Boekbinderij Drukkerij RUSTENBURG Tel.72 17 78 Amsterdam   RECHERCHES SUR L E COMMERCE. Tome Second; Première Partie.   RECHERCHES SUR L E C O M MERCE. 0 U Idees rèhtives aux intéréts des différent Peuples de ÏEurope. Da veniam Peccavimus, ; Sed mifereret precor , fpeciofoque eripe damno. O v i d. Metam. Lib. XL TOME SECOND. PREMIÈRE P A R T I E. A AMSTERDAM Chez D. J. CHANGUIO N, M D C C X C L   T A B L E DES CHAPITRES du TOME SECÖND, PREMIÈRE PARTIE. Introduction. A la fuite de eet Ouvrage Pag. % CHAPITRE I. Des Banques en général. jj. CHAPITRE II. Abrêgê Hiflorique, rel at if au Commerce des Pays - Bas, & particulierement de la Hollande, jufqiia P époque de V établijjement de la Banque dAmfterdam 16 CHAPITRE III. De la Banque d'Amflerdam 49 CHAPITRE IV. Abrégé Hiftorique du Commerce de VAngleterre, depuis Jules Cefar jufqiia Vépoque de la mort de Henry III. (en 1272) . . ^7  TABLE DES CIIAPITRES. CHAPITRE V. Continuation du meme fujet, jufques a Vépoque de Vétablijfement de la Banque de Londres Pag. 109 CHAPITRE VI. De la Banque de Londres 161 CHAPITRE VIL Idéé de Vavantage & du préjudice que les Banques peuvent occaponner dans les Sodétés ou elles fe trouvenl é'tablies. . . .184 Quelques Ordonnances de la Banque iAmfterdam 235 Defcription des anciens Vaijfeaux Vénitiens &c. & du fret quon paya dans le XIIl!"e Siècle. . 243' Fin de la Table du Tome Second , Première Parcie.  RECHERCHES S U II L E COMMERCK LIVRE SECOND. PREMIÈRE PARTIE. INTRODUCTION, A la fuite de eet Quvragti En cherchant h développer les principes quö j'ai expbfés dans lc premier Volume, il m'eft arrivé , ce que M. de Montesquieu a fi bien exprimé dans les paroles fuivantcs: Je voudrois couIer fur une rh'iere tranquille, & je fuis entrainé par un torrent* En effet, quand j'entrepris mon Ouvragc, mon defTcin étoit d'abord de me bomer a dctailler les révolutions que le Numeraire, ou la valeur des Efpcces monnoyées, a fubi dans YEurope depuis plufieurs fiecles, & de faire en même - tems remarquer la progreflion qui a eu lieu fur les prix des Marchandifes, des Denrées, Main - d'ceuvres, &c. pen» A /  s INTRODUCTION. dant les mêmes périodes. Mais je 1'avoue, je fus moi - mcme étonné, lorfque je vis la disproportion énorme qui fe trouve exifter aujourd'hui entre la valeur qu'on a affignée aux Efpeces d'or & d'argent, & entre Ie prix des chofes qui conftituent nos bcfoins. Affligé d'une fi triile découverce, je pris lc parci de remonter a la fource, pour tacher de trouver la caufe d'un événement fi iingulicr, & qui a cu des fuites fi facheufes pour les fociétés. Plus j'avancois dans mes Recherches & faifois de nouvelles découvertes, plus je m'appercevois que mes idécs acqucroient un nouveau dégré de ccrtitudc. Elles font fimplcs, & c'ell: fclon moi un préjugé en leur faveur. Excité par le feul motif de contribuer felon mes foibles lumieres au bonheur des hommes, je redoublai mes efForts pour me mettre en état de les lui préfenter avec la plus grande clarté pofïïble; de forte qu'avant de finir mon premier volume, j'avois déja préparé unc partie des matériaux qui devoient fervir a expliquer un pcu plus en détail la nature & les effets de tout cc qui feit de figne de repréfentation dans le Commerce. Je me fuis aficz étendu fur IV & Yargent. • On a pu remarquer, que la grande quantité de ces métaux qui nous eft venue depuis la découverte de YAmérique, jointe aux variations que le Numeraire a cfluyées, a produit un mal pour la fociété en général. En le faifant pour ainfi dire toucher au doigt  INTRODUCTION. 3 dans les Tableau» qu'on trouve dans le premier volume, j'aver cis dès-lors que ce mal, déja aficz grand par lui-même, avoit été confidérablement augmenté par de nouveaux fignes de repréfentation, qui, furtout depuis le fiecle dernier, ont été introduits dans le Commerce, c'eft - a - dire, par le papier qui circule aujourd'hui, qui forme un objet immenfe,& qui parconfcquent mérite une attention particuliere. Fidele a ma promeflè, je vais expofer le plus fuccinétement qu'il me fera poflible ce qui concerne cctte partie, qui intérene également & les Etats & les Particulicrs. Je fuivrai ici le même ordre & la même méthode que dans mon premier Volume, auquel le Public a fait un accueil qui m'encourage cncore plus qu'il ne m'a flatté. Avant que d'entrcr en matiere , je crois devoir avertir, que par papier j'entends non feulement tout ce qui repréfente les efpeces, ou le Numeraire, mais aufli tout ce qui contribuc a foutenir ou a augmenter le crédit des Puifiances & des Particuliers. Matiere vafie, & qui exigeroit plufieurs Volumes, fi on vouloit la traiter a fonds. Je n'ai ni le tems ni les talens requis pour une pareille entreprife; je ne préfente ici que des Idéés ou des Recherches rélatives a ces differcns objets. Ce fecond Volume dans lequel je les ai rafièmblées fera divifé en trois Parties. La première contiendra quelques idees rélatives a 1'avantage ou au préjudice qui réfultent pour les A a  4 INTRODUCTION. fociétés des Banques modemes. On obfervera que ces Etabliflemens fervent en fubftance a augmenter les fignes des richcflès, & a leur donner une exiftence plus ou moins idéale, puifque la plupart de ces Etabliflemens ne fervent qu'a procurer un crédit, bien au deflus de la valeur effeclive des efpeces dépofées. Dans la feconde partie on trouvera une explication de ce que nous entendons par Circulation, & quelques réflexions analogues a cette partie. On y traitera encore de Forigine de nos Lombards, de YUfure ou de YIntérêt ancien & actuel, du Crédit entre les particuliers, rélativcment au Commerce, du Crédit public, ou de Forigine des dettcs aétuclles de prefque toutes les Puifiances de 1'Europe; enfin de 1'influcnce que ces différens objets ont fur la maffe générale des Sociétés. La troifieme partie commencera par un expofé des effets que les Lettres de Change ont produit; effets dont Tinfiitution eft fi ililutaire, qu'on ne peut trop fupplier les Puifiances refpeébves des divers Etats d'accorder une protection finguliere a eet objet, en formant de concert la-deflus des loix uniformes, & qui puifient étre fuivies dans tous les Pays. Aprcs quoi j'expoferai mes idéés fur la Balancc du Commerce; c'efi; la oü je développerai la queftion que j'ai propofée au commencement de mon  INTRODUCTION. 5 Ouvrage. C'eft - a - dire: Si aujourd'hui le Commerce rfefl pas trop étendu, & par-la contrairs aux vrais intéréts des hommes ? Ce dernier Chapitre fera fuivi de réflexions générales , rélatives aux vrais intéréts des divers Etats de 1'Europe en général. Car mon but eft de faire voir, que la vraie Richefie de chaque fociété confifte principalement dans Ie nombre, Vindujlrie & la manier e de vivre des habitans. Et que par conféquent tout ce qui peut nuire a leurs bonnes meeurs & a la Population, doit naturellement être confidê. ré comme contraire aux vrais intéréts des hommes. Tous ces différens objets feront parfemés de faits Hiftoriques qui ont quelque rapport,foit direft,foic indireét, au Commerce, & qui vicndront a 1'appui de ce que je me propofe d'établir. Le détail dans lequel j'entrerai fervira encore a prouver que 1'or & 1'argent n'étoient pas ci-devant auiïi rares en Europe, qu'on fe 1'imagine ordinairement. Enfin, je préviens le Leéleur, qu'a la fuite de cout eet Ouvrage je me propofe de donner un fupplément a mon premier volume, qui contiendra quclques nouvelles découverces rélatives aux Monnoyes des anciens &c., & qui ne font parvenues a ma connoiflance que depuis fon impreffion. Je dois en grande partie ces nouvelles découvertes a des perfonnes qui ont pris la peine de lire mon premier eflai, & qui par amitié ont bien vouA 3  6 Chap. I. DES BANQUES lu me faire part de ce que, dans les Auteurs Grccs & Latins, dont la lecture leur eft tres- familiere, ellcs ont trouvé d'analogue a cette partie de mon Ouvrage, qu'elles m'ont par-la mis en état d'afliéliorer & de perfectionncr. CHAPITRE L Des Banques en général. Par Banque on entend communément un établifiement autorifé par le Souverain ou le Gouvernement d'un pays, pour fervir de dépot au public (i), de foutien & de reiTource au Commerce & a 1'Etar. Nous obferverons d'abord en pafTant, que la nécefïïté, oü la République Romaine fe trouva fous le regnc de Tibere,donna lieu a Tércction d'une Banque publique a Rome; mais elle étoit établie fur un principe différent, & opéroit plus falutairement que ne le font nos Banques modemes. Nous cn parierons dans la feconde partie: j'en fais maintcnant mention, pour faire voir que Forigine des Banques publiques eft plus ancienne qu'on ne le penfe généralcment. On trouve acluellement des Banques établies dans prefque tous les Etats de FEuropc. Mais les plus CO O'S. de Commtrcc par Sav*ei, au mot Banqus.  EN GÊNÉ RAL. ? anciennes & les plus confidérables font celles de Venife, de Qéftes, de Sevi/k, & Am fier dam, de Hambourg & de Londres. Ces établifTemens different aujourd'hui entr'eux en principes, & par la manicre dont ils font dirigés: mais toutes les Banques ont cela de commun, que par leur Crédit elles fervent a foriner de nouvcaux figncs de valeur (2}. Et confidérées fous ce point de vue, il y en a, qui felon moi peuvent étre regardées comme trés utiles, tandis que d'autres font certaincment préjudiciables a la Société. Si j'étois afTez inftruit fur forigine & la nature de toutes ces Banques, j'en aurois donné une hiftoire détaillée. Mais on feait combicn fouvent il eft diffieilt d'étre bien au fait des chofes, qu'on a pour ainfi dire fous les yeux. La difficulté eft cncore bien plus grande, lorfqu'il s'agit d'avoir des informations a pluficurs centaincs de lieues de chez foi: ajoutez a cela 1'impoffibilité de pouvoir pénétrer dans cctte efpcce de fanctuaire; car il n'eft pas donné a un chacun de connoitre les refTorts fecrets, qui mettent la machine en mouvement: il y auroit même quclquefois du rifque ou du moins de 1'indifcrétion a mettre au jour ce myftere politique. En Italië, outrc les Banques dont j'ai parlé, il CO Efprit des Isu-Liv. XXI. c. Savari au mot Banque. Rahercke: & Cuufidérations fur les Fhiances de la Franct ï. II. p. 424. & les lntériïs des Natious de l'Europe T. 1. c. tl. A 4  8 Chap. I. DES BANQUES g'en trouvc encore dans d'autrès villes, par exenv ple a Bologne & a Naples. En paflant dans cette derniere ville en 1750 & 1751 j'y en trouvai trois établies (fi ma mémoirc ne me trompe). Je ne me fouviens pas de leurs noms, fi non de celle qu'on nomme de St. Elige, & qui eft fous la direeïion des Moines ou du Couvent de ce nom. Cette Banque étoit a dépot & a emprunt; pluficurs particuliers & Négocians y avoient un compte ouvert, & on pouvoit y négocier de largent fur des gages dépofés a un intérêt modique, c'eft-adire, a raifon de quatre pour cent par an. De toutes les Banques ccllc de Venife paffe pour êtrè la plus ancienne : mais cette antiquité eft-elle bien conftatéc? & de qucllc époque la doit-on datter ? M. Anderson (3) rapportc que felon Tal-- f%) Voyez fon ouvrage intitulé, Chron. DeduSl. of Comm. Tom. I. p oü il s'espi ime ainfi, felon la tiaduftion que nous donnoiis ici dj 1'Anglois: „ Talkrits, & quelques autres Chronologilles rnp„ portent a 1'année 1157 Pétabliflement de la Banque de Venife. Cet Etat politique & jaloux a töujours été extiêmement refervé fur Ispifa blication des moindres matieres rélatives a fa police & ii fon Commerce. Cependant tous les biftoriens font d'accord ra - dciïiis > ,, que Venife fut le premier Etat de la Cluétienté, qui trouva de la convenance & de l'avaritage k avoir une Banque pubüque; & que „ les auties Républiques Italiennes ne tarderent pas de fuivre fon lt enewple a eet égard. 11 y en a pounant qui veulenc que cela n'ait eu licu qu'en d'autrès encore ,'plus tard. On dit que „ les fonds de cette Banque fut dans fon oiigine de deux millions _ de Ducats. Dans une guerre des Vtnitiens contre les Tutci, 1'li-.  EN GÉNÉRAL. 9 lknts cllc aurok etc érigée en 1157: fekm d'autrès en 1176, ou plus tard, cxprcffion erop génerale pour en pouvoir fixcr la vraie époque. J'avouc que malgré les Recherches quej'ai fakes, je n'ai pu ricn dccouvrir de ce qui peut avoir induit ces auteurs h dire, que la Banque actuelle de Venife a été érigée en Fannée 1157, paree que a cette Epoque il n'eft fait aucune mention de eet Etabliftèmcnt dans les Hiftoricns de Venife. II n'cn eft pas ainfi de Fannée 1176 ou environ: car ce fut avant cette année, que cette Républigue, élevée déja a un trés haut dégré de gloire & de grandeur, fe vit obligée pour fournir aux fraix de la guerre contre I'Empereur Manuel, d'établir une Caiflè d'cmprunt, oü chaque citoyen, proportionnellcment a fes facultés, fut obligé de porter une certaine fomme dargent, dont on devoit lui faire la rente. Cette Caifie fut dépofée dans le tréfor de Saint Mare ,pour y avoir recours dans le befoin, jufqu'a cc que la République cut recouvre fon ancien état de proipérité (4). „ tat fe conftitu.1 caution de 1'argcnt dJ^ofii, & s'en fervit pour fub„ venic aux fraix de cette guerre. „ Vcgio ou la prime iit monter avec le tems 1'argcnt de cette „ Banque jufqu'a utute par cent plus haut que l'argent courant; & „ quoique fEtat par plufieurs Edits eut taché de le faire bailfer dc „ prix, dans la fuite le Capital fut doublé; & 1'Etat cautionna enco-f „ re ce fmcioit: Enfin il fut aniHé par un Edit, que 1'argent de Bau„ que ou Vagio ne'pourroit jamais exceder vingt par cent de prime, „ & les cbofes font reftées fur ce pied jufqu'a ce jour." (4) [liftoire de Venife (éciite par Décret public en laan} par M. Antonio Coccio Sabelllco. T. I. p. 15Ö, A 5  jo Chap.l. DES BANQUES Et cotnme cette Républiquc, par Fétendue de fon Commerce & de fes poflèfiïons fituées dans plufieurs endroits de i'ArchipeJ & de la Mer Méditerranée, eut dans la fufce de fréquens démélés & plufieurs guerres a foutcnir, il eft probable qu'cllc dut fouvent fe fervlr des memes refiburecs. Cette Caifie aura donc vraifemblablcment non feulement été continuée, mais aura fubfifté jufqu'a l'année 1587,époque oü a ce qu'il paroit, les demieres dettes de la République furent éteintes, ainfi que nous le verrons mcefiamment. Cependant, quoiqu'il en foit de Forigine de ce Bureau d'emprunt, il eft trés different de celui de la Banque, connue fous le nom de Banco diï giro: car FHifioricn Andrea Morosini Sénateur, fixe diftinétement & clairement Féreétion de ce nouvel Etablifiement a l'année 1587 (5). Voici comment s'cxprime ce Célebre Hiftorien: „ Les Véni„ tiens, une fois déchargés des dettes qu'ils avoient „ contractées pendant la précédente guerre, accumuM loient tous les ans une trés grande quantité d'or „ & d'argcnt, qu'ils dépofoient dans le tréfor pu„ biic, pour en faire ufage en cas qu'unc nouvelle „ guerre eut lieu, & en employoient en attendant „ une partie, pour journellement embcllir la ville. (ij) TTiftoii'e de Peirfi (écrite en vertu d'un decret public en latiiO par leSenateur Andréa Mjrommi, T. VU. pag. 61. Voytzonc.ru Patü lic VttUti par F. Vcrdizolti Nul/ik Fcittv. I, iii. i P« 1587. p. itili.  EN GÉNÉRAL n „ Cc fut alors qu'on réfolutaufiï de venir au fe„ cours des Négocians, qui avoient fait des pertes „ confidérables ; car ayant prefque toujours des „ fommes dépofées chez les Banquiers, ccux-ci par „ leurs tromperies, leur avarice, & leurs folies dé„ penfes leur avoient caufé de grands dérangemens, „ lefquels influcrent même fur les revenus publics, „ qui n'en furent pas pcu diminucs. En conféquen„ cc le Sénat drefia une loi pour l'éreétion d'une „ Banque publique, dans laquelle chacun pourroit „ placer avec confiance & en fureté fon or & fon „ argent. II fut ftatué, que eet établiüement feroic „ fous l'adminiftration dun Gouverneur qui auroit „ foin de veillcr a cc que tout fut dirigé avec beau„ coup d'ordre & de fidélité. Ce fut Franco is „ Gr ad on ic us qui exerca le premier eet em„ ploi". Parmi les Ordonnances, qui pendant le cours de ce fieclc furent drelfées pour corriger les abus qui s'introduifoient dans radminiftration de la Banque, j'ai obfervé, furtout dans celle du ioMars 1704,qu'on y fait mention d'une loi ou ordonnance publiée le 11 Avril 1589. Ainfi voila donc felon moi la vraie époque de 1'éreétion de la fameufe Banque de Venife, fi célebre & fi univerfeilement connue (6> (6) Sa var y dit, au mot liamps, en parlant de ce'le de Venife : Elle a été itahlte par un Eiit folemnel de la RépuUique. Mais il ne fait pas du tout memion ni du tems ni de l'année.  12 Chap. I. DES BANQUES Elle eft poftérieure a 1'érecTion de celle de Génes (7), mais celle-ci eft, je crois, d'une nature un peu différente, & doit plutöt être confidérée comme une Banque d'emprunt, c'eft-a-dire, qui étoit autorifée a négocier de 1'argent a intérêt, telle apeu-près que celle qu'en 1550 on érigea en Frame (8). Prétendre que les principalcs Banques ont eu pour modele celle de Venife (9), eft encore une M. Johan Ca rel May dans fon Ouvrage Récrdations ff uit Nêgoeiant contenant une defcription de tout ce qui peut concerner le Commerce & la Navigation de tous les peuples de la terre, des temps les plus reculés jufqii'tujourd'liui, (1768) écrit en Alleruand & traduit en Hollandois, dit dans Ia 2de partie §. 266, que la Banque de Venife fut établie en 1587, & fervit de modele Ji toutes les autres. Cet Ouvrage, divifé en deux parties, ne coutient que 231 pages, outre 46 pages pour les notes & pour les tables des poids, mefures & monnoyes, & répond bien en quelque forte ii fon long titre, mais il eft dommage que 1'Auteur ne cite pas toujours fes garants, & qu'il n'ait pas pris plus de tems pour travailler fes matieres qu'il traite; d'aiitant qn'il parolt qu'il auroit été fort en état de le faire. (7) May §. 261, oii 1'Auteur s'exprime ainfi : „ La Banque de St. ,, George a Génes fut éiigée en 1407, lorfque la ;République fe trou„ va obligée, pour fournir aux fraix de Ia guerre, de prendre de fes „ Citoyens de 1'argent a intérêt, fur des hypotheques & fur les re„ vernis publiés. Cette Banque étoit d'autant plus ifolide (dit 1'Au,,teur) que Ia plus grande partie de 1'Ifle de Corfe lui appartenoit: „ mais depuis 1'an 1746 elle eft prefque entiérement tombée. La „ valeur de fes efpeces, ou Ia monnoye de cette Banque, eft efti„ mée environ 15 par cent au - deflus de 1'argent courant. Les let„ tres de Cbange tirées de 1'Etranger font toutes payables en elpe„ ces hors de Banque. fouri Banco." (8) Voyez Storie Florentine di Mejfer Bernardo Segni gen.tiluomo Florent'mo pag. 326. (9.) S a v a r 1 & quanüté d'autrès Auteurs.  EN GENERA L. 13 aflèrtion un peu trop hazardée; car eft-on la-deflus afTez inftruit pour le dife auffi affirmativemenc ? II eft connu combien cette République a pour maxime de garder le feeree fiif tout ce qui concerne fon gouvernement, ou qui peut y avoir du rapport. N'eft-il donc pas plus probable qu'ellc aura pris tous les foins imaginables pour empêchcr, que les Hiftoriens n'aient pu rien favoir de précis fur le vrai but d'un parcil établiflêment ? Sa politique 1'aura furement portée a ne laiüer divulguer dans le public , que ce qu'elle aura jugé a propos de lui apprendre, d'autant plus qu'il paroit que cette Banque eft auffi en partie la CailTc de 1'Etat (10), Nc nous y arrêtons pas d'avantage: Quant au Capital de cette Banque & a fes opérations, on peut voir ce que Savari a déja écrit la - deflus. LaNote(n) contient des informations récentes que je recus di,- (10) Savari au mot Banque. „ Cela fait qu'elle (la Républt„ que) n'eft point obligée dans les preflantes néceffités d'avoir te„ cours Ji des impofitions extraordinaires." (11) A Venife il n'y a qu'une feule Banque proprement dile j le* Regitrcs s'y tiennent en Liyres de Banque, qui fe divifent en vingt fo's , & ces fols en douze deniers. Cette monnoye eft idéale. Chaque livre étant eftimée dix Ducats, qui font pareillement imaginaires, dont la valeur eft de neuf livres & trois cinquiemes monnoye courante de Venife. On les nomme liyres de Ficoli, pour les diftinguer des livres de Banque. 11 y a aufii des Livres Courantes, dont chacune fait dix ducats argent couiant. On fe fert uniquement de ces livres imaginaires pour les polices d'afiiirance, oü on exprime par cette dénomrnation feule la fomme aflurée. Les Ducats courans, dont la valeur eft de fix livres & un cinquieme ie pkoli, ne Ibnt pas tout il fait imaginaires, car il y a une  i4 Chap. I. DES BANQUES reclement l'année derniere de Venife, & que j'ai cru mériter d'être inférées dans ce récit. Corame la Banque de Venife paflè pour être la plus ancienne des Banques modernes (12), j'en ai du parler pour entrer en matiere. Car au refte mes Recherches fe boment principalement a examiner quel eft le but & l'utilké de ces établiffemens, & quel eft 1'avantage ou le préjudice qui en réfultent pour les diverfes fociétés. monnoye qui a précifement cette valeur, mais on la nomme autrement; favoir Mezzi fcudi dalla croce. C'eli en ducats courans que les Négocians tiennent univerfeHement leurs livres , & c'eft aufli de ces Ducats qu'il faut entendre tout ce qu'on dit dans 1'ufage commun, quand on parle de Rente, de Dot, ou deChofespareilles. Lei Regiftres du Gouvernement font en Ducats d'argent, autiement dits Bv.cati effeciivi. C'clt une monnoye qui exifte efieétivemenr, & celle qui a le plus de cours. C'eft par conféquent en Dticati cffuTivi qu'on fait le payement des dixmes, des Impöts &c. & que la Zecca (1'hotel des Monnoyes) paye les interets des fonds, & toutes les autres charges du Gouvernement. Entr'autres chofes Ia Banque de Venife differe dans fes opérations, de celle SAmjlerdam, en ce qu'on peut difpofer le même jour de tout ee qui entre. Et qu'on n'y dilpofe pas comme a Amfterdam par Billet, mais de houche, & i la Bourfe même, depuis midi jufqu'a deux heines, & même plus tard s'il eft néceflaire. Le propriétaire ne paye nul droit quelconque pour les difpofitions qu'il fait de fon argent dans la Banque li Venife, comme cela fe pratique dans la nötre, ainfi que nous le verroas plus bas au Chap. III. Ou peut apprendre les autres particularitês concernant la régie de cetie Banque par les dilKrentes ordonnances publiées dans le cours de ce fiecle. (12) Je dis Banques modernes, pour la raifon que j'en ai donnêe au commencement de ce Chapitic ; cat il clt probable que les anciens, guidés par un efprit trés fsge, connuient tiop 1'influence défavantageufe que de pareils établiffeuiens d'emprunt devoient avoir dans les Sociétés.  EN G É N É R A L. 15 Toutes les diffcrentes fortes de Banques fe réduifent donc a ces deux efpeces, favoir: a une forte de Banque qui eft un dépot pur & fimple: & a une autre, qui eft en même-tems commercante, & dont le Bureau dcvicnt par la le premier Banquier de la Nation oü elle fe trouve établie (13). Ces deux formes fe trouvent felon moi parfaitement réunies dans les Banques dAmfierdam & de Londres: ces deux Banques ont été auffi le principal objct dc mes Recherches, & me ferviront d'exemples, pour prouver que la mafie des fignes intermédiaires eft encore augmentée, fans que lor ou 1'argent y exiftent effectivement. La Banque d1'Amfierdam ayant été établie cnviron un fiecle avant celle de Londres, il eft naturel que je commencc par elle. Mais avant que d'entrer en matiere, il ne fera pas hors de propos de rapporter ici la maniere dont on procedoit autrefois dans notrc pays par rapport au Commerce, aux échanges &c Par la on pourra en quelque forte indiquer ce qui vraifemblablement a donné occafion a fon établificment. O 3) Voyez The uniycrfal DiSionary of tradc and Commerce par S a v a r y & continué par M a l a c h y P o s t l e t ii vv a i t , au mot Banking remarks pag. 194. Et les intéréts des Nations de VEurope T. I. Chap. XXI. Ces auteurs font inention de trois formes ile Banques, leavoir des deux mentionnées ci-dclfus ,& d'une troifieme connue fous le nom de Lombards. Mais nous parierons de ce dernier éi'abliflement dans la feconde Partie.  i6 Chap. II. COMMERCE CHAPITRE IL Abrêgé Hijiorlque, relatif 'au Commerce des PapBas , & particulierement de la Hollande, juf qiïa Vépoque de V établijfement de la Banque dAmfierdam. wAl n c i e n n e m e n t on avoir. dans quelqucs priricipaux endroirs dc 1'Europe (i) & furtouf dans les villes ou on tenoit de grandes foires, & en Hollande dans plufieurs villes, des Maifons publiques deftinées a échanger les efpeces d'or ou d'argent des pays étrangers: chacun dc ces établiflèmens avoit (O Du Cange. Gtofar. aux mots Cambium Publkum , TabuU Cambil, & Tabulam tenore CaaibH\ ou y obferve que les Rois de France & d'Arragon étoient dans 1'ufage pendant les XIII & XlVme Siecles de permettre qu'on établit des Danquiers dans plufieurs Villes de leurs Royaumes. II y eut en 1304 & 1305 a Parit un établiflement public deftiné uniquemcut i: échanger les Efpeces} Cct établilTement fut placé fur le grand Penti Sous le Roi SArragon Jayme II. a fan 1301, il fut ftatué que perfonrre dans aucun endroit de la Catahnie, ne pourroit tenir la Banque, qu'il n'eut préalablement donné des aflurances pour la valeur de Mille Marcs d'argent. lis étoient outre cela tenus a certaines formalités, par cxemple, de tenir leurs Bancs ou tables en public fans aucune couverture foit de tnpis foir de toiles, afin que chacun put voir clairement tout ce qui pafibit par les mains de la peifonne afiife proche de la table tkc. & cela fous peine que celui qui contreviendtoit a ces reglcmens feioit condamué comme faufl'aire.  DES PAYS-BAS. tj avoit fon Changcur ou fon Banquier, qualifié a cette fin dc la part du Comte, ou des Villes (2) lorfque celles - ci en avoient rccu le droit de la part. Ainfi dans ces tems-la le nom de Banquier fignifioit fimplement un Echangeur d'efpeces, foit en or foit en argent, & dont les droits qui lui revenoient étoient fixés; car fes profits deperidoient de la quantité des fommes qu'il échangeoit. L'an 1322. le Comte Guillaume III (3) affer- (2) Defcriptlon a"Amjlcrdam par Jean Wa oenaar, Edit. in folio Tom. II. p. 536. Ce dernier cite en particulier fur cec article en note A. Mattii-EI Not. ad rernm Armoft. Script. page 225. L'an 1351, le 23 & 25 Décembre. Guillaume Duo de Baviere £? Comte de Hollande &c. fit don aux Villes de SsUedam & de Lcyden entr'autres du Change & du droit de Banque (ytiffet) par 1'oétroi fuivant: „ Guillaume Duc &c. favoir fai„ fons que nous avons donné \ notre bien aimée & fidele Ville de ,, Schiedam pour plufieurs fideles fervices qu'elle nous a rendus, „ & nous rendra encore, tels privileges ci - après uommés. Premie„ rement nous lui donoons le Change de leur Ville pour en faire ufa„ ge a leur profit &c." Voyez le liyre de Clmrtres de 61. van Mieris Tom. II. pag. So5 & 807. C3) Voy> Privileges &c. de la Ville de Dordrecht, augmentés de notes & de remarques par M. Pierre Hendrik van or Wal, Confeiller de la dite ville in Tol. I Partie p. 152. Item Chartres de M. van Mieris T. II. p. 290. que la Banque Qwfel') étoit différente de Ia maifon d'EmprUnts, cela paroit par uit contract, d'échange d'une certaine Mailou fituée a Schiedam, entre le Duc Guillaume & le Maitre de Tvente de Ze lande, en date du 21 Avril 1322. oü 1'on nomme la maifon, dont il e(t quefiion, fituée vis-a-vis du Lomberderhuis, la maifon des Emprunts que Jean de Keizer ticiit it prêt dc nous dat Jan de Keizer van ons helt té leencn. Voyez aufii T. IV. pag. 230. fous l'an 14I2 & 1413, ou il eft queilion des biens de deux Lombards fitués a Oudewater, dont nn des employés étoit mort. Tome II. Part. I. B  18 Chap. n. COMMERCE ma pour quatre annécs a trois Citoyens de Dordrecht fes douanes & la Banque (wiffel) fituée dans la dite ville, moyennant une fomme annuelle de 360 livres (ponden) de Hollande (4). Savoir 200 pour fes Douanes, & 160 pour la Banque. Rcmarquons ici en pafiant, que le Commerce fe faifoit alors dans nos pays (5), & même plufieurs ficclcs avant dans les principales Villes de 1'Europe, d'une maniere bien differente de celle d'aujourd'hui. Je previens en même-tems le Lecteur, que les trois ou quatre ficclcs qui ont fuivi la mort de Charlemagne, font ceux oü 1'Efprit humain des peuples de 1'Europe femble avoir été en général le plus flupide & le plus couvert des ténebres. Dès avant le regne de ce Prince , c'eft-a-dire dans le Vme Siècle, fous le regne dArcadius & SHonorius, les Banquiers doivent avoir été établis en grand nombre a Conflantinople, & dans un quartier feparé dc la ville (6). Leur profeflion doit OO Les 360 livres (Ponden) de Hollande fiir le pied dn cours établi a la fin du XlVme Siècle, feroient felon mon évaluation en valeur aétuelle 2250 llorins, & par conl'equent les iöo dans la proportion des 3(ïo, mille fiorins. 00 Voyez Defcription d'Jmilerda.m par Wagenaar Tom. H. pag. 536. On trouvera encore des lümieres fur eet objet dans V/iiftoire de Charles V. par Rocbertson, dans la note 29. de 17»troduB'.on. (6~) Après 1'accord dCArcal'ms avec Gaines Général des Goths, en l'année 400, ce dernier congut de funeftes defieins : 11 entreprit entr'autres „ d'enlever 1'argent des Banquiers, dont les Comptoirs étoient „ réunis dans une des places de la ville; ce devoit être le fignal  DES PAYS-BAS, '9 avoir été trés reipechble. Voyez la note ? cidefibus. Auffi je prefume que ces Caifficrs „ d'un pillage & d'un maCTacre général. Mais ce projet aysnt tranf,, piré, & les Banquiers ayant fenné leurs Comptoirs & tranfporté „ leur argent en lieü fur, il envoya au couimenceinent une tioupe „ de Goths, avec ordrs de mettre ie feu au Palais." Voyez FhfftoU re du Bas - Empire pat M. i e B eau, Tome VI. Chap. XXVII. § 12. GO Mr. l e Beau en exnofant la disgrace de Jean de Cappadoce, contemporain de Beli/aire, l'an 541 fous Ie Regne de Juftimen, nous fait aulïï connottre le Caractere & les qualités de fes fucceffeurs. Ce morceau curieux mérite d'étre rapporté. „ Theodole luf „ fuccéda dans Ia Préfjflure; ce n'étoit pas un homme vertueux; „ mais comme Tto.fora ne le trouvoit pas afTez méchant, elle le fit accufer de fortilege & de maléfices ; & quoique le queflreur Pro„ citlui 1'eut déclaré innocent, il fut exilé a Jerufalem. Elle jetta en„ fuite les yeux fur Pierre Barfamés, en qui elle rencontroit toutes „les qualités qni pouvoient lui plaire. Syrien de Nation, après „ avoir fait la profeiïïon de Bannuier, oü il n'avoit rien épargné „ pour s'enrichir, il fut admis dans les gardes de 1'Empereur. De„ venu Prefct du R-étoire, il déploya tous fes talens, détournant la 5, paye des gens de guerre, vendant les charges & les gouverne,, mens des Provinces, qu'il laiffoic enfuite piller par ceux qui en „ avoient acheté Ie droit, écartant les gens de bien pour 11'emplo- yer que des fcélerats, fupprimant les gages des Officiers du Pa„ lais, réduifant des Provinces a la difette, en les forcant d'appor„ ter leur bied ii Couftaiitinople, pour le leur revendre au doub!e, quoiqu'il fut gnté, & qu'il fallut le jetter dans Ia mer. La foic fe „ tiroit des Indes par la Perfe; on la mettoit en oeuvre h Tyr & a „ Be'rite en Phénicie, d'oü elle fe répandoit dans tout 1'occident. „ Barfamés s'empara de ce commerce; il forca les onvriers de ne „ travailler que pour lui, & il défendit fous des grofies peines d'eit „ vendrc ni d'en acheter d'autre que de lui. 11 vendoit 1'once de ,, foie de teinture commune fix pieces d'or, ce qui revient i 80 li„ vres de notre Monnoye (dc Francs); & celle de teinture Royale „ quatre fois d'avantage 5 ce qui ruina enticrement Tyr & Be'ryte, „ dont les ouvriers paflerent en Perfe. Les fuccefieurs de Barfamés , „ ii fon exemple partagerent avec Ie fifc les immenfes profits de ca „ monopole. Les plaintes de tout 1'Empire, les murmures du peil- B a  ao Chap. II. COMMERCE ou Banquiers auront eu des privileges accordés par le Souverain pour exercer publiqucment le Commerce de Banque. „ ple de Conjlantinople, les menaces des gens de guerre, & plus „ encore !es énormes richelïes de ce concuffionnaire , firent enfin „ ouvrir les yeux a Jufiinftn. Dans cette nou- „ veile dignité Barfamés ne changea pas de caractere. 11 fiipprima „ prefque toutes les penfions que faifoit le Prince 5 ce qui réduifit k „ la niendicité grand nombre de families. 11 retranclia aufii toutes „ les remifcs que les Empereurs étoient en ufage de faire des reli„ quats des contributions. II diminua le poids de la monnoye d'or, „ fans rien rabattre de la valeur. C'étoit une coutume établie dès „ le tems d'Augufte, que dans la cérémonie des quinquennales , c'eft - k - dire , lorfque les Princes renouvelloient apres cinq années „ la mémoire de leur avénement k 1'Empire, on diftribuoit cinq pie„ ces d'or k chaque foldat; cette libéralité qui n'avoit jamais été in„ terrompue depuis pres de fix eens ans, fut abolie par le confeil „ de Barfamés. " llift. du bas-Empire. Tome X. Chap. XLVI. §. 40. Ce feul détail fuppofe de grandes ricliefies dans 1'Empire. Et peut-on s'empêcher d'étre véellcment étonné, quand on confidere, que 1'or & 1'argent des mines de l'Amérique étoient alors non feulemcnt inconnus, mais encoie profondement cachés dans les abimes de la terre ? ]'ai cru faire plaifir au Lecleur de copier en enticr tout eet article, paree qu'il a un rapport direct avec le Commerce & les ricliefies de ce tems-lk, dont on n'a pas généralement des idéés af fez juftes, & fur lelquelles on n'eft pas aficz inftruit, ce qui fouvent donne occafion k plufieurs. méprifes. Voici encore d'autrès pafiages concernant les Banquiers, Mr. l e Beau eft encore ici notre guide. Du tems de la confpiration contre Jnflinien (en 563), un riclie Banqtiier nommé Marca en étoit le chef. Ablabius, officier de la monnoye, recut de lui 50 livres pefant d'or, pour entrer dans ce complot. Chap. XLIX. §. 63. Un Banquier devint Intendant d'un des Palais de 1'Empereur, & enfin Général d'Armée. Chap. L. §. 44. Un Banquier d'Antioche fe fignala par fon efironterie Chap. LM. $. 8. &c.  DES P A Y S-B A S. si Pai encore raifon de croire , que le Souverain ou le Gouvernement étoit en quelque facon refponfable ou Caution vis a vis du public de leur adminiftration (8) ; car pour ne parlcr ici que de ce qui a eu lieu dans notre pays, il n'y a qua lire les remarquesde Mr. van de Wall au bas de Facie de 1' an 132-5 oü en nous donnant un détail circonftancié de ce qui concerne cette partie dans le Courant du quatorzieme fiecle, il rapporte entr'autres eet article d'une Ordonnance des Magiftrats de la ville de Dordrecht. Item, on avertira en même-tems, cj? on fera favoir, que celui qui donné de Var gent en Banque (wifielen), qu'il le fait a fes propres rifques, car la ville ne s'en veut pas rendre refponfable (9). C«) Dans Ie Chap. L. §. n. fous Juftin en 557. lorfque Sophie fut devenue 1'objet de la haine générale, le même Auteur ajoute ces paroles remarquables : „ La mifere pubüque avoit grofii les ufures & multiplié les det„ tes. L'Impératrice fit payer a tous les Créanciers ce qui leur „ étoit légitimement dlï, autant qu'il fut pofiible de démêler les „ créances réelles, au milieu de ces detours, oü 1'ufure a toujours „ feu s'envelopper. Elle fit rendre aux débiteurs leurs hillets ou „ leurs gages." (sO Voyez Privileges &c. de Dordrecht pag. 153. Dans Ia Cbartre du Duc /llbert de l'an 1388 on lit les paroles fuivantes: Cvoyez le livre des Chartres de van Mieris Tom. III. p. 505). „ Afin que ce „ change ou payement foit mieux tenu dans fon cours, & pour em„ pêcher que les efpeces étrangeres, mauvaifes ou bafies,ne puilTent „ être introduites dans notre Pays, & pour 1'avantage commun des „ Négocians, nous voulons qu'on établifie dans notre ville de Dor. „ drecht deux Banquiers (y,ij[tlaars~) & dans chacune des antres vil» S 3  «2 Chap. H. COMMERCE Les Marchands venoient & alloicnr alors en perfonne vendre ou acheter leurs marchandifes (10). II y avoir. par conicquent beaucoup d'efpeces étrangeres a échanger. Et les profits qu'on y faifoic doivent avoir été encore trés - confidérables, vu le tems dont il eft ici queftion (n). „ les un Banquier, & pas d'avantage, a raoins que nous ne le ju- „ gions autrement avautageux. Et ils prendront pour eux de „ chaque fusdit Ecu (fclnld) deux deniers de Hollande. — — En „ cas de fraude il ne jouira pas même du droit de citoyen." (10) Voyez Defcription d'/imfl. par Wagenaap. T. II. p. 536. Le tems dont il eft ici queftion eft (jfnerent de celui du X & XI Siècle, dont nous avons fait mention page 18. Le Commerce dans les XIII & XlVme Siecles avoit déja pris un accroificment confidérable, voyez encore Ia-deflus la note :o de 1'' Introducilon de Rodb e r t s o n & qu'on a déjïi citée. Elle fe trouve dans 1'édit. in 40. pages 31Ó cc 317, oü ce célébre Ecrivain ajoute: „ Les Lombards „ s'étr.blirent aufii en Angleterre au XIII Siècle, & il y a encore h „ Londres une grande rue qui porto leur nom. lis y jouirent de privileges confidérables, & y établircnt un commerce fort étendu, „ lur-tout comme Banquiers." Voyez les Chapitres IV & V. Je prie le Lefteur d'obferver qu'il y avoit une grande difiërence dans notie pays entre Banquier & Lombard. Le premier exercoit une profeflion tres refpeflablc, & 1'autrc un métier trés vil. C'étoit a proprement parier un tilurier privilegie. Aufii 1'ÏIiftoire de ces tems fait aficz connoitre leur caraétere. 11 fe peut qu'il y ait eu des endroits dans 1'Europe, oü ces deux Emplois ayént été combinés. Mais duns mes Recherches, du moins pour ce qui concerne notre Pays, je n'en ai tiouvé aucun exe'inp'le. Je reviendrai fur eet artiele dans la fuitc. (n) L'auteur d'un Ouvrage recent i.ititulé Richefes de la Hollande Jn 4to. Tome I p. 116. en traïtaht de i'origine &, du prbgrès de la Bcnque d'Amflerdam, nous appre'nd que — — „ eet échange des „ monnoyes doit néceflairement avoir donnë licu a un petit com„ merce qui fe fait encore aujourd'hui. A mefure qu'on ttouvoit „ des perronnes qui avoient occafion d'employer plus ou moins cer„ caincs efpeces de monnoye, on s'en defaifoic avec plus ou raoins  DES PAYS-BAS. £3 On peut s'en convaincre par 1'anecdote fuivante: Pan 1417 on établit h Amfhrdam en qualité de Changeur ou de Banquier le Bourgucmaitre Tsbrant Heynen, qui feul avoit rccu le privilege d'échanger les efpeces. Cct emploi étoit alors refpectable & lucratif (12), & il refta tel, jufqu'a ce que les „ de facilité & d'avantage, comme cela arrivé encore aujourd'hui, „ lórfque les Auglois, par exemple, veulent échanger leurs gum/es, „ les Francois leurs huis d'or, les Alleraans leurs frederics d'or &c. Cet auteur paroit comparer Ie Commerce de nos changeurs (yifelaars) ou petits Banquiers d'aujonrd'hui, k ceux de ces anciens tems. II fe trompe trés fort la - deflus. Les échanges ds ce genre qui fe font aujourd'hui dans notre ville , fe bornent a des objets tiéspetits. Ces fortes d'affaires font dans des mains Juives. Mon intention n'eft pas de choquer qui que ce foit dans fa profenion, mais je penfe que fi je m'arrogeois le droit de comparer un de nos BaÜi quiers Juifs ïi un de ces changeurs des demièrs fieeles, on ïn'en fauroit mauvais gré, & ïi trés-jufte titre. Le Banquier (wiffelaar) de Ia Ville d'Amfterdam pendant le XIV ou le XV Siècle peut fort bien étre comparé au premier Banquier de la ville de ce tems ■ ci, pourvu qu'on ait égard au tems & aux mceurs. (Voyez la note fuivante). Car les befoins d'alors, lorfqu'un feul Banquier étoit en état de foumir h tout le Commerce de la ville ou d'un pays, font bien différents de nos befoins actuels, vu que tout elt naonté fur un au» tre pied. S'exprimer donc, comme le fait cet Ecrivain, c'eft donnet des idéés trés confufes aux Etrangers de ce qui fe praliquok autrefois chez nous ; & c'eft ce qui m'a engagé il faire cette petite remarque. 0*3 Dffcription d'Amfterdam par Wagen aar, Tom. I. page 130. & Livre des Chartres Tom. IV. page 429. La ComteSe Jmqueline accorda au feul Tsbrant Heynen Bourgueiuaüre regnant Ie )iofte de Changeur ou de Banquier. II eft dit dans i'Acte que cette même perfonne avoit déjh été favorifée de cet Emptoi du tems de fon pere, & que ce fut aux mêmes conditions. 11 n'eft pas hors de propos (vöjez la note précédente) de faire ici un cakul du benefice ou du proüt que pauvoit iauc un Banqi iet ' B 4  24 Chap. H. C O M M E RCE lettres de Change dans le XV & XVI Siecles devinrcnt plus en vogue. II y a même grande apparence, qu'après que. le Commerce des Icaliens (13) & des Villes Anfeatiques eut été confidérablement étendu, les Banquiers, par les relations qu'ils avoient entr'e.ux, contribuercnt beaucoup. a rendi-e 1'ufage de ces lettres dc Change plus commun, en donnant dans les échanges, au lieu d'efpeccs, des Ajjignatjcns ou. des Lettres de Change, qu'on pouvoit, lur 1'écbange des Efpeces, & qui étoit fixé ïi 2 deniers de Hollande de chaque Ecu (fchild). Voyez Mieris Iiv. de Clutrtres T. UI. p. 5°5; fjuppofons que le Banquier n'ait fait dans toute l'année en échange d'cfpeces feulement que pour 105003 Ecus (ces Ecus étoient fort iné"aux en valeur, il y en avoit dans 1'Acte de l'an 1411 (voyez T. IV. p. 165) de 50 & aulfi de 38 gros la picce. Et fuppofons qus fon prolït n'ait été que de deux deniers. Suivant la teneur de Ia menie Ordonnance de 1411 il y avoit alors 7 deniers de Hollande au gros. Sur ce pied il auroit eu 210000 deniers; & 7 deniers au gros font "ooco "ros. En évaluant le mare d'argent a environ 6 flor. le profit fait en poids d'argent 125 mares, qui font aujourd'hui (a 25I) environ 3200 florins. Objet trés peti confidérable, dira un de nos aros Neoocians d'aujourd'hui; mais qu'il fe rappclle un peu ce qu'on pouvoit fe procurer alors avec cet objet , qui nous paroit aujourd'hui fi chétif: car c'eft ce qu'il ne faut jamais perdre de vue. Un Préfident d'une Cour de Juftice a Gand avoit, en 1403, 500 floiius d'honoraires: & en Hollande en 1435 'e P^fident du Confeii avoit i2co fg, qui a 4 Efcalins font I44«» lefquels (le mare alors a öi) font £21 mares. Un Confciller de la même cour avoit 4 a 6coiEcus de Bourgogne, faifant environ 54 mares, calculés fur la fomme de 500 Ecus. Voyez la - deflus le détail oü je fuis entré dans ma première partie Chap. VII. pag. 210 & 213. (13) Voyez Defcription d'AmJlerdasi par Wagen aar, T. II. 5. 