LES FAUSSES CONSULTATIONS, C O MÉ DIE EN U N ACTE; Par M. DORVIGNY. K'préfemé'e, peur la première fois,a Par is, fut* le Thédlre des Variétés amufantes , en Décsmbre 1780. Prix, 1 Uv, 4 Joh. A AMSTERDAM, CtiEz CE SAR NOÈL GUERIN, Libratrê^ du College Dramatique & Lyrique & du Théatre Franfois a Amfterdam. MDCCLXXXVII,  PERSONNAGES. D AINVAL, Avocat-Confultant. FRANVILLE, Direfteur de Speftacles. Madame DE TE R N I. M. FORT-B1EN. JACQUOT. U N ANGLAIS, Acteurs de la Mad.DU BLANC. Troupe de Franville, f qui viennent fous préM. DU N O I R. texte de confulier UN MATELOT. Dainval. ÜN OPÉRATEUR. I taliën. UNE VIVANDIERE.- UN DOMESTIQUEde DainvaL La Scène eji dam le Cabinet de DainvaL  LES FAUSSES CONSULTATIONS, C O M É D IE. SCÈNE PREMIÈRE. DA INVAL, FRANVILLE. Franville. on jour, mon cher Dainval. Je parie que voas ne devinez pas le fuj'et qui m'amêne. Dainval. Non; mais il ne tient qu'a vous de m'en épargner la pdne, Vensz vous pour me confulter ? Franville. Voici le fait en deux mots. J'ai appris que vous aviez toujours eu beaucoup de goüt pour la Comédie, & qüe vous vous étiez amufé a faire quelques petites Pieces qui avaient eu du fuccès. Dainval. 11 eft vrai que, pour me délafler d'études plus férieufes, j'ai employé a cela quelques momens de loifir que Jes affaires me laiiïaient, Mais ou en voulez vous venir? Franville. Le volei: ma Tronpe eft complette, & je ftiis au mo. ment de faire l'ouverttue de mon Speelacle. Or, vous favez qu'il eft d'ufage da,ns ces occafions de commeneer par un Compliment que 1'on fait au Public. Dainval. Je fais tout cela. Eli bien, après. Franv i lle. Eh bien, j'ai jetté les yeux fur vous pour cela, & je A a  2 LES FAUSSES CONSULTATIONS, vtens vous prier de m'aider a fortir d'embarras , en ma compofant quelques petites Scènes pour ce fujet. Dainval. Je m'y préterai avec plaifir; mais pour faire ce que vous me demandez, je ne fuis pas encore alTez au fait de la difpofition de votre Troupe. Je n'a: pas encore vu ves Aéteurs, & je ne connais pas le genre de Scène auquel chacun d'eux eft propre. Franv i lle. Oh'! qu'a cela ne tienne, je vous les ferai connaftre; & roême, comme nous n'avons pas de tems a perdre, voulez - vous les entendre ce matin ? Dainval. Pour le préfent, cela eft impoffible. Voici 1'heure de mes Confultations; il nous faut remettre cela a 1'aprés-inidi. Franville. Soit. Vous me promettez donc de travailler a mon. Compliment aulïï - tót après les avoir entendus ? Dainval. Oui; vous pouvez y compter. Franville. Vous me rendrez le plus grand fervice. Adieu, je vous laifle, & tantót je viendrai vous fomaier de votre parole. D< a 1 n v a l. Je-vous la tiendrai de tout mon coeur. Franville, feignatit de Sen alkr. Au revoir. Ne vous dérangez pas, je vous en piie. (Dainval fe remet a fort bureau ,& Franville dit a part:') II ne s'attend a rien; tous mes Aéteurs ont le mot, iïs. wnt, fous précexte de Confultations, venir lui faire difr fërentes Scènes, dont il fera Ia dupe.  C O M Ê D I E. 5 SCÈNE II. LE VALET de Dainval, en entrant, fait a Franville des Jignes d'intelligence, puts il dit a Daüival i M onsieur, voila une Dame qui vous demande. Dainval, fans fe retoumer. Faites entrer. Frajjville, au Vakt. Bon. Ce font mes Afteurs qui arrivent. Je vais m'entpwer de la porte de fon Cabinet, & en cloigner tous les véritables Confultans. (II fort.) SCÈNE III. DAINVAL, Madame T E R N I. Mad. Turn i, jouatit la Heille. AhI Monfieur, je fuis outrée! défefpérée! furieufe!.> Vengez-moi, mon cher Monfieur! vengez-moi. Dainval. Volontiers... De qui, Madame? Mad. T e r n i. De qui, Monfieur! D'un fcélérat, d'un infidele, d'un ttattre, d'un volage, d'un.... Dainval. Eh, Madame! en voila beaucoup a la fois! Cotnment avez-vous pu être outragée par tant de monde? Ah! ia partie eft trop forie! Mad. Teun i. Eh non, ce n'en eft qu'un, Monfieur; ce n'en eft qu'un, mais qui eft encore pis que tout cela. A 3  |6 LES F AU S S ES CO N SU LT ATI ON S ^ Dainval. Pefle! le portraic ne me parait pourtant pas flatté. Mad. T e r n i. II faut faire ua Mémoire fanglant contre lui. C'eft urw ' D A ï Vv a l.' ff T 3 J a V 3 J Madame, je veux bien vous fervir5 maïs fur qnoi le mordre ? *'--1*&®m EiiKi «!;dv ,jus |(i K „j/f Sur quoi, Monfieur? Sur ce qu'il eft inconftant. Dainval. ; Ah! fi cen'eft que cela, Madame, tous les hommes le font. Mad. T e r n i. Eh bien, il eft plus; il eft parjure. Dainval. Oh! prefque tous les hommes le font encore. Mad. T e r n i. II eft ingrat. «I k~:,h a -ï ■Hiïjti'to,vZa.lv v. i a a C'eft encore - la un mal afTez général. Mad. T e r n i. Eh bien, Monfieur, pour tout dire en un mot. c'eft un monftre. Dainval. Eb, Madame, ce mot-lan'a prefque plus de Ggnific*. tion déterminée5 tel eft un monftre le matin, qui finic par etre un bijou le foir. Il faut vous expliquer plus clairement. Mad. T e r n i. Que voulez-vous de plus clair; Monfieur? C'eft un iourbe qui m'a trompé. D a i n v a l. Vous lelui avez bien rendu,n'eftcePas?C'eft un comnierce. Mad, T e r n r. Ceft un barbare! un homme fans delicate/Te.' II m'a fait perdre ma tranquillité , mon repos....  C O M E D I E. 7 Dainval. Et vous peut»être plus encore; c'eft un acquit. Mad. T e r n i. II eft glorieux. Dainval. Ah 1 Madame, a gréfent cela paffe pour Hoblelïe. Mad. T e r n i. Menteur. Dainval. On prend cela pour de 1'efprit. Mad. Teun i. Médifant. Da inval. C'eft la plaifanterie de la Société. Mad. T e r n i. Oh ! vous m'impatientez. Eh , fur quoi donc peut-on dénigrer un homme? Dainval. Mais il y a des remarqucs a faire: il faut d'abord favoir fon état, fon caractere, fes occupations. Celui dont vous parlez eft-il Militaire? Mad. T e r n i. Lui! C'eft un poltron fiefie. Dainval. „ Abbé? Mad. T e r n i. II n'eft pas aflez aimable pour cela. Dainval. Robin? Mad. T e r n i. II eft trop.pareffeux. Dainval. Financier? Mad. T e r n i. Bon! II n'a pas le fou. Dainval. Ah! parbleu, Madame, il paral' que 1'amour ne vous A 4  jf LES FAUSSES C O NSULTATIONS, wengtait p», fur foncompte, vous lui rendez bien j«öj. ce. Quétait-il donc enfin? Mad. Te_r.ni. II était oifif, Monfieur, de caratfére, & heï.efp[h de fon metier. V1W UB Bel-efpm! Eh mo^bltu^quVne Ie difiez-vous? Au. teur peut-étre! Eb, voiia de quoi «rmer coatre MM. -oitié de Pari, Alle,, a.,ez, Ma^me viaoir^oufö votre querelle, & V0Us ferez vengé, Commeut L L>! Mad. T e r n i. Dorimont. Dainval. Celafufitt, Madamej Monfieur Dorimont fera panf. Mad. T e r n i. Ah! mon cher Monfieur, vous me rendez la vie. Dainval. Si nous pouvions avoir quelques- uns de iès Ouvrages pour les éplucher un peu!... g Mad. T e r N i. J'ea ai, Monfiews, j'en ai. Voila des Vers qa'il a «us jad.s en mon honneur. II m'aimait alors! il m'adorait e frippon! il le jurait du moins!... Ah! quiUHaitZ ole dans ce