UN PETIT MOT DE R Ê P O N S E A M. DE CALONNE, SUR SA REQUÊTE AU ROT. Votre Requête au Roi, Monfieur; a excité , en France, ia plus grande curiofité, mais fans y faire la moindre fenfation. Chacun s'eft empreiTé de Ia lire , ' pour voir jufqu'oü 1'abus des phrafes & des expreffions pouvoit être porté dans un ouvrage de votre fac,on; & perfonne de bon' fens ne peut reconnoitre, dans vos raifonnemens fpécieux & dans 1'exaltation de votre dépit, la juftification des torts que la Nation entiere vous impute , ■& dont elle ne refTent que trop réellement 1'effet. A  i 2 5 Vous débutez par manquer de re£ peel: au Roi, è la Nation & a la Vérité tout enfemble, en interpellant Sa Ma» jefté ( pag. 8 & 9 de votre Requête ) pour déclarer : « qu'ayant une parfaite w connoiffance de tous les objets fur *> lefquels font dirigés les chefs d'accu»fation, Elle les trouve deftitués de »fondement , & qu'Elle ju ge votre » conduite dans TAdminiftration de la w Finance, irréprochable en tout point.» Vous manquez de fagefTe & de bonne foi, lorfqu'en parlant (pag. 166 de votre Requête ) des défordres que les Pariemens vous accufent davoir commis dans les Finances, & que vous fuppofez exagérés , vous dites avec emphafe , « que ce n'étoit pas pour wécrafer un mortel, mais pour faire la » guerre au Ciel même, que les Titans » conjurés lancoient d'énormes rochers. >» Vous voudriez bien , dans votre dépit coupable, mettre le Ciel aux prifés avec la Terre, & un bon Roi avec fes fideles  C' 3 ) . Sujets j mais, M. de Calonne, vous n'y réuflïrez pas. Vous manquez totalement de raifon & dequité, lorfqu'au lieu de reconnoitre humblement vos torts devant une grande Nation que vous ave? offenfée, vous imputez au Ciergé en général , & a M. 1'Archevêque de Touloufe en particulier , la difgrace que vous avez méritée. Vous allez plus loin ; vous accufez ce Prir cipalMiniflre des pertes que le Tréfor royal peut efluyer de la part de quelques Agioteurs auxquels vous «rvez livré vous-même des Fonds confidérables de la caiffe du Tréfor royal, qui font aujourd'hui en fouffrance. Vous dites , en apoftrophant M. 1'Archevêque de. Touloufe ( pag. 8 2 ) « que la perte » quelconque, s'il y en avoit, feroit de » votre fait plutöt que du mien , & que »s'il faut qu'il y ait un coupable de vcette perte, ce ne peut être que A z  C 4 ) wvous.» Ainfi , M. 1'Archevêque de Touloufe doit réparer vos irréparables terts , fous peine d'être coupable luimime; il doit faire rembourfer les Effets «jue vous avez confies ü légérement a quelques Agioteurs., quand même ces Agioteurs feroient ' aujourd'hui dans TimpolTibilité de les repréfenter. En vérité, Monfieur, il faut que vous préfumiez bien de votre logique , & fort peu de la nötre , pour prétendre nous faire adopter de pareils raifonnejmens ï Mais votre orgueil segare encore davantage : fugitif & réprouvé, acculé & coupable, vous vous jettez aux pieds du Roi, Sc vous ne doutez pas que ce fcon Maitre ne feit ému de vos fouffrances , & qu'il me vous ordonne de vous relever, fans vouloir qu'on croie qu'il vous pardonne (pag. 81 de la Requête ). Mais vous n'êtes pas un Sully, M. de Calonne; vous le . dites  ( 5 I vous-même. Rendez-vous donc juffice^ & n'efpérez pas que Sa Majefté vous confonde avec le grand Miniftre de Henri IV, comme vous confondez , pour votre prétendue juftification, le menfonge avec la vérité, & les expreffions d'une ame vertueufe & innocente avec celles d'une ame tourmentée de ' fon dépit & de fes fautes. Les mots ne font pas des a&ions; les chimères ne font pas des réahtés. Eh ! ne croyez pas, encore un coup, que la Nation vous doive de Ia reconnoiffance , & que la Pcftérité réhabilitera votre mémcire. Vous avez propofé, il eft vrai, lUffemblée des Notables; mais votre difcours a cette même Affemblée a dévoilé clairement le vrai motif de fa convocation, ainfi que vos projets ultérieurs. Ces Projets avoient une trop grande conformité avec votre conduite paffee, pour n'être pas'appergus par les Citoyens éclairés, & A 3  i6) pour ne pas enrayer la N^arion par leurs fuites (i). Non , Moniieur , les Francois ne font pas toujours dupes ; aujourd'hui, fur-tout, on ne peut leur en impofer fur rien: favez-vous pourquoi ? C'eft que depuis le moment oü v^ous êtes entré en place , ils ont été obligés de fe tenir fur leurs gardes. Vous ne doutiez de rien ; ils doutoient de tout. Qui, c'eft depuis ce tems-la que la Nation enfiere a commencé a s'occuper férieufement des affaires publiques , & a convertir fes chanfons & fa gaieté en raifonnemens folides. Depuis votre abfence même , ce changement a fait tant de progrès, que vous ne reconnoitriez plus vos Compatriotes. Ce n'eft plus de Fefprit & de la gentilleffe qu'il faut dans nos Adminiftrateurs; c'eft de a raifon , de la gravité ( de cette gravité que vous appellez pedanterie, ! . (i) Voyez les Pieces ci-jointes, cotées 1, Ut III.  ( 7 ) par contractie avec le frétillant de vos manieres , mais qui convient a 1'aplomb d'une tête penfante ) de Fexpérience, & fur-tout de 1'amour pour le travail. Un Miniftre fautillant & coquet, diffipateur & diffipé , ne tiendroit pas aujourd'hui vingt-quatre heures en place. Pour prouver que le changement arrivé dans le cara&ere national, a commencé k 1'époque de votre entrée dans le Miniftere des Finances, rappellons-nous cetteépoque: II vous fouvient fans doute qu'on annon§a dans 1'Europe eritiere la découverte d'une certaine Harpie, dont Curtius nous donna bientöt la repréfentation dans lbn Cabinet a Perfonnages. Cette efpece de Harpie t défignée par les Anciens fous le nom de Cteleno, étoit ornée d'une longue chevelure , & armée de deux griffes énormes. Elle avoit huit ou dix mamellesj pour alaiter fans doute un pa* A 4  ! s ) feil nombre de petits Monftres de & race. Elle ouvroit une gueule : ah , quelle gueule ! &: combien de malheureux animaux de toute efpece elle paroiffoit devoir engloutir pour affouvir fon impitoyable voracité ! Eh bien , Monfieur , cette repréfentation de lai Harpie Cccleno , étoit un emblême de votre future Adminiftration; c'étoit un prophete muet qui nous annoncoit les malheurs que nous avions a redouter de votre part. II étoit alTez bien coftumé pour qu'on'ne put s'y méprendre; & 1'événement n'a que trop juftifié & la prédiÉUon & le coftume. Reprenons votre Requête. Vous ne celfez d'y répéter que vous n'avez rien fait que par ordre du Roi; & ,furcela, vous croyant pleinement jufKfié, vous contemplez votre innocence d'un air fatisfait. Vous vous récriez enfuite fur la malignité de vos ennemis, fur 1'aveuglement de la Nation, fur la fottife de fopinion publique, & fur 1'injuflice des  ( 9 ) 'Magiftrats a votre égard. Soyons de bonne foi, Monfieur, & fongeons que nous parions ici a des Hommes, & non a des Enfans. Nous favons tous, (& 1'hiftoire des Nations & celle du cceur "humain* nous 1'apprennent affez ) qu'un Miniftre peut tromper le meilleur & Ie plus éclairé des Rois, & fur-tout quand ce Roi a mis fa confiance en lui, & qu'il le croit un Homme de bien. Or, toutes les fois que vous avez propofé quelques Projets au Roi, toutes les fois que vous lui avez demandé des ordres, vous avez toujours dit, fans doute, que c'étoit pour le bien de 1'Etat, & non pour le votre, ou celui de vos Amis; vous avez toujours dit que telle ou 'telle Opération tendoit au bonheur & a la gloire de la Nation, & non au bonheur & a la gloire de quelques Individus feulement. Eh bien! Monfieur, fi tous les Projets que vous avez propofés au Roi; fi tous les ordres que vous lui avez demandés fous prétexte  ( 10 ) du bien Public, n'ont tourné qu'au défavantage & au malheur de ce méme Public; vous avez trompé le Roi; vous 1'avez trompé ou par ignorance, ou par mauvaife foi : mais, de quelque maniere que ce fok, vous 1'avez bien réellement trompé 5 puifque le défordre des Finances n'a jamais été plus grand que fous votre Miniflère ; pmfqu'ayant difiipé tous les Fonds comptans, & arriéré tous les Revenus, vous avez imaginé une Affemblée de Notables, afin de faire fanftionner folemnellement, par la Nation , les nouveaux Impóts que vous vouliez établir; puifqu'enfin votre mauvaife Adminiftration & vos Spéculations inconfidérées ayant été reconnues a tems, on vous a congédié. L'allégrefTe publique a fait connoïtre affez, dans cette occafion, la véritable opinion qu'on avoit concue de vous, & combien tous les ordres de Citoyens defiroient votre chüte (i). (i) Le jour oü cette chüte tant defirée arriva, c'étoit  ( II ) En vain direz-vous aujöurd'hui que le Roi favoit tout , que vous 1'aviez prévenu fur tout; cela eft. irrfpoffible , & on ne le croira pas. Vous n'avez jamais pu dire au Roi que toutes vos Opérations n'étoient pas pour le bien de •fes Peuples; vous n'avez jamais pu lui propofer de féparer fes intéréts de ceux de la Nation qu'il gouverne, & dont il eft le pere; & jamais vous aviez fait cette tentative, vous vous feriez rendu coupable du doublé crime de Leze-Majefté & de Leze-Humanité; le Roi vous auroit cfraffé fur le champ de fa préfence, & fur le champ le Peuple lui- un contentement univerfel dans Paris; on fe félicitoit dans les rues, on s'embraffoit dans les maifons & dans les Aflemblées particulieres; chacun s'empreffoit d'en portef la nouvelle dans lous les quartiers de cette Capitale, & de la mander en Province. Les Gens de Lettres eux-mêmes, qui s'étoient laifles penfionner amplement par la vanité intéreflee de ce faux Colbert, étoient les premiers k défapprouver fon Adminiöration, & a regarder fon renvoi comrae un événement trésheureux pour la Nation.  ( 12 } même vous auroit fait votre Procèsi Ainfi, nepouvant, en aucune maniere, féparer 1'intérêt du Roi de celui de la Nation, dès que vous avez trompé la Nation, vous avez 'trompé le Roi, comme vous avez trompé le Roi en trompant la Nation. II y a plus : c'eft que, par une marche aufli criminelie qu'odieufe, vous avez toujours commencé par tromper le Roi, afin de vous autorifer a tromper enfuite plus facilement & plus hardiment la Nation j puifque vous avez laiffé ignorer a ce bon Monarque Tétat vrai des Fina"nces en 1784, 1785 & •1786; & que vous avez comDromis fa parole dans les Arrêts & Edits du Voyt^ les piéces ci-jointes, cotées I & II.' Neft-ce donc rien, Monfieur, que de faire manquer un Roi a fa parole (1) ? (1) Alexandre ayant fait affembler fes troupes a Suze, & leur ayant déctaré qu'il étoit dans 1'intention de payer toutes leurs Dettes, plufieurs , dans la crainte de faire connoitre leurs diffipations, nierent ce qu'ils devoient, & tous en préfenterent des états au-deffous de la vérité ; cq qu'Alexandre ayant découvert, il fit  < H ) K'eft-ce donc rien que de lui en impol fer pour le faire confentir a donner cette parole, quand on fait qu'il ne pourra la tenir ? Allez , Monfieur , allez vanter votre innocence aux Sauvages d'Afrique ou d'Amérique; mais ne croyez pas que nous foyions. affez bornés pour y croire un moment. Avant d'entrer dans quelque difcuffion fur les cinq Chefs d'accufation publique, qui font dirigés contre vous, & que vous prétendez avoir anéantis, il eft bon, Monfieur, que je redrefie vos idees fur un Mémoire qui paroit faire votre tourment, & que vous regardez afïirmativement (ainfi que vous le dites page 2 3 de votre Requête) , comme la ProduBion ténébreufe d'une ambitïon déclarer une feconde fois : « qu'il ne convenoit point » a un Prince de tromper fon peuple, ni au peuple » de fuppofer fon Prince capable de le tromper,,. Auflï-töt chaque foldat donna 1'état vrai de fes dettes j & toutes f«rent acquittées fur le champ. Hiftohc de U Grece,par Ai. Giliies, cAap. XXXIX, tom. VI fle la traducïionfran^oife, par M.Carra^  < 14 ) d'autant plus dévorante , qitdle aêtê trop long-temps repoujfée. Cette Produétion n'eft point celle de 1'Ambition ni d'un Perfonnage qui ait jamais été a portée de prétendre , en aucune manière , a 1'Adminiftratioru C'efr. 1'Ouvrage d'un fimple Citoyen , qui, choqué de 1'audace de vos difcours a FAffemblée des Notables, & de vos Déprédatiöns effrénées, s'eft occupé, avec ardeur ,a faire des recherches fur votre Adminiftration, & a dévoiler enfin k ces mêmes Notables , & votre conduite pafTée, & vo* projets futurs. Nul autre motif que 1'intérêt du Roi 6V celui de Ia Nation , n'a" guidé fa plume. II n'étoit connu , fous aucun rapport, ni du Perfonnage que vous défignez par l'ambition dévorante, ni d'aucun des Notables mêmes, auxquels il en a fait parvenir des copies. II n'attendoit ni récompenfe ni louange ; la confcience d'une aétiori aufli pure & auffi courageufe , dans une pareille circonftance.lui fuffifoit entiérement. Mais  aujourd'hui quelerègne duMenfonge efi paffe, & que la Vérité ofe lever fa tête augufte, celui qui a fait ce Mémoire ne craint pas de fe nommer: Ia juffrce & Phonneur lui en font même un devoir. Vous accufez puhliquement une autre Perfonne d'en être 1'Auteur; & I'Auteur, c'eft moi; c'eft celui qui répond, en ce moment, k votre Requête, & qui veut garantir fes Concitoyens du preftige de votre prétendue juftification, comme il a cherché a garantir les Notables de vos artifices & de vos projets (i). RelifezIe> ce Mémoire , & rougifiez, fï jamais (i) C'eft par la même raifon & les mêmes principes; «pie je me ferai connoitre également pour toure autre. circonftance oü j'aurai eu occafion de diyoiler des malverfations, & d'en affirmer les preuves. Cette. fuite .de ma conduite ne fera point pour arrêter le clabaudage, des Laches & des Envieux; car 1'Envie & la Lacheté font des maladies qui tiennent a 1'organifation phyfiquer de certaine* Gens, & qu'on ne doit jamais efpérer de, juérir ; mais ce fera par refpeö: pour moi-même, Sc pout.rendre compte a la partie la plus fage &. la plus éclalrée de la Nation, des vrais motifs qui me feront agir.  I ïf) votre front put rougir, des vérités qu'il contient, & que 1'Êurope entiere va connoitre (i). Voyez enfuite jufqu'a quel point de démence & d'injuftice, 1'aveuglement de votre dépit & 1'illufion de votre innocence vous ont égaré l A vous entendre, ce Mémoire eft rempli de menfonges & de calomnies; vous êtes pur comme un rayon du foleil; vous n'avez rien fait que pour le bien de 1'Etat, & toutes les perfécutions que vous avez effuyées , toutes les formes fous lefquelles ces perfécutions ont été reproduites, font 1'effet & la fuite de la Produclion ténébreufé d'une Amb'uion d'autant plus dévorante , quelle avoit été trop long-temps repouffée. Rien de tout (i ) Ce Mémoire , que M. de Calonne appelle infernal, eft imprimé a la fuite de cette Réponfe fous la cotte III , pour que le Public juge lui-mêine de la vérité des Faits que j'y ai avancés, & pour qüe chacun y reconnoiffe M. de Calonne tout entier, tel qu'il s'eft comporté perdant fon Adminiftration dans les Finances, & a 1'Affemblée des Notables. ... . ,.v is* , ei» geIa ?  ( tf ) tela, cepertdant n'a aucun fondement dö réalité *. l'édifice de votre prétendue in-* nocence, que vous conftruifez avectant d'art, difparoit eomme une ombre , k mefure qu'on en approche la lumiere j la conduite que vous avez tenue dans votre Adminiftration, a produit fans doute un Bien pour vous & vos Amisj mais il eft démontré qu'elle a occafionné un mal réel a prés de vingt~quatre miU lions d'Hommes;& les Accufations que vous portez hardiment contre les objets immédiats de votre dépit & de votre haine, & en compte de votre juftification , fe trouvent auffi fauffes que la iogique de votre Plaidoyer eft fpécieufe. Examinons les cinq Chefs d'accufation publique contre lefquels vous vous récriez tant, & voyons li le réfultat de 1'analyfe qu'on en peut faire avec la plus exa&e impartialité, plaide en faveur de v le fond purement & fimplement, mais aufïi dans les formcs que vous avez adoptées, en donnant un million a M. d'Efpagnac, en efpeces du Tréfor royal, & en prenant, de votre.cóté, poffeffion immédiate d'Hattonchdtel , pour des valeurs non encore évaluées ni échangées légalement. La Piece cotée I, que vous appellez une Piece jufKficative, ne peut être regardée de bonne.foi que comme le développement de la tournure que vous avez donnée alors a cette affaire, & que vous croyez fuffifante pour en impofer aujourd'hui au Public. Pour rendre cette Piece authentique & valide , il faudroit qu'elle füfi approuvée & fïgnée par des Commiffaires de la Chambre des Comptes. On ne douteroit pas alors que le Comté de1 Sancerre , vendu autrefois par M. Ie Prince de Conti a M. Hifs de Hambourg, pour 1,400,000 livres, & tranfmis k Madame d'Efpagnac, fille de M. Hifs,  (*ï ) par contrat de mariage , ne valut aujourd'hui 103,635 liv. 18 fois 1 den. de revenu. On feroit étonné a la vérité que M. d'Efpagnac voulüt effuyer, dans eet Echange , la perte d'une différence de 20,564 livres 17 fois 6 deniers; mais on n'auroit plus rien a vous obje£ter. Vous ne feriez pas réduit a prouver trop , pour avoir le regret de ne rien prouver du tout dans cette occaüon en faveur de votre innocence (1). Second Chef. Manoeuvres dans la Refonte des Monnoies. On dit qu'il fait bon pêcher en eau trouble , paree que les pohTons (1) II va paroitre inceflamme.nt un Mémoire appuyé des Pieces les plus authentiques, & fur-tout du. Contrat d'échar.ge du Comté de Sancerre, entre Ie Roi & M. d'Efpagnac, '& des Baux aöuels; qui prouve la léfion énorme pour le Roi dans eet échange , &C démontre que ce Comté, évalüé par M. de Calonne k 103^635 livres de revenu, ne rapporte aujourd'hui au Roi que 17000 livre*. B 3  ( *2 ) n'appercevant pas le filet, y font plus facilement pris. Peu de gens, Monfieur, comme vous le elites fort bien dans votre Piece , cote II , ont des idéés nettes fur les combinaifons relatives aux Monnoies. C'eft pour cela qu'il étoit facile, nonfeulement de tjpmper la Nation, mais de vous tromper vous-même tout le premier; c'eft pour cela qu'il falloit, avant de commencer cette Refonte, faire connoitre par approximation , dans un Ecrit public (tel que celui, cote il, de votre Requête) 1'état a&uel du numéraire en France , & le terme moyen de la quantité qui s'y trouve en circulation. Par eet Ecrit préparatoire, bien différent d'un Arrêt du Confeil qui décide & n'inftruit pas, vous auriez appris a vos Compatriotes , ainfi qu'aux étrangers , d'une part, la véritable proportion a laquelle devoientfe trouver aujourd'hui Tor & 1'argent; & de 1'autre., le béné-  t 2 3 ) Ree réel qui pouvoit en refulter pouf nous, en rendant la valeur conventionnelle de ces Métaux , non-feulement égale a leur valeur intrinfeque ik réciproque, mais a leur valeur d'échange (i). Si vous aviez fuivi ce plan, & ü vous aviez confulté publiquement la Cour des Monnoies , & non des Intriguans cV des Faifeurs de Projets, vous auriez été a Tabri de toute furprife & de toute inculpation. En adoptant uue autre marche, cette marche fouterraine ? qui ne convient qu'aux Gens trop préfomptueux ou mal intentionnés , vous vous êtes expofé a des réeriminations facheufes & a des foupcons dont vous ne pourrez (i) Sur le développement de