VERZAMELING W. H. SURINGAR  CAUSES CELÉBRES ET INTÉRESSANTE S, A VE C LES JUGEMENS QUI LES ONT DÉCIDÉES. Rldigêes de nouveau par M. R l C H E R, avnm Avocat au Parlement^" ... . ✓ - ^ * 1 i! 1 ^ XOME QUATOR-2 1EME. A- A M S TER D A'fcJGhez Michel Rhey, • *777'  Et fe trouvent a Paris 3 chei La veuve Savoie , rue S. Jacques, Le Clerc , Quai des Auguftins. HumblOT , rue Saint-Jacques. Cellot, Imprimeur, rue Dauphine. La veuve Desaint , rue du Foin. DüRAND, neveu, rue Galande. N» on i rue Saint - Jean - de- B eauvais. Dex-ALAIN , rue de la Comédie Fran rivée le 5 décembre 15 £1, a lage de C'eft d ceux qui viendront après „ moi de prendre garde qu'ils n'af„ fedlent de le devenir; car, pour moi , la mort va me délivrer de cette j, crainte». En achevant ces mots, il tendit le col au coup qui devoit le faire mourir. On trouva, dans fes poches , un papier qui contenoit 1'ordre de la conipirarion contre les prince de Guife , avec proreftarion que le nom du roi étoit faint & facré pour les conjurés. Le duc de Guife eut le bonheur d'écbaoper a la conjurarion d'Amboife j mais il fuccomba fous les attaques d'un feul particulier. Jean Poltrot, gentühomme Angoumois , après avoir pafTé fa jeunefle en Efpagne , revint dans fa patrie , oü il embrafla la religion proteftante , & la profefla avec une ardeur fanatique. En i \ 63 , irrité de la profpéricé & des heureiix fuccès du duc de Guife, il prit la  du Duc de Guife. 7 réfolution de le raer , Sc s'en vanta. Mais , comme il étoit natureilement fort réfervé on ne crut pas qu'il fut alfez téméraire pour révéler un deifein de cette imporrance, s'il 1'eüt effectivement concu. 111'accompiit cependanr, le 1 8 février 15 5 3. Le duc de Guife qui commandoit le fiège d'Orléans, éroit a cheval, alTez éloigné de fes gens qui le fuivoient , s'entretenant avec Trifan Rofteing, que la reine lui avoit envoyé. Poitrot, après avoir adrelTé au ciel une prière , pour obtenir le fuccès de fon crime , rira un coup de piftoler au duc, le frappa a 1'épaule proche Laiflelle , Sc prit la fuite. On 1'attrappaauprès d'Orléans, Sc on le eonduifita la reine dans Ie camp , proche S. Hilaire. La , en préfence du cardinal de Bourbon Sc de plufieurs autres perfonnes , il fut interrogé. II avoua fon crime , Sc déclara que Theodore de JBe^e Sc un autre miniftre de Ia religioft proreftanre lui avoient fait envifager cette action comme glorieufe Sc utile a la religion. II déchargea entiérement le prince de Conde', que Ton avoit foupConné , Sc M. de Soubife , auquel il étoit attaché. II chargea, au contraire, 1'amiral de Coligni, Sc fit entendre que A iv  8 Mariage M. de la Rochefoucault étoit complics du deflein. , Interrogé , le lendemain , il fit les niêmes réponfes qu'il figna s & dont on envoya copie a 1'amiral de Coügni. Celui-ci rlcha de fe juftif.er dans un mémoire qu'il fit rédiger, & protefta qu'il avoit abfolument ignoré le projet de ce crime. Be^e Sc M. de la Rochefucault proteftèrenr également de leur mnocence, & 1'on n'exigea point d'eux d'autre preuve. Poitrot fut appliqué a la queftion ; il rétraéta fa première confeffion, varia beaucoup fur le compte de 1'amiral, Sc futcondarané au dernier fuppüce. II fut déehiré, le 18 mars 1563, avec des tenailles ardentes , tiré a quatre cheYaux, & écartelé. Le duc de Guife mourut deux jours après fa blefiure. II avoit époufé Anne d'EJl, fille A'Hercule d'EJl fecond du nom , duc de Ferrare. Henri de Lorraine, duc de Guife fon fils ainé , mir le comble aux maux que fon pè:e Sc fon oncle avoient caufés a la France. Voici le portrait qu'en fait Mainbourg , dans fon hiftoire Je la ligue: » Rien ne lui manquoit de tout „ ce qui pouvoit concGorir , foic de  du Duc de Guife. ^ 9 „ bien, fcrit de mal, pour faire réuffir „ ce qu'il avoic fortement rcfolu. II „ avoii routes les belles qualités Sc ,} toutes les perfe&ions du corps & de „ 1'efprit les plus capables de charmer „ les cceurs , Sc d'acquérir, fans peine , „ a celui qui les poflede , un empire „ abfolu fur 1'efprit des peuples, qui en „ furent enchantés, Sc en devinrent „ comme idolatres. » Car il étoit d'une haute ftature , „ aclmirablemenr proportionnée, toute , femblable a celle que Ion attribuè „ aux héros; ayant tous les traits du „ vifage parfaitement beaux ; les yeux _,, percanrs, Sc pleins d'un certain feu , égaïement doux , aétif & penetrant j „ le front large, uni Sc toujours feiein , „ accompagné d'un agréable fourire a. „ la bouche, qui charmoit encore plus „ que lesparoles obligeantes qu'il citfoit a rous ceux qui s'empreftoient de „ 1'approcher 5 le tein vif , fort blanc „ & vermei!. Sa démarche étoit grave „ Sc hautaine , fans qu'il y parut ni „ orgueil ni affectation ; Sc dans toutes. „ fes manières, il avoir un certain air „ inexprimable de grandeur héroïque, „ ou il entroit de la douceur , de 1'au„ dace Sc de la fiertc , fans avoir tier* Av  i o 'Mariage >3 de rebatant; ce qai infpiroit tout- „ enfemble de 1'amour , de la crainte &c du refpect a tous ceux auxquels il 3, parlok. " Cet admirabïe extérieur étoit ani>} mé d'un intérieur encore. plus mer„ veüleux par les belles qualités qa'ii 3. polFédoit d'une ame vraiment granj, de , étant libéral , magnihque en „ tout, n'épargnant rien pour fe faire 3, des créatures , & pour gagner des >5 perfonnes de toutes fortes de condi3, tions , fur-tout la nobleiTe 5c les gens de guerre , civil y obügeant , pcpuy, laire , toujours pret a faire du biena j, ceux qui s'adrclToienca lui. généreux, magnanïme , incapable de nuire, „ même a. fes plus ^rands ennemis , „ autrement que par les voies d'hon33 neur; extrêmement perfuafif , difii- mulé, fous 1'apparence d'une grande „ fran.hife , fage 5c prudent dans les confeils , hardi , prompt & vaülant dans I'exécution, fbufltant gaiement 5, toutes les incommodités d la guerre, „ comme le moindre des foldars; s'ex, pofant a tout y 5c méprifanc les plus j, grand périls pour vehir dhour de ce 3> qu'il avoit une fois entrepris. » Maii, comme il h*y a point de  du Duc de Gui fe. 11 't, mine dor oü ce précitux métal fe „ trouve pur Sc fans mélange de beau„ coup de rerre aulii ces grandes ver„ rus naturelles du duc de Guife ,. étoient corrompues par le melange „ de beaucoup de défauts Sc de vices, „ dont le principal étoit ce defir infa„ riable de grandeur Sc de, gloire , 6c cette vafte ambition a laquelle il rit „ tout fervir. Etant , au refte j, témé„ raire , préfomptueux 3 nefuivant que „ fon propre fens, 6c méprifant celui des autres , fans toutefois qu'il y pa>, rüt. Couvert, fin , peu fincère Sc peu „ véritable ami ; nè fongeant qu'a lui„ même , quoiqu'iifüt le plus careflant ,j Sc le plus officieux de tous les homj, mes. Tout le bien qu'il faifoit aux: autres, n'étant que pour aller, par-la ,, ,, plus facilement a fes fins; 6c couvrant „ roujours fes vaftes deffeins du pré„ texte fpécieux du bien public r 6c de la confervation de la vérirable re„ ligion. Se fianr trop a fon bonheur j. fe perdanr Sc s'aveuglant lui même „ dans la profpériré , qui lui faifoit „ goüter avec t;mt de plailir , le bien j, préfent, qu'il ne foijgeoit pas a pren„ dre des précautions pourTavenir En— findonnantaopaJ'amouEdes^dame&j,  11 Mariage „ defquelles néanmoins , fans qu'eller ,j le detournaflent du foin qu'il prenoit „ de fa principale affaire , il fe fervoit , adroitement, pour avancer, par leurs „ inrrigues , fon grand deiTein , fans „ qu'elles s'en appercuiTenr ». En un mot, il eft cerrain que le mélange de fes bonnes & de fes ma.uvaifes qualités lerendoit propre a bouleverfer 1'état. 11 étoit affez habile pouren rrouver les moyens, & aiTez méchant pour en faire ufage* Ce fut lui qui forma cette fameufe ligue qui mit le royaumea deux dbigts de fa perte. Enfin il porta les chofes i de fï grandes extrêmités , qu'on ne trouva point d'aurre moven, pour ar^ rêrerfes attentars, que de le faire möur rir. Tout le monde fcait comment Henri III fe défit de lui , & du cardifial' de Guife dans le chateau de Biois , pendant la tenue des états. La violente réfolution oü fe porra la cour de Erance contre ces deux ambitieux, eft un de ces coups d'ét.u qui ne peuvent être excufés , que par la nér ceffité du bien public. II eft certain que, ii on n eüt prévenu le coup , les états auemblés a Blois auroient entrepris de 4dépouiiler Henri III, &. de placet la.  du Duc de Guife. 13 couronne fur la tête du duc de Guife. Entr'autres préparatifs pour faire réuflrr eet horrible projet , on avoit publié une généalogie , qui faifoit defcendre la maifon de Lorraine de la feconde race de nos rois ; Sc Fon infinuoit, par-la , qu'en placant le duc de Guife fur le tróne , on ne feroit que lui reftituer le bien de fesancctres. Si eet attentat eüt eulieu; Ci, comme c'étoit Pintention de la duchefle de Montpenfitr fceur du duc de Guife , on eüt enferrné Henri III, pour lui fubftituer ce duc, c'en étoit fait de la France. Le prince , que fa naiflance Sc les loix aopelloient a la fucceffion , étoit d'un mérite extraordinaire; il avoit la bravoure en partage •> il étoit foutenu nonfeulement par les proteftants, mais par un très-grand nombre de catholiques. L'ufurpateur n'auroit pu fe mainrenir qu'a force de combars; Sc les deux partis fe feroient pour ainfi dire, battus jufqu'au dernier homme. Cependaut la célèbre fadtion des feize exercoit 1'autorité fouverainedans Paris.Pours'autorifer dans leurrévolre, iris arraclièrent } de la Sorbonne , un décret r'endu le 7 janvier 1589 , par tequel, fous prétexte de la mort des.  14 Mariage Gulfes , elle déclara que les Francoisétoient déliés du ferment de iidélite & d 'obéiiFancequ'ils avoient prêté au roi» èc qu'ils fe pouvoient armer pour la défenfe de la religion carholique , apoftolique Sc romaine. Mais eenre compagnie, auffi-tót qu'elle fut libre , condamna ce décret, Sc le tint pour abomiiiable. Sur la foi de eet acte, Ie 12 du même mois, le roi fut affigné , au nom des étars aflemblés, k comparoir au parlemenr, pour fe défendre de l'accufation contre lui intentée al'oecafion de 1'aiTaffinat des deux Guife_ Le parlement refufa de faire droit fur une plainte Sc fur une accufation , qui n'étoit antre chofe qu'un crime de Ièze-majefté au premier chef. Mais les Seize formèrent la réfolution de donnet k cetce procédure les fuites qu'elle pouvoit avoir. Jean ie Clerc, dit Bujfi, qui avoit été procureur au parlement , Sc qui étoit alors gouverneur de la baftille , fe chargea de rendre ie parlement docile_ JLe 16 du même mois , il entre y rout armé , dans la grand'chambre , oü la compagnie étoit afiemblée, &c préfenra une requète, par laquelle il demandok.  du Duc de Guife. i? que la cour s'unit avec le prévóc des mare hands , les échevins &c les bourgeois de Paris, pour la défenfe de la religion , & fe retira , pour laiiTer la libercé de la délibérarion. Mais , la trouvanr rrop longue a. fon gré, il rentra furieux , 1'épée a la main , fuivi de. 25 ou 30 hommes , armés de cuiralTés & de piftolets , & connnanda que ceux. qu'il alloit nommer euflent è le fuivre fur le champ , s'ils ne vouloient être mahrairés.. 11 nomma le premier préfident y Achïües de Har/ai , les préfidents Potèicr de-Blanc-Mefnil, &c de 2 hou, & les plus anciens confeillers. Mais tous les autres, au nombre d'enviren 60 , fe levèrent pour fuivre leur. chef. Le Cteic les mena comme en. triomphe jufqu'a la baftaille , oü il les. enferma. Les places devenues vacantes par eet attentat, furent remplacées par des fujers a la dévotion des ligueurs. Le parlemenr ainfi détruit, le fantóme qui le remplaca fe trouva appuyé de rous les pairs , prélars maitres des requêtes attachés au parti de la ligue, & forrna une cliquecompofée de 316 perfonnes, Le roi, pour ne laiiTer aucune apparence. tde légalité Ü ce préteadu tribunal , gar  16 Mariage édit du mois de fcvrier 1589 , trans- féra le vrai parlement a Tours , d'oü il ne revint a Paris qu'après les troubles appaifés. Dès le 30 janvier , cette troupe de ligueurs, qui avoit ufurpé la place & Ie titre du vrai parlement, fit la déclaration fuivante. Extrah desRegijïres du Parlement. •< Ce jourd'hui, toutes les chambres „ aflemblces enlapréfence des princes , „ pairs de France , prélars , maitres „ des requêtes , procureurs & avocats„ géncraux , greffiers & notaires de la „ cour de parlement , en nombre de „ 316 , a efté leue la préfente déclara.„ tion en forme de ferment} pour „ 1'entretenement de runion qui fur ,, hier arreftée , laquelle rous lefdicTs ,s feigneurs ont jurée fur le tableau &z „ fignée aucuns de leur fang. DECLARATION. » Nous fouffignés préfidents, prin„ ces, pairs de France , prélats, maitres „ des requêres , confeiliers, avocats 8c „, procureur-généraux, greffiers & na-  du Duc de Guife. 17 » taires de la cour de parlement, jurons „ Sc promestons a Dieu , fa glorieufe » Mère , Anges, Saints Sc Saintes du » Paradis , vivre Sc mourir en la reh» gion catholique , apoftolique 5c ro» maine ; employer nos vies pour la « confefcvation d'icelle , fans en rien » épargner jufques a la dernière goutte » de notre fang , efpérant que Dieu , » feul fcrutateur de nos cceurs & vo» lontés , nous afliftera en une fi famte » entreprife Sc réfolution , en laquelle » nous proteftons n'avoir autte but que » le maintiennement Sc exaltation de „ fon Saint Nom, défenfe Sc protec„ rion de fon églife a 1'encontre de » ceux qui, ouvertement & par moyens » occultes , s'erForcenr 1'anéantir Sc * maintenir 1'héréfie en ce royaume. » Jurons aufli d'entendre , de tout » notre pouvoir Sc puiflance , ala garde „ Sc confervation de cette ville de Pa» ris , établiflement d'un repos afluré » en icelle , Sc aufli des autres villes Sc „ communautés unies , a la décharge Sc » foulagemenr du pauvre peuple. „ Jurons pareillement Sc promettons » de défendre Sc conferver envers Sc sj contre tous, fans aucun excepter , Sc  18 Mariage » fans aucun refpecl d'aucune digmté » ou qualité de perfonnes; ies princes , 5> feigneurs , prélats , gentilshommes, sj habitans de cetce ville & autres qui j> font unis & s'unironr ci-après pour » un h bon & un C\ faint fubjet, main>3 tenir ies priviièges & libertés des » trois ordres des états de ce royaume , » & ne permertre qu'il foit fait aucun n tort a leurs perfonnes & biens , &c » rénfter, de toutes nos puillances , »5 contre 1'erfort & intention de ceux w qui ont violé la foi publique , rompu 33 1'édit d'union , franchifes & libertés j3 des états de ce royaume par le maf33 /acre & emprifonnement commis en la 33 ville de Blois, le ving-trois & vingt33 quatrieme jour de decembre demier , 33 & en pourfuivre la juftice par toutes 3J voies , tant contre les auteurs , coupa33 bles & adherents , que ceux qui les » afjijleront & favorijeront ci-après , & » généralement promettons ne nous 33 abandouner les ans les aurres , Sr as n'entendre aucans traités, iinon du 93 commun confenrement de tous les 33 princes, prélats , villes & commu33 nautés unies. En témoin de quoi , 3) nous avons figné , de notre propre » main , la préfente dcclaration. Fait  du Duc de Guife. 19 » en parlement, le 30 janvier 1589. « Signé par les avocats & procureurs 3 » le dernier jour dudit mois ». ■Cette clique, ayant ainfi ufurpé le nom de parlement, adopta la procedure entamée contre le roi, Sc appointa les parties. D'après eet appointement 3 on préfenta a ce tribunal fantaftique , une pièce iingulière par fon atrocité , par la qualité des parries , fous le nom defquelles elle fut rédigée , & par la tournure des moyens qui y furent employés. La voici: Advert'ijfement du proces. « Meffieurs les députés du royaume *> de France., demandeursfelon 1'exploir » Sc libelle de M. Pierre du Four- Lc» vêque, en dare du 12 janvier 1589 , « d'une part, Sc le peuvle & canjorts , « aufli joints, demandeurs, d'une part; 55 contre Henry de Valois, au nom , Sc » enlaqualiré , défendeur d'autre part; » difent , par-devanr vous , Meflieurs » les officiers Sc confeillers de la cou>» ronne de France tenant la cour de » parlement a Paris , que , pour les » caufes, railons Sc moyens ci-après » déduits , ledit Henry de Valois 3  20 Manage j, pour ra'ifon du meurtre & ajfafjïnat „ commis ès illuftriffimes perfonnes de „ Mejfuurs le duc & eardinal de Guife, „fera condamm , pour raifon dudu af >y Jaffiaat_i a faire amendt honorable , „ nud & en chemife , la tére nue & puds nuds, la corde au col, affijlé de Vcxccuteur de L haute juflice , tenant en „Ja main une torche ardente de trente ., livres , lequel dira & déclarera, en „ Caffemhlée des états , les deux ge noux „ en ter re , qua. tort, & fans caufe , // ,, a commis ou fait commettre ledit af »faffinat aux dejjusdits duc & eardinal ,, ae Guife , duquel il demandera pardon „ a Dieu, a la juflice & aux éiats : que des k-préfent , comme criminel & tel ,, declaré, il fera démis & déclaré indi„ gne de la couronne de France , renon„ cant a tout & tel droit quily pourj, rok prétendre; & ce , pour les cas plus „ a plein mentionnés & déclarés au pro,, ces dont il fe trouvera bien & duement „ atieint & convaincu : outre qu'il fera ,, banni & confiné a. perpétuité au cou~ i3 vent & momil'ere des Eyéronymites ,y ajfis prés du bois de Vincennes , pour „ y jeuner au pain & a l'eau , le re(ie de j, fes jours ; enfemble condamné aux déapens ; & a ces fins difenr,  du Duc de Guife. 2t « Que Henry de Valois, depuis cinq 3> ou Tix ans en ca , faifant aucunement paroiftre qu'il eftoit fortzélé a la re„ ligion catholique, apoitolique Sc ro„ maine , ii iit bcMï Sc tonftruire , en ,, pluheurs endroirs de cette ville de Paris , Sc hors icelle , quelques mo„ naftères , pour y faire dévotement ,_, cclébrcr le fervice divin : enfemble ,, un ordre eles pénitents blancs, pour, „ de plus en plus , confirmer fa fainte „ volonté , Sc inonftrer a. plein ceil de quelle intégrité Sc iuuérité de conf„ cience il procédoit a Padvanccment „ du fervice de Dieu& de fon églife. 5> Toutefois 1'ifTueuousa bien monf„ tré le contraire ; que cela ne fe faifoit J5 que pour diffimuler , & pour couvrir „ la mauvaife afFedtion qu'il avoit a 1'endroit de la maifon de Guife , afin ,, que , foubz prétexte du fervice de ,, Dieu , il les peufl attrapper. Mais le bon Dieu , qui cognoift toutes chofes, Sc qui voit jufques au „ plus profond denosentrailles,quelles j, fonr nos conceptions, n'a permis que „ telle mefchanceté ait efté exécutée foubz ombre d'une dévotion , & foubs le nom de piété. ij Quoy voyant ledit Henry que Dieu  2 2 Manage „ lui avoir manqué de garand , pour „ cefte fois, il s'advifa, en Pannée nul „ cinq cent quatre - vingt Sc fept, de drefler a ce grand prince belliqueux, „ le duc de ijuife , une armee etiroyable „ de ces barbares Réiftres, penfant , „ auffi-toft qu'ils auroient mis le pied ,, en France, que ce brave capitaineSc „ généreux hazarderoir une baraille en „ laquelle lui Sc fa maifon y pour„ roient demeurer. « Mais ce grand Dieu des batailles, „ cognoitFant de rechef 1'entreprife Sc „ le cueur dece tyran Sc nouveau athée „ de Henry , lequel efpérant , par la mort de ce prince, planter 1'hércfie „ en France , deftourna ce coup , Sc „ favorifa tant ce prince, ou'avec une j, petitepoignée degens, il miranéant, „ & a vauderoute cette puiiTante ar5, mée, qui s'efroit retirée dans An„ neau. » Henry adverti de cette défaicte , Sc que fes deifeings étoient rompus, „ &, comme 1'on dit, que touc ce qu'il „ faifoit ne portoit coup , il délibéra , „ le douzième mai 1588, de le fur„ prendre dans la ville de Paris, y faifant entrer quelque nombre de  du Duc de Guife. 2.3 gens-d'armes, comme de fes gardes , & quatre compagnies de Suytles , lefquels fe failirent des fortes places , pour empefcher que le peuple ne fift „ réfiftance de mieuxjouer leur jeu (ij. " Toutefois cecce troifierne délibéra,, tion ne peuft non plus forrir a elïecT: que les deux premières : Dieu per„ mettant, ce jour-la , que le peuple ,, fe fauva , &c le fieur duc de Guife „ enfemblement, par le moyen des barricades qu'ils firent } oü plufieurs fuyifes furent tués que blefles , qui faifoient contenance de vouloir fe remuer. » Toutes ces chofes ainii paffées , au 5, lieu qu'elles devoient fervirde quel, que adverrilfement audit Henry , &C croire qu'il y avoit un Dieu qui rompoit &z faifoit baiffer le coup de fes „ mauvaifes délibérations , ce néant- (1) Ceci eft un menfonge groflïer. Les auteurs de cette pièce ont voulu rejetter fur Henri lil la journée des barricades , qui fut certainement complottée par la maiion de Guife , pour tuer , ou du moins prendre le roi, qui fut obligé de s'evader & de fuir de Paris, pour mettre fa peribnne en süreté. Voyez le procés-verbal de Poulain , a la fuïte du journal d'Henri III, & les riiémoires de la ligue , tome 2 , page 335, & 347;  24 Mariage ,, moins , ce malheureux loup enragé , oubliant Dieu du tout, pour alTouvir 5, fon appérit defordonné , Sc voulant, comme Pon dift , faire fa dernière „ main , il advifa de faire tenir fes ,} états en la ville de Blois , pour plus „ facilement exécuter fon entreprinfe, j, ou, non obftant toutes les alleurances „ qu'il eufl: donné au fieur duc de Guife Sc a Monfieur le eardinal fon frère , ,, par ferments folemnels > confirmés j, fur la fainte Euchariftie, cela ne peufr ,, empefcher que malheureufement il „ fift aflailiner ces deux princes valleu,j reux Sc magnammes. » Pour raifen duquel meurtre les ef„ tats s'en eftans plaints , Sc donné affi„ gnation audict Henry & autres com- plices a comparoir en la cour de par3, lement a Paris, par-devanr Meilienrs „ les confeillers Sc ornciers de la cou„ ronne de France, pour refpondre aux 5, conclufions par eulx priles en leur exploit libellé dudift M. Pierre du s, Four-Le'i éque , lequel , après , avoit „ bien Sc duement obtenu les défauts. 53 Enfin les partiesauroientété appoin„ tées en droit a écrire par advertilFe„ ments , lefquels feronr communiqués „ aux pardes pour y refpondre dans la huitaine ,  du Duc de Guife. 25 huidtaine, 5c la huictaine enfuivant , bailler contredicts 5c falvations dans „ le rems de 1'ordonnace 3 informer „ affin des dépens. » Satisfaifant auqnel appoinrement, „ diient les demandeursque , fi jamais „ il fe préfenta en la cour faict eftrange , „ & digne d'eftre puny exemplaire„ ment , ceftui-ci 3 comme du tout Js nouveau , 5c non accouftumé , doit „ eftre exrraordinairemenr puny. ji Et, fans entrer en confidération e> de la perfonne dudicfc Henry ny a fa qualiré , laquelle nous eft trop cogneue par fes malheureux déportements &. adtions funeftes : mais s'ar„ reftant feulement fur une circonftance j, de faiét, qui eft , qu'il a , conrre le „ ferment par lui faidt fur la fainre Eu„ chariftie , violé 5c rompu la foi publique , 1'on trouvera que ce feul poindb eft plus que fuffifant pour lui „ faire 5c parfaire fon procez. j> Car, comme cette facon de jurer ',j fe trouve extraordinaire 5c non accouftumée j auili y prenant garde de „ prés, on y trouvera , entr'autres cho„ fes , un blafphême contre la religioa „ catholique autant exécrable & détef„ table qui fe puiffe dire ny penfer: Tome XIV, B  %G Marl ave „ qui eft: que ledict Henry , qui, eti 9, apparence ie difoirtrès chreftien , ce 9, néantmoins n'a peu plus a defcou}3 vert fe déclarer qu'il eftoit un vrai s, athée Sc perjure, qu'en faifant Sc „ defayouant a pür & a piain , fans aucune contrainóf e , tant fa religion , 5, que la foy Sc le ferment qu'il avoit 9) faidf fur la fainte Euchariftie. Cujus J} violats religionis pcena , difoit Cicero „ i , de leg, juflam recufationem non 5, habet. Ce ferment , au contraire, a telieti ment les défuncts duc & eardinal de t} Guife aiTéurez , que, comme vrays Sc 3, bons catholiques , Sc rrès-arTecfion3, nez & zèlez a leur religion , ils ont 5> penfé qu'il n'eftoit poffib'.e au monde 3, de recevoir une plus grande aifeus, rance dudir Henry , ( fans faire aucu3, nement recherche d'autres moyens ti pour fcavoir s'ils fe devoient rier , 3, ou non ) qu'en leur donnant pour un bon hoftage le corps Sc fang pré5J cieux de noftre Sauyeur iv Redenipjj temJefus-Ch/i/z. 3> Nous lifons que les Pythagoriy, ciens, pour témoignage de la ridélité }i Sc dè 1'aiTeurance qu'ils avoient les ü uns des autres , ils avoient un pror  du Duc de Guife. 2,7 5, verbe entr'eux , lequel étoit tel , ju» waprl ïjufictWSv cTi^/aV ; id ejl unicuique dextram non porrigendam. „ Comme s'ils vouloient dire , après „ que 1'homme de bien a promis Sc „ juré fa foy a quel qu'il foit, il n'eft „ plus en lui de Ia pouvoir rompre ni „ faulfer, fans encourir une grande in„ famie 8c blafme d'un perjure. » C'eft pourquoi le poëte Homere a. p, diób fort bien: °"Z ïrctAivcis'ptTh ■ Ivè'aTrccTii'Ain , » Et véritablement Ia foy, encores 'jj qu'elle procédé de la parolle, comme „ dict Platon, fi eft-ce que nous la de„ vons eftimer comme une chofe trcsj, fainóte & inviolable, laquelle a cefte j, vertu Sc puilTance de nous unir Sc s, lier tellement les uns avec les autres , j, de forre que, s'il advient que nous „ la rompions , nous demeurerons en „ réputation du plus mefchant Sc du „ plus désloyal homme qui foic au ,j monde. » Et.pourexemple d'une desloyauté „ Sc perjure infigne , je vous fupplie li Meffieurj, de vous repréfenter( hé- r Bij  2,8 Mariage las i noftre très-grand regret) ce que ce difÏÏmulé 5r nouveau athée Henry 3, de Valeis , a commis , ces jours paf„ fez foubz une foy publique aux eftats renus en la ville de Blois , ayant in„ humainement meurtry Sc alfaffiné ces deux généreux Sc magnanimes ,3 princes Meilieurs les duc 8c eardinal s, de Guife, foubz prétexte d'une aiïemJS blée Sc convocation générale de fes eftars , qu'il vouloir & entendoit te„ nir en la dicte ville de Blois, afin de ,, plus aifément exécuter fes uiauyais defleins. » Et, pour mieux palier Sc deguifer ',, fon entreprife , il ufa de ferments ,, fort folemnels , réitérez , lefquels , j, depuis , il confirma fur la fainte 3, Euchariftie. „ O faitt eftrange & déteftable { „ Qu'un prince lequel, auparavant eed 33 homicide, par tant d'années pyroya,3 bles 5c faintes aéfcions, faifoit parol- rre ( femble ), qu'il eftoit la lumière de fon royaume, Sc très-affectionné ,, 5c zélé a la religion catholique , apof- tolique 5c romaine, foit tombé en 3, athéifme 5c perfidie li grande , de „ violer le droicl de la nature , qui eft „ la foy & celui des gens, que les La-  du Duc de Guife. 29 tins appellent fides publica , & gar nos mceurs Jauf-conduh. » Lequel a eftc- ainfi nommé a caufe „ de la permiffion Sc affeurance qui eft „ odtroyée par le fouverain aux ambafj, fadeurs, héraults , ou metTagers de 3) 1'eftranger , Sc principalement de „ 1'ennemy, pour venir librement, Sc ,» féjourner au pays, avoir audience Sc „ s'en retourner après en toure feureté, d'autant que relle affeurance, qui eft „ donnée aux légats , meflagers Sc amjj bafladeurs , foit du peuple , ou au}, tres,concernela foy tant de celui qui 1'envoye , que de celuy qui le recoir, j, cela appartenant grandement a 1'eftat public. » Et ce fauf-conduit & aiTeuranee eft chofe qui appartient au fouverain , & , pour ce ne doir eftre aucunement j, par luy violée : Sc appellée foy publi„ que , non - feulement paree qu'elle }, rouche la caufe publique , qui eftentre les rois, les princes Sc feigneurs , mais aufli qu'elle defpend de la comiHune des gens , qui a eftabli entre tous les hommes un droit univerfel „ pour conferver , remettre Sc mainte,j nir entr'eux une ferme fociété, la?>%quelle eftant troublée par la guerre , B iij  3 o Mariage » ou autremen:, ne fe peut reconci« lier que par les ambafladeurs d'une » part & d'autre , lefquels on ne peut » vióler ni forcer , qu'on ne viole aula » le droit desgens. >j Ce que remonitra fort bien Hannon » Carthaginois au fénat de Carthage, >j blafmant Annibal de n'avoir voulu .» recevoir, au camp 3 les ambafladeurs w venans des amis & confedérez , & » pour les confedérez, & dit, ainii que v recite Tite-Live : jus gentium fujtuth* 35 Les Romains ont fidèlement gardé » cefte foy publique , a. laquelle Numa S3 dédia un temple , lui ordonnant des S3 facrifices. aux dépens du public } S3 comme tefmoingne Denys d'Haiicar» naffe; voahnt, par-la , monftrer que 33 la foy fe doit garder inviolablemenc » entre les hommes } comme eftant le x tefmoignage d'une chofe très-fainéte. »> Nous lifons que les confuls romains jj conduifant leur armée contre Am.il35 ccr &c Hannon , voyants que leur » armée n'eftoit rien au prix de celle » des Romains, ils furent contraints 33 d'entrer en quelque traité de paix 33 avec les Romains. Mais Amilcar ne » voulant aller par - devers eulx , crai>3 gnanc qu'on ne luy fift- comme i!s  du Duc de Guife. _ 31 )a avoient autrefois faid iCorneiius Afi~ na , ambafladeur des Romains. En» fin Hannon fe refoult d'aller par» devers eulx, avec fiance & fauf-con„ duid. Les Romains le receurent fi» dellement, Sc feirent taire au tribuiï » des gens d'armes qui avoit did , era » palTant, a Hannon , qu'il mériroit » d'en recevoir autant que les Cartha» ginois en avoient faid a Cor. JJina^ »» (lequel ils avoient liéSc mis a Iaca» dène Sc retenu). Mais les Romains » lui dirent: Hannon , le peuple romain » t'afleure Sc te donne la foy publique « & fauf-conduit , qui doit t'aiTeurer n de n'avoir aucunement peur ny » crainde. » M. Emyk Sc L. Flamine eftaiTJ » confuls, il leur fut commandé Sc enn joind, de par le fénat, de faire renv> dre Sc livrerparlesFéciales L. Minuctv » Sc L. Manille aux ambafladeurs des « Carrhagiuois, paree qu'ils les avoient 5> outragez. Maislors le fénat ne regarda « ceulx auxquels ce!a étoit baillé , ains w feulement ce que la foy publique re» queroit» 3> Les Francois, entre tous , ont re33 Iigieufemenr gardé & entretenu la 33 foy publicque Sc fauf-conduid qu'ils B iv  32. Mariage » avoient donné , encore qu'il tournaft »> au préjudice de leur eftat, comme » le roi Francois I de ce nom (que Dieu « abfolve) , roy de France, ayeul de » Henry le Fénéant Sc Caphart, monf» tra envers Charles le Quinc. » II eft vrai que le roi Louis XI (que » Dieu abfolve), roy de France , au 5> rraicfé faicF avec Charles , duc de » Bourgogne, 1'an 1468 , non-obftant >» qu'il euft juré premiérement parolle » de roy, puis par la foy de fon corps j> 5c par fon créateur ,& par la foy 5c loy » qu'il avoit prins en fon baptême , 5c 5) fur les Evangéliftes , & fur le canon »» de la MelTe. On fcait alfez ce qu'il en » advint toft après. » Le comre de Saint-Paul ne fe vou» lut pas fier en teut cela , quand le roi » lui donna fauf-condnidt, s'il ne juroit 3* paria vraye croix de Saint Lou d'An» giers , fur laquelle il avoit juré, eftant » requis par le fieur Lefcat, auparavanc " que venir a fon fervice , Sc garda fon js ferment. » De mefme fut faiét au traiété de » paix faicF entre le roy de Navarre , 35 & Charles de France, régent , alors » que 1'évefque de Lifieux dit la MefFe »« en «n pavillon tendu entre les deux  du Duc de Guife. 33 » armées , Sc recent le ferment fur 3» 1'hiftoire -y Sc pour plus affeurer Ie » faid , 1'évefque divifa 1'Hoftie en 53 deux, en baillant la moitié au roi de j> Navarre , lequel n'en voulut point » prendre , en s'excufant qu'il avoit » desjeuné, ny le régent aufli n'en vou35 lut point prendre. » Nous trouvons , par les hiftoires , 35 que les Romains ufoient de facrifices 33 Sc d'erfufion de fang , avec plufieurs » imprécarions & exécrations contre les 3> infradeurs d'alliance; Sc mefme les 3' roys de Parthe Sc d'Arménie , quand 3» ils entroieht en ligue orfenfive Sc def3> fenfiye, fe lioyent les poulces, en fai33 fant fortir du fang , le fuccoient les 3» uns après les autres. 33 C'eft-pourquoy le peuple romain » fit faire punition exemplaire & me33 morable des Fidenates qui avoient 35 tué les ambalfadeurs romains , contre » 1'alliance qu'ils avoient contradce Sc 55 jurée enfemblemenr : Sc a. Cornelius „ Ccjfus , ne fe pouvant taire d'une telle 3. injure : eft-ce ici ( dit-il) le rompeur »» d'alliance hamaine , Sc le violareur » du droit des geus ? Maintenant je »3 donneray cefte vidime immolée ( li ij ainfi que les dieux ayent voulu eftre en B v  54 Manage „ terrequelquechofe fainct) auxcTprits. « des ambafladeurs..' » Cicero récite que Corynthe a été » ruyn.e par les Romains pour avoir « trop rudement traicté leurs ambafla» deurs; ik dit ailleurs qu'éntr'e les, » enne-uis , les ambafladeurs doivent. s> eft. e en feureté; » Pelopidas , étant■ ambafladeur en. » Theflalie , s'eftimoit eftre aiïez af» feuré par le droir-de. légation , lequel, « avoit accouftumé d'eftre fainct entre.: j> toutes les gens & narious v.&tVarron » dict, les.corps des ambafladeurs font. » fainéts.. A cefte. occafion-, le junfconfulte» efcrir que, li aucun.poufle & ófFence. » 1'ambaifadeur des ennemis , cela eft. » eftimé eftre commis contre le. droit. » des gens , paree que les ambafladeurs: » font rcpatés faincts. » De forte qu'il ne faut doubter que; » les roys, princes & grands feigneurs, « ne s'acquièrent un mauvais bruit &C sj renom par-tout leur royaume , terres » & feigneuries ,, quand ils rompent 33 violenueftefoypublique, quam etiam 33 hofl.s omnium gentium funclijjimatn » ejje judicaverunt, difo t Cic.p o leg.. » Manilid ; laquelle Iêiir doibt eftre  du Duc de Guife. 3^ 3s comme un oracle, & leur fimple pa» rolle comme une loy, non pas avoir 33 une foy d'aufli peu de durée, & aufli w peu afleurée , que celle des Grecs , 33 ainfi que rapporte Polybe , Grec de 33 nation , dïfarit qu'il fuffifoir de la 3> feule parolle entre les Romains ; en 93 Grèce , que, pour cent efcus de preft,. »> il falloit dix notaires , & deux fois » autant de fcels , & pour cela, on ne-»3 laiffoit pas de rompre la foy. >3 Er Cic. en 1'oraifon pro L. Flacco r 99 parlant des Grecs, difoit: Tefiimo.» nium , religionem & fidem nunqudm33 ifta natiocoluit; &i Juvénai, en la fa» tyre vj , parlant de la perfidie des^ 33 Grecs , difoit: Sed Jove nondum' Barbato , nondum Gmcis jurart paratip Per caput aherius, >3 Laquelle perfidie ( k la malneure 33 ces deux grands princes & pilliers de; 3i 1'églife catholique , apoftolique & ro^ 33 maine ont par trop inhurnainemerip» expérimenrée , recevanr , en leurs» 39 corps , pour récompenfes de leurs-; » Bons & fidelles fervices qu'ils ontï H'fai&s indikt Henry ? lefcel&: cacheg:  36 Mariage » de cruauté de ce Grec inhumain Sc j> barbare. » Lequel 3 pour mieux faire fa tra33 hifon , on a veu reveftir en habic 33 d'hermite déguifé , tantoft mafqué »3 d'un fac de pénitent diffimulé, plus 33 toft en hoqueton de frère oblat de 33 cuiline y rout enfumé , faifant conte33 nance Sc morgue d'eftre bon catholi>s que a Ier émoulu, 8c néantmoins de3J puis , on a recongneu qu'en lui il n'y 33 avoir aucune feureté , ny a lettres , » ny a fceaux , ny a ferrnens , ny a 34 fauve-garde qu'il euft donné ou pro3» mis ; effacant par ce moyen , la r> marqué de loyauté , qui eftoit née 33 avec luy , emportant le nom de roy » trés -chreftien. 33 Ce font en effer , Meftïeurs»les 33 déportements dudiót Henry, lefquefs « ies d-mandeurs vous ont bien voulu » repréfenrer , afin de vous fupplier » d'en faire juftice , & de punir un af» faffinat fi qualifié , comme eft ceftuy» cy, de peur que, s'il demeuroit im» puny , il ne vous foit reproché, a >; 1'advenir, d'avoir efté trop lafches, 33 fans cueur, fans courage 3 »u pluftoft 53 fans auclorité, comme il s'eft veu de  du Buc de Guife. 37 „ Rangon Sc Fregofe, ambafladeurs du „ roy de France , lefquels furent tuez „ »ar les officiers de l'Empereur Charles „ le F, fans qn'on en fift juftice. Mais „ devez faire de mefme de ces meur» triers , Sc de ceulx qui en ont efte „ audeurs Sc confentants , comme fi„ rent les Romains , lefquels hvrèrent aux ennemis Minutius Sc Mankus ; „ Sc une autre fois Fabius Sc Jpromus , - pour les faire mourir Sc en difpofer a „ leut plaifir , paree qu'ils avoient tant „ foit peu offenfé les ambafladeurs , qui » eft la peine ordinaire de la loy. „ Car il la foy n'eft gardée aux am„ bafladeurs?, que doibt on efpérer des „ autres ? Oü fera la feureté, finon avec „ les roys protedeurs de la liberté & » de la franchife, fous laquelle un chaf» cun fe targue , principalement quand » 1'on eft prés de leur perfonne , a une „ aiFemblée Soconvocation des eftats , >, oü 1'on fe promet d'y recevoir autant „ de feureté Sc de fiance , comme 1'on „ pourroir faire en fa propre maifon , » prés de fa petite familie ? » Le prince qui a la foy publique en recomrnandation n'eft befoin de luy » demander de fauf-conduid Sc d'af» feurance, comme firent les Romains  3 8 Mariale »■ aux trerrre ambafladsurs qui avoient " eté d-putez par ceux de la ville de » Carthage, pour y demanderJa paix » aux Romains. Sitoftqueles Romains » leur eurent accordé de leur donner !a » paix , il y eur un. ancien fénatear cog» noiifant la perridie punique , qui leur » demanda , en plein fénat , quels » dieux ils vouloient jurer ils refpon» dirent qu'ils vouloient jurer les dieux » qui avoient fï griefvement vengé ia » defloyauté. " De mefme le peuple franccis , & » les ames bien-heureufes de' ces dé» functs, a 1'exemple de fes anciens, » demande a ce grand Dieu omnipo" tent qu'd lui plaife prendre la ven» geance du perjure Sc de la defloyauté. » de ce tvgre Henry , prince malheu.» reufement, & a demy perdu, lequel » les a trompez contre la promelfe de la » fidélité & loyauté qu'il leur avoit » faicte Sc juréeenpleineaffemblée des » eftats que , pour falaire & récom»> penfe d'un fi malheureux acte , 1'on *> diie de luy le proverbe ancien, qui *> eftoit Rex fuit, nunc afmus , ne luy m eftant plus permis ny loyiiblc de >r prendre le tiltre de roy de France. » très-chreftien , ni d'avoir en fon gou*  du Duc de Guife, 3.9;. „ Verdemênt le peuple francois , catho„ lique & fidéle , lequel, a cefte occa„ fion, a efte difpenfé de 1'obéyiTance. „ qu'il eftoit tenu de luy porcer. » Par ces moyens , & aukres que la „ cour , de grace , pourra erop mieux. fuppléer, concluent lesdemandeurs,, „ avec defpens.. Pot» l'abjence de l'adn vo.cat, iignéCHicoT. »; Je ne ferai aucunes réflexions fur cette pièce.. Que pourroit on dire qui. caractérisat fon atrocité , & 1'abfurdité des moyens qui font allégués? II ne paroit pas que cette procédure ait eu de. fuites. Mais la veuve du duc de Guife en avoit introduit une autre , qui a. produit des actes régicides que la mauvaife foi n'a pas craint d'imputer au-, parlement. Elle prcfenta cette requête:. « Supplie humblement Catherine de. „ Cièves, ducheiTe douairière de Guife, „ tan: en fon nom , que comme tu„ trice de fes enfants mineurs: Que feu: „ M le duc de Giiyjë , pair & grand„ maiftre de France, fon mary , eftoit j, fils d'un prince qui a remply toute.„ la terre du renom de fes vertus fis „ utiles £ toute li France , que 1'ayant, „ eftendue du cofté d'AUemagne , pat  40 Mariage „ Ia confervation de Metz , il I'a rejj jomte du cofté de 1'Angleterre , a Ia 5, grand mer, fon ancicnne borne , par „ la prinfe de Calais Sc d'un autre 5, endroiót, il Pa delivrée de la terreur j, d'une place auparavant réputée inex», pugnable, par la ruine de Thionvil„ Ie : puis ayant heureufement travaillé 35 a purger ce royaume du venin conta5, gieux de Phéréfie , qui Pavoit quafi a> du tout infedté, Sc fe voyant preft de 3, venir a bouft , il fut proditoirement >, meurtry & aflafliné par les ennemis de Dieu Sc de fon églife , délaiflanc 3, trois enfants, qui fe font monftrez 3j vrais héritiers des vernis de leur père , mefme de fon zèle ardant en „ la rgligion catholique , apoftolique Sc romaine j dont Pïïn eftoit eardinal , „ archevèque Sc duc de Reims , Sc prej, mier pair de France ; Sc les deux aui„ tres duc de Guyfe Sc du Maïne, anfll pairs de France , lefquels furent en- voyez , dès leur première jeuneffe , „ aux armées uaiverfelles de la chré„ tienté, contre Pempereur des Turcs „ au fiège de Vienne , Sc k la batailie j, de Lepante , Si toujours depuis fe j, font employez k la perfécution des >t héréiies } jufques a s'enfexmei tous  du Duc de Guife. 41 - deux enfemble , pour la caufe de " Dieu, dans la ville de Poidiers eftroictement aiÏÏégée , ce qui arrefta le cours impétueux de fon ennemy , paree " que la longueur de ce vain fiège ayant „ rendu leur armée route foible &Ian" auide , 6C donné loifir d'en drefler " une contraire toute fraifche & viL goureufe, il fuft, par ce moyen , lort aifé de vaincre a Montcontour ; " teliement que la confervarion de , Poidiers , par la générohte de ces , deux frères, a efté-une des principale* „ caufes de 1'heureux fuccès de cefte '„ importante & célèbre bataille. » Auffi, en un autre combat fublequent, dont la vidoire demeura au'„ did feu fieur dt Guyfe , il y recut Ia j, plave qu'il portoit au vifage. „ Enfin , voyant que , peu-a-peu , „ la religion catholique fe perdoit en J5 france par diffimulation , 6c mefme l qu'on la menacoit de tomber du tout „ foubz la domination d'un prince notoirement hérétique; Sc qu'un com„ mencoit defia de 1'eftablir, en met„ tant ez mains de fesadhérants & fau„ teurs les grandes dignitez , gouver„ nements de provinces , villes , chat3, teaux & principales fortereffes du  42 Mariage „ royaume , de forte que , fi Pon n'y „ pourvoyoit de bonne heure , le péril ja éminent feroit en brief rendu du tout inévitable, il fe mit en devoir s> d'y remédier j mais par moyen doux 3, & gracieux, s'eftant contenté de 1'é», diótde juillet 1585, aufii fainctement >,.procuré de fa part, que fainctement 3, exécuté de Pautre De facon que les 3, connivences & praéliques fecrettes 33 de ceulx qui pouvoient du tout oppri>, merles hérétiques , leur donneroient 3, au contraire le -courage & moyen de », conduire au cueur du royaume une ef>j froyable armée d'effrangers miracu>, leufementdiffipée par moyens fupers, naturels. 3> Touresfois, en tanrque Dieu s'eflr „ voulu fervir du miniftère des hom>, mes , il cboifit principalement les j, ducs de Guyfe& du Maine aux exoloits „ de Villemory d'AuIneau, qui furent ,3 les plus prochaines caufc-s de la def», route des ennemis. 33 Mais ceulx qui pouvoïenr aifémenr „ eftendre les heurenx effects d'une fi „ divine vïctoire, jufques a 1'entière 3, exnnction du feu, lors réfervé en un „ pent coing du royaume , convertirent, au contraire Fa faire de 1? guerre », en dclices & vcdaptés , afin que les  du Duc de Guife. 43 ennemis euflent loifir de reprendre „ leur premier efprir , Sc , pour leur „ accroiftre le courage , dépanirentpu„ bliquement a cettuy qui eiloit leur principal fouftien, 1'un des premiers„ offices, Sc 1'un des plus importants ,, gouvernements de tout le royaume j >, tellement que, par ces artirices , ou,, trecequ'une infigne viótoire demeura „ infruétueufe , les plus affectionnez „ catholiques furent encores rnenacés „ d'outrages , voire de fupplices. Ce j, qui excitainopinément 5c al'impour„ vu 1'efmotion populaire de Paris , retentie 5c appaifée par le duc de Guyfe , avec tantdeprudence 5c moJ3 dcration, qu'elle a furmonté nonj., feulement 1'efpérance, mais quafi Ie „ fouhait des hommes Carayantmef3} prifé d'un courage haultement eflevé „ par-deiïus les paflions humaines,, ce qui enne 5c defyoye quelquefois „ les plus belles ames , il refferra tous „ fes delirs au foing de la gloire de Dieu , & fe conrenra , pour toute „ chofe , du fainct édict d'union folemj, nellement jurée avec tant d'exécrations contre les tranfgreffeurs , qu'elles „ euflent adftreint la foy des plus bar5, bares & infidelles nations du monde, p Et paree que le commencement de.  44 Mariage » fon exécution dépendoit de Ia tenue » des eftats généraux , oü les princes » & les députez de toutes les provinces » eftoient folemnellement aüemblez , » quand on rit celte grande & honora» ble compagnie alTeuréea une légitime » liberté , qui tendoit férieufement a. » I'extirpation de riiéréfie, (k i Ia ré» formation des defordres qui ont ruiné » ce floriffant royaume , mefme a re» trancher 1'exaction des fubfides im» menfes , & la profufion monftrueufe » des deniers publicqs , ceux qui veu» Ient toufiours continuer la dilfolution *> de leur première vie, & préparer les » chemins a la domination des héréti» ques , n'en peuvent imaginer un plus » propre moyen , que le maifacre des » princes qui s'eftoienr montrez les plus » affeétionnez au foulagement du peu" ple, & a la confervation de la pure » religion catholique; pour 1'exécution » duquel defTeing , ayant rejuré 1 edict » d'union , & renouvellé les autres pro>> melTes d'afïeurance ,tant parfermens j. folemnels , que par toutes autres fi» mulations de bien veuillance , voire » jufques a fe dévouer par imprécations » plaines d'horreur, après avoir prins » la faincte Euchariitie , enfin , le i$  du Duc de Guife. 4^ , décembre , le duc de Guyfe , qui , eftoit affis au confeil , ayant éfté „ mandé, de la part du roy , & s'eftant „ levé & acheminé, peur y aller feul „ nud , & fans autres armes, que Pépée „ nee avec fa qualité , comme celuy M qui ne fe fuft jamais deffié d'tine li „ infigne perfidie, eftcruellement maf„ facré par plufieurs meurrriers expref„ fément difpofez pour ceft effeét. Et, „ au mefme inftant, Meflïeurs les car„ dinaux de Bourbon Scde Guyfe, Ma„ dame laduchefle de Nemours , Monfieur de Nemours fon fils , Monfieur „ le prince de Jolnville, Monfieur le „ duc d'Elbcéuf, Monfieur Parchevêque ,, de Lyon , les prévoft des marchands „ & efehevins de cette ville, & quel„ ques autres députez des eftats font eftroitement emprifonnez: & le lsn„ demain, M. le eardinal de Guyfe , „ archevefque promu a 1'ordre de pref„ trife , & qui avoit facré le roy ,' „ comme premier pair de France , eft „ aulFi inhumainement malTacré. » Au bruir notoire defquelles cruau„ tez commifes en plains eftats, par la „ plus exécrable perfidie qui fuft jamais ,, ouye , routes nations catholiques, &i „ toutes lespxovinces de France fe font  46 Mariage a, juftement efmeues , comme d'une » injare publique , digne aufii d'eftre „ vengée paria force publique. » Toutesfois, fans y defroger aucu„ nement, Sc fe defpartir des aultres „ voyes dont on pourra ufer , felon „ que le requiert la qualité du faid , ,-, d'autant que , par la loy cerraine Sc j, noroire de ce royaume, ce parlement 5) eft la cour des pairs de France , qui " en. *®nt *es Premiers confeillers, avec „ privilege que ce que concerne leut „ honneur , leur eftat 8c leur vie , ne „ peut eftre traité ailleurs que par la„ voye de juft-ice : la fuppliante defireroit en informer de Pordonnance d'icelle cour. » Ce considéré , qu'il vous plaifej, lui ocFroyer commiffion pour in„ former des faicFs fufdicFs , circonf„ tances 8c dépendances, 8c ce par tels„ de nos fieurs qu'il vous plaira com„ mettre Sc députer , pour l'informati non vei;e & rapportée eftre décrété „ contre'ceulx qui fe trouveront char,-, gez & coupables , 8c autrement pro„ céder comme de raifon , 8c vous „ ferez bien >». . .. Catherine ee Cleves.  du Duc de Guife. 47 Sur cecce requête , la clique qui fié^eoit en la place , & fous le nom da parlement , fit rédiger 1'acte fuivant : w Veu par la cour, routes les cham„ bres alfemblées, la requête a elle pré-, „ fentée par dame Cath-rine de Cleves 3 duchefle douairière de Guife, &c. „ ouï, fur ce, le procureur général qui „ 1'auroit requis, öc rout confidérc , la„ dite cour a ordonné & ordonnecommiilion d'icelle être délivrée a ladicte fuppliante adreffanre a deux conleil„ Iers d'icelle, pour informer du con,, renu en ladite requefte, circonftances „ & dépendances , pour Pinformation faicte , rapportée pardevers ladicte cour, & communiquée audiét procu„ reur général, ordonner ce que de raifon.Faiéten parlement, le dernier 5, jour de janvier 1589. Signé, Bou- „ CHF.R 15. La commiflion fut expédiée , le mefme jour , en ces termes: " Sur la requefte aujourd'hui préfen,, rée par dame Catherine de Cleves , &c. la cour, routes les chambres af- femblées , a commis , & commet „ Meilieurs Pierre Michon &C Jehan Courtin , confeillers en icelle , pour s, informer du contenu de ladicte re-;  48 Mariage „ quefte, circon(tances & dépendan„ ces , & fera 1'exécution du préfent j, arreft faite parvertu de 1'extrait d'ice„ luy. Fait en parlement, le dernier de „ janvier i 5 89 ». Le roi, de fon cofté , privé des membres qui compofoienrle véritable parlement, que les Seize avoient emprifonnés & difperfés , donna étant a Blois , commiilioir a quelques confeillers du grand-confeil, pour voir les informations qu'il avoit fait faire des attentats commis par les deux frères de Guife qu'il avoit punis de mort. La veuve du duc de Guife avoit interjetté appel de cette commillion 3 & 1'avpit porté devant le prétendu parlement. Cet appel fut recu par Paóte fuivanr : » Veu par la cour , toutes les cham- bres affemblées , la requefte préfen5, tée a elle par dame Catherine de Clè„ ves, &c..contenant que , fur une aul3, tre requefte préfentée a elle, &c. „ ouy fur ce le procureur général, & „ tout confidéré , ladiéte cour a recu „ & rec/jit ladiéte de CUvcs appellante „ de 1'ocFroy de ladite commillion , exécution d'icelle , & de tout ce qui „ s'en eft enfuivi & pourroit s'enfui?) vre ; ordonne commillion d'icelle cour  du Duc de Guife. 49 j, conr luy eflre dclivréee , pour faire „ intimer en icetle tous ceulx cju'ii ap,, partieudra, fur ledict appel , & ce„ pendant fair inhibitions cV deffenfes, „ paniculierement aux coitimilTaifës & „ tous aultres , de palier oultre , ny „ entrtprendre aucune cotirr, ny jurifdiction ou coguoiifance du faiéfc „ contenu en ladide requefte , circönf5, tances Sc dtfpendances, fur peine de „ nullité des procédures. Ordonne , en „ oulrre ladicte cour, que tous exploids qui feront faids en général, a cry „ public aux prochains lieux de leur accès, vaudront Sc feront de tel ef3, fed , que s'ils étoient faids aux perfonnes ou domiciles de ceulx contre „ lefquels il fera befoin d'exploider. s> Fait en parlement 3 le premier jour „ de février 1585). Ainfi Jignc , Du- ,j TILLET ». II eft certain que, lï le parlement de Paris eüt été coupable de ces ades régicides, c'eft avec raifon que le titre de défenfeur & de vengeur de 1'autofité légitime des rois lui auroit été contefté par 1'auteur d'une prcr^nriue hiftoire du parlement qui fut répandue furtivement , il y a quelques années. Mais tous les monument/Iiiftoriques Tome Xir. G  ^ o Mariage récIamenE contre la calornnieufe infidélité de eet écrivain , qui, de tous les faits dont il aparlé , ri'a pas craint d'en faire autant de romans adaptés a fes yues , & aux opinions qu'il vouloit infinuer. Qu'ii me foit permis de m'arrêter quelques moments fur celui - ci , & d'indiquer au moins une partie des fourcesoüPon pourrapuifer, fur eet objer , la juftification de eet illuftre corps, contre les inculpations de eet auteur infidèle , qui fans ceiFe a fait de vains efforts pour ternir la gloire de cette compagnie. Ecoutons Dupleix , en fon hiftoire de France, tome 4 , p. zo : » Aucunes jj des cours de parlement, dit-il, qui v ne pouvoient agir décenament par w les armes , donnèrent de foudroyants jj arrèrs, les unes d'une part, & les au» tres de 1'aurre, ou felon que la pafj» fion les emportoit, ou forcées par la jj violencedes peuples mutincs, qui les w obliseoienr, parlacruautédelamort, w & défelation de leurs families a dém cerner plufiears chofes contre leur vo» lonré , devoir & coafcience. Celle jj de Paris étoit féparée en trois , dont » la plus grande partie demeura dans la * mème viile, ou par néceffité, ou par  du Duc de Guife. » zèle envers la religion catholique. n Une aurre partie fe retira a Tours dès » le règne de Henry III, afin de fe j> décharger des infolences commifes «» par les Parifiens, après la morr du » duc de Guife. La troifième fe logea X » Chalons en Champagne. Une dangereufe trahifon découj> verte a Tours , aucuns des complices « furent pris & exécutés a mort , &C >■> même un nommé Marry , lequel j »> fut écartelé. 11 y eut des gens d'églife m qui furent accufés, & le procés leur 3> fur fait , comme criminels de lèze»3 majefté, non-obftant que, pour dé»> cliner la jurifdicrion du parlement, *s ils alléguaffent leurs privilèges. )3 Les Parifiens murmureren! gran» dement contre cette procédure , 5c » le parlemenr de Paris, pour donner 33 quelque fatisfaóHon a ce peuple ef-. » faré,caffa &annullalesarrêts donnés •3 a Tours , fit défenfes, a groftes pei>» nes, a tous juges , de faire aucunes »» procédures contre les perfonnes ca33 tholiques , a raifon de Punion ; 8c » cependanr, ilfaifoit le proces a tous »3 ceux qui étoient tant feulement foup*• connés d'être ferviteurs du roi, fous »»le nom de poluiques, Cij  j 2 Manage » Et enfuite de cec arrêt , Ie confeil » de la même ville fit une ordonnance j> aui contenoit une déclaration , ou „ piutot menace aux juges qui étoieut J3 a Tours , de rraiter leurs femmes , enfants ou parents qui étoient dans } Paris, avec la même rigueur, dont ils uferoient envers les catholiques , » èc leur envoyèrenr fignifier par un » trompette, qui fut retenu. Et le par»j lement de Tours , en mépris de leurs » menaces , donna un arrêt général , » par lequel il déelara criminels de » lèze-majefté , ceux qui étoient rebelm les au roi, fous le titre d'union , ou jj ligue Après la mort de Henry III, un certain Bourgouin , prieur des Jacobins de Paris , fut pris par les troupes du roi dans un aiTaut qu'elles livrèrent du coté du faux bourg Saint-Jacques, ayant une pertuifane a la main , & commandant un parti des ailiégés. U fur mis en prifon aux chartreux , & de - la. transféré z Tours , oü il fut, par arrêt du parlement , riré a quatre chevaux. Le même tribunal, par arrêt du 7 aoüt 1 ? 90, fit brüler , par la main du bourreau, une bulle de Gregorie XIV, datée du premier mars 159X3 dans la«  du Duc de Guife. 