RECUEIL DES ACTES DIPLOMATIQUES COKCEKNAKT LA NÉGOCTATION DU LORD MALMESBURY a vëc LE GOUVERNEMENT DE LA RÉPUBLIQUE FRANCOISE. k PARIS du 22 Oct. au 20 Dec. 1796. SUIVIES DOBSERVATÏONS DIPLOMATIQUES et POLITIQUES. Par 1 'Auteur de la POLITIQUE RAISONSTÉE etc. a Hambourg, chez B. G. Hoffj^Sfk. ct la Haye, chez Mr. van C1 a Londrts, chez Mr. j. de Boff«aS^ptf|}JpKgJj^| « PartJ, chez Mr. Fuchs. y^y^^fe^   PREFACE. La Négociation, entamée entre les CabinetS deLondres et de Paris, quoiqu' infructueuse, ne laissera pas d'interesser ceux, qui font plus que Nouvellistes ou spectateurs oisifs a la scène du monde. Elle a dévoilé le caractére des hommes en place, celui des deux Gouvernements, leurs prétentions et leurs maximes. A moins que les vicissitudes de la fortixne n'aménent de trop grands changements, nous y trouvons d'avanceles préliminaires dun accord a venir. Les defauts de la partie fublime du Droit, qui régie les intéréts des Nations et desEtatS font trop notoires, le manque absolu dun Principe général et universel dans le Droit public de 1'Europe en est un vice trop frappant, pourne pasjustifier chaque essai d'y rémedier. Er rémontant a 1'origine du Principe des Compensations, tel qu'il a été ~)C 2 avancé  IV PRÉFACE. avancé par le Lord Malmesbury, nons avons cru découvrir une maxime générale pour fervir de Principe a un fystéme de Droit public de 1'Europe. C'est anx hommes d'Etat, aux Publicistes, d'en déterminer Ia valeur; c'est au jugement muri par 1'expérience, de prononcer fur fon admission; c'est alorsaune main plus habile, de rassembler et d'orner des traits epars d'une Esquisse a peine ébauchée et dont nous n'avons que légérement touché quelques consequences, pour ne pas empiéter fur 1'avenir. La dignlté qui regne dans le ftyle du Lord Malmesbury' nous a para conforme a cette maxime, fon langage diplomatique ne ressemble point au verbiage patelin de eet art des Cabinets, aecredité par un amas de livres, qui trakent de ce qu'on a nommé le Droit public et lafcience desNégoeiafeions. .Nous avons rassemblé et mis a Ia tête deTouvrage, les piéces dipIomatiqUeS 'essenHelles,, coneemant ïes Négociations'quï ont eü lieu,  PRÉFACE. V lieu, dans Ie cours de la guerre actuelle, entre 1'Angleterre et la France. Ces titres n'apartiennent point, ni au Rapport, rendu au Directoire, par le Négociateur Francois, d'une conversation qu'il avoit eu avec le Lord Malmesbury; ni au Rapport du mêrae genre de celui - ci, au Ministère Anglois. Cependant comme des accessoires, ces dex Rapports ont quelqu' interêt, et on les trouve comme jjppendice, a la fin des Observations. La partie fcientifique, feul objêt de ces feuiües a exigé 1'examen de la fïtuation publique des affaires -d'autant plus pénible, qu'au cours de la proSpcri'fcé on n'aime point Ia verité; que I'ambition fait bien tracer fon tableau, maïs fans s*y réconnoitre; qu'enfin la position differente des hommes, fixe I'oeil, fur des cotés et des faces, isoïés, trés differents, Avec toute précaution possible a ne point pré ven ir Ie jugement du Lecteur, Ia justice et 1'humanité, prononcent fouvent «ne fentence catégorique. S'il fut cependant le  yX PRÉFAGE. le cas, que 1'on crut ces titres méconnus, alors nous prions un chacun, de vouloir considerer, non, une partie, mais 1'ensemble; non, ce qui fe passé momentanément, mais ce qui est de 1'ordre, ou physique, ou moral, constant Les chaineS; imposées a la verité, et que 1'Auteur n'osefécouer, rétiennentfa main, il doit être obscur, mais feulement a ceux, qui voyent de trés loin, fes paradoxes ne le feront pas k ceux qui fe trouvent eux merries compromis. Enfin, 1'on ne trouvera point ici une critique desActesdelaNégociation, mais des régies qui en découlent. Des traits trop frappants d'irrégularités, des méprises, rélévées deja dans les feuilles publiques ne font pas rétracées , nous les avons consideré comme connues. a ü....t le 16 Fevr. 1797» Kêcueil  ERRATA. p. 49 I. i6. 23 Oct lisez 22 Oct. p. 63 1.4. lendemein, l furlendemain. p. 127 1.17. de principe 1. de ce principe-, / ' '   RECUEIL DES PREUVES DIPLOMATIQUES DE IA NÉGOCIATION du LORD MALMESBURY, 1 7 9 7-   I MÉMOIRE remis au MI NI ST RE des Relations extérieur es de la Répuhliqus Fmncoise par le Lord M ALMESBURT. C \Ja. Majcsté Britannique défirant, comrne Elle a deja déclaré, de Contribuer en autant que cela pourra ■ dépendre d'Elle, a rétablir la tranquillité publique, et a assurer, par des Conditions de paix justes, honorables et solides, le repos futur del'Europe; S. Maj. pense, que le mellleur moyen de parvenir le plutoC possible a ce but falutaire, fera, de convenii-, dès le cömmencemênt de la égociation, du Principe gênêral, qui devra fervir de base aux arrangement* défini tifs. Le premier objèt des Négociations de paix fe ïap« porte ordinairement aux résiitutions et aux cessions, que les Parties réspectives ont a fe démander mutuellemènt, en consequence des événements de la guerre. Ea Grande - Bretcgne, d/après le fuccès uon interrompu de fa guerre maridme, fe voit claus le cas de n'avoir aucune restitiition a démander a la France, fur laquelle, au contraire, elle a eonquis des Etablissements et des Colonies de la plus haute importance et d'une valeur presqu'incalculable. 1 Muis, en réyan*  4 clie, cette dernière a fait fur le Continent de l'Europe, des Copquétes, auxqiielles S. Maj. pent d'autant moins ètre indifferente , que les interets les plus importants de fes Peuples, et les errgagdments' les plus lacrés de fa Couronne, s'y tröuvent essejitiellement impliqués. La magrianiöiité cht Roi, fa fjonne-foi inviolable, et fon désir de rendre le repos a tant de Nations, lui font en,visager, dans eet état de clioses-, le moyen d'arriver a des conditions de paix justes et équitables pour toutes les Parties belligérantes, et propres a assurer, pour l'avénir, la tranquillité générale. C'est dónc fur ce pied qu'elle propose de négocier, en ofFrant de compenser a la France, par des résiitutions proportionnelles, les arraiigemcnts, auxquels cette Puissance fera appellée a consentir, pour fatisfaire aux justes demandes des Alliés du Roi et pour conserver la Balance politique de l 'Europe. En faisant cette prémière ouverUire, S. Maj. se réserve a s'expliquer, dans la fuite, d'uue maniere plus étendue fur / 'applkation de ce principe aux difFerentsobjèts, don,t il pourra ètre question entre les Parties réspectives. C'est cette applicati'on, qui fera la matiére des discussions, dans lesquelles Elle a autorisé son Ministre d'entrer, des que 1'on fera convenu du Principe a adapter pour base générale de la Négoeiatïon. Mai»  Mais S. Maj. ne peut fe 'dispenser de déclarer, que, fi eet off re genereux et equitable n'étoit pas accepté, o;i fi malheureusement les discussions, qui s'en suivroient, venoient a manquer 1'elret désiré, ni cette Proposition générale, ni celles plus détaillées, qui en feroient résukées ne pourroient plus ctre régardées, dans aucun cas, comme des Points convenus ou accordés par Sa Majestz^ (Signé) MALMESBURT Ministre-Plenipotentiaire de S. M. Eritannique a Parisce 24. Octobre 1796. II. RÉPONSE du ÜTREC TO TR E- EXE C ÏJ TT F au Mé- moiré de M. MA L M Li SE U R T. Paris Ie 5 Erumaire ( 26 Octobre ) an 5. Le Directoire r Exécutif charge le Ministre des Relations-extérieures, de faire au Lord Malmesbury la Reponse fuivante." "Le Directoire- exécutif voit avec peine, qu'au moment, oü il avoit lieu d'esperer le trés prochnm retour de la Paix entre la Républiq'ue Francoise et S, M. Britannique, la Proposition du Lord Malmesbury n 'offre que des moyens dilatoires ou tres éloignês, d'en améner la conclusion." " Le Directoire obferve, que, fi le Lord Malmesbury ent voulu tralter féparément, ainsi qu'il y est A 5 formol-  5 formellement autorisé par la teneur de fes Lettres de créance, les Négociations eussent pü ètre considera. blement abbregées; que la nécessité de balancer avec les interets des deux Puissances, ceux des Allies de la Grande - Brctagm, inulriplie les combinaisons, complique les difficuftés, tcnd a la formation d 'un Congres dont les formes font toujours lentes, et exige 1'accession de Puissances, qui, jusqu'ici, n'cnt témoigné aucun désir de rapprochement, et n'ont donné au Lord Malmesbury lui - rnème, d 'après fa dêclaration, aucun pauvoir de ftipuler pour elles." "Ainsi, fans rien préjuger contre les intentions du Lord Malmesbury; fans rien conclure de ce que f4 dêclaration ne paroit point s 'accorder avec les pouvoirs, qui lui font délégués par fes Lettres de créance; fans fupposer qu 'il ait récu des Instructions fecrettes, qui dètruiroient 1'erfèt de fes Pouvoirs ostensibles; fans prétendre enfin, que le doublé but du Gouvernement Eritannique ait été d'&carter, par des Proposu tions générales, les Propositions partielles des autres Puissances; et d 'obtenir du Peuple Anglois les moyens de continuer la guerre, en réjettant fur la République 1'odieux d'un retard, qu'il auroit nécessité luimème; le Directoire - Exécutif ne peut fe dissimuler, que la Proposition du Lord Malmesbury n'est autre chose, et fculement fous des formes plus amicales, que le rénouvellement de celles, qui furent faites, i'année der-  n derniere par Mr. Wickham, et qu'elles ne présentent qu'un éspoir étoignê de la Paix." " Le Directoire - Exécutif observe encore, h 1'égard du Principe des rétrocessions,mis en avant par le Lord Malmesbury, que ce Principe, vaguement et isolément présenté, ne peut fervir de base a des Négociations; que 1 'on doit considerer, avant tout le befoin commun d'une paix juste et folide; 1'équilibre politique, que des rétrocessions absolues pourroient rompre, et ensuite les moyens que peuvent avoir les Puissances belligérantes , 1'une, de foutenir des Conquetes faites, lorsqu 'elle étoit appuyée par un grand nombre d'Alliés, aujourd'hui détacliés de la Coalition; 1'autre, de les récuperer, lorsque celles, qui avoient été d'abord fesennemis, font dévenues presque routes ou fes propres Alliés, ou, au moine, Neutres." "Cependant le Directoire - Exécutif, animé du désir ardent de faire cesser le fléau de la guerre, et pourprouver, qu'il ne fe réfuse a auciine voye de conciliation, déclare" qu'aussitot que le Lord Malmesbury fera paraitrc au Ministre des Rélations extérieures, les Pouvoirs fuflisants des Puissances, Alliés de la Grande- Brétagne, a 1'effèt de ftipuler pour leurs interets respectifs, et leur promesse, a fouscrire a ce qui aura été conclu en leurnom, ïeDirectpire- Exécutif s'empressera, de répondre aux Propositions précises, qui lui feront faites; et que les difficultés s.'applaniA 4 ront  I Vont autant que peuvent le comporter Ia fureté et la dignité de la République. (Signé) REVELLIERE. LÈPEAUX, Président. LAGARDE, Secrétaire- général. ïn. NOTE remise au MI NIS TR E des Relations exterieure! par le Lord MALMESBURY Envoijê du Cabinet Britannique. Le Soussigné n'a pas manqué de transmettre a fa Cour la réponfe du Directoire - Exécutif aux propositions, qu'il a été chargé de faire pour fervir d'ouverture a une Négociation pacifique. Quant aux insinuations injurieuses et offensantes, que 1'on a treuvé dans cette Piéce, et qui ne font propres, qu'a mettre de nouveaux obstacles au rapprochement, que le Gouvernement Fr cm cois fait profession de désirer; le Roi a jugé fort au dessous de fa dignité de permettre, qu'il y foit repondu de fa part, de quelque manière que ce foit. Le progrés et le résultat de la Négociation mettront assez en évidence les principes, Tur lesqucls elle aura été dirigée de part et d'autre ; et ce n'est ni par des réproches révoltants et denués de tout fondement, ni par des injures réciproques, que 1'on travaille, de bonne foi, a 1'ouvrage de la paix. Le  9 i Le Soussigné passé donc au premier objèt da discussion, mis en avant dans la réponse du Directoire* Exécutif, celui d'une Négociation féparée, a laquelle onavoulu, fans aucun fondement, fupposer, que le Soussigné éloit autorisé d'acceder. Ses Plein-pouvoirs, expediés dans la forme ordinaire, lui donnent toute 1'autorisation nécessaire pour négocier la paix; ïnais ces pouvoirs ne lui préscrivent ni la forme, ni Ia nature ni les conditions du Traité futur. Sur ces objèts il doit fe conformer, felon 1'ufage établi et reconnu depuis long tems en Europe, aux inslrnctions, qu'il aura récu de fa Cour; et il n'a pas mauqué, en consequence, de prévenir le Ministre des Relations extérieures, dès leur première Conference, que le Roi, fon Maitre, lui avoit trés exp.ressement enjoint, de n'entendre a aücune Proposition, tendante a féparer les intéréts de Sa Majesté d'avec ceux de fes Alliés. II ne peut donc ètre question que d'une Négociation, qui combinera les intéréts et les prétentions de toutes les Puissances qui font caufe commune avec le Roi dans la présente guerre. Dans le cours d'une pareille Négociation, l'intervention, ou du moins la participation de ces Puissances, déviendra, fans doufce, abfolument nécessaire ; et Sa Maj. éspére rétrouver en. tout tems les mèmes dispositions pour traitèr fur une >ase juste et équitable, dont S. M. 1'Empereur et Roi A 5 4  10 a donné au Gouvernement FranCois une preuve fi éclatante au moment même de 1'ouverture de cette campagne. Mais il paroit, que ce feroit un delai tres inutile que d'attendre une autorisation formelle et délmitive de la part des Alliés du Roi, avant que la GrandeBretagne et la France puissent commencer, a discuter, mème provisoirement, les Principes de la Négociation. Une marche tout-k-fait différente a été fuivie par ces deux Puissances, dans presque toutes les occasions femblables, et Sa Maj. pense, que la meilleure preuve, qu'elles pourroient donner, en ce moment, a] toute 1'Europe, de leur désir mutuel de faire cesser, le plutot possible, les calamités de la guerre, feroit de convenir, fans délai, d'une base de Négociation eombinêe, en invitant, dès-lors leurs Alliés a y concourir de la manière la plus propre a accélerer la pacification générale. C'est dans cette vue, que le Soussigné a été chargé de proposcr d'abord, et dés le commencement de la Négociation, un Principe, que la générosité et la bonne-foi de Sa Maj. pouvoient feules lui dicter, celui, de compenser a la France, par des réstitutions froportionelles, les arrangements, auxquels elle dévra eonsentir pour fatisfaire aux justes pretentions des Alliés du Roi et pour conserver la balance politique de 1'Europe-. Le  tl Le Directoire - Exécutif ne s'est pas expliqué d'une manier^.prffise, I ni fur ï'acceptation de ce Principe, ni fur les changements ou modifications, qu'il désireroit d'y apporter, ni enfin fur 1'énonciationd'un aidre principe quelconque, qu'il proposeroit pour fervir au même but. Le Soussigné a donc 1'ordre de révemrïux eet objèt, et de démander, ladessus, une explication franche et précise, afin d 'abroger les delais, qui devront nécessairement résulter de la difficulté de forme, mise en avant par le Directoire - Exécutif. II est autorisé a ajouter a cette demande la dêclaration expresse: " que Sa Majesté, en faisant part a fes augustes "Alliés de toutes fes démarches fuccessives, rcla"tivement a 1'objèt de la présente Négociation, » "et en remplissant envers ces Souverains, de la "maniere la plus efïicace, tous les dévoirs d'un "bon et fidéle Allié, n'omettra rien de fii part, "tant pour lès disposer a concourir a cette Négo" ciation par tous les moyens les plus propres a "faciliter la marche et en assuver le fuccés, que "pour les maintenir töujours dans les fentimeuts, "conformes aux voeux, qu'Elle fait pour le ré"tour de Ia paix générale fur des conditions "justea, honorables et permanentes." (Signé) MALMESBURT. k Paris ce 18 Novembre 1796. IV.  13 IV. R Ê P O N S Ë du MINI STRE des Relations extérieur es a la Note du Lord MALMESB UR T. Le Soussigné est chargé par le Directoire-Exécutif, de vous inviter: a désigner, clans le plus court délai, et nominativement, les objêts de compensations réciproques, que vous proposez. II est chargé en outre, de yous démander, "quelles font les dispositions pour "traiter fur une base jnste et -équitable, dont Sa M. "1'Empereur et Roi a donné au Gouvernement Fran" cois une preuve li écht ante, au moment mème de 'T'ouverture de cette Campagne, Le Directoire - Exécutif 1'ignore. C'est 1'Empereur et Roi qui a rompu I'arrmstice. (Signè) CH. DELACROIX. a Paris le 22 Brrnnairc (12 Nov.) an 5- de la République Francoise mie et indivisible. V. h E T T R E adressèe au MIN IS TR E des Relations exterieures le 13 Novembre par le. Lord MALMESB VRT. Le Ministre-Plenipotentiaire de S, M, Britatinique .s 'adresse au Ministre des Rélations extérieures, pour J.e prier de 1'iiiformer-, «'il doit régarder la Note off- eielle,  i5 tietle, qu'il a récu de fa part, hier au foir, comme la Réponse a celle que le Lord Malmesbury a rémise hier matin, au Minisire des Rélalions extérieures, par ordre de fa Cour. II fait cette demande pour ne pas rétarder inutilement le départ de fon Courier. (Signé) MALMESB UR T. VI. RÉPONSE du MINISTRË des Relations extérieures, du mime jour 23 Brumaire, Le Soussigné, Ministrë des Rélalions extérieures, déclare au Lord Malmesbury Ministrë Plenip. de S. M, Britamüque, qu'il doit régarder la Note offi. cielle, qu'il lui a transmise hier, comme la Réponse a celle que le Lord Malmesbury lui avoit adressée le matin du mèuie jour (Signé) CH. DELACROIX. VII. SÉCONDE LETTRE du Lord MALMESB U RT au méme Ministrë du méme jout: Le Lord Malmesbury vient de récévoir la Réponse du Ministrë des Rélalions extérieures. 