COMMENTAIRE SUR LES (EUVRES DU SIEUR H A D O u x;  On prévient ki te Letteur que Pon n'a abfolumsnt. rien omis du Texte; que Fon s'ejl coufovrné fcrupyleufement a Vorthographe de l'sfuteur, & qu'enfin fon a rien changé d fes Euvres. Ainfi ce Commentaire peut dispenfer les amateurs de recourir au JLivre-mémë du Sicur Hadoux, puisque le tout ejï dans le pré/ent P'olume. Si quelqu'un, peu au courant de la littérature, demande ce que c'eji que M: Hadoux & fes Euvres ? Nous le renvoyons d la future Edition du DiCiionnaire des Crands-Hommes; mais il efi impojjible que le Dragon Verd & le Petit Cabrec n'aient pas déja fait un certain bruit doms ie. monde- favant.  LES (KUVRES ^ DU SIEUR HADOUX, COMMENTÉES. EXPLIQUÉES ET RENDUES InTELLIGIBLES. Enrichies du Portrait, de l'Auteur, et autres pleces interes sant es, Par Andrê Rkiba d'AcuNENGAt Profejfeur omni genere; Ah! qu'en termes galans ces chofes-la font mifes! Molière. A Criticopolis L'an des Muf es ioioi.  Qu at ra in qui ne regarde point du tout le Sieur Hadoux. Malheur a qui prêtant le flanc au ridicule, Aux verges du public fe Hvre fans fcrupulc, Et qui comptant pour rien de plaire ou d'ennuier, Met fon impertinence au jour fur le papier. Clément.  PREFAC1ÜNCULE. C'efl; un ufage établi de Commenter les Ouvrages des grand s-hommes, afin de les mettre a la portée de tous les efprits. Corneille, Racine, Boileau, Molière ont eu leurs Commentatems. 11 n'eft point d'écrivain un peu recommandable qui n'ait trouvé quelque Gloffateur trudit; & depuis- Hom ere jusqu'au Chef d'oeuvre d'un Inconnu, tout a palïe paria filiere des graves éplucheurs de phrafes. Vous ne ferez donc point étonnés, Lefteurs Bénévoles, qu'un Poëte du premier ordre, dont les Euvres vont tenir un rang diftingué parmi les ouvrages dramatiques, un Sieur Hadoux dont la ftatné (i) orne déja le Cabinet des Princes, & figure avec les portraks des grands-hommes, qu'un Auteur enfin aufii fupérieur aux régies, ait trouvé parmi les Savans de fon fiecle un Commentateur qui, par amour pour le Public, ait daigné confacrer quelques veilles a 1'interprctation de diverfes exprefllons de eet enfant gdtê des Muf es. L'idiöme dont fe fert le Steur Hadoux eft a peine le nötre; maïs fes Ecrits, formant la meilleure école pofiible du mérite (2) littéraire, font trop précieux pour être négligés. Loin (1) L'inauguration publique & folemnelle en a été fnre le 6 Déccmbre 1782, jour de St, Nicolas, dans la bouriquo d'un Marchand de pain d'ép;ce , très-renommé, (2) Lifez: école du ridicule littéraire , au licu du mérite littéraire, C'eft unc fauta d'inatrention. On en trouvera beaucoup da ce genre, daas ce livre fait trop a la hate pour être bicn chettié, A 3  ( 6 ) Loin d'ici cependant cette érudition vatte & profonde du fiecle paffé. Les graces & la légereté du Sieur Hadoux doivent infiuer iur la glofe de les ouvrages. Le Sieur Rhiha d'Ar cunenga eft loin de prétendre a 1'originale beauté du texte; il reconnoït que fes efforts fe» roient vains. Heureux fi fa faible lampe n'eft point trop obfcurcie par les r„yons éblouuTans de ce nouveau Soieil oui Soleil, je le réptte: „ Petits Grammairiens, grands Prêcepteurs des Jots, „ Qiii péfez la parole, ö5 mefurez les mots, „ Parcille exprejjion vous femble kazardée, „ Mats Punivurs entier don en cbérir Sidée. Epi-  C 7 ) Epitre du Commjpntjteur au Sieur HADOUX. <-^&^#^<&'<£'> Les Jaloux, Sieur Hadoux, Contre vous En couroux, Ont crié, Murmuré, Tempêté, Fulminé: C'eft tant pire, Mais que dire ? De leur ire II faut rire. La Satire, (Vrai martyre, Sot délire A profcrire, Qui déchire Et n'afpire Qu'a détruire Ou a nuire) A vrai dire Eft le pire Art d'écrire A élire. (i) L'univers De vos vers Retentit, En dépit Des Serpens Glapiflans De 1'envie Ennemie. EnCO C'efl l dire Cboifif. h 4  ( 8 ) Entte Horace Et Bocace Votre place Au parnafle Eft marqne'e,' Bien garde'e Par Momus, De Phébus Le Sergent Trés plaifant» Sur ma foi, Croyez moi, Prés de Vous Sieur Hadoux Roufieau n'eft Qu'un benêt, Méricault (i) Un nigaud, Beaumarchais Un niais, Marivaux Un grimaud, Paliflot Un franc fot, Benferade Un mauflade, Arouëc Un Baudet, (2) Cre'billon Un bouffon, Poquelin (3) Un faquin, Jean Regnard Un bavard, L'At- O) Nêricault De/louches, (2) ytrouet de Voltaire, (3) Molière le Tércnce francais,  C 9 ) L'Attaignant Un pédant, Leonard Un criard, De Pezé Un Bébé, Voifenon Un cochon, Et Greffet Un bidet, Et Favart Un caffard, Et Quinaut Un badaud, Et Dorat Un vrai fat. Votre Mufe Qui s'abufe, Quelquefois Du Francais Rompt les loix Et les droits; Mais qu'importc? L'ame forte D'un rimeur En chaleur, Tel que vous Sieur Hadoux, Peut braver, Peut biffer Sans facon D'Hélicon Le gênant Réglement, Bon pour gens Bien pédans, Et favans Jusqu'aux dents. De  ( 10 ) De ces Fous Aigre-doux Moquez-vou», Cher HABoyx; Pourfuivez, Travaillez, Ecrivez, Et mettez, Le premier, Sans quartier, Ariftote En compote, Defpréaux En morceaux, Fontenelle En canelle, La Raifon Au billon, Et Phébus En rébus.. Si jamais Déformais Quolibet Ou Couplet, Ou Sifflet, Ou Soufflet (i) De malin Ecrivain, Gallican, Anglican, Caldéen Ou latin Vous atteint; Tur- (i) Littéraire, s'entend, & non pas Manuel; expliquons-nous,  ( ii ) A Pïnftant, Mon enfant, Plume au vent, Répondez, Ec couvrez De cent vers Le pervers. Montrez-lui Qu'aujourdhui La Sotife Eft de mife, Que fadeur Eft douceur, Ignorance Eloquence, Platitude Grande étude, MAraerie Beau genie; Et qu'enfin, Par Jupin, Malgré tous Les jaloux, Sieur Hadoux Ecrira, Rimera, Chantera, Danfera, Sautera Mais hola Sieur Rhiba, Finiflez, C'eft affez. A»  ( 12 ) AVIS ESSENCIEL. A vant de paffer au Commentaire des Produttions du Sieur Hadoux , nous croyons que le Le£teur trouvera ici avec plaifir le Portrait Physique et Moral de ce Savant Auteur. II nous a été envoyé de main de maitre, & des Connoifleurs nous ont afïuré qu'il eft exact. C'eft encore un honneur que le Sieur Hadoux va partager avec nombre de grands Ecrivains , dont les Portraits fe trouvent a latête de leurs Ouvrages. Le Peinceau poëtique a cela de commode qu'il tracé également les qualités de 1'efprk; raifon pour laquelle nous 1'avons préféré a une Gravure qui n'auroit offert aux yeux que la moitié la moins précieule de notre Héros. D'ailleurs fa ftatue, corame 1'on fait, eft déja depuis quelque temps dans le Public, & on peut la confulter fur ploileurs cheminées de Cuifine. POR-  ( i3 ) PORTRAIT du SIEUR HADOUX. Jr our peindre un Alexandre il faudroit un Apelle. Hadoux eft le plus grand des Poëtes du Nord? Du Chantre de la Thrace il a 1'air & le port, „ Et va da mêmc pas a la gloire immortelle. „ Mais oü trouver un Apcllc nouveau? „ Le Peintre manque au parallelle. Pour moi, bien au deffous de ce fameux modcle, „ Je compte, en prenant le peinceau, „ Moins fur mon art que fur mon zele. „ Mais fi je peux être fidele „ Le portrait fera toujours beau. Commencons donc norre peinture Par les traits dont 1'orna la prodigue nature. Figure pindariquc, avec art contournée, Front pointu, longue oreille, cn dchors allongée, Prunelle d'un gris noir, vers le ciel élancée, ^ jambe en avant, toujours en tiercé bien placée;(ry Le fouris fur la bouche, & crachant a la fois Profe, Salive, Vers, Chanfons, a votre choix. Vrai foldat d'hélicon, vêtu modcftement, Pour la forme & pour la matiere, „ Un pourpoint lui fuific, dit-on, Panne'e cntiere. Grand chapeau, gands musque's ,& pour 1'affortiment Ceinturon de même parure, D'ou pcnd nonchalammcnt Rapiere ou Coutelas Peu brillant au dehors, peu chargé de dorure, Mais terrible (2), dit-on, dans les fecretscombats. Enfin coëfïïire enflée, & marche a la Dragonne, C'eft tout 1'ajuftement qu'il fouffre en fa perfonne. Mais (1) C'eft ainfi du moins que le Sr: Hadoux parut au Peintre, le jour de fon Triomphe, fur le théatre de la Haye, (2) Lifez traitable, C'eftunefautedecorreftionéchapée a la vigilance de 1'Editeur; on implore pourcelle-ci, & tant d'autres, 1'indulgence des le&eurs,  C 14 ) Mais de fes qualités internes Qui pouroit peindre ia grandeur? Ailcz confulter les Cafernes, Parlcz a fon Coadjuteur. (3) De fon quartier, Hadoiix eit la lanterne, De fon quartier, Hadoux eft le dofteur, Si je ne craignois qu'on me bernc, J'cn parlerois comme un Rhéteur. Ür donc il fuit, Ami 'Leóteur, Qu'Hadoux n'eit point un barboüilleur, Que du theitre il n'eft point écorcheur, Qu'il fait des vers comme un opérateur, Q'.i*cn récompenfe on hu doft en honneur Donncr bientót brévet de Corredteur, Que du Parnalie il eft nommé Cenfeur, Êc d'Apollon dé.'ignéfucceücur. Mais fur ceci c'elt affez nous étendre: Parions de fon efprit, de fon activité; Un moment lui fuffit, dès qu'il veut entreprendre. Cent Vers en un quart-d'hcurö il a fouvent dicté, Sans qu'a loifir il les cüt médité. BaTades, Madrigaux, Impromptu, Comédies, Staaces, Sonnets, Ropdeaux.Complimcns, Tragédies Peiits Vers fugitifs, Epicres & Qnanains, Tout coule, tout éclos de fes fertiles mams. Rien ne 1'etonne & ne. 1'arrête l.orvqu'au thea,tre il veut monter; E-. vit-il les fi.flËets ou la Satire prête, II (oark au Public & commerice a chanter. (4) Enfin a quclque point de gloire Que 1'aicntporté les filles de mémoire, Toujours conllant en fon projet, On doute, dans toute la terre, En relifant ce qu'il a fait, S'il eft plus grand que fut jadis Homere, Ou plus petit quö le fot N . c . let. Les (3) Le Soldat Suiife qui écrit fous fa dictee. Q/) Le parterre de la Haye peutattefterl'héiwmepoëtique & 1'intrcpidité du Sieur Hadoux,  ( 15) LES (EUVRES DU SIEUR HADOUX. COMMENTÉES De tous les Livres qui, depuis 1'invention de Flmprimerie, enrichisfent k littérature, nous n'en connoiflbns point oü rêgne avec plus de profufion la magnificence typographique. L'Editeur a épuifé tout ce que Pare a de brillant, tant pour Pordonnance des lignes & des caracteres qui compofent le Titre, que pour la décoration extérieure de la couverture. Partout on y trouve dequoi tomber en admiration. Le nom d'Hadoux s'y voit placé dans tous les fens, & de la maniere la plus ingénieufe. De grands HADOUX, des HADOUX moyens, des petits Hadoux, des Hadoux de tontes les tailles & de toutes les formes. Auffi peut-on afïurer qu'au- AVANT-PROPOS.  ( i6 ) qu'aucun Ouvrage ne mérita a fi jufte tïtre (filluftrer le nom de fon Auteur; & toute la Littérature , en corps, doit des remercimens a 1'habile Typographe qui, au mérite intrinfeque du Livre, a fu li bien ajouter celui de fon art. TEXTE  T E X T E Les euvres du Sieur HADOUX Maitre de danfe & Citoyent a la Haye Concernant la vertue réconpanfée ou le Dragon verd & le petit Cabret en un acte Suivi de toutes le Chancons faite a la Haye, dans lans 1782 & inprimé lans - 1783* Vu, Relu & Corrigé avec foin, par Mr. 1'AuteUr. HADOUX. B RE*  ( 18 ) RE MARQUÉS SUR LE TITRE ci-dsjjus. Rifum teneatis amict. Horat. X^jes Euvres. Ce mot vient du latin Opus, au plurier Opera; c'eft la raifon pour laquelle on écrit Oeuvres, afin de conferver l'étimologie; jusques a préfent aucun Auteur, du moins que 1'on fache, ne s'eft écarté de ce principe: mais le Sieur Hadoux, qui prétend vifiblement a la gloire de réformer 1'orthographe & la langue, nous enfeigne par fon exemple qu'il faut écrire Euvres. Nous croyons d'après une telle autorité qu'aucun Ecrivain n'y manquera: fuivant ce fage précepte de Boileau. Surtout qu'en vos écrks la langue re'vérée Dans vos plus grands excès vous foit toujours facrée. Art PoSt. Ch. I. Du Sieur. Quelques Auteurs mettent au Titre de leurs ouvrages, par Monjteur ou fimplement par un. tel Mais toutes ces manieres de s'annoncer au Public font ineptes; la méthode du Sieur Hadoux eft préfw-rable pour bien des raifons trop longues a déduire. D'aiüeurs le mot Steur eft un diminutif de Seigneur, & fous fon air modefte, il lahTe beaucoup a penfer aux lefteurs. Hadoux. C'eft ici que nous ayouons humblement que nous fommes en défaut,ou que la Barare s'eft trompée. En eifet, comment un Auteur au£fi recommandable ne porte-t'il pas un  ( 19 ) un nom eft us, tel que SotiJJur, Afmiv.s,Betdnius &c ? Un tel nom eüt été bien plus heureux, & plus illuftre dans les faftes de la République des Lettres. Cependant, li nous ofons hazarder nos conjectures, nous foupeonnons fortement, d'après bien des recherches, que le mot Hadoux vient de Badaud: ce qui fe prouve par un léger changement de lettres; ufage trés commode & fuivi par nombre de favans Littérateurs pour 1'éclairciffement de plulieurs points obfcurs de 1'hiftoire. La lettre h eft a. peu-près femblable a la lettre b; or il eft plus que probable qué, dans les vieux parchemins de cette familie, le b initial aura été pris pour un h. (Le célebre gcnéalogifte d'Ho/ter a démontré mille exemples de ce genre en faveur de plus d'une Maifon refpeftable.) En admettant doric un b au-lieu de la lettre fautive h, nous zurons Ba; l'o a été vifiblement un a, & quant a Vx nous ne ferions pas embaraffés de prouver qu'il a fouvenr. été pris pour d: d'oü il fuit, par un raifonnement trés concluant, que le vrai nom de notre Auteur n'eft point Hadoux, mais Badaud; familie immenfe & bien connue, dans laquelle on trouve des Seigneurs de tous; rang, & une foule d'hommes illuftrés par leurs empiois. (Nous fommes perfuadés que le Lecleur nous faura gré de cette favante découverte fur le nom de notre Auteur.) Maitre de Dan se. De tous les titres du Sieur Hadoux, celui-ci eft fans doute le plus recommandable ; en effet il n'eft point d'art plus utüe a la fociété j & nous ne favons B s rien  ( 20 ) rien de plus néceffaire aux hommes que la danfe. Ecoutons un des plus grands Ecrivains du fiecle dernier. », Tous les malheurs des hommes , tous les revers funeftes dont les hiftoires font remplies, les bévues des Polkiques, les fautes des Capitaines &c. tout cela ne vient que faute de favoir danfer. Lorsqu'un homme s'eft mal conduit dans une affaire , qu'il s'eft trompé, ou qu'il a fait une fotife: ne dit-on pas alors, Mr. un tel a fait un mauvais pas dans une telle affaire? & d'oü cela peut-il provenir, je vous prie, finon de n'avoir pas appris a danfer ? " Donc un homme tel que le Sieur Hadoux, qui enfeigne aux citoyens a faire des pas, eft plus utile a 1'état qu'un juge, qu'un magiftat, ou telle autre mince profeffion, fur qui la danfe doit toujours avoir la préféance dans un pays policé. A ce titre feul de Maitre de danfe, tous les amateurs du bien public doivent s'incliner avec refpedT:, en avouant que tout dépend de' eet art falutaire. Marcel fameux Maïtre de Danfe a Paris dont J. J. Rouileau parle dans fon Emile (*) étoit loin de pofféder le mérite du Sieur Hadoux. II eft vrai que Marcel réuniffoit tous les (a) Emile Totne I. patje 183 Edit. 8°. Ce Marcel étoit un maitre baladin qui ne paifoit rien k fes éleves, furtout aux jeunes Anglais nouvellcment débarqués a Paris, auxquels il tdchoit (pour de 1'argent) de faire prendre les beaux airs de nos petitSmaitres frangais. De ce coté le Sieur Hadoux eft fon digne Emule. No te (Pun Amateur.  C 21 ). les talens relatifs a fon art, mais le Saltinbanque de la Haye y joint ceux de Poéte Dramatique, de Poëte Erotique, de Poëte Eltgiaque; témoins les Pieces diverfes répandues dans fes Euvres. Maitre vient de Magifter, c'eft a dire, trois fois plus grand, comme le dit trés bien le Dodleur Métaphrafte dans le Dépit amoureux de Molière, Scène vu. A l b e r t. Maitre j'ai voulu M etaphhaste. Maitre eft dit a magis tf C'eft comme qui diroit trois fois plus grand. A l b e r t. Jc meure Si je favois cela. Mais fok, a la bonne heure. Maitre donc Metaph raste. Pourfuivez, &c. Et citoyent a la Haye. L'Auteur de la Nouvelle Heloïfe mettoit a la téte de fes livres -par Jean Jdques RouJJeau Citoyen de Gerieve; & alTurément fon ingratte Patrie devoit s'honorer d'avoir vu naitre un fi grand homme: mais le Sieur Hadoux avertit ici le Lec* teur qu'il n'eft pas Citoyen de la Haye, mais feulement Citoyent A la Haye, ce qui eft fort différent, & ce qui demande une grande pénétration d'efprit pour être fenti. II faut donc concevoir que Citoyen eft pris ici en général, & ügnifie en quelque facon Cosmopotite. Dans quelque villc que 1c trouve le Sieur Hadoux, B3 il  C 22 ) il y fera Citoyen dsns le même lens: a Paris, a Londres, a Pékin &c, d'oü il fuit qu'il eft rhornme de 1'univers, l'homme univerfel, & que ne jugeant pas a propos d'inftruire le Leéteur de fon lieu natal, (fans doute pour ne point exciter la jaloufie de miffe autres villes, ainfi qu'il arriva jadis a 1'occafion d'Homere) notre Auteur dit feulement qu'il honore maintenant la Haye de fa prcfence, en attendant peut être qu'il ait obtenu fes lettres de naturalifation fur le ParnafTe. Admirons encore 1'adreife avec laquelle M. Hadoux ajoute un t a Citoyen, afin d'éviter la prononciation désagréable de l'n devant une voyelle, qui produit un fon nazal infupportable aux oreilles un peu délicates. On affure qu'il a beaucoup balancé entre Citoyenz & Citoyent; mais après mure réflexion il s'eft décidé pour le t par plufieurs raifons trés importantes. Concernant. Des Ecrivains moins habiles auroient fans doute mis contenant au lieu de coiiurnant. En efict un livre ne concerne point, mais ccntient A cette objection fpé- cieufe nous répondrcns fimplement que ces gens la ne favent pas le fin des chofes, & que nous en fommes fachés pour eux. La Vertue Réconpansée. Que de chofes admirables dans ces deux motsf Dabord la Vertue & non pas la Vertu. En effet n'eft-i! pas ridicule de donner une terminaifon masculine a un nom féminin ? Le bon fens tout feul ne dit-il pas qu'il fant écrire vertue douceur e, bonte'e, e'quite'e, pour les diftinguer des masculins bonheur, malheur &c.? Jl eft en •vé-  ( *3 ) vérité honteux qu'un fiecle tel que le nótre ait dü attendre que le Sieur Hadoux foit venu 1'éclairer fur les chofes les plus fimples. A quoi fervent, bon Dieu, les Académies l Réconpansée. Si 1'orthographe de la feconde fyllabe de ce mot fcandalife quelqu'un, tant-pis pour lui. Ce n'eft pas fans de bonnes raifons que le Sieur Hadoux a mis n pour m; nous favons que c'eft pour apprendre a vivre a certaines Précieufes ridicules qui voudroient bannir de la langue francaiie les premières fyllabes des mots confejjlon, concujjion & autres. C'eft ce genre de Précieufes que Molière a Cl bien drapé dans fa Comédie des Femnttj favantes, en faifant dire ridiculement a Philaminte. Mais le plus beau projec de notre académie, Une cntreprifc noble & dont je luis favie, Un deiTein plein de gloire, ft qui fora vanté Chez tous les beaux-efprits de ia poftérité, C'eft le retranchement de ces Syllabes fales' Qui dans les plus beaux mots proddlentdes fcandalesCes jouets étérnels des fots de tous les temps; Ces i'ades licux communs de nos mam-ais plaifans Ces fourecs d'un amas d'équivoqucs infantes ' Dont on vient faire infulte a la pudeur des femmes. Afte III. Scène ^ On ne peut trop louer le Sieur Hadoux d'avoir fait une petite breche a Ja modeftie, pour faire entendre raifon une bonne fois aux curieufes qui le liront. Ou le Dragon Verd. Des gens peu verfés dans la belle littérature demanderont peut-être quelle analogie il y a entre la vertu récompenfée & un Dragon verd? a la première vue ces idéés femblent disparates; mais on ne B 4 fit-  ( H ) finiroit point s'il falloit rendre raifon de tout a ces fortes de gens ,* les au;tres le comprendront facilement fans qu'on leur dife. Et le petit CaBRET. Petit, il y a une belle différence entre petit & grand; par exemple entre grand-fot & petit-fot. Ce dernier dans la bouche d'une Dame eft presque une faveur; 1'autre dans la bouche des hommes fignifie Ha* doux. CaBRET pour Cabaret: Maniere de parler Provencale qu Languedociene, qui donne eertaine grace , certaine mignardife au discours, & que par cette raifon 1'Auteur a préférée. Un voyageur inftruit vient de nous communiquer que dans la Baffe Gascogne on dit auffi Cd'iret pour Cabaret; ceci ne fert pas peu a décéler le Sieur Hadoux, qui ne nomme point le lieu de fa nailfance; c'eft le bout d'oreille qui perce d travers la peau du lion; au refte il importe peu que notre Ecrivain foit Gascon ou Picard, pourvü qu'il aille a la poftérité. Nous devons dire encore que Cdbret approche beaucoup de Cabri (chévrcau) & 1'on dit Jauter comme un Cabri, ce qui fignifie montrer de la joie, ainfi que 1'on fait ordinairement au Cabaret. A la vérité cette derniere explication eft un peu tirée aux cheveux: mais encore vaut-il mieux en fortir de cette faeon, que de citer du grec 6c du latin a propos d'un Cabaret. En un Acte. Ahl c'eft bien dommage! Pour la beauté du fujet il en eut fallu une douzaine. Mais confolons-nous, M. Hadoux n'eft pas mort. suivi de toutes le chancons faite a la Haye. C'eft ici que les Rieurs, les Gaus- fcursj  C 25 ) feurs, les difeurs de Balivernes, les Turlupins, les faifeurs de Rebus &c. vont s'egayer & tomber fur la friperie de notre Auteur; mais on les prévient d'avance que telle chofe qu'ils fasfent, il ne produiront rien d'aufïï bon que cette phrafe. Les efprits parefieux qui ne veulent pas fe donner la peine de creuferles idéés d'autrui, pour en fentir les beautés, traiteront ceel de galimatias; mais nous leur ferons bien voir qu'il y adu fens, & unfens merveilleux. Survl De Toutes, alfurément toutes; on n'en omettra aucune, Le Chancons. Qiiezaquo? dira quelqu'un. Qu'efi>ce qu'un Chancon ? Eh. bien Chancon vient dabord de chant, & le reste d'oü vous voudrez. Quant a nous qui certes voyons clair, nous oenfons que cette jolie phrafe renferme deux fens, & qu'en cela elle eft trés adroite. 1°. au figurè, elle fignifie que la piece fera fuivie de toutes les charifons que 1'auteur a faites a la Haye; & d la lettre qu'elle fera fuivie de tous les chants qu'on fait a la Haye; cequi, comme vous enconviendrez, eft fort fpirituel. Enfin par lui même Chancon eft veritablementuneexpreffion charmante. Rare & fuhlime effort d'unc imaginativc Q ü ne (jede en vigueur a perfonne qui vi^e ! Dans Lans 1782. Ceci eft une circohftance qu'il ne faut pas oublier. Le Sieur Hadoux ne proraet que les Chancons de 1782, & non ceux de 81. II faudra bien que le Lefteur s'en contente; qu'il fe fiche ou non, M. Hadoux ne donnera rien de plus, & nous n'aurons décidément que les Chancons de 82. B 5 L'Au-  ( 26 ) L'Auteur écrït lans, au lieu de 1'an. Pour- quoi? . . . ma foi le Comme/; tateur n'en fait rien, & il avertit qu'il ne s'en foucie gueres. D'ailleurs il faut bien lailfer un petit os a ronger a la Critique. La Critique en littérature eft utile & néceffaire: ce que nous prouvons fans replique, non par un Chancon, nous n'avons pas ce talent, mais par la Chanfon fuivante. Air du Menuet d'Exaudet. Saus humeur Sans aigreur, La Critique Sait relevcr les défauts, Le Sel de fes bons mots Réveille fans qu'il piqué; L'enjouement, L'agrêment Eft fon ftyle; Corrigez en amufant, Et foyez moins plaifant Qu'Utüe. Que le trait de 1'Epigramme Frappe 1'efprit, jamais 1'ame Eparg- (*) MaMufe, enbadinant, charitable & discrctte , Sait de 1'homme d'honneur diftinguer le poëte, Qu'on vante dans Hadoux, la foi, Ia probité, Qu'on prife fa candeur , & fa civilité , Qu'il foit doux, complaifant, ofRcieux, fincere; On le veut., j'y foufcris, & fui.s pret a me tairc. Mais que pour un modele on cite fes écrits, Qu'il foit le plus Ioué de tous les beaux efprits, Comme Roi des auteurs qu'on 1'élcve a l'Empire , Ma biie alors s'cchauffii & je brule d'écrire. Boileau.  ( 27 ) Epargncz, Eloignêz La Satire, Zoïle vain & moqueur i;n degradant fon cceur Fait rirc. Un cenfeur Sans tioirceur Encourage, t S'intércflc a nos progrès, Ne critique jamais Que pour notre avantage, S ai fjcours Eft toujours Ne'cdTaire; Et 1'e'clat de fon flambeau, Loin d'offusquer le beau, L'éclairc. Et Inprtm Lans .... 1783. Autre circonftance effen tielle. M. Hadoux eft un de ces hommes qui ne vont point, comme on dit, chercher midi a quatorze heures ; il inftruit le Public, fans détour, que fes Euvres font imprimées dans 1'année 1783; & nous, par la méme honnêteré, nous croyons devoir lui apprendre auSi que ce Commentaire de fes Euvres eft également imprimé en 1783. L'Auteur qui fait la Rhétorique comme perfonne, a voulu donnerici afon Le&eur un petit exemple de la ligure nommée Jufpen/ion; il a mis des points entre Pan & 1783, en cette maniere lans 1783 ; c'eft une galanterie Litteraire dont on lui faura gré. M: Hadoux a mis inprimé & non pas imprimé paree qü'en effet on ne prononcepas m. C'eft ce  ( 28 ) cc qui s'appelle, en termes thecnïques donner un fouffiet d Ronfard. Vu, Relu et Cqrrigé avec Sotn. Cecï n'eft point une précaution inu-tile. L'Auteur dit quil a Vu; donc le Libraire eft a i'abri de tout reproche. L'Auteur dit qu'il a relu; donc il n'a rien omis d'efienciel. Enfin 1'Auteur dit qu'il aCoRRiGs avec Soin; donc il n'y a pas de fautes;"&en effet, après avoir bien fcrupuleufement épluché fon Livre, nous défions le Prote le plus clairvoyant d'y trouver un feul Iota contre 1'orthographe & la correction. Par Mr. L'Auteur. Pourquoi Monjieur ici, & non pas Sieur, comme le Titre le porte? La raifon la plusplaufible eft que Mr. Hadoux n'aime pas a fe répéter; & qu'en homme qui a appris la civilité, il fait qu'il faut toujours mettre Monjieur devant les noms propres. Voyez a eet égard fa troijieme Lettre au Libraire. Hadoux. Ce nom fe trouve placé en gros caradteres, afin qu'on ne puiffe jamais perdre de vue PAuteur du livre; des efprits diftraits pouroient queiquefois 1'oublier. D'ailleurs M. Hadoux ne veut pas que dans les fiecles futurs les Euvres éprouvent le fort fachcux d'un grand nombre douvrages charmans , dont les Auteurs font inconnus, paree qu'ils ont négligé de prendre cette utileprécaution; par exemple le Pervigilium veneris* la fatire Menippêe, le Chef d'ceuvre d'un incpnnu, la Barbe bleue &c. Voyez a ce fujet le couvert du livre de M. Hadoux. Tous les bons Auteurs devroient en ufer ainfi. Nous  ( 29 ) Nous croyons ne pouvoir mieux terminer ces re mar ques fur le Titre de M. Hadoux que par ce Quatrain, qui nous a été envoyé quelques jours après la repréfentation du petit Cdbret, & qui ne peut être miéux placé qu'ici. II n'eft point de grimaud qui ne puilïe a fa mode Sur les Champs d'Apollon prefcrire un nouveau code, Et quoique perfiflé , toujours content de lui, Verfer impunément des flots d'encre & d'ennui. TEXTE  ( 30 ) NB. Immtdiatement après le Titre ( dans le Livre du Sieur Hadoux) fe trouvent trois Lettres au Libraire , trop précieufes pour être omifes. T E X T E Première Lettre au Libraire MONSIEUR! J^aite moi le plaifir de faire imprimer au plus vite mes euvres, voyent que le Sieur Conflapet n'a pets pu ou voulü, je vous prie de mobliger ie plus vite posfible Comme je Sgai par reputation que vous étes un homme de Confiance & ■.plainde Crêdie,il me feroit bien fatisfaifant de fatisfaire toutes Ces Mefjieurs qu'il mon fait fbonneur de foufcrire, pour l'imprimerie de mes euvrages , C'eft en attendant que j'ai fbonneur d'être votre tres bumble & obeyjfance. Serviteur HADOUX. REMARQ.UES Xl feroit inutile pour le LecTeur, & trop fatigant pour nous , d'entreprendre Fanalyfe de chacun des mots qui compofent cette Lettre, quoiqu'elle ne foit pas moins admirable en détail qu'en gros. iNous ferons feulement obfer- ver  C 31 > ver tr ois chofes principales qu'on y remarque: 1 °. L'empreifement du Sieur Hadoux a faire iroprimer, au plus vite, fes Euvres ;empreffem ent trés flatteur pour le public. 20. L'impui. (Tance ou la non-volonté de M. Conftapel qui probablement n'aura pas bien discerné le mérite de notre Auteur. 30. L'heureux choix que- le Sieur Hadoux a fait d'un Libraire, hommee plain de credie, dont 1'intelligence a fu ajoatc^r un nouveau dégré d'intérêt a Ion charmant lavre. Nous ne pafferons cependant pas fous filence que cettis Lettre, modele du ftile épiftolaire, eft comparable a tout ce que nous avons de Voiture, de Balzac, de St. Evremond &c. Encore ces derniers, quoique généralement eftimés, n'offrent-ils rien d'aufïï gracieux que la tournure des phrafes de notre Auteur; & peut-être n'auroient-ils pas eu 1'ingénieufe idéé d'écrire fimprir.nerie de mes Euvres pour Vim* prejjion de mes lutvres, & de finir par votre trés obéifldnce au lieu de trés obêijfdnt; ce qui eft infiniment plus agréable, ainfi que les bons efprits en coiiviendront. Se-  ( 32 ) Seconde Lettre au Libraire. MONSIEUR! dlyês la bonté de recömmandois d ï'imprimeur qui faffe quatre d Cinq Copie d'un beau papier donc je me doit Jervir pour prefent er a la Cour auquelle je fair ai dor er fous trench>e; ainfi Monfieur je vous récommende auffi da faire mettre un beau Caracler bien lifible & avoir le foin comme pour vous même voigi une Lettre qu'il Conviendret mieux pour mettre dans le bas de ia piéce Concernant le plaifirs c[ue vous me faite pour l'imprimerie de mes nuvres fi cela ne Convien pas vous en êtes wnsjours le maitre. Je fuis en attendant votre tris humble & obeysfance Serviteur 'HADOUX. RE MAR. Q.UES (^ette feconde Lettre plus admirable encore que la première , mériteroit feule un volume entier pour en faire fentir toutes les beautés. La Cour dorée Jbus tranche eft un mot impayable, fans pari er du bas de la piece concernant  ( 33 ) nant le plaiftrs, &c. &c. certainement perfonne n'a le talent d'écrire dans ce goüt. Que Céfar autrefois, la lance fur 1'e'paule, Ait vaincu les Bretons, ait fubjugué la Gaule, Je le crois bien; Mais qu'il eüt entrepris de faire telle Epitre, Quoique de bon Rhéteur il ait acquis le titre, Je n'cn crois rien. Que le grand Cicéron, le fameux Démofthêne, Alent iUüftré, 1'un Rome, & le fecond Athéne, Je le crois bien; Mais qü'aucün de ces deux eüt réuiTi dc mettre Au jour, uae fi belle & ü charmante Lettre, Je n'en crois rien, Que l'immortel Buffon, que RomTeau, queVoltaire De leurs divms e'crits aient e'clairé la terre, Je le crois bien; Mais que ces trois Meflleurs, avec tout leur génie EuiTera pu compofer mimve auiTi jolie, Je n'en crois rien. Ledteurs, on vous a promis de belles chofes: vous voyez que le Sieur Hadoux vous tient parole ; mais gardons un peu d'admiratian pour la Lettre fuivante. Troifieme Lettre au Libraire. MONSIEUR! Comme vous êtes venu hier chez Monjieur Van , je me Juis fait l'honneur de parkr a Mon- fieur, & je lui ai appris que vous aities chargés de faire imprimer mes euvres d mon nom; comme il eft un des foufcrivans il ma dit que cela luy feroit plaiftr & méme je crois qui vous en C far-  C 34 ) pariera pour que vous eüsfiès la bonté de faire imprimés au plus vite comme il efl hier venu beaucoup de Meffieurs & Domefliques me demander fi on ne pouvoit pas pour de l'argent avoir mes euvres ainji Monjieur comme f at parlé d Monjieur Van , ou fat Vhonneur dalier chês lui pour donner l'injlrutlion de la danfe d fes enfants, C'ejl'pour cela Minfieur que je vous prie comme je Sfai qu'il ny'a que vous en ètat d'expedier ceci par votre réputation. C'eft en attendant que j'ai l'honneur d'etre votre tres huvuble & obeyjjance Serviteur HADOUX REMARQUES. ppliquez, je vous prie, la réflexion de vós penfées fur ces mots beaucoup de Meffieurs & Domefliques: c'eft a dire, grands & petits, gens de tout état, de toute profeffion, hommes, femmes, entans, vieillards, tous demandent les Euvres du Sieur Hadoux: tous bru- lent, tous foupirent après eb. bien! eh bien! vous les aurez, & même vous les payerez; paffes, s'il vous plak, aux mots fuivans: pour de l'argent avoir mes Euvres. Certes M. Hadoux ne perd pas la tête; on ne vit pas de lauriers, encore moins de 1'air du temps; & notre Auteur n'eft pas d'avis d'aller chanter aux arbres ou aux échos comme Orphée. II n'y a rien fans doute qui chatouille davantage que les applaudiffemens, mais eet encens ne don-  C 35 ) dcnne point a diner; des louanges toutes pures ne mettent point un homme a fon aife; il y faut mêler du fclide, & la meilleure faeon delouer, felon le Sieur Hadoux, c'eft de louer avec les mains; Fe loge le plus agréable eft dans la bourfe. Maxime ancienne mais qui ne vieillit point. C'eft pour cela, Monjieur, que je vous prie &c, le Ledteur eft prié de méditer cette phrafe que nous appellons, en ftile de College, Periode ronde, paree qu'elle n'a point de fin, autrement ni queue ni tête. C'eft une finefie de Tart, peu commune, & qui exigeoit toute la capacité de notre Auteur. Nous plaignons véritablement ceux qui ont le malheur de n'y rien entendre. Quant a nous qui, grace au ciel, avons reeu de la nature une certaine pénétraticwi, nous avons pafle avec plaifir plus d'une nuit a réfléchir fur les beautés inimitables du livre que nous commentons. Oui', fublime Hadoux, je vous jure Que mes yeux a lire afildus, De vos écrits trente fois lus Ne pcuvent quitter la leéture; Et je ne faurois vous cacher (Ce n'eft pas cependanc pour vous le reprocher) Qn'aux dépens de mes deux prunelies, Votre Livre fi plein de feu Qui vous coüte, dit-on, fi peu, Me coüte a moi de'ja plus de vingt-cinq chandelles; C'eft chofe fure, & croyez mon aveu, Ainfi, LeCteur, malgré 1'adage, Je petix fans doute afliirer que le'jeu Vaut la chandelle, & mêmc davantage. C 2 N. B,  C 36 ) NB. Les trois Lettres au Libraire font fuivie s de deux Epitres dédicatoires, l'une en Vers a S. A. S. Mgr. le Prince d'Orange; Pautre en Profe d S. A. R. la Princeffe fon Epoufe. Le refpeft que nous devons d ces Perfonnes Augujles, ne nous permet pas de commenter ces deux Pieces. Nous y avons feulement joint deux annexes; la première fournie par un ami; la feconde de nous, & dans laquelh nous efpérons^ rtavoir en rien bleffé la décence & l'honnêtefè convenables. T E X T E A SON ALTESSE MONSEIGNEUR LE PRINCE d'ORANGE et DE NASSAU &c. &c. &c. "Votre AlteiTe Monfeigncur, Daignés lire ce petit Ouvrage, Vous qui Comblés tout les Cceurs Agrées le de vos fuffrages. Je voudrois être en Etat De contribuer maintenant Par mes petits Appas Faire tous vos Amufemens. / Daignés Monfeigneur Toute votre Illuftre familie D'Encourager le Petic Autbeur Qui pourroit devenir plus habile. HADOUX. Un  ( 37 ) X_Jn Plaifant (que le Commentateur connoït fort bien) a imagine' de faire des Bouts-Rimés fur la piece de vers cl-deffus. II fupplie S. A. S. Monfeigneur le Prince d'Orange de vouloir bien ne pas être offenfé de 1'idée qui lui eft venue de mettre un Pendant au Tableau Poë'tique du Sieur Hadoux. Ceft le meilleur Commentaire qu'on en puiffe faire. A Son Altesse Sérénissime. Soyez indulgent, Monfeigneur, Envers ce piroyable ouvrage, Je conviens qu'il fait mal au cceur, Qu'il eft indigne de fuffrage; Mais Phcbus ignoroit qu'en fes charmans Elats Un Sieur Hadoux exiftat main:enant; Mufes jamais de leurs divins appas N'ont honoré fes fots amufements. Ainfi daignez pardonner, Monfeigneur, Vous, & votre Angufte familie, A 1'ignorance de 1'Auteur Qui jamais, j'en réponds, ne fera plus babile. g # # # * N. Deput's Pimprefiion, M. Hadoux a cbangé de place quelques piêces, en mettant la fin au commencement &c Mais nous crayons devoir fuivre Pordre primitif. C 3 T E X-  ( 33 ) T E X T E. ASON ALTESSE SERENISSIME et ROYALE MADAME LA PRINCESSE d'ORANGE et DE NASSAU &c. &c. &c. MADAME! Je me fuis avifé de Compofer cette piece de Comédie, pour avoir 1'honneur de vous la prefenter moimême, mon unique defir eft que je voudrois que ce petit ouvrage pourroit vous ètre agréable, dont je n'aurai aucun regret de 1'avoir faite, Cependant ayés la Complaifance de la lire, vous trouveres la vie de 1'infortunée Mademoifelle babé qui eft la vertue reconpanfée ou le Dragon verd, daignés agréer mes foibles penfées. Comme ceci eft mon premier effay je vous demande que vous me fasliez 1'honneur de la trouver agréable, C'eft en atteiidant que j'ai 1'honneur de vous fouhaiter toutes fortes de Bénédictions fur votre illuftre familie en general, je finis avec toutes 1'obeisfance poffible, votre tres humble Serviteur HADOUX Maitre de danfe Citoyent de Cette ville a la Haye. Corredif de la Lettre ci dejfus. A SON ALTESSE ROYALE. MADAME! D ans le rang élevé oü la Providence a placé votre Alteffe Royale, on eft fouvent expofé a des Complimens indiscrets que 1'ignorance & la fotife (qui ne doutent de rien; vien- nent  ( 39 ) nent offrir, fans faeon, comme la plus belle chofe du monde. C'eft une des peines attachéesa, votre étatilluftre: heurcux encorequand 1'importunité ne va pas plus loin! II eft vrai qu'on ne trouve pas partout des Prioces auiïi indulgens que Vous, Madame, & votre Augufte Epoux.; mais parmi toutes les qualkés qui Vous diftinguent, la bienfaifance tient le premier rang, & c'eft ce qui fait éclore la plupart des chafmans morceaux de Poëfie que le nouvel an Vous procure. Quant au Dragon Verd que le Sieur Hadoux Vous préfente tout bonnement: la réputation en eft fake, & tout le monde convient que c'eft une Piece unique en fon genre. II me refte a m'excufer, Madame, de laliberté que je prends en ce moment; je fuis loin de partager la témérité du Sieur Hadoux, & je fupplie Votre Altesse Royale de ne regarder cette Lettre que comme une Amende honorable pour celle que ce Rimailleur a 1'audace de Vous adreffer. Je finirai par une réflexion, qui fürement ne Vous aura point échappé: c'eft qu'en général les fots font entreprenans, & que les hommes modeftes, avec plus de raifons peut-être pour fe faire connoitre, reftent ignorés faute d'occaïïons ou de hardieffe. Daignez, Madame, agréer les fentimens refpeftueux avec lesquels je fuis De Votre Altesse Royale. Le trés humble & trèsobéiffant-Servkeur ] André Rhiba d'Acunenga, habitant de Criiicopole. C 4 LE  LE DRAGON verd Comédie en cioq Actes & en profe compofee, par le Sieur HADOUX .... &c. Bourgeois de cette Ville fait a la Haye le i2e. Septembre 1782. REMARQ.UES. ^^lous n'avons rien a dire fur ceTitre, finon que nous prions le Lecteur d'obferver que cette piece eft écrite en profe compofee; on en jugera facilement a lalecture. Ici M. Hadoux fe qualifie de Bourgeois de cette viüe fait d la Haye le 12 Septembre 1782. Peut-être veut-il dire qu'il a été fait bourgeois ce jour-la; c'eft ce que nous ignorons. En qualité de Commentateurs nous devriöns fans doute examiner tous les'fens poffibles de ces mots, mais il faut bien laiffer quelque chofe a deviner; d'ailleurs la modejlie la pudeur de nos Leftrices... :A'^\«$>.4h^ 4>. o <&>ip&tp&i& SCÈNE PREMIER. NEUVILLE et JOSEPH. N eu v ille. M on fils je fuis dans une inquïétude extraordinaire depuis cinq a fix jours, j'attends des lettres de Lion , je ne fcais corament Diable elle n'arrivent pas. . Jo- CO Cet arrangement des mots, Verd Comedie , eft uil trait de génie de 1'Editeur, qui ajoute une grèce infinie a ce Titre, & dont M. Hadoux a été fmgulterement reconnoiffant. LE ;DEAGON V E R D COMÉDIE(i) EN CINQ A CTESetEN P R O S E.  C 43 ) J o s e p h. II n'y a pas encore de tems perdu,je crois que vous en aurés aujourd'huy. Neuville. Mais tu ne Scais pas que je ne peut pas attendre la raifon de ceci (2), & qu'il doit arriver ici un Capitaine pour m'acheter des draps, pour habiller fa compagnie, & je n'ai juftement point ce qui lui faudra dans une conjeclure come ceci (3 >, cela me fera une belle reputation quand il ne trouyera rien chés moi. sssssssssssssssssssssssssssssssssssss; SCÈNE II. JOLI CO EUR (entre fur la Scène avec plufieurs lettres en mains. M cnfieur je viens de la pofte, il y avoit juftement ces Lettres a vötre adreffe. (IIfort.') Neuville {doit décacheter la lettre & la lire.) Donne mon ami, il y a longtems que je les attends, voïons ce qu'elles me chantent (4), Ha (2) M. Neuville eft trop prefle pour attendre la raifon ; un autre auroit mis entendre, mais la phrafe eüt été languiffante. (3) Conje&ure & non pas conjon&ttre, termc plat, dont notre Auteur ne s'eft jamais fervi dans aucnn cas. • (4) Chantent. C'eftici qu'on doitdire au Sieur Hadoux : Vous avez le tour libre & le beau choix des i::ots. Ce Chantent eft délicieufement placé, il prepare k quclque chofe qui fans doute fera plaiflr. Chantent'.  ( 44 ) Ha! en voila une de Mon Marchand Fabrïcant de Lion. „ Monfieur je vous prie de m'excufer li je vous ai fait attendre, attendu que rnes draps font encore fous preffe ( 5), li vous avés la commodite de vous tranfporter chés moi, vous pourrés choifir les plus belles marchandifes, & je vous les pafferai a bon compte. Je Suis vötre trés hurable & obe'ïffant Serviteur, Le Sieur Manuël a Lion. N EUVILLE. Comment Diable attend-il cela, penfe t'il que c'eft une promenade de campagne,deMadrix a Lion, c'eft encore une bonne courfe, il pouvoit bien m'envoïer ce que je lui ai demandê, il ne m'expóferoït pas {6). J O S E P H. Mon Pére vous me permettrés que je vous dife mon fentiment a eet égard d'y aller,c'eft vötre interêtal'exception que vous risqués beaucoup, parceque 1'on attend tous les jours pluli eurs Briguants ,qui ne font qu'arrêterles voïageurs rénexion bien faite, il faut fe précaution ner d'une bonne paire de piftolets a doublés coups, (5) Nous 1'avions bien prévu;le criant de cette Lettre annonce que les draps font fous preffe. Certes Ia profe compofée du Sieur Hadoux mérite bien auffi d'être fous prejfel (6) De Madrid a Lyon il y a au moins 160 Iieues. La promenade eft un peu longue pour aller choifir des étoffes dont on a befoin dans le moment. Mais peut-être la machine volante du sieur Desforges elt-elle en ufage en Efpagne ? ou peut-être s'y fert-on du fecret de M. Linguet ? au refte qu'importe, 1'auteur n'eft pastenu de nonimer la voiturc que prendra M. Neuville.  ( 45 ) coups, & avoir foin d'être monté d'un bon Cheval C7)- Neuville. Ce que tu dis la eft au mieux , il te femble qu'avec mes deux piftolets que je m'en vais faire trembler la terre, joint a cela j'attendöis autre chofe de toi. J o s e p h. Que fouhaités vous de mieux vous n'avés qu'a parler (8). N euville. Puisque un Cheval & deux piftolets font bons prenésen auffi (9) nous irons enfemble, par compagnie, vous êtes en état de defendre vötre Pere en cas de néceiïïté au danger. J o s e p h. Vous me mettés au comble de ma jo'ïe, penfés mon Pére fi je ne vous en ai parler, c'étoit crainte de vous déplaire, & en réponfe que vous m'auriés dit que ma Sceur Babé n'auroit pas pu garder la Maifon. Neu- (7) Ah! voila ce qui s'appelle parler! En effet il n'y a pas de meflleure rédinsote qu'un cheval. Quand il pleut, ou qu'on eft prefïe il n'y a qu'afe mettre uq bon cheval furie corps; c'eft un merveilleux fecret dont la Cavaierie devroit faire ufage , pour épargner les manteaux. Quant ao Sieur Hadoux , pn dit qu'il n'en fait jamais d'autre , il a toujours un cheval fur lui, Hyver comme Eté. (8) Le bon Jofeph! le charmant fils! c'eft Ie portrait, dit-on, du jeune Hadoux. (9) Prenez-en eft bien dit, c'eft le mot propre; comme on dit pre/iez une prife de tabac, un verre de Punch, &c.  ( 45 ) Neuville. Comment mon fils vous prenés vötre fceur pour peu capable, Appelles la qu'elle me vienne parler. SCÈNE III. BABE' ( Fait une reverjnce d fon Pére-, (ito). Neuville. JVJa fille Babé, j'ai une chöfe a vous demander, êftes vous bien en état de garder la maifon, & avoir foin du Commerce , pendant quelquesj ours d'abfence, parceque je dois partir avec vötre frére pour huit ou dix jours, j'éfpére que vous vous conduirés avec probité pendant mon voyage {li). va* (10) Cette fille eft fort bien élevce. Cc feroit ici le heu de faire fon portrait; mais nous renvoyons le Lefteur au feuillet blanc de Triftram Sandi; c'eft k dire que ne nous feutant pas le talent néceffaire pourlapeindre aufti belle que nous Ia voyons, nous laiffons Ie Ledeur maitre de l'imaginer telle qu'il la voudróit JBrune ou Ablonde, cela nous eft égal. Cependant comme il iaut etre üncere, nous voulons bien dire que c'eft une petite maflue, jouflue, forte en gorge, haute en couleur & fentant quelque peu le cafignon, comme Mademoifelle P 0u Madanïe N (11) Ce voyaee de Madrid k Lyon ne durera au plus que 10 jours, dit il , pour aller, revenir, & faire fes emplettes cela eft vif, mais M. Hadoux a eu loin d envoyer quelqu'un pour applanir les Pyrenées  C 47 ) B a b é Mon Pére je ne m'en ferai qu'honneur, & foyés perfuadé de la fidélite h vötre retour, je vous rendrai un éxaö; fidéle compte, de tout ce que j'aurai vendu. Neuville. Entend-tu ta Soeur cela ne lui fera point de mal, cela lui apprendra a tenir ménage. j o s e p h. Comment mon Pére, voudrés vous laiffer ma Soeur toute feule a la Maifon. Neuville. Hé pourquoi pas, & nous pafferons auffi chés mon beaufrére l'Abbé, nous lui prie-* rons de paffer fouvent chés moi, pour avoir Pceil a ce quil fe paffera, d'abord qu'il s'en donne la peine, ma Maifon fera un lieu de toute Sureté. (12) B abé. Comment mon Pére, vous vouléz que ce Vilain oncle vienne ici fi iouvent, vous me permettrés de vous dire que j'aime mieux me palfer de fa Compagnie & refter feule, attendu qu'il n'eft qu'un Débaucheur. (13) N e u- (12) Un lieu de toute Sureté] ceci eft un peu équivoque. Eft-ce k dire que dès que l'Abbé y fera, 011 ne risquera rien en allant voir la belle Babé? 'Ma foi, notre pénétration eft ici en défaut. Que le LeÓeur cherche lui-même. (1.3) La pauvre petite! affurément elle n'a pas befoin d'un débaucheur, elle a encore fa robe d'innocence, n'admirez-vous pas ce langage fimple & naïf? Ah! Mr, Hadoux, comme ca fend ie cocur!  ( 43 ) Neuville. Comment Babé, vous m'ozés parler ainfi d'un frére que j'ai tant de refpeft pour lui, & fur tout un homme d'Eglize, '14) mon fils j'entrevois la délunion il y a furement du myllére, Cette friponne elle voudroit plutót être feule pour mieux jouër fon rolle, ma fille vous voudriés donc plustöt refter Seule? B abé. Vous me ferés inhnirnent plus de plaifir parceque je ne puis pas fouftris fes maniéres. Ne u ville. Ma fille je vous trouve fort impertinente, que vous parlés ainfi de vötre onck, n'attendés pas que j'aurai la foibleffe de vous laiffer toute feule a la Maifon; allons mon fils préparons nous pour partir, & quand nous ierons prêts, noas pafferons chés mon frére, entendés vous ma fille je vous prie d'avoir beaucoup de refpeft pour lui, a Dieu mon Enfant embrasfe moy, & ton frére; hattons nous de partir au plus vite. (15) Babé. II eft bien Crué'1 pour moi que mon Pére ait de tels Sentiments, il veut m'envoier ici un On- (14) Ce Bourgeois eft un franc fot; ce nigaud ne connoit pas 1'Eglife : mais le pauvre homme eft en Efpagne , & 1'on fait que (15) Cette tirade donne une grande idéé de la maniere dont M. Hadoux fait manier les paflions. Le pere commence p^r une grande colere, & s'appaifant par degrès il finit par embraiTer fa fille. II part fur le champ , sinfi que Jofeph fon fils, avec chacun leur cheval fur le dos, afin d'arrivcr plus promptemcnt.  ( 49 ) Oncle que je détefte, mais voïons il ne manquera pas de venir : qu'il prenne garde a lui de metenir de mauvais discours. L'Abbé. (16) rp e voda ma ChireBabé; comment va 1'Etat de la chére Santé. (iö) Cet abbèlk eftun maitre renard qui croque volontiers les poules du voifinagc. On nous a affuré que c'eft lui qui a donrié occafion aux Coupiets fuivans cui önt couru tout Paris il y a deux ans. Ce petit collet qui n'a pas la main laidc, pr-crioit plaifir a la faire baifer au* femmes : un plaifant le Chanfonna. Sur l'air: l'ordre Ffancdis 'eft un ordre admi.able. De 1'univers 1'antique Capitale (a) Offre aux humains un fpectacle plaifant, D'un prètre heureux la mule pa'iorale Recoit au moins mille baifers par an. Dans nos climats, la morgue cléricale Sait imker 1'orgueil Ultramontain, De nos Pi'élats la main pontificale A nos baif.rs offre uu anneau divin. (b) Maïs grace aux Dieux une nouvelle mode Va mettre en vogue un ufage plus doux, Certain Abbé trouve qu'il eft commode D'offrir la main plutöt que les Bijoux. Pour SCÈNE IV. (a) Rome, réfidence du Pape. \Jj) Les Evèques font baifer un diamant qu'ils portent audolgt,  ( 50 ) Babé. a Vous rendre mes devoirs fi j'en fuis capable. I/A. b be. Monfieur vötre Pére a paffé ches moi, m'a dit que j'aie un peu Pceil afa maifon, du tems de fonabfence, &ne vous embarraffés pas ;nous nous accomoderons bien enfemble, vous fcavés que j'ai toujoursbeaucoup eü d'eftime pour vous , vous êtes 1'Enfant le plus Charmant. B ab é. Vous avés bien de la bonté je ne fcais pas en quoi j'ai tant de mérites vis a-vis de Vous. L'A b b ê. ° Cette chere enfante elle eft fi bonne, & li douce, que je voudrois qu'elle ne fut pas ma Niéce. Ba bé. Que dites vous La. L'A b b é. Rien, rien, je difois feulement que vous êtes Charmante, ma foi je voudrois paffer toute ma Pour effayer Ic pouvoir de I'Eglife A chaQue Belle il fait baifer fa main. Ces jours paffes une jeune Marquife Saus le favoir, a frayé le chemin. (c) Si la facon fcmble nouvelle & rare, C'eft que chacun le fait comme il Temend, Dans tous les temps I'Eglife fut bifarre, De tous fes torts ce n'eft pas le jplus grand. )c) L'av enture eft rée Ue, c'eft Madame Ia Marquife de L. R. & qui M, fAbbé de fit baifer fa main. Demandez plutöt i Madame la Ducheffe de M,  (5i ) vie avec vous, je crois que nous ferions un bon ménage. Babé. Vous Scavés qui je fuis & qui vous êtes, mon Pére ne vous a pas fait venir ici pour parler da ménage, & pour me trouver charmante, tout ceci ne manifeffe pas de bonnes intentions pour moy. L'A b b é. Comment ma Chére Amie croyés vous que je fuis ici pour vous caufer de la peine, bien éloigné de la , je fuis prêt avous oifrir tout ce qu'i dépendra de moi. Babè. Je n'ay befoin d'aucuns de vos Services, jusques a préfent, attendés de moy que je Suis for en état de diriger ce qu'il y a ici. L'A b b é. Je nignore 'pas que vous foyés capable ma chére enfante, vous êtes fi raifonnable & fi char* manté, que je fuis, tout enchanté de vous, mais vous êtes fi bien mife depuis que votre Pére eft parti vous avés des attraits charmants, & des petits jeux foupirants'i7)vous n'êtes pas accoutumée de vous mettre fi bien que cela. B ab e. Ne m'approuvés vous pas dans ma facon de m'habiller. L'Ab- (17) De petits jeux foupirans doivent être bien joïfs ; je n'en ai jamais vu. Nous connoiffons des yeux vifs\ dss yeux brillans, des yeux doux , des yeux per gans des yeux langoureux. mais des yeux foupirans , il n'ap' partient qu'a un abbé de voir cela, & \ un Hadoux de Ie dire. D 2  C 52 ) L'Abbé. Mais fi fait je fuis ravie de vous voir conté cela, allons Babé j'ay envie de vous parler, franchement, & je voudrois vous declarer mon fent'iment comme nous avons 1'occafiOn, d'être enfemble, vötre Pére n'eft juftement pas la pour fourrer fon né a tout ce que je dis. Babé. Qu'eft ce que vous avés donc de fi intéresfant a me dire, j'ay toujours cru que vous êties 1'Amie de mon Pére. L'Abbé. Oui c'eft qu'il fourré fouvent fa mufique & fon né oü il n'a que faire, fur ce que j'ay a vous dire je fuis fort aife qu'il n'y eft pas, pour entendre la Charmante própöfition que j'ay a vous communiquer. Babé. Dites moi donc ce que vous avés a me dire, vous me faites languir il faut que cela foit donc des chofes intéréffantes. L'Abbé. M'y voila, j'cy un progrés a vous communiquer, que je ne me plait pas dans mon étude, i'ay une toute autre envie de paffer ma vie ma chére enfante, j'ay tant d'amitié pour vous que fi vous' vouslés m'en croire nousprendronstoutes les plus belles & fines Marchandifes de vö tre Pére, avec ceque jepofféde nous pafferons dans quelque Pays Etranger & nous vivrons Enfemble. (18) „ v Corn- Cr 8) L'abbé a raifon d'appeller cela un pro? es Au refte la propofition eft engageante, & I on connoit vlu* d'un SSe;! dans cette République, formé par un progrés de cette'efpece. Oh! M. Hadoux connoit le monde.  ( 53 ) Babé. Comment monOncle fefontla vosSentiments mon Pére vous a fort bien choifi, que dira t-iï quand il reviendra. L'A b b é. II dira ce qu'il voudra quand nous ni ferons plus. B a b b é. Fakes vous bien refteaionde ce que vous me dites, ne penfés vous pas que mon Pére eft en état de nous trouver en telle partie du Monde que nous Soyons, Hélas mon Pére a bien coufu fa Maifon, en place, d'y avoir mis un frére, il y a placé un PerfL-cuteur. L'A b b é. Allons ma Chére Amie décidés vous nous n'avons plus de tems a perdre. Babé. Non Monfieur, ne croies pas avec toutes vos belles parolés, que vous foyés capable de me féduire au point de voller toutes les Marchandifes de monPére, & partir avec un hommede vötre efpéce & fi je difois ceci a 1'arrivée de mon Pére que fon meilleurAmitendaleruiner; L'A b b é. Si vous n'acceptés pas la pröpófition, je je vous connois afTés Difcrette pour n'en point parler, mais ma chére enfante j'ai tant d'Amitié pour vous que je ne puis rn'empêcher de vous dire, fi vous ne vous décidé pas bien vite, je trouverai les moyens d'authorité fur vous (19). ^ (10) Quel langage patelin! Comme notre Auteur rend merveilleufement 'le jargon mielleux mais dccidé d'un abbé! Courage Hadoux, vous dialoguez a merveille. D 3  C54) B ae é. II appartient bien a vous de me venir parler icy d'Authorité , comences a regarder la porte & n'y rentrés jamais; & attendés de moy que j'en inflruirai mon Pére a fon arrivé e. L'Abbé. Ha oui da vous vous y prencs come cela, c'êft moi qui ait un beau détail a lui Faire, je lui dirai que vous méttes vóire oncle a la porte, pour mieux prendre vos plaifirs, voyons dépéchons nous d'écrire vite a fon Pere. IJabbé fe retire de la Siene (20 j Babé. Ce Monftre^ que veut t'il faire. Ho je me moque fort peu de luy, mais mon Pere fera encore capable de le croire paree qu'il a touiours beaucoup eü de confiance en lui. SCÈNE V. LAURIN (entre fur la Scène,) H a Votre trés humble Serviteur ma chére Demoifelle, comment va 1'état de votre Chére Santé. Ba- (20) L'Abbé nebadine point; il fe retire de la Siene [c'elt a d're en ftile vulgaire de la Scène] & il va fur le charnp écrire a fon frerc Neuville qui dok être de ia k Lyon, attendü qu'il y a bien une demie heure qu'il eft parti, mais Babé affure qu'elle ,s'.en moaue fort peu, c'eft comme qui diroit beaucoup.  C 55 ) Babé (Faifant ta révérence.') (21) A vous rendre mes devoirs fi j'en fuis capable, qu'eft ce qu'il y a pour votre Service! L a u r 1n. Je fuis venu expreflement pour voir vos Chantillons, de foyes, & s'yl y a quelque chofe dt mon gout, je pourrois en acheter. Babé. Attendés Monfieur je m'en vai les cherchcr L a u r i n. Ne vous donnés pas la peine je nefuis pas préffé, mais dites moi un peu ma belle enfante ou eft Monfieur vötre Pére. Babé. II eft hors de Ville depuis ce matin. L a u r i n. Mademoifelle je fuis ravi d'avoir 1'Honneur de vötre compagnie, fi vous Souhaités noas rentrerons chés vous (22), &je Choifirais des Etoffes. Babé. Monfieur il n'eft point néce'ffaire que vous entriés chés moy, puisque voila les Chantillons. Lau- OO On voit que Babé ne manque jamais a la Civilité, nous croyons qu'elle a appris ii danfer & a faluer. (22) 11 faut croire que M. Laurin & Babé font dans la rue, puisque le premier dit neus rent-rerons. En outre Ce nous rentrerons fignifie qu'ils étoie .t dabord dedans, & qu'ils font fortis. Comment ajufter Cela? Pour ne point commettre ici d'erreur capitale, nous exhortons le Lecteur a le demandcr au Sieur Hadoux lui memc. D 4  ( 56 ) L a u r i n. Mademoifelle avés vous crainte de quelque chófe, je voudrois avoir 1'honneur de prendre. une taffe de caffé avec vous. Babé. Je ne Ferois pas cela pour toute chöfe au Monde, quand mon Pére fera de retour je yeux bien avoir pet hanneur la. L a ü r i n. Mais c'eft juftement parcequ'il n'y eft pas que je vqudroit avoir le plaifir de vötre compagnie. Babé. Vous ne venés doncpas ici pour les draps(23% L a u r i n. a Vous parler franchement, je fuis expresfement venü pour vous communiquer ma fafon de penfer, Babé. Voyons ce que c'eft dépéchons nous (24\ L a U n i n. Vous me permettrés de vous dire que je vous trouve adörable, & je brüle d'Amour pour vous, fi je croyois mon Ardeur je vous embraferois fur Plnftant, Babé que vous étes Gen03) La qüeflion eit un peu faiigrehue; Ce genttthomme pouvoit répondre: Pardonnez-rhoi, Mademoifelle , je viens pour les draps, non draps de laine, mais bien draps de lit, & couvertes encore ft vous voulez, A parler vrai, fa rcponfe dit la rnême chofe en d'autres termes. On compieud affez cz gue c'eft que fa facon de penfer: glpire fojt a 1'auteur Hadoux qui fait fi délicatement voiler les chofes. (24) Babé, certes, le comprend h merveille; jup-ezen par fon empreffement. Ah nature! nature !  ( 57 ) Gentille, non je n'ai jamais aimé fi tendrement que vous, vous me permettre de vous embrafer (25). (L'A BB E entre fur la Scène e'coute ce qu'ils difent. j Babé fe laiffe embrafer fans faire rêfiftance (26). SCE- (25) II fauc avouer. que voila une déclaration d'amour bien irouflee. (26) Sans faire réfijlance. La pauvre pctitc! c'eft qu'èllen'étoitpasla plusforte;peut-être lepied lui avoitil gliflé, & qu'elle craignoit de tombcr en fe débattant? peut-être auffi Al. Laurin avoit-il trouvé le chemin fecret de fon Coeur, & qu'alors, malgré fes bonnes réfolutions, cette fage démoifclle éprouvoit un je ne fats quoi plus facile a fentir qu'a peindre? Nous coniiois1'ons , hélas , par une douce expériencc, le pouvoir de eet enfant malin qui fubjugue jusqu'aux Dieux-mêmes. Quelle in'dulgence ne mérite pas, dans ces momens imprévus , une jeune fille qu'un heureux hazard foustrait aux yeux de fes argus? On a beau déclamer contre le penchant le plus doux de la nature , on ne parviendra jamais qu'ii faire des Hypocrites. Voici \ ce fujet uneChanfon qui nous a toujours paru fort expreflïye, & que nous intitu'erons Le pouvoir de Parnour, ou la colere d'un amant. Sur Pair. b Mabomet. Perfide Amour, je vcux brifer mes chaines, Je te refufe a jamais mon cncens; je n'ai fenti fous tes loix que des peines. Tes feux cruels m'ont troublé trop longtemps. Perfide Amour &c. D 5 Tes  ( 58 ) SCÈNE Vf. L'Abbé (avance les furprenche (27). H a je vous y prend eft ce ainfi que vous y prenés (28), je ne fuis pas en doute pourquoy vous me chaffés d'iey, c'eft des petits galants qu'il foyent bien carreffants par ma foy; vous vous killes bien embrafer, Lau- Tes vains attraits ne touchent plus mon ime, J'ai trop fouffert, Amour, de les rigueürs. Si j'ai brulé de la plus tendre flamme, Devais-je, hélas, ne verfer que des pleursl Perfide Amour &c. De ma Thisbé fi tu formas les charmes, Si ton fouris Tembellit chaque jour, Ah! tu devais, en lui prêtant tesarmes, D'un de tes traits la percer a fon tour. Perfide Amour &c. De tes rigueurs je perdrai la mémoire, En célébrant 1'aimable Dieu du vifi. Mais qu'ai-je dit? adieu faible victoire, Thisbé paroit, ma colere s'eteint. Charmant amour, fon pouvoir fait ta gloire , C'eft dans fes yeux que je lis mon deftin. (27) Qu'eft-ce que cela, avancer les furprencèe? peut-être eft-ce un mot efpagnol que nous ne comprenons pas: nous demandons pardon de notre ignorance; on ne peut pas être univerfel. (28) EJl-ce ainfi que vous y prenez ? il y a ici une faute d'imprcffion. II faut lire: eft-ce ainfi que vous lui prenez ?  ( 59 ) L a u r i: n. Que veut-il dire ce drolle la, avec qu'elle prétenfion parle t-il, vous n'avés fimplement qu'a le duffer d'i9y. L'A b b e. Je vous le Confeille Monfieur le faquin de parler ainfi de la forte, Scavés vous que moy même je vous mettrai a la porte, Allons ma Niéce chez vous nous verrons qui eft ce qui aura beau jeu a 1'arrivée de vötre Pére, je luy écrirai vötre petite conduite, il ne manquera pas de vous donner chatiment, & je lui recommanderai de vous punir, & même s'yl veut m'en croire qu'il vous falfe enfermer pour le refte de vos jours, Babé. Se retire dans fa maifon (29). L a u r 1 n. Ecoutés Monfieur le petit Collet, fi j'apprends que vous caufiés quelque peine a cette Demoifelle, je vous couperai les deux Oreilles entendés vous CLaurin fe retire.) L'A b b é. Diable comme il eft mauvais, il coupera mes deux Oreilles, je ne m'y fie pas trop, il eft encore alfés capable de la faire , j'entrevois de la manigeance avec Mademoifelle Babé, je (29) Eft-ce Babé qui prononce ces mots fe retire dans fa maifon? ou eft ce fimplement un avis que Babé va rentrer chez elie ? Après avoir tout bien pefé, nous nous décidons pour Ie premier. C'eft elle qui doit s'avancer jusques fur le bord du théAtre, & dire en confidence au Parterre, d'une voix a moitié baffe, fe retire dans fa maifon.  ( 6o ) je crois que j'aurai cependant bientöt réponfe de la première lettre (30) que j'ay écritte a fon Pére. FIN DE LA PREMIÈRE ACTE. (30) La première lettre ! il nous femble que l'Abbé n'en a encore écrit qu'une; mais après tout, PAuteur fait apparamment mieux que nous ce qu'il veut dire. LA  ( 6i ) LA DECORATION de la É*. Acte eji qu'il doit faire mi & Mademoifelle BABE doit être aux Ecoutes dans fa Maifon Cl). CO Faire uni tfeftk* e .. c'e£ k dg .. ir^t l^T^ vertuelfe Babé qui eft aux écoutes dans fa maifon eentilhomme doit i^^Sü&q^ï! couvte, puisqu'i.adit ACTE SECONDE. SCÈNE I. La uRIN (ww doucement frapper d la porie de Babé.) 2^ a ^ port/, frappons trots ou quatre C0UPS' Babe {répond.) Qui eft la? C'eft rm^^^^^h^. vrés moy (i), je vous en prie. j aurots be foin abfolument de vous parler.  C 62 ) SCÈNE II. Babé (repondra par la fenetre de fa Chambre.) JVjonfieur je n'ouvre pas pour qui que foit, apprenés que ce n'eft pas une heure qu'il convienne de venir parler a une honnête Demoifelle, je vous Confeille de vous retirer ou je Scaurai quoi faire. L a ü r i n. Ma chére Amie, je vous promet que perfonne n'en Seaura rien Faites moy le plaifir de m'accorder Pentrée de chés vous, & li vous ne m'ouvrés pas la porte je fuis capable de 1'Enfoncer en dedans ( 3). lui-même qu'il venoit pourles draps. Mais pour le couvrir il faut dabord lui öuvrir; & Babé tiendra bon, quoiqu'elle foit füre d'être feule; car fon pere & fon frere font partis le matin , ainfi qu'on Pa vu plus haut, & ils font déja bien loin. (3) On ne peut pas menacer plus poliment. Dans tout ce que dit & fait Lorrin, il y a une délicateffe qui enchante; ce jeune homme fera de grands progrès ;cependant il a tort de vouloir enfoncer la porte en dedans, cela feroit bien plus beau en dehors. SC£.  ( 63 ) SCÈNE ïtl Joseph (entre d VInflant en écoutans ce que dit Laurin d fa Soeur aïant des Bottes aux Jambes & des Efperons &un foit en mains (4>. Qu'eft-ce quejentends la, il me femble qu'il y a quelqu'un a la porte de ma fceur, voïons ce qu'eft ; fi je pourrois le connoitre a toute apparence; ce que Ton a écrit eft peut être, vraï. Laü- (4) Eft-ce Babé qui a des bottes aux jambes? Eft-ce Laurin, eft-ce Jofeph ? Mais cela ne fait rien a Paffaire. Examinons fculement comment Jofeph peut fe trouver Pa. II eft parti le matin pour Lyon avec fon pere; quelqucs heures après,l'Abbé leur a écrit, par la pofte, que Mademoifelle Babé étoit une coquine; fans doute cette lettre étoit adreffée k Lyon oü Neuville eft cenfé devoir arriver. Mais dès la première nuit, la lettre eft recue, le rapide Jofeph, toujours fon cheval au dos, a deja repaffé les Pyrenées, & fe trouve k Madrid; voila ce qui s'appelle voyager! Mercure n'y feroit ceuvrè. Mais nous devons croire qu'il y a la desfous quelque peu de fortilcgc; car de penfer que notre Auteur ait entendu qu'il y a trois ou quatre fémaines d'intervalle entre le premier acte & le fecond, ce feroit lui faire injure. M. Hadoux n'eft pas capable de commettre une 'telle faute contre la regie des 24 heures fi ftricte au théatre. C'étoit bon dans les rapfodies du VMe. fiecle. Oü fouvent le héros d'un fpeftacle groffier, Enfant au premier acte eft barbon au dernier Vbici la regie. Qu'en un lieu , qu'en un jour.unfeul faitaccompll Tiennejusqu'a la fin le théütre rempli. Boileau. Mais M. Hadoux fait cela mieux que nous.  ( 64 ) Laurin. Vous ne voulés donc pas m'ouvrir, Babé» vous ne répondéspas, je crois que le plus court eft de me rentourner. Joseph. luy Frappant fur PEpaule. Qui éfte vous que pretendés vous faire Icy fi tard. Laurin. Je vous dirai qu'il y a ici proche une jolie Demoifelledepuis que fon Pére eft parti; qu'elle recoit du monde a mon egard: je n'ay pas pü voircela, il ne ferok pas ëtonnant qu'on luy donne une mauvais réputation. A Dieu Monfieur je ne peut point avoir 1'honneur de vótre Compagnie plus longtems. ( Laurin fe retire,) Joseph (avance d la porte de fa Soeur frape trois ou quatre coups. Mademoifelle ouvrés s'yl vous plait paree que j'ay beföin de vous parler de quelque chöfè; Babé {otivre fa Fênêtre. Qui eft la. Joseph. C'eft quelqu'un que vous connoilfés bien Vous ne ferés furement pas fachée. Babé. Quant ce feroit mon Pére je n'ouvrirois pas la porte. Joseph (tourne la Té te au public (5). Eft il polfible qu'on eü Calomnié ma foeur après C5) Je le crois fans peine; ü nous la tourne aufli; il la tourneroit a bien d'autrcs ; nous ne favons plus que' penfer de ce garcon-la; il va & vient de Madrid a Lyon eri  C 65 ) aprés de cc que J'entends, voyons faifons luy ouvrir, nous verrons la Maifon s'y le tout y eit encore, Mademoifelle ouvres moy. Babé. Je n'ouvre pas vous dis-je a quique ce foit, vous paffés fort malj, vous, votre temps, alles courir plus loin vous tronvéres peut être. Joseph. Vous ne voulés donc pas mouvrir. Babé. Non. Joseph. Je fuis obligé préfentement de vous dire que je fuis vötre frére, je vois que vousne me ferés aucune difficulté de mouvrir la porte. Babé. II ne ce peut pas que vous foïez mon frére, attendu qu'il eft hors de Ville, vouspenfés me tromper en difant que vous êtes mon frére. J o s e p h. Hé oui vous dis-je je fuis vötre frére, je fuis envoié par mon Pére pour vous parler, eft- ce que vous n'entendés pas la voix de vötre frére, avés vousperdu la tête, aprés le tout je commence a me fatiguer. B a* en 12 heures; il frappe chez lui fans être reconnu; il coutrefait fa voix au point que fa foaur le prend pour un coureur de nuit. En vérité eet homme nous met a. bout. Mais dans le fait nous nous fachoHS mal a propos , nous aurions du fentir plutör que M. Hadoux eft fidele h cette regie du légiflateur des poëtes. Que le trouble toujours croiffant de fcene en fcene A fon comble arrivé fe débrouille fans peine Ainfi tout cela fe debrouillera de fui même au gin* quieme afle. E  < 66 ) Babé. Artendes je m'en vais allumer la chandelle, (6 Ha vous voila, mon cher frére je nores jamais penfer que c'etoit vous, & qui vous amene fi tard & fi vite de retour. Joseph. Je vous dirai cela Allons ma Seur n'aves vous rien a me donner a manger. (j) Babé. Que voulés vous que je vous donne, vous feavéz comme je vit quand je fuis feule a la Maifon. Joseph. N'avés vous pas quelques Chapons rotis, ou du bon patté fait a la mode, avec une bonne bouteille devin de Champagne, ma foi je vous dirai qui j'ay bien faim, allons dépêchés vous. Babé. En vérité mon frére vous ni penfés pas, que yeulent dire tous Ceux cy, des Dindons, des Champons, des pattés, & duvin de Champagne , je vous dirai que mon Vin & la Bierre qu'il y a dans la Cave, du pain & du fromage, (8j fi (6) Allur^er la Chandelle. Voila une maifon bien montée pour un marchand.de drap-; F II n'y a pas feulement une Servante. C'eft une grande avarice de la part de notre Auteur , car il ne lui en aur.it pas plus couté. Mais nous devons nous taire, en réfléchiffant que'les filles mêmes d'Augufte farfoferit le mena e, cc filoient les habits de letrr pere. Les temps font biea changés! (7) è Maneer. On diroit un picton qui arrivé dans une auberü;e & qui demande a boire. II eft vrai qu'aprés une fi belle courfe il doit avoir de 1'appétit. (8) ' On vivoit fobrement chez- M. Neuville. A vrai dire les Cuifiniers £fpagnols n'ont jamais eu grande rijputation.'  ( 67 ) fi vous en voulés vous vous accoutuméies aen manger tout auify bien que moy. Joseph (parlant en publier (9) Qu'entend-je eft ce donc la mauvaife conduite que mon Oncle a écrite a mon Pére, il faudroit que mon Oncle fut un Cruél Calomniateur, il faut abfolurnent que je luy parle, & nous verrons ce qu'il me dira de ma Sceur j faite moi le plaifir de rentrer dans vötre chambre pour un Inftant. Babé (fe retire.*) Joseph (21 prend la Lettre dans fa poche en fait la Le£iure au public.) Voyons avant que je voïe, mon Oncle, Lifons la Lettre qu'il a écrit a mon Pére, Mort frére celle 9y eft pour vous affurer de mei trés humbles refpeéts, & en même temps pour vous apprendre la mauvaife conduite de Made^ moifelle vötre fille Babé, vous n'avés pas été Citöt parti qu'elle m'a flanqué a la porte, en difant que je n'avois pas befoin de refier chés elle, je me fuis retiré quoique je n'aye pas manque de veiller a fa Conduite, toute la nuit j'ay entendu frapper a fa porte; j'ay vü qu'el. le a ouvert a des Melfrs. elle n'a pas manqué de ce bien divertir, je ne Sfavois pas que ce fut une Coquine de la forte, il faut vous dépêcher d'y metrre ordre, ou fi non vous feriés dans le Cas de ne rien trouver chés vouS a vötre arrivée, elle fait une bonbance éternelle, fi vous voudries m'en Croire fe feroit de (y3 Voila Jofeph devenu orateur, il parle en piiblis Ce jeune homme eft univerfel. E 2  C 68 ) de la faire enfermer, pour vous en débarrasfer, Je finis en vous embraffantdu meilleur de mon Cceur, Vötre frére Pier re Neuville. (10; Joseph. II y a Surement quelque chöfe il faut que j'aille voir mon Oncle, il me' dira Tout au mieux ce que c'eft, Ha le voila juftement, Voyons ce qu'il me dira. :<$>• <5><^^o«>-<£> ^>-4>4>: ^-O"5^ SCÈNE IV. HL'A b b é. a vous voila mon Cher neveu qui vous a. méne fi vite de retour. Joseph. Vous n'ignorés furment pas pourquoy je fuis de retour. L'A b b é. Par ma foy je 1'ignore. Joseph. Vous 1'ignorés en qu'elle tranquilité! me parlés vous, II me femble que vous ne Scavés pas que vous aves écrit a mon Pére, au fujet de ma fceur (11). L'A b- (16) Cette lettre eft d'un paillard dépité de n'en avoir pas eu les gands; au refte nous avouons de bonne foi que pour avoir été faire par un Abbe elle eft pitoyablement écritc. C'eft la feule cbofe, fans efprit qui fe trouve dans cette Comedie. (~ii~) Non foulement eet abbé eft un débaucheur, mais il eft encore un fiurbe, un menteur. On voit Sn ment par 1'invention de ce perfonnage , que M. Hadoux a vécu parmi certaine claffa d'hommes, & qu'il connoit le monde.  ( 6p ) L'A e b é. Ha ce font mes affaires, & Ceux de votre Pére, apprenés mon Neveux que je n'ay point de Comptes a Vous rendre. Joseph. S'en eft trop, penfés que je Scais tout, voici vötre Lettre. L'A b b é. Ceci Change la toife, puisque vous en êtes inftruit, je vous dirai que ce qu'il y a dans ma I Lettre eft vrai, & même je dis plus j'y ai vü i entrer cette nuit des Meflieurs qui luy alloient I faire viüte, j'ay même entendü qu'elle difoit attendés Monfieur je m'en vais allumer la Chandelle & je vous ouvrirai la porte, & fitöt Ce Monfieur 1'embraffat d'une bonne facon elle le : fit entrer dans fa Maifon, ainfy voyés mon Ne■ veu fi elle eft honnête & fage, Ha Diantre i quand elle m'a chaffé de la Maifon je Scavois bien qu'elle avoit quelque manigeance, elle n'auroit pas pü faire ce qu'elle auroit voulu (12) Joseph. Qu'elle heure étoit-il a peu prés quand vous . avés vü rentrer ce Monfieur, & qui 1'embrasl foit fi bien. L'A b b é. Voïons il étoit environ deux heures de la i nuit. J o- (12) Voila une tirade qui a du couter une p,eine infi■ nie k PAuteur. C'efr. ie dévclopeme it du cara&ere de l'Abbé. II y a Ik dedans une finefie que tout le monde 1 n'appereevra pas. Ha diantre ! tournure charmante : I Patience, M. l'Abbé, vous payezez bien tout cela. E 3  ( 7° ) Joseph. Je crois Cependant que vous vous trompés, j'étois préfent & pour vous parler plus Franchement je vous dirai que C'étoit moy. L'A b b é. Baba, ce font des contes, vous voulés Soutenir les vices de vótre Soeur, vous mérités punition tout auffi bien qu'elle, a 1'arrivée de Votre Pére a qui je ferai; Rapport éxaftement de tout ce que j'ay vü, & entendü, & nous nous verrons quel qui croira des deux (13). Joseph. Comment Monftre épouvantable vous avés 1'audace de me mettre de complice a tout ce vous avés Suppöfé de ma Sceur, il ne tient de rien que je vous paffe mon Epée au travers du Corps, & fortés d'icy au plus vite je vous honnorerai U4) d'un bon baton. L'A b b é. Touchés moi un peu Monfieur le Drolle. Jo,sep h < óte fon E-pêe du Fourreau.) L'Abbé (prend la fuite) (15). S C E- (1.3) Baba', exclamation en uTage chez les gens du meüle.ur ton. Dans cette rcponfe 1'Abbe ne le dément point; mais Jofeph s'en moque fort peu. (14) Honorer quelqu'un du baton, cela ne vent pas dire ie faire Maréchal de France ; mais c'eft unemaniere élégante de menacer un faquin du baton ; nous deyons cette exprcffion niuvelle a M. Hadoux; je crois qu'elle paffcra en proverbe. (15") L'Abbé fait trés gafement de prendre Ia fuite, car Jofeph, qui ne badiné point, a fur lui dans ce mr6i j o s e p h (/« retire de la foret avec grande tristesfe. (II doit faire du Tonnerre & des- Éclairs & de la ptuie.) SCÈNE II. CAPITAINE de CHAUMON (entre avec la Feuilladt. Diable quel tems fait-il j'ay manqué de me perdre dans la föret, je n'ay pas plus de regret de mon Cheval. (7) -Ly a (6) Pour toute ma vie! La pauvre enfant! ceci n'eft point du tout une Comédie: il n'y a pas la le mot pour rire; C'eft une Tragédie li jamais il y en eut L Auteur s'eft vifiblement abufé. Mais voici le fin dela chofe, C'eft que fi le fujet n'eft pas comique, au moins le ftile 1'eft &' 1'auteur encore plus; ce qui fuffit bien pour donner k cela le nom de Comedie, meme de Farce en cas de befoin. Cf) On voit bien que la frayeur fait extravaguer ce pauvre Chaumon: voyez la dcrnierc Ugne, elle eft  C 78 ) La Feu illade-. Par ma foy le mien n'a pas pü y tenir, non plus que le vótre, le Tonnerre grondoic Si forr avec un Chemin Inhabitable, que j'ay mieux aimé d'abandonner mon Cheval, & Turner fur mes pieds, Cependant nous voila bien rotis, qu'eft-ce que nous allons faire, je vous ai toujoursj averti que cela vous feroit arrivé, ausfy tous les jours a tous les jours a la Chaffe fans prendre un jours de rclache, par ma foy vous païes bien aujourd'huy vos Gibier avec ce que vous perdés, nous pourrions bien avoir Ce qu'il y a dans le Bois. De Chaumon. Parle donc Maraüt, (9) Scais tu que tu commence a me fatiguer, toutes ces raifons ne fervent pas a trouver nöire Chemin. Babé (ajjife au pied d'un arbre.) Mon Dieu que je fuis rnalheureule d'être icy bien d'un homme qui ne fait plus ce qu'il dit: mais patience , on auroit peur a moins. (8) Ces gens-lh perdcnt leurs chcvaux comme on perdroit une paire de gands; II faut croire quelapluie a fandu leurs montures; & puis ce M. le Capitaine choifit uue fingulierè heure pour aller a la chaffe a cheval dans une forêt. Les connoisfeurs admireront ici la variété du ftile; M. Hadoux entend le langage de laquais a merveille. (9) M. rOflkier a le ton dur. On dit que c'étoit jadis le ton militaire, mais que depuis quelque temps une aimable urbanité a pris la place de cës airs rognes & ndiculement hautains. C'eft une nuance que notre Auteur n'a pas appörcue; il fait parler fon Capitaine comme un ïvcruteur de matelots, Cette parite faute fera furement corrigée dans la feeondc édition.  ( 79 ) icy a 1'injure du Temps fans Scavoir quel chemin prendre, pour m'éloigner de la préfence de mon Pére. (10) De Chaumon. II me femble que j'entends quelqu'un avancons de ce coté ey. La Feuïllade. Vous avés raifon j'entrevoïs quelqu'un au pied de eet arbre, c'eft une femme parions luy. De Chaumon. Qui eft-la, que faites vous ici, toute feule dans la foret. Babé. je fuis une pauvre miférable abandonnée de mes Parens, fans Scavoir quel Chemin prendre pour m'éloigner de la préfence de Mon Pére. (ii) La Feuillade. Diable Monfieur! fi nous avons perdu nos Chevaux, vous faites une trouvaille d'unejolie Demoifelle, par ma foy ce n'eft pas tout perte. (12) D e (10) Eh Mademoifelle, raffurez-vous, M. votre pere eft a 200 lieues d'ici, il ne vous attrapera pas fitót • vous avez !e temps de choifir votre chemin. (n) Encore!.,... il eft vrai que M: Hadoux peut Ie faire revenir dans un clln d'ceil, comme il a fait Jofeph. (12) Pour un homme mouillé jusqu'aux os, lui fon Maitre et Babé, voila une réflexion bien placée 1 mais comme on fait, les Efpagnols font galans ; et quiconque n'eft pas toujours enrhumé dans cc pays-lk ne paste point pour amoureux.  ( 8o ) De Chaumon. Elle eff jolie quand dit tu. La Feuïllade. Allons je vois bien que vous vous y connoifTés tout auffy bien que moy, il ne faut pas la killer embarraffée. D e C haumon. Comptés moi un peu 1'occafion qui vous a reduite a être expofée dans la foret icy toute feule, par un Temps fi affreux, car li vous ne le elites je ne puis que Soupconner que du mal, Vous m'avouerés que ce n'eft ici la place d'une Honnette Demoifelle. Babé. Hélas Monfieur que voulés vous que je vous dife, vous n'etes pas en état de me faire emrer en graces de mon Pére, puis qu'il faut vous dire , mon Pére a obligé mon frére a me perdre icy dans le Bois, avec ordre de m'oter la vie, mon Frére reconnoiffant mon Innocence dês ce que 1'on m'avoit Calomnié, il m'a laisfé la vie a condition que je ne paroiffe jamais plus devant mon Pére, voila Monfr. je ne peut pas vous en dire d'avantage. (13) De Chaumon. Je puis voir en vous que vous etes une honnete Demoifelle, je vous offre de vous retirer de 1'état ou vous etes, vous viendrés demeu- rer (13) Qui ne feroit touché de cette ingénuité ? Quelle puiffante Rhétorique pour emouvoir le coeur du Capitaine! Mais il paroit que le temps s'eft remis au beau , et que nos gens commencent a fe fécher.  C 81 ) rer a ma maifon de campagne, nous y trou. verons ma Mére qui fera bien charmèe que je lui amenerai une aimable Demoifelle pour lui tenir Compagnie. B K b e. Monfieur vous avès bien de^ la bonté, cependant que dira t'elle Madame votre Mère quant vous luy dirés que vous m'avés trouvée dans le bois, vous pouvés bien penfer que fi elle ne dit pas, elle ne penfera pas moins. De Chaumon. Allons, Allons (14) vous ne connoiffés pas ma Mére, comme je la connois! elle n'aura pas vü fitöt vötre fifionomie qu'elle commencera a vous aimer, foyes perfuadée que vous ferés tout aufly bien que moy. La Feuïllade. Ma foy Monfieur j'ai un marché a vous faï • rC' [I5] r De Chaumon. De quoi, parle donc. La Feuïllade. Ma foy vous étes fi prefTé que je ne Scais plus bientót quoy vous dire. v De (14) Allons, Allons. Eh par oü s'il vousplait? vous 11e vous fouvenez donc plus quj vous êtes égaré? Mais n'importe , un vrai fils de Mars doit ton jours dire <3//o#.r , ainfi le veut le Sieur Hadoux. Si M le Capitaine avoir. mis fon cheval fur fon dos dés que l'oraje a comracncé, il ne Pauroit pas perdu , et il auroit eu le plaifir de mettre en croupe la belle Babé. Qö) Un marché .' voila qui eft plaifant. Ce la Feiljl. lada a toujours le mot pour nre.  ( 82 ) De Chaumon. ■ Vcyés fi ce Maraud pariera, depêche toi donc ou je te donneraï des coups de baton (16}. La Feuïllade, Et bien Monfieur m'y voila! vous avés perdü de béaux Chevaux, vous me devés trois années de gages, fi vous voulés me faire prefent de vötre trouvaille qui eft cette aimabie-Demoilelle, je vous Ferai quittance de mes gages, & je vous acheterai d'autres Chevaux(i7J. De Chaumon. Maraud quand je voudrois faire marché a» vee toi, tu ne Scais pas fi elle veut de toi, & au furpius je crois que fa modeftie & fa facon n'eft. pas fait pour aller avec un homme tel que toi. La Feuïllade. 'Ma foy Monfieur puisque vous étes tant entété, je dois en avoir quelque chole je 1'ay trouvée tout aufii bien que vous (18). De ; (16) Baton C'eft une faute d'impreffion : il doit y av'oir fufii, puisque M. le Capitaine ctoit a la chaffe; ainfi Iifez: parle, ou je te donneraï un coup de fujil; Ce qui eft bien plus vraifemblabie & plus dans la nature. (17) Ce gaillard avoit amaffé de 1'argent au fervice de fon maitre k ce qu'il paroit. Un Seigneur n'auroit pas offert davantage, & nous en connoiffons plus d'un qui ne pouroit guerre payer les Babé auffi cher. Mais dans ce fiecle il n'y a que les Valets pour faire fortune. Te moins le cuiiinier de M. le D.... le cocher de M: de P.., . le coëffcur de Mad. la C la femme decham- bre de &c. tous geiis de difcinCtion qui roulent caro'ffe , ou le rouleront bientót. (18) -U pouvoir même dire qu'il 1'avoitvuele premier ; fon droit eft clair , & Chaumon n'eft qu'un fot, ou celui qui le fait parler, c'eft tout un.  ( 83 ) De Chaumon. Que veut dire ce Drole la, quand nous ferons arrivés a la maifon je te chafferai de chés moi. Babé. Voyés vous Monfieur quand ce féroit, le Do" meftique eft en état de me deshonnorer a Madame vötre Mére, allés, croyes moy mettés moi feulement déhors delaforet & jeTacherais de méloigner pour que mes Parents n'entende jamais parler de moi. De Chaumon. Mademoifelle je ne crois pas que ce vilain Domeftique eft en état de flétrir votre réputation, il n'aura pas cette peine la, en arrivant je le mettrai a la porte. La Feuileade. "Par tous les Diables! (19) ne voila t-il pas pour avoir voulu déclarer, que j'aimé cette Démoifelle qu'on me m'ettra a la porte. De Chaumon. Allons tai toi, Mademoifelle prenons ce Chemin ici, ma Campagne n'eft pas Loin, je crois que (19) II faut prcvenir ici Facteur qu'il doit crierdetoute fa force, jusqu'a s'égofiller, Par tous les Diables\ Cet endroit eft un des plus energiques, rexclamation doit être renduc fortement: mais malheureufement la plupart des Comédiens font des gens qui n'entendent rien aux belles chofes, et qui vous eftropient tout un ouvrage. F 2  ( 84 ) que vous devés être bien fatiguée, donnés moi la main, & toi fuis moy (20). FIN DU TROIS IE ME ACTE. LA (20) Donnez moi la main. II faut fe rappeller que le chemin eft inhabitable, comme Pa trés bien dit la Fcuillade. Les bonnes gens feront furieufement crottés , la mere ne fera pas peu furprife, mais nous favons deja qu'elle eft de bonne compofition. On ne peut discoiivenir que eet aéte finit avec dignité : fuis moi. Ces chofes ont un air noble, galant et doux Qui laiffent de bien loin Terence aprés Hadour. Dans Part d'intéreffer n'eft-il pas admirable? Dans Part de plaifanter n'eft-il pas adorable ? Si L'univers favoit reconnoitre fon prix, Si le fiecle rendoit juftice aux beaux efprits, En carosfe brillant il iroit par les rues, On verroit le public lui dresfer des ftatui's Mais -  ( 85 ) LA D E CO Ü.ATION du quatriême Atfe; le Thêatre repréfente une Maifon de Campagne Formant une perfpeüive avec des Ar bres. (i) ACTE QUATRIÊME. (O Norez bien, avec des arbres, on fait qu'k Ia campagne il n'y a rien de ü rare. (2) D'une tranquilité. Voila qui eft charmant! Babé n'eft point une de ces fillesévaporées, fans cesfe courant, fautant, babillant, et fe donnant Fair foldatesque, comme Mademoifelle M qui fe fait tort, et qui n'attrapcra jamais un mari de cette maniere. F 3 SCÈNE I. MADAMEDE CHAUMON. (entre fur la fcéne avec fon fils. M ais mon fils en vérité je ne m'attendois pas que cette Demoifelle avoit tant d'Efprit pour moi: je ne Scais pas qui elle eft, mais elle eft de diftin&ion elle eft d'une tranquilité & d'une modeftie fans égale t2> mais je me plaint qu'elle ne veut pas dire qui elle eft. De Chaumon. Que vous importe ma Mére elle a furement des raifons de ne pas fe donner a connoitre. M a-  ( 86 ) Madame de Chaumon. Ne la connoiffant pas on peut foupfonner bien des chofes vous Scaves bien mon fils que cela ne pourroit pas aller quant on lui demanderai qui elle eft & qu'elle ne Scaura quoy répondre que penfera t-on de Cela. De Chaumon. C'eft vrai a ce qu'elle m'a dit je trouve qu'elle a raifon puis qu'elle veut que fes Parents rr'entendent rien parler d'Elle elle ne doit pas dire qui elle eft faifons mieux ma Mére donnons lui un nom. (3) Madame de Chaumon. Et quel nom voudriés vous luy donner. De Chaumon. a Propos vous m'avés dit que vous aviés une Sceur en france faifons la paffer pour vötre Niéce. (4) Madame de Chaumon, Tu as raifon mon fils ma Soeur qui eft a Bour- (3) Ni point, ni virgule dans cette phrafc. En effct iln'y a rien de fi iacommode pour le Lecteur que ces ennuyeux points , ces vilaihes virgules'qui vous bleilent les yeux,,qui embarasfent la diction, et qui empêchent qu'on ait le'plaifir de prouver aux aü.iiteurs qu'on n'a pas la courte haleine en lifant. Oh! Vivc M. Hadoux pour tout cela! CO II paroït que le Capitaine Chaumont n'eft pas en grande relatioa avec fa familie ; il fe fouvient a peine qu'il a une tante. \A propos, dit il ïi fa Mere, tous m'avez dit que vous aviez une ftear, Peut-être étoient* ils asfez bromllés pour ne plus s'écrjre même au premier de Pan , et que le Capitaine avoit oublié jusqu'a leur nom? Nous connoisfons quelques parens comme cela,  ( 87 ) Bourdeaux elle a deux fiïles de fon age c'eft affés bien penfé. De Chaumon. Je penfe la une chöfe mon Vilain Domeftique qui Scait le Contraire il va proner par tout qui elle eft, & la facon comme neus 1'a* vons rencontrée dans le Bois. Madame de Chaumon. Nous n'avons qu'a le renvoier. (5) De Chaumon. Doucement ma Mére faifons refléxions que s'il fortoit de chés nous par defefpoir! il babilleroit d'avantage, je connois bien ce Maraud la, de quoy fa Langue eft capable, il Faut nous yprendre d'une autre maniére avec quelques piaftres & quelques bonnes parolesil pourra obferver ce que je luy dirai, mais une autre chöfe , ne vouloit- t-il pas me dédomager de ma perte que j'ay euë dans le Bois pour luy céder cette Demoifelle. Mére de Chaumon. Que répondit t-'elle la delius? D e Chaumon. Eft ce qu'elle ma donné plus d'Eftime a fon (5) Cette bonne Dame eft un peu vive. Quediable.' renvoyer un domeflique qui eft peut-éire depuis longtemps dans la maifon, et cela pourune petite perronelle qui arrivé on ne fait d'oü , qu'on a trouvée fur les chemins, et qui fait la renchórie au point de ne pas dire k fa bienfaitnee qui elle eft. Cela pasfe la raiilerie. Madame Chaumont en étoit-ello donc amourcufe auffi ? Ma foi je ne fais que penfer. Cette bonne Dame, qui fe prend fi vite de belle paffion peur une inconnue, ne fetoit-elle point une tri.. . F4  C 83 ) fon égard, (6) C'eft qu'elle n'a pas fait at> tention a ce qu'il difoit & le Maraud en étoit un peu faché. Mére de Chaumon. Appelle le un peu mon Fils. De Chaumon. (frappant trois coups de pieds. (j) (6) Fiat Lux. M. Hadoux, voila une phrafe un peu louche. (7) Sur le plancher, fans doute: car k la porte il auroit pu 1'enfoncer, ce qui n'eft pas nécesfaire pour appelier un valet. (8) L'ufage ordinaire eft que les domeftiquesobéiffent fimplement, fans parler; il n'eft pas même decent que la chofe fe faflc autrement:mais PAuteur peut bien ignorer cela. S C E N E II. La Feuïllade. Que vous plait-il Monfieur, De Chaumon. .Ma Mére te veut parler. Mére de Chaumon.' Ecoute icy, va t'en dans ma Chambre dire a cette Demoifelle qu'elle me vienne parler & dépêche toi. La Feuïllade. Je m'en y vais tout de Suite ( 8 ). Mere  ( 8p ) Mére de Chaumon.. II faudra bien mon fils que nous luy faffions voir du Monde, elle nepeut pas toujoursrefter enfermée dans fa Chambre. De Chaumon. Tenés la voici voiés qu'elle eft belle (g). SCE- (9) II eft pris le pauvre Capitaine , il n'y a plus a s'en dédire; les beaux yeux de Meile Babé lui ont tourné la tête. Sans doute que cc petit bijou, s'eft décroté, la■vé, peigné, avant de paroitre; car on doit être un peu fale,aprcs avoir paffe la nuit dans un bois. A force de recherches, nous avons découvert une chanfon affez jolie que 1'amoureux Capitaine fit dans fon lit, en 1'honneur de la Belle; ce n'eft pas le premier que 1'amour auroit rendu poëte. Quelqu'un nous a pourtant foutanu qu'il Ia fit faire par un pauvre diable qui mouroit de faini a Madrid, & qu'enfuite il s'en donna les gands, comme font tant de grands feigneurs qui ont beaucoup d'efprit au moyen de leur feerétaire. Mais qu'importe? la yoici. Sur 1'air je fuis Lindor &c. Dieu du plaifir qu'a Cythcre on adore, Viens, en ces lieux, viens fixer ton féjour: Da jeune objet qui m'enchaine en ce jour Viens enflammer le cocür novice encore. Laiffe a Paphos ton carquois & tes armes, Trop de fracas nous rendroit moins heureux, Viens parmi nous, avec les ris , les jeux Faire éprouver le pouvoir de tes charmes. Viens habiter les yeux de ma Zémire, C'eft la le tröne ou je veux t'adorer; Et dans fon ccear fi tu peux te gliffer, Amour, toujours fixes-y ton empire. F 5 Viens  ( 90 3 Viens voltiger fur fa gorge naifi'ante, Cedouxazile, Amour, te retiendra, Et queique fois ton alle entr'ouvrira Cc blanc mouchoir qui toujours me.tourmente. A fes attraits qu'embellit la nature, II manque encorle charme du plaifir; Viens y verfer les doux f'eux du defir, La volupté doit être fa Parure. De ce beau front oü fe peint 1'innocence, Viens écartcr jusqu'aux moindres foucis , Viens égaver fes levres d'un fouris ,Et, de fon 'coeur bannlr 1'indifference, Viens me dicter par fa bouche de rofe, Tes douces loix, tes ehaïmantes lecons; Viens, viens ibrfller dans fes regards fripons, Tu gagneras a la métamorphofj. S C E N E I I I. Babé (entre fur la fcène.") Mére de Chaumon. vancés mon bel enfant. Babé ! fait une révérence d Madame. Qu'eft ce qu'il y a pour vötre Service. M"ére de Chaumon. Mais ma chére c'eft que je ne veux pas que vous refties du matin au Soir enfermée dans vötre chambre, je vous invite avec moi de venir paffer quelques heures de recréation aux Campagnes icy proches, dont ils font de nos Amis. Ba-  < 9i ) B a b e. Hélas Madame fi vous penfés me-faire plaifir vous vous trompés , aïanr. remplie d'inquiétudes & de chagrin, je ne pourrois qu'ennuïer la compagnie, ainfy lailfés moy, quoique cela ne vous empêche pas d'y aller, comme vous avéz de coutume. De Chaumon. Ma Mére , obligé cette Demoifelle de prendre du plaifirs, quant elle a des peines. Mére de Chaumon. .C'eft exprelfement ce qu'il faut faire, un peu de plaifir diffipe beaucoup de chagrin, & il faut bien faire connoiffance. De Chaumon. Lailfés la faire comme elle voudra, il eft a peu prés tems que nous aillions. Babé. Puisque Madame veut abfolument me faire 1'honeur d'aller chés cette aimable compagnie j'y irai, comme je dois faire quelques perites chofes do) vous pourés toujours y aller, & vous m'enverrés chercher dans une heure. De Chaumon. Ces Chofes font-elles donc bien preffées, pour ne point venir avec nous. Ba- (io) Voila qui eft fingulier! QueDiable veut-eilc faire dans fa chambre ? de pctites chofes. Notfs avons beau nous mettre 1'efprit a la torture , nous n'y coiicevoms rien. Depetites chofes'. ceia dit beaucoup, mais c'eft un myftere de fille qu'il ne faut pas pénétrer; de petites chofes'. entendez-vous Lefteur. Soyez discret.  ( «9 > B a b é. Je ne puis point m'en difpenfer accordés moi la grace de me laifTer une demi heure dans ma chambre (n). Mere de Chaumon. Cela m'auroit fait infiniment plus de plaifir fi vous Seriés venuë avec nous & comme cela ne fe peut nous y allons de ce pas & nous renverrons auiïï tot la voiture pour vous chercher, en aiant le plaifir de vous revoir. Babé (fait la révérence d Monfieur & Madame. Mére de Chaumon. Allons mon fils dépêchons nous je crois qu'on fimpatiente dès que nous ne venons pas. De Chaumon {falu'ó Mad. Babé en s'en allant avec fa Mere. S C E N E IV. La Feuïllade (entrefur la Scène pas d pas (12). "J[__j3. voila toute feule voyons que je lui parle & nous verrons ce qu'elle me dira. * Ba- 00 Au moins nous favons que ces petites chofes ne demandent qu'une demi-heure. Une femme de'beaucoup d'expérience, que nous venons de confulter, dit qu'en effet une demi-heure fuffit. (12) Ce faquin la eft bien hardi de venir ainfi troubler Mademoifelle Babé qui va faire de petites chofes da»s fa chambre; mais certcs ce n'eft pas pour eet infolent que le four chauffe.  C 93 ) Babé. Mon Dieu quoi dire quand je ferai dans cette Compagnie, on va me demander qui je Fuis, quoi dire 6c quoi répondre je fuis bien embarraffée. La Feuïllade. Ha bon jours Mademoifelle , puisque mon Maitre eft Sorti je veux avoir 1'honneur de vous parler, & vous déclarer le fond de mon Cceur vous Scavés bien que je vous ai a peu prés déclaré mon Sentiment. Babé. Quels font vos Sentiments. La Feuïllade. Vous Scavés bien que vous me devés a moi tout auffy bien qu'a mon Maitre, j'ay quelques droits fur vous qu'un autre n'a pas. Babé. Après tout quels font ces droits que vous prétendés Scavés vous bien que vous Commencés a m'ennuier, & penfés qu'il n'y a encore eü perfonne qui ait pü pretendre fur moi, je rendrai Compte de cela a Monfieur, vous lui dirés qu'elles prétentions vous avéz. La Feuïllade, Ha oui da aprés vous avoir trouver dans le bois, & fans moi vous auriés été mangée des Loups & vous n'avés pas plus d'amitié pour moi, puisque C'eft ainfy je vous averti que vous n'aurés pas beau rire étant icy, je Seaurois faire éloge a tout le monde de vótre avanture, & puisque vous été fi Fiere ne penfés pas que mon Maitre aura tous les plaifirs avec  C 94 ) avec vous, & moi que je m'appellerai Joly Cceur (13). Babé. S'en eft allés impertinent que vous êtes, dans une heure Vötre Maitre Scaura ce que vcjus m'avés dit. La Feuïllade. Nous verrons qui eft-ce qui aura plus beau jeu de nous deux, faites mon. Éloge & moy je ferai le vötre aDieu. Mademoifelle j'aurai Soin de penfer a vous. Babé. Hélas quél parti prendre ce Vilain Maraud, tantera de tout les Cötés a mé dire de moi il faut avouer que je fuis née malheureufe; voir icy des gens qu'i n'eftime & le vilin Valet eft pour me Calomnier je fuis tentée voyant Cela de partir d'icy auffytöt & m'en aller fi loin qu'on entende jamais parler de moy ^14). SCE- (13) Après tout, le pauvre diable a raifon; il ne fait pas , lui, ce qne c'eft que Mademoifelle Babé. Son petit air de hauteurne lui en impofe point du tout; une fille ramaflee au pied d'un arbre, & qui s'en laJffe conter par fon maitre, n'eft pas fans doute une Lucrece; il faut bien qu'il en ait fa part. D'aitleuTs c'eft la mode aujourdhui: nous favons plus d'un Élégant qui n'a que les reftes de fon valet de chambre. (14) C'eft un parti bien violent; mais cette fi!le-la eft déja accoutuméekfetrouver feule fur les grands chemins.  