5 3 quelle il qualifioit le roi defauteur d'kéréïiques, enjoignoit a tous ceux qui étoient attachés a fon parti, de Pabartdonner , & de procéder a 1'éleótiou d'un autre roi. Le même arrêt déclaroir ce pape ennemi de la paix de Péglife , & fauteur des rebelles , & ordonna que Marceime Landriane , nonce qui avoit apporté ces bulles , feroit pris au corps, pour lui être fon procés faic & parfait. Ces autorités & ces faits fuffifent pour réfuter I'imputation faite au parlement de Paris d'avoir procédé contre fon roi, & de s'être , par fes arrêts , rendu coupable du crime de lèze-majefté ; crime dont il pourfuivoit les auteurs avec toute la fermeté& la rigueur qu'il exige. Ne confondons plus jamais lacliquedes ligueurs qui forma,a Paris, le tribunal horrible qui ufurpa la qualité de parlement, avec cette compagnie augufte qui fe retira a. Tours, & y exerca 1'aurorité qui lui étoit confiée , pour le maintien de la couronne fur la tere de celui a qui elle appartenoit, Sc la punition de Pufurpateur qui vouloit y porter une main facrilège. La portion du parlement qui s'étoit retirée a Chalons ne fignala pas moins C iij  54 Mariage fon attachement pour les droits facrés de la royauté , 5c la fucceffion légitime de la couronne. Les glorieux monuments de fon zèle font confignés dans le recueil des preuves des libertés de 1'eglilegallicane (i). Cependant le duc de May enne zpv At a Lyon la mort du duc & du eardinal de Guife fes oncles. II paiTa aufTi tót en Bourgogne , dont ü étoit gouverneur , y alTembla des tronpes , & marcha vers Paris. II fut recu a. Troyes avec les mêmes honneurs , que s'il eüt été roi: & ag'.t efrectivement en fouverain. II envoya des commiilions a ceux qu'il vouloit étabür commandants dans les provinces , 5c fit fon entree dans la capitale le n février 1589. Sa préfence y caüfa une ioie excefrfive ; on alla jufqu'a expofer fon tableau avec une couronne fermé-e , & on lui dreffa un tróne royal. Mais il cut la prudencederefuferd'y monter. (1) Voyez, entr'autres, chap. IV , art. 2.8 , & fur-tout 1'art. 33 du même chapitre , & plufieurs autres articles épars dans ce recueil, qui prouvent combien eet écrivain connoit peu les vrais monuments de notre'hifloire, ou combien il eft de mauvaife foi.  du Duc de Guife. ff II fe contenta de dominer dans le confeil de la ligue, d'y faire paiTer, malgre les Seize , tout ce qu'il vouloit, & d'y exercer une autorité prefqu'égale a la puiffance royale. La première chofe qu'il fit, tut de fe faire donner , jufqu'a la tenue des états qui devoient s'aflembler pour 16leétion d'un roi , la qualité de Lieutenant - général > ( non pas du roi, car la ligue n'en reconnoifloir plus) ; mais de ïétat & couronne de France 11 prêta ferment de cette bizarre dignité , le i 3 mars , i la troupe qui fe qualihoit parlement , & qui véritia fes lettres f ellees du nouveau fceau que 1'on fabnqua au lieu de celui du roi , qui fut rompu. Et, pour commeiicer fa charge par un acte de fouverain , il fit de nouvelles loix , rédi^ées en 21 articles , dont le but étoit d'unir, fous une même ferme de gouvernemenr, toutes les villes qui étoient entrées dans la ligue , & celles qui devoient y enrrer par ia firite. Vöict un acte de fon aurorité qui ma paroir curieux. Barnahe Briffon, avocat, parut avec éclat au parlement de Paris. Henry III, charmé de fon érudition & de fon éloquence , le fit avocat-général, puis confeiller d'état, 8c enfin préfidenc r Civ  5 6 Manage a mortier en 1580. II 1'employa en pluheurs négociations , & 1'envoya ambalTadeur en Angleterre. Ce prince le chargea de rédiger le recueil de fes propres ordonnances & celles de fes prédé«efleurs : c'eft le recueil connu fous Ie litre de Code Henry. On a encore de lui quelques autres ouvrages de droit, comme , De verborum qu<& ad jus pertintnt 3 figuificatione. De formulis & folemnibus populi Romani verbis. De regio Perfarum principatu, &c. Mais la gloire qu'il auroit pu acquéjir par les qualités de fon efprit , fut bien rernie par les vices de fon cceur. Ii poiüïa Pingratirude, contre fon fouyexain & fon bienfaiteur , jufqu a ambilionner & obtenir Ia place de premier prefident du parlement ligueur y en ibrte que ce fut fous fes aufpices que fut faite , contre le roi, la procédure dont je viens de rendre compte. L'ambition qu'avoit eue ce préfident , dit M. de Thou , de fe voir a la tête du parlement, dont il n'étoit que fecond prefident j 1'avoit porté a contrefaire le ligueur, & a refter a Paris , oü , pour fe rendre agréable , il rendoit & prononcoit tous les jours des arrêrs de mort contre les bons ferviteurs du roi,  du Duc de Guife. $7 & contre ceux que Ton appelloit volui' qucs. Mais il paroit que I'ambition n'étoit pas la feule paflion qui eüt dirigé les demarches crimiueües de Br .jp. nS caÜger, après avoir exalté fon puilfant .fcavoir , ajoute qu'il étoit riche , & avoic beaucoup gagné par fes injuftices. Brif fonius , dit il euccre in Juo munerc capiebat utrdqtie mann. Quelque livré que fut l'efpèce de tribunal préfidé par Briffon , aux impreffions clela ligue, 5c fur-tout a la facïiorï» des Seize, il renvoya cependaut abfous. un nommé Brigard, qui avoit été dénoncé comme favorifantle parti du roi». Les Seize , pour s'en venger , firent arrêter Lanher, confeiller au parlement, Tardif, confeiller au chatelet, 5c BrifJon. lis furent pris le 15 novembre 1591 , a. 9 heures du matin , confeflesa dix , 5c pentlus fur le champ 1 une= poutre de la chambre du confeil des. chatelet. Le lendemain , leurs corps furent expofés attachés a des potences en place de grève. lis furent jugés par Crome, confeiller au grand - conteil qui conduilitj lui-même les cadavres en grève. Le corps de Briffon fut in— iiumi. aSainte-Croixde la.Bretonnerig> C w  5 8 Mariage On fitcourir , dans le tems, une épitaphe , qui commencoit ainii : Barnaba Brijfonii praftdis maximi exangue cadaver kic repofitum efl , qui , dum vixit , pecuniam cruce jlgnatam adamavic , cruci affixus eft , & d cruce{i) cacerisque cruenta pietate ferventibus in tsde crucis fepuhus eft. Cette expédition affeéta vivement le prétendu parlement d'alors ; il crut tout le corps outragé dans la perfonne de fon chef, 8c cefïa fes féances. Le duc de Mayenne , qui étoit alors hors de Paris , y accourut, pour appaifer une düTention qui auroir pu devenir fatale a la ligue. 11 commenca par faire pendre, dans le louvre même, les nommés Louckard, Ametine, Aurcux, 8c Emmonot, qui étoient, d'entre les Seize , les quatre qui avoient le plus contribué a la mort de Briffon j 8c le i décembre 3 5 91 , il fe rendit au parlement, ou il fit rédiger les aotes fuivants» Extrait des Regiftres du Parlement. * Ce jour, le fieur duc de Mayenne'? » lieuteuant-général de ïétat roy al & (ï) Un nommé Lacroix étoit un des plus ^urieux de la faftion des Seize.  du Duc de Guife. J 9 » ccuronne de France , les chambres af» femblées, Sc les gens du roi préfens » (1) , après avoir remonftré a la cour » lescaufes qui l'avoient fairacheminer * en cefte ville , Sc laiiTer une grofle *> armée, &que , depuisle quatorzième è joar du mois paffe , la dide cour n'ef» roit entrée , Sc que a préfent n'y » ayant aucun prefident, luy avoit fem» blé nécetfaire d'en venir communi» quer Sc advifer avec elle , pour y » en remettre jufqu'a quatre, afin que » cette grand'chambre , Sc celle de la » tournelle ne demeurent fans chefs * » Sc qif'a ceulx qui font efleas , il en » falfe expédier les provifions , n'ayant >» voulu entreprendre d'en nummer s> aucuns de fa part, ains le tout remis » a la dicte cour. Sur ce ayant inter» pellé plufieurs fois la cour de les noin» mer, Sc les gens du roi ouys, aprez » qu'il luya efté remonftré par M. Ma» thieu Chartier, doyen Sc plus ancien » confeiller , que advenant vacatiorj » defdidts eftats , la cour avoit accoufs? tumée d'en nomrser aucuns au roy, « dont il choifiiToit 1'un ou deux qui » en eftoient pourveusj maïs qua préV fe) II y avoit donc eneore- ara RoL  60 Meriage *> feilt riy ayant aucun roy , & veu » 1'eftat de la ville, ycelie cour s'en jj re met rok 1 luy , 8c le prioit d'en 33 vouloir nommer : & enfin', aprezplu» fieurs excufes , a dit , puifqu il plaia» foir a la dicte cour, Sc. fuivant la 3» prière qui avoir efté faicte le matiu a Dieu , & a fon Sainct-Efprk, que »> cefte affaire fe conduifit en toute fin.5» cérité , il fe réfolvoit de nommer pour » premier préfident, le fieur Chartierx 3> plus ancien confeiller déjanomraé par « Ia cour pour préfident en ycellejles » vertus, in tégritez Sc fuffifance duquel jj eftoient très-noroires a un ehafcun , j> Sc pour fecond le fieur Hacqueville » préfident au grahd-confeil , le riers ^ » Te fleur Nully , premier préfidenr en » la cour des aydes , Sc devant pour.»» veu de rundefdicts eftats; Sc pour le 33 quatriefme , le fieur le Maifire y ad33 vocat du roy ,, n'ayant jamais veu , 33 qu'il fcache , lefdicts fieurs Charüer 3> Sc /e Maifire y ou bien tels aultres que 33 lacouradvifera Laquelle nomination 3> approuvée par ladicte cour ,,la matière « mife en délibération, Sc non-obftant » les excufes uC remontrances dudict 3> fieur Chartier de fon aage de 7^ » aas 3 iudifpofition notoire de fa per-  du Duc de Guife. 61 » fonne , 5c qu'il eftoit nonvellemene » relevé Sc forti d'une groife maiadie , » &c que eet aage defiroit pluftoft du » repos , que le rravail requis en un tel » eftat, a efté arrefté qu'il feroit lefer» ment de premier préfident en ladicte » cour. A tam a palïé au barreau , Sc , » anres avoir jwré que, pour y parve» uit, il na bailléne promis de donner » par luy ou par d'autres , or, argent, » ne chofescquipollent.es, en oulnede » bien Sc duement exercer lediét eftac « &c office de premier préfident , il y » a efté recea , &c fait profeffion de fa « foy ez 'mains de maiftre Fftiennt ». fkuiy , plus ancien confeiller. FaicT; « en parlement le fecond jour de dé» cembre 15 9 i. Coilation faiéte.5i^e', » D U TlLLEI.. Forme des proviftons , en confequence d$L'anct cy-dejfus. » Charles de Lorraine , duc dem Mayenne, lieut<-i,<.nt-get.éral de 1'eftat » & (.ouronne de >r;<;r ont gouvemé ies eftats, 6c ce qui les  ^ _ Mariage „ a fait plus eftimer par les penples „ qui leur ont eité foumis , & admirer » par les eftrangers, a efté quaad ils „ ont eu foing de reiever Sc maintenir >, les deux colomnes fur lefquelles eft „ fondée la confervation de toutes les „ monarchies , la piété Sc la juftice. C'elt-pourquoy, depuis qu'il a pleu a 5J D.eu nous appelier a iadirecrion des » artalres^ de ce royaume, aprez avoir regardé le mieux qu'il nous a eftc « poilible aux réglements Sc provilions „ neceiTaires pour avancer la gloire de „ Dieu, noftre principale intenrion a 3, efté de remplir les places des princi„ paux officiers de la juftice de per„ fonnes de probiré , Sc de vie Sc in„ tegnte de mceurseonvenables au rang que nous avons defiré leur faire tenir. Et, fur ce qu'ii nousa efté remonftré, „ & avons recogneu qu'il eftoit trezj, neceiïaire de nourvoir aux eftats Sc „ offices des préhients de la cour de „ parlement de Paris , afin que , par „ faure d'iceulx, Ie cours de la juftice „ ne foit intermis & interrompa , „ comme i! a efté depuis que'que tems; „ ayant réfclu d'y en mettre Sc èfb'blir „ jufqu'au nombre de quatre , afin qae „ taut la gxand'criambre du piaidjyer,  du Duc de. Guife. 63 33 que la tournelle ne demeurent fans 3, chefs ; fgavoir faifons qu'après avoir ce jourd'huy communiqué a Mef» fieurs de ladiéte cour , les chambres aflemblées , nos defirs Sc intentions , >3 Sc nommé les quatre perfonnes que „ nous avons eftimé propres , dignes „ & capables de ces charges, lefquelles „ ils auroient eu très-agréables, comme „ il appert par 1'acte Sc arreft de cedicl. „ jour cy attaché fous le contre - fcel, „ nous, confidérants les bons Sc agréa„ bles fervices que Meffire , &c. Car „ ainfi le defirons. En tefmoing de 3, quoy , nous avons fait mertre le fcel „ du royaume de France. Donné a Paris „ le i décembre 15 yi.Signé, Charles „ de Lorraine , Sc fur le reply , par Menfeigneur , Pericard ». Ces acles ne furent pas les feuls paE lefquels le duc de Mayenne exerca les fonétions de ia royauré. 11 convoqua les états du royaume , Sc les fit tenir a Paris, en 1593 "• il créa un awirsu Sc quatre maréchaux de France 11 déclara aux érats que 1'on n'étoit affemblé que pour procéder a 1'élecFion d'un roi qui fut catholique. Mais , quand il vit que le choix ne toinberoit pas fur lui,, paree qu'il étoit marié , Sc qu'on vour  Mariage loit élïre un roi qui put époufer llnfante d'Efpagne , il détourna adroirement cette entreprife, Sc tous les mémoires du tems atreftent qu'il ne fut occupé que du foiii de 1'éluder. 11 craiguoit que le choix ne tombat fur Je auc de Guife [on neveu. « Faites plutót » la paix avec le roi , lui difoit Fa » femme , que de reconnoitre pour vo» tre inaitre &: pour votre roi , ce petït n< garcon ». UFe flattoit qu'en temporifant, ii feroit enfin tomber le choix fur lui-même , ou au moins fur fon fils. Charles de Lorraine , duc de Guife > fils ainé de Henry „ duc de Guife., fut Fait prilonnier, le jour que fon père Sc. fon oncle furent tués a Blois , Sc enfermé au chateau de Tours., d'ou il ie fauva au mois d'aout i 59.1. La ligue en fit des feux de jo.ye par-tout,Sc le pape en rend r graces publiquement a Dieu. II fe lia très-étroirement avec la faction des Seize. Mais la jaloufie de fon oncle , qui commenca par abailTer Sc détruire cette faction , rarrêta dans fa courfe -y Sc il y a lieu de penFer que ce fameux arrêt du 28- juin . 593, qui ordonna le maintien de La loi falique:,. fut 1'ouvrage du duc de Mayenne \ oit que , du moins, il fit infinuer.cette dé?»-  du Duc de Guife. t 6% marche au parlement ligueur qtn n'auroit ofé hafarder un aéte aufli deciift, ,-i * a ' ' .flr;,ii j',o,ncp one le orc- S il n eut eteaiiuit u.av«"».~ -i~ i tendu lieutenant-général du royaume ne 1'improuveroit pas. Les membres de certe compagnie n'avoient pas encore oublié que la mort la plus cruelle & a plus ignominieufe étoit le pnx de Ia refiftance aux volonrés de la ligue Sc de fon chef. Ce qui femble réahfer cette conjeóture, Sc dohner lieu de croire que le duc de Mayenne étoit l'mftigateur iecret de eet arrêt , c'eft que eet arret même lui confirme 1'autorité qu'il avoit ufurpée , en fa qualité de lieutenantgénéral de la couronne , qu'il fut ren du en 1'abfence des pairs ligueurs , qum'y auroient pas confenti , que le droit de Henry IFek toujours écarté , fous pre* rexte de la religion qu'il profefioit , qu'il eft tel en un mot que ie;.vrai parlement , qui étoit alors, foit a Tours » foit a. Chalons , fe feroit bien garde d'adopter & de revêtir de fon autorite un acte auffi attentatoire aux droits Sc au pouvoit légitime de celui que la lol appelloit au tróne. Enfin 1'on va voir que le duc de Guife fe contenra d'en paroitre publiquement mécontent, fans en témoi?ner de reflentiment, Sc que ,  6& Mariage dansles plaintes qu'il en fit, il „e paria nullement des principes qui fervoient debafeumquea ialigue, donc il étoit ie ener, & qui feijIe foutenoit me monftmeufe dont il étoit revêtu. Mais il ne fit aucune démarche, ni pour 1 aneantir, ni pourle fairerévoquer.'ll le regarda, au contraire, comme un acheminement au but qu'il fe propofolt, qui etoitd ecartef de la couronne , fon neveu Sc 1 Infante, & de prévenir le defir des Efpagnols , qui afpiroient faire ebre arcmduc Erncfl ,& de le marier avec 1 Infante. . Le voici eet arrêt: « Sur !a remonf„ trance cy-devant faicte par Ie procureur du roy , & la matière mife en „ dehberation , la cour , toiues les „ chambresaffemblées, n'ayant, comme „ elle n a jamais eu , autre intention „ que de maintenir la religion carhoi, hque , apoftolique Sc romaine en „ 1 eftac & couronne de France fous la „ protecFion d'un roi très-chreltien „ cathoüque & Francois , a ordonné \ „ Sc ordonne que remonflrances feront v fakes ceite après-dinée par Monfieur „ le prefident le Maifire, affilté d'un „ bon nombre de confeillers de ladiéte » cour, a Monfieur de Mayenne, lieute-  du duc de Guife. 67 ,', nant-général de 1'eftat & couronne de „ France , en la préfence des princes „ Sc officiers de la couronne , eftant de „ préfent encefte ville, a ce que aucun „ traicle' ne fe face , pour transférer la ,, couronne en la main de prince ouprin„ ceffe étrangers; que les loix fonda„ menrales de ce royaume foient gar„ dées, & lesarrefts donnez par ladicte „ cour , pour la décUration d'un roi ca„ tholique& Francois foyent exécutez ; „ Sc qu'il ah a. empleyer l'aucloritc qui „ luy eft commife , pour empefcher que, „ fous le prétexte de la religion , la „ couronne ne foit transféréz en main „ eftrangère, contre les loix du royau„ me , Sc pourveoir le plus prompte„ ment que faire fe pourra au^ repos „ du peuple , pour Pextrême néceffité „ en laquelle il eft réduit; Sc néantmoins, dez-a-préfent, a déclaré Sc „ déclare tous traiótez faicts , Sc qui fe „ feront cy-aprez pour 1'eftabliiFement „ d'un prince ou pnnceffe evangere , „ nuls Sc de nul effecF Sc valeur, comme „ faicFs au préjudice de la loy falyque , Sc autres loix foudamentales du „ royaume de France- FaicF a Paris, le „ vingt - huitieme juin mil cinq cent nonante-trois ».  £8 Manage II ne faut que lire eer arrêt, peur voir , au premier coup d'ceil, que c'eft faire injureau parlement, que de vouloir Tenger en un trophée de la fidélicé Só-de 1'attachement de ce corps augufte peur Ia loi de la fucceffion a la couronne , & pour la perfonne de nos rois. Le parlement auroit-il imploré Pautorité d'un lieutenant-général de Pétat & couronne de France, tandis que certe couronne repofoit fur la tête de Phéririer légitime , apellé par la loi ? Et, au Iieu d'inviter eet ufurpateur a empëcher tous traités qui auroient établi uu roi étranger, n'auroit-il pas déclaré nettement, qu'il en exiftoit un actuellement revêm de cette dignité & de tous fes acceftoires ? Mais on élude cette déclaration , on exciut même direcFement Henri IV y qui profeiFoit encore alors la religion proteftante , en difant qu'on ne veuc qu'un roi catholique. Au furplus , on n'éloigne que les princes ou princeiFes étrangers , c'eft-a-dire , nés en pays étrangers , & iifus de families étrangères. Ainfi les Guife, ÜTus du fang de Lorraine, établis en France depuis long tems , qui fe prérendoient d'ailleurs ifFus de la feconde race de nos  du Duc de Guife. 69 rois, n'étoient pas exclus par eet arrêt. Et, pour peu que 1'on fade attention a. la lettre de ce prétendu arrêt, aux circonftances Sc aux intéréts de ceux qui étoient a la tète des affaires , on voit clairement que 1'exclufion qui eft prononcée n'a pour but unique , que d'écarter 1'archiduc Emeji. La loi falique eft rappellée, il eft vrai, mais c'eft feulement en ce qu'elle refufela couronne aux femmes. Or 1'Infante d'Efpagne prétendoit y venir de fon chef, étant née ÜEli-abeth, fille de Henry iI, & femme de Phihppe II, roi d'Efpagne. Ainfi , abftraction faire de fon fexe, & en fuivant 1'ordre ordinaire des fucceflions, elle étoit appellée au préjudice de la maifon de Bourbon. 11 eft donc clair que 1'on ne fair Li valoir cette loi, que paree que 1'infante n'auroit pu épouferle duc de Mayenne , qui étoit marié , &c qui vouloir que i'élecFion tombat direcFement fur lui. Il prétendoit avoir, par lui-même, routes les qualités requifes. II étoit cathol/quej il n'étoit point étranger, & defcendoit, difoit-il, d'une race royale de France. Les magiftrats qui s'étoient rerirés a Tours Sc i Chalons . paroiftoient - ils craindre que quelque traité ne transfé-,  7p Mariage rat Ia couronne en main étrangère ? H falloit, pour avoir cette crainte0, la regarder comme vacante , & tous les acres émanés de ces deux clalTes du véritable parlement annoncent qu'elles regardoient le tróne comme occupé par Henry IV, dès 1'inftant de la mort de Henri Hl. Ainfi ils ne prévoyoient pas qu'aucun traité , aucune délibérarion put arracher une propriété que Ia loi fondamentale de 1'état avoit placée dans la main du véritable propriétaire. On voir,au contraire que les ligueurs , qui avoient rédieék pretendu arrêt que 1'on vient de lire, excluoient nommément Henri IV, en ne voulant reconnoitre qu'un roi cathoüquc. Maïs voyons comment le duc de Mayenne prit eet arrêt. Les mémoires de la hgue, tome i , page 35,8 , nous 1 apprennent. « Monfieur de Belin , y eft-il dit 3 >, alla le matin au palais, & dit a Mona, fieur le préfident le Maifire que Mou3, fieur de Mayenne avoit grande affec3, rion de parler a luy , mais qu'il vous, loit que cela ne vinft point de luy , 9j ains dudid- fieur de Belin; & le pria d'y vouloir aller incontinent aprez », Ie difiic au logis, de Monfieur de  du Duc de Guife. 71 'j, Lyon (1) oü ledict fieur Je Mayenne 3, avoit difné , accompagné de deux des confeillers de la cour, tels qu'il „ les voudroit clioifir. Ce que lediót 3, fieur préfident fit, ayant pris , pour ,, 1'accomp.igner, Meffieurs de Heuri „ & d'AiKouts. Eflant arrivez , trouvè„ rent lediét fieur de Mayenne avec Mellieürs de Lyon & de Rofne. ,, Ledicl fieur le Maifire dir que , le „ matin , lediét fieur Bdin eftoit venn au parlement, oc luy avoit dit que „ lediét fieur duc defiroit de parler a j, luy , & qu'ils eftoient venus , pour „ fcavoir ce qu'il defiroir deulx. „ Alors fut refpondu par Monfieur j, de Mayenne que la cour lui avoit fait „ un grand rort & affront , & que y , „ veu le rang qu'il tient de lieutenant, „général de la couronne, ladicte cour „ avoit uie de bien peu de relpect en ,, fon endroiét , d'avoir donné fon ar„ reft lundy dernier ; & que , comme j, prince , & lieutenant-gé.néral de 1'efJ} tat Sc pair de France , on Pen devoit j j, advertir, comme auili les autres prin- „ ville, pour (fi bon leur euft femblé), (i) Pierre «.'Epinat, archevêque de Lyor*;  7-t Mariage „ s'y trouver , avec plufieurs propos Sj aigres de colère. 3> A quoi fut refpoiidu , par iedict „ fieur le Maifire , que , pour le refjj pedt & 1'honneur que la cour porte „ audiófc fieur duc j elle i'avoit adverty „ dez le vendredy précédent, de ce „ qui fe devoit traicier au parlement , 3, & que , fuivant fa prière , ils avoient re leur affembléé jufqu'au lundy j „ mais que n'ayant eu aucunes de ies „ nouvelles, la cour auroit trouvé bon jj de palier outre , comme elle a fait ; „ & que, s'il euft été préfent , il euft „ cogneu que la cour ne paria jamais des princes que avec autant dhon„ neur &de refpeét, comme elle avoit „ fait de luy , & que 1'intention de Ia 3, cour n'eftoit point de mefcontenter perfonne ; ains de faire juftice a 3, tous (i). Sur ce , Monfieur de Lyon prit la 3j parolle , & avec colère , remonftra j, que Ia cour avoit fait un grand af- (i) Le duc de Vayenne faifoit donc un sjienfonge , pour ne pas indifpcfer 1'archevêque de Lyon & !e fieur de Rcjhe. I! fcavoit donc que eet arrêt devoit fe rendre ; il y confentoit donc , puifqu'ü ne Fa pas empêché, » front  du Duc de Guife. 73 front audiótfieur duc, d'avoir donné un tel arreft , qui pourroit caufer une divifion entre nous , a 1'advantage de Fennemi (1). ,, Motiiieur le Maifire luy répliqua 3, foudain , 8c lui dit que Monfieur Ie „ duc de Mayenne avoit ulé de ee moe 3, êC affront \ qu'il avoit paifé fous iï„ lence pour 1'honneur & le refpecl que ,, la cour lui porte en général & particulier (2) ; mais que de luy , il ne ,j le pouvoit endurer , pour ce que la „ cour ne lui devoit aucun refpect , a, qu'au contraire, quec'eftoit luy qui le s, devoit a la cour ; que la cour n'eftoic s, point afFronteufe , ains compofée de 3, gens d'honneur & de vertu qui fai,, foientla juftice , 8c qu'une autre fois , 3, il pariaft de la cour avec plus d'hon„•neur, de refpeófc & de modeftie. 5, Monfieur de Mayenne dit qu'il ne (1) Cet ennemi ne pouvoit être , dans la touche des ligueurs , que Henri IV. Ce n'étoit donc pas pour lui aflurcr la couronne 'que 1'arrêt avoit été rendu. (2) Un parlement dont le corps en général , 8c les membres en particulier , portoient honneur & refpeft au duc de Mayenne, s'occupoii.il beaucoup du loin de confervea ïa couronne a Henri IV i Tornt XIVM D  74 Mariage *»trouvoit point cela tant eftrange de sa tout le corps de la cour , que d'aucuns s* particuliersck: des plusgrandsd'ycelle, 35 lefquels il avoit advantagez des plus 33 belles charges & dignitez. si Ledict fieur le Maifire luy fit »j refponfe que , s'il entendoit parler 33 de luy , a la vérité , il avoit recu i» beaucoup d'honneur de lui, eftant »? pourveu d'un eftat de préfident en 35 ycelle (i) ; mais néantmoins qu'il 53 s'eftoit toujours confervé la liberté 33 de parler franchement, & principa3« lement des chofes qui concernent s» 1'honneur de Dieu , la juftice , & le s» foulagement du peuple, n'ayant rap33 porté aucun fruit de eet eftat en fon 33 particulier , que de la peine & du sa travail beaucoup, lequel eftoit caufe » de la ruine de fa maifon, & que luy 35 eftoit expofé a la calomnie de tous S3 les méchants de la ville, (i) Sur quoi font fondés ces éloges du préfident L.e Maifire, que 1'on trouve dans plufieurs livres ? Commenta-ton pu exalter ion attachement pour les yraies maximes de i'état, lui qui avoue tenir fa place du duo de M,:ymne, & qui Fep remercie ; lui qui, comn e on vg. Je voïr par la fuite de la narration , ne parle de fon roi légitime, qu'en Jeqiiabfiant é'ennemi.  du Duc de Guife. » Le fieur de Mayenne dit qne cec » arrêt feroit caufe d'une fédition &£ a> divifiou du peuple , & qu'on les '» voyoit dcfia aileir.blez pat les nies a jj murmuret, mefme que , depuis deux j> jours j Venncmi eftant adverti de cec >j arreft , s'eftoit préfencé la nuiét pres n de cefte ville, pourvoir s'il pourroic w entreprendre quelque chofe. » A cela fut refpondu que , s'il y *> avoit quelqu'un qui fuft fi hardy que w de commencer une fédition , on en » advercift la cour , laquelle fcavoit 3j forr bien les moyens de chaftier les »j féditieux, öc qu'ils s'affeuroienr tartt *> du peuple , qu'il ne demandoit rien jj que le reftabuflement de la juftice. jj Quant aux ennemis, qu'il penfe que m ce foit faux donné a entendre par les » Efpagnols. jj M. de Lyon dit que , s'il advenoit « maintenant de traiéter Ia naix avec jj l'enneini, 1'honneur eftoit déféré a la »j cour , & non pas audiófc feigneur de n Mayenne. jj A quoi fut 'refpondu que la ccur »> eftoir aflez honorée d'elie - mefme , jj & qu'elle ne cherchoit point 1'hon» neur ni l'arabirion ; & prièrent ledict p feigneur duc , 6c les aultres, de leur; D ij  7 6 Manage «« dire s'U y avoit quelque chofe en 1'ar» reft qui ne fuft de juftice , Sc qui les w aic pu tant offenfer ? car , quant a s> eux, ils ne penfoieut point que -, » poar fouftenir les loix fondamens* tales de ce royaume , Sc pour main*> tenir la couronne a qui elle appar»> tient , & exclure les eftrangers qui ,* les veulent attraper , ils aient faiófc » autre chofe , que ce qu'ils devoient »> faire. Au contraire eet arreft peut » fervir pour reconcilier Sc réunir tous ,5 les bons catholiques francois a la » couronne ; Sc quant audict fieur » préfident , il fouffriroit plufiojl cent „fois la mo-t, que d'efire ni Efpagnol^ »» ni He're'tiqut (i). » Ledidt fieur de Rofne dit ï Monj> lieur de Mayenne que ledict fieur le » Maifire avoit dit, quand la cour fai» foit quelques remonftrances aux rois m ou aux princes, que ce n'eftoit par (i) L'arrêt dont le préfident le Maiflte fait ici 1'apologie avoit donc pour objet auffi-bien l'exclufion des Hérétiques , qua celle des Efpagnols. Et ce prétendu magiftrat auroit plutöt fouffert cent fois la mort , que de confentir a voir monter fur le tróne ■un Efpagnol, ou un Hérétique. U les met fur la même ügne, Et qu'étoit alcrs Henri IV}  'du Duc de Guife. 77 * néceffité , ains feulement quand elle s» trouvoit bon de ce faire. » LedidF fiear Ze itf«i/-V« dit quil „ confefToit 1'avoir dit , & le foufte„ noit, & qu'il ne pouvoit nen monl» trer en fa charge , de laquelle il s'ac» quittoit auffi bien que lui de la fienne. „ LedicF fieur de Mayenne dit que 3 * s'il eür efté adverty , & luy Sc les » princes s'y fuffent trouvez. » Fur refpondu que la cour eftoit la „ cour des pairs de France; que , quand „ ils y vouloient aflifter , ils eftoienc „ les bien venus; mais que de les en » prier , elle n'avoit accouftume de ce w faire»». Pour peu que 1'on falTe attention aux intéréts des interlocuteurs , on apt)ercoit facilement que la colère du duc de Mayenne étoit une colère feinte ^ Sc qu il étoit d'intelligence avec le préfident le Maifire ', pour tromper 1'archevêque de Lyon , qui favorifoit les Efpagnols. Mais 1'intrigue qui a donné naiffance a l'arrêt du 8 iuin 15 9 3 , eft dcveloppée dans un imprimé qui parut en 15 94 , fous le titre de Dialoguc d''entre le Maheuflrc{ i) & le Manant, concernant (1) On entendoit alors par Makeuftre , un D üj  7 8 Mariage les raifons de leurs débats & qutjtions fur ces préfens troubles du royaume de France. Qu'il me foit permis de copier encore le morceau qui concerne ce rrait d'hiftoire , & 1'on y verra la preuve completre que, loin que eet arrêt eüt été mfpiré par le defir de conferver la couronne au véritable héririer , il n'avoit pour but que de foutenir les prétentions du duc de Mayenne. « En voftre ville, dit le maheu/ïrezu » manant, une partie de vos prineefles , « voftre gouverneur, voftre prévoft des, » marchands, avec la cour de parlement & les plus grands de voftre ville , fa « font affidez par ènfemble , pour fa- « vorifer le duc de Mayenne a la cou»3.ronne. Aucuns eccléfiaftiques , & les » Seize ont efcrit au pape & au roi 3> d'Efpagne , pour favorifer i'eflecbion » d'un roy, qui ait alliance avecl'infante » d'Efpagne , & recommandent , par - leurs lettres , la maifon de Guyfe 33 Je fcai pour vérité, & ai ouy-dire si a beaucoup de grands perfonnages , officier , ou un foldat au fervice du roi Henri IV. Quelle en étoit 1'étimoiogie ? Les auteurs Font beaucoup cherchée, Sc n'en ont donné aucune fatisfaifante»  du Duc de Guife. 79 » qui ont embraffé le party du duc de » Mayenne , qu'ils fe rendront pluf» toft au roy , que de céder a. quel» qu'autre prince de Lorraine , qui vou» droir entreprendre au par-deffus de *> luy, pour le droict de la couronne, » comme prétendant ledict droict luy » eftre acquis : joint qu'ils y font en» gagez , ayant rec,eu une infinité de » bienfaicts du duc de Mayenne , 8c 33 advancez aux grades & dignitez dqnt i) ils fe veulent prévaloir ; & a cette » fin le faire monter au fceptre , s'ils 53 peuvent rj d'autant qu ils fcavent qu'ils j' feront repoulfez 8c rechaiiez , fi d'au»3 tres y viennent; & fur tous le préfi« dent Janin , Pdbault &c Baudouyn •3 des Portes; & font la logez jufques ï j3 la mort de 1'ame 8c du corps j3 Outre ce que le duc de Mayenne y »3 eft, de luy-mefme, fort difpofé; tef»3 moin 1'hiftoire de la nomination du 33 duc de Guyfe pour roy de France , 33 qui eft 1'hiftoire la plus tragique du 31 monde , a. ce que j'ay veu , f$eu 8c 33 cogneu , ayant efté envoyé exprez 33 pour confidérer ce qu'il s'y faifoit , 33 oü j'ay veu, a la fin du mois de juin 33 mil cinq cent nonante-trois , les Efv pagnols ayant re§eu advertiiFement D iy  So Mariage -» certain que le roy fe vouloir fairé 33 catholiqae, fuivant la réfohnion Sc 33 promefle qu'il en avoit faicFe a fa 5> noblelTe en la ville de Mante , le 25 33 jour de may mil cinq cent nonante33 trois. Et, après en avoir conféré avec 3» lelégat & leur confeil, confidérans 33 la conféquence de la converfion du » roy , Sc d'ailleurs 1'opiniaftreté des 3» eftats tenus a. Paris, qui ne vouloient » entendrea Pinfante d'Efpagne feule , 33 ni au duc Ernefl. Et, après avoir fait » tout ce qu'il leur eftoit poffible pour 33 Padvanrage de Pinfante Sc du duc 33 Ernefl , & voyant qu'ils n'y ga33 gnoient rien , au contraire que les, » affaires des catholiques s'en alloienc 33 terrafler , Sc les eftats rornpre; lors a s» tems préfïxe Sc nécelTaire , ils fe » tranfportent en 1'aiFemblée des eftat» » tenus au louvre , oü , après plufieurs 33 remonftrances faicFes pour gratifier 33 Pinfante Sc le duc Ernefl, enfin laf« chèrentle mot fecrer qu'ils avoient, jj qai eftoit d'accorder le mariage de » Pinfante avec un prince francois , y jj comprins la maifon de Lorraine , a »> la charge qu'ils feroient efleus Sc 3» déclarez , par lefdicFs eftats , roy Sc 3» royne de France in folidum. Et fut  au Duc de Guife. 81 | cette offre faiéte en pleins eftats, en „ la préfence du duc de Mayenne , des », ducs de Guyje , d' Aumalle & d'El» èceuf, en la préfence du légat, du „ eardinal de Pelltvé, & des prélats de „ leur fuite , qui en furent fort joyeux. p Et le iendemain fnrent depurez qua„ tre de chafcun ordre defdi&s eftats , „ pour communiquer avec lefdiits ef» pagnols en la préfence des princes 5c », prélats , en la maifon du légat; ,j Cette déclaration donna martel en jj tefte au duc de Mayenne , lequel , ,j nuiófc & jour , prenoit confeil de fes jj agents ce qu'il devoit faire contre jj cette déclaration pour la rendre inu» tile , paree qu'il avoit ouy le venc » qu'ils vouloient nommer le duc de »» Guyfe. ,j Enfin , le préfident Janïn , homrrie ,j advifé & fubtil, luy donna un con» feil de dilayer eet affaire , & cepen» dant amufer les Efpagnols fur la fuffi» fance ou infuffifance de leur pouvokj. jj lequel ( a ce qu'il penfoit) ne pourroit 3> eftre valable , eftimant qu'il ne poej> tok aucune nomination , & que , « n ayant pouvoirde nommer, pendant jj que le tems de la nomination Tienn droit y le duc de Mayenne donneross  Mariage «• ordre a fes affaires , envoyeroir ert «-Efpagne, a Rome, & auitres en~ droicts, pour gaigner le cueur ciesj»- potentats eftrangers , en fa faveur » ou de fon fils ; &c que par deca , il >>■ falioit brouiller les carc.es par- une. 33 trève avec le roi de Navarre > par, le. 33. moyen de laquelle toures chofes de» meureroienr en furféance.. 3> Ce confeil fut fuivi, & les dépef— »3 ches faiéres .de tous coflés en faveur, 33- du duc de Mayenne, par fes agents. 3* Defpones bz Eibault , avec le fieur, jb Belin gouverneur, qui fe chargea, 33 de la pourfuite de la treve. .. . » Pendant cette difpofition. , huidt » jours fe paftent fans alfembler les ef»-tats , ni fans communiquer enfem» ble , dont les Efapgnols fe. fafchent». » Enfin, le dixieme jour de juin , » les princes s'aflemhlent avec les dé— » putez des.eftats au logis du légat , oü. » il yarriva le eardinal Je Pelleve; Si li, » fur parlé de la nomination de la. » royauté Sc du pouvoir des agents. » du roy d'Efpagne , lefquels y eftoient » a fcavoir le duc de Feria, Jean-Bap-. » titte Jaxis , Dom Die,;o d'lvaro f » ambaffadeur , qui trouvèrent fort W eftrange de demander leurs pouvoir. y  du Duc de Guife. 83 » veu qu'ils les avoient cornmumquez. » A quoi fut refpondu par le duc de » Mayenne que les pouvoirs qu ils » avoient communiquez eftoient gene» raux , & non particuliers 111 fpeaaux » pour nommer un roy ; ce qui eftoit » nécelTaire , d'autant que d'accorder » une royauté fans nomination, c'eftoit wcréer un roy en idee. Tellement » qu'il eftoit néceffaire qu'ils euflent » pouvoir de le nommer, & » eftoit qu'il juroit , comme de faid 4 » jura en la préfence de toute la com» pagnie , qu'il feroit le premier qui 1® » recognoiftroit & y employeroit fa vie,, » fes biens & moyens ■ & que c'eftoit » tout ce qu'il defiroit, que de fcavoir » la volouté du roy catholique , pour y » obtempérer, fuivantla réiolution des » eftats , joincr. la volonté cie Sa S.unc» teté afiez déciarée par la bouche de » fon légar. » Ces paroles diótes , toute la com' » pagnie fut fort joyeufs , & pria les » Efpagnols de monftrer leurs pouvoirs y> particuliers , fi rant eftoit qu'ils euf» fent puiffance de nommer , & que » cela accéléreroir fort les affaires.: de » forte que 1 affemblée fut continué©: » au matdy enfuiYsrit, 15 Juin , au-r  84 Mariage » quel jour les Efpagnols monftrèrënt » leur pouvoir , en la préfence de la » meme compagnie, par lequel appa»> roifloit de la nominatie* du duc de » GuyJe avec -'infante d'Efpagne » Lorsle duc de ^««fetrouvant » trompe d'autant qu'if n'eftimoit » qu ils euflent un te! pouvoirs ni que » la volonté du roy'd'Efpagne fuft * telfe, que de fe fubmetrre a Felle no» mination, y engageant fa fille , fes "eftats & tous fes moyens. Car, en » regie d'eftat, cette ofFre ne pouvoit fe » faire. Par quoy toute 1'afTembIée ef» tonnes de joye , en rendit gr'aces i » Dieu ; mefme le duc «fc ^ytf/ww » en changeant de couleur, fift fem * »blant Jen eftre bien aife, & qu'il » ralloit, au furplus , advifer i le def» gager & récompenfer luy qL1i avoii: * porcé rout le faix & charge , & qui » avort defpenfé tout fon bien pour Ja » caufe; Sc, outre ce , engagé pius » qu il n avoit vaillant. >> Surce, Ia cempagnie advifa qu'il » eftoit raifonnable de 1'indemnifer Sc » afleurer, & Ie mainreuir en premier » rang prés du roy, & luy faire toas » les advantages qu'il feroit poïlïble , 9 ce 1U1 fuft promis Sc accordé par les  du Duc de Guife. 85 » Efpagnols: & a cette fin , le duc de » Mayenne promift bailler par eicript » ce qu'il demanderoit dedans deux a » trois jours. » Sur ce , la compagnie feretiraavec » une grande joye &: contentement, au » refte du duc de Mayenne j lequel ef» tant retiré en fa maifon, comraenca a » foufpireren la préfence de fa femme j » laqueile , ayant ouy ces nouvelles , » commenca a fe tormenter & plorer. » L'on envoya querir le préfident » Janin , pour advifer d'un remede » plus fubril que le premier dont ils » avoient efté trompez , & s'enfermè» rent le duc .ie Mayenne, le préfident » Janin , Defpctes &C Kibault, & li » réfolurent d'ufer de toutes les réfif» tances , tant par fine/fes , que de » faict , pour empefcher ce coup. » En premier lieu , l'on renfo-rca le » pour-parler de la trève, avec charge » donnée au fieur Belin de la conclure » fans en parler aux eftats , au légat & » aux Efpagnols , ni aultres ; & qu'ef» tant faiéte , il faudroit qu'ils y paf» fa (feut » Et i cefte fin le prévoft des mar-» »> chands fut envoyé querir , afin de l> fufciter tous ceulx qui eftoient difpo-  8(3 Mariage » fez a la paix avec le roy . . . afin de » pourfuivre a 1'ouvert la trève, & Ia. 33 detnander importuncment, 6c qu'ils j» n'euffent crainre de rien. 33 Le procureur général fut auffi enjj voyé querir , avec d'A'mours, confeil33 Ier, & le préfident le Maifire , afin 33 d'exciter la cour de parlemenr a em33 pefcher l'effect de cette nomination , 3* & donner arreft contraire a l'arrefté 33 des eftats , afin de faire force fur jj cefte contradiction. 33 Tous ces moyens furent exécutez \ » Ia trève accordée par le fieur de Belin , » & demandée par les politiques (i) , » afliftez du prévoft des marchands. 33 La cour de parlement donna un 33 arreft contre les eftats, par lequel elle 33 déclaroit nul tout ce qui feroit faict 33 par les eftats , pour transférer la cou» ronne a. un prince ou princefTe ef33 trangère; & au furplus monfieur le » duc de Mayenne prié d'employer fes33 forces, pour 1'empefcher. » Les autres princes, le légat, les ef.» tats généraux & les efpagnols, voyants (i) On nommoit ainfi ceux qui, quoiqu'armés contre le roi , fouhaitoientcegen^. dant que l'on fit la paix avec lui.  du Duc de Guife. 87 n. ces traids , font eftonnés,. fe raflem» Ment avec le duc dé Mayenne a la ». huidaine, pendant laquelle l'on n'af,x feroWa les eftats , & ne fit-on que 35 de parler d'accorder lesdemandes du 5». duc Je Mayenne , qu'il avoit baillées 33. par efcrit ... . ou fut mis en délibé3» racion, fcavoir li on ne devoit point Hpafler oultre a nomination du roi, >3 fuivant le pouvoir exbibé , & , au 33 contraire ,. refuit la rrève ,. comme 33 chofe pernicieufe a Ia religion , joint » que l'on avoit eu advertillement que 3* le roi de Navacre vouloit, par impor» tunité , & pour rompre 1'effect de 33 cette nomination, aller a la mefle , 33 pour , fur cette fidion , rompre les » eftats , desbaucher &c tromper les 33. catholiques.. ,3 Pour aquoi obvier , & pourfauven 33 la religion , tous les affiftants , hor33 mis L'archevêque de Lyon , furent »3 d'avis de la nomination du roy. » Q::oy voyant, Ie duc de Mayenne >. tout furieux fe leva, & , en jurant le » nom de Dieu , dit qu'il n'en feroit » rien fait , & qu'il mourroit pluftoft' » que ladide nomination fe fift; s'exj*cufant fur le défault de forces , pour « faire validet ladide nomination-  88 Mariale. » Mais ce n'eftoic pas Pencloueure: »car,fi les Efpagnols'PemTent nom» mé, ou fon fils, ils n'euflenr point « trouvé de difficultez. Mais voyant » qu'il en eftoit privé , il inventa cette » excufe, contre laquelle on lui avoit « montré des moyens fuffifants pour y » renaédier , mefmes offert pour fon » particulier tout ce qu'il pouvoit fouj> haiter. » Et quand il veit qu'on Pindemni» foit du tout lors , il dir qu'il ne vou» loit plus parler de fon particulier , » mais du général, qui eftoit d'affeurer » le royaume j mefmement la ville de » Paris, &c qu^avant que de parler de la » royauté , il falloit avoir des armées » pour la maintenir. Et fur ces rodomontades du duc 33 de Mayenne , la compagnie fe retire; 33 &, malgré la plus grande partie des »3 eftats , malgré les princes , non-obf33 tant 1'oppofition du légat, ni les re33 monftrances des catholiques & des 3» proteftations afifichées par les carre33 fours de la part des catholiques , le m duc de Mayenne y avec fes agents » par chevent de conclurre Ia paix. 33 Le roy de Navarre va a la raefte 33 te^zj Juilletfuivant, la trève publiée  du Duc de Guife. »» a Paris le premier aoüt , les dépu,» tez des eftats licenciez, mefme ceux » de Bourgogne , agents du duc de >j Mayenne, 5cc ». Telles font les circonftances , tels font les motifs,teleft 1'efprit de cecélèbrearrêt du 28 juin 15 93.Tout annonce donc que, loin d'avoir pourbafe laconfervation de la couronne au véritable hé* ritier, il netendoitqu'a enexclure tous les rivaux du duc de Mayenne , au Hett que celui qui fut rendu a Tours le 7 aoat 1590, frappoit aplomb tous ceux qui vouloient porter atteinte aux droits de Henry IV. C'eft donc celui ci qu'il faut mettre au nombre de ceux qui caractérifent 1'attachement inviolable du parlement de Paris pour la perfonne des rois , 5c pour les droits facrés de Ia couronne. L'aurre, au contraire , eft un monument de la rebellion criminelle de laclique qui ufurpa, a Paris , le nom de parlement, & qui caftbit tout ce que le vrai parlement faifoit pour le fervice du roi 5c le maintien de fes droirs. Enfin Paris ouvrit fes portes au roi le 22 mars 1594- Pierre Pithou , St Antoine Loyfel furent chargés de déchirer des regiftres du parlement tout ee que les ligueurs y avoient infcrit  9° Mariage d'injurieux tant pour la mémoire du feu roi, que contre Henri IV; & parretdu2 8 juin I$9, fut enveloppé dans la profcnption. II nefe trouve plus que dans ies écrits du tems. Cette efpece de purification faire , le parlement , ayant a fa tête Achilles de Harlay , quitta Tours , & revint prendre fa place ï Paris. Quant au duc de Mayenne , après avoir fervi dans les armées efpagnoles contre la France , il fit enfin fa paix avec le roi au mois de janvier i $96, dans le chateau de Folembrai dans la forèt de Couci. II mourutle 3 ocFobre 1611 : apres avoir vécu dans une grande innmité avec Henri 1Fa depuis leur reconciliation. Le duc de Guife , neveu du duc de Mayenne , fit fa paix avec le roi dès 1 694 , & obtint le gouvernement de Provence-Le roi vouloir 1'oppoferau duc d'Epcrnon, qui bravoit fon fouverain , &cherchoit afe rendre maitre de cette province. Mais étoit-i! prudent de conner ce gouvernement a un prince donc la maifon avoit une vieille & rance prétention , comme difoit le eardinal d'Offn fur cette province ? Auffi le chanceher de CAewvKprotefta^n plein coa-  du Duc de Guife.

, ces confidérations , forc;a le duc de Guife de fortir de France. U fe rerira a. I Florence , Sc mourut a Cana , dans le Siéuois , le 3 feptembre 1640. 11 avoit époufé en ï6ii , BenrietteCatherine de Joyeufe , fille unique de Bend de Joyeufe , maréchal de France , ! Sc veuve de Henri de Bourbon , duc de ' Montpenfier. Entr'autres enfants , il eut Henri de Lorraine , duc de Guife , dont le mariage  5? 2. Mariage a occafiomié le procés dont j'ai k rendre compte. II naquit Ie 4 avril 1514. II étoit bien fait de fa perfonne , il avoit une grace & une adrefle fingulière dans tous fes exercices ; il étoit plein d'efprit & de courage, & fut un des hommes les plus galants de fon tems. II ne feroit pas nécelTaire d'ajouter beaucoup de fjétions k fa vie , pour lui donner l'air d'un roman. II fut d'abord deftiné k 1 eglife , & recueillit cette efpèce de fucceffion eccléfiaftique , qui confervoir, depuis Iong-tems , dans la maifon de Guife, 1'archevêché de Reims , & les plus riches abbayes du royaume. Etant devenu 1'ainé de fa maifon par la mort de fon frère , il allia, pendant quelque tems , en fa perfonne , les grandeurs de 1'églife , & les dignirés du fiècle; il devint duc de Guife, fans cefferd'être archevêquede Reims. II jouiffoit de tous les revenus attachés k ces différens titres, fans prendre aucun engagement dans 1'état eccléfiaftique. Le premier objet qui fit éclater font penchant pour 1'amour, fut Anne de Mantoue fa parente , qui deyint Pala-  du Duc de Guife. 93 1 tine du Rhin. Mais le eardinal de Ri| chelieu , jugeant cette alliance contraire au bien de 1'état , employa l'autarité du roi pour 1'empccher , Sc fit mettre !; cette princefTe dans un couvent. Soit légéreté, foit depit de fe voir ; traverfé dans fes amours , il fe précipica dans le parti de M. le comte de Soifons , fous le prétexte dont les mécontents d'alors couvroient leur rebellion , de fervir le roi , en atta-, quant fon premier miniftre. Sa maitrefle alla le trouver a ColoI gne déguifée fous un habit d'homme. > Mais il 1 obligea de revenir a Paris. II \ ne voulut pas 1 entrainer dans fa révolte, I & lui faire courir les hafards auxquels ! il aüoit s'expofer. II fe livra aux ennemis de la France,' ! & en tra dans cette ligue fameufe , qui fe donna le nom fpécieux de ligue confedérce pour la paix univ er felle de la. ckretienie. Ainfi l'on vit, en fa perfonne, . un archevêque de Reims , le premier des pairs de 1'églife , Sc le plus ancien des pairs laïques , rompre rous les liens qui 1'attachoient fi étroirement au fer\ vice du roi, pour fe livrer aux ennemis : de la France. Le roi lui fit faire fon procés} Sc ,  94 Mariage par arrêt du 6 feptembre i^ï , Ie duc de Guife fut déclaré attent & convaincu de rebellion & crime de lé^c-majeflé * .pour réparation , privé de tous honneurs & tous offices de dignité, condamné a ■ avoir la tête tranchée , fes biens acquis & confifqués au roi ; défenfes d toutes ■ perfonnes de le retirer , ni lui bailler \aide , a peine d'être déclarés adherents , ~é punis comme criminels de lè^e-majefté. - Le i i du même mois l'arrêt fut exé- cuté par effigie. -' Le duc de Guife fe rendit enfuite a • Bruxelles pour y commander les trou.pes confédérées de la maifon d'Au,triche , i'empereur & Ie roi d'Efpagne dui ayant déféré conjointemenr le titre de général. . Arrivé dans cette ville , il alla voir la duchefle de Chevreufe, qui étoit for•tie du royaume, pour fe fouftraire a Ia ■vengeance du eardinal de Richelieu , contre lequel elle avoit confpiré. C'eft :1a que fe contra&a le mariage qui fait la matière du procés dont j'ai entrepris de rendre compte. Voici commenn cette fmgulière hiftoire eft rap'portée dans les mémoires du tems; & entr'autres dans un livre intitulé : Intrigues galantes de la cour de France.  du Duc de Guife. 9J La duchefle de Chevreufeüt connoitre au duc de Guife , la comtefle de BoJJu , qui étoit une jeune veuve d'une humeur douce & enjouée.... <« On la mit d'une » partie oü le duc de Guife fe trouva , » 6c elle lui fit tant d'avances, qu'il ne » put s'empêcher d'y répondre. II eft »> vrai que 3 de peur qu'il ne jugeat 3» mal de fa conduite , elle lui paria 5» d'abord de mariage ; & le duc lui 33 témoigna ne defirer rien tant, que s» d'unir fa deftinée a la fienne , mais >• en des termes qui marquoient affez »s qu'il ne fongeoit qu'a fe divertir , 33 pendant fon exil. .» Quoique la comtefle eüt penétré 33 fes intentions, elle ne fit pas fem>3 hlant de s'en être appercue , efpéranc 33 de Pengager plus facilement par fa » femte ingcnuité. » Un jour, elle le mena k une belle 33 maifon qu'elle avoit k une lieue de sa Bruxelles , &c lui donna rous les di>• vertiflements qu'on pouvoit prendre 33 dans cette faifon , qui étoit la plus j> agréable de Pannée. >3 Le duc ne put s'empêcher de lui 33 en témoigner fa reconnoiflance, & de »» lui parler de fon amoura l'ordinaire. » La comtefle lui die que, s'il étoic  9 6 Mariage ,» auffi amoureux qu'il vouloit le lui ' » perfuader, il montreroit plus d'em» preflement pour leur mariage. Le » duc lui kira qu'il ne fouhaicoit rien 5» avec tant de paffion, que de pafler » le refte de fa vie avec une fi aimable » perfonne , Sc qu'il ne tiendroic qua elle de le metrre a 1'épreuve. » La comtelïè , le prenanc au mor , 35 lui répartit qu'elle verroit bientóc fi 3» fes proreftations étoient fincères a 33 puifqu'elle avoit , dans fa maifon , ss un notaire & un prêtre pour les ma33 rier. ■3 Le duc fut furpris de ce difcours , 59 mais il n'en fir pas femblant;, Sc crut 55 pouvoir paffer carrière fans rien ha33 farder , Sc rendre la comtelTe la dupe 33 de fon propre artiiice, puifqu'un mass riage de cette nature, dépourvu des 39 formalités prefcrites par les canons , 3* Sc fait fans le confentement du roi t » ne pouvoit fubfifter. » La comtelTe voyant le duc difpofé s> a faire ce qu'elle defitoit, fit entrer 33 Manfelle, aumónier de 1'armée , qui » leur donna la bénédiction nuptiale , »3 Sc les difpenfa de la publication des & baas, comme s'il avoit eu la mcme # autorité  du Duc de Guife. 97 ff autorité, que 1'archevêque de Ma» lines (1). » Le duc paffa la nuit dans cette fu» perbe maifon avec fa nouvelle époufe, » a. qui il témoigna tant d'amour , »qu'elle demeura contente de 1'keum reux fuccès de fes defteins. » Le lendemain , il s'en retourna » chez lui , après avoir prié la nou- » veile duchefle de trouver bon que » leur mariage demeurar fecret, juf- » qu'a ce qu'il eut obtenu 1'agrément 11 o. j_ r. l :n- » Quelque foin que l'on eüt pris de » dérober au public la connoiflance de » cette aventure, elle ne laifla pas de M venir aux oreiiles du duc d'E/beuf, » &c de la duchefle de Chevreufe , qui la " reprochèrentau du.cde Guife , comme » la dernière lacheté. Le refpeét qu'il ■» avoit pour les dames 1'empêcha de i» s'emporrer conrre la duchefTe. Mais i»> il fe brouilla fi fortement avec le duc !» d'Elbeuf, qu'ils auroient tiré 1'épée , » fi Parchiduc ne les avoit accommoi«< dés. (1) Je rapporteral, en difcutant la validité de ce mariage , les circonftances qui Font véritablement accompagné. %omeXlV% E  c$ Mariage » Lorfque le duc de Guife eut perdu » 1'efpoir de fe venger par les armes , » il chercha d'autres moyens , pour » donnet du chagrin aux deux perion» nes qui 1'avoient ofFenfé , & crut » n'en pouvoir trouver de meilleur , >> que de mener la comtefle chez lui , » & la traiter publiquement comme fa » femme. Ce fut aufli le parti qu'il pric; .•*» & il vécut toujours , depuis, en bonne » intelligence avec elle, tant qu'il de» meura a Bruxelles ». L'auteur de la vie de Sylvie de Molière attribue a une aventure bien fingulière , la connoiflance qu'eut le public de ce mariage. Elle pourra amufer le lecteur , auquel je ne la garantis pas. Le duc de Guife , dit-il , & la comtefle de Boffu avoient un preflentimeut qui les avertiflbit de leur approche refpective, long-rems avant qu'ils fe viffent. Le duc étoit devenu fort jaloux du comte de ... . qui, en effet, étoit fort amoureux de madame de Boffu. Mais toute occupée de fa paflion pour le duc , elle ne pouvoit écouter aucun autre amant. Cependant les afiiduités du comte inquiétoient M. de Guife , qui voulut enfin fcavoir par lui-même a quel point en ctoit cec amant avec h comtefle.  du Duc de Guife. 99 A eet effet , il feignit un voyage a quelques lieues de Bruxelles , Sc y re: vint incognito , dans le tems qu'on y faifoit de grandes réjouifiances , pour la naiffance d'un prince d'Efpagne. II apprit que plulieurs léïgneurs du 1 pays devoient fe déguifer en ludiens , & fe rendre, fous ce déguifement, Sc mafqués , chez la comtelTe de Cante' Croix , ou il devoit y avoir une trèsgrande affem'olée. II fe lit apporter un des habits qui devoient fervir a la mafcarade , en fit faire un rout-a-faif fem, blable; fe mêla , fans être connu , : dans la troupe des mafques , Sc entra avec eux dans la falie oü l'on danfoit. Madame de BoJJu y étoit, ayant a fes cotés le comte de. . . qui la fuivoic par-tout oü il pouvoit entrer avec elle, 1 fans que les rebulfades qu'il en éorou1 voit pulfent rallentir fes pourfuites importunes. A peine le duc de Guife fut-il entré, que madame de Boffu fentit 1'émotion : que la préfence de fon époux avoit ; coutume de lui faire éprouver. Ce fen: riment lui parut plus sur, que ce qu'il : lui avoit dit , 8c lui avoit écrit de fort 1 voyage. Elle le chercha , Sc le démêla ; parmi les mafques, Elle ne put retenir Ei)  ioo ' Mariage ies tranfports de la joie que lui caufa la préfence inopinée de fon mari , il oublia les raifons qu'il avoit encore de cacher fon amour, & fe livra , de fon cóté j aux expreiïïons du fentiment que lui infpira une vue fi chère ; & leurs affaires furent ainfi connues du public. « J'ai vu , ajoute 1'auteur de cette » narration , une lettre originale du » duc furceteffet de la fympathie, qui »> étoit, a mon gré , une des plus belles » lettres que l'on puiffe écrire. II s'y » plaignoit de 1'excès de fon bonheur : »> car 5 il avouoit bien que c'en étoit un » fort grand , que d'être ainfi deviné » par fa maitrefle. Mais il difoit que j* cela lui ótoit le plaifir de voir ce » qui fe pafToit dans fon cceur , fans » qu'elle eüt envie de le lui montrer. » Ces fortes de découvertes étoient , » a fon gré , une des plus parfaites » joies qu'un amant püt fentir j &c » rien ne lui pareiiioit plus touchant » pour une ame délicate , que ces épan>> chements de tendreife & de fincé» riré , oü 1'art & la précaution ne »fcauroient être foupconnés d'avoir » aucune part ». Le duc de Guife ne jouit pas longtems de ce bonheur. II fit la paix avec  du Duc de Guife. IOI i la cour , revint en France , & oublia madame de Boffu. Une intrigue de femmes , animée-s les unes contre les autres par la jaloufie , " engagea le duc de Guife clans une querelle avec le comte de Coligni. lis fe battirent publiquement en duel , au milieu de la place royale. Tout 1'avanrage demeura au duc de Guife, qui défarma :. fon enuemi, après 1'avoir dangereufement bleflé. Cependant fa mère , qui craignoit i avec le public, que le levaïn qui étoit toujours refté entre les maifons de Condé &c de Guife , depuis les troubles de la ligue, ne vint enfin a produire une fermentationéclatante, vouloitlui faire ! époufer Mademoifelle de Longueville , nic:e du Grand Condé, par fa mère. I Mais 1'amour qu'il avoit concu pour Mademoifelle de Pons s'oppofa a ce mariage. Celui qu'il avoit contracFé a Bruxelles avec la comreffe de Bcffu , formoit un obftacle au deflein qu'il avoit de r, s'unir avec fa nouvelle maïtrelFe. Le defir de lever eet empêchement, Sc 1'inquiétude que lui donnèrent les mou> vements du procureur-général , au fujet de fon duel avec le comte de ColiE iij  roi Mariage Bot, lui firent prendre le para d'aller a Roine , pour y fedliciter la cafiation de fon mariage. I e royaume de Naples étoit alors en eoiftbuftion } la capitale étoit défolée par une révolte qu'avoit occafionnée un panier de figues. ^ La gtierre que I'Efpagne avoit alors a foutenir, & ia rapacité infatiabledes vice rois, avoient fur-chargéce royaume d'impörs. Enfin on en mit un fur les fruits ; mais il étoit.fi léger qu'on crut qu'il feroit infenfible, & ne feroit murmurer perfonne. On ne fongeoit pas que c'étoit le plus capable d'irriter le peuple , qui , dans un pays auffi chaud, fait fa principale nourriture de fruits, qm y font fort nourriffants , & d'un goüt exquis. On murmura ; mais on n'auroit pas eté au-dela du murmure , fans un accident fingulier. Le 7 juillet 164-7 > au marin, un payfan apportoit un panier de figues , que les prépofés a la perception de I'impot arrêtèrent a Ia porte de Li ville. Le malheureux payfan , a qui elles appartenoient, n'avoit point dargent. De fureur , il jetta fes figues parterre, en proférant des juremencs & des imprécations terribles.  du Duc de Guife. 103 Le peuple accourt au temt Sc tout le monde fut touché de compaffion du fort de ce malheureux , que la perte de fon panier de figues privoit de la feule reflource qu'il eut pour vivre , pendant la journée , lui Sc fa familie. Un miférable vendeur de poillon , nommé Ma^anïdlo, garcon de 2.3 ans, hardi Sc plein de feu , accourur au bruit avec une troupe de jeunes-gens de fon efpèce , qui fe trouvèrent la par hafard avec des cannes a la main. Ma^anidlo a leur tète , ils fondsnt dans le bureau } le piilent, Si en chaflent les employés a coups de pierres. Le tumulte fe communiqué ; les mutins fe multiplient , courent au palais du vice-roi\, franchiffent la garde , Sc parviennent jufqua fon appartement. 