'dans laquelle il déclare, que la Note officietle, qu'il lui a transmiss hier, doit Ure régardée comme la Réponse a celle, que 19  *4 le Lord Malmesbury lui a adressée le matin du mème jour. Le Lord Malmesbury la communiquera dès aujourd'hui a fa Cour. (Signé) MALMESBURT. VIII. NOTE adres sée le 12 Novembre (rémise le lendemain) par le Lord MA LMESB UR T an MINISTRË des Relations extérieures. Le Soussigné nhésite pas un moment a repondre aux deux questions, que vous êtes chargé de lui faire de la part du Directoire-Exécutif. Le Mémoire présenté ce matin par le Soussigné, propose, en termes expres de la part de S. M. le Roi de la Grande - Brétagne: "de cornpenser a la France, par des réstitutions "proportionnelles , les arrangements, auxquels " elle dévra consentir, pour fatisfaire aux justes "prétentions des Alliés du Roi, et pour confer« ver la balancé politique de 1 'Europe." Avant 1'acceptation formelle de ce Principe, ou Vênonciation, de la part An Directoire-Exécutif, d'un autrë queleonque qui puisse également fervir de base a la Négociation d 'une paix générale, le Soussigné ne fauröit ètre autorisé a designer les objèts de compensation réciproque. Quant  i5 Quant a la preuve des dispositions pacifiques, données au Gouvernement Francois par S. M. 1 'Empereur et Roi a 1'ouverture de la Campagne, le Soussigné fe contente de rapporter les paroles fuivantes, qui fe trouvent dans la Note du Baron de Degetmann du, 4 Juin dernier : "Les operations de la guerre n'empeclieront "nullement, que S. M. Irrtp. ne foit toujours "portée a concourir, d'aprh teUe forme de Né* " gociation, qui [eva adoptée de concert entre les "Parties belligerantes, k la discussion des mo"yens, propres, pour mettre fin a 1'éifusion ultérieure du fang humain." Cette Note fut présentée après la rupture de 1'armistice. (Signé) MALMESBURT. IX. RÉPONSE du Ministrë des Rélations extérieures h L A NOTEprécedente du 23 Brumaire. Le Soussigné, en réponse k votre feconde Note d'hier, est chargé par Ie Directoire* Exécutif de vou? déclarer; "qu'il n'a rien a ajouter a Ia Réponse qui vous a été adressée." II est chargé également de vous démander «h, a " chfl-  1« "chaque communication officielle, qui fera faite "enl.re vons et lui; il fera nécessaire, que vous en•"voyez-un Courier pour récévoir des instructions "fpeciales" (Signé) MALMESB URT. X. ' Z • ' R «É P O N S E du Lord MALMESB UR Y au Ministrë des Relations extérieures a la précedente. T,e Soussigné ne manquera pas de transmettre, a fa 'Cour, la Note qu'il yiciit de récévoir de la part du Ministrë des Rélations extérieures. II déclare également, qu'il fera dans le cas, d'expédier des Couriers a fa Cour, toutes les fois que les Communications officielles, qui lui fcront faites, exigeront des Instructions fflciales. (Signé) MALMESBURT. XI. NOTE du Lord M ALM ES B UR TduWIINISTRE des Relations extérieures du 26 Noyembre. La Cour de Londres informée de ce qui s'est' passé ensuite du dernier Memoire, rémis, par fon ordre, au Ministrë des Rélations extérieures, a trouvé: qu'il n'y a absolument rien a ajouter a la Réponse, faite par le Soussigné aux deux Questions que le Directoire a jugé  i7 a jugé a propos de lui adresser. Elle attend donc èncore, et avec le flus grand interêt, 1 'explication des fentiments du Directoire par rapport au Principe proposé, de la part, pour base de la Négociation, et dont l'adoption a paru le moyen le plus propre, pour accélerer le progrès d'une discussion fi importante au bonheur de tant de Nadans. Le Soussigné a récu, en consequence, 1'ordre de RE NOU FE LLER la demande d'ime Réponse franche et pré cis e fur eet objèt, afin que fa Cour puisse connoitre avec certitudex "fi le Directoire accepte:1a di te Proposition ; s'il "désire d'y apporter des changements ou modifi"cations quelconques; ou enfin, s'il voudroit "proposer quelqu'^ autre Principe pour fervir au " mème but." (Signé) MALMESB UR T. a Paris le 26 Novembre 1796. XII. RÉPONSE du M IN IS TR E des Relations extérieures a la Note ci-des sus; du 7 Primaire (2? Nou.) En réponse a la Note, remise hier (26N0V. v. ft) 6 Frimaire par le Lord MALMESBURT, le Soussigné Ministrë des Rélations exLérieures, est chargé par Ie Directoire.Exécutif, d'obferver: R " qu»  i8 « que les Réponses, faites ) Ce fut aux Négociations, qui précéderent la la guerrê en 1756- La querelle fur les limites du Canada, originaire du traité d'Aix - la - Chapelle B'étoit perpetuée, échauffée, jusqu'a produire une nouvelle guerre. A la fin, la France próposa pour base de la décision "les principes gé«néraux de la jlistice, de la furetê des Colonies «réspectives, et des convenances mutuelles."' Les dettx premiers termes disoient tout, 1'An- • gleterre les admit, mais elle fe réfusa au terme, ici trés fuperflu, des convenances, quoiqu'il étoit fynonime de "la fureté des Colonies réspectives." La convenance, dit elk, a proprement parler, n'est pas du Droit de Ia justice. C'est tres vrai, quand il s'agit de Droits évidents. Oü les trouve-t-on dans les contestations publiques? Les preuves font communement aussi obscures qua les limites dans les deserts de 1'Amerique. Si, a 1'origine de la querelle, avant les voyes ae fait. que 1'on s'étoit permis, avant la discuseion d'une quantité de prétentions, On éut posé ce principe; il est bien probable, que fon admis-  65 L'esprit, comme 1'étendue de ce Principe font dévéloppés dans les deüx Mémoires confidentieJs (v. Pr. XV, XVI.) pour fervir de matiere a la discussion ultérieure. Ces deux projêts ne renferment rien qui foit onereux a la France; mais ils laissent entrevoir des moyens d'accommodement, qui ƒ* feroient au parti de 1'Angleterre. Les propositions tendent a la réïntegration de 1'Au- triche mission n'auroit causé aucune difficulté. Alors, d'un principe, on fait dériver les consequences. auxquelles 1'adversaire ne fauroit fe réfuser. Le cas est bien different, fi, la consequence ayant été réjettée fous la forme d'un argument fimple, on voudroit la rendre obligatoire en vertu de quelqne principe, qui demande une réconnoi;sance préliminaire. Lemot: convenance, étoit vraiementPexpressiou. la plus conforme a la nature de la question fusdite. De ce tems la il étoit encore clans fa dignité. De nos tems il a été flétri par l'abus que la fraude et la violence en ont fait; il a rétenti le long du ÏUiin, en Westphalie, en Franconie, aNuremberg, a Varsovie, on en verra tantot un horrible usage aux contrées du Rhin et ailleurs; il n'est plus permis de i'en ferrij; honnettement. E  66 triche dans tousfes droïts, mais feulement en termes généraux. On ne dispute point k Ia France, fes acquisitions dü cóté de 1'Espaghe; a peine ose-t-on avoir de la jalousie de fa possession de 1'Isle entiére de St. Domingue; on ne fait point m ention des conquêtes, faités fur la Couronne de S&rdaigne; on accorde tacitemerit a la République, un élargissement au Nord, a 1'Est; il dépend d'elle, fi elle veut conserver fon influence immédiate dans les Sept-Provinces -Unies; en un mot: on rend la France arbitre, de fa cause et de ce qu'elle desireroit pour elle. Comment, ces offres gratuits, en faveur de la France, fi la charge efc aux dépens des interets de 1'Angléterfe et de fes Alliés, peuvent - ils fe concilier avec cette assertion du Principe fusdit: ''pour fatisfaire aux 'justes "demandes des Alliés du Roi?""Vne juste demande fe rapporte a un Droit, et la posses* sion anterieure, non contestée, en. est un titre légitimê. Si cependant on accorde k la France de nouvelles acquisitions, fur ce qui est du Droit d'autrui; alors il faüt qü'il y ait5 ou  67 oü "une injusticè, ou un Droit éminent, général et public de l'Europe, qui, pour ainsi dire, s'assujettise des Droits individuels. Dans Ie fystême de l'Europe policée, la cónIquête en elle mème est une injusticè. II faut donc, que 1 argument qui termine le Principe fusdit, pris, de "Ia conservation de Ia balance "politique de 1'Europe" renferme ce Droit éminent; et en ce cas, le Principe du Lord Malmesbury, traduit en termes généraux, fe trouveroit a peu prés ainsi: Dans les cas, ou la £fustice par elle même i ne décide pas, les contestations de Droit ou de Fait entre les Etats; la conservation de la balance politique de l'Europe fait le Droit public de l'Europe. "La RUSTIGE, dit Beccaria c'est Ia "notion générale d'un chacun,, des liens nécessaires de la focieté dans fon rapport k Ia "felicité. Le DROIT dit-il, c'est Ia ré"striction la plus utile au plus grand nombre, "de la Force d'un chacun." Donc: le Droit public de l'Europe, coiisideré fubjecüvement et objectivement devroit établir; la restriction la E 2 plus  68 plusutile au plus grand nombre, de la Force de chaque Puissance, dans le fijstème de l'Europe, prise individuellement. Cela étant, il en résulteroit, 1'identité de ce que 1'on nomme: l'Equilibre en Europe, la balance politique de l'Europe, et le Droit public de l'Europe. Notre Principe général feroit donc hors de toute atteinte. Le domaïne du Droit s'élargit, k mesure que celui de la Justice s'arfoiblit; et il düfc s'afFoiblir rapidement, par 1'abus de la force. Dans unfystéine, tel que les Etats de l'Europe composent, leurs Droits perdent leur origine, ou dans un océan defang, ou dans 1'abime de la fraude et de la trahison de la foi publique. De la focieté primitive, ils ont conservé pourtant, la condition ou le rapport de 1'Egalité républicaine absolue, les uns k 1'égard des autres; c'est CHonneur public. A ce titre 1'Etat n'apartient qu' a lui-même, fes moyens, fon action intérieure, le produit de feS'facultés lui apartiennent; c'est fon Indèpendance. Muni d'un Droit, égal k celui de tout autre Etat, aucun n' oseroit le trou- bler  bier dans la jouissance de ces avantages; c'est fa Süretè. Tantot, 1'ambitïon, qui tend a réunir en ellemême les avantages de 1'univers, brisa les liens de 1'égalité; 1'honneur, 1 'in dépendance et la fureté de fes voisins lui étoient un jeu, quand elle trouva fes forces fupérieures. La disparité des forces, fit naitre le Droit, qui s'accrüt avec les obligations, contractées dans le besoin et dévénues permanentes, par Ie besoin et Ia culture de l'esprit humain. A la force fimple, on opposa un méchanisme de forces composées, au pouvoir réè'i, un pouvoir moral, *) C'est cette combinaison, inventée, quand la Justice ne E 3 toü- *) Pouvoir riSt; Ia position géographique, les avantages limitroplies, 1'étendue territorielle, la population, le fol, le clima, le genie belliqueux etc. etc. Pouvoir moral: des conventions, des alliances des ligues, fuadées par Ie besoin conrmun, nouées par la foiblesse ou Ia crainté, résserrée» par un danger imminent etc. etc. De ce coté, la foi publique est le grand mobile de 1'action combinée; la, ce font les passions, fouvent d'un individu.  70 touchoit plus les cceurs, qui foutient encore 1'état public de l'Europe, qui protégé le Foible a coté du Fort, et qui est le garant unique de la tranquillité générale, autant que cela fe peut. Qu'il nous foit permis de toucher d'un mot quelques unes des consequences, qui résulteroient d'un Droit public, théorique et pratique, établi fur la base de notre principe général, Des Publicistes d'ailleurs trés intelligents, ont fait passer en dérision, les mots d'Equilibre et de Balance politique de l'Europe; tout au plus ils n'y ont vu que de beaux réves. Ne dirions nous pas, qu'ici le penchant fensuel de l'esprit humain, 1'emporte fur 1'abStraction, fi le langage de 1'évidence mathematique 1'entraine? En partant du principe du Droit: de la réstriction, utile par éminence, des Forces politiques,, au plus grand nombre des Etats de l'Europe; en considerantdefun coté, des Forces materielles, et de 1'autre un pouvoir moral; que 1'on calcule les rapports de ces pouvoirs,que 1'on  7* I-on désigne par les mots fusdits, Ie terme extréme d'un pouvoir extérieur; alors toute . contrarieté tombe etils fournissent des résultats, dont on ne fauroit trouver ailleurs la folution. Tel est celui de 1'inégalité de ce qu'on nomme Ia puissance des Etats. C'est en vertu du pouvoir moral tutelaire, que des Etats du dernier ordre existent a coté des puissants et des ambitieux, fans avoir plus a. craindre que tout autre.. Si, au milieu des Etats de l'Europe s'éleva une puissance, qui parvint k affoiblir Ie pouvoir moral dans le grand fystéme, d'en reduire des parties en des forces, ajoutées aux Hennes, d'en décomposer le reste en des forces iimples; alors cette Puissance marcheroit fur la même route qui procura k 1'an:ienne Rome, 1'empire du monde. Le début itaposant;de fa politique en la Gréce, Ie fort de cette contrée illustre, font assez connus, Orla plus' funeste de toutes les calamitès qui puijsent jamais affliger 1'espéce humain e, c'est 1'empire universel, fousquel titre, de qüelte facon, fous quel droit qu'il s'établisse, E 4 fut-il  7* fufc-il posé au nom de Ia' Liberté même. Les traces de tous les fléaux de la nature, les horreurs des guerres et du carnage s'effacent de dessus la surface de la terre; il en faut autant de fiécles, qu'aux autres maux des années pour faire passer les playes profondes, que frappe 1'empire universel fur le monde et les nations, même nous en con«oissons qui restent comme un monument éternel pour faire horreur au genre huInain. *) Si *) Qui ne fonge pas d'abord 'a Ia Gréce? une vaste contrée, parsémée de villes fuperbes, ornées des merveilles du genie, dont nous ne favons pas assez admirer les débris, n'a pas même conservé fes ruines. Les descendants des plus grands hommes et des plus füblimes genies, que jamais le monde ait vu, croupissent dans la plus afreuse barbarie. Du jour que la liberté fut proclamés par les Romains, au tems de Plutarque, la 'Bïvolution étoit consommée. Aujourd'hui, dit;et Auteur, on ne trouveroit pas trois mille follats dans toute la Gréce, qui peu auparavant pcupla le monde de fes colonies. Si le reste des provinces de l'empire romain s'est rélevé, c'est, qu'une nouvelle race d'hommes, appelles barbares, y ramenérent la vertu, la probité, la géné- rosité  73 Si jamais les peuples et leurs gouvernements ont lieu de faire cause commune dans une guerre (chose qui arrivé rarement) c'est a 1'approche d'un danger pareil; et il est certain, que Ie cas existaht, üs fe trouveront unis de bon cceur. Auparavant ce font les gouvernements feuls, dont la vigilance cherche a prévenir Ie trop grand accroissement d'une Puissance; leur juste jalousie, ou 1'action de cette vigilance, les provoque, d'animer le pouvoir moral, autant que la puissance préponderante cherchera a en contrarier 1'effet. Dans Ia régie, le pouvoir moral devroit alors s'accroitre a dévenir, fuperieur E 5 aux roské dans les petits Etats qu'ils fondérent. Cette même race d'hommes passa tantot Tous le jong de 1'empire universel de 1'hierarcliie, et n'en fut fauvée, que par 1'établissement de toutes fortes de formes de gouvernements, qui favoriserent la pensee, fe fouleverent contre le joug de la fuperstition, et réstérent triomphants par la paix de Munster. A la faveur de ces troubies, Louis XIV. ménaca de nouveau la Liberté publique de l'Europe, il fuccomba fous fes éfforts, et il ne resta a la France que 1'empire frivole d& vlees du jour.  74 aux forces qui 1'attaqueroient, parcequeleur réstriction ayant pour but, la