C 95 ) SCÈNE V. Saks Soucis (entre fur la fcene d petit pas regardant la maifon (15). Babé (retoumant fa tête. Que vois-je qu'elle ordonnance eft ceci, Cela m'a 1'air d'un homme de Troupes mais je ne connois pas cette uniforme, Monfieur que cherchés vous icy. Sans Soucis (fait un Sdluspofant la main d fon Casque, N'eft-ce pas icy la Campagne dè Monfieur de Chaumon. Babé. Oui Monfieur, que luy voulés vous. Sans Soucis. J'ay des compliments a luy faire de la part demon Capitaine, & qui fe nomme auffy De Chaumon apparament qu'il eft fon frere. Babé. D'oü alles vous mon ami (16). Sans Soucis. . Je m'én vai voir mes parents il y a huit ans que je ne les ai vus. Ba- (15) Qui eft celui-ci? un dragon. Ah! 1'intrigue va enfin fe débrouiller. (16) Dorenavant pour bien parler il faudra dire : ou venez vous, & non pas cP'oti venez-vous. Ainfi que d'oü allez vous, & non pas oü alkz-vous.  ( 96) Babé. Us auront de la pekte a vous connokre fous eet habillement la. Sans Sougis. Comment me trouvés vous (,17). Babé. Je vous trouve fort bien, je voudrois avoir 1'Occafion d'acheter une habillement, & qu'il foit d'uniforme Semblable a. la votre. Sans Sougis. Qu'eft-ce que vous feriès avec un uniforme comme la miene. Babé. J'aurais 1'agrément d'aller au pays & de reconnokre mes Parents fans être Connuë. Sans Sougis. Hé bien Mademoifelle je vous offre mon ordonnance pourvü que vous vouliés donner le vótre. Babé. Je fêrai mieux que cela, je vous donneraï aulfi de quoi faire, faire un autre ordonnance en arrivant chés vous. Sans Soucis. Difpofés de les avoir quant vous voudrés. Babé. Entrons dans eet Appartement, il n'y a perfonne juftement, &nous changerons d'habillement 118). Sans (17) Voila une finguliere queftion , & cela a une demoifelle qu'il voit pour la première fois! ce foldat eft familier. C185 Comment dans la même chambre ? voila une pjai-  ( 97 ) Sans Soucis. Et la Lettre que je dois remettre a " fieur. ^ t Nous la mettrons fur la Table de fa chambre hattons nous fi vous voulés, & apres^ vous aurés la bonté de me conduire jusques a Madrix, ou j'aurai le plaifir de voir & Connoitre fans être conuë' (19). Sans Soucts. Conduifés moy je fuis prête a vous donner mes habits. Babé. Allons oui dépéchons nous, & nous partirons auffitót pour Madrix (20;. FIN DU Q.UATRIEME ACE. LA fante aventure! fi ce dragon n'eft pas un fot il v1 fe paffer de belles fetim chofes Mais .1 eft probable, quo c'eft une chambre k alcove , & que'la demoifelle va 10 déshabiller fous le rideau. Au refte Babe étoit peutêtre fur le ton des femmes de qualite, qui patiënt aujourd'hui leur chemife devant vingt hommes,avec toute la décence poffible. (19) Cela fera gentil au moins. , , (20) Le pauvre Chaumont fera bien aftrappe k fon retour, mais qu'il s'arrange; pourquoi la iaiffe-t il ieuie< G  ( 98 ) LA DE CO RA TI ON du 5me Aete efl telle que la première Acte, La Maifon de Neuville d droite, & Le Chapeau Rouge d gauche, Vis d-Vis de fun d fautre. ACTE CINQ.IEME. scène premi e'r. B a b é {entre fur la Scène en uniforme de Dragon en habit verd &casque,le fabre auCote vient frapper d la porte du Chapeau Rouge (i). scène ii. Thomas. Que Souhaites vous Monfieur. Dra- co On croiroit peut-être- que c'eft le fibre qui vient fraper k la porte du Chapeau-rouge; mais on veut bien dire au Lecteur que c'eft Babédéguifée en Dragon.  ( 99 ) Dragon Verd. N'eft ce pas icy un Auherge oü 1'on puiffe loger (2 . Thomas. Ouï Monfieur , êces vous icy pour longtems. Dragon Verd. Enyiron cinq a Six jours ma'foy! Monfieur je vous dirai que j'ay bien faim! je luis un peu fatigué. Thomas. Donnés vous la peine d'entrer & vous ferés fervi de ce que vous demanderér. Dragon Verd (tóurnant fa tete (3). Que vois-je ? Monfieur! Dechaumon feroicil a ma pourftike allons mon ami faite moi entrer d^ns ma Chambre. De (2) Une gnherge o~i Pon p'jifle loger. Apparamment qu'en Efpasjne il y a des auberges oü on ne loge point. Cfi ne fömli pas !a feule merveil'.e de ce pays-la, temoins L'Efcurial & les Auto-da - fe de la faint'e inquilitioii. (3) L'Auteur ne dit pas fi c'eft \ droite ou a gauche; U feroit c:pendant bien utile de le favoir. G 2  (4) Propice. Cet Aubergifte veut faire Ie beau parleur, mais il n'y entend rien : Propice n'eft pas Ie mot, il falloit dire Propre. Nous confeillons k ce Thomas, oü k celui qui ie fait parler, de ne plus faire ainfi POrateur, & de prendre modeftement un Maitre de langue. SCÈNE III. De Chaumon (vient frap er d la porte du chapeau rouge. Thomas ƒ préfante. Que fbuhaités vous Monfieur. De Chaumon. Pouvés vous me loger mei & mon Dcmeftique. Thomas. Oui Monfieur, j'ay encore un appartement qui fera propice pour vous Loger (4;. De Chaumon. Tout ceci eft fort bien! vous n'avés qu'a m'attendre pour coucher, & a qu'elle heure diné ton chés vous. Thomas. Sur les Trois heures. De Chaumon. Ditez moi un peu ou demëure Monfieur Neuville Marchand de Draps. Thomas. Ma foi c'eft icy vis-a-vis vous n'avés pas bien  ( iox ) bien loin a. le trouver il eft juftement chés Luy (5). De Chaumon Qfrappe d la porte de Neuville & Thomas rentre d fon auberge & la Feuillade auffy. SCÈNE IV. Neuville {vient ausfitot fur la Scène fait un falut d Monfieur. , Vötre trés humble, Serviteur Monfieur comment va 1'état de vötre fanté (6;. N eu v ille. Ma foi fi je ne me trompe je crois vous a« vois vendu des draps & plus d'une fois, allons, je vous rémai, je Sgais cependant bien que vous êtes Capitaine de Cavalerie. De Chaumon. Vous me remettés a la fin, il n'y a. pas deux ans que vous m'avéz vendu quelques piéces dont j'en ai été content. Neu- (5) Calculons un peu ceci. Ce matin Babé s'eft évadée de chez Chaumont; c'eft hier au foir que Jofeph 1'a menée au bois, & c'eft hier matin que Neuville eit parti pour Lyon. II eft déja de retour. Certes il s'eft beaucoup preflé pour la commodité de M. Hadoux. (6) II règne une grande politeffe dans toute cette familie. G 3  ( 102 ) . • - Neuville. Monfieur j'en fuis Connoiffeur en toutes mes Marchandifes je defie a mes fabriquants de me tromper mais auffi je ne puis tromper perfonne, & par ce moïen la on revient toujours chés moy (7). De Chaumon. Tout cela eft bel & bon c'eft a Scavoir il vous êtes aftbrti des mêmes draps comme vous m'avés vendu il y a deux ans. Neuville (jiire de fa poche un grand papier rempli d'Echantillons de Draps. Tenés Monfieur ils font tous de differente qualité. De Chaumon (prend un morceau de draps dans la main (8). En (7) Langage de Marchand ; je ne me fierois pas trop a lui. Un coquin qui fait aflaffincr fa filie par fon fils, tput unimeni, ne doit pas être un fort honnête homme. II faut avouer que'M. Hadoux inventc-la de jolis perfonnages: cela ne fait pas 1'éloge de fa délicateffe. Mais eelt une fiction poëtique. Pi&oribus atque poetis. Quid libet audendi femper fuit asqua potejlas. C'eft a dire : Les poëtes & les peintres ontle droit d'imaginer tout ce qui leur plait. (8) Dans la main. Circonftance effentielie; i'Auteur c i. exact.  ( io3 ) En voicy qui me convient il m'en faut douze piéces, c'eft Scavoir qu'elle diminution que vous me Ferés , nous pourrons faire affaire. Neuville (reprend ƒu Echantillons.) Puisque vous m'en prenés douze piéces je vous diminuem Vingt Piastres pour vü que vous païés Content. De Chaumon. Ha ceci change la Teffe (9) fi vous voulés nous ferons un accord le crédit que je vous demande n'eft pas long, je me propöfe de m'arranger. Neuville L'arrangement qu'il y a a faire c'eft de payer la moitié' Content. De Chaumon. Hé bien le reftant. Neuville. Tout de fuitte (io\ De Chaumon. II n'y a donc pas de crédit la dedans, Diable comme vous y allés, la moitié content, & le refte tout de Suite , il faut avoir la moitié dans une poche, & 1'autre dans fa bourfe, Monfieur Neuville vötre Facon d'agir eft Excellente a vötre avantage, cependant ce que je dis eft pour plaifanter je vous paierai en me livrant la Marchandife. Neu- (9) Un peu plus haut 1'Auteur a dit ceja cbange la Toffe; maintenant il dit cbange la Teffe. Nous croyons qu'il faut dire: Hadoux , cbange ta tête. (10; Cet homme fa entend les affaires.. G 4  C 104 ) Neuville. Par ma foi Monfieur je fuis au comble de ma joïe j'avois befoin d'argent. De Chaumon (tire de fa pocbe une bourfe de cwquante Louis. Tenés Monfieurs voila en avance une bourfe de cinquante Louis. (11). Neuville. Monfieur je vous fuis infiniment obligé vous me permettrés que j'aye 1'honneur de vous préfenter a fouper. De Chaumon. Volontiers vous me ferés plaifir. Neuville. Comme je ne Fais pas ordinaire chés mol, & j'ay coutume de manger au chapeau rouge je m'en vai commander a fouper a Monfieur, Thomas mon voifin, attendés moi la un Inftant C12)> Neuville (entre au Chaupeau rouge.~) De Chaumon. Cet homme eft bien Singulier, la moitié content & le refte toute de fuite, il faudroit que tous les credits fe fiffent ainfy, il n'y auroit point tant de Marchands ruinés. SCE- (11) Voila un Capitaine vraiment magnifique. Comment, donner tout de fuite 50 louis, fans avoir fait de compte, ni recu de marchandife, c'eft bien confiant; mais cela ne coute rien a M. Hadoux. (12) A la porte, ou plutöt fur la rue. Pour un homme qui vient de rcccvoir 50 louis, ecla n'eft pas galant.  ( los ) (13) Ce feroit ici le lieu de décrire 1'ordonnance du fouper, les mets délicats qui y furent fervis, & les fortes de vins quon y but; mais nous avons pris le parti d'omettre ce détail, quelque inftruétif qu'il eüt été, paree qu'après bien des recherches, nous avons découvert qu'il n'y avoit pas un plat de paflable. ,- Force poivre d'inde, du faffran & de Phuile graffe; c'eft le non plus ultra des cuifi-niers de Madrid; nous aurions craint de faire mal au ^oeur \ nos Lectejrs, G 5 SCÈNE V. Neuville (entre fur la Sgéne. jV'f onfieur j'ay commandé une table a fix Couverts. (13) De Chaumon. A Six Couverts je penfois que nous n'aurions été que nous deux. Neuville. Je vous dirai que j'attends mon beau frére l'Abbé & mon fils qui eft dans la maifon & vous & moi qui fais quatre. De Chaumon. Et puis encore Neuville. Je croyois être d'avantage mais on dit qu'il y a un DrBgon Verd dans eet Auberge nous 1'inviterons a fouper il nous comptera peut être quelques nouveautés j'ay tntendu dire qu'il venoit de France. De  ( io6 ) De Chaumon. Fort- bien plus nous Serons plus nous rirons. «14) (14) Si M, le Capitaine eft aceouru a Madrid pour chcrcher Babc , il n'en paroit pas fort inquiet. puisqu'il s'engage fi faeilcment a fouper avec 5 ou 6 inconnus. Comme tout cela eft divinement combiné! 05) Qn"i donc ! Ce Capitaine' voudroit-il que M. l'Abbé fut ntnlgre, palc, ou comme ondit, malenpoint? Et k quoi, je vous prie, ferviroit d'apnartenir alabonne Sainte E^life? finon p ,ur piaffera outrance, boire d'autant, acquérir trogne c .luminée, manger morceaux friands, humer caffé choifi , trouver en fa chambrette Pucelle gente & docile, porter fin linge, chauffer futaine moëlleufe tiflue par dévote rebondie , faire 1'orateurdevant Badauds a bouche béante, & damncr k tous les diables Qcoifiine dit Rabelais) tous chiens de parpaillots hérétiques qui nient la sainteté des gens portam foutane. & bon Capitaine! combien peu vous connoiflez les céleftes prérpgatives du froc è'c de l'aumuffe, dans votre pays, s'entend; ca'rcnaz'ii-aus.ahlcen'eftderhême. SCÈNE VI. L'A B B É. II. ! Bonjours mon frére. Neuville. Vous vous faites bien attendre quels devoirs pieux vous arrètent peut être. De Chaumon. % Diable Monfieur l'Abbé eft dans un bon poingt. (15; S C E-  ( io7 ) SCÈNE VII. Thomas (s'addrejfe d Neuvi-le.) J\/f^onfieur Vous plait-il qu'on dreffb la Ta~ ble. N euville. Allons oui dépêches vous, dites donc! Ecoutés igy, dites un peu a ce Monfieur le Dragon Verd qu'il nous faffe le plaifir de venir fouper avec nous. T h o m a s (met une Table d Jlx Couverts fur ie thêatre proprement & fix Chaifes. Je m'en vai vous 1'envoier. L'A B B É, Avons nous icy un Dragon? (16) Neuville. Oui mon frére. SCE- (i(5) yfvons-nous ici un Dragon, comme on dit, avons nous ici de bon feu, du roti, de la marée? &c Monfieur 1'Auteur, que Dieu béniffe, Que votre flile eft enchanteur! Sortez un peu de la couliffe, Montrez vousja votre Auditeur \ Le bon fens !i pas d'écrevi.ife, Dans vos écrits marche , ö Do^teur.' Et de la raifon , comme un Suislc , Vous etes le prédicateur .  ( io8 ) SCÈNE VIII. LE DRAGON VERD (Savanee d Monfieur Decbaumon & luy fait un falut ainfy qu'd la Compagnie. (17) Qui eft-ce de ces Meffieurs qu'il m'a demander. Ne u ville. C'eft moi Monfieur le Dragon, C'eft pour vous demander fi vous voulés me faire le plaifir de fouper avec nous. Le Dragon Verd. Avec plaifir Monfieur, C'eft bien de 1'honneur a moy. Neuville. Allons fans facon mettons nous a Table. Thomas. Meffieurs afieoiés vous. De Chaumon étant tous quatre affis Examine les Cbaifes. (18; Com- (17) Voila une Singuliere entrée! bien de la cérémonie ! (18) Peut-être pour voir ft eL'cs font de bois de noyer. On dit que ce font les plus folides; & M. de Chaumon eft homme qui fe connóït en pieccs de ménage. On n'a pu nous dire fi Thomas les avoit fait faire , ou s'il les avoit achetées a 1'encan.  ( IC9 ) Comment Monfieur nous ne fommes que quatre, & il y a fix Couverts & fix Chaifes. Neuville. C'eft vrai mon fils! n'y eft pas encore, Thomas dites un peu a mon gargon de comptoir (19) qu'il appelle mon fils & que nous 1'attendons pour fouper. Thomas frappe d la porte de Neuville. SCÈNE IX. JOLI COEUR ( je prefante.) Qu'eft ce qu'il y a Pére Thomas. Thomas. Dites a Monfieur Jofeph qu'on Pattend ponr fouper. SCÈNE X. Joseph (entre fur la Sgene en faluant la Compagnie.) Neuville. J^llons mon fils point de facon metés vous a Table. D e (19) Un gazoon de comptoir ! Ce n'eft apparamment que d'aujourdhui qu'il 1'a; car il n'en a pas été queftion jusques \ préfent; a moins qne ce ne foit un certain Jolicazur qui ne couche , ni ne mange \ la maifon, un valet de louagé.  C HO ) De Chaumon. Et le Sixiéme ne viendra pas, oü eft Mademoifelle votre fille, que j'ay vué' il y a deux années. Neuville. Elle eft partie il y a quelque tems, je ne Scais oü elle eft C'eft un mauvais fujec, que cela ne vous empêche pas de manger. 20; De Chaumon. Monfieur le Dragon Verd Comptés nous un peu qu'elqu'hiftoire. Neuville. Par bleu oui, allons quelques petites avantures. L'A b e é. ' II n'y a pas après le Francois, pour en compter des Belles. (21) L e Dragon Verd. ■ Puisque c'eft ainfi je vous en compterai une vjritable, qu'a Condition que perfonne ne m'imterrompe, & qu'on ferme, les porres, que perfonne ne puitfe fortir, tint que j'aie fini cette Hiftoire. (22) De (20) L'indigne coquin ! elie eft fiariie. dit-iljau Ttfap que cc'ta nc'v'ou-; cmpéehe pas de mauger; itee fifc le de plus ou de moins, c'eft une bagatelle, cela ne; v-aut pas la peiiie d'en parler. - f20 Voila co qui s'appelle un Ëloge! Grand-merci M- Hadoux. Mais fans doute vous etes aulli Francais., car vous nous en contez de belles. 'fvï) gfhglfliöre préeaution! Pour moicetsppareil ne rfte plaïroitDpoint. 11 y a un air de myfterc doitt je neme foucierois nullement; & li jamais ,e rencontre a Pauberj;e de teis coureurs d'hiftoire, je lortirat avant que les portes foient fermées.  ( iii ) De Chaümo n. La Feuïllade fermés moi les poules. &■ donnés moi les clefs, allons commencés Pon vous écoutera. La Feuïllade remst les Cl/fa fon Maitre. Le Dragon Verd. M'y voici! je vous dirai qu'il y avoit unc fois un Marchand de draps qui avoit un rils & une fille d'environ vingt ans, comme vous pourries être '32) Monfieur, 'que voici qui a un Fils & Paiffa Mad: fa fille pour garder la Maifon, mais ce Pére comme pourroit êcre, Monfieur pafla chés fon Beau frére pour luy prier de prendre garde h fes affaires, & veiller fur la conduite de fa fille bien éioigné dé la ? Ce Vilain Tertuf en place de prendre les Interets de fon frére eft venü. auffitöt pour la perfécuter & vouloit auffy 1'exeiter a partir avec luy en prenant toutes les Mar'chaadiles de fon Pére & en 1'excitant de paffer dans quelque pays Etranger. (.24^ L'A b b É. Ba, Ba, Monfieur Ce n'eft pas la un beau Compte fi vous ne voulés pas changer j'aime mieux m'en aller. (25) J o- (23) Vous vous trompez, moa Cher; Monfieur n'-ft point une fille de 20 ans. ■' : . (24) Ah ! voila un Tertuf bien impudent, Tout a Pheüre i! aura fon fait. Belle narration ! C2S) Tredame! M. l'Abbé, vous êtes bien dé°-outé attendez un moment, la. porte elï {'ermee.  ( U2 ) Joseph. Allons , Allons, mon Oncle puls qu'il a corr.mencé il fïnira, continues Monfieur. Le Dragon Verd. Revenons enfin pour finir: mon hiftoire, cette Demoifelle fit réfiftence au vilain tertuf d'Abbé, comme pourroit être Monfieur. (.26) L'A bbk. Aprés tous Scavés vous que je fuis fatigué de toutes vos Infultes Monfieur le Dragon Verd. Le Dragon Verd. Monfieur Cela ne doit pas vous infulter Ce.ci: eft un Hiftoire. Neuville. Mon frére eft toujours pour interrompre le discours, monfieur je vous.prie de continuer que cela ne vous empêche pas. LeDrgaonVerd. Pour finir, cette Demoifelle prit le Tertuf & le flanqua a la porte comme un geux, (27) Scavés vous Meffieurs que ce Vilain Tertuf comme pourroit être Monfieur, qu'eft ce qu'il répondit a cette Demoifelle oui da. impertinente je m'en vai pour vötre peine écrire une lettre a vötre Pére pour qu'il ne rnanque pas de vous faire enfermer, il ne manqua pas de bïen affaifonner la lettre de calomnies_ & ce vilain gueux de Tertuf come pourroit être (26) Bravo ! Que dites-vous a cela, Tertuf? (27) Bien dit: termes choifis. Flanquer furtout eft énergique.  ( tx3 ) Monfieur l'Abbé ne manqua pas de perfuader f fon Pére ceci de eet écrit comme fi vous diriés que L'Abbé que voici auroit dit Cela a Monfieur que voila. L^öJ Aprés tout Monfieur Scavés vous que tout ce qPue vous dites la font des, mentenes qu ü n'ya d'Abbé qu'il foit en etat de cela, je vous prie de vous Taire. Neuville Jeleve de bon. Hap Hap Ha? mon frére? [29] de la facon que vous prenés la chöfe on diroit que vous en êtes fufpecT;. L'A b b e. C'eft que j'enrage quant j'entends menöC De Chaumon. Meffieurs en vérité lailTes donc finir, allons Monfieur continués. Le Dragon Verd. M'y voici le Pére ne manqua pas de recevoirycette Lettre qui étoit a la P«f«u«^ de fa fille comme pourroit être Monue" q«s voici (30) quoique cette Demoifelle etoit des plus honnête, le Pére a cru ls Vilain Tertüt d'Abbé come pourroit être Monfieur. L A b- (28) II faut convonir que cela eft bien narré. (ia) Oh' oh' oh! M. Hadoux, Hé! hé! hé! de gr5. ce épargnez-noüs; on n'y tient plus, laiffez nous refpircr, l'admiration m'étouffe. (30) Abregez donc mon ami, vous nous faites fouffrir avec vos disrreffions. H  ( H4 ) L'A b b é. Aprés tout allés au Diable fi vous n'avés pas autre chöfe a nous compter. De Chaumon. Aprés tout Monfieur vous prenés tant d'Intêret on diroit que vous en êtes pour quelque chöfe, il y a plus d'un Abbé dans le monde. L'A b b é. C'efi: qu'il dit a Chaque Inftant, comme pourroit être Monfieur, Cela me fache. De Chaumon. Continués mon ami. Le Dragon Verd. M'y voici, (31) ce Pére envoia aufiitöt fon fils chês Luy fans prendre aucune Information , de 1'emmener dans un bois pour luy oter la vie, Ce fils ne manqua pas de fuivre les ordres de fon Pére, comme pourroit être le fils de Monfieur. Joseph. Que dites vous de ceci mon pére. N e u vi l l e. . Continués mon Ami. Le Dragon Verd. Ce fils étant dans le Bois avec fa Sceur pret a luy öter la vie, reconnut fon Innocence% la Confeilla de s'éloigner & ne jamais paroitre devant fon Pef*e & fon Frére comme pourroit être Monfieur, Pabandonna dans un .(31) C'eft pour la troifieme fois que vient ce plaifant M'y voici En vérité M. Hadoux vous n'y êtes pas, & vqus n'y ferèz jamais.  ( U5 ) un Bois, revenons a cette Pauvre fille un Inftant aprés elle tomba évanouie aux pieds d'un Arbre a l'Injure du Tems il s'y falfoit a 1'Inftant du tonnerre & des éclairs, elle fut en risque d'y perdre la vie. Neuville. Qu'en dites *vous Meffieurs. (32) De Chaumon. C'eft une Belle Avanture continués mon Ami Le Dragon Verd. a. l'Inftant un Capitaine de Cavalerie comme pourroit être Monfieur, *& fon Domeftique que voici, fe trouvent dans eet Environ èn aiant perdu leurs Chevaux, font la trouvaille de cette Pauvre Demoifelle comme' pourroit être Monfieur. (33) De Chaumon. Je ne fuis pas comme l'Abbé je ne me fache pas, quoique je fuis Compromis. N euville. Je crois que nous en Sommes pour c[uelque Chöfe. (34) L'A a- (32) Et vous Lefteurs, eminent trouvez vous cette hiftoire? Allons, ne vous impatientez pas, lifez jusqu'au bout, II vous pouvez. (33) La trouvaille; le terriie n'eft pasnoble, mais c'eft un pauvre Dragon qui parle; il n'eft pas obligé de favoir le beau Francais , comme M. Hadoux. (34) Admircz un peu le flegme de ce pere. Ce ca'tactere eft vraiment comique & bien dans Ia nature; ■>aufli c'eft le chef-d'ceuvre de.-notre Auteur. H 2  ( n6 ) L'A e b é. Autre Sottize tout ce que vous entendés vous le croiés fi vous m'auriés voulu croire, vous auries déja mis Monfieur le Dragon a la porte. Le Dragon Verd. Meffieurs écoutés le plus Intérreffantdel'Histoire eft a venir, Ce Capitaine comme pourroit être Monfieur trouva cette Demoifelle ; aimable avec fon gueux de Valet, ne vouloit- t il pas la prétendre & faifoit un offre de deffrayer la perte de fon Maitre, pour luy Céder cette Demoifelle, Ce Capitaine, comme pourroit etre Monfieur nécouta pas fon Maraud de Valet, amena cette Demoifelle a fa Campagne comme pourroit être Monfieur qui peut avoir une Campagne. D è C haumon. Ouï j'en ai une 1'Hiftoire eft joli. Le Dragon Verd. Etant arrivé a la Campagne de ce Capitaine peu aprés: ce Monfieur fortit avec Madame fa Mére pour quelques heures a une Campagne voifine, Ce Coquin de Valet fon Maitre, ne fut pas fitöt forti, a voulu 1'obliger de le faire manier avec luy, (35) ou li non qu'il auroit Scü quoi faire. La Feuïllade. '.park a fon Maitre.) Monfieur vous Scavés bien que j'ay des Commiffions a faire. De (35) Fi donc! le faire manier. Voyez I'impcrtinent! manquer ainfi de refpect a une demoifelle! ah! ah! Monfieur Hadoux! le faire manier. Mais, li donc!  C 117 ) De Chaumon. Tu reftera tant que 1'Hiftoire fera finie. (36) Le Dragon Verd. La peur prend a cette Pauvre Demoifelle, fit rencontre d'un Dragon francais en habit verd, comme je puis etre, elle luy propöfe de Changer d'habillement C'eft ce qu'il accepta, fitót ils Changerent d'Habits, cette Pauvre fille aiant les habits du Dragon fe réfolu de venir Loger au Chapeau rouge. De Chaumon. Je trouve cette hiftoire vraisenblable qu'en dite vous. Joseph. Affurement je crois qu'elle eft toute Véritable. L'A b e é. Et je dis que ce font tout des menfonges.(37) N eu vil l E. Doucement mon frére ceci va Loin n'attendés pas de méchapper j'entrevois du myftére continués mon ami. Le Dragon Verd. Cette fille mife en Dragon fe trouve visa* vis de fon Pére & fon frére, & fon gueux de Tertuf d'Oncle que voici. L'A b b é. Ha c'en eft trop qu'on le mette a la porte. (38) Le (36) Cela eft jufte, afin que la vertu foit reconpanfée comme dit M. Hadoux, & le vice puni. (37) Le bon-homme a fes raifons pour dire cela; mais 1'on ne peut trop admirer le maintien du pere. (38) Doucement Monfieur! nous avons encore befoin de lui deux minutcs, & puis après faitcs-en ce que vous voudrez. H 3  (n8 ) Le Dragon Verd (ote fon casque Cf fe met a rrenoux au pied de Jon Pere.) Mon Pére reconnoiffés fous le déguifement vötre fille qui vous a toujours Chéri, & j'airnerois mieux Cent fois mourir que de vous manquer. Neuville 'fe trouve interdït leve fa fille & l'ernbrajfe. Se peut t-il que c'eft toi mon enfant. (39) Le Dragon Verd. Oui C'eft moi comme vous me voiés en Dragon Verd. (40) Neuville. Mon Dien que j'ay du Malheur d'avoir perfécuté Pinnocence & avoir eu la foiblefie de croire ce Monftre d'Abbé. L'A bb£ Aprés tout Scavés vous que je cpmmence a méchauffer. (41) N eu v 1 l l e. Sort d'icy Monftre effroyable que tu ne parroifle jamais devant mes yeux. J L'A b- (30) Ah! Dieu merci, voila le Dénouemcnt Ici 1'Hiftoire rapporteque 1'Auteuraprès s'ëtre eflayc le front, afut trois fouts dans fa chambre, & a paffe d un air fier auprcs de fa fcrvante, glorieux d'avoir amene jusqu ici un li merveilleax ouvrage. f40) Cette reconnoiffancc eft bien toudvaritè; d|a une tendrefle d'èxprefïion iingulierc de part & d au re. M Hadoux a été l adroit dans ce petit niorceau qu on eft indécis fi 1'on doit rire ou pleurer. Ce qu li y a ac fur, c'eft que cela excitc la pitié. (4i) II commence feulement! II n'y a pas encore de risque pour fa fanté.  