11 leur offre , en tremblant , toutes les graces qu'ils voudront lui demander. Sa frayeur augmenta la licence ; il prend la fuite , Sc n'échappe a la populace , qu'en 1'amufant a piller les pièces d'or qu'il femoit fur fon chemm. Retiré dans un couvent, il fit publief 1'abolition de l'impót fur les fruits: on lui demanda celle de tous les autres impóts , Sc 1'exécution de tous les privileges que Ckctrlcs-Quint avoit accordés E iv  ïo4 Mariage aux Napolirains. L'archevêque de Na- ^ peuple , auquel il promit de faire obtenn- routes fes prétentions , & \ rendugarant dePexécuaon des'paroles que donnerou le gouvernement TouSteTl pr°rfi,tions «e fervirent qu'a xrrter les révoltés, qui ny voyoient ^un pxègepour leur faire metcreTs armes bas & les opprimer enfuite fa ^ifencorde.Amnlemals'irritaparles xemedes qu'on vouloit lui oppofer. Le luxe & la hauteur desnobles les envelopper dans la profcription juelques-unsfur.nttués, cPaurres *g Ma^nkUo commandoit a cent-cinquante mdle hommes. Au moindre fi. iacroit; le fort de toute Ia ville dépendoic dun caprice de ce malheu- Enfin Ie vice-roi confterné , confen* Ut a ffre «n traité avec les mutins toutes les gabelles furent abolies & i on accorda au peuple un fufFrage'pa^^ ce ai^yait Ia nobleffe dans ies ^rauonspubliques. L'on cou  du Duc de Guife 10$ fentk que la ville reftat armée jufqu a ce que la conhrmation du traite tut venue de la cour de Madrid. Mavaniello concinua d'êcre ener des rebelles. Mais une tére de cette trempe ne put fupporter le poids des affaires. D'aiUeurs les éloges dont la populace le combloit fubftituèrent 1'orgueil le plus infupportable a la poluique &: a .la douceur qui étoient les feules baies fur lefquelles put porter un gouvernement comme le fien. Le vice-roi , par les louanges affeétées qu'il lui donnoit, les honneurs qu'il bi faifoit rendre dans fon propre palais , les deferences qu'il lui témoiinoit en toute occahon , acheva de lui faire perdre ennèrement la rère. 11 fe donna des airs de iouverain , Sc rendit fon gouvernement li odieux , que le peuple le maflacra enfin, avec plufieurs de fes conhdents. On crut toucher au moment de la fin de la fédition. Mais quelqnes gentils-hommes ayant maltraité des gens de la populace ■ Sc le prix du pain etant venu ï augmenter , le feu fe ralluma plus que jamais. . , . s Les troupes de Naples étoient dans . le Milanez. On en fit vemr quelquesunes des provinces: maïs eüesne rurens  ïot> Mariage f as plutot dans la ville , qu>e[Ies f„. rentinvefties & défaites. Le peuple enivré de eet avantage , demanda au vice-roi qu'il livrat Jesforterefïes de la ville. Sur fon refus , on pnt le parti de les emporter de force. 11 falloit un homme qui entendit 1'arc des lièges. On chargea Toralto , qui , de concert avec le vice-roi , accepta la qualité de général. Son intelligence fut decouverte , Sc lui coiita la vie. Le vice-roi eut enfin recours a 1'armée navale ,compoféede quarantevaiffeaux, & de vingt-deux galères. Elle étoit commandée par Domjuan , fijs naturel de Philippe IV, roi d'Efpagne. La florte arrivée , ie vice - roi erut devoir parler en maicre , & , contre i'avis du confeil , il excita Dom Juan a employer les voies de la rigueur. Le jeune prince, qui ne s'étoit mis en campagne % que pour fignaier fespremiers faits d'armes , fit fommer le peuple de fe rendre. Sur le refus, il ik uier le canon, tant de la fiotte , que des fbrtifications. Cette rigueur , loin de rétablir Je «alsne , ne fit quechauffer les efprks davantage.. Elie étoit la preuve qu'on ■ft"avoir ckerchi qua le tromper par.  du Duc de Guife. . 107 les paroles que le vice-roi avoit d«nnées & jurées au pied des autels , lorfqu'il étoit fans force. Les armes du roi furent abattues , fes portraits furent foulés aux pieds , & Ton déclara Naples république. Un certain Gerinare Annefe s'empata du généralat, & eur alTez d'habileté pour le conferver. Non-obftant la baneffe de fa nailfance , &c les vices que lailïè germer 1'éducarion que recoivent les enfants de la lie du peuple , il avoit des talents : il étoit hardi , fans être téméraire , il étoit adroit & mfinuant; il étoit même capable de cortcevoir & de fuivre un fyftême de gouvernement. Cependant onpropofa , dansle confeil des rebelles, de fe mettre fous la proteftion de la France , qui étoit alors en guerre avec 1'Efpagne. On propofa même d'appeller un prince de la nation, &: de lui défcrer le gouvernement & le commandement de 1'état. On jetta les yeux fur le duc de Guife^, qui pouvoit faire valoir certaines prétentions fur le royaume de Naples * paree que René d'Anjou, roi de Naples» avoit époufé , le 24 ocFobre 1420 , J^ahelle , fille ainée & béritière de Charles lil, duc de Lorraine. D'ailleurs Evj  *o$ Maria on le corinoifTc.it brave , entreprenanf' fair pour les aventures. Enfin il étoic acTuellemenr a Rdme , d'oü il pouvoit fe rendre a Naples , aufïï - ról"qu'on 1 auroiE mftruir de fon éleótion. Eneffet ,il n'en eut pas pknbcla nouvelle , qurl s'embarque fur une fimple felouque , paflTe cémérairement au traVers de i'armée navale de Dom Juan , & arme a Naples, le 15 novembre \t 647.. 11 fut recu avec les acciamations de la;oie la plus immodérée. Onlui donna ies parentes de gêné: alijjlm, des armêes *e /« repubhque, avec Ie fitte ^altefTe JcreniJJtmc^ de gouverneur perpétuel. du royaume tant pour lui , que pour «ouce fa familie en ligne directe & collaterale. II ne tarda pas a ffgnaler fa valeur 8c ies taiencs militaires. H fe trouva a k tete d une armée de 20,060 hommes defit les tronpes efpagnoles qui voula*ent s oppofer i fes conquêres , prit la 30Hi de la campagne. Quant au gouvernement ci /il, H mit «tans fa conduite, une adreffe qui lui gagna tous les cceurs. II traitoit tour le monde avec fa plus grande douceur 3  du Duc de Guife. 109 1 il accordoit toutes les audiences qu'on deiiroit, écoutoit toutes les demandes qu'on lui faifoit , & y répondoit avec - cette affabilité qui caraótérife 1'homme fait pour exercer des fonctions publi- ques. 11 avoit cependant un dangereux 'concurrent dans la perfonne de Gennare Annefe. Ses exploits lui avoienc acquis une confiance fans réferve , de la part du peuple , & même de la noblelfe ; car il avoir en le talent de rc: concilier ces deux ordres. Gennare ne crut pas devoir fe roidir contre eet enthoufiafme, il fe démir du titre de duc de la republique , qu'il avoit confervé ; on lui donna le gouvernement d'une des forrifications de la ville , les titres de duc & d'excellence, & une penfiori de 1000 écus par mois. La dignité qu'il avoit abdiquée fut conférée au duc de Guife. Quoique Gennare eür plié fous le joug de la néceffité, il n'en conferva pas moins un vif reflentiment contre le duc de Guife , qui lui avoit enlevé une dignité & un pouvoir qu'il comptoit rendre perpétuels fur fa tête. D'u 'fort, dont on lui avoit confié le gouTernement a il épioit la conduite ds  1IO Mariage fon ennemi , & cherchoic I jr trouver J occafion de ie perdre. II ne 1'attendit pas long-rems. Si ie duc de Guife avoit affez d'efpric pour concevoir un plan d'adminiftration , il n'avoir pas alFez de conftancc pour le fuivre. H étoit impoffible que les feules forces des révoltés le maintinffent contre la monarchie efpagnole. II ne pouvoit attendre des fecours efricaces que de la france. Loin de chercher a fe les procurer , u craignoit d'en recevoir • il youloit devenir roi de Naples , Sc 'roi indépendant; ce que la France n'auroit pas foutfert, fi elle eüt participé au triomphe des rebelles. Dun autre coté, le duc de Guife, enivrédesapplaudilFements qu'il recevoir du petit peupk , ceffa d avoir, pour la noblelFe , la confidération qui lui étoit due; Sc , quoique eer ordre eüt une violente averfion pour le gouvernement efpagnol , il aimoit cepeudant mieux: en fupporter le joug, que detre iuoordonné a la populace. Enfin les galanteries du duc de Guife, h^ezunenation jaloufe al'excès , achevèrent de le perdre. Les beautés Napolitaines lui fixent oublier ceile de Ma-  du Duc de Guife. i ? i demoifelle de Pons. II s'attacha publij quement a la fille d'un tailleur , qui , i pendant quelque tems , le pofleda eni tiérement. La baflefle de cette inclination acheva de lui faire perdre l'eftime d'une nobleffe hautaine &c fiere , qui , dédaigna d'être foumife a un homme gouverué par la fille d'un vil ouvrier. i Mais il ne fe contentoit pas d'une feule i jmaitrelfe : voltigeant de galanteries en tiiliurpripc i! fp mif fur les bras rlfs , - -~ Jaloux plus acharnés & plus nombreux que ceux qu'il s'étoit faits par fa vaieur & par fon ambinon. Gennare, inftruit, dans le plus grand détail , des fautes de fon ennemi , 5c de la difpofition des efprits , en rendoit compte aux efpagnols avec qui il avoit lié une correfpondance fecrette. Ils fai- firent une circonltance ravorable , & 1'embrafement de larebellionfut éteinc par une caufe aufÏÏ légère, que celle qui 1'avoit allumé. Le vke-roi, dont la dureté avoit occafionné les troubles , fut révoqué , & remplacé par le comte d'Ognano. A ia rigueur hautaine de fon prédécefleur , il fubftitua des manières douces & infinuantes, qui , jointes aux menées fecrettes de Gennare x 8c aux facheufes  H2, Mariage impreilïens que la conduite du duc. de •Guife avoit pu faire _, difposèrentles efprits k la reconciliation. Dom Juan avoit quitté la fldtte , SC s'étoit retiré dans les chateaux dont les Eipagnols étoient reftés les maitres. Le nouveau vice-roi y avoit fon pofte ; de-la, il battoit la ville, qui 1'y tenoit affiégé. Le jour du lundi faint 1648 , le due de Guife fortit de la ville , pour y faire entrer lui-mème un convoi de vivres , dont les habitants avoient un trés grand befoin. L'impétuofité de fon naturel , Sc 1'ardeur de fon courage ne lui permirentpas de fongerque , n'ayant d'autre reftburce qu'en fa perfonne, il ne devoit pas abandonner la place dontil étoit gouverneur , fans avoir pourvu a. fa sureté. 11 oublia qu'il avoit , dans la ville, des ennemis dangereux , qui pourroient profiter de fon abfence ; il ne voulur confier k perfonne le périlleux emploi d'ouvrir un palTage aux provifions qu'il falloir introduire. Dom Juan , & le comte a'Ognano , avertis de fa fortie par Gennare 5 entrèrent dans Ia ville par une porte que leur ouvrirent leurs créatures , Sc fe fisent voir dans les quartiers ou étoient  'du Duc de Guife. 113 leurs affidés. Une voix s'éleva , qui fic retentir le nom du roi , imploranr ia clémence, & demandant la paix. Tous ceux du quartier jettèrent les mcmes cris, qui, dans un inftant, fe communiquèienc, de ptoche en proche, pan toute la ville. Alors Dom Juan , 8c le comte d Upnano furent joints par trois mille hommes qui entrèrent par ia même porte Ui oü ils s'etoient introduits, ils parcoururenr la ville , s'emparèrent des principaux poftes , 8c y étabhrent des corns-de-garde. En un moment, Naples fut pacifié , fans que perfonne osac refifter au torrent , & fans qu'il y eut une goutte de fang répandue. Le duc de Guife , inftruit de ce qui fe pafloit , voulut réparer fa faute „ rentrer dans la place , fe montrer au peuple , qui', jufqu'alors 1'avoit adore, & ranimer fon zèle pour la liberte. Mais on l'averrir que les Efpagnols étoient les maitres par-tout; que rout rerentilfoit des cris de foumiffion & de paix. La fuite étoit 1'tinique resource qui lui reftoit; il s'y détermina. Mais il fut arrêté dans fa courfe , conduit a Gayette , transféré en Efpagne , mis en prifon , & traité comme un cnminel.  H4 Mariage Le Grand Condé, qui fervoic alors les Wpagnols contre fa patrie , obtint la liberté. Eile lui fut accordée dans i eiperance quele duc de Guife , reconnoüFantd'un Ci grand bienfair, fomenrerou des troubles en France , en faveur de ce prince, & que I'Efpagne pourroit en profiter. Mais, dès qu'il fut de retour, il déclara que les traitements qu'il avoit recus a Madrid étoient trop durs & trop momfiants, pour qu'il entreprit rien en faveur de ceux qui les lui avoient fait iounnr , & qu'il ne donneroit au prince de Condé aucune marqué de la reconnoiuance qu'il lui devoit, tant que ce prince feroit dans leurs intéréts. i. D'ailleurs il avoit trop d'obligations a la reine régenre qui lui avoit fait 1 nonneur de confentir qu'on 1'échangeat pour quatre mille prifonniers, dont plufieurs étoient d'importance ; Sc fi eet échange n'eut pas lieu , ce fut la .pohtique des Efpagnols qui arrêra 1'efiet de la bonne volonté de Ia reine Pour s'attacher Je duc de Guife , & l'attacher au prince de Condé , ils avoient voulu qu'il leur ftt redevable de fa liberte accordée aux follicications de ce prince.  du Duc de Guife. 11 La réfolution qu'il avoit prife de refter oifif, loi donna tout le tems de fe livrei a fon goür pour les intngues amoureufes. 11 étoit revenu en France plus amoureux de Mlle de Pons , qu'il ne 1'avoit été avant fa pnlon , &c réfolut de tout tenter , pour parvenu al'époufer. Mais ayant appns qu'elle bi étoitinfidèle, & qu'elle le facnfioir. a un fimple gentilhomme , nomme Maücorne , il la traita indignement. 11 lui fit même un procés en régie , pour fe faire reftituer des pendans d'oreüks eftimés mille écus , & une riche tapifïerie quil lui avoit donnés. II perdit fon procés. Cette humiliation redoubla fa colère. Pour fe venger, il réfolut d'aller infulter Mademoifelle de Pons jufques dans fa maifon. Elle en fut avertie , &c fe garantit de 1'outrage donr elle étoit menacée, en quittant le royaume. Le duc de Guife, n étant plus arrêté a la cour par aucune affaire ni de cceur, ni de politique , s'embarqua fur la flotce du roi, & retourna a Naples , dans 1'intention d'y entreprendre une nouvelle expcdition. Mais il ne fut pas heurenx. De retour en France , il devint amoureux de Mademoifelle de Gorce, qui 1'aimade bonne foi, &: quis  116 Mariage après fa mort, feretirachez lescarme- lues , ou elle fe fit religieufe. hè duc de Guife mourut l Paris Ie * jum , <^4. U ne lai{j-a im dw tous fes freres étoienr mom , & fes deux Ws ne furent jamais mariées. Amfi finK Ja crop célèbre maif II eft tems enfin d'en venir au procés qui 1'pbjet principal dont ,e dois entretemr mes lecFeurs. Mais il faut reprendre les chofes de plus haut, Sc expliquer routes les circonftances du teüe de Boffu. Je n'en ai parlé que d'a- pres es mémoires du tems; il en faut developper les détails d'après les pièces au procés. r Retranché du nombre des citoyens, difoit M. d'jguejfeau qui porta la parole dans cette caufe , en qualité d'avocatgeneral, devenu non-feulement étranger, mais eunemi de fa patrie, privé de tous fes biens, dépouillé de fes bénéhces-, M le duc^ Guife mit toutes fes elperances dans la protecFion du roi d Mpagne & de 1'empereur, qui avoient de;a cherche a Ie confoler des grandes ' pertes qu'il faifoit en France , par les grandes fommes qu'ils lui donuèrent,  du Duc' de Guife. 117 & "par la promefte d une penficn de 5000 écus par mois , pendant la durée de la guerre. . Voila quel étoit 1'état du duc de Guife\ un grand nom , de plus grandes efpérances ; 5c , fous ces dehors éclatants >. un fujet rebelle a fon roi , qui vivoit encore parmi les étrangers, mais que les loix de fa patrie avoient déja mis au nombre des morts. C'étoit pendant cette efpéce de mort, qu'il fe rendit a Bruxelles. II y connut Bonorée de Berghes , veuve du comte de Boffu , illuftre par la grandeur de fa naiflance, diftinguée par 1'éclat de fa beauté , &: plus célèbre encore par le bruit de fes malheurs. . Elle étoit née d'une desplus anciennes maifons de la province de Brabanr. Elle defcend, en ligne direóte,& par males, de Jean ///,ducde Brabant. Cette maifon a donné aux pays bas, plufieurs gouverneurs généraux, qui 3 dans ce pays,' font les plus grandes dimités de 1'état; plufieurs chevaliers de la roifon d'or ; 5c, dans 1'état eccléfiaftique, des archei' veques de Malines 5c de Cambray. Le Fx.oi d'Efpagne érigea , depuis ; le comté de Grimberghes en prihcipauté pour le comte ds Berghes qui  xiö Mariage vivoit alors, & fes defcendants male* öc femelles, le 20 mai 16Z6. Les Berghes comptent les maifonsde Bavure^'Egmond, de Hornes, de N«C. /"«, dans le nombre de leurs alliances; tous les grands noms des Pays - bas lemblent avoir joint leur éclat i celui de certe illuftre familie, & Pon peut dire que, quelque grande que foit I'antiqiute & la fplendeur de la maifon de Lorraine , un duc de Guife pouvoit fans rougir , époufer 1'héritière de la maifon de Berghes. L%e des deux amants etoit pareillement afTorti • ia comtefle de Boffu avoit ving-deux ans : & le duc de Guife en avoit vinet-fepr Sc demi. 0 r Les préfens qu'elle avoit recus de ia nature furpaflbient encore les avanraees de fa naiflance; & elle ne pouvoit fe plaindre que de la fortune, qui ne lui avoit ladié que ^oooo iivres de pacrimoine. r Tels étoient tous fes biens, Iorfqu'en 163S , elle époufa le comte de Boffu. ba. mortaugmenta lerevenude fa veuve o un douaire de 7500 livres , & d'une chambre êtoffée, ce qui revient a notre preciput, fixée par le contrat de mamge, a 11,500 livres. Ainfi 10,003  J„ Duc. de Guife. HQ livres de rente , tout au plus , dont la plus crande partie ne confiltoic que dans nn fimple ufufruit , compofoient toute la fortune de la comtefle de Bojju dans le tems de fon mariage avec le duc de Guife. J>s charmes de cette belle perfonne firent une impreffion fi vive fur le cceut fenfible du duc de Guife , qu'il ne vit que la beauté , & ne fongea point a la fortune. _ „ Les héritiers de la comtefle de Boffu préteudoient qu'une longue recherche avoit inftruit le public des vues du duc Guife , pour ce mariage , long-tems *vant qu'il ait été accompli. Les reprefentants du duc de Guife, au contraire, foutenoient qu'une inclination fubite fut bientot fuivie d'un mariage encore plus précipité. Quoi qu'il en foit, il paroit quun feul jour a éclairé le commencement, le propres & la fin de cette alhance. Le contrar de mariage, la permiihon du curé la difpenfe de la puolicauon de bans, la célébrationfont renfermes dans le cercle d'une même journee. Le contra; fut paffe fous fignature privée. Les repréfentants du duc de  12 o Manage Guife prétendoient que c'étoit pour dérober au public la connoiflance de eet engagement , que l'on n'avoit pas voulu en confier le feeree a un notaire; on fqutenoit, de 1'autre cóté , que l'on s'étoit, en cela, conforme; a 1'ufage des plus grandes imifons de Fiandres , qui n'ont prefque jamais recours au miniftère des notaires', pour lears contrats de mariage, afin d'en pouveir produ 1 re les qriginaux dans les preuves rigoureufes de noblefle que quelques chapirres & quelques communautés de Flandr~s exigent de ceux qui afpirent a en devenir, membres. Perfonne , du cóté du duc de Guife, n'amfte a eet aéFe. 11 étoit général de Parmée s, aucun officier n'eft i»vité. Madame de Cnevrcufe, fa tante , qui étoit alors a. Bruxelles , n'y eft point préfente. ( Cette folitude étoit-elle affecFée, pour enfevelir eet engagement dans le myftère ; ou a-t-on voulu fe conformer a. la fimplicité des Pays-bas, oü l'on eft, difsit-on , dans 1'ufage de ne faire iigner les conrrats de mariage , que par les contracFants mêmes, lorfqu'ils font mafeur-s ? Cependant, du cèté de Ia comtelTe de  du Duc de Guife. 11 r de Boffu , elle fut autorifée a contracter par la préfence öc par la fignature de la comtelTe de Grimberghes fa mère , ; 8c du comte de Meghen fon oncle. Eni fin deux témoins y ajoutèrent , par i leur fignature, le complément de la ; foLemniré que Ton crut devoir donner k eet acte. Quant au fond du contrat en luimèmej on n'y trouve aucune menrion de la dot, ni des biens de la comtelTe de Boffu. Mais le duc de Guife lui pro; met un douaire de 40,000 florins , | qui reviennenta 50000 livres de notre I monnoie. A ce préfent, il ajoute une : chambre étoflee de 60,000 florins; ou, i pour parler notre langage , une préï ciput de 75,000 livres. La comtelTe de Bejju , faifant atteiii non a la pofition du duc de Guife, dont >, tous les biens étoient confifqués , &C : craignant le malheur auquel elle feroit expofée, s'il venoit a mourir avant elle-, 8c avant que la confifcation fut levée , elle lui fait contraéter I'engagemenc qu'il emploiera fon crédit auprès du roi d'Efpagne , pour la faire comprendre dans le traité de paix, relativement aux droits que fon mariage alloit lui acquérir fur les biens de foa époux.  122 Mariage Erifinil eft, ftipnlé que , fi Ia comïefia de Boffu vienr a. mourk la première , & fans enfanrs s tout ce qu'elle aura apporté en mariage, de quoi fera term notice , retourncra d fes plus proches pa-* rènis , fans aucune charge de dettes, _ _ .La comtefle de Boffu réfidoit a Bruxel* les , fur la paroifle de Sainte Guduki Le curé de eette paroifle donna k un fieur Mansfeldh permiflion decélébrer le mariage. 11 faut expliquer ici ce que c'étoit que ce fieur Mansfeld , & copier les termes de la permiflion qui lui fut donnée. II étoit chevalier d'honneur dans Ie fénat de Luxembourg ; qualiré qu'il n'avoit pu acquérir que par la-preuve la plus complette d'une noblefle fans reproches. II étoit maïtre de la chapelle de 1'in* fanre , doven du chapitre de Sainte Gudule. . A ces qualités , il en joignit une autre , qui eft inconnue parmi nous , ëc qu"il eftnéceffaired'expliquer. En 16i6f 1'Infante Ifabele - Claire préfenta une fupplique au pape Vrbain VIII, par laquelle elle lui repréfenra que, dans isiarmées »il eft difficiie d'avoir recours  'du Duc de Guife. ï 2 5' aux ordinaires , ni au pape , qui d'ailleurs ne feroient pas fuffifammenr in'f* truits de 1'état des perfonnes. En confcquence le pape donna une bulle, pat laquelle il autorifa 1'archevcque de Malines a exercer , par lui ou fes délégués, toute jurifdiction eccléfiaftique dans ; les armées, rant fur les miniftres char1 gés d'adminiftrer les facrements aux \ officiers & foldars fervant dans les 4 troupes , que pour connoitre des caufes qui font de la cornpétence du juge ' d'églife. En un mot , c'eft une efpèce ' d'épifcopat militaire qui s'exerce dans les armées , qui deviennent , en quelque forte, le diocèfe de ces prélats fub' délégués. L'archevèque de Malines , ayant d'autres occupations dans fon diocèfe, acoutume de déléguer relarivement a ces foncrions, ainfi qu'il y eft autorifé par la bulle, le doyen de la collégiale de Sainte Gudule de Bruxelles. On examinera ailleurs , en détail J ! Ies pouvoirs de cette efpèce de prélature. Telles étoient les qualités , tels étoient les titres du fieur Mansfeld auquel le curé de Sainte Gudule donna la permilTion: d'affifter a un mariage.  12.4 Mariage Voici les termes de cette permiflion t Do licentiam & facultatem affiftendi matrimonio cujusdam nobilis fqzmin^b parochiana mes, quod contraclura eft cum §üodam nobili viro militari , quQ- rum nomina, contrailo matrimonio , in hoe albo pmfato aftifienti adfcrïbantu'r. C'eft: avec cette permiflion a\'ajftjler gu mariage d'une certaine dame de la paroiffc de Sainte-Gudule , avec un certain homme de qualité engage pans les armées , qiie M- le dllC ds Guife Sc la comtefle de Boffu fe préfentent devant Charles de Mansfeld, Comme il paroiflbit réunir, en fa perfonne, la qualité de pafteur ordinaire , par rapport au duc de Guife , qui fervoir dans les armées , & de pafteur délégué , par rapport a la comtefle de Boffu, qui étyit paroiflienne du curé de Sainte - Gudule , il femble qu'il a voulu multiplier les adres de célébration , Sc en rédiger un fous chacim de ces rkres, . L'un eft un acte inféré dans les regiftres de la paroifle de Sainre-Gudule quj attefte que Henri de Lorraine duc de Guife, SC Honorée de Berghes, comtefle de Boffu , ont contradté un mafiage folemnel en préfence de Charles  du Duc de Guife. T 2 J ie Mansfeld, vicaire général deParmce t en vertu de la permiflion du curé. Solemniter contraxerunt coram JJ. Carolo d Mansfeld, vicario generali exerchüs p ad koe autorifaio per domïnum Caffier Plebanum, & que la comtefle de Grimberghes , le comte de Meghen , Gregoire Happart, official d'Anvers , Guillaume Wande?? elde , chanoine de Cambrai ont aflifté , comme témoins,a cette célébration. On prétendoit, dans la caufe, que eet aóte étoit écrir de la main du cure de Sainte-Gudule. Ce qu il y ade certain , c'eft que la vérité en eft atteftée par la fignature de Charles de Mansfeld, qui a inféré ces mots fur leregiftre : ha eft, Caroius aMansield. La forme de Pautre écrir n'eft pas aufli authentique j mais il ne mérite pas moins d'attention. •> Au bas de la permiflion du cure , donc 011 vient de lire les principales expreflions, Charles de Mansfeldcertifie qu'il a aflifté au mariage de Henri de Lorraine , & d'Honoree de Berghes , tant en vertu de la permiflion du curé de Sainte-Gudule , qu'en conféquence de 1'autorité qu'il exerce , comme vicaire apoftolique , fur tous ceux qui F iij  ï^o Manage portent les armes en FÏandres, pour \t ïoi catholique. II déclaré, en mêmetems , qu'après un férieux examen , n ayant rrouvé, dans Ja perfonne des conrractants , aucun empêchement légitime , il les a difpenfés de la proclamation des bans , pour des raifons qui lui ont paru fufHfantes : ob caufas animam noftram moventts. A la fin de ce certificat, fe trouvent lesnoras des mêmes témoins que dans laéfe de celebrarion Mais on ne voic leurs fignatures ni dans lün , ni dans 1 autre de ces deux écrits, qui font diftmgues par des différences efTentielIes. L un eft un acte revêtu de toutes les tormes aurhenriques , infcrit dans les monumenrs publics de la naifTance & cieietat des hommes , devenu public iui-meme par cette infcription , qui ne peut plus êtreni changée, ni altérée par aucune des parnes, qui peut, au contraire , leur fervir de titre commun pour prouver la validité ou la nullité de leur engagement. L'autre n'eft qu'une feuille volante, qui tire toute fon authenticité du témoignage de Charles de Mansfeld. II « eft point doublé , il n'eft configné dans aucun dépót public j mais feule-  Ju Duc Je Gui fe. ïaj ( „ent entre les mains de la comtefle d* I JSollu, qui a été la maitrefle , ou de Ie détruire , ou de lui conferver fon ex*. /.Wn'agitque comme autorite par la permiflion du curé de Sainte-Gudule; , %c fi l'on y trouve la qualité de vicaire| général de 1'armée, c'eft un tirre d hou- neur qtion HU aonne , donne a ce titre aucune vertu ; on ne dit point que c'eft en cette quahte qu il a été le miniftre , ou le temoin nécelfaire du mariage. ' Dans le fecond , au contraire , U ne fe borne pas a prendre , a la tête de eet acle , la qualité de vicaire general des armées ; il marqué expreffement que c'eft en cette qualité qu'il a aflifté- a Ia célébrarion du mariage s & non pas feulement comme repréfentant la perfonne du curé de Sainte-Gudule. Celui qui eft inferit fur le regiftre public ne fair aucune mention, ni de Ia publication desbans, ni de la difpenie de les publier. Le fecond, au contraire attefte que Charles de Mansfeld a diipenfé ies parties de cette formahte , « cela, dans le moment même de la celebratie 13. _ . ï IV  12 8 Mariage Enfin les deux acres nous afliirent que Ie mariage a été contracté le 16 noyernhre; mais 1'un & 1'aucre n'onr point ere- redigés dans le même tems , ni meme dans le jour de la célébration : celui qui fe trouve fur les regiftres n'y a «e inféré que le zo novembre au ph^ tot j &,l'autre eft daté du 30 du même mois • c'eft-i-due quinze jours après la ceiebration, A peine ce mariage fut-il contracté,' que la renommee en porta la nouvelle jufqu'en Italië. II s*y répandir, en mêmetems, un bruit confus que le duc de Guife étoit lié par de premiers engagement* avec ia princeneo'd Mantoue , Sc ioncondamnala précipitation de Charies de Mansfeld, que l'on accufoit d'avoir été, par fon imprudence , le mifliftre d'un facrilège. Le eardinal Bar berin , entrainé par 1 opimon publique , écrivit , en Flan•dres , a M. Siravius , internonce du ppe , qae 1'archevêque de Malines devoit procéder j dans toute la rigueur fw,Canons' contre le prêtre qui avoir ce eoré ce mariage ; & qu'en cas que celui dont on parloit entre le duc de Guife & la princefle de Mantoue fe trouvat vrai, ce prélat devoit contraindre  du Duc de Guife. U9 le duc a quitter la comtefle de Bofiu , pour reprendre fon époufe légitime , Cette lettre obligea M. de Guife a rendre un compte public Sc folemnel de la nature de fes premiers engagements» . , Par un certificat authentique , dont il paroïr que 1'original fut remis entre les mains du fieur Charles de Mansfeld» il déclara qu'il n'avoit donné a la princefle Anne de Mantoue que ce qa'il appelle une promejfe ne'gathe ; c'eft-adire, une promefle de n'époufer jamais aucune autre perfonne qu'elle : qu'il n'auroit même pu 1'époufer fans une difpenfe du pape , paree qu'elle étoit fa parente au troifième degré, Sc que jamais il n'avoit fait aucune démarche pour 1'obtenir; enfin qu'il avoit déclaré tous ces faits a Charles Mansfeld dans letems de fon mariage, & qu'il lui en avoit fait voir la vérité , foit par les lettres 6.'Anne de Mantoue ,. feit par ia promefle réciproque qu'elle hu avoit donnée en 165.7. Ce certificat eft date du 21 février 1642 , & figné Henri dc lorraine , duc de Guife , lieutenantgejj. tal de i:armée de l'empaeur contre. & F snee,. Rien ne manqua, dansrlaiuirepous ] w  13° Mariage , donner a ce mariage toute la publicité poffible , & pour multiplier les aétes ■qui pourroient en établir la réalité. Si le duc de Guife réfide a Bruxelles , t'eft avec la comtefle de Boffu qu'il établir fon domicile. Les pourfuites de fes créanciers lui font- ellcs cherclaer un afyle a Namur ? Elle l'y accompagne avec le nom Sc ies honneurs d'une femme légitime. Pafle-t il des acres , c'eft avec fon époufe , a laquelle il confirme cette qualité par une foule de fignamres réifcérées par-devant notaires. C'eft avec elle qu'il figne une procuïation par laquelle il donne pouvoir a tm procureur au grand confeil de Malines d'occuper pour lui , Sc de pourfuivre, le paiement des fommes dues par la maifon de Boffu a Madame la ducheffe de Guife fi femme. -Avec elle 5 il fait des tranfports ; avec elle , il s'ob'ige euvers fes créan■ciers.. On ne finiroit pas„ fi l'on vouloir détailler tous les.acres publics par lefquels le duc de Guife a ratifié fa qualité de mari de la comtefle de Boffu.. A ces aétes , fe joignent des lettres qui coafirment de plus en plus } i cette  du Duc de Guife. I?i i dame , le nom de duchefle de Guife. M. i le duc de Lorraine la reconnoit pubhi quemenr. II lui écrit , pour lui témoil gner la joie qu'il a d'apprendte lort i mariage, & finit fa lettre par ces mots, i crai font bien une approbation folemi nelle de la nouvelle qualité de la com! relTe de Boffu i votre tres - affeclionne coufin & ferviteur, le duc de Lorraine. La comtefle de Grimherghes , mere de la nouvelle duchefle de Guife , fe crut obligée de prendre des précautions contre les dépenfes de fon gendre„ qui auroient bienrbt diflipé le bien de fa fille. Elle préfenta une requête art chancelier de Bruxelles, & lui remonrra que M. le duc de Guife avoit commencé d'aliéner une partie des biens? , de fa fille fuj'ets a retour-, & demand& n' Sc obtienr permiflion de faifir lesarrérages du douaire dü a la duchefle paria maifon de Boffu. Etonné decette faifie, le duc ie Guife lui écrit des lettres aufli preflantes, qué' refpeclueufes, pour la iupplier de s'e»r défiftec. Toutes ces lettres font pleines d'èxv preifions qui marquent la ferme perfévérance de fa volonté. Bar-tour il paris-- 1 vj.  13a Mariage ala corntefle de Grimberghes, comme a fa. belle-mère, & parrout il parle de la comtefle de- Bejfu , comme de fa femme, Toutes, font terminées par la qualité de Jon tr-es-humble Ó: tres-obéif fant fils &'ferviteur. \ Enfin , après. dix htiit- mois de cohabitation publique, i'efpérance de renner en grace avec le roi > rappelle Ie duc de Guife en France. li arrivé a Paris , dans le mois de prairi i 64-■. Toutes les lettres qu'il écrit» Ibit a la comtelTe de Grimberghes-, foit, i la comtelTe de Boffu.3 qu'il nomme toujours fa femme 5.font amant de.ti-. ïres confirmatifs de fon état. Tautot il la confole de fon éloigneanent, II s'afflige avec elle de 1'ordre. qu'il a appris que la duchefle de Guife-, fa mère a obtenu, pour empêcher qu'elle: ne vienne-en France. ïl 1'alfure qu'il furmontera tous ces obftacles, Sc la flatte.d'une prompte réunion. Tantot- il fe. juftifie des reproehes. qu,'elie lui fait. II lui fair part de toutes; les tmverfes qu'il eft.obligé d'efliiyer jïïiais il- luiprorefte, en même-tems „ que les carefles Sc les menaces Font Uvl.y.-:: inébranlable dans, le. deflein oütl. eft. de vivre ayee elle j. qu'il a; oié l.  du Duc du Guife. fa familie toute efpérance de trouver d-pS nutlMs dans fon mariage , que quelques locs lui avoient per/uade sy ren-., comrer. Ce font fes propres termes. . Dans quelques unes de fes lettres a t lui témoigne la plus grande attention fur tout ce qui la regarde , &: 1 avertit qu'il lui envoie l'argenr dont elle peut avoir befoin. Dans toutes , généraïement, ü Ia traite comme fa femme légitime. IE I'aflure qu'i/ eft aufft incavable de legereté, que de foiblejje ; que fon hmneut & fa confcience font égelement mebranlables; que tout fon déffpoir eft de voir que fes malheurs foient contagieux a une perfonne qu'il aime plus que fa vie ; mais qu'elle doit itre perfuadie que la mort feule pourra les féparer. Appuyée fur tant d'aflurances , preifée par 1'ardeur de fon attachement , elle fe détermine a venir en France , fe dé^uife , franchit tous les obftacles qui s'oppofoient a fon paflage., vit fon mari, avant qu'on fut avern de fa marche. La reine en fut inftruite , & , preflée par la duchelfe dehuije,y.n avoit d'autres vues fur fon fils , elle lui fit donner un ordre rigoureux de fortit de France. Son mari la prefik , par glur  T34 Ma 'nap-e fieurs lettres, d'obéirf pour éviter un arriout , dont il ne Dourroir n»i U rantir. L b - £ile/e retire en HoIIande. Le duc Iinftrmr de routes les démarches les plus fccrertes de fa familie , pour parvenu a la diflolution de leur ma' nage. II lui apprend cjue fa mère a fait vemr de Bruxel/es tous les acles qui pourrotent fervir d l'examen de cette gueftion; qu'il s'eft temt une affcmblée de docleursfur cette queftion ( ce font les termes) - que deux evêques doivent tui en apporter un réfuhat par ordre de reine , quauffi-tót après , il lui en mandera le particulier , & le remède qui sy pourra apporter.. Enfin, ii lui fait part de Ia grace & des lettres d'abolition que Ie roi lui a accordees. II a;W que le parlemenc ooit s aflembler pour les entériner. . La conftance du Aucde Guife fe foutint jufqti'au 2 du mois davril i£44.. <-eft 1 epoque de la dernière lettr'è quil a eente i la comtefle de Grimberghes ou il femble ne penfer qu'a fortifier fes liens, & a reflerrer les nccuds ' Ma-töC , eac a la c°mtefle de Boffu.. •Maw, dès le 2.1 mars précédent p il.  Ju Duc Je Guife. 135 avoit figné une procuration pardevanc un noraire apoftolique' , par laquelle il donnoit pouvoit de porter a Rome la caufe de la validité ou de la nulhte 4e fon mariage , & de lafoumettre au fugtment du pape, en lelie jorme oumaniere que bon lui fembleroit. Ce. font les. t termes de la procuration. La duchefle de Gvife, fa mere , le , joint a lui , pour obtenir du pape la ( nullitédu même manage. Eile iigne une procuration femblable a celle de I fon bis. Elle y expofc , comme lui 1 le fuffrage unanime des plus célèbres. 1 ^u^.J-.rv^nc .In mvaume . qui avoient tous eftimé que 1'eugagemenr contrade par le duc de Guife ne pouvoit meriter le nom honorable de mariage. D'aprcsces procurations, onprefente une fupplique au pape. Le procureur de M de Guife remontre a SaSaintcte que fa qualité d'étranger en Ilandres , Sc la conjoncture de la guerre entre la Erance & 1'Efpagne ne lui permettent pas d'e%ér«r aucune juflice dans les Pays-Bas contre la comtefle de Boffu \ qu'il fcait même que 1'archevêque de Malines s'eft déclaré ouvertement contre lui; & qu'enfin 1'importance de la caufe demande toute 1'autorité & tou-  *yf Mariage fes ies lumières du tribunal apoftolique; Le pape coramet ura des auditeurs de la rote, pourconnohre, en derniet reffort , de la validité de ce mariage. L'auditeut ordonne que la comtefle de Boffu fera citée a fon tribunal , & eependant, qu'il feroit permis de compulfer les titres dont le duc de Guife auroit befoin dans la-conteftation. Deux fois, il envoie des agents; deux fois ils font découverts , avant d'avqir compuifé les pièces dont ils ont befoin; ce n'eft même que par le crédit de 1'inrernonce du pape que l'on engage Ie gouverneur des Pays-Bas a les laifler revenir en France : il vouloic les fairs prifonniers de guerre, Pour ne pas perdre entiérement les fruits de- leurs tentatives , on les fait comparokre devant 1'offieial de Paris. Is declarenr qu'il leur a été impoftible' d'exécuter la commiflion dont on les avoit chargés. L official donne acFe au duc deGuije de-leut déclaration. x Elle efl portée au tribunal de la rote-, ou on ordonne qu'attendu que 1'accès des Pays -Bas n'eft pas libre y la comtefle ie Boffu fera citée par édit; c'eft-a.dire , par fimples affiches attachées a. la porte de 1'auditoire de la rote».  du Duc de Guife. 137 Pendant que cette procédure fe pourfuivoit, la comtefle de Boffu rcclamoit proteétion du roi d'Efpagne contre i'atteinte que Ion vouloir potter aux ipuvilèges des habitants des Pays-Bas, Slesobligeant d aller a Rome cher1C &. n.- ; ,Wmr leur etre cher une juiuce 4"- 7 ; . , rendue dans leur patne fuivan les loix de 1'Efpagne & de la Flandre. Le gouverneur des Pays-Bas vint a fonfecours. Il écrit au eardinal , protefteur de la nation efpagnole , & a 1'ambafladeur de la couronne. U les charge de préfenrer au pape la mlüce des Métentions de la comtelTe de Boffu, & fimt fa lettre , en proteftant que , fi le faint Siège ne déféroit pas a ces remontratices, on feroit obhgé de recourirauxremèdes que les loix mettoient entre les roains des officiers du rot d'Efpagne, pour réprimer de pareilles entreprifes. Le duc de Guife, pour lever tous ces obftacles, fit lui -même le voyage de Rome. . vut 1 Ce fut alors qu'il entreprit, a Naples, 1'expédirion dont j'ai parlé; & ce tut pendant fa prifon en Efpagne. que fes créanciers exercèrentcontre la comtefle  533 Mariage reufef,leSpOUrfLliteS lesP^rigou- msesnf^ude fon doilaire Par nn.% lbutlfn £n fut °^onnée pa «ne fente„ce da confeil de Malines, du 16 fevner i649. Un diftnbaa 3Iï0yo flori , . monroient es arréra?es dn A rfi* m~ i «"-itrages un douairefai- 7' ?Ue emPIo>'a da refte des reprifes -fon premier rnariage, 59oooflo- yendir encore, par contrat du 6 aoüc "49 » deux rentes qui lui reftoient de fon propte bien, pour achever de payer te dettes auxquelles elle avoit été coudamneeal'acquit du duc de Guife. r '» ^«^quence des engagela Iub«ftance de fon mari, au'ell- ao|"bhe les perfidies de c£t .nfidè^ légitime par fes adhons. Elle fe déterWr?^1'6"^6^0-)'fe&v^* ^ ^ey'aifances & I'europe femblent JJors ft réumr pour affurer la vénté de  du Duc de Guife. ip L'archiduc Léopoldlm&onne un pafle, port, dans lequel il la quahfae duchefle de Guife. . . ,>vr Le duc de Lorraine ecrit au roi d. Mpagne en fa faveur ,& lui recommande les intéréts de M. le duc & de Madame la duchefje de Guife. Le roi même lui permet , rnalgre la •I «uerre , de palTer par fes états & lapj pelle , dans le paffe - port qu'il lui acIcorde, noftre crès-chïre ■ coufine , Honorée de Berghes , duchefle : de Guife. T7..c„ i„ A'VCnzvne 1'affure , pac une lettre pleine de marqués d'honneur & deconfidération , que c'eft ayec joie qu'il lui donne la permiflion de vemr voir M. le duc de Guijefon man-, Sc qu'il lui témoignera, en toute occahon , 1'eftime qu'il a pour fa perfonne , K pour fa maifon. , Elle part de Bruxelles, accompagnee de toutes ces reconnoiffances , fi favo- rables a fon érat. Arrivée en France , elle s y arreta* tetenue par les confeils de perfonnes inftruites des affaires i, on lui fit voir que , vu 1'état oü eües etoienr ene folliciteroirvainement la hberte du duc de Guife. Mais elle recut , a la cour ,  14 Mariage toutes les marqués de diftincFrón que pouvoit efperer la femme d'un membrede la maifon de Lorraine. On en trouve les détails dans des iettres ecntes par Madame Marguerite de Lorraine, femme & Monfieur, 'fiére de Loms XIII, a Ia comtefle de Grim. berghes , en 1652. . ?"te pnncefle lui témoigne la fatisfadion qu'elle a eue de vcur la du^ de Guife , qu'elle nomme fa fceur, Llle aflure la comtefle de Berghes ; que la cour a fuivi, avec plaifir, Ie fuftrage de la reine , êc qu'il tant prefentement pourfuivre, avec ardeur, Ie jugement de Rome , afin d obtemr une fentencefavorable, après laquelle Madame la ducheffe. de Guife puuTe revenir en France , fe mettre en pofleflion des biens de M. le duc de iruije Jon mari.  du Duc de Guife. 141 Ayant pris le patri de ne point aller en Efpagne , la comteffe de Boffu ecnvit a M le prince , qui commandoit les armées du roi, & lui demanda une efcorte 11 lui écrit: a Madame la duchefle de Guife , & figne , votre treshumble & tres-obèiffant ferviteur Louis de Bourbon. x Elle retourna a Bruxelles , ou elle refta dans 1'inadion pendant 2 ans. La prifon du duc de Guife ne bi permettoit pas de fuivre ie confeil que Madame lui avoit donné. Le Aucde Guife recouvra enfin la liberté en 1654- La comtefle & Bojju concut alors les plus flatteufes efperances i h vue d'une lettre qu'écnvit la marech"le de la Mothe a la comrefle de Grimberghes , par ordre de Monfieur , de Madame , & de Mademoifelle. Elle la prefle , dans les termes les plus forts, de faire partir inceflamment Madame la ducheffe de Guife fa f ile ( c'eft ainfi qu'elle 1'appelle ). Elle 1 allure qu'elle trouvera par-tout, les difpofitions les plus favorables ; que Madame la duchefle douarière de Guife eft très-bien intentionnée ; mais qu'elle ne veutpas lefaire parokre publiquem at, de peur que cela ne rende M. Ie duc dt  r42 Mariale Guife enco e plus opini'atre. Elle I'aveN .preiLon que la vue d'un a„tre obfec lettre en affurant qUe ce n'eft Das >*r,^OTe3 & Mademoifelle Par 1 ordre defguels elle écrir. P Iune*rs/» «lies d'honneur ro f ?^'I impreffi°" ^i'onauroir fouhaite que la comtefle de Boffu eurprevenue par fa préfence. M ^uoiqu',1 en foit, preffee par Ia Jetrre de la maréchale de la Mol, „„ les promefTes de Mademoifelle de lui accorderfa protedtion; déterminéeen- fin par une lettre fans dare , fans %na- fure ,mals éente de Ia main de laccfad, pee de 1'abbaye de Montmartre W du duc Mademoifelle de Guife fa fceur , & un neveu fils de fon frère : c'étok Jofeph-Louls de Lorraine. La commiffion de la rote fur fignifiée aux deux héritiers , Sc affignation dounéeenconféquenceaumoisd'aoüt 166$. La comtelTe de Bojfu prenoit , dans fes procédures , la qualité de veuve du duc de Guife. Mademoifelle de Guife fe pourvut en la cour , &C y obtint, tant en fon nom , que comme tutrice de Jo~ feph - Louis de Lorraine , un arrêt fur requête , le dernier mars \66<. , qui la recoit appellante comme d'abus des procédures faites ou a faire a ia rote avec défenfes d'y procéder. Cet arrêt fut d'abord fignifié au notaire apoftolique, chargé des affaires de iacomtefie de Boffu; salaueaBaudouin, G ij  148* Mariage qui déclara que, fon pouvoir étant limité a. former une oppofition au fcellé-, 11 ne. lui étoit pas pollible d'aller audela , & qu'il ne feroit aucune procédure. Un fecond jugement intervenu a la rote fut fignifié a Mademoifelle de .Guife. Elle obtint un fecond arrêt , le 16 feptembre 166$ , qui réiréra les mêmes défenfes , prononca un décret d'ajournement perfonnel contre 1'huiffier qui avoit fait la fignification , &c qui rut publié a la communauté des huifïiers, avec défenfes de faire aucun exploit en vertu de la commiffion de la rote , fous peine d'interdiction. Cepëndant la comtelTe de Boffu alla elle-même a Rome , pour tacher , par fa préfence , de faire iinir une affaire qui la faifoit languit depuis tant d'annges. Enfin,le 8 juin 1666, après un rapport de plufieurs féances , après une •ample difcuffion des raifons de part &C d'autre , intervint une fentence définitive qui déclaré Honorée de Berghes véritable & légitime époufe du duc de Guije , &c déclaré le mariage bon- & valable .pour tous effets. Les moyens de part & d'autre font tops expliqués dans le vu de la fen,-  du Duc de Guife. 149 itence: les lettres y ont été vues, Se ; les Juces y ont enfuire bien voulu ren-. ; dre corupre au public des raifons .qui leur ont paru viclorieufes , ft des morifs qui ont fervi de fondement a la décifion. Dedaramus prétfatum mmitnomum , 1 ... Kimr.lte.r celebratum , lervjiu. in omnibus formd facri concilïi i nden-. ... r^,rnr„m rnnnnum . TUlile f r 1 ejfe , ad quofcumque effeclus ,vahdumi.ö' legltïmum. Ce font les principales dil- poutions ae cci.it. k*^"*,*- Quand il fut queftion de la faite Ugnifier aux parties intéreflées , la comtefle de Boffu ne trouva point d'huifiier qui ofar s'expofer aenfreindre les défenfes portées par l'arrêt du 16 feptembre 1Ó65. \d duchefle de Guife , ne pouvant ( tilus faire aucune procédure a Paris , attendit impatiemment la fin de la guerre qui divifoit les deux couronnes , pour agir & pourfuivre fes reprifes eontte les héritiers de fon mari , en exécurion de fon contrar. Les princes étant enfin conyenus d'envoyer leurs plénipotentiafres a Nimègue en 1678 , pour y traiter de la paix, elle écrivit a M. de & fucmc , 1 . G iij  151 ° Mariage pléniporenriaire d'Efpagne , pour cb-: renir qu'en concluanc Ia paix , on engageac le roi a lui faire rendre juftice par la maifon de Guife fur les claufes de fon contrat. Cefaitparoitclairement prouvé par !a lertre que le marquis de ia FuenceèctWn enréponfe a Ja duchefle de Guife ; ou il lui mande qu'il a différé de lui répondre jufqu'a la fin de fa députation. Cependant les héritiers dn" duc de Guife fe rendirent encore appellants comme d'abus de la fentence définitive de la rote , & obtinrent un arrêt qui défendit a la comtefle de Boffu de prendre la qualité de veuve du duc de Guife ; & a tous notaires, huifliers , ou fergenrs de faire aucunes fignifications en vertu des mandements de la rote : ordonne que l'arrêt fera hi & publié dans les communaurés. Ne pouvant faire valoir fes prétentions en France, elle eut recours aux puilFances étrangères. Elle demanda , au roi d'Efpagne , Pexécution du jugement de la rote. Ce monarque donna nn arrêt de fon confeil d'Etat a Madrid, au mois de mars 1667, portant ordre de traiter la duchefle de Guife d Bruxella comme lesfemmes desgrands d'Efpagne. L'ordre fut envoyé, en con-'  du Duc de Guife. 15* féquénce , de Madrid, aux Pays-bas, par Dom Pedro Fernando del Campo , miniftre du roi d'Efpagne. 'Au comraencement delan 1668 , 1'impératrice étant accouchée d'un hls , la duchefle de Guife lui ecrivit & la complimenta fur la naiflance de ce prince qu'on appella 1'archiduc. L im■ pératrice lui fit réponfe , par une lettre du 10 mars de la méme annee , pleine d'honnêtetés & de témoignages d aifecFion particulière , la traitanr dans la lettre , & fur la fufcription , de ma coufine la duckefe deGuije. Elle iouit de 1'honneur fterile de fon état, pendant que les héritiers demeu- rèrent en pofleflion de ia fuccefiion du ■duc de Guife. La guerre , qui s'alluma de nouveau entre la Erance & 1'Efpagne , peu d an- nées après le jugement de la rote , ar- rêta toutes les pourmitcï. ^ ^ |efle de Boffu auroit pu faire en France, fur les biens de M. de Guife.^ Elle chercha vainement a obtemr qu'on fit une mention d'elle dans le traité de Nimègue ; on ne crut pas devoir meier des intéréts particuliers avec la conciliation des droits des fouverains. Elle mourut en 1679,danslemonaftère G ïv  fj n rr/f des religieufes hofpiralières de Malines , ou fa firuation i'avoit obiigée de iS retljer' So" tombeau fut décoré du nom de duchefle ,.£„<• ,r,«nt',nnnr.es dans les ar- tommc u. uvuj rêts dei66$&i666 ,les parties fujjent tenues de plaider fur l'appellation comme_ d'abus de la célébration du mariage , permijion du curé, & difpenfe de bans ; faifant droit fur les appellations comme d'abus, il fut dit qu'il a étémal, nullement & abufivement procédé & célébré, tant par le curé de Sainte-Gudule , que par le fieur Mansfeld, vicaïre-génér'al de 'l'armee ; qu'il a été pareillement mal , nullement & abufivement procédé & jugi a ia rote , & en confquence que le prince de Berghes f it débouté de fes demandes. & oppofitlons , avec dépens. Le prince de Berghes , de fen coté , forma une nouvelle demande de quelques fommes qui n'étoient pas comprifes dans Ia première ; &c demanda que la liquidation de toutes celles qu'il vouloit fe faire adjuger , mème l'examen & la difcuiÏÏon des tittes de créance, fulfent renvoyés par-devant tel de G YJ  i ? 6 Mariage Mefiieurs qu'il pkifoit a la cour de commeccre. M= Robert de Saint Martin , dans cette caufe célèbre, dcfenfeur de Monfieur & cónforts , divifa fes moyens en trois parties. La première partie comprend les appellations comme d'abus interjettées par Mademoifelle de Guife , & reprifes par Monfieur, Monfieur le prince &c Madame la duchelfe d'Hanover. Elles ont pour objer les commillions de la rote, citations données en conféquence, fentences préparatoires , & fentence définitive du 9 juin 1666 , qui a déclaré le mariage dont il s'agit valableö^ quoseumque effccfus , pour toutes fortes d'eftets. 11 y a quatre moyens d'abus. ( Le premier eft la contravention a 1# pragmacique-fancFion & au concordas, Tic. de caufis. Omnes & finguU caufe cpud ïllos judices qui de jiirè aut confuttudine cognitionem kabenl in regno > lerminari & finiri debeant. Toutes les caufes s fuivant le droit ordinaire de la connoi/Fancedes juges du royaume , j doivent être rerminées. Le duc de Guife éroir né a Paris fujetdu roi; fon domicile étoit a Paris; il h'en avoit ja-  du Duc de Guife. 157 jnais eu d'autres: fon voyage & fon féjour en Flandres n'écoient que des égaremenrs des premières années de fa vie. II n'étoit a Bruxelles que comme un étranger , il avoit 1'efprit de retour en France oü étoit la fituation de fes biens, de fes honneurs Sc de fa fortune; il y eft revenu , Sc il y eft mort. Ainfi la queftion de la validité , ou invalidrte.de fon mariage, a du étre jugée Sc terminée eri France. Et j quand la rore de Rome a voulu prononcer fur ce mariage , elle a exeédé fon pouvoir: fon jugement eft donc une contravention formelle au concordat , Sc par conféquent un abus (1). Le fecond abus réiulte de ce que, depuis la mort du duc de Guife , arrivée en 1(364, les juges d'églife , ni a Rome , ni même en France , ne pouvoient plus connoitre de la queftion (1) Quand il s'ngit , en France , de juger les Catifcs de mariage qui furviennent entre les fujets du roi trèschretien , il faut , qu'en première inftance , 1'affaire foit portee devant 1'évêque , ou 1'official des parties. Quand un feigneur de France , dit Papon , obtint , au cominencement du dernier fiècle , un bret du pape , pour tirer du tribunal de 1'officia.l de Paris une conteftation mrvénue aifclujet  ï 58 Mariage de la validité ou i.nvalidité de fon mariage avec la comtefle de Boffu ; paree que le pouvoirqui appartient aux juges d'églife , de connoitre des caufes de mariage , eft limité au facrement entre les deux perfonnes entre lefquelles il s'agit du Hen du mariage, dejesdere ma- \ trimo.'ü. Mais , quand 1'un des deux eft dé- , cédé , la queftion d'état eft relative au j remporel , dont la connoiflance appartient uniquemenr a la juftice royale. D'ailleurs , quand , entre le cluc de Guife & la comrefle de Boffu , il y auroit eu procés pardevant des juges d'églife en France , & qu'après avoir paffe dans les premières jurifdicFions ecclé fiaftiques , il auroit été porté a Rome; le pape auroit du déléguer des commiffaires en France , &c non pas les auditeurs de la rote de Rome. cfë fon mariage , & le faire commettre a Parchevéque de Lyon , & dix autres prélats du royaume qu'il pourroit choifir a fa volonté , il y avoit cette claufe dans le bref,. qu'il étoit accordi non-obflant les privileges de l'érlifegalli;ane , pour cette fois feulement, 6* du confentsment du roi. Conférences eccléfiaitiques fur le mariage , tome 1 , livre 1, conlérerjce 5 » §4-  du Duc de Guife. ï?? » Dans le fait, l'afiignation donnée a. Mademoifelle de Guife , a la requête de la comtelTe de Boffu, étoit une actibn perfonnelle : cette aóbon avoir pour objer les biens de Ia fucceiiion du duc de Guife \ ainli elle ne pouvoir être portée a Rome, ni pardevant aucuns juges d'églife , qui en étoient incompétents , luivant les articles 1,2, [3 & 4 de 1'ordonnance de 1 539. 11 y a donc eu abus d'avoir cité a la rote Mademoifelle de Guife , tant en fon nom , que comme tutrice AeLmdsJolèphdue de Guife, fon nevelig Le troiliètne moyen d'abus réfulre de ce que la comtelTe de Boffu a continué fa procédure au mépris & au préjudice des défenfes expreflks portées par les arrêts du parlement des 31 mars, & 16 feptembre 166"5, dontle dernier fait pareillement des défenfes a Mademoifelle de Guife de procéder a la rote. Ainfi ces procédures & cette fen' tenee forment un attentat non-feulement contre Tordre public des jurifdicHons , mais encore contre Pautoriré fouveraine des arrêts de la cour; ce qui eft le plus grand de tous les abus.^ Le quatricme moyen d'abus réfulte de ce que la comtefle de Boffu a voulu  i6b Mariage porter a Ia rote de Rome une caufe dont la juftice royale étoit faifie , par fon propre fait, au moyen de 1'oppo-' fition qu'elle avoit formée au fcellé du duc de Guife, le i o Juin 166 ^ , dans laquelle elle fe qualiiie ducheffe de Guife. Mademoifelle de Guife avoic demandé main-levée de cette oppofition , & foutenoitque la comtelTe étoit mal fondée dans fa qualité de ducheffe de Guife. Ainfi la juftice eccléfiaftique , ne pouvant jamais prendre connoiffance des affaires dont la juftice royale eft faüie ; tous ce que la comtefle de Boffu a fait a la rote, depuis cette oppolition , eft un abus manifefte. Le prince de Berghes objeéfe , en premier lieu , que c'éroit le duc de Guife qui s'étoit, le premier, pourvu a larore, & qui avoit fait afliguer ia comtefTe de Reponfe. Premiérement , le cönfenrement du duc de Guife n'a pu autorifer cette procédure. Le pouvoir des juges ne dépend point du confentement des parties , ni pour les juges etabhs dans le royaume , ni encore moms pour les juges qui font hors ie royaume. La difpofition en eft exorefte dans les articles 31 , 44& 45, des 11-  du Duc de Guife. 