MÉMOIRES S E C R E T S POUIl SERVIll A L'HISTOIRE DE LA RÉPUBLIQUE DES LETTRES EN FRANCE, depuis MDCCLXII jüsqu'a sos joursj O u JOUR N A L O'UN OBSERVATEUR, Contenant les Analyfes des Piecesde Thé4treq>n mjaru durantcet intervalk; les Relations des AJfemblêesLittémires; les Notices desLivres nou. veaux, c lande jiins, prokibés; les Pieces fuga we r rares ou manufcrites , en frofe.ou en vers; ks Vaudevilles /ur la Cour; les Anecdotts & Bons Mots; les Eloges des Savans, des Artiü'es des Hommes de Lettres morts, &c. &c. TOME DIX-HUITIEME. huc prop/i/s me, '.vos Drdine adite. Hor. L. II, Sat. 3. vs. 81 & 82, A L O N D R E S, Chez JOHN A D A M S O N" MDCCLXXXII   AVERTISSEMENT D U L IBR AIRE, Malgré U nouvelle Edition que la néceffüé nous a fircés de faire, il y a m J nous contmuerons a tenir notre engagement envers ceux qui om twMenne, en leur p^ -curant fuccejjivement les addiiïons que nous wons commencé d'y joindre. Nous ne Pouvonsfimr encore aujourdlmi ce travml & .mus nous fommes arrêtés au ï«. janvier i?S9- Ik doivem êtrefürs qidïl n*y a rieu donm; as y lirom mé me des arilcles awémrés ounouveaux,que nous avons recouvrés depms lEdition de 1781. Nous avons réuni aa/k t ***** ... , , \ r .x , , ***** armee ta dfS Lcm'eS für ,e SaiI°» , que nous pour- jparement pour les artifles mmateursou au tres, aui n'n»* j*g~a r. i ' Y">tr que de cette collettmn ... nfimrnem molns difpendieuje. Comrae ia Mtre ,qUe ms Edlteurs nous om adre/T^ A 2  iv AVERTISSEMENT. pourfervir dePréface a VAnnée 1780, nous eft arrivée trop tard pour être mifi a la tête; quelle fi trouve de la jorte , pour ainfi dire noyée dans la joule des mtices, nous la replacons ici , vu firn importance. EÜefera peut-être revenir de leur erreur ceux qui ont attribué la jutte des Mémoires Secrets du premier Inftituteur a des Ecriyains, ou a des Sociétés de Paris qui ny ont aucune part. II eft Men difficile de trou-. yer deux amateurs comme Bachaumont, & deux jbciétés comme celle de Madame Dou- ■ biet. II a jallu.pour remplir le pro jet, embrajfir une jphere plus étendue, & ce rieM en efet, comme Vannoncent les Editeurs,, ~ Pouvrage de perfinne, & celui de tout le, monde.  MÉMOIRES SSCRETS Pour servir a l'Hjstoire de la Républiquh des Lettres en France, depuis MÜCCLXII, JUSQü'il nos jours. Année MDCCLXXXII. 26 1781,. On voiravec plaifir dans le billet d'enterrement de la femme d'dn bicnfaiteur de 1'humanité, perfécuté a outrance par la jaloufie & 1'envie, que fon merite a percé a la Cour & lui a procuré de hautes proiecnons; c'eft le Sr. Dumont de Valdajou., dont les Chirurgiens furieux contre lui ont plüfieurs fois annoncé la mort, paree qu'ils la défiroient, ainfi qu'on I's» pu voir précédemment. Cc Sieur Dumont eft Chirurgien renoueur iïes camps & armces du Rói, Chirurgien ordinaire de la Reine, premier Chirurgien renoueur de Monfieur & Démonfixateur en la ville de Paris. 26 Aottt. M. Joufle, Confeiller honoraire au CMtelet d'Orléans, vient de mourir , &gé de 78 ans. Son/nom reftera célebre au barreau & dans le tómple de la Jufticc par fes ouvrages fuï la Junfprudence. Depuis plus de trente ans il jouilfok de fa réputation. Jamais auteur n'a été plus cité de fon vivant, furtout dans les maticres criminelles. Digne émule & contemporain de Pothier, auffi fimple dans fes mceurs, auffi inTome XVIII, A 1  C 6 ) tegre, auffi éclaïré magiftrat, il fera Iorjgtems, comme lui, 1'honneur de fa patrie. 26 Aoüt. A la feconde repréfentation de Calljle, le Sieur Flor mee, qui y joue u n róle, tardoit a venir; le Sieur de la Rive femainier envoie le faire avertir & exciter fa parefle ; celui - ci n'cn tient compte , répond impertinemment au mdrager, & a fon arrivée gourmande le Sieur laRive & lui met le poing fous le nez; cc qui occafiomie une rixe entre eux fur la fcene mêmc: il* étoient habillés , ils tirent leur fabre de Théatre, & fe battent dans Fenfoncement: les fpeétateurscrurent que c'étoit un jeu de leur rólc & ne fe prefTerent de les féparer que lorfque 1'on vit que c'étoit férieux. lis fe donnerent rendez-vous le kndemain anx cbamps Elyfées & le Sieur de la Rive ayant défarmé trois fois fon adverfaire, 011 les fépara; ils furent traduits devant M. le Noir, qui les fit s'embrafler, & cependant envoya le Sieur Florence au Fort - i'Evêque pour fon infubordination & fon manque d'égards au public. II y efl: refté dix jours & en-eft forti avanthier; puniüon qu'on trouve trop légere. 27 Aoüt. Avant-hier 1'Acad.émic Francoife a tenu fa féance publique. Le Prix de prolc dont le fujet étoit VEloge de Montauzier , 3 été décerné a M. Garat. M. de la Harpe a lu le difcours de eet Orateur, qui a recu pcu d'applaudiffemens,&, en général, a paru d'une philofophie monotone & froide comme le héros. L'Auteur ne s'eft point préfenté quand 0111'a appelc  ( 7 ) pour lui donner la médaille. Ou a dit qu'il s'étoit trouvé mal & avoit été oUigé de fortir. On a fu depuis, que la vraie raifon étoit qu'attribuant Ie peu d'effet que produifoit fon difcours lur les auditeurs ;\ la mauvaife maniere de lire de M. de la Harpe, il n'avoit pu y tenir. M. de Ia Crctclle a eu im AcceJJit pour lc meme fujet : deux citoyens enthouliaftes des Lettres , ont prié 1'Académie de trouver bon qu'ils lui adrelfaffent chacun 600 livres , afin d'cn former un fecond prix; en forte que eet autre Candidat a été auffi bien partagé que le premier. M. de la Harpe a également lu des fragmens du difcours de M. de la Cretelle, que 1'on a jugé plus oratoire, plus rempli de mouvement & que fur 1'échantillon beaucoup de geris ont préféré, quoique plus inégal & plus incorrect. • Cet auteur en remerciant M. de la Harpe du foin qu'il avoit pris de faire fentir au public les beautés de fon ouvrage, de les faire valoir par fon élocnöan, lui a avoué que M. Garat n'étoit pas fi fatisfait & qu'on avoit obfervé qu'il n'avoit pas réellement fi bien débité le difcours de ce dernicr: 1'Aeadémicien a répondu qu'il avoit lu comme il avoit fënti. M. Ducis , le Directeur , a annoncé qu'un éloge de Montauzier par M. le lloi , ancien Commilfairc de la marine, avoit auffi mérité les éloges de la compagnie & une mention honorable. Le Prix depoéfie, remis 1'an paflc, n'a poinc été décerné davantage cette aimée. On a parlé de A 4  ( 8 ) trois pieces oü 1'on avoit remarqué de beaux morceaux, dont on a fait part a 1'affemblée & qui ont été applaudis. L'auteur de la première ieül s'eft fait connottre , c'eft M. Carbon de • Flins. Le fnjet ccpendant étoit bien propre h infpirer les Poëtes , c étoit la jermtuae aoone dans les Domaines du Roi. Le défaut de fuccés des concurrens a déterminé 1'Académie a annoncer que iefujet, le genre du poëmc, la mefure des vers, pour 1'année prochaine, feroient au choix des auteurs. M. Ducis a déclaré que 1'Académie , fans propofer pour la troifieme fois le fujet des annécs précédentes , n'entendoit cependant pas 1'exclurc & délireroit même le voir traité avec plus de fuccès que dans les autres'concours. II a enfuite parlé , a 1'occafion de la fervitude abolie dans les domaines du Roi, d'un monument qu'un Auditeur des comptes , 'M. de Chavigny, avoit imaginé pour célébrer eet éveuemént'du regne de Louis XVI: il a préfenté a 1'Académie le plan d'un pont de communication entre 1'ifle de Saint Louis & la cité , oü feroit le trophéc propofé. Enfin, M. d'Alembeit, qui depuis longtems s'eft voué aux plaifirs du public dans ces alfemblées, a terminé la féance par une notice trèêcourte fur le Cardinal Dubois, a inférer au rang de fes éloges des divers Académiciens. L'anecdote la plus direfte & la plus importante dont il a fait partf h 1'affembléc , c'cft la difcuffion qu'a-  C 9 ) qu'avoit exrité le Monfeigmiir, que le premier Miniftre exigeoit contre 1'ufagc de 1'Académie, de ne faire aucüne diftinclion de rang ni de titre, ni de perfonne. 11 l'emporta,& Fontenelle, alors Dire&eur, donna'au Cardinal Dubois le Monfeigneur défiré. Du refte, cette notice s'eft trouvée moins un éloge qu'une fatyre très-forte de ce Miniftre. Elle juftifie ce corps célebrc du rcproche de fadeur & d'adulation; mais beaucoup de gens ont été révoltés du perh'fllage de M. d'Alembert lür fon ancien confrère, du ton iudécent qu'il y a mis,& furtout de fon aflectation a le lire dans une afl'emblée publiquc, pour mieux expofer fon héros a la dérifioii générale. 27 Aoüt 1781. La Cour des Aides a enregiftré 1'Edit ; mais s'eft réfervé la faculté de repréfenter au Roi les inconvéniens qu'il entralnc; enforte que, quoi que 1'on percoive, on croit que cette opération fera grand tort a M. de Fleury. Elle découvre fon peu de connoiirances en cette mallere: indépendamment des Mémoires préfentés a ce futjet par les diverfes Corporations, les Fermiers généraux vienneut de lui donner une lecon trés - défagréable ; ils ont défendu a tous les débitans de tabac d'augmenter cette denrée. Le Miniftre des finances leur a témoigné fa furprife de cette réfolution; ils lui ont répondu que, foumis a la loi, ils prenoient fur eux de garantir a S. M. l'augmentaiion devant réfultcr de 1'impót , mais qu'ils ne pouvoieut c.xiger un droit qui diaiinueroit la conA 5  C io ) fnmmation: occafionneroit plus de contrebande; & leurferoit un tort infiniment plus confidérable. 28 Aoiit 1781. L'Académie royale d'Architeclure-, en fa féance d'hier, adécerné le premier prix d'architeclure au Sieur Louis Combes , dleve de M. Miquet; & le feeond au Sieur JeanBaptifte Philibert Moette, dleve de M. BillandeL 28 Aoüt. A raflemblce de 1'Académie royale de Peinture & de fculpture du vingt - quatre de ce mois, le Sr. David de Paris, ancien Penfion- naire du Roi a Rome, ayant fait apporter plufieurs de fes ouvrages, pour recevoir de 1'Acadérriie des avis & des infixuctions, la compagnie, fatisfaite des tableaux qu'il lui a préfentés, a procédé fur le champ a fon agrément, & les fuffrages fe font tous réunis en fa faveur. En conféquence, quoiqu'on n'ait pu en faire mention fur le Catalogue, les ouvrages de ce Peintre doivent être offerts au fallon. 28 Aoüt. Un particulier de Bordeaux arrivé ici, rapporte qu'il a été adreffé au Parlement de cette ville des Lettres patentes qui le prorogent jufqu'au 10 Novembre ; elles ont été enrdgïflxées. II a encore été adrelfé des Lettres de cachet a chacun des Confeillers pour entrer , & aux Préfidens pour tenir note de ccux qui entreront ou n'entreront pas, & 1'envoyer tous" les huit jours au Garde des Sceaux. Malgré cela, plufieurs font les malades & n'entrent pas, & rien ne fe juge. M. lePréfident de Pichard, qui préfide en 1'abfcence de M. le Berthon , eut  ( II ) devnierement un bureau chcz lui; perfonne n'y voulut parler, paree que M. Dupaty y étoit. Le fentiment du public fur cette affaire tient bcaucoup au tort qu'elle lui fait, & ce qu'il foüffre particulierement ne peut lui faire approuver une caufe qui ne rintérelfe pas. Les ennemis de M. Dupaty s'en prévalent pour le rendre odieux, comme étant la pommc de difcorde. Heureufement pour lui, M. le Comte de Vergcnnes, Secrétaire d'Etat ayant Ie département de la Province , a plus de nerf que M. le Garde des Sceaux; il n'aime pas les Pariemens, & veut que 1'autorité du Roi foit refpecbée dans fes Cours , & qu'on lui obéifie. Tout cela doit être bien douloureux pour un Magïftrat vertueux , entrainé fi loin hors de fes mefures, & obligé d'aller contre fes propres principes. 29 Aoüt. On n'a pas manqué de chanfonner M. de Fleury a 1'occafion de l'Edit d'Aoüt 1781, & il a fait s'évertuer nos bons fiifeurs; car ce Vaudeville n'eft pas fans fel: il eft en neuf couplets & dans le ftyle un peu poiflard, ce qui rend la plaifanterie moins acre & plus gaie ; cependant la chute en pourroit être meilleure & il ne fe foutient pas jufqu'au bout fur le même ton d'aifancc & de légereté. Le voici: Chdnfon fur l'Edit d'Aoüt 1781. Sur fair: Voulez-vous que de Fanchette èf£. L'as tu donc lu , ma Commcre, L'as tu la c' fameus Èdft, A 6  ( H ) Enregiftré fans myftere Par nos Per' les Circoncis? Com' il nous favonne! Com' il nous rangonne! Si c'eft du Fleuri, Qa n'eft pas joli. Queuq' j'irons faire aux guinguettes- Si le fel eft renchéri ? Adieu 1' fin de nos goguettes; Car c'eft lui qui en fait tout 1' prix.. Com' il &c. I'veut de la bell' maniere Nous faire avaler 1'goujon ; Mais fi la fauce eft fi chere, Que ferons-nous du poilfon? Com' il, &c. I* nous baille une falourde Pour nous voler un fagot (*); I' nous prend pour des balourdes S' te vilain p' tit efcargot. Com' il, &C. Comment avec 1'am' fi juïve A-t 'is épargné 1' jambon? C'eft qu'il eft trés-bon convive Et n'eft d'nul religion. Com' il, &c. V' la c'que c'eft q' d'avoir d' 1'alliance' Dans la Cour du Parlement, C*) Chacun croit les droits fur le bois d:minu^s,j dans le fait iis font augfflentés..  C 13 ) On s' permet avec confiaiice D'étre un mauvais garnement. Com' il, &c. Puis not' excellent Monarque, Pour nous fauver d' plus grands maux r. L'envoye par la noir' barque, Aboyer après les fceaux. Com' il, &c. Mais fi la Bonté Suprème Chafïöit encor fon llanilin, - J' dirions dans not joy' extréme Dieu nous gard' des Aigrefins! Com' il, &c. 29 Aoüt 1781. C'clt au fort de Kehl, comme on 1'a annoncé dans le tems, qu'en effet ou travaille avec aftivité a la nouvelle édition des reuvres de M. de Voltaire; il y a dix-fept prelfes qui gémilTeüt fans relache. Cependant, comme on vient de perdre un des principaux chefs ouvriers a la tête de 1'ouvrage, 011 craint qu'il n'eir réfulte un retard. Le Sr. de Beaumarchais fait auffi procéder iV de petites impreffions particulieres, capables de fournir au courant, ou de lui concilier fon Protcéleur. C'eft ainfi que,s'imaginant faire fa cour a M. de Maurepas, il arecueilli toutesles pieces critiques contre 1'adminiitration de M. Necker, cc en a ordonné la réimpreffion en ce lieu. 30 dotit. Extrait d'une Lettre de St. Jeau d'Angely le 18 Aoüt 1781. „ Pour le bien & la A 7  C H ) confervation des troupes de S. M.. on s'eft „ déterminé depuis la guerre a évacuer les gar,, nilbns de la Rochellc & de Rochefort & a „ former dans la faifon dangereufe un camp de ,, falubrité dans les environs de cette ville. M. ,, le- Marquis de Voyer qui commande dans la Province, cherche pendant ce tems a parvenir au defféchemcnt des marais peftiférés qui entourent Rochefort & dont Pair corrompu „ pénetre jufqu'a la Roebelle & les lieux in,, termédiaires. Le Comte de Broglio, fort aelif, „ homme a projets , & voulantfe mèler de tout, „ fecondoit ce chef. Après avoir paffé un jour ,, a faire maneeuvrer les troupes du camp, tous ,, deux fe font embarqués dans un canot pour „ fuivre le cours des rivieres de Boutonne & de „ Charente jufqu'a Rochefort ; ils ont paffe onze beures dans cette navigation pöndant une chaleur excefiivc; ils ont fait les obfervations les plus importantes: c'eft-la oü M. le Comte de Broglio a pris le germe de la ,, mort. Le lendemain de fon arrivée a Rochc„ fort, il eft tombé malade; on a effayé de lui „ perfuader de partir fans délaï; mais emporté „ par fon a-rdeuï , il A voulu continuer fon tra-. „ vail: il eft tombé dans Paffaiffemeiit, & on ,, 1'a conduit trop tard dans notre Abbaye, oü ,, il eft mort la nuit du 16 au 17, en préfence de M. Ie Comte Jofeph, fon Sis ainé, & de la „ Comteffe de Broglio. „ Le 18 on a fait fes funéraillcs avec toute la  C 15 ) „ pompe poflible. M. Ie Marquis de Voyer avoit „ ordonnéle cortege,& M. le Comte de la Tour „ du Pin, Maréehal de Camp employé, a fait „ le deuil. j, M, le Comte de Broglio étoit peu aimé de „ fes voifms, qu'il plaidoit prefque tous avec „ un grand acharnement; fon caractere n'étoit „ pas liant, il étoit même dur, & c'étoit un „ des trois chefs renommés pour cette qualité „ dans les troupes, avec le Marquis de Poyan„ ne & M. de Lugeac : mais on effimoit fes »> talens; &, comme il périt en quelque forte „ victime du bien public, il a été regretté dans „ la province du grand nombre des" habitans, j, indiilérens a fes querelles." 3oAouti?Si. Extrait d'une lettre de Nancy du 20 Aoüt. „ Suivant Ie relevé de la Généra„ li té de Lorraine, on y a compté en 1780, naif„ fances 34509, morts 25810, mariages 6708. " 30 Aoüt. Extrait d'une lettre d'Amiens du 25 Aoüt: „ Je vous adrelTe les vers fuivans de „ M. Gence, 1'un de nos compatriotes, pen „ merveilleux en eux-mêmes, mais bons a cou„ ferver comme renfermant le précieux mot de „ 1'Empercur, en voyant notre fiimeux canal: Laurent, ton illuflre mdmoire Vient d'acquérir une nouvelle gloire: En vifitant ce canal fouterrain, Qui, creufé par ton art, va recevoir la Somme, Et vers 1'Efcaut lui frayer un cliemin: Admirant ce qu'olbit tenter 1'efprit humain, üu Empereur s'enorgueillit d'être homme.  C 16 ) 31 Aoüt 178t. Extrait d'une lettre de Boutges du 25 Aoüt. „ L'adminiftration de cette , Province, la première de toutes , vu le tems 11 de fon inftitutlpn, fe diftingue par la fageffe " de fes opérations. On voit dans fes procés H verbaux de 1778 & 1779, l£s tentatives qu'clle " a faitcs pour diriger fa marche vers les objets " les plus utiles, pour connoïtre les befoins les ?' pius prclfans & les diverfes, reffburces de la " Province. Dans celui de 1780, la marche " elt plus affurée, les vues font plus étendues, toujóurs avec la plus grande attention pour 11 éviter les dépenfes fuperiïucs. Elle a furtout " fenti le befoin d'ouvrir des canaux, que les l', rivieres d'Euve , du Cher, de 1'Inde & de la Creufe rendèht très-faciles, & qui font abfo- lument néceffaires pour rétablir , pour multi" plier les manufaclures dans une Province oü „ abondent les richelfes territoriales, oü il y a " de 1'induftrie, oü il ne manque que des dé-" bouchés. L'objet eu très-bien vu 1 relfentiel % en maintenaut de mettre de 1'aclivité dans " les opérations. La lenteur fait fouvent avor", ter les meilleurs deffeins; elle leur nuit toü" jours infiniment, quand elle ne feroit que „ refroidir les efprits,& multiplier les dépenfes. L'actlvité feule donne du relfort, étend les " connoiffances, découvre les moyens, facilite ,, les opérations, & affure le fuccès." 31 Aolt. La faculté de Théologie de Paris vieat de publier enfin fa cenfure de YHiftoire  C 17 3 Philofophique des EtdbUJfemens du Commerce des Eutopééns dans les deux Indes. Elle en a extrait 84 propofnions crronées, & 1'ouvrage contient 114 pages. 31 Aoüt. Le firjet du Prix d'Eloquence latine, fondé par Jean Baptifte Coignard en faveur des Maitres-ès-arts & remporté le fept du mois par M. le Fevre, étoit piquant; il s'agiffoit d'établir que Vépoqiu de la vraie Littérature d'une nation étoit , non cello qui produifoit le plus grand nombre d'Ecrivains ei? de Livres; mais celle oü paroijjoient les Ouvrages les plus durahks, &f par conféquent du plus grand mérite. 1 Septembre. On commcnce a revenir fur 1'orgue de Saint fulpice, trop atnerement critiqué a ce jour célebre, triouiphe pour les arts, vraie fête pour les amateurs , mais humiliant pour le facteur, dont la réputation efluya un échec paffager. On prétendit que la forme nouvelle donriée a eet inftrument. faifoit tort a la mécanique intérieure. Cette forme, fans doute, eüt gêné tout facleur qui n'eüt con^u que la routine dc fon art; mais il n'eft pas de difficultés invinciblcs pour un artifte de génie, & tel eft M. Cliquot dans fon genre. II a combiné, étendu fi mécanique & multiplié fes mouvemens en raifon de la diverfité des jeux qu'il avoit a placetcc de 1'cfpace immenfe qu'il avoit a peupler de tuyaux & a foumettre a un feul point fous la main de forganifte. Aufli admire-t-on aujourd'hui la diftribution intérieure de cette belle  C 18 ) mécanique: elle eft fi bien entendue & fi bien ordonnée , que tous les effcts s'operent fans gêne, fans confufion, & qu'il eft poffible, en cas du plus léger dérangement, de remédier a tout fans embarras, au mom ent même , & fans nuire a aucune des partjes de ce grand tour. Cette nouvelle diftribution a fourni occafion k 1'artifte de prouver qu'il eft aulïï habile facteur mécanicien, que bon facteur harmonifte. 1 Septembre 1781. Mr. Parifot, dont on avoit mal a propos annoncé la mort, doit prouver ces jours-ci fon exiftence a la comédie Italienne, oü 1'on jouera Richard , parodie de fa facon de Richard III, tragédie de M. du Rofoy, jouée iL y apeu de tems,& déja fi vigoureufement fifflée. 2 Septembre. II paroit une eftampe , oü M. Damade, dont le nom eft devenu fi célebre depuis fon malheureux combat contre les freres Queyffat, & fon triomphe fur eux au barreau, elt repréfenté entre Me. Target & Me. Elie de Ikaumont fes défenfeurs. La vertu les préfente a la Juftice fur fon tróne: la première tient une efquiire en forme de bouclier, oü eft peint la rixe de ces athletes , ou plutót raflaflinat des freres Queyffat. II eft ficheux que cette eftampe n'ait pas paru plutót , dans le tems oü tout Paris s'entretenoit de cette affaire , y prenoit part & étoit enthoufiafmé du courage héroïque de M. Damade. 3 Septembre. M. Cailbava d'Eftandoux ? a qui 1'on attribuoit génévalement le Fon raifan-  C 19 ) ndble, a cru devoir défavouer cette piece dont f! a fait 1'éloge. Le Sieur Patrat, ci-devant Comédien k la fuite de la Cour, le véritable Auteur, vient enfin de fe faire connoitre par une lettre de remcrciment a M. Caiihava, inférée au Journal de Paris d'hier. Dans cette lettre trèsmodefte , il apprend au public qu'il elt auteur de quelques proverbes compofe's & repréfentés a Trianon ; d'une petite comédie-proverbe , mêlee de vaudevilles qui a été recue de la maniere la plus agréable; d'un opéra comique qui a eu le même fort; enfin d'une comédie en vers & en deux actes, mêlée d'ariettes: il confeffe que 1'accueil flatteur & réitéré des Comédiens commencoit a lui infpirer un peu d'amour-propre , lorfque la froideur avec laquelle le public a recu fes Deux morts, &le jugement rigoureux des papiers publics ont fait tomber le voile de 1'illufion , & lui ont rendu fa timidité naturelle. II a fait le Fon raifmnable; il 1'a donné au Sieur Volange, en exigeant le plus grand fecret. Cette bagatelle a eu un fuccès auquel il ne s'attcndoit pas; il a vu tous les fuffrages fe réunir en faveur de cette comédie; il a joui du plaifir pur de Panonyme & ne s'ell fait connoitre que lorfque fon fuccès a été complet; par Fobftination du public a Ia croire d'un de nos meilleurs comiques acluels. 3 Septembre. Dans la Parodie de Richard III jouée hier aux Italiens, AI. Parifot n'a pas fuivi ia marche ordiiiaire de ce genre, qui confiite a.  ( *° 3 ' travefnr en perfonnages groffiers & fouvent bouf* fons , les héros qu'on veut ridiculifer. 11 a laifle a eeux de la piece originale leurs noras, leurs' qualités, & a,fans effort, tourné en burlefque, tout ce qui y eft préfenté avec 1'appareiï de Ja grandeur. La plupart des couplcts ont réufli, furtout a caufe des airs heureux auxquels ils ont été adaptés; il en eft auffi de piquans & de gais par eux - mêmes. On eüt, au refte, fouhaité que le parodifte eüt appliqué fon talent h la critique d'un ouvrage plus connu; car, faute de'fe fouvenir de la tragédie de M. du Rofoy, on trouve des endroits ininteliigibles & dont Fobfcurité n'eft due qu'a celui-ci, un des hommes les plus babiles dans le galimathias doublé. 4 Septembre 1781. Le Sieur Radix de SaintcFoy, en attendant qu'il répande dans le public un Mémoirc direct juftificatif de fa conduite, ayant été forcé de fe démettre de fa charge de Surintendant des finances de M. le Comte d'Artois , a compofé & fait imprimcr Mémoire a Monfeigneur le Comte d'Artois fur Vadminiftration de fes finances. Dans ce Mémoire, fort fee &. fort ennuyeux, on trouve cependant quelques faits curieux. 10. Les Apanages des Princes duSang Royal, ne font plus, comme autrefois , de véritables démembremens del'Etat, & 1'ufage aeluel eft de les fixer a 200,000 livres de rentes en domaines, quittes de toute efpece d'cntretien & de charges , réverftbles a la Couronne a rextinétion  ( « ) de la ligne mafculine des Princes apanagés. 20. Les Domaines dont 1'apanage du Comte d'Artois fut compofé au mois de Novembre 1773, a 1'époque de fon mariage, confiftoient dans les Pro vinces de 1'Angoumois, du Limofin & de 1'Auvergne. Les charges de ces deux dernieres Provinces en abforbent le produit: au mois de Juin 1770", Moufeigneur obtint 1'échange du Limofin contre le Duché de Berry & 1c Comté de Ponthieu, & depuis, en 1778, celui du Poitou contre 1'Auvergne. 30. Le Sieur de Saintc-Foy prétend que 1'augmentation faite dans les revenus de ces Provinces , par fes foins & fon intelligence en cinq ans, fe monte a plus de 300,000 livres de rentes. 40. Mais, les améliorations faites, depuis la prifë de polfeffion de Monfeigneur, ne comptant point en cette matiere, il eft bien éloigné de penter que ce Prince ait encore recu le complément de fes 200,000 livres de rentes en domaine, exemptes de toutes charges. 50. ludépendamment de eet apanage, le Sieur de Sainte-Foy a préteudu avoir fait des fpéculations utiles pour Monfeigneur par différentes acquifitions hors de 1'apanage , telles que 1'échange des forêts de St. Dizier, Walfy & Sainte Menehoud, en Champagne; du Marquifat de Maifons & Seigneurie de Carrières, des terreins de la Pépiniere au fauxbourg Saint Honoré , formant le lief d'Artois, du Cobzée & des Grev£s du Mout Saint Michel.  C 22 ) 6°. Dès la fin de 1776 Monfeigneur eut le ■defir d'avoir une habitation & une capitainerie • pour évifier une éreétion nouvelle , capable de gêner les propriétés territoriales, on fit, en fa faveur, un démembrcmcnt confidérable de celle de St. Germain en Laye, fous le fuuple titre de Canton; & S. M. voulut bien y joindrc le don du Chateau neuf de Saint Germain & de 600,000 livres par an, pendant dix années, pour aider a la réconftruction. 70. Outre 1'apanage, il y a des fonds affignés fur le tréforPvoyal pour les dépenfes de laMaifon de Monfeigneur. Ils font de 2,202,925 livres 19 fois 4 deniers. 8°. Et ces dépenfes font de 720,791 livres 7 fois 1 denier de plus que cette fomme. 9°. Enfin, par le réfumé général de la fituation des affaires de M. le Comte d'Artois au buit Aoüt 1781, la dette a dépaffé fon avoir, fuivant 1'aveu même du Sieur de Sainte-Eoy, de 2,246,238 livres 16 fois 8 deniers. 4 Septembre 1781. A la fuite des propofitions condamnées par la Faculté , les fages Maitres •obfervent dans leur cenfure du livre'de 1'Abbé Raynal, qu'outre les quatrc-vingt-quatre propofitions extraites, il en eft beaucoup d'autres repréhenfibles également; mais qu'ils n'ont pas jugé a propos de les cenfurer toutes en détail, pour épargner aux fideles un plus long expofé de chofes qui font horreur. Ce qu'ils mettent fous ksyeux, ajoutent-ils, fuffit pour faire connoï-  C 23 ) tre tout le venin de 1'ouvrage condamné, un des plus déteftables qui puiffe jamais paroitre contre la Religion & 1'Etat. 5 Septembre. On conferve comme une piece curieiüe dans fon genre & digne d'etre tranfmife a la pofhérité, un Programme d'exercice Littéraire imprimé , fait par M. Pallion, Maitre de Penfion a Ivry fur feine. Cet exercice a eu lieu 3e 24 Aoüt & 1'invitation commencoit par ces deux vers. Venez tous, gens de bien, entendre des enfans, Qui vous font dévoués autant qu'intérefl'ans. Du refte, il annoncoit que ces enfans ddmontreroient toutes les figures de chaque lettre de 1'alphabet, en converfant par fignes; qu'ils définiroient le fyllogifme, 1'entymême, & la philofophie avec argumens , latins & francois ; qu'ils déclameroient en trois cents cinquantehuit vers le rragique du maffacre des nótres a la Saint Barthelemy; qu'ils raconteroient des fables comiques fur la fage morale, 1'avantage de la fcience, de 1'efprit, du travail, de la piété, de 1'honnêteté ; les fuites funcfles de la mauvaife tducation , du goüt dépravé , de la grofTiereté, de 1'ignorance , du fifle & de la frivolité. Suit une note du galimathias le plus complet. II elt ïnconcevable qu'a deux lieues de Paris , on laiffe exifter en chaire un pareil inftituteur digne de Charenton. 5 Septembre. M. Radix de Sainte-Foy termine  C 24 ) fon Mémoire par aflurer que, fans les dépenfes extraordinaires de M. le Comte d'Artois, il auroit la fatisfaction de préfenter a Monfeigneur un excédent d'aclif de prés de neuf millions, II convient que quclques Magiftrats lui ont dit en voyant eet état dlaccroiifement de maif h & 1'impoffibilité prefque reconnue d'y fatisfaire, qu'il auroit dü Jé démettre de fa charge: „ & „ fon tort, en effet, dit-il, eft de n'avoir rien ,, trouvé d'impofïïble pour tout ce qu'a defiré fon maïtre. 11 s'eft plutót regardé comme ,, 1'exécuteur de fes volontés, que comme un ,, contradiéteur de goüts qui ne lui ont paru 55 qu'éphémeres, & dont il étoit bien fur que 1'élévation de fon ame, & la maturité de fes „ réflexions le dégageroient." On rapporte -a cette occaüon le propos de M. Radix de Sainte-Foy a fon maitre, lorfque celuici, indigné d'apprendre les déprédations dont on 1'accufoit, lui dit. „ Vous me voliez donc aufli. — Monfeigneur, les menus -plaifirs de „ Votre Alteffe Royale tien ont jamais Jouffert," lui répliqua-t-il. Du refte, M. de Sainte Foy termine fon Mémoire par un réfumé, oü récapitulant les dixneuf accufations, calomnieufes fuivant lui, du Mémoire de le Bel, il renvoie aux articles du préfent Mémoire qui les détruifent, ou fait des répoiifcs particulieres & fommaires aux imputations dont la difcuffion n'a pas pu entrer dans Xe détail de fon adminiftration, & il faut avouer qu'il  C 25 ) qu'il fe juflifie trés-mal & auroit mieux fait de ne point prématurer le Mémoire direct qu'il annonce fur eet objet. 5 Septembre 1781. M. le Premier Préfident de Bordeaux tient un grand état a Meaux lieu de fon exil. On fait que le Parlement de cette ville a fait un arrêté pour demander au Roi le " retour de cc chef, le retrait des Lettres patentes concernant M. Dupaty, trop humiliautes, trop mjuneufes pour la Compagnie, enfin la liberté d'aller i leurs terres vaquer a leurs affaires & de jouir des vacances. Du reflre, ou ne fait ricn: les Avocats & Procureurs qui ne font pas retenus en ville par Lettre de cachet vont bientót partir & quitter la ville 6 Septembre. Extrait d'une Lettre de Grenoble du 31 Aoüt. „ M. le Franc dePompignan, „ Arcbevêque & Comte de Vienne, pourfuivan' „ toujours avec un zele infatigable les apótres „ de 1'Incrédulité ou les ennerhis de I'Egüfe ,J vient de publier encorc un Mandement por*' tant d9enfes de lire dans fon Diocefe lesceu„ vres de Jean Jacques Roujfeau & MMoire „ politique 6? Philofoplnque des Etablïfferaens „ & dn Commerce des Européens dans les deux h Jndes-> Par le Sieur Rainal. Dans eet écrit paftoral, trés-bien fait dan* „ Ion genre, on diftingue ce parallele des deux coryphées de la Phüofophie moderne. VoltairJ „ Plus fecond, du moins quant a la muhixUt s, de fes ouvrages; aé Pcëte cc a»P i>? V • [ Tome XFUL jj  C 26 ) n'étoit pas; cfprit brillant, écrivain plus poli, " & en général plus foutenu dans fon ftyle ; " Tean Tacques, génie plus fort & plus ncr" veux plus éloquent, quoiqu'avec de frequen" tes inégalités; plus propre a manier le raifon?> nement. Tout confidéré, & lans décidcr qucl '] étoit celui qui, par 1'abus & la fupérionté de fes talens, pouvoit faire le plus de mal, ü eft " certain dans le fait, que les Ecnts de Vol5> taire ont eu plus de lcéteurs; ils devoient en " avoir davantage: 1'inapplication & la légerete " s'en accommodoient mieux; ils ouvroicnt un " cbamp plus vafte a la licence de tout penfer " & de tout faire. C'eft 1'attrait de cette licence " qui multinlie lcs incrédules ; auffi Voltaire " l tiü confervé jufques a la fin de fes jours, " ia dans la république des mécréans. " on y admiroit le Citoyen de Geneve; il na " Pu v obtenir que la feconde place. Dans le* " combats qu'il a livrés a la Religion * a fou" tenu ce caracleve de fmgularité, répandu fur " toutes les adtions de fa vie. Franc & ingénu, " il a dédaigné les fubterfuges , famihers aux " écrivains impies: il n'a pas prétendu, comme " la plupart d'entre eux, & notamment Voltaire qu'a 1'ombre d'une ironie qui 11 en eft " que plus infultante, ou d'une allegorie qui " n tr mpe perfonne, il auroit droit de fe plam" d e qu'on lui attribuat calomnieufement le " deflen d'attaquer le etoiffitoiftoraladtfjet" S'ent & fans détour qu'il n'y croyoit pas....  ( 27 ) *» n a retenu beaucoup plus de verités que ?, les athées & les déiftes anciens ou modernes; „ mais il ne les a retenues que pour les affoi„ blir, & les défigurer. II terrafle le matéria„ lifme; le déifme retouché de fa main n'en a pas plus de confiftance. „ Sa morale eft moins dépravde que celle des „ autres incrddules; il la colore quelquefois du »» vernis de 1'auftere vertu ; mais ceftoïcifmé „ aboutit enfin au reMchement 1c plus fcandalcux. „ II témoigne une profonde vdndrarion pour „ la perfonne de Jéfus-Chrift... Nous pouvons „ & nous devons croire que cette vénératiou „ n'dtoit pas feinte ; il rié ddguifoit pas fèé 9, fe'ntimens".... 6 Septembre 1781. En 176a le Sieur Morcau, Hiftoriographe de France, fut nommé Commisfaire du Roi pour trniter avec M. de Sainte Palaye de toute la partie hiftorique de fa Bibliotbeque & de tous fes manufcrits fans exception. Le tout fut tranfpórté, non a la Bibliotheque' du Roi, comme 1'a avancd M. de Cliamfort dans fon difcours de receptton a fAcadémie mais dans le Cabinet d'hiftoire & de monumcus' mftitud par ledit Sr. Moreau & confié a fes foins;' centrc & fiége des travaux attachés a fon titre. Lé Roi, pour cette acquifition, avoit affuré a M. de Sainte Palaye & J fon frere une rente viagere de 4000 livres. Au nombre des manufcrits de M. de Sainte Palaye,remis après fa mort au Sr. Morcau, avec B s.  ( a3 ) fes livres, eft le fameux Diftionnaire des Antiquités fraiiQoifes en 40 volumes in folio, dans lefquels ce favant & laborieux compilatcur cmbïaffoit k la fois Géographie , Chronologie , Mccurs, Ufages, Légiflation, &c. On y trouve auffi tous les matériaux du Gloffaire Franpis, commeneé par le défunt & continué par M. Monchet, fous les prdres de M. de Brequigny. i Comme dans la Bibliotheque de M. de Sainte Palaye, il s'eft trouvé deux copies du Recueil d'antiauités qui contient, rangés par ordre alphabétique, & tous les extraits des lectures que M. de Sainte Palaye avoit faites pendant fa vic, & toutcs les notes par lcfquclles il avoit voulu fe rappeler les connoiflances qu'il y avoit puifées ,■ il en a été fait un écbange avec M. le Marquis de Paulmy, qui a livré des chartres & des recueils beaucoup plus analogues aux recherches biftoriques du Sieur Moreau & de fes collaborateurs. On apprend tous ces détails dans une Lettre de M. Moreau, datée de Ville d'Avray le 29 Aoüt, adreffée a M. de Chamfort, oü il le redrefTe fur fes erreurs très-volontaires & trés-, extraordinaires au milieu d'une Académie, dont plufieurs membres, adeurs & participans de ces échanges , auroient pu mieux inftruire leur'nouveau confrère. Cela prouve de plus en plus, combien, en tout, la vérité eft fujette a s'altérer & difficile a éciaircir.  C 29 ) 7 Septembre i'78'i. Madame la Duchefie de Polignac s'étant dtablie dans la maifon de M. le Rez de Chaumont a Pafly pour y faire fes coucbes, toute la Cour s'eft rendue a Ja Mtiette, afin que la Reine put avoir la facilité d'aller'voir cette favorite. II y a trente-deux Dames de nommees du voyage & vingt-fix Seigneurs, fans compter ce qu'on appelle les Polijfons, c'eft-adire les courtilans non défignés, qui peuvent venir rendre leurs devoirs a S. M. , M; 1c Comte de Maurepas a profité de cette circonftance pour venir fe délaffer a Paris de fes grandes occupations, ainfi que d'autres Ministres. Hier M. le Duc d'Aumont leur a donné a diner a Ia Redoute CMnoife de la foire; enfuite ils fe font rendus aux Variétés amufantes , oü ils ont vu Jeróme Pointu & le Fou raifonnable. Lorfque M. le Comte d'Eftaing, un des Seigneurs invités de cette partie, .s'efl: montré , on 1'a applaudi particulierement & 1'on a ené Vive d'Eflaing! Toute cette brillante fociété elf rentrée de nouveau a la Redoute & c'étoit une foule dont il n'y a pas d'exemple. Chacun s'emprelfoit d'admircr 1'air aimabie, gai & fercin du premier Miniftre, ainfi que Ie tendre intérêt de Madame de Maurepas, qui accompagne fon ffiari partout: utiron fi rare & fi aimabie a la Cour. M. Amelot, M. de Ségur,M. de Caftries ,. M. d'Olfun, prefque tout le Conlëil fe difttoguoit dans le grouppe, oü étoient auffi de trèsjoh.es femmes. Ce jour fera mémorable dans les B 3  C 3° ) faftes de la Redoute & de la Foire. Chacim s'emprefloit & fe demandoit fi M. de Fleury n'y étoit pas auffi, pour le voir & le connoitre, mais il n'a pas paru. f Septembre 1781. Mr. Parent, avant fon jugement, a fait paroitre un Long Mémoire pour le Sieur Parent, Préfident d la Cour des Monnoyes: eor.tre les Mariés, Rogé, ci-devant faïenciers-poelliers 4 Lyon, & le Sieur OJlerwald, négociant a Lyon ; oü 1'on remarque furtout Fhiftorique de la vie & moeurs de la Dame Rogé. Suivant ce Mémoire, Marie Pierry efi née a Lyon de l'extraclion la plus bafle. Dans fon enfance la mifere 1'avoit réduite a aller vendre par les rucs de petites patifleries: a treize ans elle fe rok fille de boutique cbez une marchantle de modes : avec une figure intéreflante elle circula quelque tems dans la ville parmi les jeunes libertins dont elle abonde. En 1749 elle époufa Pierre Rogé , faïencier-poelier, ne polTédant aucun fond, dont tout le bien étoit dans fon travail & fon induftrie. En 1770 un procés fournit k la femme Rogé occafion de venir k Paris , oü elle connut le Sr. Parent. Cette femme ardficieufe & vraiment extraordinaire, devenue la maitrelfe de ce premier commis de M. Bertin, s'évertua, concut de grands projets de fort une ; mais fon plus grand étoit fondé fur 1'aveuglement & la bonhommie de fon amant, qui, fentant 1'indécence de faire certaines acquifitions en fon nom, fe  C 31 ) fervoit des offrcs qu'elle lui fit d'étre ion prête* nom. Elle acheta ainfi a Lyon des tcrreins appartenans auxJéfuites,contenant 200,000 piëds, avec des batimens précieux , appelés terreins de Saint Jofeph : elle acheta encore d'autres effets, dont un hotel confidcrable a Paris. On étoit alors a la recherche de prétendus préte-noms des Jéfuites; on foupconna cette femme. L'jnicndant de Lyon füt chargé de prendre des renfeignemens : le Prévót des marchands & les Echevins qu'il confulta, lui répondirent qu'il étoit en effet étonnant que des gens de la lie du peuple , a peine connus, fi ce n'eft par un petit tralie de ferraüle & de faïence, fufiënt en état de faire de pareilles acquiiitions. Cette notice fut lue au Parlement, les Cham» bres aftemblées, & le 15 Février 1777 la femme Rogé fut arrêtée par ordre du Roi & conduite a la Baftille. Le Sr. Parent s'étant remué , ayant appris & prouvé aux Miniftres & au Lieutenant Général de Police qu'il avoit fait tous les fonds , elle fut élargie environ fix femaines après. A la fin du Mémoire peu juftificatif du Sr. Parent, & qui annonce feulement fon étrange duperie d'une femme faufie & artificieufe, eft une Confultation délibérée a Lyon le 3 Juillet dernier par Me. Proft de Qoyer , fuivant laquelle il y auroit alfez d'induclions, de preuves & de titres pour découvrir les friponneries de la femme Rogé & la condamner a des teftitutions. Cependant, fuivant le jugement iuterveuu marB 4  C 3* 3 di dernicr, le Sieur Parent eft puni par 1'admo nition; la femme Rogé eft élargie avec un plus amplement informé de trois-mois feulement. 8 Septembre 1781. On a parlé plufieurs fois de la Dlle Bertin, fi célcbre depuis qu'elle a 1'honneur d'étre marchande de modes de la Reine. Elle avoit pour première fille de boutique Mlle Picot, ouvriere extrêmement adroite, intelligente, & furtout très-intriguante. Celle-ci s'eft prévalue de fon talent pour s'établir & a bientót enlevé la plupart des pratiques de fon ancienne bourgeoife. La Dlle Bertin furieufe , 1'ayant un jour rencontrée a Verfailles dans- la galerie, Pa injutjée & lui a craché au vifage. Procés en conféquence a la Prévóté de 1'hötel; FaSlum de part & d'autre, dont le plus plaifant eft celui de la Dlle Bertin, de la faeon de Me. Coqueley de ChaiuTepkrre, dit-on: enfin, eft intcrvenu un ïHgemeut le lundi 3 Septembre, qui fait défenfes a la Dlle Bertin de récidiver, la condamne a 20 livres d'aumóne envers le Roi & a tous le& dépcns, On trouve que, vu le lieu oü 1'infulte a été commife , le délit n'eft pas alfcz puni. 9 Septembre. Depuis que, malgré les foins du Sieur d'Auvergne a réunir dans les concerts donnés aux Tuilleries les divers genres de mufique, Francoife, Allemande, Italienne, afin de fatisfaire les trois fecles qui partagent aujourd'hui 1'empire lyrique, ils ont été encore plus abandonnés, s'il eft pofliblequ'en 1763: nous avons annoncé qu'on avoit elfayé de ramèner te  ( 33 ) le public par de pctïts aftes exécutés au tbéatre des Mcnus. II n'a pas éré beaucoup plus empreffé de s'y rendre, foit a raifön de Féloignement, foit a raifon de la fnauvaife exécution v foit paree que ces acres étoient déja ufés jufques a la corde. Enfin, on a pris le parti de remettre Echo rjf Narcijfe. Cette Paftorale tragïque ayant eu peu de fuccès la première fois, il étoit ;l craindrc que la défertion n'augmentat le vendredi 31 Aoüt, oü la première repréfentation de la reprife a eu lieu. Heureufement le pronoftic du Cheval'icr Gluck, 1'auteur de la mufique , s'eft vérilié: ildifoit, lors de la nailfance de eet 011vrage : il ne peut y avoir de trop grand th.êdtrs pour Iphigénie en Aulide, ni de trop petit pour Echo £? Narcijfe. En effet,celui-ci a eu le fuccèsle plus décidé. Le Sieur Lais qui, ayant voulu fe fouftraire a 1'ordre qu'il avoit recu,fc difpo, foit a partirpour le pays étranger, a été arrê'té & mis au fort-I'Èvêque. Rêtir'é de cette prifore pour faire le röle de Cynire, clianté autrefoispar le Sr. le Gros, il y a brille de la frtcon la plus diftinguéc. Non-feulement fa voix a paruintiniment 'propre au vailfeau dans lequel iü chantoit; mais il en. a réfüité 1'oppofition la plus^ heureufe avec celle de Narcijfe, & d'ailleurs orj Fa jugé aèleur : on lui a trouvé du goüt,. de I'ame & fürtout du zele; ce qui a fait oublier fa faute. UHymne d V Amour, qui termine eet acle, ra été redemundé & répété; cc qui jufqües-la dtoüt B S  C 34 ) fans exemple h 1'opéra. II eft des gens fëveres, qui regardent cette complaifance comme funefte & comme dégradant la majefté de ce théatre, comme alfimilant les acteurs aux hiftrions des théatres forains. 9 Septembre 1781. Les proprie'taires des maifons du Palais royal jugeant, depuis que M. le Duc de Chartres a commencé d'abattre les arbres de fon jardin, qu'il étoit tems de publier leurs défenfes, ont répandu un Mémoire, oü ils réclament contre 1'entreprire de fon Alteife. Les gens d'alfaires du Prince pendant fon abfence n'ont pas cru devoir refter en défaut & ont répondu aux propriétaires. Le public s'emprefle d'avoir ces factums , dans" une querelle oü il prend tant de part. 9 Septembre. M. de Villepatour, Officier Général d'artillerie très-renommé, vient de mourir prefque fubitement d'une goutte remontée. 9 Septembre. On a applaudi hier au concert fpirituel plufieurs artiftes &morceaux nouveaux;. 1°. une fymphonie de Mr. Froment, dont 1'andanté a paniculierement réufli: 20. un motet de M. Mcreaux: 30. M. Imbault qui a mis beaucoup de netteté & d'exécutiorr dans fon concertode violon: 40. M. Michel, qui a joué de la clarinette avec une fureté, avec une facilité , qui ont excité les tranfports les plus vifs: 50. enfin un oratorio de Jephté , morceau nouveau dont les parolesfont deM. Moline, & lamufique èe. M» Voget: le poëme a paru avoir le ton du  C 35 ) genre, & par fa coupe preter au muficien, & celui-cï annoncer un talent diftingué & digne des plus grands encouragemens. 10 Septembre. Mrs les Curés de Paris ayant député vers M. 1'Evêque de Senez pour lui demander la permiffion de faire imprimer fon difcours , il paroit & fe vend au profit des pauvrcs de la paroifle de St. André des arts. Cette oraifon funebre foutient rl la lecTure la réputation que lui avoit procuré le débït. On y trouve quelques notes ldftoriqu.es, rcndant ce morceati oratoire encore plus préeieux. L'Evêque de Senez rappelant le nombre dc difciples du Curé de St. André, que PEgb'fe de France compte aujourd'hui parmi fes Pontifes, dit qu'il pouvoit être nommé comme autrefois Salvien, le vmltre des Evêques, & il infere une lifte & les noms de quatorze Evêques qui ont été de la communauté de M. Léger. L'Abbé de Beauvais en étoit lui-même; mais il ne fut élevé a l'Epifcopat que lorfque ce vénérable Paftcur étoit réduit dans un état d'affaiffemcnt qui le laifl'a pendant quatre ans étendu fur le lit du trépas. Cependant a cette uouvelle, 1'ame étonnée du Curé fe réveilla comme d'un fommeil profond: il lui avoit tenu lieu de pere, il s'agitc, il gémit de ne pouvoir exprimer Ie fentiment qu'il éprouve. „ Ah!" s'écrie-t-il eu foupirant, „ ah! que j'aurois de cliofes a lui dire! " mais fa langue fe refufe a les exprimer. Ce morceau eft mi des plus touchans du difcours." B 6  ( 36 ) 10 Sé'ptembre' i?8i. Extrait d'une lettre dela Rochdle du 4 Septembre.. „ Nous fommes„ d'autant plus föchés ici de la mort du Comte „ de Broglio, qu'il' avoit propofé & fait agréer „ le deffécbement des marais peftiférés de la „ Boutonne & des envirous de Rochefort a „ MM. les Marquis de Ségur&de Caftries, & „ que FacHvité, 1'opiniatreté, le crédit de eet „ Officier général nous. étoient néceffaires pour „ la réuffite du projet. II a laiffé beaucoup de „ mémoires & d'obfervations fur une inHnité de matieres intéreffantes pour 1'Etat &-pour le„ public ; car aucune ne lui étoit étrangere. „ Deftiné. d'abord aux négpeiations, il s'étoit. ■ livré a fëtude des intéréts des Cours qui va„ rient fi fouvent, & il avoit continué de fes, „ Fuivrë dans leurs variations. Peut-être regardoit-il cette étude comme une dépendance de„ celle qui L'occupoit principalemeut; car il n'tft aucune connoiffance qui lui ait para „ étrangere a la fcience militaire: il en pofledoit „ parfaitement la théorie;. il s'étoit rendu pro„ pre 1'expérience de tous. les tems, a laquelle „ il avoit beaucoup aj.öuté par la fcience & par „ fés favantes eombinaifons; il s'étoit furtout „ attaché a la partie économique, exigeant des „ détails fi. étendus. Auffi la confiance que les„ troupes avoient en lui dans les marches & „ pour la fubfiftance, égaloit celle qu'il méritoit „ comme Général' dans la défenfe d'une place-,, „ ou. en, préfence. de. 1'ennemï, li avoit ime conr  C 37 ) „ ftóiQatfcë trés - vatte de ce qui conceraoit leg „ forgcs en particulier & les arts en général, „ & lbn zele pour le bien public dirigeoit tou„ jours fes vues. „ Enfin , pour mieux connoitre le Comte de „ Broglio & ce qu'il valoit, on peut s'en rap„ pörter a ce qu'en dit le Comte de St. Ger» ffl^njdontle témoignage nepeut êtrefufpeét „ dans fes Mémoires (Sect. 4. page 99 & fuiv. „ Edit. in 8°. de 1779)" 10 Septembre. Tandis qu'on prelfe avec Ia plus grande aclivité la falie en bois qu'on couftruit "prbvifoirerhent pour'Topéra; qu'on y travaille au grand fcandalc des fideles, même les fétes de Vierge , jours auxquels vaquent lesfpeélacles protancs, les Architeftes s'évertuent a donner des plans d'une falie a demeure & qui puiffe fervir de monument d'architecrure digne de cette capitalc. Un M. Huct, entr'autres , public le plan d'une a conftnure fur le terreinde 1'hótel de Longueville; il y a joint une place pour Louis XVT devant la cour duLouvre, une fontaine publique derrière la falie , & aux'deux cótés , une rue de Gluck & une rue de Piccini. 11 Septembre. La cenfure traduite contre Ie Livre de 1'AbbéRaynal commence ainfi :„ Nous „ avons cru devoir faire connoitre dans Ia forme ordinaire Ie veniu dont cetouvrage eft infeclé. „ Puillent nos travaux être couronnés par Ie „ fuccès! puillent-ils raifermir ia foi chance- laate! puilfent les forts y trouver de nouvcaux B 7  ( 38 ) „ motifs de perlevérer! Ou verra par les propo „ fitions extraites , que eet Auteur foulc aux „ pieds ce qu'il y a de plus facré: que les blas„ phêmes,la plus honteufe corruption, les for„ faits les plus atroces ne font plus des crimes „ pour lui. II n'eu connoit d'autres que de « profeffer la religion chrêtïenne , de chêrir, ,9 honorer Ê? refpecler les Rois. Quelle impu„ dence! elle devroit fulïïre pour empêcher ,, les ravages que pourroit faire la doctrine ,] de 1'Auteur. Non, il n'y a qu'tm impie qui „ puilfe fans indignation entendre appeler cent „ fois la religion chretienne, la plus méprifdble „ de tout es les fuperftitions. II n'y a qu'un hom„ me entierement corrompu qui puilfe entendre , „ fans frémir, avancer des propofitions abomi„ nables qui détruifeut les mceurs & renverfent „ les loix , enfeigner que Yadultere n'eft point „ un crime, fi les loix ne le défendent point; „ que le libertinage doit-ttre non-feulement tolêré^mns érigé en culte public. II n'y a qu'un „ homme dépouillé des fentimens de la nature „ qui puilfe applaudir a un Ecrivain qui veut „ anéantir 1'amour filial , infpirer aux entans „ une baine violente contre 1'autorité paternel„ le, qui fouleve lespeuples & les invite ouver„ tement a maflacrer les Rois...." Tel efl: le réfumé des propofitions extraites de eet ouvrage, difent les Docleurs dans 1'excès de leur rage fanatique, un des plus déteftables qui puifle paroitre contre la Religion 6? cpntre  C 39 ) VEtat. El!es font renfermées dans quatre artrcles: 1°. de VRomme &P de la Loi naturelle: 20. de la Religion révélée : 3". de la Morale , 4°. du Gouvernement. .11 &ptembre. On a dit dans k tcms que les divers Miniftres des finances , peu amis des arts, qui avoient gouverné celles de la France fur la fin du regne de Louis XV , avoient étendu leur barbarie jufque fur les fonds deftinés aux prix des diverfes Académies. Celle des Belles-Lettres s'étoit trouvée par fa réduction des rentes, dans la nécefllté de ne diftribuer que de deux en deux ans, le prix annuel fondé par feu le Comte de Caylus , confiltant dans une médaille d'or de la valeur de 500 livres. M. Necker n'avoit pas möme eu le foinde réparer cette injure, il paroif que M. de Fleury s'en elt chargé. M. Amelot, par une Lettre du premier Sep Le premier de fculpture, qui étoit David entrant dans la tevte de Saül endormi, a été décerné au Sieur Jacques Philippe le Sueur, de Paris, & fautre au Sieur Antoine Cltaudet, de la même ville. 18 Septembre. Entre les diverfes pieces que la mort de 1'Impératrice-Reine a fiüt éclore dans les colléges, il faut diftinguer un Poëme latin de M. Lnce, Bourfier du Collége de Louis le Grand, agé de quinze ans feulement, mais éleve de M. Selis fon Profelfeur, & avantageufement connu dans la République des Lettres , qui pourroit bien 1'avoir aidé: quoi qu'il en foit, dans ce Poëme, dont le plan eft fage & ingénieux, la Poëfie chaude & pleine d'images , la latinité pure & correcte, il fe trouve un portrait du Roi de Prullé trés-flatteur , quoique trèsvrai. M. d'Alembert, ancien éleve lui-même de 1'Univerfité de Paris, a la priere du jeune homme, a adreffé un exemplaire de 1'ouvrage a ce Monarque. S. M. PruiTienne, pour récompenfer le talent du jeune Poëte , & 1'encourager dans fes études, lui a fait remettre une gratificatiou par le Philolbphe. 18 Septembre. M. Bertin, le Miniftre, vient C 4  C 55 ) cfe faire placer dans 1'églife de Saint André des Ans un monument a M. l'Abbé Batteux. Sur un cippe s'éleve un vafe funéraire dans le genre antique , & orné des figures fymboliques de ia Religion, 1'Eloquence , la Douceur, 1'Hiftoire & la Philofophie; au-delfus eft la couronne de 1'Immortalité; plufieurs autres attributs allégoriques enrichiffent eet ouvrage defculpture. Voici 1'Infcription, compoféepax M. Bertin lui même , a ce qu'on affure: Carolo Batteux Honorario Eccles. Rem. Cauonico, Uni è XL Viris Academ. Gallica;. Regire Infcri. & bumanior. Litt. Academi. Socio. Amicus, amico. M. P. Vixerat. ann. LXVÏI. Obiit. ann. Dni MDCCXXX. Menfe Jul. Die XIV. Ce Miniftre avoit déji donné la même marqué d'affection a M. Bourgelat k 1'Ecole vétérinaire, établiflementfondé parM. Bertin,& qu'il a toujours favorifé avec la plus grande complaifance. 11 fe propofe d'honorer pareillement le célebre is'ouflot. Peut - être feroit-il mieux de ne pas tant prodiguer 1'admiration, & ce tribut de 1'amitié - deviendroit trop général. 18 Septembre 17S1. M. le Comte de Tliélis a la fitisfaclion bien rare pour les inftituteurs des nouveaux établiflemens,.de voir le üen fruc- tilier  C 57 ) rider & s'étendre de fon vivant. Plufieurs perfonnes fe propofent d'établir des Ecoles nationch les militair es, a 1'inftar de celle de Paris, & lui ont écrit pour lui demander des inftruélio'ns, Comme on ne peut fe promettre de réuffir qu'avec des Chefs vertueux & intelligens, ü a imaginé d'en former une pe'piniere dans fon écolemere pour en foumir aux Provinces. 18 Septembre. L'Auteur du Précis d'un projet; tfElabUfJement du Cadaftre dans le Royaume en donne la plus haute idéé dans fon avertilfement,B allure qu'il a fait 1'effai de fon plan dans 1'Election d'Angoulême y & ajoute: „ pour juger „ de la révolution heureufe que le Cadaltre a „ produite dans cette partie du Royaume, il „ faudroit voir le tableau de ce qu'elle étoit „■ avant 1737. Son agriculture, fa populatioiv „ & fon commerce lui ont donné une exilience „ nouvelle. Ses priviléges abulifs font fuppri,.. més; les impofitions qui ne fe payoient qu'en j, 12 & 15 ans, rentrent en quinze mois dans; „ les cofres du Roi; & 1'on n'y connoit „ plus ni procés, ni emprifönnemens relatifs „ aux tailles. " 19 Septembre. Extrait d'une lettre de Stras- bourg du 15 Septembre Cette ville fut ren- due aux armes de Louis XIV le 20 Septembre ï68i; nos Chefs ont imaginé de célébrer 1'annér centenaire de eet événement par une fête publique : il eft queftion furtout de marier 20 filles; de chacune des Tribus ou Corporations entree C 5  C 5S ) lefquelies eft paitagé le peuple. M. Gérard* notre Préteur, a écrit a M. Rochon de Chabannes, avantageufement connu au théatre par des fuccès multiplie's fans aucune chute, ni même faux pas, pour le prier de compofer une piece a ce fujet. Ce Poëte fécond, quoiqu'il n'ait pas» eu trois fcmaines pour 1'cxécution, vient d'èrrvoyer a fon ami une comédie en un acte trèsbien adaptée a la circonftance:. quand elle aura été jouée , je vous rcndrai compte de 1'effet qu'elle aura produit. 