MEMOIRES SECRETS POUR SERVIR A L'IIISTOIRE DE LA REPUBLIQUE DESLETTRES EN FRANC E, depüis MDCCLXII jusqu'a kos jours; O u JOURNAL D'UN OBS ER V«ATE UR, Contenant les Analyfes desPiecesde Thêdtreaui ^embiêosLitté, aires; ks NoticesdesLivres nou. veaux,clande{h„s,prohibés; les.PiecésSitives raresoumanufcrites, en profe ou enS™% ^yülesM la Cour; les AnecdotesS Bons Mots; les Eloges des Savans, des ArtiSs T Hommes de Lettres morts, êc &c. §c. TOME Dl X.SEPTIEM E. hut propias me, vos ordine adite. H°r- L. II, Sat. 3. vs. 81 & 82. A L O N D R E S, Chez JOHN ADAMSON M DCC L XXXII.  1!  memoires secrets Pour servir a l'Histoire de la république des lettres en France, depuis MDCCLXI1, jusqu'a nos jours. Année MDCCL XXXL •i jfawuier 178 1. C'eft, comme on 1'a dcja annoncé,M. 1'Abbé deBoulogne qbi eft l'auteur. du Difcours qui a rcmporté 1c Prix propofé par tine Société, aaiie de laReligion & des Lettres. Avant de paiier du Difcours, il fönt faire connoitrc les auteurs du Prix & le candidat courouiië. Les premiers font M. 1'Archevèque de Paris, d'abord pour moitié dans les 1200 livres annotfcées en 1778, & enfuitc pour les trois quarts, ayant augmenté fa mife de 1200 livres, pour exciter encore micux Ie zcïe & le talent des concurrens: les autres font un Abbé Pey Chanome de 1'Eglife deParis,,l'Abbé deCtf Uon,&c.' L'Abbé de Boulogne, jeune Prêtre habitué ;ïi Saint Germain rAuxerrois, étoitinterdit depuis deux ou trois ans par M. 1'Arclievêque, fans favoir pourquoi, fans que le Prdlat eüt jannis voulu 1'inftruire de la caufe, & malgré les atte«attons quil lui avoit rapportées conformdment a ce que fa Grandeur en avoit exige. S* doutant bieii que fon nom fie feroit poiiit ag&abfc Tomé XFll. A 2  ( 4 ) bord, il avoit prié un de fes arais de lui fervir de prête-nom : celui - ci, quand il fut bien conftaté que le Difcours compofé par fon ami étoit le Discours couronné, ïnftruifit les juges de la petite fupercheric. Ces juges étoient Mesfieurs Chevreuil, Afieline', Royou, GeofFroy, Grofier, Pey, Gcrard & Godefcard. Ils furent bien furpris & embarraffés, connoilfant 1'entêternent & la prévention du Prélat. Cependant il fallut lui apprendre cette facheufe nouvelle; il en fut furieux & vouloit que le Prix fut trans» leré au difcours le plus goüté des juges aprèscelui-la. C'étoit un difcours de M. de Milou, arbitre au premier concours & entré dans la lice pour le fecond: mais ces Mefïïeurs déclarerent a M. de Beaumont, que ce feroit unc injuftice tfautant plus manifcfré , qu'il y avoit une trés grande diliance entte 1'un & 1'aufre. II fallut que 1'Archêveque avalat la pillulc & vit le jeune abbé, viclime de fes perfécutions, emporterles iSoolivres qu'iln'avoit pas eudelfein de lui donner. Ou affure d'ailleurs que 1'ouvrage de M. TAbbé de Boulogne eft d'un mérite fupérieur, que depuis longtems on n'a rren vu d'auffi bon & qu'il furpalfe tout ce que 1'Académie Francoife a jamais couronné. L'Auteur eft dans la maniere de ivl. 1'Evéque de Beauvais; il eft plein d'idées • n beaucoup d'imagination, de chaleur, d'abondance , & fon ftyle eft noble & ferme. Sou fuccès a concilié a M. 1'Abbé de Bou? Jogne tous les geus diftingués dn parti des dé*  C 5 ) rots, & depuis ce tems ils ne ceffent de harceIer M. 1'Archevöque de Paris, pour qu'il lui rende fes bonnes graces & fa confiance. 1 Janvier 1781. Les comédieljs Italiéns donnent aujourd'Iiui pour étrennes au Public la première repréfemation des Étrennes de Mercure ou le Bonnet Magique, Opéra comique nouveau en trois acïes, en vaudevilles. II eft des fai- : feurs a la mode, MM. Augufte dePiis & Barré 2 Janvier. Extrait d'une Lettre d'Amicns du 28 Decembre 1780. „ Ce Monfieur Necker eft „ un homme terrible, qui met notre Intendant „ dans un grand embarras. Celui-ci a fu^é k „ propos de nous faire coiiftruire "une Salie de „ comédie, qui coüte 160,000 livres. Elle eft „ achevée depuis quelque tems, & 1'on y a „ joué du commencement de cette année. M. „ 1'Intendant fe propofoit de la payer des'fonds to desO&oisMünicipaux d'AmJens ; il en avoit „ donné fa paroIe & l'architefte, qui croyant » P°uvoir y compter en avoit fait les avances „ de Ion argent, ou de celui de fes affociés „ C'eft le diable aujourd'hui! Cet artifte n'en „ peut tirer un fou. Le Direéteur Général des „ Finances ne veut pas laifler a la difpofition „ des Commiffiures départis les Oclrois, s'en „ empare & fe charge des dépenfes. En cön, „ equence il nous a remis cette année 5o5ooo h livres fur les Tailles; il nous a fait fournh„ 40,000 livres pour les atfeliers de Charité„ mms ncn pour Ja Salie de comédle. Ü11 eft A 3  j, ©bfigé de prëlever fur les repréfentations une? „ fomme pour payer les intéréts de fon capital 3, a l'archite&e, qui gémit de fa crédulité & „ maudit le Comte d'Agai: c'eft ainü que fc „ qualifie notre Intendant, déteftartt a fon tour „ cordialement M. Necker." 2 Janvier 1781. La nouvelle produclion de MefTieurs Augufte & Barré n'a point eu hier le fuccès des premières. Elle a généralement déplu : on a dit que le fujet ne comportoit pas trois aétes: on y a trouvé beaucoup de longueurs, des plaifanteries groffieres , enfin point. de plan, ni fituation, ni tableaux. Voici en deux mots le fujet de la piece. Géronte, en écrivant des lettres de nouvelle année fait de fages réflexrons für ce genre de politeffe: il voudroit pouvoir difcerner parmi le& .complimens qu'il eft fur le point de recevoir, ceux que lui donncra l'amitié fincere d'avec eeux "qu'il ne devra qu'a 1'ufage ou au vil intérêt. Mercure lui porte pour étrennes, de la part de Jupitcr, un Bonnet., Quand il en fera coëfl'é, töus ceux qui lui parleront, feront forcés de lui dire la vérité: il a la mal-adrelfe de s'en fervir, & il apprend de la bouclie de fon ami, & même de celle de fa femme, tout ce qu'il n'auroit pas voulu favoir. 3 Janvier. Mlle. Duranci, morte le 28 Décembre 'dernier, eft une perte trés grande pour I'opéra & elle mérite une notice particuliere. Fille de la fameule Dariinatel, rcnommée durant  C ?■ >> ies .Jours brillans de I'Opéra comique, elle fut confaeree au théatre dès fa plus tendre enfanee' Dcmée dunc mtclhgence fupérieure & encouragée par les premiers eiTais en province, elle dé~ buta a Ia Comédie Fmncoife le i9 JuiUet 1759 dans lemploi des Soubrettes: elle n'avoit pas encore 13 ans. - Elle paiTa enfuite au Théatre Lynque en 176a, ou s'élevant aux róles de keines, elle fit celui de Cléopdtre. En 1766 elle rentra^a la Comédie Francoife. pour doublé* Mlie. Diibois, qui fuccédoit a Mlle Clairon ,'comme chef d emploi; mais bientót la jaloufie de fa rivale la forca de retourner a 1'Opéra. Celle-ci avec beaucoup moins de talent, étoit trés folie & des-Iors ne devoit pas manquer de 1'emporter. Le célebre le Kain, dont ou ne peut révoquer en doute le fuffrage,'chargé d'ctre leur médiateur reconnoiflbit en Mlle. Duranci, quoique kilde, une aétnce pleine d'ame, de fcntiment& de chaleur, dont la nobleflede fa démarche , la grace du mamtien , la vérité des geftes auroitdü faire oublier la figure. II fut indigné de voir la leconde facnfiée aux brigues de ia première Prós. des Gentilshommes de la chambre, plus empreffés de coucher avec 1'une que d'admirer I'autre au théitoe. II copia toute la correfpondance relative a cette querclle, il la certifia véritable & la conligna dans un Journal qu'il tenoit de tout ce qui fe paffoit dans fon tripot. II a confié ce Journal en mourant aux mams dunM.Antoine, ion ami3. qui conl'erve ce manufcrif & Ie montrc " A 4  ( 8' > a_iTX amateurs. Dans plufieurs de fes lettres ce iublime acteur parle de Mlle. Duranci comme d'ira fujet fait pour honorer la Scène Francoife. C'eft encore a Foccafion des injuftices dont elle avoit a fe plaindre, que Voltaire écrivoit a le Kain: „ je mourrai" bientót & ce fera avec le „ regret d'avoir vu le plus beau des arts vili„ pendé & tombé en France." Mlle. Duranci, au titre de Comédienne, le fujet le plus diftingué del'Opéra, y éprouvoit encore des perfécutions. Elle n'y a point eu le fuccès qu'elle méritoit, paree qu'elle avoit une voix prefque auffi désagréable que fa figure. Du refte, elle étoit renomméc par fa lu bricité & 1'on a parlé dans le tems de fon aventure avec M. de Louvois. Elle étoit devenue 'amourenfe d'un M. le Vacher de Charnois, gendre du Sieur Préville. Ce M. le Vacher de Charnois eft en même tems un bel efprit, un auteur qui a continué le Journal des Thédtres, commencé par M. le Fuel de Méricourt; il eft aujourd'hui le rédacteur en titre des articles des Speélacles pour le Mercure, a 150 livres la feuille. Mlle. Duranci, enchantée de trouver dans ce jeune homme a la fois le phyfique & les relTourccs de 1'efprit, goütoit par fon union un charme inexprimable. Mais M. de Charnois s'étant réconcilié avec fa femme , a dü, comme de raifon, renoncer a ce commerce criminel. L'aétrice n'a pufoutenir unetellc rupture, & fon amant s'attribue cette mort & fe fait gloire de fa victime. II lui a , par recon- norilance^.  C 9 3 noiflance, dreFé ime belle oraifon funcbre dans le Mercure. 4 Janvier 1781. A 1'aflemblée de I'Acadëmie Royale de Peinture & de Sculpture , du 30 Décembre dernier, M. Menageot, Agréé peintre d'hiftoire, a fait apporter le morceau qu'il a cxécuté pour fa réception & il a été admis avec beaticoup d'appliuidnl'emens, au iiombre des Académicicns. Le fujet eft allégorique; c'eft 1'Etude qui arrétele Tems. Sans paiierde lacompofitionquieft ingdnieufe, mals dont les artiftes s'occupent. Ie moins, ils en vantent le ton de couleur vigoureux, le beau pinceau, la touche fanne &rnoé"lleufe, 1'cxcellent goüt de draperie, enfin l'cnfemble, qui en eft trés agréable; fans doute, eet ouvrage fera expofé au Sallon .& 1'on verra (i le public déja bien difpofé en faveur du peintre , confirmera par fon fuffrage celui des juges. 4 Janvier. Extrait d'une Lcttre de Bjpulogne fur mer du 25 Décembre 1780. „ Notre Eve„ que vient d'établir dans chaque paroifle dont „ il eft Seigneur, un Prix de fagefl'e, fous le nom de fecond Prix de la Rofiere , en faveur des „ filles pauvres & vertueufes. Celui de la pa„ roiife de Saint Nicolas eft de 500 livres. II „ a été décerné le jour de lafète de ce Saint, 3, entre trois filles a mérite égal: le Prélat a „ prdfdré une orpheline de pere & de mere & qui, quoique privée des fecours de trois fre„ res matelots au fervice du Roi & vivant feaA 5  „ Ie, n'a dö la fubfïftarrce qura fon traval! & „ s'eft gagné nar fes vertus 1'effime publique." ■ 4 Janvier 1781. Ces jours derniers une femme eft veuue cbez Mlle. Bertin, la fameulè marchande de modes de la Reine, dont nous avons eu occafion de parler plufieurs fois. Cette femme a demandé des ajuftemens pour le deuil de l'Impératrice; on lui en a préfenté de plufieurs efpeces qu'elle a rejettés. Mlle. Bertin impatientée & voyant qu'elle avoit affaire a une petite-maitreffe d'un goüt trés difficile, s'ell écriée pour finir: préfentez donc d Madame , des échantillons de mon dernier travail avec Sa Majeftê. C'étoit fermer la boucbe a la critique, & la Dame s'en eft allée trés fatisfaite d'avoir tout ce qu'il y avoit de plus moderne & de plus exquis, mais non fans rire de 1'emphafe ridicule de 1'ouvriere. 5 Janvier. Extrait d'une Lettre de Grandville du ie-r Janvier. „ Depuis quelque tems J? on préparoit dans ce port & fur la cöte une ,,, Expédition avec le plus grand fecret; on avoit, „ mis un embargo fur tous les batimcns: on a, fait aujourd'hui qu'il s'agit de 1'ifle de Jerfey 3, & que c'eft un Baron de Rullecourt qui a don„ né le projet & doit 1'exécuter h la tête de la 3,. Légion de Luxembourg. Les chafie-marées,. „ les gabares & d'autres batimens raflemblés ici recurent leur monde le 28 & a 1'entrée de la tuut cette flotille, portant eriyirori 1200. „ hommes,s'éloigna». Lesvents&lecalmefont  ( II > „ coritrariéc, elle a été obligée de fe réfugicr „ a 1'ifle de Choufey & de-la elle eft revenuc a „ Cancale. Cc n'cft qu'une partie remife. „ Parmi les Officiers de la Légion de Luxemr „ bourg, il y a un Indien Mir Seed, officier au „ iervice du Grand Mogol, vcnu en FraMce „ avec M. Chevalier & qui a voulu, a toiïte „ force, aller tuer les Anglois* II s'eft afmat bléd'im beau doliman bleu, qui eft la couleur ,, de runiforme de la Légion, & il n'a de nos„ officiers ■ que les épaulettes. II conferve tou„ jours fon turban avec une bande d'étdffe „ verte, en qualité de defcendant de Mahomet. „ On racontc qu'il difoit 1'autre jour: moi man,j ger cochon, moi boire vin èf par conféquencs ,, moi Chrétien; moi toujours conferver Tur„ ban, paree que moi fang du grand Prophete. „ On vouloit 1'empêcher de s'cmbarquer; mais „ il a fallu céder a fes inftances. C'eft ua ,, homnie d'environ quarante-cinq ans, quiparolt fort vigoureux. Sa réfolution de venir s'inftruire en Europe annonce de 1'efprit & „ de 1'ardeur." 5 Janvier 1781. Les colporteurs commencent a annoncer une Vie privée de Louis XV, avec portraits, en quatre volumes. 6 Janvier. M. Lieutaud, mort le fix Décembre dernier, étoit né a Auxerre en 1703. H étoif le dernier de doüze enfans, le plus foible & le rnoins bien conformé; mais il fut dédommagé par les qualjtés de 1'efprit. Formé fous foij ' A 6  e >- tmcle Garictel, Botairifte alors trés célebre k Aix, fes études fe tournerent naturellement versla médeciiK. Après 1'avoir exereée longtems enprovince, il fut appellé d'Aix a Verfailles en 1750, & établi Médecin de l'infirmcrie Royale Son mérite n'étoit pas encore affez grand pouu avoir percé jufqu'a la cour; fon élevation fut donc la fuite d'une intrigue, dont on a perdula tracé. II fut nommé, quelques mois après, Médecin des Enfans de France, & eft fucceffivement devenu premier Médecin du Roi, & de Monfieur &.' du Comte d'Artois en mêmetemss qui n'ont jamais voulu qu'il les quittat. M. Lieutaud a publié plufieurs ouvrages fur Ia médeciue; des Obfervations fur le cmur c?fur la vejjie; des Effais d'anatomie; un Traité de Tbyfiologie, £fc. II étoit membre de 1'Académie 'Iloyale des Sctences, oü fon Eloge fera traité plus amplement. Au milieu des honneurs dont il fut comblé, ce Dofteur conferva la fimplicité de fes mceurs, fa modeffie & fon amour pour le travail. II ai3üoit les Lettres & s'étok formé une Bibliotheque choifie. Monfieur avoit acbeté cette collecïïon de livres de Ton vivant, & en avoit laiffê la jouifiance a M. Lieutaud. II n'a jamais mérité le reproche fouvent fait 4 fes confrères de prêcher peu d'exemple & d'afmer Ia table & la bonne chere; il étoit fobre & frugal & a été enlevé prefque fubitemcnt & 77 sMjk  C r3 ) 6" Janvier 17S1-. Meffieurs leSefrre & Compagnie ayaht par une Lettre du 4 Décembre dernier foumis au choix de Mademoifelle la Chevaliere d'Eon, le Capitaine, les Officiers & Volontaires qui monteront la Frégate Corfaire qui porte le nom de cette héroïne, en ont recu la réponfe fuivante en date dn 15, digne d'être cortfignée ici par le ton original qui caraétérife les produdions de cette fille célebre. „ J'ai recu, Meffieurs, la nouvelle Lettra „ dont vous m'avez honorée le 4 de ce mois. „ Si j'avois prévu les conféquences qui réfüL„ tent de la réponfë que j'ai cru devoir faire a. „ votre demande gracieufë de nommer unc-de „ vos Frégates, je me ferois bien gardée d'ac„ cepter eet honneur. Les louanges que cette „ déférence m'attire de'votre part, donnent de „ mes talens & de mon mérite une idéé qui ne „ peut s'accordcr avec 1'opinion que je dois en „ avoir. 11 elt vrai que remplie d'un attache„ ment inviolable aux intéréts de Sa Majefté, „ mon zcle pour fa gloire m'a toujours fait dé,, firer d'être utile a ma patrie. II n'y a donc „ qua ce fentiment, fecondé de votre intclli„ gence & de votre intégrité reconnues dans „ votre adminifiration , qui puiflént me décider „ a partager & a m'intéreffer, autant qu'il me ,, fera poffible, dans vos travaux, dont 1'objet „ répond fi parfaitement a ma fa9on de penfer. „ Quant au choix du Capitaine devaiffeau, m des Ofiiciers.& Volontaires, qui déiirent fe di» A 7  C 14 ) £ fiïnguer fur votre armement, je crois, Mes„ fieurs, qu'il fuffit d'ouvrir a nos ïvlarins & a nos Militaires une carrière de gloire & d'utili„ té au Gouvernement, pour les voir s'y pré„ fenter en foule, & acheter'aux dépens de „ leur fortune & même de leur vie, le droit de „ la parcourir; enforte que je regarde ce choix „ comme bien plus difficile a faire par le grand 5, nombre des concurrens, que par le mérite & „ le courage:- qualités naturelles a tous les Mi„ litaires Francois, que je fuis plus dans 'le cas 5', d'applaudir & d'imiter, que de juger. Au .„ furplus, je vous promets de faire tout ce qui „ dépendra de moi, pour répondre a la con„ fiance que vous voulez bien me témoigner i „ eet.égard, d'unc maniere digne de fon objet... „ J'ai 1'honneur d'être, &c. LA c HE VAL IER E D'e o n. 7 Janvier 1781. Les comédiens Francois donnent demain la première repréfentation du Jakux fans amour, comédie nouvelle en cinq aétes & en vers. Le nom de 1'auteur, M. Imbert, prévient pcu favorablemcnt; il eft trog jeune pour traiter a fond un fujet auffi difficile, exigeant une profonde connoiffance du ccKur humain; & fes elfais dans le genre dont il s'agit,n'annoncent pas, a beaucoup près,k talent qu'il faudroit. Ses partifans affurent qu'il y a des vers heureux, des tirades charmantes ; ce qui eft trés po'ffible, mais ne confutue pas 2e öiérite eifentiel d'un pareil ouvrage,.  C H 3 7 Janvier 1781. Extrait d'une' Lettre de Bordeaux du 1 Janvier. „ On vous a trompé , „ ft 1'on vous a dit que M. Dnpaty eut été re* „ cu a plaider la caufe devant la grand'cham„ bre ou les chambres alïèmblées pour 1'admis„ fion de fa requête civile. Au contraire, c'eft „ une gaucherie de fcs ennemis; cars'ilsavoicnt „ pü le faire exclure par un Arrêt ainfi légal & „ que M-même defiroit, l-'expujfé n'avoit plus. „ rien a dire & étoit dans le cas de fe retireiv „ Vraifemblablement ils ont erarat que fon élo„ quence ne [triompMt de leur cabale & qu'ü „ n'entrainaj- pour lui la pluralité des iufFrages.' „ C'eft cette injuftice, ce refus criant de 1'enten" „ dre, qw^euverit--tejuftffieTfpiesvoiesd'aut6„ rité qu'il a été obligé d'employer. Voiciaufur„ plus les faits plus exaérs que vous delirez. „ Le Roi, laffe d'une réfiftance téméraire' a „ voulu être obéir un Edit a prorogé la féance » c|u Parlement; des Lettres de cachet ont été „ diftribuées a tous les membres qui Ie compo„ fent, pour avoir a fe trouver au Palais Ie jour „ qui leur feroit indiqué. M. Bouvard de Four» queux, Confeiller d'Etat, eft arrivé de Paris „ pour cette commiffion importante, qu'il a *» remplie conjointement avec le Maréchal de ,, Mouchy. ils y ont mis tous deux beaucoup „ de douceur & d'honnêteté. M. Dupaty a „ été recuPréfident h mortier, & 1'Arr'êté con„ eernant M. Dufaur de la Jarthe caffé, en ce * que le Parlement n'a pas le droit de pronon,.  ( 16 ) ceraucunepeine contrè lesGens düPvoi avanf, „ que S. M. le lui ait permis. Alors FEdit de 5, prorogation fut révoqué & les Chambres eu„ rent Fair defe féparer; je dis Fair, parcëqu'il „ ell conftant qu'il y a a eu une proteftation „ fecrette contre tout ce qui s'eft paffé: mais „ j'ignore fi c'eft laveille, le jour ou le lende,, main de la féance. „ A la rcntréc le peuple béniffoit le Monar?, que du retour des deux Magiftrats , MM. Dupaty & de la Jarthe. La fermeté modefte de „ ceux-ci contraftoit merveilleufement avec Fair 9, altier de leurs oppreffeurs. Cependant un , bruit fourd ferépandr on redoute denouveaux j, évenemeiis: M. 1'Avocat Général de la Jarthe 5, quitte la chambre du Confcil, oii tous les Magiftrats étoient raffemblés, fuivant 1'ufage, & , fe retire au Parquet: d'un autre cóté, M. Dupaty eft refté dans la falie des manteaux & la Cour délibere. 11 étoit trois heures de relevée, rien ne tranfpire & le public affemblé depuis neuf heures dans la grande Salie du , Palais attendoit le réfultat avec la plus vive impatience. La meffe rouge n'avoit jamais été _ autant retardée. —' Enfin la Cour s'y rend a 3, quatre heures. Le fujet de fa longue déli„ bération avoit été contre les deux Magiftrats qu'il s'agiffoit d'expulfer. On agita long„ tems de favoir fi M. Dupaty, en fiégeant „ avec la Compagnie au rang des Préfidcns „ 5, étoit cenfé immatriculé & faire corps? Après-  s'< bIeiï tIes débats 1'affirmative paffa'. On réfo» lut Pöui' éluder cette difficultd d'affifter a la meffe rouge & de le laiffer confïné a la falie „ desmanteaux, & 1'Avocat général au Parquet. ,, Cet expédient ne rénfllt point. M. Dupa„ ty étoit aux aguets; il appercoit la compah gniefortir & court prendre fa place. M. de Ia Jarthe fe tient fur le feuil de la porte du Par„ quet & fe joint a fes confrères, qui fe rendent „ a la Chapelle. Prefque la moitië des officiers „ étoit reftée dans la chambrc du Confeil. „ Depuis cette époque le Parlement de Bor„ deaux s'eft aflèmblé tous les jours, & fi Ia „ fermeté des plus fages n'en avoit impofé a la „ multitude effrénée, cette Cour auroit infaillibk„ ment pouffé la démence a fon dernier période." 8 Janvier 1781. La comédie Italicnne, malgré les fréquentes nouveautés qu'elle donne fans relache depuis longtems, ne peut empêcheï qu'ou ne remarque le vuide laiffé fur fon théatre par la perte de d'Heles mort le 27 Décembre^ dernier. Né d'une familie Angloife diftinguée, il étoit d'abord entré au fervice & avoit été envoyé a la Jamaïque, 011 il. refta jufqu'a la fin de la derniere guerrc. II voyagea enfuite, & paffa plufieurs années en Italië. Venu a Paris vers 1770 & fe trouvant dans la détrefïe pour s'étre liyré avec trop d'ardeur aux plaifirs de cette capitale, il chercha dans les Lettres une reffource contre rinfortunc. S'étant lié avec M. Gretry, qui goütoit fon genre de travail & k trouvoij  C« i8 ) pröpre a lui échauffer le génie, celui-ci Ie pré-! fenta a Madame de Monteflbn. Cette femme illuftre, amie des arts, les cultivant, les accueilIqpt dans fon palais, fut enchantée de M. d'Hele & voulut faire jouer fur fon théatre le Jugement de Midas, comédie relative a Ia révolution que notre mufique venoit d'éprouver. Elle eut beaucoup de fuccès dans la fociété de Madame de Monteflbn, & fe foutint fur le théatre de la comédie Italienne. L''Amant j'aloux, autre piece du même auteur, dont elle futfuivie, acheva fon triomphe. Les Evenemens imprivus esfuyerent plus de cóatradiction. Docile & de bonne foi, d'Hele les retira, profita des critiques & fit reparoitre fon ouvrage avec des changemens qui lui concilierent les fpectateurs les plus difficiles. En général, les comédies de cepoëte font fortement intriguées; 1'action en eft vive & chaude & Fintérêt agréable. Ses vers font un peu Mches ; le ftyle de fa profe n'eft pas toujour* trés pur: mais fon dialogue eft naturel & prcffé. On peut Ie regarder comme créateur fur la Scène Italienne d'un genre a lui, qu'il auroit encore plus perfeélionné fi Ie tems le lui cüt permis. Attaqué de la poitrine, le départ A'Argentine dont il étoit amoureus fol, lui a porté le dernier coup: il a accéléré une mort que eet homme paffionné auroit préféré de recevoir dans les bras & au fein de la volupté. - 9 Janvier. Le Jaloux fans atnour , nonfeulement n'a eu aucun fuccès, mais a été hud  C i* ) £ peu prés depuis le commencement jtflqufö Is in. Cet excès de dégout du public fournit un prétexte a 1'auteur «Sc a fes partifans pour dcmander une feconde repréfentation. Ils prétendent n'avbir jamais vuderepréfentationplusfcandaleufcment orageufe que celle-ci, & ils attribuentau tumulte la difgrace de la piece remplie, difent-ils , de détails brillans & dont 1'action rallentie par d'autres déplacés & trop longs fera plus chaude & plus faillante quand elle en fera dégagée. On peut afiurer d'avance que ce fera toujours une trés mauvaife comédie, un caractere vague, efquiffé d'une facon triviale; de petits moyens & une intrigue fans combinaifon & fans effets. 9 Janvier 17S1. Extrait d'une Lettre de Bordeaux du 4 Janvier. „ Un trait de M. Dupaty „ qui mérite d'être confervé, vous prouvera „ combien ehez lui 1'intérêt public 1'emporte fur 1'intérêt particulier. Par un ufage rcfpecta„ ble, l'Audience de la Rede, eft cpnfacrée a la „ délivrance des prifoimiers que des événemens „ malheureux, de légeres fautes retiennentdans „ les liens. L'inftant approchoit de ce jour de „ grace & d'humanité; M. Dupaty qui n'accs„ fc d'entrcr au Palais, mais prefque toujours „ feul, craint de laifler échapper ce moment fi „ défiré pour tant d'infortunés, plus èi plaiudre „ que coupables. II fe préfente a la Tournelle dont il étoit & annonce aux autres Officiers a, que, pour ne point éluder 1'effet de 1'audience » fokraneUe qui va fe tenir yaceljainnient, il. fe  s, retire, en proteftant qu'ou ne doit attribuer 91 fa retraite qu'a un motif de compaffion & qu'il „ fe réferve le droit de rentrer dès que fon de„ voir le rappellera a fes fonétions." 10 Janvier 1781. L'Ecole Royale Vétérinaire devient de plus en plus 1'objet de la curiofité, non feulement des nationaux, mais des ëtrangers. La colledlion anatomique de cette maifon royale eft la plus iritéreffante qu'il y ait en ce genre, en ce qu'on y trouve une piece rare ou plutót unique & quicertainement n'exifte dans aucun des Cabinets de 1'Europe; c'eft la Nevrologie toute ehtiere du cheyal, fans aucune folution de continuité. Ce chef- d'oeuvre anatomique paffe pour être 1'ouvrage de M. Flandrin, ancien Directeur de FEcole Vétérinaire de Lyon & maïntenant attaché a celle de Paris. 11 eft neveu de M. Chabert, Directeur actuel de celle-ci & le fucceffeur du fameux Bourgelat. 11 Janvier. Malgré le peu de fuccès du Bonnet magique, les couplets fuivans méritent d'être coufervés. Life a douze ans demanda fes étrennes, Et fa maman lui donna des rubans; C'étoit bien peu; mais chaque age a les fiennes: C'étoit bien peu; mais Life avoit douze ans." Life a treize ans demanda fes étrennes, On lui donna des almanachs chantans; Du Dieu d'Amour el!e y vit les frédaines: Elle en fourit, car Life avoit treize ans.  C 21 j A qtmorze ans Life pour fes étrennes -Choifie Colin, Ia perle des amans; Mais ia maman fe moquoit de fes peines, En lui difant, tu n'as que quatorze ans. Life a quinze ans ne recut point d'étrennej, Mais rhymen vint appaifer fes tourmens; II étoic tems qu'elle donnat les fiennes Et fon époux eüt un cceur de quinze ans. 11 Janvier 1781. Mlle. Cécile, rentrée h l'.opéra, comme maltreffe de M. de la Ferté In tendant des Menus & Commiffaire du Roi ea cette partie, a reparu dans le Prologue de Silvtet depuis qu'on 1'a joint au Seigneur bienfaiJant Elle a recu les applaudiffement les plus yifs & a beaucoup acquis dans eet interval!" contre 1'ordinairc; elle faifoit déja les délices du théatre Lyrique & en eft anjourd'hui 1'admiration. 12 Janvier. Extrait d'une Lettre de Strasbourg du 2 Janvier. „ La Pyramide triaüeu„ laire du Maréchal de Turenne , dont les „ proportions ont été données peu exaftement, ii aura 27 a 29 pieds de hauteur., au lieu de „ 16, & la Grille de fer qui fermera 1'enceinte m Gu dle fera Pofee, en aura 72, au lieu de », 25- II faut ajouter que s'il ne fe trouvoit » Pas dans lc Régiment At-Turenne, un fol„ dat vétéran Invalide, en état de venir occü„ per la maifon & s'acquitter des foins que le „ local exige, on le prendroit dans le Régiment )} de Rohan.Soubize." 12 Janvier. Mémoire prifmi au Roi & dfin  Co-nfeil en 1780 , par Meffieurs les Députés cf Procureur général Syndic des Etats de Bretagne è la Cour, fur le droit que les Etats ont toujours eu d'élire librement leurs Députés: précédé de la Délibératien des Etats qui en ordonne l'impresJion, Ê? de VArrit du Confeil du premier Mars 1777. Tel eft le titre d'un nouvel imprimé arrivé de Bretagne & dont le Gouvernement fefoucie peu de voir les exemplaires fe répandre dans ia capitale. On dit Pouvrage trés bien fait. 13 Janvier 1781. M. Maloet, homme de lettres, autant qu'eftimable médecin, trouvant le vers bexametre de M. Delaftre fur 1'Impératrice Reine trop languiffant, 1'a changé en un pentametre, pour y jetter plus de vivacité & d'é.nergie. II faut rappeller le premier, afin de jnieux les comparcr: Femina front e pat et, Vir peiïore, Diva decore. Voici le fecond: PeSlore Vir, vuku Femina, mente Dea. Quelques gens préferent celui-ci; ccpendant ï\ manque de la gradation d'idées & d'images 9 qui fait la principale beauté de 1'autre. M. de Sancy, qui a découvert le vers de M. Delaftre, a efïayé de rcndre ainfi en Francois J'un & 1'autre ; " Coeur male, air de Venus, fageiTe de Minerve. , IIfaut avouer que, jnalgré ce laconifme, le  C =3 » ■Latin perd beaticoup a la traduclion & qu'elie eft bien inférieure a 1'original. 13 Janvier 1781. Depuis la defcei;te extraordinaire faite a Jerfey, M. de Rullecourt eft aujourd'hui 1'entretien de Paris. II eft d'Artois. C'eft le fils d'un Secrétaire du Roi, qui s'eft lïgnalé de bonne heure par fon étourderie & s'eft fait décrëter au Parlement de.'Douay. II étoit allé en Pologne lors des troubles de cette Répu. blique & avoit été a la veille d'y être pendu. C'eft un roué dans toute la force du terme, abtmé de dettes & payant fes créanciers a coups de fabre. Ne fachant oü donner de la tete, il s'eft mis k la tête de ces volontaires de Ltixembourg, gens de fac & de corde, qui ont pillé tout le pays oü ils ont paffé en Normandie. II n'eft pas étonnant que des *bandits de cette efpece aient fait un coup de main; mais toutle monde eft perfuadé qu'il ne réuffira pas & qu'ils ne feront pas foutenus. II court même des bruits déja que 1'expédition eft manquée. On parle d'un procés verbal dreffé a Granville fur le retour de 1'arriere - garde de la troupe & de 1'artillerie, Onajoute que 1'Officier qui 1'a figné, avoit encore une telle frayeur que Ia main lui trembloit. 14 Janvier. Dans le Mémoire des Etats de Bretagne annoncé, on expofe ainfi le fujet de la querelle -!vec M. le Duc de Penthievre. Les Etats crurent pouvoir uferfans crainte en 3776 d'un droit qu'ils avoient paifiblement exercé en ijYq: ils nommerent des Députés qui  e *4 ) •ïïlivoient point été recommandés par le Gouvet* neur. Les Commiffaires du Roi leurfirent notifier une déclaratión, qui leur annoncoit que S. M. nerecevroitaucuns autres Députés a la cour & ne permettroit pas qu'il en afliftat d'autres a la Chambre des comptes, que ceux qui avoieitt été recommandés. Les Etats Te trouverent dans la cruelle alternative d'abandonner leurs droits qui n'avoient point encore pu être examinés & jugés par le Confeil, ou de perfévérer dans une délibération qui pouvoit feule les maintenir. Ils fe bornerent a faire des repréfentations pour obtenir le retrait de la Déclaratión; il fut refufé : ils protefterent pour conferver leurs droits contre cette Déclaratión & contre la défenfe notifiée aux Députés de la Nobielfe &. du Tiers de fe rendre a Paris, Ils crurent devoir faire une défenfe particuliere au Procureur Général Syndic de faire aucune fonction fans le concours 'des Députés. Ils nommerent, non plus des Députés pour gérer les affaires de la Province, mais'des Procurateurs, pourdéfcndre au Confeil la légitimité des Députés. La nomination des Procurateurs étoit tellement néceffaire & indifpenfable, que le Roi ne crut pouvoir prononcer fur le droit réclamé par la Province, fans 1'intervention des Etats. Le Confeil fut obligé de refter pendant deux ans dans le filence. Depuis 1'ouverture des Etats S. M. a perfifté dans Ie defir de ne les entendre que par les Députés recommandés par le Gou- vcr-  • C =5 ) verneur: les Etats fc font conform és a la volonté du Monarque; ils les ont nommés & ils les ont autorifés a accepter la recommandation du Gouverneur, feulement afin de pourfuivre au Confeil la décifion de la conteftation. Voila oü les chofes en étoient, lorfque leMémoire a paru. Ce qu'il y a de fingulier, c'eft que M. le Duc de Penthievre femble par fon filence défavouer la prétention & attend la décilion fans comparoir. Ce Mémoire trés bien écrit, avec la dignité qui convicnt au corps qu'il défend, eft cependant tres modéré & rempli du refpect des Etats pour leur Gouverneur & de leur haute vénération pour fes vertus. 14 Janvier 1781. Nous avons négligé d'annoncer un Cours de commerce qui fe fait aux Confuls, dont 1'objet eft en réuniffant Ia théorie a la pratique, de rendre plus fertile cette fource de 1'opulencc des Etats. C'eft M. Benoit, homme trés eftimé dans fa profeffion, qui s'eft chargé de ce Cours. II a prononcé le 4 Novembre dans la falie d'audience du Confulat un difcours d'ouverture trés intéreffant & qui mérite d'être mnniment plus connu que tant d'autres difcours aumemiques, vagues & lans utilité. En voici un paragrapne. „ Nous vous parlions, Meffieurs, il n'y a „ qu'un inftant, des Monarques, nos fuprê„ mes Bienfaiteurs. Et a qui devons-nous plus „ d hommages & de reconnoiffance, qu'au Sou. Tume XFlh g  C sö ) ,, verain afïis aujourd'hui fur le tróne ? Voila le „ rigide défemeur des loix , leur ange tutélaire. Oui, Meffieurs , fes premiers foins ont été ,, pour la confervation & les progrès du Com9, merce. II s'eft armé du glaive; ce n'eft point 3, pour fe couvrir d'une gloire flérile, pour ra5, vager, pour conquérir de vaftes domaines, 5, c'eft pour défendre & foutenir les droits du 5, Commerce, & en affurer la liberté a la Fran3, ce & a 1'Europe entiere ; non content de nous 3, protéger, il nous crée des appuis dans de s, digncs Miniftres qu'il infpire: c'eft fous fes „ glorieux aufpices qu'ils font chargés d'examiner fes Ordonnances fur le Commerce & 5, de dreffer un nouveau Corps de Loix & de 3, Régiemens. Puiffe mafoible voix fe mêler aux „ acclamations publiques pour bénir un Regne 3, qui annonce tant de fplendeur au Commerce." 14 Janvier. Extrait d'une Lettre de Tours du 10 Janvier. „ M. Rougeot, Maitre de des3, fin de cette ville, ehthoufiafte de fon art & j, convaincu du befoin que tous les autres, & furtout les plus utiles, tels que la menuifciïe, „ 1'orfevrerie, la ferrurerie, &c. ont de lui, 3, ouvrït, ily a trois ans. fon Ecole k tous les 3, jeunes gens qui pouvoient manquer de quoi „ fe procurer ce fecours; il ne tiroit de fon 5, travail journalier que de quoi fournir aux frais 3, indifpenfables du local , du Iuminaire , du „ chauffage, &c. Le defir de fervir fes conciw toyens 6; d'acquérir la forte de gloire conve, 95  C *7 ) r, nable h fon entreprife, étoit le principal nio„ tif de fa générofité. Le Gouvernement vou„ lant reconnoitre fon zele & éclairé par eet es„ fai fur les avantages d'un pareil établilfement, „ vient d'ériger en Académie Royale 1'école „ gratuite de defliu ouverte par M. Rougeot. „ 11 lui a accordé 500 livres d'appointemens , „ dont deux années payées d'avance. Notre „ ville n'oubliera jamais le nom de ce fondateur „ patriote & , fans doute, les autres villes commercantes profiteront de Pexeinple qu'il >, leur donne." 15 Janvier. 'Extrait d'une Lettrc de Rennes du 12 Janvier. „ Je vous envoye pour joindre y, au Mémoire imprimé des Etats, des Ohjer„ vations du fecond Ordre de la Chambre de >, l'Eglife fur VArrk du Confeil des Dépêches „ du 4 Novsmbre 1780, lu d l'ajfemblée des „ Etats." Comme elles ne font que manufcrites, elles en deviennent plos précieufes: leur précifion & leur énergie les font d'ailleurs regarder'comme un chef-d'ceuvre. „ La deftruétion du Droit naturel des Etats de „ Bretagne, la difcuffion des moyens aemployer „ pour Ton rétabliffement, & pour exprimer la „ douleur vive & profoude de 1'affemblée, ont ,, dü feuls occuper hier tous les membres des „ Etats. r •>•> Le tai de la Patrie doit toujours être una„ nime; c'eüt été le troubler & en affoiblir 1'é„ nergie, que d'y mêler dans le premier momenc B 2  C ) les plaintes particulieres fur les infracrions faites a leurs droits. „ Nous ignorons quelle marche diétera aux 5, Etats leur fageffe relativernent a 1'Arrêt du 4 „ Novembre. „ La liberté détruite & mife jufques au toms, beau,obfervera-t-elle le filence de la mort? Ou „ bien employerons-nous ce qui nous refte de forj, ce pour faire les juftesréclamations des Etats? Dans ce dernier cas, le fecond Ordre du „ Clergé ne pourra fe difpenfer de joindre fes 3, plaintes perfonnelles a laréclamation générale. ,, Pourrions-nous n'être pas vivement affectés de 1'exclufion formelle & de droit a la grande „ Députation prononcée contre noüs par 1'Arrêt „ du Confeil? ,, Heft vrai que depuislongtems nous en fom~ „ mes -exclus par le fait. Mais des exemples ne font pas des loix. A ces exemples modernes nous avons a oppofer des exemples anciens. S) Nous citerions entre autres ceux de Mathu„ tin de Mentale, Abbé de Saint Melaine de „ Rennes, & de Jean le Provot, Chanoine & „ Tréforier de 1'Eglife de la même ville, qui dans les tems les plus difficiles remplirent „ avec fuccès les fonétions honorables & péni„ bles de la grande Députation. „ Ces fonftions, dans d'autres pays d'Etats, „ tels que la Bourgogne & PArtois, font enco„ Te remplies aujourd'hui a 1'alternative par les i, membres du premier Ordre, les Abbés & les  ( *9 ) „ membres des Chapitres. Enfin tous les Ré„ glemens qui font le texte de la Loi, nous „ confervent expreffement notre droit, & fi nous „ fommes rarement élus, nous étions des trois „ Ordres, de 1'aveu même du Gouvernement, „ toujours reconnus & déclarés éligibles. „ Nous conviendrons fans peine que dans bien „ des circonfiances il peut être avantagéux que „ le choix de 1'affemblée fe" fixe fur un des membres du premier Ordre. Les égards düs „ a leur dignité, a leurs talens, a leur mérite connu & récompenfé par le Souverain lui-mê„ me, doivent leur donner chez les Miniftres „ un accès plus facile & augmenter les moyens „ pour le fuccès & la prompte expéditïon des „ affaires: mais dans cette circonftance même „ nous ne négligerions rien pour que notre zele fuppléat a notre crédit. „ Les membres du premier Ordre favent tous „ que les places que nous occupons aujourd'hui „ leur ont fèrvi de degrés pour parvenir aux „ plus éminentes qu'ils occupent. Us fe rap„ pellent tous le zele dont ils étoient animés „ pour le Peuple, pour le Souverain, pour la „ Patne; ils reconnoiffent, ils applatidiflènt en „ nous les mêmes fentimens. „ Nous ne doutons pas qu'a ce titre ils ne „ veuillent bien foufcrire eux-mêmes h nos ju4, fles réclamations, & approuver le zele qui „ nous rend jaloux de partager avec eux 1'ho„ norable fonélion de porter aux pieds du ïrdB 3  C 3° ) ne ies Supplications 'des Etats & d'être les „ organes du Peuple auprès du pere de la patrie.. ,, Cette perfuafion a été pour nous un nou5, veau motif de commencer a faire part au pre,, mier Ordre de notre Arrêt de réclamation, fi „ les Etats fe déterminent a en dreffer une au s, Roi fur 1'Arrêté de fon Confeil du 4 de ce „ mois." Ces Obfervations convenues entre tous les membres du fecond Ordre , ont été fuivant leur veeu lues en pleine chambre de 1'Eglife le 10 Novembre 1780. 16 Janvier 1781. On a parlé plufieurs fois de 1'ét-ablilfeinent des Ecoles Nationales deM. le Comte de Thélis, qui peuapeu acquierent quelque confiftance. Dans une Lettre du 17 Décembre dernier, il répond a des objeclions qui lui ont été fakes.. i°. L'on lui a repréfenté d'abord que c'étoit aller contre fon but que d'approcher les enfans du féjour de. la corruption, en les occupant aux environs de Paris, cette Babylone nouvelle, ceutre des crimes , de la débauche & du fcandale. 11 parolt qu'il a fenti eet inconvénient autant que perfonne, maïs il favoit aulli que ce n'efl qu'en frappant les yeux de ceux dont il vouloit avoir •les fecours qu'il pourroit les obtenir & il fe propofa bien après le fuccès de fon établiffement parfaitement confolidé, de fouftraire fes éleves aux dangers qui les. environnent ici de toutes parts^ 20. Eulüite il a recu dans fes écoles beaucoup  ( 3i ) d'enfans de douze a treize ans, paree que fon principal but eft de travailler k la réformation des moeurs publiques, en donnant auxenfans du peuple une éducatiou chrétienne & patriotique, éducation dont ils font plus fufceptibles a mefure qu'ils font moins avancés en age. 30. Mais il en a réfulté plus de lenteur dans la confeftion des cbemins, auxquels les enfans font cccupés. De-la l'indiffe'rence ou la critique d'une multitude de perfonnes qui, croyant 1'argent mal employé a favorifer un établifiement dont les travaux leur fembloient trop foibles, ont refufé d'y contribuer par cette raifon. 11 a également fenti la force de ce reprocbe , qu'il croyoit balancé par les avantages d'une bonne éducation donnée a la nobleffe pauvre & aux enfans de la claffe du peuple, qu'elle rendra fingulierement propres a 1'agriculture, lorsqu'ils n'auront point de vocation pour 1'état militaire. Afin de le prévenir déformais, M. le Comte de Thélis fe propofe de choifir un certain nombre d'éleves plus agés, & de n'en point admettre d'autres qu'il n'y ait des places vacantes pour leur Age. Voici le nouvcl arrangement. Chaque chambrée fera compofée de feize éleves, dont deux enfans de douze ans, deux de treize & ainfi de fuite jufques a vingt. Le premier plan avoit été de donner pour chefs aux enfans de la feconde claffe d'anciens fergens ou foldats éprouvés du cóté de la religion & des B 4  ( 3* ) moeurs; 1'expérience ayant fait connoitre qu'ils u'avoient pas toujours les qualités requifes pour eet emploi, ils feront confiés déformais aux gentilshommes les plus agés de 1'école. L'auteur du projet apprend au public qu'en Berry on vient de fupprimer les Corvées & de propofer une foufcription pour les établiffemens utiles de la Province; que les propriétaires ont déja offert prés de 120,000 livres payables en fix ans. Exemplé mémorable qu'il cite aux Parifiens afin d'èxciter leur zele. II ne demande aujourd'hui aux bienfaiteurs des écoles nationales qu'une fomme de 12 livres. Comme rien n'eft tel que la préfence de 1'objet, M. le Comte de Thélis a profité du renouvellemement de 1'année & le deux Janvier 1'Ecole nationale de Paris eft allée rendre hommage k M. 1'Archevêque de Paris, a M. le Garde des Sceaux, au Miuiftre de la Guerre & a Mesfieurs les Maréchaux de France. 17 Janvier 1781. On a parlé plufieurs fois de M. Sage, comme d'un Chymifte trés eftimé, faifant des Cours gratuits & le Profeffeur k la mode de cette fcience, a laquelle veulent aujourd'hui s'initier les gens les plus frivoles, les petits-maitres, les femmes, 'les militaires, &c. Dans le Cours de fes expériences il a cru en avoir fait de propres k introduire du doute fur l'art a£iuel d'ejjayer Vor ê? Vargent., & il a compofé un ouvrage fous ce point de vue qui excite des réclamations. Quoique membre de 1'Aca-  ( 33 .) 1'Académie des Sciences, il ne s'eft point décoré de ce titre- a la- tête , n'ayant point Ia fanction dc fon corps. On lui veproche d'y avancer une doctrine contraire aux faits, capable d'inquiéter le commerce des matieres d'or & d'argent & renfermant en outre des perfounalités contre un confrère eftimable , M. Tiilet, Commiffaire du Roi pour les Effais & Affinages du Royaume. En conféquence fon livre fait bruit dans le monde favant & y caufe un grand fcandale. ' 18 Janvier 1781. L'indcftmctibilité reconnue de l'or|& dc 1'argent par le feu, donne la faculté de les féparer des autres métaux qui leur font alliés, foit par la voie feche, foit par la voie humide: ces deux ope'rations font, 1'une la coupellation , 1'autre le départ. Faites en grand , elks conftituent 1'art de 1'Affineur,' en petit celui de 1'Effayeur. Tel eft le fujet de 1'ouvrage de M. Sage. On croyoit que 1'art de rEffayeur, pratiqué ndceflairement chez toutes les nations depuis 1'ufage de 1'or & de 1'argent comme fignes repréfentaiifs de toutes les denrées, intércffant a Ia fois le Commerce, la Politique & 1'Avarice, devenu ainfi un art de première néceffitd chez les peuples policds, auroit atteint a la perfection depuis longtems. M. Sage a découvert le contraire; il a allarmé radminiftration fur le procddd ufitd dans les monnoies] pour le -départ. 11 prétend que 1'acide nitreux, employé a cette opération, diffout 1'or. Le Miniftre des -finances B i  C 34 ) a confulté fur eet objet important 1'Académie des Sciences & dans ion affemblée du 22 Décembre dernier, elle a décidé, fur le rapport de la claffe de Cbymie, que Popération. des Effais d'01-, telle que les EH'ayeurs Ia font journellement, eft trés exacte, & qu'il n'y avoit rien a y changer, paree qull ne réfultoit aucune disiblution de 1'or, quoique 1'eau forte que 1'on employat, fut portée a un haut degré de concentration. On reproche k M. Sage d'avoir eu 1'imprudence de prévenir par la publicité de fon livre le jugement de fa Compagnie, paree qu'il fentoit d'avance qu'il lui feroit contraire. On lui reproche de fe trap laiffer guider par fon zele & fon ardeur d'innover, d'avoir cherché a fe faire des profélytes par des affertions plus hardies qus juftes, de n'avoir voulu être le difciple de perfonne & de s'être fait des principes a lui. 19 Janvier 1781. Les comédiens Italiens avoient donné en 1778,. le Porteur de chaife-, Opéra comique, dont les paroles font du Sieur Monvel & la mufique du Sr. Defaides. Cet ouvrage affez gai n'eut alors qu'un médiocre fuccès. Les. auteurs n'ont pas voulu y renoncer. Ils Pont reproduit le 11 de ce mois avec des changemens; ils en ont déguifé jufqtFau titre & ont fubftitué d'abord celui de Jerome 6f Chanir fagne, ou le Porteur de chaife. Enfuite ils Tont refferré de deux actes en un:. mais il n'a 3?a& été mieux accueilli & le fpeclateur a para.  C 35 ) defirer encore beaucoup de facrifices'. II y a trop peu de fond dans le poëme & la mufique n'eft pas affez faillante pour remplir le vuide. 19 Janvier 1781. Le Sicur Préville , après une abfence de plufieurs mois , pendant laquelle il avoit fait courir le bruit qu'il étoit mort, pour fe rendre plus intéreffant, a enfin reparu le 15 de ce mois dans Turcaret & le Mercure galant. Au lieu de 1'accueil froid qu'il auroit dürecevoir du public, pour s'être ainfi fouflrait a fotï devoir, le public s'eft lahTé aller a fon enthoufiafme & 1'a applaudi comme il applaudiffoit autrefois le Kain a chacune des dix ou douze repréfentations par an qu'il daignoit accorder k fes admirateurs. 19 Janvier. Madame la Comteffe de Beau-liarnois, virtuofe trés renommée par fon goüt pour les Lettres & pour ceux qui les cultivent, ayaut adreffé le 20 Novembre dernier au Roi dePruffe une Epitre au fujet de la grand'meffe ehantée a Breslau pour le repos de 1'ame de Voltaire, critique indirecte de la conduite du1 Gouvernement de France,. en a recu la réponfé fuivante, en date de Berlin le 5 de ce mois.. „ Madame la Comteffe de Beaubarnois, FE» ,-, pitre que vous avez la bonté de m'adreflcr' par votre Lettre du 20 Novembre de Paimée „ dernierefur la. grand'meffe ehantée 4 Bres„ lau pour le repos de 1'ame de Voltaire, vient „ de m'être préfentée; elle réunit a beaucoup' . „ de facilité le goüt qui caraccérife le génied'ua B 6-  ( 36 ) „ fexë aimable, & Voltaire lui-même ne man„. queroit pas de vous en faire compliment, en „ joignant fon admirarion a la mienne. Je me „ borne a de fimples remercimens, priantDieu „ fur ce,Madame la Comteffe deBeauharnois, „ qu'il vous ait en fa fainte & digne garde." (Signé) Frederic. „ A Berlin le 5 Janvier 1781." 20 Janvier 1781. M. Sage, piqué des Iecons que lui a données au nom de 1'Académie M. le Marquis de Condorcet dans différens articles inférés au Journal de Paris qu'on lui attribue, n'a pas voulu fe rcndre a la décifion de fon corps. En oppofition aux expériences faites par MM. Macquer , Cadet, Lavoifier , Baumé , Cornette, Bertholet, il en a pratiqué d'autres hier devant fon aflemblée compofée de plus de fix eens perfonnes, pour démontrer que 1'acide nitreux diffblvoit plus ou moins d'or, fuivant fon état de concentration. II n'avoit eu garde d'annoncer publiquement fon projet, dans la crainte que 1'Académie ne 1'empêcMt de 1'exécuter; mais il avoit fait avertir fous main fes adeptes, qui, comme 1'on voit, s'yétoientrendus en foule & ont publié & attefté 1'excellence & 1'exactitude des obfervations de leur maitre. Ce fyltême, au furplus, n'efl pas feulement celui de M. Sage; il 1'eft auffi de plufieurs chymilles modernes d'une réputation bien méritée, tels que MM. Brandt, Schjeffer & Bergman! Mais la queflion que 1'Académie étoit priée dé  C 37 ) réfoudre, concernoit particulieremerit 1'opératiorj du Départ pratiquée aux monnoyes , c'eft-a-dire la féparation , avec toute 1'exactitude dont la Phyfiqué eft fufceptible, de 1'or & de 1'argent affiés enfemble : fondée fur la propriété qu'a 1'acide nitreux de diflbudre parfaitement 1'argent & de ne point diflbudre 1'or, il s'agiflbit de favoirfi Ia" ddcouverte de ces novateurs pouvoit influer fur la mdthode ufitée dans le départ d'effai & c'eft a la folution ndgative du problême que 1'Académie s'eft bornde jufqu'A préfent. L'indocilité de M. Sage & fa mauvaife foi en ne prenant pas 1'état véritable de la queftion indifpofent fort 1'Académie contre lui. 20 Janvier 1781. Si M. le Comt'e d'Eftaing de retour de fa campagne continue a fe plaindre de 1'infubordination du grand nombre des Officiers de la Marine, il rend juftice a ceux qui le méritent. On en pourra juger par fa Lettre fuivante a Mï de Caftries. „ M. le Marquis de „ Vaudreuil a donné une nouvelle preuve de „ fon zele & de fon bumanité, en offrant 70 „ quintaux de bifcuit & 20 barriques de vin, „ que j'ai fait remettre a VAmphion, il y a „ quatre jours, pour 1'ufage des Latimens „ marchands." „ J'ai remercié eet Officier général au nom. de S. M. de cette action, que j'ofe efpérer, „ Monfieur, que vous trouverez digne d'être „ mife fous les yeux du Roi. C'eft un nouvel ,, hommage que je m'emprefle d'ajouter a ceux B 7  C 33 3 que j'ai déja rcndus aux talcns & a la fermere* „ de M. le Marquis de Vaudreuil, après ma „ derniere campagne." Les armateurs & négocians de la Ville de Nantes, ont fait préfenter par les Députés du Commerce de Paris, une Lettre de remerciment a M» le Marquis de Vaudreuil, pour lui témoigner leur jufte reconnoiffance. 21 Janvier 1781. La féance publique de 1'Académie Francoife pour la Réception de MM. le Miere & Comte de Treffan eft enfin fixée au 25 de ce mois. Ce dernier avoit, dit-on, élevé des tracafferies de vanité , qu'il a fallu appaifer; il ne vouloit pas avóir une féance commune avec fon confrère. 21 Janvier. Quelques pcrfonnes qui ont déja lu la Vie privée de Louis XV en femblent affez contentes. Elles affurent qu'en y repréfentant ce Monarque fous l'afpect philofopbique de rhomme, on n'a négligé aucun des faits remarquables de fon Regne & que tous y font rapportés avec plus ou moins de détails, fuivant les proportions convenables. On trouve dans les pieces qu'on y a jointes en nature , des morceaux trés curieux, tels que le Mémoire du Parlement contre les Ducs 6? Pairs, la Lifte des Taocés d la Cluimbre de juflice, les Philippiques dans leur plus grande exaétitude & étendue, avec desNotesintéreffantes, &c. &c. Ce livre ie vénd trois Louis, quant a préfent. 21 Janvier.. La querelle élevée entre. M. de  C 39 ) Vifmes, le Directeur de 1'Opéra, & M. Map. montel, 1'entrepreneur de la refonte du poëme è'Atys-, dont M. Piccini devoit refaire la rnuü> que , obligea celui-ci d'abandonner eet ouvrage déja commencé, par les hnutesprétentions du Poëte, qui voulok pour fon raccommodage les mêmes honoraires que pour un opéra fait a neuf. M. Dubreuil alors préfenta au Muficien Italien fon poëme d'Ipbigénie en Tauride. M. Piccini n'ignoroit pas que le Chevalier Gluck avoit emporté a Vienne un poëme de M. Gaillard fur Ie même fujet. En conféquenee, malgré 1'ufage de fon pays, oü trente compofiteurs travaillent quelquefois fur le même ouvrage,- il refufa le poëme; on 1'affura, on lui prouva même que M. Gluck dégoüté renoneoit a revenir en France, tant que fubfifteroit la nouvelle adminiitration de 1'Opéra: ilcéda ;.il acbevoit fon troilieme acte,lorfque le muficien Allemand arriva comme la foudre & fit jouer fon Iphigénie en Tauride: il fallut renoncer a fon projet. Mais aujourd'hui que le fuccès dc fon rivai, confirmé depuis deux ans, ne laiffe plus rien a craindre k M. Gluck, M. Piccini croit pouvoir hafarder k fe montrer, d'autant mieux qu'il aflTure qu'il n'y aura pas dans les deux ouvrages deux morceaux qui fe reffemblent. Tels font les faits dont il a cru devoir inflruire le public avant de fe faire jouer, ce qui dok avoir lieu inceffamment. 22 Janvier. L'Ifle de Malthe, fondée furun roe prefque dépourvu de terre, n'a qu'un feisl  C 40 ) cimetiere, 011 les caveaux de 1'églife de Saint D tnipiquc dans la Cité Valette, conftrüite en 1567. Lc tremblement de terre du mois de Janvier 1730, a rendu'indifpenfableladémolition dc oCttB églife. Le College de Médecine & de Chirurgie, aulïï bien que le Bureau de Santé établi a Malthe, ont prononcé qu'une reconftruction fur les ruines de 1'ancienne églife pouvoit avoir les fuites les plus facheufes; ils ont infifté fnr la néceffité de murer les caveaUx, & de prendre les plus grandés précautions pour empêcher que dans la démolkion on n'enfonce quelques-uns des pavés qui les recouvrent. D'après eet avis le Confeil de la Religion a Malthe a propofé plufieurs queffions, que M. FAmbaffadeur a été chargé de communiquer a la Société Royale de Médecine, ainfi qu'aux Facultés de Médecine de Paris & de Montpellier. Celles-ci ne le lont pas encore expliquées; mais la première, dans la féance du 5 Décembre, s. doniié fa réponfe, dont il réfulte : 10. Que Pon a pris un paiti trés prudent en défendant d'ouvrir & faifant murer les caveaux de 1'églife de Saint Dominique, h raifon des . dangereux effets des fouilles & des exhumations précipitées, prouvés par une multitude d'accidens & d'obfervations. ao. Qu'il faut encore laiffer écouler un quart de fiecle avant de fouiller le terrein oü font les caveaux; enforte qu'il y aura environ 128 a Ï29 ans, depuis la pefte de 1676.  ( 41 ) 3°. Qu'il ne faudra pas même alors öuvrir ces caveaux fans les plus grandes précautions que la Sociétéindique;fages & favans procédés qui peuvent fervir de regies dans tous les cas femblables. 40. Enfin qu'on ne fauroit, en général, trop éloigner les tombeaux des églifes & des villes; précaution fuggerée par toutes les lumieres de ia raifon , fondée fur les autorités les plus refpectables, fur les exemples les plus funeftes, & qu'il eft a fouhaiter qu'un abus auffi dangereux, repugnant même h la dignité & a la pureté de nos temples, foit détruit entierement & a jamais. 22 Janvier 1781. On affure que M.IeComte de Treffan a effeótivement écrit une Lettrc a. 1'Académie Francoife, pour demander que fa réception n'eüt pas lieu le même jour que celle de M. le Miere, ou du moins pour avoir une tribune particuliere , afin que Madame la Comteffe de Treffan & fa compagnie ne fuffent pas confondues avec la femme de fon confrère & fa fociété. On ajoute que M. d'Alembert lui a répondu au nom de la Compagnie, qu'elle n'admettoit aucune diftmftion de rang & que fa délicateffe étoit trés mal placée; que M. le Prince deBeauveau n'avoit pas répugné a être- recu avec M, Gaillard & que Madame la Princefle de Beauveau s'étoit fait un devoir de faire les honneurs de la loge a la fceur de M. Gaillard. Madame la Comteffe de Treffan, au furplus, pouvoit avoir un motif d'amour-propre mieiu  C 42 ) foüdé; c'eft qu'étant vieille & laide, & Madame le Miere jeune & jolie, celle-ci n'atthit tous les regards & les hommages des fpedtateurs. -3 Janvier. L'Opéra a donné aujourd'hui la repréfentation de Ylphigênie en Tauride de M. Piccini, en quatre actes. M. üubreuil, fauteur du poëme, afuivi, comme fon prédéceffeur, le plan de Guimon de la Touche, & ne pouvoit mieux faire en effet. Cependaut les deux imitateurs different dans des points sffentiels. Thoas, dans la piece de M. Gaillard, n'efl: qu'un tyran Tuperftitieux: dans celle de M. Dubreuil, il eft amoureux Iphigénie. L'un commence par le naufrage d'Orefte & dzPylade; 1'autre employé fon premier acte aux préparatifs de 1'hymen de Thoas & Ylphigênie. Le premier fait arriver dcvant le tyran Orefie & Pylade enchainés: le fecond offre le naufrage même & Thoas vient les chercher pour qu'on les enchaine. Iphigénie ne voit dans le fonge, de M. Gaillard, rien que de finiftre; elle envifage dans celui de M. Dubreuil, le terme de fes malheurs. La, cette Princeffe émue de pitié & defirant donner de fes saouvelles a fa fceur EleStre, trompe le tyran & veut fauver Orefie; ici elle demande au tyran fon amant, la grace de l'un des deux prifonniers & Fobtient. Enfin M. Gaillard place la reconnoiffance au moment oü la Prêtreffe, armée du fer facré, eft prête k pcrcer la victime: le nouvel auteur donne a Iphigénie le  C 43 ) defir de favoir le nom & le rang de la victime-; elle apprend, dans fon dialogue avec lui, qu'il eft fon frere. 11 paroit, au furplus, que M. Dubreuil fe conformant au génie de fon muficien, a cherehé tout ce qui pouvoit le faire briller & fournir plus de moyens a fon talent. M. Piccini ayant la touche moins forte que le Chevalier Gluck, étant plus propre a exprimer le teadre & le graeieux, le poëte a plus varié fon fujet & fans le défigurer y a introduit tout ce qu'il a pu d'analogue a ces deux genres de muüque; en quoi fans doute,M. Piccini a parfaitement réuffi: il y a auffi dans fa compofition des morceaux fublimes & auxquels on ne fe feroit pas attendu de fa part. 24 Janvier 1781. Le Seigneur bienfaifint, comme tous les bons ouvrages, eft mieux goüté a mefure qu'on le joue. Ce qui prouve combien le public eft aifé a entrainer par la cabale des jaloux, &combien il revient facilement lorfqu'on fait céder a propos; c'eft que la même ariette de bravoure ehantée par le Sieur Laïs, qui aux répétitions avoit eu le plus grand fuccès, tellement huée enfuite k la première repréfentation que les auteurs avoient pris le parti de la retixer, a reparu il y a environ quinze jours & a produit le même plaifir que ci-devant. 25 Janvier. L'intrigue. de VAmour Conjugale ou Vheureufe Crédulité, piece nouvelle en un acte, jpuée avant-hier fur le théatre de la Comédie  ( 44 ) Italienne , eft fonde'e fur 1'effronterie & 1'adrelTe d'un valet qui, pour fervir les feux de fon maltre, fe joue de la crédulité des deux honnêtes époux. La rapidite' du dialogue & des fituations d'un bon comique, ont fait applaudir plufieurs fcenes de cette piece, qui auroit eu un plein fuccès, fi Fon n'avoit pas trouvé le dénouement un peu trop brufque. La jeuneffe de 1'auteur & fes talens déja connus par la comédie des deux Oncles, doivent faire excufer ce défaut, qu'il lui fera peut-être aifé de réparer. 