- 'Jf I   CAüSES CÉLÈBRES E T INTÉRESSANTES; A VE C LES JUGEMENS QUI LES ONT DÉCmjggSf*^ ^tédigies de nouveau par M. RIjc ti ancien Avocat au Parlemïm, »6tW E ° TOME SEPTlfc&tEf 4 .AMSTERDAM, Chez Michel Rhet» 1774-  Etfe trouve a Paris, che* U veuve S^-oie, rue S. tape li Clerc, Quai des Auguftins. Cellot, Imprimeur, rue Dauphine, La veuve Dqalvt , rue du Foin, Durakd, /7«^rue GaJande. Delalain , rue de la CWdie Francoife -Moutard, Quai des Auguftins, Baiixy, Quai caules qm fe plaident aux audiences pubhques, principalement dans les cas portéspar 1'ordonnance, & que 1'on doit leur communiquerquelques jours avant 1'audience, afin qu'ilspuilfent fe préparer a choifir leurs conclufions. Voilala règle; voila 1'ufaae univeriedement fuivi dans rous les°tribunaux du royaume , Sc que le fleur Baiili ne voudroit pas admettre , dans 1'ap^rébenfion que le defpctifme qu'il affecle ici n'en reaïta 1'avenirquelqueatteinte. II ajoute qu'une feule chofe feroit a fouhaiter; c'eft que je voululfe bien réduire mes réquilitoires & mes conclufions aux feules affaires qui intéreflent  & un Procureur Ju Roi. 9 Ie miniftère public. II en refte la touc coucc , & ne daigne pas s'expliquer daVantage. II doit y avoir ü-deffous, quelque chofe de très-fin, très-fpitituel; mais dont 1'intelligence.eft apparemment réfervée aux futurs commentateurs de fes oeuvres. Que n'articule-t-il , comme moi, des faits , s'il afpire a 1'honneur d'être cru ? II foutient ne m'avoir jamais fouf* trait la connoiffance d'aucune affaire fujette a mes conclufions : voici des faits articulés & prouvés. 11 a permis, fur requête , a Rouffel^ boucher a Ciamard, & a Dupuis boucher a Meudon, de vendre la viande le carême pafte , fans aucune communication , ni conclufions. Ne faut-il pas que, pourl'intérètde la religion, des pauvres & du public , ces fortes de permiilions me foierit comrfhmiquées , qu'elles foient revêtues de toutes les formalités requifes, afin que je puiffe veiller a 1'obfervation des réglements de la police ; que je puiffe prévenir, par ma vigilance , ou faire réprimer , par mes réquilitoires , les abus dont la religion &t les loix peuvent fouffrir , quand le miniftère de la partie publique eft négligé ? A v  i o Différent entre un Bailli II permit, I'année dernière, par une ©rdonnance fur requêce y qui ne me fuc point communiquée, a RouJJd„ boucher a Clamard, de.mener, au paturage, quarante moutons; quoique tousles reglements de police de ce bailliage , eonhrmés par des jugements que fuimême a rendus en conféquence , ne permettent aux bouchers d en faire païtre que dix-huit; & quoique, I'année précédente,il eütcondamnéen 1'amende ce même Roufel, pour avoirconduit un plus grand nombre. Je demande quatrièmemenr que i faute par le fieur Bailli de fe trouver a jour & heures accoutumés aux audiences, je fois autorifé a les tenir, & faire, en fon abfence, les fonctions de judieature, par préférence a tous prariciens , dans les caufes feulement qui ne font point fujettes a mes conclufions. II répond qu'au pis aller, je ne dois afpirer a Ie fubftituer que dans le feul cas de maladie, & non d'abfence; paree que, dit-il, encore qu'il demeure a Paris , on fuppofe mal-a-propos qu'il nerélide point k Meudon , puifqu'il eft toujours a portée de s'y. rendre , & paree qu'enfin il ne demande point a «re répuré abfent.  & un Procureur du Roi. 11 Comme il n'ignore pas que la qualité de bailli, & la penlion que lui fait fa majefté, exigent fa préfence , & 1'exercice actuel de fes fonctions dans le lieu oü elles font dues , il a tout d'un coup levé la difflculté, en foutenant qu'il eft par-tout. Je lui accorde, s'il veut, a caufe de fa taille avantageufe , qu'il occupe trois ou quatre fois plus de terrein qu'un autre homme , qu'il répand fix fois plus d'ombre que moi. Mais je ne lui pafferai point fon exiftence a&uelle en différents lieux. Je ne croirai pas , quand il eft a Paris , qu'il foit a Meudon. Que ne répond-il naïvement, fans dctour, fans obfcurité a une propofition auffi fimple que 1'eft celle que je lui fais ? Je dis que les procureurs du roi des jurifdiétions policées du royaume, & du relfort du parlement de Paris, dans toutes les caufes , & toutes les affaires qui n'exigent point leurs conclufions , font, en Pabfence des baillis, des lieutenants généraux & particuliers, toutes les fonctions de judicature, par préférence, non-feulement aux procureurs ordinaires& praticiens, mais auffi i tous auttes juges des jurifdictions loyales , a tous autres gradués, & non Avj  12 Différent en tn un BaUli gradués A Verfjes, eet ufage eft inconteftablement foivi. Qiiel eft nion cbjet, en demandant a {ub Wr le fieur bailli ? Son intérêt ?Cme' *■> bien des parties. Kous fornmes hu Scmoi, les feuls officiers dufiegejesfeuls gradués. II lui feroic donc lionorable, & avantageux aux pames, que je Ie fubftituaffie par prétcrence aux procureurs de ia jurifdicuon; foit quil confidère linfaffifance ae quelques-uns, foit qu'il réfléchiffie iurce quel'etude, 1'éducation met de dirterence entre eux & moi. D'oü procédé fon acharnement d me denier une préférence fi légitimement acquiie ? N entreroit-il point un peu de jaloufie dans fon procédé ? II n'y a pas grande vamte a moi de le croire. Mes petits talents peuvent lui faire ombrage , fans qu'il en revienne beaucoup i mon amour propre. Je répète encore que la préférence *ur les praticiens du bailiage m'eft in~ conteftab ement acquife par les droits de ma charge & Vu{ recu dans »outes les junfdiftions. Je me croyois hors d'ïnfuhre derrière de ii bonsretranchements. Mais y il a des braves cjiuattaquent tout indiftinc-  & un Procureur du Roi. i % cement, qui-ne connoiifent point de péril. Tel eft mon redoutable aclverfaire : il me reproche de n'avoir point été examiné a la cour , & foucient conféquemment que je ne dois point afpirer a 1'honneur de le repréfenter. Le repréfenter ! je n'y penfe point; ce ne fut jamais la ma folie. Lui être fubftituc , pour caufe d'abfence, de maladie , ou de récufation , voila le terme propre ; voila mon droit & mon objet, Les ambaftadeurs repréfentent leur fouverain. Quand le fieur Bailli m'aura dépêche dans quelque cour de 1'Europe , je le repréfenterai. Jereviens a 1'examen qu'il me reproche de n'avoir pas fubi. Lui-même f util examiné, lorfqu'il fe fit recevoir a la cour ? L'arict porte que la cour 1'en a difpenféfans tirer a conféquence. Et pourquoi follicita-t-il cette grace avec des empreftements qui furent remarqués de tout le monde ? Pourquoi eut-ii recours a mes amis, a des perfonnes cor.fidcrables dont je lui mènageai les bons cfEces j fi ce n'eft qu'au fond i! ne préfumoit pas de fes fcrces & de fa fuflifance, ce qu'il en préfume aujcurd'hui -fi légèrement ? II voudroit que 1'on crüt que la rcputation de fon fcayoir  t-4 Différent entre nn Bailli & de fes talents, opéra cette difpenfe. malms, quine la regardenr point eomme Une diftincbton, & q£ mecrenc cmegraceaunombre descbofes q" n eft pas honorable de folliciter , & L eft honteux d 'obtenir. 4 II eft vrai néanmoins, comme il me Jobjeae.quejen'ai point été examiné au parlement. La raiL en eft fimp e & me fait houneur : e'eft poUr cela qu'ü lafUpfnme5&queied01sladire. li n y avoit jamais eu, au bailW de «ar du roi5 maïs feulement un prari- procureur du roi. Jem'étoisretiréaMeudon5ParCTOüt pour la beauté du pays ■ ou fmn? t)Pnfa u r n -„f * ' 5 comme le jenfe Ie fieur Bailh (ear rien n cchappe a f penetranon) paree que la décadeSe de ma fortune me condamnoit a «ne vie champêtre. II fepréfenta aufiège une infeription defauxquefonnepouvoitniinftruire! mjugerfanseonelufions dun ,raduV Onme p„a d'en donner; & M.le p£ cureur général m'envoya , avec u£ Wtó s-obligeante,/neeommiffio; voir d f °rmV Jne ^«on pouvoirdefane au baillage toutes les fonc-  & un Procureur du Roi. 15 tions de procureur du roi ad interim 5 c'eft-a-dire jufqu'a. ce qu'il plüt a S. M> de pourvoir quelqu'un. ör les fubftirurs , qu'en femblables circonftances , M. le procureur général choifit, ne font point tenus de fe repréfenter a la cour; elle les préfume examinés Sc capables. La cour , par des arrèts , m'a donnc depuis commiflion d'inftruire en qualité de procureur du roi, de pourfuivre, & de faire juger au baillage plufieurs affaires criminelles. J'ai donc été admis aux fonctions de procureur du roi, par M. le procureur général, & par la cour même , fans examen, cela eft vrai; mais fans avoir defiré ni follicits la difpenfe ? cela n'eft pas douteux. Le fieur Bailli hafarde encore d'autres chofes , que je ne fc,aurois recevoir pour vraies, fans paffer moi-même pour un menteur. Comme, quand il avance que je ne fuis point avoeat, que je n'aï point prêté ferment en cette qualité 3 que je ne fuis point pourvu parle roi. C'eft le fieur bailli qui m'a inftallé au baillage , en qualité de procureur, du roi: &, par fa fentence d'inftallation du 2 mai 172.0, il vifa toutes les pièces originales 5 qui juftifient que j'ai été  16 Dinerou entre un Boilü yi avocat au parlement de Metz & f7 ai prété ferment, ' ^ queje nefuxs point avocat. J Umment cancilier tour cela avec h Piobite fafWe ? II dlra peut-êcre caS -a„rédem,moire,^ej;-i- . f /-f, reellement oublié qu'ÏJ ti ' fetrrf" ^*"^el oKS at?rd?5q0l5dmafeulePrière'^lui Son défaut de mémoire eft bien proPre a extenuer toutes les offenfes toL ^pechésqu'üpourrafaire. Moi' Zi * ai Pas d'excufe fi léeittw* ! ^ in^rir ,v ™ *cgiame pour etre ingrat & menteur, avouerai que lui ppoita de Verfanles : & c>eft grandeurdamequ^nefefouveltL Par un vif fennment de reconnor&ncï ^ejefoatiens lui ayoir cette obJ ^e  & un Procureur du Rol. ij tion , & que je lui donne un démenti imprimé, pour avoir avancé, comme il a fait, que je ne fuis point pourvu par le Roi. On vient de voir le precis des conclufions que j'ai prifes dans raa requête. Examinons ce qu'il emploie dans les défxnfes qu'il m'a fait figniher. II fe plaint d'abord de ce que je 1'ai traduit en jugement, moi qui devrois plutót, dit-il , faire 1'éloge de fa conduite , & de ce que , m'oppofant a i'exécution de fes ordres, je le trouble dans les fonctions de fa charge. L'exécution de fes ordres ! Efr-ce un prince, un minifae, un général d'armée, un gouverneur de province qui parle ? Voila une prodigieufe enflure dans un bailli ! Si je fuis obligé de faire 1'éloge de fa conduite , au moins il ne peut exiger en confeience que je loue fa modeftie. Mais enfin, qu'il cite donc quand & comment je me fuis oppofé a l'exécution de fes ordres : car il n'articule aucun fait. C'eft peut être encore qu'il manque de mémoire. II conclut, premièrement, a ce que défenfes me foient faites de recevoir des plaintes en matière criminelle & de police.  l8T, Pffinnt entre un Bailli J ai recu des dénonciations: cela eft de «eft podib e, la fuice ruineufe des querel es qul arrivé., J'éconrele pa ! confaence nmorée d un ;Uge do telle Wrn dece préten du trouble ? jfi * Clt tzux ' comme il voudroit 1'infi II demande fecöndement , que Jéfcnfes me foient faires de fai e^W aucun pnfonmer, ni de faire arS Perionne, fi ce n eft en flagrant dél I .veut pasSeXpliquer claxrement fe vais Ie faire pour lui, ' ]Q II eft arrivé, une ou deux fois, que ttonfieur Je gouverneur de Meudon1 &t emprifonner des gens qui Uii font aevoir , 0u d aucres, pour quelnnes le pare. Le fieur bailhs eft trouvéoffenfé de ce qu'on ne lui déféroit pas la con «oxffancedecesfortes daffaW "S vouloit qu a marequête, ees prifönniers f^ecroués,annde^^  & un Procureur du Rol. 19 en conféquence, & dejuger; car c'eft li fon fort & fon foible. Je lui ai refufé mon miniftère , paffaitement inftruit que les gouverneurs des maifons royales ont 1'adminiftratiori d'une police indépendante des tribunaux; qu'ils ontinconteftablement droit de faire emprifonner ceux qui, foumis a leurs ordres , négligent le fervice, &C tour particulier qui auroit fait quelquê chofe contre la majefté des lieux oü ils cómmandent. Le fieur bailli , pour fe venger de mon refus , dont il a eu le malheur de s'offenfer , voudroit mettre fur moiï compte les emprifonnements dont il eft queftion. Mais, comme il ne prouve rien de toutcequ'il dit, il auroitmieux fait, ce me femble , de ne rien dire; a moins qu'il ne préfende démontrer qu'il a 1'imagination très-abonda;nte: ce que je lui cède très-volontiers, avec tout ce qui appartient a. un talent qui fait de fi grands hommes pour Ia mufique & pour la peinture. Me voila infenfiblement fur fes louanges : il va fe radoucir; je ne doute plus de la reconciliation. II demande, & c'eft par oü il finit, que défenfes me foient faites de m'op-  2o Different entre un Bailli poferai'exécution de fes ordres, Que leiieur Bailli rende des ju*emenrs, que je lui préfente des eoicL iio»s,oudes requüicoires: voili, fije *e me trompe i qiI01 fe r<|d|lif ' ventables fonchons. Pour des ordres ceterme, pns dans fon fens naturel ne paroit pas nöus convenir. II aura pour agreable de s en expliquer avec nos lupeneura , a 1'autorité defquels ce terme eft confaerc. 9 II ne me refte plus qu'une petite obiervation a Gure. Le fieur Bailli qui comme je l»ai dit olus haut, m a inftallé aj Mm^bn en quaütó de pro. curear du roi, refafe , auioard'iai que hoss pkidons erdëmble, de me recounoicre en cette rriéme qualité. Void comme il parfe a la tête des derenfes il m'a fait fignifier : NlCOLAS-LioKARD de Lamet, Avocat au conföl, &c. Bailli de Meudon, C O N T R E US louis rustaixg DE SaiNT-JoRY,- faifant les fonctions de Procureur du Roi,  & un Procureur du Roi. 21 Voici ma réponfe, Louis Rustaing pe Saint-Jory, faifant les fonctions de Procureur du Roi j C O N T R E Me Nicolas Léonard de Lamet; Bailli de Meudon i ne faifant point les fonciions de juge, II fe plaint de ce que je Pai traduit en jugement; il me traite de féditieux j il dit que je fuis un brouillon ,un homme inquiet, un tracaflier , & mille autres gentillelTes. Je vais lui fermer la bouche. 11 ne faut que lire le cinquicme article de 1'ordonnance de Moulins 3 que voici mot pour mot : J\?os juges , procureurs & officiers èf Jièges inférieurs de nos cours } a peinc de privation de leurs e'tats, feront, par chacun an, recueil de nos ordonnances mal obfervées en leurs flhges } & les enverront en nos cours de parlement de leur rejfort, & aux procureurs ge'ne'raux en icelles s avec mémoires des occafions d'ou telles ftutes procéderont} afin d'y être par  12 Different entre un Bailli nous, ou nofdhes cours , pourvu. _ Saint Martin, a huit heures précifes » du mann ; même plus fouvent, s'il v eft néceftaire : &, au cas que le lundi » ipir jour de fête , que 1'audience fera » remife au lendemain mardi ; & "au » cas qu'il fut aufti fete le mardi, 1'au» dience fera remife au mercredi, ou " vT*/*** non fké- Que le bailli de » Meudon, 0u celui qui tiendra 1'aus» dience en fon abfence , ou autre Jéei» time empëchemcnr, feratenu, con-  & un Procureur du Roi. 23 •> formémenta Partiele 5 du titre XXV { >) de Pordonnanee de 1667, de voir , » a 1'iiTue de 1'audience ou au plus tard, 1? dans le même jour, ceque le greffier » aura rédigé, de lïgner le plumitif, & » de parapher chaque fentence, jugej> ment ou appointement. Qu'il ne fera s> porté a 1'audience aucunes affaires 3J concernant la religion , le Roi, la s> police, les communautés, pu les mi-» » neurs, non affiftés de leurs tuteurs ou »> curateurs , qu'elles tt'aient été préala» blement communiquées au fubftitut j> du procureur général du roi; ou en >j fon abfence, ou autre légitime em»> pêchement, au fubftitut dudit fubfti>» tut: & en cas qu'aucune y fut portée, si ledit fubftitut , ou en fon abfence, »> ou autre empêchement, fon dit fubfti>> tut fera teuu d'y porter la parol e , li » 1'affaire eft de nature ay pouvoirpren»> dre des conclufions fur le champ , & s> fans avoir eucommunication des facs j> des parties: ünon, fur la reinontrance » d'audience , pour en être communis> qué audit fubftitut, pu en fon abfence, jj ou autre légitime empêchement, a s* fon fubftitut, Que. toutes les requêres » de pareille nature ne feront point ré5: ponduespar le bailli, ou autre faifant  H Pffirent eiure un Bailli * fes fonctions en fon abfence , ou aU- * tre legmme empêchement, qu'eües «» naienr ete préalablemen: commum» quees audit fubftitut; ou, en fon ab- - lence, ou autre légiame empêche«menc.alon fubftitut. Qu encas^ab«fence,raaIadle,récufation,0u autre " fW* empêchement dudit bailli " le fubftitut du procureur général" du - roi nendra 1'audience, &Öfera toutes « les fonctions dudit bailli , a rexc[n_ " llon ds rous les autres officiers & pr-nciens ; &ce dans toutes les eaufes »& rnancres oü la religion , le Roi, la " P°ilC^ie,s communautés & mineurs » non affiftés de leurs tuteurs ou cu"- " ?°rS.' r 6 fnr°nt P°int inréreifés, & » dans lefqueliesil n'éeherra de donner » des conclufions. Seront, a eet effer « tenus les procureurs dudit badlak de " Panter leurs requêtes audit fubfti» tut faifant les fonctions dudit bailli " & non a d'a'^es. Que ledit bailli " nernmomsne fera réputé abfent qu'a" Pre^rolM'ours; fi ee n'eft dans les " ^.S1" requièrent célénté , dans » lefquelles ledit fubftitut, ni autres ne " P™m fa"e les fonctions dudit » bami a moins qu'il n'y eüt périi évi» dent dans le retardement; ce qui fera » pareiliement  & un Procureur du Roi. 2 £ '») pareiliement obfervé a 1'égard dudit «■ fubftitut du procureur général du roi, » qui ne pourra être réputé abfent qu'a» prés trois jours , ou vingt-quatre heuV> res, fi 1'affaire requéroit célérité; a ,y moins qu'il n'y etit péril évident dans j> la demeure. Que le greffier fera tenu j> de communiquer audit fubftitut fon » plumitif & fes minutes, fans déplacer, » toutes fois , 8c quand il en fera par » lui requis; enfemble de lui délivrer » toutes les expéditions dont il aura » befoinconcernant le miniftère public, j» ou les affaires dont 1'exécution lui fera » confiée. Que ledit fubftitut ne pourra » recevoir aucune plainte en matière n criminelle ou de police, ni connoïtre » comme juge d'aucune matière ou il » écherra de donner des conclufions ,' » fans préjudice a lui de recevoir les dé» nonciationsquipourront lui être faites » fur fon regiftre, conformément a 1'ar» ticle 4 du titre m de 1'ordonnance » de 1670 , dont il ne fera obligé de jj donner communicarion , qu'au cas » qu'après le jugement de 1'accufation » il n'en foit ainfi par juftice ordonné, » Que ledit fubftitut ne pourra faire 33 arrêter ni emprifonner aucun accufé , » qu'en vertu d'un décret de prlfe-d&- Tomc rJ~*l £  2,6* Différent entre un Baiiü „ corps, ii ce n'eft en flagrant délit, ori „ alaclameurpublique, conformément » a 1'article 5? , titre 10 de Ja même or" donnance de 16.70', fans préjudice » néanmoins de 1'exécution des ordon» nances eoncernant les mendiants & ?• Iesvagabonds, ¬amment de celles rff des25juillet i7oo, & 27 aoür 1701'. » Qu'il ne pourra pareiliement élargir =3 aucuns prifonniers, fans jugement „ rendu par le bailli, ou autre faifant » fes fonctions en cas d'abfence , ou » autre légitime empêchement; lequel .» jugement ne pourra être rendu, qu'il Hf nf IjjU en ait été auparavant commu« niqtié. Que ledit fubftitut ne pourra « auffi faire défenfes d'exécuter les or3> donnances ou jugements dudit bailli, s> fauf a lui a fe pourvoir contre icéux •» par les voies de droit. Comme auffi » qu'il ne pourra faire aucunes ordon'» nances eoncernant 1'ordre public , ni 5> en donner, ni faire faire la publicas> tion , fauf a lui a requérir ce qu'il » croira convenable. Qu'en cas d'ab53 fence, maladie, récufation, ou autre 5> légitime empêchement dudit fubftitut » du procureur général du roi, le fubf53 titut dudit fubftitut fera tenu de donf $ff de5 CQaclufions dans les affairq  & un Procureur du Roi. ij li» qui le requerronc j foit a 1'audjence, » ou dans les proces par écrit 5 Sc ne «5 feraréputé abfentqu'après trois jours, « ou après vingt-quatre heures , comme » il a été ci-delfus ordonné , fi ce n'eft '« qu'il 7 eut péril évident' dans la de» meure. Qua eet effet les trois fubfti« mts dudit fubftitut feront tenus de » fe trouver, atour deróle, a 1'audience .3 les jours d'icelle , pour y faire les 33 fonctions dudit fubftitut, en fon ab» fence, Ou autre légitime empêche33 ment. Sur le furplus des requêtes 8c » demandes des parties, les a mis 8c 33 met hors de cour, dépens compenfés. 33 .Ordonne que le préfent arrêt fera lu 33 a 1'audience dudit baillage, 8c enre« giftré dans les regiftres du greffe d i*> celui. Donné en parlement le dk « janvier mil fept cent vingt-quatre , 33 &c de notrerègne, le neuvième. Signé ** Baron , par ia chambre Ysabeau, 8$ ^ fcellé 3?. Bij  FILLE DESAVOUÉE PAR SES PÈRE ET MÈRE. JFoachin Cognot, docteur en "inédecine, agé de foixante ans, époufa, en 1590, a Bar-fur-Seine, Marie Naf- ■ Jïer, agée de ving-neuf ans. IIs eurent plufieurs enfants qui mou- ■ rurent en bas age, a. la réferve de Claudt \ Cognot, le plus jeune de tous. En 1597, le fieur Cognot père, agé i de foixante-fept ans, fe retira a Fon-. tenay-le-Comte en Poitou, 8c laiffa fa . femme, agée de trente-fix ans, a Barfur-Seine. Elle alla le joindre en 1598; & le 24 juillet 1599, fept mois & demi après fon retour avec fon mari, elle accoucha d'une fille. L'age du doóteur, celui de fa femme, les agréments dont la nature 1'avoit pourvue, avoiént fait naitre en lui les inquiétudes qui travaillent ordinairement un vieillard époux d'une femme jeune & jolie. La nailTance de eet enfant le confirma dans fes foupcons 5  Fille déf. par fes père & mere. 2,9. il crut que la petite fille étoit plus forte & mieux conftituée qu'elle n'auroit du 1'être , en naiffant a fept mois ; d'oii il conclut qu'elle avoit écé concue a Barfur-Seine d'un autre père que lui. II ne fit confidence a perfonne de cette opinion j 1'enfant fut baptifé folemnellement dans 1'églife de NotreDame de Fontenay. L'acte baptiftaire fut infcrit fur les regiftres de la p?.roiffe, fous le nom de Marie-% 'fille de Joachin Cognot, docleur en médecine 3 & de dame Marie NaJJier fa femm.. Elle eut pour parrein Jacques Bonnet y maitre apothicalre, ami du médecin , & deux marrelnes 3 Renée le Grand & Catherine Bonnet. On. lui choifit pour nourrice une femme de Souvré-leMouillé, village voifin de Fontenayle-Comte. Les talents du fieur Cognot pour la médecine étoient ftériles en province j il crut que la capitale feroit pour lui un champ plus fertile: il s'y rendit en 1601, après avoir tiré fa fille des mains de la première nourrice, pour la confier a Judith Mauriffet, femme d'un nommé Amafire-Louïs Coutellier, qui demeuroit aux Loges fauxbourg de Fontenayle-Comte. Biij  3° . Fille défavouée Arrivé a Paris, il regarda cette vüle comme ua lieu propre pour exécuter le prpjet qu'il avoit formé contre 1'état de ia fille. Toujours perfuadé qu'il n'avoir eu aucune part a fa naiiTance, il fe dérermina a la retrancher de fa familie, f-a/alre un uniq^e héritier de fon fils. ba femme entra dans fes vues- Sc', de concert, ils réfolurent de la faire venir a Pans. ' Pour faire perdre a eet enfant Ia tracé ce fa naiifance, un payfan fut chargé de I apporter dans une hotte. Dés ou'il int arrivé, avec fon fardeau, le fieur Cognot, fans lui donner le tems de fe reconnoitre, le conduifit, du fauxbouw - Germam, oli il demeuroit, dans celufde'S. Marceau ,rue de 1'Ourfine. U, il fat depofc-r fa ËHè entre les mains de Ja nommée Francoife Frcmont, femme de Jean Bouret, ferrurier. II compofa avec elle a quatre livres par mois pour la no-urriture de 1'enfknt, paya le premier mois d'avance, Sc laiffa de la ferge verte pour 1'habiller. II dit que cette petite fille fe nommoit Marie, Sc qu'il Be faiioit point s'informer d'aucun autre nom. Au bout de dix ou douze mois, h femme du fieur Cognot fe laiffa entral-  par fes père & mère. 31 her par un mouvement de tendrelfe pour fon enfant. Elle alla, chez FranÉoife Fremont, voir fa fille. En entrant, elle demanda fi ce n'étoit point a elle ciue 1'on avoit donné une petite fille pour la nourrir : la Fremont} comme par une infpiration fecrette , lui demanda fi elle n'étoit' point la mère de eet enfant. Elle lui répondit que non ; mais elle paya' le tribut a la nature par quelques larmes qu'elle ne put retenir. Cette foiblelTe lui fit appréhender de h'être pas une autrefois la maitreffe de fon fecret; elle prit le parti de ne plus revoir eet enfant. La Fremont la garda plnfieurs années chez elle, &, malgré fa pauvreté, en Cut autant de foin que fi c'eut été fa propre fille. Forcée enfin par 1'indigence de fe défaire de 1'enfant, ne pó'Üvant la remettre a fes parents qu'elle ne connoifloit point, elle la placa , én i(5'o9 , a l'hopital de la Trinité. Elle la fit inferire fur les regiftres de cette maifon, & fur ceux de 1'hopital-général fous le nom de Marle, fille de, le nom des père & mère en blanc. Quelque tems apres elle la tira de eet hópital, pour Bt mettre en condition chez un bommé Ncblin, maftrê écrivain. Quant Biv  3\ „ Fllle Mfavouée * elle elle fe mit en fervice chez les cordehèresdufauxbourgS.MarceaU Cependant le hïs du fieur Co«n t la P10Pre fiJJe> vim a décéder. Cette mort nerendit point a ^ le dro ts de ion pere. Toujours convaincu qu"ü ufaS n J' PréteXte d°nt S avoi^ ^it S P° r ,deCermi»^ & femme a conienm aleloignementdefa fille, ne fubfiftoit plus. Ce fils bienaimé fur voulu reunir toute leur fortune,Zt mort; il étoit donc jufte de remeC ^ iacnfiee, & en faveur de laquelle la na «rur de fa mère. LUe s'en plaignoit con! » nuellement a fon mari; Lif il „o™ Je moven de lui impofer filence, & d'a * reter les mouvements de la nature qui agitoient cette femme. q Son féjour a Paris avoit confidérable- inrfed^agner Jac-fi—dela IIcnrl lPUentV P/emière femm^ de Qlll ]e fe fon  par fes père & mere. 33. tirre: place qui le mit beaucoup en voL. La coutume de Paris, amcle 280, permet aux époux, qui n'ont point d enFancs, de fe donner mumellement , & au profit de celui qui furviyra, luiufruit de tous les meubles qui fe trouve-, ront leur appartenir, lors du deces du premier mourant,&de tous les conquèts; c'eft-a-dire de tous les immeubles acquis pendant la communaute. Le fieur Cognot3 après la mort de Ion hls, confentit ce don mutuel entre fa femme & lui. Sa communauté étoit opulente, & fon age donnoit a fon époufe tour lieu d'efpérer qu'elle lm furvivroit, 8. que, par conféquent, ce feroit elle qui recueilleroit les fruits du don mutuel. Mais elle ne pouvoit profiter de eet avantage qu'autant qu'elle n'auroit point d'enfants vivants a la mort de fon man. Elle avoit donc le plus grand interet a tenir dans le fecret 1'exiftence de fa fille Marie. r , Elle fut quatorze ans fans entendie parler de fon enfant, & fans chercher ï s'en procurer des nouvelles. Au bout de ce tems, Francoife Fremont alla, dans le fauxbourg S. Germam rendre vifite a un nommé Meelas Blondel, rnaïtre vannier. Prête a quitter la femme  34 Fille défavóuêe cms s habdlMent autrefois : elle Ie connut rant a fon habiilemenr V w periteiTe de fa taille Ta a fi ï S * > ^feeSS^iM?^ /* ^ CIiC C1 mi dit aiie rVm i- fa. «n logeou a deux pas de fa maifon, &iui mon tra fa porte „' , Cette femme, de retour aux corde-' jures, engagea une des religieufes oui ga« malade, d appeller le fifur SS Elle Jenvoya chercher dès 1= 2 /* /•roBow f arrêta, & lui dit: ' raus m>avei donnéunefiiul Zr'^ U * recounoxtre kW, & de conve-  par fes père & mère. ^ 3 <; 'nir 3u fait : mais il dit qu'il n'avóit d'autre part a ce depót que d'avoir accömpagné celui qui avoit apporté 1'enfant dans une hotte, & qui étoit fon père. 11 demanda néanmoins oü elle étoit, & ayant appris qu'elle dem.euroit chez un écrivain proche les grands degrés de la tournelle, & qu'elle avoit la fièvre , il 1'alla voir deux fois. II iit paft de cette découverte a fa femme, dont les entrailles maternelles fe rouvrirent: elle fouhaita d'avoir fa fille chez elle. Rien ne paroilfoit plus aifé que de lui donner un afyle dans la inaifon paternelle, fans que ni elle ni perfonne püt pénétrer dans le fecret de fa nailfance, que 1'on avoit enveloppé de tant de nuages, & dont la tracé étoit Ti bien interrompue, qu'il n'étoit pas polfible d'en reprendre la fuite. Francoïfe Fremont ne tarda pas a fe rendre chez le fieur Cognot. Elle lui déclara , en préfence de fa femme, qu'elle vouloit être dechargée de Marïe 3 &£ payée de fa penfion. Ils lui dirent de la leur amener j ce qu'elle lït dès le lendemain. La dame Cognot 3 pour écarter tout foupcon, demanda combien cette fille gagnóit par an. La Fremont lui répondit qu'elle n'étoit point venue pour B vj  36 Fille défavoule d'autant que la fille ne lui apparten noit, Sc n'avoit été préfent que par » hazard Sc rencontre, lorfqu'elle fut jj prife par ladite femme Fremont. Néan5» moins par charité 1'auroit prife a fon s) fervice, en étant requis par lefdits » Bouret Sc fa femme, dés le mois de 3» mars dernier. Et, pour raifon def» dites nourritures, aliments, entrete» nement, pour tout le tems qu'elle a j> été avec eux, accordent enfemble, »> pour éviter au procés que lefdits j> Bouret Sc fa femme defiroient intenj> ter contre ledit fieur Cognot, le vou» lant prendre a partie, ne reconnoifj» fant autre que lui, a la fomme de » quatre cent livres; fur laquelle fomj> me on a payé comptant cent livres, » & s'eft obligé a payer le furplus, qui n eft de trois cent livres, dans un an $ j> Sc en ce faifant, lefdité Bouret Sc fa jj femme demeureront décharges de  Jö Witte défavóuie laclite fille; fauf le rècours dudit J$J »» ^ contre qui il avifera, autres toas> tefois que lefdits 5o«r« & fa femme. ï> Fait dans la maifon dudit Cognot, lè * 16 juin i6"i7, &c. » Apeine AWfut elle dans la maifon/ paternelle, que fa mère lui donna la place, qu'elle y devoit occuper. Elle luf confia 1'économie du ménage , fans jamais lui faire rendre compte de 1'argent quelle lui remettoit; elle lui donna J autorite fur la fervante , 1'habilla comme il convenoit k fa fille de 1'être SC la fit. manger k fa table. En un mot, il ne lui manquoit que Ie nom de Cogno' * mais 011 lui fit croire qu'elle étoit Wie d un nommé Nkolas Croiffant y vcdeJeanne Aulry fa femme; & k feuemblance qui étoit entfe elle & fa mere, tant par les traits du vifage , que par le fon de la voix, la fit paifer chez les amis de fon père pour la nièce de k dame Cognot. Elle vécut airifi jufqu'i fa mort du' fieur Cognot, qui arriva en 1611. Deux mois avant'fon décès, il fitun teftament dans lequel il défigna fa fille fous le nom de Mark Croijfant fa fervante, Sc hu Iegua fix cent livres. Cet événement*' n apporta audm changement dans la luuation de Mark. Sa mère lui choifie  par fes père & mère. %tj enfin pour époüx ün fieuf Augufte de Seine , qui étoit d'une condition honnéte ; elle lui donna quinze cent' livres en mariage , & confentit quê , dans le contrat, elle fut qaalifiée fa fiileule. Ce mariage ne diminua en rien 1'af— feftion qui étoit entre la mère & la fille. Celle-ci , quoiqu'elle demeurat avec' fon mari dans une autre maifon, avoit toujours confervé la même liberté chez fa dame Cognot 3 qui ne hii avoit rien oté de fa confiance. Elles feuilletoient un jour enfemble des papiers du feu fieur Cognot; la fille trouva une lettre de fa mère , datée de 16ói, dans laquelle , après avoir parlé a fon mari de quelques affaires , elle lui difoit : je' fous recommande nos enfants : aye^Joiri de notre petice Marie 3 voye^-la Jouvent: je lui fi is des mouchoirs & des' tabliers, Marie Cognot, qui depuis long-tems, foupconnoit fa filiation , voulut s'emparer de cette lettre. La mère, qui s'ert ?pperc,ut , la demanda avec d'aYitant' plus d'inflance, que fa fille s'opiniatcoit a la garder. Enfin 3 dit celie - ci, m6 yoild éclaircie ; je fuis votre fille 3 je Juis eette Marie. Puis-je, après cela 3 douteï que mon père ne m'ait donnée ct nourrif comme Ja fille f Elle conjura fa mère de Isi avouer ce qui en étoit j & pour I y  40 Fille défavouée engager, elle lui promit le fecret Ie plus inviolable. La vérité & la tendrefle maternelle firent alors un efForc qui éclata malgré Ia dame Cognot , & rompit avec violence la réfolution qu'elle avoit formée d'enterrer fon fecret avec elle. Out 3 tu es ma fille} lui dit-elle, avec tranfport , & fondant en larmes. Elle lui découvrit la caufe & 1'hiftoire de fes malheurs. Elle lui prit enfuite cette lettre, & dit, qu'ayant été fi long-tems fans la reconnottre pour fa fille } elle étoit obligée , pour fon honneur, de continuer a la dgfavouer. Elle ajouta qa'un religieux de l'ordre de S. Francois , a qui elle avoit jait^ une oonfeffion générale au grand jubilé de 1625 3 lui avoit dit qu'elle la peuvoit défavouer devant le monde y & que néanmoins elle étoit obligée en confi cience de Cafififler comme fa fille , & de lui donner tout fon bien en mourant. Arrêtons-nous ici un inftanr , pour examiner la décifion de ce cafuifte. La dame Cognot s'étoit-elle accufée d'avoir donné a fa fille un autre père que fon mari? Ou, fans setre déclarée coupable d'infraótion de la foi conjugale, avoit-elle feulement confulté fon confefleur pour fcavoir fi elle pouvoit en  par fes père & mère. 4T fureté de confcience continuer de priver fa fille de fon état légitime qu'elle avoit eu la cruauté de lui ravir ? Dans 1'un & I'autre cas, le diredeur s'étoit trompe. Pour le démontrer, il faut reprendre les chofes dès la fource. La loi naturelle primitive a mis tous les hommes dans une indépendance totale les uns des autres; ainfi cette lol neconnoifloit point de propnétés;, tout étoit a tous. Loin que les poileiüons fuflent tranfmifes par k voie de la iucceffion, celui quipolfédoit étoit toujoitrs expofé a fe voir privé de la chofe par unravilfeur plus fort 011 plus adroit que lui; &il ne pouvoitfe plamdre cic cette perte, tant paree qu'il n'y avoit pcifonne étabii pour recevoir fes plaintes Sc ea faire juftice, que paree que la loi naturelle n'étant point corrigée par la te! civile, il n'y avoit point d'inmfhce a faivre les imprelfions d'une loi qui feule étoit en vigueur. Et fur quel principe cette injuftice auroit-elle pu être fondee? Tous les hommes, au moment de leur formation & de leur naiftance , font égaux, & 1'on ne voit point que le createur en deftine un plutot qu'un autte a polféder exclufivement telle portion ou telle production de la terre} fa deftina-  P l Fille dèfavouèe oqn eft de porter & de nöurrir é*afé« cent roos les hommes ainfii q JC les ammaux. 4 us i^È^T^^T fait pour vivre en iooctê, le genre hurnain s'eft divifé * eft hxee fc un com du ebbe & a defenda, par la force, la poftion q^lll avoit adoptie, des ihcurfa desïutrés peuplades jainftla.loidu plus fort m _ tigeeparledroit des gens a tou ™s contmue de régrr les différents pe ;D S entre eux, & de réglerleurspoffS* paisaucüne fociétén'a puadopte erte fe '•elanvement aux poffeffions de chï queparticuher qui iacompofe. II a donc Un principe général & fondamental de cette lor, eft que chactIn confe^ pofleffion dont ii étoit rpvAm J j « We depuis par les voies'ouX ndiquees:mais cette règle nepouvoia •vpir^ea que p9Ur les hommes Qui ïWtton dans Je domau?e du ^  par fes père & mère. 43 appartenoit par conféquent aa premier óccupant; ainfi 1'on auroit vu reparoïtre les inconvénients que 1'on avoit vouliï éviter d'abord en fixant la propriété & la pofleilion dans lamain de ceux qui la tenoient. La'loi civile imagina les fucceffions; c'eft-a-dire que les biens laiffés par un défunt furent tranfmis a certains d'entte les citoyens qui lui furvivoient. Mais eet ordre n'apas été abfolument uniforme chez tous les peuples. Ilparoitnéanmoins que la règle la plus univerfellement admife eft celle qui appelle les enfants a recueillir la fucceifion dé leur père. La loi naturelle ordonne aux pères de nourrir leurs enfants, au moins jufqu'au tems oü lage les a mis en état depourvoir eux-mêmes a leur fubfiftance. De-la on a penfé qu'il étoit plus conforme aux régies naturelles de donner aux enfants ce que leurs pères lailfoient en mourant. Mais cornbieu cette règle a-t-elle fouffert de variations , fuivant les différents tems, & dans les djfférents pays ! A Rome , un père pouvoit, par fon teftament, ne rien laiffer de fa fucfeffion a. fes enfants , & Ia tranfmettre toute entière a tel étranger qu'il jugeoit a propos. Mouroit-il fans avoir fait de teftament, les feulsmalese fuiyant 1'an^  44 Fille défavouée cienne loi, étoienc appelles a lui fuccéder; la loi Voconienne avoit même porté la rigueur jufqu'ane pas permettre qu'une fille, fut-elle 1'unique enfant, put être inftitu.ce héritière par fon père' Ainfi, lorfqu enmourant, on nelaifTbit d'autres enfants, que des filles, on étoit forcé de voir, a leur préjudice , paffer tous fes biens a des étrangers. Suivantla loi des Lombards, lorfqu'un homme n'avoit que des filles pour héritières , elles fuccédoient a leur père concurremment avec fes fceurs , fes enfants naturels & les autres parents; & a leur défaut , avec le fifc. Parmi nous, les fiefs, dans une trésgrande partie de nos provinces , appartiennenta 1'ainé des males . ou aux plus proches parents par males ,"a 1'exclufion des filles. Dans une des plus grandes provinces du royaume, les filles, quoiqu'elles aient droit a une portion fort modique de 1'héritage paternel, n'ont cependant pas ia qualité d'héritières , lorfqu'elles ont des frères ; & le père peut même , en les mariant, les priver totalement de toute portion a fon hérédité. Ce n'eft donc point de Ia loi naturelle que nous tenons Ie droit de fuccéder a  par fes père & mère. 45 nos parents; la loi civile feule nous a accordé ce privilege, & y a appofé telles reftricHons qu'elle ajugé a propos. C'eft donc elle feule qu'il faut confulter dans les queftions qui fe préfentent a eet égard; & comme c'eft d'elle uniquement que nous tenons nos pofleffions , que c'eft auffi uniquement par elle que nous lesconfervons & les tranfmettons , c'eft fe rendre coupable envers elle, que de s'en écarter , ou de confeiller de s'en 3 écarter. T nrfrme cette loi a adiusé les fuccef- fions aux enfants , il a fallu, en même tems, qu'elle expliquat ce qu'elle entend par enfants. 11 y a des pay? oü les batards concourent avec les autres enfants: ils avoient même parta lacouronne fous les deux premières races de nos rois. Mais enfin les troubles qu'un tel ordre pouvoit faire naitre , & 1'honneur auquel il élevoit le concubinage profcrit par la religion, ont déterminé la loi civile a. n'admettre pour héritiers que les enfants Ughimes , c'eft-a-dire, comme le mot même 1'indique , les enfants qu'elle reconnoitpour être de la familie du père qu'elle leur affigne. II eft impoffible de pénétrer dans Fe myftère de la conception des enfants-,  4j fille a Fontenai-le-Comte en Poitou, » & en quelle paroiffe elle a été bapj» tifée ? A répondu qu'elle a eu une fille a  par fes père & mère. si Fontenai-le-Comte 5 qui fe nommoit »> Marie Cognot; mais ne fcait pas 1'anm née, & qu'il n'y a qu'une paroiffe a jj Fontenai-le-Comte^ jj Qui étoient les parrein & marreine u de Marie Cognot; de quelle vacation jj ils étoient; comme ils s'appelloient ? 55 Aréponduqu elle n'eft mémorative 53 de leurs noms , de leurs qualités ; Sc 35 depuis nous a die que le parrein s'ap33 pelloit Bonnet mairre apothicaire, & 35 la marreine s'appelloit Pichard fille jj de Bonnet j qui étoit mariée a un 3> apothicaire; & I'autre marreine étoit jj femme d'un chirurgien. 35 S'il n'eft pas vrai que la femme 35 üAugufte de Seine eft fa propre fille jj & du fieur Cognot 3 & fi elle n'a pas jj accouché d'elle a Fontenai-le-Comte j» en 15 99 ? 55 A répondu que non ; mais bien dje 55 la fufdite fille. 33 Combien de tems elle a demeuré 33 a Fontenai-le-Comte avec le fieur j» Cognot fon mari ? 55 A répondu qu'elle y a demeur.é enjj viron quatre ans. » S'il n'eft pas vrai qu'ils ont mis »j Marie Cognot leur fille" au village de »> Souvré-le-Mouillé, qui eft a deux Cij  5 2 Fille défavouée » lieues de diftance de Fontenai-le- » Comte ? » A répondu que Marie, dont elle » entend parler, a été nourrie chez une » boulangère, ainfi qu'elle croit; & » quatre ou cinq mois après qu'elle en » eutaccouché, elle rit un voyage aBar* fur-Sewe , ou elle fut prés d'un an ; » & a fon retour le fieur Cognot lui die » que fa fille étoit motte ; & qu'elle ne » s'informa point de 1'endroit ou elle » etoit décédée. « S'il n'eft pas vrai qUe , lorfque Ie » fieur Cognot & elle partirent de Fon« tenai-le-Comte , avec Claude Cognot « leur fils , ils donnèrent charge a une » femme de Fontenai-le-Comte de re» tirerleur fille Marie Cognot, qui étoit « en nourrice a. Souvré-Ie-Mouillé, &c « de Ia_nourrir pour un tems, jufqu'a a ce qu'ils euffent trouvé une öccafion » pourlameneraParis, ou ils venoient » faire leur demeure a. caufe de la mala» die de lapierre dont le fieur Cognot » étoit atteint ? » A répondu qu'elle ne fcait ce que 53 c'eft. » Si après avoir été a Paris nenf ou s» dix mois, ils n'envovèrentpas a Fon?> tenai-le-Comte quenr Marie Co not  par fes père & mère. j 3 s> par un homme expres; laquelle fille » fut délivrée a eet homme par cette 33 femme qui avoit été priée de fe char33 ger d'elle, & il 1'apporta dans une 33 hotte? 3» A répondu qu'elle ne fcait ce que r> c'eft. S'il n'eft pas vrai que eet homme 33 apporta Marie Cognot dans une hotte 33 jufqu'a Paris , & que le fieur Cognot 33 ne permit pas qu'elle conchat en leur 33 maifon , de crainte que quelqu'un 33 n'en eüt connoiffance ? )3 A répondu qu'elle ne fcait ce que 33 c'eft. 33 Si elle ne fcait pas que le fieur » Cognot fon mari fit apporter Marie » Cognot leur fille au fauxbourg Saint 33 Mareeau, & la iv.'n entre les mains de 33 Francoife Fremont , femme de Jean 33 Bouret, qui pour lors étoit ferrurier, 33 Sc demeuroit devant lesCordelières ? 33 A répondu qu'elle ne fcait ce que 33 c'eft. 33 Si elle ne fcait pas auffi que le fieur 33 Cognot a dit a Francoife Fremont que 33 1'enfant s'appelloit Marie, qu'elle ne 33 s'enquit pas du refte5 qu'elle feroit 33 bien payee ? C iij  54 Fille défavouêe » A répondu au'eüp n*» f™;,- „ c eit. * » S d n'eft pas vrai qu'elle donna de » la lerge verte a Francoife Fremont, & - quarre livres pour le premier mois » d avance ? » A répondu qu'elle ne fcait ce que c eft. " ? » EU n'eft pas vrai que, I'année fui» vante que Afin* Couleur rille fut » mile enrre les mains de la » elle alla au logis de cette femme de» mander : eft-ce pas céans qu'on a mis » une nile pour la nourrir l » A répondu qu'elle n'v a point été, » & qu'elle ne fcait pas ce que c'eft aue » tout cela. « S'il n'eft pas vrai" que fa Fremont M lui dit en ces renne* : ^ui vo"r £»* » demander s'il v a une petire rille i » nourrir céans ? perfonne ne le fcait » que celui qui me fi, donnée. \Iors » elle répondit qu'elle ne s'en étonnat » point, que la rille étoit de fon pavs » qu elle deriroitlavoir;& même donna' » cmq fois ala petite Marie Cognot. » A répondu que non, & quelle ne » ican ce que c'eft que tout cela. » S i; n'eft pas vrai que treize ou qua-  par fes père & mère. $ f n torzeans environ après avoir vu Marie » Cognot, la Fremont lafutvoir accom» pagnée d'une de fes voifines, Sc au- roit mené avec elle Marie Cognot au » fieur Cognot Sc a elle, afin de la re» prendre, comme lui ayant été donuée s> par le fieur Cognot ? » A répondu que la vérité eft telle 33 qu'en I'année 1617 , revenant de la 33 ville , elle trouva en fa maifon deux 33 femmes & une petite fille qui étoient » dans fon jardin , Sc que le fieur Co33 gnot lui dit : voila deux femmes qui 33 vous amènent une petite fille pour 33 vous fervir, qui vous fera bien fidelle. :> Elle demanda a la Fremont combien m elle gagnoit par an. La Fremont ré.13 pondit qu'il n'étoit pas queftion dè 33 gages, Sc qu'elle avoit fervi chez un 33 nommé Noblin écrivain; quela-deffus >3 elle la retint; & que cette fille a tou33 jours demeuré chez elle jufqu'a ce 33 qu'elle ait été mariée. 33 S'il n'eft pas vrai que, dès le pre33 mier jour que Marie Cognot fut en 33 leur maifon, ils la firent metare a 33 leur rable, la faifant manger avec eux , 33 commandant a leur fervante de lui 33 obéir; Sc même lui ont fait appren>3 dre a écrire comme aleur enfant, lui C iv  16" Fille défavouée » confiant de 1'argent , & ]a ^ ne im donnoient pas le nom de Cb" é™< , 1 appellant feulement Marie ? " • rePondu que non: qu'elle n'a » point man^é a fa raM« „ i » aorèQ- réponfe que fes père & mère demeu» roient dans la rue de la Huchette , Sc » qu'elle avoit été baptifée dans 1'églife » de S. Séverin ? » A répondu qu'elle a ouï dire au 55 fieur Cognot que le père de Marie 33 demeuroit dans la rue de la Huchette , 33 Sc étoit homme d'affaires ; Sc qu'il le 33 connoiflbit lorfqu'il étudioit en 1'uni33 verftté, 33 S'il n'eft pas vrai que le fieur Co33 gnot a payé a la Fremont} a deux fois, 33 quatre cent livres pour la compofis3 tion qui fut faire touchant la nour33 riture de Marie Cognot} 33 A répondu que véritablement la 33 Fremont dit qu'elle ne laifleroit point 33 Marie 3 ftelle n'étoitpayée de la nour33 ritute de quatorze ans qu'011 lui de— 33 voit, qu'elle la remmeneroit. A quoi 33 le fieur Cognot répondit que, puifque m Marie étoit abandonnée de fes père 33 & mère,il la prendroit a fonfervice, 33 & lui- feroit de grandes charités ; Sc 33 que le fieur Cognot étant follicité par 33 Imbert Coliet, maitre cordonnier au 33 fauxbourg S. Marcel, qui connoifibit Cv  fS Fille dêfavouie «donner charitabiement quatre ce^ «lanournrure de^«JqJe Ja «gee de^r/e par un acte, afin de fe -^^ff^filuiredeMdoit. " ^ü n eft Pas vrai qu'eile a dit a " £ T terfonnes ^dle ét™ " £lne d? Mr"L qu'elle 1 avoit " ^mie fonts de S. Séverin, que » fon nere s'appelloit AW., C,o.4V" -* mereW ^t &J * «Oo^etounéaCMIons^é^oit » un foiiiciteur de procés. » A répondu que non ; mais qu'il eft -*~JP**.;e,Iorfqu'onpaft^e con' »trar de manage de eJ]e fot "Pneepar la mere ÏAuguJïe de Seine "rVPe^.de dire que la fccure - eroit fa hlleule, paree que ce nom-g » iervante.. » S'il n'eft pas vrai qiie la Fremont » «.condamneapayer la nourriture que cecte affi - :' fe«™»aaparer quatre cent livres »» pour-cette nourriture? => A répondu que non..  par fes père & mère. 5 9 „ S'il n'eft pas vrai que, depuis peu » de jours, foupconnant quAuguJie de » Seine avoit fait faire des recherches 35 a Fontenay-le-Comte de l'a&e de j> baptême de Marie, elle avoit dit a 33 Marie, pour arrêter ces recherches, *> qu'elle lui vouloit donner deux cent 33 livres de rente ? 33 A répondu que non ; mais qu'il 33 eft bien vrai qu'elle avoit toujouts 33 promis , n'ayant point d'enfants, de 33 récompenfer Marie en mourant, &c » qu'elle lui réfervoit fa bonne vo33 lonté. ,3 S'il n'eft pas vrai que, lorfqu'elle 33 alla voir Marie, qui étoit entre les 33 mains de la Fremont, celle-ci lui dit: 33 ne feriez-vous point la mère de cette 33 fille que m'a apportée un petit hom33 me qui porte une foutanne j & qu'a33 lors elle pleura? 33 A réoondu que non. 33 Si elle s'en veut rapporter aux té>3 moins qui en peuvent dépofer ? 