plus grande tttilité de tous, ceux-ci d'un accord reuni, s'opposeroient a 1'atteinte portée è la fureté commune, jusqua ce que le cas delaRivalité, ou le rapport de 1 'égalité des forces extérieures des grands Etats, futrétabli. L'adoption générale et consequente de ces principes, rendroit, a la luite des tems, au fystème politique de l'Europe, cette folidité, d'ou résulteroit la paix générale et le regne fouverain de la Justice, Si les guerres ne cesseroient pas, elles déviendroient moins opiniatres par le defaut des moyens; elles porteroient avec elles le reméde aux dissensions futures; de cette raison: "Le principe de 1'Honneur public, par consequent de 1'Independance de chaque Etat, étant une prérogative éminente, aucun ne fe méleroit de 1'ordre interieur et domestique de 1'autre. Ce n'est pas la forme du gouvernement, mais c'est 1'Etat qui apartient au fystème de l'Europe. La ■ Constitution Angloise, Russe, Papale, Suisse,gPrussien-  75 ne — en un mot des Nations Iibres et des ésclaves, peu vent avoir leurs Gouvernements. D'ailleurs 1'histoire prouve, que des troubles intestins nbnt jamais eudesfuites nuisibles aux Etats voisins, quand ceux - ei ne s'en font pas mélés. En voilü une raison de guerres frequentes otée. A 1'égard des Droits individuels, ils ont'leur origine, qui ne va pas au - dela d'un terme raisonnable, .qui désignera un êtat quelconque abluel, titre légitime a la possession incontestable." "De toutes les raisons actuelles il ne resteroit donc, que 1'aggression injuste; etici nous ne balancons pas, d'admettre comme théoréme politique, la maxime: que i'aggresseur fe déclare, placé dans Ia balance des pouvoirs, au prejudice et detriment de Ia fureté et de la prosperité de fes voifins et fpécialement, de celui qu'il attaqueroit. *). En effêt, *) Ceci est n vrai, que même 1'attaque d'un Eta't d'un rang inferieur, dirigée contre une. grande Puissance, n'en fait pas une exception. L'atta«pie de 1'Autriche par laPrusse en .1740. n'en estelle pas une preuve évidente? Qu'elle eut eu moins  76 effêt, 1'idée de 1'aggression nait de Ia conviction de la fuperiorité a toute résistance possible. Le principe de notre Droit public, de Ia réstriction de la force nuisible, aura donc une action rigoureuse et infinie contre elle, en ce, que par des dédommagements convénables , 1'Etat attaqué, gagna fur celui qui feroit coupable de 1'aggression. Ainsi le tems et chaque assaut contre la tranquillité publique, corrigeroient encore ce, que 1'inégalité des forces extérieures pourroit renfermer de nuisible a 1'équilibre des pouvoirs.'' Enfin, nest-il pas permis de former dé grandes et belles espérances du fort de fhumanité; ne fe croiroit-on pas proche de Ia' réalité du beau rêve de 1'Abbé de SaintPierre, qui de l'Europe fit une grande Répu- moins de fuccès, que 1'Autriclie eut conservé la Silesie; est-il a croire qu'aujourd'hui Ia fituation de l'Europe feroit, ce qu'elle est? Non jamais. Et la Pologne existeroit encore; et Ie Corps germanique n'auroit pas perdü jusqu'a Ia derniere tracé de fon pouvoir moral, et jusqu'a 1'Espagne même, on n'auroit pas entrepris de ranconner les Membres de ce Corps illustre et puissant. Quelle abjectionl  77 publique, dont l'Aflemblée présideroit aux grands intéréts des Etats, qui décideroit les contestations , et banniroit k perpétuité de fes limites la guerre et Ia désolation? Le grand exemple dont nous avons fait mention au précédent Chapitre, d'une fituation de choses, ou les Puissances comprirent, qu'il n'étoit point de leur interêt d'être conquerantes; ne pourroit-il pas fe généralifer, fe perpétuer ? II auroit été digne d'une" grande République, qui un jour professoit ces belles maximes, d'en faire adopter et aimer les principes et de féconder les vues de 1'Angleterre pour le repos et le bonheur de 1'humanité. Mais hélas! le kabinet du Luxembourg a pris une route bien oppofée. Examinons les raifons qui peuvent 1'avoir engagé k fe plaire encore dans 1'effusion du fang humain. Constitntion, Loix et Traités. T Le Directoire -Exécutif n'écoutera aucunes "Propositions , eontraires k Ia 'Constitution "aux  78 "auxLoix et aux Traités qui lient la République " (v. Preuve XIX}. Ce feroit fans doute le Directoire même, qui fauroit le mieux prouver 1'attentat du Cabinet de St. James contre la Constitution fran coise. A fon defaut, il est permis dehazarderquelques conjectureS. "La Constitution embrasse h la fois, la "formation et 1'organisation intérieur es des "differents pouvoirs publics, leur correspon" dance nécessaire et leur indépendance réciproque— tel est le vrai fens dü mot Con"stitution, il est rélatif a 1'ensemble et a la "féparation des pouvoirs publics" (v. Préliminaire de la Constitution par Mr. VAbbé SI ET ES 1789, fanctionnè par la première Assemblee nationale.) C'est la feule définition du mot Constitution, qui fe trouve dans les Actes publics de la République. C'est le Titre XIV. du Code de 1795 qui s'y rapporte, et qui determine en même tems la cifference entre la Loi et la Constitution. Cellèci ressor- . tit d'un pouvoir fouverain, invariable; 1'autre: d'un pouvoir délégué. La Liberté, la pro- pi'iéte;  79 prieté, Ia fureté'des citoyens font 1'objêfc de 1'union fociale, fupérieüre k toutes les atteintes, il est permis k la Loi de furveiller les moyens k ce but. La Constitution restreint, dirige, consent k la Loi; celleci ne peut rien fur la Constitution, et le Titre rité en est une preuve évidente. "On fait (dit Siêijes) qu'une Nation forme "avec les autres peuples, des rélations d'in"terèts, qui méritent de fa part une SurveiJ"lance active." Son prémier Code voue lê Titre VI. aux rapports de la Nation Francoise avec lesNations étrangéres, etl'Assemblée nationale decrêta. O "Que tous les Traités, précédemment "conclus, continueront k être réspectés pai"la Nation Francoise, jusqu'au moment oü "elle aura ré vu ou modifié ces divers Actes." 2) Que la justice et 1'amour de Ia paix "étantla base de la Constitution Francoise, " la Nation ne peut en aucun cas reconnoitre "dans les Traités, que des ftipulations pure"ment défensives et commerciales," Dans  Dans le Code de 1795, ce Titre a été fup- planté par le XII, mais qui ne ftatue que fur ce que Siéges nomme :Tétablisseiiient public du pouvoir exécutif, fans toucher la matiere des rélations d'interêts avec les NationS étrangéres. Cepend?nt il leurs indique les dépositaires des rélations politiques au dehors , le § 5. fanctionne même des conventions fecrettes. "Les Traités fecrets (ainsi dit un celebre "Auteur de la France) fontun usage, qu'u* "ne politique timide, occupée d'interêts mo"mentanés, a établi, et qui contribue a intro" duire la fraude et la mauvaise foi dans les "négociations et les engagements. On fait "des Traités feeréts, parcequ'on dresse des "conventions, contraires aux Loix d'un "pays, — ou parcequ'on craint de déplaire a ' "quelqu'autre Puissance. Les engagements "doivent être publics, pour qu'on ne puisse "pas les violer, fans s'exposer au reproche " de 1'infidelité et de la perfidie. Si 1'ambition " viole tous les jours les ferments les plus " folemnels, déposés entre les mams de Dieu et  8i "et des hommes*) quel rcspêfc aura-t-on "pour des traités fecrets que la Puissance "même, a qui on manque de parole, ne "produira point au grand jour, paree qu elle "ne pourroit fe plaindre d'une infidéiitè, "qu'en révélant elle-même les mystéres de "fon ambition et de fa mauvaise foi. "Quand deux Puissances fe liguent ensembles pour détruy-e les Loix d'un pays "qu'ilestdeleurdévoirderespecter, fi elles "veulent qu'on respecte la forme de leur "gouvernement; comment peuvent - elles "avoir quelque confiance 1'une en 1'autre? "L'injustice qui les lie, leur donne nécessai"rement des foupcons qui les désunissent "fans qu'elles s'en apercoi vent? de-la des "projêts mal concertés, des espérances trom- *) Le traité de la Russie avec la Pologne en 1.170*, comraence ainsi: Au nom ds let tres fainte et in. divisible Trinitê. Le 21. Mai 1792. le R0i de Pologne harangua ainsi la Nation: Tout ce que Vdus avez fait — tout le monde le fait —- vous favez fait a Vinstigalion et d'après les coaseils dft Roi de Prusse. F  82 "trompées, et des avantages passagers, "achetés trop chérement paria perte de fa "réputation. — finterêt des mechants nest "que l'interêt de leurs passions, qui ne vo"yent jamais long tems les objêts de la même "maniere — Signer fecrettement des con"ventions justes et raisonnables, c'est une "puérilité, c'est une absurdité; contracter "fecrettement des engagements injustes, "c'est vouloir être dupe ou fripon. On "craint le grand jour, on négocie en fecret, "parcequ'on fejoue des ferments, qu'on n'a "aucun principe fixe, qu'esclave des intéréts "flottants, on est toujours prêt a conclure "un traité, rélatif aux circonstances dans les"queües on fe trouve. "Si les — nations nous ouvroient les " archives de leurs fecrets, on auroit le fpec"tacle le plus fcandaleux pour i'humanité—< " on verrolt les nègociatiotts qui ne doivent 'fervir "qua lafureté des nations, en prêp-arer la mine. "Tandis que des Etats fembient ne désirer "que la paix, et aifeftent dans leurs mani"festes la plus grande moderation, on les ver-  83 "verroit fe faire garantir d'avance la possession "despays que leur ambition dévore; on auroit "la clef de toutes les injustices, de toutes les "infidélités qui ont déshonoré la politique; et "on verroit, que ces injustices et ces infidé"lités font presque toutes produices par la "malheureusefacilité qu'on trouve afaire des "traitésfecrets— eet usage est contraire aux "régies de la politique qui fe propose de faire i'le bonheur des peuples; il blesse les principes du Droit des Gens — il feroit bien "digne de la fagesse des gouvernements, d'en "profcrire fufage de l'Europe entiere" &c. &c. Ce beau morceau de fancienne politique et de la fcience des Etats, qui regnoit dans les deliberations des fondateurs de la vraie liberté de la France, explique en même tems l'esprit des Traités fur lesquels s'appuye le Cabinet du Luxembourg, Nous fommes ipcapables de concévoir fes obligations, autant que nous ignorons les articles fecrets avec la Prusse, 1'Espagne, la Sardaigne la Hesse &c. &c. Mais toujours les peuples F 2 doi-  84 doivent trembler, quand le Code de la France, autorise le Cabinet du Luxembourg (Tit. XII. §.80 de permettre l'êxécution des conditions fecrettes des Pinstant même ou elles font arretèes par le Directoire. La réstriction: que ces conditions et leurs dispositions ne peuvent être déstructives des articles patents, regarde la France et ne rassure personne. Une Province, quelque Etat d'un rang inferieur peut être attribué ou promis a un Allié de la République, fans blesser fes articles patents; et pourtant les Gouvernements et les peuples font la victime de 1'usurpateur. La Constitution est du Droit politique, elle régie les interets d'une grande association et fon établissement public intérieur. Entourée |d'autres associations pareilles, qui ont les mömes moyens et le même but, de's possessions, desjouissances, des forces; les rapports qui en résultent, font du Droit des Gens, ils font les garants extérieurs del'établissement national, ils empechent que les peuples ne deviennent bourreaux et victimes entre  85 entre enx. " Quand donc la Loi politique "(dit Montesquieu) eut établi un ordre de "choses, qui devint dé'structif'du corps politi"que pour lequel il a été fait, il ne;faut pas "douter, qu'une autreLoi politique ne puisse "changer eet ordre; et bien loin que cette "même Loi foit opposée a la première, elle "y fera dans le fond entiérement conforme, "puisqu'elles ddpendentl toutes deux de ^ce "principe; le falut du peuple est la fnprême "Loi." Par une même raison: quand une Loi politique eut établi un ordre de choses qui devint dé structif du Droit des Geus, il faut encore moins douter, qu'une autre Loi politique ne puisse et ne doive même changer eet ordre; &c. ;&c. fmon, eet Etat fera perdu, ou il perdra tous les autres: dès lors plus dejustice, plus de morale, plus de rai~ sonnement. Nous ignorons, fi d'aprêsle TilreVI. du premier Code, les Traités fubsistants ont été révus, ou fi les archives de la République font encore dans 1'état révolutionaire; ce que nous fcavons c'est, que le Ministère ( de Paris F 3 u'est  86 n'est pas moins délicat fur fétiquette que Louis XIV, et que la Légation de Suêde s'eh trouva fort en peine. Nous ignorons encore fi ce font les titres des Etats en entier, ou feulement les articles onéreux, qui'devroient être détruits; la provocation du Ministrë Francois auprès des Etats del'Amérique, fur le Traité de 1787 prouveroit, que la République y auroit encore égard. Nous ignorons enfin, quel Droit public elle ait adopté, depuis que les grands hommes qui en ont traité, ont été couverts de ridicule. Un feul (c'est Bodin) a adapté d'avance fon fystéme a 1'état actuel des choses: "un Roi "de France, dit il, ne peut en aucune ma"niere obliger fon fuccesseur (aujourd'hui "la République) a fexécution des Traités, «qu'il a fait pendant fon regne; fon fucees"seur n'est pas tenu de fuivre fes fentiments "au préjudice de la liberté que le prédécesseur "ne peut lui óter." Cest une preuve, que de tout tems il y a eu en France, des genies profonds en réssources politiques. La Constitution angioise fa'cilite beaucoup ces fortes de  87 de récherches , parcequ'elle oblige le Ministère d-adtwefctre la Nation et 1'univers a fes déliberations, etaexposer au grand jour la justice de fa cause» II paroit de tout ceci: qu'une Constitution doit être trés inique, quand elle compromet le falut de 1'Etat et la fureté des Nations voisines; trés vicieuse, quand elle ne peut pas justifier ce qui passé pour une lésion du Droit des Gens; maligne, quand fes Actes ont besoin de fe cacher dans les tenébres; perverse, qui ne fouffre de tracé de principes physiques et moraux dans 1'homme hors d'elle. Concluons: que jamais les Loix politiques par lesquelles fe forme une Nation, ne fauroient être contraires auxdroits naturels et civüs, pour lesquels toute autre nation a trouvé bon de fe former. Enfin, les principes du Droit des Gens feroient-ils moins dignes d'une discussion, qu'un article clair et evident de la Constitution, celui qui protégé «na pensée et ma plume? (v.Code de 1795. T.XIV, §.3. F 4 Pas-  88 Passons aux circonstanees, qui ont accompagné 1'argument fusdit du Ministère de Paris. Hupture dune Négociation. La bienséance, la décenee,* Festime et la dignité de fon Etat engageront un Négociateur public de s'éloigner du territoire de Fennemi, quand il ne voit plus jour k un accord; le Droit des Gens et la culture des rnceurs garantiront fa personne et Ton caractere de toute infulte, même après une rupture formelle. Si Fennemi jugea devoir limiter fon féjour ultérieur, il conviendroit d'étendre ce terme aü tems, indispensable au Négociateur, pour récévoir des instructions de fes commettants, qui pourroient apporter plus de facilité:a Faccommodement. Combien de fois des Négociations rompues, n'ont elles été réprises et alors terminées heureuSement ? Un tems de huit jours fuffiroit k une communication entre Londres et Paris, Du tems de la captivité du Roi, FAmbassadeur de France k Londres, fut muni de Let-  &9 Lettres de créance du Pouvoir - exécutifprovisoire de la République Francoise; pouvoir inconnu dans le Droit public de l'Europe. Le Manifeste du Ministrë Lebrun, qui annulla tout ce qui feroit onéreux dans] les traités avec la France; le Decrêt du 19 Nov. celui du 16 Dec. 1792, qui étoient une dêclaration formelle de guen-e générale; le Decrêt fur f ouverture de 1'Escaut, la conquête de la Belgique, 1'appel du Gouvernement francois a la Nation angloise; c'étcient autant de loix pour 1'Angleterre de rénoncer a fon Manifeste precedent "de ne pojnt fe méler'dans "les affaires intérieures de la France, mais "de s'en tenir a Ia defense de fes intéréts " directs," Malgré ces obstacles, tous les moyens de conciliation furent épuisés, une quantité depiéces officielles échangée, et la matiére tournée en toutes fortes de lens, quand la mort de Louis XVI. öta a eet Ambassadeur fon Caractere, que fes nouvelles Lettres de créance étoient les mêmes, qui avoient été réfusées quelques mois auparavant, et que F 5 la  la Négociation n'avoit produit rien qui put engager le Ministère de Londres k les aggréer. La Négociation étoit a fee, la guerre inéyitable et tout engageoit Mr. Chauvelin a quitter 1'Angleterre. II ne le fit pas, et il lui fut fignifié: "de fe rétirer du Royaunie au "terme de kuit jours; on accompagna cette "notification des Pafïèports nécessaires et de "1'assurance des niésures prises, pour qu'il "put rétourner en France avec tous les "égards, dus au Caractere qu'il avoit "exercé." Le Gouvernement de Ia France lanca un Manifeste des plus virulents contre 1'Angleterre (i Fevr. ijp?.) "Georgelll, ij est il dit, "nous a declaré la guerre, en ordonnant a "notre Ambassadeur de fortir de 1'Angleterre, " fous kuit jours — Cbasser ignominieusement "1'Agent de la République?" Le lendemain des derniers Mémoires Ie Lord Malmesbury récut 1'ordre de quitter Paris fous heures et de fortir de fuite de Ia France; et cette notification ne fut, ni pré- cedée  91 cedée de Ia moindre discussion fur la mission du Négociateur, ni accompagnée d'aucune mésure de fureté pour la personne, moins encore pour le caractere d'un Agent réconnu de la Grande Bretagne (voy. Pr.XIX'et XX.) Le Ministère Anglois s'empressa a justiJier fes mésures a 1'egard de Mr. Chauvelin, auprès des autres Puissances et aux yeux du public, par la publication des pieces officielies; Le Ministère Francois publia les pieces de la Négociation du L. Malmesbury, le jour après fon départ; en y préparant les esprits par une justification, qui n arreta plus la critique la plus acerbe et la censure publique, quand on vit de fespropres yeux.