161 ïbertésdë l'églifegaliicane , fur lefquels les arrêts font rapportés dans les preuves des libertés. Secondement, le confentement du duc de Guife ne pouvoit produire aucun effet après fa mort. La nature de 1 affaire avoit changé. H ne s'agilfoit plus defce< dere mairimonii , du hen du mariage , 1 mais feulement des droits temporels. Jamais Mademoifelle de Guife n a procédé a la rote. Ainfi le confentement du duc de Guife, nul en foi, etoit devenu caduc & inutile. Troifièmement, la comtelfe de hoflu n'a jamais voulu comparoitre en juftice ni avec le duc de Guife , m avec les héritiers. Quand U duc de Guife a vou u procéder a la rote, elle ny a pas voulu procéder. Quand les héritiers du duc de Guife ont voulu procéder en France , la comtelfe de Boffu eft aüée a Rome pour y furprendre une fentence par defaut. Ainfi, toute cette procédure eft , de la part de la comtefle de Boffu t irréguliere & abufive. Le prince de Berghes objefte , en fecond lieu , que le concordat fait une exception : Omnes caufe, excepus majoribus in jure denominaüs , & pretend que la queftion de ce mariage étoit une  ï6"2 Mariage caufe majeure , Sc comme telle réfervc'e a la cour de Rome. Réponfe. Premiérement , il n'a jamais été dit qu'une caufe de mariage foit une caufe majeure ; Sc au contraire , c'eft une caufe ordinaire entre les fujets du roi. Les caufes majeures font les éreótions , tranflations d'évêchés, abfolutions en certain cas; crimes d'hcréfie, difpenfes de parente en certains degrés ; & autres chofes de cette qualité, dont le pouvoir eft attribué au laint Siège, en y procédant canoniquement. Ainfi la queftion de la validité ou de 1'invalidité d'un mariage d'un fujet du roi, n'eft point comprife dans ce qu'on appelk caufe majeure. Secondement, fi quelquefois les papes ont pris connoifiance des caufes de mariages des rois Sc autres fouverains, ce n'eft pas une conféqnence pour les fujets du roi; Sc même, en ce cas , les papes onr commis des archevêques ou évêques fur les lieux , pour en connoirre : Sc jamais cela n'a été porté a la rote de Rome , qui eft le tribunal de la juftice des papes comme princes temporels j Sc non pas comme chefs de 1'églife. Le prince de Berghes objecle j ea  du Duc de Guife. z&T, troifième lieu , que la comtefle de Boffu n'a point eu connoiflanee des arrêrs de la cour des 31 mars k 16 feptembre 166$ , Sc 10 décembre 1666. Réponfe. Premièrement ces arrêts ont été fignifiés a Baudouin , procureur au chatelet , chez qui elle avoit élu fon domicile , 8c encore aux fergents porteurs des commiffions Sc citations de la comtefle de Boffu. Secondement, ces arrêts ont été publiés dans toutes les communautés des huifliers, fergents 6c notaires. Troifiemement, la comtefle de Boffu a fi bien co mm ces arrêts, qu'elle y a obéi , qu'elle n'a jamais fait iignirier les fentencesdelarote des3i mai itfftf, Sc 9 juin 1666, & n'a jamais formé d'oppofition a ces arrêts , paree qu'elle fcavoit bien qu'elle y étoit mal fondée. Le cinquième moyen d'abus réfuke de la fentence par défaut du 13 mai 16"5 6" , qui a adjugc une provifion alimentaire de 1500 livres par mois. Les juges d'églifenepeuvent pas prononcer fur le temporel. Quand , en France , les officiaux ont entrepris de donner de pareilles fentences , le parlement les a toujours déclarées abufives. A plus forte raifon y a -1 - il abus dans une  164 Mariage Wncerendue a Ja rote fur ces objets." r elfc l\ne enrreprife d'une jurifdiclion wrangere fur le remporel du rovaume , ou lont fitués les biens du duc de Guifi(i). La fentence du 9 juin 1666 , auffirendue par défaut , eft pleine d'une mfanite d'abus. Premièrement, elle porte que les procureurs du duc de Guife feroienttenus d'occuper j même depuis fa morr; ce qui eft contre les premiers principes du droit. Secondement, elle porte que Mademoifelle de Guife n'ayant point comparu , 1'auditeur de rote a nommé un procureur pour elle: Pompeio Torcio ad hanc ^ litem a nobis eieclo. Ce qui eft inoui contre 1 ordre judiciaire & même (1) In Gallia nullo modo patefl judex ecclef™ftlcus, nequidcm accejforiè, de do te cognofcere. Molmsus ad cap. prudemia de donat. inter Vir, & uxor. Simul at que pontificius juridicus Juper fatdere funtlus el! officio, nullwn Ulïfupenfl dedote judicium, paelifve conjugalibus aut 'arrabone , catcrifque hujufmodi paEiorum connubialium appendicibus : Pontificio enim juridico pro. nuntiante fuptreo quod intereft obnon impïètum paeTum nuptiale , locum effe provocationi ad Jenatum pluribus arreft is juiicatum eïl. CW * apolu. c. 1, aum. ij.  du Duc de Guife. 16$ contre toutes les régies de la liberté naturelle. Un procureur eft un homme de confiance. Qui jamais a imaginé de difpofer de la confiance d'un autre, & de la placer a fon infcu ? Troifièmement, la fentence porte qu'il ne fera pas permis d'en interjetter appel. Oü les juges de la rote ontils pris le pouvoir d'empêcher les fujets du roi de recourir a fa juftice fouveraine, contre ies injuftices qu'ils pourroient éprouver de la part de ce tribunal ? Quatriemement, cette fentence con.tient cette ancienne erreur de la jurifdiétion eccléfiaftique , qui menacoit d'anathême ceux quin'y obéiroientpas: -erreur qui a tant de fois été réprouvée &c condamnée par des arrêts de la cour. Cinquiemement, cette fentence déclaré le mariage dont il s'agit validum & legitimum ad quofcumque effeclus , valide & légitime pour toutes fortes d'effets. Enforte qu'elle prononce fur les effets civils, qui regardent le temporel du royaume. De-la , il fuit qu'elle eft infectie de plufieurs abus également •contraires aux droits du roi, aux loix de -1'état, a 1'autorité de la cour, a la pro-  i6f5 Mariage cédure judiciaire , 8c a 1'ordre public des jurifdicFions. La feconde partie de la caufe comprend. les .abus qui fe rencontrent dans la prétendue célébration de mariage dont il s'agit. II y en a cinq principaux. Le défaut de préfence du propre curé; le défaut de témoins ; le. défaut de publication de bans ; le défaut de bénédiction 8c de folemnité de 1'églife j &c le vice effentiel de la clandeftinité. Dans le droit, a 1'égard de la préfence du curé, ia loi eft conftante , écrite dans le chapitre premier, felf. 24 , de rtformatione matrlmonii , du xoncile de Tcente. La France a adopté cette difpoiition du concile , en 1'inférant dans les ordounances de 15 80, 163 9, & 1697.Elle eft pareillement obfervée a Bruxelles -en vertu d'un concile provmcial tenu a Malines en 1570 qui porte ces termes : Qu£ de fponfalibus & matrimoniis ■per concilium Tridenrinum decreta funt , eadem provincia/is fyrwdus Kic non in novat. Ce que le concile de Trente a ordonné fur les fiancailles 8c fur les ma•ïiages , le concile provincial n'y apporte aucun changement.  du Duc de Guife. 167 Dans le fait, Charles Mansfeld qui, «kus fon certificat, dit que ce mariage a été célébré en fa préfence , n'étoit poi«t curé. 11 n'avoit donc pas par luimême , le pouvoir de célébrer ce ma¬ riage. Mais, dit-on , il y étoitantorifé, tant par la permiflion que le curé lui avoit donnée, & qui eft tranfcrite au haut du certificat dont on a parlé , que par la qualité de fubdélégué de la délégation apoftolique dans les armées du roi d'Efpagne en Flandres. Contre la permiflion du curé dê Sainte-Gudule , il y a plufieurs moyens qui en détruifent 1'effet. Premier moyen. Le curé de fainteGudule pouvoit donnet une permiiTion par rapport a la comtefle de Boffu , , qui éroit fa paroiflienne ; mais il n'en 1 pouvoit donner par rapport au duc de '. Guife, qui n'étoit point fon paroifïïen , ) & qui, n'ayant point d'autre domicile que 1'hötel de Gufe a Paris, n'avoit point d'autre paroifle que celle de faintj Jean-en-grève de certe ville. L'article ! premier de 1'ordonnance de 1^39 porte : Fdifons tres - expreffes défenfes & I xous prétres , tantfxulicrs que réguliers, ds célébrer aucun mariage qu entre leurs  168 Mariage vrais & ordinair es paroijfflens 3 fans la. permijfion par écrit des curés des parties, ou de révêque diocéfain , non-obflant les coutumes immémoriales & privileges que Venpourroit alléguer au contraire. Ainfi la permiflion du curé de la comtefle de Boffu , fans la permiflion du curé du duc de Guife, étoit invalide. Le fecond moyen réfulte de ce que le duc de Guife étant a Bruxelles en qualité d'étrangerun curé ne pouvoit le marier fans la permiflion exprefle 5c par écrit de 1'archevêque de Malines , fuivant la loi écrite dans le concile de Trente , felf. 24, cliap. 7 , Sc dans le même concile de Malines , au titre de fponfalibus , Sc qui eft encore répétée dans le concile provincial de Cambrai , tenu en même-tems , titre 11, chap. 2. Le fieur Mansfeld fcavoit bien que le duc de Guife étoit Francois ; par conféquent étranger a Bruxelles , puifqu'il lequalifie Henri de Lorraine duc de Guife. Ainfi le curé de fainte-Gudule, ne pouvant valablement le marier fans la permiflion par écrit de 1'archevêque de Malines , la permiflion du curé ne donnoit pas au fieur Mansfeld un pouvoir que le curé n'avoit pas lui-même j Sc  du Duc de Guife. 169 Sc cette négligence de recourir a 1'aui tori té de 1'archevêque de Malines , étoit d'autant moins excufable , que ce prélat étoit alors a Bruxelles , a 1'occafion de la mort du eardinal Infant, qui y [mourut le 9 novembre 1641 , & dont BI célébra lui-même les funérailles , le 15 du même mois. Troijième moyen. Le duc de Guife , jni la comtelfe de Boffu n'étant point hommés dans la permiiTIon , elle eft tabulive en foi; & le lieur Mansfeld n'a fpu s'en fervir que dans un efprit de üfraude , qui rend tout ce qu'il a fair. | nul & de nul efièt. L'abus qui vicie intrinsèquement Ia I permiflion fe préfente d'abord. C'eft tune permiflion particulière , laquelle , Uie contenant ni les noms , ni les qualitcs des perfonnes pour qui elle eft ac- ; aclus incerti nulli funt. ! ' Si ce principe a lieu dans les affaires 1 TfMnnnrpïlpc . rnmmp nniir Ips rurellps ; les donations , les legs, les ventes s &c autres actes) a plus forte raifon a-t-il lieu pour les affaires eccléfiaftiques. Si un évêque donnoit un dimiffoire a nu .< homme fans le nommer } s'il donnoit Tome XIV. H  iyo Mariage aufli la provifion d'un benefice fans nommer la perfonne, le dimifïoire & la provifion feroieiit nuls.& abüfifs. Ainfi , quand le concile de Trente a autorifé ies mariages fairs par un prêtre qui avoit la permiflion du propre curé , cela s'entend d'une permiflion 'exprefle & légitime; &c non pas d'une permiflion vague & incertaine. L'édit du mois de Mars porre permiffionfpécidle; Sc, en cela , eet édit n'a fait qu'exprimer le fens & 1'efprit du concile, qui fuppofe que le curé a ïnieconnoiffance particuliere & perfonnelle des perfoimes qui fe marient , Sc fans laquelle fa permiflion , étant deftituée de cette connoiffance , eft nulle. En effet, aux termes de cette permiflion , le fieur Mansfeld pouvoit maner telle perfonne qu'il auroit jugé i propos avec telle pafoiflienne qu'il auroit voulu de la paroifle de Sainte-Gudule. D'ailléurs les termes de cette permiflion ne convenoient ni a la comtefle de Boffu , ni au duc de Guife; puifque luri Sc 1'autre éroient des perfonnes 'Zfè's — connues & très-diftinguées ; en f orte que la fuppreflion de leurs noms spi qdalités ne peut próvenir que d'un  du Duc de Guife, iyt concert de fraudes & de iuppofitions , pour cacher un mariage qui n'auroit pas été fait , & pour lequel la permiflion n'auroit pas été accordée , fi l'on avoit feu que e'étoit pour eux. II n'importe d'examiner fi le curé a f^u, oun'a pas feu 1'ufage que l'on vouloit faire de cette permiflion. S'il 1'a feu, il a trahi fon devoir, & a abufé de fon autorité. S'il ne 1'a pas feu , il a été trompé; fa permiflion lui a été extorquée par fubreption & obreption j elle eft par conléquènt nulle de plein droit. Mais ce qui eft certain , c'eft que le fieur Mansfeld a abufé de cette permiffion , en s'en fervant pour le mariage d'un prince de la maifon de Lorraine, 'chef de la maifon de Guife, duc èc pair de France. Ces expreflions nobtli viro miiuari, a une perfonne noble militaire , peuvent - elles fuppléer cette qualité , fereniffimus princeps dux Gui~ fi& y fon altefle féréniflime le duc de Guife ? Er peut-on préfumer que ni le duc de Guife , ni la comtefle de Boffu , aient jamais demandé cette permiflion j puifque , n'ayant point exprimé leurs noms , ce feroit, de leur part, une furprife qui annulleroit cette permiflion ? Hij  !yi Mariage S'ils nel'ont pas]demandée , comment eft-il pombie qu'on ait pu fe fervir , a leur égard , d'une permiffion oü ils ne font point nomrnés, & qu'ils n'avoient pas demandée ? La permiffion ne porte point qu'il y ait eu aucun bans publiés dans la paroifle de Sainte-Gudule : elle ne porte aucunes conditions d'obferver les formes prefcrites par les canons j elle n'eft: point tranfcrite fur les regiftresdes mariages de Sainte-Gudule , comme le pretcrit Tarnde premier de Tordonnance de 1639; «He eft fousfeingprivé j elle eft du même jour, 16 novembre 1641, que la prétendue célébration. Ainfi cette permiffion , etant abiiiive en foi, furprife par un efprit de fraude , contraire a la caufe finale du csncile , £c dénuée de toutes les circonftances d'un acte légitime; bien loin d'autorifer le fleur Mansfeld , fait voir qu'il a abufé de eet écrit, & qu'il na eu aucun pouvoir légitime decélébrer ce mariage, qui , par conféquent, a été fait fans la préfence du propre curé , & fans fa permiffion légitime. Quant au prétendu pouvoir du fieur Mansfeld, en qualité de vicaire milir  du Duc de Guife. 173 taire dans les armées du roi d'Efpagne Sc en Flandres , il eft auffi mal fondé par plufieurs moyens. Piemier moyen. La bulle du pape Vrbain FIU , fur laquelle le fieur Mvisfeld fonde fon pouvoir , eft uniquement relative aux fecours fpirituels don: une armée peut avoir befoin pour les Sacremenrs de 1'Euchariftie & de la Pénitence , pour abfoudre de tous les cas, même réfervés \ confacrer de3 autels portatifs; bénir des églifes pollues ; exercer la jurifdidion fur ceux qui font dans les camps Sc armées , éc qui, ne pouvant en fortir, ni traverfer les paffages fermés pendant fa guerre , ne peuvent s'adreffer a des pafteurs ordinaires : mais elle ne parle point du Sacrement de mariage , 8c encore moins du pouvoir de le célébrer, ni de fnppléer a. la préfence du propre curé , a la publicacion des bans , 6c aux autres folemnités requifes par les conciles &c les ordonnances des rois. Tous les canoniftes diftinguent les Sacremenrs de ncceffité , comme 1'Eucbariftie &c la Pénitence , des SacreIments de choix Sc de volonté , comme 1'Ordre &c le Mariage. L'on ne dira ;pas que le fieur Mansfeld eüt le pou; H iij  174 Manage voir de conférer les ordres facrés , ni d'exercer cette puiffance réfervée aux archeyêques & aux évêques. Ainfi Pen ne dira pas qu'il eüt celui de célébrer des mariages que route 1'églife êc tous les rois chrétiens ont attribué exclufivement au miniftère des curés. Ainfi, en fuppofant, contre la vérité, que la bulle parlat de cette difpenfe, il y auroit lieu d'appeller comme d'abus de fon exécution, paree que cela feroit contraire aux decrets du concile de Trente, 8c fujet a, de terribles inconvénients. Le fecond moyen eft que cette bulle ne donne pouvoir au deiegue apoftolique , fur ceux qui compofent les armées , que dans le rems qu'ils font acTuelle« ment dans les camps : Pro falubri direclione & animarum falute eorum qui in cajlris degunt & morantur. Quand les armées font féparées, les chofes retournent dans le droit commun: le vicaire militaire , qui avoit pouvoir fur les foldats dans le camp , n'en a plus fur les foldats qui ne font plus dans le camp. II nepeut pasexcéder les termes de fa commiffion , ou délégation; 8c quand il Pexcede , c'eft un abus 8c une nullité qui réfulte du défaut de pou-  du Duc de Guife. ^ ij% voir : Non eft major defeclus quam po* teftatis. Dans Ie fait, ce prétendu mariage a été célébré dans la ville de Bruxelles, ls \6 novembre 1641. Par conféquent dans un tems oü il n'y avoit plus d'armées aflemblées , oü le duc de Guife &£ lacomreffe de Boffu n'étoient point fous le pouvoir d'un vicaire militaire, mais chacun fous celui de leurs fupérieurs ordinaires. Le treifTeme moyen réfulte de 1'excep» tion portée par la même bulle : In eos qui ibi pro Sacramentis ecclejïafticis militibus miniflrandis pro tempore erunt , qui tarnen in proprid dicecejt,fub qua illorum ordinarii jurifdiclonern fuam ordinariam in eos ex er eer e poffit, non funt. Ainfi , du moment que les foldats, ou autres perfonnes attachées aux armées, font retournés dans un diocèfe oü ils peuvent avoir recours a leurs fupérieurs ordinaires & légirimes , le pouvoir du vicaire militaire ceffe abfolument a leur égard. Bruxelles eft du diocèfe de Malines '} le paffage de Bruxelles a Malines n'étoit point interdit ; 1'archevêque de Malines étoit même alors a Bruxelles, a 1'occafion de la mort du eardinal Inli iv  I7f5 Mariage fant, décédé Je 9 du mois de novembre 16^41 , dans Bruxelles, dont 1'archevêque célébra, 011 le répete, les obfeques, ie 15 du même mois , veille du jour cs la célébration du mariage.' Ainfi le. Leur Mansfeld n'avoit ni jurifdiction , ni pouvoir. Le quatrieme moyen eft que, ni la comtéfte de Boffu , ni le duc de Guife \ ne peüveut être compris fous le terme militant es. A lcgard de la comtelTe' de Boffu , qui n'avoit jamais été a 1'armée , de quel droir le fieur Mansfeld avoit-il pouvoir, de célébrer fon mariage ? A Tégard du duc de Guife , i! n'a jamais été engagé dans 1'armée du roi d'Efpagne j il n'é.toit point fon fujet ; liéroit encore actuc-Üement archevêque de Reims, abbé de Sainr-Denis, & dé plufieurs autres abbayes j il commandoit un corps d'armée des troupes de 1'Empereur.Dans un pafle-pórt quele prince de Berghes a communiqué, donné par le duc de Guife, le 2 décembre 1641 , ileft qualifié Henri de L&rraine, duc de Guife , général de la ligue confédérée , commandant les armées de fa majejlé : Impériale aux Pays -■ Bas. Ainfi une i perfonne de fa qualité j &c du rang qu'il I  du Duc de Guife. 177 jtenoit alors , ne peut être confóndue dans une claufe générale de milïtanies: Digniores perfond, fub claufuld generalï non includuntur. Des perfonnes d'une ■fi grande dignité ne font point renfermées dans une claufe fi générale._ Quand le fieur Mansfeld auroir eu « pouvoir de célébrer quelques mariages I dans 1'armée , cela s'entendroit 3 tout :! au plus, d'un mariage d'un foldat avec ■ une vivandière: mais que cela s'entende I d'un pair de France , chef d'armée , arI chevêque & abbé j c'eft ce qui ne tom| bera dans 1'efprit de perfonne , prinI cipalement fi l'on confidere que cette bulle eft de 1'année 16x6 , qu'elle parle des armeescommandees par Ie Marquis de Splnola , qui étoit mort long - tems I avant 1'année 1641. II eft donc conftant que Ie fieur Mansfeld n'a eu aucun pouvoir de céléi brer. ce mariage, ni par la permiffion I du curé de Sainte - Gudule , ni comme I vicaire militaire ■, que c'eft, par conféI quent, un mariage fait hors la préfence I du propre curé 3 Sc , par cenféquent} ■: nul & abufif. Le fecond moyen d'abus , qui eft le I défaut de témoins , réfulte de la feule leéFure du certificat du fieur Mansfeld „ Hv  I7§ Mariage qui eft figné de lui feul; en forte qae toute la foi de la vérité & de 1'exiftence de ce mariage roule uniquement fur le feul témoignage du fieur Mansfeld : ce: qui eft contre toutes les loix divines &c humaines, & contre la difpofition exprelfe du concile , qui demande deux ou trois témoins dignes de foi; & de nos ordonnances qui en demandent quatre. II eft vrai que le-certificat porte que. ce mariage s'eft fait en préfence de la comteffe de Grimberghe , mere ; du comte de Minghen,. oncle de la comteffe de Boffu, & des fieurs, Happart ik. Vendevel, chanoines. d'Anvess & de Cam» b-rai. Mais , ni ces quatre perfonnes y ni le duc de Guife, ni la comteffe de Boffu n'ont figné ce certificat. Ainfi ce n'eft qu'une énonciation , & non pas une preuve. Toutréfide donc en la feule fignature du fieur. Mansfeld; ce qui ne peut être autorifé en juftice dans une affaire de I'importance de celle dont il s'agit , principalement dansun aéle qui vient d'un pays étranger, & qui émane d'une main- auffi fufpeóteque celle du fieur Mansfeld.. Le. prince de Berghes a fait deux objc&ions; la première , que > fuivant  du Duc de Guife. 179 1'ufage des Pays-Bas , les témoins ne 11gnentpoint: & la fecpnde, que ce mariage eft infcrit fur le regiftre des mariages de la paroifte de Sainte-Gudule. On répond premiérement, a. 1'égard de ce prétendu ufage , qu'il n'eft juftifié que par un certificat de quelques icurés de Bruxelles' du i 2 décembre 1698 , depuis que le procés dontil s'agit a été intenté. Ainfi, outre que des certificats de: cette qualité ne font d'aucune confidération en Juftice , il eft évident que c'eft un effet du crédic du prince de Berghes , gouverneur de Bruxelles qui a extorqué ce certificat s pour s'en faire une preuve dans le proces dont il s'agit. P'ailleurs, le certificat de ces curcs-. fuppofe un mariage célébré par le propre pafteur. Mais il s'agit ici d'un mariage célébré par un autre prërre , qui n'avoit j aucun caraétere public. Ainfi ce pré! tendu ufage ne fuppléeröit pas au défaut de la preuve , qui doit être com. plette , & qui ne peut jamais être for-: mée par le certificat, oü la dépofitiora'. : d'un feul homme fans caraétère public parolt dans un mariage oü l'on a, violê: les principales régies,- Enfin j.ce précenda ufage- poursoi^ [ •- Wf$  18 O Mariage être bon entre les Flamands : mais il n'a aucune force entre une Flamande &c. un Francois. II falloit arranger les chofes de mauière que 1'acFe put avoir foi en France. On répond , en fecond Keu, a 1'égard de 1'infcription fur le regiftre : premiérement , ce regiftre n'a point été apporté a la cour. Ainfi tout ce qui en eff cité par le prince de Berghes ne mérite aiicune croyance : & quand il a fait plaider que 1'acFe de ce mariage étoit écrit de la main du curé de SainteGudule, c'eft une allégation fans aucune preuve. Secondemenr, ce qui eft écrit fur le regiftre eff encore figné du fieur Mansfeld feul. Ainfi, quand il feroir vrai ( ce qui ne paroït pas ) que le curé eut écrit ce mariage fur fon regiftre , il feroir vrai, en même-tems, qu'il n'auroit pas voulu engagex fa foi pour eet acFe , mais feule.ment i'abandoimer fous la foi du fiéur Mansfeld, qui a écrit au bas: Ita efi , Carolus a Mansfeld. Troifïèmemenr, ce qui eft écrit fur ce regiftre ne fe rapporte point au certificat donné .par Ie fieur Mansfeld , Ie 50 novembre 1641 , dans un point ef/eruiel, Le regiftre ne fait aucune mentïhn , aj de Ia publicatiou des bans ,  du Duc de Guife. 181 ni d'aucune difpenfe de cette publication -y il en eft feulement parlé dans le certificat du fieur Mansfeld , qui dit avoir accordé la difpenfe de trois bans. Ainfi cette contradicfion, entre le regiftre Sc le certificat, détruit la foi de 1'un Sc de 1'autre. Quatrièmement , dans une copie figurée de ce regiftre compulfé contradiftoiremenr avec le prince de Berghes, il paroit que ce mariage a été infcrit fur I ce regiftre après coup: car , par 1'ordre ji de 1'écriture , ce prétendu mariage , I daté du i6"novembre 1641, eft après I d'autres mariages datés des 25 novemI bre 1641 , Sc 6 février 1642 ; ce qui fait voir que cette mennen du mariage dont il s'agit n'a été mife dans ce regif¬ tre qu apres coup. Cinquièmement, ce qui eft fur ce regiftre ne peut produire plus d'eftetque le certificat du fieur Mansfeld; Sc h , aux termes du certificat j il y a des abus, comme l'on n'en peut pasdouter, * ils ne font pas couverts par 1'énouciation |, dans le regiftre. Le troifième moyen d'abus réfulte du défaut de publication de bans , foit dans la paroifle de Saint-Jean a Paris , 1 qui étoit la paroifle du duc de Guife ,  182 Mariage foit dans la paroifle de Sainte - Gudule * Bruxelles , qui étoit celle de la comtefle de Boffu • & de la. difpenfe abufive de trois bans , énoncée dans le certificat du fieur Mansjeld , comme donnée par lui pour caufes qui Pont détermine : Fat, d d nobis prodamationum difpénfatione, oh caufas animum nojirum moventes. L'abus de la difpenfe de trois bans eft fondé fur le concile de Trente ,. hco fup. citato , qui ne donne qu'aux arcbeyêques & évêques le pouvoir de 1'accorder ; & fur Pordonnance de Blois j qui veut qu'ils n'ufent de ce pouvoir, que pour des caufes légitimes, & a la réquifition des plus proehes parents des parties contraéfantes. Ainfi le fieur Mansfeld n'a point eu le pouvoir d'accorder cette difpenfe : & il ne pouvoit pas fe Parroger comme fnbdélégué du Saint-Siège. Les termes de la bulle du pape U> bain V]Il; qui n'en fait aucune mention , Pen excluoient, D'ailleurs , quand les archevêques & évêques donnent la difpenfe dés bans, c'eft en vertu de 1'autorité qui leur appartient dans leurs diocèfes comme ordinaires , & non poinfcomffiie déiégués du Saint-Siège. Or le pape-  du Duc de Guife.. 183 n'a pas le droit de fe faire fubftituer , ni de dèléguer pour les foncrions qui ne lui appartiennent pas , Sc qui font attachées a. la qualiré d'ordinaires. A Pégard du défaut de publication de bans , c'eft un abus dans la célébration de ce mariage j puifque c'eft une contravention au concile Sc a 1'ordonnance , qui requièrent cette publication , pour rendre les mariages folemnels Sc valables j Sc, quoique cette publication de bans ne foit pas repétée 1 dans les claufes irritantes du décret du i concile, elle ne lailfepas de faire partie 1 des folemnités qu'il a requifes, C'eft une loi dont les magiftrats fe fervent fuivant les différentes circonftances des affaires qui ie préfentent, Sc qui , par la jurifprudence des arrêts , a toujours fervi d'un moyen d'abus dans deux circonftances qui fe rencontrenr dans 1 i'efpece dont il s'agir. La première, lorfqu'il paroït que l'on a efquivé cette folemnité, dans la crainte de provoquer des oppofitions qui auroienr empêché le mariage: car alors la loi fe venge du mépris qu'on a fair de fa difpoiition & de fon autorité. On ne peut pas douter que , s'il y avoit eu des bans publiés,foit a Paris.,.  184 Mariage foit même a Bruxelles , la ducheffe de Guife , mère du duc de Guife , ne s'y fut oppofée , & n'eür empêché ce mariage ; les parens , les amis du duc de Guife Ten auroient dérourné ; le duc de Guife lui-même fe feroit garanti de la furprife qui lui fut faite par la comteffe de Boffu. La feconde circonflance réfulte de lage qu'avoit alors le duc de Guife , Sc de fes rapports phyfiques Sc moraux. Quand un enfant de familie , qui n'a pas atteint lage de trente ans , fe marie contre le gré & a 1'infcu de fes parenrs , le défaut de publitation de bans dégénéré alors en un rapt , &*" opère une clandeftiniré qui produifent un moyen d'abus invincible. Cela eft fondé fur 1'ordonnance de 1 < 56" , Sc fur toutes celles qui ont été faites, depuis, au fujetdes mariages; fur les anciens arrêts de Machaut Sc de la Margueric , & fur les nouveaux arrêts de Senecq , Charlet, Br ion , & une infiniré d'autres. Le duc de Guife, en 1641 , n'avoit que 27 ans; il avoit fa mère vivante , il n'avoir point d'autre domicile que 1'hótel de Guife. Par ce défaut de puhlication de bans, on lui euleve fon  du Duc de Guife. 18^ fils ainé , chef de fa familie •, on le dérobe a fa patrie & a fa mère , avant qu'elle en ait eu aucune nouvelle. Elle sleft plaint de ce mariage : fes procurations de 1^44 & 1645 , rapportées en bonne forme , juftifient qu'elle n'a jamais voulu reconnoitre la comteffe de Boffu. Ainfi ce défaut de publication de bans fe trouve dans les circonftances dans lefquelles il a toujours été jugé un moyen d'abus. Le quatrieme mouen d'abus eft fondc fur le défaut de bénéd iétion nuptiale & de folemnité dans 1'églife. Ce moyen réfulte du certificat du fieur Mansfeld , qui porte , pr&fati de yerbo de pr&fenü celebrarunt matrimonïum. Le fieur Mansfeld ne dit point qu'il ait donné la bénédi&ion nuptiale, ni que ce mariage air été célébré dans une églife , chapelle ou oraroire. Dans le droit, les mariages par pa-, i roles de préfent font expreiTément prohibés par 1'article 44 de 1'ordonnance de Blois. Le concile de Trenre porte que le prêtre prononcera labénédiébion, ego vos conjungo , dans Pé'glife intra miffarum folernnia. L'obmiflion de toutes ces folemnités ne donne aucune idéé d'unjmariage: ce n'en eft, tout au plus,  Mariage que la figure. On a dit que le fieur Mansfeld avoit adminiftré le facreraenr de mariage, & que la célébrarion s 'étoit fake dans la chapelle de 1'hótel de Grimberghe. Mais , outre que le duc de Guife étoit feul , fans être aififfé d'aucun parent , ami , ni même d'aucun officier ou domeftique de fa maifon ; fi la fcène s'étoit pafTée dans 1'hótel de Grimberghe , cette circonftance prouveroit la féduétion exercée contre le duc de Guife : féduótion dont il s'eft toujours plaint. Mais le certificat du fieur Mansfeld , auquel on ne peut rien ajouter , ne fait aucune mention de bénédiótion nuptiale , ni de la chapelle : c'eft une allégation fans preuve , qui tombe d'ellemême. Le cinquieme moyen d'abus eft Ia clandeftinité de ce mariage , qui eft prouvée par plufieurs circonftances. Premièrement, par 1'obmiilion de toutes les folemnités , de préfence du curé, de bans, & de bénédiótion nuptiale. Secondement , par la précipkatiora des aótes qui font tous du même jour. Le contrat de mariage , la permiffion du curé de Sainie-Gudule, la difpenfe1  du Duc de Guife. 187 des bans, Facie de la célébration y tout I cela n'a qu'une même date, 16 novembre 1641. Troifièmement , le complot fait pour furprendre Sc féduire le duc de Guife feul , a qui l'on fait figner un contrat de mariage fans appeller même un notaire. Cet acFe eft un écrit , fous feing-privé , qui n'eft point fait doublé , dont la minute originale eft, en même-tems , emportée par la comtefle de Boffu j écrit par lequel on fait promettre par le duc de Guife des avan- 1 rages exceflifs a la comtefle de Boffu , un douaire de cinquante mille livres par an , qui eft plus fort que celui qui fe donne aux princefles du fang, même 1 aux filles de France ; une chambre étoffée , Sc des pierreries pour 75,000 livres , pendant que , de la part de la comtefle de Boffu , elle n'apporte rien en mariage , & que l'on fe contente de I) dire qu'elle fera tenue de donner notice de fes biens , ce qui n'a jamais été fait: Sc on ajoute que , fi la comtefle de Boffu meurt fans enfans , tous fes biens retourneront a fes héririers colla-' téraux , fans aucune charge de dettes. Enfin 1'état du duc de Guife , étranger , fugitif a Bruxelles, condamné a  18 8 Mariage mort en France pour crime de lèfev majefté , comme ayant les armes a la main contre le roi, encore titulaire de Farchevêché de Reims , Sc de cinq ou Fix abbayes; tout cela, joint aux réclamations du duc de Guife contre ce mariage , au procés porté a la rote , au yoyage du duc de Guife a. Rome , a fa plainte de 1^55, fait un amas de plufieurs circonftances , dont une feule prouveroit qu'il aétéfait contre 1'efprit Sc la décilion du concile de Trente 5 mais qui, toutes enfemble, prouvent un mariage qui n'en a été que la figure , & dans lequel routes les loix divines Sc humaines ont été également violées. L'églife réprouve ces fortes de mamges : le concile déclaré, nullos & irritos , nuls & fans efFet, ceux qui font faits fans la préfence du propre curé , ou fans fa permiffion , ou celle de 1'évêq'ue , avec deux ou trois témoins. Ainfi; le prétendu mariage dont il s'agit, dans lequel on a cacbé au curé même le nom des parries, eft le plus abufif qui ait jamais paru aux yeux du public 3 Sc a la lumière de la juftice. Le prince de Berghes a objecFé des fins de non-recevoir , Sc au fonds s'eft défendu par les ufages des Pays-bas ,  du Duc de Guife. 189 . 1'autcrné du vicaire apoftolique , des lettres miffives du duc de Guife , de Madame Marguerite de Lorraine , ducheffe d'Orléans , de feu Mademoifelle , & même de feu Monfieur le Prince , dans lefquelles il prétend avoir des preuves que la comtelfe de Boffu avoit été reconnue pour ducheffe de Guife ; a quoi il ajoute un paffe - port qu'elle i avoit obtenu en 1651 3 pour aller en Efpagne , oü elle eft pareillement qualifiée ducheffe de Guife ; & plulieurs au- 1 tres lettres, dans lefquelles on lui a donné la même qualité. Quant aux prétendues fins de nonrecevoir , il ne peur y en avoir aucune j premièrement, paree que le duc de Guife & fes héritiers ont toujours fouteuu la nullité de ce mariage depuis 164 3 , époque de fon retour en France , jufqu'a préfent. Cela eft prouvé par le procés porté a la rote 9 qui eft demeuré ! indécis jufqu'a la mort du duc de Guife, comme il eft juftifié par la plainte rendue en 16$ 5 , & même par toutes les i lettres produites par le prince de Berghes , qui retentilFent par rout de ce procés ; par les appellations comme d'abus interjettées par Mademoifelle de Guife , non-feulement des citations  IC)0 Mariage 3. la ro:e , mais encore de la fentence du 9 juin 1666, qui avoit déclaré ce mariage valable. Le prince de Berghes a affigné Monfieur & conforts en reprife des appellations comme d'abus. Comment peut il donc dire qu'ils ne font pas parties capables, puifque lui même les a reconnues parties néceifaires pour le Jugement de ces appellations ? Si Monfieur & conforts n'ont pas plutót interjetté appel comme d'abus de la célébration , c'eft paree qu'ils n'ont eu connoilfauce du certificat du fieur Mansfeld qu'en 1699 , qu'il a été collationné devant M. Robert, confeiller, au mois de mars dernier. Cer appel comme d'abus eft le même procés qui a été commencé par le duc de Guife , continué par Mademoifelle de Guife , & repris par fes héritiers. Secondement , eet appel comme d'abus eft la défenfe des héritiers de Mademoifelle de Guife contre les demandes du prince de Berghes : ainfi ils font en droit de s'en fervir \ & l'on ne peut oppofer aucune fin de non recevoir, fuivantla maxime 3 qua funt tcmporalia ad agendum , funt perpetua ad excipiendum. Les moyens qui ne fe pref  du Duc de Guife. 191 crivent point pour Paction , font imprefcriptibles pour Pexception. Au fonds, tous ies moyens propofés par le prince de Berghes ne méritent aucune confidération ; & les certificats qu'il rapporce ne peuvent faite aui.une impreffion. Ceux de 1'archevêque de Malines du 24o£tobre 1643 , & 15 novembre \c\aC-, . avec Paddition de i6" ne font que des certificats mendiés, ac/cordés aux follicitations des parents ; de la comtefte de Boffu. Tous les autres certificats rapporrés par le prince dé Berghes , ne font que de Paiinée 169*) '■> les uns de quelques curés de Bruxelles, qui difent qu'ils tiennent tous les mariages faits par les  iy 2 Mariage vicaires militaires bons : les autres de quelques ayocats de Bruxelles , qui difenr que les contrars de mariage ne fe paffent point pardevant notaires ; & enfin un cerrificat de 1'archevêque de Malines, qui porte que ceux qui onr le pouvoir de difpenfer des bans, peuvent les fuppléer en célébrant les mariages. A 1'égard des certificats des curés &C des avocars, on répond premièrement que des actes de cette qualité ne peuvent faire foi en juftice. Ils font évidemmenr mendiés, & accordés au crédit du gouverneur du pays , pour en faire ufage dans le procés dont il s'agit. Secondement, ces actes cbnriennent des erreurs manifeftes , puifque les vicaires militaires n'ont aucun pouvoir de célébrer les mariages , ni de difpenfer des bans , moins encore quand les armées ne font pas alfemblées, & que les foldats ou officiers font dans les villes oü ils peuvent avoir recours aux ordinaires. A 1'égard du dernier certificat de 1'archevêque de Malines du 30 janvier 1699, il n'a aucune application au fait dont il s'agit. Cet écrit porte que ceux qui ont droit de difpenfer des bans, peuvent les fuppléer en célébrant les  du Duc du Guife. 19 3 les mariages ; mais il ne dit pas qu'un vicaire militaire ait droit de difpenfer des trois bans , ni de célébrer des mariages. Ainfi tous ces certificats font des aétes inutiles , qui ne peuvent couvrir des nullirés effentielles. A 1'égard des prétendues reconnoiffances par lettres miffives , & autres acres , on répond premièrement que toutes ces reconnoilfances font inutiles. II faut remonter au principe. Les . nullités d'un mariage ne fe réparent ! point par des lettres miffives , ni par : des qualités prifes dans des actes , reis qu'ils puifïent être. Secondement , la comtelTe de Boffu 1 n'a eu aucun acte authentique qui établifle la reconnoilTance & la polfeffion : dont on veut fe prévaloir pour elle. ; Toutes les lettres miffives que produit ie prince de Be'ghes ne font que des I compliments de perfonnes qui paroifI fent bien intentionnées pour la cora. tefTe de Boffu. Mais des lettres miffives ■ i font fouvent des témoignages fort :;trompeurs ; & ceux qui les ont écrites ^les dcfavoueroient eux-mêmes, s'ils fcavoient qu'on s'en voulut fervir en juftice. lome XI F. I  lyA. Manage Ces lettres (Tailleurs ont rapport a un procés \ ainfi elles prouvent que le mariage dont il s'agit étoit conteftc: elles ne forment donc pas une reconlioilTance. Quand on parle d'une reconnoif- fance, cela s enrend d un partage, d une tranfaótion , ou de quelqu'autre aéTe de familie : mais non pas de lettres miffives , quoiqu'elles foient de perfonnes de la même familie. II faudroit, au moins', qu'elles fuffent appuyées fur des ades judiciaires , ou des actes extra judiciaires. Troifièmement, en examinant ces lettres, elles ne renferment rien dont le prince de Berghes puiffe tirer aucun avantage. Le principal fait qu'elles atteftent, eft que la Reine mère avoit donné Ie tabouret a. la comteffe de Boffu. Mais ce fait , ayant été éclairci, fe trouve n'être pas véritable ; &c, au conïraire, la comteffe de Boffu n'a jamais eu 1'honneur de voir la reine mère qu'une feule fois au Val-de-Grace , pü elle fur introduite a la faveur de quelques religieufes , oü elle demeura debout, & fur appellée la comteffe de Boffu, Sc jamais ducheffe de Guife : &C de même dans les couvtnts de Mont-  da Duc de Guife. ig<) martre & de Charonne, elle n'a jamais été appellée que la comtefle de Boffu. Les lettres du duc de Guife ont fïni au commencement de 1644. Par ces lettres, il 1'éloigne toujours d'auprès de lui , la détourne de venir en France. Et quand on voit qu'aufli tót qu'il fut revenu dans le royaume , Sc qu'il eut obtenu fa grace du roi , il chercha des , moyens pour fe pourvoir contre ce ma: riage •, Sc que , fur l'avis des plus habiles théologiens Sc des plus célèbres , avocats, il entreprit le procés; on ne I peut pas douter q^ffes véritables fea: timents n'aient été de ne jamais recon; noitre la comtefle de Boffu pour fa femme ; & qu'il a, au contraire , toujours fongé a implorer le fecours des loix contre la furprife qui lui avoit été faite. Les lettres de Madame la Ducheffe 'd'Orléans font manies , paree qu'alors I elle n'éroit pas informée des circonfI tances de ce mariage \ Sc elle étoit pré; venue en faveur de la comtefle de Boffu. 1 a tel point qu'elle 1'appelle fa fceur, j quoiqu'elle ne fut point fa parente , Sc 1 que le duc de Guife n'eut 1'honneur de lui appartenir que de fort loin. Les lettres de Mademoifelle ne fonp  ïg6 Mariage ccrites qu'en 1653 , dans un tems ou cette princeffe ignoroit les faits , & ne eonnoifloit pas les vices dont ce prérendu mariage étoit infecFé. Mais, depuis , elle a même obtenu 1'ar-rêt du 10 décembre 1666", qui fairdéfenfe a la comtelfe de Boffu de fe qualifiec veuve du duc de Guife. La lettre de M. le Prince, écrite en Flandres en 1655 , eft une réponfe a une lettre que lui avoit écrite la comteffe de Boffu dans un pays ou elle pou voit prendre impunément la qualité de ducheffe de Guife , d'autant qu'il n'y avoit perfonne qui eüt intérêr de la lui conrefter ; & d'ailleurs cette lettre n'a aucun rapport au procés dont il s'agit. A 1'égard du pafte-port de 1652 , c'eft un de ces actes qui fe délivrent fans connoiftance de caufe , &c dont , par conféquent, onnepeut tirer aucune induótion. Quatrièmement , Monfieur & conforts prouvent , au contraire , que jamais la comteffe de Boffu n'a été ni eonnue , ni défignée en France que fous la qualité de comteffe de Boffu. Au premier voyage qu'elle y Ft en 1'année 16" 5 2 , le duc de Guife étoit  du Duc de, Guife. 197 encore en prifon a Madrid ; & tout ce que l'on auroit pu faire , fans lui, étoit inutile. En effet elle s'en retourna en Flandres, fans rienobtenir 3 ni de madame de Guife la mère qui vivoit encore , ni deM. leduc de Joyeufe, frëre du duc de Guife. Au fecond voyage qu'elle fit en 1 16" 6" 5 , après le rerour du duc de Guife, I elle në put pareillement rien obtenir, ni du duc de Guife , ni de qui que ce foir. Tout fon crédit aboutit a avoir une retraite dans le convent de Charonne , & a être renvoyée en Flandres. Le duc de Guife , bien loi.n de la reconnoitre . rendit contre elle une - 1 • ... 1: . A,i chatelet, le 8 novembre 16$$ , fur la! quelle ce magiftrat procéda a une information qui contient la preuve de Ia conduite déréglée de la comteffe de Boffu. Depuis eet aéFe, elle n'a jamais re* ; paru en France , &c n'y a fait d'autre procédure , que Foppofition du 10 juin 1664 , au fcellé du duc de Guife 3 qu'elle abandonna pour s'aller pourvoir ï la rote. C'eft ce qui donna lieu a Mademoifelle de Guife d'obtenir ies arrêts de 166 < & \66$, qui font déVai  198 Mariage fenfes a la comteffe de Boffu de fe quaiifier ducheffe de Guife , & qui caffent la fentence de la rote: arrêts auxquels la comteffe de Bojfu n'a jamais formé oppofirion. Si elle a obtenu des fentences a la rote , ce n'a été que par défaut : elle. n'a jamais ofé les faire fignifier en france , ni celle de 16$6 , ni celle de 1666. Elle n'a jamais formé aucune demande , ni pour douaire , ni pour chambre étoffée , ni pour aucune autre prétention , telle qu'elle puilfe êrre. Ainfi, bien loin d'avoir aucun acte ni de reconnoiffance , ni de polFeiïion j au contraire il demeure pour conftant qu'elle n'a jamais agi en France, 8c qu'elle n'y a été connue que pour la comtelTe de Boffu. Dans latroifième partie de la caufe," on foutenoit que , outre les abus de célébration dont il s'agit, qui détruifent le fondement de toutes les prétentions du prince de Berghes j elles font encore repouffées par un autre moyen. Le prétendu contrat de mariage du 16 novembre 1641 n'a pu produire , en France , aucuns effets civils en faveur de la comtelTe de Boffu. , En effet, comme il ya des régies ec-  du Duc de Guife. 199 béfiaftiques pour 1'exécution des mariages quant au Hen du facrement, li y a auffi des loix politiques pour empêcher 1'execution des contrats de mariale illégaux i en forte que , quand le Hen fubfifteroit , il ne produiroic aucuns eftets civils. Dansle fair particulier , trois raifons s'oppofent également aux eftets civils de ce prétendu contrat. La première réfulte de ce que le duc de Guïft avoit été condamné a morr par , arrêt de la cour du 6 feptembre 1641 , exécuté par effigie le 11 du même mois. Par conféquent, le 16 novembre 1641 , il étoit incapable de contraóter, étant mort civilement. Telle eft la difpofition de la loi 15 ff. de donationibus; qui eft recue & obfervée en france. Tous les dodtears conviennent qu'elle a lieu non-feulement pour les donations , mais encore pour toute forte de contrats. Dans 1'efpèce dont il s'agit, ce font ;:des avantages promis par le duc de Guife a la comtefte de Boffu • par con: féquent des donations, qui font 1'objet direct de la nullité prononcée par cette loi. Les facremehts ne font pas interdits aux condamnés a mort par contuliv  200 Mariage mace ; ils peuvent fe faire adminiftreir celui du mariage ; mais cette cérémonie , qui forme le lien du mariage , ne produit aucuns elfets civils. 11 eft vrai qu'au mois d'aoüt i 645 , le roi révoqua cette condamnation , &c rétablit le duc de Guife dans la polfeffion de fes biens &'de fon état. Mais cette grace, que le roi accorda a fa familie , 4 fon nom & 4 fa perfonne, ne peut avoir d'eftet rétroaótif pour 1'acFe du 16 novembre 1641 , par trois raifons. Premièrement, paree que la comtelfe de Boffu n'y eft point comprife , quoiqu'eile euteftimé que cela lui étoit néceifaire , comme il paroit par 1'acFe du 16 novembre 1641. Secondement , pour juger de la validité ou invalidité d'un acte , il faut le regarder dans fon principe , dans le tems qu'il a éré fair, initïo infpeclo. Or, au 16" novembre 1641 ,1e duc de Guife étoit condamné a mort; & cette condamnation étoit connue a la comteffe de Boffu , puifque l'ade du 16 novembre 1641 fait mention que les biens du duc de Guife étoient connfqués en France. Troilïèmement, le crime du duc de Guife étoit un crime de leze-ma]efté 5  du Duc de Guife. zot le crime d'ua fujet armé contre fon fouverain , qui eft le cas auquel, qnand il n'y auroit point de condamnation , Je crime feul emporte la privation Sc 1'incapacité des etters civils , fuivant la loi zo au digefte de accufatlonibus. La grace a été un coup de 1'autorité fouvefaine du roi. Jamais le duc de Guife n'a purgé la coutumace , jamais il ne s'eft repréfenté en juftice , jamais il n'a été abfous par la voie d'un jugement. La grace du prince fiétric ceux qu'il abfout, quos abfolvit notat. Depuis l'arrêt de la cour qui enregiftra les lettres-patentes du roi le 4 feptembre 1643 , Ie duc de Guife a été libre. Mais la cour n'a pas jugé qu'il eüt été libre auparavant, pendant qu'il étoit parmi les ennemis, Sc fous la domination de la comtelfe de Boffu. Les actes qu'il a paffes , depuis eet arrêt du 4 feptembte 1643 , peuvent être regirdés comme les actes d'un homme libre : mais les aótes qu'il avoit paffes én Flandres , pendant qu'il étoit dans les liens de la condamnation , Sc qu'il portoit tout le poids de fon crime , font toujours demeurés les actes d'un homme mort civilemenr, efclave de la peine qu'il avoit méritée , 'cc iacapx1 v  202 Manage Me d'aucufis efFets civils. II ne faut que voir , fur ce fujet, Partiele 4 de Pordonnance de 16"^ 9 ; par lequel le roi 3 dans toutes ces occafions , défend d'avoir égard aux lettres de réhabiiitation; &c veut que les procés foient jugés fuivant. les ordonnahces. La feconde raifon pour laquelle cemariage ne produiroitaucun erfetcivif, ïéfulte de. ce que la comtefle de Boffu étoic étrangère , & que ,. par les édits. Sc déclarations du roi , il eft défend u aux fujéts de fa majefté, de contracFermariage avec des étrangers ou étrangères , non feulement fous peine de privation des eftets civils-, mais encore fous des peines afflicFives contre les. hommes & contre'les femmes , & de. confifcation de biens ,. ou de groflès amendes dans les provinces oü la coaffcarion n'a pas. lieu. L'édit du mois d'aoüt 166<) , & les déclarations des 18 mai i: portent a la cour 1'appel comme d'abus ? Sont-ce des frères Sc fceurs , qui, pour rendre 1'action recevable en leur bouI che, difent : nos pères Sc nos mères I n'ont point interjetté eet appel , paree qu'ils n'ont point connu ce mariage ; il n'y a eu aucune polTeffion pendant leur vie ?  2T2 Mariage ~ Le mariage donc il s'agit a été célébré en 1641. La ducheffe douairière de Guife , mère du mari , vivoit alors; ce mariage a été fuivi de plufieurs années de poffefïion publique & paifible , d'une infinité d'aótes approbatifs : aucune aclion intentée par la mère contre ce mariage , plufieurs lettres qui prouvetTt qu'elle y a confenti ; elle eft décédée fans Pavoir troublé. Mademoifelle de Guife a imité cette conduite. Et, après le décès des parties pruicipales , des collatéraux au quatrième dégré, cinquante-huit ans après le mariage , s'en rendent appellants , quand il n'y a plus ni mari ni femme, quand il n'y a point d'enfants dont on foit obligé d'affurer 1'état. Trouvera ton quelqu'exemple d'un appel comme d'abus porté en la cour dans ces circonftances ? Et de quelle conféquence ne feroit-il point de le recevoir ? Cet appel comme d'abus peut-il être propofé après h poffèftion publique qui a fuivi ce mariage ? C'eft la fêconde fin de' non-recevoir. On établiftbit cette poffeffion d'état fur tous les aétes, fur toutes les reconnoiffances , dont on a fait 1 enumération plus hautj reconnoifTancesémanées  du Duc de Guife. 113 de tous les princes de Peurope , du roi & de route la cour de France ; Sc enfin de la familie même du duc de Guije. ! La maifon de Guije étoit branche de celle de Lorraine : ainfi ce.fonr les ducs - de Lorraine qui font les chefs de cetre illuftre maifon. Lors de ce mariage , Charles de Lorraine y a donné fon approbation par une lettre originale écrite de fa main, que Pon rapporte; il a complimenté la duchejfe de Guije iur ce mariage : il lui écrir , a. Madame la duchejfe de Guije , Sc figne , votre ajfecxtionnécoujln. Le duc Francois de Lorraine , frère de Charles,1'a pareillemenr reconnue, Sc lui a écrit, a madame la ducheffe de Guife , Sc Pa traitée de coufine. Mais ce mariage n'a pas feulement ! été confacré par les chefs de la maifon de Lorraine; il a recu le fceau de 1'ap! probation des fouverains refpecFifs des deux parties qui Pont recpnnu , en don\ nant a la femme la qualité que ce mariage lui avoit imprimée. Le roi, & le roi catholique ont cgai lement qualifié Honorée de Berghes , comme on Pa dit, du titre de ducheffe de Guife \ la reine mère , régente, lui j a donné le tabouret} le roi catholic]ue  2,14 Mariage a ordonne qu'elle jouiroic de tous les honneurs des grands d'Efpagne. Elle en a joui jufqu'a fa mort : c'eft dans cette qualité que 1'impératrice lui écrit en , avec des témoigna- ges d'amitié. Encore une fois , feu Monfieur, feu Madame , feu Mademoifelle , & feu Monfieur le Prince Tont reconnue : & quarante-quatre années après toutes ces reconnoiilances folemnelles, M- le Prince inrerjette appel comme d'abus de la célébration de ce mariage! Cemment accordera-ton eet appel avec la reconnoiffance authentique de feu M. fon père , & de toutes les têtes eouronnées ? Des collatéraux éloignés leront ils recus a contelter aujourd'hui L'état a cel'equi a été fi parfaitement reconnue par toute la familie , il y a prés de cinquante ans ? Que deviendroient les régies fi judicieufement établies pourle repos public? Que l'on faife donc voir un feul exemple d'un appel comme d'abus recu d'un mariage fi folemnellement reconnu, & approuvé par des perfonnes dont le fuffrage a , en quelque forte, '['autorité légiiïative. II n'a pas fallu des reconnoiilances jaujfi refpectables, ni d'un poids auifi  du Duc de Guife. 21 ^ grave , pour cohfirmer des mariages attaqués daas des circonftances bien . moins éclatantes ; le feul fuffrage de la I famüle a fuftï pour repoufler les attaI ques qu'on vouloit leur porter. Le fieur de Beaumont, gouverneur I du chateau de Saint - Germain, conI tradia un mariage en 165Z avec Marie 5' Raymond. Une fceurqui étoit héritière I preiomptive du mari , appella comme I d'abus du mariage , après la mort de | fon frère. 11 y avoit plufieurs défauts i dans la célébration : cependant la reI connoiftance publique de ce mariage, I &c de la plus grande partie de fa faI mille , détermina les Juges a le conI firmerpar arrêt du 3 février 166$. Cetjj arrêt eft rapporté par Dejmaifons. Voici la rroifième fin de non-receI voir. C'eft ici une queftion d'état, dé.: cidée par un jugement folemnel & ; fouverain, il y a trente trois ans, QuelI les font les maximes que nous apprei nous par la jurifprudence des arrêts ? i En matière de queftion d'état, il faut "tf tenit pour certain 5c véritable ce qui a I été une fois jugé. C'eftprécilément pour I les queftions d'état que l'on a établi la I maxime de droit: res judicata pro veI r'u&te accifitur. Des que 1'état d'une  216 Manage perfonne eft une fois jugé , il n'eft plus permis de le révoquer en doute. Y at-il jamais eu un jugement plus célébré fur une queftion d'état, que la fentence de la rote , qui a déclaré le mariage de la ducheffe de Guije bon &c valable ? C'étoient des juges que le duc de Guife avoit lui-méme choifis, juges fouverains. Premièrement, a caufe de la qualité du tribunal. Secondement, le duc de Guife , en s'adreffant au pape, pour le prier de commettre des juges qui connuffent de la validité Sc invalidité de fon mariage, demanda que ces juges fuffent établis avec pouvoir de juger en dernier reffort, fans qu'aucune partie put appelier ni réclamer contre le jugemenr qui feroit rendu , & fans efpérances d'aucun recours ni reftitution quelconque. Quacumque appellatione, reclamatione ,-rccurfu , & rejiiiutione excludantur. Ce font les termes de la fupplique. Voila ce que M. le duc de Guife a demandé au pape, en lui demandant des juges. Voila ce que le pape lui a accordé : il a commis un auditeur de rote pour connoitre del'affaire , & procéder conformément a la fupplique. Audièt  du Duc de Guife. 117 'Audlet magijler Jacobus , & procedcu ut petitur. Si l'on demandoit, au roi, des comI mifiaires pour juger une affaire en derI nier reflbrt j fi le roi, faifant droit fur la requête, nommoit des commiffaires avec pouvoir de juger fouverainement , I recevroit-on un appel qui feroit interü jetté de ce jugement ? Le pape a fait ici la même chofe : il eft fouverain dans 1'état eccléfiaftique : : c'eft de lui qu'émane la jurifdictien dans fes états fur fes fujers , comme elle émane du roi dans le royaume. Le duc de Guife lui a demandé des 1. juges , pour juger en dernier reflbrt ; le pape les a commis avec un pouvoit conforme a ce qui lui étoit demandé j , il a pu le faire. Leduc de Guift:én étoit patfaitement : perfuadé: c'eft-pourquoi, ouvranr enfin ! les yeux j prévoyant le mauvais fuccès > de fon procés, il chercha a reculer le jugement définitif: c'eft a quoi ten■ doient toutes les différentes voies dont , il s'eft fervi , lorfque le jugement in3 terlocutoire , en 1655 ' adjugea a la duchefle de Guife une provifion alimentaire de 6"ooo écus par an. II n'en interjetta point appel 3 paree qu'il fcavoit Tome XIF: K  218 Mariage bien. que les juges qui 1'avoienr prononcée étoient revêtus du pouvoir fouverain , Sc qu'il les avoit lui - même demandés au pape, avec cette qualité. Enfin la detnière fin de non - recevoir eft fondée fur ce que la'ducheffe de Guife eft morte en poffeftion de fon état , reconnue par fa familie , reconnue a la cour de France , a celle de 1'empereur Sc du roi d'Efpagne. II y a vingt ans qu'elle eft morte. Diftinguons, fi l'on veut, la queftion du mariage d'avec celle qui regarde les eftets ciyils, Ce qui, en fait de mariage , concerne les effets civils 3 ne peut, il faut 1'avouer , être prefcrit par aucuue poffeftion. Mais la queftion du mariage n'eft pas de même nature. Les proches pa-, rents ne 1'ayant point agitée pendant la vie de la ducheffe de Guife , après la mort du duc fon mari, des collatéraujc plus éloignés ne peuvent plus contefter ce mariage. Nul trouble de la part de Mademoifelle , ni de la part de mademoifelle dé Guife : jamais d'appel comjme d'abus de ia célébration. Difons donc que ce qui a été jugé i la rote 3 été jugé fouverainement Sc  da Duc de Guife, 2,19 en dernier refiort, Et qu'eft - ce que l'on y a jugé ? Une queftion d'état qui y étoit pendante , il y avoit vingt-un ans; queftion fur le mariage du duc de Guife , avec madame Honore'e de Berghes. Ce mariage a été jugé bon Sc I valable. Voila donc fon état alTuré par un ju> ! gement folemnel eu ï666. Et l'on prc- cenora , rrence-ciois ans apres ce jugement , faire recevoir en ïfJypj un nouvel appel comme d'abus de la cé- lébration du mariage , interjetté par des hétitiers collatéraux au quatrième :, degré, par un légaraire univerfel. On répond, avec 1'empereur, au code defiatu, hominum : rebus judictztis Jl andurn eff. II faut s'arrêter , fut-teut en matière d'érat , aux jugements prononcés. Nous n'avons pas de maxime plus favorable en droit, que celle qui ne permet pas que l'on trouble&que l'on recherche 1'état des défunts, cinq années après leur mort. Cette règle forme un titre entier dans le corps de droir. Ne deflatu defunciorum, pof quinquen* nium, qu&ratur. Cujas ajoute , in dete-, riorem coniitionem, pour leur donner une condirion pire que celle qu'ils avoient.  2-20 • Mariage Toutes les loix ramaïTées fous ce. titre établiflent cette maxime , que quand une perfonne eft décédée en pofleffion d'un état favorable, l'on n'eft: plus recu a former une queftion fur eer état, cinq années après le décès de la perfonne \ fur-tout quand on tend a le dégrader. C'eft encore ce qui a fervi de fondement aux arrêts qui ont déclaré des appellants comme d'abus non-recevables, après des reconnoiilances publiques du mariage dans la familie , &C une poffeffion d'état continuée jufqu'au décès des parties. Ici 1'état a été contefté ; mais il a été confirmé par un jugement folemnel , exécuté jufqu'a la mort de la duchefle de Guife , qui eft décédée en pofleffion de eet état, reconnue par les têtes couronnées, Et , fans rechercher les anciens arrêts qui ont répandu cette jurifprudence • dans nos4ivres, il yen a plufieurs dont la cour pouvoit encore avoir la mémoire préfence, lors des plaidoiries de cette caufe , qui fefaifoient en 1700. N'a-r-ón pas vu , en 1688, le mariage de Charles de Cleves , marchand 4'éveijtails, qui aYpit époufé, en fe-  du Duc de Guife. ut cond.es noces, la nièce de fa première femme , fans difpenfe pour caufe de 1'afnnité ? Charles de Cleves, étanr more après plufieurs années de pofleffion de mariage, un beau-frère appelle comme d'abus0, & contefle a la veuve fa qualiré. 