33 A répondu que non. 33 Leclure faite, &c. & a figné 33. D'après eet interrogatoire & 1'information qui 1'avoit précédé, le bailli de S. Germain prononca fa fentence le hl mai 1619, par laquelle la dame G vj;  £o Filk dèfavouée^ Cognot fur condamnée i reuir & rscon«We Mane Cognot pour fa fiUe £ ceiJe du fieur Cognot fonmari • & lav?r expofée&défavouée;elIePfu SS ^^^-dunnouvelat mcoire. Conaamnée en outre a refti- dans lafucceffiondefonpère.fuivant Wntane qm avoir été fait après fon poHeilion. des hens propres. La dame Co^or interjetta appel de cejugemenrauparlemen;. Sa fille obT des le,"res de refcifion conrre Ie don mutuel pa/Té emre fon père & fa n^ere, &mit en caufe les p'rentTde Ion pere qiu. s'étoienr j r propres. r delaTnmte5yallavifiterlesregiftres & voyant qu'on 1'y avoit infcri^e W fe nom de ïp r„,„ , 0115 ^ li V nomenblanc, 'blanc ' lnr * & mère ej J & fouter, „oavA «c, ^ nc d< taz^par la femme dc fa,JWO  par fes père & mère. 6i Bouret. Elle croyoit par-la fe prépares une pceuvc contre 1'état que fa fille réclamoit; mais elle ne fit autre chofe qu'uu faux d'autant plus facile a appercevoir, que les additions étoient d'une autre main que celle qui avoit fait la première infcription, & que les regiftres de 1'höpital-général fe tronvoient differents de ceux de la Trinité. Marie Cognot cbargea le fameux Je Maitre de fa défenfe. II noya, a fon ordinaire, le fait & les moyens dans une mer d'érudition facrée & profane. Nous en avons déja débarraffé 1'hiftoire de la caufe, telle qu'on vient de la lire; nous allons tacher d'en dégager pareiliement les moyens, qui ne confiftent qu'a rapprocher les faits qui réfultent de la procédure, & en compofer une chaine qui puiffe conduire, de 1'inftant de la naiffance de Marie Cognot 3 jufqu'a fon mariage- Elle rapportoit un extrait baptiftaire qui prouvoit que la dame Cognot étoit accouchée a Fontenay- le-Comte, le 24 juillet 1 :i . P. » «,= • ' ^, 7'1" 11 Cit Perionneilement mtcrefle a faire réuilir'fon proiet > execution, d choiiit une dépolitaire qui lui eft inconnue, & a laquelle il eft paredfement mconnu; ü la cherche dans unquartierpeu fréquente, oüdpretu que fes affaires ne Pappelleront pas dansunquartieréloignfdufien;eePq,i  par fes père & mère. 6$ De la part de la dame Cognot, fi cette enfant lui eut été inconnue ou indifférente, quel étoit le but de la vifite qu'elle lui rendit au bout de quelques mois; quelle étoit la fource des larmes qu'elle ne put retenir, lorfqu'on lui demanda fi elle n'étoit pas la mère de eet enfant ? Cette démarche, ces larmes ne décéloient-elles pas la nature qui fe faifoit jour, au travers des obftacles qu'on lui oppofoit ? Sans nous arrêter aux circonftances de la première converfation qu'eut le fieur Cognot avec la Fremont, qui toutes décèlent un homme embarraffé par les reproches de fa confeieuce, paffons a Parrivée de la fille dans la maifon de fes père & mère. A quel titre la recoivent-ils chez eux? C'eft, difent-ils, a. titre de fervante. Mais prend-on une fervante amenée par une inconnue, fans aucune information, & fans faire aucune convention avec elle? En fuppofant ce fait poffible, que répondre a la tranfaétion du 16 juin 1617 ? Le fieur Cognot, après avoir refufé le paiement de la nourriture de cette fille, eftalfigné, & appaife 1'éclat qui auroit fuivi cette aflignation, en confentant au paiement qu'on lui demande. Si  66 Fille defavouée Man* n'étoit pas effecHvement fa fille quecra.gnoK-n de cette affignatL?' Maisexammons 1'acfe en détail. Le fieur C dlt que ce trair, • a donné A 4 ntehile,& dont elle a erf cWe £r un certatn homme qui accompagS J tem Cognot. Pourquoi ne dit-il pas que c eft lm qu: a conduit ce certJhomf m r pourquo! ne le m^t-i] p™> On fent 1 objet & 1'importance de ces rencences. MaIS Ut FrcZonc Zn 'eg tout cefvftème: elle allure qu" t S èA chf§e> ^ 1'enfant qua la confidT nort que Iu, Pourquoi fe>eroir-ir renchr ^unondel'hommequ'ilaccompa.poif s il n avoit eu dans cette affaire le plus grand intérêt> r D'ailleurs quand il eft queftion de ' parer ce qu'il dit ne pas devoir, & ce quil pretend être a la charge d'un autre if ne nomme perfonne, il réferve feulementfon recours contre qui il avi- fera :rnaisil eft clair que cetl réferve n eftquune chimère, qui n'a pour ob- Four öter tout prétexte auxqueftions  par fes père & mère. Gj qu'on auroit pu lui faire fur eet homme dont il s'étoit rendu caution , il dit IV voir rencontré par hazard; mais fe renden caution , & paie-t-on pour un homme que 1'on ne connoit point, que 1'on rencontre par hazard, & que 1'on ne voit qu'une fois ? II dit enfuite que c'eft par charité qu'il prend Marie a fon fervice, a. la prière de Francoife Fremont & de fon mari. Eft-ce donc une charité que de fe faire fervir par une fille a laquelle on ne donne point de gages , de 1'admettre a fa table, de 1'habiller comme on habilleroit 1'enfant de la maifon , de lui donner autorité fut la fervante, & 1'argent de la dépenfe en maniement fans rendre aucun compte ? Eft-ce par charité que Toii paie qüaa:ê cent livres pour prévenir un procés dont on eft menacé? Eft-ce par charité que 1'on fait un legs de fix cent livres aune fervante, & qu'on lui en donne, en outre, quinze cent en la marianr? II faut faire ici atrenrion au tems oü ces genérofiris ont été faites. Quinze cent livres alorsétoient au moins aufli confidérables que le feroienr aujourd'hui fix, mille livres. Refte a détruire les objections par  68 Fille dèfavouèe verite. H ft vraifemblable, di, ces dinhurnanité envers fon enfant. -Le defaut de vraifemblance n'eft de "faitT m^£n C3pabIe de **** na te deT ' ^ ^ r6Sarder 1W m te de leurs s comme fenfe légitime. Indignum eft crimma cL:tr0CUatl de$endi- D'^uts le cnme que Pon veut faire reader -i comme hors de vraifemblane^ ne fe commet-il pas tous les jours - & nos hopitaux ne font-ils pa rT't d enfants abandonnés pa/leurs pa rents , que 1'on a trouvés par hafarT ^S(ï- WsJexpofési tous les dangers ? La dame C0^0r prétendit tirer de grands ayantages du teftament de fon man Cel e qui veut être reconnue pour ft fille, dia traite de fa fervante 13 ' r K'r0lMa'ltJ&ne lui lè 15 «- ) , ^cuc prou» ver qu un homme Pa tenue publique»ment pour fa femme, qu'il enaVu >■> des  par fes père & mère. 73 155 des enfants , il ne peut la chalTer de 3> fa maifon contre 1'ordre des loix^fnais il doit la tenir pour fa femme, & les 33 enfants qu'il a eus d'elle pour fes en33 fants légitimes ; 8c ils feront regardés 33 comme tels malgré lui 33. En effet les enfants n'appartiennent pas feulement a leur père; ils appar'tiennent auffi a la patrie. C'eft de leur père, il eft vrai, qu'ils tiennent la vie, 8c leurs biens dont il auroit pu difpofer a leur préjudice; mais c'eft de la patrie feule qu'ils tiennent leur état C'eft pourquoi un père pouvoit, a Rome, dcshériter fon fils, 8c même le faire mourir; patribus jus vita in libcros necifque poteflas olim eratpermiffa. L. 20 cod. de patrid poteflate ; mais il ne leur étoit pas permis de les rejetter & de les abdiquer: Necfilium negare cuiqiiam ejjè liberum fsnatufconfulta de partu agnofcendo manifefto j'uredeclarant. L. 9. eod. Et, comme le père eft incertain clans 1'ordre naturel, & qu'il n'eft pas dans la puiftance d'un fils de prouver quel eft véritablement fon père , les loix ne :. s'arrêterrt qua Pextérieur, &, laiffant les fecrets invifibles de la nature a Dieu qui en eft 1'auteur, elles déclarent que celui-la eft le vrai père qui paroit 1'être Tome VU. D  74 Fille dcfavouie t par le mariage : pater is eft quem nuptU demonftrant. L. i.ff. dein jus vocando. Elles ne confidèrent que Ia naiifiance , qui eft toujours certaine, & n'ont aucun égard a laconcepcion , fur laquelle il eft impoftible d'avoir des lumières alfurées. Elles préfument toujours pour 1'innocence d'une femme légitime, jugent favorablement des chofes fecreres par celles qui font connues , &adoprenr comme légitime tout ce qui nait fousle fceau du mariage. Lorfque deux perfonnes font réunies fous le joug de ce contrat fpirituel & politique, la généalogie de leurs enfants n'eft plus en leur difpofition , ce font les lóix qui la font. Les pères font obligés d'avouer comme nés d'eux, ceux que leur mariage leur préfente; ils font, pour ainfi dire , en communauté d'enfant avec leur femme , & ils nepeuvenr renoncer a cette communauté. La loi permettoit a un mari, fur un fimple foupcon , d'accufer fa femme d'adultère \ il pouvoit cependant la garder chez lui, malgré cette accufation : mais fi, demeurant ainfi avec lui, elle devenoitenceince. & mettoit un enfant au monde, il étoit obligé de s'en reconnoitre le père, fans pouvoir le défavouer.  par fes père & mère. 7^ Nos ufages n'ont pas admis une accufation appuyée fur un fondement fi léger; mais nous avons adopté la portion de la loi qui attribue la paternité au mari qui demeure avec fa femme , quelque accufation qu'il ait inrenteé au fujet de la fidélité conjugale , avant qu'elle devint mère. (1). Le fieur Cognot n'a intenté aucune accufation de cette efpèce contre fa femme : il a vécu avec elle, il 1'a toujours traitée maritalement; il a avoué 8c reconnu publiquemenr fa groffefle, il a fait plus , il alui-méme comigné 1'aveu de fa paternité fur le regiftre public deftiné a alfurer la naiffance 8c 1'état des citoyens. C'eft une reconnoiftance authentique qu'il a faite a Ia face de la fociété , 8c fur laquelle il ne lui a plus été permis de varier. Le teftament du fieur Cognot eft donc une pièce inutile , 8c qui ne peut porter aucune atteinte a (1) In primis maritum genialis thori vindicem eflè oportet; cui quidtm ex fujpïcionc rtan £OP;ugem facere licet; vel eam, fi t.mthm fufpicatur, penis fe retinere non prohibewr. L. 30, co cl. de adidt. Non tarnen ferendum, Julianus ait, eum qui cum uxore f ia ajjiduè rnoratus, vol t filium agnofcere quafi non ffium. L. 6, ff. de his qui üiï, vel alieni juris funt. Dij  76 Fille défavouèe h première déclararion confignée dans hs regiftres baptiftaires • elle a acquis i Mane-un droit dont ia fociété entière eft garante, & qui ne peüt plus Iui km ravi par le caprice de fon père. , On oppofoit encore la perfévérance de la mere dansfon défaveu: mais cette objeórion n eft pas plus confidérable que la première & fe détruit par les mêmes raifons. D ailieurs, ft 1'on fait attention a la conduite de Ia mère, onen dcW rara facilement les motifs ; & 1'on y appercevra , en même tems , mie contradicnon avec elle-même, qui met la vente dans tout fon jour. La première des paftions qui la font agir , eft lahonte. Elle n'a pas craint de dire elle-meme i fa fille qu'ayant été fi Jong-tems fans la reconnoïtre , un tel aveu la déshonoreroit. La feconde paflion eft 1'avarice. Elle ' pofledoit la fucceffion du fieur Cognot dont 1'mventaire fe montoit a dix-neuf mille hvres, fomme alors très-confidé- xuuic, sue ia poiieclou en vertu du don mutuel contre lequel Marie Cognot avoit obrenu des lettres de refcifion; & en vertu d'une tranfaction , par laquelle les hcntiers collatéraux de fon défunt man lm avoient abandonné, pour deux  par fes père & mère. 77 mille fept cent livres, la propriétéde la moitié de la fomme portee dans 1'inventaire, dont elle n'avoit que 1'ufufruit. En avouant fa fille, elle fe feroit condamnée elle-même a reftituer la fucceflion. La troificme paflion qui 1'animoit ■étoit fon amour pour fon fecónd mari. Elle 1'avoit tiré du fein de 1'indigence ou il fe voyoit prêt de rentrer. Mais ces paffions n'avoient pas tellement étouffé la vcix de la nature dans le coeur de la dame Cognotqu'elle ne fe foit. fait entendre de tems en tems. Dans 1'interrogatoire qu'elle avoit fubi, tous fes efforrs n'avoienr pas été fuffifants pour intercepter les rayons de la vérité qui éclatent au travers de la diffiitlulation. D'abord elle fe retranche fur la négative; mais quand on 1'interroge fur la nourrice qu'elle a donnée a. Marie Cognot j comme elle prévoit qu'aprcs cette queftion , on lui demandera la fuite de la vie de fa fille , elle fe hate d'en couper le fil, en difant que fon mari lui a appris la mort de eet enfant; & pour prévenir toute autre queftion , elle ajoute qu'elle eft incertaine fur le nom de la nourrice > i>~ fur le Keu du D iij  7fs Fille dèfavouêe décès. Cette indifférence peut-elle fei préfumer dans une mère, & la jufti e, qiu rend les pères & les mères garant? de ia vie & de la nourriture de leurs: enfants, n'étoit-eile pas en droit d'exiger d elle qu'elle rapportat i'extrait mortuaire de fa fille , ff elle ne vouloit pas; quon la foupcoimat de 1'avoir fuppri-. mee ? Elle nie que Marie Cognot ait été ap- ■ portée a Paris dans une hotte, ik. qu'elle i ait été mife entre les mainsde Francoife Fremont : mais ce fait eft prouvé' par i mformanon. Ainfi, en leniant, elle n'en détruit pas la vérité , mais elle fait voir qu'elle ne combat que paree que laveu qu'elle en feroit mettroit fon crime dans le plus grand jour. C'eft par le même principe qu'elle temt d'ignorer la vifite qu'elle rendit a Marie Coenot cher. Ij Vr»,r,n„r s, v~ a . . „,,.„,lL } ^ larmes que la nature lui arracha. Mais elle eft obligée de convenir que c'eft la ■Fremont qui lui a mené Marie qui réclame auiourd'hm fnn ,W ^„'„n„ pnfe a fon fervice. Cet aveu équivaut i|U ene auroit pu faire. iJès qu'il eftdémontré, par 1'information, que c'eft celle-id même qui, quatorze' ans auparavant, fat remife par le fieur  par fes père & mère. 79 Cognot a Francoife Fremont , & qui fut portee par un homme dans une hotte dans laquelle elle avoit été voiturée par 1'ordre de fon père depuis un fauxbourg de Fontenai-le-Comte jufqu'a Paris , on ne trouve point de lacune clans 1'hiftoire de Marie Cognot. Sa naiftance, Ie tems qu'elle a été en nourrice , fon voyage a Paris , fon éducation pendant quatorze ans, jufqu'a fon retour dans la maifon paternelle, voila toute fa vie. Pourinterrompre cette fuite de faits, la dame Cognot oppofoit le regiftre de la Trinité , fur lequel celle qui fe prétendoit fa fille étoit inferite fous lenom de Marie Bouret s fille trouvée , & nourrte de lait par la femme de Jean Bouret. Mais cette infcription étoit manifefremenr faufte, & faire après coup. D'ailleurs elle renfermoit des contradiébions évidentes. Comment- cette fille s'appelle-t-elle Bouret, puifque c'eft une fille trouvée , dont le père & la mère ne font pas connus ? Comment eft- elle trouvée, puifqu'il eft prouvé par la dépofition de la Fremont & par la tranfaftion, que c'eft la même que le fieur Cognot remit en 1601 a la femme de Bouret ? Comment cette femme 1'at-elle nourrie de lait, puifqu'elle avoit Div  go Fille dèfavouêe tra» ans qu'elle étoit fevrée, Sc me j entanc>n avoit;amais eu de lait > Enfin J^iW, dans cette infcription e? ynpnce comme mort en : 6l9 , tems ou Ion remitl'enfantdlaTrinit - H eft prouvé parfon extrait mortuane qu il n'eft décédé que le i j janvier ? G' ■Toutes ces fuppokons prépalesfont' Que Ion fuive le refte de I'interrogatoire drefpirepar-tout la rendreftë maternelle Elle convient qu'elle adml «ne filleafatable, qu'elle lui adonné une confiance&une autorité qui Z EneT^T ^ ll mat t fine & Tdi;-eI!e' **Kfi£ ia fille, & la, refervefa bonne volonté. Leloge expnmépar ce defir , dans un eTe^r,^ 6116 6ft -P^cè "V c v r té^r U PaSlin.^fonnel de a fifi fai eC;Tmena°n dö C°ntil^ * im faire du bien, peut-elle tomber fur «ne fervante dont la nourriture & fenf «etien, pendant fon enfance, a détf coute quatre cent livres, qui arecuun legs de fix cent livres, & qninJcent «n fe mariaut ? 1 1 A toutes ces preuves, qui fembloien*  par fes père & mère. 81 former une démonftration completce , pn joignoit la reifemblance parfiute qui fe trouvoit dans les traits du vifage &c dans le fon de la voix de la mère Sc de la fille ; enforte que la dame Cognot , en proférant les paroles par lèfquelles elle dcfavouoit fon enfant, prouyoir, en même tems, qu'elle étoit fa mère. Voici les circonftances que nous apprend M. Gaultier (v. tom. v. p. 129 )■ qui plaidoit pour la mère. La caufe fut appointée au confeil. Les juges étoient au nombre de vingt-huit, & palfoient a la pluralité des voix en faveur de la veuve , fi 1'on n'eut pris le parti d'appointer. Le procés a duré fix ans : il y a eu cinq a fix arrêts interlocutoires de répétition de témoins & autres inftructions. Enfin le procés fut jugé parrreize juges, & palfa de fept opinions contte cinq. Voici 1'arrêt, qui eft du 4 décembre 1(5" 3 3 : « Le don mutuel du 23 mars n 1723 fut déclaré nul, ainfi que tous „ les ades dans lefquels Marie Cognot w étoit nommée Marie Croiffanr; elle v, eft déclarée fille légitime de feu Joa» chin Cognot, & de Marie NaJJier ; il » eft en joint a Marie NaJJier de la recon• noïtre pour telle , & de la traiter filia-  Fille défavouêe " 'Tl^ * k 61Je de rendre n°™enr " , cT anCS a fa mère' Ordonné que » Ia fille jouiroit de la part qui lui reve» noir dans Ia fucceifion de fon père,après » partage fait de la communauté qui étoit »entrelui& fa femme ;& que cette « pmifance auroit lieu ï compter du jour « de la mort du fieur Cogn0t;aue ce par» rage ne fe feroit néanmoins que de ce » qui refteroit après avoir prélevé fur Ia » malle les conventions matrimoniales » de la dame Cognot,les legs conrenus au » teftament de fon mari, les frais funé» raires, & la fomme de deux mille fept " cent llvffs Payée par la veuve aux pa" rre"tscoI1fera^ du défuntparlatran» iadtion du 8 février 1616. Défenfes » rurentfaites dia dame Cognot de ven» dre ou difpofer de fes biens en aucun» lacon aupréjudice de fa fille. Les h-ri" coIlarérauxconciamnésareftituer » a Marie Co^odesimmeubles dont ils » s etoienr mi«pn n^(Taa:.^ 0, i__ -—- r™^uuii,a ies 270© « livres qu ils avoient recus , & ce dans » deux mois; après lequel tems , fi cette' » reftitution n'étoit pas faite,ils feroient: » tenus desinrérêtSjfans néanmoins être » obliges de reftituer les fruits & jouif» lances du paffé, attendu qu'ils avoient » ï°iu de bonnefoi, & que leur erreur  par fes père & mère. 83 » provenoit du fait de la veuve Cognot. n Nico/as Coquauk & la veuve Cognot » furent condamnés aux dépens, taxés a » 300 liv. outre 500 liv. de provifion >3 qu'ils avoient payée a. Marie Cognot 3 » en vertu d'un arrêt du 20 mai 1 cT3 4 33. S'il étoit permis de jetter un ceil critique fur les oracles de la juftice , il femble qu'on pourroit dire que la veuve Cognot auroit du être condamnée folidairement avec les parents collatéraux a la reftitution des 2700 livres qu'elle leur avoit payés, & qu'elle auroit dü être tenue elle feule des intéréts de cette fomme. Par cette difpofition , on auroit alfuré a Marie Cognot le paiement des 2700 livres qu'elle pouvoit perdre par le fait de fa mère, fi les parents collatéraux de fon père étoient infolvab.es. D'ailleurs on auroit concilié deux régies d'équité , dont la première vouloit que Marie Cognot eüt les intéréts de cette fomme depuis que la fucceifion avoit été ouverte; & la feconde que les collatéraux, en la reftituant, n'en payalfent pas les intéréts , paree que leur bonne foi les exemptoit de cette charge. N'auroit-il pas même été jufte que la veuve Cognot eüt été tenue de rePcitwet a fa filleles fruits des immeubles 5 dont elle  84 Fille défavouêe n'avoir été privée que park mauvaife roi de la mère ? Au rede M. Gaalder nous apprend encore que, malgré 1'arrêt, la veuve a perfiftc: route fa vie dans fon défaveu, & n a fait aucune déclaration en mo*. ranr. • Antohne le Maü re } qui pl^ cette. eauie , naquit a Paris le z: mai icToS. II «mt hls ainé d'/y*« /c Maure, maitre des requetes , & de Catherine Arnauld teur de M. Arnauld d'Andilfy, de M. ■jW^ évêque d'Angers, & du grand, ^Wrf doóteur de Sorbonne. M /« Afró« parut ayec édat au reau des 1'age de u ans. II n'en avoio que vingt- cinq , lorfque M. Sëguier Je choifir pour préfenrer fes lettres de chanceuer au parlement, a la cour desaides & au grand confeil. Les difcours qu liprononca dans ces trois cours prou* vent la facilité & 1'abondance de fon imaginauon, &i'art qu'il polfédoit de vaner un même fujet. M. le cbancelier le fic confeillet detat & lui offrit la charge d'avocatfefufa aU Parlemeuc de Metz> qu'il Dans Ie ten« q«e Ta gloire |ettoit fe  par fes père & mère. 8f blus. grand éclat, il quitta tout d'un coup le barreau. On crut qu'd alloic embrafler 1'état eccléfiaftique, portee dans la chaire 1'éloquence qu'il avoit fait éclater au barreau , & s'ouvrir unï route glorieufe pour arriver aux premières dignités de 1'églife : mais li détrompa bientbt le public. II écrivit ï M. le chancelier , en lui renvoyant fes lettres de confeiller d'érat , qu'il avoit delfein, non pas dechanger d'ambition, mais de n'en point avoir du tout. II fe retira a. Port - Royal, ou il s'exerca , pendanr vingt ans, dam toutes les verras ehrétiennes, fit une pénitence trèsauftère , & compofa plufieurs livres de piété. x On raconte qu'étant alle un jour a Poifiy , acheter des moutons pour k provifion des folitaires de Port-Royal, le marchand qui les lui vendu lui^fit un proces au fujet du prix.. M. le Maart plaida, devant le bailli de Poilfy, ave* cette éloquence aifée & familière qui convenoit a fon fujet; & , pour ne pas. fe faire.connoitre, il avoit pns le nor» de Brancé. Le marchand , contre lequel il plaidoit, rinterrompit deux ou troi* fois mal-a-propos. Le bailli indigné ? dit au marchand t Tais-toi, gros low*  $6 Fille dêfavouêe l*iffe parler ce marchand : *M lejrotshen que tu en battrois une vit^ne comme lui; mais on ne fe ba fci [ f • C efi Par armes-ti qu'il aura. tcs moutons malgré toi 3 car U te l a m' le Maitre '-Je vois bien -3 lui dic-iJ Crover mn ■ votrecom™andement. ' enZ?7 %KU£Ï V0tr<«>mmerce3 & entrer dans le barreau. Fous ave? du Pondreque vous acquerre? autant de sloL que lecelebre M. le Mattre. § li raourut le 4 novembre i^s c li'': ,or[1^ certeabbaye futdémiire Ss 0Parl!,r ','JU*lm vtó>^ ÜAie n 'i f danS certe vafte cten-  par fes père & mère. 87 narration morceau a. morceau, pour en faire un tout. Souvent, au lieu de raifons, on ne trouve que des citations.. Ses moyens ne font jamais préfentés d'une facon concluante, & avec ce tour qui fubjugue les fuffrages. En un mot fes plaidoyers font plutot un amas confus d'érudition facrée &c profane , que des plaidoyers. Dans celui qu'il a prononcé pour Marie Cognot} il a inféré un trait qui pourra intéreffer le letteur. II eft tiré de Ter- ! tuliien 3 dans fon traité contre les nations, liv- 1. chap. 6. Le but de M. le Maitre , en rappor'tant cette hiftoire, eft de faire voir que \ la providence découvre fouvent les yérités les plus cachées toucbant la naiffance & la condition des enfants , &c de préfenter a fes juges un effet pitoyable & funefte de ce que peut la honte fur un père & une mère , lors même qu'ils ont été plus malheureux que coupables. Du rems que Fufcien étoit gouver■ neur de Rome, une foule -de peuple s'amalfaun jour a la fuite d'un criminel ( que Ton conduifoit au fupplice. Une petite fille'agée de fept a huit ans échappa alayigilance de ceux qui étoient  S8 Fille défavouêe chargés de la garder, fe confondk dans la foule, & fut enlevée, par un grec , qui lemporta en Afie, & Vy tint en tóclavage pendant quelques années. II la ramena l Rome, & 1'apnt expofée en veme, elle fut achetée par fon propnj pete qui ne la reconnut pas. Queloue tems après , il ufa avec elle des droits de man-re, & en abufa. II la tenoit cependant toujenrrs dans 1 'efclavage ; & , pour une faute qu'elle commit, il l envoya dans une de fes raétairies ' 8i lyht mettre dans les fers. Dans le même lieu étoient pareille*» ment dans les fers la nourrice & la fervante qu, par leur négligence , avoient «e caufe de 1'enlèvement de 1'enfant. <-es trois perfonnes fe racontant leurs aventures , la nourrice & la fervante lui dirent que la caufe de leur fupplice etoit d avoir lailfé perdre une petite fille qu elles avoient nourrie & élevée. La Wie, de fon córé, leur dit qu'elle avoi* eteperdue d tel %e ,& qu'elle étoit nee a Rome d'une maifon honorable. 11 fe rrouva que le tems oü les deux elclavesavownr laiffé perdre la fille de leur maitre s accordoit alfez avec 1'a^o de cette fille; elles ia confidérèrent avec flus d'attenuon, & crurent reconnoitre  par fes père & mère. 89 dans fon vifage quelques traits de 1'enfanc qui avoit autrefois été enlevé; enfin elles reconnurent une marqué extraordinaire qu'elle avoit fur le corps. On fit part de ces foupcons au maitre Sc a la maitretfe; i force de perquifitions, ils trouvèrent le marchand qui leur avoit vendu cette jeune lille ; n avoua tout-, & le père Sc la mère furent tellement touchés de regret, l'im d'avorr abufé de fa propre fille, Sc I'autre de 1'avoir mal traitée , qu'ils s'étranglèrent tous deux. Le gouverneur adjugea leurs biens a leur fille , non a titre de fucceifion , mais a titre de réparation de 1'injure convmiXé en fa perfonne. M. le 'Makte a laifte le recueil de fes plaidoyers imprimés plufieurs fois i«-4°. Sc beaucoup moins applaudis aujourd'hui, qu'ils ne le furent, lorfqu'il les pronon^a. On trouve , dit un ^auteur en parlant de Patru Sc de le Mattre, dans ces deux hommes , appelles les lumières du barreau, des applications forcées; un aflemblage d'idées fingulières Sc de mots emphatiques, un torr de déclamateur, quelques belles images, il eft vrai, mais fouvent hors de place ; Ie naturel facrifié a 1'art, Sc 1'état de fa queftion prefque toujours perdu de vue»  5 o Fille déf. par Ces „< p. , «fcrter aucune admiraal a£ 1? d'avoir pafte ft U'n„ 5 que celJs dèles. P ilJ°JlS-temsP^rdesnio- On a encore de lui r,UG~ de ni~ré II , p'uneurs ouvraees ftbles d£ ïgetdïra£ede tOUteSJeS donna nas le£ms X m°rt "6 U euvrage. * d eXCCUCer ce g*nd  HlSTO I RE DE L' A B B É be mauroy. j4lexis de Mavroy y étoit fils de Simpkin de Maurov, feigneur de SaintOuen & de Germigny , confeiller d'etat, intendant des finances. il avoit deux fceurs : l'une religieufe aux filles de b. Thomas a Paris : Tautre nommee Anntr Radegonde de Mauroy j avoit épojdCj, en premières noces , Jean Armand de Foyer, marquis de Paulmi, mort bricadier des armées du roi en 1674. Elle tpoufa , en fecondes noces, Francais de Criiffbl* comte d'Ufei , dont elle neut point d'enfants , & mourut en 1719» dans un age fort avancé. Alexis, dont il s'agit iel, hit deitine, en nailfant, 1 la profeffion des armes. 11 entra dans le fervice a lage de feize ans. Ayant perdu fon père de bonne heure> fatutèle fut déférée a fon oncle  9 2 Hifloire F-ernel qui étoit grand-maitre des eaux & forers de Bourgogne Le jeune A/^fellvöraavec 3 • f llcence a ^^thomrprkdn^p™ f reCi'll5e & P°<" la piété: & fur reeu Sen°rtre -m^ « "ppliquaauralentdek chaire & ? acouit alTez prompreinentuneréputationbonorable.So/éloquencerSitalapieteungrandnombredeperfonne Sa pbynononne contribuoit £2 xendrecetalenteftW;elleétoitdouce pxevenante; quandil parloit, elle ,££ -oit J pr0p0s ,&inLl01t'les!aSrX juiqu au fond du cceur F reiS^^rêï^IeX^^-- rribuml^ l ' P°rtanc dansIe mbunal de la penitence ie don de perser qu'il exercoit dans la chai ƒ ! Ia vertu de ia belle fut mdomptable. La r^hftance ne faifant qu'irriter les defirs de fon epoux ellefedéfendir de toutes fes forc-es, & repouffa les attaques avec les poings& avec les ongles, tellement que lepauvre mari fut obligé d'abandonnerle htnuptial couvert'de meurtn hu-es, ac-gratignures & de W II raconta fa trifte aventure a ceux qu ui  de tabbê de Manroy. 97 qui vinrent le vifiter le lendemam. La jeune femme fut grondée comme un enfant qui avoit mal appliqué les lecons de pudeur qu'elle avoit revues de ceux qui avoient dirigé fon éducation. On lui fit entendre que la retenue & la rcfiftance dont on lui avoit fait voir la néceflité , devoient être réfervées aux hommes qui n'avoiènt aucun droit fur elle : mais que cette réferve ne devoit pas s'étendre jufqu'a fon mari, auquel le facrement avoit donné tout pouvoit fur elle. La lecon fir fon effet: 1'enfant fut traitable , la nuit fuivante \ 8c le mail fut au comble de fes vceux. Le ménage alloit le mieuxdu monde. X'époux tranquil'e fur la vertu d'une 1 femme qui la défendoit avec autant d'opiniatreté , fe féücitoit de Punion qu'il avoit contraótée. II achevoit avec complaifarue 1'éducation de fa jeune femme , 8c mettoit tous fes foins a la for:mer fuivant fon gofit 8c fon humeur. La naïve docilité de cette jeune per!fonne lui promettoit I'avenir le plus i flatteur. Sa beauté lui faifoit goüter tous i. les plaifirs de 1'amour j fa vertu 8c la :i douceur de fon caraétère lui alfuroient iiune compagne qui le feroit jouir de Tome VU. E  5 8 Hijloire tous les agréments de la fociété. Un accident inattendu vint troubler toutes ces flatteufes illufions. La petite perfonne, après quatre mois de mariage, accoucha d'un garcon, dont la conftitution annoncoit qu'il étoit vent; a terme. Le pauvre mari prit d'abord le parti du filence, & ne confia fon chagrlri qu'a fon ami 1'abbé de Mauroy. II eft vrai qu'il le menaca, s'il ne trouvoit un remède pour le dédommager de fa bonte, de s'en venger, au moins en piibliant les foupcons. qu'il avoit fur la paternité de eet enfant précoce. Que devenoient les efpérances flatteufes que 1'abbé de Mauroy fondoit fur la réputation de fes talents & de fa piété ; que devenoit-il lui-même, fi 1'on découvroit que la débauche étoit le motif de 1'éducation qu'il donnoit aux petites filles, & qu'il abufoit du facreinent de mariage pour faire paffer a la charge de fes amis, les fruits de fon libertinage ? II appaifa 1'époiix par des préfents; celui-ei publia que la fcène, dont il s'étoit plaint la première nuit de fes noces, étoit une ficTrion, & qu'il avoit lui-même féduit fa femme cinq mois avant fon mariage,  de 1'abbé de Mauroy. 99 Voici une autre hiftoire qui prouve que 1'honnêteté &c ia probité n'étoient pas entiérement baunies du cceur de I Pabbé de Mauroy. La comtelfe de ***,qui vivoit i 1 Lille en Fiandres, avoit a peine atteint ) Page de vingt-cinq ans, qu'elle devint i veuve. Maïtrelfe de fes a&ions, jouif1 fant d'un revenuconlidérable, & n'ayant point d'enfants, elle prit le parti de vei nir établir fon féjour a Paris. Elle étoit : belle i & fa fagelTe donnoit du reliëf a fa :i beauté. Son penchant la portoit a la dé; votion : mais fon mari ne lui avoit pas ;) permis de s'y livrer : il 1'obligeoit de ;i voir le monde, oü elle figaroit trèsi bien. Elle avoit toujours pris le plus grand foin pour ne donner aucune if prife a la calomnie, même fur fa répu- I tation, quoiqu'c-lle eüt, par fes graces * perfonnelles & par celles de fon efprit, è tout ce qu'il falloit pour pl .ire. Mais ij elle polfédoit Part dimpofer, par le ; refpecf, fdence a ceux auxquels trnt de t; graces infpiroient le defir de lui pl ure. Elle aflifta un jour a un fermon que 'I I'abbé de Mauroy pronon<;a fur la pé- II nitence. II paria avec tant d'onéHon &C J tant de force, qu'elle en fut p i é.rée. i Elle Palla Yoir le lendemain, l'entretint  ioo Hijloire des impreffions que fon difcours avoir faites fur fon cceur, & Je pria fincèrement de 1'admettre au nombre de fes pénitentes : bien perfuadée que, fouS un tel directeur, elle feroit des progrès rapides dans le chemin du falut. L'abbé fut frappé d'abord des charmes de fa nouvelle pénirente, Mais il rut fi édifié des fentiments qu'elle lui espnma, qu'il réfplut fincèrement de n'être autre chofe, que fon dire&eur, de la conduire fuivant les lumières de' ia confcience la plus épurée, & d'étouffer abfolument tout autre fentiment. La dévote, de fon cóté, éprouva route 1'impreflion qu'étoient capables cle faire fur un eceur les graces de la perfonne & de la converfation de fon nouveau direcf eur : mais elle attribua cette fenfibilité ï 1'affection fpirituelle que Dieu, difoit-elle , lui avoit fait Ia grace de lui infpirer pour celui qu'il lui avoit lui-même indiqué comme'le feul homme propre a Ia conduire dans les véritables voies de la vertu. Elle fit ouvertement profeffion de dé/otion. Elle en adopta tout 1'extérieur & toutes les prariques, & ne recut plus, chez elle, que des perfonnes qui viyoient dans les principes qu'elle venoit cl'adopter.  'Je tahbè de Mauroy. lot la belle comtefie voyoit fouvent fon directeur. Elle lui mettoit fous les yeux tous les mouvements de fon ame, & lui découvroit avec la naïveté d'une piété fincère, toutes les impreilions qu'éprouvoit fon cceur. 11 en étoit une cependant, dont elle ne faifoit pas mentionj elle y étoit trompée elle-même. L'abbé, de fon cbté , ne voyoit pas impunément tant de charmes & tant de vertu. Plus fa pénitente le mettoit a portée de pénétrer dans fon ame \ plus 1'amour faifoit de progrès chez lui. Mais il réfiftoit au penchant qui 1'entrainoit, & fe fortifioit, de plus en plus, dans la réfolution de refpecter la-vertu de la comtelfe, de la conduire dans la route qu'elle vouloit fuivre , & de veiller véritablement a fa perfection. Cependant 1'arTectiou de la veuve pour le directeur devenoit plus yive de jour en jour, &c lui caufoit même de fréquentes & de fortes diftractions dans fes prières. Elle foupconna d'abord qu'il pourroit bien y avoir quelque chofe d'humain dans ce qu'elle éprouvoit. Mais elle chalfa cette idee, comme une infpiration de 1'efprit malin 5 &C crut que c'étoit une rufe qu'il employoit pour 1'obliger, fous prétexte de picté, Eüj  loz Hiflolre a abandonner la direction d'un homme auili éclairé que 1 etoit I'abbé de Mau^ roy. £lle regardoit même comme un mirarie opéré pour fa converlion , le hazard qui le lui avoit fait connoitre ■> & la complaifance qu'ü avoit eue de fe charger de fa confcience. Ces réflexions , d'ailleurs, lui parurent une vérité démontrée, quand elle réfléchit a la pureté de fes intentions, & a la bonne roi qm animoit fa déwotion. _ Plus I'abbé de Mauroy voyoit fa pénitente, phrs il voyoit fa beauté extérieure, & celie de fon ame, plus ii devenoit amoureux. Son expérience dans le vies ne lui permettoit pas de fe faire illufion fur les fentiments qu'il cprouvoit. II en connoilToit bien la nature. Mais il perfévéroit dans la réfolutiea de ne pas s'écarter, en cette occalion, des devoirs de fon état. Les principes de religion qui étoient reftcs au fond de fon cceur, & que fes paffions n'avoient qu'enveloppés, ne lui permettoient pas d'abufer de Pafcendant qu'il avoit fur fa dévote, & " qu'd ne devoit qua la vertu de cette femme plus refpecPable encore, qu'elle n'étoit aimable. II eut même fom de faire tout ce  de I'abbé de Mauroy. 103 qu'il falloit pour ne pas lui laiifer appercevoir les impreffions qu'elle avoit raites fur lui. II ne lui parloit jamais que de piété, & employoit tout Tart dont il étoit capable, pour lui faire trouver de la fatisfaclion dans les pratiques qu il lui prefcrivoit. Comment un tel homme, qui ne parloit que de privations & d'aufterités, qui ne refpiroit que la vertu, qui faifoit fon unique occupation de 1 mipirer, qui ne montroit d'autre defir, que de procurer des ames a Dien , auroit-il pu faire na'ure d'autres fentiments, que ceux dont il étoit pénctre lui-même? La volupté deyoit hut a ies regards , & fes difcours mêmes étoient un préfervatif contre les tentations. A l'ombre de ces prétendus motifs de confiance , la paffion de la comtefle faifoit tous les jours de nouveaux proarès. Ses converfations particulières avec fabbé de Mauroy devinrent plus- frequentes & plus longues. Il anivoit toujours trop tard, & s'en alloit toujours trop tót. La piété, la dévotion étoient toujours dans fa bouche & fur fes lèvres: mais, foit qu'elle parlat, foit quelle écoutat, toute 1'ardeur de 1'amour etoit dans fes yeux. Le diredeur, plein au E iv  r?4 Hiftoire 5 fsn' ayoic k mèmeconrenance. li parioif toujours piété : mais elle n'é^ que dans fes difcours • & | ne ttf 'F rTO!?S *ie **» les efforts ^e faifou fadévpre pour fe faire illupour qu'elle ne vk pas le précipce qm s ouvroit fous leurs piedc E"nn leur affection mutuelle s'ac" tellei"e«5 leurs cceurs s'embraseTLZT1CT?S neP°-voientplüs le duel aiïCre- L'affidlUté W , Qlre£leur devoir aux devoirs de fa P ace,enfouffroit. Les foncPions don H etoit charge, étoient fouvent altérées P« des d.ftraclions. La dévote, de fon cote,„ etoitoecupéequede fon image, «ec laquelle arnvoit Pheure ou elle aevoitgouterleplaifirdelerevoir. L-hacnn d-enx convenok cependant avec foi-même, le directeur de? ne pi feduire fa pénken te; & la pénitenfe ae conrmuer invafiabièmenl de marcher dans la route de la vertu ou elle eroyoit être. L'abbè de Mauroy fit un vovage a Ia canip^ne, qui donna lieu l tcom- ntrlè 1 C?mmencer a foupconner Ia li'6 l!es fen"nients qu'elle éprouvoit. ü J eut a Peine qui"ée;quele.terme de  'de I'abbé de Mauroy. fon abfence lui parut reculé plus kun que celui d'une éternité. Le lommeil fit place aux inquiétudes. Mille accisdents inévitables dans les voyages poutvoient lui ravir a jamais fon cher directeur. II pouvoit trouVer quelqu'aurre iame pieufe plus propre qu'elle a faire tfructifier fes talents & fes - intentions Treligieufes 5 il pouvoit prendre le parti i de celfer de la voir & de la diriger, : pour donner tous fes foins a cette nou: veile ouaille. Car c'étoit fous ces cou1 leurs que la jaloufie réelle qui la rour> mentoit fe montroir a fes yeux. Bien . füre de ne pas le trouver, aux heures 1 ordinaires , dans les lieux ou elle étoit : accoutumée a. le voir, elle 1'y cherchoit ; pourtant. Pour fe diftraire par la piété , j elle fe rappelloit les difcours qu'il lui I avoit tenus, le ton, 1'air donr il lui avoit , parlé; & fon attention fe fixoit fur ceux qui lui avoient fait le plus d'impreifion, & avoienr allumé le feu donr elle brü; loit. Elle préparoit ce qu'elle avoit a lui apprendre; les queftions qu'elle vouloit & qu'elle croyoit devoir lui faire. Elle méditoit fur la conduite qu'elle devoit tenir, pour le rappeller anprès d'elle „ s'il vouloit la quitter ; fur ce qu'elle deviendroit, fi ce malheur lui arrivoit,, Ev  Hijloire & qu'elle ne püt Ie gagner. Enfin elfo eprouvoit tous les irfaux qui tourmentent un cceur épns pendant I'ahfence de i objet aimé. II' arrivé enfin; vole cfiez fa chère comte/Te avec les alles de 1'amour. Elle lentit, a fa vue, tous les tranfports qu cprouvent les amants qui fe rejoignent après une abfence. La dévotW pour cette fois, ne fut pas- le fuiet de leur entretien. II noula uniquement fur lescirconftancesduvoyage, fur la privation des confolations^dont la devote avoit tant de befoin. Le piaifir qui poffedoit fon ame fut B vif que la ten, drefie fe fat /our a travers le voile fous equel 1'inexpérience & la bonne foi 1 avoient mfoiie-U rflm.o ' U en ecfaappa quelques expreffions a la —« quitterent ennn, avec promefle de fe revoir prompreinent & fouvent 5 & bien réfolus de fe tenir parole. La comtelfe ne fut pas plutot feule & livree a fes propres réfaexions, qu'elle concur des foupcons fur la nature des mouvement* qu'elle venoit d'éprouver. ülle crut reconnoirre qu'ils avoient un autre principe que ia piété. Cette vertu üaliume pas ime ardeur fi vive, &ne  de 1'abbé de Mauroy. 107 donne pas a Pame des fecoufles aufii violentes a 1'occafion des démarches d'un homme qui enfin , tout habile qu'on voudra le fuppofer, peut être remplacé par un autre. Ses yeux furent enfin entièrement delfillés par un jeune homme qui vraifemblablement afpiroit a fon cceur. II la badina galamment fur les aifiduités du directeur auprès d'elle j fur le plaifir qu'elle témoignoit quand il arrivoit; fur 1'agitation de fon ame qui fe mani' feftoit fur fon tein & dans fes yeux. Elle fe défendit d'abord par la pureté de fes intentions, & par la févérité des préceptes & des confeils de fon directeur. Ne vous y fiez pas, dit-il, madame; 1'amour mondain ne prend pas pour règle i'intention de ceux qu'il veut fe foumettre. La piété même eft fouvent le prétexte qu'il emploie ,'pour s'infinuer dans un cceur qui croit que la charité 1'occupe tout entier. Un diredeur aimable par lui-même fe préfenre. Ses difeours , fa morale, fa conduite font analógues a la facon de penfer, & aux vues de l'ame pieufe qui fe foumet afa direction. On lui donne d'abord route fa confiance ; loin de fonger qu'il puiffe eoncevoir la penfée de conduire au E vj  Hijloire «eau, & qu aj n>exifte trurre C'eft un infttumeldans de Dieu qm ne peut opérer que du biemOnnevoitquelu^Llemonde" paice qud eftleleui flambeau capablê d eclairer. Enfin tout en lui femble parfait; Ion paffe infenfïblement de 1'amour de fes fennons , de fa doctrine Sc de fes confeds,d 1'amour de fa perfonne, & Wnt Ion ne vok le précipice, qUe quand on y eft engagé, fiJen 'S. voir fortir. Et fi le directeur particfpe i cette foiblelfejfi deux beauxyPeux oP e I amour qui les anime rend encore pius qui 1 avoit d'abord fait agk, pour y fubftituer Ia eendrede charneÜe, & fi i embrafemenr devient tel, de part & d autre que ni Won ^di la religion ne pmffent s'en rendre les maitres aans quels défordres ne fe précipitent pasaeuxpetfonnesquines'étoientunies que dansles vues les plus pures > , La dame vou]« ^ lacher; Mais elle fit attention que fok, que la colère la mftifiat aux yeux du donneur d'avk eHe neferoit que 1'affermir dans fon Cette converfation lui fournit ma-  de Vabbe de Mauroy. 109 tière a bien des réflexions. Elle pafla eiï revue , & confidéra d'un ceil crkique des fentiments que lui occafionnoit fon Jdire&eur, & comprir qu'il n'y avoir nen moins que de 1'innocence dans la Ipeine que lui caufoit fon éloignemenc; |dans eet emprelfement qu'elle avoit de 1 le revoir; dans eet enchantement oüfe itrouvoient tous fes fens quand elle le ];voyoit; dans ce feu qui parcouroit & ! embrafoit fes tótnes , quand elle étoit |auprès de lui; dans ce frémilTement délicieux qu'elle éprouvoir, quand par J hafard elle le toucboit. Enfin elle démêla la nature de fon attachemenr. Elle vit , en même tems., qu'elle étoit dans une telle pofition que , fi fon directeur i étoit homme a s'en prévaloir, il feroit le mattre de la faire confentir a tout ce ij qu'il voudroit. . Sa frayeur redoubla, quand, après s'ètre examinée elle-même , elle pafla a. 1'examen de la conduite de I'abbé de Mauroy. Ses affiduités, fon emprelfement , fes complaifances dans tout 'ce qui n'avoit pas un rapport direct a. la dévotion, le feu dont fes yeux s'animoient quand il jettoit un regard fur elle; les fréquents foupirs qui lui échappoient, tout lui annoncoit qu'elle étoit  1to Hijloire aimée: tout, par conféquent lui annaaJ coit qu die etoit expofée au danger le plus évident. S Cependant la haute opinion qu'elle avoit eoneue de fon directeurj opinion dont elle ne pouvoit fe détacher, Ja raffura. Elle fe rappella même qu'elle i7;:rT.!rr5etenirf-f-g^es — «.y cuions que les charmes avoient pu faire fur fon cceur. Et Ja grande confiance qu'elle étoit bien afuree qu i meritoit, lui infpira la réfo- r^ie?nfJlterlui-mêmef-f^ «at & de 1lu demander avis fur Ja conduite qu'elle devoit renir. Après Pavoir, un jour, entretenu lur les precautions qu'une perfonne de fon sexe doit prendre contre les attaques que les hommpc „; i: r V o, r , "viciic ians celle , & pour fermer Pentrée de fon cceur I 1 amour : mais , ajoura-t-elle , fi une pemtente venoit, fans s'enappercevoir, a aimer un directeur dont les confeiJs feroient une régie ffire pour Jefalur: qifoiqu elle fut bien perfuadée qu'il ne le prevaudroit pas des fentiments qu'il auroit fait nartre fans le vouloir, feroitelle obhgee de le quitter J II l'obferva,lorfqu'elle Jui fit cette queltion, remarqua dans fes yeux une  de tabhk de Mauroy. t i i ardeurmêlée d'inquiétude, qui ne laifla pas a fon amour propte lieu de douter qu'il étoit lui-même le fujet de 1'avis i„; ^UrM-M-xWir. II voulut cepen- i dant qu'elle s'expliquac clairement. ] Quel intérêt, lui dit-il, madame , prenez-vous a la queftion. que vous me |, faites ? — Faut-il que je m'explique plus i clairement, & que vous m'obligiez a faire un aveu qui ne peut que rouoir? — Ah! madame , que me faites, vous entrevoir? Pourquoi faut il que , reflentant pour la perfonne dcnt vous parlez , le feu le plus violent, je me fois laifle prévenir par fon aveu ? — Eh bien , monfteur , nous nous entendons tous les deux. Dans 1'état ou nous nous troiv vons, je vouscroisaflez honnête-homme pour me donner un bon confeil : je fuis déterminée a le fuivre, quoi qu'il m'en coute; füt-ce celui de factifier tout a ma vertu ; fallut-il me déchirer 1'ame, par le facrifice de ce que mon cceur a de plus cher. — Ouï , madame , quelque violent que foit mon amour, je vous don:;e l;avis que vous venez.d'ouvnr. Sépaions-nous, reprit-elle, & ne nous voyons plus. Séparons-nous, dit-il, & nenous voyons plus : elle le quitta brufquemenr j & ils ne fe font pas revus.  ri2 77;/7„;^ quand d ctoithvré è fes propres incli««xons; vertueux, cman/l ËS par Pexemple. ó ^ Quelqu'attention qu'il eür A cachet ^ ech ppou d Jg d X ün ne 11U v f 5to.ent Jol.es. II avoit beau sobfLT fante qui étoient obfervés, quoiqu'd crutavoupris des naefures p'oL?r ^ rober aux rémoins ioit cnaque jour, & les murmures com- • ,P°sUy P^venir le fcandale qui étoit Fetaeclater, le fupérieur général cm devoir retrrer I'abbé de Mauroy da Pofte qut. hn avoic w ^ £ du fur un coup de foudre pour u! ? V C °Iue cet affront alloit lui faire perdre^^ce qu'il 1U1 reftoix de crédir & gjelafoulede-feseréanaersallort.nnï  ie 1'abbé de Mauroy. II fit cependant réflexion que 1'exer- cice de fes talents ne lui étoit pas inUrdit, & qu'en travaillant a foutenir féclat de fa réputation, il ne perdroit : rien dans 1'efprit du public, & pourroit icontinuer de leurrer fes créanciers par les efpérances les plus flarteufes. Rendu i i lui-même, difoit-il, & n'étant plus : aftreint a confommer une partie de fon i tems pour les foins qu'exigeoit une iplace attachée a un gouvernement fpi;; rituel, il n'avoir plus d'autre occupation, Lie relle de cultiver les talents dont la ■providence 1'avoit gratifié. 11 ne peut cependant prendre fur lui .de refter comme particulier , dans une congrégation oü il avoit joué un role fi : éclatant. II la quittadonc. Mais fon tra■; veftiftemenr le jetta dans un nouvel il embarras ; il étoit, a tout moment, f obligéde donner auxcurieux des excufes f: de fon changement. Les contradictions 1 qui lui échappoient dans le récit des I motifs de ce changement, altéroient 1'eftime que 1'on avoit pour lui. II s'en j appercut, & prit le parti d'aller a Rome. 11 fe flattoit que fa réputation s'étoit j étendue jufque dans cette Capitale, & ! qu'il ne manqueroitpas d'y être pourvu I de quelque bénéfice confidérable. II n en  ri4 Kiftoire Pouvoit plus efpérer en France, 0H il adrefïe, 1 orage exeité parfes créanders :rïit3groiider=aiioitf^5 que ff U' °ter tOUCeS les refr°»rc« ne fe f ï. / . ^ullJUJes > pour qu'il "e ie fit aucun eclat, après fon déparr II comniuniquadfes créaLiers le deffe n pelle, dit-il, par une affaire très-iniPortante. II leur donna fa paroL cu" J [eroir de retour dans trois Lis c?ft! a-diteavantquefesbilletsfuffentéclius. l^cquuta même ceux qui, p0lu- C etoientaleur échéance? F ' II paya au fieur Saim-Chrifl, Üeutenantderoiaux Invalides, i QO Kvres auxfieursy^&^,^„efrèreesS' i3oohvres:enyioignanrlesautrespe' tnes dettes qu'il fo!da,le tout monra aux e i „s d n -ra ;~ -ir ""1J'Muclelieur^ö^er jouailher, 1'un d'eux, lui offnr pou preste iooo]ivres de pierredes, ^[ II confiaaia comteffe d'Ufe?, fa  de tabU de Mauroy. i f % procuration, avec un état de fes dettes &c quelques effets. 11 lui laifla en garde , une caflette qu'il ne put emEorter. L'état de fes de'ttes montoit a io-.ooo livres. 11 avoit ecnt, au Das ae 10 icet etat elauespcütes dettes , dont je ne me fouviens point. Pas un de mes créanciers ne fcait le délabrement de mes affaires, croyant, au contraire que je vais d Rome pour quelque chofe d important pour moi. Ainji il fera fort aife de les mainunir dans cette Jituation > moi leur écrivant 3 pourvuque ceux quifcavent l'état de mes affaires n'en parient point: ce quej'efpère de la bonté de Dieu , qu il nelepermettrapas. Etceux qui lefcavent de moi i me font tous l'honneur d'etre de mes amis , & ne le communiqueront point i d'autres ; ma fieur, M. le chevaher ! Befmarais, M. Tambonneau, M. Cercilly que M. Defmarais retiendra.^ II prit un valet-de-chambre a fon fervice; partit avec.un peu plus de 400 piftoles, & quatre diamants, qui valoient 8000 livres. II fondoit fa fortune fur ces diamants , dont il le promettoit de faire des préfents a propos. 11 nartit le i décembre 1691 } lur les ' cinq a fix heures du matin , dans un  carroffe qui le mena a Charenron. ff pm:1a pofte , & cominua fa route tranquillement s'arrétant pour fe repofer comme un homme qui „>a rien a craindre Il paffaparTroye,parChatillon5 & ie detourna, pour aller a Quincv ! voir la cormefle A la Riviere faoouftne, fille du fieur A Mauroy fon oncle, qui avoit ete fon tuteur. II s arrêta , pour faire uh féjour dans cette terre, oud frouva fon oncle & fa cóufine. Ce meme heur de CercUfy, .dont on a vu que 1 abbc de Mauroy craignoit Vindifcretion „e Vit pas pIutót fofl ami para qu il divulgua fon fecret. II I* rcpandufibien, que la confiance del créanciers allarmés, fe convertit en fureur. Us rendirenr plainre contre lui, comme banqueroimer frauduieux & iiigitir. II n'y avoit que trois jours qu'il étoit aQuincy quandfon oncle, qui en recut « nouvelle, la lui apprit. La honte & k fraveur Pabbatirent dabord. Après avoir joui de la réputation laplus brillante,&des refpecfts de tous es gens pieux, ü vit qu'il alloit «re en bute au mépris & i }a rifée du public. Pret a monter au faire de la We eccléfiaftique, il ne vit plus,  de I'abbé de Mauroy. 1'if \\tn lui, que 1'objet des huées de la pppulace. On a allure que, quand il fut entièrement dévoilé, le Roi dit : il a grand rort ; que ne me danandoit-il un tvtchè ? Je ne le lui aurois pas r'efufe. L'abhé de Mauroy crut d'abord que i fa pré fe nee calmeroit les efpritsj que Ij fes difcours infinuants rendroient a fes j! créanciers la confiance dont il avoit feu : les amufer autrefois , & qu'il leur per; fuaderoit même que leurs propres m: térêts exi^eoienr qu'ils appaifallent 1'e-i clat qu'une allarme mal entendue avoit (ü caufé. Ils n'avoient de refleurce, pour 1 leurs paicments, que dans la fomme 1 qu'il ne pouvoit manquer de faire. En ii la lui faifant perdre , Lis perdcient tout j eux-mêmes. f II fe meten chemin, après s'êtredem guifé , & couvrant fon ha bit ecclétiafti' que d'un habit gris, II laifle fon argent ,j & fes pierreries entre les mains de la I comtelfe de la Rivier c Dans la route , I il he mangeoit que debout , couchoit | tout habillé, fe relevoit a tout moment I pour voir , & pour écouter fi. 1'on ne ve1 noit point 1'arrêter. 11 arrivé enfin a. Paris : mais il s'ea I falloit bien qu'il trouvatles efprits dans I wue difpoüdon propte d recevoir le#  ïï8 Hifloire mipreffions qu'il s'étoit flarté de pouvoff faire. II étoit 1'objet de toutes les converfations & de tous les vaudevilles, & voici l'état oü il apprit qu'étoient fes anaires. Le fieur Jean de Vnrrnr,* o,^;. j.. plainteau heutenant criminel, Sc avoit expofe que « 1'abbé de Mauroy vint a h ft boutique , pour acheter des pier» renes; qu'il en prit pour 1000 livres » dont il fit fon billet • que trois jours »apres, il en prit pour 18000 livres » dont il en paya 9000 livres, & lui fir " cro" billetspourlefurplus, de fotte » qu'il fe trouvoit fon créancier de » 10000 livres. II a été bien furpris * ' lorlqu'fi apprit hier que I'abbé » de Mauroy dont il avoit une fi grande » opinion , qu'il n'étoit pas capable de » foupconner fa mauvaife foi, avoit été «chez beaucoup de marchands, dont » d avoitpns des marchandifes a crédit » & en avoit fait dé 1'argenr dans lé 5> deflem de s'évarW j4 r„_.:_ j_ - ^ uw juiiii ue » trance.II avoitleurréces marchands, » en leur faifant entendre qu'il a< hetoie » ces marchandifes pour des perfonnes » de qualité', qui, n'ayant- point d'ar» gent,ne vouloient pointparoitre, & » qu'il vouloit bien faire pour eux'fes  de Tobbe de Mauroy. 119 L billets. La réputation oü étoit I'abbé L ie Mauroy bannifloit la dériance du i, cceur des marchands, qui lui livroient ■ jj aveuglément leurs marchandifes. Ils u avoient été furpris , en apprenant » qu'il s'étoit evadé, qu'il étoit noyé de j^dettes,.& qu'il étoit allé i Rome. h» C'eft ce qui avoit déterminé le plaiL gnantarendrefa plainte , & a demanII» der la permiftion d'informer, de faire IL perquifition de faccufé, de faifir & '■In revendiquer les pierredes, & autres IL effets qui étoient en fa pofleiiion ». L'information fut permife. L'évafton |de I'abbé fut conftatée par les dépoftKtons. Lejugeordonna unecontinuation d'information, & qu'il fe tranfporteroit : par-tout 011 il feroit befoin, pour faire faifir & revendiquer les effets de I'abbé \de Mauroy. Cependant il le décréta de i prife de corps. Plufteurs perfonnes qui avoient eu part a fa conhance, appréhendèrent de fe voit compromifes dans fon affaire j j elles allèrent en juftice faire des déclarations de ce qu'elles fcavoient de fes pratiques fecretes. La comteife d'Ufex fi t du nomb'-e, & craignit d'être pourfuivie comme i complice de la banquerouce de fon  120 Hijloire frère. Elle alla faire une déclaration jtH diciaire contre lui. Elle le dépeignit comme un homme qui étoit allé la trouver peu de jours avant fon départ ; qui avoit héfité a lui conner fa fituation, & qui, ayant enfin vaincu fa ctainte , lui dit qu'il avoit des dettes qui 1'obligeoient a fe retirer ; il lui remit fes papiers , l'état de fes affaires & fa procuration. Elle lui repréfenta, continue-t-elle,' qu'il alloit faire une banqueroute qui le déshonoreroit. II répondit qu'il ne prérendoit pas faire banqueroute , que fon deffein étoit de payer fes créanciers: que , pendant fon abfence, on accommoderoit fes affaires; qu'il laitfoir entre les mains du fieur Defmarais , charge de les rerminer, une inflruótion qui mettoit au fait de l'état de fa fortune. Pour éloigner tout foupcon qu'elle eüt agi de comert avec lui, elle ajouta qu'ils avoient toujours été brouillés. Elle dépofa au greffe la calfette que fon frère lui avoit laiffee. On 1'ouvrit; on la trouva remplie de lettres de galanterie , de bdlers de rendez - vous criminels. 11 y en avoit oü les plaifirs amoureux qu'il avoit fait gouter A celle qui lui écrivoit j étoient décrits avec les expreifions  de I'abbé de Mauroy. 