527'.  DES PAYS-BAS. 25 faire payer ailleurs. Cette facilité dc fe procurer des remifes ou des payemens, cn contribuant infenfiblement a diminuer les échanges des efpeces, aura en même - tems donné un plus grand cours aux lettres de Change. On peut voir dans 1'Ouvrage de Wagenaar les coutumes qui étoient cn vogue cn 1597 par rapport aux lettres de change dans la ville dAnvers_ (14), & celles qu'on obfervoit a Amflerdam en 1601 (15). Ainfi pour pouvoir juger avec un peu de jufieflè fur cette matiere, il eft abfolument néceffaire d'ayoir quclque teinture de l'hiftoire du Commerce en général, & cn particulier de celui de notre pays, avant 1'ércétion des Banques. Car c'eft par ce feul moyen, qu'on peut parvenir a connoitre, 1°. quelle étoit a proprement parler anciennement la fonction des Banquiers ou des échangeurs, 20. ce qui felon toutes les apparences a le plus contribué a nous procurer l'établiffement de notre Banque. En voici quelques rraits que j'ai rafiemblé auffi fuccinctement qu'il m'a été poflibie. II paroit que fous le regne des Rois de Francs (14) Wagenaar Idem. L'auteurcite en note fiar cet artide les p. l63 & 544 du livie cODtéoant les Privileges de la ville A'Amflerdam première Edition. Et comme je n'ai pas cette Edit. je cite de celle de 1624. les psg. 94 & 95. & un petit livre contenant les Ordonnances, coutumes &c. du Change & de la Banque d*Amflerdam p. j. (15) Idem. B 5  atf Chap. II. COMMERCE dc la première & feconde race, les habitans de la Frife, & particulierement ceux de la partie méridionale, fe mêloient déja du Commerce au dehors (16). Dans la fuite divers événemens (16) „ On voit que fous le regne de D igobért Por & 1'argent „ avoient eed tiès rares en Trance, ainfi que fous le regne de Claris " & de fes Enfans : Mais il eft trés vraifemblable que, foit par les expéditions qu'ils firent cn Italië, foit par les penfions qu'ils tire" rent des Empereurs de Conflantinople, & fur-tout par le Commer" ce qu'ils établirent dans Ie Levant, il eft trés vraifemblable dis« je , que tout cela contribua a faire venir de ces pays une grande abondance de ces prétieux métaux, comme aufli des pierreries, ■ des foies, de riches vafes & örnemens, de forte que le luxe n'é* toit gueres mo'mdre dans la Cour de ces Rois, que dans celle des „ Empereurs. " Voyez M fi z B r a v T. L p. 238. C'eft auffi fous le même regne que dans notre Hiftoire de la Païrie T. I. p. 338. on trouve que Dasobert avoit érigé une Maifon de Douane a Utrecht, oü on devoit payer un droit de toutes les marchandifes qui defcendoient le Rhin. Auffi paroit-il que fous fon resne le port de Dorjlad étoit déja trés fréquenté par des vaiffeaui marchands qui venoient de la Mer. Me zk.ra y (t. I. p. iSóJ nomme,en parlant de 1'état de la France dans le VI. Siècle, comme Ports de mer, & oü 1'on battoit monnoye, Dorftad & Qjientó Vicus, qu'un Géographe francais croit ètre Quotiënt le viel, k Pernbouchure de la Riviere d'Autic en Picardie, je fais memion de cette anecdote, paree que Wagenaar paroit confondre Ficus Portas avec notre Wyk te Duurftede tk auffi avec Dorftad, & Me zera y dit clairement que ce font deux endroits differens. Je dois encore prévenir le Lccteur, qu'il eft évident, fuivant les Recherches curicufes & ralTemblées avec une grande érUtUtion par M. Baltazar Hludecoi'ER dans fon ouvrage Chronique cn vers de Melis S t o k e , que Dorftad n'eft pas notre IVyk te Duurftede, mais doit avoir été fitué a Pembouchure de XElbe un peu plus bas que Hambourg. (Voyez ï. I. p. 190 a 204). Je fais part de cette remarqué, paree que je fuis tombé dans la même erreur dans mon premier Volume, première partie, erreur d'autant plus excufeble, que je croyois ne pouvoir fuivre de meilleur guide que notre celébre W a-  DES PAYS-BAS. »7 (17) contribuerent a leur bonhcur, en procuranc aux divers dillricts , tcrritoires, cantons ou pro- g e n a a r, qui place ainfi cette ville en plufieurs endroits de fon ouvrage de l'hifinire de la Patrie. Sous le regne de Charles (depuis furnommé Charlemagne) on obfcrve fous Fan 797. (V. Mezeray T. I. p. 417) 287 les noms de plufieurs perfonnes diftinguées, qui furent bannis de toute la Flandre, & dont les noms fubfiltent encore dans plufieurs families de nos Provinces. (32) Lorfque dans l'année 1515 on chargea les habitans de nouveaux impótSj on trouva qu'il n'y avoit en terres contribuablcs pas plus de deux cents mille & trente arpents de terres, 45000 maifons, & 172000 Perfonnes propres a fupporter le charge de Capitation. Les autres terres & maifons appartenoient k des Couvens ou a des maifons de Charité. Et le refie des habitans étoient ou des Eccléfiaftiques, ou des perfonnes hors d'état de contribuer a ces Impóts. Hifi. de la Patrie T. IV. p. 391. Selon 1'Auteur des Intéréts de la Hollande pag. 19. 011 trouve dans les documens de la Chambre des Comptes (Rekenkamer), que dans l'année 1622 il y auroic eu dans la Hollande Méridionale, fevoir:  D E S P A Y S-B A S. 37 profpérité. Dc forte qu'avant la revolution arrivée dans le feizieme fiecle, on pouvoit déja dire que la Hollande non feulemcnt étoit très-peuplée, mais poffédoit dans fon propre fein de très-grandes relTources. On en trouve une preuve démonftrative dans le fecours en argent, que Charles Quïnt recut desPaysBas pendant les guerres qu'il eut a foutenir, lequel. \ Dordrecht avec fes villages . • . 40523 habitans a Haarlem avec fes villages • . . 696413 . & Delft avec fes villages ... 41744 1 111 ït Leyden & dans le Rhinland . . . 9*285 . h Amjlerdam avec fes villages • • . 115c .2 k Gouda avec fes villagesj| . . • 24662 . ït Rotterdam avec fes villages . . . 28339 ii Gomkhem (Gorcum) avec fes villages . 7585 —— ii Schiedam avec fes villages . . . 10393 Si Schoonhoven avec fes villages . . . 10703 ■ li Briel avec fes villages . . . 00156 ——. a la Haye . . ... 17430 ■ | Heusden , . ... 1444 431934 Et la Westfrife calculée au quart des habitans de la Hollande Méridionale en contenoit 120483 En tout 602417 habitans. Mi Karsseboom, dans fes EfiTais politiques rélatifs au nombre des habitans, fait monter aux environs de l'an 1737 les habitans de cette Province y compris Texel, Weland, Terfchelling & les autres Mes du Zuider-Zee appartenantes h la Hollande ,m nombre de 980000. Ce calcul eft fondé fur la quantité des Enfans qui naiflent annuellement, & qui felon les liftes fe montc ix 280,^0. On peut cependanc afièirer qu'en général la Hollande fe trouve aétuellement trés peuplée, & je crois qu'on ne rifque point dc fe tromper en difant que le to-. tal des habitans furpaCTe en nombre dans ce fiecle-ci cdui du fie?. de dernier. C 3  £9 Chap. II. COMMERCE fe trouve évalué a quarante millions (33). Ce fut le Commerce qui mit ces Provinces cn état de foumir une fomme li confidérable, a laquellc Ia Hollande feule contribua pour une trés-bonne partie. Si donc les Graces & les Privileges de nos Souverains, joints a la douceur du Gouvernement dc nos villes, ont contribuc a notre bonheur, le contraire a du produire des ctTcts tout oppofés. Aufli des que les perféeutions pendant les dernicres années de Charles Quint, & furtout fous Philippe fon fils eurent pris une certaine confiftence, 011 vit non feulemcnt un foulevcmCnt prefque général, mais auffi en mune-tems les tri/les cffets ^e ia mifcre que ces vexations produifirent, & qui ne commenccrent a diminuer,qu'après que les Grands & les plus Qualifiés du pays eurent formé. une ligue,& pris fur cux la défenfe des droits & des Privileges de la Nation (34). La Reformc nous fut alors d'un grand fecours; car cc fut elle aufii bien & peut ctre plus que les guerres, qui occalionna 1'étonnante & vifiblc décaclcnce d'une des plus grandes Villes Commercantes de 1'Europe , la célébre Anvers. On efi' réellement étonné de voir les grandes richeiiés qui fe u-ouvoient déja cencentrées dans 0,1) fM' de la Pa.'r/e T. V. p. 4 j» A tout cela il paroit que INI Montbsquieu a parlé cn Etranger, qui écrivoit plutöt fur ce que fon imagination „ lui diétoit, que fur la véritd des faits." Lorfqu'il dit, que: Daal les Etats qui font le Commerce d'Oeconamie on a heureufenunt étebli dis Banques, qui par leur Credit ont formi de nouveaux Jignes de valeur. (Kfprit des Loix T. II. p> 269). Si la critique de cet Ecrivain eft fondce, j'avoue que je n'ai pas la moindre idéé de ce qu'on nomme Banque, 11 me paroit au contraire, que M. deMontesquieu a parlé en homrae tres au fait. Je demande dans le fens Ie plus rigide,fi les Cliifiles ou papiers qui circulcnt dans le public, ne font pas de nouveaux figncs de valeurt Lorfqu'on porte dans la Banque des Piaftres ou des Linsots d'or ou d'argent, la Banque ne donnc -1 - elle pas en dchangc des chiffres, qui reprêïentent le depót. Tout cela , dira-1-on , ne va pas au buts Confidéions donc les Banques fous un autre point de vue. La Banque n'eft-elle pas a même de faire circuler plus de Hommes dans le Public que le montant en valeur de fon dépót ? Voila de quoi il. s'agit précifement; & voi a ce que le celebrè Auteur deYEfprit des Loix a voulu dire, Perfonne n'ignore, que M. DiiMoirrtsijuiEU a  DES PAYS-BAS. 47 donné l'excmple: les circonftanc.es exigeoient qu'on le fuivit. Outre ces motifs, la grande quantité de différentes efpeces étrangeres qui fe répandoient alors dans le pays, & les révolutions que fubiffoit joumellement le numéraire des efpeces (comme on peut le voir dans le premier volume) étoient une nouvelle raifon, qui rendoit obfolumcnt néceflaire 1'ércction d'une Banque publique (d'après les exemples de Venife, dc Seville (46), & d'autrès villes) oü on put mettre en dépot, non feulement les diverfes efpeces d'or & d'argent monnoyées, les lingots &c.; mais encore obvier par la aux inconvéniens des fréquens changemens auxquels on étoit alors expofé fur la valeur de la monnoye. Toujours eft-ilvrai que ce fut en 1606 (47), & cela avant que la trêve avec YEfpagne fut conclue , que M. M. les Confeillers de la ville & Amfterdam délibererent fur cet important objet (48). été occupé plufieurs années i faire fon E/prit des Loix, qu'il a voyagé dans les principaux endroits de YEurope, qu'il n'a pas negligé de faire un voyage dans nos Provinces, & que par lui - même il a pris les informations dont il avoit befoiu. Quant a moi, je trouve, felon mes lumieres, qu'il a tros bien traité la partie qui concerne le Commerce. (46J Defcript. ifAmjierdam par Wagenaar T. II p. 538. (4-) Idem Ibidem. (48) La tréve fut contlue a Atrjers le 9 Avril de l'an 1609 pour 13. ans.  4S Chap. tl. COMMERCE DES PAYS-BAS. L'Ereétion de cette Banque ne fut cependaht refolue qu'au mois de Juillet 1608. On obtint a cet effet un Oótroi de la part des Etats de la Pro vince , & cette affaire fut enfin confommée dans le mois de Janvier 1Ö09 , ainfi que nous le verrons incefiammcnt dans le Chapitre fuivant. CHA-  Chap. III. BANQUE D'AMSTERD AM. 49 CHAPITRE III. De la Banque d? Amfterdam. u 01 q u e ce foit une opinion afiez généralement recue, que Ia Banque d''Amfterdam a été établie fur le modele de celle de Venife (1), il paroit cependant qu'il y a quelque petite différence dans la conduite de leurs opérations (2). Surtout lorfqu'on confidere que la Banque d'Amfterdam n'a direéfement ni indireclement rien a démê- (O Voyez la Note 13 du Chapitre I. (2) La Banque de Venife paroit étre, pour ainfi dire, le dépöt & le c aifiier univerfel de toute la ville de Venife. Car elle fait aufii des payemens eu argent courant. Au commencement de 1'établiflemcnt de Ia Banque h Amfterdam on fuppiinia bien auffi les Caifiiers des particuliers ou des Negocians» du moins on gêna beaucoup leurs opérations : mais cela ne dura pas fort longtems; apparemment que dés qu'on vit que le crédit de la Banque étoit bien établi & qu'elle fe trouvoit munie d'un dépot afTez fort, on ne jugea plus a propos d'ufer de voyes de contrainte. Aufii voit - 011 que le Magiftrat de cette ville pcrmit en 1621 aux Caifiiers particuliers d'exercer librement leurs fonctions. Voyez plus bas. „ Les „ revenus de 1'Etat de Venife peuvent fe monter annuelletnent a qua3, tre millions d'onces d'argent qu'il faut payer en écritures h la Ban3, que, & les Collecteurs établis pour cet effet, qui recoivent a „ Bergam: & dans les pays les plus éloignés les impots en argent, „ font obligés de les convertir en écritures de Banque, lors deo paye„ mens qu'ils en fout a. la République. Voyez Efai fur la nature „ du Commerce page 407. Voyez fur 1'uu & 1'autre des articles ci„ deflus mcntionnés Savari traduit en anglois." Tomé II. Bart. I. D  5ó Chap. III. BANQUE Ier avec les deniers provenant des revenus publics de ï'Ètat ou de la ville, comme il paroit que cela fe pratique a Venife & a Londres. Par le détail oü nous allons entrer, on pourra fe formcr une idéé plus précife des principes fur lefquels notre Banque fe trouve érigée, & comment elle dirige acluellemcnt fes opérations; & pour traiter cette partie avec plus d'ordre nous la partagcrons cn plufieurs articles. Le ier- contiendra un détail fuccinét de 1'inflitution primitive de cette Banque, & de la maniere dont elle conduit préfentement fes affaires. ' Le ad. traitera de XAgio & de ce qu'il faut entendre par cc mot-la. Lc 3C. Des facilités accordées aux Commercans & aux particuliers. Le 4C. De la fomme a-peu-pres a laquelle fe montent les fraix de fa dircétion, & les profits annuels qu'elle en retire. Le y. Conjeétures fur le dépöt des fommes confidérables qu'elle renferme. Lc 6e. Enfin traitera des opérations onéreufes pour le public que la Banque pourrok faire. A R T I C L E h Par 1'Ordonnance datée du 31 Janvier icjop.concernant la Banque de Change (wijfelbank) & fe*  D'AM STERDAM. 51 prérogatives, on obferve les raifons qui ont entr'autres contribué a fon inflitution (3). Voici le commencement traduit littéralement. „ Pour prévenir toute forte de hauflè & de con„ fufion relativement a ia Monnoye, & pour foumir „ des efpeces a tous ceux qui en ont befoin dans „ le Commerce, MM. les Bourguemaitres &c. „ (van de Gerechte) autorifés par leurs Nobles „ Puifiances Noffeigneurs les Etats, & fur 1'avis „ des M M. les trente - fix Confeillers de cette vill„ le, ont jugc nécefïïüre, pour faciliter les échan„ ges & tout ce qui y eft relatif, d'inftituer une „ Banque publique d'échange. En conféquence les „ dits magiftrats ont flatué pour la commodité & „ fureté de chaque particulier de cette ville, d'é„ tablir une Banque de Change, ou chacun pour„ ra porter toute forte d'Efpeces, cn ïnafiè, gre„ nailles & billons, felon qu'il trouvera bon; & „ lefquelles il pourra retirer lorfque cela lui con„ viendra, a condition que lesdites fommes qui y „ feront portécs en Efpeces ne feront point au - def„ fous de la fomme de trois eens florins a la fois. „ Les plus bafies efpeces qu'on y admettra feront „ des Efcalins, dont même on n'en recevra que „ pour la valeur de 3 florins fur une fomme de (3) Defcript. tf Amfterdam par Wagenaap. T. II. p. 538. M. Commelin dans fa Defcript. dunne 1'extrait de plufieurs Ordop.pances du XVIIme Siècle rélatives a cette Banque. D 2  52 Chap. III. BANQUE „ ioo florins." Sclon la même ordonnance, la ville fe rend refponfablc des fonds, qui auront été dépofés dans la Banque. Elle porte encore défcnfe dc ne pas difpofer d'une plus forte fomme que dc celle qu'on y a réellement fait infcrire, fous peine d'une amende de trois pour cent (4). Elle avertit en même-tcms que ceux qui voudront échanger quelques Efpeces, pourront cn faire la dcmande a la dite Banque, lcqucl échange fe fera fur le moindre taux ou bénéfice que faire fe pouiTa. Dans le commenccment les lettres de Change qu'on négocioit a Amfterdam, ou qui étoient tirées fur les Négocians & d'autrès particuliers de la ville, devoicnt fe payer en Banque lorfque la fomme étoit de 600 florins & au-deflus; mais cet article fut changé dans la fuite (5). Par ce réglement & par la garantie de Ia ville, la Banque devint alors une Caiflê univerfelle pour tous les habitans. Dans la fuite, par un Edit (6) de Nofleigneurs les Etats de Hollande & de Westfrife, il fut HIpulé que 1'argent qu'on auroit dépofé en Banque ne pourroit être faifi. II eft donc clair que 1'inftitution primitive & conftante de cette Banque, con- (4) Ord. du 31 Janvier 1609. (5) Ord. du 11 Décembre 1643. CQ Edit des Etats, du 16 Décembre 1670.  D'A MSTERDAM. 53 fiftoit dans un dépot pur . & fimple. Celui qui y portoit fon argent, jouiffoit d'un crédit réel, & avoit un compte dans les livres de la Banque. La Banque fe ferme deux fois l'année, pour faire le Bilan des livres. La première clöture commence vers le milieu de Janvier, & la feconde vers la mi - Juillet, & dans ces tems-la la Banque refte fer* mée jufqu'au fecond Vcndrcdi faivant (7). Outre ces deux clötures que nous nommons grandes, il y en a encore de petites , qui tombent aux fêtes de Paques , de Pentccöte & aux premiers jours de la foire d'Amfterdam; outre cela la Banque eft encore ferméc a 1'Afccnfion, & au jour du Jcüne public. Ceux qui défirent un détail plus circonftancié & encore plus inilructif fur cette Banque, peuvent lire ce que S avari a écrit la-deiTus dans fon Dictionnaire de Commerce, & Wagenaar dans fa Defcription de la ville dAmfterdam (8). C?} Ordinairement le 2 ou le 3me Samedi dans le mois de Janvier ou de Juillet la Banque fe ferme, & ne s'ouvre que douze jours aprèsjpar exemple,fi la Banque fe ferme le 16 Janvier & que ce jour foit un Samedi, pendant cette journée on peut encore difpofer cn Banque, mais palfé ce jour elle ne s'ouvre plus que le 23 qui elt un Vendredi, jour auquel on peut auffi difpofer en Banque. (8) Voyez encore C om me l in dans fa Defcript. i? Amfterdam; le Commerce d'Amfterdam par de 1'E s p 1 n e continué par le Long, & le Recueil des Ördonnances &c. de la Banque d'Amfterdam, Ed. de 1775. ou fe trouvént toutes les Ördonnances concernam notra Banque, D 3  54- Chap. III. BANQUE Je me borne ici a obferver que la Banque d''Amfterdam n'eft encore aciuellement, comme dans fon Origine, qu'un dépöt dont la valeur circule féellement dans le public. Nous dirons encore ici en pafïïint, que la Banque eft dirigée par plufieurs Commiflaires (9); mais toujours fous la fuprême direftion de M M. les Bourguemaitres régnans , ou de MM. du Confcil (10). MM. les Commiflaires peuvent avec ou lans Ie confentement de la Régence en certains cas prendre des arrangemens ou faire des' Ördonnances, eoncernant les affaires de la Banque. Article II. Pour plus de clarté, & principalement pour les Etrangers, il eft nécefiaire de détailler plus amplement la véritable fource de Yagïo. La Banque recut dans le commencement les Efpeces fur le pied qu'elles avoient été limitées par les Ördonnances du Souverain ou réglées par MM. les Commiflaires \ ces Efpeces avoient cours dans le public a un plus haut prix, qu'on ne les receyoit en Banque (n), c'eft-a-dire, que ce nouvcl Cp") Dans Ie tems dc 1'établiflement de la Banque il y avoit trois Commiffaires. Voyèz Wagenaap. T. III. p. 4°2" (10) Wa'genaar T. III. p. 401. 00 u Pat e*emp!e, dans ['amée 1638 & 1641 il fut permis i ua  D'A M S T E R D A M. 55 argent dans la Banque par fa nature établiflbit de foi-même un agio, .qui devoit varier fuivant les circonftances & felon le cours du prix des Efpeces. Ce qui contribua le plus a 1'augmentation de la valeur de cet argent furent les raifons fuivantes: i°. La furcté des Deniers qu'on avoit dépofés dans la Banque. 2°. La facilité de faire ou de recevoir les paye* mens. Et 3°. Les Caifïïers même qui, nonobftant les ördonnances qui avoient été faitcs contr'eux, avoient continué d'cxercer leurs fon&ions, eurent dans la fuite la liberté de les exercer publiquement, c'efta-dire, cn l'année 1611 (12). Toutes ces raifons contribuerent donc a augmenter non - feulcmcnt le prix de cet Agio, mais auffi la confiance générale du public, envers cette fameufe Banque. Les Caifiiers qui, après la permiffion qui leur fut „ chacun de porter !e ducaton a 3 florins & la Rixdale a la croixa 48 Ibis, & dans le public le Ducaton avoit cours a 3 florins &3 fols, " la Rixdale a deux florins & dix fols. Mais en 1654. ces Efpeces „ circulant dans le public i un plus haut prix, on accepta alors a „ la Banque le Ducaton a 3 florins 3 fols & la Rixdale a 2avec 3, 2! par cent en fus. ., Par conféquent comme la Banque recevoit les efpeces a un prix „ moindre que celui oü elles avoient cours dans le public, 1'argent „ de Banque devoit repréfenter davantage que 1'argent courant." Voyez Defaiption tfAmfieriam par Wagenaar T. II. p. 539» C12) Idem. D 4  5<5 Chap. III. BANQUE accordée Fan 1621. faifoient continuellcmcnt des affaires en Banque, occafionnerent une augmentation disproportionnée fur le taux de Yagio , au point qu'en 1638 MM. du Confeil après un mür examen, arrêterent-que 1'argent de Banque ne s'acheteroit pas plus haut qu'a la prime Sun demi pour cent. En conféquence de cette Rcfolution, on publia le 22 Oétobre de la meme année une Ordonnance, a laquelle, ainfi qua celle du 4 Juin de la dite année relative aux monnoyes, les Caifiiers furent contrahits de fe conformer (13). Nonobftant cette ordonnance 1'argcnt de Banque augmenta fi fort en 1654. que pour obvier aux fuites facheufes d'un tel inconvénient il fut arrêté i°. qu'on ne prendroit le Ducaton & la Rixdale qu'au même cours que ci - devant (14). 20. on prit des précautions par une Ordonnance du 25 Novembre de la même année, contre cette augmentation difproportionnée qui pourroit avoir lieu a 1'avenir: cet Edit fut néanmoins annullé le 6 Oétobre 1656. & depuis ce tems-la le prix de 1'argent de Banque n'a pas été limité (15). \J Agio, dit notre Hiftorien Wagenaar,aété pouffé quelquefois jufques a 6 & 7 pour cent au- (13) Wagen aar T. II. p. 539> oil l*e tmuvent en note les Réfolutions de MM. du Confeil. Et fur le prix ou Cours des Efpeces Vóyez Liv. des Piacards T. I. p. 2Ü3o. (1.4') Voyez la Note 10, & la précédente» (15) Wagen aar ï. Ü> P- §39-  D'AM STERDAM. 57- dclTus de la valeur dc 1'argent courant (16). De mon tems, je veux dire depuis 1758 jufqu'en 1779,. je ne Fai pas vu (du moins autant que ma mémoire peut me le rappeller) au - dellus de 5 i a $ pour cent. Et on ne Fa vu qu'une feule fois, & cela dans le tems du discrédit en 1763 (17), a un demi pour cent au-deffous de 1'argent courant (18); mais cela ne dura qu'un inflant, pour ainfi dire; car le furlcndemain qui étoit un lundi Yagio fut a un pour cent au-deflus de 1'argent courant (19). (16) Wagenaar T. II. p. 539. (17J Ce discrédit fut occalionné par les grandes faïllites qui furvinrent k Amfterdam & it Hambourg immédiatement après 1'ouverture de, la Banque qui tomba veis la fin du mois de Juillet. (18) Ce fut le 6 d'Aoüt qu'on négocia dans le public de 1'argent de Banque ii un demi pour cent de perte; f: la Banque avoit dans ce tems - la acbeté pour fon propre compte, Yagio ne feroit pas tombé comme il fit. (19) Voici le prix de Yagio auquel une fociété de Comme^ans vendit dans les mois de Juillet & d'Aoüt 1763 de fortes fommes d'argent de Banque. Savoir : Le 7 Juillet k 215 pour cent au - deflus de 1'argent courant. 12 . . . 2 rs 14 • • .21% 29 . . .2/5 2 Aoüt . 2ï% 3 • • -2 11- 4 . . . 21*" 8 . . .au pair 9 . . . Idem. 11 . . . i au. deflus du courant. . . i| lö . . . ItV D5  5S Chap. III. BANQUE Le meilleur remede contre une trop forte hauf\ fe de Yagio, & qu'on a auffi quelquefois mis en pratique, c'eft de permettre de porter dans la Banque de 1'argent courant; par exemple pour 104I florins, la Banque, ou la Chambre du dépoi (Spetie-kamef) écrit cent florins fur le compte du propriétaire. Tout bien confideré, ce moyen eft le plus naturel qu'on puiffe pratiquer pour empêcher le furhauffement de Yagio. Pour ce qui concerne une trop forte baiffe, le remede n'eft pas fi facile , a moins que la Banque n'achette ellemcme (comme elle fait actuellement) & ne fafiè fortir ainfi une partie de fon dépöt (20). 17 . . . 11 i3 . . . 1 \ 7 23 • • • IT 7 24 . . . Il '3. , p,j • -i-r nViA'h ■/, ^m^-Mtt^muü*^ wlfcfTfcnitf 25 . . . IT 30 • • • 11 (20") La Banque en recevant des Efpeces du pays, des Efpeces etrangeres, des Lingots &c. avance a peu de cliofe pres les valeurs , & en donne fes rccus ou fes Billets, lefquels fe téajifept ordinaireinent dans la fuite, lorlque les Négocians fe trouvent en dtat de le faire, ou lorfque leur intérêt 1'exige, Mais outre cela il y a encore le dépöt compofé des diverfes fomraes qu'on a dépofées ci-devant dans la Banque : & encore d'autrès parties que la Banque vend lorfque Yagio eft ii un haut prix. Ce font donc les parties ou les Capitaux qui circulent continuellement dans le public. Par conféquent, lorfque la Banque vend de 1'argent de Banque, on peut dire que ce font autant de Capitaux qui forment un accroiuement du dépöt. De forte que fi la B mque n'achette pas pour e'le - tnéme de 1'argent de Banque , fon dépöt ne peut pas diminuer. Car qui peut obliger la Ban. yic a faire torül les deniers ou les Efpeces, .ü les recus n'exiftent  D'A MSTERDAM, 59 Article III. La Banque continue a faire des avances fur les Efpeces du pays, fur les Efpeces etrangeres & fur For & 1'argcnt cn lingots & en malle. Par exemple fur les Piaftres iïEjpagne du titre de 10 deniers 22 grains a vingt-deux florins le mare, & fur les Piaftres du titre de 10 deniers 18 grains a vingt-un florins & demi le mare, on paye un intérêt d'un quart pour cent pour les fix mois (21). pas ? Du moins j'avoue que je n'en ai pas vu d'exemples de mon tems. ^ La Banque, lorfque Yagio a été porté a 5 pour cent a vendu a 4 T pour cent de 1'argent de Banque; & a pris le parti d'acheter Mï pour cent lorfque 1'agio de 1'argent de Banque ii été ,en baiflej mais dans 1'un ou 1'autre cas , elle 11e Va pas fait au - deffous d'une fomme de eooco florins a la fois, & en Efpece de ce nom. Ces réglemcns dépendent de la volonté des MM. les Commiffaires ; enforte qu'on ne peut pas dire que ce foit une loi ou un réglement conftant. CaÖ Par exemple lorfqu'on a cent Mares de Piaflres A'Efpagnt, neuves, la Banque avance la - deflus 2150 florins. Voici la teneur du Recu ou (JRncïpife) qu'elle dunne. L'an 1779 le . . . . N. N. a porté en Banque. 100 Mares, difons cent Mares en Mexicaines neuves, a 21 florins 10 fols le mare, a condition qu'il eft tenu de les retirer dans le tems de fix mois, en payant a la Banque un quart pour cent, ou bien qu'a ce défaüt, les dites Efpeces feront appropriées il la Banque au dit prix. En rctirant ces Piaftres , qu'on peut laiffer a. Ia Banque pendant fix mois, 011 rélticue la fomme de 2150 florins & 55 florins pour 1'intérêt. Mais, dans le cas que le propriétaire voulüt laiffer fes Piaftres plus longtems dans la Banque, il paye avant 1'échéance des fix mois les 5I florins d'iméiét. Ce qui eft noté fur le recu, & alors cet empront peut étre. cominué pour un nouveau terme dc fix mois.  60 Chap. III. BANQUE Par rapport a 1'argent en lingots ou en malTe, on écrit auffi a peu de chofe prés la valeur intrinfeque fur le conrpte du propriécaire , lequel paye auffi tous les fix mois un demi pour cent d'intérêts. Nous dcvons cependant remarquer, que Pintere t des avances fur 1'or a été a un demi pour cent tant des Efpeces monnoyées que des Lingots (22); mais depuis l'année 1776, 1'intérét des Efpeces monnoyées fculement, a été porté a un quart pour cent. On a donné autrefois pour raifon de la différence qu'il y avoit ci - dcvant entre 1'intérct de 1'or & celui de 1'argent, que c'étoit afin de ne pas faire augmenter le prix de 1'or nécefTaire pour nos monnoyes (23); toujours efi-il certain que cela a Ces fortes d'opérations fe font de même pour les autres Efpeces ou pour 1'or & 1'argent en barre. Par exemple fur 1'or en Cruzades. La Banque avance 310 florins pour le mare. La valeur en eft k 325 florins 3 f fols avec un agio. Voyez ma feconde Partie du T. I. p. 176. (22; J'iguore fi cela a été ainfi depuis fon commencement. A la fin de cette première Partie on trouve fous la Lettre A, plufieurs régiemens qui ont cu lieu depuis plufieurs années, & qui fout relatifs aux lingots ik aux Efpeces qu'on permet de porter en Banque, & fur lefquelles elle prête a crédit. Ce n'eft que depuis peu que les avances tant fur 1'or (en efpeces feulement) que fur l'arger.t ont été mifes au même taux, c'eft - a - dire , ii un quart pour cent pour les fix mois. C23) Cette raifon (me femble) n'eft pas fans fondement; mais cette même raifon ne devroit-elle pas auffi avoir lieu fur 1'argent, dont  D'AMSTERDA M. 61 empêché que le Commerce de 1'or n'ait été auffi animé que fi 1 intérêt en avoit été établi a un quart & même a un huitieme pour cent. La politique de cette Banque devroit confifier, ce me femble, a attirer a elle par toute forte de facilités, 1'or & 1'argent de tous les pays avec qui la Hollande fait le Commerce. II en réfulteroit 1°. un avantage pour la Banque, & 20. un avantage pour les particuliers & les Négocians. A mefure que 1'or feroit chargé d'un intérêt moins fort, il eft probable qu'il conviendroit aux Etrangers de nous en faire parvenir une plus grande quantité. Par le moyen ou les facilités que la Banque procure, on pourroit difpofer tout de fuite a-peu-prés de la valeur, & fe referver encore la remife en cas que le prix n'en fut pas au gré du propriétaire, ou qu'il en put tirer ailleurs un meilleur parti, lorfque les circonftances dans la fuite devicndroient plus favorables pour cela. Je penfe même que la Banque de Londres feroit par-la plus fouvent obligée de fe fcrvir pour cet objet de la notre. Par ce moyen le revenu de notre Banque augmenteroit •, fans que pour cela il lui fut nécefiaire d'avoir un fonds plus confidérable; car ce que la Banque donne ou avance fur les le prix dans la proportion eft plus haut ordinairement que celui de 1'or?  52 Chap. III. BANQUE Efpeces monnoyées , etrangeres , comme auffi fur les lingots d'or & d'argent, n'eft a propremenc parler que du papier. Ce papier ou le crédit qu'il procure circule dans le public. Chacune de ces parties repréfente donc une partie de 1'or ou de 1'argent, qui fe trouve dans le tréfor de la Banque (24). En admettant qu'un moindre intérêt nous procurat une plus grande quantité d'or, le profit des particuliers pour les Commiffions ou Provifions augmenteroit dans la même proportion. De tout ccci il cn réfulteroit 'néceflairement encore cet avantage, qü'Amfterdam deviendroit pour le Nord, VAllemagne & YAngleterre le tréfor & le marché général pour 1'or: Les cours de Change que notre Ville a établis avec toutes les placcs Commercantes, facilitcroit ce Commerce, & feroit une raifon de plus pour fuivre cette idée. (24) Les fommes que la Banque avance fur les Efpeces ou fur les lingots , font tout de fuite écrites fur Ie compte du propriétaire, qui en difpofe par un Billet d'ordre de cette teneur : MM. les Commiflaires, il vous plaira d'écrire en Banque a N. N. La fomme de Amfterdam, ce .... ... Le Recu que la Banque du dépöt donne, ne contient proprement que le fmplus de la valeur de la partie qui fait un objet de Commerce , mais qui ne circule pas dans le public, comme 011 le pratique ii Londres avec les Billets de Banque ou les Banck notcs.  D* AMSTERDAM. 63 A R T I C L E I V. Par 1'Ordonnance pour Pinftitunon de la Banque" de Fan 1609. il fut régie qu'on paycroit un demifol de chaque cent florins ,• tant pour Fentrée que pour la fortie. Par une autre Ordonnance du 12 Janvier. 1683. il fut fixé que, de chaque partie du fonds en Banque dont le propriétaire difpoferoit, il feroit payé un fol: cet article a été enfuite haufle a deux fols (25). Retribution très-modique. On m'a aiTuré vers la fin de l'année 1776 qu'il y avoit alors 5010 a' 5012 'comptes différents en Banque. II y a des perfonnes qui n'ont pas cent florins fur leur compte, mais il y en a d'autrès qui en ont cent mille & beaucoup au - deflus , felon les affaires que leur comptoir dirigc. Ces fortes de comptoirs, il eft vrai, ne font pas en grand nombre. Quoi qu'il en foit, plufieurs y ont toujours des fommes confidérables en réferve. Pour avoir un compte ouvert en Banque, on paye d'abord dix florins & cela une fois pour toutes (26). ....... Les Négocians & les particuliers font obligéf? de porter ou de faire parveriir leurs billets en (25) Voyez Wagen aap. T. II. p. 540 Note (0>" c(l fait men* tion de l'an 1715. C2(i) Ces 10 florins font pour les paijvrss, Voyez 1'Ordonnanc* du 13 Mats iö3ï,  54 Chap. III. BANQUE Banque avant les onze heures du matin; fi on y manque, ils payent'une amende de fix fols oude cinq fols & demi; on eft obligé de payer auffi 5 fols & demi ou 6 fols lorfque la fomme dont on difpofe en Banque eft au-deflbus de trois eens florins (27). Ces amendes font au profit des Teneurs de livres. Selon le Bilan du 23 Janvier 1740, les appointemens des Teneurs de livres & de ceux qui fe trouvoient alors au fervice de la Banque, y compris les autres fraix, faifoient un objet de ƒ 25695-12-8 Pour un autre objet . . 2065 - - 8 Idem . . . . 99-10-8 En tout ... ƒ 27860- 3-8 fomme trés - inodique eu égard a la multitude infinie des rranfports que les Négocians fe font réciproquement , & qui chaque fois doivent être inferits &c. Cette ceconomie fait honnetir a 1'ad- miniftration C27) Voyez les Ördonnances du 13 Mars 1682. du 12 Janvier & 14 Avril 1683. MM. les Magiftrats Tont exerapts dc la fujetion de porter leurs Bülets avant n heures, de même que les Compagnies des Indes Occidentale* & Orientales, & ces dernieres peuvent difpofer h volonté fur'e* capitaux qu'elles ont en Banque de telles fommes que ce foient, fi petites qu'elles puiffent être. II eft vrai qu'ils payent annuellement un certain, revenant- bon aux Employés de la Banque.  D'AMSTERDAM. 65 miniftration de notre Banque (28). Trouveroiton ailleurs une régie fi bien entendue ? Ayant donné une idéé des frais que la Banque fait, il convient de dire un mot des prolits qu'elle retire. Bs confiftent i°. dans le revenu trés - médiocre & journalier de la Banque, c'eft: - a - dire, des deux fols que le propriétaire paye de chaque partie dont il difpofe. Cet objet fe montoit le 23 Janvier 1740 (pour une année) h . . . . ƒ 10460-16-: 20. Dans les intéréts que la Banque tire des avances qu'elle fait fur les Efpeces monnoyées & fur les lingots; ces petits profits par leur quantité répétée, puifque les occafions s'en prcfentent journellement dans notre Commerce, fe montoient, a la même Année 1740, tous frais de la Banque déduits, a ƒ 133810-1-8. Enfin la Banque jouit annuellement d'un bénéfice honnête, qui varie felon que les avances (beleening) qu'elle fait, fe montent a des fommes plus ou moins confidérables (29). (28) Wagenaar T. III.p.402. Oü il eft fait mention desEn> ployés qui dirigent les comptes de la Banque. „ Savoir quatre premiers „ Teneurs de livres, deux Adjomts Teneurs de livres , un Contre-Te„ neur de livres, deux Ueceveurs deftinés a recevoir & k délivrer les „ Efpeces monnoyées & en lingots. Ils ont encore fous eux quel„ ques autres adjoints. II y a toujours un Eflayeur dans Ia Banquet Enfin il y a encore dans la Banque deux Mefiagers, & un aide." (29) Le profit de l'année 1733, les fraix déduits, fe montaa ƒ 181200-19-; Et celui de l'année 1739. non compris les frais, i . ƒ161670- 5-5 Tome 11. Part. I. E  66 Chap. III. BANQUE A R T I C L E V. La maffe ou le total de toutes les fommes dépofées dans la Banque dont une partie fe trouve en Efpeces d'or & d'argent du pays, & 1'autre en Efpeces d'or & d'argent etrangeres, ou en lingots d'or & d'argent, n'eft pas toujours fur le même pied, mais varie felon les circonftances du Commerce en général de YEurope (3°)? ou de cc" lui duPays(3i). Mais, quelle que foit cette variation, la Banque par la nature de fon inftitution poffcdc toujours un dépöt très-confidérable. Je puis au refte afTurer, par rapport a cet important article, que je n'ai rien expofé qui ne foit exaétement vrai, ou qui du moins ne m'ait paru tel. J'ai été en état d'en parler pertinemment & avec certitude , par Ie bonheur que j'ai eu de rcncontrcr quelqucs Bilans de notre Banque, entr'autres ceux des années 1727, 1739 & 1740(32), & encore un plus récent. J'aurois donc pu fpécifier a quelle fomme fe monte ordinairement le dépöt; mais la difcrétion ne me 1'a (30) Une flotte arrivée & Cadix de \'Amdriquc nous fait venir 1'argent & 1'or, dont une grande partie étant envoyée ici, fe dépofe a la Banque. II en eft de même de 1'or, lorfque le Change de Lishonne ou de Londres Ie permet. (31) Lorfque Ia Compagnie Oriëntale a terminé fes expéditions artmielies pour YAJïe, il doit fe trouver dans la Banque moins de Piaftres qu'au printems, k moins que quelquc circonftance ne furvienne, comme je viens de le dire dans ma précédente note. (32) Le dépöt de l'année 1727. comparé au déLÓt de l'année 1*40, le premier fe trouva d'un cinquieme cn fus.  D'AMSTERDAM. 6> pas permis. D'ailleurs cet objet ne pourroit tout *au plus fervir qu'a fatisfaire une curioilté, dont le public ne pourroit pas tirer la moindre utilité. Tout ce que je puis afturer, c'eft que le dépöt eft trésconfidérable. En voici un exemple,qui ayant été publié, peut être cité fans inconvénient. En 1764 , un Négociant voulant faire une fpcculation furies PkSsmd'EJpagtte) il en fit acheter pendant deux ou trois jours pour au de-la de cent mille mares (on fait que ce Commerce fe fait a Amfterdam par le moyen des RecepiJJe ou des recus de la Banque): on avoit commencé a faire les achats a cinq fols & demi le mare, & a la fin ils furent portés a fept fols (33). La différence donc qu'il y eut entre le prix auquel on avoit commencé & celui auquel on avoit fini 1'achat, fur un objet en Piaftres de cent mille mares en poids, ou d'environ deux millions deux eens mille florins de Banque en valeur qui fe trouvoient réellement dans la Banque, cette différence, dis-je, eft fi petite, qu'elle doit faire aficz (333 Voici un petit détail qui pourra donner une idéé plus complette du négoce qui fe fait 3 Amflerdani fur les Piaftres. Les Piaftres vieilles achetées ii 22 florins 6 fols, les 100 mille Mares font en argent de ISanque . . . ƒ2230000-:-: L'avance de la Banque eft de 220ocoo-:-: la différence eft donc dc ƒ 30CCO-:-; Mais moyennant cette fomme un Négociant peut faire fur le dépöt de ces Elpeses, des entreprifes équivalente,! aux avances que la Bangw E 2  358 Chap. III. BANQUE connoiue a celui qui entend cette partie, que cette valeur, & peut - être le triplc au-deflus, fe trouvoit en nature ou en Efpeces réelles dans la Banque. Si donc on évalue Partiele feul des Piaftres deftinécs pour le Commerce entre cinq & huit miliions de florins, ce qui n'eft pas exagérer les chofes , cela fera d'abord un article aflèz confidérablc. Qu'on y ajoute les autres Efpeces & les lingots d'or ou d'argent qui fe trouvent en outre en dépöt a la Banque, & enfuite le Capital qui circule continucllement, (car c'eft précifément fur ce capital que repofent tous les viremens qui fe font joumellement fur les livres de la Banque) alors on n'aura pas de peine a fe perfuader, que les fommes dépofécs dans cette Banque doivent être immenfes. C'en eft aflez pour faire comprendre que la bafe fur laquelle repofe cette Banque eft des plus folides, & que cet Etabliflèment mérite a cet égard d'être placé a la tête de toutes les Banques connucs. Tant que de pareils Etabliflemens fe bornent aux objets dont nous venons de parler, ils ne font pas nuifibles au public, mais procurent lui fait. Ce qui cependant ne fe fait, que lorfqu'il y a apparence que ces Efpeces haufleront en prix. Car fi cela n'avoit pas lieu, 1'intérêt d'un quart pour cent qui revient h chaque fix mois & qui fi» mente i 5500 fur les 2200000 florins feroit renchérir les piaftres d'un fol environ k. chaque Epoque de fix mois, ce qui feroit un objet confidérable. De Pareilles entreprifes fe font fouvent non - feulement fur 1'argent, mais aufii fur 1'or. Le courtage des Efpeces eft a j par mif» le*, ce qui eft un petit objet.  D'AMSTERDAM. 