tems-la Ah! mon cher Monfieur, pourquoi ces momeas-ia paflèntr ils fi vite! r^quu! Dainval. Allez, allez, Madame, coafolez - vou, U n'eft pas di„fie de vos regrets, nous 3l|0as le livrer au fircrtme, aVoppr" bre.... Ceftimhommeaaaéami, rayé de Ja Liuéaage Mad. T e r n i. AHons, Monfieur, je 1'abandonne a toute la noircenr de votre encre. Appreaez-lui qu'ou ne trahit pas iamunémeutune femme!... Appreaez-lui.... maii Zn, mé„a. |ez.!e. Tout invrat, tont coupable qu'JI eft, je fen5 qyii  C' O M £ D I E. 9 «'eö encore cher, & qu'il m'en conté de lui rendre mépris pour mépris, après lui avoir rendu fi long tems «mout pour amour. (Elk s'en va en foupirant.) D a i n v a l. La vleille folie! ellc icmordrait encore a la grappe, S C E N E IF. J AC Q U OT, jouant le Niais , DAINVAL. J a c q u O t. j\'loKSiEU«, je vous fouhaite ben le bonjour. Dainval. Que demandcz-vous, mon ami? JaCQUOT, le regardatit A deux fois. Ab! Monfieur, je ne deusande plus perfonne. Dainval. Comment, perfonne? J a c q u o t. Oh! je demande ben quequezun 5 mais ce n'eft pas volis, toujours. D a i n v a l. Ce n'eft pas mpi ! Eh qui donc? ] a c q u o T. C'eft ce Monfieur qui fait des.... des Confeflathns, Q Dainval. Des Cqnteftations ? J a c q u o t. O ui, pour des gens qui ont des affaires. éto C'eft un vice de langage a-pcu-pris cotnme celui de Janot.i€*i tók fiit de manvaues couftruóuons dephrafes; celm-ci confimd les Ss & lefróXyc t contre-iens: on vort tous les jours dans le» ropveStlonsTu -We exemples de ces deux n4.cu!e, j A 5  *o LES FAUSSES CONSÜLTAT10NS, Dainval. ' Ah ! des Confultations vous voulez dire. J a c q u o t. Oui: Confultations, Couteftations, c'eft tout de rnèine» Dainval. Eh bien, c'eft moi. J a c q u o t. Vous! Oh que non; vous êtes ben a-peu-près de la taille du Monfieur que je demande, mais quoique, fa vous êtes pus groffier que lui. Dainval. Comment! plus groiTIer! J a c q u o t. Oui, vcus êtes pus épais, Ck lui il eft pus §utet que vous. Dainval. Bon ! groffier, fiutet! ou diable va. t • il chercher fes termes! Qu'eft-ce que tu veux dire? J a c (j u o T. Comment, Monfieur ; vous m'entendez ben ptêtre.... Mais c'eft que Monfieur aime a rire apparemment; je vois ben 9a, moi. Dainval. Moi, j'ai me è rire. J a c q u o t. Sans doute.... Oh ben, par esempe, il vous reflembe ben de ce cóté-ia; finon que je parierais qu'il eft encore pus ridicule que vous. Dainval. Allons, ridicule ! En voila un autre a préfent! j a c 9, u o t. , Oui, il eft toujours gsi; il fait des contes a crever de Tire. Öh! il n'y a pas nee humeur pus partiale que la fienneg Dainval, Bon, partiale! Joviale, donc.  CO M É D l E. jj Ja c j'ai été 1'attendre a Ia fortie. Dainval. Et le Fiacre aufïï ? J a c q u o t. Toujours, Monfieur. Oh de 9a nous avons été irréparables toute la journée. Dainval. Bon, irréparable! Que le diabie 1'emporte!... Cela a dü bien faire plailir a Granville! J a c q u 0 t. Oui, fürement , Monfieur; quand il eft forti de lïeComédie a neuf heures du foir qu'on n'y voyait goutte, & qu'il pleuvait encore, il a été beu aife de trouverta un Fiacre tout prét, avec fon parapluie. Dainval. Oui, c'étaient deux chofes bien nécefTaires enfembleJ J a c q u o t. Mais, pas mal, Monfieur. J'ai cédé le Fiacre a mon analtre, & je fuis monté derrière avec le parapluie, mou Dainval. C'eft bies honnéte, aflurément.  ||| LLS FAUSSR-S CON'SULT.ATï C>NSj J a c q u o t. Je ne pouvais pas mieux faire; eft-il vrai, Monfieur? Eh ben,quaad nous.fornmes arrivés a Ia raaiion , imaginezvous un peu comme mon maüre eft reflé fot, & moi aulïï. Dainval. Bon! Sur qnoi donc ? J a c q u o t. Comment, fur qnoi! Mon maitre s'en va pour lui don* ner les vingc-quatre fous de fa courfe au Cocher. Vla-ti pas ce diable da Fiacre qui lui deraande douze francs, paree qu'il dit qu'il y avait douze heures que je le tenais. Dainval, Ah, diable!... Mais le parapluie étak retrouvé toujours. J a c q u o t. Oui. II valait, comme jé vous 1'ai dit , vingc-quatre fous comme un liard. Dainval. Eh bien, qu'eft-ce qua tout cela eft devenu? J a c q u o T. Pardiue, ca eft devenu!... Quand Ia tête des maitres eft tnontée une fois, faut-ti pas toujours que le dorneftique ait le tort. II m'a voulu retenir llargent-la fur mes gages, & pis il m'a encor dit que j'étais une bete pardeffus Ie marchè. Dainval. i Ah! 5a n'eft pas reconnailTant. J a c q u o t. Quand je vous dis, Monfieur. C'eft un vilaiu êtat que le' fervice, allez..., & qu'eft fuiet a ben des ingrêdiem. Dainval. Ingrédiens!... Des inconvéniens donc. J a c q u o t. Oui: mais enfin , comme je commencais a m'attacher i Monfieur Granville, j'y ai encore paffé celle-la»  COMÉDIE. H Dainval. C'eft preuve d'un bon carróêre. j a c f> u o t. Oh, moi, je n'ai pas pus de fiel qu'un hanncton. Dainval. Ni plus de cervelle non plus, a ce qu'il paralr. Vous vous étes donc raccommodés ? J a c q u o t. Oui. Ca m'a faic une belle avance, allez.... Le iendemain il m'envoie a la grande pofte chercher une lettr» a fon adrefTe, j'y vas, Dainval. Preniez-vous encore un Fiacre? J a c q u o t. Oh non. Je n'en ai pas repris depuis. Dainval. Non, vous n'y étiez pas heureux.... Eb,, bien la grande pofte. ' J a c q u o t. Eh ben, Monfieur; j'y trouve Ie Maltre des Faéteurs. Je l'y deraande s'ii avait une Iettre pour Monfieur Granvil"le; il me dit que oui, & il m'en donue une toute petite, rij, pas pus grande que rien, & y me demande quarante* fous! Moi qui prees les intéréts de mon maitre comme les miens Propres,je dis tout de fuite, je n'irai pas jetter comme 9a quarante fous a la tête d'un homme i... Je l'y e« offre vingt- quatre. Dainval. Bon! Et les a-t-il pris? J a c q u o t. ^Lui! C'était un impoli! 11 m'a envoyé promener; Sc Ja a dit qu'on ne marchandait pas la. Dainval. Comment donc! Mais c'était un Juif que eet homme la! J a c q v o t. Je Iy ai ben dit aulïï.... Mais je 1'ai encore pus mieu* «trapa que ca.  16 LÈS FAÜSSES CONSUI.TATIONS Dainval. En quoi donc ? J a e q u o t. Quand j'ai vu qu'il ne voulait pas détnordre des quarsnte (bus, a ben falla les y donner. Mais j'ai guecté le rnoment oü ce qu'il avait Ia tête retournée; j'avais reluqué du coin de 1'ceil une grande lettre Iarge eomme les deux mains* j'y ai regliffé fon petit chiffon de papier; jat mis la main fur la grande lettre, & je me fuis en allé avec... En vla pour mes quarante fous, que j'ai dit moi. Dainval Voyez! quelle malice I J a c qu o t Pas vrai, Monfieur. Vous m'auriez ben remercié de 9a, vous? Dainval. Je n'y aufais, parbleu, pas manqué. J a c q u o T. Eh ben, voyez pourtant comme il y a des maltres qui prennent les chofes au rebours! Monfieur Granville m'a dit encore pus de fottifes que de Ia fois du Fiacre, Ilm'aenvoyé reporter la graude lettre, pour reprendre fa petite oü ce qui s'eft ofliné de la ravoir; & pis il m'a mis 4 Ia porte après. La, c'eft-i pas incrêdule une chofe comme 9a? Dainval. Ah 1 c'étoit bien mal récompenfer toa zéle! Et qu'es-ttl devenu depuis ? J a c q u o t. pai trouvé une autre condition; mais quoique 9a j'ea veux encore fortir. Da inval. Pourquoi ? Efl' ce qu'il y a trop d'ouvrage pour toi? J a c q u o t. Oh! 1'ouvrage ne me fait pas peur. Je ne fuis pas déli. cac,  COMÉDIE. t? ™, myi, Monfieur je fi* d'une bonne température. r> . „ Dainval. Vu eft-ce que c'eft doiic ? «uil/™ VV°™ '^^Ulwas, Monfieur Wlétm gn. chez Monfieur Grsnyilfe, paree queje ly en' ?nd^f fes conté, avec tous ceus qui venaie caufer" -ecu, fa m'a.ulait; mais oü queje i a pré ,cÏft chez u„ vteti homme qui eft tout malade, tont ^LpJeJ. Dainval. Incompétent!... O- n. » J A C q U o T. urn.... On n y volt que des Médeclnj.des Chirurgiens - n entend Pal,er que de de...g, .