a 1'UniverS: Les avantages qu'on doit tirer de leur fcin . fe partagcront néceffairement entre plufieurs Etats ; au moins aucun ne fera affujetti a 1'inconvénient de. les maintenir. L'Angleterre a foutenu fon rang avec fplendeur , a même fait trembler la France. avant de les polféder ; qui 1'empêcherak de jouer le mêmo röle après les avoir perduès? Lanécelfité, oii le parti contraire, oh le Roi même s'eft vu de renoncer a Ia coutume aufii ridicule qu'opiniacre, de traiter les Américains de Rebelles, fait affez prêvoir qu'elle fera 1'iffue de cette querelle. O vous! Anglomanes Hollandais, qui avez'commencé par décrier les Américains ec leurs partifans dans.eepays, qui, voyant enfin les Adminiftrations fuprêmes fe, rendre a la convicfion des raifonnemens & è 1'évidence des fans; en reconnaiifant leur Indépendance avec une éclatante folemnité, ne ceffez encore de blamer cette démarche, comme le fruit d'une faélion turbulente & comme devant prodüire les plus funeftes effets pour ce pays, ailes confuker les deux partis de l'Adminiftration Britannique; apprenez que George III lui-même eft converti & commence a fe familiarifer avec 1'idée de reconAa i nai*  137*) nnftre cette Indépendance. Une déclaration, qui luk de ü prés la démarche des États-Généraux, moncre affez la jufteffe des réflexions de ceux, qui, dans ce pays, en ont preffé la conclufion & la vaine impudence de ceux qui la condamnaient fous prétexte, que c'était diéfcer leurs devoirs aux Souverains & qu'il était de la politique de ménager les Anglais. On ne voulait pas même que les intéréts du Commerce fuffent confultés dans cette affaire importante. Cet intérêt elf cependant le moteur aftuel des efforts de toutes les Puiffances de 1'Univers. Saifir les occafions d'en étendre les branches, paraft le plus grand & presque le feul objet de la politique moderne. L'Efprit de Commerce qui domine presque toutes les Puiffances, eft même devenu plus vif que 1'efprit de Conquêtes. Si 1'on fait la guerre, c'eft moins pour reculer les bornes de 1'Empire, que pour s'enriehir. Les Anglais ne s'acharnent a garder Gibraltar, que par ceque cette place les met a même d'inonder 1'Andaloufiede Tabac de contrebande. LaNeutralité armée n'a eu lieu, que pour entrer en partage de ces immenfes profits que la fortune & 1'habileté avaient concentrés dans 1'Angleterre. Ce qui rend 1'époque oh nous vivons remarquable, c'eft l'acfivité quimeut toutes les Nations. La Suède, loin de regretter les jours de gloire ou elle préfidaitaux deftinéesde 1'Europe pendant la guerre de trente ans, & 1'éclat dangereux que lui imprima l'Alexandre du Nord, cherche dans la profcription du luxe & dans une fage économie, 1'ailance fans laquelle les Etats, comme les particuliers, ne font jamais indépendans. Le Da» nemarc trouve dans fes ports de la mer Baltique les reffources que lui offre fon heureuïe pofition dans la guerre & dans la paix; les foins foutenus donnés a 1'agriculture y préparent les fondements d'une richeffe ioiide, a 1'épreuve des révolutions dont les contre-coups ébranlent même les Etats qui n'en font pas le théêtre. La Ruffie diminue le nombre d'étrangers qui ve- naient  C 373 ) naient 1'inftruirc, & remportaicnt dans leurs pays des richeffes pour prix de leurs connaiflances. Ses vaiffeaux fe voient fréquctnment dans les ports de France & d'Efpagne; & les Anglais ne font plus les médiateurs entre eux & les armateurs de Bourdeaux. Les Germains qui entretiennent plus de foldats que tout le rede de 1'Europe entiere, invitent auA! les hommes a naviguer fous le pavillon de la liberté. Les franchifes ouvrent les ports. La force & lts fecours protegent les Compagnies. D'utiles régie* mens encouragent quiconque eft tenté de faire des eflais. Tous les pays enfin, grands & médiocres, riches ou pauvres, prennent pour bafe de 1'Adminiftration, 1'économie intérieure, élevent des digues contre le torrent du luxe. La Pologne, la Toscane, la Lombardie arrachent leurs habitans a 1'Empire ruineux de la mode, & les délivrent de l'impót que la France met fur fes voifins empreffés & crédules. Ne pourrait-on pas efpérer de cette confédération presque générale , un acheminement a une paix univerfelle? Ceux qui regardent cette idéé comme chymérique fe fondert fur ce que la guerre a exifté, depuis 1'époque la plus éloignée oh remonte 1'efpri't humain jufqu'a nos jours. Cette funefte vérité eft inconteftable. Mais aufii quelle différence dans la maniere de la faire ? On ne voit plus la terre couverte de cent mille cadavres,& lés vainqueurs &les vaincus fair également le champ de la viétoire, oh la pefte femblait vanger 1'humanité des outrages de 1'ambition. ,, Au fac de Strigonie, 300 Da,, mes, toutes dans la fleur de l'age , toutes pa- rées de leurs plus riches atours, crurenr. que le pouvoir de leurs yeux , embelh's par leurs larmes, „ toucheraient ces barbares: on les conduit ve occupe le tróne; I'homme n'obéit qu'a la loi; elle n'a que des organes fideles, puie qu'iiedépendcntabfolumenc du peuple qui les furveille toujours Nous porterons notre patrie en Amérique. Quel fpeétacle de voir les Genevois abandonner unecité que Ia France a réduite a 1'efclavage pour aller peupler un pays' qu'elle a rendu libre!" L'Affaire de Geneve eft enfin achevée, fans aucune effufion de fang. En attendant les arrangemens qui feront pris pour rétablir le calme dans cette Répubiique agitée, le Miniftere Fran9ais vient de faire publier la Relation fuivante. „ Le 8 Avril dernier, la partie la plus nombreufe de Ia Bourgeoifie, fecondée d'un certain nombre de Natifs & d'Habitans de cette Ville, prit les Armes, attaqua la Garde de la Répubiique, s'empara des Portes, des Arfenaux & Magafins, alla enfuite enlever jufques dans Ia Chambre du Confêil, un certain nombre de Magiftrats qu'elle infulta de toute maniere, & qu'elle a retenus Prilönniers dans une Auberge depuis ce jour, en les menacant de les faire périr. Le Roi, Proteéteur de la Répubiique, ayant pris des mefures, de concert avec le Roi de Sardaigne & le Canton de Berne, pour mettre fin a ce défordre, & pacifier la Répubiique, les Troupes des trois Puiffances fe font affemblées autour de Geneve, au nombre d'environ 12,000 Hommes, commandées par le Marquis de Jaucourt, le Comte de Ia Marmora & le Général Baron de Lentulus. La Bourgeoifie de Geneve avait réparé les, Fortifications du cóté de France , & pris toutes les mefures capables de prouver qu'elle voulait fe défendre." „Le 29 du mois dernier, acinq heures du matin, les trois Généraux firent fommer la Ville par une Déclaration uniforme, è laquelle était iointe une Lenre aux Syndics,contenant les Publications qu'ils devaient faire, pour quel'Entrée des Troupes Francaifes, Sardes & Bemoifes, ne eau. ffit aucun défordre. Ils ne donnaient que cinq heures pour répondre. La Ville en demanda 2) , qu'on accorda, en annoncant qu'on n'intetromprait point les préparatifs de 1'Atiaque, Dés le même jour, le Marquis de jaucourt fit ouvrir la tranchée. Le Dimanche, 30, nouvelle demande de  C3«3 ) de délai, que les Généraux accorderen!. Pendant cetems, les Francais avaient drefle leurs Batteries, & les Troupes Bernoifes é aient venues fe placer a la gauche de ceiles de France. Le Comte de la Marmora avait forraé fencdnte avec les Troupes du Roi de Sardaigne, a h gauche du Lac & du Rhóne. Après des délais encore accordés a la priere des Syndics, on allait commencer Tattaque, lorfque ce matin a deux heures, les Généraux ont recu une Lettre des, Syn.iics, qui leur annorcait que les Troupes feraient recues dans la Ville. Le Pont qui traverfe le Foffé du cóté de france ayant éé rouipu, il a été convenu que les Troupes du Roi de Sardaigne occuper.iient fur le champ la Porre-Neiwei un Déiachenunt des Bernois qui avait pa(Té le Lac, celle de Rtve; & qu'auiïitót que le Pont du cóté de France ferait rétabli, le Corps de Troupes Francaifes entrerait dans la Ville; ce qui a eté exécuié. C'eit ainfi que s'eft terminée, fans coup férir, une entreprife qui aurait pu avoir les fuites les plus funefies, paree que les Répréfentans avaient expofé Ia Ville è être bouleverfée en cas d'attaque, en diflribuant des Poudres dans les Maifons de leurs Adverfaires. II eft vrai que dans le deflein de prévenir ce malheur, on avaic pris des mefures pour fe rendre Maïtre de la Ville fans employer ni Bombes ni Canons, & qu'il n'y aurait eu vraifemblablement