la Refonte de 1'or, on peut confulter un excellent Mémoire qui vient de paroitre , intitulé : Obfcrvations fur la Déclaration Ju 30 Oiïobre iy8f , & fur l'augmentat'wn progreffive du prix des matieres d'or & d'drgent depuis iyz6. Cet Ouvrage anéantit les faux fyftêmes de l'ApologHte de cette opération , & fait beaucoup d'honneur au Clret' «! cette partie d' Adminiftration. B 4  < M 5 jamais détruire le germe. Vous avez fait^ dites-vous, dans cette Opération le bien de tout le monde; mais n'avez-vous pas plutöt fait celui de vos Amis, fans le favoir d'abord , enfuite le votre , par réflexicn , & point du tout le nótre par diftraction. Avez-vous bien réfléchi que, par cette Refonte des Monnoies, vous ne faifiez que détruire la ,proportion conventionnelle qui fubfiftoit entre 1'or & 1'argent; & porter cette propos tion en faveur de 1'argent, pour nous mettre dans le cas de refondre a fon tour 1'argent même? Votre prétexte, pour cette feconde manoeuvre, aurcit été , comme pour la première , d'égalifer les proportions conventionnelles de ces métaux. a leurs valeurs intrifeques & réci-* proques; & toujours, fous ce prétexte , on auroit pu fondre & refondre , affiner & allier continuellement, 'fans établir véritablement la balance des valeurs réciproques de ces Métaux avec leurs  ( 2 5 ) valeurs conventionnelles & celles des echanges en denrées. Vous n'avez pas concu d'ailieurs que la valeur conven-' tionnelle d'un métal étant plus en raifon de fa- quantité que de fa qualité, fa valeur intrinsèque diminue beaucoup dans les echanges de denrées, lorfque fa quantité furabonde , comme elle augmente dans ces mêmes échanges lorfque fa quantité eft rare. Ainft quelque rare qu'eüt pu devenir 1'or en France, il y feroit toujours rentré en nature ou en valeurs repréfentatives, paria proportion conventionnelle établie entre ce métal qui en feroit forti, & 1'argent ou les denrées qui y feroient reftés en fa place. Aujourd'hui que le Louis n'a cours chez 1'Etranger que pour 2 2 livres 1 o fois, 1'Etranger court a 1'argent plutöt qu'a 1'or; ce qui eft une perte réelle pour nous dans les échanges que nous faifons de notre argent avec les denrées de nos voiiins j tandis que d'un autre cöté 1'aug-  ( ^ ) mentation de nos efpeces dor & la diminution de leurs poids vont augmenter nécerTairement le prix des denrées pour nous dans 1'intérieur du Royaume même (i). Jugez, Monfieur, d'après ces vérités, qui font bien faciles a faifir, fi la Nation vous devroit quelque reconnoifTance pour la Refonte de fes Monnoies, quand même il n'y auroit eu aucune manoeuvre dans cette Refonte. Mais la manoeuvre a eu réellement lieu. Voyex les Pieces ci-jointes, cotées IV & V. (i) L augmentation du prix des denrées de première riéceflïté en Angleterre, n'eft provenue que de la furabondance des efpècs d'or dans ce Royaume ; tandis que le prix des mêmes denrées eft refté a un taux modéré en Allemagne , en Italië , en Efpagne oü la quantité de 1'argent furmonte celle de 1'or. En Ruflie oü le peuple ne connoit pour ainfï dire que la monnoie de cuivre, les denrées y font au plus bas prix. Lycurgue avoit concu cette proportion conventionnelle des métaux aux échanges des chofes néceffaires a la vie , lorfqu'il introduifit la monnoie de fer dans Sparte. Mais M. de Calonne n'eft pas un Lycurgue^  ( *7 ) Troisieme Chef. Fonds du Tréfor royal fournis clandeflinement pour foutenir l'Agiotage. Tout mauvais cas eft niable ; & quand on n'a pas de bonnes raifons pout s'excufer, on emploie toute l'adrefTe pofiible a voiler fes torts, & a lier des contradi£Hons inaliables. Votre défenfe , Monfieur, fur ce troifieme Chef d'accufation , eft dans ce genre. Vous nous avez effrayé vous-même dans votre Difcours du 2 2 Février, a FAflemblée des Notables, fur les dangers de l'Agiotage, que vous regardiez comme un fléau, tandis que vous conferviez les liaifons les plus intimes avec les principaux Agioteurs. Vous nous avez laifie entrevoir , dans ce même Difcours , que vous alliez bientöt févir contre ces Perturbateurs du repos & de la fortune des Citoyens: vous aviez même nommé une Commifiion pour les pourfuivre rigoureufement; & quelques jours après vo '■  ( i8 leur avez fourni des Sommes confidérables de la Caiffe du Tréfor royal, pour foutenir leurs Manoeuvres. Pour accorder aujourd'hui toutes ces contradicüons dans notre efprit, comme vous les accordez dans le votre, vous nous dites, pag. 5 1 de votre Requête: « qu'aux approches » de 1'AfTemblée des Notables, 1'Agio» tage influoit principalement fur la » dépreffion des ErTets publics ; que >* vous en faviez les caufes, & que >► vous en craigniez les fuites ». Votre fagacité vous fuggéra un moyen d'y remédier j & ce moyen contre l'Agiotage , fut, felon vos lumieres, de fournir des Fonds aux principaux Agioteurs mêmes , pour garantir leur crédit. Les ErTets de l'Agiotage, ajoutez-vous, font très-diftincts des ErTets royaux j mais comme tout eft lié dans la nature , & que les bons & les mauvais ErTets agiffent & réagiffent les uns fur les autres, k la Bourfe comme dans 1'Univers entier , il étoit néceffaire , toujours felon  C *9 ) vos lumieres, pour prévénir un choe trop violent des Effets royaux contre ceux de l'Agiotage, de foutenir ceux-ci par un detachement d'Effets pris dans le Tréfor royal même (i). Par eet arrangement, la partie devenant plus égale, iln'y avoit plus a craindre de déroute pour les ErTets des Agioteurs, & vous étiez tranquille. Vous aviez d'ailieurs donné au Roi Fexplication des abus que les Agioteurs faifoient des Effets , non encore claffés, de 1'Emprunt de i 2 5 millions ; mais vous n'aviez pas dit au Roi que' les Agioteurs fe divifoient en deux claffes (les Blancs & les Rouges ,par exemple), <&que vousteniez pour les Rouges. Vous n'aviez pas dit, en blamant les Agioteurs en général, que vous excufiez les Rouges, & que c'étoit pour eux feuls que {1) D'après cela, comment vous difculperez-vous vis-a-vis des Agioteurs , qui s'avifent aujourd'hui dë demander que vous foyiez mis en Caufe , c eft-a-dire, en Juitice réglée comme eux ?  ( 30 > vous jugiez a propos de détacher quelques Fonds du Tréfor royal. Vous n'aviez pas dit qu'en foutenant les Rouges & en leur donnant votre fecret, vous efpériez écrafer les Blancs. Vous n'aviez pas dit que dans le cas d'une déroute des Rouges., ceux de cette bande, a qui vous prêtiez fi légerement les Fonds de I'Etat, ne feroient peut-être jamais a portée de les rembourfer , comme cela eft arrivé. Vous n'aviez pas dit qu'en prêtant les Fonds du Roi & de I'Etat a vos Amis les Agioteurs Rouges, c'étoit pour faire la guerre aux Fonds mêmes du Roi & d-es Particulier s (i). Enfin vous n'avez dit alors , pour autorifer votre conduite, que ce que vous dites aujourd'hui pour la juftifier ; c'eft-adire , ce que vous jugez feulement con- (i) Non-feulement l'Agiotage eft une guerre déclarée des Gens oififs contre la Fortune des Négocians & des Agriculte urs, mais les Fonds qu'on y emploie font détournés de leur véritable deftination , qui eft celle de vivifier le Commerce & de favorifer 1'Agriculture.  ( 3i ) venable a vos intéréts & a la douce illufion de votre prétendue innocence. Pour combler votre juftification fur la perte des Fonds du Tréfor royal, que vous avez prêtés aux Agioteurs, vous nous citez une Lettre qu'on vous a écrite, & vous vous citez vous-même par quatre autres de vous a différentes Perfonnes. Vous conftatez, par ces Lettres , que vous avez bien réellement fait délivrer ces Fonds a la Société de MM. Se•neff, Barou,Pyron, Servat, &c.; vous en citez enfuite une cinquieme, également de vous a M. Pyron, par laquelle vous lui redemandez une partie de ces mêmes Fonds; & vous appellez ces Lettres des Pieces juftificatives ! Vous êtes donc, Monfieur, le feul Juge & 1'unique Greffier de votre innocence ? Vous croyez plus encore, vous vous imaginez qu'en prouvant fi authentiquement la légéreté & 1'inconféquence de votre conduite dans cette occafion, la faute en rerombera nécelTairement fur un autre! Vous  ( 3*) ne le croyez pas feulement; vous lé dites, page 82 de votre Requête : « S'il y a de la perte , c'eft M. 1'Arche* »vêque de Touloufe qui doit en ré»> pondre » . En vérité, M. de Calonne, y penfez-vous ? Quatrieme Chef. Extcnjion des Emprunts. Vous nous prévenez , Monfieur , fur eet article, ( pag. 9 8 de votre Requête , ) « que » cette phrafe ft rebattue , quan fut" »prend des Ordres , quon furprend la » religion du Roi , eft démentie par 1'at»tention très-fuivie que Sa Majefté » donne perfonnellement k tous les ob«jets de dépenfe qu'on lui propofe, & « généralement a tout ce qui intérelfe »1'ordre public, mais fur-tout a ce qui w peut augmenter les charges de fon »Etat & le fardeau de fes Peuples Sans doute, Monfieur, 1'intention du Roi eft de faire le bien; il ne demande que  ( 33 ) crue le bonheur de fesPeuples; il fouffre du mal qui leur arrivé; nous le favons tous : mais les Princès juftes & bien intentionnés n'ont-ils jamais été trompés , malgré toutes leurs lumieres & leur fageffe ? N'ont-ils jamais eu auprès deux des Courtifans & des Miniftres menteurs, qui leur en ont impofé fur des Opérations dont ces grands Princes ne pouvoient avoir une connoiflance affez parfaite par eux-mêmes ? Vous me répondrez a cela qu'auffi-tót que ces Princes appercevoient le menfonge imp'ur fur les levres mielleufes d'un Courtifan ou d'un Miniftre , ils devoient le chafTer de leur préfence. Ne 1'ont-ils pas fait, M. de Calonne? Lifez 