121 ■xpreffions de la paffioti la moins répervée & la plus emportée. On y trouva 1 les portraits de plufieurs dames; entr'auI tres celui d'une jeune perfonne de quaJtorze ans, qui avoit contraóté un mail tiage clandeftin avec un homme de la {•cour. La continuation d'information apprit 1 qu'il avoit féqueftré une quautité conI ildérable des effets qu'il avóit pris a i j-crédit \ &c il étoit clair que fon but 1 avoit été de les fouftraire a fes créanI ciers. Le juge fe tranfporta chez tous les ïparticuliers auxquels il feut que ces | effets avoient été confiés. Un notaire | déclara qu'il avoit une bague d'un rubis > entouré de fix brillants, qui lui avoit 1 été remife en gage, pour une fomme 1 de cincj cenr livres qu'il avoit fait prêter a. I'abbé de Mauroy ; & repréfenta 1'obli; gation dans laquelle il étoit fait menI tion de ce nantilfement. On faifit la bague. Les indications conduifirent le magiftrat chez une demoifelle ou I'abbé de Mauroy avoit fait porter fept aunes de | velours gris qu'il venoir d'acheter. Elle | u'moigna de 1'effroi a la vue du juge , i & affura qu'elle ignoroit 1'abfence de Tome VII. F  12^ "Hifloire I'abbé de Mauroy.' Elle convint quellej avoic ies ïepr aunes de velours qui avoient occafionné la defcente de laJ juftice chez elle ; mais elle foutintl qu'elle les avoit achetées de I'abbé al raifon.de neuf francs 1'annp rmVllJ les deftinoit a doubler un manteau , efpèce de. vêtement que les femmes portoient alors. On trouva , fur la fenêtre de.cettJ demoifelle, une bague d'or garnie de fix diamants. Ce bijou fut reconnu pour avoir été acheté par I'abbé de Mauroy, Elle dit qu'elle l'avoitre^uentroc d'une revendeufe , fur le pied de 400 livres qu'elle avoit payées en nipes & en argent. On voulut fcavoir qui étoit cette revendeufe ; elie répondit qu'elle ne la connoilfoit point, & qu'elle ne 1'avoit jamais yue que cette fois-Ia; qu'au furplus eiie ignoroitfi la bague appartenoit a i'abbé : elle fur faifie, On foupconna beaucoup , & non fans raifon, que cette demoifelle avoit occafiónné la plupart des dépenfes de 1'abbé de Mauroy ; & qu'elle avoit, patfes ftratagêmes , contribué a furprendre une parrie des marchands que I'abbé de \ Mauroy avoit duppés. On 1'interrogea. I Geux des créanciers qui étoient pré- I  de rabbè de Mauroy. 123 ifpnts a cette procédure , crurent trou- iiver, dans fesréponfes, non-feulement la preuve quelle etoit en commerce ticriminel avec 1'abbé; mais des indices de complicite dans la banqueroute que 1, r - • c.._ 1 ile laquais de la demoiieue rut aecrete. On entendit, 'dans 1'information , |des laquais qui avoient été commilïïonjnaires de la correfpondance amoureufe ide I'abbé de Mauroy , & des emprunts j foit d'argent, foit d'autres effers qu'il i avoit r»u faire. On entendit des cocbers I de carrofles de louage , qui avoientprêté Ijeur miniftère aux mêmes opérations. i On entendit des ouvriers; en un mot , i toutes les perfonnes que les dépofitions w fuccelfives indiquoient comme ayant . vu , f911, connu , entendu , ouï-dire , Jappercu quelque chofe eoncernant le : fait de la banqueroute, ou les circonfI tances aggravantes. On entendit des filles de joie, Sc malgré le reproche fondé fur leur rurI pitude, on eut égard a beaucoup de !. raits qu elles depolerent , aont eiies i étoient feules témoins nécelfaires, 8c I qui formoienr une chaïne avec d'autres I que 1'on tenoitd'ailleurs. Elles n'avoient i pas feulementfournia I'abbé de Mauag F ij  f 24 Hijloire des afyles commodes pour fes rendezi vous amoureux, eiles lui avoient fourni leurs fecours pour féduire,oü pour lui livrer les perfonnes qui avoient excité les defirs, Sc dont les occafions & les] ménagements extérieurs qu'il gardoit jiuuj. ±un ccar, ne nu avoient pas permis d'entreprendre la féduction lui-même. Ces mêmes filles avoient auffi coopéré a lui procurer de Pargent fur les effets qu'il prenoit a crédit chez les marchands. On voit,"par ces détails, que la débauche de eet eccléfiaftique avoit été pouffée a 1'excès , Sc que , pour fatisfaire fes defirs criminels, fon intrigue avoic mis a cöatribution tous les miniftres du libertinage. Du lieu de la retraite oü il fe tenoit \ caché a Paris, il fit tout ce qu'il étoit : poffible de faire , pour arrêter les pourfuites , & obtenir un arrangement. II ne put réuffir; les efprirs étoient trop aigns. II regarda, dans cette extrêmité, Pabbaye de la Trape comme un port dans fon naufrage. Tout le monde connoir Pauftérité de la règle établie par le i fameux abbé de Rancé 3 dans ce célèbre Wonaftère fitué au diocèfe de Séez dans is Perche. Abftineuce entière de chair4  'ie tobbe de Mauroy. I 2? Ü'ceufs , de poilfon , de beurre Sc de '• lait : des légumes cuits a 1'eau font 1'u- nique nourriture des religieux retircs \ dans cette maifon. Le fdence le plus i profond leur eft impofé pour toute leur t vie. Ils ne peuvent ouvrir la bouche , i que pour chanterles louanges de Dieu, i ou répondre trés - fuccinctement aux 5 queftions que les circonftances forcent : le fupérieur de faire. Toure la journée 1 eftemployée au travail des mains , fans jj en excepter le jardinage & le labour: Il ' n'y a de relache que pour prendre un : repas court Sc frugal, Sc chanter 1'oniLe ; au chceur, aux heures prefcrites pour ^ chaque partie du btéviaire. Au bout ' d'une journée auffi laborieufe , on va I ehercher fon repos fur un iit formé I 'd'une planche, dontladuretéeftadoucie i par une paillafle piquée pofée delfus} i &c la tête trouve, pour oreiller, un traas verfin bourré de paille. C'eft dans eet afyle que I'abbé dé I Mauroy réfolut d'aller fe dérober a ia i honte doiit il étoit couvert, Sc faire 4 pénitence de fes ctimes. Pret a partir I pour ce faint lieu , il fe laiffe engager I dans une partie de débauche, Sc va palfer 1 la journée a S.Denis, dansun cabaret, '1 avec une Hlle de joie. Ce trait achève f iij  125 Wfloire de caractérifer Ia foibleflè du carac*tère de eet infortuné. Revenu de ce nouveau trait d'ivrefle , il fentit plus que Jamais le poids de fes fautes, la néceflité d'en faire pénitence, & de fuir promptement lopprobre donc le jugement des hommes alloit infailliblement le couvrir. II avoit, de plus en plus', befoin de prendre des précautions, pour fe dérober a la pourfuite de fes créanciers , qui faifoient par-tout des perquifitions de fa perfonne. II prit un habit de laïque , monta a cheval, & fe rendit a la Trappe. L'abbé A Rancé étoit encore a la tête de ce monaftère. L'abbé de Maurav fe préfenta a lui, & le pria de 1'admettre au nombre des pénitents qui compofoient fa maifon : il lui témoigna un lincère^repentir de fes fautes , & les lui confelfa toutes. L'abbé de Rance prévit 1'éclat qu aDoient fairè les créanciers , Sd appréhencla que , s'il recevoit un homme qui fe déroboit a leurs ponrfuites, on ne le blamat. II refufa d'admettre l'abbé de Mauroy. IIefpéraqu'on n'auroirpas lesmêmes fcrupules & les mêmes cninr^s a Septfonts. Cette abbaye , fituée a fept lieues de Moulins dans le Bourbonnois, fut  de VabU de Mauroy. 117 réformée a peu prés dansle même tems quecelle delaTrappe, & la meme aufKté y fut introduite. Cette reforme eft due a l'abbé de Beaufort qui, apres avoir Eu dans les plaifirs mondains, voulut Etablir la règle de famt Benoit, avec toutes fes auftérités. Les religieux qm I étoient au nombre de quatre , & qui \i vivoient dans le déréglement le plus ieandaleux, réfiftèrent. II leur donna fon confentement, pour fe retirer dans ■ d'autres monaftères de 1'ordre, ou U , pava leurs penfions, & remplit fon mo1 naftère de moines qui fe foumirent aux 1 auftérités qu'il leur impofa. # L'abbé de Mauroy fe mir en chemm. • pour fe rendrea ce monaftère. Quand il ' fut a Orléans, il réfolut de faire le refte : duchemin a pied. 11 avoit un cheyal de prix, qu'il laifta a fon hotellene. II chargea fon hbte de le remettre i celui qui viendroitle réclamer avec un cachet dont il lui donna 1'empreinte. 11 arriva a Septfonts; & pour ne pas tomber dans 1'inconvénient que fa fincérité lui avoit attiré a la Trappe, il ne ] fe fit connoitre a. l'abbé que pour un ■ eccléfiaftique de condition qm vouloit taire pémtence. loucne uci« uu.^»«r 1 F iv  J4f Hijloire Cependant fes créanciers avoient enVoye fon fignalemenr ApJufieurs prévóts des marechauftées, avec des ordres de Ia cour pour Parrêter. .^e prevot de Bourgogne, fur W -vis qui ui furenr donnés , alk I Qnmcy,cheZkcomten-eA/;^L: On lm remn k yalife de Pabbé de f'uroy, oü étoit Pargent qu'il. avoit deftme pour fon voyag'e de Rome, & les quatre bagues dont on a parlé Le prevot d'Orléans, de fon c'óté gant eCe mftruit qu'un inconnu avoit laiflè un cheval dans une hötelierie de cette vdle, chargea 1'höte de 1'avertir lorfqu on viendroit le réckmer . L'abhi 1'ofiicial Sc le lieutenant-criminel. Pendant que la procédure alloit fon : train, l'abbé de Mauroy eut l'adrefle I d'affembler fes créanciers, auxquels il I fit ceffion & abandon de fes biens, a. (t condirion qu'ils celferoient leurs pouri) fuites. Ce contrat fut accepté par les i;, trois-quarts > c'eft-a-dire par ceux donc E y  no Hiftoire les crêances formoient une maffe qui excédoit le tiers de la totalité de la fomme due par le débiteur. Or Partiele V du rit. XI de 1'ordonnance de 1673 P'otte que : « les réfolutions pri» fes dans Paffemblée des créanciers, a » la pluralité des voix, pour le reco'u» vrement des effets, ou Pacquit des » dettes, feront exécutées par provi» fion, Sc non-obftant toutes oppofi» tions ou appellations ». L'articlè" VI ajoute que cc les voix des créanciers pré» vaudront, non par le nombre des » perfonnes; mais eu égard a ce qui » leur fera dü, s'il monte aux trois » quarts du total des dettes ». L'articlè VII ajoute encore que « en cas „J„„„„nr» vont . • -/i v ' li: _ .in...,. routes rranlactions raites par ïes accuêfés, au fujet de leurs crimes, continue ■ de les pourfuivre, quand les crimes méa:ritent peine aftliétive. Or l'abbé de Mauroy étoit dans ce cas : il étoit accufé d'une banqueroute frauduleufe, Sc de fcandale public. Quand le procés fut inftruit, 1'official prononca fa fenrence en ces termes : « Nous official, Sec. avons déclaré . » Alexis de Mauroy, prêrre, accufé, due•. i> menr atteint Sc cohvaincu d'avoir fait » des emprunts exceffifs, injuftes Sc de I » mauvaife foi, a des jouailliers Sc au» tres marchands , pour de mauvais j> ufages, Sc de s'ctre abfenté furtive» ment de nuit, ttavefti en habit étran„ ger, Sc non conforme a fon érat, chargé de dettes Sc faifi d'effets. Com,3 me auffi d'avoir entretenu familiarité 5> Sc commerce avec des perfonnes de » I'autre sèxe ; de s'être abandonné a >■> une débauche a Saint-Denis, Sc d'a» voir, par le déréglement de.fa vie , I v caufé un fcandale public. Pour répa- Fvj  *3 * Hifloirë » ledit «Se Afoaroy fera conduit inceA » famment a. la maif™ Ja c t » lous bonne Sc füre garde, pour y être » enfermé, dans les lieux de force, » pendant dix années; & Ie refte de fj » vie, garder la clöture en ladite ma'n » fon de S. Lazare : pendant lequel « tems de dix années, il jeünera tous » les mercredis & vendredis de chaque* « femaine in pane doloris & aqud an-. «gufti*; récitera, tous les jours, les » lept pfeaumes a genoux Sc tête nue :" »> demeurera, pour toujours, dépofé des te famts ordres, & incapable de pofféder » jamais aucun bénéfice féculier Sc ré» gulier : & au cas qu'il en poffédat au» cun, déclarons ledit bénéfice vacant ?' & lmpétrable. Condamnons ledit ac?• cufé a une aumóne de cent livres ap* P phcable a Pbópital-général. Et poue » la difcuffiom de fes biens Sc effets, ? renvoie pardevaht le juge compétent! *> Le condamne, en outre, en tous les* * ^Pfs du procés. Juge au prétoire « de iofhcialite de Paris, le 4 juille* Par la fentence du cfiatelet, cc U fue . fa diclaré duement afremt Sc convainca » d'avoir emprunté de différents partr- * cftliers,pliuieurs femmes de deniers,  'de Cabbè de Mauroy. i ft k Sc pris chez «Les marchands des étof- m£es d'or Sc dargent pour des hommes „ trés-confidérables.montantaiiozo? „ livres, fuivant 1'état écrit Sc drelle ne ' „ fa main, qu'il a préfenté a M. le lieuL tenant-eivil, bfs de fon interroga[ | toire du 12 aout i6~qz, Sc les avoit h toutes diffipées Sc employees a des », dépenfes non-coiivenables avune per»> fonne de fon état. Pour réparation „ de quoi, Sc autres cas réfultant du r procés, il eft condamné par corps a » payer lefdites fommes, Sc 1'ayons „ banni de la prévpté Sc vicomté de « Paris pour neuf ans , Sc condamnc „ en 100 livres d'amende envers le r. Roi, 300 livres de dommages Sc m* i » térêts envers les partie.s civiles, en *> tous les dépens du procés. Prononce „ le 16 feptembre 1692 h, ■ Le procureur du roi fe rendit appellant a minima (1). L'abbé de Mauroy interjetta appel auffi. il prétendit que, (1) Quand un accnfe eft dèckré coupable i fcar fentence, & condamné a iine peme que le procureur du roi, ou nicai, «c proportionnée au déiit, il appelle dn jugement , pour faire prononcer une peins plusgrave par le juge fupérieur. Cet appel s'apa geile appel d minima;. on fous-entend pcma^  T34 Hijloire B «u^ble-de banqueroute capitale, m a la peine infamance. Qu on examiné fa conduite, difoit-il on verra que, dès qu'il prévi ° t créanciers a\]nUnr Li' f, 1 e 1CS r„ u r •— ■ ^«er, 11 mon tra iabonnefoi & If> A~cr ■ ^ ., ; de les fatisfaire. ^ °U 11 ét°1C H eft eonftant, d'abord, qu'il n'en* «enne point ie voyage de kom , f "1 memes, dans leurs plaintes de ce voyage, qui n'a ére' qu'en profet & na point eu lieu. De1 qui Pont-IL' pu jpprendte.fi ce n'eft de lui-même" *es talents pour la prédication & pour la diredion, lui avoient infpiré laC fte decroireq^feroitunefortune dans cetfe capiralè du monde chjrfen! Le deflem étoit chimérique : cela iu deSl?tatdd??nt^,e'Crit ^ eft au b" S ^ fa W' conrie« la vé- ^Ieexpreffiondesfenrimentsde&a cceur. II prouve y . rjanciers de fon voyage de Rome qnils fle sy étoient pas oppofés, sl  de tobbe de Mauroy. avoient même promis de prendre patience jufqu'a fon retour. D'ailleurs, en remettant l'état de fes dettes a la même perfonne qu'il chargeoit de fa procuration, il fournilfoit, par cela feul, la preuve de 1'intention oü il étoit de les acquitter. S'il eüt voulu s'évader, Sc fe fouftraire aux pourfuites de fes créanciers, il n'auroit pas pris la peine de rédiger eet état, & n'auroit pas lailfé une procuration pour autorifer a. agir en fon hom. Troifièmement, avant fon départs il paya tous les bidets échus a cette époque; quelques-uns même qui ne I'étoient pas encore; & alfura fes créanciers qu'il feroir de retour avanr 1'échéance des autres. S'il eür éré un banqueroutier frauduleux, comme on 1'eit accufe, fe feroit-il delfaifi des fommes ««SI pmnlova oour faire ces paiements? ■\r0 l« snmir-il nas confervées ? La marche d'un banqueroutier frauduleux eft de fuir avec tous les enets qu 11 peue fe procurer, Sc d'en trultrer ceux qui ont eu 1'indiferétion de les lui confier ï c'eft même aux approcbes du rerme qu'il a fixé pour fon évafion , qu'on le voit multiplier les négociations Sc les emprunts, afin de groflir, autant qu'it  *3Ó Hijloirè robef POffibIe' laf°mme ^ veut «Öfl lei, au contraire, & c'eft la rfuattième oofervarion, on voit l'abbé de Afauroy refufer 1'offre que lui fit, dans letems mcme de fon départ, ie fieur le V*cher,\m de fes „ëaiïci ^ ^ preter pour 20000 livres de pierreries, fut fon fimple billet. Et, ce qu'il bien remarquer, cette offre fut faire dans lmftant même que ce prétendu banquerouner frauduleux venöit d'inftruire le fieur le Vacher de fon départ; pour Rome. * Cinquièmement. Ce créancier n'étoit pas le feulque 1'abbé de Mauroy auroit pU duper, f'il eüt eu mtenrii de le faire. Son crédit étoit alors fi bien ctabh, qud „e tenoit q«'a lui d'emprunter, la veille même de fon départ, plus de cinquante mille écus. II interpelle ici tous fes créanciers, & fomme une grande partie d'entre eux, de déclarer en leur ame &. confcience, s'il n eft pas vrai qu'ils auroient été difpoes a hu preter ce qu'ü auroit vöulu, s'il les en eut requis, Cependant, loin de chercher \ Jes «traper, d acquitte ce qui eft exieible; pouvant, en prenant fes préeatócj  de tobbe de Mauroy. ïyf quelques jours d'avance , non-feulement garder les fommes qu'il paya, mais centupler, par de nouveaux emprunts, la mafte qu'elles formoient, & 1'emporter impunément, il fe contenta, pour fon voyage êc fon fèjour a Rome,, de quatre cents piftoles, & pour quatre mille livres de pierreries, qu'il fe pro- i „ . i -i „.,.,„j 1 poioit d empioyer utuemcia , 4uaii« i 1'occalion fe prcfenreroit de faire la i fomme. Cetce conduite, on ne peut ( trop le demander, reffemble-t-elle a : celle d'un frippon, qui veut voler fesi créanciers ? Mais fuivons-le dans fon voyage J & voyons s'il a la démarche d'un co3 quin qui fuit les pourfuitcs de ceux qu'd- a volés. II conferve toujours fon habit : ecclcfiaftique, ne cache point fon nom y I fuit les grands chemins, loge dans les J hótelleries les plus connues. II ne témoigne aucune de ces ïnquiê- tudes qui accompagnent toujours ceux : qui fuient, après avoir fait un mauvais . coup. II ne précipite point fa courfe j il la fait a fon aife. 11 s'arrête , en cheI min, chez la comtefle de la Rivière fa> I coufine. II y apprend que fes créanciers ont rendu, contre lui, une plainte v I dans laqueile ils le qualifient de ban>-  Hifloire queroutier frauduleux. Pénétré de cette injuftice, d renonce a fon voyage de Rome, Sc revient i Paris , pour ft iuf, nfier, & les appaifer. j II ne peut nier que, pendant ce ft> fond voyage, on appercut en lui tous les fymptomes de Pinquiétude : il en etoit devore : & cette inquiétude même eft la preuve qu'il ne fe regardoit pas cT,!"? T, banq«eroutier frauduleux. S il 1 eur ete d auroitfui fes créanciers: »1 auroit fin la juftice qu'ils avoient armee contre lui 11 eft inquiet, fans doute du fuccès des raifons qu'il médite de mettre au jour pour fon innocence; il kaït combien il eft difficile de faire revenir les efprits prévenus, iur-rout quand la prévention eft alimenree par la malignité. Mais il fe flatte de fe mfhfer au moins aux yeux des gens raifonnables Sc de la juftice& 1 interet de fon honneur 1'emporte ' dans fon efprit, fur toutes les craintes que pouvoit lui infpirer la noirceur Sc les reflóurces de la calomnie. II arrivé tourmenté par fes agitations. Quelle fut fa furprife, quand il appric que fa propre fceur avoit abufé du dépot qu il 1U1 avoit confIé & Ja fa_ tale calfette qu'il ayoit lailTée entre des  de 1'abbé de Mauroy. 139 jrnains qu'il croyoit füres &: fidelles l avoit été oaverte pat ordre du juge, lauquel elle avoit eu 1'iniidélité de la I remettre! Voyant alors que fon honneur étoit j entiérement perdu dans le monde, fon 1. efprit fut tellement troublé , qu'il fut I quelques heures fans pouvoir faire ufa\ «re de fa raifon. Mais, au milieu de fon I défefpoir, qui le rendoit capable des : plus grands excès, il ne lui vint jamais a la penfée de jouer le role d'un banqueroutier frauduleux : il en fut toujours incapable. Quoiqu'il ne lui reftat ; plus d'autre reflource, que de retourner a Quincy reprendre fon argent Sc fes i pierreries , comme n'auroit pas manqué de faire un homme de mauvaife I foi; quelque facilité qu'il eüt a fairè I ce voyage ^ quelqu'impérieufe que font i, la loi de la nécelfité , il ne put jamais r s'y réfoudre; ranr le nom de banque'i routier lui faifoir horreur. D'après ce récir, la cour voit claire? menr, fans doure, que tout annonce ) la bonne foi de 1'accufé ; 1'avis de fon | voyage qu'il a donné a fes créanciers ; 1 la confiance qu'il a dans leurs paroles j ; la procuration qu'il lailfe avec un état ; de fes dettes ^ le refus des pierreries  *4ó Hifloire qu'on Im.offre; les paienièrits du* fan immediatement avant que de par- retour ^?ne ^°.a départ, de fon retour. Toutes ces circonftances torment autanr de preuves qui fe don«ent reciproquement de la force les rurervutres'qui Ie pei§nenc a» naturel, & ecarrent toute idéé de banqueroute frauduleufe. Cette fatale caffette, oü 1 on a cm trouver des preuves d'un commerce fcandaieux avec desperfonnes du sèxe auroit-ellefourni delfarmes contreTuL roit-il pas brule toutes ces Iettres équivoques, qui ont paru fi fufpe&es ? II n'a done forméni la penfée, ni edelfem mie projet d'une banqueroute condamnable. 1 II a'a point dérourné d'effets, il n'a point ende la made de fes dettes', pour retirer fous des noms empruntés une pame des effets qui font Ls knZ la lotterie, combien de chanfes un prépendant a-t-il contre lui ? j L'abbé de Mauroy avoit, fans doute i fous les talents extérieurs qui peuvent . conduire aux premières dignités èccleifiaftiques. Mais avoit-il exclufivement jces talents? Et, parmi fes rivaux, n'y En avoit-il donc point qui puflent être , ia jufte titre, fes concurrents ? Combien id'autres, auxquels, toutes chofes_ éga^ . les, la préférence étoit due a jufte titre ? Combien d'autres qui, avec des talents moins éclatants, mais plus folides , mé;ritoient d'être mis en place ? Combien ;:d'autres motifs, finon d'exclufion , du rmoins d'éloignement ne pourroit-on :pas mettre fous les yeux de l'abbé de [Mauroy , pour lui prouver qu'il ne pouI Voit ignorer que les efpérances fur lefG iij  t?o Wiftoire quelles il fondoit le rembourfement de les créanciers, dépendoient du plus grand des hafards ? Quelque langage qu'on ait prêté au Koiün nen p0UV01t faire c{lan 1 d idee a ce monarque, ou du moins en retarder i'exécution. L'efpérance du marchand, au contraire, qm prend i crédit dans 1'efpérance que fon gain le mettra a portee I de reftituer , eft fondée fur un ufaoe ordinaire; & eet ufage eft fondé luirneme en raifon. Pour entrerdans Pidég de labbe de Mauroy, il faut fuppofer que ce marchand a des vues pures comme 1'accufé prétend qu'étoient les fiennes Ainfi il eft certain que le marchand fera un bon ufage de ce qu'il a emprunté : non-feulement il ne le difftpera pas 5 mais il nevendra pas a perte • il trahiroit la confiance de celui qui lui a- prete; mais il ne lachera pas Ia main , lans voir un pront quelconque, pour Ion compte. Alors il eft en état de faire Jonneur d la négociation : il reftitue i Ion bienfaiteur le prix dont ils étoient convenus, & fe voit, par les profits qui lui reftent, en état de continuer fon eommerce avec honneur. S'il a le maiheur de nepas trouver de profit a faire;  de l'abbé de Mauroy. t V ouilvenda pm courant, ou ü garde k ïarcnandife. Dans 1'un & Hutre cas, repaxconvenu^udeteftuuerlesrnar- chanclifes en nature. Mats, quand l'abbé ie Mauroy z^' prunté des fomme. immenfes que: lui Lftoit-il qui put dédommager fes pie turs , Sc Lr procuret e recouvremen de leurs créances ? L'énormite de fes emprunts , 1'ufage auxquels il les delnnok & qu'il en faifoit, rapprocbcs k bouche, décèlent la perverfite de fes lucêntions , & fa mauvaiie tol , * le conftituent banqueroutier rrauui»™*. C'eft pendant les trois ou quatre années q/ila été curé des Invalides qu'il a fait tous ces emprunts. A quel u?age les a-t-il employés r ils lui ont fervi a féduire des femmes honnetes-, a entretenir des concubines , & a payer des filles de joie.Etoit-ce par cette voie au'il efpéroit parvemr au faire de la tortune eccléfiaftique ? H ne pouvoir ignorer que, fous le règne d'un pnnce aufli pleuxquel'étoitLouisXlV,k conduite qu'il tenoit étoit un éloignement eer%* de route place, ecclefiaftume U n'étoit donc rien moins qu affute de le f G iv  ï\1 Hijloire voir jamais en étatd aeauirr.r les états ou'il j e tQ1 da»s fans ce^ën & Ö dans ea° i1,UnretateCi;it de fa main , pJusquTnV °nn°ir l8oo°W* F »s qu il n avoiIe aujourd'hui. L abbé afe Maurov A.V /" ■ ïia,^ ) 1/ -t""roJ/ fait ioinser biPrt ■ -Jl-ce fur «ne chimère que Poa  de l'abbé de Mauroy. m , , • c Aps reftitutions aufli conti-. Eg-qu'il échouat dans fes projets de 'f°XvintaPads,quandilfcutqu'ils j .voient-daté, c'eft qu'il Lues & de fes promeffes « aP^_ roient, & qu'il P0^01""^^' I dre tranquillement la route de Rome 1 Mais^equiprouvefanstépl^ I étoit banqueroutier frauduleux eft ' „ Ar fon propre aveu, U etoit, i Tand 1 p"titP, nanti de pierrenes. HuUonfdes effets appartenanta ie, vert Or ce genre de fraude eft un cie* laScfères q°u'indique pour cormoitreunbanqueioutie trau duleux. «« Déclarons, dit 1 art. io cl» j ut! XI de lordonnance de^,,  -54 mjlolré * deckro^»queroutiers frauduleux ^ «ceux qui aurontdiverti leun effiS!' V'y a-t-il un diverrüTement d'effets plus marqué^ que quand un débiteur ^P^^eclufen.pay,£Cran^| Na-t-d pas voulu les fouftraire dfe de leJar quds avoient fait ? Quand il apnslepartiderevenirpourleltrl rapportes pour les leur reftituer ? Ne les ' a-t-il pas lailfés en dépöt a Quincv afin Mais, dit-on, il a ordonné qu'on U Poffeffion. £ncore ne reMcba-t-il ronElVIn m0t' dePuis Pikeurs années > tous les jours de la vie de 1'abbé 1' ^étoientmarquéspailelud^ qud pratiquoit, & nar A l  de Valbe de Mauroy. p$ «ue fous celle d'un banqueroutier fraiv Leux . qui eft d'autant plus coupable , que les fornmes qu'il empruntott étoient Jï'aliment de fes débauches ? Quant a 1'abandonnement dont il ie » Irévaut, c'eft un abandonnement force ; fine conuent même pas la quittance ; de ceux qui 1'ont accepte. \ Enfin 1'affaire fut roife fur le bureau. J Les conclufions des geus du roi ten- doient a un banmiiement perPe.utl. ~ veut des voix a la mort eet avis étoit conforme auxloix. Unedit donne par Heniu le Grand en 1609 , potte qu'il fera extraordinairement procédé contre les banqueroutiers frauduleuxJ * cüe la fraude étant prouvée y ds Jeront exemplairement punis de mort , comme yoleurs & affronteurs publics. L ordonnance de 1673, tït. 1 x, en.it , pone que les banqueroutiers frauduleux feront pourfuivis extraordinairement, & punis de mort. . , K « L'arrêt tendu au rapport de M. '3) Portaii de Chatou, le 17 oftc-bre \6? 3 > „ mit la fentence du chitelet au neant, „ & pour les cas réfultant du proces, 1 ab„ bé de Mauroy fut condamné a etre me„ né & conduit aux galères, pour y etre „ détenu a fervir le Roi comme forcat, Gvj  HLRoire " le tenif & efPace de neufans, &g » pajrer les fommgs par lui dues a fes f*n«ers , fuivant l'état écrit &nW « de fa mam, qu'il apréfenté, lors de * ion wterrogacoire du 21 aout i £9 z.., * en 300 hvres de dommages & mté" 'm en ve« les fieurs de Var enne frères »&enrous les dépens du procés, qui • " ^roncP^s par préférence fur les de-? ™°rs ,c°mptants & autres biens & * effets dudit- de Mauroy; permis a fes» créanciers dele faire enfermer, après »> ledit tems de neuf années de gakW « expire , jrifqu'i Paftuel paiement de- S^t-^^^^^i'^^bncernë ia diftnbution des effets trouvés en Ia poffeffion de 1'abbé de'Mturoy, entre les differents créanciers, fuivant les circonfrances dans lefquelles ils fe trouvoient. VoiU eet Homme, qui avoir foni' pendant plufieurs années , de la confïderation & : de 1'admiration du public au comble de-Pinfamie.- " II ne. fubit cependant pas la rigueur de la condamnanon prónoncée contre fa ËfïS Labbé de SePifo™> s'é«nt lincerempm- v 1, 3, , , ----- «....««.ug 1 aDDe . Ur°y» **m te* protécrions qu'il avoit en eour.d celles dela familie de  W de l'abbé de Mauroy. 1*7 fetrnfortuné-, fc l'o*obrinc des lettret Eu Roi, qui commuèrent la peine pioEncée contre lui, en une penitence CluelledansrabbayedeSeptfonts. KI rendit, recommencafion noviciat ; piJioncafesvcruxs & ? a ^/«T ILe-temsdaiis 1'exercice continuel des Sfications lesplus auftères. La vre J qu'il Y mena fut en un mot auffi edl1 T J cue celle qu'il avoit tenue dans; éon ^ 1'abbaye de Septfonts, l « U feroit a fouhaiter que le public 4 Püt être témoin de la penitence de , défordres. Le fouvemt du fcandale , s'il en refteencoredans>.les:^in«V * s'év'anouiroit bientèt ala vue de eet lluftrepénitent, en faveur duquel c£ peur dire que la grace fe trouvem, ■ L tenantavecfurabondance oulepeche [ t ouvoitauttefois abondan,ment. 3 ,LePèreabbérafaitdWier,ou. 3,célérierdudedans. Cet' emploi qui, avant lui', étoit partagé entre trois ou ; q^ étengieux, U leemten lui; IS &parconféquentles peines» „L'ont-eUes fi fori changc ,. qu elles  *J,8 Hijloire wi0/lt«ndurnéconiloirabIe.Car enfin' :^^eaansuneJel£e^ Piété ii ll^T Conf«encePde - tnvau'x ^ ^ ^ nouveau* J?eS/?lnssétendentatousieS" » beloins desfrères & il „ U x ^de la r,,;/: j ' 7% a la dll'e<2ion de la ci ifine , du réfe&oire , du vef " tiaire. 'iBc • , ' uu vei~ » de I, " . du ardinage, » oe la boulano-enp ^a L r n *. » II a r a fommeilene. 11 a I mfpe&on fur tous les ouvra^es " tous> smvriers, foit étranif/ » fendonieftiques. II leur prefcr feS » tache: il leur Aiar:u > CXLlli:ieur » tiom- rl d"™e leurs occupa- lui-tout, exercerunefévère economie » nu-touteladépenfedelamaifon i » en menagerie revenu avec une exaf » titude furprenanrf. l . ~ r^uanr naturel I'avoit tou " "x*hé vers la profufon &t «> prodigaJïté ». r ia  'de Tabbede Mauroy. bua a l'abbé de Mauroy. Les circonftatices & le nom dececélèbre penitent lui donnèrent une grande vogue. Mais, comme ce livre étoit au-deifous du mediocre, fonfuccès fut éphémère; & 1'on decouvrit qu'il étoit de ce fameux le hoble , dont j'ai tant parlé a 1'occafion de la helle Epicïere. J'ai promis de dire un mot du dêüt commun , & du cas privilégié. _ Le délit commun eft celui dont 1 animadverfion eft confiée aux juges d'eghle, & qui ne mérite pas plus grande peine , que celles que les tribunaux ecclcfiaftiques peuvent infiiger; en un mot, qui, fuivant 1'exprelfion des auteurs, mentor am non egreditur ecclefiaftic* vmdtcl*. Le cas privilégié 3 au contraire , eft mn délit grave qui, outre les peines canoniques, mérite encore des peines afHiaives, & telles que le juge d eglile ne peut les prononcer. Ainfi, 11 femble, d'apres cette diftinftion , & la dénomination appliquee achacunde ces deux délits , que c eft le droit commun qui «nd tous les eccléfiaftiquesfoumis l la jurifdi£tion des officiaux\ & que c'eft par un privilege que Pégüfe a bien vpulu conceder aiyR  fP Üiftoire giayes, faire le procés aux clers. u y a loog-tems que oos auteurs ft ftot pla,„ts de ees Ixpreffious, & „ut mis, pour les acres exterieurs „ I 1 mots> «lue les mots ne touchent ^«.-encecas, il'eflènce deschofes reci fit P k Pei'ie «'««prendre de recTrifier ces expreffions,. Voia Ja règle qu'il faut fui Ko Si T0UtnCnme f"/ec i 1'aninradverhondumrn^èrep-ublic^ourraifon^netlé3anCe P^^^Vcotnmispar délir 3 qUe' W f?auroit Pafler pSur güie ne P$auroient condamner a despei--  de tobbe de Mauroy. lot fces corporelles & affli&ives : autremenC les crimes les plus graves relreroient ^punis^uaumoinslafoaeteoumrfeeneferoit pas vengce : ce qttjii n eft E poffibled'admettre, ^s fWe vio. ïence a la raifon & au bon ordre. II eft Jdonc certam que rout délit qui meme ïpeine affbctrve , eft cas pnvU^c, & ne Jpeut, par conféquent, etre juge par e Jiuge drégbfe feul. Mais il faut que le Jcrfme mérite pein* artuclive : car il eft des crimes qui ne font mis qu au rang i des délits commuus , quoiqu ds inte'i tfir,„r pnoueloneforte, 1'ordrepuDlic: I iKultqu'ils nemérkent que des peines ï diuntur ecclefiaftic* vmdiclt; Ainfi le juge d'égUfe connoit feul du I délft ommuf,Lejugeféculiereonnoit I du cas privilégié, conjomtementavecle f I'S. & le iu»e féculiet connoit I ïuoedesme, oc 10 jlib>- _ feul de certains crimes qui degradent' 'eccléuaftrque IpfofaSo comme le vol j & le privent du droit d'être revendique test le i'u°e d'églife' * Le 0e féculier connoit, conjomte-' , inent avec le juge d'églife du cas Pn- vilégié; paree qu'un ecclefiaftique, en comUSrt cette efpèce de crime ,,ne peut pécher, par rapport a-la fociete ci ■  *?* Üifioiré Yile j fans pécher, en même tems, par «pportafon état} & ne peut, fcquent.encourir des peines capitaie gns eoconnr des peines canonioS C eft pourquoi, on a établi que leluï d eghfe eXercer0)c fes droits fur le c ere Arr /n j p . 3 exerceroit les fiens. A t. 3? de J. OTdonnance de Moulins damoisdefévrier IJtfA Art. "fd* ÜïttAP** Att. 38 de6 1678. ># U mois de fén'ter Qaand un eccléfiaftique s eft rendu co-unab e d'n-n £,^„,„ j/t? y- ACJlcm ■ - "-""^c uent commun le Fgedeghfe en connoit privativemem formalkésdePc^:,r^mntle? -ïi a """«-^.xvAms, quand 1 7 a, en même tems, cas pxivilégS dom les deux juges doivent connoSe • alorsla procédure fe fait par les deux juges con/ointemenr. Quand un Keutenant-crimmelacommence d'inftniire le procés d'un e déJfttque ^iï lWéföu lepronioteur demande le renvoi par devand'offic a Pourraifon du délitcommun 3 le S «vis al official, afin qu'il fe tranfporte  de l'ahbé de Mauroy. 163 furies lieux,n'effet.dmftranetepro^ cès s'il le iuee 3 propos, pour le bien de jui/let 1684. . , , Si 1 official, furl'avis qm lm a etedonné , déclare vouloir proceder en Kofficialité, hukaine après cette decia.ration, les accufés doivent etre transtcrés dans les pnfons de 1'officiahte. U lieutenant-cnminel , ou autre officier du fièee doit pareiliement s'y tranlporter dans la hmtaine, quand meme cette officialité feroit hors de fon telfort, la loi lui attribuant, a eet eftet, route couu iurifdicrion & connoiffance , fans qu Ü 'r • _t-ii_4t Aa rlpmanJer temtoire , nl 101c uu»^ . , fC-pr. de prendre aucun pareaus des officiers des lieux. Dédaraüon de 11,84. Cette loi déclare , en meme tems , que fi le lieutenant-criminel, ou autre officier du fiège, ne fe tranfporte pas dansla huitaine, aufiège de 1 offiaalitc ou 1'accufé aété rransfére, le proces ie» inftruit, conjointemenr avec 1 otticial, par le juge dans le territoire duquelie Luve 1'officialité. Déclarauonde 1684Tout ce que le juge féculier feroit fans 1'official, depuis le renvor requis i ©u la revendication faire par le pro-  1 * id iaterrogaclt; ■  de Pahhé de Mauroy. 16^ gstécolements, &c. Le juge féculies peur cependant requérir que I'autre mi terpelie les accufés fur tels faits qu'il I jogera néceflaires , pendant toute laI procédure ; & fi le juge d'éghfe refufe de faire ces interpellations, I'autre les i peut faire, de fon chef: & le tout doie 1 être rédigé par les deux grefliers. De\ claratïon du 4 février 171 1. L'official, lorfque l'mftruéhon eft achevée, doit prononcer fon jugemenc avant le juge royal : autrement fa fentence pourroit être abfolument ïüufoire, & produire même des effets finsmliers. Il pourroit fe faire qu'il : condamnat au féminaire, ou a dire certaines ptières , un homme que le juge laïc auroit fait pendre pour le ïnême délit. Quand i'cfficial a rendu fa fentence définitive, 1'accufé eft transféré dans les prifons du jug* féculier, qui achève feul fa procédure i & fi , alors_, il croit devoir ordonner une continuation d'iuformarion, il le peut fans appeller 1'official qui, par fa fentence, a mis hn a fon miniftère. Je ne m'étendrai pas davantage iur cette matière, fur laquelle on pour-  t€6 Htfloire de l'abbé de Mauroy «p«. faire un ample traité, & M feroit ici déplacé. J'ai feulement voulu donner a ceux de mes kéteurs ani ne font pas au fait de ces matières, Ja raifon pour Iaquelle l'abbé de Mauroy & le pneur de Mizeray, dans X affaire de ia Pivardilre 3 ont efuiyé Aiux jugements pour le meme cas,  FILLE QUI RÉCLAME UN ENFANT. CONTRE UNE FEMME. C'eft ei Af. Gayot de Pitaval que je dois U fonds de mon ouyrage. IL eft jufte que je laiffe fub'lijler un monument de Jes & mie mes lecleurs ap~ prennent, par lui-meme , Le cas qu'il en faifoit. Je vas tranjcrire ici un mémoire de ja facon, & fefpèce de préface quil "avoit fait imprimer, d la tete de ce mémoire , dans le cinquieme tome de fes Caufes célèbres. Ony verra une partie de ja vie, ce qu étoit fon père 3 la juftice quil fe rendoit a Lui-même, & fon talent a faire des éloges e% vers.  Ï68 Fille qui reclame un enfant* C efl M. Gayot qui va parler. JXa cine a demande au public un pe| Ia première de fes pièces de théarre. J'ai droit de oemander ia même graee pouri cefaclum, qm eft ie premier.que faS fan au barreau. Mais je ne erois pas que: trein a U crifique. Je ne me flatteraii Pas auffi de 'arrAt^,- t;,„„ i t , . —iducneinent, u je n avois pas cru que ce mémoire püc foutenn les regards du public, je ne lui cn aurois pas fait préfent. II eut un fuccès prodigieux, nonfeLdementaLyon,0i\ilp&arut;maisdgris , ou il fut reimprimé. La fingulanre de Ia caufe excita la curiofité : mais J ole dire qu'elle auroit été éteinte fi je navois pas traité mon fujet avec quelque art. Comme ce mémoire a donné lieu i mon entree dans ie barreau, j'ai cru que ,e devois faire part au public d'une hiftoire que jen fis dans une lettre a un de mes amis. On y trouvera répandu un certain har,,,-,-.,,^ • _ 1 i • i 7~- °o •» fL11 P0«rra Dien preferver de 1'ennui. * Vous ™ul$z que je vous dife la " caufe  Contre une femme. 169 , caufe de mon entree dans le barreau. i II faut vous fatisfaire: mais il faut re- > prendre un peu plus baut le lil de . ma narration. Las de ne gagner a la > guerre que des lauriers ftériles, je » pris congé brufquemenc du Dieu > Mars, Sc je réfolus de faire connoifi fapce avec un dieu fort doux & fort • humain ; c'eft le dieu de 1'hymen, > qui tend les bras a tout le monde. » Je palfai par le temple de 1'amour, , avant que de palfer dans fon temple: » c'eft une voie que 1'on ne prend plus » maintenant. Clélie fut le préfent que »le dieu d'hymen me fit; Clélie que j j'ai tant célébrée dans mes ouvras ges (1) : Clélie qui avoit toutes les » qualités pour faire, d'un époux, Pa1 mant le plus fidele. Auili 1'époux, > dans moi, a toujours obéi a 1'amanr, » Sc n'en a jamais fecoué 1'aimable I» joug. Mais Pamour du monde le plus .» parfait ne fournit pas aux befoins de 13 la vie. Que de befoins fe multiplièI» rent, pour fe joindre aux intens ! I» ceux de Clélie _, & ceux des fruits de |> mon hymen. Mon pattimoine étoit f1 (1) Je parlerai des ouvrages de M. Gayot ïWe Pitaval^ après avoir copié cette lettre<  170 Fille qui reclame un enfant » fort écorné. Le tréfor des agréments » de Clélie étoit ineftimable : mais le » tréfor de fes richeflès étoit fort petit, j) Comment faire ? M'embarquer dans 3» le commerce ? Adieu mes titres da 3i noblelfe. D'ailleurs il faut, dit-on, » avoir 1'art de tromper; il faut poffé3» der le génie de 1'arithmétique; il faut H fcavoir bien allier Van. avec I'autre. s> Toucher un aftre du bout du doigt, 3> cela feroit plus aifé pour moi, que m de faire cette alliance. Entrpns dans ai la finance ; mais que les voies en font » fcabreufes! D'ailleurs, fans patrou, 3J comment pouvoir voyager dans ce. 35 pays ? Dés le premier gite, on vous .n en exile ; & de plus, il faut avoir un 3> cceur honnêtement dur j je Pai natu33 rellemenr tendre. Erigeons-nous en s? avocat. La noblede de cette profefsj lion fympatifera bien avec celle de ma nailTance. Comme auteur, poëte,. 33 ou verfificateur, fi 1'on veut, j'ai une s> provifion d'amour-propre : les avo53 cats, dit-on, ont bien la leur. Ebs) bien, ce fera doublé provifion pour ss une. 33 Mais il faut avoir une bibliothè* que dans la tête; & j'ai de 1'ignorance i fond. II faut fcavoir droit éciit,'  contre une femme, 171 s, droit coutumier, les ordonnances, le „ grec j voire même un tantinet d'héjj breu, afin de connoirre la loi divine. I C'eft ce qu'il faut polféder pardelfus I le marché. 11 y a un cerrain grimoire, „ oü il faut être grec ; c'eft la forman lité : celui qui la fcait donneroir de » la tablature au diable. Cette forma» lité eft la broderie de la fcience de » 1'avocat; fans quoi elle n'a aucun re| lief. Voila la magie noire Sc blanche n qu'il faur fcavoir. 99 Vous allez croire que d'abord je 39 fus découragé : vous vous trompez. 93 Voici comme je raifonnai. Pour faire 33 un fcavant, dis-je, il faut des yeux >3 & de la mémoire. Ma vue Sc ma mé33 moiré font faires expres pour cela. Je 33 fijais bien qu'il faur encore une por33 tion délicate de jugement que 1'on » appelle le difcernemenr : mais fi la 33 mienne eft petite, en tout cas, j'irai 33 a Pemprunt. 33 Voici comme je préludai. Heureun femenr dans le barreau de ma pro33 vince ( Lyon ) oü j'entrai d'abord, jj fans aucun degré , on agitoit une 33 queftion fingulière. Un enfant étoit 13 réclamé par deux mères. Les avocats » qui avoient écrit pout Sc contre, Hij  172 Fille qui reclame #g enfant » avoient cité force latin,' qui effacpi? « le frangois dans leurs ouvrages ; & » pms, cette matière fi fufceptfble' de v traits, ils s'y étoient refufés; ou ces » traits s'étoient refufés a eux: je ne dé» ciderai point Iequel des deux. Je trou» vai, dans mon chemin l'Une des par» ties : c'étoit une femme mariée, qm » difputoitl'enfantaune fille. Comme » elle n'entendoif pas le latinelle ne ;3 voyoit pas comment on prouyoit que jj 1'enfanr lui appartenoit: elle crai gois. » Je travaillai pour elle; mon ouv vrage lui plut : elle ne douta plus, s> alors de fa maternité. Cette opinion w j.ul i_uni.agieuie a tous les lecreurs : le » procureur du Roi fe déclara pour elle, » Mon coup d'eifai fut fi heureux, que s> le public le demanda avec empreflef» menr. » Avqcatforcé par la forrune, je refr femblai, en cela, au médecin malgr4 s> lui. J'avois, comme lui, beaucoup d'i* p gnorance : j'éprouvai fon fort. On fut 8 endiable a, rne croire fiabiie homme ï  contre une femme. iyj} on me porta des procés de tous cótés. i, Voici qui commence a: devenir férieux, me dis-je a moi-mêrne: je fuis; 3, fur un grand théatre : je n'ai pas eri» core appris mon röle; il faut pourtant 3, que je jdue. Ce parterre, qui ma „ applaudl par avance, eft alfez malin, 3, pour rire de ma culbute : j'entens déja 3, raifonner fes frfflets ëpouvantables. „ Mais c'eft dans les grands dangers que „ le coufagé éclate. Parmi le nombré ,, des queftions qu'on m'öffroit, je me s, rabattis fut .celles qui demandoient 3, plus d'éloquence, que de fcavoir j & , 33 quoique la mienne he foit pas fu» blime , telle qu'elle eft, elle plüt att i, public prévenu. C'eft ainfi que je fis 35 face d'abord. Pendant ce tems-la, 93 j'étudiois le droit civil & le dtoit „ frangois , commè un homme qui eft 33 bien prefle. Me voila dans lé code, „ dans lé digefte, daris les ordonnances 33 jufqu'au col. Je maniois 3c renianiois 33 le texte j je confultois des barbous : i, enfin me voila avocat. La fortune si aveugle, ou clairvoyahte, comme il 93 vous plaira Pappellër, me fit gagnef 33 des procés : les juges fe trompèrent » peut-étre. Quoi qu'il en foit, ces fuc33 cès enflè'tent mon courage, & augHiij  174 FilU qm réclame un enfant » mentèrent laconfiance qu'on avoit en » moi. On croyoit que j'avois éclairé » [es juges, & que, fans mon fkm»' beau, ils auroient donné du nez en f terre. Je ne fcavois pas trop fouvent « comment j'avois pu leur faire voir " troubIe-7°" ™up vaille; je voguois - en grande eau, & j'étois fi crédule » que, quoique demi-fcavant, je me " croyois profond. Quand on vouloit ? pourtant un peu fonder ma profon» deur crainre qu'on ne trouwt le tuf; » alte-la, difois-je £ celui qui étoit trop t> cuneux j je le remettois a une autre * fois. Je n'avois pourtant point en- * ^ore,fe Regres. L'épée que je portois » fembloit dire que j'étois prêt a dé"fendre mon clienr par les armes, " ain» que par Ia plume. •»vEnfin 11 a fallu prendre des deetés. » Des que je fus gradué, il ne fut plus » permis de douter de mon fcavoir. V Que pouvoit oppofer un incredule | « un parchemin authentique, fcellé du * lceau de 1'univerfité, qui faifoit foi » que j'avois été métamorphofé tout >> d'un coup en habile homme ? » Ce que je fcais, c'eft que mes hi- • » mieres croilfent, & que, fi j'enfcais  contre une femme. 175 5,arTezpouréblomr,j'efpère en fcavoir „ bientot affez pour echater». M. G«y« i Pi«v«/vapres avo fon propre cloge, paffe i celui de mérite d'ëtre recueilh. « Combien de ^es,dit-il,oudifttaits,ouvamV5n par le fommeil, jugent enfuue :ayFrécipitadon!3e ne fuis.pas un „auteur affez grave, pour faire, des „ lecons aux magiftrats : ie me conteu USaide leur ^ropofa e fieur ^ ayot „de la Rejujfe pour modele. Ce ju e H célèke fuivoit, dans fes jugements , k rèdes les plus pures de fopi» „AffisL letnbunal,il étoit toujours s fur fes gardes pour ne pas fe ladler it Tyrann fé par le fommeil tl s y l«ra, 4 daLuneaïdience^&ce futlunique „ fois de fa vie qu'il accoi:da, au pa ais, „ un pareilavantage aMotpbee Quand „ ilfut aux opimons ilnoubha nen, „pourréparer cette foute. Le prefident M en dit.le précis. Le fieur Gayot Z donna enfuite fa voix. Les opimons „ ftarint fort balancées. Celui qm gagna „eutl'avannge de deux vo«. Le fieur „ 6^apr&tóiugeme^,&npqte^ .„ qu;U pouvoir avoir mal juge. U ie tit  *7« Fille 1ui réclame Un mfant S?' PKS avoir ™™«é I» pró. yjjiLience, de ia liberté de nr*« foor e»v«n.r7r / am,-Le  contre une femme. 177 UU ne lui avoit pas permis d'entendre? C'eft ia conduite que j-'ai vu temr pinfieurs fois par des magiftrats qui, comme lui, avoient fuccombé au befom de ridormir. Se faire inftruire par un des opiEants, dans un moment ou chacun des I Rages a pris fon parti, c'eft etre allure de voir la caufe que fous le point de vue uqui a frappé celui que 1'on conlulte , ÖC B'être, par conféquent, emporte par Ion ■: flvis, fans que 1'on puiffe fe preferver de Herrem, s'il y a donné. Une feule cir, conftance échappée, ou mal vue , peut , préjudicier k la vérité, & faire tnom, pher 1'iniuftice. H eft donc indifpenfable , que chaque opinant puiffe difcuter fon , avis, & combattre celui des autres par. - fes propres eonnoiffances. Au refte, voici 1'épitaphe que 1 en- - tboufiafme de M. Gayot de Pitaval pour la mémoire de fon père, lui a mL- I pirée. Ci-gift le Roi des gens de bien. Que de vertus dans fa courfe il affemble l i Le fage féculier, & le fage chrétien Par un accord divin étoient unis enfembte; Le ciel verfa fur lui la plus pure éqüité. B fjutint ï'innocsiice, 6C rcprima le' vice, Hy  A 78 Filh qui réclame un enfant -Ce rayon échappi du fóleii de juftice Retourne au fein de la Divinité. Juges, voila votre modèle. Confultez-le fur fon tombeau Et fi jugements vous fervenf d£flan;bea Vous ferez du grand jftge une image fidéle. ■ Quelqu'éminentes que puflent être les vertus de M. Gayot nère l I> « enge a fa gloire d'autres monument* ^e cette e>taphe, il eft fort douteux qu elle paffe i la poftérité. Pour terminer ce qu'il y a 4 dire cemant M. ^ Je £c°« 11 pnt dabord le petit collet, cm'*! quina, pour joindre deux frère S avou au fervice. II quitta les arm s ponr fe faire avocat en 171, iJT ' -onquaranteans,&m^t'e! apres avotr éprouvé, dit-on, plugde quarante attaques d'apoplexie Ses prin cipaux ouvrages font \llation des P°gnesdel7ll & l? L'art d'orner '« 1 2- C eft dans ce recueil princioal*.  contre une femme. 17 ij U „om de Damon/Sc de fa femme, fous le nom de Clélie. Enfin les Caujes célèbres, en 10 volumes in-ii. lous «es ouvrages ont été apprecies par les critiques , qui ne 1'ont pas eparge. II feut avouerquefongout&festalentsetojenc médiocres. Mais ce qui a le plus contnbué i le faire ttaiter fans menagement, c'eft qu'il fe croyoit le plus ingemeux ; des écrivains , Sc ne s'en cachoit.pas. H i s'étoit meme érigé en juge lur le l arnalTe, Sc ctitiquoit hardiment les écrivains les plus célèbres :& qnelle errtique! On en a vu des traits dans 1 affaire de le Brun, au fujet de Barbier d'Jucour. Voici Ie mémoire donr »ï fait tant d'éloges,& qui 1'introduifit au barreau. - 7P..J ia ;„,,ir«.fnmr. II faut faire lx ïuiec eu cji. "hv-—, attention que la vilk de Lyon eft le lieu de la fcène. QUESTION D'ÉTAT. Fille rédamée par deux meres. La Providence, qui perroit que deux femmes fe difputaftent un meme enfant, pour exercer la fagefte de Salo«non, avant mis celle des magiftrats de Hvj  iieu de les mettre en parallèle avec li P^&ge ^ tous les hommes. Iïxf! foire de ce procés, qm eft foumis i leus a les aider dan» Ia recherche de Ia Jé! «te quon a cru devoir rappeller mfqualamoindrecirconftanc? J J^card*™C°'*u> de Pioreffion.,a a défabufiIe bfi« de la mauv-aile opinion quïlYemble avoir prife de la vertu dl celles qui exercent ce métier. On diroit que eet 3 F-fedion eft. fatale UaJ&gg t :xaronytrouvedefréquentsexem: f'5, /ragilné du sèxe. 6*/I pnrdeDecoufu fuivit letorrencLe fieur «he de Dqon, arr,va, en peu de tems chemm qui veonduifoit étoit fort batI ■*J °U foit Par,ce q«'ü étoit guidé par m a™our- violent, qui leveöles g-ndsobftacle, II trUpha,dir i^ de W.m de cette blancWeufe, ou des apparences de fa vertu ? Elle deIv,^fe- ^ ^uvrageduW ö'-ie de jalomoir auroit éehoué fe'il avoit vonla déddetde pareilles que^  contre une femme. iBï dons. Elle fut abandonnée de ce jeune homme. Prelfée des douleurs de Paocouchemenc r elle alla dans la me Mulet chez le fieur Chambrr, ou elle ie foulagea du fardeau dont 1'amour 1'a- voit chargée, . , La fage-femme qm fut appellee, oc nul 1'aicfe, fut la Dupré. C'eft une de ces confidentes des foibleifes du sexe, i qui font auffi corrompues, que les eoitpables qu'elles viennent délivrer dit Ai UIL L*W - . La Découfu ayant accouche, gemot* gna qu'elle ne vouloit pas qu'on exposat r_„ ^£ü„; réfnlut. on ne peut en J.UU cmaiii. ^ * douter, de s'en fervir comme d un gage de 1'amour, pour rappeller le hem Qritnae. La fage-femme, qui etoit lort intérelfée , corapta qu'elle pourroit exioer de la mère & du père pretendu, une penfion confidérable, en fappofant rui'elle élevoit & nourrilfoit eet enfant, pour calmer 1'inquiétude de la Découfu, elle n héfita pas a lui faire un billet, ou elle s'engagea i lui repréfenter fon en- fant toutes les rois quwu. Ce billet eft daté du 13 norembre 17 07, 'tour de 1'accouchement de cette hlle>: c'eft une époque qu'il faut obferverLe lendemaii^ la Dupré fut appel-  182 Fitte qm reclame un enfant f' Pour accoucher Jeanne Perc/ie ftmme de ƒ«« dilerand • ed< 1 avoit déja aidée dans un autre accoa chement^-Elle ladélivradunefille qi] fut baprifée, le jour fuivant, fö^l nom de GahUlU 3 & fou, u ,• , infant de cttt & ^fg femrne , dans l%life de faint Georte I qm etoit leur paroilfe. UIöes^ Le jugement ie plus favorable ouJ on pu.ffe eoneevoir pour * DupV\ c eft qu'elle a expofé>« afeandonné O dr/'e fabl-^eufe:car on a HetV de fo"P??nner qu'elle s'eft noireie du cnme de lui avoir abrégé fes jour" " • fruit de fon crime, exigea, de la I)f qu'elle Kofl ^-Quand lapaffi-^l^^ öans ces ames v^nnlp. Sne «ire muer dansf™ / , .de » —uu imaginaire,  contre une femme. 18? .' Elle prefla vivement la Dupré, Ia menaea de lui intenter un procés, fi elle ne lui rendoic pas fon enfant. Cette matrone fut effrayée par 1'idee du fupplice que fon crime méritoit j crime énorme dans une fage-femme qui abufe de la confiance que 1'on a dans fon miniftère. Elle crut pourtant Kt dérober k la punition de la juftice , ,en fuppofant qu'elle avoit remis a la ! femme de Chaiant 1'enfant dont la Decoufu étoit aceouchée. Elle fe flatroit de ; réuffit dans cette fuppofition, paree 1 qu'elle croyoit féduire par 1'attrait de 1'intérèt le père & la mère, qm ne font ; pas dans une heureufe fituauon. L'indi°ence eft une tentation qm a triom: phé plus d'une fois de la tendrefle paternelle. r Tout fembloit favonfer la iuppoh'• tion; la proximité de 1'accouchement de la fille & de la femme : il n'y avoit qu'un jour d'intervalle j le même sèxe des deux enfants, & quelques traits de reflemblance que la nature capncieule a mis entre 1'enfant & la faufle mère. Les hiftoires les mieuxcirconftanciees ne coutent rien z 1'impofture. Iffupre r 1„ rhnlnnr l'avoit folllCltee lLippoia que w ».>•■» vivement a lui remettre un de ces en-.  