2.6 Janvier. L'affémblée publique de 1'Académie Francoife pour la réception de M. le Miere & du Comte de Treffan, a eu lieu Jiier avec une affluence de femmes plus confidérable encore que ce qu'on avoit vu. L'empreffement n'a pas été moins grand de s'y rendre de bonne heure & Madame la Ducheffe de Chartres s'y eft trouvée en place k deux heures & demie. Les Académiciens, au coin du feu dans leur falie d'affemblée, ont laiffé fon Alteffc fe morfondre impitoyablement. Au furplus, elle ne fembloit pas s'ennuyer. Des virtuofes plus zélées encore que les autres, malgré leur diligence, n'ayant pas trouvé a s'affeoir, font reftées debout. Le Difcours de M. le Miere, du moins fon début, s'eft trouvé neuf paria fiertérare qu'il va montrée: au lieu de fe profterner aux genoux de 1'Académie , k 1'exemple de fes dévanciers, il a prétendu que cette modeftie déplacée dégradoit également & le Récipiendaire & les Juges: il s'eft rendu le no-  C 45 ) ble témoignage de n'avoir brigué fa place que par fes travaux & fes fuccès , il a reproché indirectement h fes confrères nouveaux de 1'avoir fait attendre fi longtems , comme s'ijs ne le voulusfent couronner qu'au bout de fa carrière; ce qui fuivant lui, devroit être 1'objet de 1'inffitution de fa Compagnie. Ce dèbut, dans lequel eertaines gens ont trouvé trop de morgue, a eu en général les fuffrages de tous les hommes de Lettres, capables de -fentir la dignité de leur être, Malheureufement M. le Miere ne s'eft pas foutenu fur le même ton & a fini par fe rendre long & ennuyeux. M; le Comte de Treffan a affecté de mettre dans fon difcours la naïveté & la loyauté de nos anciens Chevaliers. Mais on n'y a plus trouvé que les efforts languiffans d'un vieux Paladin. L'Abbé deLille, le Directeur, dans fes deux réponfes a fort amufé 1'afiemblée; on a cru jvoir revivre en lui 1'Abbé de Voifenon , fi jfécond en faillies gaies & fpirituelles: il faut convenir cependant que le premier a un ftyle plus noble, plus ferme, & n'eft point affefté & maniéré, comme fon dévancier. j- M. le Miere a rempli le refie de la féance par quelques Scènes de fa tragédie de Barnevelt , qu'il prépare. Malgré le commentaire idont il a précédé cette leéture, il n'a pas eu 1'art d'intérefler le fpeélateur, & fa verfificatiorj idure n'a pas flatté.  C 4ö ) Le Directeur a fini la féance plus heurcufement, & le chant de fon poëme fur Vart d'orner les jardins, a prouvé que le public n'étoit rien. moins que dégoüté de Ia poélie, quana ene eu bonne & que Fharmonie eft jointe a la richeffe des images & a la vérité des idéés. Tous fes vers ont été fentis & applaudis avec tranfpórt. «26 Janvier 1781. II y avoit a Paris depuis onze ans un Concert établi fous le nom du Concert des Amateurs; il fe tenoit a 1'Hótel de Soubize & après le Concert Spirituel étoit fans doure le plus brillant fpeétacle harmonique de FEurope. Depuis longtems on attendoit Fouverture de la feffion, cette année dcvant avoir douze repréfentations, comme les précédentes. On avoit même annoncé des virtuofes nouveaux, eat'se autres Madame Secmann, née Cefari, Cantatrice déja célebre dans plufieurs cours étrangeres; on avoit donné pour raifon du retard Findifpofition de plufieurs fujets, dont les talcns devoient y être employés. Enfin on déclare aujourd'hui que ce Concert n'aura pas lieu du tout: on parle même de la diffolution de la Société Muficale qui Fa fondée. Ces Meffieurs n'en donnent pas la raifon véritable, qu'on croit être le dérangement dans la fortune de M. Audry, fermier général, l'un de leurs plus purffans fbutiens: ils difent qu'ils ne fe déterminent a abandonner leur établiffement, que paree qu'ils craignent de ne pouvoir faire entendre dans ce moment des concerts auffi brillans & auffi  C 47 ) variés que ceux qu'ils ont exécutés jufqu'a préTent. Quoi qu'il en foit, les enthoufiaftes de la mufique ne peuvent que regretter ce Concert, qui avoit amené le goüt de la mufique Italienne, ou exécutée par fragmens détachés & choifis, elle avoit produit le plus grand effet. C'étoit une école oüs'étoit formée une foule d'amateurs, qui a la longue avoient beaucoup contribué a Ia révolution de notre Mufique. 26 Janvier 1781. Extrait d'une Lettre de Bordeaux du 22 Janvier 17S1. „II court ici „ plufieurs pampblets imprimés fur les diflen„ fions du Parlement; entre autres Lettre d „ M. Linguet, en réponfe d l'article inféré dans fes Annales, concemant les difficultés êlevées „ dans le Parlement de Bordeaux. Cette Let„ ere, datée du 16 Décembre 1780, eft fort „ gauche, en ce qu'elle eft adreffée a un homme ,, qui certainement ne pouvoit pas la recevoir, ,, étant a la Baftille depuis prés de trois mois, „ & d'ailleurs au moment oü toutes les nouvel„ les qu'il pouvoit donner de lui étoient inter„ ceptées, oü même il couroit un bruit de fa „ mort. Je ne 1'ai pas encore ltie; mais elle „ intrigue fingulierement nos Magiftrats, qui fe difpofent a févir contre; ce qui la rendra „ plus rare encore." 27 Janvier. M. Erancois de Neuf-Chateau a eu 1'honneur d'être dernierement admis chez M. le Prince de Condé, pour lire un chant de fon poëme du Roland de 1'Ariofte en vers. ï *, fe difpofent a févir contre: ce ciui la rendra  ( 4§ ) On obferve a cette occafion que les gens deLettres ne rendent pas affez d'hommage a ce Prince, qui les aime & toutes les femaines en admet quelques-uns a fa table. Ceux qui ont riionneur d'approcher de fon Alteffe & de converfer avec elle, affurent qu'elle eft trés in» ftruite, qu'elle daigne même prendre quelquefois la plume & compofer. Ce Prince a travaillé principalement fur le Grand Condé, digne de lui fervir de modele & d'en être célébré. Mais fa modeftie rempéche de rien communiquer de fes ouvrages. 27 Janvier 1781. Les'comédiens Italiens annoncent encore une nouveauté pour lundi; c'eft la Melomanie , comédie nouvelle en un acte, mêlé d'ariettes, mufique de M. Champein. On a peu d'efpérance du poëme, dont le titre feul annonce un fujet triviai & rebattu cent fois, mais on efpere davantage du fecond auteur. 28 Janvier. II paroit une nouvelle, brochure fur" la querelle qui fubfifle depuis longtems entre la Faculté de Médecine & la Société Royale. Comme elle eft fort fage, fort honnête, fon auteur ne fe cache pas abfolument. Elle eft d'un jeune Docleur nommé Hallot. Ses amis craignent cependant que eet aveu ne lui caufe du chagrin; ils voudroient qu'il gardat 1'incognito,' mais fon zele bouillant 1'emporte. 28 Janvier. On eft fort furpris de la lenteür avec laquelle 011 procédé a la publicatiou du.  C 49 ) du ProfpeSius de 1'Edition nouvelle des Ocuvres de Voltaire, annoncée depuis fi longtems. On le promet enfin: quclques amateurs 1'ont lu: en attendant qu'il foit pleinement répandu, on voit un Avis imprjmé aux perfonnes qui ont des écrits particuliers, des pieces fugitives on des Lettres de Voltaire, par lequel on les invite a les communiquer & a dpnner tous les renfeïgnemens dont on auroit befoin. On déclare en même tems a ceux dont ona trouvé dans les manufcrits de ce grand homme des miffives qu'il fe plailbit a conferver, qu'on eft difpofé a les leur rcndre & a n'en faire du moins aucun ufage contraire a leur volonté. ^ 11 paroït que ce qui a retardé fi longtems 1'opération, c'eft qu'il ne reftoit en Anglèterre qu'un féu'l ouvrier de Baskerville en étatde graver les accens francois , qui manquoient a fafonderie. Ces accens font gravés maintenant; les matrices viennent d'en être frappées & la Franc© eft enfin enrichie des types les plus parfaits de 1'Europe. 29 Janvier 1781, II court dans les provinces des bulletins manufcrits de Nouvelles fi narrt^u. lieres & fi contraires, dit-on, au refpeét dft aux perfonnes dc la familie Royale, que M. le Lieutenant Général de Police eft cliara-é de 're. monter a la fource cc qu'on vient d'arréter M. Boyer, counu pour auteur de Nouvelles a la main, puifqu'il a été lonstcms le cbrrefnnnHanr du Courier de VEurope. On le dit a la Baftille. Tomé XVIL • C  C 5° ) On park auffi d'autres perfonnes arrêtées dans' des caffés, 29 Janvier^ 17.81. Les connoiffeurs en chef-' d'ceuvres typographiques favent que 1'art de 1'imprimerie & furtout 1'art de la gravure des types ou poincons, ont dté portés au plus hautddgrd dc pcrfection poffible par le célebre Baskerville. Une Socidté de gelis de Lettres 6c de riches amateurs des beau'x arts a fait 1'acquifition de ces types. Elk a acquis fon art de liffer le papier, le fecret de fon encre & de fes autres principes & procédés relatifs a la fonderie, a la papeterk & a 1'imprimerie". Cétte Société fe propofe de faire Femploi de cette acquifition importante aux éditions des fameus auteurs de plufieurs nations: dcvenue propriétaire exclufive de tous les mariufe'rks de Voltaire, par la ceffion que Madame Denis, niece de 1'auteur, & le Sieur Panckoucke, le premier acquéreur, lui en ont faite, elle doit commencer par imprimer les Oeuvres de ce grand homme. Elle a choifi pour fon correfpondant général le Sieur Caron de Beaumarchais, & c'eft enfin entre fes mains que va s'ouvrir lafoufcription, ' II y aura deux fortes d'Ëditions de Voltaire. L'une en 60 volumes in-8°, dont 20 nouveaux; 1'autre en 40 volumes in-40: k tout prêt a être porté alafoisaradreffedesfoufcripteurs a la fin de 1782, La nouvelle Edition fera compofée des Oeuvres eonnues, corrigées par 1'auteur, accompagnées de variantcs, notes & fragmens prin-  C 5i ) cipaux tirés dc fes porte-feuilles; de favie, avec les anecdotes qui y ont rapport; de fes ceuvres pofthumes; d'un choix de fes Lettres, avec des notes Inftoriques; & d'une table raifonnée des matieres. ^ Le prix de Pm-go. fera de quinze Louis; de ï'in-40. vingt-cinq Louis. Tel eft le précis du ProfpeStus, fuivant que 1'annoncent ceux qui 1'ont déja parcouru. 30 Janvier 1781. Un enthoufiaftc - fou de mufique, grand.partifan de In Période, & qui prétend qu'on ne doit parler qu*en chantant, eft réfolii de dönner fa fille h un famcux compofitcur Italien, M. Fugantini; mais la jeune perfonnea fait un choix tout différent. Sou amant, aidé par un valet adroit, vient a bout de trompet le vieillard, en fe faifant paffer pour un des premiers virtuofes d'ltalic. Tel eft le fujet de la Mêlomanie, qu'on a donné hier, & qui a eu du fuccès, a raifon de la mufique variée, fraïche fouvent riche & faifant honneur au jeune compofitcur. II eft a fouhaiter feulemcnt qu'il foic Plus févere déformais dans le choix des paroles fur lefquelles il voudra travailler. 30 Janvier. II paroit des Lettres n3w»n~,, - données au mois de Novembre 1780 & rék  C 61 ) table en la pérfonné de Mlle. Luzuries. Eile s'étoit lrVréè a celui de la peinture & comme n. coit a y développer des talens au-defTus de fon fexe. Elle pcignoit trés bien une tête & fupéricurement les vétemens; elle connoiifoit 1'harmonie du tableau & les effets de la lumicre. Elcve de M. Drounis, elle tcnoit a la maniere de fon maitre; c'efi-a-dire, qu'elle répandoit trop d'éclat fur le haj.it de fes t'Ites, ce qui leur donnoit le tranfparent du verre ou de 1'émail. Mlle. Luzuries n'étoit point encore en état de Iutter contre Mlle. Vallayer, ni méme contre Madame Fillcul plus rapprüchée de fon genre, encore moins contre Madame le Brun, pousfarit fon art jufques a la compofition hiftorique & allégorique; mais , avec le tems, elle auroit pu devenir leur émule: malheureufemcnt elle a été moiffonnée a la fleur de fon age & dans le fort de fes études. 6 Février 1781. Le Sieur Grammont, recu a la Comédie Francoife a penfion, a perdu a Rochefort tous fes effets de tbédtre & de villc, confumés dans un incendie de 1'aubergc 011 il étoit. Pour réparcr ce malheur autant qu'il eft en eux, fes camarades ont arrêté de donner mardi treize une repréfentation a fon profit. Ce qu'annonce le Sieur Fleuri, femainier, dans une Lettre du cïnq Février, inférée au Journal de Paris. 6 Février. Ce qu'on avoit prévu eft arrivé. M. de Laffoue ,1e premier médecin , fe trouvatit indireclement injurié dans une note dè la LetC ?  C 62 ) tre du Docteur Hallot, a obtenu uiïe Lettre dc cachet contre lui & il eft a la Baflflfe depuis qielques jours. M. le Licutenant de Police 1'ayant interrogé' pour favoir de lui quel étoit le nom dc 1'imprimeur de fa Lettre, il a répondu avec une fierté noble a ce Magiftrat: „ me prenez-vous, Mon,, fieur, pour un Sociétaire ?" M. Ie Noir penfant trop noblement lui-mêmc pour ne pas fentir & apprécier cette réponfe, s'eft trouvé forcé malgré lui d'exécuter fes ordres. Ils étoient même fi-féveres, que ce prifonnier a été d'abord fans feu; mais M. le Noir a fi bien fait qu'on a tempéré cet ordre rigoureux & 1'on efpere que, graces aux bons foins de M. le Lieutenant de Police , il fortira bientót. 7 Février 1781. La Faculté , fenfible au malheur d'un de fes membres, eft allée en grand cérémonial a Verlailles demander a M. le Garde des Sceaux 1'élargiflement du Docteur Hallot. Le Chef de la juftice leur a répondu que cela ne le regardoit pas. On n'a pas été peu effrayé a la cour de voir tous ces miniftres de la Mort, dont le cortege lugubre n'étoit point attendu. 7 Février. On parle beaucoup d'une perte énorme ,faite au jeu par le fils de M. delallaye: on la porte & 800,000 livres. II étoit tellement ivre que le lendemain il ne s'en fouvenoit pas. On dit que c'eft chez M. de Genlis que s'eft paffé la fcene & que M. de Fenelon eft un des gagnans. Ou efpere qu'a force de crier conu-e  C 63 ) ces coupe-gorges, le Gouvernement rcmédiera k ce fcandale & fera fermer des lieux oü fe pasfent de pareilles cataltrophes. 9 Février 1781. Le Procés des trois Rois commence :\ percer dans cette capitale. C'eft une brochure écrite d'un ton mauirade & apocalyptique: mais k travers ce galimathias 011 fent facilement que 1'auteur a eu fes raifons pour déguifer ainfi fon ftyle, qui n'cft pas le véritable; qu'il entend trés bien la langue francoife &Lne fe trompe pas fur le choix du mot, toujours employé dans fa véritable acceptïon. Quant au fond des chofes, il faut bien de la patience pour le faifir & le fuivre k travers cette contexture dégoütante. II y a furtout des calomnies atroces contre la Reine; ce qui doit rendre 1'ouvrage détefiable pour tout bon Francois. On voit en tête une immenfe caricature, oü figurent tous les Potentats , Souvcrains, petits Princes, Miniflres principaux de 1'Europe, dont 1'explication emblématique mériteroit feule un long commentaire. 10 Février. M. Cailhava d'Eftandoux, dans la nouvelle édition de fes Oeuvres, a ajouté des Réflexions nouvelles a fon Traité des caufes de la décadence du théatre. On y Iit celle-ci. Les Italiens fe font noblement chargés de „ leur enlever leurs acleurs (aux Spectacles des „ BoulcvardsO Le Crifpin du Bois de Boulogne a débuté fur leur théatre: le fameux Jeannot » des Variétés amu/ctntes eft paffé a leur tMM^  C 64 ) Les Comédièns Italicns outrés de ce reproche , qui ne veulent avoir rien de commun avec les lpeftacles forafns, ont écrit au Sieur Panckoucke, le breveté du Mercure, ou Fon avoit cité cette phrafe, une Lettre pour fe jullilïcr; il en réfulte. t°. Que le Sieur Boucher, qui a quitté le Bois de Boulogne pour débuter a la Comédie Italienne, n'y a paru qu'en vertu d'un ordre fupérieur, follicïté par quelques perfonnes puiffantcs. 20. Que le Sieur Volange y a débuté en vertu d'un pareil ordre; que Fintention des Comédièns Italiens n'a jamais été de le conferver & qu'après fept mois de féjour parmi eux, le Rofcius des remparts s'étant convaincu de fon peu d'aptitude a ce théatre, ils fe font empreffés de folliciter fon ordre de retraite. 30. Que M. Cailhava , enfin, a contribué plus qu'eux au débnt de Jeannot, puifque de concert avec M. d'Hele il s'étoit donné la peine de rédiger pour lui les trois freres jumeaux Vénitiens , comédie de Colalto, dans laquelle Volange avoit defiré faire fa première apparition. 11 Février 17,81. M. d'Argens, Agent de la ville d'Amiens & Vice-Conful d'Efpagne, a été arrêté ces jours-ci comme auteur de faux billets de la Loterie Royale & conduit a la Baftiile, ainfi que le Sieur Defaint, Fimprimeur, qui les avoit imprimés. C'eft un jeune homme fort bien né, d'une belle figure & 1'amant de la Dlle. Colombe. \\ paroit que le defir de fatisfaire au  C 65 ) luxe de cette actrice 1'a conduit k cette fripotinerie. Celle-ci, au refte, en e(l vivement affectde & a obtenu de fes füpéïïeurs la perroislion de s'abftenir de jouer dans les premiers tems de fa douleur: mais tout confiddrd, pour éviter qu'on ne la foupconnat complice du crime , 011 lui a confeilld de fe vaincre & d'affecter, au contraire, de fe montrer davantage. 11 Février 1781. Les deux Academies dont M. le Marquis de Paulmy eft membre, n'ont fait aucun cas des Requêtes de M. le Grand contre lui & ont même cru inutile de rccevoir les originaux des preuves inconteftables de fa propridtd & du mauvais procddd de cet auteur, ' que M. de Paulmy vouloit mettre fous les yeux dc ces Compagnies; Du moins c'eft ce que ce Seigneur annonce. On trouve qu'il met trop de cbaleur & d'amour-propre dans une pareille querelle, qu'il devoit s'élever au-deffus & mdprifer fon advcrfaire ; ce qui auroit dtd plus noble de fa part. 12 Février. M. Mercier, dont les Drames "font joués en province avec beaucoupde fuccès, mais qui, depuis fes conteftations avec les Coraddiens Francois, a lieu de ddfdfperer de paroitre jamais fur leur fcene, fe trouve obligd de fe vouer abfolument aux Italiens : malgrd le peu d'aptitude de ceux-ci a reprdfenter des pieces aufli graves, auffi fdrieufes, il ofe leur eonfier fon Jenneval en cinq acres & en profe. On fait que cc fujet, d'une touche trés fombre, trè&  C 66 ) rioire, trés atroce même , n'eft autre chofe que le Barnevelt Anglois, imprimé depuis longtems. •Les troupes de province s'en étoient emparés. Nous allons voir quel effet il produira dans la capitale. C'eft demain que les Italiens en donneut la première repréfentation. . 13 Février 1781. Le Parlement avoit mandé au commencement de ce mois les Gens du Roi' du Chatelet, & leur avoit ordonné de faire des recherches fur les différentes Banqueroutes qu'il y a eu a. Paris depuis cinq a fix mois,- ainfi que fur Jes fuitcs qu'elles ont'entrainées. II leur avoit été enjoint en même tems, de faire promptement leur rapport a la Cour, pour être ftatué par elle ce qu'il appartiendroit. II étoit également queftion des lüicides , on vouloit remettrc en vigueur le fupplice ordonné par les loix en j pareil cas. On pouffoit les recherches jufques a vouloir faire exhumer le Notaire Bronod. Les Gens du Roi s'étoient, en conféquence, rendus le neuf aïï Parlement. 11 paroit que tout ce bruit-la fe réduira a faire un Réglemcnt contre les Jeux r c'eft ce dont doit s'occuper aujourd'hui cette Cour, oü les Pairs fe font rcndus d'office & oü M. le Lieutenant général de Police doit fe trouver. 13 Février. II paroït conftant que M. Haudry de Soucy, Fermier général, fait une banqueroute décidée. Mlle. la Guerre n'y a pas peu contribué & n'a pas pris cet amant en traitre. Elle lui a déclaré qu'elle ne lui domioit  C 67 ) pas plus de deux ans; elle lui a dit que Fexcmple du Duc de Bouillon devoit Finftruire. 11 n'a pas voulu en profiter; elle a travaillé en confequence & quand il n'a plus eu rien è. lui :donner, elle 1'a misa la porte. 14 Février 1781. II y a eu effectivement hier & Faffemblde des Chambres une ddnonciation des maifons de jeu publiques : M. le Lieutenant .géndral de Police a lu un Mdmoire extrèmement bien fait fur ce fujet, dont il a rdfultd que, malgrd le bénélice confidérable qui en provenoit pour fon Ddpartemcnt, malgrd les ceuvres de bienfaifance auxquelles il appliquoit cet argent, il ne pouvoit difconvénir que cette toldranee ne produifoit infiniment plus de mal que dé bien. La matiere dtant trop importante pour ne pas mdriter la plus fdrieufe attention, dtant d'ailleurs fort ddlicate relativement aux perfonnes enplace, chez lefquelles fe tiennent de ces fortes der. jeux & même pouvant compromettre les Miniftres dtrangers, étant effentiel dc faire un Réglement folide que perfonne n'ofilt enfreindre5 on a arrêté que les Princes & Pairs feroient invités de venir prendre leur place au Parlement le mardi 20; que M. le Lieutenant de Police y recommenceroit la leclure de fon Mdmoire & les Gens du Roi donneroient leurs conclufions,&c.: 14 Février. La piece de Jenneval, ou le Barnevelt Francois, n'a point rduffi gdnéralement a la première repréfentation; il s'en faut de beaucoup auffi qu'elle ait gdndralement ddplu, O13  ( 68 ) peut dire que Ia piece eft arrivée a Ia fin au milieu des hüées & des plus grands applaudiffe- mens. une partie du public s'écrioit: c'eft horrible; une autre: voild qui eft beau, parfait , fublime. Les uns difoient: quelle fuperbe legon de morale on peut pui/er kil Les ailtres: fue[ tableau affligeant pour l'humanité! Jamais il ri'auroit dd paroitre aux yeux du public Francais! Dans ce cönflit d'opinions il faut attendre Ia feconde repréfentation & peut-être les fuivantes, pour juger quel parti 1'emportera. 15 Février 17S1. Une jeune & jolie perfonne attachée a la cour, ayant éprouvé un de ces accidens, fuite fréquente d'une paffion trop aveugle , on a fait la chanfon fuivante d'un genre neut & qm mérite place ici a raifon de 1'anecdote : on la trouve digne du Chevalier de Bouflers. 1. J'allai chez Life hier au foir, Et quoique charmante, On pouvoit 1'app'ercevoir Trifte & languiflante. Vous croyez qu'avec Licas Ce font de nouveaux débats, Non , non, vous ne favez pas Ce qui la tourmente. Da* un bofquet, 1'autre jour, La jeune innocente A cueilli des fleurs d'amour, Mais trop imprudeme  ( 69 ) Elle tremble d'avoir pris Avec les Heurs quel.ques fruits, Et voila, mes chers auiis, Ce qui la tourmente. 3- Déja Phoebé dans fon cours Lui paroït plus lente: Un courier depuis trois jours Trompe fon attente. Mais chacun peu confterné De fon fort infortuné, Lui voudroit avoir donné Ce qui la tourmente. 15 Février 1781. Quelques perfonnes s'étant plaintes au Sieur de Beaumarchais qu'elles n'entendoient riep au grimoire de fa Loterie , il a voulu en donner une explication dans le Journal de Paris. Ce commentaire, auffi obfcur que le texte, ne fait pas fortune & il y a apparence qu'il trouvera peu de dupes. On dit que les foufcriptions n'arrivent pas en affluence, comme il l'efpéroit,& l'entreprife exigeant de gros fonds d'avance pour commencer, on ne s'y doit livrer que lorfque la foufcription | fera complette a peu prés. 16 Fevier. Extrait d'une Lettre de Vienne du ier Février. „ On fait que 1'Empereur „ avoit defiré que le Pape rendit a fon augufte mere des honneurs particuliere: il eft d'ufage qu'on célebre dans la capitale du „ monde Chrétien un fervice pour les Impéra»  C 70 ) „ trices. Celle-ci étant d'un ordre fupérieur „ & ayant gouverné longtems feule & avec des 9, qualitéspcucommunes,le Prince fon fils avoit ,, lieu de s'attendre a une exception: mais la „ Cour de Rome trés ftriöe fur 1'étiquette n'a „ pas voulu jnnover en rien. Sa Majeflé Im„ périale piquée a réfolu d'apprendre a 1'Evê„ que de Rome ce que c'étoit que de manquer „ a un Souverain comme lui. 11 eft queftion „ de deux Ordonnances qu'il doit rendre : 1'une, ,', pour empécher qu'aucun Ordre Religieux de „ fes valles Etats ait un Général hors de fes „ Etats: 1'autre, pour qu'aucun Refcrit de „ Rome n'y foit exécuté fans fon ordre; ce 9, qu'on appellc VExequatur. 17 Février 17S1. On parle beaucoup d'une Lettre de M. le Comte d'Artois a M. Ie Noir. On avoit fait courir le bruit qu'une maifon nouvellement conftruite fur le Boulevard & oü ce Prince a choifi fon jeu de paume, alloit être établie en maifon de jeu. S. A. Royale dément cette rumeur & déclare au Magiftrat qu'il n'cn eft rien. On ne doute pas que M. le Chevalier de Cruffol n'ait influé beaucoup dans cette réfolution du Prince. II eft Gouverneur du' Temple, & une compagnie s'eft préfentée a lui pour obtenir du Comte d'Artois la liberté de jouer dans ce lieu privilégié : elle offroit 113 bénéfice effrayant. Pour mieux conftater le fait, ce Seigneur a paru acquiefcer aux propofitions, les a bien éclahxies & après en avoir vendu compte  c 71 i axi Prince, lui a fait fentir quel gouffre de per.dition devoit être un pareil lieu. M. le Comte d'Artois a e'té effrayé lui-même du calcul & a rejetté avec indignation cet infame marché. 17 Février 1781. Le Docteur Hallot, qui avoit été arrêté avec la plus grande tranquiliüé & jouant de la flüte , a foutenu fon féjour a la B.aftille avec la même férénité. On a fait rougir M. de Laffbne d'une vengeance auffi atroce & le Doéteur eft forti après douze jours de captfvit'é, 18 Février. Extrait d'une Lettre de Bordeaux ;du 13 Février. ,, L'afFaire de M. Dupaty ne „ finiffant point & le Parlement' ayant déclaré qu'il ne le regarderoit point comme recu, .„ qu'il n'eüt fait enteudre fes doléances auprès [,, du tróne & n'eüt recu les ordres de la bou» „ che de S, M. même; le Premier Prefident & „ quelques autres membres de cette Compagnie ,„ font mandés a Verfailles & doivent y être „ rendus inceffamment. Les membres qui ac- compagnent le Premier Préfident, font fon ;„ gendre M. Linche, 1'AbbéFeugeres, MM, de Conteneuil, un autre & un des Gens du Roi." 18 Février. On parloit depuis quelques jours de donner & la Comédie Italienne 1'Amant Statue, opéra comique en un acte & en vaudevilles , exécuté cet hiver & Brunoy, La repréfentation a été fufpendue: on préfume que c'eft ■pour en fupprimer ce qu'il y a de trop fort, des Igrayelures qui, excellentes dans un fpectacla  C 7-0 particulier, nc peuvent fe tolérer par la police dans un fpectacle public. Les changemens annoncés dans la Melomanie, qui devoient avoir lieu Iber, fe font réduits a quelques phrafes fupprimées dans le dialogue du dénouement & en quelques vers ajoutés, dont le muficien a fait une finale. Le public a été iudigné de cette fupercherie & vraifemblablement n'y fera pas repris. On prétend aujourd'hui que c'eft la perfonncrepréfe.nta'nt a Paris 1'auteur de la Mélomanie, qui n'a pas voulu adopter les changemens affez confidérables qui y avoient été faits. 19 Février 1781. On parle beaucoup d'une brochure contre les jeux publics, adrcffée a M. Duffaulx, qu'on fait avoir écrit fur cette matiere. On dit que dans ce pamphlet fort rare on révele tout ce qui fe paffe dans les tripots , on en peint les héros & après en avoir montré toute Fhqrreur, 011 appelle fur eux la foudre du ciel. 19 Février. Compte rendu au Roi par M. Necker, DireSteur général des Finances, au mois de Janvier 1781, imprimé par ordre de S. M. in-40., de 116 pages, avec deux Cartes. Comme cet ouvrage eft broché & couvert d'un papier bleu, les perfifleurs ne manquene pas dc dire -que c'eft un Conté bleu. 20 Février. M. Dumont le Roman, peintre du Roi, Chancelier , Recteur & ancien .Directeur dc 1'Académie Royale de pcmture & dc  'C 73 ) de Sculpture, vieni Je moürir. Sou grand a>e rendoit fon talent inutile depuis plufieurs années.' _ M. Francois Bourgeois de Cliateaublanc ancien Ingénieur Privilégié du Roi, Inventeur \ Entrepreneur des Bluminations de Paris vient dc_mourir_ auffi trés vieux. C'efi un honnne a qui la capitale a Fobligation d'être mieux éclairee; mais comme tous les premiers auteurs des découvertes, il n'en a pas recueilli le fruit- on avoit eu bien de la peine è lui faire accorder par les entrepreneurs actuels une modique penfion » & lui conteftant iufques a fa h» i» ^ toient de radoteur & auroient voulu faire oublier fes utiles travaux. . 20 f™kr I?Sl- Un Jc»ne homme,afin de joutr de la vue d'une veuve qu'il aimc & qui afieéte de paroitre infcnfible a fes feux, employé, diflerens moyens pour s'introduire chez elle. II imagme en dernier lieu, de fe metóre a la place d ime_ ftatue, dont le piedèftal eft cenfé organifé la il joue plufieurs airs 'de flütc, qui difpofent favorablement pour lui le cceur de fa m'altrefielel eft ca fubfiance le fujet de la farce exécutée au.!ourd hui,qui refiemble beaucoup,comme on voit, a 1 Abbê de pldtre. Elle a réüffi. c'eft-adire quon a ri; ce q„i cft h meilleui.e f „ la plus naturelle, d'applaudir. ' ao Février. Hier on a donné la première repréfentation dn Roi de cocagm ,piece decannT^m Vb^?rCOUp amufd >avec nouvelle mu-  C 74 ) fique du Sieur Bcaudron, premier violon de la comédie Francoife, auteur déja connu par cellc. de Fygmaleon. 21 Février 1781. Les,comédièns Italiens, qui ont déjd cinq ou fix pieces nouvelles en train & marchant h. la fois,enpréparent encore une autre qui doit avoir lieu inceflamment. C'eft un Opéra-comique en un acte, en vaudevilles, inti* tulé les deux morts: en voici le fujet. Deux valets, qui ayant introduit chez leur jeu» 11e maitrcflc un amant libéfal, imaginent, pour fe fouftraire au courroux du pere & de la mere, de faire toura tour femblantd'être morts, & confeillcnt enfuite a 1'amant de fe déguifcr en Commiffaire, pour intimider ces bonnes gens & les forccr a lui donner leur lille : a en juger par les repétitions,. le pronoftic n'eft pas heureux, & la froideur dc 1'ouvrage doit néceffairement paffer dans 1'ame du Spectateur. 21 Février. L'affembléc du Parlement au fujet des Jeux a eu lieu aujourd'hui. Tous les 'Princes dufang y étoient & beaucoup de Pairs: on a été laché de n'y pas voir les freres du Roi. M. le Lieutenant général de Police a repris la kciure de fon Compte rendu; les Gens du Roi ont donné leurs conclufions & enfuite 1'on eft allé aux voix. Parmi les Princes du fang M. le Duc d'Orléans s'eft fignalé furtout, & quand il a été queftion d'adopter 1'Arrêt propofé par M. de Lamoignon & d'en rédiger les termes, il a fort infifié qu'on ajoutat a cette formule de dé"  C 75 3 fenfes. a toutes perfonnes, de qtielque êtat £? .condition qu'elles foient, ces antres mats plus précis; de quelque rang & dignité qu'elles foient. On a feuti quelle raifon Ie portoit a cette addition & le Duc de Chartres en a paru déconténancé. Plufieurs Pairs ont auffi trés bien parlé. Un de Meffieurs, dans le cours des opinions, ayant dans la peinture qu'il a faite du défordre de ces jeux publics introduit j'ufques dans les Intendances de Province,' défigné ces Commiffairesf départis comme le fomentant par leur exemplej un Intendant préfent & voulant prendre a parti le Magiftrat comme calomniateur des Intendans, M. de Cipieres, Intendant d'Orléans„. homme fiigc & judicieux, lui a confeillé de fetaire, en convenant que ce reproche n'étoit que trop vrai a 1'égard dc plufieurs de fes confrères. Enfin il a été rédigé un Arrêt des' plus ri~ gcurcux, non fculement contre les Canquiers,. mais encore contre les propriétaires des raai. fons ou fe tiennent les tri pots. Quant aux Miniftres étrangers, on a pris toutes les précautions convenablcs pour, fins blefler leur dignité, leurs prérogatives & privileges , les engager d'b.onncur a fe conformcr a 1'exemple général. Comme il faut auparavant 1'agrément du Roi, cet Arrêt ne paroitra que précédé -d'une Déclaratión, & ceux qui trouvent le Reglement trop dur, elperent qu'il fera modifié ca quelque chofc D 2  C 76 ) Du refte, on a déja donné 1'éxemple -a ia' Cour & les Banquiers dc la Reine font réformés. 20. Février 1781. On doit exécüter aujourd'hui fur le théatre Lyrique la Fête de Mirza, ballet pantomime, pour fervir de fuite h celui qu'on connoit déja & qui a recu tant d'applaudiffemens: on y a joint une petite comédie en mufique, qui en fait partie, de la compofition de M. Gretry, Les avis font déja trés partagés fur les répétitions. Les connoifleurs admirent le choix des airs, 1'ufage heureux qu'on y a fait de plufieurs morceaux de mufique du Chevalier Gluck & l-'intelligence avec laquelle tout ce qui eft pantomime eft exécuté. A 1'égard du petit Opéra qu'on y a joint,ils trouvent également heurcufe cette nouveauté , qui devoit d'autant micux réuffir qu'elle préfenfe une action complette, bien filée & dans laquelle il n'y a a reprendre que quelques négligences de ftylc. Des gens plus leveres fur les convenances, fur la nature de la pantomime théatrale, ne penfent pas de même de la Fête de Mirza & de fon enfemble; ils la iugent un afiemblage raonftrueux de diverfes «ictions delavie,qui ne font pas faites pour être admifes au théatre & encore moins pour s'exécuter en cadence & au fon des inftrumens. 22 Février. II a déja paru en 1777 un Mémoiré du Marquis de Quincy contre le Comte dc Limbourg-Styrum fe difiint Prince, &c. dans lequcl on dévoiloit tous les reflbrts que cet  C 77 ) Zwanger, artifideüx avoit pour myftiëficr fa dupe crédule & s'cu approprier les biens; Ce perfonnage revicnt fur la fccne: c'eft aujourd'hui- un laboureur nommé Charlemagne qui 1'attaque; il répand un Mdmoire a coufalter trés voluminèux & prdtend ddvoiler toute la conduite du Comte de Limbourg, le fuivre dans les principales époques de fa vie & de fes intrigues, éclairer le gouvernement, la juftiee & le public fur fes démarches les plus fourdes & les plus fccrettes-, nommer & dépcindre fes priutipaux complices 6 afin qu'on puiffe fe garantir déformais de leurs infames féduétions & de leurs aftuces. On concoit qu'un pareil détail ne peut qu'infiuimènt amufer les leéleurs, dont la malignité fe'plait a parcourir le roman de ces. famcux avenmïiefs. Celui-ci eft des plus incroyables. II eft fiifd d'une Confultation en date du fix Décembre 1780, oü 1'on approuve fon attaque, fi le Sieur Charlemagne eft en état d'adminiltrer, t-ant par titres que par témoins, la preuve de ce qu'il avance. 23 Février 1781. Toute la France fait que Madame Necker, participant dans fon genre a l-'adminiftration bienfaifante de fon mari, s'eft chargée d'un Bureau analogue & d'une 'efpece nouvelle au Controle général. II eft intitulc Bureau de commifération. Dans fon département eft compris 1'hofptce de charité qu'elle a inftitué fur la paroifie de Saint Sulpice & riont on a vu le compte rendu pour ia première an~ rj 3  C 78 ) née: celui pour la feconde, qui eft 1780 , fe publie depuis peu imprimé al'imprimerie Royale.Les deux Comptes fe rapportent relativement a la dépenfe de cbaque mois pour les divers articles de confommation; il en réfulte qu'au moyen d'une fomme de 33000 livres on eft parvenu, dés le premier effai, a fournir les fecours les plus abondans a 1430 malades; que pour moins de 17 fous par jour, on leur a donné les alimens & les remedes de la meilleure qualité, tels que les perfonnes ricbes de la capitale n'auroient ■pu s'en procurer de meilleurs; qu'on les a teams dans Pétat. de propreté la plus recberehée , jufqu'a les changer de linge deux ou trois fois |>ar jour; &, ce qui furprendra encore davanta.ge , eft que ce réfnltat a été tiré, en réuniffant la dépenfe propre des malades, la nourriture des foeurs, la nourriture & les gages des domeftiques, les appoiutemens de 1'aumónier, du médecin, du chirurgien& les achats du linge neuf. Cet exemple encourageant a déja produit un licureux eflet: deux des principales paroiffes de Paris, celles de Saint Euftachè & de Saint Jaques du baut ' pas & les adminiftrateurs de bon fecours, préparent un afyle femblable aux pauvres malades de leurs diftriéts. 23 Février 1781. M. 1'Abbé de Bourbon prenant, comme de raifon, le parti dc fa mere dans fa querelle avec M. de Cavanac, a obtenu une Lettre de cachet contre c'elui-ci, quir 1'cxile a quarante lieues de Paris.  ( 79 ) L'Abbé dc Boifgelin triomphe &, paria même raifon on ne doute plus aujourd'hui qu'il ne reité Grand- Vicaire de M. 1'Archevéque d'Aix '& Agent général du Clergé. 23 Février 1781. Après un Préambule trés adroit, trés honnête & tout-a-fait fpécieux, mais oü Pon critique cependant 1'affertion erronnéc & inconftitutionnelle , que Vaugmentation des impóts efi foumife d la puijfance, du Roi, M. Necker divilè fon Compte en trois parties. La première concerne 1'état actuel des finances du Royaume & toutes les opérations qui font relatives au tréforlloyal & au Crédit public. La feconde développe des opérations qui ont aêufii des économies importantes a des avautages d'adminiftration. Dans la troifieme le Directeur général des nuances fait valoir les difpofitions générales, qui n'ont eu pour but que.le plus grand bonheus des Peuplcs & la profpéiïté de 1'Etat. 11 réfulte de-la, que deux grandes parties d'adminiftration font remifes entre les mains du Miniftre des Finances, dont les élémens n'unt malheureufement aucun rapport enfemble, & eependant s'il ne réunit les connoiffances & le génie qu'elles exigent, il ne peut occuper digncment fa place: voila pourquoi tous les prédéccffeurs de M. Necker ont échoué, & voila pourquoi il a réuiïï. Tel eft la conféquence qu'il tire modeftement in petto de fon Compte rendu, & qu'il indique au Leéteuri amour-propre D 4  C 8e ) 5UanV qiji a révolté beaucoup de ge„s. On trouvedans Ie courant de 1'ouvrage difiérens autrespS f qui, mdépendamment du fond, qu'ils reFarg comme plein d'inexactitudes' & de g£ letés, en rendent la forme trés propre \ lui ntaeurT" r"'61111?1'8 ^ y • panS! k f0Ul£ imme»fé-de leurs 24 iVi>mr i78i. On trouve dans le Comt te rendu par M. Necker, plufieurs li bons a rccueillir & a conferver, P ' S M par M. de C]ugnyj annon 7 defie ci de vmg -quatre millions de Ia recette a la tlépenfe ordinaire. *S If\ Pf reffit des foins de ee Direc ttm général des Finances, & des diverfcs réformes que. S. M. a permifes, que par 1'amé^tltIUu df,s vf~™s, ov. par leur augmenta, tion naturelle, & enfin par fextinclion de quelques rentes & de quelques rembourfemens, pat actuel des. finances eft tel, que, nialgté Ie deficit en i776, malgré les dépenfes immenles de la guerre, & malgré les intéréts des emprunts faits pour y. fubvenir , les revenus ordinaires excedent en ce moment les dépenfes ©rdiuaires de dix millions deux eens mille livres. 30. En ne compofant le chapitre des revenus que des verfemens faits au tréfor Royal m- ■  par les différente^ baifles', déductïon faire des charges qu'elles lbnr tenues d'acquitter, & en ne portam paréillement dans la colonne des dépenfes que les parties qu'il paye; la recette n'eft que de 264 millions & les revenus pasfent 430 millions; mais le furplus eft confommé, foit par des charges affignécs fur les recettes générales, foit par les rentes fur 1'hótel de vilie & les autres objets hypothéqués fur les fermes, foit par les dépenfes dönt le payement clt indiqué'fur le domaine, furie produit des régies, fur les impofitions des Pays d'Etats, &c 4". Par exemple, les vingtiemes, la taille , la capitation fc montent a environ 149 millions ; mais par des Etats du Confeil , les charges alfiguécs fur cette recette s'élevent a* environ 29 millions. 5°. M. Necker demande au Roi que ce Compte foit examiné chez M. le Garde des Sceaux, ou chez M. le Comte de Maurepas, par un Comité compofé de quelques perfonnes de fes Confeils, auxquelles il en communiquera les détails. 60. 11 voudroit que tous les cinq ans un pareil Compte fut rendu d'une maniere authentique. 70. On a compris dans les dépenfes ordinaires 17,300,000 livres de rembourfemens T qui devant fe regarder comme un fuperfiu dea revenus, forment un acroiffement ëventuelj, D 5  C S2 ) lorfquc les capitaux feront éteints. _ 80. Les rentes viageres fe raontent a 50 millions. & dinrinuent tous les jours, II y a 2S millions de^pcnfions, s'éteignant de même. Enfin S. M. n'eft pas au bout des économies & des amélioratioiis de divers genres qu'elle peut fe propofer: par exemple, 1'augmentatiou que peut procurer la Loi qui vient de paroitre fur les domaines engagés, n'eft pas comprife dans 1'Etat achiel des finances. 9°. M. Necker a été obligé de pourvoir a 350 millions de dépenfes extraordinaires par an depuis la guerre & n'y eft fubvenu que par Ie crédit public. ro°. Lorfqu'il eft entré en place, les Contrats fur 1'hótel de Ville,, portant quatre pour cent d'intérêt, ne valoient que fóixante pour cent r ainfi les capitaliftes pouvoient placcr leur argent a un intérêt de fix pour cent & deux tiers en rentes perpétuelles: au contraire, au commencement de la précédente guerre, 1'on avoit peine a trouver des placemens a quatre & demi pour «ent & les Contrats fur les poftes, qui ne perdoient que trois pour centUl'intérêt, étoient montés jufques a quatre-vingts. ii°. Dans ce moment-ci les Refcriptions ne perdent que fept & demi pour cent & les Actions des Indes font a 1940 livres. II a emprunté a un. prix plus modéré que dans les autres gueries. La Loterie ouverte, il y a deux ans, étoit calcük'e fur Ic piert de cjnq pour cent d'kfc.  C 33 ) féfêt en 1777. On a négoeié des rentes viageres jufques a 13 pour cent d'intérêt fur une tcte & S. M. n'a encore emprunté qu'a ncuf & a un intérêt proportionné fut plufieurs tètes. La Lotérie derniere rembourfable en neuf années n'eft qu'un emprunt a fix pour cent. 12°. 11 s'eft fouftrait a la domination d'un feul Barrquier de la cour pour les Anticip;-tions, il en a pris plufieurs: il a cependant été forcé d'avoir plus d'anticipations qu'il n'auroit voulu,par 1'abus des billetsdes Tréforiers5> & cependant ces emprunts, qu'il auroit roaintenus a. cinq & demi pour cent, fans cette infidélité , ne font qu'a fix, en y coinprcnant tous les fraix. 130. M. Necker a propofé au Koi de faire vifer par le premier Gommis des finances , les billets des tréforiers, dont il promettoit la négociation,- 140- 11 a ramené au Roi le bénéfice fur la fabrication des monnoies, laquelle s'élevaut de 40 a 50 millions en tems de paix, ce bénéfice ne doit point s'abandonner aux particulier:;. 150. 11 a établi un Comitécontcntieux,nécesfaire pour une perception de prés de cinq eens millions , en ajoutant a celle qui fe fait pour k. Roi, le Compte des Villes, des Hópitaux & des» Communautés. II y a eu depuis cet établifleinent plus dc 2000 Arrêts rendus, fans cooipter un trés grand nombre de difficultés particulieres, fur lefqucilcs il a doané.foa avis a M» Je Directeur. * D 6  c 84 y 160. II voudroit bien fuppriraer les Gabelles, mais comment fe priver d'un impót qui rapporte 54 millions net, c'eft-a-dire autant que celuifor toutes les propriétés foncieres du Royaume,, repréfenté par les deux Vingtiemes & les quatre fols pour livre du premier. II prétend cependant qu'en établiffant le prix de cette denree de cinq a fix fols la livre dans le pays exempt, ou-' non exempt, la fomme en réfultante feroit a peu prés la même. 170. M. Necker eftime qu'en tems de pais les dépenfes occaffohnées par nos arts de luxe ©ccafionnent en France un verfement de 1'étran*g'er de plus de .30- millions par au-. II fe félicite auffi de 1'inffitution d'un Prix arinuel en faveuB de 1'invéntion la plus utile au Commerce & aux Manufaétures. 1-80. II s'eft occupé des moyens a employé? pour rendre les poids & les mefures uniformes dans tout le royaume, & il a vu avec fatisfac* tion que 1'affemblée de la haute Guyenne 1'avoit prife en confidération. 19". II approuve 1'établiffement du Mont de piété & voudroit qu'ön y joigriït 1'argent des Confignations pour qu'ikne reftat pas mort. 20°. Enfin il n'a rien accordé au crédit , a la puiflance, a 1'amitié fi quelqu'ün doit a fa fimplfi faveur-une penfion, une place, un cn> glbr, qu'ön le nom me; 24; Février 178.1. Extrait d'une Lettre de  C §5 3 Eruxellcs du is Février. „ Ou n'a rien vendu „ des meubles de M. Linguet; fa maifon efl „ toujours dans 1'état ou il i'pccupoit & fon „ homme d'affaires continue d'en avoir foin „ Madame Bulté, fa maïtreffe, appellée vuU „ gairement Madame Linguet, qui étóit reftée „ ici jufqu'a ce moment, défefpérant fans dou„ te dc le revoir de fitót & craignant de n'êtra „ pas en füreté dans cette ville, oü fon mari auroit pu la faire enlever, vient dc partic j, pourLondres, oü vraifemblablement elle jet„ tera un trifte coton. II eft bien a craindre, ü „ la détention de M. Linguet dure, qu'elle n'y „ meure de faim , fes charmes ne pouvant plus lui ötre d'un grand fecours.. „ Quant a M. Linguet & fes Annales, on „ n'y penfe plus ici. Cet ouvrage périodique „ par fon égoïfme & fon acharnement contre les „ perfonnages obfeurs de votre Littératurer „ étoit devenu faffidieux & ne pouvoit avoir „ vogue que chez.vous." 24 Février 1781. Extrait d'une Lettre de Bordeaux du 20 Février. „ Voici des circon„ ftances plus détaillées de la mort de M. Fa„ bre & de fa caufe. Ces particularités mérw „ tent d'être connues & lui procureront „ fans doute, les regrets des ames fenfibles.' „ Depuis la prife des Etats d'Artois, n'igno„ rant pas les propos injurieux auxquels cet événement donnoit lieu, il revint dans fa. s, patrie & crut y trouver des confolations chez, D 7.  C 86 ) fes amis; il ignoroit fon plus grand malheur, ,, il ne lui rcftoit plus un feul ami a Bordeaux. Ceux qu'il faluoit, ne lui rendirent point le „ falut; ceux qu'il vouloit aborder, fe détoury, noient & le fuyoient: poffeffeur autrefois de „ 1'eftime publique , il prouva qu'il nen étoit pas encore indigne par fa fenfibilité extreme a tant d'humilktion. Son efprit fembla s'af,, foiblir d'abord. II chercha enfuite dans la religion des confolations qu'il ne pouvoit „ plus trouver ni dans lui-même ni dans. les hommes. On ne le rencontroit plus que dans les „ églifes & toujours profterné fur la pierre: en- fin ne pouvant foutenir fon malheur, il s'eft. „• jetté, il y a environ un mois, en plein jour „ par fa fenêtre ,• ainü que je vous 1'ai marqué." 24 Février 178 r. L'Académic Francoife, dans fon affemblée du buit de ce'mois, avoit ardjugé pour cette année le'Legs de 1200 livresdu Comte de Walbelle k M. Garat: cekü-ci n'ayant point ju gé a propos de 1'accepter, a' prié 1'Académie de vouloir bien lui permettrede le rendre, par une Lettre, dont voici 1'Extrait., ,, L'Académie" (écrit-il fur ce fujet aM. d'Alembert) ,, m'honore infmiment dans le choix J5 qu'elle a fait de moi pour m'adjuger le Leg's „ inftitué par M. de Walbelle. Un fecours 5, qu'un homme de Lettres fans fortuue recok ,, des mains de 1'Académien'eft pas feulement „ un fecours, c'eft encore une diftinétion & 3-, un hon»euv, 'C'eft ainü que j'envifage 1'éta»  C 87 > „ bliflèment de Mv de Walbelle; mals jé n'aP „ point voulu-, Monfieur , entrer en- concours„. avec les; hommes de Lettres qui ontpu defip rer ce Legs. Je ne 1'ai deraandé a auctm„ des Académiciens qui m'honorent de leur „ amitié; je me ferois furtout reproché de le „ difputer a M. Cours de Gebelin, dont j'efiime „ les ouvrages & dont je confidere laperibnne." M. Gebelin qui, ainfi que M. Garat, n'avoit demandé ce Legs ni l'aiinéë derniere, ni celleci, avoit partagé prefque également les fuffrages dans la féance du huit, la différence n'ayant été que d'une voix; il a eu a peu prés 1'unanirnité dans la féance du dix-fept, oü 1'on lui a adjugé ce Legs pour la feconde fois. 25 Février 1781. II y avoit au chateau de Ham en Picardie un homme qui depuis vin°tfept ans étoit confiné dans un cachot de huit pieds en qüarré : la couché fur la paille, environné d'infe&es, de reptiles & d'animaux dégoütans, fans feu, fans lumiere, fans vêtemens, il maudifibit fon exiftence. Deux prifonniers & une perfonne de 1'Etat-Major, infiruits du fort de ce malheureux, qu'on fa'voit être un homme de qualité , ont écrit a Madame Necker. Le courier fuivant a apporté unordre de rendre ce malheureux il la lumiere. B a été mis dans une chambre, rafé „ nourvii de vêtemens, & 1'on va examiner quel eft le crime qui a pului attirer une punition fi crn 1'élégance & Ia nobles1'e du ftyle; ils prétendent qu'il fera une époque ;\ jamais mémorable & glorieufe dans les falies de Ia Monarchie. Les autres n'y voient qu'un charlatan qui pare fa marchandife & la vante pour attirer les chalands: ils critiquent un égoïsme puant, une forfanterie révoltante , une infolencc impardonnablc dans tout Miniftre & furtout dans un parvenu comme M. Necker: ils veulent que fa recette en foit cnfléc, la dépenfe diminuée; que tous les calculs en foient faux & ils obferveut que c'eft d'autantplus mal-adroit} qu'il y a des erreurs fenfibles & pouvant lanter aux, yeux des plus ineptes. C'eft au tems feul a éclaircir ce problëme effeuticl & quc perfonne ac peut réfoudre au moment actuél.-  ( 9i ) o7 Février 1781. On ne publie point ericöHS le Reglement du Parlement concertant les JeuX publiés, paree que le Premier Préfidcnt ayant été porter au Roi 1'Arrêté de la Cour des Pairs a ce fujet, S. M. s'eft réfervé d'y ftamer^& de faire connoitre fes volontés. On croit qu'en confirmant les fages difpofitions de cette Cour, elle en affoiblira quelques articles comme trop rigoureux. 28 Février. Dans la nuit il y a eu une tempête fi affreufe dans Paris & les environs, que le nombre de cheminées & de toits enlevés n'eft pas peu confidérable; qtte dans les jardins des Tuilleries & du Luxembourg plufieurs arbres de la première grandeur ont été déracinés ou coupés par le milieu , & que le vent a jetté bas la belle grille du cbateau dé Verfailles.. 28 têvrier. Tout 1'Opéra eft en rumeur k 1'occafion des nouvelles qu'on recoit de Londres. On fait que les deux Veftris y font;: 011 prétend quTis ont été mal accueillis du public un certain jour & que, fans refpect pour le Diou de la Danfe C*) & P0U1' fon fils> on les a bués, on leur a jetté a la tete des pom- mes & des pelurcs d'orange fur le thé;ttrc 1 Mars. Une aventure affez plaifante arrivée ce Carnaval fait en ce moment la matiere des- converfations. M. de la Frenaye , ancien Notaire, voit dans la rue un petit policon fort. „m„., ,T,w r» fr-vf un Frwi» Veliris stnê . en oaïlanï  C 92 ) oecupé a ramaffer a terre une facochc qu'il ne pouvoit feul enlever, & fe plaignant beaucoup de fon embarras. M. de la Frenaye trés compatiflant, met fa canne & fon chapeau fur une borne & aide 1'enfant a foulever le fardeau, & tk le mettre fur fes épaules: comme il lui rendoit ce fervice, 1'enfant ouvre la facoche & il err découle une grêle de cailloux qui inondent le trop obligeant Notaire: affailli des huées du tems., il a cbié au Ut'.... furieus il reptend fa canne & fon chapeau, court après le Savoyard qui fe refugié chez un parfumeur; il ne refpecïe point cet afyle , entte dans la boutique & veut frapper |e petit ingrat. Un Suiffe qui piloit, ttouve ceh, niauvais & lui appliqüe unepaire de foufflets; puis recommenee fon róle. Cependant la feule s'amaffe; le maltre & fes gens entourent le Notaire; on lui demande ce qu'il veut? on crie d la garde, qui arrivé M. de la Frenaye ne pouvant remplir fix vengeance, veut qu'il vienne Tsn Commiiraire. Survient 1'Officier de Police, qui, après s'ètre fait cxpliquer le cas, dit a M, de la Frenaye qu'il a tort, qu'il ne devoit point chercher a fe faire juftice lui-même, qu'il fal- loit qu'il eüt recours a la voye légale Ea conféquence, accablé de cailloux, hué,. baffoué, fouffleté , il eft encore obligé de donner 15 livres au Commiffaire pour fa vacation; lc Parfumeur ayant bien voulu n'exigeraucune indcmnité.. 1. Mars. Un particulier qui ne s'eft point  C 93 ) fait connoitre, a dépofé 1200 livres chez wé Notaire, pour un Traité élémentaire de morale, qui expliqudt cf prouvdt les devoirs de l'homme et du citoyen. Ce Prix fera adjugé par des perfonnes initruites, éclairées & connues , que 1'auteur du Programme a diftribuer doit prier d'être juges du concours. 2 Mars 1781. L'Auteur anonymc du Prix dont on vient de parler, eft un particulier zelé pour le bien public , penfant qu'une bonne éducation y peut beaucoup contribuer. En conféquence il defireroit que le traité demandé fut compofé d'après les principes du droit naturel; qu'il fut clair, méthodique & propre a toutes les nations. Comme il eft deftiné aux Ecoles, il voudroit qu'il fut court, écrit dans un ftyle fimple & n'excédant pas cent ou cent vingt pages d'une impreffion in-120, caractere ordinaire, afin que fervant aux enfans qui apprennent a lire, il püt être lu & retenu dans le cours de 1'éducation & acheté a bas prix. II faut que 1'ouvrage foit imprimé & approuvé, ou, fi 1'on ne veut pas rifquer les frais de 1'impreffion, il faut que le manufcrit foit revctu d'une approbation ou permifiion d'imprimer. 3 Mars. M. Carter, célebre graveur Anglois, a compofé une trés belle Eftampe, repréfentant la fin du combat entre le Surveillant & le Qjtebec, dans le moment oü Fermer refte feul. avec fon Lieutenant Roberts, & oü le Cheva?  C S>4 ) ïier du Couëdic donne des ordres, afin qu'on fauve tous les malheureux qui fe font jettés ala mcr pour éviter d'être dévorés par les Hammes. II 1'a fait paffer par M. le Marquis de Caftries a Madame du Couëdic, avec cette Lettre: „ Madame... Souffrez qu'en vous rappellant e> Ie fouvenir douloureux d'un Epoux illuftre & m dignement chéri, je vous le reprdfente dans j, le plus bel inftant de fa vie. Si d'un cóté je 55 renouvelle votre douleur, je crois de 1'autre „ vous en offrir la plus douce coiifolation, en 5, cherchant a dternifer une aclion qui feule doit s, rendre fon nom immortcl: c'eft un hommage „ qui vous eft juftement dü, & quand la pofté«,, rité faura que ce tribut fut payd par un dtran„ ger & par un ennemi, ia gloire du vaillant „ Couëdic n'en paroitra que plus complette. Telle füt mon intention, & je croirai avoir j, tout fait pour moi-même, fi vous daigncz „ acceptcr cette foible efquiffe du grand ècnoble „ tableau que ce héros a donné a 1'Europe s, entiere en combattant un ennemi digne de lui." 3 Mars 1781. Hier le Parlement s'eft affcmblé pour entendre les volontés du Roi au fujet de 1'Arrêté de la Cour des Pairs porté rt Sa Majefté par le Premier Préfident. Monfieur, le Comte d'Artois & les Princes & Pairs s'y font trouvés. Monfieur a remis une Déclaratión de S. M. en date de la veille, qui a été enrégiftrée fur le champ. Elle confirme cc qu'on a dit, avec des additions; car 1c Pvoi y an.nu.He tous  C 95 ) «Contrats, Obligations, Promcffes, Billets, Ven•tcs, Ceflïons, Tranipórts & tous actes de quelque nature qu'ils foient, ayant pour caufe une dette de jeu, foit qu'ils aient été faits par des majeurs ou des mineurs, &c. 3 Mars 1781. On voit ici une médaille frappée a Amfterdam en mémoire de la Confédéra'tion pour la Neutralité armée cntre la Ruffie, lo Dannemarc, la Suede & les Provinces-Unies. D'un cóté, elle offre le Buflc dc 1'Impératrice de Ruffie, couronnée de Lauriers, avec cette infcription: Catharina magna, Dei gratid, Imperatrix, Autocratrix Rujjorum. Au revers, ,on voit un matelot confierné ; fon bonnet, qui eft celui de la Liberté, eft jectéa terre: unGouvernail & un Pavillon font a fes pieds. Mercure , dans le dernier abattement, eft affis fur une Corne d'abondance qui eft vuide: d'une main il porte fon Caducée devant fa poitrine,de 1'autre il moutte les Privileges violés de la Liberté de la Navigation. Neptune eft d'un autre cóté dans fon Cbar marin, tenant fon Trident élevé & promet, ainfi que Mercure, de partager le Droit des mers. Pour peindre en même tems la fraude & la violence, on voit un vaiffcau de la Baltique, fans défenfe, contrahit par un Corfaire armé, qui fait une décharge fur lui, de fe livrei a la merci des Barbares avides & fans frein. Sur le Char de Neptune , font les Armes des Confédérés, qui n'ont d'autre but que de reudre la M.cr Libre. Qn voit dans le Ciel  C 9' | „ entrctenir fa pais & de maintenir Fexéeutioa | „ de fes ordres." 4 Mars 1781. M. de la Ciirne de Ste. Palaye vient de mourir dans un age fort avancé-; il laiffe deux places vacantes, Tune a 1'Académie des Belles-Lettres, & 1'autre a PAcadémie Francoife. C'étoit un Littérateur érudit, eftimable & d'une grande douceur de caraétere; il avoir. beaucoup vécu dans Ia fociété de Madame Doublet, & 1'on ne doute pas que dans les Mémoires Secrets de Bachaumont il n'y ait plufieurs articles de lui; il payoit certainement fon tribut p£ cette fociété danslcsmatieresqjuilè concernoient. 5 Mars. M. Junker, Cenfeur Royal, comjpOfant parfaitement bien en Allemand, eft chargé par un des principaux Libraires d'Allemagnc de traduire le Compte rendu de M. Necker dans la langue dc ces contrée's. On le traduit acluellemcnt en Anglois. 5 Mars: Les Comédièns Italiens donnem: aujourd'hui la' première repréfentation de Blan.che £? Vermeille, comédie nouvelle en trois aétcs, mélée d'ariettes. Elle eft d'un M. de Florian, 1'auteur des deux Billets: ce qui eft déja d'un bon augure. La mufique a été com.pofée par M- Rigel, connu furie méme théatre par des fuccès mérités: on fait que cet artifte a du nerf, -un caracïerre a lui & eft vraimcnt original. 6 'Mars. La Société Royale de. Mtfdecine Tornt XP'IL E  C * } doit tenir aujourd'hui fa féance publique. On fait d'avance que le Prix deftiné a celui qui au- ; roit le mieuxréfolulaqueflionfuivante: Déterminer qui eft le meilleur traitement pour la rages ne fera pas décerné. 11 avoit été annoncé dès la première féance publique de cette Compagnie cu 1778. Trois ans n'avoient pas paru un tering trop long pour le concours. Le Prix, d'abord de 600 livres, a été porté a inoo li- | vres & il cit connu aujourd'hui qu'il eft dft a la bienfaifance de M. le Noir, Lieutenant géné- j ral de Police, dont la modeftie avoit defiré gardcr 1'anonyme. 7 Mars 1781. Le premier acte de Blanche C? Vermeilk a été jugé trés agréable; le fecond a moins plu, & le troiiieme a fingulierement bien j réuffi. On retrouve dans cette comédie tout j 1'efprit, toute la grace qui ont fait accueillir les | autres ouvrages de 1'auteur ; mais le public ayant defiré des changeraens, il faut les attendre pour j en raifonner pertinevnment. Quant a la mufique, j elle n'a pas eu un fuccès complet; on y a ren- j contré des morceaux peu faillans & des motifs j qui n'ont pas paru neufs; on y a critiqué fur-. tout des airs de bravoure déplacés , en ce qu'ils arrêtent le cours de 1'aciion. 8 Mars. II falloit pour avoir des droits au Prix de laSociété Royale de Médecine annoncé, j ajouter quelques connoifianccs nouvelles acelles] que 1'on avoit déja acquifes fur le • traitement de laiwge; répandre, par des obfervations exac-  { 99 ) t-es & autlientiques.', un nouveau jour fur Ia queftion; en un mot, rendre le traitement de , cette maladie plus fur qu'il n'étoit auparavarit. Aucun auteur n'ayant répondu k la queftion .d'une maniere complettcment faiisfaifante, le j Prix a été remis: mais elle en a diftingué plufieurs,aux travaux dcfquels elle a donné des éloge?., M. le Noir, membre honoraire de la Compa-, ; gnie, mais non préfent ,informé de ces détails, n'a point voulu que ces athlctes reftalfent fans récompenfe. En conféquence il a fait frapper k fes frais trois médailles d'or, chacune dc la va- ! Jcur de cent Livres, ayant la même erapreittteque ; ie- jetton de la Société , pour leur être diftribuées. 9 Mars 1781. Rien de plus plaifant que ce \ -quife paffe a Londres au fujet de Vejlf'Allarih On ne croiroit pas que les féances du Parlement ont été fufpendues dans cette crife,la plus im- \ portante oü le Peuple Anglois fe foit trouvé dc- i puis plufieurs fieclês, pour le voir danfer. Le ,Sr. Veftris, qui s'affimilok déja aux plus grands 1 hommes de 1'Europe & ne trouvoit au deffus de lui que le Roi de Pruffe & Voltaire, va revcnir bien bouffi de cette nouvelle gloire, de fe voir furvivre dans un rejetton déja fi précieux a 1'Eu- 1 rope entiere. 10 Mars. L'anecdote du jeune Veflr'Allard fent des plus curieufes & trés vraic, on ne | Suroit la configner ici avec trop de détail. Le | jeudi 11 Février il dêvoit y avoir une repréfen) tation de bénéfice au profit de ce Danfeur, Le E %  fameux OratcurEurke, le Demofrheue de Londres avou propole pour ce jour-la au Parlement la lccture.de fon fameux Bijl F,conomique. Le Lord Nugent fou de la mufique & furtout de } opera propofa de remettre la féance, & pour ne pas donna- un motif auffi futile que celui quil avoit xeprdfenra que c'étoit un jour de jeune pour le Royaume. M. Burke ne fut pas dupe de fon excufe & en dévoila 1'objet; malgré cela la remife que defiroit le Lord pafla k la pluralité de trente-trois voix. Le jour indiqué étant venu, il y eüt beaucoup de tumulte a 1'occafion d'une innovation fake dans 1 annonce, oü 1'on mettoit les fecondes places au inêmcprix que les premières. Le tapage fut ü grand, que Vcfir'AUard voulutvenirharanguer le public .avec un interprête, & fut fifHé , hué& renvoyé deux fois h coups de pommes oc doranges.: la troifieme un Membre du Parlement 1'amena lui-méme & par fa préfence d'efpm calma les mécontcns, Le jeune homme en fut quitte pour des excufes, des révérences pour refter profterné deyant le parterre durant la valeur d'environ cinq minutes: enfin on lui cria Bravo & les deux Veftris triompherent, ei} remportant tous les fuffrages. Cette repréfentation de bénéfice a dü rapporter a Veftr'Allard 12.00 guinées. Une anecdote finguliere pour les Veftris , c'eft que le jour de 1'annivcrfaire de la naiflancc de la Reine, ils avoient paru au bal dc la cour; ce  quï avoit occafionné des brocards dans tous les papiers publics; on difoit qü'ils ne devoient paroitre aux bals de la cour, que lorfque ce feroit c-elui de Ninette d la Cour, & c'eft celui qui fut exécuté le jour dc fon humiliation & de fa gloire. 