( 147 ) pour déguifer celui-ci & le faire palR-r. 2.6 Décembre 1785. On accufe beaucoup dans 1'alfaire de Mr. le Maitre , un Sieur Cadet de Senneville de manceuvrer iafidieufement pour perdre ce galant homme dont il s'avoue 1'ennemi, mais en faifant femblant d'être 1'atni de la femme. C'ell lui qui a empêché Madame le Maitre de jetter au feu le billec écrit par fon mari a Gutlwri, fous prëtexte qu'il falloit le garder afiö de le montrer a MK de Crofne & le tourner a la julhiication du prifonnier, & au lieu de le mettre enpoche, l'a laiffé fur lacheminée; enforte qu'il elt tombé le lendemain aux mains des inquifiteurs; qu'il leur a donné des foupcons fur cette cuifinière ; qu'ds 1'ont arrêtée, ont fouillé dans fa chambre & y ont trouvé beaucoup de chofes qu'on appelle pieces de conviclion ,qui ont été mifes fous les fcellés en préfence de 1'accufé qu'on a ratnené chez lui avant de le conduire h la Baftille. C'eft le Commiffaire de la Porte qui a fait toute 1'expédition, mais extrajudiciairement. 27 Décembre 1785. Depuis longtems on parle de tranfporter ailleurs la Bibtiotheque du Roi, comme ne pouvant être placée dans le local aétuel. On compte prés de trente mille volumes qui reftent épars & fans ordre. II avoit été queftion autrefois de la transférer au Louvre & même tin Arrêt du Confeil rendu a cet etTet, il y a peut-être vingt ans, eft refté fans exécution. G 2.   MEMOIRES S E C R E % S POUR SERVIR A L'HISTOIRE DE LA RÉPÜBLIQUE DES LETTRES EN FRANCE, depuis MDCCLXII jüsqo'a nos jours; JOU RNA L D'UN OB SER VAT EUR, Contenant les Analyfes des Pieces de TLédtre qui ontparu durant cet intervalle;lesRelations des Affemblies Littérair es; les Notices des Livres nouveaux, clandejiins, prohibês ■ les Pieces fugitives, rares ou manufcritesl en profe ou en vers; les Vaudevilles fur la Cour; les Anecdotes & Bons Mots; les Eloges des Savans, des Artifies, des Hommes de Lettres morts, &C &c. £fV. TOMÉ TRENTIEME. huc propius me, • vos ordine adite, Hou. L. II, Sat. 3. vs. 81 & 81. A LONDRES, Chez JOHN ADAMSON. MDCCLXXXVt   MEMOIRES SECRETS Pour servir a l'Histoire de la Repuijlique des Lettres en France, depuis MD CC LXII, jusqua nos jours. ANNÉE MDCCLXXXV. 7 Qcïabre 1785. Les égards que Mr. le Controleur général a montrés au Corps des Banquiers en venant au fecours des plus embarralfés & en écoutant enfin leurs répréfentations^ & Mémoires fur l'Arrêt du Confeil du mois d'Aoür. concernant 1'agiotage qui a porté le trouble & le difcrédit parmi ëux, n'ont pas fuffi. Les Papiers Royaux ont bien remonte un peu & -la ftagnation a difcontinué ; mais 1'emprunt des cent vingt-cinq millions elt toujours en défaveur & en perte. Ce qui a provoqué un Arrêt du Confeil du 2 Oétobre; oü Pon voit que Mr. de Calonne a d'auffi bons faifeurs de Préambules que Mesficurs Turgot & Kecker. On y lit ce paragraphe remarquable: „ Sa Majefté ne voulant „ pas borner fes vues bienfaifantes a ce que „ 1'ordre public a exigé d'Elle pour faire ces„ fer 1'agiotage effiéné qui s'étoit introduit „ & defirant faire difparoltre le pliuót poffible „ des embarras dont la prokmgation feroit „ nuifible au Commerce, Elle a jugé conTome XXX. A 2  „ venable d accelérer Peiler, de la difpofitiön de fon Arrêt du 7 Aoüt dernier, qui a eu ., pour but de diftinguer les Contraétans en état de remplir leurs engagemens, d'avec „ ceux a qui la livraifon de ce qu'ils ont ,, vendu feroit dans tous les cas impoffible; |, & Elle a penfé qu'il étoit de fa bonté au„ tant que de fa juftice, de mettre les ven„ deurs & les acheteurs également k portée ,, de liquider fans délai leurs intéréts refpec5, tifs par une conciliation équitable,a défaut ,, de laquelle, Elle s'eft réfervée d'y ftatuer Elle-même en connoiffance de caufe, afin que bientót il ne refte plus aucune tracé de „ ce vertige de fpéculation défordonnée qui., n'ayant pas encore eu d'exemple dans le. „ Royaume, néceffitoit un remede extraordinaire." 7 Oclobre 1785. Un nouvel Agréé recu après 1'ouverture du Sallon a expofé quelques morceaux de genre depuis le fecond arrangement. II fe nomme Bikocq: il travaille dans le goüt des Flamands. Son pinceau femble trop brillant pour fes fuiets. Sa Difeufe de bonne aventure lui feroit beaucoup d'honneur, fi ce n'étoit pas une copie. 8 Oclobre 1785. M<\ le Cardinal de Rohan fe promenoit les après- dinées fur la platteforme des tours de la Baftille, avec un officier qui 1'efcortoit. II étoit en redingote brune, en chapeau rond & rabattu: cela faifoit fpectacle pour le public qui fe ren doit a 1'cxtrêmité des boulevards & le contemploit. Pour  ( 5 ) éviter ce concours on a fupprimé ce genre de t promenade, ou peut-être n'en a-t-on que changé Theure. 8 Oïïobre 1785. Par une Lettre datée de Francfort le 17 Seprembre, Mh BlancJwrd fe plaighoit auprès des Journaliftes de .Paris de 1'acharnement avec lequel Mr. Mallet au Pan, le Rédacteur de la partie politique du Mercure, afFectoit de décrier & de tourner en ridicule fes voyages aëriens. Cette Lettre qui n'étoit point fans fel,a été imprimée dans la feuille du premier Oclobre. Mr. Mallet du Pan a trouvé mauvaïs que les Journaliftes ayent donné cours a cette diatribe j il y a répliqué & adrclfë ft réponfe aux Rédacteurs qui vraifemblablement auront refulë de s'en charger; en conféquence ili'aiuférée dans fon Mercure ri'aujourd'hui hnit, Cette réponfe amere, pédantefque, digne des Savans en us du XVre Siècle, ne fait point honneur a Pécrivain politique, & ks rieurs reftent abfolument du cóté de 1'aréonaute. 8 Oclobre 1785. Le Projet da Mr. de la Rocque annoncé il y a quelque tems a caufé une grande fenfation; la cupidité des manoeuvrkrs s'eft évcrtuée cc beaucoup cherchent a fe ménager des rentes pour leur vieilkffe, fuivant- la méthode économïque qu'd leur prefcrit. Mais cette fpéculation n'étoit point a fon point de clarté cs: de maturitënécesfaire; en conféquence il a recu beaucoup de Lettres & de demandes. II elt obligé de donA 3  ( O lier un dévéloppement de fon plan, qui n'eft pas encore trop a la portée de tout le monde & laifie beaucoup de chofes k defirer. Quoi qu'il en foit, on le trouve auffi dans le Mercure d'aujourd'hui huit. 9 Oclobre 1785. L'Abbé Riballier qui vient d'être rernplacé dans fa dignité de Syndic, eft mort aux eaux il y a quelques mois, fans que perfonne même de fon parti lui ait décente" le moindre honneur funebre dans aucun Journal. C'étoit cependant un homme de mérite dans fon genre &furtoutun zélédéfenfeur de la religion , un dénoneiateur intrépide de tous les ouvrages tant foit peut fufpects. 9 Oclobre 1785. On voit dans l'Arrêt du Confeil du 2 de ce mois que les gagiftes du Miniltere cxaltent jufques aux nues, combien il a été agité du mécontentement général des Banquiers & de l'inaétion abfolue a laqueüe ils s'étoient condamnés depuis l'Arrêt du 7 A""t dernier, qu'ils qualilioient d'acte d'un defp'aUfrflè terrible, dont il n'y avoit point d'exemple dans leurs négociations & qui attaquoit fuivant eux les propriétés jufques dans les conventions les plus facrées. Quoi qu'il en foit, fans en difcuter le fond,il eit certain que le Préambule de cet Arrêt eft aux yeux des connoiiTeurs un chef-d'ceuvre par la clarté, la nobleffe, 1'énergie & la jufteffe d'expreffion avec ltfquelles les parties les plus difficiles a traiter y font préfentéts; mais furtout par les tournures artificieufes avec les-  C7) quelles on déguife les frayeurs du gouvernement & 1'on traveftit ce coup d'autorité en un afte de légiflation falutaire & confervateur. „ SaMajefté,ydit.on,eft informéequel'obli„ gation de dépofer les effets (ft livrer) dans le „ terme qu'Elle a prefcrit, a déjft fait liqui„ der une partie des Compromis, qu'elle n'a „ embarraffé que ceux qui s'étoient engagés „ au de-la de leurs moyens & que cet embar„ ras même n'a pu paroltre aux yeux des gens „ inftraks qu'une kcon pour 1'imprudence & „ une crife falutaire qui, loin de porter la moindre atteinte au Crédit du Tréfor Royal, „ a fervi ft démontrer qu'il eft aflis fur des „ bafes inébranlables & indépendantes de „ toute efpece de négocia'tion particuliere; „ que néanmoins il en eft réfulté une inquié„ tude vague parmi les Capkaliftes, qui, „ effrayés de cette fouie exorbitante d'en„ gagemens d'un genre infolite & ne fichant „ pas jufques ft quel point celles des Maifons „ de Commerce & de Banque qui s'y trou„ voient cornpromifes, pourroient influer par „ contre-coup fur la fituatiou decelles-même „ qui n'y avoient aucune part, ont fufpendu „ ft 1'égard de toutes leur confiance, ont res„ ferré leurs fonds & différé leurs placemens; „ ce qui a produit au milieu de la plus gran„ de^ abondance du numéraire, toutes les „ cailfes publiqucs étant garnies, tous les „ payemcn fe faifant avec la plus grande „ exactitude 6c plufieurs même étant antiA4  (3) cipés, un moment de langueur dans la ;, cireulation, une forte de ftagnation fur Ia „ place & la dépreffion ïnftantanée de quel„ ques effets." On continue , après avoir précédemment '. Boudon eft arrivé avec lui. Mr. Franklin a remis a fa fille fon fils, déjft formé, qui étoit encore enfant lorfqu'il Pemmena en 1776 a Paris. 20 Oclobre 1785. Depuis longteros on n'avoit parlé d'un Duel anffi mémorable que celui qui vient de fe paffer entre deux officiers du Régiment de Soiflbnnois & un autre. Les deux premiers font Meffieurs de Saint Me/me, parent du Colonel de ce nom, & M>'. Barras, parent de 1'officier général de Ia Marine du même nom. Le dernier eft Mr. Dumefnil Durand. On ne fait fi c'eft celui, connu par un Syftême de taétique particu-  lier. Ce dernier faifoit la chouette au trictrac aux deux autres; il s'éleve entre eux une difpute, elle devient fi grave qu'ils fe battent d'abord ft 1'épée, & fur ce que le régiment des deux premiers ne trouve point la rixe fuffifamment vuidée, ils conviennent d'en venir a un combat plus régulier au piftolet: les conventions faites , ils prennent des témoins & fe rendent 4 Luxembourg. Mr. Dumefnil Durand continue ft leur faire la chouette en ce duel, comme au jeu. II tue d'abord Mr. de Saint Mefme : le fecond fe, préfente, ' il le blefle ft 1'épaule; M''. de Barras n'en devient que plus ardent, il tire fon coup de piftolet & calfe la cuifle de Mr. Dumefnil Durand, qui tombe fans défenfe. Ces féroces combattans, comme les juges du point d'honneur avoient décidé que la mort feule pouvoit laver ou éteindre la querelle, étoient convenus que 1'on acheveroit ft terre celui que le malheüreux fort des armes y jetteroit; Mr. de Barras s'approche de Mr. Dumefnil, lui dit qu'il eft maitre de fa vie, mais la lui laifle: les témoins décident la querelle vuidée abfolument par ce beau trait, qui met Mr. Dumefnil Durand dans 1'impoflibilité de fe battre de nouveau contre un vainqueur aufli généreux. On les fait s'embraiTer & ils font rentrés fur les terrés de France. On dit que le Roi eft trés mécontent de ce duel. fil Oftobre 1785. Un échantillon des plaifanteries  C 25 ) plaifanteries de M'\ Hilliard d'Auberteuiï contre Mr. le Comte de Mirabeau fuffirapour en donner une idéé; c'eft une Epigramme ioi-dnant qu'on trouve en note dans fa Lettre VII de fon pamphlet intitulé fur Jon Mériti Litteraire &fur la Caiffe d'Efcompte, Mirabeau, grand Patriote, Fait la guerre a notre argent, Contre la Banque il complotte, Des Banquiers il eft 1'agent. Tandis qu'uu autre agiote, On 1'infpire , ilparle, écrit, Et met nu rabais 1'efprit. « OElobre 1785. On eft fort furpris que Ia Gazette de France qui ne laiffe palfer fous Uence rien de ce qui intérelfe la marche de Ja cour & rend ordinairement dans le mms grand détail les circonftances de ces événr menspublics, n'ait fait aucune mention d'une efpece de fête pour les Parifiens quia eu Peu le dix de ce mois, jour du départdeLenrsMajeftés pour Fontainebleau. La Reine qui a caufe de fa groiTeiTe,- en 1783 s étoit rendue a Fontainebleau par eau dans la gondole de M, le Duc d'Orléans,l été fi fatisfaite de ce genre de voiture & fans doute du beau coup-d'ceil de la route, que fans une pareille néceffité elle s'eft fait ™ plaifir de voyager de même cette année.  C & ) lant, riche & commode; on allure qu'on y a ménagé .iSaMajefté un appartement compofé de neuf pieces. On en évalue la dépenfe k foixante mille livres. On fut que Sa Majefté pour éviter les ponts s'embarquoit a la Rapée, ce qui attira la foule fur la rive & donna lieu a beaucoup de parties de plaifir. Le Roi qui avoit cbaffé du cóté de Cboify, Voulut fe trouver au chateau,ou plutót dans les jardins pour voir palier la Reine , & toute la route fut bordée de monde, forti des villages & maifons de campagne des environs, curieus du même fpeclacle: fans doute beaucoup de Vive la Reine! répétés de tems en tems, ont fiatté agréablement les orcilles de Sa Majefté. 2.2 Ocïobre 1785. Depuis qu'on fait que 1'Inftruction a faire par le Rapporteur dans 1'affaire du Cardinal de Rohan eft terminée, 1'on raifonne différemment fur ce qui en tranfpire. Las uns prétendent tenir duGrefüitFremin qu'il n'y a nulle charge contre fon Éminence : les autres concfuent qu'il faut au contraire qu'on le juge dans le cas de lafévérité des Loix. Ils difent que ce Prélat n'étant encore frappé d'aucun Décret, étant fimplement fous la main du Roi, on n'auroit pas manqué de Pélargir provifoirement jusques a ce que fon innocence éclatk en juftice; d'autant que dans la circonftance de Pérat de mauvaife fanté oa il fe trouve, ce feroit  C »7 ) Une forte de cruauté de le iaiiïér en prifon. 22 Oclobre i785. Le peuple & beaucoup d hpnnêtes gens qui le font, tirent parti de tout. pour leur..amufement; c'eft ainfi qu'une proceffionrehgieufequin'avoit pas eu lieu depms plus de, vingt ans, a attiré la foule non feulement des Parifiens, mais de beaucoup d habitans des environs. II s'agit de trois eens treize Esclaves francois , rachetés 4 Alger en 17S5, par les deux Ordres de la Rédemption, favoir, celui des ChanoinesRéguliers de la Sainte Trinité, dits Mathurins, cc celui de la Mercy. ' L'ufage eft de promener & de faire voir ainfi ces Efclavcs pout exciter d'abord la curiofité & enfuite la charité du public La proceffion a eu lieu pendant trois jours'de fc mmnere u1Vante : Le Ixxndi dix-fept Oétobre ï785; en léglife de Pabbaye Royale Saint Antaipe; le mardi dix-huit enceüe de POrdre Royal&militaire deNotre-Dame de la Mercy. & le mercredi dix-neuf en celle des Chanoï nes Reguliers de la Sainte Trinité On ne fait pourquoi Je premier jour il a été m un compliment h Madame PAbbeile de Sn* Antoine au nom des deux Ordres par Thomas le Bmuf,tgé de qui„ze ans, qui ifeft Wiommé parmi lesEfclaves; pourquoi fe. dit jour le méme jeune homme a préfenté au Général de POrdre des Matburins les Captifs rachetés par eux, fans qu'il foit fait mention d aucune haranguc de cette efpece a Pégard B 2  du Chef des Mercitains. Quoi qu'il en foit parladiilributiondelamarehe, de laréunion ' de la féparation & des évolutions de cliacun de ces Ordres & de leurs Captifs refpecrifs, als ont parcouru a peu prés toute 1'e'tendue de la ville de Paris & il u'e<ï en quelque forte aticun cceur dont ils n'aient follicite' la pitié. La Proceffion fe fahoit en grande pompe $ Pon y avoit joint tout Pappareil qui peut eu jmpofer; duGuet, les Gardes de la ville, des _ iuftrumens militaires & religieux; - des Croix, des Bannieres , des Cherubins foutenant avec des cordons des Etendards' de Ia Rédemption des deux Ordres ; un grand Cortege d'Eccléfiaftiques, de Muficiens, de Suisfes: en outre chaque Captif poitoii 1'éculTon de celui des deux Ordres auquel il appartenoit & étoit fous la garde de deux Anges les enlacant avec des Rubans rouges & Jdeus; cesAnges tenoient des banderoles aux armes refpeétives desdits Ordres: enfin les Commiflaires députés pour fa Rédemption fermoient lamarcheavec des palmes a la main. Une promenade auffi longue exigeoit nécesfairement des paufes, conféquemment des rafFraichilTemens , oü le vin couloit en abondance, tellement qu'on a vu nombre de Captifs quelques Religieux dans un état peu décent &. faifant dégénerer en farce cette cérémonie pieufe & charitable, qui feterminok chaque après dlnée par des antiennes & des béaédiétions. Tel elt le fort des nulitutions  (fis) humaine»5oii Ia profanation & le fcandale fe trouvent preique toujours mêlés avec la charité & la. dévotion. 22 Oclobre i7S5. Depuis la mort de Mr. TW beaucoup de concurrent s'étoieut mis lm es rangs pour la place vacante a Académie Francoife; le Siw Sedaine Pour «e point mauquer.fon coup cette fois avoï c .antL la Compagnie entiere & il fe flattoit ^ uimr par cette tournure dont aucunca«- SuiSt?0^ cncore avifé; mds °» ^ qu aujourd hui tous fe font retirés en annre- anSStt; 1785- Cha^eM»-^clatedeS tuf! T ^CerM1 «le Cardinal &fon aven- ' s'otd fenv? Bf^^*« par des ^nsqu. femolent fans pour être bien inflruits. Si 1 ff CataaT°Phe> vim trouver un SKlêB*' «N*W*>* ^ Ie pont « .im Fortran. C'étoit celui de la Reine W dai?s ll» ^at fort indécent & décolletéê ^ques aunombrjl. EUe propol. a ?S ci u chafler cette miniature avec un fecret lln 'Z"hTd?£ 0ua 13 ^her comme ' Pnlc&fon mdjgnation de ce qu'omle choifit o ur une pareille oeuvre. Madame de la Motte WiU^e en lui ajoutant que c'étoit la Reiae B 3  C 30 ) siêmeqm 1'avoit chnrgée de cette coftimifTjon-. Alors 1'artifte le rendit ft ces inftances, & la bolte enrichie du Portrait, cette Dame 1'offrit au Cardinal comme une preuve de la faiisfaétion de Sa Majefté. 23 Oclobre 1785. Mr. BaJJet de la Mar elle,< 1'un des Préfidens du Grand Confeil, a été «onduit pour dettes ft 1'hótel de la force & eft menaeé d'y refter longtems. Sou Tiiou* aial a cherché 'ft tenir le cas fecret ie plus qu'il a pu; mais enfin la chofe eft publique & 1'on fe doute combiende farcasmcs o ruches lancées en liberté dans le jardin du Sieur Ruggieri. La première étoit une Nymp'ie de buit pieds de proportion & 11e pefant que dix onces; elle. étoit coëffée d'un Balion & portoit une robe tranfparente, couleur de feu. La feconde, le Cheval allé & tranlparent, monté par un guerrier richement armé, qu'on voit depuis longtems au Palais Royal. Ces deux machines fe font élevées avec beaucoup de grace & de célérité; elles ont toonté trés. haut; on ne fe ffattoit plus de les rcvoirj cepeudant Pune a été trouvée a Gen**-  (37) villiers, & Pautre prés de Montmoréncy. Par ks Procés Verbaux du même jour, elles n'ont gueres été qu'une heure en Pair, chacune, & fans être endommagées; elles ont été remi» fes de même au propriéiaire. 28 Oclobre 1785. Deux débuts trés intéreffans ramenent aujourd'hui vers la fcene francoife le public qui s'en étoit éloigné & furtout le public galant ;carce font deux jeunes actrices. L'une eft M»e. Candeille, fille du mufieien de ce nom, auteur de 1'opéra d'Alexandie, & protégée par Mr. de Breteuil. Elle eft trés jolie, elle avoit paru d'abord fur le théatre lyrique, oü quelque peiite incongruité qui lui échappa en fcene, foit partitnidké, foit par iuconnnodité réelle, ne lui a jamais permis de remonter. Ekve duSkuriWo/e', elle s'eft retournée du cóié du théatre francois & s'eft appliquée aux róks forts des jeunesPrin* celks, tels que ceux tfHermione, de Roxeïane , óAmemïde, aAlzire & d'Ariane; c\a lui a trouvé fouvent de 1'énergie, de la fenfïbilité , des mornens d'abandon intértffans, des intentions juftes, mais des incorreciions & des inégalités; ce qui eft la fuite du jeu d'une débutante qui n'eft pas encore füre d'elie-même, qui fe tate & le Parterre: comme elle paffe pour avoir beaucoup d'efprit, elié eft plus en état qu'une autre de faire valoir ks heureufes difpofitions qu'elle a recues de fa nature. B 7  • L'autre eft WK Vanhove, fille & éleve dit comédien de ce nom, ayant k peine quatorze ans. Elle a paru pour la première fois dans le róle d'Iphigenie vis-è-vis de fon pere repréfentant Agamemnon; elle a obtenu de nombreux & de vifs applaudiflemens ce jour-la 10 Oétobre: un fon de voix intéreffant, de lintelhgence, de la fenfibilité, lacandeurla plus ingénue; telles font les qualités qu'on hu a reconnues a cet eflai. Elle a joué depuis dans le comique les róles d'Amoureufes tencres, & femble réuuir déja les plus heureufes difpofnions pour les deux genres. Son fuccès fe foutient cc s'accroit; tout Paris fe porte en loule pour 1'admirer. . 29 OSlobre 1785. L'un des deux cótés intérieurs de Pfiglfle de Sainte Genevieve elt cntierement terminé- il eft débarraffé aujourö hui de tous les échaffauds & Pon y entre « Jirion de ce bel édifice, fon ordonnancê tóajeftueufe , Pélégance de fes colonnes, la nchefle des fculptures attirent le concours des amateurs & les applaudiflemens des fpeétateurs les plus groffiers. On travailïe aétuellement au Dóme; voila le moment inté. refiant de la folution du problême élevé par le Sieur Patte. Comme il y a des fonds affectés chaque année pour cet objet, on efpere toujours que dans fept ou huit ans ce monument fera terminé. 30 OSlobre 1785. Mr. le Marquis de Cour•WM.Mdfctde Camp,Cheyalierde POtie  C 39) Royal & Militaire de Saint Louis,' Gommisfaire perpétuel pour 1'impofition de la Province de Bourgogne & Membre de PAcadémie des Sciences eft mort ïe cinq. de ce mois dans fon chateau. II étoit penfionnaire vétéran. On ne fait trop ce qu'il a fait, & il faut attendre VEioge qu'en fera Mr. k Marquis de Condorcet. 30 Oclobre 1785. Comme tout ce qui concerne la marcbe de M'\ de laPeroufe ,eft intéreffant , voici des partieularités exiraites d'une Lettre de Sainte Croix de Teneriffe, datée le 27 Aoüt. Les Navires la Eovjjole & VAfirolabe ay.int fait voile le premier Aoüt, arriverent le treize fuivant a 1'ifle de Madere. Les Perfonnes embarquées fur la Boujfole font, k Comte de Ia Peroufe, Capitaine de Vaiffeau, Chef de 1'Expédition; les Chevalkrs de Génard & de l'Efcars, Licutenans de Vaisfeau; Mr. Botin& leChevalier de Pierreverd, Enkignes; Mr. Colinet, Lieutenant de frégate; Meffieurs Ceran de Montarnel & d'Arbaut, Gardes de la Marine; Mr. Broudac Voluntaire; Meffieurs de Moneron, Capitaine au Corps de Génie; Bernicet, Ingénieur Gér» graphe;' Pafteur efpere enfin en venir a bout &le faire mourir trés chrétiennement. 6 Novembre 1785. On ne voit encore d'autre réponfe a la lettre vraie ou ficïive de M!la. Contat k Madame Vanhove que le madrigal fuivant, que font courir les partifans de k nouvelle actrice, a laquelle ü eft adreffé: Qu3 Contat, nouvelle EripMïe, Contre coi de 1'envie épuite tous les traits, Paris répond avec Achille, Vous nüen voyez encor plus épris que jamais. Ce vers thé de VIphigénis de Racine eft d'autant plus heureufement appliqué ici, qu'en effet toutes les fois qu''Achille le difoit durant les débuts de Mlle. Vanhove qui faifoit, comme Pon fait, le róle de la fille d'Agamemnon, le Parterre faiOflbït 1'allufion & applaudiflbit a tout rompre. Ce madrigal, attribué a un jeune homme de beaucoup d'cfprit, nommé M". Salior , a été fait par impromptu dans un Tem XXX.. C  ( 5o ') fouper, oü 11 fe rencontroit pour la première fois avec la familie des Vanhove. 6 Novembre 1785. L'apologue oriental ou. 1'on a raconté dans le plus grand détail toute 1'affaire du Collier eft inférö dans une Lettre de Ia C de M. d 1'Abbé G. C'eft une réponfe fictive de la Comtelfe de Marjan a la Lettre de 1'Abbé Georgel qu'on a rapportée dans le tems. On a aftécté de faire tomber dans les uiains du' Roi ce pamphlet imprimé au rouleau. La Reine y elt défignée fousle nom de Myria, & comme il eft tout entier a la gloire de la Souveraine , fon augufle Epoux 1'a goüté, a même adopté ce nom & depuis ce tems-la a appellé plufieurs fois»la Reine, fa cher'e Myria: outre 1'anecdote du jour, ce Conté allégorique rappclle d'autres faits & geftes qui ne font pas plus d'honneur au héros. Ce font fa vie & fes moeurs , préfentées fous le point de vue le plus honteux. 7 Novembre 1785. Depuis plufieurs jours on parle d'une ceffion de tous fes biens, faite par Monfieur au Duc de Normandie. On tient la chofe pour füre aujourd'hui. Elle eft d'autant plus extraordinaire qu'elle fembleroit ansoncer quelque inimitié fecrette eutre ce Prince & le Comte d'^rrofr,fon frere, dont il fruftre ainfi cruellement les enfans; ccpcndant comme on ne fache rien qui puiffe autorifer ce foupcon, ou regarde cette conduite fimplement comme uu coup de politique & 1'on croit qua c'eft le fruit des confeiis de Mt. Crotno. En effa fuivant cette combiriaifon, de eet évene-  C 51 ) ment il réfulteroit une coalition entre-la Reins & Monfieur, qui, pour condition fecrette, entreroit au Confeil. De fon cótéSaMajefté tiendroit a une diftance c^nvenable ceux qui out aujourd'hui fa confiance & ladonneroic toute entiere a cette Altelfe Royale. Ils aideroient ainfi le Roi a föutémr le poids des affaires & les chofes n'en iroieut que mieux, avec le fecours d'un Prince inftruit, fage, appliqué, économe, peu livré au plaifir & intérefle? perfonnellement a la confervation & a la profpérité:du Royaume.. Le tems feul dévoilerai totis ces myfteres. 7 Novembre 1785. Un nouveau SupplêmenS au Journal de Paris en date du douze Oclobre paroit encore imprimé au rouleau. II elÊ toujours principalement dirigé contre Mr. de Calonne & révele plufieurs anecdotes qui na lui feroient point honneur} fi elles e'toient vraies. Ce qui décrédite fort 1'écrivain, c'eil d'impliquer dans tout cela le Comte de Ver» gennes, dont les mceurs, le caractere & la re'putation ne paroiffent gueres compatir avec Hne pareille aflbciation. 8 Novembre 1785. Mr. le Controleur Général voularrt fans doute donner un dernier coup de collier en faveur de fon Emprunt, 'avoit chargé le Comte de Mirabeau d'écrire contre les AEtions des Eaux, montées comme certains effets particuliers ou étrangers a un prix fol. L'auteur dans fa brochure pleiiie de logique & écrite avec le feu & l'élaC a  c 52) quence qu'il répind iufques dans les matieres les plus abftraites, dccouvre d'une facon biert fenfible 1'extravagance de eet agiotage! Mcsfieurs Perrier en ont été furieux: ils ont fenti le dangerde laiffers'accréditer une pareille dïatribe: en conféquence ils ont eu recours au Sieur de BeaamarcJiais;ils lui ont reiuis leurs papiers & Font chargé de' répondre. 8 Novembre 1785. Extrait d'une lettre de Fontainebleau du 7 Novembre 11 y a une rivalité de gofit abfolu'ment ouverte e'ntre Ia cour & Ia ville. Tinm;fioc.le eft tout - a- fait tombé ici, & Penelope dont les répétitions avoient fant "enchanté les Parifiens, n'a gueres mieux réufli. Dardanus, au contraire, dont ils étoient dégontés, a joui d'un plein fuccès. Mr. SaccJiini dans 1'excès de fa joie s'elt écrié qu'il avoit fait eet opéra pour la cour, que fon fuffrage lui fuffifoit & qu'il fe f. de ceux de la ville. Quant au Sieur Morel, feyant refufé de mettre en mufique un.de fes ouvrages, il lui avoit juré une haine immortelle, 1'avoit menacé par fes manoeuvres & par fon crédit dans la troupe lyrique de faire tomber tous fes opéra. Mr. Sacclini n'avoit pas manqué d'en inflruire la Reine -& Sa Majefté s'eft fait un plaifir de veuger fon protégé. Du refte Dardanus, dans Ie principe en quatre aétes, n'eft plus qu'en trois. 9 Novembre 1785. On afiure que la Reine s'eft li bien trouvée dans fon vacht qu'elie a réfolu de s'en fervir pour revenir de Foniai. nebleau. Comme il y a une cheminée dans  C 53 ) fon pppartemem, Ia rigueur de la faifön n'y fait point ohfiacle; il y a une autre cheminée dans Ja cuifine , en cas que Sa Majcfte veuille manger 'un po'ulet. 9 Novembre : 1785. Autre Supplément an Journal de Paris du vingt - fept Oétobre 1785. C'cli un fttQlffljjhetfient aftïeux contre MH de Calonne. ■ Dans . celui - ci on tient Note-jour par jour de tout ce qu'il a fait depuis, le commencement du voynge, ou plutót de ce qu'il n'a pas fait; car, a en cruire ce Journal, il 11'auroit vaqué qu'a fes plaifirs & n'auroit trouvé aucun moment pour le travail. ii Eu, Q.utre, on trouve dans ce pamphlet une L*ttre fiêtive de ce Minillre, oü 1'on lui fait dEjiiflijder a hh: d'Aulun pour fon frere 1'Evêchê.de Saint Malo vacant. Cette.Lettre eft plaifjmte rekuivement a VAbbé de Calonne , qui paffe pour un alfez mauvais fujet comme Eeeléiiaftique. 