d'autre mal que celui qui ferait arrivé fur les Remparts." „On ignore encore ce qui a déterminélesRépréfanransa fe rendre , fans tirer parti des moyens de défenfe qu'ils avaient accumulés. II y a appafence qü'ehfin la voix' des Perfonnes modérées de leur Parti a pu fe faire entendre. Uoe trentaine de Répréfentaus ayant ellayé de fe fauver par le Lac , dans un Bftteau, ont été pourfuivis par uue Barque armée a Verfoy, & fe font jetés a la naga. On a feulement trouvé dans ce Bateau un Porte-Feuiüe rempfï de Papiers, apparrenans a un des Chefs. AufTitót que le calme fera rétabli dans la Ville, le Marquis de Jaucourt & le Comte de la Marmora revêtiront ie Caraftere 'de Mfnistres-Piénipotentiares, pour, de concert avec les Srs. Stei. guer & de Watteville, nommés en la même qualité par le Canton de Berne, travaiiler a la Pacificatioti de la Répu. blique." II parait, ainfi, que 1'arrangement fe fera fims qu'on ait recouts a des exécutions fanglantes. Elles feraient d'au- tant  C 384 ) tant plus déplacées, que les deux Partis fe croient également autorifés par la raifon , & qu'il ne faut pas juger des événemens qui furviennent dans une Répubiique populaire , d'après des principes d'une Ariftocratie pure ou d'une Monarchie abfolue, Auffi le Général Lentulus n'a exigé, pour entrer dans la Ville, que les Conditions fuivantes. „ 1. Que les Citoyens & Bourgeois fe tiendront cha. cun dans fa Maifon , fans en fonir que par la permiffion de 1'Officier, qui commandera dans le Quartier. 2. Qu'on retirera la Garde donnée aux Négatifs détenus comme Otages, en les alfurant qu'ils font hors de tout péril pour leur vie. 3. Que les Confeils feront rétablis tels qu'ils étaient au 7 Aviil dernier, avant la prife d'armes, en excluant cependant ceux des Répréfentans, qui en étaient Membres & qui ne le feront plus. 4. Que 21 des derniers Chefs de ce Parti (*) & défignés par leurs noms, fortiront inces. famment de la Ville, munis de Pafleports, s'en éloigne. ront de 20 lieues, & attendront dans la retraite, ce qu'il plaira a la Répubiique de Ifatuer fur leur compte. 5. Enfin qu'aucun Citoyen ou Bourgeois ne pourra s'approcher de 1'HóteI-de-Ville, oü perfonne n'entrera que les Syndics, le Lieutenant & les Auditeurs." (*) Ces Chefs font Mrs. Dentand ; Ringler; Achard; Lamotte; Soref, Auditeur ; Claviere ; Grenut ; Richarcl , Vieufleux ; de Roveray; Achard; Guerre; Chauvet; Klournoy; J. M. Chappui { Vernes, Pa/leur; Bonnet, Cufitaine; Lechet; Lazare; Rigaud; Bouvier; Joannin. Ces Feuilles périodiques paraifient rigulierement, tous les Lundis d Amfierdam , chez 'f. A.Crajenfchot; d Haarlem , chez Walree; d Leide , chez Luzac & van Damme, & Les Freres Murray ; d la Haye , chez J. van Cleef, Detune, van Drecbt & La Veuve Staat man; d Gouda , chez Van der Klos; d Rotterdam, chez Bennet £f Hake, & D. Vis; d Dordrecht, chez Blufè; d Deventer, chez Leemhorst; d Groningue, chez Huyzingh; d Nimegue, chez Van Goor; d Arnhem, chez Troost; d Bois-le Duc, cnezj. H. Pallier , dHambourg, chez J. G. Virchaux & chez les principaux Libraires des Pays-Bas.  L E POLITIQUE N°.LXXVII. LUNDI, ce 29 JUILLET, 1782. C H A P I T R E XLVIII. Sur les Brochures les Feuilles en faveur du parti Anglomane. 11 nous eft fans doute permis d'avertir le public que nous avons attendu vainemenc les trois mille florins, que nous avions demandés a TAuteur de VOuderwetfcbe Nederlandjcbe Patriot; non pour nous ,mnis pour foulager un de fes Admiraieurs prét k périr dans la derniere dëtreffe ; cependant il ne faut pas en conclure que 1'Auteur foit mort tout de bon, comme nous 1'avions craint ; il parait avoir connu notre appel; car, pour montrer fon exiftence, il a fait annoncer une dixaine de fes numeros a la fois, qui feront fans doute auili fublimes , auiii patriotiques que les premiers. Il faut donc concluie que 1'Auteur n'eil pas auffi riche qu'il le prétendait: ainfi tombe 1'argument qu'il avait tiré de fon opulence pour prouver qu'il avait plus d'efprit que ceux contre lesquels il vomiffait des injures Le voila forcé jufque dans fon dernier retranchement. II ne pourra donc plus dire: je luis le plus riche, donc mes argumens font les meilleurs. Mais, dans rra pauvreté méme, j'ai toujours eu le cceur noble & compatiffant; on (ait que je n'ai jamais iovoqué d'autre vengeance contre mes Ennemis qu'en Tome III, Bb de-  C 386 ) demandant au gouvernement, qu'on leur laiffit toute liberté de déraifonner. Auffi ne veux ie pas profiter du difcrédit oh ils font tombés, pour mfulter a leur malheur ; je laiffe la vengeance aux Smes étroites & partiales. Pour donner une preuve mémorable de ma magnanimité envers des Ennemis qui indiquaient la néceffité de me faire pendre ou noyer, comme 1'argument le plus propre a me réduire au filence, je vais leur enfeigner un moyen de fe tirer de 1'oubli ou du mépris outrageant qu'on fait d eux dans toute la Répubiique. Voici 1'efquiffe d'une Requête qu'ils pourraient préfenter; ce n'eft qu'une ébauche ..de ma main rude & groffiere • ie laiffe a leurs plumes élégantes & bien taillées dè la porter a fa derniere perfecfion. A tous les Magiftrats cif Régens prépofis pour Vadmimftration civile & politique des Pays-bas-Unis. Repréfentent très-humblement les fouffignés qu'ils iont hors d'état de fuivre leur carrière, d'écrire des brochures ou des feuilles hebdomadaires, dans tous ILf0™ats dePuis l'M-24 jufqu'a Yin-folio, pour défendre les Anglais que nous devions autrefois asiiiter par crainte , aftuellement par commifération pour les fervices auffi importans qu'innombrables qu ils nous ont rendus dans tous les tems, contre 1'univers entier qui les abandonne ou leur fait la guerre; attendu que depuis le manifefte de Leurs Hautes Puiffances qui les ont déclarés Ennemis de 1'Êtat & furtout depuis la reconnaiffance folemnelle qu'e'lles ont fait de 1'Indépendance de I'Amérique ; notre commerce eft tombé de la maniere la plus déplorable; au point qu'un d'entre nous (YOuderivetfcbe Pamoï) en eft, de fon própre aveu, pour fes frais qui font confidérables & qu'a notre grand détriment^ a notre douleur extréme, on ne demande plus comme aupa. ravant des brochures, & des feuilles fabriquées d'après notre fyftéme; quoique nous ayions porté la licence juiqua traiter les Souverains de Frife de faifeurs de fro-  ( 38? ) fromage, jufqu'è nous faire abandonner par ceux que nous élevions jufqu'aux nués; & quoique même on nous défigne publiquement comme des traïtres& des Ennemis de la patrie; la curiofité n'en eft pas plus grande k rechercher & lire nos producfions. Au moins fi quelqueMagiftratureou que'que Régence eut déféré nos ouvrages a 1'animadverfion publique, nous aurions pu èfpérer que eet éclat nous aurait relevé. Mais vainement avons-nous accumulé les. injures contre la ville d'Amfterdam , employé lesperfonnalités les plus irritantes contre des perfonnes de tous les rangs, on n'a pas même fait attentiona nous; les perfonnes que nous avons attaquées nous ont ainfi que les neutres , unanirnement écrafé j fous le fléau du mépris ou de la raillerie: la nation entiere femble avoir confpiré pour ne lire que les écrits de nos adverfaires; elle méprifertout autre papier public. Comme TAuteur du Reynier Vryaarts Brieven, s'en eft plaint beaucoup avec raifon; il aurait pu ajouter qu'aucun de nous n'ófe fe faire connaftre publiquement , crainte d'étre lapidé, Eft-ce donc la liberté qu'on a dans un pays libre; nous qui penfions avoir le droit de faire pendre ou incarcérer quiconque nepenfait pas comme nous? L'animofité du peuple des leéteurs contre nous va fi loin, qu'un Gazetier étranger, établi fur la fronttere , avec tout fon es» prit & fes faillics, s'eft vu dans le cas de fe plaindre de la diminution de fes foufcripteurs, uniquement pour avoir laiffe entrevoir qu'il s'était rangé fous nos étendards, Repréfentonsde plus, pauvres mal heureux que nous fommes, que nous avons offert humblement k divers libraires d'écrire pour le fyftéme aciueilement dominant, k beaucoup meilleur marché que nous ne faifions pour 1'ancien ; mais que nous n'avons trouvé perfonne qui voulut accepter notre offre; au point que nous ferons bientót obh'gés d'imprimer k nos propres frais, comme \'Ouderwet febe Patriot, fans avoir comme lui 1'efpoir d'un puiffant foutien. Ainfi nous nous voyons a tout moment a la veille > Bb a de  C 338 ) de moürir de faim avec nos femmes & nos enfans; n'ayant jamais fu d'autre métier que de faire des eitationsinfideles ,des dénonciations perfonnelles,d'employer 1'injure au défaut de raifon, d'appeler nos adverfaires méprifables & infames, paree qu'on leur faifait plus d'accueil qu'a nous: nous n'avons pas même d'efpoir du cóté des Anglais ; les pauvres diables peuvent h peine fe foutenir eux-mêmes; comment nous fourniraient-ils des reffources ? Ainfi nous prions toutes vos vénérables Seigneuries de faire enforte ou de nous profcrire pour nous donner de 1'importance, ou de nous procurer des resfoutces certaines,ou d'enjoindre, fous peine d'emprifonnement, a tous &un chacun ; d'acheter & de lire nos écrits. Autrement la génération qui va paraitre, courra grand rifque de perdre la race utile de ceux qui foutenaient ies points fuivans: 1. Que le premier Magiftrat de Ia Répubiique eft infaillible. 