C ii9 ) L'A b e é (fe retire honteufement comme un Infame.) ^42 De Chaumon. Je fuis pour quelque chöfe dans cette affaire. Le Dragon Verd. Sans votre gueux de Valet je ferois encore chés vous. De Chaumon parle d fon Valet. _ Et toi Coquin fort d'icy ne parois jamais devant mes yeux? puisque j'ay le bonheur de retrouver ma chére Babé fous Puniforme d'un Dragon verd permette Monfieur Neuville que je vous la demande en mariage. (,43* Neuvïll-e. Puisque Monfieur eft temoins de fon innocence & lauteur de fon bonheur j'y donne mon Confentement. De Chaumon. Y Confentes vous Mademoifelle. Le Dragon Verd (parle au public.) _ Oui, Moafieur qui auroic crü après avoir eü tant de peines, que je Serois venuë au com- (42) II a donc demandé les clefs de la porte a quelqu'un' Peut être a-t'il fauté par la fenêtre, peut etre a-t'il monté par lacheminee, peut-être a t'il enfouce le mur? Que fait-on, dans fa colere? car tout-a 1 heure il commencoit a s'échauffer. (43) On voit ici que le Capitaine ne la demande en mariage que par ce qu'elle eft habillée en dragon C'eft par amour pour 1'etat militaire; fans eet habit 11 n'en auroit pas voulu. (44) C'eft au Public que ce oui s'adreffe. Ne vous y trompez pas. H 4  C I20 ) eomble de mon Bonheur, (ne nous deconcertons jamais dans telles peines) que nous ayons, fi ! nous fomme Innocents, nous vaincrons les Monftres Perfecuteur. FINDELA C I N QI EMEACTE. C45) Voila la morale de ila Picce. On appclle cela finir dans les regies. Le Public elt inftruit, & chacun s'en retourne édifié.  ( 121 ) Dans renthoufiafme oü nous avoir. jetté cette charmante Comédie de M. Hadoux, nous allions répétant partout que Molière n'avoit rien fait qui en approchat. Dans tous les cercles, nous ne parlions que du Dragon verd* & nous avions le plaifir de voir partager cette admiration par tous ceux qui 1'avoient lu. Mais depuis quelques jours nous avons fait une finguliere découverte. Une vieille fervante, qui alloit & venoit fouvent dans la falie d'une maifon oü je m'entretenois avec 1% dame du logis de Pexcellence du Dragon verd, fe retourne tout a coup vers nous, & m'adreffant la parole , me dit d'une voix rauque: Pardi, Monjieur, je vous entends toujours parler du Dragon verd'. j'en /ais ld deffus phts long que vous Je demeurai tout fur- pris Comment donc,bonne femme , lui dis-je? Eh mais, Monfieur, me répon- dit-elle, il y a plus de 60 ans qu'on chante ca dans notre pays. Toutes les nourices en Dercent leurs enfans. Si Monfieur Hadoux dit qu'il Fa inventé, il ment. Ma grand mere m'en a appris la chanfon, que je n'avois pas Elus plus de quatre ans; toutes les petites lies la favent, & c'eft un conté qui eft vieux comme les rues. Demandez plutót a Marie- Jeanne qui eft de Liege comme moi. Elle fe fouvient encore de la Chanfon, j'en fuis fure, car pour moi je Fai ou- bliée La deffus nous fi- mes venir cette Marie-Jeanne qui demeuroit H 5 dans  ( 122 ) dans le voifinagè; elle nous confirma tout ce que la Vieille nous avoit dit,&a notre priere chanta la Chanfon du Dragon verd. Nous fümes dors convaincus que M. Hadoux n'étoit point 1'inventeur du fujet; ce qui ne nous empêcha pas de convenir qu'il n'en étoit ni plus ni moins admirable pour la maniere élégante dont il 1'a .arrangé pour le théatre. Nous voulons bien gratifier le Lefteur de la Chanfon fusdite. C Voyez page fuivante.) LE  ( 123 ) LE DRAGON VERD Sur Fair, Ton humeur ejl Catherine. ou autre air cennu, O vous que Mme amoureufe Eveille foir & matin ; Vous, gens a cervelle crcufe Qui crachez Grec & Latin; Vous enfin d'humeur joyeufe, Qui noyez tout dans le vin, De Babé la couragcufe, Vencz Chantcr le dcftin. En 1'abfence de fon pere, Un oncle abbé la pourfuit; , ÏS'y faifant que de 1'eau claire, 11 en coneoit du dépit; Aulfuöt dans fa colere, Contre la Belle il écrit; Arrivé bientót fon frere, Qui dans un bois la conduit. Au pied d'un arbre il la place, Tout au milieu de la nuit; Un Capitaine qui paffe, En fa maifon 1'introduit; La Mere de bonne grace, La recoit & la produit; Mais un valet la tracaffe, Auffitöt elle s'cnfuic. D'un Dragon par avanture, Venu-la tout juftement, Babé revêtit 1'armure, Le casque & rhabülement;  ( 124 ) Puis trouffant fa chevelure, En ville prend logement, A 1'enfeigne de la Hure (i), Oü 1'on traite proprement. Voici que ce jour-la même, Son pere vient y manger, D'une politeffe extréme, II invite 1'écranger; Ignorant le ftratagéme, L'oncle auffi vrent goberger, Mais comme Paque en Carêmc, La fcène va bien changer. On ne peut pas toujours boire, Dit lemarchand, d'un ton fier, Racontez-nous quelque hiftoire, Monfieur le Batteur de fer; A cette offre invitatoire, Notre aimable Dragon verd Dit, j'ai dans mon répertoire, Quelque chofe pour deffert, Alors la Belle raconte, De but en but tout fon cas, De l'Abbé qui fe démonte, On remarque Pembarras; Mais Ie Dragon n'en tient compte, II démasqué le Judas, Qui bientöt couvert de honte, Gagne la porte a grands pas, A 1'inftant le Capitaine De fon amour fe fouvint; Aux pieds de fa fouveraine, Sa tendre flame il dépeint, Babé Ci) M. Hadoux, au lieu de la Hure a misle chapeau rouge, on ne fait pourquoi.  ( 125 ) Babé ne fut inhumaine, Avec la mere on convint, Et pas plus tard que huitaine> Son époute elle devint. Par ce récit véritable, Apprenez, jeunes tendrons, Que pudeur eft préférable Aux fleurettes des gargons. Evitez d'un vénérablc, Les dangereufcs facons, Mais d'un amant bien aimable, Ne fuyez pas les lecons. F I N. S T A N C E S A M. HADOUX. Sur fa Comédie du Dragon Verd. Du fruit de tes veilles favantes, Je m'enrichis, fublime H;;doux, Dans le Dragon verd tu m'enchantes, Rien n'eft plus beau , rien n'eft plus doux. Jofeph excite mes alarmes, Babé me fait verfer des larmes, Je ris avec 1'heurcux Chaumont \ Je fuis charmé de la Feuïllade, Quoiqu'il mérite 1'eftrapade, Mais ton Abbê n'eft qu'un fripon. La Neuville, quel tendre pere! Qui pouroit ne pas s'attendrir? C'eft bien le meilleur caradtere Que le théatre puiffe offrir. La bonne Mere eft adorable, Lorrin encor eft bien aimable, Quoi_  ( i£6 ) Qu'oiqu'il n'ait pas le fens commun; Mais li 1'enfemble eft de'leótable, Ou fi la piece eft déteftable, Tu recois Pargent, c'elt tout tin. Que la fortune & fes caprices, Sur toi raffemble fes revers, Hadoux, tu goutes les dolices, D'écrire & compofer des vers. Cette fe'licité fuprême, Par fon charme, des fifflets mêmcs Peut adoucir 1'afpeéf. aftreux; Sous les yeux de ta ménagere, En iinilfant ton pot de bjere, Tu rime, Hadoux, tu vis heureux. A V I S Pour ne pas nous morfondreici en trop longs discours, nous paffons, lans autre préambule, a. la feconde Comédie de notre Auteur, intitulée Le petit Cabaret. Si nos Lecteurs a la ledture du Dragon verdom été étonnés, a celle-ci ils feront ébahis. Le  Le Petit Cabaret Co medie en un Acte & en profe ornée; de quelques ariette Compofée par le Sieur H AD O U.X 1 . Citoyent a la Haye Ce 18 Novénbre 1782.(1) G R O C- (i) Le Petit Cabaret eft une de cesprodu&ionsdont on ne peut rien dire avant de 1'avoi'r lue. Le Tltre annonce qu'elle eft ornée de quelques Ariettes: II faut les voir pour en juger. Nous n'anticlpcrons donc point point fur le fentiment de perfonne. En qualité de Commenrateurs nous fommes piongés dans 1'admiration de notre texte ; ainfi notre avis feroit fufpecl:, il vaut mieux laisfer le Lccteur maitre de lui même.  ( 128 ) GROCCOS Matelot. MADAME Groccos. D I G I T T E fille de Groccos. (a) LEMPESE foldat. D O D I N O particulier. (b) THOINETTE fervante. FLORENTIN. Du B ü I S S O N. cc) La (a) Notre Auteur eft hcureux dans le choix des noms de fes perfonnages. Digitte a quel que chofe de gentil. Cela fe touche au doigt, Digitte! il y a menie de l'érudition. (b) Oui le tout eft tfès particulier. (c) Quels font ces deux Meffieurs? Ce ne font pas tics particuliers, car , 1'Auteur 1'auroit dit. Nous croyons que ce font des Poëtes de taverne.  . ( 129 ) LA DECO RATION du Theatre doit re* pré/enter la Chambre d'un Cabaret, ornée d'une tabk Commune & quelques Chaifes, dans te bat du Theatre & une grande tabk dans le haut. avec deux bans des Chandeltes fur les tables une bouteitle & des verre & quelles potteries d'Etain. (i) Lintitulé de la Piece eft le Petit Cabaret en un Afte la - Scène fepaffe a la Haye. (2) S C E- rj) II eft bien néceflaire d'expliquer tout cela, car on pouroit être embaraffé fur la maniere demeubler une chambre de Cabaret. (2) Que DiablelM. Hadoux, vous abufez de notre patience. II y a dcja une heure que nous favons que votre Piece fe nomme le petit Cabaret. A quoi fert de le répéter ? Vous faites des balourdifcs impardonnables; vous êtes bien heureux que 1'efprit qu'on trouve dans voire ouvrage falfé oublier tout cela..  ( 13° ) Thoinette refl a bdillkr la Chambre & nettoyer les Chaifes. JVJon Dieu quelles fallpperies j'airaerois, mieux être La fervante d'un Maltotié que d'être dans un Cabaret, a quel Métier il faudroit plutot s'aller noyer que d'y refter. (3) SCÈNE- II. Groccos. IJa bon jour Thoinette Comment te porte tü Mon Enfant. Thoinette. Hé vous voila Groccos depuis quand êtes vous arrivés. Groccos. Je te dirai Cela donne moi toujours une bouteille de Vin & trois ou quatre verres. Thoi- (3) Voila toute la Scène. II faut avouer qu'elle ne pêche pas par trop de longueur. En recompenfe , elle eft aufft fine que bien écrite. SCÈNE PREMIER,  ( I3i ) Thoinette. Mais vous êtes feule pour quoy tant de verres. G r o c g o s. Si il vient de la Compagnie il boiront avec moy. (4) Thoinette (elle dpporte fix verres & une bouteille. Je m'en y vai. (5) Groccos. Que diantre dans Cette Maifon il n'y a perfonne SCÈNE III. Thoinette. j^llons tenés voila du vin remplirai-je tous les verres. Groccos. Tu en prendra bien un verre avec moy. Thoi- (4) Ce M.-Groccos n'a pas bien étu lié la Grammaire; il mêle le plurier avec le fiingulicr, lc masculin avec le féminin &c. C'eft uu galimatias auquel on n'entend goute. (5) Mals, fi elle apporte la bouteille & les verres, elle n'y va donc pas? Expliquez-vous mieux,fi vous pouvez. Je vous en avertis, Hadoux, Ces inadvertances font capables de deshonorcr FAuteur, & par contre-coup le Commentateur aux yeux du Public. Cela n'eft pas honnête de votre part. Tandis .que nous fuons a groffes goute.s pour vous concilier radiniration generale, vous nous compromettez par vos ctour.krks. De grace faites-y plus ü'attention. I a  ( i32 ) Thoinette. Hé pour quoy pas Monfieur C'eft les proflts des petkes Servantes. Groccos. Tu es une fille rufée tu as raifon bois toujours il n'en mourra que les plu9 malades, ata fanté. (6) Thoinette. Choqués donc avec moy Monfieur Groccos. Groccos. Tu as raifon Choquons en femble. Thoinette {aprés avoir vide le verre tous les deux.) Votre ServanteMonfieur, Groccos, je Crois que voila dümonde. Groccos. Tant mieux allés voïr ce que C'eft. SCÈNE IV, L a m p e s e. Bonjour Monfieur le Matelot. Groccos. Bonfour Monfieur le Soldat voulés vous boire un verre de vin avec moy. L a m- (6) Que fignifie-la ce Proverbe? a quel proposyient il? Quoi! paree qu'un homme eft matelot, faut-il qu'il n'ait pas le fens commun ? Encore' une fois , M: Hadoux, faites mieux parler vos perfonnages, oü nous ne nous chargerons plus de faire connoitre tout le brillant de votre génie au Public^  ( 133 ) L a m p e s e. Volontiers büvont en femble nous'parlerons de quelque nouveauté vous qui alles fur mer & moy fur terre nous nous aprandrons quel-> que Chofe (7) a votre fanté. SCÈNE V. Madame Groccos '.avance pas a pas fur prendre fon mare verre d la main. II a je . vous y prends pour cette fois eft ce ici que vous êtes a travailler eft ce la place d'un honnete homme de laiffer fon travail pour aller au Cabaret. G r o c- (7) Cela eft jufte. ' Par exemple , parions politique; rêgloris 1'Etat, dlscutons les intéréts des Princes, faifons la paix, la guerre, appreiions a vivrc a Mrs. les SouveraTns Allons garuon , la Gazette , C'eft une ledure admirabje que la Gazette < point de faiut fans la Gazette; mias laquelle voulons-nous lire? . . . 4 Eb. bien, celie de C'eft la meilleure. Ab\ M. Groccos, fi donc! je vous crtyois pour la bonné caufe. Qu'appellez-vous la bonne Caufe? je me foucie oien de tout eela. Ne diroit-on pas que ma voix eft bien néceffaire a tel ou tel parti? Bh! Meffieurs, occupcz-vous de vos affaires, & n'ailcz pas fottement" vous mêler de celles des Princes. II femble \ trois ou quatre grimauds que 1'Etat ne fauroit fe paffer de leur fecours. Les Pauvres gens écrivent, écrivent, & ne voycnt pas qu'on fe rit 'd'eux. Eh! morbleu, encore une fois, mèlez vous de gagner de 1'argent, & n'allez pas trancher de l'olibrius oü 1'on n'a pas befoin de vous. Que d'abfurdités ! Que d'impertinences' Mais on voit bien que c'efi un matelot qui farlet I 3  ( 134 ) Groccos. Vous aves raifon Madame Raifon vous avés. Madame Groccos. Vilain que tu es nete möque pas de moy fi je prends la bouteille & les verres je les fraccalfe fous mes pieds. Groccos. Vous avés raifon Madame raifon vous avés. Madame Groccos. Aprés tout tu te móque de moy tout a fait Scai tu que fi je m'y met je te donneraï un fouflet. Groccos. Vous avés raifon Madame raifon vous avés. (8) L'A m p e s e. Allons Madame Groccos afleyes vous avec nous vous ne lerés point trop avec vötre Mary. Madame Groccos. Ha! C'eft un Miférable qui me fera mourir de Chagrins il'n'a pas fitöt deux fois que C'eft pour le Cabaret. Groccos. Vous avés raifon Madame raifon vous avés. Madame Groccos. Qu'eft ce que vous diriés Monfieur le Soldat vous voyés bien qu'il fe möque de moy. SCE- (8) II y a PIl,s de fens °.u'on ne penfe dans cette Reponfe; c'eft bien lemeiileur morceau de toute la Piece. Le fang-froid de ce Buveur eft vraiment d'un bon comique. Après tout, on peut quelque-fois trouver une perlë dans un fumier.  ( ^35 ) (o) Apparamment que cette jolic Digitte eft un cadeau que Madame Groccos a fait a fon marl. Les femines de Matelot, dit-on, font coutumieres de faire de. tels préfens a leurs époux qui, a leur retour des gram des ou petites Indes ," trotivent une maifon toute peuplée, fans qu'ils s'v foicnt donné la moindre peine: Ce Groccos eft fi bouru qu'il ne mérite pas même que fa fem» me veuillcbien faire celapourlui. I 4 SCÈNE VI. D i g i t t e. llons donc ma Mere vous etes bien long- tems. L'A m p é s é. Commant Monfieur Groccos je ne Scavois pas que vous eufliez une fi belle fille. Madame Groccos. II ne merite pas que je luy faffe des fi beaux Enfants. (9) Groccos. Vous aves raifon madame raifon vous avés. L'A m p é s e. Mademoifelle afleyes vous au Cöté de moi. D i g i t t e. Mais ma mere comme Ces foldats font polis ün matelot ne mendiroit pas autant. S C E^  ( 136) SCÈNE VII. D o d i n o. H a! vötre trés humble Serviteur Meffieurs. Madame Groccos. He voita Dodino avancés par icy affeyés vous au Coté de moy puisque mon Mari boit quand il veut je puis bien Caufer (10) avec qui que je veux. Groccos. Vous avés raifon Madame raifon vous avés ^n). D'Am- (io) Caufer-, c'eft adire fuffit, les Dames faürónt bien ce que ce mot fignifie en eet endröit. Quant aux maris, il faut le leur cacher. '(ii) Le bon homme a raifon d'être infouciant fur Partiele ; 1'on en fait de plus hupes que lui quine font pas plus difficilcs. La toit-rance eft une belle chofe. En effjt, qu'importe qu'une femme &c Pefte foit du premier qui eut 1'invention, De s'affliger 1'efpnt de cette vifion , Et d'.'ittacher 1'honneur de l'hommc le plus fa:re Aux chofes que peut faire une femme volage.' ' Puisqu'on tient k bon droit tout crime perfonnel, Que fait la notre honneur pour être criminel? C'eft un vilain abus , & les gens de police, Nous devroient bien régler une telle injuffice. N'avons nous pas aflez des autres accidens Qui nous viennent haper en dépit de nos deins , Les  ( 137) L'A m p e s é. Allons Madame Groccos lailTons la tous cela & parions d'autre chofe.. G c o c c o s. II nous faut parler de Boire un verre de vin. L'A m p é s é. Vous avés raifon & nous Chanterons quelque petites Chanfons. Madame Groccos. Parions de cela j'aime beaucoup a entendre Chanter. Groccos. Vous avés raifon Madame raifon vous avés. Madame Groccos. Voyés vous Monfieur le Soldat comme mon Mary le möque de moy. L'Am- Les querelles, procés , faim, foif & maladie, Troublent ils pas affcz le repos de la vie, Sans aller, de furcroit, s'avifer fottement, De fe faire un chagrin qui n'a nul fondement? Moquons-nous de cela , méprifons les allarmes , Et mcttons fous nos pieds les foucis & les larmes. Si ma femme a failli, qu'elle pleure bien fort ; Mais moi, pourquoi pleurer, puisque je n'ai point ton? En tout cas ce qui peut m'öter ma füeherie , C'eft que je ne fuis pas feul de ma confrairie. Voir cajoler fa femme & n'en témoigner rien , Se pratique aujourdhui par force gens de bien. Quel mal cela fait-il? la jambe en devient-elle, Plus tortue après tout, & la taille moins belle? II a raifon le bon homme Sganarelle; il fait fort bien de fe confolcr, il faut bien que Monfieur de * * * * * s'en confole. is  ( 138 > L-'A m p é s é. Pour vous mettre d'accord tous les deux je m'en vai Chanter une petite Chanson fur ia prife & reprife de St. Euftache qui eft tout a fait plaifant '12 . Madame Groccos. Nous vous Ecoutons. Groccos. Vous avés raifon Madame raifon vous avés. Madame Groccos. Faite le taire Monfieur le Soldat ou fi non je luy ferai voller la Pcrruque dehors de fa tête (,13). Groccos. Vous aves raifon Madame raifon vous avés. Madame Groccos (Je léve de Ckaife les deux bras aux Cote's avance a Jon mary luy tire fa peruque de fa tête if marche deffu. Tien ca t'apprendra voila long tems affésque tu te möque de moy. Groccös (reprendfa pcrruque de s'en froid & la met fur fa tête. Vous (12) Hadoux! Hadoux! Voila encore une des vötrcs! Eft-ce donc St. Enftachc qui eft plaifant? Eft-ce la prife ' Eft-ce'la chanfon ? Mon ami, vous vous ferez des affaires. Lamntiere eft délicate. Dans ce pajs on n'en- tend point raillerie : vous favez ce qu'il en coute a pour un mot. Si votre livre alloit ctre vous m'entcndez. Pour Dieu, foyez prudent. fiO Autrefois la tête étoit dans la Perruque , mais aujourdhui la Pcrruque eft dans la tcte; & chez bien des gens, elle tient lieu de cervelle.  C 139) Vous avés raifon Madame raifon vous avés. (14). L'Ampésé* (fe leve de fa Chaife. Pour le coup fi vous continue & que vous ne voulés point mé couter je m'en vai parions plutot de Chanter & de boire vous Scavés bien Monfieur Groccos que c'eft la vie des gregoires. Groccos. Parlant de Chanter j'ay entendü un Monfieur il y a quelques jours qu'il ma chanté des belles Chanfons de fa compofition (15). L'A m p é. s é. Je voudrois bien les entendre deffüs quel fujet font elles. Groccos. Ma fois il y en a une entre une fergatte francoife & une Angloüe quel n'eft point indifferente donc le Franfois enporta ia vi&oire fur 1'Anglois. L'A m p é s é. Mon Cher ami Groccos faites moy le plaifir de la Chanter. Groccos. Puisque c'eft ainfy que vous la demandés & que j'eftime la nation(,i6) je vai vous la Chanter. {Groccos ici chante.) Nous (14) O modele des mans débonnaires! Nous penfions que de tels n'exiftoient qu'a Paris; mais aujourdhui nous favons que la Haye en fourmille. Comme la Hollands fe forme.' (15) On fent affez que ce Monfieur la eft le Sieur H x. C16) Quelle eftlaNation que M. Grocos eftime5 Ceci eft équivoque; maïs cela importe affe'z peu.  ( MO ) i. Nous nous mimes a la voille ' Lc huitiéme de may, Croycnt que tous les voilles, Le vent eu daichirai, Tan bour & corne cbache, Trompêtte & viblion, Faifant réfouifance, A Grand coup de Canon (17). 2. En Snivant notre route, On voit foulevant a nous, Un gros navire deguerre, Faifan chache après nous, Ayan tous c'eft aituic, C eft peroquet vollans. Sa contre fi vadiere, Nous è trapas linficn (j8). 3- Etafit pres d'abordage, Ces aituie na mener , Quarga c'eft baffe voille , Nous donna fe volles, Et nous fans puis attendre, Comme des bons guerriers, Canon eft mou quetric , Nous avons fait jouers (19). pen. (17) Dieu béniffe ceux qui entendront quelque chofe a ce premier couplet! 08) Le Diable empnrte fi nous favons ce que c'eft 1 (19) Hélas! Lefteuis, aidez-nous. En quelle/tan- gue, sil vous plait, eft compofée cette Chanfon' Ne ieroit-ce pointlade 1'ancien Celtique3  ( Mï ) 4- Pendant fix heures entiere, Nous avons Combattue, Nos Marrinies bien fiere, Continüer toujours feux, Tirant vante en arriere, A. grand coup de boulés, Brifant tous fon derrière, Lavons tous des mattés (20), 5- L'Anglois Crias a bord, De fe noble Frangois, Nous fommes ici tous mort, Et moi je fuis bleffois, La Canautte eft a bord, Pour nous rendre prifonnier, Menés nous a bons port, Pour nous e,n prifonner (21). SCE- (20) Ah! nous commencons k y comprendre quelque petite chofe. (21) Nous y fommes maintenant. C'eft un fort joli morceau; 1'Auteur a du talent. Sur quel air cela vat'il?  ( ï42 ) (22) Voila ce qu'on .appelle une fcène bien filée. Ho/as Maifon! ' • (23) Ce DubuiJJbn tient la un propos bien poiflard. Cela n'eft point du tout dans le genre noble. M. Hadoux s'encariaille furieufemënt. Nous ne favions pas qu'il voyoit des gens fi mal en bouche. SCÈNE VIII. FLORENTIN. DU BUISSON ( entre fur la Sgene caufant tous bas.) Fl.0 rentin. Holas maifon (22). SCÈNE IX. Thoinette. Qué fouhaitté vous Monfieur. Du Buisson. Donnés nous une bouteille de bon Vin. Trio it; e tte. Du rouge ou du blanc. Du Buisson. Pernons du rouge la Couleur refte dans le ventre v «3). _ Flo-  C M3 ) flo rentin. Donnés donnés du rouge. Thoinette'. " Vous allés être fervis a 1'inftant. Groccos (regardant les deux Meffieurs & fe ^levant de fa Chaife s'addrejant a ïempèfé. Tenés voila juftement ce Monfieur qui ma donné^ & faite Cette Chanfon que je vous ai chanté tout a Pheure. L'A m p é s e (fait un fuut d Ces deux Mes, fieurs.) Meffieurs pourrcis je a voir 1'honeur de vous prefenter Ces Chaifes pour avoir 1'honneur de VÖtre Compagnie. 