19 Septembre 1781. Le Bureau de Légiflation. dramatique eft abfolument difperfé , & qui le croiroit? C'eft fon auteur lui-même qui le premier a donné 1'exemple de la défeétion. C'eft le Sieur Caron de Beaumarcbais que les Poëtcsdramatiqucs , après svoir eu la baffeffe de fe ranger fous fes drapeaux, ont la lacheté d'imiteren fe foumettant aux régiemens & en s'alferviffant aux Comédiens. Ce Beaumarcbais, tonjours avide de faire du bruit, n'importe corament, voyant que fon projet de dominer impériéufement fes confrères ne réufliflbit pas,.& par la fermetéde quelques- uns,~& par la contrariétê des Gentilshommes de la Chambre, a imaginé d'aller trouver les Hiftrions, de s'èn rapprocher ck de les flagorner pour obtenir d'eux de faire jouer la fuite de fon Barbier de Séville; ce qu'il a gagné après avoir elfuyé quelques rebuffades de 1'Aréopage-comique. Sa piece doit être repréfcnténinc.efiamiïicnt.3L\L.Xït/fJX & de la Harpe ^  C 59 ) Font fuivi, & ont fait la leemte de leurs tragédies. La farce du Sieur de Beaumarchais a pour titre: Le Mariage de Figaro. 20 Septembre. Al. d'Alembert eft retombé dans 1'état vaporeux oü il étoit il y a quelques annécs, lorfqu'il entreprit fon voyagc d'Italie. II craint la mort & tous les maux qui affligent notre trifte humanité. Scs confrères de FAcadémie des Sciences remarquent, lorfqu'on lit quelque mémoire fur ces matieres, rintéröt fingulier qu'il y prend & le retour fecret qu'il fait fur lui-möme. Ce qui augmente le fikheux de fa fituation, c'eft qu'il ne peut plus fe diftraire par des occupations féricufes & foutenues , furtout a 1'égard des hautes fciences, de la Géométrie tranfecndante a laquelle il étoit appelé plus véritablement qu'aux Belles-Lettres oü il ne fera jamais qu'un Auteur ordinaire. La vkilkfle du Roi de Pruffe eft encore un objet affligeant pour lui. Son amour propre eft flatté de pouvoir fe glorilier de tems en tems defa correfpondance avec le Monarqtie, d'en lire quelque lettre ; & il s'eft envain eftbrcé de fe tourner vers 1'Impératrice des Rttffies, inexorablea jamais. Cette Souveraine, piquée de Is facon injtuïeufe dont M. 1'Abbé Chappe a park dans fon voyage de Siberië de 1'intérieur & dm gouvernement de fes Etats, a trouvé cette ingratitude d'autant plus grande, que le favant Auteur avoit été accueilli par S, Af. Imoériafe avec beaucoup de diftihetiort. L'ufage dl, ' C 6.  C 60 ) qu'un membre de 1'Académie des Sciences vent faire rmprimer quelque chofe avoué d'elle, de remettre 1'ouvrage a des- Comndlfaires qui ydonnent leur approbation.. Le voyage de 1'Abbé Chappe en portoir une, & entre les noms des approbateurs étoit celui de M.. d'Alcmbert. L'hnpératrice des- Ruffies 1'a lu avec peine & s'en fuuvient. Ce qui prouve fintérêt vif que cette Princefle y mettoit,, c'eft qu'elle n'a pas dédaigné, a ce qu'on allure, de prendre laplume elle - même & de répondre aux alfertions- calom- " nieufes de 1'Abbé Chappe. On ajoute que Voltaire, malgré tous fes efforts-, n'a pti détruire, les préventions de 1'Impératrice. L'état de. M. d'Akmbert, s'il favoit fe faire une raifon & fe foumettre a. la fatalité., elt cependant' heureux. II a iacoo livres de rentes , dont il employé 4000 livres en bienfaits. lljouit. d'une confidération afiez étendue;. il remplit fon goüt pour Ia. domination dans 1'Académie Fran9oife; il a une Cour nombreufe & affidue. Malhcureufement., c'eft le Philofophe qui a le moina de philofophie.. On le voit quelquefois feul courant dans les Tuilleries, & cherchant a fe fuif hu-même; quoiqu'i portée de voir la fociété la plus brillante , elle lui déplaït. Le fexe n'a ja? Hiais eu un grand attrait pour lui, & ce n'eft pas durant fa vieilleffe qu'il y trouvera ce charme: doux, touchant, confolaut les hommes tendres,._ qui ont fu fe faire d'une amante une amie qui: leur dcro.be, les. horreurs du tombeau.  ( & 5 21 Septembre 1781. M. le Marquis de Porarine menacaut ruine depuis longtems, Monfieur avoit donné la furvivance des Carabiniers a M. le Comte de Chabrillant, un de fes Capitaines des Gardes du Corps. Le moment de 1'infpection & de la revue approchant, M. dePoyanne, déia piqué de fe voir nommer un fucceflèur, & apprenant qu'il. fe difpofoit a remplir fes fonctions, n'a pas voulu les lui lailfer faire, &, malgré toutes les repréfentations de fa familie & de la Faculté, a voulu abfoiument fe rendre a Vendöme oü font les Carabiniers:. il a eifcétivement fait fa revue, mais n'a pu en termmer le travail; il elt mort comme il s'en occupoit. Un pere Chartreux, autrefois Capitaine da Carabiniers, étoit forti de fa retraite pour convertir eet Officier général, qui depuis peu de tems avoit été en perfonne a fa paroilfe y remplir les devoirs de la religion d'ufage en pareil cas; ainfi nulle inquiétude fur fon falut. Du relle, M. de Poyanue eft peu regretté ; c'étoit un Chef fans humanité , dur & haut; qualités peu propres au commandement. 11 Septembre. UIncognita perfequitata, mifë. en chant par le Seigneur Anfolïï, a paru a Rome en 1773. O'1 en dit la mufique délicieufe. On a imaginé d'exécuter eet Opéra bouffon fur le théatre des Menus ,&.on doit lejouer aujourd'hui. C'e't M. du Rofoi qui s'eft chargé de réformer le poëme très-défeclueux, & de Farranger; & ua M. de Rochefort, Compoliteur Frangois , q,ui C 7  C 62 ) en a coufu la mufique. On ne croit pas ces deus Auteurs, chacun dans fon genre, pourvns d'alfez de gofit pour faire un triage & des'futures auffi difliciles. L'ouvrage elt en trois acles très-étoifës dans le poëme 1 taliën. 22 Septembre 178 f. II paroit par 1'Avertiffement imprimé en tête du poëme que M. du Rr> foi s'eft permis de changer le plan de fintrigae; il prévient qu'il n'a d'autre but que de rendre fervice aux amateurs des arts, en leur donnant occafion d'entcndre une mufique, fuivant lui, étincelante de beautés fublimes. II efpere que fon talent pour la fcene ne fera pas jugé d'après eet ouvrage dans lequel il avoue n'avoir d'autre mérite que celui d'avoir Créé. Re public conviendra facilement avec lui des défatits du Poëte Italien, & il fait en effet a quoi s'en tenir tiir le compte de M. du Rofoi; il n'avoit pas befoin de eet efl'ai; mais il ne peut lui accorder le titre de créateur, foit comme traducteur, foit comme parodiftc. Tout cela elt du galimathias trèsdigne de lui & auquel on 1'a bientót reconnu, malgré le voile de 1'anonyme dont le couvroit fa modeftie. Du rede, on fait depuis longtems ce que 1'on doit penfer de 1'acrion, de la marche, du dialogue , de la diction , & au total de 1'intéret des Opéra bouffons. Celui-ci,ati défaut des autres, en joint un particulier: c'eft que 1'intrigue ne répond point au titre. LTnconnue refte toujours hiScinuie, tant pour les perfounages que pour le  C 63 ) public; les prétendues perfdcutions qu'ellèeffiue $ confifrent a avoir pour adorateurs, le pere, les deux fds & le valet de la maifon, ce qui, aux yeux de bien des femmes, fcroit un tourment fort tolérable. II eft fuperflu de nous dgarer dans le labyrinthe de eet imbroglio. II iulfira d'obferver que lc fujet relfemblc a la Bonne Fille, a Silvain, a Pamela, & même un peu au Sei' gneur Bienfaifant par 1'apparition de deux enfans dont l'afpeflfe contribue a réconcilier le pere avec fon fds & fa bru. C'eft fur ce mince cane'vas, d'ailleurs rerhpli de ddfauts , que 1'art des traduéteurs les plus diftingués par leurs tellens, n'a uroit pu fauver, que M, Anfofli, doud,. comme tous les Virtuofes qui excellent dans les boulfons , du rare mérite de faire de bonne mu-, fique fur des paroles ridicules, a établi fes broderies. 11 a fallu en facrifier plulieurs , pour ajufter a notre Théatre cette production bifarre y ■pour en lier les airs par un récitatif fupportable,.. & pour coudre a radion, qu'il s'agiflbit aufli de rendre plus rapide, un ballet qui fuppléat au vuide & au manque d'intérêr. La mufique a été fort goütée en général;:il 'y a des ariettes- de la plus grande expreffion ;. mais quelquefois de la monotonie & peu d'intention de la part du Compofiteur. 23 Septembre. II parott Réponfe d un Precis dijlribué par M. le Duc de Chartres. Tandis: que ce Prince pourfuit 1'exé.cution de fon proj?E par un nouvel abbatis d'arbres du cóté de.  k 64 ) Fallée d'Argenfon, les Propriétaires continuent a barbouiller du papier & a faire des acres de procédures. Cette Réponfe ne contient que des notes ou réponfes très-féduifantes, mifes en marge du Précis. Elle ne mérite aucune analyle ; mais afin de faire mieux connoitre combien ces partis oppofés font peu d'accord,même fur les faits les plus fimples■■: fuivant le Précis de M. le Duc de Chartres, les maifons au pourtour du Palais royaf font au nombre de 72., & fuivant la Réponfe, il n'y en a que 52. 23 Septembre 1781-. M. GoJJec a encore répliqué auPere^fo, & a fait une efpece de traité de mufique a cette occafion. Un anonyme lui a adrelfé les vers fuivaus. Oui, Golfec, tu viens de confondre L'étranger dont l'orgueil défioit les Francois; Inttruit par fa défaite, ofera-t-il répondre ? Que fon filence rende hommage a ton fuccès! Mais eft-ce affez d'avoir de l'liarmonie Dévoilé favamment les myfteres divers, Et longtems de la fymphonie Epuifö les tréfors, pour orner nos coucerts? - Non, non ,Prêtre de Polymnie , Pourfuis, remplis de ton génie Le temple a fon art confacré; Peins la terreur, le choc des armes, Les malheurs d'un peuple éploré-, La vengeance des Dieux, le défefpoir, les tormes Das Bergers, de« Araans, des Héros & des Rois*-  C *J ) Cette Ddeffe , par nos voix, Excite, échauffè ton courage; Qui pourroit- elle infpirer davantage Que finterprete de fes loix ? II eft queftion, fans doute ici, de 1'Opéra de Thefée, dont M. Goffec a refait Ia mufique , & qui doit être joué eet hiver. On prépare ainfi ie public a I'admirer par eet éloge prématuré. 23 Septembre. M. Sacchini exigeoit le möme traitement que M. Piccini, c'eft- a-dire d'abord 2000 écus de fixe & la même rétribution pour chacun des ouvrages qu'il compoferoit. On n'a pas voulu lui accorder cette faveur, fous prétexte qu'il n'étoit accouru a Paris que paree qu'il faifoit mal fes affaires en Angleterre ; qu'il ne devoit pas être fi exigeant dans une pareille fituation, & que, d'ailleurs, aucun de fes ouvrages lyriques n'ayant encore été exécuté ici, on ne pouvoit eftimer quelle fenfation ils y cauferoient. On croit que M. Sacchini fera obligé de s'en retourner ainfi qu'il eft venti, d'autant que le bruit fe renouvelle de la prochaine arrivée duChevalierGluck,fe ranimant pour venir jouir d'un nouveau triomphe fur le théatre élevé par M. le Noir. 23 Septembre. Extrait d'une lettre de Stras- bourg du iS Septembre Tous ceux qui ont eu déja communication de la piece de M. Rochon, en font très-contens. Ce n'eft pas un de ces lieux communs, vagues , comme font la plupart des fujets de commande. Celui-ci eft  ( 66 ) adapté h la circonftance, au local, aux moeurs des habïtans, & du rede eft une jolie comédie , pleine de naturel, de décence & de gaieté douce, qui pourroit fe jouer fur tout autre théatre avec beaucoup de fuccès. J'en aime furtout la moralité , fondée fur une ancienne antipathie qui fubfifte encore ici parad le Peuple entre les families Francoifes & Allemandes ,"ce qui les empêche de fe marier enfemble. Le Poëte cherche a déracinerun vieux préjugé, &, s'il eft moyen, de 1'extirper; c'eft en le rendant ainfi ridicule au théatre dans une fète confacrée a ce même peuple. C'eft la femaine prochaine que la repréfentation de la comédie de M. Rochon doit avoir lieu. 24 Septembre 1781. MM. Augufte de Piis & Barré ayant entrepris de traiter les quatre faifons, les ont terminées par YEté. Les répétitions font a leur fin, & la première repréfenta* . tion doit avoir lieu demain. Comme les paroles font déja imprimées, voici 1'efquiffe du fujet. Les Moijfonneurs étoient un obftacle en ce que , dans eet opéra comique, les travaux de la faifon étoient déja repréfentés. II a donc fallu créer des fituations nouvelles & s'occuper totalement des occupations relatives a 1'agriculture. Les Auteurs ont en conféquence tranfporté le lieu de la fcene fur une riviere oü fe paffe prefque toute l'acliön; ce qui offre des tableaux d'un genre neuf, agréable & fouvent galant. L'intri-gue roule fur une joute que 1'on donne pour ia.  ( 67 ) $ètk du Seigneur du village & fur les difficultés qu'éprouve le nis d'un meunier de joindre fa maitreffe, qui demeure a la rive oppofée de celle oü fe trouve fon moulin. 11 fe feit a eet effet du bateau de fon pere, &, quand cette reffource lui manque, il traverfe la rivicre a la nage. Enfin, après avoir remporté le prix de la joute, voulant s'introduire en fecret chez celle qu'il aime, il 1'engage a le monter dans un feau, qui de fa fenêtre, donne prefque au milieu de la riviere. Comme elle s'efforce de tirer un poids auffi lourd, fon pere accourt pour 1'aider, & monte, au lieu d'eau , Famoureux de fa dlle ; éveneinent qui détermine le mariage. Les payfaris arrivent alors, avec les bateaux de la joute, garnis de lanternes de différentes couleurs, & emmenent en triomphe, au clair de la lune, les nouveaux époux. 25 Septembre. Extrait d'une lettre de Partenay le 20 Septembre II y a dans cette Province de Poitou une affociation de Pre tres de différéns grades & de différéns diocèfes, qui s'aflembknt chaque année le 17 Aoüt ou environ, a 1'effèt de prier en commun pour les confrères déeddés. Cet établiffement,formé depuis plus d'unficcle, fous 1'approbation des Evêques de Poitiers, vient d'êu-e confirmé par le Prélat acluet. Benoit XIV avoit donné une Bulle d'indulgence fort étendue, pour les Eccléfiadiques qui en font membres. L'aflbciation eft compofée de 68 décuries, chacuue de 8 a 10 Prêtres qui font obligés de  ( 68 ) faire un fervice par décurie & de dire une mefTc pour chaque confrère défunt. Quoiqu'on n'y admette point de laïcs, dans l'aflbmblée générale tenue le 21 Aoüt, M. Mouffet, en fa quaMté de Procureur général, propofa de faire un fervice pour tous les militaires qui font morts dans la guerre préfente & pour tous ceux qui perdront la vie, tant qu'elle durera. Cet avis patriotique fut accueilli avec le plus vif intérêt & un applaudilfcment univerfel. Le premier fervice,fë fera dans le mois d'Oétobre prochain; ainfi voila plus de fix cents meffes par an pour les Officiers, Soldats & Matelots qui, aux dépens de leur vie, auront foutenu fhonneur du pavillon. M- 1'Archiprêtre de cette ville n'avoit pas peu contribué a enflammer fes confrères par un difcours , oü il avoit rappelé Fexemple de Judas Machabée, faifant offrir dans le temple de Jérüfalem des facrifices pour les généreux guerriers morts en défendant la patrie & la religion de leurs peres; car ce qui redoubla le zele des votans, c'eft la réflexion qu'on faifoit la guerre a des bérétiques. Voilé, les Palteurs du fecond ordre qui non contens de contribuer par les décimes &le don gratuit aux armemens, y contribuent encore de leurs prieres: comment répondront a cet exemple ceux du premier? 25 Septembre 1781. Le commeneement de la piece des Aniours d'été, exécutée hier aux Ita-  C 59 ) üens, promettoit beaucoup; mais la fuite n'y a pas répondu, De fréquens défauts de fens bommun lui feroient grand tort, fi 1'on jugeoit féverement une femblable bagatelle, oü 1'on défireroit d'aillcurs plus de gaieté, furtout dans le denouement; 25 Septembre. Les Députés des Armateurs de Bordeaux ont parfaitement réuffi dans leur misfion; le Miniftre a goüté la juftice de leurs repréfentations; on s'eft rapproché, & les conditions nouvelles paroiffent devoir être fatisfaifantes pour les parties léfées. 26 Septembre. M. le Noir, fentant que la rapidité avec laquelle on exécute la nouvelle falie provifoire d'Opéra pourroit caufer des foupcons fur fa folidité, a cru devoir ralfurer le public par une lettre oü il donne quelques détails fur cette conftrucbion. 10. Le théatre a moins de longueur que la dernier; mais il a 20 pieds de large de plus, Ce qui prêtera au fervice par fa hauteur & fa profondeur. II elf fufceptible de recevoir les machines & décorations de 1'ancien opéra. 20. Sous une voüte folide, pratiquée fous 1'orcbeftre, eft un réfervoir vafte oü M. Morat a établi deux pompes dont les tuyaux feront au befoin un fervice général prompt & alfuré. s 30. Les deux corridors , a droite & a gauche s affureront la fortie du parterre par fix iffues. 4°. Toutes les portes s'ouvriront en dehors; celles des loges a cliaque étage par deux cordons  ( 7o ) placës au centre dont 1'un a droite & 1'autre a gauche , & d'un i'eul coup par le moven d'un reifort. • 50. Les efcaliers, au nombre de fept, pour dégagement, defccndront de fond. 6°. On difpofe un ventilateur pour renouveler fair. 26 Septembre 1781. Les Comédiens Francois donnent aujourd'hui la première repréfentation d'une comédie nouvelle en un aéte.Sc en profe, intitulée le Qtdproquo. On n'en dit point 1'Auteur. II court un murmure fourd que le Sieur Molé en elt le pere. 27 Septembre. M. le Nou, pour encore mieux raflurer le public, invite les artiftes, amateurs, curieux & perfonnes de tout age , de tout fexe & de tout rang, a venir vifiter fon édifice, qu'on verra librement aux heures des repas des ouvriers. II continue a dire que , quoique la ville lui ait donné un mois de répit, la falie fera prêtö au 5 d'octobre. 27 Septembre. La cailfe d'efcompte, fe regardant comme ayant pris une alfez forte confidance pour ne pas craindre de révolution, a voulu célébrer fon iuftitution par une médaille ordort-i uée a M. Duvivier, Graveur général des mónnoies de France & des médailles du Roi. Cet artifle en'a frappé une de 25 lignes oü 1'on voit d'un cóté une femme tenant des bidets & un cofre plein d'argent; de 1'autre une femme reeonnoiffanie des richelfes que Mercare , fym-  C 7i ) bole des Invcnteurs, répand fur elk avec abondance. On voit que cette allegorie peu ingénieufe elt digne des Plutus auxquels elle eft deftinée. Les actionnaires, par une délibération unanime, ont décerné cette médaille aux inventeurs & adminiltrateurs de leur établiflcmcnt. 27 Septembre. Un tableau de M. Aubry, expofé cette année au fallon, fait qu'on s'cntretient de cet artifte dont on regrette la mort. 11 étoit né a Verfailles. Ayant copié dans fa jeuneffe beaucoup de portaits a la Surintendance, il embralfa ce genre, comme par occafion, s'y perfeétionna & fut regu en 1774 a 1'Académie. Voulant donuer plus d 'eflor a fon génie, qu'il fentoit ne devoir pas être borné a ce talent fté» rilc, il fe livra au genre auquel M. Greuze a donné fon nom. II imagina des fcenes pathétiques & morales, prifes dans la vie domeftique. Le Mariage interrompu lui fit beaucoup d'honneur en 1777: enfin, il étoit entré dans la carrière de l'hiftoire, & étoit allé en Italië fous les aufpices du comte d'Angiviller. On prdtend qu'il 'emportoit dans fon coeur un trait qui !'a conduit au cercueil; malgré le chagu'n, poifon deftruc* teur de tous les talens, il n'eft perfecKonna pas moins les fiens, ce qu'on voit dans une oeuvre pofthume de fa facon; les Adieux de Coriolan d fa femme , juftemeut admirés cet année; oü 1'on trouve une couleur vraie , une compofition fage, un eflet net, & furtout un excellent goüt de I'anrique. On ne peut que regretter un pareü  ( 7: ) nrtifte , dont ce tableau étoit le début dans 1'his- toire, & mort a 36 ans dans fa ville natale. 28 Septembre. Indépendamment de la premiere mife dehors qu'exige la conftrucbion de la falie provifoire d'opéra, elle entraïne, dans remplacement oü elle ed, des dépenfes acceflbires qui ne font pas petites; comme d'acheter des maifons cirvonvoifines pour les foyers, magazins & aut'-s logemens des acteurs & actrices; comme de prolonger Ja rue de Bondy & de 1'ouvrir a la barrière du Temple ; comme de réparer une portion des Boulevards & de paver a neuf tout ie teire-piem aux environs de cefpeclacle, d'y établir des bornes; comme d'illuminer tous les Boulevards par des réverberes; «Si, malgré tant de frais extraordinaires, il ed impoffible de prévenir beaucoup d'inconvéniens & d'incommodités pour les gens de pied, réfultant de ce local. On confirme de plus en plus que des intéréts particuliers 1'ont emporté fur 1'intérêt général , fuivant un ufage trop commun dans ce Royaume- 28 Septembre. Suivant des lettres circulaires des manufiébures dë draps, adreflees aux marchands drapiers de Paris, en date du 1 Septembre, & un tableau comparatif de la valeur des matieres premières qui fervoient a la fabrication des draps en 1774, époque deouis laquelle ces étoffes font redées au même prix & en 1:781: elles ont augmenté fucceflivement, les uncs de 4, les autres de 5, d'autres de aö, de 30, dc 60, de  C ?3 ) de 69 pour cent & quelques-unes de 100 pour cent. Les ingrédiens d'ailleurs, dont les hautes tèintures font compolees, font auffi montés a un taux exhorbitant. En conféquence, les Directeurs de ces manufacrures déclarent ne pouvoir fe difpenfer d'augmenter de 40 fois par aune les draps de couleur ordinaire, & de 3 livres ceux de haute tcinture. 29 Septembre. Le Qjiiprcquo, joué famedi, avoit recu quelques appiaudifférnens dans le commencement; mais avoit parü a Ja fin fort long, fort ennuyeux & d'un vuide exceffif. On en a cependant donné aujourd'hui une feeonde rcpréfem-ation,qui, fuivant 1'ufhge i;ifaillible, a eu le plus grand fuécès. On en a demandé 1'Auteur; & le Sieur Mölé eft venu annoucer trèsmodellement au public qu'on ne le connoiflbit pas ; ce qui a confirmé beaucoup de fpeétateurs lans leur opinion que le Comédicn qui s'eft chargé de la piece auprés de fes confrères en eft le vérilable pere. 29 Septembre. Le Sieur dc Beaumarchais malgré h bafleife de fes démarches envers les Comédiens, n'en a pas recu généralement 1'accucil qu'il en efpéroit. Le Sieur Defeffarrs enflé du fuccès de fa vehste*ntn> r™t™ ïui ron ö: M. Salaun. & arrnnf„m,i a ^„.^ les Auteurs, n'a pas mal molefté celui-ei. Le Sieur Molé fa traité avcr Hom-*,,,.. ^ i„ ö- _ iréville, a qui ce camarade reprochoit d'avoir lu,r' «e-aererepce pour ie Sieur de Beaümar 'WK .A/lil. D  C 74 ) chais, lui a répondu qu'il fc concilieroit toujours avec les Auteurs fur leurs ouvrages qu'il trouveroit jouables, comme étant les véritables foutiens de la comédie ; mais qu'il n'accorderoit jamais fon amitié a celui-la, & le tiendroit toujours loin de lui. Ce qui a furtout révolté les Comédiens, c'eft qu'ils n'ignorent pas les démarches du Sieur de Beaumarchais pour former une troupe d'autres acteurs & fe mettre a leur téte; car il n'eft aücun moyen de gagner de 1'argent & de faire parler de lui que ne tente cet/ Jntrïguant cupide & prodigue , dépenfant 1'argcin encore plus facilement qu'il ne le gagne , mal a 1'aife au milieu d'une grande fortune & fe ruinant en procés & en chicanes. 09 Septembre 1781. M. David ne pouvant expofer au fallon un grand tableau de fa facon repréfentant le Comte de Potocki a cheval dans fon manége, 1'a foit voir chez lui, & cet ouvragen'a point démenti la haute opimon concue de cet artifte. II n'eft pas compofé fimplement en faifeui' de portraits; mais on y retrouve le mais dont on ne dira pas: Chyfologue eft tout fe? tfeft rien; car il s'eft- diftingué & a réuffi dans prefque tout ce qu'il a entrepris. II eft attaché fpécialement k M. le Duc d'Orléans; il eft Directeur de la troupe dc Madame de JVIonteffoa & Intendant de fes menus. Sa critique manque fouvent de jufteffe ; el te. fift pardale & outrée , & d'autant plas dangereur  C S3 ) fe, que fes" raifonnemens fpécicux font préfèrttés avec grace & revêtus d'un fiile facde & léger. Pu rede, il y a trop d'écarts & de digreffions étrarigerés au fu]et,mais amufanres. On apreud.» dans cet écrit, qu'il n'a pu être recu de 1'Académie , ce qui lui donne de 1'humeur contre fes membres. iio. Le Pourquoi, ou l'Ami de; Artifles. Cet. écrit ed le ph;s üigc & le plus judicieux: le ftilë en ed noble. L'Auteur coffimence par pader en revue les cfiti'ques & les aprécier avec plus de goüt & dc fir.clïe que celui de Raflt de Jept. II difeute enfuitc lui-même & le fait en homme de 1'art. II s'avoue Sculpteur. Sa brochure eft femée d'anecdotes trés-indruétives fur 1'état acbuel de 1'Académie & fur quelques-uns de fes membres; elle eft ;\ conferver par cette raifon, comme hiftorique. 7 'Octobre 1781. M. 1'Abbé de Launay, avanttiïsx matin , a eu 1'honneur de préfenter a M'. le Duc de Chartres un placet en vers oü. il exhorte fon Altclfe d'abandonner fon plan de batimens au pourtour du Palais - Royal, & de fuivre un nouveau plan de décoration plus agréable au public, & non moins digne de fa grandeur, qui feroit furtout d'élever au milieu du jardin uri monument au Cardinal de Richelieu, le donataire de ce chateau, & de former du rede «ne colonad'e analogue a cette première idée. Le Prince fa fait èntrer a fon lever, 1'a très-bien accueilli, & lui a prönris de faire examincr le projet dans D 6  C 84 ) fon Confeil, ce qui, vis-a-visdu Poëte, n'eft qu'un vrai perfiflage. 3 Ottobre 1781. Vers jut la dejlruction des arbres du Palais royal. Le Prince des Gagne- deniers, • Abattant des arbres antiques, Nous réferve fous ces portiques A travers de petits fentiers L'air épuré de fes boutiques Et 1'ombrage de fes lauriers. En confervant la chute de cette épigramrne, on la retournée d'une facon plus noble, plus vive & plus poëtique. Pourqnoi de ces chênes altiers Déplorer fi fort le ravage? Le vainqüeur d'Oneffant pour ombrage Nous laiffe encore fes lauriers. 8 Ocfobre. Par des Lettres patentes, données i Verfailles au mois de Mars dernier & enregiftrées en Parlement le 31 Juillet, S. M. approuve rétabliffemeiit d'une Maifon de Santé, en faveur des Militaires & des Eccléfiaftiques.' i°. Le Roi autorife les Religieux de la Cba» rité d'acquérir une maifon & jardin fitués au petit Mont-rouge & terres adjacentes, k 1'effet d'y former 1'établiffement en queftion. s°. S. M. ordonne qu'il fera incelfarament fourni auxdits Religieux la fomme de 250,000 livres de capkaux en contrats de conukutioa  C 85 ) produifant k 4 pour cent 10,000 livres de rentes, fans retentie, lefq-uelles commenceront a eoflrir du 1 Juillet 1780. 30. Ces revenus doivent être applique's tant k 1'entretien & fubfidance des Religieux qui deferviront ladite maifon, que pour la fondation & entretien de douze lits dont fix demeureront affectés aux traitemens des perfonnes Eccléfiafriques malades & fix autres a des ïVlilitaires, exceptc dans le cas oü ils feroient attaqués de maladies incurables ou contagieufes. Tel eft en fubftance ce réglement contenant en tout 10 articles. 8 OStobre. Vers d Meffieurs Augufte ds Piis tjf Barre. Qaoi! vous criez qu'oa vous dépouüle Be vos droits fur défunt Pannard, Et fans pudeur vous chantez pouilla Anosatnis, Laujon, Coflé, Favart! Bon Dieu! quelle avance extréme! Pqurquoi compter ce qa'onorous prend? Le dommage n'eft pas bien gran.l Quand on eft riche par foi-même. Pourfuivez hardinient, retracez-nous toujours. "Qi vos -bergers, leS plaifirs, les ainours; Et chacun a cette peinture Ne connoiffaut pour Apollon Et pour confeil que la nature Dira: quelle aimabie impofture! ' Les plus jolis tableau* ne font point au fallon Ce u'étoit cepeudant chofe très-néceflaire D 7  C S6 ) De' mettre votre Mufe en frais, Pour nous fournir de 1'an 1'agréable carrière; Et vous n'auriez eu nuls regrets D'abandoniier ce foin a d'autres ; Car on peut dire avec raifoh: Que des pieces comrae les vótres Paroitront toujours de faifoa, . 8 Ottabre i7<èi. Rien de plus fingulier qu'une eftampe allégorique rechercliée des gens de lettres pour le ridicule rare de fa compolition, imagmée par m confrère,le SieurFclix Nogaret des Académies dAngers & de Marfeille, döffiuée par M. Durand & gravée par M. Fefl'ard. 11 eft parvenu a engager le Roi, Ia Reine & toute la familie royale a foufcrire. Cette eftampe eft li confufe qu'elle fourniroit ■ matiere a un Poëme épique entier. On 1'a déii annoncée.; elle paroit aujourd'hui & ne démew point le jugement qu'on en a porté. 8 Oélobre. Ce qui doit furtout affliger le Sieur Raynal dans le mandement de 1'ArcheVcque de Vienne du 3 Aoüt , cc font ces phrafes.. „ un Prétre, un ancien Religieux (il a été Té„ fidtej déployer fëtendard de 1'impïété ■ il n'y „ a nen de plus odieux , ni de plus vil fur la „ terre qu'un Prétre impie & arTeétant de le „. paroltre; d ne peut infpirer de la confiance „ paree qu'on le méprife. Son apoftafie lè déshonore." 9 -Oaobre. Extrait d'une lettre dc Toulonfé du 30 Septembre Notre Parlement, bien  C 87 ) lont d'adopter les, principes modernes de "ros économides fur 1'ufure, & 1'étrange légiflation de M. Turgot , vient de rendre, cn pareil cas, tm arrêt mémorable. Le 21 de ce mois, il a condamné le nommé Fournier , dit Rubiffon , au carcan pendant trois marchés confécutifs ; cn 1200 livres d'aumóne envers le Roi, & au baninlfement pour deux ans du reflort de la Cour» avec défenfes de rompre fon ban, fous plus fortes peines. Cet honnête horame prêtoit a 60 pour cent: il Mbit en outre un cadeau a fa femme, en forme d'épingles, en faveur de la négociation; il exigeoit de plus, que femprunteur leur donnat un repas a raifon de 3 livres par tête dans la meilknre auberge du lieu de fa réfidence; enforte que celui qui avoit befoin d'une fomme de 300 livres étoit obligé, pour üitisfaire aux conditions prel'crites, de confentir fa lettre de change du billet de 498 livres, felon le calcul original fuivant. Argent compté 300 livres. BéildGcü180 i 498 livres. Cadeau a fa femme. . 9 \ Repas de 3 perfonncs. 9 Ce particulier étoit parvenu k jouir ainfi d"une fortune confidérable , ce qui , avec le tems , n'ed pas dilficile a croire. 10 Octobre. C'ed ie Sieur Antoine', Architect de S. M. qui a fourni le plan de Ia nou-  C 88 ) Veile Maifon royale de Santé, & doit en finVre les travaux. Les Religieux de laCharité auront la dcfferte, tam. au fpirituel qu'au temporel, de ladite maifon! Les Députés du Clergé de trance , alfemblés en 1780, frappés des avantages d'un pareil établiffement, ont accordé une fomme de 100,000 ■livres en deniers comptans pour le commencer, ce qui a déterminé le Roi a 1'uivre ces bons erremens. A 1'égard des Eccléfiadiques malades, ceux préfentés, en conféquencc de cette fomme donnee, par les Agens généraux du Clergé, feront recus & admis par préférence. '. Les Militaires feront préfentés alternativement par le premier Préfident & par le Procureur général du Parlement. 10 Octobre 1781. Les fpeétacles forains contïnuent a attirer le public & a donner de tems en Èems & alternativcment des pieces qui font fenfation. On va voir aujourd'hui VAmbigu Comique (cbez Audinot) VA;nour ftiijfs; Coaime on reproche a 1'auteur d'avoir calqué fa piece fur le Fol raifonnable, il répand un avis oü. il réclame contre 1'imputation, puifque Ia fienne eft i'alnée de beaucoup. Elle a été faite a Nancy en 1768. Elle étoit defHnée pour une fête préparée au Roi de Dannemarc, lors de fon paüVe dans cette ville. La fête n'eut point lieu, & 1'Auteur ayant retiré fa piece, la transforma'depuis en Opéra boulFon. C'eft. dans cet état  C 89 ) qu'clle a été lue, il y a prés de trois ans, a la Comédie Italienne. La majcfté des idéés , qui régnoit alors fur la fcene d'Arlequin, ne permit pas d'y admettre des perfonnages agredes: enforte que M. Dancouit, 1'Auteur , s'ed trouvé réduit a chercher un afyle a la foire, oü il a lieu de fe féliciter de 1'accueil qu'il a recu. ii OÜobre. M. le Berthon, premier Préfident du Parlement deGuyenne,aeu ordre de changer de lieu d'exil; il ed aétuellement a Chalons en Champagne. On Fa trouvé trop prés de la capitale & de Verfailles; il recevoit beaucoup de monde; il avoit des relations fufpecles a la Cour; de la il remuoit encore a Bordeaux, intrigüoit dans fon Parlement & en dirigeoit les membres : telles font les caufes que donnent de cette tranflation fes adverfaircs. Ses amis prétendent que c'ed lui qui Fa demandée , ce qui n'elt, guere Vraifemblable. 11 OStobre. On apprend qu'un Négociant de la Rochelle, intérede fans doute. avec quelque armateur de Bordeaux, ayant parlé trop ind.itcretement fur 1'expédition violente de M. de Cadries , a été arrêté & mis au chateau Trompette. On ajoute qu'un Sieur Terradbn, armateur de la même ville., ayant dans 1'alTemblée des armateurs protedé contre la foiblelfe de fes confrères & réclamé avec une énergie trop forte les Priviléges de la propriété, a recu une réprimande de la Cour. Tout cela prouve a quel dégré de 'fermenta*  C 90 ) tion étoient les efprits depuis 1'opératïon defpotique, fuggérée au Miniftre par le Sieur Marchais, chargé d'abord des'ordres du Minidre, & que celui-ci a remplacé par M. Guillot, comme V'op défagréable aux négocians. 11 ed a efpérer qu'ils font calmés aétuellement. M. de Cadries, revenu a fon aménité naturelle, a dit la femaine derniere en riant aux deux Députés du Commerce de Bordeaux: A ca, aétuellement qui hous ne fommes plus ennemis , que tout ed: arrangé, je puis vous donner a diner, & il £ fait placcr 1'un d'eux a cóté de lui & 1'a traité avec toute la confidération due a 1'état utile du commercant,quandil leremplit avec didinclion Comme fait M. Grignet, ainfi que fon confrère. 11 Otïobre 1781. L'Opéra cd retombé dans le défordre & 1'anarchie oü il étoit, & 1'on ne fait fi 1'on pourra le jouer demain. Certains fujets ont obtenu des congés , d'autres font partis fans en demander: il cn ed qui font les fnalades; il en ed qui invoquent la „Religion k leur fecours & demandent a fortir d'un état de damnation: tous prétendent n'être pas affez payés, & la douceur des Chefs produit & entretient cette fermentation dangereufe, qu'on ne pjurroit calmer que par des punitions rigou*öüfes & exemplaires. 12 OStobre. Bien loin que la nouvelle falie? d'Opéra ait été pröte au tems indiqué, des évcnemeus furvenus en rendent 1'ouverture plus éloignée. Meflleurs de la Ckvmbre de la iftacon-  ( 9i ) Ilierie étant venu 'faire la vifite du Mtiment & ayant dreffé leur procés verbal de fon état, ont reconnu qu'il y avoit un défaut de folidité du cóté de la rue de Bondy, dont le vieux mur confervé a été jugé infufïïfant pour fupporter la furcharge d'une charpente audi élevée. En conféquence, il s'agit de condruire dans cette partie une galerie avancée qui donnera plus de foutien au mur, fournira dans la partie fupérieure une trés-grande aifance pour le fervice du théatre, & dont le dedbus fervira d'abri pour la livréc, ou pour les maitres qui attendent leurs voitures. ; 13 Octobre. Extrait d'une lettre de Stras- bourg du 28 Septembre Voici les princi- paux détails avec lefqueis on doit célébrer ici la fête centenaire de la foumidion de cette ville a la France. Les Magidrats ont fait frapper 33 médailles d'or de la valeur de 200 livres chacune, & 530 d'argent de la même forme & grandeur de la valeur de 12 livres chacune. L'effigie de Louis XVI ed d'un cóté & fur le revers on lit: Argentoratum felix votis fiecularibus 1781. Cette infcription ed entourée d'une couronne de chêne, qui étoit la couronne civique des Romains. - On a ajouté a ces médailles 1500 jetons d'argent de la valeur d'un florin ou 40 fois de France , chacun, avec une fleur de lys d'un cóté & de 1'autre Argentoratum felix. Les médailles d'or feront préfentées au Roi., a la Reine , a la familie royale, & aux Minidres-  C 91 ) ■par le Préteur royal Gerard, qui partira, Mardi » Octobre, pour la Cour. M. le Maréchal de Coutades, Córnmandant pour le Roi dans la Province, le Cardinal de Rohan , Evêque de cette ville , 1'Evêque de Tournay, en qualité de Pontife officiant au Te Deum, le Marquis de la Salie, le premier Préfident, 1'fntendant, le Préteur royal & le Profeffcur Oberlin, Auteur de Pinfcription, font fur la lifte de ceux qui doivent rccevoir les Médailles d'or, ainfi que M. Rochon,Auteur de la Comédie dont on a parlé. Les médailles d'argent feront diftribuées aux Stattmeifters, premiers Magiftrats tirés du Corps delanobleffe, ïiuxAmmeiJters, tirés des Bourgeois les plus notables au nombre de quatre dont 1'un veille a la Police &c. pendast trois mois, aux Adeffeurs des Chambres des 13, des 15 & des 21; aux 20 Confeillers de ville, & aux Citoyens des 20 Tribus, ainfi qu'aux amis diftingués de MM. du Grand-Sénat. Vingt mariages, un pour chaque tribu, feront dotés; les époux auront droitjle Bourgeoifie , prérogative confidérable a Strasbourg. Mellieurs de 1'hótel de ville fe chargent des frais de noces: les 10 Catholiques fe célébreront Dimauche 30 •a la Cathédrale, & les 10 Luthériens auTemple neuf, oü le Te Deuni en Allcmand, fera chanté en mufique le matin, & après vêpres en latin a la Cathédrale au bruit de trois falves de toute rartillerie & moufquetterie des remparts. Du'  C 93 ) refte , vin , vicTuailles & pain: les fpectacles feront ouvcrts gratuitemerit chèz les Allemands & chez les Francois; bal, illumination, repas, &c. Demain a n heures, l'Univerfité ouvre lesfêtes par fa barangue, qui fera précédée d'un concert de mufique vocale & inltiumentale de Ja mcilleure compofition.. 14 QStobre 1781. Par une nouvelle lettre en date du ia Octobre, qu'a publié PArchitecle le Noir fur la falie provifoire de 1'Opéra qu'il conftruit, il chercbe a raffurer le public que la démarche de la Chambre de la Maconnerie avoit inquiété; cn convenant du fait & de l'opérauon qu'il eft obligé de faire, d'après le rapport des Jurés, il 1'indique feulement comme un confeil & un furcroit de folidité, qu'ils ont exigé & qu'il avoit prévu lui -même, avant fon plan propofé au Miniftre. Du rcfte, il fe défend fur d'autres reproclies relativement aux chofes d'agrément, & il chercbe a donner plus dc confiance au beau fexe & aux hommes qui craindroient d'étre incommodés 3 foit par la fraicheur des platrcs, foit par 1'odeur des peintures: il n'a point employé 1'un 'dans tout 1'intérieur de la falie, & rieh en hüile; tout elt en détrempe. ' Enfin, il convient de la diffieulté d'une telle entreprife, dont il n'avoit point envifagé tous les détails; il fupplie les gens de goüt de vouloir bien 1'éclairer fur les incorrections qui lui feroient . échappées, & il nlchera d'y remédier.  C 94 ) i5 0etohrei7Si. MM. Pamentier & Cadet. toujours occupés de Ia panification des différentes iubftances farineufes &-de 1'utilité qu'on en pourroit tirer, firent il y a deux ans des expénences qui tendoicnt a reconnoltre les avantares pour la Marine & les Colonies d'un bifcuit fait, fon avec la pomme de terre , foit avec la palate Es envoyerent aux Hes de ce bifcuit, auquel M Parmentier j01gnit Ie procédé qu'il venoit de publier. M. Gerard, Médecin au Cap francois, d après cette inftruffion, répéta 1'expérience fur la patate, & préfenta au Gouvernement & a la Chambre d Agriculture de la Colonie, le réfultat quil venoit d'obtenir de . la converfion de cette racme en bifcuit, comme la reflburce la plus précieufe pour les Mes dans les tems de cinette, & furtout dans les tems de guerre. ■ II eft queflion de condater de plus en plus cette expérience, & fans doute d'en perfeciionner la mampulation. Eu conféquence, le Jeudi 18 de ce mois a 9 heures, on doit faire du bifcuit de pommes de terre, a 1'écote de la boulangcrie rue de la Grande-Tuandcrie, par ordre de M. le Marquis de Cadries, cn préfence du nouvel Intendant de la Guadeloupe & des membres du Comité de 1'école de boulangerié. 0£l°b7' La llouvclle de la groffcfle de Madame fe foutient; on cite a ce fujet une anecdote de la Cour. On raconte que la Reine dans les commencemens de ces bruits ayant demandé afon beau-frere avec iutcrét,. fi l'on pouvoit fe  C 95 ) flatter qu'il y eüt quelque fondement, beaucoup, Madame, répond Monfieur avec gaité, il n'y a pas de jour oü ccla ne puilfe être vrai. Ah, rcprend en riant S. M., puifque vous repondez fi bien, je ne vous ferai plus de queffions. 16 Otïobre. On doit découvrir demain le nouvel autel du chceur de Saint-Germain 1'Auxerois, exécuté en marbre & en bronze, fur les defleins de M. Bacarit, Architecte des écuries du Roi & de 1'hópital royal des Quinze-vingts. C'eft auffi lui qui a conduit les travaux. Le coffre de cet autel , orné de confoles, repréfente une defcente dc croix, formant un bas reliëf en bronze. Le tabernacle de marbre blanc, offre le nonTde Jéhovah, au milieu d'une gloire , 1'un & 1'autre 'dorés d'or moulu: 51 ed furmonté d'une colonne de marbre brocatclle d'ef'pagnc , & couvert d'une draperie de marbre vert , fous un focle d'or moulu, qui porte une boule dorée de même. Un ferpent entoure la boule & le pied de la croix, laquelle ed ornée d'un linceul de bronze, ainfi que de la couronne d'épine & de 1'infcription, dorées d'or moulu. La colonne ed accompagnée de deux Anges en bronze, de grandeur naturelle, dont 1'un ed cn adoration , & 1'autre tient de Ia main droite , les clous de lapaffion, & montre dc la gauche, la croix d'oü le corps de notre Seigneur a été defcendu , pour être mis dans le tombeau. 17 Ocïobre. Dans la Comédie du Céiibatairt  ( 9$ ) deDorat, acte premier, fcene feptieme, ©n 3it tes deux vers. Mais pourquoi revenir fur les maux de 1'abfenceLa peine eft déja loin quand le bonheur commence. M. Collet les revendique aujourd'hui, dans une lettre datée dc Verfailles le 9 Octobre , adreffée aux Auteurs du Journal de Paris. Il raconte qu'il y a douze ans environ, M. Dorat les trouva dans im Opéra de fa compofition , uiütulée -Sapho & les retint par reminefcence. Du moms, c'eft la tournure qu'il donna a M. Collet , lors qu'il lui fit des reproches de ce plagiat. Celui- ci prétend avoir une lettre d'ex. cufe de M. Dorat a ce fujet & des témoins de la propnété. Quoi qu'il en foit, il prie le public de n'étre point furpris de voirreparoitre ces deux vers lorfqu'011 exécutera fon Opéra, qu'on met acluellement en mufiqae. 17 Oïtubre 1781. II paroit un nouvel Arrét du Confeil du 25 Aoüt 1781. par lequel S. M. informée que malgré toutes les précautions qui ont été pnfes pour arrêter les abus que font de Ieurcommerce les Imprimeurs & Libraires d'Avignon, ils parviennent cepcndant a'tromper la vigilance des Infpcéteurs dc la librairie, prend de nouvelles mefures a cet égard. 17 Octobre. Voici encore un quatrain oue la licence a fait enfanter contre le Duc de Chartres ou plutót c'ed un ancien qu'on a retourné & tfdapté aux circondances. lm-  C 97 ) ïmmolant tout au coffre fort. Se montrant fans jamais fe battre» C'eft être batard de Meifort Et non defcendant d'Henri - quatre. 18 Oclobre. Rien de plas plaifant qu'une pettte feuille du Libraire Pankouke , intitulée Moyen cTaugmenier le bor.heur d'une partie de la tiaiion, fans nuire d perfonne. Voila un grand titre bien propre a exciter la curiofité, & a faire travailler le génie , pour réfoudrc le problême dc 1'Auteur. On s'éieve aux plus hautes fpéculations, on reclierche ce que la métaphyfique a de plus délié; la morale, de plus exquis; & 1'on ne peut le deviner. Cette annonce impofante, pour être remptïe, conlitfc cn un changement de 1'heure des Ipectacles, qu'il faudroit mettre tous,fans exception, a 8 heures du foir pendant netif mois de Pannée, & a 9 heures depuis le premier Juin j'ufques au premier Septembre. M. Pankouke, de ce moyen fimple, voit dé* couler des biens iïifinis pour la fanté du corps & de 1'ame, pour 1'économie, pour les mocurs, pour les femmes , pour les Magiftrats , pour les gens de lettres, pour Ie commerce, pour les affaires. II eftime qu'il ne s'eft jamais trouvé de cir* conftance plus fivorable que cette époque oü 1'on voit trois nouvelles- falies de grands fpeclacles prêtcs a s'oüvrir en même tems dans la capitale. II pfétehd que, pour opérer cette révolution , il ne faut ni Edit, ni Ordonnauce, ui Tome XFIll. E  C 98 -> Arrét du Confeil; mais un fimple Ordre aux .Comédiens. On voit que ce projet ridicule, par 1'emphafe que 1'Auteur y a mife, n'eft qu'un réchauffé de ce qui a été dit & écrit déja fur cette matiere; il eft, du refte, plein de bon fens & il feroit k fouhaiter qu'il fut' adopté. Mr. Pankouke renouvelle eh palfant les deux qucftions agitées auffi depuis quelque tems , fi deux troupes de Comédiens ne feroient pas plus utiles qu'une feule, & s'il eft mieux d'étre debout ou affis dans le Parterre ? A 1'occafion d'une brochure de M. Rochon dc Chabannes, oü celui-ci vouloit deux troupes & le Parterre dcbout ; ce Libraire avoit déja lutté contre ce Poëte comique, mais trop inégalement pour que celui-ci daignat lui répondre. II en femble fiché & le provoquer de nouveau eu reprenant de plus fort fes aflertions négatives. 18 Ottobre 1781. Les Comédiens Italiens doivent donner aujourd'hui la première reprélëntation d'une comédie nouvelle en un acte & en vers, mêlée d'ariettes, intitulée: Les deux Sylfhes; les paroles font de M. Imbert & la mufique de M. Defaugiers. Le nom de ces Auteurs n'excitera par un concours bien nombreux. 19 OCtobre. Extrait d'une Lettre du Cap Francois en date du 5 Aoüt M. de Lilan- cour , qui avoit déja gouverné deux fois par Interim la Colonie, avoit été obligé de remettre le commandement, par un ordre furpris de la  ( 99 ) Cour,a M. de Renaud: il lui a été rendu le 15 Juillet dermcr, & M. de la Thebaudiere, Procureur général du Hoi au Confeil fupéricur de cette ville, 1'a harangué a fa réception d'une facon trés - flatteufe. Son difcours, qui ne confifte pas en lieux communs comme les autres, a fait la plus grande fenfation dans la Colonie & elt remplie d'anecdotes curieufes & critiques; mais d'une tournure trés - adroite: en lui difant tout ce qu'il ne fe'ra pas, on btömë cc qui a été fait. „ Vous n'ajouterez point, lui dit-on, ,, aux dépenfes extraordinaires que nécellkent les circonftances actuelles , celles de "con„ ftruélions étrangeres a la défenfe de la Colo- „ nic, & a réfervcr pour des tems de paix „ Vous n'agravcrez point, par des corvees & ,, des travaux forcés, ou mal - entendus, les „ maux inféparables de la guerre & les calami- tés attachées h 1'internpérie des faifons qui .,, défolcnt malheureufement la Colonie depuis ,, quelques années. ... L'habitant des villes fe ,, flatte que le produit de fes maifons ne fera „ point abforbé par des projets ruineux La ville du Cap attend de votre fageffe que vous confidérerez qu'elle n'a pas befoin de fecours „ éloignés pour fuppléer a la pénurie de fes eaux, qu'elle eft environnée de tous cótés de „ fources abondantes qu'on peut y conduite „ fans de trés-grands frais , après en avoir „ indemnifé les propriétaires Tous les Co- lons favent que vous n'aurez égard qu'au E 2  „ mérite dans Ia diftributipn des cmplois & des „ graccs, & qu'a Ia veitu néceflitcufe dans la ,, conceifion des ter-res vagues, & non a ces ,, ambitieux qui ne les follicitent que pour cn faire un tralie honteux, contraire aux vues „ du Prince, a 1'intérêt de la Colonie, & reprouvé par les loix. La correfpondance de la métropole avec la Colonie ne fera point inter,, ceptée.... Nos gazettes & nos papiers publics „ feront irrévocablement fupprimés , ou rendus ,, a leur première & véritable dedination; on n'y trouvera point, a la bonte d'une .fa ge police, aux risques d'allumer dans les fociétés „ une guerre civile, 1'éloge d'un gouvernement ,, lage & jude a cóté de la fityre la plus ridi„ cule & la plus méprifable ; ce ne fera point furtout a des feuilles de cette efpece , impri„ méés avec votre permiffion, que vous remet5, trez le foin trompeur de vos louanges équivo- , ques Enfin , les Magidrats favent que ,, loin de chercher a brifer le glaive des loix, „ vous ferez le premier a le foutenir dans leurs „ mains Que vous ne ferez point une étude „ de miner leur autorité fourdement, de gêuer leurs fulfrages Que vous ferez leur dé- „ fenfeur auprès du Prince;. que vous vous atj, tacberez furtout a détruire les imputations calomnieufes , imaginées pour rendre leur zele fuipect...,. C'ed I'expéiïence d'une con„ duite audi fagc de votre part,qui a déterminé „ cette augufte Compagnie a faire la démarche  ,, etc vous témoigner fes regrets de voir finirJ ,, votre adminidration. lAücün de vos prédé„ ced'eurs n'avoit eu 1'avantage glorieux dé „ recevoir la députation d'une Cour fouverainé, gémiliant de voir palfer le gouvernement en ,, d'autres mains.... II fut peut-étre un tems oü le frein des loix & de la cqnfiance ont été ,, impuilfans; mais que de luftres il s'eft déja j, écoulé depuis 1'enfance de la Colonie, que fes defiruéteurs ingrats, enricbis prefque tous„ de fes bienfaits, la méconnoiifoient & la ca,, lomnioient peut-être pour 1'opprimer plus ,, fufémenï car, vous le favez par expé- ,, rk'tlee: vous favez gouvernée deux fois era „ chef; avez - vous trouvé 1'obéilfance en dé- „ faut? Daignez faire parvenir ces inté- „ reffantes vérités jufqu'aux pieds du Tróne.... „ Que 1'Ordonnance du premier Février 1766, y, concernant le gouvernement civil de cette „ Colonie, que celle du 18 Mars fuivant, fur les enregidremens dans nos Confeils, devieu,, nent enfin la bafe unique, la regie inviolable ,, de votre adwinidration & de celle de vos „ fuceefleurs." On voit encore un coup que ce difcours plus étendu, dont on ne rapporte que les priricipauX paragraphes, ed un réfumé hidorique des grarrds évenemens, des malheurs de la Colonie, & une peinture vive des vues des adminiftrations précédentes. 2.0 Octobre i7§i, M. Olavides, cet Intendant Ë 3  C 102 ) d'Efpagne fi maltraité par 1'Inquifition, eft enfin a Paris fous un nom étran'ger, il y a déja même du tems; mais, comme il a changé de nom, fa retraite en cette capitale eft plus fecrete. 11 OStobre 178,1. Le Peintre véridique , ou Diatribe contre le beau Sexe. .Objets fous qui tout rampe, & n'étes que foibleffe^ Aimables ennemis qui tuez par les yeux. Charlatans, qui vendez des poifons doucereux; Tyrans, dont lepouvoirnousplaitquandilnousbleffe; Habiles inltrumens, mis en jeu par i'amour; Souuce de nos plaifirs, ainfi que de nos peincs; Pangereufes Circés, féduifantes Syrenes, Qui corrompez les Rois & régnez dans leur Cour; (,'ruelles, dont jadis je chériflbis les chaines; J/aux eipoir de nos ceetirs, idoles de nos fens; Sexe vain & trompeur, qui captives les grands, Le fage & Finfenfé, le valet & le maltre ; Ecueil contre iequel il eft doux de périr. Fe.nimes... pour une fois que vous nous faites naitre, Combien de fois, hélas! nous faites-vous mourir. On attribue cette plaifanterie piquante a un Officier de Dragons invalide. 22 Oclobre. Une nouvede feuille périodique s'éleve fous le nom d'Annonces , Affiches <3 avis divers du Païs Chartrain in-40. Elle commence du 1 Octobre & fe diftribuera une fois par femaine. Semblable aux autres du même genre , elle a pour objet prineipal de raffembler & de réunir les Notes qui, par leur nature, doivent acquérir de la publicité, & qu'il eft important  C 103 1 de connoitre dans les Provinces pour lesquelles ce journal ed dediné. Comme celle-la n'eft point maritime & ed peu commercante; elle fera fouvefit littéraire ou économide. 22 Octobre. Ce qui contribue furtout a mettre le défordre dans 1'Opéra, ce font les prorfleffes datteufes dont berce les fujets le Sr. Noverre , qui, remercié ici; paffe a Londres ou il va établir un fpechicle; & par piqué , amant que pour fon intérêt, il cherche a enlcvcr les mcilleurs coriphées. 22 OÏÏobre. II y a eu aujourd'hui une répétition fur le nouveau théatre d'un acte CCJldele de Ponlhleu, Opéra remis en mufique par 51. Piccini. Quoique la falie foit encore très-informe^, ouverte dc tous cótés, on a trouvé qu'elle étoit déja fonore. Le coup-d'oeil en a paru fort agréable, fa forme demi-circulaire & plus évafée qnc celle des autres , favorife mcrveilleufemcnt la vue du fpectacle de tous les cótés. Le théatre ed un peu court pour fa largeur. On fera comme ci-devant debout dans le parterre. Vraifemblablemem ou ne 1'a pas jugé affez fpacieux pour y être aflis , & on a craint de perdre trop de terrein par cette hmovation. 22 Octobre. Aujourd'hui la ville a recu un premier courier a une heure trois quarts après midi, aunoncant les prémières douleurs de la Reine, & a deux heures & demi-quart un fecond a apporté fheureufe nouvelle de la nailfance d'un Dauphin. E 4  C 104 ) M. le Prince de Condé qui étoit a Paris- a recu fur le champ différéns couriers & n'aura pu ie trouver a 1'accouchement fuivant le droit qu'ont tous les Princes du fang d'y affifter & d'étre témoins oculaires de la naiffance de 1'augufte rejeton. Sur le champ on a tiré le canon, le tocfin du palais & celui de la ville ont fonné. A 6 heures le Prévót des marcbands, a la tête des Officiers municipaux,a fait une proceffion autourd'unfeu de bois pendant laquelle autre falve d'artillerie. L'Ordonnance fur le champ a été rendue pour une illumination générale pendant trois jours, & 'quoiqu'clle ne püt être connue dans le jour même, la plupart des quartiers ont été illuminés volontairement & par zele. 23. Oclobr.e. Aujourd'hui & demain il y aura trois décharges d'artillerie a fix heures du matin, a midi, a dx heures du foir. Les tocfins de 1'hótel de ville & du palais continnent a fonner fans relüche.. 11 y aura illumination, orchedre i la Grcve, didribution de vivres & de boifibu accoutumée, & demain même cérémonie. La Chambre des Comptes dés cc matin a déja fait chanter un Te Deum particulier a la Ste. Chapelle. Hier les Comédiens Francois, qui avoient affiché pour petite piece'/e Procureur Arbiire, ont donné UEcole des Maris oü fe trouvent quelques vers analogues a la grande nouvelle. Ces vers ont été entendtis avec des tranfports réité- rés  C i°5 ) re's; 011 les a répétés, & ils ont été applaudis avec la raème véhémence. Le mörae jour, a la Comédie Italienne après les deux Sylphes, la Dame Billioni, qui joue une róle de Pée dans cette piece, a chanté un couplet analbgué a la circonftance , il elt de M. Imbert, & le voici : ■ Air de Joconde, ]i fuis Fée & veux vous corner Une grande nouvelle; Un fits dé Roi vient d'ènchaiiter' Tout un peuple fidele Ce Dauphin, que 1'on va fêter, Au tröne doit prétendre Qu'il foit tardif pour y monter....