2. Que dans une Répubiique comme la nótre; il convient d'avoir de nombreufes armées & point de marine ou , ce qui revient au même , des navires enchainés dans les ports. 3. Qu'il n'y a pas de meilleur moyen pour avoir une paix perpetuelle avec les Anglais que de leur pardonner tous les affronts , de leur abandonner tout ce qu'ils nous demandent & de faire caufe commune avec eux dans toutes les guerres qu'ils encreprendront. &c. &c. &c. &c, &c. &c. (Signés,) Les Auteurs du Politiek Vertoog , Oaderivetfcbe Patriot, Post naar den A'eder-Rhyn, Correfpondance Politiq. Het waure Daglicht,Zeven Dorpenin Brand, Request van 't Sleepers Gild, Pbilew [tberut Batavus, Brieven over de tegenvjoordige^ tydsomjiandigbeden. CHA-  C 389 ) C H A P I T R E XLIX. Sur 1'Etat aftuel des affaires intérieures £? (Xtérieures de la Répubiique Belgique. La Fiotte de 1'Etat eft enfin fortie ; depuis le 6 de ce mois elle eft en pofleflion de 1'empire de la mer du Nord ; fes vaiffeaux deftinés pour les Indesürientales & Occidentales ont profité de cette occafion pour porter a ces pays lointains des nouvelles de leur patrie & les rafraichiffemens qu'ils en attendaient depuis fi longtems. Nous pouvons prendre notre revanche fur nos Ennemis; nous pouvons enfin interrompre leur commerce, alarmer 'eurs có;.es dans la mer du Nord, pendant que les Frangais & lc;- Espagnols les tiendront bloqués dans la Manche, Leurs flottes marchandes ne pourront plus entrer ni fortir, fans courir le danger d'étre enlcvées. L'indolence, 1'immobilité, qu'on reproduit aux Ennen is de 1'Angleterre, vont fe changer en fcenes de vigueuróc d'aélivité. Attendons de grands effets de cette beuïeufe combinaifon entre la France , 1'Efpagne & les Pays bas-Unis. L'occafion eft uniquc. Des forces aufii redoutrbles ne doivent pas abandonner la partie avant d'avoir tiré vengeance des outrages de la GrandeBretagne, en lui portant des coups fenfibles. Mais, pour que la navigation dece pays obtienne ce triomphe.que fes forces, les promefi'es de 1'admiftration fuprême & les diverfions des Ennemis auraient dfi lui afiurer depuis longtems, que de clameurs, de plaintes, n'a-t-on pas entendu pouftèr ? L'mftant dudénouemént parait enfin venu. On verra bientót fi la Répubiique n'aurait pas pu déployer auparavant de la force & de 1'énergic. Plufieurs membres de 1'Adminifiration fédérative demandent hautement k voir tous les documens relaufs k 1'adminiilration des chofes maritimes. Sans doute le rapport fait dernieremenr par les Amirautés ne leur femble pas fuffifant. LaZeeiaude méme, qui paraiflait monBb 3 trer  C 390 ) trer tant de répugnance a concourir .aux opérations générales de la guerre, eft une des premières a demander pourquoi on ne les a pas pouffées avec plus'de viguéur Goes,Middelbourg,Flefiingue, Ziric?ée ont parlé fur eet article avec une vigueur qui a étonné le? autres confédérés. Goes., d'après une Réfolution du 29 Juin, propofait d'abord de fufpendre les prieres publiques ordonnées tous ies mois, jugeant que 1'Etre Suprème n'était pas obligé de faire des miracles en notre faveur, qu'on ne pouvait lui demander des viétoires, pendant que nos flottes feraient enchainées dans nos ports, d'après cette maxime, énergique quoique populaire : aidet-toi; le bon Dieu Vainera. On s'eft rappelé'a ce fujet 1'hiftoire de cette bonne vieille qui ne manquait jamais d'asfifter au tirage des billets de la Grande-lotterie; elle f)araiflait fort attentive aux numeros qui fortaient de a roue de fortune; quelqu'un qui avait fouvent obfervé fonattention a ce moment,fon afliduité a fe trouver régulierement a ces affemblées, prit occafion de lui demander? fi elle mettait beaucoup k la lotterie JamAs, rien. Eb! mais pourquoi prenezvous tant d'intêrêt aux tirages ? Vous ne pouvez espérer de gagner. Pourquoi non, répondit-elle? on ne fait pas ce qui peut arriver. Puisque la fortune de la guerre ne dépend pas toujours du hazard ou des accidens imprévus , que la prudence & la fupériorité peuventfixerIe plus fouventfescaprices; efpéronsque mettant en oeuvre, quoiqu'un peu tard,ces deux mobiles pui flans, nous pourrons tirer quelque bon lot d'une Lot» terieoh notre faibleffe nous a caufé de fi groffes pertes. Middelbourg , Flefiingue & Ziriczée ont furtout pouffé les hauts cris, de ce que la Répubiique, pouvant oppofer des forces fupérieures a 1'Ennemi, on lui laiffait 1'empïre de la mer, au point qu'avec des forces très-inférieures , il avait fu tenir bloquées celles de la Répubiique pendant longtems, empêcher leur joncfion; & que la plupart des corfaires qui avaient hazardé de fortir, étaient tombés entre fes mains. Mais  ( 3S>i ) Mais nul n'a parlé d'un ton plus ferme que les Etats de Frife. La piece eft trop propre a développer les difpofitions aétuelles de la nation frifonne,a montrerle tour que prennent les affaires, pour fouffrir une mutilation. La voici dans toute fa teneur & fon intégrité. Avis du Qtiartier cVQostebgo „ Le Quartier eft d'Avis, que rien n'eft plus néceffaire ni plus décent, que de fe tourner, dans la préfente_ conjoncture des affaires fi pleine.de follicitude, vers notre Dieu & celui de nos Peres, avec des impreiïions profondes de fa Toute.Science, de fa Juftice, de fa Sainteté, de fa Grace & de fa Clémence, afin d'expofer.de la maniere la plus humble, fans déguifement & en vérité nos befoins & les circonftances devant fa trés • fubtime & glorieufe Ma • jefté, dont 1'ceil pénétre tout; de lui faire avec contrition 1'aveü de nos péchés & de nos injuftices; de le fupplier avec ardeur de nous les pardonner pour 1'amour de Jefus; & de le prier avec dévotion de nous accorder fon gracieux fecours & notre délivrance. II propofé en conféquence aux autres Quartiers le projet d'une Lettre-Circulaire, pour la tenue d'Heures de Prieres publiques, ainfi qu'elle fuit. Nobles , Fe'aux , Chers & Ame's. PursQUE Dieu ordonne: Invoques• moi au jour de ta détrejfe; qu'il y ajoute 1'affurance gracieufe, Je t'en tirerai; & qu'afin qu'il ne manque rien a ce bonheur, il dit encore, & tu me Gloriefiras; nous avons toute raifon d'approcher a la préfente Epoque três-allarmante, & dans les tems fombres & pleins d'inquiétude oü nous nous trouvons, avec confiance, mais en humilité devant ce Dieu, en qui nos Peres ont toujours trouvé un réfuge fur dans des jours né> buleux & d'angoiffe, & de le fupplier de la maniere la plus humble d'avoir pitié de nous; d'accorder gracieufement aux Régens de ce Pays, & aux autres Membres du Gouvernement de cette Répubiique, dans leurs Confeils, toute la fageffe & la prudence requifes, réunies a 1'ancienne franchife male & Batave; de couronner leurs Réfolutions de fes Bénédictions Divines; de donner aufli gracieufement a S. A. S., 1'Auiiral-Général, auquel la direction des Bb 4 Flot.  