10 Npvmbre 1785. M'". Pkrre RouJJeau de Tüuioufe, Conléiii^r Aulique de 1'Electeur üalatin, vient de fuccomber enfin a delongues ci cruelks fouürances. On ne fait encore i qui le Journal Eueydopédique fera confié. Outre la manufaéture qui lui appanenoit en propriété, eet homme de lettres travuilioit depuis kmgtems avec beaucoup de fuccès a eet ouvrage pénodique né fous fa plume. il paroif qu'il a trés bien ibmenu fon röled'Encyclopédilk & qu'il eft mort philofophiquement. iMr. k Curé de Saint Roch étoit venu le voir une C 3  C f4 ) . fois & il avoit été admis; depuis cette première vifite, le malade repofoit toujours,IorfSque Ie Pafteur fe préfentoit. ïoNevembre 1785. Ces Supplément au Journal de Paris qui prennent le train de fe fuccéder périodiquement & fréquëmmejit, ne Inisfent pas que d'intriguer larPÊiiceipon les attrit, bue A la fociété d'un Ex-Miniftre, qui fe venge ainfi du tour qu'on lui a joué en Pexpulfant peu après fon exaltation. Quoi qu'il foit dous & honnête, 011 le foupconne rancunier. En tout cas ces pampblets ne peuvent s'attribuer qu'a des gens bien infiruits des opérations & des marchés de Mi-, de Cdlonne: en outre, il faut quils aient de certains entours &des facilités peu communes pour 1'impreffion de ces fcuiiles &pourfe fouftraire pendant unfi long -efpace de tems a la vigilance des efpions & üux recherches des prépofés a cette inquifition; il faut encore qu'ils foient en état de faire des facrilltcs pécuniaires confidérables, d'autant que la diftribution s'en fait par ïïmis .& gratuicemcnt; enfin ce ne peut etre qu'aniéië de quclque puffion violente, qu'on fe livre aux embarras, aux inquiétudes qu'entraine ce genre demanceuvres clandeltines & multipliées. 10 Novembre 1785. La Reine eft li contente de fon yacht qu'elle vent faire avoir un Bon de Fermier général au Sieur Leleu, 1'un des entrepreneurs de fa conftruétion. • 11 Novembre 1785. On a annoncé que le Sieur Audinot avoit repris la direétion de fofi  C 55 ) fpeétecle a la grande fatisfaéliori du public; il s'eft aiTocié. un Sieur Arnould & tous deux cherchent a foutenir leur entreprife en raflemblant les circonftances les plus propres a piquer la cufiofité. Depuis longtems le premier avoit douné une pantomime, oü eft reprcTentée 1'aventure du Sieur Gilet, qu'on a vu recemment expofée au Sallon dans un tableau de Mr. Ville. A cette occafion on a découvert que ce brave Marécbaldes Logis étoit aThótti des Invalides. Le Sieur Audinot a imaginé de Pinviter d'affifter a une repréfentation de la pantomime le lundi quatorze de ce mois, avec un grouppe de fes camarades, auxquels on réfervera la première banquette. II s'elt flatté avec raifon que chacun s'emprelTeroit de voir ce perfonnage vénérable qui a foixante-feize ans aujourd'hui & en avoit déjafoixtnte-treise tors de fon conibat généreux. ii Novembre 1785. II paroit des exemplaires d'un Mémoire de vingt pages d'imprefiiou in quarto, fervant de réponfe a la derniere déclaration de, la Cour dc Berlin; il a pour titre: Examen des Motifs d'une ajjociation pour la confsrvation de la Conjlitution de 1'Empire, expo/és par Sa Majefté le Roi de Pruffe, fiP adreffês de fa part d fes Co Etats de l'Empire ef d d'autres Cours de l'Europe. 11 Novembre 1785. M-è. Fanier a peine 4 revenir du coup que lui a porté la mort de Mr. de Larbtulmé, fon ancien amj, arrivée C 4  C 56) fnbitement chez elle en jounnr. Ce Capitaine aux gardes vivoit depuis vingt ans chèz cette actrice & lui étoit fi fort attaché, qu'en Ié irtaiiant il avoit mis pour condition que fa femme reftcroit dans fes terres en Auvergne, autant par économie qu'afin que rien ne put troubler fon union avec la courtifanne en question. II y tenoit bureau d'efprit avec le Préfident (PHérivourt & d'autres commenfaux de M"e. Fanier & s'étoit ainfi formé un peu a la littérature. 11 ya environ quinze jours qu-'elte eft dans le deuil & la douleur de cette perte irréparable. D'un autre cóté, la familie fe plaint du défordre énorme qui a réfulté de ce commerCe dans la fortuné de Mr. de Larboulerie, qui fe trouve, fans aucune dé« penfe apparente , endetté de cinquante mills écus. ia Novembre 1785. On a diftribué depuis peu anonymement chez les Banquiers & dans le public fans favoir ni comment ni pourquoi , trois Tableaux concernant les forces & les Enances du Royaume. C'ell un beau jeune liomnie qui vient les offrir moyennant finance, mais fans vous taxer. Ces Tableaux font de Ia plus grande beauté, mais exagérés dans leurs calcuis; on préfume avec raifon que 1'auteur eft autorifé parle Miniftêre & fepréfenter ainfi dans les mailóns, autrement il auroit été déja arrèté. 12 Novembre  C 57 3 li Novembre 1785. Relation de Ia féance pubfque de 1'Académie Royale des Sciences pour fa rentree d'après la St. Martin. Les Prix font aujourd'hui fi multipliés qu'il eft a.craindre qu'ils ne deviefinent trop communs & que le vrai mérite ne les dédaigne. Les annonces feules ont tenu un tems confiitórable; c'eft fuivant 1'ufage, le Secrétaire de la Compagnie qui les a promulguées, ^ i..Conformément aux iutentions du Roi, PAcadémie avoit propolé pour 1783 un Prix de deux mille quatre cents livres, dont le fujet étoit de trouver le procédé le plus-fimple £f le plus éconamique pour décompofer en grand le fel de la mer, en extraire ï'alkali qui lui fert de bafe dans fon état de pureté ,dégagé de toute combmaifon acide ou autre,fans que la vakur de eet alkali minéral excede le prix de celui que ïm tire des meilleures foudes étrangeres. , Les Mémoires envoyés n'ayant pas , au jugement de PAcadémie, fuffifamment rempü le but du Gouvernement en 1783,, elle a remis le Prix pour 1785; elle n'a pas été encore entiérement 'fatitfaite a ce concours & prupufe pour la troifieme fois la même question. L'Académie s'expliquera délinitivement dans 1'affemblée publique de Paques 1788. 2. L'Académie fe trouvant a portée de dispofer d'un fonds proprea douner unPrix tous les deux ans, depuis f777 a joint un Prix de: Phyfique au Prix de Mathématiques, au'elte C 5  C 53 ) eft dans 1'ufage de propofer annueliement. Le fujet pour la prochaine proclamatlon eft la queftiou fuivante: Expofer les principes de la meilleure méthode, d'après laquelle les obfervateurs devroient étudier 6? décrire Vhifioire minéralogique d'un canton ou d'une province; 1'Académie exige que 1'auteur faffe l'application de fa méthode d un canton, même d'un fetite étendue. Le Prix de quinze eens livres fera décerné dans 1'alfemblée publique de Paques 1787. 3. Un amateur éclniré des Sciences a pro pofé a PAcadémie de fe charger du jugemens d'un Prix fur la queftion fuivante : Onfuppofe 1. qu'un vaiffeau connu depoids, de furme, de pojition, Je meuve fur la fur face de la Mar, fuppofée plane ef horifontale, avec une vhejft donnée £f paralklement dfaquille; z.Qu^une eaufe quelconque foffe naitre, fur la ftirfaee de la Mer, une onde ou lame circulaire unique, dont le centre foit placé fur le prolongement de la quitte, & dont on connoiffe la fortne, eu a l'origine, ou dans uncertain injlant de fa durée: 3. Qjie cette lame, en vertu de fa vheffe, atteigne le vaiffeau; cela pojé, on demande les changemms que la lame fera naitre dans les mauvemens du vaiffeau, foit par le chec, foit par la différence des prejjions. Cette propofition a été acceptée par PAcadémie & elle décernera le Prix dans fon alfemfelée publique d'après Pliques I787. Malheujeuieineut ce Prix n'elt que de deux eens qua-  C 59) • jan te livres & plufieurs auditeurs ont obfervë que c'étoit bien peu d'argent pour tant de ehofes. 4. Un Citoyen anonyme a fondé un Prix de mille quatre - vingts livres, en faveur dun Mémoire fout eau a" Expériences, qui tendra d fimplifier les procédés de quelque art mchanique. L'Académie entrant dans les vues da fofidateur, avoit propofé pour le premier Prix en ce genre le fujet fuivant: de perfecïionner la conjlrucïion des moulins d eau, furtout de leurs parties inttrieures, &c. II devoit ê'.re adjugé k Pilques 1784 , & il avoit été remis .pour cette Séance aétuelle. C'eft un Mr. Dranfy, Ingénieur du Roi, qui Pa obtenu. Quelques obfervateurs dans la féance ont prétendu qu'il étoit abfolument incapable d'avoir compoféfon Mémoire, que c'étoit un homnie des plus ineptes. Cependant le Secrétaire a ajouté, que PAcadémie en couronnant Mr. Dranfy, 1'invitoit a continuer fes recherches, fur un art dont il s'eft beaucoup occupé & li digne par fon objet de toute 1'application d'un homme iuftruit. 5°. Le fujet du Prix a décerner a Paqtres 1787 eft: la meilleure maniere de dijlribuer, fuivant des rapports donnés, un volume déter* miné deau entre les dijférens quartiers d'um ville, en ayant égard aux divers accidens du terrein; c'eft ■ d dire, aux inégaliiés des hau-. teurs des lieux, cü les eaux doivent être en* voyées}auxpentes &s aux fnmofités du terrein. C 6  C f5o ) 6". L'Académie avoit propofé* encore pour un Prix qu'elle devoit adjuger en 1784 & dü également au zele du même citoyen anonyme Je fujet fuivant: ,, Déterminer la nature fi? Ut caufes des maladies des ouvriers employés dam la fabrique des chapeaux, particulier2ment ceux qui fecrettent, fi? la meilleure mamere de les préferver de ces maladies: n'ayant pas été pleinement fatisfaite des Mémoires envoyés a cette époque , elle remit le Prix pour cette féance-ci, & c'eft Mr. Henri-AlInert Gojfe de Geneve qui Pa mérité; il avoit déja remporté le Prix de 1783 fur un fujet du même genre: Le Secrétaire en conféquence en nommant le Laureat y a joint le compliment fuivant: L'Académie, en couronnant deux fois les travaux de Mr. G(#, voit avec beaucoup cl ïr.térêt, que la claffe des hommes qui, par leur état,font expofés è des accidens graves, at ire conftamment l'artention de ce Cnymifte. elhmable; que fes regards fe portent naturelItment fur cette multitude d'ouvriers fi dignes. qu'on veiile pour eux, & qu'il trouve une véritable gloire & leur vouer tous fes talens. 7°. Mr. de Condorcet a ajouté: le Public voit avec reconnouTance combienle fondateur * ces Prix défi'"e de contribuer au progrèsces Arts par de tels encouragemens : un fentiment bien capable de remuer les hommes a. deji porté, comme 011 a vu, ce vcrtueux cisoyen a excitcr Péinujaiion parrai les üvans,  (Cl ) pour qu'ils s'occupent en particulier' de confervation d'un trés grand nombre d'arttfans, dont la fanté eft fouvent altérée par la nature même du travail qui les fait fublifter. L'Académie , toujours empreffée d'entrer dans des vues qui vont direétement au bien de Fbumanité, prqpofe , pour le fujet d'un fecond Prix, la recherche des moyens par lesquels on pourroit garamir les broyeurs de couleurs des maladies qui les attaquent fréquemment & qui font la fuite de Uur travail. Quoique le métier qu'ils exercent, foit fimpk en lui-même, n'exigeant de leur part qu'un peu ri'babitude & furtout de la propreté, ceptndant PAcadémie invite les auteurs qui travailleront fur ce fujet, a donner une defcription ext.cte de Ce métier: elle attend d'eusc eneore qu'ils entreront dans un détail circonftancié des djlférentes matieres qu'tmployent les broyeurs de coukurs , des mélanges qu'ils font obligés de faire & des efléts dangereux qui en réfultent aflez fouvent. L'Académie défire principakment que les auteurs tourntnt toute leur applkation du coté des moyens par kfquels il fera polTible de meure ces ouvriers a 1'abri de tout accident, fans nuire a lVxaétitude de leur travail, & au broyement complet des couleurs qui en eft le véritable but. On remarque avec peine que les atteliers de : ces artifans-font, pour 1'ordinaire , trés xeffcnés j qu'en géniral ils fervent de dépot C 7  C 62 ) pour les maiieres nuifibles par elles-mêmes dont on y fait ufage, & qu'ils font privés de courans d'air qui en diminueroient le danger. L'Académie ne doute point que les auteurs qui lui préfenteront des Mémoires fur ce fujet intéreflant, ne foient frappés de ce dernier inconvénientquel'artifan, ou négligé par un défaut de réflexion, ou n'évite point par un défaut d'aifance, & qu'jls n'infiftent fur les avantages d'un attelier un peu vaste, féparé du dépót des matieres dont les couleurs font corapofées, & dans 1'étendue duquel 1'air foit fans ceiTe renouvellé» Trois Eloges & fix Mémoires ont partr^é Ie refte de la féancc. ö Mr. le Marquis de Condorcet a payé d'abord le tribut aux manes de Mr. Wcirgentin, Aftronome célébre & Secrétaire de 1'Académie de Stockholm. Cet Eloge a été trés court I e defont n'étoir que depuis peu AiTocié étranger; il a été furtout queftion de la mfinicre dont il rempliflbit fes fonftions dans fa digni té. 11 a vraifemblablement écrit en Suédois les Mémoires de fa Compagnie, car c'eft fur paroie feulement, que le Panéayrifte a vanté fon ftyle fimple, clair, méthodique & trés adapté au genre: PAcadémie des Sciences de Suedc lui a fait frapper une médaüle, honneur qu'elle ne rend qu'a fes membres ksprus diftmgués , & qu'il méritoit d'autant mieux que la gloire feule 1'animoit: ainfi que difftrens denos foyans le5 g|M o}mmé»j u  (63 ) ne s'étoit nttllement occupé de fa fortune; 2 auroit péri dans la détreffe, fi fa Compagnie ne lui eüt accordé au lit de la mort en quel> que forte, une gratification fur les fonds dont elle difpofe & n'eüt obtcnu du Gouvernement pour fes enfans une penfion: nouvelle qui rafiura- fa tendrefle & le fit expirer tranquiU lement. Le premier Mémoire ïu étoit de Mr. d'Au* benton fur l'amélioration des laines en France. Comme il rentre dans ce qu'on a dit déja fur cette matiere, il feroit fuperflu de s'y étendre davantage. Le fecond de Mr. Gentil, voulok fur ïorigine du Zodiaque; Mémoire trop fcientifique pour êtfe fufceptible d'analyfe: le galant Académicien a trouvé cependant le fecret d'y fai. re venir 1'éloge de la femme a 1'occafion du figne, de la vierge, fous 1'emblême duquel il a prétendu qu'on voulok défigner la fécondité de la terre; idéé auffi bizarre qu'abfurde. Pour dédommager de 1'aridité de ces deux icftures, Mr. de Condorcet leur a fait fuccéder YRloge du Comte de Milly; après avoir vanté Paucienneté de fa naifiance , rendu eompte de fes ferviccs militaireg, il eft convenu que fon héros n'avoit commencé i fe livrer aux Sciences qu'a la Paix de 1762, c'eft - a, - dire , trop tard pour avoir acq vert la Séance par VEloge de Mr. Séguier: c'étoit un grand antiquaire, il aihioic iurtout les médailles; fon goüt ou plutót fa paffioa pour ce genre de monumens fe manifelh dés Page de dix ans a 1'occalion d'une médaille qu'il gagna au jeu a 1'un de fes camarades: depuis ayant appris que des ouvriers avcient trouvé des médailles dans un puits, il s'y fit riefcendre dans la nuit de complot avec des écoliers de fon age, qui ne purent Pen retirtr; de forte qu'il fut obligé d'y refter jus. ques au jour. Ure autre fois, n'ayant pu acquérir des Médailles qui étoient trop cheres pour fes médiocres revenus , il en tomba férieufement malade & peniii en mourir: tout cela contrarioit fort les volontés de fes parens qui auroient défiré le deltiner a la magiftrature , mais inutilement: entrainé par fon pencbant il voyagea en Italië,ou il fe lia de Pamitié la plus étroite avec le Marquis Maffêi, amitié qui a dure jusques 4 la mort. Mr. Séguier avoit une- fagacité merveilleufe pour devincr les inferipdons cfïacées; il en  O* 3 donna une preuve a 1'occafion d'une de Nis • mes, fa patrie^ qui depuis longtems étoit ie défefpoir de tous les antiqnaires. • Tels font les faits les plus frappans de eet Eloge bien digéré, rempli de vues fines & de chofes ingénieufes; mais qui tenant a l'a pro. pos, perdroient tout leur mérite a étre ifolées. Mr. Séguier, réfidant en province n'avoit pu avoir qu'une place d'Affocié-Libre-regnicole; il eft mort trés agé, Membre d'une foule d'Académies & Proteéteur de celle de Nismes; titre faltueux que fa modeftie auroit voukt refufer. A eet Eloge ont fuccédé quatre Mémoires. i. Un fur le Jonge du Vergier par Mr. Camus. Ce vieux manufcrit eft un des plus utiles a ceux qui veulent défendre les Libertés de 1'Eglife Gallicane. On n'en connoït point 1'auteur; i'Académicien ne fait que hazarder des conjeétures a eet égard. Il fut compofé fous le Regne de Charles V; il en donne l'analyfe qui eft une fiétion: les détails dans lesquels il entre, font trés propres a exciter 1'envie de le lire; il en cite des morceaux fiityriques qui doivent le rendre tout-a-fait piquant : enfin le favant Acadérnicien indique oü 1'on peut cherchcr les copies ks plus exaétes & ks plus complettes d'un ouvrage auffi capital , défiguré dans 1'impreffion & furtout dans les espèees de traduétions plus francoifes qu'on en a voulu faire. Cet-  (73 ) Cette notïce n'eft qu'une partie du travail géneral de Mr. Camus , fur les raonumens reiaufs aux libertés du Royaume & del'Eslife Galhcane depuis la fin du huitieme fiecle julqu a la fin du feizieme. Ce début deMr, Camus. lindes nouveau* Aflociés , lui fait infiniment d'honneur ; il regne dans fon Mémoire, la*larré, la méthode: la précifion, 1'efprit de jugement & danalyfede 1'Académicien Ie plus confommé. A? vT vlmeT> Béllédiftïn^utre nouvel Aflocié de PAcadémie, en vertu dn changeant furvenu dans la Compagnie, n'a pas été auffi l eureux que fon confrère Dom Poirier dans Ia précedente Séance. Celui-Ia s'eft donné pour tkhe d'affigner VéMue jufte dl la mort du Roi Robert premier &de \>LZ nmt de fonfiU Henri premier au Tro J Ilprouvepar des monumens de toute cspece que ce doublé événement appanient uÏÏ SdlëncédrirannéC 3°33, comme le ohie Wir 3UteUr dé la Cométogra. ph e fondé fur une éclipfe arrivée Ie vingt. venir cme c f ^ onnepeutdisconSc4nce puSiq^ M fUt ^ Pour une Tornt XXX. D  ( 74 3 «. Le Mémoire de Mr. de Sainte Croix v fur les révolutions & la légiflation des ancien • nes Rêpubliques de la Sicile, au contraire plus hiftorique que favant, a obtenu 1'attention des auditeurs, quoiqu'ils ne viflent aucune découverte nouvelle, aucune méthode particu'iere, aucun fyftême capable de fixer Ls regards des éruclits. Aufurplus, c'eft le quatrieme de 1'Auteur fur les loix & le gouvernement des Colonies Grecques. II y offre le tableau des calamités que firent éprouverl'anarchie, la licence & latyrannie. II rcnferme des détails concernant Ja légiflation que Dioclès donna aux Syracufains, & fur les régiemens auxquels Rome foumit tous les Sicilicns. 4. Mr. 1'Abbé Erothier a pnrfaitement fontenu fa réputation dans fa diflertation fur ks Labyrinthes : il s'eft attaché fpécialement a ceux d'Egypte. 11 aparlé de trois principaux. L'objet de ces grands monumens deftinés a fervir de tombeaux aux Rois, d'une étendue in> öienfe, & enrichis avec une profufion de magnificence incroyable, étoit trés moral. Le? ügyptiens, le peuple le plus lage de Fatitiq'uité, avoient pour maxime que 1'homme ne commencoit k vïvre qu'après fa mort; & en conféquence ils lui fabriquoient des habitations proportionnées a fa durée. On voit que cette allégorte tientfort h nos idéés religieufes. 15 Nwembre 1785. Les Comédiens Ftaucols ont joué hier pour la première fois le  C 75 ) .Roi Edgard , Roi d'Angleterre, ou k Page Juppojè: cette comédie nouvelle étoit fur le répertoire de Fontainebleau & devoit y être repréfentéj mais le féjour abrégé de la Cour en ce lieu ayant forcé de retirer certaines nouveautés, celle-ci a été du nombre. C'eft 1'ouvrage d'un écolier, oü il ne fe trouve ni invention , ni dialogue , ni bienféance. Le Poëte eft Mj. le Chevalier de Chenier, jeune militaire, qui auroit bcfoin de laifler mürir fes ouvrages. On aflure que les comédiens eu ont recu plufieurs autres, vraifemblablement dek même force. Ce qui fait désespérer du débutant, c'eft qu'il eft trés préfomptueux & parle avec dédain non-feulemeutde fes contemporains , mais des meilleurs auteurs claffiques. Ilafaitpréfent de fon ouvrage au pere Vanhove, qui pavoit abandonné a fa fille ; mais les huées du public feront malheureufement la feule recette qu'ils laifleront a 1'auteur. 16 Novembre 1785. II y a longtems que les amateurs des beaux édifices voyoient avec pei11e 1'état de dégradation du palais du Luxembourg, dont ils s'étoient flattés vainementque Monfieur le retireroit depuis qu'il en a la Posfeffion. Ce Prince s'eft contenté de faire réparer le petit palais oü il loge, ainfi que Maname, lorsqu'ils viennent a Paris. Quant au jardiu qui étoit alfez bien tenu, on a gémidu bouieverfement qu'il a éprouvé par des fpé-ulauons mal vues que des artiftescupides avoient D 2  C 76 ) imprudemment fuggerées n Son Alteffe Royale. Depuis peu 1'on a été bien furpris de voir fortir du milieu de ces ruines un pavillon qu'on arrange avec autant de goüt que de richeffe: c'eft celui de la gauche en entrant, attenant a un jardin dont oh a abattu Ié mur & auquel on fubftituera une grille ; ce qui fera décoration en cette partie. On efpere que c'eft le prélude d'une régénératlon générale de ce fuperbe monument. Quoi qu'il en foit, on allure que ce Pavillon eft deftiné h Made. ]a Comteffe de Balby, Dame d'atoursde Madame & que la Princelfc & le Prince affeétlonnent également. 16 Novembre 1785. Le début du Sieur Palange a la comédie Italienne fi bruyant, fi tumultueux en 1779, 11'étoit rien atiprès de 1'arrrivée du Sieur Gillet avant-hier a \ Ambigu Comique. C'eft que non-feulement les amateurs s'empreflbient d'avoir des billets pour enrrer a ce fpeétacle; mais une foule plus nombreufe encore s'étoit rendueafin de voirpaffer le perfonnage qu'il s'agiffoit de éélébrer : ' oa eut cru que le Roi ou la Reine alloit venir fur les Boulevards: enfin il eft arrivé précédé d'une trentaine d'Invalides , fes camarades. Tout PEtat Major de 1'hótel s'étoit fait un de voir de s'y rendre & Mr. Gilibert le Major avoit amené le Sieur Gillet dans fon carroffe. II a été recu aux acclamations de toute 1'affemblée & afin que perfonne ne püt le méconnoitre, on  t 77 ) étoit convenü qu'il refteroit durant'tout Ie fpeclacle, le chapeau fur la tête avec une cocarde Manche. A la ün de la Pantomime titulée le Maréchal des Legis, qui n'eft que la repréfentation de fa glorieufe aventure, on l'a fait monter & affeoir fur le théatre pour entendre deux couplets a fa louange. C'eft M«e. Julie, actrice faifant le róle de la jeune fille qui, après 1'avoir embraffé, les lui a chantés. Voici ceux d'un anonyme bien préférables acx au tres: . . . ' Voilé ce Maréchal illuftre, Qui dans fon quinzieme lullre, Des bras d'infames ravilTeurs A tiré par fon feul courage Une beauté fans défeufeurs: C'eft que les héros n'ont polüt d'age. Contant aujourd'hui Ta viftoire, Qu'il jouilTe enfin de fa gloire, Au .milieu de tous. ces guemers^ A fa valeur rundons hommage ; Couronnons fon front de lauriers: Chantons les héros n'ont point d'age. 16 Novembre 1785. Mr. le Duc de Prashn vient de mourir. Mile. Dangeville eft inconfolable de cette pene. Ils vivoient enfemWe depms prés d'un demi-fiecle. 11 étoit Ho. Boraire de PAcadémie des Sciences. On ne D 3  (?s ) ihït s'il ïaiffe des monuraens de fon favonvmais on lui.a trouvé un million cent mille livres en or: du moins c'eft le bruit public. 17 Novembre 1785. Mr. de Crofne vient d'oirdouner quelque chofe de trés utile & que fembloit exiger la füreté publique. On ne. trouvoit pas facilement dans la nuit la maifou des Commiffaires au Chatelet: afin que 1'on n'éprouve aucun retard , lorsqu'on en aura befoin , leur demeure qui étoit déja défignée par une lanterne particuliere, mais pas afléz reconnoiffable pour tout le monde & en tout temSj doit 1'étre déformais par une lanterne faillante &2 trois pieds fur la rue, deforme carrée & marquéè de trois ileurs de lys en rouge fur le panneau- de face. Ces lanternes feront éclairées pendant toute 1'année, <s nuits entieres du jour au jour, fans aucune cf ffation. 17 Novembre 1785. On fait aujourd'hui que 'les folies philofophiques dont on a parlé déja, font de Mr. leMarquis de Lucuet. 18 Novembre J785. Le Sieur de Veime* range, qui'iigure depuis quelque tems dans les pampblets contre Mr. de Calonne, comme un de ceux qui participent le.plus aiaconfiance & aux opérations fecrettes du Controle gé* néral, vient d'en obtenir la récompenfe, par la place d''Intendant des Foftes aux Chevaux, Relais £? Meffageries de France, créée pour travailler fous ie Duc de Polignac.  C 79 ) Ce Feimerange étoit un CommilTaire des guerres, gros joueur &fi gros qu'on en porta des plaintes au Duc de Choifeul , encore Miniftre de la guerre. Mr. de Choifeul lui óiafon Département; depuis il s'étoit raccroclié, car il avoit été nommé en 1779 Iatendant del'armée qui devoit paffer en Angleterre. 18 Novembre 1785. Le Journal de Paris a fait mention, il y a quelque tems ,. del'enterrement d'une Demoifelle^e'n'fe', fille majeure, rue des Martj'rs: unplaifant, en jouant fur le mot, a donné une Relalwn véritable fi? re~ marquable de la vie fi? mort de cette vieille fille, dont toutle monde parle & que peu de gens ont vue. Cette bagatelle morale, courte & vive, eft remplie de naturel, de gaieté & de fiuefie; comme il y a des farcasmes contre des perfonnages connus cc dé figués afliz clairement, elle ne lailfe pas que de faire bruit dansles foeiétés. II eft aiie d'en dévoiler 1'auteur a certains paflages qui ne peuvent concerner que celui du livre êchappé au Dêluge, & cette aÜéct-ation de ramener a lui 1'aventuriere qu'il auroit dfi généralifer davantage, eft peut-étre lafeule tache qu'on puilfe reprocher a fon ingénieufe & piquante allegorie. 18 Novembre 1785. Depuis quelques jours on parloit de Mr. le Duc d'Orléans, comme tombé dangereufement malade a Sainte Aflife: 011 s'étoit fiatté un moment que cela n'auroit D 4  ( 8ö ) pas de fuit.es; mais elles font devenues fi graves qu'on vient d'apprendre fa mort. Ce Prince eft fort regretté desParifiens acaufe de fa bonté, de fa popularité; il leur étoit devenu plus cber depuis que le Duc de Chartres par fa conduite & fes propos avoit annoncé fe peu foucier' de leur alfeétion. Le Roi aimoit beaucoup auffi le Duc d'Orlêans; il envoyoit de quatre heures en quatre heures favoirde fes nouvelles. Mr. le Duc de Bourbm, a 'caufe de fa femme, étoit brouillé avec fon beau-pere; il n'alloit point & Sainte Aflife : s'étant préfenté devant le Roi, pendant la maladie du Duc d'Or* ïéans, Sa Majefté lui a fait des reproches de cette indifférence & lui a-dfr que c'étoit par lui qu'EUe auroit du en apprendre des nouvelles; ce qui a forcé ce Prince a fe rendre a Sainte Asfife & a donner au mourant une confolation alaquelle il ne s'attendoit plus. L'on attribue la mort du Duc d'Orléahsau Docteur Barthès, fon premier midecin, qui amal vu la maladie. Au refte, ce Prince avoit 1'eftomac ufé; il étoit gros mangeur, comane tous les Bourbons; il faifoit des tours de force en ce genre & Pon compte vingt-fept ailes de perdreaux qu'il avoit expédiées en un repas. 