^Jj"; ;:urmoi.?aU,e-' °hi«<™^ eft troP ^ r.k > . • . Dainval. Oh, lubnquel C'eft bien trouvé! Lugubre donc. T?U I , j ac q (J o t. Eh ben lugubre, iubrique, dH paj ,a meme chofe? ce trJ^T^' Cp™°y Je lepenfeben, Monfieu!;^ dlós ie fond il eft trés^-i—chczluid'unecondulL li  ï3 LES FAUSSES CONSULT ATIONS ] a C q u o t. Ah» Monfieur, ca feta ben fait a vous. Et fi ga sVrauge, foyez £üc que vous n'obligerez pas un ingrat; j'aurai toujours pour vous la reconnaiflhnce.... la plus.... milèe.... la plus afectée.... D A i m v a l, r.ien obligé, mon ami, je te difpenfe des compliraens.... J a c q u o t. Pnrdonnczmoi, je vous en dols.... & beaucoop mdme, & fi vous vouliez ordonner, je vous fefais toujours quelques commilïïons a compte.... Dainval. Non, non , pour le moment je if ai oJ parapluie d'oublié, ni lettre a la pofte. J A C q u o t. Dame, vous voyez que c'efl de bon cceur, Monfieur. Ne vous gênez pas pus avec moi, que moiavec vous* je reviendrai vous voir; & je fuis toujours ben votre fervueur jufqu'a deraain matin. Ul sV" va'J S C E N E. F. DAINVAL, feul. ParblbuI je crois qu'un Mairre doic être bien fervi avec un pareil Domeftique! SCÈNE Fl. DAINVAL, Madame DUBLANC, parlant vite & répètant fes mots. M. D UNOIR , bojfu c? bègue. Mad. D o b l a h c. ]Vf o n cher Monfieur , voulez - vous bien nous faire la giace de nous enteudtc- ?  C O M Ê DIE. Da i n V A L. - Avec plaifir, Madame. Afleyez - vous, s'il vous p(air. (tl donne des Jïéges', & fe place entreux deux.) D u M o i « , èégayant. Vou ou ousüu au aurez donc, Mon on onfieur.... Mad. D o b l a n c. Ah! mon frére, laiffèz*moi parler, je vous en prie , j'aurai pluiót fait que vous. Dainval. Oui, je in'en doute. D ü n o ik. Eh bien, oui, pa a a arlez, Ma a dam DubJancécou ou outez-la, Monfieur. Dainval. Allons , Madame, je fuis tout oreille. Mad. D u b l a w c. Je vous dirai donc, Monfieur, que Monfieur Duhoïf & moi nous avons un procés qui fious coüce déja beaucoup d'argent,& nous voudrions notis aecorder a famiable» D u n o i k. Cora om omprenez - vous ? Dainval. A merveille. Et je vous loue de votre intention. D u n o 1 r. Pou ou ourfuivez, Ma a dame Dublanc. Mad. Dublanc. Eh bien, Monfieur, on nous a dit que vous étiez fort lié avec notre Partie adverfe, & 1'on nous a confeillé de nous adreiTer a vous pour nous arranger enfemble. D o n o i r. Vou ou ous entendez bien ? Dainval. Oui, Monfieur, trés-bien; & je me prêrefai a cela trèsvolontiers. Quel eft le nom de la perfonne a qui vous avez affaire ? B s  ,a- LES FAUSSES CONSULTATIONS Mad. Dublanc. Oh! pour fon nora, il m'elt échappé. C'eft un nom fi biroque! Dites-le donc, vous, mon frère. Dun oir. Ah! parolen» il s'a a appelle Mon on onfieur... Vous ne co onnaiffez que 9a. Mad. D ,o b l a n c. Oui, je favais tout-a-l'heure fur le bout de Ia langue [ Ah! Monfieur de. ...Bon! voila qu'il m'échappe encore.... Monfieur de de.... Mais c'eft égal, le nom ne fait rien a 1'affaire. Dainval. Pardonnes moi, il y fait quelque chofe; mais en me le défignant de quelquei manière, je le reconnalcrai peut-êtte. D u n o i r. Oui, vou ous ferezau au fait tout de fuite. Dainval. Que fait-il? Quel eft fon état? Mad. Dublanc. Ah ga, par escsnple, fon état, je ne le fais pas polïtivement. Dainval. Èt vous Monfieur? D u n o 1 r. Oh, moi! je e e ne vous ous le diral pas non plus. Dainval. * Me voila bien inftrui't! Et qui diable me Ie dira donc? Mad. Dublanc. Attendez, Monfieur; je crois pourtant qu'il ét#t...^ oui, je ne me trompe pas.... D U N O I R. Oui, je e e le crois au au aufli. Dainval. Eh bien, il était? Mad. Dublanc. li était employé dans les.... Aidez-moi donc, Monfieur Duuoir.  C O M É D r È il D u n o I r. Eh bien, il était em em employé. Mad. Dublanc. Non , non. Nous confondons. Ce n'eft pas celui-la. Il n'eft pas employé, lui. Rappellez vous donc? D u n o i b. Oui, nou ou ous confondons. I i il n'eft pas employé. (A Dainval.') Co o o mencez- vous è vous le e remettre' un peu ? Dainval. Moi! Le diable rn'emporte fi je le divine. D u n o i s. C'eft pou ou ourrant clair. On on vous dit que Ahornme la n'eft pas em employé. Dainval. Mais il eft quelque chofe, enfin? Mad. Dublanc. Ah! Monfieur, autant que je peux me le rappeller, il *® i! eft au demeurant, tout cela eft égal. L'état a'y fait encore rien. Dainval. Oh non , pas plus que le nom. Eh oü demeure-t-il -ca Monfieur-la? ' Mad. Dublanc. Oh ca, c'eft dilférent. II demeure dans la me de auprês de.... & vis-a vis 1'Hótel de..... Artendez donc! je crois qu'il a changé de quartier a préfent. D ü n o i R. Oui, i i il a dé é é ménagé. Dainval, qui fimpatiente a me/ure. Mais encore il demeure quelque part? Mad. Dublanc. Certainement. Oh,nous trouverons bien cela. Ce n'eft pas fa demeure qui embarraffera. B 3  02 LES FAUSSËS CONSULTJTIONS D u n o i k. Saus an ans doute, on fau au ra fa quand on voudra. Dainval. Mais c'eft a préfenc qu'il faut le favoir. Dans quelle rue enfin ? D u n o t b. Ce n'eft pas la a a rue qui i i y fait. Dainval. Non. Rien n'y fait avec vöus autres. II faut pourtant bien me le faire reconnaiire par quelque chofe ? Eft-il grand? Eft il agé ? Mad. Dublanc. Eh! grand, fi vous voulez.... il eft de la taille a-peu< prés de.... D u n o i n» I i il n'eft ni ni vieus, ai i jeune. C'eft un un homme qui i i peut avoir.... Mad. Dublanc. II a a peu-prés cinq pieds, & deux..., trois..., quatre.... ou cinq poucef,... Je ne fais pas trap combien avec Dainval. Voila une taille bien déterminée! Dun o i r. II peut a a avoir entre trente..., trente-cinq..., ou qua a rante a quarante-cinq ans a-peu-près.... Je ne peux pas vous ous dire au au jufte. Dainval. Allons! me voila aufli favant fur 1'age que fur la tailie. Mad. Dublanc. Au furplus, Monfieur, qu'importe la taille dans tout cela ? Dun oi n. Oui, 1'M age n'y y fait rien non plus. Dainval. Bon ! voila le fignaiement le mieux donné que j'aie vu de ma vie. Eh, a quoi diable voulez vous que je foupfonne  C O M É D I E. 23 feulement l'homme dom vous ma parlez? Expüquez-vous mieux. Mad. D ü b l a n c, fe kvant. Quoi! Monfieur, aprè? tout ce que nous vous en avons dit, vous n'êtes pas encore aiTez infiruit! Vous n'êtes done guère pénétrant, mon cher Monfieur! vous n'êtes guère péne" trant! D u n o 1 r. Co o oment! vou ou ous n'êtes pas au au fait ? Dainval, riant par réflexion. Ma foi, j'y fuis apeu prés autant que vous, je crois, & ce n'eft pas beaucoup dire. {Apart.