C 392 ) Flottes a été corfiée par une fuite des horreurs & de Ia confiifion des années 1747 & 1748, Ia fagi-iTe, le courage, Ia p-rfotcacité & la pruder.ce male, qui lui font fi hautement néceffairesi afin que, rempli d'un amour ardent & brüiant de zele pour notre Patn>. il réoonde a toute l'importance du Pofte dont il s'eft chargé^ qu'il emnloye les moyens raffemblés.a des frais immenfes; & qö'énluité il plaife au Dieu des Armées de hénir gracieuferoent nos En. treprifes. nos.Marins & nos Armes, afin que dans la fuite nos Finances ne foient plus épuifées a pureperte, & le Pays chsri^é inutilement de Dettes infolvables; mais que le lupeibe Anglais puifïe enfin apprendre, d'une maniere fenfible pour lui, a ne plus fe montrpr devant nos Cótes, ooiIer d3iis nos Eaux & infulter nos braves marins par des défis audacieux; qu'ils le combattent avec couraee en fe repófant fur la puiflance Divine, qui a bien voulu fe manitefier avec tant de bonté & de gloire fur le Doggersbank; & qu'ils obtiennent fur lui de nouvelles Vifloires, afin de procurer ainfi une Paix générale, honorable, avsntageufe oc permanente. Et attendu que, depuis longtems 1'on s'eft piaint avec Ia plus grande raifon de la lenteur, qui regne i iéjjard de rotre Marine, mais que les Auteurs de ceite lenteur font refté inconnus jufqu'a préfent, nous devons pner de la maniere la plu* humble un Dieu a qui rien n'eft csché, de vouloir les découvrir immédiatement, afin qu'ils foient üvrés a Ia Juftice & punis publiquement, fans confidération de Perfonne, ni de Rang, fans connivence, ni pardon, & que ce bon Pays foit purgé des peftes dénaturées, qui déchirent cruellement Ie fein de leur tendreMere: Et, s'il fe trouvait aufii des Gens, qui, pour lernplir des vues perverfes, filTent impudemment des teniatives ontinueiles, pour entraïner méme des Membres du haut Gotiyernement par des promefl'es ou des menaces, dans leurs imérêts, que de telies Gens foient convertis, ou que leurs Confeils d'Achitophe] s'évanouifl'ent en fumée, & qu'ils re» foivent la punition due a leurs Crimes. Cependant, comme nos Pechés & nos Iniquités nous rendent ir.dignesde cesGraces, nous vouions qt^il en foit fait une fincere Confefiioh è ce Dieu, qui en même tems qu'il eft juste & faint, fanstache, n'en eft pas moins Miféricordieux & dispofé a des Pardons itératifs, en le priant avec Ia plus profonde humilité de pardonner nos Transgreflïons multipliées, de nous accorder ia grace puiflante du St. Efprit, * pour  ( m ) pour l'Amendement de nos vies, de nous exaucer, & de nous délivrer de notre trés grande détrefte, le tout unique* inent par les mérites infinis & trés parfaits dejéfus Chijl t le Fils de fon Amour & de fa Grace. Et afin qu'il foit fatisfait fuccefiivement a ces bonnes intentions, nous avons jugé a propos d'établir a eet effet la eélébration d'heures de Prieres publiques pour chaque mois, afin de les tenir a celle du mois, que les Quartiers refpectifs jugeront a propos de fixer ultérieurement; voulant que tout ce qui pourrait aucunement troubler eet Acte Religieux & Solemnel, foit rigoureufement défendu; vous ordonnant d'en informer, le plus promptement pofllble , les Palleurs & Miniftres du St. Evangile dans vos Difrrifts , de leur enjoindre de fe régler dans leurs Prieres exaclement fur la teneur de la Prétente, jusqu'a ce qu'il furvienne du changement & que nous expédions une autre Formule; voulant que eet Act.» Religieux foit d'une heure de durée. Et, comme c'eft notre férieufe intention , que tous les Citoyens eonfacrent ce teras, nous voulons que toutes les Sociétés Religieufes tolérées fe réunifient dans leurs Affemblées, pour invoquer Dieu avec ardeur; qu'en conféquence, la Fréfente foit publiée partout oü il eft d'ufage, afin que nos intentions foient univerfellement connues, & que chacun s'y conforme: Sur quoi, nous repofant, &c. Tout femble préfager des révolutions importantes dans 1'intérieur de cette Répubiique. Les fentimens qu'on trouve exprimés dans cette picce intéreffante ne font pas particuliers & la Frife. Ils font répandus dans toute Tétendue de la Répubiique. Ils ont une multitude de partifans; & leur nombre, au lieu de diminuer, femble augmenter chaque jour. Ce que nous avons prédit en commencant la compofition de ces feuilles parait fe réalilër. Tous les bons citoyens paraiffent fentir que, s'il n'y a pas des coupables parmi les Officiers chargés d'exécuter les ordresdansla Marine , il y a dans l'adminiftration en général des défautseffentiels qu'il importe de faire disparaïtre. Ii eft, fans doute, d'un bon citoyen de maintenir le gouvernement préfent ; mais fi cette regie était prife a la rigueur, nous n'aurions jamais Bb j fé-  ( 394 ) fécoué le joug dePhilippe; jamais on n'aurait rétabli le Stathouderat; il ne ferait pas même permis de faire connaitre les abus qui s'introduifent impercep. tiblement dans tous les ouvrages des hommes quelque parfaits qu'on les fuppofe. II eft effeclivement certain que fi les Adminiftrateurs patriotes ne profitent pas de ce moment de fermentation pour réparer 1'édifice chancelant de la confédëration belgique ce beau monument de la liberté moderne, courra le'pius grand risque de crouler fur lui-même, s'il n'eft pas démoli par des mains étrangeres. Les documens qui émanent chaque jour des corps d'Etat indiquent aflez qu'il regne une défiance générale & les foupcons les plus odieux. Partout le péuple femb'e demander le recouvrement de fes anciens droits dans l'adminiftration publique. Un grand nombre d'Adminiftrateurs eux-mêmes defireraient ne dépendre que des anciennes corporations populaires, pour avoir plus de liberté a expofer leurs fentimens patriotiques ? r Dans ce mouvement général, Amfterdam qui a donné laj première impulfion aux efprits, refte dans Ie filence. La plus grande partie des villes de Hollande, celles-méme qui paffaient autrefois pour le plus faciles a fubjuguer, prennent les réfolutions les plus importantes, les plus courageufes. On dirait qu'Amfterdam , depuis qu'elle a paru mollir dans fa démarche contre le Duc de Brunswyk, a changé de fyftéme & d'efprit. Une feuille hebdomadaire publiée dans 1'idiome national, lue avec une avidité qui en fait regarder les Auteurs comme les Oracles de la nation, auxquels on ne peut refufer la gloire d'avoir le plus contribué ó établir les opinions qui commencent è prévaloir, en un mot le Post der Neder-RByn s'exprime h cette occafion avec la plus grande force dans un de fes derniers numeros. ,, Amfterdam ,, dit-il, a toujours été la plusardente a fe préfen„ ter pour foutenir la liberté nationale, quand elle „ a été menacée , . foit au dehors , foit au de»> dans. Elle s'eft furtout fignalée pour prévenir i, cette  ( 3PJ ) „ cette guerre malheureufe oh des Trafcres nous ont ;, entraraés." Cette réflexion eft jufte. Que 1'on jette en effet les yeux fur les Réfolutions prifes dans le Sénat d'Amfterdam en 1778, 1779, jufqu'a la fameufe démarche du 8 juin de 1'année derniere. On la voit la première & fouvent la feule a s'oppofer k tout ce qui pouvait porter quelque atteinte aux droits eflentiels des habitans, aux avantages d'un commerce & d'une navigation libres. A peine a-elle entrevu les difpofitions de 1'Angleterre a faire des ceffions aux Américains pour en tirer des conditions défavorables a notre commerce, qu'elle prit fur foi les intéréts de la Répubiique entiere & prépare un plan de traité de Commerce , pour prévenir les coups que la jaloufie & 1'avidité des Anglais pouvaient nous porter dans ce pays -la. Cette conduite éclairée, courageufe & patriotique acquit k la ville d'Amfterdam une eftime, une confiance, un afcendant fi grands dans toute la Répubiique, qu'elle pouvait efpérer de 1'appui dans les démarches les plus hardies. Les acclamations générales en fa faveur, 1'ardeur avec laquelle on la célêbrait comme la proteftrice de la liberté belgique, étouffaient les clameurs des Traftres qui cherchaient è la faire pafier pour la feule caufe de tous nos malheurs & 1'Ennemie naturelle des autres membres de la Confédération. „ Mais hélas," dit la feuille déja citée, „ que „ difons-nous de cette Reine de la Hollande, qui „ parait aétuellement enchaïnée par les Ennemis de „ la liberté? On défefpere de fa fermeté; on va jus. ,, qu'a croire qu'elle a perdu toute ardeur pour s'oppo„ fer aux ufurpateurs des droits des citoyens, qui „ triompheraient déja,fi d'autres villes de Hollande, „ & de braves Citoyens dans les autres Provinces, „ n'avaient, avec un courage héroïque , pris en „ main les intéréts de la patrie." Je ne faurais dire fous quel rapport cette accufation ferait fondée; ce quedifentcertains patriotes , c'eftque dans  C 3öö ) dansles tems oü 1'on fe portait avec tant d'ardeura la reconnailTance de 1'IndépendanceAméricaine, Amfterdam montra la plus grande répugnance pour cette démarche; c'efl: qu'elle a fait paraïtre la plus grande dispofition pour accepter les offres d'une paix particuIiere par la médiation de la Ruflie; c'eft quele Penfionaire van Berckel, dont tous les partis avouent les yertus & les talens, éprouve des obftacles conftans a rentrer dans les fonétions oh il a fi bien fervi fa patrie; c'eft que cette ville qui fe plaignait avec tanr. d'energie de la lenteur & de 1'inaclion de nos opérations navales, a gardé le plus profond filence dans ces derniers tems oh les clameurs étaient fi vives &fi générales. L'hiftoire cherchera dans quelque tems les caufes fecretes de cc changement de conduite. 