19 Novembre 1785. Ceux qui fe flattoient que Pefprit de bigotterie & de fuperltition alloit s'éteindre infenfiblement depuis le regne de la philofophie,  ( 81 ) philofophie , depuis qu'elle commencé a infpirer le Souverain & ks Miniftres en France, font fort déforientés par le réfultat de la comparaifon desprofefiions religieufes des annces 1783 & 1784, dans quinze Généralités du Royaume: fuivant kquel malgré Page' reculé pour rémiffion des vceux, le nombre, loin de diminuer, eftaugmenté presque d'un cinquieme: en 1783 il ne fe montoit qu'A quatre eens foixante-deux votans, & en 1784 il eft porté Jus* ques a cinq eens trente-un. 19 Novembre 1785. Les petits fpectacks de 1'inténeur du Palais Royal ont vaqué depuis la nouvelle de ia mort de Mr. le Duc d'Orléans. 20 Novembre 1785. Quoique depuis fon incendie, Phótel-Dieu femble confolidé plus que jamais dans fon ancien emplacétoent &par fa reftauration & par les aügmenrations qu'ori y a jointes & par celles auxquelles on travaiile en ce moment fur le terrein du petit Chatelet démoli ; une fociété de patriotes qu'on croit être la Phüantropique , fait un nouvel efforf poür 1'exécution du j)rojet de letransférer a 1'ifle des cignes. A ce projet dn Sieur Poyet, Architecle & Contrókur des bidmens de la ville , qui a donné ks plans du nouvel hótelDieu, ils ont joint un Mémoire oü 1'on s'ejfforce de démoutrer que datts le local aeluel, Thötel-Dieu ne fera jamais ni falubre, ni 1'uffifant, ni commode-; mais qu'il s'oppolera encore a tous ks projets généraux d'enxbeilnïemaut? D 5  C so . de commoclité, de falubrité même que le gou* vernemen t voudroit former pour la capitale. Cette fociété profite de la circonilance de la démolition des maifons fur les ponts, pour faire voir que ce fimple projet de magnificence ue peut bien s'exécuter qu'en y joignant 1'exécution de celui-ci de néceffité première & impérieufe. Suivant le Devis dn Sieur Poyet la dépenfe fe monteroit a douze millions, qu'on pourroit obtenir,. dans ce moment de générofité, de bienfaifance , de patriotifme, oü tontes les fcourfes s'ouvrent au feul mot ó'humanité, par une foufcription volontaire, dont la Société d'environ trois cents membres veut donuer 1'exemple en offrant cent mille écus. Mr. le Baron de Breteuil, avide d'iliulirer fon Ministère par des monumens patriotiques, a ce projet fort a cceur. ao Novembre 1785. On évalue ft prés de treize millions le procés gagné par le Prince de Guemené au fujet du Port de 1'Oriënt, qu'on fait acheter au Roi onze millions, quoi. qu'il n'en vaille gueres que quatre ou cinq. Indépendamment de cette fomme a payer en vingt-deux ans, & raifon de cinq cents mille livres par an , le Roi donne encore pour une autre partie environ un million cinq eens mille livres. Au rooyen de eet arrangement, le Prince dn Cuemenê eft forti de fa retraite & paroit ici tettf fier. II eft allé voir fa femme au Bor*  C 8 3.) deaux - de • Figny prés de Pontoife, eü, comme on l'a dit dans le tems, elle a fait conftru.ire un théatre & jouer la comédie dont elle regale fans doute fon mari; ce qui eft encoreplus indécent ou plus affreux dans ce moment de Paflaire du Cardinal de Ro'ian, fon frere. 20 Novembre 1785. Un- des pampMets contre PArchevcque de Bordeaux actuel a étéeuvoyé ici par un membrc du Parlement. 11 eft fanglant non-feulemeut contre le Prélat, mais encore contre fes commenlaux , fes Grand-Vicaires & aiures collaoorateurs dans ie faint miniltere. mNovembre 1785. Quoique dans la nouvelle édition desüeuvres dzl/oltaire fortant des pres* fes de 1'imprimerie de la Société Littéraire'fypographique, on ait affeété de laiffer des lacu- nes dans la férie des volumes livrés au public, fans doute pour dérouter les contrefacteurs, le thédtre eft complet en neuf volumes. Comme on 1'avoit prévu,il n'y a rien de nouveau que trois pieces inférées dans leneuvieme & qu'on auroit pu fupprimer fans rien dérober a ia gloire de 1'auteur; fa voir, le Baron d'Otrante, les deux. Tonneaux, & Ta?iis fi? Zeilde, ou les Rois Pafteurs. La première eft un opéra bulFa; ce qui confirme bien la manie de Foltaire d'eflayer de tous les genres, même de ceux qu'il décrioit: on ne le reconnoit abfolameut pas dans cetta bouiTonnerie, groffiere & platte fans.gaïté. La feconde eft une eiquifTj'c'opéra conjiD 6  ( 84 ) que, préfentant une idéé plus ingénieufe & plus morale, mais trés médiocre dans 1'exécution. Quant a la troifieme, c'eft une tragédie pour fetre mife en mufique, c'eft - a- dire ,un opéra _de grande maniere aprétentiou, & 1'on fait que Voltaire n'y a jamais réuffi. Les Editeurs trés circonftanciés fur les ousrrages connus & qui n'ont pas befoin de plus de détails, n'en donnent aucun fur ceux-ci. ]ls ne difent pas , fi ces morceaux lyriques ont jamais été mis en mufique & joués quel, que part. Cela feul prouve le peu de foin qu'ils ont apporté dans ce genre de recherches & d'anecdotes, qui en nécefiitoit le plus, & la première chofe que le public avoit droit d'exiger d'eux. 22 Novembre 1785. La Dot, comédie nouveile en trois actes & en profe, mêlée d'ariettes, qui n'avoit pas eu de fuccès & la cour, a été mieux recue hier a la ville au raoyen de nombreux battoirs que les auteurs avoient ïépandus en profulion de tous les cótés; car dans le fond le poëme n'elt qu'une niaiferie, une farce, & la mufique trés agréable dans le premier aéte dégénéré infiniment dans les deux autres, Au furplus, une anecdote de la vie cu Roi de Prufle, racontée dans quelques par piers publics, a vraifemblablement fait naitre 1'idée du fujet; trait infiniment plus comique dans 1'hiftoire que dans la piéce. ss Novembre 1785. Dans foji nouveau  C 8'5) Profpe&us intitulé Hommage d l'oeuvre de la Rédemption des Capüfs:, Mr. Bafiide, trés fade de fon naturel, en parlant de la Lettre par laquelle Mr. le Controleur Général lui annonce que le Roi a daigné foufcrire pour cinquante exemplaires, qualifie ce Miniflre de Vertueux interprête cle Sa Majefté. Le p.rragraphe a été dans le tems copié mot pour mot par la Gazette de France & 1'on en a bien ri & fans doute Mr. de Colonne lui-même, quine fe piqué pas d'une auftérité de nioeurs a laquelle 1'épithete puilTe convenir, qui fe piqué au contraire d'ètre trés aimable, trés galant, ri'aecunniler conquêtes fur conquêtes & d'être plutót ce qu'on appellc Roué de Cour dans 1'acception gaie & agréable qu'on donne aujourd'hui a ceite expreffion. Auffi tranfpire-t-il que Louis XVI, lorfqu'il a lu cette phrafe , a fouligné d'un crayon rouge le mot Vertueux, qui a plutót 1'air d'un perfifflage que d'un éloge décent & mérité. ' 22 Novembre 1785. II paroit confhté qu'on impute au Doéteur Barthès la mort du Duc d'Orléans; que ce Prince ayant la plus grande confiance en lui s'eft enfin appercu qu'il étoit la viétime de fa méprife & de fon entêtement, le lui a fait connoïtre, en ajoutant qu'il lui pardonnoit. M'r. le Curé de Saint Euftache dont le Duc d'Orléans étoit paroiffien , s'eft tranfporté a Sainte Aflife le jeudi comme pour s'informer par lui-même de fon état & lui reiidre fes D 7  C 86" ) devoirs. Le Prince a fenti ce que -cela voulok dire, a fait écarter mist,te monde , s'eft confeffé a fon Pafteur & a recu les facremens avec une édification générale. Les Abbés de St. Far & de Sl. Albin, fes enfans-naturels , n'ont pas quitté k Prince & lui rendoient tous les offices d'une garde, ainfi que Madame de . . . leur keur. QuaudNle Prince a été paffe, Madame la Ducheffe de Chartres & Madame la Duchefle de Bourbon ont pris avec elles Madame de Monteffon & Pont ramenée a Paris. Le cceur de M*. le Duc d'Orléans, fuivant fes dernieres volontés, doit refter a Sainte Affife, & fon corps être transféré ici au Val de Grace, fépukure de fa Maifon. C'elt au» jourd'hui que la cérémonie aura lieu. 23 Novembre 1785. On ne voit point dans ie public de réponfe direcle de Madame Vanhove a la lettre de Mlle. Contat qu'on a rapportée. il fembleroit même que la première fe feroit mife a la raifon par la déclaration qu'elle a faite a fes camarades de ne plus réferver la fceur pour les róks de foubrette. Ceux qui vivent dans ce tripot favent cependant que 1'inimitié fubfifte entre les deux famik les. Mr. de Murville s'eft rendule défenfeur des Vanhove & ceux-ci répandent une fable de lui qu'on peut regarekr comme une vengeance de la lettre. La Rofe orgueilkufe & le Ponton font M1Ie. Contat & fa pétite fceur; ia Rofe nou veile & modefte eft MK Vanhuve i  ( 87 ) fans cette explication on ne fentiroit pas trop le fel de 1'allégorie. Dans un jardin on 1'art & la nature» L'un de 1'autre jaloux brilloient de tuutes pnrts, Une Rofe orgueilleufe étalant fa parure Sembloit fur elle feule auirer les regards; Mais ce qui la rendoit plus fuperbe & plus fiere» C'étoit un jeune & foible rejetron; Elle avoit mis-'fur lui fon efpérance entiére: (Rofe toujours fe plaic dans fop bouton.^ Un fol efpoir trop fouvent nous égare! Le Dellin autrement en avoit ordonné Et de fes dons pour lui Nature trop avare Sembloit 1'avoir abandonné. Pour fon malheur, mie Rofe nouvelle Non loin de-la s'élevoit chaque jour; Jamais Rofe aux regards n'avoit paru plus belle i Elle croiffoit fous les ye'üx de 1'Amour. Les Zéphirs empreiTés k lui faire la cour Devenoient plus conftans & fe fixoientprèsd'elier Les Graces, la Beauté font toujours des jaloux;. La jeune Rofe en fut Ia preuve; Tout ce que peut un injufte courroux Contr'elle fut mis a 1'épreuve ; Mais 1'envie a la fin vit fes traits épuifés; Elle ne perdit rien de tous fes avantages, La Rofe & fon bouton furent hu'miliês; L'autre emporta tous les fufTrages. NVnvions pas les dons qui ne font pas chcz nous; Se taire alors eft un parti fort fage:  C 38 ) On triomphe toujours des efforts du jaloivx, Et le jaloux fouvent n'emporte que la rage. A cette fable allégorique Mr. de Murville nvoit joint un Envoi d M«*. Vanhove, qui en öéveloppe encore mieux 1'objet: J'ai dit le bien tout baut, je dis Ie mal tout bas; On ne gagne rien a raédire.... Oa a beau chercher a leur nuire, Les méchans ne fe rendenc pas. Sous le voile de cette fable Je u'ai jamais voulu les blefler aujourd'hiu; Ce n'eft point aux dépens d'autrui Qu'un éloge a vos yeux peut paroitre agréable. Sur celui-ci j'ai gardé Ie feeree, S'il s'éventoit pourtant & 11 quelqu'mdifcret Venoit me reprocber une jufte fatyre, Je répondrois encore au Cenfeur irrité, Ce vers que j'aime tant a vous entendre dire, „ Nu faut. il pas toujours dire la vérité." 24 Novembre 1785. Depuis Ia-mort de Mr. le Duc d'Orléans on agitoit dans les fociétés fi Madame de MonteJJon draperoir. Le Roi a décidé ia qutftion; iladéclaré qu'elle pourroit porter dans fon intérieur le deuil, comme bon lut fembleroit, mais nullement en public. Eu conféquence elle va deraeurer en convent durant 1'année de.fon veuvage. On croit que ce qui s'eft pafl'é a la mort de Louis XIV a régie1 cette étiquette.. Madame de Maïntenon ne drapa  C 89 3 point; elle habilla fes gens couleur de feuil. les mortes & fe retira a Saint Cyr. 24 Novembre 1785. Le fameux Mufceum recule au lieu d'avancer;on comptoit enjouir 1'année prochaine, ou du moins en 1787, & 1'on n'a rien fait celle-ci. Une nouvelle difficulté s'eft ékvée , 011 plutót s'eft renouvellée; c'eft fur h maniere. d'éclairer: quoique toutes les croifées fuirent prêtes, on a fenti que le jour venant par la voüte conviendroit infkii. ment mieux. Ladépenfe avoit effrayé lesautres Contrókurs géuéraux: M<'. de Colonne a déclaré qu'il ne falloit rien épargner pource mo¬ nument national. bn conféquence la déci- jion eit remüe a Pacadéraie royale d'architecture. 24 Novembre 1785. Réponfe a 1'ouvrno-e qui a pour titre Sur les JBions de h Compagnie des Eaux de Paris, par Mr. \e Comte de Mirabeaic,pi\r lesadminiftrateurs delaCompignie des Eaux de Paris. Tel eft le tkre du nouvel ouvrage du Sieur de Beaumarchais, de deux eens feize pages d'impreffion in octavo. On dit que fon adveriaire lui a déja repliqué. ■ 25 Novembre 1785. On affure avoir vu mardi dernier a 1'opéra Mr. k Prince de Conti, pendant que Pon enterroit au Val de Grace Mr. k Duc d'Orléans & que tous les autres Princes affiltoient a cette cérémonie. On vem même qu'il ait afkété defe montrer en grande loge. Tout le monde en général s'eft reerié; contre Pindécence ; cependani les partifans- du  C 90 ) Prince le défuident en difant que c'eft une revanche qu'il prend des autres qui font laiflé feul en 1771 lors du Lit de juftice, aliénéspar 1'exemple du défunt; ils louent fa'fermeté & difent que c'eft avoir du caractere. 25 Novembre 1785. Les eomédiens de Mr. le Comte de Beaujolois ont repris le mercredi, le leudemain de 1'enterremeiH du Duc d'Orléans, & les Variétés n'ont-recommencé qu'un jourpius tard. Un donne pour raifon de cette différence que les premiers ne font pas cenfés dans 1'enceinte du Palais , airdi que ks feconds. 2ó Novembre 1785. WK Vanhove doit jcuer demain dans Eugenie le röle de l'kéroïne. Le Sr. de Beaumarchais a promis d'y alfjlter. Ce fera la première fois qu'il rcparoitra a la comédie, depuis fa retraite a Saint Lazare. 26 Novembre 1785. On prétend qu'on a éventé la mine d'oü fortoieilt les Bulletins en forme de Supplément au Journal de Paris, dirigés principakment contre Mr. de Calonne & Pon compte que le cours eft arrêté. Ainfi pour en compktter les notices, il fuffira de revenir fur deux qui nous avoient échappé. L'un intitulé No. 155 page 6555 ce qui fe rapporte au kptjuiu dernier, oü après avoir plaifanté fur le Journal de Paris & fur fa fuppreilion , Pon rend compte de la maniere dont ie Miniftre des finanees a fait fes fonds pour deux ans d'avance; oü 1'on entrc dans le détail  ( 9i ) des ornemeiis de luxe & d'agrdment dom il a enrichi 1'hótel du Contróle général , d'uilè fête qu'il y doit donner au Clergé, de fes fpdculations fur fon projet de fe débarrafler d'une partie du fardeau de fa place en faveur de Mr. le Noir, qui plus exercé que lui au travail, ne lui laiffera aucune inquiétude fur ks évduemens. L'autre, daté du douze Juillet roule fur les brochures de Mr. Ie Comte de Mirabeau, en faveur du Contróle contre la Caiffe d'Ëkompte, la Banque de Saint Charles; &c. oü Ton park d'une chanfon prétendue, dans laquelle M1'. de Colonne fe feroit égayé fur M'. de Cipieres qu'on défignoit alors pour en faire un Lieutenant de Police; d'une autre chanf >n au contraire, oü 1'om perfiflk k rembourfemencdes Refcripiious, oü 1'on annonce une brociiure intitulée F ie fe? Maeurs de Mr. de Colonne , &c. Ces deux pamphkts dans le même genredes autres , vrais fans doute fur quelquespoims de -fuits firn pies, font infiniment brodds flans' leurs cifeoni'hncès , quelquefois avec gakte,plus fouvent avec beaucoup d?amertume, de ddnigrement & de méchkriceté. 26 Novembre 1785. Extrait d'une Lettre de Limoges du 15 Novembre Tout ce qu'on vous a dit & écrit des'travaux faita dans cette ville par Mr. d'Aifne, 1'Intendant,. prdddcefléur de celui ac'tucl , pour fo.n utilké & embelliffoment, elt fbrt'exagéró. Cc Com-  (PO RiifTaire départï aimoit beaucoup a fe vanter, h fe faire próner dans les papiers publics: en général les monumens qu'il a élevés font de mauvaisgoüt, fans nobleïfe, & ne répondént point aux dépenfes qu'ils ont caufées. 26 Novembre 1785. La comédie de PO*« ele & les deux Tantes, du Marquis de la Salie, qui devoit être jouée a Fontainebleau, n'y a point eu lieu & caufedes changemens furrenus dans le repertoire; enforte qu'elle a paru toute neuve hier.a Paris, oü elleaété repréfentée pour la première fois par les comédiens francois. Quoiqu'clle reflémble a plufieurs aufres du même genre & ne foit qu'un réchauifé d'une du même auteur (cJiacun a fa folie') jouée en 1781 fur le théatre Jtalien fans fuccès; le Public n'a fait attention qu'a la gaieté affez continue qui y regne & a beaucoup ri; elle a eu un fuecès complet, qu'elle n'auroit pasobtenu peut-être a-Fontainebleau a raifon des caricaturesoutrées qui ne font pas faites pour plaire aux gens d'un goüt fin & délicat. < 97 Novembre 1785. Mr. Franpis de Neuf» Chdteau, Procureur Général au Confeil du Cap, y eft tombé dangereufement malade & a penfé mourir: Voicice qu'il aécrit a un de fesamis de. Bordeaux. . ■ ; ■ ' ï - Que font devenus tous nos amis? Je FuïS „ réduit pour enténdre parler de ce qui m'in- térefle dans Bordeaux a lire les lambeauxdu >, Journal de Guyenne.... Je fuis trés con„ tent de ce Journal..... Je. fors d'une Ion-  t 93) gUfi & cruelle maladie qui m'a duré fept a huft mois. I! y a trés peu de tems que je puis écrire; -on me gronde même de me remettre fitó't aux affaires. Le travail du cabinet eft peu afforti au climat de Saint Domingue. Mals on me gronde vainemeut, De bon gré je me facrifie A mon unique amufement, Le travail eft mon élémeist, Et le bien public eft ma vie. Je fais que le Dieu du repos Jadis aux Chttulieux ,'aux Chapelles, Fit vanter fes triftes pavots. J'aime leurs rimes immortelles; TVlais, en dépit de leurs accens, Leur indolente lethargie N'obriendra jamais mon encens. C'eft dans le travail que je fens L'ex'ftence & fon énergie; Et ce n'eft que par fa magie Que je retrouve 'encore mes fens, L'arne oifive eft une fumée Dont ia vapeur noircit les airs; Mais l'ame active eft enflammée D'un tiflu de brülans éclairs Qui font briller dans 1'univers, L'écharpè de I-a Renomaiée. Heureux trop heureux le morteï Qui peut fans ceffe a fon autel Porter 1'offiande r.ceoutumée;  ( S>4 ) Quand même plus rapidement, Ma lampe eu feroit confumée , Du moiiis jusques au dernier moment je veux qu'elle refte allumée. On obfervera peut-être a travers lesfentimens patriotiques dont ces vers fontremplis, des métaphores qui fe reffentent de la chaleur du climat &c de la fievre ardente dont 1'auteur étoit dévoré. 27 Novembre 1785. Mr. 1'Avocat Mar> chand eft mort enfin, il y a quelques jours; il étoit tombé dans une enfance abfqlus & Mr. le Curé de Saint Nicolas a eu beau jeu. 28 Novembre 1785. Mr. de Colonne s'eft rendu mercredi a 1'hóteldes monnoies; ilyeft refté fort longtems relativement a la nouvelle opération. II a voulu voir des échantillons des quarante mille nouveaux Louis fabriqués pour commencer & en a été trés mécontent. II a trouvé le type vilain. En conféquence il a demandé Mr. Duvivier, le graveur général des Monnoies & des Médailles du Roi & lui a fait dts reprcches. Cet Artilte lui a d'abord répondu qu'il n'étoit point attaché a la Monnoie & n'en avoit proprementquerinfpeétion; cependant il eft convenu s'être mêlé des deflins en cette occafion & a montré fon efquifie au Miniftre qui l'a trouvéecharmante; lafauteen ett refiée.aux ouvriers &furtout aux balanciers tiès defiétueux. En conféquence Mr. de Ca* lon?ie ayant befoiu de douze mille Louis potif  ( 95 > la Cour qu'il devoit y porter le dimanche, il eft convenu qu'on les fabriqueroic aux Médailles & que Mr. - Duvivier préfideroit au travail. 28 Novembre 1785. Depuis quelque tems on parloit de Mémoires qui devoieut fe publier dans 1'affaire du Cardinal; depuis deux jours on en voit un de Made. de la Motte. II eft de Me. Doillot, fon Avocat. Tous les eXemplaires, au rrombre de deux mille, ont été enlevés avec une rapidité incroyable. On le dit trés mal fait, mais inculpant fortement Son Éminence. 28 Novembre 1785. Extrait d'une Lettre de Strasbourg du 20 Novembre Ileftcertain que Mr. le Cardinal ™ prétend qtfil n y peut tenir que deux mille  C "3) einq eens perfonnes: on en jngera mieux demain que dok s'en faire 1'ouverture véritable. 7 Décembre 1785. Mr.le Prcüdent de Meinier-es, avant fa mort, avoit vendu fa Bibliotbeque & tous fes manufcrits a Mr. de Flandre de Brunville, Procureur du Roi au Chatelet, moyennant la fomme de cent mille livres; mais il s'en étoit réfervé la jouiffance durant fa vie, & 1'acquéreur lui faifoit cinq mille livres de rentes jufques au payement, fauf 1'eftimation; car il étoit convenu que fi la Bibliotheque étoit prifée feulement cinq eens livres de moins, Mr. de Brunville feroit autorifé a déduire cette fomme, ou telle autre plus furte en propordon fur le capital; on eft aétuelkment a procédcr a cette eftimation & Pon calcule qu'elle pourra bien coüter dix mille livres de frais. Quoi qu'il en foit, la privation de cette Bibliotheque fera trés fenfible a Madame la Préfidente de Meinieres, qui aime les Lettres & les cultive: comme elle s'eft piquée de beaux fentimens lorfque le Préfident Pa époufée , elle n'a voulu accepter aucuii avantage confi.lérable, & elk refte dans une médiocrité de fort une qui fait houneura fon désintéafTement, ou a fa délicatefie. 8 Décembre 1785. La fermentation qu'on croyoit raflife a la comédie francoife au fujet de M"emaiidoit; que dans ie premier moment ü a  C n6 ) été queftion de le mettrc entre ïes mains de la Juftice & de faire porter' plainte de'ces~ Hbelies par le Procureur du R.oi au Chatelet; mais qu'on préférera cependant d'afiöupir Paffairc. 9 Décembre 1785. Me. Marizot, Avocat au Parlement,ayant voulu plaider lui-même fa caufe en cette qualité, au Chateleti Pannée derniere; les autres Avocats de la jufisdiétion ont prétendu que n'étant point infcrit fur le tableau, il n'avoit pas le droit de fe mettre au 'banc des Avocats, ni d'avoir le bonnet quarré fur la tête, ou a la mailt, & le dix Décembre par fentence du CMtelet il ne lui füt permis de plaider qu'a la barre de 1'audience, comme un profane. Appel de la fentence aujourd'hui pendant au Parienent: telle eft la caufe dans laquelle a été publié le Mémoire dont on a déja parlé, fur les Privileges des Avocats , oü 1'on traite du Tableau fi? de la difcipline de POrdre. 1 Dans ce Fatïum , trés volumineux, trés érudit, fon auteur, Me. Falconnet, qui luimême a lieu d'être mécontent de POrdre, va jufques a-lui contefter fon Batonnier, fa Difcipline k les divers Privileges qu'il lui reproche d'avoir uf lieu a un qui prt quo du Mercure qui avoit 1'air d'un periifiiage & que PAcadémicien a été obligé de relever. On croit qu'on lui a confervé auffi fon logement au Louvre. 21 Décembre 1785. Les reprdfentations da Parlement a 1'occafion de l'Emprunt ont été portées au Roi dimanche & Sa Majeftd y a fait une réponfe irnpdratïve qui ordonne 1'enrégiltrement , pour le lendepiain, avec une phrafe a la Maupeou fur les limites de la réMance du Parlement , dont les fonStions font d* éclair er F autorité, & non de la reftreindxe ou la gêner. Le Parlement n'a point obtemperé, ce dont il a été rendu compte au Roi, qui a bien voulu recevoir d'itératives Repréfentations, qui ont été fixées, rédigées & lues dans la matinde du mardi & portées au Roi 1'aprèsdinée,SaMajefté ayant perfifté a vouloir être obéi , le Parlement a enrégiftré de Vexprès Commandement du Roi, & a joint a fon enrégillrement des modifications fi fortes qu'elles ne pourroient que décréditer l'Emprunt; ce qui a alarmé le Controleur • général, qui, dit - on, a obtenu un ordre pour Pure arrêter 1'impreffion & rompre la planche chez Pimprimeur du Parlement. 22 Décembre 1785. A la Bourfe d'hier,fur la réfiftance du Parlement,un Agent de change qui avoit des Récépiiïés du nouvel Empruut, car il eft a obferver qu'on 1'avoit toujours ouvert au Tréfor'Royal depuis quelquea  ( 140 3 jours, a offert de vendre fes Récépiffés ;\ demi pour cent de peite': il en a réfulté la plus ;grandè fenfation, le Commiffaire de la Bourfe eft venu dreflér procés verbal de cette offre 'illegale, alarmante, & 1'on a craint pour la liberté de eet Agent de cbange ; on affurê pounant que'cela s'eft civilifé. 22 Décembre 1785. Les Négocians de Paris font fort mécontens de la création de la nouvelle Compagnie des Indes & de tout ce qui s'en eft enfuivi. En conféquence 1'un d'eux a fait un Mémoire fous le titre d'Oèfervations fur l'Arrêt du 10 Juillet 1785 , fortant défenfes d'introduire dans le Royaume aucune toile de coton £f mouffeline venant de l'étranger £ƒ qui interdit le débit des toilis peintes, gazis é? linons de fabrique étrangere. Cet imprimé timbré de Nantes , fans nom d'imprimeur& fans aucune approbation, n'eft fotifcrit que du Sleur Guillaume: fes confrères n'ont ofé fuivre fon-exemple. Le réclamant n'en a pas moins eu le courage de le remettre au gouvernement. Le premier cri étoit de le faire arrêter comme féditieux; cependant 1'écrit eft fi moiéré, il 'montre fi évidemment 1'injuftice ou 1'inepde de plufieurs articles de l'Arrêt, qu'on n'a ofé févir & qu'on travaille aéruellement a un Arrêt du Confeil interprétatif du premier, qui a déja été fait & refait plufieurs fois. Cet écrit eft fort rare. 23 Décembre 1785. Les colporteurs ont redemandé de nouveaux envois des volumes  C 141 ) huif, ncuf & dix de YEfpion Anghis faifis, & ils fe répandcnt enfin avec plus de facilité. Ils font trés curieux, non-feulemeiu par 1'importance des matieres, mais par leur variété. D'abord tout ce qui concerne la guerre maritime allumée a cette époque entre la France &l'Angkterre,y elt traité dans le plus grand, détail & avec non moins de clarté que de vérité; chofe d'autant plus étonnante, qu'a commencer par les Mémoires de Duguê- Trouin li infért flans pour le fond, nous n'avons aucun ouvrage en ce genre dont la leclure fe puiflé fupporter. Les opérations de Mr. Nee» her y font encore difcutées avec beaucoup d'intelligence.- Tout ce qui concerne la mort de Voltaire & celle de Roujfeau arrivécs alors, n'y eft point oublié: plufieurs autres Lettres fur les Arts , fur des Procés fameux, font inltruétives & agréables; on y trouve aufii les anecdotes. galantes du jour: mais les Lettres fur les Tribades modemes font piquantcs furtout &d'un genre ablblument neuf. Ces nouveaux volumes ont réveillé 1'ardeur du public pour ce livre & il eft a fouhaiter que la Suite 11c tarde pas ;\ paroltre. 23 Décembre 1785. Mr. de Calonne, non content d'avoir fait arrêter 1'impreffion des modifications oppofées pir le Parlement k rEnrégidrement de fon lidit, a voulu les faire fupprimer par 1'autorité. En conféquence tout le Parlement elt mandé a Verfailles pour  C Ha > aujourd'hui fix heures du foir, avec fes Regiitres. Comme tout ce qui concerne cet événement'eft précieux a reeueillir, il faut ajouter a ce qu'on a dit que, malgré la feconde réponfe du Roi infiniment plus douce, il y avoit encore vingt-une voix contre l'iidit,foixante pour 1'Enrégiltrement avec des modifications, & pas une pour 1'enrégiftrement pur & fimple. 24 Décembre 1785, Depuis la mort du Sieur Pildtre, foit par le dégout naturel aux Francois pour tout établiflement trop long, foit par 1'augmentation de 1'abonnement porté h uu quart de plus, foit paree que les augultes Proteéteurs qui font a la tête y font difparoltre 1'égalité , bafe de toute afibciation femblable , fon Mufée eft abandonné , du moins on a beaucoup de peine a recruter des fujets: afin de ranimer le zele des tiedes, on a imaginé d'en changer le nom en celui de Lycêey plus analogue par Ia réuuion de tous les genres d'inftruction 'qu'on y doit trouver & de travaillér un ProfpeÏÏus trés ample & trés bien fait des avantages que 1'un & 1'autre fexe doivent y trouver. II a pour titre Programme du Lycét étab/i fous la proteclion immédiate de Monfieur & de Monfeigneur le Comte d'Artois, & 1'ou le répand en profufion. 24 Décembre 1785. Le mieux eft 1'ennemi du bien. C'elt ce que vient d'éprou.ver Mr.  ( 143) Sedaine: quoique fon opéra Richard ceeur de lion^ ait eu trente- cinq repréfentations , le Public a toujours été mécontent du dénoue-. jnent: pour en faire un autre , 1'auteur a imaginé de joiudre a fon poëme un quatrieme aéte qui ne l'a rendu que plus long & plus froid , avant • hier, qu'il a été joué dans cet état. ' 24 Décembre 1785. Quoiquc le projet du nouvel Hótel-Dieu foit trés próné & que le Miniftre de Paris défire le voir eifeétué, il y a grande apparence qu'il ne produfra aucun effet, furtout aujourd'hui qu'on fait que ce projet, du moins pour 1'idée principale, fe trouve dans un Mémoire de M>'. A. Petit, Médecin , fur la meiüeure maniere de conftruire un hópital de malades, publié en 1774; c'eft-adire, dans le tems oü PHdtel-'Dieu venoit d'étre incendié , tems le plus favorable póur agker cette importante queftion. 