- Tardif pour en defcendre. L'on a auffi joint a la Matinee vilhgeoife trois couplets d'un M. Dry; mais ils ont été trouvés bien inférieurs au premier, & ont paru très-platSaux counoilfeurs. L'Opéra doit fe fignalcr par une repréfentation gratuite ,- qui aura lieu le Sa'medr vingtfepï, & fera 1'ouvcrtuïc de la falie; c'clt-a-dirc qu'on donnera entree au peuple a la répétitioilgénérale qui devoit toujours s'exécuter ce jourla. C'eft une économie bien entendue , mais öu> eft fiché pourtant de voir la falie fouilléc dans fafnueheur par totite cette canaille dégoutante. sjOaofere. Extrait d'une lettre de Stnjbounr/, du-8 Octobre. ... La Tribu, Comédie en um E 5  C 106 ) arte, pour les réjouiftances de Strasbounr, en honneur de la fête féculaire de la foumiffion de la ville a Louis XIV,par M. Rochon de Chabannes. iel elt le titre de la piece qui a été jouée ici avec Je plus grand fuccès. On a été étonné que ce Poete, qui ne connoit point cette ville, qui n y ed jamais venu, ait eu Part d'en particulanfer fi fingulierement le fujet, dc peindre nos mceurs & „os ufages dans la plus grande venté dans le cofiumc Ie plus exact. Ouoique ia modedie fait empêché de venir jouir lui-même de Ion triomphe, d'alTifler aux répétitions& de pénétrer les Auteurs de leurs róles, la piece a été parfaitement bien exécutée; le fujet en ed fimple. II s'agit d'une Madame Ridern Allemande, auberg.de, chez qui fe fait la noce des couples ums par la ville dans la Tribu.. Elle a une fille aimee d un Francois qui en éprouve du retour; elle refuie de Ia marier par fantipathie naturelle des deux nations, invétérée chez cette Strasbourgeoife, antipathie dont la font revenir fijcceffivement un Officier Francois qui y cd Ipgé & qui gagne fa confiance par fes graces & fon amémté ; un pere Louvois centenaire qui lui pifre lexemple de pareils mariages faits dans fa tamille , & toujours avec Ie meilleur fuccès • enfin-, une Madame Rinchouin fa commere ' vive, gaie, étourdie & madrée cependant, qui f^'f de Pctits contes très-propres a la frappcr ^ a lm moiurer Ie ridicule, 1'injuuice & le dan-  ( 107 ) ger de fon averfion. Ce róle ed amufant, celui du Pere Louvois ed refpeéïade; il fin.it majestueufement l'aétion par une cérémonie impofante & religicufe, par la bénédicdion que lui demandé fa nombreufe podérité dont il cd entouré. Dans le róle de Madame Ridern, qui détede les Francois, mais aime la France, 1'Auteur a eu 1'art de glillèr pludeurs anecdotes relatives aux circondances & d'autant plus datteul'es pour la Reine , qu'elles n'ont point fair de Fadulation, & font 1'clfufion d'un coeur franc que fubjugue la force de la vérité. Mr. Rochon s'étoit contenté, dans des obfervatious envoyées aux Comédiens, de faire feutir la néceilité d'une pantomime continue dans la multitude des peribnnages compofant la triple génération du pere Louvois fur qui roule tout 1'intérêt de cette bagatelle, & qui, faute d'étre bien exécutée, par la froideur ou la diflractiou des Acteurs, auroit óté a la repréfentation um partie du merite de 1'ouvrage; aufli n'a-t-ors rien h. leur reprocber. II y a eu a la fin des couplets charmans, plein* de fel & de gaieté , 'tels qu'il enfaut en pareilleeircondance. On a jugé k propos de faire imprimer la piece' ayant de la jouer, & elle n'a rien perdu a 'être connue dés la repréfentation. 24 OStabre 1781. L''Année Littéraire a repris cours depuis quelque tems; mais le priviléae en a été óté au Sieur Fréron, dont il-. ne li 6  C to3 ) porte plus le nom, & transféré a fa belle-merc, lans autre arrangement pour Panden propriétaire qui rede ainfi a la merci de cette maratre , a laquelle il. a été feulement recommandé de'lui dohrier les fecours pécuniaires que fa bienfaifance & le débit proportionné de cet ouvrao-e périodique pourront lui permettre. C'ed par un. Arrêt du Confeil qu'ed opéré cet arrangement. On motive la tranflation du privilége fur Pabus; que le Journalide en faifoit: on qualifie fes feuilles de fatyriques, calommeufes contre les citoyens, même contre des perfonnes etranger.es a la littérature ; &, ce qu'il y a de plus facheux , c'ed que l'arrêt ed rendu du prcpre mouvement du Roi, tournure dont on fe fort quand on veut couper court a toute oppofition, a toute réclamation. juridique. Cet arrêt a été figuifié au, Sieur Fréron par un Huiflier du Confeil. II eft enjoint en outre a la Dame Freron de nepoint fe fervir, pour collaborateurs de fon nis* des Sieurs t'alaun & Clement, hommes de lettres qui compofoient la plupart des extraits des feudles précédente's; on veut encore qu'il y ait en général défenfes a tous les Journaux qui fe débitent en France de rien recevoir provenant de leur plume trop mordante. On ne peut concevoir que le mot de Fintriloque ait provoqué une punition auffi cruelle; on ne doute pa's que le parti philofophique n'aif beaucoup influé dans cette vengeance & n'ait  furpris la religion dc M. le Garde des Sccauxv préven u d'abord par le Maréchal dc üuras., Les défcnlès qu'on aflbra qu'a recu auffi la Dame Fréron de rien. kaffer inférer dans fan journal contre FAcadémie,. ou contre aucun de fes membres,ne peuvent que fortilier cette coi> jedture. On doit douc efpérer que les Miniftres mieux. indruits, tót ou tard , rendront leurs bonnes graces a M. Fréron. 24 ühobre 1781. On-parle beaucoup d'une brochure nouvelle intitulée: Le Cn du Peuple, On la dit extrêmement violente contre M. le Comte de Maurepas & M. de Fleury, leMinidre des fmances. On-ne doute pas qu'elle ne parte d'une plume foudoyée parle parti de M. Necker,, 25 Octobre. Les fêtes continuent en réjouiffance de 1'heureux accouchement de la Reine & de la naiflance d'un Dauphin. Toutes les Cours font fucccffivement chanter le Te Debm , & il y cn aura un folemnel, Vendredi, ou le Roi fe trouvera. Les fpeclacles doivent avoir lieu gratis, fuivant 1'tuage. Les Comédiens Francois ont commencé aujourd'hui. Ils ont donné Adelaïde. du Guesclin & la Partie de chajje deHenri quatre qu'ils n'avoient ofé remettre depuis la grande, fenfation que caufa cette piece a la, difgrace de M. Necker. Le' Sieur Dugazon y a coufu un. pet.it bout de fcene analogue a la circondance, qui a augmenté la gaicté des fpecbateurs & les amieux difpofés au feftin que les Hiftrions donueiit enfuite aux chefs de la populace. E 7 ,  C HO ) 25 Oïtobre 1781. Exttut d'une lettre de Hcsdin du 11 Oftobre. U y a trois ou quatre ffioig qii un mcendie confidérable confoka une partie dun bourg appelé Fruges, enArtois, a quatre heues dia; le Vicaire du lieu, homme trészélé, fe chargea de quêter dans les environs pour fes malheurcux Paroiffiens; il trouva a St Uracr les lecours les plus géuéreux chez MM. du Regiment de Béarh. On rectit Dimancbe dernier, a Fruges , 1'ordre de loger ce Régiment a fon padage; auffi-tót ce Padeur 1'annonce &, de concert avec les gens de loi du lieu ' on arrêta de lui témoigner Ja reconnoiffance due' a fes bienfaits; en eflèt, hier h fon arrivée on arbora un drapeau bianc au clocher ■; les feux les acclamations ne cederent point; cliaque ha* bitant, fuivant fesmoyens, regala fes hótes de ion mieux, & les gens de loi avec les principaux habitans, réfolurent d'olJfir a diner a MM. les Officiers, qui, ainfi que tout le Régiment ' qunterent cet endroit, pénétrés des témoignages de reconnoidanccs que leur prodiguercnt ces bonnes gens. 26 Oclobre. Extrait d'une lettre de Rouen Ie 24 Oétobre.... Notre Parlement continue k veiller a ce qu'il n'y ait plus de cimederes dans cette capitale & a ies faire remplacer par cinq hors de la ville. C'ed lui-méme qui entte dans. tous les détails néceffiures. II taxe cliaque Paroiffe, tantpour frais d'acquifition, que frais de Clóture, fuivaflt le nombre des morts qui  C in ) fortent de cliaque Paroilfe année commune , le tout aux frais des fabriques. 26 Octobre. C'ed Madame la Princeffe de Lamballe qui, cn qualité de Surintendante de la maifon de la Reine, donna ordre, au moment des douleurs de S. M- d'avertir les Princes & Princclles de la maifon Royale qui fe rendirent dans le grand cabinet de la Reine oii S. M. étoit fur fon lit de mifere. Le Garde des Sceaux de France s'y étoit rendu auffi & occupoit fa place aux picds du lit a genoux. Le Roi & les Princes étoient cn dedans du paravant qui entouroit le lit, le furplus des courtifans en dehors. La Reine accouchée, on préfenta 1'enfant a M. le Garde des Sceaux pour en condater 1c fexc , & il fe releva. Un grand filence ayant cette fois régué dans 1'appartement; la Reine craignoit de n'avoir mis au monde qu'une fdle ; mais quand elle fut en état d'en recevoir la nouvelle , le Roi s'approcha & lui dit: „ Madame , „ vous avez comblé mes vceux & ceux de toute „ la France; vous ctes mere d'un Dauphin." La Reine défira voir ce précieux enfant, qui lui fut apporté par la Princeffe de Guémenée , Gouvernante des Enfans de France. S. M. en le lui remettant lui dit; „ Madame, je n'ai pas „ befoin de vous recommander ce dépot, qui intéreffe tout le Royaume ; il ne fauroit être „ en meilleures mains; mais, pour que vous puis- fiez vaquer plus librement aux foins qu'il „ exige, je compte partager avec vous 1'éduca- tion de ma fülc "  ( iïk ) Les cotirtifans , toujours malins, toujours exacts obfervateurs des paffions des Princes, ont cru remarquer fut le viiagë de Monfieur, a la première infpeórion du fexe , un mouvement d'humeur & de chagrin; mais fon ame magnanime, furmontant biehtót cette foiblelfe , s'eft li vrée énfuite a toute la joie que lui ont inlpiré fon attachement au Hoi & a la Reine, & fon zele pour la félicifé de 1'Etat. Le Roi, depuis ce tems , eft dans la plus grande joie; il ne s'occupe que du nouveau - né & répete vingt fois dans une heure: Mr. Ie t>awphin; en un mot, il jouit dc fon bonheur avec toute la fenfibilité du meilleur des Peres. . 27 Octobre 1781. Le Roi eft v'enü bier a Notre - Dame , affifter au Te Beutn, chante' en réjouiiiance de fheureux événement qui comble, de joie tout le Royaume. S. M. a pris a la porte dc la Conférence fes carolfes de cérémonie : Elle avoit dans le fien k fa gauche Monfieur, fur le devant M. Ie Comte d'Artois & M. le Duc d'Orléans,& aux ponieresM. le Duc de'Chartres & M. le Prince de Condé. La diftribtition d'argent a commencé depuis ce moment jufqu'a la cathédrale. La marche a. eu lieu par le quai des Théatins, ce qui Pa rendue plus longue & a fourni plus demoyens au peuple de voir & d'applaudir fon Roi. Le Roi eft entré fur les cinq heures rt NotreDame. II étoit placé dans le chreur, au.milieu fous i'Ui dais, a la hauteur de celui de 1'Arche*-  ( "3 ) vêque. Les Princes de la maifon royale, les Princes du lang & toute leur fuite les entouroient. Aux pieds de rArchevêque étoit le Garde 'des Sceaux. a la tête du Confeil; a cóté Ie Parlement, la Cour des Aides & les Chanoines; du cóté oppofé , la Chambre des Comptes & la Ville. Depuis environ 80 ans la Cour des Monnoies h'affifte point a pareille cérémonie A 1'occafion d'une difpute qu'elle eut avec un GrandMaïtre des cérémonies, dont elle n'eut pas la latisfaétion qu'elle déliroit. Dans le fanétuaire, a la droite de 1'autel, les Evêques, du cóté oppofé, les mimitres éirangers, &c. Le Roi en fortant ed allé.faire fa priere a la chapelle de la Vierge. II a été reconduit a la porte de 1'Eglife par le Chapitre, 1'Archevéque a cóté de S. M. ?. qui il donnoit la gauche feulement. ü avoit eu 1'honneur de haranguer le Roi a fon arrivée» 27 OStobre. Voici encore un homme de lettres traduit devant les tribunaux, donné en fpeétacle par fa femme. C'ed ce qu'on voit dans un Mémoire pour le Sieur le Brun, Secrétaire des Commandemens de feu M. le Prince de Conti-, contre Marie-anne de Surcourt, fa femme, demandereffe en Jéparation de corps. Ce "procés , commencé depuis plus de fept ans, & que ls mari avoit tilché d'adbupir de fon mieux , fe réveille plus fort que jamais, & devient 1'entretien du public.  C Ï14 ) ; La Dame & Surcourt dénonce a la juftice & a la fociété , fon mari, comme le perfécuteur le tyran & prefque le bourreau de fon époufe • 'celui-ci fe plaint qu'après quatorze ans pafies dans 1 union & la paix, pour avoir exclu de chez lui un homme qui lui étoit fufpeét, il fe voit teuta-coup arraché de fon cabinet & du commcrce des iMufes, entrainé dans 1'arene du Bareau tout a la fois dépouillé & diffamé par les per-' ionnes les plus cheres. Le factum du Sieur le Brun ed curieux par ■ des détails très-amufans ou figurent plufieurs k^u^u, uc ut L-our cc gens de lettres, par des épitres de la Dame le Brun, citées en preuves de leur bonne intelligence, pleines de graces & d'elprit, par des vers , des odes , des chaafons, ornemens qu'on ne trouve guere dans de pareils écrits. Quant au fonds, ce font les Magiftrats qui prononceront. Le Sieur le Brun paroit aflez bien défendu par Me. Hardouin de la Reynnerie, fon Avocat; malheureufement il a contre lui fa mere & fa foeur; &'Ü eft cruel de trouver de pareils adverfaires. D'un autre cóté, les témoins admiutdrés par la femme font d'une efpece aflez vile; les ficns font des hommes de qualité, des femmes honnötes, des auteurs, des hommes irréprochables. Ce qu'on peut raifonnablement préfumer de tout cela, c'eft que la femme aimabie & jolie étoit trés-galante, & que le mari eu revanche  ( |¥5 ) tfétoitpas fort exact au devoir conjugal; qu'il ie livroit fouvent a fon caractere violent, & qu'il •n'eft guere poffible que ces deux êtres fe rapprochènt & vivent enferable. 27 Octobre 1781. Comme 1'on ne connoiüoit point encore tout 1'efièt qui pouvoit réfulter dans la nouvelle falie de 1'Opéra de la foule immenfe qu'elle devoit contenir aujourd'hui pour la première fois, M. le Lieutenant général de police a voulu apporter les plus grandes precautions pour ne point rifquer le plus légerement la yie de cette populace effrenée. Le jeudi 25, ce Mag-ïftrat vigiiant a provoqué 1'ordre d'une vifite générale par cinq Architeétes; il s'ed trouvé préfent lui-même a leur infpeétion, & dia furveillée dans fes divers détails. 28 Octobre. Dans un Chapitre qui a précédé la venue du Roi a Notre-Dame, les Chanomes ont délibéré fur la meilleure manicre de témoigner leur aleerefle , & ont deüré faire, quelque chofe d'extraordinaire. M. l'Abbc de Montjoye, Grand-Mattre des cérémonies, qui aime 1'appareil & le fpeétacle, a propofé d'illuminer la facade de 1'églife & les tours , ce qui étoit lans exemple jufqu'a préfent. Quelques membres s y font oppofés , & paree que c'étoit une rnnovation, & paree que le feu eu pouvoit réfulter; enfin,paree que 1'onne manqueroit pas de prendre acte contre le Chapitre de ce fait, & qu ü contracteroit ainfi une charge de ville dont il étoit exempt.  ( "6 ) Ces raifons produifoient peu d'effet, lorfqu'urï membre-s'eft levé & a pris 1'objet du cóté de la • religion. II a dit que dans un jour oü le Roi venoit rcndre hommage au Roi des Rois & préfentoit a fon peuple cefpeéhcle édifiant, c'étoit en alfoiblir la grandeur que d'y möler une paredle puérilité , des feux follets propres a amufer feulement des femmes & des enfans. L'Orateur excitoit déja une forte fenfation, & peut-être auroit entrainé tous les fufrages, fi 1'Abbé de Champigny ne Peüt combattu. Jai, Meffieurs, dit-il, été a Rome , dans cette capdale du monde chréticn, & j'ofe vous affurer qu'il n'eft point de jour de fête & de réjouifiance oü la bafdique de Saint Pierre ne foit illuminée, oü fon dóme ne foit décoré de feux & d'artilices.... oferons-nous craindre de faire ce qui fe pratique fous les yeüx du Saint Pere, dans le centre de la Catholicité. 11 n'y a pas eu moyen de réfider acetexemple; & 1'illumination a été décidée.. Elle n'a malheureulèment pas répondu a 1'effet qu'on en attendoit. Elle étoit pauvre, mefquine, ' & ne faifoit nul honneur au décorateur. On avoit retardé la venue du Roi, afin de donner a S. M. le plaifir de ce coup-d'ceil. Entre toutes celles qui ont eulieu, il paroit que 1'illumination des Comédiens Italiens fa emporté par fes recherches & fa fingularité, olfrant encore du nouveau en ce genre ii fort épuifé. 28 OStobre 1781. La falie de 1'Opéra s'eft ou verte hier dès 9 heures du matia, ce qtir *  C "7 ) donné la facilité de la faire remplir avec le plus grr.nd ordre. Le fpectaclc a conunencé avant deux heures. II a régné un profond filence pendant 1'ouverture; mais au moment oü la toile s'eft levée, toute la falie a retenti d'un cri univerfel: Vive le Roi, vi•> Cour Vous ne pourrez voir la R.eine, „ paree qu'elle ed au lit; vous irez chez mon „ dis, & vous 1'appellerez Monfeigneur. 29 OStobre. Dans ces jours d'alégrefle générale oü 1'accès du tróne doit s'ouvrir a toutcs les Corporations, les Sörruriers ont voulu fe diflinguer par un chef-d'teuvre d'indudrie dans un .genre oü 1'on fait que S. M. n'a pas dédaigné de s'exercer dans fon loifir: connoilfant fon goüt pour la mécanique, ils ont imaginé une ferrure a fecret dont 011 alfure que 1'elfai a depuis été fait avec le'plus grand fuccès; il ed tel que lorfqu'on veut 1'ouvrir on en voit fortir tout-a-coup un Dauphin cxtrêmemcnt bien fait , qui doit fmgulierement datter S. M. 30 Octobre. Extrait d'une lettre de Strasbourg du 15 Octobre.... C'ed au 30 Septembre qu'a été arrêtée la fête féculaire dont vous avez entendu parler , paree que ce jour ed 1'époque mêrae de la fignature de la capitulation. Le famedi 29, le Magidrat fe rendit dans le grand auditoire de fUniverfité Luthéricnne oü le Panégyrique du Roi fut prononcé en latini La  ( 121 > La folemnité avoit commencé par 1'exécution d'une Cantate latinc, en forme de Poëme féculaire, imité de celui d'Horace. Le portrait en pied du Pvoi, dont, par un arrangement préalable S. M. venoit dc faire préfent a la ville , placé fous un dais, faifoit le principal ornement du lieu, & donnoit quelque chofe de plus impofant, de plus augufte a Ia fête. Le foir il y a eu grand concert public, dans lcquel on répéta le chant féculaire , exécuté le matin. Les mariages ont cu lieu le 30. Le foir on exécuta un fpecdacle Allemand fur Ie fecond théatre de la ville; tout le peuple y entra gratuitement. On fe doute que la fcene fut ouverte par une piece analogue aux circondances, avec des ballets & une décoration brillante. Ce n'eft que le lundi, premier Octobre, qu'on joua au théatre Francois la petite piece de M. Rochon de Chabaniies; mais cette repréfentation manqua fon principal objet, n'étant pas gratuite. Elle fut honoréc de la préfence de la Princelfe Chridine de Saxe, de celle de pluficurs Princes & Princelfes étrangeres, & de toutes les përforines de diftincdjon'*& notables de cette ville; il eüt été*a défirer qu'on y cür pu introduire le peuple pour laquetfe elle cd principalement compofée, a raifon dc la moralité qui tend h détruire 1'antipathie; on a prétendu qu'il n'entendoit pas le Francois, ou du moins aflez bien pour y comprendre rien. Tomé XFUI. F  ( 122 ) 3o Octolre 1781- L'Opéra devant avoir lieu snjourd'hui, il eft décidé que les Variétés Amufantes fe tranfportëröht fur le champ a la foire du fauxbourg Saint-Germain. 31' Oclobre. Le jour de la naiftance de RL le Dauphin, RIcffieurs de Bohfy, Tréföriers de la Compagnie de 1'Affiftance des Prifonniers, recurent une lettre d'un inconnu qui leur faifoit part de fon intention de confacrer 15000 livres a la délivrance des prifonniers pour dettes de mois de nourrjee, dont il leur déféroit le choixi En effet ,1e tendemain 23, 1'argent leur fut apportéèc ils procurerent la liberté a 194 perfonnes. On ignore quel eft ce citoyen bienfaifant; mais cette anecdotc fe réxufit a une autre moins louable1, & beaucoup plus finguliere. Le Dimanche 21, la vèiÜë.de 1'accouchement de la Reine, une efpece de Pélerin, grand, bien fait, vétu de blanc , la tète couverte d'un voile; ayant les jambes entrclacées, au lieu de bas, de rubans de la même couleur &, au lieu de fouiiers, des fandales, après avoir été a Ste. Géfievieve , entra dans Notre-Dame, pendant la mede; fut a la chapclle de la Vierge ou il alluma un grand cierge qu'il tira du fond d'une croix énorme qu'il portoit a la main. Ce fpectacle attira 1'attention des Chanoines, dont quelques-uns, traitant la chofe gravement, opinoient déja pour le faire arrêter, comme un objet de fcandale; car on fe doute du brouhaha qu'avoit caufé une pareille mafcarade. Cepcndant 1'avis  ( 123 3 plus cöiivenable fut de lui envoyer le SuifTe pour lui demander qui il étoit; ce qu'il vouloit &c. II ne donna pour toute réponfe qu'un paffeport de M. le Lieutenaut général dc police, qui difoit en fubftance: Laiffez poffer le porteur du préfent billet. II remit en même tems quelque argent a ce Suiife, afin de le diftribuer aux pauvres, & ajouta qu'il fe tranfportoit de la au Calvaire, ott 1'on veut qu'après avoir finj fa priere , il alt quitté fon accoutrement bizarre & foit monté dans un carolfe qui 1'attendoit. Bien des gens prétendent que ce pélerin eft le même qui a donné les 15000 livres. 31 OSiobre. Ce font tous les jours de nouveaux fpectaclcs édifians ou amufans relativement au nouveau-né. Lundi toutes les paroiffes orit été en procetfion a Notre-Dame pour remercie Dieu dc I'événement. On y a furtout remarqué les Invalides, fortis dès 1'anbe du jour de leur hótel, ayant a leur tête leur Etat-major & le Baron d'Efpagnac leur Gouverneur, venus a pied & s'en retournant de même. Le Curé de Saint-Nicolas s'eft auffi fignaïé par un cortege de 500 pauvres de 1'un & dc 1'autre fexe, auxqucls, la cérémonie finie, il a donné un écu & un pain de quatre livres pour chacun. C'eft ce Pafteur humain & ingénieux dont 011 a vu dans nos fcuilles une lettre très-plaifante a M. Ehe de Beaumont, relativemeut a une chaF a  C 124 5 rite, 011 celui-ci avoit mis plus d'odentation que de bienfaifance. 31 OCtobre 1/81. Lundi dernicr, les Comédiens Italiens ont donné leur Gratis. On a été faché qu'ils aient choili pour amufer le peuple des picces qu'ils ont crues plus analogues a lui; fcavoir : Les deux Avares , le Silvain & les Vendangeurs: on auroit mieux aimé qu'ils eufïè'bt exécuté quelque fpecdaele capable de le Frappèr par de belles décorations, par une grande pompe, par un coup-d'ceil impofant, comme Zemiré~'& Azor. En eifet , fe retrouvant au milieu de lui-même cn quelque forte,parmi ces cottes rouges,ces gens a fabots, ces villageois, il a été peu frappé & n'a éprouvé que de foiblcs fenfations. Cependant Mrs. Augude de Piis & Barré s'étoient mis en frais & avoient compofé un long Dialogue en couplets entre un Charbonnier é? une PviJJarde. De tous ces couplets, au nombre de viugt-deux, le plus adroit étoit celui relatif au compliment de 1'Univerfité a Verftilles. Tu s'ras p' t' ét' bien en pein' Nicole, Du latin que I'y a récité Le Recleux d' TUniverOté; Mais on ra'a dit 1' fecret d' I'école. Ca vouloit dir', c' n'eft pas plus fin, Viv' le Roi, la Reine & 1' Dauphin. Le refrein géuéralement répété a reveille 1'engourdiifement de cette pbp'ulacé.  C "5 ) Le Sieur Carlin, 1'Aéteur le plus cn poUeffiorl tle rcjouir le peuple & le public par la nature de fon róle d'Arlequin, n'a pu paroitrc en fcene dans ces deux pieces 'ou il n'avoit pas de place; & il a gémi, depuis 41 ans qu'il ed au théatre , d'étre ainfi nuiet pour la première fois aux Gratis. Ce qui a déterminé les Auteurs des couplets a préférer de mettre en aérion pour interlocuteurs un Charbonnier & une Poijfarde, c'ed que ces deux Corporations font ceulees les premières de la populace. En vertu de cette prérogative, aux trois fpeétacles, les Charboiiuiers ont conftamment occupé le balcon du Roi, & les Poidardes celui de la Reine. On leur garde ces places.En conféquence, ils ne fe prelfent pas & n'arrivent qu'au moment oü le fpectacle doit commencer. Le jour de 1'Opéra, les Charbonniers parodiant les grands Seigneurs, les gens couftitué's en dignité font venus en charette & eu defcendantont dit au Charretier: Ce foir d cinq heures. 1 Novembre. La Compagnie des eaux de Paris, fe propofant enfin de recueillir le fruit des frais énormes qu'elle a avancés pour la conltruction du chateau d'eau qu'elle a fait élever a la Grille de Chaillot, répand un nouveau Profpec tus pour exciter les amateurs a fournir des fonds & a foufcrire. Sa célérité devient d'autant plus intéreflante pour ceux-ci, que la dépenfe fera plus confidérable s'ils laid'ent paifer leur rai5g, pour i'arrangement des canaux particuliei-s, F 3  C 1*5 ) 0 Profpectus, un peu charlatan, très-verbeux, ' très-emphatique , eft attribué en partie au Sieur de Beaumarchais, 1'un des Entrepreneurs; car il fe trouve partout,& a centpieds & cent mains pour aller a la fortune. 1 Novembrs 1781. Les partifans de M. le Noir, & il faut convenir qu'ils font en grand nombre, ne celfent d'exalter fon édifice depuis qu'il a etc* expofé aux regards & au jugement du public avec tout 1'appareil requis, lors de la première repréfentation iVAdele, avant-hier. II y a, fuivant eux, déployé toutes les relfources de fon art, pour le rendre commode , agréable , fonore, & furtout d'une folidité a toute épreuve. Les précautions contre le feu, les dégagemens pour la fortie, les Communications des loges des Acteurs au thédtre, &, en général, toutes les difpofitions relatives a la fureté du public & au fervice du fpectacle font trés-bien entendues. La même intelligence regne dans la didribution des loges & de tout 1'intérieur de la falie , qui, outre que la décoration en eft trés - élégante, ne contient prefqu'aucune place d'oü 1'on ne puilfe jouir a la fois, du coup-d'ceil de la fcene & de celui de 1'ademblée. Endn, un Enthoiifiafte a couronné tous ces éloges parle madrigal fuivant, Pour les Renauds, pour les PvOlands, Créerdes derneures pareüles, Trouver moyen, en auffi peu de tems, Que tout y plaife aux yeux comme aux oreilles,- Du pays des enehantemens C'eft réalifer les merveilles.  C 1=7 ) i Novembre. L'Opéra d'Adck avoit en 177? été exécuté en trois actes: fon peu dc fuccès obligea Mr. le Marquis de Saint Mare de 1 étenuru en cinq, en i?75- Cette feconde métamorphofe n'ayant pas mieux réuiïi, il Fa rétabh en trois, comme la mefure la plus analogue au génie des compofiteurs Italiens, malgré tous ces efforts, malgré la beauté du fujet, c'eft encore un Poëme médiocre. En accordant même aux défenfeurs de 1'Auteur, que le ffile en foit correct., facie * élégant, que les vers n'cn foïent jamais vuides de feminiens ni de penfées, ils feront obligés de convenir de ce réfultat général. D'un autre cóté ,en accordant au Sieur Piccini qu'il ait,en beaucoup d'cndroits,rcndula mufique énergique & exprelfive, telle que 1'exigent certaines fcenes, oü la paffion éclate & tonne, on regrette, fuivant fes apologiftes mêmes, ces chants céleltes & brillans, ces airs fi délicieux ,& fi flatteurs pour 1'oreille , qui font le charme des autres productions de 1'Auteur. En un mot, ils avouent qu'il a plus facrilié a 1'harmonie qu'i ia mufique. Ils avouent que, malgré 1'infériorité du talent de Mr. de la Borde , 1'Auteur de 1'ancienne mufique , on trouve bien fupérieure chez celui - d la fcene du défi entre Alphonfe & Raimond, qu'il a traitée fupérieuremcnt, & qui , dans M. Piccini, manque de la vigueur nécelfaire: onaime encore mieux dans le premier la marche du 3-1. acie , paree qu'elle n'a pas dans fon F 4  C ia.8 ) rival Ia majeflé qu'exige la circonftance. Les ballets font deffinës avec antant d'intelhgencè que de goüt, & tout le monde s'accorde 3 dire que je Sieur Gardel 1'ainé, empöche de regretter M. Noverre, du moins en cette occafion. a Novembre 1781. Extrait d'une lettre de la Martmique du 15 Aoüt Mr. le Marquis de Bouillé ne s'en trouve pas mieux d'avoir cabalé pour que M. de Montdenoix paflat a la Guadeloupe & que le Préddent Peynier revint ici. Celui-ci n'a aucune des reflources de 1'autre, & nous commencons a nous en appercevoir par la rareté des denrées & leur cherté , précurfeurs de la difette qui ne tardera pas a fe faire fentir; ce qui nous fait foupirer après 1'arrivée du convoi promis. M. de Montdenoix, outre qu'il étoit infinitnent plus travailleur , plus décidé, plus expéditif que ce vieillard qu'on nous a cnvoyé pour Intendant, avoit gagné la confiance des habitans au point d'avoir fouillé nos .bourfes, pour le compte du Roi dans des crifes difficiles jufqu'a 500,000 livres. M. Peynier n'obtiendroit pas un écu, & d'ailleurs fon génie leut & fans invention ne s'accorde pas avec le caraétere bouillant & acdif du Général. II n'eft pas a s'appercevoir dc fon tort. II rend juftice aux talens de 1'Adminidrateur précédent. II eft fAchcux que le déchainement de la Colonie dont il 1'a cru 1'inftigateur, lui ait fait prendre le parti violent dc demander Ie changement de M. iie Montdenoix. Une lettre de cet Qrdonnateur a M. . . ' ■ " Pup-  ( 129 ) Puppé, Pun de nos mécontens, oü il s'explique pen favorablement fur le cotnpte du Général, a achevé de tout gater, & il s'eft livré a fon humeur; voila comme le monde eft gouvcrné. Une anccdote fort fingiüicrc , c'eft que M„ Olivaro , qui commande en f'econd a la Guadeloupe , ayant rendu des honneurs militaires ü M. de Montdenoix a fon arrivée dans cette Colonie, on vouloit lui en faire un crime auprésde Mi de Bouillé. Ses ilatteurs ne manquerent pas de lui peindre cette conduite de M. Olivaro comme déplaeée & baffe. Soit politique, foit efprit de juftice & de modération, il répondit que ce Militaire avoit bien fait, qu'il fe füt conduit de mime en pareiile circonftance; qu'on ne fauroit trop faire refpecter du peuple les perfonnes chargées de la confiance du Roi. Nous apprenons avec douleur que M. de Montdenoix, très-mécontent de tous les pafte* droits qu'il a effuyés, eft parti au commcncement de Juillet pour la france. a Novsmbre. L'Opéra étant rétabli fur un théatre convcnable, & le peu de fuccès de Vinconnus perfécutée fur celui des Menus , devantr rendre le comité de ce fpectacle peu jaioüx dc; conferver la piece fur fon répertoire, les Comédiens Italiens fe remuent pour avoir la liberté d'exécufcr cette même piece. 2 Novemlrre. Extrait d'une lettre de Roncra du 27 Octobre Le Mercredi 24, on fsnftbic la Feillés l'lliageoife, & déja le public fe di'b'>F 5  C 130 ) fök a fbrtiï, lorfque plufieurs coups de fouet te flrent entendre derrière le théatre & retinrent la foüle-. Les AéteiiES en parurent étonnés , & voyant entrer fur la fcene un courier en bottes fortes, ils 1'entourerent avec empreffement. II répondit par des couplets fur 1'Air: par la p'tit' Pofte de Paris, analogues a la nouvelle du jour & dont le refrein étoit Vive. I' Dauphin, Viue l' Dauphin.. Le public le répeta dans une ivrefle de joie inconcevable. Le róle de courier étoit fait par Ie Sieur Patras, Auteur des couplets & dont la- piece du Fou raijonnable a déja donné la meilleure idée. II eft venu dans cette ville pour faire exécuter cette comédie & d'autrcs de fafacon. z Novembre 1781. On a exécuté hier au Concert fpirituel une Cantatille fur la naiffance du Dauphin.. Le Directeur défirant, amant que ce ibectacle le comportoit, concourir a célébrer cet. heureux événement, avoit prié RL !e Rlarquis de St. Mare de faire quelque chofe. Cet Auteur, a. compofé une Cantatille trés - heureufe , courte,. vive & prêtant beaucoup a 1'harmoniè. On s'attendöit que le Sieur Piccini, chargé de la mettreen mufique, y déployeroit tout font talent; mais le fujet eft raté abfolument. II n'a recu aucui? battement de main. On a trouvé que la partie du récitatif avoit, trop peu d'exprefliön;; Ie. chant du chceur, point aflez de noblefie, & ;je faifoitpas ronder digncment les noms dc Louis & d'"Antoinette,. qui en formoient le refrein. 3-; ~&%smkm,. Las- avatuages qu'oflre- Fétablifr  C w ) fèment formé par la Compagnie des eaux dc Paris, font pour Ie particulier d'avoir a fort bon marché dans tous les tems de 1'année & fans interruption, de Peau faine, en telle quantité qu'on voudra; de fe procurer des bains chez foï fans frais & fans embarras; furtout d'avoir un fecours toujours pret pour arréter un inccndie naifl'ant; pour le public, de pouvoir arrofer abondamment les rues pendant les fécheredes de P'èté, & d'entraiucr pendant 1'hiver, dans les égnuts , les glacés &les neiges a demi-fondues qui féjourncnt dans lesmes, les rendent impraticables & entretiennent fouvent dans fair un froid & une bumidité nuifibles; enfin, dans tous les tems de 1'année Paris pourra être continuellement layé & nétoyé a peu de frais de cette boue qui ie rend fi incommode pour les gens de picd & II malpropre pour tous les babitans. On ne fentira. plus cette horribte infecdion qui prcnd i\ la gorge, étoulfe & fulfoque dans les divers quartiers oïl. les égouts,fans eaux qui les détergent,accumulent & retiennent des amas d'immondices, dont le moindre inconvénient ed d'alfecter trés - defagréablement 1'odorat. Ce premier établiffement, fuivi d'un fecond? placé, a 1'autre extrêmité de la ville, eft aflez élevé pour la dominer toute entiere & fournir de Peau partout.. De ces deux cbateaux d'eau,. . ifréfuitera une made de 50,000 muids, quan*ti-té fuBJfaitte pour fournir a tous les befcius des habkans-. F S  C m ) L'abonnement eft de 50 livres par année pour vra rnuid d'èau par jour. On le recevra j.utqu'aü premier Février 1782. La iburniture ne s'en fera que tous les deux jours, fuivant 1'ufage de Londres,afin que les Entrepreneurs aientle tem» de vaquer aux répauations néceflaires. 3 Novembre i78.1i: Entre la mükitude des vers fades qu'a fait naftre avec elle la nailfance de Monfeigneur le Dauphin, il fa ut difdnguer ceux-ci de M. de la Chabeauffiere, 1'AtiteiiB «les Maris corrigés. Un jardinier, conntf par fon difcernement, Qui ne lai'ffoit jamais un bon terrein en frictie; Avoit un jour enté, dans un jardin charmant, Sur un laurier de France un beau roOer d'Autriehè. Son travail fut fuivi- du plus heiircux fuecés; LSiïfcuifte tont joyeux de fa métamorphofe, Fit d'abord galamment les honneurs a la Rofe; Mais le Propriétaire eut peu de tems après La rofe Autrichienne , & le laurier Franc-jis. 3 Novembre. C'ed un M. Compan qui euY auteur de la traducïion de YInconnue perjécutée que défirent jouer les Comédiens ïtaliens : il prétend que M. Durofoi a tellëment edropié te Poëme ltalien, que la mufique s'cn ed refièntie, & qu'il en a réfulüédes coi:tre-fens frappans,quï Font rendtie méeonnoifïable a ceux qui en faifoient le plus de cas, & Pavoient li fort admirée dans le païs. Ce qu'il'y a de fur, c'ed que Fouvrage de- M.'Oo-mpau a été exécuté- a Verfadles k buit Juin de cette année devant la- Reine., & a  C 133 ) .fingulicrcment plu k S. M. & j ceux qui Voüï entqndli. Mr. Compan reproche encore aux Directeurs dc 1'Opéra d'avoir chóiii un Mudden aulii foible que le Sieur de Rochefort pour arranger la mufique d'Anfoffy, 1'un des plus grands maltres niodernes , & en faire les futures; ce qui n'apu produirc qu'une difcordance barbare. 3 Novembre. Au concert du jour de la Touffaint,ou la nouveauté de M. Piccini avoit attiié une affluence conddérable de fpectateurs, une autre de M. Giroufi n'a pas mieux réufli; c'étoit un Oratorio intitulé: les fureurs de Saül. Dans celle-ci, contre 1'ordinaire, c'elt encore le Mudden qui a manqué au Poëte: on a jugé que M. Moline, Auteur des paroles, méritoit des éloges pour s'être appliqué a bien faifir le ton de ce genre dc poëfie, depuis le grand Roulfeau, trop négligé par les modernes; mais que le compofiteur n'avoit pas mis dans fon chant toute 1'énergie , dans fa partie inflxnmentale touterharraonie bruyante, que le fujet exigeoit. 4 Novembre. Entrc les divers Te Deum cbantés depuis la nailfmce du Dauphin, il faüt didinguer celui que Madame Méiard, Bouquetiere de S. M. &de la familie r ïyale, doit faire dianier demain en 1'églile royale & paro'iuralë dc St. Germain 1'auxerois: il doit étre précedé d'une mede folemneile en mufique. 4 Novembre. On voit a Paris quelques exemplaires d'une brochure ayant pour titre: du Peuple des Pa-js-bas. La profcription qui en a élé F 7  C 134 ) fake par les Etats de Hollande qui out arrê'té Ie 20 Octobre de publier un placard contre firnpreffion de cc libclle fèditieux, & promis 14,000 rlorius a celui qui en découvriroit 1'Auteur r ne peut qu'exciter la euriofité des leéteurs, quand cet ouvrage n'auroit rien de faillant en lui - même. II' eft peu connu encore ici: on le dit dirigé contre le Prince en particulier, & le Stathouderat en général; on dit que c'eft unePhilippiquefurieufe, dellinée a foulever la canaille contre 1'autorité établie. Quoi qu'il en foit, on allure qu'on y trouve des notions alfez exacTes-, & détaillées fur la nature du Gouvernement de la République. 5 Novembre 17S1. C'eft hier que toutes les Communautés d'arts & métiers ont été i Verfailles pour témoigner leur joie de 1'heureux événement qui caufe celie de toute la France. Les Corporations, comme les fix Corps, les Poiffardes & autres qui ont la permiffion dc paroitre devant le Roi même & de le haranguer, doivent faire une répétition d'abord chez M. le Lieutenant général de police, enfuite chez le Miniftre de Paris, & devoient auffi voir avaut M. le Comte de Maurepas;. mais ce Miniftre, étant trés-mal de la goutte, n'a pu les admettre. 5 Novembre. Les Comédiens Italiens donnent, Jeudr'8, la première repréfentation de Lucette & Lucas, piece nouvelle en un acte , dont. la mufique eft d'une perfonne de quiuze ans. 6 Novembre. Les Dames de la Malle, c'eft aküi qu'on les qualifie dans les cérémonies de  C 135 ) Tepréfentation , ont eu 1'honneur de complimen* ter hier le Roi fur la naifTance de M. le Dauphin. C'ell M. le Duc de Cofié qui, comme Gouverneur de Paris, les a introduites chez le Roi; lesdeux battans fe font ouverts; S. M. s'eft préfentée a la porte de fon appartement, & 1 une d'elles, avant fon compliment écrit fur fon éveutail 1'a Ui & fuppléé ainfi adroitemeut a fon défaut de mémoire. II eft fans contredit le medleur qu'on ait encore fait, & 9 feroit difficile den compofer un autre aulfi bon dans fa bneve fin> plicité. II mérite d'étre rapporté. SlU E-j „ Si le Ciel devoit un fils a un Roi, qui re'o-arde fon peuple comme fa familie, nos prieres & nos veSüx le demandoient depuis long' tems; ils font enfin exaucés. Nous voila furs" que nos enfans feront aufli heureux que nous; ' car cet enfant doit vous reflembler. Vous hu " apprendrez, Sire, a être bon & jufte comme vous. Nous nous chargerons d'apprendre Z aux nótres comme il faut aimer & refpefter ,, fon Roi. " Ces Poulardes, les repréfentantes du peuple, étoient habillées en noir. Elles out été traitées par le Roi, qui, fuivant 1'étiquette, leur a tait fervir a diner. Le compliment fini', S. M. n'a pu s empêcher de rire d'une telle cérémonie , & celle qui na«nguoit, fans fe décontenancer, a n auffi awcmio grande franclüfe-  C 130 O 6 Novembre 1-8r. Depuis 1'établtflement fM dc la machine a (cu des freres Perrier, elle devient un objct de curiöfité; 011 ne celle de Palier voir & de s'en entretenir, C'ed Voltaire qui le premier, il y a plus de cinquante ans, a reproché aux Francois de négliger une imitation dont ils recèvoient fexempie a LonJres. Après lui 4 d'autres voyagcurs, en vifitant cette capitale de nos rivaux, ont été furpris d'y en trouver onze de cette efpece montees. Enlin , une Compagnie ■s'eit évertuéc-, & ce qui auroit dü être le fruit d'un patriotifme aclif & clairvoyant, ed dcvcnu Pèffort d'une cupidité intrépide, Cette Compagnie ayant trouvé dans les Sieurs Perrier freres, autanc de lumieres & d'habileté pour les machines , que de qualités délirables dans une alfociation, a pris alfez de confiance en eux pour fe conltituer en des avances de prés de deux millions, afin d'acquérir les terreins , les matériaux, les atteliers & indrumens néceffaires a la forination des deux ctabliifemens; furtout a 1'acbat & a 1'importation de tous les tuyaux & cilindres qu'elle a été forcée dc tirer d'Augleterre. Le plus fingulier & le plus douloureux pon? elle, c'a été de fe voir obligée è traiter avec un Anglois , établi a Birmingharn , a cent vingt mille de Londres, & qui venoit d'obtenir, au mots d'Avrd 1--J78, le privilége exclufif de conftruire des machines a feu dans toute la France. Elle lui a été fubitituée.par un Arrêt du CQüfcil*  C 137 ) revêtu de Lettres patentes enrcgiftrées au Parlement. Enfin,depuis quatre ans elle a perdu tous les intéréts d'un ca'pital aufli énorme. Aujourd'hui que cette Compagnie a dévoré toutes les diiucultés , éprouvé tous les dégoüts, bravé tous les obftacles ; qu'elle a alfuré fes fuccès par une patience a toute épreuve & par les fuperbes travaux des freres Perrier, il s'agit de.favoirfi elle trouvera aflez de foufcripteurs pour fe remplir de fes avances & fe mettrc en état d'en faire de nouvclles a 1'endroit oü elle compte établir fon fecond chateau d'eau. 6 Novembre 1781. On n'a appris que depuis peu Ia perte de M. le Prince, Peintre de réputation, paree qu'il elt décédé a la campagne. Elle eft anivée le 30 Septembre dernier dans la 48eme. année de fon age. Agréé de 1'Académie en 1764, il avoit été recu 1'année fuivante & faitConfeiller en 1772. II étoit en langueur depuis longtems ; toutefois luttant contre la mort qui le pourfuivoit , contre la noire mélancolie, plus cruelle que la mort, 1'amour de fon talent avoit ranimé fes forces pour terminer un tableau qu'il avoit commencé, & qui, fans avoir été annoncé fur le livret, a été expofé les derniers jours du fallon. II repréfentoit des freres quêteurs diftribuaut des Agnus Dei a la porte d'un cabaret: il fe faifoit, de fon lit , porter au chevalet, travailloit quelques momens & fe recouchoit. On voit par 1'idéé du fujet, qu'il cherchoit a égayeï  ( 138 O fon imagination, & que la peur du Diable ne le toumierftoit pas. 6 Novembre 1781. Le délire patriotique pour la naidance d'un Dauphin, loin de fe ralentir, ne fair que s'accroitre par la ferracntation générale. Les femmes le manifedent jufque dans la frivolité de leurs modes. Elles portoient, il y a quelque tems, au lieu de diamans aux oreilles ou dans les cheveux, des médaillons au col: cnfuite elles y ont fubditué des Jeannettes, c'eflr a-dire des croix d'or, comme en ont les femmes de la campagne, bientót enrichies de diamans fuperbes. Aujourd'hui c'ed un Dauphin qui a pris la place de ce figne de notre religion. Enfin, les broderies a la mode pour les fonIiers font un nceud h quatre rofettes, furmonté d'une couronne dont le centre ed occupé par un Dauphin: au-delfus ed écrit en lettres d'or, Vive le Roi, au milieu Vive la Reine, & audedbus Vive Monfeigneur le Dauphin. 6 Novembre. Extrait d'une lettre de Rouen du 1 Novembre Avant-hier Meffieurs les Maire, Echevins & vingt - quatre du Confeil de cette ville fe font afiemblés pour délibérer fur le . meilleur moyen de témoigner la joie de notre capitale de 1'évenement qui vient de combler les vreux de la France; ils ont arrêté a 1'unanimité de le célébrerplus particulieremcnt par des acles de bienfaifance. Ijs ont en conféquence autorifé Mcdieurs du Bureau de la ville a yerfeï dans le iein des families indigentes de Rouen, & notauv-  C 139 ) ment dans celles des matelots morts au fervice du Roi depuis le commencement de la guerre , telles fommes qu'ils croiront proportionnées & relatives aux facultés de la ville. 7 Novembre. Les Dames de la Halle , plus heureufes que les Cours Souveraines, ont eu la liberté de voir la Reine & de lui réciter leur compliment: il eft moins excellent que celui adrelfé au Roi; mais a pourtant quelque chofe de caraétóriftique, & ne reflemble cn rien aux lieux communs dc cette efpece. Le voici: Madame, „ Toute la France a déja témoigné a Votre „ Majefté fa joie li vive & fi vraie de la nailfan„ ce de Monfeigneur Ie Dauphin. Nous avons „ fait éclater nos tranfports avec tout 1'amour que nous avons pour vous: il nous eft per,, mis aujourd'hui de porter aux pieds de Votre „ Majefté les expreflions de nos coeurs ; ce „ droit-la nous eft plus cher que la vie. II y a „ fi longtems, Madame, que nous vous aimons , „ fans ofer vous le dire, que nous avons befoin „ de tout notre refpecl: pour ne pas abufer de la „ permilïïon de vous 1'exprimer. " Celui a Monfeigneur le Dauphin , le moindre de tous par la difficulté de dire quelque chofe a un enfant qui n'a encore ni langue, ni orcilles s ni yeux, étoit concu ainfi: Monseigneur, „ Nos cccurs vous attendoient depuis long„ tems; ils étoient a vous avant votre-nauTaneei  C 140 ) „ Vous ne pouvez ~ entendre encore les vosux que nous faifons autour de votre berceau; on 5, vous les expliquera quelque-jour ; ils fe ré- duifent tous a voir en vous 1'image de ceux 3, de qui vous tenez la vie." 7 Novembre 1781. Voici quelques traits recueillis fur M. le Prince , dont le nom & les ouvrages pafferont certainement a la poftérité. 11 étoit né a Metz, & frere de Madame le Prince de Beaumont, connue par des ouvrages pour 1'éducation des enfans. Son pere n'étant point en état de lui faire faire a Paris les études néceifaires pour fe perfeclionner dans le talent de la peinture dont ce jeune homme avoit déja Pattrait; celui-ci fe fit préfenter chez le Maréchal Duc dc Belle-Ifle, Gouverneur de la Province, lui plut par la pétulance & la franchife de fon ilge & de fon caractere, par fa phyfionomie intéreflante & fpintuelle, & en obtint une peufion qui le mit en état de fe foutenir dans la capitale, centre des beaux arts. II devint éleve de Boucher; fes delfeins, qu'il gravoit lui-même a la pointe, lui firent dès ce temsd;\ öne réputation, dans le. genre du payfage, enforte qu'il ne voulut plus etre a charge a Ion bienfaiteur. II fe maria peu après avec une femme plus agée que lui; mais 1'humeur économe & revêche de celle-ci lui déplaifant, il lui rendit fo bien, & choifit le parti d'aller en Ruflie oü il étoit appelé. M. le Prince s'emb.irqua & fut pris par un corfaire Anglois; il étoit a la veille de perdra  tout, iorsqu'il tifa c!e fa malle un violon dont il •jouoit, &, faifant contre mauvaife fortune.bon cceur, par fon harmonie charma ces barbarcs qui ne lui enk verent rien & danferent au 1'on de cet indrument. Arrivé enfin a Saint Petersbourg, il y peignit, pour le Palais impérial, plufieurs plafonds dans la maniere de fon maitre. Bientót après, frappé du codume pittorefque du peuple Rulfe, il fe livra tout entier a ce genre. Son premier eflai fut une vue de Petersbourg, trés-bien gravée depuis peu par M. le Bas. Non content de desliner les objets fur nature, il fit encore exécuter en petit les modeles des maifons, chars, traincaux, uftenfilles &habillemens de tous les pays fujets & voilïns de la domination Rulfe.. Mi le Prince féjourna environ cinq ans dans ce pays; il y fut admis dans la familiarité des plus grands Seigneurs, entre autres du Comte Poniatowski, aujourd'hui Roi dePologne. Mais, attaqué d'une maladie grave , il repartit au moment de la révolution' qui mit la couronne fur la té te de Catherine deux & revint dans fa patrie oü il fe diftingua par le nouveau genre qu'il s'étoit formé, On en a parlé dans le tems. 11 fe livra depuis au codume francois. Sa touche gagna de la légcreté , fa couleur de la folirlité, de 1'harmonie, de la tranfparence; fa compofition, de la grace, de la fagelfe: on voit aujourd'hui fes tableaux fe foutenir dans les cabinets Éhtre les Tenkrs & les PFouvermens.  C *4a ) ■8 Novembre 1781. MM. de 1'Eglife de Paris, fuivant le privilege qu'ils en ont,ont étéDimanche dernier en députation pour complimentei- le Roi & la familie royale. Elle étoit compofée de douze Chanoines, le Doyen compris, tous en longue foutannc. L'ufage eft que M. fArchevêque de Paris s'y joigne; mais , malgré fa préfence, c'eft toujours le Doyen qui porte la parole; cette fois M. de Beaumont n'a pas jugé a propos d'en être. lis ont été auffi chezM. le Dauphin,& Madame de Marjan les a invités d'approcher du berceau & de contempler de plus prés cet augufte enfant, dont on a déja pris toutes les dimenfions. II pefe 13 livres & a vingt- deux pouces de long. Sa nourrice fe nomme Madame Poitrine; c'eft une payfanne qui s'eft évertuée d'ellemême, qui eft venue a Paris avec fon mari, & fe fentant les qualités requifes, s'eft tellement démenée & fait connoitre, qu'elle a été acceptée. Elle a continuellement auprès d'elle une gardienne du ventre qui ne la quitte point, méme lorfqu'elle va a la garderobe, & rend compte a la faculté de 1'état de la fanté de la nourrice, afin que, s'il lui furvenoit quelque dérangement, elle put être remplacée fur le champ par une autre de celles toujours en réferve pour ces cas éventuels. Cette payfanne, malgré fon aifurance, a cependant Pair encore aifez embarraifé dc fe voir en pareil lieu, & du róle qu'elle y joue. Elle venoit de quitter fes habits de village & de  C 143 > fe vêtir fuivant le codume de fa place. Tëls font les détails dans lefquels Madame de Marfiin a bien voulu entrer avec Meffieurs de FEglife de Paris, comme très-précieux, concernant une tête auffi chere. Ces Députés ont auffi été chez tous les MiHiltres & ont diné chez M. le Grand-Aumónicr qui les avoit fait inviter avec le plus grand cérémonial. 9 Novembre. Extrait d'une Lettre de Rouen du 2 Novembre L'Arrêt du Parlement de Rouen, cn faveur des Exécuteurs de la haute judice , de plufieurs villes de la Normandie, n'ed pas une plaifanterie; il a été rendu le fept Juillet dernier, & imprimé fous le titre d'Jrrêt notable du Parlement deRouen.En voici le fujet; Le 19 Mars, leurs enfans étoient au fpecdacle, au parterre, fort tranquilles; leurpréfence déplüt a plufieurs perfonnes, au point qu'ils furent infultés, battus, & même mis dehors par un des Grenadiers de la garde. Oubliant ces injures particulieres, mais voulant déformais les prévenir, ils préfenterent feulement requête pour demander a jouir paifi. blement de la liberté de fréquenter les lieux publiés ; ils prouverent qu'aucune loi, aucun jugement ne leur avoit interdit cette faculté. Ils réfutcrent 1'adertion erronée , que des hommes pourvtis de 1'office des expofans, font eux & leur familie, gensinfameF; tandis que, pour y être recu, il feut être reconnu & avéré bon Catholi-  C 144 ) que-Romain, & citoyen de mceurs irréprochablcs, ce quiimpliqueroit concradiction. Le 30 Mars, -le Procureur général fit un réquifitóire en leur faveur, oü il dit, entre autres chofes rémarquables, que la profelfion des expofans ne peut oliénfer que celui dont 1'ame naturcllement portée au vice, a Poifiveté qui en elt la mere, fe révolte a 1'idée feule des peincs & des fupplices dont la crainte le contient; que tout homme honnête les laifié fans les inquiéter partout oü ils ne troublent point 1'ordre public; que d'ailleurs, ils font fous une proteóïion plus partictdierc des loix , en étant les fuppöts néceffaires. Que, d'après les faits qu'il a rapportés, 6 les pieces juftificatives qu'il a vifitées, la Cour ne peut qu'appercevoir la confédération punilfable que des têtes mal organifées imaginent pour altérer, intercepter la liberté & 1'état des expofans; en conféquence le Miniftere public concluoit, i°. a ce que, conformément ;\ l'Arrêt dii 7 Novembre 1681, publié le 20 Février 1683, dérenfes foient itérativement faites a toutes perfonnes de traiter les expofans, leurs families, ou ceux employés a leur fervice, de Bourreau. q.0. Que de pareilles défenfes foient faites de gêner la liberté des expofans dans les lieux publiés, tels que les églifes, les promenades, les fpecbacles , &c. 3°. Que 1'Arrêt foit lu , publié & afliché tant dans cette ville, Caën, Coutances, qué dans tous les baillages & haütcs jaftices du reïïbrt de la Cour. L'ar-  C 145 ) L'arrêt rendu en Ia Grand'Chambre conforme ti leurs conclufions, prononce contre les contrevenans une amende de 100 livres. 9 Novembre 1781. La piece de Lucette & Lucas, exécutée hier aux Italiens, eft une bagatelle , qui, malgré fa foiblefle, a été goütée, paree qu'elle eft pleine d'ingénuité & fans prétention. La mufique a fans doute contribué beaucoup a la faire valoir. L'Auteur prétendu de celle-ci eft la fille de M. Dezaides,& 1'on agrand lieu de foupconner que le pere 1'a beaucoup retouchée. Quoi qu'il en foit, elle n'a pas eu abfolument befoin de 1'indulgenee a laquelle tous les fpedateurs étoient difpofés en faveur de fon fexe & de fa jeunefie. Plufieurs morceaux ont été juftement applaudis. Le principal mérite du criant eft d'avoir la fimplicité convennMr nnv uirhx. nages: a quelque monotonie prés, il eft difficile de s'annoncer plus avantafféirfempnt- » —O 1"*. V-ULLC jeune Virtuofe. L'Auteur des paroles eft M. Forgeat, fils d'un Procureur du Grand - Confeil, a'qui'1'on attribue aujourd'hui la niece des *Br rw7„. II prétend 1'avoir compofée a 21 ans, 1'avoir oubliée pendant trois , & mife au jour fans amour propre. 9 Novembre. Les Comédiens TrilSpn-c Aa~~„J. aujourd'hui une Comédie nouvelle, intitulée 1'Amant trop prêvenu de lui-même; elle eft en deux ictes & en vers. On 1'attribuea un ancien Acteur p 011 croyoit mort. lome XVlll. Q  C 146 ) I0 Novembre 1781. Le fond de 1''Amant trop irévenu de lui-même eft tiré d'un conté de Marroontel. II s'agit d'un foperbe Militaire qui ofe nreitre ft maitrefle a 1'éprcuvc fingulicre de fe nontrer a fes yeux avec un ceil & une jambe de moins, qu'il fuppofe avoir perdus a la guerre. CeÜe-ci a peine a réfifter contre une pareille attaque- cependant, bientót inftruite d'ailleurs, que ce n'eft qu'un jeu, elle fe venge cn feiguant a fon tour d'avoir cliangé & d'écouter les vceux d'un jeune cavalier, aimabie autant que bienhut. Ce fujet ainfi préfenté femble affez plaifant & prêter au comique ; mais il eft traité d'une maniere fi aride , fi froide & fi mauffade , qu'il n y a pas le plus petit mot pour rire & qu'il ennuie mortellement. . L'Auteur, pour y jeter quelque gaieté, y a introduit un róle de Docleur, qui fait le petitHiaitre, 1'agréable, & finge aflez bien nos jeunes Mëaécins a la mode. Malbeureufement la fcene e'fta Londrcs, c'eft-a-dire dans un pays pü le peuple eft en général très-grave, & oü les Medecins le font encore plus; d'oü il réfulte un contre-fens dans les mceurs nationales, qui rend ce caraétere ridicule & déplacé aux yeux des gens au fait. La piece a été écoutée avec une tranquillité rare. On ne peut 1'attribuer qu'a 1'indulgence, du parterre pour 1'Auteur , applaudi autrefois. comme Acteur. En effet , 011 prétend que la piece eft du Sieur Roclmrd, retiré depuis long'  C 147 ) tems, & quidoïtitre au moins fepiuagénaire; On ne fait qui lui a procuré cette manie fingultere dont il femble avoir été tourmenté pour la pre. miere fois dans fa vieillefle. M. Roehard étoit alfez bieii né; il avoit été Subftitut du Procureur-gén éral des requêtes de 1'hótel, & entrainé par fa paffion pour le théatre avoit quitté cet état honnête pour celui de Comédien danslequei il s'étoit diftingué paf un goüt exquis & unc grande propreté de chant. 