11 fera d'autant plus difficile de les découvrir que nous avons a la tête de la Kégence des ames dont les fentimens n'ont jamais varié., dont le patriotifme eft au-defius du foupcon, & donc la poftérité ne pourra prononcer les -noms qu'avec 1'enthoufiafme iSc rattendrifi'ement de i'admiration. Suite du CHAPITRE XLVII. Sur i''Indépendance de 1'Amérique, & particulierement fur les difpofitwns des Anglais d eet égard. D'après la déclaration du fameux Charles Fox en plein Parlement, d'après les démarches-même des Anglais a l'égard des Américains, on eft étonné de les voir héfiter a reconnaftre 1'Indépendance Américaine. Nous avons rapporté les principales raifons de ceux qui font en faveur de cette déclaration. On fait qu'ils vont jufqu'a foutenir que cette reconnaisfance prompte eft ie feul moyen de tirer 1'Angleterre de 1'état critique oh elle fe trouve. I! faut que le parti contraire veuille auparavant s'aflurer fi cette reconnaiffance lui procurera les avantages qu'on en promet. Ils veulent auparavant favoir fi les Améri. cains  ( 3f7 ) cains.reconnus indépendans, fe contenteront de cette déclaration, qui, dans le fond, ne leur accorde que ce qu'ils poiTedent déja. Les Américains ont déjè déclaré qu'ils ne regardent pas cette cefiion com» me un bienfait; ils femblent donc attendre davantage; ils ne ven ont fans doute pas les Anglais avoir des garniforis dans leur voifinage ; peut-être même exigeraient-ils la cefiion du Canada qu'ils inviterent autrefois aaccédera leur confédération. Le Cabinet de St James, voudrait fans doute. favoir a quoi s'en tenir fur ces articles avant d'aquiefcer a 1'lndépendance des Américains; d'ailleurs, cette déclaration d'indé. pendance, avant d'étre affuré de la paix avec ces peuples , ferait trés- funefte aux Anglais; car dès lors toutes les nations neutres s'en autorifeuient pour porter leur commerce dans ce pays* ils y iormeraient des liaifons de commerce ; & les Anglais en faifant 'la paix , trouveraient toutes les places prifes. 11 parait que ces idéés fomaient la bafe du fyftéme de l'adminiftration éphémere qui vient de panitre & difparaitre dans la Grande-Bretagne. Comme il importe effentiellement d'approfondir ces fentimens, pour prévoir 1'iifue de cette importante querelle qui approche du dénouement, il convient de donner une idéé claire des difpofitions du Miniftere Britannique a ce fujet. Les deux partis qui ont occafionné une nouvelle révolution dans le Miniftere Britannique, paraisfaient s'accorder a reconnaitre 1'Indépendance Américaine Mr. Fox demandait qu'elle fut reconnue a 1'inftant, fans équivoque ni condition. Les Miniftres de 1'opinion contraire ne voulaient 1'accorder que comme la condition néceffaire d'une paix avec la France, 1'Efpagne & la Hollande. Mr. Fox regardait cette reconnaiffance préliminaire , comme le feul moyen de faire tomber les armes des mains de I'Amérique, de 1'intéreflerau fort de la Grande-Bretagne, ou du moins comme le feul moyen de mettre les forces Britanniques en état de réftfter a la ligue de fes autres Ennemis. Cédons, dit-il, aux Amé.  C 398; Américains 1'Indépendance dont ils font déja en posfefiion; difons leur franchement: „ Nous n'atten„ dons ni ne demandons rien en échange. Jouiffez li„ brement de ce que nous n'avons aucun droit de „ vous difputcr plus longtems: nous ne vous nrcs„ crivons aucune condition en retour." Eft-il è 'concevoir, pourfuivait Mr. Fox, que cette conduite male & généreufe ne feroit aucune impreffion fur les Américains. Avons-nous d'autre moyen pour rega» gner cette amitié que nous avons perdue,pouréteindre cette animofité que nous avons enflamée ? La fuite au N». procbain. LETTRE au Politique Hollandais fur le crédit de la Répubiique Américaine, pour fervir de fuite au C H A P I T R E XLVII. II parut, il y a déja bien du tems, deux lettres fur le crédit de I'Amérique Septentrionale. Ce pays était alors trop peu connu; 1'efprit Anglomane régnait encore trop ici, pour qu'eïles fiffent fenfation. On les attribue auDoéteur Franklin; auffi les papiers Anglais qui en ont- fait mention fous le nom de ce fameux Auteur, n'ont pas manqué d'en dire beaucoup de mal; 1'événement montre enfin ce qu'on doit penferdu jugement & de 1'impartialité de ces critiques oü 1'intérét national eft compromis. Comme 1'apparition de ces deux lettres était prématurée pour la nation Hollandaife, vous m'obligeriez beaucoup de leur donner une exiftence utile, en les publiant dans votre feuille, par extraits, fuivant que la difcufiion d'autres matieres plus importantes pourra vous leoermettre. r PRE-  C :es>) PREMIÈRE LETTRE d'un Négoctant de.... d fon Correfpondant a fur le Crédit de la Grande - Bré- tagne , d'un cóté, & de /'Amérique • Septentrionale» Unie, de l'autre. Vous demandez, Monsieur, de|favoir les raifons qui me déterminerent, il y a deux ans, a réalifer fi fubitement mes fonds d'Angleterre; & celles qui m'ont engagé depuis è confier mes marchandifes & mon argent aux Américains. Ja ferai fort court fur la première de ces queftions. Je ne voulois plus d'un débiteur que je voyois s'engager dans une entreprife toujours très-mauvaife , quel qu'en füt le fuccès 'r & 1'événement a juftifié ma prévoyance. Pour avair vendu a .18 des Fonds qui font aujourd'hui a78, j'ai 30,000 Horins de plas que je n'aurois fi j'avois tardé. Quant a 1'autre Queftion, Ie fujet avoit été agité a table entre un Philofoph*, un Politique, & moi. Le premier s'étoit étendu fur Ia fatifaction que doivent goüter les araes généreufes, lorfqu'elles réfléchilTent qu'en aidant de leur crédit & de leur argent des peuples qui réfiftent a la tyrannie, elles appuient la caufe de la liberté, qui eft celle de tous les hommes. Le fecond m'avoit rappelé la derniere Guerre entre 1'Angleterre d'un cóté, la Francs & 1'Efpagne de 1'autre; les conquêtes & les triomphes dont les fiers Bretons furent redevables principalement a leurs trop fideles Freres les Américains i les violences, les injuftices, les brigandages qu'ils s'étoient permis contre nous, leurs bons amis & alliés; 1'empire. des mers qu'ils s'arrogeaient avec une infolcuce de plus en plus alarmante pour toutes les nations intéreffées a. la liberté de la Navigation, &c. II en avait ininféré, que ce qui pouvait arriver de plus heureux pour 1'Europe en général, & pour cette Répubiique en particulier, c'étoit une féparation totale entre la Grande-Bretagne & fes Colonies; 1'indépendance abfolue de celles-ci; 1'abolition du Monopole des Anglais dans une partie fi confi. dérabie de notre Globe; le Commerce de tant d'Etats affranchis ouvert h tous les Peuples; I'Amérique-Méridionale délivrée du danger de devenir a la première Guerre la proie des forces unies de la Grande-Brétagne & de I'Amérique Septentrionale, &c. Et du tout il avait conclu que c'étoit être bon citoyen,que d'aider celle-ci k fecouer lejoug de celle-lil. Aptês nous être fépsrés, mon in érêt perfonnel & préfent me  C 400 ) me fit faire les réflexions fuivantes,fom!éei fur la connais. fance que j'ai acquife des affaires en général, & de celles en particulier de 1'Angleterre & de I'Amérique; contrées oüj'ai voyagé, féjouri-é, & fait beaucoup d'affaires. J'avoue, que ce ne font que ces réflexions qui m'oiitdéterminéanégocicr avec les Américains, & a leur faire des avances. Cela n'empéche pas, qu'a cóté de la fatisfaftion de voir mes Traites honorées, & mes intéréts bien payés, je ne goüte auffi celle de pouvoir penfer que mes opérations font utiles al'Humanité, a 1'Europe, & a ma Patrie. En fait d'Emprunts pécuniaires, le crédit d'un homme dépend plus ou moins des confidérations fuivantes. I. Sa conduite connue par rapport d des Emprunts précédents, & l'exaélitude avec la quelle il les a acquittés. II. Son indu/lrie dans ia geftion de fes afaires. III. óa frugalitè dans fes dépenfes. IV. La folidité de jes Fonds, lorfqu'il a des biens d'un bon rapport, & cxempts de detta antérieures; tfoi s'enfuivent les moyens ajfurés de payer. V. *a perfpccHve , bien fondée. de plus grandes riches. fes d 1'avenir, foit par lamèlioration de fon bien, foit par des fecours d'ailleurs. VI. Sa prudence connue dam le maniement de fes af. faires ordinaires; cjf 1'avantage que lui procurera vrai femblablement le bon ufage de l'Ewprunt qu'il fe propofé de faire. VII. Sa vertu reconnue, & l'honnitetè de fon caraclere maniteftée par le paiement volontaire de dettes qu aucune loi tCaurait pu l'obliger d payer. Les mêmes circorftances, qui donnent du crédit i un Particulier, doivent infpirer, & infpirent aux prêteurs d'argent une certaine confiance en des Communautés, ou en des Nations. Or, fi nous voulons confidérer & coraparer la GrandeBretagne & I'Amérique fous ces différents points de vue, pour favoir en Irquelle des deux il y a: le plus de fureté a prêter fon l'argent, nous le verrons. La fuite au N0. procbain, Aux Adreffes ordinaires.  