-) Ii me paraic que' je n'en tirerai rien de mieux,- le plus court c'eft de m'err défaire. (Haat.) Ecoutez, Madame, & vous, Monfieur: apfês des renfeignemens anffi clairs que ceux que voiis m'a. vez donnés je crois conuaitre votre affaire autant que 1'homme dont vous me parlez.... ainfi, lail^z-moi travailler a arranger cela; je vous rendrai réponfe dans quelques jours. (A part.) Je donnerai de fi bons ordres qu'ils ne viendrom plus m'étourdir. Mad. Dublanc. Eh bien, Monfieur, nous vous recommandons cette af. faire la. Sur-tout, n'oubliez rien de tout ce que j'aï eu Phonneur de vous dire. D a i n v a l, les reconduifant. Oh! je n'ai garde affurément. D u n o i r. Bon on onjour, Monfieur fbu ou ouvenez vous bien de tout ca. Dainval. Ne vous inquiétez pas, allez; QMontrant fa téte.) tout fa eft la. ' Mad. Dublanc, revenant. Si vous aviez encoie befoin de qj.elque explicaiion, vous n'avez qu'a dire. B 4  24 LES FAUSSES CO N SU LT AT IO NS D u n o l r. Ou de e quelque lu u mière fur fthomme-la? Dainval. Non, non; c'eft fort bien expliqué! C'eft affez clair comme cela.... Je fuis votre ferviteur de tout mon cceur. (II les renvoye , ils fortent.) SCÈNE VIL DAINVAL, feul. helle manie I avec leur homme contre qui ils plaident fans le connaitre. Voila pounant 1'hiftoire de tous les procés! lis commencent fans ('avoir par oü; ils continuent fans favoir fur quoi; & les querelles fe perpétuent faute de s'enteudre. SCÈNE VIII. L'ANGLAIS, DAINVAL. L'Anglais, baragouinant. H o v dy edou, fer. Dainval. Monfieur, votre très-humble ferviteur. L' A m g l a i s. Monfit, vous voyez en moi ein homme qu'il eft rempli d'ein fuperlatif grandiffime chagtin. Dainval. D'oü vient donc, Monfieur? L' A n g l a i s. Je ne fais pas quelle fatalité il me pourfuit; mais je fuis  COMÉDIE. 25 affèz infonuné pour ne pas pouvoir reufllr h attraper ein mai. faeur dans rien du rout. Dainval. Comment, Monfieur!... Mais autant que je puis vous comprendre, i> me femble que vous vous plaignez d'ètre trop heureux? L' A n c L a i s. Oui, Monfir, c'eft ?a même. Je fuis trop heureux, je vous dis, je fuis au défefpoir. Dainval. OhJ oh! la piainte eft nouvelle! Mais, Monfieur, il y a du reméde a tout cela. L' A n g l a i s. Je n'en connais pas, & je viens demander pour vous, enfeigne moi ein. Dainval. Parbleu! cela eft bien facile. Etes vous ricbe d'abord? Avez vous du bien ? L' A n g l a i s. Oui, Monfieur, immenfément, beaucoup. Dainval. Eh bien, vous pouvez aifément vous eu defaire d'une partie. L' A n g l a i s. Non Monfir; j'ai eflayé inutilement toutes les manières poffibies de me ruiner einpetit peu, je n'ai pas encore pu patvenir! Je vous dis, je fuis enforcelé. Dainval. Et vous vous plaignez de cela! IJ y a bien des gens qui ne prendraient pas cela comme vous. L' A n g l a i s. Tant-pis, Monfir, tant-pis. J'ai lu fouvent & j'ai entendu dire qu'une grande conflance de fortune il couvait ordinairenem quelque grande calamité & menacait d'ein grante B 5  ft6 LRS FAUSSES CO NSU LT AT IO N S, difgrace, & pour prévenir de moi-même ein revers auffi terrible0, j'ai cherché expreiTément a me procurer quelque petit malheur, je-ne peux pa3 réufür abfolument. D a i k v a l. Comment vous y étes • vous donc pris ? II y a de tam de gens qui en trouvent fans le chercher. L' A n g l a i s. D'abord, Monfir, j'ai fait des paris confidérables , a tort & a travers, fur des cocqs, fur des cbevaux. J'ai gagné toutes; piqué de cela, je me fuis mis dans la ieterie. fèi rifqué mon argent fans réflexion fur les chan» ces les plus défavantageufes. J'ai fait des ternes , j'ai compofé des quaternes, j'ai ajulié des quines.... Dainval. Eh bien, Monfieur? L' A n g l a i S. Eh bien, Monfir, j'ai ruiné toutes les Bureaux des Entrepreneurs. Dainval. Voila un malheur bien obftiné! L' A n g l a i s. Voyant qu'il n'y avait pas moyen de ce cóté , je me fuis retourné d'un autre. J'entrepris le jeu. Je me fuis mis a jouer dans les maifons les plus fufpect.es, avec les Joueurs les plus hablles, les Efcamoteurs les plus malins, les Dames les plus entêtées, & les Frippons les plus con' nus qui fréquentent en habits dorés dans les maifons comme il faut. Dainval. Oh! alors vous aurez ree/u quelqu'échee? V L' A N g l A i S. Au contraire, Monfir, j'ai fait fauter toutes les bau« ques. Ca n'eft-il pas uiatoreux!  C O M È D 7 E. D a i n y a l. Oiii. Q/l part!) J'autais bien voulu être de raoitié de ce malheur la. L' A"*-g lil!, J'ai donc été obligé de renoncer au jeu. Dainval, Que de gens y ont renonce* par un autre motif!... En» fin, Monfieur, qu'avez- vous fait? L' A n g l a i s. J'ai voulu elftyer de la chicane. Dainval. Ohï la, fürement yous aurez trouvé rabat-joie. L' A n g l a i s. J'ai intenté des procés qui n'avaient pas 1'ombre, pas 1'apparence de fondement; j'ai pris des Avocats qui ne favaient pas plaider; je n'ai point fait de vifites a mes Juges; j'ai eu contre moi des Solliciteufes charmantes, aimables beaucoup; des Procureurs qui étaient des diables en malice, & des Piaideurs qui étaient la fine fleur de la Normandie. Dainval. Eh bien, Monfieur, vous avez perdu, cela eft clair. L' A n g l a i s. Eh non, de par tous les diables ! non. J'ai gagné toutes mes Caufes. Dainval. / Eh parbleu, Monfieur, vous étes né pour les prodiges! A votre place, moi, j'y aurais renoncé. L' A n g l a i s. Non pas. J'ai encore fait une tentative. Dainval. Laquelle ? L' A n g l a is. J'avais entendu dire que le mariage il était fouvent eiis  £S LES F AU SS ES CONSULTATIONS, fource d'amertume & de chagrin; j'ai donc dit, il faut me maiier. Dainval. Oh! par exemple,je répondtais prefque de ce remède la. L' A n g l a i s. J'avais encore entendu dire qu'une femme Frangaife ü était bien plus capable qu'une autre pour bien faire enracher ein marie.... Moi, ne voulant pas faire la chofe a demie, je prends la pofle, je parte & je vole a Paris. Je fais chercher une fille bien jeune, bien iolie ,bien vive, bien éiourdie; je trouve tout de fuite, je me préfente, je parle & j'époufe. • , Dainval. Allons, voila 1'affaire en bon train. L' A n g l a i s. Si-tót la cérémonie du maiiage faite, je reparte le lendemain pour aller arranger des affaires pour des biens que fai en EcoiTe en Irlande, en Angleterre. Comme j'ai fait le tour des trois Royaumes, les einbarras que j'ai trouvé ils m'ont retenu deux ans. Enfin, Monfir, je reviende d'hier au foir a Paris retrouver mon femme.... Dainval. Eh bien, Monfieur ? L' A n g l a i s. Eh bien, admire Ia conftance de mon étoilel En arrivant, je trouve, j'ai encore gagné. Dainval. Encore gagné 1 Comment donc cela? L' A n g l a i s. Oui, Monfir; deux enfans , dom ma femme il m'a fait préfent. Dainval. Ah, pour celui - la, c'eft poufler te bonheur auffi loin qu'il' peut aller.  