10 Mars 1781. Un M. Zacharie & compagnie ont projetté uil Cartal, qui doit joindre le Rhóne & la Loire & former la communication des deux mcrs au travers de la France. Ce projet valte porte avec lui une utilité fi marquée, que le gouvernement Pa accueilli. Ce Canal eft avancé & peut déja , dans 1'état oü il eft procurer de grands avantages^ 11 Mars. La Déclaratión du Roi donnée h Verfailles le premier Mars concernant les' jeux' défendus, modifie un peu les difpofitions de la Cour des Pairs & les adoucit. Elle renouvelle les Edits, Ordonnances, ArTêts & Régiemens fur cette matierc. On répute jeux prohibés tous ceux a cbarfces inégales & préfentant des avantages certaius a Pune des parties au préjudice des autres. On fait défcnfes a toutes perfonnes, de quelque qualité & condition qu'elles foient, de s'affem-' bier en aucuns lieux, privilégiés ou non privilégiés , pour jouer auxdits jeux prohibés. Les GommiiTaires au Chatelet & les Officiersde Police font tenus de veiller a ce qu'on ne contrevienue point a ces défenfes dans la capitft-le & dans tout le Royaume. La première fois, les banquiers contrevcnans li 3  ( 102 ) feront condamnés en 3000 livres d'amende & lejr joueurs en 1000 livres, payables par corps. En cas de recidive, amende du doublé & enfuite les convaincus punis fuivant la rigueur des Ordonnances & de peines affiictives ou infamantes. Ceux qui auront prêté ou loué fciemment leur maifon aux joueurs, condamnés en 10,000 livres d'amende. 12 Mirf 1781. Le Sieur Creites, inventeur d'une machine pour dételer, enrayer & defenrayer a volonté les roues d'une voiture, dans la courfe la plus rapide, en a fait voir hier 1'expériencedans un enclos prés le Colizée & doit la continuer pendant quelque tems aux ycux du public, k des jours déterminés. 13 Mars. Dans la féance publique de la Société Royale de Médecine, tenue le fix, outre le détail relatif au Prix dont on a parle, i° le Secrétaire a fait mention d'un Avis qui doit Étre publié par cette Compagnie dans les provinces, dont le but eft d'expofer le plan dé la Correfpondance entrétenne par elle avec les Médecins & Phyficiens Regnicolcs & Etrangers. 11 a enfuite donné une autre courte notice d'un Mémoire fur la meilleure maniere de faire les obfervations météorologiques, lequel doit être diftribué aux Correfpondans de la Société. 11 a lu un extrait d'un Rapport fur plufieurs qucstions relatives aux Sépultures de 1'ifle de Malthe, lefquellcs ont été propofëös a, cette Com-  Éag:fHe de la part de Monfeigneur le GrandMaitrc , par M. l'Ambaifadeur de la Religiom Ce rapport a été irrrprimé d'après le vccu & aux dépens de i'Ordre de Malthe. d". M. Lorry a lu enfuite un Mémoire fur les odeurs des médicamens, divifés en cincj claiïes naturelles. 30. M. Carrere a lu le plan d'un Catalogue raifonné fur tous les ouvrages qui ont été publiés fur les; eaux minérales du Royaume. Ce travail a pour but de faciliter les expéricuces a faire fur 1'analyfe & les propriétés de ces différentes eaux. 40. M. de Fourcroy a lu un Mémoire fur une nouvelle maniere d'employer certains réactifs dans 1'analyfe des eaux minérales. 5°. M. Vicq-d'Azir, Secrétaire de la Société, a lu 1'Eloge de feu M. Navier, Affocié Pvegnicole , Médecin & Chymifte célebre k Chalons-fur-Marne. 60. M. Caille a lu des Recherches chymiques fur les différens procédés employés jusqu'ici par les Pharmaciens pour la préparation du tartré flibié. 7». M. 1'Abbé Tetïier a fait la leéture d'un Mémoire fur une maladie trés meurtriere, appeilde Maladie Rouge, qui enleve chaque année une grande partie des moutons de la So» logne, & au traitement de laquelle il a été employé par le gouvernement. 8", La leauce a été terminée par la leclurc .E4  C ïo4' > d'un Mémoire de M. Mauduyt, fur les effetsde 1'Electrické appliquée a 1'incubation & a la végétation. 14 Mars 1781. M. 1'Abbé Mauri, eccléfiaflique hardi, intriguant, avide de parvenir, h quelque prix que ce foit, pronte de 1'honncur qu'il a de prêcber devant leRoi pour fe fignaler: il n'eft point rcbuté des dégoüts qu'il a recus en diverfes occafions pour avoir voulu faire parler de lui & 1'on cite déja plufieurs de fes fermons qui font bruit a Verfailles. II a pris la méthode pour fe difünguer de les femer de traits Mftoriques analogues a ce qui fe paffe aujourd'hui, ou même de les enrichir tout fimplement des anecdotes du jour. Cette méthode peu évangélique, d'autant qu'elle eft le plus fou•vent fatyrique, èfi trés propre a rendre fes discours piquans, mais auffi & lui procurer des enïiemis & A lui faire des affaires. On affure que ïe Roi eft peu content de cet orateur pour cette raifon. 15 Mars. On lit dans le Mercure de Francs du 10 Mars, ces Vers d M. Necker, par les. ouvriers de Flmpiïmerie Royale : Pour Dieu, Monfieur ,c.e(Tez d'écrire , Nous payons trop cher vos honneurs; On n'eft point lafl'é de vous lire;. Mais il la foule des Lefteurs Notre zele ne peut. fufiïre: SI vous n'avez pitié de notre fort, Votre immortalké nous dounera la mort;  C 105 ) ït y a'grande apparence que l'anonyme auteur' étoit un plaifant, dont le Rédacteur èlxMsrcure a été dupe. On a fait fentir , fans doute, au Direcïeur général des finances le ridicule de ee prétendu madrigal; & 1'on a excité les oir» vriérs- de 1'Imprimerie Royale a le défavouer par 1'organe du Siei.tr le Roi, l'un d'eux, qui a' fait infércr a ce fujet tfii petit bout de Lettre eu date du onze Mars dans le Journal de Paris d'aujourd'hui.- 15 Mars 1781. On parle beaucoup d'un écrie de M. Bourboulon contre le Compte rendu de M. Necker. On allure que cclui-ci, aux affuts de tout ce qui peut attaquer fon ouvrage , a été inftruit a tems que cette critique étoit a 1'imprclfion & a eu 1'art de faire enlcver lemanufcrit. ■ 16 Mars. M'. Bourboulon eft aujourd'hui Intendant des Finances de M. le Comte d'Artois; il avoit été premier Gommis des finances fous" 1'Abbé Terrai & renvoyé par M. Turgot, redoutant un homme qui avoit travaillé fous un prédécelfeur auffi' décrié. Quoi qu'il en foit, ce Bourboulon s'eft affocic 'avec M. Radix deSaintfoix , avec Mi le Cierc & autres détracteurs' de M. Necker, pour compofer ft critique, fon^dée fur les ■ connoiffances qu'il croyoit avoir de la matiere. Comme fon ouvrage teud a inculper ' de fauffeté, de charlatanerie & de m-auvaife foi décidée le Directeur des finances, celui-ci a été allarmé & a cru devoir arrêter 1'effor d'une brochure capable d'affoiblir Ie crédit public dur.«1 Ê 5.  mi tems ou il en a fi grand beföïn. On pré- ! tend qu'il exige même que le Sr. Bourboulon foit puni. On a compofé a Paris un ouvrage intitulé, Etat Militaire, Naval, Nobiliaire, Eccléfiajlique,. Civil & Municipal de la Grande Bretagne. Ce Recueil, vraifemblablcment formé fur d'autreséerks en Anglois & compofés a Londres, four-nit ce réfultat de la Marine Angloife. Vaijjeaux ou Batimens en CommïJJion. Du premier rang. . . 3. ... de 100 Canons. I Du fecond, idem. . . 13. . . . de 98 a 00, idem. Dutroifieme,idem. . . 34. . . . de 80 a 64, idem.. ! Du quatrieme,idem. . . 20. . . . de 60 a 50, idem. 120. Frigattes ou Corvettes. Duciiiquiemerang. . . 56. . . . de 44 h 32 Canon.v Du fixieme, idem. . . 59. . . . de 28 a 20 idem. 115. On compte en outre 75 Sloops de 8 a 18 Canons, 22 Batimens de 8 a 10 Canons, 24 Cutcers, 12 Brülots, cinq Galiottes a bombcs-, 4 Yachts. Le Réfumé général eft de Batimens non en fervicc. . . 20 En Commilïïon. . . 377 En Conftru&ion. . . 74 Total 471. "5- On compte en outre 75 Sloops de 8 a 18 Canons, 22 Batimens de 8 a 10 Canons, 24 Cutters, 12 Brülots, cinq Galiottes a bombcs, 4 Yachts. Le Réfumé général eft de Batimens non en fervicc. . . 20 En Commilïïon. . . 377 En Conftru&ion. . . 74  C 107 ) 18 Mars 1781. Vaudeville chantë dans une Société. oü étoient M. & Madame laRuette, Mlle> d''01igny & M. de Ja Rivc. Air: du Vaudeville de la Rofiere. . Que! plus beau champ pour nos chanfons, Que 1'heureux inftant qui nous lie, Avec les plus chers nourriflons De Melpomene & de Thalie! Ilonneur aux talens précieux Qui font réunis eu ces lieux. A celle (*) qui feut a la fois, Nous cbarmer d'un doublé délire, Enchanter nos fens par fa voix, Et nous attendrir pour Zémire ; Honneur aux talens précieux Qui.font réunis en ces lieux. A celle (f) qui dans chaque traic, De la vertu tableau fidele, Sur la fcene en eft le portrait, Dans le monde en eft le modele; Honneur aux talens précieux Qui font réunis en ces lieux. A ce peintre de 1'enjouement, (§) Qui, toujours vrai, toujours aimable , Peignit Cajfandre fi plaifant, Et Mathurin fi refpeétable 5 Honneur aux talens précieux Qui font réunis en ces lieux. (*} Madame la Ruettc. (t) MHe d'OKguy. Qd Sr. la Ruette. E Ö  e r>8 > A celui, fj*) qui de tous les coeurs, A f911 rafl'embler le fuffrage, Et trouvant Melpomene en pleurs ,. Lui fit-oublies 1'on veuvage; Honneur aux talens précieux. Qui font réunis en ces lieux. On a vanté dans tous les tems,. Le fameux feftin des fept fages; Prés de nos convives charmans Que feroient ces froids perfonnagesi Honneur aux talens précieux. Qui font réunis en ces lieux. Heureux qui peut dans un banquets Affis auprès de Colombine,. En trinquant avec Mahomet,, Boire a la fanté de Nanine; Honneur aux talens précieux. Qui font réunis en ces lieux. Lorfque le ccsur eft de moitié, II n'eft point- de plus doux éloges,. Et le tribi.it de l'arnitié, Vaut ceux du parterre. & des loges;. Honneur aux talens précieux Qui font réunis en ces lieux. 19 Mars 1781. Depuis la première repréfen* tation de la Fête de Mirza, fi mal accueillie du* public,, on parloit de remettre cette Pantomime avec des cbangemens confidérables & effentiels; mais il y a apparence que ce n'étoit qu'une tournure pourménager 1'amour-propre de 1'aft^t). Sr. ia Riitj' qui a teap'tci le K-ün au ih&tre..  léttK Comment corriger cc fpectacle incorrigible? comment en bannir toutes les fituationsfakes pour affliger 1'ame, tous ces maffacres, ces fupplices, objets auffi déplacés que repousfans dans une Fête. 20 Mars 17ÖL Extrait" d'une Lettre de Turin, du 28 Février. „Amateur de 1'art du chant comme ,, 'vous Fètes, entboufiafmé de la 'voix touchan„ te, flexible & jufte, que Madame Todi vous „ a fait entendre dans les Concerts de Paris, „ vous apprendrez fans doute avec plaifir, que „ cette Cantatriee eft devenue actrice a Turiri „ & a eu le plus grand fuccès fur notre théatre „ dans le premier róle de 1'opéra cYslndromaqne, „ poëme de Mètaftafe, mufique du Sieur Vin„ cent Martoni, maitre de chapelle de fon Al- teffe Royale, le Prince des Afturies. 21 Mars. Les changemens faits a Blanche £f* F~ermeille nous mettent dans le cas d'en rendre compte aujourd'hui. Blanche &. Vermeille font deux jeunes filles , qui ont été élevées a la campagne par une Fée ■ qui veut faire leur bonheur. Elles ont chacune un galant. Vermeille n'eft fenlible qu'a 1'amour: Blanche devient inlidele & fe laifle gagner par Pambition. Auffi, quand leur proteétrice leur permet de former chacune un fouhait, Vermeille demandc a époufcr fon amant villageois, & Blanche fouhaite époufer le Prince qui lui a propofé fa main. La Fée exauce le premier vceu:1 quant a Blanche, elle lui permet d'aller pafiér un". E 7.  C "O 3 jour k la cour, avec promefre de 1'yfaire regner j li elle s'en trouve bien. Elle y eft conduite M tandis qu'on la revêt des habits convcnables a fon nouvel état, Colin qu'a délaiffé Blanche A vient implorer la pitié du Prince & lui raconte la perfidie de fa maitreiïe. Cette ouverture engage eelui-ci a éprouver par lui-même la tendreffe de Blanche; il feint que pour la féduire il a prjsün nom & un rang qui ne lui appartienncnt point, 1 que le Prince qui Pa appercue s'eft enllammé pour elle d'une paffion tros violente: il lui de- i mande fi Pamour qu'rl lui a infpiré lui fera obte~f nir la préférence fur un rival redoutable? L'em- 1 barras, la furprifc de Blanche indigncnt le Prince, qui fe dévoile & FabaiTdonne a l'inftaut.më- I me y oii les courtifans viennent cbanter fon bon- I hcur_& fa gloire. Elle eft obligCe de retournor j au village; elle y arrivé au moment ou fa fceur'f vient d'dpoufer fon amant. Ce fpeótacle fait I renaitre le remords dans fon cceur; Colin lui 1 pardonne & 1'époiife. Ce fujet offroit beaucoup de difficultc's a Pau- j •teur, par la reflemblance qu'il a avec quantitd ] d'autres & notamment avec le Prince noir 8? 1 Uanc, piece des boulevards trés courue, qu'on I jouoit a la même époque: mais la fagcfiè du ! plan, 1'efprit & la délicatefie du ftyle, quoiqu'ayant befoin d'être plus foigné en quelques endroits, ont fait otiblier ces divers paralleles-, pour-ne s'occuper que de la piece, dont 1'auteur eft d'ailleurs fort ainié du public.  C in 3 21 Mars 1781. Les fondemens de lanouvell® Salie pour la Comédie Italienne vont fe jettcr.C'efl décidemment fur le terrein duDuc de Clioifeul; mais il parolt que c'eft une fpéculation lucrative de fa part, qu'il forme & fuit l'entreprile a fes vrais. 22 Mars. M. Turgot , Miniftre d'Etat , eft mort le 18 d'une goutte remontée , avec toute la préfence d'eipiit & toute la philofophie qu'il a toujours montrée. Saus 1'examiner du. cóté dc fes qualités miniftérielles, devenues trés problématiques, on ne peut lui enlever la gloire de s'ctre diftingué dans fon Intendance de Limoges, de facon a y laifter encore des regrets; on ne peut lui óter une probité intacte, une bumanité, mie popularite,. une philantropie ; qualités qui rendront fa mémoire d'autant plus précieufe, qu'elles font de plus en plus rares dans les gens en place. 22 Mars. Extrait d'une Lettre de Toulou du 12 Mars 1781. „La ville de Marfeille vient d'acheter 1'arfenal que le Roi avoit dans cette ville: elle en donne dix millions. L'Etat trouve par cet arrangement une reflource dans le moment préfent, & gagne pour 1'avenir les dépenfes conlidérables qu'il falloit faire pour Pen* treden des batimens & pour les appointemens' des perfonnes employées dans ce département de Marine. C'eft M. Malouet qui, comme Commiflaire dn Roi, a confomme: cette vente, en trainde?  4 Mars ï78n M. le Maréchal Duc de Clermom-Tonnerre vient de mourir ügé de 93 ans Pour qui compte les jours d'une vie inutüe L age du vieux Priam paffe- eelui d'HefiorIour qui compte les faits, les a„s du jeune Achile L égatent a Ncfior. zi Mars. M. le Marquis de Ia Salie, auteur de a comédie de l'Officieux, cncouraJé par ce iticcès vieht de faire jouer aux Italiens mardi dernier 2D de ce mois , une autre piece iutitulée Chacun a fa folie, eirdeux aétes & en vers. Elle répond afon titre, qui'n'anuonce pas une piece d'intrigue. L'acrion eft compofée ptincipalement de trois perfonnages, dont l'un elt entêté des mceurs & des ufa^es anciens 1'autre n'aimc que ce qui eft moderne, & jc tronteme a la fureur de jouer Ia comédie. On vo;t que ces caracleres peu faillans & peu ncufs, qur plutót ne font pas des caracteres , mais des ridi-cules, fourniftent peu de fonds & ne pouvoicnr fe foutenir que par les détails. II &ut attendre une feconde repréfentation pourprononcer 25 Mars. Madame la Ducheffc de Mazariu pent de mourir: Elle avoit été une des pmsbellesfemmes de la cour & fon ainotii-pour Ie blalfrr na pas peu contribué a accélérer fa fin' dansm age encore floriffant. Son mari forti dë cap-  C ri'3 ) tivité depuis peu , a pu profiter de Ia leeotr d'un pareil fpeétacle ; car ils fe font rapprochés & la Religion a déterminé la Ducheflc a recevoir en grace le coupable de tant d'infidélités & de perfidies, qu'elle lui avoit bien rendues, il eft vrai. 25 Mars 1781. La comédie Francoife clt dans untel délabrement, qu'il en eft réfulté jeudi dernier une fmgularité piquante. La Dame Preville, après avoit joué dans Nanine le róle de la Baronne , avec cette fupériorité de talens qu'on lui connoit, a rempli dans le Médecin malgré M, celui de la femme de Sganarelle. Une chofe plus extraordinaire encore, c'eft que la Dlle. Raucourt s'eft piquée de fe rendre utile: elle a fait dans 1'une la vieille Comteffe & dans 1'autre la Nourrice. Elle s'en eft trés bien tirée: du moins le public a beaucoup ri. On a paru lui favoir gré de fa complaifance, car, fans elle, des maladies & le fervice de la cour auroient fait fermer le fpectacle. 26 Mars. ML. Necker a, fans doute, été trés vivement affefté de la critique de M. Bourboulon , puifqu'il en a porté des plaintes a M. de Maurepas, en demandant que 1'auteur fut exemplairement puni, non rclativement a lui, mais pour avoir tenté d'ébranler le crédit public dans un inftant de guerre, oü il eft effentiel de le conferver. II paroit que ces plaintes avoient été ü efficaces, qu'on étoit fur le point de déccrner une Lettre de cachet pour 1'envoycr a la  Éaftille, lori'que lc Comte d'Artois a' mandé le I Directeur général des finances & lui a rcproché de fe plaindre a d'autres qu'a lui d'un homme qui lui appartenoit & dont c'étoit' a lui a faire juftice. Cet incident a obligé M.' Necker dc fe' 1 relachcr de beaucoup, funout quand le Prince lui a objeclé que fon Trcforier n'avoit fait que ramafler le gant que lui auteur du Compte rendu avoit jetté dans 1'arene, en provoquant & défiant tout critique qui auroit des objeétions a lui faire. Son Altefie Royale a ajouté que difpofée & punir le Sieur Bourboulon dans le cas oü fon ouvrage le mériteroit, par des errenis volontaires, par' une maüvaife foi décidée, ou pnr des ; pcrfonnalités calomnieufes, elle voüioit qu'on nommat des Commiflaires pour examiner le Mé- : moiré en queftion. On ne 'erwt pas que le Roti le permette' & vraifemblablement Paffivire en-i reftera-la. 27 Mars 1781. Le lundi deux Avril prochaiff i commenceront dans le pare du chateau de Vin- | cennes les courfes des jumeus Francohes & des-] jumens étrangeres, pour lèfquelles il a plu au] Roi d'dtablir des Prix. C'eft ainfi que S. M.j fera tourner en établiflement utile, un jeu d'a-j bord futile & tendant uniquément a occuper lel loifir de nos Princes & grands Seigneurs. Ces courfes auront lieu les 2, 6, 10 & 14I Avril; & en tout on décernera huit Prix. Les jumens Francoifcs qui fe prdfentcront potui ooncoimr aux prix , ferout montées par desl  C "5 ) Francois; les étrangeres par les monteurs qtil conviendront aux propriétaires. Tout proprie'taire de jumens Francoifes, otf étrangeres, fera admis a faire cöürir fa jument, en fe eonformant au Réglcment pour la police des (.onnes oue I\ï. tcra connoitre mccilammenta ± 28 Mars 1781. La Matinee & la Soiree Vil* lageoife , ou le Sabotperdti, nouveau Divertisfement eirdeux actes, en vaudevilles, de MM. Augufte de Piis & Barré, a furtout réuffi hier par les jolis tableaux qu'il préfente. Babet, pour aller voir Colin qui 1'attend a la porte, eft obligée de prendre de vieux fabots de fa mere„La terre eft couvérte de neige.- Babet furprife pendant fon rendez-vous, prend la fuite & lailfe un de fes fabots. Le Bailli qui furvient le ramalfe, foupconne qu'il appartient k Babet dont il eft amoureux, & d'après des traces d'homme qu'il voit aboutir a la maifon de Colin-, fon rival, il conclut qu'ils fe font vus furtivement. Pour tilcher de confondre Babet, il va déclarer a toutes les femmes du village qu'il a trouvé un fabot, qui prouve qu'une de leurs filles eftcoupable. On fe décide a 1'elfayer a chacune des lilles en particulier; comme il ne vaaaucune, l'un des maris veut qu'on 1'effaye aufli aux meres elles-mcmes , & 1'on rcconnoit que le fabot appartient a la mere de Babet: mais celle-ci, pour ne pas la laiffer calomnter, avoue 1'hiftoire du rendez-vous, & par fes prieres & celles de fon amant obtient enfin 1'aveu de fes parend pour époufer Colin,  On a trouvé quelques momens de langucuf4 clans Paétion, & du découfu dans Pintrigue;, mais on a applaudi de charmans couplets & traits d'efprit, tels qu'on en trouve dans toutes lespieces des deux auteurs de celle-ci. Ce dernier ouvrage ne déparera point leur agrdable colleéltion^ • 28 Mars 1781. On travaille a la nouvelle Salie pour les Comédièns Italiens, en vertirde Lettres patentes enrégiftrées en Parlement le 14 Octobre 1780, qui ordonnent la tranflation de la comédie dite Italienne dans le jardin de Phötel de Choifeul, fur Poffre faite par M. le Duc & Madame la Duchefle de confentir a Pabandoir gratuit d'environ 1800 toifes de fuperficie de leur terrein, pour y confiruire ladite Salie & y former une place au-devant, & les rues nécesfaires a fon débouché. La Salie de Speétacle fera ifolée: elle aura une place au-devant & la ville confent que la partie de derrière furie Boulevard foit élaguée, netcoyée & pavee,.pour en faciliter les abords. On a vaincu la-defl'us la faufïe délicateffe de Meffieurs les comédièns; en forte que la Salie fera entre deux places & deux rues. Dans les deux rues latérales , k qui Pon donne les noms de Favart & de Marivaux, on pratiquera pour les gens de pied un trottoir,, formé par des bornes placées k cinq ou fixpiedsde diltance des murs. En-tout cinq ruesyaboutirout, fans compter un paffage qui fera ménagé aouriesgens de pied en tacemème de la comédie..  C 117 ) 29 Mars. Extrait d'une Lettre de Bordeaux •du 24 Mars. „ M. Dupaty, quoique jouiffant de 4a place de Préfident, n'en eft pas moins en bute a des perfécutions indireétes. Le Parlement a -pris occafion de pamphlets imprimés & répandus fur fon affaire, pour inftruire une procédure & faire une information, comme fi 1'on 1'éri foupconnoit Pauteur, le coopérateur ou 1'inftigateur. On a entendu en dépofition prefque .toute la ville,: 011 a furtout interrogé trois Avocats extrêmement liés avec ce Magiftrat, Mes■fieurs Seize, Boufquet & Garat: tous trois lui -ont rendu juftice & Pont déclaré incapable d'tmc -vengeance pareille. - II pourroit fe faire que des ,ennemis de M. Dupaty auroient pouffé la fcé-lérateffe jufques a fabriquer ces pamphlets & a s'injurier eux-mêmes pour Pen faire foupconiier complice. Quoi qu'il en foit, la Cour, pour arrêter cette affaire, qui continue a mettre la •ville en difcorde-&; en feu, ne veut pas que le ■Parlement la fuive. 30 Mars. On prétend que ce qui a furtout -envenimé M. de Saintfoix contre M. Necker c'eft que celui-ci a découvert qu'il avoit été rembourfé d'une penfion viagere qu'il continuoit a toucher, & qu'encouragé par la fécurité 0111'on le laiffoit, il en follicitoit le rembourfement une feconde fois. . Le Directeur général lui en a fait les reproches les plus amers & exige qu'il regorgc les intéréts qu'il a recus mal a propos. Cet ofilci.er du Comte d'Artois profite de Ja confiancs  C iaS ) «ju «Prince , pour lui faire partager fon reffentiment & lui do mier des infinuations facheufes contre M> Necker: ce qui éleve un orage confidérable fur la tête du Direéteur des finances. 31 Mars 1781. Extrait d'une Lettre de Limoges'du 27 Mars. „ Nous fommes affligés jufqu'aux larmes de la mort de M. Turgot. II a gouverné cette Province pendant douze ans, dans un efprit d'équité, de popularité, de bienfaifance, avec une application conftante a lui procurer-toutes fortes d'avantages. On n'y ou,bliera jamais les dons généreux qu'il répandit dans le fein des pauvres , lors de la eruelle difette qui nous accabla pendant plufieurs années; les foins infatigablcs qu'il fe donna pour nous procurer des fubfifhnces de première néceflité dont nous manquions, le zele actif & prefque Jmportun avec -lcquel il parvint a dclairer le Miniftere iur la furcharge énorme qu'éprouvoit la Généralité dans fes impofitions, d'après une ciTCiir de calcul malhcureufement confacrée par un long ufage. C'eft a fa bienfaifance, autant qu'a fes lumieres, que le journalier, le malheureux habitant de la campagne, doivent 1'exemption de la eruelle fervitude qui les forcoit a travailler, fans falaire, fur les chemins, & a voiturer gratuïtement les équipages des troupes. La converfion de la Corvee perfonnelle en argent, dont il donna 1'cxemple aux autres provhv ces, porte avec elle cet efprit d'équité fi conforme ftu caraclere de M. Ttu'got, qui dirigeoit toutes  C "9 ) fes opérations. Dans Tanden fyftême, le propriétairc, 1'homme riche, qui doivent tircr le 'plus grand avantage de la confeclion des cÜemins, ne contribuoient cependant prefque pour .den a la dépenfe; le pauvre feul étoit accablc, Dans lc nouvel ordre, les proportions naturelles furent établies; & ce qui doit être regardé comme un bienfait incfiimable, la province eommenca a efpérer d'avoir enfin des routes praticablcs. „ Depuis cinquante ans notre culture fouffroit, Jes gens de 1'art, s'agitoient, les adminiftrateurs s'excédoient de foins & de peines & nous n'avions pas encore deux lieues de route qui ne préfentaflent aux voyagcun les obftacles les plus dangereux & les plus rebutans; & cela doit être ainfi dans un pays oü le phyfique préfente tant .d'obftaclcs a yaincre, des montagnes, des rocbers, des ruüfeaux, des rivieres, des fources s qu'on trouve a cbaque pas, des marais dans quelques parties; tout cela néceffite des travaux au-deffus de la portée des manouvriers. A peine 1'art le mieux dirigé peut-il y fuffire. „ Graces a 'cette heureufe révolution qu'a procurée M. Turgot & qu'il n'a pas perdue de vue pendant fon Miniftere, fon fucceffeur a pu continuer & réalifer ces entreprifes d'utilité publique. Au moyen des fonds accordés pour des atteliers dc charité, lc Limoufin préfente aujourd'hui au voyageur étonné les routes les plus fi> perbes 'de 1'Europe, & indépendamment des grandes Communications avec Paris,avec 1'Efpa-  ( 120 ) , i-^lwWM.^!. , Uil V.H vuil otuuui UdU" nee en annee de particuiieres, qui font de la ■plus grande utilité & les abords des villes fe faciliter & s'embellir." • 31 Mars 17&1. Aujourd'hui, que ceffentJes Spe&acles, il n'eft pas hors de propos de donlier 1111 réfumé du travail extraordinaire fait a chacun des Théatres Royaux, depuis le4 Avril 1780 jufqu'a cette clóture. On a remis ii 1'Opéra fix grands ouvrages: Cajlor & Pollux, Roland , Alcejle , l'Iphigénie m Tauride du Chevalier Gluck, fon Iphigénie ■en Aulide, Echo fj? Narciffe, & fix petits ac- i tes : Bathile £P Cloé, Philemon £? Baucis, la Cour d'Amour, Vertumne ê? Pomone, le Devin du Village & Pygmalion. Ses pieces nouvelles font au nombre de fept; trois grandes tragédies: Andromaque, Perfée & VIphigénie en Tauride de M. Piccini: un opéra BalJet en trois aétes , le .Seigneur Bienfaifant, & 4:rois intermedes en un acte, Laure&'Pétrarque, Damete fc? Zulmis, & Erixene. II faut ajouter a ce travail, .la remife des Caprices de Galathée, de la Ctercheufe d'efprit & la Fête de Mirza. Ce dont il réfulte un Tableau de vingt-deux ouvrages,'tant mis que remis: travail prodigieux ;\ ce Spectacle. 11 eft des amateurs qui obfcrvent même le danger d'une trop grande variété , foit par la crainted'uferpromp-' tement un repertoire encore peu nombreux, a caufe des révolutious dc la mufique en France depuis  C i=i ) depuis quelques années, foit pnr celle d'une dépenfe trop cxccffive en décorations & habits, qui doivent fe fouiller, fe brifer, fe déchirer dans des tranfports auliï fréquens, foit enfin par les répétitions trop multipliées, capables dc fatiguer les fujets, d'obliger a des efforts, d'altérer leurs organes & de nuire a 1'intérêt général. Quant a la Comédie Francoife, elle n'a donné en tout que fept nouveautés: une Tragédie, Thamas Kouli-kan; deux piéces héroïqües, le Siege de Saint Jean de Lofne & la Rêduftion deParis; une Comédie en cinq actes, le Jaloux fans amour: deux petites pieces, V'Antipathie pour VAmour en deux aétes & le Bon-ami en un • enfin un Drame en cinq acres, Clementine £? Deforme. L'indifpofition de Mlle. Sainval a empêché de jouer la tragédie de Richard III tragédie de M. de Rozoi, a Fétude depuis longtems Ils ont remis fix Tragédies: la Veuvc du Malabar, la Mort de Pompée, Orpbanès, Pierre le Cruel, Oedipe chez Admete & plrrhus Le retour des Officiers, les Caroffes d'Orléan's & le Roi de Cocagne font les feules Comédies remifes. Jamais ce Speftacle „'avoit été d'un travail fi fténle. On attnbue cette pénurie a la querelle des comédièns avec les auteurs, qui a aliéné ceux-ci & a empêché les autres de donner a 1? gde un tems diffipé en intrigues & en cabale Cette revue de la Comédie Francoife ne peut m e  pc, le fcul rcmcde a la décadence du théatre national. Jamais les Comédièns Italiens, au contraire, n'ont fait des. efforts auffi confidérables ; ils ontexécuté: i°. cinq Comédies de 1'ancien repertoire ; le Mari gargon, le Tour de Carnaval, la faujfe Suivante, le Sylphe :& le Déguifement. 2°. Onze Comédies nouvelles; la Bemande iniprévue, le Déguifement forcé ,1'Officieux ,Jeannot 6? Colin, le Dormeur éveillé, Jenneval, la Comédie d l'impromptu, les deux Oncles, le Som. nambule , V Amour conjugal, Chacun a fa folie. oo. Six Drames Lyriques; les Torts du fentiment, Florine, Rofanie, Pygmalion,' la Méleinanie, Blanche ê? Vermeille. 4°. Enfin neuf Opéra-Comiques: Caffandre Oculifie, Arifiote amoureux,la Veuve de Cancale,les Vendangeurs9 Caffandre aftrologue, les Étrennes de Mercure, i'. 'mant ftatue, les deux Morts, la Matinée & la Vaillée villageoife. Ce qui donne un total de trente-trois ouvrages, dont le repertoire des Italiens a été augmenté cette année. 1 Avril 1781. Le fils de M. de Rochambeau, qui a dü repartir pour PAmérique Septentrionale fur la même frégate ou s'eft embarqué M. de Barras, qui va fuccéder a M. de Ternai, avant de quitter VerPailles eft allé prendre les ordres de la Reine. S. M. Pa chargé de témoïgner fa bienveillance a fon pere & a ajouté avee iïaieté :„faites-luipart de mon bonbeur." Ce qui ne laifie plus aucun doute ftir fa groffefTe défirée,'5  C 1=3 ) ï Avril 1781. Les Comédièns Francois ont donné hier pour leur clóture Jodeïet Mailre cff Valet, comédie en cinq acles & en vers de • Scarron. Cette farce ayant prés d'un iiecle & demi, puisqu'elle eft de 1645, prouve dans quelle pénurie d'aéteurs eft ce théatre pourexécuter lc tragique. C'eft peut-être Ia première fois qu'on joue une pareille piece encarême & ala fin de 1'année dramatique. II faut attribuer aufïï la bizarrerie de cet événement a la trop grande iudulgcnce du fupérieur, qui a laifie les meilleurs acteurs prendre leurs vacances avant le tems & partir pour la province, oü ils gagnent en buit jours plus que ne leur vaut ici part entiere. 1 Avril. C'eft aujourd'hui que doivent commeneer a Vinccnnes les Courfes pour les Prix fondés par le Roi. II y en aura trois de cent Louis chacun,, conformément au Réglement rendu pour la police de cet exercice. C'eft M. le Marquis de Conflans que S. M. a nommé , afin de préfider aux Courfes & a la diltribution des Prix. 1 Avril. II parolt que M. le Duc de Chartres, malgré la réclamation des propriétaires réunis des maifons donnant fur le Palais Royal, perfifte dans le projet lucratif qu'on lui a fiiggeré, de convertir fon jardin en une efpecé de foire ou d'enclos privilégié. Ils ont déja préfente plufieurs Mémoires a fon Alteffc infructeufement, ils ont même eu recours h. Madame la Ducheife toute débounaire, mais qui a employé fa médiaF a  C 124 ) tion fans fuccès; enfin il doit y avoir vendredi une députation compoféc des principaux d'entr'eux, pour tenter .un dernier elFort auprès de ce Prince. 3 Avril 1781. MM. Augufte de Piis & Barré, auteurs de la Soirée villageoife , ont coufu a la fin de leur piece, exécutée pour la troifienie fois a la clóture, des couplets en forme de compliment: cette tournure plus piquante que la formule ordinaire, a trés bien pris: on a furtout fait répéter le couplet fuivant, chanté par la DHe. Carline fous le nom de Tberefe; il faut fe rappeller que ce font des payfans qui chantent: Air; Robin turelure. Rien qu'un feul mot en paflant: J Marquais lui, j' vous en conjure, Qu' fon r' tour pour mon p'tit talent S' ra, j' 1'afïïire, C' qu'eft 1'printems a la verdure; J' bornons la not' écriture. 3 Avril. M. Bouquet, Avocat ati Parlement, CommifiTaire du Tréfor des Chartres, Bibliothécaire & Hiltoriographe de la ville de Paris, vient de mourir. C'étoit un favant homme , dont on a eu occafion de parler plufieurs fois, ainfi que de fes ouvrages: il avoit écrit du tems de la Révolution en faveur du fyftême du Chancelier; il eft a préfumer, au refie, qu'il étoit de bonne foi; il n'étoit point du tout intriguant , il avoit même de la bonhommie & de  ( "5 ) ïa fimplicitd: il 'étoit devenu fort lourd, fort épais, dormant toujours, & Fon ne pouvoit concevoir comment il avoit acqüis toutes les connoiffances qu'il polfédoit. 3 Avril 1781. Les ennemis de M. Necker continuent a répandre "des pamphlets contre lui, & fon Compte rendu leur donne beau jeu : il parolt Lettre d'un ami d M. Necker, fans date cc de 16 pages feulcment. 4 Avril. M. le Gros, Direfteur du Concert Spirituel, qui a fingulierement amélioré ce Speftacle, ainfi qu'on Fa obfervé plufieurs fois , va le perfectionner encore dans ce tems-ci, oü ce fera bientót le feul dont jouira le public. Non feulement il a fait venir diffdrens virtuofes dignes d'être entendus des connoiffeurs, mais il a encore cherchd les morceaux de mufique les plus intdreflans, les plus rares, les plus propres a exciter la cüriofitê. II fe propofe entre autres nouveautés de faire exécuter un Stabat Mater de Fleyden & un autre du Pere Vito. II donnera enfuite celui de Pergoleze, toujours en poflesfion de ravir 1'auditoire: les amateurs feront amfi en état de comparer les difrerentes mariières de ces trois grands maitres & de les juger. 4 Avril. C'elt demain que 1'Acaddmie Francoife doit procdder ddtinitivcmcnt a 1'électióndu fucccffeur dc M. de la Curnc de SaintePalaye. II parolt qu'elle n'eft partagée qu'entre deux concurrens, M. Bailly & M. de Champfoït. 5 Avril. La Lettre d'un ami d M. Necker F 3  f 1*6 ) tend a établir qu'il y a beaucoup d'inexactkude & d'illufion dans fon Compte rendu. C'eft un écrit rempli de calculs , oü 1'on prekend relever fes erreurs. U.faudroit être bien au fait de la Biatiere pour en juger. On compare a fa méthode celle de Demarets & de 1'Abbé Terra'i, & 1'on trouve que ceux-ci avoient beaucoup plus de clarté- & de franchife. Du refte, 1'ironie eft la figure favorite de 1'auteur; il accable delouanges M. le Directeur général & il les tire des propres expreffions & phrafes de fon ouvrage, 11 s'excufe de garder 1'incognko & de relter dans Pobfcurké, fur 1'éloignement qu'a M. Necker de tout éclaircifl'ement, de toute difcusfion honnête, quoiqu'en publiant fon travail il paroiffe le foumettre a 1'examen de quiconque voudrale critiquer. Ce pamphlet feroit précieux par le rapprochement des calculs, s'ils étoient exacts. 5 Avril 1781. Extrait d'une Lettre de la Guadeloupe du 15 Janvier. „ Nous avons vu 3, avec plaifir revenir ici pour Intendant M. de j, Montdenoix; mais nous fommes fichés que „ le motif en ait été auffi défagréable pour lui. C'eft une fuite de fa divifion avec M. de .... ,, lc Gouverneur de la Martinique. C'eft d'au„ takt plus funefte que cet adminiftrateur a des „ refiburces que n'aura pas fon fucceffeur. Dans „ les tems les plus difficiles du féjour du Coma, te d'Lftaing & de fon Efcadre, il a trouvé „ jufques a 500,000 livres de crédit pour lé Roi  C 1=7 ) „- & nous doutons que M. Pcynier puiffe en „ faire autant. ,, M. de Montdcnoix eft environ depuis le commencement d'Octobre dans cette Colonie; mais nous craignons qu'il ne nous refte pas longtems,foit a raifon de fes mécontentemens 3, perfonnels, foit par les intrigues de M. de..., „ qui le trouvera encore trop prés de lui. Ce Gouverneur, qui ftir la fin du Miniftere de M. ,, de Sartines étoit fort mal en cour & devoit ,, s'attendre a fon rappel, fe fiatte d'avoir re„ pils confiftance fous le Marquis de Caftries. „ II a du courage & de 1'acTavité; mais il eft bouillant, entété, brouillon & ne peut que „ nuire aux intéréts du Hoi, par fit méfintelligen- ce avec tous les chefs qui viendront fucceili„ vement aux Mes du vent commander les ar„ méés navales & qui excitcront riéceflairement „ fa jaloufie, plus ils fcront recommandables par leurs talens. ,, Au furplus, il eft trés mal avec les habitans. „ Nous entendons parler d'un Mémoire envoyé „ contre lui en Cour, oü il eft fort mal traité: heurëufement pour lui Madame Blot, du Palais „ Royal, qui a 1'oreille du Miniftre actuel, „ raccommodera tout cela. ,, Je ne vous parle point des Anglois, qui „ tiehnent la mer actuellement dans nos parages „ & font tout ce qu'ils veulent, jufques ace que „ nous ayons une Efcadre qui leur en impbfe." j Avril 1781. C'eft M. de Champfort quj F4  C «8 ) 1'a emporté cette après-midi; il a eu feize voix contre douze. 6 Avril 1781. On parle depuis quelques jours d'une autre brochure fort courte auffi, oü 1'on 'attaque le Compte rendu de M. Necker. Elle eft-intitulée les Comment. On veut qu'elle foit vive & preffante. 6 Avril. Le prédicateur le plus renommé cette année, au gré de ceux qui fuivent les fermons, c'eft un AbbéMafle , qui monte depuis peu en chaire a Paris. II préche a Notre-Dame & c'eft un concours prodigieux; on le trouve déja fupérieur a tout ce que nous avons de plus briliant aóhiellement. 7 Avril. On parle beaucoup de la féance qui a eu lieu hier matin au Palais Royal. M. de Vaudreuil,Confeiller d'Etat,M. le Comte de Talaru & M. le Marquis de Voyer s'étant rendus a 1'heure indiquée par M. le Duc de Chartres, pour écoutcr les repréfentations qu'ils avoient a lui faire au nom des propriétaires des maifons fur le jardin; le Prince, après s'être fait attendre longtems, a paru en robe de chambre, fans bas & fans culotte. La discuffion a été vive, & fon Altefle Séréniffime fe rctranchant conftamment fur le befoin qu'elle avoit d'argent, M. de Voyer outré a fini par lui dire : Monfeigneur, nous en avons, non pas pour vous le dunner, mais pour nous dêfendre. La converfation en eft- reftée-la & 1'on s'eft retiré. Ces Meffieurs fcmblent décidés a recourir au Roi. 7 Avril  C "9 ) 7 Avril 1781. Une Dame amatrice d'Horace, promet pour prix a celui qui lui traduira quelques Odes de ce pocte, une veile rofe & ar. gent, qui eft fur fon tambour. C'eft dans Je Numéro 93 du Journal de Paris qu'on lit cette annonce iinguliere. 7 Avril. Les Comment font une grande fortune. On trouve dans cette brochure, i ce que publient les détractcurs de M. Necker, le ton de 1'honnêteté & dc la vérité, la touche fine & délicate de 1'homme de goüt; ils veulcnt que la cour & la ville Paient lue avec avidité. On en pariera plus pertinemment, quaud on 1'aura difcutée. 7 Avril. Le Sieur Lavenant , Agent de Chauge, a été conduit aujourd'hui a la Bafblle. On 1'accufe d'infidélité dans fa charge & de s'être approprié un récépiffé des nouvelles rentes viageres , qu'un particulier lui avoit donné a négocier. 8 Avril. On ne fait que parler de la féance du Palais Royal & il parolt que le public voit de mauvais ceil M. le Duc de Chartres, depuis que les détails en ont tranfpiré : on allure menie que fon Alteffe Sérénilfime a été huéc hier chez Nicolet. On ne peut voir fans une forte de mépris un grand Prince fort riche, afficher une cupidité auffi fordide & fe refufer a tout fenutuent de juftice & de commifération. 8 Avril. M. le Lieutenant général de Police, accompagné des officiers de fa jurisdicF 5  C 130 ) tion, a fait jeudi 1'ouvertuve d'un nouveau rnarché arrangé au fauxbourg Saint Antoine. Le clergé de Sainte Marguerite s'y eft rendu pour en faire la bénédiction: cérémonial affez furprenant en pareil lieu. 8 Avril 1781. C'eft aux auteurs du Journal de Paris que la Dame anonyme s'en rapportc, pour décerner le prix qu'elle deftine au meilleur tradufteur d'Horace. 9 Avril. M. le Duc dc Chartres a fait afficher dans le Jardin du palais Royal une Ordonnance, oü il renouvelle le Réglement pour ia police.de ce lieu;. 011 y a remarqué cette pbrafe : les propriétaires des maifons autour du Jardin ,qui tiennent de la bienveillance deMonJeigneur des jours ê? des iffues fur ledit Jardin , &c. On la regarde comme inférée a deffein pour attaquer leur propriété & 1'on croit qu'ils fe difpofent a faire cxpliquer le Prince, dont la religion a été furprife. 9 Avril. Encore une brochure contre' le Compte rendu de M. Necker. Elle eft intitulée: Troijieme fuite des Obfervations du Citoyen* On y a joint le Compte rendu au Roi par l'Abbé Terrai en 1774., & cer-te piece rend l'euvrage trés curieux. 10 Avril. Un certain Abbé de Marjinville ? fort renommé dans le parti Janfenifte, s'eft trouvé Légataire d'une g toffe fucceffion qu'on a jugé étre un Fidei-Commis entre fes mains pour h fameufe Boite & JPerette, trés vuide depuis-  C 131 ) quelque tems, que Ie zele des fideïes fe rafrentit & s'éteint. M. Ie Prèfident Roland, h qui devoit revenir une grande portion de cet héritage, quoique lui-méme^ entiché de Janfénifmc , n'a point trouvé bon de s'en voir ftuftré : il s'eft cru tout auffi propre pour faire des ceuyres pies que. Ie légataire & a intenté un procés a 1'Abbé de Marjinville; mais il a fuccombé & vient de le perdre en entier ces jours-ci. 10 Avril 1781. Tous nos Princcs femblent vouloir fe ménagcr aujourd'hui par èux-iBètnes des reffources utiles, qui les mettent enétat dc faire face aux dépenfes énormes qu'ils font d'ailIcurs. C'eft ainü que Monfieur, pour être en état de rétablir fon Palais du Luxembourg, lans fe déranger, fe propofe de vendre une partie du Jardin, compofant environ un tiers, & déja la muraille de féparation s'éleve. 10 Avril. Une anecdote finguliere, rapponée dans la Troifieme Juite des Obfervations du ti~ toyen, éclaircit mcrvcilleufemcnt tout ce qui a été dit a 1'occafion de M, Bourboulon. „ Cet „ ancien premier Commis des finances, perfuadé „ que M. Necker cherchoit fincerement la vé^ „ rité, a fait des obfervations honnêtes & rai„ fonnables fur le Compte rendu: 1'argent & „ 1'intrigue ont fait tomber le manufcrit daus. „ les mains du Directeur général des finances, qui a couru fur le champ demander avec vio„ lence qu'on mit les auteurs a Bicêtre.... Déj.\ M. Bourboulon albit Être imraólé - quand un F 6  „ Prince, auffi jufte que grand & généreux, a ré'„ clamé contre la furprife & dcmandé qu'avant ,, tout on nommdt des Commiflaires, pour ju-' „ ger duquel il falloit faire jufiice, ou de 1'ac„ cufateurou de 1'accufé." 11 Avril 1781. Onfe rappelle que dans les Fatïums conire le Sieur Marin, le Sr. Beaumarchais fe plaignoit de n'avoir pu profiter des avantages de fon premier contrat de mariage par défiuit d'infmuation; mais il avoit Fimpudence d'invoquer la familie de fa femme & de prétendre qu'il e'toit trés bien avec elle. Et cependaut c'étoit cette même familie a laquelle il refufoit de refiituer la dot de la défunte & qu'il a accablée de chicanes depuis plus de trois ans qu'il efl condamné a la payer, fans fatisfaire aux Arrèts de toute efpece rendus en faveur des parens. Enfin ce cauteleux peribnnage s'eft tellement retourné, que lundi dernier il aété non-feulement difpenfé d'acquitter ce qu'il devoit, mais qu'il fe trouve avoir, compenfation faite, des répétitions a exercef conire eux. Dans le Mémoire que les héritiers Aubertin ont répandu contre lui, on trouve une lettre curieufe & qui développe t merveille fon caractere de féduction , fon ame corrompue & les vues criminelles qu'il avoit déja fur la malheureufe viclime d'une paffion aveugle, dont il 1'avoit enivrée. II faut obferver que le Sr. Franquet, lc mari de fa première femme, vivoit encore: cc qui rend 1'Epitre plus remarquable. II lui dit:  C 133 ) „ Croyez-vous qu'il vous foit bien permis „ de difpofer des jours que vous m'avez defti„ nés? Ne vous reffouvenez- vous plus que j, vous devez rcgarder Fépreuve paffagere oü „ vous êtes lburnife, comme un moyen qui vous „ eft offert d'adorer la main qui conduit tous „ les évenemens, qui ne vous afflige achielle„ ment que pour vous faire goüter avec plus de „ douceur le plaifir de la comparaifon, lorfque „ vous aurez changé d'état'? Si j'écoutois les „ fentiraens de compaflion que vos cbagrins „ m'infpirent, j'en détefterois 1'auteur; mais „ lorfque je penfe qu'il eft votre mari, qu'il „ vous appartient, je ne pais que foupirer en „ filence, & attendre du tems & de la volonté „ de Dieu qu'il me niette en état de vous faire „ éprouver le bonbeur pour lequel vous fem- blez deltinée." 11 Avril 1781. II n'eft point encore décidé fi les comédièns Francois iront a la Salie qu'on leur fait conftruire; ils y repugnent toujours & Monfieur ne feroit pas faché d'y avoir une troupe a lui; ce dont il réfulteroit une concurrence qui feroit encore plus défigréable pour eux & fait le vceu des auteurs, qui voient la chofe le plus avantageufement pour les progrès de 1'art. 12 Avril. Dans la Troifieme fuite des Obfervations du Citoyen, on fait des reproches graves a M. Necker, tendant A infirmer la véracité de fon Compte rendu. On étabjit d'abord que, bien loin qu'il y ei\t un déficit dc 24 millions F 7  c i34 y dans les finances, lorfqu'il efb parvenu :\ les diriger, la recette étoit au pair de la dépenfe. On 1'accufe enfuite de beaucoup- d'autres erre urs volontaires; & c'eft aux pïeds du tróne, au tribunal de la natioiï, a la face de 1'Europe, qu'on' porte cette accufation èc qu'on le fomme de répondre. Du rcftc, cet écrit de pure difcuffion n'a rien d'agréable ni de piquant comme littéraire; il parolt fortir de la même plume que les autres & fe diftribilc toujours gra-tis. 12. Avril 1781. On s'occupe trés férieufeBïent de la nouvelle Salie de la Comédie Italienne & les travaux fe pouiTent avec .vigneür on prétend même qu'on a enlevé les ouvriers occupés a la conftruction de Féglife de la Madelaiue, pour les tranfporter a cet édilice profane; ce qui fcandalife fort les dévots. 13 Avril. On a déja vu par la première Lettre rapportie du Sieur de Beaumarehais, eombien ce Lovelace trop récl étoit dangereux pour une femme crédule & amoureufe; on va juger par une autre, rapportée dans le même Mémoire, jufqu'a quel point il eft capable de pouffer la perfidie, en cherchant a entretenir rillufion de cette malheureufe dont il troubloit le repos , tandis qu'il en excitoit trop juftement la jaloufie. „ Ne favez-vous pas, k n'cu pouvoir dou« „ ter, que je vous aime dc tout mon coeur, „ & quand je voudrois lc taire, quan,l même  C ï35 ) dj oh pourroït me foupconner cxtérieurefflent, „ n'ai-je aucune défenfe k efpérer dans votre „ cceur? Ah! Julie, vous le dites trop jufte„ ment que les tems font changés. Tout nous- interdifoit autrefois 1'amour que nous avions ■„ l'un pour 1'autre; qu'il étoit vif alors! & que „ mon état étoit bien préférable k celui dont fe „ jouis acluellement! Ce que vous appellez ma froideur, n'eft fouvent qu'une retenue de fen„ thnens, dont je cache la tracé, crainte dc „ donner trop de prife fur moi a une femme „ qui a changé fon amour en domination impé„ rieufe. Cependant, ma Julie m'époufe; mais „ cette Julie qu'un tendre regard faifoit expirer „ de plaifir dans les tems d'ivreffe & d'illufion , „ n'eft plus qu'une femme ordinaire, a qui des „ difficultés d'arrangement font a la fin penfer „ qu'elle pourroit bien vivre fans 1'homme que ,, fon cceur avoit préféré a toute la terre." 13 Avril 1781. M. de Brunoy vient de mourir a Villers en Normandie, agé de trente„ trois ans. Ce perfonnage fera cité dans la pofilérité comme un des étres des plus finguliers de la nature. Monfieur, qui avoit acheté Brunoy en viagcr, aura paree moyen eu cette terre a trés bon compte. 14 Avril. Longchamps n'a pas été brillant cette année en équipages; mais on v a vu Mon¬ fieur, Monfieur le Comte d'Artois & Madame 2a Comteffe d'Artois, M. le Duc de Bourbon, Madame la Ducheflc dc Bourbon, qui s'y font  C 130 ) trouvés le même jour. Le Duc de Chartres y étoit aufli a cheval & s'y eft remarqué caufant longtems ;\ la portiere du caroffe d'une fille, Mlle. Beaupré. Ce qui n'a pas augmenté pour lui la vénération publique. 14 Avril 1781. On a exécuté fticceffivement cette femaine fainte au Concert Spirituel les trois Stabat, qu'on fe propofoit d'offrir aux amateurs pour exercer leur goüt & leur fournir matiere a comparaifon. Leréfultat desjugemensadté, que celui del Signor Padre Vito, Portugais, n'étoit qu'une imitation de Pergoleze, foible & fervile. Le Stabat d'Heyden a eu , au contraire, le plus grand fuccès. On y a trouvé des morccaux fublimes & pleins d'énergie. Cependant, rien n'approche de la belle unité de 1'auteur Italien, qui, avec des moyens fimples, produit les plus fuperbes effets. 15 Avril. Les Comment ne ceffent d'être courus avec la plus grande aviditê; il n'eft pas jufqu'aux partifans de M. Necker qui ne les recherchent; car la critique fe fait toujours lire avec plaifir, même de ceux qui la défapprduvent & n'y croient pas. Dans celle-ci, 1'objet du differtateur eft de détruire 1'illufion dangereufe, fuivant lui produite par lc Compte rendu, que les rieurs appellent plaifamment le Conté bleu, paree qu'il eft relié en papier bleu. Leur procédé eft d'oppofer M. Necker a lui-même; ce qu'il a dit en 177Ó ,a ce qu'il dit aujourd'hui; ce qu'il dit dans un endroit, a ce qu'il dit dans un  C 137 ; utre, & ce qui eft feu de tout lc monde, fi cé ui n'eft feu que de lui. Ils fe fervent furtout u Mdmoire donné par ce Directeur des finances u Comte de Maurepas au mois de Juilleti 776 nfqu'il s'cfiörcoit de parvenir au Miniftere: .ore il préfentoit tout comme poffible & faifoit ivifiiger des refiources évanouïes depuis. Après douze Queftions ou Comment, tous lus embarrafians l'un que 1'autre, 1'auteur deent plus confolant, en aflurant qu'il fe fait autant moins dc fcrupule d'expofer le véritable at des chofes, qu'intrinfequement il eft tel que )s ennenus ne fauroient s'en prévaloir, ni la toon sen allarmer. II n'eft pas befoin, fuiint lui, d avoir recours au menfonge, pour sriuader ce qu'on peut prouver géométriqueent; que les moyens de la France font a ceux : 1 Angleterre, comme 1'opulence eft a 1'épuiinent: une population triplo, un numéraire plus ie doublé, un meilleur fol, un climat plus ureux & tout ce que 1'amour du Souverain )ute au Patriotifme: voila nos vTais avantages i' nos ennemis. Cet écrit clair&méthodique,eft en outre d'un le noble & vigoureux & ne peut qu'affliger uicoup M. Necker. ii6 Avril 1781. M. 1'Abbé Mafle eft un mme de cinquante-cinq ans, ayant une figme !ble & approcbant beaucoup de celle de Bqst. II compofé longuemcnt, mais il eft fort de :uves cx de raifonnemens; on trouve que c'eft  C T33 > Ie fermotïaire qui, depuis Bourdaloue,ait eu une logique plus preffante; il eft en outre plus orné que celui-ci, a un trés beau ftyle, &, quoique fon élocution ne foit pas fans défaut, elle ajoute encore au fond'des chofes excellentes qu'il débite. Le Chapitre de Notre-Dame a été fi content de cet orateur, qu'il a fait une exccptïon pour lui & a porté a ooo livres les honoraires dc la ftation qui, jufques a lui, n'étoient que de650 livres. II. eft malheureufemenr tombé inalade dans la femaine fainte, & les fidelés qui s'étoient rendus en fonle le jour du Vendredi Saint pour erttendre ia Paffion, vantée comme un chefd'ceuvre , ont été bien étonnés de voir monter en chaire un Capucin. Madame la Ducheffe de Duras vouloit s'en aller; mais le Maréchal de Broglio 1'a retentie, lui a demandé fi c'étoit la parole Mafle ou la parole de Dieu qu'elle venoitentendre? que, fi c'étoit celle-ci,elle étoitbonne dans toutes les bouches & qu'il ne falloit point que gens de leur efpece donnaffent un pareil fcandale. ió Avril 1781. Efquiffe des travaux d'adoption dirigês par les Officiers de la Loge de la Candeur, depuis fon êtablijjement al'Oriënt de Paris. Tel eft le titre d'une brochure qui, quoique nneieime , puisqu'elle eft datée de 1778 , ne eommence qu'a perccr depuis peu parnri les profanes & ne kiffe pas que de leur dévoilér des ehofes curiéufes & iniérciiantcs.  C 139 1 D'abord, 011 entend par Loge d'adoption une" Loge de Francs-macons, oü les fe mines font admifes pour participer a ceux de leurs myfteres qu'elles font fufceptibles de connoitre. On fe doute bien que c'eft aux Francois qu'eft düe cette heureufc innovation, & que dans le pays de la galanterie il n'auroit pu fubliller longtems dans tout fon 1 ultra une fociété dontlefexe auroit été totalement cxclu.- Du relte, on lit a la fin un tableau des fceurs, compofé des femmes de la plus haute qualité: a latête defquelles eft Madame la Ducheffe de Bourbon, GrandeMaltrelfe des Loges d'adoption. Nous reviendrons fur cette finguliere- produétion. 17 Avril 1781. Sous le feu Roi on avoit commandé a un jouaillier une Riviere de diamans pour la Comteffe Dubarry, montant a 7503000 livres. Le pofleffeur en étoit fort embarralfé: enfin ayant feu que la Reine fe propolbitde ramener la parure des diamans ,pour favoriter ce genre de commerce extrêmement tombé, il 1'a fait voir a Sa Majefté. Le Roi infiruit qu'elle la defiroit, en a fait faire 1'acquifition depuis fa groil'efie, a fon inicu, & par une galanterie qui n'a pu qu'être trés agréable a fon augufte compagne, il fa fait trouver fur fa toilette, au moment oü elle s'y attendoit le moins: attention qui a flatté extrêmement la Reine. 17 Avril. Suivant une cérémonie ridicule & même indécente, mais qu'on confervoit a eaufe de fon ancienneté, la nuit du Jeudi. au  C 140 ) Vendredi Saint on exorcifoit'a la Sainte Chapelle de prétendus poffédés. Cc fpectacle dégoutant & horrible, par 1'efpece d'individus qui s'y préfentoient, attiroit beaucoup de curicux. La philofophie & 1'honnêteté publique gémisfoient depuis longtems des indécences qui fe commettoient dans cette églife a cette occafion. Enfin cette annde on a fupprimd la cdrdmonie. Le peuple,qui n'dtoit pas inllruit dcsnouveaux ordres, s'eft préfente' en foute1, h 1'ordinaire; il a vu des gardes qui Font repoufle: dans le nombre il y a eu des mutins qui n'ont pas trouvé cela bon; il y a eu des épées tirées & un foldat a été blefié: ce qui a dönnë lieu d'arrêter deux quidams, qu'on a conduits au corps de garde: il s'eft trouvé que c'étoieut le Comte de Du *** & le Duc de Bour ***, deux freres, fils du Maréchal de Du ***, déja trés tarés & regardés comme de fort mauvais fujets; ce qui ne contribuera pas a rétablir leur réputation. 18 Avril 1781. Ce qui rend précieufe YEs. guijfe des travaux d'adoption, réc qu'on a annoncée, c'eft un détail biftorique des perfécutions fufcitécs a Naples contre les Francs-macons, dont les papiers publiés ont beaucoup parlé, mais trés imparfaitement & avec une réferve qui ne leur permettoit pas de dévoiler tout ce myftere d'iniquité. II fe trouve dans un difcours du Frere de la Chevalerie, un des Orateurs du Grand Oriënt, prononcé le 17 Mars 1777. Les faits en avoient été fournis par le  C 141 ) Frere Lioy, m des plus fameux Avocats dö Naples, qui en cette qualité & Macon zélé & diftingiié par les dignités les plus éminentes de 1'Ordre, avoit établi 1'injufticc du Décret porté contre fes freres & de Ia détention de quelquesuns. Lui-même, vicfime de fon zele, fur Ia dépofition de trois copiftes de fes Mémoires, il avoit été profcrit des deux Royaumes comme criminel de Leze-Majefté: retiré a Venife, il ne s'y étoit pas trouvé en füreté & étoit palfé en France & venu a Paris. Voici le réfumé de ce qu'on a feu par lui. Tanucci, maitre tout-puilTant a la 'cour des deux Siciles, déteftoit depuis longtems les Francsmacons. Une femme de qualité admife a une Loge d'adoption a Naples, fut furprife quelque tems après d'une maladie violente: elle tenoit de trés-prés au Premier Miniftre d'une cour voifine, prépondérantc dans celle de Naples' on lui perfuada que cette maladie imprévue prei noit fa fource dans les épreuves auxquelles elle avoit été hvrée: en conféquence il porta, tant en fon nom, qu'au nom de fon maïtre les plaintes les plus vives a la cour de Naples.' Tanucci paroiffant ainfi, en fatisfaifant ft propre haine, remplir feulement les vues d'une cour étrangere & avoir égard k fa requifition , furprit a fon maitre la fignature d'un décret, I proscrivant non feulement toute affemblée Maconique dans 1'étendue du royaume des deux Siciles, mais même qui déclaroit ceux qui y  C 142 ) aflifteroient, criminels de Leze-Majefté. Par une noirceur plus grande , ayant corromp* un Frere, Tanucci parvint a faire convoquer une Loge depuis le décret rendu, & le 2 Mars Ï775, les travaux commencés, il fit inveftir la Loge, arrêter ceux qui la tenoient & on inftruifit leur procés. Ils auroient infailliblement fuccombé fous I'accufation, fi la Reine ne s'étoit attendrie fur leur fort & n'avoit obtenu la délivrance des prifonniers. Cet acte de juffice avoit été fuivi de la démiffion de Tanucci & de la difgrace des coopérateurs de fa haine. Cependant les ennemis de 1'Ordre fe prévalant des Bulles de profcription que 1'ignorance avoit fulminées contre lui fous les pontificats de Benoit XIII & de Benoit XIV, les atteliers Maconiques étoient encore fermés a Naples & le Frere Lioy éloigné de fes foyers. D'après ce récit, la Loge de la Candeur ar-rêta: 1°. que le Frere Lioy lui feroit agrégé en qualité d'aifocié étranger: 20. que la Santé de Faugufte Reine de Naples feroit a perpétuïté célébréc au rang & avec celles de la Maifon Royale de France: 30. que la Loge adrefferoit a cette Reine bienfaifante un julie tribut de fa reconnoiffance: 40. que le grand Oriënt de Naples recevroit une Lettre de félicitation de la part de la Loge. 18 Avril 1781. Extrait d'une Lettre d'Angcrs du 30 Mars. „ Le nombre des naiffanecs en 1780  C 143 ) „ dans le reflbrt dc cette Sénéchauffée, a été |, de 10336, & celui des morts de 10578; ,„ nombrc bien inférieur a celui de 1779, qui j, étoit de 13993: fuite dc la dyifenterie qui „ défola ia province 1'été & 1'automne de cette „ année-bi. Lc nombre des mariages a été „ de 3023." 18 Avril 1781. Extrait d'une Lettre de Montpellier du 23 Mars. „ II eft né dans cette „ ville en 1780, 1129 enfans; il eft mort 1253 „ perfonnes, & il n'y a eu que 243 mariages, „ On remarque une diminution fenfibie dans ces IL derniers depuis quelques aunées." 19 Avril. On parle beaucoup d'une dénon i ciation qui doit fe faire au Parlement des Alfemblées Provinciales. On ne croiroit pas qu'une jnftitution auffi fage, auffi patriotique en apparence,füt fufccptible de critique & d'inconvéniens affez dangereux pour exciter la réclamatïou des Cours, dont certaines les avoient demandées ayec inftancc. Voici les principales objections,fur lefquelles 1'on affure que doit rouler le Mémoire. i°. L'on trouve que les membres du Clergé lont trop nombreux dans la plupart de ces in» -ftitutions. 20. Que cet Ordre , comme le premier, préfi.dant néceffairement dans ces diverfes affemblées , c'eft lui donner trop de prépondérance, c'eft faire courir au Royaume & a nos Rois le rifque de retomber fous le jong des prêtres, dont oa .s'étoit affranclu.  C 144 ) 3°. Comme ce n'eft point la Nobleflc qui él! les membres qui font partie de ce Bureau d'ad miniftration, ce n'eft pas 1'Ordre qui eft ceilfé ] concourir; & ce ne font pour 1'ordinaire que lei Gentilshommcs les plus fouples, les plus ignoi rans, les plus dévoués au Miniftere. 4°. Dans le Tiers, on trouve mauvats qu'il n'f foit admis aucun Magiftrat; ce qui eft en ex dure la portion la plus faine, la plus propre ce genre de travail. 5°. Enfin , le but des Cours a toujours été dc reftreindre le pouvoir des Commiflaires départiss elles fe font conftamment élevées avec force con tre ces Magiftrats ampbibies, qui par leurnatun fe trouvent prefque toujours oppofés aux véri tables intéréts de la Province confiée tt leur foins: comment fouffriront-elles qu'ils acquicrem plus de confiftanee que jamais par ces Affem blees Provinciales, dont ils font nommer ei quelque forte les divers membres, qui ne 1 tiennent que fous leur influence & dont, pari formation de ces Aliemblées, par la liberté qu'il: ont de les réunir, de les diriger, de les féparer ils font les chefs & 1'ame ? 