*) Ce *) La fetülle officielle intitulée te Rédacteur, ce véhicule des opinions ministerielles, et puis le Ministrë Plenipotentiaire Batave faisoient une exception de la régie, Celui-ci jugea "la raa"niere, dont les Négociations avoient été enta. " méés, conduites, et interrompttes, digne d'ime "Nation grande et généreuse, amie de la paix, "la désirant vivement" (v. Note du Ministrë Meyer au Directoire) Tant il est vrai: quo femel imbuta recens — din fervabit odovem. Un ci- devant Curé Hollandois a juré une foiimplicite fur la Synode de Dordrecht,  92 Ce font 1'ouVerture et la rupture d'une Négociation, qui agissent le plus fur 1'opinion, dont la faveur donne une fupériorité morale et physique a 1'une ou 1'autre des Parties belligérantes. Autant qu'il importe de 1'interesser pour fa cause, autant la rupture four-tout d'une Négociation, doit être traitée avec fagesse et ménagements. D'après elle on juge des talents, du genie, du caractere des hommes publics, on dévine leur fecrêt, on fe prononce pour óu contre une cause; Ie dernier individu s'anime ou s'indigne, s'attache ou seloigne d'une contestation, ou fes facultés, fon courage et fon ardeur entrent en ligne de compte. Un Gouvernement qui réjette des propositions équitables, qui ne fe donne pas la peine d'y répondre, qui chasse brusquement un Négo-' ciateur public, qui ne daigne pas d'exposer des raisons valables; un tel gouvernement déclare hautement, qu'il veut la guerre. Mais s'il la vent absolument, il doit avoir 1'art de cacher un dessein qui revolte 1'humanité; et pour le cacher, il doit avoir 1'art de prévenir toute  93 toute Négociation qui pourroit trahir fes desseins et exposerau mépris, des hommes de fi peu d'esprit Quelle finistre impression cette découverte ne doit-elle pas produire fur les Alliés, fur les fujêts, fur le guerrier, dont Ia confiance, 1'éspoiret le courage font - foutenus par le fentiment du juste efe de futile. Est-il croyable qu'aucifne Puissance voudroit courir les risques de traiter avec un gouvernement, ou il n'y auroit que des outrages a remporter? Cependant la fórtnne, lasse de i'insolence de fes favorits, les abandonne fouvent impitoyablement. Les Hollandois a Gertruidenberg rendent, a ce terrible conquerant, la même monnoye dont il avoit payé leurs foumissions, aux portes d'Amsterdam. Enfin est il concevable qu'un Gouvernement puisse être plus décrié, que quand des nations policées y cherchent en vain, les traces de la justice, de la morale, de la raison, jusqu'a celles de la culture" moderne. Telle est la nation, dont ie genie, les  s4 lestalents, les arts et les fciences, fecondent l'industrie exterminante, et refusent aux vertus, leur faint miniStére. Coup d'oeil fur les Formes diplomutiques. ïl est vrai, nous en aurions moins befoin, fi les cinq ou fix Constitutions *) que nous avons vu naitre, portoient les caracteres de la justice publique. L'insuffisance, 1'imperitie, 1'inhabileté; puis 1'extravagance, et la maladresse, et encore la stupidité des Législateurs leurs ont imprimé ces mêmes caracteres. Pourquoi aucune de ces Constitutions, n'a-1-elle pas adopté 1'institution romaine des Féciales**) cette véritable et uni- *) 1'Américaine, la première Francoise, Ia Polonoise, la révolutionaire en France, celle de 1795, la Batave. etc. **) Collége diplomatique, nombreux, réspectable et indépendant dans 1'Etat, institué par le roi Numa, constitné par Jncus. Ce fut le tribunal rupreme du Droit des Gens. Le peuple, ayant décrété en pleines Comices, une guerre, le Coilége des Féciales pouvoit casser fon arrèt. II * iugea  95 unique cause de Ia grandeur de cette République? Est ce, qu'occupés des vices de eet ancien peupJe, c'est k dire des tems de fa puissance, nos Législateurs modernes n'ayent ni fu, ni pu fineer fes vertus? Au defaut de la réalité defendons au moins notre chétiye médiocrité. Comme jugea les contestations publiques, réclamoit le Droit des Gens par des députations, qui expofoient les titres de 1'Ètat, et fi, dans trente jours la ratisfactiön' n'étoit pas rendue, ils déclaroient la guerre. Tous les Actes publics furent dresses par ce Collége, il présidoit aux traites, et veilloit a ce qu'il ne fe fit rien dans les résolutions de 1'Etat, qui leurs fut contraire. C'est uniquement, a cette institution, que la République étoit redévable de la célebrité de ra foi publique et de fon amour de la justice. De grandes na-^ tions venoient de loin porter leur cause devant le tribunal de ce petit Etat. La République, n'étoit elle pas plus grande, .alors, que quand fa puissance ne s'embarassoit plus de ces formalités? {voy. Denys d'Halkamas L. II.) Aujourd'hui que la fciencc des Féciales est transformée en des matieres de mauvais aloi, il faut des racoleurs, des damoifeaux et des commis de comptoirs adriatiques, pour voyager au débit de cette rnarchandise.  9 •>-«*.«?v. ï| Le  11X Le contenu de ee rapport n'a point besoin decomiiientaire, aujourd'hui, que la révolution de deux ans a fait connoitre la force comme ie kit des expressions et des maximes, dont il est composé. II ne justifie que trop, ce que nous venons d'avancer ci'dessus. Cependant, Ia Gloïre, pourroit-elle être acquise au détriment de ce que nous nommonsleS grands intéréts de FEtat? La nation Argloise, dépouillée des avantages qu'elle avoit droit d'espérer de fès efforts, ne fe feroit-elle pas un jour élévée contre les pacificateurs? Qu'un fecond Walpole fut mis au timon des affaires, que les dissensions, ■dechimeriques, deViendroienfc réelles, qu'au fardeau des impots, insupportables par les entraves deFindustrie et du commerce, un •voisin inquiet ménaca derechef FEtat — Ia gloire acquise, fauveroit-elle alors la chose publique? Certainement, fi Ie Ministère 'de Londres eut êtó für, de rétablir, par la paix, le fystéme de l'Europe et de lui rendre la vigueur, qu'un jour , il opposa A Fam- bition  11Z bition de Louis XlV. Certahwnent, s'il pouvoit compter fur 1'adoption générale des maximes, dont il a voulu inspirer la passion, au gouvernement Francois. Mais l'Europe estménacée de plus d'un coté, le centre de fa force est déplacé, la discorde dechire les liens les plus facrés, et la violence dédaigne fe couvrir du masqué usité. La puissance de 1'Angleterre, rélativement a celle de la France, est infinie aujourd'hui. Celle-ci a dèsarmê par mer, elle armera, pour desarmer encore; fon Alliée la République Batave a désarmé et tantot 1'Espagne en fera autant. Si, dans la paix, après faggrandissementprojettéde la France, par un hazard, du moins possible, fa puissance s'établit fur une base folide; que la nation, entrainée par une tête fougueuse, aux choses bruyantes, répritfa manie de détruire 1'Angleterre; celle-ci, feroit-eüe encore aussi heureuse, qu'elle 1'a été jusqu'ici? Disons le toujours: eü égard aux facrifices a faire, et a 1'établissement de la puissance extréme de la France, celle-ci, aux fervices importants, qu'au  H3 qu'au fort de fa'colére elle n'a cessé de rendre k 1'Angleterre, a ajouté le plus fignalé, celui, de réfuser la paix, qui lui a été offerte, *) Sacri- *) Sans parier des prohibitions, confiscations, in. eurrecticns» ni des projèts d'invasion, r.i da l'expédition de Brost pour l'Irlande etc. etc. on trouvera dans PEdït de la liberté desNégres% & fommation aux colonies Euröpéémies dans le» Indes, 3 fe foumèttre a la domination Angloise. Du tems de 1 etablissement des Etats de 1'Améri. que-sept^.trionale, 1'idée de 1'ind^pendance vin» d'abord aux halutants du Cap de-bonne-Espérance , ici les Francois républicains avoient les ■ plus^zélés partisans. Tantot eet enthousiasme s'arrête a la vue des milliers" d'esclaves feroces; onpaliten fixant Tes biens , fes femme* et enfants, H-sagit de la vie et de 1'existence, le fentiment politique céde aux grands interèis'de 1'espéce Immaine, on tremble des d-devant fréres en liberté, et on recoit a bras ouvet ts ceux, dont on étoit fi éloigné par fentiment. Et quei Colon des Isles voudroit facrifier. fon aisance a une forme de gouvernement, qui fait fortir de fes plantadons une race de Cadmus qui égor^e en naissant? H  n4 SacrifieeSy Avantages et Hésultats pour la France de la Paix, telle qti elle a été offerte a elle. Ne considerons que des Avantages paree* qu'il ne s'agifc point ici de Sacrifices ni de pertes, telles que 1'Angleterre les auroit éprouv^ par la pacification fus-mentionnée. AuxDeux-Indes, Ia France feroit rentré^ en possessions de tous fes établissements» De plus elle auroit fait 1'acquisition de flsle de St. Domingue; dont la paix d'Utrecht: garantit a 1'Espagne les deux tiers de fa furface. Dans la partie Francoise quarante mille hommes Iibres et trois cent mille escla* ves cultivérent les productions réeherchéeS des Isles, et en livrérent annuellement a la métropole, pour Ia valeur de prés de cent millions L, de France, Cependant la colonie étoit bien loin de 1'état de culture dont elle est fusceptible. Sa population actuelle, réduite a quatre mille hommes libres> en vertu du fystéme révolutionaire; des éscla- ves  iiS ves déchainés, 'incendiaires et désfcructeurs, qui doivent s'exterminer de leurs propres mains ou êfcre détruits; ceci démontre, qu'il faudra y régénérer efc même récommencer un établissement industrieux» La partie Espagnole, non encore ravagée par les Négres, offre des terres non entamées qui invitent k la culture. Toute cette immense furface de prés de 4500 lieues quarrées, est fupérieure de qualité, au foï de 1'Amérique en général, parcequ'il fe déteriore moins rapidement fous la main dv* cultivateur, et exige moins de travaux pénibles. Un clima fain, une fituation henreuse». au centre de toutes les parties de fAinènque» d'excellents ports, des ftatións pour Ia marine de guerre, ce font des avantages éssentiels, propres k cette Isle. Son état florissant fupporteroifc une population d'au-dela de deux millions, Elle auroit été d'un prix infini a la République* fondée fur le bonhenf national, "Si nous eussions Ia paix, que "férions nous des armées?" Ces mots — quelle langue en a répïthéte—. ont été pro* H 3 nö.h-  noncés aux Conseils législatifs. N'auroit-ou pas pü distribuer aux foldats, les terres de cette Islela?' Quel établissement formidable! La République fe trouve chargée de 1'engagement d'un milliard a payer a ces guerrierSi Ils ne voudront point fe contenter de fa valeur nominale, et ft 1'exemple des Cohortes prétoriennes ils forceroient 1'Etat d'agir comme un créancier honnêfce envers fon débiteur. Autant que la guerre dure, cette armée fera fans cesse réproduite, le nombre des Francois qui n'ont ni feu ni lieu, ni industrie ni fubsistance, ira en augmentant, et la patrie court grand risque d'être livrée par éux au pillage général. D'ailleurs des milliers de déserteurs de voleurs et de brigands, accourus en France des quatre coins du monde, qui ont organisé le vol et 1'assassinat et qui par bandes ravagent le pays (comme le Directoire l'a fouvent déclaré) n'auroient-ils pas été de dignes instruments pour dompter les esclaves de cette Isle? En les embarquant pour des expéditionS en Angleterre, on peüfe, il est vrai, en faire périr un grand nom-  nombre. Efc autant; que des Légions infernaks *) peuvent être réleguées aux armées en Allemagne efc en [talie, la patrie en est débarassée; mais le caractére dont il est prouvé, qu'elles ont infëcté toutes les années'francoiSes, réjaillit fur le gouvernement de la République, fon fystéme en est maudit des peuples, les victoires qu'il proclame font horreur, et les nations pillées, régardent 1'arbre de la liberté comme un pilori, et la cocarde tricolore comme le fignalement des assassins. En effêt, fi le Ministère de Paris eut écouté des propositions raisonnables, n'est il pas k croire, que 1'Angleterre 1'auroit fecondé de tous fes moyens pour purger le fol de l'Europe de cette calamité; elle, qui pem avant le commencement de la guerre, et k 1'éruption des eifêts de 1'Edit des Négres, fécourut d'armes, de munitions et de proviH 3 jsions, *) Nom que portoient des bandes de Cbouans et des Corps républicains accoutumés aiix horreurs des guerres de Ia Vendée, des plus cruelles que 1'histoire du monde connoisse peut - être.  sions, les Colons Francois! a. St. Domingue; elle qui ofï'rifc au .gouvernement de cette lsle tous les moyens de la Jamaique, pourfoutenir les habitants contre leurs ésclaves rebelles ? Jamais les Européëns n-ont étédivisés fur ce v point, parceque ces interets majeurs i'emportent fur la eonsideration des hostilités qui réspectent 1'humanité. II est du Droit des •Gens des Européëns dans les colonies, de joindre leurs forces pour étouffer la révolte .des ésclaves; et fi même une guerre ouverte eut lieu entre les métropoies, c'est au moins la faveur d'une tréve absolue, dont jouira la colonie qui fouffre de la révolte, nonseulejnent, mais aussi, tous les convois déstinés pour une telle colonie, doivent traverser les mers sous cette garantie. II est étonnant, que les Puissances, qui ont des Colonies, n'ayent jamais proclamë cette loi fuprémé, pour fervir de régie a leurs gouvernements dans ces établissements, afin qu'ils n'eussent pas besoin d'ordres exprès. Même nous ne nous rappellons pas d'exemples, avant celui que le Gouvernement de la Jamaique nous a four-  fourni, que les Européëns fe foyent prétés des fecours éfficaces a ces forfces d'occasions. Les avantages offerts a la France fur le ■Continent, renferment tout ce, qu'elle auroit'pü espérer d'une guerre des plus beu» reufes, fi elle auroit voulu s'en tenir aux choses raisonnables. On n'a point contesté les grandes acquisitious de la République du coté de 1'Espagne. Les gorges des pyréjiées, les cléfs de ce royaume et un de fes beaux ports de mer apartiennent a laFrance. II n'est point question de Ia réstitution de^ Ia Savoye; et Ie rétablissement de 1'état public del'ltalie, réstreint par les mots: autant que jpossible, assura a la France fa limite-, telle qu'elle a été tracée par fon traité avec la Sardaigne. En possession des boulevards de 1'Italie comme del'Espagne ces deuxcontréeS feroient restées fous fa loi immediate. Les expressions réservées du §. I. de la XVmt Preuve ne préscrivent rien fur Ia nouvelle limite, qu'elle auroit voulu fe donner a 1'Est et au Nord. D'ailleurs la destinée de la Hollande étoit abandounée pour ainsi dire a\ fa H 4 gêné-  120 générosité. En un motr c'étoit a la France a dicter la loi k fes voisins, prêts k s'y foumettre, fi, rélativement a fes avantages, la République auroit été disposée k la moderation. A ce vain titre, la vraie gloire fe feroit jointe, fi, après avoir garanti le grand but de 1'institution fociale, la tranquillité et la fureté de 1'espéce humaine, Ia France en eut fait autant a i'égard de 1'état public de l'Europe, en effacantles traces d'un crime public abominable. Quel oeuvre fublime, fi la République, en fe déclarant hautement pour la cause d'un Roi