69 une utilité réelle, & outre cela une célérité non moins avantageufe au Commerce. A r t 1 c l e. VI. Ayant jufqu'ici fait connoitre comment la Banque a été érigée, & comment elle continue d'opérer fur des principes folides & qui lui font honncur, par la fécurité qu'elle procure aux Négocians, & par 1'utilité qui en réfulte pour Ie Commerce cn général, il nous refte a dire encore un mot de quelques opérations que la Banque pourroit faire, & qu'un Ecrivain moderne paroit approuver. Voici ce que dit 1'Auteur de la Circulation & du crédit, page 14. en parlant de 1'argent dépofé dans la Banque d''Amfterdam. „ Je fuis perfuadé qu'on pourroit, fans altérer „ le crédit, ni violer la bonne foi, le faire circu„ Ier a 1'avantage du Commerce." Voici quelques réflexions, qui, malgré leur briéveté, pourront fervir de réponfe a ce que cet Auteur avance. Par 1'inftitution de cette Banque, il paroit clair, i°. qu'elle ne peut ou qu'elle ne doit jamais faire circuler dans le public au-deiTus de la fomme qui repofe chez elle: a. que fi elle le faifoit, elle courroit rifque d'altérer non - feulement fon crédit, mais qu'elle abuferoit de la bonne foi,& de la confiance qu'on a en elle; & 3°. qu'au lieu de procurer par-la un avantage au Commerce, elle feroit E 3  7o Chap. III. BANQUE au public un tort réel, plus ou moins grand fuivanc les circonftances. II n'y a felon moi que deux cas oü les opérations dont cet Auteur fait mention pourroient être praticables; le premier pourroit avoir lieu avec utilité ; pour Fautre nous ne prétendons pas le juftifier. Lc détail oü nous allons entrer éclaircira mieux la queftion. i°. Suppofons que la Ville ou 1'Etat par quelque circonftance fachcufe fe trouvat dans le cas d'rvoir befoin d'argent, & qu'on ne fut pas a même de le négocicr fans expofer fon crédit, &c. alors il feroit dans 1'ordre, fur-tout lorfqu'il n'en réfulteroit aucun prejudice pour le public , que la Banque fe prêtat a ce befoin prcfïant & momentané par le moyen de fon crédit, & voici comment on pourroit opérer dans un pareil cas. MM. les Commiflaires n'auroient qu'a faire écrire par la Chambre du Dépöt fur le compte de la Ville, ou des Etats, ou fur celui de leurs Tréforiers, une fomme d'un ou de plufieurs millions. Le Capital que la Ville ou 1'Etat reccvroit fur fes comptes, par le moyen du crédit que la Banque lui prêteroit, fe négocieroit dans le public & y circulcroit comme les auircs fommes ou capitaux des particuliers, dont 1'équivalent en valeur a été porté dans la Banque. On conviendra fans peine que le crédit que la  D'A M S T E R D A M. 7t Banque accorderoic, eft une opération qui dans eertains cas pourroit être d'une grande reflöurce. Mais nous conviendrons en même - tems qu'on ne doit y avoir recours que lorfqu'il y a un befoin preilant. Et dans ce cas , fi la Banque fe prête fans exiger aucun profit pour fa part , cllc merite de grands éloges. Mais il n'en feroit pas ainfi , fi la Banque par de pareilles opérations exigeoit un profit des particuliers , & c'efl ce qui nous refie a éclaircir, d'autant plus qu'il paroit que 1'Auteur de l'Ouvrage cité ci-deflus 1'entend dans ce fens-la. a°. Suppofons, par exemple, que la Compagnie des Indes Orientales établie a Amfterdam (34) ait befoin de tems a autre pour peu de tems, ou feulement pour quelques mois, d'un ou de plufieurs millions; ce befoin pourroit facilement être rempli par le moyen du crédit de la Banque. Rien ne feroit plus facile, puifqu'un feul trait de plume fiiffiroit. Ce crédit étant écrit fur le compte de la Compagnie , répandu par elle dans le public, feroit vendu pour de 1'argent comptant, & enfuite rembourfé avec un intérêt a raifon de trois pour cent cn fus pour une année. Le rembourfement fait, les parties fe trouveroient vice-verfa entierement libérées. II paroit a la première vue, qu'une pareilie opc- C3.O Ce corps, compofé & régi par les prindpaux de la Régence d''Aniftsnlam, eft k jufte titre eltiiné d'une folidité a toute épreuve. E 4  ?2 Chap. SL B A N Q Ü E radon ne feroit d'aucun préjudice: i°. vu la'folidité du débiteur, & sP. qu'outre cela il en réfulteroit un profit pour la Banque ou pour la Ville. Mais examinons un inftant, un peu plus a fond, la nature de cette opération. Dans les deux cas que nous venons de fuppofer, ce n'eft pas, comme on voit, un empruntpar forme de nantiffement, c'eft un pret pur & fimple de crédit. Car le contre-poids du papier ou du crédit que la Banque accordé dans ces cas, ne repofe pas fur un gage ou fur un dépöt réel d'or ou d'argent en lingots ou en Efpeces, mais dans la folidité feule du débiteur, c'eft - a - dire, de celui a qui la Banque a prêté fon crédit. J'avoue que dans les cas dont il eft ici queftion, le papier, ou le crédit qu'on prête, eft deftitué d'un fonds réel ou de la repréfentation ordinaire & requife. Cette repréfentation fi effentielle devroit par conféquent fe trouver néceffairement, fuivant 1'inftitution de la Banque, dans un dépöt d'or & d'argent en Efpeces ou en Lingots confervé dans les Ca ffes ou tréfors de la Banque. Car c'eft en conféquence d'un pareil dépöt que les Négocians & les particuliers dirigent toutes leurs opérations, & établiffent la valeur de tout ce qui fait 1'objet du Commerce. Je vais tacher de me faire entendre encore plus clairement. Suppofons par exemple que les fommes ou le Ca-  D'AMSTERDAM. 73 pital de tout 1'or & 1'argent qui fe trouvent dans la Ville $ Amfterdam fe montent avant le pret a vingt cinq millions : ces 25 millions en efpeces monnoyées & en barres exiftent en nature, & ont une influence directe fur tout ce qui entre dans le Commerce. Le pret de la Banque furvient, & fe monte par exemple a cinq millions: voila donc 30 millions qui circulent, & les 5 millions dont le dépöt n'exifte nulle part, influcnt cepcndant fur le prix de nos denrécs, &c. Avant le pret, les vingt-cinq millions en nature régloicnt la valeur des objets qui fe trouvoient dans le Commerce; maintenant que par lc crédit on a porté la maffe a trente millions, cette augmentation influe dans une certainc proportion fur tout ce qui fait 1'objet du Commerce (35). Et felon (353 Pour rendre mon idee aufii intelligible qu'il m'eft poffible, je compare 1'objet dont il eft queftion, a la valeur qu'on affigne a „n moreeau d'argent. Par exemple, une piece d'argent fin du poids de 25 onces, repréfente une valeur quelconque , ou eft équivalente a telle ou telle quantité de marcliandifes &c., cette piece d'argent eft portéc, en y ajontant & onces d'alliage, au poids de 30 onces, fans que pour cela il y ait un feul grain de plus en argent. Avant 1'alliage,la piece de 25 onces étoit réputée équivalente a 20 muids de bied : portée par 1'alliage a 30 onces, j'en achette plus de 20 muids, mais Ie vendeur n'a cependant en réel que 25 onces. C'eft précifément le cas qui a eu lieu dans tous les Etats, lorfque les Souverains ont altéïé la monnoie, comme nous 1'avons démontré dans le Touie I. E 5  74 Chap. III. BANQUE les circonftances, cette opération pourroit être des plus préjudiciables a la fociété (36). La manoeuvre, dont nous venons de faire mention, occafionne encore une autre inconvénicnt,mais qui cependant fe trouve d'une nature un peu différente de celui dont je viens dc fuire mention. Je veux dire que , par le prêt de la Banque, on privé les particuliers ou nos Concitoyens qui ont de 1'argent en Caiflè , de le placer avec avantage ; de forte que cet argent oifif ne trouvant pas a fe placer dans le pays , doit être placé chez 1'Etranger, fouvent au préjudice de 1'Etat, Toutes chofes ég?.les, on ne devroit donc pas acheter davantage pour le poids de 30 que pour le poids de 25 onces. II en eft de même de notre papier, ou du crédit dont nous parions , èt nuelque différence prh, paree que le papier repréfente aufii 1'argent, & c'eft ce qu'on donne encore mieux a entendre par la Note fuivante. (36) Pofons le cas qu'il y ait 2 ou 3 millions h placer, lorfque Ia Banque fait un prêt. Si cet argent fe tiouve fans emploi, & entre les mains de perfonnes entendues dans le Commerce, elles peuvent 1'employer par exemple k 1'achat des grains, lorfque ceux - ci fe trouvent 4 bas prix; ce qui dans ce cas doit naturellement les faire renchérir. J'avettis que je ne limite pas le tantum de ce dérangement, car il opere fi impcrceptiblement qu'il feroit ridicule de le vouloir fixer. II fuflït que je falie fentir que cela fait varier le prix des chofes dans Ie total. Les Evaluations ne font pas toujours fondées ni conduites dans une proportion équivalente au befoin, c'eft fouvent 1'opinion feule qui les regie ou qui y entre pour beaucoup. C'eft une regie générale fondée fur 1'expérience, qu'une plus forte abondance d'argent fait tout renchérir de même que ia rareté d'efpetes produit un eflët tout contraire.  D'AMSTERDAM. 75 & plus fouvent encore au préjudice de notre Commerce. Une pareille manoeuvre ne 'doit donc jamais avoir lieu que dans une derniere néccffité, foit dans le cas d'une rai'eté d'Efpeces parmi les particuliers, ou dans celui d'un discrédit total (37). Le célebre Auteur qui nous a donné occafion de nousétendrc fur cet article,auroit dü obferver que, dans toutes les Sociétés, toutes les valeurs, & même certaines affaires , ont un rapport direct avec la mefure univerfelle, c'eit-a-dire, avec 1'argent (38), & non pas avec le papier ou le crédit, qui ne fert qu'a 1'avilir. Outre la Banque $ Amfterdam, il y en a dans notre Pays encore deux autres, 1'une établie a Middelbourg, & 1'autre a Rotterdam , toutes deux poftérieures a la première. (37) Du tems du discrédit qu'il y eut a Ia fin de l'année 1772 & au conimencemcnt de celle de 1773, les particuliers fermcrent leurs Bourfes, & quelques Negocians fe trouverent fort emharrafTés pour avoir de 1'argent. On n'en pouvoit pas méme obtenir fur des gages folides, tels que des marcliandifes, &c. La Régence tint alors une conduite trés - faire. Elle établir pour un rems une caifie publique, qui fournifibit a un chacun de 1'argent fur une hypotheque de marchandifes. Mais, pour faire une pareille opération, la Régence ne Ce fervit pas de 1'argent de la Banque, mais de celui de la Tréfoterie de la ville. Des que les particuliers virent cette Caifie ouverte,la confiance revint, la tranquülité fe rétablit, & les Négocians s'étant remis en crédit, les affaires reprirent dans peu leurs cours ordinaire, car a peine quelques mois fe furent écoulé*, que la caiflè ne fut plus néceflaire. (38j Voyez Tom. I. Partie II. p. 137 & 1S8.  ?6 Chap. III. BANQUE D'AMSTERDAM. SI j'avois eu les informarions qu'on m'avoit promifes fur celle de Rotterdam, j'en aurois pu dire un mot; mais je doisrenvoyer cet objet a un autre tems, ou bien le laiffer a d'autrès Perfonnes qui voudront bien prendre cette tache fur elles, & qui s'en acquitteront fans doute beaucoup mieux que je ne pourrois le faire.  COMMERCE D'ANGLETERRE. 77 CHAPITRE IV. Abrégé Hiftorique du Commerce de VAngleterre, depuis Jules Cefar jufqu'a Vépoque de la mort de Henry HL (en 1272.) Pour. mettre un peu plus d'ordre & de clarté dans cet Abrégé Hiftorique du Commerce de la Grande-Bretagne depuis Jules Cefar jufques a 1'éreftion de la Banque.de Londres, nous avons partagé tout cet intervalle en deux parties ou Chapitres ; le premier fe trouve par la même raifon .fous-divifé en trois Périodes. Ie. PÉRIODE. Depuis la defcente de Jules Cefar, jufqu'a la fm de la domination des Romains dans la GrandeBretagne. L'Ifle nommée par les Anciens Albio & Brittannia, & que nous nommons aujourd'hui Angleterre ou Grande-Bretagne, a toujours été fertile en produótions utiles & néceüaires; auffi a-t-elle été fréquentée par les Commercans dans les tems même de la plus haute antiquité. Les Phénkiens venoient acheter ou prendre en échange 1'étain de eette Kle pour le vendre enfuke aux autres nations:  78 Chap. IV. COMMERCE les Grecs ayant découvert Ia fource de cette mafchandife, vinrent auffi - bien que les Phéniciens, 1'acheter des Bretons (i). Lorfque Jules Cefar eut parcouru & fomnis toute la Gaule, & qu'il eut forraé le deffein de paflèr dans 1'Ifle de la Grande-Bretagne, il s'adrefla h des Négocians pour avoir des informations fur la nature & le fol du pays (a): mais, comme ceuxci ne fréquentoient gueres que la cöte, tout ce qu'il put apprendre d'eux, fut que les habitans du cöté du midi avoient déja une forme de Gouvernement, & que la population s'y étoit augmentée a mefure que 1'agriculturc y avoit fait des progrès. Les autres habitans de 1'ÏÏle avoient feulement des paturages, fe revêtoient dc peaux de bêtes, habitoient ou dans les forets ou dans des lieux marécageux, & changeoient avec leurs troupeaux aifément d'habitation, pour aller chercher des paturages ailleurs (3). Cette information n'avoit rien de bien attrayant pour Jules Cefar ; mais ce guerrier, enflammé du défir de faire une nouvelle conquête, vint a bout,dans deux defcentes en cette Ifle, de foumettre Ia Bretagne a Ia République Romaine. Cette foumiffion fut cependant plus apparente que O) Voyez 1'Abrégé de Phiftoire d'Jngleterre de M. Rapin de Thoïras, Introduélion page 5. (2) Commentaires de Cesar Tome I. Liv. IV. (3} Hiftoiie £/Ingieten» t par M. David IIume^ Edition üi-12. T. I. p. 5.  D'ANGLETERRE. 79 réelle. Cefar après un court féjour (4) s'en retourna dans les Gaules avec toutes fes troupes & fes vaifleaux (5). Soit que FEmpereur Augufte ne confidérat pas cette conquête comme étant de quelques importance,foit que les Bretons ne portaflent qu'a regretle joug des Romains, toujours paroit-il que ces derniers avoient 4oannées après, recouvré leur ancienne libertc (6). Ce fut a cette époque que FEmpereur Claude, excité par les Confeils d'un certain Serieus, entreprit d'en faire de nouveau la conquête, & d'y placer des Gouverneurs. Agrieola entr'autres gouverna les Bretons avec beaucoup de gloire & de fagefle pendant les regnes de Vefpafien,óe Titus & de Domitien. II feut par des voies douces rendre a quelques -uns leurs chaines plus fupportablcs. Mais il s'en falloit bien que la Nation entiere eüt la même docilité. II y en eut parmi eux qui aimerent mieutf tout abandonner, que de fe foumettre au joug (7). Ils fe retirerent vers le nord parmi les Picles & les Scotes ou Ecoffois, peuples alors entiérement féroces & Barbares, & qui avoient toujours été le fléau des Bretons. (4) Jules Ces ar fit fa première defcente l'an de Rome 697, ou 55 ans avant 1'Ere Chrétienne, & la feconde l'année fuivante, & pafia 1'hyver de la fin de cette année dans les Gaules. Voyez Hift. Romaine, par M. Rollin T. XII & XUt. C5) IIume, T. I. p. 13. (fT) Rapin T. I. p. 2t.  8o Chap. IV. COMMERCE On prétend que les Piétes font venus originairement de la Scythie,ou plutötde la Scandinavië,& qu'après avoir débarqué dans YHibernie (Mande) ils y avoient féjourné quelque tems, & qu'ils s'établirent emuite dans la haute - Bretagne (8). Les Piétes & les Ecoffois étoient continuellement en guerre avec les Bretons. Sous les Empereurs Honorius, Confïance & Théodofe le Jeune, les Romains foutinrent les Bretons contre ces Barbares, jufqu'au commencement du Vrae. Siècle. Mais les Romains fe trouvant obligés d'employer ailleurs les troupes qu'ils avoient en Angleterre, 1'Empereur Honorius par un acte en forme rendit en 410 la liberté aux Bretons (9). Les peuples du Nord commencerent derechef a inquiéter les Bretons,lefquels ayant imploré 1'affiftance des Romains, obtinrent, après les viftoires remportées fur les Vifigots & les Bourguignons fous Valentinien III, un renfort d'une légion, qui les mit en état de repoulTer leurs ennemis, mais ils ne jouirent pas longtems de ce renfort; car, dès que la fameufe muraille de 1'Empereur Sévere eut été reparée, le général Romain leur confeilla de fe défendre euxmêmes, après quoi les Romains (en 426 ou 427) quitterent pour toujours la Grande Bretagne (10). (8) Voyez 1'Art de Véïifier les dates au mot Angleterre. (9) Rapin T. I. p. 51. Ctó) Idem p. 51 & 52.  D'ANGLETERRE. 81 II eft affez probable que le féjour des Romains avoit de plus en plus civilifé les Bretons, & leur avoit donné 1'idée d'un gouvernement plus régulier. Toujours eft - il bien certain que peu de tems après le départ des Romains, les Bretons fe trouverent avoir fait de tels progrès dans les arts, & leurs moeurs avoient été tellement civilifées, qu'ils' s'étoient bati vingt-huit Villes ou Bourgs confidérables, fans comptcr un grand nombre de Villages & de Maifons de Campagne (n). Dans les beaux jours de la République, les Romains auroient feu tirer un grand avantage d'une Ifle telle que celle de la Grande Bretagne, que la décadence de 1'Empire les forca d'abandonner. On fait que dans les premiers Siecles de Rome, non - feulement 1'art militaire, mais auffi 1'agriculture fut 1'occupation favorite des Romains: ce fut de cetté fource que découlercnt leur grandeur & 1'extenfion de leur Puifïïmce. Dans les tems méme de leurs conquêtes les plus glorieufes ils avoient confervé les maximes trés - falutaires de leurs ayeux, pour procurer 1'augmention de la population: les différentes Colonies qu'ils établirent en font une preuve évidente. Londres fous le regne de Néron con« tenoit déja une Colonie de fept mille hommes- pref- OO Homi T. I. p. f,3; Les Bretons durent k leur Commefcê^ avec les Romains , 1'art d'écrire & celui de chiffrer & de calcnlet cït,' Voyez Hifi. tTEcefe par M. G. R o-n lï rt'S-o T. I. f>. 3. Terne IL Part. L F  82 Chap. IV. COMMERCE que tous Romains (12). Ces Colons, experts dans le labour des Terres, exercoient en outre des arts utiles & néceflaires a la vie civilc. On prétend que ce furent les Romains qui apprirent entr'autres aux Bretons 1'art de faire des étoffes de laine & de lin (13). Au refte on fait que le bied (14), Pér tain (15), le plomb & les chevaux (16), étoient les principaux articles contre lefquels les Bretons échangoient alors d'autrès marcliandifes, ou par le moyen defquels ils fe procuroicnt de 1'argent. Car je penfe que c'eft: des Romains qu'ils apprirent a fe fervir de monnoye. Dans un des articles de la paix que les Bretons (12) Hu me T. I. y. 18, avant l'an 78. ' (13) Anders on, Chron. Deduct. of Comm. T. I. Liv. II. (14) L'an 358,lorfque l'année Romaine fous Julien fe trouva manquer de vivres aux environs du lieu oü le Rhin fe jctte dans 1'océan, ce général Romain fit abattre des forêts , & fit conitruire des Barques un peu plus grandes que nos Barques de pêcheurs, au nombre d'environ huit eens, lefquelles furent fucceflivement envoyées dans la Brcfógwpoury être chargées de grains. II paroit que ces bathnens , dans plufieurs voyages qu'ils firent, en rapporterent une fi grande quantité de bied, que non - feulemeut l'année en fut largement fournie, mais on en remplit en outre les magazins qu'on avoit fait conftruire le long du Rhin , & les habitans des environs en furent nourris & mis en état de Temer de nouveau leurs terres, que les Allemans avoient dévafiées. Voyez Hijl. de la Patrie, T. I. p. 246. (15) Pour 1'Etain il a été conftamment regardé avant le XlIIme. Siècle comme une produétion que 1'Angleterre fournifibit feule, & notamment les Provinces de Cornouaille, & de Devonshire. Dans ce même fiecle on en découvrit en Allemagne & furtout en Bohème;. Voyez Anderson T. I. k l'an 1241. (iö) Andïrïon, T. I. Liv» II.  D'ANGLETERRE. 83 firent après le départ des Romains avec les Piétes & les Ecoflöis, il fut ffipulé que les premiers devoient payer une fomme confidérable Qr 1'Ifle ne produifant alors (18; ni or ni argent, quelle qu'ait été 1'origine de leur monnoye, il faut néceffairement que ces métaux y fuflènt venus d'ailleurs. Quoi qu'il en foit, les Bretons poffédoient dans le cinquieme Siècle de grandes Tichelles, & leur pays étoit trés -bien cultivé. Cela paroit entr'autres par le rapport que les Saxons firent a leurs compatriotes de la grande fertilité du Pays, & des richeflès qu'ils y avoient découvertes a leur premiere defcente, ainfi que nous 1'allons voir. IIe. période. Depuis environ l'an 448. jusqu'a l'année 1066. Les Bretons défunis par des difputes théologiques (19) & menacés d'une nouvelle invafion de la part des Barbares, fuivirent le Confeil de Forti- O?) Rapin, T. I. p. 53. 08) Dans le XlIIme. Siècle fous le regne du Comte Florent K on tira de 1'argent de 1''Angleterre pour en fabriquer de la monnoye. Cet argent fut tiré des Mines de Devonshire. Voyez Hifi. de la Patrie T. QL p. ai. Et Afta pub!. Angl. T. II. pars IV. p. 50. (19) Voyez Hume T. L p. 33 & 34. Rapin T. I. Etat de 1'Eglife Bretonne. Le Pelagianifme y fit des progrès. Pelage étoit né en Angleterre, & Agricola fon difciple y avoit répandu fa doctrine. F a  84 Chap. IV. COMMERCE gern Chef ou Prince du Dumnonium, en faifanc venir a leur fecours des Saxons, peuples de la bajjk Germanie, en qualité de troupes auxiliaires (20). Ces troupes, au nombre de feize eens hommes embarqués fur trois Vaiffeaux fous la conduite de llengift & dc Ilorfa (21), étant arrivé-es en 449 & 450, repoufferent conjointement avec les Bretons, les Piétes & les Ecoffois. Les Bretons fe trouvant pour lors a leur aife, crurent qu'avec la paix ila alloknt voir renaitre parmi eux 1'état de profpérité dont ils avoient joui fous la domination des Romains; mais les Saxons, enchantés de la beauté du» climat, des richeffes & de la fertilité de la Grande Bretagne (22), confidérant en outre avec quelle facilité ils avoient remporté la victoire , voyant d'ailleurs les vices & la lacheté de Vortigem chef dis Bretons, formerent le deffein d'en faire la conquête pour eux-mêmes, & demanderent a leurs compatriotes d'outre-mer un nouveau renfort de cinq mille hommes (23.). Dès que les Bretons vi- Oo) Hume T. I. p. 34- & Rap in T. I. p. 59- Lorfque les Bretons envoyerent demander du lécours aux Saxons, ceux-ci occupoient déja la Saxe, la mfiphalie, la Frife tkc. C2.1) Hume T. I. p. 42. Schotanus dans fon llijloire des Frifons. (Voyez Liv. I. p. 39) rapporte que llengifl & Ilorfa, felon quelques Hiftoriens, étoient Frifons d'origine, &qu'au fecond embarquement plufieurs Frifons avec leurs fepimes & leurs. Enfans. s?embarquerent pour aller s'établir en Angleterre, & non pour y faire-Ja guerce. ,(22) Humb T. I, p. 43. Rapin T. I.„Liv. LU (a§) Idem.  D'ANGLETERRE. fe§ rent arriver ces nouveaux hötcs (un ah après les premiers) fur 17 Vaifleaux, ils comprirent bientöt, qu'au lieu de s'être procuré des alliés, ils s'étoicnt donné des Maitres. Les Saxons, après avoir chicané les Bretons fur le payement des fubfides & la livraifon des denrées (24), leverent le mafque, & fe joignirent aux pcuples feptentrionaux de 1'Ifle (25): enforte que, de proteéteurs qu'ils avoient été ci - devant, ils devinrent les plus cruels ennemis & enfuite les deftruéteurs des Bretons (26.) Entre les années 450 & 475, les Saxons renforcés continuellement par des troupes fraiches qu'ils reccvoient de la Germanie, & toujours en guerre avec les Bretons, parvinrent cn 473 a faire une paix, par la quelle il fut convenu que chacun des deux partis garderoit ce dont il étoit cn pofleflion. Hengifl alors feul Général des Saxons peu content de cette pafx, obtint par la perfidie une grande étendue de pays au voifinage de Kent, dont le Gouvernement lui fut déféré (27). ïl paroit que l'an 476, Ambroife, Breton de naiffance, mais Romain d'origine, avoit été reconnu chef de fes compatriotes. Par fon courage il vint (24) Hume p. 44. (25) Idem. (26) Idem . . 44, 45 &c. (27) R Ap 1N T. I. Liv. II. & Hume T. I. p. 45 & Cuiv. Horfit paroit avoir été tué a la ba taille üEglcsford dans le pays de Kent environ l'année 455. F 3  86 Chap. IV. COMMERCE a bout de réunir les Bretons, & les foutint même pendant un certain tems contre les nouvelles attaques des Saxons (28). La fin du Vrae. & le commencement du VIme. Siècle fe paflerent en guerres & en incurfions réciproques ; car le fuccès de Hengift avoit excité Favidité d'autrès habitans du Nord de la Germanie. Ces différens eflaims font aflèz connus fous les noms de Saxons, SAnglois & de Jntes. D'après ce court expofé on peut juger aifément que la puiflance des naturels du pays dut aller cn déclinant, & celle des Etrangcrs en croifiant. Les revers que les premiers Saxons efïïryerent, particulierement dans le cours du VIrae. Siècle, ont certainement fait prévaloir le nom dAnglois ou AngloSaxons, fur celui de Saxons (29). Les Bretons au milieu du VIme- Siècle ne pofiedoient que trèspeu de pays, qui même fe trouva partagé entre plufieurs Tyrans qui prirent le titre de Rois; de forte que les Bretons a la fin fe trouverent entierement confondus avec les peuples des Nations qui les avoient fubjugués (30). 08) HdmeT. I. p.47. & R ap 1 n T. I. Liv. IL (29) 11 paroit que dans le Vme. Siècle les Saxons, les Frifons, les Angles & les Jutlandois formoient quatre Nations diftinctes, & occupoient difTérens territoires ou diftricts , mais que dans la fuite elles ont été confondues enfemble. Voyez Dict. Encyrt. aux mots Anglen tk. Saxon. (30) R A P 1 N T. I. p. 97.  D' ANGLETERRE. 87 Enfin, après un Siècle & demi de troubles, on vit s'élever 1'Heptarchic ou les fept Royaumes des Anglo - Saxons: ces Royaumes ne formoient pourtant h. proprement parler qu'un même corps & un feul Etat. Les habitans établirent une forte de Gouvernement prefque femblable a celui fous lequcl ils avoient vécu en Allemagne, & dont la loi fondamentale portoit 1'obligation de fe fccourir mutuellement, & d'agir dc concert pour le bien commun. Ils fe choifirent un chef panni eux, auquel ils accorderent certaines prérogatives. Celui-ci venant a mourir, on en élifoit un autre d'un commun confentcment (31). Quoique chaque Royaume eut un Roi ou un chef, on tenoit une afièmbléc générale des principaux membres des fept Royaumes. Cette aflemblée portoit le nom de Wüteriagemot ou de Confeil général. Mais cela n'empêchoit pas que chaque Royaume n'eüt fon affèmblée particuliere, & ne fut Souverain chez lui (32). Ce Gouvernement fi fage eut le fort ordinaire dc tous les Etats. L'ambition parvint a y mettre le trouble & la défunion. On ne vit alors que des guerres prefque continuelles parmi les grands & les principaux de la (31) R a p 1 n T. I. p. p8j 110,, m & 112. (32) Idem . . Liv. III. p. 113, & Hume T. II. p. 5, 10 &c. Le mot W'Menagemot fignifie propvement AJfemMde des Sages. Les Eyéaues, les Abbés, _& quelcuiefois les Abbefes en compofoient une paitie elTentielle. F4  86 Chap. IV. COMMERCE Nation, qui durerent jufqu'a l'année 828 , ^.1 Egbert fut reconnu premier & feul Roi de ce qu'on appelle aujourd'hui Angleterre. LTIeptarchie prit fin, & le Gouvernement devint purement Monarchique (33). Quoiqu'un pareil Gouvernement eut de grands ayantages, pour mettre ie pays a 1'abri de nouvelles incurfions, les Danois & les Normands qui depuis long - tems avoient déja fait le métier de pirates, fe montrercnt en plus grand nombre que ci - devant fur les cötes de VAngleterre, exercerent les ravages les plus cruels, & finirent par réduire les Anglois a la plus grande mifere (34). Pendant le regne SEthelwolph en 851 ils firent une fameufe defcente avec trois eens cinquante Vaiffeaux (c'étoient fans doute plutöt des barques que des navires de quelqu'importance) pour fecourir une partie de leurs compatriotes qui avoient hiverné pour la première fois en Angleterre. Ils brülerent les Villes de Londres & de Cantorbery (35). Les regnes fuivans fe reflentirent auffi des ravages de cc pcuple alors féroce. Ce ne fut que fous le fameux regne dAlfred qu'on vint a bout de les dompter, & de preferke des bornes a leurs déprédations ($6). QiS) Rapin T. I. Liv. III. Hume T. I. p. 131. (3i) Idem Hume T. I. p. 145 & fuiv. (3S) Hume T. I. p. 154. (36; Idem .... 197 & 201,  D'ANGLETERRE. 89 Mais les Rois qui fuccedercnt a Athelfian étoient li vicieux & 11 peu propres a leur tenir tête (37), qu'a la fin les Danois & les Normands devinrent facilement les maïtres de Y Angleterre, foit par la voic des armes, foit par les allianccs qu'ils y contraéterent (38). Nous remarquerons ici avec les Hiftoriens Anglois que le regne éCAlfred fait époque dans les annales dc la Nation Britannique, non-feulement par rapport au Gouvernement en général, mais auffi relativement a la matiere que nous traitons dans cet ouvrage: on me pardonnera volontiers fi je m'y arrête un peu. Ce fage Princc, que les Hiftoriens ont nornmé a jufle titre le plus grand Roi qu'il y cüt dans le IXme. Siècle après Charlemagne en Europe (39), fit embrafièr a une partie des Danois la Religion Chrétienne, & fit fervir fes nouveaux fujets a 1'avantage de tout fon Royaume , en forcant ceux d'cntr'eux qui étoient les plus mutins a abandonner le pays & a fe retirer ailleurs (40). B rebatit les villes ruinées (41), & fut Ie premier (37) Hume T. I. p. 238 & fuivantes. (38) Le célebre Guillaume, dit Ie Conquérant, étoit parentSEdouari III, nis naturel de Robert Duc de Nonnandie & de Harkte fijle d'un Taneur de Falaife. Voyez H u m b T. I. p. 381 & fuiv. (39) Hume T. L p. 218. (40) Rapin T. I. p. 289. & Hume p. 194. (40 Les Villes ruinées, & particuliérement Londres détruite par les Danois Tous le regne A'Ethelmlph paroiflent avoir été rebaties en SSo, Voyez Hums T. L p. 187. F 5  9o Chap. IV. COMMERCE qui établie une marine, qu'on doit regarder comme la défenfe naturelle d'une Ifle (42). II fe mit a couvert de nouvelles invafions, établit infenfiblement par fon aétivité une jufiice réguliere, fit la divifion en Counties &c. de toute VAngleterre (43), encouragea le Commerce (44) , les Arts. méchaniques & les fciences (45). Entr'autres ouvrages dignes de lui, & même en quelque facon au-deflus du Siècle oü il vivoit, il fit faire la Defcription de toute XAngleterre; Defcription qui ne fut fuivie & rédigée que trois Siecles après, mais dont il eut la gloire d'avoir concu le deflein (46). Auffi afa mort obtint-il pour prix de fes grands travaux, le titre bien mérité de Grand, & celui de Fondateur de la Monarchie Angloife (47). Car ce fut lui qui pen- (42) „ On avoit négligé la marine jufqu'au regne SAlfred : il 3, au»menta Ie nombre & perfeétionna la conftruction des Vaifleaux ,, de fon Royaume, encouragea fes fujets fi s'appliquer & 1'art de Ia „ Navigation, & a celui de combattre fur mer. — — Une flotte „ de 120 vaifleaux de guerre protegeoit les cötes. Ils étoient bien fournis d'artillcrie & d'habiles matelots Frifons ou Anglois j car ce , Prince fuppléoit au défaut de fes propres fujets en engageant des étrangers a fon fervice &c:" Voyez Hume T. I. p. 188 & 189. (43) Voyez Rapin T. I. Liv. IV. & Hume T. I. p. 202 &c. Alfrcd divifa toute 1''Angleterre en Counties, ou Provinces; ces Provinces fe fubdivifoient encore en Hundreds ou Cantons, & ces Cantons, en Thylhings, ou dizaines de families. (44) Hume T. I. p. 217. & Ander son i l'an £85, 886, & 900. (45) Hume T. I. p. 213 &c. & Rapin T. I. Liv. IV. O) II u m e T. II. p. l8l. (47) H u m s T. 1. P. 198.  D'ANGLETE R|R E. 91 dant fon regne rétablit 1'ordre des Loix, & fema le germe de cette précieufe liberté, dont les Anglois jouifTent aujourd'hui, & dont ils font ou parohTent fi jaloux (48). Don précieux, lorfque cette liberté elf. fondée fur un efprit d'ordre & de défintéreiTèment, & qu'elle eft uniquement dirigée vers le bien commun. Le Regne dAthclftan nous fournit, entr'autres, une loi remarquable pour 1'encouragement du Commerce. Elle portoit que tout Négociant, qui auroit entrepris a fes frais deux longs voyages fur mer, feroit ennobli (49). La ville de Londres, dans laquelle (depuis fon origine) a toujours réfidé le centre du Commerce de Y Angleterre, étoit déja connue avant le Regne dAlfred comme une place marchande. Après que les Danois 1'eurent ruinée & brulée en 839, ce Prince la rebatit en 886 ,• les maifons étoient alors, ainfi que bien des Siecles après, toutes conItruites de bois. Alfred fut le premier qui y batit un Hotel ou un Palais de Briques ou de pierres (50). On peut voir ce qu'ANDERson (48) Hume T. I. p. 205. & fuiv. & fi la page 211. „ Alfred eut toujours les égards les plus facrés pour Ia liberté „ de fon peuple; & le Tellament de ce Prince eft un monument „ précieux de fa fagon de penfer fur cet article 5 il y dit expreffé. „ ment qu';7 feroit jufte que les Anglois pujfent toujours rejler aujfi „ libres que leurs propres penfées. " (49) Idem. p. 236. (50) A hderson a l'an 872.  92 Chap. IV. COMMERCE rapporte du Commerce de cette Ville pendant les .années 604 (51) 728 (52) , & 1041 (53). Avant la conquête de Guillaume I. elle avoit déja un grand pont de bois fur la Tamife (54)- On trouve dans la Note (55) les péagcs ou droits qui (5Ü ïïeda nomme la ville de Londres, fous l'an 604 > une place de marché pour beaucoup de Nations qui venoient s'y rendre fréquentment. Voyez Anderson, k 1'an 604. C52) Anderson, k l'an 728. C54) iörtf. (£5, i°- Un petit Batiment devoit payer en anivant k Bellinsgate au port de Londres un demi - denier de péage. 2°. S'il étoit grand & portam voile, un denier. 3°. Pour une Ourque QKcel ou Hulk) gros Vaiifeau plus long &large que les autres quatre deniers. 40 .Un Batiment chargé de bois, devoit donner (one Piece) une piece pour péage. 5°. Un Bateau chargé de poiflbn payoit (one lialfpenny) un demi denier; un autre plus grand un denier. 6C. Ceux de Rotten chargés de vin ou de Grampois, comme auiB ceux de Flandre & de Ponthieu, ainfi que des auties ports de Norwttndie öi de France, étoient dans 1'ufage d'ouvrir la marchandife ou de la mettre k découvert pour la libérer du péage. Ceux qui venoient de Licge, & d'autrès places , débaloient leurs marcliandifes & en payoient le péage. Les fujets de 1'Empereur (c'elt - k - dire les Allemands établis alors ou après dans le Steelyard) étoient plus favorifés par les Loix ; ils pouvoient vendre dans leurs vaifleaux : mais il ne leur étoit pas permis de faire le Monopole au préjudice des Citpyens de Londres. lis devoient payer le péage, & outre cela k Noêl deux pieces de drap gris, & une en brun, avec dix livres de poivre, cinq paires de gands, & deux Barils de Vinaigte, k Paques tout amant. 7 • Le pain devoit payer un droit pendant trois jours de la fetnaine, favoir le Dimanche, le mardi & le Jeudi. Chaque Panier de poules en devoit dormer une. Le Beurre & le ftomage qui entroient  D'ANGLETERRE. 93 fe pereevoient a Londres avant la fin du dixieme Siècle; & nous avons cru qu'il ne feroit pas inuti- quinze jours avant Noll, un denier, & huit jours après Noël aufli un denier. Voyez Anderson k l'an 979. Voici les prix de quelques articles. En 719. Dans les Loix SIna , Roi de Wcffex, publiées dans 1'intei valle des années 712 & 727 11 y eft dit qu'une Brebis avec Ton agneau valoit un Scheling, juf. ques k quinze jours après paques. Probablement ces Beftiaux devenoient k meilleut marché après ce tems. Voyez Anderson. La Toilön d'une Brebis, dit H u m E T. II. p. 69, s'eftimoit a deus cinquiemes de Ia valeur de 1'animal entier. Un cheval de parade valoit, en 965, dix Schelings (Hume die 12 Sch.), un acre de Terre n'en valoit qu'un ; & le Hyde de Terre contenant 120 acres s'achetoit pour cent Schelings. Voyez Anderson. Entre les Xme. & Xlme. Siecles, dit Hume, Ednoth acheta une hyde de terre prés de 118 Schelings. Cétoit un peu plus d'un Scheling 1'acrc, ce qui paroit en efFet avoir été le prix ordinaire, comme d'autrès Auteurs nous 1'apprennent. Un homme étoit évalué a trots livres , ce qui prouve qu'il étoit eftimé en général le plus. Voyez Hume T. II. p. 70. En 979, il fe fit un traité entre les Commiflaires du Roi 4thelflc.n & ceux du Pays deGrt//^,au fujet des beftiaux égarés, & aufii concernant le Commerce &c. Par ce traité le prix d'un cheval étoit taxé ït trente Schelings, un bceuf k trente pences ou pennys, une vache a 24 pences,un mouton k un Scheling, une chevre & deux pences'. II paroit par, lk, dit Anderson, qu'un cheval valoit alors cinq boeufs j car 5 pences ou deniers faifoient dans ce tems-Ik un Scheling. Un Bceuf fe vendoit environ l'an Mille, deux Schelings fix deniers &c. Sous le Regne SEdouard le Confefleur en 1043, il y ent Ia plus horrible famine dont on eüt jamais entendu parler. Autant qu'un cheval pouvoit porter de Froment c'eft - k - dire, un quarteron de huit boifleaux, fe vendit jufqu'a foixante pennys, & le boiflèau7£. Or H le prix ordinaire étoit un Scheling par quarteron, ce qui eft probahle (dit Anderson) on vivoit alors dix fois k meilleur marché' qu'k préfent. Voyez Anderson k l'an 1043. Cet Auteur cite xmeCfironique précicufe de 1'Evffue d"Ely-, FlïETïïCOB &C. Voye? tncore Hume ï. II. p. 69 &• fuiv.  94 Chap. IV. COMMERCE le, dans un ouvrage tel que celui - ci, d'y joindre les prix de quelques ardcles de première néceffité pour les befoins de la vie, & que quelques Auteurs ont eu foin de nous conferver. On concevra fans peine que pendant les ravages des peuples du Nord, & pendant les troubles & la confufion qui regnerent dans rille, le Commerce de la Grande-Bretagne étoit pour ainfi dire nul: cependant pour fe formcr maintenant une idéé du progrès que l'induftrie & le Commerce, foit par le moyen de l'agriculture ou des productions du fol, avoient fait dans la Grande-Bretagne depuis le regne SEgbert, jufqu'au tems de la Conquête du Duc de Nor mandie , on n'a qu'a confidérer a quel degré d'aifance , de profpérité & de population le peuple Anglois étoit déja parvenu avant la fin du XIme. Siècle. On voit par exemple : i°. Les grandes prcrogatives & les gros revcnus dont jouifibient les Eccléfiafiiques, ainfi que les richefles & les privileges dont ils fe trouvercnt en pofieffion a 1'arrivée de Guillaume I. dit le Conquérant, ce qui démontre la profpérité dont jouiffoit dès lors ce pays (56). 20. Les fommes immenfes qu'ont du payer aux Danois pendant le cours de leurs pyrateries, & par- (56) Hume T. I. p. 53, i°3. 109, 159 217, 242. & T. III. p. 401. Voyez encore Rapin & Anderson.  D'A N GLETERRE. 95 ticuliérement depuis l'an 993 jufques & compris l'an 1017, dont le total fe montoit a 209 mille livres pefant d'argent (chacune de douze onces) , prouvént encore que VAngleterre poffédoit de grandes richeflès (57). Le droit du Danegeld (d'un fcheling par chaque hyde de Terre) qui fut établi pendant ces calamités, & qui continua pendant 38 années confécutives, eft auffi une preuve que les propriétaires des Terres pouvoient fupporter cette charge (58). 3°. Pour ce qui regarde Ia Population, il n'y a qua confidérer que peu de tems avant la conquête on comptoit dans le Royaume 243600 hy- (57) Voici les difFérentes Epoques dans lefquelles les Danois ont levé des contributions en argent: En l'an 993. 16000 Livres. 998. 24000. 1007. 86000. 1017. 83000. 209000. En fuppofant que 1'argent qui avoit cours 'alors dans le public fut du titre dont les Ecus d'argent fe trouvent aujourd'hui, cette fomme auroit fait au cours aéhiel 632225. Livres Sterlings. Voyez le Tom. I feconde Partie de mon ouvrage p. 160, oii une Livre de 12 onces eft évaluée i-. L. 3. 7 J. Outre la dite fomme de 209 mille livres, les Danois en ont probablement levé encore d'autrès, car en 981, ils avoient déjk eu 10000 Liv. Voyez Hume T. L p. 291» (58) Voyez Hume T. II. p. 68. Outre Ie Danegeld qui eut lieu pendant ces troubles, il y avoit encore une autrc taxe, qui fervit pour la fubfiltance de la Hotte. Voyez Anderson a l'an 1012 & 1050. En 1050 Edouard U Confefeur remit le Danegeld & caufe d'une grande famine. Le Danegeld a été aifez long-tems en ufage. Voyez Humb T. III. p. 373.  96 Chap. IV. COMMERCE des de Terres; or cinq hydes devant fournir un homme, il s'enfuit que leurs forces milicaires fe montoient a 48720 hommes, dans les tems ordinaires, car dans les cas extraordinaires on pouvoit mettre un plus grand nombre de troupes fur pied (50). Et 40. Selon les calculs que les Anglois font au fujet de la population dc VAngleterre avant la defcente de Guillaume le Conquérant, ils 1'évaluent aflèz généralement a un tiers de ce qu'elle poffede aujourd'hui d'habitans (60). M. Hume, entrant dans un grand détail fur les évaluations des Efpeces anciennes, s'exprime ainfi: (Voyez Hiftoire $ Angleterre T. II. p. 74). „ En „ admettant qu'aujourd'hui VAngleterre a au moins cinq fois plus d'indufirie , & trois fois „ plus d'habitans qu'elle n'en avoit au tems de la „ conquête & quelques regnes après, nous con„ clurons de cette fuppofition , & de toutes les „ circonftances combinées enfemble, que chaque „ fomme (59; Hume T. II. P- 65 & 67. Cet Auteur & Anderson évaluent chaque Hyde de terre a 120 acres, Hume T. I. p. 213. a la note C. dit: deux Hydes de terres font environ quatre arpens ,■ melure de France. Une hyde contient de quoi occuper une charue. (60) Voyez Anderson. — Le Chevalicr Pet- ty évaluoic (en l69°0 )e nombre des habitans de \'Angleterre a fix millions. m. Davenant autre Auteur politique le réduit k 5,545000 ames. Voyez 1'Encyclopédie B'Tyerdua au mot Arithmétiaue puülique. Mais'il me femble que ces deux Auteurs font monter ce nombre u»peu trop haut.  D1 A N G L E T E R R È. 9? „ fomme donc parient les Hiftoriens, doit être ,, regardée, comme fi aujourd'hui elle étoit mul„ tipliée plus dc cent fois au dcfius d'une fom„ me de la même dénomination ". Si cette fuppofition n'a pas été fake fans quelque fondement de la part d'un Auteur aufii phüofophe que 1'étoit M. Hume, il en faut conclure que la différence de la population en Angleterre depuis la conquête, fe trouve être comme de i a 3. & 1'induftrie comme de 1 a 5. & même plus. Et que par conféquent la progrefiion de la population ne va pas de pair avec la progrefiion de 1'induftrie. Cette différence doit néceffairement avoir cu fa caufe phyfique. Mais oü réfide - t'elle ? Une recherche auffi curieufe & aufii importante ne feroit pas indigne d'un Anglois qui chérit fa patrie & fes concitoyens. IIIn:e. période. qui commencé au tems dè la descente de Guillaume le conquérant , jüsqu'a la fin dü Regne de Henri III. ou a - peu - prés vers l'é- poque que la chambre des communes fut érigée, c'est-a-dire jusqu'a l'an I265. M. Hume rapporte très-judiciculcment, que „ 1'Angleterre avant que le Duc dc Normandie en „ fit la conquête étoit léparée du refte du monde, Tomc II. Part. I. G  93 Chap. IV. COMMERCE „ amant par fa politique , que par fa fituation. „ Excepté les invafions des Danois , les Anglois confmés che« eux n'avoient ni enncmis ni alliés „ fur lc continent (61)". Les confédérations entre les Puifiances de 1'Europc étoient alors inconnues. La théorie des affaires politiques entre les mémes Puifiances, étoit beaucoup moins compliquée & moins cnvcloppée qu'a - préfent (6a). L'intérieur des différents Etats & leurs forcesrcfpectivesn'étoient prefque pas connus. La Cour dc Rome avoit dans ces tems-la la plus grande influence fur toutes les affaires: & c'étoit elle qui les dirigeoitfelon fon bon plaifir, & toujours a fon avantage. L'arc de la Navigation n'étoit pas encore né, car a parler cxaétement on. ne peut point donner lc nom dart aux voyages des anciens Grecs, ni a ceux des Italiens du moyen age. L'Etat Militaire & les Finances fe trouvoient fur un tout autre pied qu'aujourd'hui. Les Barons, ou les grands Vaffaux de chaque Etat, étoient des petits Souverains qui fouvent diétoient la loi h. leur Roi. On étoit alors uniquement occupé^a obfei-ver ce qui fe pafToit dans fon propre pays. II n'y avoit point de Miniflres &c. réfidant dans les Cours Etrangeres. La place dc premier Miniftre, aujour- C60 Hume T. II. p. $$6. ' C62) Hume T. II. p. 3_S+ &=■  D* ANGLETERRE. 