1'Hiftoire, vous en trouverez mille exemples. Mais quel eft 1'homme fur la terre qui puiffe fe flatter d'être a 1'abri d'une furprife ? Un Miniftre impofteur dit a un Roi bon & fenfible : « Tout ce que je fais, Sire, » eft pour le bien de vos Peuples; fi je C  ( 34 ) » propofe a Votre Majefté un nou vel Im» pót, un nouvel Emprunt, une extenfion »des Emprunts antérieurs , c'eft que t> I'Etat le demande & que la gloire de pvotre régne 1'exige; vous n'en pou» vez douter, Sire , voici le tableau-de » fituation. La partie la plus éclairée de » h Nation approuve mes Opérations , »je puis m'en flatter hardiment. Mais, » Sire, malgré mon zele & la pureté de » mes intentions, mes Ennemis ne mannqueront pas de me calomnier auprès » de Vous & de décrier mon Adminiftra*> tion; que Votre Majefté fe défie de »leur langue perfide : comment pour»rois-je en impofer a un Maïtre. qui » m'eft fi cher, a un Maitre qui m'a com»> blé de fes bienfaits ? Non, Sire, vous »ne prêterez point 1'oreille aux laches »infinuations de mes Ennemis; 1'expé» rience des événemens vous convaincra »de maProbité, de ma Fidélité & de »la jufteffe de mes idees & de mon rai» fonnement». Voila ce que dit un Mi-  (35 ) niftre importeur; il fe fert, pour abufer fon Roi, a peu prés des mêmes expreffïons dont un Sully pourroit fe fervir; il invoque 1'expérience de 1'avenir pour juftifier fes intentions & fes opérations préfentes, & 1'expérience finit par défiller les yeux de fon Maitre & par le faire congédier. Vous voyez , Monfieur , par la logique de eet apologue , combien 1'art du langage & 1'adreffe d'un Courtifan ont de moyens pour furprendre la vertu & la bonté d'un Roi. D'un autre cóté , les Rois ne peuvent pas toujours garantir les Opérations qu'un Miniftre leur propofe, quoiqu'on les faffe fans cefTe parler en leur nom dans les Edits & Déclarations de leur Confeil. C'eft au contraire toujours au Miniftre, qui propofe une Opération, a en répondre aux Rois & aux Nations. L'extenflon des Emprunts vous a paru un bien , je veux le croire; mais elle a produit, dans  les circonftances cü étoient les chofes, un mal réel, & c'eft vous qui 1'avez fait. Vous n'avez point clonné d'extenfion , dites-vous, aux Emprunts particuliers a votre Miniftere , mais vous en avez donné aux Emprunts antérieurs; ce qui ne prouve rien en votre faveur, mais feulement, ou que le Public avoit plus de confiance aux Opérations de vos Prédécefleurs qu'aux vötres, ou que vous aimiez mieux charger de cette extenfion la mémoire de leur Adminiftration que la mémoire de la votre. On vous accufe d'excès dans les ex.tenfions données aux Emprunts antéj-ieurs a votre Miniftere; on vous accufe d'abus dans Femploi des Fonds provenus de ces exteniions. II n'y a point d'excès, dites-vous, dans ce qui eft néceffaire. Mais ce qui paroiflbit néceflaire a vos Spéculations momentanées & particulieres, pouvoit certainement n'être pas néceflaire a I'Etat en géneral & pour 1'avenir : dans ce cas, c'étoit un excès  ( 37 ) trés - répréhenfible. Vous ferez voir , ajoutez-vous, en parlant de 1'emploi de ces Fonds, que la totalité en a été appliquée a des Paiemens inévitables. Pour preuve de cette affertioa . vous nous donnez , de votre main, un Etat général de tout ce qui a été emprunté depuis Novembre 1783 jufqu'en Janvier 1787, & enfuite une Récapitulation des Dettes de la Guerre & autres a la fin de 1783, avec un fimple appercu des principaux articles de dépenfe pour les années 1784, 1785 & 1786. Mais ce n'eft pas tout, Monfieur ; il faut prouver que les extenfions d'emprunts faites fous votre Miniftere, n'ont pas excédé pendant ce même temps le calcul des valeurs que vous portez en compte , ou piutöt que les Effets de la place , repréfentatifs de ces valeurs , ne furpaffent pas aujourd'hui, de votre fait, ces valeurs mêmes. Vous comprenez bien que, fans de pareilles preuves, on  ( 38 ) craindra toujours, pour 1'avenir, Ia fuperfétation de ces Effets, & qu'en con~ féquence on ne pourra de fitöt vous allouer un Brevet d'innocence fur ce point. Cïnqüiëme Chef. Ahus d'Autorité, & autres en tous genres. Tout homme qni abufe de 1'Aurorité ou des Tréfors qu'on lui confie dans une Adminiftration, pour peu qu'il ait quelqu'afïuce , ( & il n'en manque jamais ) cherchera a fe prémunir contre les Accufations futures , & a couvrir fes Déprédations & fes Injuftices , foit par des Ordres qu'il furprendra a la religion du Prince , foit en fupprimant, autant qu'il pourra, les Preuves écrites de fes Malverfations ; foit en mettant une telle confufxon dans les affaires , qu'il foit prefqu'impoffible d'en retrouver le fil. Pour vous fauver de cette imputation, Monfieur, vous nous dites ( page 89 de votre Requête ) « que 1'homme in- »tegre tx. iur de la purete de fes vues,  ( 39 ) » marche avec fécurité, & n'imaginé » pas qu'on puiffe fufpeéter fa droiture »; & eet homme-la, c'eft fans doute vousmême ! Je vous obferverai d'abord, a. 1'occafion de cette Apologieque les phrafes qui la compofent appartenant k chacun pour en faire ufage quand il lui plak, 1'homme le plus coupable peut s'en fervir a fon gré, comme leplus innocent. Je vous apprendrai enfuite ( ce que vous ne faviez peut-être pas ) qu'il eft des Etres tellement organifés , que ce qui eft regardé dans 1'opinion pubhque & en bonne morale comme un véritable crime, ne leur parok a eux qu'une chofe toute naturelle & toute fimple. L'aveuglement de certains hommes eft tel , qu'ils s'imaginent qu'en fe cachantla vérité a eux-mêmes, il eft impoffible que perfonne puiffe la découvrhv paree qu'ils ne con^oivent pas que dans 1'analyfe du cceur humain en général on puiffe jamais pénétrer affez profon- C4  ( 40 ) dement le leur en particulier pour y trouver la fource de leurs égaremens & de leurs torts. Vous joignez , Monfieur, & eet aveuglement 1'adreffe d'un efprit tourmenté , mais prévoyant, qui cherche a fubtilifer non-feulement les juftes préventions données contre lui, mais les moyens qu'on pourroit employer pour juftifier ces préventions. Vous dites, ( page i 2 i de votre Requête ) « qu'un » véritable abus d'autorité, ce feroit fans » doute d'ouvrir une information contre »l'Adminiftrateur d'un grand Empire, » fur une accufation illimitée ». Vous croyez, Monfieur, intimider par ce raifonnement les Miniftres aétuels, & forcer leur politique a vous fouftraire au déshonneur, afin de fe faire une planche pour eux-mêmes en cas d'événement. Mais, Monfieur, aucun de nos Miniftres aétuels ne vous relfemble: on peut afiirmer cela, fans prétendre leur faire un grand compliment. Aucun d'eux »'a rien a craindre de ce que vous  ( 4i ) éprouvez : i °. paree qu'ils ont des principes non équivoques d economie & de probité: 20. paree qu'ils ne s'aveuglent pas fur 1'Autorité qu'on leur a confiée, pour en abufer a tort & a travers: 3 °. paree qu'ils ne difpofent pas des Fonds de I'Etat avec cette légéreté & cette profufïon indécentes que vous mettiez dans la diftribution des Penfions&desGratifications a vos Partifans & a vos Commis: (1) & 40. paree qu'iis favent dif- (1) M. de Calonne ne réfléchiffoit pas que les tréfors prodigués dans ces libéralités extravagantes ne lui appartenoient pas ; rien ne lui coütoit par conféquent pour fe faire des Partifans & des Pröneurs. II donnoit ordinairement a fes Commis favoris les deux tiers de leurs Appointemens en gratifications ; ce qui explique pourquoi ces Meffieurs foutiennent encore fa Caufe en ce moment. Ils efperent fans doute le voir revenir comme « Scipion, accufé par les Tribuns » & par Catondui-mêjne , aui au lieu de fe défendre, ne 3> fait que rappeller l'époque de fes triomphes, n ( p. 194 de la Req. ) Les Pröneurs 8c les Partifans de ce nouveau Scipion , dans une circonftance pareille , ne manqueroient pas de le fuivre.... au Tréfor royal, & c'eft-la que fon innocence brilleroit du plus grand iclat 1  ( 4i ) tinguer le merite , & qu'ils ne prodiguent pas a la médiocrité des talens , la portion des Graces du Roi qui revient aux plus dignes. Je dis plus , M., ouvrez les annales de notre Monarchie & vous n'y trouverez aucun Miniftre qui ait difïipé en plufieurs luftres , ce que vous diffipiez en fix mois pendant votre Miniftere. Jamais aucun d'eux n'a imaginé que la magniücence & la gloire d'un grand Empire confiftaffent a épuifer le Tréfor du Roi & les Reflburces du moment. Je fais bien que vous ne ceflerez de dire que vous aviez des ordres ; & moi je ne cefferai de répéter que vous avez furpris ces ordres & que vous en avez impofé au Roi; car ft cela n'étoit pas ainfi , & que les principes de Probité que vous affe&ez, euflent été dans votre cceur, comme ils font dans votre bouche, vous auriez donné votre démiffion fur le champ. Cet argument, je crois, eft fans replique.  ( 43 ) L'apologie que vous fakes de la douceur de votre caractere pendant la durée de vos Intendances eft démentie, malheureufement pour votre juftification ; d'abord, paria conduite que vous avez tenue dans 1'affaire de M. de la Chalotais; enfuite par les récriminations, en tout genre, qu'on ne cefle de faire de toutes parts contre vous, en ce moment, (i) D'un autre cöté, pendant votre Miniftere, qu'aviez-vous befoin d'être perfécuteur en titre? N'aviez-vous pas auprès de vous des Agens & des Affidés, qui, tandis que vous cherchiez a furprendre la bienveillance du Public par des manieres féduifantes,fe chargeoient de fa malédiction par des intrigues odieufes, néceffaires fans doute aumaintien de votre Pouvoirl On fait avec quelle magnificence vous avez payé les Services qu'ils vous ont rendus. On connoit les liaifons intimes. (i) Le chapitre de Verdun & les habitans de SaintMihiel vont faire paroitre inceflamment des Mémoires dans leiq; e's la Douceur du cara&ere de M. de Calonne ,& fa Bonne-foi foufFriront de cruelles exceptions.  ( 44 ) que vous aviez contraétées, avec les Hommes les plus corrompus, les plus décriés, les plus dangereux de ia Capitale & des Provinces. Vous n'êtes pas méchant, dites-vous ? & vous profitiez de la méchanceté des autres pour mieux affermir votre Crédit, & pour augmenter votre influence fur toutes les parties de 1'Aminiftration! Vous n'êtes pas méchant? & vous conduifiez une Nation entiere a fa ruine par le défordre de vos idéés & par 1'orgueil de vos prétentions! Vous n'êtes pas méchant ? & vous accufez faulfement & avec une effronterie fans égale un Prélat refpeftable d'avoir fait un Mémoire contre vous, pour avoir occafion de le perdre, d'un feul coup, Sedans 1'efprit du Roi 6V dans celui de la Nation! Vous n'êtes pas méchant ? & vous tentez d'allumer le flambeau de Ia difcorde entre un Souverain & fes Sujets, pour vous venger, non des remords que vous éprouvez, car une ame comme la vötre n'en éprouve pas, mais du dépit  ( 45 ) funefte que vous reffentez aujourd'hui de n'avoir puconfommer leurperte commune. Ah ! Monfieur, que de ravages la douceur prétendue de votre caractere a caufés dans notre Patrie, & combienelle efta redouter pour le Peuple généreux qui vous a recu dans fon fein I Je n'entrerai point dans la difcuffion de 1'abus d'autorité dont le Chapitre de Verdun vous accufe , pour avoir fait de-s percées dans fe Bois j c'eft une affaire -particuliere qui rie concerne que ce Chapitre , & qu'il aura foin d eclaircir bientöt. Je dirai feulement que la Lettre que vous avez écrite a ce fujet au premier fecrétaire de 1'Intendance des Trois-Evêchés , ri'eft pas une Piece juftificative, paree qu'encore un coup, vous ne pouvez être Juge & Partie dans votre affaire. Nons arrivons maintenant k la propofition que vous prétendez avoir faire au Roi, de difcuter , en préfence d'un nombre fuffifant de Comraiffaires choifis  ( 4* ) dans 1'AfTemblée des Notables, la fïtuation des Finances en 17 8 i, contradictoirement avec M. Neker lui-même. Mais M. Neker vous a fait publiquement cette propofition dans le temps I Pourquoi ne 1'avez-vous pas acceptée alors ? pourquoi avez-vous follicité enfuite par vos Amis, après la publication de fon Ouvrage , 1'éloignement de eet ancien Direéteur des finances , dont les connoiffances & la réputation tourmentent autant votre vanité, que la fage Adminiftration de M. 1'Archevêque de Touloufe tourmente votre dépit ? Pourquoi, aujourd'hui, fugitif en Angleterre, imaginez-vous de parler de cette propofition , comme fi nous allions 'tout de fuite fuppofer que vousferiez forti triomphant du débat, & qu'une pareille intention , prononcée auffi vaguement & d'aufilloin, feroit réputée en ce momentci pout 1'efFet ? Non, M., nous ne croyons pas plus a la fincérité de cette propofition, qu'au defirque vous marquez de  ( 47 ) revenir en France plaider vous-même votre caufe & vous foumettre au jugementde nos Tribunaux. Si vous aviez bien réellement ce defir, vous ne nous renverriez pas aux Loix romaines, & vous ne citeriez pas les Loix angloifes, qui font très-fages affurément, mais qui ne peuvent êtreadmifes dans ce Gouvernement qu'en changeant fa conftitution. Quand vous exerciez le miniftere des Finances dans ce Royaume , vous en connoiffiez les Loix criminelles; vous faviez bien qu'en cas deprévarication vous feriez jugé par ces mêmes Loix , toutes gothiques qu'elles vous paroiffent. C'étoit a éviter leur rigueur par votre conduite, & non par la fuite, qu'il falloit vous attacher. Ce n'efl pas, au refte, que je n'approuve fort tout ce que vous dites fur la réforme de nos Loix criminelles; mais les réflexions que vous faites ne font pas nouvelles pour nos Jurifconfultes , & fur-tout pour le Miniftre éclairé & ver-  ( 48 ) tueux qui eft a la tête des Tribunaux du Royaume. C'eft a la fagefle de fes principes & aux lumieres de fa raifon que la réforme de ces mêmes Loix eft confiée. II s'en occupe dans ce moment avec ce zele pour le bien public & ces grands talens qui font héréditaires dans fa Maifon, & que le Roi & la Nation reconnoiffent depuis longtems. Vous n'attendrez fürement pas, M., cette réforme pour prendre votre parti fur ce que vous avez réellement envie de faire par la fuite. Quant a préfent, je vous confeille , en voyant le peu d'effetqu'a produit votre Requête dans 1'opinion publique , en faveur de votre innocence , de vous concentrer dans une illufion moins groffiere, & de chercher a étouffer en vous, pour la tranquillité de vos jours, cette vanité des Grandeurs & ce goüt pour les Diftipations effrénées qui font votre honte & le malheur de notré Patrie. Cote I.  Cote I. INTRODUCTION AULlVRE DE m. NECKER. Vol. Ier, page > s'en étoit trouvé de mémoire ij d'homme.» Pag. 5 26 du vol. I Ie.« Qu'on 33 ne dife point, pour infpirer 33 des doutes aux Créanciers de 33 I'Etat,qu'il refte encore beau33 coup de dettes a payer de la 3; derniere guerre ; car en la 33 fuppofant de 100 millions , » on verra que 1'accroilTement 33 du produit des droits & les » extinéKons de rentes pendant » une ou deux années, fuffi33 ront pour affurer 1'intérêt de » cette ibmme. » Page 5 27. ti L'on aura vu j> dans ce chapitre quel vafte « champ eft ouvert aux écono« mies & aux améliorations de » tout genre.. Heureux le Mi33 niftre des finances qui peut, v dans un tems calme, faire » valoir de fi belles reffources , i) & plus heureux encore fi tant » de faveur eft le prix de fes » vertus! » Au Supplément , fin du vol. I Ie. u L'Edit d'Aoüt 1784 j> a paru depuis rimpreffion j) des chapitres précédens , mais » on doit montrer feulement » enquoiconfifientlesrapports 33 ou les différences qui exifient 3) entre le Tableau annexé a eet j) Edit, fous le titre de rem3) bourfemens indiqués . épo3) ques fixes, &c la fon me dé3> fignée dans le chapitre des »> dettes de I'Etat, &c. &c.» Edit de Déc. 1782* Emp'unt de zoo millions, moitïè argent , moitié contrats; remhourfement en qua'cr\e années. «C'eft pour » rempiir ce point de j> vue , ókpour manij) fefter dès a préfent 3) 1'intention oü nous 33 fommes d'amortir )> fucceflivement la 3) plus grande partie 3> des dettes de notre 3) Etat, même celles 3> contraöées avant 331'époque de notre 33 regne , qui ne font 33 pas comprifes dans 331'ordre des rembour33 femens , que nous 3) nous fommes déter33 minés a une créa33 tion de rente a cinq 33 pour cent fans rete3) nues........ Nous 53 admettrons jufqu'a >3 concurrence de la 33 moitié feulement, 33 & fur le pied du de3) nier 25 , les capi33 taux des rentes an3) ciennes dont les ar51 réragesfe payent au33 deftousde cinq pour 33 cent. 3> Tableau des Édits & État des Finances depuis lySi. É D I T DE DÉCEMBRE i783. Emprunt de 100 millions. Nous étant fait rendre compte des dettes arriérées , nous en avons réglé les payemens de maniere qu'ils ne dérangent en rien les vues d'ordre, de liquidation & d'améliorat'wn que nous avons adopties pour nos finances. Après avoir fermé 1'emprunt de 200 millions, encore ouvert pour meitié, nous avons jugé d'y fubftituer un emprunt de 100 millions. Occupé de tous les moyens d'opércr eff.cacement cette libération , nous avons réfolu d'établir une Caiffe d'amortiffement.. .. C'eft ainfi qu'en acquittant nos engagemens , enprenant de jufles mefures pour affurer l'équilibre entre nos recettes & nos dépenfes , nous parviendrons enfin a diminuer le poids de 1'ïmpöt. ARRÊT DU CoNSEIL du 1 4 Mars '7*4. Sa Majesté veut maintenir les difpofitions ordonnées pour fes Finances , en facrifiant toute dépenfe d'agrément , en différant toutes celles qui peuvent fe remettre ; en fufpendant des conftruCtions fur les fonds de fesBatimens..fe privaat pendant quelqtie tems du plaifir de faire des graces. ÉDT.T D'AOUST 1784. Caisse d'amortissement. Nous avons porti un regard attentiffur la maffe entiere de la dette publique ; nous en avons confidéré toutes les parties pour en bien connoltre l'enfemble, & apr'ès avoir fait difcuter en notre Confed le compte dètailté que nous nous fommes fait rendre , nous avons reconnu avec une grande fatisfaélion que cette dette s'éteindrafacüement dans une période déterminée , par des moyens fürs , gradués qui pourront être maintenus en tout tems. ..., même de guerre. Dans 1'efpace de 2$ ans i! fera rernbourfé plus de 1,264 lions de la dette publique, & nul motif ne pourra jamais nous faire déparlir d'un plan qui mettra 1'ordre dans toutes les parties de la finance ; qui donnant au crédit de lafcrce , étendra 1'agi iculture, foutiendra les efforts du conmerce , lenergie de I'induftrie nationale , en rendant tous les foulagemens poffibles & toutes ies améliorations faciies. Édit du 30 Déc. 1784. Empr. de 12$ millions. La néceffité de continuer avec exaétitude' 1'acquittement des dettes les engagemens pris pour accélérer les payemens arriérés.... nous obligent d'oavrir un emprunt qui /facilite toutes les difpofitions d'ordre £• d'économie. C'eft en augmentant nos reffources par la dlminution des frais de recouvrer,ens; c'eften foulageant nos Peuples par une diftribution plus égale du fardeau qu'ils fupportent, que nous a(Turerons de plus en plus la folidité des créances publiques. Édit de Déc. 1785. Empr. de 80 milli. Tous nos engagemens ont été