11 demeuroit d'accord de la poffeffion ; mais il difoir: le moyen d'abus eft de droit public. On répondit , 1* moyen d'abus eft bon en fci; mais *a fin de non - recevoir doit 1'emporter. Et , par arrêt contradictoire du 31 mai 1688 ,1'appellant fut déclaré nonrecevable , & la veuve maintenue. Au mois d'aoüt iÖ94,onagita la queftion fur le mariage de JacquesLcucker & de Marie Duval; mariage contracté par un fils majeur , mais fans le cenfenremenr de fa mère , & hors Ja préfence dupropre curé. Après 7 ans de pofleffion de mariage, Jacques Loucher étant mort fans avoir eu le confentement de fa mère , elle appella comme d'abus. Le moyen de défaut de préfence du propre curé étoit parfaitement bon ; mais la fin de non-recevoir tirée de la pofleffion d'état étoit encore plus puiffanre; &, par arrêt contradictoire du 5 aoüt 1694, fur les conclufions de NL K üj  2,22 Mariage 1'avecat général d'Aguefeau, 1'appel- lantea été déclarée non-recevable. La même chofe avoit été jugée I'anJiée précédente fur les conclufions de M. 1'avocat-général du Harlay, pour le mariage de la nommée des Hayes , comédienne , avec un fils de familie de cette ville de Paris. II y en a cent autres. En forte que c'eft une maxime que l'on peut dire inconteftable , quand snême il y auroit quelque défaut dans la célébration du mariage. Et nous fommes même ici dans une efpèce ou cette maxime a bien plus de f orce que dans les circonftances oü ces arrêts font intervenus. Car il n'y avoit alors qu'une des parties contradtantes qui fut décédée : ici toutes les deux Ie font, il y a plus de vingt ans. Dans ces arrêts , c'étoit une mère , c'étoient des frères $c foeurs qui conteftoient 1'état de la veuve , immédiatement après la mort du mati: ici ce font des collatéxaux au quatrième degré , un légataire univerfel d'une collatérale , qui conteftent 1'état, trentecinq ans après la mort du mari , & vingt ans après la mort de la femme , cinquante - huk ans après la célébration.  du Duc de Guife. 11% On dira que la pofleffion du mariage , étoit d'un grand poids dans ces arrêts , ; paree que ia validiré n'avoit point été attaquée du vivant du man & de la femme, qui avoient vécu durant plu\ fieurs' années , jouilfanr paifiblement , i 1'un & 1'autre , de leur état ; qu'ici ce ' n'eft pas la même chofe , paree que le duc de Guije a réclamé lui - même contre fon mariage long-tems avant fa ÏT,ort- . rr rr II eft vrai qu'apres une pofteüion conftanre & publique de fon mariage durant plufieurs années , il a réclamé. > Mais quel fuccès a eu cette réclama: tion ? La queftion a été jugée , & la i pofleffion confirmée a 1'avantage de la : femme : c'eft ce qui forme une fin de non-recevoir infurmontable. Dira-r-on quele jugement de la rote n'a pas eu une exécution paiftble, paree qu'il y a eu appel comme d'abus interjerté par Mademoifelle , Sc Mademoifelle de Guife du vivant de la duchefle de Guife ? Mais eet appel comme d'abus ne tomboit point fur la queftion d'état, puifqu'il n'y avoit point d'appel comme d'abus de la célébration ; & que celui qui avoit été interjetté ne regardoit iS.1V  2i4 Mariage que 1'exécution de la fentence pour les effets civils : & eer appel n'a jamais 3nême été pourfuivi par une affigna- ïion. Le jurifconfuke apinien , dans Ia loi z ff. ne defiatu hominum qu&ratur , examine fi cette prefcription de cinq années , introduite par le droit , peut amettre a couvert de trouble ceux qui font morts en poffeffion de leur étatj li elle avoit lieu dans un cas oü il paroïtroit que le défunt auroit été troublé & inquiété fur Ion état avant fa mort ? Cet auteur , dont Juftïnien a adopté les décifions , & les a revêtues de la forme & de 1'autorité Iégiflative , dit : fi c'eft un proces qui ait été intenté & enfuite abandonné par un long filence , cela n'empêchera point la prefcription j & , fous prétexte de ce procés , on ne fera point recu a troubler 1'état du défunt , cinq années après f»n décès : praficriptio quinque annorum , qua fiatum defunclorum tuetur , fpecie litis ante mortem i'dau non fit irfitd ,fi veterem caufiam , defiftente qui movit, longo filentio finitam probetur. Et la glofe , fur ce mot longo filentio, met, ficilicet triennio. Nous fommes ici dans une efpèce  du duc de Guife. [ bien plus avanrageufe , paree que nonv feulement eet appel comme d'abus eft demeuré dans un long (ilence, n'ayant i jamais été pourfuivi par les appellants ; .. mais, ce qui eft plus confidérable , il n'eft jamais venu a la connoiftance de , la duchefle de Guife. La fentence ^ de i Ia rote eft du mois de juin 1666; 1'at! rêt qui recoit appellant eft du 1 o de1 cembre fuivant. Ces arrêts fur requêre ne lui ayant jamais été fignifiés , on ne i lui a point donné aflignation pour défendre contre eet appel comme d'abus % ] elle eft morte en pofleffion paifible de ! 1'exécution du jugement qu'elle avoic obcenua la rote. f ' Au moins refpe&ans fon état. Difcutons 1'exécution quap.t aux biens , a la bonneheure; réduifons-nous ala quef. tion des effers civils: Sc c'eft véritablement oü la caufe devoit être renfermée.. Mais d'attaquer 1'état de la duchefle; de Guife par un appel comme d'abus, après qu'elle a joui , jufqu'a fa morr , dans Bruxelles , du rang Sc de la qualitéj de veuve du due de Guife , traitée , & caufe de ce titre , comme les femmes des grands d'Efpagne , ainfi que le rol; i «atholique L'avoit régie 5 & il y a vingp Ut  Mariage ans qu'elle eft morte en cette pofleffion. eut-il jamais une efpèce ou l'on dut appliquer plus juftement la régie du droit, non de Jlatu, defunSorum po/i. quinquennium qu&ratur. 11 ne faut point dire que cette règle n'eft faite quen faveur de ceux. qui font morts en poffeflion de 1a liberté y & qu'elle ne concerne aucunement 1'état. qui réfulte du, anariage. Elle eft concue en termes géliéraux : il ne faut point troubler 1'état des défuntscinq années. après la mort* Non de jlatu , &c. Et ce mot Jiatus fe. iapporte au mariage comme ala liberté, puifque la loi dernière ff., de cap.. min*. sous apprend que , dans le droir ror. siain , on. confidéroit 1'état des perfonnes par rapport a trois différentes cho~ fes; la liberté , la familie & le droit de ciroyen :. libertas,, civaas.ffamiUa^ Réuniflons. donc ici toutes les circonftances , raflemblons les. quatre fins. de non-recevoir contre 1'appel comme d'abus que l'on interjette préfentement. de la célébration de ce masiage., Sans.fe départir des fins de non-recevoir , on répondra aux moyens d'appel comme d'abus qu'on propofe. On.  du Duc de Guife. 2 2.7 a 1'avantage que ces fins de non-recevoir , qui font des moyens généraux qui ne permettent pas qu'on écoute les moyens d'appel comme d'abus , feroient, quand on voudroit les écouter, des moyens particuliers qui les détrui-, roient. Le duc de Guife , après fon mariage célébré , a perfévéré dans une cohabitation publique a Bruxelles , a Namur , a Liège , jufqu'a fbn départ, conjoïntement avec Madame Honorée de Berghes fa femme , & 1'a reconnue pour i telle. Le certificat qu'il a donné, le 11 : février 1642, pour alTurer qu'il n'avoit ; point d'engagement avec la prïnceffe ■ Anne ; les obligations qu'il a contractées conjointement avec elle, les procurations qu'il lui a données pour agir les procédures qu'il a faires, êc la fentence qu'il a obtenue au confeil de Malines contre la maifon de Boffu , en qualité de mari , & maïtre des droits de fa femme ; les quittances qu'il a données , & les tranfports qu'il a fairs conjointement avec elle , toujours i'auto1 rifant comme mari , & elle prenauur 3, avec lui, la qualité de ducheffe de Guïfe, PolTelTion coniinuelle après fa retraite : combien. de. Lettier 5. gendant une. aiK.vj  2*28: Manage »ée, tant a h ducheffe dc Guifefa femme^ qua la comttjfe de Grimberghe fa mère l Quand ü éerit a fa femme, d Madame la ducheffe de Guife j quand il écrit a la, dame comteffe de Grimberghe , c'eft. toujours le ftyle refpeétueux d'un fils a fa mère. Que de titres de la pofleffion de 1'état de ducheffe de Guije \ On a dit que c'étoit un mariage clandeflin , un mariage furpris au duc de Guife,, A peine eft il contracté , que? ce prince en donne avis a 1'empereur au roi d'Efpagne. On a dit qu'il étoit obligé de diflïinuier pendant qu'ilétoic dans les Pays-. Bas : mais, dès qu'il eft en Erance 8c. en liberté de fa perfonne , au lieu de3-éclamer contre. ce mariage , il le confirme par les lettres.qu'il écrit pendant une année entière. A-t il protefté pendant ce tems la. contre la furprife qu'011 lui a faite ? Le duc de Guife étoit majeur-quand. il a contracté ce mariage; il avoit vingt? fept ans & demi ; il paffe tous ees actes.. approbatifs durant ies trois premières, années de fon mariage. Ce font. autanf de reconnoiffances réitérées en pleine majouté, & jufqu'a lage de trente ans,. paffes».  du Duc dc Guife. 2. ï 9 L'auroit-on écouté en eet état, s'it 1 avoit porté a la cour Pappei comme i d'abus de fon manage ? Comment poui voit-ildéfavouerune femme qu'il avoit. reconnue par tant d'aétes ? La jurifprudence des arrêts nous apprend que les mineurs devenus majeurs n'y font pas recevables. La cour 1'a en-. 1 eore jugé, depuis quelques. années , ■ contre Franxois Crony au. fujet du mai i riage qu'il avoit contracté avec la fille .' d'un aubergifte de cette ville de Paris, i nommée Mat ie Morrant. Francois Cron I avoit contracté ce mariage enminorité; 1 mais il appelloit comme d'abus en mal jorité. On Pa déclaré non recevable par arrêt du 21 mars 1687. Si des majeurs font non-recevables J a interjetter eet appel comme d'abus, 1 quoiqu'ils aient contraété en minorité, I a plus forte raifon un majeur qui as j contraóté en pleine majorité , & qui ? 1 depuis , a continué d'approuver fon I manage par plufieurs actes publics, &C par une cohabitation de plufieursanncesavec fa femme. En un mot , on ne peut trop le répéter , il s'agit ici d'un mariage célébré il y a cinquante-huit ans par un ma;eur, fuiyi d'une cohabitation publique de  2-3° Mariage plufieurs années, durant ce tems cottfirmée par plufieurs a&es, & par des reconnoiflances perpétuelles de la part du mari & de route la familie : c'eft un mariage reconnu par le pape, par le roi , par le roi d'Efpagne, par Vimpér ettrice , par toute la maifon de Lorraine > par celle de Guife , par toute la cour de France, & daas tous les Pays-Bas j déclaré valable par un jugement folemnel & fouverain » il y a plus de 30 ans. II y arren te-cinq ans que le mari eft mort, il y a vingt ans que la femme eft morte en pofleffion de fon état. Chacun de ces faits forme une finde non-recevoir ; chacune de ces. fins de non-recevoir feroit feule fuffifante pour faire rejetter 1'appel comme d'abus que Ten interjette préfenrement de la célébration de ce mariage. Quand on les voit concourir enfemble, peuton s'empêcher de regarder eet appel comme une chofe monftrueufe daas 1'ordre de la procédure > & d'un exemple très-dangereux ? Sans fedépartir, encore une fois , deces fins de non-rgcevoir , pourfuivons 1'examen des moyens d'appel comme d'abus que l'on propofe contre ce manage. } après. quoi nous examineions la:  du Duc de Guife. 231 prctendue incapacité qu'on attribue au duc de Guife. On fondeun moyen d'appel comme d'abus fur le défaut du pouvpir de celui qui a célébré le mariage. Ce n'eft pas , dit-on y le propre curé y c'eft le vicaire général des armées qui a fait la cérémonie de la célébration. Le mariage dont il s'agit a été célébré en Flandres , dans les Pays-Bas efpagnols , entre le duc de Guife, engagé lors au fervice de la maifon d'Autriche, & commandant, en cette qualité» les troupes confédérées contre la France? & la comtefle de Boffu , domiciliée '1 Bruxelles. Quelles font les régies & les ufages des Pays-Bas envers les perfonnes engagées dans les troupes , foit officiers principaux , foit fubalternes, ou foldats ? Le vicaire général des armées ^ ou les eccléfiaftiques par lui commis 3 8c fous fa jurifdiétion , peuvent leus adminiftrer les facrements , &c fpécia? lement célébrer les mariages. Le premier vicaire général. eft ctablï par une bulle du pape Urbain VIII de 1'année 161.6 , quij comme 1'archevêque de Malines., peut exercer , par lui , ©u. fes délégués, toute jurifdiéFion. ec-  2 ^ 2 Mariage tféfiaftique dans les armées, tant fur les miniftres chargés d'adminiftrer les facrements aux officiers & foldars fervant dans les troupes , que pour connoïtre des caufes qui font de Ja corrvpétence du juge d'églife. En un mot , il a le droit d'exercer , dans les armées, la même jurifdiction que celle qui appartient aux ordinaires dans leur diocèfe. Cette bulle fut obtenue fur la fupplique de Pinfante Ifabelle - Claire , gouvernante des Pays Bas. On a expli-. qué plus haut quel fut le motif de cette fupplique , ce qui en réfulta, & quel eft le pouvoir que le pape donna au vicaire général de Parmée. C'eft une efpèce d'épifcopat qui lui eft conféré ^ pour Pinftruótion & le falut de tous ceux qui fervent dans les armées , 5c qui font éloignés des lieux foumis a la j'urifdicrionde leurs ordinaires naturels, & qui ne peuvent pas quitter les lieux ©u la difcipline militaire les retient s pour y avoir recours. C'eft fous 1'autorité dece vicaire général , que Pon procédé a la célébration des mariages des officiers & foldats °. nut ne peur fe marier fans fa permftion; & 9> quandcefonc des perfonnes diftinguées^.  du Duc de Guife. 233' le vicaire général y procédé par luimême : il eft le principal curé, il eft en pofleffion dedonner des permiflïons de c élébrer en telle églife que bon lui femble,d'accorder les difpenfes de bans; en un mor, de faire, pour les mariages des militaires , tout ce que feroit un ordinaire dans fon diocèfe : tel eft 1'ufage. Le vicaire général eft tellement le propte curé dans les troupes , que les curés des paroifles dans lefquelles fe trouvenrdomiciliées les fillesqui époufencdes militaires 3 ne fcauroient procéder a. la célébration du mariage de ces filles avec un officier ou foldat, fans le confentement exprès du vicaire général. La raifon eft qu'il y avoit des gens dans les troupes qui époufoient , fans fcrupule, une feconde femme , les premières étant encore vivantes; &, afin de détrutre eet abus, & prévenir les inconvénientsqui arrivoienrlorfqu'on n'y tenoic pas la main , 1'archevêque de Malines, qui eft vicaire général député par la bulle du pape, a fair publier une ordonnance expreflè , le 24 janvier 1638, portant défenfe a tous les curés &c vicaires des paroifles de la ville de Bruxelles t de procéder a la célébration  234 Mariage du mariage des militaires , fans un confentement expres de 1'archevêque de Malines,.ou de fon fubdélégué dans I'exercice de la jurifdiction fur les troupes, quand même il y auroit eu une publication précédente des bans. Le vicaire général des armées exerce fa jurifdiftion fur les troupes pendanr qu'elles réfident a Bruxelles , comme il 1'exerce pendant qu'elles font en campagne. Tel a tou|ours été 1'ufage conftant; ce qu'on juftifie par un grand nombre de certificats. En effet, les officiers , les foldats , ne fe marient guères pendant qu'ils font en campagne : s'ils font des mariages , c'eft durant le quartier d'hiver , c'eft en garnifon : & les mêmes raifons n'ont-elles pas lieu pendant que les troupes font en garnifon, ou en quartier d'hiver , comme pendant qu'elles font en campagne ? Car on ne connoit pas 1'état d'un officier ou foldat , pour quelques mois de réfidence dans une garnifon. S'il a voulu le diifimuler \ comme on le connoit a 1'armée, Le commerce familier que les chapelains^ de 1'armée , ce que nous appellons ici les aumoniers, ont continuellemeut avec les troupes, les inftruit avee  du Duc de Guife. 2 q S > bien plus de süreté de 1'état des offiI ciers Sc foldats de leur régiment, que ne • pourroient être des curés dans une ville oü le régiment pafferoit trois ou quatre mois. Ainfi , foit en campagne , foit en : garnifon , ou en quartier d'hiver , le : pouvoir du vicaire général de 1'armée : eft égal fur les troupes, quand il s'agit : des mariages des officiers. Le vicaire général , avant de donner fon confeni tement a la célébration , prend un ceri tificar du chapelain , ou au moins du régiment, qui Paflure de 1'état de celui ■ oui veut fe marier : Sc le mariage , cé¬ lébré en conféquence , par le prêtre |i qui a la permiffion du vicaire général , : eft bon Sc valable , fans qu'il foit 1 même befoin du confentement du j curé de la fille. Son confentement li eft fi peu néceffaire , qu'il ne peut 1 empêcher de faire la célébration du 1 mariage de fes paroiffiennes, fuivant I Pordonnance de 1'archevêque de Malines de 1638. Ce vicariat général a été renouvellé a 1'archevêque de Malines en 1671 , par un bref du pape Clément X. Ce bref oblige expreffément le vicaire général de vifiter tous les regiftres j Sc  2^6 Mariage on a toujours gardé le même ufage. Ou renouvelle ce bref de cinq ans en cinq ans. Cetufage eftcertifié, non-feulement par le vicaire général préfenremenr en place , par les officiers de Malines Sc de Bruxelles , par le fecrétaire du vicaire général; mais , ce qui eft encore plus fort , par les curés mêmes de la yille de Bruxelles, qui feroient parties mtéreffées a fouteniF que c'eft a eux a maner leurs paroifliennes. Ils ont cependant donné uneatteftation en forme d'a&e de notoriété , portant que les mariages qui fe contract-ent entre les perfonnes qui leur font fujettes , d'une part, & les militaires, d'autre, fe célèbrent par les chapefains des militaires, Sc ont toujours été tenus pour bons Sc valables en cette forme : ce qui eft notoire Sc fe pratique conftamment. Ce lont les termes de ces actes de notoriété. S'il arrivoit quelques conreftations iur la validité ou invalidité de ces mariages , c'eft devant le vicaire ^énéral de 1'armée que l'on procéderoit Öc'eft a luiqu'appartiendroitla connoiftance de ces fortes de caufes. On a communiqué plufieurs tenten*  du Duc de Guife. 2 3 ? I ces tirées des regiftres du fecrétariat du i vicaire général de 1'armée } par lefquelI les il paton que l'on a cafte plufieurs I mariages de militaires,quand ilsontété j, célébres fans le confentement du vicaire général , ou des chapelains qui font employés fous fesordresdanslesarmées. Ou en a confirmé d'autres, quand ils fe fonr trouvés revétus de la formalké ordinaire. Toutes ces fentences font rendues par le vicaire général fubdélégué, comme feul juge compétent de connoirre de ces fortes de mariages : êz fa jurifdicfion s'étend , acetégard , :\ fur les officiers principaux de 1'armée , comme fur les fubalternes. Les acres ! de notoriété qu'on a communiqués le portent expreffémenr. Et la preuve que cette jurifdiétion a lieu , même a 1'égard des officiers généiaux, fe tire pofuivement des actes de notoriété. Elle paroït encore par 1'exrrait des regiftres du vicariat qui a . été communiqué. On y trouve une difpenfe de trois bans, donnée en 1677 , par le fubclélégué vicaire général des armées au duc deRofthtin , qui commandoit alors les armées du roi carholique en flandres. Cette difpenfe eft accompagnée d'une permiffion de célébrer Ie  238 Mariage mariage , dounée au vicaire par Ie cure de Ia perfonne que le duc époufoic; Sc il 1'autorifa pour célébrer dans une chapelle donieftique. Le mariage d'un grand feigneur , Sc d'un général d'arriiée autorifé , célébré par le vicaire général des troupes, n'eft donc pas un cas extraordinaire. Qui pouvoit mieux , au refte, juger du fens Sc de la force des termes contenus en cette bulle ? Qui pouvoit mieux expliquer 1'étendue du pouvoir que le pape a confié a fon fubdélégué en cette partie , Sc quelles en devoient être les bomes que la cour de Rome a prefcrites , que le juge de la rote , qui a confirmé le mariage du duc & de la duchefle de Guife ! L'objeclion que l'on fait fyr ce que la bullé cYUrbain V1U , d'oü dérive le pouvoir du vicaire général, ne parle point expreflementde mariage, échoue contre 1'ufage conftant, contre le motif de la bulle , Sc conrre la. qualité de vicaire général de Pordinaire , dont le fieur Mansjeld étoit revêtu. C'eft fuivant les maximes & les ufages du pays que la queftion du mariage doit être décidée. i Que réfulce t-il de ces tkres Sc de  du Duc de Guife. 239 cet ufage ? Que le duc de Guife, étant I conftamment engagé dans les troupes du roi catholique contre la France, lors ; de fon mariage , étoit foumis a. la jurif? i dicFion du vicaire général de 1'armée. II étoit membre, il étoit même chef de ces troupes. II étoit donc fubordonné au pouvoir fpirituel qui s'exercoit légH timeinent fur toute F armée. C'eft en vertu de cette jurifdicFion que Charles Mansfeld , vicaire général % a donné la difpenfe de Ia publication des bans : il le marqué expreftément , ' dans fon certificat du 30 novembre 1641 , c'eft-a-dire que affflendo difpenfavit. Et c'eft en vertu du même pou1voir , qu'il a fait Ia célébration du mariage. II y avoit alors dix années eni tières que Charles Mansfeld étoit dans 1 1'exercice de fa foncFion , &c étoit infI truit des droits & de 1'ufage de la jurifdicFion qui lui étoit confiée. Quand il a pris une permiftion du i curé de Sainre-Gudule de Bruxelles, qui étoit le curé de dame Honore'e de Berghes , c'eft une précaution furabondante qu'il a prife , a caufe du rang & de la dignité des perfonnes : mais il n'en avoit pas befoin. Suivant les régies & les ufages, le vicaire général étoic  3 4 o Mariage Ie curé du duc de Guife: Sc , en cette qualité , il pouvoit, comme on 1'a vu plus haut , marier la paroifïenne du curé de Sainte Gudule , contre le gré de ce pafteur. Ce n'eft que pour plus de régularité, qu'il s'eft foumis a cette déférence ; c'eft un furcroit de formalité ; c'eft, fi l'on veut, un acte purement fuperflu: mais quod abundzt non v'uiat. Mais , ce qui ferme abfolument ia bouche , & ce qui anéanrir le moyen d'abus qu'on a oppofé , c'eft qu'outre Ie pouvoir du vicaire général fur les perfonnes engagées dans les troupes , comme étoit le duc de Guife; le mariage ayant été contracté & célébré a. Bruxelles , ce même vicaire général de 1'armée fe trouve être encore, en mêmetems , I'ordinaire des lieux. Bruxelles eft du diocèfe de Malines, & Charles Mansfeldétoit vicaire général de 1'archevêque de Malines (i). (i) Quand les évêques ont étabii im grand vicaire , tout ce que celui-ci accorde, conformément a fa commiffion , eft cenfé accordé par 1'évêque. II eft la perfonne de 1'évêque , & agit en fon nom. Ainfi, quand les laïques ont befoin d'obtenir quelques graces de 1'évêque pour leur mariage, ils Si  du Duc dc Guife. 341 Si les parties &c les témoins n'ont pas figné 1'acte de célébration , c'eft que cela ne Te pratique point dans le pays. En effet 3 on a rapporté cet acre de célébration a Rome : le duc de Guife 1'at-il dénié ; a-t-il jamais dit qu'il n'y avoit point de témoins ? N'a-t-il pas ij fait , au contraire , tout ce qui étoit • en lui, pour en attefter lui-même la vé4 rité ? Tous les actes ou , en qualité de A mari, & comme maitre des acrions de I fa femme , il a figné avec elle ; toutes 'a les lettres qu'il lui a écrires , 1'inftance ik même qu'il a formée enfuite contre la J validité de fon mariage , ne fonr-ce pas 'i autant de témoignages émanés de fa n propre main , qui certifient la réalité d de 1'engagement qu'il avoit contracté ? La rote , d'ailleurs , eft inftruite des el ufages du pays ; elle a voulu même 7. avoir le fentiment de 1'archevêque de li Malines: il en a donné une déclaration A authentique en 164(1 & i6$i. On a rapporté deux confultations de m tous les doéteurs & profelfeurs en théo1 iogie de 1'univerfiré fameufe de Louvain .4 peuvent s'adrefler indifFéremment a l'évêque 011 a fon grand-vicaire ; cela eft marcuis clairement dans 1'article 3 de 1'édit de 1695. TomcXIF. L  341 Mariage Ajoutons a tont cela que 1'efprit, ies termes, 1'effet de la délégation apoftolique s'appliquent beaucoup plus naturellement aux fimples foldats , qu'aux olficiers> & fur- tout a un général d'armée. Si les évêques ontfouffert que, contre la première intention dn pape , les yicaires militaires fe foient attribué mdirectement le pouvoir de célébtet des mariages , ils n'ont eu cette tolérance , que paree qu'ils ont cru que les vicaires, que leschapelains de 1'armée, connoilfoient mieux 1'état Sc la condition des fimpls foldats , que les curés. auxquels ils pourroient s'adrefter. Mais eette raifon nepeuc jamais convenir a une perfonne du rang & de 1'élévation de M. le duc de Guife, chef des armées de 1'empereur Sc du roi d'Efpagne. En un mot, il eft conftant que la réfidence de M. le duc de Guife n'étoit point dans un camp, mais dans la ville de Bruxelles; il n'étoit donc point dans la jurifdiction du vicaire militaire. Toutes ies loix eccléfiaftiques s'élcvent contre 1'extenfion que l'on a voulu donner au pouvoir de Charles de Mansfeld. ï/ufage dont on argumenre n'a pas d'application a 1'efpèce. On rapporté ,  du Duc de Guife. 34? pour le prouver , un grand nombre d'adres , par lefquels il paroïr que le vicaire général a donné des difpenfes de bans, célébré des mariages, & pro«oncé des jugements fur leur validité. Mais on ne voit point fi ces matiages ont été célébrés dans les armées , ou dans les villes \ s'iisontété contractés par des perfonnes qui euflent un domicile, ou une habitation certaine \ ou par des foldats qui n'euflent d'autre habitation , que leurs tentes, ou leursgarnifons. Enfin fi les curés ont donne une permiflion au vicaire général, ou s'üs ne lui en ont pas donné. Tant qu'on ignorera ces circonftances , qu'il eft impoflible de fcavoir , ce fera en vain que l'on multipliera les adres de pofleffion du vicaire général des armées. La queftion n'eft pas de fcavoir s'il a pu célébrer des mariages, 1'ufage 1'y aurorife ; mais fur quelles perfonnes , 8c dans quels lieux il a pu exercer cette autoriré. C'eft ce que les actes rapportés ne peuvent apprendre. II en eft de même des certificats des curés de Bruxelles. Ils ont gardé le filence fur le point eflentiel de la caufe. Ils n'ont point marqué fi le vicaire général célébré les mariages des officiers, P iv  344 Mariage nies, la première érant encore vivante; on renouvelle 1'injcnction portee par les anciens conciles , de faire publier trois bans avant la célébration du mariage, Mais le concile de Trente ne prononce pas la nullité des mariages qui feront célébrés fans proclamation précédente de bans : au contraire, il remet exprelfément a la prudence de 1'ordinaire d'en difpenfer felon qu'il le jugera a propos : A proprio cpntrahentium parocho intra. miffarum folemnia. matrimonium puhhce denuntïetur ; niji ordinarius ipfe judicaret ut pr&dicld. denuntiationes remittantur} quod il/iusprudentie & judicio fancla Synodus reli* quit (i). I/ordinaire eft donclemajtre de re« (i) Le concile de Trente , laiffant aux évêques Ia liberté de difpenfer de la publication des bans , c'eft une preuve certaine qu'il ne les croit pas néceffaires a 1'effence «3u mariage. L'ordonnance de Blois , dit Theveneau , doit être expliquée la-deffus dansle lens des canons. Elle le marqué elle-même par ces paroles, article 40, le tout fur les peines poriêespar les conciles. Les grands-vicaires , qui repréfentent la perfonne de 1'évèque , & qui, felon Flami-, r.ius, font compris dans le concile de Trente ftius le nom d'ordinaires, peuvent en difpen-  du Duc de Guife. 34? mettre les trois publications de bans , & d'en difpenfer quand il le trouve a propos. Telle eft la loi du concile de Trente , 8c tel eft 1'ufage des Pays-Bas, que les ordinaires accordent ces difpenfes tres - facilement, quand elles font demandées par des majeurs connus pour être libres. Qui pouvoit mieux expliquer les termes 8c le fens du concile de Trente que les juges de la rote?, Ce concile eft tous les jours la règle de leurs décilions: ils ont fcrupuleufement examiné les circonftances du mariage dont il s'agit ici, lesontappréciées d'après les rcglements établis par cette afiemblée , 8c ont prononcé la validité du mariage. Mais celui qui a donné la difpenfe avoit-il caraétère a cet effet ? Le vicaire général eft tellement en pofleffion d'exercer cet aóte de jurifdiction , que , des difpenfes de bans rapportées 8c tirées de fon fécrétariat, la plupart ont été accordées pour la publication des trois bans ; & jamais on n'a vu, dans ce pays} que la validité fer ; c'eft même un ufage dans le diocèfe da Paris , & dans plufieurs autres de 1'égüfc latine. Flaminius, de refign. benefic. cap. 3, quejl. i. L iij  34^ Mariage dit dans 1'acre infcrit fur le regiftre ? II y prend la qualité de vicaire général,. mais, comme un fimple titre d'honneur ; & , quand il eft queftion de la célébration , il dit qu'il 1'a faite comme autorifé par le curé. Et ce n'eft que quinze jours après la célébration , que l'on s'avife de tirer de ce Mansfeld un certificat, oü il ajoute que c'eft en qualité de vicaire général, & non en vertu de la permiffion du curé,qu'ilacélébré le mariage. Certificat qui n'a été fait,. que poar donner au mariage une nouvelle couleur , qui put couvrir le défaut de la permiffion , mals qui ne fert qu'd faire voir qu'on a fenti ce défaut, & qu'on n'a pu le réparer. Certificat même qu'on doit rejetter comme une pière informe ; foit paree qu'il n'a jamais été dépofé dans aucun regiftre public , foit paree qu'il n'a jamais été remis qu'entre les mains de la comtefle de Boffu. Si on paffe a la fecoude qualité de Charles de Manfeld y on trouvera que «elle de prêtre commis par le curé n'a pas été pour lui un titre plus folide, que celle de commiflaire fubdélégué pa* l'arebevcque de Malines.  du Duc de Guife, 347 M. 1'avocat-général adopte ici la diftinótion propofée par les héririers du duc de Guife , enrre les permiflions générales , Sc les permiflions générales Sc paniculieres. 11 fair voir que trois raifons rendenc abfolument nulle celle dont il s'agir ici. Elle eft incertaine , elle peut convenir k toutes fortes de perfonnes ; elle eft frauduleufe ,. Sc pourroit ouvrir la voicd'éluder impunémen: les loix les plus faintes. Après avoir montré , par le raifonnement, Sc par les exemples le danger qu'il y auroit d'adopter une permiflion ainfi con^ue, il ajoute une réflexion que les avocats n'avoient pas touchée, Quelle apparence , difoit-on , de la part du prince de Berghes que , quoique le curé, dans fa permiflion ,,n'ait parlé que d'une maniere très-vague des perfonnes qu'elle concernoit, il ait ignoré le nom de ces perfonnes? 11 a lui-même ordonné qu'après la célébration , leurs noms feroient marqués au bas de la permiflion même. 11 faut joindre ce raifonnement a celui que l'on a tiré de 1'infcription faite fur les regiftres } de la main du curé.. Pvj  54*8 . Mariage de la dame Paffan avec le fieur Touharti Le grand moyen de la dame Daver-, douïn , mère de la dame Pajfarc, c'éroit la clandeftiniré prouvée par le défaut de publication de bans. La difpenfe avoit été accordée de trois bans: ce-: pendant la mère déclarée non-recevable , par arrêt du i i juillet 1698. Auffi a-t-on été forcé de convenir ^ en plaidanr , qu'il étoirfort difficile de toucher a la validité d'un mariage fait par un majeur , fous prétexte de ce défaut 3 quand d'ailleurs les formalités font obfervées. Ici, toutes les formalités prefcrites par les loix du pays onc été exécutées religieufemenr. Mais nous avons un arrêt rendu , il y a quelques mois , dont Papplicatiort eft encore plus jufte a 1'efpèce particulière : c'eft l'arrêt qui fut rendu le jeudi 31 janvier 1606", fur le mariage de Pierre Grippier du Quefnoy avec Pru~ dence Dumont. Pierre Grippier étoit un gentilhomme chez le roi, qui s'étoit marié ea Flandres , dans une ville efpagnole du diocèfe de Cambrai , fans publication de bans, & fans conrrat de mariage : deux témoins feulement a la célébration ; appel comme d'abus du mariage i  du Duc de Guife. 3 49 & appel des fentences qui avoient adnugé des provifions a la femme. On difoit que Grippier fervoit alors ; & étoit en quartier d'hiver dans cetta ville qui , a la vérité , étoit a la France , lors du mariage. MahGrippier n'y avoit pas fon domicile; le roi-même la ren•: dit par le traité de Nimègue } il n'y avoit que deux témoins ; 1'ordonnance j en veut quatre j il n'y avoit point de 1 publication de bans. On rcpondit, au premier moyen , ihi domicilium efl ubi manet, le domicile eft la oiï on demeure. Au fecond & au troifième moyen , on oppofoit 1'ufage conftant du pays. Enfin , 1'archevêque de Cambrai donna un certificat, comme a fait dans notre efpèce, 1'archevêquede Malines , qui fait foi que ce mariage avoit été | célébré fuivant les formes 6c ufages de ce pays. On difoit que , quand ils auroient été obfervés , les formalités prefcrires par les ordonnances du royaume ayant eté vioiées, on ne pouvoit lui donnet d'exécution en France, &c que 5 par eoivféquent, la femme ne pouvoit fe faire payer des previilons qui lui aVoiensE L y  37 o Mariage Etoic-ce si Charles de Mansfeld, coafident & miniftre de leur paflion ? Ce ne pourroic donc être qu'au curé même. Cec argumenceft fans réplique. Enfin , pour foucenir la conduice du fieur Mansfeld & du curé, on arapporcé Rne efpecede jugemenc de 1'archevêque de Malines , qui approuve les opérations de ces deux eccléfiaftiques. Mais ce précendu jugemenc n'eft qu'ma avis, non fur un point d'ufage, mais fur une queftion imporcance , dont le jugement avoic déja écé déféré a la rote. Cec avis , d'ailleurs 3 n'avoir été donné que depuis que M. de Guife avoit quitté le parri del'Efpagne, dans un temsfou perfonne ne pouvoic expliquer fes raifons , &c ou la maifon de Berghes écoic toute puilfante dans les Pays-Bas. Enfin cet avis parroir d'une main fufpecre.L'archevêque de Malines s'étoit déclaré ouvertement contre M. de Guife , dès avant qu'il fe fut pourvu. k Rome. Cet avis auroit cependant plus de force , s'il étoit configné dans une fentence en forme. Mais elle feroit fufceptible de i'appel comme d'abus. On ne voit point, au furplus r les  du Duc de Guife. raifons fur lefquelles il eft fonclé. Ce fonc les circonftances que 1'archevêque dit avoir apprifes du curé & du fieur de Mansfeld. Mais quelles. font ces circonftances? On ne peut favoir fi elles font vraies ou faulfes , puifqu'elles ne font pas expliquées. 11 eft donc évident que la bénédiction nuptiale a été donnée par un rniniftre qui n'avoit pas caractère. Mais , difoit M. 1'avocat général, fl ee mariage , eonfidéré en lui-rnème , & dans fon principe , n'eft qu'une profanation manifefte du facrement, fi les loix civiles & canoniques ne peuvent le regarder , dans fon commencement, qu'avec indignation y fe hifleront-elles défarmer par des confidérations de faveur & d'équité ? Seront-elles yaincues par la force de la poffeflion & des appsobations publiques que les plus grands noms de 1'Europe ontdonnéesa ce mariage ? Tout ce qui a fuivi la célébration aura-t-il le pouvoir d'effacer les nullités qui 1'accompagnent ? Première efpèce de confirmation. La cohabitation publique cpr la fidélité perfévérante de M. le duc de Guife , depuis le mois de novembre 1641 , jufqu'au mois d'avril 1644.  3 ^ x Manage les témoins ? Deux chanoines , 1'un de 1'églife d'Anvers, 1'autre de Cambrai. Ce font deux eccléfiaftiques &c deux femmes qui ont forcé & violenté un général d'armée ,. dont 1'hiftoire nous apprend des exploits de valeur incroyables. Auffi le duc de Guife n'a t-il jar jnais allégué ce moyen. Après cela Ia clandeftinité peut-elle ètre propofée ? Elle eft condamnée en Efpagne comme en France j cela eft vrai. Mais ici, a-t-elle lieu, après la forme en laquelle ce mariage a été célébré , & la publiciré qui 1'a fuivi ? La clandeftinité ne forme un moyen valable , que quand on la prouve par des dcfaurs de folemnitês eftentielles. Quelles font les folemnitês e.Tentielles prefcrites par Ie concile ? La préfence du propre curé , ou d'un prêtre jnuni de fa permiffion , & la préfence de deux ou trois témoins : Prafente paracho , vel allofacerdote de ipfius parochi feu ordinarii Hcentïd , & duobus vel lrl~ bus tfllbus. Car , pour la publication des bans , ce n'eft pas une folemnité .eifentielle , puifque le concile permet a 1'ordinaire d'en difpenfer. Si 1'une des deux folemnitês eftentielles manque , le concile répute le mariage dam  du Duc de Guife. 3 5 3 deftin & nul : mais fi elles ont été obfervées , il n'eft plus clandeftin. Ici , les folemnitês elfentielles ont I été obfervées j le vicaire général étoit \ le propre curé du duc de Guife , Sc I avoit encore une permiffion du curé 1 de la femme. La célébration s'eft faite i en préfence de deux témoins : donc il n'y a point de clandeftinité. Que fi on veut établir la clandeftinité fur ce qu'il n'y a point de publicité qui ait précédé le mariage , & qu'il ne paroit pas qu'il y ait eu affiftance de parents; ce moyen eft-il recevable après la publicité qui a fuivi la célébrarion ? La renommee prend foin de répandre la nouvelle de ce mariage , la gazette 1'a publié j onl'apprend a Rome au commencement de janvier 164Z le eardinal Barberin en eft informé , comme on le voit par fa lettre de ce tems-la. Nous avons vu cette foule de reconnoiifances, qui donne a ce mariage le dernier degré d'authenticité. Qu'on dife , après cela, que Ie duc de Guife , rentrant en France, a été dégagé de fon mariage , comme il a été dégagé du traité qu'il a fait aves, les ennemis.  3H Mariage M de facrement, que 1'églife Sc la lei iui refufent egalemenr. Or le défaut de préfence du propre cure eft une de ces nullités abfolues , victoneufesdu tems, & contre lefquelles il eft prefque toujours permis de reclamer. Autre principe. Quand il eft queftion de reparer les vices d'un mariage par une longue , par une favorable potfef- rr'rr11 ^ ' m°inS » auxquelles il n'eft pas poffibie de donner atteinte fans rompre ce Hen facré, par lequel les deux puiffances fe foutiennent réciproquement. Ce n'eft point dans 1'opinion des Ultramonrains qu'il faut chercher la défenfe du duc de Guife : elle fe rrouve tout naturellement dans le fait même de la caufe. Toute queftion d'état eft action perfonnelle :enacFion perfonnelle , il faut fuivre le domicile de la perfonne: cela eft conftant. Mais de quelle perfonne faut-il fuivre Ie domicile ? C'eft celui du défendeur-. & ce principe fait la folution de la difticulté. La pragmatique, le concordat ne  du Duc de Guife. 3 une preuve qu'ils aient été bien defendus; mais ce n'eft pas un moyen d'abus. La fentence a prononcé ad quofcumqueefficlus, c'eft i-dire , qu'elle doit s'exécuter pour toutes fortes d'effets. fi eft certain que , quoique la rote foit en droit, en prononcant fur la va-  du ï)uc de Guife. 3 63 Jidlté du mariage , de prononcer fur les effets civils, l'on ne peutnéanmoins exercer ce droit furies biens des lujets du roi , en dépouillant les juges dn royaume de la jurifdiction qui leur appartient. Maison ne peut tirer aucunavantage de cette difpoiition contre la validité du jugement., Quels fonr les juges qui ont été dépouillés par la procédure que l'on a faite a la rote ? C'eft 1'archevêque de Malines. La rote ne dépouilloit point les juges du royaume : la rote a exercé au lieu «Sc place de 1'official de Malines. II faut confidérer cette procedure comme fi le duc de Guife avoit procédé a Malines. Alors il auroit procédé pour tous effets. Quel eft 1'ufage a Malines ? Que Ie juge d'églife connoit des effets civils du mariage , comme une dépendance du mariage. Plufieurs fentences levées au greffe de 1'ofhciaUté , & un acte de notoriété en admmiftrent la preuve. Cet ufage n'eft pas extraordinaire en France , ou les ofhciiux de Tournay , de Cambrai , d'Ypres , d'Arras , de la domination francoife , font dans la  364 Mariage même pofleffion. La rote eft dans le même ufage ; c'eft fur ce fondement cju'elle avoit déji rendu une fentence deprovifion alimentaire. On dira , fi l'on veut, que, fuivant nos régies , ce jugement ne doit pas être exécutoire fur les biens fitués en France; qu'il faut fe pourvoir par nouvelle action. C'eft un autre point : car autre chofe eft de fcavoir fi le tribunal de la rote ne pouvoit pas le prononcer; autre chofe, quand il auroit pu le prononcer , s'il pouvoit le faire exécuter en France. Cette impuiffance n'eft pas un moyen d'abus. Mais allons plus loin. Suppofons que ia rote n'ait pas du prononcer in quofcumque effect" us, pour toute forte d'effets , & ne Fait pas pu contre Mademoifelle <5c Mademoifelle de Guife. Quel feroit 1'effet de ce moyen d'abus ? Que Ia fentence ne fubfiftera point en ce chef; qu'il faudra diftinguer la queftion du mariage , de la queftion des effets civils. ■ 31 y aura , fi l'on veut , abus en ce chef: mais cet abus n'influe point fur Ie refte du prononcé ; la fentence fubfifte, au furplus , dans toute fa force; c'eft de quoi il y a des exemples dans les preuves de nos libertés, Sc c'eft un ufage  du Duc de Guife. 2.f5 En. nu mot,. tel eft 1'ufage. , Si on eüt faitfigner les témoins,; ceut éti une affectation contraire a ce qui fe pratique. On en eut fait ua -nioyen contre le mariage. Nimia cautda do Lus ,. auroir-on dit. Trop de pré«aution- annonce le doL Le neuvieme moyen d'abus qu'on oppok eft Ie défaut de bénédiótion mm. tiale Le fieur Mamfald dit fimplemer* qu'il a célébré , & que Les parties. om contracïé par paroïes. C'eft le langage de tous les acles de mmmm en ce pays. Vingt emairs des regiftres en font foi. 11 n'en eft pas- un feul oü il foit par4é de bénédiction. Cela n'empêche pas que le prêtre »e la donne j mais ij ne cer,ifie aurr£ chofe, dans faéte , que fa célébration. cela eft conforme aux rermes dans leiqnels s'expiiqne ie coneiSe.  Ju Duc de Guife. 277 Le dixibne moyen d'abus, on le fonde fur le défaut de confentement da roi > qu'on prétend néceffaire pour les mariages des grands feigneurs , quand ik 1 fe contradlent hors du royaume avec des érrangères. Pour que ce défaut de confentement opérat la nullité d'un mariage , dans ce cas il faudroit qu'il y eut une loi , un canon , une ordonnance, un reglement qui eüt prononcé les mariages non - valablement conttaftés par cette raifon. Oü eft 1'exemple qu'il y ait eu un mariage, en ce cas , déclaré nul, <5c même incapab-le d'eftets civils ? 11 y a plufieurs exernples ,dans 1'hiftoire., que le roi prenoit des promeffes des grands feigneurs pour les contenir fur ce point; il n'y avoit donc point de peines établies contre ces mariages. Le roi peut faire des défenfes de les concraéter, comme a remarqué M. du T'dlet : mais il ne les -a jamais faites par aucune ordonnance ; il n'a jamais prononcé j en ce cas, ni 1'intvalidité du contrat, ni même 1'inexécution. Tout le monde feait la délibcratiofï du clergé, en 1Ó35 (1) , qui établie la (1) Gafian de France , frère unlque de  '2*78 Mariage différence qu'il faut faire , & cet égard ; entre les héritiers préfomprifs de la couronne les princes du fang, 6c les aiiSres feigneurs. Les premiers, fuivant Lancienne courume du royaume , ne Lorris XIII , s'étoit m.irié avec Margueute , -tenr du-dac.de Lorraine , contre la défente que lui en avoit faite le roi [ c'éroit avant la naiffance de Louis XIV ]. Louis XIII fit -demander aux prélats & au efergé de 1'églife tgalhcarte affemWée ,ifi ies maiia»es des prin«es du fang qui peuvent prérendre a la fucceflïon du royaume , & particuliérement de ceux qui en font les plus proefles, & pré■ autres eccléJuifliques diputés de toutes ie* previnacs de ce royaume , repréfentans le cUrzè de France, après avou■ foigheufement examinéia que'flïon qui nous a éti propofée de la part de fa 'majefté ; vu les dêcifions & les conftitutior.s eccléfiaftiquesfurie pouvoir des coutumes des lieux en ce pui concerne la validité des manage*, & ave: le communfentiment de ceux qui ont écrit fur cette ■matter: ~ confidéré auffi la courume , pratique & ujage 'Ae la trance en ce qui K_>- r\..„,.l, ~«r-,A*,t Ainfi faits font nle~ gitime's, Invalides & nuÜ,par le défaut £l une ci ndmon Jans laqueue ujauo ->.«•*<-• — j--. capalles de léghimement &> valablement contraster, & que cette coutume eft raifonnabh , ancienne , ajfermic par ur.e légitime preplptier. , & autorifée de 1'églife Tel fut aufïi i'avis de plufieurs dotleurs qiu furent confdus de k part du clergé , & qiu ' répondirênr prefque dansles inênies tenues,  2S0 Mariage L'inrérêr de letac exrge que Ie röï mette le fceau aux mariages des premiers par fon approbation , paree que leurs aliiances rejailiilfenc fur la couronne a laquelle ils appartiennenr > Ces doSern-s furent meffieurs IfamBert 2 Froifard , Lefcot, Haten , Cornet, Duval Sc de liaconis. En conféquence de ces décifions , le mariage de ce prince fut réhabilitè en face deglife, du confentement de Louis XIII, dans lecbitean de Mendon, parl'archevèque . de Paris. L auteur de la bibliothèque canonique ,' V. mariages , tome 2 , p. 25 „ fait deux remarques au fujet du mariage de ce prince. Preïruèrement que les fentiments de fa forbonne n'avoient pas été uniformes. Secondement, que h réponfe de I'anemblée eft indubitable pour la propofitiort de droit: que les coutumes des états , fondées fur une ancienne prefrription , & auioritêes de 1'églife , peuvent apporter /une condition dont le défaut rendjes mariages nuls. Pour la queftion de fait, il n'en convient pas. , Mais Fevret, L. 5 , c. t \ n. 5 , mpporte plufieurs exempies qui autorifent cette coutume de la Frahcè : il rapporté ,'entr'autres , après Fauchety le mariage'de Louis Lebefgueayec Anfgarde , qui fut caffé , quoiqu'iTêneut eu xle'ux enftnts , paree qu'ii avoit été Lut faas le confentement du roi fon père. Ce prince fe maria enfnite avec Alix, de laquelk il eut Charles lé Simple , quirégna après lui fans aucune conteftation.  du Duc Wt.Guife. 2,öï '«lont ils peuvent hériter en leur rang. L'honneur dn roi & de la couronne demaudent donc que leurs manages foient dignes d'eux. ' _ On convient que 1'intérêt de 1'etat exige auffi que les feigneurs ne fe ma- M. de Launcy , dans la feconde partie de fon traité du pouvoir des princes fur les mariages , fait voir , par une longue tradition hiftorique , qu'il comnience au regne de Ckarles le Ckauve, & qu'il conduit jufqu a Louis Xil, en fuivant 1'hiftoire de prefque tous les rois de France , qu'il n'a jamais été permis , même aux grands feigneurs du royaume , de fe marier légitimement fans 1'ajirément du roi. Le fieur de Beaufort, dans la vie de Phihppe le Bel, rapporté qu'il a lu , dans un ancien inanufcrit, que c'étoitune ancienne coutume de France , que les feigneurs du royaume ne puuTent fe marier avec des étrangères fansle confentement du roi. Cette coutume fe trouve anflï autorifée dans les royaumes de Nnples & de Sicile par une loi de 1'empereur Fréderic II, & dans le royaume d'An-gleterre par des loix & des exemples que cite M. de Launoy. On ajoutera que de fages politiques , qui ont vécu avant Jefus-Chrirt, ont dtt des grands feigneurs, que, comme leurs mariages font fouvent du bien ou du mal a 1'état°, c'eft a la république, ou au prince , a les défendre , ou les ordonner : Potentierum matrimwia femper ejfe è republhd.  2.o2 Mariage riem pas pour tranfmectre leurs biens hors du royaume. Mais ici c'eft un feigneur qui devoit amener fa femme en France. Quel préjudice le royaume en auroit il foufferr ? II auroit pu y jouir des biens de fa femme. Un mariage d'un grand feigneur ne doit pas être permis, quand il peur produire quelqu'effer contraire au fervice du roi. Ce n'eft pas le mariage du duc de Guife qui a produit fa retraite nors le royaume; mais c'eft la retraire de ce feigneur qui a donné lieu a ce mariage. Le roi ne s'en eft jamais plaint : en Fm pardonnantfarébellion , iln'a point défapprouvé fon mariage : la maifon royale 1'a approuvé & reconnu. Le roi Henri JU, dans 1'affèmbiée des notables renue a Sainr-Germainen-Laye en 1585 , propofa aux états de faire des défenfes a tous princes , ducs , officiers de Ia couronne , de s'allierfans le confentement de fa majefté. II Vie demandoitpas queleur mariage fijt déclaré non valablement contracté , ni incapable d'effèts civils fans ce confentement; mais il exigeoit que Ia peine éüc -pour objet la privation de leurs états.  du Duc Je Guife. 283 fi Les notables répondirent que les defenfes de s'alüer fans la permiflion du Elles n'ont jamais ete kites. Tels font les moyens d abus que Pon propofe contre le manage de la Pour leur donnet de la favem , on produit une information faite a ja reLête de ce feigneur contre cette dame, l donne cette information comme,an tableau fidele de fa conduite dereglee Leduc* Guife, ne pouvantpom .reulflr 1 faire cafler fon manage par un coup de défefpoir enttepm: ce te information , compofée de W*^ï quais, dont le plus confidcrable, nom Zs ns-foud?sh*b\« domicilie dans un cabaret a Montmarrre: ceft dans e lieu-la que le complot a et^: fait. Que dépore^il? Que la.duchefle A Guife au oit voulu perdre fon proces a Rome pour pouvok époufer un particulier. LmrLitaccorder cela avec les pourfuites vives & fans relache qu elle ta felt a Rome même, pour foutenir a validité de fon mariage & avec ie refus des propofuionS que lui fit le duc de Guife ? 11 lui demandoit Ion con-  2-3 4 Mariage fenrement a la etflation de ce même mariage. Un autre témoin dépofe qu'elle fe iauva, la nuit , du couvent de Charomie, fous un habit d'homme , achevaf, incopnuo; tandis qu'il eft notoire qu'elle en fortit en plein jOUr, \ La Vue de tout le monde, le jour de fon départ pour la Flandres. Enfin ces dépofuions font des tiffus de fauffetés. Comment pourroit - on donner cours aux traits qui noircifFent la ducheffe de Gu:fe , dans une information qui fe décrédire d'elle-même , par la- fuppohtion qui en eft 1'ame ?' Jugeons-en par le mépris que le duc de Gu,fe en a flair. Il n'en a jamais tiré aucun parti; il ne 1'a jamais fait décréter; & , depuis trente ans qu'elle a été faite , on 1'a enfévelie dans le filence. N'eft-elle pas, d'ailleurs, effacée par 1 eciat de la fageffe de la ducheffe , re.connue par tant de témöignag^s iiluf■tres ? Une relle ombre ne peut donc jamais lui nuire. , Ln validité du mariage étant ainfi recabhe, il eft facile detablir, en mêmetems , les demandes formées par le prince de Berghes. .  du Duc de Guife. 28^ II y en a de de deux fortes. Les unes regardent Ie paienientdes conventions matnmoniales, douane, preciput, an! ments-j les autres concernent la reftitution des fornmes payées a 1'acquit du duc di Guife par fa femme. La principale de ces demandes tend a ce que le contrat de mariage foit dé, claré execuroire contre les héritiers du duc de Guife. Le contrat, quoiqne paflé en pays etranger , du moment quü eit redige dans les formes, & fuivant les ufages : ordinaires du pays , doit avoir fon exéctition en France , comme il 1'auroic dans le pays oü il a été recu, C'eft la difFérence que nous faifons , dans le ; royaume , entre les contrats paffes en ■ pays étranger , Sc les jngements qui y font rendus. A 1'égard des jngements, il eft vrai qu'ils ne s'exécutent point fur les biens fitijés en France. 11 faut fe pourvoir par nouvelle acFion : &c nous ne connoiffons , en France , de jugements exécutoires que ceux qui font prononcés par des juges dont la jurifdicFion émane de la fouveraineré du roi, qui feul a droit fur Ie temporel de fon royaume. Mais on s'oblige par contrat en tour  206 Mariage pays. La foi publique & Ia liberté dg commerce veulent que tous contrats foient obligatoires, en quelque pays qu'ils foient palfés. Le confentement des hommes pour s'obliger,& hyporhéquer leurs biens, doit être libre , & avoir fon effet en tour pays. C'eft le droit des gens : autrement j fi l'on établiffoit qu'un Francois ne s'obligeroir point en contractant en pays étranger , pendant que 1'étranger s'obligeroit avec les Francois; ce feroit violer la bonne foi, qui doit être la bafe de la fociété publique; ce feroit interdire aux Francois tout commerce avec les autres nations , & leur èrer la parricipation au droir des gens. De tous les contrats qui fe paflent , les contrats de mariage font fans doute ceux dont 1'exécution eft Ia plus favorable; ce font ceux qui participent davantage au droit des gens. Et quoique celui donc il s'agit foit fous fignature privée , il n'en eft pas moins obligatoire ; paree que tel eft 1'ufage du pays. La date'en eftcerraine, èc par les deux témoins qui ont aflifté au contrar & a la célébration , & par l'aéle de célébration qui eft du même  du Duc de Guife. 287 jfour du contrat. Auffi le duc de Guife n'en a-t-il jamais contefté la vérité , de fon vivant. On oppofe , contre les demandes du princeBerghes , des moyens gé- : néraux , & des moyens particuliers contre chacune. Deux moyens généraux. Première- I ment , le mariage , fuppofé qu'il fut , bon , eft incapable d'effets civils , paree que le duc de Guife étoit mort civilement. Secondement, il n'a jamais eu d'effets civils en France , &£ il n'eft plus tems de les demander. A 1'égard du premier moyen , Ie duc de Guife , dit-on, étoit condamné a mort , la contumace exécutée. II eft vrai: mais il y a deux réponfes invincibles a cet argument. La première , le duc de Guife a été rétabli. La feconde , il a été rétabli dans les cinq ans. 11 faut convenir , premièrement , que la condamnation prononcée contre 1 le duc de Guife ne le mettoit point hors d'état de contracFer mariage; paree que le mariage, a. le confidérer dans la fociété , eft un contrat du droit des gens; & a le confidérer dans 1'églife , c'eft un facrement. La mort civile n'ote la parricipation ni de 1'un ui de 1'autre,  2.88 Mariage II eft vrai que la condamnation 'a mort civile auroit emporté 1'incapacité des effets civils , fi elle eüt fublifté.Mais qu'eft devenue cette condamnation ? Elle a été anéantie par la grace du prince; & le duc a's Guifea étéreftitué comme fi rien ne füt arrivé. Quel eft 1'effet de cette reftitution ? Quand elle eft générale , comme celle* ci , c'eft d'eftacer entièrement & le crime & la condamnation , & la faire réputer non-avenue , & de remettre le condamné au même état que s'il n'y en avoir jamais eu C'eft une maxime que nous trouvons érablie dans la loi derniere au code de reflit. in integ. Que l'on life rous les docteurs fur cette loi , qui eft le fiège de la matière , on n'en trouvera pas un qui ne foit d'avis que 1'abolition accordée par Ie prince opère un rerour entier a tous les droits du condamné , fans qu'il refte aucun veftige de la condamnation. lis comparent tous cette reftitution au droit que les Romains appelloient poft liminium , droit de retour. En vertu de ce droit, ceux qui avoient été prifonniers chez les ennemis reprenoient , en rentrant dans Rome , tous leurs droits de cité & autres, fans aucune  du Duc de Guife. 