COMÉDIE. COMÉDIE. ar> L' A n g l a i s. Aiiffï a prdfent j'ai aflez, & je viens demander pour tous ein confeil. Dainval. Ah, ma foi, Monfieur, que voulez • vous que je vous dife a touc cela? L' A n g l a i s. Oh! Monfir, il y a quelque chofe a faire Ia - deiTus. Comme je commence a être ein peu impatienté, fi j'étais a London, je tuerais pour moi tout-a-l'heure. Dainval. Monfieur, le remède ferait un peu violent. L' A n g l a i s. Non, ce n'eft rien. Je tuerais moi, je vous dis; a London c'eft la mode. Mais ici a Paris, je ne fais pas bien les ufages, & je demande pour vous qu'eft-ce qua je dois tuer. Dainval. Mais perfonne, affurément. L'Anglais. Pardonne - moi. Je ne connais pas au jufte; mais je fais bien qu'il faut tuer pour quelqu'un. Serait-ce pJs la femme plutót? Dainval. Eh non, Monfieur; ni 1'un ni fautre. L'Anglais, férieufement. Excufe moi, Monfir; j'ai voyagé, & je connaitre ein peu les manières des autres pays. II y a ein autre pêre pour ces deux enfans, n'eft-fl pas vrai? Heim? Dainval. Cela fe peut bien Monfieur. L' A n g l a i s. Eh bien, en Portugal, je tuerais pour 1'autre pêre. Dainval. Mals entendez-moi donc, Monfieur, je vous dis qu'ic? on ne ree perfonne-.  gj LES FAÜSSES CONSULTJTIONSi L' A n g l a i s. ■ Mais, Monfir, vous ne faire pas accroire cela pour moi, peut-être; je fais fort bien qu'il faut que quelqu'urt il raeüre. Dainval. I 3fi nou, vous dis-je; cela eft abfolument inutile. L'Anglais, très-flegmatiqaenient. Pardonne moi. Kin chofe pateille i! ne peut pas pafier ainfi pour un Anglais; il faut tuer pour quelqu'un. Alors, puifque vous ne voule pas éonfeiller pour moi, je vas tuer pour vous. Dainval. Moi, Monfieur! mais cela ne me regirde pas du tout. L' A n g l a i s. Si fait, Monfir, beaucoup même. Je demande a vous ein confeil tranquillement, & fi vous ne donne pas pour moi s je apporte ici un fecret qu'il va déterminer vous tout de fuite. Dainval. Qu'eft ce que c'eft que ce fecret ? L'Angla is tire tranquillement de fa poche un piflolet, & l'amorce. Le voila. Ly ètre la-dedans ein petite provifion de crois dragees de plomb. A ftheure, dire ein peu pour qui je dois faire avaler. Eft - ce pour la femme ? Dainval Non, Monfieur. L' A n g l a i s. Eft-ce pour 1'autre père? Dainval. Non, Monfieur. L' A n g- l a i s, Eft - ce pour moi? Dainval. Eh! non, Monfieur?  COMÉDIE. 31 L' A n g l a 1 s. Alors; c'eft donc pour vous. Allons, Monfir, prépare-vous, mettre-vous & vo;rè aife. Dainval, sécriant. Miféricorde} Au fecours! au feu! Quelqu'un!... L'A n g l a i s , flegmatiquement. Eh bien, Monfir, eft-ce que vous perde la tête donc? II n'eft pas befoin de témoin , décide - vous vlte, parle. Dainval. Mais, Monfieur , je fuis tout décidé. Allez - vous- en Eft-ce que vous avez le diable au corps? L' A n g l a i s. Ecoute, Monfir, je voudrais bien faire la chofe amica. blement, je ne gêne point pour vous, & je donne le tems pour la réflexion. Prendre vous vingt-quatre heures. Demain a midi je reviendre ici, & alors vous dire franchement pour moi, & tiendre vous tout prêt, ou la femme, ou 1'autre pêre, ou mol, ou bien vous, faire la cérémonie d'avaler la petite médecine. En attendant, je baife bien les mains, porte- vous bien, Gouth baye Gentlemann. (II sen va.) Dainval, feul. Le diable foit de I'homme ! II ne faudrait pas beaucoup de Confultations comme ctlle - ci pour me faire renoncer au métier. SCÈNE IX. DAINVAL, UN MATELOT, UNE VIVANDIERE. LA VtVANDIERE. orag fervante, Monfieur.  3a LES FAUSSES CÖNSULTATIOIVS , L e Matelot. Bon jour, not Bourgeois. Dainval. Qui deraandez-vous, mes enfaus? La Vivandiere. Pardi, Monfieur, je voulons que vous nous mequiez d'accord fur un petit ariique. Dainval. Comment, mes amis, eft ce que vous êtes en difpute? Le Matelot. Ah! ventergué oui, not Bourgeois, j'y fommes; & rudement encore! mais le tout par amiquié, pourtanc. Dainval. Expliquez-moi donc" 9a. La Vivandiere. Faut favoir, Monfieur, que je nous appellons la BelleTofe, & que je fommes veuve d'un nommé Bellerofe, qui était Guernadier au Régiment d'Hainaut, qui regut un coup de canon a la prife de la Guernade, oü ce que ce brave gargon, que vous voyez-la, y a été blefle aulïï. L e Matelot. Oui; mais malheureufement il en eft mort, & moi, me vla. La Vivandiere, avec attendrijfement. Sans doute, il en eft mort, ce pauvre cher Bellerofe! Je 1'aimais ben! mais c'eft égal, il a fait fon devoir il eft mort en brave homme; je ne le regrette pas.... C'eft le tioifième que je perds comme ga Monfieur; deux par le canon, & 1'autre par un éclat de bombe. Dainval'. C'eft bien malheureux! La Vivandiere, avec fermeté & fentiment. Malbeureux! je ne trouve pas ga; c'eft ce qui pouvait leur arriver de mieux. Dans not état, je nous attendons a 92,  C O M É D I Ë. 33 C3, & je n'avons que Ie choix, ou de vivre en payfan, ou de mourir en général. D a 1 n v a l. Ma bonne, il me parait que vous avcz le coeur bien placé. Le Matelot. Elle! oh, je vous en répondons. Ca fait une maitrefl'e femme, allez. La Vivandiere. Monfieur, j'avons été élevé a ca. Je fommes Vivandiére depuis vingt-cinq ans. J'ons vécu aux dépens de 1'Enneuii, j'onsfervi nos Officiers, j'ons fréquenté les Soldats; & quand je n'aurions pas de cceur, ca fe gagne par 1'habitude d'étre avec de braves gens. Dainval. C'eft fort bien, ma bonne! Je vois que vous y avez bien profité. La Vivandiere. Or donc, pour vous en revenlr, feu ce pauvre Bellerofe avait fait Ia traverfée d'Europe avec ce Matelot la dans Ie même vaiffeau ; ils étiontamis; & dans queuques combats OÜ ils aviont fait des prifes, ils aviont partagé enfemble un petit butin, a condition que fi Pun venaic aétretué, 1'autre garderait le tout. Mon mari y eft refté a ce fiége que je vous dis; eh ben, ce Matelot-la doit garder fa part. Ca n'eft ti pas naturel? la , dites un peu. Le Matelot. Non pas, Monfieur, non pas. Quand j'avons fait 1'accord avec Bellerofe, je ne favions pas qu'il avait une femme. Je fuis garcon , moi; le marché n'était pas égal. A préfent que je favons qu'èlle eft fa veuve , je iy rapportons le tout, comme une preuve de 1'amiqué que j'avions pour fon mari. La Viva ndiere. Et nous, Monfieur, je n'en voulons pas. Je n'avons pss d'enfar.s a éiéver, je n'avons pas befoin de fortune. Dieu merC  34 LES FAUSSES CQTtSULTATIöNH ei, avec roon peilt commerce, je vivons au jour le jou?