24 Décembre 1785. On a publié aujourd'hui 1'Edit donné a Verfaiiles au mois de Décembre 1785» portant création de Rentes héréditaires, rembourfables en dix ans, dont l'enrégiltrement a été réformé dans 1'efpece de Lit de juftice tenu impromptu h Verfaiiles hier au foir. II porte feulement du trés exprès Commandement du Seigneur Roi, porté par fa réponfe du dix-huit du préfent mois aux trés humbles & trés refpeétueufes Repréfentations du feize du même mois & réitéré par fa réponfe du jour d'hier aux trés humbles &  C 144 ) trés refpectueufcs üératives Repréfentations de fon Parlémeat, pour être exécuté felon la forme & teneur. Comme tout cela eft trèsillégal, Meffieurs ont rem'is a délibérer fur cette féance de Verfaiiles au mercredi vingt-buit de ce mois. 25 'Décembre 1785. Au moment oü par le retour de M;f. Au geard en cette capitale on fe flattoit que 1'aflaire de Mr. Ie Maitre fe civilifoit, on. a apprïs tout h coup que ce prifonntèr avoit été transféré hier de la Baltille au ©hareiet a huit heures du matin & avec h plus grand myftere; qu'il avoit été interrogé fur le champ par le Lieutenant Criminel & que fon it terrogatoire trés pénible avoit duré douze heures; qu'enfuite il avoit été mis au fecret. On affure même qu'il 11'aura point de Confeil & qu'on lui en a refufé un. 25 Décembre 1785. Le ciel du lit de Mr. de Colonne, comme il étoit endormi profondément, s'eft détaché & lui eft tombé fur le corps. Sa première idéé cn fe réveilhnt a été de croire qu'on venoit 1'afTafliner: heureufement il n'a eu point de mal & en a été quitte pour la peur; on l'a faigné deux fois. II en a réflilté des calembours a 1'infini; on a dit que le ciel étoit jufie, que c'étoit un coup du ciel, que c'étoit un ciel vengeur, que c'étoit ■un lit de juftice & mille autres quolibets du même genre, quepeuvent enfanter le bavardage, la méehanceté ou la gaieté des Parifiens & des couniüms pcrfiffleurs. s6 Dé-  C 14? > 26 Décembre 1785. II paffe pour confïanc que Mr. le Prince de Soubife a eu ordre de s'abftenir d'en'rer au Confeil,que Madame la Comteffe de Brionne eft auffi dans une efpece de difgrace, enfin que toute la familie des Rohan eft mal vue a Ia cour, fauf Madame de Marsan. Quant au Prince de Condé, on a remarqu£' que depuis longtems il ne fe mêloit plus de Paffaire du Cardinal; il ne s'eft point préfenté chez les Juges avant les affemblées du Parlement & Pon ajoute qu'il a dit que le Cardinal 1'avoit trompé, qu'il ne lui avoit pas avoué les faits comme ils étoïenr. 26 Décembre r785.LePréa.nbiiledu nouvel Emprunt eft trés féduifant: a en croire le rédacteur, malgré le furcroit de dépeufes occafionnées par les mefures prifes pour écarter ce qui auroit pu troubler la tranquilité de PEurope; malgré 1'augmentation des charges ordinaires du gouvernement pour le foulagement dü aux Sujets foulfrans de 1'intempérie des faifons & des calamités qui ont affligé plufieurs provinces ; malgré la diminution des revenus & le retard dc-srecouvremens qui en ontréfultéles payemens relatifs aux différens fervices n'ont pas été un feul inftant moins exacts: tous les engagemens ont été ponciuellement acquittés a leurs époques, les termes de plufieurs rembourfèmens ont été même anticipés, les arrérages des rentes ont été payés plus promptenient qu'ils ne 1'avoient jamais été; Tomé XXX. G  C 140" ) jamais autant de fonds n'ont été employés en atnortiffement; jamais il n'en a été accordé d'auffi confidérabies pour les travaux d'utilité publique, pour les ports, pour les canaux, pour les chemins , pour les defféchemens; jamais le commerce n'a recu plus d'encouragemens; jamais des fecours plus abondans n'ont été répandus dans le Royaume. Tels font déja les fruits, telles devroient être les premières bafes du plan adopté: les reffources trouvées pour fatisfaire a autant de befoins, malgré tant d'obftacles ont de plus en plus convaincu Mc. de Calonne que les dépenfes d'amélioration font des reffources de richefies & que le crédit fe föïtifé par les payemens. II eft au moment d'achever ceux de toutes les dettes de la derniere guerre & même de toutes celles arrivées dans les dilférens départemens. C'eft pour y parvenir dans le courant de 1786 , qu'il fait faire au Roi un Emprunt de quatre-vingts millions. Cet Emprunt, loin de déranger ou de retardcr en aucune forte la marche de la libérafW fucceffive réglée par 1'Ëdit du mois d'Aoüt 1784, eft ccmbiné pour s'accorder & en aceélérer les difpofitions. Du refte, Mr. de Calonne annonce qu'il compte fur une augraentation de'revenus par le renouvellement du bail prochain. Enfin comme il avoit fait promettre au Roi de ne plus emprunter de fitót en rentes viageres, ii fe re co urne le mieux qu'il peut  ( 147 ) pour déguifer celui-ci & le faire pafler. 2.6 Décembre 1785. O11 accufe beaucoup dans 1'aiï'aire de Mr. le hlaitre , ira Sieur Cadet de Sena-eville de manceuvrer iufidieufement pour perdre ce galant homilie dont il s'avoue l'ennemi, mais en faifant femblant d'être 1'ami de la femme. C'ell lui qui a empêché Madame le Maüre de jetter au feu le billec écrit par fon mari a G t!:ont fous p/étcxte qu'il falloit le garder sim de le montrer k MK de Crofne & le tourner a la juitiiication du prifonnier, & au lieu de le mettre enpoche, 1'a laiffé fur lacheminée; enforte qu'il elt tombé le lendemaiu aux roains des inquifiteurs; qu'il leur a donné des foupcons fur cette cuifiniere ; qu'ils Tont arrêtée, ont fouillé dans fa chambre & y ont trouvé beaucoup de cfiofes qu'011 appelle pieces de convi&ion ,qui ontéré mifes fóus les lcellés en préfence de 1'accufé qu'011 a ramend chez lui avant de le cöndüire a la Baftilie. C'eft le Commiffaire de la Porte qui a fait toute 1'expédition, mais extrajudiciairement. 27 Décembre 1785. Depuis longtems 011 parle de tranfporter ailleurs la Bibliotheque du Hoi, comme ne pouv.uit être placée dans le fóckl acluel. On compie prés de trente mille volumes qui reftent dpars & fans ordre. II avoit été queftion autrefois de la transférer au Louvre & même da Arrêt du Confeil rendu a eet effet, il y a peut-être vingt ans, eft refté fans exécution. G 2.  ( i4« > Mr. Ié Ncir qui, depuis qu'il a 1'adminifihation de cette partie,s'en occupe avec le plus grand zele, a vraifemblablement excité le génie des Architecles de Sa Majefré fur eet ohjet. L'un d'eux, Mr. Boullée, a concu une idéé grande, neuve , ingénieufe .& fimple. C'eft tout uniment de couvrir la cour qui eft immenfe , d'en difpofer la décoration intéïieure,de maniere qu'elle préfente un fuperbe amphithéatre de livres, &de réferver les batjmens acluels comme dépóts des raanufcrits, des eftampes, des médailles, de la géograpbie les Arts, par une fociété de gens de lettres, avec des planches en cotileurs naturelles; fecret oü excelloit eet arüfte 30 Décembn 1785. Malgré tous les effons öu Parlement de Rennes pour obvier a la dis» tnbution du tabac pernicieux dont la Breragne eft mfec¥e depuis plus de quinze ffiois, I95 G 5  C 154) Fermïers gendraux fe font obftinds è. n'y point envoycr une mcilleure denrde & Ie Contróleurgdndral trompé fans doutepar leur expofd ,!es a foutenus au point que cette Cour n'obtenant aucune juftice s'eft pond a des Arrêtés & a des coups d'autoricé plus violens: le Commandant de la Province a été envoyé a Rennes pour y tenir une fdance militaire , biffer les Arrêts & Arrêtds dü Parlement & y faire enrdgiftrer de force les volontds du Roi. Toute cette conduite illdgale a donné Jieu a des Remontrances trés graves, & une Ddputatïon du Parlement doit arriver inceiTamment a Verfailles. 31 Décembre 1785. L'efpece de Lit da juftice tenu a Verfailles le vingt-trois de ce mois dtant un des évdnemers les plus mdmorabks qu'il y ait eu depuis longtems pour la Magiftrature, on ne fauroit trop en conftater tous les ddtails. D'abord, quoique le Roi eüt demandd fon Parlement, 011 a fu que Sa Majefld ne vouloit pas le voir; Elle comptoit feulement fe fairs olFrir les Regiftres par le Gn.ffier en prdfence du Premier Préfident & des Gcns du Roi, pour y bifFer ce qui lui ddplaifoit & y faire inf.:rire fes volontds. Mr. le Garde des Sceaux a repréfeuté k Sa Majeftd que ce feroit contre toute regie & fans exemple; qu'ayant mandé fon Parlement en corps de Cour, Elle ne Püuvoit fe dispenfer d'en admettre tous les  C 155) membres en fa préfence : a qnoi Elle a enfin confenti, en ordonnant qu'on n'ouvrir qu'un battant de fon cabiner. Le Premier Préfident a obfervé a 1'Huiflier, quand il s'agit d'entrer, que 1'ufage étok qu'on ouvrit les deux battans: 1'huiflier lui a répondu que tels étoient fes ordres; il en a cepeirdant été référé au Gemilhomme de la Chambre de fervice, qui a confirmé cette mortifiante étiquette. On a paffé par deflus» 1'on elt entré & le Roi a dit: „ Mon Parlement, qui connolt les regies „ & les formes, n'auroit pas dü inférer dans „ fon Arrêt d'enregiftrement deftiné a être. „ publié & affiché, des chofes qui doivent „ refter dans le fecret des relations intimes „ que je lui permets d'avoir avec moi. Je „ retrancherai de eet Arrêt tout ce qui eft „ éfranger a fon objet; je trouve bon que ,, mon Parlement m'avertifle par de refpec,, tueufes llepréfentationsde ce qui peut inté„ refter le bien de mon fervice & le bonheur „ de mesPeuples; mais je ne prétends pas „ qu'il abufe de ma bonté & de ma conliance „ jul'ques au point de fe rendre en tout tems „ & en tout lieu le cenfeur de mon adminif„ tration. Je dois anéantir un Arrêt aufli „ peu réfléchi." lei Le Roi a fait lui-même la radiation d'une partie de 1'Arrêt & de tout 1'Arrêté; il a enfuite ajouté: „ Je compte que mon 'Parlement réglera G <5  C 15O „ les effets de fon zele d'après les principes „ de fageffe, de refpeét & de foumiffion qui „ font dans le coeur de chacun de fes mem„ bres & dont il ne peut être excufable de „ s'écarter. Au furplus, je veux qu'on fache „ que je fuis content de mon Controleur gé„ néral, & je ne fouffrirai pas qu'on trouble .,, par des inquiétudes mal fondées 1'exécu* tion de plans qui tendent au bien de mon ,„ Etat^& au foulagement de mes fujets." Enfiute le Roi a fait lire par le Griffier en 'Chef 1'Arrêt, tel qu'il fe trouve depuis la raduuion faite par Sa Majefté, & a ajouté: C'eft ainfi que 1'Arrêt doit fubfifter & 5, voila comme je veux qu'il foit imprimé & s, affiché." Alors le Hoi a donné a Mr. le Baron de Breteuil un. pa pier qu'il a tiré de fa poche & lui a dit de faire inferire fur le Regiftre par le Greffier en Chef tout ce qu'il'venoit de dire. Mr. le Baron de Lreteuil 1'a difté tout haut au Greffier, a qui Sa Majefté a ordonné d'en faire lccture; puis Elle a dit a Mr. le Premier Préfident de le figner. S'adreffant enfuite h Mn Seguier, Sa Majeflé lui a dit: „ vous avez bien entendu „ que 1'Arrêt doit être imprimé tel qu'il eft „ a préfent". A cette occafion Mr. Seguier n'ofant en faire ladifficulté au Roi lui même,a demandé a Mr. le Baron de' Ereteuil de quand on éatejoit 1'Arrêi? ]1 lui a obfervé* que li 1'oa  C '57) eönfervoJt 1'ancienne date, avec ces cbange^ mens, cen'étoit plus le mêmeArrêt & c'étoit un faux: que fi 1'on le datoit du jour de la préfente feance , il falloit faire mention de l tfpece de Lit de juftice que Sa Majeflé venoit de tenir &y joindre les formules ufnées en pareil cas. Mr.le Baron üe Breteuü n'éioit point préparé a ces diffioultés; il a dit qu'il falloit s'en tenir a fuivre liitéralement les ordres du Souverain & Mr. le Premier Avocat Général n'a pas infifté davantage. Comme le Parlement fe retiroit, le Roi a appellé le Premier Préfident & lui a dit:- „ je ne veux plusJque Mr. d'Amecowt foit Rap„ porteur de mes affaires; vous en indiquerez „ un aufre a mon Garde des Sceaux, qui m'en rendra compte." Pour mieux entendre ceci,il faut favoirque précédemment il y avoit cu une conteftation vire k Verfailles eutre Mr. le Contróleur général & Mr. des & longues Remontrances ordonnées dans PafTemblée d'hier trente furtoutes lesdifgraces & humiliations qu'elle vient d'éprouver. 31 Décembre 1785. L'accident de Mr. de Odonne eft des plus extraordinaires & il eft bien heureux d'en avoir été quitte a Ti bon marché. 11 pouvoit être affommé trés facilement: du rede , il s'eft trouvé tellement empêtré qu'il n'a pu ni crier,ni foni;er& qu'il n'a recu de fecours qu'au moment oü fon valet de chambre eft entré pour allumerfonfeu. Le Roi, in fora é de l'accident deux beu* res après, a écrit une Lettre affedtueufe a ce Miniftre. Du refte , les cale.mbours continuent. On dit que ce Miniltre ayant ordonné a fes gens de chercher , de voir s'ü n'y avoit pas quelque voléur de caché , qu'il y en avoit sürement dans la chambre; ils lui ont répondu, après leur perquiïition: muit nous ne voyons que vous ici, Monfeigneur. 31 Décembre 1785. Extrait d'une Lettre de Mortagne Dans cette ville, capitale du Perche,il vient d'être élevé un monument d'un genre unique & méritant par cette raifon d'être connu. Cette ville ayant obtenu par une Déclara.tion du vingt-trois Septembre 1784 la décharge de droits litigieux & fufceptibles de recherches ruineufes , a voulu en confacrer la mémoire. Mr. Bouchu, Architeéte, éleve de 1'Aca-  C 'Goj démie, a été chargé de l'exécution. II a compofé un deffin fimple & clair , d'une grande correction, oü il a repréfenté la Mufe de PHiftoire, aclievant de graver fur une Pyrarnide de marbre le titre de la I.oi bienfaifante. Ce deffin approuvé pröduit un trés bel effet en reliëf. ! L'ouvrage fini, on en a fait 1'inauguration le quinze Novembre dernier. Au bas on lit ces qnatre vers , adreffés aux. Députés: Vertueux Citoyens, qui dn Peuple & du Prinee Avez cor.cilié les intéréts divers, Mortagne accompliflant le voeu de fa Province A la Poflérité confacre vos bienfaits. Plus bas font gravés les norus de ces Députés, Mr. Bertereau, Lieutenant Général; Mr. de Fontenay, Chevalier de Saint Louis.  PREMIÈRE LETTRE SUR LES PEINTURES, SCULPTURES ET GRAVURES EXPOSÉ ES AU S A LL ON DU LOUVRE LE 25 AOüT I785. JL/es Artiftes, Monfieur , font comme certains malades qui, ne ponvant vaincre leur répugnance ft la vuc d'un remede, préferent les foufi'rances & quelquefois même la mort ft uri dégoüt momentané. Heureux de rencontrer des parens ou plutót un ami qifi s'hueV refle affez ft leur confervation, pour ufer d'une contrainte falutaire, & lesfauver,en quelque forte, malgré eux. La Critique eft ft 1'égard des premiers ce remede fouverain ; mais en horreur ft l'amour-propre de tous, & cependant quels biens infuus elle leur aprocurés! En ener;, n'ett-ce pas elle qui, ft force de s'élever contre 1'indignité du local, fi longtems théatre de leur rivalité, fous le titre ridicule de Sallon, eft venu ft bout de le faire convertir en un féjour plus décent,plus noble & plus analogue ft cette dénomination faftuetife? N'eft-ce pas elle qui, fans relache , gémiffant fur le grand nombre de portraits obfcurs, de bambochades puériles , de tableaux de genre eftimables, mais oü le génie ne peut prendre fon eflbr, a réveillé le zele, du gouvernement, a provoqué fa munificence & fait naitre cette foule de Peintres d'liidoire dont s'énorgucillit aujourd'iiui 1'Ecole Fraa-  ( 162 ) coife? N'eft-ce pas elle qui pourfuivant impitoyablement le mauvais goflt, le goüt faux , la maniere briljante, mais fouvent déplacée & toujours trnp prodiguée dont Boucher avoit engoué fes éleves, a rappellé les jeunes athletes aux vrais principes du grand genre, aux beautés mftles de 1'antique ? Enfin , pour tout comprendre en un mot, n'eft-ce pas elle qui a produit le.Sallon actuel, le plus magnifique & de 1'aveu général le plus impofarit qu'on cite depuis fon établiflement? Nulles futilités, nuls colifichets, point de gtotefques, point de cnricaturcs , point de ces fcenes molles & efFéminées dont 1'efFet ordinaire eft d'énerver le talent en corrompant le cceur. II y regne un ton févere qui Je rend raoins agréahle aux gens frivoles & fuperfieiels; mais qui plalt aux vrais amls des arts, & aux partifans des mcctirs; qui éleve & aggrandit 1'ame ; qni fournit aux méditations du génie & le perfec.tionne en 1'exercant. C'eft k quoi, fans doute, font deftinés furtout plus de trente Tableaux d'Hiftoire, dont la plupart de vaftes machines, & dont quatorze commandés pour le Pvoi. On défireroit feulement que, fuivant le plan arrêté, les fujets euflent été choifis dans nos Annales & L'on regrette de n'y en trouver qu'un de cette efpe-ce: (*) toutefois il (*) Saint Louis rendant la julliee dans le Bots de Fincennes ; Tableau de Mr. Brenet, defliné pour la chapelle du chateaü de Coinpiegne.  C i«3 ) feroit bien tem* que les Romains, les Grecs , les Egyptiens, les Hébreux, qui depuis quatre rnille ans occupent Ja fcene, cédaffent la place a des peifonnages plus rapprochés de nous, plus dans nos mceurs & plus intéresfins pour des Francois. Quoiqu'il en foit, j'envifage du moins de toutes parts des traits d'héroïfme , des actions patriotiques , des yertus douces, fociales ou religieufes. Ici Mr. Vien, après avoir otTert il y- a deux ans Priam allant fupplier Achilk deluirendre le corps de fon fils Heclor, nous le montre qui revient dans fa capitale avec ces précieufes reliques: 1'on fort au devant de lui; le cliar eft bientót entourd de fon augufte familie qui 1'arröte. Hecube cmbrafle le héros inanimé. Andromaque lui prend la main & femble fe plaindre encore aux Dieux de la mort de fon époux. AJlianax, conduit par fanourrice, tend les bras a fa mere qu'il voit éplorée: Paris & Helene, craignant les reproches, fe tiennent a 1'écart derrière Andromaque; & Cajfandre qui a prédit tous ces malheurs, fe précipite fous une des roues. Mêmes beautés & mêmes défauts abfohiinent que dans le tableau précédent. On reproche en outre a Mr. Vien, quoiqu'il fache bien l'hiltoire & connoilfe parfaitement 1'antiquité, d'avoir employé dans fon architecture 1'ordre doriquealors ignoré & mis (ür la tête cVHecube b} couronne a rayons, fatlement en ufage foiis les Empereurs Roniains.  ( 164 ) La, Mr. la Grenêe ï'kiné'Aoüs re tracé Ia génér.ofité compatiflante é'Alexaiïdre. Ce Monarque averü par un Euuuquc de la mort de Ia femme de fon ancien rival, quitte le cours de fes expéditions militaires, vierit au Pavillon de SifigamMs, qu'il trouve couchée par terre, au milieu des PrincefTes éplorées & prés du jeune fïïs de Darius encore enfant; il prend part a leur douleur & les confole. L'artifte du moins annonce cette intention ; mais elle n'eft pas remplie. On a peine a difHnguer le Roi Macédonien de fon Confident Eplestion. Sa tête n'eft point rendue d'aprës 1'antique, & quoique ce morceau ibit riche de détails & d'un beau faire, Ton fait mauvais gré a M'. la Grenêe d'avoir ofé lutter contre le Brun, dans un fujet traité par ce grand inaitre, & de refter 13 fort au deöbus. Dis connoifleurs préféretit fon Ubalde & }c Gievalier Danois aux prifes avec les Nyrnphes qui chtrchent'ft les féduire, cosome plus dans fon genre aimable; cependant l'aétiqii principale y elt mal exprimée & il y regne un ton trifte,peu convenable au fujet oü le Tajfe a répandu tant de charmes. En levant les yeux on voit Enèe qui, au milieu de la ruine de Troye, n'ayant pu détvrminer Anchife, fon pere,a quitter fa patrie & fon palais, veut, dans fon défefpoir, retourner au combat: Créuze fa femme, 1'arrête, cn lui préfentant fon jeune fils Afcagne. Lire que ce morceau eft de Mr. Suvée, c'efï  C 165 ) annonce* en möme teras une «fompofition nette & faeile , des plans bien diftinös, une fcene fimple, mais trop vuide. Ü'ailleurs ii ne s'eft pas aflez péne'tré du premier livre de ïonEneide, en traitant un fujet qui de fa nature exigeoit. néccifai;ement plus de chaleur & de mouvement, méUne de tumulte & de défordre. Sa Créuze prefque aulli jeune, aufli fine que Ie petit Afcagne, eft dans la forme francoife .plmót que dans celle des Troyennes de M*. Vien , tout ami que foit celui - ci des femmes fvveltes & légeres. Et les couieuvres étouffies Seront le jeu de fon berceau. Ces deux vers d'une Ode de Rouffèaa lont le pnncipal fujet du tableau voifin dont le but eft d'exprimer comment Amphytrton ,. voulant s'aïTurer de la difti'nétion qu'il devoit faire des deux enfans qu'Alc mme avoit mis au jour, fit lacher deux Gapens entre leurs berceaus, Le courage, du petit Hereule détermina fon choix; il recut fon hls, Euryfthée, qui fe jetta tout effrayé dans les bras en préfence de la mere, de la nouc nee St des femmes, témoins de cette épreuve On eft d'abord fenté de rire, en voyant eet Amphytrion depuis tant de, liecles devotie? ;\ la plaifanterie; & pour peu qu'il eflt eu de go'üt Mr, Tmval auroic 1'euti que ce perfonna<*è ridicule ne pouvoit figtirer dans un v>ocms héroïque comme le fien; il y auroit confdqnemment renonce. Quoi qtVil en ibit, quant a la compofitioi], il ne b'eu eft pas ujal üsé-  C 16Ö ) mais VAlcmene eft déteftable, & tout le coloris de ce tableau eft du plus mauvais ton. M!'. Brenet nous exprime enfuite la piété & la générofité des Dames Romaines qui, ft la prife de Veies, apporterent aux tribuns militaires leurs bijoux d'or pour les fondre & exécuter une coupe de ce métal que la République avoit fait vceu d'offrir ft Apollon; veen que fa pauvreté ne permettoit pas de remplir. On auroit defiré que ce Peiutre , toujours fnge, favant t\ froid, eüt rendü plus nombreux le concours des Dames & montré plus d'admiration de la part des Tribuns,ft moins qu'on ne dlfe que les belles acllótis étoient déjft fi familieres ft ce pe'uple que rien en ce genre ne les étonnoit; obRrvation bien dérournée pour Mr. Brenet, dont le défaut n'eft pas de péciier dans fes ouvrages par trop d'efprit. Le Moïfe fauvé des eaux par lafille de Pharaon, eft fe tableau qui vient après, & je vois avec peine que M-. la Grenêe le jeune niette le fp'tctafeur dans le cas de fe rappeller le Moïfe fauvé des eaux, du Poujfm, qu'on compte parmi fes ouvrages les plus remarquables. Le premier eft fort gracieux ; mais ce qui fèroit beauté ailleurs, eft ici défaut: la fiaéfls des têtes de pyofil, 1'élégaucé des forroes donne plus d'idée des Grees que des Hébreux ou des Egypticns. D'ailleurs le lieu de la fcene n'eft point indiqué; rien ne caractéiife le NU. Enfin la Priucefl'e trop éloignée du grouppe de 1'enfant & fa focur, amenant fa  C 167 ) rnere pour lui fcrvir. de nourrice,. trop defra? délFdans 1'ombre, rendent 1'action fans enfcmble & abfolument découfue. Indépeudamment de ce tableau pour le Roi, 1'Artifte laborieux, toujours fécond, a expofé plufieurs petits morceaux qui ne manquent pas de partifans & dont quelques-uns lont menie plus eftimés que fii grande machine , tels que Roland abandonnant Armide, malgré Ie défaut de coftume d'avoir 5 au tems des Croifades, habi'Hé lesPreüx Cbwaliers a la Romaine, Sa Frïiè repréfentant Moïfe ,' chaflant les Bergers de Madian qui emnêchoient les fiües Acjethro de faire boirc leurs ■ troupeaux, elt pl.ine de mouvement & d'une exéeuiion hardie & originale. Les Amateurs du goüt fain , y rëtrouvent avec piailir le genre antique. La iriautere large & grande de Mr. Menageot dont le Tableau elt a cóié du Moïfe , lui iajt un vrai tort. Celui ci nous inontre Cle'opdtre rendant fon dernier hommage au torn- • beau d'Antoine. „ Après la défaite d'AStium & la mort „ d'Antoine, cette Reine lachant que 1'intentioa d'OSavs e'tóic de la conduire a „ Rome pour orner fon triomphe, réfolut de „ ne lui pas furvivre ; mais avant elle fit ckmander au vainqueur la pénrrifiion de 55 vifiter pour la derniere fois 1c tombeau 3, d'Antoine. La s'iffiagiriant qu'il h voyoit 5> & 1'eniendoit encore , Clêopdtre lui dit  C 163 ) „ qü'elle allok lui donner la plus grande preüve de fon amour,- lui fit fes adicLf^& „ après avoir femé fa tombe de fleurs, elle „ fe retira avec fes femmes & remplit fa „ promefle". Cet expofé de 1'artifte offroit , comme Ton voit , deux traits , Pafte religieux & 1'aöe béroïque , fujets de deux tableaux,- a rnoins. d'mi génie bien inventif pour les rendre en un. Mf. Ménageot a choifi le premier, fans doute comme plus fécond en acceffoires, comme plus fufceptible du développe» ment des dilférentës parties de fon art. Peutét re meme a-t-il cru avoir exprimé 1'autre par le cléfefpoir dont eft empreinte la figure de Cléopdtre, par une carnation plombée & livide, d'une maniere fi outrée qu'elle annonce déja non feulement la mort; mais la putréfaclion. Peut-être auffi cette mauvaife plaifanterie eft-elle trop exagérée: du moins eft - il vrai que la douleur de la Reine d'Iïgypte, profonde & concentrée, ne devoit point être celle d'une fen^melettc de Paris, dont la moiudre attaque de nerfs dérange toute 1'économie animale, en altérant fes traits, ne devoit point s'étendre fur toutes les autres parties de fon corps, comme fi elle fortoit d'une rnaladie longue & cruelle,ou même comme fi elle avoit déja un pied dans la tombe. Vous voyez , Monfieur , que je m'arróte principalement a 1'exprefiion, partie la plus eiïèntielle, dont le plus ignorant peut juger. D'au-  C 169 ) D'autres critiques obfervent que les figures de Mr, Menageot n'ont pas le caracfere Egyptien ■ • que ce pent Page portant le manteau de la Reine n'eft point dutems; que fon farcophage eft la copie de celui VAgrippa a Saint Jean de Latran; enfin que ce tableau manque d'har- .mome, que la couleur en eft dure Bien des geus preferent encore lëYabieaii de chevalet de eet arfifte, oül'on voit Alcejle rendue a lonmaripar Hereule: quoique celuici foit un peu jeune, point affez male & ne reflemble en rien a VHercule Farnefe. Je vous parlerois , Monfieur, de 1'efquilfe de Mr, Menageot, d'un tableau pour la ville au fujet de la Paix de 1783, fujet intéreflant plus que tous les autres.fi je ne préférois d attendre le tableau , qui doit vraifemblablement figurer au premier Sallon. A ce morceau d'hiftoire profane fuccede un morceau d'hiftoire fainte, dont la moralité eft Ie danger des vceux indifcrets, ou plutót doit être d' „fpirer de 1'horreur contre des veux atroces. En efFet, le ciel envoyant a Jephtê lapropre fille, lorsqu'il vient de lui faire le ycet,, s'.il remporte la vicW fur lesAmmonites, dimmoler la première crêature que fes yeux reucontreront en rentrant dans fon palais. eft une terrible lecon. En Ia voyant, le pere detourue promptement fes regards, déchire fes vètemens tombe dans les bras de fon écuyer, & fa fille fe précipite i fes pieds, pour appren- r tv2 fa d0Uleur- Me ^oit fttivie lome XXX. H  ( &» ) de fes femmes jonant des inftrumcns , & a ces concerts d'allégrcffc fuccede un ülence morne & effrayant. Vous jugez, Monfieur, par cette dcfcription, que le tableau tlt heureufement compofé, furtout pour fon efpace, necomportant que huit pieds de large fur dix de haut. En cela Mr. Fanloo ell bien fupérieur a fon ouvrage duSallon dernier: mais le coftume ji'en eft point exact au gré des antiquaires; les perfonnages font habillés comme des Grecs, & toujours point de coloris ou plutót un ton blalTurd, qui donne 1'air d'une croute a celuici & repugne au fpectateur, n'y revenant que par réflexion. En général, eet artifte ne femble pas fait pour 1'hiftoire; il veut foutemr 1'honneur de fon uom & fa dignité de Profeffeur, & cependant il vaudroit mieux être le premier des Peintres de genre, que le dernier des Peintres d'hiftoire. Ce n'eft pas un petit plaifir, Monfieur, pour le public , que le contrafte de tous ces imets & de toutes ces manieres. C'eft mamtenant la fouaue d'un débutant plein de verve, dont ïe rédt feul a coup für vous enflammera 1'imagination; quel elfet ne doit pas produire le fpeftacle de 1'aclion