289 ètme altération; paree que 1'on feignoic qu'ils n'en étoient jamais fortis. Auffi 1'eftet de la reftitution accordée par la grace du prince, difenr tous les dodeurs , eft de feindre qu'il n'y a jamais eu de condamnation. C'eft la raifon pour laquelle on juge alors qu'il n'y a point de confifcation acquife aux feigneurs , paree que le crime eft réputé éreint dans fa fource. On s'eft eftorcé d'exagérer , en cet endroit , le crime du duc de Guife. On n'entreprendra point de 1'excufer; mais il auroit été a fouhaiter qu'on eut concilié , k cet égard , le commencement de 4a plaidoierie avec la fin. Dans le commencement de la caufe, on a repréfenté la fortie du duc de Guife hors le royaume , comme 1'effet d'une animofiré particulière entre lui & le miniftre qui étoic lors en place ; on a die que les bénéfices qu'il poftedoic aggravoienc encore fon crime , Sc qae le miniftre étant mort , il ne fe trouva aucun obftacle a fon retour. On a préfenté , enfuite , ce crime tout autre. On 2 dit qu'il étoit d'une telle nature , que , de lui- même , il emportoit la mort civile, fans que la condamnation fut prononcce. Tome XIV, N  zjo Mariage Tout cela eft indifférent. Que l'on donne telles idéés que l'on voudra de ia grandeur du crime, il a été entièremenr aboli par le prince: il eft réputé non-avenu : par conféquent le duc de Guife pleinement libre , &c capable de tous les actes qu'il a paffés inrermédiairement. On nedira pas fimplement qu'il reprend fa capacité : il eft réputé ne 1'avoir jamais perdue ; il n'a pas ceffé de pouvoir acquérir , veudre , pofféder ; a plus forte raifon contracter mariage. Son crime , fa condamnation étoient un obftacle a cette capacité : 1'obftacle eft levé par la grace du prince , qui a un effet rétroaétif a la fource , puifqu'elle anéantit le crime ab initio 3 qui eft réputé non-arrivé. Ainfi la capacité demeure en fon entier : il eft cenfé ne 1'avoir point perdue ; puifqu'il eft réputé n'avoir point fait le crime, le crime eft comme non-avenu. II eft de la grandeur du fouverain que la grace ne laiffe aucune cicatrke alaplaie: il a voulu en effacer entièrement ëc la mémoirejSc Peffer. II y a même lieu de croire que c'eft la première grace que Louis XIV air accordée après fon avénement a la couronne.  du Duc de Guife. 291 ïl eft i-mpoffiblc cle douter que cette veftitution n'ait éteint le crime & tous fes effets , fans révoquer en doute ie pouvoir du roi : & c'eft ce que 1'on ■n'oferoir fbutenir. N'eft - ce pas une belle fubtilité de dire que ce rétabliffement eft une grace a la familie , que ces lettres ne parient point de la ducheffe de Guife} Eft-il befoin qu'elles en parient ? La femme ne fuit-elle pas la condition de fon mari ? ïl n'y avoit point de condamnation contte Ja ducheffe de Guife : c'eft le duc de Guife qui avoit été condamné , c'eft lui qui a été rétabli. Son rétabliffement eft une réfurreetion, comme difent les pères Grecs , quand ils parient de ces fortes de reftirutions aecordées par les empereurs ; c'eft un retour a la vie civile , fans mélange d'aucune infirmité : par conféquent il faut confidérer ce mariage de la même manière que s'il n'y avoit jamais eu de condamnation. On va plus loin , Sc c'eft la feconde réponfe a cette objection. La condamnation du duc de Guife n'a point emporté de mort civile , paree que c'eft une condamnation par contumace ; Sc lï a été rétabli avant les cinq ans. Nij  ■ 20% Manage Que k condamnation foit par conturriaée , le fait n'eft pas révoqué en doute. 11 eft pareillement certain que le rétabliffement a été accordé avant 1'expiration des cinq ans. La condamnation eft du 6 feptembre 1641 ; le rétabliffement eft du mois d'aoüt 1643 : il n'y avoit pas feulement deux années I entières. Et on veut que cette condam- | nation ait emporté une mort civile ! On fcait la différence que la loi fait, I a cet égard , entre les condamnations 1 contradicloires , & les condamnations f par défaut. Toute capacité civile vient de k loi; j 5c comme c'eft la loi feule qui k donne , c'eft la loi feule qui en peut I priver. Elle a introduir cette privation dans certains cas; mais elle y a oppofé fes reftrictions, au-dek defquelles il ] n'eft pas permis de la porter. C'eft de da que nous apprenons k différence qu'il faut faire entre les condamnations contradicloires , & les condamnations par défaut. Les condamnations contradictoires produifenrl'incapacité , dèi Pinftant de la prononciation , quand même le criminel s'échapperoir enfuite (1) , paree (1) Cette aflertion eft contraire aux yrais L' Ik  du Duc de Guife. 293 cue le condamné étant préfent, ayant été entendu en fa défenfe, fon jugement eft parfait. Ainfi il eft raifonnable qu'il ait fon exécution dés ce moment. La loi 1'ayant jugé digne de mort en connoiftance de caule , elle ne le connoit plus pour homme vivant. Mais, a 1'égard des condamnations par défaut J la loi donne un tems au condamné pour fe repréfenter & venir propofer fa défenfe: 1'échéance de ce délai eft le terme de fa capacité , ou 1'époque de fon incapacité civile. llconferve fon état &c fes biens pendant les cinq ans; & ce n'eft qu'après ce tems écoulé qu'il en eft dépouillé: de forte que , s'il eft rétabli dans les cinq ans 3 il eft préfumé n'avoir jamais perdu fa capacité , il recucille les fucceflions , Sc exerce tous les aétes de la vie civile. C'eft ce qui paroir. par la difpofition de 1'article i8 de 1'ordonnance de Moulins: c'eft-a-dire que , durant ce temsla, la confifcation n'eft point acquife au principes de la matière , qui exigent, pour , qu'une condimnation , même contradictoire , produife quelqu'efFet, que le jugement ait été exécuté. Voy. le Traité, de la mort civile , p. 144 6* fiüv. .... N nj  294 Mariage rot. Les condarnnés reftent donc pro priétaires & poffeffeurs. II eft donc vrai que les condarnnés a mou par contumace confervenelacapaeiré des effets civils pendant les cinq ans -y fufques-la qu'tin homme qui revient dans cet efpace de tems , & fans s'être repréfenté , venant a décéder avant 1'expiration de ce terme , eft réputé mourir integri flatus , dans 1'intégritc de fon érat \ Sc les a&es qu'il a paffes font jugés bons Sc valables (i). Ici , le rérabliffement du duc d$ Guife s'eft fait non - feulement dans les cinq ans , mais dans les deux ans de Ia condamnation par contumace. il n'avoit donc pas encore perdu les facultés de la vie civile, iln'avoit donc pas encore perdu le pouvoir d'acquérir, de póffeder , de fuccéder , moins encore celui de contracter mariage. Le roi prononcé : toutes les procédures de eoMumaces mifes au néant. II ne veut (1) Cette queftion , qui erf ici traitée forê fuccintement, pour ne pas dire fort légère■mem , eft très-épineufe , & demandé la plus grande attention. Eiie eft difcutée avee fceaacoup d etendue dans le traité de la mon eiviie , p. i8i, & fuiv,  du Duc de Guife. 29% donc pas qu'elles aient aucun effet. On oppofe qu'il n'a pas purge la contumace dans les régies , qu tl ne s eft pas repréfenté & mis en etat. Cela ett Vf Mais il en a été exprefiément difpenfé par lettres parentes ;& la cour les a enr/giftries parement & fimplement. Ce qui prouve même 1'abfolution entière du crime. H n'avoit point befoin d'arrêt d'abfolution , puifquune abiolution juridique fuppofe une acculation. Mais le roi , ayant tout eftace , il n'y avoit plus ni crime , ni accuiation' autrement il faudroit mettre des bornes a la pniflance du roi. _ C'eft une illufion de fefervir, en cet endroit, de 1'aiticle 4 de 1'ordonnance de ió 39, par lequel le roi ne veut pas cme l'on ait égard aux lettres de rehabilitation qui feroient accordces aux coupables de crime de rapt. Le duc de Guife n'étoit point en ce cas. _ II faut donc écarter toutes les tnductions que l'on a voulu tirer de 1'incapacitédvile;&il paroit qte Morfeur Sc monfieur le prince ny ont pas beaucoup compté, puifqu'on a appel ecomthe d'abus de la célébration da maliase, &c qu'on s'eft détermmc a pren0 •* N iv  2- 9 6 Mariage dre cette voie après cinquante - hult ans ; ce que ion n'auroit pas fait fans dopte, Ci cn avoit trouvé un moyen fuinfanrpour fonderi'incapacitécivile, indéperidamment de la validité da mariage. Voici ce que l'on a encore allé^ué pour foutenir cette prétendue incapacite. C'eft , dit-on, une étrangère , unè ennemie qui fe marie . pendant la guerre , a un feigneur du royaume : ce feigneur fe marie fans la permiflion .eu roi. A ce propos, on a cité la déclaration faite en i &8 5 , qui prononcé , dans ce cas , des peines affiictives contre les hommes & contre les femmes. . ; Qu'on regarde , fi l'on veut, ce manage comme une faite du crime de rcbellion du duc de Guije. Ec le crime & les fuites ne font-ei les pas enveloppées dans Ie pardon que le roi lui a accordé? D'ailleurs , quand la guerre eft finie, Ie titre d'ennemi s'évanouit. II eft vrai qu'il eft de la bienféance , qu'il eft du devoir des grands feigneurs du royaume, de ne point contracter manage fans demander 1'agrément du roi: le roi peut faire, comme on a dit, une loi qui prononcé I'incapacité, qui pourra produire un empêchement dirimant,  du Duc de Guife. 297 & rendra fes fujets inhabiles acontracter mariage dans ce cas. Mais cette lol n'exifte point ; il n'y en a encore aucune qui air déclaré ces fortes de mariaaes incapables d'effets civils, ou qui leur ait oppofé des empêchements dl- rimants. . , . Enfin , on a dit: ce mariage n a jamais eu d'effeten France , & n'y a jamais été connu : le contrat n'eft venfie qu en i699. On a même dit, en plaidant , que la ducheffe de Guife n'a point obtenu des lettres de naturahre , qu elle ne s'eft jamais préfentée a la juftice. II n'y a point de prefcnpnon a oppofer. S'il étoit queftion d'étabkr la capacité de la ducheffe de Guife , pour recueillir , comme hétitière une fucceffion en France, il feroit aifc d etablir qu'elle n'auroit pas befoin des lettres de mturalité , & que les héritiers du Brabant fuccèdent, en France , comme les recmicoles , fans quele droit d'aubaine au lieu a leur égard; que cela eft expreffément porté par les traités de Cambrai & de Crépy , par les lettres-patentesdu roi Henri IV, enregiftrées en la cour au mois d'aofit 1597 » dont 1'exécunon a été confirmée , depuis , par plufieurs arrêts oue nous trouvons dans Bacquet, 1 N v  298 Mariage droit iaubaine, chap. 8. C'eft uit pays cjui a fait autrefois partie du domaine de la couronne „ Sc qui n'a été démembré , dans les premiers tems >qu'a la ■charge d'en relever en hef. _ Mais , fans nous jetter dans cette differtation, a-t-on jamais out dire qu'une étrangère eüt befoin de lettres de nacurahté , pour demander 1'exéc* tion des claufes de fon contrat de mariage avec un Francois né fujet du roi ?' Ce contrat étant obligatoire par tout pays, 1'exécution n'efFelle pas du droit des gens ? L'on ne regarde point comme aubaine, une femme étrangère qui époufe un Franeois. Comme femme, elle fuit la fortune & le domicile de fon mari j elle eft confidérée comme faifant partie de fa familie : in manu maiiti eft , dit la loi j. & comme ü ne faut point de lettres de naturalité pour fe marier, il n'eft pas befoin auffi de lettres de naturalité 5 pour demander f2 dor, fon douane , Sc hs autres conventions dont un contrat de mariage eft fufceptible. Mais, outre que laducheffe de Guife; ea qualité de femme fubordonnée a fon mari, n'avoit pas befoia de iettïes de namralité, elle n'a même eu d action. ouvtrte cue pat la more de fon  du Duc de Guife. lp mari. Elle a commencé, des lor?, aagir, elle s'eft oppofée au fcellé, elle a enfuite fait jager fon état. Les demandes qui naiflent de la validité de ce mariage fontconfidérables, par rapport aux grands biens qu'elle avoit réunis en fa perfonne. Mais ce n'eft pas le bien de Monfieur , ni de M. le prince que demandé le prince de Berghes. 11 exerce une créance légitime fur la fucceffion de la maifon de Guife > dont le profit monte a plus de neuf milHons i il a demandé une créance qui n'étoit pas inconnue a mademoifelle de Guife , tfui paroit avoir en intenrion de charger fes héritiers & fes légataitef de 1'acquitter. Soa teftiment porte que , fur les revenus des grands biens qu'elle laiffe , on acquittcia toutes les detres de la maifon , avant que ceux a qui elle les> laifte puiffent en jouir. Quel eft le motif qui lui a infpiré cette fage difpofition ? Elle nous apprend , au commencement de fon teftament , que c'eft pour fatisfaire an* obligations de fa conf ience Sc de celle de tous ceux dont Dieu a permis qu'elle aitrecueilli fes-fucceffions. Elle kavelt le mariage du dus de Guifa&m  300 Manage frère, dont elie avoit recueilli les biens; elle fcavoir le jugement de la rote , les obftacles qu'elle-même ayoit apportés i ion exécution: tous les aótes de ce mariage lui avoient pafte par les mains , & elle en connoiftbit la bon-ne foi. Elle recommande, en mourant, a tous ceux a qui elle laiffe fes biens ,. de réparer le mal qu'elle a fair, d'effacer fes'injuftiees ï c'eft une loi qu'elle a prononcée elle-même , & dont on demandé la. confirmation» On convient qtie le douane , le préciput, la provifion alimentaire dépendent de la validité du mariage; & que sfci n'y a point de mariage, toutes ces demandes deviennent caduques. Mais elles font inconteftables , G elles ont pour bafe une union légitimement contracrée. Je ne fiiivrai point le prince de Berghes dans la difcuffion des autres droits qu'il prétendoit exercer contre la fucceffion de mademoifelle de Guife, pour ir.ifon des fommes que le dac de Guife avoit recues de la comtelfe de Boffu, & de celles qu'elle avoit payées a fon acquit, comme Ca caution. «' 1 le mariage eft déclaré vaiable ^ difcit M. Nouet, il n'eft pas certain  du Duc de Guife, 3oï , que le prince de Berghes air droit de répéter ces fommes. Mais fi on alloir le déclarernul, elles C .. : .u..itu.mml exirnbles, & pro- ïeruieiiL tci**""»»*»"» o / . - • duiroient des intéréts du jour des paiementsj ce qui produiroit des fommes énormes , tant en ptincipal qu'en intéréts, qui fe paient en Flandres , iur le pied du denier feize. Après ces difcufFions, M. d'Agueffeau, avocatgénéral , & depuis ehancelier de France , prit la parole , & examina dabord les rins de non-recevoir oppokes i Monfieur, & a /e pri»c« , pas le prince de Berghes. La première fe tiroit de la qualité des parties, qui n'étoienc que des collatéraux. Eft-ilbien vrai, difoit ce magiltrat, que la loine puifFe prefque jamais ecooter les plaintes des cóMatéiaax qui attaquent on mariage comracFé par celui qu'ils repréfentent ? 11 eft, en cette matière , trois -ou quatre principes confirmés par un » grand nombre d'arrêts , que c'eft les avoir prouves , que de les avoir ümplement propofés. ^ , i Un mariage ne peut être attaque, du vivant de celui qui 1'a contracFé ,  3°2 Mariage que par les parties mêmes qui ont contracté ce hen ; ou par les pères , mères 4 tuteurs ou curateurs que la loi arendus depofitaires de fon autorité, pour veilJer iur la conduite des enfants de familie mineurs , & venger, en même* rems , 1 offenfe publique , & leur injure particuHère. Mais cette puiflance n'a point été conuee aux coilatéraux, qui ne peuvent faire entendre leurs plaintesqu après la mort de celui dont ils veulent concefter le mariage. Ce n'eft pas qu'ils acquièrent une autorite qu'ils n'avoient pas ; mais on juge qu'ils ont droit d'artaquer le manage , paree qu'ils ont un incérêt fenfib!e a le détruire. Mdscomment doivent-ilsufer de ce droit? Deux fortes d'abus peuvent faire declarer un maringe non valablement contracté & célébré. Les uns produifent des nulliris qui ne font relatives qu'a certaines perfonnes ; mais ces perfonnes feules peuvent ies faire valoir ■ & elles deviennent des armes impuiffantes dans toute autre mam. II eft d'autres nullités quin'ayant  du Duc du Guife. 505 pour objer que 1'utüité publique, peuvent être propofées par tous ceux qui ont intérêt d'atcaquer un mariage. L'ancienne & la nouvelle juniprudence font parfaitement d'accord lur ce point. Toutes les fois que des collatéraux ont propofé des nullites generales, effentieiles , abfolues , comme 4e défaut de préfence du propre cure , on n'a pas cru que la qualité de collateraux put faire donnet des fuites legitimes a ce qui eft nul dans fon principe. II faut eonvenir cependant que^, quand un mariage eft fuivi de la naitfance de plufieurs enfants , ratifie par une longue cohabitation , confrmepar une pofleffion tranquiile , publique , continuelle, dont la mort feule amterrompu le cours , fans que perfonne ait entrepris d'y porter la moindre attemte. Quand, d'un autre coïé,on volt des collatéraux avides rroubler les cendres d'un défunt , & attaquer un manage «ui a exifté long-rems aux yeux de la familie & du public , qu'ils ont fouvent eux mêmes approuvé par leur conduite, on rejette alors leurs plaintes", & on leur impofe un filenee éternel , en les declarant non - reeevables. C'eft par ces principes que Ton con-  304 Mariage cilie parfairemenr la contrariété appaJ rente qui fe trouve dans les arrêts. La diverfué des circonftances produit feule la diverfité des arrêts. II faut donc examirier ici les circonftances de cette affaire. Qui eft-ce qui fe préfence pour atcaquer le mariage du duc de Guife , avec la comteffe de Boffu ? Sont-ce des collaréraux avides qiu veulent troublerPunion d'un mariage fubfiftant ? Mais il y a plus de trente--cinq ans 'que la more a diffous ce mariage. Sonc-ce des parents qui nepropoferrt que des nullrtés relarives, établies par les loix en faveur des pères , Sc qui n'ont de force , que quand c'eft eux qui les propofent? II eft vrai qu'on en allègue ici quelques -unes de ce caractère ; mais 011 en ajouce d'autres qui peuvent être écpUtées dans la bouche de toutes fortes de perfonnes ; c'eft le défaut de préfence du propre curé ; I'incapacité des concractancs, Sc Ia clandeftinité de leur engagement. Enfin , font-ce des héritiers qui viennent actaquer une tinion qui a toujours été reconnue Sc refpectée par ceux qui l'ont formée ?  du Duc de Guife. 301 » rP fnnt des héritiers AU COHU..UH. , n." 4, qui ne font que reprendre une aftion déja intentée & pourfuivie par celui qu'ils repréfentent. ^ Bienloind'ètrernortdanslapaihble poffeflion de fon état M. ... u..:. „,,e »-,f>rnflhfentDaSDOur einquance-nui'- i « en fixer la deftinée ? Mais, fans s'arrêter fur ces grandes  Manage maximes , tant de fois répétées, qne 1 abus nefecouvrepoint, qu'on ne peut preicnre contre la pureté de la difcipnne etabhe pour les mariages; que la nulhtedu titre réclame perpérueliement contre ceux qui veulent s'en fervir: il iumr de dire que 1W oublie encore , en prcpofant cette fin de non-recevoir que cet appel comme d'abus n'eft pas tant une demandé formée par les héritiers du duc de Guife 3 qU>une défenfe qu ils oppofenta la prérention de 1'héfttier de la comtelfe de Boffu; qu'ainfi cet appel ue doit jamais paroitre trop tardir, puifqu'il a éré oppofé , fur Ie C™P' „^ demandé qui 1'aprovoqué. i il talloit même impofer filence a I une ou 1'autre des parties, a qui pöurroit-on reprocher ici de la négligence, ou des héritiers de la dame de Boffu' que tant d'intérêts devoient exciter a' agir , ou de Ia maifon de Guife , qui pouvoit fe contenter de jouw, en repos. du hlence de fon adverfaire ? On emprunte la troifièmehn de nonrecevoir de cette loiéquitable du droit romain qui rendoit 1'état des mores immuable, après cinq ans. N'examinons point, difoit M. I'avocat-général, Ü cette efpèce de prefcrip-  du Duc de Guife. 3G7 rion eft adoptée dans nos mceurs. Peut- arrêts qui 1'euflent autorifee- Mais, q and mi la regarderoit exemple digne d'ètte tfMte , convien droit elle a 1'efpèce de cette caufe ? dlDeuxconditions effenuelles étoient requifes , pour qu'on put profiter de CeC"!lTKeceluidontonvor lok défendre 1'état contre une recherche odieufe , après cinq ans, fut mort dans u„e pofleffion cettaine & publique de ïa condition.Tel il avoit pani au mornentdefamort^tella loi le rcputcit toujours, lorfquele terme de «nqannées avoir mis ledernier fceaua fa def- tinée Si...* cïvis Romanusujqueta Hem mortis vixit. Si quafi '*H™a ""Z muni opinione vixit . • • • V™ r^^^^Cefontlescermes desloiXi,4N,cod.« de Jlatu defmB. poll quinq. qu^r. f J Ce n'eft pas tout. En vain cet etat auroit été public s'il eut ere contefte. La loi netraitefavorableme.it que les  3.o8 Mariage Vixit, fitte interpellatione utcivis Rotnanus egu. ... Si velut ingenuus vixit nccfiatus controverfiam paffus eff. L. i * L<_ 7 , eod. eod. ' Telles font les conditions fous lefquelles la loi protégé 1'état des morts : conditions qui manqtient toutes deux egalement dans 1'efpèce de cette caufe. _ L etat de la comteffe de Boffu n'a jamais ere un état public, reconnu , approuve dans le royaume. Peut-on alléguer en fa faveur, une pofleffion que ia différence des royaumes peut faireregarder comme clandeftine, ou du moins comme abfolument inutile ? Ne pourroit- on pas, au contraire, lui appliquer ces termes d'une loi , qui conviennent parfaicement a fon état ? Nee emm fenatus - confultum intervenit fi dejunaus in fiigam conVerfus atque kataas decejfr. L. 8 , cod. eod. La comtelTe de Boffu a toujours fui Ja lumiere de ce tribunal, & 1'éclat du rang que fa qualité de veuve d'un duc de Guif Qk d» jui donnej_ gn ^!mcQt Lbe a vecü dans les Pays-Bas , pendant plusje quatre années de paixentres les pui!fances,öbfcure , inconnue,& prefque ignorée des héritiers de M. leduc ae Crui/e,  du Duc de Guife. 309 Enfin cet état, ou public, oucaché , n'a point été paifible. C'eft en vain que l'on invoque 1'autorité de Papimen , qui décide que la prefcnption des cinq ans peut revivte en faveur de celui dont Lrk ,.„nt*fté . lorfoue la contei- tation eft éteinte , & comme afloupie par un long filence. * II faudroit que ce long filence eut précédé la mort de la comtefle de Bojju. Mais on ne peut pas feindre un moment de filence , lorfque fon henuer ne fe défend de la prefcnption que par les guerres conrinuelles qm lont empèché d'agir. . • Les fins de non-recevoir ecartees , M. 1'avocat-général fe difpofe a entrer dans le fond. Mais il trouve encore un obftacle a combattre; c'eft le jugement de la rote , par lequel on pretend que. la queftion a été non-feulement preju°ée, maisdécidée irrévocablemenr, °Deux queftions, a cet égard. L'appel eft-il recevable? S'il eft recevable dans la forme , les moyens en font-ils folides & légitimes dans le fond ? On ne trouve qu'un exemple d'appel comme d'abus d'un jugement de la rote ; c'eft le recueil des libertés de 1'églife gallicane qui nous le fournit.  3ïO Mariage Nïcole dé Pars , pourvu d'une cure dans le diocèfe de Verdun, pric cette voie conrre une fentence de ce tribunal, qui contenoit plufieurs claufes abufives. L'appel de 1'exécution de cette fentence Sc de toutes ies procédures qui avoient été faites contre Fappellanr, fut recu. La cour de R.cmelanca, contre Nicole de Pars , un interdir , a 1'effet de ie forcer a. déférer aux jngements de la rote. Cet interdit fut déclaré abuüf, par un arrêt folemnel. Cet exemple eft unique, il eft vrai paree qu'il eft prefqu'inoui qu'un Francois ait procédé a cette jurifdicFion. La pragmatique , le concordat, un ufage plus ancien que ces deux ioix ; tout s'oppofe a une telle procédure. Le reméde eft prefqu'ignoré , parceque ie mal eft prefqu'inconnu : mais, de ce que , depuis Jong - rems on n'a point éprouvé ia malheureufe néceffité de s'en fervir , il n'en eft pas moins légitime , Sc 1'application n'en c-ft pas moins néceflaire. Nova res novum jurïs remedium dejïderat , difoit autrefois I'empereur Mare - Antonin , dans une occafion femblable. Mais fi cet appel , quoique d'un exemple ii rare 5 peut cependant être  du Duc de Guife. 311 écouté , fera - t - il moins recevable , paree qu'il a pour objec un jugement rendu par un rribunal , auqutl on Honne le nom de fouverain ? Ce feroit d'abord une grande queftion , difoit M. 1'avocat-général, de fcavoir fi 1'auditoire de la rote peut toériter , en général, & fans aucune diftinéaon , le titre de tribunal fouvejrain ? Si le tems , difoit - il , permettoit d'entrer dans des diffenarions plus curieufes qu'utiles , on feroit voir que , par fa nature, tout jugement d'un auditeur de rote eft fujet a être réformé j que , dans leur première origine , les auditeurs n'étoient pas de véritables juges \ qu'ils recevoient les plaintes , écoutoient les fupplications de ceux qui avoient recours a 1'autorité du faint Siège , faifant, auprès du pape , a peuprès, les mêmes fonclions , que les maitres des requêtes faifoient autrefois auprès du roi. Que , bien loin de rien , prononcer par eux mêmes , ils fe contentoient de recevoir la décifïon du pape, & de Pannoncer aux parties. Que, depuis que Jean XXII en eut fait une efpèce de tribunal ordinaire , quoique toujours délégué, ils ont commencé i  311 Mariage faire véritabiement la fonction de juo-e; mais que l'on a commencé auffi , en même-tems , a demander la réforma* tion de leurs jngements. C'eft ce que nous apprenonsde Guiliaume Durand, dans fon livre intituié, Speculumjuris.C't&CQ qui eftconfirmé. par Gome% , fur les régies de chancellerie, & par IPeJirius , dans le traité qu'il a fait des jugements romains. Enfin c'eft ce que nous apprend un auteur beaucoup plus ïlluftre, feu M. Bignon, dans le traité qu'il a donné au public de 1'état de Rome. C'eft dans cet ouvrage , que ce grand homme nous explinue une partie de Ia procédure de la rote. C'eft-la qu'il nous apprend que, pour rendre une décifion de ce tribunal irrévocable, il faut qu'elle ait pafte par trois degrès différents , dont le dernier eft regardé comme jugement définitif. C'eft a cette condition que la rote peut porter , en Italië , le titre de tribunal fouverain. Enfin , continue ce magiftrat , on •obferveroit que , fans fortir des bornes de cette caufe , il fuffit de jetter les yeux fur la fentence de la rote , dont il s'agit aujourd'hui, pour être convaincu gue les juges de ce tribunal ne font pas toujours;  du Duc dc Guife. 313 toujours «gardés comme juges fouverains. On 7 apprend qu'il a fallu inférer une claufe précife dans la commiffion de 1'auditeur que le pape a établi juge du mariage du duc de Guife, pour interdire aux parties la liberté d'appeller du jugement qui feroir prononcé. On pourroit donc condure , avec beaucoup de raifon , que le droit de fe plaindre des fentences d'un auditeur de rote, eft regardé , a Rome, comme le droitcommun. II refteroir, après cela, a examiner fi la claufe qui déroge a ce droir commun , n'eft point une claufe abufive Sc contraire a nos libertés. Mais pourquois'étendrefurune queftion abfolument fuperflue ? Accordons, ce qui pourroit être trèVslégitimement contefté , que 1'auditeur de rote a pu exercer, dans cette caufe, cette efpèce de jurifdidtion fuprême qu'on lui attribue; s'en fuivroit - il , pour cela , que l'on n'eütplus la liberté d'interjerter appel comme d'abus de fa -décilion •? Son pouvoir feroit - il plas étendu que celui des commiftaires délégués par le faint Siège dans le royaume , pour y prononcer fur 1'appel de deux fentences confornies ? Si ces commif- Tomc XIV. O  214 ' Mariage faires rendent un troifième jugement conforme a ceux qui Pont précédé , qui doutera , dans ce cas, qu'ils onc exercé un pouvoir que l'on peut appeller fouverain, puifque leur jugement ne peut plus être réformépar Ia voie de 1'appel iimple ? Qui pourra cependant être affez peu inftruit de nos maximes , pour foutenir que 1'appel comme d'abus des premières Sc de la dernière fentences , ne fera plus recevable ? Tous nos auteurs nous apprennent que, li la dernière fentence eft a 1'abri de la réformarion par la voie de 1'appel fimple , elle peut toujours être attaquée par 1'appel comme d'abus , li elle renferme une entreprife manifefte fur la jurifdiétion féculiète. N'attaque-t-on pas , tous les jours , par cette voie , les refcrits & les bulles de cour de Rome, en interjettant appel comme d'abus de leur exécution , Sc même de leur obtention , fans croire manquer, pour cela , au profond refpeel:, & a la parfaite vénération dont jious fommes pénétrés pour la dignité , la primauté & 1'autorité du S. Siège ? £n effet, 1'appel comme d'abus, bien différent, en cela , de 1'appel fimple , ne fupppfe, dans le juge qui lerecoit,,  du Duc de Guife. 315 jKic'ime fupériorité fur le juge dom oft attaque la décifion. II a fuccédéa 1'ancienne voie du retours , qui eft encore ufitée dans quel-t ■ques royaumes, & qui Ta été , pendant ïong-tems , en France , jufqu'a ce que les appellations comme d'abus , devenues plus ftéqueutes vers ia fin du quinaième fiècle, aient fait oublier nos premiers ufages ^ ou plutót les aient perfectionnés, en confervant, fous un autre nom, la faculté de recourir aux dépofitaires de 1'autorité du fouverain. Qu'écoit - ce donc , autrefois , que Ia voie du recours , & qu'cft-ce , aujourd'hui, que 1'appel comme d'abus, fi ce n'eft une prière refpecfueufe , par laquelle on implore le fecours de la jurifdiórion féculière , pour fe mertre a couvert des entreprifes de la jurifdiétion eccléfiaftique? Ce n'eft poins précifément un a Manage entre elles cette concorde Sc cette uniori qui leur eft égalementfalutaire. ïl eft donc inutile d'examiner ici la qualité du tribunal dont on accufe le jugement d'abus Sc d'incompétence, Cette queftion , qui pourroit être importante , s'il s'agiffoit d'un appel fimple , eft ablolument étrangère dans un appel comme d'abus. L'appel comme d'abus du jugement de la rote eft donc recevable dans la forme , mais eft-il légitime , dans Ie fond ? Si l'on confidère , d'un coup d'ceil général, la procédure qui a été fuivie a la rote , on y découvrira deux nullités eftentielles. ïncompétence certaine dans Ie tribunal. Procédure continuée par un juge d'églife , aupréjudice des défenfes prononcées par les arrêts, L'incompétence peut être envifagée dans deux tems différents: pendant la vie de M. de Guife , Sc après fa mort. II eft certain que.. pendant fa vie, Ia queftion étoit foumife au juge d'églife. II s'agiftoit du lien du mariage ; & lorfque ce nceud , ou véritable , oa  du Duc dt Guife. 317 apparent , eft attaqué direcftement par la voie de la demandé en nullité, la matière mixte , en elle-même , par les rapports qu'elle a néceflairement avec la religion Sc 1'état, eft regardée comme intérefl'ant le fpiriruel, Sc portée, fuivant nos mceurs , au tribunal du juge d'églife. Mais ce tribunal pouvoit-il être celui de la rote ? C'eft ce qui réfiftoit nonfeulement a nos libertés ( il eft inutile de s'arrêrer a prouver ici une vérité , que l'on peut jufflmentappeller un premier principe ); mais qui ne réfiftoit pas moins aux ufages des Pays-Bas ; ufages dont toutes les parties conviennent , ufages approuvés par les papes même; ufages enfin fi conftants, que la comtefle de Boffu les a long-tems réclamés contre la citation que M. de Guife lui avoit fait faire ,poat procéder a la rote; Sc que les officiers du roi d'Efpagne fe font joints a elle , pour foutenir, Sc pour appuyer la juftice de fes préteutions. II eft donc inutile de s'étendre fur les preuves que 1'ancienne Sc la nouvelle difcipline de 1'églife pourroit fournir de cette efpèce de droit des eens obfervé dans tous les royaumes * O lij  3i c? Mariage les plus catholiques, qui ne penner pas que l'on oblige les fujets du prince k aller chercber, a Rome, &fur-rout en première inftance , des juges que fa pretedFion doit leur faire trouver dans fes érars. Ce principe eft égafement reconnn par les deux parties. ^Mais Papplication en pourroit être lei conteflée, fur-tout relativement autems oü M. le duc de Guife vivoit. 11 agiffóit a. Rome , comme demandeur, pour faire déclarer fon mariage öul ; Sc , dans cetre qualité, n'ét®it-il pasobügé de fuivre la loi du domicile de ia óbftitéffe de Boffu , qui étoit la défenderelfe ? Ce n'eft donc point ici le cas de faire valo;r les privileges des Francois , ou plutöt le droit commun , que la France a toujours été plus artentive a. conferver, que toutes les autres nations. La France n'a point d'intérêtaempêeber que , dans une matière purement perfonnelle , fes fujets ne traduifent a Rome les fujets d'un aurre prince. Cétoit aux Pays-Bas a fe plaindre , & a réclamer la forcede leurs privileges^ & 1'autorité du droit commun, Mais puifqu'ils. ne font point fait ^  du Duc de Guife. ( p$ ou que , du moins , ils fe font défiftés, par im long filence , ou plutot par une approbationexprefle de la procédure de la 'rote, ft la caufe étoit rédutte a ce feul moven, elle ne feroit pas foutenable.^ Nos libertés n'y feroient point intereifées; il feroit indifférent a la France que le duc de Guije procédac ou devant 1'official de Bruxelles , juge naturel du différend, ou devant 1'auditeur de rote, juge extraordinaire, approuvé de toutes les parties. 11 eft donc inutile d'examiner ce qui s'eft paffe pendant la vie de M. de Guife. Mais fi la procédure qui s'eft faite alors, étoit légitime , a-t-elle pu ceffer de 1'être après fa mort? Les héritiers ne fuccèdent-ils pas a fes droits? Ne fontils pas engagés par les démarches de celui qu'ils repréfentent ? C'eft ce qu'il fautexaminer. Le mariage peut être confidéré , ou comme un lien indiffbluble , honore par 1'églife de 1'adminiftration d'un facrement, 011 comme un acFe de la fociété civüe, auquel la loi attaché des effets civils. Quand il s'agit du lien confacré pat1 l'ésdife. c'eft ï elle a confidérer fi 1'unior» ö Oiv  I 3xo Mariage «onrre laquelle on réclame eft fainre , eu facrilège , & a déclarer a ceux qui léclament fa décifion , s.'ils font libres , ou s'ils font engagés. La fe borne fon pouvoir; & c'étok fur qnoi Ja rote avoir * prononcer entre le duc de Guife Sc la comtefle de Boffu, Mais, quand il ne s'agit plus que de décider des effets civils du contrat de mariage , la puiifance de 1'églife ceffe alors elle n'entreprend point de connoitre ce qui eft eflentiellement foamis a la puiifance temporelle. Or telle étoit la nature de la contefration qui devoit être jugée entte les héritiers deM.de Guife , Sc la comtefle de Boffu*. ^ Jamiis queftion n'a eu pfus de caraceéres d'une caufe purement temporelle. Elle 1'étoit dans fon principe ., puifqu'elle avoit pour fondement, non le facretnenr, mais le contrat & 1'obliga^ tion extérieure. Elle étoit temporelle, quant aux perfonnesquil'agitoient. Le lien que forme le facrement n'a jamais uni les héritiers du duc de Guife avec la comtefle de Boffu. Ce lien a été rompu paria mort, Sc 1'obligation fpirituelle a été totalement décruite. 11 ne reile donc plus^  du Duc de Guife. 311 dans 1.1 caufe , que des laïcs , qui n'ont plus d'autre fujet de conteftation qu'une obligation civile. Elle étoit temporelle enfin dans fes effets. 11 n'y en a aucun qui regarde 1'églife & la religion j tous , au contraire , appartiennent uniquementa 1'état Si a la loi civile. II s'agifloic de confirmer la qualité de veuve , d'adjuger le douaire , le préciput , la reftitution de la dot , le remploi des biens aliénés , 1'indemnité des dettes , &c. Qu'y a-t il ,-en tout cela , qui puifte avoir le moindre rapport avec la jurifdidion eccléfiaftique? Mais , dit-on , il n'étoit plus queftion , fans doute , de juger s'il y avoit un lien \ mais s'il y en avoit eu un ; & ,, fur cette diftincYion , on demandé fi celui qui eft juge d'un a&e préfent, n'eft pas juge.d'un a&e pafte ? Qu'impofte , dit-on , qu'il foit queftion d'un lien qui exrfte ,oir d'un lien que la mort a rompnv ? Sa validité paftèe ou préfence ne doir-elle pas être jugée parles mêmes régies? ,. La force apparente de cette objear 1'objet de 1'adion , la première de ces queftions doit être deférée au tribunal eccléfiaftique: mais la feconde nepeut jamais être portee adleurs, que devant les juges royaux Sr féculiefs. Sur quels objets ne s'étendroir paslajurifdidion eccléfiaftique, au préjudice de celle du roi, s'il- furnfoifpout la faifir, de dire qu'il y a eu autrefois■an mariage entre deux perfonnes ? L'état des enfants , la qualité de lcgitimes ou de batards , la parenté , \& droit même de fuccéderferoient fcu£ mis a la jurifdidion. des ofticiau»,.puif-qu'il s'agjroit de fcavoir sfih f a eu;, ©ui t) Vjj  ytA Mariage s'il n'y a p3s eu, autrefois , de mariao-e. La bigamie feroit toujours de leur compétence, fous prétexte qu'il faudroir examiner fi le premier mariale a fubfifté. Otitre que ces, conféquences , & une yifinité d'aatres- auffi fauffies & auffi dangereufes ,. que l'on pourroit indiques , f ïffiroient- poar faire rejetter la dangereafe diftincuon imaginée pour foutenir- le jugement der la rote , on, psut, pour achever de la réfuter , j ajouter les exemples de cequi fe pratir que tonsles jours. Quand une des parties meurt pendant le cours d'un proces pendant al'officialité , fur- une promefle de mariage , at-on jamais fait afligner fes. héritiers, pour reprendre le procés ? Quand un eccléfiaftique eft pom-fuivk devant un juge d'éghfe % pour une demandepurgjn ent perfonnelle, peut-onv après fa morï , la faire juger, avec des héritiers laïcs, dans-ie tribunal de l'ofhr cialité ? Cepencknt on pourroit toujours dire Y dans ce cas, comme on 1'a ditdans. cetts «aufe, qua la vériré il ne s'agitptas de fcavoir s'il y a une promefle „eu une ■ebiigaxios capabk de donner une ac-  du Duc de Guife. ftf tion contre un eccléfiaftique; mais j a eu une obligation» Si ces prétewions' n'ont jamais éte hafardées , c'eft que perfonne n'ignore que rien ne peut ébranler ce grand principe, que la compétence des jugesfe décermlne pa>r 1'objet de la conteftation ; & que, toutes les fois que 1'objet change . 1'ordre des jurifdiétions change en même tems. 11 ne faut pas obj'efter que M- de Guife avoit engagé, lui-même, l'afFaire a ln rote. Quand il eft décédé , 1'auditeur iii'attóic encere rien-prononcé; c'eft donc avant le jagwnan» que la queftion fpintuelle a dégénéré dans une action purement temporelle. C'eft donc avant k jugement, que le juge a ceffé d'èrre compétent. Ce changement en a donc anfli nécelfairement opéréun dans.la qualité && dans l'adtion des parties.. L'inftanse portée a la, rote , par M. le duc de Guife T sft-périe avec lui ; i? y vouloit obtenir tin. jugement qui rompit fon lien i la mort 1'a rompu» Ses héritiers avoient été rads en pofleffion de fes biens , par la loi ; & cette poffetlïon liaur donnoit cet avantage. }  yi6 Mariage que y non-feulement elle obllgeok f* comtefFe de Boffu a, les attaquer ; mais a les attaquer dans Ie royaume ; paree qu'elle étoit devenue demanderefle , Sc ils étoient défendeurs. C'eft donc en leur faveur qu'il faut faire valoir ces maximes invioiablesqui ne permettentpasqu'un Francois puifte jamais être traduit, ni en première inftance , ni par appel, dans un tribunal ctranger. II y donneroit fon confentement , que la loi réclamerok pour lui y contre lui même ; dc on ne luipermettroit pas de violer cette portion de 1'ordre publk, qui regarde 1'utilité publique , autant que 1'avantage des particuliers. Le tribunal de la rote, fous quelque point de vue qu'on 1'envifage ., étoic donc abfolument incompétent pourproaoncer fur cette affaire , au moins dans Ie rems ou il a rendu fa fentence. Mais elle eft encore profcrite pais Fautorité des arrêts qui lont précédée. Tout le monde fcait que 1'appel comme d'abus a la force de fufpendre les procédures , 8c d'en arrêter Ie cours , fice n'eft en maticre de cortecFion & de difcipline» Tout le monde fcait encore que T  du duc dc Guife. 3Z7 quand Ia jurifdi&ion royale eft une fois faifie d'une affaire , Sc fur-tout quand elle a prononcé des défenfes de procéder dans un autre tribunal , le juge d'églife commet un abus rnanifefte y s'il ne refpecte pas ces défenfes. Ici 1'appel comme d'abus eft certain J, les défenfes le font aufli; la comteffe de Boffu ne les a pas ignorées. Que Eefte t il donc , fi ee n'eft de détruire vin ouvrage que la furprife , prariquée i$>ar une partie , a élevé fur les ruines de la jurifdicFion féculière ? Après cela r U eft inutile d'entrer dans la difctiffion de la procédure faite a la rote ; d'examiner fi on peut, en France , exécuter un jugement eccléfiaftique , qui prononcé des condamna* tions pécuniaires r Sc qui déclaré un mariage valable par rapport a toutesfortes dTeffets. 11 fuffit prefque de propofer ces queftions., pour les faire décider.. On a dit, & on a rapporté 1'a preuve que. les officiaux de Malines & de Bruxelles ont quelquefois prononcé fur des. demandes purernent civiles , a 1'occafionde la. diffolution , ou de laeonfirmationdes mariages. D'ou l'on coneludl que la rote >. exercautdans cette a£-  328 Mariage faire , ies fonctions de ces mbtinarrx ; a pu fe conforrcser a leurs ufages, Sc exercer , comme eux, une autoricé indirecte fur les effets civils. Mais, fans- s'arrêter a faire voir que les effets n'éroient pas fimplement im acceffoire dans cette caufe , mais qu'ils formoient 1'objet principal, il fuffit de s'arrêter a un principe, dont on ne peut jamais fe départir y c'eft que , en quelque rribunal qu'une fentence foit rendue, ellene peut jamais être exécutée fur des biens fitués dans Ie royaume, fi elle n'eft conforme a nos mceurs. Pour prévenir cette diffeulté , ons propofé de partager Ia fentence de la rore , en rejettant ce qui eft abufif, &: iaiffant fubfifter ce qu'on prétendne pas 1'êtxe. Cette diftfnetion a quelquefois été adoptéepar les arrêts; mais elle ne neut pas êtreadoptce pour un jugement abufif dans toutes fes parties , &z fous tous les afpects. Les fins de non-recevoir, Sc Ia fentence de la rote ne fubfiftanr plus, rien neropêcfte que l'on n'examine le mariage en lui-même. M. 1'avocat-général, pour traitercetter partie de la caufe , examina fi Ie ma-  du Duc de Guife. yi*> riage en queftion étoit légitime dans fon principe; &, fuppofé qu'il renfermat quelques défauts , le filence de M. de Guife , 1'approbation de fa familie , & la pofleffion les avoit-ils réparés ? . La première efpèce d'abus oppofés a ce mariage confifte dans 1'inégalité des parties ; le défaut de confentement de la mère de M. de Guife; dans 1'omiffion de la difpenfe de la proelamation de bans ; le défaut de bénédiótion nuptiale ; le défaut de fignature des témoins, & leur qualité; 1'incertitudeou l'on eft du jour & du lieu de la célébration. 11 faut avouer que , fi M. de Guife avoit voulu trouver une parfaite égabte dans un mariage, il ne fe feroit ttouvé3 dans 1'Europe, qu'im fort petit nombre de maifons qui euflent pu lui oftrir des partis conveuables. Mais, quelque juftice que l'on rende £ 1» fniendeur de fa nahTance, il faut ~ r . ou abufive: quand  332 Mariage cette fuppofirion feroit vraie , qu'en réfukeroir-il, par rapport i la validité du mariage ? Depuis Jong tems, le défaut de publication de bans entre majeurs n'eft plus regardé comme un défaut qui , pat lui-même, & dégagé de toute autre circonftance, puifie former un empêchement dirimant. Er, quand on feroit encore dans Ie tems oü une jurifprudence plus févère regardoit comme nuls les mariages célébrés fans publication de bans, ellene pourroir pas être invoquée ici,puifqu'il s'agit d'une alliance formée dans un pays oü le concile de Trente fait la loi. Or ce conciJe permet de différer la publicarion des bans jufqu'après Ja célébration. IJ ne confidère donc pas le défaut de cette folemnité comme une nallité irritants & irréparable. On peut dire prefque la même chofé du prétendu défantde bénédiction nuptiale. On a voulu , dans les plaidoieries , établir que tout le devoir dn curé, dans Ie diocèfe de Maiines, & dans les PaysBas , fe borne a une fimple aiïifbnce corporelle lors de la célébration des , mariages qui s'y ccntraoienr. Mais une  du Duc de Guife. WX 6wiU rranrnricés tirces des loix mcmes de ces pays, 5c des rituels des diocèfes , prouvent que le propre curé y eftle vélitaole miniftre du facrement de ma- Mais , non-obftant toutes les obfervations , toutes les citations que l'on pourroit faire a ce fajet, il ne paroit pas que le prétendu défaut de bénédiction nuptiale foit encore ici un obftacle infurmontable ; & cela par deux raifons. T.'une . uue l'éslife n'a point pro¬ noncé entre 1'ancienne difcipline qid , cl un cote , ïemDie aiinu» , •» >~ diaion du prctte, toute la fainteté du mariage; & une grande partie des théologiens fcholaftiques , qui ont cru que la feule préfence du curé pouvoit ctre fuftifante. ïl femble même que la congtegation des cardinaux , établie pour Pinrerpré- tationdu dernier concne, au »uy»»y vers cette dernière opinion;& ,quoique fon autorité ne püt pas ctre citée dans une autre caufe , elle n'eft pas néanmoins a rejetter dans une affaire qui doit être jugée par les loix d'un pays oü les décifions de cet.e congregation font d'un grand poids. L'autre raifon , plus puiffante que la  334., Mariage première , c'eft qu'on ne peut fcavoir précifément fi Ja bénédiótion exig.~e par Ie rituel de Malines, qui dir, en propres rermes , Bcnedklio nupdarum j proprio paiochofieri debet, a été omife, ou adminiftrée en effet. Ce n'eft pas 1'ufage du pays de marquer conftammenr, dans les regiftres , que l'on a fatisfaic a cette cérémonie! Ona rapporté, dans la caufe, plufieurs extraits non fufpeds des regiftres pu- > i on ne trouve aucune mention de la bénédiótion nuptiale; on la donne;, mais on n'écrit pas qu'on 1'a donnée. Mais , dit-on , les témoins n'ont point figné 1'aóte de célébration. II n'y a , dans les Pays - Bas, ni loi canonique , ni loi civile , qui exige ccllc ngnacure. eit donc 1 uiage qu il faut confulter : Or il eft prouvé que 1'ufage accorde au curé toute la foi du mariage. II fe contente d'en inférer les aótes dans les regiftres 3 fans même les figner; & ces regiftres font regardés comme authentiques , & font foi en juftice. Enfin , ajoute t-on, le jour & le lieu du mariage font incertains. 11 paroit effeócivement, par les aótes  Ju Duc Je Guife. -335 jd& ce mariage eft configné , qu'il fut célébré le 16 novembre 1641. Les nouvelles publiques même annoncérent alors que cette célébration s'étoit faite dés le 11 novembre; ainfi 1'état des contraótants a été incertain , au moins, pendant quatre jours. Mais fi le jour de la célébration eft incertain , le lieu oü elle a été faite 1'tft encore davantage. Il n'eft mnrqué, ni dans 1'aóce infcrit fur le regiftre, ni dans le certificat de Charles de Mansfeld-y & ce n'eft que par ce qui a été dit dans la plaidoirie, que l'on peut croire qu'il a été célébré dans la chapelle de i'hótel de Grimberghes. Tous les auteurs regardent 1'incertitude du lieu comme une préfomption , ou même comme un argument de clandeftinité. Et fi , fur Pincertitude dans laquelle les aótes nous laiffent flotter , on prétend que ce lieu eft une chapelle domeftique , on retombe encore nonfeulement dans une autre fufpicion de myftère & d'obfcurité ; mais dans une contravention manifefte au rituel de Malines, qui ordonne aux curés de ne célébrer les mariages que dans 1'églife. Sacerdos celebret matrimonïum in eccleJla tantum. On ne rapporté point de  33 £ Manage permiflion de 1'archevêque: 'ainfi , Ie fair & le droit font également certaii» fur ce point ; mais également incapables de rompre le lien d'un mariage. • De cettedifcuflïon detousces moyens, il réfulte qu'il n'y en a pas un , fi on les prendtousféparément, quipuifle portsr atteinte au mariage. Mais réunis , ils forment de violents préjugés contre cet aéte. M. 1'avocat-généralentra enfuitedans i'examen d'une autre circonftauce bien plus importante, Sc qui devoit être du plas grand poids dans la décifion de 1'affaire. C'eft la préfence du propre curé. N'entrons point dans I'examen de Ia néceflité de cette préfence. 11 n'y a pas de loi plus connue , plus fainte, plus falutaire , plus inviolable dans tout ce qui regarde la célébration des mariages. Les conciles de Malines Sc de Cambrai, tenus depuis le concile de Trente, ont pris les plus grandes précautions pour aflurer 1'exécution de cette loi confervative de i'exécution du contrat civil j Sc de Ia fainteré du facrement. Les rituels de ces diocèfes réunis aux canons de ces conciles, prouvent qu'il  du Duc de Guife. jyj tf y a aucun point dans la difèipline eccléfiaftique pour lequel ks Pays-Bas aient plus de vénération. Ainfi la différence des paysifadmet ki, a cet égard, .aucune variation dans ks loix. 11 faut donc examiner celle-ci en elk-même , Sc fans -acceptation de lieux. Charks de 'Mansfeld , qui "a célébré le mariage du duc de Guife , n'a pu êrre confidéré , Telativement a cette fonétion, que comme vicaire général des armées , délégué par 1'archevêque de Malinesou comme délégué par le curé de Sainte - Gudule , 4c repréfentant alors le pafteur ordinaire. Comme vicaire général, 1'autorké de Chirks Mansfeld stzendoii-zWe fur les mariages; Sc M. de Guife pouvoit-il être foumis z cette autorité , foit a rai« fon de fa dignité , foit a raifon du lieu ou la cekbration a ete raitef 11 eft un premier principe. Tout privilege , toute délégation , -toute exceptiou du droit commun eft défavorable , Sc ne peur être érendue d'.an cas a uh autre. Qrtous lesdo&eurs , même les plus relachés , réclament contre 1'exercke Terne XIVi P  3 $3 Mariagé du pouvoir que les vicaires généraux des armées fe font artfibué fur la célébration des mariages. Quel eft le motif de cette déléganion ? II arrivé plufieurs chofes dans les armées, dit le pape , qui demandent le fecours & la vigilance d'une perfonne conftituée en dignité eccléfiaftique , paree qu'il n'eft pas facile de recourir aux ordinaires, ou au Saint Siège. Or 1'adminiftration du mariage eftelle comprife dans ces motifs ? Les mariages font-ils de ces rencontres inopinées, pour lefquelles il foit néceflaire de trouver une reftburce prompte & extraordinaire ? Eft-il donc fi difficile d'obtenir une permiflion de 1'évêque , pour célébrer un mariage clans le camp , ou de différer fon accompliflement jufqu'après la campagne ? Je ne fuivrai point ici M.- Pavocat général dans la judicieufe & fcavante difcuflion qu'il a faite , pour établir que les vicaires généraux des armées n'ont pas le pouvoir d'adminiftrer le mariage. Cette queftion n'eft pas d'un grand intérêt parmi nous, oü l'on ne connoit point ces fortes de vicaires généraux. II a demontré que, quand le fupérieur eccléfiaftique qui délègue, fe cou-  du Duc de Guife. 339 -tente depermettre l'adminiftration des facrements, alors on diftingue entre les facrements de nécejftte', & les facremems de volonté'. Les premiers font cenfés compris dans les conceffions générales J les autres exigenr une mention particulière. Or le mariage eft un facremejit de volonté. Les pouvoirs accordés a. Charles Mansfeld étoient généraux , & fans aucune fpécification particulière. II n'avoit donc pas le droit d'adminiftrer le facrement de mariage. Mais , malgré les principes cerrains qui femblent devoir priver le vicaire général des armées du pouvoir de marier , il eft certain qu'ils étoient dans 1'ufage dele faire. Sur quoi, dit M. 1'avocat général , trois propolirioiis également certaines. i°. Quoique eer ufage foit oppofé a 1'efprit de la bulle , il n'eft cependant pas abfolument contraire a fes termes. z°. L'ufage a donc pu 1'étendre, fans que l'on puifle dire, titulus perpetub clamat. 30. Cet ufage s'eft introduit & a été fuivi fous les yeux des ordinaires , qui i'ont approuvé par leur filence. Ainfi, fi on ne peut pas dire , en Pij  14 o Manage cette occanon , optima legum mtcrpres confuetudo , difons , au moins : error communis facit jus. Mais ce pouvoir, que 1'ufage a étendu par rapport ï la matière , doit-il être auffi étendu , par rapport aux perfonnes? C'eft déja donner , au bref qui a établi cette efpèce lingulière de vicaires généraux, une grande extenfion , que de 1'appliquer a la célébration des mariages , qui certainement n'eft comprife ni dans fes expreffion.s ni dans fon efprit, Mais c'eftérendrel'exrenfion même, que de youloir qu'un privilège , qui n'eft accordé que pour exercer une jurifdicfion fur le camp & fur 1'armée , pro falubri direclione, & anirnarum faluie eorum qui in caflris degunt & verfan' tttr, puiffe avoir lieu dans les villes , &z fur une perfonne de la naiffance <$c du rang de M. le duc de Guife. Et fur qui le pape donne-t-il cette jurifdiclion?Dire6temenr furlesclercs, & indireétement fur les laïcs ; mais avec ceitg reftriétion importante , qui tarnen in propriet dicecefl non funt , fub qu£ iliorum ordinarii jttrifdiciionem fuam firdinariam in eos exercerepoffunt?  du Duc de Guife. 34* II s'agit donc de fcavoir fi un vicaire général&des armées du roi d'Ffpagne a pu être confidéré comme lepropre curé & le pafteur iégitime de M. de Guife, Quel eft fon titre? On trouve , en lifant ce titre, qu'il n'eft établi que pour Ie fecours de ceux qui réfident dans le eanip-, ainfi il eft inftitué pour 1'armée, & non pour les villes. Atfons plus loin, & nous verrons que cette jurifdidion extraordinaire ne lui eft accordée, que paree qu'il eftfouvent trés-dlrficile, dans les armées , d'avoir recours aux ordinaires. Alors on ade la peine a concevoir comment le duc de Guife , qui réfidoit a Bruxelles , auroit eu de la peine a avoir recours a 1'ordinaire. Enfin , on lit, un peu plus bas, que ceux qui font dans le lieu de leur demeure, oü ils peuvent facilement jquir du fecours de la jurifdidion ordinaire, 11e paurroient plus s'adrefler au vicaire général, Alors , ii femble que , pour confondre le miniftre du mariage dont il s'agit , il fuffit de lui oppofer fon propre titre ; & que rien ne détruic davantage fa prétendue jurifdidion , que le bref même fur lequel il prétend' felevex. P üj  342 Maria pe Ajourons a tout cela que 1'efprit, fes termes, 1'efTet de la délégation apoftolique s'appliquent beaucoup plus natureHement aux fimples foldats , qu'aux officiers., & fur-tout a un général d'armée. Si les évêques ont fouffert que, contre la première intenrion du pape , les vicaires militaires fe foient attribué indiredement le pouvoir de célébrer des mariages , ils n'ont eu cette tolé^rance , que paree qu'ils ont cru que les vicaires, que leschapelains de 1'armée, connoilfoient mieux 1'état & la condition des fimpls foldats , que les curés auxqueis ils pourroient s'adrefler. Mais eetce raifon nepent jamais convenir a une perfonne du rang & de 1'élévation de M. !e duc de Guife, chef des armées de 1'empereur & du roi d'Efpagne. ^ En un mot, il eft conftant que la réfidence de M. le duc de Guife n'étoit point dans un camp, mais dans la ville de Bruxelles; il n'étoit donc point dans fa jurifdidion du vicaire militaire. Toutes les loix eccléftaftiques s'élcvent contre 1'extenfion que l'on a voulu donner au pouvoir de Charles de Mansfeld.^ I/ufage dont on argumente n'a pas 'd'application a 1'efpèce. On rapporté y  du Duc de Guife. 