* mais lui, dans le méquier rude qu'y fait, y peut attrape* queuque maladie, queuque bleiTure, & ftargent la ly fer. vira a fe donner queuque douceur. Le Matelot. Non, Mame Bellerofe, ca ne fera pas comme ca. Je fommes fort, je fommes Officier marignier, j'avons une bonne ration; c'eft aftez pour tous les jours. Si y m'arrive accident. ou que j'attrapions queuqu'anicroche en mer, & *norgué je n'aurons encore befbin de rien. Chez nous, on a foin des bwet gens; & a ce tkre la, j'efpérons ben qu on ne me laiffera pas manquer. Dainval. Ah, mesamisl vous macharmez, Embraflèz-moi tous deux* Avec des fentimens comme les vócres; on peut pré. dire d'heureux fuccès a la Patrie qui vous les infpire.... Vous venez me confuk«r, je vous mettrai bientót d'accord. Au lieu de féparer la fomme en queftion, permettez mo» de la doubler: vous êtes gargon, & vous veuve; manezvous enfemble, & donnez a 1'Etat desenfans, qui, venanc d'auffi bonue race, ne fauront manquer d'être de bons Serviteurs. Le Matelot. Ahl venterguél m'eft avis que vous êtes de bon confeiL Mame Bellerofe, le ceear vous en dit il? La Vivandiere. Ma foi, mon enfant, quand ce ne feralt qu'en retour de lamiqué que t'avais pour mon mari, je m'y fentirais affez éifpofée. Dainval. Ehbien, moibleu. il »'« *»« pas davantage, & je réponds que votre union fera le bonheur de tous les deux. Mes enfans, ne perdez pas de tems, allez faire les premières déaasreaes pour votre manage; & quand il n'y aura plus que  COMÉDIE. q$ la cérémonie, revenez me trouver, & je me charge d'en faire les honneurs. Le Matelot. Adieu, Monfieur; quele Ciel vous le rende! La Vivandiere. Vote fervante, Monfieur.... Mais pour nous faire Ia gracö complette, il faut nous promettre encore nommer note premier enfant. Dainval. Avec le plus grand plaifir du monde. Dépéchez-vous feulement, & je me charge du refte. La Vivandiere. Bon! laiffez nous faire, Monfieur, nous allons mettre les fers au feu. (Ils s,en vont.} > SCÈNE X. dainval. feul. En vétité, c'eft un grand plaifir que d'avoir affaire a d'honnêtes gens, & de pouvoir les obliger! La fatisfaclion que j'ai goutée avec ceux-ci, me dédommage bien du défagrément que m'a fait éprouver 1'Anglais de tout-a-i'heure. SCÈNE XI. m. fort-bien, dainval. FOUT-BIEN. Je vous fouhaite bien le bon jout, Monfieur; je fbis votte ferviteur de tout mon coeur. c 3  36 LES FJUSSES CONSULTATIONSt Da inval. Votrs très-humble, Monfieur. Qu'y a-t-il pour votrr fervice ? Fokt-bien. Je vous dirai, Monfieur, qu'il m'arrive quelque chofe de fort fingulier, de trés. fingulier mêrne, on ne peut pas plus fingulier, de trés fingulier méme, on ne pent pas plus fingulier!... Imaginez - vous, un beau jour, je ne penfais a rien ; bon jour, bonne oeuvre ; il m'arrive une lettre que le Faéteur m'apporte, c'eft fort bien. Je la décachète, elle vient de mon pêre qui eft en Alleraagne ; c'eft a merveillel 11 me marqué qu'il eft a toute extrémité ; 9a va le mieux du monde. Dainval. Oui, jufques-la cela me paralt en bon train. F o k ï - b l e n. La - defTns , moi , je fais une réfkxion. Je dis me voila ici, moi; c'eft fort bien. Mais on ne fait ni qui vit, ni qui meurt; mon père me prévienc de fa maladie, c'eft a merveille! mais il peut avoir un événement, eet homme, il eft vieux, il peut venir a manquer d'un moment a Pautre, & fi je ne fuis pas la, les Coltatéreaux s'empareront de la fucceffion. Dainval. Et cela n'ira pas le mieux du monde. Fon t - bien, Sans doute. Mais quoique 9a, je dis toujours c'eft ibn bien. Un bon averti en vaut deux. I! faut partir & fa tranfporter fur les lieux. Je demande une chaife de pofte; elle arrivé, vlè qui eft a merveille; on graifïè les roues, je pars, le Poftillon fouette, & tout va le mieux du monde. Dainval. Allons, Monfieur, bon voyage. Fort-b 1 en. Voila qse nous uouvon? un chemin diaboliquefun tems  CO M Ê D I Ë. affreux! clair comme dans un four!... Mais quoique erf pous allions toujours, c'eft fort bien. Au bout d'une heure, nous tombons dans une orniére, les chevaux s'abattent & la voiture fe brife; vla qui eft a merveille 1 C'eft un accident; fa peut arriver a tout le monde. Dainval. Saus doute. FoKT-BIEN. Mais en relevant la voiture, le Poftülon mal-adrolt pomTe fes chevaux trop vlte, je tombe entre les roues & je me cafle une jambe. Dainval. Ah, diabiel & qu'eft ce que vous dites alors? F o k t - b i r N. Moi! ma foi, mettez vous a ma place. Je dis, je pouvais être tué roide; je n'ai qu'une jambe calTée, c'eft bien heureux ! Ca va le mieux du monde. Dainval. C'eft prendre les chofes comme il faut. Fout-bien. Eh dame, je voudrais vous y voir II y a un parti dans tout.... Me voila donc avec ma jambe caiTée & fouffrant comme un diable; jufques - la, c'eft fon bien. Dainval. Oui, il n'y a rien a dire. Fout-bien. On me porte chez un Chirurgien; il me remet ma jambe, & me dit : Monfieur, en voila pour vos quarante jours dans le Kt, Allons, je dis, moi, voila qui eft a merveille! il faut prendre patience. Bref , pour vous abréger , les quarante jours fe palTent, je me guéris, je paye le Chirurgien, je me remets en route, & j'arrive en Allemagne. Tout fa eft le mieux du monde. Dainval. Oui, voila un pet.it voyage bien heureux! C 3  33 LES FAUSSES CONSULT/ITIONS^ FoRT-BIEN. Si - tót artivé, je me fais conduire a la maifon de mon père. J'y trouve tout le monde chagrin, les Douiefiiques pleurant; je dis, moi, c'eft fort bien. Ces gens-la font attachés a leur Maijre, c'eft naturel.... Enfin, je m'informe de fanté. Ah! Monfieur, me répond-on, vous arrivez trop tard, il vient de mourir.... De mourirl Ca me pétrifie, moi, cette nouvelle-la!... Cependant,après le premier mouvement, je dis, il eft mort, voila qui eft & merveille! il n'y a plus de remêde ; mais quoique ca voyons le teftament. Dainval. Sans doute; il faut fonger a foi dans la vie. Fort-b ien. Le teftament, me dit - on! Ah! Monfieur, de colère de ce que vous 1'abandonniez dans fes derniers momens , le pauvre défunt vous a deshérité. Dainval. Eh bien, voila qui va le mieux du monde! Fobt-bien. Non pas. Je dis, moi, je me fuis caffé la jambe en chemin , 9a m'a retenu; c'eft fort bien: pendant ce terasla mon pêre eft mort, c'eft a merveille; mais il m'a deshérité!... Oh! je ftrai cafler le teftament, & 9a ira le mieux du monde. Dainval. Mais, oui, c'eft bien imaginé. Fort-Bien. J'ai donc ramafTé tout ce que j'ai pu, j'ai vendu queN ques nippes, j'ai emprunté de 1'argent; & je me fuis mis en route pour aller plaider contre les Collaiéraux. Da inval. Et c'eft donc la-deflus que vous me demandez confeil? Fort-Bien. Ooi, majs ce n'eft pas le tout ; 9e n'eft-la que le commencement de l'aftaire.  COMÉDIE. 