19 Avril 1781. On parle beaucoup d'ui Mandement rendu dans la quinzaine par 1'Evj que d'Amiens. (Machault) Ce Prélat trés fana tique s'y éleve avec un zele amer contre la nou veile Edition de Voltaire, dont on a répandi le Profpetlus avec la plus grande profufion, 1 défend a fes ouailles de foufcrire pour cet ouvrs ge de ténebres. 20 Avri  C 145 ) 40 Avril 1781. Entte les virtuofes qui ont brillé au Concert Spirituel, il faut furtout diftinguef Mlle. Renaut, jeune fujet agé de onze ans & qui, dans cette extreme jeüneffe, a déja la fermeté de gofier, Ie goüt & 1'expreffion des cantatrices les plus confommées : c'eft dans Titanen qu'elle excelle principalement. Seulement il eft a craindre que le travail exceffif dont on Ta furcliargée,ne lui devienne nuifible, & que fon talent naiffaut ne puiffe parvenir jufques au degré de p'erfeétion & de maturité dont il elt encore fufceptible, ne dégénéré mème par un ufage immodcré dc Torgaae. 21 Avril. On reprochoit h M. Ie Préfident Rolland d'avoir inféré au Mémoire pour les héritiers du Sr. RoUillé des Filletieres deux picces fort indécentes; Tune , Copve figurée du Régifire verd du défunt, contenaot la recette & la dépenfe de fes revenus depuis Janvier 1772,011 fe trouve la Lifte de tous ceux auxquels il faifoit des aumönes, ou du bien; ce qui ne pouvoit qu'humilier de trés honnêtes gens y dénoinmés: 1'autre, une Lettre de lui Préfident, oü Ton lit cette pbrafe :,, Taffaire feule des Jéftiites „ & des Colleges me coütoit de mon argent plus „ de 60,000 livres, & en vérité les travaux s, que j'ai faits & furtout relativement aux Jé„ fuites, qui n'auroicnt pas été éteints fi je „ n'avois confacré a cette oeuvre mon tems, ma „ fanté & mon argent, ne devoient pas m'at„ tirer une exhérédation de mon oncle." Phra- t ia imuuu uuc ileunde portant le nom du Directeur général des finances; au bas de laquelle font 1'Equité, la Charité, FHumanité & 1'Abondance. L'Economie ordonné a la Mufe de 1'Hiftoire d'effacer de nos Faftes lc mot Impót & la Renomniée publie les effets de fa lage adminiftration, dont elle étend la gloire dans les quatre parties du monde, 23 Avril. Depuis longtems on parloit d'un nouveau genre de Speclacle que des gens avides d'argent avoient imaginé d'offrir a Paris; celui d'une Courfe de Taureaux d l'E/pagnole & d'un Taureau mis d mort par les Tauréoiores, c'eftfi-dire par des hemmes combattant contre cet aiümal, Ce combat a eu lieu Ie 16 de ce mois,  < H7 ) malgré la Police qui avoit pre'cédemment fait défenfes aux Entrepreneurs de donner pareil fpectacle, oü la vie des hommes pourroit ötre expofée en combattant le taureau; quoique, pour éyiter tout accident, on eüt pris la précautiort de faigner copieufement le taureau & de 1'avoir préfenté dans 1'arene prefque inanimé. Les annonces & imprimés s'en étoient diftrïbués fans permiffion; du moins tel eft 1'avis allez iucroya•ble qu'on public a cette occafion. _ 23 Avril 1781. La rentree des Italiens avanthier a eu beaucoup de fuccès par le compliment du Sieur Favart en förme de Divertiflemcut. I fait fuite a la petite piece qu'ils avoient jouée a la clóture. Le village avoit gémi fur le départ du Seigneur: ici Lucas, M. Richard, Henrieite & Babet fe félicitent de fon retour, & fe propofent de ne rien négliger pour le fi'xer au milieu d'eux. Tout rcfpire la gaieté; le Pere la Joie ia ranime encore en accompagnaut les vaudevilles avec fon tambourin. Richard. Air; le petit mot pour rire. Le feaciment par fa douceur En tout tems parvient jufqu'au coeurc Son charme doit féduke; Mais Monfeigneur eft mieux fêté., Quand on y joint par la gaieté Le petit mot, le joli mot Le petit mot pour rire G z  C 143 ) II E N11H T I I, Ne pe-rdons pas un feul inflant. Vers Monfeigneur, qui nous attend, Notre cceur nous attire. Pour reconnolcre fes bienfaits, M.êlons pour lui, dans nos bouquets, Le petit mot, le joli mot Le petit mot pour rire. Le Pere la Joie. Que la gaieté , que les amours Voillent fans ceffe fur fes jours Ceft ce que je defire. Pour conferver fa belle humeur, Je clirai toujours de bon cceur Le petit mot, le joli mot, Le petit mot pour rire. 24 Avril 178!' On ne peut plus douter aujourd'hui qu'il n'yaitetiune trés grande fermentation dans le Parlement contre M. Necker a 1'occafiondes AlTemblées Provinciales: mais on n'eft pas bien d'accord fur la maniere dont elle s'eft élevée & fur 1'efpece de fuites qu'elle y doit avoir. 24 Avril. lnvitation aux amateurs des abeille;, par Vorateur improvijle des Boulevards , auteur de différens petits ouvrages qu'il veni lui-mime. Tel eft le titre d'une feuille imprimée, quoique non revêtue de permüuon , que diftribue fur les Boulevards un quidam aux-paflans,, dont il " cherche a exciter la curiolité.  C 149 ) L'aviS trop long eft fur le même ton de folie & finit ainfi : „ Humanifez-vous donc en pas„ fant prés de ce fou d'outre-mont ; abjurez „ pour un inftant les airs, la dignité, le ton; „ peut-être ne vous repentirez-vous point de „ cette faveur, & que, pour prix de cette graj, ce, vous recevrez de lui des fleurs, non de ,, celles dont Fodeur fait mal a la tête, mais ,, fleurettes des champs, oü les abeilles vont „ faire leurs emplettes, excellentes pour tout le monde, excepté pour ceux qui ne font pas mal bötes." En voila plus qu'il n'cn faut pour appréciur 1'auteur. II faut lire un tel avis pour jugcr a quel degré de démence fe peut porter 1'ei'prit luimain dans un prétendu homme de Lettres; fpectacle bien propre a faire gémir le Philofophe fur notre trifte humanité. 24 Avril 1781. Deux morceaux qui doivent fitte lus aujourd'hui a 1'Alfemblée de 1'Académie des Belles-Lettres, pourront y attirer plus de monde que de coutume. C'eft d'abord Z'Elogé de M. VAhbi Batteux, attaqué depuis fa mort dans différens écrits;. 'M. Dupaty, le Secrétaire , doit venger la Mémoire de ce confrère cher aux Lettres: enfuite un mémoire que doit lire M. Brotier nouvellement recu , fur les, jeux du Cirque , confidérés dans les vues politiques des Romains £f fur le nombre des jours dans Vannée qui étoient confacrés d ces jeux. On voit que l'ouvrage eft intércffant, furtout de la part G 3  d'un fiomme auffi verfé dans 1'antiquité, auffi' pro fond lïttérateur. Sa qualité de ei-devant foidifant Jéfuite n'eft pas peu propre encore a exciter la curiofité. Les autres Mémoires qui doivent occuper la féance, font un fecond Mémoire de M. de Keralio fur les connoiffances que les anciens ont eues des pays du Nord : un de M. Larclier fur Phydon, Roi d'Argos, oü le but de 1'auteur eft de concilier la chronique de Paros avec la chronique d'Eufebe. Une préface, que doit mettre M. de Rochefort l la tête d'une tragédie de fa compofition, intitulée EleBre, n'eft pas ce qui piquera le moins 1'attention des auditeurs. 25 Avril 1781. L'annonce que doit publier aujourd'hui a fa rentree publique 1'Académie des Sciences par i'organe de fon Secrétaire , Mi le Marquis de Condorcet, ne pourra qu'en augmenter 'la foule , toujours immenfe. II s'agit d'une nouvelle fondation confacrée a 1'avancement des Sciences. II lira auffi 1'Eloge de M. Lieutaud. Le titre des autres Mémoires n'annoncc que des cliofcs trés fcientïfiques & trés feches. i". Un de M. Bertolot fur 1'acide Arfénical. 2°. L'annonce d'une nouvelle Comete obférvée par Mi Meffier. 30. Un Mémoire de M. Defmarcts fur la fosmation des glacés dans la rivierc. 4°. Un de M. 1'Abbé Rochon fur la vifion.  ( i5'i ) 5°. TJrr de M. le Comte dé Mi'lly fur 1'analyfe végétale. 6<\ Un de M. de Foucliy fur un moyeii d'employer un quart de cercle a pied aux mèmes uff ges qu'un inft-rument azimuthal. 25 Avril 1781. Mlle. Luzzi, dont 011 annoucoit depuis plufieurs années la retraite, quitte le théatre au moment oü 1'on s'y attendoit le moins. Une maladie eruelle 1'avoit déja mife dans lc cas d'y renonccr & de fe jetter dans la dévotion; elle étoit retournée a fon ancien pêché : 011 verra fi cette fois elle fera plus ferme dans fa réfolution.- 25 Avril. Le Sieur Riguet, qui lundi dernier 23 Avril devoit exécuter dans fa chaioupe infubmergible fon faffleux voyage de Paris a Auxerre & d'Auxerre a Paris en douze heures, non feulement ne 1'a pas fait, ne 1'a pas même tenté; mais des curieux qui fe font informés de lui a 1'hótel indiqué, ont appris qu'il étoit en effet arrivé une infinité de Lettres a 1'adrefle de ce quidam, qu'on ne connoilfoit point & qui n'avoit point paru ni écrit lui-même. 25 Avril. On veut aujourd'hui que M< Necker éteudant le projet des Afiémblécs Provhieiales ait donné fur cela au Roi un Mémoire Seeret , dont 1'objet foit de rendre les Pariemens abfolument inutiies a 1'admiuiltration, (cc que le gouvernement defiroit depuis longtems) & de les réduire a la fimple fonction dc juger. Le Hoi a communiqué ie projet 11M dc Maurcpas,G 4  C .15a ) <$ui a era en devoir faire part au Premier Préfi- | dent: ce qui a jetté Pallarme dans ia Magiftrature. Telle eft Porigine qu'on donne de la querelïe, que les ennemis du Directeur des finances, fes jaloux, fes cnvieux, fes concurrens, clierchent a rendre plus grave; ce qui fait courir Ie bruit de fa difgrace prochaine. 26 Avril 1781. On eft abfolument incertain de la maniere dont le Mémoire qui allarme fi fort Ie Parlement & le Confeil, rCar les Intendans y font auffi trés mal-traités ) eft tombé aux mains du Premier Préfident. On veut aujourd'hui qu'il lui foit venu anonymement avec une Lettre, oü 1'on lui marquoit que M. de Gascq (Préfident a mortier du Parlement de Bordeaux & Premier Préfident de cette Compagnie duraritla ïéyplution, partifan du Maréchal de Richelieu & logeant chez lui) avoit remis ce manufcrit entre les mains d'un ami, en le priant de ne le ' faire connoitre qu'après fa mort. On ajoutoic que cet événement rendant le dépofitairc libre , il croyoit ne pouvoir en faire un meilleur ufage que de 1'adrefler au Chef d'une Compa ffiiie respeciable qu'il intérefle auffi efientiellement. On prioit en même tems M. d'Aligre de brüler & : la Lettre & le manufcrit, quaiid il auroit tiré une copie de celui-ci. Les 'partifans de M. Necker imaginent que cette tournure a été concertée entre M. de Maurepas & le Premier Préfident, pour couvrir aux yeux du Roi & du public' 1'indifcrétion de ceux qui  C TS3 ) qui Font fait connoïtre, Ie Préfident de Gascq ne pouvant revenir dc 1'autre monde pour démentir cette aflertion. Elle femble d'autant plus inmifemblable , que Ie plus clier & le plus intime confident du Magiftraf Bordclois étoit. M. Valdec deLeflart, dont il pnfibit pour le véritable pere & qu'il a fait fon légataire ufliverfel. Or, M. de Leffart, étant le bras droit de M. Necker, eft-il croyablc qu'il eut eu la perfidie de publier un écrit capable de chagriner cruellement le Directeur général des finances & de lui attirer des ennemis fi redoutablcs & fi puilfans? Quoi qu'il en foit, afin dc tour. menter mieux celui-ci, on a fait hnprimer le Mémoire. On en a envoyé des exemplaircs a différens membres du Parlement & M. d'Ëpremefnil le doit dénoncer aux chambres aflémblées; il a déja même preffenti le Premier Préfident , en 1'invitant de faire part. a la Compagnie de 1'anecdotc & du. contenu du Mémoire; ce que M. d'Aligre a évité adroitement, en répondaut qu'il avoit en effet recu un manufcrit anonymement; ce qui le lui avoit ren. du d'abord trés fufpeci, qu'il 1'avoit pareburu' & jugeant que c'étoit un libelle indignc d'at-' tention 1'avoit jetté au feu. On ne doute pas que M. d'Aligre ne r'ecqj-ve des ordres d'empêcher qu'il foit queftion au Parlement de ce Mémoire; on veut même' qu'il ait été mandé aujourd'hui aMariy pour cela; 26 Avril, Extrait d'une Lettre de Marfeilte & 5  C 154 ) cTn 19 Avril. „ M. Maloüet, le CömrmWre sj du Roi, qui a fait un marché fi avantageux pour S. M. de la vente de Tarfenal, vient de 3, répandre un Profpeclus en date du 11 de ce mois, par lequel il s'agit d'èn titer le meil„ leur parti poiïible pour la ville, en trouvant „ un produit net de huit millions dans les em„ placemens a vendre, diftraéfion faite des rues,, „ quais & place projettée ; car vous favez qu'il „ s'agit d'élever au milieu de cette derniere une „ fiatue pour Louis XVI. ,, Tous les Plans cc Mémoires de diflribution ?, doivent être remis dans 1'efpace d'un mois, „ a compter du 15 Avril. Ils feront adreffés- au Confeil municipal, après qu'il aura été' „ communiqué a tous les membres dudit Con9, feil qui defirereront en prendre connoilfance- & le Plan le plus'agrdable au Confeil recevra„ un Prix de,600 livres de la part de S. M., „ qui fe réferve ndanmoius d'ordonner 1'exécu„ tion de celui qu'elle aura agréé encore qu'il n'eüt point dté préfentd au concours." 26 Avril 1731. On a oublié de nommer les trois concurreus qui ont participé aux prix particuliers concédds par M. le Noir dans la fdanee de la Socidté Royale de Médecine du 6 Avril. Le premier eft M. Mathieu, Maitre en Chirurgie a Conze en Sarlandais, prés de la Linde en Perigord : le fécond M. Bouteille, Médecin A Manefga en Provence: le troifieme, M* Baudot s Médecin a la Ckarité fur Loire..  C Ï55 ) 27 Avril 178 r. Les Petites Affiches de Marfcille, qui éioient déja les miéux faites de toutes celles de province, vont encore fe perfectionner entre les mains d'un M. Beaugeard, fous le titre de Journal de Provence. 11 feta compofé de trois feuilles par femaine de huit pages d'impreffion in-8"°. Dans chacune feront compris les avis, annonces, affiches dc Marfeillé, Aix, Arles, Toulon & du reste de la Provence. Mais la première fera deflinée aux Edits & Déclarations, Arrêts du Confeil & de Régiemens des Pariemens & Cours des Comptes , Ordonnances d'lntendance & de Police; "aux précis des caufes majeures que leur importanee rendra plus intércffantes ; a Pagriculture, aux arts méchaniques & libéraux, aux modes; a cc qui regardera les fpeétaclcs, la langtie francoifc,, 1'hiftoire, la géographie, les obfervations météorologiques , évenemens, cataftrophes, nai:ffar> ces & morts remarquables , &c. La feconde cpn tiendra tout ce qui pourra avoir rapport au Commerce de 1'intérieur ou de1'étrangcr, la notice des Marchandifés qui, d'après les eireónftances, feront permifes, prohibées ou chargées de droits dans les différensEtats; la connoiffanee des révolutions, innovations, accidens, &c. qui auront trait au Commerce ; le détail des prifes actives ou paflives ; 1'arrivée, les chargemens, patrons , &c. desnaviresdans les ports; le prix courant des effets de commerce; le cours des change?, effets G ó.  ( 156 ) royaux & généralement tout ce qui aura trait aux manufaclures &c. La troifieme fera principalement deftinée a la Lktérature. On y trouvera la hotice des ouvrages & livres nouveaux, les pieces de vers qui auront toujours le merite de la nouveauté, l'annonce des féances académiques, avec le précis des ouvrages couronnés & des difcours: fans oublier les chanfons nouvelles, fouvent les airs notés, quelquefois avec accompagnement. 27 Avril 1781. M.l'Evêque d'Amiens avoit arlrelfé fon Mandement aux auteurs du Journal de Monfieur, qui fe font déja fignalés par une déuonciation vigoureufe au Parlement de la nouvelle édition de Voltaire, & ceux-ci étoient fur lc point d'en donner 1'extrak, lorfque le Prélat leur a écrit pour fufpendre cette levée de bottelier. 11 parolt qu'on a engagé M. de Machault a modérer fon zele anti-philofophiquc & il retire le plus qu'il peut les exemplaires de fa diatribe courte, fougueufe, mais mal écrite. Elle devient rare de plus en plus- L'efprit minuticux de ce Prélat 1'avok déja porté a menacer fon imprimeur a Amiens de le deftkuer-, paree qu'il avoit fait courir des avis ou il annoncoit qu'on trouveroit chez lui des exemplaires des nouvelles Editions de Voltaire & de Roulfeau. II a fallu que cet imprimeur renonak au commerce de ces ouvrages, ou ne le fit. que clandeflinement... 27 Avril.. Ms. Necker a été trés piqué de la  jmblcité du Mdmoire en queftion & il parolt' eonflant que craignant le crédit des inftigateurs de fa nouvelle perfécution, a laquelle il alloit Fe trouver en bute, il avoit donné fa démiffion au Roi; c'eft la Reine qui le protégé aujourd'hui & a engagé S. M. a fe conferver cet excellent Serviteur. Le Duc de Cboifeul s'eft rangé abfolument du parti de celui -ci & lui a concilié les bonnes graces de la Souveraine. Dernicrement la Reine, en cntrant dans le - Sallon dc Marly, vit quelques Seigneurs occupés a lire & cachant brufquemcnt la brochure a 1'approche de S. M. Elle voulut favoir ce que c'étoit. Iuftruite que c'étoit le Mémoire de M. Necker: „c'eft, dit-elle, 1'ouvrage d'un homme bien zelé pour la gloire du Roi & le boh" beur de fes Peuples." Un 'propos auffi flatteur ne peut que confoler bien agréablement M. Necker, qui défavoue 1'ouvrage au furplus & prétcnd qu'il a été falfifié, afin d'cn rendre 1'auteur plus odieux au Parlement & au Confeil. a8 Avril 1781. Le Compte rendu de M. Necker eft actucllement imprimé prèfque dans toutes les langues connues & ne ccfie dc rccevoir des éloges. Les partifans de 1'auteur homme d'Etat regardent cet cmpreffement des différentes nations a fe procurer la leclure de cette piece importante, comme la réponfe la plus victorieufe aux écrivains obfeurs qui ont cflayé de ternir une gloire fi légitimément, fi noblement & fi défintéreffement acquife; d'altérer par leur G 7  C 158 ) opmion folitaire, 1'opinion générale; enfin de facrifier, autant qu'il eft en eux 4 me . 1 "e J Perfonnelle,lcs plusgrands fatéieSde"K Ün graveur, par une idéé fimple & ingénieine' J cru exprzmer énergi^ement le vceu public7 il J, dans undeflin, pofé le Buste de M. Necker ie monifae, lm fm vomir de f j affre„fe. des pamphlets fatyriques, caracténfies par le £ tie.. On regrette d'ailleurs la mauvaife èxécution de ce trophée, oü le Directeur général d"fi nances n'eft point du tout reffemblant! ' 28 Avril i78r. Extrait d'une Lettre de Metz du «4 Avnl. Hier «3, M. Bertrand de Bou" ?CP,°™ ' ,*nteadaM de Corfe, a été recu v..uiiiuutT a nonnpiir pn nntr„ n„..i . „ ° W1 1JUL11_ j.r,me uien t cc eer ,, événement eft métnorable dans la MagifW " IT l efati0n qft'n a cauföe d^«s le public „ M. de Boucheporn s'étoit d'abord diftin*, gué dans notre Barreau comme Avocat, & " bief?t a la place d'Avocat général & y " 5 f £Péc,alenret» dans 1'affaire célebre de „ M. le Bceuf de Valdahon contre M. le Mir„ quis de Monnier.. On fut gré a ce Jeune „ onteur de la chaleur intéreffante avec laqud? „ le d fit W la plus barbare des erreurs „ celle qui fait réiafte- r„r „r,» e.„:.»_ • »" ,» , „J -u">- i'uuiue mnocen- „ te l opprobre d'un patent flétri; les falies du „ palais retent rent des npplaudilfemens qu'on " eren™^ rec» " Zul ^r jf f fflc eff«'vercencc,. lorfqn'ifc » parut au fpeéhcle..  C *$9' ) 5, Les révolütions de la Magifti'ature ne lui 5,. pennettant pas de continuer fes fonctions, il paffa au Confeil , d'oü il fut nommé Intendant „ de Corfcr il y a encouragé 1'agriculture, le „ commerce, la population, fait cèffer 1'arbi„ traite dans les impofitions, procuré des fe„ cours ■ néceffaires dans un pays dévafté par' ,, trente années de guerre, par des troubles in„ teftins, par plufieurs années de familie: il y ,, a fait connoitrele-meilleuremploi des forêts, „ & les a reudus utiles furtout au Port de Tou,, Ion, pour les conftruétions durant la guerre ,,. aétuelle. Tels font les principaux motifs qui ,, ont détenniné le Roi a aceorder a M. de „ Boucheporn la diftinclrion flatteufe dont il jouit aujourd'hui". 29 Avril. Extrait d'une Lettre de Marfeille ciu 19 Avril. „ Le premier numéro de nos Af,, fiches , Annonces & Avis divers, ou Jour- ml de Provence, première feuille de Commer„ ce , paroit aujourdïiui, précédé d'un difcours^ ,, préliminaire fur le Commerce, trés bien com-- pofé & dans un ffyle pur & noble." 29 Avril. De Sens le 23 Avril. „ Beaucoup- de gens s'étoient raffemblés cc matin pour „ voir palfer des bords de 1'Yonne la chaloupe „ infurmerfible du Sieur Riguet; mais rien n'a „ paru. Les partifans de cet impofteur foütien„ neut qu'effectivement il eft parti de Paris, „ mais qu'étant arrivé a Monterean, au lieu„ d'enfiler le pont de l'Yonne, il a remonte la  C ï6b- D « Seine jufqu'i Nogent; d'autrcs, après avoi? „ trés lérieufement réfléchi fur les moyens de „ procurer une viteffe affez confidérable Pour „ faire dix lieues par heure , concluoient pour „ lanégative; d'autres enfin, fachés apparem*i ment d'av0!1" été dupes de leur curiofité t l,, cliënt de perfuadcr a tous ceux qu'ils ren'con„ trent, qu'ils 1'ont vu réellement pafier h Sens ?' & font de Ia , chaloupe une clefcription jna.„ gnifique • de maniere qu'il yaura ce foir peutti ÊtW autant de monde que ce matin." „ Tout cela prouve combicn 1'bomme avide „ du merveiïleux eft crédule, facile a tromper & court lui-même au-devant de Terreur qu'il aï„ me, quelque abiurdité qu'on lui annonce. "' 30 Avril 1781. On allure que M. Tabbé Maury a fini fii ftation a la cour fans receyoir aucune marqué de fatisfaéüon de la part du Mo narque. On croit qu'il n'atira pas d'abbaye , comme il s'en flattoit. Voici ce qu'on en raconte. : Dans un fermon fur Vaumón&W a parlé des hó- : pitaux &, fuivant fa coutume, nourrillant fon difcours d'anecdotes, il a obfervé que la multitudè des enfans-trouvés augmentoit tous les jours a Paris, qu'en 1780 il y eh avoit eu 13,000, dont 7,000 étoient morts faute de foins & de bonnes ' nourrices. Le Roi, mécontent de cette obfervation, en a parlé au Grand-aumónier, qui a ■ envoyé cbercher le Prédicateur & lui a dit„ Monfieur Tabbé, fongez que vous préchez «- devant le Roi & non pas le Roi. Evitez dè ! <  C 161 ) „ faire venir dans vos difcours des cliofes étran„ geres & relatives a 1'adminiftration, que vous „ devez ignorer, ainfi que le public, & furtout „ prenez garde au moins de débitér de fauffes „ anecdotes." II lui cita enfuite celle des enfans-trouvés comme peu exacte. Malgré cet avertiflement, M. 1'abbé Maury, quoique plus réfervé, n'a pu fe retenir & dans ua Sermon fur la calomnie, a cité des exemples profanes de Miniftres en bute aux méchans, a rappellé Sully, Colbert &, fans le nommer, il a défigné M. Necker fi fenfibiement, qu'on n'a pas douté de 1'objet du difcours & du but du prédicateur. Ce qui a déplu beaucoup aux eourtifans, prefque touscoupables du-crime contre lequel s'élevoit 1'orateur. 30 Avril. Depuis longtems on parloit d'une maifon bifarre, élevée en forme de temple ou de palais au bout de la rue d'Artois. Quoiqu'on eüt d'abord fait myftere de la Divinité qui devoit 1'habiter, le bruit général s'eft enfin accré- dité que c'étoit pour Madame Tclufibn, la veuve d'un Banquier, & 1'on n'en peut douter aujourd'hui. Cette maifon prefque finie eft maintenant 1'objet de la curiofité des Parifiens & c'eft un empreflement général pour 1'aller voir; ce qui ne s'accorde que par une grace fpéciale : il faut d'es billets pour y entrer. C'eft le Sieur le Doux qui en eft l'architeéte. On y retrouve les talens & les écarts de cet artifte, plein de grandes idéés, d'un goüt exquis dans les détails;  ( r62 ) nïais n'ayant pas affez de tête pouf combintr f enfemble de fes ouvrages , leur donner de justes proportions & furtout les menner au rang & aux facultés de ceux pour lefquels il- bdtit. Madame Teluffon vöuloit mcttre 400,000 livres a fa maifon & elle lui coütera pent-être deux millions. C'eft une particuliere riche, qui defiroit fes aifes, fes commodités, un luxe bourgeois; & il a fait un hotel qui exigeroit la prefence, le train & le nombreux domeftique d'un Prince. Ce font partout des colonnes, des ftatues, c'eft unefcalier d'Ambafladeurs; en un mot, une extravagance complctte. 30 Avril 1781. Mlle. Luzzi étoit entretenue' par un M. Landry, Receveur général des finances qui lui prodiguoit 1'argent avec un luxe digne de fa qualité. Elle pouvoit par ce moyen mettre de cóté tout ce qu'elle gagnoit a la comédie & d'ailleurs', enforte qu'elle a environ 17 & 18000 livres de rentes de fon chef. M. Landry 1'a quittée depuis quelque tems & ,quoiqu'il eüfc des enfans de la comédienne, a époufé une autre maitreffc ne valant, dit-on, pas mieux. C'eft ce qui a donné de 1'hümeur a Mlle. Luzzi, au point de quitter le théatre &deferetirer du monde* 30 Avril. Madame la Ducheflc de Polignac étant groffe, pour être plus a portée de faire facour a la Reine,cet été, avoit. prié Madame de Bouflers de vouloir bien lui louer fa maifon d'Aur teuil, renommée pour fes jardins k 1'Angloifedu meiüeur goCit & qu'on va voir par curiofité.-  C ï«3 ) I Cette Dame extrêmement attachée h cette poffelïion , fans ccpendant vouloir désobliger la Duchefl*e,lui répondit par les vers fuivans :' Tout ce que vous voyez, confpire a vos defirs, Vos jours toujours fereins eouten't dans les plaifirs ,.. L'Empire en eft pour vous finépuifable foürce. Ou fi quelque chagrin en fnterrómpt la courl'e, Le courtifan, foigneux a les entretenir S'cmpreffe a fefiacer de votre fouvenir. Moi je fuis feule ici, quelque eunui qui me prefiey Je n'en vois dans mon fort aucun qui s'nitéïeffe Et n'ai pour tout plaifir, Madame, que ces fleurs Dont le parfum exquis vient charmer mes douleurs* Madame de Poh'gnac ayant montré les vers,, tournure obligeante de la refufer, fes ilatteurs les frouyerent mauvais, croyant qu'ils étoient de* Madame de Bouflers: on ne manqua pas de rendre a celle-ci Ie jugement qui en avoit été porté dans le eerde de la Ducheflé. „ J'en fuis fa„ cbée, répondit-elle, pour le pauvre Racine, „ car ils font de lui." En effet, on les lit dans Bntannicus, Acte II, Scène IIL i Mai 1781. C'eft en 1778 qu'il parolt que M. Necker a préfenté au Roi fon Mémoire contre les Pariemens en faveur des Adminiftrations Provinciales, c'eft-a-dire dans un tems oir ces Compagnies & furtout le Parlement deRouenle tracaüoient beaucoup au fujet des Vingtiemes. De-la 1'humeur violente qu'il y témoigne contre les magiftrats & peut-être même n'eft-ce qu'a cette humeur qu'on doit 1'établinement des--  C «54. ) ik.es afïeniblées imaginées longtems avant hu, par Pidée qu'il avoit dès-lors dc les fubftituer infenfiblement aux Cours. Pour commcncer a donner confiftance aux Ad«riniftrations Provinciales, a la rentree du Parlement M. Necker y a fait porter un Edit cre'ateur de ces alfemblées; il auroit ainfi fait concourir les magiftrats a 1'crection d'établiflemens qu'il prétendoit un jour leur oppofer. C'eft le moment qu'on a cru devoir cboifir pour donner de la publicité au fameux Mémoire & faire connoitre aux Cours les intentions de fon auteur. On a déja fait 1'extrait des propofitions reprchenfibles dans cet écrit, & de la facon dont elles fout préfentées il y a trés fort matiere a décréter le Miniftre des finances. Comme Meffieurs n'onr pas encore ftatue' fur Ie fameux Edit & que, fuivant la formule,. ils ont nomme des Commiliaires qui trament en longueur depuis plufieurs mois, malgré les 01dres du Roi, il eft difficile qu'il ne foit pas queftion , du moins indireclemcnt, du Mémoire, avant de procéder a renrégiftrement: ce qui, fans doute, caufe les délais dont on ufe. 1 Mai. On parle beaucoup de la Iuxure effrénée d'un militaire qui,devenu amoureux d'une jeune perfonne ayant fait fa première communion a Saint Germain 1'Auxerrois, avec les autres de la paroiffe, le ieudi 10 Avril, n'a pu r& lifter a fa paffion & 1'après-midi, après les yéVj pres, 1'a entralnée a 1'écart & s'eft permis les ac*.  C 165 ) tes les plus obfeenes, au point qu'elle a.crié: on ajèute que, pour fe débarraffcr de la foule^ furvenue , il a tiré 1'épée, s'eft ouvert un pafla- ' ge & s'eft enfui. On dit pourtant qu'il a été arrêté. On ignore ce que cela deviendra. On préfumc que , pour le fouftraire au ftipplice, on le fera pafier pour fou. 1 Mai. M. Necker , en prétendant que la Caiffe d'efcompte n'entre pour rien dans fon Plan d'adminiftration., n'eft qu'un établiffement du commerce & une reffource pour les particuliers, cherebe a la propagcr le plus qu'il eft pollible, avec un zele qui dément trop bien ce qu'il ofe avanccr la-deffus dans fon Compte rendu.- Ce n'eft, fans doute , que par fon impulfion qu'on agitc a Rouen d'y établir une fuccurfale de cette CaifTe, femblable a celle de Paris. Cette caiffe, dit-611, fera appuyée des fonds & crédits des meilleures maifons de Paris & de la capitale de la Normandie. 2 Mai. La direction de i'opéra, en attendant qu'elle puifle donner quelque nouveauté plus intéreffante, annonce pour demain 1'Acte d'Apollon cf Coronis, tiré des Amours des Dieux, remis en mufique par Mrs. Rey, l'un maitre de mufique de la chambre de S. M. & de I'opéra, 1'autre muficien ordinaire de la chapelle du Roi. Cet acte affez bien fait, dont les paroles font de Fuzelier, prête aux compofiteurs & ils ont pu y déployer leur talent. 3. Mai. C'eft au 29 de ce mois qu'eft -fixéi  < 166 ) fa cérémonie du fervice ordonné par la Cour pour 1'ïmpératriee-Reine & c'eft a Notre Dame que fera éievé le catafalque, fuivant 1'ufage; ce qui va fingulierement gater cette Bafilique réparée a neuf. Un amateur, afin d'éviter 1'inconvénient de ces monumens paffagcrs qu'il faut •fans celfe élever & détruire a grands frais, avoit propofé de confacrer a jamais a ces fêtes funéraires 1'églife de Saint Louis, ci-devant celle de la maifon profeffe des Jéfuites, trés convenable en effet; mais Meffieurs de Notre Dame, jaloux d'une poffeffion ancienne, craindroient de fe la ■voir enlever, malgré tout le foin que 1'auteur du projet avoit pris de leur conferver leur privilege & leur droit. C'eft M. 1'Evêque de Blois (Themines en fon nom) qui doit prononcer 1'orailbn fuuebre. 2. Mai. Les ennemis de M. Necker ne cef-fent de gliffer des pamphlets contre lui. On voit aujourd'hui une petite fenille ïntitulée Extrait des papiers, fignée Anti-Charlatan & datée du Bureau dc TAmirauté le 31 Mars. II y a cent contre un a parier que cet éerk eft fadice. Cependant, pour faire uneforte d'illufion,on a mis 1'Anglois a cóté, mais ce qui décele la fraude, «'eft qu'il eftrempli de gallicifmes, tandis que, pour rendrc la traduétion plus vraifemblable, on a affecté d'y répandre des anglicifmes en grand nombrc. Quoi qu'il en foit, 1'objet du prétendu auteur Anglois eft de répondre aux éloges «ntrés & abfurdes que lc pmi de 1'Oppofition  c 167 y prodigue au Directeur général des finances. On y réfumé en peu de mots tous les rcproches qu'on •lui a déja faits féparément. i°. D'avoir fupprimé un grand nombre d'ofliecs, avec promelïe de rembourfement immédiat .en argent comptant & de n'avoir rembourfé rien. 20. D'avoir forcé les différens autres financiers ■confervés, fous peine de renvoi, de prêter environ 25 millions a 1'Etat A cinq pour cent d'intérét. 30. D'avoir foreé les hópitaux de vendre leurs immeubles, pour en remettre les fonds entre les mains du Roi. 40. D'avoir mis une impofition annuelle & vexatoire fur tous les tenanciers des domaines & bois du Roi. 5°. D'avoir augmenté la Taille & la taxe des terres, fans la fanction de la Loi. 6°. D'avoir vendu certaine branche de revenu pendant huit ans pour celui de fix ans. 7°. D'avoir anticipé le libre revenu de 1'Etat pour plus de dix mois. 8°. D'avoir encouragé & amélioré la plus infame des Loteries (fous le titre de Loterie Royale de France) dans laquelle le Roi paye 100 livres avec 2 livres 10 fols, c'eft-a-dire fur laquelle il gagnè \%. 9n. De faire monter, fuivant même fon Compte rendu , a 33,740,000 livres le Département de la Maifon du Roi, qui, en 1775, fuivant celui de 1'abbé Terrai , ne coütoit que 33 millions.  C 163 ) On revient enfuite fur les infinuations déja malilicieufement dounées de fes liaifons avec le Miniftere Anglois, fur fa patrimonie a fournir des fonds d'avance pour approvifionner nos arfenaux, pour envoyer des Subfides aux Américains, &c. Enfin on rappelle la maniere malhonnête & perfide, dont il a fait fa fortune aux dépens de fes bienfaiteurs & par la préyarication de fes fonctions, lorfqu'il trabiffoit les intéréts de cette même Compagnie des Indes, qu'il étoit chargé de défendre. Cette feuille eft d'autant plus facheufe, qu'elle quinteflencie en bref toutes les autres & groffit d'une facon monftrueufe les iniquités minifté- rielles dc M. Necker. 3 Mai 1781. Un a trouve dans la nouvelle mufique d' Apollon & Coronis beaucoup de réminifcences, des endroits foibles , froids, mais de la vigueur & du génie dans le morceau qui termine 1'acte ou Apollon exprime fes regrets d'avoir tué les deux amans ; 011 y a reconnu la maniere du Chevalicr Gluck, que les nouveaux compofiteurs fe font efforcés d'imiter. Le róle de Mercure, quoique le plus court, a plu généralement, moins a raifon de la mufique que des beaux fons que le Sieur Cheron a tirés de fa voix. 3 Mai. L'Edit porté au Parlement concernöit 1'Adminiftration Provinciale de Moulins; enfin il en a été rendu compte a ralfemblée des Chambres mardi dernicr & il a été décidé que la Cora-  I Compagnie ne pouvoit 1'enrégiftrer; que S. M. feroit fupplie'e de "ie retirer & de ne point donner confiftance a ces Aflemblées par les raifons qu'on indique, devant être, au furplus, mieux développécs dans les Rcmontrances que la Compagnie fe propofe de préfenter au Roi. C'eft dans ces Rcmontrances qu'on doit inférer tout ce que le Parlement a a. répondre au Mémoire de M. Necker. II paroit que le Roi en cfïet a déclaré au Premier Préfident, que ce Mémoire n'étani: fait que pour lui, n'ayant été divulgué que. par une trahifon , il attendoit de la fageflê de fon Parlement qu'il ne ftatueroit rien deïï'us & ne s'en occupcroit pas. Ce a quoi il fe conforme, en s'abftenant de décréter 1'auteur, comme il auroit fait; mais il ne compte pas moins en refuter les afiertions repréhcnfibles & c'eft ce dont font fpécialement chargés les Commiflaircs nommés pour la rédaéïion des Rcmontrances. 3 Mai. On a déja épluché le Mémoire donné au Roi par M. Necker en 1770, & il paroit Lettre d'un bon Francois, brochure de 21 pages , oii 1'on en extrait les propofitions les plus repréheniibles, afin d'excitcr la vigilance des Magiftrats & de foutenir leur courage ébranlé par le crédit de leur-ennemi. 4 Mai. Les divers changemens annoncés concernant 1'adminiftration de I'opéra n'ont pas eu hou; lc comité eft compofé d'un plus stfand nombre de perfonnes, voila toute la différënceI paroit que les chofes reftcront eri cet état ea- Joms XFLL 11  ( 17° ) core pendant nn an. La feule retraite qui faffc fenfation jufqu'i préfent au théatre lyrique, eft celle de Mlle. P.caumefnü, danfeufe agréablc, excellente mmicicnnc, actrice non moins bonne. Elle réuniflbit beaucoup de talens. Elle avoit débuté le 27 Novembre 17Ö6 dans le róle de Sylvie,de Popera de cc nom , & avoit dès-lors été jugée trèsiavorablement: elle a foutenu 1'a réputation, &, quoique plus propre aux róles de la paftorale, qu'a ceux dc la tragédie, elle a eu du fuccès même dans celle-ci. La foiblelfe de fon organe & une certaine aigreur dans les fons de fa voix font les feuls défauts qu'on lui ait reprochés. Lc Sieur üurand s'eft auffi rctiré; fa voix avoit fouvent mérité les applaudilTcmcns du public , furtout avant Fintroduction du nouveau fyftéme de mufique a I'opéra. Son organe ne pouvoit plus fe déployer aux étranges modulations, ou plutót aux criailleries des novatcurs. 4 Mai 1781. Avant d'extraire les propofitions au Mémoire de M. Necker, préfentées au Parlement par le bon Francois, comme dignes de fou animadyerfion, il fait quelques réflexions fur la maniere dont cet écrit a percé dans le public; il tracé au Miniftre des finances 1'efquiffc du difcours qu'il auroit pu tenir au Roi, fi, au lieu de fe rendre auprès de S. M. lc délateur amer & feoret de 1'Adminillration & dc la Magifbature, il eut uniquement voulu éclairer fa jufiice , •jtaoavoir fa bienfaifance, défendrc les droits de  C 171 ) la Naïloa & cngager le Monarque a Yen faire jouir: il en difcute enfuite le plan & les principes ; il prouve qu'ils tendent, au contraire, a ébranler la Conftitution de la Monarchie & a la renverfer jufques dans fes fondemens. Tel eft 1'efprit de ce pamphlet vigouredx & patriotique. 5 Mai. On commence a fe louer beaucoup de M. de Ségur, qui aflccle un zele vif pour la' difcipline militaire & exige que les Colonels ailx lent paffcr exactement les quatre mois de regie1 a leurs Corps. On ne vantc pas moins 1'exceffive économie qu'il commence a introduirc dans les diver'fes parties dc fon Département: il eft furtout décidé que les troupes ne voyageront pas aufïï facilement qu'elles le faifoient. Quoique toutes ces améliorations roulent fur le compte du Miniftre, on les attribue cependant au comité, a la vcille de perdre le Marquis dc Poyanne, qu'on regarde comme ne pou' vant aller loin, a raifon d'une hydropilie de poitrine dont il eft attaqué. 6 Mai. Si M. Necker a des cenfeurs qui 1'épluchent, furtout le contrarient & lc traitent fou vent trés-durement, il a aufiï des próneurs, qui ne fc lalfent point de renceufcr. Voici de' nouveaux vers a fa louange: ■ Difciple d'une Loi qu'a Geneve on profeife, Infigne Réformé, que 1'Eglife profcrit, Que 1'Europe révere & qu'un grand Roi chén't, -On te voit a la fois fervir par ta fa^effe li s  C m ) TesFreres, le Francois,I'Honneur & Jefus-Christ! ■ Et lorfque dans tout lieu la Gloire te proclame, Quand re's hautes vertus par leur célébrité T'appellent dès ce monde a Timmortalité, Qui peut douter encor du falut de ton ame? 6 Mai 1781. Le Pere Vitot, Auguftin, Portugais de nation, dont on a exécuté lc Stabat dans la femaine fainte, fe propofoit de donner aux Auguftinsdu grand couvcnt un Concert Spirituel de divers ouvrages Latins de fa compofition , les dimanche 29 & iundi 30 Avril; il devoit enfuite toucher de 1'orgue : on a trouvé peu convenablc a la modeftie d'un religicux de s'offrir ainfi en fpeclacle; il a été arrêté dans 1'on projet parJVT. FArchevéque. 6 Mai. Dès 1720 le quartiér de Gaillon, audgla du rempart de la ville de Paris, depuis le fauxboug St. Honoré jufqu'au fauxbourg Saint Dpnis, a fixé Fattentión du gouvernement, qui5 r\ cette époque, projetta 1'établiffemeat d'un grand égout & le percement de difrerentes rues ; cé quartier a pris depuis 1760 un accroifl'ement fi confidérablCj que leRoi a ordonné FétablilFcment d'tme chapelle fuccurfale de la paroifle Saint Euftache, dont la conflruclion a été autorifée par Lettres patentes du mois de Septembre 1779,^11régiftrées au Parlement. 11 a auffi arrété d'y trans» férer les Capucins du fauxbourg Saint Jaques. Ceft le Sieur Bronguiart, architecte, qui a foucni les plans & deffius de 1'églife, approuvés & fignés par Je Roi & confirmés par Lettres pa» j  ( 173 ) Lentes du 9 Juin 1780, régiftrées en Parlement L 29 Aoüt fuivant. L'églife & les batimens fé conftruifent avec aclivité; on efpere que le tout fera couvert a la fin de rhiverprocbain & qu'aul fikes de la pentecóte en 1782, la maifon conventuelle fera habitéè & qu'on y célébrera la rcefie. Cet édificc fera d'un genre trés fimple, mais noble, & fa pofition d'un accès facile & commode,par les rues anciennement ouvertes & celles qu'on doit ouvrir inceffamment. 7 Mai. Extrait d'une Lettre de iTfle de Fraucc le 30 Septembre 1780. „ M. Maillart Du„ mefle, notre ancien Intendant, a imaginé de „ faire eonftruire dans cette ifle & dans cello de „ Bourbon des étuves a grains, pour coufcrv.r „ ceux qu'elles produifent, fans être obligé dc « lcs remuer, & en gardcr une grande quantite „ dans un petit efpace : doublé avantagc trés 3, économique. Après les procédés néceffaires pour étuver „ le grain, on le verfe dans une caiiïe fabriquée „ exprès : celles de Flfle de Francc contiennenr „ trente-cinq milliers pcfant de bied, il y en a „ même deux qui contiennent chacune'cinquau„ te - quatre milliers. Dans trois heures de tems elles font remplies, & fe vuident de même „ avec la plus grande facilité. Le grain une „ fois renfermé dans ces caifles, on n'y touche „ plus & il n'cxige aucuns frais de main-d'ceu„ vre pour fa coüfervation. „ Nous favons que cet Intendant a fon retour II 3  C m ) '„ en France ayant voulu connoltre ce qui réfaï3, teroitde 1'embarquement des farines provcnant ö, de bied étuvé , a été trés fatisfait de lés expé3, riences. II paroit qu'on a reconnu d'après fes 3, obfervations, qu'il étoit préférable d'étuvcr 3, les farines qu'on envoye dans les Colonies & 3, que c'eft 1'objet des étuves établies dans Ie 3, Département de Bordeaux. „ Quoi qu'il en foit, nous confommons ac"p, tuellement les bleds que M. Maillard a fait 3, étuver en 1774 & 1775, & le pain qui eu 3, provient eft excellent. Ainfi 1'on doit lui 3, avoir une trés grande obligation de fa décou- verte, d'autant plus effenticlle dans ce pays, „ que des ouragans terribles viennent ravagcr 3, nos moiiïbns au moment oü elles font dans p, leur plus grande beauté." 7 Mai. On annonce encore un pamphlct contre Necker, intitulé; Dialogue entre Madame Mecker, M. de Lejfart £? M. le Marquis. de Pezai.. 7 Mai. M. le Tellier, Avocat dc Chartres, confervoit depuis plus de vingt ans le manufcrit de Zulime, tragédie de M. dc Voltaire, qui lui t'toit tombé entre les mains , on ne fait comment. Les correétions nombreufes qu'il contient font dc la main même de 1'auteur ; elles font littéralement conformes a toutes les éditions qui ont précédé celle de 1772; dans laquelle on fait que Voltaireiigé pour-ïors de 78 ans, a fait des cbangemens ;\ quelques-unes dc fes pie_ces de théatre..  ( 175 > Les corrections de ce manufcrit doivent être regardées comme d'autant plus curieufes, qu'clles font faites en interligues ou fur canons* Ainfi, en même tems qu'ellcs donncnt la liberté de lire les vers ratures, dont lés vers corrigés? ont pris la place, elles lailfent appercevok la' merveillcufe facilité avec laquelle Fhomme dc génie , devenaut en quelque forte fupérieur a lui-même, fait rompre & renouer rapidement le _ lil-de fes idéés, changer a fon gré les nuances d'une palïïon, marquer la gradation de fes mouvemens, & par-Ia découvrir & développer toute la magie de fon art. M. le Tellier, inltruit que la Bibliotheque de M.- de Voltaire devoit pafier du chateau de Ferney au palais de Petersbourg, par les foins du Baron de Grimm , Miniftre Plénipotentiaire de la Cour de Saxe-Gotha & chargé de la confiance de 1'Impératrice de Ruffie en cette partie, lui a adreffé ce manufcrit pour 1'envoycr a cette Sou-veraine, qui en recounoifiance vient de faire don a 1'Avocat d'une médaille d?or-.- C'eft celle qu'elle a fait frapper én 1777, a 1'occafion de ia naiifance duGrand-Duc Alcxandre Pavvlowitfch. La face repréfente Catherine II, & le revers 1'hom. mage qu'elle fait de fon petit-fils a la Divinité. La perfection de 1'ouvrage annonce combien les arts deviennent florilians dans cet Empire, touta-fait barbare avant le commenccment du lieclc graccs a la protection de Faügufte Impératrice,-' H 4  & mai 1701. maarigai. rourquoi lamonr eft - ïl donc le poifon, Et Pamicié le charme de la vie ? C'eft que 1'amour eft fils de la foiie, Et 1'amïtié fille de la raifon ! 8 Mai. C'eft la familie de M. de Machault qui a jufques ici empéché PEvêque d'Amiens de donner a fon zele tout Peflbr qu'il vouloit prendre contre Voltaire & fes oeuvres ; enfin le Prélat 1'a emporté & 1'Abbé de Fontenay, le rédacteur des feuilles des Affiches de Province , doit inférer en entier le Mandement du Prélat dans celle de demain. On craignoir que le Cen- ieur ne fit le difficile; mais c'eft M. de Saricy, trés religieux & qui n'a pas craint de fe mettre a dos tout le parti Encyclopédique. C'eft le jour de Paques que le Mandement dont il s'agit, a été lu au próne & aux prédi-cations dans les églifes des villes du Diocefc d'Amiens; il n'y a que les Curés d'Abbeville qui ont refufé de feconder les bonnes intentions du Prélat: comme il eft queftion dans ce Mandement de la malheurcufe cataftrophe du Chevalier de la Barre & de fes camarades, arrivée dans cette ville , ils ont craint d'exciter une trop grande fermentation: enforte que 1'Evéque mécontent leur intente un procés fur ce refus. 8 Mai. 11 y a quelques jours qu'au débotté h Marly, le Roi fe livrant a toute fon indignattbn contre M. Ie Marquis de Voyer qui y par une cupidité indigne d'un homme dc fa qualité &  ( Ï77 ) & d'un Lieivtenant-Général des Armées du Roi , fait un commerce trés lucratif de chevaux, tiëiit la pofte & Fauberge a fa terre des Ormes , lui reprocha toutes ces infamies en termes trés durs. On fle peut qu'applaudir au Monarque ami des mceurs & de 1'honnétcté, quoique beaucoup' de courtifiins qui fe trouvent dans le cas de re» proches du même genre , fe permettent de critiquer S. M. On préfume que M. lc Duc de Chnrtres , auquel M. de Voyer a répondu avce beaucoup de vivacité lors dc 1'aiïemblée au fujet des maifons du Palais Royal, aura mftruit le Roi de toutes ces vilenics. 9 Mai. C'eft au fujet, en effet, de Fannofice dans les Affiches de Pieardie,- hnprimées a Amiens le trois Février, d'une édition nouvelle de toutes les Oeuvres de Voltaire, que le zele du Prélat s'eft échauffé. II n'a pu tolércr les kmanges honteufement proftituées ;\ cette criminelle entreprife par le journalifte; & le fafte philofoph:que du Profpeftus, répandu avec la plus grande profufion , 1'a indigné. Sa profcription eft motf*. vée, fur ce que ce coryphée des incrédules a jpéré en France une affreufe corruption & que fes ceuvres tiennent le premier rang parmi le3 mauvais livres dont le Royaume eft inondé; fat ce qu'il y en a eu dans le Diocefe même de 1'Evêque d'Amiens une preuve éclatante, lorfqu'une fociété de jeunes gens, abufée par le Dietionnaire Philofophique, afheha hautement 1'irïéligion éc le fcandale; ce qui condnifit 1'uiï H 5  C 178 ) «Teux rt l'échafTaud & au buchcr. Vient enfuite raiie digrefiion fur la maniere dont cet abominable auteur fe formoit des difciples & féduifoit fon fiecle, fur fes écarts dans la religion, dans la philofopbie , dans 1'hiftoire, fur fa licence & fon impiété dans fes poéfies.. M., de Macbault regarde lc projèt d'une colleélion complette des reuvres d'un pareil auteur, comme un attentat non-feulement contre la religion, mais contre la police civile & le juge digne de la févérité des loix & de 1'animadverfion publique. 11 s'éleve enfin contre l'annonce du Prix propofé pour couronner les hommes ftudieux qui marchcront, dit-011 , dans la noble carrière de Voltaire, d'un homme qui a abulé dc tous fes talens pour fe rendre le corruptcur de fon fiecle, & dont la mort, auffi détcllable que la vie , 1'a fait rejetter avec horreur de la fJpulture chrétiennc, qu'on n'a pu lui procurer que par fubtilité dans un pays éloigné. En conféquence, le fougueux Evêque ddclare a fes ouailles, qu'elles ne peuvent,. fans fe rendre coupables devant Dien , ni foufcrire, ni contribuer en aucune maniere pour 1'édition du Rccueil abominable qu'on ofe leur propofer: que les citoyens qui out quelque autorité, ne feroient pas moins condamnables devant Dieu, en n'empêchant pas, autant qu'ils Ie pourroient, cc recucil de parvenir a ceux qui ieur font foumis. Telle eft 1'analyfe de ce Mandement, oü il y a plus- dc fanaüftnc que d'éloojiencc^  9 Mai 1781. Les amateurs de danfe gaillarde font fachés de voir Mlle. Allard obligée de fe retirer dc I'opéra. Le comité n'a pu la tolérer plus longtems. On avoit auffi congédié Mlle. Pcllin; mais cclle-ci a trouvé grace. ' 11 eft eertain que la première, grofle, courte &vieille, n'auroit pas dü attendre ce renvoi hontcux, ccpendant après avoir fait longtems lés délices du public , & ne fe montrant pas même encore fansexciter les applaudifl'emens, elle méritoit d'être ménagée davantagc. On a pris le prétexte qu'il falloit lailler prendrc leur eflbr aux jeuncs talens. 10 Mai. Extrait d'une Lettre de Bordeaux du 5 Mai. „ Depuis que le Parlement eft „ obligé de laifier jouir M. Dupaty des hon„ ncurs, prérogativcs & droits de fa charge , „ ne peut lui en contefter les fonctions, il boni „ de le public & ne juge point d'allaires, afin „ -d'être difpenfé de prendrc fa voix. Les plai„ deurs gémilfent & toute la ville eft indiguée. „ La Cour n'apporte aucun remede ii cc défor„ drc. Senatus decipit, Conful videt &? tacct. „ J'ai oublié de vous marquer que le Grand „ Banc, a une procelfion d'ufage, pour fe difpeir fer dc fraternifer avec M. Dupaty, s'eft ab„. fenté dc la cérémonie; en forte qu'il y a pré„ fidé feul. Ses enncmis font furtout furieux „ de fe voir arrêtés par le Roi dans 1'éclat qu'ils „ fe propofoient de faire au fujet des pamphlets „ répau'dus a 1'occafion de ce magiftrat & de „,fa qucrclie." II 6  ( iSo > ioMk I7S1. L'abbé Matiry, un peu hurrtm'é de fon róle a Veifailles pendant fa flation, affecte de dire aujourd'hui qu'il s'eft juftifié auprès du Roi; que S. M. a reconnu qu'il ne lui en avoit point impofé au fujet de 1'anecdote des enfans -trouvés & avoit bien voulu déclarer devant fes courtifans qu'elle s'étoit trompée. En conféquence il compte être dédommagé de Fora» ge paüager qu il a efluyé , par une faveur infigne & être fait Evêque in partibus. Son ambition excefïive de parvenir a laPrélature lui a faitfufpen. dre fes démarches pour entrer k 1'Académie. On lui a fait obferver qu'on voyoit fréquemment des Evêques devenir Académiciens, mais qu'il n'y avoit point d'Académicien devenu Evêque. Ses rivaux s'indignent de voir le fils d'un favetier du Comtat afpirer aux honneurs du corps EpifcopaL 10 Mai. II y a quelque tems qu'on a joué devant la Reine, que fit groffeffe empêche de venir k Paris, la Veillêe Villageoife : S. M. en a été fi contente, qu'elle a fait donner aux auteurs 1200 livres de gratification. Ces jours derniers on a exécuté k Marly les Vendangeurs , oü le Pere la Joie chante les couplets luivans: Pour animer nos chanfons, La gaieté fe palfe De violons & de balfons Et de contre - baffe. Mais 1'ennui parrai les grands* Secbe tant leurs ames,  Qu'il faut beaucoup d'mft'rumens Pour ces grandes Dames. • Ces couplets critiques & gaillards ont fort dé* plu a la cour & il s'eft élevé un murmure qui a fait remarquer la mal-adrefle des auteurs de ne les avoir pas fupprimés en pareille circonftance; M. lc Comte de Maurepas, qui s'y eft fait potter & fe faifoit répéter les parolcs par Madame de Flamarens a caufe de fa furdité, a obfervé que c'étoit gai, mais poliflbn- On croit que fi. les auteurs n'avoient pas eu leur gratification 3 ils auroient couru rifque de ne pas la toucher. L'anecdote eft d'autant plus finguliere, que la piece avoit déja été exécutée a Verfailles le 10 Novembre 1780 devant leurs Majeftésfans qu'elle cüt caufé aucun fcandale. 11 Mai. Extrait d'une Lettre de Marfeille du iEr Mai. „ Ce qui a déterminé a préférer „ le corps municipal pour 1'aliénation des ter- reins de 1'arfenal de marine, ou plutót ce qui „ a engagé celui-ci a en faire 1'acquifition, c'eft „ le projet d'y former une place, pour élever au „ Roi la première ftatue que 1'amour des peu>- pies lui ait décernée jufqu'icL L'infcriptiori „ doit étre d Louis - Augujle , Bïenfaiteur de „ fes Sitjets, Restaurateur de la Marine, Proiecleur du Commerce. M. Malouet, le Commifiairc de S. M,, n'a pas peu contribué a faire prendre confiftance au projet; &, en conféquence, les Députés du Confeil municipal M H 7  C 182 ) „ ont décerué le titre de Citoyen de Marjeillè." 11 Mai 1781. Extrait d'une Lettre du Contróle Général du 11 Mai. „ M. Necker n'a „ travaillé de la femaine avec perfonne , pas „ même avec fon Sergent-d'aflaires. (le Sieur „ Hamelin, ainfi défigné dans les brochures.") „ On dit qu'il fonge férieufement a fa retraite ,, & que Madame fon époufe, malgré fon am„ bition, Pen prelfe vivcment. „ On craint actuellement que ce ne foit pré» „ cipité & que celui qu'on defircroit pour le,, remplacer n'ait pas le tems de diriger toutes „ fes batteries. " 11 Mai. L'Académie Royale de Sculpture & de Peinture a perdu depuis quelque tems deux fujets qu'elle regrette. L'un eft M. Mokte, Graveur, qui, fans avoir rien d'original dans fa maniere, n étoit pas-fans talens. II eft remarquable par quatre hls, tous entrés dans la carrière des Arts: l'un eft Peintre, 1'autre Sculpteur, le troifieme s'eft fait Arcbitcéte & le dernier fuccede au burin de fon pere. Le fecond Artifte mérite plus de détails. C'eft M. Dumont le Romain, Peintre d'hiftoire, recuen 1728; il eft mort oclogénaire. La nature 1'avoit doué d'un phyfique & d'un caractcre pleins de force & d'énergie. 11 fe jetta avec em*. portement vers la peinture & curieux de fe former fur les grands modeles de 1'Italie , il entre-prk. le voyage a pied & fans argent. Sou enthouftafme lui fit furmonter tous les obftaclcs;.  C *S3- > 5: fes talens, a fon retour, lui valurent fon admiflion a 1'Académie. C'eft cette époque de fa vie qui lui a fait donner le furnom de le Ro~ main. La vigueur de fon ame paffant dans fon pinceau, le rendoit fouvent dur; il étoit trarjchant dans fon coloris, qui manquoit de 1'harmonie fi admirable chez les grands maitres. Il fe plaifoit a préiénter dans fes tablcaux beaucoup I de parties en raccourci , ce que 1'on évite le plus poffible, paree que ces tours de force font rarement heureux & nuifent toujours aux graces d'un ouvrage. Un des beaux. de M. Dumont eft dans les Chartrcux. On reproche furtout a cet artifte de s'ètre arr-öté trop tót, d'avoir négligé de perfectionnerde plus en plus fon talent par une étude conftante de la nature- II paroit que fon amour-propre 1'a aveuglé & le rendoit intraitable avec fes confrères ; il repouflbit tout le monde : il portoit ce défaut jufques dans la fociété; enforte que, malgré les qualités les plus effentielles, il étoit fans amis, & n'a pu fe flatter de voir pleurer fa mort par perfonne. n Mai. M. Poiftbn, frere de Madame de. Pompadour, fucceffivement Marquis de Vaudieres, de Marigny & en dernicr lieu de Menars vient de mourir. des fuites d'une goutte qui 1'avoit tourmenté pendant longtems, & après lui avoir léffé quelques années d'intervallc 1'a enfin, entrainé au tombeau. ia- Mai. Extrait d'une Lettre dc Strasbourg  C i84 3 du 25 Avril. „ Vous êtes ciirieux de favoir au julte ce qui concerne le Comte de Caliol,, tro, dont depuis quelque tems les papiers pti„ blies parient avec tant d'emphafe. II eft ar„ rivé ici au mois de Septcmbre dernier; il étoit „■ fans fuite & fans équipage : logé d'abord chez „ un fimple bourgeois & fort fimplement, 1'on y, fit fort peu d'attention a lui. Ce ne fut que fur la fin d'Oétobre qu'il commenca d'avoir s, de Ia célébrité. On dit que c'étoit un hom- me de la première qualité , né en Arabie , 1c„ quel avoit des fecrets merveilleux & guérif- foit toutes fortes de maladies fans aucune „ efpece de rétribution & que même il donnoit „ de 1'argent aux pauvres qui en avoient befoin „ pour fe médicamenter, C'eft a cette époque que le public a couru en foule chez lui & „ que, pour fatisfaire a fon empreflement, il s'eft monté avec magnificence dans un des quar„ tiers les plus fréquentés de la ville , ou il „ doime tous les jours des audiences publiques „ depuis onze heures jufques a une heure. „ On ne peut nier qu'il n'ait fait de belles „ cures; mais il a échoué dans d'autres, fur„ tout a 1'égard d'un fourd, & il a fini par dé„ clarer qu'il ne fe foueioit plus d'entteprendre „ de furdité. j, Son remede favori confifte dans une lr„ quetvr, qu'il donne par gouttes & qtii eft a „ peu prés le Lilium de Paracelfe. II a une 5> telle confiance en cet élixir, qu'obligé de  ■ 5, fortir de Ruffie , a ce qu'il dit, par 1'effeï „ de la jaloufie du premier médecin de 1'Impé» ,, ratricc,il lui propofa un duel d'un genre nou.,, veau. C'étoit d'avaler réciproquement le ,, poifon le plus fubtil , compofé par 1'adver„ faire, & de s'en préferver: le médecin Rulle „ n'ofa accepter. „ II eft vrai que M. le Comte de Calioftro „ diftribue gratuïtement de fon élixir; il eft vrai „ qu'il n'a point recu d'argent des malades qu'il „ a traités : mais il a avee lui un cbirurgien ,, Gascon, qu'on paie ordinairement fort cber. „ A 1'égard de fa naiffancc , il eft vifiblement „ Sicilien pour tous ceux qui ont voyagé en „ Italië. Cet accent eft auffi aifé a reconnoitre, „ qu'en France 1'accent Gascon ou Normand. „ On vient de drefïèr un procés verbal con„ cernant un malade qu'il a traité depuis le 9 „ Avril jufqu'au 1 Mai, & il réfulte qu'il Fa „ réduit a 1'état le plus déplorable. " 13 Mai. En attendant que le Sallon qui doit s'ouvrir cette année ait lieu, on va voir a la Bibliotheque du Roi deux morceaux précieux,dont les connoiffeurs impartiaux parient avec enthoufiafme. L'un eft une Statue de M. Floudon: une Diane exécutée eu marbre. dont on avoit déja admiré le modele; elle s'éleve au milieu des roicaux qui fiéchiffent mollement fous fes forme3 arrondies. L'autre, un Tableau de M. Boninieu, qui repréfentc Adam & Eve bannis dn Paradis terreftre; la profonde douleur de Fhom-  C 186 ) m?,' accablé fous lc peids du repentir, celle dela femme,qui n'eft que troublée & confufe, foirq parfaitement dilFérenciées. L'artifle a eu le talent de rendre la nudité d'Eve fi pure, qu'il y a tout lieu de croire que les envieux parmi fes confrères ne trouveront aucun prétexte pour 1'exclure de 1'Expofition prochaine. 13 Mai 1781. M. le Curé de Saint Stilpice actuel, pourluivant avec Ie même zele que fes prédèVj cefleurs la fuperbe bafilique commencée fous M. Languct, vient de 1'omer d'un buffet d'orgues, le plus vafie & le plus ricbe en décorations qu'on ait encore vu ici. Les amateurs fe plaignent même, qu'ayant moins d'égard a 1'orejlle qu'al'ceil, on ait plus fongé a 1'embelliffement de cet inftru»" ment qu'a perfectionner fon harmonie. Quoi qu'il en foit, le mardi 15, Meffieurs Couperin, Balbaftre,;Sejeau & Charpentier en feront la réception: le tems n'étant point fuffifant pour' faire toucher Meffieurs les Profefl'eurs, Meffieurs Luce, l'organifte de la paroifie & Clicot,. le facteur de 1'orgue, les invitent pour le lendemain. Déja la foule des amateurs fe difpofe a fe rendre a un pareil fpeétacle, & la piété du Pafteur 1'a obligé de prendrc toutes les précautions que lui a didtées fon zele pour empêcher le tu-. muite & les applaudiflemens trop bruyans qua troubleroient la majefié du lieu faint. 13 Mai. Cette nuit le feu a pris a une maM fon Seize-rue des folies Montmartre prés la place des Victoires ,.par 1'imprudcncc d'un domefti--j  C 187 ) que. Dans cette maifon logeoit M. Nogarct Receveur des domaines & bois de M. le Comte d'Artois. C'étoit un curieux qui avoit un riebe Cabinct & furtout des Tableaux précieux. On craint bien qu'ils n'aient été la proie des HamBies. M. Racine, Intendant général des finances de Monfieur, babitoit la même maifon. 14. Mai. On parle toujours de la retraite de M. Necker & 1'on penfe aujourd'hui que c'eft lui-même qui prolite de la fermentation élevée par fes ennemis pour la demander & fe retirer adroitement d'un pofte qu'il a rempli jufqu'ici avec gloire. 11 fent bien que l'illiifion fe diffiperoit, fi la guerre duroit &fi, obligé d'en venir a des moyens extrêmes, il ne pouvoit plus laiffer les peuples dans la fécurité oü ils font. Afin de fe faire encore mieux regretter, fi cet événement a lieu, il'vient de promulguer des Lettres parentes, données a Verfailles le 22 Avril & enrégiftrées cn Parlement le 11 Mai, concernant 1'Hótel-Dieu de Paris & les changemens avantageux qu'il y veut introduire. Cet acte de bienfaifance, furtout envers les clafles inférieures de la Nation, eft bien propre a s'en faire regretter & a caufer unc-grandc fenfation auprès de ceux qui ne connoiffent pas le faux dc fes opérations & leur danger pour 1'avenir. 