chéri, adoré de fon peuple, et en épousant les interets d'un Etat déchiré, eut professé des maximes dignes d'un gouvernement fage, éclalré et généreux. Alors les cceurs droits et les araes fensiblés auroient été consolés des injustices et des crimes, que la révolution Francoise a répandu fur le monde. Mais—les vastes conquêtes de la France en Italië, fur 1'Allemagne, laBelgique, la Hollande! Le Directoire fetrompe, quand il mésure, fur 1'état actuel, leurs rapports futurs,  121 futurs, (voy. Pr. II. p. 7.110.) il n'en fauroit jamais disconvenir, que leur possession rendroit la République rélativement plus föible, qu'elle ne Ie fut du tems qu'elle étoit engagée dans la defense de fa frcnt-iere — a moins qu'il n'ait projetté 1'empire universel. Toujours, une vaste conquête est un malheur décidé pour un Etat, puissant par lui-même. Toute conquête est une acquisition, qui dans l'esprit du vainqueur renferme, conservation, usage, augmentation de fa puissance et de fa prospérité publique. Semblable a une terre en friche, ce .n'est pas au moment de 1'occupation, qu'elle récompense les frais de 1'acquisition; ce n'est qu'au fcerme du labour moral, qu'elle devient d'une utilité réëlle. Dans eet espace de tems, fa circonvallation politique absorbe encore des dépenses et des peines; dont la plus fatigante est, d'y faire aimer la domination étrangére. Les 'préjugéa et 1'habitude obligeront le vainqueur de déspotiser Ie vaincu, en le forcant de récévoir, même un véritable bonheur, ou une condition, préférable a fa précédente; en un mot: Ie' ^ 5 vain-  fff vainqueur ne fauroifc éviter de mettre lè vaincu fous un jong quelconque. " Or c'est une verité constante (decret de *' l'Assemblee Nationale) et qu'on ne peut trop "répéter aux hommes: que 1'acte, par lequel "le fort tient le fpible fous fon jong, nepeut "jamais devenir un droit; et qu'au contraire, " 1'acte, par lequel. le foible fe foustrait au jong' "du fort, est toujours un droit, et que c'est "un devoir, toujours pressant, en vers lui "même." Tel étant l'esprit de la Constitution Francoise, il en apert, que des foulévements et la révolte feroient legitimes, dans ces contrées par plusieures générations — a moins qu'il ne foit question de 1'empire universel. D'ailleurs, les peuples dans ces régions fontnuds, fans toute fubsistance, a Ia rigueur du terme. SemblableS aux forêtsquitombent fous la lïache révolutionaire, qui a imprimé k ces contrées leur destinée future; le germe de la prospérité y est tellement déraciné, qu'il en faut plus. d'une génération, et des fecours publics avant de rendre aucun bénéfice  Ï25 aleurpossesseur, Mais la France, traiteroitelle ainsi des Provinces, déstinées a être reünies a ia République ? Mais quel Etat décliire sou Corps de fes propres maius. Le fystéme Francois a pris un caractere constant depuis Ia mort de Robertspierre. II ne voit dans les pays a fa portée qu'une réssource momentanée, qu'il s'agit d'épuifer jusqu'a fes fondements. A la place de 1'arbre de la liberté 1'exacteur dresse fon bureau; la révo» lution s'organise fur les biens; les fmances, les armées, la République doiyent fubsister par les richesses extérieures, la conquête fe faire par Ia conquête, et' le fruit en réfluer fur la Capitale. Un fystéme de réimion n'abat pas 1'arbre pour en faisir le fruit — a moins qu'il ne s'agisse de 1'empire universel.*) Révenons aux avantages directs que la paix acceptée par le Directoire, auroit assuré a Ia République Francoise. Le *) Mille bvigands par leurs hordes féroees ont fub» jiigé le monde, leur vie étoit le terme de leur empire. Les Romains feuls ont réalisé 1'empire du monde durable; ils y font parvénus par deux . wioycns: en armant entre eux des peuples: ea vendant  124 Le comble de Ia plus grande utilité, ee fera toujours le vrai moment de faire la paix. La France, eu égard a fes Alliés, étoit aü comble de fes fuccès et de tous fes desirs politiques, extravagants mêmes, du tems que 1'Angleterre lui offrit Ja paix. Deux Couronnes, une République, la rïche partie de 1'Amérique feroient restéesfous fa Loi imruédiate; une Couronne, une autre République, plusieurs puissants Princes et RépuUiques récévoient fes ordres; fa volonte auroit été Une Loi pour les dsux tiers de l'Europe. Une fortüne aussi inouie ne s'arrête qu'aux extrémes, on a tout perdu, quand on n'a pas le tout. Voyons de quelle manière. L'Espagne, ruinée par la guerre, engagée dans une autre qui ira 1'achever, est fous un gouvernement, docile aux ordres de la France et odieux k fa Nation. Celle-ci restera vendant comme ésclaves, ceixx qui resterent les plus forts. Détruire des peuples belliqueux, donner un mauvais gouvernement aux laches, a'ttiser dans leur milieu le feu de la discorde; c'est le fystéme ünique et absolu de 1'empire universel.  12.5 restera fbumise, autant que Ia République fera k même, de maintenir ce gouvernement. Supposons un revers possible. Alors les Grands réveilleroient le Roi, et fon reveil feroit d'autant plus terrible, qu'un esprit Jourd, montéparla passion, ne connoit pas de bornes k fon ressentiment; toute la sensibilité de la Reine ne fauveroit pas le PotemUn Espagnol, et la Nation, monrée par 1'enthousiasme reïigieux et politique, s'exposeroit k tous les extrémes d'une fureur non réflechie. L'existence de la paix auroit écarté pour toujours cette alfcernative. La République auroit percu le tribut ftipulé, elle auroit eu a ia disposition, Ia marine et les portsde 1'Espagne, elle auroit fait un commerce exclusif aux possessions américaines de eet Etat. Les Etats du Roi'de Sardaigne, aujourd' hui une place d'armes des Francois, travers-és par eux, en toute forte de fens, feroienfc restés dépendants de la France, au moins pour un fïécle. 11 n'y est plus ni armes, ni Canons, ni munitions ni forteresses, excepté, ce  x&6 ce qu? en apartienfc a ia République. La paix auroit contertti les foldats de- cette belle armée de foixante mille hommes, dispersés, mutins, porfcés a fe venger de la trahison de ceux, dont 1'interêt personnel et la réputation n'y font que trop compromis. La République Batave. a fuivi pas-a-p^S, la marche de la Révolufcion Francoise. SeS Decrêts font Fécho de ceux que celle- ci occasionna, jusqu'a celui fur 1'Existence de Dieu. Mais aussi, elle s'est avisée fagement par 1'exemple, en évitantles faux pas, qui ont fi fouvent compromis lé gouvernement de?ia France, et violé le depót de 1'honneur et de la loyauté du peuple Francois, quand celui: prit fous fa fauvegarde les Assignats-mon* noye. Ainsi, aux vicissitudes des choses humaines,la Ccnvention Batave n'a point pris d'engagement 'pareil, fi funeste et illusoire en France. Avec ce dévouement révolutionaire le Gouvernement Batave a cependant le plus grand besoin des fecoursdefon Alliée. Tous les Patriotes de 1'an 1787, qui ont quelques biens, ont changé d'avis, la Nation en général  Ï2? général est d'accord avec eux, on nê peut plus engager des personnes notables k fe charger des affaires publiques. Jusques a Ia Convention Batave, c'estk peinë le tiers de fes membres, dont le zêle et 1'activité admira. bles, maintiennent encore Ie nou vel ordre des choses, etrésserrentles liens avec la France; et tel est leur dévouement, qu'ils épuissent la patrie pour la fécourh\ Ces fidéies amisferoient raffurés, fi les vicissitudes de la guerre ne foutenoient plus I'éspoir d'ün peuple enhuyé du desceuvrenient, pressé parfindigence, et attaché k ce qu'il nomme fes beaux jours. Avec le tems on s'accou* tume k tout, pourvu qu'on foit fans espoir. D'ailleurs Ia nation Hollandoise n'est plus infectée de principe irascible, qu'elle eut du temsduDucdAlbe; elle est fi aisée k gou* verner, fi ce n'est pas par la raison, ce fera parlacontrainte, qu'elle rénoncera a fes «ens préjugés. L'Etat politique des nouvelles Répnbli--ques en Italië, exige encore 1'assistance de la France. fcft multitude de ceux qui y aspU rent  Ï2d rent aux honneurs du gouvernement* est grande, celle des mécontents et des enragés, innombrable; ils font d'autant plus dangereux que feu Is ils possédent des richesses et des biens-fonds. L'Alliance de la République avec la Prusse et la Hesse est d'un genre bien different, elle répose fur la base folide de la conformité des principes, des maximes, des vues, des caracteres deS hommes qui gouverncnt et des peuples qui obéissent. Que la France foit en paix, qu'elle ait la guerre, elle n'a rien a craindre,de ce coté. Mais aussi elle n'en aura rien a espérer. Ni k la déroute en 1795, ni k celle en Eraneonie, ces; deux Alliés 11'ont boUgé. Nous croyons donc, que la Proclamation dans le Rédacteur, du 22. Dec. 17pó. a eu tort 'd'assurer "que 'U'Autriche, pressée par fes propres fbjêts, «mênacée peut-être, d'une autre part, fentira "la nécessité de traiter avec la République, "que des-lors, 1'Angleterre Hvrée k elle"même, feule, justement en butte au ressen-, "timent des Francois, récévra plus docile- "ment  129 *ment la paix." D'abord il est doüteux, que les Hongrois et les Bohémiens fe laissent entrainer a une feconde conspiration, comme les noms des mécontents furent trahis a ia première en 1790. Ensuite la Prusse fent trop bien fon cAs, cette Infanterie, couchée a terre a la canonade de Valmy, cette Cavalierie, trop réservée pour faire 1'attaque contre une troupe de paysans Poionois, ne font aujourd'hui qu'un vain épouvantail. Et comment dans la foule des affaires la Prusse fe méleroit - elle de la guerre ? D'abord elle doit avoir les deux yeux au guet en Russie. Ensuite elle prëside a la Diéte de la Demierégion du Nord. Et puis la fituation des Puissances bslligérantes donne lieu a réculer eneore la fameuse ligne de Démarcation, pour en repandre le bienfait fur une plus vaste étendue de Provinces *) Ceci demande de *) Je vis un homme, dit $adi> un matin il lauva des dents du loup, un agneau — après midi iï lui coupa la gorge pour le manger kfon fouperi— Sadi étoit prophéte. I  de nouvelleS mésures. A cela aecédent les arrondissement! enFranconie, qui causent tant de criaillerïes; mieux valoit envahir toute la Pologne, qu'entamer les terres de ces petits Seigneurs oule bord de la robbe episcopale. D'ailleurs les foucis de familie et d'administration, des emprunts a r«mplir, des comptes a 1'Empire, des Contributions a régler, encore trois Dames de la Maison h doter, tant d'autres trlbulations politiques, tiennent les esprits en haleine, et ont fans doute occafionnê faugmentation du Ministère par un etranger a grands talents. *) Donc, le Rérfartwjffetrompe, quand il fe flatte, que la Prusse iroit tomber fur les derrières de 1'Au- «) C'est le Comte trés noble, mécönnu en fa patrïè, le Dannemarc, injustement calomnié. C'est » dire: chargé, de léver dans un district, les voix pour ou contre l'abolition de laftrvitude, il fit. un leger changement aux chiffres du Procésverbal, qu'il presenta au Prince - royal; et cs 1'rince-royal, fi mimitieux dans les bagatelles de rhumanité, en prit de 1'humeur. II s'en ïépentira, en voyant le Comte briller commaun astre a 1'horizon politique. Tant il est yrai, que tot qu taxd le talent triomphe du mépris..  i'Autriche, efc il en impose aux amis de la justice, ravis de joye quand ils s'apercoivent du debut d'un ackeminement fortuit, qui tient lieu de raisonnement.*') En général, il n'est point douteux, qu'en ' profitanfc du moment pacifique, ia France n'aifc établi fa préponderance déeisive dans le fystéme des Etats de l'Europe. La République feroit intervenue dans toutes les querelles que la dissen sion auroit fait naitre. Les grands Etats, une fois désarmés,auroient eu bien de la peine, a fe remettre dans un état'de defense, tel, qu'aujourd'hui 1'ardeurde leurs peuples leurs offre. Ceux - ci, une fois rendus au répós, fatigués de l'enthousiasme, auroient été insensibles a 1'un efc adonnésal'autre; quand, k cause de Ja facilité de fes armements, la France auroit. été è-même de réparoitre fur la fcéne avec un grand avantage. A cela accédenfc tant de germes funestes de dissensions dans i'intérieur des Ecats, qui ne tarderont pas de. I * pousser, *) Incidunt in tentationes et laqueos — quikst tra- .hmtur in pernietem Ep. T at). Tim. Q. 6,  132 pousser, et qu'une politique fubtile et ambi? tieuse dirigeroit a fon profit. *) La '*} Les résultats de la révolution Francoise a 1'égarA de 1'espéce humaine, en font une époque dea plus mémorables dans fon histoire pliilosoph.'qne et politique. Les Gouvernements fages en ont été éclairés, les mal - adroits , aveuglés davantage. En Dannemarc, tous les esprits et les coeurs fe rencontrent dans 1'amour de leur gouvernement, le throne en est consolidé, et les citoyens unis par 1'estime et 1'aiFection mutuellos. Dans la Demie'-region du Nord, en Saxe, en Hesse, aux Pays de Hanovre etc. etc., des maximes opposées ont prévalu. Une extension des immunitéa de 1'ordre de la Noblesse, d'autant plus odieuse, qu'elle porte fur les chaiges au fisc des Etats, n'a pü que blesser le bas peuple, trop fensé pour ne pas s'apercevoir, a qui fera, de remplir ce vnide, et deplaire a la classe notable, par fon exclusion implicite des postes et emplois de la Judicature de 1'Administration etc. etc. qu'elle regardoit comme fon partage, en échange des places d'honneur et de confiance, réservées k la Noblesse. Les hommes fages de eet Ordre, dont les idéés embrassent plus d'un coté de la chose, désapprouvent Pabus imprudent, que les hommes en place font de leurs avantages. "Ya-t-il une "Noblesse, ainsi disent ils, plus glorieuse, plus " re-  153 La fortune prodigieuse des armes de la "France, fuadoit imperieusemeht la paix. La Ré- "réspeetée en Europe et en fa patrie, que celle "de la Grande - Bretagne? Quel Gentilliorame "allemand jouit d'une fortune fi avafitageuse, "que 1'Anglois? Chez vous chaque fot, chaque "usurier, chaque riche fripon, meprisé des "Roturiers, passé dans notre Ordre, et n'y "apporte que fon ignominie et fon bas orgueil. "Une Noblesse fondée fur une Constitution "libre, aimée et honorée du pèuple, n'est elle "pas preferable a celle, qui ne peut fe maintenjr, "qu'en foulant le peuple, qu'en le rendant mise" rable, qu'en réduissant le tout au pouvoir absolu ? "Ea dignité et le vrai honneur de notre ordre ne *Jtiendent pas aux bienfaits du Palais; c'est aux "fervices utiles, en éclairant les Grands, en fai*'sant aimer leur domination, et en travaillant? *' au bonheur public, que nous nous rendons ré"'spectables. Soyons les premiers a nous char"ger des inrpöts; les réjétter fur le peuple c'est "décéler un but méprisable, celui: de vouloiv "piller la patrie et le Prince; et pour ceux parmi "nous, qui imagineht ces bassessee, ils nieri" tent d'ètre abaissés fous cette classe d'hcmmcs, "qu'ils ont tant peur d'approcher." Ainsi parient et pensent les dignes membres d* 1'ordre de la Noblesse. Ils prévoyent tous les dangers d'un projèt, de plonger les hommes I 5 dan*  154 République étoit k ce point de fes fuccês, qui, dans 1'enchainement des choses humain es, fe développent en un principe déstructeur de toute immense fortune. Sans avoir des vaisseaux, fans marins expérimentés, peut on raisonnablement fonger a une invasion en Angleterre? Le bon mot du Sire de Coucy *) pouvoit étre trés vrai au quatorziéme fiécle, aujourd'hui il ne 1'est plus; et quiconque est tant foit peu au fait de la matiere, conviendra, qu'au premier abord d'une dans les mem es maux et ne leurs attaclier les mèmes chaines, qu'ils porterent au douzieme fiécle. La Philosopliie et les lumieres ont fondé Un empire trop folide, celui qui voudroit Ie ïenverser, fera infailliblement écrasé fous fes ruines. L'homme du bas peuple est plus instruiE aujourd'hui, que ne le fut la première classe du quinzieme fiécïe. C'est 1'efFèt necessaire de I» Réligion protestante; avant de rejetter les peup. ïes dans les tenebres, il faut les priver d'une réligion, qui aime le jour. Enfin il répugne trop au fens commun, d'ajouter foi au bruit, «l'assocïations fecrertes et d'engagements, con* tractés avec certains Cabinets pour Ia garantie de priviléges, non encore attaqués. *) " Que 1'Angleterre n'étoit plus foible que dans "fon Isle.  *5C d'une descente en Angleterre, on'aura affaire a un demi million de gens courageux et préts & perir pour une liberté, devenue 1'ouvrag© de la raison, de la passion, de 1'experience etentée fur les moeurs de la nation. D'aüleurs en France même on désespére du fuccês d'une révolte en Angleterre. "1'Opposition "dit ia Gazette nationale de Paris du 6 Avril i^pS "n'en veut qu'au Ministère et aime fon pays.'