39 Dainval. öh, oh! Contiriuez; elle va fort bien jufques.laf Fort - B i 2 n. Chetnin faifant, je m'arréte darts uue Auberge fur la route pour y cóucher. Or , il faut que vous fachiez que je fuis fujet a un petit dérangement de tempérament. Dainval. J'entends, vous tombez malade dans 1'Auberge. fort-BlEN. Point du tout, je ne fuis pas maladif, moi; j'ai une iarrté de fer. Mais imaginez - vous que deux ou trots fois par an, au moment oü j'y penfe le moins, il m'arrive tout d'un coup de tomber, la.... comme fi j'étais mort.... Dainval. VoilMne fingulière habitude que vous avez-la! FoRT-BlEN. Dame! on n'eft pas refponfable de 9a.... C'eft le fang.... les nerfs.... que fais-je, moi? Da inval. Ah! c'eft une léthargie apparemment, une apoplexie, quoi!... f o r t - B 1 E n.| Oni, c'eft 9a mème, une léthargie. Voila donc que ca me prend dans cette Auberge, & voila que je meurs; c'eft fort bien. Je paffe la nuit comme cela. Le lendemain, 1'Hóte voyant que je ne 1'appellais pas pour compter , monte, & me porte la carte: il me trouve mort! Je penfe bien que 9a 1'a mis dans 1'embarras. ,11 ramaffe mes effets, mon argent; tout 9a eft a merveille! Je ne pouvais pas 1'en empècher, moi; j'étais lk mort.... II appelle du moude, il prend des témoignages, il fait de* informations; bref, il va jufqu'a me' faire enietrer; toat fa eft le mieux du monde. Dainval. Oui, il n'y a lien de plus honnête, C 4  40 LES FAUSSES CONSULTATIÖNS, FOR T-BlEN. Oh! mais vous ne favez pas.... Le bon de 1'affaire, c'eft que je fuis revenu avant la fin de Ia cérémonie. Dainval. Ah! par exemple , c'eft ce que vous avez pu faire de mieux. FoRT-BlEN. J'ai redemandé mes effers & mon argent au Cabaretier, qui n'a pas voulu me les rendre. 11 prétend qu'il 1'a dépenfé en mon honueur; & il m'intente un procés, pour me prouver que je dois étre mort tout de bon. Dainval. Oh , cela n'eft pas raifonnable ! Avez - vous quelques papiers concernant tout cela, qui puifle m'éclaircir fur ces différens anicles. Fort- Bien. Oui - da , voila un petit précis de tout cela que je vous apporte; vous allez fexaminer , & je reviendrai vous voir dans quelques jours. Vous me ferez rendre mes eflèts & mon argent par Ie Cabaretier, 9a fera fort bien; vous me conlëillerez pour faire cafTer le teftament de mon père, 9a ira a merveille: je toucherai la fucceffion , & je vous oublierai pas; & vous verrez comme moi que 9a ira le mieux du monde. Votre ferviteur de tout mon cceur, (J£ s'en va.) SCÈNE XII. DAINVAL, feul. a un homme d'un heureux caraótère! Tout eft k merveille avec lui. Dans le fond, il a raifon; a quoi fert de fe gendarmer contre les événemens ? Ce qui eft fait êft fait, le chagrin jie guérit de rien, & je crois que la  COMÉDIE. /}I ineilleure politique eft toujours de trouver bien ce qu'on ne fauraic empêcher. SCÈNE XIII. L'OPÉRATEUR Italien, DAINVAL. L' Operateur, baragouinant. A reverifco mio Signor, fono houmiliflimo fervo. Dainval. J'ai 1'honneur de vous faluer, Monfieur. L' Opérateur. Signor, paflando dovanri la voftra caza, j'ai cru qu'il éiait de mon devoir de vi préfenter les aflburances del mio profondo refpetf, èk della mia fervitou. Dainval. Je vous fuis bien obligé, Monfieur 5 mais a qui ai. je 1'honneur de parler, s'il vous plait? L' O p e r a t e u r. Monfiou, vi me demandez quouafque je fouis, j'aurais de la peine a vi le dire , perche quouando que je réfléchis fur les connaiflances que j'ai, fur les merveilles que j'ai opérées; enfin, Monfiou, four les talens que le Ciel ile m'a donnés, j'en fouis honteux moi-même. Dainval. Comment, Monfieur; mais vous êtesmodeftel L' O p é r a t e u r. Quouers - ce que c'eft, Monfiou ? Vi penfez peut - étre a dire vela oun Charlatan.... Eh non, que je n'en fouis pas oun Charlatan. Je fouis oun huomo qu'il a parcouru toute 1'Ounivers, & traveifé touta la vafte Immenfité des Mers; oun Phyficien qui s'eft élevé perdeftbus les Planettes dans les greniers del Firmamento, & qui de ■ la eft reC 5  $2 LES FAUSSES CONSULTATIONS, defcendou dans les emrailles & les ablmes de la tetre; 1« les caves della Natoura! Eb, perquoi faire ? pour décompofer & vérifier les végétaux, les ininéraux, les métaux, les oifeaux, les animaux, en un mot, per faire des découvertes importantes per il bien de 1'houmanité. Da inval. C'eft louable k vous, Monfieur.... Et en avez-vous fait beaucoup de découvertes utiles? L' Operateur. Ah! Monfiou, dans tous les pays oü ce que j'ai paffe-, j'ai opéré des prodiges, & je pouis dire que ma répoutation elle a volé dans toutes les parties del mondo. En Portougal, j'ai gonérito touto oun Auto-dafe d'oüna im» flammation del grand inquifitore.... Qu'elle eft oune maladie bien dangereufe ! En Italia, j'ai gouérito un vieillard de Milan. En Tourquia, j'ai guérito oun Vifir d'oun torticoli, qu'elle eft la matadie a la mode dans fto pays. Et dernièrement a Londres, j'ai gouérito toute la Ville d'oune indigeftion de Grenade. Dainval. Comment donc, Monfieur; mais voila des cures merveilleufes! L' Opérateur. En France, j'en ai fait bien d'autres. Oun Gafcon, il avait oun dépót de vérité fous Ia lingoua, il ne pouvait pas aboutir; je 1'ai mis au régime de 1'eau de Ia Garonne, & 1'abfcès, il a difparou. Oun Commis qu'il avait oun gonfkment d'impertinence entre les deux épaules; je 1'ai fait frotter d'huile de coteret par oun Officier de Dragons; guérito foubito. Oun Soldat étranger il avait des palpitadons de cceur, oun tremblement général quouando qu'il approchait dou feu; 1'odeur de la poudre a canon loui faifeit mal; je 1'ai fait paffer fous les diapeatix de France; fuérito radicalemen:.  COMÉDIE. 43 Dainval. Monfieur, je voos fais mon compliment, & de vos cures, & des recettes que vous employez. L' Opérateur. Monfiou, la chofe qui m'a fait le piou d'honore , il m'a arrivé a Berlin en ProulTe, l'année de fte grande hiverno qu'il fafeva tant fredo. Je pouis dire qu'il eft oun miracolo que j'ai opéré. Dainval. Ah! contez-moi donc cela, je vous prie, L* Opérateur. Signor; j'arrive dans fta Ville de Berlin, & je demande la meüleure Auberge. Ils m'indiquent al grande Monarque; efFectivement, je trouve la maiirefle qu'elle était oun prodigio de politefle. Elle me dit, Monfiou, vi êtes bien tombé! Vi aurez ici tout ce qu'il vi fera blfogne pour boire & pour manger, vi ferez bien logé, bien couché, mais je dois vi prévenir d'ouna chofe: dou bois per vi chauffer, je ne vi en donnerai pas, perché je n'en ai pas.... Eh bien, Madame, que je loui dis, je m'en fournirai moimême, j'en ferai acheter per mon compte. Monfiou, qu'elle m e répond, vi n'en trouvérez piou, perchè les grands Seigneurs & les riches ils ont fait des provifions confidérables, & afihoura, on n'en peut piou avoir ni per or, ni per argent. Eh, Madame, lafciate fare a mi. Je n'en aurai. Effeélivement, Monfiou, je fais afficher fur tous les murs, & annoncer a tous les coins des roues que il Signor Gioufeppe, Mare Slntonio falva la' vita il était arrivé dans Ia Vil. Ie, & loge a Siaubeige, & qu'il volera gouétir gratis tous les eftropiés des dernières guerres. Dopouis fto momento, il s'eft fait oun concourfo perpétouel del mondo, & avec les jambes de bois & les bequilles de ceux que j'ai gouérito, je me fouis chauffé trois appartemens pendant tout Thiver. Dainval. Voila, certes, un trait qui a dü vous bien mettre en. réputation.  