99 tf hui fi importante dans les Monarchies, étoit alors enticremcnt inconnue (63). Le Commerce du cöté dc 1'occident & dans le Nord de 1'Europe n'avoit pas encore lié les Nations. Tel étoit en raccourci 1'état des chofes lorfqu'après la mort tVEdouard demicr Roi de la race Saxonne, & après la défaite de Harold, Guillaume Duc de Normandie fit la conquête de 1'Angieterre en 1066 (64). Donnons maintenant fuccinétcment une idéc générale du progrès que les Anglois ont fait pendant cette derniere période. A la conquête des Normands les Bourgs n'étoient prefque que des hamaux, leurs habitans vivoienc dans une entiere dépendance du Roi & des grands Seigneurs, & leur état étoit un honnête efclavage: ce n'étoit réellcment qu'un nombre d'artifans aflervis dans une baflè dépendance. Les villes étoient en petit nombre & mal peuplées. La licence regnoit au plus haut dégré dans Londres même (65). (6.0 Hume T. V. p. 35. (64) Cette entrepriTe avoit été faite par une flotte de trois mille vaifleaux tant grands que petits & une armee de 60 mille hommes, tous gens cho'Iis & bien armés. Le camp formoit le fpeclacle le plus fupeibe & le plus martial. Voyez Hume T. I. p. 4.9 Les fraix pour cette espédition avoient été fournis par les plus ïiches particuliers de Ia Province de Normamüe. Car la pluspart des membres des Etats de la Provir.ce avoient montré de la répugnance !> accorder des fubfides extfaordfaaires. Voyez p. 417. (65) Hume T. III. p. 94 & 353. G a  ioo Chap. IV. C O M M E R C E Les Barons & la Noblcflè du fecond ordre ne connoiffant que 1'abondance & PhöfpitaKté ruftique, ne protégcoient d'autrès profeffions que celles des armes, le feul art qui fut en vogue parmi eux dans ces fiecles. Si une perfonnc, foit par fon induftrie ou par fon Commerce, parvenoit a faire quelque fortune , il devenoit ordinairemcnt la viétime de 1'envie & de la cupidité des nobles militants {66). B paroit que fous le regne dc Henry II. la population de Londres fe trouvoit monter a 40 mille habitans (67). A la fin du XII Siècle, & pendant lc cours du XIIIme. cette ville doit avoir été embellie & s'ètre aggrandie confidérablement (68). (66) Hum f. T UI. p. 339. (67) Robbertsön Note XVIII. de 1'Mtfoditlhiti (63) Les Privileges dont les habitans de la ville de Londres furent favorifésfous ddTéicns regnes contnbua i. augmenter fenfiblement le nombre de fes habitans. Sous Henry IL un ferf ayant demeuré un an & un jour d.ms un Bourg étoit regardé comme Citoyen & comme tel il jouiObit de la franchife du Bourg. Voyez Andersom il l'an io'16. Avant le XII Siècle la cité de Londres n'étoit pas encore pavée ,& le tcrrain en étoit marécagcux. En 1078 Guillaume I. fit pofer les fondemeni d'une forte citadelle nommée depuis Ia Tour de Londres. Par la fuite on en bitit une plus grande de pierres avec des arcades. Dans ces tems les Batimens de pierre & de briqucs étoient kres, mcme a londres. Les incendies étoient fréquens d:ms cette ville, oit les maifons étoient génétïlement de bois cc couvertes de chau'me. Pour prévenir le feu & les voleurs on ordonna dans la première année du Roi Richard I. (11S9.) que dorenavant on ne b&tiroit dans la Cité que des maifons de picirc, jufques a une certaine hauteut, & qu'ön les couvriroit d'ardoifes & de tuilcs cuitcs. En IÏ46. la plupart des Maifons étoient encore couvertes de chau-  D'ANGLETERRE. 101 On y forma des corps de métiers & plufieurs ctrangers vinrent s'y incorporer (69}. En 1215. les Marchands furent invites ouvertement par le Roi Jean a venir commercer dans le Royaume (70). On leur affigna pour demeure un quartier de la ville nommé Steelyard (71), oü ils s'établirent. En 1236 ou 1239, 1250, 1260 & 1267 ils recurent de nouveaux privileges, & les anciens leur furent me. Une Ordonnnnce renouvellée la mime année porte, que toutes les mailbus de la Cité devoient être couvertes de tuilles ou d'ardoifes &c. Le Pont de bo;s qui avoit été refait fous Guillaume TL avoit été confumé dans la fuite par un incendie. Sous Henry II. il fut réfolu de bltir tin pont de pierre fur la Tamil'e, mais ce Hatiment ne fut fini qu'en 1212. Voyez Anderson fous les différentes époques citées. (Cc,) Les Tifieiands et les üoulangers ont été les plus anciennes corporations. Voyez Anderson il l'an 1106. Sous le regne de Henry I. & de Richarü 1. on trouve des Manüfacturés établies. Henry II. accorda aux Tiilerauds de Londres ou a leur Confrairie tous les droits & ftanchifes qu'elle avoit eu du tems de fon grand Pere Henry 1. nioyennant deux mares d'nr ii payer annuellement. Henry I. penfa le premier k rendre les Rivieres dans l'mtérieur du Royaume plus «avigables. Ce Roi affigna (1135") a des pauvres flamands qui vinrent fe ïefügier en AngLttrre une partie des terres incuit s dans le pays de Galles. On penfe que ce font eux qui s'appliquerent a la fabriq ie d^s Draps &c. Ce fut encore foul: le même regne qu'on comt'nenca ii fe faire pnyu' une partie des revenus en argent. Dans la fiute cette coutume devint pour ainfi dire permanente. Voyez Anderson a l'an 1135 & 1154. (70) Hume T. Hl. p. 289. (71) „ Stcel-yard fign fie pefon avec lequel 011 pefe des Marchan„ ui fes. II y a un Endroit ii Landjes qui porte ce nom , ce qu'il le ,, fit peut-être donner aux Marchands qui »'y établirent." Hume T. III. p. 262. i Ia Note i^j). G 3  io2 Chap. IV. COMMERCE -confirmcs (72). Les Laines dans ce Siècle étoient déja un objet trés confidérable de Commerce pour les Flamands auffi bien que d'une trés grande rciTburce pour le Roi, qui feut mettre les Etrangers & leur Commerce a contribution (73). En 1249 les chofes furent même poufïces a un tel excès, qu'on reprocha en plein Parlement a Henry, lorfqu'il follicita un nouveau fubfide, qu'il devroit rougir de demander des fecours a un peuple qu'il affeétoit de méprifer & de haïr, & auquel en toute occafion il préferoit des Etrangers &c. On lui remontra encore que les vexations qu'il exercoit dégradoient la Nobleffè du Royaume Les expreffions fuivantes méritent d'être remarquées. „ Que les Commercans, au grand préjudice & „ a la honte du Royaume, fuyoient les Ports SAn„ gleterre , comme s'ils étoient habités par des „ pirates, & .que le Commerce privé de toute fu„ reté , fe trouvoit abfolument interrompu avec „ toutes les Nations, Que jufques aux pau- (,-2) Anderson a l'an 1232, 1239, 1260 6c 1266. Aft. Publ. T. 1. pais II. p. 106 & Chron. Anleat. par Willedrandt a l'an 1250, 12(^7 &c. (733 Le^ Habitans ile la Campagne, les Villageois, les Couvens cVc. vendoient leurs Laines ou leurs produits aux Etrangers & 1 ceux qui avoient penniflion ou privilege de faire ces fortes d'achats. Ces Marchands furent aftraint.*, a faire fortir ces marchandifes hors du Royaume par Cinq Ports. C'étoit la que les marchands payoient les dróits de fottie, & ces Droits étoient plus ou moins forts felon que le fouverain avoit befoin d'argent. Hume T. 111. p. 370, 371, 3Ï5. iB6 & ï. IV. p. 205.  D'ANGLETERRE. 103 „ vres Pêcheurs qui gagriölent leur vie fur les cö„ tés, ils étoient les viétimes de fon avidité & de „ celle de fa Cour, Que fes actes de piété „ même fcandalifoient fes fujets, quand ils voyoient „ qu'une fi grande quantité de cierges & de magni„ fiques étxoffes de foie, prodiguées pour des pro„ celfions inutiles, avoient été prifes de force a ceux „ a qui elles appartenoient réellement (74) ". A ce récit nous en allons joindre un autre tiré encore de rhiifoire d''Angleterre , ou fous Pan 1264. M. Hume s'exprime ainfi: „ Pendant que Henry, fils ainé de Leicefler, fai„ foit un monopole de toutes les Laines cVAngle„ terre, Punique marchandifc eilimé'e puifqu'elle „ foumifibit au Commerce étranger, les habitans „ des Cinq-Ports cxercoient la Piratcric la plus atro,, cc. Par leur conduite ils bannirent bientót tous „ les Négocians des Cötes & des Ports de \An„ sleterre. A cette occafion toutes les Marchan„ difes des pays Etrangers monterent a un prix „ exorbitant". Les Etrangers qui fréquentoient alors 1'Angieterre étoient les Allemands, les Flamands ou les habitans des Pays-Bas (75), les Juifs & les Italicns (76). Ces derniers plus connus dans ces fie^ T74) Hume, T. IV. p. 76. (75) Ilift. * la Patrie, T. II & III. & enti'autres T. Hit p. 21. pour amant que cela concerne les Conimercans tle notre Pays. C7Ö) Les villes cc les Bourgs en France ÖC en Angleterre au XII & G 4  ic-4 Chap. IV. COMMERCE cles fous le nom de Lombards, fe trouvoient les plus riches en argent, panni ceux qui fe meloicnt du Commerce (77). Auffi tous les échanges des efpeces étoient prefque entre leurs mains. Ce furent eux & les Juifs (qui aufii par leur indufirie & leur économie avoient acquis de 1'argent) qui lé mêloieijt du métier dc préter de 1'argent a intérêt ou a ufure. Le rifque qu'il y avoit alors a préter de 1'argent, en faifoient haufièr 1'intérêt; les baItem, par la profeffion qu'ils faifoient de la religion dominante rifquoient généralement moins que les Juifs (78), & avoient aufii un accès plus facile chez les grands. A mcfure que le Roi & la Noblefie fe trouvoient dans le befoin, ils fe fervoient de ces reffources ruineufes (79). C'étoit dans ces fiecles que les Grands faifoient aflèz généralement ce qu'on pratique encore aujourd'hui panni un trés grand nombre de perfonnes de Familie , qui ont donné XHIme Siecles contenoient beaucoup de Juifs & A'ltalicns qui s'occuppient uniquement du Commerce en Marcliandifes & en Efpeces. Voyez Hifi. dc France par Vsiu. T. 1. p. 42°) 5<5°» 561 & AKdh.kson aux «mé«S 1091, li&i 1244» 1274 &B (77) Rubbertson. Note XX'X- de Vlmrodiclion. (78) Hume T. III. p. 108 & 109 T. IV. p. 122. (79) On en vólt plufieurs exemplcs fous les regnes de Ki.hard I. du Roi Jean, & de Henry UI- Voyez la note 81. l es Juifs étoiem totalefnent piivés de la proteélion des Loix,& étoient abanduunés i la cupidité infati.-.ble du Souverain & de fes Mmiftres Hume T. 111. p. 094.  D'ANGLETERRE. 105 dans le falie, dans les excès &c. On ne doic donc pas être furpris de voir que le peuple fut fi acharné contre ces ufuriers de profeflion. Car fi le Roi ou les grands n'avoient pas eu de pareilles reflburces (quoique trés ruineufes) de trouver de Fargent, ils auroient été obligés de le chercher dans leur économie, ou chcz le Peuple; c'eft-adire, en cédant a ce demier quelques privileges ou prérogatives (80). Les Juifs, & enfuite les Marchands Lombards, étoient donc autant d'obftacles a Ja liberté du peuple. Auffi les abominations qui eurent lieu a la fin du XII & du XIIIme. Siècle lorfqu'un grand nombre de Juifs périrent miférablement (81), furent -elles une fuite naturelle du perfonnagc qu'ils avoient joué. Les peuples les plus Barbares n'ont jamais commis de cruautés fi déteftables (82). (80) Anderson aux années io86", 1199, 1205, 1208, 1234. * Hume ï. lil. p. 382. (81) Les Juifs jujqn'au dcuzieme Siècle avoient profpeté en Angleterre. Les Souvtrains étant devenus plus entreprenans, l'uPure auginenta en prop irtion des befoins $ les rifques dc mime. l.es J.ifs en deyinrent enüu la viflime. Sous Richurd en 1189 les Juifs furent cruefement maflacrés a Londres & ailleuis. Voyez II u m is T. III. p. ,„. Sous le Roi 'jrnn on les nrt tous en prifon , & ils n'obtinrent leur liberté qu'en payam rto mille mares. On en trouve fous ce regne en«ore d'autrès exemples , voyez p. 394. Lts Juifs ma'gié ces oppresfions & ces rilqucs ic-fterent cn Angleterre, l'ufure ajant été poitée jufqu'au taux de 50 pour cent. Hit me T. IV. p. 181. (8-J Lu 1241. on fit pavei aux Juifs 20000 mares 5 deux ans après G 5  io6 Chaj>. IV. COMMERCE Le premier Traité d'amitié & de Commerce qui ait eu lieu entre les Anglois & une Puiflance étrangere eft datté de Fan 1217 & fut avec Haquin Roi de Norwege (83). Et outre ce Traité avant la mort de Henry III. en 1272 on n'cn trouve que deux felon Anderson, dont un eft avec la France & 1'autre avec la Norwege (84). II paroit d'après ce que je viens de rapporter que depuis la conquête de Guillaume jufqu'a la mort de Henry III.lc Commerce ne fit point de progrès.M. d'autrès groifes fommes, & une feule perfonne paya 4000 mares. En 1250. Henry les opprima de nouveau. Un Juif nommé Aaion fut condamné a. 30000 mares. En 1255. le Roi demanda 8coo mares & menaca les Juifs de les faire pendre s'ils refulbient d'obéir. Alors ils perdirent patience & foiliciterent la periniflion de fortir du Royaume. Le Roi leur répondit en fubftartce , qu'il étoit ruiné lui-même , qu'il devoit lui-même 200 mille Mares & même 300 mille: qu'il n'avoit pas le fol, qu'il lui failoit de 1'argent, dc quelque main, de quelque cöté, de quelque maniere que ce fut. Alors lts Juifs furent livrés au Comte de Cornouailles, qui continua ii les opprimer. Enfuite il y en eut buit de pendus.fous prétexte d'avoir erdcifié un Enfant en dérifion des fouffrances de Jifus Chrifl. Sous Edöuard en 1275 on en pendit 208 ii la fois a Londres, fans compter ceux qu'on punit dans les autres provinces, & cela fous prétexte d'être des faux monnoyeurs. Enfin pour cloture rapportons que le Roi Jean pere de Jlcmy HL demanda une fois icooo mares d'un Juif de Briflol,&. fur fon refus ordonna de lui arrachcr une dent tous les jours jufqu'i ce qu'il conftntit it payer ;cette fomme. Le Juif petdit fept dents éi paya'. Voyez Hume ï. IV. p. 182, 183» i«4, & 202. Anderson ai'an nco, 1189, 1210. 1241, 1252 & 1290. A cttte derniere Epoque les Juif? furent bannis, apparemment paree qu'ils étoient alors trés pauvres. (83) Anderson a l'an 1217. & Robbertson Note XX!X. (84) Anderson, 'année 1224 & 1269.  D'ANGLETE RRE. 107 Hume paroit n'être pas de ce feminiene, & croit qu'avant la fin de ce regne le Commerce en Angleterre s'étoit beaucoup étendu (85). La raifon fur laquelle il fe fonde, c'efi que depuis la conquête le prix du pain étoit haufie. Cet enchérificment a eu vraifemblement une caufe plus naturelle, c'eft - a - dire, la population des Villes & des Bourgs, & la depopulation des Campagnes. Un changement auffi fenfible, devoit naturellemcnt produire une différence dans les prix des Denrées &c. D'ailleurs 1'invention de nouveaux arts devoit occuper moins de mains a 1'agriculture que ci-deVant. Dela les difettes & les chertés, fi fréquentes dans ces fiecles. Elles étoient une fuite naturelle des troubles ou des guerres civilcs. Le prix moyen des Beftiaux dont M. Hume fait mention, confirmeroit mon idéé (86). Quoiqu'il me femble que le Commerce n'a pas augmenté en Angleterre pendant le cours dc cette derniere période,jepenfe cependant que les revenus des terres accrurent les richefies des poffefleurs; cela paroit du moins a cn juger par les richefTcs que les Eccléfiafiiques & les Souverains acquirent pendant les deux Siecles qui nous occupent maintenant. Henry II. laifïa a fa mort en Efpeces 100,000 mares cn argent (87). Son Fils Richard I. en (-5) Hume, T. IV. p. 179. (üö; Hume, T. IV. p. 179 & j80. (87J Hume, T. lil. p. 112.  ioS Chap. IV. COMMEPXE D'ANGLETERRE. 1193. étant prifonnier cn Allemagne couta aux Eccléfiafiiques & au peuple 150000 Mares (88). En I2C< la C our de Rome demanda aux Evêques & aux Abbés du Royaume 150540 Mares en argent pour Capital & intéréts debourfés a 1'occafion de la Croizade pour la conquête de la Steile. On diftribua des Billets a des marchands Italiens qu'on fiippofoit avoir avancé les fonds pour les fraix de la guerre contre Mainfroy. On fit a cet effet des conditiom pour le payement (89). Mais ce qui prouve furtout les relTources qu'il y a toujours eu dans le fol pour les habitans de 1'Angleterre ,ce font les guerres qu'on eut a foutenir fous les Regnes de Richard I. & du Roi Jean (90) , 1'argent qui fortoit prefque continuellement du pays pour Rome ^91), & puis les fraix qu'on devoit continuellement faire pour les voyages de la terre fainte. Enfin malgré toutes les Revolutions que YAngleterre avoit cfiuyées depuis 1'invafion de Jules Cefar, jufqu'a la mort de Henry III. il elf afiez clair qu'elle avoit augmenté confidérablcment fa Population. feule richeffe fondamentale , cj* la plus folide d'une Nation. (885 En argent comptant 100 mil'e mares. Voyez IIume, T. IV. p, ift. (89) Hume T. IV. p, 68. (90") Rapin JS Hume Tous ces diffirens Regnes. (9 O Hume T. IV. p. 5S , 59 & fuiv. & Andersom* l'an 1:44.  COMMERCE D'ANGLETERRE. 109 C H A PIT R E V. Conttnüation du même fujet, jiifqiCa fépoque de FEtabüjfement de la Banque de Londres. C e Chapicre, pour la raifon que nous avons dite dans le précédent, fe trouve fous-divifé en trois Périodes. Ie. Période. Depuis l'an 1272. ou depuis le commencé ment du Regne d'Edouard I, jusqu'a la fin du XVclIie. Siècle. Dès que les dalles les moins honorées, mais les plus induflrieufes & les plus utiles pour 1'Etat, furent encouragées par les Souverains, on vit les Sociétés prendre en Europe de nouvelles forces (1), & revenir peu a peu de cette efpecc de léthargie oü elles avoient été enfévelies depuis plufieurs Siecles. Le peuple Anglois en particulier eut ccpendant plus d'obftacles a furmonter qu'aucune autre Nation, a caufe des révolutions de differente nature qui eurent fucceffivement lieu dans 1'Ifle de la Grande Bretagne. CO Hu.wis T. IV. p. a88.  iio Chap. V. COMMERCE VAngleterre poffédanr, ainfi que je 1'ai déja dit, des refiburces pour ainfi dire inépuifables, le Souverain étoit a même, lorfqu'il avoit les qualités requifes pour cela, d'étendre fon ambition, même au - dela de ce bras de mer qui fépare VAngleterre du continent. Les guerres fous Edouard I, fous Edouard II, & fous Edouard III, en fourniflènt des excmplcs. Mais fi ces guerres prouvent de quoi cette Nation efi capable Iorfquelle déploie fon courage , ces mêmcs guerres épuiferent Ie Royaume d'hommes & d'argent , deforte que 1'Angleterre au lieu de profperer pendant ces Regnes, fe trouva encore plus affbiblie qu'auparavant. Sans cet cfprit d'indépendance qui commenca alors a ranimer le courage Anglois, les habitans de cette Ifle auroient été dans lc XIII & XIV Siecles dans un état pire que dans les deux Siecles précédens; mais 1'efperancc de recouvrcr la liberté faifant joumellement des progrès panni la Nation,. cette feule idéé foutint le peuple au milieu des charges qu'il eut continuellement a fupporter; & malgré les calamités qu'une guerre entraine, même pour une Nation viétorieufe, on vit néanmoins fous Edouard I des Bourgs s'élevcr dans les Terres Domaniales avec des privileges particuliers, comme celui de fixer eux-mêmes les droits & les péages de leurs difiriefts, & furtout d'élire leurs propres Magifirats; mais le Roi fe referva toujours le pou-  D'ANGLETERRE. m voir d'impofer la taille , ou les impóts fur ces Bourgs, & cela a fa difcrétion (2). Le tems , mais furtout 1'abus qu'on fit de ce privilege Royal, ouvrirent enfin les yeux a la nation, & corrigercnt ee grand abus fous les regnes fuivans. Malgré les extorfions $ Edouard I cn 1297. & malgré les coups d'autorité qu'il exerca fur les Juifs & fur les Eccléfiafiiques (3), il faut avouer qu'il fit des régiemens utiles aux Commercans étrangers qui étoient établis dans fon Royaume (4). Edouard a été le premier Prince Chréti.en qui ait défendu au Clergé par une loi pofitive de faire de nouvelles acquifitions de terres. Cette Ordonnance fut aufii avantageufe a fon Royaume (5), que 1'augmentation du pouvoir des Barons lui fut préjudiciable. Aufii fous le regne tYEdouard II on obferve par les mécontentemens des Barons combien cettte augmentation de pouvoir que fon Pere leur avoit laifle fut dans la fuite la fource dc plufieurs troubles (6). Sa guerre avec YEcojJe, les fermentations intérieures, 1'exécution du Comte de Lancajlre, & le Roi lui-même dé- 00 Hume T. IV. p. 289 & a la note G. (3) Edouard I. dépouilla les Juifs de leurs biens & les bannit,mit Ie Clergé hors de la protectron des Loix, fe faifit de toutes les Laines cc de tous les cuirs du Royaume, & impofa des taxes confidérables fur les anciennes marchandifes le3 plus précieufes &c. Voyez Hume T. IV. p. 393. CO Hume T. IV. p. 301. C5) 39-1 & 395. C.6) Hume T. V. Chap. III. p. ö & fuiv.  ui Chap. V. COMMERCE tröné, tous ces événemcns cauferent un fi grand défordre dans ce Royaume, qu'il eft aifé de comprendre que les Hiftoriens ne fe font pas plaints fans fondement, en difant, que le Commerce & les Manufaóhires fe trouvoient alors en effet prefque réduits a rien (7). Le detail des déprédations commifes dans les Campagnes, cn nous donnant une idéé des ravages qui eurent alors lieu, nous apprennent en outre quels étoient les objets dans lcfquels confiftoient les principales richefies de la nation (8). Les guerres contre YEcojJe & la France, fous Edouard IIIVfont autant de témoins qui dépofent, que YAngleterre, foit par fon Commerce, foit par 1'induftrie dc fes habitans, ou foit par le crédit du Roi (7) Hume T. V. Chap. III. p. 33 & fuiv. O!) Hume rapporte fous fan 1327, que la requóte prétentie par Spencer le Pere, contenoit qu'on avoit ravagé Ibixante trois de fes Seigneurief ou Maifons de Campagne, & il apprécie le ddgat il 46000 Livres, qui feroient aujourd'hui en monnoie aetuelle 133000 Livres. Enu'autres effets perdus pour lui il compta. 28000. Brebis. 1000. Breufs & GeniiTes. 1200. Vaches avec leur portee de deux ans. 5C0. Chevaux de Charoi. 2000. Porcs & 600 ileches de lard. 80. Boeufs & 600 moutons falés. 10. Tonneaux de cidre. Des armes pour armer deux eens hommes, & d'autrès inftrumens & munkions de guerre. Voyez Hu.me T. V. p. 89.  LV ANGLETERRE. 113 Roi chez les Commercans étrangers, étoic alors a même de fuppléer aux befoins preffans que fon arabition exigeoit^ & qu'il ne pouvoit trouver chez lui (9). Par exemple Edoüard III, en commencant ia guerre avec la France en 1339, fut réduic a la derniere cxtrémité (10); quelques redevances des terres, & furtout la toifon des Befliaux, lui furent d'une importante & prompte reffource (n). Le fuccès qu'il eut dans cette guerre, bienloin dediminuer les dépenfes & les befoins de 1'Etat,Contribuerent au contraire a les augmenter & a les faire durer plus longtems; & quoique les relTourccs dont nous venons de faire mention fe rcnouvellafTènt tous les ans^ elles ne furent pourtant pas fuffifantes. Car a mefure (9) Edouard 111. étoit un Prince d'un grand courage, & doué d'un Vafte genie. Voyez Hume T. V. p. 106, 337 & flriv. (.10) „L'an 1339. Edouard lil. avoit contraclé pour pris de trois eens „ mille livres Sterlings de dettes (probablement par le moyen des Etran. „ gers). II avoit anticipé rous fes reveuus, & engagé tout ce que lui „ & la Reine avoient de meubles prJcieux. — — II s'étoit même „ engagi ii ne fgpafler en Angleterre pour fe procurer de 1'argent, „ qu'avec la permiffion de fes Créanciers, & fur la parole d'lionneur „ de revenir en perfonne s'il n'aCM'ittöit pas fes dettes." Hume T. V. p. 158. 00 En 1337. Edouard avoit obtenu du Parlement un don de vingt mille facs dé Laine, appréciés \ plus de cent mille Livres. Eti 1339.il obtint de nouveau des Barons & des C'ievaliers des levécs extfaordinaires fur leurs Tunes pour deux ans , de la 9111e. partie des gerbes de bied, des to'.fons des agneaux, enfuite le 9111e du mbbilier des Bourgeois qu'on feroit eftimer ii fa jutte valeur. Le Parlement accorda auH] un droit de 40 Schellings fur Chaque fac dc Laine esportée, fur cliaque trois eens peaux d_- mOütOn>fur les cuits&c. Voyez H uM ii' T. V. p. 150, 161 & 175 Tome II. Fan. I. H  ii4 Chap. V. C O M M ERCE que les conquêtes s'étendoicnt ,il falloit plus de monde, & encore plus d'argent pour les conferver. Ajoutés a cela que les dépenfes de la guerre étoient devenues plus couteufes par 1'invention & l'introduclion de 1'artillcrie dans les armées (12). Deforte qü'Edouard fut enfin obligé de recourir a la refiburce la plus ruineufe pour un Etat, c'eft-adire, d'affoiblir les Efpeces. Ce fut felon les Hiftoriens la 2oeme. année du regne & Edouard III qu'on altera pour la première fois les monnoyes cn Angleterre (i 3); & cela dans le tems même que les armes (12) Hume T. V. p. 225 5 l'an 1346 & A n d e r s 0 n a l'an 1337- C13) Avant la some. année du te%tie$ Edouard lll.h livre avoit été une vraie livre de poids: ce Roi fit tircr dans la sotne. année de fon ïcgne dc Ia livre de 12 onces 22 Schellings, & fept ans après 25. Henry V. fit pendant fon regne frapper des Monnoyes fut le picd, de 30 Schellings par livre. Voyez II u k E T. VI. p. 129 & Ande rs o n it l'an 135!! ccc. On penfe généralement qu'avaut l'an 1348 la monnoye n'avoit pas fubi de changement cn Angleterre, c'eft - k - dire , qu'une livre de compte contenoit efieAivement une i.ivre de poids. Selon mes idéés il faut qu'anciennement ily ait en en Angleterre dei Efpeces d'une même dénomination, mais différentes en yaleut intrinfeque. Les anciennes Loix obngent néceflairemerit a fa'ue cette ddrinctiont La Loi d'un diftrict fixe la tête d'un Ceorle i 16(1, & felon la Loi Meriienne cette amende étoit fixce a eoo Schellings. Voyez Hume T. II. p. 53. L'EtabluTeuient d'un même poids & d'une même mefure qui fe fit en 1215 (Hume ï. iii. p. 289) dans tout le Royaume confirme cette idée. -Au refte Ie Tbrinfai paroit avoir été la plus anciennc monnoye, & la livre de poids avant l'an 1348 la plus moderne. C'eft pour le moment tout ce que je puis préfentcr de plus précis au Leéteur fur cette matiere. J'ai du me hornet k ce qu'on trouve la - duflus dans des Atueurs auffi éclairés que le font Hum And s r s 0 n.  D'A N G L E T E R R E. nS Angloifes avoient eu le plus grand fuccès poffible, comme on peut le voir par le gain de la bataille de Creci, la prife de Galak, & la captivité du Roi èüEeoJJe (14). Au refte on doit admircr comment Edouard feut tirer tout lc parti poffible du Commerce que VAngleterre faifoit alors avec les Etrangers, car les Flamands cmbraflerent fon parti par le befoin qu'ils avoient des laines SAngleterrei Calais fe trouvant au pouvoir des Anglois devenoit par la 1'entrepöt (15) de leurs Marchandifes; auffi y faifoit-on un grand Commerce en tout genre, fur-tout pendant les démêlés que 1''Angleterre avoit prefque continuellement avec les Puifiances du Continent. Nous avons vu qu'avant la fin du XIIe. Siècle le Commerce des produétions de Y Angleterre fe faifoit par des Etrangers. En 1320 Edouard II avoit permis que les exportations des Laines fe fiffent dans huit Ports de cette \fc ,Ywo\r ,JVeymoiith, Southampton, Boflon, Tarmouth, Huil, Lynn i Tpswich, & Newcaftle (16). Dans Londres les Marchands Allemands y vivoient alors felon leurs coutumes (17). Ils n'étoient fubordonnés qua leurs Cm) Home t. v. p. 223 ^ 250. (15) Anderson, a l'an 1348. 06) Km 1313. (17) Chaque Corps d'Etrangers refidant dans le Royaume devoit répoudre de la conduite de fes individus. Anderson a l'an 127S & 128c. H 2  n6 Chap. V. COMMERCE propres loix (18), & ils jouircnt par la fuite dc plus grands privileges (19). Sous Edouard I les Lombards & les autres Marchands Italiens, favoir les Génois,.les Florcntins, les Lucquois, les Pifans & les Venitiens, foumiffoient toutes les Drogues & toutes les Epiceries qui venoient de YArabie & de YInde, comme auffi les Etoffes de foye, les vins & les autres fruits de 1'Italie (20). Ces Marchands vinrent a bout, foit par le Commerce qu'ils faifoient, ou par 1'adminifiration de la plus grande partie des biens des Eccléfiafiiques, d'être toujours cn pofleffion de beaucoup d'argent en Efpeces, fur lefquclles ils faifoient un profit confiderable, par le befoin continuel qu'on avoit d'argent comptant. Pendant 1'onzieme année du regne tVEdouard I ces Etrangers acquirent le privilege de pouvoir pourfuivre leurs débiteurs dans les Villes dYorck, de Briflol & de Londres. Ce privilege leur étoit (18) Anderson k l'an 1302. Voyez la Chartre Mtrcatoria Art. 10. Il y elt dit, que dans les procés entre les Foraius & les Anglois la moitié des Jurés fera compofie d'Etrangers. — Art. a°. Qu'il y aura a Londres une peifonne qui d'oflice adminiftrera la Judice aux Marchands Etrangers. Voyez Chron. Anfeat. aux annéesisoj, IS". '3l8, '348 & 1349- (19) AS. Puil. T. V. pars II. p. 113 année 1462. p. 170 année 1472. Pro lUercatoribus Colonxa p. 183. année 1470. De Traitando , cum Gul/. Pat. Ilauza Teutonica fuper Pace perpetua, Pars III. p. 15. année 1472. p. 25, 30, 36. année 1474 cVc. (20) Robbertson a la Note XXIX. de \'Introduttion. A t»« UBiuoB aux années 1274 & 1283.  D'ANGLETERRE. 117 ii avantagcux, qu'il donna même de 1'ombrage au Parlement, lequel étoit avec raifon trés animé contre les abus des emprunts a ufure, dont ces Marchands faifoient un gros Commerce. En 1283 les Communes accorderent Ie 50™. denier de leurs biens meubles au Roi, a condition qu'il chaflèrok ces Etrangers du Royaume, Mais cette expulfion ne dura pas long-tems, car en 1289 le Roi & les Seigneurs les rappellerent. La ville de Londres fit des remontrances contre ce rappel, mais on fit au nom du Roi la réponfe fuivante ; que ces Marchands Etrangers étoient utiles & d'une grande reffource aux grands du Royaume, & que le Roi jugeoit par conféquent a propos de les rappeller (21). Dans les XIIR & XIV» Siecles le befoin continuel d'argent, les lettres de recommandation dü Pape (22),le peu de connoiffance qu'on avoito.x\Angleterre du titre & de la valeur intrinfeque des Efpeces étrangeres, tout cela donna a ces Marchands un (li) Anderson nnnée 1283. f22) Voyez la Bulk- dir Pape Boni face VIII. pour Ia Société de Riszard» compofée de quelques Marchands de Lucques. Voyez M. Puil. T. I. pars III. p. 155. année 1296. Dans Rymer on trouve plufieurs Lettres de recommandations en faveur des Ita'ucns de la part des Papes , adreffées aux Rois d'Angleterre. Les Marchands Floientins eurent beaucoup de crédit tems EdouardI. Ils étoient non feulement de gros Négocians & dos Banquiers, mais encore les receveurs des Droits du Roi fur la Laine & le Cuir. Voyez Anderson année 1304. H3  n3 Chap. V. C O M M ERCE grand Crédit, & leur procura plufieurs avantages dans la direélion des affaires du Commerce cn gér riéraï, & particulierement dans ce qui concemoit la Monnoye. Etant plus au fait que d'aurrcs fur ces objets, il ne faut pas s'étonner de les voir employés dans les Motels des Monnoyes & dans les échanges des Efpeces (23). Auffi les vit-on longtems exercer le métier de Banquiers publics dans les principales Villes de ce Royaume. Edouard I établit un Officier fous le nom de Changeur ou de Banquier Royal (24). Sous Edouard III il y eut un Bureau de Change royal a Douyres (25). Le Roi (23")* Dans la "me. amice du regne d'F, 'ouard I. les Marchands de Lucques rétfdant i Londres étoient les gardes du Cambium, ou de la Monnoye de Londres. Nos gens (c'eft Anderson qui parle) tten favolent pas ajj'ez pour baltre leur momioie eux-mSmes. Voyez Anderson année 1279. (24) üem année 1307. (25) Ath Pd.il. T. II- pats UI. p. 70. année 1331. Cette Ordon nance exempte tous les Batimens qui apportoient du Hareng ou autre poillbn ii vendre, d'aller au Bureau du Change étabü i Douyres & dans les autres Ports, pour y échanger la bonne monnoye Slerlings qu'ils recevoient de la veine de leur poiifon Sic. On y obferve encore que du confentcment des Prelats, Comtes & Barons du Royaume, le Roi ordonna que perfonne n'emporteroit du Royaume la bonne monnoye, mais qu'a Douyres & dans d'autrès Ports oü 1'on avoit coutume de paBèr la mer, il y auroit une table fufpendüë, pour les échanges des Efpeces, pour que ceux qui entroient & ibrtoiènt du Royaume pull'ent la confulter au befoin. Anderson rapperte que dans la même année on envoya des Ördonnances lemblablcs h Cheflcr, a Nwcajlle, h I/artrlope, ii Torck, \ Scarboroifgh, ii Ravensrede, h. Lincoln, & Norwkh , & Lynn , ii Ipsy/ich, ii Sandwich, '<■ Jllnchelfca, k Southampton, ii Briflol & en 1333 ii Londres, a '£..rmouih, a Huil & a Bojlon. Voyez AndekISon amite 1331.  D'ANGLETERRE. 119 droit un cercain revenu de ces Etabliflemens, & ces revcnus doivent avoir été confidérables, a caufe des riches produits qu'on a toujours exportés de XAngleterre pour I'Etranger. M. Anderson en donne un exemple qui mérite de trouver place ici, c'eft un Bilan du Commerce en général de XAngleterre de l'an 1354. U paroit par la qu'elle avoit exporté ou livré aux Etrangers des Marchandifes pour la valeur de 882553 Livres, & en avoit recu d'eux pour la fomme de 116910 L. Le déficit de la derniere fomme a la première aura été probablement fuppléé en Efpeces, ou en lingots d'or & d'argent (26). Nous avouerons cependant qu'une grande partie en devoit étre (26) Les Exportations du Commerce de 1''Angleterre dans l'année 1354 fuient. V^ó'l Sacs de Laines h Liv. 0 & 3036 quintaux & 65 picces de pcaux, chaque quintal de fix vingt peaux a 40 Schellings le Monnoye ancienne. Monn. ae^uelle. quinral , qui avec les ' ,. v > droits fe montoicnt . . . Liv. 277606 - 2 - 9. Liv, 832818— -°- Cuirs & droits . 96-2 6. 288 —■ 2°. 477'It pieces de gros Draps ii 40 fols la piece & "o'n 1 pieces de mrfteds a ió fols $ deniers dito . . 16266-13-4. 4S800 —' 4». Droits la - deflus . . . . 215-13-7. 647 Toral des Exportations, avec les droits fur icelles . . Liv. 294,184-17-2. Liv. 882^53 —  i2o Chap, V. COMMERCE reiïbrtie pour 1'Eglife de Rome, pour les retributions qu'on lui payoit, & pour foutenir les guerres contre la France, qui alors épuifoient le Royaume (27). II arrivoit fouvent que, lorfqu'on remarquoituuerareté d'efpcccs, on tachoit de remédier au mal cn ordonnant que ce que 1'on recevoit en payement des Marcliandifes porties & vendues dans le Royaume, ou que les payemens a faire a 1'Etranger a la fortie du Royaume devoient être faits moitié en Marcliandifes & moitié en Efpeces. Sous Henry IV lorfque le défordre & le luxe, que les grandes conquêtes amenent ordinairement, eurent augmenté les befoins & les dépcnfes,on régla que tous les retours devoient être 1 faits cn Marcliandifes. Mais on s'appercut bientöt que c'étoit augmenter le mal que de faire des Loix qui gênoient le Commerce (28), Impoi'tations. ia. 1831. pieces de Draps fin h 6 Livres par piece & les droits. Liv. 11083 -12. Liv. 33250 mm 2°. 397| quintaux de cire & les droits S15- 7-5. 2246 — 3°. 18:9 i Tonneaux de vin k 40 Schellings parTonneau 6f les droits , jJij. lg. II526 — 4C. Toiles, Merccries, Epiceries & autres Marcliandifes .... 22943 - 6-10. 68830 —5°. Droits la-deflus 285-18-3. 858 — Total des Importations. Liv. 38970-3 - 6. Liv.116910— r27) Sur les tases pnyces a l'Eglife de Rome Voyez Hume T. V-P- 357-. ainfi 1ue li" les Guerres &c. le Chap. V. du même Tom? , Si les regnes fuivans apres la mort d'Edouard Hl. (28) Anderson, année 1331, 1335, 1403 &c.  D'ANGLETERRE. 121 Au XIIIe. Siècle on ne fabriquoit en Angleterre que de tres gros Draps & des Etoffes nonnnées Worfteds, qui étoient trop groffieres pour être portées par les grands ou la Nobleflè du Royaume. Auffi par le même Bilan on obferve les droits qu'on avoit percus fur les Draps qui avoient été probablement portés pour la Nobleflè dans le Pays. Edouard III connut par expérience combicn les Flamands s'étoient cnrichis par les Manufaétures en Laines; la licence qui regnoitparmi les ouvriers en Flandre,fut caufe que plufieurs d'entr'eux abandonnerent leur Patrie , dont une partie furtout fous Edouard IV vint fe refugier en Angleterre, & une autre partie en Hollande; les Manufaétures en Angleterre fe trouvant ainfi infenfiblement fournics de meillcurs ouvriers, on y fabriqua des Draps d'une qualité fupérieure, enforte que fous le regne de Henry IV les Draps étrangers furent prohibés en Angleterre (29). Pendant le regne cYEdouard III les Efpeces ayant déja été aiïoiblics deux fois, elles le furent encore fous Henry V. pour la troifieme fois (30); mais dés avant cette derniere époque la cherté des vivres avoit déja augmentée aflèz fenfiblemcnt, furtout a Londres (31). Les fabriquans furent obligés (29) Ce fut dans la première année du regne de Henry IV. c'efta-dire l'an 1399. („o) Voyez la N te 13, (31) ün admettanc que la Livre ait contenu avant le premier affoibüllement des lilpeces fous Edouard lil, 20 Schellinss 5 & que pen» H 3  iaa Chap. V. COMMERCE en 1402 de quitter cette Capitale (32), & de transferer leurs Manufaétures dans des Villages, dans des Bourgs ou des Villes éloignécs, oü dans la fuite plufieurs autres Manufaétures fe font établies. Ces manufaétures ont été d'un foutien bien plus folide a la Nation Angloife, que ne le fera jamais leur grand Commerce actucl aux Indes orientales (33). dant fon regne la livre ait été portee a 25 Schellings , cela feul devoit occafionner un rcnchériffenient de 25 pour cent. Mais il eft probable, pour les raifons que j'ai amplement expofées dans mon premier ïome, que cette différence fur la haufle des prix des vivres aura été plus fenfible. (32) Les fabriquans en Draps cherchant le bon marché des vivres, fe redrerent d'aboid dans les Cointés voifms de Londres, comme Surrey, Kent, Eflex, Berkshire, Oxfordihire Sc. Enfuite dans ceux de Dorfet, Il'ills, Somcrfet, Gheefler, IVorcefler & enfin k Torkshire. Voyez Anderson année 1402. (33) 11 eft raanifefte que psr l'érabliffement des diverfes Fabriques, F'Angleterre a aequis & repandu des Richeffes trés confidérables parmi fes habitans, & qu'elle a encouragé fur un principe folide fa Population. C'eft en grande partie aux dépens des Etrangers que ces Fabriques fubfiftent. On doit étre affez généralement convaincu de ce fait, Mais pourroit - on bien en dire autant du Commei ce que VAngle. terre fait aux Indes Orientales, liutout depuis l'an 1765 que Lo d Cliye a bouleverfé le Gouvernement daus le Bcngale ? Les Particu-liers, dira-t-on, y ont acqcis des richeffes immerifes, & il en efl aulfi rèfulté pour le Gouvernement mi [biilagement dans fes finances! mais qu'on daigne un peu confiderer combien ce Commerce abforbe de morde, & i quel 1 oint ces richeffes ont accéleré ure certaine corruption panni une partie de la Nation. —— . Je m'arrête. Etant Etranger il ne m'eft pas permis dc m'expliquer !i - deffus aufii librement qu'un Anglois: J'.-.jouterai fiulcmsnt que la Compagnie venant de s'emparcr de Pondkheri & des autres EtablifferOens des Francais fur !a cóte de Ctromandel, aii (i que des Comptoirs dans le Bcngale .,Y Angleterre femble pour air.fi dire regner en Souveraine dans cette partie du Globe. Elle n'a donc plus ricn k craindie de ce co-  D'ANGLETERRE. 123 L'extenfion que le Commerce recut en Angleterre par le moyen des Compagnies privilcgiées dans le Courant du XIV. & furtout dans celui du XVe. Siècle (34) a été affez confiderable. C'eft ce qui donna lieu a plufieurs Traités de Commerce qui furent conclus avec divcrfes Nations Etrangeres, particulicrement avec les Italiens & les Villes Anféatiques (35). En 1322 cinq Vaifleaux Vcnitiens vinrent au Port de Southampton chargés de diverfes Marcliandifes (36). Avant l'année 1336 on s'étoit emparé fur la cötc de Kent d'un gros Vaiftèau Gcnois envoyé cn Angleterre avec une Cargaifon dont la valeur étoit de 14300 Mares pefant d'argent en Marchandifes (37)- Les Venitiens en 1325 firent avec V Angleterre leur premier Traité de Commerce (38) ; car les Anglois ne trafi- té-la ? Mais une faction panni les Employés peut devenir plus fu. nefte que ne 1'auroit été le pouvoir des Francois, que je confiJere Mans cette partie éloignée comme un rempart pour ['Angleterre meme. (34) Voyez Anderson, année 1296, 1319, 1357, 1388,1407, 1430 & 1444. (35) Voici les dattes des différens Traités. En 1325 & 1408 avec Venife. En 1347, 1414, 1421 & 1460 avec Genes. En 1417,1437, 1456 & 1472 avec les Villes Anféatiques. Dans cette derniere année il y eut encore des Traités avec les Pays- Bas, le Portugal, kt France Ik VF.cofe. En 1474. il y eut un tiè;. famcux Traité avec les Villes Anféatiq. En 1490 un Traité avec Florence. Voyez dans les Act. Pub!, (de Rïmerj fous ces différentes Années & Anderson. (36) Anderson, année 1322. 0.7) 133C G8J 1325.  i2+ Chap. V. COMMERCE quoient pas encore alors par eux-mêmes en Italië, mais bien en Portugal (39). Et ce ne fut qua la fin du XV°. Siècle qu'il paroit que les Anglois commencerent a commercer en Italië avec leurs propres Vaifleaux (40), du moins paroit-il certain que vers ce tems-la ils établircnt des Confuls dans plufieurs endroits dc Y Italië (41). Enfin Henry VIL en 1496 accorda a Jean Cabot Marchand Venitien ctabli a Brijlol une chartre pour faire de nouvelles découvertes (42). Les circonftances multipliées qui fe préfenterent infenfiblement panni les Anglois, leur fit toumer leur attention fur le Commerce du dehors ; ils commencerent a s'appliquer de plus en plus a la Navigation , ils acquirent dans ces deux arts des connoifiances plus étendues, & parvinrent a pou- t\yf) F.n 1381. il falloit encore une permiflion a tout fujet, excepté les Perfonnes diftinguées, pour fortir du Royaume. En 1391. on trouve une Ordonnance de Richard II. par laquelle il fut recomm.mdé aux Marchands Anglois de fretter des VailTeaux de Ja Nation . bien entendu ^ eft - il dit) que les propriétaires des Vaiffeaux Anglois fe contenteront d'un frêt raifonnable. Voyez au refte Anderson, année 1458 & 1485. (40) AS Publ. T. V. pars III. p. 180 année 1486. Le Rei Henry VII. confera a Chrijloplu Spene le Conpjlat Anglois a Pife &c. (41) Act. Publ. T. V. p. IV- p. 73. année 1494. Benott 3 Laurent famuci, comme Confuls & Pife, & dans toute Xltalie. Les premiers Confuls avoient pour leurs peines ik pour les fonctions qu'ils devoient faire, un quart pour cent de toutes les marcliandifes que les Anglois esportoit de Xltalie. Voyez Act. Publ. T. V. p. Hl. p. 164, année 1485. (42) AS. Publ. T. V. part. IV. p. 89. année 1496.  D'ANGLETERRE, 125 voir diriger par eux - mêmes, ce qu'autrefois ils avoient été obligés de faire par le moyen des Etrangers. Voila unc cfquiflè de 1'état oü le Commerce s'eft trouvé depuis le regne $ Edouard I jufqu'a la fin du XVe. Siècle chez les Anglois, & cela au milieu de plufieurs grandes révolutions, des guerres etrangeres , & des guerres Civiles, nonobftanc les differends qui regnoient entre les Maifons de Lancaflre & STorck dans ce même Siècle, qui certainement ont été nuifibles au progrès du Commerce. Mais ces démelés prirent heureufement fin lorfque la Maifon de Tudor en 1485 fut affermie fur le Tröne. Avant de pourfuivre le récit que j'ai encore a faire, il eft ici a fa place de mettre maintenanc fous les yeux du Leéteur quelques articles, pour prouver que 1'argent pendant les XIV. & XVe. Siecles fe trouvoit déja affez repandu dans YEurope. Pendant les années 1338 & 1339 Edouard III emprunta en Brabant de quelques Négocians environ un million de Florins (43), & d'un feul (43) De la Socidté des Bardi & Peruci Marchands Lombards établis en Brabant .... 