14 Mai. M. Pitra , 1'auteur des paroles d''Andromaque, opéra dont M. Gretry a fait la mufique, avoit confervé le dénouement de Racine, autant que le comportoit le genre du Spcc-  C 188 ) tacle pour Iequel il avoit travaillé. II a eni s'ap* pereevoir qu'obligé d'étrangler les deux fuperbc-s leen es de 1'a tragédie , il en réfultoit de la langueur; ce qui avoit empeché Ie fuccès complet de 1'ouvrage. En conféquence , il a imaginé que, par une innovation beureufe, s'il dérobort Pyrrhas avec Afiianax ,aux fureurs des Grecs, il produiroit un intérét plus attcndrilTant & plus doux & fe ménageroit des fêtes & des danfés plus favorables au théatre lyrique & fi defirées des amateurs. C'eft ainfi qu'on va remettre Andromaque, & les connoifleurs jugeront fi le poëte a bien trouvé la caufe véritable du peu de fuccès de cet opéra. 15 Mai. L'objet des nouvelles Lettres patèn> tcs concernant 1'Hótel-Dieu, eft furtout de re» médier a 1'inconvénient affreux dont on fe plaihÉ depuis li longtems , de taire coucher julqu a lept & huit dans un lit des perfonnes attaquées d'infirmités différentes & des malades avec des mourans & même des morts: en conféquence il doit être difpofé de maniere, qu'il puifle contenir au moins trois mille malades couchés feuls & placés dans des falies féparées, fuivant les prineïpaux genres de maladies , & en obfervant encore que les hommes & les femmes foient mis clans des corps de logis diftiucts & qu'il y ait des promenades & des falies particulieres pour les convalcfcens. Ce nombre fera nlus aue fuffifint . nuisnii,» celui commun des malades réunis aimuellement  C 189 ) ii riiötel-Dieu & a 1'hópital de Saint Louis eft I au plus de 2400 a 2500. II peut augrnenter, il I eft vrai, lorfque 1'on n'en fera pas repouflë par I La crainte de maux plus grands que ceux qu'on I éprouve , ou de fecours dégoütans; mais d'un I autrc cóté, on 1'a diminué , en préparant des inI firmeries dans tous les hópitaux deftinés aux vaI ljdes & en formant quelques hofpiccs afïïgnés I particulierement aux paroiffes: d'aillcurs le plus | grand ordre a réfulter des nouveaux plans renI dra les maladies moins longues, & en procurant | une plus grande circulation de malades, il s'en I tnuvera une moindre quantité a la fois. Enfin I les nouveaux Réglement dont on s'occupe, reI médieront aux abus & ufurpations du vice ou de I la pareffe fur les véritables malades. Cependant, pour fubvenir a la poflibilité d'uI ne trop grande foule excite'e par le meilleur trai| tenient, on ménagera un efpace qui pourra con» I tcnir 1000 malades de plus, mais placés comI me ils le font achiellement, jufqu'a ce qu'on I puiffe faire micux. L'hópital Saint Louis fera toujours réfervé pour les maladies fufceptibles de contagion, ou pour fervir de fupplément dans des circonftances extraordinaires. Quant aux arrangemens pdcuniaires, M, Necker dvalue la dépenfe de chaque journée de malade a vingt fous, & fur ce pied a calculé que 1'hótel-Dieu avoit des revenus fuffifans pour fubvenir a peu prés a 3600 journées de malades: il prétend que le furplus fe payera par 1'augraen-  C 190 ) fsatïon des revenus de la maifon, lorfqu'elle vendra fes immeubles, parle zele & le défintéreflemcnt des adminiftrateurs, par les charités qu'excitera le fpeclacle d'une adminiftration plus humaine & mieux entendue. Du refte , S. M. veut donner les fecours qui lui paroltront néceiïaires. La dépenfe extraordinaire & momentanée pour e'ffectuer les nouveaux arrangemens, foit h 1'égard des eonftructions, foit des immeubles & uftenfiles a acquérir, 'n'excédera pas 600,000 livres, fuivant 1'évaluation faite aulïï par M. Necker. Le Roi y pourvoira, ainfi qu'il 1'a fait a 1'égard des nouvelles prifons, fans rien détourner de fon tréfor royal. II y defiine, 10. un fonds' qui lui eft particulier & myltérieux Cpuisqu'on ne l'affigne pas.) a°. les droits que 1'Archevêque de Paris avoit acquis fur cette capitale; mais qu'il a cédés en partie a S. M. & confacrés a un établiffemcnt d'utilité publique: 30. le montant des offres que les Fermiers généraux, les Adminiftrateurs des Domaines & les Régiffeurs généraux ont recu Finfinuation de faire a la fignaturc de leur dernier traité,-également dans la vue de quelque objet charitable. Dans 1'efpoir d'exciter plus efficacement 1'activité des chefs dans toutes les parties de cet hópital, les Etats de fituation de 1'Hótel-Dieu feront imprimés tous les ans a 1'imprime'rie royale & auxfrais du Roi; ils contiendront le nombre ceatrx dc déclamation cnpables d*gr|cHfer le Clergé & le Gouvernement: point du tout. On pré» tend, au contraire , qu'il les a augmentés & ren» forcés, enforte que le bruit a couru qu'il étoit a la Ballille. Ce bruit s'eft foutcnu pendant quelque tems; on a lieu de croirc aujourd'hui qu'il eft faux. 18 Mai. M. Mauduyt, pour une plus grart] de authenticité de fon traitement des maladies diiTérentes de la paralyfie par l'élcétricité, a lu dans la féance de la Société Royale de Médecine , tenue au Louvre le 20 Avril dernier, un Avis donné au public par ce Médecin, oü il déclare qu'il continuera pendant quatre ans k traiter gratuïtement les malades qui fe préfenteront dans des cas oü 1'éledricité pourra leur être utjïe; Ces cas font, en général, le rbumatifme, foit fimple, foit goutteux; le rachitifme des enfans, le lait épanché , les fcrophulcs ou écrouclies, la eatarade commencante, la goutte fereine recente, la furdité , &c. 11 ajoute que ce traitement,. afa connoiflance, même en ne rénffiflaut pas, n'a encore occafionné aucun mal réel. Afin d'infpirerplus de confiance aux malades, ceDocteuiapótre de 1'électricité médicale n'en admettraaucun fans avis de fon Médecin ou de tout autre, Le compte rendu par plufieurs Aflbciés & Correfpondans de la Société, foit Rcgnicoles* foit étrangers, d'EfTais dans le même genre, confirmant le fyftême & les fuccès de M. Mauduyt, eft un préjugé de plus en plus favorable» £3  M. Vicq d'Azyr, Sécrétaire perpétuel dc Is Société de médecine, eft intervenu le 22 Avril & a donné im certilicat a M. Mauduyt, par lequel il attefte que Ia Compagnie a approuvé fon avis & a defiré qu'il fut rendu public. 19 Mai 1781. On eft plus inquiet que jamais au fujet de M. Necker. Les conditions principales qu'il exigeoit pour refter dans fa place , étoient d'entrer au Confeil & d'obtenir un 'Lit de juftice pour 1'enrégiftrement des Lettres parentes concernant 1'Afiemblée provinciale de Moulms: il paroit que fes ennemis 1'ont emporté & comme le Roi a mis néant k fes demandes » on ne doute pas qu'il ne donne aujourd'hui fa démiffion. 19 Mai. Un Imprimeur de Touloufe, nommé Rayet, ayant contrefait les Contes Mor aux , du vivant & fans le confentement de 1'auteur, toute FEdition a été faifie & mife au pilon, & par Arrêt du Confeil du 20 Avril il a été condamné a 6oco livres d'amende, dont 2000 livres au' profit de 1'auteur j M. Marmontel, & le furplus a tel ufage qu'il plaira a S. M. M. de Neville a voulu par'cet acle de vigueur , en maintenant fes Arrêts nouveaux du Confeil concernant la L,ibrame, objets de tant de recJamations ot oe fcandales, prouver combien il eft zelé pour conferver aux auteurs leur propriété, bien loin de 1'attaquer, ainfi qu'on 1'en aecufe. 2o.ilM. Ms Houdon, pour s'écarter de fes confrères, qui depuis peu nous out offert plufieurs  C 199 ) Diaries, & repréfenté Ia fieurre en Chafleréfle & en action. Le fwelte eft fon attribut brillant. 1 Elle marche. Elle eft cenfée traverfer un marais, & pour mieux lc francbir s'appuyc fur un 'builion dc rofeaux qu'elle rencontre* Rien de plus charmant que cette figure, oü les fij&ctateurs trouvent réunies la légereté, ia nobleffe, la pudicité, les graces & Ia beauté. S011 are, fes fleches font d'un fini précieux; mais la pofition hardie oü Partifte 1'a placée, étonne furtout les connoilfeurs. Le marbre d'ailleurs eft d'une blcHicheur éblouiffante, d'une pureté qui répond a merveille a celle de la Décfle. 20 Mai. Rien de plus certain aujourd'hui que la démiffion dc M. Necker, donnéc hier & acceptée. On eft perfuadé que c'eft Madame la Ducheffe de Polignac qui, trompée par les ennemis du Direéteur général, lui a porté les derniers coups & qui, en lui ótant la proteétion de la Reine, 1'a laifie fans appui auprès du Roi. C'eft M. de Fleury de la Va lette qui le remplace. Tout le parti du Comte dc Maurepas s'en fé'licite & reproche au Direéteur général expulfé fon ingratitüde envers fon bienfaiteur. Les honnötes geus, qui ne font d'aucuné cabale , gémiffent , en ce qu'ils ne doutent pas que cet événement ne fafle tort au Royaume & ne réjoüiffe nos ennemis. 20 Mai. Le Mémoire préfente au Roi par M. Necker en 1778 eft toujours trés - rare. On n'cn a imprimé que douze exemplaires, pour être envoyés aux gens qui avoient intéret de le conI 4  £ coo ) nokre & dc le refuter. D'ailïeürs, c'étoit une tournure pour prétexter & en favorifer la dénon- ciation. Aujourd'hui le Parlement eft le plus actif pour en empöcher la pnblicité & Ja réimprefiion : corhme il n'eft pas extrêmement long & n'a gueres qu'une feuille d'impreffion, beaucoup de gens Pont copié. On nepeut nier qu'il n'y ait des chofes excellentes, fpécieufes , des inorceaux écrits éloquemment: cependant on peut auffi lui reprocher du bavardage, de Pincohérence dans les'idéés, des contradictions, au point de fournir h quiconque voudroit le refuter, desmoyens, des raifonnemens, des principes tirés ifiême de 1'ouvrage & qu'on -tounierok contre 1'auteur. Au furplus, ce qu'il contient de mcilleur, c'eft le portrak deslntendans , Ia critique de leurs fonclions, du genre de leur adminiftration dans 1'affiette des impóts. Et tout cela eft tiré des fuperbes Remontrances de la Cour des Aides en 1775.. 2,1 Mai 1781. Extrait d'une Lettre d'Anifterdam du 17 Mai. „ Nous fommes ici encban,, tés de notre nouvelle liail'011 avec laFrance; „ nous exaltons le Regne de Louis XVI, qui „ gouverne fans maltrefle ; ce qui n'étoit pas „ encore arrivé chez vous depuis 140 ans. On ,, hok dans nos compagnies publiques & parti„ cidieres a fa fanté & enfuite a celle de M. de ,, la Motte-Piquet. On chante continuellement „ des chanfons a la gloire des Francois, le bas „ peuple en langue flamande. cc les gens comme  C 201 ) me il faut, dans la votre. Voiei une chanfon faite récemment en 1'honneüf du Chefd'efcadre dont je viens de vous parler & au fujet de fa capture du z de ce mois. Elle eft maligne & gaie; vous la trouvcrez dignc de vos Collet & de vos Beaumarchais de Paris-" Les Suites de la Prife de St. Euftache. Sur fair: il n'y a qiCun pas du mal au bien. Grande eft la derniere vifloire Du fameux Amiral Rodney, L'univers en eft. étpané! , Saint Euftache comble fa gloire: Voyez quel bonheur eft le fien 11 a tout pris & ne tient rieul II étoit entré fans obftacle Dans un fameux Port Hollandois, Oü chacun croyoit être en paix. Quel trait de valeur! Quel miracle! Voyez quel bonheur eft le fien,. II a tout pris & ne tient rien. Pour montrer qu'en faifant la guerre L'Anglois agiflbit galamment, II avoit généreufement Tout enibarqué pour l'Angleterref Voyez quel bonheur eft le fien, II a tout pris & ne tient rien. Tout le burin de Saint Euftache' Que croyoient tenir les Anglois,. Repris par un brave Francois, Leur a pafié fous la möüftache* I 5  C 202 ) Piquet 1'a pris, p:quet Ie tient, Et ce qu'il tient, il Ie tient bien. 21 Mai 178'ïi H parolt conftant que les trois eonditions mifes par M. Necker pour reprendre fa démiffion étoient: 10. fon entrée au Confeil, pa du moins aux Comités fecrets des affaires ciEtat: 20. des Lettres'de juffion & un Lit de Jidnce, s'il le faüoif, pour 1'enrégifrremènt de 1 Jidit de créationdes Adminiftratious provinciafcs: 30. Ia punition de M. Gueaux de Revereau , Intendant de Moulins, qui avoit traverfé fcs vues du Direéteur général, fors de 1'établilTement dc 1'aflemblée de cette Province, qui avoit cabalé pour la rendre inutile & la faire diffoudre 1 année derniere. _ M. Necker, ayant remis mardi ces cenditions, fuites du mémoire qu'il avoit fourni au Roi le dimancbe, s'étoit (latté par i'accueil de S. M. qu'elles feroient acceptées. Les chofes avoient changé de face clans 1'intervalle. On a prétendu que lés adverfaires de M. Necker avoient eberebé h lui aliéner la Reine par 1'entremife de Madame la Dtichefië de Polignac, en lui faifant fentir le danger de reccvoir ainfi la loi d'un étranger parvenu, guidé moins par le bien public que par fou ambition. M. Necker étant revenu vendredi a Marly pour travailler avec le Roi, ne put le voir. II fut chez M. de Maurepas, qui ne I'admit point en ia préfence & s'excufa fur" une attaque de goutse: il paffa chez. la Reine'l oü il rclia quelques  C 203 ) minutcS. S. M. lui confcilla de rcvenir le lendemairi chez lc Comte de Maurepas ; cc qu'il fit. Ce Miffiftre lui dit que le Roi acceptoit fa démiffion : ce fut uu coup de foudre pour le Directe ur général, qui, atterré, tourna le dos 6? allachez le Marquis de Callrics,fon ami, pc ur y rccevoir quelque confolation; de-la il revint a Paris. I eft réfugié a fa maifon de Saint Oucn. Sic tranfit gloria mundi! 21 Mai. Les comédièns Italiens donnent de? Hiain la première repréfentation du Prïntems ,Aivertiflement paftoral en un acte & en vaudevilles. C'eft encore une produérion de MM. Augufte dc Piis & Barré, qui fe propofent, fans doute, dc peindre ainfi fucceiTivement les quatre faifons. Ils ont commence par 1'Automne, dans les Vendangeurs; l'Hiver a fuivi dans la Matinee & la Veülée Vïllageoife: les voila a la troifieme aujourd'hui. On ne parle pas,au furplus, de cellcci aufti favorablement. La piece a été exécutée a Marly & il paroit qu'elle 11'y a pas été fort goütce. - 21 Mai. Le Parlement avoit retardé lc travail de fes Rcmontrances, dans 1'efpoir que le Directeur général des finances ne refteroit pas ' longtems en place; aujourd'hui qu'il eft fatisfait, ileft a croire qu'il en demeurera-la. Voki, au furplus, les propofitions fur lefquelles il devoit infifter le plus & 1'efquiifc du travail de M. Necker fous le point dc vue attaquable. „ Les lntentlans abufent: les Parlemcns g£* - ï 6  C 204 ) „ ncnt: les anciens corps ofltcnt des obftadea v> & des réfiftances a Fautorité: réformer & re„ firéindre les premiers-: réduire les feconds au „ feu-1 métier de juges: abroger toute forme, „ toute dénomination, toute tracé d'ancicns „ Etats & de leurs prétentions, en les rempla„ cant par des Adminiltrations locales & da *> cboix, qui s'afTembleroient rarement, qui „ n'offriroient jamais de réftltance, qui ne pour*, roient que faire des obfervations rapidcs de „ trois ans en trois ans , qui feroient faciles ;\ ,., corromprc, & qui au befoin deviendroient un moyen de force pour convertir & corriger la>, conflitution acïuelle de la Bretagne, du Lan,, guedoc & de 1'Artois".. ,. Voila ce qu'on appelle dans lc mémoire un premier pas a 1'amélioration générale. 11 Mai 1781. De Londres Ie 11 Mai. „Sa „ Majefté Britannique, toujours difpofée a fa„ vorifer les p-rogrès des lumieres, vient de don3., ner les ordres les plus précis pour préferver „ des dangers de la guerre M. Foucherot Archi3, teéte, & M. Fauvel Peintre, que M. de j, Choifeul Gouffièr, auteur du Voyage pittoref„ que de la Grece, a envoyés fur les'h'eux, afin d'ajouter de nouvelles recherches a celles qu'il M a déja faites lui-même, & de contribuer par „, leurs talens a perfeérionner de plus en plus ce bel ouvrage." v 02 Mai. Le fujet du Printems confifte dans ï'iadifférence de deux jeunes bergères, qui.ne  C 205 3 pouvant réfifter a la conftance de leurs afflans, ;\ 1'exemple de leurs compagncs & a la fermentation que la faifon oecafionne dans leur Tang, finiflent par recoimoitre le pouvoir de 1'amour, On voit que cc fujet eft trés finrple: auffi les moyens en font petits & mefquins; cependant la gaieté des tableaux, le fpectacle, & 1'habitudc d'applaudir les auteurs, ont foutcnu 1'ouvrage & on a fait répéter plufieurs couplcts. 23 Mai. Les amateurs, en général, ne font point contens de 1'orgue de Saint Sulpicc: malgré le talent des grands maïtres qui l'ont touché , ils l'ont trouvé extrêmement dur & ne produifaut qu'une fenfation défagréable a 1'oreille. 23 Mai. L'engouement pour M. Necker s'eft mahjfefté dans le public dès lc premier moment dc fa difgrace. Le dimanche,oü la nouvelle s'en répaudit, on jouoit aux Francois la Partie de Chajfe de Henri IV. On fait qu'il y eft beaucoup queftion de Sully; qu'en un endroit, après lui avoir pardonué le Roi s'écrie: les malheureux-y ils nfpnt trompél une voix du Parterre a répondu: oui, cui, & a lïnftant mille voix Font répété. Ce meme tumulte a rcccmmcncé a chaqua phrafe ou il étoit queftion de Henri. On a bientót rendu compte a M. le Lieutcr.ant général de police de ce brouhaha, & les Comédièns pour fe juftifier auprès de lui ont été obligés de lui députer quelques-uns de leursi membres chargés du repertoire, par lequcl ils ont prouvé que le hafatd feul avoit caufé cet a pro» I 7.  pos, cc que la piece étoit indiqnée dès_ Ie eönfniencemerit de la lèmaine pour ce jour-la. A I'opéra,le même jour M. le Bailly du Rollet étant dans le foyer, ne femblbit pas de Pavis de beaucoup' d'autres & traitoit afibf mal M. Necker: un Chevalier de Saint Louis préfent s'eit écrié qu'il n'y avoit qu'un J... F... capable de tenir un pareil propos-: comme il n'étoit pas direct au Bailly, il a jugé plus fage de faire une pirouette & de s'en aller. Le militaire eft un Sieur le Noir de Rouvray, frere du Notaire de cc nom, grand intriguant & qui avoit fes raifons, fans doute, pour parler ainfi. Enfin le Sieur Bourboulon ayant paru au palais royal s'eft bientót vu entouré, fuivi & a été bué au point qu'il a fallu qu'il fortit de la promenade. 24 Mai 1781. M. Joly de Fleury de la Valerte a paru réfifter quelque tems aux volontés du Roi; enfin il s'eft rendu & a pris le porte-feuille, mais par interim feulement. II n'a aucun titre: il n'a point prêté de ferment & a déclaréaux Receveurs & Fermiers généraux qui ont été a fon audience, qu'il ne rcmpfiffoit cette place que par foumiffion aux ordres du Roi & pour effayer fes forces. Du refte, il leur a ajouté qu'il fuivroit les erremens de M. Necker & tiendfoit religieufement tous fes engagemens: il Fa fait dire auffi a la böurfe. 24 Mai. Quelques écoliers du college d'FIarcoiut ayant choifi un jour de congé le chateau  C.207 ) tfe Belle-vue pour leur point de promenade, ei?rent de la peinea y entrer, paree que Mesdames y dtoient; mais ces Princefles toutes bonnes ayant fu les difficultés que lc Suifiè leur faifoit,. ordonnerent qu'on les laifllt aller dans les jardins. Le Roi dtant venu, Mesdames en vouiurent amufer S. M., qui les fit jouer aux barres & fe confititua juge du camp. Ces jeunes gens ' ayant difparu pour aller manger a lfaoiberge oü lc repas dtoit commandé, il vint un courier des Princefles qui leur annonca qu'clles leur avoient fait préparer a diner & qu'elles les attendoient. N'ayant pu jouir dc cet honneur paree qu'ils ïi'avoient plus faim , ils revinrent & eurent la liberté d'entrer dans les appartemens & de voir jouer le Roi au triclac. S. M. les interrogea & voulut favoir quels ils dtoient l'un après 1'autre, & comme tous portoient des noms connus: „ Je connois tous ces noms-la, dit-elle; ils me „ rappellent des geus qui ont bien fervi f'Etat; | je ne doute pas qu'a votre tour vous n'en „ faffiez autant. " Le Roi caufa familierement avec eux, les fit goütcr & leur donna rendezvous pour leLandi,fameux jour de vacance dans les colleges, qui arrivé au mois de Juin. Cet événement fait une grande fenfation dans lc p'ays Latin & tous envient lè bonheur de leurs camarades. La familiaritd des Princefles & du Roi allume ddja dans ces jeunes cceurs 1'amour de leur Souverain & de la familie royale. Quelques congés accordés par le Monarque doivent  ( 208 ) s'employer agréablenient rt le célébrer dans leurs' inuocentcs orgies & a chanter fes louanges, 25 Mai 1781. Un nouveau pamphiet répandu depuis peu a défolé M. Necker, plus qu'aucun autre, par lc ton lette qui y rcgne, par le ridicule qu'il verfe a grands Hots fur lui & fon parti, par la hardieife avec laquelle il nomme chacun de ceux qui próncnt a la Cour ce Directeur & dévoile les motifs qui les font parler. C'eft «ne brochure de 44 pages gros caractere in- 8»., intitulce: Lettre de M. le Marquis de Caraccioli d M. d'Jlembert, en date du premier Mai. On l'attribue au Sieur de Beaumarchais, a raifon de fon extreme méchanceté. 25 Mal. Extrait d'une Lettre de Verfaillcs du 23 Mai 1781. La démiffion de M. Necker a foit affligé Sa Majefté ; elle a été enfermée avec la Reine pendant une demi-heure , lors de eet événement & 1'on ne favoit ce qui en arrivcroit. II parolt que la hauteur feule qu'il a fiiife dans fes demandes a empeché d'y acquiefcer. On 1'auroit laifl'é entrer au Confeil , s'U n'eut exigé que cette faveur; mais les aétes de rigueur qu'il vouloit -faire exercer fur lc cbamp contre le Parlement & contre les Intendans qu'il n'avoit pas trouvés dociles a fes idéés , ont révolté. La Reine a fait fentir a S. M. que le ton impérieux que prenoitM. Necker, annoncoit un génie defpotique qui s'étendoit jufques fur fon maitre, & qui ne feroit que s'accroitre fr Pon. le fupportoit. II a été décidé qu'il avoiü  C 209 3 mis le Roi dans la néceflite de ne plus le reprendre. Le Roi paroit aujourd'hui calme & ferein. Le ton d'aménité qu'a mis M. de Fleury dans » fon dcbut, bien oppofé a la dureté de M. Necker, a achevé de trauquillifer la familie royale: on voit que ce nouvel Adminiftrateur des finances a envie de plaire jufques. aux moindres ftibalternes. Du refte , il affiche le même désintérefiement que fon prédéccffeur , quoiqu'il ne foit pas aufli riche a beaucoup prés, & il a refufé tous les bénéfices quelconques de fa place. 26 Mak Les gens dc haut parage qui fe font mêlds" d'intercéder pour M. 1'Abbé de Boulogne auprès de M. FArchevêqüe de Paris , feont jamais pu tirer de lui fes griefs contre cet Abbé:envain ils ont interrogé les perfonnes conftituées en dignité qui ont fa confiance ; elles ont répondu que le Prélat étoit entouré de délateurs obfeurs qui, pour lui plaire, venoient a'nfi calomnier auprès de lui les plus honnêtes gens du monde & malheurcufcment étoient crus trop fouvent. Tout ce que ces puiflans protccteurs ont gagné de M. de Beaumont, c'efl qu'il oublieroit les fautes de M. 1'Abbé de Boulogne & qu'il lui accorderoit même fon amitié , mais a condition qu'il iroit quelque tems au Séminaile : efpcce de punition a laquelle celui-ci s'eft foumis: il eft a St. Lazare acluellcmcnt. II paroit que M. FArchevêque confus de cette perfécution , ne veut pas avouer cependant fon injuftice & a exigé cette démarche pour mettre fon  C" 210 ) ,*mour-propre & même fa juftice a couvert. 26 Mai 1781. M. le Comte de Parades eft forti de la Baftille le ltmdi fept de ce mois & a donné dès le lendemain un grand repas. On. aflure que s'il ne s'eft pas juftifié entierement-,, du moins on n'a pu 1'inculper alfez pour- le ptil nir du fupplice réfervé aux efpions ,. aux-traitrcs a 1'Etat: du refte, nul doute fur fon origine &! fur la maniere dont il s'eft poufle dans le monde ; tout ce qu'on en a dit dans le tems fe continue de plus en plus. 26 Mai. Hier a la comédie on jouoit le Mifanthrope & les partifans de M. Necker ont encore trouvé dans cette piece de quoi faire des applicatïons a ce qui fe pafte aujourd'hui relati-i vement aux intrigues de cour, aux complots, des pervers contre les honnêtes gens; il y a eui beaucoup de brouhaha. On a fait auffi un couplet fort fimple & qirj jn'eft a conferver que pour 1'anecdote: North & Necker dans leurs puiflantes mains De leur Etat foutenoient les Deflins: Voila la reffemblance. North triomphant éleve les Anglols, Necker tombant entraine les Francois: Voila la difFérence. 26 Mai 1781. Extrait d'une Lettre de Stras-: bourg du 20 Mai. Le délire pour lc Comte dei Callioftro eft poufie au point qu'on a gravéi fon portrait avec ces vers:  C ui ) De 1'ami des humains recomioiflez les traits: Tous fes jours font marqués par de nouveaux bienfaits; [1 prolonge la vie, il fecourt 1'indigence: Le plaifir d'êtsg utile eft feul fa récompenfe. „ C'eft a qui fe pourvoira de la gravure de )S cet étranger célebre." 27 Mai. M. Joly de Fleury -fe nommoit cidevant la Valette : il eft bis du fameux Procureur général de fon nom & le cadet de deux freres, dont l'un Procureur général & 1'autre Préfident k mortier. Le pere difoit en parlant d'eux, qu'il n'y avoit que fon la Valette qui vaiüt quelque chofe. II a beaucoup d'efprit, eft fort inftnüt & dévoré d'ambition. 11 eft d'une fanté délicate , fe leve tous les matins a fix heures, travaille jufqu'au diner; après le repas caufe avec quelqu'un, fe remet au travail jufques a huit ou neuf heures du foir, qu'il vient faire fon wisk chez Madame de Fönt-pertuis logeant dans fa maifon , foupe légerement & fe couche a onze heures. Cette Madame de Font-pertuis eft une ancienne habitude , a laquelle M. Joly de Fleury eft fort attaché; c'eft une virtuofe dont la fociété Pintérefiè & 1'amufe. M. Joly de Fleury eft peu riche, a peut-êtrc de fon patrimoine dix'a douze mille livres de rentes ; mais a environ 6o,coo livres de bureaux. C'en eft affez pour le préferver de la cupidité que fes ennemis ne manquent pas de lui fuppofer. II ne s'eft point inftallé au Controle général & s'y tend feulement pour donnet  C 2Ï2 ) des audiences & y travailler. II a déclaré qua" M. Necker avoit laiffé tout dans le plus bel ordre du monde & furtout 130 millions en efpeces ou valeur au tréfor Royal. Celui-ci a fon tour dit a tout le monde, que s'il s'e'toit choifi unfuccefleur, il n'en auroit pas nommé d'autre. On croit cependant M. Joly de Fleury peu au fait de la iïnance , n'ayant jamais travaillé dans cette partie & n'ayant été qu'un fnffant Intendant en Bourgogne: on fuppofe que fon idéé eft de devenir Miniftre & d'entrer auConfeil d'Etat, le feul dont il ne foit pas encore: il ne feroit pas fiché non plus de devenir Chancelier, ou du moins d'avoir les Sccaux. 27 Mai. M. 1'Abbé Raynal n'eft point a la Baflilie, mais il eft forti du Royaume; on le dit aux eaux de Spa. On a dénoncé au Parlement la nouvelle édition de fon Hiftoire Philofophique 6? Politique, & fes amis Font obligé de fe fouftraire ainfi au décret de prife de corps décerné contre lui dès vendredi dernier. Son imprudence de mettre fon nom & fon portrait k la tête de cet ouvrage , d'y avoir ajouté un fupplément concernant la guerre actuelle, & de nouveaux morecaux de déclamation injurieux au Gouvernement & au Comte dc Maurepas défigué fp.écidement, l'ont mis dans le cas de craindrc des " fuitcs trop facheufes dé fon aveu, pour oferle fotitcnir devant les Magiftrats. II faut donc attendre que la fermentation que fon ouvrage occafionué, foit pafiee.  ( 2i3 ) it Mai 1781. Un bruit trés accrédité & appuyé de bulletins lort détaillés , s'eft foutenu pendant deux ou trois jours fur 1'interception d'un convoi par les Hollaudois & fur un avanfage confidérable remporté par le Marquis de 'la Fayette : tout cela s'eft trouvé complectemen: faux & il eft aflèz vraifemblable que le Gouvernement avoit autorifé cette faufle rumcur pour faire diverfion aux lamentations du public fur la retraite de M. Necker. 28 Mat, C'eft le mardi 25 Mai , Grand*cbambrc & Tournclle affcmblécs, que M. J'Avocat-général Scguiera fait un long rcquifitoire contre un imprimé en dix volumes in-8°., ayant pour titre Hijloire Philofophique £f Politique des EtabliJJemens &? du Commirce des Européens dans les deux Indes, par Guillaume-Thomas Raynal. A Geneve , chez Jean Léonard Pellet, Imprimeur de la Ville ê? de V'Académie , 1780. En conféquence la Cour a ordonné que ledit livre imprimé feroit laceré & bruid en la cour du Palais, comme impie, blafphéniatoire , féditieux, tendant d foidever les Peuples contre l'autoritê Souveraine £ƒ d renverfer les principes fondamentaux de l''ordre civil: & PAbbi Raynal a été décrété de prife de corps, &c. Les Magiftrats ne voulant pas donner fuite a ce décret ont, avant de le rendre, laiffé a 1'auteur tout le tems de prendre la fuite: il étoit a Courbevoye chez M. Paulze, Fermier général J c'eft de-la qu'on 1'a fait évader.  C 2*4 ) 28 Mai. La Lettre du Marquis de Caraccioïz ü M. d'Alembert, eft un des plus jolis pcrfif> fla.ges qui aient dté faits depuis longtems. L'auteur, après avoir décrit rapidement la maniere miraculeufe dont M. Necker s'eft élevé de fon néant au Miniftcre, s'arrète particulierement fur celle dont il a fu myftifier la nation francoife depuis qu'il eft en place, infpirer ce fanatifme avec lequel on le prónc & 1'on admire de fa part ce qui feroit crier de celle d'un autre. II s'étend plus au long enfuite fur le Compte rendu & fur le fameux Mémoire; enfin il révelc les manoeuvres de toute efpece, par lefquelles fes nombreux partifans ont cberché a parer le coup dont étoit menacé leur héros. On a d'abord pcrfuadé a Ia Reine que le bien de 1'Etat étoit lié inféparablcment au fort de M. Necker: c'eft lc Marquis de Caftries qui, profitant de fon accès auprès du Tróne, a engagé S. M. a relever le courage du Directeur général des finances par quelque témoignage public dc fa bienveillance. La Duchefte de Polignac a été plus circonfpecle & n'a jamais voulu confeiller a la Reine d'avoir uae opinion fur une affaire aufiï délicate ; mais M. d'Adhemar a eu plus de hardiefle. Le Prince de Poix s'eft furtout diftingué par fon zele a vanter les opérations merveilleufes & patriotiques de M. Necker: 1'Abbé de Vermout n'a pas peu contribué a le bien mettrc dans lcfprit de la Reine.  Le detail de Farmée de próneurs, d'cnthou» fiaftes & de cre'aturcs de M. Necker n'elt pas ce qu'il y a de moins amufant dans 1'ouvrage: a 1'avant - garde 1'on place les vrais affidés & cointérelfés, portant les enfeignes dorées de la Baiique. Viennent enfuite lc Clergé & les Proteftans réunis pour la première fois fous la même bannierel'un comme livré a quiconqu» étend fon pouvoir; les autres, comme voyant déja leurs prêches rétabïis. Arrivcnt fur la même ligne les amis de cour tournant a tout vent, entr'autres les Noailles & les courtifans ferviteurs-nés de 1'homme en place. Vient après cela la grande troupe des dupes, des fots admirateurs, des illuminés & de provinciaux, tous la bouche béante & les yeux fixés fur le tableau du Compte rendu, qui leur feit d'étcndard. On voit autour des préambules bleu coloriés & pour devife les grands mots, de Bienfaifance, de Réforme, de Soulagement & de Liberté, gravés en lettres d'or. Toute cette race moutonniere forme Ie gros de 1'armée, & marebe pêle - mêle, lans favoir oü 1'on la mene, au fon d'une mufique bruyante, compoféc dc gens de Lettres qui.y donnent le ton» d'Ecrivains périodiques & d'Êconomiftes. tenant tous la trompette, de 1'abbé Raynal faifant le fervicc de timbalier, &c. Sur les alles marchent plufieurs efcadrons d'ambitieux, commandés chacun par des chefs différens, qui tous mafquent leurs projets particu-  Ücrs fous les dehors d'une faufle concorde & ne tendent qu'a leur but, cn parouTant férvir M. Necker. De ce nombre eli 1'Archevéque dc Touloufe , Vifarit au Minillere & cberchant fourdement a le fupplantcr; le Duc de Choifeul, a qui 1'adroit Directeur fait entendre qu'il le fert dans 1'efprit du Roi; le Duc du Chatejet, a qui il a promis d'ouvrir le cbemin, foit au Departement de la Guerre, foit a celui de la Politique; le Prince dc Beauveau, ayant la perfpeclive du Département dc Paris, ou au moins d'entrer dans lc Confeil. Les femmes s'en mélent auffi, mues par les hommes, ou dans des vues particuliercs pour leur compte : 1'impérieufe & dominante Ducheffe dc Grammont, la fuperbe Comteffe de Brionne,la Princelfe de Beauveau a 1'efprit féduifant, la Comteffe dc MontefTon revétue de tous les charmes que 1'art peut donner; la précieufe Comteffe de Blot, au jargon fentimentaire; 1'enthoufiafte Comtelfe de Tcffij; 1'idoldtrée Comteffe dc Cbalons, trainant a fa fuite fon amant lcDuc de Coigny;lamervcilletife Princelfe d'Hehin, la fweke Comteffe de Simiane, la piquante Marquife de Coigny, la douce Princelfe dc Poix. Le plaifant finit par revenir a la raifon & par 1'énumération des fuites effravantcs que peut avoir Pdlufion momentauée que caufeM. Necker lorfque fes tableaux magiques difparoïtront ! pour ne laifler voir que 1'affreufe vJritc' ' £9 Mai 1781. C'eit aujourd'hui que Ie livre de  C 21? ) de Fabbé Raynal a été brülé & 1'on public 1'Arrêt & le Requifitoire en date du 25 Mai. Celuici fort verbeux a quatorze pages. On y peint le livre comme entremêlé de déclamations impics, de reproehes amers, de fareafmes indécens & d'impofturcs groffieres fur tout ce qui eft relatif k la religion Chrétienne; comme contenant des difiertations révoltantes fur les préjugés, fur 1'iafluence de 1'opinion ;\ 1'égard des mceurs , & fur le bouheur de 1'homme; comme cherchant a fubftituer partout aux dogmes, aux loix & aux principes, une philofophie audacieufe & facrilege; comme aflurant que les lettres & les arts décorent Pédifice de la religion & que la philofophie le détruit: que 1'impofture .parle dans tous les temples & la flatterie dans toutes les cours, que tout écrivain de génie eft magiftrat-né de la patrie; que fon tribunal eft la nation enticre, le public fon juge, non Ie defpotc qui ne 1'entcnd pas, ou le miniftre qui ne veut pas 1'écouter; que c'eft aux fages dc la terre qu'il appartient de faire des loix, & que tous les peuples doivent s'emprefter de les adopter: comme vomiflant des atrocités contre la Souveraineté , calomniant fans pudeur la mémoire de Louis XV; comme critiquant témérairement les opérations & la politique du gouvernement, & rejettant fur Ia nation Francoife, fur les Miniftres du Roi, fur le Roi même \ tous les malheurs de la guerre acluelle. L'oratcur obferve enfin , que c'eft un homme Tome XFII. K  ( ai8 ) qui a fait profeffion dans un ordre rcligieux, (des Jéfuites) un homme rcvêtu du caraétere & de la dignité facerdotale, un homme qui fe qualifié de citoyen & d'ami de tous les hommes, un homme qui veut être le contemporain de tous les figes j qui ofe avancer dc pareilles propolitions. 30 Mai 1781. Une des opérations de M. Necker trés injufte, mais contre laquelle 011 ne crie point, qu'on vautc même, paree qu'elle n'attaque qu'une propriété financiere, c'eft la retentie qu'il a faite des répartitions revenant a chaque fermier général a la fin du bail; elles fe font trouvées de 6oo,coo livres: il leur en a fait toucher 100,000 livres feulement & a mis la main fur le refte. On ignore fi pour le furplus la rente leur en fera faite a cinq pour .cent jufques au parfait rembourfement. M. de Senac, l'un des fermiers généraux fupprimés, a préfenté requête a la Cour des Aides, pour demander qu'il lui fut permis d'affigner la compagnie des fermiers généraux aétuels en re» ftitution des 500,000 livres lui revenant; la Cour des Aides 1'a permis: 1'afiignation a été donnée, mais bientót eft intervenu un Arrèt du Confeil d'évocation de la conteftation.... On ne trouve point tout cela dans les grands principes de Fauftere équité. 30 Mai. C'eft aujourd'hui le moment d'annoncer un quatrain fait parM. dc la Place, pour être mis au bas du portrait de M. le Chevalier 4e]ii Motte -Piquet, Chcf-d'efcadre; il n'avoit  ( -lp ) pas alors toute la jufteffe qu'il a en ce moment: Marin dès ta première aurore, Guerrier, cher même a tes rivauxi La France fait ce que tu vaux, Et 1'Angleterre mieux encore. «o Mai. Extrait d'une Letre de M. le Cbevalicr Gluck, datée de Vienne le n Mai: „ Ne „ croyez point tous les bruits qui courent fur H mon procbain retour a Paris; a moins que „ des ordres fupérieurs ne m'y attirent, je n'irai l, point en cette ville, jufqu'a ce que les Francois „ föïèrit d'accord fur le genre de mufique qu'il " leur faut. Ce peuple volage, après m'avoir H accueilli de la maniere la plus flatteufe, fem" ble fe dégoftter de tous mes opéra, oü il ne " fe porte plus avec la même foule qu'autrefois, " & voila le Seigneur Bienfaifant qui fixe auS' jourd'hui fon. attention; il femble vouloir retöurner a fesPont-neufs: ilfaÜtïe laifler faire." " & Mai. Le zele du Parlement contre 1'abbé Raynal ne s'efi évertué qu'excité par des ordres fupérieurs. Un ennemi de cet auteur a aft fcfté de mettre fur le Bureau du Roi un des volumes de fa nouvelle édition, tellement rclié & arrangé qu'il s'ouvrit naturellement aux endroits les plus repréheniibles: S. M. n'a pas manqüé d'y tombei; elle a fenti le Jonger des aflertjons qu'elle a lues; elle a fur le cbump cnvoyé chercber le Garde des Sceaux & lui afait des reprodies dc ce qu'il laifloit pénétrer en France un K a  .ouvrage atiffi condamnable; S. M. lui a ajouté qu'elle favoit qu'il avoit foufcrit pour un exemplaire, ainfi que M. de Vergennes, & qu'elle étoit furprife que des perfonnages auffi religieux vouluflcnt avoir un pareïl livre dans leur bibliotheque. M. le Garde des Sceaux eft fur le champ allé chez le Miniftre des Affaires Étrangeres. Celui-ci a écrijt a Gcncve pour folliciter auprès de cette République la proicnption du hvre;on a en même tems pris les précautions néceflaires afin d'en arrêter l'introduclion dans le Royaume .& le Parlement a recu injonction de lancer contre lui & 1'auteur, qui avoit eu 1'audace de 1'a•vouer & d'y mettre fon nom, les foudres magifirales. La Sorbonne s'eii occupe aujourd'hui .& doit Je condamner théologiquement. On croit que M. 1'abbé Raynal fe fixera en Suiffe. En général, ij étoit plus eftimé des étrangers que de fes concitoyens. II avoit une fois par femaine un déjeüncr philofophique, oh almtoit tout ce qu n y avoit de plus iljufbre a Paris entre les Ambafladeurs & Seigneurs voyageans qui fe trouvoient dans cette capitale: c'eV toient des carofles comme a un Speètacje. 31 Mai 1781. On a différé jufqu'a préfentde configner ici un afte de bienfaifance & dc dévouement civique fi extraordinaire de la part d'unEvêqu.e,qu'on ne pouvoit ycroire & qu'01? youloit en acquérir la certitude. II paroit con- j ftant aujourd'hui que M. f Archevêque d'Auch s'^tanttranfporté dans cette capitale a un ineen-  ( dit ) élie qui le 30 Mars dernier a confumé prefque tuut tui quarticr & voyant au milieu des Hammes une mere & fon' erifant qu'il s'agiflbit de fauver, ofïrit d'abord 800 livres & nicccllïvement 1200 Iivfes a quiconque tenteroit cette entreprife iï pe'rilleufe , que peffonne n'ofa s'eil charger:' alors tranfporté d'un zele vraiment apoftolique il ie préciptte' lui-m'eme dans le feu & réuflit a lui enlcver ces deux: vicrimes. II a depuis affuré a la femme 8oö livres de rèntes, reverfibles fur latete de 1'enfant. Cet Archevêquë eft M. d'Apchon',qui a cYa.bord fervi daiis la Marine & a qui il fut annoncé qu'il feroit Evêque de Dijon; ce qui aeu lieu. 31 Mai. On a encore fait le quatrain fuivanc au fujet du renvoi de-M. Necker:- Les vertus, le génie exilés de la cour;Ce malheur trop commun n'a rien qui me furp'rénne %■ Que leur regne ait duré cinq ans dans ce féjour C'efl: ce que 1'avenir ne- croira qu'avec peine. 31 Mai. La cérémonie dü' fervice folemnel célébré a Notre-Dame pour le repos de 1'ame de 1'Impératrice- Reine a eu lieu aujourd'hui. Madame , Madame la Comteffe d'Artois & Madame Elifabeth en ont fait les honneurs, avec' Monfieur, M. Ie Comte d'Artois & M. le Duc de Ghartres. Quant h 1'oraifón funebfe, peu de gens en peuvent rendre compte. M. 1'Evêque de Blo:s avoit deja'-déclaré modeftement qu?irne craigaoi&K 3  C 222 ^ que Pimpreffion , paree qu'on ne 1'entendroit pas, Effectivement le défaut d'organe du Prélat a fait paroltre trop long fon premier point, roulant fur les vertus Impériales & Royales de MarieTherefe: il s'eft appercu du murmure & de 1'ennui qui regnoit dans 1'alfemblée & avant de commencer le fecond roulant fur les vertus Chrétiennes de cette Princelfe, il s'eft écrié: „ j'aurois 3, befoin ici, Meffieurs, d'un nouvcl organe & s, vous d'un redoublement d'attention "... i Juin 1781- Les détraéteurs de M Necker , après 1'avoir démafqué dans leurs brochuïes, a ce qu'ils prétendent, le plaifantent & le ridiculifent dans leurs chanfons. En voici une. Pourquoi préfenter un Mémoire Qui fait fa fin; Chacun glofe fur cette hiftoire, Sur ce Martitr. C'eft que dans cette oeuvre célebre Modeftement, II fait fon oraifon funebre De fon vivant. II n'eft poïat de cour étrangere Qui pour de 1'or Ne voulüt dans fon Miniftere Un tel tréfor. Ah! que n'eft - il, dit l'Angleterre, Mon Chancelier? Ah! que n'eft- il, dit Ie Saint P^re, Mon Moutardier? 3 Juin. Le bruit général eft que M. de Fleu»  C s23 3 ry entrera le lundi de la Pentecöte au Confeil d'Etat & fera déclaré Miniftre. C'eft déja un des points qu'il ambitionnoir. r Juin. Enfin les partifans de M. Necker entrent en lice & publient: Obfervations modejles d'un Citoyen fur les opérations de finances de M. Necker, adrejjées d Meffieurs les pacifiques auteurs des Comment, des Pourquoi &'au~ tres pamphlets anonymes. On attribue celui-ci a M. de Lefl'art. 2 Juin. Les gens au fait du manege de la cour ne croient pas que le Miniftere foit encore bien tranquille; ils veulent qu'il y regne une fermentation fourde qui fera bientót éclorre un nouvel orage. M. le Maréchal de Richclien difoit $i cette occafton, que depuis foixantc-dix ansqu'it habitoit dans ce pays-la, il n'avoit jamais remarqué tant d'intrigues, de cabalcs, de noirceurs, que durant les derniers huit jours du voyage de Marly. C'eft M.de Caftries, créature de M. Necker, que la révolution regarde aujourd'hui; on ne tui pardonne pas (difent les gens de ce parti) d'avoir plaidé la caufe de fon proteclcur, d'avoir ofé dire a M. deMaurcpas que le Roi pouvoit, quand il le voudroit, renvoyer lui & tous fes Miniftres, qu'il en trouveroit toujours cent dc Ia même étoffe pour les remplacer, mais qu'il n'y avoit qu'un Monfieur Necker. iï Juin. M. lc Marquis de Menars ayatït kmgtems préfidé aux arts comme Direéteur géK 4  C "4 ) »éral des Batimens du Roi, merite une notice en cette qualité. Après avoir acquis des connoiflances aflez approiondies en géométrie & avoir étudié les élémens de FarebiteétUre en 1740, H yoyagea en italie,afin de fe mettre en état d'oecuper dignement la place de M. de Tournehem , dont il avoit la furvivance. 11 fut accompagné dans fon voyage par M. Souflot, architeéte depuis célebre; par M. Cochin, deffinateur eftimé, & parl'abbé le Blanc, homme de Lettres qui fe vantoit d'avoir des connoiflances dans les artsRevenu prés de deux ans après il eüt la place cn chef. II augmenta le prix des Tableaux d'hiftoire & en ordonna qui puflent fervir de modeles a la Manufacïure des Gobelins, moins pour le befoin qu'on en avoit que pour entretenir & foutenir ce genre peu cultivé en France. II ordonna auffi des Statues pour entretcnir la Sculpture; mais c'eft furtout FArchiteéture qui lui fut redevable de fa régénération. Les éleves pour cette école qu'il eüt foin d'entretenir a Rome régulieremont , accélercrent fingulieremcnt les progrès de cet art. II appell'a de LyonM. Souflot & le chargea de la eonftrutfion de la fuperbe bafilique de Sainte Genevieve. En 1755 M. de Marigny, honoré du-Cordon Bleu & de la charge de Secrétaire Commandeur de cet Ordre, qui comprend auffi celui de Saint Mïchel, eüt la facilité d'augmenter les encourngeoiens donnés, aux Arts, en gratiliant du Cor-  C «fc > Cordon Noir les hommes clflebfes dans ces diTcrentes parties; les Souflot, les Cochin, le* Picrre, les Pi'gale, &c. En 1762 il fit nommer Carle Vanloo a la placfr de premier Peintre du Roi & ce qui prouva que la faveur n'avoiti point en de part a ce choix ce fut le mot dc M. Ie Dauphin qui, lorfque M. le Direéteur général le préfeuta a ce Prince-' en qualité dc premier■ Peintre, répondit: il y «< lötigtems qu'il l'ejk M.déMenars s'étoit propöfé d'achevcrleLouvre, mais la guerre 1'obligea bientót d'intcrrompre & il n'en réfulta- que la dépenfe d'un échaffaudage immenfe , qu'on a vu fubfifter pendant plufieurs années & pourrir enfin.- Le feul changement cortiiu qu'il y ait fait', c'eft ce guichet fi nécefiaire & qui porte fon nom. M. de Menars avoit concu ■ plufieurs iïkreg projets avantageöx aux arts & a 1'embelliffemenï de Paris , que les rirconftances ne lui permirens pas de remplir davantage. 11 fe retira en 1773, dégoüté par 1'abbé Terrar, qui vouloit avoir fa> place, & depuis ce terns il avoit teltcmcntpris la cour en averfion qu'il n'y alloit jamais; Quelques artiftes lui étoient reftcs attachés & lui faifoient encore afliduement leur cour; entre» autres M. Cochin, qui a eu le courage d'inféres; fon Elogeau Journal de Paris*- 1 Juin. A tout ce qu'on a rapporté conccr»'naftt la Pyramide élevée k Sasback- par Ie-Cardi»al dc Rohan, a la mémoire de Turenne, au Iv- 5 >  C 225 ) lieu même oü il a été tué, il faut ajoutcr le quatrnin fuivantde M. 1'abbé d'Aymar, Vicaire-général de cette ville: Tarenne, enfeveli dans la tombe des Rois, Du Roi qui 1'y placa, fait cliérir Ia mémoire; Mais dans ce monument on célebre a la fois-, Turenne, fes vertus, fon trépas & fa gloire. 3 Juin 1781. Les modes font plus que jamais la matiere du génie inventif de nos artiftesdans les divers genres: celles qui concernent les ajuftemens de femmes, exercent même le goüt des élégantes, des agréables, des 'pctites-maitrelfes de la cour. Les dernieres robes en vogue font les Levites, imitées fur ces robes majeftueufes des enfans de la tribu confacrée a la garde de 1'archè & au fervice du temple de Jérufalem. Ces Levites fe modifient déja de cent manieres. Madame la Vicomtelfe de Jaucour ayant imaginé des Levites d queue de finge,, a paru, il y a quelque tems, au Luxembourg avec cette queue, trés longue, trés tortillée & fi bizarre que tout le monde fe mit a- la fuivre; ce qui obligea les Suifies de Monfieur de venir prier cette Dame de fortir pour éviter un trop grand tumulte. II faut efpérer que pour 1'honneur de 1'inventrice le public étant fait k cette mode,, on pourra s'y conformer -impunément & fan» fcandaie. 3 Juin 1781. Le défenfeur de M. Necker, commence par annoncer fon impartialité. 11 ne-i  'C 227 ) doit rien au Direéteur général des finances, il n'en attend rien , il n'a aucune reïation avec lui: il eft pcut-êtrc le feul qui eüt lieu de fe plaindrc d'une injuftice perfonnelle qu'il en a éprouvée , fous le prétexte même de 1'intérêt dc 1'Etat! N'importe, il eft citoyen , & a ce titre il ofe entreprendre de juftifier le plan d'adminiftration & le Compte rendu deM. Necker. En conféquence : i°. II conftdcre 1'état des finances au moment oü cet étranger fut appelïé pour les* diriger. £i°. II décrit Ia fituation du Royaume , du Crédit, de'la Marine. 3°. II détaillc les améliotations , les économies , les fupprèffions réfultantes de fon Plan d'adminiftration. 4°. Enfin iiagïte la queftion, fi les Emprunts ont été faits en proportion des amélioraticns, & s'ils étoient préférables a 1'augmentation des impöts. Le réfultat de ces quatre chapitres dc difcuffion eft, que M. de Ciugny durant une admiifi'tration de quelques mois avoit laifie' la mafte des dcttes augmentée de 200,000,000 livres, outre les anciennes créanccs, les rentes arriérécs cc furtout les années depenfions dües,fans aucune amélioration ou économie: qüe fous M. Necker la confiance a été rétablie, les effets royaus lont montés avec une rapidité prodkucufe • la France a vu les arfenaux dc fes ports remphV la mer couverte de fes flottes; elle en a impÓfé k fes ennemis par une marine formidable, & a fe> K 6  C saft > tenu- une guerre de plus de quatre armées, fansaugmenter les impóts & fans altérer les reffour-ccs du crédit; 1'état de fes finances s'eft cependant augrnenté de plus de 43 millions: enfin la Ynalfe des dettes contraétées par les opérations^ .de M. Necker ne forme qu'un capital réel de la. fomrne d'environ 350 millions; ce qui n'elt pas beaucoup prés-en proportion desbénélices & na furcharge en rien la Nation comme auroient. fait les impóts-., " 4 Juin. Les Obfervations modeftes, dont lesraifbnnemcns & les calculs ne peuvent fe vérifier & conféquemment peu intéreflantes fur cet articlefont.précieufes par.deux. anecdotes. Laa première eft de M. Marmontel. Ce Philofophe étoit a-Verlailles le jour de. la difgrace de M. Turgot; il obfervoit dans ur* morne filence la joie tumultueufe des courtifans,. des financiers & de tous ceux qui efpéroient pro~ titer: de cet .événement pour leurs intéréts. Quelqu'un frappé de ce contralte, lui demande fur quoi ibmédite li gravement? II répondj en élevaat la voix:.,, je me repréfente d'après-tour „ ce que je vois ici-, 1'image d'une troupe de brigands. rafiemblés dans la forêt deBondy, ,, a qui . 1'on vient d'annoncer que-le Grand-Pre— 5, vót eft renvoyé. "* L'autre coacerne le Maréchal de Richelieu.' " Lorfque le Mémoire dc VAmi de; hommes fur les Etats Provinciaux parut, Louis XV remar-r quant la fenfation qu'il caufoit & lui- memeéma.  £ aap J du tableau patbétique des ravages de 1'arbitrarfe: qu'il olFre, ouvrit 1'on cceur au Marëchal. Cc: cceur tout dévoué au defpotifme, mais encore plus a fon maitre, ne voulut pas prendre fur lui' 1'odieux d'exhortcr le Roi a rejetter un projet auffi patriotique; en fin politique il propofa au Monarqüe d'en parler a fon Confeil: ce que fit' S.. M. Le Confeil étenné demanda du temspour examiner 1'écrit & en rendre compte: en* fin, fuivant ce qu'avoit prévu M. de Richelieu, le Confeil difiuada le Roi. d'une pareHle idéé & lui en fit. perdre pour jamais le defir. Au refte, 1'auteur des Obfervations n'elt point aflez aveuglé furM. Necker,pour ne pas 1'ineul-per fortement d'une afi'ertion- erronnée & trop dangereufe qu'il avance dans fon Compte rendu & dans fon Mémoire. Cet étranger dit: l'augtnentation des impóts eft foumife d la puijjancs du Roi de Trance; ce qui eft contraire a laCouftitution: maxime dont Louis XIV, de tous nos Rois le plus jaloux de fes droits, le plus avide du pouvoir, reconnut la faufieté, ainfi que Louis XV, qui a toujours cru ce droit fubordonné a 1'enrégifirement. A en juger par ce pafthge & par un Poftfcrip. turn qu'on lit a la fin de 1'ouvrage , 1'écrivain pi'eft point un adulateur intérefie de M. Necker, &fon hommage eft d'autant plus pur, qu'il n'a publié fes Doutes qu'après le renvoi dc ce Directeur général des finances; 4.'juin. Le Maufalée élevé a Notre Dame. Iv7.  C 230 2 pour 1'Impératricc - Reine, n'étant pas de F'efpece ordinaire, mérite qu'on en conferye quelques détails principaux & relatifs a la vie de cette augufte Souveraine. Dans le premier des bas-reliefs ornant ce temple funéraire, on voyoit Marie - Therefe préfentant fon fils encore enfant a la Diette de Hongrie ; on lifoit au deflus ces mots: adjurans eos, ojlendit eis filium Regis. Dans le fecond, elle donnoit la Couronné Impériale a fon époux : po/uit Diadema Regni in capite ejus; légende tirée de 1'Ecrkure Sainte, comme la précédente & les autres. Dans le troifieme, 1'Impératrice préfide Féducation de fes enfans: in filios cjf in filias refpicietur. L'Alliance des Maifons de Bourbon & d'Autrichc faifoit le fujet du quatrieme: Statuam pac~ turn interme cif te foedere fempitemo. Le cinquieme étoit confacré au fouvenir de 1'inftitution de 1'Ordre de Marie-Therefe : fic ciirrüe ut comprehendatis. Lc fixieme étoit relatif a la réforme de la Juftice: Pondus êf Statera judicia Deifunt. Le feptieme repréfentoit la Princefle échauffant le génie des arts & du commerce: cognovit quia bona eft negociaiio. Le dernier rappelloit 1'évenement du mariage du.Roi avec 1'Archiduchefle Marie-Antoinette : po/uit Thronum ejus fuper Thronum Regum. Le Monument funebre, ou le Cccnotaphc J  e *3i y étoit élcvé Ga une bafe compofée de fix dcgrés; nombre prefcrit pour les Catafalques des tetes eouronnées. Entre les autres ornemens il faut encore faire mention d'un grouppe de deux fignres: 1'une rcpréfentant 1'Europe dans 1'attitude de la plus grande afïliction; 1'autre, la France debout devant elle, lui montrant, pour la confoler, la nombreufe poftérité de la Princelfe; entr'autrcs le portrait de la Reine, avec ces mots s Similem reliquit fibi poft fe. Toute cette ponrpe funebre , fous les ordresdu Mardchal Duc de Richelieu, Gentilhomme de la chambre de fervice, a dtd conduite par M, de la Fcrté, Commiflaire général de la maifon du Roi, fur les deffins du Sr, Paris, deifinateur ordinaire de la chambre & du cabinet du Roi & membre de 1'Acaddmie d'architeéture. Les fujets des figures en reliëf avoient été exécutés par le Sieur Bocciardi, fculpteur desmenus plaifirs du Roi, d'après les deffins du Sieur du Rameau,. peintre de la chambre du Roi & adjoint - profefleur de 1'Académie royale de peinture.. 5 Juin 1781. II faut efpércr que la Demoifelle Thenard, dont le début brillant a la comédie francoife femble annoncer enfin la découverte d'une actrice en état de relevcr ce théatre & d'y rappeller les jours brillans des Dumesnil & des Clairon , mettra les acleurs bientót en état de jouer quelque nouveauté tragiquê;  n y a quelques années que la Dcmóifelle Thei aard avoit paru fur la même fcene, mais avec peu de fuccès. Cependant les connoiireurs en«woyoient déja fes lieureulès difpofitions: elle jtiftme aujourd'hui leur pronoftic. Trés bien par* tagée du cóté du phyfique, elle a d'ailleurs tous les moyens qui peuvent la condmre a la perfecüon, une taille agréable, une figure théatrale un organe noble, flatteur ■& fcnfible, de la cha' Icnr, de Ia raifon , une prononciation netter telles font les qualités qu'onlui remarque dan' ce moment, & qui ont entrainé les fuffrages des fpecbateurs, depuis qu'elle reparoit fur la fcene de la capitale. 5 Juin. Actuellement que la retraite de M Necker vraifemblablement mettra fin aux travak des artiftes lui élevant des trophées, on peut re! cueilhr toutes ces cftampes en fon honneur* on a deja parlé do la principale,, intitulée la Vertu recompenfée. La feconde eft fon Portrair trés bien fait: if eft dans 1'attitude d'un Penfeur, & fa phyfiono mc n'eft pomt exempte de la morgue & ie h dureté que lui reprochCnt fes détrafteurs A h droite eft une écritoire, & un livre manufcrit rdatif a fes opérations: a fa gauehe fon Se" une guirlande de fieurs eft t fes pieds & ^ con^'abondance3.cn^^ &SuSST?UBe a,Ic!gorie' i,o"rfo™ <** tontilpKe ail Compe rendu.. La Franco, a 1*  C 233 ) tête de fa Marine , appuyée d'une main fur le Compte rendu au Pvoi par M. Necker, tient de 1'autre une corne d'abondance , d'oü fortent des fruits & des édits de bienfaifance. Aux pieds de Ik France un Léopard couché fur une autre corne d'abondance renverfde, regarde un Coq qui le fixe avec fierté. Plus loin les écuries d'Augias. Dans le fond une troupe d'habitans dc la campagne pleins d'allégrcffe danfentautour de la ftatue de S. M. y pour tdmoigner la joie que leur caufent la haute fageife & la bonté du jeune & vcrtueux Monarque , conftammcnt occupé du bonheur dont il les fait jouir & de celui qu'il leur prdpare. Au bas on-Kt: que le nom de V. M. toujours chéri, ne foit proncncé que pour la confolation fcf pour Vefpêrance.... Compte rendu , folio 75. Au haut efl: cette ldgende tirde du même Compte,folio 19: ce tableau fatisfaifant n'eft: dé qu'a l'ordre que V. M. a mis dans fes affaires. La quatricme repréfente Thémis redemandant la Paix. Cette Ddelfe tient de la main droite une balance; dans un des plateaux font les Dépenfesr payées au Tréfor & dans 1'autre le Compte rendu au Rui, & celui-ci Femporte: de la gauche ci1c montre un Ecuffon, oü un Coq foule de. iès pattes le Ldopard renverfd & enchainé , ainfi; que 1'Envie, défignée par un ferpent. Le Pavillon Francois triomphe «& le Trident de Neptune devient 1'attribut de la volatile. Autqur da: FEcufion 011 fit ces deus vers:.  C 234 ) rPonr fon propre bonheur & le repos des mers, Puiffe-t-il s'adoucir, ou refter dans les fersl Minerve, au milieu de FEftampe, lui montre la Déefie de la Paix docile a fes defirs & portant dans fes mains une branche d'olivicr. Enfin on lit ces autres vers : Amis! quel Regne heureux! que de nouveaux bienfaits> Si pouvant a fon gré déployer fa jnfiice, Louis, tranquile au fein des tréfors de la Paix, N.avoit point a punir faudace & la malice. Bientót ils reviendront ces fortunés momens: Le Commerce, les Arts, la favante Induftrie, Tout, enfin, prouvera ce qu'a 1'aide du tems Produiront fans impóts 1'Ordre & 1'Economie. La cinquieme eft encore une Allegorie du Compte rendu. Elle eft trés compliquée. Louis XVI fur fon tröne recoit ce chef-d'ceuvre des: mains du Directeur général des finances, pofant un genou en terre. Henri IV du haut de FEmpyrée applaudit a fon petit-fils & lui montre le médaillon. Au deffus du Trónc du Roi on lit ces deus yers Latins: Sol geminas noftris partitür 'munera terris: Dividit Mc lumen, dividit alter opes. . Au bas on lit ce quatrain francois : Au bonheur de 1'Etat confacrant fes talens, ■ II va droit a fon but fans craindre les méchans \  C 235 } Comme un antre Sully, ce Miniftre fidele A Ia Poftérité fervira de mpdele. Autour font différens médaillons relatifs aux travaux de M. Necker, avec des devifes. La fixieme & derniere, eft'encore le Portrait de M. Necker au fujet du Compte rendu & biftorié en conféquence: il eft en Bufte, furmontant un Trophée élcvé fur le corps de 1'Envie renverfée: autour font épars les divers pamphlets contre les opérations. du Direéteur général des finances & contre fa perfonne, &c. 5 Juin 17S1. Extrait d'une Lettre de Laubach dans la Carniole , le 6 Avril. „ Nous „ venons dc voir rétablir dans cette capitale une „ Académie qui, par laps de tems , s'étoit j, éteinte, quoiqu'elle eüt eu de la réputatiou „ dans fes commencemens. Elle avoit été fon„ dée fous le titre de Glioperoji fous 1'Empereur Léopold L C'eft a la proteétion que Jofeph II „ accorde aux Lettres, & aux foins du Comte „ d'Edling, Chambellan & Confeiller provin„ cial, que nous devons 1'heureufe reftauration „ de cet ancien Corps Littéraire. Le 5 de ce mois il a tenu la première aflemblée , préfi„ dée par le Comte d'Edling. On y remarqua „ furtout un difcours Allemand d'un jeune hom,, me agé de 23 ans , nommé Zinhard, déja „ connu par des ouvrages qui ont eu du fuc„ cès & qui ont fait concevoir de grandes ef„ pérances de fes talens. Le jeune orateur S5 obferva qu'il ne pouvoit y avoir une époqu-3  ( 236 ) sj plus propre au rétabliflement d'un corps acn»'1 démique: nous avons, dit-il, toute liberté'de 3, pen/er, puifque Jvfeph eft fur le Trene. Elo,, ge d'autant plus frappant, qu'il étoit une fa„• tyre indirecte du regne de Marie- Therefe re„ lativement & cette partie. 6 Juin 1781. Extrait d'une Lettre de Dijon du 25 Mai. „ Le 12 de ce mois on a répe'té t: en préfence de S.< A. S. Monlèigneur le Prin„ ce de Condé &de tous les membres des Etats „ alfemblés , dont la tenue avoit lieu alors , „ 1'cxpérience déja tentée ï Paris en 1777 d'u„ ne maifon inconbuftible. Cet édifice, quoi,-, qu'entierement conftruit en bois, a réfifté „ a 1'action du feu le plus violent & le fuccès „ de cet elfai, beaucoup plus complet que ce- lui de la capitale ,• a été tel, qu'une partie de „ la maifon n'ayant été akérée, on auroit pu „ le répéter le lendemain fans aucune répara„ tion, avec 1'efpoir de la même réuffite. „ J'ignore fi les procédés de cette expérience font les mêmes que ceux employés par 1'ar„ tifte étranger. L'auteur de celle-ci eft M, „. Chauflier , membre de 1'Académie de cette : „ ville: il a lu le précis du fait a Faflcmblée: publique de fa Compagnie & fe propofe d'enj ,, publier inceffamment le3 détails." 