même? U a'agit du Sac de Troye , au moment épou» vantable oü Pyrrhus bleffé par Poltte , le dernier des fils de Priam, le pourfuit jufques dans le palais de ce Monarque, le maflacre S fes yeux, & le pere eufuite, voulant vanger la mort du jeune héros. Tuut fe lent ici de  ( i?i ) rinexpérie'nee du compofiteur. On lui reprochpic 1'an paffe d'avoir choifi la nuit pour ie tems de 1'éducation duCentaure Clnron; aujourd'hui, dérogeanta la vérité de 1'hiftoireil oublie cette nuit défalïreufe que nous peignent fi cbaudement & Virgile & Racine, oü fa paffa la cruelle fcene qu'il veut rendre, & it la tranfporte dans le jour: il oublie que le pathétïque n'y doit être que fecondaire, que l'acfion principale eft la cruauté de Pyrrhus % & il met dans 1'ombre ce vainqueur barbare, & il attire les premiers regards fur le grouppe ó'Hêcube, d'Jndromaque & de Cajfandre éplorées. Toutefoisjl'onfonde dejufies efpérances fur eet artifte, lorfque 1'age & la raifon lui auront rnüri la tête. II faut que 1'Académie penfa de mötne, puifque, a peine recu, elle fa employé aux tableaux deffinés pour Ie Roi. Qu'il confulte encore longteras fon Maïtre M'-. Bardin fur le deffin & la compofition; car, quoiqu'il 1'ait laiffé derrière lui, il peut fans s'humilier continuer d'en prendre des lecons. Toujours Agrééjlorfqu'il voit fon éleveAcadéruicien, Mr. Bardin dont c'eft ici le cas de faire mention, prouve bien que dans ce fiecle frivole on va beaucoup plus loin avec urt mérite brillant qu'avec uu mérite réel. Sou tableau repréfentant 1'Extrême - Onction , d'une grande & belle ordonnance , C) mais gris & fans effet de couleur , ne C) 11 eft de 15 pieds 2 pouees de'long, fur 6 H 2  C w ) frappe point & 1'on paffe fans le regarder, lórfque 1'autre plein d'écarts & d'extravagances faiüt & attire la multitude. Comme dans fes êfquiffes deffinées, dont 1'une repréfente 1'adoration des Mages & 1'autre une Vierge, il n'eft plus queftion de couleur, on convient qu'il fait infiniment mieux & qu'on les conüdere mêrae avec plaifir. Le fang-froid dont Manlius TorquaW condamne k la mort fon ffls, quoique vainqueur, pour avoir combattu, malgré la défenfe des Confuls, (*) eft le principal objet du tableau de Mr. Bertellemy, qui occupe le milieu entre Mr. Renaud & un Athlete entrant dans la carrière. Cet artifte a toujours l'cxpreffioa jufte & n'eft point maniéré jufques a préfent j depuis trois Sallons qu'il figure avec éclat, fes fujets ont été tous variés. D'abord noble & gracieux, il s'eft enfuite montré terrible, & aujourd'hui il eft grand , fier & pathétique; car la vertu Romaine pouffée dans le principal perfonnagea fon plus haut dégré ,ne 1'empêche point d'être pere & cette doublé conception eft trés bien fentie. Le ftyle eft ferme & févere , comme la compofition. Mr. Peyron eft le nom du débutant indiqué, & fo'n fujet Vhéroïfme de l'amour conjugal. pieds S pouces de haut, II eft deftiné pour la Chartreufe de Valbonne, prés le Pont Saint-Efprit en Lanttuedoc. . (*_) Ce trait d'hiftoire eft de 1'an dc Rome 413-  C 173) Ced Euripide qu'il a pris pour guide dans Ia diftribution du poëme. Alcefte s'étant dévouée volontairement h 1* mort, pour fativer les jours de fon époux fait fes adieux a fon mari, que le delèfpoir accable, &, après lui avoir fait promettre de refter fidelle a fa mémoire, elle lui confie fes enfans , dont. elle elt entourée , & qui , baignés de larmes, participent a la douleur d'une fi cruelle féparation , a proportion de leur dge. Les femmes plongées dans la triftefl'e rempliffent le palais de deuil, & la Statue de 1'bymcn eft voilëe a jamais, comme ne devant plus éclairer d'autres embraflemens. Le pathétique de l'aëtion y femble bien rendu, les convenances morales parfaitement fenties! Le fond en elt trop noir; ce qui, au gré des connoilfeurs , provient en partie de Ia mauvaife expofitiondu tableau & d'ailleurs ne meilied pas a la triltelfe de la fcene. Les geus de Part, examinant tout avec 1'équerre & le compas, y critiquent trois plans abfolument paralleles, défaut capital contre le% premières regies de la compolhion matérielle , & les differtateurs de 1'Académie des Belles - Lettres font choqués d'y trouver encore fur la tête a'Admette cette couronne a rayons ulitée ieulement dans les tems trés poltérieurs. Malgré ces reproches fondés, Mr. Peyron s'annonce comme devant être un jour un des foutiens de 1'Académie & elle en a jugéainfi en 1'admettant, quoique Agréé, a travailler pour le . H 3  ( 174 ) Roi; honneur rare, s'il n'eft pas fans exemple. Le morceau de reception de Mr. Taillaffon, dont je ne vous ai dit qu'un mot il y a deux ans, comme Agréé, eft au-deflus du Tableau de Mr. Peyron ; c'eft PhiloEtete a qui Ulyjfe & Néoptolême enlevent les fleches Ó'H.ercule. On ne trouve point au premier les formes d'un héros Grec; on prétend que fa pofe luidonne plutót Pair terrafTé que menacant; quant aux deux autres perfonnages , ils font un peu roides & pas affez variés; toute 1'exécution efl pcinée. Malgré cela, 1'intérèt du fujet , de la penfée , un bon ftyle & de 1'éclat dans le coloris, lui ont valu les fufïrages des maitres. La föulé des autres ouvrages que eet artifte. a expofé, attelte d'ailleurs fa conftance au travail & fa facilité. Sa Sainte Therefe (*) en extafe eft généralement applaudie. Elle éleétrife le fpeétateur & le ravit h fon tour, malheureufement d'une maniere toute profane , fans lui faire quitter la terre & en s'attachant^plus que jamais ft la créature. Je vous ai, Monfieur, obfervé autrefois .que les Peintres manquoient prefque-toujours la figure de Jejus ■ Chrifi; il en eft de même de Jupiter. Ce Souverain des Dieux, endormi fur le mont Ida, fujet du tableau de (*) Ce tableau elt pour les Dames Carmélites de Limoges, ainfi'qu'un St. Juan de la Croix, trés goüté auffi.  C 575 ) Mr. Barbier 1'ainé, devant lequd Je me trouve en ce moment, eft bien ioin de la majefté qu'il devroit avoir : la Junon eft beaucoup mieux pour la figure; c'eft uuejolie femme, mais non encore celle qui dit dans Virgile : aft ego qua Divüm incedo Regina. Le Morpliée dans les airs qui répand les pavots fur ce couple augufre, elt bien fufpendu & d'une grande légereté; & quant au mécbanifme de Part, le tableau n'eft point fans mérite. Vous vous impatientez peut-être, Mon* fieur, de ne point m'entendre vous pnrler de Mr. Vincent; .m'y voila. II a compofé deux tableaux faifant une fuite biltorique. Par le premier, fans doute il a voulu s'eflayer, fe pénétrer de fon principal objet, afin de le mieux rendre; dans le fecond, deftiné pour 3e' Roi & de plus grande maniere, Ccecinna Pcetus; s'énnt attaché a Scribonius, qui avoit foulevé 1'Illirie contre 1'Empereur Claude, fut pris & mené a Rome. Arrie , fa femme , trop inftruite qu'il n'y avoit aucune efpérance de le fauver, 1'exhorte a fe donner la mort. Cette héroïne , voyant que Pcctus n'avoit pas le courage de fe tuer, prit un poignard, ie 1'enfonca dans le fein & le préfenta a fon mari, ,en.lui difant, Tiens, Pcetus, Une m'a point fait de mal: exemple qui détermina fon époux incertain , a ne pas lui furvivre. Quels beaux fujets & que 1'ame doit s'élever en les traitant? Vous voyez, Monfieur, que 1'un n'eft, a proprement parler, qu'une 11 4  ( i?6 ) préparation a 1'autre. Aaffi Mr. Vwieent n'en a fait qu'un tableau.de chevalet; mais bien 'loin d'avoir fuivi la gradation qu'il fe propofoit, il femble s'être épuifé, pour ainfi dire, A compofer fon esquilfe, & fon grand morceau elt fort inférieur aupetit:(*) dans celuier fon Jrrie fiérement pofée , comme 1'exige la circonftance , le bras droit bien tendu ,. embraiïknt de la meme main le poignard , tourné vers fon fein, les doigts ramalfés en pointe & portés contre fon front, indique h fon mari que rien ne peut arrêter une réfolution courageufe, bien prife, & qu'elle va lui en offrir la preuve. Pcctus, aü contraire, porte dans toute fa contenance, 1'humiliation, la foibleffe & le découragement. II eft affis, panché en avant, les yeux fixés vers la terre; fes vêtemens font ternes comme fa figure , tandis que la robe éclatante de fhéroïne forme ïin contrafte piquant pour les elfets pittorefques, & ingénieufement allégorique aux fentimens & a la fituation des deux perfonnages. Arrie s'eft poignardée dans celui-la; on le fuppofe du moins, car Ia blelfure n'eft pas affez vifible. Mais au lieu de préfenter le fer a fon mari, avec ce calme héroïque , rendant autant qu'il eft polfible ie fublime de ce mot, Pcete, non dokt, elle le tient toujours dirigé vers (*) De trois pieds, (lx pouces de ham , fur quatre pieds trois pouces de large feulement.  C177 ) vers elle, & fa tête renverfée en arriere annonce la défaillance.: d'un autre cóté, Pcetus par fon attitude exprime plutót la furprilë & 1'effröi, que fa difpofition a fimiter. Ce que le Pcintre auroit dü faire fentir & ce qui auroit été le comble de Part. Le coloris n'en eft pas non plus auffi fier. La Pefte de Milan de Mr. le Monnier eft un tableau qui paroit bien froid après celui dont je viens de parler, & Saint Charles Borromée, malgré 1'auréole qui ceint fa tète , ell un pauvre peifonnage mis en regard tfArrie. Quoi qu'il en foit, ce début de l'auteur mérite des encouragemens; il y a de 1'ordonnance, de belles maffes, un bon ftyle; mais on obferve qu'un fléan dévafteur comme la pelle n'eft point rendu par une feule femme expirante & tenant fon enfant mort dans fes.bras, & 1'on exhorte eet Agréé a être plus correct, dans fon deffin, partie fi eifentielle de 1'art & dans laquelle a toujours excellé 1'école fran?oife. Je ne fais, Monfieur, fi c'eft par coquettcrie, mais voila pour la feconde fois de fuite que Mr. Callet fe fait attendre, defirer & prdner d'avance; on vient enfin de placer fon ouvrage, qui nous ramene encore a cette histoire grecque dont nous ne ponyons fortir. Le fujet eft celui qui précede les tableaux de Mr. Vien & qu'il a eu foin de pafler, comme peu analogue a fon génie trop fage pour Penthoufiasme & la fougue qu'il exigeoit. Je ü 5 t  C 178 ) veux parler A'Achille trainant le corps d\HffCtor devant les mur's de Troye & fous les yeux de Priam & d'Hecube, qui implorent le vainqueur. Ce tablenu, comme celui de Mr. Peyrm, qui eft a l'oppofite , eft placé trop haut & recoit le jour d'une facon trop ingrate pour n'en pas perdre bèaucoup de détails; d'autant mieux qu'il eft auffi trés ombré, pour ne pas dire noir. La figure la plus apparente eft le cadavre du héros vaincu; fpeftacle qui répugneroit, fi l'auteur n'avoit eu 1'attention de Tious 1'offrir en eet état de confervation dü aux foins de Venus & ffApollon, comme en prévient Mr. Vien dans fon explication, mais ridicule óiincompatible ici, oü il eft cenfé couvert de la fange & de la pouwere dont il eft fouillé fuccefiivemenr. L'artille a facrifié la vérité & même la vraifemblance aux belles formes, a la fivante anatomie qu'il vouloit développer. II en a fait la partie principale de fa compofition, lorfqu'elle ne devoit être qu'acceffoire. Son héros vainqueur ne s'oifre auX yeux & ne frappe qu'en fecond. La pofition hardie avec laquelle il fort le pied droit ce fon char pour fouler fon rival, eft plu tót un tour de force reffemblant a ceux du Sieur Aftley, (*) que 1'attitude noble & fiere d'un (*) Faraeux Ecuyer Anglois, qui tierït depuis plufieurs années a Paris un fpeftacle de chevaux fur lefqaels il eierce des tours de force & d'aüreffe merwüleux»  ( 179 ) Prince faifant parade en ce moment.de fa férocicé, mais non luttant d'adreffe avec les Auto~ medon dc 1'armée grecque. Ces défauts & pluüeurs autres, tels que la jambe (ÏAcldlle, qui n'eft point musclée vigoureufement comme devoit être celle de 1'éleve du Centaure Chiron , n'empêchent pas que ce morceau ne foit trés eüimable pour la chaleur & le mouvement qui yregnent: on croit voirrouler le cbar, que fuit involontairement 1'ceil dit fp.'étateur. Cependant fi , comme on 1'eu accufe , Mr. Callet n'avoit fait que copier fervilement un peintre Anglois nommé- Hamilton, tout fon mérite fe réduiroit a rien. J'allois, Monlieur, flair & fermer cette Lettre concernant les Tableaux d'hiftoire , lorfque, retourné au Sallon pour le vifiter de nouveau & confidérer fcrupuleufement fi je n'ai rien oublié en ce genre qui puilïe vous intérefler , je vois la foule des Speérateurp jufques la ü flottante &.fi agitée, ne faire, pour aintï dire , qu'une maffe ftupéfaite d'admiration en préfence d'un chef-d'ceuvre qu'on venoit de placer. Vous n'en ferea pas étonné quand je vous dirai qu'il vient d'Italie, mais ne vous y trompez pas; il ne s'agit ni d'un Rap7iaël,r\i d'un Guide,ni d'un Tüieny ni d'un Correge, mais d'un Dami Ce jeune Peintre fe trouve k Rome & y a compofé pour le Roi fa tache, qui étoit le Serment des Horaces entre les mains de leur fere. Revenu a foi, chacun fe répand m H 6  ( i5o ) louanges & fe récrie fur le genre de beautés qui lui plak dav'antage. Quelle. compofition fimple & fublime, dit 1'hoinme de Lettres ! quelle ordonnance noble! quelles hautes couceptions dans la tête du pere! quelle fermeté patriotique dans le prefnier des jeunes gens! Quel deffin! répond i'artrfte ; comme ces mufcles font prononcés favamment &variés avec intelligence dans la jambe du pere & dans celle du fits! quellevigueur! quelaceord! quel coloris! Ce tableau écrafe tous les autres. J'en aime furtout l'architecfure, continue un de nos Vitrunes; elie remplit bien le fond du tableau, elle eft d'un grand goüt, fans ornemens, comme 1'exigeoit le coftume du tems & tirant toute fa beauté de fes proportions bien entendues. L'aimable perfonne que la fceur! ajoutc un jeune homrne , quelle douceur, qu'elle eft touchante dans fa triftcffe! Les beaux yeux, quoique baignés de larmes ! Si dolci nel pianti the farun ml rifo! La pauvre mere, repart en fanglottant une bonne femme l Quelle douleur de voir partir fes fils pour Ie combat oü ils vont peut-être périr.' Oui, mais c'eft la douleur d'une 'Romaine , répond a ' cóté d'elle 1'homme d'efprit philofophe, accoutumé k difféquer & a nuancer les paffions. Enfin le favant s'extafie fur les draperies, fur les vêtemens, oü rien n'eft omis de ce qui peut ]s fatisfaire. Ce concert d'éloges cent fois répétés ayant pris fin , j'entends 1'envie qui fait üffiLer fes ferpeus & gliffe fourdement fes  C isi ) murmures. Le tableau eft un peu jaune de couleur, les grouppes font découfus;-le plus apparent des Horaces pour prêter le ferment écarté les jambes, comme s'il alloit tirer une botte. II y a quelque chofe d'embarraffé dans les bras tendus des trois freres & furtout la mak du deruier eft d'un profil mal dtffiué. Oui, je le répete, il y a de la confufion en général dans ces bras & 1'on a de la peine ft déméler ft quel corps chacun appartient. Le pere Horace, au lieu de préfenter les fabres ft fes iris, les retient ferrés dans fa mak & femble craindre de les leur confier. Les fabres ne font pas trop bien rendas; ilyafurl'un d'eux une ombre trop forte: la jambe gauche du pere qui , quoique reculée, devroit Être fur le prémier plan, femble fur le fécond; ee qui fait perdre 1'a plomb au vieillard & le rend chancelant: le tableau en général eft trop éclairé ; il n'y a point affez d'oppofition dans* les ombres. Mr. £>amd forme le iour comme il lui convient pour faire briUer fon talent & non comme il eft dans la nature. L'Arehitecture eft trop bien entendue pour le tems fes Horaces , la fcene trop nue; Padion fe feroit mieux i'entie , fi Pon eut vu dans un lointain ks deux armées, du moins 1'armée Romaine.... 11 pourroit fe faire qu'il y eüt quelque chofe de vrai dans toutes ces critiques, & le tableau de Mr. David n'en feroit pas moins, je le répete, un chef-d'ceuvre, ce *m ne fjgnifie pas un ouvrage fans défautsi • H 7  ( 182 ) mais un ouvrage qui encbante, tranfporte, ravit tcllement, que le fpeótateur n'a pas le tems de s'en appercevoir d'abord, ne les obferve enfüite qu'a la difcuffion. En voila, Monfieur, affez pour vous faire connoïtre les progrès rapides que notre Ecole a fait dans le genre de 1'hiftoire: dix-huit concurrens dont je viens de vous entretenir & dont aucun n'ait beaucoup de mérite, for« ment un corps d'artiftes bien précieux & bien propres a illuftrer les Arts fous le Regne de Louis XVI, dont ils doivent aulïï faire en pnrtie la Gloire. J'ai 1'honneur d'être &c. Paris ce 13 Septembre 1785. SECONDE LETTRE. A u fujet d'une expofition de Tableaux qui, fuivant 1'ufage , a eu lieu cette année a la place Dauphine , le jour de la petite FêteDieu, de la part des jeunes gens des deux fexes fe livrant a la Peinture & en defirent faire voir leur talent, il s'eft élevé, Monfieur, une conteftation grave. Comme dans le nombre des concurrens, on citoït beaucoup de Demoifeiles dont on prónoit dans les feuilles publiques les heureufes difpofitions, un rigorifte a prétendu que c'étoit un meurtre de les encourager ainfi ; qu'uir tel art 'étoit perni»  C 183 ) cieux pour les perfonnes du fexe, qu'il leur faifoit perdre cette pudeur précieufe, leur plus bel ornement & les entralnoit prefque toujours dans le libertinage. Je n'entre point dans la difcuffion de cette queftion morale ; mais il feroit fort h regretter pour la Peinture d'être privée de nos Minerves moderres: il eft des parties auxquelles les femmes femblent plus appeliées que les hommes, & dans les Arts comme dans les Lettres tout ce qui tient aux graces & 4 1'enjouement eft par effence de leur domaine. Depuis plufieurs expofitions leurs ouvrages brillent au Sallon entre cenx du fecond ordre. Elles difputent la palme aux hommes; elles 1'emportent & s'en glorifient tour a tour. Je vous ai parlé dans le tems & a plufieurs reprifes des fuccès de MUe* Vallayer , devenue Madame Cojler ; je me fuis enthoufiafmé en 17R3 fur les chef-d'oeuvres brillans & vigoureux de Madame le Brun. C'eft aujourd'hui Madame Guyard, dès-lors la ferrant de prés, qui triomphe & fait entou* rer fes produétions avec ces cris de furprife & de raviffement involontaires qui ne s'arrachent que par un mérite re'el & éclatant. Son tableau qui frappe le plus & le fujet de 1'admiration générale,eft un tableau hillo* rié, oü elle s'eft figurée elle-même en pied, occupée a peindre , avec deux de fes éleves derrière elle , confiddrant Pouvrage de leur maitreffe & épiant, pour ainli dire, le mo-  ( 184 ) ment de furprendre le fecret d'un fi rare talent. Unité d'aélion , plan net, intention bien fentie, beau choix de nature , attitudes variées, vraies & naturelles, grande intelligence du clair obfcur, tous fürs, coloris harmonieux, accord de la grace & de la vigueur, tout ce qu'on peut defirer fe trouve réuni dans cette compofition favante & digne des plus habiles maltres. Les autres portraits faits par cette académicienne caractirifent un pinceau févere, plus propre a rendre les têtes penfantes & profondément occupées que les alfecïions frivoles des gens du monde. Elle nous offre un Amedêe Vanloo , un Vernet , un Cochin, trois artiftes qui ne prêtent rien moins qu'aux.graces & Ha gentilleffe du faire, mais exigeant une touche réfléchie & vigoureufe. Entre les. femmes elle femble ne choifir auffi que celles qui font de fon genre; on le remarque dans une Comteffe avec fon fils agé de trois mois, fraiche comme Flore, belle comme Venus, mais chafte comme Penelope & dont toute 1'habitude du corps annonce la vertu conjugale dans toute fa pureté la plus parfaite; Comteffe fi inodefte, qu'elle a voulu refier anonyme, quoique fa figure ne puifle qu'exciter la curiofité des amateurs (*). (*) On dit que c'efl Madame la ComtelTe de Flao, belle -fceur de Mr. d'Angiviller.  (m 5 Il n'en eft pas de même de Madame fe Brun , fe vouant aux plus jolies femmes de la cour, aux plus galarites & les fervant de tous les agrémens de fon pinceau. L'une eft en Sultane boudant de n'avoir pas été choifie par fon maïtre pour cette nuit-la; 1'autre, en Jardiniere qui , fous ce déguifement fimple & attrayant , cherche les aventures ; celle- la minaude, celle-ci agace; la demrere féduit par les charmes de fa voix (*): du fein de toutes ces Beautés s'éleve M''. le ContröleurGénéral, & comme il n'eft point ennemi du fexe, les bonnes gens croient le voir au milieu de fon ferrail. Ce portrait hiftorié eft bien plus favant que ceux dont je viens de parler. II eft riche de compofition, vrai dans fes détails. Les étoffes en font précieufes, les ombres, les reflets ménagés avec foin; il eft monté fur le haut ton de couleur qui lui convient. La reifemblance du perfonnage elt te-Hé, que chacun le nomme au premier coup d'ceil; c'elt fon air ouvert, fon oeil plein de feu, fa figure fpirituelle, riante & afFable ; c'eft 1'homme en un mot, c'eft Mr. de Colonne exactement: mais ce n'eft pas le Con- (f) Ces cinq Dames font Madame Ia Comtefle de Clermont-Tonnen-?, Madame la Comtefle de Grammont- Caderonfe, Madame la Comtefle de Ségur, Madame la Comtefle de Chatenois & Midame la Baronne de CruffoL  C 186 ) tróleur-général, il a Pair plus diflrait qu'cccupé; une Lettre au Hoi, un Mémoire déployé ft cóté de lui font cxcellens pour faire briller le talent de l'artifte , mais ne font que des enfeignes & ne déugtient nullement ce Miniftre enchanteur, qui fait avec tant d'art attirer au fisc public, non • feulement Pargent de la nation, mais celui des étrangers , pour le reveifer enfuite avec tant de profufion & de munificence. je paffe ft la Bacchante affffe, de graudeur naturelle & vue jufques auxgenoux; ouvrage de la même académicienne, fort admiré d'abord & plus fort critiqué enfuite. 11 elt certain que la tête en eit charmante au poffible, pleine de fineffe, de malice & de gasté. Le corps ter* gcment peint, d'une carnation admirable & i'éduifant par fa nudité lubrique : mais ft la peau du tigre prés, pnifaitement imitée, on la prendroit plutót pour une beruté de ferrail que pour une Prêtreffe de Bacchus. On trouve encore la tête trop petite pour le corps & les chairs de celui- ci point affez lacqueufes, mot fcientifique,voulant dire pas affez rougeatres, affez fouettées de fang;ce qu'exigeoit 1'état de la Nymphe fréquent & habituel. Enfin d'autres vont jufques ft dire que cette figure elt d'une >exécutipn moile & peu fivante. Quant ft Madame Coster, on eft faché de lui voir abandonner prefque entïerement le ' genre de la nature morte oü elle étoit fupéricure, pour fe livrer au Portrait & au Portrait  C 'G? f hifforié, dans lequel elle eft bien inférieure a fes rivales. A cette occafion, il eft trés plaifant de voir un Evêque la choifir pour fa.Minerve; auffi le Prélat n'a-t-il ofé fe ïioromer & en paroit-il tout bonteux dans fon coin. Le Portrait en pied de Mademoifelle de Coigny cueillant des fieurs dans fon jardin, eft une preuve de mon affertion ; il n'y a de bon dans ce morceau que les fieurs; la figure principale eft manquée, mal deffinée & pour ainfi parler , écorchée. Maïs fon ouvrage, d'autant plus blamable qu'il eft ft grande prétention, c'eft le Portrait de Madame de Sainte Huberti fous Pliabit de Didon. L'Actrice ne manque pas de reflemblancc: ft travers fa laideur, fon air fpirituel brille & elt bien fitifi; il y a du caraéterc dans fa tête: mais ce n'eft que Madame de Sainte Huberti, & au coftume prés Pon y cherche vainement la Reine de Carthage, róle cependant oü elle jouoit avec une chaleur bien propre ft enthoufiafmer 1'artifte, oü elle faifoit oublier fa figure ignoble & paroiflbit belle & toucbante, comme 1'aimable & tendre Souveraine d'Afrique. Les faifeurs de Portraits femblent avoir tous voulu cette fois prendre un vol plus haut & fe rapprocher autant qu'ils pouvoient de 1'histoire. C'eft ainfi que Mr. Rojlin nous ofFre une Dame debout , en fatin blanc, devant une glacé, pour y achever fa toilctte : quelques autres perfonnages étendent êk remplisfent la fcene; la femme dc chambre qui en  ( i88 ) eft partie intégrante & tient Je' chapenu de ia Dame; un petit garcon qui joue en un coin; enfin un Clievalier de Saint Louis affis eft occupé ft lire. Par cette notice, exceptée la première liée ft Paétion, on voit que ie refte n'y tient en rien. L'auteur a cru fans doute pouvoir s'autorifer en cela des Hollandois, qui s'embarraffoient peu d'être découfus dans ces fortes de fujets; mais comme la regie de Punité eft prife dans la nature & le bon fens, je ne crois point qu'un pareil exemple difpenfe de s'y afférvir & ce n'en eft pas moins un défaut capital. Quant ft 1'exécution, elle eft charmante. II y a même beaucoup de gentilleffe & d'efprit dans le jeune enfant: tous les détails font foignés avec une perfection exquife. On fait que Mr. Rojlin excelle principalement dans le rendu des étoffes, furtout des fatins,on ,fuivant plufieurs connoilfeurs, il 1'emporte fur les Flamands; il s'eft piqué cette fois d'une Perfpeclive favante & de faire reffortir de la glacé jufques ft Ia figure de la Dame. En un mot, on ne reproche ft 1'artifte qu'un précieux trop fini, de maniere que las acceffoires attachent autant que le fond; léger défaut dans un fujet vague comme celui-ci & ne portant aucun intérêt. Mi'. Buplejfis n'effuye pas le même reproche ; on dit au contraire qu'il copie avec une grande vérité & n'embellit jamais. Ce qui feroit un éloge, ft prendre le terme dans le fens phyfique ; mais la critique 1'entend au  C 189 ) moral. Elle veut dire qu'il rend les traits & non Pefprit de fes perfonuages; que dans Mr. de Chabanon , par exemple , on ne trouve point ie membre de 1'Académie dès BellesLettres & de 1'Académie Francoife, ou du moins 1'homme aimable, doué des talens enchanteurs de la fociété; dans Mr. de LaJJonne, leMédecin, leSavant, le Chymille, le fondateur de la Société Royale ; dans Mr. Vien, le Peintre d'hiftoire , le Directeur de 1'Académie. Quant a la petite obftrvation de ne 1'avoir point décoré du Cordon de SaintMichel, qu'on découvre feulement fufpendu auprès de lui; elle porte a faux, en ce qu'il eft repréfenté en robe de chambre & que c'auroit été lui prêter une vanité ridicule que de le barder de ce Cordon dans fon déshabillé. Je finis, Monfieur, cette énumération des Portraits, par oü j'aurois dft commencer. En efFet la Reine méritoit fans doute d'attirer Ia première mes hommages; mais je repugnoïs a y venir, comme le public a la confidérer. Eft-il poOible, qu'un auffi habile homme que Mr. Wtrtmuller deftiné k remplacer le premier Peintre du Roi de Suede, fe connoiffe fi peu en graces & en majeflé : on affure que la Reine, lorsqu'elle eft entrée au Sallon, s'eft méconnue elle - même & s'eft écriée: „ quoi! „ c'eft moi- ü" D'ailleurs quel moment a t- il choifi? Elle fe promene, dit> il, avec Menfeigneur le Dauphin ,& Madame , fille du Roi, dans le jardin Auglois du peut Triatlon;  C 190) action froide & particuliere, n'excitant qu'un iutéret de curiofité ; il falloit , comme 1'a oblërvé un critique judicieux, (*_) ïvpréfenter la Reine , motitrant fes enfans k la nation, appellant ainü tous les regards & tous les cccurs & refferrant plus fortement que jamais, par ces gages precieus 5 1'union entre la France & TAutriche. Ce grouppe de la familie royale en font les fevfls perfonnages qu'on rencontre peints au Sallon.... Je me trompe, Monfieur: après bie-u des chofes je découvre le Roi s'éclipfant, il elt vrai, k 1'éclat du Tróne ; en cönféquence llrvi fuivant fes vues & confondu dans un des boudoirs (t) de ce lieu. En elfet, ce n'eft point un acte de Souveraineié qu'il cxerce, mais un acte d'hümanité, dont Mr. de Bucourt s'eft propofé de rendre compte. Ce fut durant 1'hiver rigoureux de 1783 qu'il fe paffa. Sa Majefté fe faifpit un plaifir de fe ddguifer , de parcourir le matin les chaumicres de Verfailles & des environs & d'y répandre lui-même fes bienfaits. (ff Mr. 1'abbé Soulavie dans fes RéjJexions Iltipartiales fur les progrès de Part en France. (f) On appellejes boudoirs du Sa/Ion, les enibrafurés des fenètres & les coins adjacens,>qui form'ent au mpyen des treteaux fur lefquels font étaöliës les Scu'piures, comme amant de cabinets particaliers.  