L E POLITIQUE N°. LXXVIII. LUNDI, ce 5 AOUT > 1782. Suite de la LETTRE au Politique Hollandais fur le crédit de la Répubiique Américaine, pour fervir de fuite au C H A P I T R E XLVII. I. A l"égard des Emprunts antérieurs, que I'Amérique, qui emprunta dix Millions Sterlings durant la derniere Guerre pour 1'entfetien de fon Armée de 25 mille Hemmes, & pour fes autres charges, a fldelement payé & acquitté cette dette , & toutes fes autres dettes, fans exception, en I772 C)> 'ancJ's que 13 Grande-Bretagne, pendant Ces dix années de paix & d'un Commerce lucratif, n'a fait que trèspeu, ou point de réduétion de fa dette; & qu'au contr.iire elle a diminué de temps en temps les efpérances de fes Créanciers, par une divïïp.unn frivole, & par un mauvais emploi du Fonds d'amortiflement que 1'on avait deftiné a fa libération. II. A l'égard de l'induflrie dans les afaires, tous les hommes en Amérique font occupés, les uns a cultiver leurs terres, & c'eft ie plus grand nombre ; les aures a la navigation, aux arts & au commerce. Un homme oifif y eft une rareté. L'oiQveté & 1'inutilité y forment un caractere de difcré- (*) Cètre aflertion.fondée fur Ia vérité, fur le témoignsge detou» les Anglais inftruits , n'en déplaife au Doyen Tucker, fuflït pour démontrer les reflburcej de I'Amérique, la folidité de fon crédit, & 1*. bonne foi des H-bkaas, Tome. lü. Ce  C 4°2 3 dlfcrédit. II n'en eft pas de-même en Angleterre; la quantité de gens de cette efpece y eft exorbitante; la mode les y a répandus par tout. Dela fembarras desfortunes particuJieres, & les banqueroutes journalieres, provenant de Ia manie du fafte & des plaifirs difpendieux. De la dérive encore, du moins a certains égards, la mauvaife adminiftration des affaires publiques: -car 1'babitude des affaires & Ia capacité ne s'acquierent que par Ia pratiqae; &, lorfque la difïïpation univerfelle & la recherche perpétuelle des amufemens font en vogue, la Jeunefle, élevée dans ce goüt, peut rare. ment acquérir cette attention patiënte, & cette application conftante aux affaires qui eft indifpenfabfement néceffaire a un homme d'Etar. De la les fréquentes erreurs des Anglais en Politique; dela leur ennui au Confeil d'Etat, leurparefï'a A s'y rendre, leur répugnance continuelle a s'engager dans .aucune démarche qui demande de Ia réflexion & des foins. De Ia encore leur propenfion a renvóyer d'un jour a 1'autre toute propofition nouvelle; renvoi qui devient ainfi une partie des affaires dans laquelle ils acquierent de 1'expérience, paree que cette expérience eft le produit naturel d'une pra. tique, qui leur eft fi familiere. C'eft tout le contraire ert Amérique, oü les hommes, élevés dans une occupation fans relache a leurs affaires particuüeres, s'appliquent avec une facilité habituelle aux affaires publiques, lorsqu'ils s'y trouventappelés; au moyen de quoi la négligence ne fait man. quer aucune affaire. III. Quant a la frugalité dans les dépenfes, la maniere de vivre en Amérique eft généralement plus fimple, & moins difpendieufe qu'en Angleterre. Des tables frugales, des ha. billemens unis, des ameublemens fimples, peu de voitures pour le plaifir. En Amérique un air de dépenfe nuit au crédit; & c'eft une raifon pour 1'éviter. En Angleterre on fe inonte fouvent fur ce ton, dans la vue d'acquérir du crédit ; & 1'on y perfifte jufqu'a fe ruiner. Dans les affaires publiques la différence eft encore plus grande. En Angleterre les falaires des Officiers, & les émolumens des places, font énormes. Le Roi a un Million Sterling de revenu, & encore ne peut-il foutenir fa Familie fans cuntrafter des dettes. Les Secrétaires d'Etat, les Lords de Ia Tréforerie, de 1'A. mirauté. &c. ont de forts appointemens. Un Auditeur de 1'Echiquier a, dit-on, fix Deniers par Livre, ou un Quaranlieme de tout 1'argenr public que la Nation dépenfe; de forte que, fi une Guerre coüte quarante Millions, il aun Million  rC 4o3)) lion pour lui. Un- Infpecceur de Ia rMonnaie a reeu, pour fes droits dans la derniere refonte des Monnaies, foixante. .cjnq mille Livres-Sterling par an; rétributions auxquelles tous les fervices que ces Mtflieurs peuvent rendre an public ne fauraient jamais être équivalents. (*) Tout cela fft 'payé par le peuple, qui, écrafé par des taxes établies a la légere , s'en trouve d'autant moins en état de contribuer au paiement des dettes néceflaires de la Nation. En Amérique les falaires, lorfqu'ils font indifpenfable--, font extrêjnement petits; mais la plupart des affaires publiques font gérées graruitement: 1'honneur de fervir Ia patrie dignement & fidelement efr réputé fuffifant. L'efprit patriotique exifte véritablement dans ce pays-la, & y produir les plus grands effets. En Angleterre il eft univerfellement regardé comme un Etre de raifon; &, fi quelqu'un yprétend,on fe moque de lui comme d'un fot, ou 1'on s'en défie comme d'un fripon. Les Committés du Congrès qui formerte le bureau de la Guerre, le bureau de la Tréforerie, le bureau de la Marine, le bureau pour la reddition des cotnp.tes, le bureau pour les affaires étrangeres. ceux pour procurer des armes, des munitions, des habillemens, &c.tous ces Committés gerent les affaires de leurs Minifteres respeftifs fans aucuns falaires ou émolumens quelcor.ques, quoiqti'ils y emp'nient beaucoup plus de leur temps qu'ancun Lord de la Tréforerie ou de 1'AmiratJté en Angleterre n'en pourroit prendre fur fes amufemens. Un ci devant Miniftre Anglais comptoit, que toute la dépeiife des Américains, pour le Gouvernement de trois Millions d'hommes, 41e montoit qu'a foixante & dix mille Livres.Sterlini' par an, & tiioit la conclufion, qu'ils devaient être taxés jufqu'a ce que leur dépenfe füt proportionnée a ce qu'il en coüie a la Craude-Bretagne pour en gouverner huit IVIilIions. 11 ne lui vint pas dans l'efprit , que 1'on pouvoit rétorquer fon raifonnement, & en tirer une conféqueice toute oppofée, favoir, que fi trois Millions d'habitans peuvent être bien gouvernés pour foixante & dix mille Livres, un peut également bien gouverner huit Millions de citoyens pour le triple de cette fomme; &, par conféquent,qu'il ferait poffible,hon- nête C*) On prévoit bien que Ia reform ? commencée dans ce département par M. Burke , fouffiira des obfracles par J'abdication de ce fage Adminifhateur & par finfluence des perfonnes intéreffées a 1'emi'Ccber CC 2  C 404 3 nête & falutaire, de diminuer la dépenfe de fon Gouvemement. Dans une Nation corrompue , telle qu'eft aujourd'hui la Nation Britannique, perfonne n'eft honieux de prendre intérêt dans les affaires Iucratives de 1'adrjiiniftration, oii 1'argent du Public eft fingulierement mal employé & prodigué, le tréfor pil'é, & les taxes impofées toujours p;us nom breu. fes & plus pefantes; ce qui aggrave ropprefiion du peuple. Et, attendu que la Guerrooffielaperfpecti 'ed'un plusgranft nombre de femblables affaires, c'eft un mötif, pour beau. coup de gens, de crier a la Guerre en toute occafion , & de s'oppofer a toutes propofitions de Paix telles qu'eïles puis* fent être. De Ia s'enfuit I'accroiffement fuccefïïf de Ia Dette nationale, & l'impofïïbilité de fe flatter de la voir jamais acquitter. IV. Pour ce qui eft de la folidité des Fonds, les TreizeEtats-Unis de I'Amérique font engagés folidairementaupaiement de toutes les dettes contracties par le Congrès, & fa det'e a contrséter pour la préfente Guerre eft la feule dette qu'ils aient a payer, toutes les dettes précédentes, ou è> peu prés, des Colonies particulieres, étant déja acquiirées; au lieu que 1'Angleterre aura a payer, non-feulement 1'énorrae dette que cette Guerre lui