7 Juin. Extrait d'une Lettre de Strasbourg du 30 Mai 1781. „ Le fouvenir du fameux,TBorri, Milanoïs, cbymifte, alcbymifte, adcp-- te * ece*. qui palfa par cette ville dans - lc iioclss  < 237 ) „ dernier., «Mtoit pas encore cffacé de Ia mé„ moiré de nos vieillards, lorfqu'une beureufe ,,.mfluence nous envoya M. le Comte de Cal„ Jiolfea. On prétend qu'il a aoo ans révolu's „ & fon poraait trés reffemblant fe voit tou? |, jours a Médine & chez Ie Grand Seigneur, oü „ il eft repréfenté fous 1'habit Oriental. On en ^ voit auffi une copie a Londres chez Milord 6, Pembrock. „ Cet ..être fmgulier & extraordinaire ne fe p couche jamais que dans un fauteuil, ne fait s> qu'un repas avec des macaroni au fromagc. „ H eft anti-médecin, anti-chymifte d'Europe; „ il y apporte la véritable chymie, qui eft Cel! „ le des anciens Ejrvptiens - ainfi mip u„r „ deerne, & il propofe de fournir 50,000 écüs „ pour fonder un hópital Egyptien, oü fe fbrh mci'G]" ks éleves; & a cet effet il eft prêt a |j facrifier un ou deux de fes diamans. „ Les malades abondent de toutes uarts dan* „ «.-^ w^1Ltlic. 11 1It; communiqué pomt avec ,» ies gens de I art, qm lui rendent le réciproque & le déteftent. Ceux-ci triomphent du , mauvais fuccés du Marquis de Cambis; ils , ptiblicnt avec oftentation le traitement fait , par rempirique de ce Seigneur , jour par , jour, depuis le 9 Avril jufques au 1 Mai, oü , M. le Marquis de Cambis a appellé les vrais , médecins. ■p Le traitement externe qu'employoit M. de , Calhoftro, fuivant ce jourml, reflemble beau-  „ coup-& même complétement, ft celui que pra* tiquoit, il y a quelque tems, mi Thaumaturge, qui paffa a Lyon, ft Grenoble, avec une voiture ft fix chevaux, & qui avoit tics J? montrcs fervant de boutons ft les habits. Ses „ rcmedes n'curent point de fuccès. On eu a' , vu un autre qui avoit une montre ft répéti„ tion dans une canne achetée en Prüfle , & ,, dont la femme avoit des montres ft carillon i „ dans des rofettes qu'elle portoit ft fes oreilles., „ Ces pedis acceïïbires ne laiifent pas quelque-. „ fois que d'en impofer, & ajoutent infiniment: „ au mérite des guérilfeurs, dont les plus fa-me'ux, en général, nous vicnnent de 1'Italie,, „ le centre du merveilleux , tant au pbyfique: „ qu'au moral" . ... 7 Juin 1781. Ce qui fiifpend un peu les rat grets des Parifiens, c'eft 1'idée oü ils font que ne: pouvant fe pafler de M. Necker, il eft toujoursi derrière le rideau & que M. de Fleury a la complaifance d'être fon agent. Une vilite que celui-ci a faite a St. Ouen, a donné lieu a cette merveilleufe idée. Comme M. de Fleury, ft cé< qu'ön affure, a demandé pour adjoint le Srr Marquet de Bourgarde, grand vivrier, eïtimé'J dit-on, du Directeur général des finances, on fai confkme dans cette opinion. Ceux qui connoifi fent le caraétere du Confeiller d'Etat & celui dut Genevois, n'en croient rien; mais en même tem$: ils regardent le premier comme alfez fin pouó accréditer cette opinion & Fa voir répanduc. ■  C *39 ) S Juin. Par la révoluüon arrivée en France dans la mufique depuis quelques années, le depót immenfe des ouvrages qui enrichilfoient le magafin de I'opéra devient nul. II s'agit donc de le renouveller & d'en fbrmer un autre: en conféquence, on a augmenté les encouragemcns des auteurs lyriques. Déja par un lléglement du 30 Mars 1,7.76, S. M. accordoit, foit au poëte, foit au muficien, ayant compofé un ouvrage qui remplira la durée du Spectacle, 200 livres pour chacune des vingt premières rcpréfentations, 150 livres pour chacune des dix fuivantes, & 100 livres pour chacune des autres, jufques & compris la quarantieme, & dans le cas oü le nombre des rcpréfentations cxcéderoit fans interruption celui de quarante, une gratification de 500 livres doit être la récompenfe de ce fuccès. A 1'égard des ouvrages en un acte, les honoraires, fuivant le même lléglement, feront toujours pour chacün des auteurs, de 80 livres pour chacune des vingt premières repréfentations, de 60 livres pour chacune des dix fuivantes & enfin de 50 livres pour chacune des autres qui fe feront, auffi fans interruption, jufqu'a la quarantieme inclulivement. Entend néanmoins S. M. que l'adminiitration ait la faculté d'interrompre les repréfentations de chaque ouvrage , quand elle le jugera a propos. L'éditiomdu poëme, qui auparavant appartenoit a 1'Académie, appartiendra a 1'auteur,pour  C 240 5 ïa première mife au théatre feulement, h Ia charge par lui de fournir gratis 500 exemplaires a ÜAdininiftration pour les diftributions ordinaires, & de fe fervir de 1'imprimeur de 1'Académie, ainfi que des diftributeurs. Par un autre Article, S. M. veut que les auteurs du poëme & de Ia mufique, qui auront fourni trois grands ouvrages, dont le fuccès aura été affez décidé pour les faire remettre au Théatre, jouiffent leur vie durant, d'une penfion de 1000 livres, qui augmentera de 500 livres pour les deux ouvrages fuivans & de 1000 livres pour Ie fixicme. Par un Supplément fait k ce Pvéglement le 18 Avril dernier & qui n'eft connu que depuis peu, Partiele 18 porte: „ Sa Majefté defirant encou' „ rager de plus en plus les auteurs lyriques & „ les compofiteurs de mufique & leur donner „ des marqués de la protcction qu'elle leur ac„ cordera dans tous les tems, veut qu'indépen„ damment des honoraires qui leur ont été ac„ cordés particulieremeut par les articles 19 & „ 20 de 1'Arrét du Confeil d'Etat du Roi portam „ Réglement pour 1'Académie Royale de Mufi„ que du 30 Mars 1776, a commencer du pre„ mier Mai prochain, trois Aétes féparés qui „ auront eu un fuccès décidé, feront comptés „ pour un grand ouvrage, relativement a la „ penfion a obtcnir après trois grands ouvra„ ges,dont le fuccès aura été affez décidé pour „ les laire refter au théatre. De plus S M ac-  C Hl ) „ accorde aux auteurs pour les trois grands„ opéra nouveaux qu'ils donneront, ft compter „ du i Mai prochain, fans que cela puilfe avoir ,, un effet retroaclif pour ceux déja joués, une. rétribution de 60 livres toute leur viedtirant, „ ft toutes les repréfentations qui en feroient „ données, palfé le nombre fixé, & 20 livres de même pour ceux en un acte." 8 Juin 1781. Ce n'eft pas comme adjoint que M. de Fleury a demandé M. de Bourgade , mais pour en faire un Directeur du Tréfor Royal, ft Finftar de M. Necker du tems de M. Taboureau, avec la différence que M. de Bourgade fera totalement fous les ordres du nouveau Miniftre des finances & ne travaillcra qu'avec lui. On croit que 1'objet de M. de Fleury eft de confier a ce collaborateur la fuite des opérations des finances entrcprifes par le Directeur général. Du refte,M. de Fleury eft eflectivcment entré au Confeil le lundi 4 de ce mois. 8 Juin. Lors de la fuppreflion du plomb & du cuivre dans les ufages publics intérieurs, on propofa d'y fubftittier 1'étain , le Gouvernement, avant de 1'adopter, lailfa la fubftitution indécife dans la Déclaratión rendue ft cet effet & H propofa ft la fagacité des chymiftes cette queftion : peut-on, Jans aucun danger, employe'r la vaijfeaux d'étain dans l'ufage êconom'que ? Margraaf avoit avancé que 1'étain contenoit de Farfenic. Eu conféquence du defir du Miniftere, M. ié Tem Xni. L  C *4* ) Lieutenant général de Police chargea le college de pharmacie de détcrminerle degré de'cónfian-, ce que méritoic cette fubftance métallique. MM.. Rouclle, Bayen & Charlard firent des expériences trés précifes, que le premier n'a pu fuivre étant mort. II réfulte de celles des autres, que 1'arfenic contenu dans 1'étain eft un infiniment. petit, qu'on peut, quant aux effets, réputer. zéro. La précifion des nouvelles expériences tt cet égard eft telle, que M. Bayen eft parvenu a retrouver jufques a un deux mille trois eens quairieme de grain d'arfenic allié avec de 1'étain. 9 Juin 1781. Hier au foir environ un quartd'heure après que tout le monde a été forti de I'opéra, le feu s'eft manifefté dans la Salie &en dehors, au point qu'en peu de tems tout a été incendié & il n'eft refté que les gros murs. Le feu, fans s'étendre, duroit encore cc matin dans les fouterreins. Le Palais royal heureufement nej s'eft pas reffenti de ce funefte voifinage. On a retrouvé onze cadaves trop défigurés pour lesrevonnoitre & que -M. le Lieutenant général de police a fait tranfportcr a la Morguc: on préfume que ce font des acteurs, ou danfeurs , ou ouvriers, qui étoient encore dans leurs loges, ou fur le théfttre , ou aux machines. Entre. les plus eélebres on n'eft inquiet que du Sieur; Cardel le Cadet. On a trouvé aufli un homme aflez bien vêtu J ayant deux montres & des bijoux, qui n'a poinfj été brülé, mais étouffé par la fuméc, fuivanij • les apparenc.es.  C 243 ) On ïgnore comment Ie feu a pris; on prcTume que c'eft un fimulacrc du troifieme acte repréfentant lc feu des eufers, dont des flammeches, voltigeant jufqu'au comblc, y auront en-, tretenu un feufourd,quiauraéclatéau bout d'un certain tems avec violence & aura tout embrafé. 9 Juin. Le Concert Spirituel du jour de Ia Pentecóte n'a point eu le fuccès ordinaire. Le feul virtuofe qu'on y ait admiré eft M. Groll', violon de S. A. R. Mgr. le Prince de Pniffc Peu jaloux de 1'efpece d'admiration qu'excite la difriculté féchement vaincue, aux tours de force des modernes il a joint l'agrément des anciens, leur belle fimplicité, & il a excité les plus grands applaudilfemens par le naturel , le lini & la juftelfe de fon jeu. II eft bien a foubaiter qu'il nous vienne beaucoup de virtuofes de cette efpece, pour fuppléer par des concerts a la ceffation de I'opéra, qui ne peut étre que longue, & entretenir panni nos artiltes & amateurs Ie goüt de la vraie & bonne mufique. 9 Juin, M. Hallé, Chevalier de 1'Ordre du Roi, Reéteur de 1'Académie royale de Peinture & de Sculpture, vient de mourir. II étoit mort aux arts depuis longtems & 1'on a pu iueer nnr les derniers Sallons que fes mains languilfiuites ne pouvoient plus manier le pinceau avec au- ■ cune forte de fuccès. 9 Juin. M. 1'abbé D.... defirant glaner dans les ocuvres de Voltaire avant que la grande édition paroiffc, oü toutes doivent être épuifées L a  C 244 ) s'eft haté de publier Lettres de M. de Voltaire a, M. Vabbè MouJJinot, fon Tréforler, écrites depuis 1736 jufques en 1742, pendant fa retraite a Cirey, chez Madame la Marquife du CMtelet, & dans lefquelles on voit quelques détails de fa fortune, de fes bienfaits ; quelles furent alors fes études, fes querelles avec 1'abbé Desfontaines, &c. Le plus curieux de ce recueil c'eft de trouver fabbé Mouftinot Janfenifte, correfpondant de Voltaire. Du refte, on y apprend que ce grand homme, accufé d'avarice, répandoit cependant de petits bienfaits fur de jeunes Littérateurs, non fans deflein & dans 1'efpoir de s'en faire des próneurs, des créatures, des efpions; en quoi il ne réuffilfoit pas toujours. On y apprend qu'il s'occupoit principalement de phyfique a cette époque, qu'il avoit déja du goüt pour la retraite. A quelques paftages prés, alfez plaifans, toute cette corrcfpondance n'étoit pas digne de voir le jour. Cependant 1'éditeur la juge d'une fi grande importance, qu'il promet de dépofer les originaux a la Bibliotheque du Roi. Ce dont le difpenferoieutbien , ainü que de cette publieke', plufieurs perfonnes actuellement vivantes & compromifes par ces Lettres, qui diyulguent leurs affaires. 10 Juin 1781. C'eft dans Féglife de St. Ho noré qu'on fait tranfporter les cadavres que 1'on retrouve dans les décombres de I'opéra, dont le feu fe nourrit toujours des reftes qu'il confume.  C 245 ) M. k Pfevót des Marchands, M. le LkutertanÉ général de Police y font encore; ce dernier y occupe onze Commiffiaires & tout fe paffe avec ld plus grand z>rdre, M. le Duc de Chartres a veillé lui-même a ce qui le concernoit. Du refte, tout 1'intérieur de ia Salie eftenef* fet confumé, mais a peine s'en appercoit - on du cóté de la rue St. Plonoré dont la facade fubfifte, Ce feu formoit un fpectacle horrible; & dans les rues adjacentes & même un peu éloignées c'étoit une pluk d'étincelles, pendant plufieurs heures. Dans les premiers momens 011 le peuple n'étok pas indruk de la caufe, il croyoitque c'étoient les étoiles quife détachoient du firmament. Le plus extraordinaire, c'eft qu'il pafte pour conftant qu'il n'y avoit pas une goutte d'eau dans le réfervoir de I'opéra, & que fi 1'on avoit pu jetter fur le champ quelques feeaux d'eau, on auroit préventi cette cataftrophc & 1'incendie n'auroit été rien. 10 Juin. Uneperfonne inconnue, qu'on affure aujourd'hui être M. Necker, ayant confulté le Curé de Saint Roch, paroifie fur laquelle elleréfide,relativement a une bonne oeuvre qu'elle defire faire utile a la fociété, eft conventie avec ce Pafteur de placer folidement un capital de 100,000 livres,exempt de toute retenuc,pour maner annuellement cinq filles de la paroifib pauvres, mais vertueufes, laborieufes, irréprochables & fans tache depuis leur naiflance. L'examen des filles doit être fait par le Curé L 3  ( 246 ) k choifir depuis 17 ans jufques k 25: Ie même examen eft exigé pour les garcons , depuis 25 jufques a 35 ans, fans qu'on foit obligé de les prendre dans la paroifie. La condition efl'entielle & indifpenfable eft qu'ils foient artifans, connus par leur induftrie, leur conduite & leur probité. II y a tous les ans 5000 livres applicables a cet objet; c'eft- k-dire 1000 livres a donner en dot a chacune des cinq filles choifies. Ces fommes confiées aux foins du Pafteur doivent s'employer k payer la maltrife de chaque mari, k fournir tout ce qui eft néceffaire ft chaque ménage particulier ; le furplus eft deftiné a acheter des marchandifes relativesa la profeffion de chaque garcon. L'époque de ces mariages ayant été fixée entre Piqués & la Pentecötc, la première célébrai tion a eu lieu le 17 Mai avec une pompe digne d'une inftitution auffi refpeétable. Deux des marguilliers qui avoient préfenté fi 1'églife les cinq époufes, ont tenu un p'oële commun aux dix conjoints, qui, après la cérémonie, conduits a la fabrique, y ont trouvé, ainfi que leurs procbes parens,un repas convenable a leur état, 11 Juin 1781. Les partifans de M. Necker, qui tant qu'il a été en place étoient reftés dans la modération & n'avoient rien répondu aux injures dc fes ennemis, font furieux depuis fon expulfion +■ ne fe contiennent plus, fe permettent contre M. de Maurcpas les invecfives les plus atroces & ofent même reprochcr au Roi de n'avoir point imité dans cette occafion  C 247 ) le bon Roi qu'il a pris pour modele. Void ton quatraia dans ce genre qui fait Ie plus de bruit: Monftre , qui n'as que trop vieiiïi, Triomphe ! l'Anglois va nous battre: On juge au renvoi de Sulry Que nous n'avons plus d'Henri Quatre. 11 Juin. Les befoiris de 1'Etat ont fait frna* g'mer un tribut fur plufieurs fortes d'actes & de transaétions entre particulicrs; tels que les contrats de mariage, les tcftamens , les contrats de fociété, les acquifitions d'irameubles & une infinité d'autres. Le génie fifcal a fait fuccéder dans la levée de cet inrpöt les tarifs, les explications , les diftindions, les exceptions , & le code du controle & de rinfinuaticii des acles' s'eft tellement accru & diverfifié, qu'il eft devenu un dédalc, oü s'enveloppe néceflhiremcnt & s'égare le contribuable de bonne foi & même le prépofé de la ferme. M. Necker a jugé efientiel de s'occuper d'un tarif nouveau & général, oü 1'on chercheroit a létablir une proportion plus jufte entre les aftes qui concernent les riches & ceux qui intércflent les pauvres & oü furtout toutes les diftindions entre les diverfes clalfes de la fociété & ja nature des ades fuffent plus fimplcs & plus fenfibles, de maniere que chaque contribuable put facilement être inftruit de fon obligation. Ltn fiomme expérimenté avoit commence d travail L 4  C 24S > depuis nombre d'années; il 1'avoit montré a M; le Directeur, qui 1'avoit approuvé en Fexhortant a le continuer. Ce travail extrêmement long & difficile eft achevé: M. Necker 1'avoit reou & confié a des Magiftrats du Confeil pour 1'examijaer; il eft a préfumer que M. de Fleury fuivra les idéés trés louables a cet égard de fon prédécefleur & 1'on s'attend a une loi nouvelle fur cette matiere importante. 11 Juin 1781. Extrait d'une Lettre de Lyon du 3 Juin. „ M. le Vifte de Briandes, chanoi„ ne, chantre de 1'églife collégiale de Sr. Paul de Lyon, vient de fonder dans fon Prieuré dé Saint Symphorien d'Ozon un Prix de fageffe, qui fera donné tous les deux ans , le „ premier dimanche de Mai, a la fille la plus }, vertueufe & Ia plus pauvre du lieu. Ce prix 2, confifte dans une fomme de 360 livres, dont „ le capital eft hypotbéqué fur les biens du „ patrimoine du fondateur, & une couronné 3, de rofes. „ La première qui pour ce Prix a réuni pref„ qué tous les fuffrages , fe nomme Fleurie Drevon. Le6Mai, jour de fon triomphe, ayant pour cortege toute la nobleffe du lieu „ & des environs , une compagnie de jeunes „ gens qui avoient pris les armes, les douze „ compagnes qu'elle avoit pr-iées, les parens & „ les juges qui 1'avoient élue Rofiere, elle fut j, conduite a 1'églife au fon d'une excellente fymrmonie & atix acclamations de tous les „ fpcc-  C 249 ) J5 fpeclateurs. Entre les vépres & Ie fa-hit „ elle reent la couronné des mains dn Curé, qui „ prononca un difcours trés attendriflant: en„ fuite collaiion, mufique, couplets, ballet, 3, falves d'artillerie villageoife , &c." 12 Juin. Dans la Lettre du Marquis de Caraccioli, il eft parlé des démarches du Marquis dc Caftries auprès de la Reine , du zele avec let quel il a défendu M. Necker , fon ami & foa proteéleur a la cour, il a engagé cette Majclté a le foutenir dans 1'efprit du Roi. Quelqu'un a profité de cette anecdote pour compofer un Difcours au Roi, préfenté d la Reine par M. le Marquis de Caftries & lc répandre manufcrit comme véritablement émané de ce Miniftre. C'eft une feuillc, oü 1'on peint d'abord la confternation générale de la France a la première nouvelle du renvoi dc M. Necker, oü 1'on demande quel eft le fujet de fa difgrace, comment il a pu déplaire au Monarque , quels font fes crimes ? Après avoir rappellé a S. M. les heureux commencemens de fon regne,. on exalte fon courage a vaiucre les obftacles qu'offroit naturellement le premier choix, d'un homme de néant, d'un étranger, d'un Proteftant, pour régir les finances de la France. On décrit rapidement le tableau des profpérités de ce Royaumemalgré la guerre, depuis qu'il les gouverneron eu prophétifc 1'état plus brillant encore a la Paix; on gémit que tout cela fe foit évanouï avec M. Ie Directeur général, & 1'on exhorte le Monarque L 5  ( 250 ) & fê rendre aux follicitations de fon augufte corapagne, qu'on fuppofe intercéder pour 1'expulfé, & au vceu unanime de tous les honnêtes gens de la nation. En lifant ce bavardage , oü 1'on repréfente M. Necker, les yeaxfixés fur S. M. comme l'aigle fur le foleil, on ne peut le regardcr que comme le travail d'un rbéteur & 1'on eft parfaitement convaincu que le Marquis de Caftries n'a pü avoir parlé ainfi. 13 Juin 1781. M. Necker, comme on 1'avoit prévu, rongé de chagrin de fe voirarrété au milieu de la carrière oü 1'avoit fait entrer fon ambition, vient enfin de tomber malade; on juge qu'il 1'eft gravement,puifque leDoétetir Tronchin ne pout vant 1'aller voir a St. Oucn auffi fréquemment que 1'exige fon état , 1'a déterminé a venir a Paris. Comme il n'a pas de logement arrêté en ce moment, fon ancien ami M. Fournicr, qu'il avoit négligé durant fes projets de grandeur,, lui a offert un afyle & 1'a recu. On prétend que M. Tronchin , , vu la caufe de 1'état facheux de M. Necker, craint qu'il n'yfuccombe, ü moins qu'on ne vienne & bout de lui infpirer plus dc réfignation , plus de ealme & de repos dans 1'imagination. 13 Juin. Extrait d'une Lettre de Lyon dii 8 Juin. ,, Nous avons perdu depuis quelque ,, tems M. Bordes, Académicien de cette ville.' 11 étoit peu connu en Littérature, paree qu'il étoit fort modefte, que la louange l'iroportUf>  C 251 ) „ noit & qu'il n'avoit pas dc proneurs. II a. „ d'aillcurs pen imprimö: il ofa eutrer en licé „ contre Jean-Jacques Roufleau & a fait deux „ difcours pour refutcrles paradoxes de ce grand „ homme, lefquels pourroient figtirer avec hon„ neur a cóté des ceuvres de celui-ci. „ II a fait des poéfies légeres,dont quelqucs„ unes ont été attribuées a Voltaire; entr'auj, tres la jolie Epitre au Papefur les Caftrats. „ On a auffi de lui une trés belle Ode fur la Guer„ re,oü il eft tout a la fois poëte & philofophe. „ 11 a encore compofé de trés jolics comédies, „ du moins elles font réputées telles par ceux „ qui les .ont lues. Elles ne font point impri„ méés; mais on efpere qu'elles ne tarderont „ pas de 1'être. „ Une qualité trés rare dans M. Bordes, c'eft „ qu'il ne parloit jamais de lui dans fes ceuvres. 13 Juin. On confirme que 1'incendie de I'opéra n'a fait autant de progrès que paree qü'i| n'y avoit point d'eau & que les fecours ont été trop leuts. Le Roi lui-même, lorfque M. Amelot vint lui annoncer le vendredi foira onze heures cette fdcheufe catafirophe, fit cette judicieufe obfervatiou & le Miniftre rendit a S. M.. les exculès qu'on lui avoit données. Quoi qu'il en foit, comme c'eft toujours après le mal qu'on fonge au remede, on doit demain exécuter ït la Comédie Italienne la manceuvre d'une pompe qu'on regarde comme infailiible en parcil cas. Ce .Speclacle étant placé dans le quartier le plus L 6  ( £52 3 peuplé de Paris & oü les rues fort étroites ofïrent plus d'aliment & de facilité aux Hammes, en 1772 on imagina cet établiflèment. Jufqu'a pré* fênt on n'en a pas eu befóiu heureufement. C'eft ce fimulacre qui aura lieu demain en préfence de M. le Lieutenant général' de Police, de M. le Prevót des Marchands & de M. Ie Comte d'Angiviller. La pompe dont il s'agit, rire de Peau d'un vafte réfervoir pratïqué fous te corps de garde deIa rue Mauconfeil & qui agit intérieurement & extérieurement au premier coup de fonnette,par lequel font avertis plufieurs faétionnaires durant le fpeclacle; de maniere qu'en moins d'une mlnutc Peau peu fe diriger dans tous les endroits du théatre de la Salie, & inonder en même tema tout rextérieur» C'eft par les ordres de M. dè Sartine qu'a été exécuté cette belle machine: elle a été depuis entretenue journeltement par les fóins de M. Morat, Direéteur des pompes. II- y a tous les jours de fpectacle un nombre fixe de foldats du régiment de gardes pour la manoeuvre. 14 Juin 1781- En attendant qu'on puiffe reconltruire une autre Salie d'opéra, on en doit établir une dans le goüt des Salles foraines, qur fera élevée en peu de tems, & jufques-lfi on exécutera dès Concerts francois , comme ou a fair en 1763 8. la Salie du Concert fpirituel. Le premier doit avoir lieu mardL C'eft aux dtqpcns du Koi que doivent le con*-  c m 5 flruïre les divers édifices. En outre, S. M.-es* tretient tous les fujets fur le pied oü ils dtoient & indemnife les propridtaires des Loges a fannee , quine pcuvent ainfi jouwde leur abonnement. 14 Juin. Madame Teluflbn a quarantc-deux ans ayant voulu fe faire inoculer , vient de fuceomber au traitement par une maladie de femme qui lui eft furvenue & mortelle en pareille circonftance. On allure qne M. Tronebin rdpugnoit a la fatisfaire ; e'eft cependant lui qui s'en eft chargd. On ne fait ce que va devenir le fingulier ddilïce eonftruit pour loger cette Dame; il ne peut convenir aujourd'hui a fes enfans & ils auront peine a s'en ddfaire , même avec la plus grande perte. 14 Juin. Dans le Compte rendu de M. Necker on lit a Farticle de Main-mor te: „plufieurs .Seigneurs ont affranchi leurs ferfs, a 1'imita„ tion de V. M.; & dans ce mement le Chapi. „ tre de Saint Claude répondant d vos intenti,, cns, va rendre la liberté d fes mains - mortaj, bles, moyennant un léger eens, pareil d celui fixé dans vos Domaines. " Les Chanoines de Saint Claude réclament contre cette aflertio». II eft bien vrai que M. Necker les a fait folliciterfortement a cet égard; mais ils ne font point difpofds ft perdre 2.5000 livres de rentes qu'il faudroit facrifier, a moins que S. M. ne les dédommage, & ils le lui ont ddclard. 11 eft bien vrai qu'un de leurs memfcres qui eft ici, pour faire fa cour au Directeua? L 7  C 254 ) général des finances, lui a dit qu'il fe faifoit fort de fes confrères; mais le Chapitre 1'a défavoué. L'oftentation avec laquelle 1'auteur s'eft permis .ce petit menfonge, annonce peu dc délicatefie furce qu'il avance, & fait en conféquence révoquer en doute fa véracité fur d'autres points-, 15 Juin 3781. Le fimulacre projetté a la Comédie Italienne a eu lieu en effet hier. L'expérience a parfaitement réufli.& il n'y a eu que 22 fecondes d'intcrvalle entre le moment du fignal & celui de 1'effet. Tous les fpectateurs ont été enchantés de la précifion de la machine. 15 Juin. A la fin du dender Ballet tfOrphée, qui eft fort long, un des chefs de la dqnfe s'étant appercu que Ie feu étoit a' une toile , eüt la préfence d'efprit de finir tout-a-coup la danfc & faire baifter la toile pour ne point effrayer le public, qui trouva le Ballet trop court & ent ainfi le tems de fortir fans obftacle & fans dér fordre. Cette toile enflammée eft une de celles qu'on appelle Fri/es: on demanda de 1'eau ; il n'y en avoit pas: on cria de couper les cordes auxqüelles la toile étoit fufpendue; on ne le fit que d'un cóté; la toile penclrant alors perpendiculairement, donna plus d'aliment i la ilammc j qui embrafant la toile du fond, parvint bientót au ceintre, fe communiqua a toutes les frifes: en moins de deux minutes le théatre fut embrafé. Tout fecours devint alors inutile & les fpeétateurs repouffés par la fumée chercherent leur falut dans la fuite, Lc feu gagua toute 14  ( 255 > Salie: a une vapeur noire & épaiffe fuecéda ure colonne de feu h plus de trois eens pieds. La charpénte de 1'édince ne s'affailfa que vers ks neuf heures & demie. Par bonheur il pleuvoit; k vent conftamment auSud-Eft & au Sud-Oueffc étoit trés foible; enforte que , quoique le feu ait pris a différentes reprifes au comble des batimens de la cour des fontaincs, & a ceux du grand efcalier, les pompiers font toujours parvenus a 1'étcindre. Tel a été le fort de la nouvelle Salie,qui n'a duré que onze ans. On jouoit dans 1'ancienne } brülée en 1763, depuis 1660. On a fait deux enterremens descadavres trouvés dans les décombres,l'tin de douze & 1'autre de neuf. Lc Sieur Gardel dont on a été inquict fe porte bien; c'efl un nom approcbant du lien qui a donné lieu ;\ la méprife. Le feu brüloit encore ce matindans les fonds; mais fans pouvoir gagner ailleurs. Les Builes de Rameau & de Quinault, qui étöient dans le grand foyer, font tombés & ont cté brifés : il n'eft refté debout que ceux de Lully & de Gluck. 16 Juin. Les amateurs de méchanique vont voir une Pendule Aftronomique tout a jour, exécutée par le Sieur Boucher , horlogcr du Roi. Elle a quinze pieds de haut fur dix de large.^ avec focle de marbre, pour être plaeée fur une cheminée ou fur une commode. Elle fonne les heures & les quarts; elle préfente fix cadrans de  C 256 > face, & trois cercles tournans. Le premier cadeau indique les heures, les mi» mites,le tems vrai & le tems moyen;lefecond, les mois; le troifieme, les phafes & le quantieme de la lunè ; le quatrieme, le lever & le cou» cher du foleil; le cinquieme, les jours de la femaine & les fignes aftronomiques de chaque jour, & le fixieme, k quantieme da mois. Le premier cerele marqué les fignes du zodiaque; ledeuxieme les faifons;&letroifieme les années» Le mouvement fe remonte de lui-même toutes les quinze fecondes; la verge de la lentille eft compofée pour corriger les inégalkes du chaud & du froid. 16 Juin 1781. Les vrais amis de la gloire de Voltaire font furieux de la publicité donnée par 1'abbé Duverney aux Lettres éerkes par ce graml homme au chanoine de Saint Merri; a qui, fifivant 1'éditeur, le Chapitre avoit conlié fa caifte , les Janfeniftes la leur, & Voltaire la fienne. Ils favent que quinze jours avant fa mort celui - ci avoit prié 1'abbé de brüler ces paperajjes, de peur qu'on ne l'y uit trop en laid ou trop en négligé; on vous y verra tel que vous avez été," lui répondit 1'éditeur. Eft-ce fincerement & réellement dans 1'idée que ces Lettres feroient honneur ft la mémoire de fon protecleur qu'il les a publiées ? Les partiflms du défunt ne peuvent le croire & jugent qu'a 1'exception de la quarantedeuxieme, de celles a M. de la Condamine & de trois ou quatre autres déja connues, dont ou  ( 257 > a grofïï ce recueil, tout le rèfte méritoit la con.damnation prononcée par 1'auteur lui-même.- iö Juin. M. Valdec de Leffart, Maitre des Requétes, étoit le bras droit de M. Necker, furtout relativement a la partie contentieufe des fermes, dont il étoit chargé de rapporter les affaires. II eft remplacé dans ces fonctions par M. de Villcvault. 17 Juin. Extrait d'une Lettre de Luxembourg du 5 Juin. „ Au moment oü 1'on s'y at„ tendoit le moins, 1'Empereiir eft venu ici le „ jeudi 31 Mai a deux heures après-midi. U „ n'avoit pas été reconnu n la porte, & il fut „ quelque tems dans la ville qu'on ignoroit fon „ arrivée. 11 n'avoit avec lui que le Comte de „ Tercy & quelques domeftiques: il venoit de „ Manheim, il alla droit a 1'auberge & remer„ cia 1'Abbé de Saint Maximin qui vint le len„ demain matin lui offrir un logement. Pendant „ fon féjour ici, il s'eft occupé alternativement „ a vifiterlesfortifications, & a faire manceu,, yrer les troupes. De retour k fon auberge „ il reccvoit les perfonnes de tout rang qui %e„ noientlui préfenter des placets, ou avoient „ quelque chofe a lui communiqués „ Le jour de la Pentecóte il a aftifté k Ia „ grand'meffe de paroiffe. On lui avoit prépa„ ré un fauteuil qu'il refufa, & il fe placa dans i;, un banc parmi le peuple, ne portant fur lii „ aucune marqué de diftinclion. i ?» Le luudi de la Pentecóte il fertit de fon aj>  C £58 ) ti partement a quatre heures moins un quart: iï recut quelques placets qu'il lit irettre dans fa „ voiture & fe rendit enfuite a 1'églife d.s Re„ collets , oü il entendit la mede, toujours con,, fondu dans la foule, comme un fnnple parti„ culier, &v£tudemême d'un fnnple drap gris avec des culottes de peau. „ Au fortir de 1'églife il revint a fon auberge, ,:, devant laquelle il trouva fa voiture préparée „ pour fon départ: avant d'y monter il fe tour,, na vers le peuple, en demandant fi perfonne „ n'avoit rien a lui dire ? Etant dans fa voiture, „ qui eft ouverte par-devant& qu'on appelle un „ charriot de Hongrie, il la fit avancer a petit „ pas, tant qu'il fut dans Luxembourg , fe tenant druk, le chapeau $i la main,& faluant „ a droite & a gauche, jufqu'a ce qu'il füt a la porte de la ville." 17 Juin 1781. Comme dans les catlavres trouvés dans les décombrcs de I'opéra, il en efl: plufieurs dc danfeurs, morts cc qui s'appelle in fiagranti delitïo, M. FArchcvêque auroit defiré qu'on les eüt privés de la fépulture Chrétieune; mais le Curé de Saint Euftache a prévenu le Prélat a cet égard: enforte que les cadavres étoient inhumés lorfque les défenfes font venues. 17 Juin. Le Séminaire de Saint Lazare eft devenu depuis quelque tems 1'afyle des pécheurs & des gens de Lettres pénitens , qui vont y faire des retraites. On a déja parlé de 1'Abbé de Boulogne , qui y réfide pour complaire a jNL  C *59 ) i'Archevêque: ce jeune & fervent eccléfiafiique ne veut pas en fortir qu'il n'ait compofé- fon Eloge de Bojfuet, fon Sermon de la Céne, qu'il doit prêcher devant le Roi en 1782, enfin un Carême en tier. M. 1'Abbé de Launay, grand fou, ne manquant pas d'un certain talent, mais faifant des vers rifibles, y eft allé, y a édifié toute la maifon & a compofé deux Odes, 1'une fur Dieu cc 1'autre en l'honneur da Saint Vincent de Paul, le fondateur des Lazariftes; ouvrage dont ces Meffieurs ont été enchantés: ils ont rendu ;\ M. I'Archevêque les meilleurs témoignages de 1'Abbé, &lePrélat qui étoit prévenu contre lui, le goüte aujourd'hui & veut lui faire du bien» On y a vu depuis peu encore, outre M« de Boulogne, 1'Abbé Mignot, neveu de Voltaire, &l?Abbé de Lille. L'anecdote de celui-ci eft curieufe. " II fe promenoit ce printems a Marly, durant le voyage de la cour; on le montre a la Reine, on en parle a S. M. comme d'un grand poëte digne de fon admiration; ou lui donne le deftr de 1'entendre: elle ordonné qu'on le lui amene & 1'invite a lire fon fameux poëme de 1'art d'em~ hellir les jardins. Sa Majefté en eft enchantée, elle dit a M. le Comte d'Artois, qui eft préfents „ vous devriez lui donner quelque bénéfice „ vacant dans votre appanage," & le Prince lui a fait avoir une bonne abbaye. Mais la conduite de cet Eccléfiaftique, peu canonique jufques-la, a dü. fe purifier par une retraite. Ainfi la poéfie  C 2Ó0 ) qui avoit fous 1'Evêque de Mirepoix fait nbfkcle a la fortune de 1'Abbé de Bernis,eft devenue le principe de celle de 1'Abbé de Lille. 18 Juin 1781. M. d'Alembert, qui eft trés méthodique & annonce longtems d'avance les fétcs académiques pour qu'on s'y prépare mieux & qu'eües aient plus d'éclat, a reculé jufqu'au 5 Juillet la réception de M. de Chamfort & il y a déja trois femaines que le jour eft indiqué. 18 Juin. Extrait d'une Lettre de Strasbourg du 31 Mai. „ Je ne cherche point ft lever le voile que le Comte de Callioftro fe plait a laiffer fur fa patrie, fur fa naiflance & fur les évenemens d'une vie qu'il paroit avoir confacrée toute eatiere au foulagement de fes femblables:car, quoi qu'en dife la faculté, il a fait ici de trés belles cures. Celle de M. Ie Chevalier Langlois, Capitaine de Dragons au Régiment de Lefcurne, ne peut fe révoquer en doute, puifque c'eft celui-ci-même qui la publie. C'étoit un état de confomption pouffé au plus baut période ; fes vapeurs étoient fi noires qu'il vouloit fe donner la mort & qu'on étoit obligé de prendre les précautions les plus humiliantes contre lui,afin de Tempêcher d'exécuter ce funefte deffein. 11 eft revenu abfolument dans fon état naturel, & qnoiqu'il ait éprouvé depuis toutes les efpeces de fenfations vives, capables de le remettre dans cet ancien état, elles ne produifent plus fur lui que Tellet qu'elles doivent caufer fi tout être fenfible: il y a trois mois qu'il eft guéri,  C 261 ) fans avoir éprouvé la moindre affeétion hypocondriaque." 18 Juin. Difcours au Roi, préfente d la Reins par M. le Marquis de Caftries. Sire, „ C'eft envain que nous aurions recours au „ preftige de l'éloquence,pourattendrir le cceur „ de V, M. Quelles plus touchantes prieres que „ les cris d'une douleur univerfelle & les gé,, milfemens de tout un peuple! „ La capitale & les provinces rétentiffent de „ la nouvelle la plus affligeante & la plus impré„ vue. Au filence de la confternation et de la „ furprife ont fuccédé ces queftions tumultueu„ fes & réciproques: " le Miniftre des finances ejl-il difgracié? de quoi s'eft-il rendu coupable? fon éloquence male &f libre auroit-elle déplu? eft - on bleffê des formes Helvétiques avec lefquelks il apréfenté la vérité? Enfin la religion dn Roi auroit - elle été Jurprife ? „ Ah ! S1 n e , au milieu desfollicitudes perfon„ nelles, dont votre ame doir être agkée, dai„ gnez jetter les yeux fur le tableau confolanc „ de votre Adminiftration , & la comparer i „ celle des Rois vos prédécefleurs: quels grands „ & rapides changemens n'ont pas couronné les „ travaux de votre Majefté ! C'eft du choix des „ Miniilres que dépencl le falut de 1'Etac; & ce „ choix elle a fu le faire: Elle a montré Mentor  a. fon peuple ; elle lui a rendu fes juges na- turels; elle a refufé des tributs légitimes; en „ fin, Sire, vous avez été jtifte & clément, „ & vous avez fui la louange, en faifant toul „ pour la mériter. ,j Votre Majefté a confié les relforts les plus 9S compliqués du gouvernement a celui que fon „ état fembloit en exclure, & qui n'eut pas été ,, choifi par un Prince foible, ou indifférent au j, bien public. „ C'eft ici que fe multiplient les obftacles de „ tout genre; c'eft ici que les idéés vont plus „ loin que les expreffions, & qu'un Adminiftra„ teur des finances doit fe montrer fupérieur a 5, la difgrace, comme a fes ennemis. II doit „ affronter leur haine dangereufe pour le fuffra„ ge de vingt millions d'hommes. „ -Celui qui emporte aujourd'hui les regrets „ de la Nation, a ofé exécuter ce qu'il avoit ofé entreprendre. Rien ne 1'a arr'été dans fa pé„ nible carrière & les yeux fixés fur Vetre Ma„ jefté, comme 1'aigle fur fe foleil, il a dédai- gné les méchans, qu'il auroit fallu cbercher dans les ténebres. Livré . tout entier aux „ grandes penfées de radminiftration, il ne s'eft occupé que des moyens prompts & difnciles , „ qu'il falloit, pour ainfi dire , créer vos, „ Tréfors: une Marine formidable, un enthou„■ fiafme univerfcl alloient vous rendre 1'arbitre „ de 1'Europe. Vous deveniez 1'exemple des: si Souverains, dans un Age oü 1'on n'a que des:  ( a«3 ) „ modeles a imiter. Des jours de triomprie als „ loient encore embeliir la France ; & Fhiftoire dc votre Ilegne étoit celle de vos fuccès & „ de vos vertus. Le nom feul de votre Mini„ ftre imprimoit autant de confiance a vos fu„ jets, que de terreur a vos ennemis. La plu,, part de ceux qui Font précédé, ont palfé com„ me ces météores qui défolent la terre: celui- ci lailfe après lui un fillon de lumiere, qui „ doit éclairer, mais effrayer fes fucceifeun. ,, Votre Majefté pourra-t-elle réfifter aux „ inftances d'une jeune Princelfe , 1'ornement de ,, la cour, la patrone de fes peuples , qui tem,, pere le refpect par les graces, & qui ne peut vouloir que votre repos, votre gloire & la „ profpérité de FEtat ? „ Votre Majefté punira-t- elle un homme „ vertueux qui défend 1'innocence & 1'amitié, comme il a défendu la Patrie ? Un fujet dé„ voué a fon maitre, qui n'a pas craint de lui „ déplaire, en montrant le courage & Fénergie „ d'un Chevalicr Francois ? „ Enfin, s'il eft vrai que le plus grand Monar,, que de 1'univers doive régler fes opinions fur „ celles de quelques hommes fupérieurs, qu'il „ regarde comme 1'ame de fes Confeils, quel doit être 1'afccndant du vceu général de la Na,, tion qui, profternée aux pieds de Votre Ma„ jefté, la fupplie dc rappeller un Miniftre in„ terprcte de fes fentimens, un Miniftre qui eft 1'image d'un bon Roi, comme Votre Majefté  C atf4 ) j, eft celle de Dieu fur la terre." 19 Juin. On affure aujourd'hui que le difcours faclice au Roi préfenté a la Reine par M. le Marquis de Caftries, eft du Marquis de Villette. 19 Juin. On parle beaucoup d'un ouvrage nouveau en deux volumes, intitulé le Tableau de Paris: on 1'attribue ft 1'auteur de 1'An 2240 & un particulier de Soleure, qui étoit venu dans cette capitale avec un nombre d'exemplaires du livre, a été arrêté & conduit a la Baftille, On dit 1'ouvrage piquant & il eft.fufceptible dc L'êti-e. II y a quinze on vingt ans quefeuChevrier publia un livre de cette efpece, ayant pour titre, Paris. Onpeut donner de tems en tems des dcfcriptions de cette ville, toujours neuves & intéreffantes. 19 Juin. M. le Comte de Thélis a fait pafler une Lettre aux Soufcripteurs des Ecoles Natioiiales, oü il leur apprend qu'il s'eft déterminé a. retirer fes éleves du voifmage de la capitale, avec 1'agrémcnt de S. M., qui veut bien Ini continuer les mêmes fecours en province. On adit qu'en approchant fesécoles de Paris, il n'avoit eu d'autre but que d'exciter le zele de fes habitans & leur faire connoitre fon établilfe- ment par cet effai. II a rempli fa tache a cet égard: fes éleves ont conftruit une alfez grande partie de chemin pour donner au gouvernement & au public une idéé nette de ln nature & de Putilité de cette école. II faut auffi & elfentiellement s'occuper de leurs mceurs & éducation; qui  C £65 ) qui ne peuvent ft bien peifeétiouner que dans la campagne; car M. de Thélis craint pour fes jeunes gens, même la contagïon desgrandesvilles. Les deux écoles feront déformais en Berry & en Forès. Le Duc de Charoft préfidera a la première, M. le Comte de Thélis a la feconde. A la fuite de cette Lettre 1'auteu? a joint 1'é* tat des dépenfes des Ecoles Nationales Miiitaïres de Paris & dc Lyon pendant les quatre premiers mois 1781 , d'otï il réfulte que la toife quarrée de pavé, qui coüté ordinairement 24 ïivres 10 fols, n'a coüté en ferrë que 25 fols & i! alfure queFentietien de cette même toife quarrée n'ira pas a plus de 7 a 8 fols par année ; ce qui feroit une économie trés grande pour tous les chemius, qui ont le gravier plus a portée que le pavé. 19 Juin. Le Journal dg Paris eft arröté & h ftuille d'aujourd'hui 19 n'a point paru: on dit que c eft h caufe de Partiele ou le journalifle rend compte de 1 oraifon funebre de lTmpératri ce-Pvemeprononcée au Louvre par 1'Abbé de Boibnont, l'un des Quarante, le vendredi pre•mier de cc mois. 20 Juin. Le Journal de Paris n'a été arrêté que pour la journée d'hier. II paroït conltantque cetoit fur les plaintes de 1'Académie, trouvant mauvars qu'on eüt autant mal-traité un de fes meinbres relativement a I'öraifon funebre de i mperatrice Reine par 1'Abbé de Boifmonr .  C e66 ) voir qu'il ti*y avoit pas la plus légere perfonnalité, qu'il s'étoit rcnfermé dansles boines d'une critique purement littéraire & que cette critique étoit même tempérée par des éloges. II n'y a pas eu moven de foutenir une fulpenfion qui feroit devenue tyrannique & auroit fait crier tous les foufcripteurs. II parok qu'on n'a même exigé du journalifte aucune rétractation, excufe, ni modifkation. n . 2i 'fuin 1781. M. le Comte de Chaftenai, Lieutenant de Vaifleau, un des fils de M. de Puyfegur,ayant eu occafion d'allerplufieurs fois chez Ie Docleur Mefmer, a fi bien étudié & atfrapë fa méthode, qu'il traite aujourd'hui des cures comme lui. Le médecin Allemand, furieus de fevoir dérober fon fecret, ne veut plus le recevoir chez lui. Au rede, cet exemple confkrae fon afïertion, que tout homme a cet agent du magnétifme animal qtfil fait valoir & qui ne co ribde que dans une certaine préparation & métbode de 1'employer. 2i Juin. II eft décidé que la Salie provifoire k conftruire pour 1'Opéra, fera auprès de la porteSt Martin, oü étoit autrefois le magafm de la ville. On dok avoir déja commencé les travans & 1'ou veut qu'on y puiffc jouer au mois d'Octobre. On regarde toujours comme décidé que Ia Salie elTentielle aura lieu au même emplacement; mais on croit qu'on n'y fongcra qu'a la paix. Sa Majefté a demancié a vou' ^ rwiw..  C *0* ) zi Juin. C'eft mardi qu'on doit commencer a plaider au Palais le grand procés du Duc dc Chartrcs contre les propriétaires des mailbusMe. Target doit requérir pour le Prince 1'enréai- ftrement des Lettres patentes obtenues parS. A. Séréniffime a cet effet: Me. Gerbier doit s'y oppofer au nom des propriétaires. L'importance des adteurs de cette fcene & 1'éclat qu'a déja eu cette conteftation, y attirera beaucoup de monde. 22 Juin. Journal de Marine, ou Bibliotheque raifonnée de la Science du Navigateur. Cet ouvrage périodique a été entrepris par M. Blondcati, Profeffeur de Matbématiques a Breit & Membre, de 1'Académie Pvoyale de Marine. li en avoit publié le Profpecïus dès 1776; mais, les obftacles qu'a rencontrés fon projet, ne lui ont permis de commencer qu'au mois de Juin 1778 & fous les aufpices du Duc de Chartrcs, auquel il 1'a dédié. Cependant 1'auteur prévoyant les inconvéniens de fou Journal, s'il entroit dans le récit des faits militaircs & hiftoriques, avoit eu grand foin dc prcvenir qu'il s'abltiendroit de ces matieres, quelques intéreffantes & curicufes qu'clles fuffent, & il a recu des ordres fupérieurs qui lui ont défcndu de s'en occuper. 11 a donc été borné a fe rendre udlc, ne pouvant être agréable. i°. A rapporter toutes les pieces capables de donner une idee & un développcment dc 1'état de la Marine actuelle chez nous & de la Marine eu général. M 2  ( 268 ) " 2°. A foumir des extraks , analyfes & crittqnes des ouvrages fur la Marine, a mefure qu'ils paroltrónt. 30. Au récit des faits dont la connoiffance fera avantageufe a la Marine; comme travaux nouveüement faits dans quelques Ports, ou fur 'quelques Cótes, pour la, fürêté de la navigation; inventions nouvelles, propres a produire épargne ou perfection dans les travaux de la Marine ; accidens qu'on peut pvévoir & évitcr lorfqu'ils font connus; annonces de livres nouveaux qu'il ne fera pofiible dc faire connoitre plus en détail; aétions mémorables dont la connoilfance tiendra a la perfection de 1'art, ou a la füreté de ceux qui 1'exerccnt. Dans 1'état de féchéreffe auquel eft réduit cet ouvrage périodique, dont on ne publie que huit cahiers par an, il ne peut être recherché que des gens du métier, ou des nouvelliftes curieux de fe mettre au fait d'un art trés ignoré jufqu'a préfent & devenu depuis la guerre, purcment maritime, le fujet de toutes les converfations. 23 Juin 1781. Lc Sieur Monvel vient a fortir du R-oyaume & dc fe retirer a Bruxclles, On dit que cet événement eft la fuite de fon inconduite, qu'il doit 200,000 livres. II palfoit pour avoir des gitons & 1'on veut que cette efpecc de plaifir lui ait coüté fort cher. Quoi qu'il en {'oit, M. le Lieutenant Général de Police ayant eu vent du projet de ce Comédien, 1'avoit en*  C z69 ) Vóyé chercher quelques jours avant, 1'avoit confeflë, lui avoit donné des efpérances que les chofes s'arrangeroient & exigé fa parole d'honnetir qu'il ne partit pas: ce qu'il avoit promis. Cette pene ne peut que jetter la comédie francoife .. déja dans un défordre confidérable , dans un délabremerit encore plus grand. II y a fix mois qu'ils n'ont joué de nouveautés & il n'y a pas d'apparence qu'ils en puiflent exécuter de fitót. 23 Juin. On eft inquiet du Maréchal Prince de Söubife;ce Seigneur a un mal confidérable a une jambe, & comme le genre de vie qu'il a mené ne fajt pas préftimer qu'il ait le fang trés pür,on fent que cet accident peut 6tre de grande conféquence. 23 Juin. M. Cocbu, Avocat au Confeil trés cftimé, ayant un peu tourné en ridicule Ia jurifdiétioQ delaPrévóté de 1'hóteldans un numéro en faveur du BaiUiagedeVerfailles contre cettejurifdiélion, a été interdit pour trois mois par Arrêt du Confeil du premier de ce mois. Le 13 1'Arrêt luia été fignifié: il s'eft défendu & a fait voir au Miniftre de Paris que fa religion avoit été furprife & dès le 21 nouvel Arrêt qui Pa rétabli dans fes foncHons. Entre autres auecdotes plaifantes fur les fonctions du Prévót de i'hotel qu'il n'a fait que citer, on trouve que fa jurifdiction étoit de veilIer fur les filles dejoie fuivant la Cour; onl'ap». pclloit le Roi des Ribauds & il avoit le privilege de faire faire fon lit par quatre maquerelles, M 3  C &70 3 34 Juin 1781. Un certain abbé Cardon qui avoit été Prémontré , puis Prieur de la Ferté en Normandie & s'étoit enfin établi a Paris, y fréquentoit beaucoup les lieux publics, fe permettant les propos les plus indifcrets. II a été arfêté, il y a quelques jours, & conduit, a ca qu'on croit, a Charenton. Cet homme ne manquoit pas d'efprit & de connoiflances, il plaifoit furtout par fes farcafmes & fa mécbanceté: il étoit en outre trés obfceue. Quoique fils d'un artifan, il fe prétendoit homme de qualité & avoit allongé fon nom pour fe faire defcendre de l'illuflre maifon de Cardonne. En un mot, c'étoit un original de toutes les manieres. 25 Juin, Le public eft d'autant plus feufible a 1'accident de M. de Soubife, qu'il vient de donner ft 1'égard d'une portion de ce même public un exemple de fa déférence & de fon envie de lui plaire. Les propriétaires des maifons de la rue des Quatre-fils trouvant que les murs de Fhótel de Soubife trop élevés en déroboient la vue aux premiers étages & même la rendoient trés confufe & gênée aux feconds, ont fupplié ee Prince de vouloir bien permettre qu'a leurs frais ils les fiffent baiflcr. Cette démarche, qui peut-être eüt été regardée comme indifcrete par beaucoup d'autres & même comme ofienfante, a été , au contraire, accueillie avec cmprcffement par M. de Soubife. II a répondu qu'il s'cftimoit trés heüreux de pouvoir faire quelque chofe d'agréable a fes voifins, qu'il fe  C =71 > conformeroit a leurs defirs & ne vouloit poini: qu'ils fe conftituafient en aucuns frais. Ce procédé bicnfaifant & génércux eft regardé comme une belle lecon qu'il donne en ce moment-ci indirectement au Duc de Chartres. 25 Juin. Dimancbe dernier une pauvre femme étant mortefur la paroilfe de Saint Sulpice , unPrêtre eft vcnu pour 1'euterrer; mais 1'ayanï frouvée lans biere & ne voyant point d'argcnr. pour la rétribution, s'eft en allé. Les commercs yoifiues & amies de cette pauvre femme, indignées du procédé de 1'homme de Dieu, or.t chargé le cadavre fur leurs épaules, l'ont poné elles-mêmes a 1'églifc & ont conté au peuple encore afisaihté pour le lbrviec Divin, le füjet de cette a vent ure; ce qui a caufé un rnermure conlidérabic & obligé les Prètres de. fatisfiinG bien vite a la cérémonie, afin id'éviter les fuites de la fermentation. 25 Juin. Entre autres originalit.es dc 1'Abbé Cardon, on rapporte que peu après la mort de M. de Clugny il entra au Caffé du Caveau, on le Médecin Bouvart déjeünoit avec une talie de chocolat. II va a lui & lui dit: „ Monfieur le Doéteur, je m'emprefle de vous remercier au ,, nom de tous les bons citoyens,de 1'cxpéditioii „ patriotique que vous venez de faire, en déli„ vrant la France d'un de fes plus grands lléaux,. „ de ccj. F... de Clugny, qui auroit marché „ fur les erremens de 1'Abbé Terrai & auroit „ achevé notre perte." M. Bouvart lc regarde M 4  C 272 ) fixcment, ne lui dit pas une parole; mais en allant payer fa tafte de chocalat s'écrie: „ il faut „ avouer que dans ces lieux on eft fujet fi enj, tendre de bien mauvais propos. " 26 Juin 1781. Le Tableau de Paris eft précédé d'une préface date'e du 8 Oclobre 1780, ou 1'auteur capte Ia bienveillance du Lecreur par l'annonce Ia plus piquante de 1'ouvrage; mais il ne tient pas parole : rien de plus vague, de plus découfu. C'eft un recueil de peut-"être trois eens titres, dont chacun pourroit être matiere d'un long cbapitre & n'eft qu'effleuré; dont plufieurs n'ont pas plus de rapport a Paris qu'a Londres, ou a Conftantinople ; dont Ie grand nombre enfin font des morceaux abfolument étrangers a Pqbjet. On voit que 1'obfervateur a eü la tache de fon Libraire de compofer une mafte de deux volumes in - 8"., qu'il a rempli comme il a pu. II voudroit être me'chant & n'en a pas la force. Le ftyle en eft plus emphatique que noble & les penfées fous un air de profondeur n'ont rien que de trivial. 26 Juin. M. de Grimaldy, des Princes de Monaco, Evêque & Comte de Noyon, Pair de France, eft un Prélat faftueux, entier & qui ne fe piqué pas d'édifier infiniment fes ouailles par fes vertus paftorales. L'Evêché du Mans ou il étoit avant de pafter a Noyon, eft encore rempli de fcandales qu'il y caüfoit avec une fotile de jeunes Abbés, égrillards comme lui, dont il ftifoit fes Grands ■ Vicaires: c'étoit a qui feroit, le  C 273 ) k plus d'explolts galans. Cependant lorfqu'ilquieta cc liege, le Chapitre, par une délibération du 30 Janvier 1778, arreta de faire placer dans le reveftiaire fon portrait, au bas dttquel devoir être gravé fur un inarbre 1'infcription fuivante:. Tn omnioïe, quaft rncl, hidulcaVilur' Un]us antiflis memorie., Otti dilexit decorem domus Domim., Honoravit temp 'um, Dedit in celehrationiVus decus j'uxta Lcgcm ê? Ceremonies. IïïuRrifuno ac Revcrendijimo Patri 70. Domino Ludovico Andretz de Grimaldy fi? Prhcipüm Mbnatt' Cenomcmetifium Epijcópo die V'fulii MDCCLXXt'II Conjunut Ad Sedem Noywnietifim die 26 Ocfo'rris 1777 trttnflato- Hoe perpetuum amoris pïonumentum Decanus, Canonici c' Capittilum infignis Eeclsfta Cenomamnjis Memore pofueruht , h Comitils generalibus pojl Fijlum beatijjtmi fuliani eclchraiif.Anno 1778. II paroit q\ie le Chapitre de Noyon n'a pas en pour fon nouveau chef la même adulation. M.. 1'Evêque ayant jugé a propos, fans fon concours, de fupprimer par un Mandement le chommage de cinq fêtes & de transférer aux dimanches le chommage de huit autres, d'afiranchir le peuple de 1'obligation du fervicc le jour du: Vendredi Saint; les Chanoines s'y font oppofes& ont réclamé leur droit d'aider Monfeigueur dans fa légiflation épifcopale, comme étant fesConfeillers - nés, comme formant fon Sénat. Le: Parlement a été faili de 1'affaire: il y a, paru des; Mémoires curièux de la part de Me. Gerbicr.' pour le Prélat, & de Mc. Dcbonnieres pour les; M 5  ( 274 ) Boyen, Chanoïnes & Chapitre de 1'EgSfe Cathédrale de Noyon. M. 1'Ëvêque vient de fuccomber & il a été décidé qu'il ne pourroit faire de ces innovations fans fon Chapitre, ou fon Synode. 27 juin 1781. L'affaire du Sr. Monvel s'éclaircit, mais d'une facon plus honteufe pour lui. II paffe pour conflant qu'il a dtd ftupris en flagrant - délit aux Tuilleries, oü 1'on le remarquoit fe promenant fouvent feul daus 1'allde des- licrcorations. C'eft-la le vdritable objet du maudat de M. le Lieutenant général de police:comme c'étoit pour Ia cinquieme fois , on veut que cc Magifitat lui ait enjbint, au contraire, de fe foufiraire par une prompte fuite au fupplice dont il étoit menacd. Ce crime devenu trés commun & des effets de la Nature. Lc Sallon de danfe ofiïe le plus grand mor» ceau d'architecttire Chiuoife qui ait encore été cxécuté en France. Le plafond furtout s'eft fait remarquer, tant par la richeffe de fes couleurs, que par une 'colleétion de vingt-quatre tableaux. exécutés fur les deffins de Bottelier. , C'eft dans la cour ou jardin oü 1'on trouve les jeux annoncés x tous variés & dans le coftume Chinois. Cet ouvrage eft exécuté fur les deffins dc M.. Munich, peintre, & la conftruétion a été dirigde par M. Melan , arcbitedle. La feule chofe qu'on ait critiquée, c'eft 1'Jllumination, qui ne produifoit pas affez d'effet k. caufe des lanternes Chinoifes, fermdes par des vers mats, trés favorables k la peinture, mais; peu propres au jeu des lumieres. 30 Juin. 178-1. La Reine avance heureufe-ment dans fa groffeffe & en plaifante agréablement. Quelques courtifans rapportent que S.M.. difoit 1'autre jour au Comte d'Artois :■- „ votre „ neveu me donne de furieux coups dans le ven„ tre; éi? d moi, Madame, des coups de pied „ au cul," reprit Son Alteffe Royale avec beaucoup de gentilleffe & de vivacité. 30 Juin. Les conférences pour le Code nouveau de légiflation des Colonies fe tieiment toujours, tantót chez M. de Bongar, Intendant de: Saint Domingtie, tantót chez M. le Préfident Tafcher,, ancien Intendant de la Martimque..  I Un M. Foulquier, Confeiller au Parlement de I Touloufe, qui s'étoit fait nommer adjoint du premier pour aller a St. Domingue , eft entré f en conféquence dans ce comité, oü aiïiftcnt I auffi plufieurs Commis des Bureaivx. Ce M. Foulquier pafié aujourd'hui Intendant | a la Guadeloupe, d'oü eft rappellé M. de Montl denoix. 30 Juin. Les projets fur la Salie provifoire ^font encore changés. On ne la conftruit plus prés la porte Saint Martin: on a donné ordre raux Francois de fe difpofer a païïer a Paques dans leur nouvelle Salie & a vuider celle des Tuillcries , oü s'étabiira le Théatre Lyrique jufques h la paix, Comme cet hiver paroltra fürement long aux amateurs, on pourra jouer fur lc Théatre des Menus quelques fragmens, ' quelques petits acFes propres a les amufer. Quant a la grande Salie, il efi. toujours queftion d'attendre la paix avant d'y travailler, & malgré la foule des projets qu'on donne a cet égard, il y a a parier que le Duc dc Chartrcs obtiendra qu'elle foit rebatie dans le même emplacement. 1 Juillet. C'eft le jeudi 5 Juillet que doitrecommencer a 1'hótel de Villaycr, rue Saint André des Arts,l'affemblée des Savans & des Artiftes , dont M. de la Blancherie eft 1'inftigateur & le promoteur en la qualité qu'il s'eft conférée, d'Jgent général de correfpondance pour les Sciences es- les Arts. II a imaginé d'avoir trois fortes de foufcripteurs, pour donner a fon établiflement  ( rtV-J plus de confiftance qu'il n'en a eu jufqu'a préfciiL i°. Une fociété de quarante grands Seigneurs s'eft cbargée de payer le loyer & c'eft a leur munificence qu'on doit le fupérbe emplacement oü va s'inftaler M. 1'Agent. a°. Une autre fociété non moins bien compofée fe forme a fon exemple, afin d'afl'urer pendant trois ans un fonds pour les frais de la Correfpondance. M. de la Blancberie propofe encore deréufiir a ces deux fociétés, toutes les perfonnes qui J par une foumii'fion pour trois ans, voudront contribuer de deux Louis par an a la confiftance de l-'établitfemcnt. Tout ceia eii indépendnnt d'un Louis par att que fourniront les foufcripteurs de la feuille heb-, domadaire, fous le titre de Nouvelles de la République des Lettres rif des Arts, Mi de la Blancberie reftera chargé de la direct tion générale de 1'établiflement, felon le Plan approuvé par 1'Académie des Sciences & le Iléglement publié en 1779. Tous les détails de la. Corrcfpondance, dans toutes les parties des Sciences & des Arts, feront remis par lui a fix Savans aftbciés pour les rédiger. Une petite Loterie, car il en faut partout J eft propofée pour amorcer la cupidité des fouf-j cripteurs. Outre favantage d'entrer libremenr.4 dans ce fanftuaire, fermé déformais aux profa-nes, ils auront 1'efpoir de pofleder par la voie.* du fort quclqu'un des morceaux précieux expo-  ( # ) - fós pendant Pannée, dont on fera 1'acquifition de 1'excédent des fonds provenans des diverfes foufcriptions, après avoir fatisfait a toutes lea dépenfes. Ces Méfljeürs donneront gratuïtement leur travail & leur tems, n'étant excités que par 1'amoür de la Gloire & par un zele dévorant pour la propagation des Sciences & des Arts. 2 Juilht. M. Hallé, dont on a annoncé la mort, étoit fils & petit-fils de Peintres tous deux célebres. 11 mlquit ft Paris en 171 i, & par une fingularité affez rare fuivit fes peres dans la carrière des Arts. II remporta le premier Prix de Peinture & alla fe perfectionner en Italië. A fon retour il fut agréé en 1747 & paffa fucceffiveÈaerit p;:r les divers grades de 1'Académie. II obtint la Surinfpechondc la Manufacture des TapiÜcrics de la Couronné en 1771, & en 1775 M. le Comte d'Angiviller, jaloux d'établir une nouvelle difcipline dans la geffion de 1'Académie de France ft Rome , le détermina a partir. M. Hallé, en elFet, y ramena en peu de tems la décence & 1'économic. II refufa toute récompenfe pécuniaire. C'eft alors qu'il fut décoré du Cordon de Saint Michel, & S. M. foumit a toutes les' dépenfes néceffaires pour fa réception. Sou pinceau a toujours été cbafte: il n'avoit point de fougue dans fa compofition, mais elle étoit conftamment fage & foumife aux vraifemblanccs & aux regies de 1'art. La perfpeétive étoit la partie qu'il avoit la plus approfondie9  & il vifoit furtout a Ia correétion. Sa couleur étoit foible, mais avoit quelquefois un ton argentin qui plaifoit a Fceil. Ce ton fe remarque particulierement dans fon Tableau de Prédieation, que 1'on voit dans 1'églife de Saint Louis de Verfailles. M. Hallé avoit un intérieur fort doux, comme fon caraétere, & le dernier figne de vie qu'il a donné, a été un fourire a fa femme, a fes enfans & ft fes amis. 2 jfuület 178 x. Mercredi dender 27 Juin Paffaire du jeune Comte de Solar a enfin été jugée au CMtelet: il a été reconnu pour le véritable fils du Comte de Solar: le Sieür Cazeau cependant déchargé de 1'accufation de 1'avoir peidu,ou voulu perdre; ce qui implique unefin* guliere contradiction. La Demoilélle de Solar mife hors de Cour, feulement par rapport a la connoilfance qu'elle étoit accufée d'avoir eu du crime de fa mere, avoué par celle-ci au lit de la mort. 2 J-idllet. Le fameux Ami des hommes, M. de Mirabeau, a fuccombé a une nouvelle demande en féparation intentie contre fa femme;, paree qu'il a été prouvé qiPau moment oüjobéiffant a 1'Arrêt, elle fe rendoit auprès de lui & rentroit dans fa maifon, il faifoit divorce lui-même & s'en éloignoit. Cette inconféquence de conduite prouvée a été un argument invincible contre lui. a Juület. Lettre du Comte d'Albany au Lori  Bute , traduite de VAnglou. Tel eft le titre d'un ouvrage nouveau en politique, attribüé a •M. Favier, ci-devant employé dans les affaires étrangeres. II eft encore fort rare & Fon ti'en parle que fur parole. 