Cm ) Louis XVI eft repféfenté enveloppé d'un rnanteau d'écarlate, coftume autorifé par la faifom & fous lequel il cache fans alFeclatïon toutes les décorations qui le pourroienttrahir; il a la tête enfoncéedaus un chapeau profond & rabattu qui dérobe une partie de fa figure; il vient de donner fa bourfe k un petit garcon ,1e plus prés de lui a 1'entrée de la chambre: il eft reconnu par le grand-pere qui fe jette a fes genoux & toute la familie en fait autant: la mere malade dans fon lit, fe fouleve prefque nue & ramafle fes forces pour rendre fes hommages & exprimer fa reconnoiffance a fon augulte bienfaiteur. Cette fcene touchante elt compofce de dix aéteurs , non compris le Roi, variés chacun de figure, d'age, d'attitude, d'accoütrement. Mais plus le fujet eft intéreffant, plus 011 auroit défiré que l'auteur en eüt fait reffortir tout le pathétique. D'abord la rigueur de 1'hiver n'eft point alTez exprimée; on voit bien une femme al'atre, ranimant un charbon, cc qui annonce un feu maigre, une difette de bois: du refte ces pauvrcs gens, fauf celle qui eft alitée, font vêtus de fac;on a ne pas foufFrir beaucoup de froid: on ne remarque pas d'ailleuis s'ils ont d'au« tres befoins & tout cela fe préfume plutót qu'il ne fe feut, par 1'aétion généreufe de 1'étranger, dans lequel il eut fallu furtout que Louis XVI efit été plüs rcconnoiffable: & pourquoi ne pas conter 1'anecdote dans le livre, -circonfiancier tous les détails, faire ea  C 192 ) quelque forte viölence ft la modeftie du Monarquc ? De pareilles lecons qui s'exercent & fe dontient fous nos yeux, par aes perfcrnnages connus, font d'une moralité bien plus frappante, bien plus directe , bien plus utile que les plus beaux traits de 1'hiftojre Grecque, Romaine & mêmeSacrée, qui, vu 1'éloigtiement , la dilFérence des tems & des moeurs, font peu d'.impreffion ou rencontrent beaucoup d'incrédules, auprès defquels ils n'obtiennent gueres plus de confiunce qu'un roman. Du refte, quant ftl'exécution , ce petit morceau eft encore charmant & de beaucoup préféré par les ariiftes ftun autre fujet du même , plus gai, oü le Peintre amoureux de fon raodele, en recoit un billet & lui baife la main , tandis que de 1'autre la femme prodigue de feintes careffes ft fon mari qui fourit ft la vue du portrait commencé & en eft enchanté. Ils trouvent que ce tableau-ci grifaille furieufemenr. Mr, Wilk n'ayant point les mêmes confidératións de rcfpect, les mêmes craintes de déplaire, fait beaucoup plus de fenfation par un fujet de ce genre, autour duquel les flots de fpeftateurs fe fuccedent fans interruption. Voici comme il s'explique. „ Le Sieur Louis Gillet,Maréchal des Lo„ gis au Régiment d'Artois , Cavalerie, re„ tournant de Nevers ft Autun fa patrie, & „ s'étant égaré dans fa route, eft attiré dans „ une  c 193 y » une forêt par les cris Iamentables d'une » jeune, fille que deux affaffins avoient dé» pouillée & attachéea un arbrej le brave " u, i?1K 7°}* au fecours de 1'infortunée, „ bleue, défarme & met en fuite 1'un des „ deux fcdlérats , court au fecond qui lui » lache un coup de piftolet, le manque, & >, recoit lui-même un coup defabre, qui lui sj abat Ie poignet. " Ainfi quatre acteurs dans cette fcene: 1'Artifte afaifi 1'inftant le plus chaud & Je plus draraatique, oü, débarraffé de 1'un des brigands que 1'on voit teriyuTé dans un coin du tableau, hntrépide défenfeur de la villageoife brave & combat le fecond, h la vue de cellec. encore fufpendue & attendant fon fort de l iflua de cette attaque. P0Ur ajouter plus d imerêt a fon fujet, ,1 a fait de Ia Urne une tics belle creature , mais dans 1'efpece des payiannes,forte,charnue,rubiconde. Le fcélérat agreffeur a bien 1'air d'un vrai garnenient; a travers la rage qui le trarifporte & lui tient beu de courage , 0n entrevoit fa poltronnene, & par fon attitude il femble déjft dtfpofé a fuir, s'il manque fon adveSe! Des Cntiques ont obfervé que les quatre • P"fonnages ont la boucbe ouverte, & ü Je fai loit. La jeune fille doit crier & appeller du fecours; le fcélérat, hors de combat, Trufi Ion voit une vafle entaille dans le bras, „é peutréfifter aux douleurs de fa blelfure: f"H cas;xTxé ]ure & b'afphêffie>& *****  C 194 ) réchal des Logis avec Fafcendant que lui donHe fon róle, menace & foudroye le brigand qui lui refte. Tel tft le dialogue de la fcene parfaitement exprimé par la figure. & la pantomime de chaque interlocuteur. Mr. Wille, en habile compofiteur, n'a rien négligé des petits détails qui pouvoient concourir au dévéloppement de fon aciion& intócliir le fond de fon tableau. On voit par le col de la fille maceré, écorché, par les oreilles de fes fouliers rabattues, qu'on lui a volé fa Jeannette & fes boucles: elles fe trouvent futIe devant, avec un poignard appartenant fans doute au défarmé. L'autre, outre le pillolet qu'il tient en aftion de la maïn droite, conferve un fer dans la gauche. Sa ceinture eft garuie d'inftrumens meurtriers. Sp„'ftacle elïrayant, fi 1'on n'étoit raffuré par la préfence du héros. Le refte de fon collume eft d'une grande vérité & plein d'effefs pittorefques. Peut-être la fcene fe paffant dans un bois &, vu fa nature, eft-elle trop éclairée? peut- être aufli le Peintre s'eft-il perfuadé ne pouvoir donner trop d'éclat a.pette aftion rare & héroïque. La beauté de fon coloris y répond & fon pinceau mol ordinairement, s'eft renforcé & s'eft monté a la vigueur des conceptions de la tête. t Je m'applaudis, Monfieur, d'avoir réfervé pour la derniere de cette efpece la defcription du tableau de M*. Wille, d'un intérêt vraiment trngique, après laquelle toute autre paroltroit ftoide, füt-ce celle de la Marine de Mr. Vernet,  C 195 ) avec une Tempête & Naufrage d'un vaiffeau. Ce morceau de quatorze pieds de long fur haat de haut,eft pour Son Alteffe Impériale le Grand-Duc de Rulïïe & je n'ai qu'un mot a y joindre pour en faire 1'éloge. C'eft que, quoique 1'artifte ait foixante-dix ans, fa touche eft encore ferme , fiere & terrible. Ses autres ouvrages d'un genre plus doux ne dégénerent point de ceux de fa jeuneffe, en graces, en fraiche'ur, enbrillans. Le ftul reproche qu'on lui faffe d'être toujours le même, confirme mon a-ffertion & prouve qu'il n'a rien perdu. La vafte Machine de Ml. Vernet fe trouve entre deux de Mr. Robert, deffinées au même Prince étranger & non moins impofantes par le volume , (*) dont 1'une repréfente un incemiie dans la ville de Rome, appercu a travers h colonnade d'une galerie, & 1'autre la réunion des plus célébres monumens antiques de la Frar.ce. On reproche peu de vérité h la première, quoique d'un grand effe£, & k la feconde un allemblage idéal d'édifices difparates qui n'ont jamais exifté enfemble; bizarrene révoltante pour le fpeétateur, chez lequel c'eft fuppofer trop d'ignorance. Mr. Robert iuventif, rempli de reffources dans fon art, pour vouloir être original pêche fouvent contre le goüt & le bon fens. Le tableau dont je viensde parler,.eft un exemple du premier de- (*) Ces deux tableaus ont chacurj onze pieds de large fur hui: di haut. I %  C 196 ) faut & les ruines d'une longue galerie éclairée par un trou da fa voüte, tableau appartenant h Mr. le Comte d'Adhemar, ne peuvent être défendues du fecond. 11 a imaginé de produire plus d'effet pittoresque en placant 1'ouverture au centre, c'eft-a-dire, dans la clef de la voüte. Ce qui eft impoffible, puisqu'ft 1'inftant toute la voüte s'écrouleroit. Ce Peintre eft d'autant plus blamable , que c'eft trés fciemment qu'il pêche, &, q'uand il veut, eft trés capable de la plus fcrupuleufe exactitude. La preuve en exifte dans fes deux Pendans de la Fontaine de Vauchife & des Rochet tfOliou enProvence. (*) lis font 1'étounement du naturalilte , qui reconnoit le carac' tere de la pierre calcaire de Vauclufe , les coupes particulieres d ces fortes de pierres, 6? dans les roclies d'Oliou , Venfemble des pierres vimscibles & primitives. (f) Voila de ces nuances érudites dont ne feroit point capable le vulgaire des ariiftes. (*) Ces deux tableaux appartiennent è Mr. 1'Archevêque de Narbomie. (f) Ce font les propres exprelïïons de Mr. Vabbé Soulavie dans fon ouvrage déja cué fur les ubleaux. Ce Philofophe fi profond dans 1'étude de lniftoire naturelle en cette contrée , admire comment Mr. Robert a pu voir & marquer des chofes qui échappent au plus grand nombre & ne frappent que les naturaliftes les plus exercés.  ( t97 ) Mr. de Machy, en poffelïion de conferver i la puftérité le fouvenir de tous les événemens publics de fon reffort & de les fixer fur la toile , n'a pas manqué de nous expofer cette année les départs de diïférens ballons mais plus en artifte qu'en hiftorien, plus a deffein de faire briller fon pinceau, que frappé d'un vérirable enthoufiafme pour cette importante découverte. Aufli a-t il facrifié 1'action au local qui ne devoit être qu'acceffoire; enforte qu'on peut regarder ce fujet comme a refaire: du refte , en s'accordant fur la richeffe de fes plans, fur l'exacfitude de la perfpecfivc, certains critiques lui reprocbent de dégénerer pour la couleur, de n'avoir plus cette teinte qu'il tenoit de Servandoni & de Panini. Entre les Payfagiftes, 1'homme étonnant, Monfieur, c'eft M-'. Nivard, qui n'en eft qu'a la feconde expofition, encore fimple Agréé & furpafilnt déja fes maitres, même M>". Hue qui fe foutient, mais ne fait pas les progrès rapides de fan concurrent. Sa Vue du chdteaude la Baronnie de Melk (*) eft un chefd'reuyre; il eft vrai qu'on ne peut être mieux fervi par la richeffe & les difpofitions du fitc; mais auffi 1'on ne pouvoit le mieux rendre. En homme de génie dans fon genre , il a clioifi pour fon jour un tems variable ; ce (*) Appartenant a Mr. Duclos Dufrenoy, Nataire. I 3  qui lui donnoit le moyen de fe ménager ;\ volonté les divers accidens de lumieres les plus propres k faire reiTortir chaque beauté de ce iieu charmant. Sun ciel éclipfe fans contredit tous ceux du Sailon. La verdure de fes arbres eft variée & dégradée k l'infini; les grandes maffes n'empêchent point qu'on n'en diftingue les efpeces, qu'on ne les compte , fi c'étoit néceffaire. Ses fabriques nobles, bien affifes , rares, placées k propos & fans confufion, produifent des effets piquans: fes animaux d'un bon choix de nature ; fes villa» geois naïfs & corredtemenc deffinés, jettent de la vie & du mouvement dans toute la fcene: en un mot, elle eft fi vraie, que tous ceux qui ont vu Mello , le recounoiffent , & fi enchantée qu'il n'eft aucun ami de la nature qui ne défmtt y fixer fon féjour. On juge que l'auteur pour chaque partie en a profondement étudié -les différens Malerei le Lorrain, le Salvator, le Gouespe & le Berclwm. Je voudrois finir, Monfieur,de. peur d'être trop long; mais le moyen de paffer fous filence Mr. de Marne, Meffieurs Cé/ar Vanloo & Veftier. Vous connoiffez le premier qui a débuté, il y a deux ans, avec Mr. Mvard: quoique 1'Académie l'ait traité plus rigoureufement que celui-ci & ne l'ait pas encore jugé digne d'être admis parmi fes membres , il n'en eft pas moins précieux aux amateurs pour fa fineffq», fon briljant & fa facilifé; mais il ne s'eft point comgé des défauts qu'on lui  trouvoit du cóté du deffia & de la vérité des fites : cepcndant les critiques exceptent fes Vues d'un Lac Suijfe & des Ruines du Ch&teau de Bermont, deux petits morceaux, lés meilleurs de dix- qu'il a expofés & qu'üs jugent d'un pinceau charmanr. On voic avec peine en citant le fecond, que le fils du fameux Carle ne marche pas dans la carrière brillaiïte de fon pere: apparemment qu'il ne s'eft pas feuti les forces fufnTantes pour foutenir dans le genre de l'hiftoire un nom malheureufement trop fameux pour lui; if a préféré d'être au premier rang entre les Peintres de la feconde claffe. 11 n'avoit point encore paru fur la fcene & débute comme Académicien ; faveur accordée fans doute au defcendant du grand Artifte, premier Peintre du Roi , & dont on trouve trés dignes fes morceaux de reception. 11 parolc fe vouer au Payfage du genre héroïque. Ses fites font d'un choix noble , fes fabriques font rich s & magnifiques; mais fon pinceau eft fee & fa maniere noire; on 1'invite ft rechercher des compofitions fufceptibles d'eiïéts plus piquans, ou pour mieux dire ft les faifir & h les rendre. L'anecdote de 1'admiffion du troifieme au rang des Agréés fulfit feule pour donner une idee de fes reffources & de fa facilité. Son genre eft la Mihiature ; il en avoit préfenté 4 1'Académie: cette Compagnie ordonna des cxéciuions en grand & des preuves d'un autre I 4  C 100 ) «nCdes 2?h* CCtte ^ ^ 1'on doit on des plus beaux morceaux du Sallon le nZLF:itrfJefm ^ Lef Art£ l el ment trés habilement fait, compofé avec goüt pour les acceffoires bien mis a leur place; les étoffes font auffi rendues avec une grande vénté, mais ce preffige eft devenu fi commun , que ce n'eft plus qu'tm petit mé_ w n QTZ k f£S Miniat^es , rival de Mr, ,7, U,t une route Drente. Celui - ci a la légereté de h touche, la vigueur du colons lahardiefo du pointillé, 1'efprit adapte a fes différens caracferes de tête & furtout la variété & la grace des ajuftemens: celui-Jè Plus monotone, excelle pour la douceur du lane, 1 agrémënt de 1'cxécution, le fini précieux; les cónleurs fe noient tencirement & rien n'y tranche trop. Je pourrois vous entretenir encore de Mcf fieurs van Spaendonck , Sauvage , Martin Robin, Huet, &c. mais n'ayant rien de par' ticuher a en dire, il faut s'arrêter & la Sculo. ture m'appelle. v J'ai 1'honneur d'être &c. Paris ce 22 Septembre 1785. TROIS IE ME LETTRE. Dtpuis quelque tems, Monfieur, un nouveau fyftême introduit dans notre Ecole de Sculp-  C 201 ) Sculpture tendroit a lui faire perdre, s'il s'accréditoit a un certain point, la haute confidération dont elle jouit, il y a plus d'un fiecle , dans toute 1'Europe. Ce fyftême eft d'autant plus dangereux qu'il fort d'un grand homme & a été foutenu de fon exemple durant fes dernieres années. Je veux parler de Pigal, que les Arts pleurent aujourd'hui. 11 étoit un fcrutateur fi rigoureux de la nature, qu'il n'en vouloit rien omettre, même dans Ion fcat de dégradation & d'abjeétion. C'eftce qu'atteftent fa Statue de Foltaire , celle du Comte d'Harcomt a Notre Dame & jufques fon fuperbe Maufolée du Maréchal de Saxe, oü il a ofé introduire le Squelette de la Mort, non fans beaucoup d'art, il elt vrai, & avec les reffources du génie. La première Statue qui s'offre aux regards dans la Cour du Sallon, eft de ce genre, "c'eft Philopasmen, Général des Aehéens. 11 elt repréfenté au moment oü Diviocrate & les Magiltrats Melfeniens lui font boire la ciguë. On reproche k Mr. de Joux, fon auteur, d'avoir choifi le corps de ce héros Grec d'une nature pauvre : 1'hiftoire nous apprend bien qu'il avoit alors foixante-dix ans; mais ce n'étoit pas une raifon pour le modéler fur quelque malheureux échappé des cachots de Bicêtre. Cet ouvrage au furplus n'eft pas fans mérite &la grande ame du vainqueur deLacédémone fe retrouve fur fon vifage, k Fair de tranqut». lité avec laquelle il recoit Ie poilbn. ' - 1 5'  C 202 ) Le Mercure de Mr. Boizot pourroit bien, aüx yeux des critiques féveres, paffer pour tenir quelque chofe de la même Ëcole, & cepenoant c'eft un Dieu du premier ordre qui doit jouir d'une je un elle éternelle. A la bonne heure, qu'il ne foit pas mufclé comme un Jnpiter, comme un Neptune,comme un Pluton, ou comme un Mars; qu'il ait la légereté du MeiTager de POlympe: mais point de ces méplats, de ces rides ou de ces plis qui annoncent dans 1'homme les progrès de 1'jge & le dépériffement. Le modele en pldtre par le même du Racine a cxécuter en marbre pour le Roi, e* d'un goüt plus faüsfaifant; mais il s'eft mépris fur la nature du génie de ce Poëte, reprétenté la plume a Ia main, les yeux levés au ciel & ïemblant en attendre 1'infpiration. Ce uleft pas la qu'il alioit chercher fes conceptions, comme Corneille; c'eft dans le cceur humain qu'il fouilloit & il ne fe mettoit jamais au-desiüs de notre portée: il falloit donc lui donner tin regard plus terre a terre. C'eft ce que d'un autre cöté a bien fenti & ingénieufement exprimé 1'artifte; en mêlant aux attributs de la Mufe Tragique ce myrthe,emblême du genre des pieces de l'auteur de Britannicus & d' /ïndromaque. Ce qui diltingue Mr. Boizot cette aunée, c'eft fon Pufte de Louis XVI, oü s'élevant au deffus de lui-même & a la hauteur de fon fujet, il a repréfenté non feulement Pliomme,  C 203 ) mais IcRoi; il a ennobli la figure de cePrince, en général plus populaire que majeftueufe. La Draperie en eft ajuftée avec élégance, & tous les attributs en font traités d'un cifeau aufli favant que précis. A cette occafion je vous obferverai, Monfieur, que nos Artütes qui regardoient le costume francois comme ingrat & ont agité plufieurs fois s'ils s'y alferviroient, y excellent mnintenant & ont vaiucu toutes les diificultés du Rendu qui en avoit de trés grandcs. Rien ne les elfraye plus. Les fouliers, les bottcs, les velles , les foubrevefles 3 les baut-dechauffes, les cravattes, les manchantes a- dentelles , tout eft de leur reffort, & quoique ces détails ne foient qu'acceffoires , ils en tirent fouvent patti & quelquefois en gens de génie. Ce n'eft pourtant pas Mr. Gois qui en a dép'oyé er. tant d'occafions & nous reproduit aujourd'hui d'une facon trés commune ce Matthieu Molê ,r qui eu 1779 avoit fi fort enthoufiafmé M1'. Fincent. Afin de mieux 1'enfévélir dans fa vafte fimarre, il 1'a figuré affis & s'eft cru de la forte difpenfé d'expliquer le corps. Son attitude eft de tenir le mortier de'la main droite & d'appuyer la gauche fur les Sceaux; ce qui défigne la doublé dignité de Premier PréliJent & de Garde des Sceaux. Du refte , le perfonnage a un air renverfé, comme fi 1'ou lui faifoit quelque propofttion ■ revoltante & la févérité de fon vifage Ibutienc cette idéé, -mais trop *vague. Ou pourroit I 6  C 204 ) également prendre la pofition du Magutrat pour ae la roideur & de la pédanterie. En un mot, c'eft le Bufte de Molé trés relfemblant; mais nen n'y caraétérife fa probité, fes talens, ion zele pour le bien public & pour la gloire de 1'Etat. L'Artifte s'eft 'appliqué fpécMleasent h développer toute la richeffe de la draperie, a donner de la foupleffe aux contours, a iaire jouer jufques aux poils du manteau nerminé. On en peut dire autant du Bufte de Mr. de Colonne par le même. C'eft bien lui, mais ce n'eft ni le Controleur général ni le Miniftre. Si Mr. Monot chargé de la troifieme ftatue pour le Roi, n'a pas tout-a- fait rempli fon fujet, il s'en eft au moins donné un & s'en dl échauffé. U avoit rt repréfenter Abraham Duquesne. Le bombardement d'Alger étant un des principaux traits de la vie de eet Amiral, il fa choifi ; ce qu'il exprime par des mortiers, des bombes & autres inftrumens de. ftrucleurs dont il a entouré' fon héros. Sou attitude eft celle d'un Général, 1'attitude du Commandement. Des demi - connoiffeurs qui eroient fe donner plus de reliëf & en impofer avec un ton tranchant, décident que le perfonnage ell manqué & que c'eft un morceau a refaire. Je crois que le défaut vient de l'artifte, qui n'a pas affez confulté fes forcés & dom le cifeau a généralement plus de grace que d'énergie. -Mais dans I'état même  C 205) sfi il fe trouve, 1'ouvrage eft trés Iouable & ce ne fera certainement pas la plus médiocre Statue de la Colleétion Royale. Ce qui prouve , Monfieur , Ia mauvaife humeur des critiques dont je viens de parler, c'eft qu'ils étendent leur profcription jufqucs ft la ftatue du grand Condé, la derniere ordonnée pour cette Expofition & la première dont Mr. Rolland, Agréé, ait été chargé. Ce coup d'effai qui n'eft pas fans défauts dans 1'exécution , elt peut-être pour les conceptions le plus parfait des morceaux de cette efpece; j'ofe dire même qu'il eft fublime. L'Artifte a pris dans la vie de fon héros 1'inftant oü le Prince attaquant le camp de Merci fous les murs de Fribourg, après uh combat qui avoit recommencé trois fois, a trois jours différens , jetta fon baton de commandement dans les retranchemens de 1'ennemi & marcha pour le reconquérir 1'épée ft la main, ft la tête du Régiment de Conti. 11 eft dans 1'attitude décifive de 1'acfion; il a pafle fon épée fufpendue ft la main gauche & de ladroite levée, il tient ce baton a lancer , le fignal d'un nouvel affaut. Sa figure eft trés animée, le feu fort de fes yeux, il eft indigné que le vainqueur de Rocroi trouve tant de réfiftance. Afiürément du cóté de la compofition, on ne pouvoit ehoifir un moment plus heureux & Ie mieux caracférifer fuivant moi. Voyons maintenant les objeétions des faifeurs de pamphlets. lis difent que 1'action de la main droite n'eft VI 7  C 206 ) point dccidée ; que le bitton eft tenu trop mollement. Mais il ne s'agit pas ici de faire lutter le héros de force ou d'adreffe; peului importe que cefignal aille quelques toifes plus loin ou plus prés; c'eft un premie* mouvement que lui fuggere fon imagination eVflammée & qu'il fuit comme fa fituation le permet. Ils ajoutent qu'un héros ne doit point avoir 1'air colere ni menacant, & furtout celui qui dormoic fi profondement la veille de fa première bataille gagnée. Cette maxime eft vraie.prifegénéralement, mais mat appliquée & faufle dans la circonftance. Voudroient-ils qu'un jeune Prince, ardent, bouillant, opini;\tre comme Achille, eüt le fang froid d'un Catinat ou d'un Tut enne? Quant a ia douceur cie urn lommen, elle provenoit du calpre d'un Général habile , qui a tout ordonné , tout prévü & n'a plus rien a faire en ce moment qü'a' prendre du repos pour fe mieux difpofer au combat; mais c'auroit été un contre. fens & de caraétere & d'action, d'avoir donné la même tranquilitéauDuc d'Engkien ,contrarié dans fa fougue héroïque & voyant reculer deux fois fon armée. lis vont plus loin ces impitoyables Ariftarques & prononcent que cette figure n'a ni dignité, ni grandeur. Vous avez vu, Monfieur , par le détail de toute la compofition, qu'il feroit difficile , pour ne pas dire impoffible, qu'une Statue ainfi pofée & ordonnée manquat de dignité, & quant a la grandeur, ü  C 207 ) elle confifte dans les proportions furbumaines de 1'antique , je paffe condamnation ; mais repréfentant un héros francois & devant etre placée a la fimple portée des fpectateurs, il feroit ridicule fans doute de 1'avoir fait colpffale & au deflüs de la ftature ordinaire. Enlin le Duc d'Engliien, de. la main a laqueUe il a fon épés. fufpendue, a deux doigts e'nlaqés dans fon Echarpe; ce qui eft trop mifquin & trop recherché. Pour accorder quelque'Chofe k ces Meffieurs & (quoiqu'on put encore chicaner la - dcffus, en répondant qu'un Général ne doit pas avoir toujours fon Épée en 1'air comme un foldat, qu'il fufïit qu'il la tienne pré te au befoin) je leur accorde ce défaut trés facile a réparer & que je regrette cependant, paree que fi 1'attitude n'elt pss héroïqué, elle elt pittorefque & trèspropre a, faire briller le talent duStatuaire, qui n'a pas moins foigné tous les accompagnemens du corps. Je cherchois envain, Monfieur, une Statue que j'avois vu expofée dans la cour le premier jour de 1'ouverture du Sallon r une Pfic'.ê Abandonnée , de Mr. Pajou, lorfque j'appris que le Curé de la Paroiffe du Louvre 1'avoit dénoncée a 1'Archevêque &que Ie Prékt avoit obtenu un ordre de la retirer. Curieux de favoir quel pouvoit étre le motif de profcription, je me rendis k 1'attelier du Sculpteur, oü elle fe montre puhliquement & forme une feconde affcmblée. Je fus bien furpris da  C 208 ) trouver une figure qui, quoique parfaitement mie, étoit trés pudique. Je gémis fur 1'idiotifme des Dévots & j'admirai ia belle fimplicité de 1'ouvrage. _ La Nymphe, plongéc dans la .douleur, en indique h fource par la main droite qu'elle tient fur fon cosur: le Poignard, la Lampe fatale renverfés a fes pieds achevent de la défigner. Le grand art de l'auteur eft d'imprimer fur le vifage de fa figure les fpafmes de fon ame, fans la faire grimacer, fans en altérer en rien la beauté. Le défaut que j'y critiquerois, ainfi que nombre d'amateurs , ce font de tróp fortes proportions pour une jeune fille telle qu'on imagine Pfiché. Le pied eft aüfli certainement trop petit pour fon corps: mais cette ftatue n'eft encore qu'en pnltre,il eft aifé d'y fubftituer les corrections qu'ou defire & que le gout é> le jugement de Mr. Pajou lui feront fans doute adopter. Revenu au Satlon, Monfieur, & m'attacbant & détailler les Sculptures que je n'avois prefque pas obfervées jufqu'ft ce moment, il en fa ure une a mes yeux d'un faire délicieux , mais cent fois plus dangereufe que hP/yché. C'eft le Gemimede de Mr. Julien, verfant le Netlar djupiter changé en Aigle. Le nom feul de ce beau jeune homrne rappelle déja unefable trés obfeene, & 1'artifte a déployé tout fon talent pour faire mieux travailler 1'imagination fur cette anecdote fcandaleufe du plus grand & du plus libertin desDieux: 1'Aigle de fes yeux de feu femble dévorer le féduifant Ecbanfon  ( 2C-9 ) qui eft nu; il le ferre de prés & de fon aile lui carefle amoureufement les feffes..... Je ne fais , mais il me femble que c'étoit bien la le cas oü le zele du Pafteur auroitpu s'échauffer, i moins qu'on ne prétende que le pêché philofophique étantplus familier aux gens d'Eglife, les effraye moins Jem'arrête & reprends mes fonétions de critique amateur, ou plutót admirateur. On ne peut mieux travailler le marbre, ce morceau remporte tous les full'rages. On eft füché de ne voir cette année que des Buftes de Meffieurs Caffieri & Ho:tdon; mais les grands Artiftes fe retrouvent dans les moindres chofes. Le Thomas Corneiile du premier en marbre pour la Comédie franeoife, eft d'une vérité de nature unique: le Boileau eft d'un caractere dccidé , qui le feroit nomraer prefque fur fa figure. Le fecond nous a confervé le fouvenir desPrincesEtrangers qu'on a vus avec intérêt & qu'on revoit avec plaifir: le Roi de Suede & le Prince Henri. Quant k 3\'P. le Noir, c'eft fa phyfionomie pleine de fineffe & de graces. La tête inclinée en avant qu'on lui reproche, eft fuivant moi un trait caradtériftique; il défigne les fonétions de ce Lleutenant de Police ; il exprime la maniere facile & pleine d'aménité de fes audiences. Si Mr. Bridan n'attire pas beaucoup plus Pattention par fon Maréchal de Vauban en marbre, qu'il ne 1'attiroit par le Maréchal de Vtiuban en phttre; de jolis morceaux de fa compofition & en grand nombre dédommage-nt  C 210 ) les amateurs; entr'aiitres une jeune fille jouant aux oiïelets, uae autre jouant aux billes , qui fuut d'une naïveté charmante. Mefïïeurs Moucliy & Berruer ne nous oiirent gucres que des Maquettes, c'elt-ft-dire, des eiquiffes trop imparfaites pour en juger; Mt.Mouchy annonce beaucoup d'invention, il faut voir fi 1'exécution y répoiidra. On admire dans Mr. Stouff un débutant pourvu d'excellentes études & rempli de bons principes: fes deux têtes du Belifaire & d'une jeune fille affiigée en font fin; fon petit grouppe ü'Hercule combattant les Centaur es étuk d'une compofidon difficuY, dont il s'eft tiré en habile homme : mais fon Abel expirant fous les coups de Cain , morceau d'une plus grande maniere & abfolument fini en marbre, atlire furtout 1'attention, en lifant que c'eft fur ce chef - d'oeuvre qu'il a été recu Académicien. L'artifie en eft trés fatisfait; il n'en eft pas cie même du fpectateur qui ne reconnoit pas plus Abel dans ce perfonnage expiïant que tout autre individu: au lieu d'une figure hiftorique, ce n'eft a fes yeux qu'une figure acadéarique. Sans doute la mtlchoire d'Ane , inltrumentdont Cain fe fervit contre fon frere, étoit un accefibire peu noble a placer & cependant le texte facré ne 1'oublie pas; il falloit trouver quelque moyen de bien rendre & de ne point altérer 1'airecdote de ce Livre Divin. Le Morceau de Réception de Mr. Foucou,  C 211 ) te dernier des Académiciens, eft.plus caracté. rité; c eft un fleuve défigné avec fon attribur il efl appuyé fur une urne d'oü il dpand fes ilots; mais c'eft encore une idee vagtiej: quci fleuve? On cherche en vain fon Bufte de Mr. le Batlli de Suffren qui , annoncé de deux mams différentes, (*) par une fatalité qu'on ne peut concevoir,_ ne fe rencontre d'aucune. M"-. Moite, Agréé qui commence & femble fe voueraux Buftes, montre une grande facilité pour faifir les caracteres les plus oppofés: il rend également bien la bonhommie de Mr.' Dufault, fur la figure de eet Académicien * & la méchanceté noire de 1'Abbé Aubert, fur celle de ce Zoïle. Son combat d'U/yJfe -Sc d'Ajaxhte hitte, bas - reliëf efquiffé feulement en terre cuite, montre qu'il fera capable des grandes compofitions. J 011 ■ que Meffieurs Milot, de Seine & de Laijïre , fes confrères , difputent enfemble dans le genre de cette nature pauvre, dont ils,ont. revêtu tour ft torn Socrate, Biogene, & Pliiloclete : il faut efpérer qu'ils ne perfifteront point dans ce mauvais goüt. Mr. de Seine furtout par fes têtes d'émde faites ft Rooie & dans ie genre du plus.bel antique, a trop de,talent pour Ie dégrader par un faux cfprit de fyftême. Je ne ferai mention , Monfieur, des Gnfe C) L'autre Artifte eft Mr. Monof,  c «ft) veurs que pour leur rappeller le Réglement de l'inftitution du Sallon, auquel on ne tient pas affez la main: fiiivant les Statuts , ils devroicnt réferver pour cette joüte académique leurs morceaux neufs & même en compofer exprès. lis fe négligent étrangement la - deffns & femblent dédaigner une lice oü le dernier rang eft encore fufceptible d'honneur & de renom. Je terminerai, Monfieur, par Mr. de Wailly, dont je vous ai déja éntretenu plufieurs fois , & qui nous offre un nouveau tour de force dans fon genre. C'eft le modele d'un Efcalier ft trois rampes, qu'il décrit ainfi luimême en vantant fon utilité : ,, La première rampe eft foutenue avec Ia ,, plus grande folidité par la feule coupe des marches, fans le fecours d'auciin mur, ui „ 'd'aucune voüte. Sous cette première rampe ,, eft pratiquée une defcente de cave. „ Les deux autres font de même foutenues par leur coupe & par le mur de cage, qui „ n'a que fix pouces d'épaifleur. Ce nou- veau moyen réunit ft 1'avantage de la plus 5j grande folidité, 1'économie de la pierre , de la main-d'ceuvre, tk. 