345 pour le prouver , un grand nombre d'aétes,par lefquels il paroir que le vicaire général a donné des difpenfes de bans, célébré des mariages, & prononcé des jugements fur leur vahdite. Mais on ne voit point fi ces mariages ont été célébrés dans les armées , ou dans les villes 5 s'ils ont été contradés par des perfonnes qui euflent un domicile , ou une habitation certaine ; ou par des foldats qui n'euflent d'autre habitation , que leurs rentes, ou leurs garnifons. Enfin fi les curés ont donne une permiflion au vicaire général , ou s'ils ne lui en ont pas donné. Tant qu'on ignorera ces circonftances , qu'il eft impoflible de fcavoir, ce fera en vain que l'on multipliera ks actes de pofleffion du vicaire général des armées. La queftion n'eft pas de fcavoir s'il a pu célébrer des mariages , 1'ufage 1'y autorife • mtis fur quelles perfonnes, & dans quels lieux il a pu exercer cette autorité. C'eft ce que les aftes rapporrés ne peuvenr apprendre. II en eft de même des certificats des curés de Bruxelles. Ils ont gardé le filence fur le point eflentiel de la caufe. Ils n'ont point marqué fi le vicaire général célèbre les mariages des officiers, T iv  34+ Mariage même pendant 1'hiver , même. dans iavilLe capicale des Pays-Bas , fous les yeux.des.curés, fous ceux de. 1'archevêque.. Ik n'ont cependant. pasignoré que c'étoit. la la principale difficulré de la caufe , fur laquelle on les confultoit, Quelques-uns de. ces certificats avoient même été donnés depuis que les.plai.doieries étoient commencées. Ce filence n'étoit-il pas un aveu fotmel qu'ils n'ont trouvé aucun ufage , aucun fait même qui put appuyer les grctentions du prince de. Berghes ? Mais le. fieur de Mansfeld, dans. deux ouvrages qu'il. a compofés fur les droits de fa place ,.rend témoignage contre rautorité qu on veut ici hii actribuec U dit, lui-même , qu'il fuffic d'avoir un domicile, ou un quafidomicile, dans une ville, pour n'être plus foumis k Ia jurifdidion militaire du vicaire général, lorfqu'on y eft une fois revenu. Dans un autre endroit, il établit ce grand principe , qui. fijffit feul pouE décider cette partie de la caufe : que la jurifdiction déléguée celle., toutes les fois que le recours k la jurifdiction ordinaire eftcertainemenr & évidemment auffi sür h auffi facile, auffi utile au pu-  du Duc de Guife. _ 34$ felle , que le pourroit être 1'autorité du fuBdëlégué. ; Je ne fuivrai pas M. 1'avocat-genéral dans le détail des paflages des ouyrages du fieur de Mansfeld , qu'il a cités &C exjffiqués pour établir que ce yicairegénéral n'avoit aucune jurifdidion fur M. de Guife. De cette difcuffion, cemagiftrat tire cette couféquence , que Charles de Mansfeld, contraint par la force de la v-érité, a êtte contraire a lui - même , a fóurni , dans fes ouvrages, une des.plus grandes preuves de 1'abus qu'il a commis. A cette conféquenee, M.d'Aguejfeiu ajoutedeux téflexionsbien importantes.. i°. Si la qualité de vicaire - général étoit un titre fuffifanc, pourquoi obtenir une permiffion de 1'ordinaire, qu'il femble même que Charles de Mansfeldne pouvoit jamais recevoir , fans déroger a fon droit, puifqu'aux termes des* certificats que l'on rapportoit , une des prétentions des vicaires généraux- militaires eft de n'avoir jamais befoin du, confentement, ni de la permiffion descurés. z°. Si cette qualité étoit le titre de Mansfeld, pourquoi n'en a-t-il riesV» B v-  34 £ Mariage dit dans 1'acïe infcrit fur le regiftre ? II y prend la qualité de vicaire général „ maisj comme un fimple titre d'honneur ; & , quand il eft queftion de la célébration , il dit qu'il 1'a faire comme aurorifé par le curé. Et ce n'eft que quinze jours après la célébration , que l'on s'avife de rirer de ce Mansfeld un certificat, qü il ajoute que c'eft en qualité de vicaire général, & non en vertu de la permiffion du curé,qu'ilacélébré le mariage. Certificat qui n'a été fait , que pour donner au mariage une nouvelle couleur , qui put couvrir le défaut de la permiffion , ma-is qui ne fert qu'a faire vcir qu'on a fenti ce défaut, & qu'on na pu le réparer. Certificat même qu'on doit rejetter comme une pièce informe. ; foit paree qu il n'a jamais été dépofé dans aucun regiftre public , foit paree qu'il n'a jamais été remis qu'eatre les mains de la comteffe de Boffu, Si on paffe a la feconde qualité de Charles de Manffeld > on trouvera que «elle de prêrre commis- par le curé n'a pas été pour lui un titre plus folide, que celle de commiffaire fubdélégué pa? 1'archevêque de Malines.  du Duc dc Guife. _ 347 M 1'avocat-général adopte ici la. dütinótion ptopofce par les herinets du duc de Guife , entre les permiflions générales , & les permiflions generales & pamculieres. 11 fait voir que trois raifons rendent abfolument nulle celle dont il s'agit ici. Elle eft incertaine , elle peut cenvenir i toutes fortes de perfonnes j elle etfrauduleufe „ & pourroit ouvrir la voie d'éluder impunément les loix les plus faintes.- , 1 :r„„ Après avoir montre , par e raiionnement, & par les exemples le danger qu'il y auroit d'adopter une permiflion ainfi concue, il ajoute une reflexion que les avocats n'avoient pas touchee, Quelle apparence ,. difoir-on , de la part du prince de Berghes que r quoique le curé , dans fa permiflion ,.n'ait parle que d'une maniere trés-vague des perfonnes qu'elle concernoir, il au ignore lenom de ces perfonnes? Il a lui-meme ordonné qu'après la célébration-, leurs noms- feroient marqués au- bas de la permiflion même. , II faut joindre ce raifonnement a celui que l'on a tiré de l'infcnption faite fur les regiftres , de la main du curé. n . Pvj  JSff Mariage S Cette ,lnfcription avoit été faite- ii * «-wvo" a aborci, & comme .11 paroic par la fentence de la rote, que ce tribunal fa préfumé, dans » jour & dans le moment même de Iacélébration cette conjecture feroit afiurement d un grand poid«-. • La Pe™iffion & 1'acfe de célébration feroient trop proches , pour préfu™r que le curé eut connu les noms des parties dans 1'une ,& qu'il Ies efV ignores dans 1'autre. Cependant cettepréfomption ne feroit pas infaillible. Mais,ci le; jour de 1'infcription fur le regiftre eft douteux. On eft forcé de «onvemrque Ie mariage célébré dés le \,\nz "e> au Piumtinfcritdans Ie depot public, que le 20. fi y a donc eu quatre jours d'inter-' pendant lefquels onapu fu*rjrendre la fimphcité du curé;& fö. ÜVVint a"Fèsdeiui du moyen ordinaire crue l'on emploie auprès des efpnts foibks , lui perfnader oue la chofe etaar cenfommée , il ne failoit plus penier qu'a en couvrir les nulütés &a en-reparer les défaurs , en adopt'ant f ouvrage de Charles de Mansfeld. Qm peut même fcavoir ü la permifa précédé Ia célébration du ma-  du Duc deGuife. 3-49riacre ? Cette permiffion ne peut avoir-, «le date, que parTaóte de célébration : or cet acte n'en peut avoir d'autre ,, que le ro : donc il n'eft point certain que la permiffion ait 'été accordée plutót le 16 , que le 17 ,.& les autres jours, qui ont fuivi la célébration , mais qui en ont précédé 1'infcription dans le regiftïe. ' Enfin , s'il falloit fe liyrerici a toutes. lès conjectures, on.pcurroit dire qu'il y a prefque une efpèce de démonftrarion. de 1'ignorance ou le curé étoit de. la. qualité des parties. ' S'il" étoit vrai qu'il leut connue ,. pourquoi fé feroit-il exprimé en termes. li vagues , fi'incertains , fi abfurdes ? On ne. fait pas gratuitement. un acte auffi contraire aux bonnes m.cenrs-, & a. la raifon naturelle ; on n'a pule faire que pour cacher une célébration quin'eft qu'un ouvrage de ténèhres, Or a qui prétendoit-on la cacher dans un acte fécret tel que la permiffion dont il s'agit ? Car.enfin cet acte fe paftbit.entte le curé.cV Charles de Mansfeld. Etoit-ce aux cöntractants qui obtenoienr cette permiffion , qu'on voulojt. cacher leur nom cVleur qualité ?.  37 o _ Mariage Etoit-ce i Charles de Mansfeld, coafident & miniftre de leur paflion ? Ge ne pourroit donc être qu'au curé même. Cet argument eft fans réplique. Enfin , pour foutenir la conduite du fieur Mansfeld & du curé , on a rapporté nne efpèce de jugement de 1'archevêque de Malines , qui approuve les opérations de ces deux eccléfiaftiques. Mais ce prétendu jugement n'eft qu'ue avis, non fur un point d'ufage, mais fur une queftion importante , dont le jugement avoit déja été déféré ala rote. Cet avis , d'ailleurs j n'avoit été donné que depuis que M. de Guife avoit quitté le parti del'Efpagne, dans un temsfoü perfonne ne pouvoit expliquer fes raifons , Sc ou la maifon de Berghes étoit toute puiflante dans les Pays-Bas. Enfin cet avis partoir d'une main fufpecte. L'archevêque de Malines s'étoit déclaré ouvertement contre M. de Guife , dés avant.qu'il fe fut pourvu-a Rome. Cet avis auroit cependant plus de force , s'il étoit configné dans une fentence en forme. Mais elle feroit fufceptible de 1'appel" comme d'abus. On ne voit point, au furplus T les  du Duc de Guife. tfi raifons fur lefquelles il eft fondé.^ Ce font les circonftances que 1'archevèque dit avoir apprifes du curé Si: du fieur de Mansfeld. Mais quelles.font ces cireonftances? On ne peut favoir fi elles font vraies ou faufles, puifqu'elles ne font pas expliquées. ( 11 eft donc évident que la benediction nuptiale a ésé donnée par un miniftre qui n'avoit pas caractère. Mais , difoit M. 1'avocat général, fi ce mariage , eonfidéré en lui- même , & dans fon principe ,. n'eft qu'une profanation manifefte du facrement, fi les loix civiles & canoniques ne peuvent le re^arder , dans fon commencement, qu'avec indignation , fe laifleront-elles défarmer par des.confidérations de faveur Sc d'équité ? Seront-elles vaincues par la force de la pofleffion Sc des appsobarions publiques que les plus grands noms de 1'Europe ontdonnéesa ce mariage ? Tout ce qui a fuivi la célébration aura-t-il le pouvoir d'effacet les nullités qui 1'accompagnent ? Première efpèce de confirmation. La cohabitation publique f, la fidélité perfévérante de M. le duc de Guife , depuis le mois de novembre 1641 , julqu'au mois d'avril 1644.  ï Mariage Seconde efpèce de confirmation. fuffrage d'une partie de la maifon roya* le., & de la maifon de Lorraine. Troifième efpèce |de confirmation.. Les honneurs que la comteffe de Bojfu a reeus des princes étrangers , comme. duchejfe de Guife. ^ Quarrième efpèce de confirmarion.. L'apprqbarion que le roi même Sc la. reine régen te ont donnée a fa qualité. Mais c'eft un principe certain eödroit , ^que 1'état des hommes ne peut. jamais être que 1'ouyrage de la loi. Les. lettres , les déclarations, les reconnoiffances des parriculiers ne peuvent jamais rendre légitime ce qui eft nul. dans fon principe, j il. faut.toujours rev.enir a la vériré. La loi même.n'impute que rarement. ces reconnoiffances a ceux qui les font. Une. erreur probableapu les arracher;. mais. la vérité reconnue les fait tomber delle-même. Cette vériré eff conffgnée dans des. loix que l'on cite tous les jours. Non' epijlolis confetudo corifanguiniutis ,fecL natahhus, yti'adoptionisfolemnitate con-jungitur. L.. i }., cod. de probat. Non nudis ajjeverationibus, nee emen- tita profeffidrïe (licèt utrique confientiant)}  du Duc de Guife. 35$ fed matrimonio legitimo concepti , vel adoptione folewMi fiüi jure patri confit- tuuntur. L. 14- lbd' . f . 11 faur toujours en revemr a diitin•uer deux fortes de nullités; les unes relatives a certaines perfonnes-, les autres abfolues. Les premières s'effacent fouvent par la longueur du tems, par la poffeflion, par le filence , ou par 1'approbation de ceux qui , dans le commencement , pouvoient fe plaindre du manage. Ainfi un jeune homme fédmt dans fa minorité , peut réclamer contre fon en^ement. Mais s'H perfévère pendant long-tems } fi la majonté ne ut ouvre point. les yeux, alors , aprcs plu.fieurs années de pofleffion , Ion manage s'affermit fi folidement , qu it n'eft plus poflible de 1'ébranler. De même , fi un pere laiffe paffer un tems confidérable, fans fe plaindre du mariale que fon filsmineur a contracté i foninfeu , s'il 1'approuve expreffeBocnt , ou tacitement, quoi ab initHh non v.alet, traclu temporis convahfctt. _ Maisni Letems , ni la poffeffion, nt i'apptobation d'une familie entière ne peuvent imprimer a un mariage la qua-  3H Mariage htc de facrement, que Péglife & la W lui refufent également. Or le défaut de préfence du propre cure eft une de ces nullités abfEs ^s permis de Autre principe. QLXand il eft queftion de reparer les vices d'un mariL par fZ 7fe'Par u"ef-orablegpoS non ,1 faut . au moi qu ƒ pofleffion au tous Ies CaracLes qd peuvent la rendre légitime. ^ raut qu'elle foit libre & volontaire. tinuée rqUdlef0it Iong«e,&contin ee , fans mrerruption, pendant un grand nombre d'années. LH ™? qU'elie foit Wrouvée pa* ceux qui ont un véritabie intérêt de Ia - T'f"'^d faut que certeapproba! non foit folemnelle. V iJ[J?Ut enBn ^l'eIJe ne foit jamais tion mPUCpar fé"eufe co™efa~ , S:.tol,tesces circonftances nefontnas -unies en faveur de celui qui fe pft  du Duc de Guife. ^ Ces principes fuppofés, M 1'avocargénéral examine , en particulier , chacune des efpèces de confirmation alle- ^T0'. La cohabitation des deuxépoux-, & les témoignages reitetes ae ia vérance de M- de Guife pendant deux ^Mais ce moyen eft vicié par deux défauts. i °. La pofleffion eft trop comte pour réparer un vice efientiel. % ^ „'étoit pas libre. Comment U.deGufe pouvoit-il rompre les hens qui 1 attachoientaïa comteffe de Boffu , pendant qu'il confervoit encore quelqu'engagement avec 1'Efpagne? 11 falloit qu'il redevint Francois , avant que de ceffer de paroitre man de la comteffe de Boffu. On ne peut donc retirer aucun avantaee des reconnoiffances du duc de G^uife, que depuis fon retour en France. Mais alors , il reftera , a peine , dix mois de pofleffion; Sc ce tems-la peutil être fuftifant , pour autorifer un mariage que 1'églife Sc 1'état condamnent également ? . i°. Approbation d'une partie de la maifon royale , & de la maifon de Lorraine.  3") ^ Manage Mais quelles font°ies perfonnes de ces deux maifoiw qui ont donné cette apprabation ? II faut d'abord retrancher M. Ie duc jfe Lorraine, & le duc Francois, fon "ere , qui n'avoient nul intérêt a examinerce mariage ; & qui peut-être fe failoient un devoir de polirique de ïapprouver, pour réunir M. Ie duc de Guife avec 1'Efpagne , Sc le brouiller avec Ia France. II faut retrancher auffi M. Sc Madame d'Orléans , qui n'étoient point héritiers préfomptifs de M. le duc de Guife. U faut, par Ia même raifon, retrancher M. Ie prince de Condé.. IJ ne refte donc plus que mademoite.Ie d'Orléans , qui avoit une qualité beaucoup plus importante, puifqu'elle etoit mèce de M. de Guife. Mais ce feul fufFrage fera-t-il plusfort , que tant de loix qui s'élèvent contre ce mariage ? Madame de Guife, mïre du duc, mademoifelle de Guife-, fafaur, M, dc Joyeufe Pont-ils approuvé ? Ou it s'agit ici de la fucceffion de mademoifelle de Guife : c'eft d'elie qu'il faudroit, par cónféquent, r ter des reconnoiffances.  du Duc de Guife. 3^7 D'illeu-rs dans quels aétes font ces prérendues reconnoiilances ? Eft-ce dans des parrages, des rontrats de mariage, des créations de tuteurs, en un moe, dans des actes de familie qu'elles font conteuues ? Non. C'eft dans des- lettres écrites i hxamreiiedd BoJ/u., i la dame fa mère , dans la faufle perfuafion ou ceux qui ont é rit tes lettres étoient que le mariage étoit légitime. Or la loi déclaré expreffément que l'on ne dolt avoir aucun égard a ces fortes de .reconnoiilances. Sive quajiad fororem epijiolam emijifii, .... fraternitaüs qtujlio per hac tolli non potuit. L. 13, cod. de probut. Cette loi femble faire exprès pour cette caufe. Ün frère écrit a celle qu'il croyoit fa foeur, & la traite ainfi dans fa letrre. Cette lettre ne forme point, contre lui, une fin de non-recevoir , & ne 1'empêclie pas de contefter un état que , dans un tems d'ignorance , dans un tems oü il n'avoit pas d'intérêt a fe contefter, il a reconnu par une lettre. Ces reconnoiftancesn'onr donc point le caractère requis &c eflèntiel , pour produire une pofteflion légitime j foit parcequelles ne font pas confignées dans  ■ Mariage des acres de familie; foit paree qu'elles ne font faites, la plupart , que par des perfonnes qui n'avoient nul intérêt d'atfaquer le mariage de M. ledue de Guife, Mais -ce qui mérite Ia plus grande attent ion , c'eft le tems , ce font les circonftances oü ces reeonnoilfances ont «té écrites. Elles 1'out été au milieu du trouble que la comtelfe de Boffu éprouvoit dans fon état. Toutes les lettres rapportces fuppofent ce trouble ; & puifque les prineeffes qui les ont écrites confeillent a Ia comtelfe de Boffu de faire confirmer a 'Rome fon état, elles ne peuvent 1'approuver que condirionellement; c'efta-dire en fuppofant qu'il fera confirmé. Le dernier caraótère de la polfeftion, qui eftdetre paifible, manque donc encore ici. Qui fcait d'ailleurs quels pouvoient être les morifs fecrets qui faifoienr agirces perfonnes illuftres ? Ne fcait-on pas que mille refforts fecrers mettent en mouvement les membres des grandes niaifons, foit pour agir de concert, foit pour fe croifer dans leurs vues , & dans leurs projets, & que la politique «ft prefque toujours le principe de leurs aclions ?  du Duc de Guife. 3^9 3 °. On fe prévaut de pièces émanées (des fouverains étrangers j de 1'empexeur , du roi d'Efpagne. Mais, unis d'intérêrs Sc de politique, n'éroit-il pas naturel qu'ils foutinflent une femme qui étoit fujette de 1'un d'êux , & qu'ils la foutinflent contre un étranger qui avoir abandonné le roi d'Efpagne , malgré la promelfe qu'il lui avoit faite de ne quitter les armes qu'avec lui ? . 40. Enfin, on fait valoir le fuffrage du roi lui-même , Sc de la reine -régente. Quant a la reine , 1'acle de reconnoiffance qu'on lui attribue eft fort incertain. On ne rapporté aucune preuve que cette princeffe ait accordé les honneurs du tabourera la comtefle de Bojjit, comme duchefle de Guije ; Sc M. le prince de Condé foutenoit qu'il étoit faux y Sc que Madame, qui avoit écrit ce fait a la comtefle de Grimberghes , étoit mal inftruite. Quant au prétendu fuffrage du roi , oü le trouve-t-on configné ? Dans un pafle-port. Mais les rois agiflent - ils donc , parlent-ils donc roujours en légiflateurs ? Leurs paroles Sc leurs écrits ne font des loix , que quand il leut  3'éo Mariage plait: Sc alors ils les font revêtir -de tous les fignes extérieurs qui caraétérifent la loi, & annoncent la fouveraine volonté dulégiflateur. Combien de mariages dont les contrats ont été honorés de la fignature de fa majefté , Sc qui eependant ont été déclarés abufifs ? On fcait d'ailleurs comment s'aceordent les pafte - ports. Ils s'expédientdans les bureaux , fouvent fans que le roi en ait connoitfance. "D'ailleurs , -quand le roi 1'auroir accordé lui-même , en faifant tranfcrire les expreflions qui étoient dans la fupplique , a-t-il entendu , par-la, terminer un procés qui éroit pendant, Sc qui ne pouvoit fe décider qu'après le plus mtir examen , & la plus a-mple difcuftion ? Après ces obfervations fiarle lieu du mariage confidéré en lui même , Sc fur la fainteté, ouplutótfur la profanation •du facremenr, M. 1'avocat-général entra dans I'examen de ce même mariage confidéré par rapport i fes fuites , Sc aux effets civils qu'il pouvoit avoir dans le royaume. Pour mettre 1'état dela queftion dans teut fon jour , il diftingue deux fortes d'incapacitésquipouvoient fervir d'obf- tacle  du Duc de Guife. 361 tacIeaPexécution du contrat de mariage de M. de Guife. La première réfulte , nonfeidement de la condamnation prononcée contre lui; mais du crime même. Car telle eft la nature du crime de lèze-majefté , qu'il prévient la condamnation; ou plutöt telle eft Thorreur que la loi a pour cet attentar, qu'elle n'attend point 1'öftice du Juge , pour livrer Ie coupable a cette efpèce d'interdictisn , qui eft la première peine de fon crime. Une autre incapacité réfulre du mépris de 1'autoriré du roi , qui n'a point été confulté furie mariage d'un pair de france, & du chef de la maifon de Guife ; ou fur la qualité d'étrangère , ou même fur celle d'ennemie , qu'on ne fcauroit nier que la comtelfe de Boffu n'eut dans le tems qu'elle a contracté fon mariage. Or toutes ces incapacités ont - elles pu être effacées , ou tellement anéanties par les lettres d'abolition, que l'on doive , par une fiétion favorable, fuppofer qu'elles n'aient jamais fubfifté ? En un mot, les lettres d'abolition ontelies un effet rétroaórif ? s'étendentelles également fur le pafte, & fur i'avenir? lome XI F. Q  3 6 z Mariage EtabHffcms d'aborddeux propofitions générales, qui peuvent écarter une partie des difficultës de cette queftion , & la renfermer dans fes juftes bornes. iB. II ne s'agit point d'examiner ici fcrupuleufement fi cette loi fameufe indulgentia principis quos libcrat notat, eft recue dans nos mceurs. S'il falloit expliquer nos fentiments fur ce point, difoit M. 1'avocat-général s non-feulementnous embrafferions avec plaifir cet ufage favorable attefté par Papon , par Denis Godefroy , par Bugnion, quia tempéré, dansce royaume , 1'extreme rigueur de cette loi romaine; nous irions encore plus loin , & nous foutiendrions que , dans le droit romain même , le jugement de cette queftion dépendoit uniquement de la manière & des termes dans lefquels le prince avoit expliqué fa volonté. S'il n'avoit accordé qu'une rémiftion & une indulgence imparfaite \ c'eft-adire, s'il paroiffoit avoir voulu feulement faire grace de la peine civile , la peine naturelle , qui n'eft autre que Finfamie, furvivoit a la reftirution. Mais lorfque 1'empereur avoit donne une entière abofition , 1'honneur , la dignité , la réputation du coupable  du Duc de Gu{fe, 363 'feoïent rétablis dans leur premier étatII n'en faut point d'autres preuves, que la définition-célèbre dc cette efpèce •d'indulgence parfake , que nous trouvons dans la loi première , au code de fentent. paff. & reftit. Ut auum Jcias quid (k in inugrum reftituerc , honoribus & ordini tuo , & omnibus cMcris te reflitua. Telle étok la formule de cette forte -de reftitution. La même idéé fe trouve encore dans la loi dernière du même titre , §. 4. Ut deportationis ipfurn per fe nomen rerum omnium fpoliatio efi , indulgentia reflitutio , bonorum ac dignitatis, uno nomlne amifiorum, omnium fit recuperatio : en forte que la loi veut que tantum ad reftitutionem indulgentia valeat, quan. turn ad correilionem fententia valuit. Mais il ne s'agit pas de fcavoir ici s'il étoit refté, fur la perfonne de M. le duc de Guife, quelqu'impreflion de cette note, que fon crime avoit répandue fur fa réputation. L'intention du roi, a cet égard , eft trop clairement expliquée dans les lettres d'abolition , pour qu'il puifte refter le moindre doute. On peut, d'ailleurs , diftinguer , en général, deux fortes de reftitutions :  3 6 4 Mariage les unes de juftice , Sc les autres de, grace; & cette diftinclion s'applique a celles qui rérabliftènt les condarnnés dans la pofleffion de leur état. Les premières font des reftitutions accordées par la loi même a celui qui vient fe juftifier devant la juftice. Ce font des abfolutions réfultant de la juftification , plutót que des reftitutions; ce font des preuves de 1'innocence du fujet, & non pas de 1'indulgence du fouverain. Les fecondes font , au conttaire , de vérirables graces , marqués éclatantes de la bonté du prince, qui, comme loi vivante , a le droit de faire taire , en certaines occafions , les loix générales , & de fufpendre le cours de fa juftice, pour fignaler fa clémence. Dans la première efpèce de reftitutions , on ne doute point que le jugement n'ait un eftet rétroaöif. II attaque I'incapacité dans fon principe j & dès que 1'innocence paro'it, non-feulement toutes les fuites de 1'accufation fonteffacées de plein droir , mais on juge qu'elles n'ont jamais exifté. Le miniftère du juge déclaré Pinjrocence , & ne la donne pas. C'eft même parler improprement de dire qu'un ju-  du Duc dc Guife. 36$ cement d'abfolution a un effet réttoactifj il faut dire que 1'innocence n a ete qa'obfcurcie pendant que la condamnation par contumace afubfifte. Mais ia pureté intérieure n'a jamais louftert d'atteihtej & bien lom qu'jl taille emprunter le fecours de la fiction pour détruire, dans le paffe , 1'effet d'une telle condamnation , on peut dire, au contraire , qu'il faudroit admettre une forte de fiction , peur que celui qui a toujours été innocent, put être répute avoir été coupable pendant un certain tems. Mais 1'autre efpèce de reftitution , celle qui provient , non pas de 1'innocence , mais de la grace du prince , a-telle un effet réttoactif? C'eft une queition qui doit être examinée. Mais il faur, auparavant, écarter un moyen de faveur que l'on a voulu repandre fur cette caufe , en faifant pafier la reftitution de M. de Guife pour une de ces reftitutions favorables ^ que la juftice accorde a ceux qui fe préfenrent dans les cinq ans , après qu'elle les a condarnnés par contumace. 11 ne s'eft pas repréfenté, il eft vrai, paree que le roi 1'en a difpenfé. N'exa-  3 f 5 Mariage mmons point 1'effet de cette cireenf- tance. Mais, ce qui eft décifïf, c'eft qu'il ne peut jamais y avoir de différence entre Ia condamnation par contumace , Sc Ia condamnation contradictoire , en matière de crime de lèze-majefté , lorfqu'une fois Ie crime eft auffi public Sc auffi conftanc qu'il 1'éroit dans la perfonne de M. de Guife. Non-feulemenr cela eftdécidépar la fameufe loi poft contracium j 5 ff. de donat. Mais il y a une loi plus précife ; c eft la loi 5.1, §.4, au même titre. Rats donationes effe non pofjunt, poft crimen perduellionis contracium , cum heredem quoqueteneat, etjt nondum pofJuiatus vitd deceffcrit. ^ Le moment qui 1'a rendu coupable d'un tel crime, eft le moment oü fon incapaciré a commencé. Qui incidit in hoe crimen > neque vender e potejl, neque manumittere, neque ulio modo alienare; nee recie foLvit ei debitor. Z. 6 cod. ad leg. jut. majef. §. 1. La ioi 8 , au même titre , répète la même décifion. Ce principe fuppofé, remarquons d^abord que perfonnne ne doute que le roi  Ju Duc Je Guife. 367 n'ait le pouvoir de donner aux eraces qu'il aceorde, telle étendue qu il ,uge M;°pPett donc leur donner un effet préjudice d'un tiers, paree qu en acco dancunbienfaitaun de fes fu.ets ., e foi n'bte jamais le droit acqms a un aUMais il faut que cette volonté foit annoncée dansles lettres memes; K lorfquele roi ne s'y eft point expnque précifément fur les actes paffes pendant Le I'incapacité a fubfifté alors il eft Jflez difficile , difoit M. Mg-ejfe*» * de prendre unparti dans une matiere ou „otfstrouvonspeudeguides foit dan les loix, foit dansles arrets , foit dam les écrits des doéteurs. Effayons eependant, difoit ce maoiftrar, d'en découvrir les principes } & diftinguons deux cas differents, dans lefquels on peut demander fi Ia grace du prince confirme tous les aétes qui font placés dans le tems de lmcapa- Cltpremier cas , lorfque l'ade eft valable en foi, & n'a d'autre defaut que I'incapacité qui réfulte d'uncnme pre-  360 Mariage cedent, fans qu'on pui/Te regarder cet acte , comme un nouveau crime. Second cas. Lorfque Pafte eft nonfeulement défectueux par le tems dans lequel ,1 a ete pafte , mais augmente encore e crime qui avoit produit I'incapacité. Le premier cas paroit difficile a décider. D'un coté, on peut dite : i°- Que I'incapacité eft une partie de la peine , & que la loi éteignant la peine avec ie crime méme, on ne peut en faire fubfifter une partie , contre linrention du prince. 2°. Que les lettres d'abolition , & far-tout celles de M. le duc de Guife , CRiinennent une claufe exorefle , par laquelle on Ie rérablit dans fa pofleflTon & joiuftance de tous fes biens, ainfi qu u a fait, ou pu faire auparavant toutes les procédures & condamnations, & comme fi rien ne fut advenu. Paroles fi fortes, qud femble qu'elles décidert nettement la queftion. 3°. Enfin , que Pon ne fcauroit donner trop d'étendue aces graces, puifque, ïuivant la remarque de Cujas, c'eft i elles que s'appliquent ces paroles de la  du Duc de Guife. 36c) loi 3 ff de conftitut. prir.cip. Beneficium imperatoris ... quam pleniffime interprs.tctri debetnus. D'un autre cóté on peut_ répondre, ï °. Que la peine n'eft eftacée , n'eft remife, n'eft abrogée que pour 1'avenir, & non pour le paffe; & que , puifqu'on veut regarder I'incapacité comme une partie de la peine, on doit en conclure que I'incapacité ne ceffe auffi que du jour des lettres d'abolition. 20. Que c'eft un principe général , que les lettres d'abolition n'ont d'effet que pour ce qui eft expreffément contenu danslagtace du prince:&, comme il n'y eft point parlé du pafte, on ne doit pas faire violence aux termes des lettres, pour leur donner une extenhon qui n'eft point comprife dans 1'intention du roi. Au reftè , tous ces termes, pour en jruir comme aüparavant les condamnations , & comme fi rien ne fut adv.nu,ie rapportent toujours au tems préfent. II y en a même deux preuves écrites dans Fefpèce de cette caufe. Une dans l'arrêt d'enregiftremenr , qui a ordonne que Tarnende ne feroit point rendue a M. le duc de Guife. 1 Qy  37° Mariage La cour pouvoit-elle marquer plus; clairement qu'elle n'avoit pas cru que. l'on püt donner un effet rétroactif i la grace du prince ; que c'éroit affez pour M. le duc de Guife de récouvrer fon premier état , par rapport a 1'avenir, lans faire revivre ce même état par rapport au rems oü il avoit été criminel? Et qu'enfin il étoit du bien public, Sc du falut de 1'état qu'il reftat toujours. quelque tracé de cette jufte févérité avec laquelle on a puni la révolte d'uH pair de France contre fon roi. L'autre preuve eft confignée dans leslettres d'abolition.. Lorfqu'il a été queftion de faire revivre les titres de duché & de principauté, que le roi avoit éteints dans le tems de la révolte de M. de Guife , Sc de révoquer le don qui avoit été fait de: fes biens a madame fa mère, s'eft-on contenté de ces claufes générales qu'on. veut faite valoir ici ; & n'a-t-on. pas jugé qu'il étoit néceffaire d'inférer une claufe fpéciale dans les lettres d'abolition ? Le prince qui a accordé Ia grace n'a: doncpes cru qu'elle eüt, de plein droit, un effet rétroaélif; Sc fur-r©ut fur ce qui n'éroir qu'unefuite de la condamnation j  du Duc de Guije. yfi paree que les chofes n'étoient plus enticres , & avoient été confommées dans le tems de I'incapacité. 3°. N'y auroit-il point de différence entre un innocent abfous par la juftice, 6c un coupable abfous par la grace du prince ? Le roi peut , a la vérité , égaler 1'un a 1'autre; mais ne faut - il pas qu'il le déclaré ? 4°. II doit y avoit quelque différence entre un fujet fidéle , qui, après avoir été pris par les ennemis de 1'état, revient en France jouir du droit de retour, appellé poft-liminium ; & un fujet auquel le prince fait grace par un excès d'indulgence. La loi fait aifémentdes fiétfons favorables, quand il s'agit du premier, maisel'.e refufe d'en faire pour le feconcL Transfuga nullumpojl-liminiumeft,narrt qui mulo conjïïio & proditoris animo patriam reliquic, hoftium numero habendus^ •fi. L. 19 , §. 4 > # d* eaFl- & P°ft limin. m II n'eft pas a préfumer quela loi fafle•ané ficFion en faveur du coupable; ou il faudroit qu'elle 1'eüt expreffemenr expliquée , car il n'eft pas poffible delafuppléer.. 5°. Quele droit roniain nous ag»-  37* Mariage ptend que l'on ne donne point un effet rétroactif aux lettres d'abolition, contre les aótes confommés pendant I'incapacité de celui 'qui eft condamné. Un pere , a la vériré, recouvre , par J'mdrilgence du prince , les droits de la puiffance parem elle , qu'il avoi t fur fes e#ants avant la condamnation. Mais tout ce que fes enfants ont fait pendant f*n incapacité , eft confirmé par la loi ■> même leur teftament, d 1'égard duquel oa ne peut cependant pas dire qu'il y eüt encore de droit acquis irrévocablenjent' a un tiers; de peur, dit la loi dernière , §. i , cod. de fentint. paf. & refth. que, par une étrange abfurdiré, u.n'arnve que l'on juge que le fils a ére, eamême-tems, père de familie & fils de familie, affranchi de la puiffance paretnelie , & fbumis a cette même puiffance. Ne eorum refcifo efficiat (quod eft maxime abfurdum ) eodem temport , nee in putris , nee in fud fuïffe poteftate. Difons ici la même chofe. N'eft-il pas également impoffiblede préfumer que M. le dacde Guife a été, en même-tems, capabie & iucapabie dg contrader un mariage légitime? Capabie , fi on examine fon domicile acruel dans les Pays-Bas, qui le föümet-  du Duc dc Guife. 373 toit au curé de Bruxelles; incapable , h ouadmer refter, rétroacFif que l'on véut donner aux lettres; puifqu'alots il faudra fuppofer que fon domicile a roujours été en France , Sc qu'ainfi il ne pouvoit trouver ailleurs un pafteur légitime , & un vérirable curé. A ces raifons , M. l'avocat-général en ajouta d'autres, qui prouvoient, de plus en plus, que cette opinion étoit , au moins , auili probable , que 1'opinion contraire. Nous avouons , difoit-il, que notte efprit demeure prefque fufpendu entte ies deux partis. Mais , pour terminer ce doute, il faut pafter au fecond cas propofé. Ce cas, eft celui d'un acFe criminel en lui-meme, indépendamment de la qualité de celui qui 1'a pailé. Trois fortes de crime que l'on prétend trouver en un feul. . Mariage d'un des plus grands feigneurs du royaume, d'un pair de France, d'un poifeiTeur de plufieurs liefs qui le foumettoientégalement au roi, & comme vaftal, Sc comme fujet, fans avoir obtenu fon confentement, avant de le contracter. Mariage avec une étrangère.  374 _ Mariage Mariage enfin avec une ennemie. II faut examiner fi ces trois circonftances reünies fuffifent pour rendre 1'acFe criminel. Et fuppofé qu'on ne puifie douterque cet acFe ne renferme un nouveaucrime ajouté a celui de la rébellion de M. le duc de Guife, nous n'aurons plus qu'i tirer des conféquenees juftes & précifes de cette vérité, pour prendre un parti fur au fujet de ce mariage. Première circonftance. Mariage d'un. pair de France & d'un des plus grands feigneurs de 1'état ,. fans le confentement du roi. ^ Ce n'eft point ici le lieu , difoit d'Aguefleau, d'approfondir la grande, la célèbre queftion, qui femble renfermée dans I'examen de cette première circonftance.Une queftion fi importante demanderoit un difcours tout entier. Ou plutót, difons que cette queftion. a eté fi doctement traitée , continuoitil, & fi fcavamment approfondie dans. ce fiècle, par des éerits qui font entre les mains de tout le monde, que cette matière toujours grande & roujours illuftre enelle-même, femble être devenue commune par les diflertarionff qui Pont éclaircie, & qui 1'ont prefque entièremenr épuifée.  du JLJuc de Guife. JJ$ II faut donc fe conrenter de remarquer, en général, que les mariages desprinces du fang, Sc même des grands feigneurs , ont toujours été regardés comme une a&ion qui, loin de fe renfermer dans leur familie particulière „ intérelfoit toute la république. On a jugé qu'ils appartenoient a Ia patrie Si a leur prince , d'une manière plus étroite , que le refte des citoyensrr &c que toutes leurs adions devant avoir pour but le bien & la gloire de 1'état „ c'étoit a 1'état, encore plus qu'a euxmêmes, a examiner fi 1'alliance qu'ils vouloient contrader pouvoit lui être avantageufe, • Enhn , que les rois étant regardea comme les pères , les tuteurs , les gardiens Sc les protedeurs des princes du fang & de ceux que leur naiflance élèye aux premières dignités de 1'état , ils commettoient un véritable crime ,lorlqu'ils méprifoient tant de titres & tant. de qualités réunies a celle de fouverain , en fe marianr fans avoir obtenu la permiffion du roi.. Autrefois même ce droit n'étoit pas propre aux rois & aux fouverains. Les fimples feigneurs 1'exercoient fur leurs .vaffauxj Sc 1'églife même a reconnu cette  3?6 Mariage autorité dans le huitième fiècle, puifqne; t par un canon du concile de Compiègne de Pari 7^7 , elle déclara le mariage d'un vaflal abfolument nul, paree qu'il avoit été contracté fans le confentement de fon feigneur. Depuis, cette dépendance exclufivement réunie a la dignité Sc a 1'autorité royale , a été renouvellée , de tems en tems , par des conventions exprelTes , qui ne doivent pas être regardées comme des loix particulières , mais comme une hmpie coniirmation de la loi générale. Ceux qui ont ofé violer cet engagement , & rompre ce noeud , qui doir paroitre fi précieux aux feigneurs du royaume , puifqu'il les attaché li étroirement a la perfonne du roi, ont fouvent été regardés , pourfuivis , punis comme criminels d'une efpèce d'attentat contre l'autorité du fouverain. Les exemples fameuxducomted''Armagnac Sc du comte d'Alencon , fous Charles VII, Sc 1'exemple du proces du maréchal de Birony en font les preuves éclatantes. Enfin, on peut afouter que, quoique, dans ces derniers tems, l'on ait fouvenc fermé les yeux fur ces fortes de mariages  du Duc de Guife. yj7 par rapport aux grands-feigneurs , il faut néanmoins avouer que la raifon d'érat qui fubfifte roujours , Sc les circonftances qui accompagnent ces mariages, peuvent donner lieu aux juges de les regarder ou comme tolérables , ou comme abfolument criminels. Enfin , il exifte , en cette matière , deux maximes principales; 1'une que le mariage des princes du fang eft abfolument nul, même quoadfxdus 3 Sc que cette loi eft encore dans fa, pleine vigueur , comme le prouve 1'exemple de Monfieur. L'autre qua 1'égard des grands feigneurs , attendu la défuétude, il n'en eft pas de même. Mais ces mariages fonr, a leur égard , fujets a des peines arbitraires , felon la gravité des circonftances. Or entre ces peines , en peut-on trouver une plus douce , que la privation des effets civils ? Et quelles font ici les circonftances qui peuvent autorifer, Sc même provoquer cette punition? C'eft la qualité d'étrangère. 11 eft inutile de citer le droit romain , qui ne connoiffoit de mariages légitimes, que ceux qui fe contradoient entre ci-  378 Mariage royens romains. Juflas nuptlas inter fe tives romani eontrahunt. Des exemples fameux ont confirmé 1'exécution de cette loi, 3c nous ont appris combien elle étoit facrée. Jules-Céfar, qui avoit tout enfreint , & qui pouvoir tour , n'ofa époufer CUopatre. Titus, qui étoit, a fi jufte titre , 1'idole du peuple ro~ main , qui , en qualité d'empereur , réuniffoit tous les pouvoirs de 1'état dans la main, n'ofaépoufer une étrangère ; il renvoya , dans fes états , Bérénice qu'il adoroit. Si cette loi n'eft plus en vigueur parmi nous j il eft toujours certain qu'un grand, qui époufe une étrangère, fans fa veu du roi , commet un délit. Et c'eft, en effet , prefque toujours dans ce cas, que l'on s'eft élevé' autrefois contre les mariages contraccés par les' grands feigneurs, fans 1'aveu du roi. Mais ce qui aggrave encore cette circonftance, c'eft que la perfonne que le duc de Guife a époufée , étoit ennemie de Ia France. Elle étoit fujette du roi d'Efpagne , avec qui 1'état étoit en guerre. Or il faut abolir tout veftige de cet ancien ufage , conforme a la raifon naturelle, & fi utile au bien de 1'état j  du Duc de Guife. 379 eu ïl faut avouer que jamais il n'y a eu plus de fujet d'en conferver au moins quelques veftiges, par rapport aux eftets civils. C'eft un duc de Guife , dont le nom feul réveille le fouvenir de tant de inaux , qui s'engage a porter les armes contre fon roi, qui s'allie avec les ennemis de 1'état, Sc qui fcellé fon union par un mariage, qui le lie étroitement avec une des plus puilfantes maifons du Brabant. S'il eft défendu, comme le dit M. le Bret, auxgrands-feigneurs, d'équipper des vaifleaux , d'avoir des maifons fortes , Sec. a combien plus forte raifon doit-il leur être défendu de fe lier, par le plus inviolable de tous les engagements, avec les ennemis de 1'état ? Ce ctime, qui a para fi grand a nos pères , deviendra-t-il léger par 1'oubli des anciennes maximes, Sc paree qu'il fe préfente rarement des occafions de le punir? Au contraire ; c'eft paree qu il eft rare , qu'il femble que Po» eft obligo de faifir une occafion de foutenir avec fermeté 1'intérêt de 1'état. Cela fuppofé , peuton dire que les lettres d'abolition ont confirmé un tel attentat ?  380 Mariage Or commenr appliquer a ce crime des lettres d'abolition qui n'en parlenr point ? Les lettres, quelque générales qu'elles paroiffenr, ne fe rapportent qu'aux faits qui y font énoncés. Or il n'y eft fait aucune mention de ce mariage ; Sc on ne peut pas préfumer que le roi ait eu intention de Py comprendre. S'il avoit eu cette intention, Ie confeil de M. de Guife étoit trop habile , pour laiffer échapper une claufe fi précieufe. En effet on a eu grand foin de faire inférerdans les lettres, qu'elles auroient un effet rétroaétif, par rapport a la confifcation 8c au rétabliffement des diguités. Cependanr ce rétabliffement étoit un effet beaucoup plus naturel de la grace du prince ; on n'a pas négligé de i'exprimer ; pourquoi a-t-on laiffe le contrat de mariage dans 1'oubli ? C'eft qu'on fcavoit bien que Ie roi ne confentiroir pas qu'on en fit mention. Au furplus , il n'eft pas nouveau de comprendre cetre efpèce de délit dans des lettres d'abolition. II eft nommément exprimé dans celles que Charles /^7/accorda au comte d'Armagnac, qui furent enregiftrées au parlement de Touloufe en 1446.  du Duc de Guife. 381 Enfin , fi u-n tel mariage produifoit, parmi nous, des effets civils, quelle différence y auroit-il entre une alliance contracFée en France avec uneFrancoife, & autorifée par 1'agrément du roi; &c un mariage contracté pendant la guerre , avec une étrangère, & une ennemie de 1'état; fur-rout n'y ayant eu aucune pofleffion en France? Car on ne regardera certainement pas un paffe-port, comme un titre de poffeffion. S'il y avoit eu, en France , une poffeffion publique & certaine , on pourroit dire que le roi auroit approuvé, que la loi auroit tacitement confirmé ce mariage , quant aux effets civils. Alors on examineroit fi cette efpèce de ratifacation remonteroit jufqu'au conrrat, ou fi fon effet n'auroit lieu que du jour des lettres d'abolition. Mais on n'a point ici cette queftion a examiner, puifqu'ü n'y a aucune ombre de poffeffion. • r Ce mariage, dit M. 1'avocat-genera! en finiffant, eft donc auffi indigue d etre regardécommelégitime dans 1'état, que comme facremenr dans 1'églife. Ce magiftrat récapitula enluite les demandes incidentes, qui avoient pour objet les fommes pour lefquelles la  3S2 Mariage comtefle de Boffu s'étoit engagéepoui? le duc de Guife, Sc celles qu'elle avoit . payées a Ion acquit. II conclut enfin a ce que, fur J'appel comme d'abus , tant des procédures de la rote , que de la célébration du mariage, il fut dit qu'il y avoit abus , ÓC en conféquence que le prince de Berghes fut débouté de toutes fes demandes , en exécution du contrat du 16 novembre i 641 ; & fur le furplus des demandes , les parties hors de cour; fi ce n'eft que la cour ne jugeat plus a propos d'accorder un délai au prince de Berghes , pour rapporter les titres originaux Sc pièces juftificatives de fes prétendues créances. Voici l'arrêt. « La cour, en ce qui concerne les »> appellations comme d'abus interjets» tées par Monfieur 5c conforts, tant s» de Ja célébration du prétendu mas> riage, que des jugements intervenus sj a la rote de Rome , dir qu'il a été j» mal, nullement Sc abufivement pros> cédé, célébré , ftatué , Sc ordonné. *> En conféquence , évoquant le pxin» cipal fur les demandes du prince de » Berghes, réfultant du prétendu con*>trar de mariage du 16 novembre  du Duc de Guife. 383 h 1641 5 met les parties hors de cour » &c de procés & le condamné aux dé» pens; & fur les autres demandes du» dit prince de Berghes, ordonne qu'il » fe pourvoira , ainfi qu'il verra bon »> être, défenfes & fins de r.on-recej» voir réfervées au contraire. Fait ce 5 1» janvier 1700 ».  3°4 HISTOIRE DU CH EVALIER DE MORSAX. C e t t e caufe eft une de plus fingulières & des plus intcreffantes , par les faits, que l'on puilfe trouver dans ies faftes de la jurifprudence. La vérité des événements qui en formeht ie tiffu n'a jamais pu être approfondie; & cette incertitude même femble ajouter au merveilleux qui la caractérife. Charles-HenriDonc, notaire a Paris, laifta, en mourant, trois enfants un garcon & deux filles. Marguerite CharLotte, une des filles, eft le fujet principal de cette hiftoire. Marie Chenuet , leur mère , fut nommée leur tutrice. Mais les parents des mineurs fe crurent obligés de la deftituer , pour leur fauver une partie  'du Chevalier de Morfan. 3$ £ partie de Ia Fortune que leurpère leur avoit laiftée. Son peu d economie &C fes profufions livrèrent leurs biens au fléau de 'la faifie-réelle; formalité établie par les loix, pour aifurer aux créanciers leur paiement, & aux débiteursles reltes de leur fortune-; mais qui eft devenue-, dans la main de la chicane , un flambeau dévorant , qui confume rout; ou plutót une fource inépuifable de fraudes, qui tranfmettenr les biens , des mai os des véritables propriétaires „ dans celles des agents fubalternes de la juftice , qui partagent entr'eux les dépouilles des malheureux. Quoi qu'il en foit, les parents des enfants mineurs de Donc leur élurent, pourcurateur, le fieur Mare de Joigny , qu'ils chargèrent de faire rendre compte i la mère. Elle donna fa confiance , pour cette opération , a un fieur Robert, qui étoit alors clerc de notaire. Charlotte Donc n'éroit alors agée que de quatorze ans : mais fa beauté étoit déja dans tout fon éclat. Elle fit impreffion fur le cceur de Robert, qui defira d'en faire fa femme. II obtint ie confentement de la mère. Mais ce confentement ne levoit pas tous les obftacles. Tome XIV. R  2urdiffantfur le danger qu'il craignoit.,. a. eu plufieurs aventures de galanterie. C'étoit au. village de Combe - laYille-, dans une maifbn. qui appauenoit au fieur cVbnonville , que fe fai— foient les parties de plaifir; & c'étoir toujours la Duclos qui Jes lioit, &c qui* ypréfidoit.. Ei ie y conduifoit les feigneurs &c les> gen? riches- avec qui elle étoir en$ Ibifon.. Lachafii,. la. daufe.x ia tahie. §c  du Chevalier de Morfan. 39 e fainour occupoient rout le tems que l'on paffoit dans ce lieu de délices. Le prétendu chevalier, qui s'étoit enfin aguerri, étoit 1'ame de tous les plaifirs. Le jour ,. c'étoit un homme charmant,. qui avoit toutes les graces dufexe dontil avoit adopté 1'extérieur :■ il rendoit amoureufes de lui toutes les femmes qui ne le connoifïbient pas; s'amufoit, & amufoit ceux qui le connoiiT-aient, des feux qu'il allumoit, Sc qu'il ne pouvoit éteindre. La nuit, il mertoit le mafque bas y & devenoit une femme pleine d'appas* pour ceux- qu'elle admettoit a fes fa-veurs. Le fieur Maro fe rendoit fouvenr dans cette maifon de campagne. En; trant un jour dans une chambre ou il y avoit grande compagnie, il fut aiTer indifcret pour dire au chevalier, qui s'étoit fixé enfin au nom du chevalier deMor fan : Eh bien, Charloue , comment cela va-c-il? Cette indifcrérion apprêra» a rire, Srexcica la curiofiré de quelques. perfonnes , qui, pour s'éclaircir , cru-irent être en droit de faire des queftions-; au fieur Maro ^ qui rompi t la converfa" tiom. Ll- n'étoit gas pofllble que lecheva^ Rvjj  39°~ Bifïoire lier, qui changeoit de nomprefqu'aiiflï fouvenc qu'on change les mors duguet, &c qu'on annoncoit tantot cemme un gentilhomme étranger , tantót comme le fils d'un prince, ne donnar de 1'exerciceaceux qui cherchent a démêler les aventures d'autrui 3 dès qu'elles paroiffent un peu myftérieufes 8c complir quées. Enfin la vérite perce de tous cótés ; le fcandaleaugmenre ; le curé de Coin* be-la-viile , que le zèle éclaira fur les défordresque ce déguifementreceloit> trouva le chevalier dans le lit de ia dame d'Imonville, avec. un bonnet de nuit, 8c une chemife d'homme. IJ crut d'abord qu'il n'y avoit qu'une femme qui put occuper le lit d'une femme : il veut éclairc-ir fes foupcons; il i'nter* Toge le chevalier : mais celui-ci répond par des plaifanteries, tourne lebon curé en ridicule, change de propos, & laiffe Je pafleur dans la perplexité ou.il étoit lorfqu'il^roit entré. L'infirmité périodique.,. a laquelle ies-femmes font fujettes, trahit le my£ tére aux- yeux des domeftiques de la Duclos. En vain voulur - on leur permades que les fymptömes qu'ils remarquoient^  du Chevalier de Morfan. 3'97' -provenoient des hémorrhoïdes donton difoit que le chevalier étoit tourmentér le retour régulier des fignes ne leurpermettoit pas d'ètre duppes de cette dcfaite. La femme de Robert, dir-on, enprenant les habits d'un homme ,. en prit le courage : elle eut une querelle, elle fe battit, elle futbleffée dans le bas-ventre 3 anxenvirons de Combe-la-ville. Manh not, chirurgien de Brie Comte-Roberry la panfa de cette bleffure qui ne fut pas mortelle : c'eft un témoin oculaire de la vcrité. Peu de tems après ,1e chevalier revint a Paris dans la maifon de la Duclos , qui avoir quitté la rue des Marais , pour aller demeurer rue Mazarine. II tomba malade de la petite vérole. Gette maladie, qui augmenta , fit re_venir tous ies troublesd'uneconfciense alarm ée. Le chevalier avoit fans cefle , a. Ia bouche, lenom de fon mari: le rableaiï de fa vie paffée fe rerrace a fon imagination , il fe croit affiégé d'une troupe d'archers qui viennent pour 1'enlever» II fallut fongeraJurprocurer les fecours fpiriruels :; on manda le P. Conftanc 9 leligieux dés Petits-Auguftins du faux,-  39 8 Hijloire bourg Saint Germain , afin qu'il con^ fefsat ie chevalier de Morfan. Le religie ux , qui le prit pour un homme , paree qu'on le lui avoit annoncé comme tel, lui paria en conféquence de cette fuppofition : mais le chevalier, femant que 1'heure étoit venue oü le mafque alioit tomber, & que le myftère devoit bientót fe dévoiler, dit a ce confeffeur , d'un ton plaintif •, hclas ,je ne fuis point homme, je fuis femme. A ce difcoursj le religieux, frappé d'étonnement, s'écria : comment r vous êtesFemme ? Elle lui dit pour la feconde fois : cui , je fuis femme. Le leligieux alors lui demanda fi: elle vouloir qu'il révélat le fecret a la Duclos : elle répliqua: dites-le , fi vous vouiez. Soit qu'il ne crüt pas que le danger fut fort preiTant, ou pour quelqu'autre raifon , ij différa de le confeffer jufqu'au lendemain : mais , danseer intervaile, mourut le chevalier traveftile ^novembre 1723. On continua le déguifement, même après fa mort. II fut queftion d'enféveiir Ie cadavre.-. Michelle de la Keau, veuve de Ju/ien R a$in, & Renée Ba^in, femme de Jofeph Comhaut fa fille & fervante de la Duclos, furent employées a. cet ofEce;;  da Chevalier de Morfan. 399^ Sc leurs yeux étonnés trouvèrent que ee corps étoit celui d'une femme , Sc mon d'un homme dont elle avoit potté 1'habit. Elles. en témoignèrent leurfurprife a la Duclos , qui feignit un pareiL étonnement ,. Sc dit alors qu'on avoit bien eu rorr dans le nionde de dire que c'étoitfon amant» Cependant ce cadavre enféveli fut mis dans une bière, Sc expofé a la pot te de la Duclos y Sc , pour perpétuer cedéguifement , on mit une épée Sc un fourreau en fauroir fur la bière, afin d'annoncer au public que c'étoit un homme d'épée , Sc un chevalier. Les prêtres de Saint - Sulpice étant venus , on porta le corps en cet. équipage a 1'églife.. Robert prétetjd que ceux qui marchoient a la tête du deuil étoient' les auteurs du déguifement. L'inhumation fut faite. L'extrait mortuaire eft concu dans les rermes que l'on a rapportés plus ham» Et, a.córé de eer acle mortuaire , on trouve , fur le regiftre qui a été compulfé, Sc apportéau chatelet , de Tordonnance de monfieur le: lieutenant-ctiminel , ce.re infertion.. Nora , nepointdzllvrer cet extraitfa* dilement.. De. tout cela on concluoit que--  4öo Hiftoïre ee chevalier de Morfan étoit CSar&tÜr Donc; on accufoit les témoins qui> avoient foufcrit 1'acfe mortuaire, & on prétendoit qu'en atteftant que c'étoit ie corps du chevalier qu'on inhumoit ils s'éroient reudus coupables d'une fauffieté facrilège; que leur témoignaao faifort leur crime-: auffi les mit-on dans les hens d'un décrer de prife-de-corps, ( Selon les loix de tous-les états polieès, difoit Roèert , Ie violement des tepukresa été regardé comme un grand crime r crimen Uf& religionis ad facrilegium pertinens. TémoinTacite, /. 3 , h i cod. de fepulcris violat. De quels crimes ne font pas coupables ceux qui recèlent le nom-& 1'état des morts ? Qu'elle confufion ne jetfent-ils pas .dans les families ? Altcrer , par de faux noms , les regiftres pnblics , c'eft metrre le trouble dans. 1'otdre focial , en . donnant. lieu de regarder comme ouvertes les fuxceffions des perfonnes qui font encore vivantes , ëc de prendre pour veufs des hommes dont les femmes ne font pas décédées. Quels ravages ne peuvent pas caufer des fuppofttionsauffi criminelles? Et quelle artefttion la juftice ne doit-elle pasapportes pour les.réprimer?  du Chevalier de Morfan. 401 En vain Robert cherchok fa femme, elle éroit enveloppée des ombres de 1* mort, Sc repofok dans le tombeau fous un nom différent du Een , & fous le titre d'un chevalier de Morfan. Quelques années fe paflenr fans rien découvrir: enfin , fept ans après le décès de la femme de Robert , arrivé en 1723 , qui étoit le même intervalle de tems qu'avok duréfon abfence, depuis 1716 , tems de fon évafion Sc de fon enterremenf, il apprend, de rous cötés, que la mort de fa femme étoit certaine. 11 redouble fon attention, pour démêler les circonftances; il parcourt les maifons Sc les quartiers oü elle avoit demeuré a Paris ; il s'adrefle aux voifins, jl rencontre des domeftiques de bonne foi; il va a Combe-la-Ville , Sc aux endroits circonvoifins oü elle avoit fait différents féjours, Sc dénoue toutes les intrigues Sc routes les aventures. Antoine Dons , frère de fa femme , Sc fon unique héritier , également intérelfé , fait des perquifitious de fon coté. Tout fe réunita confirmer le décès de Charlotte Donc, fa fin déplorable, les artifkes Sc les ftratagêmes qui avoient été mis en pratique , foit pen-  402 Hiftoire dant Ia vie, foi: l la mort du cnera- lier travefti. Robert, ayant toutapprofondi, conjomtement avec fon beau-frère, Sc les preuves étant prêtes, il ne balanca point a mettre cette affaire fous les yeux de la juftice. Telle eft 1'hiftoire que Roèertz faite: Sc pour la prouver il rapporté les dépofitions des témoins. Lepremier rémoin eft JeanneBa^in, fille domeftique.^ qui , en 1720 , Sc depuis, a demeuré quatre ans huit mois chez la Duclos; elle dépofe « qu'elle a » vuloger.chezlaZ/ac/oj, une perfonne » habiliée en homme, qu'on nommoit » Ie chevalier de Morfan , qui buvoit » & mangeoit avec elle : Sc le fieur » d'Imonville Sc fa femme logeoienr » dans la même maifon ; que cerre » perfonnetomba malade; que pendant » fa maladie, elle avoit grand foin de » fe cacher dans fon lit, difant qu'elle » avoit peur que les archersne vinffent » Ia prendre dans fon lit; que cette per«Tonne étant motte, la mère d'elle » dépofanté ayant enféveli !e corps , » lui dit que ce n'étoit point un homme, 4» mais une femme; qu'elle a vu le ca-  du Chevalier de Morfan. 40 5 » davre mis dans une bière , & porté a » 1'églife de Saint-Sulpice fous le nom » du chevalier de Morfan , & qu'on mie » une épée fur cette bière ». Rien n'eft plus précis que ce témoignage. On 1'a voulu rejetter , dit-on „ paree que Jeanne Ba^in eft un domeftique & un enfant. D'abord il eft certain que , quand il eft queftion d'un fait qui s'eft pafte dans 1'intérieur , & dans le fecret d'une maifon , la preuve domeftique eft admife : quoniam non facile qua domi gemntur per a/ienos poffunt probari : paree qu'on ne peuc guere prouver , par des étrangers, les «umtts qut fe paften: & ia mauon. crj ce cas , les domeftiques deviennent des témoins néceffaires. dont le témoignage eft recu par la loi 8 au code de repudiis. Momac ,fur la loi 3 ft*, de teflibus , en rapporté un arrêt du 9 aout A 1'égard de lage , la quatorzième année fuffit pour rendre le témoignage valable , tant en matièrecriminelleque civile : cervffimam apud nos fervamus h-inc regulam ,faclum puberem pofeferre teflimonium de ils qu& viderlt pubertat't proxïmus, quia fcilicet non prohibctur a lege ^ & fuffciunt 14 anr.i e.v_ cap* Carolï  4^4 Hifloire Magni, dit encore Mornac, fur la loi ao au digefté de tcfiibüs. Nous regardons comme une régie très-certaine , qu'un pubère peut rendre témoignage' des efcofes qu'il a vues: la loi ne rejerce ■point fa dépofition , & quatorze années font foffifanres pour lapuberré. Le deusième témcdn, qui eft JeanFrancais Maulnory, derc tonfuré, prieur de notre-dame des EiTards , 'gé de 37 ans, dit: « qu'ayant fréquenré dans 3» une maifon ou demeuroirla Duclos, » rue Mazarine, il y a connu une per» fonne habillée en homme , qui fe » faifoitappellerle chevalier de Morfan, » qui lögeoitcnez ia Duclos, buvoi: Scf » mangeoit avec elle, avec le fieur Jo» quet f Imonville , & fa femme. Que » ce foi-difant chevalier paroiftbir tout " Parncuiier, fe retirantdans fa cham- bre , lorfqu'il paroifioit quelqu'un » qu'il ne connoiftoitpas. Qu'il tomba " tnahae chez la Duclos, de la petite »> verole , & qu'étant décédé de cette » maladie, il filt enterré iSaint-Sul» pice , fous le nom du chevalier de » Morfan ; & que quinze jours après » ion enterrement, 11 fe répandit un » bruir, dans le monde , que ce foi-di» Luit chevalier étoit une femme ; ce  du Chevalier de Morfan. 