3 Juillet. M. I'Archevêque & Comte de Vienne marchant fur les tirxes de M. 1'Evêque d'Amiens , vient auffi de publier un mandement, touchant 1'édition annoncée des ceuvres du Sieur de Voltaire. II eft daté du 31 Mai & après ua préambule non moins fougueux contre le Poëte , le Prélat déclare a tous fes diocéfains qu'aucun d'eux ne peut, fans pécher mortellement, foufcrire a 1'édition fusdite, acheter ces ceuvres, les lire, les retenir, les communiquer : il les met au noiribre des livres fpécialement défendus dans fon Diocefe, & dont la leéture emporte. par conféquent les peines encourues en pareil cas 11 faut obferver, que cet Archevê- que de Vienne eft un peu jugc & partie , c'eft le frere de M. de Pompignan, ci-devant Evêque du Puy & fi bafibué par lePhilofophedeFerney. 3 Juillet. 11 eft affez vraifemblable que dans les fieclcs de ferveur, 1'inftitution primitive de fonner pendant les orages fut pour raffembler lc peuple dans 1'églife , afin d'implorcr la clémeuce de FEtre fuprêmc , & de le fupplier de ne pas buffer détruire en un jour 1'ouvrage & Fefpoir de Tannée. Depuis longtems on ne prie plus dans les villages & même dans plufieurs villes, mais 1'on ne ceffc de fonner. Cette mé-  f 286 ) thocle peu conforme aux principes de la pbyfique, ayaiit caufé récemment plufieurs accidcns ,en Lorraine, M. Marcol, Procureur général du Parlement de Nancy,a écrit le 15 Mai une Lettre circulaire a tous les Curés du relfort, afin de les engager a inllruire la-delfus leurs ouailles & a leur apprendre que, s'il eft utile d'agiter 1'air par ie mouvement des cloches, lorfque la nuée marche vers la ville, le botirg ou village, ce qui la divife & la difperfe; il elt trés pernicieux de le faire lorfque Forage eft imminent, & qu'alors il faut eclfer , en général , d'ébranler 1'air & craindre de provoquer la foudre, en cherchant a 1'éloigner. 3 Ju-Met. Ce font tous les jours au Palais Royal de nouveaux placards infames , qu'on affiche clandeftinement dans ia nuit & qu'on lit le lendemain. Cette voie abomiuable de tourCienter le Duc de Chartres par les menaces les plus infultantcs & les plus vaines , lui ramene beaucoup de gens impartiaux & ceux-ci commeneent a préfutner qu'il faut qu'il foit dans le droit inconteftiblc d'efFectuer tous les changemens qu'il trouvera bons pour fa commodité & 1'embellilfemeut de fon palais, malgré toutes les .clameurs des parties adverfes. II paroit que les Lettres Patente» obtenues par ce Prmce font enrégiftréts au Parlement, faus oppofition & qu'il n'y aura aucune plaidoicrie. On alfure que des . ciuquante-quatre Propriétaires réclamans , il y m a quarante - fept, dont 1'oppoütion feroit abfo-  ( 23 7 ') 'litment mille. Quant aux autres, ils recevrorrt* fans doute, une indemnité proportionnée. M le Duc de Chartres, pour mettre le public eh état de juger de fon projet, doit en publier inceflamment un Profpectus, qu'on attend avec impatiencc. ' 5 Juillet 1781. Dénonciation des feuilles da Sieur Linguet, faite en Parlement , toutes les Chambres ajjemhlées, les Mardi ii , Vendreii ja 8» Mardf 18 178?. f«r M -• • • . On a parlé dans le tems de cette Dénonciation de M. d'Epremefnil ,• mais on defefpéroit de la lire jamais imprimée: elle perce enfin & la voici en 55 page» in-8°. caraétere alfez fin. Au premier coup d'eeïl on s'appercoit atfément que cet écrit eft trop verbeux; c'eft le défaut ordinaire de i'orateur. On en rendra compte plus en détail < fuillet. Enfin la tragédie de M. du Rozoi, intitulée Edonard ///, fe donne demain 6. 6 Juillet. Le Jardin du Palais Royal a 167 toifes de long & 72 de large. Le projet eft de retruncher fur la largeur de chaque cóté quatre toifes, & fur la longueur dans le fond cinq'toifes,pour faire des rues paralleles a la rue de Richelieu, a la rue neuve des Bons enfans & a la rue des Petits cbamps Ces rues nouvelles feront bordées du cóté du jardin de maifons, dont les facades feront uniformes, & les diftributions intérieures a la voIcnté des acquéreurs fur une profondeuï d en*  C 288 ) viron fept toifes fur les cótés, & de dix au foud. Ces maifons préfenteront, fous une partie de leur premier étage, du cóté & au niveau du jardin, une longue galerie couverte, libre dc bout en bout & ouverte au public dans tous les tems de 1'arinée. Elle aura environ douze pieds dei large, portera toute la hauteur des rez-de-chauffée & entrefols & fera percée dc 1S8 arcades. , En avant de la grille actuelle, on batira un grand corps de logis de quinze toifes de large & s'étcndant en longueur depuis les maifons de la rue de Richelieu jufqu'a celle des Bons-enfahsj Le petit jardin aétuel, conau fous le nom del jardin dé" fon -Alteflë Royale, fera converti en une cour ouverte de trois grandes portas fur la rue de Richelieu, & communiquant par trois arcades a la cour Royale. Trois percées dans la rue de Richelieu, dans celle des Bons-enfans, & dans la rue neuve des Petits-champs, formeront les entrees & de'gage-1 mens toujours libres de !a nouvelle rue établie; au pourtour du jardin. Le nouveau batiment conftruic en avant de la grille fera foutenu par des colonnes, qui forme-;: ront trois galeries couvertes, de foixante toifesl de long, a 1'ufage du public: ces galeries feront] croifées carrément par d'autres galeries de droitej & de gauche fous les deux ailes de la cour Ro-I .yale,dont feront fupprimés tous les appartemensj des rez-de-chauffée & entrefols. La voute quij eft en face du grand efcaliér aeluel, fera conti-' miée  C 289 ) ïiuée fur la même iongueur & de toute la profondeur du batiment des archives , qui fera démoli. Enfin le palfiage étroit & incommode qui conduit a la rue de Richelieu, fera redrefle & confidérablement élargi. Ainfi tous les batimens de la cour Royale feront portés fur des colonnes & arcades, formant des galeries ouvertes au public, qui s'uniront k la galerie du pourtour du jardin, laquelle aura 324 toifes de développement & dégagera par des, arcades fur le jardin même, dont les dimenfionj réduites alors a cinquante toifes de large fur 137 -de Iongueur, formeront encore une étenduc de plus de fept arpens & demi. Le nouveau jardin fera compofé de deux allées, qui auront chacune exactement les mêmes dimenfions que rancienne tant regrettée, appeilée la grande allée. Le jardin qui fera bordé par la grande colonnade du palais & par des maifons régulieres, toutes aflujetties a une facade uniforme, qui communiquera dans tout fon pourtour a la promenade touverte , la plus vafie & la plus maguilique , éclairée d'aillcurs le foir & même la nuit, jufquesa deux heures, par 188 révcrberes fufpendus fous le cintre des arcades , & par les lumieres des appartemens des nouvelles maifons, fpectaele a la fois & promenade de toutes les faifons & de tous les momens, préfentera de la forte dans fon nouvel arrangement un genre cie beauté dont il n'y a pas d'exemple a Paris. Tomé XFIL N  ( 2Q0 ) ' Tel eft le précis d'un Expofé de? changement a faire au Palais Royal, imprimé par ordre du Duc de Chartres & qu'il fait diftrib uer dans le public en profufion. 7 Juillet 1781- Extrait d'une Lettre de Cadix du 21 Juin.... „ On attend ici'le Duc dc „ Crillon nommé Lieutenant-Général des ar„ méés de Sa Majefté Catholiquc. La cour 1'a „ fort bien traité; il a le doublé des appointe,, mens affeclés a un Commandant & S. M. 3, Catbolique lui a fait donner en outre 100,000 3, livres pour fes équipages. Ge Seigneur, dans 3,- 1'éffufiön dc fa rcconnoilfance, en quittant. Aranjuez le 16 de-ce mois, s'écria: Sire, vous 55 agiJïez en R-°i"> ïe me conduirai en Crillon." Le Duc de Crillon doit commander le détachement de 8000 hommes qu'il eft queftion d'etnbarquer & la deftination eft toujours un problême. 7 Juillet. 11 feroit difficile de trouver un ouvrage dont la conduite fik plus mal entendue que celle de la tragédie jouée hier, dont le ftyle fïït plus négligé, pour ne pas employer d'autre exprefiion. Les trois premiers act.es font d'une obfcurité difficile a éclairer. Le quatrieme offre des fituations ïntéreflantes, mais qui en rappellent d'autres déja portées avec fuccès fur notre fcene. Le commencement du cinquieme aéte a des beautés: le dénouement eft abfolument manqué. L'auteur n'a pas eu même 1'efprit de profiter des beautés fublimes de Shakefpeare & il en a  C *9* ) tiré fi peu de parti qu'on entrevoit a peine 11 celui-ci hd eft connu. Au refte, on a, en général , fi peu de confidération pour la petfonnè 'du Sieur duRofoy v& une fi petitc idéé de fes talens , qu'on eft venu a fa tragédie plus difpofé a rire qu'a pleurer, & qu'en efFet c'ont été des brouhaha, des éciats continuels , comme a Ia comédie la plus amufantc. Dès avant la repréfentation on avoit répanda dans les caffés & autres lieux publiés des placards, dont le but étoit de tourner Ia piece en ridicule & d'ameuter la foule contre le poëte. II a un amour-propre fi puant, que le motif de rhumilicr, fans doute, plutöt que la jaloufie d'un talent auffi médiocre, on, pour mieux dire, auffi nul, a pu porter quelqu'un de fes confrères a ce procédé malhonnête. 8 Juillet. Hier les Italiens ont donné pour la première fois Léonore, ou VHeureufe épreuve, comédie en deux aclès, mêlée d'ariettcs. Le poëme eft lent, trifte & froid. L'aclion n'a rien d'intéreflant, paree que 1'auteur n'a pas fu tircr parti des fituations qu'elle ltd préfentoit, & qu'il 1'a ralentie par le grand nombre de morceaux de chant, avec lefquels ü a coupé fes fcenes & fon dialogue. La mufique, de M. Champein , quoique fort applaudic, a éprouvé quelques critiques. Oiï y a remarqué des réminifceuces; on a reproclié au compofiteur de n'avoir pas un ftyïe aftez fuivi, d'étoufter la partie du chant par des accomN z  C 29* ) pagnemcns trop chargés & trop bruyans, d'avoir enfin mauqué quelquefois 1'expreffion, a farce de la chercher: mais on y a trouvé du trlent & des motifs d'efpérance , encore plus marqués que ceux que 1'auteur a donnés jufques ici. II y a dans cet opéra -comique une ariette de bravoure ehantée par Madame Trial, qui, quoique trés ridicule, a eu leplus grand fuccès. Les plaifans obfervent a ce fujet, que le Francois veut étre pris par les oreilles. 8 Juillet 1781. M, le Marquis de Courtanvaux, Capitaine - Colonel dc la Compagnie des Cent SuiÜ'es de la garde ordinaire du Corps du Roi, eft mort. 8 Juillet. Dans le projet de fes nouveaux édifices M. le Duc de Chartres n'a pas oublié un inftant le public, au point que le fameux Méridien fi renommé, ne pouyant refter oft il eft, doit étre remplacé au fond & fur le batiment du milieu du Jardin. • Durefte, les plans originaux, profils & élévations font dépofés dans un appartement du palais royal, oü, a commencer dès demain 9ju'llet, chacun peut aller les voir. II eft définitivement conftaté qu'il y a des oppofitions k 1'enrégiRrement des Lettres patentes, qu'il y aura plaidoierie, mais que les délais entrainés par les formalités inévitables de la procédure, empêcheront qu'elles n'aient lieu avant Ia Saint Martin. C'eft en effet Me. Target qui plaidcra pour S. A. Séréniffime; Mrs. Gerbicr  C *93 ) & Treilhard défendront les propriétaires des maifons : enfin M. 1'Avocat Général Séguier portera la parole dans cette grande affaire. 8 Juillet. M. le Coftite de Caiiollro efi venu a Paris pour le Prince de Soubife, qui fe trouvant mieux n'a cependant fait aucun ufage des fecours de cet étranger. La jaloufie des médecins n'a pas foufiert qu'il relblt longtems dans cette capitale; il a été obligé de repartir, fuivi de cinq ou fix petites-maitrefles de la cour, engouées de lui & qui vont fe mettre fous fon infpeétion a Strasbourg. '9 Juillet. Dans la dénonciation des feuilles du Sieur Linguet, M. d'Epremefnil commence par un exorde oratoire, oü il cherche a éloigner de lui la mauvaife opinion que femble faire naitre d'abord le róle de dénonciateur, furtout a 1'égard d'un homme fugitif, expatrié & que fon malheur fembleroit devoir rendre refpectablc & facré. II entre enfuite en matiere & après un hiftorique de ce qui a précédé 1'évafion du journalifte, il en vient aux Annales , dans lefquelles il diftingue cinq objets: les Particuliers,la Conftitution Francoife , la Magifirature , les Souverains, les Peuples: il fuit 1'auteur fur chacun de ces articles & le prenant toujours par fes, propres paroles, par fes écrits, dont il_,citc d'arrtples fragmens, il le convainc d'avoir dans fes Annales deftructives de tous les droits de 1'hOmme: Erigé la force en véritable droit. Fondé toutes lesCourounes fur des titres dc Mig. N 5  Soutenu que les Rois font propriétaires des biens & des perfonnes de leurs fujets. Soutenu qu'entre les Rois & les fujets, le cM s'explique par des victores: Traité la Magiftrature Francoife de Corps dt féditieux inconféquens & fes Remontrances de déclamations monotones, pédantefques'& incei> diaires. Infulté tous les Tribunaux Francois par des accufations continuelies d'ineonféquence, d'oppreffion, de meurtre. Fait de la Banqueroute publique un droit de la Couronné, un de voir de chaque nouveau Roi. Outragé le Barreau, travaillé a femer la divifion dans le fein de la Cour. Et tout cebt, non dans un palTage, dans un article, dans une feuille, mais dans les volumes de fes Annales, qui forment un corps de doctrine médité, fuivi , combiné , développé , dans la vue de prêcher aux fouverains le defpotifme, aux peuples la révolte , au genre humain la fervitude, aux Francois la haine de leurs loix & de leurs juges; ce qui tend a détrtiire les principes fondamentaux de la fociété, les regies générales de tout bon gouvernement, les maximes conftitutives de la monarchie francoifc, les droits & 1'influence des corps dépofitaires & gardicns de ces maximes, en unmot, a compror mettre les perfonnes mêmcs de tous les fouverains & la tranquillité de tous les peuples. 10 Juillet i78i.Le Frere Saint Jean deCóme,,  C 295 ) viflgairement appellé Frere Cóme , eft rftort ■ avant-hier. II n'eft perfonne qui ne connoifie ee Feuillant renommé pour la taille de la pierrc; perfonnage qui a longtems excité la jaloulle des chirurgiens & ne 1'avoit furmouté que par les plus puiifantes proteétiors. 10 Juillet. Les volumes XV & XVI des Mémoires Secrets pour fervir d l'hijioire de la République des Lettres en France, fe diftribuent depuis quelques jours ici. On voit dans un AvertiJJement des Libraires: qu'on a repris de longues & nombreufes additions pour les volumes précédens, qui n'allant cependant que jufques au troilieme font plus de fept feuilles d'im? preffion; ce qui néceffitoit une nouvelle édition qui a en lieu en eifet, 011 1'on trouve plus de iooq notices d'augmentation; mais 1'honnêteté. des Libraires les a engagés a les joindre au feizieme volume pour ceux qui voudront conferver 1'ancienne. Cet ouvrage gagne a mefure qu'il eft counu & c'éft a qui s'en pourv'oira. C'eft-un répertoire trés amufant pour les gens du monde, & une chronique d'un grand fecours même pour l'hiftoire : indoSti difcant ef ament meminijje periti.(Cet article eft tiré d'une Gazette manulcrite trés accréditée dans Paris & attribuée a un Abbé de qualité.) j 10 Juillet. M. Plulot, méchanicien brcvcté du Roi, que la mort vient d'enlever,mérite une notice diftinguée. Sa naiflance & fa forums N 4  C SQ6 ) fernbloient 1'éloigner pour jamais de toute célebrité: il étoit fimple tourneur en bois; mais fon (génie 1'a élevé au point de lui faire inventer mille chofes ingénieufes pour 1'exécution & la perfeétion des ouvrages en divers genres. L'horlogerie furtout lui doit des fecours knportans. II perfeéHonna 1'art du tour en général. Sa vivacité 1'entrainoit a faire des incurfions dans les arts collatéraux au fien, ce qui lui procura des connoiflances prefque univerfellcs, qu'il communiquoit avec la plus grande facilité i il prodiguoit fes fecours avec plaifir, non-feulement aux artiftes, mais aux amateurs. Cette difpofition bienfaifante lui devint nuifible par des pertes de tems confidérables; ce qui mit un obftacle invincible a fa fortune. M. Hulot a décrit dans un ouvrage 1'art du Tourneur. II éprouva fur la fin de fes jours des chagrins qui altérerent fa fanté & lui ont fait terminer fa carrière a foixante - cinq ans feulement. ii Juillet 1781. Mémoire fur l'expédition du Vaiffeau particulier le Sartine, fur les eaufes de la ruine de cette expédition, les évenemens que cette ruine a entrainés, & fur les aclions qui en réfultent. Tel eft le titre de ce Faélum pour le Sieur Lafond de Ladebat, écuyer, négociant a Bordeaux, armateur de ce vaifl'eau. Snit une Confultation en date du 27 Mai i'7-8x; fur le fond de fes demandes au Confeil, . au  ( 29? ) au fujet des indemnités réfultantcs de Fexpédition du yailTeau le Sartine. Le róle que joue dans tout ceci un Sr. Chevalier de Saint Lubin actuellement a la Baftille, aventurier, dans lequel le Gouvernement avoit mis fa conliance pour les Négociations de t'Inde, rendce Mémoire extrêmement curieux: on y développc les vues du Miniftere pour profiter adroitement de l'embarras des Anglois durant leur guerre d'Amérique & leur fufciter d'autres ennemis dans 1'lnde. 11 Juillet. Le jeune Frcron , dans le numéro IX de fes feuilles, en parlaut du Sr. Defdfarts, Comédien'de la comédie Francoife, d'une vaftc corpulence & furtout d'un ventre énorme, 1'a appellé Fentriloque: le Sieur DelelTarts a trouvé la plaifantcrie mauvaile, il s'en eft plaint au Maréchal Duc de Duras & ce fupérieur trés zélé pour les comédièns a intérelfé le Gouvernement dans cette querelle. On exige une réparatiou de la part du journaïifte. Celui- ci confent a la faire , mais honnöte & non telle que 1'a dictie le comédien; on ne veut point de cet arrangement & depuis un mois Ia négociation traine en Iongueur: enfin on a menacé le Sieur Freron de lui óter fon Privilege, fi cela ne fe termine pas ft la fatisfaction du Supérieur. Un M. Salaun, coopérateur de M. Freron & öuteur de Partiele, s'eft mis en caufe, s'eft avoué pourle coupable, s'il yen avoit, & pour le feul a punir. On le prend a partie aufli; mais N 5  ( 29S > on n'ea' tient pas quitte le premier & jufques ici M. le Garde des Sceaux eft inflexible. On ne peut concevoir a quel exces d'aviliflemcnt on réduit ainfi les gens de Lettres par complaifance pour un grand engoué d'un méprifable hiftrion. '12 Juillet 1781-. On trouve dans la dénonciation de M„ d'Epremefnil. quelques. anecdotes qu'il ne faut pas omettrc. i°. L'animofité ne 1'a point guidé dans cette démarche & il laméditoit longtems avant que le Sieur Linguet 1'eüt mis en fcene.. Dès la pu» biication du No. 25 des Annales, fon zele Magiftral s'étoit enfiammé. On étoit aux Vacan>ces de 1778. M. le Préfident le Pelletier de Rozambo préfidoit la chambre. M. d'Epremefnil en paria a ce chef, en préfence de M.. le Fevre d'Amecourt; ü 1'engagea d'en prévenir M. le Garde des Sceaux & le Comte de Maurepas. Le réfultat fut que-M. le Préfident, après avoir conféré avec ces Miniftres, 'détermina ie dénonciateur a refter tranquille fur la promeffe qu'on veilleroit a ce que le folliculaire s'expliquat avec plus de retenue. Dans fon N°. 26 il donna en effet quelque efpoir de réfipifcence, mais vaine"ittvent; il reprit bientót le cours dans fes diatribtS inflammatoires. Depuis M. d'Epremefnil a tenté une nouvelle dénonciation; il en paria lui-même au Garde des Sceaux, qui Pen détourna en alléguant des motifs, auxquels le Magiftrat céda, plus par déférence que par aflentime.ntr.  C 299 ) Quoi qu'il en foit, üréfulte de ce navré que 1'incurfion de Me. Linguet contre M.- d'Epremefnil a été 1'effct & non la caufe du zele de. ce •Confeiller. 20. On arrête en France, quand on le veut, les feuilles du Sieur Linguet; on Fait plus, 011 les fupprime. Les N°. 59 & 60 n'ont percé qu'en petit nombre & par des voies détournées , du moins dans cette capitale. II exifte donc en France une autorité qui difpofe de ces feuilles. Cette autorité a le pouvoir d'arrêter les Nos. qUi lui déplaifent. Elle n'a pas la volonté d'arrêter ceux qui outragent M. d'Epremefnil, & ce qui confirme, fuivant lui, cette defaffection du Miniftere, c'eft qu'aux vacances dernieres il avoit prié le Premier Préfident d'interpofer fes bons offices auprès du Miniftre des affaires étrangeres, pour que les joumaux étrangers, notamment le Courier de VEurope & les Armodes pol:-tiqiies, f uilent avertis de s'exprimer avec exacFi-tude & circonfpeétion fur le Magifirat & fa caufe. Malgré cette précaution , dès que 1'intervention de M. d'Epremefnil a éclaté: Joumaux étrangers , Joumaux1 frangois; d'abord le Mercure de France, enfuite le Courier de VEurope, enfin les Annales Politiques fe font décbainés contre lui. Envaïn s'en eft - il plaint & au Miniftre des affaires étrangeres & au Garde des Sceaux ; il n'a pu obtenir juftice. Ces Miniftres le renvoyoient de l'un a 1'autre. II cite a cette occafion une Lettre curieufe de lui a M. de Miromefnil ^ N 6  ( Soo ) en date du 28 Mars 1780, & Ia réponfc trés hétéroclite de ce Chef de la Juftice , du 2 Avril. 30. Tout Fbiftoriqüe de la vifite de M. d'Epremefnil chez le Sieur le Quefiie, ainfi que leur converfation , font reftituës dans leur exacte véfifé & 1'on voit que M. d'Epremefnil s'y eft conduit avec la parfaite modération que fon róle exigeoit; que le marehand de foie y a mis tout le refpeét, toute la déférence convenable, a donné les plus belles parole*, mais qu'il n'en a tenu aucune & ,fans doute encouragé par les ennemis de M. d'Epremefnil, s'eft porté a la plainte étrange qu'on lui a fuggérée. 12 Juillet 1781. Jufqu'a préfent on avoit regretté que la Caufe de la Marquife de Mirabeau', fi curieufeen elle-même & encore plus par la fingularité du Marquis,d'un auteurPhilofophej affectant Ie Stoïcifme le plus rigide dans fes ouvrages & vivant avec le plus grand fcandale, n'eüt pas eu de défenfeur en état de la faire valoir & d'y imprimer tout 1'intérêt qu'elle comporte. Elle en a trouvé enfin un digne d'elle & le Mémoire de Me. de la Male fe lit avec le plus grand plaifir, même depuis que Ia Caufe eft jugée. Après avoir réfumé les faits antérieurs qu'on connoit, qu'il reflerre & préfente fous un jour plus frappant & plus lumineux , il rapporto ce qui s'eft pafte depuis 1'Arrêt du 21 Mai 1777,. qui déboutoit la Marquife de Mirabeau de la demande en féparation de corps & de biens. En conféquence elle fe rend a fhótel de fon mari;.  C 301 ) mais ce même jour le Marquis fouloit aux plecls les loix qu'il avoit implorées; ce même jour il continuoit le divorce le plus fcandaleux, il exécutoit la répudiation la plus injurieufe que jamais femme ait fouffertc: d'une main il recevoit 1'Arrêt, de 1'autre il flétriftbit & repouflbit fon Epoufe. Le 20 Mai a deux heures après-minuit, ii follicite une Lettre de cachet; on 1'enleve & on la conduit au convent de Saint Michêl, avec défenfe de voir qui que ce foit. La Marquife de Cabris, fa rille, paroit fenfible a 1'infortune de fa mere; elle s'attire la haine du Marquis: fonexil, la défenfe d'approcher de Paris, 1'interdiétion du Marquis de Cabris,la féparation violente de deux époux arrachés du lit nuptial, enfin la reclufion irrévocable de la Marquife de Cabris a Sifterou, font les fuites & la récompenfe dc fes foins. Cependant M. de Mirabeau s'empare du pende bien qui reftoit a fa femme & , pour reculer fa prifon, il obtient un fecond ordre pour la transférer au Valdóne de Charenton, oü 1'on enferme les folies. Heureufement fon courage & Ja compafTion de la Supérieure empêcherent que la tranflation n'eüt lieu. Alors le Marquis voyant qu'il ne pouvoit éluder de reparo'itre en juftice, eut recours ii la reffource des momens difficiles ,, aux négociations; mais, au moment même oü ii intéreflbit les Miniflrcs & les premiers Magiftrats, obftiné dans fon dci'potifme & encouragé N 7  C 302' ) dans fa hainc, il exercoit encore 1'une & 1'autre par des vexations fecretes. Tel eft le tableau que 1'Avocat de la Marquife nous offre de la conduite de VAmi des hommes envers fa femme. Auffi une Confultation du 25 Avnl 1781 regardoit. la féparation comme. iuévitable. 13 Juillet 1781. Tout le monde parle d'une eftampe fatyrique frappé en 1'honneur de M*. Necker &injurieufe au Comte de Maurepas On a enlevé divers marchands qui la vendoient, entre autres un du palais royal.. 13 Juillet, Extrait d'une Lettre de Limoges du 11 Juillet. „ Nous avons ici une troupe de *> comédie»s qui nous jouent despieces nouvel,., les. Ils ont donné le 7 .& lc 8 de ce mois, „ il y a bonnejuftke, ou le payfan maeiftrat ,,. drame en cinq actcs, en profe, imité de 1'Eft „ pagnol de Calderon, d'après la traduclion de „M> Linguet.. II eft rempli d'incidens, a la „ maniere Efpagnole, qui en compliquent beau„. coup 1'action. Elle eft fouvent frappante- il „ y a des fcenes plaifantes tout-a-fair un „ melange degaietés qui y font femées ca & la „ & de reflexions pbilofophiques qui y domi! „ nent,. reudent la piece non moins intéreflan„ te a la lecture qu'au théatre. „ L'exécution n'a poiut été maiIVftife & les „ acteurs ont momré beaucoup d'iiitclligcr.c* " 13 Juillet. On potend qUc les trnublcïe'levésa Bordeaux dans lefcia dc la Ma -iftr.^ura  a 1'oceafion de M. Dupaty, ne font pas appafCis & que le Premier Préfident. eft de nouveau mandé en cour. 14 Juillet. Le célebre Frere, Cóme ayant confervé après fa mort toute la. férénité que fon yit'age oiTroit a fes amis dans la fociété, fes confrères les Feuillans ont cru. devoir céder a 1'empreflement de ceux qui ont defiré profiter de cet inftant pour le peindre: ils s'y font prêtés d'aiir tant plus volontiers que cet homme fi cher a 1'humanité avoit toujours refufé de laifler tracer fon portrait. M» Notte, jeune artifte eftimé., eft parvenu a le rendre fi reflèmblant, que toutes les perfonnes a portée d'en juger, lui ont confeillé de le faire graver: ce que doit exécuter M. GodefroL 14 Juillet. La Faculté de Théologie, excitée par 1'exemple de deux Prélats qui ont profcrit FEdition annoncée des Oeuvres de Voltaire, a arrêté au prima menfis dernier, d'adreficr un Mémoire a M. le Garde des Sceaux pour lui témoi-.gner les alarmcs des fages maitres fur 1'intrcduétion méditée en France de ces ceuvres de té— nebres & de fcandale :1e Chef de la juffice leur a répondu qu'ils n'eufient aucune crainte, que c'étoit affaire de police qui ne les regardoit pas,. & qu'ils euflent feulement a veiller avec. leur zele ordinaire au dégót de la Foi & a la pureté du Dogme. Les fages maitres ne s'attendoient pas a un pareil perfiflagc & en font fort fcandalLfii.s.. 11. cil ccrtaiü que cette réponfe. eft contra-  C 304 ) dfétoïre :i la publicité qu'on a laiflïS prendre aux Mandemens des Prélats, iufdrdsdans les feuilles pdriodiques. 14. Juillet 1781. II paroit un Arrêt du Con- leil dü.tat du Kot en date du premier Juin, portam réglemcnt pour la vente des Bibliotheques» II renouvelle entre autres chofes les difpofitions des anciens régiemens & fon objet principal eft de maintenir l'exécutiori de celles qui font, y eftil dit, fi néccflaires pour conferver Ie bon ordre & réprimer Ia llcence avec laquelle les livres les plus défendus fe fépandént dans le public. '14 Juillet. Le Pere Vito, Portugais, de 1'Ordre de Saint Auguftin, plus engóué vraifemblablement de mufique que des devoirs dc fon état, venu ici,-comme 011 Pa dit, pour faire exécuter fon Stabat, n'y a pas recueilli toute la gloire'qu il elpéroit & après s'ètre fucccflïvemcnt produit au Concert Spirituel & k des Concerts particuliers fans fuccès, s'eft détermind a quittcr Paris. Mais avant d'abandonner cette capitale inftruit des efforts de fes envieux pour lui faire perdre le peu de réputation qu'il a acquife , inftruit que les uns difent qu'il n'eft pas auteur du Stabat exécuté fous fon nom, que d'autres ltfi refufcnt jufqu'au talent de Ja corapofition, il porte un défi a qui voudra le foutenir. II invite les compofiteurs francois ou étrangers qui fe trouyent a Paris , de fe rendre lundi 16 de ce mois chez M. 1'Abbé Rouffier pour faire aflaat de compofition; on lui donner? un motif, il Je rem-  C 305 ) plira k autant de parties qu'on defirera. Si quelque compofiteur veut entrer en lice, il lui fournira également un motif & Fon publiera leurs productions refpeétives. 15 Juillet. Eb 1770 le Privilege de la Compagnie des Indes venoit d'être fufpendu. La navigation au-dela du Cap de Bonne Efpérance étoit ouverte au commerce particulier; mais 1'obligation d'armer & de délarmer a 1'Orient détruifoit cette liberté & tcndoit a réunir tont le commerce de Pinde entre les mains de quelques Négocians Commiffionnaires, qui, par le peu d'étendtie & le peu de rellburces de no's Etabliffemens en Aüe, devoient n-'être bientêt que les facteurs des "Anglois. M. LaFond de Ladebat, Négociant de Bordeaux trés eftimé, trés accrédité, bonoré de Lettres de NoblelTe en 1773, follicitoit mie liberté entiere, qu'il regardoit comme la baFe de tout commerce utile, & il demandoit que tous les armeniens pour 1'Inde & leur retour pulFent être faits dans tous les ports du Royaume. II penFoit que 1'économie particuliere & les Fonds conFidérables que les armateurs de tous nos ports,& Furtout de Bordeaux, de Nantcs & de MarFeille pourroient employer pour Pinde , fi leurs opérations étoient libres, donneroient une plus grande aftivité a ce commerce, ouvriroient de nouvelles fources de tralie, féconderoient même nos manufactures intérieures & convaincroient bientót le gouvernement de 1'avantage qu'il y auroit a multiplier nos comptoirs  C 3S6- > & a protéger notre navigation dans cette partie du globe. M. de Ladebat avoit en 1775 développé fes vues dans un Mémoire communiqué au Maire de 1'Orient, qui fit imprimer & le mémoire & fes objeétions. M. de Ladebat y répondit & fa réponfe eft inférée dans les Ephémêrides du Citoyen de 1776. Quoique ce Mémoire & fes principes eulTent fufcité a 1'auteur des ennemis, il avoit obtenu la liberté d'armer & il alloit propofer a Sa Majefté celle des retours lors du changement de 1'adminiftration. Dans cet efpoir, il voultit toujours donner 1'exemple au Commerce de Bordeaux & il fit conftruire le vaifleau le Sartine. Cet armement rempiilfoit a plufieurs égards les vues du Miniftere, il fe trouva lié aux intéréts de 1'Etat, 011 y embarqua des fufils, des canons-, desboulcts, de la poudre a canon, des munitions de toute efpece: ce qui n'annöncoit pas des projets bien pacifiques; mais cc qui plut furtout au Gouvernement dans ce projet; ce fut de pouvoir faire palfer dans i'Inde'dans ce bfiti* ment, fans affeétation, le Sieur Chevalier de Saint Lubin, qui 1'avoit féduit par lés fpéculations & fes promefles. C'eft cc Saint Lubin dont nous avons parlé plufieurs fois. Son hïltoriqua fe trouve tout au long dans ce Mémoire & n'en eft pas 1'épifode le moins curieux. . 15 Juillet. La réception de M. de Chamfort i 1'Académie Frangoife, différée depuis tres.  longtems & remife plufieurs fois, eft enfin afrêtée pour le jeudi 19. Comme il a Phouneur d'être Secrétaire des Commandemens de S. A. Monfeigneur le Prince de Condé, on croit que ce Prince veut y aflifter & 1'on s'attend a une trés brillante chambrée. 16 Juillet. Le Sieur de Saint Lubin a été envoyé par le Gouvernement a la cour des Marattes, dans le vaiffeau le Sartine,, armé par le Sieur de Ladebat. Cet Envoyé n'avoit d'autre pouvoir dans le vaifleau que celui que pouvoit lui déférer le refpect du a fa miffion fecrete, d'autre droit que celui des égards , & peut - être celui de fe faire débarquer, &. conduite aq lieu de fa miffion avec les honneurs düs a un Envoyé de la Cour de France. II parolt qu'il a abufé des pouvoirs du Souverain , en s'arrogeant une autorité abfolue fur Pér quipage, en s'oppofant, par des vues perfonnelles, a la vente de la cargailbn a Mangalor, & a ce qu'il füt fait une nouvelle cargailbn de marchandifes propres au commerce de la Chine: il paroit enfin que le vaiffeau a été pris a Pondichery & la cargaifon perdue.. Fondé fur ce que le Gouvernement eft refponfable de fes mandataires, lorfqu'en vertu de leurs pouvoirs ils attentent aux propriétés particulieres, lc Sr. de Ladebat s'eft pourvu devant le Roi & a fupplié Sa Majefté d'ordonner qu'il füt payé du prix de fon vaiffeau, indemnifé de la pei;te de fa cargaifon , & dédommagé des héné.-  C 305 o fices qHi'il a manqué de faire dans cette entreprife. Pour faire droit fur cette inftance, le Roi a établi une CommiiTion particuliere, qui a' déja ftatué fur une partie de fes demandes, mais non fur toutes : d'ailleurs,' M. de Ladebat a obtenu un Arrêt de furféance & fufpendu fes payemens. Cet état affligeant pour un homme d'honneur le met dans le cas de faire tous fes efforts pour en fortir: en conféquence il a propofé' trois queftions aux Jurifconfultes. 1°. Si indépendamment de 1'indemnité qui lui a été adjugée pour la perte du vaiffeau le Sartine,'ü a le droit d'en réclamer une nouvelle pour raifon des évenemens du voyage, & comment elle doit être fixée? £°. Si le jugement qui a eu lieu peut fuppléer en quelque forte au fupplément d'indemnité qu'il demande ? 3°. S'il doit contiuuer a fonner fes demandes a' |r Commiffion qu'il a plu au Roi de lui accorder? Par une nouvelle Confultation du 2 Juillet, d'Avocats au Confeil, il eft décidé que c'eft k la même Commiffion que le plaignant doit avoir recours, & 1'on ne doute que les Magiftrats qui la compofent, n'aient égard aux objets importans qui fondent fa nouvelle réclamation, d'autant que 1'intérêt politique exige qu'on encouragé ceux qui, comme le Sieur de Ladebat, entreprennent le commerce des Indes & qu'on excite également les négocians a fé confier entierement dans la iufticc du Gouvernement, lorfque  C 3c9 ") leurs fecotirs & leur entremife deviennent néceffaires pour des opérations fecretes., 16 Juillet. M. Joly de Fleury, le nouveau Miniftre des finances, s'eft un peu barbouillé avec le Parlement', indépendamment du projet qu'on lui a reconnu de fe mettre a la tête de la Magiftrature, en fe faifant donner les Sceaux & même en obtenant de M. de Maupeou fa démiffion , on a fu qu'il vouloit faire Premier Préfident fon frere le Préfident a mortier : ce qui ne pourroit avoir lieu qu'au préjudice de fes anciens , M. d'Ormeflbn, M. de Lamoignon, &c. qui ont des prétentions encore mieux fondées ; enforte que tout le grand banc eft furieux & difpofé a le chicaner fur les opérations qu'il voudroit tenter. 16 Juillet. M. Saboureux de la Bonneterie, Profefleur en Droit, vient de mourir. C'étoit lui qui, lors de la difiblution de la Société, avoit traduit les Conftitutions des Jéfuitc-s par ordre de M. le Dauphin. Ce travail lui avoit procuré la confiance du Prince, qui 1'avoit appellé a la cour auprès de fa perfonne; mais cette lueur de faveur s'éclipfa a la mort de M. le Dauphin furvenue peu après. 17 Juillet. On fe rappelle que lorfque Rouffeau de Geneve rentra dans le Royaume après le décret lancé contre lui par le Parlement, il affecta de renoncer aux livres & a la Littérature & de fe livrcr uniquement a la Botanique; il alia herborifant par toute la France & fe retira fur-.  ( 3io ) tont en Dauphiné, oü il prit le nom de Renou. Madame la Préfidente de Verna, de Grcnoble, fachant qu'il avoit établi fon féjour dans la province , lui écrivit pour 1'inviter a prendre un gite dans fon chateau; il lui répondit & cette piece originale, reftée manufcrite entre les mains de Madame la Marquife de Ruffieux, fille de la Préfidente, ayant échappé aux Editeurs des Oeuvres de ce grand homme, mérite d'être confignée ici. „ Lailfons fi part,Madame, je vous fupplie, „ les livres & leurs auteurs. Je fuis fi fenfible ,., a votre obligeante invitation, que (i ma fanté „ me permettoit de faire en cette faifon des vo- „ yages de plaifir, j'en ferois un bien volontiers „ pour aller vous remercier. Ce que vous avez j „ la bonté de me dire, Madame, des étangs & „ des montagnes de votre contrée, ajouteroit k j mon emprelfement, mais n'en feroit pas la pre„ miere caufe. On dit que la Grotte de la Balme J „ eft de vos cótés, c'eft encore un objet de ] „ promenade & même d'habitation, fi je pou„ vois m'en pratiquer une dont les fourbes & I „ les chauves-fouris n'approchafient pas. A „1'égard de 1'étude des plantes, permettez, „ Madame, que je la falfe en Naturalifte & non „ pas en Apotliicaire: car, outre que je n'ai „ qu'une foi trés médiocre a la médecine, je „ connois 1'organifation des plantes fur la foi de „ la Nature qui nemcnt point, & je ne connois « leurs vertus médicinales que fur la foi des  C 3" ) „ hommes qui font menteurs. Je ne fuis pas „ d'humeur k les croire fur leur parole, ni k „ portee de la vej'ifier. Ainfi, quant k moi? j, j'aime cent fois mieux voir dans 1'émail des 3, prez des guirlandes pour les bergères, que „ des herbes pour les lavemens. Puiifé-je, ,, Madame, aulfitót que le printems ramenera la verdure, aller faire dans vos cantons „ des herborifations, qui ne pourront qu'ê„ tre abondantes & brillantes, fi je juge par les „ fieurs que répand'votre plume, de celles qui „ doivent naitre autour de vous. Agréez, Mada„ me, &faites agréer a M. le Préfident, je vous „ fupplie, les aflurances de tout mon refpeét." (Signé) Re nou. 17 Juillet. Hier, en conféquence de 1'invitation du Pere Vito, il s'eft trouvé chez M. 1'abbé Roulfier plufieurs auteurs & amateurs de mufique. Un Profefleur Francois a donné au Pere Vito un fujet de batfie, pour y ajouter un defius, une haute - contre & une taille. Le reh'gieux Fa fait en dix minutes. Ce quatuor a été exécuté par Mefiieurs Vandermonde de 1'Académie des Sciences, Benault,de Launay & le Pere Vito. Tous les auditeurs l'ont redemandé k plufieurs reprifes, . Enfuite lc Pere Vito a fourni un fujet au méme Profefleur, qui après un quart-d'heure y a renoncé. Le moine Poraigais, quoique fachant trés peu la languc franeoiie, a difcuté les principes de 1'haraionie 65 de la compofition d'une  ( ff* ) maniere trés fatisfaifante pour les auditeurs; eaforte qu'on ne peut plus douter des connoiflances de 1'dtranger en mufique, ainfi que de fes talens: il eft auflï profond dans fa théorie que dans la prarique. 17 Juillet 1781. ÏVI. le Marquis de Courtanvaux, le Tellier en fon nom, étoit non-feulement un protecleur des fciences, non-feulement un amateur,mais un favant-lui-même:il avoit établi a Colombe un riche laboratoire; il y avoit auffi un obfervatoire, qui bientót fut rempli des meilleurs inftrumens d'aftronomie en Europe: il y appella les plus fameux chymiftes, les plus grands aftronomes, des favans & des artiftes de tout genre. II avoit auffi des machines trés curieufes. M. Rouelle le jeune avoit été fon maitre en chymie & étoit devenu fon ami, ainfi que M. Camus qui lui enfeigna la géométrie, M. Jeaurat Ia gnomonique, Meflieurs Pingré & Meffier 1'aftronomie. Honoraire de 1'Académie des Sciences, il en auroit pu être membre comme fimple particulier. Cette compagnie defiroit avoir une frégate a fesordres, afin d'éprouver les montres marines deM. Julien le Roi: M. le Marquis de Courtanvaux, avec 1'agrément du Roi, lit conftruire Ia Corvette YAurore :il l'équipe;il prend a bord 1'jnventeur des montres, couronné depuis peu par TAcadémie; Meffieurs Pinsré. Meffier. Du- fault: il entreprcnd le voyage lui-même, & cette hardiefie lui fit infiniment d'honneur. 18 Juillet.  C 313 ) i3 Juillet. On fait que tous les fujets de IV péra ont recu déferrfes de fortir de Paris fans congé, le Gouvernement, comme 011 a dit, ayant déclaré qu'il leur continueroit leurs appointemens, méme pendant qu'ils ne jöueroient pas. C'eft a ce fujet qu'a été compofé par un plaifant le quatrain fuivant: Paffe que les aftenrs ne puilfent s'abfenter! On peut avoir foudain béfoin de leurs fervices. Mais qac devieridront les aftrices? On leur défend de s'éeaner! 18 Juillet. Le Sieur Pallebot a joué difféïens röies, travèfti fucceffivement fous le nom de Winflow, de Malfey, de Chcvalier de Saint Lubin. Sa familie, qui apprït de bonne hettre a le connoitre, le fit palier a 1'Ifle dc France, ou il fut garcon-chirurgien. Les détails de fa vie danscette ifié ne lui feroient pas d'honneur, non plus que les nioycns qu'il employa pour aller k Pondicbery; fes voyages au Bengale, fa conduite avec le Sieur Braver, Ingénieur de Calcuta; avec M. Ziegcnbalg, Gouverneur dc Sirampour, ' Etabliffement Danois; avec M. Taillefer, Gouverneur de Sinchurat, Comptoir Hollandois; fon retour en Europe; les fervices qu'il prétendit avoir rendus a la Compagnie des Indes, piuz obtenir d'elle des appointemens; fon voyage en Portugal, fon féjour a LLsbonne; fa fuite de Livourue, oü M. le Duc de Chartres avoit eu Ia ■bonté de 1'accueillir; fon paflage en Chypre k Tomé XFIL O  C 314 ) Bagdad, h Baffora, d'oü il alla dans- Pinde. II parut en 1776 chez Hyder- Aly-Kan, décöré d'une croix. M. Mayftre de la Tour étoit alors a la tête des Francois qui fervoiéiit dans 1'armée de ce Prince. Le Sr. de St. Lubin lui ayant été annoncé comme officier fupérieur, par le Sieur Houffé, Chef de la Loge de Calicut, il s'emprelfa de recevoïr cet avcnturier avec tous les égards düs au rang qu'il fe donnoit. 11 le préfenta au Nabab, auquel le Sieur de Saint Lubin fit préfent d'une tabatiere qui avoit appartenu au Duc de Cbaulnes, Ingrat envers fon bienfaiteur, il obligea M. Mayftre de luióter le commandement qu'il avoit & il fut réduit a exercer la cbirurgie dans le camp. De nouvelles perlidies le firent arrêter, jl fe fauva & fe rendit a Madras. II fe préfenta chez les Anglois avec des projets de conquête fur Hyder-Aly: ils réuffirent d'abord, mais le courage d'Ilyder-Aly le tira de ce mauvais pas & il forca les Anglois a faire la paix en 176S, Le Sieur de St. Lubin avoit obtenu, a Madras, la place de Commiffaïre départi pour débaucber des foldats Francois, Danois, Hollandois, Indiens & les réunïr aux forces Angloifes. II étoit alors, ou fe difoit tout Anglois; il écrivoit: „ je fuis Anglois en dépit du hafard de la naif- „ fance, car je me piqué d'être homme: demandcz a Martin combien de fois, dans le „ camp d'Hyder-Aly, i! m'a sppellé Anglois, „ entbóufiafte des Anglois: j'cn fals gloire, & s, me la ferai toute la vie. "  C 315 ) Sou objet étoit uniqueinent dc faire une grande fortune pour revenir dans fa patrie: ayant réuffi, il ofa s'embarquer pour 1'Europe. Le vaiffeau qui le portoit, toucha a 1'Ifle de Bourbon. Le Sieur de Sc. Lubin y débarqua, fous prétexte qu'il étoit mécontent du Capitaine. Sa conduite dans cette colonie & des dénonciations trés graves de fa conduite paffee détermiuerent ii le faire arrêter. On 1'envoya prifonnier fur le vaiffeau Ylndien. En arrivant en France , il fut transféré a la Baffille. Cette détention tourna a fon avantage ; fon procés ne fut point inlïruit par le défaut de témoins & par le crédit de fes proteéteurs fur ceux qui auroient pu parler; il obtiut fa liberté. Son efprit & fon argent lui procurerent des próneurs. B gagna la confiance de quelques perfonnes en place, il s'introduifit dans les Bureaux de la Marine; il fut chargé de quelques parties dans le département de Pinde & par ce moyen il eut fous fes yeux la plupart des papïers des Bureaux fur le commerce & la politique de 1'Afie. Tous les Mémoires adreffés a l'adminirtration en 1774 & 1775, lui furent remis, fur lefquels il en compofoit de trés féduifaus qui en impofoient aux Miuiïtres: pnur voiler la fource ou il puifoit, il répandoit adroitemeut le fïcl de la calomnie fur la conduite des officiers refpectables dont il s'approprioit les projets. On remarqua que dans le même tems la Cour de Londres étoit parfaitement informée des dépêches de nos Gouverneurs dans ITnde, O a  Tout s'applahilToit parle génie facile duSieur de St. Lubin: il donna des plans d'alliance & de commerce avec les différens peuples de 1'Indoftanjil fuppofa qu'il 'entretenoit des liaifons avec leurs Chefs; qu'il en connoiflbit a fond & le earactere & la politique: c'eft ainfi qu'il trompa 1'adminiflration , & qu'il obtint d'elle le titre d'Envoyé Plénipotcntiaire dans 1'Inde, & qu'il dé voila le ïi Octobre 1776 fur le Sartine, en uniforme , ayant le Cordon rouge & 1'Ordre du Chrift; il étoit ordonné de par le Roi, en vertu des pouvoirs & des ordres que S. M. lui avoit confiés ; il étoit ordonné a tous Francois, Capitaines , Subrecargues & autres qui touchcroient h la Cóte de Malabar dene s'expédier qu'avcc fon ngrément & d'être foumis a fes ordres. 11 lut enfuite les pleins - pouvoirs qu'il avoit de eréer des Confuls, des Agens, des Députés de. Commerce, des Capitaines de Port & demanda un falut de 21 coups de canon pour les ordres de S. M. & un fecond falut du même nombre de coups pour lui, comme Miniftre Plémpotem- tiaire Depuis il s'arrogca toute autorité fur le Capitaine & le vaifleau & par fes mauvaifes difpofitions eft regardé par M. de Ladebat comme 1'auteur des accidens du vaifleau & de fes pertes. Cependant revenu en France, fuivant le rapport de, fa miffion politique, cet aventurier fe vante d'avoir allumé Ia guerre dans ITndoftan, öü il prétend que c'eft fon génie qui a tout fait; que c'eft fon impiilfion qui a tout produit & que  ( m ) les viétoires d'IIyder-Aly & des Marattes foirf fon ouvrage. II s'eft affis, dit-il luï-méme , au Confeil des Marattes, &, fous le nom de Sahmez -:Panas, ou Prince des loix, il a imi pour' jamais cet Empire aux intéréts de la France. Cela n'a pas empêché qu'il n'ait été mis a la Laffille a fon retour' & il faut voir comnient il en fortira. 18 Juillet 1781. M. 1'Abbé Raynal avoit une penfion de vico livres fur le Mercure', fon décret & fon évafion le privent de cette faveur. Le Miniftre de Paris a offert a M. Garat de lui tranfporter cette penfion ; mais il a répondu qu'il ne favoit point s'enricliir des dépouïlles des vivans. 18 Juillet. La foire Saint Laurent que M. le Lieutenant-général de police a fait rouvrir & qu'il a a cceur de remettre dans 1'état brillant oü elle étoit autrefois, malgré la beauté de fon local attiroit encore peu de monde. Cette année on a imagiué une Redoute Chinoife , efpece de Colizée, de Wauxhall, fous des formes bizarres & nouvelles. II n'en faut pas tan't dans ce paj^s-ci de mode & de frivolité. Ce lieu ne desemplit point & non-feulement les filles y abondent, mais les femmes de qualité & toute la cour. Dernierement M. 1'Abbé Arnaud y étoit. C'ell un Académicien quolibetier, grivois, ordurier, qui} fans faire dc vers , fe permet quelqucfois des épigrammes dures, maïs falées: voici 1'improfnps tu qu'on lui attribue au fujet de la Redoute :> 0-3  C Sï3 > La voila donc cette Redoute Qu'a bon droit. tout fage redoute ? Charmant & funefte réduit Oü, pour peu que 1'on rime en oute,. Infailliblement il en coüte , Et le plus fouvent il èn cuit! 1,9 Juillet 1781. On parle beaucoup du réta* blifiement des Receveurs généraux des finances en tout ou en partie; on ne dit pas précifément encore fur quel pied il s'effecFuera, mais il paroit conftant que Mr. de Fleury s'occupe de cette befogne, & les intéreffés ont tous les plus grandes efpérances. Si le nouveau Miniftre des finances commence une fois a attaquer quelque partie du plan de fon prédéceflettr, on ne doute pas que tout 1'édifice ne s'écroule & que fes innovations n'éprouvent le fort de celles de M. Turgotdont il ne refle plus de vefliges. 19 Juillet. La réception de M. de Chamfort a en effet eu lieu aujourd'hui & le Prince de Condé, ainfi que Mademoifelle de Condé, l'ont honoré de leur préfence. Le difcours du récipiendaire a été mortellement long: il a duré une heure & n'a cependant roulé que fur deux:points : la Chevalerie Francoife, principal objet des travaux de M. de Ste. Palaye,l'académicien auquel ilfuccede; & Vamitiê rare qui fubfijloit entre le dêfunt £f un frere jumeau quHl avoit,. mort peu de tems avant lui. On a trouvé dans. tout cela un melange de philofophie, d'efprit  C 3"i9 ) de gaieté, dc fentiment, qui n'a pas produit fout Tellet attendu, a raifon de cette Iongueur mfoutenable & du ton langourcux & aiïaifljÊ du le'éteur. M. Seguier fe trouvant élu Direéteur par le fort, a répondu & a encore tenu une demi-heure fur le même fujet,. ce qui a mis le comble a Ia fatiété du public. M. d'Alembert, qui faifit toujours Yk propos , a lu une ïiötice fur le Comte de Clermont, ancien membre de cette Compagnie; ce qui amenoit naturellcment 1'élogc du Prince de Condé fon neveu, & S. A. déja fatiguée de PencenSque lui avoient offert tour-a-tour le Récipiendaire & le Directeur, a dü refpirer encore celui du Secrétaire; ce qui a paru lui repugner fortoDu refte, la notice fur le Comte de Clermont étoit affez curieufe par des anecdotes ignorées du public concernant l'admiilion de ce Prince a 1'Académie cc les relations qu'il a cues avec elle. Elle n'embraffe uniquement que cette partie de la vie. Ce qu'on a remarqué dans cet article ce font quelques vérités que le Philofopbe a eu le courage de dire & en même tems cette triftèflc continue dont il eft affecté en parlant de la Littérafure. On ne fait quelle nouvelle aflliction il éprouve ; mais il a déclaré que le regne des Lettres paffoit de jour en jour & que bientót elles auroient plus béfoin de confolations que de gloire,. II a lini par la lecture du Programme d'un Prix extraordinaire S3 annuel, propofe par 1'Aca' O 4  C 320 ) démie Francoife. Ce Prix trés bizarre mérite des détails particuliérs , qu'on ne peut offrir qu'avec le fecours du Programme. 20 Juillet 1781. Extrait d'une Lettre de Montpcllier du 7 Juillet. „ «Les Adminiftrateurs „ de 1'hótel-Dieu St. Eloy de cette ville, d'après „ une demandeide M. Necker ont profité de „ 1'occafión pour manifefter les principes, les „ regies & les détails de leur geftion. Ils ont, „ en conféquence, rédigé un Mémoire, dans „. lequel on trouve la plus grande analogie entre „ leurs opérations & les procédés de Madame Necker, une égalité fi parfaite entre le prix „ des journées de chaque malade de Fune & de „ 1'autre maifon, qu'il femble que les fonde„ mens du nouvel hofpice de Paris aient été „ puifés dans le monument aniique de la cha„ rité de nos peres." „ D'après les comptes des dix années de 1'hó„ pital St. Eloy, depuis 1770 jufques en 1779, „ il réfulte que le prix de chaque journée de „ malade fe trouve fixé a 16 fols 11 deniers, j, ,1'honoraire du médecin compris; & celle des „ malades de Fhofpice de Madame Necker eft de 16 fols 10 deniers; elle s'éleveroit a 17 fols „ 2 deniers, fi le médecin qui fait le fervice ,, gratuit, recevoit 1'honoraire affeélé a celui de „ notre hópital. " 20 Juillet. Extrait d'une Lettre de Grenoble „ du 30 Juin. „ Le relevé général qui a été yA fait fur les régiftres des paroifies dc tout Ie u Dan-  C 3*ï ) j, Üauphiné pendant J'année 1780, porte qu'il „ eft né dans cette Province 14007 garcons , y, 12743 filles; en tout 26750 enfans. II yeffc ,, mort pendant la même année 12666 hommes, „ 11983 femmes ; cc qui donne un total dc ',, 24649 perfonnes: enforte que 1'excédent des „ naiflances fur les morts eft de 2101. II y a „ eu 6069 mariages." 20 Juillet. Extrait d'une Lettre de Colongeslc 13 Juillet. „Le viliage d'oü je vous écris, eft „ a cinq lieues.de Geneve & elt mémorable pat' „ le fait fuivant. Voltaire paffa ici il y a envi„ ron dix ans. Le même jour un habile peintre „ s'y arrêta. Cet artifte, ce qui-eft rare, n-'a„ voit fur lui ni pinceaux ni palette: Ie gén ia „ fupplée a tont. EchaiuTé paria vue du grand „ homme qu'il rencontre, avec un charbon il „ le deffine furie mauteau de la cheminée d'une„ facon trés reffemblante. Peu de tems après- de jeunes étourdis méconnoiflant le patriar„ che de Ferney, s'égaient fur fa figtirè gró~ ,, tefque , & alloient la défigurer. Ils portoient déja. leurs mains facrileges fur cette tête véné„ rable, lorfque 1'hótcffe s'en appercoit & leur „ crie: c'eft Voltaire! Frappés d'un refpèét rcj, ligieux ils s'arrêtent & l'un d'eux prend la: „ pofte , voie a Geneve & ramene un vitrier 3, qui met le portrait a 1'abri d'une pareille in-„ fultc. II eft de grandeur naturelle & peut- être le plus rellëmblaut qu'on ait. On a mis. „ au bas ces quatre vers: O 5  C 322 ) Mem ceil le reconnok, c'eft !u!-même, c'eft lur Qui de la vérité fut le plus ferme appui! O toi! qui dans ces lieux viens mettre pied a terre, Trop heureux ,.ne pars. pas.fans contempler Voltaire!' si Juillet if%ï.. Le même citoyen qui m donné a 1'Académie des Sciences une fomme de12000 livres pour des objets d'utilité publique relatifs aux Sciences & aux Arts,a fait remettre a 1'Académie Franeoife par une perfonne publique & connue le Mémoire fuivant, en gardant l-'anonyme. „ A Meffieurs de 1'Académie Franeoife,. „ Meffieurs, ,, Un.citoyen qui aime les Lettres, & qui les „ croit utiles a Fhumanité, défire fonder un „ Prix en faveur, de 1'ouvrage de Littérature „ dont il pourra réfulter un plus grand bien„ pour la fociété; fermon , piece de tbéiltre,. „ roman, profe, vers, bifloire, traité dejurif„ prudence, réflexions morales, dilfertation-po„ litique,.. mémoire furies fciences ou fur les „ arts, recherches érudites , aucun genre „ n'eft exclu." „ Ce Prix fera obtenu fans être demandé, & „ adjugé fans examen; c'cft-a-dire,.qu'il fulfira „ que les juges dëclarcnt quel eft, parmi les. livres qui auront paru dans 1'année précéden„. te , & dont ils auront eu connoiflance, celui „ qui leur, paroit devoir contribuer le plus au w. bonheur temporel de Fhumanité. L'Académie „. décidera fi les ouvrages de fes membres. doL „, vent: concourir..."  C 323 ) Lc Citoyen qui a cor.cu cette idee, fnpplié „ PAcadémie d'agréer, 1'hommage qu'il rend aux „ Lettres, & d'être juge du Prix. Une fonune „ de douze mille livres eft depoiee, pour être „ employee en une rente viagere fur la tête du ,, Roi; & du revenu annuel il fera acheté une. „- medaille d'or qui formcra le Prix. Motifs de cette difpofition. „ Un géometre méprifoit une piece de tlida„ tre applaudie, parcequ'elle ne prouvoit rien;, „ ce géometre avoit ton: mais un citoyen aura: „ raifon, fi pour régler I'eflime & 1'intérêt que. „ mérite un livre, il demande quel bien em „ réfulte-t-il?je fais aujourd'hui cette queftion,, „ & c'elt a 1'Académie qu'il appartient de ré„ pondre. On a repréfenté les Lettres & les; „ connoilfances humaines comme un fléau ajotv „ té a tous ceux qui défolent le monde : ainfi; „ fouvent on a calomnié notre Religion, nor^ „ Loix & les lnftitutions les plus fages, & fi; „ le fort de 1'univers avoit changé fuivant nos, „ opinions, 1'imprudence de nos vccux. auroit. „ augmenté la maffe de nos maux. Les Lettres„ n'ont pas befoin d'apologie; mais les born„ mes qui les cultivent, peuvent,comme Ie la„ boureur Romain, mettreleurs prétendus poi*„ fons fous les yeux de leurs accufateurs." „ On prétend que notre nation eft légere & 3, frivole. Je ne me permets point d'en être le: „ juge ni le cenfeur: mais je vois'un peuple 93; oiüt déferter les monumens du génie poux O &  C 324 ) „ cotirir aux farces du rempart: je vois le muftiplier les éditions de romans médiocrement ,, intéreffans &foiblement écrits: un livre férieux & profond eft efiimé, mais n'elt pas lu. je „ vois les auteurs d'ouvrages qui doivent pafl'eiaux générations fuivantes , n'être connusy recherchés, fétés dans la fociété, que pouï „ quelques débauches d'efprit qui doivent les „ faire rougir de leurs fuccès. Auffi, tandis „ que la preffe gémit pour une foulc de brochures plaifantes , épigrammatiques, licencieu„ fes, il nous manque une Hiftoire de France „ complette & lifible, un Corps de Droit Public „ Francois , un Recueil d'expériences fur la „ nature de notre climat & fur fes influences» ,., Nous n'avons point de defcription du fol de „ nos provinces & des richefles qu'il renferme; „ richeifes que chaque fiecle décquvre fuccefii„ vement, & qui n'ont échappé aux fiecles pré„ cédens que faute de recherches, &C. Dans „ ce défordre, il faut que les chefs de la Litté„ rature difent a quiconque efl entré dans cette ,y carrière : En -voila le but; & a la nation r „ VMa, dans la claffe des gens de Leitres , „ ceux d qui vous devez le plus." „ Sans doute on objectera que ces vues font „ trop ^ grandes pour une fi petite difpolition ; „ car jamais on n'épargna un reproche a une „ aétion louable : mais vous ne penferez pas „ ainfi, vous, Meffieurs, qui, dans toutes .„ cbofes, confiderez lc raotif & les conféquem  C 325 5 L ces, & qui fövez qu'uu fait peu' important,., peut etre 1'origine d'un grand bien. Que le „ foible exemple que je donne foit fuivi! que „ tous ceux dc mes concitoyens qui jouiflent „ d'une fortunc fupérieure a la miemie, faffenf „, un facriftce égal au mien; & les Lettres, les„ Sciences & les-Arts trouveront des fecours* immenfes! " Cette difpofition extrömement bizarre a occafi'onné des débats dans le fein de ra Compagnie& elle y a apporté des reftrictions dont nous» donnerons le réfivkat. 22 Juillet 1781. Les Italiens ont donné avantbier la première repréfentation d7Ariane abariêonnêe, mélodramc dans le genre du Pigmaliow de Rouflbaü. Théjée forcé par les Atbéniens, abandonneAriane dans 1'ifle de Naxos. Cette jeune Princelfe, inftruite a fon réveil, par fes craintes &r par une Nymphe invifïble , du départ de fon amant, s'abandorme a toute fa, douleur & finif par fe précipiter dans la roer, pour y term'mer fa vie. Tel eft le fujet dc la piece Le plan comme on le voit % en eft fnnple & dénué d'action; auffi cette nouveauté doit en grande partie fon fuccès a la mufique, qui y.joue, pour ainü" di're, le premier rólè. Elle a paru d'un bout a 1'autre de 1'ouvrage, riclie', variëe, expreftive, & toüjours bien aftbrtie aux fentimèns des per? fónnages. Madame Vgrteuil, dans le röle d'A^ ti'aHe, qui eft'tres pcrable, a obtenu les applaus O 2  C r-5 ) diiïemens les plus vifs & les micux mérites.. II eft a défirêr que le muficien ,-M. Benda , 'enrichifle de nouveau ce théatre de fes produétions. 22 Juükt. Extrait d'une Lettre de Bordeaux du 17 Juillet. „ Puifque vous êtes curieux de „, fcavotr ou en eft notre Parlement, c'eft tou„ jours le même défordre. Quoique la Grand'„ Chambre foit compofée de trente juges envi„ ron, ils s'arrangent fi bien qu'ils ne font ja„ mais en nombre competent pour faire Arrêt. „ C eft une dérifion. Le Premier Préfident que „ le Roi dans fa derniere réponfe du mois de„ Février a chargé fpécialement de faire rmdre.„ te jufticeavéc exactitude , de veüïer fur' la „ Compagnie & que S. M. a rendu pcrfonnel. „ lement refponfable des troubles qui yfurvien" «ST* rC manqU£ pas d'aTC affidu lui-mê. „ che, 11 eft incroyable que le Chef de la Ma" £7, S end0me fl!r «i°n totale de.^cr^''1'9"11^"1 ^^lument: *i Juillet L'Académie Franeoife a recu & propofition dont on a parlé , avec toute lareconHOiflanee & 1'eftime que mérite le donaTeur • cV a les loix, fe permettre d'accepter la donaoon, qu'aux conditions fuivantes 10. Que parmi les ouvrages, utiles au bien de l'humamte qui auront paru dans le couran de chaque année.elle donnera la préférence a ceil  C T~7' O qu'elle jugcra le mieux fait ë? le mieux écrit',. Ce mérite devant procurer a 1'ouvrage un plus grand nombre de Leckurs , n'en remplira que: mieux 1'objet cCutilité que le donateur a principalement en vue- 2°. Que la Compagnie ne portera aucun jugement fur les ouvrages qui auront pour objet desmatieres de théologie ou de jurisprudence locale & contentieufe, ou celles dont s'occupe 1'Académie des Sciences (*), ou enfin les matieresd'Adminiftration & dc Politique, dont la dilcuffion ne feroit pas permife par lc gouvernement.. 