occafionnera néceflairement, mais encore toute fon iromenfe dette précédente, ou du moins l'intérêt de cette dette. Et, tandis que I'Amérique, par les prifes qu'elle fair fur le commerce Britannique, s'enrichit plus qu'elle n'a jamais fait, par fon propre commerce direct fous les entraves du Monopole Britannique, h Grande-Bretagne s'appauvrit par Ia perte de ce Monopole & par la diminution de fes revenus; &conféquc-mment etle devient d'autant moins capable d'acquuter 1'augmentation indifcrerte de fes dépenfes afluelles. V„ Quant ó la perjpecïive d'une plus grande opulence fu. ture, la Grande-Bretagne n'en a aucune. Ses Hes font circonfcrites par 1'Océan, &, a 1'exception d'un petit nombre de Parcs & de Forêts, elie n'a aucune terre nouvelle a mettre en valeur, & ne faurait conféquemment étendre fa culture. II en eft de même de fa population: au lieu de s'accroltre par 1'accroilTemeBt des fubfiftances , il va continuellement en diminuant, par la progreflion du luxe, & par la difficulté plus grande de maintenir une familie; ce qui décourage naturellement de fe marier de bonne heure. Ainfi elle aura moirs d'hommes pour contnbuer ö payer fes dettes; & ces honimej, en plus petit uombre, feronc en  C 405) en même temps plus pauvres. L'Amérique, au contraire, a, outre fes terres déja défrichées, des territoires immenfes A défricher encore: fes terres cultivées augmentent journel. lement de valeur avec l'augmentation du peuple; & le peuple , qui doublé de nombre en vingt cinq ans par la propagation naturel'e, doublera plus promptement par radmiiïiott des étrangers, tant qu'il y aura des terres k concéder a de nouvelles families,- de maniere qu'il y aura tous les vingt ans une doublé quantité d'habitans obligés au paiement de la dette publique; & ces habitans, étant plus riches, paieront leur cm'i'gent avec p'us de facilifé. VI. A l'égard de la pruderie? dans leurs affaires ordinaires- & des avantages qu'ils ont lieu d'attendre de l'Einprunt propofé, les Américains font des agriculteurs; ceux d'entre eux qui s'appiiquent a la pêche & au commerce étant en petit nombre, en comparaifon de la malTe du peuple. lis ont toujours adminiftré avec iagefle leurs gouvernemens refprftifs, évitant les Guerres & les projets vains &ui(pendieux, fe complaifant dans leurs occupations pac fiques , oui, vu 1'étendue de leur territoire encore irculte , leur fourlïiront de 1'emploi pour des fiecles. 11 en eft tout suttemt-nt de 1'Angleterre; toujours ir.quiete, ambitieufe, avaticieufe, imprudente & querelleuf>; elle eft la moitié du temps engagée dans quelque Guerre deci ou dela \ & toujours avec une dépenfe infiniment plus grande que les avantages qu'elle s'en promet, quand même elle pourrait les obtenir. Ainfi elle fit la Guerre contre i'Efpngne en 1739, pour la revendication d'une dette d'environ 95 mille L. St., revenant a peine a une piece de quatre Sols par tête pour la nation. Cette Guerre lui coüta quarante Millions Sterling , & cinquante 'mille Hommes; & elle fit la Paix fans obrenir la fatistaction ■prétendue. A peine y a t-il une Kation en Europe, & qui elle n'ait intenté la Guerre fous tel ou tel piétexte frivole; & par ce moyen elle a imprudemment accumulé une dette, qui 1'a réduite a deux doigts de la bar.queronte. Mais Ia plus indifcrette de toutes fes Guerres , c'eft celle qu'elle a entre'prife contre I'Amérique, avec qui elle pouvait conferver, pendant des fiecles, fes liaifons avantageufes , uniquement par une conduite jufte & équitable. Elle en ufe aujourd'hui comme un marchand infenfé , qui voudrait battre tous ceux qui paffent devant fa porte, pour les forcer aentrer dans fa boutique, & i aclieter fa marchandife. L'Amérique ne faurait fe foumettre ann tel traitement, li ellè n'eft Cc 3 préa-  C 40<5 ) préalablement ruint'e; &, fi elle eft ruinée , fa pratique ne , vaudra plus rien. Cependanc 1'Angleterre, pour remplir eet objet, sjoute a fa dette nationale &■ fe ruine effeclivement elle même. Ü'un autre rdté, I'Amérique n'afpire qu'a éta-, biir fa Ijbeité & a donner a fon Commerce cette liberté qui fera ayantageufe a toute 1'Europe; en méme temps que 1'a. bolitio-i du Monopole , auquW elle a é:é affujet'tie jufqu'a'. prefenr, !ui procurera un avantage fuffifant, pour rembourfer'. tacileraent ia dette qu' lle pourra con raéter dans cette vue. ^ V,I Quant au caraeïere, enfin & a tbonniteté dam. tacqu-f' ■' r.t da dettes, on a fait voir, dans le premier' article, ,'ex..cf.itiide de I'Amérique a acquitter fa detre publique. Lecaraftere général des Américains, a eet égard, parait evidemment dans leur fidélité a payer leurs d tt.es particulieres chez les Anglais depuis Ie commencement de la Guerre. II eft vrai qu'il s'eft trouvé certains petits politiques, qui ont propofé d'irré'er ce paiement jufqu'au réta. bWeraént de la paix. (Is alléguaient, que dans le cours ordinaire du commerce, & du crédit que 1'on y accorde, i! y a toujours une dette exiftante, égale au commerce de 18 mois; que le commerce des Colonies étant de cinq Millions Steding par an, cette dette doit être évaluée a fept Millions & demi; que, cette fomme étant payée aux Man. chands Anglais, fon effet ferait de prévenir la détrefle oü 1'on s'était propofé de réduire la Grande-Bretagne par la fcppreflïoti du Commerce, avec elle ; car, difaient-ils, les Marchands recevant leur argent, fans recevoir des ordres pour des fournitures ultérieures, il en arriverait, ou qu'ils ,1e plac.raient dans les Fonds public», ou qu'ils emploieraie.it les Fabriquants a accumuler des marchandifes ouvrées pour les vendre tót ou tatd a I'Amérique, dénuée de tout, a la récdnciliation attendue; au moyen de quoi 1'on foutiendrsir les Fonds pubiics, & 1'on préviendrait les murmures des Fabriquants Arglais contre le Gouvernement. Mais on répondit a cela, qu'il ne falait pas fe venger des injures des Miniftres fur des Marchands amis des Américains; que Ie crédit procédait d'engagemens particuliers contractés fous 1'asfurance de ia bonne foi, qu'ils devaient être tenus pour fa. crés, & fidelèment exécutés; que quelque utilité publique qu'on put efpé'er de retirer du manque de foi particuliere, elle était. injufte , & le trouverait finalement infenfée, la droiture étant au fond la meilleure Politique. Sur  C 407 ) Sur ce principe la propofïtion fut univerfellemeut rejetéej &, quoique les Anglais aient poufl'é la Guerre contre les Américains jufqu'a une barbarie aujourd'hui fans exemple, brülant leurs Villes fans défenfes au milieu de 1'hiver, & armant les Sauvages contre eux, la dette a été ponétuetlement payée; & les Marchands de Londres ont^ atteflé au Parlement, & attefteront è tout 1'Ünivers,que,d'après 1'expérience qu'ils avaient déja de la maniere d'agir des Américains, ils n'avaient eu, avant la Guerre, aucune appréhenfion d'infidélité de leur part, & que depuis la Guerre lis avaient été convaincus que la bonne opinion qu'ils en avaient était bien fondée. L'Angleterre, au contraire, Nation dès longtemps corrompue, extravagante & ruinée, fe voit^enfoncée dans une dette qu'elle n'eft point du tout enétatd'acquitter, & ne laiffe pas,- auffi follement que mal'nonnêtement, de s'y enfoncer de plus en plus, fans efpoir de jamais fatisfaire fes Créanciers, & ne voit d'autre moyen de fe débarraffer de fes dettes que celui d'une banqueroute pablique. Tout bien pefé, il parait, qu'attendu nnduftne générale, la frugalité, la richeffie, la prudence & la venu ds l'Amé> rique, elle eft une débitrice beaucoup plus aflurée que la Grande-Bretagne. J'ai 1'honneur d'étre &c. Suite du même C H A P I T R E XLVII. Sur les difpofitions des Anglais relativement d la guerre Américaine. II eft bien difficile, pour ne pas dire impofïïble, d'affignerle fentiment réel, les projets futurs de l'adminiftration acluelle en Angleterre fur la guerre Américaine. Des affertions étonnantes, attaquées par les démentis les plus fcandaleux, laiftent tous les efprits en fufpens. A en croire le Général Conway, le Roi commencait a fe familiarifer avec 1'idée de déclarer 1'Indépendance des Etats-Unis. Tout le Miniftere fentait la néceffité d'avaler cette pilule amere.1 D'autres prétendent que le Miniftere Britannique reflemble, fur eet objet, a unmoucheron qui réduit, pourfa fauver, a traverfer d'un vol rapideun feu perfide^ Cc 4 tour-  C 40S ) tournc a 1'entour, s'v confume peu a peu, jufqu'a ce qu'épuifé , jl tombe