10 IVovemhre. La l5? ) détails minutieux fur la police intérieure des camps-, & alors il y auroit plus de chaleur,& le pathétique ne manqueroit pas fon effet; il faudroit changer auffi le dénouement trop poftiche. Quant au ftyle, il exigeroit plus de nerf & de pittorefque. i, Au refte , cette morale vient trés a propos, dans un tems oü la difcipline militaire eft fi relachée en France & auroit grand befoin d'exemples féveres. Cette circonftance ne peut que la faire approuver par le Gouvernement. Refte ;\ favoir fi le public fera d'accord. La nouveauté du fpectacle eft un grand point, & peut contribuer beaucoup a fon fuccès, avec de noitbreux & longs élaguemens. 12 Novembre 1781. M. le Comte de Maurepas, malade depuis quelque tems , va mieux. Vendredi il étoit fi mal que S. M. ayant voulu en favoir des nouvelles, avant d'aller a la chaffe, & les apprenant très-mauvaifcs, contremanda fes équipages & s'abftint de ce plaifir. Cc trait du coeur excellent de S. M. avoit éte précéüe a un autre moins connu & auffi digne de 1'être. On a parlé quelquefois d'un Sieur Grault , 1'un de fes valets - de - chambre de garderobe, que S.' M. aime beaucoup. Quoiqu'il ne foit pas de quartier, il eft dans 1'ufage de paroltre de tems en tems pour conferver la bienveillance de fon maftre. Le Roi, ayant étélongtems fans 1'apperccvoir, s'en informe & demandé pourquoi il ne le voit pas?On lui apprend qu'il a été gravemeut ma-  C 153 ) malade depuis deux mois, qu'il a failli de mourir'; mais qu'il ed 'hors d'affairc. S. M. charge quelqu'un de fa chambre d'aller le vifiter & de lui en rendre compte. On ne doute pas que S. M. ne lui donne une gratification fur fa caffette pour le dédommager des frais de fa maladie. 13 Novembre. Extrait d'une lettre de Vetfaillcs dix heures du foir le 12 Novembre.... M. le Comte de Maurepas a eu plufieurs évacuations dans la journée qui lui ont fait beaucoup de bien; la tête ed abfolument dégagée; il a trèspeu de fievre; il a eu des momens de gaicté & a mangé même une efpece de crème de ris. Le Roi 1'ell: vcnu voir a 6 heures & a voulu que Madame la Comtede de Maurepas redat en tiers aflïfe. II s'eft en allé après un quart d'heure, crainte de trop fatiguer le malade. Le Duc de Choilèuil, qui étoit ici & intriguoit de toutes fes forces, a un pied de nez, ainfi que beaucoup d'autres. Cependant il y a encore de 1'agitation , & 1'on doit tout craindre a un pareil age, après une attaque aufli violente. La goutte ed toujours vague & n'ed pas encore fixée aux parties extérieures. 13 Novembre. Quelqu'un indigné du dcluge de madriganx fades, occafionnés par la naiflance de M. le Dauphin, a enfanté a cette occafion Yimpromptu fuivant. II apofirophe le nouveau-né. Prince dont dépèndront tin jour nos deftitiées, Lon^tems Dauphin & iongtems Roi , Z G 5 '  C 154 ) Puifle-tu vivre amant d'années Qu'on a fait & fera de mauvais vers pour toi! 13 Novembre 1781. M. 1'Archevêque de Paris n'eft pas bien: il avoit depuis- longtems lesjambes enflées; Penflure a gagné les cuitfes & même lc bas ventre: on 1'a ramené dc Conflans a Paris: d'ailleurs, la tête commence a fe perdre» 14 Novembre. Le Cri du Peuple eft encore fort rare; ceux qui ont lu ce pamphlet, attribuent fon défaut de circulation a 1'extrême hardieffe de 1'Auteur, ofant fronder fans ménagement toute 1'adminilfration de M. de Maurepas , depuis fa première entrée au minidere jufqu'a nos jours. L'Ouvrage cd diftribué par chapitres. On y reprend fucceflivement les principales époques du r-egne ancien & du regne actuel, auxquellcs a coopéré le Comte, & on lui fait de grands reproches. M. dc Fleuri n'ed pas épargné, & 1'Ecrivain fatyrique étend fes rédexions malignes jufque fur toute la familie de ce Minidre. II réfervetoutes fes louanges pour MM. de Malesherbes Turgot & Necker. Ce- dernier ed furtout fon Héros & 1'objet particulier du pamphlet. Tclfe ed 1'idée vague qu'on en donne. Du rede , cet écrit, oü perce trop 1'efprit de parti, paffe pour ■avoir de la vigtieur & du patriotifme. 14 Novembre. Trois Médecins ont été appelés pour M. 1'Archevêque, fon Médecin ordinaire, le Döcteur Cochu; le Dofteur Bouvart,..  C i55 ) fon Médecin extraordinaire, & le Docteur Bacquer, fort renommé pour le traitement de 1'hydropifie: ce dernier ne regardant pas fans doute les accidens apparens comme les fymptómes de cette maladie , n été d'avis de lui donuer des délayans & dc le fidre boire beaucoup; le fecond, abfolument oppofé a fon confrère, veut qu'on refufe toute boilfon au Prélat; & le premier, nagcant entre deux eaux, fuivant la réllexion des plaifans, ne fait quel parti prendre, dit qu'il y a du pour & du contre, qu'il y a beaucoup de choies a dire; ce qui jette Monfeigneur, fa familie, fes amis & ceux qui s'intérelfcnt a lui dans une affreufe perplexité. Cependant trois concurrens font déja fur les rangs pour le remplacer, du moins lui fervir de Coadjuteur. Al. de Roquelaure, Evêque de Senlis, dont on parle depuis longtems, & fort aimé du Roi. M. 1'Archevéquc de Touloufe qui , auteur de la fortune de 1'Abbé de Vcrmönt en eft próné a fon tour auprès de la Reine, & eft favorifé par S. M. Enfin, M. 1'Archevêque d'Aix, dont M. le Comte de Maurepas connoit les talens & 1'efprit doux & pacifique. 14 Novembre. Les favans gémilfent du malheur que vient d'éprouver Dom Louis Arguedas , Lieutenant de vailfeau, Efpagnol & Aftronome. Chargé d'aller obfervera Saint Domingue 1'éclipfe du 23 Avrii dernier, il étoit parti de Cadix du G 6  C 156 ) 28 Février, &, quoique mimi d'un paffe-port de la Cour de Londrcs pour la fureté, attendu 1'utilité générale de fa miiïion en faveur de tous les peuples policés , il a été vifité, vexé, & arrêté par plufieurs corfaires. L'un d'eux a, entr'autres, pillé jufqu'aux inftrumens & uftenfiles nécelfaires a fes travaux: cnforte qu'il eft a craindre qu'il n'ajt pu arriver a tems, ou que le défaut des chofes nécelfaires n'ait rcndu fes obfervations inutiles ou peu exactes. 15 Novembre 1781. Extrait d'une lettre de Rochefort du 4 Novembre C'eft le 7 Octobre que, d'aprés les ordres de M. le Marquis de Ségur, 1'on a fait 1'épreuve du Fort en bois , conttruit par les méthodes & fous la direction de M. le Marquis de Montalembert. L'objet de cette épreuve étoit de s'alfurer de la folidité de la conltrtiction dudit Fort, contre la commotion & 1'explofion de fon propre feu, Le motif en étoit 1'idée qu'avoient pris ou donné plufieurs gens du métier , qu'une batterie de canons de 3,6 établie au premier étage fur un plancher, ayant fous elle une batterie du même ealibre, & furmontée enfin d'une terralfe fur laquelle elt alfife une batterie de pieces de 12, ne pouvoit former un édifice alfez folide pour réfifter a 1'effort du feu coiifidérable que fourniifoit fa défenfe. Pour apprécier cette opinion, on a fait d'abord un feu a volonté & tel qu'il s'exécute pendant on coinbat,. dc la totalité des bouches a feit.  C 157 ) au nombre de 68 pieces, dont 57 de 36 & 11 de 12. Ce feu a duré une demi-heure, pendanc laquede lesdites pieces , fervies chacune par trois hommes feulement, ont tiré a raifon d'un coup par cinq minutes. On a fait faire cnfuite, 1°. une falve de la totalité des batteries du rez de chaulféc, de 16 pieces de 36, iervies & tirées enfemble. 20. Une femblable de la batterie du premier etage de 41 pieces, aufli de 36. 30. Une idem de la batterie dlevée en terraffe au-delfus du Fort, & armde de n pieces de 12. 4°. Enfin, une ddcharge gdndrale des 68 pieces fervies & tirdes enfemble. Les Commiflaires nommds étoient, pour Ie Département de la Guerre, M. le Marquis de Voyer, Lieutenant général, Commandant en .fecond dans la Province , M. le Marquis de Montalembert, Maréchal de Camp, M. Dajot, mardchal de Camp, Directeur du Génie: M. Divoleye, Colonel, Directeur d'Artillerie; & pour le Département de la Marine, M. de la ToucheTrdville, Commandant de Rochefort, rempheé, pour caufe de maladie , par M. dAuberton, Capitaine de Vaifleau, M. de Beaugard, idem, & M. le Chevalier de la Clocgeterie, Lieutenant de Vaifleau. Tous ces Commiflaires n'ont trouvé dans 1'examêh qu'ils ont fait dudit Fort, après cette épreuve , aucune dégradatïon d'aucun genre. II s'étoit rendu a 1'lfle d'Aix une grande quanG 7  C 153 ) thé de Militaives de différéns Corps & de tous les grades, qui ont rendu ce fpecTacle encore plus brillant & ont applaudi 1'invention. 16 Novembre 1781. Pa (cal eft un des hommes que 1'école des Philofophes modernes regrette le plus de ne pouvoir compter au rang de fes coriphées, & a ce défaut ils cherchent a le couvrir de ridicule, a en atténuer le mérite en Ie faifant pafier pour un efprit foible, tombé prefque en démence aforce de fanatifme & de ftiperftition. On ne peut du moins fe diflimuler que ce n'ait été le but dc M. de Condorcet dans le commentaire & les acceffoires qu'il a joints aux eeuvres de ce grand homme, entrcprife déja commencée par Voltaire. On en a parlé amplcmcnt. Deux Philofophes fe joignent a ceux-ci & avéc non moins d'adreffe fcmblent contiuuer la même conjuration. M. 1'Abbé Boffut,dans un Difcours fur la Vie êf les Ouvrages de Pafcal & M. d'Alembert dans les vers très-fmguliers qu'il a plaeés au bas de fon portrait, & qui par la-même méritent d'étre confervés. -Les voici: II joignit 1'éloquence aux talens d'Uraiiie; Mais bientót a Dieu même inimolant fon Génie, II venge-a de la foi faugulle obfcurité. O toi religion, dont la févérité Enleva ce grand bomme a Ia pliilofophie, Permets du moins qu'il en foit regretté ! 16 Novembre. II a fallu une négociation pour déterminer les Harangeres ou Dames de la halle  ( 159 ) n aller a Verfailles remplir leur mifllon d'ufage. Elles avoient été attrappécs la dernicre fois au diner qu'on leur avoit'donné, & de mauvais plai' fans avoient glilfé dans des tourtes ou patés des chofes peu comeftibles, ou des chofes malhonnêtes. On les a ralfurées a cet égard, & en elfct on les a traitees magmhquement. Elles étoient au nombre de 120. On alfure que les Princes dc la Maifon royale ont voulu les voir a table & fe font beaucoup amufés de leur joie bruyante. Le Roi s'elt eu elfet fait porter la ferrure myfiérieufe; k 1'inftigation de quelques courtifans prévénus,il a eflayé d'en découvrir lui-même le rclfort. On y conduifit adroitcmeut S. M. & elle fut li contente de cette galanterie, qu'elle donna 30 louis de fi pocbe au Corps des Serruricrs. On parle encore des Ramoneurs, qui avoient porte' pour chef-d'oeuvre de leur art, ou marqué caractériftique de leurs occupations , une cheminée fort jolie & aflez vafte pour que 1'un d'cux y foit entré & ait chanté une Chanfon analogue aux circonftances & très-gaie. C'eft Madame la Princcfle de Guemené qui, comme Gouvernante des Enmns dc France, eft chargée de diftribucr 1'argent k toutes les Corporations. 17 Novembre. M. Pierre Cbriftian, Baron de Wimplfen, & du St. Empire, Commandeur de i'Ördre royal & militaire de Saint Louis, Maréchal des camps & armées du Roi, Infpeéleur général des troupes, & Directeur de la Noblelfe  C 160 ) dc la bafie Alface , vient de mourir. C'étoit le pavent,l'ami & le bras droit de feu M. le Comte de Saint-Germain; & il en ed fort quedion dans les mémoires & lettres de ce Miniftre. i3 Novembre 1781. Les conférences fur le Commerce, établies depuis F année derniere, par les vues patriotiques & bienfdfantes des Magiftrats du Commerce, Indituteurs de ces conférences , ont recommencé le 8 de ce mois. 'Medieurs les Députés du Commerce de Paris & autres villes, MM. les Gardes des fix Corps des Marcbands, ainfi qu'un grand nombre de citoyens les plus diftingués dans 1'ordre du commerce, étoient préfens a cette féance. Mr. Billard, le premier Juge-Conful, Pa ouverte par un difcours fur Futilité & la néccfüté de cet établilfement. Le Sieur Gorneau, agréé aux Confuls, & qui eft cbargé des conférences, a prononcé un autre difcours ou il a ramené différéns traits hiftoriques glorieux au commerce. Celui de Guftave , Roi de Suede, ordonnant h Stockholm, 1'érection d'un monument public a la mémoire d'un fameux négociant; celui des Fuggers brülant pour plufieurs millions de reconnoidanccs dc Charles-Quint; enfin, des négocians de St. Malo, a leur retour du Pérou en 1710, offrant a Louis 'XIVdans fa détreffe, 30 millions de préfent. Ce difcours, d'environ trois quarts d'iieure de leclure, a donné lieu de jager de Félocution facile & agréable que 1'Orateur joint a fon intel-  C 161 ) ligence profonde de' la matiere. 18 Novembre. On a parlé déja du Décret de la Faculté de Médecine , rendu par 1'organe du Doyen Philips , le cinq Novembre, pour faire chanter un TeDeum,\e io du même mois, dans fa chapelle en acKons de graces a Dieu de la nailfance du Dauphin. Une phrafe, glilfée maladroitement dans cet élégant difcours, a occafionné beaucoup de rumeur; on, 1'a trouvée repréhenfible , & la Faculté non-feulement ne veut point donner de copies de ce décret que recherchent les amateurs de la belle latinité, mais a fait arracher le plus qu'elle a pu tous les placards imprimés qui cn exiftoient. Voici cette phrafe relative a la nailfance du pretnier enfant du Roi; de Madame Royale.... primum Miraculum Puellam dedit (Ccelum) in cujus ortu, tam ardenter , quam diu expecïato, gefiire co opportunius fuit, quod naturce tarditas jam calumniis lacejjita , injïciebat quamdam diffidentiam furtivu lap/u animis irrepentem. 18 Novembre. M. Saurin , de 1'Académie Francoife, Secrétaire ordinaire de M. le Duc d'Orléans, vient de mourir, Cet Ecrivain eui* mable, qui a eu au thé-atre des fuccès foutenus & mérités, apéri d'une facon cruelle. II craignoit la pierre; il s'étoit fait fonder & la fonde s'étoit calfée dans la Veflie. Eprouvant des douleurs inexprimables, il demandé un calmant & ,par un quiproquo d'Apothicaire, on lui apporte une  C «Ja ) potion érnétifée qui lui fait fiiire les plus violens eifbrts & augmente fes fouffrances , au point qu'il paffe dans une convuffion. M. Cöuvers Deformeaux, Avocat, vient de mourir auffi. 11 étoit célebre dans fon ordre par les perfécutions du Chancelier, & par un long féjour a la Baftille durant la révolution de Ia ■magiftrature, comme accufé d'avoir écrit quelques pamphlets du tems, ou au moins contribué aux diftributions de ces écrits furtifs. ^i8 Novembre 1781. M. le Duc de Nivernois n'efc pas entré au Confeil, fuivant le brult général qui en couroit. II fe défend même d'en avoir eu 1'idée. II prétend que c'eft un ridicule que lui donnent fes ennemis. II dit que c'en feroit un eneffet d'étre refté éloigné des affaires jufqu'a Hge qu'il a & de vouloiry entrer, lorfque fa foible fanté lui óte même fouvent la faculté des occupations les plus légeres & les plus agréables, des travaux des Mufes qui charment fon' ennui & diffipent fes vapeurs. C'eft ainfi du moins que fes partifans le font parlcr dans le monde. 19 Novembre. De Poligny en Franche-Comté le 10 Novembre 1781..... Mr. d'Aftory, Enfeigne des vaiffeaux du Roi, agé de 11 ans, ayant fait remettre aux Officiers municipaux de cette ville, fa patrie, a l'occafion de 1'lieureufe naiffance du Dauphin, une fomme de 600 livres, pour être diftribuée aux pauvres , ces Officiers ont unanimement délibéré de rendre public cet  ( i«3 ) acte Je bienfaiftnce & de générofité, en faifart' iniprimer dans les affiches de Befancon, la lettre fuivante. A Breft 28 Octobre 1781. Trés-cher Papa, je vous avois prié de trouver bon que je vous filïe paffer une partie 'les fonds provenans de ma part de la prife du convoi de Saint Euftache, comme une foible preuve de ma reconnoilfance de tous les facrifices que vous avez faits pour moi; vous vous êtes refufé a ma priere, & m'avez lailfé la difpofition entiere de cette fomme. Votre générofité m'eft d'avancc un für garant de 1'approbation que vous donnerez a 1'ulage auquel j'en deftirie une portion. L'évenemcnt heuretix de la nailfance, dont nous recevons aujourd'hui la nouvelle, m'infpire 1'idée d'cn faire partager la joie générale aux plus pau'vrcs de nos compatriotcs , en foulageant leur mifere de mon fuperflti. Je vous prie donc, cher Papa , de vouloir bien leur faire compter la fomme de 600 livres , que vous remettrez Èt Meffieurs les Officiers municipaux, qu'ils emploiront a payer les impóts des plus indigens, dont iis peuvent plus aifément connoitre les befoins. .Vous m'avez fi fouvent perfuadé, en le pratiquant, que le plus grand bienfait étoit de faire des heureux, que je ferois bien coupable de 1'oublier , lorfque la circonftance , due au hazard, me permet de vous imiter 19 Novembre. M. de Maurepas eft décidément trés-malj il a été adminiftré; il a la gan-  ( *S4 ) grene , & 1'on n'en efpere plus rien. Le Sieur Barihès, Médecin de Montpellier, venu ici pour obtenir des Lettres de Noblcfie a fon pere, s'étant impatronifé chez ce Miniftre, avoit donné un moment 1'efpoir de le tircr d'affaire. M. de Maurepas, dans le mieux qu'il a eu, a demandé au Roi la grace que défiroit cet Efculape; il choifit le bon moment, a reprisS. M., & en effet le Miniftre femble n'être revenu a la vie que pour ce dernier bienfait. 19 Novembre 1781. Extrait d'un lettre de Caftres en Languedoc le 4 Novembre L'E- vêque de cette ville vient d'inftituer des prix un peu plus intérelfans que ceux de nos Académies, ou même de nos Rofieres. On comptoit dans ce Diocefe 25 a 30 enfans & 40 a 50 femmes qui mouroient ordinairement tous les ans par la faute des matrónes qui, fans autre miffion qu'une pratique vicieufe & meurtriere , s'ingerent dans 1'art des accouchemens. Touché de cette perte effroyable d'individus, le Prélat a imaginé d'établir dans fa ville épifcopale des cours d'accouchement. II a écrit une lettre circulaire a tous les Curés & Officiers municipaux de fon Diocèfe pour les inviter a choifir entre les femmes de leurs diftricts refpeclifs qui fe deftinent au métier de Sage-femme, celles qui, par leurs mceurs & leurs difpofitions, paroitront les plus propres a remplir fes vues. II a offert de fournir & tous les frais de voyage, de retour & d'entretien pendant le tems que durera leur inftruclion,  C 16J ) &vil a établi trois prix en argent qu'on diftribuera a la fin du cours a celles qui auront fait le plus de progrès. Le Sieur Icarf., Profefleur>& Démonftrateur royal en Chirurgie, connu trés- avantageufement par des opérations hardies & favantes, & par plufieurs ouvrages qui ont obtenu des prix a 1'Académie royale de Chirurgie de Paris, & qui lui ont mérité depuis peu la place d'Alfocié de cette Compagnie, s'eft prêté aux intentions du Prélat avec un définterreifement trés - louable, 6? s'eft chargé de 1'inftruction gratuite des Sagesfemmes. Le cours a été ouvert le 14 Octobre dernier, par une féance publique tenue dans une des falies de 1'hótel de ville avec un eoncours de monde de tous les ordres de citoycns, & le Sieur Icart a lu un difcours fur 1'utilité de 1'établilfement. 20, Novembre. M. de la Blancherie, cet infatiguable Agent de la Correfpondance univerfelle des Sciences & des Arts, a ouvert Jeudi dernier fon affemblée ordinaire des Savans & des Artistes, fufpendue pendant les vacances, &,'pour preuve qu'il n'eft pas indigne de 1'importante miffion qu'il s'eft donnée, a expofé, en échantilion de fon talent poëtique, le quatrain fuivant. ,0 Monfeigneur! que votre fort eft doux, Non d'étre né pour gouverner la France; Mais de ne pas avoir la moindre connoiflance De tous les mauvais vers que nou« forgeons pour vous. Malheureufément on 1'accufe de-plagiat & de  B'avoir fait que parodier d'ancicns vers de Voltaire en pareille circondance. 20 Novembre- 1781. La rareté du Décret de la Faculté de Mcdecine mérite qu'on le conferve en entier. De Mandato M. Jofephi Philips, Facultatis medicae Parifienfis Decani, .& MM. Docborum Regentium ejusdém Facultatis, obfereniffimi Delplini Natalia. Solium Ludovicus XVI confcenderat, conjux felix, tam amans quam amore dignus, fed nondum pater; & dum a fingulis civibus dulciffima appellatione meruit vocari Pater patriae , deerat tarnen qui ipfum proprio nomine patrem falularet. Flagrantibus votis, follicita prece, vim coelo intulit Gallia. Dictum ed a divo Augudino: afcendunt defideria, defcendunt miracula; primum miraculum, puellam dedit, in cujus ortu, tam ardenter, quam diu expectato , gedire eö opportunius fuit, quod nature tarditas jam ca■lumniis laceffita, injciebat quamdam diffidentiam furtivo lapfu animis irrepentem. Amor fecerat follicitudincm, qua; femper magnae expcctationis comes ed; & certè hanc excufabat. Ex ido puellari proventu felix augurium ducere, & aevo fpes dulciores adhuc jaculari licuit : Denub afcendunt defideria , dejcendunt miracula, nonnec & lilia. Terfis odenfus ed Delphiuus. Salve ö nobilis liliorum farcule ! Vive diu, vive laetus & incolumis. Tibi dormienti adfpket blanda  C 167 ) quies , vigilanti adfpirent rifus venufii, lufus nmabiies, Jacu, rifu matrem adorandam cognofec. Jam blanda manu eburneum matris collum premc molliter. Jam rofeis labris cada iige ofcula. Tot blanditias , tot materno pectori voluptatis fontes; & quando tibi erit aetas iirmior, difce ex amore noftro, patrem, ex reverentie, regem colere. Votum patrias facrum addimus: non minus amans,quam amabilis, ut primum amari te fenferis, redamare fcias. Solio nafceris; led diu ignora quam grande fit pondus, & fceptrum & corona ; itias regendi populos , & prafertim amandi artes combibe intimius, totis te proluens fontibus ex quibus ortus es. Dum gratulabundo cultu, cunas floribus confpergunt varii civiura ordines, cruore madens laurus non tenera oiïendat lumina; arrideat tibi tanquam molle pulvinar olea pacis, cujus praenuntium quadNumen in te amamus & veneramur. Cum multa bona toti imperio afferat, cum multa & alia fpondeat ferenidimi Delphini ortus, nefas foret unicum inexhaudumque bonorum, ©mnium fontem non agnofcere; quapropter hymuis & cantrexs cxultantes quas Deo optimo maxi» mo folemnes preces jam fudimus , una cum exteris Academia: nodrae ordinibus peculiariter renovare decet, ut fummo Numini pro fauflilfi» roo eventu gratis mceffabili voce agantur immortales. Idcircó Facultas medica Pafifienfis , in fcholarum i'uarum faceflo, folemne facrum cel&i brari decrevit, a quo hymnus eucharillicus Te  ( 168 ) Déum cantabitur die Sabbatti iot. menfis Novembrisanno fupra i78i,hord ipfa Io matutina. Datum Paridis die Lima; 5*. ejusdem menfis & anni. Jacobus Philips Decanus. 20 Novembre 1781. Mr. le Baron de Wimpffen, qui vient de mourir, ed audifort regretté de M. le Marquis de Ségur qui connoidbit fon mérite militaire, fa tête excellente, & en faifoit au* tant de cas que le Comte de St. Germain; il le confultoit fouvent; il étoit d'ailleurs du Comité de la guerre. 21 Novembre. M. Beauvais, Sculpteur de la nouvelle églife de Sainte Genevieve, eft mort le 31 Octobre dernier, a la fleur de Page; il n'étoit point encore de 1'Académie, mais il travaülöit k une figure de Mars en repos, qui vraifemblablement lui en auroit ouvert les portes. ïl lui falloit a peine 15 jours de relache pour la finir. Le bas reliëf du portail de Ste. Génevieve, oü cette fainte diftribue du pain aux pauvres , eft un morceau de fa compofition qui fuflït pour caraclérifer fon talent: 011 y remarque inconteftablement de la facilité, de la grace & une maniere large dans 1'exécu'tion. B auroit été de 1'Académie plutót, fi, frappé de frayeur a la vue de la difgrace du meilleur de fes anus, rcfufé par cette Compagnie , il n'avoit brifé le morceau auquel il travailloit; 1'exemple de ce candidat, plus heureux depuis, lui avoit fait reprcndre courage. In-  ( -69 ) ïndépendamment de ce qu'on a en France dc cet artifte; n'étant qu'éleve a Rome , ü avoit recu ordre de 1'Impératrice des Rufties de lui faire une figure en marbre repréfeutant Ylmmortalitê: h Genes il a exécuté toutes les fculptures du fdlon du Marquis de Spinola. En 1764 M. Beauvais avoit remporté avec beaucoup d'éclat le premier prix de fculpture; il eut 1'unanimité totale des voix, phénomené trés-rare, & 1'annonce des grandes efpérances qu'il donnoit, & qu'un féjour de 17 ans a Rome devoit augmenter. II étoit modede & timide a 1'excès, deux qualités compagnes fouvent du plus grand mérite; mais qui ne contribuent pas a le faire fortir de 1'obfcurité. 21 Novembre, Mlle Buret 1'ainée , qu'on avoit déja entendue pkifieurs fois au crmccrt fpirituel, a débnté hier au thédtre lyrique dans le róle cVAdele. Elle a peu d'acauit au rhéütro comme Actrice; mais on a applaudi vivement a la dexibilité de fa voix, a la fureté de fon clmnt & encore plus a la netteté & a 1'agrément de fa prononciation, merite mhniment rare al'Opéra & cependant le plus effentiel de tous. ' 21 Novembre. Outre les deux mandempn* dont on a parlé contre la nouvelle Edition des ffiuvres de Voltaire ; il y avoit une Dênwiciation au Parlement, anonyme, avec cette épigraphe Vlutate 6? Clamate. Ces hurlemens avoient ft étouffés par les amis & défenfeurs de Vol- lome AVW. H  taire , cc cc n'eft que depuis peu, que ladite dcnonciatiön fe répand davantage. Elle eft encore plus violente que les mandemens. On en ju «-era par cette phrafe remarquable entre beaucoup d'autres: 1'Auteur y exhorte les Magiftrats a déployer toute la rigueur des loix contre 1'ou- vra(re 5, dans un fiecle ridiculement philo- föphe , oü 1'on ne connoit de vertu qu'une ", cruelle tolérance, la févérité feroit regardée H comme barbare: mais, du moins, eft-il per'" mis de la remettre fous vos yeux. Des Auteurs 9J impies avoient compofé des vers impies contre 1'honneur de Dieu: la Cour les condamna au dernier fupplice , comme criminels de lèfe" Majefté divine , & comme plus funeftes a. " 1'ordre focial que les empoifonneurs & les in- " cendiaires Puilfe cet exemple vous con- " vaincre qu'il eft des cas ou les Cours doivent déployer toute la rigueur de la puiflance que '„ le Prince leur a confiée " Malgré toutes ces réclamations, il paroit que f Edition du Sieur de Beaumarchais fe continue. On regarde comme avortée celle du Sieur Clément , qui vouloit chatrer Voltaire & le réduire de 20 volumes, malgré un'commentaire de fa facon pour rendre 1'ouvrage claffique, après favoir purgé dc toutes fes ordures. Le Sieur Palilfot avoit auffi brigué auprès du public le róle d'Editeur de Voltaire. Pour amorcer les foufcripteurs , il promettoit autant de matiere que le Sieur dé Beaumarchais, & en  C 171 1 oütre uii commentaire auffi, & le tout ü moitié moins. II eft certain que celui • ci auroit été excellent pour la deriiiere fonction; il écrit bien & a beaucoup de goüt; cependant lbn entreprife femble auffi échouée. 22 Novembre 1781. M. le Comte de Maurepas eft mort hier au foir fur les onze heures. Lorfqu'on en vint portcr la nouvelle au Roi, S. M. fe couchoit. M. le Duc d'Eftiffiic, GrandMaitre de fa garderobe, intime ami du défunt, ne put s'empêcher de fe livrer a une exclamation vive, dont il s'excufa auprès du Roi qui lui dit: Si vous faites une grande pcrte, j'en fais une bien plus grande. Le Roi devoit aller aujourd'hui a Brunoy oü Monfieur avoit fait préparer une fête pour recevoir fon augufte Frere. S. M. lui a fait dire qu'elle n'iroit pas le voir ce jour-ci; elle n'a point chaffé, & eft dans une douleur profonde. S. M. a ce matin envoyé complimenter Madame de Maurepas, qui lui a répondu qu'elle faifoit une perte irréparable, celle d'un mari avec qui elle avoit vécu cinquante-cinq ans fans s'être quittés d'un jour; qu'il lui laiflbit une fortune confidérable; mais que rien ne pouvoit adoucir fa douleur que les bontés de Sa Majefté. Comme M. le Comte de Maurepas étoit logé 'au chateau d'oü 1'on expulle les morts dès le premier inftant. Madame de Maurepas avoit prévenu le Roi & avoit demandé un fépit de 'fix heures qui lui avoit été accordé; en mcme II 2  ( w ) tems ne pouvant fe difïimuler la fin prochaine de fon mari, elle avoit donné ordre qu'on tint a 1'Hermitage un appartement bien chaud & un lit tout prêt a être balfmé & a recevoir le cadavre lors qu'il amveroit: en elfet, il a été tranfporté dans fa robe de chambre & en chaife a porteurs; &, tout ce cérémonial rempli, la Comteffe eft partie vers les onze heures du matin aujourd'hui, pour fe rendre a Paris. UHermitage eft un chateau de plaifance bati dans le pare de Verfailles pour Madame de Pom- ' padour, & que Louis XVI a donné a vie au Comte & a la Comteffe de Maurepas. Le corps doit être préfenté demain a NotreDame de Verfailles, fa parodie, & transféré de la dans un corbillard a Saint-Germain 1'Auxéróis, 'oü eft la fépulture des Pontchartrains. Comme tout le monde ne regrette pas la perte de ce Miniftre, dès aujourd'hui il a couru dans ■Verfailles & a Paris le diftique fuivant. O France! applaudis-toi, triomphe de ton fort: Un Dauphin vieiu de naitre,& Maurepas eft mort. sa Novembre 1781. M. de la Harpe fe difpofe enfin h donner une tragédie nouvelle fous le titre; de Jeanne, Reine de Naples. Les Comédiens; en ont une trèsdiaute idée. En cenféquence, ils; font beaucoup de dépenfe en fpeclacle & en habillemens. On alfure que la mante feule de la Reine coüte 1500 livres. L'Auteur a été retardé dans fon triomphe par  ( 173 ) quelques contrariétés qu'il a éprouvées a Ia Police. II a fallu qu'il retoucMt certains endroits fur les Prêtres, capables de déplaire a M. 1'Archevêque, & d'autres fur fautorité , qu'on a trouvés trop forts. La première repréfentation doit avoir lieu incefiamment , la Difcipline militaire du Nord réduite en 4' acdes, n'ayant pas mieux pris, & étant abfolument tombée. 23 Novembre. Extrait d'une lettre de Liége du 4 Novembre.... II a para ici une petite piece de vers , intitulée La Nymphe de Spa è 1'Abbé Raynal. Je ne puis vous en dire davantage: ce mondre d'irréligion a été étouffé au berceau par un mandement du Prince-Evêque, qui a fait 1'honneur au Poëtc de lancer contre lui les foudres temporedes & fpirituelles. Voici le 'commencement de cette piece originale „ Ce n'eft point fans da plus vive douleur „ que nous venons de voir s'élever du fein des „ brebis confiées a nos foins, un homme tur„ bulent, aflez audacieux pour ofer publier, „ par une témérité inouïe, une piece de vers „ infultante pour tous les genres d'Autorités. „ Ne pouvant ni tolérer, ni diflimuler une en„ treprife auffi dangereufe, nous jugeons devoir „ rendre publique 1'indignation que nous avons „ relfentie a la leéture de cette piece fcanda„ leufe.... dont nous entendons punir 1'Auteur fuivant la rigueur des loix Le refte eft une exhortation a fes Peuples & H 3  C 174 ) óuaüles de conferver le précieux tréfor de la f0j d'avoir du mépris & de 1'horreur pour ksVophifmes & les attentats d'une philófophie inféufée 23 Novembre 1781. M. Thomas n elt pas encore*5 rétabli de la grande.maladie qu'il a éprouvée il y a plus de 18.mois, & qui depuis ce tems 1'oblige de reder dans une inaciion abfolue. Ses facultés ont beaucoup de peine a revenir; cepcndant on 1'a trouvé aliez bien pour pouvoit entreprendre le voyage de nos Provinces méndionales & y aller paffer 1'hiver. 24 Novembre. Les Comédiens Itahens ne déceflent de jouer des pieces nouvelIes._ Ils en annoncent encore une pour Lundi, intitulée le Baifer, feérie en trois actcs & en vers, mêlée d'ariettes; mufique de M. Champehi. 24 Novembre. Mlle Contat de la Comédie Francoife, fe flattant qu'un grand Prince avoit des vues fur elle, enorgueillie de cette conquête, avoit quitté M. de Maupeou qui la combloit de bien. Cependant ne trouvant pas que ce Prince répondit aux vues de haute fortune auxquelles elle s'étoit portée, pour exciter fa générofité, elle fe permit une petite rufe. Klle fit fabriquer fur un papier timbré une alfiguation pour payer une fomme de 10,000 livres , & la lailfa, comme par oubli, fur la cheminée. S. A. R. arrivé, voit ce papier & veut le lire; la Comédienne fait femblant de f en empêcher & de ne céder qu'a regret a la curiofité de 1'augufie amant. Le Prince lui dit  ( '75 ) qu'elle a tort, qu'il fe charge de la dette & emporte 1'aflignation. Le leudemain il lui envoie un Arrêt de furféance pour un an. On ne doute pas que cette plaifanterie ingénieufe, & digne p unition de la fupercherie, n'ait été fuivie de quelque cadeau confolateur; mais qui n'a pu la dédommager du regret de voir fa cupidité démafquée & fruftrée. Elle a voulu retourner a M. de Maupeou qui lui a répondu qu'il étoit trop tard. Heureufement fa figure & fon état lui feront trouver hientót quelque autre dupe. Vraifemblablement c'eft ce qui empêchera le Prince de reconnoitre 1'enfant qu'elle vient d'avoir, & dont elle ed en couche. 24 Novembre. Dans la féance publique de rentrée du Bureau académique d'Ecritnre, préfidé par M. le Noir, Lieutenant de police, & M. Moreau Procureur du Roi au Chatelet , M. Bernard , Ecrivain du cabmet du feu Roi Stanidas, créateur d'un genre de deflin en traits jetés parfaitement conformes a leurs vues, préfenta a 1'Aifemblée un ouvrage dont il avök été chargé par fes confrères: c'étoit le portrait de chacun des deux Magiftrats fous les aufpices defquels elle eft née. lis devdient être analogues aux beaux ouvrages en écriture qui ornent la falie , & 1'on admira ces deux chef - d'cetivres. „ On a vu quehjuefois, dit M. Harger, le „ Secrétaire, dans une petite digreffion qu'il fit a ce fujet, des portraits a la plume; mais ces  C 170 3 ouvrages étoient d'abord deffinés au crayon, ,, & enfuite recouverts a la plume, avec le plus grand foin; ici, excepté le profil, dont la „ reflemblance eft le moindre ouvrage, PArtifte „ exécute librement, & a raain volante, tous „ les objets qu'il veut imiter. Ce qu'il y a de „ merveilleux dans ce travail, c'eft que 1'Auteur „ étant privé'des moyens de réparer fes fautes, ,, fes ouvrages annohcent un goüt & une fureté de main dont il n'y a point d'exemple." Un des fpectateurs entte les mains duquel avoit pafte" le Portrait de M. le Noir, écrivit au bas avec un crayon l'impromptu fuivant: Sans doute il eft aifé de rendre ce portrait, Lepinceau, Ie crayon 1'attrappent trait pour trait; La plume encor y peut atteindre; Oui, c'eft le Noir lui-même, on ne fauroit mieux feindre; L'oeil en eft enchanté.... mais, pour charmer nos coeurs, Pour modele a fes fucceffeurs, C'eft fa bonté qu'il faudroit peindre! 45 Novembre 1781. La vivacité francoife ne pouvant s'accorder avec la lenteur efpagnole, lui a fait enfanter la plaifanterie fuivaute fur le fiege de Gibraltar. E p t t r e d Mrs du camp de St. Roch, Meffieurs de Saint Roch entre nous Ceci paffe la raillerie; En avez vous lè pour la vie, Ou quelque jour finirez - vous ? Ne pouvez-vous a la vaillance . ■ Join.  ( -77 ) Joindre le talent d'abréger? Votre éternelle patience Ne fe laffe point d'affiéger; Mais vous mettez a bout la nótre; Soyez donc battans ou bartus, Meffieurs du camp & du blocus; Terminez de facon ou d'autre; Terminez, car on n'y tient plus. Fréquentes font vos canonades; Mais, liélas! qu'ont-elles produit? Le tranquile Anglois dort au bruit De vos nocturnes pétarades, Ou s'il répond de tems en tems A votre prudente furie, C'eft par égard, je Ie parie, Et pour dire: je vous entends. Quatre ans ont du vous rendre fages; Laiffez donc la vos vieux ouvrages $ Quittez vos vieux retranchemens; Retirez-vous, vieux affiégeans: Un jour, ce mémorable fiege Sera fini par vos enfans, Si toutefois Dieu les protégé. Mes amis, vous le voyez bien „ Vos bombes ne bombardent rienj Vos bélandres & vos corvettes, Et vos travaux & vos mineurs N'épouvantent que les lecteurs De vos redoutables gazettes. Votre blocus ne bloque point, Et, grace a Votre heureufe adreffë,, Ceux que vous affaminez fans ceffst Ne périronc~que dVmboupoinr.» H 5  C 178 ) 25 Novembre 1781. Comme Chef du Confeil des finances , M. le Comte de Maurepas avoit un porte-feuille; il étoit obligé de figner tous les Arrêts du Confeil en cette partie, furtout depuis qu'il n'y avoit plus de Controleur général.' C'ed a M. de Vergennes que S. M. a confié cette fonction. Du rede, M. de Maurepas n'en avoit aucune , n'écrivoit, ni ne recevoit point de lettres, & fe contentoit de donner fes confeils au Roi ou aux Miniftres, fuivant 1'exigence des cas. R n'ed conféquemment pas nécelfaire que S. M. défigne perfonne a cet égard , fi elle veut tout voir par elle-même, entendre chaque Secrétaire d'Etat & n'écouter que fa propre fagelfe. Mais on eft habitué de voir une efpece de premier Miniftre, & le public en défigne plufieurs, M. de Vergennes, M. d'Oflun, M. de Machault, M. le Cardinal de Bernis. C'eft ce dernier fur lequel on s'arrête le plus aujourd'hui; on préten i que le Roi lui écrivoit déja de fa propre main du vivant de M. de Maurepas, & qu'un jour celui-ci ayant furpris S. M. la plume a la main, elle lui fit la plaifinterie de cacher précipitamment fon papier & d'exciter fa jaloufie, qu'elle Lui avoua enfuite ce qui en étoit & 1'en plaifanta. On ajoute que Madame Adelaïde, qui ne laide pas que d'avoir du crédit auprès dc S. M. porte puilfarnrhent cette Éminence. 26 Novembre. Les progrès de la philofophie  C 179 ) fe font fenfiblement remarqués a 1'occafion de M. le Dauphin, & la joie générale, au lieu de fe manifeder flmplement comme autrefois par des fêtes frivoles & inutilement difpendieufes , a éclaté prefque partout par de bonnes aétions: on en a déja lu plufieurs; eu voici d'autres: A Rennes, le Parlement a arrêté qu'il feroit pris fur fes fonds une fomme de 6coo livres, qu'on didribueroit aux Bureaux des paroiifes & aux Soeurs de charité; pour fubvenir aux befoins les plus prejfans des pauvres, dont le nombre, porte 1'arrêté, eft effrayant dans cette ville. A Vienne en Dauphiné, M. 1'Archevêque, de même que les Maire & Echevins, a doté plufieurs filles,& didribué d'abondantes aumónes. Enfin, a Villeneuvede-Roi, Eleclion de Sens, un particulier, au lieu d'illuminer fa maifon , a mieux aimé payer la taille des pauvres de fa paloilfe; ce qui a donné lieu a 1'impromptu fuivant: J'ai vu 1'autre jour a ta porte Cent malheureux comblés de tes bienfaits Des lampions de cette forte,. Ami, ne s'éteindront jamais. 2.6 Novembre. Extrait d'une lettre de Marfeü- le du 10 Novembre Mr. Malouët, Com- milfaire du Roi, envoyé ici pour la vente h la ville des terreius de 1'Arfenal, dont je vous aï déja entretenu a plufieurs reprifes,. a pris occafion de la ceflion feite par S. M. a 1'Académie des Sciences & Belles-Lettres de MakiBlte » de H 6  C 180 ) rObfervatoire royal de la Marine, pour donnés de 1'éclat a cette cérémonie en Ia tournant en une efpece de fête littéraire, afin que les journaux s'entretinlfent de lui encore 'une fois. II y a eu des difcours qui ont été imprimés ilafiute de ceux prononcés a ce fujet, précédés d'un procés verbal de la notification des ordres du Roi k 1'Académie. On ne fait fi ce Commiffaire, occupé de beaucoup plus grandes affaires, s'eft donné la peine de compofer lui-même fon difcours; mais on y a remarqué le morceau fuivant, précieux a conferver: il apoftrophe les membres de cette Compagnie. „ Vous appartenez déformais a. 1'Etat autant „ qu'aux Lettres & aux Sciences. Vous êtes „ appelés a concourir a la perfeftion de la navi„ gation, & la gloire & a la fureté du pavillon „ francois, illuftré de nos jours par des traits „ de la plus brillante valeur. Si nous étions „ encore au tems oü les favans même, oü Ie célébre Calfmi fubiflbit Ie joug des fuperfti\, tions populaires, le premier ufage que vous „ feriez du don de S. M. feroit d'ajler confulter ,t le ciel fur la nailfance de 1'enfant précieux, „ dans lequel la France doit reconnoïtre un jour „ fon Maltre. Mais 1'illuftre Prélat (PEvê'què „ de Marfeille) dont la préfence honore cette 5, Alfemblée, vous appelle aux pieds des autels „ pour y préfenter au Maitre de la nature, les s, voeux d'un peuple fidele " 27 Novembre 1781. La piece de M. de la  ( iai ) Harpe, qui devoir. fe joüer demain, eft encore reculée par un accident arrivé au Sieur la Rive: ü s'eit blelfé la main a une répétition d'aujourd'hui en s'efcrimant au combat qui fe paffe fur la fcene dans cette tragédie. Pour fufpendre 1'impatience du public , les Comédiens annoncent une pctite comédie nouvelle, en un acte & en vers , qu'ils efperent jouer Samedi. Elle a pour titre , le Rendszvous du Mari. 17 Novembre. On raconte que le Sieur dof Beaumarchais, bouffon-né du Comte de Maurepas, au commencement de la maladie de ce Miniftre, prolita d'un mieux momentané , & voulut Fégayer par la lecture de fa Comédie du Mariage de Figarfi. Le Comte accepte, donne le jour & 1'heure. L'Auteur ayant fini, le malade exalte cetouvrage, le trouve excellent; mais , reprend-il, comment fe fait il, Beaumarchais, qu'accablé d'affaires comme vous 1'êtes , que vous immifcant de tout, que diargé même de négociations graves & vous étant élevé jufqu'a. la politique, vous vous amufiez encore a ces frivolités, que vous ayiez le tems d'y travatller? Monfeigneur, répondit-il, j'ai pris celui oü vous êtiez d la Redoute. Le Comte, entendanï la raillerie, lui réplique, Diable! le calembouï n'elt pas mauvais. En effet, tandis que vous en aurez toujours de pareils a votre difpofition, vous ne ferez point mal de rire & de plaifanter, & je vous garantis le fuccès. H 7  28 Novembre 1781. Les fujets de fiierie en général font froids. On ne peut guere s'intéreffer pour des perfonnes au-deffus de la condition humain'e. Des incidens qui ne nailfent en rien du jeu des paflions, mais font 1'effet feulement d'un pouvoir fuprême & irréfiftible, n'occafionnent point dans le cceur ce flux & reflux de mouvemens qu'y produifent les aventures de nos femblables. La piece de ce genre, exécutée avanthier aux Italiens , étoit moins propre qu'une autre a réuflir, puifque tout le nceud n'y confiflre que dans un Baifer interdit a deux amans nouvellement mariés, le premier jour de leurs noces & qu'ils fe donnent malgré toutes les défenfes de la Fée qui les a élevés. La Belle tombe a l'inftant au pouvoir. d'un Enthanteur, d'un Génie malfaifant, d'un Podagrambo, auffi béte que celui d'Acajou, & qui fe laifle ravir fa proie par une rufe peu naturelle & très-grofliere même. Tel elt le fujet; telle en elt fintrigue; tels °n font les pitoyables reflbrts. Dans de pareilles pieces , on s'attend qu'au moins un grand jeu de machines, une multiplicité de furpriles , un fpecbacle pnmpeux remplaceront le vuide de 1'aétion & frapperont les yeux, fi ïe cceur n'efl: ému. Ces moyens du Décorateur n'ont été même que foiblement employés ici; enun mot, on eft faché que 1'Auteur, M. le Chevalier de Florian, dont la piece des deux Billets avoit donné de juftes efpérances, ne les  C 183 ) remplifie pas dans cette nouveauté plus que dans les précédentes. Quant a la mufique de M. Champein, elle a été applaudie ; on y a trouvé un enfemble & une vigueur auxquelles on ne s'attendoit pas, & qui le font juger digne de compofer dans le grand genre & pour le théatre de 1'Opéra. 29 Novembre. Extrait d'une lettre de Soiflbns du 26 Novembre M. le Pelletier, notre Intendant , vient d'honorer 1'agriculture d'une maniere nouvelle en France, & digne des Romains ou des Chinois. Hier Dimanche 25 , ayant préparé une fête pour la nailfance du Dauphin, il y a fait inviter les principaux Laboure urs de fa Généralité. Après le Te Deum, auquel ils ont affifié, au milieu de toute la Nobletfe, ils ont été placés avec les Dames les plus diftinguées de la ville & des environs, a une table oü étoient 1'Ëvêque, 1'Intendant & les gens les plus décorés. En commémoration de 1'évenement & dans cette fermentation générale de patriotifme, ces Laboureurs ont demandé a fe charger chacun d'un orphelin, auquel ils donneroient lefurnom d'Antoine. II eft a remarquer que parmi les Agriculteurs, il en eft qui ont déja 12 13 & 14 enfans. M. le Pelletier, voulant que la fête füt entierement populaire ., avoit fait conftruire dans fa cour une falie très-vafte pour contenirle peuple, & des buffets garnis de pain & de viandes aulft délicates que celles de 1'Intendance, qui ont été  C 184 ) diftribuées avec du Vin en abondance a plus de 3000 perfonnes. Tout cela n'étonne point de la part de M. le Pelletier; c'eft lui qui, 1'an pafle, eft allé chercher, dans une chaumiere, deux filles de condition réduites a la mifere, & qui a obtenu pour elle des fecours de la bonté du Roi. C'eft lui qui, le premier, a reftauré a Salancy ld. fête de la Rofiere; c'eft lui qui, depuis un an , a cbangé en maifon de travail, 1'horrible xepaire des dépóts de mendicité; c'eft lui qui, depuis environ fix ans, a établi dans la Province des cours publics d'accouchemens, qui y ont le plus grand fuccès, & procurent déja des biens infinis. Enfin, il vient de fonder une école gratuite d'inftruclion pour les enfans des pauvres artifans. 29 Novembre 1781. M. Lavoifier a lu k 1'Académie des Sciences, le jour de la féance publique pour la rentrée de la Saint-Martin, un Mémoire fur la meilleure maniere d'éclairer une falie de fpectacle. Ses moyens font de fe fervi» de réverberes. II explique la difpofition qu'il veut donner a ces réverberes pour éclairer les décorations, le fond du théatre, la fcene & la falie. Ce dernier objet, le plus difficile de tous, fcroit, fuivant lui, rempli par des réverberes elliptiques, cachés dans la voute & qui fervi" roient en même tems de ventilateurs. MM. Peyre & de Wailly, auteurs de la nouvelle falle.de Comédie Francoife, prétendent  ( i85 ) avoir eu des idéés femblables antérieuremenr & les avoir communiquées depuis plufieuus années a M. le Roi de 1'Académie des Sciences, a M. Cadet de Vaux& k diverfes autres perfonnes. Es eonféquence, ils annoncent aux amateurs qu'ils• en vont faire incelfamment f elfai dans leur falie. 29 Novembre. M. le Baron de Tott, qui a réfidé longtems a Conftantinopïe , depuis fon retour a propofé au Gouvernement la fabrication de certaines étoffes de laine a 1'ufage des Turcs , dont 1'exportation ferfoit aflez confidérable pour occuper a leur fabrication tous les pauvres du Royaume , & en extirper entierement la mendicité. Ces étoffes groflieres fourniroient du travail pour toutes les clafles d'ouvriers , de nuniere a employer les vieillards, les infirmes, & jufqu'aux aveugles. Le projet a été adopté depuis plus d'un an: dix-huit foufcripteurs, parmi les perfonnages le plus illuftres du Royaume „ font k la tête de 1'entrepiïfe, &, malgré cela , elle éprouve des contradicbions. M. Necker furtout y a mis beaucoup d'obftacles pendant le tems qu'il a été en place. 30 Novembre. Aujourd'hui eft mort M. Tronchin de Geneve, premier Médecin de M. le Duc d'Orléans, Affocié étranger de 1'Académie Royale des Sciences. II étoit dans fa 73eme. année. 11 eft le premier qui nous ait apporté 1'inoculation; &, q uoique la vogue dont il avoit joui pendant longtems füt bien paflfée , il confervoit encore une grande réputation.  C .186 ) 30 Novembre 1781. Le Mémoire de.M. dek Lande jur l'année folaire ne lailfe pas que de faire du bruit dans le monde ftivant. Cet Aftronome la fixe , d'après 1'examen des obfervations d'Hipparque, de Techo, de Ia Caille, de Mayer &deM. Dagelet, a 3650 15 h. 48' 48". II 1'avoit précédé d'une note très-courte fur les deux cometes que fes confrères obfervent acfuellement, ce qui lerend pluspiquant a caufe de 1'apropos; On fait que 1'une de ces cometes , découverte k Bath, au commencement de cette année, a un mouvement trés ■ lent, & qu'il n'a pas encore été pofiible de juger fi 1'on ne doit pas la re» garder comme une nouvelle planete. 30 Novembre. C'ed M. de Caumartin , le Prévöt des marchands, qui doit avoir la place de Confeiller d'lïtat vacante par. la mort de M. de Videnc-uve. M. Taboureau a eu fes bureaux & furtbut la place du Comité des finances. - On alfure que M. le Pelletier, 1'Intendant de Soilfons, vient d'étre défigné Prévót des MM» diands pour fuccéder a M. de Caumaitm. Jufqu'ici on ne 1'auroit pas cru capable de cette place importante, & qui exige beaucoup de gravité , d'ordre & de cir:onfpectinn; mais les beaux établidemens qu'il a faits dans fa Genéralité, ont fait préfuraer que ce perlbnnage frivole avoit acquis plus de maturité & le génie propre h une admiuidration municipale. D'ailleurs , c'eft une maniere de le dédommager des frais confidérables que vient de. lui coüter la  ( i87 ) fête qu'il a donnée & dont on a ren du compte. i Décembre. La piece du Rendez- vous du Mari, jouée aujourd'hui, eft tirée d'un conté de M. de Champfort. Quelques traité faillans qui y brillent, parmi un bien plus grand nombre de lieux communs & ufés, n'ont pu empêcher que fa marche lente n'occafionnat de Fennui-, & que plufieurs plaifanteries de mauvais goüt n'excitaflent même des murmures. L'Auteur, s'il veut qu'elle refte au théatre , fera obligé d'y faire de grands changemens, encore aura-t-il peine a conferver la meilleure fcene, en ce qu'elle choque trop les bienféances théiltrales. C'eft un homme qui veut féduire la femme de fon ami, en lui prouvant qu'il eft infideleï Cette nouveauté eft de M. André de Murville, débutant dans la carrière; il ne frappe pas mal un vers; mais il faut autre chofe pour réuffir au théatre. Ce Poëte a époufé une fille de MUe Arnoux, & 1'on fe doute que cette Actrice célebre, fe mêlant de bel efprit, aura voulu mettre du fien dans la piece: comme elle a le genre de plaifanterie très-ordurier , il étoit diflicile qu'elle ne fe fentit pas du goüt du terroir. i Décembre. La mamere d'éclairer la nouvelle falie de Comédie Francoife de MM. Peyre & de W dlly, fefflble en effet fe rapprocher beaucoup des procédés de M. Lavoifier. L'éxpérience que font les premiers, confifte a procurer la chuté par une ouverture pratiquée au centre de la voüte 3 a dérober a 1'ceil du fpeftateur les mafles  ( 188 ) lumiere & a Ia réunir dans un foyer commuH, de facon h produire le plus grand effet & même a éclairer la fcene en forcant la lumiere de ce foyer. Un grand avantage de la nouvelle méthode, ed de remédier au reproche qu'on fait depuis longtems a nos fpeétacles, d'en préfenter les objets d'une maniere contraire a la nature, en les éclairaut de bas en haut, lorfqu'ils devroient, dans 1'ordre pbyfique, 1'être de haut en bas. a Décembre 1781. Le jour oü le Roi ed venu i\Notre-Dame pour adider au TeDeum en acbion de grace de la nailfance du Dauphin, les Chanoines étoient dans leur codume d'hiver, qui commence a la ïoulfaint; c'eft-i-dire en foutane noire & en camail. Ce camail eft une efpece de domino noir. S. M. qui ne les avoit pas encore vus dans cet accoutrement biiarre, & vraifemblablement ne le connoüToit pas, en fut furprife, & demanda fi 1'on étoit en carnaval; elle trouva qu'ils avoient ainfi fair de loupsgarous. Les jeunes, plus fenlibles a ce reproche , au Chapitre tenu a 1'occafion du Te Deum k chanter mardi dernier 27 pour remercier Dieu de la vicloire du Comte de Rochambeau, ont' agité s'il ne conviendroit pas, le jour oü la Reine: vicndroit a l'EglMe de Paris, pour ne point effrayer cette Princeffe plus fufceptible, encore, de changer de décoration. Les vieux, attachés toujours aux anciens ufages, ne vouloient pas s'en départir. Heureufement il s'eft trouvé une  ( l«9 ) délibération du fiecle précédent, autorifant de prendre 1'habit d'été dans les grandes cérémonies, c'eft-a-dire la robe violete & l'aumufie. En conféquence, il a été réfolu de s'y conformer; ce qui a eu lieu Mardi pour la première fois. En outre , les Cbanoines peüts-maltres fe plaignoient depuis longtems de cet habillement, en ce que le camail étant une invention du befoin & non un attribut de leur dignité, les Chantres, les Chapelains & tout le bas Chceur s'en fervoient audi; ce qui les confondoit abfolument avec ceux-ci durant tout 1'hiver. Ils ont remonté a une viedle délibération de 1616, qui a été remife en vigueur; & les dimanches & fétes ils porteront encore 1'habit d'été, c'eft-a-dire le violet & 1'aumuffe, interdits abfolument a leurs gagides. a Décembre. II fe répand un Profpeztus arinon^ant un nouvel établifiement qui fait frcmir M. de la Blancherie, cet Agent général pour la correfpondance des fciences & des arts, en ce que 1'Auteur femble devoir aller fur fes brifées & bientót 1'écrafer par une rivalité infiniment plus avantageufe. II s'agit d'un Mufée, autorifé par le Gouvernement, fous la protection de Monsieur & de Madame. Ce Mufée, particulierement confacré a favorilér le progrès de plufieurs fciences relatives aux arts & au commerce, ne doit pas être confondu avec un autre établi il y a environ un an, fans confidance, fans protecleurs connus, & n'étant encore qu'une Aflèmblée de gens  C 190 ) de lettres fe réuniffant entre eux cliaque Jeudi pour y lire des pieces de vers & de profe, & quelquefois auffi cependant des morceaux fcientiiiques , fous la préfidence de M. Court de Gebelin. L'inventeur du nouveau Mufée eft M. Pilatre de Roller, premier Profeffeur de chymie de la Société d'Emulation de Reims, attaché au fervice de Madame, Infpeéteur des pharmacies de la Principauté de Limbourg. Ce dernier titre pourroit lui óter la conliance, en ce que tout ce qui a rapport avec le Souverain de ce nom, doit être violemment fufpecté de manceuvres ténébreufes & d'intrigues peu honnêtes, d'excroqueries mêmes, fuivant qu'on en peut juger par les divers procés qu'on a déja fufcités a Paris au fufdit Prince de Limbourg. Quoi qu'il en foit, le Mufée, dont lafoufcription eft de trois louis par an, s'ouvrira le Mardi onze Décembre. 2. Décembre 1781. M. 1'Archevêque ayant recu défenfe de travailler, de la part de la Faculté, a été obligé de remettre toutes les affaires a fes quatre Grands-Vicaires, 1'Abbé de Beaummit d'Autichamp, fon parent, & les Sieurs de YEclu/e , Chevreuü & Jffeline. 