to4 Flik qui reclame un enfant fants a qui 1'amour ne fcait pas corifetVer la vie qu'il leur a donnée. On n'ignore pas que le miniftère des matrones, dans une grande ville, leur fait fouvent remettre de ces dépots-la. Afin de détruire la preuve de 1'extrait baptiftaire de 1'enfant, elle ajouta quede concert avec la Chaiant, elle feignit de 1'accoucher de 1'enfant qu'elle lui avoit feit délivrer; & que le lendemam, elk affifta au baptême, Elle s'aveugla tellement, qu'elle ne vit pas qu'elle s'accufoit d'un crime énorme j & qu'une hif» toire auffi extraordinaire que celle-la, ne pouvoit pas fe fourenir; paree que, •fi la vérité fe oachoit, pendant quelque tems, elle fe feroit bientot jour, & diffiperoit tous les nuages qu'on lui oppoferoit. La blaiichi'lfeufé, guidée par la fagefemme, vint (bez la ChaL nt lui demander cette fille , qu'elle prétendok etre la fienne. Comme cette demande ne fervit qua irriter la eolère d'une véritable mère, la Découfu s'avifa de donner ; Ie ir aout' 1709, fa plainte en juftice, & de demander que 1'enfant fut féqueftré. Elle étoit follicitée par fon intérêt, Elle apprit alors Ia mort du beur Orienne^ qui avoit légué mie  contre une femme, i S jnent les yeux les plus clairvoyants peuvent-ils pefcer dê pareils myftères > La cour mareha avec be&ico'ap' dexircönf-  contre une femme. jo^ LcHon. Elle ordonna, le 18 juin 171 o, runinnr & fa femme feroient ad- |ds a la preuve dgs faits quils avoient avancés. On permis a la Detoufu de i faire fa contre enquête. On décreta de prife de-corps la fage-femme,afin d inir itruire fon procés par la voie extraordinaire. . La Découfu crut aiors que 1 amour m dédommageroit, dans une nouvelle im A* mnres les inquiétudes qu'il ilui avoit procurées. EUe s'embarqua I dans un commerce avec le fieur Gmli laume Devaux, man hand. Mais 1'etoile ■ de cette fille ne vouloit pas qu'elle tut heureule en ampur : ia mon, api«> u.iy intrigue d'une année & demie, lm enleva ce nouvel amant, le 30 janvier ï7Comme on fit 1'inventaire de fes effets , elle s'avifa de fqrmer une oppofition au fcellé, pour quelques hardes qu'elle réclama. Ede fut déboutée^ fon oppofition ; &on lui foutint, a la £ice de la juftice, qu'elle avoit cte la concubine du défimt, & qu'elle en avoit plufieurs enfants. Le plauloyer qui com tient eet éloge eft inféré dans la fentence. Ainfi elle achevade perdre Uinbj^  f90 Fille qui réclame un enfant de Phonneur qui lui reftoit encore; Moins habile que beaueoup decoquetres, qui, malgré leurs inrrigues, ont le fecret de fubftkuer toujours un fantóme de Phonneur a Phonneur réel qui les a abandonnées, la Découfu fe ménagea fi mal, qu'elle ne tiroit plus aucun revenu de fes appas. Elle ne pouvoit pas d'ailleurs être payée de la penfion alimentaire qui lui avoit été léguée par le fieur Orienne3 paree que 1'enfant qui étoit le motif de ce legs, ne fubfiftoir plus. On eur dit qu'elle étoit née, pour avoir toutes les difgraces de 1'amour. La jaloufie dans le cceur d'un de fes amants lê conveitit en fureur. Après des reproches violents, elle vit fondre fur elle un orage de coups. Elle les rendit fi vivement, que 1'amant, qu'on ne veut pas nommer, mourut de fes bleffures. L'hétoïne malade fe fit porter a 1'hötel-dieu. Elle confia au fieur Boutdin, tapiffier, la fille qui fait le fujet du procés. Le père & Ia mère, que leur ten-; drelfe rendoit continuellement attentifs, craignant que leur enfant ne leur fut enlevé, demandèrent que 1'on fit défenfes au dépofitaire de fe delfaifir du dépot. Ils obtinrent leur demande.  contre une femme. 19 ï Comme la fauffe mère négligeolt de payer la penfion de 1'enfant, le père i% ' la mère demandèrent qu'on la leur re! mït \ leur caution juratoire. Ils eurent ■ des conclufions favorables de M. le pro- ■ cureur-général. On confia pourtant 1 enfant aux religieufes Urfulines de Saint- Juft. „ , . Le 1 3 juillet 171 3 , on arreta la iagefemme: elle fubit un fecond interrogatoite. Quoiqu'elle ait eu prés de quatre années a préparer fes réponfes, elle n'a pu donner au menfonge les couleurs de la vérité. Elle fe coupe de nouveau, &C fe contredit fouvent elle-même- On peut comparer le tableau que tracé la vérité a celui d'un peintre du premier ordre, que les plus habiles copiftes ne peuvent jamais bien imiter. L'air naturel de l'original ne peut jamais être tranfporté fur la copie. Le 14 juillet 1713, le pere & la mère firent procéder a leur enquête, compofée de douze témoins. Cette enr qucte n'eft pas une lïmple preuve, mais une vraie démonftration des faits qu'ils avoient articulés. La faulfe mère fit aufti fa contre-enquête: mais elle femble n'ayoir travaülé qu'a. dctruire fon infofe  l€)Z Fille qui réclame un enfant jmtion, 8c a fourhir de nouveïles preu-' ves a fes parries. Les religieufes Urfulines, agilfiantde concert ayec la faulfe mère, donnèrent les mains a 1'enlèvement qu'elle fit de ff?11' Le père *la mère furenc ac- cablés de ce nouveau malheur , auquel leur tendreffe ne s'attendoit pas : ils donnèrent leur plainre. Le juge fe tranfporta au couvenr des religieufes, & procedant a une information, il interrogea la fupérieure & plufieurs religieufes, qui convinrent de eet enlèvement. ? Dans eet état, le procés aété appointé en droit. II s'agit de décider a laquelle des deux, a la femme, ou a la fille, on doit adjuger 1'enfant qu'elles récla" ment. 'En fuppofant que 1'on puiffe douter laquelle des deux eft la véritable mère > on doit adjuger 1'enfant a la femme ^ plutót qu'a la fille. Cette propöfition eftfondée fur cette maxime : Que dans Ie doute, il faut ulfurer l'état de 1'enfant, & 1'on doit le •^cclarer légitime, u  contre une femme, 193 Le jurifconfulte Pomponius , lib. 7 , \md Sabinum, 1. 10 , de reguL jur. décide que, dans une caufe ou il s'agit de la jliberté, fi les juges font partagés dans i leurs opinions, le préfident doit faire I tomber la balance du cöté qui favorife I la liberté. Quoties dubia interpretatio klibertatis > fecundum libertatern refponvdendum erit. Le jurifconfulte Manian lajoute a cela que la caufe de la liberté imérite les mêmes égards, que toutes Icelles auxquelles le public prend queljiqu'intérêt. Caufa libertatis non privata s \jedpublica eft. L. 5 3 , ff. defidecommiffa.rlis übertatibus. L'application de cette loi a. 1'efpèce préfeute eft d'autant plus ijufte, que la caufe de la légitimité eft II plus favorable, que celle de la liberté. La condition de 1'efclavage, quelque rodieufe qu'elle fut, pouvoit fe changer a par 1'arfranchilfement: mais le vice d'une Inaiifiance iilégitime ne peut jamais être leffacé. Si la batardife étoit odieufe pari mi lesRomains, quoiqu'ils confacraf-> ifent 1'impureté , en adorant des dieux il fouillés de ce crime ; avec quelle hori reur ne devons-nous pas envifager cette ilrache d'une naiffance impure, nous qui : Ifaifons profeifion d'adorer le dieu de la tijpureté, & qui fommes pbligés de re-* ! Tome Vil. 1  19 4 Fille qui réclame un enfant tracer cette vertu dans nos acKons ? Qti'eft-ce qu'un batatd ? C'eft un homme qui porte fur fon fronr le caractère de 1'incontinence de ceux qui lui ont donné le jour j qui crie ce pêché originel a tous ceux qui le confidèrent, qui lit dans tous les yeux le mépris qu'on a pour lui. C'eft un homme qui acontraété une fouillure honteufe, dont il ne peut jamais fe laver. L'autorité du prince, en lui alfurant un état, lailfe toujours fubfifter la tache de fa naiffance. Un batard n'a point de familie ; il n'a nulle parenté. Vul go qu&fitos nullos agncuos habere manijeflum eft. §. 4, ïnftitut. de fuccsff] cog. II n'hérite pas même de fa mère. Les batards ne font point compris fous le nom d'enfants: leurs pères & leurs mères ne font point au nombre de ceux qui leur peuvent fuccéder; & le Roi hérite d'un batard, comme occupant un bien qui ne peut palfer a aucun fucceffeur. Si le batard a un mérite perfonnel .qui le pourroit éleJ yer aux honneurs Sc aux dignités, fa nailfance le repouffe fans ceffe : c'eft un obftacle perpétuel, qu'il ne peut pas yaincre: le mépris qu'on a pour lui le détourne de la pratique de la vertu. P.our rendre fhomme capable de ré£f»  wntro une femme. 195 ter au penchant qu'il a pour le vice, il lui faut élever le cceur : & comment Pélever a un homme qui eft dans une humiliation perpétuelle ? Après cela, dans le doute ou la jufitice feroit fur l'état de la fille qui fait le fujet de ce procés, uferoit-elle d'une fi grande cruauté, que de la reléguer idans un rang auffi vil & auffi honteux , ique celui d'une batarde? En feroit-elle iuii monftre de la fociété, tandis qu'elle en pourroit faire une citoyenne capable de tous les effets civils? Ne peut-on pas dire que le public s'intérefie dans la icaufe de cette fille? Caufa non privatas ifed publica eft. Si on lui faifoit un fi j grand préjudice, chaque moment de fa j vie ne feroit-il pas marqué par des re:proches légitimes qu'elle feroit aux juVges qui Pauroient avilie injuftement? Dans le doute, le juge fuppofera-r-il qu'elle a recu de la nature u ie tache ' qu'elle peutne lui avoir pas imprimée? La fouillera-t-il d'un pêché originel i dont elle n'eft peut-être pas JnfecPée? | N'oublieroit-il pas entiérement 1'huma- mté,s'd ufoit de cette rigueur.'' 11 ne doit jamais impofer aucune peine a un accufé, qu'il ne foit entra'né par des raifons évidentes, qui lui font voir le lij  Fille qui récln-ttc un enfant crime dans Ie coupable. Dans le doute,'' non-feulement il doit tenir fon glaive en fufpens, mais il doit renvoyer le erij minel. ) Si 1'qn obferve cette règle, a 1'égara d'un crime volontaire, on la doit fuivre, a plus forte raifon,a 1 egard d'un yice qui n'a point fa fource dans la vo- '! lonté de celui qui en eft taché. La batardife eft un vice de cette nature. On ne doit donc pas couvrir j un enfant d'opprobre, en le declarant illégitime, dans le doute que 1'on a de fon état. 11 faut obferver qu'en donnant a la Découfu eet enfant, on la charge encore d'un autre pêché originel, paree que cette faufle mère a eu de proches parents, qui ont fubi des jugements infames, On tire, la-deifus, promptement le rideau, pour ne pas arrêter 1 davantage les yeux fur la turpitude de ! cette familie. L'on voit donc que ce n'eft pas feulement la caufe de la véritable mère que l'on plaide ici • mais la caufe de 1'enfant. C'eft un avantage que l'on a : fur 1'avocar de la Découfu. C'eft 1'enfanr qui implore la juftice, qui lui demande ne la pas nétrir indignement, en ia I  contre une femme. i 97 declarant batarde, de ne pas lui imprimer plufieurs caraótères d'ignominie qui la rendroient 1'objet du mépris de kóut le monde, & la réduiroient dans mn état qui lui feroit préférer la mort 14 ia vie, dés que la raifon 1'auroit renJdue fenïible aux impreflions de 1'honi neur. On ne doit pas doutef que, fi la i raifon 1'éclairoit, elle ne fe tint aux 1 pieds de fes juges, pour les conjurer de lui affurer un état, & de ne lui pas ravir un titre que la nature lui a donnné : ou fi elle le lui a refufé , de la faire profiter de fa bonne fortune qur a caché le préjudice qu'elle lui a fair. Elle chercheroit des relfources dans rhumanité qui eft au fond du cceur des juges. Elle leur repréfenteroit qu'ils font hommes avant que d'être juges; &C • que, dans cette occafion, la compaflion & fhumanité fe concilient avec 1'équité. Mais fi, dans le doute, on doit adjuger 1'enfant a Chaiant & a fa femme, fa juftice héfitera-t-elle de 1'accorder a ; ce père & a cette mère, qui établiflent ! leur qualité, non-feulement par toutes ! les préfomptions qu'on appelle juris & 1 de jure, mais par de véritables dérnonf! t adons? 1 üj  198 Fille qui réclame un enfant Préfomptions pour Jean Chaiant, & Jeanne Pefche fa femme. La Découfu convient elle-même, clans fon avettilTement en droir, que Ia circonftance du mariage de fes parties leur eft rrès-favorable ; que c'eft une prelomption de droit qui combat en leur faveur. En effer, qui ne préfumera qu un enfant appartient a des gens manes qm Mèvent & le reconnoilfent dans cette qualité ? On n'a jamais vu d'exemple d'un I •man & d'une femme qui difputent un enfant contre fa véritable mère : mais, quand un mari & une femme pourroient-être capables d'une pareille impofture, feroient-ils capables de la fou- r temt pendant phüTeurs années dans le public, & a la face de la juftice? Si la Découfu joue, depuis li long-tems, le role d'une faulfe mère, c'eft qu'elle a ete féduite par la fage-femme, & qu'elle < eft conduite par fon propre intérêt. . -^a*s une préfomption encore plus I violente, qui ouvre d'abord le chemin a la vérité, c'eft qu'on ne jugera jamais qu un artifan & fa femme, qui gagnent leur pain, en gémilfant fous le poids  contre une femme. 195 jdu travail, aillent réclamer 1'enfant d'auzL: - Kr 1p nourrir. Croirai- UUl, uumiwv.w. t-on qu'un faux père & une faulfe mere • »,,fanr Hans cette aiincc ou le ciel étoit d'airain, K la tene ae 'fer, pour ufer des expreflions du texte facré; ou la nature fembloit avoir con- juré la perte des hommes, ou 1* oubliant qu'elle étoit notre mère , iembloit être devenue une cruelle maratre qui nous refufoit les aliments? Auroiton vu, dans ce tems ou la faim regnoit, un homme & une femme s oter le pain de la bouche, pour le donner a Penfanc d'autrui? C'eft dans cette année fatale, qui vaut elle feule un fiècle de fer, que Chaiant & fa femme ont nourn la falie qui fait le fujet du procés. Combien de pères,dans ce tems-U,ont été durs: envers leurs enfants \.& Chaiant & fa femme auroient eu des entrailles de pere & mère pour 1'enfant d'autrui! Pour pouvoir perfuader cela, il faut commeneer par étouffer les lumières communes que Dieu a départies a tous les hommes. L'on doit conclure que la hlle que Chaiant & fa femme ont nourrie dans ce tems de familie, étoit leur véritable enfant. liv  La n r rédame un <»M JU Découfu n'a point combattu ces pr,f0mpri0„, qui fubfi c| \Tctr E^1^S,eft-if-d'att^b,er1 ia Chaiant quelques motifs qui aien, £ kfaIre Tantót elle ditqïe eet* p£ 1 n *anci»'" en étoit Ie P-re &. que cette opinion lui infoirf! uvecoV1",,1101""?6^ co^éi-ation, vo T5;lk™^ P» -tte f , A T OUS contribution. La <-A*W protefte de ie^omvo{t ^•Toutes ces calomnies n'ont aucune apparence. mo^1^"16"^ tOUS ces di®rents monfc ne peuvent pas s'accorder Se condement, quand la Chaiant auiolr eu de pareilles idéés, fe feroit ell, «e vingt-deux ans, qui avoit eu deur ^fantspouvoit-elleVdtel'eSiÏie den avoir? N'i <■ 0n ^ r\lanLe pais » Fr l' , Pas été groffe de- le c™uva a" milieu de Ia fbule F K ceue he«re fatale, ouj 'oa $j  contre une femme. 201 tant de vidimes qui couroient fi incon* fidérément & fi précipitamment a a tóort (1). La Chaiant penfa avoir ia même deftinée : elle accoucha d un enfant qui avoit perdu la vie. ( 0 A une lieue de Lyon du cSté du fauxfeourfc de la Guillotière, eft un vdlage nomrri. Penis-le-Bron. 11 faut pour y aller , paffer le Rhöne, fur un pont fort long & fort ttroit. Au milieu du pont, eft une de, portes . . ... • ffMitps es autres, le < e la ville qui, amu 4"»- ..«-—rgrme le foi k une certaine }-ure, apres que l'on a fonné la retraite. Le jour de k fet. de S. Denis fe fait, dans ce village, 1 ouverture d'une foire qui dure huit jours ; & les b*g tn sdeLyonchoiftffent ce jour-la, pour sy aller promener en affluence. En i?1.1',™ nommé i^fergent d'une compagnie chareAe de veiller i la garde des portes de Wie , lavifa de fonner la retraite une heure plutot ïffiSe, & de fermer la porje d« ront On accourut en foule, dans la crainte Se cóucher hors de la ville. Dans un m ce jour;-/er&Ie hernam, fans Ie faire ba?. Premiérement, on na point tenu ee Jaugjge dans tout le cours du pro és qai ^re depuis prés de feptansPS on ne peut plus faire cette allégatio avancer ce fait-H, on a dit précifémenr le contraire. Ia fage-femnfe a dS chl' f J blanchiffeufe accou- cna, Ion enfant fut remis a Ia atówj * % ' . * <"«ne, lur (es cinq beuICS ^ fo1^ feignit d'accoucbet: cette femme & que leWemain, el £ amfta au baptême. W^/^r'^-^"16^ Ia Découfu dans fa plai„re, dit que l'enfant !;;e,baPfél-4"ovemb?e. La ^ ^^ dans fes premières réponfes perfon"Jles, donne Ia même date air bap-  contre une femme. ±o^ foAni..** /t„ne. Pevllonneau , fecond yj aintuLo -jj.- - . . témoin, Nicole , quatrième témoin ,^la Welvau , huitième témoin de 1'enqucte de la Chaiant, dépofent unammement que, le lendemain que cette femme accoucha, l'enfant fut bapnfe, Quand on fuppoferoit, aux dépens de la verité, que eet accouchement auroit ete teint, il eft toujours certain, fuivant la Dupré, & trois témoins, que l'enrant a été baptifé le lendemain de eet accouchement. Or la Dupré ayant affirme que le 13 novembre fut le jour du teint accouchement, il s'enfuivroit,felon elle, que l'enfant auroit été baptife le 14. Cependant il a été baptifé le 15 .comme on le voit par lextrait baptiftaire. Comment la Découfu fe tirera-t-elle de ' _ s,irA-> VnilA un abvme ou cette cuiiLiai-i^ . . w..- , 1'impofture fe précipite fans reflource. On voit donc, avec des rayons auih clairs, que ceux du foleil dans fon midi, que la Découfu étant accouchee le 1 ? novembre 1707, h Chal*nÉ a poncho le lendemain. , f. • Or c'eft une vérité certaine que, u la Chaiant eft accouchée ce jour-la, l'enfant qui fait le fujet du procés lui apparDent; paree que l'enfant dont elle a accouché le 14 » été baptifé le 15,»  F'fe qui réclame un enfant que l enfant qui aérébaprifële{5 eft rZcÏLGTIeme circo"fta»ce conïS^irf'?Xa deux enfants differents ;,Pun de la £W« & 1 autre de la .Chaiant. J * Charks Meunhr.premier témoin de * fage-femme coupa le. cordon (:) de & i^if forentre' veine , deux arteVe7 1 . ' qU1 font une «ne efpècTde anaV ft ' ^ efl «Her c^s Jl^^^ fê» "nt ne les rompe m7i« p que 1 en" fiit- U fait eS l v rmouvements qu'il 1 enfant efl né mf f v Auffi-tot que «ion, a den" travel Tll§atUre a ce tre de 1'enfent & o„ 1 gt Pr°Che le ve"^ Jigature/lnfutTa nature*^^5 de ^^^^^^ ieur pêché • , w' avant te noüü'é1^ mon des vsiiT^v , me de Ja réu-  contre une femme. 20f' Eenfant, après avoir accouché la Dér Coufu. Pefrette Ovaye , fecond témoin, chez qui fe fit eet accouchement., dit auffi qu'elle vit l'enfant qui tenoit par le cordon, & que la Dupré acheva 1'oUr vrage : donc elle coupa le cordon. La Dupré elle-même, dans fes,premières réponfes perfonnelles, dit qu'elle coupa le nombril de l'enfant. Voila donc le cordon coupé a. l'enfant de la Découfu. ' Nicole Bouchard, quatrième témoin de 1'enquête de la Chaiant, déppfe précifément qu'elle vit, chez cette femme, le cordon attaché a l'enfant: elle en défigne la longueur. La Delvau, huitième témoin, que la Dupré lia le cordom Nicole Bouchard dit auffi que la fagefemme demanda du fil, pour lier le il eft évident qu'ils ne devoient pas avoir de nombril, puilqu'ils n'ont pas été engendrés comme nous. Cette note efl de M- Gayot de fiu.val. U auroit dü nous expliquer auffi ce qu'il entend, par le Ut de l'enfant. II paroit que c'eft du placenta qu'il veut parler, puifque c'eft du placenta que part le cordon umbihcaL Mais le placenta ne feit affurément pas de lit a l'enfant. Ce n'eft pas ici le lieu d'ex->pUquer cette partie de Fanatomie. Je ne me piqué pas d'aiileurs d etre verfé. dans cette. fcience.  ÈoS Fille qui réclame un enfant cordon. Anne Peyffonneau, fecond témom, dn qu'elle apporta, pour eet «lage, un fufeau garni de fil. Ii s'enfuit clairement que lë cordon de 1 enfant de la Découfu avant été coupe chez le fieur Chambry t l'enfant qu'on a vu chez la Chaiant n'eft plus le ïneme,puifqu'il avoit un cordon. Voiid comment la vérité fe fait jour de tout eote. Maisnediffipe-t-elle pas tous les images dans 1'enquête de la Chaiant? J_es^deux points eflentiels font la groffelfe & 1'accouchement de cette lem.ne. Premiérement, a 1'égard de la grofielle, ecoutons les témoins. E dennette rerret, premier témoin, dit que, dans i annee 1707 , elle a vu la Chaiant, «ans la fiufou des vendanges, prete d accoiuher,, Anne Peyffonnesü , fecond témoin , öepofe aufli que, dans ce tems-ld, elle } Vu 'a Chala"t encelnte; & que, cette femme etanr fort incommodée, elle lui tata Je ventfej ^ ^ Hde ajoute qu'elle fentit l'enfant remuer. ^e SeecW, quatrième témoin, depo.e qu'elle a vu la Chaiant, dans ce tems-la, pïelTée des douleuri de 1'asceuchemenr*  contre une femme. aó$ Louifc Safange, fixième témoin, raeonte que, dans I'année dont ïlsagit, a vu la Chaiant encemte l qu elle , 1'a eardée quinze jours \ & que ^pendant ce tems-U, elle a remarque que cette femme avoit le ventre fort enne, & qu'elle paroitfoit prête a accoucherj & que même, au bout de quinze jours, la trouvant preffée des douleurs de 1'ac. couchement, elle 1'obligea de fe retiret j chez elle. " Larue, feptième témoin, man de la Safange, fait une dépofition entiérement conforme a celle de fa femme. ^ La Delvau, huitiètpe témoin, cjcpofe auffi que, dans cetK même annce» i ün mois avant 1'accouchement de la Chaiant, elle coucha avec elle, & que, la trouvant indifpofée, elle lui mit la rriain fur le ventre qui lui parut fort gros, & fort enflé. Elle ajoute qu'elle fentit remuer l'enfant. Leroi, parrein de l'enfant, cinquième témoin de la contre-enquête da la Découfu, dépofe que la Chaiant lui parut fort groffie , & qu'elle 1'avoit prie d'être parrein plus de trois mois avant le baptême. Voila fix témoins qui dépofent de la «olTeiTe de la Chdant. 11 y a deux  JTO Filk qui réclame un enfant &t avec des arconftances fi nature 1 & fi conva.ncantes, que l'efprk ne peu pas fe refufer a cette véri^ '„ r P fi évidemment ' ^l ^Q La feconde vérité, qui eft 1'accouchement de la Ckalan, Xudent la pr ^erer ede eftparfaicementéclaircie? 4nnePeyjj0nnea^-fecond témoin JU-qu'elle étoit dans la chambrede"a CAaW, lorfqu elle aceoucha, & qu'elle ^„ ; j 7> 5 ^ies clrconltances du jour de faccouchement: & fa dépo fi"on s accorde parfaitement avec ïs reponfes perfonnelles de la Chili? qmfau ptéafémentle téat de ces mê' mes arconftances. ^~ , z eJ'f- Wie ajoute qu'elle entra dan. la chambre après l^couchement cS -meme témoin quladépofé^  contre une femme. 2iï , on Pa obfervé, qu'elle vit a l'enfant tin cordon fort long. La Delvau , hnitième témoin, ne lailfe pas le moindre foupcon fur eet : accouchement. Elle dit que la Servant ; Pappella, pour fecourir la Chaiant qui ; étoit prête a accoucher j qu'elle alla a fon fecours„ &c que la Dupré arriva. i Elle affure qu'après deux ou trois doui leurs , elle vit accoucher la Chalant.^ On voit la fincérité de ce témoin. I Lorfqüelle raconte que la Dupré lia le , cordon, elle dit qu'elle ne lui vit point I faire cette fond ion. D'oü l'on doit con: clure qu'étant dans la chambre , h elle i n'avoit pas vu accoucher la Chaiant,. elle auroit dit firaplement que cette femme avoit accouché ; mais qu'elle ne 1'avoit pas vu accoucher. Elle cite trois perfonnes témoins de 1'accouchement. Toutes ces dépofitions, qui fe fortifient & fe foutiennent, font , futeett? matière, une des plus parfaites démonftrations que l'on puiffe offrir aux regards des juges. L'efprit le plus indocile ne pourroit pas réfifter a des vérités. & évidentes. II faut ajouter que la Chaiant a alïaité l'enfant. Combien de témoins s'expliquent la-delfus! hüennette Perret, premier témoin.?  212 Fille qui reclame un enfani dans Jannce dont il s>agir, éomlrt A\?n%eP7$°"neau> feco«d témoin ^ auffi qu'elle 1'a vu allaitercet enfant' preuant fon fein, en fit fortir du lait £i,e raco»te q«e, dans ce tems la ^ntunexnflammatmnaun^ro^l etouentréquelqueorduteJa?Lr ft preflint un peu le fem, lui /et a dé ftn lm dans Pffiil pour la foulair Ene ia cwaw allaiter fon enfant. f^rlne ^^dnquième témoin, tuntlememelangage. Elle dépofe encore qu'etant accouchée , Sc^Zt pomtde lait pour nourrir fon enfC canr J f "ge' fmème témoin, ra-  contre une femme. %i$ qu'il vit a la Chaiant le fein fuffifamment rempli, ce témoin curieux embellit fon récit, en difant qu'elle avoit la gorge jolie. Des yeux auffi attentifs que ceux de ce témoin, paroilfent avoit bien obfervé la vérité. La Delvau, huitième témoin, raconte qu'elle a vu la Chaiant plus de cent fois donner a tetter a fon enfanr. Jojeph Guiliaume, tailleur, onzième témoin, dépofe que la Chaiant, qui travailloit chez lui, dans I'année en queftion , interrompoit fouvent fon ou* vrage, pour donner a tetter a fon enfant. , . Fleurie Tartarcl, douzieme ternoin,' femme du témoin précédent, dit la même chofe. II eft donc certain que la Chaiant a allaité l'enfant qui fait le fujet du procés. Cette vérité eft environnée des rayons les plus vifs & les plus percauts. Si' la fource d'eau que Moyfe fit fortir autrefois d'un rocher impofa filence a 1'incrédulité des juifs; les deux fources de lait qui fortent des mammelles de la véritable mère, ne doivent-elles pas faire taire Pimpofture ? LaC/zdWadoncétégrofie en 1707; file a accouché le 14 novembre decett^  ft-4 Fille qui reclame un enfant meme armee, d'une fille qm a été baptifee le lendemain : elle I'a allaitée plubeurs femaines : elle 1'a enfuite mife en nourrice, paree qu'elle ne pouvoit pas en lm aonnant du lait, travailler pour fe nourrir elle-même. Que I'enfanf ait ere mis en nourrice, cela eft conftant au proces. Quel défordre ne cauferoit-on pas aans es families, fi l'on écoutoit 1'incredulite, lorfqu'elle voudroit combattre des preuves auffi claires que celles que Ion yient d'apporter? On donneroit beu d'attaquer l'enfant dont l'état ieroit le plus certain. Pourroit-il mettre en ceuvre des preuves d'une autre nature, pour etablir par témoins la groflelfe & 1'accoucbement de fa mère > Pourroit-il même fe flatter d'être fi beureux que de rrouver un auffi grand nombre ae témoins irréprochables, qui depofaffent en fa faveur auffi clairement & auffi précifément, que ceux de 1 enquête de la Chaiant? II s'enfuit qu'en fuppofant que la Découfu ait etabli, par fon Information & la contre-enquête, Phiftoire que la Dupré avoit imagineé, pout fe derober au fupplice qu'elle méritoit, 1 enquête de la Chaiant prévaudroit  contre une femme. 21$ toujours fur 1'information & fur la. contre-enqiaête 5 paree qu'étant en poffeifion de l'enfant, lorfqu'on le lui a difputé, la preuve littérale & la preuve reftimoniale concourenr en fa faveur. Mais la Chaiant a encore furabon; dammenr eet avantage, que 1'informa1 tion ne forme aucune preuve^pour la Découfu, &c que fa contre-enquèce fournit des armes contre elle. L'information de la Découfu n'établk point les faits contenus dans fa. plainte, & fa. contre - enquête les détruit. t ~ ■y déia nrétu°ré que l'infor¬ mation ne faifoit pas une preuve complette & régulière , puifqu'elle a admis Chaiant & fa femme a la preuve des faits qu'ils avoient articulés. L'hiitoire éclole du cerveau uc 1* matrone fait le fondement de la plainte de la Découfu. Elle n'eft foutenue que 1 '„„„r^,- ncrfnnnpllfts de cette par les ïcpun^o r^ - -- - ; fage-femme, & par la depofuion de Pierre Bonnet, cinquième témoin. La depofuion de la fage-femme eft entikement décréditée, paree que ^nonfeulement c'eft un témoin qui depofe  2i6 Fille qui réclame un enfant dans fa propre affaire , mais c'eft encor* un témoin qm s'accufe d'un crime enorme (i). La confeffion feule du cnme, dans Ia bouche de I'accufé ne fan point de preuve contre lui. Qeft une femme familiarifée avec le crime qui porte fon reproche avec elle : Jeft une femme foupconnée d'un crime fort «oir, qm veut diilïper ce foupcon, en s accufant d'un crime moins enorme. Wie avoit fait pénr l'enfant qu'on lui demandoit ; toutes les prefomptions s elevoient contre elle. Comment s'efforce-t-elle de les combattre 3 Elle tache de fubftimer un o„^Q „r": ï-,\r tera-t-elle a violer Ia religion du ferment, fi elle efpère,par fon pariure, d attenuer fon crime, & de fe dérober au iupphee qu'elle mérite? Ne s'étoitClle pas oubbée jufqu'a expofer l'enfant defabelle-hlIePUyaune procédure qui fait foi de ce crime. Si elle n'a pas ecoute lavoix defonfang, on croira facilement qu'elle a été fourde a la voix au lang d'un étranger. On ne peut donc faire aucun fond T y NfïS 'tTUS te(lis U *& '^ellmtvr. f' fde Omnibus in re proprid dl cendt teftimoni fjcultatem h,r„ nu F h 10, C. dc tïflib 1 fubmoverunt.  contre wie femme. 217 Xur la dépofition d'une femme fouillée d'un délit énorme, dans qui la crainte d'une peine capitale conduit 1'efprit, le cceur Sc la langue. D'ailleurs c'eft une accufée contre laquelle on a procédé extraordinairement, qui n'a point été récolée, ni confronrée. Ainfi fa dépofition, fuivant toutes les i.règles, ne mérite pas qu'on y faffe attention. Mais, pat furabondance de droit, on va examiner ce témoignage vifiblement nul. Que de prefomptions le détruifent! 1 La fage-femme prétend avoir été follii citée par la Chaiant a lui remettre un l enfant. Elle s'accufe d'avoir feint de 11'accoucher de l'enfant de la Découfu, . Sc d'avoir ailifté au baptême, ou la qualité qu'on donne a cette petite fille cache le crime aux yeux les plus percants. Elle s'accufe d'une fuppofition de part ) crime énorme dans une fagefemme. Elle 1'a donc commis gratui1 tement : cat elle ne dit point que la I Chaiant fait gagnée par un métal fé. dutteur. Quand elle Pauroit dit, elle n'auroit pas été crue. L'indigence de la , Chaiant ne lui avoit pas permis d'ufer de cette tentation contre la fage-femme. Tome VIL K  1 x 8 Fille qui réclame un enfant On ne croira jamais qu'une coupable ait commis un grand crime fans intérêt. Perfonne n'eft méchant gratuitement. La vertu feule fe pratique fans 1'attrait de 1'intérêt. Mais le crime, & un grand crime, & un crime qui mérite une peinê capitale, ne peut être commis que par une perfonne entrainée par un intérêt très-preftant & trés confidérable. Pour fuppofer que la Dupré ait agi auttement, il lui faut donner un cceur d'une trempe différente de celui de tous les criminels. La préfomption qui veut qu'un grand intérêt foit le mobile de ces gtands forfaits, eft d'autant plus convaincante , qu'elle eft prife dans la natute même, & qu'elle eft fondée fur la difpofirion du cceur de tous les coupables : difpofirion de cceur auffi invariable, on 1'ofe dire, que la place même du cceur. Préfumera-t-on encore que la Dupré ait remis l'enfant a la Chaiant, fans avoir exigé une füreté ; elle qui étoit obligée, par fon billet, de le repréfenrer a la Découfu. Mais fuivons cette fage-femme dans fes réponfes : on démêlera fans peine Pimpofture a travers les voiles qui la déguifent.  contre une femme. 219 Elle dit, dans fon premier interrogatoire, qu'elle fit entendre a. la Découfu qu'elle alloit remettre fon enfant i a. une femme de condirion qui 1'éleveroir par charité. Cette hiftoire ne s'ac1 corde pas avec la dépofition de Pierre \ Meunier, premier rémoin de 1'infortóiatïon, qui rapporte que la Dupré dit a la Découfu, pour calmer fon inquiéi tude, qu'elle alloit remettre fon en, fant a une femme de qualité; qu'elle 1 feindroit de 1'ac.oucher, afin de rétablir, 1 entre elle & fon mari, 1'union qui en étoit bannie. Voila deux difcours différents. On voit, dans le dernier, un feint accouchement, & un motif, qui font , oubliés dans le premier. La Dupré, dans fes premières réponfes, foutient qu'elle n'a connu la Chaiant que trois femaines avant le 13 novembre 1707. Dans le fecond interrogatoire, elle varie fur eet article. Elle dit d'abord qu'elle ne fe fouvient pas bien depuis quel tems elle connoiffoit la Chaiant avant le 13 novembre 1707; mais qu'elle peut bien alfurer qu'il n'y a pas quatre années. Un pareil langage ne veut-il pas dite qu'il pouvoit y avoir environ deux ou trois ans qu'elle connoifloit la Chaiant Kij  220 Fille qui réclame un enfant ■avant le 13 novembre 1707? Après avoir die fi pofitivemenc qu'il n'y avoit que trois femaines, auroit-elle pu faire une variation fi confidérable, fi elle ne s'étoit pas dévouée a 1'efprit de menfonge & d'impofture ? Elle reconnoit même préeifésnent qu'il y avoit plus de trois femaines qu'elle connoiffoit la Chaiant avant le 13 novembre 1707car elle dit, dans fon fecond interrogatoire, qu'un mois, ou fix femaines avant ce rems-la, cette femme 1'avoit fpllicitée a lui remettre un enfanr. Mais reprenons le fil du roman de la fage-femme. Si elle a cru feulement que l'enfant devoit être remis a une femme de qualité pour 1'élever, pourquoi a-t-elle délivré le Ut que la nature forme a l'enfant dans le ventre de fa mère ? La queftion étoit embarraffiante. Voici comment elle s'eft efforcée de fe tirer de ce mauvais pas. Elle dit que, lorfqu'elle délivra l'enfant a la Servant, cette femme lui fit entendre qu'il falloit remettre le lit de l'enfant, paree que la Chaiant feindroit d'accoucher ; que ce lit favoriferoit la feinte ; qu'on le montreroit enfuite k la femme de qualité qui vouloit élever l'enfant, afin qu'elle crut que la Cha-  contre une femme. 221 toen étoit la mère ;& que cette ra* fon 1'engagea a aflifter la Chaiant. N'eft ce pas la une hiftoire fi forcee, qu'il femble qu'elle ait été concertee en 3épit de la vétité ? Car pourquoi liChclant,en follicitant auparava* la Dupre a lui remettre un enfant, ne lui auroitelle pas dit qu'il étoit a propos qu elle feignlt d'accoticher, i caufe du munt qu?on vient de lui armbuer?Puifqu elle avoit tant fait que de folhcirer h Dupre a commettre un grand crime, elle pouvoit bien lui découvrir d'abord tout fon deffein. Cette feinte, ï laquelle on donnoit un motif innocent, n'auroit pas étonné une fage-femme que la propofition d'un grand crime n'effrayoit point. Ce qui paroït de plus romanelque n.. tf:n.„:^Q 1 s» faeilite avec dans cette umunt, ^ laquelle la Dupré remet le lit de 1 enfant a la première follicitation que lui en fait la Servant. Cette femme avoitelle Part de perfuader dés qu'elle ouvroit la bouche ? Ce caradère fabuleux eft encore lort fenfible dans la fuite de 1'hiftoire. Apres que la fage-femme a remis l'enfant a la Servant, elle fe rend fur les cinq heuresdu foir chez la Chaiant, pour développer, dit-elle, le myftere. Elle  22.2 Fille qui réclame un enfant Chaiant veut gatder I enfant, bien loiq de le remettre d une femme de qualité. £Le fe plamt doucemenr de cette inddebte: eüe favonfe, fur le champ, Ie cnme de ia Chaiant; elle feinr de Paccoucher. Ala vérité prés, elle n'oublie .aucune circonftance de 1 accouchement: &,pourfoutenirlafeintejufquaubout le lendemain elle affifte au baptême. Une lage-femme trompée dans une affaire de ia dernière importance, qui e plamt doucement, qui favonfe, fur ^ champ J3 tromperie, qui conduir, pourfmt le crime jufqu'au bout avec une grande tranquillité, comme fi elle eut concerte cette entreprife de lommeren ; tout cela fans intérêt, fans prendre aucune précaution contre la femme qm_lexpofc.it a un grand daneer! Jamais on na tendu a la crédulité des Feges plus groffiers, que ceux qui lui lont prepares dans cette hiftoire. Pour trouver des dupes qui s'y lailfent furFendre, i faut chercher dans 1'entance, ou dans la décrépitude. Cette matrone dit, dans fes réponfes, que la Lhalant n'avoit point de lait. Elle ajoute que cette femme nourriffoit 1'ejv tam avec du lait &c du fucre qu'on alloit  contre une femme £\ ■arheter Eticnnette Penei, AnnePeyh r Z, Nkole Bouchard, Cathenne fonneau, ' ° & Larue fon man, ■ Brun, la Safange « _ . t.r...u r'„, nuine cC la reui me"v:5in2& formel,fur ce dennet fait, 4 la lage r ' -plU eft donc convaincue d z.- tes les régies des cnrmnaliftes, pour File a encore artecte as ^ i > fa porte étoit fermee. La ^«v , üèrne témoin de vement que, dans le tems de Laccou IlTmen ' la porte fut toujours ou- ^Bie dit que la Chaiant a employé olufieurs perfonnes pour la gagner. elle ca on n'a pas fait entendre ces petfonquel^'offrondeproduiteceste. moins en um^ . Tombe-t-il fous le fens que la (.ha/Jefitconfiéun tel fecret aplufieu« perfonnes? N'autoit-elle pas couru aveiv Pg Leutafaperte? Si la eut du  j" cjie avoir envové nupi-.V « r> 3 -nva avec lui ch^Tfi P ctT' Dans les fecondes elle ê l > «ette prière • pIIp ü i> p 11 faue  contre une femme. 12> rendit pas chez le fieur Chamhn pour recevoir fa commiffion. On Bonnet, qui avoit fa dépofition par écrit, ne 1'a pas bien retentie ^ ou la Dupré a oublié de concerter entierement fa dépofition avec celle qu elle , avoit fuggérée ï ce témoin. 11 eroit bien difncile de décider auquel des : deux on doit impurer la meprde. Des i _ 1/1 _-i^onri^n<; . 1ö fourbes, malgte ie us > décèlent fouvent a la face de la juftice. Dans le premier interrogatoire, la Duvré déclare qu'elle dit a Bonnet qu il allat quetir la Servant: dans le fecond interrogatoire, elle dépofe qu elle chargea Bonnet de dire a la Chaiant que l'enfant qu'elle avoit demande etoit prêt. Dans le premier interrogatoire , la commiffion s'adreffe a h Servant ; & dans le fecond, elle s'adreffe a la Chaiant. Dans le premier, Bonnet ne porte aucune parole ; & dans le fecond, U doit expliquer le fecret de fa commiffion. . , i Bonnet dépofe qu'il avoit ordre de dire a la Chaiant que 1'arTaire queUe fcavoit étoit prêre. Ce langage eft obicur , myftérieux. Mais l'enfant que vous ave* demande eft pret; voila un langage K v  2 2 6" Fille qui réclame un enfant chn & „et: ce font donc deux difcours differents. La fage-femme déclare, dans le premier interrogatoire, que la Chaiant [yxi demanda U lit de l'enfant dans le dojuoife du fiem Chambri, au pied du degre. Dans le fecond interrogatoire, .6W« dit que la Z)^r/remit 1'enfant emmaillotté & quelques linges k la JW«; & la ZV,' dit que ce fut ^rqmremit l'enfant. Voila deux Jourbes qui fe font unis pour combattre k vente, & que le menf0„ge divife. Ils defont eux-mêmes la trame qu'ils avoient ourdie : ils dénouent le lien qu ds avoient noué, & leurs dépolitions li bien concertees fe contredifent Comment reconnoitre Ia Dup'ré dzm le portrait qu'elle fait d'elle-même dans fes réponfes? Cette femme habile eft credule jufqu'd la fimplicité. Cette femme, que tout le monde a connu arra, cnee a fon intérêt, eft défintéreifée jufqu a commertre un grand crime fans rél°7fiï ?«e femme, qui dit qu'elle n,l \ ru !ong-tems ™* follicitations q«e la Chatqnt lm a faites de lui re-  contre une femme. «W mettre un enfant, fe rend d'abord fut U propofition qu'elle lm faitde fuPPofer un enfant, & de feindre de 1 en accoucher. Voila une femme bien ferme, gcbienfoible tout enfemble. Ne croiroit-on pas quil y a dans cette femme deux ames qui agilfent tour-a-tour? Mais d'ou vient que cette femme habile, ayant eu tout le tems de preparer, de concerter fa dépofition trouvant même les conjeftures les plus favorables pour foutenir ce quelle avoir melde dépofer, ayant eu la facihte d'inftruire Bonnet , s'étant fervie de tout le pouvoir qu'elle ayoit fur cette ame vénale, comme fa creaneiere; d ou vient que , malgré tous ces avantaees, cette femme fe coupe & fe contredit a tout moment elle-même; tandis que la Servant & la Chaiant , qui ne font pas , i beaucoup prés, 6 habiles fe foutiennent dans leu» réponfes, fans jamais varier, s'engageant dans des hiftoire* de longue-haleine, qui ne fe dementent point? On voit que les témoins de leurcenquètes établilfent & fomfient les dépofitions de ces deux femmes, 5c achèvent de répandre le jour qm peut éclaircir ces rémoignages.. D ou peut naïtre cette différence? _ Kvj  228 Fille qui réclame un enfant La reponle fe préfente d'abord. La ^parle le langage de 1'in.pofture: h.Servam & Ja Chaiant parient le langage de la vérité. Le menfonge, quo 1 queconcerré, chancelle & f| rrouble. En vain 1 effronrerie lui forme-t-elle un frpnt d'airai„;le cceur le trahit &c Ie depouide de tous fes arrifices. La vérité hmple ingenue, &fansfard, ne peut jamais etre furprife. Elle n'a pas befoin de preparation : fans autre fecours, que celuide la candeur, elle fe foutiem I Jafacedela;uftice. Qui voit le front vott le cceur. Ils s'accordent fi parfaite! ment,nqUiIsnonc quW même Ce qui décréditerolt encore entiérement Ia dépofition de la Dupré, indépendamment des moyens effentiels que fon a mis en oeuvre, c'eft qu'elle a cormmpu & fuborné Bonnet, le einquième temom de 'm&rmario* La il>o£l non d u„ témoin eft 1'artifice Ie plus «oir de 1'impofture. II eft certain qu'un temmn qui en fuborne un autre, afin que leurs temoignages s'accordent & fe feamennenr, eft vifiblement un faux temom Amfi, quand les juges oublieroient les moyens invincibles qui dénuifent 1 hiftoire imaginée par Ja Du-  contre une femme. 129 Li, pour ne s'attacher ce dernier moyen, ils 11'héfueroient pas a rejetter la dépofition de cette matrone. II faut d'abord obferver que la vé;rité s'élève contre Bonnet. I) dépofe >m . u n„or/ remettre l'emant a qu 11 a vu 11 ^ >v la Servant. Lorfqu'oncommet un grand crime, va-t-on fans nécelfité prendre un eonfident? Si la Dupré eut commis le délit dont elle s'accufe, Bonnet ayant fait fa commiffion, ne 1'auroit-elle pas renvoyé, afin que les yeux d'un temom qui ne lui pouvoient plus rendre aucun fervice, n'éclairaflent pas un fi grand crime? La Dupré dit même que, dans le tems qu'elle remit l'enfant la Servant lui demanda le Ut de l'enfant. Auroit-elle fait une pareille propofition en 1 n i rt. „onr mi'nn r.n- préience de vonnci r v-^i n« —minel qui cherche les ténèbres ,quiyoudroit pouvoir dérober fon crime a Dieu, SC a lui-même, aille choifir un temom qui ne lui eft d'aucun ufage ; & encore un témoin foible & indifcret. Voila ou 1'impofture eft réduite. Ses hiftoires ne fe peuvent foutenir, fans dementir les plus communes himières du bon lens, & les fentiments les plus naturels du D'ailleurs la fubornation de Bonna  230 Fille qui reclame un enfant eft prouvée au procés par la dépofition dlfabeau Tiffeur 3 huitième témoin de Ja contre-enquête de la Découfu. Qui n'adnurera la force de la vériré, qui obhge cette femme aparler contre fon man? Elle déclare qu'il a roujours été trouble & mquiet, depuis fa dépofition: que les inquiétudes redoubloient, toutes les fois qu'il s'alloit confelfer, & qu'il fut extrêmement tourmenté pendant la dernière miffion, ou les iéfuites fignalerent leur zèle. f Voila un témoin en proie aux fynderefes de fa confcience, par ce qu'il dépofe : d'oü l'on doit conclure qu'il neft byré i ces reproches, que paree qu d a fait une faufle dépofition. Mais qu'on fuive le récit de cette femme, on ne doutera pas de cette vérité. Cet homme déchiré fans ceffe par les remords qui, comme autant de vautours cruels, lui rongent le cceur, eft adigné. Alors toute 1'horreur de fon crime fe préfente a lui. II „e peut pas la loutenir- d tombe en fyncope. Eft-il revenu de cette défaillanee, il va chercner le père Héte, Jéfuite, qui étoit ion confelfeur. Sa femme 1'accompagne julquau grand collége, ou demeuroit  contre une femme. ^ 2,31 'feereiigieux. Elle arrend fon man ; die le voit revenir entouré de plufieurs jcfuites qu'il coafultoit pour trouvei:uri remède qui cahnfc le defotdre de fa confcience. U quitte ces rehgieux, Sc joint fa femme, a qm d dit, tout pe*>' Aa ««pnrir de fon crime, quil a fait une faulfe dépofition, lorfquil a dit quil avoit vu la Dupre remettre un paquet a la Servant. 11 foutient qu il n'a rien vu, Sc qu'il n'eft point venu chez le fieur Chambri avec cette femme ;& il dit que , pour avoir fait cette dépofition, iU toujours ete inquiet Sc trTlbavoue qu'il a été fuborné par la Dupré, Sc une autre femme , qm eit a dame Rouffi que ces femmes , dont a première eft fa créanciere de mdb b» menaces, a raire cet t»»»»- ^'" > epiefonconfeireurluiaordonnedela ^étraaer, quand il devroit s expofera une peine capitale, paree que le falut de fon ame lui devoir être plus cher que ^ La'femme de Bonnet ajoute qu'étant interrogée par la Dupré pourquoi^fon marine venoit pas depofer, elle repondit qu'il étoit abfent 5 mais ques  232 Fille qui réclame un enfant s'il paroiffoit, il ne foutiendroic pas la faulfeté qu'il avoit témoignée. Elle avoue encore que la Dupré 1'a voulu fuborner. Bonnet a déclaré, depuis, a M. le premier-préfident, &aM. le préfident Cholier3 qu'il avoit rendu un faux témoignage. Ces magiftrats inftruiront fans doute la religion de la cour de cette rétractation. Ce témoin qui, étant unique, ne faifoit pas une preuve régulière, voila fa dépofition anéantie : voila la vérité qui triomphe pleinement. Le mari 1'avoit outragée; fon époufe Ia venge : il la venge lui-même par fes inquiétudes, fes remords & fa rctraótation. La vérité eft aflez puiifante, pour prévaloir fur 1'amour conjugal, fur 1'amour même de la vie; pendant que le menfongeeft fi foible, qu'il fe trouble, feconfond, & cède a la moindre lueur de la vérité. Les autres témoins de 1'information & de la contre-enquête de la Découfu 3 ne favorifent point Pimpofture. Perrette Ovaye 3 témoin de Pinformation, parle des emportements & des inveclives de la Chaiant 3 a qui on vou- ' lottravir fon enfant. On voit jufqu'ou  contre une femme. 233 peut aller la colère d'une véritable mère dans une pareille conjonóture. Ce témoin ajoute qu'elle a oui dire a la Champïn, marreine de l'enfant, qu'elle ne regardoir pas hChalant comme la vérirable mère. Antoincttc Gerboiiy quatrième témoin de l'information, dépofe auffi qu'elle a om dire a la Chaiant que la Champïn ne la regardoir pas comme la véritable mère. C'eft une maxime recue parmi les criminaliftes, que les ouï-dire ne font point de foi en juftice j paree que l'on fcait que les hiftoires qui paftent par plufieurs bouches s'embelliftent, & fe chargent de tant de circonftances, que Pon perd de vue la vérité ; femblables a ces étoffes riches, dont la broderie cache entiérement le fond. D'ailleurs, que fignifient ces omdire; finon que la Champïn pouvoit avoir concu une opinion frivole ? Car on ne voit point le fondement de cette opinion. Une preuve que cette opinion , fi la Champïn l'a concue, eft très-légere, c'eft qu'elle n'y fait elle-même aucun fonds, puifqu'elle n'en parle pas dans fa dépofition, quoiqu'elle faffe 1'hiftoire du baptême de l'enfant. La dame Guillard, époufe du fieur de  qui réclame un enfant Rouffi, troifïème témoin de Pinformanon, ne mérite aucune croyance; puif-, que, fuivant la dépofition d'Jfaheau HJfeur, huitième témoin de la contreenquête de la Découfu, elle a fuborné Bonnet. La dame GuUlard rapporte route 1 hiftoire inventée par la Dupré, non pas comme témoin, mais comme Payant ouï dire a cette fage-femme. Elle dépofe qu'elle étoit préfente lorfque la Dupré demanda l'enfant i la Chaiant, & que celle-ci lui répondit: ft vous ne foutene^ pas que vous m'aver accouchée d'une fille , je vous ferai cajfer la téte. A mon égard, quand je verrols ringt potences drejfées , ,e iefoutiendrol* toujours. Quand la éhalant auroit tenu un pared difcours, qui n'eft rapporte que par un feul témoin, ce feroit le feufenè d'une véritable mère qui, craignantqSe Pimpofture ne prévale, encourage la lage-femme a foutenir la vérité&avec fermeté, en lui propofant fon exemple. La réponfe que ce témoin met dans fe bouche de la Dupré eit vifiblement didée par 1'efprit de menfonge. Elle hu fait dire qu'elle fouriendra en juf-, ace qu'elle n'a jamais accouché la Cha-  contre une femme, 2.3^ lam d'aucun enfantou, afin de me fervir des ptoptes tetmes qu elle M prête, qu'elle ne lui a jamais mis la main dejjiis. ; 11 eft'conftant néanmoins que la iagefemme a non-feulement accoiiche la Chaiant de l'enfant qui fait le fujet du procés ; mais elle 1'a encore deuvree, une année auparavant d'un enfant mort. C'eft ce meme efprit de menionge qui a fait dire k la Dupré, dans fes reponfes, que la Chaiant n'avoxt jamais mis d'enfant au monde. Par quel miracle neuf témoins ont-ils donc vu la Chaiant allaiter fon enfant? Leurs yeux ont-ils été fafcinés? Ou foutiendra-t-on que le lait peut veniï avec abondance a une femme qui n'aura pas été mere ? On voit que, pour foutenir Pimpofture & la calomnie, il faut renverfer toutes les loix de la nature. , . , Anne Gerbou t quatneme temom de Pinformation , dépofe qu'elle a oiu dire i la Chaiant que fon man, de retour d'un voyage, avoit témoigne beaucoup d'éloignement en voyant un enfant chez lat; quil avoit dit que, lorf qu'il partit, elle n'avoit pas dü etre enceinte, & qu'il avoit ajouté: oh! les en. Panes fe font donc bien promptement.  ï^G Fille qui réclame un enfant Cette dépofition n'a aucune vraifemblance. Préfumeya-t-on que la Chaiant fe fut déshonorée elle-même dans une converfarion qu'elle aura tenue avec im témoin qui dit n'avoir aucune liaifon avec elle, & qui la connoit a peine ? D'adleurs ce difcours ne feroit que le langage d'un père chagrin, qui a mis au monde un enfant qu'il ne peut pas nourrir: & c'eft en vain que 1'impofture empoifonne ces paroles, quand on voit Pardeur avec laquelle ce père réclame fon enfanr. On ne s'arrêtera point ï 1'ouï-dire de Dengin 3qu Anne Gerbou rapporte : car Dongin lui-même ne lui avoit parlé que par ouï-dire. _ Quant a la reconnoiffance que fait ce témoin de Ia Découfu pour la véritable mère, a caufe de Ia reftemblance qu'elle trouve entre l'enfant & cette fille, Pon fera voir qu'une pareille opinion n'a aucun fondement. L'étonnement qui faifit Ia Dupré, lorfque la Découfu lui dit qu'elle croyoit que fon .enfant étoit chez Ia Chaiant, & la rougeur qui vint au front de cette fage-femme, ne fervent qua prouver le reproche que fa confcience lui fit alors d'avoir fait périr 1'enfant de la  contre une femme. tyj 'Découfu. A peine revient-elle de 'fon trouble, qu'elle fe fert de 1'idée de cette fille . pour celer fon crime. Perrette Bouilloud, fecond témoin de la contre-enquête, parle d'une négocialion que la Dupré tramoit, afin que la Chaiant lui remit fon enfant pour vingt écus. Cette dépofition établit que la Dupré fe flattoit de corrompre la Chaiant. C'eft dans cette idéé qu'elle crut pouvoir réuflir dans 1'hiftoire qu'elle imagina, pour fe mettre a couvert du fupplice qui la menac,oit. Ce témoin dit que la Chaiant ne vouloit confentir a remettre fon enfant , qua condition que l'on conviendroit qu'elle remettoit fon enfant, Sc non pas l'enfant d'autrui. Cette circonftance fert plus a la Chaiant, qu'elle ne lui nuit. Cette négociation, qui n'eft foutenue que par un feul témoin, prouveroir, puifqu'elle a échoué , que , fi 1'indigence peur, dans le premier mouvement , faire oublier la tendrefle maternelle , la réflexion la rappelle bientbt, pour la faire rriompher. Antoinette Jourdan, troifième témoin de la contre-enquête, dépofe qu'elle a entendu dire a la Servant j  238 Fille qui réclame un rvfant qui n'avoit pas, clans la mauvail'e annte, de quoi nourrir l'enfant, quil auroit mieux valu le laiffer a qui il étoit. Suppofons que la Servant ait tenu ce difcours rapporré par un feul témoin; quelle conféquence peut-on tirer d'un langage que le dépit fuggère a une femme qui eft dans une extréme nécedité? Quand on eft abattu par le chagrin que caufe une tnfte fituation , on croit le foulager, en difant tout ce qui fe préfente a 1'efprit, vrai ou faux. La raifon abandonne notre langue, & la lailfe guider par Ie caprice. D'ailleurs Antoinette Jourdan pourroit avoir confondu le difcours de Ia Servant. Nicole Magnin s quatrième témoin de la contre-enquête, fervira a eclaircir certe penfée, Elle dépofe qu'ayant vu l'enfant qui revenoit de nourrice, la Servant lui dit qu'il autoit mieux valu lailfer cette petite fille ou elle étoit; c'eft-a-dire en nourrice. Antoinette Jourdan aura entendu ce même difcours: elle 1'aura confondu avec celui qu'elle rapporte, en prenant un mot pour un autre; ce qui paroit forr facile. Voila ou fe réduifent 1'information & la contre-enquête de la Découfu. Une fage-femme qui concerte fa dépofition  contre tint femme. 