16000 florins d'or de Florence. De trois Marchands i Malines . . 54000 ———-—_____, De Nicolao Banholomeo Marchand de Lucques établi a Anvers .... 140000 ——— _____ 210000 f Idem. Voyez M. Publ. T. II, p. IV. p. 46, 40 & 50.  i2Ö Chap. V. COMMERCE Négociant établi a Anvers au-dela de fix eens mille florins (44). Les frais de l'année deftinée pour la Flandre, & les vivres ou provifions cmbarquées pour la Guienne, monterent a une fomme affez confiderable (45). Anderson fous les années 1386 & 1440. nous donne une idéé des richeffes que la Nobleflè Angloifc pofledoit cn vaiffèllc d'or & d'argent. Le Tcflament du Roi Richard II mort en 1400. contient entr'autres que le Roi avoit mis en dcpofoiooo mares pefant d'argent, pour fatisfaire aux legs & (44-) De Guillaume de la Pole Marcliand Anglois établi \ Anvers (Voyez AH. Puil. T. II. pars IV. p. 39. année 133") en deux parties 18500 Livres pefant d'argent, qni font,a L. 3. 7| chaque livre compofée d'argent an coin d'aujourd'hui, en monnoye actuelle 62437J Livres Sterlings. Er, reconnoifflmce de fes fervices , il fut fait Chef Baron de VEchiquier d'Angleterre & Chev. Banneret. Lc Roi 1'inveIHt aulfi de la Pairie de Uol'.dcrnefs. Voyez Anderson, année 133G. (45) L'armée d''Edouard devant Ca'ais étoit compofée de 31084 hommes, & fa paye pour 6 mois fe montoit a 127201 Liv. (entendez liv. pefant.) Voyez H u m e T. V. p. 364. Note b. Les Provifions embarquées pour la Guienne confifioient en 42-10 Quarterons de Frouieut. 2O0 ■ de feves & pois. 63oo —> de Malt. 500 ■ de Sel. tico Cocbous faiés. 700 Bceufs. 3ioo Mourons. 5Ó Laft de IInrengs falés, chaque Laft eft de dix miiliers. 10600 P.erres fmefure de 3 ou 14 livres) de Fromage. 56500 de Merluches. Voyez Anderson, année 1338.  D'ANGLETERRE. 127 aux charités qu'il avoit promis de faire (46). Le Duc de Glocefier pendant ce regne jouiffoit d'un revenu de 60000 Ecus d'or , ou de 30000 Livres fterlings de monnoye aéïuelle (47). La Dot de 150000 Liv. ft. promife & payée d'avance en 1339 par le Duc de Brabant au Roi Edouard III, eft une preuve que cet argent fe trouvoit en efpeces dans le tréfor du Duc (48). Jean Galeas Duc de Milan conclut en 1367 le manage de fa Piile avec Leonel Duc de Clarence troifieme fils SEdouard, a qui elle apporta pour Dot 50000 florins d'or de Florence, & des Terres qui donnoient annuellement un revenu de 24000 florins d'or; ou en cas qu'il préferat une fomme d'argent aux Terres, le Duc s'cngageoit a donner 250000 florins d'or pour le tout (49). La rancon de cent mille Mares d'argent pour la liberté du Roi SEcoffe, qui avoit 'été fait prifonnier en 1347, celle du Roi de France (qui avoit auffi été fait prifonnier en 1356) fut de trois millions d'Ecus d'or (50). (4CO AB. Publ. T. III. p. IV. p. 153. — Ces 91000 mares font» 25 fl. le m. 2,275000. florins. (47) H u m e ï. VI. p. 228. (48) AB. Publ. T. II. pars IV. p. 47' 011 " & ffit mention de 50 mille livres, qui cn monnoye ïftuelle font au de la de 150 mille Livres. Robbertson dans la Note XX!X. de VlntroduBion fait mention de trois eens mille Livres. Je penfe qu'il a fuivi Anderson dans fes évaluations fuppofêesl C40) AB. Publ. T. IlT. pars II. p. ie8. (509 La rancon du Roi d'Seofe devoit être pavee en 10 années, li feroit a 25 florns le mric deux millions & demi de florins.  128 Chap. V. COMMERCE Les revenus des biens Eccléfiafiiques en Anglc terre fe montoient en l'année 1412 a 185000 mares par an (51). Henry V. s'étant rendu maitre en 1418 de la Ville de Romen, taxa la ville a une concribution de 150000 Nobles d'or (52). Le Roi Henry VI. en 1450 (les revenus des domaines royaux fe rrouvant diffipés) étoit chargé de 372000 Livres de dettes (53), fomme qu'il doit avoir négociée ou parmi fes fujets ou chez les Etrangers. Enfin le Roi Henry VIL a fa mort laiffa dans fon tréfor cn argent un million de livres, ou deux millions fept cent cinquante mille livres fterlings de monnoye aétuelle (54). Tous ces objets prouvent qu'il n'y avoit pas une fi grande rareté d'efpcces que les Hiftoriens veulent nous le faire croire. Et furtout, lorfqu'on remarque ce que 1'argcnt repréfentoit dans le XIVe. &XVC. Siècle. Les Les Ecus d'or font dans Ie traité évalués a un demi Noble A'Angleterre. Le premier payement devoit être de fix eens mille Ecus, 011 trois eens mille Nobles, chaque Noble évalué alors a 74 gros, & dans laproportion leDucat a 34 gros , feroient aujourd'hui ƒ3,450000. & la fomme totale cinq fois autant, ou ƒ 17,250000. Voyez Anderson & H:J1. de France par Yillaret, T. III. p. 133 & 142. f51) Hume T. VI. p. 45. Les 185000 mares évalués a ƒ 25 le mare font 4,625000 florins. (52) Ilift. de France par Vil l are t T. IV. p. 168 année 141P (53) 0n trouve pendant le regne de Henry VI. le premier exemple des dettes contractées fur des furetés Parlementaires. Eu 1450. les Anglois furent entierement expulfés de France. Voyez II umeT. VI. p. 244, 256 & 322. (54) Hume (Hijl. de Tudor) T. I. p. 171. Henry mourut .en 1500.  D'A N G L E T E R R E. 129 Les Etats font - ils donc plus richcs- depuis que 1'argent abonde fi fort? L'art qu'on a aiïèz généraleinent introduit de s'endetter a perpétuité & dc fur* charger continuellement les Peuples, feroit plutöt une preuve évidente (ce me femble) de notre pauvretéi Si on vouloit objecler a combien peu fe montoit 1'cntretien du Roi, de la maifon Royale & même le revenu de la Couronne (55), ou le Capital auquel fe montoient les dépenfes (56), & ce que 1'Irlande couta (57), tout cela fourniroit amant de nouveaux exemplcs qu'on étoit alors cn état de faire de trés-grandes chofes avec peu d'argent. O5) Aft. Pu!)!. T. IV. pars. IV. p. 26. Anderson, année 1421. Hume T. VI. p. 125. le Revenu fe montoit k 55754. Liv. (5(>) tdem . . la depens a 52507. Liv. (57) Vlrlande coutoit tous les ans 2000 Livres au de-Ia de Ton pro» duit. Hume (Hifi. d*Angleterre) T. VI. p. 129. — „ Sous le „ re«ne de la Reine Elizabetli le revenu de cette Ifle ne fe montoit qu'a „ fix mille livres par an. La Reine en ajoutoit communément vingt „ mille, qu'elle prenoit ii regret fut f'Angleterre ; avec ces deux petites „ fommes reünies on eritrëténdit (en 1599) un corps de Troupes „ compofé de mille hommes, & qu'on portoit jufqu'a deux mille dans „ les cas extraordinaires. " Hume (fitówp T. VI. p. 16a ik i;e. Tome II. Part. I. I  130 Chap. V. C O M M E R C E IIe. période. XVIe. Siècle. Avant le XVIe. Siècle les Sociétés Commercantes avoient répandu des lumieres & inltruit les peuples du Nord fur le Commerce (58). Vers lc midi de YEurope la prife de Conflantïnopk par les Turcs (cn 1453), cau^a ^a deftrucïiori de 1'Empire des Grecs. 'Après qu'on eut découvert la propriété de 1'aimant (felon M lira tori (59) dans lc XIÏIe. & felon d'autrès au commencemcnt du XlVe. Siècle) (60) , on fe trouva en état dc faire tous les jours de nouveaux progrès dans Part de la Navigation , & furtout pendant le cours du XVe. Siècle. Et comme les images font plus propres a faire comprcndre les chofes , j'ai cru rendre fervice en inférant ici la figure des Vaifleaux tels qu'ils étoient encore dans les XIV. & XVe. Siecles. (58) On eft ravi d'admiration en voyant le dégré de PuhTance & de confidération auquel la Ligue Anféatique étoit parvenue avant la fin du XV. Siècle. Voyez dans Rymer fes différens Traités avec 1''Angleterre: Chron. Aufeat. par Willebrandt «Sc Robbert, son Introduclion p. 76 & 77. (59) M.Muratori paroit avoir des raifons fondées pour croire que la Bouflble avoit été découverte avant le milieu du Xlllme. Siècle. Voyez Dijfertazioni fopra le Antichita Itallane. t. i. p. 3c6. (60) En 1302 dans Ainalfï, ville CommSrcante en Italië.    D'ANGLETERRE. 131 On donnera donc ici les figures. I. D'un Vaifïèau Venitien , dont on trouve le deiïein fait dans l'année 1366. fur une Carte Géographique. II. D'un autre Vaifïèau, qui a fon pavillon paroit avoir été un Vaiffeau Gènois. Et III. celle d'un Vaifïèau copié d'après un tableau qui fe trouve a Venife dans la Chapclle ai Sant Orfola, dans 1'Eglife dc Sr* Giovanni & Paolo, repréfentant 1'hiftoire de cette fainte. Cc Vaiffeau eft de la fin du XVe. Sicclc (61). (61) Ces Vaifleaux Tont gravés d'après 1'Eftampe qui fe trouve dans le Livre intitule: Dell origine dialcuni Arti principali apprcjfo i Véniziani Ann. 1758. L'Aureur entre dans un détail trés curieus fur les Batimens confttuits par les Venitiens depuis le IX. Siècle, & particuliérement fur ceux du XII & XlIIme Siecles, tems. des Voyages des Croizés. Suivant une convention entre Louis IX. & la Republique (dans l'année 1268) on loua 15 Vaifleaux, dont 3 étoient de grands Vaifleaux. Un qu'on nommoit la Rocca forte étoit long de 110 pieds (appa. lemmcnt mefure de Venife) & in Colomba (la Qtiille) de 70 (a). Et un autre noiumé la Santa Maria, de io3 pieds de long, & de 70 in Colomba. Ces deux Vaifleaux étoient montés de 110 hommes de mer, ou matelots. Voyez encore Dclle Monete & delle Infl. delle Z'celte par le Comte Carli-Rubii Tomo III. Diu". VII. Et Della Dechna di Fiorenza. T. II. p. 7. O) Pour fatisfaire la curiofité de ceux qui fe COnnoifient en cette partie , j'ai traduit de Yltalien a la fin de cette première partie le texte de mon Auteur- On y Obferve en détail toute la conïrruction. du Vaifleau Santa Maria: ainfi que le fret qu'on payoit dans le XIII. Siècle dans la Mer méditerrnnée , & aufli les VaifleStiSt qui étoient d'ufaje depuis le VIII Siècle. Objets cuiieux pour les amateurs de 1'antiquité. I 2  132 Chap. V. COMMERCE En 1419 les Portugais découvrirent 1'Iflc dc Madere; depuis ce tèms pfqu'en 1484. ils firent plufieurs découvertes fur les Cötcs SAfrique: peu-après, par les encouragemens du Roi Jean, on fraya la route aux Indes orientales (62); & enfin YAmérique nous fut connue. Tous ces divers événemens contribuerent a la décadcncc du Commerce des Italiens, ou pour mieux dire, furent caufe de fa ruine. Tel étoit en raccourci 1'état des chofes lorfqu'au XVIe. Siècle Lisbonne, Cadix & Seville devinrent les Marchés oü on tranfportoit les Marcliandifes de rOricnt & de 1'Occident. C'étoit de ces trois Villes qu'on les faifoit pafier dans les places de Commerce fituées dans la Mer Méditerrannée, & furtout dans les Pays-bas, dont les habitans avoient toutes les qualités requifes pour fe rendre maitres du Commerce. Bruges & Anvers, ainfi que nous 1'avons déja vu dans le XVI. Siècle furent les marchés publics du Commerce de 1'Europe. Si 1'Angleterre n'cut aucune part dans cet accroifiement de Commerce des Pays-bas, c'eft i°. paree que fa Marine n'étoit pas encore établie pour protéger fa Navigation (63). 20. Paree que Ie Tröne n'étoit pas encore délivré des troubles intérieurs & (62) Hifi. de l'Amérique par Robeep. tson, T. I. Liv. I. (63) Lorfque Henry VIII. (mort en 1547) voulut dquiper une Hotte, i! fut obligé de louer des Vaiiïeaux de Hambourg, dc Lubec, de Dantzick, de Genes & de Venife. Voyez Hume (Titdof) T. VI. p. 537. & T. IV. p. 132.  D'ANGLETERRE. 133 des guerres civiles, & 3°. paree que le Souverain continuoit de vexcr les Commercans par toutes fortes d'impöts, & par des entraves, par des patentes particulieres, & par des privileges exclufifs; enforte que malgré les avantages que la Reforme caufa par la fupprcffion des Monafieres &c. (64), le Commerce en Angleterre rcfla pour ainfi dire encore fous le joug, fut u-èsbomc, & prefque réduit a rien jufqu'a la perte de Calais cn 1558. L'Etapc des Marcliandifes Angloifes fut alors transferée a Bruges (65), & clles fe repandirent depuis dans plufieurs endroits des Pays - Bas. La différence entre le caracrerc de Philippe & de la Reine Ëkzabeth fit de Fan un perfécuteur, & de 1'autre une protearice des Proteflans perfécutés (66). II en refulta une interruption totale du Commerce entre les habitans des Pays-Bas & ceux de ï'Angleterre. Auffi cn 1559 & 1560 chargea-t'on les cuirs & les laines deltinés pour nos contrées d'une doublé douane, on fiiquieta & on infulta nos Vaifleaux Marchands (67). Eu 1564. on défendit dc même dans les Pays-Bas Pen* trée des Draps Anglois, & 1'Etape des Marcliandifes (60 Hum f, (Tudor) T. IL p. i4o, 262. En 1538 on diinölit en plufieurs Provinces 90 Colleges, 2374 Chanteries ou Chapeiles libres &110 Hópitaux. Les revenus rle tous ces Etabliflemens lé montoient a 161,100 Livres, ib'ul. p. 335. & T. III. p. 215. C65) Andbrson année 1558, Calais avoit été pendant 211 ans au pouvoir de YAngleterre. (65) Hume (Jurtor) T. IV. p. 146 &C. (67) Bijl. de la Patrie, T. VI. p. 61. I 3  134 Chap. V. C O M MERCE Angloifcs fut transferée de Bruges \Embden (68). En 1566 on convint que provifionellement qu'il y auroit liberté de Commerce entre les habitans des deux pays (69), & 1'Etape fut remife a Anvers, oü depuis (l'an 1569) elle fut de nouveau tranfportée a Hambourg (70). Cette conduite de la part dc Philippe, & celle qu'on avoit tenue depuis fan 1551 en Angleterre vis-a-vis des Marchands étrangers du Steel yard, (71) engagerent les Anglois a donner plus d'attention au Commerce. Ce fut donc la différence qu'il y avoit entre le caraétere de Philippe & KEUzabeth, & la jaloulie qui s'étoit élevée dans le même-tems entre les Marchands Anglois & les Marchands privilégiés, qui caufcrent enfin la ruine totale de la marine des Villes Anféatiques (ji). Cette ruine tourna au (68) Anderson, année 1564. (69) Dans les Aftes de RïiiER,"Ed. 1744. % 'X. p. III. p. 164. 011' trouve un mqreeau curieux: DeduRïon Chronologique rouchrnt les Diaps A'Anglehrre, tirés des Traités entre la Maifon de Bourgogne & la Couronne £ Angleterre. Voyez a l'an 1566. (70) Hifi. de la l'atrie, T. VI. p. 305- année 1569. (71) Hume (TVor) T. III. p. 262, 263. On trouve dans les M. Puil. de Rvmer T. IX. p. II. p. 67. que la ligue des Villes Anféatiques s'étoit rendue fi puilfante, qu'elle s'étoit emparée de prefque tout Ie Commerce des Draps. II fut prouvé que dans l'année 1551. elle en avoit envoyé 50000 Pieces hors du Royaume, & que tous les Marchands Anglois enfemble n'en avoient débité qu'onze eens pieces. (72) H mm E (Tndor; T, VI. p. 335 &«•  D'ANGLETERRE. 135 profit des Anglois & des habitans des Provinces-Unies. Ce fut pendant le glorieux regne SElizabeth qu'on ctablit une marine permanente (73), & par la la Navigation Angloife étant efficacement protegée, la Nation acquit plufieurs nouvelles branches de Commerce chez 1'Etranger. Pendant le regne de Henry VLL la Compagnie des Négocians établie a Londres, & nomméc de YEtape, recut le Nom - & Avonturiers (74); fon Commerce fe bornoit* principalement aux PaysBas. Cette Compagnie avoit de fon autorité privée,exclu tous les Marchands Anglois du droit, ou de la liberté d'aller trafiquer aux grandes Foires dans nos contrées, a moins qu'on ne lui payat une certaine retribution (75). Mais malgré cette retribution on vit dans le cours de ce fiecle plufieurs particuliers s'adonncr au Commerce ; & les gros bénéfices qu'ils en rctirerent les anima a faire tous les jours de nouvelles entrcprifes & de nouvelles déO's) Hume (Tudor) T. VI. p. 337 &c. En 15S2 le nombre des Matelots fe montoit h 14205 les Vaifleaux a. 1232. dont 270 étoient au dtffiis de dix buit Tonneaux. La Marine du Royaume h la mort de la Reine étoit de 4 Vaifleaux de 40 canons. 2 de mille tonneaux. 23 —• au dciïus de 500. quelques-uns de cmquarite, & mine plufieurs de vingt. Le total des canons appartenant a la flotte étoit 774 &c. (7<0 Anderson, année 1505. Hume (Tudjr) T. I. p. 99 & 2c2. (75) Hume (Tudur) T. I, p. 203. I 4  i36 Chap. V. C O M M ERGE couvertes (76). Le Commerce que cette Société Commercante faifoit dans les Pays - Bas, furtout a Anvers , vers le milieu de ce Siècle , fut trésconfidérable (77). Au commencement du XVIe. Siècle le Commer ce au Levant, ou dans Y'Archipel, n'étoit pas encore de quelque confidération. On obferve que ce fut en 1511. que les Anglois commencerent a fréquenter ces Mers (78). Et ce ne fut que dans l'année 1513. qu'on établit dans 1'Ifle de Scio,qui appartenoit alors aux Gemis, un Conful (79), & en 1522 un autre Conful dans 1'Ifle de Candie (80). Ces deux Employés étoient des Etrangers, preuve du peu d'cxpérience des Anglois dans le Commerce de ces contrécs, puifqu'ils étoient obligés de le faire diriger par des Etrangeres. En 1530 D, Marris Marchand a Londres fut nommé par Henry VUL Conful pour réfider a Candie, & ce fut le premier Anglois qui parut dans ces contrécs dans cette qualité (81). f76) Hume (Tudor) T. III. p. 473- ,, La valenr de mille mares cn „ fonds de marcliandifes étoit: regardée comme 1'équivalent de deux „ eens livres dp rente. —— Cette circonftance prouve que le com,, merce produübit de grands profits ii ceux qui ferobraifoient. (-7) A n d e e son année 1549. Hume (Tudor) T. III. p. 419. (70) Idem. . . année 1511. fjflj AH. Publ. ff VI- V' h P- 41- PWfa. 151.3. Baptijla, JufliKano. (80) ..'ff. Publ. T. VI. p. I. p. 203. année 1522. Cenfio Balv8ij Idem. . . . . . p. II. p. 154. année 1530.  D'ANGLETERRE. 137 Dans la même année un Anglois de Plymoutlrht un Voyage a la cöte de Guinée, oü il fit quelque commerce ,& fe rendit après au Brezil (8 2). Entre 1540 & 1542 on fit d'autrès voyages au Brezil, & en 1553 on ouvrit lc Commerce avec la Rujjie (83), qui encore en 1554 fut cédé a des particuliers; ils obtinrent pour cet effct une Chartre de la Reine Mariè (84); c'eft par le moyen de cette Compagnie , & par le canal de la Rujjie, qu'on établit en 1563 un Agent a la Cour de Perfe (85), pour y avoir foin de cc qui pouvoit intérefièr le Commerce qu'on pouvoit faire dans ces contrées. Vers le milieu du même Siccle les voyages de long cours étant devenus communs, la Nation Angloifc parvint bicntöt a avoir des liaifons plus fuivies dans les endroits oü on faifoit quelque Commerce. Ce ne fut qu'en 1579 que la Reine Elizabeth cnvoya a Conftantinople (oü plufieurs Nations (86), avoient déja cn 1572 des Confuls) un Négociant Anglois, qui obtint pour fa Nation du Sultan Amurath la permifiion d'y faire le Commerce fur le pied des Comrnercans de France, ("2) Anderson , année 1530 & 1542. (83) Idem 155;;. (34) Anderson année 1553 & 1555. Hume (Tudor) T. VL ?• 332, 333 & 334. (85) Idem année 1563 & Hume p. 334. (86) Les Francais, Veniticns, Gcnois & Florentins. Voyez A Nd e rs o n année 1572. I 5  138 Chap. V. COMMERCE de Venife, de YAllemagne & de la Pologne (87). Les Anglois étendircnt enfuite leur Commerce dans les Etats de la Barbar-ie (88), avec lefquels il paroit qu'on avoit pourtant déja eu quelques relations pendant le regne de Henry VIL Lc Commerce du Cöté de la Guinée fut foutenu par des Sociétés privilegiées. En 1588 quelques particuliers recurent pour dix ans un privilege exclulif, qui fut revoqué fix mois après (89). En 1577. le célebre Francis Drake fut le premier qui eut la gloire d'achever le tour du Globe (90). Enfuite M. Waker Raleigh, d'une Société compofée de particuliers & de marchands, après avoir obtenu une Chartre de la Reine pour fon Voyage, partit en 1584 (91), & après avoir reconnu les Ifies Canaries & les Caribes, il jetta 1'ancre dans cette partie du Continent qu'on nomma alors cn 1'honneur de la Reine la Virgiuie (92). Depuis l'année 1586 les Voyages potir VAmérfc que fe multiplierent a 1'occafion des hofiilités & de (87) Andersom années 1579 & i?8i. Selon cet Auteur il fut accordé une Chartre 1 u.ie faouété de Conimercans, coiuetiant un privilege exclulif poui le Commerce au Levant & en Turquie. 11 u m e (Tudoi-j T. VI. p. 334. place Ie même fait h l'année 1583 ou envüon. (38, Anderson année 1582. '0V) 15Ü8. (yo) H ome (Tndorj T. V. p. 178. (t)i> Anderson année 1584. (929 Idem Hume p. 266.  D'ANGLETERRE. 139 la guerre avec 1'Efpagne (93). Sir F. Drake partie une fecondc fois avec une flotte de vingt Vaiffeaux pour attaquer les établifïcmens Efpagnols dans Y Amérique. Dans cette expédition St. Domingue & Carthagene furent pris; les Anglois brulerent deux autres villes fur la Cöte de la Floride , & retournerent avec tant de richefles, que malgré la mortalité qu'on avoit eu fur la flotte, plufieurs jeunes Aventuricrs furent excités a faire de nouvelles entreprifes (94). Les divers voyages qu'on fit encore a la fin de ce Siècle aux Indes Orientales, & enfin 1'établifïèment de la Compagnie, en 1600 (95), prouvent que, fur la fin du regne SElizabeth, les Anglois avoient déja acquis de grandes lumieres dans 1'art de la Navigation & dans le Commerce. Ce progrès doit être en grande partie attribué a l'établifTèment de fa marine , aux encouragemens qu'elle donna fur cet article aux particuliers & aux Commercans, & furtout a la haine que la Reine avoit contre Philippe (96). Car Peiprit des Monopoles qu'elle autorifa pendant tout fon regne, continuoit toujours (97). (93) Hume iTuJor) T. V. p. 264. (94) Idem 265, 26Ö & 339. (95) Mem . . . . VI. p. 33-. cc Anderson annee 1600. Le fonds originaire de cette Compagnie dtoit de 72000 Livres, & chaque paitie 011 portion d'lnréiöt de 50 Liv. (96) Hume (Tudor) T. V. p. 265 & IV. p. 148. (97) Monopoles fous Henrj Vil. T. Lp. 202. Anderson  I i4o Chap. V. COMMERCE On peut encore nüeux juger du progrès du Commerce des Anglois par 1'augmentation des Douanes; au commcnccment du regne de cette Princefiè ellcs fe montoient a 14000 & en 1590 elles furent déja portées a 50000 Liv. annuellemcnt (98). Quoique Tétat des Manufaétures fur la fin du regne ÜElizabeth felon Hume (Voyez T. VI. p. 341) ne fut pas encore florifiant en Angleterre, il paroit cependant que pendant le Cours du XVIe. Siècle, elles firent des progrès; car fous le regne de Henry VII, elles furent encouragécs & foutenucs (99). Et avant l'an 1582 (felon Anderson d'après Werd en ha gen) 011 exporta une quantité très-confidérable de pieces de Draps (100). Les perfécutions que les Protefians éprouverent en France & dans les Pays-Bas contribuerent au progrès du Commerce & des Manufaétures dc ce Royaume. La Bourfe, édifice magnifique, fut batie après 1553. fous Maiie. Hume III. p. 470 & 471. fous Elizabetb. T. V. p. 61, 70. T. VI. p. 39, 135. 250, 251, 297, 300, 303, 308, 309, 322 & 331. (98) Anderson 1590. M. Hume fait mention de 15000. mais il penfe que la foinme devoit être plus confidéiable. Voyez T. VI. p. 326. (99) Hume (Tudor) T. I. p. 200 & 201. (ico) II pavoit felon Hume qu'cn 1555. les Italiens avoient exporté pour le Levant plus de 40000 pieces d'Etoffes Voyez T. III p. 420. Anderson i l'an 1582 fait inention d'après Werdenhagcn qu'avant cette année on avoit exporté 200000 Pieces: ce qui me paroit un peu fort, ainfi que le Capital auquel il évalue le Commercs avec les Pays-Bas. Voyez année 1564.  D'ANGLETERRE. 141 cette Epoque aux dépens de Sir Thomas Gresham (101). Mais ce qui contribua a rendre 1'état des habitans de 1''Angleterre encore plus florifïant, fut 1'cfprit d'oeconomie que la Reine obferva dans tout ce qui concernoit les finances & fes dépenfes (102). Auffi fon crédit fut - il établi fi folidement chez 1'Etranger, que lorfqu'clle avoit befoin dargent, foit pour la reforme de la Monnoye (103), foit pour d'autrès objets, elle en obtenoit tant qu'elle vouloit, & particuliércment a Anvers (104). ILK PÉRIODE. XVHme. Siècle. Nous venons de voir le dégré auquel le Commerce avoit été porté pendant le regne dUEtizqketh; celui de Jacques I. qui parvint au tröne en 1603. nous fait voir des progrès encore plus confidérables. En 1604. lorfque les monopoles étoient (10O Hume T. VI p. 342. (102) — V. p. 157, 198. VI. p. 321 , 323 & 329. (103) Le crédit de Mafte éroit fi mal établi en 1555 i Anvers, que quoiqu'elle ofFrit 14 pour cent h la ville d'Anvers d'une fomme de 30000 Livres, elle ne put 1'obtenir que lorfque Ia ville de Londres en fut reflée caution. Voyez Hume T. III. p. 420. Voyez encore fur cet article les deux pages précédentes. En 1559 lorfque Elizabeth altera pour la derniere fois les Efpeces, en réduifant la livre d'argent a 62 Schellings au lieu de 60 qu'elle avoit auparavant, elle fit Négocier 200000. Liv. pour la reforme de fes monnoyes. Voyez Hume T. VI. p. 329, 330. (104) Humb T. IV. p. 159. T. V. p. 158.  i4a Chap. V. COMMERCE encore en vigueur, & que tout le Commerce fe trouvoit entre les mains de plufieurs compagnies exclufives, établies furtout dans Londres (105), il paroit que les droits d'entrée de cc port fe montoient annuellemcnt a 110000. & ceux des autres ports a 17000 Livres Sterlings (106). A la fin de ce regne ces objets fe montoient a 160000 Livres (107). La paix que Jacques I. procura en 1604 a Y Angleterre (108) augmenta fenfiblement le Commerce. La révocation de plufieurs Patentes en faveur des particuliers diminua les monopoles (109) , & donna un plus libre cours a rinduftrie. Dans la 3me année du Regne de ce Roi le Commerce avec YEfpagne devint libre a tous les particuliers(110),celui de la France Pétoit déja. Les manufaétures fe multiplioient de jour en jour (i i r). En 1622 on érigea une Chambre de Commerce, & ce fut la oü Paéte de la Navigation fut ébauché (112). (ioï) Abrégé Hiftorique des Mes Publics d'Angleterre, T. X. pars II. p. 73. a Partiele: raoyens que Jacques I. employa pour avoir de 1'argent. Hume (Stuarf) T. I. p. 39 & 42. (to6) Idem . . . . • . • P' 43- Tout le Commerce de Londres étoit alors entre les mains de deux eens Citoyens. O7J Idem . . . p. 323. (108; ■ 49- (109) ■ 43» 44- Ci 10) ■ ■ 340- („O 338 & 339- T. VI. p. 3&- (II2) . 341. En 1670. on établit auffi une Cham¬ bre de Commerce dont le Comte dt Sandwich fut fait Préfidenft Voyez T. VI. p. 361.  D'ANGLETERRE. 143 Pendant le regne de Charles I. (en 1639) on révoqua non feulcmcnt plufieurs monopoles (113) mais on prohiba 1'exportation des Laines (114), ce qui contribua vraifemblablement encore a augmenter le nombre des Manufaétures. La Guinée & les Indes Orientales rapporterent par le moyen du Commerce des avantages confidérables (115). On fabriquoit tous les ans a la monnoye des efpeces pour la fomme de 700000 Livres Sterlings. Le Commerce avec YEfpagne fe trouva alors entiéremenc entre les mains des Anglois, & on cnvoyoit annuellement 20000 pieces de Draps en Turquie (116). Les troubles & les guerres Civiles qui occafion- (113) Proclamation de la volonté du Roi iür divers Oébois, Pernriffions ccComnrffions qui ont été obtenues fur des fondemens controuvés. Voyez /Iel. Publ. T. IX. p. II. p. 220. (114) Proclamation pour mieux rcgler le tianiport des Draps & autres Manufaclures de Laines en Alkmagne & aux Pays - Bas & pour empöclier le franfpórt de la laine, des peaux de laine, de la laine filce- &c. Voyez AB. Publ. T. IX. p, II. p. S21. II paroit qu'on avoit déjii fait ci-devantdes défenfes au fujet des laines. Commiifion particuliere adreflee au Lord Préfidont du Confeil privé, & a d'autrès (eaettant le Commerce des Laines de l'année 1622. Voyez AB. Publ. T. VII. p. IV. b. 11 & Hume QStuare) T. I. p. 339. & Andersom aux années 1622 & 1639. (115) Hume T. IV. p. 332. (n6) Hume T. IV. p. 332. Cet Auteur dit que 1'augmentation du Coin pendant les regnes de Charles II & de Jacques II. fut de dix millions deux eens foixsnte un mille Livres Sterlings. Voyez T. VI. p. 360. Voyez encore Oir les monnoyes fabriquées dans le XVII Siècle Anderson année 1638, 1646, 1657. p. 101. 16570, 105 & 1675.  i44 Chap. V. COMMERCE nerent encore des guerres au dehors pendant 1'intcrregne, & même pendant le regne de Charles II. cauferent de 1'interruption au Commerce. Cependant les Anglois devenant .plus libres fous le Gouvernement républicain, lc Commerce s'accrut a mefure qu'il fut moins géné & plus protégé. En ió"5i. fut dreffé le fameux Acte de Navigation (117) portant en titre: Acte pour accroitre la Navigation & le Commerce. Par cette inilitution Cromwel fe propofoit de ruiner (fi la chofe eut été poffible) le Commerce & la Navigation des Hollandois & des Zélandois; il eut du moins la fatisfaction de fe venger de la conduite louable que notre République avoit tenue pendant le tems qu'il exenjoit fes horreurs en Angleterre. Les Evénemcns qui ont fuccédé ont fait voir, qu'on ne nous caufa pas alors autant de tort qu'on lc penfoit dans le tems. Si cet Acte fut utile & contribua a 1'accroifiement de la Navigation & du Commerce des Anglois, 1'expérience démontra dés avant la fin du même fiecle, que le Gouvernement Anglois avoit donné trop de foins a étendre fon Commerce chez Pétranger. Car en 1689 on TUt obligé d'encourager & de ranimer 1'agriculture par des Dons gratuits (118). Les fortunes rapides que le . Anderson année 1651. Home T. IV. p. 103. (u8) Anderson année iólio. Le rróinent recoic 5 Schelling paf  D'ANGLETERRE. 145 le Commerce procuroit, avoit fait abandonner la culture des Terres, bafe primitive, & je ne crains pas de le dire, bafe unique fur laquelle on peut dire que VAngleterre avoit fondé fon Empire, ainfi que nous 1'avons démontré dans tout le Chapitre précédent. Les divers Bilans du Commerce pendant le cours du XVIP.Siècle,que M. Anderson nous a confervés, peuvent nous donner les meilleures idéés de 1'accroiflement du Commerce (119). Mais fi nous les comparons a ceux du XIVe. Siècle, que nous avons donnés, ne peut-on pas affirmer que dans la proportion IAngleterre étoit alors réellement beaucoup plus riche, qu'elle ne le fut dans le cours du XVP. & du XVIP. Siecles? Pendant le cours du XVIP. les principales Compagnies qui avoient recu des Privileges exclufifs pendant le regne iïElizabeth & les deux regnes précédens, furent confirmées & on en forma par quarter, mefure d'environ 460liv. poids de mare, lorfqu'il n'excede pas le prix de 2 liv. 8 fclielings Sterlings. Le feigle re?oit 3 fchel. 6 deniers, quand le prix eft & 1 Liv. ia Schel, ou plus bas. L'orge 2 fchel. 6 deniers au prix de 1 liv. 4 fchel. mais lorfque les prix excedent, la gratification celle. (119) Anderson, année 1613,1622,1668,1688 & 1699,die qu'a l'an 1613 les Exportations moncerent ii . . . . Liv. 2,487435 . & les Importations 2,141151 4 a l'an 1699 Exp r.iv. ^9.^ ImP 5,640506 — Tome IL Part. I. K  H6 Chap. V. C O M M ERCE de 'nouvelles. Celle'qui commcrcoit fur la cötë A'Jfrique, qui en 1618 avoit recu une Chartre de Jacques-l (120), & laquelle fut depuis continuéc ou renouvellce, accorda cn 1698 a des particuliers la liberté de faire le Commerce fur cette ebte moyennant une redevance dc 10 pour cent (121). Les pêches cn général ont toujours été cn Jngkierre un objet chéri du Gouvernement, ou du Souverain , & auquel on a donné tous les foins imaginables. La Compagnie de Rufjie étant par fes chartres primitives en poflefTIon dc commercer fin- les Mcrs fituées vers le Nord, fe trouva par-la en poffeffion de la pêche dc la Baleinc en Groenlande (122). C'efl cc qui a fait que les Anglois fe font adonnés fort tard a cette pêche, dans laquelle ils n'ont figuré que dans le courant de notre Siècle, & furtout depuis qu'ils 1'ont animée par des encouragemens a la charge du Gouvernement (123). (120) Anderson, année 1618. (121) — 169,8. (122) > 1613. (m*) . — 1693 & 169I, dit que les Anglois n'ont figuré dans cette pêche que dans le Courant de notre Siècle ; c'eft ce qui paroit -par un Mémoire qui fut préfenté aux Seigneurs les Etats de Hollande & de Westfrife fur 1'état dans lequel fe trouvoit cette pêche pour nous -ou relativement a notre Pays : on y expofc conunent les Anglois Ont confiderablcment augmenté cette Navigation depuis que le Parlement a accordé une prime de 40 Schel, par Tonneau ,• enforte que de deux Vailfeaux qu'ils avoient, la quantité en étoit montée en 1775 a 109. Cette prime fut évaluée tl 66636 L-. S. Ce Mémoire eft ttès-curieux fur ce qui conceme cette partie, & fe trouve dans mos Annales T. "XII. Au "mois de Mars 1777, les Ettts réfolurent d'accorder une  D'A NGLETERRE. 147 Jc n entre, au refte, dans aucun détail fur toutes les révolutions que les diiTérentes Compagnies exclufives, & fur-tout celle des lades orientales ont eflüyées (124). Mais par la nature de mon récit je me trouve obligé de dire comme cn paflant un mot d'une troupe d'aventuriers connus fous le nom de Flibufliers, & qui ont figuré fur le Théatre du nouveau Monde fur-tout depuis environ 1660 jufques vers la fin du même Siècle. Si ces perfonnes ou les chefs de ceux qui compofoient ces diiférentes bandes d'aventuriers avoient eu plus de conduite, il eft vraifemblable que dans le Siècle paifé ils feroient parvenus a ié formcr un Etat trèspuifïant dans quelques-unes des liles de ces contrécs. Ces Flibujlïers étoient compofés de Francois, $ Anglois & de Hollandois. Ils étoient a proprernent parler des Corfaires ou pirates , qui firent un tort confidérable aux EJpagnols. Les circonftanccs cn Europe étoient favorables a leurs entrcprifes. Ils étoient la plupart d'une conduite li- prime de 30 ƒ. par tête au profit des Propriétaires des Navires qui fe» roient e>,pédiés pour cette Pèclie, & de laquelle foinme les Propriétaires peuvent difpofer lorfque le Vaifieau a ïnis en mer. Cet encouragement utile mérite la reconnoilfance de tout bon Citoyen , ces moyens étant les meilleurs pour mainttnir notre Commerce. Si la jaloufie travaille ii mettre des obftacles ii cette branche de commerce, de quoi veut-elle que notre Nation s'oecupc ? d'autant qu'elle fait par néceffité & trbs-fouvent ii fon préjudice cette pêche , pour occuper fon monde, tandis que les Anglois aniuiés d'un efpric de jaloufie pqurroient occuper leur monde ailleurs avec beaucoup plus d'utilité pour leurs intéréts(ia.0 Anderson aimée 1681, & 1698. K 2  148 Chap.V. COMMERCE cencieufe & déréglée, mais en état de tout entreprendre. Leur Hiftoire contient des rélations aficz curieufes, en ce qu'elle fait voir ce que des hommes intrépides font capables de faire; mais il n'eft pas douteux qu'elle ne fut encore devenue plus intéreffante, fi ces Aventuriers avoient eu des fuccès plus heureux (125). Je penfe qu'avec de la conduite ces hommes intrépides auroient &Lkéax\sl'Amérique avecunefprit commercant, ce qu'on fit dans les XIIe. & XIIIe. Siecles dans la Mer Méditerranée par efprit de Religion, & dont il nous refte encore 1'ordre des Chevaliers ■de Malthe qui en tirent leur origine. Leur Hiftoire tient un rang diftingué dans les Bibliotheques, & leur ordre eft compte en quelque forte parmi les Puifiances Européennes. Maintenant il nous refte encore a dire un mot des Colonies Angloifes fituées dans YAmérique. M. Hume eft entré fur leurs premiers établiflèmens dans un détail fi ample & fi bien concu, qu'il ne me refte qu'a y renvoyer le lecteur (126) Ces Colonies fur le Continent ont été principalement fondées pendant le regne de Jacques I (127). Elles, auffi bien que celles qui fe trouvent dans les (125) Hift. des Fübuftiets. Anderson T. II. p. 140 & 185 , & Hifoire Pbilofophique & Polkique &c. T. IV. p. 36 a 65. Edition originelle. (126) Hume (S/nart) T. I. p. 346, 347 & 348. (127) Idem p. £45. Voyez encore Act. Puit. T. VII. Edition de 1743.  D'ANGLETERRE. 149 Ifles, ont été fondées & cimentées par toutes fortes d'encouragemens & de bienfaits de la part du Gouvernement Anglois. Elles font devenues encore plus florifiantes par Fefprit de mécontentement & de fanatifme, qui a regné en Angleterre fur-tout pendant le cours d'environ un demi Siècle (128). Sans un ordre du Confeil émané par Charles I, Olivier Cromwel feroit parti avec plufieurs Seigneurs Anglois pour YAmérique; le jour de leur arrêt ils fe trouvoient déja embarqués, dans le deffein dc quittcr leur patrie (129). Ce fut fous le même Cromwel (en 1655) que la Jamaïque, Ifle aujourd'hui de la plus haute importance pour les Anglois, fut conquife fur les Efpagnols (130). Les progrès que toutes les Colonies ont faits, a furpafië 1'attente même de YAngleterre. La nature de cet ouvrage ne me permet pas de m'étcndre d'avantage la-deflus; d'ailleurs les circonftances actuelles me donneront peut-être 1'occafion de revenir fur cet important objet. II eft tems maintenant de terminer cet Abrégé Hiftorique par des remarques générales, pour démontrer combien, lorfque Guillaume III monta fur le tröne, 1'établiflèment d'une Banque publique C12ÏO Hume T. IV. p. 333- T. II. p. i«9. Mn. 1637. & T. IV. pag. 92. (129) T. II. p. 190. (_i3o) T. IV. p. 179. Anderson ann. 1653 K 3  igb Chap.'V. COMMERCE devint pour la Nation & pour 1'Etat d'une néceifité abfolue. Mais avant de vcnir a cette conclufion, fuivons encore un moment 1'hiftoire des Banquiers ou des Changeurs publics. Nous avons vu que pendant les XII. & XHR Siecles tout ce qui conccrnoitles Efpeces ou qui y avoit du rapport fe trouvoit entre les mains des Marchands Italiens. Depuis Henry I. 1'office de Banquier ou de Changeur public dépendoit entierement du Souverain., & étoit confidéré comme une pré* rogative Royale (131). Le Roi Jean afferfna 1'office du change de Lon- ~es pour 5000 Mares. Cet Etabliflèment étoit fitué dans Londres proche de la Cathedrale de St. Paul,, & dans un Edifice qui a donné le nom a une rue nommée Old-change (132). • Sous les Regnes fuivans il y eut dans les priricipales Villes outre Londres des Maifons dc Change. La maniere dont on faifoit alors le Commerce rendoit cet office trés lucratif. Indépendamment des échanges des Efpeces, il paroit qiïen Augletcr* re ces Perfonnes prenoient & donnoient de Fargénr. k intérêt. Dc Féchange d'un Ducat ils avoient un denier & d'un Noble un denier & demi (133). O31) AwnERsoN nnnée ir>28, Cca) 1628.  D'ANGLETER R E. 151 On peut obferver par la conceffion que Henry VIL fit l'an 1508 a Pietro Corfy Marchand Florentin, que ci-devant on payoit un denier pour échanger un Ducat, & qu'alors 011 pcrmit d'en prendre 3. pour change & rechange (134). J'entends par-la que c'étoit en changeant une Efpcce Etrangere contre une autre Efpece Etrangere. Ce Privilege fut accordé, moyennant une redevance au Roi de 240 Livres chaque année (135). Les Lettres de change qui dans le Courant du XVe. Siècle étoient devenues plus en vogue, rendit les échanges des Efpeces moins fréquens, & au lieu de ces échanges en Nature on accorda encore des privileges pour Negocier en lettres de change. Henry VIII Pan 1509 accorda a Thomas Boleyn (Milite pro corpore no/ïro) le privilege dc donner dans la ville de Calais a tous les Voyageurs qui y pafièroient, foit en pelerinage pour Rome ou pour les affaires de Commerce dans d'autrès endroits, des Lettres de change contre des Efpeces. Et pour ce trafic il lui fut permis de prendre tel lucre ou profitdont on pourroit convenir (136). Cet oétroi lui fut accordé fous une redevance dc L. 30. 6. 8. payable au Roi annuellement. Cela continua ainfi, jufques vers le milieu du (1.34) Act. Publ. T. V. p. IV. p.256. Anderson T. I. o. 33?. 035) Idem. (130) Idem, T. VI. p. I. p. 4. K 4  i5a Chap. V. COMMERCE regne de Henry VIII. Son goüt pour le plaiiïr & les folies dépenfes épuiferent fon tréfor. L'an 1522. il avoit fait faire un dénombreraent exact des habitans de fon royaume, de leur age, dc leur profeffion, dc leur fonds & de leurs revenus; & trouvant la Nation trés opulente, il demanda aux plus riches Citoyens un Emprunt particulier 137). Au refte pendant fon regne il exerca une autorité abfolue, & dans fes befoins non fculement il altera la monnoye en faifant frapper des Efpeces d'un trés bas titre, mais il haufla le prix de 1'or & de 1'argent (138), de forte qu'il fut prefque impofllble d'établir un change régulier. Cette manoeuvre fit tomber les échanges des Efpeces entre les mains des orfevres, qui par leur profeffion étoient le mieux a même de conduirc avec avantage ces fortes d'affaires. D'ailleurs les befoins particuliers du Roi auront fans doute facilité 1'introduétion de leur trafic; car avant ce tems il femble qu'ils étoient bornés a la profeffion feule d'orfcvre ordinaire (139). La Reine Elizabcth voulut remedier h ces abus, qui (par des conceffions foit tacites ou ufurpées) s'étoient introduits parmi les orfevres dans le Com- (13;) Hume (TudorO T. H p. 36. (138) 1 T. III. p. 37 & 219. (cy) Proclamation pour empeclier Ia fortie & la conrommation de Pot & de 1'arsent tant rnonnoyé que non monnoyé. Voyez M. Puil. ï. VII. p. 111. p. 243.  D'ANGLETERRE. 153 merce(140): mais il paroit que cela neut pas tout 1'effëtattendu,du moins cela neut lieu que pour un tems; vraifemblablement que les changemens dans la monnoye qui eurent lieu pendant fon regne (141), 1'accroiffement de la Navigation & du Commerce étranger ne lui permirent pas de remettre alors les affaires fur leur ancien pied. Pendant le regne de Jacques I. les finances étoient trop mal dirigées, pour toucher a cet article, les Orfevres ou les Banquiers étoient d'une reffource trop néceffaire dans fes befoins continuels. Charles I, Prince moins politique & trés jeune, par conféquent peu verfé dans les affaires, voulut tout d'un coup remettre les chofes fur leur ancien pied. En conféquence l'an 1627. parut une ample Proclamation, dans laquelle on obferve combien les orfevres s'étoient rendus les maïtres du Commerce entier de toute forte d'or & d'argent foit en barres ou rnonnoyé. Le Roi y reclame fes prérogatives, & déclare vouloir reformer Pabus qui étoit refulté d'une certaine liberté devenu commune, particulierement parmi ceux qui exercoient le métier d'orfevre dans la ville de Londres & autres lieux de fes Etats &c. II établit Henry, Comte de Holland, pour exercer 1'emploi de Changeur Général $ Angleterre, (14°) Ad. Puil. T. VI. p. IV. p. 167. 04 O Anderson *nn. 1560, 15-76 & 1600. K 5  i54 Chap. V. C O M MERCE . 202. BIS. of Trade and Comm. T. I. au mot Bank of England. Et An AbftraS o/Their Majesties Commi pon, undcr the great Seal, dated the i$ih day of June 1694. Fjr taking fubferiptions for the Bank, purfuant to the late Act of BarMament.  DE LONDRES. 163 Mais la Soufcription ayant été entiérement remplie dans 1'efpace de dix jours, cet Aéle provifionnel , émané du Parlement, prit de Ia confiftance (3). En conféquence une Banque publique fut établie fous le nom de Gouverneur cF Compagnie de la Banque d, Angleterre (4): & elle fat érigée a-peu-prés, d'après les vues & les principes que M M. William Pat er fon, Négociant-, Michel Godfrey Efqr. & quelqucs autres Perfonnes avoient expofés & concertés enfemble dés l'année 1691 (5). Cette nouvelle Société publique obtint fa Chartre originaire fous le grand Sceau, laquelle eft datée du 27 Juillet 1694. En voici quelqucs articles fondamentaux: 'Extrait de lA&e du Parlement & de la Chartre, coneernant Vétahliffement d'une Banque publique. 