* Du tems de 1'invasion en Irlande un membre ardent de 1'Oppcsition demanda publiquement au Chef du Club des Whigs, de rayer fon nom de cette liste, et dene plus comptei? fur fon appui aux motions de réforme intérieure "parceque, dit\il, du tems que "j'ai a defendre ma maison contre xine'bande "d'assassins, je ne faurois examiner le platt wd'un habile Architecte pour fon embellisse» " ment." Et feroit- on aussi fimple -en France a ne point déméler le jeu mystique del'Opposition, telle'qu'elle est aujourd'hui ? En un mot: avec le quart de fa marine, f Angleterre fera a 1'abri'de toute crainte du fuccès d'une invasion. Mais aussi ces ménaces tiendront I 4  156 la Nation en haleine, elle fe prétera a tout ce que la fureté de la patrie exigera. Si au contraire la France auroit profité" d'une vingtaine d'années de paix, a rétablir fa marine et a 1'égaliser a fes forces de terre, li elle feroit parvenue a s'emparer de 1'empire des mers, fes projêts actuels auroient été moins chimériques. La continuation de la guerre rend indis„ solubles les liens entre FAutriche et 1'Angleterre; les justes doléances politiques de quelques autres Puissances ne peuvent manquer de donner tantöt è cette ligue une force, dont on ne fe doutoit pas. L'amitié de la Russïe pour FAutriche, ce^ne fut que l'afFection personnelle de feue 1'ImperatricepourlaMaison regnante, fubordonnée aux maximes de Ia Puissance dominante *) La fcience de la tactique *) La France a arobidonnè ce rang en Europe; et Ia Russie l'occupe. Elle dicte la loi a 1'Asie, la Por te chancéle, la Snede tremble, la Prusse sliumilie, la Pologne n'est plus; corament 1'Autriche foutiendroit elle le role de rivale? Sa grandeur rapide, consommée a 1'abri de 1'ambition insensée, fondée fur la force, le fera peut-être fur  557 tectique navale, et la connoissance des para. ges de 1'Angleterre valoient bien la peine de 1'armement d'une douzaine de Vaisseaux, principe de Fardeur morale de Ia Russie i animer la guerre quiaffoiblit fes voisins, et celui de fon inaction physique absolue.'ne fauroit plus être un fecrêt; il est füperflu 1 5 den fur les avantages du fol, de Ia lïtuation, de la culture, du genie et du bonhenr des peuples - la nature y invite, il „e faut que le genie, vaste d un ftcond Pierre, orné de Ia Philosophie fen «ble a Ia voix de 1'humanité, pénetré des grands devoirs du throne, pour cimenter 1'oeuvre d'une nouvelle création. Ces qualités, 1'on prettKdf /les apporte au throne; le tems décidera fi kperJl du diadéme, Musfcn de Ia datterie, le venmdescourtisans, le fracas artihcieux autoor duPriuce, la cabale chagrine, pourront detrture ou fortiner un grand caractere. Que 1'ambition ou Ia vertu regnent en Russie, la Pologne, indépendante, en fera Je rampart- détruite, elle en fera la bréch'e. Ici fe feva 1'érup. tio^unGeugizkan, qui, fóuïïès décombr» des Nations, ensévéüra les débris de 1'empire et la Dynastie de Paul I. Ainsi un Caractere, fait aux belles choses, peu t être entraine aux grande, choses, quand la Efcüitë de Pent reprise 1'y follic»re; appelié d'.tre fo^ateü* ü ^ eomm, «estructeur.  138 d'en déduire des consequences, évidentes, par elles mêmes. La féparation des interets de 1'Autriche et de 1'Angleterre, tres possible, tresprobable même, au commencement de 1'an 1796 est impossible aujourd'hui, et ces anciens amis, qui un jour s'étoient perdus de yue, en resteront d'autant plus intimes, que la France s'obstine a vouloir les féparer. Sur le Continent, la France au comble de fes fuccès, marche vers la ruine de fes affaires, au pas, que la nature préscrit k tout mobile qui s'éloigne de 1'origsne de fes forces. Le chemin des Francois a Vienne, kRome, kNaples, ce fera celui, par lequel, pour la dixiéme fois, ils feront chassês de 1'Italie. Jusqu'ici les Gouvernements entrainerent les peuples k la guerre, malgré eux. L'espécehumaine, impassiveaux changements politiques, passoit de 1'un empire fous un autre, on murmuroit, onpayoit, on felaissa enroler, on defertoit et la possession de ses biens tenoit lieu de patrie k chacun. Or cette patrie cesse d'exister par la présence des armêes Francoises. La perte des biens est fuivie  *39 fuivie de celle de Ia liberté, d'autant plus fensible, que 1'on passé fous la domination de ce qu'on connoissoit de vicienx parmi fes égaux ou fes inférieurs. Entourés de la misère, pressés par Ie besoin, maltraités par leurs chefs, les Coeurs des peuples fe disposent a la révolte, Ia vertu, aigrie jusqu'i 1'atrocité, leurs inspire la colére, la passion enflamée s'emporte, les hommes reprennent leur caractere d'hommes et les pmpks-soldaU triompheront d'un peuple-piilard. Si, en ce moment, qu'il ne s'agit plus des illusions de la liberté du monde, mais des richesses des voisins, tel est l'esprit généra! des peuples, n'auroit-il pas été fage de pré, venir eet eclat dangereux? Encore les. esprits fe' feroient rendus k leur ancienne apatie; et la France, un jour, auroit répris avec plus de faveur fon fystéme ambitieux. Enfin, nous demandons: "Pourquoi, les. "mêmes causes, dont le Gouvernement de "la France attend la foumission de fes enne"mis, dont il promet dans toutes fes Procla"mations au Public, une promtejfin de la *'guerre  j4 "guerre, dont il démontre 1'impossibilité de "leur résistance ultérieure — pourquoi ces "mêmes caufes, n'auroient - elJes pas un "même effêt fur la France? L'Angleterre est, dit-on, accabïée de fes Detfces, FAutriche, dit le Redacteur, est réduite a piller fes propres Provinces, elle a épuisé toutes fes ressources, 1'une et Fautre feront forcéesd récévoir la paix. L'épuisement de la France est il moindre? Consultons le Message du Directoire du 10 Nov. 1796 au Conseil des Cinq-cents; il propose un troisiéme papïer-monnoye, fur tin préambule fuivant: ■ Toutes les parties du fervice vous le faveZ, font en fouffrance; la folcle des troupes est arrièrée, les défenseurs de la patrie Tont livrés aux horreurs de la nudité; leur courage est énervé par le fenti•ment douloureux de leurs besoins; le dégout, qui en est la fuite, entraine la désertion; les hopitaux manquent de fournitures, de feu, de médicaments; les établissements de bienfaissance, ' en proye au anême dénuement, réponssent 1'indigent et 1'infirme, dont ils étoient la ressource; les créanciers de 1'Etat, les entrepreneurs, qui, chaque jour contribuent a fournir aux besoins des armées, n'ar- rachent  14.1 rachent que de foibles fommes, qui leurs font dues; leur détresse écarté des hommes, qui pourroient faire les mêmes fervices avec plus d'exactitude ou a de moindres bénêfiees; les routes font bouleverfées, les Communications interrompues; les fonctionnaires publics font fans falaires; d'un bout a Pantfe de la République on voit les Juges, les administrateurs, réduits a 1'horrible alternative, ■ou de trainer dans la misère leur existence et celle de leur familie, ou de fe déshonorer en fe vendant a 1'intrigue; par - tout la malveillance s'agite; dans bien des lieux fassassinat s'organisc, et la Police, fans activité, fans force, parcequ'elle est dénuéê de moyens pécuniaires, ne peut arreter ces desOrdres —« En proposanfc tin troisieme Papiermonnoye, le Directoire finifc ainsi: "c'est "préparer les moyens de forcer Fennemi a "récévoir cette paix que nous lui offrons et "que 1'humanité réclame." —> L'humanité réclame cette paix pour la France, parcequ'il n'y a point d'Etat aussi malheureux, que le Message du Directoire nous presente ici le tableau de la France» L'administratjon, des Finances, ea & rendu m  i4& un compfce fi cela fe peut, encore plus éffrayant. Elle fixe le revenu assuré de 1'Etat a 350 millions; tout y compris il ne s'éléveroit qu'a 439 millions et un demi. L'état intérieur absorbe 450 millions; 1'extraordinaire de guerre s'éléve a 550 et depuis,fur un apei^u général, on a calculé les besoins de 1'année courante a 1500 millions. Le Directoire dans fon Message fusmentionné, netrouve, que dans la paix, un espoir fondé de la profperité publique; et Cambaceres foutient au Conseil "que c'est par les Finances feules, "que la révolution peut fe consolider." Or, fi la guerre est la cause évidente de cette calamité, fi la paix feule offre le reméde a tous ces maux; ne la feroit on pas, quand on peut la faire avantageusement ? Peuples, ce n'est rien, que 1'accord de Ia nature et de 1'humanité; de la raison et de la conscience; de 1'interét et des devoirs; de la gloire du gouvernement et du bonheur national; ces vérités ont leurs limites, des causes exirémes produisent des eifêts discordants* Une  H5 Une Constitution exposée k la fubversion et tine nation portee k Ia revolte — un gouvernement investi de conspirations et un peuple fondant en imprecations — une Capitale ensévélie dans Ia plus infame débauche et uu pays fans marchandises et fans ce qui les achéte — des Exacteurs qui depensent mal Ie fruit de leur fanguinaire industrie et toutes les mains actives paralysées — des millions de malheureux, victimes de leur confiance et point d'hopitaux — un Etat fans ressources intérieures et une armée habituée £ 1'abondance, — des chefs de 1'ordre civil efc une République conquerante — un code de loix et la loi de 1'épée — le 'courage du guerrier et la terreur de fes concitoyens; Ie Général triomphant, terrible k la patrie Ou il faut un génie divin qui préside k Ia destinée de eet Etat; ou le désespoir i'emportera fur la prudence et la raison des hommes fans vues et fans-pro-jets raisonnés. Maxlmti  i44 Maximes de la France moderne. Nos armées maitrisent Htalie; y mém-" cent 1'Autriche Hans les dernieri asijies de sa "puissance, occupent toute la Belgique, "garantie par une Ligne de Neutralité for"midable, et tous les Etats EcclésiaStiqueS "jusqu'au Rhin — elles y tiennenten échéc "toutes les forces de 1'Autriche; elles ont "tellement avancé etmultiplié nos Barrières "et nos réssources, que ï'Autriche ne peut "tenter, dans de nouvelles campagnes, d'au"tres mccès, que de ravager fes; propres " pays, incendier et détruire fes propres forte"resses — —■ Les Francois qui, ont 'ü "fouvent vaincu les Anglois, fe font engagés "par des Ailiances folemnelks, a dompter leurs t insolentes prétentions. L'avénir prouvera, "que tot ou tard, une Puissance, forte par "fes armées et fon énergie guerriére, doit "1'emporter fur celle qui n'a que des vaisse"aux — alors 1'Angleterre récévra plus " docile-  2 45 *dociIemenfc la paix qu'elle ose mé"priser. *) Ainsi raisonne le Gouvernement de ïa France, et en consequence de ces idéés, il établit cette maxime d'Etat: "Les Francois "doivent favoin qu'ils n'auront pas la paix "avec leurs ennemis, que lórsqu'ils auronfc "mis ceux- ei dans l'impossibilité de pour"suivre leurs projêts. Cette époque n'est pas "éïoignée." (voij. le Message du Directoire du 26£anv, i?p?) U eSt question des projêts manifestés par le L. Malmesbury, et on les connoit. Ces ouvertures expliquent des expresSions, depurs quelque tems naturalisées en France , det donner la paix; foreer è récêvdr ïa paix % faire accepter docilemmtla paix etc. 'etc, Le ton des Agents diplom atiques du Cabinet de Paris s'y rapporto; et nnalemen't, a la fuite du Message fusdit, k Rédacteur nous déclare: *) Vbyez ïe Manifeste a la rupture des Nègaciatróns. ïnseré dans la feuille officieïle intUulée le teur du £a-, Uec, 1796» K  i4« déclare: que ia Diplomatie est passée du Cabinet au Camp. C'est en d'autres mots : dorénavant les Puissances et Etats n'auront affaire qu'aux Généraux a la tête des armées. C'est pourquoi, il n'a point paru encore en Italië, de Négociateur en Chef du Gouvernement, et que c'est Bonaparte, qui régie tout ce que ci-devant on nommoit des intéréts politiques. En verité, ce Général a tous les talents possibles, a rendre du plus grand rapport, fon genre de négocier. "Vos propositions font absurdes "(dü il au Secrétaire d'Etat duRoideSardaigne) «écoutez les Loix que je vous impose et "exécutez les fur le champ; fans quoi etc," "(voij. Lettre de Bonaparte a fon frere.) Les «Ducs de Modéne, de Parme (dit il a fes "foldats) ne doivent leur existence politique, "qu'a votre générosité (Proclam. du 20 Mai "1^6.) De riches Contributions en Espéces " et en nature préparent de loin la fubsistance "future de l'armée. Les Puissances de 1'ltalie "s'humilient toutes, et Vheureux Bonaparte,, «conquerant et Pacificateur, fait par-tout; "triom--  147 «triompher Ia République (Rapport au Com. "mandant de Varmêe des Alpes.) Dira - t - on "de nous, que nous avons fi* vaincre, mais "que nous n'avons pas ,fü profiter de Ia «VJctoirè ? Les journées perdues pour la "gloire, Ie font pour w^bonheur. Rétablir "le Capitole - tel fera le fruit de vos victoi"res.~ Vous aurez Ia gloire immortelle "de changer l a pa c e * la plus belle ''contree de l'Europe. *) Le peuple "Francois libre, respecté du monde entier, "donnera a l'Europe une paix glorieuse, qui , ) - "il ne Hm |n'u« génie ardent, un enthoupour mettre de nouveau ia terre en combnstion. Les peuples de 1'Orient et du Nord, font eneore tout préts a répanche leurs tenebres et leurs chaines dans toute l'Europe; Ne fuffiroxt-ü pas d'une irruption des Turcs "ou des Africains en Italië, pour y renverser es temples et les palais, p0Ur y confondre 'dans une mine générale, les idoles de la reli"gion avec les chefs - d'oeuvres des arts? Une «ville qui a couté deux llécles a décorer, est "bruiéé et faccagée en un jour. Un Tdrtari "bnsera peut-étré, d'un feul coup de hache, "cette ftatue, que Pigalle „'aura pas achevé en "dix ans etc. etc. O  *43 *'qui 'l'iNDEmNiSera des facrifices de «'toute espéce, qu'il a faits depuis fix ans. "(Proclam.fusdite du 20 Mat.) Encore la politique a fon jeu, il faut de la rétenue, les préjugés demandent des précautions; la crédulité, de la circonspection. Encore des peuples fe laissent fubjuguer par lé fantome de la nouvelle liberté, les mots éeRéquisition, d 'Emprunt forcé*) font 1'effêt des \ tributs, et les Alliances, celui de réduction en province. "Ce ne font point ici, comme j xtdit Ciceron, des traités de paix, ce font des j ,*'pactes de fervitude." La France, feule 1 chargée de la défense des Etats désarmés, j les ] ©homme, doué d'un esprit divin, oracle del ïa posterité; fi, avant dix, mème avant fix ans, j quelqu'vm eut dit-qu'il te faudroit rempiacer les] ■noms fa Tuïcs, Africains-, Tartan, par celui 1 de Ta propre nation! *) En Angleterre 1'on ne risqüe guerres d'étre volé! I Souvent le voyageur est -abordé par un Inconnu»! le pistolet a la main, qui lui demande /'£«!-IJ prttnt de fa bourse, de fon porte - feuille, de fa» montre. En les ckmnant de bonn-e grace, en» en est rémercié poliment, finon, le pistolet faitjB exactement Tellet d'une fusillade.  