239 avec un témoin qu'elle a fuborné : des difcours vagues & généraux de quelques témoins : des conjectures vaines èc frivoles. _ . f Ce foible & léger amas d'indices prevaudta-t-il fur les preuves teftimoniales & littérales de la Chaiant? Faire une pareille queftion, c'eft demander fi des foibles lueurs, fi des crépufcules d'une lumière chancelante & incertaine doivent effacer le foleil dans fon midi. RÉPONSES AUX OBJECTIONS DE LA DÉCOÜSÜ. Première Objeclion. La Découfu fe fait un bouclier de Phonneur qu'elle devroit avoir. Quelle apparence, dit-on, qu'une fille voulur fe déshonorer , pour fe dire la mère de l'enfant d'autrui? Son défenfeur, donnant 1'eflbr a fon éloquence, dit que la tendreife maternelle a fait taite fhonneur en cette occafion. On a obfervé que la fage-femme Pa trompée, & que fon intétêt la follicite a pourfuivre ce procés. Après cette obfervation, l'on répondra qu'il n'eft pas furprenant de voir  240 Fille qui réclame un enfant taire un honneur qui a perdu la parole -long-tems auparavant. Mais paflons 1'éponge fur toutes les eouleurs de 1'éloquence. C'eft une fille qui, étant déshonorée réellement, léve tous les voiles de rhypocrifie, pour paroïtre telle qu'elle eft. Si elle facrifie quelque chofe, ce n'eft pas 1'honneur, mais un fantóme d'honneur: Sc encore ce foible facrifice, elle le fait a fon intérêt. On ne s'écarte point ici de la vérité : car fi 1'honneur d'une fille eftproprement fon unique Sc fon véritable bien, on peut regarder la Découfu comme une fille prodigue, qui a diffipé fon patnmoine: dijfipavhfuam fubftandam, vivendo luxuriosè. Luc xv, 13. Mais doit-on la mettie au rang des filles, elle qui publie qu'elle eft femme, grace a fon incontinence! Seconde Objection, On fait, dans le monde, une autre objeótion. La fage-femme, dir-on, a perfévéré jufqua la mort dans 1'hiftoire qu'elle a dépofée en juftice. L'heure de la mort eft le triomphe de la vérité: alors le bandeau que nous avons devant les yeux fe léve j nos paffions font amor- tiesj  contre une femme. 241 ties; notre confcience, dont nous avions lï fouvent étouffé la voix, rend hautement témoignage a la vérité; & nous 1 voyons les objets tels qu'ils font, & non a travers les eouleurs de notre amour-propre. Voila l'objection dans toute fa force. On répond qu'on ne prouve point que la fage-femme ait confelfé, a 1'heure de la mort, ce qu'elle avoit depofé. On n'établit cela par aucun acte jtrridique. Ainfi on doit lailfer dans le doute fa ! perfévérance dans te crime, ou fa ré- j tracf.atidn. Mais fuppofons qu'efre ait perfifté dans fa déclaratioii, il s'enfuivroit qu'elle a grolfi le nombre des criminels fur lef- 1 quels Dieu exerce fes vengeances, en 1 leur endurciffant le cceur, & leur fermant la bouche, afin qu'ils 11e confeffent pas leur crime. La mort nous furprend toujours : c'eft une vérité qui nous 1 eft prédite par 1'oracle meme de la vé- 1 riré. VernamJicut fur. Un criminel mouranr ne croit point être au bout de fa I carrière. II fe Harte de revenir en fanté, I & il tient captive une vérité dont 1'aveu I fe feroir périr. Ainfi, quoique l'on dife que la vérité règne a 1'heure de la mort, il eft Tomé VU. L  2.42 Fille qui réclame un enfant bien des exemples de ces impénitences finales, oü le pécheur entre dans le tombeau accompagné du menlbnge Sc de 1'impofture. On a même appris que la fage-femme eft morte fans confeffion. A Dieu ne plaife pourtant qu'on veuille ici Ia réprouver. L'on n'ignore pas que fon falut a pu être 1'ouvrage d'un moment de grace; que Dieu frappe, quand il veut, fes grands coups de fon bras. Mais, s'il a fait ce prodige, c'eft un myftère qu'il n'a révélé a perfonne ; Sc n'ayant pas laiffé le tems a cette criminelle de faire hautement fa rétraétation, il femble qu'il ait voulu laifler cette converfion dans le doute. Troi/ième Objeclion. L'objeéKon que l'on fait valoir davantage, eft tiree de 1'intervalle de tems qui s'eft écoulé depuis le commencement du procés jufqu'a 1'enquête de la Chaiant. Le procés a commencé par la J plainte de la Découfu, le r 1 aoüt 1709. Dans le mois fuivant, ia Chaiant & la Servant ont été interrogées , 8c elles n'ont fait procéder a leur enquête que Ie 13. juillet 1713. Voila prés de quatre  contre une femme. _ 243 1.' ii„ T '^.n mnAnA rle-la aue. ans a ïnueivauc. 1 » fi la CWanf eüt été la véritable mere, elle n'eüt pas héiité fi long-tems a faire fa preuve ; & l'on veut infinuer qu'elle a eu befoin de tout ce tems-la, pour eagner fes témoins. 11 ne faut compter eet mtervalle de tems, que depuis la fentence du 18 juin 1710, qui permit a Chaiant & a fa femme de faire leur preuve. Voila donc prés d'une année qu'il faut rayer du compte que l'on oppofe. S'ds ont : Jïffir^ r'pft narce aue leur ïndi- eence ne leur permettoit pas d'avancer les frais de 1'enquête. L'abfence de plufieurs témoins leur a encorc fait remettre cette procédure, quand ils ont été en état de la faire. _ Au fond, les témoins qu'ils ont lait entendre, étant irréprochables , ont parlé le langage de la vérite. Qu elle prle tót, ou qu'elle parle tard, elle ne doit rien perdre de fa force. ^ II eft inutile de répondre a ces teloches vagues & générauxque fon fait contre les témoins. Ce font de ces objeótions de ftyle, qu'il femble que 1'oa foit convenu de faire dans le palais, pour alonaer les écritures. Ceux qui font ces objecYions, fcavent qu'elles ne Lij  244 Fille qui reclame un enfant font pas fohdes : mais le courant de leur plume les entrame. On pourroit comparer eet ufage du palals a celui des comphments que l'on ne prend point clans le monde, a ia lettre. ' II fuffira donc de dire quê les témoins de 1-enquête n'ayant point été reproers, ne peuvent plus recevoir aucune attemre & que leurs dépofitions fubfiltent dans 'toute leur force. L'on foutient encore 1'impofture par h reftemblance que l'on fuppofe emre 1 enfant & la Découfu. 1 ll.^ut d'abord obferver que la reffemblance n'eft fouvent que dans 1'idée de certames perfonnes, & que bien des gens n ont trouvé qu'un fils reifembloit a fon pere que lorfqu'on leur a dit que lun etoit le fils, & que I'autre étoi?Ie pere. 11 y a des opinions dont les hommes font efclaves : ilsveulenr fouvent qu il y ait un air de familie ou il n'eft point. S'd y a quelque reflemblance a laquelle on ne doit point s'arrêter, c'eft fans doute celle que l'on trouve entre un enfant & une autre perfonne. Rien «eft fi ftqet a changer, que les traits a un enfant. A mefure qu'il croit, fon m de vifige change fouvent. Ainfi l'on  contre une femme. 245 Voit s'évanouir la reflemblance quil avoit avec quelques perfonnes. La reflemblance n'eft pas precifcjnent la conformité des traits, mais je ne fcais quel air, qui réfulte de 1'aflemblage des rraits, que l'on trouve être le même entre les perfonnes qm fe reffemblent. Or quelle eft la caufe de eet air de vifage ? N'eft-elle pas purement fortuite ? Ou, fi l'on veut raifonner phyfiquement, nous fommes fujets, dans le ventre de notre mère, a diverfes impteflions qui peuvent changer la figure de nos traits, qui font tendres Sc flexibles. Si nous avons eu une impreflion qui nous a donné un certain air de vifage , nous pouvions avoir une autre impreflion qui nous auroit donné un air différenr. Ainfi nous aurions pu n'avoir aucun rapport i cette perfonne a qm nous reflemblons. * Quand on voudroit avoir recours a Timagination de la mère, Sc a la communication du cerveau de la mère avec le cerveau de l'enfant, fuivant le principe du difciple de Defcartes, qui lui fait le plus cThonneur (1), il s'enfm(1) Nicolas Malebranche, fils de Nicolas Malebranche, fecrétaire du roi, & de Cathe- L iij  246" Fille qui réclame un enfant vion que nous aurions un certain air de vilage, paree qu'il s'eft excité, dans Ie rmede Laiifon -naqiiit \ Paris le 6 aoüt 1638 • Centra dans la congrégation de 1'Oratoire Tl ^ t ^gt-un^ns, le a8 janvier 1660 II s attacha d abord a 1'étude de 1'hiltoire ecclé- t%Tf' &d6S kn§UeS f?avantes- Maisle teu de fon genie ne trouvoit pas, dans la connoilTance des faits & des mots, 1'aliment dont i.I ayojt befoin. Le P. Makbranche quitta ce genre de travail, pour fe livrer tout entier a les propres meditations, dont le premier fruit tatle hvre de la Recherche de la vérité. Le traité de lhomme de fut la def j lui ou_ v it la «mère de fes recherches. Cet ouvrage fut pubi 1673. C'eft affurément un des hvres qui fait le plus d'honneur a 1'efprit humain ; on y voit jufqu'oü peuvent le porter V -I6 \a r/flexion & de la méditation. i eft difficile defeperfuader que Maltbranche a fum Defcartes; & fi pon ne fcavoit q e l,,n a eent avant I'autre, on croiroit qu ils fe font rencontrés. Le génie de Male- tZl ua fe b0rn°" Pas a Pénétrer dans les idees abftraites auffi lom qu'il eft pcffible dy penetrer, il f?avoit les préfenter dans tont leur ,our & en même tems, les fortiner par Ja liaifon qu'il mettoit entre elles aZtT(* di^°n eftP"re & cMtiée, eue r« f, M gmtv,qU£ deiMndent les matières fubbmes qu'il traite, & tome h confifte a dtre que nous voyon, tout en Dieu, q. e Ren eft un miroir qui repréfente tous le- objets, tant reels qu'imag'.naires, & fur  contre une femme. 247 cerveau de la mère , une^trac*.plutot qïfune autre qm pouvoit fe foim.r, K lequel notre a lans cefle k je fijte, eft neut-être ch.menque Mais il e - rablcment expoie, que i on_»^ , fant, de cramdre ^ue^e^ ' ès fon imafans s'en appercevoir, penfedar*e gination, que d apres la real te. re . aéclarè une guerre plus «"Egukggg La tlon , & perfonne n'en a ete mieux urv Se étL forte & b#g|'ö?ÖS Ce fyftême, fuivant lequel ™^es d ^%^^^te^^ fion de la recherche de la «™ «ï» « Sratotraïtè de la nature & de laf ace, que JA" en publia en x68o, & dans lequel 1 etoit pas d'accord avec les idéés du dotoux. ^ les oifvrages du P. f^^èk & l'on fité par ff, roi f Ag^'^ le rlit crae des pnnces dAUemagne ni la converfation , ü n attecta iu v „  H8 Fille qui réclame un enf„„, mort Je 13 oöobre ttt^ c nation dans lellen e &? *S *entioö & Je reK *■ aif°n 41135 Fat- Par les *S Je «rf, ,0U" lu avec Plai»> «ïavoireu des idé« n» ,eft Pas tour abftïv ^n' 1uexle Jes avoir * «Je ZtitT^TeUesfont/a Jap°- avoir préfenVtc peu attentif> & de les  contre une femme. M? peut comparcr aces Mies dor extre-. Lement minces, dont le momdre ven rioue-Ainfilemomdreraifonnemen de phyfique fait évanouir un pareil tyeniq'ui eft d'ailleurs démenti par 16 CombTen 1'hiftoire nous repréfentet-elle d'impofteurs qui, fut:1e tonde- ufnrpéle nom de gens Wjf^ï voient aucun bende parente L hiftoire fa faux Caille, fi femblable rable (0 qui a embarratfé la prudence eore toute récente? • Des naturaliftes curieux n ont-ils pas obfervé que les enfants des femmes SlesVembloient aleurs^s Lelies n avoient point aftocies a ouvra«?On prétend trouver la caufe de l §effetdanPsnmaginationd;uneW me qui, dans le tems de fon infidehte eft aV e de la crainte d'fctre furpnfc par L mari. Ce feroit une queftion a Sminer,fielleaalorsL'imagmation f „ rp „Mfofe alors fuivant le torrent *i du faux taille, qu u r;.,vot ' au véritable. Cette note efl de Af. Gayot.. Lv  ; m i - ^ . ut ld j^/ecou u. Le nu- Wie aunpenchant extraordinaire a don- ^rdanslemerveilleux s ü reooit avi- dement toutes les hiftoires qui le furFenne t. ^ ^ fJe u SY-'^-plaint, en difant qu ceft dommage qu'eiles ne foient Ls vraie, Rien n'eft plus étonnaut,  contre une femme. l%t de voir une fille difputer un enfant a une femme. L'exemple eft fi fmgulier> qu'il ne s'étoit point encore prelente. C'eft bien le cas de s'écrier que c eft dommage que cette fille ne foit pas la véritable mère. La vénte vient bien mal-a-propos gater la beauté de 1 rui- toire. ' .4* « Qu eft-ce que le public? Ceft une multitude de gens efclaves de leurs préjugés, qui fe laiflent eblouir par des dehors fpécieux, qui jugent ordinairement par les premières impreifions des fens. Mais qu'eft-ce qu'un magiftrat? U elt un homme éclairé , qui dépouille toute prévention, qui s'ouvranr le chemin a la vérité, prend pour guide une raiion épurée* en un mot, qm prend pour mo dèles les jugements de Dieu meme. Un ne doit donc pas craindre que la cour juee comme le public. D'ailleurs, on conviendra que Ia coniedure a d'abord favonfe U prevention. Une fage-femme qm depole en faveur de la faulTe mère, un témoin qui fortiÊe cette dépofition par la fienne. L'impofture de la fage-femme fe fauvoit fous un nuage favotable. Le loui que 1'enquéte de la Chaiant a. Lvj  U 2 Fdk qui réclame un enfant repandu fur Ja vérité, rie s'étoit pas encore leve. II n'en falloirpas tant pour. fedune le public; & quand le préiugé a gagne une fois fon imagmation, il réjute opmiatrément a la vérité, &c ne im ccde prefque jamais Ia vidoire. Dommages & intéréts de Jean Chaiant^ & de Jeanne Pefche. Ils ont demandé que la Découfu fut eondamnée a leur payer 6000 livres par rorme de dommages & intéréts, & ds fe font réfervé le droit de faire iupporter aux béritiers de laZWces dommages & intéréts fobdairement avec la faulfe mère. Cette prétention eft conforme aux tegles de 1'equité. L'impofture & la caomme de la fage-femme ont donné ueu aux dommages du père & de la mere. Si la faulfe mère a- d'abord été j £f.ï , Venté *eft édair«e lui a deffille les yeux. Ainli fa perftévérance dans fon erreur la rend auffi criminelle que Ia fage-femme. Suivant la rè^le des dommages & intéréts, on les adju2e dans toute leur étendue, quand ils ont ieur fource dans le dol , la fraude & la mauvaue foi de ceux qui les caufent  contre une femme. jjf 3 kt leut origine, c'eft la calomme, 1 ü£ U Sn doit conGdéter combien 1W neur du père 8c de la mère ontreende ïoin depuis prés de fept ans, d aignr fa ceffe. LaJuftice n'a point de bala eou elle puifle pefer jufte les dom- alirmes & les inqmerudes. mortel es. „mrès •> Un invite ie» "g,^- - i «ta, les at.em.es qu'cu refeaX*. ; , Kr f, femme. Qui pourroit. expri c'eft bien alors qu elle auroit pu s ecrier.. HélasUnm'impoiantunelolftfévèr^ todsDieux^edevlex-vousl^un. ecear de mère.  "is ae i enranrement, & I-, més' mere1ue '"Mtureyaimpri, prendre ce trifW 7 ' 1 °fanc Pas  contre une femme. 2,5 droit èc même par corps; fans prejudiee de la folidité pour ces mêmes dommages, intéréts ê/dépens contre les hennen de la Dupré; pour raifon defquels ds ;! fe réfervent tous droits * aftions: & quil leur fok permis de faire afficher votre jugement par-tout oubeloin iera, ïquilLpalfLurre^leur caution juratoire, nonobftan.t 1'appel. i. : J„»-i«i fp« rnn- Le prpntreur nu wl u.u«"«. ~- — clufions , pour faire adjuger l'enfant a la CA«nW* Mais la Découfu ayant enlevé cette petite fille , la Chaiant ne pourfuivit pas: par confequent U n y eut point de jugement. Maleré le ton d'alfurance avec le- . O, j r>: ,„7 -i #v-rir ra mémoire, malgréle pathcnque quil a voulu y mettre, malgre ce quil appelloit les traits d'éloquence qu il y a femés, il s'en faut bien quil ait convaincu que l'enfant en queftion ne rut  28 Fille qui réclame un enf. &c pas celui de h Découfu. Je h4tré] pendrai pomr de combattre fes raifonnemenrs Pour Ie faire avec fucces, i\ faudroic avoir les écrirs qui ece/aits P°" cette fille; & je\9 icais ou les prendre.  Hl STO I RE DE LA MARQUISE D E G AN G E> LA marquife de Gang* étoit fitte * enfant muque d'un parucuher d Av^ Lit feule hénuère de fofggfê* „el, nommé Joanv fieur de richede prèsdecbq-cenr miUeW On la nommoit, avant qu elle fut ma ri e mademoifdUdeChateaublanc, ^ Devenue orpheline, elle paffa dans* maifon, & *"°us U condul^e rr 1 over 1'aee la douceur de fon caractere, riX'ents paifibles de f.- prit bi concdièrenr toute la tendrefle de eet aieul qui fit connoitre que la tortune 5dé?able dont il dot que fa peüte-fiUe porteioib a celui  *8 . Hijloire ^ugero. digne ,é Wf ^ i I'avantaae d'lre i(T ^ U "f"*** «obles K des Zl d une des P1"» de I ta £VlTT^ etó^ «P« Ion ait vues Te f ' ' charte de 1080 parleTn" f6" ,Mais une Janne, feienem- fn, B°nirace de Caflel- f ome, naquit 4 T" £nS fit a 4 Paris en i69ï. SoIZ^l \^monr^ s annorJca des Vage dein P°Ur 5 peintl,re ^ desportrairsgtrÏ refi? \7J 11 deffinoit dant fon père le deït , mh^nts. Cepen- Dansles vidtïïïe^^  de la Marquise de Gange. 161 trait & eet ouvrage eft mis au nombre des c'hefs-d'ceuvre de ce célébre artifte. Voici la defcription de fa perfonne, d'après un ouvrage imprimé a Rouen faifoit avec fon maitre , au lieu d'écouter les ndfonnements du dofteur, il remarquoit 1 attitude du malade , & des perfonnes qui 1 environnoiertt, pour les deffiner enfuite. A quinze ans, le maréchalde Vnry le chargea de peindre la chapelle de fon chateau de Couben en Brie. A Rome , il s'apphqua a defliner d'après les antiques , & d apres Raphael & U Tuien; ce fut d'après ces modeles qu .1 forma fon goüt pour le deffein & pour le coloris 11 s'acquit, pendant fon fejour en Italië , une telle réputation, que les etrangers , & les Italiens mêmes s'empreffoient de le faire travailler. II avoit, pour le portrait, un talent extraordinaire. II porton 1 art ,ufqu a rendre les graces délicates du fentunent. 11 faififfoit & rendoit avec toute 1 expreffion poffible , non-feulement la reflemblance parfaite, mais IcS fympt&mes du caraftere & du tempérament de ceux qu il pe.gnoit. De retour en France, le Roi 1'annoblit, & le fit fon premier peintre, après la mort de le Brul. II peignit fix fois Louu ff v&P^ fieurs fois toute la maifon royale ; & fit les portraits de toutes les perfonnes de la cour. C'eft lui qui a peint a frefque le dome du Val-de-Grace a Paris. La douceur de fon caraöère, les agréments de:fon> efpr.t & taifiipêriorité de fes talents lm firent diUuftres amis. II fe trouvoit fouvent avec UapeUe* Boileau, Racine & Molière.  262 Hiftoire en i fi6*7, irititulë /« vérhalles & princjpales circonftances de la mort déplorable de madame la marquife de Gange. Son teint, qui étoit d'une blancheur éblomfiante, fe trouvoit orné d'un rouge qui n avoit rien de ttop vif, qui s'uniiïoic SC ie confondoit par une nuance que lart n'auroit pas plus adroitement ménagee, avec la blancheur du teint L'éelat de fon vifage étoit relevé par le nou-decide de fes cheveux placés aurour dun front bien proportionné, comme ï £ Pei"rre du meiUeur goüt les eüt deflines Ses yeux grands & bien fendus étoient de Ia couleur de fes cheveux: & le feu doux Sc percanr donr ils brilioient, ne permettoit pas de la regarder fixement La petitelfe, la ferme, le tour de fa bouche & la beauté de fes dents n'avoientrien de comparable. La pofition & k proportion régulière de ion nez ajoutoit d fa beauté un air de grandeur qui infpiroit pour elle autant de refpect, que fa beauté pouvoit infpirer d'amour. Le tour arrondi de fon vuage, fermé par un embonpoint bien menage préfentoit toute la vigeur Se a fraicheur de la fanté. Pour mettre le comble a fes charmes, les graces lembloient dingerfes régards, les mou-  de la Marquife de Gange. 26*3 vements de fes lèvres Sc de fa tere. Sa taille répondoit a la beauté de la tete, fes mouvements Sc les geftes des plus beaux bras Sc des plus belles mams du monde "paroiflbient encore etre 1 ouvrage des graces. , . Je ne garantis pas la fidelite de ce portrait; mais il eft toujours certain que la marquife de CafieUaae etoit d une beauté rare. Louis XIF, qui etoit dans la fleur de 1'age, en parut frappe Sc lui donna de grands éloges. 11 voulut même danfer avec elle dans ces ballets ordonnés par la galanterie Sc la magnificence. U lui fit eet honneur deux tois; Sc chaque fois elle remporta le prix des araces Sc de la beauté. La fameufe ChrifUne, reine de Suéde, étoit alors a la cour de France, Sc dit que, dans tous les royaumes qu'elle avoit parepurus, elle n'avoit rien vu qui egalat l* belle Provencale (c'eft ainfi que l'on nommoït inadame de Caftellane) Sc que, ft elle étoit d'un autte fexe, elle lui voueroit fon cceur & fa tendrefle. Sa beauté faifoit trop de brult pout que la chronique fcandaleufe de ce t%ms-la ne s'exercat pas fur fa conduite. On lui a attribué quelques aventures galantesj mais on n'en a fourm aucune  l64 Hiftoire preuve ; on n'a même rapporte aucuns raifonnabï7 ^ io^n La bonté du caraclère répondoit i fa beauté du corps: elle avmi- l'f, fornM~ • «li " • 1C 1 humeur oc able elle etoit compatifianre au malheur d'autrui. Quant d feS « etoit plus fetré, que vif; il iKj* de fohdité, que de briljant. P * Hlle jouilFoit de toutes les douceurs que procure la beauté ornée des don' ^ lafortunejorfqu'on apprit le itu fege d Jères danlPa ^ «j ^cue, & que fon mari, qui y com„ S S ^ *«A dansTes «ors Ceux f f « n-pns que la ró^i^ * avoit fait de leurs fe„Y f W{a"e n„vil« , - • ux> loutenoient que e n avoit point d'efprit, & que ce n ctojtqu'une belle idole, épand rent lebrun qu'elle avoit dit enlZt nantl^adent de fon époux\ uTL Ses affaires la rappellerent bien-tAr de foupirants, que fa fortu„e & fa beautc mirenr a fes genoux. Mais 1'a monr prononCa en faveur du fa , de  de la marquife de Gange. ló"? de ving: ans, & d'une familie diftinguée dans le pays. Il avoit une taille avantageufe & bien proportionée; les traits du vifage d'une beauté male, &C cependant la phifionomie du monde la plus douce. Rien ne paroilfoit mieux afiorti que ce mariage : il réunilfoit les deux plus belles perfonnes du canton;lage étoita peu prés le même : la richefle de 1'époufe compenfoit la noblelfe & les qualités du mari, qui d'ailleurs n'étoit pas fans fortune. Il étoit baron du Languedcc & gouverneur de faint André dans le diocèfe d'Uzès, au bas Languedcc. Ce mariage fe fit en 1658; la marquife avoit alors vingt-deux ans. Les commencements de cette union furent des plus heureux. Le mari, enchanté de fa femme, ne la quittoit point; & cette afliduité faifoit le bonheur d'une époufe, qui n'en connoifloit d'autre que la poifelfion du cceur d'un homme fi aimable & fi aimé. Deux enfants, un gar^on &c une fille, furent les gages de leur tendrefle. Après un certain tems, le marquis commen^a a fe répandre un peu dans la fociété. Sa femme ne fe cru pas pbligée de fupporter la folitude cü la Tomé VU. M  Hijloire diffipation de fon mari 1'auroit lailféeL* Elle vit du monde & en recut chez elle. Mais elle ne fe livra a la compagnie que pour prévenir 1'ennui, fan? ionger a former, avec les hommes qu elle voyoit, d'autre liaifon , que celle d'une fociétéaimifante:& la vertu la foutint toujours dans ces difpofïtions. Si elk s'appercevoit que fes charmes excitaflent dans le cceur de quelqu'un, d'auwes fenrimens que ceux d'une Galanterie honnête, elle 1'évitoit, pour fe her avec d'autres dont les vues yuflent moins intéreflees. Toute la réferve & toute la régularité qu'elle put mettre dans fa conduite ne la garantit pas de la jaloufie de fon man. Honteux d'abord de fe d'une paffion qui jette toujours du ridicule fur celui qui lailfe voir qu'il eneft polfédé; ne pouvant* d'ailleurs fe diffimuler ï lui-même que la conduite de fon époufe ne lui en donnoit aucun motifraifonnable, le marquis deGange paclia, tant qu'il put, 1'agitation que lui caufoient des foupcons dont il fe rendoit a lui-même le témoignage qu'ils étoient fans fondement. Mals le chagrin qui le dévoroit engendrpit Ia mauvaifé humeur • a cej<  de la marquife de Gange. iSy air de fatisfadHon & de joie qui 1'accompagnoit toujours , lorfqu'il rejoignoit fon époufe , avoit fuccédé un air fombre Sc trifte. Aux propos agréables Sc aux aveux tendtes qui, jufques; la, avoient fait le fond de fa converfatïon, avoit fuccédé une fécherefle Sc une j| dureté qui font les avant - coureurs J ordinaires d'une rupture éclatante. * Ainfi toutes les reifources que la marp quife pouvoir chercher dans une diiïïÈ pation honnête , étoient empoifonées < par les chagrins domeftiques que 1'huI meur brurale de fon époux lui faifoit 1 elfuyer fans ceife. Un événement, dont elle auroit du attendre la fin de fes maux, ou du moins du foulagement dans fes peines, préci■ pita la marquife dans un abime de I tourments Sc de malheurs. Le mairquis de Gange avoit troisfrcres. L'un éttfit le comte de Gange „ I colonel du régiment de dragons de 1 Languedoc, qui fe diftingua dans la ! fuite, par un trair de générofité dont i j'aurai occafion de pariet. Le fecond des frères du marquis; étoit l'abbé de Gange. Le róle qu'il va jouer dans la fuite de cette iiirration cxige que je le fafie connoitre. 11 avoit M ij  SuTS Hijloire beaucoup d'efpritj mais il n'en faifoit ufage, que pour voiler les démarches que lui infpiroit le plu? horrible caractére. La débauche, 1'impiété, la fcéléxatefle 8c la férocité formoient le fond de ce caraétère. Lhabit eccléfiaftique quil avoit adopté, fans être revêtu d aucun ordre, lui avoit paru plus propre a couvrir 8c d favorifer fon libertmage. II étoit impérieux , 8c vouloit que tput céddt a fes idéés 8c d fes volontés; il étoit violent, emporté dans fes palfions, & capable des plus grands excès.. Mais, ce qui le rendoit le plus dangereux de tous les hommes, ii etoit rufé, artificieux, & d'une adrede incroyable dans 1'art du déguifement. Perfonne, quand il le vouloit, ne paroinpit plus honnête-homme plus aimable, plus dpux, plus officieux' plus complaifanf, , Le chevalïerde Gange ,.troiheme frère du marqms, étoit un homme médiocre fmt pour être gouverné, 8c qui marchoit, felon qu'il étoit conduit , dans fa route de la vertu, ou dans celle du mme. L'abbé fon frère s'étoit emparé de lm, 8c en difpofoit d fon gré : il ne fe donnoit même pas ia peine de lui jxjdiquer les motifs des loix qu'il lui  'de la marquife de Gange. 2 6" 9 ïmpofoit. Mais il avoit eu 1'art de lui cacher 1'afcendant qu'il avoit pris fut lui; enforte que le chevalier croyoit n'agir que de fon propre mouvement, quoiqu'il ne fit aucune dématche que par Pimpulfion de l'abbé. Ce formidable fcélérat s'étoit aufh rendu le maitre de 1'efprir du marquis. II lui avoit inlinué qu'il lui étoit entièrement dévoué; 8c que, par fes confeils, il étoit en état de le guider d'une manière propre a foutenir 1'éclat de leut maifon. 11 lui donna une grande idéé de fa fcience dans 1'art de régir les biens, Sc d'en employer utilement les revenus. En un mot, il laiffa au marquis la qualité de maitre, 6c attira a lui route 1'autorité. L'abbé de Gange, ayant ainfi af range toutes chofes, vint, avec le chevalier y demeurer chez leur frère commun. II n'eut pas plutót vu, de prés, les charmes de fa belle-fceur, qu'il fentit pour elle les premières impreflions de 1'amour. II. n'étoit pas acoutumé a réfifter a fes palfions; il donna a celle-ci un libre cours, & fe flatta que 1'autorité dont il s'étoit emparc dans la maifon de fon frère foumettroit fa belle-fceur i fes vues. M üj  270 , Hijloire Ilcmtclevoircomrnencerresaruques par chercher i pW II fCiu fi bie„ xranquillifer 1'efc du ma^uis l£ l" venu& lafidélué defafe^e/qu'l Z'a/^' ne voulut pas que fa belleiceur xgnorat a qui elJe devoic Je ^ ^es beauxjours dont elle jouiifoir. II ne iui degurfa point qu'ils étoient fon ouvrage oc le fruit de 1'afcendant qu'il -vmtfurfon mari, dont il tournoules volontes, & même les paifions, a fOIl gre. La marquife fut fachée d'avoir une obbgation auffi elfentielle i un homme Pour qui, dès Ia nrfmlir. f—**wv^ vue, ene avoit concii une antipathie invincible. öans connoitre fon caractère, elle 1'avoit le7e', * craig™ qu'il ne voulut abufer du fervice qu'il venoit de lui rendre; fes appréhenfions étoient forti&esparlefoin qu'il avoit pris de 1'en mftruire lui - même. feise valoir un fervice que l'on a rendu, c'eft en exiger de la reconnoilfance. ö Ede ufa, pour le remercier, de ces eompliments vagues ; f s 1 expres on d'une politelfe ufuelle, que *elie des fentiments du cceur • & p£0_  de la marquife de Gange. ij i rïonca des phrafes qui font de pure convention dans le ftyle de la fociete d'un air fi froid, qu'il étoit impoflible de ne pas s'appercevoir que le cceur Sc la bouche n'etoient point d'accord. II fut piqué de voir qu'il n'avoit pas rétfffi a infpirer la reconnoilfance, qui étoit le fentiment par lequel il avoir compté s'infmuer dans le cceur de la belle-fceur. Mais fa vanité lui fit croire qu'il y entreroit par fes propres agrements. II eut beau appeller a fon fecours les petits foins de la galanterie, Sc le charme que , par fon efprit, il foavmt mettre dans la converfation , il ne fur payé que d'un fond d'indirTérence, couvert des dehors de la politefle. 11 réfolut enfin d'éclaircif fon fort, Sc de .s'expliquer nettement. La marquife alla pafier quelques jours d la maifon de campagne d'une de fes amies. Il s'y rendit. On fcavoit que perfonne n'étoit plus agréable que lui en compagnie , Sc qu'il étoit 1'ame de la converfation; il fut aceueilli de tout le monde, Sc le defir de plaire a fa bellefceur le rendit encore plus agréable qua 1'ordinaire. ■ . Les femmes voulurent fuivre a cheval une partie de chalfe. L'abbé Miv  VI Hijloire paffion,& famlTr e^emCnC fa «ons de fer SrfeS eXPref, ter air de rimidiré oni arrnm mais elle prit eet a l pCrer' » compIime„r. , ""pareil * ce nno ;» V • a~vuusav°us-même , iui ait. « feavez-vous ma » dame, que vorre bonheur eft emrt » mes ma nc entre  de la marquife de Gange. ij j » vous dis, pour me prévenir Sc me jj traverfer. Je fuis bien atfuré que , »> quelque chofe que vous difiez, Sc » quelques mefures que vous prenïez » pour vous faire croire, vous ne ferez »j pas crue. Pour le repos 1'un de I'autre, jj „e nous heurtons point: répondez a » ma tendtefle, & nous aurons tous jj les deux des jours fereins Sc riants. » Si vous avez appris a m'aimer, lui »j lui dit-elle , apprenez a m'eftimer, h & fcachez que la perfpeétive du plus >j parfait bonheur, Sc la crainte de la jj deftinée la plus malheureufe ne pour>» ront jamais me déteiminer a manquer jj a ce que je me dois, & a rien faire » aux dépens de ma vertu. D'ailleurs, jj dit-elle en finilfant, fi j'étois capable jj d'une foiblelfe, vous fcriez le dernier jj homme pour qui j'en aurois ». Ces dernières paroles humilièrent notte amoureux , fans le guéiïr de fa paffion, & fans lui faire abandonner fon projet. Rendu alui-même, il ranima fon courage Sc fes efpéranres, Sc fe flatta qu'en redoublant d'éganis Sc de complaifances, il viendroit a bout enfin de vaincre la vertu de fa belle-leem; car il ne pouvoit fe petfuader que le refus mortifiant qu'il avoit effuyé, Si Mv  274 Hijloire la déciaration hnmüiantê qui I'avoit rermmé ■ puifent provenix d'une amre iource que de cette vertu qu'il .vouloit iubjuguer; & que tout autre homme que lui, en pareil cas, auroit éprouvé la meme mortiftcation. La marquife conrinua d'ètre heureufe; mais elle jouüfoit de Ion bonheur fans que fon antipathie pour celui qui en étoit 1'auteur, püt' s adoucir. Elle prenoir les plus grandes precaimons pour ne pas fe trouver feule avec lui. Le chevalier, de fon cóté, n'étoit pas moins amoureux que fon frère : mais ia douceur de fon humeur rendoit fon entrenen agréable a la marquife: elle lui raiioit meme des ouvertures de cceur. <^e n eft pas qu'elle eüt pour lui aucune impreffion d'amour ; mais ia comparaiion _qu elle faifoit de lui avec l'abbé toutnoit a 1'avantage du chevalier & Je failoit regarder de bon ceii. , Les homés <]ue fa belle-W lui temoignoit lui donnèrent un peu d'efperance. Leur liaifon n'échappa point a L abbe; voyant meme qu'elle fourffoit volonners fon frère , tandis qu'elle I evuoit avec foin, il ie crut aimé! il les eipionna, fans rien découvriroui püt lui feirefoupconnerla vertu dela marquife.  de la marquife de Gange. 275 II comprit que 1'afcendant qu'il avoit fur le chevalier échoueroit contre 1'amour. 11 prit le parti de la rufe. Nous aimons tous les deux, lui dit-il un jour, la femme de notre frère : ne nous traverfons pas; je fuis le maitre de ma - pailion, Sc je peux vous la facriher : mais fi, après avoir elfayé de vous rendre heureux, vous n'y pouvez réuüir , retitez-vous, Sc j'elfaierai a mon tour : mais ne nous brouillons pas pour une femme, lis s'embrafsèrent, Sc 1'accord fut coneïu. L'abbé, dans ce traité, avoit pour but de s'alfurer fi la vertu feule de la marquife étoit la caufe de la difgrace j qu'il avoit éprouvée; ou s'il ne la devoit qua la répugnance qu'elle pouvoit avoir concue pour fa perfonne. Le chevalier, débarralfé d'un rival fi ! formidable, redoubla fes foins auprès 1 de la marquife, qui les recut avec com, plaifance, tant qu'elle crut que 1'amour 1 n'y étoit pour rien. Mais dés qu'elle put connoitre la fource des attentions qu'on lui témoignoit, elle fubftitua a l'air de bonté avec lequel elle les avoit revues , Pindifférence la plus caraótérifée; Sc elle fe comporta de manier© que jamais eet amant n'ofa découvrb M vj  27<* Hïfwïre ouverrement Ie fecret de foa ^ , ^eomFit enfin que jamais il ns rcuifiroit a faire: agréer la palfion par fa belle-fceur. II pric le d/, vaincre, en avertit l'abbé, qui le fortiria dans fa refolunon; & fcut même fi bien laigrir quelaverlion, dans fon cceur, pnt la place de 1'amour. L'abbé, qui n'avoir pas perdu fes efperances,&quin'avoitfeinr de fe retirer que pour régler fes démarches lut i efret que produiroienc celles de fon frere, reprit fon projet : mais il cnoiut une route différente de celle qu il avoit d'abord adoprée. Les douceurs, qu'il avoit procurées d ia marquife, en lui rendant la confiance % f m™>Jt0Ïent Peut-être la fource de fon indifference. II effaya fi, en 13 tendant ma heureufe, il ne pourroit pas devenir heureux Iui-mêm**Maitre de lefpnt du marquis, il ne lui avoit pas permis de voir, ou dumoins dUriterFeter les affiduités du chevalier auprès de fa femme. Pour celles de l'abbé eet epoux crédnle ne les attribuoit q'u'au foin declairer les démarches d'une femme que fa beauré expofoir a tant de io licitanons qui pouvoient enfin opé* rer une foiblefie, r ■  Je la marquife de Gange. vjf Elle alloit fouvent dans une maifon i ©ü fe trouvoit un jeune homme dont les difcours 1'amufoient; & ne fentant tien de coupable dans eet amufement, elle fouffroit quil fe placat auprès d'elle, & fe nrêtoit a lier avec lui, en prelence de tout le monde , des converfatioiis particulières. L'abbé de Gange parut de la, pour infpirer a fon frère des ioupcons fur la conduite de fa femme. 11 feut fi bien empoifonner ce plaifir innocent qu'elle fe permettoit, que le marquis , fans la vouloir écouter , en vint aux outrages. Elle vit d'ou partoit le coup; elle n'entreprit point ae delhüer les yeux de fon mari j U ne 1'auroit pas écoutée. . , L'abbé voulut un jour faire entendre a fa belle-fceur que les maux qu'elle enduroit éroient fon ouvrage, quil les convertiroit a fon gré en agréments, que fa félicité dépendoit de hu, & que pour la faire renaitre, il ne lui demandoit qu'un peu de complaifance. Pour toute réponfe, elle lui tourna le dos. Cette marqué du mépris le plus caractérifé mit la rage dans le cceur de eet homme chez qui toutes les paffions, étoient extrêmes. ; Peu de tems après, un jour qu elle  ^78 tr;n-.. avoit cornpagme chez elle, elle fit £rvir un rafrajcWlWru en crême n h Petite quanriré " 7 e" avoir er* ^quienSj^-^P-Je detuHXr fitd'ab-dbeaucoup fürnntunecirco, A 1 °"Wia. II Les effets oui f ' ^ ^rafids bi^"s Cec evenement lui donna del! lui apparriennent,fe»^ b-ns' «Wpm dans Ja dot cm'eiïe T f?nt Pas "an. Elle a la lihrJdiï £■ aPPortée a fon « fonds de ces b Wdes & de fa femme. J tU d une Procuration  de la marquife de Gange. 179 iu marquis qu'il SU* ménageirune femme qui pouvoit difpofer de fonds & de revenus fi confiderables. . Elle ne prit pas ie change fuile Ltif d'une révolunon fi fubite. Elle étoit toujours le meme , & qu elle n'avoit obügation de leur retour aPParent,qu'afafonune. Elle fe ont toujours', i leur égard, dans la meme re- ^'Sn propofa d'aller paffer 1'automne 4 Ganges /petite ville fituée dans le bas l^uedoc%udiocèfedeMontpelher Ife^Ueues de cette ville, &ad1X-neuf d'Avienon. Le marquis "en etoit leigneur & y avoit un chateau. A cette pro- s'empara de fefpnt de la marquife. Elle fe rappella 1'aventure de la crème empoifonnée; elle étoit bien convaincue Le, dans fes deux beaux-fretes> elle avoit deux ennemis implacables , od'autant plus terrible* les maïtres abfolus de 1'efpnt de fon mari. Elle réfolut de faire fon teftament Sant fon départ. Elle injhtua la dame de Rouffan fa mère, fon hentiere, a la cLrge%pellerafafucceffionceU,i des oeux enfants de la teftamcequ ede  2»o tr;nn:„ de cinq. e WJe agee Sla ft •dSfeb"? defavouoit formellement £' i 6 qu'on s'en tfnt au premier r «"on fLlc rédi e.r; Certe deck- %0it forcée a dS de Pt ^ gré de fes tyrans " blea aii  rJe la marquife de Gange. i%t . 'drelfe dans les adieux qu'elle fit:aux ' fonnesdefaconnoilTance,quilfembloit que c'étoit un adieu éternel. lont le \ monde étoit attendri, & croyoit voir, . dans cette féparation, quelque chole de funefte. ' . . _ <• Elle fut précédée a Ganges par la ■ belle-mère, femme d'un mérite rare, i & qui faifoit fa demeare a Montpelher; • par fon mari, & par fes deux beauxi frères. Tout le monde, i 1'envi, se*3 forca de lm faire une reception agréable. Ils n'épargnèrent rien pour eöacer les , idéés du chagrin que la marquife avoit éprouvé : les termes d'amitie les plus infinuans, les dehors de 1'bonnetete la plus prévenante,tout fut mis en uiage , pour lui infpirer une parfaite fecunte. L'Abbé & le Chevalier, qm feavoient combien leur amour déplaifoit a leut belle-fceur, s'abftinrent de lm en rien , témoigner. Ils quittèrent le role damants, pour ne marquer que de 1 ami- ■ tié de la civiüté & de la confidéra¬ tion. ^mmp. oui avoit le cceur droit & plein de franchife, donna dans le panneau qu'on lui tendoit. Au bout de quelques jours, fa belle-mere retourna a MontpeUier j le marquis le  tlifioire rendit aAvignon, oü fes flfC,i„„ Peüoient; madame de Ganfe reda feX avec fes beaux-frères. lkfóS£^ *ST dam k Co"fi-ice de Ja mar, point, labbe ht vemr un jour forr adr01tement,IaconverfanonfarJe ï amem de la marquife ,& lui n_ tendreqlie5 tant que eet acre fobiïfteroit , union qm etoit entre elle & fon qu i feroit toujours autorifé a croire qu elle etoit indifpofée contre lui: quï Javoit que ce tendre époux étoit dan ia refolution de vivre avec elle dan, U7n kPI^P«faite Mnais qu'il fl Ion ever eet obftaclequitrave^foit let fam fÊ VeiT01 C gU£ fon ™ & h fanm e de fon man concourroient tous Pour IuipW-que les plaifirs fé/our- neroientparmi eux,fans aucun mélange damertume;& qu'elle règneroit fur . Ce monftre réuffit a perfoader fon infortunéebelle-foun complaifance compofoient Ié fond de  de la marquife de Gange. a% ment en faveur de fon mziu LAtbc St Pas fans doute connodTance de a'dédarationfaite par la marqo.fe de- En: ^ ^^> ^t^aS^ Sremré oud Y avoit de la ïctiattei, pofbvHdité du fecond teftament f^Xdé que fa diffimularion lui ); avoit procuré tout ce qu'il pouvoit: eloc,,,r il cefta de fe contraindre, & ie ] tépraatirervengeancedumcprisque ^belle-fceur avoit fait de fon amoui, cerninement promis une recompede proportionnée au fervice une jouifïance prompte & cettaine des biens le'gis par l'aPde que la fédudion venolt Une médecine, le 17 mal 1667. Elle fot compofée par le médecin du beu. d.^.lebreuvage lui parut fi nor ft éuais qu'elle eut de la repugnance a ü epais , qu ____ d'avalerdes le prendre: eue ic pilules ufuelles, dont elle prenot U précaution d'avoir toujours une ptovt. fion avec elle.  ct •^■•-'-ii.uLre quelque prix que cefuc> °e"ein» a La marquife, qoi refta au lit inv.Y, uinaire, de vemr lui renir ™^ • ■Prcsle diner. Ja,„° s"Te Penfernn'Jlc^:...? Uü'JJU1C 1Ie" d.  j„ u -nisirmjffe de Ganve. a8< agréablement la guerre fur leur filence. Le Chevalier, qui étoit au pied du Ut, fprtit de fa rêverie, pour faire de petite? malices a la marquife; & VAbbé, quand les reproches de fa belle-fceur le rappelloient a lui, ne laüToit pas de dire des. jfpfes agréables Sc amufantes. Mais la jpptrainte, oü ils étoient, n'échappa (.point a la compagnie. _ 1 On fervit une collation, dont elle ht n les honneurs, Sc donr elle mangea beau» 0 coup : mais fes deux beaux-frères n'y ;< touchèrenr pas. , Enfin la compagnie fe retira. L Abbe accompagna les dames jufqu'a la porte. Le Chevalier refta feul avec la marquiie, 1 plongé dans une profonde rêverie. Elle n'en pouvoit deviner la caufe, Sc cherchoit a s'en éclaircir, quand l'Abbe', qut rentra, lui manifefta 1'énigme. Les détails que l'on vient de lire lont lg réfultat de 1'information qui fut faite; Sc ce qui fuit eft celui de la der plaration juridique que fit la marquife. ' L'Abbé, en entrant, tenoit d'une main, un piftolet, Sc de I'autre un verre plein d'une liqueur noire, trouble, 8C épaifle. Sa phyfionomie étoit effroyable, A... 1 A* valier, qui fe promenoit dans la cham1 bre, en la gardant, lui tournoit le dos. Une perlonne de la compagnie lui | donna un verre d'eau, pour foulager le . feu que le poifon & 1'orviétan avoient allumé dans fes entrailles. Le Chevalier N ij  '202, fe jetta fur le verre, le cafFa dans IeV denrs de fa belle-fceur, & die aux femmes qui étoient préfentes, qu elles lui feroient grand pladir de n'être pas les témoins des folies de fa fceur, ni de 1 favonfër fes idéés; qu'il étoit la, pour prendre foin d'elle, Sc ne la quitteroir j point qu'elle ne füt en meilleur étaf | qu'on pouvoit s'en repofer fur lui. ' I La marquife, qui faifilfoit aviclement toutes les lueurs d'efpérance qui fe pré- 1 ,LLlL MUCiie pourroit enhn flechir fon bourreau. Elle pria la compagnie de la laifler feule avec lui. Tout le monde pafla dans une chambre voifine. Alors elle fe jette aux genoux de fon beau-rrere, lui retrace encore les marqués d'amitié qu'elle lui avoit données • lm promet d'être, dans la fuite, aveug ement foumife a fes volontés, d'oubner le traitement qu'elle a recu , Sc de donner, i la fcène qui vient de fe paffer, 1'mterprétation que l'on iagera i propos. . Ce "gre furieux, pour toute réponfe 1 ure fon épée, en donne deux coups dans Je fem de fa belle-fceur. Elle court vers • la porte, en criant au fecours; il la pouriüit}Iiu domie,par derrière, cinq coups  'ie la marquife de Gange. 193 d'épée, dont il lui laifle le troncon dans ï'épaule. 11 joint tout de fuite l'Abbe, qui gardoit toujours la porte : retironsnouï, Abbé, lui dit-il, l'affaire ejl fa'ue. . „ Les cris de la marquife attirerent toute la compagnie dans la chambre ou elle étoit: on la trouva baignee dans »' fon fang. On crut qu'elle pouvoit enI core être fecourue , & l'on cm, par la ï fenêtre, de faire venir un chirurgien. UAbbé jugea, par ces cris, que fa J belle-fceur pouvoit en reven»; ilrentre, \ perce la foule, arrivé sL elle, lui appuie i fe bout de fon piftolet contre le feïh , & tire fon coup. Heureufement rarme 1 £t un faux feu; d'ailleurs le coup , s'il eut porté,eüt été détourné par la demoifelle Brunelle, qui dérangea le bras de 1'alfaffin. II donne auffi-tót un grand coup de poing a la tête de cette femme, retourne fon piftolet ;& s'en fervant comme d'une maffiie, il en vouloit affbmmer la marquife: mais toutes es femmes fe jettèrent fur lui, 1'accablerent de coups, & le condmfirent ainfi jufqu'a la porte de la rue. On courut au fecours de la marqmle. Une des femmes de la compagnie étancha le fang des plaies, après avoir retire N üj  f94 - Hiftoire Ie troncon de i enp<» r ~ fraiW \ ? U COUP avoit éte mPPe avec une telle £ur\ï i Pointe s'étoit enga^é d p' ^ * ^yeriegenouconlflfc' garde autout de h &on Une ^ts. Le baron 4"" Z d" vor f« rtüa/2j grand-pré- V "Is pensèrent sW . ,Tet>  ■Jelamarquije de Gange. 7^ èrrêtés, s'ils reparoilfoient fur les lieux. Ils fongèrent donc a fe derober au iapplice. Ils gagnèrent le voifinage d Agde, Sc s'embarquèrent vers une plage que Pon nomme le Gras de Putaval. On verra, dans la fuite, ce quils devin- rC La marquife recut tous les fecours néceffaires; on fit venir promptement des médecins Sc des chirurgiens de Montpellier. Toute la noblefle des environs s'emprefia de lui venir temoigner la part qu'elle prenoit a fon malheur. _ Cependant le marquis etoit a Avignon, quand le bruit de fafet de fa femme parvint jufqu'a lm. S d avoit t-amé avec fes frères la mort de fa femme , il ne s'étoit, fans doute, pas attendu cue leur fureur put les porter jufquaux excès attoces Sc publics qu'ils avoient commis-, il avoit compte qu ils prendroient la route obfcure dun poiion adroitement adminiftre. Ouoi qu'il en foit, il parut enapprenant cette nouvelle, frappe de 1 horreur qu'elle devoit natnrellement inipirer ; il éclata en imprécations contre fes frères, Sc jura qu'ils n'auroient jamais d'autre bourreau que lm. En un mot,iljoua, en préfence da courier, ' N iv  ■ ' Je ™e q«i convènoit a fa B„r • «o«p de voler aa S Pj ?as deau- après fon diner P i lende™ain fonnes de i vl ]e * per- Arrivé d Gano-e ;'| r c 'a malade par nf V ' a"n°ncer * des maris- fa f«£ e* Je meiJJene ■ «andtp^dt ■ CI repr°rhe' dle Jui d- Ja maniJre h1 ? pr.efenta,Ja «ain de autre fentiment. EIIe W 3" 3 t0ut --q-detCe°nUSde Hter^ ces fon teftament d'A™ q Confirmoit g'ftrement de Suf? >nfefafer J'enre- 9 Clle J5e VOLi!oit Pomt toucher  de la marquife de Gange. 297 k fon teftament d'Avignon; qu'il contenoit les volontés dans lefquelles elle vouloit mourir. On croit que la marquife ouvrit alors les yeux, & connut les véritables fentiments de fon man: Lus elle fit tous fes efforts pour n'en rien témoigner. Que n'avoit-elle pas a craindre d'un tel homme , s'd eut pér nétté qu'on pouvoit le foupconner de complicité avec les treres ( II ne fut plus queftion de teftament entre eux, & le marquis contiuua de rendre des foins a fa femme dans la maifon du fieur des Prats, d'ou fon etat n'avoit pas permis qu'on la tranfportat. Elle demanda avec inftance qu'on la conduisit i Montpellier, ou les fecours dont elle avoit befoin fe trouveroient fous la mam, & lui feroient admimftres per la dame de Koffan fa mère, qui deJneuroit dans cette ville. Le médecm ne permit pas ce tranfport, qui n'auroic pu fe faire fans mettre la vie de la malade dans un danger éminent. La dame de Koffan fe rendit auprcs de fa fille-, mais elle ne put voir, fans frémir d'indignation, le marquis auprès d'elle; & ne put voir, fans la plus grande furprife, qu'ils étoient en bonne mtelÜeence. Rien ne fut capable de la reteö N v  iomme qu'elle Zl a v1vre avec u« «^.^ ft^'T^ ParfeS ^^Xlaïïf rJ1^' ^ choit è fait de W ' {qn elIe cher" ^^ommer ^ Pleï"e d'e- P-r communion s5#nde rece™' J3 en leur faveur hommes 6ns ffliracJe 'ff °''.ne P°?™t 1'arracher  de la marquife de Gange. 199 infenfible même aux éloges que l'on donnoit a fa beauté, qui n'ayoit jamais eii plus d'éclat que depuis fa ma adie. Elle tenoit fans cefle fon fils au chevet de fon lit, & faifoit tous fes efforts pout lui öter les defirs de vengeance qui s'elevoient dans fon cceur. Mais la juftice ne pouvoit fe preter aux vues charitables de la marquife. L'horrible attentat commis contre la perfonne fur déféré au parleme.it de Touloufe, qui commit le celebre U.de CateUn (1), pour aller fur les heux interroger la marquife de Gange, & taire toutes les informarions qui pourroient conduire i la conviéhon des coupables. Dés qu'il fut arrivé, il eut une converfation particuliere & fecrete avec la malade. Il fit tous les efforts que la prudence lui infpira, pour inftriure fa relicion fur le crime atroce donr la juftice pourfuivoit la vengeance. Après avoir déclaré i ce magiftrat tout ce que la religion du ferment qu'elle avoit prete , 1'obligeoit de déclarer, elle lui temoicma que c'étoit avec beaucoup de répuSnance, qu'elle reftoit a Gange ; que plufieurs juftes motifs de crainre 1 el- (1) Voyez tom. VI p. 37- N vj  "n hen qUi j • _ T r5lt:ei dans %ées. 3U elIe avoir ef- ^^^^a, ^u «s ?-iWoienrcondu1 TaCm: ^ étoit, redoubla fon rnal FH °r Ja nuit dans de cruelL d f ^ ies quatre heures duLir* *7*f" fiee, ? P/gjle lLU avoit con- ^«eau. Il ditTce^or >QSf0a P^ndre, qU'il étoiie «oumutile dWo^lf^i^ fen de/fein étoit dX 1 r - ' giIe parlement le, mntemnt les monfs de Paccufation qu'elle avojt mtentée contre fon ge„dreq 6 elle 1/aU r°Tb\endiffici!e^ifoit. «le de perfuader d la juftice & L lenom.juWi préfent, n'a étéfuS taire alTaffinerparlamain de fes propres frères une époufe d'une beaut" r re cdement encore que la fureiuq i 1W roit ammé föt capable de hdSS fes ZxT ""ff P°Ur d-ejes deux freres d la fois d fe ciWr rJ barbane,de la bonte & fuXger  de la marquife de Gange. 303 \ de cecce exécution. Mais la furprife augmente encore,.ajoutoit-elle, quand on fait artention que la cupidité feule a pu être le principe de cette atrocité. Ii jouilfoir, de fon cóté, d'une fortune honnête; il jouilToit de la dot de fa ; femme. Si elle adminiftroit fes para: phernaux par elle - même , 1'emploi qu'elle en faifoit étoit a la décharge de i fon mari, qui n'ayant point de dépenfe a faire pour 1'enttetien de fa femme , 1 pouvoit difpofer a fon gré de fes pro1 pres revenus, &c de celui de la dot qui I lui avoit été conriée. Une pofition auifi avantageufe ne ' fuffifoit pas encore a eet homme avide ; i il a voulu s'alTurer, après la mort de , fa femme, la propriété de fa dot, & de fes paraphernaux. II lui extorque le refta1 ment qui fut fait a Ganges; & pour ne 1 pas lailfer le rems a la teftatrice de révoquer eet afte, &c fe voir, en mêmetems, le maitre abfolu des biens dont la jouilfance étoit retardée jufqu'après la mort de la teftatrice, il prend le parti de la faire aflaifiner fur le champ. Ces faits, fans doute', font mcroyables; mais tout incroyables qu'ils font, ils n'en font, malheureufement, pas moins vrais.  È°4 . Hijloire C'eft en vain que Je marquis de Gange pretend fe prcValoir Vfo* *dere contre lui aucune preuve ni fche111 teftim,°maIe- ^3 eroit-ü fe garantir de la peine „arce quenennemamfeftefi^^^P^ complot qu':J afonné avec fes fS s &q«e ces deux alfaifins s'e'tant évades on ne peut leur tirer Ia vérité/^ Si les criminels ne pouvoienr êrr^ convamcusque par la preuve yïcale g Wie, que de „Les demeu eo ent^punislQuedecnminei: l totent d s prerogatives de Ilnnocence - eiles tiennent liV,, d» ia cer«tude, 165 ' Cc ^ Mm cenains,  i. u „mïmaïü de Gange. 30^ de foi, que les acles authcnttques (1). £ légillateur dit ailleurs qu'// rf^« I 2,„ £ même duffe les témoins trrepro. chables, les acles évidents, &kstndues Iindu.bito.bles (i). . • : Telles font les prefomptions qui ■U'élévent contre le m-r^i* ^ ^"fe I I«.Onne peut douter queJabbcU le chevalier n ont attenté a la vie de leur i belle-fceur que pour alfurer au marqu,* , la fuccefliou a laquelle d étoit appellc pat s le dernier teftament de fa femme. Ces } 'deux fcélératsnépargnèrentm les polil telles, ni les attentions, m les prcvenaiv- ces, pour capter les bonnes eraces &. fat a confiance de la vi&mequ als dcvouoien» i 1- u„..k.«. mnidité de leur frera. Quand ils furent aifurés qu'ils pouvoient propofer la révocation du premier teftaLnt, fans étre repouftés par 1 avetfion, l'abbé fit ufage de fon éloquence natfe (0 Judicia certaquajure non ufVuuntuf , non iinorem probationis , quam mflrumenta , continent fidem. l.^i "d- fe ra V'*f* re rem (i) Sciant cuntli accufatores eam je rem defje in vublkam noüonem debere , qu Lt qui eft celui qui eft naturellement fegarde comme 1'auteur du crime, fi ce 3i eft pas celui qui en profite ? Is fecit Jcelus cui prodeft. D'un autre cóté, non-feulement les deux mmiftres de 1'aiTaffinat n'avoient pas mteret de s'en rendre coupables de leur propre mouvement ; mais ils n'auroientpu s'abandonnera cette atrocité gratuite, fans courir a une perte alfurée Auroient-ils afiaffiné Ia marquife, s'ils n y avoient été excités par le mari; 8c «Hs navoient été furs que fa réfolu-  ■J. u „A+mufe. de Ganve. 