acquittés.... Tels font les fruits, telles devoient être les baf es du plan que nous avons adopti. L'entier acquit doit être confomm* dans Ie courant de 1'année 1786 , & nous avons la fatisfaction detre affurés qu'avec le fecours du, nouvel Emprunt nous pourrons effectuer eet appurement total fans lequel 1'ordre que nous travaillons a mettre dans nos finances feroit impoffible. EXTRA I T DU DISCOURS de m. de Calonne, Du 21 Fcvrier 1 y 8 7. Page 12. SaMajeftéapu fuivre les mouvemens de fa bienfaifance , fans agraver les charges de fon Peuple. Page 10. II s'éleve de toutes parts des monumens des décorations qui ont droit a. la reconnoiffance nationale : la Place de Bordeaux , fes Communications .... les plus beaux points de-vue de 1'Univers. Page 12. Par le tableau raccourci des opérations depuis trois ans , vous pouvez juger s'il y a eu de 1'ordre dans le régime des finances. Page 16. Depuis ux AS je n 'ai pas ceffé de travailler k prendre une connoiffance plus certaine qu'on ne 1'avoit eue jufqu'a préfent de la fituation des finances. Page 18. Le déficit annuel eft très-confidérable. Page 19. II s'eft accru depuis 1781 a Novembre 1783 , puifque les emprunts dans eet efpace de tems montent a environ 450 millions. Page 20. La réunion de tous les moyens de crédit ne forment pas, a beaucoup pres, une fomme égale a celle des acquitemens effeöués pendant ces trois années. L'ordre, l'économie & les arrangemens ont fait le refte , & tout est solde. (Page 5. Le paffe 1'arriéré, au courant de toutes les parties. Page 20. II n'en réfulte pas moins que le déficit annuel a pris denouveaux accroiffemens. Page 21. Ce feroit pourtant une idéé fort exagérée du déficit que de joindre 1'intérêt de la maffe d'emprunts a ce qu'il étoit antérieurement; mais jufqu'a la fin de 1797 , il s(l impojjlble de laiJJ'er I'Etat djns le danger fans cejfe imminent auquel 1'expofe le déficit qui exifte : 'mpojfibk de faire aucun BIEa , DE suxvre aucun plan d'économie aufli long-tems que ce désordre sub- s1stera. Page 22. Economifer S. M.leveut lefait....." le fera. Impofer plus, feroit accabler les Peuples que le Roi veut foulager. Page 27. Vous aurex connoiffance de quelques difpofitions qui tendent a bonifier les recettes , par des moyens qui neferontpas onéreux ; tels qu'une perception plus exacle du droit de timbre. Page 23. Vous reconnohrez dans 1'enfemble du plan qu'il eft ƒ utile pour 'e bon ordre , qu'il faudroit en defirer 1'exécution, quandmême la fituation des finances ne l'exigeroitpas iMPZRIEUSEMENT. 48   ( 49 5 Cote II. Obfervations fur les contradïcTwns des Ed'us chis entr'eux & entre le Difcours de M. de Calonne. Si au moisde Novembrc 1783 , il y avoit un déficit de 80 millions de la recette a la dépenfe, il en réfulteroit que dans 1'intervalle de Novembre 1783 aFévrier 1787,1e déficit feroit augmenté de 35 a 40 millions , puifqu'on Tannonce de 115a 1 zo millions. II y a certainement erreur quelque part, & cette erreur M. de Calonne ne 1'éclaircit point dans fa Requête. M. Necker dit qu'il a laiffé les Fonds affurés pour une Année entiere , & au Tréfor royal plus d'argent comptant & d'effets exigibles qu'il ne s'y en étoit trouvé de mémoire d'homme ; & il porte a 100 millions la dette de laderniere Guerre. M. de Fleury veut que fon Emprunt foit rembourfé en feize années , & qu'il ferve même k acquitter des Dettes du regne précédent. On creit que eet Emprunt n'a été rempli qu'au quart ou environ. M. de Calonne, Edit de Décembre 1783, juge k propos d'y fubftituer un Emprunt de 100 millions; & pour opérer efficacement la libé- D  t 50 ration , 11 a réfolu d'érablir une Caifle d'amof* tiffement. L'Arrêt du Confeil.du 14 Mars 1784 , veut facrifïer toute dépenfe d'agrément, en différant dans chaque département toutes celles, &c. L'Edit d'Aoüt 1784 établit cette Caiffe d'amortiffement, & annonce une libération de plus de 1264 millions en vingt-cinq années , & que cette libération commencera en 1785 par une fomme de 45 millions. Voye^U Supplément a la. fin du ze vol. de Vouvragz de M. Necker. D'après tout cela, pouvoit- on s'attendre k de nouveaux Emprunts ? Quatre mois cependant furent k peine écoulés , qu'on vit paroïtre 1'Edit deDécembre 1784, pour un Emprunt de 125 millions, rembourfable en vingt-cinq années, & 1'Edit de Décembre 1785 pour un emprunt de 80 millions , & plufieurs autres Emprunts encore , jufqu'a 1'époque du 22 Février 1787. Du toutil réfulte finalementun déficit aöuel de 115 k 120 millions, & peut-être plus. On ne peut s'empêcher de remarquer un contraire auffi frappant que celui qu'il y a entre 1'Edit du mois d'Aoüt 1784 fcleDifcours du i% Février 1787. C'eft paffer rapidement de 1'opulence k la détrelTe, & les caufes de cette détreffe font bien importantesadécouvrir. Voyez 1'Edit de Décembre 1785 , qui promet que tout fera acquitté en 1786, &c.  (V) Ön peut ajouter encore que M de Fleufya augmenté les revenus de plus de 50 millions, ce qui joint a un accroiffement de produit danS les differentes régies, démontre qu'au mois de Novembre 1783 , la fomme des revenus étoit augmentée de 60 millions au moins. Ënfin fi 1'on fe refufe a croire au déficit de 8a millions k 1'époque de Novembre 1783 , c'eft qu'on n*en voitaucune tracé nulle part, & qu'au contraire on voit que töus lesÈdits annoncent & promettent une libération» Ex tra.it d'une No te remife au Parlement par M. dé Calonne , pour le pref er fur l'Enregifinment dt 1'Edit de 80 millions. ;.... Les premières années après la Guerre ont du être confumées k Pacquittement des dettes qu'elle avóii oecafionnées. C'étoit 1'époque pénible.Il a fallu les accélérer ( Ces dettes) le plus qu'il a écé poffible, pour arriver plutót k celle (1'époque) du rétabliffeihent de 1'ordre 5s de 1'amélioration de la conftitutiön. On toucha aujoufd'hui k cette feconde époque : les vues font préparées; il y a tout k efpérer de leur exécution, fi 1'on ne détruit pas les moyens d'y parvenir, » , , * , Arrêter en ce moment la marche dn Dij  ( 5> ) 1'Adminiftration, ce feroit Pexpofer au plus grand des malheurs , lorfqu'on eft parvenu a en efFacer jufqu'a la crainte , lorfque tout annonce un état profpere ; enfin lorfque, pour prix de la confiance on garantit 1'acquittement pro- chain de la totalitc des dettes exigibles ; en même tems que la libération fucceffive de la dette conftituéefe trouvera afïïirée par 1'établiffement de la Caiffe des amortiffemens. Remarque. Il eft a propos de remarquer auffi que dans cette Note il y eft porté une fomme de 19 millions employee pour rapprocher les paiemens des Rentes de 1'Hötel-de-Ville; & dans le Difcours de M.de Calonne, c'eft 48 millions au lieu de 19; il y a donc quelque erreur de calcuï dans cette contradiciion.  ( 53 ) Cote III. Mémoire envoyè en manvfcrit a plujïeurs Membres de Ü Affemblée des Notables , au commencement de cette Jjjemblée , en Février iy8y. Le Foi veut foulager,'réformer , mettre de forlrt dans les Finances , ék pour cela il affemble des Notables afin de les ccnfulter. De pareilles Affemblées ont été dans fous les tems le iignal de la détrefie; & la feule annonce de ce'le-ci révele les maux qui nous accLblenr. Tout prend fa fource dans le défordredes Finances & trouvera fon remede dans Yordre a y mettre. On peut comparer les grands événemens aux petits: lorfqu'une maifon opulente eft fur le point de tomber, on met fes Revenus en direction, on vérifie les Dépenfes & les Dettes exiftantes pour réduire Pabus, recouvrer les doublés em'plois, punir les ufures, & on regie invariablement les dépenfes a venir : voila 1'ordre d'oü nait le crédit, qui conlifte , difoit Colbert, dans la bonne opinion de l'arrangement des affaires. 1 Mais c'efticiprécifément que nait 1'incroyable difficulté de concevoir comment il eft poffible qu'en 1787 il faille mettre de 1'ordre dans les Finances de la France. Dii)  ( 54 ) Le 14 Mars 1784 Sa Majeflé s'engagea par uiï 'Arrêt de fon Confeil a maintenir fi exa&ement les anangemens qu'elle a ordonnés pour fes Finances , qu'elle déclara facrifier toi&s dépenfes tfagrément Jufpendre toutes conflruclians de bdtïmens , & vouloirfe priver même du plaijjr de faire des graces. En Aoür 1784 unEdit folemnel fut publié pour PétabliiTement d'une Caiffe d'amortiffement , & le Roi y déclara qu'ayant porté un regard attentif fur la maffe entiere de la dette publique , elle en a confidèié toutes les parties pour en bien connoitre l'enfemble; qu'après en avoir fait difcuter en fon Confil le compte détaillé.... elled teconnu avec fatisla&ion que cette dette s'éteindra facilement dans un période déterminé..,.< que des opérations conjlamment fuivies ïlréfultera que dans fefpace de vingt-cinq années til fera rembourfl plus de iiz6~4>ooo)ooo de la dette publique & que nul motif, nulle circonjlance ne pourra jamais faire départirSa Majeflé en aucune forte , de l'exêcution du plan qui METTRA L'ORDRE DANS TOUTES IES PARTIES de fes Finances, donnera au crédit 4e I'Etat toute la forcequildoit avoir, &c. &c. Affurément fi on vouloit avoir la définition , la théorie 8? 