i4d les peut considerer de ce Sentiment degênérosité, si signiflant dans l'esprit du peuple protecteur. Ses intentions a eet egard, fe trouvent énoncées dans la réponse, qu'& 1'Audience publique du Luxembourg, le Président Barras a rendue au Ministrë-plénipotentiaire des Etats-Unis de 1'Amerique, le 50 Dec. ijpó. En présentant aujourd'hui, au Directoire-Exécutif, vos lettres de rappel, dit ce Président, vous donnez a TEurope un fpectacle bien etrange. La France, riche de fa liberté, entourée du cortége de fes victoires, forte de 1'éstime de fes Alliés, w s'abaisstra pas, a calculer les fuites de la condéscendance du gouvernement Américain, pour les fuggestions de fes anciens tyrans. La République Francoise espére, que les fuccesseurs de Colnmbus etc. etc, toujours fiers de leur liberté, n'oublieront jamais, qu'ils la doivent a la France {la paix in 1783 qui assura cette liberté, fut l'ouvrage de Louis XVI et du Cabinet de Versailles. — quel fouvenir impolitique du Président.'). Ils péseront dans leur fagesse la tnagnanime bienveillance du peuple Francois, avec les astucieuses caresses de quelques perfides, qui méditent de les ramener a fon antique éselavage-  15£> Assurez, M. le Ministrë', le bón peuple Américain, que, comme lui nous adorons la liberté; que toujours il aura notre éstime, et qu'il trouvera dans le peuple Francois, la générosité réfuelicaine, qui fait accorder la Paix, comme, elle fait faire réspecter sa s o ijver AINETÉ. Ces ouvertures n'ont pas besoin d'un commentaire. Elles tracent d'avance le fort 'de tous ceux, qui un jour étoient'chers k la République Francoise. L'Amerique, il est vrai, auroit pü prévènir les hostilités, que lafoeur en liberté s est permises d'abord, fi, k 1'exemple de Venise, de Portugal, de Génes etc. etc. et de quelques membres da Corps germanique, elle eut d'abord payé un tribut a la France, qui ne cherche que de s'indcmniser de fes fix ans de — guerre, comme dit Bonaparte, et de liberté, comme il femble. Mais un Gouvernement, tel que 1'Américain, ne fauroit doubler brusquement les impots fur le peuple, a 1'exemple du Senat d'une ville de 1'Empire, pour payer tribut k la France, a 1'Espagne, k la Prusse et a tous les fangsues de leurs voisins. D'ailleurs 1'Ame-  i5i 1'Amérique est aussi bien defendue, que la Grande-Bretagne, contre une expédition de Brest ou de Dunkerque. Cette guerre fe réduira donc a la piraterie> digne pendant des Emprunts fords. Les Etats tels que Naples, Rome, Toscane, Parme etc, n'ayants pas eet avantage geographique, les indemnités de ce coté-ci ne rencontrent d'autre obstacle que la foi-publique, confiée a la discrétion du Général. Dans d'autres parties de l'Europe on avoit deja disposé de 1'expedient, nécessaire pour des vues d'une politique ambitieuse. La prétention, de promener les Eouleurs de la République par toute l'Europe, est contraire au Droit des Gens, et insultante pour PHonneur, VIndêpendance et la Suretê des Etats, qui dans chaque faquin francois doivent rédouter, un être, dont 1'inconduite ou les bassesses, peuvent compromettre la paix publique intérieure et extérieure ; qui peut convertir en querelle politique, fes haines privées; qui peut fervir de pretexte a une nouvelle contrïbution, en s'exposant a 1'insulte. K 4 Les  *5» Les raisons, qui termment'Ia fèction précedente, et le nouveau plan politique, exigent de nouvelles maximes populaires. A 1'exempie des compagnons de Cortes et de Pizarro, les Exacteurs, les Généraux, les Commissaires, rentrants de 1'Italie et des pays voisins, chargés d'Or et d'argent, aiguiseront Favarice d'un peuple extravagant ou malheureux. L'ardeur guerriere doit étre enfïammée au degré extréme, par la célébration des exploits militaires. Une espéce de honte fera imprimée a ceux; qui restent chez eux; "tous doivent bruler de "porter au loin la gloire du peuple Frangois'* (voij. Pr oei de Bonaparte du 15 Mal i^pó.) Par la desertion générale des hommes entreprenants le gouvernement fera rassuré. Des maximes anaïogues feront adoptées aux bu reaux dAdministration et des Finances; tart de vivre aux. depens des peuples, cultivé habilement, doit avoir fes noms illustres, comme celui de Ia guerre les a eü. L'attente des richesses fera d'autant plus passionnée, que la migration fera nembreuse, " Qui vou- "dra  153 "dra rentrer dans fon village, dit Bonaparte *j> "fans pouvoir dire: fai été de farmée conque"rante de ritaüe! " Quel enchainement étrange du'jeu de Ia fortune! La Républiquenaissantefe propose une Liberté fage, heureuse du peuple Francois—un nouveau Guise tombe fous la hache, teinte du fang de fon Roi et une nouvelle S faction *) Bonaparte - L' Italië, au 5™ et 6me nédeg devastée^r les barbare*, aujourd'hui maitrisê, par les Francois, invite a la comparaison de ces deux époques. Alaric, Attila, Odoacre, Ttéodoric, Totila et leurs bordes fauvages firent moms de mal, que les anciens maitres. La „é. nerosité des chefs est relevee par la perfidie de leurs ennemis. Sous leur regne 1'Italie jouit dun bonheur inconnu. On s'immortalise, on jert la focieté en fondant des villes; en les dUm& sant onfe déclare 1'ennemi des hammes on fe des W, Acet avis de fon ennemi, Ie MeiTe \ ^lIa' faCrifie rinterêt de f°i - même, qui exlgea la destruction cle Rome et qu'il épargne - L'hi 6to,re ne permet pas d'éléver au niveau de ces hommes, le desructeur de Binasco, de Pwif ■ etc. etc. roppresseur de Toscane, et de Modéne, qm Te ,oue des traités; ni de comparer k ces Peuples, celni, qui) a leurs vices,aajouté tous ceux des Romains de ces tems la.  154 faction des Seize crie a la liberté du genre humain pour consolider fon ufurpation — la conquête de la Hollande inspire 1'idêe de 1'empire dominant; les richesses y trouvées, la passion de favarice; les armées y entrëtenues, un plan de fubsistence pour elles loin du fiége de 1'Autorité révolutionaire — la •Constitution de 1795- etl'Edit des Deux-tiers exigent un nouveau débordement; celui-ci finit par être funeste; on est fans vues, fans projêts. — Une intrigue fubtile prépare 1'ouverture heureuse de la campagne en Italië, au Printens 1796; les fucces en Allemagne y répondent; a 1'idée de domination fe joint celle de 1'empire universel, fondée fur la prise du Piémont et du Müanez.— La déroute des deux armées en Allemagne associé a ce plan, celui de dépouiller au préalable, les nations a foumettre — la conquête de fitalie ètla paix avecle Roi de Naples font réfluer 1'or a Paris, excitent Ia cupidité et accreditent cette Loi fupréme: que L'Or, le Fer, et et l'Ar gent font les feules Divinitéi dont le culte fait la gloire du nom Fran» 9ois.  »55 cols*) La liberté est pour les fots, et la patrie un désert. En diminuant Ia masse intérieure du peuple mutin, le gouvernement fe rend terrible a 1'extérieur et inamovible dans fon liége. Résut- *) Caes. de B. G. L. VI «n™™™ „ iJeorum numero eOs "iolos ducunt, quos cernunt et quorum ope "aperte juvantur, Solem et Vulcanum et Lu"nam" _ Dans 1'état de l'Europe policée la force ne laissera pas a fe ranger tót ou tard du coté des moyens c. a. d. des richesses, qui a la vérité.font louvrage des travaux assidus. Un tel caractére s'affermit par la disgrace et tire une nouvelle rigueur de fes blessures mêmes; quaAd le peuple Pauvre et rapace, a besoin de 1'enthousiasme, femblablea une fievre ardente, pour résister au principe intrinséque de fa déstruction, qui fe developpe au plus léger obstacle. Ce peuple ne pourra conserver ni perpétuer fes moyens, par Ia conquête; il n'en gagnera que les vices de la nchesse avec ceux de la pauvreté. II y a des Ideahstes politiques tels que Mallet du Pan qui pretendent, «que le Fer prendra 1'empire'per"manent fur la culture, les arts, le génie et l'i„. "dustrie" ils debitent aux Francois cette fa^esse originaire du fol de ce peuple et propagent° une chimère, dont il est a régretter qUe l'illusion ne lera dissipée que par des fleuves de fang humain Ces reveurs, du fond de .leur étude, conteim plent  156 Résultats, pour lafüuation actuelle de l'Europe,] du Principe général du Lord Malmesbury. L'application du Principe général établi, (pag. <*7J d" Droif public de l'Europe: de la héstriction, laplus utile au Systême politique de l'Europe, de la fokce individuelle des Etats, aexigéune digression, aussi pénible en elle même que contraire a notre gout. Ceux, qui poursuivent des intéréts isolés, indépendants du bien public et général, s'arréteront aux vérités, incommodes a leurs projêts. L'enthousiasme, né d'un fentimenfc généreux d'humanité, a 1'origine de la Révolution en France, efc qui ne s'apercoit pas encore du changement absolu dans la nature des choses, aura de la peine a rénoncer a fes préventiohs. L'une et 1'autre consideration ne manqueront pas d'influer fur la partie fcientifique, feul but de ces feuilles. ^ plent leur idéal dlnterim, de VcbïV d'une petite fille, qui calcule Ta destinée future de Dame de la maison, mais dont Les projêts fontmoins niaia ou fantasques, que ceux de ces visionaires.  157 Cependant, une Théorie qui s'occupe du vrai et de 1'Utile, pour être généralisée, demande la démonstration de fes rapports avec les circonstances, si cela est possible;; et cette consideration fuffira pour justifier la partie politique, transmise avec toute cette reserve dans les expressions, dont la vérité fauroit être fusceptible. Dans eet esprit nous irons ajouter quelques traits encore a l'Esquhse, présentée a 1'examen des Publi-. cistes. En premier lieu: II existe, parmi les Puissances de FEu« rope, un Pouvoir rêè'l, au degré éminent utite et avantageux a tous les Etats; tuttlaire du pouvoir général moral; bienfaisant pour 1'humanité: il réside dans la Grande-Bretagne. D'après la nature de fes intéréts essentiels et permanents, feule base du caractére des gouvernements, la Grande-Bretagne, par fa position géographique, ne fauroit jamais donner de finquietüde a aucun'Etat de l'Europe, Une experience réïterée a dicté Ia loi fupréme a la politique Angloise, de ne mettre jamais pied a terre fur le Continent i  158 nent; et il est eer-tam, qu'a I'époque de 1'empire'd'une faine politique dans l'Europe, 1'Angleterre abandonneroit d'elle même Ia feule possession qu'elle y garde a trés grands frais, pour la fureté de fa navigation. La puissance de 1'Angleterre, fondée fur Ia richesse, acquise par le travail, qui en est le contrepoison, est interessée directement h la prospérité publique de l'Europe, qui assure un debit avantageux a fes productions et a fes atteliers. II est de 1'interêt d'une Puissance commercante de ne point indisposer d'autres Etats, et de cultiver la plus heureuse intelligence avec tous» La Grande-Bretagne, pour ces deux raisons, Ioin d'entrer, comme partie intégrante, dans Ia Balance politique de l'Europe, en doit être censée Ia gardienne de fon équilibre; et fans s'en apercevoir peut-être, elle a fuivi cette loi, du tems de Louis XIV. ou a la vérité elle fe chargea de la defense de l'Europe; elle en a conservé la qualité qu'elle prendroit a Tégard de toute autre Puissance qui voudroit affecter 1'empire immoderé. Donc,  3 59 Donc, les principes fur lesquels elle a fondé fon commerce et fa puissance intérieure, 1'engagent fouverainement a maintenir le pouvoir mor at, du tems, que Ia tranquillité publique de l'Europe feroit menacée. *) Ainsi *) La Constitution Brittannique repose fur une vie entiérement occupée de la Nation; fa puissance consiste dans fa richesse; fon ambition détournée fans cesse de l'Europe, doit fe diriger fur les deux autres mondes, ces fources de la prospérité qui par fes mains fe communiqué au reste du Continent. Aujourd'hui 1'Angleterre est forcée de compenser, par la quantité, comme le debit de fes productions des Indes, une perte incompatible avec fa prospérité, que lui ont causé Ia guerre actuelle, la diminution du prix de fes chefs - d'ocuvres et les entraves données a fon industrie. Une guerre potir ces nouvelles acquisitions , c'est autant qu'une guerre pour fon existence future. En consequence de cette loi, elle doit profiter de Pardeur insensée de fes ennemis; en fe vengeant de la fausse politique Européenne a la guerre contre fes colonies Américaines, elle vcngera le nouveau monde des atrocités de rËspagne, en y portant, a tout prix, 1'indépendance et la liberté, et ces interets lui attacheront les Etats -Unis du Nord. La diiïerence des établissements Francois et Anglois dans les Indes, celle de l'esprit de ces denx  a6o Ainsi parle 1'Auteur ïmmofteï, Ie modéle des bons esprits de notre fiécle. *' DeS pré*jugés absurdes avoient fubjugué l'Europe, lorsqu'en deux gouvernements, -et du caractere des 'Na» tions, rassurent l'Europe fur ce qu'on fe plait a Hommer la trop grande puissance de 1'Angleterre. L'esprit militaire, enraciné dans la Nation Francoise, s'est étendu jusque dans fes Colonies êt en a banni toute industrie. C'est un fait aussi connu que mémorable, que le germe de la prospérité y a été fouvent pOrté par la conqnétè des Anglois et déraciné de nouveau par les anciens maitres et leur gouvernement militaire. Les Anglois n'ont encore fondé d'établissemcnt que fous la fauvegarde de la liberté qui crée 1'industrie. 'Or il est de 1'ordre physique et moral, que le desordré de 1'une contrée nuit k toutes les autres, que 1'industrie étraugére élargit celle de f toute autre, et que la ricbesse des próductions de 1'une partie du monde altire les próductions de i'autre. Si un gain énorme Faüróït exciter pïutöt a la recherche des causes, qu'a une avidité déméBurée; leprix des próductions, la vaieur des ter- j res, doublés, en Euröpe-, 1'extènsïon et les pro- ! fits que 1'on fait dans ces circonstances; auroient ] deja démbntré 1'absurdité de 1'idée , de la ruine de ceux, qu'avant peu, on étoit trés aise de pouvoir fervir, Ce feroit un bien grand mal-' beur ;  i6x "lorsqu'en 1688 la nécessité d'un gouvernement juste passa, parmi les hommes, pour "une vérité incontestable. Alors furent "posés les fondements des societés. La "décadence de cette Constitution feroit uft "grand malheur pour les nations. Toutes "lui doivent un fort, plus doux que celui "dont elles jouissoient. L'exemple d'un "peuple libre, riche, magnanime et heureux, "au milieu de l'Europe, a frappé tous les " esprits. Les principes d'oü découloient tant "de biens, ont été faisis, discutés, présen"tés aux Monarques et a leurs délégués, qui, " pour éviter faccusation de tyrannie, fe font "vu contraints, de les adopter avec plus ou "moins de modification. Les anciennes maxi- "mes lieur, dont l'Europe fe répentiroit trop tard, fi 1'Angleterre perdit l'emplre des mers, et (pareeque l'anibition ne permet pas de milieu) qu'il fut dévolu a une Puissance aussi fortement consd» tuèe que c'est la France, a tous égards j fans fe* Colonies elle fera encore trop dangereuse a Tindépendance de fes voisins, Craïgnons plutót eet esclavage, que celui, qui entrelace les fortunes et les échanges, L  m ""mes révivroïent bientot, s'il 'n'existoit pas, "pour ainsi dire, au milieu de nous un tribu"nal perpétuel, qui en démontra la déprava"tion et 1'absurdité — Si 1'Angleterre rétom" beroit dans le néant des choses et des horja"mes, l'Europe ne pourroit montrer a I'uni" vers, une Nation dont elle osa s'honorer, et mtè despotisme léveroit feul la tête au milieu •£de la ruïne des arts, des mceurs, de la '" raison et de la liberté." *) En 1'econd lieu: il existe dans l'Europe 'nn centre commun des deux pouvoirs, du rédl et du moral, et il resfdè dans la Constitution du Corps Germanique. En placant ici *) Les connoisseurs du fystéme constitutie-nel de 1'Angleterre et de celui de la Monarchie de Frederic II. avoueront, que le caractere de celle-la est la criüqne la plas amére de l'esprit de celle-ci. Le Philosophe de Sans-souci propage les prini ipes' de 1'Anglois, er. le Roi deteste 1'Angleterre ; il fe réjouit du foulévement des Amérkains, aprés avoir rédnit en fystéme ia domination absOlue. Le throne de Mare Auréle empmnta de la Philosophie fa' fplendeur, fa pratique a rendii fon Hom immortel. Mais Frederic pénetra IHtt. cohérence des maximes et de te toutepnissance, fon empire feul dut gagner au boiüeversement.  ïciïemofc, Constitution, ils'entend, que nous ne ]'appliquons nullementa 1'état actuel d'un pays fans force ef fans consideration. Tout Ie monde connoit Ia racine du mal, la division des interets et Facheminement, trop fensibie, des choses, vers la tyrannie et 1'esclavage; et telle est Ia décadence de 1'état public, que fbuvent on ne fauroit indiquer, ou réside le gouvernement de fun ou de 1'autre Membre de 1'Empire.*) Nous avons en vue, cette Con- *) Nous fommes bien fachés que du tems de rimpression, Une circonstance nous empéche d'insérer ici une Note, rémise a la Diéte de 1'Empire, de Ia part du Gouvernement de Hanovre» au mois d'Octobre de Tannée 1*796, Cette Note "ne fc trouve dans aucun des papiers pufe-Bcs de l'Europe; elle a été inserée pöurtant dans les feuilles Angloises, (the Times, the Sun, tke Courier etc. etc. des premiers jours de Nov.) et jelle porte en fubstancé la dêclaration: "que S. "M. Britannique; vü llmuilite comme riuju.