10. Que la Compagnie ou Société de la dite Banque feroit formée par les Perfonnes qui auront foufcrit pour une partie du Capital de douze eens mille Livres fterlings, & que les fonds en pourront être négociés, vendus, ou transferés a d'autrès. «°. Que chaque propriétaire de 500 Livres & (3) Anderson T. II. p.203. La première Soufcription fut faite par plus de treize eens Perfonnes. Voyez A Schort of ths Bank of England, London 1695. O) Acte du Parlement de Ia 51110 année de GuiLLAUMC&de Marie Cap. 20. cc SecT:. 20. Anderson T. II. p. 232 & 203. L 2  i6"4 Chap. VI. BANQUE au-deffiis dans Iedic Capital aura voix dans les Affemblées générales concernant la régie &c. des dits fonds. 30. Que ces propriétaires choiilront leur Gouverneur, fous -Gouverneur, & vingt quatre Dire&eurs. Et que perfonne ne feroit éligible pour quelqu'un de ces poftes, a moins qu'il ne fut né en Angleterre, ou qu'il n'eüt obtenu des Lettres de naturalifation. 40. Que, pour être éligible ou admis au pofte de Gouverneur, il faudroit en outre être propriétaire pour fon propre compte dans la Banque d'un capital de 4000 Livres, le Sous - Gouverneur de 3000 Liv. & chaque Dire&eur de 2000 Liv. 50. Qu'un Membre de la Chambre des Communes pourra être Membre de cette Compagnie de la Banque, nonobftant le Statut 5 & 6 de Guillaume & de Mark (Seéh 33). Dans la fuite il fut ftatué que pendant que le Gouverneur, SousGouverneur ou les Birecleurs feroicnt en fonction dans la Banque, aucun d'eux ne pourroit avoir d'emploi dans la direélion de la Compagnie des Indes Orientales, & réciproquement (6). (6) Statute 5 and 6 of Will. and Mar. Cap. 7. & 9 Ann. Cap. 7. S. II. ——— Voyez Dict. of Trade of Comm. II n'y a aujourd'hui aucune Loi ou Reglement pour empêcher qu'un Directeur de Ia Banque foit membre du Parlement; il y a même aftuellement quelques Diredleurs qui le font; mais on ne peut en même - tems être Directeur de la Banque, & de quelque autre Com. pagnie octroyée.  DE LONDRES. 165 6°. Que le Gouverneur, Sous -Gouverneur & les Dire&eurs feroient fculement en fonftion pendant une année (7). Ils étoient en outre obligés de prèter ferment entre les mains du Lord Keeper (Garde du Sceau) ou du Chancelier, &c. •7» Que les propriétaires dans une Afïcmblée générale & a la pluralité des voix pourroient régler, limiter, ou fixer les Honoraires du Gouverneur, Sous-Gouverneur, des Dire&eurs, des Employés &c. On fixa en même - tems la maniere dont leurs AfTemblécs ordinaires fe tiendroient. 8°. II fut permis de négocicr cn toute forte de Billets, ou en Effcts commcrcables, comme Lettres de change, en or & en argent, foit en Efpeces monnoyées, foit cn lingots ou billion &c; on per' mit auffi dc recevoir toutes fortes dc Marcliandifes en dépót, fur lefquelles on avanceroit de 1'argcnt; mais on y ajouta auffi pour condition, que fi TEmprunteur n'avoit pas rembourfé au tems fixé ou dans 1'efpace de trois mois la fomme qu'il avoit recue fur un gage dépofé, alors la Banque pourroit procéder a faire la vente des Marcliandifes qu'elle avoit recu en d'jjöt. (-) Les premiers Adrnhjltrateurs de la Banque' devoient refter en fonftion jufqü'an 25 Mars 1096. Le ferment toXAi ét.e pretë entre Ï»S mains du lor,! Keeper (Garde du Sceau; ou da Ch.u ceher ccc. & dans la fuite il fut permis qu'h chaque nouve le éleitlon on pourroit choifir le nombre des deux tiers des anciens Directeurs. Voyei Anderson & les Auteurs cités a la Note 2. L 3  i66 Chap. VI. BANQUE La Banque avoit encore Ie droit de prendre des Terres en hypotheque, & par conféquent de vendre les produits de ces terres. H fut cependant défendu d etendre ce privilege fur les Terres Domaniales (de la Couronne) & de faire des avances au Gouvernement, a moins que le Parlement n'y eut au préalable autorifé la Banque. Et dans ce cas lc Parlement devoit pour cela affigner les furetés néceffaires pour le payement des intéréts. Le tout fous peine de certaines amendes fh'pulées &c. U leur fut défendu de pouvoir faire pour le Compte de la Banque aucun Commerce en Marcliandifes, foit par achat ou vente , fous peine d'une amende &c. 9°. Qu'on feroit une jufle repartition des profits que la Banque feroit ; que ces profits feroient verfés fur lc capital, & qu'on établiroit un Divident au prorata du capital de chaque particulier; mais que pour cela il faudroit au préalable convoquer une Aflèmblée générale &c. io°. II fut fait défenfe exprefic a la Banque de faire de nouvelles Soufcriptions, ou d'entreprendre de nouvelles Négociations, au deflus de Ia ditte fomme de douze eens mille Livres Sterlings. On flipula en outre que la Banque ne pourroit donner des Billets fous fon fecau que pour la fomme de 1,200,000 Livres, a moins qu'un nouvel  DE LONDRES. 167 Aéte du Parlement ne Fy autorisat &c. Mais il fut tacitement permis de faire circuler dans le public fes Billets &c. comme nous le verrons plus clairement un peu plus bas (8). ii°. La Banque fe chargeoit de fournir , par forme de prêt, & pour fubvenir aux befoins de FEtat, la fomme de douze eens mille livres Sterlings, pour Fintérêt de laquelle fomme, (a raifon de huit pour cent) on lui adjugea la fomme de 96000 Livres Sterlings fur les droits qu'on perccvoit fur les Vaifleaux, fur la Bicre , fur leCidre, & fur d'autrès boifTons: a cette fomme en devoit être jointe une autre de 4000 livres fterlings, pour les fraix que la Banque feroit obligée de faire pour 1'adminiftration des affaires qui avoient du rapport avec YEchiquier ou la Tréforcrie de FEtat. Ces deux fommes formoient ainfi en tout un revenu annuel de cent mille livres fterlings (9). 12°. Enfin pour abréger j'ajouterai uniquement, qu'on n'accorda a cette Société la jouiffance des privileges ci - deflus mentionnés, que jufqu'au premier d'Aoüt de l'année 1706. Mais on convint de part (8) Anderson rapporte (voyez T. II. p. 203.) u'après M. Godfrey, que la Banque pouvoit faciletnent faire circuler en Billets ion Capital de 1,200,000 Livres, fi feuleraent elle avoit lom de tenir en caifie Ie qrart de fon fonds, ou une fomme de 300,000 Livres, pour être toujours en état de fatisfaire aux payemens qui pourroient être demr.ndés en Efpeces. (9) Voy. Anderson p. 202 & 203. & la Chartre du 2; Juillet 1694. L 4  i68 Chap. VI. BANQUE & d'autre qu'on s'avertiroit mutuellement une année auparavant, pour déclarcr ii la dïte Société continueroit d'éxifter fur le même pied, ou fi le Capital preté feroit rembourfé (10). Tels Furent les princioaux articles concernant l'EtMflrflèmèrrt & la régie de la Banque de Londres , & d'après lefquels elle commenca fes premières opérations. Dans la fuite les circonftances oü 1'Etat fe trouva furent caufe qu'elle fut non feulement maintenue & continuée,mais qu'elle acquit même de nouvelles prérogatives, qui de tems a autre ont varié, felon le cours & Fétendue du Commerce de YAngleterre cn général (n). Nous n'entrerons pas dans un détail circonftancié fur chacune de 'ces révolutions, paree qu'elles n'ont infiué en Hen fur 1'eflèntiel de 1'adminiitration dc la Banque. Son principal but a prefque toujours été de procurer & d'accélerer la circulation & les opérations du Commerce, & de foutenir le Crédit de la Nation dans les befoins preflans de 1'Etat. Nous tachcrons donc principalement de fuivre les révolutions qui ont eu lieu rélativement au Crédit dc la Banque; car, comme on ne manquera pas de 1'obferver, ce font en partie des circbnftanees facheufes qui ont fouvent contribué k (lo") Voyez la Note précédente. 00 Voyez Anderson 6? DIS. of Tradi and Comm.  DE LONDRES. i6> augmenter le fonds ou le Capital de cette Banque. Le public étoit accoutumé depuis environ un demi Siècle a voir rouler de main en main les Billets que les Banquiers & les Orfevres avoient mis en vogue fur la place de Londres, & furtout entr'eux: mais les pertes qui en étoient réfultées pour les particuliers avoient rallenti 1'ardeur de ceux qui avoient placé leur argent entre leurs mains, & avoient en mcme-tems retrcci la confiance publique (12). Ce fut cette confiance qu'on [fe propofa de faire revivre, par 1'établiiTèment d'une Banque qui réuniroit elle feule la direéh'on de toutes les affaires que les Banquiers avoient fait jufqu'alors fur la place de Londres. Mais pour établir cette confiance fur un pied folide & a 1'abri de toute crainte pour les particuliers, il auroit fallu un tems moins orageux que celui oü on fe trouvoit. Le Crédit dépend trèsfouvent de 1'opinion: fi on veut 1'étendre, on fair fouvent plus de mal que de bien. La Banque en (12) Dans Ia Brochure intitulée A Schort account of the Bank of England inirrimce en 1C95, i] eft fair, mention des peites que les Orfavres ou les Banquiers avoient occafionnées, & comment la Banque avoit déja réduit Pintérêt de 6 a 5, 4 1 & même a 3 pour cent l'année. On y voit aufii que les opérations de la Banque fëivirënt a établir la valeur des Terres (fur lc pied d'un revenu au denier 3omeO, & que par la les pófièfleurs des Terres dans YAr.gkterrc fèule pou' voient augmenter leur Capital de cent millions de Livres fterlnigs. L 5  i7o Chap. VI. BANQUE fit 1'éprcuve prefque des Ie comniencemenc de fon établiffement. Le détail oü je vais entrer confirmera ce que je viens de dire. Les particuliers, excités par Tappas du profit qu'ils étoient a même de faire de 1'argent qu'ils avoient dans leurs coffres, & plus encore par un effet de la confiance qu'on avoit dans la folidité de la Banque, y apporterent leur argent; cet argent fut le premier fonds par le moyen duquel la Banque étendit fon Crédit, répandit dans le public fes Billets, continua fes affaires, & foutint fes opéradons. Pendant la première année les affaires journalieres confifierent principalemcnt dans les efcomptcs des lettres de change, dans les avances fur des Hypotheques afiürées, dans le Commerce de 1'or & de 1'argent en Efpeces monnoyées & en lingots, & auffi dans les avances fur des Tailles, Impóts &c. Et par la fuite la Banque contribua a donner un libre cours aux Billets de YEchiquier (13). Le Crédit de la Banque au printems dc l'année 1695 paroiflbit affez bien établi, & c'eft ce qui fit naitre a fes Adminiftrateurs lc projet d'augmentcr les profits de la Banque par une extenfion qu'ils crurent pouvoir donner encore a leurs affaires. On en fut averti par une Annonce dans les Papiers publics (1;) Anderson, p. 203 &c.  D E L O N D R E S. 1?1 du 6 May 1695, & qui eft rapportie par Anderson. II y eft dit: que les Direéteurs de la Banque, d'après cc qui avoit été réfolu dans leur AG femblée, offrent au public de faire des avances, ou de preter de 1'argcnt courant fur de 1'argent en barres ou en lingots, fur le Plomb, fur 1'Etain , le Cuivre, 1'Acier & le Fer, & cela a raifon d'un intérêt de 4 pour cent par an (14). Voila comment on étoit déja parvenu en fi peu de tems a reduire le taux de 1'intérêt: & ceel prouve encore combien on étoit attentif & induftneux pour étendre les opérations & les entreprifes de la Banque. Mais a mefure qu'elle embraflbit de nouvelles branches, & donnoit ainfi plus d'étendue a fes opérations, celles des Banquiers fur la place diminuoient dans la même proportion , ce qui augmentoit joumellement Ia jaloufie, entre ces deux concurrens. Aufii vit-on paroitre dans le public plufieurs Brochures de part & d'autre, pour démontrer le préjudice ou 1'avantage qui devoit réfulter d'un pareil Etabliflèment. La refonte des Efpeces, qui eut lieu dans ce temsIa, & les intentions louables des Adminiftrateurs de la Banque, qui firent tous leurs effens pour preter leur affiftenceafin de foutenir le crédit de l'Etat,renverfa leur propre crédit. La perte que le public avoit (14) Anderson, p. 204.  i-a Chap. VI. BANQUE fait fur les Efpeces, 1'ialerruptibn que cela avoit caufé clans le Commerce, joint au mécontentement & aux clameurs des Banquiers, tout cela avoit occafionné un discrédit total fur la place, & arrêté toute forte de circulation en papiers (15). Auffi la Banque, ne pouvant plus faire honneur h fes engagemens qu'avec de 1'argent comptant, fe vit-elle bientöt obligée de differer fes payemens. Elle fe borna a payer dans les commenccmens dc ce discrédit fur fes Billets qui couroient dans le public, tous les quinze jours un a compte de dix pour cent, & enfuite chaque trois mois feulement trois pour cent (16). Aufii les Billets de Banque perdirentils fur la place 15 a 20 pour cent, & les Billets des Tailles &c. furent .vendus a 40 & a 50 pour cent de perte (17). Enfin la Banque dans l'année 1696- fut encore obligée de demindcr de nouveaux fonds aux propriétaires, & la reftitution des d ■ .(.'."elle.avoit preté. L'un & 1'autre objet ne, :■. rempli que trés ïentement , £1 avec peu d'honncur pour la. Banque ; • c'eft ce qu'on peut obferve? puf-Ie 'detail:que nous rapportons la-deffüs m note (18). (15) Anders o n p. 217. On avoit apjG étahti une Ban.jue e» Ecofle. Voyez p. 208. (16; Anderson p. 217. (17) Idem, p. 217 & 219. (i3) La Banque. penda it le difcrédit, fit un appel ii fes Intérefliis de 20 pour cent au pro rato du Capital dc chaque Propriétaiie , ious  DE LONDRES. 173 Après que la refonte des anciennes Efpeces a la Monnoye eut été faite, que les nouvelles Efpeces eurent été répandues dans le public, & furtout après que la Paix avec la France eut été conclue, le crédit de la Banque & de VEchiquier fe retablit, & ce fut VEchiquier qui mit la Banque a même de liquider fes engagemens. On fit de nouveaux arrangemens pour liquider les anciennes dettes de la Banque, & pour établir fon crédit a 1'avenir fur un pied plus folide: fa Chartre fut confinnée, & fous la Reine Anne elle fut même prolongée. On lui accorda de plus, qu'après que fon Capital auroit été porté a Douze Cens mille Livres, il lui feroit permis d'ouvrir une nouvelle Soufcription (19). Ce fut a cette occafion que le Capital de la Banque, qui jufqu'alors n'avoit été que de 1,200,000 promefle d'un intérêt de fix pour cent par an, & qu'en payement elle recevroit fes propres Billets, qui perdirent encore Ie 21 Juin 1697, 13 a 14 pour cent. Elle accorda de plus qu'on pourroit difpofer k la Banque par forme de tranfport jufqu'fc la fomme de cinq Livres fterlings a Ia fois. Voyez Anderson. A la page 217, on obferve encore plus clairement 1'embarras de la Banque, & combien peu fes Propriétaires étoient cinprelfés a fatisfaire promntement a 1'appel que la Banque leur avoit fait. (19) Andersom, p. 217, 219 & 244. Et Biel. of Trads ani Comm. oü les différents Actes concernant la Banque fe trouvent cités. Pendant le difcrédit il y eut plufieurs Perfonnes qui firent des gains confidérables par 1'achat des Billets de Banque. Entr'autres une feufa Perfonne y fit un gain dans ce tems-la de foixaute mille Livres fterlings. Voyez Anderson p. 219.  ï74 Chap. VI. BANQUE Livres Sterlings, fut augmenté de 1,001,171-10. & porti par conféquent £12,201,171 livres, 10 fchelings. Le Parlement affigna auffi a cette nouvelle fomme un intérêt de huit pour cent, a prendre fur les impöts du fel (20). Telle a été forigine de la Banque de Londres fous le regne de Guillaume III. Dés que ce Roi fut mort, & que la Reine Anne fut parvenue fur le Tröne , elle déclara auffitöt la guerre a la France (21), laquelle dura pendant prefque tout fon regne. La Banque affilte de nouveau la Tréforerie ou 1'Etat pendant le cours de cette guerre. Elle s'étoit même engagée a faire circuler pour un million & demi dc Billets de VEchiquier (22); Et pour fe mettre plus en état de foutenir par fon crédit 1'engagemcnt qu'elle avoit contraclé, elle accorda de nouveau a fes Billets, qui avoient cours dans le public, un intérêt de trois pour cent par an, lequel intérêt dans l'année 1708 fut porté a fix (23). Ce fut alors que la Banque fe trouva OcO Voyez Anderson& DIK. of Trade and Comm. &c. (21) $1 & ttöfcr les Dates, & Réfiïxions Politiques de Mylori Boling'broke dans les Difours Politiques de D. Hume, T. I. p. 338. (22) Voyez Andersonp- 244. & DiSi. of Trade and Comm. (23) Au commencement de 1'EcablhTement de la Banque, elle accorda aux Billets courant fur la place uu intérêt de 3 a 4 pour cent par an. II paroit que cela fut défendu dans la fuite, & auffi de nouveau permis, felon les circonflances. Voyez Andersom p. 217, 244 & 247.  DE LONDRES. 175 de nouveau dans le plus grand etabarras; car fans une protection diftingucè de la part de quelques principaux Seigneurs, le Crédit de la Banque auroit été renvcrfé de fond cn coinble (24). Cc fut pendant le regne de la R ' que la Banque obtint le plus p écicuv de ès pril ileges, c'eft-a-dire,celui de ccnir hl Banque exclufivement a toute autre affociation de Banquier?. Sa Chartre fut non feulement confirmée, mais encore prolongée jufqu'au premier Aoót de l'année 1733 (25). En 1708 le Capital de la Banque fut doublé , & par conféquent porté a 4,402,343 Livres ftcrlings. En 1709 on fit un appel de 15 pour cent, qui produifit 656,204 L. 1 f. 9 d. Et en 171 o un autre de 10 pour cent, qui fe trouva monter a 501,448 L. 12 f. 11 d. Enforte que le Capital de la Banque fe trouva alors être deL. 5,559>995-14- 8 (26). Le Crédit du Gouvernement fe trouvant mieux établi que ci - devant, on fe trouva auffi beaucoup mieux cn état de foutenir celui de la Banque; c'eft ce qu'on peut auffi obferver par la réduétion qu'on fit de Fintérêt de huit a fix pour cent. La Banque alors , pour conferver 1'annuité de 100,000 L. (24) Anderson p. 247- (25) Voyez Di£t. of Trade and Comm. & Anderson pages 246 , 247, 248 & 249. (26) Tnquiry in to the Nature and Caufes of the wialth of Nations par M. Adam S m 1 t h Vol. I. p. 387.  ij6 Chap. VI. BANQUE quelle avoit eu fur les 1,200,000, y ajouta une fomme de 400,000 L., & ainfi elle fe conferva la dite fomme de 100,000 L. cn entier. Elle avoit fourni encore une fomme de 1,775,027 L. 17 f. 101 d. contre des Billets de VEchiquier (27). Pendant le regne de George I le Crédit de la Banque & du-Gouvernement étant toujours allé en augmentant, les opérations des Finances fe firent avec plus d'aifance; auffi les intéréts allerent-ils en diminuant, jufqu'a ce qu'enfin ils furent réduits pour la Banque fous le regne de George II a trois pour cent (28;, taux auquel ils'font refiés depuis ce tems-la. Pour ne plus entrer dans des détails fuperflus je me borne a dire que dans l'année 1746. le Capital transferable de la Banque fe montoit a 10,780,000 Liv. (29) , & qua cette époque 1'engagement du (i.fi Andersom p. 248 & 249. (28) Idem. p. 368. (29) Idem. p. 264, 268, 307, 317 , 320 & 374. & om. of Trade and Comm. Tableau de Pétat oü Ie Capiral de Ia Banque fe trouvoit en 1744. i°. Le premier Capital de 1,200,000 Livres augmenté de 400,000 livres & cnfiiite doublé pour conferver les 100,000 Livres annuelles, apoit été porté a Liv. 3,200,000 — 2°. En annullant les Billets de PEcniquiet 011 avoit dans la sme. année du Regne de George I. augmenté le Capital de £00,000 ■ 30. Aehetté en 1722. de la Compagnie du Sud un Capital de 4,000,000 — 4°. Les  DE LONDRES. i7; du Gouvernement fut de ii,68(5,8oo Liv. (30). II paroit que le Capital de la Banque, fur lequel fe fait le divident, n'a pas varié depuis. Pendant le regne de George I la Banque obtint une prolongation d'Oétroi jufqu'a l'année 1743 (31). Sous George II un pareil jufqu'en 1765 (32). Et depuis fous George III il a été prolongé pour 21 ans, moyennant une redevance (c'étoit pour la première fois) de 110,000 L. C33)- Depuis 1'établiiïèmcnt de la Banque fon divident a été fujet a plufieurs variations, & a hauffé & baiffé a mefure que le taux de 1'intérêt fur la pla-r cc a varié, & que les opérations de la Banque Font permis; plus il y a de circulation en papiers fur Ia place, plus la Banque profite; car il eft toujours de fon intérêt d'étendre fes affaires, & c'eft a quoi elle ne manque pas de donner tous fes foins, autant que la prudence le lui permet. En 1727, lorfque le taux de 1'intérêt eut été 4°. Les Annuite's a la charge de la Loterie de 1'annce 1714 1,250,000 — 5°. Les Annuite's aflïgnées fur les Douanes de charbons 1,750,000 — Enfemble 10,700,000 —■ Ce Capital paroit avoir &ti enfuite porto ii 10,780,000 Livres Sterl. Vojcz Anderson p. 379. & Ad au Smitii p. 387. (30) Anderson & Smitii. (31) Anderson p. 264. & DB. of Trade and. Comm. (32) Idem p. 368. C33J Adam S m r t 11 p. 388. & Mémoires fur les Finances p. 65. Torna II. Tart. I. M  i78 Chap. VI. BANQUE encore diminué, le divident de la Banque fut réduit dès l'année fuivante de 6 a 51 pour cent (34). Depuis il a été encore réduit a 4 J (35). Pendant la guerre avec la France (entre les années 1755 & 1763) les affaires de la Banque ayant confidérablement augmenté, & par conféquent profpéré, on fe trouva en état,après laPaixen 1763, deporteren 1765 fon divident a 5 pour cent (36). Et depuis (en 1768) il fut porté a 5J, taux auquel il eft refté depuis. (37) Nous nous bornerons ici a donner par forme de calcul une idéé de 1'état aéluel de cette fameufe Banque. En partant du principe que fon fonds transférable fe monte a 10,780,000 L., & que le divident refte fur le pied aéfuel de 5J pour cent, alors la Banque doit payer annuellement a fes Propriétaires 592,900 L. Des fommes qu'elle a données au Gouverne- C34) Anderson, T. II. p. 317. (35) Idem ■ & Mémoires fur les Finances p. 66. O11 m'a affuré que le plus bas divident a été a 3 J , & le plus haut a 7 pour cent. (36) Mémoires fur les Finances p. 66. (37) Idem. Aprcs que ie Divident eut été arrêté a 5 J pour cent par année, le prix du Fond de Ia Banque fut porté a environ 170 livres , pour cent livres de Capital transférables: Depuis ce tems - Ia le fond a varié, & les prix ont roulé d'après les circonftances des affaires politiques. Au moment de la Déclaration faite par 1'Efpagne (en Juin V.79) 'e fond de la Banque a dié vendu a 106, quoique le divident Jolt !e méme que lorfque le fond fut porté a environ 170.  DE LONDRE S. %79 ment (& qui fe montoicnt a ce qu'il paroit en 1775 a 11,686,800 L.) elle n'a que 3 pour cent d'intérét; & par conféquent elle n'en retire que 354,604 L. II y a donc un déficit de 238,296 L. au délavantage de la Banque fur ces deux articles (38). II eft queftion maintenant de donner une idéé de la manicre dont la Banque s'y prend pour fe procurer, non feulement une fomme auffi confidérable, mais méme encore beaucoup plus grande. On fait que les affaires de la Banque a Londres fe bornent aujourd'hui principalement a 1'efcompte des lettres de change, des Billets de la place &c. & furtout a faire des avances au Gouvernement fur des furetés afïignécs par le Parlement (39). Outre f38) Les iiv(58(j,8oo Livres a 3 pour cent font l'année Liv. 350,604 —> Pour les fraix de 1'adrainiilration de la part du Gouvernement, cet article fe montoit au commencement de l'établifiement de la Banque a 4000 Liv. ainfi que nous 1'avons vu 4.000 * Liv. 354,604 —■ II manque donc a Ia fomme dc 592000 Liv. qu'il faut paytr annuellement en dividents aux Propriétaires 238,296 Liv- 592,too—« On m'a afiuré que Ia CommifTion que le Gouvernement paye aujourd'hui a la Banque efr. de 500 Livres Sterlings par an fur chaque million de la Dette Nationale, dont les intéréts fe pavent ii la Ban« que; la fomme des 4000 Liv. ci-defliis meniionnée doit donc être confidérablement augmentéc, & cela en proportion de 1'aiigment*. tion de la Dette Nationale. (39) Les profits de la Banque provitnnent aujourd'hui, M 2  i8o Chap. VI. BANQUE le Commerce qu'elle fait fur 1'or & 1'argcnt, foit monnoyes ou en lingots, elle a le droit dc faire fabriquer des Efpeces fans fraix extraordinaires, lorfque cela lui convient, ou que 1'état des affaires du Commerce le demande. En outre elle a la faculté (40) de faire circuler fes Billets, Banck notes, qui ne portent aucun intérêt, & qui ont cours par tout le Royaume, & fouvent même chez PEtranger. Voici comment elle s'y prend pour trouver le déficit de 238,296 L. dont nous vcnons de parler. Je fuppofe que la Banque a cn Billets qui circulent pour environ 15,000,000 de Livres Sterlings, & que pour tenir fa Caifie toujours bien garnie, elle a pour maxime d'avoir dans fon trefor de refer- I6. De fon Capital avancé au Gouvernement fur !e pied dc 3 pour cent par an. 2°. De 1'Efcompte du papier des particuliers, qu'elle prend aéhictlemcnt a 5 pour cent par an. 30. Des avances que la Banque fait fur les nouvelles Soufcriptions dans les Négociations du Gouvernement, i raifon de 5 pour cent l'année. 4°. Des avances faites de tems & autre au Gouvernement par anticipation fut les revenus de l'année , ï raifon dc 3 pour cent par an. 5°. Des loyers de plufieurs maifons qui lui appartiennent, mais •jui ne peuvent faire un obj'et de confidération. Et enfin 6°. de la Commiffion dont nous avons fait mention dans la Note pré--édente. (40) Tous ces droits fc font appareinment établis par Ie tems & par 1'ufage fucceffif qu'on en a fait, car dans mes recherches je n'ai icncontré nulle part que la Banque ait obtenu quelque privilege en forme vour faire circuler fes Billets.  DE LONDRES, 181 ve le tiers de ce Capital; par conféquent le reflant, c'eft-a-dire, les deux tiers de ce Capital, eft ce qui lui doit procurer les intéréts des avances qu'elle fait. Et cn évaluant feulenient ce bénéfice a un intérêt dc trois pour cent (car il faut fuppofer que fouvent les affaires n'ont pas toujours un cours ft animé, furtout en tems de paix) alors cela rendroit fur les dix millions qui reftent 300,000 L. d'oü il faut déduire la fomme de 238,296 ~ II refte 61,704 L. (41). II faut encore déduire de cette fomme les fraix que la Banque a a fupporter, comme par exemple ceux des Honoraires, des appointcmens des Employés &c. qu'Anderson dit fc monter a 17000 L. (429 & que j'évalue a bien d'avantage. A (41) Le Gouvernement, fuivant les ir.formations que j'ai fakes, ne paye aujourd'hui fur les avances que la Banque lui fait que 3 pour cent d'imérêt par an. Voyez la Note 39. Au refte ce n'eft que lorfque V/lngleterre fe trouve en guerre qu'on peut admettre que 1'argent de la Banque, c'eft -a- dire les deux tiers des quinze millions mentionnés ci-dilfus, eft prefque toujours en circulation , ou employé. Je penfe par conféquent qu'en établifl'ant pour b:.ze de mon calcul une période dc vingt aunées, il faudroit reduire encore le Capital ii 7 ou 3 millions tout au plus; ik en évaluant les intéréts feulement a trois, ou tont au plus ii trois ik demi pour cent, on voit que mon calcul fe trouve alfez bien fondé. C42) Anderson T. II. p. 375. SelOll les informations d'un particulier demeurant h Londres , le* fraix de ia Banque fe mouteroient aux environs de i'Jooo Liv. mais il y a toujours des fraix extraordrnaires. Les Honoraires des Directeurs de la Banque font de 150 Livres par an ; le Gouverneur & le fous - Gouverneur ont chacun 200 Livres par an. M 3  182 Chap. VI. BANQUE quoi il faut encore felon moi ajouter les dépenfes qu'elle doit faire pour fes Batimens (43), pour faire frapper prefque continuellement de nouvelles Efpeces (44), & en outre la perte qu'elle fait fur les Billets qui peuvent avoir été contrcfaits &c. &c. &c. (45). Voila a - peu - prés 1'état aétuel de cette Banque. Au refte on ne fauroit affez louer lc zcle avec Icquel les Adminiftrateurs de cette Banque fe font toujours conduits, dans tout ce qui a eu quelque rapport au foutien du crédit de 1'Etat & de celui du Commerce. Elle cn a donné des preuves convaincantcs dans les années 1763 & 1773 (46). . Mais y a-t-il en Europe une Société qui fe trouve plus intéreffée que la Banque de Londres, a ce que la Circulatipn cn général dans lc Com- C47.) Le Batiment oü fe tient la Banque a Londres a été conftruit ou refait il y a quelques années, & doit avoir conté une fomme confiderablc. (44) Lorfque 1''Angleterre doit faire des Remifes au continent, le cours du Change s'établit de facon que 1'or & 1'argent en elpeces au en lingots doivent fortir du Pays. C'eft alors que la Banque fe trouve Ie plus obligée de fe tenir garnie d'efpeces, afin que lorfque le Conit merce ou le public en deraande, elle ait de quoi fournir. Quoique le cours du Change n'exjge pas toujöurs la fortie des efpeces, il en fort cependaut toujours pour le petit Lommcrce de poilibn, qte nos Pêchems vendent aux Anglois, & en outre pour le Commerce frauduleux du Thé, des eaux de vic, du genevie dellullande&c. Ce Commerce eft affez connu.&eft bien plus contidérable que Ie premier. C45) Ce qui pourroit contrebalanccr cette perte, c'eft que les Billets qui fe pernent reviennent au profit de la Banque. i^ij Adam Smjth Vol. I. p. 388.  DE L O N D 11 É S. 183 mcrce fe foutienne fans interruption? N'eft-il pas évident que la Banque, a mefure qu'elle fait plus d'afliures, & par conféquent de plus gros profits, eft a même d'augmenter fon divident & de groflir ainfi fon Capital, ou celui de fes- Intércffés ou Proprietaires ? Nous pouvons donc dire que cette Société, ou ces Proprictaires, profitent a mefure que les befoins de 1'Etat & du Commerce font plus forts. Si dans le détail oü nous fommes entrés on ne rencontre rien de neuf, c'eft que nous n'avons voulu expofer que ce qui eft connu, & qui a été rendu public par des Auteurs tres accrédités. C'eft (Tailleurs une matiere délicate; & comme nous n'avons chérché qu'a faire connoitrc Forigine & Tétat aétuel de cette Banque, nous nous fommes bornés a expofer les faits tels qu'ils fe font prefentés naturellement, & rclativement au but que nous nous fommes propofés: peut -être que ce que nous ajouterons dans le Chapitre VII pourra fournir quelques vues intereflantes pour une Nation qui a été, & qui fera toujours (comme je Ie fouhaite trés-fort) Tadmiration de TUnivcrs. 1VI 4  184 Chap. Vil. CONCLUSION DES CHAPITRE VIL Réflexions fur Pavantage & le préjtidice que les Banques peuvent occafionner dans les Sociétés ou elles fe trouvent établies. jNI o u s avons fait voir dans lc premier Volume dc cet Ouvrage la grande confufion que les variatioris des Monnoyes ont caufe dans la Société; avec quelle prodigieufe difproportion cela a fait rencherir le prix 'des Denrées, la main-d'ceuvre &c. & combicn la grande quantité d'or & d'argent qui nous eft venue de YAmérique depuis prés de 300 ans a augmenté cette difproportion. Nous obfervames a Ja fin de la feconde Partie que lc mal avoit été encore augmenté par de nouveaux fignes repréfentatifs de la valeur des chofes, c'eft-a-dire, par lc papier qui circule dans le public. Comme les Banques font dans le cas de faire circuler cette nouvelle forte de fignes, il a fallu néceftairemeht dire un mot de leur origine, & des principes fur lefquels roulcnt toutes leurs opérations. Nous avons déja remarqué que toutes les Banques fe réduifent a deux efpeces : &. comme celles d''Amfterdam & de Londres nous fuffifoient pour les faire connoitre plus particuliércment, nous nous fommes bornés a les citer pour exemple,  CHAPITRES PRÉCÉDENTS. 185 Par les détails Hiftoriques oü nous fommes entrés dans les Chapitres II, IV & V, avant de donner la defcription des Banques ft Amfterdam & de Londres on a pu obferver: i°. Le progrès que lc Commerce cn général avoit fait, particuliérement en Hollande & en Angleterre, avant Pépoquc de ces Etabliflemens. 2P. Que les Hollandois étoient redevables de ce progrès chez eux a leur indufirie & a leur aétivité naturelle; & les Anglois aux mêmes caufes, & en outre a 1'agriculture & aux produits du fol de leur Ille. 30. Que ces deux Nations, avant que les Banques fuflènt établies chez elles, avoient déja augmenté confidérablement leur Population par le moyen du Commerce. 40. Que 1'argent fe trouvoit cn grande quantité & très-repandu chez Elles. 50. Que les circonflances oü fe trouva 1'état des affaires politiques avec 1'Efpagne, mais furtout 1'étendue du Commerce que les Hollandois faifoient déja chez 1'Etranger au commencement du XVIE'. Siècle, engagerent les Etats de Hollande a permettre 1'éreétion d'une Banque publique a Amfterdam. Elle étoit même devenue nécefïaire, non feulemcnt pour afuirer le crédit, mais auffi pour mettre de la célérité dans les opérations du Commerce. M 5  iB6 Chap. VU. CONCLUSION DES 6°. Enfin que ce fut en partie par les merries raifons, & ce qui doit particuliérement étre remarqué , par des raifons d'Etat, & qui avoient un rapport direct au Gouvernement en A&gJeterre. qu'on fit un pareil Etabliflèment a Londres. Nous avons vu que les Banques cn général (voyez Chap. I.) fe réduifcnt a deux fortes : les uncs font un dépöt pur & fimple, dont Ia valeur circule dans le public; & les autres font en mêmetems Commercantes. Dans les Chapitres III & VI. nous avons donné un ample détail de la forme de ces deux Banques, & de la nature de leurs opérations. II nous refie maintcnant a donner une idéé i°. de Furilité & de 1'avantagc que de pareils Etabliflemens peuvent procurer, foit a 1'Etat cn général, foit au Commerce en particulier. Et a°. du préjudice qu'ils font a même d'occafionncr, ou qu'ils caufent quelquefois aux Sociétés oü ils fe trouvent érigés. Si toutes les Banques étoient comme celle Amfterdam, c'efi - a - dire, un dépot pur & fimple , bien loin de caufer quelque préjudice au public, elles contribueroient a 1'avantage de 1'Etat & du Commerce. Qu'oi: me permette dc préfenter ici un Tableau de la grande utilité qui réfulte d'une Banque telle que la notre. La compuraifon qu'on fera enfuite de cette Banque avec celle de Lon-  CIIAPITRES PRÉCÉDENTS. 187 clres, fera voir aux raoins clair - voyans dans quelle Claüè on doit placer cette derniere, & fera fentir les abus que la circulation de fon papier entraine. La Banque d''Amfterdam doit être placée dans la première ClafTe. Elle ne fait par elle-même aucun Commerce. Bien loin de porter aucun préjudice a 1'Etat ou aux particuliers , elle procure par fon infHtution une fureté entiere aux particuliers qui y ont leur argent en dépöt. Par la maniere dont fe font les payemens en Banque entre les Négocians, le Commerce fe fait avec plus de facilité & de célérité (1). Combien de tems ne faudroit-il pas employer , s'il falloit chaque fois compter les Efpeces, & combien de fraix n'entraineroit pas continuellement le tranfport des Efpeces d'un endroit a 1'autre? Un Négociant ou particulier qui a dépofé fon argent dans la Banque, eft d'ailleurs tranquille, il n'a ni vol ni infidélité quelconques a craindre. Son argent eft en plus grande furcté dans la Banque qu'il ne le feroit dans fa propre maifon & fous fa propre garde. Outre Putüité & les avantages qui réfultent d'un pareil CO Un Négociant qui a par exemple 50000 florins en Banque, peut aclietter des marchaudifes pour la diie fomme» & faire fes payemens dans une demi lieure de la matinée en quelqucs petites parties que ce foit, fans qu'il foit obligé de compter un fol; il ne lui en coute que la peine d'éuiie deux lignes fur un petit boidereau de papier pour chaque fomme, ik celle de porter ou d'envoyer ce bordereau a la Banque.  188 Chap. Ml. CONCLUSION DES Etablificment pour les Negocians , il procure en outre plufieurs autres avantages a toute une fociété. i°. L'argent qui fe trouve dans de pareils dépots ne circule pas tout a la fois dans le Commerce ni dans le public (2). 20. On rend par la infructucufes beaucoup de manoeuvres de Meffieurs les Caifiiers ou de Banquiers particuliers, & dc tous ceux qui font le métier d'agioteurs d'argent (3). 30. Ce dépöt, dans un tems de calamité, peut être d'une trés grande refiburce (4): mais je le repete, c'eft un objet tres délicat: ce feroit abufer de la confiance du public, que de toucher a un dépöt fi facré; il n'y a qu'un danger éminent qui puifie légitimer une pareille manoeuvre. La Banque SAmfterda n étant donc un fimple dépöt , c'eft ce même dépot qui forme fon Capital, dont elle ne paye aucun intérêt; au con- CO Si, felon M. Hume, & felon tous les Ecrivains qui ont traité cette matiere, !i dis-je, uce grande circularion d' Ipeces doit néccniiiremcnt avilir le prix de l'argent, & faire renchërir les Denrées , la main - d'ceuvie &s. (Voyez D/'cours Politiques de M. D. Hume p. ico). voila d'abord la Banque d''Amjterdam qui eft comme une cfpece de digue, qui du moins caclie au puiilic une partie de l'argent dépofé, & qui bien loin d'en augmenter la malfe con? tribus p;u;öt ii l'anêter-, ou du moins 1'empCche de produire dans le publi: le reiicheriuemefit dont on vient de parler. (3) Difc- pulit. de Hume p. 102 & 103. (4J Idem.  CHAPITR.ES PRÉCÉDENTS. 189 trairc ce font les particuliers qui individuellement contribuent a payer les Honoraires des Employés, par les fraix modiques qu'ils payent a chaque tranfport ou revirement de Livres qui fe fait pour leur compte. Ses autres profits proviennent des avances qu'elle fait par le moyen de fon crédit fur 1'or ou l'argent qu'on dépofe chez elle (5). Deforte que par lc moyen de ces deux objets elle fe procure un revenu affez confidérable, fans qu'elle ait befoin que la Ville ou 1'Etat lui fourniflènt le moindre fonds pour cela (6). II n'cn eft pas de même de la Banque dc Londres ; elle eft d'une nature prefque toute différente. Celle dAm/lerdam eut pour fon principal but d'établir la confiance, de foutenir le crédit du commerce de la Hollande chez 1'Etranger , & d'en accélerer les opérations : celle de Londres fut érigée pour mettre le Gouvernement en état de remplir avec facilité un Emprunt que les city conftances rendoient néceflaire. II faut furtout avoir préfent a Pefprit, que lorfque Guillaume III. parvint au Tröne d''Angleterre, la dette Nationale n'étoit que d'environ un Million de livres fterlings (7): mais la guerre qu'on eut a foutemr , le haut intérêt qui couroit fur la place, & l'argent (5) Voyez Cbap. III. p. 65. (6) Idem . t7) La Detic nwhSnale h Ia révolution étoit de 1,054,925 Livfts Voyez Cliap, V. p. 159.  i9o Chap. VIL CÓNCLUSION DES enfermé dans les ColTrcs d'un petit nombre de par" ticulicrs, routes ces circonftances, font alTèz tem tir combien une levée d'argent devoit être difficile a faire, & que par conféquent on fe trouva obligé de chercher un expédient qui facilitat le moyen de faire un emprunt d'argent, & qui en même-tems operat une reduétion dans lc taux de 1'intérêt. L'un devoit être une fuite naturelle de 1'autre (8). Le capital qui devoit former le fonds dc la Banque de Londres, n'étoit donc pas deftiné h être un dépöt pur & iimple , mais devoit immédiatement être a la difpofitiön dc 1'Etat, afin de le faire circuler dans le public. C'étoit un prêt que faifoient plufieurs particuliers, animés par Tappas d'un gros intérêt. Chaque particulier, & les Etrangers même, fans être négocians, pouvoient placer leur argent dans cette Banque, a peu-prés comme on le fait dans les Négociations d'argent de plufieurs Puifiances de VEurope. Les Intérefies avant donc fourtti a 1'Etat les 1,200,000 Liv. moyennant une redevance ou un intérêt annuel de 100000 Liv. cet argent fut verfé dans la Caifie de 1'Etat ou de VEchiquier, pour fubvenir aux fraix de la Guerre, & la Banque (8) On peut oliferver dans la Feuille intitulee A Schort account of the Bank of England London 1695 , comment le taux de 1'intérêt dans le Commerce fur la place de Londres fut reduit, des que la Banque eut été éiigée,a 6,35, k 4 J&niêuic & 3 pour cent.par an. Voyez la Note 12 du Chap, précédent.  CHAPITRES PRÉCÉDENTS. 191 pour fe mettre en fonds (9), devoit par conféquent s'en pourvoir d'ailleurs. On voit par la que la Banque dans fon principe n'avoit proprement fait d'autre opération que de Négocier 1,200,000 Liv. pour les donner au Gouvernement. Et que pour fe mettre en état de fournir aux befoins des affaires qui avoient du rapport au Commerce, elle étoit obligée de fe procurer elle-même d'autrès fonds par le moyen de fon crédit (10). Cp) II eft clair que Ia Banque, dès qu'elle eut fourni au Gouvernement les 1,200,000 Liv. (.car fans ce foumilTement fes propriétaires ne pouvoient pas jouir des 100,000 Liv. que 1'Etat s'étoit engagé de fournir) elle devoit pour fe mettre en fonds, & pour foutenir fes autres affaires , fe procurer ces fonds d'ailleurs, ainfi qu'il paroit qu'elle a fait. Voyez le Chap. précédent. (10) Voyez La Note précédente. L'Auteur de 1'Ouvrage intitulé, de la Circulation & du Credit, dit a la page 36. „ Qui ne feroit „ féduit, en trouvant dans un Livre eftimé & trés bien écrit (Re„ marqués fur les avantages & les désavantages de la France & de la „ Grande Brétagné) & cela avancé comme un fait conftant, que la „ Banque cV Angleterre a réuni en elle, comme dans un point, tout ,, Ie Crédit de la Nation & toute la confiance des Particuliers ï" Sur quoi le même Auteur fait cette réponfe. „ La Banque ü Angleterre n'a rien de commun avec la Dette na„ tionale." Le fait prouve affez que cet Ecrivain s'eft trompé. Ce que le même Auteur avance ii la page 38 mérite encore notre attention. Et quand la Banque auroit coulé a fond, ce qui ejl impoflible, cela n'a rien de commun avec la Dette nationale, qui ejl inexigïble &c. Nous avouons que tant que 1''Angleterre foutiendra fon crédit, il eft trés vraifemblable que le crédit de Ia Banque fe foutiendra, mais pour cela la prudence exige qu'elle ne faffe pas un trop grand abus de fon papier de crédit, 1 — Je pounois m'étendre affez  I22 Chap. VII. CONCLUSION DES Elle fit donc ce que les Banquiers jufqu'alors avoient fait fur la Place, avec cette différence, que les Banquiers avoient en propre a eux des fonds pour foutenir leur crédit & pour pouflêr leurs opérations (ii), au lieu qu'ici les Particuliers, foit Négocians ou rentiers &c, fournirent a la Banque de l'argent, les uns moyennant un intérêt, d'autrès pour en difpofer a volonté; ce fut fur cet argent que Ia Banque négocia enfuite, & fur lequel elle fit des profits confidérables en le faifant circuler dans le Commerce fur la place de Londres, de la maniere dont nous 1'avons dit ci-deflus. (Voyez Chap. VI.) Tous ces objets réunis mirent la Banque a même de réduire le taux exhorbitans de 1'intérêt de l'argent qui avoit eu cours depuis quelques années, & firent qu'elle fe trouva a même de pouvoir payer a fes fut cette matiere, mais 1'articlc eft trop délicat; tout Leéleur fenfé comprcndra aflez la juftelfe de ce que j'ai pris la liberté d'avancer la - deflus comme en paflant. Au refte il eft tres vrai, & tout Ie monde en convient, ainfi que le même Ecrivain 1'obferve a Ia page 38. que les Aétions de la Banque Font trés differentes de fes Billets de Banque; les premières forment les fonds proprement dits de la Banque, & les derniers ne font que de limples Billets qui circulent comme argent, & qui ne portent aucun Intérêt comme ci-devant, ainfi qu'on peut 1'obferver dans Anderson &c. Voyez le Chap. précédent. (11) C'eft un fait avéré, que les Banquiers avant 1'Etablifiement de Ia Banque avoient travaillé fur leurs propres fonds, & fur les fonds de plufieurs particuliers. Voyez Anderson T. II. p. 127, izZ, 130, 150 & 151,  CHAPITRES PRECËDENTS. 