fans force au milieu du bu. cherquiachevede le confumer, Il cft cependant des Citoyens eclairés qui, depuis longtems, ont prévu cette" funeft'e Citaftrophe ; un d'entr'eux vient d'adreffer au Lord Sheiburne une Lettre concue en ces termes. ,, L'idée générale étant que la guerre Américaine ,, fera eonrinuée fous votre adminiftration , vos amis „ même n'ofant contredire cette opinion, vous êtes fans doute préparé a entendre la vérité fur cetim* portant fujet. Je penfe avoir d'aurant plus de droit „ k votre attention , que jufqu'a préfent 1'événement ,', a yérlfié toutes les conjectures que j'avais faites, fur hffue de cette füneffe guerre. je ne récapitulerai poinc la multitudc des erreurs qui ont con„ duit cette nation k cette crife alarmante. II fuffi. „ ra de dire que chaque feffion du Parlement a pro„ duit un nouveau Symbole de foi, relativement k „ la maniere de conqüérir I'Amérique. Nos dernie,j res efpérances, que dis-je, les plans de notre fu,, ture domination pofaient fur la révolte de la ligue ,, de Penfylvanie & fur Pextindtion du papier-mon„ naie. Mais en cela i nous avons ététrompés, com„ me dans tous les autres cas, oh nous avons attendu fuccès & foumifiion. La poignée de ces bra„ ves qui jeterent leurs armes dans le New-Jerfey, „ les emp'oyerent peu de mois après avec acharne„ ment & gloire contre toutes les forces du Lord 5, Cornwallis dans la Virginie. La fuppreffion du „ papier-monnaie eft regardée par tous les Améri,, cains comme un des événemens les plus heureux „ qui leur foit arrivé depuis le commencement de la „ guerre. Ce grand coup d'Etat abrifé les entraves du commerce , fait difparaicre les loix deftruclives de fa liberté, ouvert de nouvelles fources d'or „ & d'argent & leur a procuré le véritable nerf de la „ guerre. Quelles racines profordes ne doit pas avoir „ pouffé ce Gouvernement dans l'efprit du peuple, u pour avoir non-feulement foutenu dans fon enfan- „ ce  ( 409 ) „ re le choc d'une faillite fi générale, mais poury avoir trouvé une reflburce ? Combien d'autres perfpectives avantageufes n'offre „'pas ce nouvel Ltat! Qu'on jecte les yeux fur la fagelTe „ des fyftêmes de gouvernement & de légiflation que , les Américains viennent d'adopter. Encore faiblesdes " entraves qu'ils venaientde fecouer ,ilsne s'avance" rent d'abord qu'en tatonnant ; ils firent quelques " écarr.s,mais enfin, fuivant leurs fentimens plus que " leurs réflexions. ils s'abandonnerent d'abord a des " hommes dont 1'enthoufiafme tenait lieu de talens; mais enfin, éclairés par 1'expérience du tems & de ' 1'infortune, ils ont mis plus de difcernement dans le " choix de leurs adminiftrateurs , plus de jufteffe " dans leurs plans d'adroinifiration & plus d'écono\\ mie dans les départemens chargés des dépenfes „ publiques. ,, Les Etats-Unis ont eu la fageffe de repartir le pouvoir éxecutif de la confédération en différens " bureaux, a la tête desquels ils ont placé des " hommes du premier mérite par leurs talens, leur !! expérience, & leur intégrité. , La perfonne qu'ils ont mife h la tete de leür t'réfor public eft connue du noble Lord qui avait " ci- devant 1'infpeftion fuprême des finances de ce pays. Le Lord North connait toute 1'étendue du " erédit de eet Américain chez toutes les nations " commercantes de 1'Europe. 11 ne tiendrait qu'au " noble Lord de nous raconter comment,ayant fu" borné quelques marchands de Londres, pour faire " protester contre les billets de 1'Américain, & 5' 1'empêcher de procurer des munitions navales au Congrès, il eut la douleur d'étre trompé dans 3' fon attente; 1'Américain échapa non-feulement a ce coup; il fut même établir fi bien le crédit " & la confidération du Congrès qu'il lui procura tout " ce dont il avait befoin dans les premières années ' de la guerre. . , _ , 11 n'eft pas inutile d ajouter que les différens Ctouvernemens de I'Amérique vont chaque jour acqué. " C c 5 rant  ( 4ro ) „ rant des forces & s'adaptent aux mceurs des ha-. „ bitans. Dans la plupart de ces Etats les Committés „ & les Confeils inveftis de pouvoirs arbitraires, s'abo„ lifient peu a peu; les adminiftrateurs font alfujet. „ tis a des Conftitutions établies &, le peuple a des„ loix fixes. L'aurore de la tolérance politique com„ mence auffi a percer. Les exclufions religieu- fes, miférable invention des Tyrans Européens, „ difparaiffent; on donne aux opinions fur le dog. „ me la même liberté qu'aux fyftémes de gouverne--. ment. La liberté de la preffe, quoiqu'en difent „ 1'ignorant Tucker & fes feétateurs non moins ig3, norans, y eft 'méme érigée en loi. Les réfolu„ tions du Congrès, la conduite du premier Magi,, ftrat, font, aufii bien que les tétions du dernier „ des citoyens , fujettes a 1'examen & a la ceniuie 5, publiques. „ Sunout, il ne faut pas perdre1 de vue que les Américains font unis plus que jamais contre 1'An„ gleterrc & forment chaque jour de nouvelles „ liaifons de commerce & de politique avec fes En„ nemis ,, Oh font donc ces miférables fugitifs qui s'atta„ chtnt depuis tant d'années è nous perfuaderqu'en „Amérique, de dix perfonnes, il y en'a neuf qui défirent de rentrer fous 1'ancienne domination. „ Qu'on :ife leurs feuilles périodiques. O^u'on lifefur- tout ce qu'ils écrivent dans toutes les parties de „ ce vafte Continent depuis la réduflion du Lord „ Cornwallis ; nous verrons qu'il n'y a prefque „ pas une habitation qui n'ait célébré' eet événe„ ment par des illuminations ; pas une colline „ qui n'ait retenti des décharges tirées a la nouvel„ le de cette grande vicloire. Nous avancera-t on „ quecesréjouiffances univerfelles ibnt le fruit des in „ trigues d'une poignée de Démagogues fiégeant dans „ 1'Aréopage dePhiladelphie?Non, non; 1'effufion vo„ lontaire ues cceurs n'a pas de marqués moins équi ■ „ voques. Non, on ne peut rien alléguer qui • „ prouve fi .foreement 1'unanimité des Américains.  ( 4'O ■ Tl vanlus: on fait que dans toutes les fociétés " c vïlesP cft des caracfteres timides qui n'ofen " %m aucun parti & qui forment ^ven le plu " «rand nombre, Eh bien ces hommes pufillanime* " Int abandonné leurs intéréts & leur fureté » °rotec?Ón du Congrès Ils font tellemen famill" Pari£au fyttê'mc de 1'Indépendance qu'ils em» Sofent ï laYmaintenir tóöi ce qu'ils ont de talens, v Hp fortune & d'influence. 8? deEnunmot. I'Amérique entiere, a 1'except.on des 'oen "s po ms ifolés oü fe blodffenc nos miférables gar • " Kns louiffent au milieu de a guerre , de tous les " avantages de la paix. Les ravages des armées ne méme.des chofes de première nécefllté, font des " orosrés dont la rapidité n'offre aucun autrelexem" Se dans les annales du monde Pu.fque le Cteln'a nas deftiné ce peuple g-and& heureux h nous fer- " & d'e& Iln 6ft, " o s dïutre moven que de rapeler imméd.atement " foutes nos armées de l'Amérique& de reconnaitre " Sntement&formellèment, pour fervir douvertu9 ^rtóftSKri générale, 1'Indépendance & J la Souveraineté de E-ats - Unis. Li fuite au N". procbain. Suite du CH A PIT RE XLIX, Sur VEtat aïluel des affaires inlirieures & extérieure: de la Répubiique Belgique. Oui, nous avons dans la Régence d'Amfterdam dés natriotes dont 1'ame eft inaceifible aux vils motifs de SS , de 1'ambition ou de la crainte Leurs non» font connus. leur image eft gravée dans les coeurs de tous les citoyens. II eft vrai qu'on peut:1e d s■riwuer de la foule: mais leur petit nombre ajoute Tkur glofte. Ce nè font pas ceux la fans doute qui  C 412 ) ft fontoppofés au rappel du Penfionaire van Berckel lis ri étaient pas parmi ceux qui opinaient a accen.' ter la paix particuliere fous la médiation de la Rus- ï?i Can5ft pas' ~'api'ès leu!' avis> que ^s Députés d Amfterdam aux Etats de Hollande fe font trouvés fans anitrucftions quand il a fallu prendre une delibéradon finale lur le. Traité de Commerce avec i'Amérique. Que cette conduite, & furtout ce dernier trait offre de réflexions aux perfonnes impartiales.&fineerement attachéesa la patrie! Comment! c'eft Amfterdam qui la première jeta les fondemens de ce traité; c'eft 1 fon aftivité patnotique fuj ce fujet, que fes ennemis attribuentla guerreaftuellc & fe fuites;&, lorfque iescirconltanccs 1 autoriient hautement a mettre la derniere main a cec ouvrage; lorfque les voeux de la plupart des citoyens en réclamentla conclulion, cectevil!^fipUIfl-ante,héfite, chan.elle . recule! Amfterdam difait 1 année derniere, (voyez /on Mémoireeönïre ^Dwde^m