40^ ?».qui donna occafion a plufieurs bro»> cards , & excita la curiofité de lui ?» dépofanr de fijavoir ce qui en étoit, » d'autant que ce bruit avoit été confirj» mé par la fervante de la Duclos , &C o par la mère de cette fervante, qui lui » dit 1'avoir enfévelie; 5cque, fur cela, » ayant vu la femme d'Imonville , il lui » raconta le bruit qui fe répandoit a >5 cette occafion ; qu'alors la femme de » d'Imonville feignit d'ignorer lachofe ; » quecependanr elle lui dit que le bruit » couroit que ce foi - difant chevalier » étoit la femme d'un greffier de Saint» Denis, qui en avoit porté fes plain-, » tes a M. le procureur-général »,, On voit, dans cette dépofition , des préfomptions convaincantes du fexe du chevalier trayefti, & le fondemenr fur lequel on atrribuoit ce perfonnage a Ia femme de Robert. Le tronie-me témoin , qui eft Nicolas Mor eau, prêtre du diocèfe de Paris, &C bachelier de Sorbonne, dépofe « qu'il » avu, au village de Combe-la-Ville, >> en la maifon de Joquet d'Imonville , }•> une perfonne affez grande , ayanrl'air s> effcminé , .& la voix claire , qui fe * difoit officier dans les troupes d'Ef» paglie> qui buvoit tk fumoit comme  4°£ Hijloire » un homme ; que ce fut a cette per« fonnei qui le fieur Maro , qui étoic « au village de Combe-la Ville , adref» fant la parole , dit: ( eh bien, Char» latte, comment cela va-t-ü} ) ce qui * excita Ia curiofité dece témoin , qui » ayant déja entend.u parler de 1'hiftoire » de Charlotte Donc, & qui faif0it du » bruit dans le monde, demanda au » fieur Maro fi ce prérendu chevalier « n'étoit pas la demoifelle Donc ; fur « quoi Mara ne lui répondir rien, & m changea de converfation ». Ces termes de Charlotte, &c. dit Robert, ne prouvenr-ils pas que ce chevalier travefti étoit fa femme , qui s'appelloit Charlotte ? r Le-quatrième témoin , qui eft Francois Turcot, clerctonfuré, qui pofsède une maifon a Combe-la-Ville , dépofe de plufieurs entretiens qu'il a eus avec Ie curé de ce village, au fujet du chevalier de Morfan; qu'ils ont eftimé 1'un & 1'autre <■ être une femme traveftie, & « la femme de Robert, que ce témoin » trouva un jour cachée fous un cana» pé ». Le cinquième témoin , Nicolas Quinebert, bourgeois de Paris, dit: « qu'é•* tant * Combe-ia-Ville, il y a vu une  du Chevalier de Morfan. 407 « perfonne habülée en homme qui lom geoit dans la maifon de d'Imonville, *> qu'on appelloic le chevalier du Cou» dray , &c qu'il changea de nom , s'én tant fait appeller le chevalier de Mor»fan, Sc que, depuis , il a entenda » dire que ce particulier étoit une fem» me». Le fixième témoin , qui eft Rene'e Ba-fin (1), femme de Jofeph Gombault, cuifinière, dépofe, « qu'elle a demeuré » fept ans quatre mois chez la Duclos, »» rue Mazarine, en qualité de cuifiw nière, dont elle eft fortie en 1717 ; »> que, pendant ce tems 3 elle y a vu » une perfonne qu'on appelloir le cheva» lier de Morfan, aflez grand de taille, » les cheveux bruns, un habitgalonné, » dont la Duclos lui difoit qu'elle pre» noit foin par bonté ; que plufieurs » paflans de Combe-Ia-Ville lui ont dit »> que celui qu'on faifoit pafter pour le » chevalier de Morfan étoit une femme »> déguifée, dont elle dépofante n'ofoit s> parler; mais qu'ayant blanchi le linge » de ce prétendu chevalier, elle y re1» marqua roures les marqués d'une » femme , $C que, dans la maifon , (1) Soeur de Jeanne Bafjn, premier tém«i«.'  408 . _ Hijïolre » on lui difoit que c'étoit les hémorv rhoïdes; quece chevalier étant tombé » malade, a fon retour de Combe-Ia»> Ville , oü il 1'avoit dé/a été d'un » coup d'épée, elle entendit ce préten» du chevalier malade dans fon lit, »> qui parloit fouvent d'un mari ; qui » paroilfoit embarrane ; & difoit avoir « peur que les archers ne vinffent le » prendre; qu'enfin il mourutde cette *> maladie, qui étoit Ia petite vérole, » 8c qu'elle , avec fa mère coniointe« ment, ontenfemble enfévelile corps » dece prétendu chevalier, & qu'elles *> furent très-étonnées de trouverlecorps «) d'une femme , au lieu de celui d'un » homme dont elle portoit 1'habk ; fur » quoi elle en paria a la Duclos, qui lui « dit que cela la furprénoit beaucoup, » qu'elle n'en fcavoit rien; qu'on avoit » bien eu tort de dire que c'éroit fon «amant; que cependant ce corps fut » mis dans une bière, expofé a la porte « de la Duclos , avec fon épée & un « fourreau en croix fur la bière, &c a » été mis en terre a Saint-Sulpice ,fous ♦> le nom de chevalier de Morfan , au» quel enterrement Joquet d'Imonville » a aflifté , 8c profité d'une partie de la » dépouille 8c des hardes de ce préten- »du  du Chevalier de Morfan. 409 w du chevalier ; & que la demoifelle » Duclos a fair vendre le furplus, dis> fant que c'étöit a elle *, Enfuite ce ■témoin ajoute , «• qu'elle aentendu que » le mari de cette femme étoit aux ■sj faifies-réelles, Ik qu'elle a remarqué 5» que cette femme traveftie prenoic » toujours grand foin de fe cacher lorf» qu'il venoit, chez la Duclos, quel-, » ques inconnus». Le feptième témoin, qui eft Michellt de Lavcau, veuve de Julien Ba^in , mère du précédent témoin , dépofe « avoir gardé, pendant quelques jours, ■» le prétendu chevalier ae Morfan , qui « étoit tombé malade de la petite vé» role, & qui en eft mort. En le dé« pouillant pourl'enfévelir, elletrouva » fachemife pleinede fang&qu'ayanc » viiité le corps, elle y vit celui d'une s5 femme , qui fut enterré a Saint-Sul« pice, fous le nom du chevalier de t-. Morfan , avec une épée & un four.> reau en croix fur la bière ». Ces deux témoignages font une preuve complette du fexe du chevalier déguifé. Le huitième témoin , qui eft 'Jofepk de Guernes, curé de Combe-la-Ville , .dépofe « qu'il y a quatorzeans qu'il eft Tome XIF\ S  41 o Hijloïre » curé dn lieu, & que. dans le com» mencement, il y a vu venir plufieurs » fois la demoifelle Duclos, comédien» ne, accompagnée d'un quidam, grand » de taille, portantlongscheveuxbruns, »» vifage pale, qu'on appelloit le ckeva„ /Ver Coudray ; & quelquefois le „ chevalier de Morfan ; qu'il a appris h que ce quidam étoit une femme tram veftie en homme , 5c qu'on difoit, •) dans la parohTe, être la femme de „ Robert ; & que lui dépofant ayant » été appellé dans la maifon du fieur „ d'Imonville, ou ce quidam étoit ma» » lade , il le trouva dans le lit de la » femme du fieur d'Imonville, avecun jj bonnet de nuit & une chemife d'homjj me \ 8c qu'il a appris que ce quidam j» étoit mort en 1713 , chez la Duclos, » 8c qu'il a été enterré a S. Sulpice fous jj le nom du chevalier de Morfan ». Le neuvième témoin, Claude du Boulai, veuve d'' Antolne Paris , bourgecis de Paris, parled'une manière conforme a la dépofition du précédent: elle ajoute feulement « que le prétendu chevalier n de Morfan avoit le vifage féminin », Ces deux témoins confirment la pteuve du fexe du chevalier de Morfan. Le dixième témoin} qui eft Loulfe-  du Chevalier de Morfan. 411 Ilenriette de Beauchamp , fille majeure , dépofe, « qu'il y a treize a quatorze »> ans qu'elle demeuroitrue des Marais , » chez la Duclos, oü. demeuroienr auffi »» d'Imonville, fa femme & la dame u Roger, & qu'elle y a vu un particu» lier vêtu de rouge, que la Duclos a j> entrerenu dans la füite; que ce partijs culier s'appelloit le ckevalier de Mor»fan, & que d'Imonville Sc fa femme » le faifoient palTer pour le fils d'un jj prince étranger;qu'elleavu, lorfqu'il jj venoit quelqu'unchez ïzDuclos, que j» ce particulier fe cachoit fous le lit, §*• » dans la ruelle, & qu'elle a ouï dire par » d'Imonville Sc fa femme, que ce chej> valier avoit pafle pour la femme de jj Robert, notaire a Saint - Denis ; Sc » que, fous 1'habit de femme , elle *> avoir été penfionnaire au couvent de » la Raquette, plaidant avec Robert; Sc » qu'il y avoit un arrêr qui ordonnoit j» que la femme feroit enfermée dans » quelque couvenr; qu'elle a ouï dire » que ce particulier éroit mort, & que » ce n'étoit point un homme , mais une jj femme, qui , cependant, avoit été » enterrée fous le nom du chevalier de » Morfan». Ce témoin aide a prouver que le Sij  412. Hifloire chevalier de Morfan. écoit Charlotte Donc. Le onzième témoin , qui eft le fieur Mauduit , intendant des dames de S. Cyr , parle de faits peu importants , qui n'ont aucun trait au procés. Le douzième témoin , No'el de Mortagues, maitre-ès-arts en 1'univerfiré de Paris , dépofe , entre autres chofes , « que Joquet d'Imonville , dans une » converfation qui rouloit fur cette af» faire , lui a dit qu'il ne doutoit point ,> que ce prétendu ckevalier de Morfan » ne fut une femme , & que la dame m d'Imonville étoit plus au fait que lui » de Ion état ». Enfin le dernier témoin, Gabriel Conflant , prêtre religieux auguftin du couvent du fauxbourg Saint-Germain , dépofe « qu'il y a environ dix ans qu'il h fut requis de fe tranfporter chez la » Duclos, comédienne, pour confeffer » le chevalier de Morfan y qu'il y fut ; » que s'étant approché du malade , & >» 1'apoftrophant comme homme , il fut » furpris que ce malade , appellé . le » chevalier de Morfan, lui parut em,> barraffé, & lui dit: je ne fuis point » homme, je fids femme. Sur quoi le w dépofant lui dit; comment, vous êtes  du Chevalier de Morfan. 413 » femme ? Oui, dit - elle, je le fuis. » Enfuite le confefleur lui demanda fi » elle vouloit qu'il le dit a la Duclos ? » Dites-le, fi vous voulez, dit-elle , w & tourna la tête de 1'autre cóté , Sc » ne put la confefler'». Ce témoin ajoute « qu'il fcait qu'elle aété enterrée, » depuis , a Saint-Sulpice , fous le nom » du chevalier de Morfan w. Ainfi , en joignant a la preuve complette & furabondante du fexe du chevalier de Morfan la difparition de Charlotte Donc ; 1'apparitiön du chevalier de Morfan , qui fe fit en même-tems , le foin qu'il avoit de fe cacher a 1'afpeéc. d'un inconnu \ cette apoftrophe qu'on lui fit en 1'appellant Charlotte; cette voix du peuple qui crioit que c'étoit la femme de Robert; la relation du curé, qui certifie que tous les habitants de fa paroiffe en fonr convaincus; Ie témoignage du dixième témoin , qui attefte avoir ouï dire a d'Imonville, que le chevalier étoit la femme de Robert ; la crainte que le chevalier avoit d'être enlevé par des archers, & 1'idée de fon mari qu'elle avoit toujours préfente 2 1'efprir pendant fa maladie. en raffemblant tous ces rayons de lumière , qui réfultent de tant de témoignages , Ia S iij  4} 4 Hijïoire véricé fera dans remt fon jour, & on iera convaincu que Charlotte Donc a joue Ie röle du chevalier de Morfan. Les acenfés, qui ontfaverifél evafion, qui ont favorifé le déguifement. Sc les défordres qu'ils ont occafionnés , lont donc fujets aux peines les phis grayes. Non contents d'avoir féduit, ravi & enfevé la femme de Robert, de 1'a voir déguifée & proftituée fous des habillemencs affignés par 1'ufage & par la loi, pour difVinguer un fexe d'avec i'öutre ; non - contents de tromper Ie public fous des debors apparents d'un demi quLindique que c'eft un homme qu'on ra inhumer, ils fe fervent encore des regiftres publiés, dans le lieu Saint, 8c i la face des autels , comme d'un inftrument propre a canonifer leur injuftice; &font infererfauflement, dans ces monuments confacrés a 1'ordre 8c au repos de la fociété , pour aflurer le nom des citoyens qui naiJfenc &c qui meurent,que le corps de MargucriteCharlotte Donc , qu'on va inhumeur , eft celui de Maximilien de Morfan , chevalier, fils de Maximilien de Morfan. tv cCEmilie de Confiance. . Mais ce qui fert a cara&érifer , de f-us en plus, la fraude pratiquée ioxs  du Chevalier de Morfan. 4 r % de 1'infcription de cec a&e mortuaire fur le regiftre, c'eft 1'apoftille qui a été mife a la marge. Eft elle Pouvrage du prètré qui a écrit 1'aéfe ? Pourquoi aver* tit-il de ptendre des précautions , pour délivrer un extrait qui appartient a toute la fociété ? II foupconnoit donc quelque fraude. Ce foupcon ne pouvoit lui avoir été infpiré que par des faits dont il avoit été témoin , ou qui lui avoient été rapportés par des témoins. II y avoit donc , dés ce moment, des indices de la fraude ; & ces indices fe font convertisen preuves parl'information. Cette apoflille eft-elle Pouvrage de ceux qui ont aflifté a la rédaction de l'aóte ? Elle met le comble a la preuve de la fraude qu'ils ont exercée. Pourquoi chercher a envelopper des ombres du myftère un acfedeftiné.parfa nature, a être connu de toute la fociété, qui a le plus grand intérêt d'être inftruite de la naiffance & de la mort de tous les membres qui la compofent ? S'ils euffent été convaincus que c'étoit le chevalier de Morfan qu'on avoit inhumc , pourquoi auroient - ils cherché k le dillimuler ? Le fecret qu'ils cherchoient ayoit donc pour but de cachaf Siv  4" 6 Hifwire leur fraude, qui a été décelee par I'in- xormation. Ainfi cet acte eft infeété de deux raufietes. On le charge d'un nom étranger_a celle qu'on inhume ; première raufïete : on lui a donné un fexe & un nom différent, crime eapital , feconde faufletc trés - puniffable. Faljï nominis vel cognominis afeveratiopcena falficoërcetur : pana autem falfi deportatie- eft., Cr omnium bonorumpublïcatio, ditMornac, ad legem Corneliam, Celui qui s arnbue un faux nom , ou furnom, eft pumfiabie de la peine de faux : la peine oe faux eft la déportation , & la coniücation de tous les biens. Que de crimes fe réunifientici! Premièrement c'eft un rapt de féduétion ; c eft une femme fubornée par les artifices qu'on a mis en oeuvre , qu'on a oeguifée fous les habiilements d'homme , & qu'on a cachée & retenue dans des maifons privées. Suivant Ie Jurifconfulte ülpien, celui qui retient une perfonne libre chez lui, quoiqu'elie y confente , en eft le raviffeur; paree que la féduction eft une efpèce d'ivreffe , un enchantement de la raifon qui óre Ia liberté. Une perfonne féduite fait Je mal qu'elle ne veut pas faire, & ne  Ju chevalier de Morfan. 417 fair pas le bien qu'elle veut faire. Que Je fois lié par des chaines extérieures qui me tiennent captif, ou que ma volonté foit enchainée par despreftiges &c des illufions , je fuis également dépouillé de ma liberté. Le rapt de Charlotte Donc eft d'ailleurs d'autant plus criminel, que c'eft une contravention formelle a l'arrêt du 16 raars 17 1 , parfaitement connu aux accufés. Cet arrêt eft, en quelque forte, un nouveau titre, qui confirmoit au neut Robert, les droits que fon mariage lui avoit donnés fur fa femme, En !a lui raviffant, on violoit la loi qui attaché la femme a fon mari , Sc on commertoitun véritable attenrat contre 1'autorité des magiftrats, qui ayoienc réilerré ce lien. Mais cet attentateft lafource de bien d'auues crimes. 11a produit un enchaïnement de plufieurs adultères. Une femme de vingt-deux ans, fous 1'habic de cavalier , qui , fuivant les confeils pernicieux des accufés , a mis en ufage les appas de fon fexe , dont la nature 1'avoit libéralement pourvue-3 pour fairedes conquêtes, pendant lept ans qu'elle s'eft livrée a des parties de plaifir & ds campagne! La nouveauté 6c lafurpri-  4to Hifloire fe qu'elle jettoir dans les fens , fous des habits d'homme donnoic un relief a fes charmes. Pour la rendre encore plus habile dans Part d'enchanter les hommes, on 1'a mife a 1'école d'une célèbre comédienne. Qu'a-t-elle düignorer ? On a éré jufqu'a violer la fépulture, Ce crime a été mis dans tout fon jour. La juftice proporrionnera la peine quieft düeal enormité de tant d'attentats , & donnera une jufte étendue aux dommages& intéréts de Robert, quL ©nt une fource fi fanefte. IVlais, dit-on, & c'eft Ia grande objecfroa des adverfaires , 1'état, la perfonne , & ie décès dn chevalier de Morfin font certains par l'aéte mortuaire en forme fur le regiftre de h paroiife de Saint Sulpke r Robert n'eft ponn recevable a prouver la- négative de 1'état 8c perfonne de ce chevalier „ pour y fubftitueria perfonne de Charlotte Donc* L'ordonnance de 166j , article 7 , tit. 20, porte que les preuves de lage & du tems du décès feront recues par «ies regiftres en bonne forme qui feront foi en juftice. Ainfi, quand un fait eft établi par des actes auffi authentiques „ li doit demeurerpour conftant: la preu-  du chevalier de Morfan. 4 1 9 ve teftimoniale du contraire eft inadmiffible , quand des témoins dignes de foi ont figné 1'afte mortuaire. La vériré du décès de la perfonne qui y eft dénommée fe trouve invinciblement établie: autrementil s'enfuivroit qu'on pourroit abufer des regiftres Sc des dépots publics, par le fecours des preuves incertaines Sc mendiées ; & ce feroit prétendre, dansl'efpèce , que le chevalier de Morfan n'éroit pas lui - même : par conféquent cette négative ne peut être fufceptible d'une preuye teftimoniale. Voila 1'argument dans toute fa force, auquel la réponfe eft prompte. i°. L'inadmiffibilité de la preuve , dans le cas particulier , ne peut être" propofée. Robert fe plaint que Charlotte Donc, fa première femme , a été inhumée a Saint-Sulpice, Sc fousle faux noin de chevalier de Morfan: c'eft un fait pofitif, un fait aftirmatif, en un mot un crime de fuppofition Sc de faux, qu'il s'agit d'approfondir : donc 1'information eft une voie de droit. On convient que., régulièrement , une fimple négative ne peut fe prouver s mais quand la propofition négative eft S  .420 . Hiftoire jointe a un fait pöficif & rée!, articulé comme dans lefpèce oü Robat foutienc que le corps inhumé fous le nom du chevalier de Morfan étoit celui de fa femme ; la preuve de ce fait intérelTant n'apu lui être refufée, fur-tout dans. les circonftances de Penlèvement de fa femme , qu'on avoit tenue déguifée pendant fept ans ; déguifement perpétue jufqu'au tombeau. 2.0. On ne peut argumenrer de 1'authenticité des regiftres publics, & encore moins du témoignage deceuxqui ont figné l'acte mortuaire , pour en induire que c'étoit le corps du chevalier dc Marfan. ■ Quoique les regiftres pnblics aient ete introduits , par les ordonnances , pour faire foi de la naiffance & de la mort des citoyens, ils ne font cependanr pas foi a 1'égard de la preuve dè la quame, &c de 1'état de ia perfonne. Par exemple, quand il s'agirde déciderfiun enfant eft rils légitime d'une perfonne., ou s'il ne 1'eft point, & que cela forme une conteftation , on ne fait point ennèrement la foi de I'extrairbapriftaire, m Ja déclaration des parrains & marraines, qui déclarenr que 1'enfant eft fils d un tei père, & d'une telle mère; cela  du Chevalier de Morfan. 42T doit fe décider par les autres preuves doïu la loi fe fert en cette rencontre. De même , lorfqu'il eft queftion de fcavoir li une perfonne a été inhumée fous un nom différent du lien , cela regarde 1'étar du corps inhumé j & ce regiftre ne peut décider fi c'eft le corps d'un homme ou d'une femme qu'on préfente a 1'inhumation : 1'ufage n'eft point d'en veniraune telle vérirication. L'acte mortuaire fe rédige par le curé ou le vicaire, a larelation des témoins , qui indiquent & atteftent que c'eft le corps d'une telle perfonne: par conféquent cet adfe mortuaire eft 1'öuvrage des témoins : & pouvant- être intéreffés a la fuppofition , leur témoignage ne peut couvrir leur crime , ni exclure les preuves juridiques de cette même fuppofition , qui paroi't, pour ainfi dire sannoncéé dans le regiftre, par la note infolite & extraordinaire qui eft a córé de 1'acte mortuaire en queftion : Nota. Ne point délivrtr cet extrak facilement. RÉ P ONS E DES ACCUSÉS. M. Briffon, leur défenfeur , pour idétruire 1'hiftoire raccontée par Robert,  f:x Hifioire g en a oppofé une autre. Ha emrepra deprouver que Ie chevalier de Zfan homme venrable, un étranger dont i etat eft certain. 6 Iieftné ,dit-il,enBavière: il a été vmta Paris eni7IJ.D confiance re%;eux3 fes affaires ies plus fecrette &Ies rayons qui le consigneren t de J'bl. a fes malneurs, s'engagea de lui rendre tous les fervices qui dépen §er, do„t il avoit connu le père trèsparnculierement. de chercher un afyle faeur dlmonvdle , fon oncJ ■ pe paree ;éfuiteJ& par fa n è'e.oföt famaIfOI1&faboQrf^ce chev^ « £ d/VOIt un i°ur ^bienrécompe„fer: On devine aifemenr quelies furent les ra. ons qui engagèrent le fleur d'Jmon- tner reCTeV61f ',chez Jui>Ie chevalier de Morfan. Le plaffir fecret que nous fen- tons rous a obliger quelqu'un • vjl rance de trouver, dans Ie chevalier Pua cceur reconnonTanr, & de s affurer Un ami qui pouvoit être auffi utile que le Sr. Lnamdlard. -1  du Chevalier de Morfan. 425 Tl eft impoflible aux accufés de juftifier, par des preuves fans réplique, la naiflance du chevalier de Morfan : ils n'onr aucun titre qui puiffe la démotitrer; ils ne fcauroient dire, fur cet article, que ce que le chevalier leur en a appris lui-même. 11 leur avoit dit, peu de tems après qu'il fut venu chtz eux , qu'il étoit fils de Maximilien de Morfanr & d'Emilie dc Confiance ; qu'il avoit quitté Munik pout des affaires de la dernière conféquence , dont il ne pouvoit -confier le fecret a perfonne , fanstrahirfes intéréts. Le chevalier prévint, par ce moyen , toutes les queftions ïmportunes qu'on auroit pu lui faire. Mais , touché des fervices qu'on lui rendoit, il crur devoir ouvrir fon cceur a fes hotes. II les aftura qu'il feroit bientót a portée de leur marquer effentieilement fa reconnoiflante. J'ai éprouvé, leur dic-il, votre difcrétion; vous mcritt\ bien que je vous parle avec plus de confiance que je n'ei fait : je vous ai deguife'ma naiffance : je fuis fils natuiel de l'élecleur de Baviere y mais je ne connois pas ma mère 1 cet avantagt fi commun jriefl refufe'. Le fieur d'Imonville , tranfports de joie d'une pareille confidence , crut  4H Hijtoire qu'il ne couroi: aucun rifque de fa réve;er au P ChamiUard Je fcavois tout cela, lui dit ce Père : ne vous avois-je pas a (juré qu'il étoit d'une naffance dluftre r Ses affaires font en bon train ■ vousf ouvel compter que l'on vous récompenJtra au centuple de toutes les dépenfes que vous aure^faites;jefuis charmé que la bonne jortune foit tombèe fur vous. La dame Roger, & les fieur & dame d Imonville crurent deviner Pénigme de 1 affaire myftérieufe qui fe ménageoit * *vec tant de fecret: ils ne doutoient P*«s qu.ii ne fut queftion de la légitimation du chevalier de Morfan. 11 fut regardé d'un ceil tout différent : Ie fils d un prince fouverain demandoir des egards auxqcelson avoit peui-être manque. Lefieur d'Imonville, en 1717, quitra Ja rue SaintJacques: ii vim deméurer darisla rue des Marais. La dame Roger & le chevalier de Morfan le fuivirenr. La demoifelle Duclos demeuroit au premier appartement, & le fieur d'Imon. ville^occupoit le fecond de la même maifon. En 1719 , ]e chevalier dit au fieur a Imonvdtequé fes affaires tournoient au, gre de fes defirs: quïl étoit o'bligé de fe.  du Chevalier de Morfan. 425 faire voir a Munik : il le pria de ne lui point refufer le fervice qui devoit cou«» ronner tous ceux qu'il lui avoit déja rendus. Le kngage étoit clair. Le fteur d'I monville emprunta, chez Défefcures., n©taire, deux mille trois cents livres. li falloit que le chevalier fit fon voyage , -& paruta Munik d'une facon convenahle a, fa natifance. €>n lui acheta un habit brodé a 1'inventaire du comte de Moneflerol, &c une chaife de pofte de Pintendant de madame la marquife de Seignelay. Le chevalier cependant ne pouvoit feréfoudreapartir: une affaire decceur le retenok a Paris, & 1'amour fertile en raifons lui en faifoit toujours trouver de Houveiles pour différer fon départ. Le lieur d'Imonville , qui ne vouloit pas que la dépenfe qu'il avoir faire pour ce voyage fut inutile , preffa le chevalier d'en fixer le jour , en lui remontrant qu'il devoit prendre un parti. Le chevalier s'emporta. La Duclos , qui étoit au - deffous de la chambre ou la fcène fepaffbit, monta au bruir. Le fieur d'Imonville lui expliqna le fujet de la converfation , & ajouta qu'il venoit de faire un dernier eftoit. La Duclos s'a-.  4*6 Hiftoire drefla alors au chevalier: j< prendrüi Join de vous, man cher enfant, lui dit- r *{'n'vous abandonneren point puifque M. d'Imonville ne peut plus rien faire pour vous. ■ L!iChIeVallir' ravi a reconnoiflance en vers Ie fieur dlmonville lui fitoablier la converfation vive qu U avoit ene avec lui : il Ie forca de prendre deux mille livres de billets de banque que la Duclos lui avoit prêtés. vJl^ïJV? en r7"- Le chevalier rfe Malherbe Ie recut dansfacompag'"e en qualité de cadet: mais fesamis lui ayanrreprcfente que le fervice étoit mcompatible avec fes affaires, il chan- f aJe„réfflBtion' & PriaIe chevalier de Malherbe d'agréer fa retraite. II avécu,jufqu'en i7i5 , comme un homme repandu dans ie monde , qui avoit fa,t beaucoup de connoiffances dans Ie fauxbourg Saint Germain : il les cultivoit affidüment; & on le recevoir toujours avec un nouveau plaifir. II alloit fouvent voir le P. Ckamillard ■ il connoifToic auffi particulièrement ié f.Kichard, auguftin.  du Chevalier de Morfan. 427 Au mois de novembre 1723. !e chevalier eut la petite vérole: le mal crut, &c arriva a fon dernier période. La fièvre étoit continue avec un tranfport au cerveau. On envoya chercher le Père Conjïant , auguftin , pour adminiftrer au malade les fecours fpirituels.Letranfport continua jufqu'a la mort, qui arriva le 9 du mois. Le fieur d'Imonville rendit les derniers devoirs au chevalier. Croua-t-on qu'un rel petfonnage ait été métamorphofé en femme ? Telle eft 1'hiftoire du chevalier que les accufés out racontée. M. Cochu, défenfeur de la veuve Ponfgnard, adopta cette hiftoire , & établit fa défenfe fut deux propofitions. Premièrement, le chevalier de Morfan n'étoit point une femme. Secondement, en fuppofant qu'il en étoit une , elle n'étoit point Charlotte Donc, Pour prouverque le chevalier de Mor* fantin une femme ,on'a employé 1'aveu que le chevalier a fait au P. Conftant , fon confefleur; les dépofitions des deux gardes j les foupcons qu'on avoit formés a l'infpeétion de fon linge •, la dépofition du fieur Maulnory, qui ditavoic vu Ie chevalier dans le lit de la dame  4*8 ffiftofre dUmonvllle , paree qu'on ne juge pss qu une femme d'honneur fouffre qu un homme occupe fon lit. Premièrement, i 1'égard du laneage que le chevalier tint au P. Conflant%\ eron dans le délire. Les deuxgardes dépoient du tranfport au cerveau. Peuten faire quelqu'artention au difcours d une perfonne qui eft dans cet état 2 . fondement, a 1'égard de Ia déclaration des deux perfonnes qui ont enféveJi ie chevaher, il eft évident qu'elles ont ete féduites. Comprendra - t - on quedes euflent été huit jours fans révéler un cel fecret; qu'elles n'euflent pas ypelle les voifins pour leur faire part de cette découverte ? Auroient elles caene Ie mvftère a ia Duclos & au fieur d Imonvllle ? A t on jamais vu des perIonnes de cette efpèce, chargées d'un grand fecret qu'elles n'étoient point ob igees degarder , ne le dire a perfonne? Lafedudion fe préfumefacilemenc dans des perfonnes d'une condition abjedte. Si on ne croit-pas une de ces femmes-li capab.es dn fecret dans ces cir- ' conftances3croira-ton que deux femmes aient pu faire un tel effbrt ? Troifièmement , a 1 egard du linn-e qui a donné lieu aux foupcons j les hd-  du Chevalier de Morfan, 42 e) morrhoïdes auxquelles le chevalieréroit fujer, fourniftenr ane réponfe naturelle , &c qui fe préfume bien plus facilemenc que 1'hiftoire romanefque , a laquelle il faut que 1'imagination fe prête, pour croire que ces taches avoient la caufe qu'on cherche a. leur attribuer. Quatrièmement, il n'eft pas étrange que la dame d'Imonville ait prêté fon lit au chevalier , qui étoit malade. La complaifance d'une femme en fanté, qui fait ufage d'un lit commode, &qui le prête a un homme malade, dont le lit habituel eft moins propre a foulager fa foibleffe &c fes maux, n'a rien qui foit contraire a la bienféance. Et qui jamais s'eft avifé de tirer d'une pareüle complaifance, infpirée par 1'humanité, la conféquence que la perfonne qui en eft 1'objet, déguife fon fexe ? Enfin, on ne fcauroit douter que le chevalier ne fut un homme : fa phyfionomie male, fa barbe, fa grande raille y fa jambe pleine & forte ; tout;s les habitudes de fon corps ne permettentpas de penfer qu'il fut une femme. Combien de fois s'eft il expofé aux recherches des médecins & des chirurgiens, des gardes , & de ceux qui le ioignoient dans fes maladies, fans que  43° Hifloire perfonne aic jamais eu lieu de foupconner fon fexe ? Le chirurgien qui l'a panfé du coup d'épée que ion prétend qu'il a recu dans le bas venrre, celui qui 1'a examiné dans fa petitevérole, auroienc pu dcpofer feavamment. Robert n'a pas ofé les faire entendre. Les inclinations du chevalier pour les cxercices violents annoncentencore certainement qu'il étoit homme. ilaimoic le fleuret, 1'efpadon , la chaffè, les chevaux : on 1'a vu , plufieurs fois, palier, aux environs de Combe-la-Ville, des joumées entières a la chaffe ; & faire ., dans les jeux de paulme , les parties les plus fortes & les plus fatiganres. Sont-ce lalesamufemenrs d'une femme ? Nous avons beau déguifer notre fexe; nos inclinations Ie décèlent tót ou tard, & nous trahillent malgré nous. On prèfente des armesa Achille travefti en fille parmi les filies du roi Lycomede: fon inclination violente pour les armes fait connoitre qu'il eft homme. L'amour étoit encore une des paftions du chevalier de Morfan • & , s'il n'eüc pas été du fexe dont ilportoit les habits, ce n'eft pas aux femmes qu'il fe feroit attaché. Cependant combien y en a-til qui, fi on pouvoit ies entendre fur ce  du Chevalier de Morfan. 43 r point, feroient en état de dépofer feavamment fur fa vitilité ? Combien de maris dépoferoient des alarmes qn'ii leur a caufées \ des reprocbes &c des menaces que leurs femmes ont bravées, plutbt que de rompre les chaines qui les attachoient a cet amant, &c qu'elles n'auroient pasconfervées, fi des plaifirs effentiels ne les euffent entretenues. Enfin ce chevalier avoit été confié au P. Chamillard. Un jéfnite de cette diftinction ne fe feroit point chargé de la conduite d'une fille déguifée. Les jeunes gens , avec qui il fe divertiffoit , Pont toujours pris pour un homme : il a porté la poffefTion de fon état jufques dans le tombeau. Robert n'a point troublé cette pofTeflion en le faifant exhumer. Si Pon peut renverfer une pofTeflion fi publique par le rémoignage de deux femmes de la condition la plus vile, par quelques paroles échappées dans le délire de Ia mort, quel état eft en süreté? La moindre circonftance que Pon trouvera dans la vie d'un homme , propre a faire labafe d'un roman; quelque difficulté a expliquer fa naii'fance ou fon origine, avec la dépofition de deux témoins coirompus, fuffuont pour ébran-  43^ Hijloire Ier fon état, &c, d'un homme, en faire une femme. La poffeffion qui eftconfcante, qui eft, de tous les titres, le plus fort en matière d'état, fera donc comprée pour rien ? Cerre règle fi füre pour fixer 1'opinion des hommes, aurorifée par toutes les loix, fera donc méprifée ? Lafecende propofïrionque les adverfaires de Robert onr établie , c'eft qu'en fuppofant que le fieur de Morfan füt femme , ce n'étoit point Marguerite* Charlotte Donc. Robert a voulu prouver 1'identité du chevalier de Morfan avec fa femme; premièrement, par les anciennes relations de la dame Roger, SC des deur & dame d'Imonville avec Charlotte Donc; fecondement, par le compliment indifcret du fieur Maro : ek bien, Charlotte , comment cela va-t-il? Troifièmement, par les alarmes perpétuelles du chevalier, qui fe cachoit eu différenrs réduits , a 1'afpeóf. d'un inconnu, &c qui prenoit différents noms: quarrièmement, par plufieurs dépofitïóns qu'on veut faire paffer pour le cri de la vérité. Premièrement, ces relations ne font point établies; êc en les fuppofant 3 le lieur a"Imonv'ülen'auroit point choifi fa propre maifon pour afyle^a Charlotte. Donc*  du Chevalier de Morfan. 433 "Donc. Auroic-elle été a Pabri des recherches de fon mari ? D'ailieursces relations intimes, continent prouveroient elles cetre identité ? Voit-onquelqueliaifonentre cefait 6i la conféquence qu'on en veuttirer? Paree que le fieurdJmonvtlle a été, autrefois . en féclamation avec Charlotte Donc , s'enfuit il que Charlotte Donc étoit -le chevalier de Morfan ? Secondement, i 1'égard de 1'apoftrophe, CharLtte, comment cela va-t-il ? Ie témoin qui en a dépofé a varié dans 1'époque de la vifite du fieur Mmo qui a fait cette apoftrophe, & dans plufieurs autres circonftances qu'on a rapponées. D'ailleurs , de ce qu'en badinant, Sc fe fervant peut - être d'un fobriquerde fociété , on aura appellé le chevalier , Charlotte , Sc que la femme de H-dbert fe nommoit Charlotte , on en conclura que ce même chex alter étoit Cha lotte Donc , femme de Rohen ? A-t ou jamais fait un raifonnemenrplus frivole ? Ou en feroit-on, fi on pouvoir établir fur de pareils moyens, les fairs les plus importants ? 11 ne faudroit plus avoir recours aux preuves les plus foüdes Sc les plus cerraines. On fe joueroit impunément de 1'état des hommes furies lome XIV. J  434 Hijloire conjectures les plus légères & les plus foibles. Troifièmement les alarmes continuelles qu'on atcribue au chevalier font bien démenties par fa conduite. II alioit au fpecbacle, au théatre , dans les promenades publiques ; faifoit des parties de campagne : il étoit répandu dans un grand mondei & alloit aux cérémonies les plus intéreffantes. Eft-ce la une perfonne alarmée qui fe cache ? Quatrièmement, ces dépofitions , qu'on appelle le cri de la vériré , ne font que des ouï - dire. Ils font, il eft vrai , en grand nombre dansles informations: mais jamais les ouï-dire ne furent de quelque poids en juftice ; & rien de li facile que de leur donner 1'être. Un impofteurn'auraqua répandre fa fable dans le monde : elle circulera d oreill'e en oreille. II fera ailigner enfuite tous ceux qui auront recueilli ces illufions , &c en fera une information d'une infinité de témoins. Sera-t-elle le cri de la vérité ? . Voila ce que Robert a fait , tant a Paris , qu'a Combeda-Ville; & il a eu grandfoin de faire afligner les témoins a qui ces illufions font parvenues par le canal de ceux qui ont prêté 1'oreille a fonimpofture.  du Chevalier de Morfan. 435 Enfin, tandis que les regiftres publiés dépofent de I etat du chevalier de Morfan , écoutera-t-on , au préjudice de 1'ordonnance, des preuves qui détruiroient la foi due a des monumenrs établis par la loi; qu'elle n'a établis que pour leur donner fa confiance, & prévenir routes les fraudes que les paffions pourroienr faire commettre relatiyement a. 1'état des hommes ? Les défenfes de recevoir des preuves contraires a ces aétes folemnels font formelles, & les miniftres de la juftice n'ont pas le pouvoir de les enfreindre. Le fieur Maro dejoigny fépara fa dé.! fenfe de celle des aurres accufés. M.1 Boucher , fon défenfeur , n'oublia rien pour établir que cette caufe n'avoic qu'un faux merveilleux préparé par le CieavRohert. , Toute cette affaire, dit-il, n'eft qu'un tiffu de merveilleux & de ténèbres. Un mariféroce, qui n'apu vivre avec une de fes deux femmes , quoique, pour les époufer, il eut enlevé 1'une & trompé 1'autre, fe trouvant abandonné de ia première qui le fuit, & pourfuivi de la fecondeparune accufationde bigamie , a imaginé un roman curieux & mtérefl fant, pour détourner 1'attention de fon Tij  43 6 Hijloire «bjet, en Pattachant a des faits étran» gers. Cet induftrieux coupable a cherché a fe faire des monuments qui puiffenr fuppléer Pextrait mortuaire de fa femme, qui lui manque, &c a faire 3 de Pincident, le fujet principal du procés» Par-la , il devient lui-même accufar teur. d'accufé qu'il étoit. De femblables renverfements nefcauroienr fe faire fans de grands eftorts': il a fallu, pour cela, le fecours desmorts des vivants. La difcrétion des uns &c I'intérêt des autres ont applani toutes les difficultés. On a imaginé une fable: on a voulu ; en 1730 ,qu'im étrangermorten 1723, 8c inhumé a Saint-Sulpice avec toutes les folemnitês, fous le nom du chevalier de Mor jan, fut la première femme de Robert, Ona trouvé deux fervantes , la mère & la fille, qui , après fept ans de filence , ont dépofé que ce mort n'étoit plus lui-même \ qu'en Penféveliflant, elles avoient reconnu que c'étoit une femme, 8c que cependanr elles avoient eu la complaifance de la voir inhumer fcus la dénomination d'un homme^ 8s  du Chevalier de Morfan. 437 d'avolr laiffe couler fep: ans, fans qu'il leur foit échappé la plus petite indifcrétion furun événement qui devoir occuper prefque uniquement Pimaginatiori de femmes de cet état, Sc faire un des principaux fujets de leur babil. Ona ajoute, a ces deux femmes, quelques aurres témoins, qui dépofent d'ouï-dire , & des faits moins importants. On a compris, dans Paccufation, un grand nombre de perfonnes ; & , avec tous ces fecours, on a compofé un procés des plus compliqués & des plus embarraffanrs, a la faveur duquel le vrat coupable a feu éluder, ou du moins différer la punition de fon crime. Quoiqu'on fe flatte aifément dans fes entreprifes , il paroit que Robert a défefpéré de réuffir dans la fienne , puifqu'après avoir intenté Paccufation en 17 3 o, Sc fans attendre que la juftice eüt prononcé fur fon état , // s'eft remarié comme garcort, & s'eft ten du coupable du crime de fuppofition d'état qu'il reproche aux autres; Sc ce n'eft que pour le garantir de cette accufation, qu'il a repris celle qu'il avoit abandonnée , Sc qu'il a jercé, dans cette affaire, fi fitnTiij  43 8 Hifloire ple par elle-même , tout Pembarras qui s'y trouve. ' Pourquoi ' après avoir eommencé cetce procédure extraordinaire , Pa-t-il abandonnée ? Comment, avant que de confrater fon état, & de faire prononcer fur la mort ineertaine de fa femme , a-t-il pu paffer a de fecondes noces? La demandé qu'il a formée, tendant a faire déclarer que fa première femme a été enterrée fous Je nom du chevalier de Morfan , prouve qu'il eft convaincn lui-même qu'il faut un jugement qui conftate ce fait. Cependant, fans attendre ce jugement, il fe remarie, & com— • -■'j~J-??ïfl-?-tz la plus incerraine Sc la plus dangereufe eft celle-ci-, Sc qua moins"qu'elle nefoit parfaite , on .ne s'y arrê'te Jamais. Quant aux faits imputés par les té-*moins, au fieur ^wperfonnelfement 5> ils rie font rien moins que prouvés. Les avenmres qu'on lui prête avec Ie' éievdiier dê Mar fan-fe réduifent a un' feul voyage qu'il a fait a Combe-iV-¥il% §c le témoin qui lur met- daasn  44Hijloire dans la bouche 1'apoftrophe , eh bien ~ Charlotte , comment cela va-t-il} a varié dans fon récolleruent , fur le cems Sc fur les circonftances; le curé de Combela-Ville, qui a dépofé 1'avoir vu plufieurs fois , a dit, a la confrontation, qu'il ne le reconnoilToit pas. Enfin , Robert a bien mal riftu fon roman. Lorfqu'il y aintroduitla Duclos, il a bien mal obfervé le caraéfère de cette célébré comédienne. Qui jamais imaginera qu'elle a entretenu un homme qui n'en avoit que 1'habit ? Jufquici, la caufe n'a roulé que fur la queftion de fcavoir fi le chevalier de Morfan 8c Charlotte Donc, femme de Robert, étoient le même individu. On va voir parcutre , fur la fcène un nouveau perfonnage , qui va difcuter ies principes d'après lefquels 011 doit juger Ia validité du fecond mariagede Robert; c'eft la veuye Maffpn, fa feconde femme. Elle leuren oir, ainfi que les accu^es, que ie chevalier de Morfan n'étoit pcinr Charlotte Done; d'oü elleconcluoit que Charlotte Donc étoit préfumée vivante, Sc que, par une feconde conféquence a il y avoit nuiüté Sc bigamie dans fon maiiage avec Robert.  du Chevalier de Morfan. 443 De tous les engagemenrs que les hommes peuvent contraóter , difoitelle , le mariage eft le plus faint & le plus indiftoluble; aucun laps de tems , aucune forte de prefcription , ne peut le réfoudre. 11 eft perpétuel dans fon vceu, il doit 1'être dans fes eftets : la snort feule peut le faire cefter. Cet engagement eft incompatible avec un autre engagement dela même efpècer les afteófcions qu'il doit mettre dans les cceurs ne fouffrent point de partagé. Ainli, jufqu'a ce que la mort ait détruit le premier mariage , tout autre mariage eft impraticable; & fi 1'un des. conjoints ofe en célébrer un fecond y il n'embraffe qu'une ombre ; il fe rend eoupable du crime de bigamie , crime également odieux dans 1'ordre de la religion, Sc dans 1'ordre de la fociété civile ; paree qu'il emporre la profimation d'un facremenr, qu'il eft contraire a 1'honneur du premier époux, Sc qu'il traine, a fa fuite, une foule de maux. C'eft le titre de Paccufation que fa veuve iV/ar quelques-unes de ces preuves que. la loi & la jurifprudenee permettent d adopter au défaut des regiftres , que. la mort a. diffousfon premier engagement zvec.Margiterke-Ckzrlotte Donc-, cet engagement doit être regardé comme fubfiftant, & Roben doit paffer pour. coupable du crime d'avoir voulu être » en même-tems, mari de deux femmes!. ^ Robert prétend rtéanmoiiis- que ce. *eftpas afiez.de prouver , par la reprcfenratian d'un a&e de célébration , qu'il. sfe-contraété un premier mariage; mais. qu'il faut encore prouver, par.la repréfenrarion de la perfonne. même avec laqueüe il 1'a coutraclé, que ce mariage. sft acluellement fubfiftant. ^Pour lui èter cette reifource, il eft Jiécerfaire d'entrer dans la difcuffion de. quelques principes; &• d'établir que Is maüitédu fecond mariage, & les peinesde Ia bigamie, peuvent êtreprononcées•eónrxe lui, fans que 1 exiftence.de Marguerae-Chdr.lotte Donc foir prouvéegrc * ^nmüoa de fa^perfennfe.  du Chevalier de Morfan. 44^ C'eft une maxime confacrée par les«ïeilleures autorités , que toute perfonne abfente, Sc dont la mort n'eft pas connue , doit être préfumée vivre jufqu'a cent ans , c'eft-i-dire, jufqu'au terme le plus reculé de la vie ordinaire des hommes. Cette préfomption efttiréedeplufieurstextes des loix romaines, & notamment- des loix 56 ff. dc ufufr, 1. 8 ff. de ufu ê ufufr, leg. /. 13 , ccd. de Jücrofanclis ecclef. Is finis vit* longavi Iwminisejl: c'eft la fin-de 1'homme qui vit Ie plus Jong-tems, difent ces loix. Letexte facré en avoit parlé de mêmes numerus dicrum hominum , ut multum y ccntum anni y_ eccléfiafte , chapitre 1$,, verfet 8. Des motifs d'humaniré & de religion même , ont étabii cette préfomption. On doit a la divine Providence affez de confiance , pour croire qu'elle veille toujours- fur fes ouvrages ; Sc comme on doit fouhaiter la confervation de tous les citoyens ab'feits, on doit marquer-ee vceu en efpérant toujours leur retour > Sc en les préfumant vivants lorfqu'on ignore quel eft leur fort. Ce feroit prononcer, contre les als—leurs» une efpèce de profcription bvers  44 Hifloire odieufe, que de Jes réputer mortsdans Ie tems qu'ils peuvent vivre encore ; cer feroit marquer une avidité & un e'mpreifement impie , pour s'approprier leurs droits Sc leurs biens. Aufli cette préfomption opère-t-elle toujours autant que la vérité même. S'agit - il de partager une fuccefiion a laquelle un abfenr pourroit avoir part? On le fuppofe vivant j on partagé les tiens comme s'il étoit pre'fent, quoique 1'ordre de fuccéder en foit déran^é , comme dans le cas de repréfentation( i % Lchoit - il a 1'abfent quelque drois unie ? On admet fes créanciers a Ie recueiliir (2). Les fubftirués, en cas de mort, leslégataires nommés par le teframent de 1'abfent, font obligés d'attendrece dernier terme de la vie, pour demander la remde du ndéicommis , ou la déljvrance du legs (3). A peine peut-on citer unexemple oü lapréfomp- (OfLe Brun , des fucceffions , Kv. t , chapitre r. Charondas, en fes réponies liv 7 reg. 107. :-C* . (2) Arrêt des Tiélement du 7 juiilet 1629 , TOB*, des aud. a la date du 14'mars 1628. arr malités. Mais alors le divorce étoit permis ; & il ne s'agiflbit que de ménager fhonneur d'un citoyen. Le chriftiamfme, qui ne fe prête pus fi facilement aux paftions , a peu a peu ïéduit cette liberté que les femmes avoient de fe remarier après cinq ans j $c enfin, par la novelle 117, chap. 11, de laquelle eft .tiréel'authentique hodie3 au code de rtpudiis , il a été défendu , fous les peines prononcées c.ontre les adultères, aux femmes dont les maris s'écoieAt .perdus a Ia guerre, ou avoienr  etu Chevalier de Morfan. 46 \ difparu par quelque hafard de-la rortune, de fe rerriarier' avant d'avoir appris des nouvelles certaines de la mort de leurs maris , & d'en avoir la preuve dans des certificars authenriques. Si* prater hanc ohfervatiohem, drt cette novelle , muiier pr&fumpferit qd aliud matrimonium venire; & ipfa , & qui ducit tam uxorem velati adulteri puniantur.'L'empereur Lèon a confirmé, dans fa novelle 5 3 , cette loi pénale. Godefroy , & tous les interprètes de fün & 1'aütre droit fe rénnilfent a. foufenir que ces difpofitions ont toujours éré gardées , &C s'appliquent également 'aux conjoints. Si ces textes fïé parient que des femmes dortt les maris font abfents, c'eft paree que le cas eft plus fréquent: mais la loi ïr'en eft pas moins générale, puifque 1'engagement eft égaf entre le mari & la femme. Nos jürifconfulfes Francois parlent de la même manière. Leut fuffrage eft fi uniforme, que M. de Lamoignon a jugé a propos de le réduire ;en maxime dans un de fes arrêtes. La. femme de l'abfnt, porte cet arrêté,/2«' poürfa contracler mariage , même après trente ans , s'il ny a preuve certaine de la mort de fon mari, Vfij  4^2 Hifioire Enfin, fa jurifpmdence de nos arrêts a toujours été infinirnent rigoureufe contre les conjoints trop emprefTés a romPte leurs chaines. 11 y eil a deux , par lefquels on a condamné aux peines de la bigamie des maris qui avoient ofé pafier a de fecondes noces J fans avoit des preuves légitimes de la mort de leurs femmes abfentes. L'un eft du 28 juillet 1601 , & 1'autre du 12 janvier Après de tels exemples, Robert pourroit - il fe retrancher dans une diftinction entre un mariage contradté , & un mariage a contrafter ? Ici les loix font abfolues dans leur prohibition: non pofJint ad alium confortium canonicè convolare , dit le canon inprefentid. Ut adulttri puniantur , dit la novelle 117. Leur difpofition eft néceffairement irritante , c'eft a-dire, qu'elles annullenc abfolumentles mariages qu'elles ontprohibés, & que rien nepeutréfiftera leur rigueur; puifqu'il ne s'agit pas d'une fimple formalité extrinsèque, mais de la forme efTentielle , & de la fubftance même Efiquoi! paree que Robert aura eu Ia (0 Traité des contrats de mariage, par M. Duperay , p. I0> & p. 56.  du Chevalier de Morfan. 46*3 témérité de déguifer fon état aux mi*niftres desautels, paree qu'il aura violé toutes fortes de devoirs, l'on confirmera un mariage que l'on n'auroit pü per«mertre ? Oü en en fommes- nous , fi B pour éluder les loix, il ne s'agit que de les tranfgrefler ? Roben ne peut donc ni foutenir Ia validité du mariage qu'il a contracté avec la veuve Majjon , ni échapper au3t peines de la bigamie. Quand la vie de jMargue.'ïte-Charlotte Donc feroit abfolument incertaine , cette incertitude fuffiroit pour détruire la fubftance dti contrat. Mais les loix ne nous permettent pas de nous livrer a des raifonnements dans cette con joncture.Elles veulent que 1'abfent foit réputé vivant Jufqua cent ans j & par confequent que tout engagement contraire a la fidélitéqui lui étoit düe,. difparoiffe. Doit-on héfiter , aufurplus, a annulier un mariage dont Robert a profane les droits par tant de mauvais traitements , & par tant d'outrages, & dont il faudroit néceffairement fufpett* dre les effets par une féparation ? On confondoit , dans cette caufe r difoit Robert en répondant a ce nouveau genre d'attaque , le mariage fait V iv  46*4 Hijloire « avec le mariage a faire. II y a cependant, relarivement aux circonftances de cetce caufe, une grande différence k faire. C'eft ce qu'il faut développer. Celui qui époufe une feconde fem.me, lorfqu'il eft certain quela première eft vivante , commet un crime capital, qui r pat 1'abus. du facrement& fes. dangexeufes conféquences , étoit puni en 17Z3■= avoit étéinfrumée dans. feglifè de Saint-Sulpice, fous le nom d un Maximilien chevJier de Morfan.- ■ •Par conféquent on ne peut lui faire uncrime de ce défaut de repréfentation d'exrrait morruaire de Charlotte Donc ^ qui nefe trouve dans aucun regiftre, paria haude criminelle de ceux qui Pont. enlevée & cachée de fon vivant, & ont  du Ckevalier de Morfan. 467 eu foin , aprês fa mort, d'étouffer tous les veftkes de fa mémoire éc de fon nom. II n'y auroit donc que lecas oü Charlotte Don-c fe repréfenteroit , qui put earaétérifer le crime de bigamie. Or , tant qu'elle ne fe repréfentera point a la juftice, pour réclamer Robert comme fon mari, 1'accufation de bigamie tombe d'elle-même. Mais une preuve bien fenfible que cette repréfentationne fepeut faire fansun miracle de réfurredtion , c'eft que,, depuis dix - huk mois que 1'accufation de bigamie eft formée , que MarieMagdeleine de Ponftgnard, fous ce pré— rexte , a prétendu faire diftbudre , par 1'ofEcialité, fon mariage avec Robert,, & qu'elle eft en liaifon intime avec le; fieur Maro , la- Duclos, d'Imonville ,. fa femme , & la Royer leur nièce , quii connoiftoienr fi parfakemenr Charlotte: Donc; jamais elle n'a ofé avancer que; celle-ci exiftat; elle n'a pu la faire pa— roitre , ni fournir le plus léger indice-' de fon exiftence aétuelle. En fuppofant que, 1'averfion invinci— ble que Robert avoit infpirée a fa première femme- eüt ernpêché qu'elle ne.' confeutit a découvrir le lieu de fa;re>-  ntjtoir-i. .cra;:2} «n mariqiii lukétoit ffodiet:*,. n'é.coit-il pas bien facile i Ia dame McfJon de profiter de lïnume liaifon ba,elle étoit avec tous les complices de Charlotte Donc , pour leur dérober leur fecret? D'ailleurs , Roten ayanr contrafté un fecond mariage , ce fecret devenoit inutile , pour les vues de la première, femme. En couvaincanr., par fa feule repréfentation, fen mari de bigamie elle s'affranchiiToic, pourjamais, de la nécediré de retourner avec- luife dé livroit de la contrainte affrenfe de le tenir toujours cachée, & fat-isfaifoit la ve ngeanc e don 11 es mau vais trai tem en es qu'elle avoit recus de cet époux 1'avoiene animée. Robert eft' donc pleinement juftifié du crime de bigamie. En vain Magdeleine de Ponjtgnard \ pour foutenir fon accufation &c la nullité de fon mariage avec Robert, invoque- t elle les difpofitions du droit civiT & canonique. La preuve de fa mort d'un conjoint, requife par la loi, pour que 1'autre puilfe pafter a defecondes noces, ne fe trouve* t-elle pas ici? N'y a -t-il pas des informations juridiques faites. en. 1730 ï  Ju Chevalier Je Morfan. 4^9 Elles ont préeédé le fecond manage , qui n'a été fait qu'en 17 j 1. A 1'égard du droit canon, nous avons deuxdécrétales, 1'une du pape Clement Ilf.cap. in prafencid , de fponfalibus3 & matrimonüs ; & 1'autre du pape Lucius III, cap. Dominus , extra de fecundis nuptiis. La décrétale in prefentid , qui a traic aux mariages a faire ,contient deux difpolitions. Dans la première, il eft déeidé que les femmes, pendant la vie de leurs maris abfenrs , ne peuvent fe re? marier, quelque longue qu'ait été 1'abfence : quancocumque annorum numero Ua remantant: vlveniibus viris fuis non poffunt ad alïorum confortïum canonicï' convolare. La feconde difpolition ajoute, donec certum nunclum recipiant de morte viro.'um.. D'après cette décrétale, qui a pouï objet les mariages a-faire , il faut que le miniftre fe livre a cous les éclaircilTements que la piudence humaine peut imagiuer, pour fcavoir ft ceux qui fe piefenterit pourrecevoir la bénédiótion nuptiale , ne font point aótuellemenc dans les liens d'un premier engagement, Sc Ci les liens qui ont pu fubfifter fubfiftentencore..  47Q . Hiftoire Mais la décrétale Dominus, extra de Jecundis nu; üis, parle du mariage fait Jconfomme, après lequel il s'élève des rioutes. Si l'on s'appercoit que la preuve de Ja morr du premier mari, ou de la première femme , n'eft pas certaine ; nondum kabhd obeantls conjugis certhudmt; Ie texte de cette décrétale ne dit point que le mariage eft nul, ni que les conjoints doivent être féparés; il décide au contraire, que la femme doit rendre le devoir conjugal a fon mzn,poftulanü , quoiqu'elle même ne puifte pas 1'exiger: cuoadfe tarnen, noverit nullatcnus °exigendum. C eft dans Ia conciliation de ces deux textes que confifte 1'éclairciffement du pomt de droit, & cue pon trouve la différence que l'on doitmettre entre un manage fait, & un mariage a faire. Dans le premiercas , il faut chercher la lunnere; dans le fecond, il faut 1'atrendre Et quand il s'agit d annulier , non - ietdement un adte authentique » mais encore un facrement, il n'eft point permis de chercher des motifs dans les teneb-es: ,1 n'y a que la préfence feule de la première femme qui fespuiffe difi'per ^ paree qUe c'eft a elle qu'il appartient ae reclamer fon mari, & les droits  du Chevalier de Morfan. 471 'de fon manage. Jufques la , la feconde femme eft fans action, &c ne peut fe plaindre légitimement; fur-tout quand on fcait qu'il eft impoftible que la première femme reparoifte jamais par la cêrtitude de fa morr, précédée d'un enlèvement, accompagnée & fuivie d'un déguifement, dont la preuve fe tire invinciblement des informations , 8C des interrogatoires même des accufés. Surrouresces raifons de parr 8c d'autre, eft interventie ia fentence du chatelet du z6 avril 1736 , quimet Robert hors de cour, fur Paccufation de bigamie tontre lui intente'e , d la requête de fit feconde femme , & décharge les ac:ufés de 1'accufation du rapt de la premièrefemme , & condamné tnvers eux Robert aux dé- pCnS' l ,., • II ne paroit pas qu il y aiteu appel de cette fentence ; 8c il y a lieu de croire qu'elle eut été confirmée. En effet 1'accufation intentée contre Robert, étoit fans fondement. Vainement remarqueroit-on que y lorfque Charlotte Dnnrfon de la fcène Ie chevalier de Morfan y entre. Le chevalier eft produit par les perfonnes que Charlotte Donc a connues. L'incertitudede 1'origine du chevalier de Morfan t le-  47 2 Üiftoire fnyftère perpétuel qu'on en fait ; le Pj Chamillard qu'on met fur la fcène , a qui on ne pent pas demander compta du role qu'on lui a fait jouer, paree qu'il eft mort; le traveftiflement du prétendit chevalier qui paroirpronvé j 1'a veu qu'il en fait, dit on , au dernier moment de fa vie , & les remórds qui 1'accompagnent; tous ces faits ne font que des lueurs plus propres a nous égarer, qu'a nous éclairer. On ne peut même les regarder que comme des allégacions qui ne portent fur aucune preuve jüridique» La vériré du monument public qui les combat, monument'dont les Juges font obliges de conferver 1'autorité, a-caufe des cönféqirencesdang'ereufes qui réfulteroient des atteintes qu'on lui por"teroit.a achevéde déterminer les juges» II faut entofe obferver que les accufés n'ont point fait voir que le chevalier & Charlotte euffènt des traits différents; S'ils nefe reffembloient point-, pourquoi n'onr ils pas rapporté les differences qui étoient entre 1'un &c 1'autre? Quelles preuves plus concluanres pour les acculés , que de prouver ia dilfemblance ? Leur innocence a dü prévaloir contrè des conjectures quine font point lumineufes. Autre chofe eft de juger comme  du Chevalier de Morfan. 473 ■xxn juge,