1'indication de 1'ordre enfmance, on les puiferoit dans eet Edit folemnel. Deux ans apres, cependant? on appelle la  C H ) Nation , pour avifer aux moyens de rétabliV Vordre. Les Arrêts & Edits de 1784 n'ont donc été que des impoftures , ou s'ils ont été exécutés, ce qui fe paffe atfueiiement eft donc un leurre & un piege } S'ils n'ont pas été exécutés, quel en a été 1'obftacle ? comment eet obftacle ne peut-il être vaincu que par de nou veaux moy ens?tout cela offre autant de problêmes que M. de Calonne doit expliquer. D'unautre cöté, ie problême femble devenir ïnfoluble : i°. fi on confidère le tableau des Emprunts & affaires extraordinaires depuis le commencement de 1784, montant k plus de uoo millions, c'eft-a-dire , a-peiuprès a la fomme que 1'Edit de 1784 annoncoit devoir en vingt-cinq ans , acquitterla Dette publique; i°. s'il eft vrai que cette dette n'en ait point été ou prefque point diminuée; II eft évident qu'un défordre auflï exceffif, aufii inoui , ne pourroit avoir pour caufe que le défaut de confeil, de regie & de mefure dans la difti ibution des dépenfes. Le feul & vrai remede , par conféquent, ne peut fe trouver que dans la. ceffation de ce défordre., c'eft-a-dire dans 1'établifTement d'un Confeil fixe pour ré» gier la répartition des Revenus. En effet,pour peu que 1'on parcourel'Adnuaiftration aöuelle des Finances % on ne voit qus D vr  ' (50 ^ources de manx & de ruines. Cette Adminiftration fe divife en pure Adminijlration, & en Adminiftration contentieufe. Pure adminijlration. Depuis PAbbé Terray tout eft conoentré dans la volontéfeule du Controleur Général. II n'y a plus de Confeil de Finances: le nom de fes membres n'exifte que* dans 1'Almanach & fur les régiftres du Tréfor royal qui les paye ; jamais a préfent on n'examine, ón ne difcute, on ne regie ,on n'apure en Confeil ni Recettes, ni Dépenfes, ni Comptes: les Intéreffés les font; des Commis les contrölent, le Controleur les met en porte-feuille , les feit figner au Roi; on les porte enfuite au ChanCelier & aux autres Miniftres , qui fignent ou Hs fe trouvent, ad relationem , en vertu du principe moderne fi commode & fi dangereux:« que » la fignature du Miniftre de la Finance pour les » chofes de fon département, commandetoutes » les autres fignatures ». Ainfi jamais le R.oi ne fait que ce que le Controleur Général veut bien lui dire dans fon travail tête a tête. Les Commis font tout, & donnent la tournure a tout, felon qu'ils font honnêtes ou payés par les Intéreffés. Dela 1'effroyable Bureaucratie qui exifte & qui eft telle que ce qui faifoit fept ou huit départemens fous 1'Abbé Terray, en fait vingt-fept  C 57 ) cm trente k préfent. Ce qui ccütoit environ 300,000 livres , coüte 3,000,000. Par exemple , le Bureau de M. de * * * coütoit en tout par an 30,000 livres : depuis qu'il en eft ie chef il a coüté i9. pour fes meubles. 40,000** . a°. Pour payer fes dettes 60,000 30. Pot-de-vin du bail par inno- ^ vation 80,000 40. Par don pour payer fa charge de Maitre des Requetes 120,000 50. Quatre Commis a 12,000 liv. chaque. • • 48,000 (°. Quinze Ecrivain k 1500 & aoco livres-••• environ 24,000 70. Dcnné a 1'un d'eux pour travail du bail 16,000 8Q. A M. de *** par an en tout • • • 40,000. J 90. Par contrat de mari.3ge, affurance d'une retraite de 20,000 Hv. • • 428,000 Ce qui fait quatorze ou quinze fois plus que n'eüt coüté M. deTrudaine ou M. de Villevaut lui-même. Pourquoi ces faveurs k M. de aux dépens de I'Etat ? Un Confeil des Finances eut-il alloué ces prodigalites ? C'eft de-la qu'eft réfulté la proftitution des Penfions , qui, fous M. Necker , étoient k yiagt-huit millions ,& quiaprès des extin&icns  C 58) énormes , font encore au même taux, indépendamment de tout ce qui eft afligné ailleurs qu'au Tréfor royal, & tout cela au mépris de 1'Arrêt du Confeil de 1784. Un Confeil auroit-il opiné pour M. de*** une penfion de 8o,ooo** Pour M*** d valoir fur fa retraite • • 40,000 A M. de***, tandis que le Roi paye les Dettes de fon parent, qui feit perdre le refte 40,000 A MM. de***, déja engraiffés des dons du Roi k Pexcès, 40,000 -' &c. &c. &c. &c. &C &c. &c. &c. C'eft du même efprit de prodigalité, que provient Pabus ruineux d'Acquifitions , fans autre caufe que la faveur & la proftitution. ' —Biens de***--Terres de***— Biens deM*** •—Droits rêgaliens, vendus par M. de*****. —Rachat de PHötel Marigny , que le Controleur général s'approprie.-Manufaclure de Dunkerque de Cuirs tannés.--Maifon de Charité.-Hötel de M***.—Maifon du fieur*** au près k celles d'aujourd'hui. Que fit Sully? II ne voulut point s'oppofer au projet qu'un Courtifan , plus rempli d'imagination que de bon fens, propofa, celui d'affembler les Notables en 1596. — L'Affemblée arrêta deux chofes ridicules: un impöt onéreux & mfuffifant, que 1'on ne percut point, & un Confeil de raifon, qui devoit être tenu par les Magiftrats.-Sully laifla dire, & tomber ces plans : il y fubftitua deux chofes : i°. Pétabliffement d'un vrai Confeil de Finances , tel qu'il étoit ordonné par le beau Reglement de 1582 , qu'Henri III n'avoit pas eu le temps & la force de faire exécuter. 20. Appuyé de ce Confeil, Sully vérifja les comptes précédens, & fit entrer beaucoup d'argent détourné, en même temps qu'il fit arrêter invariablement 1'ordre & 1'économie des dépenfes k venïr. Avec ce régime il arnaffa 40,000,000 d'épargnes au Roi. ( Voyez Forbonnais, Tome I,, Page 75-) Un fiecle après, les chofes étoient retombées au même point de ruine , de déprédation & de confullon oii Sully les avoit trouvées en 1594. Colbert arriva au Miniftere: il n'affembla pas les Notables; 1'expérience 1'avoit éclairé ; mais il rétablit la forme rigoureu(e d'un Confeil des Finances, partagé en  ( f> trente-deuxiemes.Aufuc- » en notre Cour des plus, tout ce qui provient » Monnoies , confor- des remedes , appartient mément a nos précé- au Roi. Les Directeurs w dens £dits & Déck- en comptent, & n'en re- „ ratioRS ^ u Ms tirent rien. , . , etant au titre de 21 karats ~ , font jugés bons , &C leur titre efl tel. M31S quand le Rédacteur de la Réponfe de M. de Calonne fait fes calculs d'après le titre de 21 karats ~, il en impofe très-certainement. II fembleroit, par ce Le proces-verbal efl faux expoté, que les ef- ilWal&par cönféquent peces ne tont miles en ,°rT .r, . .,, 1 circulation .qu'après qiïun nul. Un Admniniftrateur Arrêt de la Cour des Mon- vraiment fage n'auroit noies a conftaté qu'elles eu aucun égard 1 r • * w' 1 que Hote des Monnoies. "r^f-™ connoitre le L'envoi des deniers em- ndicule de ce pnacesboités fe tait enfuite a la verbal, on 1'a joint ici, Cour des Monnoies, qui avec la lettre du Mine les juge que tous les nlirre, fous la ccte V. fix mois, & meme tous rv/i„„„ , • A les ans pour les Provir.c».. C c ft «pendant ce meme Corrmem peut-on dire P^ceS-verbal que M. de que le Miniftre a feint de Calonne annonce comcrohe , foriqu'il n'acru me très-régulic r & trèsque ce cui ré uhe d'un (X?Q.' Iï>Enayeiir eénéprqces-verbal aurhennque' „ni g.r vi„rt a & dreffc fuivam la ferme * 1 ^/P^Cur ge- toviours ufitée en pareil ne™ ' l11" Clte comme cas? préfens a t-outes ces opérations , n'ont été réellemcnt appelles & préfens que le 14 Novembre a un ïe'ül cfTni. On leur a remis deux lirgors a cffayer, & ils feroient fort emTjarrafles de dire de cuelles e'peces i!s avoient été fondus. C'étoit le fecret des — ; je veux dire, le mot de 1'énigme.- II eft conftaté, par ce f (wfiit de lire le» procés -vërbar, que les Procés-verbal, fous la 1 -uls f.;briqués depuis cote V, pour ju^er ti^ &tt0-ff»laS'-aU ccmbien 11 eftfufoeft ti re, & qu il falloit aiou- 0 11 , * ter quatre trente-deuxie- f <ïuelle dPece cIe edities pour qu'ils le fuffent. fance on peut , & * ble, ce qui tient le milieu . _ . , J , entre dix-fept & dix-huit. inftruit que le 18 au plu- II a paru équitable de tot. Sa lettre aux Direc- compter fur le pied de teurs eft en effet du 30; dix-fept , & les vérifi- & .■ comme \\ faut de cations pofteneures ont ^ ^mes prouve quon ne s etoit 10-' \ 1 pas trompé. Le Roi ayant tentes adreflees a la décidé dans fon Confeil Chambre des Comptes, qu'il corrvenoit que le ti- ( •& non k la Cour tre des nouveaux Louis, des Monnoies, quoique «e püt jamais être moin- cette Loi ^ jVj êtfe dre que 21 karats vingt- „. , rr' \ /■ untrente-deuxiemes,tous auffi adreffee ) font du remèdes déduits, il étoit meme jour ; & cepen- Jufte & néceffaire d'or- dant le Directeur tra- donner 1'addition de qua- yailloit déja , fondoit, tre trente - deuxiemes , ajoutoit ou n'ajoutoit pour que la matiere qui ' ' n'étoit qu'a 21 karats 17 PaS'. a 18 trente-deuxiemes, Sl la fortie de nos püt toujours être portée a louis devenoit excef- ce titre, & qu'il ne reftat five, comme le dit M. aucun prétexte de s'en de Calonne, ces louis ecarter. M. de Calonne a ,, . ,* ,, écrit en conféquence, & n e£>*nt donc pas de- une déclaration en forme tettueux ', oC S ils n e- a confirmé cette décifion. toient pas défectueux , pourquoi avoir autorifé quelques Directeurs k ajouter 3% de fin qui font inutiles & en pure perte pour le Roi.  (7«) OBSERVATION. Le p'oïet de la refonte de 1'or avoit été propöfé a M. de Fleury & a M. Necker, qui 1'avoient rejetté fur la foi d'un de ces Faifeurs de projets qui n'ont que leur intérêt pour guide, & nulle connoiffance des principes de 1'Adminiftration, M. de Calonne adopta ce plan, paree que 1'on propofoit un réfultat de 16 a 18 millions de bénefice. II auroit dü auparavant confuiter le premier Commis, chargé du département des Monnoies, qui eft très-inftruit de cette partie d'Adminiftration, ou le chef de la Cour des Monnoies lui - même; mais il redoutoit apparamment les lumieres & les connoiffances de l'un, la probité & le défintéreffement de 1'autre. En 1759 , lors de 1'apport de la vaiffelle aux Hó* els des Monnoies , le Directeur de Ia Monnoie de Paris , pere du Directeur aöuel, obferva qu'il y avoit une efyece de vaiffelle , qu'il défignafous le nom de vaiffelle platefoudée, laquelle, a raifon defdites foudures, ne rapportoit pas le même titre que les autres vaiffelles a la fonte. II fit faire, par les Commiffaires de ' Hotel, des procès-verbaux pour en conftater le titre. Ces procès-verbaux qu'il dirigea  (77) furenf faits a fon avantage; ils fixerent le titre de cette vaiffelle a 11 den. 6 gr. Par Ie réfültat de ces procès-verbaux, il intervint des Lettres Patentes adreffées a la Chambre des Comptes, qui autoriferent les Directeurs a compter de cette vaiffelle furie piedde i id. 6 gr. 11 fut même rendu quelques comptes de Directeurs, en vertu & conformément auxdites Lettres Patentes. La Cour des Monnoies ayant eu connoiffance de ces procès-verbaux & du titre inférieur de cette vaiffelle , fixé par.lefdits procès-verbaux, fit rendre plainte par fon Procureur Général, contre 1'Affineur & Directeur de la Monnoie de Paris, pour s'être induement approprié , au préjudice du Roi, une partie du fin contenu dans lefdites vaiffelles. L'Affineur fut décreté de prife-de-corps & le Directeur d'ajournement perfonnel. II fut fait des effais juridiques qui prouverent fa faufieté du titre porté auxdits procès-verbaux ; mais 1'Affineur & le Directeur éviterent la peine que la loi prononcoit contr'eux, en employant , pour feul moyen de défenfe , le contenu de ces mêmes procèsverbaux. 3% L'Adminiflration éclairée par la procédure, fit faire de nouveau des procès-verbaux authentiques , par le réfultat defquels le titre de cette vaiffelle fut fixé a 11 dtn, 9 gr. j en  eonféquence il intervint une Déclaration du Roi, annullant les Lettres Patentes, qui autorifoient les Directeurs a compter fur le pied de ii den. 6 gr. La même Déclaration annulle également les comptes rendus, & ordonne qu'ils compteroient fur le pied de 11 den. 8 gr. Ce Directeur fut interrogé fur la fellette. II eft aifé de voir la reflemblance de 1'opération de la fonte des vaiffelles en 1759 , avec celle de la refonte de 1'or.  (79) Cote V. Copie du Proces - verbal d'Effai peur la Refonte ■ des Efpeces d'or. L'an mil £ept cent quatre - vingt - cinq , le onzieme jour du mois de Novembre, fur les huit heures du matin ; nous Noel-Dominique de Bourdelois, Confeiller du Roi en fes Con-. feils, fon Procureur Général en fa Cour des Monnoies , en cette qualité Commiffaire da Confeil pour 1'intérieur de 1'Hötel des Monnoies k Paris , étant audit Hotel, affifté de Pierre-Louis Gueudré de Ferrieres , Greffier en Chef de la Cour des Monnoies, Secrétaire de Sa Majeffé prés ladite Cour, & Greffier ordinaire de la Commiffion, en conformité des ordres du Roi a nous notifiés par la lettrede M. le Controleur Général des Finances, en date du 4 Novembre de la préfente année , laquelle demeure annexée k la minute du préfent procés-verbal; nous nous fommes fait repréfen» ter par le fieur Dupeironde la Ccfte, Directeur de ladite Monnoie , vingt mille louis d'or de a4 livres, lefquels il nous a remis en vingt &cs qu'il nous a déclaré lui avoir été remis  ( So ) par rAdmïniftration , & pefer 660 marcs, 5 onces 7 den. 12 gr. Lefdites efpeces nombrées , examinées & pefées , après en avoir écarté quelques pieces dont la légéreté, la couleur & la figure, nous faifoient, ainti qu'au Directeur , fotip^onner la bonté , & y en avoir fubtlitué d'autres , dont le poids & le caradtere ne laiflbient rien è defirer; nous avons reconnu, i°. que lefdits vingt mille louis étoient indifféremment mélés de doublés, de Jimples , & de demi louis; 20. qu'il y en avoit de toutes les Monnoies qui font actuellement ouvertes oü qui 1'ont été depuis -172.6; 30. qu'il y en avoit de tous les mille-_ fimes , tels qu'ils circulent tk ont toujours circulé dans le Royaume depuis 1'Edit de 1716. Nous avons requis que lefdites Efpeces nous fuffent remifes , a 1'efFet de les faire fondre &c convertir en lingots ; après les avoir néanmoins fait pefer de nouveau en préfence du Directeur , pour reconnokre fi le poids en étoit Te même, nous avons vu que lefdites efpeces pefoient 660 marcs , 3 onces, 7 den. 12 gr. A Tinflant le Directeur nous a livré lefdites efpeces , & fait repréfenter par Lebceuf, Fondeur de ladite Monnoie , quatre creufets neufs. Nous étant tranfportés dans la fonderie a l'or3  'C 81 ) • i*or, ïls hous ont remis la clef d'une armoirè fermante a. deux tours, dans laqueilenous avons dépófé lefdits facs contenant chacun mille louis a 24 livres. . Les fourneaitx étarit allumés, nöus avons mis féparément dans les creufets ci-deftus, es vingt mille 'tous dïins leurs lacs, ferm és & cachetés a eet tffet, m v.inetur; & il en eft réiiilté vi iet lingots de tr< rite-un a trente-deux marcs enviro.n chacun, lcins comptcr les déchets ; èc ladite fonte feite, nous avóns remis 'cf iits vingt ïineots au fitur R^cle j Effeyeür particulier de la Monnoie de Paris , pour en faire 1'eflaï ; cé 'qu'il a exéciré en notre préfence. I! s'èft tróuvé par le réfültat dudit effei, qtté le titre commun defdits vingt lingots eft de 21 karats $|j faivaflt le rapport dudit fieur Racle, qui a figné avec nous & notredit Greffier. Airtfi figné, Bourdelois , Rade & GueudrL Et le lendemuin do;;ze dudit mois, furies huit heures-du marin , étarit aiui-t Hotel des Monnoies, afïifté c mme deiTus,' nous avons requis le fleur R^cle , Ei'iaycur particulier de ladite Monnoie, de faire une nouvelle reprife de tous les eftais feits la vei!ie. D'abord nous 'avons pris' cinq de ces HngotS au ha'ard, que nous lui avons remis pour faire-lefdits eftais > & de fuke nous avons mafqué les quinze autres F  (^) lingots pour qu'ils ne puifïent être reconïius; ledit Effayeur ayant procédé en notre préfence aux priies d'effai aux deux bonts & au milieu defdits lingots , & fait toutes les opérations néceffaires auxdits effais, il en eft réfulté un titre commun de 21 karats ~ un peu forts , ou 21 karats 17 è yf, ftiivant le rapport dudit fieur Racle , qui a figné avec nous & notre Greffier, &c. . . . Et ledit jour, fur les fix heures du foir , audit Hotel des Monnoies, aflifté comme deffus; nous avons demandé au fieur Dupeiron de la Ctfte, Directeur de ladite Monnoie, quatre nouveaux facs de mi'le louis chacun , pour en faire une nouvelle forite , lefquels il nous a remis , & après les avoir comptés & examinés avec les mêmes précaütiöns que le jour d'hier, nous avons procédé en préfence dudit Directeur a leurpefée, & avons reconnu quele poids defdits quatre facs étoit de 13 2 marcs 22 den., après quoi nous avons fait ficeler les facs 011 r.ous avons mis lefdits quatre mille louis, & ks avons cachetés & paraphés ne varietur , &C avons figné , &c. . . . . Et le lendemain 13 dudit mois, aftiflé dudit Me Gueudié, Greffier de notre Commiftion , furies huit heures du matin , étant audit Hotel des Monnoies; nous nous fommes tranfportés  ( *3 > a la fonderie a 1'or dudit Hotel', oü , après. avoir fait allumer quatre fourneaux, nous a vons fait vuider dans quatre ereufets que nous avons reconnus pour neufs , chacun defdits facs de mille louis, mis cejourd'hui tous nos fcéllés , oü ils ont été fpndus en notre préfence. Enfitv nous avons fait remettre les quatre lingots au. fieurRacle , Effayeur particulier de ladite Momnoie , pour faire-1'effai de chacun d'eux féparéraent, lequel après avoir fait fa prife d'efTai * aux deux bouts & au milieu de chacun defdits lingots, & fait de fuite en notre préfence lts opérations defdits effais, il en eft réfulté que le titre commun defdits quatre li' gots eft de li karats, 17 a ^; & a , ledit Effayeur, figné avec nous &: notre Greffier , &c. . . .. Et le lendemain, 14 dudit mois de Novembre audit an , étant audit Hotel de la Monnoie,. affifté comme dtffus , en raifon de nos opérations des jours précédens,. furpris de trouver ©bftinément un titre auffi foible, & croyant devoir apporter plus d'attent'on & de fcrupule a une expérience de cette conféquencej, nous avons demandé au fieur Dupeiron de la Cofte , Dlrefteür de ladite Monnoie, deux, Bouveaux facs de mille louis chacun, & avons, requis le fieur Dupeiron pere , ancien Dire&eur, 4e ladite Monnoie, &c le.fieurTillet, Infpe&auk F 1  ( «4 ) général des effais, d'examSner avec nous, piece a piece, lefdits deux facs de iooo louis; ce Cju'ayant fait avec toute Pattention poflible, après en avoir coupé plufieurs dont la figure nous paro.ffoit défvöueufe qui, au fond, fe font trouvés bons, & deux feulement reconnus. faux ; nous avons fa'it procéder, en notre préfence & en celle dudit Directeur, a la pefée defdits deux mille louis qui fe font trouvés pefer 66 marcs 22 deniers 12 gr.; ce fait, nous nous fommes tranfportés en la fonderie a 1'or dudit Hotel , accompagnés & affiftés comme deffus,oü nous avons fait fo; dre, en nos préiences, dans deux creufets r.euts lefdits deux. facs de 1000 louis chacun, verfés a nud dans, lefaits creafers. Ladite fonte faite,il en eff réfulté deux lingots, que nous avons fait remettre aux fieurs Beinier, Eftayuir général des Monnoies, & Racle , Effayeur particulier a la Monnoie de Paris, en les requérant d'en faire 1'effai , en notre préfence &i celle du fieur Tillet, Infpefte-ïr général des effais; lefquels Effayeurs, après avoir fait leur prife d'eftais aux deux bo ts & au milieu de chacun defdits, lingots, & fait de fuite cs mêmes préfences que déffus toutes les opérations néceflaires; nous ont dit & rapporté que le titre defdits deux lingots, eft de 21 karats de j| un pe»  e Calonne. Collationné fur la minute, figné Gueudré.