307" Ln etoit fi bien prife , qu'ils n avoient pas a craindre que le repentir opeiatf gun retour dans fon cceur a leut preiudice ? Sans cette certitude fe feroientils expolcs ï ètregratüitementl onjet de la f ureur, de 1'horreur 8c de la vengeance d'un man deieipcre ne .«rr ' pas le rifque d'etre les vidimes de la Lftice, i laquelle ils n'aureient pu fe lérobet quV trés-difficüemen;., etan pourfuivis par un homme auquel fes Ltiments 8C fon honneur impofoien ia qualité & les fondions dun enneml implacable ? r1 i r.J Nevoyoient-ilspasque, filehafard les déroboit a la main de ce vengeur acharné, 8c au bras de la juftice, il leur falloit trainer leurs jours dans des ter- reurs conrinuelles, dans la misère, Si dans toutes les horreurs qui 1'accompa- enent? . Ces crimes énormes ne fe commettent que par ceux qui font poufles par des paflioiis exceflives. Les feu es paffions qui pouvoient ici ammer les deux frères, étoient la vengeance ou la cuptt ^ Mais par ou cette infortunée auroit-^ elle pu exciter leur vengeance? Quel tortleur avoit-elle fait? Ne les avoit-  $f Hijlöirè Wie f>as, au contraire, obligés autWi pplamdre? Elle n'avoir pas répondu | leur amonr. Mais cette réfiftance nL pomeP-rD'?,rijtrer dG ^ Comment la cupidité auroit-elle du fur accordoit rien. Vouloient-ils, ap 2 Wfr. joujourscachés, en un mot ^gardes par-tout ou ils feront CQJinu ■ g^eies ennemk du genre huS Ve vo11 d a 1 e««, n'eut pas été une reffource capable de leur procurer■ en o e 1 quendro1tqueceffit,htranaumtó& E de f16"" fière- Ileftdoncimpoff , de fo"Pconner qLie I'appat d'un Wqauiepouvoitleurlnocu/erd'alré  de la marquife de Gange. 309 ivantage, que la honte de 1'avoir com. £, les 'eut engagés dans u^aiTaffinaf. «ccomoagné de toute la barbane & de toute k Irocité poffible j leut eut fait abdiquer tous les fentiments de lnür nianité,Pout les ttansfotmer en tigre, fUlTnu,enfuPpofantqu'UsneulTent pas agi pat les ordres du marquis eet exeèsVodigieuxde cmauté, non-feu, lemen? fe feroit commis fans caufe mais auroit pt^J^^LÏÏ anaflins dans un gouffre de malheui. au lieu qu'en adoptant le fyfteme^ que cette aèfón a été ordonnee par le marquis , tout devient poffible. ^ On voit des affaffins qui, anunes pat la récompenfe qu'il leur a promife, s expofent hardiment i la peine que merite Wcrime; bien alfurés qu'ils font, de n'ètre pas pourfuivis^ou du moms qu 1 * aurontletemsdes'évader.Onnepeu.; douter que la récompenfe n ait ete proportionlée au crime. Hs étoient bien Ls.d'aiUeuts^e^dansquequeW qu'ils allalTent, fousquelque «iel qu üj véculfent, le marquis acheteroit leur fecours dont ils auroient befom, pou* vivre cotnmodement,  S1^ Hiftoire IJ eft donc bien démontré que eet iflafinu n'a pu être projerté, médité & qm la ordonne a l'Abbc & au C/Wtor.' autremenr, il faudroit f f quds ont commis le plus hornble de touslescnmes5degaietédecceur,p0^ feperdre, fans être animés paraS P-'üon; en un mot gratuitement. C'eft f^^^ouleverfement rotal dan. Ia nature. Ainfi l'on peut dire que, quel- q-e fecret qu'auétê Ie confeilkdLt ^neertece enme hornble, il eft ^ avere.que s'it avoit été public. On ne peut pas penfer, a la vérité, «tte abominable exécution, foiem entrees dans le plan qui avoit été projetté, On vat cvidemment, par ce qui s'eft falie, que le etoit la marche qui avoit ote concerree.On s'attendoit bien, qu'en donnant a la viftime le choix fur les trois genres de mort qui lui furent propofes elle opteroit le poifon. Le piftopret a lui calfer la" tête, & pretea hapereer Ie fein,„e lui furent prelentes que pour lui faire voir que fa mort etoit réfolue. II D'y a point, en general d'être vivant qui nerecule l M vue du trepas; celui dont on eft me-  de ta marquife de Gange. 31 ï mcé par une arme a feu, ou par le claivé, eft d'autant plus effrayant, qu'il eft fubit. Le poifon, au contraire, peut lanter quelques lueurs d'efpérance. Le tempérament peut être alfez fort pour réfiftet, la dofe peut n'ètre pas fuihr fante; des circonftances imprévues peuvent procurer un fecours inattendu, avant cue le poifon ait fait beaucoup de ravages. D'ailleurs la marquife fcavoit par expérience que la mort préparee pat le poifon n'eft pas inévitable; elle etoiE échappée une fois a fes atteintes. Et 1 on ne peut nier qu'elle n'ait été capable de toutes ees rcflexions. La conduite qu elle a tenue pendant les trois ou quatre heures qu'elle a été entre les mams de, fes bourreaux, prouve bien que le danser ne lui btoit pas la faculté de reflechir, 8c d'avoir 1'qfprit toujouts prefent. .r On fcavoit d'ailleurs que la marqmle étoit pieufe , 8c l'on s'attendoit bien qu'elle chcifiroit le genre de morr qm lui laifleroit le tems de veiller aux interets de fon ame. Ceft dans ce point de vue, que l'on avoit mis Perrette dans ie complot, 8c qu'on lui avoit ordonne de fe tenir prêt pour lui admimftrer les derniers fecours ffirituels. 11 étoit yb  312, Hiftoire caire de la paroifle, & auroit fait mhJ mer, fur fa parole, la marquife, après 1 avoir adminiftrée, & fans autre perquifition. La circonftance étoit même d autant plus favorable, qu'après avoir pns médecine, elle avoit beaucoup mange, en prefence d'une nombreufe compagnie, & qu'une mort fubite pouvoir tout naturellement être imputée voyant que leur coup étoit manqué. Les arconftances manifeftèrent leur delfein au public : mais ne voyant plus pour eux ■, d'autre reflource que la fuite ils voulurent au moins s'alfurer, dans leur retraite, la récompenfe qui leur étoit promife, en mettant la dernière  de la Marquife de Gange^ 31? ^nain a l'aftaflinat dont leur frère les avoit chargés. . Ainfi, loin que les actes qui paroiifent n'avoir pas été concertés dans le complot, foient a la décharge du marquis , ils prouvent de plus en plus qu'il étoit 1'ame de la cataftrophe. Seconde vréfomptlon. Avant que la : marquife eüt fait le teftament par lequel elle a inftitué fa mère fon héritière, on avoit tenté de 1'empoifonner < avec de 1'arfenic mêlé dans une crème qui lui fut fervie a une collation. La cu- mdite du mari uouvua uu-iwo I , , 1 _ r r .ar compte dans la mort ae ia , tout annonce qu'il étoit 1'auteur de eet attentat. Tout le reflort du parlement de Eouloufe, & le comtat d'Avignon font fqumis au droit romain. Suivant ce droit, la puilfance paternelle donne au père la jouiflance des fruits de tous les biens de fes enfants, de quelque foutce qu'ils proviennent; excepté ce qu'ils peuvent acquérir dans le fervice militaire, ou dans les emplois honorables de 1'églife ëi de la robe. Et il conferve eet ufufniit, tant qu'il n'émancipe pas fes enfants. La mort de la marquife afluroit donc a fon itiari la jouuTance de la fucceifion opu-  Hiftoire a fa fille• & Iafaifant mounr ayai * par un teftament, elle eüt, comme ehV a fait depuis, inftitué un béritier, autre" que fes enfants, rien ne pouvoit lui ravn; eet ufufnut. II avoit donc intérêt^ prevemr par une mort prématurée, J ^e qui l auroit dépouillé du bénéfice de la pmirance paternelle; & les mauvaifes facons qu'il avoit eues pour fa femme lu, domtoient Iièu d'appréhen! on lui en ïaiflöi't le tems. ■ Or tout annoncé que ces combinaiions avoient determiné le marquis £ prevemr, par-ée premier empoifonnement lesdifpofitions qu d Lit ml nte qu-elle fit a fo„ préjudice. I ous ceux qui mangèrént de'la crème avec elle, en furent maiadès. On nëfi> aucune perqmfition du crime; on laiCa au tems le fbin d'aflbupir cette affaire. 01 Ie marquism'ent pas été coupable n auroit-il pas cherché 1* auteurs du deht, afin de les faire punir ? Son propre mteret ne Pauroit-il pas èngagé f cette .recherche puifqu^uroi^couni Si! meme le danger d'être empoifonné par Ja meme mam qui avoit ofé hafarder ce premier attentat, & qui auroit éSf  de U marquife de Gange. qi? •fencouragée par Fimpunité ? Sa ftoidéurtTon infenfibilité, fa fécurité fur un accident dont il auroit pu être lmmème ia viclime , ne forment-elles pas I une preuve démonftrative qu'il étoit le c. coupable ? .... o 11 a Luiuiiii^ ^ ^^^..«^w» , i commis le fecond. Troifi.me préfomption. La cUpidite | qui avoit infpiré ce crime, ne trouva, I dans fon cceur, aucun obftacle. II avoit ; pout fa femme, les fentiments d'une , haine féroce. A 1'occafion d'une que: relle qu'il lui fit un jour de gaieté de : cceur, il la frappa avec un baudrier; & i la tint enfermée, pendant plufieurs : jours, dans une tour, ou le chagrin lui i occafionna une efpèce d'apoplexie. II fe préparoit, par ces excès de cruaute, a la fanglante cataftrophe qu'il devoit faire jouer par fes frères. Quatrième préfomption. L'étroite amitié qui i'unifloit avec fes frères ne leur -auroit pas permis d'entreprendre un pareil attentat fur fa femme, s'ils ne 1'a, voient concerté avec lui j & cette ami*; tié eft la preuve qu'ils ont agi par fon : ordre. Elle étoit aflez forte , pour qu'ils i ae puflent fe déterminer a lui refufer i même un crime auffi atroce. Elle a du Oiij  318 Hiftoire: J^gouvernerabfolU51e„; ë^I T >U f ™~C1 faif°ic aucil"e dé fflarche fans Je confidter. PeneTc aflaffins avo.t eté précepteur du marfjms, & avoit fa confiance. Fononnee, & s ctanE ■ é detteïn 1' /rducr»u ;etta> dans Je; ' ffJ Pleine d eau : & afin de rendre fon ^f^fpr^m, C'eff Gange qui aete cfioifi pour Je théStre de cetf/faf seigneur y a un pouvoir abfolu, & qu'il preX Tl' °feroit e"^- g a Hmes"6 leS ^  'At U marquife deGange■ 3i£ commis le^ -'f ; £ fut commis - ; eyalet dg Erquisj enfotte qu'il avoit , couriet' que le man appnt letat ou > &oit fa femme, & ce fut par lui,jque 1 nouvelle du crime tranfpira dan Avionon. Un alfalfm envoie-t-d lui- 3acéléritépoffible I^Wg i dpottée de prévemr fa fuite par leurs pourfuites? , t rn.,t.n,1ïg V Huitiemt préfomption. Le marquis j o_c.il fait aucune démarche aupres de k uftice contre les aifaffins? Son macf ion ! hf!? "Lelie pas qu'il a craint d'en faire contre lm-meme ? Mais examinons fa conduite, elle va de fon crime. Quoiqu il eu appus, des dematin,le malheur -ivé a fon epoufe il ne partitque le lendemain & hit eoLjom-safaireunvoyagequelenvoye des aifaffins avoit fait en une nuu. Cette mar.che prouve fonindiffe.ence  Ion? f r hiftoire pom fa femme & ,h . , "ntention d« Jai/r.r mC'"e ter«'^ te^^yade^fÏ! aiI^ H ? auroidpas VoJé jj r "ienc d Wanité , compiIce des attenta / moi«^e Perfonne ? N'eft tf C?mmis f« fa Par cf/emporifem2aSiieJidenr gne' complJces Je Joifi/^'^^tafes ^fdc^l^ 9* eet* idéé ?ent ie pW ff and -C de /p,t^ ' /* srand Mterêr au r^, < QC feur evafiou. Si Ja ;„n; aAu lucccs «teindre, elle W *S' ?5PU J« de ^ compliciré de Efe* J'aveu. P«rnée ^Ti*'eu^ Upaffela comme^ fon V*?* t0ut & ™ ni dansïu at On ae- * & conduit comme 7uemme> <ïu il en avoit rern*i S noilveIles  I de la marquije de Gange. 32,1 nouvelle du crime commis contre ia femme, n'étoit encore venue qua les oreiUes; & qu'il pouvoir , par-confcouent, faire femblant de 1 ignorer; car Bil eut eu 1'imprudence de faire con„oitre qu'il en étoit inftnut d autoit Wtè impolfible qu il füt refte a Avignon, 1 qu'dn'ebtpasfeintau moinsde fe - donner des mouvements pour prevemr ' la fuite des affaffms, ou pour les joindre, , avant qu'ils fuffent en beu de fajetew ; Cette ina&io», fi l'on eüt feu qu 10 inftruit de ce qui s'étoit paffe, auroit Sé un motif fumfant au miniftère , public, pour le faire arrêter, comme • violemment foupconné de compha é. Mais avouonsJe. Sl cette condu e 1 étoit néceffaire a fa fürete d frflQB, ' pour «arder le fang froid dont d avoit, i Tefoin, qu'il eüt dans lecaraftere un grand fonds de férocité , & une haine bien déterminée pour fa femme. _ • II part enfin, & prend, pour faire a route tout le tems qu'il croit néceffaire 11 arrivé. 11 avoit eu le loifir de le Loit deux objets a remphr. de carter les foupcons que M^j! femme avoient pu concevoir contre lui,  ^'ob«nirffe . q^ezie avoit paffe } 7T Qe l a^ fes aifaffins !^;reVocat,0«3 celui,! «on Par leur crimë l ^ ceux quiI'enronr ■ "me &devant fouhaite rien tanr „ / , Cfolre, ü ne jengeance, & ne '"V ?e refP"e qUe ^ettre^ortll P P°ur ionétendue. Crcer da»s toute Je Peut foupco„«e M tJ7enré' 9* dans un cceur qu'ellY de "olrceur ^ d^ 3n.es Lot^,dedl°Htek c«J<* marqués de tend ^ » e toutes fe barbare manqUP T . °" fecours. facupiditéPav3e feft Pmdencei °* cette inforrunfe fe w m°me« dont elle £ aUX fe'3"-  de la marquife de Gange. 323 ' , 1 p11 e avoit déclaré devant les p.rlequel elle^vok eentencbit ma§f ^me^tCunltitaoit fa mère que le teftame^at Le malheureux! S cem^ derévoquerle . torquerids ont oubhe y ^ aucun doute. . :r ies veux t a feule propofmon ouvrit es yeux La ïtuic ^ r . fi omioltre 1 au de la marquife, & lui h^co» ^, fo_ lutlon fe"- ^faucune atteinte i ?neV^ tetmSt. Elle necrut pas fon premier «Iteme au itQe qui lui fut pcim s tommet- la «cornpenffequi 1 avo ^ tre' r6gdVune a^P-bation indiroande comme une P|&/ê .  324 , Hiftoire tance ou k prudence a abandonné le ^^J^g^peudCoi tre ;ours, avec Perretu. C'eft avec lui queafermé rête-a-tête dans Je ch eau de Gange, ü paflbic Jes foirées qui de! F-fon We/ont précédék mo je fon epoufe-& cependant ilaavmS dans fes mterrogatotres, que ce mêmê iW étoit notoirement complfce de eet affarbnat. II ne faut point £ reflexions fut cette conduite^ elle pö tefe catacleteleplusautbendquedekcom! rèrfeö? derdes preuves litteraje & telhmomales qui puflènt entrei e„ concurrence avec une maffe de ^Wonsaufficonv^ncahte,?^ ieurs ilyamun corps de délit •& d eftde pnnape que, dans ce cas,' 1^ cufe contre lequel s'élèvent pkneil Prefompnons eft reconnu coupable tant qu'd n'établit pas fa /ufHficarion ^ des preuves plus ckires que lejour c°^-les Preuves .peurder «uie a k demonftrarion qui vient d'être ^fe fous les yeux de k cour? A I egard de /'^,' &.dlI que dT; Convai»c^ avant S«ed etre accufes-lecri public jeul&8  ae ia marquife de Gange. 31?; 'déférant a la juftice, avoit détaillé les preuves de leur atrocité. La défenfe du marquis de Gange étoit bien fimple , &: ne demandoit pas un grand détail. Il avoit le malheur d'avoir pour frères deux fcélérats, qui ont atrenté a la vie de fa femme, &c d'une femme qu'il aimoit tendrement. Ils l'ont fait pcrirtd'une mort cruelle j &• pour comble de malheurs, il eft accufé d'être 1'auteur de ce crime, qui fait frémir la nature. Son innocence confondue & accablée fous le poids d'une accufation dont il ne peut imaginer qu'il puijfe être 1'objet, n'a pas la force de fe défendre. Tout ce qu'il peut faire, c'eft de dire qu'on ne lui oppofe que des indices Sc des calomnies. Voila les armes dont on fe fert contre lui. Les indices ne font autre chofe que des fignes qui annonccnt la poflibilité des faits qui peuvent être; mais auffi qui peuvent ne pas être. Or peut^ on condamner un accufé fur des poffibilitc's ? Ne doit-on pas, au contraire, quar.d 1 y a po flibilité de part & d'autré, quar.d il y a au tant beu de prefumer i'mtocence que le crime, fe détermi-  3^ Hiftoire ner en Faveur de 1'innocence ?Cetterè>U hite, & par 1 equué. Autrement, il n'y ?uPX dr°Cent^f«^l'abr idl «alard fa t concounr certaines circonf ances qui peuventfaire e„rrevo[ X cel homme peutêrr^Ip^ li_ 2 , C£,"fef P-nippurlecoupaWe . yuelque grand que foit Ie uombre ^s c a elles ne ™ cent aucune force ; elles n* ^ —iquent Wff fc J e» ou mnocents. Tels font tous ceux ^^^^  de la marquife de Gange. 327 'dans une crème, ni du mauvais traitement qu'on accufé le marquis d'avoir exercé contre fa femme. II borna toute fa défenfe i ce peu de réflexions. Le public demandoit yem eeancea haute voix. Les juges étoient bien perfuadés, comme hommes, que 1'accufé étoit coupable l mais ils ne crurent pas que de (imples prefomptions, quelque puilfantes qu'elles fuffeiit, pulfent alfeoir une condamna^on a morn Par arrêt du zi aoüt 16^7 , « / Abbe „&cle Chevalier de Gange, furent jpott» damnés a être rompus vifs; le Afar« quis leur frère, i un banniflement p perpétuel, dégradé de nobleffe, les „ Hens confifqués au profit du Roi:le » prêtre Perrette,, après avoir ete deb gradé des ordres par la puuTance ec„ cléfiaftique, condamné aux galeres a is perpétuité ». On fut forr furpris de ce jugement mitigé, qui parut trop doux, ou trop rigoureus. Si le marquis étoit coupaole, li métiroit la mort. S'il étoit innocent, il falloit 1'abfoudre. Si les préfomptions ne fuffifoient pas pour opérer une condamnation a mort, il falloit ordonnet un plus ampleraent informé j 8c lous c«  Hijloire S,KTre'lT'ir dans Ies fers un hom: me fufpe£t d'un crime fiatroce -Les murmures qu'excita eet arrêt & lemccontentementque ie Roi en ƒ mojgna lui-même, furent peu -êtret caufe que le marquis de la *DL q 1 fut accufé, quelque tems après ?ayoS ernporfonné fa femme, f£ conda^ 1^1 eft au pademcnt d/ToUlo /e/& l^^auts de Gange s'en eJhZ Voici ce que M C*** /rf;f, enNiverno, ifStS "f^j Epj-T anciennes & H»/ „i •„ j? ' d une des plus - ans fe fignala par ^ *sl agede Nivernois. II ■ fcS,t Utfna^néral en pollon avecceï de Ma' fiI f W" d'A" blancourt 1 t uroS' > de d'A'  de la marquife de Gange. p4 Le z»5 oftobre 1669. « Le marquis„ de la Dcm\e fut arrêté, il y a quelque- crit, mümlè: H.-phe amoureufe des Gaules . om fut hïftrimée en 1665 , faifoit beaucoup =, de bruit, par 1'art & la vérité des portraits de i plufieurs perfonnes de la cour, & par un ton , Se dépravation qui ne plait toujours que , trop 11 avoit en outre f fair un peut livre- ■ relié proprement, en forme d'heures : mais ' au liet. des images qui fe mettent ordinaire-' ; ment dans les livres de prières, il avoit misy i dansle ficn, les portraits en mmuitm'e de- quelques hommes de la cour, dont les rem, mes étoient foitpconnées de galanterie; Sc- au bas de chaque portrait, il avoit accommoI dé, en forme de prière, un pent diicours ■ rèlatif au portrait. C'eft a eet ouvrage que 1 JJoüeau- fait allufion dans ce vers : Me mettre au rang des faints qu'a célê-1' brés Buffi. Ces deux ouvrages le firent mettre a la I baftille Une maladie occafionnée par fa prit fon lui fit rendre la liberté. Mais jamais il ne püt rentrer dans les bonnes graces du Roi 5 il eut beau Hmportuner par des lettres plemes de flatteries, ie prince n'y fut pas trompe. D'ailleurs il faifoit tout ce qu'il falloit pour prouver qu'il étoit bien éloigné d avoir dans le coeur, les fentiments qu'il expnmoit itir e - papier. Quand 1'épitre de Defpreaux fur te paffaee du Rhin parut, Buffi, fit des rc-marLes fanelantes fur eet ouvrage. A lendroit fW-tout oü le poëte dit que,fi le pnn.ee continue de prendre tant de villes en fi peu de  33Ö Hijloire , *ïeï°L.^"«a.confpita avec foft a qul elJe a fuccédé Cerr* » da^>voyantfournariarrêt c fc £ V5 *± li avoit ce taL^tTde »• ^ de «1 avoit encore pl„s dWf,™mais coumian, comme " i" ^omms *er en clZ ffuf£ mASf de I>emP^ q» elles ont été fJZ\Z? * °n V01t troP q,"'un panégyriquefade t " .Ce n'e* d'autantdusqu'onvn;, ' i* qm révolte contre fi/penfée Sn £1>Uï.eur écrivoit têt d'un bei efnrit r§ * 'ls font Plu' time guere 3 ^ * Un Poëte- °n n'ef-  de la marquife de Gange. 331 «ner des confeils, & pour concercer av e lui des moyens de fe tóndre; Sle malheur voulut pour e le qu elle fut déeouverte&arrècée^ cem «roe malheur a fair trouver descon^ „ jedures très-fortes quelle a trempe l au mervrtre de fa devanciere. On les ! doit juaer demain rous deux t c eft un i monde. 11 y a des diffieul s & des , incidencs dienes de mémoire. bi je „ les conter dans quelque tems, je ie , ferai-.hrion vous vous én vég«~-i Dans la lettre de mademoifelle P... | aucomtedeI?#, elle lui envene k telation de la mort de ce marquis, du 1 %1 décembre fuivant. . , «« Te vis I'autre jour mourir le mar- Jetreme-cinqans,beau & dun air „ fort noble. Tout ce quil fit & d t, :^puislalecWdefonanitjufquau „ coup qui luitraneha la tete, fut he/roïque, fans affeftation pourtant . Auifi-tbt que fon arret fut u, & qu'il feut écmité fans s'émouvoir ÏsaPprochade 1'autel, & levant les )mainsauciel,ildit:vouslevouleZ,  3 32 Hijloire » Seigneur j & je Ie veux bien auffi. » 1 uis, fe rournant vers le commiffaire » je vous remercie, monfieur, lui dit-il „ "davou opiné pour moi; je frais de » quel avis vous avez été; & Dieu m'eft' »tenioinque,fi je pouvois, je vous » donnerois des marqués de ma recon» noiflance. Cependant j'attefte ce mê» me Dieu que je meurs innocent. Puis * il demanda une écritoire, pour écrire » a ia femme: ce fut en ces termes » : _ Ma très-chère & très-aimable enfant, je men vais mourir trls-fausfait. puifque Dieu le veut. Le feul déplaiftr qui me rejte ejt de n avoir point vu mon fils Jé vous le recommande, & vous prie de k faire elever en la crainte de Dieu. Jè Juis un bel exemple. La Douze. « Un certain homme de fes amïs ^ etoit prefent, affis & pleurant, & la » Voure fe promenant fans pleurer fe "tourna tour-i-coup, & lui dit: ah, " ^fieur, je vous demande pardon » ii je me promène fans m'entretenir • ;' |*?5 ou l'e fi"? eft un peu violent, & » aélion me foulage. Vers le foir, on » ie mit dans un tombereau avec deux " c°rdehers.& le bourreau. II fut COnP duit par la ville, pour être rhéné a  de la marquife de Gange. 333 », féchafFaiit. Ayant vu a une fenêtré „ une dame qu'il avoit fort aimée, il s, Ia falua deux fois, avec un profond » refpedt. Il étoit nue tête & les pieds Hés; & par grace, on lui avoit lailTé » fon pourpoint. Au pied de 1'échaf» faut, onlui dit: monfieur, prenez la » peine d'inftruire la cour de tfaflaflinat 5> commis en la perfonne de votre b'eau» frère. Moi, dit-il d'un ton alfuré, un aflaffinat! Cela eft faux : c'eft le plus » beau combat qui ait jamais été fait en Guienne. II monta hardiment avec »> le confefleur; on chanta le Salve. On » le dépouilla: il noua lui-même fon » mouchoir: il s'aflit fur le poteau, puis ,3 fe releva, pour dire encore un mot a „ fon confefleur. Le bourreau lui dit: ,, monfieur, j'ai un grand déplaifir de „ commencer le métier par vous. He*. » las, lui répondit-il, mon ami, tu es. „ ici le feul qui me regrette: je te pne „ de me laiffer dire quelque prière „ quand j'aurai le col fur le poteau. U » cria trois fois Jesus , & -dit enfuife : 35 frappe quand tu youdras, Le coup ,3 1'empêcha d'én dire davantage ». Sa femme fut renvoyée de 1'accufapon. L'atfaifmat de fon' beau-frère, fut jequel on lui demanda des fclairafle-.  334 Hiftoire ments, étoit une autre affaire qui rféj voit .rien de commun avec celle-la • afTaffinat" tra^ltilfoit en/ Pour revenu: a la marquife de Gange, Perreuefw attaché a la chame, & moumt en chemin. Le Roi donna au comteee Gange les { biens connfqués fur Ie marquif fon frere., Mais dés que fon neveu fut en age d en pouvoir jouir, il les lui rendit, Le marquis après fon jugement, fe tint cache pendant quelque tems. Mais °UVf t?C1'et de fe faire bien venir •uprcsde M.AZW/,(l),mtendanc de Languedoc, en prenant foin de faire aller a la mede ceux de fes vaffa„x qil| etoient rehgionnaires, & dénoncanc ceux qui refufoient d'y aller. Cette prote&onlui donna la facilité de ne blus fe gener; & d vivoit ouvertement dans Ie chateau de Gange, qui appartenoita CO Nicolas de la Moignon de Baville étoit ?e .«nouiêmefils du premier préfidem dont comonöures difficiles. II mouruta Paris CoS fedlerd'étatordinaire.le i7mai i7a4 *&fot «luuue aux cordeliers. V ' * ™'  êe U marquife de Gange. 33? fon fils, en vertu de la donation qu* fon oncle lui en avoit faxte, il fut enhn oblie* de fortir du pays, par un ttait cui prouve de plus en plus que fes palfions, quelque criminelles qu'elles fulfent le dominoient toujours, Mais ït faut faire connoitre ce fils, qui fut contraint de demander lui-même 1 exe- cution de 1'arret pronoucc ***** peie. . . . . 1, i _ . , f^niMineri Uil CJe jeune nomme c«aml regiment de dragons, & avoit eu le tafent, par la bonté de fon caraftere, Sc par fes facons obbgeantes, de faire —iïi:— —'51 ^mir fils du marquis de Ganse ; il fembloit même que la me-moiré des forfaits de fon père a,outoit un degré a 1'eftime que fon avoit; POEtant en gamifon i M'ëtz, il devint amoureux de la femme d'un orfevre. U «nit tout en ufage pour la rendre lenfible a fa tendrelfe , nen lie put lal©, duire. , „ , . II en étoit la, quand fon regiment recut ordre de dragoner les huguenors i Mets. La maitrelfe du jeune marquis de Gange étoit de la nouvelle rebgionj les dragons futent mis en garnifon chez elle, Sc vouloient ,i toute force, 1 obl*  83£ Hijloire -ger d'aller a la meffe. Elle foutint leurs ferfecunons pendant quelques jours; Jnais enfin, n'en pouvaut plus, & cer■pendant réfoluede.tout facnfier, plutót '-que de celTer d'être huguenote, elLo de, Jnanda a parler au marquis de Gange •J-es dragons, quoiqu'il fut dans leur •comigne.de paverde..toutefaiüfadHon •ceux qui ne vouloient pas fe convertir n oserent refufer d'aller chercher un dé ieurs officiers a qui on vouloit pariet. ' JDès qu'elle le vit entrer : marquis9 Jui dit elle, vous m'avez dit oue vous m'aimiez. Voulez-vous me le prouver > xirez-moi d'icij donnez-moi les moyens de fort* du royaume ; & pour récompenle,.je vous promets le.prix que votre amour pourra imaginer. Je crois que Dieu me pardonnera un pech; qui m'eV -pargnera le crime de paffier Ie refte de mes jours dans 1'hypocrifie. Non, madame, dit Je marquis; je •oie me prévaudrai point de v0tre lituarion. Je ferois au comble de mes vaux, ii j'obtenois de votre tendrelfe ce qufe ne devrois aófuellemenr qu'au nou' ble ou vous êtes. Je voudrois devoftout a votre cceur: mais je ferois le plu; iache des hommes , fi j'abufois de fptreetat. Je vais vous en délivrer,'  de la marquife d.e Gange. 337 Z< ne vous demande pour toute récompenfe que la grace de penfer quelquefois a moi. 11 tint parole ; & malgré le rifque qu'il couroit lui-même, en lui rendauc un fervice de cette nature, il trouva. des expédients pour la faire fortir de nuit de fa maifon & de la ville , Sc la fit conduire en füreté fur les frontières. Ce jeune-homme époufa, quelque tems après, la fille du baron de MotJJacy qui étoit riche &c aimable. 11 mena fa jeune époufe a Ganges, ou il la laiffa, pour rejoindre fon régiment. Son père y étoit alors. On 1'y toléroit, paree qu'on ne penfoit plus a fon affaite , 8c qu'il n'y avoit perfonne qui y füt alfez intéreffé pour vouloir fe déclarer fa partie , & Pobliger a. garder fon ban. Son fils lui recommanda tendrement fon époufe, qu'd lailfa fous fa conduite. Mais , fous prétexte qu'elle étoit nouvelle catholique, & voulant fe procurer la piotection de 1'intendant, en fignalant fon zèle, il lui öta d'abord une fille qu'elle aimoit beaucoup, & qui, depuis long-tems, étoit auprès d'elle. Ce ne fut- pas le feul chagrin qu'elle éprouva; mais elle les diflimula toust Tome VIL P  Elle; étoit feule dans le chateau avec fon ueau-pere, a qui. tout étoit fon- --^uiimuic en ie voyant tous les jours tete-a-tête 3 table avec lui, dans ce meme appartement ou fa belle-mère ■avoit fi cruellement fini fes jours. Enfin fon epouvante & fa terreur montèrent au comble, quand elle trouva, dans ce beaupere, un amant paffionné. Quelle conduite temt dans une conjoncbure fi critique? Son devoir & fon indinarion ne lui permettoient pas de fiatter un amour fi cnmmel. Mais quel danger n'y avoit-il pas a irnter un homme, chez lequel les paffions produifoient les plus rerri, bles effets, & dont-on avoit de fi cruels exemples ? Elle ne pouvoit'propofer un voyage; le marquis, fous prétexte de rehgion , Pauroit retenue. Elle n'avoit perfonne a qui fe confier; tout lui étoit ; ffir r k chaceau- Le baron de McJJac ion père étoit nouveau cathotè que & avoit même beaucoup fouffert pour la religion. Elle jugea bien que Ie marquis s'autoriferoit de cette eirconfEance, pour ouvrir les lettres, & s'en feroit même un mérite auprès de Pin-, tendant. II ne lui reftoit qu'une réfioUree: encore n'en pouvoit-elie attendre qu'uu  de la marquife de Game. 339 effet bien lent; c'étoit d'écrire a Ion mari. Il étoit ancien catholique: ai'nfi il n'y avoit pas de prétext|pour ouvrir fes lettres. Dés qu'il fut inftruit de la polition ou fe trouvoit fa femme, il frémi* a la vue du dangeroii elle étoit expofée; & n'écoutant que fon premier mouvement, il.prit la pofte; alla fe jetter aux pieds du Roi, pour le prier d'obligcr fon père a exécuter fon arrêt, promettant de lui faire tenir abondamment tout ce qui lui feroit nécelfaire dans quelque Heu du monde qu'il voulut fe retirer. Le Roi parut furpris, quand il apprit que le marquis de Gange avoit rompu fon ban, &c ordonna,fi on le trouvoit dans le royaume, qu'on lui fit fon procés tout de nouveau. Le comte de Gange fon frère, qui étoit alors k la cour , apprit ce qui s'y paffbit, partit en pofte, pour tirer le marquis, du chateau, & le fit paffer a Avignon, d'oii il fe retira a. Lide,petite ville du comtat Venaiifin, voifine de la célébre fontaine de Vauclufe : cV depuis on n'a plus entendu parler de lui. ' Quant aux deux autres alfaftins , te Chevalier fe retira a Venife , demanda du fervice a larépublique, qui étoit alors Pij  34° Hiftoire en guerre contre le Turc. II fut envoyé au fiege de Candie, que les Mufulmans aillegeoient depuis vingt-deux ans: & le bruit fe repandit qu'il fut tué, peu de tems après, d'un éclat de bombe. Ce qu il y a de %, c'eft qu'd a abfolument aifparu aepuis; & que perfonne n'a pu dire ce qu'd étoit devenu. ÜAbbê fe retira d Viane en HolJande dont le comte de la Lippe étoit alors fouveram. Ses defcendants 1'ont renaue depuis aux états de Hollande, Labbe de Gange y fic connoiffance avec un gentilhomme, qui le préfenta au comte, comme un francois réfugié dun merite diftingué; il avoit pris% nom de la Mar tellier e. Le comte, qui dans la convetfation trouva, dans eet étranger, beaucoup' defpnt & 1'efprit très-orné, enrichi de fort belles connoilfances, très-verfé dans les belles-lettres, lui confia 1'édu.cation d'un fds qu'il avoit, agé de neuf a dix ans. Les talents de ce gouverneur aides du bon naturel de 1'éléve, en firent un prince accompli. Le faux ft Martellière gagna fi bien 1 eitime & Ia cpnfianee du comte & de a comtefie, qu'il ne fe faifoit rien dans ia maifon, qu'il ne fut confulté j il étoit  de la marquife de Gange.^ 34* DesVncois refugiés vouloient s^etaur " vimé & v batir des maifons. Lr rfe/u^«,chefde la juftice du la donner, de U & aue Pour être furs de 1 obtemi , fnlkdt 'fe concilier le fuftrage du fieu1^ oue ft les fencois formoient un ÉW £ement a Viane, il ne fur enfin Son crédit devint enfin fi grand, ou 'il crut pouvoir afpirer k U mam Ke demoifelle jeune & aimable , ïl ée a lacomteireUqf avoit pour bi les fentimentsqu elle Uu avoit inf- pirLa' comteffe aimoit le gouverneur de fon ds , lui faifok du bien ,& avoir honnête,pour le refte de fes joms pouvoir prétendte a fon alliance. tlte pa La ala demoifelle-, lm dit qu elle roublioit-, qu'onAne fouffriroit pas nu'elle fe «ïéfalltët ace póint-ra. Lu K,/^-,difoit-elle,eftunhonnete- homme; nous fommes tres contents de  te jamais pu AAr^-_ y un n 3 P°"; Peu qu'il eüc pu fe f ir T = ^ de & généaloeie il " « 1 ho„„eur lemiments reU,^ . , doute Jes * fit part de ce- pn? f°" Para', "™> de I'abbé 2 ?• d«'»»ntle vrai  de la marquife de Gange Jtf fon nom, dans d'aau-es arconftances, r r i fPc nieds : « Madame , ,V fe ie trant a les pieu» „ alteiie m nonoiuu. ^ . ce cependant elle s'bppofe aujou r " ïhui d mon bonheur. Mademorfe le *A mefakfbonneurdem'agrcer „ ma recirercne. v"- — ' Pn.ro- . „ madame, & que B*W^£B«a „ eher depuis piulieurs ^« n- > » me reproche a moi a avvr _ II1C l^M o0,,,W.-vous iul- : ^'convlennent^ vous aure. beu , de vous louer de ma reconnoil&nce iDemandezdesemplois.onvousen , donneta: mais ne vous , jufqu'a prendre d.une alhancg ^qneVe^neis^^^; , de pouvoir parvenu. Car cnhn ie In vftère que vous nous avez totqours „ l'on a toujours vu que vous prenie*  344 Hijloire « matière, eft llne preuve qQ.eJle , „ » Madame, répliqua le faux la Mar«•"Uier* /ijepouvois me faire con" 0,M; votre alteffe, fans enaSr • fon indignanon, elle verroir bien que - ««.eft pas par ma naiffance £?ï «faismdignede 1 'honneur ou j'afpVe rezteZ-TVamCUe'^andTO^%" dont le nom &le crime font fe ^UD1' s.ccna Ja comteffe, en poufreur, vous ètes eet exécrable abbé »e d'Hótel. Ma- teftantifme/^^t dans ]e duurt fon caraciêre, " ™? ï * pl"S finSuliére & P« fa figilre : jf -«on de s'Jwbiller , fries ridfcpJesqSW pronts qne; 'lo^e qm la dévorók Jf °"n?lt> & ]" ja' ««X a la cour atfit ' ^ n W fa« dïi,yer ■EUe avoit Ja W,,/7' de fa,nii e roht grcane^ït l, jour au™ /e W Hfe fe & * ia ladder attr1 !rreS^arité dö fa taijfe f grand nombre?S?'C 3?eiIr & a«teur lJ fo^fiWafiqile.3gf yrenconrra & > autres dont on a Pf^nslesDrVnonnatresh-l l^^YUsn'atentpeui Il , , . ^«-«ucs. Ji a nart 2 ^ents du jurifconfulte de %US les ch*rmes du (lyk tul, TTJ'r m?yen d'inf fant Zr FrJmder> en am"Jant Mats les agréments av'U ^ P-relles-mêmes^nefont atni3flJe PeUX ^Pnmer «m i s des agréments para/lees U les ttre. >f* l„ Zhö* „ nfUre d^fleutsdans . ras—. ivuces- dkaü £ a parUr Plus « ^^fuue.Jemeflatequefe  pour Jean Palmier. 351 meprocurerai enfin les mémoires néceffaires pour rendre a fa mémoire la juftice qui lui eft due, La caufe, dans laquelle on m'engage aujoutd'hui, préfente peut-être 1'efpèce la plus fmgulière qu'on ait jamais vue. Deux domeftiques introduits chez 'Charles de Saint-Yves , mon oncle, ont trouvé le fecret de devenir fès maittes! lis m'ont chalfé de fa maifon , & m'ont enlevé fa tendrelfe Sc tout fon bien, qui confiftoit en plus de cinq cents mille livres. Ils ont fait plus ; ils ont abufé de fa vieillefle jufquau point de lui extorquer un confemement, par lequel il leur eft permis de potter fort nom. Qui croiroit qu après m'avoir dépoaillé de la forte , il me reftat encore quelque chofe de mon oncle qui püt être 1'objet de leur jaloufie ? Elevé par eet oncle, introduit pa* lui-même dans les fecrets de fon art, je regardois la gloire d'avoir eu un fi atand maitre , comme une confoiation que perfonne ne me pouvoit oter ; jecomptois me faire honneur de la Iiaifon que le fang avoit formée entre lui & moi. Enfin je m'imaginois qüétanf  ^2, ^ Mémoire • a la fois, & fon neven & fon élève perfonne ne pouvoir efpérer plus que moi de jouir des avanrages de fa réputation.. Cétoit, pour ainfi dire, une portion de fa fuccefuon, qui fembloit m avoir eté tranfmife d'avance, & dont je me flattois d'être le paifible pofTefieur. C'eft cependant I'ufage de ces droits naturels'que lues adverfaires veuient aujourd'hui m'interdire: ils viennent folliciter avec chaleur 1'autorité de ia juftice, pour me faire "des défenfes exprefles de m'annoncer au public comme le neveu de mon oncle, & comme i elcve de mon maïtre. Je n'aurois iamais penfé qu'une prétention fi bizarre put iaire naitre la matière d'une conteftation férieufe. Mais fur quoi ne plaide-t-on pas? Voyons ft l'on m'empêcbera d'êVre le neveu & 1'élève du fieur Charles de S^nt-Yves; c'eft-d-dire, fi l'on me fera eefler d etre ce que je fuis. Voici, ei* deux mots, les faits de ma caufe. Le fieur Charles de Salnt-Yves J mon oncle, commenca a exercer la cfiirurgie a ^aint-Lazare. 11 s'attacha principalement a la partie de eet art qui a pour objer les maladies des yeux. Ses travaux iurent fmvis d'un fuccès que le public  pour Jean Palmier. 3-53. ji'i<»nore pas. Comme j'étois fon umque neveu, il me deftina k la meme profenion , & m'enfeigna les mêmes principes Sc les régies de fon art. Je travaillois fous lui k S. Lazare j & je fis 9 fous fa conduite, différentes operations. La preuve eft écrite dans mon en- ^La' multkude des malades dont la réputation de mon oncle attira la confiance, le forca de fortir de S. Lazare. II alla demeurer rue notre-dame de Bonnes-Nouvelles. Je 1'y fuivis: d continuade me donner des lecons, Sc mol de pratiquer fous fes ordres. Il me menoit chez tous les malades: je es panfois fouvent devant lui. II me les confioit, lorfqu'il ne pouvoit pas les voir. 11 y a même certains malades que j ai vus avec lui pendant dixdiuit mois con~ fécutifs: mon enquête en fait foi. C elt ainli que j'ai pafte environ fix annces a recevoir les inftrucftions de mon oncle, & k exercer, fous fes yeux , la prof elfion d'oculifte. MaiS voici i'cpoque de ma difgrace. . Mon oncle prit chez lui une jeune domeftique, nommée Manon (ons le titre de cuifmière. Cétoit une Uit qui ïéunifloit beaucoup de talents ; auLi  Mémoire mon oncle fut-il ewrêmèment fatisfkfi de fon fervice & de fon attacheinent • &, comme il avoit IWè extrêmefnent reconneiifante, il crat qu'il y avoit de a mface a a retirer de la fervitude. . 11 changea donc fon état, & k retint aupres de lui comme une compa«rne qui par fes attentions, kd tenoklieu' de lemme dans le menu détail du mi* «lage» L empire de cette fille fur 1'efprit de Jon oncle devint bientót une forte d enchantement. II n'étoit plus a lultaeme; il ne penfoit plus, il n'aglffoit plus que par elle, &po«r elle. Son cceur , pour bair ou pour aimer, ne fe déterminoit plus que par les impreffiohs de cette hlle. Comme j'eus le malheur de deplaire a Manon, Sc ^ ma qualité tl henriet ptefomptif lui paroiflbit une ailez bonne raifon pour me haïr, jefus une des premières viébimes de fon defpotiftne ; Sc Leoffroy, mon adverfaire y trouva, dans la fuite, le principe de la rortune» \ Ce garcon, qui nWoTt alors pour tout mer.te que les bonnes graces de Mcthorii fut fnbftitue a ma place dans la maifon de toon oncle: mais il yentra fous de plus Aeureux aufpices que moi. Au refte f»  pour Jean Palmier. 3^ «e dois point envier la fortune qui s'eft offerte l lui, puifque j,'aurois fans doute eu la délicateife de n'en vouloir pas profiter. 11 fut moins difficile, & peut-etre plus fase : il époufa Manon ; ou pluto» Il époufa, pour ainfi dire, mon We lui-même, qui, par la force du charme, étoit, en quelque facon, identifie aveo cette fille. . « Deouis cette utile nmon, mon oncle eut une infinité d'égards pour le nouveau mari, qui y répondit de fon cote, par une extréme complaifance. Mais, comme les obligations que mon oncle avoit afes généreux commenfaux s etoient apparemment multipliees de jou« en jour, il craignit que la mort ne le furprir fans leur avoir donne des mar-, ques fobdes Sc fingulières de fa reconnoiifance. Son premier bienfait tut cl adopter Leoffroy, en confentant par un adfce précis, qu'il portat le nom de SaintYves. Le fecond fut d'inftituer Manon & Leoffroy fes légataires univerfels: Sc, comme pour mettre le comble a toutes fes libéralités, il mourut. Depuis la mort de mon oncle, Leoffroy 8c moi, nous exercons ï Paris , chacun de notre cbté, la profeffion d ocuiiite j lui dans la rue S, Thomas du Lou*  3 "5 *> Mémoire vre; & moi dans la me Bardubec, ffl tote de la rue d« la Verrerie, prés l3 eimerière S. Jean. P II prend le nom de Leoffroy de Saint*vesg & moi la qualité de neveu & d'é- ■ leve de Saint-Y^s : & c'eft fur cette i quahficanon, qu'il m'inrente aujourd hm un procés. II demande qu'il me loitdefendudeme dire, dans le public, le neveu & l'éleve de Saint- Yves. J avoue que je ne concois pas quel expediënt il fournira 4 mes juges, pour les mettre en état de lui aecorder ce qu i demande: car enfin je ne penfe pas qud foit au pouvoir des hommes, ni, ;e 1 oie dire , de Dieu même^ de faire que je ne fois pas le neveu de mon encie. Leoffroy convient avec moi que Charles de Saint-Yves étoit mon oncle. Je faifis eet aveu ; & il me parojt qu avec un peu de dialettique, on peut ailcment en inférer que je fuis fon neveu. Or fi je fuis le neveu de rnon oncle, pourquoi m'empêchera-t-on de dire que je le fuis? Voila d'abord une moine de la demande de Leoffroy, qui me paroit detrmte par des raifonnements fflez fohdes. Voyons I'autre partie. J'ai prouvé, par une enquête, que monroncle m'a éleyé dans fon art,  pour Jean Palmier. 3^7 Lie j'ai cravaillé, pendant fix ans, fous _ fes yeux, & fous fes ordres. N'eft-ce pasla être fon élève ? Pourquoi ne prendraiie pas ce titre qui, dans ma profeffion, m'cft auffi honorable qu'avantageux ? Mais, dit Leoffroy, je produis des témoins qui ont été fort lies avec votre oncle, & qui cependant ne vous ont jamais vu travailler fous lui; & la plupart dépofent que votre oncle n'étoit pas content de votre conduite. ( Je n'ai que deux mots a répondre. Je demande d'abord fi, lorfqu'U s'agit de conftater la preuve d'un fait pofitif , comme dans 1'efpèce, ou il eft queftion de fcavoir fi j'ai travaillé fous mon oncle , la dépofition des témoins qui declarent n'avoir aucune connoiflance de ce fait, doit 1'emporter fur le témoignacre de ceux qui atteftent affirmativement la vérité? Je ne crois pas qu'il faille être un grand jurifconfulte pour prendre fon parti fur cette queftion. Je ne dis rien des difcours défavantageux qu'on ptétend que mon oncle a remis fur mon compte. J'ai déja avance que je n'étois pas 1'ami de Manon: &C l'on date de fon règne. Voila toute ma caufe, dont j'ai cru devoir donner ce pet.it détail au public.  *<8 Mem. pour Jean Palmier. J'efpère que mes juges ne me laiiTeront pas joner plus long-tems le rble de Sofia avec ce nouveau Mercure. Par fentence de police du 7 mai 1734, d hit permis au fieur Palmier de prendre le nom & la qualité de feul neveu & éleve de feu Charles de Saint^ Jves , chirurgien oculife, & de faire infcnre ces deux qualités dans fon tableau; avec defenfes a Leoffroy de pre* die Ie nom de Saint-Tves.  # COUPABLE échappée au fupplice. Hélèse Gillet ,'agée de vingtdeux ans \ fille du chatelam de Bourgen-Bretfe', fut foupconnée, au mois d'oelobre 1614, d%tte enceinte. Les fymptomes qui avoient occafionne ce ~foupcon difparurent au bout de quelque tems! 11 n'étoit mention que de eet événement dans toutes les convetfations de la ville. Enfin le lieutenant-particuher, prenanr le bruit public pour une déndnciation, ordonna qn'Hélène Gillet feroit vifitée par des matrones. Le réfultat du procés-verbal de vifite fut qu'elle avoit eté délivtée d'un enfant, depuis quinze jours. L'accufée fut dccretee, & conltituée prifonnicre. Elle convinr,lors de fon interrogatoire, qu'un jeune homme, qui demeuroit dans le voifmag* de Bourg, & qui venoit enfeigner a lire & a éenre a fes frères, étoit devena amoureux d'elle; qu'elle avoir toujours réfifté a fes follicitations; mais qu'enhn il avoit feu gagner une des fervantes de fa mère, qm 1'avojt enfetmée, il y avoit  3 6° Coupable quelques mois, dans une chambre, avec ce jeune homme, qui 1'avoit violée- Sc que Ie troubie oii eer attenrat 1'avoit iet tee, ne lm avoit lailfé ni la force, ni la liberté d'appeller i fön fecours. Quant . aux couches, eilen'en vouloit pas couvemr: & ce-qhi vraifemblablement 1 obhgeoit a fe tenir fur la négative, ï eet egard, c'eft qu'elle ne pouvoit reudie compte de l'enfant qu'elle avoit mis au monde. Elle étoit,,fans doute, inftrmte de 1'edit de Henri II de icctf qm ordonne que « Toutes femmes qui »ie trouveronr duement atteintes & » convaincues d'avoir oelé & caché tant " J.eur grofefle que leur enfantement » lans avoir déclaré ni 1'un ni I'autre » Sc lans avoir pris de 1'un ou de 1'au» tre, temoignage fuffifant, même de » lors de 1 ilfue de leur ventre: & après *> ie rrouve l'enfant avoir été privé, tant " fn \acrement de baprême, que de la "lepulture accoutumée , «femmes tenues pour avoir homicidé leur » enfant ;& pour réparation pubüaue s » puntes de mort & du der nier fupplice, 3> de telle r;n„?„r >- rr . * - y«c quaute particu- ?> //ere /(? weritera ». JS$* gftfo pouvoit d'autant moins ignorer  échappce au jupplice. g£? ignorer cette loi, que Pon exécutoit alors ponétuellement, 1'édit de 1585 , qui enjoint aux curés de la publier aux prones de leurs mefles paroiffiales, de trois mois en trois mois, & aux procureurs du roi & des feigneurs hautjufticiers de tenir la main a ce que cette publication foit faite. Le rapport des matrones qui avoient cru remarquer les traces d'un accouchemenr, étoit fans doute une préfomption rtès-forte; mais ce n'étoit qu'uné préfomption qui ne fuffifoit pas pour opérer une condamnation au dernier fupplice. Le juge étoit dans cette perplexité, quand un foldat, en fe promenanr, apper^ut un corbeau qui faifoir des efforts pour tirer un linge d'un cieux qui étoit au pied d'un mur voifin du jardin du père de 1'accufée. Il approche, & tiouve, dans ce linge, le cadavre d'un petit enfant. II alla, fur le champ, faire fa déclaration en juftice. On fit la levée du cadavre & du linge qui 1'enveloppoit. II fe trouva que ce linge étoit une chemife qui, par la qualité de la toile, & par la grandeur, étoit pareille a celles de 1'accufée , & étoit marqu^e, comme Totne FIL Q  3^2 Coupable elles, des deux lettres H G, Hé/è/14 Gillet. Le juge crut trouver, dans la réunion de ces circonftances, un motif fiuhïant pour fe déterminer, Le public, fur les apparences qui annoncent ordinairement la grolfeffe, avoit accufé hautement cette fille d etre enceinte. Quan<| les marqués de la groflefle eurent difparu,des fages-femmes commifes par la juftice déclarent, fous la foi du ferment, que cette même fille, que l'on. avoit yuegrofle, portoit tous les fymptomes d'un accouchement qui avoit tout au plus, lors de leur vifite, quinze jours, de date j & c'étoit a-peu-près 1'époque ou l'on avoit remarquc qu'He'lène Gillet avoit celTé de paroitre enceinte. Le viol dont elie étoit convenue elle-même, étoit une caufe toute naturelle de la groflefle dont le public 1'avoit accufée, & de 1'accouchement dont les femmes de f art avoient trouyé les traces. Et ces prefomptions paroilfpient d'autanr plus déterminantes, que les époques s'accordoient parfaitement avec le cours de- la nature. Du jour du viol, dont HéPene Gillet convenoit, a la date que les matrones affignpient a 1'accouchemenj  échappée au fupplice. 363 dont elles avoient trouvé des traces, ,oh eomptoit a-peu-près ne.ufi mois; & le bruit de la groffelfe produit par les apparences avoit commeneé a< fe répandre deux mois, ou environ, avant le terme que les fages-femmes avoient aiiigné aux couches. Toutes ces circonftances: róuniesétoient encore fortifiées par 1'enfantque le fo.ldat avoit trouvé dans Ie voifinage de la maifon cVHélène Gillet 3 &C enveloppé dans une chemife qui appar-. tenoit conftamment a cette fille. Enfin le juge crut fa religion fuffifammeot iaftruite par les préfemptions; qui dépofoient contre 1'accufée, & puit fur lui de la condamner par fentence du 6 février 16^,5 , a., avoir la tête trancbée. II faut conyenir que eet ofiicier écouta. un peu trop le préjugé qui réfultoit nécellairement de la réuniqn de tous ces faits. II étoit bien diffieile, fans doute , de ne pas croire o^Hélène Gillet étoit mère de l'enfant trouvé par le foldat. lylais les motifs qui peuvent f ure naitre les foupcons les plus violents dans 1'efprit d'un homme ftige & prudent, qui peuvent même lui fervir de guide dans ia conduite ,*& la.déterminer, ne font  3^4. Coupable pas fuffilants pour iïxer la juftice, & di&er fes oracles. Elle doit refter indécue, tant qu'elle n'appercoir que des prefomptions 5 paree qu'il n'y a point de préfomption a laquelle on ne puiffe op, pofer des poftibilités qui les balancent, ou du moins les affoibliflent. Or on n'avoit connoiflance de la groffelfe imputée a 1'accufée, que par la voix publique; & les boots populaires ont-ils jamais été, & peuvent-ils jamais être regardés comme une preuve juridique ? La dépo. fition des fages-femmes eft-elle infaib. bble ? Combien de caufes naturelles ne pourroit-on pas ailéguer qui auroient pu les mduire en erreur, fans comoter la prévention dans laquelle elles ont pu être induites par la renommée ? La circonftance de l'enfant trouvé enveloppé dans une des chemifes de 1'accufée, pent être le réfultat d'une précaution prife par la vraie coupable, pour détourner d'elle les foupcons, & les faire tomber fur Hélene Gillet. Les volumes précédents de ce recueil ont fourni plus d'un exemple de ftratagêmes du même genre, plus furprenants encore&plus réfféchis! Voyez, entre autres, torn. V, p. 437 & 43 8. Enfin on fcait qu'if s'en faut beaugoup qu'un viol, ou même Tappi-ocha  echappie au fupplice. 36"? 3'un homme, fut-eÜe de concert avec la femme , produife nécelfairement & infadliblement une groffeue & un accouchemenr. . Quoi qu'il en foit, Ia fentence tut coniirmée le 11 mai 16 z 5, par arrêt du parlement de Dijon , qui ordonna que 1'exécution fe feroit dans cette ville. Le bourreau fut averti de fe préparec pour la faire le lendemain. 11 fe eonfeife le matin, & communie. Arrivé au lieu du fupplice avec la malheureufe qu'il devoit faire mourir, il donne, en public, toutes les marqués de la plus grande inquiétude : d chancele , il fe tord les bras , il les léve vers le ciel, il fe met a. genoux, fe reléve , fe rejette a terre, demande pardon a la patiënte ; & aux prêtres qui 1'afliftent, leur bénédiótion. Enfin le bourreau, après avoir dit qu'il fouhaitoit d'être a la place de la patiënte qui fe prépare a recevoir le coup, léve le coutelas , & la frappe dans 1'épaule gauche. Hélene Gillet tombe fur le cóté droit. Le bourreau quitte fon arme, fe préfente au peupie, & demande la mort. Le peupie s'émeut & fait voler des pierres fur ce malheureux. Sa femme, qui avoit été témoin de la  3^ 'Coupable de cette commiffion, 1 avoit accompagne pourlengagerilaWuireina. £H rd k panente^qui 5, d eire-meme vers le poteau, fe remit I genouX,&préfentafa«te. Le bourreau reprend le fabre de lamainde fa femme, en decharge un fecond coup fur ia vichme, & la manque encore. ilfuïeur^du peupie redouble : le bourreau fe fauve dans «ne chapeile qui étoit au pied de 1 echafaud: fa femme rede feule avec a panente, qui eft tombée fur le courelas, prend la corde qui avoit fervi a her k malheureufe Héléne Gillet, & f im f*fe aueou. Cette fille fedéfend-Wlui donne des coups fur 1^ & fur les mams, la fecoue cinq ou fcfo^pourPérrangler.Sefentant^ Pee de coups de pterres, elle tire park tere cette mfortunée i demi-morre ve s les marcbes de f echafaud, prend d« cifeaux longs d un demi-pij, veut lui eouperkgorge,&iuin"tjafquadix p aies tant au vifage, qu'au & Se t l eftomac. Enhn Ie peupie, ne pouvanr —-- «. ues mams de cette *emme, qu'il maffacre ainli que fon man. On emporre k malheureufe Gilkt  ichappée au fupplice. 367 , chez un chirurgien , dont les fecours lui „rent revenir les efprits. Elle s ecrie alors 1 je fcavois bun que_ Dieu m affiftc. reit. Le parlement la rfflt fous la garde ! d'un Wtkèt, jufqu'a ce qu'il en fut au: trement ordonne. Ce récit eft tiré des memoires du tems - & d'autres pièces authentiques ' dont je vas parler. Mais je n'ai pu decouvrir quel pouvoit être le motif du trouble dont le bourreau fut agite , de la répugnance qu'il témoigna pour cette exéa«iln,& de 1'acharnement feroce de fa femme contre la malheureufe victime qu'elle vouloit immoler. 