193 a fes propriétaires tous fraix déduits, un divident Vraifemblablement bien au deflus de 1'intérêt qui alors avoit cours fur la Place (12). Voiia le principe fur lequel les opérations de la Banque de Londres ont été fondées & continuées jufqu'aujourd'hui, a quelque petite différence prés, que les circonfhmces ont fait naitre, ainfi qu'on 1'a pu voir dans le Chap. VI. Les fonds des propriétaires de la Banque fe trouvent toujours entre les mains du Gouvernement, ou font du moins a fa difpofition; & toutes les affaires que la Banque entreprend en outre , font conduites & foutenues par le feul moyen de fon Crédit. Mais fur quel fonds repofe ce Crédit? Queftion intéreflante. Voici quelques idéés rélatives a cet objet. . Pour que la Banque de Londres ne put caufe? aucun préjudice, il faudroit que fes fonds repofaflènc fur un Capital fourni par 1'Etat, ou par plufieurs intéreffés; & ce capital devroit être affez fort pour fatisfaire a tous les befoins qui fe préfentent dans Ie Commerce, comme par exemple d'efcompter (12) J'ignore a quel taux fut porté le premier divident de la Ban* que. Je pèrMe pounant, & ctla fur un principe afléz folide a co qu'il me femble, qu'il fut au moins de 7 pour cent, tous fraix déduits , puifque le Gouvernement leur en payoit 8. Et comme 1'intérêt fur la place avoit été réduit, on peut fans lifque s'en tenir k notre ellimation. D'ailleurs,, ainfi que je 1'ai déjii dit au Chap. VI. on m'a informé d'aifez bonne part que Ie Divident de ia Banque n'a jamais été plus haut que 7, & jamais au deflbus de 3 J pour cent. Tome IL Part. I. N  i94 Chap. VIL CONCLUSION DES les Lettres de Change ou les Billets de Commerce &c. de faire en certains cas rares des avances fur les revenus de 1'Etat, & fe borner au Commerce de 1'or & de l'argent en lingots &c. Et afin que de pareilles opérations fufient toujours a 1'avantage de la fociété, il faudroit qu'une partie des fonds de cette Banque fe trouvat prefque toujours en Caifie, pour étre a la difpofition dc ceux qui peuvent fe trouver dans le befoin, & la Banque ne devroit jamais venir a leur fecours que moyennant de bonnes furetés. Le refte, ou la plus grande partie du Capital pourroit circuler fur la Place, ou dans le public, non en papier, mais en efpeces courantes; ou fi on faifoit circuler du papier, ce papier, comme dans la Banque d'Amfterdam, ne devroit repréfenter que ce qui eft en dépöt dans Ia Banque. Tant que les Banques Commercantes fe borneront a des opérations auffi fimples, elles ne cauferont pas de préjudice. Mais aufii alors les profits s'en trouveront tres médiocres, & peu propres a tenter la cupidité des intérefles. Les profits feroient trés - modiques, a caufe des fraix a faire pour l'adminiftration, pour les Honnoraires dés Direéteurs , des Employés &c. & un particulier trouveroit alors un avantage plus réel & plus confidérable a faire valoir par lui-même fon argent fur la place; car il gagneroit pour fon propre compte les fraix de l'adminiftration, & ne  CHAPITRES PRÉCÉDENTS. 195 riendroit d'argent oifif dans fes coffres, qu'autant qu'il lui en faudroit pour fes befoins particuliers. Un pareil établilfeinent ne peut donc fubfifteravec avantage, a moins que 1'Etat ne l'affifle, en lui faifant un fonds defliné a etre continuellement oifif, pour fubvenir aux befoins qui peuvent fe préfenter (13); ou bien a moins qu'un pareil Etabliffement (14) ne travaille a peu pres dans le goüt O 3) Au lieu d'un Capital fourni de la part d'un Gouvernement dans quelque Etat quelconque, on pourroit par une bonilication annuelle compenfer les intéréts du Capital qu'on eft obligé de tenir oifif pour les befoins du public, comme fit par exemple le Roi.da Danemarc Chriftien VI. le 29 Oéïobre 1736. lorfqu'il fut queftion d'é~ riger une Banque publique a Copenhague. Voyez les Art. V & VI. de cet Edit. Le Roi y prend a fa charge les principaux fraix \ faire dans les trois premières années ccc. C14J La Banque de Copenhague, érigée au commencement de l'année 1737, paroit avoir été établie a peu - pies dans le même gout que celle de Londres, avec cette différence, que lc but de cet Etablifiement femble uniquement avoir été de foulager les Négocians dans leur Commerce, & de leur procurer une diminution fut le taux dj» 1'intérêt. Son Capital, fourni par plufieurs Intérelfés, ne fut d'abord que de 500,000 Rixdales. L'intérêt que la Banque avcit droit de prendre, ne pouvoit être au deflus de 5 pour cent l'année, mais bien au defibus. A 1'ouverture de la Banque l'intérêt fut établi it raifon de 4 pour cent l'année. Le cours de l'intérêt avant 1'établiflement de la Banque avoit été de 5 a 6 pour cent, & vraifemblablement plus haut.' Les Billets ou les Papiers de crédit de la Banque par 1'Edit du Roi du 5 Novembre 1736 étoient formellement admis. Par les Dividents que la Banque a faits avant l'année 1758. 11 eft facile de faire en gros un calcul des Billets qui doivent néceflai. rement circuler comme argent, car M. Savari dit que le Divi. dent de cette Compagnie a été de 9 a 12 pour cent. A cet objet. on devroit ajouter les fraix de la Banque &c, Voyw Savari »» niet Banque. Edition de 1759. p. 371. N ü  io6~ Chap. VII. CONCLUSION DES que fait la Banque de Londres. Mais le préjudice qu'une Banque occafionnc dans le dernier cas eiT fi confidérable , qu'il mérite qu'on entre la-deflus dans un plus ample détail. Pour faifir plus clairement le point de vue fous lequel nous confiderons cet objet, il faut au préalable qu'on fe rappelle ce que nous avons inculqué Les prix de fes Aétions, dit cet Auteur, font montées depuis500. jufqu'a 1500. Ecus ou Rixdales. Ce Célebre Ecrlvain ne inanque pas de parler avec éioge de I'eltïtnable Citoycn qui fut 1'Auteur de ce projet. On obferve alfez généralement dans les pays oü on a formé de pareils Etabliffemens la réduétion frappante qu'ils ont caufée fur 1-e taux de l'intérêt. Mais en quelle proportion n'ont-ils pas d'un autre cöté fait tout rencherir dans la Société ? Cet objet peut facilement être fuU'i dans ce Royaume, paree que ce n'eft que depuis enviion 40 années que cet Etablilfement a eu lieu en Danemarc. Peut - être un jour fe trouvera - t'il dans cette Contrée un Citoyen qui en expofant la-deflus les fuites de cet établifiement, ne rendra pas un moindre fervice que le premier a fa Patrie. Tout le monde fait que le bon marché des vivres contribue ii ériger avec avantage des Manufaétures ou des Fabriques dans un pays, & procure par la encore fcnfiblement un accroiifement de Population. Le Nord de VEurope efi: aujourd'liui le pays le plus propre a devenir une vraie pépiniere d'hommes. II n'y a pour cela qu'il procurer ii fes habitans les moyens de mettre leurs bras en mouvement. Ces moyens produiroient une acquifition bien plus folide pour un Etat, que les gains que Ie Capital des IntérefTés a procurés. Car il paroit bien certain que 1'éreétion de cette Banque n'a pas encore été fuffifante pour fe procurer tous les fonds dont ce Royaume a befoin. Cela paroit par les Négociations qui ont été faites en Hollande pour le compte du Roi, pour celui de la Compagnie des lades Orientales, & pour celui des Propriétaires des Plantations dans quelques unes des Isles que le Roi de Danemarc poflede dans les fydet. Occldentales,  CHAPITRES PRÉCÉDENTS. 107 dès le commenceraent, que 1'or & l'argent en lingots ou en Efpeces' ont été établis pour fervir non ièulement de mefure ou de figne repréfentatif, mais encore pour fervir de gage ou de fureté: & que ce figne fert a repréfenter, non feulement les denrécs, main - d'oeuvre &c. mais tout ce qui fait 1'objet du Commerce. L'Empereur Confiance donna une Ordonnance oü il étoit dit que l'argent ne devoit point être Marchandife, mais uniquement le prix ou la repréfentation des Marcliandifes (15). On penfoit alors fur cet articlc beaucoup plus folidement que nous ne le faifons aujourd'hui. Depuis la découvertc de YAmérique furtout, l'argent même efi: devenu un objet de Commerce, & eft envoyé en AJie comme Marchandife (16). On fcait qu'en Europe, a mefure que la quantité (15) Elle (Ia Monnoye) ne doit pas ttrt (difoit I'EmpereuO une Marcliandife, mais le prix ou la repréfentation des Marcliandifes. —— Pour emfjê'cher toute fraude fur cet article, il fixa la fomme qu'il feroit permis aux Marchands de potter avec eux pour les fraix de leur voyage. Tout le Commerce étranger nï devoit fe faire que par écliange. Voyez Hifi. du Bas-Empire. Liv. XI. p. 105 \ Pan 361. (16.) Montesquieu (Elprit des Loix Liv. XXII. Chap. V.} remarque trés-bien. que, „ l'argent des mines itYAmdriqüe, tfariP „ porté en Europe, de la encote envoyé eh Oriënt, a favorifé Ia „ Navigation ; c'eft une marchandife de plus que VEurope recoit en „ troc de YAmérique, & qu'elle envoyé en trpc aux Indes. „ Une plus grande quantité d'or & d'argent eft dnnc favorable, „ lorfqu'on regarde ces métaux comme Marcliandifes; elle ne 1'eft „ point lorfqu'on les regarde comme figne, paree que leur abjudar». ft dmee choque leur qualité de figne." N 3  Sp8 Chap. VII. CONCLUSION DES d'or & d'argent efi plus ou moins abondante, Ie prix des Denrées &c. fe regie dans une certaine proportion. On fcait même par expérience, qu'une rareté ou une abondance d'argent influe 1'ur le taux de l'intérêt. Par rapport a un Etat dont la profpérité des habitans dépend de Factivité de leur Commerce, il ell effenticl que Yargent feul foit la mefure des chofes qui en font 1'objet. Tout autre figne déran^ ge trop 1'équilibre qui a été établi entre la quantité de 1' 'argent & le prix des Marcliandifes, ou des chofes dont nous avons befoin. Cette regie efi: encore de plus grande conféquencé, lorfqu'on obferve que depuis la découverte des Indes Occidentales 1'or & l'argent font devcnus de jour en jour plus communs dans prefque toutes les parties dc 1'Europe, & que les prix des denrées &c. font montés beaucoup plus haut qu'on ne les avoit jamais vus depuis la décadence de 1'Empire Pvomain (17). Ces prix, comme nous 1'avons dé» montré dans notre premier Volume, n'ont plus confervé la proportion qui fe trouvoit anciennement avoir lieu entre ces métaux & le prix des chofes. II y a même beaucoup de dLTérence dans !a progrefiion furvenue entre le prix d'un jrfti* clè comparé a celui d'un autre article. II efi; vrai ü?j Hume (StuarQ t. I. ?. 8&>  CHAPITRES PRÉCÉDENTS. 199 que plufieurs caufes ont contribué a produire ce dérangement, mais le plus grand & le plus nuifible efi: venu de Pextenfion du Commerce, de 1'augmentation de la mafie d'argent, & furtout de la circulation du papier, & de Pextenfion qu'on a donné au Crédit (18): voila la vraie origine ou la vraie caufe dc la grande différence qui fe trouve entre nous 08) S'il étoit prouvé que Pextenfion du Commerce ,1'augmentation de l'argent, Pextenfion du Crédit & des Dettes, ne nuifent en rien a la Population & au bien étre du public, les Souverains pounoient continuer fur le mime train qu'on a trouvé établi. Mais la Population & le bien être du Peuple augmenté - t'il en raifon de cette prétendue profpérité'? Voila la grande queftion. Dès qu'on obferve qn'une extenfion trop forte qu'on a donnée au Crédir, aux Dettes & aux charges énormcs qui en font une fuite naturelle , peut occafionncr un dérangement dans les fortunes des Peuples, ou de la multitude, les Legiflateurs devroient tacher d'y remedier au plutót. La profpérité d'un Etat quelconque ne doit pas~ fe mefurer fur quelques années feulement, mais fur un principe permanent. On ne voit malheureufement que trop que les vices qui occafionnent de grands defordrcs dans les Sociétés, ne font ordinairement appercus par aucun de ceux qui font ii même d'y porter remede, que lorlqu'il n'eft plus tems de les guerir. Si les maux dans tous les Etats étoient toujours fentis par ceux qui occupent les premières Places, le mal n'y jetteioit jamais de profondes racines. Mais ou ils ne font point du tout appercns, ou ce n'eft que par de fimples particuliers qu'on laiffe a 1'écart. lis ont beau en avertir, la voix de ces Perfonnes vraiment patriotiques eft trop foiblc pour étre cntcndue des Miniftres, & rour pouvoir penecrer jufqu'au Tröne. Combien d'années ne faut-il pas fouvent, & combien de families ne fe trouvent-elles pas ou ruinées ou mortes de mifere, avant qu'on ait même penfé ii porter du remede a un mal, qu'on ne con* noit point, & qu'on ne veut pas même connoitre ? Si dans un Royaume ou dans tel Etat quelconque plufieurs milliers d'hommes meurent de mifere, le Souverain ou les premiers Seigneurs n'cn trouvent p«» moins de plats fur l^ur table. N 4  200 Chap. VII. CONCLUSION DES & les anciens dans la facon de vivre, & dans la maniere d'acquerir des Richefiès. Les hommes, il eft vrai, ont toujours été dominés par 1'amour des richeffes; on les a vus en tout tems appliqués a fe les procurer par toute forte de moyens, & l'intérêt particulier a été le grand mobile qui les a mis en mouvement. Le bien de 1'Etat n'entroit pour rien dans leurs vues: ón fe rendroit ridicule ii on prétendoit fonder la félicité publique fur les moyens qu'ils mettent journelïement en oeuvre pour s'enrichir. Mais que dans une Société qui a cu au milieu d'elle les premiers Sa ges de l'univers,on ait par toute forte de voies imaginables aggravé le mal que 1'augmentation de l'argent a fait en général, voila ce qui eft furprenant, mais non pas incompréhenfible, lorfqu'on y réfléchit murement. Les principalcs Puifiances de XEurope, furtout depuis environ un fiecle, ayant eu continuellement befoin d'argent, elles fe font prefque toujours trouvécs dans la néceifité de recomïr a des emprunts, afin de pouvoir foutcnir les guerres qu'elles ont ent-repris, & les énormes dépenfes qu'elles entrainenr. II s'eft toujours trouvé de ces hommes inclufirieux qui a chaque nouvel événement enfimtoient de nouveaux plans; & les Miniftres ont embraffé avec avidité tous les projets ou tous les plans qui pouvoient accélérer leurs empmnts fi9). Q9J Ce'» a eulieu dsns prefque to:is les Erats CUrétiens de \'8vr*  CHAPITRES PRÉCÉDENTS. 20i Au commencement on négocioit cn tems de guerre dans le deflèin de fe liberer en tems de paix; enfuite on vit que cela furpaffoit les forces de 1'Etat débiteur: pour colorer l'impui(Tance oü Pon fe trouvoit, on commcnca a vouloir faire croire que les dettes publiques étoit trés avantageufes a un Etat (20). On prétendit même que pc , mais furtout en Francs, en Angleterre, & en Hollande jufqu'a l'année 1748. Nous aurons occafion drns la fuite d'y reyenir. (zo) Voyez les Oürrages de I\l. Melon, & 1'Auteur de 1'Ouvrage de Ia Circu/ation or dn Créait,tk entr'autres les pages 43 ,44 &c. de re dernier Ouvrage- Et nonobftant que 1'Auteur repete fouvent qu'on a parlé ou écric fcir eet article fans approfondir la matiere, j'avoue qu'après des réflexions mures , je luis plus porté a adopter les idees de Mylord Bolingbroke, de Walpole, du Chevalier Bernard & de M. II u m e. Ce dernier s'cxprime la - delfus avec toute Pénergie polfible dans fon Difcoars politique p. 285 a 287. Voici fes plo. pres paroles: „ Au contraire, notre expédient moderne, qui eft devenit trés „ général, eft d'engager les revenus publics & de compter que la „ pollérité pendant la paix acquittera les cliarges contracléss pen. „ dam la guerre précédente. Ceux qui ont devant leurs yeux 1'exem„ ple de leur Peres, ne laiflént pas de fe repofer avec la même „ prudence fur leur pollérité, qui a la fin par nécefiité, plutót que „ par choix, eft obligée de placer Ia même confiance dans une „ nouvelle pollérité. Mais pour ne pas perdre Ie tems ii déclamer „ contre une pratiqne qui paroit f; évidemment ruireufe , il eft trés „ cercain que les maximes anciennes étoient ii cet égard bien plus pru„ demes que les modemes , quand bien même les dernieres euffent „ été renferméés dans des bornes raifonnables, & eufient quelque„ fois dans les tems de paix été fuivies d'afTez de frugalité, pour „ acquitter les Dettes d'une guerre ccuteufe; car pourguoi 'le cas „firili.fl fi prodigleufiiiient elférent. entre le Public iS un Parti. „ cmier, qu'il nous vbligscH a'établir des maximes fi oppofies de een„ duits pw Pan 01; peur l'autre? si les fonds ia premier &Ht plus N 5  soa Chap. VIL CONCLUSION DES c'étoit Ie vrai moyen d'obvier aux fuir.es naturelles d'une trop grande abondance d'or & d'argent. Mais on ne fut par long-tems a s'apperccvoir que cette abondance feroit bientöt abforbée par les dettes enormes qui ont été contracties, furtout en Angleterre, depuis la fin du fiecle dernier (21). Je le demande, depuis que le papier fert non feulement a repréfenter la Dette d'une Nation, mais encore a repréfenter l'argent, produit-il le menie effet que l'argent? N'en repréfente - t'il pas même plus qu'il n'y en a? On nous a leurré, & on fe joue de la crédulité des hommes: le remede qu'on a inventé pour guérir les maux d'un Etat, a été un poifon déguifé; car malheureufement on a recours a l'empirifme auffi bien en politique qu'en médccine: mais, comme nous aurons occafion de revenir fur cet objet lorfque nous en parlcrons a fa place, appliquöns en paffant ici au papier du Crédit des K grands, fes dépenfes nécefiaires font pioportionnellcment plus for„ tes; fi les refiTources font plus nombieufes, elles ne font pos infi„ nies 5 & comme fa conftitution doit être calculde pour une plus „ longue durce que celle d'une feule vie ou même d'une familie, elle „ dcvroit aufii cmbrafier des maximes conftantes, grandes & yéné„ reufes, convenables a 1'étendue fuppofée de fon exifteuce. La „ nécelfité des affaires lumiaines nous rêduic fouvent i nous fier au „ hazard, & aux expédients qui dépendent du tems; quant k ceux „ qui choififient volontairement de pareilles reffources, fi les mal„ beurs auxquels ils s'expofent leur arrivent, ce n'eft point la né» cefiitd qu'ils en doivent accufer, c'eft leur propre folie." C21J Depuis le regne de Gutöaume ik de êiaric.  CHAPITRES PRÉCÉDENTS. 203 Banques la réflexion fenfée du célebre L o c k e (22). „ Les moyens qu'on met en oeuvre pour multi„ plicr les Efpeces en fabriquant des Billets, ne „ nous délivrcnt pas de 1'état de pauvreté, mais „ nous cachent pour quelque tems notre mifere''''. Tout homrne qui ne veut point s'aveugler volontairement doit fentir la vérité & les conféqucnces dc cette réflexion fenfée; & il feroit a fouhaitcr que plufieurs de mes Compatriotes voulufiènt un peu confidércr les fuites qui en réfulteront un jour pour eux ou pour leurs defcendans, & qui peuvent même felon les apparences aéïuelles devenir funefies a toute V Europe. Si je me fuis étendu fi amplement dans mes Abrégés Hiftoriques, j'ai voulu faire voir que la profpérité a laquelle la Hollande & VAngleterre font parvenucs, ne doit point être attribuée a 1'établifTèmcnt de leurs Banques, encore moins aux dettes publiques &c. A mefure donc qu'aujourd'hui on augmenté Ia maffe de l'argent ou des Efpeces par le papier qui les repréfente, l'argent fe trouve avili, & perd réellcment dans fa valeur repréfentative. Les Efpeces, ou l'argent, ne contiennent plus cette valeur primitive qui leur avoit été affignée originairement dans les Sociétés. Non fculement on leur a affigné une valeur plus forte, a mefure que leur (22) L'OCKE, d3ns fon Ouvrüge, Some Confderations of the con. fcaier.ee of Ihe lowerinv , of Interefi end rijing the vei/tte of money.  2o4 Chap.YSL CONCLUSION DES raaflè augmentoit, mais on a encore augmenté cette maflè en idéé par le papier, ce qui a fon tour influe fur la valeur totale de l'argent. La mefure univerfclle fe trouve par conféquent altérée. J'ai déja expofé ailleurs 1'influence que cette manoeuvre a déja eue fur toutes les affaires qui tombent dans le Commerce (23), qui eft le feu] obj-et dmt nQUS nous occupons actuellement. Auffi obferve-t'on que dans les grandes Villes oü le papier eft admis comme argent, & oü on fait ufage du Crédit, le prix des denrées, de la main-d'oeuvre &c. fe trouve bien plus haut qu'ailleurs. A mefure qu'on s'éloigne de ces grandes Villes, & dans les Campagnes oü on ne connoit pas ce Crédit ni cette facon de conduire ou de gé rer les affaires, tout fe trouve a meillcur marché. II eft inutile que je m'étende la-deflus, car ce font des faits connus de toute YEurope. Un habitanc de la Suijje qui a deux mille florins dc rente, provenant de la ferme de fes Terres, ou du petit Commerce qu'il fait avec fes voifins, peut vivre plus fplendidement , & faire une plus grande figure qu'un habitant de Park ,de Londres ou $ Amfterdam avec un revenu de 12000 florins. II eft facile de comprendre par Ie détail que nous venons de donner, comment les opérations d'une Banque peuvent ctre préjucüciables, cn confidirant (23) Voyez Chap. III. Art. VI.  CHAPITRES PRÉCÉDENTS. 205 feulement cette manoeuvre de multiplier les fignes des richefics. Plus on abufe de ce moyen , ék plus grand efi: le tort qu'on fait a la fociété. 10. Une Banque fait courir aux particuliers un rifque, lorfqu'elle fait circuler les fonds dépofés, ce qui ne devroit jamais être permis, puifqu'elle abufe de leur confiance, ék met leur fortune en danger. 20. Lorfqu'une Banque fait circuler plus que fon Capital, par le moyen de fon Crédit ou de fes Billets de Banque, elle caufe un préjudice mortel a 1'Etat: elle fait rencherir les vivres ékc. & dérange toutes chofes dans la Société. Elle en réduit même une partie a la mendicité. Tous les voyageurs s'accordent a dire qu'il n'y a point de pays en Europe oü il y ait plus de mendians qu'a Londres & cn Angleterre. Par la nature de 1'inftitution de la Banque d''Amfterdam, elle ne peut pas poufler fes opérations fur ces deux articles, fans ainfi que le fait la Banque de Londres, expofer fon crédit. Voyez les Chap. III & VI. Enforte que fi notre Banque fait ufage de fon Crédit, cela ne peut être que pour peu de tems, ou dans une calamité. Voyez Chap. III Art. VI. ck fans jamais expofer la fortune des Particuliers. II n'en eft pas ainfi de celle de Londres, fa  2o5 Chap. VIL. CONCLUSION DES Caifie efi un vrai Emprunt de 1'Etat. Et le papier que la Banque fait circuler par tout le Royaume repréfente plufieurs Millions de Livres fterlings, fans que l'argent que ces Billets repréfentent fe trouve nulle part en dépot. Et comme cette circulation, depuis 1'éreétion de la Banque de Londres, efi: non feulement permanente, mais même augmenté tous les jours, il convient de nous y arrêter un peu, pour expofer ce que nous avons encore a dire fur le préjudice que fait ce papier de Crédit. Pour apprécier Ie préjudice occafionné par cette monnoye idéale & de nouvelle invention. il faut obferver la progrefiion furvenue fur les prix de toutes les chofes, non feulement des vivres, & autres Marchandifes, mais encore fur les prix des Maifons, des Terres , & furtout fur le Salaire des Ouvriers, fur les appointemens & Honoraires &c. Si je ne fins pas a même de m'étendre aufii amplement la-deflus que je le fouhaiterois, & que je pourrois Ie faire fi je me trouvois cn Angleterre, je tacherai du moins de donner ici un petit détail, qui mettra lc Lecteur en état de fe convaincre de la vérité de ce que j'ai avancé fur cet article. Mais pour Mtir fur un fondement un peu folide, on ne doit pas prendre pour baze les prix des Denrées &c. tcls qu'ils étoient quelques années avant  CIIAPITRES PRÉCEDENTS. 207 1'époque de 1'établiflèment de la Banque a Londres, mais il faut remonter jufqu'au tems de la Reine Elifabeth. i<». Paree que c'eft depuis le commenccment de fon regne que la Monnoie d'argent a été fixée fur le pied oü elle fe trouve encore aujourd'hui dans ce Royaume (24). Et a«. paree que pendant tous les regnes des Souverains qui lui ont fuccédé les Billets ou papiers de Crédit étoient déja en ufage, & avoient cours dans le public, ainfi que nous 1'avons vu aux pages 155, 160 & 169. Plufieurs Banquiers faifoient alors ce qu'un feul Banquier pour ainfi dire a fait depuis. On eft affez communément dans Popinion qu'il y avoit en Angleterre du tems de la Reine Elifabeth quatre millions en Efpeces qui circuloient dans le public (25). Je fuppofe que ces quatre millions équivaloient dans cc tems-la a environ cinq millions, par la raifon que j'en donne dans la Note (26). (24) Ce fut fous le regne SElizabeth qu'on altera pour Ia derniete fois la Monnoye d'argent en Angleterre, car elle eft toujours reftée fur le même pied depuis le regne de cette Princeffe. On divifa la üvre d'argent en roixaute deux Schellings , au lieu de foixante qu'elle renfermoit avant ce regne. Voyez Hume (Tudor) T. VI. p, "30. & Anderson & l'an 1560. Pour ce qui concerne la Monnoye d'or elle a fubi depuis ce tems - la quelque altération. Voyea Anderson T. I. p. 489. T. kt P- 27» 28, 213, 214,274 (Sec. (25) An der son T. I. p. 449. a l'an l6o°. (26) On croit affez généralement que depuis l'an 1600. la Population s'ert accrue de neuf eens mille aines en Angleterre} mais je  üo8 Chap. Vil CONCLUSION DES Ces cinq millions en Efpeces fuffifoient aio» pour ' rente que cet accroiffement n'a pas pu étre aufii confidérable paree que, io. ,| paroit prefque ineroyable qu'il ait pu avoir lieu dans IVpaee dun Sieele , c'eft - a - dire, entre l'an töoo & 1700 ou environ; 2°. paree que pendant les deux derniers Siecles les guerres que VAngleterre a en a foutenir, le grand nombre des perfonnes qui qmttcrent le Royaume pour aller s'établir dans les Colonies de VA. wc-rique, & 1'extenfion qu'elle a donné a fon Commerce, rendent un fi prodigieux accroiffement prefque impofiible dans tm Royaume oü CV compris VMande cc YEcofe) Mr. Busching ne comptoit en i;6o qu'environ huit millions d'habitans. En fupporant que VAngleterre a eu ii Ia fin du XVIme Siècle une population entre 4 & 5 millions, & qu'elle ait recu depuis ce temsla julqu'au commencement de ce Siècle un accroiffement dc 9co mille ames, alors pour établir le calcul des Efpeces fur un pied un peu fohde, il faudroit ihppofer qu'a la fin du XVIme. Siec'e il y avoit amant d'habitans qu'au commencement du XVlIIme. & qee les Efpeces y ont été dans la même proportion. Enforte que les 4 millions d'Elpeces du tems de la Reine Elizabeth, & dont il eft fait mention dans le texte, doivent êoc portés en raifon de la Population, qu'on fuppofe avoir eu lieu au commencement de notie Siècle c eft-a-dire a 4 millions & demi, ou ii 5 millions. On lit dans la Gazette Ilollandoife de Leyden du " Juillet 17-9 que d'après un Ouvrage du Docteur Puien, le nombre d-s habr tans de VAngleterre & du Comté de Galles ne fe monte pas a cinq millions, que le nombre des grandes Maifons en douzc années Cde pms 1765 jufqu'en 1777) s'y trouvoit porté de 236018. a 263831 ou a une augmeritation de 27813. Mais d'un autre cóté que pendant la même période le nombre des Huttes & des autres Maifons qui ne con tiennent pas Inritfenêtres y étoit diminué de 5577!. & |e teml}re dej habitans pour le moins de 200 mille ames, (ce qui me paroit tres confidérable). Si ce calcul eft braft, i! peut donner lieu a bien des réflexions dans les conjonctures acruelles. On attribue cette dépopulation h quatre caulès. i°. A Psugrnentation des Flottes & des Années. 2°. Au trois guerres que YAriglélerre a eu pendant ce Siècle. 3°. Au grand nombre d'émigrans qui font paffés en Amérlque. 4-. A  CHAPITRES PRÉCÉDENTS. 209 pour fournir a tous les articles (27), y compris les Salaires &c. Cette maflc repréfentoit donc alors 4°. A la cherté des Terres, des Dcnrici, & fiirtous a raugrnentation du luxe, des Dettes, df» Injpto. durfie* puUiqpcs &c. Voici ce que je lis dam ü Gitoyspiïb ét BuichiMO, ceci eft traduit du Hollandois. On a coinpté eu Anglticm, Jt rorcailnii de rimpöt fur les fenêtres, 690 mille maifons fans y comnreitdre lts Humt, don» on ne fait pas le dénombrement, & qui Idaj M. Rr.£inrhi ? Un Cochon au delfus d'un an ii 6 „ Un jeune Cochon a 2 . Une Chevre a 5 ___ Une jeune Chevre a 2 , A mefuie que depuis Edouard 111. les Efpeces en Angleterre changoient de dénomination, 011 que leur numéraire éroithauffé, le falaire des Ouvriers, Artilhns &c. fubifibit des changemens & alloit en auguieutant. Aufii trouve-t'on qu'en 1563. le'Parlement s'occupa dc cet objet, & il paroit qu'il s'en eft fouvent occupé depuis ce temslii, mais fans pouvoir reinedier au mal. Voici quelques articles que M. Anderson rapporte, & qui peuvent fervir de point de comparaifon. Un Profclfeur dans une des deux Univerfités avoit vers lc commencement du regne d'Elizakth 40 livres fterllngs par an pour fes llonoraires. Le Bow. Stringmaker (Fabriqueur de cordes d'arc) avoit un falaire journalier dc 16 dtniers. Aujourd'hui, dit 1'Auteur, pour fe trouver dc niveau avec le prix des vivres dc notre tems, il lui faudroit 6 Schellings & huit deniers. Un Maltre d'artillerie avoit un Scheliin par jour. Anderson évalue la différence dansles dépenfes journalieres du tems d'alors a celles d'aujmird'bui dans la proportion de 1 ii 5. A la fin du regne ó'E/iza'.eih le prix des denrées &c. étoit déja augmenté confnlérablemeui; car il paroit qu'a la fin du XVI. Siècle  CHAPITRES PRECEDENTS. 211 les articles qui faifoient Pobjct du Commerce de VAngleterre. le prix du froment étoit it 20 Schellings, celui des pois & des feves ii ir, i. celui de 1'orge cc de la dreche ii 12: & tous ces articles étoient cohfidérés comme ponvant fupportcr un droit de 2 Schellings pour le froment &c. Voyez la Note 52. & furtout Anderson ï. I. p. 394, 401, 412 & 442. cc AB. I'ubl. T. VI. p. IV. p. 87, 121 cc 143. Suivant des informations qui m'ont été envoyées de Londres les prix de quelques uns des articles mentionnés ci - deflus roulent maintenant dans cette Ville & aux environs, favoir: Une Charge (a had) de foin entre 45 & 55 Schillings Ie load. Une Brebis environ 20 Sch. Un vieux Mouton propre pour la boucherie entre 25 & 30 Sch. •Un Bceuf au defius de 4 ans 9 i 10 livres fterlings quand ils font d'une péfanteur ordinaire. Une Vache a lait 8 ou 9 livres Sterlings. Une jeune Vache 2$ ii 3 livres. Un Cochon au deflus d'un an entre 20 & 25 Sch. Un jeune Cochon 12 k 13 Sch. D'oü il refulte, qu'en comparant les prix de ces articles avec ceux des mêmes articles pendant le regne d''Elizabeth, le prix du foin a augmenté dans la proportion de 1 a 4 cc au delfus. Un Mouton du prix de 2 | Schellings & celui de 20 Schellings dans Ia proportion de 1I7. Et entre le prix de 6 & de 30 Sch., dans la proportion de 1 a 5. Le prix d'un Cochon ci - devant ii 6 Sch. & aujourd'hui entre 20 & 25 Sch. dans la proportion de 1 h 4. (mais le prix de 25 Sch. pour un Cochon bien nourri doit étre plus confidérable, a ce qu'il me femblej. La dilférence entre le prix d'un jeune Cochon ci-devant k 2 Schellings & aujourd'hui it 12 ou 13 Schel), eft comme de 1 h 6. Le prix des bétes a corne paroit avoir aufii monté dans la pro> portion de 1 ii ; & même au dellus. Je 11e fuis pas aflez cxaétaiient informé pour pouvoir faire de femblab'es comparaifons fur les autres objets, car par exemple, les Honoraires d'un Profefl'eur dans une des deux Univfcifirés A'Anglt* terre qui du tems d''Elizabeth étoient fixés 40 Liv. Sterlings par an, O 2  212 Chap. VIL CONCLUSION DES Environ un Siècle après, les calculateurs entendus dans ces fortes de matieres evaluerent les Ef- Ytnent paree qu'ils lont prefque tous les ans ü,ceruins,& dépendent' des prodmts des terres que Jes fondateurs de, College ont ES pour leur entretien. II y a des Profefieurs dn Roi dont I s U ,,o ranes n'exeedent pas rco Liv, Stcrüngs par an : „ais il s 0 „ e l Je me bornerai donc k citer un petit nombre de faits, afin de ne *■ r- c , aEjpcgne rouloient en «ros enf e Aout i//9) a un prix encore plus haut. Ordli^^ur'^erie":?*" ™'n * — f«« IV. p. ÏT Z ï P"* d°,S V"TCS CVoyez ^. ftst T. VIII. caufe des pnfelcS s r:',er ' * ^ Ch°fa > ^ oü on donne de dMS Ies A^ P-is le vin) que ,TJ » Pour ce cmi eft h„ p„ 1 y eft dlt en ou»e: ^£ tïlïSJTTvS; - r- „ Auberglftes de Zm*», de mgJJL % TT ' & plufieurs » ~ d-avis,qi,c vu les prix .JES* ^deS^t T .,&onn'exiSe7a 2'p r '^rVi, 0:; " ^ ft'ffirMt' . Ptix, ils feront condles fe a' ÏÏÜÏÏÏÜ * *" „ -x prix excelfifs & déraifonnables ^ 1^^' QUa"C „Voyageurs qui ne s'arrêtem que peu 11 3l'X des «nous eftimons que moreül n'a p£ S de fe ï .'f*** » Prenant qu'un *uf par cheval .1 r Phlndre en ,,e  CHAPITRES PRÉCÉDENTS. 213 pcces Monnoyées a dix-huit millions & demi (28). Que ces dix-huit millions & demi ne fuffifoienc pas alors, cela paroit par le Crédit & par le papier (29) qui avoit été admis, probablement de- „ s'en retoume Ie même jour, 1'Hotelier doit fe contentet de deux „ pennis par clieval, & ne pourra rien exiger de plus &c." Aujourd'hui il Londres dans les Auberges on paye felon qu'on veutêtre fervi; on eft affez bien traité aux tables d'höte moyennant trois Schellings, y compris une demi pinte de vin. En voyage on paye aux Hóteleries qui font fur la route, favoir: pour nn cheval ayant pafl'é une nuit dans 1'éctuie, & ayant eu du foin, 8 pcnnis, pour un picotin d'avoine un Schelling. Pour un cheval qui n'a pas refté la nuit & qui a eu du foin 4 pennis, & pour un cheval dont 011 n'a pis détaché la bride 2 pennis. Voila encore depuis l'an 1Ö33. jufqu'aujourd'hui une augmentation fur les articles fus - mcntionnés dans la proportion de 2 ii 3. & de 1 ii 2. Ce petit détail, qui ne regarde que des objets de trés peu d'importancc, peut fervir d'excmple fur la progrefiion étonnante furvenue dans les autres articles. Nous en avons donné des preuves fans replique dans notre premier Volume par rapport a la France & h la Hollande; mais il n'y a pas de pays dans YEurope oü cette progreffion fur le prix des objets de première nécefiité foit fi fenlible qu'en Angleterre. (28) A la révolution qui eut lieu vers la fin du Siècle dernicr les Efpeces du Royaume fe montoient, felon le calcul de D avenant, h dix-huit millions & demi (Voyez les Ouvrages de Davenant raflemblés & revus par M. Charles' Wiihwort ii. Vol. I. pages 363 &c. 443 &c.) Depuis 1599 jufqu'cn 1675. on avoit frappé en Monnoyes d'or & d'argent pour 21,051,876 Livres Sterlings. Anderson T. II. p. 158. (29) Par le détail oü nous fommes en trés a la fin du Chap.Vme. on a pu obferver combien les Banquiers dans le XVlIme Siècle firent ufage de leur crédit. Les révolutions, les guerres civiles & itrangcres qui eurent lieu pendant le regne de Charles I, fous Crent; O 3  2i4 Chap.Vll. CONCLUSION DES puis la fin du regne $ Elizabeth , ou depuis le regne de Jacques T. Depuis Ia fin du regne d''Elizabeth lc prix de prefque tous les articles ayant augmenté du triple(3o), toutes chofes égales, il falloit au commencement du. XVIIIme. Siècle au moins le triplo en argent (31), pour repréfenter les mêmcs articles en valeur, tels qu'ils étoient vers la fin du regne de cette Princeffe. Outre cela, par Pextenfion qu'on a donnée au Commerce , & depuis qu'on a introduit de nou- wel, & fous le regne de Charta II, augraenterent les befoins d'argent, ainfi qu'on Pa obfervé dans le même Chapitre. O) Voyez Anderson T. I. p. 4.2-& 44, \ i'an I594. C3Ü Um T. I. p 443. Le Biblioïhecaire a IFeft- mhifier avoit pour Honoraires 13 Liv. 6 Scbell. 3 deniers par an, aujourd'hui (dit Anderson) il lui faudroit quarante livre, pour fatisfaire aux feuls befoins que la facon de vivrc de ce tems - la exigeoient. A la même page cet Auteur rapporto, que les Honoraires d'un Miniftre avec le caraeftere d'Envoyé en Hollande Ce montoient en 1594 ii 40 Schellings par jour, non compris les fraix du Voyage. Dans les Inftructions qui lui furent doiinées de la part de la Reine* il efi: dit, ., pour les dépenfes de fon voyage & pour fon en actiën „ quarante Schellings par jour, c'ell pourquoi, ajoute -1'011, nous „ voulons & vous commandons de lui payer 011 de lui faire payer „ de la Caifie de notie Tréfor de VEchiquier, 011 a fon Agent, la :, dite fomme de quarante Schellings par jour, a commencer de la „ date de cet orrire, jufqu'a fon retour dans le Royaume, & de „ lui avancer encore la fomme de foixante livres, pour les fraix de „ fon Voyage, ce qui fera enfuite rabattu de fes Honoraires. Voyez „ AS. Publ. T. VII. p. I. p. 143 — Anderson, a la page 445. „ année 359-. ajoute; les Honoraires du Secrétaire de la Reine pour „la langue francoife étoient de 661 Livres, & par conlSquent ils „ éqmvaloient a 200 Liv. de notre tems." Voyez encore Act. Publ. f. VII. p. I. p. 143, ,s8 & r?at  CHAPITRES PRÉCÉDENTS. 215 veaux articles, il eft arrivé que nous avons auffi connu de nouveaux befoins (3^). Ces articles exigent par conféquent une augmentation d'argent pour pouvoir continuellement ctre repréfentés. On pourroit admettre, par fuppofition, que trois millions peuvent avoir fuffi pour fe procurer tous •ces nouveaux objets, & pour tous les autres qui devoient ctre continuellement repréfentés (33). II s'enfuivroit de ce calcul que dix-huit millions & demi en Efpeces auroient été dans ce tems - la plus que fuffiiants C34-)- Mais indépendamment de tous (32) A mefure que Ie Commerce s'eft étendu depuis Ie XlIIinc Siècle, les fociétés relpeétives ont connu de nouveaux befoins. Ces befoins fe font encore confidérablerhent aecrtis par Pextenfion du Commerce, depuis la découverte de V/lméiique, & furtout depuis le XVHme. Siccle. (Voyez mon premier Volume partie II. p» 131.) Quel objet immeufe ne forme pas aujourd'hui le feul article du Tabac, introduit en /Ingietenérations & la même facon de travailler, a dü monter bien plus haut, ainfi que nous 1'obferverons plus bas. (391 Adam S m it h T. II. p 555. (40) Idem La Reine 4nne mourut le 14 Aoüt 1714. (41) Idem ——- .  -20 Chap. VIL CONCLUSION DES monter a 130,51(5,807 Liv. 2 fols 4 den. (42). Depuis, & pendant une Paix de douze années,elle a été réduite a 129,146,322 Liv. 5 fols 6 d. (43). Mais elle eft confidérablcment augmentée depuis ce tems-la (44). Toujours eft-il vrai, qu'è mefure que la Dette Nationale s'eft augmentée, les Impöts ont augmenté dans la même proportion: & par conféquent il a fallu augmenter le papier de Crédit, afin de repréfenter ces deux objets. M. Hume ayant donné fes Réflexlons Politiques avant Pépoque de la Guerre de 1755. fuppofoit qu'il y avoit alors dans le Royaume pour douze millions dc papier qui circuloit comme argent, & pour dix-huit millions cn Efpeces réelles (45). En 1762 M. Anderson prétendoit que les Efpeces fe montoient a fcize millions (46). Aujourd'hui on penfe afiez communément qu'il y a environ dix-huit ou dix-huit millions & demi en Efpeces réelles. D'autrès les font monter a vingt C42) Adam Smith T. II. p. 556. C43) Idem. (44) Je penfe , en fnppofant meme que Ia Paix eut lieu dans le courant de cette année, que Ie total de la Dette doit fe monter aujourd'hui au dela de cent foixante millions de livres Sterlings. (45) Voyez Hume dans fes Dlfcours Politiques. T. I. p. 210 & entr'autres a la page 211. oü il s'exprime ainfi: „Par notre finre po„ htique, nous fommes f, foigneux de farcir la Nation de cette belle „ denrée de Billets de Banque & autres papiers , qu'il femble que „ nous ayons peur d'étre furchargés d'or & d'argent. C-Jö) Andersom T. II. p. 105.  CHAPITRES PRÉCÉDENTS. 221 millions en or & a deux millions en argent. (47). II y cn a qui penfcnt qu'il y a pour environ vingt millions en papier qui circule comme argent, tandis que d'autrès jugent que 1'objet de cette circulation ne fe monte qu'a huit, & tout au plus a dix millions (48). Par le détail oü je fuis entré la-deffus au Chap. de la Banque de Londres, on peut admettre, a ce qu'il me femble,fans rien hazarder, que cette dernicre fomme fe trouve trop petite (49). En évaluant donc toute la fomme qui circule en papier a quinze millions, ainfi que je 1'ai déja fait,je penfe que je ne rifque pas d'exagerer trop les chofes. En voila afiez pour faire fentir 1'influence que (47; Inrbrmations qu'on a revues d'un Particulier demeurant h Londres. (4«) Idem fi on déduit de Ia fomme totale des Billets de Banque qui circulent dans le public, la fomme en Efpeces qui doit être en réTerve dans Ie tréfor de la Banque, alors la fomme ne fe montera qu'it dix millions .