3 Décembre. Le Mufée nouveau a deux objets ; le premier eft d'offrir aux favans & aux amateurs , des laboratoires , dans lefquels ils pourront étayer leurs découvertes par des expériences. Ceux qui cultivent les fciences ne peu-  f C 191 ) vent pas tous être a portde de fe procurer des objets difpendieux, & cependant néceffaires; & ils y trouveront tous les indrumens de leur art. Le fecond objet eft d'enfeigner aux commen^ans a faire ufage des machines, & de leur démontrer les applications pour la fabrication de toutes les chofes nécelfaires a la vie. En conféquence, on y fera i°. un cours Pliyfico - clnmique , fervant d'introduction aux arts & mdtiers, dans lequel on fera connoitre 1'hidoire naturelle des fubdances qu'on y employé; 20. un cours Phyfico - mathèmatique expdrhnental, dans lequel on s'appliquera fpécialement aux arts mécaniques ; 30. un cours fur la fabrication des dtoffes, les teintures & les aprêts ; 4°. un cours d'anatomie , dans lequel on ddmontrera fon utilité dans la fculpture & la peinture, auquel on joindra les connoitfances phyfiologiques néceflaires a un amateur ; 50. un cours de langue angloife ; 6°. un cours de langue italienne. 3 Décembre. Extrait d'une lettre de Marfeille du 24 Novembre C'ed par un Arrêt du Confeil du 5 Octobre dernier, que le Roi a donnd a 1'Acaddmie des Sciences & Belles - Lettres de cette ville, 1'Obfervatoire de la Marine, cidevant attachd a 1'Arferial. M. Malouet a dtd chargé de lui remettre cn confdquence, les bdtimens , meubles & indrumens ddpendans de 1'Obfervatoire. M. le Marquis de Cadries adreda cet ordre audit Sieur Commiflaire du Roi le 20 Octobre avec une lettre obligeante, oü il le char-  ( m ) geoit de témoigner a la Compagnie fon effime & fon emprelfement a faire valoir auprès du Roi Ie zele que fes Membres témoignent pour 1'ac.croiiïement des fciences qu'ils cultivent, & particulierement des cönnoiltances aftronomiques fi intéreflantes pour la Marine. M. Malouet a rempli cette commiffion le 19 Oftobre, & le 7 Novembre elle a arrêté dans une fe'ance extraordinaire, qu'en témoignage de fa reconnoiflance, elle célébreroit a 1'avenir 1'époque féculaire du 10 Décembre 1481, ou Marfeüle & la Provence furent réunies a la Couronne, & qu'a cet effet, elle fera chanter un Te Deum folemnel, ce qui aura lieu le 3 Décembre prochain, après trois fiecles écoule's. Quand le procés verbal de cette féance & de la précédente, rendu public, me fera parvenu, je vous ferai un détail plus circondancié des autres difpofitions de cet arrêté, très-honorable pour le Miniftre, & fort fingulier a bien des égards. 4 Décembre 1781. Les amateurs de mufique. inftrumentale & vocale fe difpofent a fe rendre en foule au concert fpirituel prochain de Samedi huit, qui doit être très-brillant en Virtuofes & en morceaux nouveaux. On y doit entendre une Demoifelle le Bceuf, Cantatrice dans le goüt italien, qui n'a pas encore paru, & dont on dit le plus grand bien. M. Coufmeau fur la harpe, M. Salentin fur Ia flüte , M. Fodor fur le violon, exécuteront rcf-  C 193 > refpecdivcment des concerts de leur compofitiorn M. Molinc a compofe' une ode qui a été mife eu mufique par M. Mereaux; enfin, M. Rochefort y produira le fpeélacle pompeux de YApefnéofe en vers £f en mufique de 1'Impératrice Reine de Hongrie & de Bohème. Ce dernier morceau, qui raproche ce [pectacle des anciennes cérémonies des Romains & des Grecs, elt furtout fait pour piquer la curiofité, & par fon intention, & par fon objet. 5 Décembre. Enfin , le Sieur Pankoucke, cet Atlas de la librairie , dont les valtes épaules fupporteroient le poids des malles les plus énormes, a tronvé ie moyen d'obtenir du Gouvernement une permifiion ouverte de fiirc une nouvelle édition de 1'Encyclopédie en 40 volumes de difcours & fept volumes de planches in -4°'. & en 84 volumes de difcours & fept de planches in 8°. au même prix de 672 livres 1'exemplaire -de chaque édition. Cet ouvrage aura. pour titre Encyclopedie Méthodique ou par ordre de matieres, précédée d'un vocabulaire univcrfel, fervant de table pour tout 1'ouvrage. Les premiers Editcurs, MM. Diderot & d'Alembert n'y figureront plus que par leur portrait qui fera a la tête. L'objet principal de la rcfonte de 1'ouvrage elt, en corrigeant les fautes, les omiffions & les erreurs fins nombre qu'on lui reproche, de leperfectionner,en le rendant tout-a-la-fris cc Tomé XFIII. I  ( 194 } un DicTionnaire & un Traité. Du rcfte, ou dit qu'il y aura plus de 30,000 nouveaux articles. Les frais de ce grand monument font un objet dc dépenfe de prés de deux millions, & 1'on fcnt qu'il faut que le zele des foufcripteurs s'évertue pouï venir au fecours du Sieur Pankoucke. 6 Décemlre 1781. Extrait d'une lettre de Marfeille du £19 Novembre.... Notre Académie, dans 1'effufión de fa reconnoilfance envers le Marquis de Caftries, a arrêté que le nom de Caftries feroit infcrit fur les regiftres a cóté de celui de Villars; que, dans tous les difcours publics, il feroit nommé comme le bienfaiteur, ainfi que les fondateurs & protecbeurs de 1'Académie; que ce Miniftre feroit prié d'agréer le litre d'Académicien honoraire, & la demandé que la Compagnie lui fait de fon portrait. _ L'Académie en outre ne pouvant oublier ce qu'elle doit a un ancien Miniftre, qui, le premier, a bien voulu concourir a fon établiffement & lui procurer un traitement annuel, a arrêté que M. Necker , ci-devant Directeur général des finances, feroit infcrit dans la lifte comme Académicien honoraire , & fon nom aflbcié a celui du Miniftre bienfaifant auquel elle doit fon établifiement actuel. Que copie collationnée de la préfente déhbération fera envoyée a M. le Marquis de Caftries, & une feconde expéditiou a M. Malouet, Commilfaire du Roi, par deux Députés de la Compagnie , chargés de lui renouvelerfes remercimens.  C 195 ) L'Académie a de plus arrêté que le procés verbal de cette féance & de la précédente fera rendu public. 6 Décembre. II y a a Paris une petite Cotterie littéraire, qui n'ed qu'une foible imitation de celle de Madame la Comtelfe de Beauharnois, la première aujourd'hui, & de plufieurs autres; mais , comme elle cd précédée les Mercredi d'un bon diner, les Freres ne manquent pas de s'y trouver. C'ed une Madame Pannelier, femme d'un ancien Receveur général des domaines & bois , qui en ed la Préfidente. Les corriphées principaux font MM. de la Lande, Sautereau, le Clerc de Montmercy, Gnicliard, &c. Elle fe nommc Catherine , & les Poëtes, fes commenfaux, nc manquent pas de célëbrer leur Divinité : M. Guichard s'étant trouvé abfent, ou ayant oublié la fête , a réparé cette omiffion par les vers fuivaus. Catherine en mon cceur eft plus qu'en ma mémoire; Mais faut-il, ne fuivant que 1'crdinaire cours, Fêter, a jour nommé, ce qui plak tous les jours? Parmi vos enfans de la gloire, Je me glilfe, batard, en toute humilité. Vous ne me verrez point jaloux de leur viftoire, II me fuffit d'étre adopté. Ma place, prés de vous, vaut 1'immortalité. 7 Décembre. Voici les noms & la ttlche dc chacun des Coopérateurs de F'Encyclopédie Méthodique. I t  ( ï96 ) Meffieurs 1'Abbé BoJJat & de la Lande, tous deux Membres de 1'Académie des Sciences, fe chargeilt des Mathématiques, le fecond prendra foin de la partie allronomique principalement. M. Monge, Profeffeur de Phyfique a Mezieres &de 1'Académie Royale des Sciences, compofera le Traité de Phyfique. La Médecine fera mife en ordre par M. Vicq ffAzn , Dockur- Régent & Profeffeur de la Faculté de Médecine de Paris , de PAcadémie Royale des Sciences , & Secrétaire perpétuel de la Société Royale de Médecine; le même tfaitéra de 1'Anatomie , & de la Phyfiologie fimple & comparée. M. Louis, Secrétaire perpétuel de PAcadémie Royale de Chirurgie, embraffera cette partie. La Chymie, par M. de Morveau, Avocat général au Parlement de Bourgogne, Membre de plufieurs Académies; la Métallurgie, par M. Duhamel , Infpefteur général des mines ; la Pharmacie par M. Maret, Secrétaire perpétuel de PAcadémie de Dijon. L'Agriculture proprement dite , ou la culture des terres, par M. 1'Abbé Teffier, Docteur-Réo-ent de la Faculté de Médecine de Paris, & de fa Société Royale de Médecine; le Jardinage oü l'a culture des jardins & vergers, par M. Thouin, Tardinier en chef du jardin du Roi; & la culture des bois & aménagement des forêts, par M. Fougemix de Bondoroy , Membre de 1'Acadénue Royale des Sciences,  ( 197 ) MM. Daubenton, de 1'Académie Royale desSciences , Lecteur & Profeffeur d'Hifloire naturelle au Collége royal de France, Garde & Démonftrateur du cabinet du jardin du Roi; Mauduit, Doéteur - Régent de la Faculté de Médecine de Paris & Membre de la Société Royale de Médecine; Guenau de Montbelliard, Académicien honoraire de PAcadémie de Dijon , la partageront cntr'eux 1'hiftoire naturelle des animaux. LaBotanique, par M. le chevalier de la Marei, de PAcadémie Royale des Sciences. Mr. Daubenton lë charge de nouveau de PHfstoire naturelle des minéraux. Mr. Defmarefi , de PAcadémie Royale des Sciences, & Infpecleur des manufaétures de la Champagne , embraffera la Géographie phyfique , ou les phénomenes généraux de 1'Hiftoire naturelle de la terre. MM. Robert, Géographe du Roi, Maffon de Morvilliers, Avocat au Parlement, & Mentelle Hiftoriographe du Comte d'Artois, Penfionnaire du Roi, Profeffeur émérite d'hifloire & de géographie a 1'Ecole royale militaire, de PAcadémie des Sciences & Belles-Lettres de Rouen, prendront foin de la partie concernant la Géographie ancienne & moderne. M. Bourfe, Ingénieur hydographe de la Marine fera exécuter les carrés,1 Les Antiquités, Infcriptions, Chronologies, Art de vérifier les dates,Numifmatique ou fcience des médailles, cxplication des f;ïbles, eaufes I 3  C -93 ) des mceurs, coutumes & ufages des anciens , ieront traités par M. Court de Gebelin. L'Hidoire, par M. Gaillard , de 1'Académie Francoife & de celle des Infcriptions. La Théologie, par M. 1'Abbé Eergier, Confeffeuf de Monfieur & Chanoine de 1'Eglife de Paris. La Philofophie ancienne & moderne, par M. Naigeon. La Métaphyfique, la Logique & la Morale encore, par M. Gueneau de Montbelliard ; la Grammaire & la Littérature par MM. Marmontel & Beauzée de PAcadémie Francoife. La Jurifprudence, par une Société de Jurisconfuites. Elle fera rédigée & mife en ordre par M. Remy, Avocat au Parlement. Les Finances, par M. Digeon, Directeur des fermes, qui fe flatte de reclifier beaucoup d'erreurs de Pajfelier , fon prédécefTeur dans ce travail. L'Economie politique, par M. 1'Abbé Beaudeau. M. 1'Abbé de Montlinot, connu par un excellent difcours fur la mendicité St par plufieurs mémoires fournis au Gouvernement fur ces objets, s'eft chargé de toute cette partie dans ce Diétionnaire. Le Commerce, encore par 1'Abbé Beaudeau & par M. Benoit, Confeiller de Monfieur & ancien Profeffeur du cours gratuit dc jurisprudence confulaire. La Marine, par M. Vial de Clairbois, Ingénieur-conftrufteur dc la Marine, de PAcadémie  C m ) Royale da même nom; & par M. Blondeau, de 1'Académie Royale de Marine & de plufieurs autres. L'Art militaire mis en ordre & publié par M. de Keralio, de 1'Académie Royale des Infcriptions & Belles-Lettres. M. de Pommereuil, Capitaine au Corps royal d'Artillerie, en traitera la panie. Les beaux Arts, par M. 1'Abbé Arnaud & Suard, de PAcadémie Francoife. ËnSn les Arts & métiers mécbaniques, par MM. Roland de la Plattere, Perrier freres, &c. 8 Décembre 1781. L'Alfociation des favans & autres littérateurs travaillant a élever le nouvel édilice de 1''Encyclopédie Méthodique regrettent déja un confrère, Me. BoiJJon, qu'une mort foudaine vient d'enlever au Barreau, & qui depuis longtems travailloit a rectilier les articles de 1'ancienne. On fera du moins ufage de fes matériaux. 8 Décembre. Les gens les plus prévenus commencent a regrctter M. de Maurepas pour le crédit qu'il avoit fur 1'efprit du Roi & des Princes de la maifon royale; pour fon efprit de conciliation a la Cour, lorfqu'il s'y élevoit quelque nuage. On fe rappellera toujours la maniere noble & fublime dont il répondit a M. le Comte d'Artois qui, témoignant de 1'éloignement pour quelques acbes de fommifTion a S. M., lui demanda avec humeur: après tout, que le Roi peut-il me faire ? Monjéigneur, ü peut vous p&rdenner. I 4  C 2.00 ) 8 Décembre i7§i.Le concert fpirrtuel, exécuté aujourd'hui avec une nombreufe affluence d'anditeurs, a réufli en beaucoup de parties. La fymphonie del Signor Rqfetti, jouée pour 1'ouverture, a été fort godtée. L''Andante furtout a paru d'un genre abfolument neuf. On regrette que ce Compofiteur, attaché a fon Alteffe Séréinflime Monfeigneur le Prince éTOrftingWallerftein, aille fe fixer dans une Cour étrangere ; il annonce beaucoup de talent par les traits de chant agréables dont eft rempli fon ouvrage. Mllc le Bwufz recu des applaudiffemens bien capables de 1'encourager a dure tous fes cfforts pour ajouter a la légereté de fa voix, les autres qualités qui peuvent s'acquérir par le travail. L'exécution. rapide de M.. Coujineau a fait plaifir, principalement dans 1'Allegro. Plufieurs morceaux de YOde fur la naiffance de Mr. le Dauphin ont été jugés dignes. de la réputation de M. Mereaux, &lesparoles dignes de fon Auteur, M. Moline, chez lequel le cceur tient lieu d'éloquence , fuivant fes propres expredions. La grace & le fini que M. Fodor a. mis dans fon concerto de violon lui out mérité les plus grauds applaudiffemens. II n'en a pas été de même de VOratorio de M. Rochefort fur 1'Apothéofe de PlmpératriceReine: ce n'eft pas qu'eri général la mufiq,ue n'enfoit bien écrite; mais elle n'a pas paru aflez va-  C 201 ) variée, & on y a trouve , ainfi que dans les paroles, beaucoup de réminifceriees: ces dernieres font d'un M. le Bmuf; on ne fait li c'eft Ie pere de la Cnntatrice. 9 Décembre. Extrait d'une lettre de Lille du" 4 Décembre Partni les fêtes & réjouiffances de nos cantons, il faut diftinguer celles- très-fin.-gulieres qui ont eu lieu a St. Omcr. Les Haaponnois font les habitans d'un fauxbourg de cette ville, ainfi que les Lifelarts le font d'un autre fauXbourg prés du premier. Ou croit que ce font des Saxons, autrefois tranfplantés par Charlcmagne dans 1'Artois. Ils patiënt Flamand, & ont confervé leurs mceurs & leur franchife. Ils ne s'aliient guere qu'entre eux, & il n'y a pas longtems qu'ils s'habilloient encore d'une maniere fort fimple, ayant deschapeaux en pain de fucre , des habits noirs ow bruns fort courts, & un manteau. Leurs femmes n'ont pour coëffure qu'un morceau de toile.' ferrée, & les jours ouvriers un chapeau rond de' paille, fur lequel elles mettent des mannes pleines de légumes qu'elles vendent au mar'ché. Ce font des Marnichers qui cultivent des ten-es entrecoupées de beaucoup de canaux. Au milieu' de ces canaux, il y a plufieurs illes flotantes^ lis en ont amené le 17 Novembre une fur laquclle s'éleve un arbre- alfez gros ils font fixéer dans le canal de cette ville allant a Dunkerqua' & prés de la porte du haut pont. Ils ont faie fur cette iüe un feu de joie a 1'occafion de fhèö*I 5  reufe nailfance de M. le Dauphin, & ils ont illuminé toutes leurs maifons. Le lendemain dixhuit, ils ont fait chanter un Te Deum clans .1'églife de Sainte Marguerite, leur paroilfe, & y ont affifté avec une dévotion auffi vraie que leur zele eft fincere. L'adulation n'a furement eu aucune part a cette fête unique dans fon efpece. Entre les mauvais vers dont nous avons été inondés a la même occafion, il faut conferver auffi le quatrain fuivant fait dans cette ville & intitulé: L'Impromptu d'un Gafcon. Sandis, vous 1'entendez, Rochambeau, IaFayette, Vous favez réunir les vaincüs, les vainqueurs; La France a fon Dauphin préfente tous les cceurs, Et vous forcez 1'Auglois a payer la layettel io Décembre 1781. M. FArchevêque eft fort mal; 1'ehfture a gagné confidérablement; il eft dans un affbupilfement léthargique, & il y a eu une confultation dont le réfuïtat a été qu'il n'en pourroit revenir; mais que la ponélion prolongeroit peut-être fon exiftence. 10 Décembre. Ce n'eft que le 6 Novembre que M. de la Blancherie, Agent général de correfpondance pour les Sciences & les Arts , a jugé a propos de faire part h M. Deferres de -la Tour, Rédacteur du Courier de 1'Europe, de 1'Article ci-delfous. Extrait des feüilles de la Correfpondance pour fes Sciences & les. Arts, publiécs fous le titre de  ( 203 ) Nouvelle* de la Re'publique des Lettres & Arts, du Mercrëdi 15 Aoüt 1781. M. de la Blancheric ayant mis fous fes yeux , les feuilles du Courier de 1'Europe, dans lefquelles il eft fait mention de* 1'ètablilfement de la Correfpondancc depuis le commcnceinent de fon inliitution, elle a arrêté: Qu'il feroit écrit cn fon nom , au Rédacteur de cette fcuille, une lettre de remercimcnt, & confidérant qu'il n'a pu mettre tant de recommendations & d'éloges dans fes annonces réitérées, que dans l'intention de contrebalancer les elfets de 1'envie & de la méchanceté, toujours acharnées après les chofes utiles, & d'éclairer le public fouvent fi aveuglé fur fes propres intéréts ; a arrêté de, plus: Que la feuille de la Correfpondance lui fera envoyée a titre cVAJJocié honoraire, que fon nom fera infcrit avec fa qualité dans le tableau qui fera publié a la fin de cliaque année , & qu'il aura de même une acbion a la divifion des objets achetés. M. de la Blaficherie a été chargé de remplir les intentions de l'Alfemblée, & de prier le Rédacteur du Courier de 1'Europe, de donner place a ce témoignage de reconnoillance dans un de fes premiers numero. Ces délibérations ont été prifes avec 1'applaudilfcment de toutes les clalfes & artiftes, & de plufieurs étrangers diftingués. Cette notice, accompagnée d'une lettre fort plate de 1'Agent, oü il loue balfement le R.& continue, & 1'on voit 1'eau monter en dehors de cette corde & tout autour d'elle jufqu'au-deflbus. de la poulie fupérieure, oü une efpece de Chapiteau la force de tomber dans une goutiere qui la verfe oü 1'on veut. | C'eft par une lettre du 18 Octobre denuer,qua  M. de Bernieres a écrite au journal de Paris, que les Amateurs & Artiftes out eu connoiffance de la découverte du Sieur Vera. Ils fe font empreffés d'allerla vérilier & font fords émerveillés de fa fimplieité & de fa jufteffe. Elle a été foumife a Fexamen de PAcadémie Royale des Sciences , & 1'on ne tardera pas a en avoir la décifion. 26 Décembre 1781. 11 parolt condant qu'eu effet M. 1'Archevêque de Toülou'fe , appuyé par 1'Abbé de Vcrmont auprès de la Reine, a été nommé 24 heures Archevêque de Paris; mais que le pamphlet dont on a parlé a produit fort effet. Tout le parti des dévots a été tellement alarmé du danger que la religion courroit, fuivant eux, fi ce Prélat athée eüt été élevé fur le premier fiege pontifical de la France, qu'ils ont cru devoir fe permettre d'ufer de la voie peu hon«< nête d'écrits anonymes. Ceux qui ont lu celui* ci difent qu'il n'ed pas nouveau, que c'ed ut* libelle répandu il y a quelques années & Touloufe, lorfque ce Prélat dt fécularifer une Communauté de filles religieufes; il étoit tombé dans Poubli, & on Pa rajeuni. Quoi qu'il en foit, c'eft en effet M. de Chalons qui eft nommé par le Roi, Archevêque dc Paris. Ce Prélat de fort bonnes mceurs, fort religieux , eft en outre un très-zélé Molinifte. Scs principes'font les mêmes abfolument que ceux de M. de Beaumont, & il y a grande apparence que ce fera la même adminiftration. M. de Juigné eft aufli fort charitable, & d'ailleurs d'une maifon  C *35 ) riche, ce qui ne le mettra pas dans Ie cas de faire part a fes parens des gros revenus dont il va jouir. 26 Décembre. L'Académie des Sciences , en elfet, ayant nommé des Commiffaires pour examiner la machine du Sieur Vera, leur rapport a. eu lieu le 15 Décembre, & cette Compagnie a confirmé les éloges qu'ils lui ont donnés. MM. le Roi & 1'Abbé Boflut étoient ces Commiffaires. Suivantlesexpériences qu'ils ont faites, le réfultat moyen d'une corde de fparterie ayant 2.1 lignes de circonférence a été de 250 pintes en 7 minutes & 45 fecondes. L'eau , dans les expériences, a été élevée a 63 pieds. Une corde doublé cnviron de circonférence, n'a pas donné tout-a-fait antant d'eau dans le même efpace de tems - il a fallu onze minutes 45 fecondes pour obtenir le même volume de liquide par une corde de chanvre de 15 lignes de circonférence. D'après cet examen & 1'approbation des favans, on ne doute pas que cette machine ne foit adoptée dans les manufachires , dans les maifons particulieres, & furtout dans les marais & dans les jardins, au produit & a 1'embellilfement defquels 1'arrofement contribue d'une maniere auffi effèntielle. 26 Décembre. On répand encore contre M. le Duc de Chartres un Quatrain enfanté fans doute par le défefpoir de propriétaires ruinés & cherchant a exhaler leur rage: ils oublient en ce moment le Prince du fang, pour n'ënvifager qu'un  ( ) cnnemi cruel dont ils cherchent a fe vengef dé toutes les manieres; & ils ofent fe porter jufqu'aux imputations les plus calomnieufes pour peu qu'elles foient fondées fur des apparences. A la gloire préférer Tor, Fuir 1'ennemi fans le combattre , Ce n'eft pas fortir d'henri quatre; C'eft être batard de Meifort. 27 Décembre 1781. On ne s'en eft pas tenu k des louanges fades de M. de Beaumont. On 1'a apprécié plus véritablement dans ce quatrain, oü 1'on exalte fes bonnes qualités fans ditfimuleï fes défauts. Dieu lui donna la bienfaifance; Le Diable en fit un entêté: II couvrit par fa charité Les maux de fon intolérance. 27 Décembre. II devoit y avoir aujourd'htfï appartement & banquet a Verfailles en réjouiffance de la nailfance du Dauphin; Madame la Comtelfe d'Artois n'étant pas encore bien réta- blie de la fievre qu'elle a eue il y a prés de deux mois, s'eft trouvée pendant la nuft dans un état fi critique & fi dangereux qu'elle a défiré être adminilfrée. Elle a en effet recu tous les facre- mpnc 4 rïp'nv l->pii-rpc thi mntin (Sr nn 1ipn rlpa têtes auxquelles on le préparoit, on a ordonne 1p« nriprps rlp Ar, tiPums. P.PftP nnnvpllp n rp_ pandu une conlternation générale dans la capitale.  C =37 ) 27 Décembre. Les amateurs continuent a fuivre avec empreflement les concertsfpirituels, furtout depuis que leur concert par excellence n'a plus lieu. II y en a eu deux Ia veüle & le jour deNoeL Le motet de M. Chardini, chanté Ie vingtquatre, annonce un Compofiteur qui, quoique jeune, connoit parfaitement les regies de Part; mais auquel ilmanque de la confommation. D'ajlleurs, 1'cxécutio.n lui a fait grand tort & 1'on ne peut diffimuler que les chceurs manquoient d'enfcmble. II y a t\ parier qu'une feconde fois , ce morceau produira plus d'eiTet. M. Qiierat, éleve de M. Capron, a fait plaifir par la maniere agréable dont il a joué fon concerto dc violon. On n'en peut dire autant de la voix de Madame Ferandini qui a chanté pour la première fois un air dc M. Mifliwecek. Cette mufique a paru aufli barbare que le nom de fon autetir„ M. Salentin qui remplace a POpéra M. Rault pour la flute, & qu'on croit déja très-goftté dani d'autres concerts , a prouvé dans celui-ci du vingt-cinq, par 1'exécution finie de fon concerto de hautbois , qu'il favoit profuer des applaudisfemens, pour en mériter de nouveaux. MM. Fodor, Miclwl & Duport font alfurés de réuflir toutes les fois qu'ils fe font entendre. L'Oratorio de M. GolTcc fur la Nativüé a terminé d'une maniere brillante les deux concerts. Le public n'a pu y voir fans intérêt la fille dc M. le Gros, chargce a 1'age de 7 a 8 ans  C 238 ) au plus, d'un perit morceau de récitatif, qu'elle a rendu avec toutes les graces de fon enfance. Elle annonce les plus heureufes difpofitions pour marcher fur les traces de fon pere. 28 Décembre 1781. M. Moline vient de faire Imprimer fa Comédie en trois actes & en vers de YInconnue perjécutée, mêlee d'ariettes, repréfentée devant Leurs Majeftés par les Comédiens Italiens ordinaires du Roi le 12 Novembre 1776. 11 conclut de cette époque que fantériorité de fon Poëme eft bien condatée fur celle de M. du Rofoi; il ajoute peu modeftement, il eft vrai, mais du moins avec vérité, que la fupériorité ne le fera pas moins pour quiconque voudra en faire la comparaifon. II reprocbe enfin a fon rival d'avoir copié une infinité de morceaux de la première ex,en avouant ces iarcins,ae ne les avoir pas défignés avec des guillemets de facon qu'on püt diftinguer clairement la part de chacun & qu'on ne confondït point le travail de M. Moline avec les idéés fubümes dont lui, du Rofoi, a enrichi cette Comédie-Opéra. 28 Décembre. MM. les Gardes du Corps, a la naiffance du Dauphin, ont le privilege qu'ils ne veulcnt pas laifter perdre, de donner ;\ la Reine un bal qne 1'un d'eux ouvre en danfaut avec S. M. Ce bal devoit avoir lieu demain 29, -&M. de Prefly, 1'un des Majors de Cour. étoit choifi pour cette bonorable fonction. La Maladie de Madame la Comtelfe d'Artois empeche que le bal n'ait lieu; c'eft d'aütant plus facheux  C 239 ) Ique la plus grande partie de la dépenfe étoit faitc. Chaque garde du Corps s'étoit cottifé, avoit donné un Ioüis, les autres Officiers a proportion. II y avoit 3800 bougies de commandées ; on peut jugcr par cet article du rede de la magnificence. Ce qu'il y a de plus faclieux encore, c'eft que cette fête a déja cofité la vic a plufieurs (Gardes du Corps. MM. les Chevaux - légers, & les Gendarmes ont trouvé mauvais de n'avoir pas été invités en corps; il en a réfulté' des propos dont fe ('ont fuivics des rixes, & 1'on allure qu'il y a déja trois Gardes du Roi de tués. 29 Décembre 1781. Les Comédiens Francois depuis que M. Rochon de Chabannes a répandu fa brochure au fujet des deux troupes qu'il défircroit, boudoient cet Auteur, & ne vouloient pas reproduire fa piece des Amans généreux. Envain Mlle Doligny, qui aime le Poëte & cette Comédie, follicitoit fes Camarades de la jouer. Enfin , le Sieur Préville eft venu a fon appui, & les Amans généreux ont reparu hier jeudi avec le fuccès ordinaire, & ce qui confond les détracteurs du Poëte dans la troupe, qui prétextoient, pour cxclure fa piece, le peu de bénéfice qu'elle rendoit, c'eft qu'on a fait a la porte 1800 livres malgré le mauvais jour. 29 Décembre. Extrait d'une lettre de Stras- bourg du 10 Décembre 1781 La nation juive d'Aliace a cru devoir célébrer avec éclat la naiffance du Dauphin; cn conféquencc, les prépofés  C 240 5 généraux ont écrit aux Rabins de la Province| pour les inviter a cornpofer un cantique en ac-j tions de graces, & a indiqüer les pfeaurncs & prieres analogues a la circonftance. Sur leur réponfe, ils ont été, ainfi que les I Prépofés particuliers & autres Députés des Com-1 munautés juives de la Province , invités a Ie 1 rendre a Bifchheim au Saum prés Strasbourg pour le Mardi 20 Novembre. Je paffe fur les préliminaircs de cette fête, fur ce qu'elle eut de commun avec toutes les autres, fur les cbarités qu'elle occafionna en faveur des étrangers & même de nos Moines catholiques, contre les mceurs & les pratiques religieufes de cette nation, & j'en viens aux cérémonies partil culieres qui la caraétérifent. Les Rabins, Prépofés généraux, accompagués des Prépofés particuliers & Députés des Communautés juives de la Province , précédés des jeunes gens & enfans juifs de la Communauté de Biscbheim , rangés fur deux lignes avec deux drapeaux, accompagnés de mufique & au bruit d une décliarge de douze petits canons öt de j nombre de boetes, partirent de la maifon ou ils 1 étoient aiiembies , cc ie rendirent cn corps a celle du Sieur Cerfbert, 1'un des Prépofés géné¬ raux, ou elt la öynagogne ,■ laqüelle ie trouva décorée des plus riches ornemens , illuminée d'un grand nombre de bougies, & remplie da monde que la curiofité avoit attiré. Le Tabernacle fut ouvert, &, ce qui ne fe pra'tique que dans  c m ) dans les circonlrances les plus extraordinaire?, les tables de Moïfc furent expofées a Ia vue, au brüit d'une nouvelle décharge de canons & de boetes. On commenca les prieres ordinaires, fuivies de celles ufitées tous les Samedis pour lc Roi & la Familie Royale, puis on chanta le cantique cn actions de graces, compofé pour la circonllance. Enfuite, repas, bal, illumination. Entre les devifes on diftinguoït celle-cien latin, au-deffous du portrait du Roi en médaillon. Si mora Ion ga fuit, nimios mme define qiiieffus Gallia, Boibouides parturiendus erat. 29 Décembre. Le Docteur Barthès, quoique M. lc Comte de Maurepas foit mort, n'a pas moins acquis par fon audace & fes intrigucs aflez de confiftan.ee pour fe faire nommer, a la mort de Tronchin, premier Médecin de M. le Duc d'Orléans, i 1'exclufion de dix ou douze praticiens de Paris qui afpiroient a cette place, & y avoient des prétentions plus ou moins fondées. Ce triomphe a excité 1'envie, & Pon recherche quel elt cc Barthès. On convient alfez généralement que c'eft uu homme de beaucoup d'cfprit, parlant très-bien-, ayant une mémoire prodigieufe & conféquemmeht des connoilfances infinies; il a été pendant plufieurs années Chancelier de FUniverfité de Montpcllier & a la tête de la Faculté de cette ville, très-renommée en médecine. II a ftfit quel- Tome XF1II. L  C 242 ) ques ouvrages, dont le principal eft une efpece de traité» de métaphyfique, intitulé Nomeaux Elémens de la Science de PHomme, qui n'eft autre chofe que la Médecine de l'Efprit de le Camus retournée ; c'eft-k-dire la doarine pure du matérialisme. Quant a fon état, on le re<-arde comme profond en théorie; mais 011 lui refufe ce taét fi néceifaire peur exercer fa profeffion utilement envers 1'humanité. ' Ses rivaux jaloux difent que c'eft un cinique, un homme fans mceurs, un roué. 11 vient d'étre tout récemment recu Membre de la Société Royale de Médecine. 30 Décembre 1781. Quoi qu'en difent les détraéteurs des fciences, leur application eft fouvent très-utile dans la fociété, & fans doute M. lc Noir, Lieutenant-général de Police de cette capitale cn a jugé ainfi en établiffant une école de bou.langer.ie, dont il eft Je Préfident, & un Comité de Membres experts dans la théorie ou dans la pratique , pour le diriger dans les régiemens a faire ou a réformer concernant cette partie importante de fon adminiftration. L'objet qu'il a foumis le premier a 1'examen du Comité, a été la vente du pain au poids, afin d'en difcuter par des expériences multipliées les avantages & les inconvéniens. 30 Décembre. M. de Maurepas n'a pas été mort que tous les afpirans a le remplaccr dans la confiauce du Roi fe font rendus a Verfailles. On y a remarqué entre autres le même jour M. le  ( =43 ) Duc de Choifcml & M. Necker; ce qui fit dire a un rieur : que c'étoit le comte rendu, la recette & la dépenfe. On a verfifié ce bon mot dc la maniere ibivante. A la Cour en diligence, Dès qu'eut paffe Maurepas, Vint choifeuil plein d'affurance, Et Necker fuivant fes pas. Pourquoi de cette alliance S'étonner ou fe Facb.er? Enfemble doivent marcher La recette & la dépenfe. 30 Décembre. L'afFaire de M. de Flaudres de Branville de'vient de plus en plus faqheiufe pour lui: cnvain les Préfidcns du Chatelet ont-ils cru qu'il ne falloit point faire attenlion a un mémoire ven 11 d'Oftendc, fans fignature d'Avocat & portantles caraclercs du libelle; Meffieurs les Confeillers out trouvé mauvais qu'ils euflèfit pris une pareiHe décifion fans les appeler. En conféquencc , il efi plus queftion que jamais de dénoncer le Mémoire comme libelle, de décréter PAuteur, M. Garnier, & de mettre M. de Branville dans le cas de fe jultiiïcr fi les imputa* tions de fon accufstéiir femblent exiger d'étre réfutées. 30 Décembre. Le Sieur Duval, Confifeur du Roi, au grand Monarque rue des Lombards, continue a ollrir au public un cours d'hiftoire eu fucrerie. II annonce qu'on verra chez lui le mois prochain dans fon magazin d'étrenncs la L 2  C 244 ) flotte francoife bloquant la baye de Chefapeac, Vinvejliffement d'York cif Glocefier par les arméés Francoifes & Américaines, la reddition de Lord Cornwalis, le défilé des troupes Angloifes rendant les armes: il a en outre repréfcnté le fuperbe obélisque , élevê fur la place du port de Venire en Roujfillon, en l'honneur de la bitnfaifance de Louis XVI. Enfin, il a figuré en f'ucre les cérémonies qui fe font obfervées d la naiffance du-Dauphin oü tous les Princes & Frinceffes font reprêfentés. II a en outre des bonbons Anti- Anglois, ou Pierre de touche d la Fayette, des bonbons au Général Washington fjfc. Ce zele patriotique a valu au Sieur Duval la faveur infigne d'un Brevet de Confifeur du Roi. 30 Décembre 1781. Madame la Comteffe d'Artois va mieux, & fon efpere que les plaifirs de Verfailles différés n'en feront que plus vifs. La Cour & la ville fe font également intéreffés pour cette Princeffe. Le compte qu'on lui a rendu de cet attacbement adü la foulage.r dans fes maux; mais ce qui y a furtout contribué , c'eft l'affeétion vraiment conjugale de fon Auguffe époux ; 1'excellence de fon cceur s'eft manifeftée en cette occalion , & il a rendu a la malade les foins les plus tendres, les plus conflans & les plus recherchés. Elle s'eft écriée dans fa joie, qu'elle étoit bien füre jufque-la d'cn être aimée; mais non a ce point & jufque dans cet état'trifte & repouffant. 31 Décembre. Les Boulangers affujettis a don*  C 245 ) ner exactemcnt le poids proportionné au pain- du peuple, préfenterent il y a quelque tems un Mémoire a M. le Lieutenant-général de Policc pour ne plus vendre le pain au poids. Ils s'y plaignoient qu'en employant la quantité autorifée par 1'ufage de quatre livres dix oiiees de pats pour un pain de quatre livres, ils obtenoient rarement ce poids & fe trouvoient fouvent dans le cas de 1'amande. MM. Parmentiers & Cadet de Vaux avoient traité cette matiere dans le Parfait Boulanger & inclinoient pour le vceu de ces marchands. C'eft a 1'occafion de ce Mémoire & de la question élevée, que M. le Noir a défiré qu'on éclairftt fa fageiTe. Des Commilfaires ont été nommés, a la tête desqueïs s'eft trouvé M.Tillet de PAcadémie Royale des Sciences qui, dans une afietnblée du Comité de ftoulangerie tenu le 5 Novembre , a lu les expêriences £p obfervations fur le poids du pain aufortir dufour & fur le régiement par lequel les Boulangers font aiTujettis a douner au pain qu'ils expofent en vente un poids fixe & déterminé. Suivant fon rapport, par ces expêriences faites en préfence non-feulement de tous les Membres du Comité, mais de plufieurs Magiftrats recommandables par leur zele & leurs lumieres, il réfulte que 50 pains mis dans le même four, faits de la même pdte, au poids de quatre livres dix onces , trois feulement font fortis pefant quatre livres, trois ont excédé ce poids, & les L 3  C 246 ) 44 antres ont varié au point que la diffërence entre les deux extrênies s'eft trouvée dc quatre onces &'demie. D'après cette confidération & plufieurs autres fuperflues a détaillef, il paroit que la Police feroit portie a fe rendre aux repréfentations des Boulangers. Cependant, pour mieux éclaircir la'matiere avant de pronencer, M. le Noir a défiré que tous ceux qui auroient des objections a faire, vouluffent bien les communiqucr. On doity répondre, & tout ce travaü fera réfumé dans un Comité extraordinaire & public, oü 1'on itatuera définitivement. 3l Décembre 1781. Mlle Contat qui, malgré tout ce qu'on a dit, a captivé aifez M. le Comte d'Artois pour en concevoir un fruit, après être accouchée d'un garijon, a reparua la Comédie, & joué il y a quelques jours. On aflure Cependant que le Prince n'a pas voulu le reconnoltre. 31 Décembre. Suivant ce qu'on écrit de Bordeaux, le Parlement de cette ville a renouvelé depuis la rentree fes arrêtés en faveur du premier Préfident & plus fortement que jamais; il a en outre pris une tournure très-adroite vis-avis de M. Dupaty: c'eft que, comme un Membre d'une Compagnie ne peut refter a une délibération le concernant, toutes les fois que les Magiftrats veulent en tenir une, ils commencent par 1'avertir qu'il fera -queftion de lui, & 1'obligent par la a fe retirer. Malgré ces nouveaux acles de fchifme , on  C 547 ) allure que M. Ie Berthon va retourner a Bordeaux: on dit même qu'il adéja quitté Chalon?. 31 Décembre. A en juger par les deux grandes répétitions préliminaires d'une première repréfentation d'Opéra. Celui de M. de Santerre elf. déja regardé comme trés-médiocre quant au Poëme, comme de beaucoup inférieur a Ninette a la Cour , qu'ön reconnoit parfaitement ici, quoiqu'il en ait changé le nom. On commence a dire qu'il elt très-imprudent a lui de reproduire la fiennc pour la troifieme fois, lorfque nous en avions déja-deux charmantes ,1'une en comédie, 1'autre en ballet; que c'ell s'expofer h des comparaifons défavantageufes -qui ne feront que mieux relfortu les défauts fenfibles & multipliés de 1'ouvrage. Quant a la mufique,onl'a trouvée délicieufe, mais découfue comme le fonds, & d'ailleurs pleine de difparates par la même raifon. Quoique fes partifans alfurent que c'ell 1'ouvrage le plus parfait de M. Gretry , les vrais connoilfeurs prétendent-, au contraire , que de vingt-deux ceuvres de fa compolition, celle-ci n'eft peutêtre pas la vingtieme. Au'furplus, 011 jugera demain plus pertinemment , & le Poëte & le Muficien. 31 Décembre. Les femmes de Cour , iniiniment au-deflus des fcrupules d'une bourgeoife, craignent moins d'annoncer leurs foiblefles: c'efl: fans doute ce qui a autorifé M. le Chevalïer de Boullers a divulguer la chanfon ftiivante. Elle eli L 4  ( MS ) adreffée au fils naturel qu'il a eu de Madame te Princeffe Cr***, nee San*** Do*****. Sur 1'Air: D'Albaneze, champêtre afils. O toi qui n'eus jamais dü naitre Gage trop cher d'un fol amour, Puiffes-tu ne jamais connoitre L'erreur qui te donna le joür'! Que ton enfance Goüte en filence Le bonlieur qui potir elle eft fait, Et que 1'envie Ignore, ou taife ton fecret. (Bis) La nature, au nom de ta mere, T'offrira fes premiers bienfaits, Un lait pur, un air falutaire De doux fruits, un ombrage frais. Que ton enfance Goüte en filence &c. ■ ■ fird (lift & Mitlii Renonce au rang, a 1'opulence , C'eft 1'homieur qui t'en fait la loi; Ne crains pourtant pas 1'indigonce , L'Amour i'écartera de toi. Que tori enfance Goüte eu filence &c. ■ Souvent une main inconnue T'oriiira quelque don nouveau,' En fecret une mere émue Viendra pleurer fur ton berceau. Connois ta mere, L'bonneur févere i i lil] , lijn;ffa ri tstt " ■ Ltii  ( 249 ) Lui défend de fe découvrir; Mais par tendrefiè, Mais par foiblefle Une mere aime a fe trahir. D'un air plus touchant & plus tendre, Peut - être un jour tu la verras Tour a tour dans fes bras te prendre, Et te remettre entre mes bras, Connois ta mere: L'honneur févere. &c. A D D I T I O N S Aux premiers Volumes de cette collection. A la page 284 du 2e Volume de la première Édition de Londres 1777. 19 Octobre 1765. Epitaphe de Bêbé, D. O. M. Ilic jacet Non corpusculum, fed Exta Nicolai Ferri Lotharingi, , E Vico de Plane In falmenfi Principatu, Nati die 14 Novembri, anni 1741, Et denati die 9 Maii anni 1704. Sceleton verö fervatur in bibliotheek Regia Nanceiana. Praster naturam portentum Corporis uon inelegantis L 5  Brevitate & gracilitate Speftabilis homullus Ut pote longus fex & viginti francicos Septenarum autem pondo librarum francicarura Et unciarum triura. Beneflco Staniflao 10. Polonorum Regi, Duci Lotharingite & Bard Carus: Cuique, qua; cajteris juvenilis tetas eft Seniam fint, Et luftra quinque fajculum. Tomé 3. A Ia page 57. Le 3 Juillet 1766. De célebre profcrir, Jean Jacqaes RoulTeau,n'a pas fait en Angleterre la fenfation que fa réputation fembloit lui promettre; il paroit même par les écrits publies anglois, qu'on n'y a pour lui qu'une très-méciiocre eftime, & qu'on y a cherché plus a le ridiculifer qu'a 1'admirer. Soit dégoüt ou dédain, il s'eft éloigné de la Capitale peu de-tems après fon arrivée,&il s'eft retiré k la campagne, ou u vit preique ignoré. iVlalgrê la lmgularué de lcn etre, on ne peut s empêcher de le plaindre & lui refufer beaucoup d'^prit. A la page 59. Le 10 Juillet 1776. Trois jeunes gens de 16, 17, 18 ans, qui fe prétendent impliqués injuftement dans 1'affaire de la mutilatiou d'un crucifix , arrivée a Abbeville le 9 Aoüt 1765, viennent de répandre un Mémoire a confulter& Confultation, lignés de huit Avocats, tendans a improuver la fentence & arrêt qtu condamnent au feu & a la mort,, comme on a  C 251 ) vu, deux autres jennes geus; ordonne qu'a 1'égard dc ceux-ci il fera fürfis a leur jugement jufqu'après 1'exécution. Ils prétendent que, dans les procédures & dans les jugemens intervenus dans. ce procés, il y a des vices qui ne peuvent êtreréformés que par des tribunaux fupérieurs; en conféquence , ils concluent a une requête civile, ou en celle dc revilion ; mais il ne paroit pas que leur demandé foit admile. A la page 63. Le 18 Juillet 1766. Le Cbevalier le Febvre de Ia Barre a été exécuté a Abbeville, & y a fnbi 1'on Arrêt dans toute fon étcndue. II a témoigné beaucoup de fermere a la vue de fon fupplice , n'a chargé aueun dc ceux qui ont paru participer aux ficrileges cömmis, a rapporté k lui feul tous les délits dont on a parIé, & s'eft attiré, par ce dernier acte de fa vie „ la pitié de tous les fpectateurs. A la page 64. le ar Juillet 1766. Extrait d'une lettre de Ferney du 15 Juillet M. de Voltaire, toujours occupé de la nouvelle affaire des Sirvins, n'a pas négligé la circonftance du voyage de Madame Géoffrin a Varfovie , & a profité du crédit de cette Dame fur 1'efprit dit Roi de Pologne, pour 1'engager k folliciter ce Monarque en faveur des accufés; il lui a en même tems adrelfé un Mémoire avec une lettre trèsadroite, telle qu'il en fait écrire en pareille circonftance. Je vous 1'enverrai; mais il ne veut pas qu'elle foit publique avant Lv réponfe. L 6  C 252 ) A ta page 64. Le 22 Juillet 1766. ïl feroit dilficile de rendre compte fuccincfement de ce qui s'eft pafte dans 1'ordre des Bénedictins, des divifions inteftines qui ont partagé les membres qui le compofent, &ont forcé le Gouvernement a en connoitre. B a été rendu a leur fujet plufieurs Arrêts du Conléil du Roi pour parvenir a concilier les efprits. Un nouveau du fix de ce mois confirme les Bulles & Lettres-patentes d'érecYion de la Congrégation de St. Maur, ordonne 1'exécution provifoire des déclaracions fur la regie, & des conftitutions de la dite Congrégation. Cet Arrêt coutient 42 articles. "La fermentation n'eft point éteinte & doit avoir des fuites, a en juger par les écrits que répand cliaque parti. A la page 64. Le 23 Juillet 1766. Extrait d'une lettre de Grenoble du 10 Juillet Ce n'eft que depuis peu que 1'Arrêté de notre Parlement fur la réponfe du Roi faite aux Députés mandés. a Verfailles , fe répand clandeftinement dans cette ville. ft eft daté du 21 Juin dernier & a fept articles. Meffieurs convienneut, dans cette piece fingu- ■ liere, que le Roi n'eft compiable qu'a Dieu de l'autorité fouveraine qu'il exerce dans fon Royaume , qu'a lui feul appartient l'inftitution de la loi fans dépendance £? fans part age, &,-par üne inconféquence très-palpable, prétendent cependant óter a S. M. la liberté de juger ou faire juger fes fujets, aiufi qu'il 1'eftime uéeeffaire,  C *53 ) & fe réfervent la faculté d'exatniner, de com- battre, de rejeter fes loix nouvelles Du refte, beaucoup de Pathos. II n'y a pas d'apparence qu'ils ofent faire irnprimer cet Arrêté, comme les précédcns. Ala page 66. Le 27 Juillet 1766. Un procés criminel trés - fingulier entre M. de laMaugerie , Gentilhomme de Normandie, & M. de Briqueville de la Luzerne d'un nom plus connu dans la nobleiTe, occupe le public & le partage. Le fond eft un cheval de 150 livres; maïs 1'acceffoire eft un aflaflinat en fa perfonne, dont le premier accufe le fecond. Le procés étoit a la Connétablie , & il étoit intervenu fentence qui avoit ordonné un plus amplement informé d'un au, pendant lequel le Sieur de la Maugerie Teroit. élargi, & le Sieur de la Luzerne tenu de garder prifon. C'eft dans ce point favorable pour lui, que 1'accufateur, voulant une viétoire plus complettc, s'eft pourvu au Parlement, & demandé la calfation de la Sentence. On annonce de ft part un Mémoire curieux. A la page 78. Le 18 Aoüt 1766. Le Mémoire de. M. de la Maugerie paroït depuis quelque tems. C'eft un fupplément aux autres. II y a joint mie carte fort détaillée du lieu du délit; ii y a même fait graver toutes les pofitions oü il prétend s'ètre trouvé'le 18 Février 1764,3 Saint Lo, jour & lieu de la fcene du délit, & il en fut réfulter des preuves phyftques devant paxjetau défaut dc témoins..  C 254 ) M. de la Luzerne, de fon cóté, répand un Précis pour infirmer les nouveaux raifonnemens de fon adverfairc; mais on eft obligé de convenir qu'il n'a ni la logique ni la force du FuEtum de celui - ci. A la page 80. Le 11 Aoüt 1766. Voici des détails plus exacts fur la rixe dont on a parlé. La courfe d'un cheval de M. de Lauragais, inonté d'un poftillon, avoit occafionné plufieurs paris. Par un mal-entendu entre M. le Marquis de Villette, & M. le Comte de Lauraguais, ce dernier a prétendu avoir gagné un tableau de prix au nouveau Marquis, qui s'en eft défendu. M. de Lauraguais, piqué de la négative ,-a écrit une lettre a M. de Villette qui n'étoit pas faite pour flateer fon amour-propre. Blelfé de 1'épitre, il y a répondu par des épigrammes , & s'eft rendu chez Mlle Arnoux pour y rcjoindre foidifant M. de Lauraguais. Mais , comme cette hiftoire avoit déja fait bruit, a peine y étoit-il, que,fuivant de prés, des gardes des Maréchaux de France fe font attachés a leurs perfonnes.Comme 1'un & 1'autre ont. réellement beaucoup . d'efprit, ils en ont fait ufiige pour s'expfiqnèrplus de Hing froid, & fe font conciliés de fttcon qu'ils font devenus les meilleurs amis, ne fe quittant prefque plus , a la promenade , aux fpectacles &c. M. de Villette a acquitté ie paris; en revanche M. de Lauraguais lui a fait préfent d'une joiiè voiture. Tout cela alloit le mieux du monde; malheureufement il a fallu compa-  C 255 ) rottre au tribunal de MM. les Mardchaux deFrance, & s'y expliquer fur le fonds de Falïaire. Ce refpecbable Aréopage, après les avoir ouïs, & pris connoiffance de beaucoup de détails dans lefquels il n'eft pas pofïïble d'entrer, a cru devoir prononcer un jugement; mais il doit être confirmé par le Roi avant qu'il s'exécute. Cette aventure a fait ici beaucoup de bruit & n'a point furpris de Ia part des auteurs. M. le Comte de Lauraguais n'eft. pas un homme ordinaire, & M. de Villette a fait fes preuves. 