11 peut ie faire que eet homme n'exercat que malM lui eer infame métier, que des arconftances 1'avoient oblige d'embraffer, & que fa femme, qui y etoit attachce pat fa naiffance, voulftt le forcer a 1 exercer, 1'y excitat par fa prefence & voulut le fubftituer, pour ne pas perdre la rétributlon attachée a cette hornble fonction. . Quoi qu'il en foit, un concours de circonftances heureufes opera e falut A'Hélène Gillet. J'ai établi dans le traite de la mort civile, pag. 15 f, q*e, h uri coupable s'échappoit, pendant qti on le conduit au fupplice, des mams de ceux Qiv  3f8 , Coupable a la garde defiads U eft confie 3tó li en doit être de même i dJ.,-P i avun. pas ete executée D'3I1 mottf étoit vraifemblableme'nttsrè joumances qui fe faifoiem 2K!%* Poccafion du AUl, ayec Charles I, roi d'Anglererre - «fawflanee, pour folliciter I»  èchappét m fupplice. 369 ftrace de la malheureufe Hélene Gdlet. Elle fut accordée par des lettres d'abo- litlon datées de rans, au \G^. Voici'comment le crime de ia coupable eft énoncé dans ces lettres, d'après le mémoire préfente en,jog nom: « Nous avons recu 1'humb.e iupJ pïication 'cVRtiéne Gillet , agée de » vingt & unans, ou environ, hlle de J de Pierre Ghlex, notre chatelain-en ï notre ville de Bourg en Breflej cona tenant qu'induite par mauvaifes re„ cherches, elle fe feroit trouvée enV, ceinte j Sc comme la crainte ne ies „ parents, gens d'honneur Sc de bonne „ familie, lui faifoit. appréhender leur 5 blame & le chatiment de fon pere, elle auroit, par mauvais confeds, re„ folu de diflimuler fa faute , tellement ' rMiMLs*. A* Ton malheur, aue mal „ aliiftce en fon port, fon fruit fe ierolt M trouvé meurtri. Si que, pour réparai tion, elle auroit été condamnée, Sec». L'hiftoire en abrégé des circonftances rapportées plus haut, eft inférée dansces lettres. Enfnite le Souveram continue ainfi: « mais, pour ce que notre„ dit parlement a commis fa garde a „ un huiiiier, 1'appréhenfion d'un nou^ veau fupplice lui eft une continuelle  37° Coupahk xuicnco.ae, 8c requénr très-ham - bement nos lettres'de J f(ïufFerts en fes divers fuppbces qui " *** ftrpalTent hpeine de "pcondamnarionrac^qu/k^fi! " ^^/«Père&rnère^elevi l "aiempJoyexdiouerDxeu&lepJer " r^^^P^itérfcavoirfaiLs «qmnchnant nour 1* V r,/ . ' » fufdfr* 1 i P coniideration iuidxte, a la recomma.ndation d'au" CUnsn?fpéciauxfervireurs, en fl " Ï^T* de i'^ureax mariai de X ^«rne de la Grande-Bretagne, notre ' " f"8"***" * ^s-aimée fj£, 1 " tre, ProPre mouvement, grace foi «ciale pleme pui/fance cl autorité »»yale j nousavons i ladite S » ^«.füpphante, quitté, remis & "Pardonné, quitt^ remettons & «pardonnonsparces préfentes We! "de ve rnam, Ie fait & cas fufdi t" » comme ü eft exprime, avec touté » ace FY ™ 7" nous ec ace. Et mettam anéa*t toutes infbr-  échappèe au fupplice. ,, mations, décrets, même ladite fen» tence & arrèt de murt qui en font » enluivis, la reftituons & rétabliffons „ en fa bonne renommee & en fes biens „ non d'ailleurs conbiqués. Impofons „ fdence a nos procureurs - généraux » lieutenants, fubftituts, préfents & a • » venir. Si donnons en mandement, « &c ». Ces lettres furent prcfentées par Charles Fevret (i), auteur du traité de (i) Charles Fevret naquit k Semur, capitale de l'Auxois, le 16 décembre 1583.11 étoit fatfné de Jacques Fevret , confeiller au parlement de Bourgogne. II fut recu avocat erï en 160a, a 1'age de 19 ans , & alla fe perfectionner dans 1'étude du droit, fous le célébre, DenysGodefroy, k Strasbomg. De retour dans fa patrie, il époufa Anne Brunet, dont il eut 19 enfants. En 1626, Henri II, prirtce de ConJé,: lui envoya des lettres de provifion de l'état & office de confeiller & intendant ordinaire de fes affaires. Le Grand Condé, fils de Henri, lui continua les mêmes honneurs. Louis XIII alla a Dijon, pour y punir les auteurs d'une fédition populaire. Fevret le harangua. Le prince fut fi touché de fon éloquence , qu'il pardonna aux coupables , voulut que le difcours fut imprimé , & nccorda & 1'orateur une charge de confeiller au parlement de Dijon de nouvelle création : mais^ celui-ci, ne voulant pas quitter le barreau/ fe contenta d'un office de fecrétaire de la Qvj  372 Coupable l'abus. J'ai era que je ferois plaifir l plufieurs de mes lecleurs de rapporter le difcours de eet homme célèbre, qui ne ie trouve que rrès-difficilement. Ce n'eft pas que ee difcours foit bien merveilieux;d rouleprefque tout entier fir • Qes an^hefes. Maisc'étoitleaoütd'i jerne, Sc ne confiftent pas uniquement dans les mots. Dailleurs bien des geus aimem a connoit toM ce eft de la plume d'un homme dont la mémoire ) om t d'une célébrité méritée. « Meiheurs, ft^e • f " ffc fnte m co»fPect de la cour, donne " f 1 ,Ctonneme»t * ceuxqui Ia voient * eV n en a pas moins elie-même Elle n avoit vu la juftiee de céans que dans » le trone de fa plus févère majefté - «rrCiVue que ie vila^e » plein de courroux Sc d'indignation , cour aux anpoiriteraents de ooo llvrpc 11 ™urut a Dijon le I2 aoüt föói 1'de pres df 78 ans. II y a plnfieurs ^ a- ^ Mais 1 ouvrage qui a fait paffi, & fervera fon nom a la pol&ité/eft * ^ Jout le monde fcait le cas que tl Jimfconfuites & Ies tnbunaux font de eet excellent hvre. La meilleure édirion eft de Lyon en 1736 , en 2 vol, «-/0/;0, av^™« notes de Gtów & de 7 £S  echavpée au fupplice. 373 „ tel qu'elle le fait paroïtre aux plus „ ctimmels ; elle ne 1'avoit confidcrce 1 que L'épéc a la main, dont elle fe lert E pour la punitiön des maléfices. Mais, chofe étrange, elle trouve M aujourd'htuce premier appared toi.t „ chanaé: il lui femble que le yifage de Cette déeffe lui rit,comme plus adou„ ci & favorable : elle voit fa mam del; „ armée , Sc vous diriez qu'elle tend „ les bras, pour promettre que'quaiyie „ Sc protecfion a celle qm, de crnni„ nelle, eft devenue fuppbante. „ Vous vites, melfieurs, cette part„ vre file , il V a quelques jours, le viM faae couvert de home , par 1'ignomiM me de fa condamnation , la langue „ nouée parl'étonnement de fon iup„ plkerles yeux ternis d'horreur &de„ pouvantement, 1'efprit trouble dans „ les dernières agitations d'une funefte „ féparation 5 vous la vites, dis-je, aller „ courageufement k la mort, pour ia„ tisfaue a votre juftice : mamtenant „ elle retourne , pour vous dire que „ 1'ayant traitée par la rigueur de vos „ jugements,vousnepouveZpuslm „ refufer votre miféncorde. Elle eft „ humblemen: profternce a vos pieds, „pour baifer, de 1'inteneur de lcn  374 Coupable " détail^ o?oneTl°nrJeS eXamine F-Js rare, de plas émerveiünble j  échappée au fupplice. 375 „ je ne fcais fi j'oferois dire de plus mi„ raculeux qu'en tour cela. „ Car ici le glaiye a tranche,la cofde „ a fait fon office, la pointe des cifeaux » a fecondc la violence des deux: & ce„ pendant cette fille, dans 1'imWhte „ de fon age, dans 1'infirmite de Ion >, sèxe, dans les horreurs du fupplice, „ dans les appréhenfions de la mort, » frappée de dix plaies ouvertes, n'a „pu mourir. Mais bien plus, tgarlt „ mori volemem mors ipfa, quamvis ar< mater, perimere non potuil. „ Quel prodïge, en nos jours, qu une s, fille de eet age ait colletc la mort corpS „ a corps! qu'elle ait futté avec cette „ puiffante geuite dans le pare de le* „ plus fanglantes exécutions, dasS le „ champ même de fon monmont: Sc , „ pour dire en peu de mots, qu'armce „ de la feule confiance qu'elle avoit eit „ Dieu, elle ait furmonté 1'ignommie, „ la peur , 1'exécureur, le glaive, 1* „ corde, le cifeau , 1'étcmffement & 1* n mort même! „ Après ce funefte trophee, que lui » reftre-t-il, fmon d'entonner gloneufe» „ menrce cantique qu'elle prendra do» rénavant * fa part: Exultetur Domi%  376 Coitmble * nus meus, quoniamfupcrc-xahavit mL »jencordia judicium. " S11' PeUt"eIle faire> fm™ d'ap«pendre.pour éterhel mémorial % J.^fefe tableau votif de fes mi! :iui^^^^^^ " W fe^ cboi/ir plus * con^bIe afacondirion5que d'P/rtS * ger un aarden fon cceur, ó? elle ad * mirera tous les jours de fa vieS » W mam de fon Ubérateur ? & - movensmeonnus aux hommes; Pa tivue &. lordre de fa 1 toLeschof ■ -aunteoneourupourfaiibération^ 'W~e tut un commencement de bon- -naml%^ftre> 4«e, Je » main ae 1 etprnrinr. i j i CAtCUCion , la cour entr? " dans Ies ft"es nouvelles que ie S »goft concfdeesparlettrelexprefft " Peu ^övant enrérinées. CeB « encore quelque chofe de plus üJ§ -qu alors qu'on recouru. dia bonté g -IWe pour rmpétrer des iettres de " f"°» »Jui&fi cour étoient en d-ï 7i Q ? ~ >f ■ * a caule de 1'heu-  échappie au fuppfice. yft ï, Henrictte-Marie, princeffe du lang „ de France. Ce fut bien plus de voir % qu'a 1'inftant que le difcours de cette l fanelante cataftrophe eut frappe lol reillede ce fage Orphée, de ce doux * ravilfant efprit, qui tient dignement « le premier rang en 1'éminence de p 1'ordre de la juftice (*), ü alt aufll- Có II veut parler de M. le chancelier^faË'lifi-» Z//-p«étoit fils de f f f^ 1, feigneur de Chouvill.ers, & de Jeanne Umberï. II prêta ferment au P,"1?«^J.°« U charge de préfident au prefidial de Cl ares ,K fep«mbre 1587. Charles de Bourbon, comte de Èoijoni, couiin germam du Roi Henri IV, le nomma intendant de fa maiion , & tmeur'honoraire de Louis fon fils : d étoit Sors confeiller au grand confeil. La réputation qu'il avoit d'êtrc un des plus fcavants & d-s plus intégres magiftrats du royaume detennina Henri IV a le nommer pour remphr ïine place de préfident au pariement de Breagne. Mais Lm* XIU le retint dans la fiuw Sfprès de lui, en qualité de confeiller ordi3re en fes confeils d'état & de nuances. II fi,t fait earde des fceaux le 6 janvier 1624, öe c an E après la mort de M. de Silleri au mois d'oftobre de la même année. Des inmgues de cour luifirentöter les fceauxen 1626 avec ordre de fe retirer a fa terre de k Ri\w» e au Perchc, oü il vècut, le refte de fes jours , en homme privé. 11 mourutle n decembre xli7 4*é de 75 ans. Son fils Etienne parvint auM'a la efigflité de cluncelier en janvier  !7j Coupable » tot empoigné la lyre pour charmer la Gevente des loix, rappeller les^l «crersxnv.olablesdelaiLr^evvam «cette ^nformuéeEurid^ernorte™ f lement Par, a cemdamnation, & pref- * quenaturellement par la peine. C'eft " Une digne d'admiration " 3,Ue ceIIe gUI &vóit être dans 1'oubli » d.unemorttnfame, vive encoreavec * ce cpntentement qu'elle donnera ft' *ietala pofténté de dire que norri iegmmement acqms, ait fnérité nar cette a&on.Ie nom de dém ^i «mtfencordteux^pouravoirpardonnt ' * ,& fan* **» P«ne que de prier pour *h profpenté de fa perfonne & dé » Ion etat. * Quant bönus prlnceps qui inMget • * lU;m Pf* lui rifiretur; quhmfidelis » qui vcU nocentibus, nil nift'„cel * ^PP^onesexpofcit; quaLenè * d™«^proximuss qui veniam criéi- " n"m> nonfuPP^ngravitate,fed vo- * torum^ncupatwne pro fua totilip *> impcriLfalute difpenfat.' H j. . , \?72- u monrnt revêm rU ^ 1 — age ae 05 ans.  échappée au fupplice. 379 » 'Puiftiez-vous toujours ainfi, jufte nRoi, marier heureufement la juftice „ avec la paix, le jugement avec la mi„ féricorde, la clémence avec la ieve» rité! Puiftiez-vous fi glorieufement » terrafler les ennemis de votre cou» ronne, qu'après les avoir domptes w par la rigueur de votre juftice, vous » leur imprimiez les mouvements d'une „ humble & fidelle obéiffance par les „ effets de votre clémence & débonnaireté! Puiftiez-vous, grand Monarque, » punir fi parfaitement les crimes, que » les coupables, ayant fatisfait k Ut peine, „ puiftent futvivre 1 leur fupplice, pour * exalter k longs jours la féhcité de vo„ tre règne & de votre domination! „ Cependant, puifqu'd a plu k Dieu 4 de redonner la vie k cette rille, au „ Roi de lui concéder 1'abobtion de Ion „ crime,elle vous demande, meflieurs? „ la liberté, fans laquelle le refte lui „ tiendroit lieu d'un fecond & detnier » fupplice : & fous efpérance d'obtenir „ ce qu'elle pourfuit, elle vous pre» fente, en due tévérence, fes lentes « de pardon, vous fuppliant de proce* der k 1'entérinement d'icelles ». Cés lettres furent entérinées pureinent & fimplement par arrêt du parlê-  3go . èoupabk taern de Dijon rendu en la fcurnelle Ie 5 juin 1615. * Mais cette grace rendit-elle a Hélène Gillet la plenitude de fon état civil > Te vas examiner fuccinétement eette queftion dapres les principes que j'ai étabhsdans le traité de la mort civile Pag- 5*9 & fuiv. " Les lettres d'abolition, telïes qu'é* toientcellesquifurentaccordéesicette Ml, doivenc etre entérinées, fans e-xatnen, de la part des juges, C'eft une grace que leSouverainiirde en teZ ^^f^^ü.e^té.tó faire joepnnonfance de caufe; fauf aux cours a raire des remontranees fur les fuites que pourroient avoir de telles aboli-' «ons, qui femblent toL-rer le crime 3 en ui accordant I'impunité. * «ffaue jufqui la note d'infamie impripar e crime. Mais if faut, pour cela qu elles aient précédé le jugement endernierreirort5&quellesjaLtiié ies mams du juge. Si elles ne font obtenues, comme celles d'Hélène Gillet qaapres la condamnation prononcée! elles ne Wem point de 1'infamie. La raifon de cette différence eft que • ffnnd elles font préfents avant Ie^  échapvée au fupplice 38^ •ement prononcé, le juge eft obhge d'arrèter le cours de la procedure qui tendoit \ éclaircir Sc a conftarer en même tems , les faits mentionnes dans 1'accufation S enforre que la fonvidkioa ti~Sl «\Ur.t nas acqmfe , d eft mcer- tain fi 1'accufé eft véritablement cöu* pablei&il n'eft pas jufte de mettre au nombte des infömes , un homme do*t le crime n'eft pas avéré. Si, au contraire, ces lettres ne font préfentées qu'après la condamnation , fe juaement prononcé contre laccuie eft une preuve infaiUible, ^qüe, ment parlant, qu'd étoit:coupabe da délit dont il avoit ete charge Oi les lettres peuvent bien épargner la peine du cru-, elles peuvent bien releve de la mort nvile&ae fes effets: mais elles ne peuvent pas laver la taclie d mfamieimpmnée par le crime dont1 rn„étranr étoit conftamment coupable . ÖC les Romains par laloi_$ , Cod. degen' „li alolit. lndulgentia quos Iderat, notat, necinfamïam crïmmis tollu:Je4 peen* gratiam facit.  MIST 0 1 RE DE LOUIS GAI/FRIDY, ZoUlS. Gatfridy fut via[ d { facilue avec Snelle, dans le fiècle & acculanons de mag.e. Ces procédures &lescondamnationsfréqueLesqu^lIes, preiiion fur les efprits foibles que oh, ^re qu elles étoient forcières, patve MWH enfin a fe le perfuader. feïe eft % (?«^ dans fes inrerrogatoiresPP Un patre dans fa bergerie, dit Ia ^I^^^bat. Comme i ft perfuadelui-même qu'il va été, que "(on imagwarion eft modérémenc -cbauffée par les vapeurs du vinX  mfloire de Gaufridy. '383 » manqüe pas d'enparler d'une manière c c~,-. Mr^nupnce naturelle j» VIVe OC ïuucou" ^— „ étant donc accompagnee de la diipp» fition oii eft toute fa familie pour entendre pariet d'un fujet auffi nouveau „ & auffi effrayant, il eft très-vraifem» blable que des imaginations aufli toi„ bles que le font celles des femmes 8e „ des enfants , demeurent perfuadees, , „ C'eft un mari, c'eft un père qui parle , » de ce qu'il a vu, dp ce qu'il a fait: on , „ 1'aime, on le refpeóte j pourquoi ne ■> „ le croiroit-on pas? Ce patre rcpete „ donc fon hiftoire en différens jours | „ 1'imagination de la mère, celle des „ enfants en recoit peu a peu des traces „ profondes. Us s'y accoutument enhn. „ La curiofité les prend d'y aller. Ils le „ frottent, ils fe couchent j leur imagi? » nation s?échauffe encore de cette dil„ pontion de leur cceur; & les traces que „ le patre avoit ouvertes dans le cerveau „ s'ouvrent aftez pour faire juger, dans „ le fommeil, comme préfentes, toutes « les chofes dont il leur avoit fait la * defcripripn. Ils fe lèvent, ils s'entre* „demandent & ils s'entredifent ce qu'ils ont vu; ils fe fortiftent de cette forte mutuellement. Les traces deleur » cerveau, aidées de celui qui a l'imar  3^4 Hijloire * gination Ia plus forte, ne manquent -pas de regler, en peu de nuirs, Phif«toire du fabbat. Voila donc des forciers » acheves que le patre a faits 5 & ils en «reront un jour beaucoup d'autres, fi » ayant I'imagination force & vive la' » crainte ne les retientpas de faire'de » pareilles biffoires ». - Voila comment Gaufridy , ayant le cceur corrompu , 1'imagination forte & les paflions vives, fouhaitant d'ailleurs pour fe procurer plus facilement la faciiite ae les fatisfaire, avoir commerce avec Je diabe prit fes fonges pour des rentes; & a force de s'entendre dire qud etoit forcier, crue en effet qu'd 1 etoit. ^ Voici les principaux traits de fa vie oc de Ion proces. 11 naquit aBeauvefer, village fitu^ aupres des montagnes de Graffe en Provence environ Pan 1580. II étoit fils dun berger , & neveu de Chriftophc Gaufndy, curé de PoVurrières, villaee voifin cefieauvefer. II eut, dés fon en* fance, beaucoup de difpofirion a laforcellerie. On lui reprocha, dansje cours de fon proces, d'être tombé, i Pdge de lept ans, d'un Jieu fort élevé, fans fe iaire aucun mal. Comment ce prodi^e auroit-il  de Gaufridy. 38 auroit-il pu arriver , difoit-on , fi le diable ne s'en fut mélé, & ne 1'eut foutenu & porté a terre ? Son oncle reconnut en lui des talen s capables de 1'élevet au-delfus de l'état de patre; il réfolutd'en faire un prêtre. II le futen effet.Quoiqu'il n'eut jamais étudié en théologie, on lui confia néanmoins les fonctions curiales de la paroilfe des Accoules ï Marfeille, qu'il exerc,a pendant fix ans, au bout defquels il fut brulé, a 1'age de trente-deux, comme roi des forciers. 11 aimoit les plaifirs de la table, Sc ceux de 1'amour. II avoit, danslecaractère, un grand fond de gaieté, & poffédoit 1'art de donnet une face plaifante aux chofes les plus fimples. C'eft avec ces fortilèges qu'il avoit 1'art de s'attacher les femmes dont il entreprenoit la conquête. • Ses hittoriens nous racontentque fon oncle avoit en fa poffeflion un petit livretcontenant environ fix feuillets remplis de quarante caraclères ou chiffres, £c de deux vers francois au bas de chaque page. Ce bon écléfiaftique ignoroir abfolument ce que c'étoit que eet ouvrage; mais la figure bizarre des caractères lui fit croite que c'étoit une chofe Tome VIL R  386 Hiftoire fort précieufe. II" regarda cette pièce comme un tréfor qu'il devoit tranfmettte a fon neuveu. II Ie lui envoya fix mois avant que de mourir, & lui recommanda de le conferver avec grand foin. Gaufridy ne fit pas grande attennon a ce préfent, & l'oublia pendant cinq ans entiers. . ^n iour, »1 cherchoit des épitres de Cicéron pour en faire préfent i un écolier auquel il étoit attaché; le livre fatal de fon oncle lui tomba fous la main : c'étoit un grimoire. II 1'ouvre, lit les vers francois, & le diable lui apparut foudain fous une figure humaine. Son habillement n'avoit rien que de fort commun; il avoit même pris la précaution, pour nepas trop effaroucher Gaufndyi ée ne point avoir d'épée. Du refte d avoit 1'air d'un homme de condition. Ses traits étoient fort bêaux, & leur' aflemblage formoit une phyfionomie noble, douce& agréable. Ces dehots flatteurs ne préfervèrent point Gaufridy d'un premier mouvement de peur, què lui occafionna une apparition fi fubite. Raffur-par les proteftations de bienveillance du fantóme, il revint k lui, & acquit meme alfez d'intrépidité pour s'emendre dire fans éniotion que celui  de Gaufridy. 387 qui lui parloit étoit 1 ucïfer même. « Tu » m'as évoqué, lui dit-il enfuite, que a> me veux-tu? Je fuis prêt a rempiir » tes defirs; mais que me donneras-tu ? » Que veux-tu que je re donne, dit » Gaufridy ». Le démon lid demanda qu'il lui rapportat routes fes bonnes ceuvres. L'auttey confentit, ala réferve des facrements qu'il adminiftreroit , paree qu'il perdroit trop d'ames. A ce prix, il demanda que le diable, d'un cóté, le fit jouir dans le monde d'une grande réputation de fagefle , fur-tout parmi les perfonnes diftinguées par leur probité; d'un autre ebté, qu'il lui donnat la facilité de jouir au gré de fa pallion des femmes tk des filles qui lui plairoient & qui irriteroient fes defirs. Etant ainfi convenus de leurs faits , ils firent un écrit doublé entre eux, que Gaufridy figna de fon fang. li eft bien étonnant, pour le dire en paftant} que des auteurs écrivent férieufement de pareils faits. Comment peuton concevoir qu'un écrit puiffe obliger le diable, & qu'on puiffe, par la même voie, s'obliger envers lui ? Quel eft le tribunal qui feroir compétent pour contraindre les contraótants a exécuter leurs conventions ? S'il n'y ena point, quelle Rij  388 Hijloire confiance pourroit-il avoir lui-même en ceux qui s'obligeroient envers lui ? Ne fcait-il pas qu'un repentirfincère efface, aux yeux de Dieu, rous les crimes, Sc arrache a la puiftance infernale , ceux qui ont le bonheur d'être véritablement pénirents ? Mais c'eft trop réfléchir fur de pareilles puérilités. Le pacte fut exécuté de part Sc d'au-tre avec aifez de bonne foi. Gaufridy futregardécommeun modèle defageffe, & cependant il vivoit dans la plus grande débauche.Combien de tartuffes jouiffent du même avantage, fi c'en eft on, fans avoir fait aucun écrit avec le diable? Qaoi qu'il en foit, Gaufridy n'avoir befoin, pour foumettre a fes defirs la vertu la plus farouche, que d'un fouftle : d n'étoit même pas néceffaire qu'il fouffiat de fort prés, il fuffifoit que la perfonne qu'il vouloit réduire fenrit ce fouftle. C'eft un fait que la violence des tourmenrs&la foibleffe de fon cerveau ébranlé par 1'idée affreufe du fupplice dont il étoit menacé, lui ont faitavouer. La réputation de fa fageffe lui avoit donné accès dans la maifon du fieur de Mandols de la Pallus, gentilhomme de Marfeille. II s'y acquit la confiance sveugle de teute la familie. Ou le  de Gaufridy, 389 reeardoit comme un fidnt homme, ïneapable de concevoir aucune mauvaite penfée, & dont les confeils étoient autant dorades. _ . _ Ce gentilhomme avoit trois falies plus bedes les unes que les autres, élevées dans les principes de la vertu & de la dévotion. L'une d'entr'elles nommee Magdeleine , captiva le cceur de Gaufridy, quoiqu'elle fut encore, pout ainfa "dire , dans 1'enfance; mais dans un age cependant a pouvoir commencer de fentir les premières atteintes de 1'amour. 11 feut la déterminer a le choifir pour fon confeflèur & fon direcfeur. A 1'ombre de ces deux qualités, il eut de grandes privautés avec elle, fans néanmoins confommer le crime. Des fentiments qu'elle ne pouvoit démêler , lui mlpirèrent tout a coup une mélancohe extraordinaire qui caufa de 1'inquietude pour fa fanté. Les médecins ne purent trouver la fource de fon mal, ds hu ordonnèrent de prendre 1'air. On la fit partir pour unebaftideou métaine voiiine de la ville. Gaufridy contmua de lui rendre vifite dans fa retraite, & de faire auprès d'elle les fondions de confeffeur & de directeur. \ Enfin fa mélancolie , qm cherchoit R üj  39° Hijloire ans celTe un objet oü elle pfit fe fbrer * Jm infpira de fe retirer dansje matfon des Urf^s : elle alk a Aix dan couvenrdecetordre.Eloigtfed:iobrt qui caufoitfon troubie, elle reprit 'fc «anquiHiré & p^ troL ans £££ ^t^ agedevouenfin^ubourde/ere^ avoir misladernièremaina la perfect non des charmes de la demoifelle de fequentes vifires &lui refid^n m ^ tems fa melancohe. II parla aiors ou! verte^ntdefa^onrilfbt&oorf, & ob„ntmeme la penniffion d'écrire fur le ton d un amant déclare, & pou£ prevemr es accidens qui pourmient -ure de f ufage ou font\s fupériet r es de couyent, d'ouvrir les lettrïs adrefo lees a leurs penhonnaires , les deux amantsconvmrentdecertainscaraécères qui ne pouvoientêtre entendus que par eux. Mais un convent n'étoit nas un beu propre pour fatisfaire aifément les defirs cmninels de Gaufridy. U prit £ pretextedelamélancoliedefLaitrefri! fout la faire retourner dans la maifon  de Gaufridy. 391 paterneïle , afin de la faire changer d'air, Plus libre dans fes entrevues, il torma des entreprifes fur Phonneur de fapénitente. Les fentiments de piété dans lefquels elle avoit été élevée lui firent trouver de la réfiftance, & ce ne fut qu'après un grand nombre d'attaques qu'il triompha enfin de fa vertu. Ce fédufteur avoit fibien feu fafciner les yeux du public, & particulièrement des parents de la demoifelle de.Mandeis, que fa mère 1'a fouvent conduite ellemème chez Gaufridy, & les laiffoit feuls dans fa maifon, pendant des tems confidérables. Lorfque cette fille eut franchi les barrières de la pudeur, elle ne garda plus de mefures. Ses plaifirs augmentèrent fon amour. Elle ne pouvoit foutfrir un inftant la privation de la vue de fon amant-, elle l'alloit chercher a 1'égüfe, vouloit qu'il fut toujours dans la maifon de fon père : en un mot, il lui fembloit qu'elle n'exiftoit que lorfquelle étoit avec lui. La demoifelle de Mandols eut toujours la principale part dans le cceur de Gaufridy; mais il ne laiffa pas de lm faire quelques infidélités. 11 lui prit fan« R iv  39? Hijloire tame de féduire une nommée Cotbïefemmede Francais Perrein, héte de Mariedle.Apeineeut-dréuffi dans fon «e fut pas maltreffe d^irerl'inoifl?Ste dr!,[0n amantVE1Ie ^vint au contraue telletnentpaffionnée, qu'elle le fu voitpar r0ut, & vouloit s'^troduire par-tout ou d etoit. On a même dit que ^and il paifoit dans la rue, eik en «emejandevoir.p^p t-rUr ^ kfaifoit c"er: yodoGaufniy ^ . & ^ en meme temps * ]a fenêtre pour ^ m^P- "T"^?oarf«" & une nommee Ppde devinrent auffi la proie de %S d,Ë S' ^ dernière avoit tenu chambresgarniesdansMarfeille.&ravoit faciliteehez elle des entrevues a //•/rfy avec la demoifelle de Mandols 11 nLe Paroït pas qu'il ait eu commerce avec beaucoup d'autres femmes, aue les quatre qui viennent d'être Hommees : mais il paron qu'il ainfpiré des fennments tendres a plufieurs autres, ^ que 1 on a meme vu des prudes déci' deeS devemr coquettes pour tacher de iui p'aire. Les extravagancés de la demoifelle  Gaufridv. W — j ^ . , - de Mandols hrent ennu uuviu »v> de fa familie & du public lur leur véritable caufe. La réputation de lageüe «me 1'hypocrilie de Gaufridy lui avoit nrocurée, & la vetru de la familie de la demoifelle de Mandols, les avoient tait atttibuer a un principe de devotion : mais les chofes fiuent poulTees a un tel exces, ils gardèrent fi peu de mefures i dans leurs plaifirs, que la verite fe inanifefta. . Les amis & les parents de la demoi1 felle de Mandols lui reprocherent les déréelements : elle ne peut nier des , faits qui étoient notoires : mais elle du que Gaufridy étoit magicien, & quil 1'avoit enforcelée. L'inclination que 1 on avoit alors, fur-tout dans ce pays-la, a croite aux forciets, fit que cette excufe futooütée.On necrut pas qu'il fut dans 1'ordre de la nature qu'un homme put, fans le fecours du diable, infpirer un amour fi violent a plufieurs femmes ala f° Voici comment la demoifelle de. Mandols comptoit 1'hiftoire de fon en- forcellement. Elle étoit encore enfant , lorique Gaufridy lui fit préfent d'un agnus da, qui étoit enchanté jelle le portafur elle,  394 . Hijloire & de-k vmt cette mékncoiie qui avoic alarme pour fa fzmé. H hJ-T" f ]°Ur avec fa «ére i hur bafhdeprès de Marfeiile, GaufrMyt promeuouavecelledansiejardm ÏIM d" ^^^P^fpirituekavo e'^Vlo welles, & 1UI demanda fi elle ne con fentou pas qu'il k donnatd qui bon lui fleew"10"50^6^ ^£ ïïf et°1,t. Ceslours Ja tourmentée d'une ^ekncoben01re5qui k rendoit infunf lanour queje vous porte efi / ^es, ,l y avoir deux ccemsenrrelafl?, & ^ de «feur flèches qj?^!  de Gaufridy. ^ 39^ foient, avec ces mots : ma tres-cktre amie, voila comme je dejïre que votre cceur foit avec le mien. Elle préfenta cette lettre a la fupérieure qui n'y vit que des caradères oü étoient des chiffres broudlés ou effacés; elle feule pouvoit y voir des lettres diftinófes. De retour a Marfeiile, elle eut^ la fiévre, Sc Gaufridy difoir qu'elle guériroit quand il voudroit. Elle prit fur elle de ne le point écouter; elle lui fit meme effuyer des mépris. Il la détermina un jour a manger une pêche avec hu; c'étoit un charme qui lui infpiratant d'amour, qu'elle s'adoucit, Sc fouffrit fescarefjes, fans néanmoins lui accorder la derniere faveur. Ce charme n'étant pas aüez tort au gré de fon fédudeur, il lui en donna ün autre. C'étoit une noix dont rien n'egaloit la dureté. Elle la mit au feu; mais elle réfilta a 1'adivité delafiamme, Sc difparut tout a coup. Cette noix lui óta entièrement Ia raifon Sc 1'empire qu'elle avoit jufqu'alors confervé fur fes fens. Gaufridy 1'avoit fubjuguée a un tel point qu'il lui fit faire confécutivement fept a huic pades avec le démon. Elle les figna dö. R vj  39^ Sijïoire fon propre fang, que Gaufridy^ dra aö quacneme oWc avPr ■ fortdélié. S * ««Poincoü Pour écarter les obftacles que la févéntc de ia mere auroit pu apporter a (enrs pa^nte,qu:elleJmamenaeüe-nre feuls r 7 " Cbamb^ & i« ylaira ieuls :Ga^, qm vouloit que la demoifelle A ]m f ^ « avances,pour edédommagerdespe nes que fa conquête lui avoit coütées Pinf M, TAe£on f°"ffle -io reL r jTclne! folllC1Eaenfind-onfomre; Soit pour la fervir, f01't au'ü voulüt avoir un garant de fa fidélité, il m7tl J fuite un écuver iafenial, auquel y donna ordre d exécuter toutes fe vci ™c,CetjcU7eru„iourlurMf; au travers des airs, fur une montaene den, F C(>mme prince des magi- ciens,&heutenant deZüc/^r /? - ï etoit affisi fes cótés T « ^ 1„ l •/• • ,coces- Les autres forders leur baifoient les pieds. Elle feu* dans un détail abominable t dl  ^ GaufrlaW. 397 eoutant de routes fortes de crimes 8c Ümpiétés qui fe commettoient au lab- ^Gaufridy s'approcha d'elle , Uk faire une proteftation folemnellequ elle feroit bonne & ndelle fervante du diable: & pour preuve de Ion engagement, il la fit marquer en plufieurs endroits, entr'autresa la tète & vis-a-vis du cceur. . . Le père Michaèlls, jacobui & mquifiteur a Avignon, inforroc de tous ces bruits, voulut s'en affurerpar m-menre. 11 ttouva un jour la demoife1 e.de Mandols a la Sainte-Baume. lll exorcifa folemnellement & en drelfa proces- verbaL . . Voici les principaux traits de cette opérarion, tels que ce bon rebgieux ks rapporte. Premièrement , quoiqu e e neut jamais appris le latin, & qu elle le feut lire a peine, elle lm repondoit en francoisa toutes les queftions latines qu'il lui faifoif, ce qui ne le Wend poinr, dit-il, paree que 1'auteur du hvre ftagellum dzmonum 3 dit que les diables qui pofsèdent les femmes repondent rarement en latin. a ; Secondement, la polfedee, agee alors de dix-neuf ans, avoit de trés bons m-  39°* Hiftoire rervalles :^rfqu'elie n'étoit point charge faraifon étoit très-faine. Le démon, Pendanr qmnze Jours, lui donna plu! leurs charmes Un jour enrr'autj, il Pr ndrP°UVrirla ^Uche P°M lai£^ prendre «„e matière ghante; le père ■Mducuslm mit aio's la main fi a Troifièmement , un tremblement bres 1 orfqu on 1'exorcifoit, & avec tant deviolence,quel'on craignoit ponrfa i ce qm étoit caufe qu'on ne £uvofc W pxorcifmesqu'Zdenn.LePmc^ tremblement la prenoit lorfqu-'on lui mon. Quand on lui mettoit, dans ces ï dedans. des mouvements comme ^f^dyecles^uand^ f ! 7eranon des exorcifmes, ouü eft Parle des parties tantintérieures qu'ex- teneures du corps, elle remuoitchl une d-es parties, a mefure qu'on les noZ .Quatrièmement, quand on Pexhorroit a renoncer au diable & a tous fes adherenrs, dés qu'elle commencoit t prcaoncercecterenonciation^le diable  de Gaufridy. 399 la prenoir par le dedans du gofier. Elle tournok fes yeux & demeuroit comme morte. iufnua ce au'elle revinr d'elle- c même; & alors elle reprenoir le ril de i fon difcours. Cinquièmement , elle fcavoit ce qui ; fe paifoit dans des lieux ou fa vue 11e pouvoit pénetter : eue nommuu ^,v^ ligieux qui alloient du dortoir a l'églife, quoiqu'elle ne les vit pas. ï Quand on difoit des paroles qui n'étoient pas dans les rubriques, elle reprenoit 1'exorcifte, & lui fuggéroit ce qu'il de voit dire. Sixièmement , elle parloit difertement des ordres des anges : elle difoit que le premier de chacun des neuf chceurs avoit été enveloppé dans la chute des démons \ que Lucifer étoit le ptemier des féraphins dans k plus haute hiérarchie"; que Bei^ébut étoit le fecond; qu'après Lucifer c'eft le plus puiftant de tous les diables; qu'il a la liberté de venir parmi les hommes; mais que, depuis la mort de J. C. Lucifer eft enchainé aux enfers;que tous les démons font cependant prêts a lui obéir , a moins que la volonté de Dieu ne sf oppofe. Le troifième diable s'appelle Léyiacan; que S, Miehei étoit le qua-  40° Hiftoire tnèrne aiige créé , qu'il livra bataille a Lucifer dans le eiel, le vainquk, & le chafla dans 1'abïme. Enfin le procésverbal du bon père Michaëlis eft chargé acet égard, de rèveries dont on croit devoir épargner 1'ennui au lecfteur. Septièmement, elle nomma vingtquatre malins-efprits quilapofledoient, & répéta leur noms plufieurs fois dans' je même ordre, Elle nomma auffi rous les bons anges qui leur étoient contraires. Elle fcavoit les noms des anges gafJ «tiens de tout le monde, & de quel ordre ils étoient. On lui demanda pourquoi 2 étoit éntre rant de diables dans fon corps«He repondit que le premier des magiciens les y avoit introduits par la puiffance de Lucifer, & qu'elle y avoit donné une efpèce de confentement. Elle ajouta qu'un des principaux d'entreles démons qm la poffédoient étoit Afmode'e, le démon de 1'irhDureté. On lm demanda pourquoi , après tantdeprières, les démons ne défenv paroienr pas de fon corps ? Un d'entre eux repondit: « fi nous fortions, com« ment découvriroit-on le magicien ? " Dl^a veilt que nous gardions notre » pofte, paree qu'il veut exterminer la  de Gaufridy. _ 401 •» fynagogue des forciers, dont il eft las » de fupporter les abominations & les « impiétés, & nous ne forrirons point ,» que Gaufridy ne foit ou converti, ou .. mort, ou arrêté en juftice ■>. L'exorcifte rapporte, dans fon procesverbal , qu'on entendit une fois clairemenr plufieurs voix des forciers & des forcières qui crioienr tous a la fois au delfus de la Ste Baume, fur les dix heures du foir, le 9 du mois de janvier 1610 ; & le 24 du même mois, le même charivari fe fit encore entendre. 11 attefte encore qu'un homme de Marfeiile, qu'il ne veut pas nommer, lui demanda des nouvelles de la fille, mariée dans cette ville, & petdue depuis le dernier jour des innocents. II lm repondit qu'il ne lui étoit pas permis d'mterroger le diable la-delfus, & que, huit jours après, le mari & 1'oncle de cette femme, auxquels il avoit fait la meme réponfe, entrèrent dans 1'eg ife, ou la poffédée dit au mari : «« tu cherches ra ï femme; tu peux bien la chercher; „elle voie dans les airs, & elle eft 101 a préfent , Interrogée plus partieülierement de fon fort; elle dit que cette femme avoit été charmée par le prince des magiciens,  4ö2 f Hijloire qu elle etoit morte, & que fon■ Corp avoitete pofté au faKko^ * > , P9 IJ faut dire un mot du détail dans lequel elle entre au fnjet du fabbat. Les foiciers y font appellés par m conet ionne par le diiKlV- ;i r r • Lornet> ^oSie^^1^^ies oreil es d aucune autre perfonne les ans pour y aller, cbaque forcier II v a f V FmCe re"d le fal"t. qui pion des fo™s STave, ^"r ^ f°rciers endamSUn Vlfa§e»™> des yeux dune grandeur enorme, toujours ou_ verte, toujours fumaate : mais aux yeuX Ies'v t f beauté ra^ante. J-es grandes occupations du fabbac eondftenti compofet des malénces ]es SST Aar^nt ce ^avail avec' £ diable On y fait des feftbs ferv?s ea m«s qU1 neralfafient jamais Les r™ teauxje fel & VUnul f \ ■ OU~ cette 3ll 6 font bannis de cro L &>LeSC°ateaux P°«"oient fe ««Her, & formeroient akfi une figLIre  de Gaufridy. 403 ,pour laquelle les diables ont la plus violente antipathie. Le fel eft le fymbole ide la fagefte, & 1'huile fert dans les jmyftères de la religion. Cependant Itoute les cérémonies de 1'églife font •imitées & toutnées en ridicule au fabbar. Les flambeaux qui s'y brulent font i de poix & de fouffre; ils font conti1 nuellement un bruit éclatant. La cloche I eft de corne, & le battant eft de bois. On ne finiroit pas ft l'on vouloit entier 1 dans le détail de toutes les rêveries Sc ■ de toutes les abfutdités dont ce procès; verbal eft chargé; on croit devoir en : épargner 1'ennui & le dégourau ledeur. ' Mais onne ft;ait lequel eft Ie pluséton: nant de la patience avec laquelle ce bon ; père a écouté & rédigé ces menfonges ■ impertinents, ou de laibonne foi &c du ; ton perfuadé avec lefquels il les ra1 conté. Cette affaire fit tant de bruit, Sc Ie public étoit tellement perfuadé que la demoifelle de Mandols étoit enforcellée, & que eet enforcellement étoit 1'ouvrage i de Gaufridy, que Ie parlement de Proi vence en voulut prendre eonnoiffance. M. Rabaffe, procureur général, requit ' qu'il en fut informé , & meffieurs Le\ guiran & Thoron, furent nommés com-  494. Hiftoire milfaires. Les 19 & zo Février 1611 j ils entendirent plufieurs témoins. Cependant Gaufridy fe rendit volontairement en prifon. Entre les témoins qui furent enten* dus, M= Devantano Prota, notaire apoftolique, dépofaque, par ordre de Pinquifiteur, il avoit vifité la chambre de Louis Gaufridy} & n'y avoit trouvé ni livres ni papiers qui annoncaffent Ia <»agie; qu'il y avoit vu au conttaire des livres dignes d'un bonchrétien. Le père Carenne, reiigieux de 1'Obfervance , rendit Ie même témoignage. Le lieur Berthe, prévót de 1'églife collégiale de S. Martin, dépofe que Gaufridy étoit fort débonnaire; enfin plufieurs témoins parlèreiit è fa décharge. Le 22 Février, la demoifelle de Mandols fut mtei-rogée par M. Thoron* Elle faconta toute 1'hiftoire de la magie de Gaufridy, & comment il 1'avoit enforcellée. Elle chargea fon récit de tant d'abfurdités, & de tant de contradictions, qu'il paroit que, fi on lui eut rendu juftice, fut fon feul interrogatoire , on 1'auroir ou condamnée comme calomniatrice , ou enfermée comme folie. Elle joua d'abord le réle de poffédée.  de Gaufridy. 40J £ile difoit que plufieurs diables fe fuivant a la file entroient dans fon corps , & en fortoient fuccelfivement, & elle les nommoit d mefure avec une aglta» tion perpétuelle. >/] Elle fit des efforts comme poar s clever en Pair; mais Une paroh pas qu'elle v ait réufli. Elle tenoit fes bras & fes Lams renverfés , fes doigts étoient raccourcis & croifés les uns fur les autres} fans qu'il parüt aucune diflocation : toutes ces grimaces étoient accpmpar snées des poftures les plus indccentes, Elle fe difoit principalement polledee 1 Dans eet état, elle louoit Gaufridy, elle difoit qu'il étoit homme de bien, qu'il méntoit qu'on lm drefsat des autels, & que tout ce qu'elle avoit dit contre lui n'étoit qu'impoftures. Faifant enfmte femblant de repréndrefon bonfens, elle fit le détail de tous les crimes les plus fecrets qu elle avoit commis avec Gaufridy, 8c de toutes fes proftitutions. Elle dit que ces aveux lui étoient arrachés par f orce & par contrainte. Elle voulut meme le ietter fur le papier du greffier comme pour le déchirer, difant que toutce qu on  4° 6 Hiftoire vJrtf ^ ^7"^*> gnmd-vicaire de larüievequed'Aix, étoit préfent d eet mterrogatoue. II bi mitles doigts fac é dans a bouche. La polfédée avant fa femblant de les rnordre,il lui dit d Ie ^e^diment.Donnez-moiles autre lui dit-elle vous verrez conmme j e £ bnferai & les broirai j horte Gaufridy de tenir bon en juftice & de patier auX juges en ces tinnes f lp Ti?16116" bl«desfacon : »alegarddelamagie,jefuisi„ocent. " 'e tiendrai toujours ce langage l" ' " nUand on d^ok me faire'iour r! - On croira lm dit le démon, fi f »prles de Ia forte, que tu es mor " Inn.°«nt & que tout ce que la de_ «mo&lledeAfandol,* dit contre toi que fi les dia bles avoient Ie pouvoir de ^vierdekprifon.ilsleLtttoient C eft ainfi qu'elle prévenoit les aveux &les dencgationsqu:elle fcavoit que la vente d^eroit d & qu'elle  de Gaufridy. 407 3011e comme des inftigations du diable, i ' C'eft dans eet efprit qu'elle foutint Mout le refte de fon interrogatoire. Ce |ne fut qu'un flux & reflux de mouveiments convulfifs , & d'inftants de traniquillité. Lorfqu'elle étoit tranquille, lelie accufoit Gaufridy de magie, & fe 1 livroir aux détails les plus fales & les jplus impudiques. Dans fes moments ; d'agitation, comme ft le diable eüt parlé I par fa bouche, elle fe rétracloit, & s'ex■ haloit en éloges de Gaufridy. Elle ne celfa, lorfqu'elle parut être s dans fon bon fens, d'aflurer que, depuis I 14 ans, Louis étoit prince des magiciens, 1 qu'il faifoit tenir tous les jours le fabbar, 1 qui, avant lui, ne fe tenoit qu'une fois la femaine. Le juge s'étant récrié'-. voila un beau prince qui eft un miférable qui I ne poflede tien ! Elle répondit que Gam, i fridy avoit de 1'argent tant qu'il vouloit, paree que les diables en peuvent pêcher dans la mer. On avoit donné ordre, lorfque Gaufridy fut couftitué prifonnier, de le tenir I dans un cachot fort étroit. Elle dit qu'il : étoit fott au large, & qu'il avoit la libeté de fe promener. On feut effeótivement : que , par les ordres de M. Seguiran , le geolier 1'avoit mis dans un, lieu fort.  4°3 Hiftoire fpacieux: dc la prifon, & l'on regarda certe déclaration comme une preuve qu'elle avoit 1'art de deviner. On inyira la demoifelle de Mandols de faire voir les marqués qu'elle avoit a fes pieds; on en trouva une au pied droit lur 1'avanr pied, & une autre au pied gauche prés du petit doigt, toutes les deux de couleur bitnatte. M. Thoran enfonca une épingie fort avant dans Ia marqué du pied gauche, fans que ia pofledee témoignat aucun fentimenr, ' & fans qu'il en fottit aucune goutte de lang. Elle fut interrogée de nouveau le 24 février, en préfence de M. Corlolis, préfident du parlement, de quatte conleillers de la chambre des comptes <5c courdesaydes & des deux commiifaires de la cour. M. Thoron lui demanda en quel état 1 elle fe^trouvoit, 8c li elle répondroi: elie-même, ou Ie démon par fa bouche. Eüe dit tout bas, & avec beaucoup de^ modeftie, qu'elle répondroit ellemème. ■ Après différens difcours de part & d'autre, elle paria en ces propres termes : « notre Seigneur m'a fait de grandes » graces 3 il m'a mife dans une ütuation » d'efprit  de Gaufridy. 409 p d'efprit oü j'ai pu me confeffer au » père Michaclïs : j'ai tout avoué a M. n du Vair, premier préfident, Sc a vous m monfieur , qui m'avez interrogée. ■n J'efpère que la cour fera touchée de j> ma jeuneffe, & qu'elle confidèrera jj que j'ai été féduite Sc abufée par uit « magicien, Sc qu'elle me dérobera jj a la peine de mes crimes j». Aprcsqu'on 1'eut affurée qu'on luiferoit grace» elle fe trouva trés confolée, & remercia les juges qui étoient préfents. On ne peut s'empêcberde rémoigner ici la furprife que caufe la promeffe que cette hypocrite feut arracher a la bonré de fes juges. Ils éroient donc perfuadés dès-lors que Gaufridy étoit un magicien, & que la demoifelle de Mandols n'avoit donné aucun confentement aux crimes qu'ils avoient commis enfemble. Quelle pieuve avoient-ils dans ce moment de la magie de Gaufridy ? Ils n'en trouvoienc aucune tracé ailleurs que dans le procésverbal ridicule Sc abfurde du bon père Michaëlis, Sc dans les grimaces préparées &£ les fables puériles de cette fourbe. Quoi qu'il en foit, aufli-tot après raffurance que fes juges lui eurent donnée, elle confeffa que Gaufridy l'a-.oit marquée a la téte, aux reins SC To:ne VIL S  41 o HiPcoire dans plufieurs endredes de fon corps, Après cette confeffion , elle fut violen*. Inent tourmentée. Tout a coup fes bras, fes jambes fe tournèrent, fes doigts fe retirèrent en dedans en" forme decroix, fes jambes parurent fe raccourcir, & fans le fecóurs qu'on lui donna, elle feroit ïombée pat terre de fon haut. Elle epreuva encore des tourments plus violents ; elle avoit les mains roides & les dóigts tout crocbus & prefque immobiles , & le démon crioit par fa bouche : je brüle, je brüle. Comment peut-on ïïnaginer que de graves magiftrats aient pü voir tranquillement de pareilles farces , & en être les dupes ? Le 2 5 février, les pères Capucins qui affiftoient la poflédée, artefièrent fort féneufement que Gaufridy avoit prié Bel^ébut d'effacer toutes les marqués que la demoifelle de Mandols avoit fur elle. Pour prévenir cette opétation , on nomma promptement deux médecins & deux chirurgiens pour examinerfi elle avoit été déflorée, & pour dreffer procésverbal des caracières diabcdiques qu'elle avoit fur le corps. Heureufement que le démonn'exaucapas Iaprière de Gaufridy avec une grande diligence, car la vifite ne fut faite que piufieitts jours après.  de Gaufridy. 41 e Elle fubit, les jours fuivauts, plufieurs interrogatoires, dans lefquels ellene fit que répéter les propos & les grimaces dont on a parlé a 1'occafion des précédents. Enfin le 6 mars, M. Thoron youlut entendre le père Michaëlis. Celui-ci dit que tout ce qu'il fcavoit deM'état & de la difpofition de la demoifelle de Mandols y il 1'avoit appris fous le fceau de la confeflion, & qu'il ne lui étoit pas permis de le révéler , a moins qu'elle n'y confentit. M. Thoron la manda &c lui fit entendre que le bien de la religion Sc du public exigeoit que la vérité des crimes qu'elle avoit commis avec Gaufridy fut manifeftée, & qu'elle confentit que le père Michaëlis les révélat d la juftice. Elle répondit que, pourvu qu'on 1'aflurat qu'elle ne feroit point recherchée pour ces crimes-la, & que la juftice lui accordar fa grace, elle confentoit a tout. Le père Michaëlis lui avoit donné cette alfurance, qui fut ratifiée par la cour. Enfin elle fut vifitée par deux médeeins & deux chirurgiens, qui difent, dans leur procés-verbal, que « en entrant dans s> la chambre du palais archiépifcopal » d'Aix ou la vifite fe devoit faire , ils r trouvèrent la demoifelle de Mandols Sij  4i 1 Hiftoire » agenoux en prières; que,parlanr avec « elle, ils eiitendirent tout d'un coup » dire a haute-voix que Bel^ébut étoit » arrivé. Le père exorcifte qui I'affilloit » leur dit d'impofer leurs deux mains « fur ia tète de ladite demoifelle, & « chacun d'eux fentit un mouvement « & agitation provenant d'un bouillon» nement impétueux du cerveau, fans « qu'il y ait aucun mouvement extta-f ?> ordinaire au derrière de la tête. « Peu après elle fit un gtand hurle« ment, avec lequel elle dit que Be/^ér « tut étoit forti, & il ne fe trouva plus » aucun mouvement extraordinaire ni » au devant, ni au derrière de la tête, » Au bout de quelques inftants, on » lui entendit dire que Léviatan étoit » arrivé. Nouvelles impofirions de » mams fur la tête ; on trouva encore » qu'elle étoit intétieurement agitée»» mais le mouvement avoit changé de » place: il fe trouvoit dans le derrière » de la tête. Les experts alfurent que ces » pbénomènes ne pouvoient être pro» duits par aucune maiadie ordinaire * » donc il y avoit du futnatutel. « Le lendemain, ils vifitèrent Ie » pied droit, ou ils ttouvèrent une » marqué grisaae en facon d'une yieilk  de Gaufridy. 413 L cicatrice de mediocre grandeur. Ils fe firent piquer eet endroit avec une h, ai, deux grands doigts en travers , fans , » qu'elle fentit la plus légere douleur t ! *» ni qu'il en fortit aucune goutte de » fang ni d'autre humeur. Au pied „ gauche étoit une marqué bleuatre j> prés du petit orteil. On y enfonce un ,5 aiguille de la profondeurd'un pouce, £ fans douleur. Sans retirer 1'aiguille , „ on la détourne un peu de coté, & la M poffédée fent alots la piquure. v Elle avertit fes experts de la vifitet » audelfous du tetin gauche. Ils y ap» petcurent une petite marqué de la » couleur de celle du pied droir. Ils appliquèrenr autour la pointe de l'ai» guille en plufieurs endroits; ils troit« vèrenr par tout de la fenfibilité: mais » a 1'endroit de la marqué, ils enfonj> cérent environ d'un demi pouce, fans 35 aucune douleur; mais quand ils vou55 lurent 1'enfoncer d'avantage, elle »5 fentit la piquure. „ Elle leur dit de lui examiner 1'épine 55 du dos, environ la quatrième ou dnquième vertèbre : leurs recherches 53 furent inuriles; ils n'y trouvèrent au; 33 cune marqué, non plus que fur Ia S üj  4H . Hiftoire » partie antérieure de la tête, environ » deux doigts deffus le front, oü elle » diloit cependant qu'elle avoit été re» connue plufieurs fois. Et lors, difent » les experts, nous émerveillant grande» ment de eet événement & effacure des * deux fufdites marqués, la demoifelle v nous dit-.j'aurois bien caché les autres » Ji Dieu me Veut permis. Toutes ces » marqués apparentes & infenfibles, con- ■ » nnuent-ds, felon noire avis, ne fe « peuvent rapporter qu'a une caufe ex» traordmairefurpajfant toutes les efpèces » de maladies qui arrivent ordinairement » au cprps humain. » Us paifent enfuite a 1'exarnen de «letat de la virginité de la demoi» Mie de Mandols. Us entrentdans tous » es details des indices qui appuienr " !e"iTment' & décident qu'elle a « ete deshonorée plufieurs fois. Ils ajou» tent que la demoifelle crioit que tout " cda n]ccoit W des imaginations : & » lors l'un-de ceux qui V'avoit vifuée ré» pondupar moquerie : cela ejl vrai. Et » deffus ce dire, elle répartit : ft vous « autres hes pour nous , nous fommes « tropforts „. Ce procés-verbal fut clos -Ie 3 mars 1611. Cependant Gaufridy avoit fubi un  de. Gaufridy. 41? premier interrogatoire, dans lequel il niatout, & foutint qu'il étoit homme de bien : mais M. Thoron ayant continué 1'information, il acquit la preuve complette des déréglements de cetecckfiaftkme, de lafédu&ion de la demoifelle de Mandols, & d'autres femmes qu'il confelToit. \ On fongea enfuite a le confrontet a la demoifelle de Mandols. Pour y déterminer celle-ci, M. Thoron lui fit entendre que, lorfqu'elle auroit eu la rorce de foutenir a Gaufridy ce qu'elle avoit dépofé, elle rcfifteroit aux tentanons d.u démon. / , . Elle dit d'abord qu'elle ne vouloit point parler contre fon grand ami, qui étoit homme de bien 5 que tout ce qu on avoit dit contre lui étoit des ïmaginations. On dit a fon démon de la lauTer parler. 11 repondit qu'elle ne parleroit pas Elle cherchoit fon arm des yeux & Se la tête, & difoit qu'elle le fentoit prés d'elle. On lui demanda fi elle deiiroit le voir & le baifer; elle répondit que oui, & qu'elle ne vouloit lui dire qu'une bonne parole a 1'oreilk. On dit la meife, pendant laquelle elk fut lort cranquille. Après k mede, elle rétracta tout ce ± Siv  4T^ Hijloire qu'elle avoit dit contre Gaufridy. On fuJ dit qu'elle mentoit, or elle femit arire Le pere Billet, auguftin réformé ' Wifa: pendant la cérémonie, elle recitoit les oratfous avec lui, & mème eprevenoit.Elle difoit que'le démon folie. Au milieu des exorcifmes, elle devint comme muette, & fat faifie d'un O grand fecoument de tête & de bras contrnerSn0iHqU,eIle OC fe ft^ contre Ia muradle- On foupconna que Gaufridy, mi «etoit pas loin, étoit la cauïVde ces mouvements violents, & l>on cmr mettre fes charmes en ufage. On ie fit entter. Elle parutd'abordlevoÏÏvc ^Ue^W5 mais fes mom ^TtTrd - ,agitatl0nS la^Pnrent avec tant de violence, que les médecins H^iZ*^*» e"^ntéronné5 & meme efrrayés. Enfin on la trouva fi ^Iguée, &fiépuifée que l'on ne emt pas pouvoir continuer la confrontation; eüe fut remife a 1'après-dinée. ^Ile parut alors être d'un fens fort raöis. Le commiflaire lui demanda fi elle auroit alfez de courage & a on lui demanda s'il vouloit s'en tenir a ce que la demoifelle dc Mandols avoit dépofe contre lui. 11 répondit que non, paree qu'elle étoit polfédée, & que le malin-efprit lui avoit infpiré routes fes dépoütions pour ie | perdre. Lorfqu'011 lui en eut lu les points ] principaux, il dit qu'a 1'égard des fa1 miliarités & des privautés qu'elle tui reprochoit d'avoir eues avec elle , il les : avouoit; mais que tout le refte étost : faux, & que jamais il n'avoit eu d'elie les dernières faveurs. 