-tice "de' la guerre actü'elle ne fauroit fcomcourir a *■ aucun des moyenS, préposés paf 1'Empire» ** pour fa continuation etc, etc." Les expressions, en font fi peu moderée's, q'uè 'cètte Note furpasse tout te, qüi a été jamais porté d'inconstitntroneï i» VM&mbï&è du Corps g«rmani'— Je dois ajouter, que, toutes les foi» que je fis mention de la réstitution des Pays-Bas ■k 1'Exnpereur, • j'eus toujours foin, qu'il put bienl entendr» i  i3i entendre qu'elle devoit être accompngnée d'autrcs cessions, pour leur former une Ligne de défense fuffisante, et qu'il ne feroit pas permis a la France de retenir tout le Pays intermédiaire jusqu'au Rhin. Pinsistai particulièrement fur ce point, quand je lui fis entrevoir la possibilité de consentir a une extension de limites de la France du coté de VAllemagne. Mais, comme le Ministrë Francois s'opposoit aussi fortement a la réstitution des Pays-Bask 1'Empereur que je mettois de tenacité a la démander, le reste de mes reclamations ne pouvoit devenir 1'objet de la discussion. Jusqu'ici je crois avoir rendu a V. Ex. un compte assez exact des fentiments du Ministrë Francois a 1'egard de cette partie de mes Instructions qui fe rapporte immédiatement a la paix de la Grande-Bretagne et de S. M. 1'Empereur avec la France. "II me reste a vous faire part de ce qui s'est passé entre nous au fujet de nos Alliés réspectifs." "Sur les Articles, qui réservent a la Cour de Pétersbourg et a Celle de Lisbonne le droit d'accéder au Traité de Paix fur le flatus ante bellum, le Mi nistre Francais ne fit aucune autre remarque, que de demander, en parlant des Alliés de la République, "fi "j'étois prêt a traiter ce qui étoit relatif a leurs intéréts, que certainement la République n'abandonne"roit jamais." Cela me donna occasion de remettre M 3 le  182 le Mémoire confidentiel relatif a PEspagne et a la Hollande: Etpréliminairement je lui répétai en fubstance la première partie de votre No. 12. Quoique j'eusse touché un mot de la partie Espagnole de Saint-Domingue, en traitant de la Paix avec la France, cependant , comme elle ne fit un objet de discussion entre nous que lorsque je parlai de la Paix avec l'Espagne, , j'ai cru, qu'il valoit mieux placer dans cette partie de ma Dépêche tout ce qui fe dit a ce fujet. C'est le feul point qu'il discuta. Mais de ce qull ne paria d'aucune réclamation de PEspagné, je n'en conclus pas, qu'il n'en feroit aucune mention dans le cours de la Négociation. Je ne doutai pas, au contraire, qu'il n'en eut plusieures a faire, et même d'inadmissihles. Neanmoins il garda le filence en ce moment, et fe borna a combattre 1'idée, que, par le Traité d'Utrecht, l'Espagne fe füt engagée a n'aliéner aucune de fes Possessions en Amérique. J'avois 1'Article copié dans ma poche; et je le lui lus: II avoua, qu'il étoit clair et formel; mais il prétendit, "que les circonstances " avoient changé fi essentiellement depuis 1713', que "les engagemens pris alors ne pouvoient être regar"dés comme étant en force." 'Je lui dis, "que, par "l'esprit de 1'Article même, on avoit voulu prévoir "des événemens éloignés, et non pas ce qui devoit "arriver au tems du Traité ou peu après, et que "e'etoit paree qu'on avoit prévu, autant qu'il étoit " pos*  185 "possible, le changement des circonstances, qu'on "avoit inséré cette Clause, qu'enfin fi /'Espagne avoit " aucun égard a la foi des Traités, elle dévoit fe ré"garder comme autant liée aujourd'hui par cette "Clause, qu'au moment oü elle avoit été rédigée.'' Je pourfuivis, en disant, "que riéanmoins il n'étoit " pas tout - a - fait impossible d'arranger ce point fans" " beaucoup de dimcultés, et qu'on pouvoit trouver " des moyens par lesquels Sa Maj. Catholique ne man"queroit pas a Ia bonne foi, et qui concilieroient " également ïAngleterre et la France." Je lui laissai alors entendre en termes généraux, que VEspagnt pouvoit regagner la partie de Saint - Domingue en faisant quelqiie cession considérable a la Grande-Brétagne et a la France pour prix de la Paix, ou qu'ea cas de laisser a la France tout Saint- Domingue, nous pourrion's retenir la Martinique ou Sainte-Lucie et Tabago.— Mr. Délacroix écouta ces Proposition? avec quelqu'attention; mais il craignit de fe compromettre, en paroissant approuver, et laissa tomber 1'objet de la Cour de Madrid, en observant, que la France n'abandonneroit jamais les intéréts de fes Alliés." Notre conversation fur la Hollande, comme Alliée de la France, avoit été plus longue, parceque la teneur du Mémoire la dirigea directement au fond de la. a-aatiere. Mr. Délaerpix envisagea comme inadmisM 4. sible,  184 6it>le, toute réclamation contre Ie traité fubsistant entre la France et ce Pays la, ou pour la réstitution des disl.ricts cédés en vertu de ce traité. II traita comme également inadmissible le rétablissement de Pancienne forme de Gouvernement dans les SeptProvinces- Unies. D'un ton triompbant il vanta l'institution d'une Convention nationale a la Haye, il allecta de la joye de ce que la cause de la liberté avoit prévalu parmi un peuple nombreux. Cependant il étoit prèt a convenir, qu'eu égard a la perte immense que la République B'ollandoiseavoit éprouvée dans lés Colonies, et fur tout a raison de fon état de defense afFoibli 1'on ne pourroit guerres s'attendre a tme réstitution absolue, a faire par S. Maj. et que 1'équité demanderoit quelque facrifice k faire; s'informant en même tems fi je pourrois lui faire part de I'étendue de nos vues fur ce point ? Je lui répliquai, quej'avois lieu a fupposer, que S. Maj. ne demanderoit que des possessions ou dés établissements, qui, , ïoin d'augmenter la puissance et Ia richesse de fes i possessions dans les Indes, ne ferviroient qu a en assurer Ia proprieté moins gênante. Vous visez peutêtre dit Mr. Délacroix au Cap de bonne - Espérance \ et Trincomale? Py répondis, que fans doute ils étoi-ent dans le cas fusdit, et que je ne voyois guerres i comment les réstituer a la Hollande. Mr. Délacroix; s'en répandit dans une ample déductïon fur la valeurr dut  185 du Cap de bonne- Espêrance, qu'il considera, nullement comme un Port de rélache mais comme une possession, qui, entre nos mains, deviendroit une des Colonies des plus rédoutablcs et profitables; et d'après fa maniere d'éstimer, il ne balanca pas a foutenir, que dans la fuite, cette acquisition feroit pour 1'Angleterre, d'une consequence plus essentielle, que celle des Pays-bas ne le feroit pour la France; que eelle\ta devroit être considerée comme une compensasation pléniere et fuffisante de ceux-ei. Si, ajoutat-il, vous fussiez les maitres du Cap et de Trincomale, toutes nos Colonies dans l'Jnde comme les Isles de France et Bourbon ne feroient que des possessions dépendantes de votre volonté, ellens ne feroient k nous, qu' autant qu'il vous plairoit de les laisser a nous. Je lui répetois, que 1'on prétendroit a ces possessions a titre de moyens de défense et non d'aggression, et que, considerant la chose de bonne foi et fans prévention, 1'on y trouveroit une grande et nouvelle fureté pour nous, mais pas un furcroit de puissance, même en cas que nous fussions portés, a troubler la paix. dans cette partie du monde. En tenant a ces établissements et peut-être a quelques autres de peu de valeur pour les Holtandois, et qu'il trouveroit bon de faire 1'exposé de ce que nous aurions a lei r rendre en compensation; on ne fauroit mèconnoitre comme g«inéreuse* et liberales M $ Us  ;86 les conditions de Ia paix, offertes par S. Maj. aus. Hollandois." "Mr. Délacroix, peu disposé d'ètre d'accord avec iTioi, foutenoit, que la Hollande, privée de fes possessions, en feroit ruinée. Tantót, comme fi 1'idée ne lui en venoit qu'a 1'instant mème, il fit entrevoir la possibilité de compenser a la Hollande ces perles dans les Indes, en lui cedant un district du coté de la Mrdse, (je n'ai pas pü decouvrir, s'il visoit a ceiui d'Aix ■ la - Chapelle, ou hien de Liége, de£fuliers, de Bergite). Encore il donna a connoitre qu'au cas qu'il n'y eut lieu a ceci, 1'on pourroit céder a la Hollende une h le a fucre. Je lui dis, que tout ceci pourroit devenir d'objet d'une discussion ultérieure, en observant, qu'après nous être accordés fur les points essentiels, le Traité mime ne feroit point contrairé par ces objêts accessoirs." " Notre conversation avoit eté extrèmement longue: Mr. Délacroix la finit en disant, "que, quoiqu'il eüt pris fur lui d'entrer jusques-la en matière, •'je ne devois pas consklérer rien de ce qu'il avoit dit, "comme liant et cngageant Ia République, jusques a " ce qu'il eüt remis au Directoire les Pièües, que je "\enois de lui donner;" et, pour plus grande exaclitude, ilmedemanda encore, "fi dans fon Rapport ■' il devoit annoricer la desunion de la Belgique de la "France comme le fine qua non, dont Sa Majesté ne i  iS7' "fe cléparürok pas?" — Je répondis, "que tres-ca: "tainement c'etoit le fine qua non, dom Sa Majesté ne "fe départiroit pas; et que toute Proposition , qui "laisseroit les Pays- Das amexés a la France,' feroit' "•pour elle un beaucoup plus grand avantage, et pour "les Ailiés une beaucoup plus grande pcrte% que Ia "ütuation rélative et' actuelle des Puissances lïclllaé"rantes ne pouvoit donner lieu.au Gouvernement " Francois de prétendre " Mr. Délacroix me témoigna encore fes regrets de la manièreperemptoire, dont je faisois cette dêclaration, et me demanda, fi elle «'étoit pas fusceptible de quetque modification. — J3 répliquai, «que, fi la France donnoit un Contre"projèt convenable et praticable, ne pêrdant jamais "devuë, que les Pays-Bas ne póuvoient pas être "Francais, ni dans la possibilité de tomber entre les "mams de la France, certainement une teHe proposi"tion feroit prise en consideration."— Mr. Délacroix ne m'encouragea en aucune manière a nCexptiquer plus ctairement: II me répéta plusieurs fois, que cette difficulté jélative aux Pays-Bas étoit insurmontable, etc." "Au moment oü je prenois congé de lui, il nie demanda, d'expliquer ce qu'on entendoit dans le Mémoire par le quatrième paragraphe, commencant par ces mots: De s'entendre nmUiellement fur les moyens A'assnrer, etc. et fmissant par leurs Possessions re- r ■ f fpectives.  188 fpectives. — Je lui dis "qu'ils avoient rapport au " fystéme destructif, adopté par la France dans les " Indes-Occidentales; et qu'ils exprimoient un désir, "que les deux Puissances convinssent de quelque " Systéme général et uniforme de Police intérieure, "pour contribuer a la furete de leurs Possessions " réspectives, en mème tems qu'au bonheur des Ha"bitans de toute espèce." — Mr. Délacroix, un peu blessé de mon expression du fystéme destructif adopté par la France, s'efforca de récriminer, mais il finit en disant, "que certainement on concourroit a tout " arrangement relatif aux Nègres, qui ne feroit pas " contraire aux principes de Ia Constitution.'* " lei finit notre Conférence; et comme, pendant tout le tems qu'elle dura, 'j'avois continuellement a l'esprit, que, quoique ce füt Ia première, elle feroit peut-être la feule, qui me donneroit une occasion favorable de parler des principes généraux, d'après lesquels {S. M. étoit disposée a traiter; je m'eiTorcai, en fuivant plus ou moins tous les Points de mes Inftructious, de mettre M. Délacroix, fi fon Rapport est fidéle, en état de rendre compte au Directoire de ce que j'avois,dit, de manière il lui trter tout moyen etc mal -imerprèter les intentions de Sa Majefté, a eloigner toute possibilité de chicane, et a 1'amener a répondre clairement et distinctement, "s'ilvouloit " consentir k entamer Ia Négociation fur Ie principe «du  159 " du flatus ante helium: ou fur un autre, qui n'en "différoit que par la forme et non par la fubstance.* Jemeflatte, qu'en 1'essayant je ne me fuis pas compromis; que je n'ai découvert de mes Instructions que ce qui étoit convenable; et que dans cette conrcrsation rien ne m'est échappé, qui puisse nuire par la fuite au progrès de la Négociation. Je crois vous avoir rendu compte de cette Conference presque mots pour mots; et j'ai pris un foin particulier de le faire correctement et en détail, afin que vouspuissiez juger' de ce que j'ai dit, et que vous foyez inftrait assez parfaitèment de ce qua dit Mr. Délacroix, pour que vous puissiez vous en fervir comme d'un témoignage authentique. — II faut fe rappeller, comme je 1'ai observé au commencement de cette Depêche, qu'il a parlé d'aprês lui-même, a la vérité, comme Ministrë, mais non fur Pinstruction immédiate du Directoire; et cette observation justifiera un peu la fingulariti de qtielques • unes de fes Propositions.'" «J'avouë, Mïlord, que, d'apres fa politesse et fon empressement apparent a entrer en discussion, 1'impression, qui m'est restée en le quittant, a été, que la Négociation iroit en avant, malgré tant de difficultés; dont quelques-unes presque fi insurmontables, que connoissant, comme je la connois, 1'opi-! nion du Directoire, je voyois peu d'apparence qu'elle fe terminat heureusement: Mais je nefm'attendois pas,.  ÏQO pas, que le,Directoire fe conduiroit tout de fuite de manière a demontrer une inclination évidente, et mème une détermination k rompre fur les premières Propositions. Aussi ne fus-je pas peu furpris de recevoir Dimanche, a trois heurcs après-midi, la Lettre ci - jointe, ( celle ou M. Délacroix lui demandoit ïa fignature du Mémoire et fon Ultimatum dans les vingt-quatre heures.) ■ II mc fenvoya par le Premier-Secrétaire de Ebn Département, Mr. Guiraudet, qui me communiqua 1'Original de 1'Arrèté du Directoire, dont cette Lettre, fauf les changemens de forme, est une Copie littérale." " Après 1'avoir luë, je demandai a Mr. Guiraudet, b'11 étoit in'struit de fon contenu: —> Une conversation s'engagea a ce fujêt. Je lui dis , " que ces deux " demandes étoient fi iriattenduës, que je ne pouvois rty répondre fur - le - champ; que, quant a la pre"•mière, il étoit tout- a fait contre l'usage de iigner "•les Mémoires annexes a une "Note fignée, et quë "j'avois de la peiue a me croire autorisé a me dépar"tir de ce qui me paroisspit une règle invariable :. "Que, quant k la feconde demande faite d'une ma"nière ü inouïe et li peremptoire, je dirois fans hé" siter, qu'il n'étoit pas possible d'y fatis■faire.'" — Mr. Guiraudet m'en temoigrïa beaucoup de regret. et dit,' "que cela étant il craignoit, que nos principes de' "-Négociation ne pussent jamais s'accorder." Je lui1 témoignai le mème regret. Nous continuames a eauser quelque tems, fans qu'il fe passat rien de digne k; remarquer. Je lui dis, "que je lui enverrois ma " Réponse le lendeniain." " En  w "En ré'flèchissant plus mürement fur Ia demande de figacr les deux Mémoires, je me convaiuquis, que je ne m'engageois a rien en y confentant, que c'étoit uniquement ceder a un peu d'humeur, et que cette complaisance ne fervirok qu'k mettre le Directoire encore plus dans fon tort. Quant a la demande étrange de l'Ultimatum, je vis clairement ce que j'avöis a Idire; et j'espére, "que ma Réponse fera trouvée conforme aussi Rrictement qu'il étoit possible a mes " Instructions." "Hier au fok, a deux heures et demie, Mr. Guiraudet m'apporta la Note C (celle qui portoit l'ordre departir de Paris dans 48- heures.) Jy répondis aussi■tot par la Note D. Elles n'ont pas besoin de Commentaires. Comme je prétends quitter Paris démain et voyager en toute diligence, il fera bient&t en mon pouvoir de vdïs rendre comptc de ce qu'il me reste a direréiativementala cloture fubite, quoique peutètre non imprévue, de ma mission." (Signé) MALMESB ÜRT. "Copie desPlein-pouvoirs du Directoire-Exécutif au Ministrë Délacroix etc. etc. Extralt du Registre «fe, Arretés du Directoire-Exécutif da % Brum. an 5 de la Jfw^ Une et ïudivüibL Le Directoire-Exécutif, après avoir ouï Ie Ministrë des Rélations extérieures , arréte ce qui fuit. Le Citoyen Charles Délacroix, Ministrë des Rélal tions extérieures est chargé de négocier avec le Lord Malmesbury, Commissaire Plenipotentiake de Sa Maj. Britannique, mmi de Plein-pouvoirs, pour pré»  1Q2 préparer et négocier la Paix entre la République Francoise et cette Puissance, et pour la conclure définitivement entre elles. Le Directoire - Exécutif donne audit Ministrë tous Pouvoirs nécessaires pour conclure et figner le Traité de Paix a intervenir entre la République et S. M. Eritannique. II fe conformera aux Instructions qui lui sekont DonsÉes. II rendra compte successivement du progrès comme de Tissue des Négociations. Le présent Arrêté ne fera point imprimé, quantk present. Pour expedition conforme (Signé) L. M. Réveilliere Lépeaux, Le Sécrétaire - général Lagarde. Pour Copie Le Ministrë des Rélations extérieures (Signé) Ch. Délacroix. (L. S.) Par Ie Ministrë T. Guiraudet, Secret. gen,. Les Plein - pouvoirs du Lord Malmesbury font concus dans le ftyle et fur le Formulaire de 1'ancienne Diplomatie; la réstriction: que VAutorisation générale ne puisse diroger aux Instructions fpéciales, fait voir, que tous ces grands mots fonores n'en disent, ni plus ni moias, que ce que les dernières lignes de la précedente Instruction, préscrivent au Négociateur Francois', que, ü le Directoire dicte a celui-ci les phrases de fes Réponses, par plus forte raison, le Lord Mal' mesbury étoit engagé d'en chercker l'esprit a Londres. Fin de l'Appendice.