11 elt fils de Tanden Tréforier général de 1'extraordinaire des guerres, & elt aujourd'hui Chevalier .de Sr. Louis; il étoit dans la derniere guerre AideMajor général des logis de 1'armée. A la page 80. Le 24 Aoüt 1766. L'Académie Royale de Mufique fe difpofe a remplacer les fragmens, & doit y fiibftituer trois aétes nouveaux fous le titre de Fêtes lyriques. Le premier ballet ell d'un jeune Muficien de 1'Opéra, qui fe nomme Francmur, neveu du Surintendant de la mufique du Roi: Lindor & Ismene; ce Poëme elt attri'oué a plufieurs perfonnes qui gardent 1'anonime; on le croit cependant commundment de M. dc Bonneval. La feconde entrée elt un ouvrage pofihume de deux Auteurs morts, Rameau & Calrazac, & a pour titre Anacréon, qu'il ne faut pas confondre avec un autre Poëme du même nom, aufli de Rameau. Le troifieme ballet enfin, eft Ernfine , Pafiorale héroïque, reprcfentée a Fontaineblcau lc 9 Novembre der-  C 256 ) Hier; Drame de M. de Moncrif, Leéteur de la Reine, & mufique deBerton, Me. de mufique de f Opéra, & connu par plufieurs diacones de Ia première difiinétion, ainfi que par différéns morceaux détachés &c. A la page 84. Le 31 Aoüt 1766. On a fait hier 1'ouverture de la foire Saint-Ovide. Depuis fon nouvel établiffement a la place de Veridóme, elle a acquis chaque année de la célébrité par la fureur du public a s'y rendre le foir & a minuit. Des m'arionettes, des batteleurs, a la honte du bon goüt & de Phonnêteté publique, y attirent tout Paris, & Pon voit a ces fpectacles plus d'a& fluence qu'aux meilleures pieces des Francois. A la page 84. Le 1 Septembre 1766. On a donné aujourd'hui pour la iere. fois fur le théatre de POpéra Lesfêtes lyriqiies aimoncées. i°. Lindor £ƒ Ismene, dont les paroles & Ia mulique ont paru médiocres , pour ne rien dire de plus ; Anacréon; il a été recu avec plaifir, & le Poëme, fans être merveilleux , elt palfablement coupé, & il y a de jolies chofes. Quant a Erofine ,il faut abandonner le Drame pour n'écouter que la mufique qui a plu beaucoup, ainfi que les ballcts; on regrette que le Muficien ait travaillé fur d'aulfi plates rimes. L'accueil que( fon ouvrage a recu du public , doit 1'encourager a courir cette carrière. A la page 86. Le 7 Septembre 1766. D'Après le jugement de Meffieurs les Maréchaux de France , M. le Comte de Lauraguais a été obligé de  C 257 ) rendre le tableau en queftion a M. de Villette. Nos Seigneurs ont fans doute regardé le pari qui I en avoit été fait comme nul, ou devant être tel après ce qui s'eft paflé enfuite. A la page 89. Le 12 Septembre 1766. On va délivrcr inceffamment la feconde foufcription de 1'eftampe de la familie des Calas qui a fait la plus grande fortune. L'emprelfement du public a favoir n'ayant pu être fatisfait par la première planche, on en a fait graver une autre qui fera copiée fidelement fur la précédente. A la page 90. Le 14 Septembre 1766. Depuis ; qu'il eft queftion de 1'illumination meilleure de cette capitale, on ne s'eft pas encore déterminé pour 1'efpece de lanternes qui doivent 1'éclairer, & 1'on a laiffé fubdder les anciennes. On a feulement tenté un nouvel cffai d'une centaine du nommé Bailly, 1'un de ceux qui ont concouru pour le prix. A en juger par 1'effet de fes lanternes , comme il n'eft que momentané, il eft bien loin de remplir les objets du programme. La plupart de fes lampes s'éteignent & ne produifent pas conftamment la clarté qu'on a droit d'en atteudre. D'ailleurs, ellcs font fujettes ü des inconvénients qu'il feroit trop long de détailler & qui font croire qu'elles feront profcrites. II y a toute apparence qu'on reviendra a celles qui ont été expofées 1'année derniere fur le Pont ncuf, & qui approcbent le plus de ce qu'on défire; elles ont fubi toutes les épreuves de 1'intempérie de Pair pendant un an environ,  C 258 ) & conitamment éclaird plus de douze heures de fuite fans diminution de lumiere. Elles font du Sieur Bourgeois de Chdteau-blanc, qui a partagé le prix propofé, & dont les inventions ont été imitées en partie par tous ceux qui ont concouru. A la page 91. Ie 16 Septembre 17Ó6. Mlle de la Chalotais, fous le nom de fon pere & de fon frere comme fondée de leurs pouvoirs & fe faifant fort pour MM. de Montreuil, de la Gacherie, & de Kefalaut, a fait préfenter au Roi deux Requêtes tendantes a fupplierS.M. de retirer les Lettres patentes du 5 Juillet dernier , comme étant un obftacle au renvoi qu'ils ont demandé par la Cédüle évocatoire. , La première de ces Requêtes eft du 11 Aoüt & la ae. du 26. Elles font foufcriptes par huit des principaux Avocats du Parlement qui eftiment que la procédure faite a Rennes depuis les Lettres patentes du 5 Juillet dernier, ainfi qu'elle elt expofée dans cette Requête, eft nulle, par les moyens qui y font établis, & que cette nullité ne peut que fortifier ceux fur lefquels on a fondé la Requête par laquelle le Roi a été très-humblement fupplié dé retirer ces Lettres. Ces deux Requêtes ont prés de 80 pages d'impreffion in-40. A la page 91. Le 16 Septembre \j66. II paroiÈ encore un noüveau Mémoire d confulter öf Confultation, fous le nom de la familie de M. de la Chalotais, qui demandé fi 'la preuve par cömparaifon d'écriture, fur laquelle on ne pourroit pas prononcer une condamnation a peine capi-  C 259 ) I tale, fuffiroit pour donner lieu a une pehie lége-» I re, pour faire órdonner un plus aiuplement inI formé ou pour mettre hors de cour fur 1'accuI fation. Le Confeil qui a examiné la queftion & 1'ouvrage de le Vayer fur le même fujet, perfifte dans fa Confultation du 26 Juillet dernicr, & recueille de nouveau une multitude de faits qui prouvent les erreurs & les'contradictions continuelles des Experts, d'oü il conclut que s'il n'y a contre M. de la Chalotais que la feule dépofition des Experts , en quelque nombre qu'ils puiffenc être , on ne peut ni mettre hors de cour, ni prononcer un plus amplement informé , & qu'on duit le décharger de 1'accufation. La Confultation ajoute de plus que, par 1'examen des pieces imputées, tout dépofe en faveur de M. de la Chalotais ; que jamais délit ne fut moins vraifemblable; que la qualicé du crime, celle de 1'accufé , fa conduite , fes fentimens les plus connus, que tout concourt a établir qu'il n'eft pas auteur des billets anonimes , & qu'on blcfteroit également les loix naturelles & pofitives, en ne le déchargeant pas de 1'accufation. Cette Confultation eft fignée des mêmes Avocats que ceux qui ont foufcrit celle des Requêtes, & eft auffi du 26 Aoüt dernier ; elle contient 36 pages in-4.0. A la page 98. Le 4 Oclobre 1766. Vers le commencement de ce mois on a répandu dans Paris & a la Cour avec la plus grande profufion, un Mémoire (prétendu fignifié) contre M. Beu-  C aöo ) det, Secrétaire général de la Marine , & ne tendant pas moins qu'a lui faire perdre 1'eftime publique; mais 1'auteur s'y livre a une déclamation qui décele fon caraftere; il a manqué fon coup, & 1'attaque eft fi grofliere, qu'avec un peu d'attention, on dévoile 1'iniquité des prétentions de fa partie ; toutefois , comme ce Mémoire eft plutót un libelle & une diffamation qu'une légitïme défenfe, M. Beudet fe propofe de prendre a partie 1'Avocat & de le mettre fous le glaive de la Juftice; il fe nomme la Ville, & pafte pour Être un homme très-fufpect, pour ne rien dire de plus. MM. les Avocats en font fi perfuadés, qu'ils font fait rayer de deffus le tableau oü il avoit trouvé le moyen de fe faire inferire. A la page 102. Le n Octobre 1766. La Difette desfujets a la Comédie Francoife, tant pour les róles de Petit-Maitre que pour ceux a manteau, a déterminé M. le Duc de Duras, Gentilhomme dc la Chambre du Roi, a envoyer un Acteur confommé dans les Provinces , pour tilcher de trouver dans les troupes qui y font répandues des gens en état de faire ces róles: c'eft le Sieur Préville qui eft chargé de cette commiflion. A la page 102. Le 12 O&obre 1766. Les ordres font donnés pour la conftrucYion d'un pont en face du cours fur la riviere de Seine, qui tiendra lieu de celui de Neuilly; on abattra 1'efpece de monticule qui fe trouve a 1'Etoile, de forte que la vue portera fur ce pont de la place dc Louis XV  & de Ia terraffe des Thuilleries. Ce monument fuperbe fera plufieurs anne'es a édificr, ainfi que le chemin pour y conduire; on croit qu'on y enverra des troupes pour 1'enleveroent des terres, ce qui en accélérera beaucoup 1'exécution. II y a longtems que 1'on fait des vceux pour qu'on emploie ces bras inutiles en tems de paix, aux travaux publics ; 1'utilité generale s'y trouve avec leur avantage particulier; étant jufte de leur augmentcr leur paye dans ces occafions. A la page 10a. Le 14 OStobre 1766. On a arrêté , il y a quinze jours environ, & mis a laBaftille 1'Abbé Defplaces, pour avoir écrit des lettres injurieufes contre une novice de Remiremont. A la page 103. Le 16 QStobre 1766. L'eflai du Sieur Bailly pour éclairer quelques rues de Paris 11e prodtiifant pas 1'effet qu'on en attendoit, on vient de recourir au Sieur Bourgeois de Chateau. blanc pour entrer en lice nouvelle, & il paroit que nul compétiteur ne peut lui difputcr la préférence. L'on ne doute pas qu'il ne foit choifi pour 1'illumination complette de tout Paris; mais comme cet objet de dépenfe eft confidérable, il fera exécuté en plufieurs années. A la page... Le 25 O&obre 1766. Le fameux Pere la Tour, ci-devant foi-difant Jéfuite, qui a été longtems Principal du college de Louis le Grand, eft mort aBezancon , il y a quelque tems. Ce n'étoit pas un lïttérateur, mais un des intriguans de la Société, & il y avoit une grande prépondérance; ayant eu 1'hoiineur d'avoir été Préfet  ( 262 ) du Prince de'Conty,auprès duquelil avoit beaucoup de crédit, S. A. 1'avoit d'abord retiré au Temple. Ala page 101. Le 30 OSlobre 1766. On mande de Rochefort qu'on y a fait une foufcription de cinquantc ac"tions,de mille livres chacune, pour y batir une falie de fpedtacle; qu'elle a été auffitót remplie, & qu'on y pofa la première pierre le 22 du mois dernicr. A la page 101. Le 31 OSlobre 1766. La nouvelle d'Efpagne au fujet des Jéfuites n'eft pas telle qu'on Pa débitée depuis quelques jours , mais il paroït qu'il y a eu des foupcons contre eux alfez fondés pour mériter 1'attention du Gouvernement, & 1'on apprend de Madrid, que M. d'Aranda a fait inveflir leur college, appelé le College Impérial. On croit que cette expédition eft relative a 1'affaire de Bayonne dent on a parlé. A la page 101. Le 31 Octobre 1766. Le début de Mlle Durancy continue avec fuccés ; elie vient dejouer Eleftre dans ÏOrefie de M. de Voltaire. II paroit qu'elle a trés-bien faifi ce róle ; le •public en a été fort fatisfait, & efpere beaucoup de fon talent. On dit que Mlle Clairon voit avec douleur ce jeune fujet donner Pefpoir dc ne plus la regretter bientót. Mais c'eft furtout Mlle Dubois qui, étaut en acbivité, eft furieufe de voir une auffi laidc créature 1'emporter au Théatre fur fa figure fuperbe. : A la page n 1. le 3 Novembre 1766. M. Poivre  ( *63 ) de Lyon , homme intelligent, qui a voyage' beaucoup dans 1'Inde & qui y a fait un commerce aflez confidérable , mais fins nailfance, fans grade, & tout neuf dans 1'adminiftration , a été choifi par la Cour pour Commiffaire général a 1'Ifle dc France, faifant fonction d'intendant. II a été Lazarifte & eft manchot. II eft de la fecbe des économiftes, & ces Philofophes triomphent de voir un de leurs coriphées immifcé dans les affaires publiqucs. A la page ui. le 5 Novembre 1766. Toute PEurope a rctenti du projet de Pexécution des moyens d'extraire desPyrcnées des mdtures pour notre Marine; après des travaux auffi immenfes qu'effrayans, furmontés par une conftance de prés de vingt années de peine & de foins , au moment de jouir de 1'avantage flatteur d'avoir mis a heureufe fin une auffi belle entrcprife, fon véritable auteur s'eft vu en butte a Penvie & a la jaloufie de geus intéreffés ;\ lui ravir 1'honneur & 1'avantage de fes veilles; par des menées auffi fourdes que lachement ourdies, ils ont eu le crédit de s'approprier la manutention de cette grande affaire & d'cn éloigncr le Chef principal & fes aflbeiés, fous des prétextes auffi faux que vains, & de confommer leur iniquité en furprenant au Confeil du Roi, lc 28 Mai 1764, un' Arrêt qui réfilic & déclare nul & comme non avenu le traité fait avec le Miniftre de la Marine, pour 1'exploitation & le tranfport de ces bois. Par cette conduite inouïc, le Sieur de Forcade  C 264 ) s'eft vu molefté dans fon entreprife, dérangé dans fa fomme , attaqué dans fon honneur, & au moment de tout perdre; mais , confiant dans la juftice du Roi & de fes Miniftrcs, il s*eft rendu ici aux pieds du tröne, y a porte fii réclamation dans une Requête au Roi, oüil a expofé les faits détaillés de cette odieufe manoeuvre, les déprédations qui en ont fuivi, &c. Le Gouvernement, convaincu de fon atrocité, par les pieces qui ont été mifes fous fes yeux, en a donné des preuves non équivoques en faifant droit fur la Requête du Sieur Forcade & en lui rendant fa confiance pour la geftion de cette importante exploitation , qui eft aujourd'hui régie pour le compte du Roi par des Commiflaires établis par S. M. & a la tête defquels il a eu 1'honneur d'étre nommé. A la page 111. Le 7 Novembre 1766. Une Demoifelle Saint-Val, ci-deviant Actrice a Lyon, & qui a déja paru, il y a prés de fix mois, fur le théatre Francois, vient de reprendre fon début dans Ternerede; elle y avoit déja rempli le róle &'Amênaïde avec fuccès; mais, a cette reprife, elle a furpalfé 1'attente du public hier, ce qui n'avoit pas été la furveille ; on a imputé a timidité fi elle n'a pas joué Lundi comme on 1'efpéroit; remife de fes craintes , elle a rendu fon róle avec une chaleur & un fentiment fupéricur aux plus beaux momens de Mlle Clairon. On ne peut pas dire qu'elle n'aitpasa travailler encore;: mais on peut juger, par fes talens actuels, jufqu'a:  C a«5 ) qu'a quel point elle elt capable de les porter. Lè Théatre Francois a lieu de fe féliciter de cette ncquifition: jointe avec celle de Mlle Durancy, elle doit relever la fcene qui étoit a la veille de manquer de fujèts tragiques femelles , & qui auroit grand befoin de fecours en hommes. A la page 112. Le 9 Novembre 1766. Un difciple de M. Tronchin, nommé Nurmandie, de Geneve , qui étoit ici depuis peu dc tems pour fuivre les inllructions de fon maltre; dans une vapeur des plus fortes , pour ne rien dire de plus, s'elt jeté dans le Palais royal du fecond étage d'une des maifons qui font dans la rue des Bons-Enfuis; il elt tombé fur le treillage qu'il a brifé fans fe tuer: avec de la docilité on auroit pu le guérir, mais perfiltant dans fa manie de vouloir périr, le Ciel a comblé fes vceux, & il elt mort. Ala page 112. Le 10 Novembre 1766. L'Aca- démie Royale de Mufique fe difpofc a donner uu Opéra nouveau, intitulé'SzYiJz'e, ballet en trois actes, précédé d'un prologue. Les paroles de ce Poëme font de M. Laujeon, qui a déja donné des Poëmes lyriques qui ont été bien recus du public; le Sieur la Garde, Muficien, avoit fait la mufique de cet ouvrage, qui a été joué chez ie Roi aux petits appartemens; mais depuis , M. Lnitjeon ayant retouché les paroles, elles ont été remifes en Mufique par les Sieurs le Breton & Trial, & le tout exécuté 1'année derniere a. Fontainebleau avec aflez de fuccès. Les Tomé XVUL M  ( a.66 ) trois Auteurs ont encore fait de nouveaux changemens pour être mis ici fur le théatre de 1'Opéra. A la page 117. Le 18 Novembre 1766. On a "donné aujourd'hui pour la première fois le Ballet de Süvie en trois acres, préeédé d'un prologue repréfentant les forges de Vulcain. Cet Opéra, annoncé avec diftincrion dans le public, n'a pas répondu a fon attente; il y a quelques morceaux qui ont été applaudis; mais, en général, il n'a pas été bien recu; on ne peut pas imputer ce peu de fuccès aux Directeurs; ils y ont prodigué la dépenfe dans tous les genres, & elle cd trèsconfidérable. A la page, 117. Le 19 Novembre 1766. Rien n'eft plus commun que les maladies de poitrine, & jufqu'a préfent Part des Médecins femble y avoir échoué. On aflure que le hazard vient j d'indiquer un remede trés- efficace, & plufieurs : perfonnes attaquées de cette maniere en font' ufage. C'eft de fe renfermer dans une étable a j vaches &d'y pafler plufieurs mois, de compagnie j avec ces animaux ; on prétend que leur haleine J les efprits qui s'en exhalent, améliorent Pair, qui, porte ainfi dans les poumons un beaume falu-j taire & leur rend 1'élafticité. Quoi qu'il en fóitJ comme tout eft mode ici, nos petites-maitrefles, principalement fujettes au mal en queftion, font prefque toutes conftruire de ces efpeces d'infhv meries dans leurs nouvelles maifons. | A la page 117. Le 20 Novembre 1766. Onj allure que 1'Impératrice de toutes les Ruffies ,j  C '267 ) ayant requis plufieurs fois le Roi de Poïogne d'introduire dans les Etats le rite grec, S. M» Polonoife lui a fait remettre en dernier lie^ la réponfe fuivante. „Je ne méconnois pas les obligations quej'ai ü 1'Impératrice des Ruffies dans lesmoyens dont Dieu s'eft fervi pour m'élever au tróne; mais en y montant j'ai proinis 1'exaéle obfervation de ma-religion dans toute 1'étendue de mon Royaume. Si j'étois aflez foible pour 1'abandonner, ma vie & mon tróne feroient cxpofés au jufte reflentiment de ma nation. Vous me menacez d'employer la force pour établir vos profets; c'eft une extrëmité qui me deviendroit également funefte. Je n'entrevois que du dauger dans les réfolutions que j'ai a prendre;. mais i'aime mieux m'expofer a celui que 1'honneur & le devoir m'engagent h choifir, & dès a préfent je m\mis a ma nation pour la défenfe de notre fainte religion. A la page 128. Le 6 Décembre 1766. On vient de publier un Arrêt du Confeil concernant les Attes du Clergé. II eft du 25 Novembre deruier, & rappelle ceux du 15 Septembre 1765 & 24 Mai 1766. Le Roi cafle & annulle les Arrêts du Parlement de Provence du 30 Décembre 1765, des Pariemens de Touloufe, de Bordeaux, de Rouen & de Paris du 14 , du 15, du 23 Novembre 1765 & du 8 Juillet 1766, comme ne pouvant fe concilier avec les difpofitious de fon Confeil & avec les raifons qui ont M 2  ( 268 ) déteifltiné S. M. a caïïei les Anêts de fon Par* lefnent de Paris des 4 & 5 Septembre -1705. N'entend néanmoins S. M. autoritei 1'efFet qui pourroit être donné auxdits actes de 1'AiTem* bjée, en exigeant des adhéfions ou fignatures qu'elle n'a pas cru devoir exiger, & qui pourroient être également préjudiciables aux loix.de PEglife & a. la tranquillité du Royaume. Défend S. M. d'cn exiger de nouvelles h favenir, fe réfervant, au furplus, a ellefeule, comme elle a déja fait par fon Arrêt du 24 Mai, la eonnoiffauce de toutes les difputes & conteftations qui pourroient s'élevcr au fujet defdits actes. A la page 140. Le 25 Décembre 1766. On vient de publier un Arrêt du Confeil d'Ltat, daté du 6 de ce mois, qui fuprime , comme Libelles , plufieurs écrits imprimés fans permiffion. Ils ont pour titre CommiJJions extraordinaire!; foumal des événemens qui ont fuivi lesacles de démijjion du Parlement de Bretagne du 22 Mai 1766; Suite du mime Journal, Chronologie des Lettres de Cachet. II y elt dit que dans la vue de prévenir & d'émouvoir les efprits , les Auteurs obfeurs de ces ouvrages clandeitins, ont avancé les principes les plus captieux & les plus faux; qu'ils ont elTayé de les accréditer par les citations les plus infideles; que, par un artilice auiTi condamnable & pour fatisfaire leur malignité,' ils ont altéré ou déguifé plufieurs faits importans; qu'ils ont enfin porté leur témérité jufqu'a reudre public ce qui par fa nature  devoit demeurer fecret, & jufqu'a y joindre tout ce qui pouvoit le plus aigrir & animer les efprits contre des évenemens que les circonftances ont rcndus nécelfaires. ^A la page 140. Le 26 Décembre 1766. La Chronologie des Lettres de Cachet, que 1'on a vu fupprimée par 1'Arrêt du Confeil du 6 de ce mois, elt une feuille d'imprellion de huit pages feulement, qui a pour titre le Tableau Chronologique des Lettres de Cachet diliribuées, & des actes violens du pouvoir abfolu , exécutés en Bretagne depuis la ügnature de Pafte-des démirfions desOfficiers du Parlement du 22 Mai 1665. L'Auteur de ce pamphlet prétend que, depuis cette époque, 158 perfonnes ont été enlevées, enfermées, exjlées, vexées, & décrétées; il en donne la lifté par noms & qualités. On voit par Pénoncé feul de cet Ecrit, combien il eft dans le cas de la profcription, d'autant qu'il eft 3cCompagné de notes analogties au titre. 11 eft cruel pour le Gouvernement que fon aétive vigilance ne puilfe pas prévenir la publicité de ces fortes de libelles, & qu'il foit obligé d'employer la févérité pour en arrêter le cours. A la page 149. Le 4 Janvier 1767. On a fiit plufieurs éditions tres - clandeftines des Mémoires de M. de la Chalotais & de fes Lettres au Hoi & a M. de St. Florentin. On ne peut imputer ces impreffions furtives qu'a Pappas du gaitr. La plupart des vendeurs ont déja fiibi la peine de leur témérité & font arrêtes. M 3  C 270 > - A la page 149. Le 5 Janvier 1767. Après 1'éclat de Pavanture de Madame de Boisgiron , convaincue d'avoir abufé de la condance de Madame la Dauphine & de 1'avoir volée, il femble que le jude chatiment qu'elle a éprouvé auroit du être un frein pour quiconque auroit 1'honneur d'approcher de prés nos Princefles •: contre cette attente, ce funede exemple n'a point elfrayé la nommée Gruelles, Femme de Chambre de Madame ViStoire. Elle a ètd arrêtèe par ordre du Roi fur la preuve & fon aveu d'avoir volé Madame Vicboire. Elle ed fille du Conciërge de Choifi (Filleul) qui a la meilleure réputation du monde, & la plus judifiée; dans le dèfefpoir de cet événement, il ed venu fe jeter aux pieds du Roi & demander a fe retirer. S. M., touchée de fon état, a bien voulu lui ordonner de reder, & lid, dire que les fautes étoient •perfonnelles. Al?, page 151. Le 10 Janvier 1767. L'Académie Royale de Mufique fe difpofe a reproduire fur fon théiitre , le Poëme de Théfée de Quiaa'ult, remis en mufique par Mondonville, le même qui fut joué il y a deux ans a Fontaineblcau. Le public ed bien impatient de juger de la témérité du moderne Muficien. La mufique de Lully ayant été en poficflion de lui plaire jufqu'a préfent. Paris n'a pu faire comparaifon des deux Auteurs, cet Opéra n'ayant été repréfenté qu'une fois a la Cour, fuivant 1'ufage.. A la page 142. Le 12 Janvier I767.LC nommé De/prés Rouquerel, frere d'un négociant dc  ( 276 ) le même efprït, a répondu que c'étoit une hiftoire calomnieufe, inventée a plaifir. Malheureufement, on prétend que Monseigneur cn portera toute fa vie la cicatrice imprimée fur fa cuioè'. A la page 162. Le 4 Février 1767. Le Mémoire de Mi de la Chalotais, dont on a parlé, a pour titre: Troifieme Mémoire de M. de la Chalotais, Procureur général au Parlement de Bretagne, & tient 71 pages d'impreffion m-12. On y voit réguer le même ton d'affurance que dans les précédens. II y impute a la calomnie la plus atro.ée les accufations intentées contre lui; il y réclame 1'équité & Ia juftice du Roi, & il y inculpe des perfonnes en place des faits qu'il prétend réfuter. II termine par fon teftament, oü il* affirme de nouveau fon innocence & en prend le Ciel k rémoin; &, par un Poftcriptum, annonce qu'il apprend qu'il y a un Mémoire contre lui de M. de Calonne. II n'ignore pas les moyens qu'on apporte pour qu'il refte dans le filence; mais il allure que cet adverlaire ne perdra rien pour attendre, & qu'il répondra a quelques faits relatifs a M. de Flelfeile, Intendant de Bretagne. A la page 162. Le 5 Février 1767. On mande de Rochefort que 1'effai-d» la pAte alimentaire n'a pas eu le fuccès qu'on attendoit, & que les fix forcats n'ont pu en foutenir 1'épreuve plufieurs jours; on a été obligé de les mettre a riiopital pour leur faire prendre une nourrkure pIöS tblidc.»  C *77 ) A la page 80. Le 9 Février 1767. Le froid accueil du public pour Eugenie 11'cn a point impofé a fon Auteur; il a prétendu le fubjuguer , & il y eft prefque parvenu. II a élagué, retranché & ajouté. En 24 heures fon Drame , moins défectueux, a répara fur la fcenc, purgé des expreflions balfes & trivialcs qui avoient ddplu. L'intérét plus relferrd , 1'action moins trainante, le pathdtique plus ddveloppd, les Acteurs mieux enfemble, le tout enfin a fait plaifir en général. On a demandé 1'Auteur qui n'a pas daigné fe montrer; on a forcé l'Acteur a le nommer. Des bidets rdpandus dans la Salie n'ont pas peu contribué a ce fuccès, qui pourra fe foutenir fi, a chaque intervalle des repréfentations, on corrige une partie des défauts qui rendoient la piece miférable. Du refte, elle fera toujours médiocre. A la page 168. Le 17 Février 1767. 11 y a longtems que les Amkafladcurs o'nt formd la prétention d'aller au bal de 1'Opéra, 1'épée au cöté comme les Princes du Sang. Le Roi a bien voulu décider en leur faveur, & en conféquence plufieurs Ambafladeurs y ont été ainfi ce carnaval, pour prendre aéte & polfeffion de cette prérogative. A la page 169. Le 24 Février 1767. Un Officier fort épris d'une femme & au moment de Pépoufcr, s'étant appercu qu'elle differoit de lui donner la main fur les notions qu'on lm avoit fait parvenir de fon caractere violent, de défefpoir s'eft brulé la cervelle avaut-hier dans 1'autjM 7  C 2?s ) chambre de fa maitreffe. Elle fe nomme Mlle Gouilli. Elle a été fuccefïïve'ment la maitrelfe de MM. de Trudaine, Clairault, Duféjour & autres Académiciens & Savans. A la page 169. Le 25 Février 1767. Le Poëme de Pandore avoit été mis en mufique par feu M. Royer, & devoit être joué fur le théatre de PAcadémie Royale de Mufique huk jours après la mort de cet Auteur, mais fon décès fubit en fit fufpendre la repréfentation en 1775. A la page 179. Le 10 Mars 1767. On mande de Rochefort que la récidive de Pexpérience de la pate alimentaire fur dix nouveaux forcats n'a pas eu plus de fuccès que la première, & qu'on a été obligé de 1'abandonner entierement. A la page 184. Le 18 Mars '1767. On parle beaucoup d'une ealfette précieufe pour les papiers qu'elle contient, lailfée par M. le Dauphin a Madame la Dauphine, & dont cette Princeffe a fait gardicn M. 1'Evêque de Verdun, fon premier Aumónier. On prétend que dans cette ealfette font différéns Mémoires, Ouvrages & ïnftruclions du Prince défunt, a remettre au Duc de Berri, le Dauphin aeluel, lorfqu'il fera en état d'en profiter. A la page 187. Le 21 Mars 1767. On vient d'imprimer les Remontrances du Parlement au Roi du 30 Aoüt dernier, au fujet des AcTres de 1'Affemblée du Clergé de 1765 &c. Elles 11e font _ point fufceptibles d'analyfe par la difcuflion oü elles entrent fur les matieres qui en font 1'objet  C m ) fort foelies , & ne devant jntéreffér que les Théotogiëns ou les ddvots. Tout ce qu'on peut alfurer, c'elf que 1'ouvrage elf excellent dans fon genre & infniiment plus fort de raifonnemens & de preuves que celui des Prdlats. A la page 188. Le 24 Mars 1767. L'Académie Royale de Mufique a remis aujourd'hui fur fon théatre Hypolite & Aricïe, Opéra de Rameau, qui a commencé la réputation de ce céIcbre Muficien ;.il a été bien recu du public, mais cependant pas avec cet enthoufiafme que fon a porté a Caftor cjf Pollux, & 1'on eft forcé d'avouer que, malgré la bonne volonté des Directeurs, ils n'ont pu en diftribuer les róles aulïi avantageufement qu'ils 1'auroient defiré fi tous leurs employés avoient été en état de jouer. A la page 198. Le 7 Avril 1767. Les batimens du Palais royal font. conduits avec plus de qélérité que de goüt. L'Efcalier eft fiui & ne répond point a la dépenlè & a ce qu'on attendoit, aiufi que le refte. II feroit trop long de rendre compte des défauts monftrueux qui fe trouvent dans 1'enfcmble qu'on ajoute a ce palais. II fera bien au-delfous de 1'argent immenfe qu'onyfacrilie. La première cour, par le nouveau plan, eft alfez belle, & , pour la rendre plus vafte, au lieu d'une colonnade qui devoit régner fur la rue Saint Honoré, on y met une grille. II paroit que la Salie de 1'Opéra n'eft pas mieux traitée & qu'elle eifuira de fortes critiques. A la page 205, Le 21 Avril 1767. On vient  ( 28o 3 d'imprimer la Sanclion Pragmatique du Roi d'Efpagne ayant force de loi, qni cnjoint a tous les Religieux de la Compagnie de Jefus , de fortir de fes Royaumes; leur fait défenfe de jamais s'y rétablir, & ordonne la confifcation de tous leurs biens. Cette piece curieufe, datée du deux de ce mois, elt traduite en francois & fe vend a tous les coins de rue avec Mm profufion peu commune. En général,la nouvelle a été accueillie ici avec la plus grande joie, & le public elt tellement indifpofé contre cette trop célebre Société , qu'il ne celfe de faire des vceux pour fon extinction totale. On ne doute pas qu'a 1'élection du nouveau Pape, une des conditions ne foit d'abolir les Jéfuites dans toute la Cbrétienté. A la page 206. Le 24 Avril 1767. Les fpectaclcs des feux d'artifices, fufpendus a caufe de lafaifon, ont repris hier. Le goüt du public pour ces amufemens, les a multipliés beaucoup, & ont encouragé les artilles a les perfectionner. A la pas:e 2o5. Le 24 Avril 1767. On a fait imprimer un Tableau prétendu des AJJemblêes fecretes cS frequentes des Jéfuites ts leurs affiliés d Rennes. On impute a leurs complots la difgrace & les malheurs de MM. de Caradeu & de la Chalotais &c. On y lit les noms prétendus de ceux qui forment ordinairement ces afl'emblées, les lieux oü elles fe tienncnt; on y trouve tous gens affiliés, foi-difant, aux ci-devant Jéfuites &c. On' doit fe rappeler que le Parlement de Bretagne n'a pas donné a fon Arrêt contre les  C ssi ) Jéfuites toute Pextenfion de celui de Paris, & que Rennes eft dévenu, pour ainfi dire, 1'afde de tous ceux qui n'ont pu en trouver ailleurs. A la page 217. Lc 13 Mai 1767. Les 'nouveaux Directeurs out remis a la rentrée Théfée; ils ont fait des changémens alfez confidérables dans les fujets tant des ballets, du chant, que de Porcheflre qu'ils ont augfhenté de plufieurs infixumens; mais le vicc radical de cc théatre heft aujourd'hui dans fi mufique foporative, depuis qu'on s'eft un peu familiarifé avec fltalienne. A la page 217. Lc 14 Mai 1767. M. le Marquis de Courtanvaux, ayant delfein de connoitre les cótes de la Manche, de Flandre & dc la Hollandc, pour les vifiter a fon aife & fatisfaire fa curiofité, a fait conftruire au havre une frégate qu'il arme & équippe a fes frais, & dans laquelle il s'embarque'ra avec plufieurs de fes amis , & furtout avec des fiivans qui 1'accompagneut dans ce voyage. II fe propofe de mettre a la voile dans le courant de ce mois. L'Académie compte fur beaucoup d'expériences de cet illuftre confrère & des autres. A la page 217. Le 15 Mai 1767. On parle beaucoup d'une lettre du Pape au Roi d'Efpague au fujet de 1'expulfion des Jéfuites. S. S. témoigne fa douleur de la facon dont il a plu a S. M. Catholique de profcrire cette célebre Société de fes Royaumes. II impute a la calomnie tous les délits dont on les accufe, & demandé qu'elle foit recue .a fe juftifier.  C 082 ) A la page 219. Le 19 Mai 1767. Le Roi étatit a Choify il y a quelques jours, & prenant le divertiffement de la chafie du cerf dans la forêt de Sennar, s'égara a la pourfuite de 1'animal qui fut couru plus de trente lieues. S ui vie d'un très-petit nombre de Seigneurs, de M. le Prince de Beauveau , Capitaine des Gardes , S. M. fut furprife par la nuk dans les bois: ineertains de leur route, ils marcherent a Pavanture & gagnerent enfin un village pres Rambouillet, ils y trouverent heureufement un maltre de pofte qui avoit une chaife dans laquelle le Roi monta, M. le Prince de Beauveau derrière. M. de Polignac & quelques autres Seigneurs firent atteler des chevaux de pofte fur une charette & accompagnerent S. M. qui arriva après min uit a Verfailles, d'oü Pon expédia en diligence un courier a Choify pour raffurer les Seigneurs qui y étoient. L'abfence du Roi les avoit piongés dans la plus cruelle incertitude, d'autant qu'il y avoit un Confeil indiqué pour fept heures. Cette avanture a beaucoup réjoui S. M. A la page «20. Le 23 Mai 1767. A Poccafion des nouveaux Directeurs de PAcadémie Royale, de Mufique, un Anonime a compofé des ftatuts de régiemens furl'Opéra. Ils font en vingt-quatre articles & en vers libres. C'eft une fatyre plaifante & piquante, tant de la nouvelle Direction, que des Aèteurs & Aétrices qui prêtent aux farcafmes & a 1'épigramme. On Pa croit d'une Société oü M. Barthe n'a pas été des derniers a  C 283 ) |s'ég&yer"fur ces Meffieurs & Dames^ A la page 220. Le 24 Mai 1767. Le Roi d'EfI pagne a chargé M. de Campo-Manèz de l'examen I des papiers trouvés dans les diffêrentes maifons I des Jéfuites. Ce M. de Campo-Manèz, qui eft I actuellement Confeiller dans un des Confeils jétablis a Madrid, étoit ci-devant un des plus célebres Jurifconfultes d'Efpagne; II a compofé, il y a quatre ou cinq ans, un ouvrage qui a été imprimé, dans lequel il a prétendu donner les preuves de très-grandes ufurpations faites fur les domaines de la couronne depuis le regne de Ferdinand & d'Ifabelle par différéns ordrcs religieux, & notamment par la Société des Jéfuites, & s'eft acquis par fon mérite 1'eftime & la confiance de M. d'Aranda. ■ A la page 220. Le 26 Mai 1767. II y a eu atï Parlement, il y a quelque- tems, une dénonciation par 1'Abbé Chauvelin , 1'adverfaire infatigable de la Société , concernant ce qui s'eft paffé en Efpague. Elle a été fuivie de plufieurs délibérations, qui, après de longues difcuffions, fe font enfin terminées par un Arrêt rendu le 9 Mai, toutes les Chambres affemblées, qui ordonne que, dans quinzaine de 4a publication, tous les cidevant foi - difant Jéfuites feront tenus de fortir du Royaume. 5 Pes affiliés tenus de faire leurs déclarations & 'de rapporter leurs lettres. • Défenfes aux Archevêques & Evêques d'em$oyer ceux qui avoient quitté dès avant 1767. Le Roi eft fupplié d'obtenir du Saint Per& L  C 484 ) 1'extinétion de cette Société , & de rendre Com> munes il tout le Royaume,par une loi générale, les difpofitions de 1' Arrêt qui eft trés-long & fera imprimé incelfamment. A la page 221. Le 28 Mai 1767. On vient d'imprimer, publier & afficher 1'Arrêt du Parlement contre les Jéfuites ; il eft précédé d'un Réquifitoire des gens du Roi. On ne peut s'imaginer avec quelle avidité cet Arrêt a été acheté par le public. L'imprimeur n'a pu fournir a 1'alHuence des demandeurs. On y voit en détail ce qui a détermmé la Cour a le rendre, & 1'on 1 n'a pas été peu furpris d'y lire que le Roi fera très-humblement fupplié d'écarter de fa perfonne & de celle des Princes de la familie royale tous ceux qui auroient encore aucune fraternité ou affiliation publique ou fecrete avec ladite Scciété, & d'interpofer fes bons offices auprès du Pape a 1'effet d'obtenir l'extinétion totale d'une Société pernicieufe a laChrétienté toute entiere, & particulierement redoutable aux Souverains & & la tranquillité des Etats. A la page 221. Le 29 Mai 1767. Le Parlement a rendu un nouvel Arrêt qui ordonne que les Lieutenants généraux des Bailliages & Sénéchauftées drelferont un état des ci-devant foidifant Jéfuites , que des infirmités grave.s & habituelles mettroient dans fimpoffibilité abfolue d'exécuter 1'arrêt de la Cour, êcindiqueront aux mêmes Religieux les böpitaux oü ils pourront fe retirer. Le même jour, Arrêt qui ordonne qu'il fera.  ( 2§5 ; ;l wforrné contre les foi-difant ci-devant Jéfuites qui ont rétraété le ferment qu'ils avoient prêté. ! A Ia page 222. Le 3 Juin 1767. A 1'oceafion ' de l'extinétion des Jéfuites, de la domination , Efpagnole, on vient d'imprimer le détail de toutes leurs maifons connues dans les quatre parties du monde, & le nombre des Religieux qu'el'1 les contenoient chacune en particulier; ce qui ;: forme un corps de plus de 20,000 hommes & une Milice beaucoup plus cenfidérable en comptant les Membres divers qui y tiennent, par les Afïïliations, lés Congrégations, &c. Ala page 224. Le 9 Juin 1767. M. 1'Abbé Guyot, Aumónier de M. le Duc d'Orléans, qui s'étoit deltiné A la chaire oü il a parlé avec fuc-cés dans cette capitale, devant le Roi & ailleurs, devoit prêcher A St. Nicolas du Chardonnet; les Marguilliers, informés qu'il avoit été Jéfüite , n'ont pas voulu qu'il prêchAt fans avoir fait le ferment. ■ A la page 225. Le 12 Juin 1767. II parolt très-clandeltinement une lettre contre M. Tronchin , dans laquelle ce moderne Efculape elt extremement maltraité; on prétend y démontrer des méprifes de première ignorance; on y difcute fa conduite A 1'égard de Madame la Dauphine ; on le met en contradiclion avec lui-meme & avec les principes de.-l'art. Cette épltre, écrite avec beaucoup de paflion, manque fon but par IA-même; on y découvre un ennemi caché qui ne pent lui feu] balancer 1'opinion pubhque.  ( 287 ) dcvant foi-difant Jéfuites , un Arrét prefque conforme ji celui de Paris. Celui deProvence, en conformité de Pefprit qui fe ranime contre cette funefte Société, & fur la dénonciation qui lui a été faite de ce qui s'eft palfé en Efpagne, d'après les conclufions motivées du Procureur général du Roi fur cet événement & le refus du Pape de recevoir en fes états les Jéfuites Efpagnols, a ordonné, par u.n Arrêt du ier. de ce mois, que les Membres de cette Société, a 1'époque du 5 Juin 1762, feront tenus de fe retirer hors du Royaume dans quinzaine, a Pexception de ceux qui auront prêté les ferments ordonnés, & de ceux qui n'avoient pas atteint 1'flge de 33 ans le 28 Janvier 1763, & qui prêteront le ferment ordonné par 1'Arrêt dudit jour. Le Procureur général, dans fon Réquifitoire, ne laiffe pas ignorer les droits du Roi fur le Comtat d'Avignon , droits inaliénables & imprefcriptibles , dit ce Magïhtat ; ce qui autorife S. M. a ufér de fon pouvoir pour exiger dans cette petite contrée la deftruétion des établillèmens des Jéfuites qui y font. Ala page 228. Le 20 Juin 1767. Un certain Abbé Desbrotfcs, grand intrigant , qui prétend polféder des fecrets rares dans la médecine, furtout pour les maladies de peau, & avoit guéri Madame la Ducheffe d'Orléans d'une dartre, dont il avoit obtenu la proteclion ainfi que celle de plufieurs grands Seigneurs; n'en a pas été moins condamné depuis k Dijon a être marqué & aux galeres. II y a trois ans de ce jugement  C 89- ) Biief moment oü je m'appercoive qu'il foit trop tendre. Adieu. A la page 254. Le 20 /TJt 1767- L Aft£ ü" Apollon & de Coro?zü par oü 1'Opéra s'eft ouvert aujourd'hui, quoique toujours en pofleflion de plaire, n'a pas eu le fuccès qu'on s'en promcttoit. Le Sieur Pillot, qui faifoit leDieu du chant, & qui ne i'eft pas a beaucoup prés , a jeté dans toute cette entree un dégout dont on ne s'eft fauvé que par des écbts de rirc & des applaudiffemens ironiques qui ont' fait dégénérer en farce une.aétion noble & tragique. Coronis étoit repréféntée par Madame Larrivée , auffi médiocre Actrice que Cantatrice excellente. Le Sieur Larrivée a foutenu prefque feul cet acte, il faifoit le róle d'ipliis; & fon bei organe, fon jeu franc & aifé ont rendu intéreffantes les fcenes oü il parolt. Les danfes , quoique gracieufes & bien deiïinécs , n'ont rien d'expreffif. .Les Dlles Dervieux, Duperei, Audinot, jeu nes fujets qui donnent de grandes efpérances , en ont fait Fornemcnt. La mufique, fauf le fameux chceur de Penterremeut de Coronis , n'a pas produit beaucoup de fenfitiou. L'acte du feu a été mieux exécuté. Mlle Dubois faifoit le róle de la Prêtreffe , & Larrivée cciiii de Famant. La première , quoique peu agréable au public, a force de talent & d'art a fu fubjuguer les fufrages; elle développe ici un trés-bel organe, & toute 1'cxpreflion du fentiment; 1'Acteur ^ de fon cóté, répond a merN 7  C 304 ) le Sieur Molé fur leur feule renonciation au théatre; il exigeoit une ratification des Gentilshummes de la Chambre, & leur congé abfolu en bonne & due forme. Ceux-ci n'ont pas cru devoir fe prèter a cette fourberie, fur laquelle les Hiftrions n'auröient pas été déücats. Dans cet intervalle ie Sieur Molé s'eft refroidi, & porte achicllement fes hommages a Mlle Dubois. A Ja page 255. Le 21 Aoüt 1767. Les fix Corps des Marchands & Négocians de Paris viennent dc préfenter une Requête au Roi & a Noffcigneurs de fon Confeil contre Padmiihon des Juifs aux brevets nouvellement créés dans les arts & métiers par l'Edit de création enregiftré le 19 Juin au Parlement. Ces Juifs , (bus le titre d'étrangers, veulent aujourd'hui abufer du terme pour s'immifcer dans le commerce & dans les arts, ce qui tendroit a leur acquérir en France un droit de bourgcoifie qui leur a été refufé de tous les tems & partout. On repréfente dans cette requête que 1'admiffion des Juifs feroit direcbement contraire aux vues bienfaifantes de - S. M. de rendre le commerce de plus en plus florilfant; que non-feulement ils font incapables de lui procurer le moindre avantage, mais qu'ils ne pcuvent & ne doivent même dans leurs principes que le défoler &" le ruiner. Ces affertions font foutcnues de trnits hilloriques puifés dans nos annales, & cités comme des autorités fans reproche. On peut dire que cette requête eft une culieeuon des plus injurieufes contre cette nation,  Ff C 306 ) heures a digérer fon plan, & un an k marteler fes vers; e'eft-a-dire que la fable eft vicieufe d'un bout a 1'autre, pleine d'invraifemblances , d'abfurdités mêmes, & que les vers, quoique correfts & aflez bien faits, font durs & bourfouflés. Après ce jugement, il feroit inutile d'en dire davantage, fi la jeuneflc du candidat ne lui avoit mérité 1'indulgence du public , & fi la piece ne paroilfoit devoir avoir quelques repréfentations. D'aiileurs, 1'Auteur a le mérite rare, furtout a fon ïlge, d'avoir fait un drame fans amour, d'avoir tiré tout fon dialogue du cru, 'pour ainfi dire, de fes perfonnages & de n'avoir point eu recours k ces tirades poftiches que nos modernes ont toujours prêtes dans leurs portefeuilles; a ces vers brillantés dont ils émaillenr, par intervalle leurs tragédies. Ainfi nous reviendrons fur cet ouvrage. A la page 258. Le 30 Aoüt 1767. On parle beaucoup rfuii Roman nouveau qui a pour titre VIngénu. II a plus de 200 pages d'impreflionj il piqué d'autant plus la curiofité, qu'il' eft encore fort rare & d'une plume accoutumée k fe faire défirer; on aflimile cet ouvrage a Candide ; il eft du même Auteur. A la page 259. Le 2 Septembre 1767. Cosroës eft un Roi de Perfe, fous 1'empire duquel le chriftianifme commence a s'étendre & a exciter des troubles. Ce Monarque a pour Miniftre un Certain Phanelfar qui profefle hautement fit Religion , & n'en eft pas moins 1'ami & le confeil de  Le róle de la Reine affoiblit encore 1'intéïêt, elle ne fait que pleurer & n'agit cn rien ; elle dégrade de plus en plus Cosroës dont elle niet Pinflexibilité dans un jour plus marqué & peutêtre odieux. En un mot, par la difcuffion on ne trouve dans cette tragédie, ni caraétere, ni nceud, ni péripétie véritables. A la page 260. Le 5 Septembre 1767. On a donné depuis deux jours la deuxiemc repréfentation de Cosroës, fufpendue pour que 1'Auteur eüt le tems de faire fes correcbions. II a raccourci le 4e. acte & changé abfolument le 5e. La fcene s'ouvre par la réfignation du jeune Prince ; mais il déclare a Cosroës combien 1'appareil du fupplice 1'épouvante, qu'il ne craint point la mort, mais 1'infamie de périr fous les coups d'un bourreau;il fe décide pourtant en apparence; il demandé a fon pere de recevoir fes derniers embralfemens; il profite de cette approche pour efcamoter le cimeterre de Cosroës; il vent en fe tuant lui-même échapper a 1'indignité du fupplice. Le Roi retient les bras dc Ion fils dans 1'inftant oü 1'on annonce que Memnon a la tête des rebelles triomphe par tout, qu'il s'avance vers le Palais. Le Roi veut reprendre fon épée, fon fils dit que c'eft un coup du Ciel, qu'il va s'en fervir pour réparer fon crime. En ce moment Memnon fonce fur le Théiltre, le jeune Prince fe met a la tête des gardes de Cosroës ; il fe livre an combat qui va fe terminer dans la couliflc. Le  ( 324 ) rccteüT général des Mtimens fit abattre ce mur par une belle nuit. Inde irce. A la page 276. Ce 12 Octobre 1767. Extrak d'une lettre de Berlin du 25 Septembre 1767.. • On n'eft point a la mode ici, li 1'on n'eft Bourdelois. Voici ce qui a donné lieu a cette plaifanterie. Le S. Bourdeaux, natif de Hollande, & Libraire du Roi, a inventé a 1'occafion du nouveau mariagc une trés-belle médaille pendue a un ruban couleur d'orange lizeré de verd avec ces mots: Vive la Princeffe Guillaume de Pruff fe , Vive le Prince d'Orange. La médaille peinte & émaillée repréfente deux cceurs fur Pantel de 1'hymen , entrclacés d'une guirlande de fieurs, Pamour les enllamme de fon brandon & les couronne de lauriers. Au-delfous font les armes de Pruffe , & celles des ProvincesUnies. En outre, il a dédié au Stadhouder une colleérion de devifes gravées fur des colifichets, ou des breloques propres a pendre a une montrc. 11 a eu Phonneur de préfencer ces inventions au Roi & a la Reine & a toute la Cour &c. Cela a eu kaucoup de fuccés. S. INI. a attaché ellemèroe de fa main a la boutonniere de M. Verclot, un ruban & une médaille; il en a diftribué a toute la cour, ainfi que des breloques , & elle font devenues ft en vogue, qu'on ne peut fe difpenfer de porter ces ornemens , au moins a fa montre A la page 279. Le 17 Octobre 1767. Le Coincre dont on a parlé eft arrivé a Fontainebk-auj  ( 342 > Mais en dépït de fan fier pédagogue, . Le jeune amant fe réfoud a refter: Le bon papa, dans un beau dialogue, Au tróne encor refufe de monter, Le Tyran brave Fait fon efclave De cet ami Qui lui fervoit d'appui. Dans Ia prifon ayant perdu la tête, Le tendre amant fe croit enfin trahir II y rcaudit fon pere & fa conquête Son pauvre efprit eft bientót abnui. On le détrompe ; Bloment de pompe ! Q te je vois d'art Dans un doublé poiguard! Les deux amans veulent s'óter la vie, Comme Idaraé, comme fon cher Zanti; L'auteur alors fait preuve de génie, En déguifant ce larcin iravefti. Le fer fe leve'; Mais eft-ce un réve, Nos deux amans Sont déjè. triomphants! Le bon papa s'étoit vu par fa fille, Sauver au prix des jours d'un tendre époux , Mais il re vient, déja fon glaive brille, Et le Tyran va tomber fous fes coups. En flanc, en tête, Chacun 1'arrête, Trait peu commun , lis marchent cent contre un.  C 343 ) JVIais & la fin tout cela s'accoinraode; Chacun d'accord retourne en fon pays. A ce beau Drame, écrit fuivant la mode, Le cromatique ajoute encor un prix. Cette mufique, Trés -pathétique, Eft tout efprit, Et fait beaucoup de bruit. C'eft un effai qu'un grand génie hazarde, Comme Sancho Rainaud doit s'exprimer. C'eft, pour tout dire, une jeune batarde, Qu'on voudroit bien faire légitimer. Mais le comique La révendique; Car Arlequin Veut ê:re fon parraln Voilé quelle eft cette oeuvre merveil!eufa Borde Defmastres,neveu du premier,pour s'infinuer dans foa  C 3S0 ) prix de mufique remporté par 1'Abbé Giroült, projetoit d'en faire autant a 1'avenir. En conféquence, il deftine encore une même médaille d'or de la valeur de 500 livres pour le meilleur motet fur le pfeaume 45. Deus nofter rcfugium êf virtus &c. Un autre particulier propofe un femblable prix pour celui qui aura le mieux mis en mufique 1'ode quatre de Roulfeau qui commeuce par ce vers la Gloire du Seigneur, fa grandeur immortelle gfc. La même perfonne delline une feconde médaille de la Valeur de 200 livres pour fecond prix du motet Francois, s'il fe trouve une autre piece qui en foit digne. Enfin, les Directeurs du concert veulent audi couronner 1'Auteur du meilleur ouvrage qui aura le premier accedit fur le fujet latin défigné. En voila plus qu'il n'en faut pour faire fortir les talens,& peut-être eri elt ce trop : quand il y a tant de gens couronnés, les couronnes en deviennent moins précieufes, & Fémulation fe ralentit. Toutes les conditions font les mêmes que celles de 1'an pafle, mêmes Juges , même lieu, même tems du concours. A la page 63. Le 28 Juin 1768. On vient de traduire en francois le Marchand de Venife, un des Drames les plus vantés du célcbre Sliakespear. Les Anglois le rcgardent encore comme le chef-d'cèuvre de leur Théfitre, oü cette piece a aujourd'hui tout autant de fuccès qu'eïlé en  C 381 ) ent lors des premières repréfeiijtations. Pour nous autres qui mcttons d'autres conditious a un chef-d'ceuvre, en convenant des beautés de détail de cette piece, nous .la regarderons dans fon enfemble comme un vrai monftre dramatique. Le Traducteur a confervé autant qu'il a pu le mérite de 1'original, dans fa profe forte & harmonieufe. A la page 63. Le 29 Juin 1768. II s'eft élevé depuis quelque tems en Italië une difpute entre les Philofophes de cette contrée fur YEtat brut des premières générations. M. Duni, Profeffeur de Jurisprudence au Collége Delza Sapienza de Rome , eft pour 1'affirmative, & prétend d'après Vico, le fondateur de cette opinion, que les hommes originairement vivoient exaclement comme des bêtes. Les partifans de ce favant font appelés Ferini. M. Finette eft a la tête des adverfaires de ce parti qui fe nomme Anti-Ferini. Ces deux chefs ont beaucoup écrit, chacun de leur cóté , & ils ont mis dans leurs ouvrages le caraebcre de leur feebe, c'eft-a- dire que ceux du premier font fans aucune aménité, mêmes durs & un peu barbares, les répliques de 1'autre font au contraire pleines d'honnêteté, de douceur & de graces. A la page 64. Le 1 Juillet 176S. Pour completter les 30000 livres de penfion que lc Miniftre s'eft réfervées fur le nouveau privilege du Mercure, il a donné 600 livres au Sieur de la Dixmerie qui coopéroit depuis longtems gratuite-  Rennes, impïïqué dans 1'alfaire de Bretagne* convaincu d'avoir écrit des Lettres anonimes k M. le Comte de Saint Florentin, oü, fans refpect pour le Minidere, il s'eft livré a une déclamation indécente & trés - criminelle, a été conduit a Bicêtre. A la page 152. Le 14 Janvier 1767. On a donné hier fur lc théatre de 1'Opéra , Théfée , fajcuni par M. de Mondonville. Le Public a paru regretter Lully, & les belles fcenes de cet ancien 11'ont point été erfacécs par la mufique nouvelle. On doit cependant rendre au Sieur de Mondonville la juftice d'avoir fait des morceaux qui ont paru de toute beauté, & qui, ajoutés aux autres de Lully, rendront cet Opéra admirable. A la page 152. Le 15 Janvier 1767. Extrait d'une lettre de Saintes du 4 Janvier 1767..... Mr. de la Chalotais , fes deux fils & fa bru font arrivés dans cette ville le 31 du mois dender; ils ont été trés-bien accüeillis. La célébrité de M. de la Chalotais, fes malheurs, ont contribué a exciter ce fentiment d'intérêt que les honnêtes gens ne peuvent refufer a ceux qui font dans la peine. D'ailleurs, fon éloquent Mémoire nous étoit parvenu, & c'eft a qui le lira. A la page 153. Le 17 Janvier 1767. On a enregiftré la femaine derniere a la Grand'Chambre des Lettres patentes du Roi au fujet de M. de Laverdy, aujourd'hui Miniftre & Controleur général des finances; elles ont été préfentéés par M. 1'Abbé Terray: leur objet eft de rappelcr M 4  C m ) ane généalogie qui avoit été ignorée jufqu'a ce jour, concernant ce Minidre moderne. Son pere avoit été maintenu dans la Nobleffe, il y a plus de vingt ans; mais de nouvelles recherches ont mis Mi dc Laverdy cn état de juflifier une très-longue poflèdion de Nobleffe de race trés - ancienne, condatée par ces Lettres patentes & leur enregistrement. La médiocrité de la fortune de fes Peres les avoient réduits au talent; & leBarreau fe glorifie d'avoir vu de nos jours M. de la Verdy pere de M. le Controleur général y figurer avec didinétion. A la page 156. Le 21 Janvier 1767. La mere de M. Duclos Secrétaire perpétuel de 1'Académie francoife, vient de mourir a Dinan a 104 sus. Un ami lui a adred'é les vers fuivans. De ta mere a cent ans & plus A la fin te privé la Parque. Snns te répandre hélas! en pleurs trop fuperfius . Rejouis-toi plutót de cette heureiife marqué; De longtems ne crains rien de fes coups mena^ans. Mais quand aujourd'hui la cruelle Trancberoit le fil de tes ans, N'aurois-tu pas vecu plus qu'elle? Ala page 156. Le 23 Janvier 1767. Le peu de fuccès de 1'Opéra de Thefée remis en mufique par le Sieur de Mondonville, a déterminé cet Auteur a le retirer du théatre; & les Directeurs de 1'Académie Royale de Mufique, en gens intelligens , vont y remettre le même Opéra de Lully, tel qu'il a été joué 1'année derniere. Les mê-  C 273 ) ïnêmcs dépenfes tant enhabits qu'en décoratioiis peuvent fervir; en conféquence on le répete, & en attendant on a .repris Silvie. Le Théjêe moderne n'a été joué que quatre fois. A la page 157. Le 24 Janvier 1767. On écrit de Rochefort que les ordres de la Cour y font arrivés pour y faire Péxpérience d'une p.lte altmentaire fur fix forcats des plus foits & des plus robufies. II feront mis chacun dans une chambre féparée , gardés par des faélionnaircs &y feront villtés par les Médecins tous les jours. On leur difiribuera trois onces feulement de cette pilte avec de 1'eau bouillaute, du bcurre, du poivre & du fel, & 1'auteur de ce fecret prétend qu'ils feront fuffifamment nourris pendant vingt quatre heures avec cette dofe; 1'épreuve durera un mois. Si cette paté réuffit, il eft confiant qu'on en pourroit faire ufage cn mer dans des circonltaiaces critiques. Elle efi trés-compacte & paroït être faitc de la fine fleur de froment. A la page 159. Le 28 Janvier 1767. Un Avocat, nommé la Ville, rayé du tableau & ne fubiillant que des Mémoires ou plutöt des libelles clandeltins qu'il diltribue, elf a la veille de fe voir prendre a parti pour une affaire grave dans laquelle il s'eft immifcé d'écrire, & oü fon 1'accufe comme calomniateur. C'eft toujours la fuite du procés de M. Reudet, & cela caufe une grande fermentation dans le Bareau , qui abandonneroit volontiers ce confrère expnlfé, mais n'aime pas un tel exempfe. M 5  C 274 > A la page 159. Le 30 Janvier 1767. Au mois de Septembre dernier, on diftribua avec profufion dans Paris un Mémoire fous le nom d'une veuve Herige contre M. Beudet, Confeillcr honoraire au Confeil fupérieur de Leogane, Secrétaire de la Marine. Son objet parohfoit urt projet médité & réfléchi pour fon rédacteur , de perdre M. Bcudet & de porter a fa réputation le coup le plus funefte. Mais a peine parvint-il dans. k public, que les faits les plus graves, avancés contre M. Beudet, furent démentis par des actesauthentiques,& que le Sieur de la Ville , auteurde ces Mémoires, chercha a fe rétracter dansdes journaux. M. Beudet vient de publier aujourd'hui un Mémoire a confulter & Confultations tant fur le fonds dans 1'affaire qui eft une difcuflion de prétentions de la veuve Herige fur un. bien acquis par le beau-pere de M. Beudet,que fur 1'atrocité de la diffamat;ion que le Sieur de la Ville s'eft permife fous ce prétexte. Le Confeil qui a iigné cette Confultation, eft d'avis que M. Beudet eft en droit de pourfuivre par la voie extraordinaire, les auteurs-, complices, & adhérans de cette diffamation , qui ne paroit pas être feulement 1'ouvrage du Sieur de la Ville, mais. de gens ennemis du Sieur Beudet, qui fe font fervis du miniftere de cet Avocat pour publier ce libelle. Le Sieur de la Ville y eft également pris a partie , comme étant fans caractere pour foufcrire un Mémoire, & ayant ufurpé un itre. que lui refufe 1'ordre des Avocats. Les  C =75 ) plus célcbres Jurifconfultes de Paris ont foufcrit cc Mémoire a confulter & une Confultation qui le fuit. Le 31 Janvier 1767. Extrait d'une lettre de Rennes du 25 Janvier L'Evêque de Saint Brieux (Bareau de Girac) trés-lubrique, qui cn prendroit fur Pantel & en conteroit a la Vierge pour fe délafl'er de fes occupations pendant la tenue des Etats, a entrepris la conquête d'une Dame jeune & jolie, & de plus niece d'un de fes confrères. Dans fa pourfuite amoureufe ,. dont il ne fe cachoit aux yeux de perfonne, fe trouvant un jour tête a tête avec cette Dame, emporté par fa paifton, il la prelTe vivement & oublie la précaution de mettre le verrouil: le mari furvient, entre , précilément a 1'inftant du dénouement; la Dame ne perd point la tête ; elle feint que le Prélat lui fait violence; elle faute fur 1'épée du mari & la plonge dans la cuiffe du téméraire. II y avoit bien de quoi ralcntir fon ardeur; il fe retire confus, bumilié, 1'oreille balie , & eft obligé de garder la chambre Cette hiltoire eft aujourd'hui publique: on ne parle que de 1'adrelfe de Madame de la M qui a donné a 1'Evêque de St. Brieux un coup d'épéc dans la cuilfe fans endommager fa culotte. Cette nouvelle eft allée jufqu'a la Cour. On dit que M. le Prince de Conti en a réjoui, le feu Roi v M. 1'Evêque d'Orléans , trés-fcrupuleux poiu1'honneur de 1'épifcopat, a cru devoir cn écrireauClergé alfemblé aux Etats, qui, entrant dsnt> M. 6-  ( aS6 ) A la page 225. Le 14 Juin 1767. La Lettre d'un aftionnaire de la Compagnie des Jndes a MM. les Commiflaires nommés a PAflèmblée du 4 Avril dernier faifant beaucoup de bruit, exige quelque détail. Cet écrit, ou il entre de 1'humeur contre fadminiftrationacruelle, préfcnte cependant un tableau alfez vrai des julles inquiétudes des actionnaires; mais 1'Auteur exagcre Ics vices qui peuvent s'y trouver & s'éleve avec trop d'aigreur fur les ftatuts & réglements propofés par elle. II prétend qu'avant de pouvoir affigner de julles réglements, il faudroit mettre les aétionnaires cn état de faVoif quelle cd la fituation préfcnte de la Compagnie ;qucllcs font fes charges; quelles font fes relfóurces ; le tout au vrai, & fans chercher a s'abufer ou én abufer d'autres., comme il prétend qu'on 1'a fait dans les divers comptes rendüs aux Affemblécs publiques depuis 1765; & il fmit par mettre en queftion 'fi la Compagnie peut, dansles cas prévus & a prévoir,fe foutenir,régie & adminiltrée comme.'elle 1'eft aujourd'hui. En général, cette lettre ne peut que déplaire k ceux qui'font a la •tête de la Compagnie, qui doivent voir avec douleur qu'on leur prête de chercher l fe perpé- . tuer dans leur adminifiration & a y établir un; defpotifme dont le public ne les croit pas capa»| bles, & qui par la-même ne fe confolidcroit que : mieux, fi 1'on ne deffilloit les yeux des intéreffés., A la page 105. Le 18 "juin 1767. Le Parlement de Normandie a rendu, au fujet des ci-'  C 2SS ) dont il a fubi la première peine; il s'eft pourvu en caftation & a évité de la forte la chaine oü il devoit être envoyé. II a obtenu la caffation de 1'Arrêt, ce qui fait grand bruit. A la page 229. Le 25 Juin 1767. Rien de plus plaifant que la lettre du Roi d'Efpagne au Pape en date du 31 Mars 1767. On la prendroit pour un perfiflage, ft elle avoit été écrite en France. En voici la traduction exacte : „ Votre Sainteté fait que le premier devoir d'un Souverain eft de veiller A la tranquillité de fon Etat & au repos de fes fujets. C'eft pour remplir ce devoir que je me trouve dans la nécedité abfolue de chalfer de mes Etats tous les Jéfuites qui y font établis & de les tranfportcr dans les Etats du Saint Siege fous Ia fageffe & la fainte direclion de votre Béatitudc, qui ed le Pere commun & le Chef de tous les fideles. Je tomberois dans le cas de 1'indifcrétion envers la Chambre apodolique, en 1'obligeant de pourvoir A 1'entretien de ces Peres Jéfuites qui font nés mes fujets, fi je n'avois pourvu moirnêmc A leur fubfidance en leur donnant A chacun une penfion alimentaire fulhfante. Dans ces circonftances, je prie Votre Sainteté de regarder ma préfente réfolution comme un arrangement économique qui étoit indifpenfable, & qui n'a été pris qu'après un mür examen & une profonde méditation. Cette juftice m'étaut rendue par Votre Sainteté,  teté, je la prie de m'envoyer fa fainte bénédiction apoftolique fur cette conduite particuliere, ainfi que fur toutes mes autres démarches qui fe trouveront dirigécs , comme celle-ci, vers Thonneur & la gloire de Dieu. A la page 229. Le 26 Juin 1767. La Réponfe du Pape au Roi d'Efpague porte en fubfiance que fi S. M. Catholique n'a pas des raifons trés - graves pour cn ufer comme elle le fait envers les Jéfuites, il y auroit de Pinjuftice & de 1'inhumanité de les maltraiter de la forte, mais que, fi c'étoit pour des crimes, il approuveroit cette rélblution; que , dans ces cas - la , il ne vouloit pas donner afile dans fes Etats a des afl'aflins & a des malfaiteurs. Malgré cela, Ie Roi d'Efpague garde dans fon cceur royal !es délits des accufés. Ce font les propres expresfions de S. M. Catholique, ce qui foutient trèsbien le perfillage de la lettre a fa Sainteté. A la page 231. Le 29 Juin 1767. Carlin, PArléquin de la Comédie Italienne, qu'on croyoit perdu pour jamais, va beaucoup mieux, il elt a fe refaire a la campagne; il fera bientöt en état dejouer, a cc qu'on cfpere. Les partifans de ce róle ne peuvent fe faire au jeu dc celui d'aujourd'hui qui tient trop au goüt italien. Cet Acteur chez nous doit être naïf & non fot, Éentü & non balourd. D'ailleurs, comme le fucoeiTeur de Carlin écorche le francois, il ne peut mettre dans lés lazis la finefiè d'un homme au fait dc la langue. Tmne XVlll. N  ( =9° ) A la page 236. Le 10 Juillet 1767. Lepctitfuccès des Régiemens & Statuts de 1'Opéra a fait naitre a un anonime fidée d'en faire fur la Comédie Francoife. L'Auteur n'en a pas ménagé la plupart des Membres & releveavec amertume les difgraces de leurs talens; peu y font traités plus favorablement, &en général il yreguc beaucoup d'aigreur; il n'y a point cette galté & cette plaifanterie qui peuvent feules faire le mérite de ces fortes d'ouvrages, & qui fe trouvent afTez dansles Régiemens de F Opéra, attribués a M. Rarthe, connu dans le monde littéraire par quelques pctits vers & par une piece qui a pour titre YAmateur, joué aux Francois , il y a quelques années. A la page 239. Le 14 Juillet 1767. Les Comédiens Italiens ont donné, aujourd'hui Mardi 14 de ce mois, la première repréfentation du Turban enchanté , piece italienne en deux actes avec fpectacle & divertiffement. Elle elt du Sieur Colatto, Pantalon; elle a eu le plus grand fuccès.. Carlin (1'Arkquin) y a reparu avec des applaudiffemens infinis. A fa reprife, cet Acteur a fait un compliment de remerdment au