24, Du Buison. Volontiers mon ami on Scait plus a fept qu'a deux j'ay toujours aimé lavariation. (25) Groccos. Ha ca Meffieurs fans facon affoyés vous avec nous je ne connois point la politcife paree que je ne fuis qu'un Matelot. D u (24) O laplaifinte phrafe! Le drèie de coinpjinjen't' Relnez cela, je vous prie, cherLecteur Ce M Lampefé afait fes études; J'ai Monnsor de 'vous 'faAfen ter des chaifes pour avoir 1'honneur de votre co'n pagme. Bon Dieu! Que d'honneur dans un oabarV Cela fait beaucoup A'tionneur k M. Hadoux Nous a vons 1'honneur d'affurer le Public que notre Auteur a 1'honneur de favoir vivre. (25) Que veut dire celui-ia avec fa variariom tl femble qu'il veut faire le bel efprit. Allez alfez n,„ ami, foyez modeiïe, ainfi que votre pere H 'x  C 144 ) Du Buisson. Allons Monfieur florentin afioyons nous je Crois quenous fomme en bonaeCompagnie. (26) Madame Groccos. Monfieur Florentin faffoyera a cöté de moï comme il a fait préfent d'une belle Chanfon a mon Mary il nous en Chantera une autre de fa compofitïon. Florentin. Avec plaifir Madame Groccos. L'A m p é s é. J'ai entendü parler de la prife & réprife de St. Euftache & plufieurs autres Chanfons qui ne font point indifferentes. (27) Madame Groccos. C'eft Monfieur Florentin qui les a compofée. D i g i t t e. Ma Mere priés Monfieur de les chanter. Fto- (26) Je le crois auiïi. Madame Groccos n'eft pas du chien ; Mademoifelle Digitte eft un peu mieux clevée que fa couline la marchande de pommes ; Lampefé eft un grivois qui fait manier la plume; Dodino eft la fleur des garcons boulangers; M. Florentin eft un Mirliflore qui, comme on dit, fe doone du talon dans le cul, c'eft la coqueluche de toutes les Dames du marché au poiffon; Enfin Groccos, la perruquc fur 1'oreille, fait parler haut dans un Cabaret. II n'y manque plus que M. Hadoux, pour rendre la compagnie complette. (27) Indifférentes. M. Lampefé choifit précieufement fes mots; il y a dans tout ce qu'il dit un petit air de fcience qui donne une grande opinion de celui qui 1'a mis en oeuvre.  ( 145 ) Florentin. Mademoifelle vous eft accordée je m'en va vous la Chanter. (28) G r o c c o s. Monfieur Chantes celle de St. Eufiache. Tous en General. Oui! Oui! Oui! Monfieur Chantes la. Florentin (Chante le pot au feu d St. Eufiache. Chanfon fur l'air d'un Soldat par un coup funefte. (29 (28) Vive les gens qui ne fe font pas prier! Mais M. .Florentin eft für d'avance des éloges de fes auditeurs; ce n'eft pas fon coup d'efl'ai. Voyez-vous ce ton léger, Mademoifelle vous eft accordée: accordée! fans! doute; c'eft une faveur que M. Florentin nous fait. Ne Pentend pas qui veut: il faut pour cela avoir 1'honneur de lui piaire; & nous favons qu'il a dédaimé dé Chanter devant Mademoifelle Margot, paree qu'elle avoit dit un jour en pleinc compagnie qu'il avoit des bas percés. (29) Siience , ma niéee! (Comme dit Belife, dans les femmes favantes de Molière.') ik Le  ( 146 ) (30) Rime riche, & penfce ingénieufe: Le Pot au feu, la fcupe, fi vous voulez. (31) Piquet. Voyez un peu 1'écornifleur qui vient man ..er le potage! charmante allegorie. (32) Pefte! Hadoux, oü prend votre efprit toutes ces gentilleffes ? (33) Pet-na. Cela vient du verbe Perner; je-perne tu pernes &c. II rime fort bien avec Beroer, ie terne, tu bernes &c. N'eft-ce pas M. Hadoux' li '. Le Pot au feu a St: Ettftache Etoit tous pret a Ecümer Rodney a eu fi grande audace Di dcsbarquer pour lecumer (30) H a fait preparer la table Contant de fe bien regaler Ca luy palTa fous la mouüache Piquet, fen eft bien re'gaié (31) 2, ■ . La Viande étoit fi delicate Dont les francois en firent leur dine' Les anglois en faifoient fi grand cas Ca luy paffa fous le mufé (32) Rodney perna (33) fa longue pipe Et il fe mit a fumer Piquet le vit Cafia 'ia pipe Dece grand Admiral Rodney Vo-  ( M7) 3- Voyés par tous dans fes defaites Ou il a voulu de'barquer Ha il voulu fe mettre au net (34) è St: Vincent a hazardés Avec trois mille de ces anglois Croyant de vincre fept Cent francois On le Challa a grand coup de fouet Se Retira avec un pied de ne' (35) 4- En voulés vous Scavoir davantage Pour conrioitre L'Admiral Rodney II eft guerricr avec audace Quand il n'a point en lur le ne' Monfieur de Gras en amérique Ira voir fyl eft bon guerrier Avec provifion de Belles pipes Et du bon taba pour fümer. (36) Les (34) Qu'entendez-vous par ces paroles fe mettre au wei? Cela voudroir-il dire s'ejfuyer en fortant de la garde-robe? Nous invitons la SociétéLittéraire de, . i . ... de s'aflembler pour décider ce cas important. (35) Avec un pied de nez: comme M. Hadour, quand il defcendit du theatre le jour du Petit Cabaret. (30) M, de Gras\ Comme on défigure le nom des grands hommes! Ceft ainfi qu'on dit Conjücius pour Confutzée, Moyfe pour Moftab, Salomon pour So/eiman, Alexandre pour Scander, & Hadoux pour Ba* daud. (Voyez Pages ï8 et 19.) K a  C m8 ) les frangois & les Hollandois Sont tout a fait tous preparés Pour voir L'audace de ces anglois Sy Ion pourra les s'abouller (37) Et nous irons a St, Euftache Nous verrons l'Admiral Rodney Nous conterons fous fa mouftache Ses Chemifes & mouchoirs de né. (38) DlGITTE. Je voudrois bien être Matelot comme mon Pére j'aimerois bien a Chanter des Chanfons Comme luy. (39") Du Buisson. Apropos Chantés un peu la fille matelote je crois que Cette jeune fille cela luy donnera du gout a devenir Matelot. F l 0- (37) Si Fon pourra eft bien dit. Ces Anglais font quelques-fois récalcitrans. On leur a pourtant appris k vivre depuis quelques années; mais k la fin du compte ces gens-lk,ne fe mouchent pas du pied; on ne les Sa- •■boulé pas comme on voudroit bien. (38) Mouchoirs de nez. L'Amiral Rodney doit en avoir de très-beaux et k bon marché. Quant k fes chemifes, on ne fait que trop qu'elles font de totle d'Hollande\ Ce charmant Pot au feu finit par la Garde-robe- cela eft fort ingénieux. Honneur foit au Poëte, nous lui fouhaitons beaucoup de chemifes et de mouchoirs de nez. (39) Ah' le beau fouhait! Vouloir être matelot pour bien chanter J Cette Oigitte a bu un coup de trop, affurément.  ( MJ> ) Florentin (chante la fille en Matelote. Chanfon la fille déguifée un matelot. (40) (40) Grace! grace! M. Florentin. Vous ne nous laisfez pas refpirer; Faut-il donc toujours Chanter? II n'y a rien de fi infipide. 6 que les grands Chanteurs font par moi déteftés! je fuis de cent lieues quand j'appercois ces Chanteurs fempiternels, qu'on ne peut plus faire taire quand ils ont une fois commencé, qui ont toujours un couplet a vous corner aux oreilles. Monfieur écoutez celle ci. Madame voulcz-vous que je vous apprenne celle-la. Ils vous pourfuiven , ils vous affomment, on tourne le dos , & ils Chantcutencore. Non, non LeÊleur, ne riez pas, fi vous avicz connu comme moi M. de Lieutenant au Regiment de vous fauriez quel fupplice c'eft qu'un grand Chanteur, Certes, apres les grands difeurs de nouvjlles&les grands Lectcurs de gazettes , je ne fais rien de pire. II faut pourtant écouter celle de M. Florentin. (41) Cela nous promet aif'que chofe. Voyons. K 3 1. Chanton la gloire aulfi la valcur Dune fille de Coeur Qui s'eft engagée pour aller voguer Son deffein étoit de voir Les anglois En difant enfin nous fcrons butin Sur les Eauxdes marins. (4;) 2. Eyant la mine dun bon Garcon Pour fuivant fa raifon Fort  ( 150 ) Fort delibéré le Corps degagé La taille bien faite Comme un mainier (42) Sen fut auffitót a bord du vaiiTeau Avec les autres matelot. 3- Etant entre' dans la Compagnie Ou luy a dit mon ami Soye's bien venuë le Coeur rcfolü Nous fommes Charmés de votre arrivée DivcrüfTons nous icy entre nons En attendant le bon Coup. (43) 4. Etant en train dc fe divertir L'orde de vint de partir Le tambour battant mit la voile auvent Le Corfaire partant la fille eft dedans (44) Un Chacun difoit ce nouveau ftijet Elle Scait fort bien ma neuvrer. Ce (42) Mamier \ Nous croyons que 1'Auteur a voulu dire Meümer. Mais les Mcüniers ont-ils donc la taille fi bien faite? II y a unpeu cPembrotiillamini 2a dedans. Enfin Meünier, foit. (43) Voila de francs Epicuriens, des Sybarites du premier ordre. II eft vrai que pour bonnè cbere les pauvres diables ont de bon pain de fon., d'excellente bierre moifie; & pour s'ébattre, toutes les Veftales du Boter-mark d'Amfterdam, lesquelles ont un air très-ragoutant. C44) Ce vers eft délicieux. Sentez-vous toute la flnefie que 1'Auteur y a mife? M. Hadoux lui-méme l'a-t'il bien compris en 1'écrivant? Ah! quand vous ave» fait cette rime charmante, En avez-vous fenti la tournure piquante?  ( I5i ) 5- Ce Corfaire Cetroven accofté (45) D'un gros vaiiTeau anglois Se Croyant trois fois dans leur porte voix Eft-te vous francais pavillion montrés a Coups de Canons répondit que non Nanon dit Cela eft bon. (40") 6. Nanon Croyant de bien profi ter Du buttin des anglois Hadi Comme un lion fen futes aux Canon è Coup de boulets les mas font brulés Tous dun p-entaffaut amonté al'affaut A 1'abordage du vaiffeau. (47) 7- Ceft deux vaiffeaux étants a crochés lis fe font mis a fabrer Mais nanon hélas dedans le combat Se trovent blesfée par un de ces anglois Se Cryant enfin a Moi le mal loin Car ie fuis en grand befoin, (48) a Pres C45) Cetroven. C'eft le nom de familie du Corfaire. L'Auteur 1'a cite pour attefter d'autant plus 1'Hiftoire qui eft trés véritable. (46) Cela fent un peu le gascon. Mademoifelle Nanon étoit-elle donc cuiraffée ? (47) Tudieu ! comme ils y vont! M.Hadoux ne badine pas quand il donne bataille au coin de fon feu. (48) La voila maintenant qui pleure comme unc vache. Fi! que c'eft laid ! K 4  C 152 ) 8. a Pres avoir bien Combattü 1 es anglois fe font rendus l.cs Gorfaires tiancois les a menés Au milieu des flois au port St: malo, Et les mamniers qui étoiem bicsfe' Les a fallü tous penfer. (49) 9- Cette fiile deguifée en gare m Tombat en poimaifon Son fang repandoit la fallut penfer Lon voit auflitöt quelle neft pas matelot Et les marriniers quils fetoient écrie's Ma foy nous voila bien trompés. (50) D O D I N O. Par dieu monfieur je vous en fais mon Compliment vous en avois 1'honneur ^51) madame Groccos & toute la Compagnie faites moi (49) Ce couplet finit d'une maniere bien dégoutante. Le coeur me foulevc. Des plaies, des Chirurgiens, des biftouris; voyez un peu les belles images a mettre. en chanfon! (50) La pauvre enfant avoit recu une terrible bleffure dans un endroit oü il y en avoit deja une affez grande. Le Frater qui y mit 1'appareil en refta tout ebobi: 11 n'en avoit point encore vu de cette taille . Auffi affurat-'il que la plaie étoit incurable. (51) En effet cette Chanfon eft charmante , il ne fe peut rien de plus joli, & pour le coup M. Hadoux en a 1'honneur.  ( 153 ) moi ïe plaiiïr de m'en laiffer Chanter une è mademoifelle Digitte. Madame Groccos. Avec plaifir mon Amy. Du Buisson. Allons Chantés la, Cela me fera plaifir. Dodino (chante »fi? au couplet vient tendre objet de ma flames. Chanfon fur 1'air d'anfun verfois Collinette. C52) 1. Vien tcndre objet de ma flamme Viens amoy flanbau damour; Que tues Chere a mon ame Pour toi langiraige toujours Sera tu asfés Inhumaine Pour voir languire ton amant Brisfés les nceuds de fa Chaine Et fon Cceur fera Content, (53) d ï- (52) Dans un Verfois! Quelqu'un fait-il ce que c'eft? on prétend que c'eft un fort beau chancon ; a la bonne heure! Nous ne connoiffons que Dans un verger colinette. (53) Voila de 1'Anacréon tout pur. Cc flambeau d'atnour eft tout a fait intéreffant Pour toi langiraige toujours offre une image bien tendre; 11 faut avouer que 1'Auteur a mis dans la bouche de Dodino le couplet le plus gracieux qui ait jamais été chanté fur aucun the^re. C'eft dommage que la voix de PActeur ne réponde pas toujours a la beauté des paroles; auffi confeillons-nous a M. Hadoux de jouer lui-mème le fi.61e de Dodino, lorsqu'on donnera le Petit Cabaret, afin de faire valoir comme il convient toutes les grdccs de ce charmant Couplet ou Paquet de vers.  ( i54 ) DiGITTE. Ma Mére il faut que je luy réponde. • Madame Groccos. Mais furement il faut luy répondre. Digitte Chante igi les deuxautres couplets.(s^) 2. Pour u« tendre Amant fidele Je ne puis plus refifter (55) Pour avoir été trop cruêlle Dans mon Cceur j'ay durégner (56) Mon Cher ami tuma fléchie Par ton bon Cceur & ton a momJa- (54O Comment Diable! Mademoifelle Digitte eft une Virtuofe. Eilc fait des impromptu comme un autre de la profe. Deux couplets fur le champ! Cela ne lui conté rien. C'eft la chanteufe du quartier; c'eft elle qui fait les Complaintes de tous les Pendus & autres grands criminels. Enfin c'eft une favante qui méritoitde partager la couche du Sieur Hadoux. Si jamais il devient veuf, on ne doute point qu'il ne la prcnne en croupe fur Pégafe , & qu'on ne les voie un jour^ paffer au desfus de nos tètes, faifant route pour le Parnaffe, oü ils iront prendre place entre Tibule & Sapho. Les malins prétendent que la monture du Sieur Hadoux ne peut jamais venir que d'Arcadie. (55) C'en eft fait, 1'inftant eft venu , profites-en mon ami Dodino; Mademoifelle cede , elle ne réfifte point, voila 1'hcurc du berger: la pauvre petite n'en peutplus , elle t'attend, elle paine. C'eft ce que fignifie a la lettre ce Vers exprefiïf je ne puis plus refifter. (56) jf'tii du rêgner. Nous ne favons pas trop ce qu'elle'entend par rêgner; mais le Lefteur peut le demander a M. Hadoux qui 1'expliquera fort bien.  ( 155 ) Jamais je n'obüerai de mavie Le grand bonheur de nos amours, (57) 3- Vient a moi objet que j'aime Vient a moi mon tendre Cceur A douciflbns nous de même Par le lien de 1'honneur (;8) Tes yeux (bik dune amour extreme Dans mon Cceur font animés Er.diriés vous auffi de même Plutot mourir que de Changer. Groccos. Diable nous ne fommes plus a Ia guerre,ce font des amourettes. (59) D u (57) Le grand bonheur. On en connoit de deux fortes: le grand bonheur & le petit bonheur. Le grand bonheur, par cxemple , eft de s'appeller Hadoux. Le petit bonheur eft de lire les ouvrages qu'il vient de donner au Public. (58) Adoucijfons nous par le lien de Phonneur. Ce langage eft bien précieux. Pour féduire un garcon boulanger il n'eft pas néceffaire d'empioyer des phrafes fi relevées; mais c'eft que cela coule de fource. Le feu poëtique emporte la belle Digitte qui ne peut plus réfifter; & Dodino qui Pécoute la bouche ouvertc croit que ce font les plus belles chofes du monde. M. Hadoux qui eft caché derrière la toile, fe frotte les mains en s'applaudiffant de fa fublime production, & faifant lamou ) aux ignares qui le fifflent paree qu'ils n'y eutendent rien. (59) Vous avez raifon Monfieur Groccos, raifon vous avez.  ( 156 ) Du Buisson. Florentin (fe léve en remerciantla Compagnie) Metfieurs il n'eft fi bonne Compagnie qu'il faut fe quitter en ayant le plaifir de vous revoir a dieu Monfieur & Madame Groccos & toute vötre Compagnie. (il fe retire de la Scène.) (60) Dodino. Puisque j'ay 1'occafion Monfieur & Madame Groccos je vous demande votre fille en mariage. Madame Groccos. mon Amy Cette a mitié eft bien venué' vitte. Digitte. Vous Scavés bien ma Mére 'qu'a la' matelottej on ne fait pas beaucoup de facon il mai- (60) II eft inutile de demander oü ilva. C'eft un Poëte, un faifeur de Ctancons , il va fe faire entendre dans un autre cercle. II a ïecu dans notre Cabaret le tribut d'applaudiffemens qu'il defire, il court en recevoir autant ailleurs. Vous Ie voyez ordinairement pasfer tous les Dimanches en habit noir, allant, felon le vent, partout oü on veut bien le recevoir, & fë regardant comme un être important, paree qu'il a chanté une fois devant des gens de qualité, & qu'il a fait une piece que la Cabale impertinente a Sifflée. Ah! M: Florentin, que le liecle eft injüfte! Mais confolez-vous; vous n'etes pas encore au'ffl maiheureux que votre confrère Homere qui alloit mendier de p irte en porte. 11 eft vrai que de fon temps on n'avoit pas la reffource des Souferiptions.  < 157 ) maime & moi je Panne que peut on de mieux C'eft tout dire. (6i)s Grocc os. Allons, Allons, je Connois Dodino & je luy donne en mariage. (62) Madame Groccos. Allons & moy auffi. Groccos. Vous avés raifon Madame raifon vous avés D o d 1 n o (fur fair de mattendrc mufette.) n (60 Cette fille-lk n'eft point difficile , elle eft fort accommodante ; il n'eft pourtant pas du bon ton de paroitre fi preffée; mais 011 nous a dit en confidence qu'elle étoit dans le cas de Mademoifelle X: , ... auiourdhui Madame Z. . . . qui fit fort bien de brus- qucr fes noces, & pour caufe. Cinq mois aprés on répandit dans le monde que Madame Z. ..... avoit fait une chute, & qK'il'avoit iallu tout de fuite aüDeller 1'accoucheur. Mais qu'importe ? on peut pafier ouelque chofe k Mademoifelle Digitte en faveur de fon talent- & Dodino fera encore trop heureux; pendant qu'il enfournera fon pain , Madame fera des vers. ("62) Quoi' Que donnera t'il en mariage? II s'arrête la tout court. C'eft que le bon homme ne veut pas mentir: il ne donnera ni argent ni fille.  ( 158 ) i. II eft donc vrai ma Cuére Que je ferai vötre Epoux (63) Vous qui mette fi Cne're Par le Lien plus doux Digitte. Oui Mon Pére & Ma Mére Ils veullcnr me maner (64) Ha fi je vous fuis Chcre Mon Cceur s'eft décidé Le (63) Oui, Do'ino, oui mon ami, tu feras 1'époux, comme tant d'autresque je connois. Mak quoi! tu fais des vers auffi ? Ah pfèti'ds gardé que cette maladie ne te gagne: c'eft bien affezde tafemme & de M. Hadoux; apprends mon ami qu'il vaut mieux faire des petits pains d'un fol, décroter même les fouliers, que de rimailler h tort & a travers, fans talents, fans génie, fans connoisfances, & fans favoir lire. II y a déja tant de fots livres: pourquoi en aller augmenter le nombre? On t'eftime dans ton état de Boulanger, on te rira au nez lorsque tu féras 1'auteur, & tu n'en retirerasquele plaifir d'être hué, fifflé, moqué.berné, baffoué &c. &c, &c, Pour Dieu, mon cher, fais des petits pains. (64) Cela n'eft pas vrai , Mademoifelle Digitte, c'eft vous même qui le voulez. Pourquoi mentir au Public? Croyez-vous que cela eft plus beau paree que vous le faites en mauvaifes rimes ? Ailez dire a celui qui vous fouffle ces beaux vers'qu'il eft caufe que vous pafiez pour une bavarde, & même pour une effrontée, qui fe jette a la tête du premier venu , au moindre motde douceur.  ( 159 ) 2. Le Petit Cabaret mon Pére Me Fait un grand bonheur Je naurrois point cru ma Mére Avoir un fi bon Cceur Vous avés 1'amitié De vouloir me mariér Votre petitc fille ainée Quelle n'en n'eft point fachér (65) 3. Qui auroit crü 1'attenre Du petit Cabaret (<56) L'hazard la plus briliiante Nous feroit point retirer (67) En vuidant la bouteille Nous nous fommes amufés Do- (65) Ah.' Le joli gcntil petit couplet! Les deuxderniers vers font mignons. Voila ce qui s'appelle de la poëfie! Auffi cela a-t'il été chanté furie théÉtre de la Haye, devant tout ce qu'il y a mieux dans la Hollande. (66) Hclas! Elle abien raifon; qui auroitpus'attendre a tant de fottifesk la feuleinfpeétion du titre? (67) Ceci paffe encore tout ce qu'on a vu Effce une Enigme, une Epigramme, uneParabole, unLo°-ognphe? Que veut dire ce beau vers! Nous feroit po°int reurer. Eh ! Hadoux, retirez-vous , retirez vouscrovez moi;&meme n'y reparoiffez plus (Helas!aussu.t'h,fait)  C 160 ) Dodino prénd fa belle (68) Pour fe bien amufer, 4, Qu'il nous feroit doux dc plsire Dans le petit Cabaret (6;) Des loges & du parterre Avoir leur amïtié (70) En- (68 Par oü s'il vous plait? Eft-ct ?ar fous lebras? vous auriez bien du nous dire par. oü 0.1 prénd une belle pour fe bien amufer. Certes Ia qhofe en valloit bien la peine. Vous nous laiffcz h dans une incertitude défagréable. Allons, Hadoux, comment vous y prenez vous^ en pareil cas! Ne manquez pas au moins de nous éclaircir cela dans la feconde Edition de vos Euvres, Le public eft impatient de vous entendre raifonner fur eet article. (69) Ce que vous demandez-la n'eft pas peu de chöfe, M Hadoux. On ne plait pas fi facilement que votis le croiriez bien. Nous le dcfirons atifii nous autres, fans öfer le demander comme vous. II eft vrai que nous ne fommes qu'en feconds, & que ce n'eft qu'a 1'ombrc de vos ailes que nous pouvons nous produire; mais nous comptons fur votre proteftion auprès du'Public; il vous a accueilli d'une maniere a nous donner les plus flattcufes efpérances, (70) Vamïtié \ Cela n'eft pas nécefiaire; c'eft fargent que vous voulez dire: cela vaut beaucoup mieux. Avouez que c'eft la votre penfee: h quoi fert de faire la petite bouche ! Eft-ce qu'on ne vous connoit pas! Soycz fincerè, mon anii; ne faites point le gas co n.  ( I6i ) Encourgés 1'auteur Par l'applatisfement (ji) Vous Cornblés nos Coeurs Et nous 1'erons Concents. (72) (71) Le mot Encourger eft un ancien verbe gaulois qui fignifie Battre, /rapper; d'oü eftvenu le Proverbe je vous donnerai les escourgêes: c'eft-a-dire je vous roJJ'erai d'importance. Noui ne concevons pas en vérité , d'après cela, comment notre Auteur peut prier le public de Pencourger: cela nous paroit extrêmement fingulier. Jamais écrivain quelconque n'a fait une telle demande \ fes leóteurs. Quant li nous, nous ne voulons point du tout partager rien de cela avec M. Hadoux. — Par Papplatiftement: QueDiable! C'eft fe moquer du monde; c'eft une chofe fort peu agréable que d être applati. „ Monfieur 1'Auteur que Dieu confonde „ Vous êtes un maudit bavard. Mais nous vous avertiffons que fi votre defir eft d'étre applati, vous le ferez, ma foi, tout feul; nous ne voulóns décidêment y entrer pour rien. (72) Contents. C'eft bien dit. Faffe le ciel que tout le monde le foit, & vous auffi, M. HADOUX, des lix douzaines de Notes que votre Cabaret nous a couté. Or fus Bon-foir. Travaillez, écrivez, ramez comme'corfaire, & tüchez d'attraper a la volée quelques petits rayons de gloire poëtique; mais comme dit la -chanfon, Eb non, non, non, ce n'eft pas pour vous que le four cbauffe. > F I N. h Pont;  C 162 ) Po u r ne rien omettre de tout ce qui a rapport aux produftions de M. Hadoux, nous nous faifons un vrai plaifir de communiquer a nos Le&eurs diverfes Pieces qui nous ont été remifes en temps & lieu pour en faire ufage. LE JUGEMENT du PETIT CABARET. Vers Acrostiches Sur le nom de M: HADOUX. 1'on vous trouve enfin. Eh d'oü donc venez vous ? — h>u Diable foit 1'auteur, fes vers, fa rapfo- die! — $3?e quoi parlez-vous la? d'oü naït ce grand couroux? f^n croiroit — ah Monfieur, pardonnez je vous prie, fj^n faquin m'a mené au Cabaret d'Hadoux. ^antipe na rien dit d'aufli fot dans fa vie. (*) Le (*) Xantipe étoit femme de Socrate. On dit que le bon Philofophe enragea pliis d'une fois du bavardage & des bétifes de fa chere niöitié. Xantipe ne s'attendoit guere a fe trouver ici, mais elle a le bonheur d'avoir un nom qui commence par un X.  ( 163 ) J^e jour que 1'on donna le Petit Cabaret fur le théatre de la Haye, quelques Sergens de la garnifon, quelques Caporaux & même quelques Soldats de la connoiffance de M. Hadoux, emprunterent des habits bourgeois pourvenira la Comédie, & s'y rendirent, au risque d'êrre mis aux arrêts le lendemain. Un Grenadier, bel efprit de fa Compagnie, témoin du triomphe de notre Auteur, en fit ainfi le rapport a fon Camarade, en buvant un coup. (a) Un S de plus ou de moins dans la rime eft peu de ehofe. Un Grenadier n'y regarde pas de fi prés. L z Sur fair Jiila qui a pincê Bergopzoom. je reviens, mon cher Bagnolet, De vou le petit Cabaret, . Et pour afin que tu n'en doute, Tiens, bois ton verre & puis m'e'coute. Premierement, en premier lieu Te m'luis planté droit comme un pieu Tont jufte au mitan du parerre Quand on allurr.it les lumieres (a) Dès  ( iö4 ) Dès qu'les acteurs ont commcncé Les fifflets partoutont perce'; Dame il falloit voir la bataille Pour moi ca mfémut les entrailles. (b) Hadoux qu'eft un plaifant vivant Les fit tous taire en paroiflant; Par la mordienne quel Compere.' Pour bien parler c'eft a lui 1'pere. Mais vraimcnt ce n'eft pas la tout S'il parle bien, il chante itou; Enfin il a la voix fi belle Qu'après lui faut tirer 1'échelle. Pour amufer tous les Bourgeois II a chante des airs grivois, Puis après les -hatteries flottantes Les dames ont été bien contentes. EPIGRAM ME Imitêe de fur le Petit Cabaret. par un des Eleves du Sieur ****** D'avoir hanté la Comédie Un penitent en bon chrêtien Se om'éfioit, promettant bien De n'y retourner de fa vie. Voyons, lui dit le Reolet, C'eft le plaifir qui fait 1'otïenfe, Que donnoit-on? le Cabaret. . Vous le lirez pour péaitence. £b) Autre licence poëtique foldatesque.  ( 165 ) J^^vant de paffer au Commentaire des Chanfons du Sieur Hadoux, nous devons avertir ici qu'un fculpteur célebre travaille au Bufle de notre Auteur. . II fera couronné de trois branches de laurier (a) artiftement entrelacées de mirthe. (b) On en fera préfent aux Directeurs du théatre de la Haye pour en orner leur Avant Scène. Sur une tablette de marbre, incruftée au bas, fe liront les vers fuivans. Ce bel (O efprit, Meffieurs, euttroistalensdivers Qui trouveronr un jour Payenir peu crédule : Il fut chanter (d) danfer, mieux qu'homme en 1'univers, II fut rendre au parfait la fcgene ridicme, . Et de fon fiecle enfin fit les plus charmans (t) vers. Qa) Lifez Chardons. (b~) Lifez'Gratte-cul. (O Lifez Lourd. (d) Lifez Br ai Her. CO Lifez Mécbans. L3 CHAN-  CHANSONS CHANCONS Dont le Sieur Hadoux a gratifié le Public, le jour de la Repréfentation du Petit Cabaret, & qui fe trouvent dans la Colledlion de fes Euvres. O U COM-  (i67) (1) Cela apprendra a yiyre a M-sffiears les faifeurs de Battcries. Le Sieur Hadoux, qui eft Anglican jusqu'aux dents, leur chantera bien leur gamme. Vous ferez troupés d'importancc Meffieurs, je vous en réponds; M. Hadoux ne vous laiffera pas la. 11 vous dira bien votre- fait. Vous ferez troupés , vous dis-je. (2) De quel Canon parlez-vous, M. Hadoux5 Le bruit de ce Canon. N'y en avoit il donc qu'un 'a votre comptc? Oud galimathias nous faites-vous-la ? Un tonnerre, un Canon, &c. Ce ftile eft pitoyable; votre Apollon n'a pas le fens commun aujourdhui; mais il faut bien vous pardonner quclque chofe en faveur du refte. (3) Eh quoi! en voila a préfcnt deux cent? mais êtes vous bien fur du compte ? il ne s'agit pas de tromper ici. Un homme comme vous ne doit pas mentir: paffe encore pour les Gazettiers , on fait que c'eft leur privilege; mais vous, fans doute cela ne fe peut pas. Allons M. Hadoux, mettez la main fur la confcience; cft-il vrai qu'il y avoit deux cent piéces dc Canon ? L 4 Compleint' des Bateri Flotanté. Douze Batteries de Canons A 1'Honneur des bourbons Etant munitionnés Comme des Bons Guerriers Croyant de faire Conqu'ête Ils fe fircnt bien trouper (i) Les Anglois furcnt les Maitres II fircnt tout r.oyer. 2. On entend un tonnerre Le Bruit de cc Canon (Y) La foudre & la tempête Deux Cent pieces de Canon (3) Bris- '  C 168 ) BrifTans tous les Rempars Et tous les Baftillions Pour en avoir la gloire A 1'honneur des Bourbons, (4) Elliot en bonnet rouge II fit faire des grands feux (5) Tirants a Boulets rouges Pour y mettre le fcux (ó) Milles & Bombes & CarcalTe Trois Cent piéces de Canon (7) Tiarnt fur Ces CarcalTe Pour les Couler a fon. Con- (4) Nousne vouscomprenons pas trop , M.Hadoux; Ces deux derniers vers ne font que du rempliffagc. On'voit bien que vous êtes Auteur dans les regies. Quand on ne fait plus que dire, on compile, on barbouille, on remplit la page, & cela fe vend au bénin public. Pcfic! vous entendez le métier. (5) Pourquoi, s'il vous plait, en bonnet rouge? Prenez-vousSir Elliot pour un galéricn detoulon ? Oü diantre avez-vous pris que le Gouverneur de Gibraltar porte des bonnets rouges? Vous êtes un plaifant original avec votre bonnet rouge. Avez-vous vu ce bonnet rouge pour en parler? Je ne crois pas que vous ayez jamais été valet-de chambre du héros britannique; comment favcz-vous fi fes bonnets font rouges? Allez, mon ami, ne vous ingérez point de. parler de la Garde-Robe dé Sir Elliot; il n'y a rien la de cotnmun avec'vous. (6) M. Hadoux aime les rimes riehes. II fait rimer rouge avec rouge, feux avec feux , carcajfe avec carcafj'e. Cela eft favant! (7) Comptons, je vous prie, M, Hadoux. Vous nous donnez la des Canons fort a votre aife. Dabord un , puis  Ci69) 4- Contre la refiftance La force ny été plus Les Batteries en decadence Dans leau furent confonducs On voit de toute part Ces malheureux dans 1'eau Nageants prés des rampards En fe fauvants des flots (8). 5. Le Prince de Naffau Etant tous desarmé Par les Bombes & les flots Etant tout allarmé (9) Prc- puis deux cent, & iel trois cent. Cela fait jufte cmq cent & un Canons pour le fiége de Gibraltar. Nous ne voulons pas vous chicanner; ilvaut encore mieux vous croire que d'y aller voir: mais il ne vous en auroit pas plus coüté de dire en une feule fois la quantité. Enfin foit, vous êtes poëte & grand poëte, c'eft tout dire; qn doit'recevoir tout avec une filencieufe admiration. (8) Ah! que c'eft trifte ! La chofe n'eft pourtant que trop vraie, malgré les fades plaifanteries des écrivains du Moming-Poft & confrères. Mais patience, i] faut bien donner au Public quelques petites tragédies, pour 1'amufement de Meffieurs les Généraux : fans cela leur vie feroit trop monotone. (9) Quel flile, bon Dieu! il faut être bien für de fon fait pour IScher de tels vers dans le monde. Mais M. Hadoux fait bien que tout leêteur doit 1'admirer fans examen. L 5  ( i7o ) Pernant une Chaloupe Et fe mite a ramer Peu a fallu fans doute Quil fe fit Prifonnier (10). (10) Qu'tl fe fit prifonnier: c'eft-a-dire que le Prince de Naffau a été fur le point de fe prendre lui même par le bras, & de fe merier en prifon. Cela eut été cttrieux k voir. II auroit enfuite acheté fa propre raneon, dont il auroit requ le payement, après avoir bien marchandé comme de raifon , attendü qu'il n'eft pas un petit perfonnage, & qu'il n'auroit pas voulu fe IScher pour peu de chofe. Ah! que nous avons perdu de ce que tout cela n'a pas eu lieu. Chan-  ( i7i ) Chanfon fur les Comédknes (n). Martinelle (12) a des Charmes Qui donnent a déchirer (13) En tout tems elle Charme On voudroit fon .ponrtrait Sans ohlyer fa Taille Quelle n'eft point méprifés Et un Jolie petit Pieds De Petite Tailie (14). Elle (h) Nous avertiffons les Dames ou Demoifcllcs en faveur de qui M. Hadoux a mis ici fon Phebus en frais, que nous fommes fachés pour elles de ce que 1'Auteur a eftropié leurs louanges d'une manière fi grotesque; niais enfin c'eft toujours de la poëfie, & n'eft pas mis en chanfon qui veut, même par M. Hadoux. (12) Martinelle lifez Martin, elle &c. Du moins nous le penfons ainfi; peut-être 1'intention de 1'auteur eft-elle de dire Martinelle pour Martin, comme on dit fillette pour fille &c. C'eft ce que nous ignorons. (13) è Déchirer\ voila qui eft drole! II ne faut pas aller chez cette Demoifelle avec des manchettes de dentelle apparamment. a Déchirer \ Nous ne favons pas trop ce que M. Hadoux entend par la. (14) Comme tout cela eft mignon! Tudieu! 1'ami, vous n'avez pas vos yeux dans votre poche. Vous pasfez tout en revue , a ce que je vois. N'auriez vous point par hazard volé quelque jolie mule a Mademoifelle Martin? Vous paroiffez tout émerveillé de fon pied furtout. Allons, dites la vérité, je gage que vous avez été chez fon cordonnier exprès; car pour chez elle, je crois bien, mon pauvre Hadoux , que c'eft pour vous porte clofe.  ( 172 ) Elle a auffy des Levres Q 5) Un nés & u» manton (ió) La rand la plus Celebre Qu'une venus tout de bon Aufll C'eft une gloire Dadmirés fes beaux yeux C'eft Imagesftueux (17) C'eft dans Dyvoire (18.) La Taille !a mieux faite Du Sexe Madame Magniez (ip) Ses Oö) Quoi! elle a auffi des Levres? Combien de pai- res, s'il vous plait? Fi donc! M. Hadoux, on va vous prendre pour un anatomifte. Vous détaillez cela d'une manière bien bifarre; votre imagination galope furieufement. (16) Tout de bon? eft-il poflible? Mademoifelle Martin a-t'elie bien un nez & un manton ? en êtes vous fur? (17) Qu'entendez-vous par des ImajeflueuxX Eft-ce quelque chofe de particulier \ Mademoifelle Martin? Nous ne favons rien de tel a aucune femme de notre connoiiTance. Ci8) Ca ne fe lit pas, mais 5a fe devine, k ce que nous a dit quelqu'un qui nous voyoit embaraffés fur ces trois mots. (19) Apparamment que M. Hadoux a parcouru tous les boudoirs des Elégantes de Paris, de Londres, de Venife , & tous les (ératls de 1'Afie peuplés de ces fameufes Gcorgiennes fi rénommées pour leur taille & leur beauté , puisqu'il décide fans appel que Madame Magniez polfcde Ia plus belle taille de fon fexe. Sans doute qu'il a fait toutes les comparaifons ci-deffus. En ce cas 1'aflrice de Ia Haye doit être bien orgueilleufc de 1'emporter fur toutes les belles de 1'univers.  ( 173 ) Ses Jambes font parfaite (20) Marche fur le pieds francois Sa Gorgc fans pareille Tous ces ajuftement Sont vermilliont Charmant Seait a merveille (21). La Plante elle a des Charmes Que 1'on peut admirer (22) Qu'un Chacun la régarde Voyant ce beau portrait Un Chacun la réverc Et voudroit fur le Champ L'avoir un feul moment Pour fa bergère (23). Chan- Ozo Ses jambes'. Allez M. Hadoux, allez en conter k d'autres. Jamais vous n'avez vu les jambes de Madame Magniez. Vous venez faire la 1'homme h bonnes fortunes , comme ü 1'on étoit dupe de vos gafconades. Ne dlroit-on pas que toutes les Dames courent apres vous pour vous montrer leurs jambes? fdO Oui, M Hadoux, vous avez raifon, le tout en bloc eft d merveille, & votre chanfon auffi. Je doute pourtant qu'elle faffe grande fenfation chez les héroïnes que vous célébrez; je crois qu'elles auroient volontiers difpenfé votre Apollon de fes eloges. (22) Ils font donc vifibles ces Charmes'. En vérité, M Hadoux, vous êtes un peu indifcret; Mademoifelle Plante n'a pas befoin que vousfaffiez les honneurs de fes charmes. f20 II V a ici une faute de CorreSion tout a fait maladroite. - Au lieu de pour fa bergère, il faut Ine fur fa bergère. Un feul moment, dites-vous t elt bien peu M. Hadoux. Si vous aviez dit feulementune Heure encore paffe; maisun moment; enhonneur ce n'eft pa's affez. Faites enforte de corriger tout-eela dans la feconde édition.  C 174 ) (24 Ou donc , m. Hadoux ? Vous n'en,dites pas un mot. Faut-il donc que 1'on foit forcier pour vous lire? Vous marqueZ fi bien 1'année, vous auriez pu nommer aufii 1'endroit: cela n'auroit point g&te l'arfaire. (25) Des ames qui pleutent doivent être bien extraordinaires. On ne voit cela qu'au purgatoire; il faut avouer que M. Hadoux eft tout k fait'baroque. (26) Pomper 'a pleine gorge pour éteindre le feu: cela eft trés poëtique. L'Auteur veut peut-être dire qu'on a fait venir toute la garnifon a ce grand'incendie. & que chaque foldat ayant craché fur le feu, 5a ne lil pas empêché de brulër. - {7.ï)-L'autel. m. Hadoux n'écrit pas P Hotel de Fran* ce , mais Pautel de France, attendü qu'il y a une chapelle oü 1'on dit la meife. Dans le moment le plus cri- Chanson jur l'air de VEnfant prodigue. L'an Mille fept cent quatre vingtdeux Le feu prena des plus affreux (24) Vous n'auriés vü que feu & Fiammes Tout le monde eft agité II n'y avoit aucune amc Qu'il neut envie de pleurer (25) Don a fait Citot Sonner - Et marcher tous les Pompiers On pompa a pleine gorge Dix a douze pompes a la fuis r\'cmpccha pas le defordre Que 1'autel eft aux abois (27) Tous  ( 175 ) Tous les voifins de Ce Canton lis déménagent tout de bon Chacun court de toute part pour fauver Mcmbre & effets Un Chacun prené fa part (a8) Par la foi les a nimé. Monfieur le Duc de Vauguyon Voyant Le feu dans fa maifon II fecria avec douleur Ou eft-il mon enfant Le feu eft a fa demeure Sauvés le de tourmant (20) On critique le Chapelain ayant fauvé les vafes facrés & autrcs omemens facerdotaux , les bonnes femmes fe font écriées : la vier ge foit bénie, le bon Dieu ne fera- pas brulé\ ivl. Hadoux n'auroit pas dü oublier cette pieufe exclamation. (28) Cela nous rappelle ces deux vers de Boileau qui, parlant d'un incendie oü pour 1'ordinaire accourent auta'nt de coquins pour voler, que d'honnêtes gens pour fecourir, dit: Que maint Grec affamé, maint avide Argien Au travers des charbons va piller le Troyen. Ceci feraduhaut allemand pour M. Hadoux; mais qu'il tache de fe le faire expliquer par quelque maitre d'ecole, & qu'il lui apprenne en retour le pas de bouret ou de fixfone. (29) Ah! Monfeigneur, que votre Excellence daigne pardonner h ce pauvre poëte! Il vous fait parler bien piteufement. Que voulez-vous? Ce n'eft pas la fa première fotife. II faut bien d'ailleurs qu'il garde fon ftile d'un boutk 1'autre; le fujet n'eft pas gai.  ( 176- > On monta au même Inftant Parmi le feu dévorant On le prit dedans fa Chambre Dan fon lit tout endormi On ie paffa de Chambre en Chambre Par la fume'e (20) tout evanoui, ^ Hó Ciel quelle Cruauté De voir un tel feu agité (31) Le feu fortait comme la poudre A gros Charbons tout allumer L'autel brüle Comme la poudje Ln huic heures elle fut ConfoméD (32). (30) On le paffa par la fuméey tamme on paffe un poulct par la flame. Tout cela eft rendu avec une précifionjqui ne laifié rien k defirer. Aucune circonftance n'eftomife , endormt, évanoui. (31) Un feu agité. Certes ce feu-lk avoit grand tort. Pourquoi s'agiter ainfi? II eut été bien plus honnête k lui de bruler tranquillement, fans fracas. (32) Si eet accident funefte , que nous ne pouvons rappeller k notre fouvenir fans verfer véritablement des larmes , ne nous affectoit encore auffi vivement, nous nous donnerions le plaifir de turlupinerM. Hadoux fur fa chanfon ; mais notre gaité s'évanoult aux idéés triftes & facheufes que ce malheur trop réel nous retrace. Com-  c 177 > Compliment tfheureüfe anhêe d fon Altejfc Sercniffime Monfeigneur le Prince d'Orange & de Najjau &c. &c. £fc. 1783. X-T" fidele fujet, Monfeigneur Vous fait voir fon fentiment ; 33) Vous qui comblez tous les cceurs Voudroit en ce moment Que votre illufire familie Soit córnblée de bénédiftion Dans les campagne et dans les ville Pour eftimer un prince li bon. (34) V ous fouhaitant une heureüfe année Et raccompliffement de tous vos defirs Pour vous voir vivre cent années C'eft (33) Ccla eft bien intéreffant pour ie Prince! C'eft qütlque chofe de bien utile qüe fe fentiment de M. Hadoux ! Vous verrez qu'il faut laiffer-Ia t^uies les affaires publiques & privées pour voir le fentiment de M. Hadoux. Croyez-moi, mon ami, n'aliez point ennuyer mal a propos la Cour; c'eft bien afiez de ia ville. n(34) Eflimérl Que voulez-vous ciire par ejïimcr? Croyez-vous qu'on nttend vos ordres pour aimer&refpeaer un Prince dont la blerfnifanCe eft fi connue» Sachez M. Hadoux qu'on n*a pas befom de vos fouhaits pour efttmer 1'Augufte Defeendant des libérateurs de la Holiande. Faites nous erace de vos platitudes ro6tiques. M  ( *7* ) C'eft tout 1'agrement que je defire (35) Que votre altefle Royale Madame la Princeffe Ayant le cceur loyal; C'eft a vous que je m'adrefle C36) Voyant eet heureux jour Qui ren ou veile 1'annèe Que Pétendue de votre cour En brillants foit ornée. (37) Et (35) II n'eft pas fou, M. Hadoux. II veut bien que le Prince vive cent années, mais il prétend en être tcmoin , le voir de fes propres yeux. En effet M. Hadoux eft un être trop néceffaire en ce monde pour en décamper fitöt; 1'univers en feroit inconsolable; le foleil paliroit de douleur , les fleuves cefferoient de rouler leurs ondes défolées ; la nature en dcuil ne produiroit plus de fleurs ni de fruits; les meres oublieroient d'allaiter leurs enfans, & les Snes cefferoient de braire. Dieu nous préferve de la perte de M. Hadoux. (36) Fort bien , notre ami. II me paroit que vous avez quelque grain d'ambition. Vous n'aliez pas chercherfaint Pierre pour pariera Dieu. Quanth moi, j'admire votre hardiesfe. Faffe le ciel que cela vous reusfifle! (37) Une Courpavée en brillans feroit, ma foi, raagnifique. M, Hadoux fait des rêves bien riches. Nous lui fouhaitons beaucoup de ces pavés ; car on nous allure qu'il n'eft pas cxtrêmement bien avec le feigneur Plutus-, mais en recbmpenfe il eft le favori d'Apoüon, & 1'on fait bien qu'il eft impoflible de fervir deux Maitres 'a la fois.  ( 179 ) Et vos illuftres enfans Princes et Princeffe, Qu'il foient remplis d'agrémens Durant leur jeunelTe. (38) HADOUX (38) Duram leur jeunejfe. C'eft bien peu, M. Htdoux. Pourquoi pas aufli dans Page viril, dans Page rour, & dans la vieilleffe? Quand on fait un fouhait, il n'en coüte pas davantagè de le faire honnête. M z Adres*  ( i8ö ) Jfdreffee aux MeJJÏeurs les Officiers & les Etats Major (39) de toute la Garnufon de la Haye préfenté en , 1782. ÜT^es officiers etats majors De toute la garnifon, On voit votre cceur en dehors (40) Par toutes vos bonnes facons. On fait que vous étes jufte et equitable Et vous avez beaucoup d'indulgence Si je pouvois vous être agréable Je ne regretterois point ma naiffance. (41) En m'etant favorable Je ferai foulagé De la perfécute des diables Qui m'ont calomnié. (42) C'eft (39) Combien y a-t-il donc d'Etats-Majors k la Haye ? Mais qu'hnpone le nombre ? petit ougrand, M. Hadoux s'addreile k tous, fuffent-ils mille. (40) En debors! par deffus 1'habit. (41) La naiffance de M. Hado\ix! Nous fommes bien fachés de ne pouvoir indiquer 1'heure & le jour de cette heureufe naiffance. Quel eft Paflrologue qui a obfervé fon étoile? Le devin qui a tiré fon horofcope? Tout cela feroit bien intéreffant: mais nialheureufement tout cela nous manque. (42) Voyez les méebans qui fe font amufés aux dépens de M. Hadoux! Ne le fouffrez plus, mon ami; ccrivez contre eux.  ( 181 ) C'eft a vous Meffieurs Qui me vois humilié Vous guérirez ma douleur De toutes les iniquités. 43) Je fens fort bien moi même Que je fuis incapable (44) Je voudrois pour moi mêne Etre plus louable (45) Je vous prie de m'encourger (46) Te (43) Cet homme doit être un grand péchcur: admirez comme il fe confeffe ! il avue'fes iniquités , & il prie Meffieurs les Officiers de la flaVe de lui donner 1'ab.fblution. Cela eft bon , M. Hadoux, mais1 aupa'-.ivant il faut accomplir votre pénitence. , Allons, a genoux, & demandez pardon au Public de vos fotifés Levez-vous maintenant, vous êtes abfous, mais n'y revenez plus. (44) Hélas' il n'eft que trop vrai; le Public le fait fort bien. (45) Il faut prendre patience, cela viendra peut-être quelque jour. Mais ne vous preffez point trop, M. Hadoux; donn«z-vous le temps de devenir louable; vous avez encore du chemjn \ faire. (46) Oh pour cela trés volontiers; s'il ne tient qu'h vous encourger, M. Hadoux, vous pouvez compter deffus, quand cela vous fera plaifir. En prévenant quelques jours d'avance, vous ferez fervi a fouhait. Ces Meffieurs les Etats-Majors ne font pas gens a vous refufer, & je vous réponds qu'ils feront galamment les chofes. Vous pouvez être tranquille: un mot fuffira, •' M 3  ( ï82 ) Je mettrai toute mon ardeur Pour vous remercier De tous vos bons coeurs. (47) HADOUX. (47) Cela eft jufte: comme 'dit-la Chanfojn, Ce n'eft pas te tout que d>être pendu, c'ejl qtfil faut être bonnête. Si vous voulez, on vous diftera la formule du remerciment, afin que tout fe fafle en regie. Avant de terminer ce Commentaire, nous prierons le Lecleur de jetter les yeux fur PAvertiffement fuivant de M. Hadoux, quHla placé fur le coté intérieur de la Couverture de fon we, dans le deffein de donnerla listë ou les NOMS des foufcripteurs qui ont bien voulu facrifier deux florins pour fes Belles Euvres. NON  NON (48) Les Souscrivens qui mon fait Vhonneur cVappuler a Vimprimerie de nes euvres. Messieurs! &c N- B. ON a réfléchi depuis qui ne falloit pas les mettre, par ce que tous les jours y en venant de nouveaux, on ne pouroit pas mettre tout. Ca fera pour dans la Seconde edition de mes euvres, fi on en fait une, pour que je reponde peut-être, au Commentaire qu'on dit qu'on fait de mes pieces. HADOUX. r48) Comme ce non eft fin, joli, fpirituel! Quelle foufcauroientfau ceux qui auroient mis noks! M 4  C 184 ) C3n voit par PAvis ci-deflus de M. Hadoux qu'il répondra peut-être au Commentaire. Nous le Supplions de ne pas nous tenir longtemps le becdans 1'eau, étant fingulierement curieux de voir la Philippique qu'il écrira contre le Commentateur de fes Pieces. JS}ous finirons par quelques morceaux qui nous ont été remis de divers lieux, & qui couronperont admirablement bien le préfent Ouvrage. I. Un Amateur a fait encadrer fous glacé une des Chanfons de M. Hadoux & a mis au bas le QuATRAiN fuivant; En admirant ces Vers qu'un iliuilre Danfcur Compofa d'une main qui ne fut point e'crire, Süuviens-toi que Midas chanta fans favdir lire. Et ne t'étonne plus qu'Hadoux fuit un Rimeur'. II. Un^ Gentilhomme de nos amis a un Valet qui fe mêle de faire des Rondaux, des Bouquets a Clpris, des Trioiets &c. Entouliasmé de la grande réputation de M. Hadoux, ce gareon s'eft ouvert a fon maitre, pour le prier de lui procurer la connoiffance de notre Poëte. a fa  ( i85 ) a fa priere 1'honnête Gentilhomrae a écrit k M. Hadoux k Piece de vers fuivante, intitulée. Placet de mon iaquais au Jieur Hadoux. Un jeune Eleve d'Apollon Mon Laquais, un fujet de trés grande importance. Qni defire grimper fur le facré vallon, Vous vient, Hadoux, dans cette circonftancc, Préfenter un Placet qui ne fera pas long. Mon Laquais donc qui veut ëritref cn lice, Bon Diable, & de plus grand Rimeur, Prétend fur 1'Hélicon tirer ó. la milice, Et des Mufes enfin mériter la faveur. Avide, hélas, du poëtique honneur, II a, dit-il, fujet de croire Qu'auprès des Dieux obtenant votre apptii. Sur tuut autre bientöt il auroit Ja victoire, Er qu'on ne parleroit que de vous & d: lui. Or donc il demande la grace D'être fur votre dos au Parnafie guindé, Et dufliez-vous, Hadoux, parcitre ane bate, I! faut que fur le feuil de la poftérité Vous allicz lui montrer quelle fera Ia place. Soit dit ici fans vanité, Mon Laquais peut trés bien vous porter jalöyüèv) Car je vous jure, Hadoux, onc n'ai vu dt: ma vie Homme aller mieux que vtous a 1'immurtalité. III. i Stances Irregulieres. Adrejfêes d M. HADOUX par un poëte de Jet amis, (le Sieur Dodino.) Sublime Hadoux, par qui le Théatre & PÉcl >gué Offrent aux Amateurs mille nouveaux appas: Sal- M 5  < i86) Saltinbanque favant, que pour le Dialogue Fontenelle & Lucien, certes, ne valent pas: Hadoux, que le bon góütéclaire, Viens gourmander les fot vulgaire De tesfuccès encor furpris; II eft, il eft des beautés neuves, Et j'ofe pourdernieres preuves Le renvoyer a tes écrits, Par tes beaux (i) chants eet ignorant vulgaire Connoit enfin tout le prix du favoir. Ta Poëfie a fes yeux faura plaire (2) Sur tous les coeurs s'étendra ton pouvoir; Tout cede a ton intelligence (g") Le Parterre aime a te louer {£) Tu forces 1'envie au filence, Et la contrains de t'admirer. (5) IV. Strophe Imitatxve Au feul afpeót de tes ouvrages On tombe en admiration. Au Dragon verd tous les füffrages Sont dus fans conteftation. Le p'tit Cabret, eet heureux gage De ton imagination, Au Parnaffe fera tapage, Du moins c'eft notre intention. ■ Adieu (1) Beaux Lifez Sott (€) Plaire Lifez Braire. (3) Intelligence Lifez Extravagance. (4) Louer Lifez Berner. C5) Admirer Lifez Turlupiner.  ( i«7} V. Adieü du Commentateur au Sieur Hadoux* Hadoux, acceptes eet hommage Sue je t'ofFre è condition u'aurons encor plus d'une page, De ta fertile invention. Je te promets qu'a chaque marge Je joindrai 1'explication., De peur, Hélas, que le Lecteur volage Ne crie haro fur ta producbion., PIECE FINALE Au Public. Si fans ceffeautrefois tu répandis des larmes Pleure encore, Héraclite, en lifant la Babé Démocrite, k tes ris fi tu trouvas des charmes, Eclate & ris encore en voyant le Cabret. Mais, nous, quel parti prendre ? Eh fans tant de caquet; Chantons, Meffieurs. chantons la gamme de Silene Hi han! hi han>! hi han! Hi han! hi han! hi han! Hi han! M, H a d o u x. F I N.