30. Qu'elle ne jugcra que des ouvrages écrïts en langue franeoife, 1'auteur pouvant étre d'ailleurs ou Francois ou étranger.- 40. Qu'elle . pourra, fuivant que les circonflances lui paroitront 1'exiger , ou remettre Ie Prix, ou le partager entre deux ou plufieurs ouvrages ,. ou lc donner doublé.. 50. Qu'elle cxclura fes membres du Concours.. Le Donateur ayant approuvé ces conditions, 1'Académie a, d'une voix unanime, & de 1'aveudu Roi,fon augufte Proteéteur,accepté la donation propofée.. Elle annonce donc aux gens de Lettres, qu'a. k fin de Décembre 17812 elle adjugéra le Prix dont il s'agit, a celui qui aura donné au public C") Le menie Citoyen a donné ï 1'Académie des Saen. irae païelüe femme dc douze mille livtes pour des obj. d'utüité üubli^ie , relatïfs aux Sciences & aux Anb.  C p ) Fouvrage te plus mik t en fe couformant cPaiXleurs aux conditions expofées Ci-deftus Ce Prix fera une Médaille ri'or, de'la valeur de douze cèns livres* Le concours fera ouveit, & commencer du premier Janvier de la préfente année 1781 Toutes perfonnes , excepté les Quara'rité de 1 Academie, feront admifes a concourir Quand 1'Académre aura décerné ce'premier Prix elle en donnera tous les ans un femblable qui era annoncé par un femblable Programme! Elle auroit bien defiré de faire connoitre k Citoyen a qui les Lettres & Phumanité font redevables de cette donation; mais il a coiftam-ment perfifté a garder Panonyme ^ ai Juillet 1781. Extrait d'une Lettre de Lyon du 10 Juillet. Le 3 de ce mois.j'ai eu un plai,V firconuderable aune féance publique dc notre „ Academie ou il y avoit environ cinq eens„ fpeclateurs. Le grand Avoeat-Général Ser„ vant, aujotfrd'hui honoraire du Parlement de „ Grenoble, qui en eft devenu membre, pour fa' „ réception nous a lu un difcours fur les oro„ gres des icences & des arts, qui embrafiok. ,, fpécialcment par couféquent les éloges des „ favans & des. atfiftes. If y a fait ^ ^ ,, ceux des Mnnftres qui les ont plus favorifés -Sr f^»4,TS " tl' nEa ParIant de « deruier, il a mis „ tant dcraéhon dans les regrets de fa perte » q-u ü'a Pi- urer tout l-'audit. ure. "  ( 3*9 ) a3 Juillet. On efpere que le Sieur de Brrfeilhac, neveu du frere Cóme & membre du college dc Chirurgie, continuera a faire ufage du lithotome dont ce Feuillant étoit 1'inventeur; inftrument avec lequel il a rendu de fi grands fervices i Fhumanité pour la taille de la pierre, pendant fa longue vie, quoique trop courte encore. II eft mort a 79 ans. Le facheux c'eft que le Sieur de Bafeilhac a une fenfibilité rare, capable de faire tort afa dextérité: au contraire, fon oncle apportoit dans fes opérations un cceur de bronze, '• 03 Juillet. Extrait d'une Lettre de Metz du 19 Juillet. „ Le 14 de ce mois les trois Ordres „ de cette ville ont agréé le projet de Lettres ,. patentes pour 1'érection d'un Mont de piété; „ 1'on y prêtera fur gages fur le pied de, dix „ pour cent par année, comme cela- fe pratique. „ a Paris & en Flandre. " . 23 Juillet. Extrait d'une Lettre de Rotten du 15 Juillet. „ Dimanche dernier M. le Prince de „ Condé & M. le Duc de Bourbon, efcortés „ par la brigade de Maréchauffée , arriverent „ vers le foir dans cette ville. Ils trouverent „ hors de la ville les compagnies de laCinquan„ taine & des Arquebufiers rangées en bataüle , „ & furent complimentés a 1'entrée par le corps „ municipal. Ils defcendirent * 1'Archevcché, „ ou il y eüt grand fouper:. enfuite leurs Al„ tefles fe rendirent a la comédie qui ne com„ menca qu'a dix heures. Uue foule immenfe les y attendoit:. on admira leur bonte , „ leur affabifité & furtout leur patience d'enteu.-  ( 33° ) „ dre les plats éloges dont les régala le Sieur „ d'Herbois , premier acteur de ce fpectaele. „ C'eft un des grands malheurs de la Princi„ pauté que d'être ainfi obligé de faire bonne P, contenance a toutes les fadeurs qu'on vous débite...." 23 Juillet 1781. Extrait d'une Lettre de Limoges du ï3 Juillet. „ Madame la Marquife de ,, Mirabeau, iffue de la trés ancienne maifon „ de Pierre-Buffierc, premier Baron du Lhnofih, „ éibignée depuis plufieurs années de fes t.erres „ par les perfécutions de fon mari. les exils, „ les emprifonnemens qu'elle a fubis, ayant ob,, tenu fa féparation d'après 1'Arrêt du 18 Mai dernier & la jouifiance de fes biens, eft ventte „ le 9 de ce mois prendre pofleffion de fir j j, terrede Pierre-Buffiere. Tous fes vaflaux fe j 55 font emprefl'és de lui témoigner leur joie de | s, la revoir : les principaux habitans font monj, tés a chëval pour 1'attcndre fur la route de | j, Touloufe, jufques aux dernieres limites de la ' s, juftice. Ceux de Saint Hilaire Bonneval ont 55 été également en grand nombre fous les ar55 mes, pour,au fon des inftrumens,la faluer, sj ils avoient leurs drapeaux & étoient conduits 5» par plufieurs officiers a cheval, ayant a leur. 55 tête M. Landry du Masgardeauqui après une ?3 falve lui adrefla des vers trés mauvais & trés j5 plats, fuivant la coutume. La troupe enfuite 55 a efcorté la voiture de Madame la Marquife' f, pendant plus" d'un quart de lieue elle a pris- \  C 331 3 >5 congé après une feconde falve." „ A quelque diftance du pont de pierre de „ Buffiere, étoit poftée une troupe d'infanterie „ qui s'eft jointe au cortege: le Clergé & les' „ Dames attcndoient de 1'autre cóté du pont. „ M. Dumontjjuge de cette jurisdiclion , a ha» rangué Madame de Mirabeau avec beaucoup- d'éloquence & d'attendriffement fur fes mal„ heurs: cette fcene étoit vraiment pathétique „ par les larmes de joie qui couloicnt des yeux dc la Marquife. Le foir il y a eu des feux „ de joie & illumination volontaire dans toute „ la ville." Le lendemain Madame de Mirabeau s'eft „ rendue a fon chateau d'Aigue-Perfe, oü de „ nouvelles acclamations l'ont fuivie. ,, J'ai cru que ces détails vous feroient pré,, cieux a raifon de YAmi des hommes , qui doit„. crever de dépit " 24 Juillet. Suivant le relevé de la Généralité de Limogesjil ya eu en 1780,26123 nailfances,6823 mariages, 23071 morts. _ 24 Juillet. Un procés peu important en luimême a cependant occupé tout Paris ces joursci a raifon des acieurs:. il s'aghToit d'une femme de condition qui, logée chez un Magiftrat & ne payant point, avoit été attaquée par les voies ordinaires de la jufiice & pour prolonger avoit employé des moyens malhonnétes & de mauvaife foi, tels que dc fouflraire les meubles faifis, de les mutilex au point de ne pouvoir plus confer-  c 332 ) ver aucune valeur &c. Des gens de la cour s*? font trouvés impliqués comme complices & participans a ces infames procédés. II a été répandu des Mémoires fatyriques propres a ainufer le public. Enfin le 18 de ce mois eft intervenu 1'Arrêt fuivant: Enjoint auChevalier de la Gratige &a Bonnier de St. Cóme d'être plus circonfpects a 1'avenir. Fait défenfes a la Comteffe de Couftain, au nommé Corbin ci-devant fon cocber & au Comte de Lovvendal de récidiver, Condamne toutes les parties adverfes folidairement & par corps a payer au Préfident de Chavaudon tout ce qui lui eft du. Condamne toutes les parties chacune en 50 livres de dommages & intéréts, applicables, dtï confentement de M. le Préfident de Chavaudon, au pain des prifonniers. Supprime le Mémoire de la Comteffe de Couftain, interdit Monnaye (le Procureur dont il éft figné) pendant un mois. Condamne toutes les parties folidairement aux dépens. 24 Juillet i78r.L'Abbé d'Efpagnac, Confeiiter de Grand'Chambre & Rapporteur de la Cour , vient de mourir. L'Abbé de Breteuil vient de mourir aufii. On a eubien de la peine a déterminer celui-ci, malgré fa robe, a fatisfaire au cérémonial d'ufage: c'eft rAmbafliideur de Vienne qui a dü Fexbor. ie? fortement. Quant a 1'autre, ou prétend qu'il  C 333 ) ïTicint de chagrin, a caufe de la banquerante du Sieur Hifs, lc beau-pere de fon neveu. Ces deux ecclélialtiques laiflent de riches dépouilles a panager. 25 Juillet. M. 1'Abbé d'Efpagnac étoit Rapporteur de la Cour: M. le Fevre d'Amccour a de grandes prétentions a lui fuccéder & a cu provifoirement tous les papiers relatifs: les Clercs réclament & prétendent que cette place doit néceflairement appartenir a l'un d'eux , attendu que n'étant jamais de Tournelle, rien ne peut des diftraire des fonclions qu'elle exige. Malgré leurs eflbrts 011 croit que M. d'Amccour, intriguant trés actif, fort accrédité , lié avec beaucoup de grands Seigneurs , 1'emportera. 25 Juillet. De Marfeille le 14 Juillet. „L'Aca„ démie des Belles-Lettres, Sciences & Arts „ de cette ville, dans la féance publique du 25 „ Avril dernier, avoit annoncé que le Prix def- tiné a un Mémoire fur les caufes qui peuvevt „ diminuer la profendeur des Ports de Mar„feille, fur les moyens d'en prévenir les ef„ fets S5 d'y remédier, avoit été remis a 1'année „ procbaine. Cc prix confiftant cn une médaille „ d'or de la valeur de 300 livres, a paru trop „ modique, & le Commerce que le fujet inté„ reffe, de 1'autorifation du Marquis de Cas„ tries, Miniftre & Secrétaire d'Etat au Dépar„ tcment de la Marine, y a joint pareille fomme „ dc 300 livres; ce qui elf peu magnifique pour „ uuc pareille Chambre de Commerce."  C 334 ) r$ Juillet 1781. Quoique le Mdmoire da Madame de Couftain ne füt figné que de Me. Monnaye, fon Procureur interdit pour un mois, on a fu qu'il étoit de la compofition de Me. Falconnet, qui n'étant point fur le tableau ne pouvoit avoir cette faculté; ce nouvel échec ne contribuera pas a I'y faire mettre & Fon défefpere aujourd'hui de 1'y voir jamais infcrit. 26 Juillet. Extrait d'une Lettre de Mirecourt le 1 Juillet. „ Un officier d'artillerie du Régi„ ment de la Fere, du nom de Gaffendi & pa„ rent du fameux Philofophe de ce nom, ayant .„ paifé par cette ville, M. Francois de Neuf„ chateau, notre Lieutenant général, lui a .„ adrelfé la piece de vers fuivante, que je vous envoie dans fa primeur; elle eft d'ailleurs courte & je puis facilement vous la tranfcrire. 5, II faut préalablement vous obferver, afin d'é„ claircir davantage certains pafiages, que cette „ ville a quelque réputation pour la fabrique des bons violons & que nous avons encore les dé3, bris d'un temple confacré autrefoïs a Mercure. J'apprends qu'aujourd'hui la cité Qui jadis adoroit Mercure, Recoit dans fon enceinte obfeure Un nom depuis longtems cité A cóté du nom d'Epicuré, Prêtre d'Apollon & de Mars ■Gaffeudi, defeendant trés digne Du célebre Prétre de Digne, Arrivé au fein de nos reinparts  C 33.5 } :(Si pourtant de ce titre infigtte, 11 eft permis que 1'on défigne Des murs ouverts de toutes parts.} Par malheur ce climat fauvage Aux enfans du Dieu des beaux arcs Ne peut offrir aucun hommage. Mirecourt a fes violons Dont on eftime la cadence ; Mais c'eft a la belle Provence De produire des Apollons Et de les donner a la France. Du moins 1'écho de nos vallons llepete le bruit de leur gloire; Notre refpect pour leur mémoire Accroit le peu que nous valons. Ainfi de la fphere célefte jettant les yeux fur 1'univers, Le grand -Gaflëndi que j'attefte Recevra bien mes mauvais vers , Comme on cueille une fleur agrefte Qu'on trouve au milieu des déferts. 26 Juillet. Extrait d'une Lettre d'Auch du 3 Juillet. D'après le relevé de cette Généra„ lité, on voit qu'en 1780 il y a eu 34216 naif„ fances, 7896 mariages & 27671 morts." 26 Juillet. Le procés du Sieur le pjel eft a la vcille dc finir & le rapport eft comraencé au Parlement. II paroit deux mémoires de cet accufé, le premier oftenfibie & répandu dans le public: le fecoud plus détaillé, contenant l'hiftorïque de toutes les friponneries commifes dans 1'adminiftradon des affaires de la Maifon d'Ar-  C 336 ) tois, qui n'a été imprimé qu'en un petit norabre d'exemplaires & pour les juges feulement. Les gens intérefles a empêcher 1'examen & 1'approfondiffcment de ce myftere d'iniquités avoient déterminé le Comte d'Artois a demander au Roi 1'évocation du procés au Confeil; mais S. M. a rèfufé. 27 Juillet 1781. Extrait d'une Lettre de Hennes du 15 Juillet. Les ennemis de no.,, tre Evêque & il en a beaucoup, viennent de .,, répandre dans le public un manufcrit intitnlé „ Généalogie de la familie Eareau de Girac, .„ 1780 , avec les piéces au foutien. Suivant cette généalogie il defcendroit d'un .„ boucher d'Angoulême en 1562 & en feroit ar„riere-petit-fils. ,, Curieux de parvemr, il s'eft d'abord attaché au Duc deChoifeul,auquel ilrendit beaucoup „ de fervices en tout genre & furtout dans 1'ef„ pionnage: ce Miniftre le fit faire Evêque de „ Saint Brieux en 1766. j, Sa belle-btEur, jolie femme, n'a pas pen „ contribué a fon élévarion. Un jour le Prélat J} Barcau témoignant a fon confrère M. de Bel„ lefcife , Evêque de Saint Brieux après lui, qu'il n'étoit pas content de fon fort: celui-cl homme franc & plaifaut lui répondit: de quoi„ vous plaignez-vous? vous avez 150,000 livres de rentes ,un palais d loger un Roi une bel„ le-foeur, oh ! délicieufe, pour en faire les hon- nsurs? Cette même belle Dame a fait faire  C Ï37 3 ;, fon mari Marquis. ., On ne fait a quelle époque ni pourquoi les 5, Eareau ont pris Ie nom de Girac. „ En 1766 1'Evêque de Saint Brieux dcvenu „ Membre des Etats fe rangca du parti du Com„ mandant & le fervit chaudement durant tou„ te cette tenue trés orageufe; on le regarde „ comme le rédacteur de la fameufc Proteftatiou „ des 83 Gentilshommcs. „ En 1768 les Etats'affeniblés extraordinaire„ ment en 1'abfence du Commandant, qui comp„ toit fur JEvêquc dc Saint Brieux dans la ville „ duquel ils fe tenoiént, ce Prélat-fentant baif„ fer le crédit du Duc d'Aiguillon fon protec„ teur, 1'abandonna & fut un des plus ardens „ inftigateurs des repréfentations de la Nobleffe,, „ qui porterentle dernier coup au Commandant. „ Devenu Evöque de Rennes en 1769 & ré, „ compenfé ainü de fa perfidie, il s'eft conduit ,, avec le même efprit d'aftuce fur ce théatre „ plus brillant & a varié fuivant que fon intérêt „ 1'exigeoit: tantót zelé partifan de 1'ceuvre du „ Chancelier, & puis afFeétarit le plus pur pa„ trio'tifme dans 1'affaire de M. Defgrée, il „ s'eft de nouveau liyré a la puiffance & au „ crédit; il eft devenu tout Duras. C'eft ce qui „ a donné lieu aux recherches du pamphlet eii „ queftion, non-feulement fur fon origiue ,mais „ fur fa.vie entiere. On y trouve des anecdotes „ biftoriques trés curieufes & accompagnées de „ preuves qui en conftatent la véracité. " Tome 'XVII. p  ( 33§ 3 27 Juillet 1781. Voici la note que le jeune Freron ofl'roit de mettre dans une de fes feuilles pour correctif a Fendroit du compte rendu dc la piece du Jaloux fans Amour de M. Imbcrt, qui a caufé tant de fcandaie dans le tripot comique & excitc la vive réclamation du Sieur Defcffarts. „ Nous apprenons que Fcxprellion de Ven~ triloque dont nous nous fommes fervis a Fé„ gard de Mr. DefciTarts 1'a mortifié. Notre in,, tention n'a jamais été de 1'offenfcr ni de lui „ dire rien dïnjurieux , comme il s'en convain- era aifément a Fouverturc du premier Diéti,, onnaire." Le Mngiftrat avoit trouvé Partiele bien ; mais Je Supérieur des comédièns a jugé que ce n'étoit pas fuffifant, que c'étoit a Foffenfé a difter les termes de la réparation. Ce a quoi le journalifc n'a pas voulu acquiefcer: interea patitur JuJlus & les feuilles reftent fufpendues. Le Sieur Panckouckc intrigue beaucoup pour faire fuppritner VAnnée Littéraire & 1'annexcr a fon Mercure. Tout le parti des Encyclopédiftes le feconde & il eft bien a craindre que cela ne tourne mal pour le pauvre Freron, 27 Juillet. Frere Cóme, originaire d'une familie nommée de Bafeilhac, qui exercoit la chirurgie, étoit né dans le Diocefe de Tarbes. Après avoir appris dans la maifon patcrnelle les élémens de fon art, il alla fe perfecbionner a Lyon cliez un de fes oncles, d'oti il vint Pa,  C 339 ) ris. II s'attacha aux meilleurs maitres & aux hópitaux. II fe lia bicntót avec les Chirurgicns les plus célebresde la capitale, MM. Duverncy, Petit, Boudou, La Pcyronie , Morand , Guerin, Hevin, Gautier, Levret, & il en demeura confiamment Pami. On juge bien de-la que ces hommes ccqebrcs ne voulurent entrer pour rien dans les perfe'cutions qu'il éprouva depuis de la part de leur corps. 11 s'attacha a M. 1'Abbé de Lorraine, Evêque dc Bayeux, & fut chargé du foin de Fhópital de cette ville. A la mort dc ce Prélat, il entra aux Feuillans & fe voua au fervice des pauvrcs. Ses fuccès ne tarderent pas a lui faire une réputation. II fut recherché des grands & des riches: on voulut lui.faire quitter fou ordre; mais il ne fe fervit de la proteétion des uns & de Populen.ce des autres que pour le foulagement des malheureux. II forma un hospice, ou il entretctmt conltamment un nombre de malades: indépendammcnt des autres opérations chirurgicaIcs, il a fait plus dc mille tailles. II opéroit trés' bien; on ne lui a reprocbé avec jultice que dene pas préparer alfez & de ne pas fuivre le traitement avec tout le foin qu'il exige. Le Frere Cóme a foutenu a fes frais pendant nombre d'années Fétablilfement dont nous par- K.uo, uuu content a aammiltrer les fecours de fon art, il foulageoit encore pécuniairement les indigens & leur donnoit de quoi retoumer commodement dans leur province: auffi a fa mort la P 2  ( 34o ) porte du cloitre des Feuillans a été trois fois forcéè par la foule du peuple venant pleurer fur fon cercueil. II étoit né avec im génie actif & du goüt pour les arts. II les connoiifoit tous: il a beaucoup vécu avec Meffieurs de Reaumur, d'Qfembray, Gcoffroy, du Hamel, de Juffieu, de Parcicux, de Fouchy, Winfiow, II étoit naturcllement brufque & dur a l'extéricur & cette derniere qualité lui étoit elfentiellc pour opérer, mais au fond tres bumain, trés compatillant. II feroit difficile qu'un homme aufli occupé füt trés religieux, cependant il fuivoit autant qu'il pouvoit les regies de fon ordre & fatisfaifoit de fon mieux a 1'extérieur. Quelques gens prétendent qu'il avoit de 1'enjouement, qu'il étoit fort tolérant & qu'il avoit une tournure d'efprit fine & féduifante. Peut-être en effet avoit - il eu ces qualités, qu'on ne confcrve gucres au milieu d'occupations pareilles aux fiennes & jufques a 1'age de 79 ans, oü il eft mort, 28 Juillet 1781. Quoique le rapport de 1'affaire de le Bel foit commencé, ainfi qu'on a dit, le Parlement par une faveur infigue , hier 27, a disjoint le procés en ce qui concerne Me. Elie de Beaumont,l'a décbargé des accufations contre lui intentées ;\ la requéte deM. le Procureur-? Général, a déclaré Pyron non reccvable dans fa plainte, Fa débouté de fa demande en 20,000 livres de dommages & intéréts, permet a Me.. 4e Bcaumont .de faire imprimer& a.ffichcr 1'ArrcJ;:  C 341 ) partout oó bon lui femblcra, condamne ledit Pyron aux dépens. • Les Conclufions de Meffieurs les Gens du Roi étoient les mêmes que ce difpoGtif & ont été données d'une voix unanime au Parquet, ainfi que cet Arrêt rendu a Funa'nimité des trcn« te-huit Magiftrats formant la féance. Me. E'fie de Beaumont n'a point obtenu de dommages & intéréts, paree qu'il n'eil a point' exigé, même applicablcs aux pauvres; ii are-' gardé fon adverfairc comme ne méritant point qu'il s'abaiifat a cette demande. 29 Juillet. Extrait d'une Lettre de Trevoux du 5 Juillet. „ On compte dans cette Généra„ lité pendant le cours de 1'année derniere 1169 55 naiffances, 266 mariages, & 1211 morts." 30 Juillet. Le réfultat de la nouvelle Requête du Sieur Ie Bel eft de prouver que n'ayant dW" tres accufateurs fur tous les délits mentionnés au procés que les chefs de 1'Adminillration de M. le Comte d'Artois, qui avoient intérêt de perdre le fuppliaiit pour 1'empêcher de divulguer toutes les déprédations commifes dans 1'administration des finances de ce Prince, déprédations qu'il a été néceffité de révéler, ils ne peuvest le charger d'imputations qui ne doivent être regardées que comme des récriminations odieufes de leur part. L'endroit le plus fingulier de cet écrit eft celui ou le Sieur le Bel cite une note de créance p'erfonnclle h Madame la Comteffe d'Artois d'une P 3  ( 34* ) fomme de plus de 80,000 livres, qucle Prince avoit confenti en 1777 de faire acquitter de foil irefor & dont les parties prenantes fe trouvent toutes fous des noms fuppofts. On parle, au furplus, d'un Mémoire en regie du Sieur le Bel, par Me. Blonde Avocat, dont on a déja dit un mot, oü 1'on dévoile des iniqui* tés fi grandes de la part des Chefs de 1'Admi- niltration de S. A. Royale, qu'on n'en a donné des exemplaires qu'aux juges. 30 Juillet 1781, A rafi'emblée de 1'Académie Pvoyale de Peinture & de Sculpture tenue le r>8 de ce mois, le Sieur Philibert Louis de Bucourt, de Paris, a préfenté plufieurs tableaus dans le genre familier: Ja compofition de tous les fujets a été jugée bien ordonnée & la couleur de cet artifte aimable & vigouretife en même tems. Le même jour le Sieur Paul-Jofeph Sauvage, de Tournai en Flandre, a foumis au jugementde 1'Académie fes ouvrages choifis dans le genre de natures mortes, comme bas-reliefs & autres. L'imitation naïve du vrai lui a concilié Meffieurs. Ces deux artiftes ont été admis dans la clafib des Agréés. 30 Juillet. Le Premier Préfident du Parlement de Bordeaux a ordre d'être le 8 du mois prochain a Verfailles & d'y porter avec lui les Regiltres qui font mention de tout ce qui s'eft paffé depuis la réception de M. Dupaty, & il a été auili adreflé a la compagnie ordre de rendre la juflice.  C 343 ) 30 Juillet. On eft revenu au projet de faire provifoire pour 1'Opéra & au même local dont il étoit déja queftion. Le Sr. ie Non" Architecle, s'eft engagé pour une fomme de 200,000 livres, de conftruire fur ce terrein qui lui appartient, fur le boulevard prés la porte Saint Martin, une falie complette a quatre raugs de loges , avec les dhnenüons qui lui ont été prefcrites & de la livrer entierement terminée de facon que le fpectaele puifte y être donné le 5 Octobre procbaii:. Pour aflürer d'autant plus cet arrangement, il a GonféntiÜ ce qu'on appelle un déditde 24,000üv. On s'eft déterminé a cet arrangement pour plufieurs raifotts. -On s'eft bieutót appercu paria différencc des recettes, que les concerts 112 pouvoient fuppléer a I'opéra: d'un autre cóté , la plus grande partie des talens qui font le charme de ce fpectaele, bemande pour i'entretenir un exercice journalier, & les concerts ne peuvent ofl'rir qu'une foible reflburce & cet égard pour le chant. Le rétabliftement de la falie ne peut être que 1'ouvrage de plufieurs années: il eft douteux,qü'on eüt obtenti 1'agrément de jouer I'opéra fur ia falie des Tuilleries , & pour la mettre en état 011 ne pouvoit éviter la plus grai> de dépenfe, ni une perte de tems confidérable. II falloit attendre que cette falie füt libre, il falloit ree uier les loges, aggrandir le théatre, réparjer.... L'offre du Sieur le Noir pré vient ces divers inconvéniens; mais fon emplacement eu offïe d'autres, 1'éloignement, la diflk&ité pour P 4  ( 344 ) les gens de pied de fortir en hiver, ou de fe procurer-des voitures.... Enfin les amateurs préfereront encore ces dégoüts a la douleur de fe voir privés de I'opéra pendant le cours enticr d'un hiver. Ce projet en outre ménage la dépenfe, fi, comme on 1'atfure, les dimenfions de ce théatre font prifes de maniere que toutes les décorations qui y feront adaptées pourront fervir fur lc théatre dc la falie a conftruire. Enfin cette falie ne fera point détruite, après-la conftrucrion de 1'autre, & pourra fervir au befoin , nonfeulement dans des cas comme celui-ci, & pour les deux autres fpectacles , mais même ofiiïra ces iacinr.es pour aes retes puDiiques. 31 Juillet 1781. Hier a été jugée 1'affaire' du Sieur le Bel, mais non définitivement. H a été élargi en état de décret d ajournement perlonnel, avec un plus amplcment informé de fix mois: il a été prononcé plufieurs décrets , dont le détail n'eft pas bien connu encore: on fait feulement que Pyron en a un de prife de corps & le Sieur Radix de Saint-Foix d'ajournement perfonnel. 31 Juillet. M. le Duc de Chartres a donné fon défiftement des Lettres patentes qu'il avoit obtenues pour 1'aliénation du terrein du Palais royal & il 1'a fait fignilier a tous les propriétairts des maifons oppofans. Cela n'a pu leur 'donnés qu'une joie momeiitanée: on afiurc que le Prince u'en perfifte pas moins dans 1'exécution de fon projet, fans aliénation de terrein, & que dès demam 011 commencera a abattre des arbres. 31 Juiltet  C 345 $ 31 Juillet. On revient fur Ie quatuor du Pere' Viio. Un Sieur Guerin, apprentif éfevè en mufique, fe domiant pour le difciple du Sieur Golfec, critique ce mo-rceau de compofition, renv pli de plufieurs- irrégularités. Son maitre vient a 1'apptii & en faifant profeflion d'eftiine pour les talens du Religieux Portugais, dans une Lettre en date du 18 Juillet, inférée au Journal de Paris, pulvérife fon quatuor & fubftitue quatre manieres difrérentcs d'en titer parti. 1 Aoüt. II y a de tems en tems aux petits1 fpecracles des pkces qui méritent' d'être excep-1 tées de la foule & qui attirent même les con-noifleurs les plus difficiles. De ce nombre font' aux Variétés amufantes , Jerome pointu , & le' Fou raifonnable: la première furtout elf un petit' chef-d'ceuvre dans fon genre & le Sr. Volange y jotie avec une perfection fans exemple : quoique fon róle foit trés long, puifqu'il rede fur le théatre depuis le commencement de la feconde'. fcene jufques a Ia fin, il ell tellement transformé dans le perfonnage qu'il repréfente, qui eft un. Procureur, qu'il ne s'en écarté pas un inflatie, & il fe renferme dans les bornes du naturel le' plus vrai, fans fe permettre la plus légere cartcature. Le Sr. Préville ne pourroit jouer mieux & vraifemblement joueroit'plus mal, en ce qu'il charge & il en eft convenu modeftement - lui-même. • r Aoüt. En ePfet on a commencé auiourd'hui; & «wttrc la cohvu.'c dans la rangéc darbij qui, P 5 > ~s -  C 346 ) bordc le cóté des maifons de la rtie de Ruchelieu : ce qui a excité une défolation générale parmi les propriétaires & les amateurs de cette promenade , en ce que ce début confirme lc bruit que M. le Duc de Chartres perfifte dans 1'exécution de fon projet. 1 Aoüt 1781. On ne peut douter aujourd'hui que le Tableau de Paris ne foit en effet de M. Mercier. Mais il convient lui -même qu'il n'a entrepris cet ouvrage que comme une fpéculation pécuniaire & une tftchc qui lui avoit été impofée par fon imprimeur de NeücMtel. Celui-ci étant venu a Paris fans précaution & fe trouvant muni vraifemblablement d'une quantité d'exemplaires du livre, a été arrêté, moins pour 1'ouvrage en lui-même que pour avoir 1'on aveu de 1'auteur; ce a quoi il s'eft refufé généreufement, déclarant qu'il tenoit le manufcrit d'un Quidam qu'il ne connoiffoit pas & qui eft venu le lui apporter. Le livre ne méritant aucune recherche ultériere, 1'étrairger a bientót été élargi & eft reparti pour Neuchatel avec M. Mercier. 1 Aoüt. 1/abelle Houfard, parade en un aéte & en vaudevilles de M. Desfontaines , a été jouée hier aux Italiens pour la première fois avec un trés médiocre fuccès. Le fujet en eft trés fnnple. Cmur de Lion revient de fon Régiment pour époufer 1/abelle: celle-ci veut s'affurer de 4fc.la tendreffe de fon amant; elle fe déguife en houfard , recoit d'une enchantereffe une.épée avec laquelle on doit néceffairement vaincre foa  C 34? ) ennemi, & fe préfente a Cceur de Lion comme fon rival. Ils mettent 1'épéc ft la main, & la viéloire fe déclare en faveur cYI/abelle, qui récompenfe par le don de fa main 1'amour de fon cher amant. II y manque cette gaité ou plutót cette folie continue qui doit faire 1'eü'ence de feinblabtes fitcéties. 1 Aoüt. Extrait d'une Lettre de Riom du 25 Juillet. „ fi y a cu dans cette Généralité pen„ dant 1'annéc 1780, naiifances 27445, ïnaria„ ges 6090, morts 21766." 2 Aoüt. II faut ajouter aux Décrets prononcés lundi dans 1'affaire du Sieur lc Bel, que Nogaret a été décrété d'ajotirnement perlbnuel , que les béritiers Balbxrdont été mis bors de cour fur la rcquète préfentée en demande de réparation d'honneur; ordonné que les termes injutieux contre le Bel fêroient rayés dans cette requête. 2 Aoüt. Le Sieur le Noir fait travailler la nuit a la conltruction de la falie qu'il a entreprife , pour tenir 1'engagement qu'il a pris. II a obtenu par forme de fupplément du prix , le privilege durant dix années, lorfque I'opéra fera tranl'porté a fa vraie deltination, de donner dans cette Salie des fêtes publiques pour fon profit particulier. 3 Aoüt. C'eft avant-hier que les fêtes pour 1'arrivée du Comte de Falckenftein ont cu lieu au petit Triauon -: on lak que c'eft la Reine cllemêmc qui arrète la lifte des cotutifans admis au P 6  ( ) fpectaele ï c'eft Sa Majefté qui recoit a Ia ports & fait placer. Ou a joué VIphigénie en Tauride de M. le 'Chevalier Gluck, & Fexécutión a été parfaite.: il y a eu bal, illumination générale. 3 Aoüt 1781. Suivant ce qu'écrit M. 1'Abbé Raynal a un de fes amis a Paris, entre les diverfes confolations que dans fon infortune 1'Europe entiere & les plus grands Potentats fe font emprelfés de lui prodiguer, il a feu diftinguer celles de Pamitié &y attacher tout leprix qu'elles méritent. Du refte, il eft toujours a Spa, oü le retieut le Pi 'irice Henri de Pruffe, qui a exigé qu'il y refhlt auffi longtems que fon Akelfe Royale. Il> eftbeureux & tranquile, paree qu'il n'a aucun reraords: s'il n'avoit point encore écrit les grandes vérités qu'il a publiées , il profiteröit du loifir qu'il a pour les répandre & les configner a la poftérité. Enfin il eft toujours incertain de 1'afyle qu'ils éhoifira entre ceux qu'on lui ofr're & il paroit qu'il préfére Bruxellcs. 3 Aoüt. M. de Saint-Foix a été obligé de fedéfaire depuis fon décret d'ajournement perfonnel de fa charge de Surintendant des finances, tótimens, arts, mannfactures, jardins & gardemeubles chez M. le Comte d'Artois; c'eft un M. de Verdun, neveu du fërmier général de ce nom, qui le remplace. On avoit fait préalablement de nouveaux efforts. pour ie fdtiftraire a Ia jurrsdiction du Parle-  C 349 > inent, mais le Roi a pcrftfté a dire que lc Pai> lemeiit étoit inftitué pour juger les fripons & qu'il falloit laifler tm libre cours a la juffice. Ce maguifique Seigneur foutient de ion mieux cette humiliation. II a fait batir a fa fuperbe maifon de Neuilly une charmante vacherie pour y loger, avec deux vaches, fa maïtrefle Mlle. de Saint Albans , qui fe meurt de la pokrine & tout le monde va voir ce lieu par curiofité. On fait que c'eft un remede imaginé par nos Doctcurs modernes pour les pokrinaires , de les faire habiter avec des vaches, 4 Aolt. La piece dc Jér ome pointu, qui pafte pour être du Sieur Volange, eft de 1'auteur ordinaire de ces petits fpectacles,. ci-devant Abbé Robinot, aujourd'hui M. Robinot dc Beaunoir. On veut que 1'hiftrion lui en ait donné 1'idée & qu'il n'ait fait que 1'exécutciv Quant au Fou raifonnable , on 1'attribue aflez. gcnéralement h M. Cailhava: on ne fait pourquoi il s'en défeud ; car elle ne lui auroit pu. que faire honneur fur un autre théatre: quoique moins parfaite dans ce genre, moins gaie que 1'autre , il y a cependant plus d'intrigue & plus. dc vigueur. 5 Aoïit. Le Sieur le Quesne, toujours zelé pour fon maitre Linguet, & attentif a faifir les. occafions cle travaillcr a fon élargiffement, a cru que la venue de 1'Empereur cn France étoit une circonftance favorablc; cn conféquence,après en svoir conforé avec divers partiians & amis dik P Z  ( 35° ) journalifte, il s'eft transpórté a \rcrfailles au mr> ment oü 1'Empereur y eft arrivé; malheureufcment il n'a pu parvenu encore k voir cc Prince, il n'a parlé qu'a fon Ambalfadeur. II écrit qu'il a eu une lueur d'èfpéranCe; mais que la cabale eft devenue fi forte contre fes follicitations, qu'il défefpere de réuflir. Cependant il ne desempare pas & ne veut avoir rien a fe reprocher. II fout conclure au moins de fa démarche, que M. Linguet, dont on n'cntendoit plus parler, eft toujours exiftant. Voila lc onzieme mois de fa détention qui court: on fait qu'un homme cn place a dit depuis peu en parlant a un journalifte qüi s'étoit mis a dos le Maréchal Duc de Duras: „ prencz-y garde , vous devriez favoir combicu „ ce Seigneur eft redoutable & implacable dans „ fes vengeances. " Ce qui induiroit alors a croire que c'eft en effet le Maréchal qui eft la caufe de la détention de Pécrivain des Annales. 5 Ao'it 1781. M. de Mouvillc eft un riche particulier de cette capitale , qui , comblé de ^ous les dons de la nature , y a joint tous les talens que 1'art lui pouvoit procurer, & pourvu ainfi des diverfes chofes capables dc rendre en apparence un homme hcuretix, eft cependant le pms ennuye mortel de i dans la marche, dans 1'imbroglio, peu de liaifons entre certaines fcenes, 1'inutilité même de quclqucs-unes pour 1'aclion, un défaut de vrai-. fcmblance dans plufieurs incidens; enfin on a trouvé des longue urs, principalement dans les, deux deraiers aéies.  C 357 ) La piece a été fupérïeurement jouée par ltS Sieur Clairval& Madame Verteuil remplilfant les premiers róles&les faifant finguliercment valoir. L'auteur elf M. de la Chaboiffiere, qui, par fon talent & fa moiicltie, mérite d'être encouragé. 9 A: tli. D- pu s le commi-ncement de ce mois il vient de s'iriuituer a Ldlc une feuille intitulée, Annonces, Affiches, Nouvelles cj? Avis divtrs de la Province de Flandre, concernant tout ce qui peut l'int rejjer. Elle doit paroïtre chaque vendredi & aura huit pages in 40. Elle a pour épigraphe ce vers d'Ovide: En ego leetarum, venio tihi nuncia rerum. Si le Profpectus eft bien rempli, elle fera fans contredit plus inftruétive, plus amufante & plus gaie que les autres. La première du trois Aoüt n'a rien de bien piquant encore. 9 Aodt. Extrait d'une Lettre de Befancon du 28 Juillet. ,, On a compté dans cette Généralité „ pendant le cours de 1'année derniere 18528 naitfances, 6149 mariages & 19622 morts." 9 Aoüt. Par 1'Arrêt du Confeil dont on a parlé, les cinquante-deux députés de 1'anemblée Provinciale de laGénéralité de Moulins,nommés le 1 Mai 1780, font autorifés a nommer neuf Syndics & Procureurs fondés, favoir trois Ec-' cléfialtiques Bénéliciers, trois Gentilshommes & trois dans lc nombre des Bourgeois Notables , dont trois du Bourbonnois, trois du Nivernois & trois de la Marche. i Lans leurs délibérations les voix feront comp«!  ( 358 ) tées par ordre & non par tête. 10 Aoüt 1781. On a fait avant-hier au foir en préfence de M. le Lieutenant Général de Police, & de Meffieurs les Prévót des Marchands & Echevins, le premier effai de la Pompe d feu établie d Chaillot pour fournir de Veau dans tous les quartiers de Paris. Cette Machine exécutée par M. Perrier , avec Pintelligence fupérieure qu'on lui coimoit, & d'ailleurs modeléc fur celle de Londres, a élevé & verfé une trés grande quantité d'eau, dans les réfervoirs pratiqués fur la hauteur de Chaillot, a 110 pieds du niveau de la riviere. Les Magiftrats & les fpeflateurs ont-témoigné une graijde fatisfaétion de la réuffite. 11 eft a défirer qu'un établifTement auffi évidemment utile foit bientót porté a toute la perfeétion dont il ell fufceptible. 10 Aoüt. La comédie du Chirurgien de Village, piece nouvelle en un aélé & en profe , exécutée ce foir pour la première fois par les comédièns francois, n'a. pu aller jufques h la fin. Malgré fa brieveté elle a paru fi longue que les acteurs ont cédé, par refpect, a 1'ennui du public , & ne l'ont point achevée: il eft par conféquent inutile d'entrer dans aucune efpece de détail fur 1'inrrigue & le dialogue de cette comédie. ^Elle devoit étre fuivie d'un divertifiement qui n'a pas eu fieu. On 1'attribue & un M. Simon, Chirurgien. 10 Aoüt. Le Pere Vito 11e s'eft pas tena pour feattu par M. Goflcc, & il a inféré aujourd'hui  ( 359 ) dans Ie Journal de Paris une Lettre pour fa défenfe, oü- il repoulTe vivement 1'attaque de fon adverfaire. II n'eft que des gens trés exercés dans la compofition qui puiflent juger de cette querelle, fort ennuyeufe pour tous les autres. 10 Aoüt. Depuis la dcftruction du Palais royal, le jardin des Thuilleries qui, malgré fa beauté, étoit abandonné, reprend fa fplendeur; la foule y abonde & il eft aujourd'hui le théatre de ces fccnes bifarres ou ridicules , inévitables dans les lieux publics & propres a amufer un moment, a diftraire de leur ennui les oififs dont cette capitale abonde. Trois évenemens de cette efpece s'y font palfés dimanche & font encore Pentretien des cercles. Un jeune homme y a paru dans 1'après-dinée avec un habit, vefte, culotte & bas de couleur de merde d'oie; il avoit la bourfe & les fouliers de la méme couleur & étoit poudré d'une poudre femblable: ce qui Fa bientót fait entourcr cc obligé les Suiffes de le prier de fortir. A cet original a fttccédé une Dame fort bien mife, en Levite & en chapeau, mais tenant fon chapeau a la rnain a la maniere des hommes , Fótaiit & le remettant alternativement: la fingularité du fpectaele a porté le peuple vers elle & les SuilFes font venus lui faire le méme compliment qu'au jeune homme. Enfin un troifieme perfonnage ayant rencontré une jeune femme avec un homme en têle a tête , a donné publiquement une paire de foufflets a  C 36° ) Ia première; fcandale plus grave, qui 1'a fait aritëter & conduire au chateau. II s'eft excufé tout haut, prétenc ant que c'étoit fa femme quis'étoit abfentée depuis plufieurs jours, féduite par ce galant , & qu'il n'avoit pu fe refufer a cette correction. 11 Aoüt 1781. C'eft le Roi lui-.même qui a dit au neveü du Comte de Grafie, lorfqu'il lui a apporté les drapeaux de Tabago, & s'eft écrié: 55 qu'eft-ce que c'efi que ces loques que vous „ inapportez-lü?'" Ce qu'a rendu fort fot cet officier, s'attendant k quelque re'compenfe. S. M. a témoigné, au contraire , ainfi le peu de cas qu'elle faifoit d'une pareille conquête & fon mécontentement que l'oncle avec une auffi belle armee navale n'eut rien opéré de mieux. Ii Aoüt. Extrait d'une Lettre de Saint Quentin du 28 Juillet. „ M. le Comte de Falckenfteiti vcnant de Bruxelles , accompagné du Général Tercy, a quitté la grande route k deux lieues de cette ville pour aller voir le Canal fouterrein qui doit joindre la Somme a 1'Efcaut. II a été recu a 1'entrée de ce canal par M. d'Agay, Intendant de Picardie, accompagné de M. Laurent de Lyonne, Directeur des Canaux de Picardie & de Fiandre; de M. de Ia Gatinerie, Ingénieur de la Marine , & de M. Rigaud, Phyficieii de la Marine. L'illuftre voyagcur dcfcendu dans le canal foutcrrain , Fa parcouru en bateau, fur une Iongueur de plus de trois eens toifes, jufques a un mot> ceau  C 361 ) esm exëGüté en grand, & dans les dimenfions que tout le canal dok avoir. M. lc Comte de Falkenftein en arrirant a la galerie s'eft exp'rimé fur cet ouvrage en ces termes: „ je fuis fier ,, d'être homme, en voyant un de mes pareils „ haagteer & exéeoter un ouvrage aufli vafte „ & auffi hardi. Cette idéé m'élcve 1'ame. " Pendant deux heures & demie qu'il a employées a vifiter dans le plus grand détail cet ouvrage, a faire des queftions & a dilferter en connoiffeur' il n'a celfé d'admirer & a flut feulement -une objection fur quelques retranchemens poffibles des dépenfes, quant a la magniiicence des dimenfions de ce fuperbe établifiement. M. le Comte de Falkenftein s'eft furtout étendu avec complaifance fur Pufjlité du canal en tems de paix, comme cn tems de guerre, pour le commerce de la France & des Pays-bas Autrichiens. II s'eft enfuite rendu fur le Port de Saint Quentin, pour y voir la jonéïion dc Fancien canal de Picardie avec le canal fouterrain. 12 Jout. On voit dans un Eloge de 1'Abbé de.Brcteuil, inféré au Journal de Paris, numéro 8, qu'il eft très-facile de traveftir en hommes fupérieurs, les hommes les plus médiocres. II eft vrai que les faits cités a 1'appui des grandes qualités prodiguées au défunt , ne répondent guercs a 1'idée qu'on cn voudroit donner. Par exemple, on regarde comme une preuve de fix fageffe, d'avoir fait fou teftament avant fa mort. 11 eft aifé dc juger que 1'autcur de la noticê Torus XVII. O  C 36a ) ifétoit pas intércffé pour peu h fon exécution* On parle de fa biënfaifance ; mais on n'en raconte aucun trait, & 1'on fait que, quoiqu'ü eüt pour 300,000 livres de bénéfices, le patnmome des pauvres, fuivant le vceu des fondateurs & fuivant 1'efprit de 1'Evangüe & les canons de 1'Eglife, il leur en donnoit peu & confervoit fes -■ros revenus a 1'avancement & aux prodigalités dc fon neveu; on fait que fes maitreiTes en avoient auffi une partie, ce qui eft encore moins édifiant dans un Prêtre: enfin, 1'on fait qu'un de fes cofeigneurs ayant fait un établifiement de charïté dans fa paroific &.y ayant confacré 300 liv., il a eu beaucoup de peine a faire contribucr 1'abbé dc Breteuil, & n'en a jamais pu arrachcr que 200 livres. 1 Cn le donne auffi pour un homme de Lettres, ou du moins pour très-capable de produire des ouvrages d'efpfit, fans la multiplicité de fes affaires l & fans une forte de parcffc aimable, & 1'on vantc un difcours de fa compofition fur 1'affaire de I'Archevêque d'Aix contre le chapitre de ion Églife MétropoÜtaine; 1111 autre , au fujet de 1'établiffement d'un Bureau dAgence, enfin •un Réquifitoire fur une demande de Don gratuit, pieces d'éloquence obfeures que perfonne ne connolt, & que même, fuivant toute apparence, il n'avoit pas enfantées. 13 Aoüt 1781. On raconte que M. lc Comte dc Falkenftein fe trouvant dans 1'ceil de bceuf ïiycc beaucoup de conrtifiins cn attendant qu'on  C 363 3 pftt entrer chez le Roi & eaufaiit avec eux & iurtout avec le Marquis de Caftries, appercut en un coin un Seigneur ifolé, remarquable par fa bonne mine; il demande qui c'eft? On lui dit que c'eft le Comte d'Eftaing, qu'il ne connoiflbit pas & qu'il n'avoit pas eu occafion dc voir durant fon dernier voyage, A 1'inftant il quitte le Miniftre fort fot pour aller a lui, pour lui témoigner fa joie de le rencontrer, mais fa furprife en même tems qu'ön auffi bon fervitenr re fint dans 1'maction: il entre enfuite en converfation plus particuliere & ne le quitte que lorfque S. M. apprenant que le Comte de falkenftein eft-la, le Éit appeler; 13 Ao>H. On vante beaucoup 3a modeftïe de M. de Verdun , le nouveau Surintcndant de la maifon de M. le Comte d'Artois. II a demandd a. ce Prince la permiffion de conferver la place de Permier général qu'il a aéhieftement, pouvant ne pas plaire a fon Altefte Royale, ou manquer des talens néceflaires pour fes nouvelles fonc» tions: il a refufé auffi le gouvernement des chateaux de Saint Germaiu & de Maifons, que follicitoit le Sieur Radix de Sainte-Foix; il a dit ,.-0 f_ ..^vuj.Wf on fe moqueroit d'un financier qui s'en revêtiroit. Tout ce qu'on craint, c'eft que M. dc Verdun n'ait pas aflez de fineffe & de fentietó tour arrêter les déprédateurs & déeouvrir outes leurs rufes. 13 Aoüt. Tous les préparatifs préalables néQ a  C 3^4 ) céiTairês dtant faits .a la falie des Menos, on y doit jouer demain de petits actes. On commence a habituer le public a une augmentation de prix des places; & celles du parterre, autrefois de deux livres huit fols, aujourd'hui font a trois livres, fous prétexte que c'eft un parquet, & qu'on eft alïis. '" Au retle, c'eft furtout pour exercer les fujets de la Danfe, pour les empêcher de fe rouiller & les tcnir en haleine qu'on s'eft haté de fubftituer ce fpectaele aux concerts. 14 Jotit 1781. Hier a onze heures du foir a été jugée au Palnis une grande affaire qui tenoit tout le public en fufpens-& avoit attiré une foule prodigieufe de curieux. C'eft celle de M. de St. Pierre, Marquis de la Roebelle: ce fcélérat, qui avoit fait périr fon pere de cbagrin après onze procés qu'il lui avoit fufcités, avoit imaginé une accufation de poifon dans laquelle il avoit enve1 )ppë ft belle -mere & tous fes ennemis principraix, au nombre de fept. Par 1'Arrêt d'hier tous les aceufé's ont été déchargés de 1'accufation & 1'accufateur condamné a 20,000 livres de dommages & intéréts -envers Me. Dumont, Avocat, a 10,000 livres envers fon cocher, a 6000 livres envers fa belle-mere, ,;\ 6000 livres envers la fceur de celle-ci, enfin a 1000 livres envers les Sieurs Mauni, la Thib.iudiere & la Morendiere. Enfuite le Procureur Général ayant rendu plainte en fubornation de témoins & en machi-  C 365 3 nation calomnieüfe d'une préten due acciüatioiï de poiibn,fa plainte a été admife-ie Sieur Marquis de la Rochclle a été décrété d'ajournement perfonnel, & la Deschamps , fa maitreiïe, de prife de corps. On a été furpris de ne voir ce monftre que décrété d'ajournement perfonnel, & 1'on ne doute pas que ce ne foit une tournure prife par les juges pour ménager la' familie & donner a 1'accufé le tems de s'enfuir. 14 Aoüt. Rien de plus miférable que tous les quolibets imaginés par les ennemis du Duc de Chartres pour tourner en ridicule, ou rendre fon projet odicux. lis difênt qu'il a beau faire arracher les arbres de (on jardin ,1! y reltera toujours le platane ; (le plat une) ils le repréfentent avec un crochet, fouillant dans les ordures «& cherchant des loques a terre (des Locataires): mais ce qui eft plus atroce , c'elt une Lettre qu'on lui a adreffée, a 1'ouverture dc laquelle il n'a trouvé que cette phrafe du Pfeaume de 1'j» Exitu: mare vidit &f fugit 14 Aoüt. Depuis que le Mont de P'rétê s'efr. étendu & a fini fon magnifique baüment, ce lieu eft devenu une des curiofités de Paris qu'on vti voir. L'ordre avec lequel tous les elFets fons placés dans les falies, leur immenfité, la foute des détails que ce travail journalier entralne , étonnent lc fpeétateur. On y compte 40,000 montres, tout le refte en proportion. Mais un coup-d'ceil vrajment aSligeant, c'elt celui de toutes les guenilles qu'on y trouve en dépöt; preuve  dbuloureufe & irréfiftible de Ia foule de malbeureux dont cette capitale eft remplie. On porte a 15 millions environ 1'argent en circulation pour valeur des elfets dépofés, qr.i ne 1'étant, l'un portant 1'autre, que pour moitié, font un total de trente millions, & 1'on frémit en fongeant que ft le feu y prenoit, en peu d'heures ce mobilier énorme fe trouveroit anéanti. Ce dépót occupe 60 commis.. 15 Aofit 1781. Par un Arrêt du 7 de ce mois» le Parlement, Grand'Chambre & Tournelle affemblées, a fupprimé un Mémoire du Comte de Lolly de Tollendal en réponfe au dernier libelle dei M. Duval d'Epremefnil, Confeiller de la première des Enquêtes. Quoique ce Mémoire foit daté de 1781, 1'Avocat-général Séguier, dans fon Réquifitoire, obferve que cet écrit ne porte ni le lieu de 1'impreftion, ni le nom de 1'imprimeur; qu'il a tous jfcs caracleres de la clandeftinité, & en cela eft déja repréhenftble comme contraire aux Régiemens de la Librairie... II remarque enfuite que cet écrit fort tout-afait des bornes de la modération, de la décence, du refpecl dü aux perfonnes rcvêtues de quelque caracftere. II eft, fuivant 1'oratcur, rcrapli de farcafmcs amers , de plaifanteries indéccntes , dc mécliancetés groffieres, d'injures même les plus graves:. en conféquence ii ne peut croire qu'il feit- de la pcrfonne dont il porte lc nom. II eft fort fingulier que, d'après ce Réquifitoire,  C 367 > le Parlement n'ait fait que fupprimer ce Mémoire ; qu'il n'ait ordonné aucune information pour connoltre 1'auteur de cette contravcntión & de cette diffamatipn publique ; enfin,qu'il n'ait pas au moins ordonné que le Comte de Tollendal feroit tenu d'avouer ou de defavou'er ce lib'elle. 15 Aoüt. On a déja vu des vers de Mmfiettf fur un évemail. Tout le monde fait que ce Prince ai'me beaucoup 1'étude & les Lettres, & qu'il s'occupe d'amufemens ingénieux. C'eft: ainfi que tout récemment il a propofé a M. le Marquisde Montefquiou Fezenfac, fon premier Ecuycr des bout! rirnés a remplir extrèmement baroques, & ceux qui ont lu les vers alfurent que ce Seigneur s'en eft tiré d'une maniere pïquante & facile 16 Aoüt. Extrait d'une Lettre d'Alencon du 10 Aoüt. ,, Suivant le relevé fait dans cette' „ Généralité, en 1780, il y a eu 19506 naiffan- ces, 5084 mariages & rSoco morts." 16 Aout. Bouts rimês d remplir, donnés par' Monsieur. > Un accord Synallagmstique' Lioit Mars a Venus; Vulcain au pied Fourchu, Voulut faire comre eux valoir fe Pragmatique; Les Diens (kent au nez de cet Epous Crochn. Cette biftoire Hiérogliphique' Apprend a tout mari foiirchu, crochu , Ventra, A voir Pon horoicope écrit dans 1'Ecliptïque :■ S'U eft lage, il en rit, & n'eft pas moius Dodu. Dans la machine Pfleurnatique, Renfermat - il Ia Belle, il fe verra fiërnë} S'il 11'oppofe a fon fort une ame PWegmatiqufr Mieux vaudroit mille fois pour lui d'être Mai't---né Q 4  C 368 ) tos Ccturs font tous fornuis aux Loix de L'hydraulique Ils cherchent ieur niveau : maint auteur a Beuglé Pour dire le contraire: Orgon ' Apoplecliqué Met les graces en fuite & juftifie Eglé. 16 Aoüt 1781. Depuis iongtems on parloit beaucoup d'un Mémoire du Comte Dubarry le Jloué, le pere de celui qui a époufé la Demoifelle de Tournon, dans lequel il lui reproche une ingratitude caraétérifée, en ce que née fans fortune, n'ayant rien apporté en dot, elle avoit ■abjuré' dans fa viduité le nom, les armes & la livrée d'un mari dont elle n'a eu aucun fujet de fe plaindre; en ce qu'elle cberchoit a avilir fa mémoire, a méconnoitre fes bienfaits, ceux de fon beau-pere & de toute la familie, par lefquels elle a été comblée lors & depuis fon mariage de tous les avantages poffibles; & afin de rendre plus marquée & plus grave 1'injure qu'elle leura faite, reprendre fon nom de fille.' Ce Mémoire ,fort rare jufqu'a préfent, & dont on avoit arrêté la publicité, fans doute dans la crainte de la fermentation qu'il pouvoit oceafiónner, perce infenfiblemént, & 1'on en peut parler a préfent en connoilfance de caufe. II a pour titre Mémoire d confulter pour le Comte Dubarry Cerès , Seigneur éf Gouverneur de la ville de Levignac, contre la Comteffe de Tournon , ci-devant Vicomteffe Dubarry. 11 eft fuivi d'une Confultation en date du 22 Mai 1781, fignée de trois Jurisconfultes & appuyée fur une Confultation délibérée a Touloufe ks  ( 3ö9 ) les i & 15 Février 1781, qui décidé que le» grands avantages faits k la Comteffe de Tournon par fon contrat de mariage font révocables, & paree qu'elle ne remplit pas la conditiën fous. laquelle ils lui ont été faits, & par fon ingraritude en la maniere annoncée ci-delfus. 17 Aoüt. Mlle. de Tournon, fille d'un Gentiihommc du Vivarais, pauvre & ayant deux autres enfans , fut mariée en 1773 au Vicomte Dubarry, qui avoit été Page de la Chambre du Roi, Officier au Régiment de S. M. Infanterie, & Cornette des Chevaux-Légers dc fa garde, avec rang de Meftre de Camp de Cavalerie: on. aceumula fur elle une inlinité de donations & d'avautages par le Contrat que le Roi & la familie Royale fignerént le 18 Juillet. Après plufieurs tracafferïes domeffiques & même une féparatiori, une évafion de. la femme, elle revintafon mari,le renditpere d'un garcon, & prit fur lui un tel afcendant qu'il ïFofoit refufer de fatisfaire k fes goüts difpendieux. Eu 1778 elle le fit aller a Spa, oü ayant fait connoifTancë avec le Comte de Rice , elle dëfira voir FAngleterre. Ce fut-li qu'arriva le combat au piftolet entre le Seigneur Anglois & le Vicomte, qui fut tué. Son pere n'a jamais pu rijer de fa bru les mótifs de la querelle. Pendant fon veuvage elle fit aequifitióh de deux petits fiéfs en friche en Corfe; elle obtint d*s ktttcs patentes pour les faire enger m 4 5  C 370 ) Comté de Tournon, & en effet, les 15 & Février 1780 , elle parut k la Cour fous le nom. de Comteffe de Tournon , & fe fit annoneer ainfi dans- les différent.es maifons oü elle fut rendre vifite. Six mois auparavant elle avoit fait effacer ■ de fa voiture, dans le tems du plus grand deuil,, . Ie* armes.de fon mari accollées avec les fiennes & y avoit fait fübfiituer un T en chiffrc: quant a la livrée, elle ne 1'a jamais fait portera fes domeffiques. L'odieux de cet écht füt aggravé par les ci-rconftances les plus férieufes, forfqu'on demandoit au Sr. Dubarry,. fon beau-pere, commenon - noble, lc droit de franc - fief., 11 prétend, quant a ce dernier point (par parenthèfe) être forti vainqueur de la conteftation le 26 Février 1780, oü il eft intervenu un jugement de 1'Intendant , qui a caiTé & annullé la contrainte. décernée contre.lui.. Quoi qu'il en foit, voila. comment Mlle ó& Tournon a reconnu des bienfaits dont elle demande a jouir, montant a 747,000 livres.. Envaiu fe prévaut - elle ■ dc 1'exemplc du troifiemc frere. Elie, qui fe nomme aujourd'hui Comte dM-Iargicourt. II a dü fe conformer a une donation confidérable dont il.ne pouvoit jouir qu'a ..cette condition. II eft bien vrai que lé Comte Dubarry infinue que c'étoit une tournure prife pour le fouftraire a l'hjflnenee des circonftances ,„ oü Elie fe trouvoit: il y a fix, ans;: mais ii y a lüin», ajputc-t-il, des orages paffa-  C 371 ) gers de 1774 au calme profond de 1780. En général, cc Mémoire eft mal fait, mal' écrit, contient peu d'anecdotes & ne fatisfait pas la éuriofité du leclcur. 17 Aoüt. La Réponfe du Comte de Lally de Tolendal, que PArrêt du Parlement a fait connoitre, n'en eft que plus recherchée. Eile eft datée du 3 Juin 1781 & a pour objet furtout uni Mémoire contenant Déclaratión; de Jon adverfaire, qui lui a été fignifié par huiflier. Ces déclarations, au nombre dc trois , font 10. que le: Gomte de Lally de TolenJal n'a rien fait fignifier a M. d'Epremefnil de ce qu'il a fait imprimcr , quoique lc dernier fe foit conduit tout: dilFéremment. a°. Qu'il n'a ni vu ni lu la Requête de fon: adverfaire, qu'il ne la connoit pas; mais qu'ib ne diute pas que les imputations n'en foient calomnieulès, telles qu'elles foient. 3°. Qu'il pardbnne ces calomnics a M. de: Lally, s'il parvient k réfuter un des raifonnemens de fon interveution réduite. . Toute cette guerre de piume ne con tenant' gueres que des injüres, oü il n'y a ni faits, mi anecdotes, commence k devenir faftidieufe.. Ce qu'on voit de plus fatisfaifant dans cer. écrit, oü jVf; d'Epremefnil eft tourné dans le; plus parfait ridicule & traité comme un poliffon ,, comme un pendart, c'eft que M. de Lally v.k enfin entrer cn lice au Parlement de Dijon, fe^, ' après des obftacles qu'il a fallu lever, y uoutv- Q 6  ( 37* ) fuivre rigoureufement & iufatigablement la juffification de fon pere. 17 Aoüt 1781. M. le Premier Préfident dn Parlement de Bordeaux, après avoir été quelque tems a la fuite de la Cour , eft exilé a Meaux; il n'a pu obtenir de Fêtre a Virlade, fa terre. Le Maréchal Duc de Richelieu, qui ne peut le fouffrir ,en eft enchanté ;il difoit lors de fon dernier mandat: ,, Le Roi a pris un fi grand „ amour pour le chef de la Magiftrature Borde3, loife, qu'il ne peut-étre fix mois fans le voir." Cette punition eft la fuite de 1'entêtement de ce Premier Préfident dans 1'affaire de M. Dupaty & 1'on parle de Lettres de juffion envoyées au Parlement pour qu'il ait a rendre la juftice, intcrrompue depuis cette malheureufe querelle. 18 Aoüt. Les Poëtes Efpagnols ont déja célébré le Duc de Crillon & voici une piece que M. de Sancy nous a traduite dans k Journol ie Paris, Quel eft dortc ce guerrier plein de feu, de courage, Que 1'on voit s'élancer dans les champs du camage r C'eft Mars, diroit, fans doute, un enfant d'Apolloiu La vérité m'infpire & me dit, c'eft Crillon; Mars aime trop Vénus; Crillon chérit la Gloire; Mars eft fait pour la fable, & Crillon pour riiiftoïre. 18 Aoüt, Au Concert Spirituel de Samedi dernier, on aadmiré furtout le concerto de violon de M. Ifabey, jeune débutant qui n'a pas encore quinze ans, & annoncant une précifion & une  C 373 3 fènrjeté dans les doigts', qu'il eft trés-rare cfe móntrer a fon age. 18 Aoüt. Extrait d'une Lettre de Soilfoiis du n Aoüt. „ Suivant le relevé dc cette Généra„ lité , on y a compte en 1780 , nailfances ,1 1/3349 maniages 39-55, morts 1465)4." 18 Aoüt. Hier a eu lieu une cérémonie unique: on a fait ft Saint André des arts 1'inaugnration d'un Maufolée élevé dans cette paroifle en rifonncur de M. Léger, fon ancien curé,mort il y a fept ans: elle a été précédée d'un fervice, oü ont affilté tous les Curés de Paris & dix Evêques. M. de Senez a prononcé 1'oraifon funebre de cc Paftetir, dont il avoit été le difciple & le coopérateur. Cet orateur eft convenu que Ia matiere étoit très-Itérile; mais il a eu 1'art de la féconder. II a divifé fon difcours en trois parties: il a confidéfé M. Léger, i«. dans les fonctdons de la vie Paftorale: 20. dans la direclion des ames: 3°: dans fa vie intérieure. • Le tableau d'une paroilfe & le développement des fonétions d'un Curé ont paru dans la première partie un morceau vraiment oratoire, trèspbilofopbique & d'un genre neuf. Une anecdote curieufe & ignorée a frappé dans la feconde.M. de Senez nous a appris que Louis XV, lors de la diffolution des Jélüites, fe trouvant dans le cas de chercher tui confelfeur, & apportant dans ce choix la fagacité rare dont jl étoit douc lorfqu'il fuivoit fes oropres kmüfeQ 7  C 374' } ïes, avoit eu envie de nommcr a cette place M.. Léger. II n'a pu dire pourquoi ce choix n'avoit pas eu fon effet..II a fu feulement que, pourécarter ce Pafteur,on avoit repréfenté au Monarque qu'il étoit déja agé; a quoi S. M. avoit repliqué: ,., tant pis! je veux- trouver dans mon confejjeur „ un ami, £f il me Jeroit douloureux d'avoir d m'en féparer. " Dans la troifieme partie on'a entend u avec plaifir le Prélat donnant des Iecons a fes confrères , faifant 1'éloge des Curés de Paris & tracant d'un pinceau ferme & terrible les défordres'qui regnent dans cette capitale. Ce difcours, dans le genre tempéré, a eu beaucoup de fuccès; on y a trouvé une grande fenfibilité, & du refte 1'oratcur 1'a orné de plufieurs épifodes qui, fans être étrangers au'fujet,out paru des reffourees que n'auroit pas imaginé un panégyriftc ordinaire. II a fait un grand éloge de feu Madame la Comteffe de Gifors, une des dévotes affiliées au défunt Curé, chez quiavoit été concu pour la première fois, lc plan des honneurs funéraires a rendre a M. Léger, du monument a lui élever; cc qui a amené na. turellement cqux du Duc de Nivernois fon pere, du Comte de- Maurepas , & plufieurs autres:. M. de Senez n'a point perdu 1'occafion de faire venir clans ce difcours 1'éloge de I'Archevêque de Paris & de vanter fa fermeté & fon zele ; en. un mot, fans fortir des bornes que lui prefcri■TOit fon héros, il a intéreffé, il a foutcnu Pat-  C 375' > tentfon de fes auditeurs & les a touchés au poim»: de faire répandre des larmes a plufieurs; ce qui eft la perfection de 1'art. On n'entroit a ce difcours que par billets.. Le maufolée, encore imparfait, offrele Curé i genoux, que la Religion enleve a la Charité qui le réclame., 19 Aoüt 1781. Le Sr. Roufteau de Touloufc fait un article de nouvelles dans fon Journal Encyclopédique. II y avoit mis le prononcé de 1'Arrêt rendu dans 1'alfaire du Sr. le Bel: il étoit tout imprimé & alloit paroitre • mais un ordre efi venu de biffer cet article & de fubftituer un carton.. On fait auffi qu'ayant été infiruit qu'on réitnprimoitle Mémoire du Sieur le Bel; M. le Comte: d'Artois, a la réquifition des officiers de fa mai-fon,, auxquels il a confiance, a fait donner desordres pour en retirer les exemplaires; malheureufement if étoit trop tard , la difrribution.i étoit faite. Tout cela prouve que le Sieur de Sainte-Foix a encore du crédit & pourroit bien échapper a la vindicle des loix. 19 AoM. L'Edit du Roi de ce mois portant augmentation de deux fols pour livre en fus des droits, établijjement , fuppre!jion & modération de différens droits, a été fort mal accueilli^du public: il eft elfrayant & par 1'énorraité de 1'impbt en lui-m-huc qu'on afture devoir rendre vingt -ï- vingt - cioq, anllions pour Paris feul &  C S7