public, oü il lui dit entre autres chofes qu'il y a vingt ans qu'on a de 1'iridnlgence & des bontés pour lui, qu'il veut recommencer un nouveau bail, & qu'il compte fur les mêmes faveurs. Cet épifode n'a pas effnyé les mêmes critiques que celui du Sieur Holé. On permet a un Arlcquiu des familiaii-  C 291 ) I tes qtie n'admct p:ünt Ia majefté de Ia Scène Francoife. A la page 23?. Lc 15 Juillet 1-67. Les Ifalicns, toujours fócónds en nouveautés, ont remis, aujuuri'hut Mercredi 15, un ancien Opéra cuaique Je Fadiy kniudé Nicaife. On fa en- v richi d'ariettes avec une mufique toute fralche du Sieur Bambini. M. Framcri a retouché les vieilles paroles, & compofé les nouvelles. Cet i ouvrage, mélange dc la fimplické du Vaudeville avec les broderies fcavantes de la mufique mo| derne, n'a point répugnéaux oreilles des fpeci tateurs, & 1'on court avidement a ce monftre harmonique. A la page 240. Le 18 Juillet 1767. Hyrza, après avoir cifuyé dilïérentes métamorphofes, eft ; arrivée, aujourd'hui Samedi 18, a fa trcizieme & derniere repréfentation. On 1'avoit annoncée, il y- a quelques jours, fur les affickes avec de nouveaux cliangemens; 011 fe llattoit de ramencr par la lc public rafluré. Cette petite charlatanerie n'a pas eu le fuccès qu'en attendoit 1'Auteur. Toutes les variations n'ont roulé elfentiellement que fur le dénouement. La première fois, Hirza tuoit fon amant voulant tuer le pere, & ne fe tuoit point. Dans la fuite, elle a tué fon amant & elle-même; elle a fini par fe tuer feule. L'abfurdité & la complication de la fable 11'étant point corrigées, il en réfulte toufours un travak pénible pour le fpectateur , qui ne peut que fiudifpofer contre 1'Auteur, C'eft fans N a  ( 29Ï ) doute a quoi faifoit illuflon M. le Miere paï le bon mot rapporté. A la page 240. Le 20 Juillet 1767. M. Jourdain de Rocheplatte , amateur du théatre, ayant écrit fuccclïivement a Mlle Clairon trois lettres oü il 1'engage a profiter de la circonftance de la maladie de Mlle Dubois pour reparoitre généreufement dans les Illinois, lans contracter aucun engagement nouveau, a recu deux réponfes de cette Actrice que les curieux recherchent & dont 011 prend des copies. L'augufte Melpomene y configne fes dernieres réfolutions de la facon la plus irrévocable. Ala page 240. Lc 20 Juillet 1767. Des Dames de la Cour, êntr'autres Madame la Duchcffe de Villeroy, & Madame la Marquife de Sennccrerre étant allé voir les divers camps de Compiegne,vilïterent d'abord les quartiersFrancois.; elles paüérent enfuite chez les Suifits. L'Olficier qui les recevoit, leur dit: Mesdames vous vencz de voir les troupes de Darius; vous aÜez voir celles oVAlexandre. Ce propos fingulier fit une telle fenfation, que les Dames le releverent elles-mêmes & en firent fentir 1'indécence a celui qui le tenoit. II a occafionné une rumeur ü confidérable, que M. le Comte de Ségur, qui commande, a fait défenfe a qui que ce lbit, fous peinc de la vie, de le répéter & de le critiquer en rien. On croit que 1'Officier fera puni féverement. A la page 246. Le 31 Juillet 1767. Un par-  ( =93 > ticulier a fait remettre entre les mains de M, d'Auvcrgne, Surintendant de la mufique du Roi, & Directeur du concert fpirituel, une médaille d'or de la valeur de 300livres,pour être adjugée a celui qui, au jugement de ce Muficien, ainfi que de MM. Blancltard & Gamargues, Maitres de mufique de la chapelle du Roi, aura compofé le meilleur motet furiepfeaume cent trerite , Super flumina Babylonis, II doit entrer dans ce morceau deux récits,un duo, & deux chceurs, dont un en fugue; il ne doit pas durer plus de trente minutes. Les pieces doivent être remifes avant le 1 Février, & le concours s'en fera au concert fpirituel dans la quinzaine de Paques; c'eft-a-dire que ces Melfieurs commenceront par faire un triage des pieces fufceptibles d'étre exécutées. A la page 346. Le 1 Aoüt 1767. II a paru, il y a quelque tems, une petite brochure dont on a parlé; elle contenoit une lettre de M. Tronchin a M. le Contróleur général; des réflexions fur cette lettre; la Déclaration de M. Tronchin lors de 1'ouverture du corps de Madame la Dauphine; enfin, de nouvelles réflexions fur tout cela. Cet ouvrage, oü fon relevoit les erreurs, les bévues & même 1'ignorance de cet Efculape Génevois, 1'a affeété vivement; il a obtenu de 1'autorité les recherches les plus féveres, & le pamphlet eft devenu fort rare. II eft attribué ;\ M. de Vernage. Le Lieutenant de Police voulaiit ménager ce Docbeur, refpcctable par fon rlge, N 3  par fon favoir & par d'illuftres & ptiilans amis, a mandé depuis peu M. Malouet, jeune Méde- cin, 1'éleve & le fupót du premier. II a comparu devant ce Magiftrat; il a éclairé fa religion furprife; il a déclaré n'avoir point rédigé la brochure, mais qu'il ne feroit pas fiché, a quelques expreffiöns prés, d'en étre 1'auteur; que, du refte, il étoit furpris qu'on lui Qt perdre pour une accufation auffi mal fondée,des inftans précieux oü il pourroit être utile au public, fur quoi il a tiré fa révérence. A la page 250. Le 4 Aoüt 1767. Les Comédiens Francois doivent donner bientót une tragédie nouvelle, intitulée Cosroës; elle elt d'un M. le Fcvre, jeune débutant dans la carrière dramatique. Rotro-u a traité, le même fujet eu 3648. La piece ent du fuccès; & M. Duifé de Valentiné reproduifit ce drame antique en 1704 ï.vec des correétions de fa facon qui 1'avoient rendu meilleur. A la page 250. Le 8 Aoüt 1767. Vers a JYL leChevalierd'Arcy a 1'occafionde la fête donnée le trois Aoüt a Madame la Marquife de Langeae.. J'ai vu le Goüt, FECprit, les Graces Fêter a 1'envi la Beauté, Leurs foins font toujours efïïcaces. Jadis la fage andquité Pour une aimabie Déité Prodigua les jours de féerie.. Que j'aime fa mythologie.! Que je préfere fa, folie  ( 295 ) A notre augnfte gravité! Vous en égayez la trifteffe, Et votre exemple eft d'un grand poids; Mais chacun n'a point a fon choix D'cncenfer pareille Déeffe. Moi, qui fuis-je? tui foible próneur; Je n'ai garde d'entrer en lice , Ét tiendrois a fort grand honncur De porter chape a votre office- (*) A la page 250. Le 9 Aoüt 1767- Extrait dV ne lettre de M. L. C. (La Combe d'Avignon) datée dc Rome le 20 Juillet 1767...J'ai etf Phonneur d'étre admis ces jVurs-ci a'faudience de fa Sainteté &- de 1'entretcnir vingt minutes; elle m'a fait celui d'acceptcr un exemplaire demes ceuvres II n'eft queftion que de Jéfuites dans ce pays-ci,oü tout le monde n'eft pas leur partifan, il s'en faut. Le grand nombre des Cardinaux leur eft même oppofé; ils ne ceffent de folliciter le Saint Pere pour la deftruction d'un Ordre fi dangereux a la chrétienté. II s'eft paffé ces jours-ci chez ces Peres une fcene tragicomique. Le Général Ricci a eu une prife avec le Procureur général des Jéfuites des Royaumes Efpagnols. Le premier s'étant répandu en termes infultans contre le Roi Catholique; 1'autre, foit morgue nationale , foit refpect naturel pour fon Souverain, foit politique pour fe le rendre favorable, a relevé avec hauteur les termas in- C) Ces vers font de M. de la Dixpierie, auteur de 1'Avantcoureur. N 4  jurieux de Ricci. Ce fougueux defpote a trouvé la réprimande très-mauvaife; grande altercation qui a dégénéré en un combat entre ces deux Religieux. Leurs confrères font furvenus heureufement, qui ont mis les holas, en leur repréfcntant 1'indécence de cette querelle. On vouloit 1'envelopper dans le fdence; mais tout tranfpire. On dit le général très-contufionné &c. A la page 250. Le 10 Aoüt 1767. Un M. Deforges a préfenté a 1'Académie des Sciences un Mémoire pour arrêter 1'eau de la riviere au-delTus de 1'hópital, la contenir, 1'élever & la diftribuer r.vec plus de propreté, de falubrité & d'abondance dans tous les quartiers de Paris; il y a joint fes plans, fes modeles de macbincs, fes calculs &c. en un mot, tout ce qui peut mettre la Compagnie a même de juger de Ia vérité, de la bonté , & de 1'économie de fon projet &c. il «ft infiniment moins difpendieux que celui de M. de Parcieux; mais eft - il poflible de fournir par machine 1200 pouces d'eau continuelte, comme il en faudroit a paris. M. de Parcieux propofe d'y faire pader une feconde riviere entiere, celle d'Yvette , de fournir 1000 pouces d'eau, mais il calcule fes dépenfes a 12,000,000 livres. Celui-ci voudroit charger de fon exécution une Compagnie, & prétend que fon projet ne feroit en rien h charge au public. Si PAcadémie lemtmitde fon approbation, il fera préfenté au Confeil. A la page 250. Le 11 Aoüt 1767. II a débuté aux  ( -97 ) aux ïtaliens, le 24 Janvier dernier, une Dèmöifelle Dangui, fiïle du joueur de viele & fteur de Madame Content, femme du premier Architeéte de M. le Duo d'Orléans. On applaudit beaucoup alors aux graces naturelles de ■ fa perfonne , a rintclligence de fon jeu & au goüt avec lequel elle conduifoit une voix peu forte, mais agréable & légere. Des raifons de fortune 1'out obligé de pre'ndre le parti du Théatre: abandounée d'un mari qu'elle avoit, & manquant des velfources qu'elle étoit en droit d'attendre de fa beur, elle a fait yaloir les talens dont elle étoit douée. Sa familie a trouvé cela trés-mauvais; Madame Content a iuterpofé pour lors 1'autoritc de M. le Comte de Saint Florentin , qui voulut bien s'en mêler. La jeune perfonne offrit de re* noucer au théatre fi fa fceur vouloitlui faire 1200 livres de penlion;celle-ci n'ayant pas acquiefeé aux conditions, le Miniftre s'eft défifté, & la jeune perfonne a fuivi fa deibnée. 'Depuis ce tems Madame Content n'a celfé de mettre cn oeuvre tous les móyens pollibles de fufciter des dégouts & des tracalferies a fa feaur. Enfin,Mlle Dangui,excédéc,a prisle parti d'écrirc afafceuï une, lettre dont il a tranfpiré des eopies, & qui couvre celle-ci de ridicule. A la page 250. Le 12 Ao 1t 1767.. On continue a parler beaucoup du Mauifefte du Roi d'Efpague, fans qu'on trouve perfonne qui affure pofitivement favoir lu. On dit que c'eft un volume iu-folio de prés dc 1000 pages; que S. M. N 5  Catholique , bien loin aujourd'hui de vóutofr garder dans fon cceur royal" les profonds fecretède la dedruclion des Jéfuites dans fes Royaumes, veut, au contraire , que fon Manifcde foit traduit dans toutes les langues, & que tout 1'univcrs foit en état de juger ft conduite. C'eft ce concert unanime de publicité , a pareil tems dans toute la Chrétienté, qui empèche qu'il ne parende encore ici. A la page 250. Le 1.3 Aoüt 1767.. M. deVaujour, Médecin du Roi a la Guadeloupe, arrivé depuis quelques jours a Paris, a ramené avec lui un quadrupede nommé le Coincre, li went du continent de PAmérique méridionale;, il eft de la grolfeur d'un fort marcaum , & eft remarquable par un trou ovale qu'il a fur le dos par lequel il refpire. Quoique cet animal fait décrit dans 1'hiftoire naturelle de M. de Buffon,. M. de Vaujour prétend qu'on n'en a point encore a Marfeille, & ce Dofteur compte en dure préfent au Roi, fi S. M. 1'agrée. A la page 251. Le 16 Aoüt 1767. L'Académie Royale de Mufique doit donner le Mardi 18 de ce mois des fragmens compofés de l'acte d'Apollon £f Coronis & de ceux du feu & de la terre.. Le premier eft tiré des amours des Dieux, paroles de Fuzelier, mufique deMouret. Les deux autres font partie du Poëme des Elémens du. Poëte Roi, mufique de Deftouches&de la Lande, 0n fent bien que tout cela eft totalement refondfc* &. fortifié d'une. harmonie, moderne..  C 299 ) A la page a# Le 18 Aoüt 1767- Lettre de Mlle Dangui a Madame Content fa fcenr. Paris le 25 Juillet 1767* Celfez, ma cliere fceur, vos pourfuites au prés de mes fupérieurs pour m'aiTacher au théfltre. Je n'ai embralfé cet état qu'avcc rédexiou & fur votre refus perfévérant de me fournir les fecours dont j'avois befoin pour en prendre uit autre. Si vous vous étiez fouvenue alors que vous étiez ma fceur, vous ne rougiriez pas de 1'être aujourd'hui; fi votre amour-propre fouffre, c'eft a la dureté de votre cceur qu'il feut vous cn prendre. Je fuis pourtant encore afièz bonne pour venir a votre fecours & confoler votre orgueil humilié. Sachez qu'il n'y a pas une ft grande différence de vous a moi. Nous lommes toutes deux fules d'un homme a talent; vous avez enfoui les vötres, je fais valoir les miens. Vous vousrepofez fur ceux de votre man; vous fenorez que c'eft un Architeéte médiocre qui gagnèra plus d'argent que de réputation; moi je crée la miemie & chercbe a perpétuer un nom» connu dans la mufique. Le public a daigné applaudir a mes premiers eftais; il me foutient ; il m'encoufage,. & peutÊtre mériterai-je 1111 jour les éloges qu'il m'ac- corcie aujouui nui ptu luumgv^, — - jamais qu'une bourgeoife bien coffue, bien étot- fée, bien ennuyee u*us »- coteries obtcures: une Actrice cewiuc w»w <^»r N 6  ( 30° ) une fpliere briljante qui s'étend a mefure que fes talens fe développent. Mon nom fera imprimé ■dans les nouvelles publiques, dans les gazettes, dans Je Mercure; le vótre ne le fera pour la première & derniere fois que dans votre billet d'enterrement. Et ne me parfez pas de mceurs ; •vous autres honnêtes femmes, faites fouvent fonner bien haut un état qui les fuppofe, pour en pouvoir manquer plus a votre aife; vous nous les décidez dépravées au contraire, afin d'autorifer une différence plus extérieure que réellc. Au rede, Mlle Doligny, a la Comédie Francoife , nous venge bien: trouvez, fi vous pouvcz, dans toute votre bourgeoific une vertu plus éprouvéc, plus nette, plus reconnue. Refie ce malhcureux préjugé d'infiunie; qui dit préjugé a déja répondu. Bien plus, il eft détruit chez les Grands & chez les' Philofophes. II eft encore enraciné dans le peuple; peu nous importe , nous ne frayons point avec lui. En un mot, trouvons-nous toutes deux a Villers-Cotteret ou au Palais Royal, vous reconnoitrez la différence on'un Prince fait de la femme de fon Architeéte a une Aélrice dont les talens ont le bonbeur de lui plaire & de Pamufer. Je vous laiffe fur ce paralelle, & me retranche derrière le mur de féparation que vous avez prétendu élever entre nous. Adieu, ma chere fceur, n'ayant plus rien -de commun , puifque vous le voulez ; mais, malgré vos mauvais procédés, vous ne fortirez point de mon cceur, & c'eft peut - être Je pre>  C 302 .) Vrille, & joiie avec autant d'ame que dlnrellrgence. Les Directeurs ont voulu mettre du leur; ils ont ajouté des ariettes d'une mufique fupérieure a celle qu'ils ont retranchée, & très-plattes quant aux paroles. Les ballets ont mieux réuffi. Mlle Guimard y brille avec toutes les graces. La volupté qu'elle caraefterife, feroit mieux exprimee dans fa pantomime, fi elle y mettoit plus de naturel & moins d'afféterie. On reprocboit h Mlle Lany qu'elle remplace un jeu tropféve're; celle-ci efi auffi correcte, mais minaude beaucoup. Le Sieur Gardel a exécuté une chaco' ne de fa compofition , &, par une ferte de fatalité, c'eft peut-être le jour oü il ait le plus maf réulïï; il efi vrai que fair eft miférable. On feroit forti fort mécontent du fpechcle fans la froifiemé entrée. Rien de plus agréable, de mieux joué & de plus- fini que Padie de la Terre. Mlle Arnóux, prefque oubliée-a force d'étre défirée, a daigué reparoltre dans l'acbe de Pomone. Elie a femblé avoir acquis dans fa retraite encore plus de nobleffe & de fentiment. Le Gros, faifant Vertumne, ne s'eft pas moins diftingué. La fcenc de la reconnoillance a été ffice fupérieurement; ce dernier a chanté Ie morceau Voyez dans ces vergers la fource qui ferpente&c. avec un moelleux, avec une onction qui ont pénétré tous les cceurs. Les Ballets ont completté 1'enthoufiafme. Mlle Allard a plu par fes attitudes molles & fon enjouement lubrique. Mile Peflin a étalé fa grolfe gaieté , la vigucur  C 3°3 ) cte fon jarret, une danfe robufte comme fes ap» pas. Ón a vi de la foupleffe, des diflocations du Sieur Lany; le Sieur Slingsbi, Danfeur Anglois,a fait admirerfalégereté & fon aplomb. Les divertiffemens étoient entremêlés de chants, & le Sieur le Gros a fmi par une arictte fimple, mais d'un naturel exquis; il a lahfé le fpectateur animé d'une joie douce comme fa voix mélodieufe. A la page 255. Le 20 Aoüt 1767. II s'éleve un grand fchifme dans la troupe des Comédiens. Francois. Mlle Dubois , laffe de galanteries, parott vouloir fe livrer toute entiere h fon métier; elle a repris tous les róles dont s'étoit chargée Mlle Duranci, & a décla-ré qu'elle vouloit jouir de fon droit comme première Actrice , que 1'autre la- doubleroit, & ne joueroit qu'a fon refus. Le Kain, qui protégé cette derniere & lui feit de mattre de déclamation, a pris le parti de fon éleve; il a proteflé de fon cóté qu'il ne pouvoit figurer.-vis-:a - vis Mlle Dubois; que c'étoit une trop mauvaife Actrice , que fa feule préfence le gla^oit &c. Molé eft intervenu, &, pour faire fa Cour a Mlle Dubois A laquelle il commence a s'attacbei-, comme on a vu, il a dit que le refus de M. le Kain ne devoit point inquiétcr, qu'il fe chargeoit de fes róles. Celuiei voyant cela, ne veut pas les céder; il fauSra une autorité fupérieure pour arranger cette querelle. M. 1'Arcbevüque n'a jamais voulu confentir a la publication des bancs de Mlle d'Epinay avec  C 305 ) ehérie autrefois de Dien, & aujourd'hui Popprobre de tous les pays. A la page 255. Le 24 Aoüt 1767. M. Duclos, lc Secrétaire de PAcadémie, doit être demain k i'Affembléè- tl eft de retour depuis quelques jours de fon voyage de Pvome. Le motif de ce voyage excitoit la curiofité de bien des gens; on le fait aujourd'hui. Cet Académicien eft fort Hé avec MM. de la Chalotais; il s'expliquoit trèsouvertement fur cette affaire dans la chaleur du procés. M. le Duc de Nivernois, craignant que nrtcUfcrétion de M. Duclos ne lui attirat quelque difgrace de la Cour, lui a confeillé amicalement de proüter de ce tems - la pour aller eu Italië comme il en avoit défir depuis longtems, & 1'autre s'eft rendu k ce fage avis. A la page 258. Le 29 Aoüt 1767. II parolt une Lettre fur les Pafiégyriques, qu'on attribue a M. de Voltaire; & en effet elle femble être de lui, a en juger par le ftyle, & fon art de préfenter les chofes les moins intércflantes d'une facon piquante. Elle eft courte & n'a que quinze pages. L'Auteur , comme il lui arrivé fou* vent, tombe dans le défaut qu'il veut corriger, cc a tast mérité le reproche qu'il fait aux autres, qu'il a mauvaife grace de le relever. Au relle, cet écrit eft ft peu de chofe qu'on n'en parleroit pas s'il ne fortoit de la plume de cet homme célebre. A la page 258. Le 30 Aodt 1767. Cosroes eftla tragédie d'un écolier qui a été vingt - quatre  C 307 ) fon Prince. II cache fous une modération apparente le zele aveugle & fanatique dont il eft intérieureuient dévoré. II a proflté de 1'abfence du Monarque,de fon crédit & de fa puilfance dans la capitale,pour fouftraire un enfant au berceau,; le feul rejeton de Cosroës; il répand le bruit defa mort, & le reproduit enfuite dans fa maifdn comme un enfant inconnu qu'il adopte & qu'il éleve dans le Chriftianifme ; fon projet eft de ménager cn ce jeune Prince un proteéteur a fa religion, & de le faire reconnoltre & monter fur le tróne a la mort de Cosroës fon pere. L'évenement ne répofid que trop bien aux vues de Phamjjar. Manaffès, c'eft ainfi qu'on nomme Pinconnu, fuce le fanatifme avec le lait; il eft d'ailleurs d'un caracbere bouillaut & impétueux;il ne refpire que la guerre & les combats; il a une foif de gloire inextinguible, & chercbe tous les moyens de couvrir par fes actions Pobfcurité de ft nailfance; il fe mêle dans toutes les factions; il eft a la tête de tous les partis. Par une fympathie de la nature, fans doute , la Reine Ameftris 1'aime, le protégé, le foutient contre toutes les cabales & les intrigues de cour ; il fe rend bientót redoutable au Monarque même:. celui-ci, pour le punir par 1'endroit fenfible, Mt le conduit point a une. guerre qu'il entreprend, & lc laifie languit dans 1'oifiveté de la capitale; c'eft la oü la piece commence. Un certain Memnon , Satrape, proche parent - de 1'Empereuc, & fon feul héritier par la mort  C 3°0 du fib unique de Cosroës, voudroit profiterdu mécontenternent de. Manaffés pour Ie porter a confpirer, & fe frayer par fon moyen un chemin plus prompt au tróne , que dévore ce Prince ambitieux. Le fanatisme fouleve les Chrétiens, Manaffés fe met a leur tête, Memnon fe joint a eux & fe ménage des Abyffins captifs pour s'en fervir au befoin en leur donnant la liberté. Cosroes revient dans ce moment après avoir vaincu fes ennemis; il a feu les nouveaux troubles qui s'élevoient dans fes Etats ; il veut y mettre ordre définitivement, & il indique un Confeil oü Pon prendra les réfolutions les plus promptes & les plus füres pour arréter les féditioris qu'ëxtitent les Chrétiens. Le Confeil fe tient. Cosroës le premier j ure de ne pardonner a perfonne des coupables; les Satrapes en font autant; un entr'autres déclare qu'il immölera même fon fils, s'il eft criminel...., a 1'inftant on apporte un billet a Cosroës; il eft d'un efclave qui lui dévoile la conjuration; il indique les principaux factieux, & il laiffe tomber des foupcons fur Manaffés..... II annonce qu'on peut d'autant mieux le croire qu'il vient de fe tuer. Cosroës rompt le Confeil; il dit a Phaneflar qu'il laifle fous ft garde Manaffés jufqu'a ce qu'il fe foit décidé a fon égard. Le premier cherche a ramener 1'autre par tout ce que la raifon , 1'honneur, la religion, la recounoiffance peuvent lui diéter de motifs les plus preffants & les plus forts. .Le jeune Prince étant inébranlable, le Miniftre fe  ( 39 ) rlétermme k lui déclarer fa nailfance pour lui Épargner un parricide; au moment oü il va dévoiler ce fecret, on vient arrêter Manaflês de la part du Hoi. II ne refte d'autre reffource a Phaneflar que d'aller révéler fon crime au Roi. 11 le fait, il fe déclare 1'auteur de 1'enlevement du Prince ;, Cosroës lui pardonne fous la cottdition qu'il laiflera ignorer ce fecret k tout 1'empire & a fon fils même; il lui ordonne d'aller le chercher & de 1'amener a fes yeux. Le Roi dans cet interrogatoire veut remuer les entrailles du coupable, mais envain; 1'amour paternel eft fur le point d'éclater , & Cosroës rompt 1'entretien pour ne pas laiffer percer fa teudrefie. La Reine furvient; elle a appris tout ce qui s'eft paffé; elle vient demander grace pour fon protégé. Dans ce moment on annonce au Roi qu'un parti de mëcontens a éclaté, qu'ils ont délivré Manaffés de fa prifon; qu'il eft k leur tête &c. Cosroës fort pour aller mettre ordre k la fédition; Phaneflar le fuit, & par des mots entrecoupés laiffe entrevoir k la Reine que 1'inconnu eft fils du Roi & le ficn. Les rebelles triomphent ; Manaffés a tué de fa main un guerrier; il craint que ce ne foit le Roi. En ce moment Cosroës arrivé, il fe trouve feul, fans armes, dans fon palais; il fe préfcnte dans cet état k Manaffés & a fes complices; il les invite a Lui percer le fein. La Majefté rovale, une force fecrete & inconnue arr.êté la niam du parricide; la nature femble lui parler en ce moment, il tombe aux genoux  C 31© ) du Roi avec les coufpirateurs; & la Reine qui furvrent, lui apprend fa nailfance. Le tout elt confirnié par Phanelfar qu'on amene mourant fur le théatre & qui fe trouve être la viclime du jeune Prince. Cependant le Roi perfide dans fa réfolution de facrificr fon propre fils a la fureté de fes Etats & a la religion de fon ferment. Ameftris ne peut rien gagner par fes larmcs; elle lui fuggere un moyen qui paroit cependant Pébranler; c'ed de faire grace a tout le monde; mais le Satrape qui a juré d'immoler fon fils même s'il étoit coupable, arrivé pour exécuter fa parole, & n'ayant pas le courage de la remplir, il 1'élude en fe tuant lui-même ; il óte par fa mort Ia reflburce qui redoit a Cosroës; il envoie le Prince au fupplice ; aprês avoir rempli les devoirs du Roi, il fe livre a la nature, & le pere fuccombe fous le poids de fa douleur; dans le moment on lui apprend que Memnon a la tête de fes Abyffins, étant venu ranimer la révolte, le fils de Cosroës a ralfemblé quelques troupes, s'efi mis a leur tête, a tué Memnon, diffipé les factieux, s'eft couvert de gloire, & que les pcuple's en foule le regardent comme leur libérateur. 11 arrivé précédé & fuivi des acclamations publiques, une joie univerfelle fuccede au dcuil général de PEmpire. On voit par cette efquifle combien la charpcnte de ce drame eft bizarre & monftrueufe , fans compter nombre d'abfurdités de detail qu'on a fupprimées.  C 3" ) L'expofition eft aflez bien faite; elle eft claire , .& fai: connoitre tous les perfonnagcs principaux. Lc ai, acte eft le uicillcur; la fcene du Ministre & de fon fds adopté cd fupérïeurement traitée entre Brifard & Molé, furtout par le dernier; il ed facbcux que la reconnoiffance foit fufpendue par un rcffort de com mande cc ufé que 1'Auteur fait jouer précifément au moment nécefi'aire. ün inltant plus tard, la piece étoit fmie. Dans lc 3e. acte, 1'aveu que fait Phaneffar au Roi de ft fupcrcherie, & la découverte d'un fils, 1'efpoir du tróne , traitre ft fon Roi & confpirant contre lui, n'a produit prefque aucun effet; i°. paree que le fpecdateur eft dans la confidence riès le premier acte; 20. paree que 1'intérêt eft attenué par la foibleffe des caracteres mal frappés; car le Miniftre n'eft ni fanatique, ni vertueux tout-a-fait. LeMonarque n'a point encore développé ces entrailles paternelles qui auroient préparé tout le patbétique de cette fituation ; & le jeune Prince n'eft pas d'une ambitiön aflez décidée , affez effrenée pour ne pas rentrer dans fon devoir dès qu'il faura fon état; !> 30. paree que fembarras de la polition de Cosroës n'eft réellement que dans la tête de 1'Auteur. On voit combicn il lui feroit facile de pardoimer & d'appaifer les troubles en mauifeftant ii Manafles fa nailfance & le crime qu'il alloit commettre. De la toute la langueur qu'on éprouve dans le 4e, & dans le 5c actes, toujours prêts a finir quand il plaira au Poëte.  C 313 ) Le Roi rentre fur la fcene, il a laiffé fon fils diffiper-le refle des faérieux; on annonce qu'il a tout calmé, que le peuple va fe rendre pour demander la grace du vainqueur& le reconnoitre comme héritier du tróne. Toute cette cataftrophe eft fondée fur le doublé contre-fens d'un Chrétien qui veut fe tuer, & d'un Monarque Payen aflez inflexible, pour vouloir que fon fils périlfe, & qui lc rctient dans un moment ou ce dernier chercbe a fe fouftraire, non a la mort, mais a 1'infamie &c. mais H s'enfuit du fracas fur le théatre , un granl mouvement, plus de chaleur;& ce denouement abfurde eft de beaucoup fupérieur a fautre,plus dans les mecurs, mais plus froid. On a demandé 1'Auteur; il a paru. A la page 260. Le 6 Septembre 1767. Les fètes de St. Cloud durent encore ; elles font d'une magnificence & d'une variété dont il y a peud'exemples. On ne man ge jamais deux fois dans le même endroit. Les fpectacles confiftent principalement en anciens Opéra comiques qu'on a rajuftés au théatre & dont on a refait la mufique. Comme ils font en partie exécutés par la troupe des petits enfans de f Opéra, auxquels préfide d'Aubcrval, ils ne font pas fupéricurement bien joués. II y a auffi des parades de la compofition de M. Poinfinet, qui s'eft déja excrcé dans ce genre pour la fête de M. le Chevalier dArc. A la page 264. Le 10 Septembre 1767. II y a Tomé XVIII. O  ( 3.*4 ) depuis longtems un canal commcnsé en Picardifi a la tête duquel étoit le fameux Crozat, grandpere de Madame la Duchefïe de Choiftuil.S. M. k charo-e de le continuer fuivant un arrangement propofé au Confeil. Elle fe fubfiitue aux droits & place des héritiers de M. Crozat; elle les reflibourfe en conféquence d'une avance de o"ooo,cco livres qu'ils ont faite. M. le Duc de Choifeuil doit avoir pour fa part un million cinq eens mille livres; pour le Maréchal de Broglio 5oo ooo livres & le furplus paffe en d autres mftins. Le rembourfement doit être fait en contrats h 4 pour cent. C'ed le fameux Laurent qui fera, dit-on, chargé de la continuation des travaux On connott fes talens pour 1'bydraudatique, par la cafcade de Bruuoy, par celle de °ttp&^. Le » Sept^^f? préfentés a M. Beudet, Secrétaire géneral de la Marine & Secrétaire de M. le Duc de Praihn, mr M. Tacquet, jeune homme de 14 ans, eu lui préfentant de fon écriture pour lui demander de 1'emploi. D'un Miniftre éclairé confident nécefftire Dontle génie aftif 1'aide fi bien en tout, Puilfe mon talent foible être de votre goot, Et m'attirer du moins un coupTi'ceil tutéla.re! Du Ciel la prudente bonté Ne donne a tous la même chofe, Chacun de mérite a fa dofe, • L'un peut moins,1'autre ph».,*al» 011 efthmités  C 315 ) Vous avez une tére a gouverner un monde, Moi; pour exécuter.je n'ai qu'un doublé bras: 11 fe préi'eute a vous, ne Ie dédaignez pas, Commandez & je vous feconde. A la page 263. Le 13 Septembre 1767. Vingenu vient d'étre arrété ces jours - ci , après s'être vendu publiquement pendant plus de huit jours. II ne valoit que 3 livres & coüte a préfent un Iouis. A Ia page 266. Le 15 Septembre 1767. Le Sieur Vendeuil continue a Ia Comédie Italicnne fon début dans les róles d'Amoureux, commencé le deux de ce mois dans le Cadi dupe. Quoiqu'il ait de la voix , il manque de goüt & n'eft: point agréable au public. Cependant une haute protcclion le porte a ce fpeélacle, & M. le Duc ■de Noailles furtout s'y intéreffe forcement , ce qui fait fenfation dans ce tripot & occafionne beaucoup de rumeur. On prétend que Clairval ne peut refter depuis fon aventure & qu'il faut nécelfairement le remplacer. A la page 266. Le 16 Septembre 1767. M. le Prince de Conti étant a fi terre de 1'Ifle-Adam a vu palier fur la riviere quelques bateaux de bied qui defcendoicnt. 11 a demandé ce que c'étoit, & fur les informations qu'on lui a donné que c'étoicnt des grains qu'on exportoit pour 1'étranger, il a fait heller les bateaux & les a obÜgés dc débarquer chez lui; il a'acheté ces bleds & les a fait diftribuer a fes valfaux qui commengoient a le payer cher. O 3  C 316 ) A la page 266. Le 17 Septembre 1767. M. de Cboifeuil eft parti Lundi dernier pour fa délicieufe terre de Ümnteloup; il y doit refter'jufqu'au 22; quöiqu'il y ait 34 poftes, il fait ce chemin en 13 heures. H s'y eft rendu des environs une tronpe de Comédiens pour amufer les loifirs de ce Miniftre, toujours aétif même dans fes plaifirs. A fon retour il doit en paffant par Paris faire lui-même la revue du Régiment de Chamhorand d'Houffards; c'eft un nouveau fpectaele qu'il veut donner aux badauds de ce pays-ci. A la page 266. Le 18 Septembre 1767- Madame la Comteffe de Stainville, dont il a tant été fait mention pour fes amours avec Clairval de la Comédie Italicnnc, & furtout par Pefclandre faite par fon mari, eft tombée malade dangereufement dans le couvent oü elle eft. Les Médecins du pays Pont mal traitée, & il eft néceffaire qu'elle revienne a Paris. On prétend que c'eft pour cette raifon qu'on veut éloigner 1'Histrion'qui lui avoit tourné la tête. Du refte, PAbbefle rend les m'eiUeurs témoignages de cette jeune Dame qui parolt s'être jetée dans la haute dévotion. A la page 266. Le 18 Septembre 1767. On parle de deux nouveaux ouvrages de M. de Voltaire: La Théologie portative, & Ylmpojture facerdótale. On ne connoit que les titres de ces deux brochures infernales , comme on s'en doute bien. A la page 266, Le 19 Septembre 1767. Cosroës  C 31? ) eft aujourd'hui a fa oe. & derniere repréfentation. Ce qui eft une efpece de fuccès pour un pareil Drame, & dans une faifon femblable. Saus doute cette induigenc-c eft duc a la jeunelfe du débutant que tous les journaux annoncent pour n'avoir pas encore 23 ans. Cet Auteur eft fils d'un marchand Mercier de Paris. Le pere, contre 1'ufage des vieillards féveres, ne paroit point s'oppofer a 1'eflbr des talens de fon fils; il étoit a la première repréfentation , & fembloit agité des mêmes mouvemens du véritable Auteur. A la page 266. Le 20 Septembre 1767. II eft queftion d'établir a Paris un journal Efpagnol, c'eft-&-dire un ouvrage périodique qui rendra compte de la littérature de ce Royaume. Cette entreprife paroit d'autant plus difficile a exécuter,que le journal étranger dont ce travail ne faifoit.qu'une branche, n'a pu fe foutenir. Quoi qu'il en foit, c'eft un M. d'Hermilly qui doit faire les traducrions, & M. le Chevalier de la Morliere qui tiendra la plume. A la page 267. Le 22 Septembre 1767. II a débuté ces jours - ci a la Comédie Italienne deux jeunes Danfeufes, ou pour mieux dire deux enfans. Elles font-Pruffiennes; elles attirent tout Paris par la vigueur de leur jarret a un pareil age; elles naroilfent plutót deftinées aux cabrioles qu'a la danfc noble & gracieufe. A la page 269. Le 26 Septembre 1767. M. le Prince de Lamballe, qui a époufé l'hiver dernier une Prineelfe aimabie èkjolie, s'étant laifle aller O 3  ■ C 318 ) a la facilité de fon caraclere, un autre Prince {M. le Duc de Chartres) a abufé de fon amour du plaifir pour lui donner des goüts fort contraires a celui qu'il devoit avoir; du moins on 1'en aêcufe. L'ardeur de fon tempérament 1'ayant emporté fort loin, la Princeffe s'efl trouvée atteinte d'un genre de maladic qui n'auroit pas dü Papprocher. Le Duc fon pere a écrit au Roi de France. On a févi contrédifférentes créarures que ce Prince avoit honorées de fes bonnes graces; mais la plus coupable & la plus adroite elt une Hommee la Furêt , courtifanne recommandabte par 1'excès de fon luxe, & le rafinement de fon art dans les voluptés. N'ayant pu déterminer fon illultre amant a la quitter, & craignant les fuites de cet attachement, elle a pris le parti de s'éclipfer. Elle elt partie, fans qu'on fache oü elle elt, & le Prince de Lamballe eft dans la défolation. A la page 269. Le 27 Septembre 1767. On ne parle aujourd'hui que des fêtes de Chanteloup, qui ont répondu ft la magniricence du maitre. La vei'fle du départ, le Duc de Choifeuil donna ft Madame la Duchelfe de Villeroi & ft une cour trés-nombreufe, une fête oü Préville , mandé expres de Paris, joua dans une Comédie de fa facon, intitulée la Difpute des Comédiens; après le Drame on chanta plufieurs Vaudevilles relatifs au camp de Compiegne, & 1'on exécuta enfin un Opéra comique nouveau. Ala page 269. Le 28 Septembre 1767. II court  ( 319 ) une lettre manufcrite, d'une DemoifelleJe Clerc* une des impures de Paris très-renommée, & qui par la fait fenfation & fe copie. Paris le 29 Aoüt 1767. Lettre de Mlle le Clerc d M. Poinfinet. Vous avez raifon , mon cher Maïtre: malheur aux jolies femmes qui établiiïent leur réputatiou fur leurs charmes; elle eft fragile comme eux. Heureufes celles que la nature a douées de quelques talens; je fuis bien réfolue a faire valoir les miens, & k mériter une gloire que je ne dois jufqu'a préfent qu'a des attraits puffahles. J'ai plaifir a croire qu'une grande Actrice doit aller a 1'immortalité, & que la ftlblinie Clairon fera 1'entretien des races futures comme le prodigieux Voltaire. Je compte donc travailler firieufement a entrer au fpecbacle cet hiver; je me fuis dégroffie Phiver dernier chez Madame la Ducheile de Villeroi; je me fuis exercée depuis , & je profïrerai de mes protections pour débuter aux Francois, le plutót poffible. Celb a vous, moa cher maitre, k me guider, & k me dire de-quels róles vous me croyez plus fufceptible; car 011 ne peut pas être univerfel. J'ai, fans me flatter, les graces des Amoureufes, 1'ingénuité xles Agnès;jc puis prendre k mon gré 1'airmalin des Soubrettes, & je n'aurai pas de peine a en développer toute la malice. Je fais jouer la févérité des Duegnes cc^des Meres; je monterois s'il le falioic a' la dignité des Coquettes; j'en aurois 04  ( 32° ) los manieres folatres; en un mot, je fuis aflez Prothée pour prendre toutes fortes de formes; il s'agit de favoir celle qui me convient le mieux, & c'eft a vous, cher maitre, que j'ai recours. Vous avez des lumieres; vous me connoiflez depuis longtems: décidez-moi, afin que je me fixe; arrachez ■ vous un peu aux grandeurs qui vous environnent. (*) Hélas! il fut un tems ou vous m'auriez facrifié tout cela! mais ne rappe- kms point des jours trop heureux Vos con- feils, cher maitre, ne me les refufez pas. Je fuis, &e. A la page 163. Le 29 Septembre 1767. Qui croiroit qu'après plus de deux ans d'un jugement rendu dans une affaire qui a attiré les regards de toute 1'Europe, un anonime viendroit, fotis le nom du Sentiment Politique , expofer dans cinq lettres la juftice des deux Arrêts du Parlement de Touloufe contre Calas pere & fes coaccufés? 1'Auteur prétend convaincre fes lec* teurs fans préventions & fans préjugés , que 1'enthoufiafme a plutót opéré dans la capitale que le prétendu fanatifme n'a agi dans la ville de Touloufe. A la page 269. Le 1 OCtobre 1767. Les Comédiens Italiens ont'donné, lundi 28 Septem-' bre, la première repréfentation du Doublé Dé- gui- (*) M. Poinfinet étoit alors a Chaiuilly pour dhigat les fptctscles du Prince d« Co:idé.  ( 3" ) guifement ,• Opéra comique boufFon & trèsbouffon: quoique les premières repréfentaticms aujourd'hui ne foient qu'une répétition, il paroit que celle-ci n'ert aura pas deux. La mufique eft de M. Goffec; il y a de jolies chofes, mais nul génie, pas plus que dans les paroles, dont 1'Auteur garde 1'anonime & fait bien. A la page 273. Le 7 O&obre 1767. M. Poinfinet n'eft pas relté en arriere , & 1'on diftrilute aufli ta iléponfe a Mlle le Clerc. 'Elle eft curieufe par un examen aifez jutte des talens de nos principales Actrices de la Comédie Francoife. Rêpo'nfi de M. Poinfinet d Mik le Clerc. Je vous loue, ma belle voiüne (*) de votre facon de p.enfcr philöfophiquè. Certainement après un grand Poëte, une Actrice illuftre eft ce qui fait le plus d'honneur a l'hutnanité. J'aime a voir fermeuter chez vous Pamour de la gloire. Vous êtes faite pour 1'acquérir. Puillent nos noms entrelacés paffer a la poftérité comme ceux de Voltaire & 'de Clairon ! Vous prenez bien votre modele. Cette femme illuftre n'a .percé qu'a force dc travail & d'affiduité. Vous avez, comme elle, des graces extérieures, votre efprit peut vous être d'un grand fecours; quant aux róles auxquéjs vous devez vous appliquer, il y a bien des chofes a examiner", & cela mérite quelque détails. II faut pefer vos talens, & ceux des concurrentes que vous aurez. Dans les róles (*; M. Pjinfinet de:ijeilrs ita'rtS 14'fiiaifón de Mtlè leCIetc, O 5  ( 32Ü ) d'Amoureufes, je vois MUes Flus & Doligny. La première eft peu redoutable; elle a pourtant quelques fituations oü elle eft très-bicn. Le public eft fi cngoué de la.feconde. Qu'il me paroit difficile d'éclipfer cette rivale! Mlles Dumesnil, Gautbier & Préville brillont dans le genre plus graye , mais votre jeuneffe vous pourroit faire cfpércr de voir bientót les deux premières vous céder la place. La derniere a une froideur que furmonteroit aifément votre vivacité. Quatre Soubrettes courent la même carrière, & chacune a des talens différéns. Madame Bellecour joue lesNourrices a merveille; cette énorme tetoniere a ia bonhommie franche d'une Appareiileufe qui aime bien a rendre fervice pour dé 1'argent. On trouve dans Madame le Kain toute 1'aigreur, tout le revêche d'une Boudeufe dont il faut faifir le moment, Mlle Fannier a le ri'éz retrouffé d'une Suivante. fine, exercée, & faite pour tromper a la fois trois ou quatre amans. On admire dans Mlle Luzi la tournure d'une Confidente d'une femme du grand monde; c'eft- une malice rafinée, aprofondie, réfléchie comme celle de fa maitreffe; & il faut un art bien fupérieur pour atteindre a cette méchanceté fublimc. Malgré tout cela, je crois que vous êtes née pour un pareil genre: je ne vois pour vous a craindre que cette derniere ;& vous pouvez, vous devez même éviter la .concurrence. Du rede , vous êtes taillée en Soubrette ; vous en avez la figure k proposa le jeu, les gefies. Tenez-vous ü'  C 323 ) & ne fongez point a vous élever davautage. Je vous dis mon avis avec toute 1'ingénuité que vous exigez. Vous réudïréz furement, fi vous voulez - vous concentrer dans de pareils róles, & furtout étudier beaucoup. Du rede, je. fuis a vos ordres; vous n'avez qu'a parler, ma belle „voifine; je fuis trop reconnouTant pont ne pas vous rendre tous les fervices qui dépendront de moi. Ed-ce a vous a regretter le tems paljé? Ce feroit a moi; mais il faut fuivre fes deftins. La fulélité en amour n'eft pas ma vertu. J'en fuis. a ma 485e. maitrede, & Mlle Arnoux , toute Arnoux qu'elle eft, n'a pu me fixcr. Avec ce caractere de légereté dont mon tempérament a befoin, je n'en fuis pas moins le très-humble ferviteur de toutes celles qui le méritent, & pour lefquelles j'ai confervé de 1'eftime au lieu d'amour; vous êtes du nombre, ma belle voiline , & je vous prouverai dans tous les tems 1'attachement refpectueux avec lequel j'ai 1'honueur d'étre &c. a Chantilly ce 3 Septembre 1767. A la page 274. Le 8 Octobre 1767. L'Origine de la divilïon entre M. de Marigny & M, Gabriel pour ceux qui ne fe la rappelleroient pas eft 1111 mur aux Champs-Elifées dont M. Gabriel avoit fait enclore un jardin. M. le Marquis de Marigny a prétendu que 'ce premier Architecie avoit ufurpé une partie des potagers de Madame la Marquife de Pompadour, dont le terrein avoit été rendu a la vilie; en conféquence M. le Di.0 6  C 325 ) & «n été préfenté au Miniftre de la Marine. Cette bete reflemble par la couleur de la peau a 1111 petit fahgher qui a le poil plus gros que du erin: fon muzeau eft comme celui d'un poiflbn de mcr, fes pattes imitent celles du cerf; elle a une ouverture fur le dos, comme on a dit, par oü elle refpire; elle eft trés-familierc. A la page 279. Le 17 OStobre 1767. On avoit arrêté au Confeil que 1'hótel des monnoies feroit établi a la place de Louis XV; en conféquence, des plans en ont été dreffés; on en avoit déja jeté les premiers fondemens & fait une dépenfe de plus de cinquante mille écus, lorfque, fur des repréfentations qui ont été écoutées, on a fufpendu 1'ouvrage, & après un mur examen, il a été décidé qu'il ne pouvoit avoir lieu dans cet emplacement. On vient de choifir celui de Conti prés le Pont- neuf, & on doit y travailler au commencement de 1'aunée procbaine. Le public s'étoit ftatté qu'on auroit faift cette occafion pour achever une partie du Louvre, oü il fembloit qu'on put placer 'la Monnoie: le deur qu'on a de voir a fa perfeétion cet immortel monument, fait faire des vceux a tous les bons citoyens pour qu'on premie enfin les moyens d'y parveuir; ce qui s'exécuteroit facilement en peti de tems en y mettant fuccelfivcment des objets iitiles que 1'on place journellement ailleurs avec beaucoup de dépenfe & lans rien ajouter a la beauté & a la magnificénce de la ville , comme ¥-MM des menus phifirs du Roi, fe Garde-menO 7  ( 32Ö ) Ik de la Couronne &c. & cPautres qu'on fe pröpofe de faire. A la page 284. Le 24 Octobre 1767. Le Sieur de la Garde, ancien Bibliothécaire de Madame la Marquife de Pompadour , & acolythe du Sieur de la Place pour la fabrication du Mercure , vient de mourir. B étoit chargé de la partie des fpectades, & c'étoit un des articles de ce journal les plus ridicules par le ftile néologique de ce rédacteur, & plus encore par le fade encens dont il parfumoit indiftinctement les Auteurs , les Acteurs & jufqu'aux valets de théatre. Sa place eft fort briguée. A la page 248. Le 24 Octobre 1767. Les Pefifionnaires du Mereure ont préfenté un Mémoire a M. le Comte de St. Floreutin a 1'occafion dé la mort du Sieur la Garde, oü ils font voir que les fonds ne fuffifent pas pour les remplir , en conféquence ils le fupplient de ne point nommer a cette place vacante. Lc Minidre a eu égard a ces Repréfentations. La Garde avoit mille écus. A la page 284. Le 24 Octobre 1767. Les nouveaux fragmcns n'ont point repris; il n'eft pas méme pollible qu'ils fe foutiennent, furtout 1'aéte A'Amphion fe trouvant deftitué de Ie Gros & de Mlle Arnoux qui n'y jouent plus. A la page 284. Le 25 Octobre 1767. M. dc la Borde, ci-devant banquier de la Cour, fameux par fexcès & la rapidité de fa fortune, vient de couclure un marché avec M. Vernet, ce Peintre célebre de mannes. II lui demandé huit tableaux  C 327 ) jpour orner mie magnifique galerie, & iT donne quarante mille écus a l'artifte. Ce dernier a abandonné la collection des différentes vues des ports de France qu'il devoit porter au nombre de quarante; on croit qu'il ne s'eft pas eftimé aflez bien payé. A la page 278. Le 27 Octobre 1767. On a remis il y a quelques jours a POpéra 1'Acte de \Vertumne £ƒ Pomone, ?. la place du Prologue des Amours des Dieux qu'on a retiré. Mlle Durancy a joué dans Pafte d'Amphioti. Son retour auroit été plus fêté, s'il fe füt annoncé dans quelque chofe de meilleur. Cet acte |eft fi barbare, d'un goüt fi monftrueux, qu'il Tévolte le public; on le trouve fort de penfées a. la lecture; il eft dans le coftume fauvage; mais de pareilles moeurs révoltent fur le théatre de 1'amour & des graces. 11 faudra le retirer inceffamment. Quant a Thêonis ou le Toucher, le fonds eft une iJéc trés-obfcene que M. Poinfinet a enveloppée dans des images communes. II pafleroit fi la mufique le foutenoit. Ce Poëte dit mo.leftement que cet Acte eft une efquiife, en attendant fon magnilique tableau, c'eft-a-dire fon grand Opéra. II a débuté auffi un jeune homme de 15 a 16 ans qui a une trés-belle voix & une hardieffe fiuguliere , quoiqu'il ait chanté quelque chofe de fort diflicile. D'ailleurs , fon age fait ■fraindre que fon organe ne rede pas le même. . A la page 291. Lc 29 Oftobre 1767. Les  C 328 ) Comédiens Francois ont rentreprife des trois Comédies de Verfailles, de Fontaineblcau & de Compiegne; ils comptent y faire des efpeces de magalins oü ils formeront des Sujets pour les fpectacles de Paris. A la page 295. Le 4 Novembre 1767. On a parlé de 1'évafioU de Mlle la Forcft au gran.1 regret d'un jeune Prince nouvellement marié qui avoit concu pour elle une palfion dangereufe; On fait actuellemcnt le motif de cette fuite précipitéc. L'Amant lui a fait préfent d'une partie aflez confidérable des diamans de la Princeffe. Sur les recherches que la Courtifanne a eu vent qu'on faifoit, elle a cru devoir s'éclipfer. Mieux confeillée, elle s'eft repréfentée depuis peu au' Duc de Penthievre, pere du jeune Prince , a rapporti les diamans, & s'eft jetée a fes genoux en implorant fes bontés. Le Duc a paru fatisfait de cette démarche; il lui a dit qu'on feroit' eftimer les diamans, & qu'on lui en payeroit la valeur, qu'elle ifeüt aucune inquiétude; qué fon fils étoit le feul coupable; qu'on auroit foiu de fon enfant; fi elle étoit grolfe, comme elle difoit le foupconner, que dans tous les cas on pourvoiroit a fes befoins ; mais qu'il exigcoit qu'elle ne vit plus le jeune Prince , fon amant. A la page 295. Le 4 Novembre 1767. 11 fe confirme que M. Doigny quitte la ferme générale & qu'il époufe Mlle Liancotir't, néc d'une Actrice, fille célebre, appelée la Covjlitution. 11 compte. palier deux ans dans fa terre , Uiffer  C 329 ) épuifer les propos & les farcafmes de la capitale, & reparoltre enfuite avec fa femme, purifiée par une femblable retraite. A la page 295. Le 4 Novembre 1767. Le mémoire des Penu'onnaires du Mercure n'eft pas refté fans réplique. M. de la Dixmerie, qui alimente de contes cc Journal depuis fix ans prefque gratuitement, a demandé la place & le traitem ent de Ms dc la Garde; il accufe ces MM. d'inlidélités, & M. le Comte de St. Florenriti fait compulfër les regilïres. La chofe doit fe décider le Lundi, 9 de ce mois. A la page 295. Le 5 Novembre 1767, Une jeune Princelfe, vive, aimabie, mariée 1'hiver dernier a un époux fort jeune auffi , n'a pu fupporter tranquillement les infidélités réitérées de fon mari; quelques funeftes qu'elles aient été ü fon amour même pour ce moderne Théfée, elle n'a pu voir fans un excös de jaloufte marquée, fon éloiguement & fes écarts; elle a concu de 1'enviecontre les objets les plus méprifables, que le Prince honoroit de fes regards; elle en a contraété une mélancholie profonde, & desvapeurs convulfives. Les Médecins a la mode n'ayant pu calmer ce mal plus moral que phyfique; elle s'eft mife entre les mains d'un nommé Pütarra, Charlatan en vogue par des empldtres qu'il applique fur le nombril. Plufieurs femmes de la Cour en ont eflayé , & Madame la Duchelfe de Mazarin en ayant parlé a la Princeffe, celle-cï vient depuis peu de Ie faire appeler auprès d'eiie.  C 33°' ) A la page 295. Le 6 Novembre 1767. M. de la Dixmerie ayant lieu de fe plaindre de Pingratitude des Penfionnaires duMercure, qui pour la plupart n'y contribuent en rien, & veulcnt cependant le fruflrer d'uire penfion qu'il a droit d'efpérer par fix années de coope'ration prefque gratuite a ce journal, vient d'exbaler fes plaintes dans une fable allégorique & ingénieufe. La voici. Le Laboureur £? les Oifeaux. Pour féconder un champ de ftérile nature, Guülot employöit tout, foins, travaux & culture* Ah! dit-il, fi les Dieux fecondent mes efforts Si de Cerès le regard m'elt propice , Elle doit m'ouvrir fes tréfors, Le travail affidu vaut bien un facrifice. Attendons: il attend; mais un effain d'oifeaux Sur les épis dorés vient fondre h tire d'aiie, Et dévore a l'inftant le fruit de fes travaux. II feme encore, incurfion nouvelle} • Six fois le pere des faifons De fes douze palais a parcouru la fuite, Et fix fois de Guillot 1'efpérance eft détruite. Un de ces oifeaux meurt (*). Ca , dit-ii, compofons: Je veux bien, mes amis, travailler pour vous plaire f Mais le fage, dit-on, fuit les biens fuperflus, Prenez donc votre néceffaire, Et laiffez-moi la part de 1'oifeau qui n'eft plus. A ces mots Dieu fcait quel ramage; O Lp Gavds.  C 331 ) On tieut Confeil, c'étoit pour mieux faillir, Voici 1'Arrêt de cet Aréopage; Seme Guillot; femer eft ton partage, Lü nötre eft de tout recueillir. A la page 295." Le 7 Novembre 1767. Ön a parlé du Cas de Confcience &c. Ouvrage attriI bué a Dom Clémencé des Blancs-mantcaux, oü 11'on attaque la Commiffion nomniée pour PexaI men des conftitutions des Moines , dans fon f eflènce & dans fa forme; on en démontre les I irréguhrités & lc vice. Ce Mémoire n'eft pas I forti de Ia pouffiere des cloitres , ou eft retombé I dans celle des cabinets des favans. Un plaifant I a porté h ce tribunal un coup plus mortel: c'eft j une eftampe allégorique, fatyrique & d'autant |p!us offenfante pour la prélature , qu'elle eft f trés-vraie. D'un cóté on y voit les cinq Archejvêques chargés de cette befogne. Celui de |Rheiras (Mr. de la Roche-Aymon) ed; en face jde l'Eglife Rotnainc, figtirée fous une figure de Ifemme qui lui fait Ia mouc. Une main paroit jpréfenter un cordon bleu a 1'Archevêque d'Arlles (M. de Jumillac) elle 1'attire, 1'occupe, 1'aijmufe, & fe joue de lui. Un équipage de chaife loffert ;\ 1'Archevêque de (M. Dillon) Jcaptive fes regards, & paroit mériter toute fon fattention. Celui de Touloufe (M. de Brienne; lella fon bureau, deux Volumes de 1'EncycloIpédie ouverts devant lui, 1'un if.l'article Célibat, ll'autre a f article Moines. EnSii, M. 1'ArchevêIque de Bourges (Philippeaux; préfenté un bou-  ( -332 ) quct a une Demoifelle qui Fagace & porte tous les caracleres d'une fille de joie. De Fautre cóté, font trois Moines de différéns ordres avec les attributs de la pénitence, les liaires, les cilices, les crucifix &c. & dans les dirafes attitudes qui leur convienncnt. Au bas font écrits ces mots: Ce font ceux - ld qui réforment ceux-ci. Cette pasquinade trés - bien faite eft de la plus grande rareté, tout le clergé s'eft remué pour en arrêter le débit, malheureufement quelques cuïieux en ont eu des exemplaires. A la page 295. Le 9 Novembre 1767. Une Virtuofe, recommandable par les graces de fa figure & par celles de fon efprït, a écrit les vers fuivants a une veuve de fes amies qui 1'invitoit tl venir pafFer quelques jours k la campagne. A Ste. Aflité le 4 Novembre 1767» Je ne crains point !a foütude, Que votre efprit daigne embellie; Loin du fracas chez vous j'irai me recueillir, Dans une douce quiétude. II faut pouvoir vivre avec foi, Mon cceur fera rernpli ; lui feul me détermine. Couple ckarmant de fceurs! en tiers reeevez-mol. - Dans notre comité par Fois 4 la fourdine Si fennui cherche a fe gliffer, L'Amitié viendra le chaffer. Réponfe. Ne tardez pas, ma cliere belle, Venez vous repofer au fein de 1'Auiidé* J  ( 333 ) ■ L'Araour va vous traiter fans doute d'infidele, II voudroit du voyage être auffi de moitié; Mais tout eft fexe ici, nous lui fermons la porte; Nous craignons que ce Dieune vedlle nous tenter, Les Graces feulement vous ferviront d'efcorte, Celles-la , je le fcais, ne peuvent vous quitter. Par une autre que vous je me ferois maudire; Elle redouteroit 1'ennui d'un tel féjour; A tous les feminiens votre cceur peut fuffire, Vous favez paffer tour a tour Des bras de 1'Amitié, dans les bras de 1'Amour. A la page 295. Le 10 Novembre 1767. On regarde d'un oeil très-favorable un Arrêt du Confeil du 30 Octobre dernier fur les Privileges, Prérogatives fjf Exernptions dont le Roi entend ■que jouilfent les Négocians en gros; S. M. ne fe borue pas a y annoncer fon augufte proteêtion, il flatte le commerce d'accorder par chacun an deux lettres particulieres d'anoblilfement a ceux d'entre les Commercans qui fe feront diftinguds dans leur état, A la page 295. Le 11 Novembre 1767. Am- ■ phion n'a pu tenir plus longtems, & les Directeurs ont été obligés de le réformer; ils y ont fubflitué le Devin de Village. A la page 300. Le 15 Novembre 1767. II paroit une brochure de 55 pages in-8°., intitulée EJJai hijiorique & cnlique fur la diffenfion des Eglifes de Pologne. L'Auteur prouve d'abord que PEglife Latine eft la fille de l'Eglife Greque. II fait voir enfuj.  ( 334 ) te comment le Pape & les Evêques ont acquls j leur puiflance temporede; & il expofe en troiueme lieu, comment & fur quels motifs fe font formées les fectes Luthêïienne & Calvinide dans 1'Europe. Après ce préambule, 1'Auteur fait voir com¬ ment le chriihannme s elt étabh en Pologne, vers fan iooo, & en Liihuanie vers 1'an 1387 , & que, quoique 1'Eglife-Catholique-Romaine y fut la dominante , la Luthérienne & la Calvenifte fous Ie nom de Dijjidents, & les Grecs connus fous le nom de Défunis, y ont confervé leurs cultes, & leur participation aux adminiflrations civiles, & charges de la République. On eftime que les Défunis, qui forment cinq Diocèfes en Lithuanie , & les DifGdents, font le fixieme de la Nation Polonoife. Sigismond Augufte, le dernier Roi de la race des Jajellons, anéantit dans la Diete de Vilna de Fan 1565 toute différence qui pourroit jamais naüre entre les citoyens pour cas de religion, &? décida que nul ne fera exclu des charges pourvu qu'il foit Chrétien. La Diete de Grodno de Fan 15Ö8 admet aux foncbions publiques tous les citoyens, dc quelque communion confeffion qu'ils foient. Après la mort de Sigismond jiugufte, Henri trois de Valois , qui lui fuccéda, jura dc maintenir les droits des Diffidents. Tous leurs fuccelFeurs ont fait le même ferment h leur couronnement, jufqu'au Roi Augufte de la Maifon  C 335 ) |de Saxe, & ie Roi Poniatouski régnaut. Le zele trop ardent des Catholiques commeitl^a vers 1'an lóco, fous Sigismond fecond , a iperfécuter les Diflidents & les Défunis. Cette ilperfécution elf paryenue a réduire les cinq DioIcèfes Grecs a un feul; a leur óter ainfi qu'aux iLuthériens & Calviniftes la liberté du cuüe, & ■ la participation aux adminifirations publiques, jufque-la que, 1'an 1717, dans une Diete toute compofée de Nonces catholiques, il ne leur fut pas permis de pratiquer leur culte que [dans les églifes alors exidantes, fous peine de prifon & de banniffement s'ils ofoient le pratiquer ailleurs. Depuis cette époque, quoiqu'ils paroiffent garantis de cete perfécution par les fermens réitérés des Rois, on n'a ceffé de les molefier de toutes parts, même par des peines capitales , & de les dépouiller de toutes les prérogatives dé citoyen. „ En 1724 on fit i Thorn, fous un léger prétexte, périr du dernier fupplice un grand nombre de Diflidents , Magifirats, Bourgeois notables & Artifans, en haine de leur religion. C'ed pour être a 1'abri de ces vexations & pour être rétablis dans leur culte & leurs droits civils qu'ils fe font confédérés fous la protecbion des Rois de Prufle,de Dannemarc & de Suede; & principalement fous celle de Catherine II, Princeffe de toutes les Ruflies. Cette Priucelle & les autres médiateurs pofciit  ( 33.° ) pour principe de leur protection la tolérance de toutes les religions, la liberté naturelle & les droits de 1'bumanité. •C'eft ce fameux Mémoire qui eft attribué a M. de Voltaire, oü, fous prétexte de tolérance, il fappe toutes les R.eligions de la maniere la plus intolérante. A la page 300. Le 16 Novembre 1767. On parle d'un Mufceiim, ou forte de féminaire profane , que les trois fpectacles réunis fe propofent d'établir,oü des Néopbites des deux fexes iront fe former dans le grand art de la prédication dramatique. On ignore encore quel fera le Bacba ou 1'Eunuque de ce moderne ferrail. On trouve fmgulier que la Comédie Italicnne & 1'Opéra furtout fe foient réunis aux Francois pour cette école. Mais la déclamation eft la bafe des trois fpectacles, & quand les fujets y jouw dront de la voix, ceux-ci les prendront pour eux. A la page 300. Le 17 Novembre 1767. Ou conté une hiftoriette qu'on prétend être arrivée réccmment a M. Marmontel & qu'il nie comme de raifon. Cet Auteur s'étoit rendu le premier dans une maifon de campagne chez une Dame qui venoit de retirer ft rille du couvent. C'étoit une veuve feule & qui n'avoit pas un gros ménage. A 1'arrivée de cet homme cclebre, non attendu, & plus encore fur 1'annonce qu'il lui donne de Madame Gaulard & fa compagnie qui vont arriver, elle le quitte pour donner des 01dresj elle lui demandé la permiffion de s'abfenter quel-  C 337 ) uueiuucs jiiiniucs ,• ene recommanae a ia üue d'entretenir Monfieur, & de faire les frais de la converfanon; elle fort. La Demoifelle étoit jolie, & agnés plus qu'on ne 1'eft fans doute en fortant de beaucoup de couvents. Quoi qu'il en foit, le bieurMarmontel s évcrtue, s'oublie, pronte de 1'innocence de la jeune perfonne, & devient fort entreprenant. Sur ces entrefaitcs la mere revient, fait fes excufes a notre A'cadémicien, lui témoigne fes regrets de favoir laiflé, dit qu'elle craint qu'il ne fe foit ennuyé; il répond, protelie, jure que point du tout , que Mlle fa fille a de 1'efprit comme un Ange; qu'il s'eft fort amufé, la mere fe retourne vers elle, témoigne a fa fille combien elle fouhaiteroit que cette elfufion ne fut pas une affaire de politef- fe M. Mannontel ripofte de nouveau qu'il n'y a rien de plus vrai, qu'il a eu beaucoup de plaifir. La petite , ijnpatiente , ré pond vivement: il ment, Maman , il ment; le beau plaifir de manier le cul des gens avec des mains froides comme glacé On ne peut entrepren- dre de pcindre 1'état de la mere & du Sieur Marmontel ; il n'attendit pas le compliment qu'il inéritoit, & remonta brufquement en voiture. A la page 300. Le 20 Novembre 1767. Les Membres de PAcadémie Royale d'Architecture ayant écrit, comme 011 fa dit ci-devant, a M. le Marquis de Marigny, au fujet de ce qui s'eft palfé, M. Gabriel en a recu la réponfe fuivante. ' A Menars le 2 Novembre 1767 „ T'ai Tomé XVIII. p  C 338 > recu avec bien de la fatisfaction, Monfieur, " la 'lettre que vient de m'écrire 1'Académie " d'Architecture, pour m'annoncer fa foumis'\ fion aux ordrcs de S. M. & me marquer fes " fentimeus pour moi relativement a tout ce qui s'eft palfé depuis quelque tems, & que " je veux oublier abfolument. Je conferverai W volontiers a 1'Académie 1'eftime & labienveil" lance qu'elle m'a demandées, & je profiterai, comme je 1'ai toujours fait depuis qu'elle elt l] fous mon adminiftration , des occafions de ' lui marquer combien je m'intéreffe a fa gloire & a 1'utilité de fes travaux. Je fuis, Monfieur, &c. " En même tems Mr. le Comte de Samt Florentin a écrit a Mr. Gabriel une Lettre pour être communiquée a 1'Académie d'Arcbitecture, oü il difoit qu'il avoit rendu compte au Pvoi de tout ce qui s'étoit paffé & que S. M. étoit fatisfaite de la prompte obéiflance de .1'Académie a fes derniérs ordres. Que le Roi a vu auffi avec plaifir les démarches de l'Académie a L'égard de M. le Marquis de Marigny, & les fentimens qu'elle a exprimés dans ia Lettre qu'elle lui a écrite , cette conduite ne pouvant qu'attirer a l'Académie de nouvelles preuves de bienveillance de S M. & le maintien de fes Régiemens & Statuts dans lefquels fon intention eft de ne faire aucun changement Qu'il fadé inférer a la rentrée de l'Académie , fur les regiitres des  C 339 ) I délibérations , ce qu'il kii écrit par ordre du I Roi &c A la page 300. Le 21 Novembre 1767. Oit I eft fort OGCupé des moyens:de corriger les déI fauts fans nombre qui fe rencontrent dans Pédt| fice de la balie aux bleds, conftruit a 1'emplaceI ment de 1'hótel de Soilfons. On ne peut affez s'étonncr dc 1'iueptie de ceux qui cn ont dirigé les plans, & comment ils ont pu furprendre la confiance des Magiftrats qui préfidoient alors aux batimens publics. Quoi qu'il en foit, on prend des mefures pour tirer le mcilleur parti poflible de ce qui eft fait, & fuppléer a ce qui y manque. On voit avec douleur que les mónumens élevés, ou qui fe conilruifent depuis quelque tems,n'olfrent que des fujets de critique les mieux fondés, & que ce fiecle des beaux arts foit le plus pauvre en fait d'architecture. Le Palais Royal, le Palais Bourbon éternifent a jamais la home de ceux qui en font chargés. Des malles énormes de pierres, fans goüt, fans propórtion, lans accord avec Panden batiment, dépoferont ri la poftérité cette vérité trifte. D'après les foins que le Gouvernement fe donne pour encourager le talent, il eft facheux de voir qu'on ne puilfe citer aucun édilice public depuis Louis XiV, qui puilfe faire honneur a un artifte & a la nation. A la page 301. Le 22 Novembre 1767. On a donné Vendredi dernier fur le théatre dc la Comédie Francoife Les deux Sesurs. Elles n'ont sas été trouvées jolies apparemmeiit, puifqu'elP i  C 34® ^ les n'ont pns reparu. Cependant une fccne pasfablement dialoguée & fupérieurement jouée a para plaire au public qui a jugé le refteavec peu d'indulgence. L'Auteur a gardé 1'anomme. Ce Drame eft en deux acbes & en profe. On donne le 24 a 1'Opéra, les trois Couronnes, Tragédie en trois acbes de M. Poincmet, qui cn a changé le titre. C'eft aujourd'hui Ernelinde. A la pa^e 305. Le 30 Novembre 1767. Le Diftionnaire de mufique de Jean Jacques Rouffcau Paroit: 11 mérite une difcuflion très-ample, & 1'on ne peut en rendre compte qu'après une lechire réfléchie. f A la page 306. Le 2- Décembre 1767- Cherd'ceuvre de deux Auteurs nouveaux. Air: Du cantique de St. Roch. Or écoutez, s'il vous plak de m'entendre, Tous les beaux traits de 1'Opéra nouveau, Vous y verrez du terrible & du tendre, Vous jugerez comme il eft bon, & beau; Sa Poëfie Son harmonie, Du goüt frangois Afiurent le progrès. Un bon papa par un duo fublime A fon enfant annonce des combats; Pendant longtems ce couple magnanime Parle au public qui ne le connolt pas: L'enfant s'allarme, Le pere s'arme, Et 1'ennemi Attend qu'il ait fini.  C 34* ) En un inftant un grand fiege eommenee, En un inftant les mnrs fout renverfés: Prés d'un autel tombant en défaillance , Le pauvre enfant voit les fiens repoulfés; Monfieur fon pere, Dans fa colere, Las du duo, Se bat incognito. Mais le vainqueur entre & voit fon amaute Evanoüie au pied de cet autel: II fait un figne a fa troupe fanglante , Et le héros chante plus doux que miel. Vient un troifieme, Amant de même, Et le papa Pour pleurer s'en vient la. Mais le Tyran veut effuyer fes larmes, Déja 1'on danfe un petit rigaudon, L'inftant d'après les rivaux parient d'armes, Le chien d'amour leur trouble la railbn. Avant de faire Si grande guerre, Pauvres jaloux, Que ne vous parliez-votu. Or le plus vieux veut que fon rival parte , Et dans l'inftant le théatre elt un port: Au tendre objet dont enfin il s'öcartc, Le matelot s'arrache avec effort: Tableau tragique, Et poëtique ! La chacun fait, Et porte fon paquet. P 3  ( 344 ) Marquis de Senneclere , Faveugle, étoit au foyer de ce fpeftacle ou la converfation étant tombée fur le nouvel opéra, il dit a fon laquais qui le conduit, quand 1'Auteür paroltra ici, faites-le venir a moi, que je lui fafle un .compliment. Poinfinet fe préfenté; le Dorneftique f arrêté, le mene au Marquis qui fembralfe tendrement, & s'écrie: mon cher Maitre, recevez mon remerci.ment du plaifir que vous m'avez fait ; votre Opéra eft plein de beautés, la mufique en eft déiicieufe; il eft ftlcheux que vous ayiez eu a travaiiler fur des paroles auffi ingrates..,.. Et tout lc monde de rire. A la page i3i. Le 5 Décembre 1767. II a paru ces jours-ci aux Italiens un Arlequin nommé Marignan, il avoit déja joué il y a plufieurs années. II a la taille propre a ce róle , la fouplelle, la légereté; il a de la faillie; mais pas aflez de naturel. II a été fort bien accueilli; il continue fon début avec fuccès. A la page 308. Le 6 Décembre 1767. L'on ne fauroit aflez s'étonner du fuccès de Mlle d'Ervieux qui joue le róle de Colstte dans le Devin de village. Cette jeune perfonne qui n'a pas quatorze ans, & très-diftinguée dans le genre de la danfe, mais qui n'avoit encore paru comme Chanteufe qu'a Chantilly chez M. le Prince de Condé, attire les amateurs en foule. Elle n'a qu'un filet de voix; mais elle le ménage avec lout le goüt & tout Part poffible ; elle eft d'ailleurs Aètrice, & quoiqu'clle paroifle avoir beaucoup  ( 345 ) coup emprunté du jeu de Mlle Durancy, elle fe 1'eft aproprié au point de fe le rendre naturel. A la page 309. Le 8 Décembre 1767. On doune chez Nicolet une piece de M. Quetant _ en trois actes, intitulée YEcolier devenu Maitre. Cette farce, fupérieure a celles qui s'exécutent ordinairement fur un pareil théatre, eft dans le goüt des tourbenes de Sc apin & des Comédies de Molière du même genre ;on y a remarqué du talent, de la gaieté, & tout Paris en rafolle. A la page 314. Le 10 Décembre 1767. Mlle de Florigny, qui avoit dehuté il y a quelques anbées aux Italiens fans fuccès, y a reparu hier. Elle a joué dans Rofe Éf Colas & dans le Maitre en droit. Elle fait les perfonnages de meres, de vieilles; elle eft pour les róles de charge. Son jeu eft hardi, pour ne pas dire impudent; fa voix eft médiocre,& fon age ne permet pas d'en | attendre rien de merveilleux. Elle n'a pour elle que la protection du Prince de Conti. A la page 314. Le 19 Décembre 1767. On prétend que la lettre anonime a Madame Bomptems, dont on a parlé, eft de fon oncle; qu'étant brouilfé avec elle par fes travers & fes ridicules , il avoit efpéré la guérir par cette lecon; qu'il eft défefperé dc la tournure qu'a pris cette hiftoire , & furtout de la publicité qu'elle a.recue par la voie de Pimprefïïon ; car on 1'a dit inférée dans une gazette de Bruxelles. A la page 314. Le 11 Décembre 1767. Vers P 5  C 346 ) pour mettre au bas du portrait d'un Roi con» quérant & philofophe. Ce mortel profana tous les talens divers, II charma les humains qui furent fes vktimes. Barbare en aftions & Philofophe en vers, II cbanta les vertus & commit tous les crimes. Haï du Dieu d'amour, cher au Dieu des combats, II baigna dans le fang 1'Europe & fa Patrie. Cent mille hommes par, lui recurent le trépas, Aucnn n'en a refu la vie. A la page 187. Le 12 Décembre 1767. Le ■nouvel Opéra va toujours, malgré les critiques, & a rapporté 30,000 livres cn buit repréfentations. On ne fauroit rendre le degré d'avililfement oü elt tombé M. Poinfinet par fa préfomption intolérable. On en peut juger par les deux. vers qu'on va rapporter, trés-dignes du perfonnage, s'ils ne le font pas trop d'étre préfentés. au public. Pégaze conftipé s'efforc'oit un matin, Le petit Poinfinet fut fon premier crotin. A la page 317. Le 16 Décembre 1767. Madame Favart eft accouchée aujourd'hui tout a coup d'un enfant qui n'a pas vécti, fans qu'on feta qu'elle étoit groffe , & fans s'en douter ellemême. Ce phénomene a d'autant plus furpris qu'on la croyoit hors d'fige d'en faire; fes partijÉns auffi font fonner bien haut cette nouvelle, qui. fait grand bruit dans un certain monde.. La  C 347 ) Mufe de M. 1'Abbé de Voifenort a fait, dit-on , un impromptu de fon cóté, & ce n'eft point un enfant mort, mais on ne le produit pas au grand jour; il refte renfermé' dans la cotterie, il faut attendre qu'il prenne 1'elfor pour en paiier. A la page 318. Le 18 Décembre 1767. Outre la réponfe déja faite au Cas de Confcience, efpece de libelle critique des opérations de la Commisfionétablie pour la réforme des Corps religieux; on vient de le faire encore dans une lettre adreflee a 1'Auteur qui fe cache, mais que fon foupconne connoitre. Ces écrits polémiques n'intérelfent guere que ceux qu'ils regardent. A la page 318. Le 19 Décembre 1767. M. de eiermotit (Tonnerre) Chevalier de Mal the & défigné Ambafladeur en Portugal , eft un grand amateur de mufique, & eft Muficien lui-méme, mais défenfeur de la mufique Francoife, a I'exelufion de toute autre. A Foccafron du nouvel Opéra, il a rompu des lances en différentes occafions, entr'autres contre M. le Chevalier de Chaftellux, partifan décidé de la mufique Italiénne, M. Poinfinet, qui voudroit s'identifier mal apropos avec Philidor, quoique le public en falfe une grande différence, a trouvé mauvais que M. le Chevalier de Clermont fe déchainat partout contre Ernelinde; fa bile s'eft exaltée , & il a fait une tirade de vers injurieux contre ce Seigneur; il a eu la hardieffe de les avouer, & d'en donner des copies. Le détracleur de la mufique Italienne n'a fait que rire de cette P 6  C 348 ) efpece de fatyre ; il i'a fait copier lui - même , & Fa envoyée a tous fes amis. Cette querelle mulicale a fait une forte de bruit. Le Magiftrat de la police en a été inftruit, & Fon étoit fur le point de févir contre M. Poinfinet & de le mettre au Fort-1'Evêque, lorfque M. le Chevalier de Clermont eft allé demander grace poar ce Poëte. II a fait entendre a M. de Sartines qu'un pareil éclat feroit plus de tort a un Ambaffadeur de Portugal, qu'a un malheureux fatyrique; que Mr. Poinfinet étoit a 1'abri de tout ridicule; mais que c'en feroit un pour lui (Chevalier de Clermont), qu'il fouhaitoit qu'on lui épargnat. En conféquence M. de Sartines s'eft contenté de mander le Sieur Poinfinet, & de le réprimander en pleine audience. A la page 319. Le 21 Décembre 1767. On parle d'une fcene comique , arrivée ces jours derniers dans 1'appartement de la Reine entre Madame la Princeffe de Talmont & M. le Controleur général. La première ne connoiffant pas M. de Laverdy, ou faifant femblant de le méconnoltre, Fa entrepris dans une con verfation oü, par un perfiflage allégorique & foutenu,elle a contiiiuellement comparé fes opérations a des drogues, mauvaifes, altérées, falfifiées, rajuftées, &c. Quand on en eft venu a Péclairciffement, elle a prétendu Favoir pris pour 1'Apothicaire de Sa Majefté. Ceux qui connoifFeut Madame la Princeffe de Talmont, affurent qu'elle eft d'une gaieié I fe permettre pareille malice. I!  C 349 5 A la page 319. Le 11 Décembre 1767. Un anonime vient de s'attacher a faire la critique particuliere du quinzieme Chapitre de Bélizaire fous lc titre de Lettre d Mr. Marmontel par un Déifte converti. L'Auteur, qui entre en lice, difcute dialeétiquement toutes les propofitions qu'il regarde comme repréhenfibles , & finit par dire qu'il faut que M. Marmontel ait bien du tems ft perdre pour srêtre amufé a faire un écrit plein de contradiétions , de fophifmes & d'impiotés. Cette brochure peut fe mettre encore au rang des honnètetés théologiques. A la page 319. Le 23 Décembre 1767. II court de tems en tems ici de petites hiftoriettes, dont les oififs s'emparent avec avidité; elles fervent d'aliment aux converfations; chacun fe les tranfmet avec plus ou moins de graces , mais a force d'étre répétées & relfalfées, elles acquierent un air de vérité , & fe perpétuent jufqu'a ce qu'il fuccede quelque chofe de nouveau. L'aventure du Capucin de Meudon peut être mife au rang de ces contes frivoles, quoique bien des gens 1'attefient. Ce Capucin étoit un Frere quêteur qui revenoit dans fon couvent avec ce qu'il avoit de poilfon pris; un valeur 1'arrête, & lui demandé le piftolet fur la gorge , la bourfe ou la vie. Le Moine fait fes repréfentations, lui déclare que c'eft tirer la poudrc aux moinéaux, qu'un homine de fa robe n'a pas grand chofe a donner; 1'autre infifte , lui fait vuider fes poches , fes  C 3$° ) . gomTets, fes aiffelles, fa tirelire, forme une kapture de 36 livres & s'en va. Le Moine le rappelle , lui dit: Monfieur, vous me paroiffez mettre bien dc 1'humanitd dans votre procédé; reiidez-moi uu fervice : je vais rentrer dans mon couvent; j'aurois befoin de juftifier que j'ai été volé, ou je cours rifque d'efl'uyer un chatiment .plus cruel que la mort; tuez-moi, ou fournisfez-moi quelque exdufé. Pere, que faut-il faire ? , Tirez-moi votre piftolet dans quelqu'endroit de ma robe, que je puilfe prouver avoir fait quelque défenfe. —Volontiers, étendez votre manteau. Le voïeur tire, Le Capucin regarde —— mais il n'y paroit prefque pas C'eft que mon piftolet n'étoit chargé qu'a poudre.... Je voulois vous faire plus de peur que de mal Mais vous n'avez point d'autre arme fur vous Non:.... a ces mots le Capucin lui fattte au eolet Coquin! nous fommes donc a armes égales? Ce moine étoit grand, gros & vigoureux; il terralfe le voleur, le roue de coups, le laiffe pour mort fur la place, reprend fes 36 livres & un louis en outre , ck revient triomphant a fon couvent. Ala page 319. Le 24 Décembre 1767. II eft grandement queftion d'exécuter un proiet que Mlle Arnoux route depuis longtems dans fa tête: depuis qu'elle a échoué a faire te róle dc Colette du Devin de village , elle a toujours été rentée de faire celui de Coïte; elïe avoit pour cxomple Madame dc Pompadoy.- qui a exéewè .^trefois  C 351 ) ce róle d'homme a Bellevue avec le fuccès le plus décidé: aujourd'hui elle réuffiroit d'autant mieux que le Sieur Narbonne, quoique Muficien très-foncé , & hardi dans fon chant, eft deftitué de tout Ier jeu néceflaire dans un pareil róle; fon air gauche & niais contrafte on ne peut plus défagréablement vis-a-vis les graces naïves & enfantines de Mlle d'Ervieux. Le défir extréme qu'auroit Mlle Arnoux d'accélérer plus promptement la chute d'Ernelinde, eft un nouvel encouragement. Bien des gens la dilfuadent pourtant, & craignent qu'elle ne commette fa réputation. Cela fera décidé bientót; on afture même qu'elle jouc après-demain. A la page 319. Le 26 Décembre 1767. Le Préfideut Roland & autres Membres du Parlement ont mandé le Recbeur & les principaux Officiers & Suppóts de 1'Univerfité pour les engager k donner un défaveu du Mémoire d'un Univerfitaire, en leur infmuant que le refus fur cet objet feroit croire qu'ils y auroient eu quelque part. Ceux-ci ont refufé; ils ont prétendu , au contraire, que le nier formeilement feroit Pavoiier; qu'au furplus, ils n'y voyoient que des faits vrais & des conféquences tirées de principes reconnuS & authentiques; que tout ce qu'ils y trouvoient a redire , c'étoit qu'il fut anonime; mais qu'il étoit, au contraire, du devoir des interreffés de réfuter & de renverfer ce mémoire. Ce colloque n'a point fatisfait M. le Préfideut qui les a renyoyés de fort ma&Vaife humeur...  C 35* ) Ala page 321. Le 31 Décembre 1767. Mlle Eeaumefnil a remplacé Mlle Arnoux dans le róle de Pomone; elle 1'a fait regretter; on a trouvé fon jeu fee & fans la moindre onétion, grand défaut dans un róle fi fufceptible de fentiment. A la page 322. Le 1 Janvier 1768. Mlle Arnoux a eu un peu plus de fuccès hier dans le róle de Colin; mais elle n'eft point encore au degré d'applaudiflement qu'elle fe promettoit. II eft rare que le public revienne de fa première imprelfion. Le Prince de Conti qui a Ia bonté de fe mêler de 1'Opéra relativement au Directeur Trial, qui s'eft élevé & formé dans fa maifon, eft entré dans divers confeils de détails a 1'égard ( de Mlle Arnoux; cette Actrice efpere en profiter la troifieme fois. A la page 225. Le 5 Janvier 1768. Les Météorologiftes ont obfervé que ce matin a fept heures le Thermometre étoit a 14 degrés, c'efta-dire a un degré feulement du froid de 1709. A la page 225. Le 6 Janvier 17Ó8. On cite, on répete partout le bon mot de M. Seguier, premierAvocat général, qui, au retour du voyage du Parlement en corps a Verfailles, mandé, relativement a M. Chardon, & fon Arrêt contre un Membre du Confeil, dit que Meffieurs n'étoient jamais revenus fi vite, que les chevaux même alloient comme s'ils euffent eu tous le Chardon au cul. A la page 225. Le 5 Janvier 1768. On prétend que M. le Prince de Lambaile s'étaut ab-  ( 353 ) fenté fans qu'on fcüt oü il étoit, Ie Duc de Pen* thievre la fait chercher partout; qu'enfin on a trouvé ce Prince dans un hótel garni oü il fe : faifoit traiter de la cruelle maladie, fuite funefte d'une galanterie trop hafardée. On le dit dans 1'état leplus déplorable, &l'on ajoute que peutêtre fera-t-il étrangement mutilé. A la page 327. Le 7 Avril 1768. M. le Prince de Lamballe eft a la Chauffée d'Antin chez M. de Vargemont; il ed dans 1'état le plus déplorable , aggravé paree qu'il s'eft bleffé a cheval; 1'opération efl; indifpenfable, encore ignoret-on s'il en réchappera. Malgré cette rude le£on, il he peut vaincre fapaflion pourle fexe; il a , dit on, encore auprès de lui, une certaine Dlle la Cour, furnommée Palais d'or; paree qu'en effet elle a perdu le palais h la fuite d'une maladie vénérienne, & qu'il a fallu lui en faire un artificiel d'or. A la page 329. Le 10 Janvier 1768. On affure que le Duc de Penthievre étant allé ces jbursci faire fa Cour au Roi, S. M. s'étoit écriée, comme il s'en alloit : voila le plus honnête homme de mon Royaume, & le plus malheureux des peres. A Ja page 339. Le 27 Janvier 1768. Madame la Maréchale de Luxembourg ayant été il y a quelques jours chez Madame la Comtelfe de la Marche , a trouvé qu'on y jouoit aux proverbes. Après les premiers complimens , elle a débité des nouvelles trés - abfurdes & très-inju-  C 354 ) fieufes nu Roi, & furtout a Mesdames de France \ ïa Princeffe indignée a témoigné combien elle trouvoit mauvais qu'on ofit en fa préfence & chez elle répandre de pareilles horreurs; Madame la Maréchale s'en eft tirée en répondant , Madame a beau, mentir qui vient de loin. Ca jeu, tout indécent qu'il étoit, n'auroit peut-être pas eu de fhite, fi Madame de Luxcmbourg n'avoit été faire des gorges chaudes de fa hardiefle, ou plutót de fon impudence, dans une maifon oü elle foupoit. Cette aventure eft parvenue a la Cour; ou dit même que Madame la Comtefle de la Marche a cru devoir en inftruire le Roi. Les Dames de France, & furtout Madame Adélaïde, en font outrées; Madame de Luxembourg a recu ordre de ne point paroitre a la Cour, de refter chez elle; on efpere pourtant que les Princefles, revenues a leur caracbere de bonté, folliciteront elles-mêmes la grace de la Maréchale. A la page 256. Le 12 Février 1768. La piece de M. Rochon , intitulée les Valets Maïtres de la maifon, ou le retour de Carnaval, a été jouée aujourd'hui. Ce n'eft qu'une farce établie fur un fond trivia!» Rien de piquant dans 1'intrigue, ni dans le ftyle. Le feul caraéïere aflez plaifant eft celui de Préville qui a quelquefois des faillies heureufes," une critique fine, trèsdifparate avec le gros fel dont eft faupoudré le refte du Drame. II eft en profe, & ne peut faire tort a celui de M. Barthe. On doute que cela paffe le carnaval. On raconte a propos de cette  C 355 ) Comédie un tour d'efcroc arrivé récemment, & qui feroit beaucoup plus amuiant fi c'étoit ajufté au théatre. Quatre grivois, voulant faire franche - lippée, vont chez Aubry & fe font donner une chere en gras qu'ils n'avoient point envie de payer. Après le repas on demandé la carte. Le garcon vient; on commence par lui donner un écu pour boire ;. enfuite grande conteüation a qui fera 1'Amphitrion de la fête. Chacun veut défrayer fes camarades. Enfin, 1'un d'eux s'écrie: „ Meffieurs, ,, nous ne finirions pas, donnons le choix au „ hazard, habillons ce garcon en Colin -maü„ lard; tenons nous chacun a un coin de la „ chambre, & celui qu'il touchera de fon plein „ gré, fera le payaut. " Le garcon admire leur générofité & leur gaieté. On lui bande les yeux, puis chacun s'éclipfe 1'un après 1'autre & emporte ce qu'il trouve d'argenterie. Cependant le garcon fe démenoit comme un Andabate; il fe laffe enfin; il crie, il appelle ; le maitre monte; le premier le faifit par le bras comme celui qui devoit payer; le maitre ne fait ce que cela veut dire; il croit fon garcon fol; bref, le tour s'éclaircit, & le traiteur en eft pour fon repas, fes couverts &c. A la page 355. Le 13 Février 1768. M. le Prince de Lamballe elt a 1'hótel de Touloufe acluellement. On ne croit pas qu'il foit en état de parottre en public avant Pitques. Des gens de Part penfent même que fon accident peut  C 356" ) avoir encore des fuites dangereufes, & que le ménagement qu'on a voulu avoir pour fa vhilité, lui pourroit être funefte. II eft féparé de Mlle la Cour. II paroit qu'on a fait un pont d'or a cette courtifanne pour la faire s'éclipfer d'elle-niême. A la page 366. Le 29 Février 176S. M. Suard ie Roberti vient de donner un recueil de pieces fugitives. II s'intitule modeftement Eleve du Génie, agé de 17 ans. 11 n'a malheureufement pas même 1'invention de cette fatuité. M. Durofoi fa devancé & a donné autrefois Ouvrage de mes 17 ans. On doit juger par un pareil début ce que peut être un femblable perfonnage. A la page 370. Le 7 Mars 1766. On a parlé de diverfes lettres d'un acbionnaire. L'Auteur eft a fa cinquieme, confervant toujours la même animofité contre 1'adminiftratión actuelle, & la même clandeftinité. Cet-ouvrage n'a aucun mérite littéraire. II roule fur des détails inftructifs pour le commerce. A la page 373. Le 13 Mars 1768. On voit dans le Journal encyclopédique du premier de ce mois une feconde lettre de 1'Abbé Comte de Guafco, oü il défavoue avec plus de force encore 1'édition des Lettres familieres de M. de Montesquieu. Elle eft datée de Rome du 7 Janvier 1768. Les Journaliftes, a ce propos, parient dans une note d'un Mémoire anonime en forme de lettre qui leur a été adrelfée, oü 1'on réclame  ( 357 ) cette édition en déclar-ant qu'elle n'eft point de 1'Abbé de Guafco auquel on 1'impute. Dans ce fiecle de fourberie & de charlatanerie , cette réclamation prouve d'autant moins qu'elle eft fans ïignatufe. L'Auteur auroit dü avoir le courage de fe nommer pour mériter quelque croyance. II eft des gens qui regardent ce Mémoire comme une fupercherie de 1'Italien, A la page 376. Le 18 Mars 1768. Les amateurs du théatre francois font dans de grandes alarmcs a 1'occafion d'une difpute qu'a eu le Sieur Molé, Acteur très-aimé du public, avec le Sieur Velaine, autre Acteur a penfion. On prétend que le premier , mécontent de n'avoir pas eu juftice par fes camarades & par le Gentilhomme de la Chambre, veut quitter, & qu'il doit aller a Vienne. On ajoute que Mlle d'Epinay, fa maitrefTe, & trés médiocre Actrice du même théatre, doit le fuivre; on efpere que tout cela fe pacifiera. Querelles de vilains ne durent pas longtems d'ordinaire. Celle - ci n'aquiert d'importance que par l'intérêt qu'y prend le public. A la page 376. Le 13 Mars 1768. On voit dans le Journal encyclopédique du 1 Mars la Source & la Prairie,fobie d'un M. D.,... Capitaine de Dragons, qui décele les plus grands talens pour ce genre de compofition. Les Jourlaliftes anno.ncent qu'il en a plufieurs dont il promet de les enrichir. On trouve dans celle-ci la naïveté, l'enjouement&les gracesde la Fontaine. A la page 378. Le 22 Mars 1768. II paffe  C 353 ) ffour conffant que M. de Voltaire elt toujours k fon Chateau de Ferney, & que 1'arrivée de Madame Denis dans ce Pays-ci n'eft qu'une fuite d'une difcuffion qu'il y a eu la-bas entre 1'oncle & la niece. A la page 379. Le 24 Mars 1768» tin'particulier a dépofé, il y a quelques mois, fuivant ce que nous avons annoncé, un prix pour lc meilleur motet furie Pfcaume fuperflumina Babylonis. Les pieces devoient être remifes aux Directeurs du Concert fpirituel, & le concours devoit s'ouvrir dans la quinzaine de Paques. 11 commencera demain. Vingt-deux motets ont concouru. Les trois juges, M. d'Auverghe , Surintendant de la mufique du Roi, & MM. Blancbard&Gauzargues, Maltres de mufique de la chapelle du Roi, après avoir examiné avec lbin les partitions, ont trouvé trois de ces motets dignes d'étre exécutés au concert fpirituel, & d'étre comparés entr'eux. Chacun doit être exécuté deux fois. A la page 379. Le 25 Mars 1768. M. Böycr, Chevalier de 1'ordre du Roi & Médecin ordinaire de la faculté de Paris, fe meurt pour avoir voulu faire le jeune homme. A 68 ans il eft devenu éperdument amcureux de Madame la Comteffe d'Eft****. Les affaires de cette Dame étoient fort délabrées, & le Sieur Boyer lui paroiffant dans 1'opulence, elle n'a pas cru devoir le rebuter; elle s'eft même portée a des agaceries qui toi ont fait foutirer en différéns tems cinquante  C 359 ) mille écns de ce vicillard. Celui-ci, de fon cóté , n'a.pas voulu être dupe, & a prétendu avoir au moins du plaifir pour lbn argent; mais la nature ne fecondant par fes intentions, il a bu du fang de bouquetin & mangé des cantharides. Ces elfets extraordinaires, foutcnus de la force de fon tempérament & d'une nourriture fucculente, ont duré quelques années; mais il fuccombe enfin ; il eft dans le plus grand épuifement & toutes les parties péchereffes font dans un état déplorable ; il a d'ailleurs 74 ans. A la page 379. Le 25 Mars 1768. M. dc Fays, payeur des rentes & un des héros de la feebe janfémfte, préfenté un fpecbacle bien rare dans ce fiecle-ci. Victime de fa virginité , il avoit elfuyé, il y a trois ans, un accident qui lui annoncoit le danger d'une trop grande continence. Malgré cet avis de la nature , il a perfifté dans une chafteté funelie, & les vaiffea'ux fpermatiques s'étant gonflés •& durcis dans une des aines, il lui eft venu une tumeur bien différente de celles qu'éprouvent quelquefois les gens d'un genre de vie contraire. II a fallu appliquer le fer, & il eft entre les mains de M. Moreau, premier Chirurgien de FHó tel-Dieu. M. Milfa, Médecin fort accrédité, qui préfide a cette cure , déclare n'avoir jamais connu que deux martyrs de cette efpece, un Chanoine & un Feiiillant. A la page 383. Le 29 Mars 1768. Le concours des dilférens motets eft fini d'aujourd'hui.  ( 36° ) A Piffue du dernier concert les Juges ont accordé le prix d'une voix unanime au N". 15 dont 1'Auteur edM. 1'Abbé Girouft, Maitre de mufique de la cathédrale d'Orléans.' Cependant, comme il leur a paru que le motet N°. 16 avoit auffi beaucoup de mérite, ils ont déclaré que leur deffein étoit de donner a 1'Auteur un fecond prix confiftant en une médaille d'or de la valeur de 200 livres. M. d'Alembert & toute fa féquele cabaloient pour celui-ci,& 1'avoient voulu faire couronner, s'imaginant qu'il étoit de Philidor. Quelle furprife lors qu'a 1'ouverture du billet, il s'ed trouvé être encore de M. 1'Abbé Giroud. On ne peut qu'admirer le génie fouple de cet Artide qui fait varier fes produétions au point d'étre fi différent de lui-même avec prefque une égale fupériorité. A la page 383. Le 29 Mars 1768. La que*. relle du Sieur Molé avec le Sieur Velaine n'a pas eu les fuites funedes qu'on craignoit. On a déterminé le premier a reder en France, & le dernier lui ayant propofé un cartel, il n'a pas cru devoir fe compromettre au point de fe battre contre un pared policjon. II paroit que le théatre Francois ne perdra a cette rentrée de Paques que le Sieur Grandval, dont ia Mémoire inlidelc ne permet plus qu'il paroilfe fur la fcene. Cet Acteur, qui avoit autrefois eu du fuccès, & s'étoit retiré avec de la réputation, 1'a perdue entierement depuis fa rentrée. A la page 384. Le 31 Mars 1768. La Religion  ( 3öi ) gion chrétUnne analyfée eft un ouvrage fort rare encore, quoiqu'imprimé f année derniere. On 1'attribue au favant Freret. C'eft une difcuffion profonde & érudite de cette matiere importante. Le fang-froid de 1'Auteur, fon ftyle fimple & fans chaleur, fes raifonnemens méthodiques & pleins de franchife , tout rend cet ouvrage très-dangereux pour un lecteur impartial. On y a joint des notes qui font elles-mêmes un Traité plein de recherches & de citations formidables aux défenfeurs du parti qu'on attaque. Le Philofophe s'y déride quelquefois & fe permet de rire fur un fujet fans doute trop gravc pour être fufceptible de plaifanterics. Cependant, dans les objets qui fournilfent a fa gaieté, il feroit difficile de ne point remarquer le ridicule qui s'y joint, & de ne pas s'y arrêterun inftant. ■ A la page 384. Le 31 Mars 1768. Le zele de M. 1'Archevêque ne fe ralentit point, malgré le peu de fuccès dont il eft fuivi. Madame la Duchefle de Villars a pour ufage de faire joucr la comédie chez elle dans la quinzaine de Paques. Ce Prélat lui a écrit pour lui repréfentcr 1'indécence de ces repréfentations. II Ja conjurc au moins de ne point faire jouer f'Honnête Criminel. A la page 3. Du tome quatrieme. Le 1 Avril 1768. II court une lettre de M. de ,1a Harpe jtiftificative dc fa conduite envers M. de Vóïtaire; on dit qu'elle doit être inféréé dans les journaux. La voici: „ Monfieur, je n'ai eu connoilfance qu'auTome XVllL " Q  C 362 ) jourd'liui. d'un article inféré dans la gazetta " d'Ütrecht, au fujet de mon départ deFernay, " artfcfe qui n'eft compofé que d'injures & de " fauflètés. Le correfpondant du Gazetier , 11 Auteur de ce morceau, commence par dire '„ que je ri'ai jamais feu me concilier l'amitié de " perfonne. ' II paroit du moins que je n'ai pas '] la fienne. II prétend que j'ai été recueilii & " congédié par M. de Voltaire: quand cela fe' rolt vrai, je ne vois pas trop pourquoi on en " feroit un article de gazette; mais 1'uh & 1'au" tfe eft faux. II ajoute que je perds 6000 livres " de rentes, que M. de Voltaire ni'avoit ajjurées " après fa mort. Cet homme apparemment a lu " le teftament de Ml de Voltaire. Comme je " n'en fais pas autant que lui, je'n'ai rien a " réponrirc la-defi"us. II fmit par infmuer, üms " rien 'affirmer pourtant, que c'eft moi qui ai ' répandu dans le public le Cathécumene, " rHomme aux 40 écus , le Sermon prêché d " Edle & la Lettre de M. 1'Archevêque de " Cantorbery. Je doute que M. de Voltaire trouve bon qu'on lui attribue ainfi pubbque" ment le Cathécumene , qui n'eft point de lui, " & d'autrcs ouvrages anonimes, qu'il n'eft per" mis d'attribucr a perfonne, a moins d'avoir " des preuves.' Qüant a ce qui me regarde, " tout ce qui a lc moindre commerce avec la " littérature fait a quel point l'imputation du " Gazetier au fujet des ouvrages ci-deflus, eft " faufle & calomnieufe. Ce feroit lui donner 11 plus d'importance qu'elle n'en mérite, que  C 363 ) „ d'y répondre par des témoignagcs authenti„ ques qui furement ne me manqueroient pas. „ Je fatisfais fuffifamment a ce que je me dois „ moi-méme,en oppofantlavérité au menfonge. „ Je dois ajouter auffi , quoi qu'il en doive „ couter au bonheur de certaines gens, que je „ ne fuis point bröuiltó avec M. de Voltaire, „ & que ce grand homme n'a rien diminué de „ fon amitié pour moi, qui m'-éft auffi chcre „ qu'honorable. „ Je vous fupplie, Monfieur, de rendre cette „ lettre publique. J'ai 1'honueur d'étre &c. cc „ 26 mars 1768. " A la page 3. Le 2 Avril 1768. Différéns grands-maïtres d'Italie ont débuté au concert fpirituel. Le wSieur Manfredi, fameux Violon. ■ n'a point eu le fuccès qu'il efpéroit. On a trouvé ft mufique plate, fon exécution large & moclteufc, mais fon jeu fol & défordonné. Le Sieur Boccarini a joué du violoncelle avec auffi peu d'applaudiffement; fesfons ont paru aigres aux oreifles & fes accords très-peu Iiaimonieux. Le Sieur Frantzy, Violon de 1'Elecleur Palatin a a réuni tous les fuffrages par une mufique favante & i;> génicufe, une main brilfante & facile , en un mot, par toutes les graces de fon art, jointes k 1'érudition muficale la plus profonde. II s'eft montré plufieurs fois avec un plaifir toujours nouveau de la part des fpectareurs. Le Sieur Sallentin, jeune homme de n i 12 ans a feit admircr fa belle embouchure fur la flüte ci la Q a  ( 3Ö4 ) setotMè dc fes points d'orgue. A la page 4. Le 4 1768. M. Boycr eft mort il y a trois jours. Ses différeutes places ont été données, fcavoïr celle de Médecm du Parlement, ï M. Tlderri; celle de Médecm des afmées a M. Petü , furnommé YAnatomiJte; celle deMédecin de la Généralité de Paris pour fe maladies épidémiques, a M. Malouet; celle de Médecin de la Baflille, a un Médecin étranger, favorifé de Madame la Marquile de Lanoeac, ci-devant Madame Sabbatin;celle de Médecin de la ville, a celui de M. le Piévot des Marcbands ; enfin , la place de Secrétaire de 1'Ordre de St. Michel ,aM. Morand, Chirurgienmajor des Invalides. Toutes ces places valoient environ 50,000 livres de rentes a M. Boyer. A la page 4. Le 6 Avril 1768. Ce lont les Directeurs du Concert fpirituel qui ont fait faire a leurs dépens la médaille d'or de 200 livres qu'ils ont donnée a 1'Abbé Giroiut pour prix de fon fecond motet. On ne fe laffe pas d'admirer avec quel art ce jeune Muficien a vané fes deux 'oeuvres, au point de furprendre tous les connoiffeurs qui ne s'attendoient pas a voir le même homme couronné fous deux faces auffi différentes. Les d'Alembert, les Duclos & toute la féquele de ce parti cabaloient beaucoup pour le motet de YAcceffit , s'imaginant qu'il étoit de Pbilitlor. A la page 14. Le 18 Avril 1768. Quoique U, de la Harpe ait répandu une lettre juflifiea-  tive oü il prétend répondre rt 1'article du Gazetier d'Utrecht qui attribue fon retour de Geneve au mécoutentement de M. de Voltaire, on trouve que ce jeune homme fe défend trés-mal des griefs qu'on lui impute. ■ i°. Quant a 1'article oü fon cceur fe trouve fi fortement attaqué par le repröche de n'avoir jamais feu fe concilier Vamitié de perfonne, il ne montre point la vivacité de toute ame honnête fur une pareille imputation; il gliffe légerement a la faveur d'une épigramme,- & c'eft mettre de 1'efprit oü il faudroit du fentiment. ab. II pêche contre la gratitude& la vérité,en affurant qu'il n'a point été recueilli chez M> de Voltaire. II fe feroit fait plus d'honneur en ne proteltant pas avec tant de délicatéfié contre un mot peut-être otfenfant pour 1'amour-propre, mais jamais pour la reconnoilfance. II ne peut nier que lui & fa femme n'aieut été au moins accueillis, s'ils n'ont pas été recueiüis, par ce grand homme, pendant un an ou dix-huit mois. 3°. On voit qu'il éludc le vrai larcin dont il elt coupable, en affedlant de donner le catalogue de ceux dont on ne 1'accufe pas aulfi formellement. C'eft le fecond chant de la guerre de Geneve , de la publicité duquel M. de Voltaire fe plaint, & c'eft de cette réclamation dont M. dc la Harpe ne parle point. Enfin, il affure qu'il a toujours 1'amitié de M. de Voltaire ; mais il ne dit pas fi c'elt par fuite d'un fentiment non interrompu, ou a titre Q 3  C 366 ) ■de générofité , de compalfion , de pardon...... Une lettre du Philofophe de Ferney a fon ami, -M. Dannlaville, va nous apprendre jufqu'oü il faut apprécier celle de M. de Ia Harpe , & 1'ostentation faftueufe avec laquelle il fait valoir la eontinuité-des boutés d'un ami de cette trempe. Dans cette lettre, que plufieurs perfonnes ont kei, M. de Voltaire en convenant du larcin de M. de la Harpe , & dn chagrin qu'il lui donne , termine par dire: que le public met a la chofe plus d'importance qu'elle n'en mérite,. & qu'il lui pardonne de tout fon cceur» Cette phrafe, jointe a ce que Madame Denis débite la-delfus, prouve que M. de la Harpe eft réelleinéiit coupable . & que malheureufement ce qui ne feroit. qu'une légere infidélité, ou une gentillelfe dans tout autre cas, devient une faute grave, un vice du cceur vis-a-vis d'un bienfaiteur auffi généreux; & M. de la Harpe, bienloin d'avoir pour lui la même indulgence que M. de Voltaire, devroit pleurer amerement une pareille offenfe. A la. page 14. Le 19 Avril 1768. On allure que M. le Duc d'Aumont, a qui Madame 1'Evêque a préfenté fon contrat de mariage a figner, comme au Gentilhomme de la Chambre d'année, fon fupérieur; lui a répondu; „ rappelez,, vous, Madame, le fort de la première; je „ craius bien de figuer en même tems votre „ billet d'cntcrrement. " A la page 15. Leso Avril 1778. On voit dans  ( 367 ) TAvant-coureur du 18, la déclaratïon fuivante de M. de Voltaire. J'ai appris dans ma retraite qu'on avoit in„ léré dans la gazette d'Ufrccht du 11 Mars „ 1768, des calomnies contre M. de la Harpe, jeune homme plein de mérite, déja célebre ,, par la Tragédie de Warvvick & par plufieurs ,, prix remportés a l'Académie Francoife avec „ l'approbation du public. C'ed fans doute ce „ mérite-la même qui attire les imputations en„ voyées de Paris contre lui a 1'Auteur de la „ gazette d'Utrecht. ,, On articule dans cette gazette des procédés „ avec moi dans le l'ejour qu'il a fait a Ferney* „ La vérité m'obüge de déclarer que ces bruits „ font lans aucun fondement, & que tout cet „ article ed calomnietix d'un bout a 1'autre. 11 „ ed tnde qu'on chercbe a transformcr les nou„ velles publiques & d'autres écrits plus férieux „ en libelles dilfamatoires. Chaque citoyen eifc „ intérede a prévenir les fuites d'un abus fi fu„ nefie a la fociété. Fait au Chftteau de Fer„ ney, Pays de Gex en Bourgogne, ce 31 Mars „ 1768. Signé Voltaire." A la page 16. Le 21 Avril 1768. On vient d'imprimer une lettre, fous le nom d'un Genlilhomme des Etats de Languedoc, a un Magistrat du Parlement de Rouen fur le Commerce des bleds ,^ des farines êP du pain. L'Auteur, pour remédier a leur cherté , qu'il prétend ne pas provenir des caufes auxquelles on 1'attribue, Q4  C 363 ) propofe un nouveau moyen de moudre & dé boulanger. II veut que des moulins économiques qu'il indique ,produifent par mefure de bied foixante livres de pain plus que 1'ufage ordinaire; ce qui en diminueroit le prix pour le confommateur confidérablement. Ces moulins font de 1'invention d'un nommé Lambert. A la page 18. Le 25 Avril 1768. M. d'Auvergne réclame contre un bruit répandu, que les Directeurs de 1'Opéra lui avoient procuré d'office une penfion de 1000 livres. C'eft lui D'auvergne qui, fur 1'inftance qui lui a été faite de la part de ces Meffieurs pour avoir la Vènitienne, Opéra dont ce Muficien a refair. la mufique, n'a voulu le donner qu'a cette condition qu'ils ont acceptée. II ajoute que celle accordée a M. de Mondonville ne 1'a été que par réflexion, & d'après la propofition de M. d'Auverge. A la page 24. Le 30 Avril 17Ó8. L'affaire du Mercure, agitée depuis longtems devant M. le Comte de St. Florentin, eft fur le point de fe terminer. Par la compulfation des regiltres, le Sieur Lutton, Coinmis & Caiffier de ce journal, bieu loin d'étre créancier dc 18000 livres, com-, me il le prétendoit, elt en debet de 12000 livres. On croit qu'on. fera une penfion au Sieur la Place, & que la Combe, cet Avocat-Libraire, aura la direction de 1'ouvrage avec des arrangemens propofés. A la page 27. Le 4 Mars 1768. Les perfonnageg illuitres & éclairés- auxqucls la Cour a don-  ( 37° ) Marche font h Lucienne, & ticnnent compagnie a toute la familie défolée. Du refte, le Prince fait une trés-belle fin; c'eft le Pere Imbert, Théatin, qui Pa confelfé. M. le Prince de Lam balie vient de rnourir*. A la page 33. Le 10 Mai 1768. La Fénitienne a été trainée fur la claie dimanche & aujourd'hui. La recette a été fi miférable, que MM. les Directeurs prennent le parti d'abandonner cet Opéra a fon malheureux fort; ils vont re» mettre Sylvie jufqu'a ce qu'ils aient quelque chofe de prêt. A la page 33. Le 12 Mai 1768. On a parlé d'une déclaration de.M. de Voltaire en date du chateau de Ferney, Païs de Gex en Bourgogne > le 31 Mars 1768. Elle difculpe vaguement M. de la Harpe & porte fur les mêmes procédés articulés dans la gazette d'Utrecht, qui font en effet étrangers au vrai grief de ce jeune homme. On voit facilement que 1'humanité a diclé cet écrit a celui qui 1'a tant célébré. Quoi qu'il en foit, il paroit que M. Bontin.,, Intendant des finances, n'a pas eu plus de foi a ce certificat. M. de la Harpe étoit entré chez. lui comme Secrétaire intime ; il Pa congédié lous prétexte qu'ayant une femme, cela entraineroit une fuite-de procédés trop gênants. II efb plus vraifemblable que ce Protecbeur ne fachant a quoi s'en tenir, d'après les bruirs injurieux a 1'ame de M. de la Harpe, a craint d'élever un ferpent dans foa; fein. D'ailleurs , M. de la,  ( 37* ) être" la dupe des applaudiffemens qui lui ont été prodigués. On n'ignore pas combien il y avoit de billets donnés , & quelle forte de manoeuvres emploient les Auteurs pour fe foutenir. Malbeureufement ces fecours ne peuyent fe réitérer fouvent, & la cbute n'en elf enfuite que mieux marquée. A la page 44. Le 24 Mai 1768. Un jeune Auteur ayant compofé une Héroïde fur les reproches d'une mere a fon époux qui ayant voulu faire inoculer fon fils , elt fuppofé favoir perdu, la Police n'a point voulu paffer- cette fable, dans la crainte qu'elle ne fit impreflion fur quelques ames foibles. On voit par ce trait, combien le Gouvernement protégé une méthode qu'il regarde fans doute comme falutaire a la nation. A la page 46. Le 26 Mai 1768. M. Linguet, Auteur efttmé de divers livres hittoriques, fe trouvant maltraité dans les Notes du Tacite de M.'1'Abbé dc la Bletterie , n'a pu tenir a fon reffentiment ; du motns on lui impute 1'épigramme fuivante, qui a en effet affez fair d'une perfonalité. Apoftat (/*) comme ton Héros (f), Janfénifte fignaut la butle, Tu tiens de fort mauvais propos, Que de bon cceur je diffimule; Je t'excufe & ne me plains pas; Mais que t'a fait Tacite, hélas! Pour le traduire en ridicule ? (*) M. 1'AbW de la Blttten'e a été Pere de 1'Oiï.toire. Q) II a fait ia vie de Jiiliï.i 1'ApoIlat.  < 37§ 3 efprit, fe rendre néceffaire, & lui faire enfin f époufer la Dlle Boutaudon, fa niece, le 18 Avril 1766. Alors il a montré les dents, & fe mettant a la tête des affaires du jeune homme, a fait des répétitions conlidérables contre le pere & foncle de fon neveu, capables de ruiner 1'un & 1'autre, fi elles étoient accordées dans leur totalité. Trois Mémoires trés - volumineux font déja éclos darts cette conteftation, vrai labirinthe oü Pon de perd, & d'oü il réfulte en général pour le leéfeur des impreflions facheufes contre toute cette familie. Un y trouve de chaque part une aigreur capable de uuire aux meilleures caufes , & les parties auroicnt infiniment mieux fait d'enfévelir dans 1'oubli, a quelque prix que ce fut un détail de faits peu lionorabïes pour tous: on voit toujours- avec peine un neveu proyoquer'fon oncle, un fils fon pêre, & un oncie & un pere réduire le neveu & le fils a la cruelle néceffité de s'armer contre eux. La piece la plus curieufe de tout ccci eft un bout de Mémoire du Sieur de Clauftre qu'il a joint a celui de fon neveu. Le ton caffard qui y regne, fes verfets de 1'Ecriture dont il eft fardé , 1'efprit de modération, de paix, de charité que ce Prétre affiche, font une préfomption forte contre lui, & le font pafler aux yeux de bien des geus pour un monltre de chicane, revêtu de la peau d'un agneau. II ne faut point confondre ce la Borde avec le la Borde, ancien ■Banquier de la Cour, fotiche d'une autre familie.  ( 379 3 A la page 55. Le 14 Juin 1768. Un Auteur Italien, M. J. Del Turco, vient d'entreprendre la Traducbion de Fllliade d'Homere en vers Italiens & en Iranees de huit vers. II a fait imprimer le premier Tome qui paroit avec fuccès , & qu'on ne juge point indigne de 1'original; il fait précéder Ion ouvrage d'un excellent difcours fur la poëüe d'Homere & fur le plan de f'Uliade; il donne enfuite un abrégé hiftorique de la vie de ce Prince des Poëtes. A la page 59. Le 21 Juin 1768. II y a de grands mouvemens en Médecine fur 1'affaire de 1'inoculation. On fait que cette méthode a déja été approuvée dans deux Alfemblées de la Faculté. Mais pour que le Décret ait force de loi, il faut qu'il foit confirmé dans une troifieme. C'eft ce qui afflige les Antï-inoculateurs. Aujourd'hui ils cherchent a rufer, a temporifer , .pour pouvoir cabaler & gagner des fufrages. Ils prétendent que la matiere eft aflez. importante pour exiger que tous les Membres, même abfents, donnent leurs voix; en conféquence, avant de laiffer opiner pour la troifieme & derniere fois, ils veulent qu'on agite cette nouvelle queftion. En un mot, ils fe propofent d'employer tous les obftacles qu'il leur fera poflible , pour reculer la coiiclufion qu'ils préfumènt ne leur devoir pas être favorable dans .1'état acbuel des chofes. A la page 62. Le 26 Juin 176S. On a dit que 1'amateur qui avoit donné la médaille du  C 332 > ment a cet ouvrage, 600 livres a 1'Abbé de la Porte, Acolythe du Sieur de la Place; 600 livres au Sieur Poinfinet, Auteur de 1'Epttre a Madame la Marquife de Langeac; 200 livres de fupplément au Sieur Marin, Cenfeur de la Police, qui cn avoit déja une, & 300 de fupplément auffi a 1'Abbé le Blanc, efpece de brocanteur littéraire, qui, par fes hjtrigues, s'étoit fait mettre fur la lifte depuis longtems. Quant au Sieur la Combe, c'étoit un Avocat, homme de lettres, qui faifoit des livres en communauté avec un Frere, avec les Macquers & autres Auteurs, & qui, tyrannifé par les fmprimeurs , s'effdévoué pour la Société , a quitté la robe de Palais & s'eft fait recevoir Libraire. Ce nouvel état lui a infpiré de la cupidité; il a étendu fon commerce, a envahi tous les journaux & devient formidable a fes confrères. II prétend mettre le Mercure fur le meilleur pied. C'eft aujourd'hui que doit paroitrele premier volume de la facon de fa Coterie littéraire. Ils ont commencé par rectifier 1'épigraphe & , après bien des recherches, ils fe font décidés pour cellc-ci Mobilitate Viget. Allufion favante au Mercure Métal, au Mercure Dieu & au Mercure Journal. A la page 65. Le 4 Juillet 1768. Le nouveau Mercure eft en effet fupérieur a tous ceux qui paroiflent depuis longtems par le choix des pieces qu'on y a inférées & la variété répandue dans 1'ouvrage. Mais, outre que ces fugitives, trés-bonnes en elles-mêmes, 01U déja paru dans  C 383. ) f: différéns journaux, & autres papiers publics, fel é'eft qu'il eft moraleroent impoflible tle remplir i 14 volumes par an de morceaux d'élite. Un des i& défauts dc 1'ancien Jounialiïie étoit de prodiguer 'I des éloges a tout propos & d'enivrer de fon fade n encens lc moindre cuiflre littéraire, le plus petit I Hiflrion. Celui-ci, plus modéré fur les Iouanli ges., aura peut - être pcine a s'expliquer libre1 ment fur quantité de gens qu'il aura intéröc de J-ménager, & furtout fur les Comédiens dont il 1 tient fes entrées aux fpeétacles, fuivant 1'ufage. [| Ajoutez a ccla les cntraves de toute efpece i qu'a nécefiairement en France un Auteur couH vert d'un privilege du Roi & toujours fous la f main directe du Gouvernement. Concluons que I le Mercure eft par effence une rapfodie trón- II quée, monotone & faftidieufe, & ne fortira jamais Ij! du rang oü fa placé, il y a longtems, un Criti1 que judicieux (La Bruyere) c'eit-a-dire imméI diatement au-deffous de rien. A la page 65. Le 5 Juillet 1768. Le ConI cours du prix de poëfie a l'Académie Francoife I roule ordinairement entre vingt & trente pieces. I Cette année, il en a-été reinis quatre - vingtI quatre au Secrétaire. On prétend qu'un homme I de qualité , agé de 82 ans, le Baron de ChateauI neuf, n'a pas dédaigné d'entrer en lice contre 1 la brillante jeunelfe qui court la même carrière. 1 Les vceux feront a coup für pour le moderne I Sopbocle, & il feroit a fouhaiter pour fhonneur I du üecle qu'il eüt le prix.  C 384 ) A Ia page 65. Le 6 Juillet 1768. Madame Benolt, cette Vivtuofe littéraire, déja connue par des Romans , vient de s'élever jufqu'a la Comédie, & de nous en donner une, en un acte & en profe, qui a pour titre la Super cher ie réciproque. L'intrigue n'en eft pas mal conduite; il y a de la fimplicité dans le ltyle, mais nu He énergie dans les caracteres, & rien de comique dans les fituations. Cette piece reuera dans la bibliotheque des amis auxquels 1'Auteur femelle en a fait part. Fin du dix - huitieme Volume.