-mais il n'en refte cependant pas moins vrai que les Billets de la Banque, fur le pied fupporé , forment un objet de quinze millions, ou a-peu-près, de Livres Sterlings. (49) En évaluant la fomme qui circule en papier a quinze millions, & en mppofant qu'il y a 20 millions en Efpeces il y auroit enfëmble 35 millions. Mais comme de ces 20 millions 5 millions doivent refter en repos dans la Banque , (Voyez ma précédente note) il en réfulte qu'il y a dans ces 30 millions amant de valeur cn papier, que de valeur en Efpeces qui circule dans le public. Car ainfi que je 1'ai déja dit, la Banque fe trouve obligée (& fün exiftence en dépend) de tenir au moins dans fon tréfor de réferve le tiers de tout l'argent qu'elle fait circuler; & ainfi les 5 millions en or ou en argent monnoyés, ou au moins en lingots &c. qu'elle doit nécefiairement avoir en réferve , ne circulent pas dans le public, mais doivent refter oififs, afin de faire des efcomptes,& pour fervir a reparer promptement un difcrédit momentané, qui pourroit fubvenir dans Ie Commerce en général , tk même dans la partie des Finances de 1'Etat,  222 Chap. VII. CONCLUSION DES toutes ces manoeuvres ont les unes fur les autres , & combien cela dérange & doit déranger en général les prix des chofes, & produire quantité d'abus funeftcs dans les moyens d'acquérir des Richeffes. Du moins, felon mes idéés, il me femble que fi on n'avoit pas introduit en Angleterre & cela conftamment depuis le commencement de cc Siècle, une fi forte mafle cn papier, les dix-huit millions cn efpeces auroient repréfenté a peu dc chofe prés tout cc que répréfentent aujourd'hui les trente millions en Efpeces & cn papier f50): car tous les prix auroient dü dans une certaine proportion fe régler cn conféquence. Enfin, je te répete encore une fois, l'argent ne doit pas étre confidéré comme une richcfie, mais comme la vraie mefure de nos richeffes. En confidérant les chofes fous ce point de vue, un hommc un peu au fait pourroit calculer de combien VAngleterre eft aujourd'hui plus ou moins richc qu'elle ne 1'étoit il y a deux eens ans. Ne pourroit-on pas en effet admettre que les revenus & la dépenfe d'aujourd'hui dans toute VAn- (50) Nous avons dit plus haut que les Efpeces,,felon les uns, fe montoient au commencement dc ce Secle a dix huit on a dix-huit millions & demi, & felon d'autrès h vingt deux millions. En fuppofant que la fomme fe monte a 20 millions, il en faut déduire les 5 millions qui font fupporés étre mis aujourd'hui cn féferve dans la Banque ,• d'oü il fuit, qu'il fe trouveroit fur ce pied Ia feulement 15 millions én Efpeces roulant dans le public; ce qui avec les 15 millions en papier qui circulent comme argent, forment 1'objet des 30 millions dont je fais mention dans le texte & dans la précedente Note.  CHAPITRES PRÉCÉDENTS. 223 «kterre, ne font pas dans la proportion oü les revenus & la dépenfe étoient du tems de la Reine Elizabeth'? Je veux dire, que lc furplus, ou ce qu'on tient de réferve après les dépenfes faites fur toute la Société, 'eft aujourd'hui pour toute la Nation en Angleterre moins confidérable, qu'il ne 1'étoit du tems de cette grande Reine. (51). Si une Terre eft eftimée valoir 500 Liv. ou 1000 Livres fterlings, foit que cette Terre doivc fupportcr peu ou beaucoup de charges a 1'Etar, elle ne produira pas pour cela plus de froment. Une Perfonne au XV1,,1C. Siècle pofiedant un revenu de 1000 Liv. & en dépenfaat 600 , étoit plus riche que celui qui a aujourd'hui un revenu de 5000 Liv. & qui en dépenfe 4800. Les différentcs charges que nous devons fupportcr abforbent une grande partie des revenus. Quelle utilité, ou quel avantage en réfultc-t'il donc pour un Ouvricr, s'il recoit aujourd'hui un falaire doublé de celui qu'il avoit autrefois, fi avec ce furplus il (51) Perfunne h mon avis ne feroit plus propre ii faire lii-deflus un, calcul auffi exact que curieux & intéreffimt, que celui qui fe trouve i la rite de l'adminiftration des Finances en Angleterre. Une telle Perlónne feroit plus cn état de fentir la force de mes raifonnemens, & plus ii portee de découvrir la fource des maux qu'on a caufés par tous ces expédiens fpécieux, qui en procurant une utilité momentauée, n'ont réellcment fervi qu'a favorifer la folie ambition des Souverains, & ont caufé la mifere des peuples dans prefque. toutes les Soeiétés de l'liurope.  224 Chap. VIL CONCLUSION DES ne peut pas fe procurer les mêmes articles qu'il faifoit ci-devant pour lui & pour fa familie (52)? L'ar- C50 Suivant les Inforrnations d'un Particulier réfidant a Londres les Salaires des Ouvriers a la Campagne a Ia fin du XVI. & au' commencement du XVHme. Siècle rouloient entie 7 & 3 pennis ou deniers par jour Et a Londres entre . . . . .o & 10 Sous Guillaume lil a la Campagne '9 & 10 , Et a Londres h I2 Dans le XVIII. Siècle k la Cam- Pa3ne emre 14 & 15 Et h Londres . t . . . h 18 ,e x™me: siec,e — tie * *° de yi a 12 Pendant ce XVIIIme Siècle le prix du FromenFa été a 40 Sdu* lings, & quelque chofe en fus. Et les falaires font montés de 9} & 12 deniers a 14X & ,8 deniers Les autres denrées. les Loyers'des maifons, les Ixes &c on't vmremblablement haufle dans une difproportion' encore u's o ifid rable que les Salaires. r <-umicu. Comparons feulement les prix des Salaires a celui du Froment. Neft-il pas évident qu'un Ouvrier a la fin du XVIme. ou au com mencement du XVHme. Siècle avec fon Salaire de 7i Zu1 jour pouvoit en ,4 jours & demi de travai, gagner de cfuo T iet un Oj^er de Froment, C,e prix étant , £ EfcaHns '"Lis Z dans e Sieele oü nous vivons, avec un Salaire de .4I pen is ft prix du Froment feulement calculéfur lepied de 40 Eicauns O ter.) i. devroit travailler pendant jours pour le pro ^1 1^ quantité de Froment ? Piocuiei la même Je dois remarquer en paflant que le prix du Froment en Amrle terre na pas été confidéré par les Auteurs modernes dans LtS' tablc point de vue. Par exemple, M A n . „ c nsnt les prix du Froment depuis l'année töi iufbu'lV * "' T ^ Porte les Prix des aies ££*-**klm* 1601 De  CHAPITRES PRÉCÉDENTS. 225 L'argument qu'on tire de ce que le prix des Bleds a été plus bas dans ce fiecle en Angleterre De l'an 1561 a — Liv. 8 Sch.— 1562 a — 8 — 1574 a 2 — — 1587 a 3 4 — 1594 a 2 16 — 1595 a 2 13 — J596 a 4 — — 1597 a 4 12 — 1598 a 2 16 8 1599 a i 19 2 i6co k 1 17 8 1601 a 1 14 10 Liv. 28: 9: 4- den. le Quarter Ce qui, comme on le voit, Fait revenir le prix moyen des grains pendant ces 12 années & 2 Liv. 4 Schell. 9 \ deniers année commune. Si on remplit les années dont 011 ne donne pas le prix fur le pied de 8 Schellings leQjiarter, on a 19 Sch. ou environ, pour le Quarter, &"non pas 45. Pour fe convaincre que mon calcul approche du vrai, on n'a qu'a confidérer que dans Anderson (a Fan 1553) 1'Ordonnance de Philippe & de Marie fur 1'exportation des grains, portoit que loifque le prix du Froment n'excéderoit pas 6| Schel., & le feigle 4 Sch. 1'exportation en feroit permife: d'oü il s'enfuit que dans ce tems-1» c'étoit le prix modéré ou ordinaire du Froment &c. Dans l'année 1593, la 35me. du regne de la Reine Elizabeth, il fut ftatué, que lorfque le Froment feroit k 20 Schellings & audeffous, 1'exportation s'en pourroit faire moyennant un droit de s Schellings par Qjtarier. & pour les autres grains un droit de ij Sch. (Voyez A n d e r s o n T. II. p. 442. Voyez encore fur eette parti» le Livre de M. Du Pré de St. m a u r aux prix des grains VAngleterre p. 187 a la Note If). Dans le XVHme. Siècle le prix des grains augmenta confidérable. ments je penfe que les troubles qui pendant le même liecle regnerent «n Angleterre auront le plus contribué ii cette cherté. Terne 11. Part. I. P  226 Chap. VIL CONCLUSION DES que dans le fiecle dernier, pourroit: être admis, fi on obfervoit la même diminution fur le prix de tous les Voici Ie prix du Froment dans les Périodes fuivantes. Pendant ao Années, depilis 1601 jufqu'a 1620, le prix fut aenviron 39 Sch.si derniers le Quart er. 20 Années depuis 1620 .1 1640 i 50 Sch. . den. te 1646 a 1665 a 57 ... 5£• de i(565 a 1685 ii 46 ... 31- de ï686 h 1705 a 54 . . lorl' de a 1725 « 44 ... 9 s pendant 15 ann. depuis 1726 jufqu'h 1740 a 39 ... 7 Voyez 1'Ouvrage de M. du Pré de S t. Maur, & celui de M. Adam Smitii T. I. p. 318 & fuiv. Je dois obferver a cette occafion; „ que le Otiarter de bied de „ Winchefter 011 de Londres contient huit BoifTMux Anglois, dont „ chacun, fuivant Rich a rd. pefe 56 k 60 livres poids"de mare. „ Dix de ce Ojfarters font, dit-il, un Laft f Amfterdam , qui felon „ lui, (page 54) pefe en Froment 4600 a 4800 livres poids de mare, „ en feigle 4000 ou 4200 des mêmes livres, & en Orge de 3200 a' „ 3400 livres: ainfi le Quarter de bied peut étre évalué a 458 de „ nos livres (de France). En effet, Ie Otiarter de Londres répond „ a 17424 pouces cubes Anglois,011 a 14560 pouces cubes de Fran„ ce, & a environ 458 ÏÏvres poids de mare. Ce n'eft pas tout a „ fait deux feptiers, mefure de Paris." Voyez du Pré de S T. Maur cité ci - deflus. Voici encore Ie prix du Froment depuis 1769 jufqu'aujourd'hui » Londres. En 1769 a 33 Schellings par Quarter. mefure de IVmclieftcr. 1774 a 46 ScheH. Ï770 \ 31 im a 47| . 177! a 43 1776 a 36 1772 * 50 1777 a 36 1773 a 52 • ' 1778 ii 37 Et pendant cette année (1779) les prix ont roulé entre 30 a 38 Sch. Le prix du Seigle n'a pas été enregiftré exactement; mais il a roulé entre 25 & 36 Schell. pour la même mefure, pendant les dix années précédentes. Actuellement le prix du feigle ne furpaiTe pas ao it 21 Schellings.  CHAPITRES PRÉCÉDENTS. 22? autres articles. Les gratifications qu'il a fallu donner pour encourager 1'Agricukurc (53), & la réduéüon furvenue en Angleterre dans ce fiecle fur le taux de l'intérêt devoit naturellement produire la diminution Nous avons Iu dernierement dans les Nouvelles Publiques, que les Moiflbns pendant cet Eté ont été plus abondantes en Angleterre que pendant les 60 dernieres années. En général la récolte des ftuits & des grains a été trés abondante dans les contrées du Nord de 1''Europe, enforte qu'on peut dire qu'on a eu une année trés fertile & tres favorable. (53) On a pu obferver dans ce qui eft dit dans la Note précédente combien le prix des grains avoit renchérl dans le XVHme Siècle en Angleterre. Cette cberté, par les révolutions violentes qui eurent lieu dans ce Royaume pendant le cours de ce Siècle, devoit naturellement attircr au premier moment de tranquilité 1'attention du Gouvernement Anglois; auffi la gratification fur 1'exportation fut-elle établie en 1689; & elle ne manqua pas d'influer fur 1'Agriculture, & par conféquent fur les revenus des Propriétaires des Terres laboura. bles. Auffi s'appercut - on de tems h autre d'une certaine diminution fur le prix des grains. Anderson rapporte que la gratification pendant l'année 1734. fe monta k 72,433 Liv. pour 433,893 Quarters de Froment qu'on avoit exporté de VAngleterre. L'année a'auparavant on en avoit exporté 800,000 Qiiarters. Voyez Andersom T- II. p. 357 & 349. Depuis l'année 1746 jufqu'a l'année 1750 inclufivement, & par conféquent en cinq années, on a exporté en grains des 57 Ports de mer d'Angleterre, pour le Portugal, la Flandre , la Hollande, la France, la Norwege &c. pour 7,405,768 Livres Sterlings. Les gratifications accordées par le Gouvernement fe monterent pendant les années 1748 & 1749 a plus de 200 mille Livres Sterlings. (Voyei la Géographie de Busching). Si d'une part ces gratifications contribuent au progrès de 1'AgricuIture, & établiflent un haut prix dans la valeur des Terres, d'une autre part n'augmentent-elles pas Ia charge des Impóts? car enfin cet impöt qu'il faut lever pour fournir ces gratifications doit être fupporté par Ia Nation, & c'eft toujours Ie bas peuple qui en foufÜe le plus, Ne cauiènt - elles donc pas a toute la Société une d4P 2  2a8 Chap. VII. CONCLUSION DES fur les prix des grains. La valeur des Terres étanc une fois établie dans la proportion d'un intérêt de 4 ou de 3 pour cent, il falloit que la rente, ou le produit de la Terre , s'établit a-peu-prés dans la même proportion. Ce produit cn argent étant moindre, & les dépenfes en général n'ayant fubi aucune diminution, il s'enfuit que le Propriétaire s'eft réellement appauvri. Voila précifément ce qui eft arrivé , & voila ce qui prouve la jufteflè du fyftême que nous avons établi. Voyez la-deflus la Note (54). penfe extraordinaire, dont les Poflefleurs des Terres feuls font leur profit ? II me fenible du moins que pour calculer avec précifion fur le prix des grains, il faudroit ajouter les gratifications que 1'Etat accordé, aux prix auquels ces mêmes grains font vendus; & enfuite examiner fi ces gratifications font réellement avantageufes a la fociété, prife en gros. Combien de fois ne fe laifle-t'on pas éblouir par des opérations avantageufes en apparence I (54J Des que le taux de l'intérêt fut établi a 3 pour cent en An. gleterre (Voyez Anderson T. II. p. 3<58 ii l'an 1742) la valeur des Terres devoit par une fuite naturelle s'établir dans Ia même proportion. Suppolbns un inftant que le taux de l'intérêt depuis l'année 1731. jufqu'en 1740 ait été ii 4 pour cent, & depuis 1741 jufqn'en !75o & 3 pour cent par an; n'en devoit - il rien réfulter fur la valeur & la rente des Terres ? Nous fuppofons ici que les rentes fur les Particuliers ou fur 1'Etat ont été de pair avec les rentes que les Terres produifent ordinairement. Par exemple. Depuis 1731 jufqu'en 1740 un Terrein qui produifbit un Qiiarter de Froment, donnoit, lorfque 1'intérêt étoit a 4 pour cent ,un revenu de 37 Efcalins, (Voyez les prix que M. Adam Smit h donne dans fes Ouvrages Vol. I. p. 325). Cette Terre fur le pied de 4 pour cent, l'année de rente nette, devoit par conféquent former un capital de 025 Efcalins, pour trouve.t uri teveuu de 37 Efcalins en argent.  CHAPITPvES PRÉCÉDENTS. 229 II nous refte a dire un mot fur Partiele du taux de 1'intérêt, qu'on regarde comme le Barometre actuel dc la profpérité des Etats. Pendant le regne de Jacques I l'intérêt de l'argent fut établi a 8 pour cent l'année (55). Mais l'intérêt tombant k 3 pour cent, la ditte Terre continuant \ produire un Otiarter de Froment, qui entre les années 1741 & 1750 donnoit un revenu de 33 Efcalins (Voyez le dit Ouvrage d'A dam SmitiO alors la valeur de la Terre dans la proportion de la rente de 3 pour cent, s'établit k raifon de 1100 Efcalins, qui rendent aulli les 33 Efcalins de revenu. D'oü il rél'ulte qu'en Angleterre, pendant les dites Périodes, le Propriétaire des Terres, par la feule réduétion de l'intérêt, s'eft trouvé appauvri dans fon revenu. Et comme le prix de tous les autres articles font confidérablement augmentés, les dépenfes du Propriétaire des Terres fe font accrues dans la même proportion, & il fe trouve par la dans une polition moins favorable que ci - devant. Puifque nous fommes iel fur le chapitre de la valeur des Terres, nous devons encore faire obferver, qu'avant le commencement des troubles en Amérique, elles étoient alTez généralement ellimées au denier 30 ou 33'me, c'eft-a-dire qu'on tiroit de fon Capital 333» pour cent. Aujourd'hui les Terres fe vendent en Angleterre au denier 25 , ou fur le pied d'une rente de 4 pour cent. On voit par lk que les Terres chez les Anglois produifent un moindre revenu que l'argent placé fur 1'Etat, car les rentes des fonds placés fur 1'Etat fe trouvent établies fur le pied de 5 pour cent, & celles des Terres fur le pied de 4. La valeur des Terres 1'emportc donc réellement de 20 pour cent. Ce qui prouve que ce dernier revenu, quoique moins avantageux, eft pourtant eftimé comme plus folide. 11 y a apparence que les droits fur les Terres ne font pas cotnpris dans le fusdit revenu, lequel il faut regarder comme un revenu net tous fraix déduits. Le droit fur les Terres & celut fur la Dreche. (qui ne font point Ilypothéqués) Ê moment enfemble annuellement k 2,750,000 Livres Sterlings. (c5) Hume (Stuurt) T. I. p. 323- oü «c Auteur dit: " L'i,lté" „ rêt pendant le regne dc Jacques I. ne fut jamais au - defibus de 8 „ pour cent." Voyez Anderson T. U. p. 16 a l'an 1624. P 3  S3C. Chap. VII. CONCLUSION DES Du tems de Cromwel il fut quelquefois a 6 (56). Après la reftauration auffi a 6 (57). Lorfque Ia Banque fut établie il fut fixé a 3 pour cent. A la 1 ime. année du regne de la Reine Anne il fut réduit a 5. (58}. Pendant la dcrniere guerre la Banque a continué d'efcompter les lettres de change &c. a 4; & aujourd'hui on m'a afluré qu'elle le fait a 5 pour cent (59). Tout le monde fait que le Gouvernement s'eft vu obligé de négocier au commencement de cette année (1779) a un intérêt un peu plus haut (60). On peut donc appliquer ici ce que j'ai dit plus haut, que dès que nous faifons un abus des reme- C56) Anderson T. IL p. 85. a l'an 1651. (57) Hem p. 107 & 108 k l'an 1660. L'intérêt qui tut lieu quelques années plus tard, (Voyez page 156) pendant la guerre avec Ia Hollande , ne peut pas être allégué comme un intérêt courant, mais plutöt comme un Commerce proprement dit d'ufure, dont alors les Banquiers s'étoient rendus les maitres &c. (58) Anderson T. II. p. 265. a l'an 1714. (.59; Informations qui m'ont été communiquées par un Particulier demeurant il Londres. (60) Dans le mois de Février de cette' année il fut arrêté qu'on leveroit fept millions de Livres Sterlings. On accordoit pour chaque 100 Livres une annuité de 3 Livres, & encore pour 29 années chaque année une annuité dc 3 | livres. Outre cela on acquéroit pour chaque loco Liv. fept Billets de Loterie, chaque Billet évalué ii raifon de 10 Livres, & qui ont valu fur la place de 13 a 14 Liv. Sterl,  CHAPITRES PRECÉDENTS. 231 des, qu'alors ces remedes ne produifent plus un effet falutaire. Que VAngleterre ait réellement abufé de fon Crédit, cela paroit clair, puifquc 1'intérêt de l'argent y elf. aujourd'hui plus haut que fur la fin du regne de la Reine Anne. Plufieurs raifons ont contribué a caufer un pareil dérangement chez nous; le haut intérêt en Angleterre a influé fur le notre. Ce qui fait non feulement beaucoup de tort a notre Commerce, mais même a celui de toute VEurope (61). (61) On fait que les Négocians $ Amfterdam, par les affaires qu'ils dirigent, ont des Comptes ouverts dans prefque tous les Pays qui font le Commerce du Change. Chez 1'Etranger, & dans prefque toutes les Places refpectives de VEurope, on établit le cours du Change d'apres celui ff Amfterdam. A mefure que l'intérêt de notre argent fe trouve a un bas prix, ce cours du Change s'établit plus ou moins dans une efpece de proportion: il en eft de même dc l'argent que nos habitans placent chez 1'Etranger; a mefure qu'il abonde dans nos Pays, les Hollandois font naturellement plus ou moins faciles a le placer chez 1'Etranger. L'abondance de l'argent influe auffi fur les affaires de Commerce que nos Négocians font avec les Etrangers; car, lorfqu'ils pcuvent fe procurer de l'argent avec plus de célérité ou de facilité, ils font plus portés a accorder du Crédit aux Etrangers, ce qui ordinairement leur procure le moyen de faire de trés grandes entreprifes. L'argent feul peut établir ce crédit, & animer les opérations du Commerce: c'eft le bas intérêt de l'argent dans notre République qui fait que les habitans du Midi & du Nord de VEurope trouvent un avantage réel a fe fervir de l'argent des Hollandois. C'eft par la que nous nous trouvous d'une maniere non moins avantageufe pour 1'Etranger, que trés utile pour nous mêmes, les Commiffionnaires de la majeure partie du Commerce de VEurope. Voila auffi ce qui fert a entrctenir notre Commerce de fret, & ce qu'on appeüe le sabotage. Car notie ceconomic nous met en état de P 4  a32 Chap. VII. CONCLUSION DES Le croiroit-on, qu'en Hollande le taux de l'intérêt dans les trente dernieres années a été plus haut dans le Commerce (62), que dans les trente années précédentes (63")? D'après ce Barometre, il eft certain que notre Souverain dans un cas de befoin trouveroit moins d'argent en Efpeces dans nos Provinces, aujourd'hui que nous fommes plus rïches, que cidevant lorfque nous 1'étions moins (64). pouvoir tranfporter les Marcliandifes a beaucoup meilleur marché qu'aucune autre Nation. La grande abondance d'argent dont nous avons été & fommes encore en pofleflion , n'a donc porté aucun préjudice a aucune Nation de VEurope: il y en a même qui au contraire y ont trouvé leur avantagej car c'eft par cette abondance d'argent (furtout lorfque le taux de 1'fa. térêt fe trouve fur un pied modique) que nous établiflbns un certain bon marché dans prefque toutes les branches du Commerce, & dont toutes les Nations de VEurope profitent. ^ La France & VAngleterre, dont nous fommes les voifins, peuvent rune & Vautre nous occuper trés avantageufement dans leur Commerce : mais c'eft üe la F ir a n c e furtout que nous pouvons tirer beaucoup plus d'avantage que de l'A ngleterue: ce n'eft ni enthoufiafme 01 efprit de parti qui m'arrache cet aveu, c'eft une vérité que nos medleurs politiques & nos habiles Négocians ont toujours foutenue. (Ga) Depuis l'année 1748, & furtout entre; les années 1760 & 1770. & encore plus tard, n'a-t'on pas vu fur la place des efcomptes des lettres de Change entre 4 & 5 pour cent. & même au deffus, furtout avant l'an 1763? Et voila quels furent les préludes de ce qui arriva dans le Commerce pendant le cours de la même année. (63) En 1723 plufieurs gros Capitaliftes dans la Ville d'Amftertam firent des avances fur nos Acïions de la Compagnie des Indes Orientales, a raifon de 1 % & de 1 l pour cent l'année. II y a des Courtiers Juifs qui par les Livres de leurs ancêtres peuvent attefter Ces faits. (fii) Combien des fommes imraenfes, en Efpeces réelles, ne font-  CHAPITRES PRÉCÉDENTS. 233 Terminons en peu de mots ce Chapitre: les Banques en général par les reffources qu'elles procurent peuvent donner lieu a des pertes, & a des dérangemens trés préjudiciables (65) , qui furpaffent de beaucoup Putilité & les avantages qu'elles font a même de procurer aux Sociétés oü elles fe trouvent établies. Enfin une Banque telle que celle de Londres augmenté encore par fes opérations, la circulation & le Crédit, & foutient par la cette maffe énorme de papier qui circule aujourd'hui dans le Commerce (66). C'eft ce que nous détaillerons dans la pas Porties de chez nous depuis 1760, par des Négociations particuheres, foit pour les Colonies dans V/lmdrique, foit pour plufieurs Puifiances de VEurope ? 11 eft vrai que nous y gagnons annuelle. ment des revenus afiez confidérables par les intéréts qu'on nous paye. —— Le mal qüi en réfulte pour un grand nombre, c'eft que trés fouvent ils établiflent leurs Dépenfes fur leurs revenus actuels, fans trop confidérer la folidité du Débiteur. II y a par exemple des fonds placés chez 1'Etranger qui donnent 5 pour cent, & d'autrès qui ne donnent que 4 pour cent par an. Une preuve que nos Concitoyens commencent & ouvrir les yeux fur cet objet, c'eft qu'ils préfcrent de placer leur argent a un plus bas intérêt chez certaines Puifiances. Aufii leurs Négociations font - elles bien plutöt remplies , que celles qui accordent un intérêt plus haut. Mais cette matiere eft trop délicate pour nous y arrêter plus long-tems. (65) M. M a y (Voyez Ricréations dun Négociant Partie II. p. 232.) dit: „ généralement parlant l'utilité des Banques n'eft pas aufii „ grande qu'on fe 1'imngine, & que quelques Ecrivains veulent nous ,, faire h croire." Voyez encore fur la Banque de Londres, les ln~ têrêts des Nations de VEurope T. I. p. 280. (66) Combien la Banque de Londres iie contribue - t'elle pas i P 5  234 Chap. VII. CONCLUSION &c. feconde Partie, mais pour cela il faut attendre des tems plus tranquilles, car nous fommes trés éloignés de vouloir nuire a fon Crédit dans les circonftances aétuelles, oü des efprits peu au fait de ces matieres pourroient mal interpréter nos expreffions & nos intentions. Toute VEurope a aujourd'hui les yeux fur VAngleterre: fes démêlés avec les Colonies n'entrent point dans la fphere de la matiere que nous traitons dans cet Ouvrage; non que nous ne fentions les fuites, peut-étre malheureufes de cet événement: car la guerre que ces démêlés ont déja allumée en Europe, doit être regardée comme une vraie guerre de Commerce, & j'ofe avancer que c'eft des conditions de la Paix qui la terminera que dépend la félicité des habitans de toute l'EuROPE. foutenir les opérations qui Te font fur les fonds A'Angleterre &c. ? Si on n'avoit pas étendu ces reflburces auffi fortement qu'on 1'a fait depuis quelques années, il eft vraifemblable que le Gouvernement Anglois auroit été obligé de faire un accommodement avec les Colonies fur le continent de YAmérique, ce qui , pour ne rien dire de plus, auroit probablement tourné a 1'avantage de la Nation.  ÖRDONNANCES DE LA BANQUE &c. 235 L. A. Appartenant au Chapitre III. page 6b & a la Note 22. Conditions auxquelles VOr en Lingots ejl regu provifionnellement dans la Banque /f Amfterdam. Art. I. Tous les Lingots devront être fondus & efiayé par un Elïayeur demeurant dans cette Ville. On donnera deux Billets d'Eflai. Sur 1'un de ces Billets devra être noté au dos, que le Lingot a été fondu par tel ou tel Elïayeur, ce qui doit être attefté par fa lignature. II fera fait un Contre-EJJai de chaque Lingot par rEfiayeur de la Banque ou par fon Aftiftant, au dépens de celui qui en fait la livraifon a la Banque. II payera 30 fols pour chaque Eflai. III. Si les Efiais ne fc trouvent pas d'accord, alors il fera permis a celui qui en fait la livraifon de s'en tenir a rElïai qui aura cté fait par l'ElIayeur de  s36 ÖRDONNANCES la Banque ou par fon Affiftanr. Au défaut de quoi on refufera d'acceptcr le dit lingot, fans qu'on foit tenu d'entrer dans aucune difculfion la-defius. IV. Les Lingots devront contenir en poids au moins ao Mares, & ne doivent point être d'une qualité au-defibus de 18 Carats. L'argent qui fe trouvera mêlé avec 1'or ne fera ni évalué, ni porté en compte. V. L'on ne recevra point les lingots qui font inégaux en poids d'aloy, non plus que ceux qui contiennent du Plomb ou de 1'étain, ou dont la qualité paroit être fufpecle (*). (*) On lic dans Ie texte original die eenigz'ms kwaadaardig zyn, ce qui littéralement traduit (ignifie, qui eft ou paroit tant foit peu malU %ne. Pour mieux faire entendre le fens de cette expreffion , nous ajouterons ici 1'explication fuivante: on entend par or kwaadaardig tout or non-malléable, & qui en même-tems eft mêlé d'un métal étranger qu'on ne connolt pas encore afiez it fonds pour le décrire parfaitement : on le nomme communément Kakara, ou Platina del Pinto; fa gravité fpécifique furpafie ou égale du moins celle de 1'or, & le métal eft fi tcnace it 1'or qu'il ne s'en départit qu'après un travail long & pénible: on 1'appercoit aifément pendant 1'efiai, lorfque 1'or eft en bain ; on voit alors fur la furface du bouton une taclie noiratre, qui fait de tems en tems des élancemens vers Ia coupelle, fans cependant s'en laiffer abforber, deforte qu'il refte toujours une tache fur le bouton refroidi, qui ordinairement ne fouffre point le martcau, malgré le bain qu'il a fubi; & la tache noire lè trouve encore fur la Cornette, apres être paffée par 1'eau forte.  DE LA BANQUE &c. 237 VI. Les Lingots devront être livres a midi dans la chambre de l'ElTayeur de la Banque, avec une note , fur laquelle fe trouvera fpécifié, le poids & la valeur intrinfeque de chaque lingot; afin qu'on puifle faire de nouveau le calcul pour voir s'il n'y a pas d'erreur. On donnera un recu qui devra être échangé le lendemain contre le recu ou RecipiJJb du Receveur (Ontfanger) & alors le Porteur ou le Propriétaire pourra difpofer de la fomme que la Banque lui avanccra fur ces lingots dépofés. VIL Lorfqu'on fera a la Banque la livraifon des Lingots, on frappcra fur chaque Lingot la Lettre & le Numero de la Banque; ces Lingots & les reftants feront mis dans un fac auquel on attachera un des Billets de 1'efiai, fur lequel feront notés la Marqué & le Numero de la Banque, & 1'autre Billet On obferve le même défaut dans 1'or qu'on recoit des Doreurs, mais ce mélange n'eft pas fi défeétueux. Auffi je ne penfe pas que dans POrdonnance on y ait eu égard. L'Or dont il eft ici queftion étoit plus abondant dans Ie Commerce il y a 50 ou 60 années 5 on le vendoit alors a 355 florins le mare fin fans agio, & quelquefois moins. Dans Ie Billet d'eflai on devoit faire mention que 1'or contenoit cette dite qualité: ce qui trés fouvent aujourd'hui eft négligé. Auffi rencontre-t'on quelquefois de 1'or qui en tient, quoique le Billet d'elfai n'en fafle pas mention. Cette n/gttgence proviettt du peu dattentlon qu'on donne aftuellement au Commerce des Efpeces.  ÖRDONNANCES fera donné au Porteur, qui fera obligé de le remettre lorfqu'il voudra retirer les Lingots. VIII. Les Lingots feront acccptés fur le pied de 340 florins argent de Banque pour chaque mare fin. IX. Les Propriétaires feront tenus de retirer les Lingots avant 1'expiration du terne de fix mois, en payant a la Banque un demi pour cent. Au défaut de quoi ces Lingots feront regardés comme appartenant a la Banque. X. En retirant les Lingots, le Propriétaire ou le Porteur fera tenu de rembourfer k Ia Banque la fomme mentionnée dans le Recu (Recipiffe), & le demi pour cent en fus. Et cela fans aucun égard aux erreurs de plus ou de moins fur leur valeur intrinfeque, qui pourroient avoir eu lieu dans leur eftimation. Le tout provifionnellement & jufqu'a nouvel ordre, & felon les ftatuts, ufages & coutumes de la Banque (Wisfel-bank).  DE LA BANQUE &c. 239 ANNÉE 176-3. Réglement ou Conditions auxquelles on accepterales Lingots d'argent dans la Banque ^Amfterdam. Provifionnellement & jufqu'a nouvel ordre on acceptera les Lingots a un demi pour cent pour le tems de fix mois, fur les efiais des Eflayeurs de la Ville & Amfterdam, dont il fera fait un doublé eflai dans la Banque au dépens du Propriétaire. On n'acceptera dans la Banque, & on n'en pourra jamais retirer pour une fomme au - deflbus de 10000 florins, dont on fera auffi des doublés Billets d'efiai. Chaque Recu ne pourra être au-deflbus de la valeur de 10000 fl.; lequel devra refter & fera enfuite retiré fur le même pied. Voici les prix auxquels on acceptera les Lingots dans la Banque. De 11 deniers a flor. 21 le mare brut. 10 ■■ a 19 dito. 9 a 17 dito. 8 £i 15 dito. 7 a 13 dito. 6 a 11 dito. 5 —— a 9 dito. 4 a 7 dito. 3 a 4. 10 dito.  240 ÖRDONNANCES Les Onces & les Eftelins ne feront point evalués. Ceux qui voudront retirer des Lingots devront remettre la veille les recus ou la note des calculs a MM. les Commiflaires. Les Lingots devront être au moins du poids de 50 mares, & ne doivent pas excéder celui de no Les Lingots feront livres a la Banque I'aprèsmidi entre 2 & 3 heures & demie. On ne difpofera de la valeur des avances que le lendemain du jour que la valeur en aura été écrite fur Ie compte du Propriétaire. Celui qui fe propofe de faire porter en Banque des Lingots d'argent, en préviendra avant midi Ie Receveur, & lui en remettra Ia note Provifionnellement, & jufqu% nouvel ^ h Banque acceptera les Piffoles de Lunebourg, lefquelles devront être du titre au moins de 21 carats & 6 grains, & chaque fac devm pefer 22* mares. La Banque fera les avances a raifon de 300 flor. le mare, moyennant le demi pour cent pour les fix mois. Le tout felon les flatuts & coutumes de Ia Banque. A commencer le 2 Janvier 1770, on acceptera dans  DE LA BANQUE &c. 241 dans la Banque les nouveaux Ducats de la même année a raifon de 5 florins la piece, & chaque fac devra contenir 500 ou 1000 Ducats. Le tout felon &c. Provifionnellement, & jufqu'a nouvel ordre on acceptera en Banque les Drittels fins de Lunebourg contenant 11 deniers 21 a 22 grains, a 23 f. le mare. Chaque fac fera de 100 mares & de bon poids 2 pieces, de deux tiers Rixdalers par 100 mares. Moyennant la paye d'un quart pour cent pour les fix mois. Le tout felon &c. Le premier de Mars 1771. Les Ducats neufa de la même année feront acceptés en Banque jufqu'a nouvel ordre a f. 4. tjfci fols la piece. Chaque fac fera de 500 ou de 1000 Pieces. Le tout felon &c. Après le premier de Janvier 1773. On recevra \ la Banque a raifon de ƒ 21 - 10 fols le mare les Mexicaines qui font frappées a un coin différent de celui des Mexicaines connues fous le nom de vieilles, mais un peu moindre en alloi que les vieilles (*> Le tout felon &c. Ces nouvelles Mexicaines ne devront point êrxe O) Voyez Oir ces Efpeces T. L Partie II. p. 171. Tomé IL Part. I. Q  524^ ÖRDONNANCES DE LA BANQUE &c. mêlëes parmi les anciennes, mais refter féparé* me'nt: & cela par fac de 100 Mares & de bon poids felon 1'ufage accoutumé. Juillet 1776. Provifionncllcment, & jufqu'a nouvel ordre, les Efpeces d'or monnoyées , feront acceptées cn Banque fur le pied d'un quart pour cent pour les avances dans les fix mois. Et les Recus (Recipifes) qui fe trouvent actuellement rouler dans le public, feront prolongés a leurs échéances a un quart pour cent. L'or cn Lingots reftera comme ci - devant fur le pied d*un demi pour cent dans les fix mois. Les Ducatons feront acceptés a 60 fols & j pour cent pour les fix mois. Les pieces de 3 florins a 56$ fols, & a raifon d'un quart pour cent pour les fix mois. Les Rixdales a 48 fols & a raifon d'un quart pour cent pour les fix mois. Les Ecus neufs de France feront acceptés fur le même pied que les vieilles Mexicaines, & cela par 100 Mares & a raifon d'un quart pour cent pour les fix raoi*.  DESCRIPTION DES VAISSEAUX &c. 243 L. B. Appartenant au Chapitre Vme. page 131 & a la Note 61. Rélativement aux Vaiffeaux du moyen dge. Extrait du Livre. Dell'origine di alcune Arti princi- PALI appresso i VeNEZIANI, PARGlROl A mo zanetti VeNEZIA 1758. C e l u 1 qui voudra fe former une idee des forces de Mer de la République de Venife vers le XIIme. Siècle n'a qua lire Nicete Coniate, écrivain contemporain a la conquête de Conflantinople faite par les Venitiens & par les Frangois. On travailla pendant trois ans entiers dans 1'Arfenal de Venife a préparer la flotte pour la dite Entreprife; cette flotte étoit compofée de 110 gros Vaifleaux, parmi lefquels il y en avoit un, auquel k caufe de fa grandeur finguliere, on donna le nom de Monde ; & en outre deux autres qu'on nomma la Pélérine, & le Paradis. Zanetti a donné une rélation exacte de la cönvention bu du Traité qui fut conclu entre le Roi de France Louis IX. & Ia République de Venife pour le paflage a la Terre Sainte; C'eft le plus ai* Q 2  244 DESCRIPTION DES VAISSEAUX cien Document qui prouve quelles étoient les forces maritimes des Venitiens. Cette Convention ne date pas, a la vérité, plus haut que l'an 1268 , mais tout le Monde concevra afiez clairement, que felon toute apparence la puifiance des Venitiens doit avoir été fur le même pied au moins plus d'un Siècle avant cette époque , & que, par conféquent, les connoiflances dans 1'art de la Navigation, dont il efi: fait mention dans ce Traité, font dignes de la plus grande attention. Mare Quirini, qui fe donne Ie titre de Nuncius Domini Duels Venetiarum , promet par Ie dit Traité, & s'engage au nom de la République, de livrer pour la dite expédition quinze Navires, foit de la République, foit d'autrès Vaifleaux appartenant a des particuliers parmi lefquels il y auroit trois grands Navires communs, nommés Rocheforte, Ste. Mar ie, & St. Nicolas, pour tranfportcr a la Terre Sainte 4 mille chevaux, & 10 mille Mommes. Les deux premiers Vaifleaux devoient être montés de 110 matelots; & Ie troifieme de 86". Les 12 autres en devoient avoir 50. II efi: bon d'obferver que la conftruétion des Vaiffeaux Venitiens étoit déja changée en partie, & que fes Navires de tranfport ne fe fervoient plus de Rames; on doit de plus confidérer la grandeur desdits 15 Navires, qui devoient tranfporter un tel Itombre d'hoinmes & de chevaux &c.  DU MOYEN AGE. 245 Le fret des fusdits Navires étoit de 3200 mares d'Argent fin, qui correfpondent a peu - prés a quarante mille Ducats d'argent (de Venife') de notre tems, ce qui effeétivement étoit beaucoup pour ces tems-la (a). Pour ce qui concerne les autres navires, on ITipula pour chacun d'eux des conditions relativement a leur grandeur &C. Chaque Chevalier avec deux Domefh'ques, un cheval, un valet d'écurie, des vivres, & hardes, devoit payer huit mares & demi & étant feul, deux mares & un quart (c). Chaque Ecuyer devoit payer fept onces d'argent (cT), & chaque valet d'Ecuric quatre & demi (e). Chaque Pélerin trois quarts de mare Cf): J'omets diverfes autres circonftances afiez curieufes, mais qui n'ont aucun rapport a notre objet, & je reviens au fusdit document par lequel il conlte, que le Navire Sainte Marie avoit 108 pieds de longueur; favoir, 70 de quille, & 38 entre les deux perches de poupe & de proue. 00 En fuppofant que 106« mares poids de Venife ont été égaux & 103 \ mares poids de Troyes, les 3200 mares de Venife, font 3112 mares poids de Troyes, & l'argent fin évalué h 25 florins & demi, font en florins courans de Hollande 79356 — Si l'argent fin pendant le treizieme Siècle doit être entendu argent le Roi (comme il me paroit probable) alors la dite fomine devroit être moindre d'un vingt - quatrieme. (J) Huit mares & demi font dans la fusdite proportion environ 2ti florins. Ce) Ou environ 55 florins & demi. (d) Idem. 22 florins. (e) Idem. 14 florins. Cf) Idem. 18 florins & demi. Q 3  a46 DESCRIPTION DES VAISSEAUX Dans le fond il étoit large de 92 & haut dans la première couverture de 11 J & dans la feconde de 6%; avec 285 de largeur dans toute la partie fupéricure du navire. Les Galeries étoient hautes de 5 pieds, & il y avoit 3 pieds de la galerie en defius jufqu'a. 1'extrémité du bord. Du bout de la quille jufqu'a la hauteur de la poupe il y avoit 40 pieds '4 il avoit deux Paradis, qu'on nommoit Jartöim, & qui dans la fuite furent nommés Chdteaux. Deux ponts, & un pont au deflus), de 4 a 5 pieds derrière la poupe; & en outre tous les agrêts néceflaires. Les dits navires avoient aflurément plus d'un arbre ou Mat, puifque le plus grand fe nommoit Parbre du milieu: mais je ne crois pas qu'ils en eufiènt plus de deux, c'eft - a - dire un fecond du cöté de la Proue. Les autres deux navires, favoir, Rocheforte, & St. Nicolas étoient dc la même conftruétion ' que lc fusdit nommé SainteMarier a la réferve qu'ils n'étoient pas fi grands. On peut en outre obferver que le Doge dans fon contract promit d'entretenir a fes fraix 15 galcres pendant une année entiere , pour 1'honneur de Ciirif, & pour 1'exaltation de la foi Chrétienne. Ces \Taifleaux étoient les feuls qui devoient former a proprement parler 1'Arméc navale; les autres étoient uniquement deftinés a tranfportcr les Vivres, Munitions &c. Si nos ancêtrcs eufiènt étés plus attentifs a nous conferver &a nous tranfmettre, foit par la fculptu-  DU MOYEN AGE. 24? re, foit par la peinture, ou par quelque autre maniere la forme ou l'architerfture des monumens de leur tems, nous pourrions nous en former une jufte idéé: mais, malgré toutes les recherches faites, il n'a pas été poffible de trouver quelque figure de ces anciens Vaiffeaux, excepté celles qu'on voit dans la planche Qa) N°. L qui nous repréfente un navire Venitien deffmé a la plume en 1366 & qu'on a trouvé dans une Carte Géographique drefTée en ce tems-la. Le N°. II. nous donne la figure d'un navire qu'on croiroit Genois & caufe de la Croix qu'il a dans la Banniere. Le N°. III. eft Copié d'après certaines pcintures anciennes qu'on voit dans la Chapelle de Sainte Urfuk a Venife, oü il y a auffi d'autrès navirts ; mais tous pcints vers le XVme. Siècle. En obfervant ces Navires avec attention, & en comparant les deux premiers au troilieme, on s'appercoit aifémcnt que la maniere de conftruire les navires eft confidérablement changée, & on voit par quelle gradation on eft parvenu a la conftruclion moderne de nos Vaiffeaux qui, a tout prendre, n'eft autre chofe qu'une perfeétion de la conftruótion ancicnne. Ce n'étoit pas fans fondement que Marin Sanudo confeilloit en 1320. aux Princes Chrétiens,de préferer les navires Venitiens pour enlever la Terre Sainte des mains des Infldeles. Les ■ VaifTeaux Venitiens , tant ceux qu'on ar- 60 Voyez la Planche a la page 131. Q4  448 DESCRIPTION DES VAISSEAUX moit en guerre, que ceux qui fervoient pour le iranfport, étoient les meilleurs & les plus parfaits. Leur marine s'étoit accrue depuis l'année 1261 a un tel point, qu'ils en avoient toujours en affez grande quantité pour en louer ou pour en vendre a quiconque pouvoit en avoir befoin. La République donna même peu de tems après cette époque des ordres pour faire conffruire des Arfenaux. Quelque fuccinte que foit la defcription que nous venons de donner des principales parties des plus grands Vaifleaux qu'on conftruifoit dans le XIIIme. Siècle, de leur grandeur, proportions &c. elle mérite notre attention. Nous ajouterons ici un petit mot au fujet des noms techniques ou autres dont on fe fervoit dans les anciens tems. ■ Les noms que jufqu'a préfent on a pu trouver dans les anciens Documens, fe reduifent a ces deuxci, favoir Galandre, ou Zalandre, qui eft le plus ancien, & celui de Coque qui 1'efl moins. Galandre eft un mot Grec, fuivant le rapport de I'Annalifle Bongarfio ; & fuivant fon témoignage, il confle que du tems du Doge Pierre Tradonico, c'eft-a-dire en 838. on avoit commencé a conftruire quelques Vaifleaux dans les chantiers de Venife; ce qui prouve 1'Antiquité de cet art chez les Venitiens. L'Etymologie de Coque, quoique dérivant auffi du Grec n'eft pas fi obfcure, ce nom ayant beaucoup de rapport au mot Concave.  DU MOYEN AGE. «43 Pour expliquer le mot Colomba. Voyez page 131. Note 61. L e s Venitiens dans la conftru&ion de leurs Navires prennent ordinairement la troifieme partie de la longueur de la Quille ou Colomba pour fervir de proportion a la largeur du Navire, ou Bocca ; bien entendu que la Quille n'excede pas les 90 pieds (ja). Si la dite Quille fe trouvoit avoir 100, 120 ou 130 pieds, qui font les longueurs des plus grands VailTeaux de Guerre, en ce cas on divifera la longueur de la Quille en quatre parties, & une des dites parties fera la largeur du Navire. La moitié de la largeur du Navire fert communément, de proportion pour la profondeur du Navire, qu'on nomme pontale di Stiva. La feptieme partie de la Quille fert de proportion pour 1'élancement de la perche, of Stange, 0 ajla de la poupe, & de même la feptieme partie de la Quille pour 1'élancement de la perche de la proue. Suivant le fentiment d'un Capitaine Venitien(F)y 60 Voyez la figure cï derrière. 00 M. George Caenazzo, Capitaine Vcnitien qui étoit dans le Port ÜAmfferfom pendant les mois de Juin & Juillet 1779-  «50 DËSCRIPTION DES VAISSEAUX &c. les élancemens font un peu excefïifs ; cependant on expérimente que les Vaifleaux de guerre de conflxuétion ancienne des Venitiens font tous de parfaits voiliers, & que ceux de la nouvelle conftruftion ne font point a comparer en viteflè. Fin de la Première Partie du Tome II.