111'exhorta enfuite de penfer au fa'ut de fon ame & de dire la vérité. II ajoutaaue, puifque, S v  4i 8 Hijloire fuivant eile-même, elle avoit été en relation avec le diable, il lui avoit fait illufion, & lui avoit fait croire qu'ils avoient confommé le crime enfembie. Elle lui repondit avec fermeté qu'elle etoit fure que ce n'étoit point une illufion. Vous convenez, lui dit-elle, des converfations vives & fréquentes que nous avons eues enfembie; vous convenez des privautés que vous avez eues avec moi; ia perte de mon honneur elt la fuite de toutes ces familiarités. N'eftce pas vous qui m'avez marquée ou fait marquer en plufieurs endroits? N'eft-ce pas vous qui m'avez donnée au démon , & qui êtes caufe que j'en fuis poffedée ? Vous fcavez que vous êtes le feul homme què j'aie fréquenté. Je ne vous charge point, lui dit-il, pourquoi me chargez-vous ? Elle dit que la force de la vérité ia faifoit parler,'Sc ajouta : « J'ai confefle & publié mên 35 crime; je ferois bien malheureufe fï » je vous accufois aux dépens de la vé» rité; je prie Dieu qu'il vous infpire » ün amer repentir de votre pêché', &c * qu'il vous le fade confelfer », Gaufridy perfifta toujours a dire que Ie diable lui infpiroit tout ce qu'elle difoit. M. Thoron lui tepréfenta qu'elle  de Gaufridy. 419 i étoit dans fon bon fens, &c qu'elle parloit de fon propre mouvement. Elle de i toute 1'hiftoire du fortilège qu'il lui avoic donné par le moyen de la pêche qu'ils ■ avoient mangée enfemble, & de la gtolfe noix incombuftible qu'il hü avoit donnée : &c comme Gaufridy invoquoit fouvent le nom de S. Jean-Baptifte, qu'il appelloit fon patron, la demoifelle de Mandols dit que l'on avoit 1'impiété , au fabbat, de donner ce nom-la. au précurfeur de YAnte-Chrift. Le 9 mars, Gaufridy fut confronté aux témoins. II s'en tint a la dépofition de quelques-uns, & récufa les autres. Après toutes ces confrontations , prelfé de dire la vérité, il avoua qu'il étoit forcier, qu'il avoit, par le moyen de fon fouftle, & de plufieurs autres enchantements, corrompu la vertu de la demoifelle de Mandols, & de quelques autres femmes qu'il nomma; qu'il avoit réfolü, dès le premier jour de la feptuagéfime, de renoncer entièrement au diable; mais que ce malin-efpric 1'avoit menacé des plus grands malheurs, s'il fe converthToit; qu'il avoit brülé le livre de magie qu'il avoit recu de fon oncle; qu'd avoit auffi voulu brüler les cédules que la demoifelle de Mandols S vj  420 Hijloire 6c loi avoient faites au démon, mais qu'd ne les avoit point retrouvées. II paria du fabbat, dont il fit une hiftoire fort longue & fort ennuyeufe. II paria des aftaires d'état, fur lefqueiles il débita cent rêveries. Enfin on ne peut lire ces interrogatoires, fans être étonné de la patience du commifiaire qui Tentendoir. II fur ordonné qu'il feroit vifïté. On lui rrouva plufieurs marqués infenfibies aux piquures, quoiqu'on enfoncat 1'ak guille de trois travers de doigr- Se les médecins & chirurgiens cemfièrent que ces marqués infenfibies ne rendant point d'humidité étant piquées 3 ne pouvoient arriver par une maladie du cuir pre'cidente: . Le 12 avril y Gaufridy fubit un fecond interrogatoire, ou il fe retrancha fur Ia négative a toutes les queftions qui M furenr faites au fujet de plufieurs femmes avec lefqueiles- il étok accufé d'avoir eu des habitudes. II ne lui- échappa nen a eet égard qui put donner ie plus kger mdice; tantót il nioit féchement; tantot il s'escnfoit fut le défaut de fa mémoire. L'apr^-midf, il tint toujours la meme condair-e , & avbua feulemen*  de Gaufridy. 421 Ia chute quil avoit faite i 1'age de fept anS; mais il ne dit point que le diable 1'eut foutenu eomme il 1'avoit dit aupa- ravant. . . Le 18, dans tra autre interrogatoire, qui duradu matin au foit, il fat: une ample hiftoire de fa magie & du fabbat &c depuis , il prit le parti de fe dedite encore , difant quil n'avoit fait toutes ces confeffions que par la crainte de la mort, & dans 1'efpérance qu en les hufant, on lui accorderoit fa grace, acaure de fa fmcérité. . , Telle étoit 1'affiette de 1 efpnt de Gaufridy, ouvett a toutes fottes d'impreflionsqui fe fuecédoient tour a tour. Enfin M. le procureur-general donna fes conclufions. Elles font d'une efpece trop fingulière, pour ne pas etrecopiees en entier. , „ , « Vu le procès-crimmel des procetf dures faites pat autorité de la cour,,* » notre requêre , contre «««.f*? » Gaufridy, prêtre,béneficier de l eglii„ des Accoules de la ville de Marfeiile , „ querellé de crime de magie , lorcel,, lerie, idolatrie , de lubncite abomi„ nable, prifonnier ès prifons du palai s; „ même le procés-verbal fait par le pere fc Michaëlis, les interrogatoires Sc rc-  422< Hijloire » ^gieufede Sainte-Urfule , poffédce l ^m^n-efpnc par la féduciou & » iHbornacion dudit Gaufridy- Je procès »ex*aordimure, les réponfes decon» feffions en dernier lieu faites par ledit "^/"^dui4de cemoisd'Avril » rapport des médecins & chirurmens ' " ™tf"rIa vifice defdits 2 " Atcend" que ledit C7^y fe » ^uvefulhfaznrnentconvaincu,-^ant "juffides chirurg.ens^ueparlaudi« «on des témoms a lui coufrontés & " fieL'rs endroits de fon corps de di* verfes marqués, fans avoir eu aucun -fennment m rendu aucune humeur - ou fanglorfcju'ila été picjué par le, " nedecins & chitutgiens av/c mS » longue aiguille és fufdits endroirs ■ ce " 19lö.W être arrivé que p^ l^ - eynt5&. par la qualité de la magie, » de fortilege, ainfi que ceux qui en " f°nt Profefll°» & treuyent órdmaire» ment maroués de nï..^. "lu'ure- » infenfibies9 & ! P £ u marcIues » r, r Tr' que d ailleurs ledit » Gtufudyk trouve auffi fumfammenr  f2 Lconvaincu d'une longue, grande öc „extraordinaire pnvauu. -j»'"„ tion avec ladite Magdelemcde Manl dols, tanten l'égüfe qu'er.la maifon „ d'kelle,&enlabaftide du hem plufieurs céduies de la teneur conte» nue en fes réponfes; avoir joui d'icelle » charnellement, & encore été enfem„ ble avec elle en la fynagogue & fabbat P des demons, plufieurs & diverfes fois, * es beux& endroits exprimés partieu» üerement en fefdites réponfes & y « avoir fait & vu faire une infinité de P chofes & actions fcandaleufes, impies P & abommables, contre Phonneur de » Dieu & fa gl0ire % même d^yok r> adore & idolatré ledit malin-efprit • » erant ainfi ledit Gaufridy convaincu ,' » par fa propre confeffion, d'avoir * charme & enforcelié la femme dudit P Perrin & d'avoir ufé de plufieurs » attouchements fales & impudiques » relpecbvemem en leurs perfonnes, « par ia même force du charme. » Pour ces caufes & confidérations » SC autres réfultant dudit procés, & » fans s'arrêter aux prétendnes rétracta» tions & négations que ledit Gaufridy » a depuis voiilu faire, pour couvrir fa  de Gaufridy. 417; „ honte Sc fon pêché abominable, qui „ le convainquent d'autant plus de fon „ obftination diabolique : ■ Nous réquérons que ledit Gaufridy „ foit déclaré, atteint, convaincu des | cas a lui impofés, Sc pour reparation „ d'iceux, qu'il foit préalablement de„ Maximin3 duement attefté par d'aum tres pères, en date du zo dudit mois » délibération de la cour contenant „ commidion a meffire Antoine Segui» ra/?, confeiller en icelle, pour infor„ mer fur les faits de ladite accufation, 5> & faire faifir & traduire aux prifons „ du palais ledit G'aufridy ■ autre déli» bération de ladite cour, contenant » commiffion a. maitre Antoine Thoron> » auffi confeiller en icelle, pour ladite 3, la Pallud^ & informer fur lefdits faits 33 & intendits baillés par le procureury> général du Roi, & faire le procés 3» audit Gaufridy conjointement avec 33 maitte Garandeau3 vicairede 1'arche33 vêque d'Aix, du 20 dudit mois; >» audition & dépofition Sc confeffion 33 de ladite Magdekine touchant ledit 3» rapt, féducïion 8c fubornation d'i33 celle, en ce qui eft de magie, pactes 33 Sc promeftes faits aux malins-efprits, •> & autres abominations mentionnces 33 au procés - verbal du 21 dudit mois; 33 autre cahier d'informations prifes par » ledit commiifaire, du 2 3 du même 33 mois; atteftation de maitre Antoine >f de. Me'rindol, docteur médecin, Sc 33 profeüe ur  de Gaufridy. 433 j»; profefleiir royal en 1'univer/ité de » cette ville d'Aix, touchant les acci» dents Sc mouvements étranges Sc 1» exrraordmaires artivés en la perfonne ■ ij de ladite laPallud, durant le tems v qu'il Pa ttaitée.avant la manifeftation j> de la polfeffion d'icelle, du 13 dudit v mois; rapport fait pat meffire Jacquet n Fontaine 3 Louis GraJJi, docleurs, &C jj refpectivement profeffeurs & médev eins , & Pierre Bon tems , chirurgien V anatomnte, aum proteüeur en ladite » oniverfité, Sc Mérindol auffi chirur- _ n-J^,-, «r^J^mn^Jnfj;^, \t . $y 3 j;ai uiuwiuaiiiv UUIUUUIUIUUI- L faires, fur la qualité des accidents »> extrordinaires qui arrivoient par in-. » tervalle en la tête & cerveau de ladite L la Pallud, Sc caufes d'iceux; & fur la 33 qualité, caufes & raifons Sc marqués » infenfibies étant en fa perfonne, Sc :» par elle indiquées •, & encore fur la u virginité & défloration d'icelle, du 13 huitième dudit mois de mars dernier; f> intetrogatoires Sc réponfes dudit Gau„fridy, des 17 février & quatrième ■3 mars dernier; autre délibération de « ladite cour, que ledit maitre Antoine 13 Thoron, commiflaire ci-devant dé.3 puté, fera & continuera 1'entière inf|a trucfion dudit procés, dudit 4 mars; Terne Vil. T  434 , Hijloire 53 procés-verbal de la confronration, Sc „ conteftation verbale d'entre ladite de » la Pallud Sc ledit Gaufridy, du neuf „ dudit mois; rapport des marqués i trouvéès en la perfonne dudir Gaujj fridy , fuivant i'indication faire paf „ ladite de la Pallud, du 10 dudit mois as de mars; publication dudit rapport, sj avec confrontation defdits médecins „ Sc chirurgiens a ce commis & députés ,j par lefdits commilfaites; récolement sj Sc confrontation des autres témoins, » dudit jour i o mars : autre cahier d'in„ formation prife en la ville de Mar» feille , des 5,6,7 Avril dernier; aus> dirion de damoifelle Viiloire de » Corbie , prétendue d'avoir été char» mée par ledit Louis Gaufridy; fur le jj fait Sc caufe du trouble Sc la difposs htion de fon entendement, amour jj Sc affëétion fcandaleufe & dérégiée » envers ledit Gaufridy , fur le fait de sj ladite Information, en foufflant fat jj icelle, des 12 & 16 dudit mois d'a« vril : procés - verbal des confeiïions j> volontairement faites par ledit Gaujj fridy des autr;s cas & crimes a lui » impofés, des 14 Sc 15 dudit mois; » rétractation d'icelui , du même 15 j» Ayrd après midi; lettres de vicariat  de Gaufridy. 43 ^ m de Pévêque de Marfeiile a M. Jofeph » Pelicot, prévbt de Péglife metropoli-». „ taine en cette ville d'Aix, pour, afon s» nom, lieu & place, faire juger, ordonjj ner a. Pencontre dudit Gaufridy fon s> diocéfain, tout ainfi que ledit evêque n pourroit faire, fi préfent y étoit, du »j 17 dudit mois; procuration faire par jj ledit Gaufridy pardevant ledit prévór 5» en ladite qualité de vicaire, afin de u pourfuivre la reftitution des cédules ji y mentionnées aux qualités y conte5? nues, du 1 9 dudit mois, ordonnance 9j dudit confeiller & commilfaire Sc jj dudit maitre Pelicot, tant en qualité jj de vicaire dudit évêque de Marfeiile, »j que comme vicaire dudit archevêque jj d'Aix, que ladite la Pallud feroit ré» colée fur fes auditions Sc dépofitions, j> & de nouveau confronrée audit Gaujj fridy; autres fecondes confellions par j» lui faites & réitérées refpectivement jj les 11 & x 3 dudit mois d'Avril, conjj formément aux premières; autre rapjj port defdits docteurs en médecine Sc j> chirurgiens fur 1'abolition des mar»3 ques de ladite de la Pallud , rétablifjj fement Sc vérification de tous les enjj droits d'icelles défignées au précédent jj rapport du 13 dudit mois; procésTij  435 Hijloire » verbal des interruptions Sc accidents » extraordinaires furvenus durant la j> conreifion de ladite Magdelelne, tor» tures & tourments par elle foufferts, „ & paroles exprimées par la bouche, jj outre Sc pardelfus le contenu auxdits ». interrogatoires & réponfes; atteftajj tions de 1'abolition, rétablilTement jj Sc vérification defdites marqués adjj venues le jour Sc fête de paque dujj rant la célébration de la fainte melTe; .jj jugement desobjers & conclufions du „ procureur général du roi, ouï ledit jj Gaufridy en la chambre, & le rapport » du commiflaire fur ce dépuré. » Dit a été que la cout a déclaté & m déclare ledit Louis Gaufridy atteint Sc jj convaincu defdits cas Sc crimes a lui jj impofés; pout réparation defquels la » condamné Sc condamné d:être Iivré enjj tre les mains de Pexécuteur de la hautejj juftice, mené Sc conduit par tous les >j lieux Sc carrefours de cette ville d'Aix >• accoutumés, Sc audevant de la gtande jj porte de Pégljfe métropolitaine de S. jj Sauveur dudit Aix, faire amende hojj norable, tête nye, Sc pieds nuds, la jj hart au col, tenant un flambeau ardent » en fes mains, Sc la a genoux, dejj mander pardon a Dieu 3 au Roi . & s  de Gaufridy. 437 1,-la juftice; Sc ce fait, être mené en la io place des precheurs de ladite ville, Sc „ y être ars Sc brulé tout vif fur un ;, bücher, qui, aces fins, y fera drefte, „ jufqu'i ce que fon corps Sc oftements M foient confumés & réduits en cendres, ,s Sc icelles après jettées au vent, Sc tous Sc chacuns fes biens acquis Sc » confifqués au Roi: Sc avant être exe„ cuté, fera mis Sc appliqué a la queftion jj ordinaire Sc extraordinaire, pour avoir „ de fa bouche la vérité de fes compli„ ces : & néanmoins, avant que de „ procéder a ladite exécution, fera mis » préalablement entre les mains de le» vêque de Marfeiile fon diocéfain, ou, „ a fon défaut, d'autte prélat de la qua„ lité requife, pour être dégrade a Ia „ manière accoutumée. Fait au parle» ment de Provence féant a Aix, Sc i, publié i la barre, Sc audit Gaufridy , en la conciergerie , le trente avnl » i a Tonncipendanfir^e°dé cL01t * ? d« "J'étois avec une f*m£ £f! e que - corps &un pgfc ™^S - ? »Ouire cela mes D;' V 'l™ Pr«™•>t»néS> „c m™" f hiflï ™ere fo" lnf»-  de Gaufridy. 441 ment d'Aix, ne crut point crue Gaufridy füt forcier. En eftet ia fédudtion de plufieurs femmes ou filles ne doit point être mife au nombre des preuves de la macne; rien n'eil plus naturel, fur-tout quaiid le féducteur a quelques graces „ ment affifté & favorifé, que je me vois « clevé aux plus grands honneursdu royaume, j. avec des biens abondamment, & quafi plus i, que je n'ai defiré, & la réputation & la „ bienveillance commune telle que ]e l ai pu >, deürer : en quoi je reconnois que la divinc » bonté a voulu choifir mon infirmite, pour « faire paroitre fa puiffance & bénéfkence ». O prélat a laiffè divers traités , des meditations fur les pfeaumes , fur la ïainte philoiophie, qui ont été reciuillis en un volume infolio ,z Paris en 1641. II a traduit quelques " oraifons de Demoflhènes, d'Efihmes &L de Ucéron, & le manuel A'EpiÜne. ^ Jean du Vair chevalier , fon pere, tut procureur général de la Reine Cathenne de NUdhis & S Henri de France,dac d Anjou. U fut enfuite mahre des requêtes de 1'hotel du Roi, depuis le 15 janvier 1573 rfïu e" i«84, qu'il rendit cette charge au Roi, le réfervant la faculté d'en conferver la quahte. 11 mourut le 16 juin 159* , & fut enterre au cimetière de S. Andre-des-Arcs, avec Barbe Francoife fa femme. Outre le garde des fceaux,il eut pour enfants Pïerre du fair, evèque de Vence , mort en 1638 ,Anmnetu mariée a Nicolas Aüeaume , confeüler au parlement, & Philippe du Vair mort jeuae.  44* Hiftoire dans lefprir, & qu'il eft doné de T_ cues autres talents. Leshgures extraordinaires, les mouvements violents que la demoifelle de Mandols a eprouvés dans fes membre< n ont nen qui apprcche de ce que foör certams bateleurs. Elle a fait f enuméntion des différens ordres des anges & des demons : Qui pouvoit la contredire? Wfc a nomme des religieux a mefure quiis palToient du dortoir i l'éient enfin raifonnables. Dans les pays au contraire ou l'on brule les forciers, on ne voit autre chofe; paree qu'en les voyant briiler, le public croit qu'ils le font en effet; on en patle beaucoup, les imaginationss'écha.iftent, & lacroyance fe fortifie dans ceux qm simagment Vetre, & dans ceux qui les regardent comme tels. II eft ainfi nombre d'opimons dangereufes , dont la juftice ne foauroit trop  44f Hijloire le hater d'arrêterle cours. C'eft dans eet ^;\f%fe^Uele Parlement de Grenoble a défendu de débiter 1'hiftoire d une fille qu'on difoit avoir été en^rof courf^" ^ettefable 3TOicVis cours, &fi on eut permis qu'elle sfac- ctcditat.comluen de filles auroient mis \W le compte du vent les fruits de leut mcontinence ! Pourrevenir a Phiftoire de Gaufridy, f y a tont Ileu de préfumer que, fi les juges qui préfidèrent a la procédure , neuflent pas regardé, dés lecommencement comme un fait certain, que eet eccléfiaftique étoit forcier , qJi£ cuflent au contraire été perfuadés quil 7euTTf°mt^ ^MePa"ie eflennelle de leurs fonctions étoit de convaincre la dem01fells de Mandols ^ lomme, il auroit réfuité de leurs opéranons,qUe Gaufridy éroit un fédudeur II paroit même que le parlement cl Aixn apas toujours continué de croire «« de lopmion d'une partie des membies de cette cour fur Paffaire de la ,, ,urc> ™onfs qu'ils ont envoyés a M. lecnanceher, ds difent que /les lob'  de Gaufridy. 447 » Ci fèvères contre les ravifleurs n'im» pofent d'autres peines aux viótimes » de leur paffion, que la honte dont » elles demeurent chargées : c'eft ainfi, n conrinuent-ils, que notre parlement » 1'a toujours obfervé dans les accufa„ tions de rapt, 6c même dans le cas * d'un incefte fpirituel. Nous en avons » un célèbre préjugé dans nos" regiftres, >, en la caufe de Louis Gaufridy, curé » de la paroifle des Accoules en la „ ville de Marfeiile. L'illuftre M. du „ Vair, qui ne croyoir pas aux forciers, » préfidaa ce jugement; & M. le con» feiller Thoron 3 dont les lumières font « encore en honneur dans ce parlement, » fit l'inftru&ion de ce procés. Comme n ici, difent-ils en faifant 1'application „ au proces dont ils rendent compte , il » y avoit du fortilège imputé a 1'accufé: * mais ayant été atteint & convaincu » d'incefte fpirituel, il fut condamné i * être brülé tout vif; & Magdeleine * Mandols de la Pallud, pénitente de ft ce curé, & par lui féduite & abufée, * ne fut pas même décrétée ». ^ Plus bas, ils difent que le père Michaëlis, confefteur de Magdeleine de Mandols, ne fit rien de repréhenfibie, & donnant des lumières aux juges -fur  44^ Hijloire fa péniteme. II ne révéla Ia confeffion de cette fille que fousJa condition, continuent-ils, que la cour confirmetoit, & accorderoit a cette fille 1'alfurance de «etre pomt recherchée. On pourroit conelure de Ia que Gau- /r^jnefutcondarnnéaufeu que comme coupable dincefte fpirituel , & non comme forcier: cependant 1'arrêt prouve Ie contraire, puifqu'ü Je déclare atteint & convaincu des cas & des crimes d lui tmpuies, du nombre defquels étoit le lortdege. Qu'une fille qui a été féduite, & * laquelle on ne reproche d'autre crime que Ie facrince de fon honneur, mérite iwdulgence de la juftice, c'eft ce qu'il eft diffici e decontefter : mais que, fous Pretexte de cette féduflion, elle fe livre a des impiérés & a des abominations redes que celles dont Magdeleine de Mandols s'eft elle-même reconnue coupab,e, & que tous ces crimes reftent impums, c'eft ce qu'il eft difncile de comprendre. II n'y a point de confidération, quelqu'importante qu'elle puiffe etre, qul autorife, même les cours fouveraines, a faire grace aux coupables. ^e droit eft incommunicablement attaché a Ia couronne. Le Roi feul peut  'de Gaufridy. 449 iccorder des lettres de grace •, & les cours les enregiftrent 8c les mettent a exécution ; ou font des remontrances, pour en découvrir les inconvénients au fouverain, fuivant les circonftances. On a vu, dans la caufe de la Pivardière, qu'étantobligé de comparoitre en juftice pour juftifier fa femme accuféedel'avoir tué, il demanda au parlemenr de Paris un fauf-conduit, paree qu'il étoit prévenu du crime de bigamie. La cour ne crut pas que fon pouvoir allat jufqueSla, 8c refufa le fauf-conduit5 il fut obligéj pour 1'obtenir, d'avoir recourS a 1'autorité du Roi. Mais les juges ne doivent pas être moins réfervés fur les punitions, qu'ils doivent 1'ètre a accorder des graces. Rien, encote une fois, n'eft plus équivoque que ce que l'on eft accoutumé de regarder comme des preuves de magie. Saint Auguflin , dans fon livre de la cité de Dieu, livre 14, chapitre 24, parle d'un certain prêtre de Calame, qui, quand il le vouloit, devenoit comme mort, 8c fe rendoit tellement infenfible, qu'on pouvoit Ie piquer, lui arracher la peau, 8c même le briiler, fans qu'il éprouvar aucun fentiment de douleur, fi ce n'eft celle que lui caufoit la plaie,  «tf ö f Hijloire quand il 'étoit revenu de fon extafeu Le père le Brun, dans fon hiftoire cntique des fuperftitions religieufes, rapporte « qu'une hlle qui avoit, dit on' » trois makdies compiiquées fans au- * ome marqué de fentiment, la cata■■> lephe, ie tétanos & les affections hv» pocoiidriaques, avoit des vinons auffi * bien exprimées par geiles, fans pa» ro es, que pourroient faire les meil" leurs pantomimes. On lui a fait di*> verfes piquures d'épingie dans les *> cuiftes, fans quelle eüt aucune mar« que de fentiment. Dans eet engour« diffemenr de tous les fens, les mem» bres étoient inflexibles. On lui re» muoir les doigts, les bias* le corps » lans aucune peine. Soit qu'on levatles " bras oeux doigts horifontaiement au" deffus du lit, foit qu'on les élevat a la « hauteur d'un pied ou de deux, ou qu'on » les mit dans quelqu'autre fituation, » lans que perfonne les fourint, ils de» meuroient ainiï en 1'air jufqu'a ce qu'on » les abaifsat. Ce qui rnefuprenoit encc- re davantage, c'eft que le bufte de fon » corps, depuis la lête/nfqu'a la cein» ture, étoit tout aufti liexible & auffi f leger que les bras : on le levoit fans " aucune peine, deux doigts, un demi- •  'de Gaufridy. 4*>t » pied, ou un pied au delfos du chevetj I lc il demeuroit dans cette ütuation fi „gênante, au grand étonnement de * tout le monde, jufqu'a ce qu on 1 ab„ baifsat furie chevet; ce quon taiioit » fans peine • • . Le même auteur ajoute que, dans la maladie du tétanos , tout fon corps etoit roide comme une barre de_fer, & qu cm lui auroir plutot cafle les bras & les jambes, que de les fléchir eu aucune manière. . , XJ[ La fille a avoué de vive-voix , a M. é'Jrgenfon, lieutenant depolice, qu'il ■n'y avoit que fourberie dans fon fait. Cependant elle étoit infenfible aux piquures des épingles, elle tenoit quatre heures fes yeux ouverts, toujours fixes, fans craindre des geftes menacants. Le père le Brun penfe que cette fille avoit ellaye ae reprcjeutti. *;*"r — la caralepfie, dont elle avoit entendu les defciïptions. _ , Au fond, il n'y avoit rien de fort étonnant dans les attitudes dont on vient de parler; nos bateleurs, qm ne te donnent pas pour forciers , font des chofes beaucoup plus furprenantes. Quant aux piquures d'épingle, on voit tous les jours des perfonnes qm, lans  M*> Hijloire «re ni bateleurs ni forciers, s'en enWent fort avant des plus groffes dans ie gras de jambe, ou dans d'autres parnes du corps, fans nuile douleur, & lans aucune éfrufion de fang. J'ai deja parié tome i ,p. 423s de/a r*nfin , celebre devinerelfe, qui \ dnpé Paris pendant iong-tems, & poot qui la credulite de la cour & de Ia ville a été une fource abondante de richelfes. Voici quelques autres traits de fes fortilèges. EUe avoit a fa folde un très-erand nombre de domeftiques qm lui révéloient ce qui fepalfoit dans 1'interieur des families. Ainlï les dames qui la venoient confulter, furprifes de Ia trouver fi oien mftrmte de tout ce qui les concernoit, ne pouvoient fe difpenfer de croire qu'elle avoit un efpritfamilier qui lui revéloit tout. Les domeftiques d'une maifon fcavent qu on a volé deus piftolets a leut tnaitre, & connoiflent le voleur. Ils fe donnent bien de garde de faire part de leurs connoiftances a ce maitïe: ils cue leur donna Ia Voifin. Lorfqu'elle fut bien au fait de tout ce qui s'éton Fffe, & que fe machine fut préparée les domeftiques infpirèrent aleur Litre  de Gaufridy. 413 d'aller confulter la Voifin. Elle Pobügo de reearder bien attentivementdans un baftin plein d'eau bien clane. Penaant qu'il eft aiteötifa confiderer cette eau, on fait defcendte du planchet perpendiculairement audeflus du baflin une '< •! -•_„ /-.„u^nollp font reorelentes deux piftolets pofés fur une table pareille a celle fur laquelle ils avoient ete effectivement pris.L'eaurérléchit cette pém. ture aux yeux du fpectateur & la peinture difpatoit fur le champ. Succede un? autre toile repréfentant le portrait du i _ t 'U/immp 1 prpronnoit, recouvre voieur. iiu"""1- i i j : fes piftolets, & paie fort cher la devinereflèqui les lui a ainh fait retrouver . ^ j_ r„„ k^rtm fnrhante. par le moyen ue iun v*-*» - - . , 1 Un amant veut fcavoir s'il eft airne de fa maitreffe , & veut, en cas qu elle 1'aime, la forcer a le lm declarei: par écrit. 11 difparoit tout d'un coup, & le cache chez ia FÓifw. Sa ma«refle quiette de cette difpannon fubite, e t confedlée d'aller Ha devmereiie. On la fait entter dans une chambre, dans laquelle étoit un cadre demiroir: au hen de glacé, il y avoit un trou au mur. Ce trou répondoit a une chambre obfcure & tapffée denoir. On place la dame. devant cette glacé fimulee, §c fon amant,  414 Hiftoire cjm éto'it dans I'autre chambre, pafle xapidement devant ie trou. Sa mairrefle «011 que c'eft une appantion. La Voifin ja derermine a eenre a fon amant, & hu promet de lui faire tenir Ia lettre. Ede leent en effet. La lettre eft efcaniotee & paffée adroitement dans k chambre ou etoit le jeune homme II paroir auffitöt dans le prétendu miroir Ut la lettre, y fait réponfe, difparoi'r, & cette reponfe tombe fur le champ aux pieds de fa maitrefle. EHe mettoit tout | contrlbution k coquettene, k poltronerie, 1'artachement a k vie. Elle vend fort cher k une jeune fille des bifcuits qu'elle lui dit ayou k vertu de faire venir des tétons. Elle vendoit de k pomade qui appetifioit Ia bouche, rendoit 1'ceil plus fendu oc donnoit au np? im» ;„aa ■ tril ■ % ""l,/lutc poportion. üüe avoit un firop qui embellifToir 1, vniY. Ede fair croire 4 un bourgeois qu'elle a une epee enchantée avec laquelle on tue fon adverfaire fans courir aucun rifque. Elle hu vend bien cher un tréfor ii precieux, & pour tromper plus furementcettedupe, elle apofteun homme & fe iailfe defarmer tout d'un coup par  de Gaufridy. 4^ 1'épée enchantée. Sur de fon fait, notre faux brave cherche querelle a un autre, & eft battu. II fe plaint a la Fcfm de fon défaftre 5 elle lui fait entendre que fon vainqueur avou aum -r cbantée qu'elle lui avoit vendue aupara- yant. 'V , , Elle s'entend avec la femme de chambre d'une dame qui veut fcavoir fi Ion mari mourra avant elle. Elle lm perfuadé au'elle connoitra eet événement par un fiVe. L'urne, dit-elle, qui eft au milieu de plufieurs porcelaines fur votre armoiré, tombera cette nuit, pendant que vous dormirez : fi elle fe cafte, votre mari mourra le premier; fi elle refte entière malgré fa chute, il vous furvivra La femme de chambre fait tombec l'urne a 1'heure dite; elle fe caiTe ; & la dame , tant qu'elle voit fon man en fanté, eft dans une fécunté ennere luï fa propre vie. . C'eft par ces ftratagemes qu elle vmt a bout de fe donner la réputation de forcière. Le maréebal de luxembourg n'en fut cependant pas la dupe; d demanda a voir le diable : on le hu ht paroitre fous une forme epouvantable. Le maréchal tire fon épée, &^ alloit percer le diable, fi celui-a n'eut ene  4ï4 Hiftoire miiéncorde, & n'eütavoué qu'il jouoir « role pour gasner fa vie Voici ce que penfe fur les forciers «n des plus beaux efprits de notre bede' * ^lland on commenca a croire que les' * ames des mf™ venoient vifiter les " ™s'&feFéfentoientaeuxfous »des fonues fenfibles, elles enfei! " pneren^ceux qu'elles venoient voir -la manrcre de les évoquer; & Je moc " abraxa> Prononcé avec quelques céré«monies, f^foit venir les ames auxq^fdes on vouloit parler. Je fuppofe ■ 9° ™ %pnen eüt dit a un philofo- " f^f'«« 'nferpents , & ljeaux » du Nd en fang; un de mes ancétres Cc " mana Py^n{ffe d'Endor aui ^P^lo-nbredeSannuelUa.rUre »P Rot Saai: dU communifua fes "fiens. Jepoffede eet héritagc de pere & " dernere> ^g^alogUeftbien avérée, »je commande aux ombres & aux e"/ r> ments. Le philofophe -n'auroit eü » aurre chofe i faire que de lui de» mander fa prqtect.on : car h ce phi» oiophe avoit voulu niet & difpuS - le magicien lui auroit fermé la bon» che,  de Gaufridy. 4^7 che, en lui difant: vous ne pouve^ 1» nier les fairs; mes ancétres ont été » incontejlablement de grands magiciens, » & vous n'en doute% pas; vous n'avert » nulle raifon de croire que je fuis depire „ condition queux, fur- tout quand un » homme d'honneur comme moi vous af n fure qu'il efl forcier. » Le philofophe auroit pu lui dire : » faites-moi le plaifir d'évoquer une Ü ombre, de me faire parler a uneame, » de changer cette eau en fang, cette ,> baguette en ferpent. Le magicien » pouvoir répondre : je ne travaille pas » pour les philofophes; j'ai fait voir des >» ombres a des dames très-refpecbables, h a. des gens fimples qui ne difputent » point. Vous devez croire au moins » qu'il eft très-poflible que j'aie ces i> fecrets, puifque veus êtes forcé d'a»» vouer que mes ancétres les ont pofle»i dés : ce qui s'eft fait autrefois peut fe m faire aujourd'hui, Sc vous devez croire 1, a la magie , fans que je fois obligé » d'exercer mon art devant vous. •> Ces raifons font fi bonnes, que >> tous les peupies ont eu des fotciers. it Les plus grands forciers étoient payés n par l'état, pour voir clairement l'avet» nir dans le cceur Sc dans le foie d'un Tome VU. V  4ó 8 Hijloire » bceuf. Pourquoi donc a-t-on fi W » tems pum ies autres de mort ? ils fain. ioient des chofes plus mervedleufes » on devoit donc leshonorer beaucoup' » on devoit fur-rout craindre leur pmf? lancf - Rlen "'eft plus ridicule que de » condamner un vrai magicien a être » brule;_ car on devoit préfumer qu'il » pouvoit eteindre le feu, & tordre le " 'OU a teSj^?- T°utce qu'on pouvoit » faire c eft de lm dire : mon ami, nous » ne vous bruions pas comme un forcier » véritable, mais comme un faux forcier qm vous vantez d'un artadmi» rable que vous ne poffédez pas; nous » vous ttaitons comme un homme qui »debite_de la faufle monnoie: plus « nous aimons la bonne, plus nous pu" nifl°ns ceux qui en donnent de faufle. » iMous fcavons rrès-bien qu'il y a eil » aurrefois de vénérables mamciens • » maïs nous fommes fondés i croiré -que vous nel'êtes pas, puifque vous » vous laiflez bruler comme un fot » 11 eft vrai que Ie magicien poufle i » bout pourroit dire : ma fcience ne » s etend pas jufqu'a eteindre un bücber » lans eau, & jufqu'a donner la mort 4 » mes juges avec des paroles. Je peux » ieulement évoquer des ames , lire  de Gaufridy. 4^9 v> dans 1'avenir, changer cerraines masj tières en d'autres \ mon pouvoir eft t> borné : mais vous ne devez pas pour » cela me bruler a petit feu. C'eft comme » li vous faifïez pendre un médecin qui jj vous auroit guéti de la fiévre, 5c qui jj ne pourroit vous guérir d'une paralilie. jj Mais les juges lui répliqueroient : jj faites-nous donc voir quelque fecret » de votre art, ou confentez a être brülé 1» de bonne grace. » II n'y a que les pofledés a qui on n'a jj jamais rien de bon a répliquer. Qu'un » homme vous dife, je fuis pofledé , il jj faut 1'en croire fur fa parole. Ceux-la » ne font point obligés de faire des jj chofes bien extraordinaires; 5c quand jj ils les font, ce n'eft que par fura» bondance de droit. Que répondre a. » un homme qui roule les yeux, qui jj tord la bouche, & qui dit qu'il a le jj diable au corps ? Chacun fent ce qu'il jj fent. II y a eu autrefois tout plein de jj poffédés r, il peut donc s'en temontrer jj encore. S'ilss'avifent de battrele mom jj de, on le leur rend bien , & alors ils jj deviennent fort modérés. Mais pour jj un pauvre pofledé qui fe contente de jj quelques convulfions, & qui ne fait jj de mal a perfonne, on n'eft pas en Vij  400 _ Hiftoire •» droit de lui en faire. Si vous difputez » contre lui, vous aurez infailliblement » le delfous : il vous dira : le diable eft »>. entré hier chez moi, fous une telle i» forme; j'ai, depuis ce tems-la une m colique furnaturelle, que tous les apo»» thicaires du monde ne peuvent foula» ger.Il n'y acertainementd'autteparti u a prendre avec eet homme, que celui » de 1'exorcifer, ou de 1'abandonner au » diable. » C'eft grand dommage qu'il n'y ait » plus aujourd'hui ni poifédés ni ma» giciens, ni aftrplogues , ni génies. 3> On ne peut coneevoir de quelle ref» fource étoient, il y a cent ans, tous » ces myftères, Toute la noblefle vivoit » alors dans fes chateaux. Les foirs » d'hiver font longs, on feroit mort » d'ennui fatis ces nobles amufements. » II n'y avoit guere de chateau oü il » ne revïnt une fée a certains jours » marqués, comme la fée Mcrlufine, » au chateau de Lujïgnan. Le gtand ii Veueur, homme fee 5e noir, chaf-, « foit avec une meute de chiens noirs » dans Ia forêt de Fontainebleau. Le « diable tordoit Ie cou au maréchal •> Fabert. Chaque village avoit fon \x fqreier 0u fa forcière \ chaque prince  de Gaufridy. „avoit fon aftrologue, toutes les da~ „mes fe faifoient dire leur bonne „ aventure, les polTédés couroient les „ champs j c'étoit i qui avoit vu le „diable, ou i qui le verroirj tout „cela étoit unfujet de converfations * inépuifables, qui tenoit les efprits en „ haleine. A préfent, on joue innpide»ment aux cartes ,& on a perdu i etre „ détrompé ». Vlij  *EjVF4NTS AD ULTÉRINS) D'UN IMPOST£UR, Gut de Firé, écayer, feiCTr,eur dP cwWj avoit - £££££ oSltó t^r6 rCgIment de en quahte d enfeigne I] ^ ^«r , E* « *5 o , quelques compagnies du rcgnnenrdesgaruesfurenrLwesa iaumur. Parm es foMarc - ' ' «« ces compagnie econnuc C/W, fon fere. fj fic ^ cette decouverreafamère, qui ravie rou Ia perre depuis plufieurs années J venuIeioldacchezVElletrom ' Ufir ?raitS' ceux *^fikH& lu. fiplufleurs queftions^uxguellê d  En. ad. d'un ïtn, dé. legi. 463 répondit d'une manière fatisfaifante. En un mot elle le reconnut, & le ht reeonnoitre pour Claude de Vere, par toute la familie. II étoit en pleine poffeffion de Ion état, lorfaue fa rroupe fut commandce pour aller en Normandie. II s'y rendit , & fut fuivi par Jacques de férés fecondfils de Marie Peut, qui avoit pro ce frère tellement en affeétion, qu'il ne vouloit plus le quitter, & vouloit d'ailleurs travailler, auprès des orhciers du régiment, pour avoir fon congé. Ayant féiourné un certain tems dans cette province, le foldat époufa Magdeleine Dauplé, qu'il abandonna peu après fon mariage, pour retotirner a Saumur, goüter , dans la maifon maternelle, les douceurs de fa hberte, obtenue aux dépens d'une partie de la dot de fa femme. Quelque tems apres ion retour , u dit qu'il étoit veuf, & porta le demi en conféquence. Il convola enfmte en iecondes noces, & époufa Anne AUard. Le contrat de mariage fut figne par la dame de Véré & par Jacques; Ion iecond fils. II vint des enfants de ce mariage ; 1'évafion du mari n'avoit pas griffe le tems a-l'autre d'ètre feconde. V iv  K,»,?"^";^ """«f v=nu feuT^-,e • ie meme qui en revem dJabord 1f lavoir eté vemen: par 1iV ^ ^ fucceffi- -voirrou^taT? ^ ^ ■ les aftions ;.if±f°nCOUraged^ avoir enhn écéfatnr r0It ^ qU'il 2-«rM/7tf £ ,e Par le maréchal & poufla dignue dufacrcmënt de mariale, qui foj avoit ere adminiitré. Elieavoftété trompeefans doute; mais fon erreur étoit Jiné erreur de bonne foi. Et quels étoient les auteurs de cette erreur ? C'étoit une rare qui lm avoit donné fon propre fils ■Hf??* '■/ét0k Un frè^ qui avoit ï 5 Va£ance de fon frère. Si donc ia dame ^ ^luia donné, pour mari, «n fils qu elle reconnoifibit, elle ne peut ie defavouer, fans etre obligée de reftiWfer ia dor qui n'a été délivrée que fur ö foi de fa propre maternité, qu'elle  d'un inpoft. dédarés UgL 469 atteftoit. Jacques de Véré, ion fecond fils, a été un infttument auffi efticace de 1'erreur, que fa mère. U U* autorilee par fa fignature au pied d'un contrat de mariage, dans lequel 1'impofteur etoit qualifié fon frère j & en raufiant, par ia préfence, la célébration du mariage qui a fuivi ce contrar ,& qui a été admimftre a 1'époux comme frère de Jacques de Véré. , . La mère & le fils font donc egalement complices de 1'erreur dans laquelle ils ont précipité Anne AUard. Hs font donc tenus folidairement des dommages & intéréts qu'on ne peut lui refufer; & qm doivenr être proportionnes a Ia grandeur de 1'injure. Pour les enfants A-Anne Allard ,on prétendoit que leur état ne pouvoit être contefté. Leur mère rapporte un contrat de mariage folemnel, paffé par-devant notaires. Dans eet acte, Marie Peut, veuve du fieur de Véré } a figne, comme mère du futur. Jacques de Véré hete du même futur, y a égale ment figne, en cette qualité. Ce mariage, enitute , a été cclébté & avec toutes les cérémonies requifes, & Dieu femble 1'avoir ratifie par la nailfance des enfants qm reclament leur état.  47£ ■ E^a"" "Juhêrins J pIi,s lo1"- p<« J>a mère 'aaimpili; r Pacne- \\ a Ja aaccueiiJi comme fon enfantilademeurf avec elle pendant trois ou eu ,e lo ïfe pendant eet ntervalle dV tudier ie vifage, les traits 1 vidusj&des'afcerfi^o,6^ n etoit pas fon fils. ecoit>°ufice aulfiT' Cr°mbatcre d« préfomptions auffi decifives, on fait paL'tre un in  d'un itnpoft. d êclares legr. 471 & même iUuftres? Si un figne, fi Une cicatrice , une brülure pouvoient etre regardés comme la preuve d'un fait auffi important, il n'y auroit point de familie en furété , il n'y auroit point d'enfant mort que 1'impofture ne put faire renaitre, ni de vivant qu'elle né püt faire mourir. Ce n'eft pomt, en un mot, a des marqués fi éqmvoques, que le hafard Ou 1'artifice peuvent produire, or que le tems peut effacer, que Ia juftice décide du fort & de l'état des citoyens. Comment donc la marqué d'une brülure a-t-elle pu perfuader a Marie Petit qu'un aventuner, un inconnu'étoit fon fils, & qu'elle devoit réprouver celui quelle a, tant de fois, pendant tant d'années, appellé de ce nom • & qu'elle a marie comme tel? Mais, quand les enfants n'auroient que la bonne foi de leur mère , c'en feroit affez pour les faire déclarér legitimes (1), &, en affurant leur état, garantir leur mère de tout reproche. C'eft une maxime adoptée par toutes les lóix, paria jurifptudence, Sc dont {0 J'ai établi cette vérité, torrie IU,pnge ze i & fuivanus , par les loix romames, -par le droit canon, & par la jurifprucknee des arrets.  472 Enfants aduhérins2 on a vu plufieurs exempies dans le* vokmes précédenrs de ce\ecueiL . Lerfud^e{oatm: qu elle feule devoir jouir des effets & des\vanrages de fon manage: il n'y avoir qu'elle qui püt prétendre fa dor & fes convenrions manmoniales Toure autre fociété Contractee par fon mari depuis la fienne eft une alhance criminelfe. Ou ne peur P« faire que le fecond mariage L c ^^Wnefoic„ul.EllenefpuC Par confequenr, rirer aucun avantafe au qudice de la vérité du premie/m" Quant i Ia dame de Véré, elle dit qu on ne pouvoit lui imputet ni dol ai ie cas d un arrer qu'on lui oppofoit oui fe trouve dans le recueil aPmo^Z) cette cauie. On verra, dans cette Iiif toije, quily avoitdela rnauvaifefoi de lapatt du père qui avoit marié fon ni ™a s ici, Ia dame & > , , , nelJes ont ete la fource de fon erreur dans Ia douleur & dans les larmes fur  d'un impofl. déclarés legi. 473 la perte de fon fils alné. Son fecond fils, aveuglé par 1'amour fraternel, trouve le fimulaere de ce frère dont la perte tenoit, depuis fi long-tems, la maifon dans le deuil \ il prend ce fimulacre pour la réalité, il 1'amène, tk entre avec lui dans la maifon, en criant, avec ce ton ik ces tranfports de joie qu'mfpire un fentiment naturel & vertueux: voila mon fiere, voila mon frère. Ces acclamations foudaines & imprévues faififfentje cceur de la mère d'une furpnfe mêlee de joie. Elle fouhaite que cette erreur foit une vérité, & ne voit pas de motifs qui puilfent I'empêchei de croire ce qu'elle defire. Cette nouvelle, qui flatte fi fort fes fentiments, lui eft annoncée par un fils qui a plus d'intérêt qu'elle encore a pénétrer le menfonge, & a 1'écarter, fi c'en eft un. 11 fe donne un cohéritier auquel les droits de primogéniture défèrent la plus confidérlble portion des biens de la maifon, qu'il auroit eus feul, fi fon frère ne fe fut pas repréfenté. Mais 1'amour fratetnel excité par la préfence de 1'objet, tk juftifié par la reflemblance des rraits qui frappent fa vue avec ceux qui s'étoient gravés dans fa mémoire pendant qu'il avoit vécu avec fon frèie, impofent  474 Enfants adultérins, faire rriompher Ja nature & Ja vérité I ant de motifs de crédibilité avoient «termmé cette mère tendre d adoptet "tlld'ie5nfilyerreur do- 52 «oir dabord eté frappée elle-même encore confirmée par Jes converfation delimpofteur.AfonarrivéedSaumar p abeursperfonnesdeJavdJe lm diren qu d avoit quelque reflemblance avec ie d'lT deJadame^^-Hrépondit denton myfténeux, qu'il pouvoit bien 7 avoir plus qiie de la reflemblance- avmtT AVTlf°n f°nder ie :«S avant que de fe faire connoitre. Cepen- dantilsmformoitadroitementdemut ce qui pouvoit concerner la familie oü d vouloit ufurperuneplace,&neParlo XrenCqUeqUand 1,fe-utPafle^ tóftmt pour répondre a toutes les ^ons que fon pourroit lui faire! 1, aV6C COMolira"ces foutenuÈ par la conformité des rrairs, quil a entretenu la mère, le fils, 'toute Ia familie cV toute la ville, dans lerreu rtitnabie1,dfPregUe^ler«-^ rentable fils de la maifon. _ Mais, ni fon fecond fils, nieire,ne Peuvent etre tenus des dommages &  d'un impofl. déclarés legi. 47^ intéréts cY Anne Allard. S'ils ont aecédé aT'obligation cohtractée par 1'impofteur qu'elle a époufé, c'eft par erreur. Or la la loi dit qu'un confentement donné par erreur n'eft point un confentement, & n'opère point d'aliénation : quia. nemo errans rem fuam amittit. L. 35, jf. de acquit, rer. dom. Le droit canon eft d'accord, a eet égard, avec le droit civil. Le canon 6. cauf. 34, queft 1 & l , décide que celui qui couche avec fa belle-fceur, 'croyant que c'eft fa femme, n'eft fujet a aucun blame. II eft même décidé, par les maximes du droit canon, que le ma» riage d'une femme eft nul, ft elle a époufé un efclave, croyant que c'étoit un homme. libre. A plus forte raifon, la dame de Vére' ne s'étant point obligée, mais ayant fimplement figné le contrat de manage, elle ne peut être tenue de la reftitution des deniers dotaux. En effet, par un arrêt rendu fur les conclufions de M. Servin, un impofteur ayant été marié par fon pere 5c fes frères prétendus , qui s'étoient même fengagés aux conventions matnmoniales, furent déchargés de cette obligation, quand 1'erreur fut découverte.  476 Enfants aduhèrins, Leur bonne foi fut Ie motif de ce juge* ment. II y avoit cependant des différences bien frappantes entre 1'impofteur & le véritable fils de la maifon. Celui? ci avoit une marqué au vifage, que 1 autre n'avoit point : celui-ci fcavoit eenre, fcavoit un métierj I'autre ne icavoit rien de tout cela. On oppofoit encore ala dame de Yere Sc a fon fils, qu'ayant eu connoifiance du premier mariage de 1'impofteur, ^le confentement qu'ils avoient donné au fecond avoit corroboré 1'erfeur de I'infortunée vieftime de la bigamie de Lerauderie; d'oü l'on concluoit qu ils devoient etre au moins tenus de les conventions matrimoniales par forme de dommages Sc intéréts. La mère Sc le fils étoient, aia vérité convenus dans leur intetrogatoire, qu'ils avoient eu connoiffance du premier mariage del'impofteur : mais ils avoient ajoute, en même tems, quil leur avoit certifié la mort de fa ptemiète femme, & qu'il en avoit même porté le deuiL Or il ne viendra jamais dans la penfée de perfonne de foupconner qu'un homme qui fe dit publiquement veuf, & qui prend toutes les marqués exténeures de eet état, ofe impofer au pu~  ef un impoft. déclarès legt. 477 blic fur un fait quil eft fi facile de yérifier, & dont mille incidents imprévus peuvent manifefter Ia vérité a chaque inftant. En un mot jamais on n'a puni perfonne de n'avoir pas foupconné un crime que rien n'indique -. & qui eft voilé fous les apparences d'un événement ordinaire, & fous l'erfronterie incroyable du coupable, D'ailleurs, puifquil faut le^ dire, Anne Allard n'a de reproches a faire qua elle-même, & a fa foiblefle, de la furprife qui lui a été faite. Elle avoit eu, pour 1'impofteur, des complaifances criminelles, dont elle portoit le fruit dans fon fein. Pour cacher fon état , & réparer fon honneur, que fa lubricité avoit compromis, elle exigea & obtint que fon mariage fut accompli avec la plus grande précipitation, fans publication de bans, &c avec difpenfe de la préfence du propre curé. Si ce mariage s'étoit fait avec les folemnités accoutumées , la publicité qu'elles lui auroient donnée autoit pu en faire parvenir la nouvelle jufqu'aux oreilles de la première femme, qui n'auroit pas mam qué de réclamer fon mari, & d'arrèter, par fes cris & par fes pourfuites, la  47^ Enfants adultèrinss confommation d'une alliance adulté- elle feule 1'mjure dont elle fe plaint. Ede dott donc feule en fuppo/er le ^tes; & perfonne ne doit être garan dunefautedontelleeftl'uniqueauteur, "i. dune erreur contre laquelle fon Quant a Magdeleine Dauplé, pretere femme deZfW^ la demande de 1500 hv au.eIle a Wée contre la dement, lis n'om affiflé, m en perW, m par procureur, a la célébration de fon manage, & n'ont, a eet égard contracle aucune obligation, de quel que nature qu'elle puilfe êt^ * Les enfants d'Anne Allard ne font ni rnieuxfo„des,ni plus favorables dans la demande qu'ils font qu'on leur accorde une provifion furies biens de Ia dame & du deur de Véré. Cette de! mande en provifion eft un aveu de hmpofture de.leur père. II n'eft J mort, & jamais des enfants ]é • ^ ne Peuvent l«f admis a demander une  ttun impojl. déclarés légï. 479 provifion fur la fucceiïïon d'une aïeule &c d'un oncle vivants: une telle préten; tion répugne aux bonnes mceurs, aux régies naturelles & judiciaires. Ils ne peuvent donc la former que fous le prétexte de Terreur dans laquelle la dame I &c le fieur de Véré font tombés al'égard : de leur père. En avouanr cette erreur, ils avouent que ce père étoit un impofi teur, & qu'ils font, par conféquent, le fruit d'un adultère. Or certainement des enfants adultérins n'ont aucun droit, ni provilionnel, ni erfectif a aucune fucceifion quelconque. D'ailleurs, qu'ils falfent valoir, tant qu'ils voudtont, la bonne foi de leur mère \ ce moyen pourra leur afTurer la qualité d'enfants 1'égitimes d'Anne Allard &c du nommé Lerauderle : mais il I ne leur donnera jamais aucun droit fur , }es biens de la familie des de Véré, a laquelle ils font totalement éttangers. M. Talon, qui porta la parole dans cette caufe, comme avocat-général, fit voir que, fi la dame de Viré avoit reconnu un importeur pour fon fils, c'étoit une etrenr dont elle n'étoit point coupable. Et quoique, ajoute-t-il, ceux qui font complices d'une fuppofition de perfonne, foient fujets.a des dommages  480 ( Enfants adultérins, & intéréts, la dame de Véré n'étoit pas dans ce cas, puifqu'elle avoit effeétivement un autre fils, dont la longue abfence .étoit lafource de la furprife qui lui avoit fait adopter un importeur. Ce inagiftrat conclut a ce que, fur I'appel, les parties fulfent mifes bors de cour; Sc qu'il fur crdonné qa'Anne Allard fe pourvoiroit en reftitution de dot fur les biens de Lerauderie,' & fur Ia eommunauté, par préférence a Tarnende prononcée contre lui par Ia fentence de mort. Mais , par Tarrêt rendu en la tournelle, le 21 juin i669, k dame de Vzré &: fon fecond fils furent condamnés en deux mille livres de dommages & intéréts en vers Anne Allard 3 dont les enfants furent déclarés légirimes. Cet arrêt a donc jugé que la dame de Véré Sc fon fecond fils étoient refponfables des effets de leur erreur. Ce ri'étoit que fur la foi de Tadoption pubiique qu'Hs avoient faite de Timpofteur, qu'Anne Allard avoit eu, pour lui, des complaifances dont elle avoit efpéré réparer les fuites par un mariage honnète Sc fortable. Leur erreur étoit involontaire, il eft vrai; mais elle n'étoit  'd'un impojl. déclarés légit. 481 n'étoit pas invincible; & cette circonftance étoit fuffifante, pour les en rendre civilement refponfables. D'un autre cbté, la bonne foi de la mère eft tellement favorable, qu'elle a prévalu, pour donner les effets civils a fon mariage, fur deux circonftances cumulées qui fembloient en devoir faire prononcer la nullité. II y avoit erreur de perfonne, & bigamie, de la part de fon mari. Elle avoit cru époufer un gentilhomme de fa ville; elle n'avoit époufé qu'un aventurier de Normandie. Elle avoit cru époufer un homme libre; elle ; avoir époufé un homme engagé dans lef \ liens d'un autre mariage. La bonne foi , couvrit tous ces vices, a fon égard, & a ; 1'cgard de fes enfants. Tomé Fil,  * E NFANTS D'UN BATARD, HAB1LSS A SVCCÉDBR A LEUR AÏEUZ. V^oici I'efpèce de Parrêt dont j'ai parlé dans la caufe précédente, & qui eft rapporté par Montholon (i). Un nommé Renard avoit eu un batard, qu'il éleva, dans fa maifon, avec fes enfants légitimes; lui donnant la même éducation, lui faifant porter fon nom, & le confondant, en un mot, tellement avec les autres, que tout le (i) Jacques de Montholon étoit fils de „ s?"ie Montholm>&rte des fceaux fous ■Henri III; frère de Matthieu, confeiller au parlement, & de Francais, confeiller d'état Jacques ne voulut d'autre qualité, ni d'autre' fonéhon , que celle d'avocat. II 1'exerca avec cuftinchon, & mourut en 1622. On a,de lui, un Recueil d'arrêts in 40. imprimé I'année de la mort,  En. d'un ba. ha. a fuc. d l. a. 483 monde ignoroit la tache de fa naiffance. Renard mariacet enfant, comme fon fils, Sc lui en donna la qualité dans le contrat de mariage. Ce batard mourut avant fon père, Sc lailfa des enfants. Le père décéda quelque tems après, Sc lailfa,de fon cóté, plufieurs enfants légitimes. La veuve du batard, comme tutrice de fes enfants, demanda la portion héréditaire de leur père dans la fucceifion de leur aïeul. Les enfantslégitimesfoutinrent qu'elle étoit non-recevable. Ceux pour qui elle ftipuloit, ne venoient que par repréfentation de leur père. Mais leur père étant batard, ne pouvoit être héritier de perfonne ; Sc ne pouvoit, par conféquent, être repréfenté par perfonne. La veuve répondit que la qualité de batard n'excluoit pas euentiellement ceux qui la portoient, des fucceflions afcendantes, puifque le droit romain les y admettoit. Vulgo qmfiti admittuntur ad matris legitimam h&reditatem. L. 1 , §• 2, ad Senat. Tertull. La même chofe a eu lieu en France, pendant lorgtems. L'hiftoire nous apptend même qu'ils fuccédoient au tróne. Xij  4^4 Enfants d'un batard, Mais, abftracftion faire de cette cor> fideration, cette femme, en époufant fon mari, a cru époufer un enfant lé