44 LES FJUSSES CONSULTATIONS, L' Opérateur. Je vi en réponds, Monfiou; auffi je n'ai pas le tems d'arriver dans ouna Ville, que je fouis demandé dans oune autre; & afthora même, je fouis appellé per Conftantinople. Ma auparavant de partir, je venais per prendre congé d'oun de mesamis, qu'il eft voftro voifin, & que 1'on ra'avait dit que je trouverais chez vous. Il eft Monfiou Franville, it Directer do Spectacolo. Dainval. Ah! Franville. Effectivement, il m'eft venu voir ce ma« tin, Eft ce qu'il s'eft fervi de vos remèdes? L' Opérateur. Non, Monfiou. Dou cóté del tempérament, il fe porte fort bien. Ma comme il a fait ouna entreprife de Théatre, & qu'il ferait courieux de fatisfaire il Poublico, il m'avait demandé oun journo oun fecret per plaire généralement k touto il mondo. Je loui ai répondu: fto feereto li eft audeflus del mio talent, perchè moi je fais tout avec des fimples; & chez vous, il ne s'en trouve pas.... Ma faites oun petit effai. Mettez infoufer quoualques grains de talens dans ouna doze confidérable de zèle, mêiez y oune once de gaieté,joignez quoualquesDrachines dé nouveauté; paf. fez tout cela a 1'alambic del bon goüt, & le tranfvazez en. fouite dans oun récipient d'indoulgence, & je vi garantkais prefque le fouccès. Dainval, Effeclivement, vous ne pouviez pas Ie mieux confeiller. L' Opérateur. Eh bien, Monfiou, je venais per loui domander fi 1'expérience il avait/ouccédé houreuleraent. Dainval. Monfieur, on ne peut encore vous rien apprendre la delTus, car fon Ouverture n'eft pas faite; mais fi vous ne partez pas trop vlte pour Conftantinople, vous poarrez le favoir de lui même fous peu de jours.  COMÉDIE. L' Opérateur. Allons, Monfiou, comme il m'intérefle infiniment, jeremettrai mon voyage per quoualque tems. En attendant, jevi domando bien pardon della mia importounita; je me recommande alla voftra proteition, & vi renouvelle les affourances de la confidération la piou parfaite, avec laquoual que je fouis, Monfiou, il voftro fervitor houmiliffimo. Qll fen va.) SCÈNE XIV. FRANVILLE , fortant du Cabinet, pendant que Dainval va fe remettre & fon Bureau. Franville. Elibieu, mon cher, mon Compliment ? Etes • vouj difpofé a me Ie faire? Dainval. Ah! vous venez fort a propos; vous devez avoir reneontré a la porte quelqu'un qui vous cherchait. Franville. Oui; oui; je fais ee que c'eft. Mais mon Compliment? Dainval. Eh bien, votre Compliment ? Vous favez nos condittons. Je ne connais pas vos Acteurs; & pour le moment, j'ai Ia tête toute troublde des Confultations que je viens de faire. Franvil le. Vous étes dans Terreur, mon ami, vous n'avez point fait de Confultations, & vous connaiflez mes Acteurs. Dainval. MoiJ Et oü diable les ai-je vus? Franville» lei, toute la mscinée.  46 LES FAUSSES CONSÜLTATIO NSi Dainval. Oh! je vous comprends encor moins. Franville. Rien n'eft pourtant plus clair. Apprenez, mon araij que, pour vous mettre a mêine de lés juger fans prévention, je leur avais donné le mot; qu'ils fe font tous habil • lés a leur fancaitle & de différentes maniêres pour venir ici, fous prétexte de Confultations, vous faire différentes Scènes a l'impromptu. A préfent que vous les connaiffez, c'eft a vous a les employer. Dainval. Ah! parbleu, 1'idée eft fmgulière! Je ne m'étonne plu» fi j'en ai été la dupe.... Mais ne me plaifantez-vous pas è préfent vous - même ? Pour vous croire tout - a • fait, je voudrais encore revoir une fois vos Acteurs. Franville. Oh! qu'a cela ne tienne. (// appelle a la porte du £abinet.~) Entrez, mes amis. SCÈNE XV. Les Precedens, Madame DUBLANC, LA VIVANDIERE, M. FORT-BIENarrivant. La Vivandiere. t fervante, not Bourgeois. Mad. Dublanc. Bonjour, Monfieur. Avez - vous des nouvelles de none homme? Fort-bien. Ehbien, Monfieur, comment 9a va-t-il maintenant. Dainval. Oui, oui, c'eft-cela même. Je les reconuais bien; mais il m'en manque quelques - uns  COMÉDIE. 47 SCÈNE XF1 et desk i e11 e. Les Précbdens, L'OPÉRATEUR. L' Operateur. N o n , Monfieur, il n'en manque piou, vela le refte. Franville. Oui, mon cher, a 9a prés des habits qui font reflés dans votre Cabinet. Dainval. Fort bien, Meflieurs; a merveilles , Mefdames; c'eft. a ■ dire, que vous vous êtes amufés è mes dépens. L' O p é r a t e u R. Ah! Monfiou, il étoit de 1'ordre de Monfiou Director, Dainval. ■ Bon! Eh bien, c'eft auffi contre lui que je retournerai ma rancune; & pour le punir, je ne lui ferai pas de Compliment. La Vivanuiere. Pas de compliment!... Mais, Monfieur, c'eft nous tous que vous puniriez comme cela. Franville. Pas de Compliment!... Ah! mon ami, ce ferait un mauvais tour a me jouer! FoRT-bien. Ecoutez, mon Directeur, & vous mes Camarades: au pis aller, quand nous n'en aurions pas, je crois qu'un Compliment n'eft pas toujours une chofe bien néceffaire, & c'éft prefque toujours une chofe fade. Ainfi, je fuis d'avis que nous réfervions Ia bonne volonté de Monfieur 1'Avocat pour une autre occafion A préfent qu'il nous connait, il aura Ia complaifance de novs compofer une petite Piéce en fcénes épifodiques, dans iaquelle il nous employera, chacua fuivant notre capacicé.  48 LES FAUSSES CONSULTATIONS, Franville. C'eft bien dit; mais pour mon Ouverture?... L' Opérateur. Pour votre Ouverture, reffouvenez vous donc de la recette que je vous ai donné: du zèle , de la nouveauté, de la gaieté, & pardelTus tout 1'indoulgence! Vela la pierre fondamentale. FORT-BIEN. Et fans doute; d'après cela, tacljez d'avoir quelque bonne Pièce; nous, nous tacherons de la jouer de notre mieux, & puis avant ou après, fuivant la circonftance, on vient faire au Public les trois révérences d'ufaga, auxquelles on ajoute feulement ces trois mots: Meflieurs, lorfqu'en paraiflant ici pour avoir 1'honneur de vous amufer nous voyons la Salie bien remplie, les Directeurs difen't c'eft fort bien; lorfque'enfuite la Pièce commence, & que pendant fon cours nous avons le bonheur d'obtenir vos applaudiffemens, nous difons, nous, c'eft a merveillei mais 1'effentiel , MefGeurs , c'eft lorfque la Pièce fime, vous vous trouvez contens & que vous revenez le lendemain; oh alors, les Spectateurs , les Direfteurs & les Acteurs, tous s'écrient a 1'uniflbn : voili qut va le mieux dtt monde 1 F I N.