'peut réulfir dans „ une plus petite cage , en la faifant paroitre j, plus grande. L'auteur en a déji fait exé- cuter deux de ce genre, 1'une au chateau „ des Ormes en Touraine , & 1'autre dans „ la maifon de Voltaire, rue de Richelieu." Eu général, Monfieur, la Peinture , la  ( 213 ) Sculpture & l'Architeclure font trois Arts dont les deftins font communs. L'un ne peut. gueres faire de progrès que 1'autre n'y participe, & vous pouvez juger par eet échantillon que le dernier devient aufli trés florisfant. Malheureufement il vous prouve encore que 1'efprit d'innovation, de fingularité, n'y altere pas moins les bons principes & y fait fubftituer ft la noble fimplicité , aux riches proportions, ft 1'élégante fymmétrie desGrecs, des idéés pauvres, bizarres & incoiiérentes. Puiffent les efprits folides y réfifter comme dans les autres & marcher,loin de ces écarts, droit ft la perftclion ! J'ai 1'honneur d'être &c. Paris ce 28 Septembre 1785.  C 214 ) A D D I T I O N S. Année MDCCLXXV. A ja page 348. Le 9 Mars 1775. Peu ayant la mort du feu Roi, S. M. ainfi qu'on Fa rapporté dans le tems, avoit fixé le jour de 1'entrée de Mi Ie Comte d'Artois dans Paris: le fa'tal événement qui eft furvenu, 1'a ruardé & il n'a eu lieu qu'avant- hier. Le Prince eft vehii feul a caufe de la groffefle de Madame la Comte ffe d'Artois. Le cérémoniala été le même que celui pour Menfieur , alors Comte de Provence ; c'eft-a-dire que Son Altefle Royale eft eritrée comme fils & non comme frere de Roi. Le Comte d'Artois eft d'abord allé k Notre Dame, enfuite a Sainte Gcnevieve, puis aux Tuilleries , Ie foir a Popéra. II étoit dans la loge du Roi, fout feul dans un fauteuil, fes Oflïciers derrière lui. On n'a point trouvé a Son Alteffe Royale Pair de fatisfaction qu'on efpéroit lui voir, d'après le defir extréme qu'elle avoit témoigné autrefois de fe montrer aux Parifiens dans eet appareil augufte. A la page 350. La Reine ayant pris goüt a la courfe de chevaux qu'elle a vue, S. M. après 1'avoir plaifautée fur cette paffioii & en avoir ri avec elle, a cependant envoyé ordre k  C 2i5) la ville de faire confïruire dans la plaine des Sabloris un édifice propre a recevoir la Reine & fa fuite & a Jui procurer le plaifir de ce fpectacle. A la page 351.. Le 13 Mars 1775. M'. le Comte de Mercy • Argenteau, Ambaffadeur de 1'Empereur, dans les fêtes qu'il a données en cette qualité a l'Archiduc Maximilien, n'a pas apporté 1'intelligence néceffaire pour 1'affortiment des convives. A certain jour entr'autres, il a.prié Mr. le Duc & Madame la Ducheffe de Choifeul, avec Mr. le Duc & Madame la Ducheffe d'Aiguillon. Madame de Brioniie qui étoit auffi du repas , a fait Rtdeffus des obfervations au Comte & même des reproches, en lui faifant fentir fa baïour- . dife,bien oppofée h 1'efprit de fineffe, de conciliation & de politique que devroit avoir un rnembre du corps diplomatique. A la page 351. Le 13 Mars 1775. Dans fa Tliéorie du Libelk,Ms. Linguet accufe un Me. Cadet de Senneville, Avocat & Cenfeur royal, non feulement de lui avoir r'efufé fon approbation pour un écrit contre les Economiftes , mais d'avoir fait part de fon écrit a ces Meflieurs; & , par une trahifon plus noire & par une infidélité vraiment punilfable, d'avoir fouftrait ce manufcrit, fins qu'il ait pu le revoir: ce qui fiche d'autant plus Mc. Linguet qu'il n'en a pas d'autre copié*. On s'imaginoit que Me. Cadet feferoit pl.aint dans la derniere affèmblée des Avocats du 9 Mars, d'une accufation fans  ( *iö ) doute aufli calomnieufe; mais il n'y a pas para & 1'on ne voit pas encore qu'il fafle aucune démarche pour fe juftilïer. , Ala page 353. Le 16 Mars 1775. Les fourriers de la maifon du Roi font déjü partis pour Rheims & vont y féjourner d'ici au Sacre , afin de marquer les logemens. La cérémonie refte jufquesici fixée pour le milieu de Juin environ. A la page 354. Le 20 Mars 1775. Mr. le Chevalier de la Tour du Pin la Charce époufe une Demoifelle Pajot, fort riche.C'étoit d'autant plus ndceffaire que par un quolibet peu décent, mais vrai, on 1'appelloit le Chevalier de la Tour non du Pin, mais fans pain: il eft frere de Madame de St. Julien, la femme du Receveur général du Clergé, qui a eu la manie d'cpoufer une fille de qualité dont il n'a pas lieud'être content. Quoi qu'il en foit,par un procédé noble & généreux, il vient au fecours de Ionbeau-frere qui,fans lui,n'auroit pas eu fur quoi affigner le Douaire de la future. Mr. de St. Julien PalTure. Ala page 360. Le2ó Mars 1775. La Sainte Ampoule eft une reliquc fi précieufe qu'il faut des ótages pour la déplacer: ils font au nombre de quatre; favoir: Mr. le Comte de Ia Roche-aymon , Mr. Ie Marquis de Rochechouart, Mr. le Comte de Talleyrand, M. le Vicomte de la Rochefoucault. On affure que la fuite de eet honneur eft d'être nommé Cordon - bleu. A la page 360, Le 16 Mars 1775, Sans les  ( 2I7 ) les divers projets fur le gouvernement, la réforme des finances, le payement des dettes de 1'Etat, &c. dont on eft inondé au comjnenceraent de ce regne, on diftingue deux plans qu'on voudroit bien voir réalifés: 1'un de vendre les biens du Clergé pour fubvenir aux befoins du royaume, ce qui ne feroit mm en dcnaturer la deftination, puifque c eft le patrimoine des pauvres; d'affurera eet Ordre des revenus fixes , proponionnés a la oignite des membres, mais borne's. L'autre, qu'on regarde comme plus réfléchi & dont les vues s'accordent atTez avec celles de tous les gens infiruits, indique des Etats pour chaque province, en les dépouillant des inconvémens bien reconnus de ceux qui fub. Ment aujourd'hui., Par 1'appercu qu'on en donne on croit y trouver le bien de PEtat & cciui de tous les membres. ^ITt1- U:SMa" '775. L'affaire du bieur de Beaumarchais contre Ie Comte de Ia Blache eft décid.emeut renvoyée au Parkment d'Aix ; envain k premier s'eft donné beaucoup de mouvemens pour Pempêcher A la page 361. Le 28 Mars i775. Eutre ks fept nouveaux Maréchaux de France les bons patriotes ont vu avec douleur le Duc deFitz-james, dont tous les exploits confiftent k avotr porté le trouble & la terreur dans les Proyinces de Languedoc &de Bretagne: il a eu fucceffivement le commandement de ces  C 218 ) du Muy, Miniftre de la guerre, indigné que pour dédommager ce petit defpote de cecte doublé mortification ou lui donnar, le baton au préjudice de fes anciens qui avoient mieux fervi que lui, Pavoit fait retirer de la lifte ; mais le Comte de Maunpas n'en a pas voulu avoir le démenti: quoiqu'il en foit, comme le Comte du Muy a été élevé a la même dignité, on a dit qu'il avoit eu raifon de brifer le baton du Duc de Fitz- james, puifqu'il en avoit confervé quelque éclat pour lui. A la page 361. Le 28 Mars 1775- APrès avoir beaucoup varié fur 1'emplacement qu'on choifiroit pour placer les Plans en reliëf des places de guerre, on s'eft déterminé pour les Invalides, 0C1 ils ne feront pas auffi utiles qu'è PEcole militaire , mais oü le local a paru fans doute plus convenable, & pour éviter la dépenfe que cette tranflation entralneroit a 1'hótel de PEcole militaire. A la page 372. Le 31 Mars 1775- M». le Comte du Muy , rait Marecnai ae rrance, s'excufe d'avoir paffé fur le corps de fon frere en difant que S. M. Pa exigé. On ne fauroit rendre compte de tous les brocards qu'on lance contre lui & les autres promus nouveb» lement, dont aucun n'a fait d'action a mériter eet honneur. Les deux Noailles furtout font 1'objet de la dérifion générale: on n'a point d'exemple d'une telle faveur , accordée en même tems a deux freres. A la page 372. Le 31 Mars 1775- Extratt  C 219 ) d'une Lettre de Bordeaux du 25 Mars 1775... Entre tout ce qui fe paffe au fujet de ia réintégration de notre Parlement, il ne fa ut pas: oublier de vous raconter une petite anecdote trés piaifante. Un Confeiller, nommé Mr. Doriïii!g<:, 1'un des reltans , en retournant du Palais chez lui dans fa chaife, entendoit des huées qui le faifoient trembler. II s'imaginoit que toute la populace étoit après lui; il crioit fans ceffe a fon laquais qui Pefcortoit a pied, de faire preffer ft marche par fes porteurs: enfin il arrivé a la maifou, & tout' tranfi, ne voyant, n'entendant rien, il fe félicite devant fon laquais de 1'avoir échappa belle, & fur la furprife de celui-ci qui n'avoic obfervé aucun tumulte, il lui répond: „ n'as„ tu pas entendu ces huées continuelles „ qui me pourfuivoient? .. Bon! Monfieur, „ ce n'étoient que vos porteurs qui vous huoient." A la page 3 du huitieme volume. Le i«r. Avrü 1775. On eft 'fi mécontent de la Gazette de France depuis qu'elle eft entre les mains de 1'abbé Aubert , qu'on parle d'en confier. la rédaétion au Sieur Bret , autre bomme de lettres, mais'qui n'eft pas plus exercé dans le genre de ce travail public. A la page 3 du huitieme volume. Le 2 jtvril 1775. Le 17 Mars 1'Acadéraie des JeuxFloraux a pris ladélibérationfuivante... „ L'Académie pénétrée des fentimens que la „ France & la ville de Touloufe en particuK 2  ( 220 ) „ lier ont fait échter al'occafiondu rétabliffe35 ment du Parlement, a cru ne pouvoir par3, ticiper k la joie publique d'une maniere „ plus convenable k fon inllitution & k fes j, anciens ufages , qu'en propofant un Prix 5, extraordinaire deftiné k une Ode qui aura 3, pour fujet le rétablijfement du Parlement &c. A la page 3. Le 2 Avril i77S. Madame dé Champbonas eft admife a la preuve des févices & mauvais traitemens de fon mari. Cette affaire eft fi orduriere qu'elle fe pJaide a huis ■ clos. A la page 4. Le 4 Avril 1775. On ne fait k quoi attribuer la ceffation des violons ordonnée par la Police dans les guinguettes , longtems avant celle des fpectacles: les .uus ont dit que c'étoit k caufe de la cherté du pain, d'autres par ordre de Mr. le Duc de la Vrillicre puur favorifer la foire & le Wauxhall, auquel Mad. de Langeac elt fans doute intéreffée. A la page 4. Le 5 Avril 1775. Les deux regnes font un déteftable poëme , ou plutót ne font qu'une hiftoire en mauvais vers. Jl y a cependant des images , des fictions, des épifodes, mais qui,faute d'être mis en oeuvre par un auteur de génie & de goüt,ne produi1'ent aucttn effet , ne répandent aucun mouvement dans 1'ouvrage. Au furplus, on juge que l'auteur eft un trés chaud Parlémentaire. Quelques anecdotes fcandaleufes ont fans doute fait arrêtcr ce pamphlet. Celle coneernant les caloranies prétendues inventées par ■  C £2i ) Ie Cbancelier contre la Reine n'a pas peu contrihué a le faire prcferire. Quant a 1'hiftorique il eft affez exaifi. Il commence a la mort de Louis XV. & finit par le retablilTement des Pariemens. Dans ce poëme d'envlron 6000 vers, onauroit peinea en choifir quelques-uns h retenir pour leur excellence. A la page 5. Le 8 Avril. 1?75. L'afraire du Comte de Guines contre le Sr. Tort, fon Secrétaire, continue a s'inftruire ou a 's'embroiulier, par de volumineux Mémoires qui fe muitiplient journellement. Cependant il ne faut pas confondre parmi ces écritsd'Avocats lacorrefpondancefecrette de Mr. le Duc d'Aiguillon au fujet de l'affaire de Mr. le Qomte de Guines & du Sr. Tort £ƒ autres intéreiïes pendant les annéesi17u l??2, ]?7^ 1?7» & 1775. En iifant avec attention cette brochure, on devient trés au fait de la contefration, de toutes fes circonftances & desprogrès qu'elle a fait, malgré les obftacles, les contradictions, les leuteurs qu'on a cherché a y apporter. On ne peut fe diffimuler que cette publication doit tourner au desavantage de Mr. de Guines, en ce qu'elle produit-au jour une* conduite trés oblique de ft part. On voit qu'il ne s'eft foumis a la décifion des Tribunaux ordinaires , qu'après avoir épuifé les divers moyens qu'il a imaginés de mettre en ceuvre pour s'y fouftraire ; qu'après avoir provoqué la déteniion du Sr. Tort & 1'avoir^rolongée autant qu'il a pu, il a d'abord cherché a écarK 3  ( 322 ) ter ce grief du plaignant contre lui, fous prétexte que remprifonuement ayant été fait par ordre du Roi, S. M. n'eft comptable de fes motifs qu'a elle-même; qu'elle s'en réferve la connoiffance exclufivement , & que d?ns aucun cas, un de fes fujets ne peut en dcmeurer refponfable. Ce principe trop favorable au defpotifme pour ne pas être adopté du Miniftere , fe trouve coufigné en plufieurs endroits de cette correfpondance, notamment dans une lettre du Duc d'Aiguillon du dix Novembre 177a. On voit encore que la prétendue décifion du Confeil du Roi en fa faveur, n'eft qu'un rapport fait par M1S. d'Agueffeau , Joly de Fleury,Conf ülers d'Etat,&M. deTolozan, Maltre desRequêtes, qui, fuivant leurs lettres des & 21 Décembre 1773 prononcent que 1'autorité du Roi, 1'honneur de fa couronne & la dignité de fes Ambaffadeurs dans les cours étrangeres ne pouvoient être compromis par une inftruction judiciaire, & que S. M. ne devoit point arrêter le cours de la juftice ordinaire. Mais ce qui déeele la mauvaife foi du Comte de Guines, c'eft qu'après s'être prévalu d'abord de fa crainte que la révélation des dépêches minifterielles ne compromit les fecrets de 1'Etat, & s'en être fait un moyen pour demander que 1'aflaire ne füt pas portée devant les juges ordinaires, il déclare enfuite que les dépêches dont il doit faire ufigey  C "3 ) n'intéreiYent en rien les négociations du Mi» niftere & requiert lui-même en conféquence la libené d'en donner commuuication aux Magiftrats & au Public. A la page 5. Le ü Avril 1775. La décifion derniere des Comédiens fur la comédie des Courtijannes a été précédée d'un difcours du Sr. Pahffot, prononcé le vingt du rnois der- j nier, dont le réfultat eft de déclarer aux histrions qu'il n'abandonnera pas légerement les avantages qu'il avoit droit de fe promettre de fon ouvrage; que la Police au furplus y ayant mis fon attaché, 1'objection faite par quelques-uns la première fois devoit tomber; qu'ayant joué les Phüofophes, ils devoient encore moins être retenus par les confidérations qu'ils apportoient en cette occafion-ci: qu'enlin fa piece étoit non feulemeut très-admisfible authéatre, mais même néceffaire pour concourir a la réforme des mceurs, objet fur lequel. le jeune Monarque dès fon avénement au tróne avoit annoncé vouloir porter fon attention. Ce difcours n'a produit aucun effet, comme on a vu, & les comédiens n'ont été que plus opintétres a rejetter la comédie , fauf le Sr. le Kain, dont l'auteur fait beaucoup valoir 1'opinion en fa faveur. A la page 5. Le 9 Avril 1775. Les nouveaux Maréchaux de France ont pris féance le 4 au tribunal, oü a été jugée Paffaire d'honneur élcvée entre Mr. le Marquis de Montalembert, Sous-Lieutenant des Chevaux légers K 4  ( «4> & Mr. de Rouffignac, Capitaine.de Cavalerie. Celui -ci avoit, il y a plufieurs années, écrit une lettre au premier en forme de cartel, a raifon de procédés de- fa part dont il n'avoit pas été content, relatifs i une difcuffion d?inTérêt: fon adverfaire s'en étant prévalu contre Jui, 1'accufé avoit été-condamné a fix ans de prifon. Sorti depuis pen, il a trouvé Mr. de Montalembert chez le Miniftre de la guerre, & ne refpirant que la vengeance, il 1'a apoItrophé de la facon la plus injurieufe & Ia plus méprifante. II a été de nouveau condamné a. un an & un jour de prifon. A la page 6. Le 10 Avril 1775. Mr. le Duc de Ciiartrcs s'eft fortement intéreffé auprès du tr.bunal pour Mr. de Rouffignac, qui d'ailleurs s'eft conduit avec beaucoup de fermeté. Son adverfaire a été obligé de donner la déïnifiion de fon emploi dans les Chevaux-légers. II étoit fort connu pour des comédies qu'il donnoit chez lui, oü fa femme jouoit, & fi renommées que les gens de la cour les plus diftingués vöuloient y affifter. On fe doute bien qu'un pareil événement a fait fermer le théatre. Par une cruelle plaifanterie on a mis fur la porte du maitre, reldche, allufion a la doublé circonftance. A la page 7. Le ia Avril 1775. II court une lettre manufcrite adrefl'ée a M. le Comte de Maurepas; C'eft une criüque amere de fou adminillration : on la croit de quelque mem-  C 225 ) menibre du Grand-Confeil: les connoiffeurs Pattribuent ft Mr. Gin; elle eft encore trés rare & mérite une difcuffion. A la page 8. Le 14 Avril 1775. On a parlé d'un httirnent ordonné ft la ville & qu'elle avoit fait ériger dans la plaine des Sablons ft 1'ufage de la Reine, pour que S. M. pCtt'y voir plus ft Faife les courfes de chevaux & autres fpëctacles de ce genre: il eft venu depuis peu un ordre du Roi pour le détruïre. A la page 8. Le 14 Avril 1775. Dans la Lettre d M. le Comte de Mamepas, ce Ministre eft fort maltraité : il paroit qu'on lui eu veut furtout pour le rétabliflement du Parlement, qu'on lui reproche comme une furprife faite ft la rdigion du Roi; il eft aifé d'en conclure que l'auteur eft uil partifan trés attaché ft M"-. le Chaucelier & ft fon fyftême. Ce pamphlet manufcrit eft plus rempli d'anecdotes que de raifonnemens. On y rappelle d'abord en bref celle qui a ramené ft la Cour Mr. de Maurepas, après vingt-cinq ans de difgrace; on a la noirceur de faire rejaillir fur lui 1'imputadon atroce attribuée ft M'. de Maupeou concernant les calomnies fur ia Reine ; calomnks trop criminellement audacieufes pour qu'aucun des deux s'en fat rendu l'auteur, & qu'il ne faut envifager que comme une imagination infernale produite par les ennemis de tous deux. . La maniere dont oiï veut que le Mentor du Roi ait écarté de S. Mr les anciens Miüiflres, & même les nouveau^ K 5 ■  C 226 ) qu'il fentoit ne devoir pas être favorables h les vues, t ft plus vraifemblable, & n'eft qu'un cuup de politique innocente fuivant la légitimité de fes projets. Son concert avec le Duc d'Orléans pour lui faire rompre le premier la glacé fur un projet délicat dont 1'annonee . feule devoit révolter un jeune Monarque jaloux de toute fon autorité, n'eft encore qu'une manoeuvre fage , ufitée par tout homme prudent qui médite un grand deffein auquel il prévoit des obftacles proportionnés. L'inconféquence dans 1'exécution & dans les fui» tes, la molleffe de fon adminiftratiou & de celle du Chef fuprême de lajuftice, 1'efpece d'anarchie qui en réfulte, font des reproches plus fondés & plus vrais. Cet écrit fimple, modéré en rpparenee, eft une fatyre arnere & punilfable par 1'injultice & la noirceur des imputations dont on charge Mr. de Maurepas, qui,' a certains égards ca« lomnié, n'eft pas mal peint k d'autres, & qui certainement fe feroit fait beaucoup plus d'honneur, s'il eüt quitté la cour & fut re« tourné dans fa retraite après le rétabliffement du Parlement de Paris. A la page 8. Le 14 Avril 1775. II paroit un Arrêt du Confeil du 2 Avril qui fupprime la Théorie du libelle, comme contenant des injures, des déclamations & des calomnies contre des perfonnes dignes de Peftime & de la coijfiance publiques. On ne doute pas . que ce ne fok M'. ïurgot qui ait provoque' cette  ( 227 ) vindidïe en faveur des Economiftes contre RK Linguet: comme ce Minifire d'ailleurs n'aime pas le Lieutenant-général de Police actuel, il aura été bien-aife de faifir ainfi 1'occalion de mortiner indirectcment ceMagiftrat, dont l'auteur de 1'ouvrage avoit furpris la conflance. & qui avoit ofé le produire fous fes aufpices. A la page 8. Le 14 Avril 1775., On voit avec peine dans la Gazette de France d'aujourd'hui que dans 1'énumération des perfonnages augulies de la familie royale qui o:it fait leurs dévotions,. Ml'. le Comte d'A * * * foit le feul non compris, ce qui comlrmer.rit les bruits publics fur les aifeéfions crimincües dans 1'efprit de la religion qu'on lui fuppofe, & qui ont occalionné ces fréquens voyages incognito a Paris de S. A. Royale, qui xcitoiént la curiofité des courtifans & ont été divulgués par eux. A la page 9. Le 15 Avril 1775. Mfi ïf Duc d'Aiguillon débite un Supplément d /« Correfpondance: cc font de nouvelles lettres retrouvées au bureau des affaires étrangeres, ou il la police/, qui ne font pas plus favorables que les précédentes h M. de Guines,-. A la page 9. Le 16 Avril 1775.'La Demoifelle du Thé eft une courtifanne trés renommée. On a prétcndu depuis peu que M. le Comte d'Ar**** avoit jjris du 'goüt pour elle. On difoit par plaifanterie que ce Prince ayant eu une indigeftion de bifcuit deSavoyes K 6 t  C £28 ) venoit prendre du the; k Paris; mais ce quolibet fondé feulement fur une rumeur générale n'a nul motif. Cependant c'en eft affez pour avoir indifpofé le public contre elle ; & jeudi dender s'étant rnontrée aLongchamp dans un caroffe k lix chevaux avec Pappareil d'une femme de la plus haute qualité , elle a été tellement entourée & huée-, qu'elle n'a pu entreren file, & que fon caroffe a été forcé de retrograder; il a fall'u qu'elle s'en allüt. A la page m Le 17 Avril 1775. II paroit un Mémoire d Confulter Éf Confuüation pour Je Sr. Paliffot de Montenoy contre la troupc de Ia Comédie Francoife. Voici le fait comme il le raconte. Le famedi 11 Mars il avoit lu k 1'affemblée des Comédiens une piece nouvelle intituiée les Courtifannes, ou TEcole des Mceurs. II y ent fept voix pour 1'acceptatiön pure & fi.nple; huit, en louant la piece, Pont rejettée avec Ie plus grand regret comme peu compatible par fon extréme indécence avec Ia dignité du théatre francois. L'auteur, pour lever ces fcrupules, a obtenu fans difficulté le 18 Mars Papprobation de la Police, & Ie lundi co il Pa notifiée lui-même aux Comédiens en prononcant le difcours dont on a parié. La troupe, en délibérant de nouveau, a chargé Ie Sieur Defeffarts d'annoncer k 1'autem qu'elle avoi{ |ugé fa première décifion légale. On fent combien tout cela prête aux ïaicatines de FAvocat,Me. Francois de Neuf-  c 2=9 y cMteau. Suit une Confultation datée du hult Avril, oü les Jurifconfultes font d'avis que la queftion propofée intéreffe vifiblement la grande police, & doit confé.quemment être foumife a la décifion des Magiftrats. i Ala page 10. Le 17 Avril --775.- Mr. de Monralembert a 4000 livres de retraite, & fon neven l'agrément. de- la cornette vacante par la fortie. Cette doublé faveur indifpofe la compagnie des Chevaux-légers contre le Commandant, qui manifelte fa partialité pour eet officier. Cela renouvelle 1'anecdote de 1'intimité de ce Seigneur avec Mlie. de Comarieu, ci-devant fa makrelfe connue, aujourd'huï femme de 1'expulfé. La vilaine affaire du mari avec Mr. de Rouffignac donne lieu a s'entretenir de cette anecdote fcandaleufe , dont Madame de Montalembert femble auffi provoquer la révélaüon en fe montrant en fpëctacle fur fon théatre: en admirant fes talens, ou s'entretient de la perfonne, & ces détails répandus encouragejit merveilleufement les aipirans. A la page 10. Le 17 Avril 1775, La Salie de Comédie de Troyes a été brülée & quelques niaifons qui en étoient voifines: auffi ce dommage auroit dü étre plus grand, toute la ville étant prefque batie eu bois. Le goüt fcénique propagé dans toutes les Provinees , qui excite a batir jufques dans les moins fufceptibles de cette dépenfe des Salles de comédie deviendra non moins funefte au pbyfïK 7  ( 23°") que qu'au moral , fi Fon ne prend pas plus de précamions pour prévenir ou arrêter ces incendies. A la page ia. Le 19 Avril 1775. Mr. le Comte d'Ar**** dont les counifans continuent d'épier les démarches , veulent que S. A. R. ait été feulement remife a huitaine ft confefFe , fufpenfion qui 1'a empêchée de faire fes paqüés avec la familie royale; il a rempli ce devoir mardi dernier avec beaucoup d'appareil pour Fédification publique. A la page 12. Le 20 Avril 1775. Un refus de facremens fait avec éclat fur la paroilTe de St. Severin ft un abbé malade, _a penfé ranimer la fermentation aflbupie depuis quelques années entre les deux partis qui divifent actuellement les dévots. Sa mort a terminé la querelle. On a afFeété de le faire enterrer avec beaucoup de pompe. Tous les Prêtres Janfeniftes du quartier fe font rendus ft fes obfeques & même plufieurs Confeillers au Parlement entftchés de ce ridicule, tels que MrS. Clément, &c. A la page 12. Le 21 Avril 1775. Mr. le Controleur général perfiftant toujours dans fon fyltême fur la liberté du commerce des grains, dans lequel 1'entretiennent lesEconomiftes,ne s'émeut point de la cherté qui s'éleve de toutes parts: il affure qu'elle ne fera pas plus forte qu'elle ne Fétoit du tems du monopole, mais que cette calamité n'aura qu'un tems & que.les accapareurs punis de leur cupidité perdront  C 231 ) pour toujours lc defir de garder leurs bied*. A la page 12. Le 22 Avril 1775. II paroitune petite brochure intitulée la Cenfure, lettre a****. Elle roule fur la longue querelle entre Me. Linguet & fon Ordre. On Fattribue a Mc. Target. A la page 12. Le 23 Avril 1775. Outre les fept péchés capitaux dont on a fait la plaifanterie fur les nouveaux Maréchaux de France, on dit un quolibet qui n'eft pas fans fel; on prétend qu'ayant cherché a les comparer aux fept planetes, on n'a pas trouvé de Mars. A la page 15. Le 24 Avril 1775. Mr. de Rulhieres a eu 1'houneur de lire derniérement devant le Roi fon hiftoire manufcrite dé la Révohilion de Rufjïe: on ne doute pas que ce ne foit Monfieur auquel il a Fhonneur d'être attaché qui ait excité la curiofité de S. M. Bien des politiques font fichés de la publicité de cette anecdote : ils craignent qu'elle ne parvienne aux oreilles de lTmpératrice de» Ruffies : ils favent combien , vraifemblablenient par ordre de cette Souveraine , on a intrigué pour anéantir, s'il eüt été poffible, jufques au raanufcrit de eet ouvrage. Elle ne pourra qu'être trés fachée du cas qu'on en fait a la cour de France & cela doit éloigner cette Princeffe d'une réunion avec elle qu'on fembloit avoir fort coeur. A la page 15. Le 25 Avril 1775. Extrait' d'une lettre de Dijon du 20 Avril 1775. II  C 232' ) vïent d'arriver dans cette ville une émente conlidérable par rapport ft la cherté des grains. Grand nombre de gens de la campagne ont abattu un moulin appartenant ft uiï monopoleur. Ils font venus ft la ville , &,. après diff'érens defordres ont été chez Mr. de Ste. Colombe, Confeiller au Parlement, un des reftans, & expulfé pour raifon de cette imputation de monopole.' Les mutins font entrés chez lui ; ils ont déclaré ne vouloir rien enlever ; mais ils ont tout caffé, tout brifé & tout jetté par les fenêtres. M. de la Tour du Pin qui commande en cette ville, n'a pas peu cóntribué ft les irriter par la réponlé dure dont il n'a pas fenti vraifemblablement 1'inbumauité. Sur ce qu'i.ls lui expofoient leur befoin, le manque de pain oft ils étoient, oudu moins 1'impofiibilité pour eux d'atteindre au prix de cette denrée, il leur a répondu: mes amis, l'herbe commence apoujjer, alkz la brouter. Sans PEvêquequi eft forti de fon Palais Epifopal pour haranguer ces malbeureux &lesramener ft la douceur, il eutété a craindre que le defordre ne fut devenu plus grand. Un frere de 1'Evêque, militaire, inquiet de ce Prélat, étant forti pour aller ft fa rencontre a été pris pour Mr. de la Tour du Pin. Dé fa un homme derrière lui avoit le coüteau levé pour le frapper, lorfqu'un aurre lui a retenu le bras, en lui difanr qu'il fe trompoif. A la page 15. Le 27 Avril 1775. II parolt un Arrêt du Confeil du 24 de ce rnois, qui.  ( 23*3 > excite une grande fermentatïon dans cette capitale: il eft relatif aux grains. On femble ciicrcher a y raffurer le public fur les alarmes que lui donne la cherté du bied augmentant de jour en jour même a Paris, malgré routesles précautions prifes pour que cette ville foit abondamment fournie. On ne trouve pas que le Préambule' foit adroit-J il y. elt dit que la médiocrité de la xécolte de Paunée derniere n'avoit fourni a la France que la fubfiftance néceflaire polir la totalité de fes habitans ; enforte que pour peu que les Propriétaires, par précaution ou par cupidité, ne voüuüTeut pas mettre dans le corrtmerce toute la portion de leur récolte, il feroit a craindre qu'il n'y eüt difette; que d'un autre c6te, la rareté de cette même denrée- chez Pétranger,ne Payóit point rendue moins chere chez eux & que cela pouvoit avoir empêché les commercans de faire des fpéculations .utiles fur ce négoce: que dans ces circonftances S. M. croyoit devoir leur fournir un encouragemenr. En conféquence des facilités, des exemptions , des gratifications , des primes &c dont le détail eft inutile. Ce qu'il eft effentiel d'obferver, c'eft que,. par le premier article de eet Arrêt, toutes les difpofitions du fyftême actuel fur cette adminiftration font confirmées: iiberté entiere & générale de tranfporter d'uue Province a Pau-» tre, d'emmagafiner, de garder chez foi, fans que les officiers de police püiffent fe reëler, est  C 234 ) rien de cette partie. Enfin il réfuhe de eet Arrêt que le .gouvernement veut bien 'empêcher qu'on ne manque de Bied en France , mais non qu'il y foit cher: il le déclare même aflezpofitivement, en aunoncant que la denrée qu'on va chercher fera pour le moins auffi chere que celle de France. A la page 15. Le 27 Avril 1775. C'eft aujourd'hui que Mr. le Chevalier deCfaatellux élu par 1'Académie francoife póur remplacer Mr. de Cbateaubriui, vient prendre féance dans cette Compagnie. Pour éviter le tumulte occafionné a la derniere reception, Mr. d'Alembert, le Secrétaire perpétuel, a propofé h fes confrères des difpolitions nouvellcs. On eft convenu de renforcer la garde & d'élever de fortes barrières qui puffent en impofcr au public. Cet appareil, au lieu de préfenter la iimple & modefte entrée du paifible fanctuaire desMufeSjfembloit annoncer leTemple efcarpé de la Gloire qu'il falloit gagner par efcalade. Au refte , la foule des curieux augmen. tée encore cette fois a juftifié cette formidable précaution. Ces affemblées font devenues des fêtes h la mode, auxquelles il eft du bon ton de ne pas manquer , même de la part des femmes les plus qualiriées de la cour. On feut qu'en conféquence toutes les regies doivent être interverties, & que 1'heure de la féance, trop fcholaftiqua (a trois heures & demie) a du être reculée. Oh a eommencé fort tard, pour donner le tems au beau fexe d'arrlver & de s'arranger.  ( 235 ) A la page 16. Le a3 Avril 1775. Hier M. le Chevalier de Chatellux, dès fon entrée dans la falie de 1'Académie francoife, a été ac- ; eueilli du public prefque avec autaut d'enthoufiafme que Mr. de Malesherbes 1'avoit-été le jour oü il parut pour la première fois dans cette aflemblée. Malheureufement ces applaudiffemens n'ont pas été foutenus , & durant le débit de fon difcours , le Kecipien» daire en a pen obtcnu , on 1'a trouvé long, abondant en paradoxes & dénué de ce goüt qui a fait le principal objet de la diflertation de M'. le Chevalier de Chatellux, 11 a fagement évité de la définir: il a prétendu la faire mieux connoitre hiftoriquement, c'eft-ft-dire, en rendant compte des diverfes époques oü le goüt paroiffoit avoir véritablement dominé. II a avancé comme un axiome trés certain que le goüt ne pouvoit point exifter au milieu de 1'efclavage , & cependant il a contredit fur le champ lui-même fon affertion en afiignant, ainfi que tous les gens de lettres, les fiecles d'Alexandre , d'Augufte & de Louis XIV, comme les trois fieclrs brillans de la ; littérature. Eh ! qui ne feut que c'eit dans ces trois fiecles oü les ames ont commencé a fe faeonner ft 1'efclavage ! Son principe fe trouve donc faux, & peut - être qu'on prouveroit plus aifément la propofition contraire , 1 c'eft que le Recipiendaire a confondu mal a propos le goüt & le génie. Mr.. de Chatellux a avancé une autre pro  C 03Ö ) poötion non moins hétérodoxe; fa voir que le goüt n'étoit point, comme les chofes phyfiqucs , afTujetti nécefiairement ft 1'alrération & au dépériiïemenr. On a concu aifééent que c étoit par adulation pour ce liecle qu'il avoit halardó cette étrange opinion, trop démentie par les faits. II a donné des définitions plus jufles de ce qui avoit conftitué principalement le goüt dans les trois époques mémorables dont on vient de parler. Chez les Grecs , dont la vanué & h curioflté étoient les paffions dominantes, il falloit flatter le Peuple par un luxe faftueux de paroks & 1'amufer par des conté». C'eft en effet ce qui caraclérife Homere, k modek de tous les auteurs de cette nation. Le Romain , plus auftere & plus farouche, avoit befoin qu'on parlat moins ft fon oreilie qu'a fon ame; & voila pourquoi les écrivains de cette nation font. plus précis, plus ferrés de penfées. Enfin ]a raifon eft pappauage dominant des auteurs francois, paree que la philofophie ayant marché chez nous prefque de front avec les arts & ies lettres, a fait les mêmes progrès qu'eux & a dü prendre bientót 1 empire qui lui convknr partout. -Après une digreffion trés étendue fur tous ces objets, k Recipiendaire en eft enfin venu au véritable point de 1'inftitution de ce discours; c'elt-ft.dire, qu'il a fait 1'éloge de fon prédécefléur, Mv de Chdteaubrun , mais il 1'a traité fuccintement. & a prétendu que  C 237) le Directeur renipliroit plus dignement cette fondtion. Ce Direéteur étoit Mr. de Buflön, pour le comptevduquel étoit venu une grande partie des fpectateurs empreffés de 1'entendre. II a le talent de débiter de mémoire , d'un ton ferme & noble, proportionné a fon ftyle. II a commencé par fronder la malheureufe habitude oü 1'on étoit depuis plus d'un fiecle k 1'Académie, de faire a ces fortes d'affemblées un échange reciproque de louanges fades & viles. Ce coup d'oeil pbilofophique fur 1'abus de ces affemblées a merveilleufement excité 1'attention du public; mais on a bientót reconnu que ce n'étoit qu'un tour oratoire pour amener les louanges de Mr. le Chevalier de Chatellux, fur lesquelles il s'eft repofé avec complaifance. Outre le livre de la Félicité publique, le feul de eet auteur que 1'on coimüt, il a fait mention de l''Accord de la poéfie & de la miifique , & des Vies de quelques gra?ids capitaines; autres productions du même candidat qu'on ne connoiffoit point. II a hazardé une légere cn'tique fur le premier ouvrage, qu'il a bientót compenfée par 1'éloge du fecond, modele de goüt, fuivant Mr. de Bulfan. It ne s'eit pus appéfanti beaucoup plus que le nouvel Académicien fur Mr. de Chdteaubrun &, par une affeclation encore plus remarquable dans l'auteur de l'üijloire Natuielle, il a moins exalté les talens que les vernis chrétiënnes du dé-  ( 238 ) funt. La circpnttance de fon pere mort,com-| me Mf. de Chateaubrun tout recemtnent dans un £ge trés avancé, lui a fourni unej tranfition pour fortir de fon difcours, en di*j fant que fes fanglots étouifbient fa voix. A travers les excellentes chofes qu'a dites. le Directeur, on a critiqué quelques puérilitésl telles qu'une comparaifon trop foutenue de ces complirnens avec unbouquet, dont l'auteur1 a retourné toutes les faces apphcables a l'ob In ,-;n„.>,„. A„„ I *.:„ . , , luiiuiu iq ii.sLii.iu uta : retinproiis „ tous officiers cotnmandans deprêter main , .v.,^ ^ ,u„ tAttuuun , i.cieiKioi s a rou- , tes perfonnes de s'introduire de force chez , les boulangers, même fous prétexte d'v 5 acheter.du pain, qui ne leur fera foumi L 4  „ qu'il la charge de Ie payer au prix ordinaire. Mandons aux Commiffaires du Chfttelet de tenir la main ft 1'èxécution de notre ,j préfente Ordonnarjce, qui fera imprimée, publiée, "affichée dans cette ville , fauxbourgs & banlieue , & part.out oü befoin „ fera, ft ce que perfonne n'en ignore. ,, Ce fut fait & ordonné par nous Jean„ Charles-Pierre le Noir, Chevalier, Con„ feiller du Roi, &c." A la page 25. Le 5 Mai 1775. Mr. Ie Noir, Lieutenant-ge'néral de Police, a reen bier une lettre du Roi, qui le remercie de fes fervices' & lui demande la dérniffion de fa place. S. M. ne lui marqué aucun mécontentement perfonnel. Elle lui dit même qu'elle n'a rien ft lui reprocher; mais que le fachant dans des principes oppofés ft ceux de fon Controleur • général, & au genre d'adminiftration qu'il veut introduire, elle ne le croit plus propre ft remplir la place qu'il lui avoit conliée : que du refte elle 11'oubliera point les fervices qu'elle fait qu'il a rendus ft fon ayeul en diverfes circonftances. - C'eft Mr. d'Albert, ancien Confeiller au Parlement, chargé de l'adminillration des bleds, comme Intendant du Commerce, qui fuccéde ft Mr. le Noir. Mr. Turgot, lors de fa difcuffion avec ce Lieutenant-général de Police, ft 1'occafion de la nouvelle loi concernant les grains , lui avoit fait óier 1'approvifionnement de Paris, qu'il avoit déja confié ft Mi. d'Albert. A  C 249 ) ' A la page 25. Le 5 Mai 1775. Malgré h lettre du Roi, le Parlement a cru de voir s'&ffembler encore hier fur Pobjet intérefiant qui alarme tout Paris. Plufieurs de Meffieurs ont mit récit de ce qu'ils avoient vu, entendu ou appris de leurs terres. II en a réfuké que tout étoit en commotion, non feulement daas la capitale, mais dans les environs, ft une grande difrance,& dans les pro vinces circonvoifines; ft 1'égard de Paris, que le peuple étoit refté encore tranquille & fimple fpecfatuir du pillage exécuté feulement par léï geus venus de la campagne; mais que plufieurs circonftances indiquoierit que ces drangers vagabonds étoient moins excités par ia mifere que par d'autres motifs effentiels ft approfondir. Un fait dont un Confeiller des Enquêtes a rapporté avoir été témoin, a confirmé cette opinion. M. de Pomeufe a raconté que s'étant trouxé dans la bagarre du mercrédi, ü'ivók vu une femme plus animée que les 'autres; qu'il étoit allé ft elle, qu'il faVoit follicitée de fe retirer de Ia mêlée, en lui offrant un écu de fix francs pour aller acheter du pain; mals que cette femme, rejettant fon écu, lui avoir, répondu avec un fourire ironlqué: va va nous n'avonspas bejoin de ton urgent,' nous en avons plus que toi; &, qu'en même tems, elle avoit fait fonner fa poche, dont Ie bruit fembloit indiquer en effet la véiité de ce qu'elle difoit. L 5  C 250 ) D'après les divers récits de Mefiieiirs, &; les cor.fidérations que chacun a propofées, on eft convenu de la néceffité de rendre Arrêt i'ur le champ; foit pour empêcher le peuple de prendre part au tumulte, en renouvellant ïcs Ordonnances contre les attroupemens , emeutes , &c. évitant cependant de 1'aigrir par des menaces de peines articulées & trop jêveres; foit, pour le confoler, en lui fsifant voir que le Parlement s'occupoit de fes bej'oins & fongeoit a réclamer la vigilance paternclle du Monarque. En conféquence 1'Arrêt a été rédigé par un difpofitif trés court, & il a été mis au bas 3'Arrê-té fuivant: ,, Ordonne en outre que le Roi fera trèsat» humblcment fupplié de vouloir bien faire prendre de plus en plus les mefures que lui infpireront fa prudence & fort amour pour „ fes fujets, pour faire baiffer le prix des grains & du pain a un taux proportionné „ aux.befoins du peuple, & pour óter auffi aux gens mal intentiomiés le prétexte & „ i'occafion dont ils abufent pour émouvoir a, les tfprits." • Cet Arrêt a été envoyé fur le cbantpn 1'imprcfiiqn ; mais la Cour ne le trouvant pas conforme a fes principes, a donné des ordres ai'lmprimeur de ne le point diftribuer, d'en ïompre la planche. Ala page 25. Le 5 Mai 1775. Mr. je Lakoureur, qui exercoit par interim la place de  C -si) Commandant du Guet, en attendant que Mr. dePoquemont, le vrai titulaire, fut en Agè d'en faire les focctions, a été defb'tué en même tems que Mr. le Noir, & c'eft un Sr. de la Galerne, Sergent aux Gardes, Chevalier de St. Louis, qui lui fuccede. A la page 25. Le 5 Mai 1775. 11 a ére afiicbé a Verfailles une Ordonnance du Roi trés févere contre les attroupemens: elle a été auffi envoyée a Paris &placardée, furtout aux endfohs oü 1'Arrêt du Parlement d'hier avoit été affiché. Voici le texte de cette Ordonnance , qui n'a point de date & n'eft fignée de perfonne: . „ II eft défendu fuus peine de la vie h ten„ tes perfonnes, de quelque qualité qu'dles „ foient , de former aucun attroupement, „ d'entrer de force dans la maifon ou la bouti„ que d'aucun boulanger, ni dans aucun dé„ pót de grains, graines, farines & pain. ,, On ne pourra acheter aucune des deti„ rées fufdites que dans les rues ou places. „ II elt défendu de même, fous peine de „ la vie, d'cxigèr que ie pain ou la farine „ foient donnés dans aucun marché au-dd„ fous du prix courant. „ 'Poutes les troupes ont recu du Roi 1'or„ dre formel de faire obferver les défenfes „ avec la plus grande rigueur, & de faire „ feu en cas de violence. „ Les contrevenans feront arrêtés & jugés s, prévotalement fur le champ." L 6  C 252 ) f*ff:'*V^ Le Minis. teie non content de garantir la capitale, a cru devo;r_ve,lIeralafüreté des campagn s, «ff,,ï m°inf e,üPêChef "ne Plus grande dé* vaflauon j il a donné ordre ft différens régimens d infanterie, de Cavalerie, aux Carabiïiicrs, &c. de fe rapprocher ft des diftances fonvenues & de s'y cantonner. II a été arm préalablement un ph„ de campagne Les difpofitions pour Paris font que les Moufquetatres noirs s'étendront fur les rives 'de la Marne; les Moufquetaires gris, fur celles de la balie Seine, les Gendarmes & Che- ;v3ux-légers furies rives de la haute Seine; les GardesFrancoifes, les CardesSuiffis &les Jnvahdes continueront ft garder les marchés, Jes carrefours, les licux publiés , les fauxfcourgs & les boutiques des boulangers Mr. Ie Maréchal Duc de Biron a le' com- mandement général des troupes, tant du de- dans que du dehors; & je Commandant du £«et par extraordinaire, va prendre Pordre ,«nez lm. ; A la.Page 25. Le5 Mai i775. L'aflemblé* «es lairs qui devoit avoir lieu aujourd'hui rour 1 affaire du Maréchal, Duc de RichelieU a été rermfe. 5 (Ge matin, Ie Grand Maltre des cérémonies m vcnu apponer au Parlement une Lettre de J acbet, par laqueUe S. M. lui ordonnoit de ie rendre ft Vufailles, dans la matinée, en  C 253 ) Le Parlement s'eft affemblé poür délibérer. fur cet ordre: de nouveaux faits, furvenus la veille & dans la nuit, ont donné matiere a de nouveaux récits, entr'autres , a celui de M'. 1'Abbé le Noir , Confeiller de Grand'Chambre, qui a dit: que fon chapelain, arrivé ce matin de fon Prieuré de Gournay, lui avoit appris que les bandics s'y étoient répandus; mais, mettant de 1'ordre dans leur defordre, u'avoient enlevé chez les Fermiers que du bied & du bied battu , propre a faire de la farine; qu'ils 1'avoient même payé 12 livres le feptier, en difant que le Roi avoit mis le pain a deux fois la livre a Verfailles & ne vouloit pas qu'il füt payé plus cher. A la page 25. Le 6 Mai 1775. Aujourd'bui, jour de marcbé, pour prévenir encore mieux tout prétexte de défordre, 1'on a affiché 1'Ordonnance fuivante fans fignature ni date, comme ia première; mais portant feulement au bas de l'Imprimerie Royale 1775. ,, II eft défendu h ceux qui veulent ache„ ter des denrées dans les rues ou marchés „ de s'y préfenter avec des biltons, ni aucune „ efpece d'armes & d'outils propres a nuire, ,, pour ne pas être confondus avec les vo„ leurs qui ont détruit & pillé des prov'fions „ deftinées aux habitans de Paris, ou qui ont voulu fe les faire donner a un prix audeifous du courant. " A la page 25. Le 6 Mai 1775. Le Parlement s'eft rendu hier a Verfailles, en robes L 7  C $5* ) noires feulement: S. M. leur a d'abord fait donner k diner dans une Salie de Cérémonie, oü s'affemblent les divers Corps qui doivent Être introduits auprès du Roi. La féance a commencé a trois heitres & demie par un difcours du Roi, par un de M. le Garde des Sceaux; cSf, après avoir été aux voix pour la forme, on a enrégiftré une Pécluration portant attribution aux Prêvóts généraux des MarêcliauJJées, de la connoijjance &? du jugement en dernier rejjort des crimes ciP exces y mentionnês. II faut favoir que la connoiffance de ces crimes & excès avoit été attribuée d'abord k la Tournelle par des Lettres patentes préfentées la veille au Parlement; mais que ces Lettres patentes y avoient été trouvées irrégulieres & dans le fond & dans la forme: dans le fond, en ce qu'elles le rendoient Commiiïion st 1'égard d'une portion d'autorité qu'il avoit par effence, puifqu'uue de fes principales fonclions eft de connoltre en première inftance de tout ce qui intéreffe 1'ordre public & la grande police: dans la forme , en ce qu'elle devoit être adreffée,a la Grand'Chambre & non k la Tournelle. Par cesdiverfes confidérations, 1'avis dominant avoit été de laiffer de cóté ces Lettres patentes, & de rendre, du propre mouvement de la Compagnie , 1'Arrêt ci- diTfus du 4 Mai. On ne doute pas que ce ne foient ces difÜcultés du Pailement qui aient déterminé la  ( 255 } Cour ;\ redrer lefdites Lettres patentes & h changer 1'attribution: mais, par une inconféquence fort finguliere, la Cour, en s'oppo* fant de fait & par violence a la publication de 1'Arrêt, n'a point employé la voie judiciaire pour 1'anéantir en le caffant par un Arrêt du Confeil; enforte que le Parlement regarde le fien comme toujours fubfiftant. Quoi qu'il en foit,lesChambres aflemblées hier pour délibérer fur ce qui s'étoit palTé la veille , le bruit elt, que Meflieurs confternés du coup mortel porté a leur autorité , mais n'ofant faire de réclamation ou verte, fe font contentés de proteftations ordinaires & d'un Arrêté' vague, dans lequel ils ont dit que, pour donner au Roi des marqués de leur entiere foumifüon, ils s'abftiendroient de s'occuper en ■rien des troubles acluels, fans toutefois cefler de faifir toutes les occafions favorables de repréfenter au Monarque les befoins & la mifere de fon Peuple. On a remarqué au Lit de juftice, que,lorfque M. le Garde des Sceaux elt allé aux voix pour la forme, il n'y a eu que M. le Princc de Conti parmi les Grands, & MT. Freteau parmi les membres du Parlement, qui ayent parlé & difcuté leur avis. On a remarqué encore que M1'. le Garde des Sceaux, en retournant au Roi pour lui rendre compte du vosu de 1'affemblée, étoit refté un quart-d'heure aux genoux de S; M. ; ce qui fembleroit nnnoncer qu'il 1'auroit iuformée de ces avis particuliers.  C 25S- ) A la page 26. Le 7 Mai 1775. Paris elï comme une place de guerre inondée de troupes & oü le fervice fe remp'lit avec la régularité la plus grande. Mr. le Maréchal , Duc de Biron, ne cefie de parcourir tous les poltes, efcorté d'officiers de chaque corps, qui lui fervent comme d'aides de camp pour porter fes ordres partout oü ils font nécelfaires. II n'elt pas jufques aux gens de la robe courte & aux gardes de la ville qui ne foient fous fon infpeétion, & rempiilftnt en ce moment des fonctions- militaires. A la page 26. Le 7 Mai 1775. Les Nouvelles recues de Normandie fonttrès facheufes. On apprend que les principaux marchés" publics de cette province ont été pülés fucceffivement & qu'il y a encore eu plus de gafpillage que d'enlevemens réels. On voyoit les brigands fouler aux pieds le bied qu'ils ne pouvoient emporter , comme pour le rendre inutile a tout le monde. A la page 20. Le 7jMai,i»S, On apublié & alhché aujourd'huija Déclarationdonnée a Verfailles le 5 Mai, &, par une fingularité remarquable, ponant, régijlrée en Parlement ie 5 Mat 1775, quoique le Parlement ne fe foit pas ralfemblé cejour-lè, en revenant de } * n'a!t Pu ainfi, par un enrégif- trement fubféquent, rendre légal un erjréajftrement vicieux dans le principe & d'ailleurs contre les formes d'ufage. Par une autre fingularité, cette Déclaratioa  (=57 ) porte qu'elle a été 'imprimée chez fe Sïeur Simon, Imprimeur du Parlement: en voici le préambule,qui ne donne pas moins de matiere aux réflexions. ,, Nous fommes informés que, depuis 5, plufieurs jours, des brigands attroupés fe ,, répandent dans les campagnes pour piller les moulins & les maifons des laboureurs; „ que ces brigands fe font introduits , les „ jours de marché, dans les villes, même dans celle de Verfailles & dans notre bonae „ ville de Paris; qu'iis y ont pilié les halles , forcé les maifons des boulangers & volé les „ bleds, les farines & le pain deftinés a la „ fubfiftance des habitans defdites villes & de „ notre bonne ville de Paris; qüils infultent même fur les graudes routes ceux qui por- tent des bleds & farines; qu'üs crevent les „ facs, maltraitent les condufteurs des voi„ tures, pillent les bateaux fur les rivieres, ,,-tiennent des difcours féditieux, afin de „ foulever les habitans des lieux oü. ils exer„ cent leurs brigandages & de les engager „ fi fe joindrc a eux : que ces brigandages „ commis dans une grande étendue de pays „ aux cnvirons de notre bonne ville de Paris, &dans notre dite bonne ville même „ le trois de ce mois, & jours fuivans, doi„ vent être réprimés, arrêtés & pttnis, afin „ o'en impofer a ceux qui échapperont a la „ punition, ou qui fcroient capables d'au„ gmenter le defordre. Les peiucs ne doivei-ür  C 25S ) „ éffe impofées que dans les formes preferites s, parnos Ordonnances; mais il eft néceflaire „ que les exemples foient faits avec céiérité. „ C'eft dans cette vue que les Rois nos „ PrédéceiTeurs ont établi la Jurifdidtion Pré„ vótale, laquelle eft principalement deftinée „ a établir la füreté des grande* routes, a „ répnmer les émotions populaires , & a ,, connoltre des excès & violences commis a „ force ouverte &c." L'enrégiftrement a d'aurres caracleres de nouveauté, 31 porte: lm cj pub/iée, le Roi Jeant en fon Lit de jujiice, fc? régifirée au Greffe de la Cour, ce requérant le Procureur général du Roi, pour être exécutée felon fa forme ty teneur; £? copies collationnées d"icelle enyoyêes aux Baüliages, SénéchauJJées & autres SU ges du rejfon, pour y être pareillement lue, publiée cf régifirée; enjaint aux Subfiituts du Procureur général du Roi d'y tenir la main, Êf dien certifier la Cour au mois. Fait d Verfailles, le Roi Jéant en fon Lit de juftice, le cifiq Mai 1775. A la page 2*5. Le 7 Mai 1775. II paffe pour_ conllant qu'on a conduit a la Bafïüle ces jours - ci deux perfonnages trés connus & que le gouvernement recherchoit depuis quelques mois. Ce font les Sieurs Saurtn & Daumer. On fait qu'ils étoient chargés de faire le commerce des bleds fous le Miniftere de l'Abbé Terrai, pour le compte du feu Roi: quant au S*. Mirlavaud, qui avoit eu  C 259' >.. Fimpudence de fe faire infcrire dans 1'AItrmmch royal de 1774, Tréforier des grains au earnpte du Roi, on le nommoit auffi parmi les détenus-, mais on a vérifié que non. La détention de ces Meffieurs qui fe regardoient déja comme innocentés , faite dans mi tems auffi critique , fembleroit indiquer qu'on les foupconneroit d'avoir quelque part aux treubles actuels. A la page 2.6. Le S Mai 1775. Le Parlement de Metz, le dernier qui refte h retablir, devoit Fêtre ces jours- ci; de nouvelles difficultés reculent encore cet événement fi defiré pour completter Ie grand oeuvre du regne a 1'égard de la magiftrature. Ce rétabliflement devient même probjématique, graces aux foins de ceux qui s'y oppofent, & furtout de vingt membres de cette compagnie qui ont paffé a Kanci. L-'Evéque de la première ville qui y étoit retourné, ayant appris les obftacles que faifoit renaitre la cabale, eft revenu a Paris recommencer fes follicitations. Mr. le Comte de Broglio qui commande a Metz fous le Maréchal fon frere , dont on connoit le génie actif & ardent, n'eft pas le m >ins ernpreli'é a toiirmenter Ie Miniftere fur cet objet. Malheureufement la décifion eft renvoyée au Confeil des Dépêches & ne dépend plus du Garde des Sceaux feulement. A la pnge 26. Le 8 Mai 1775. Un dé* fach.ement de cinquante Motipquetaires fousks ordres de Mr. de Janfon, officier a hatilié-  ( *5o ) col, eft parti la nuit du fiimedi au dimanche h deux heures du matin pour Corbeil: ce qui annonce que les brigands ne fout point encore épouvantés dans les campagnes & menacent de commettre de nouveaux desordres. Ala page 29. Le 9 Mai 1775. Quoique l\lr. Turgot croye ne pas devoir en apparence fe relacber de fon fyftême de liberté , il paffe pour conflant que ce Miniftre a fait donner fous main des ordres aux fermiers de garnir de bied les marchés, & de ne pas abufer de la circonftance pour mettre cette denrée a un prix trop exceffif. II parok en effet que c'cit la maniere la plus prudente d'éteindre infeniiblement une fermentation qui n'a fait que de trop grands ravages & qui en cauferoit de plus funeftes infailliblement. Les desaftres arrivés déja favorifent les fpéculations de nos Kégocians & beaucoup s'empreffcnt a faire venir de 1'étranger des bleds avant les délais prefcrits,pour, indépendamment du gain accru par les circonftances, profiter du bénéfice que S. M. promet comme encouragcment & récompenfe. A la page 30. Le 10 Mai 1775. SaUs qu'on connoiffe encore au jufte les inffigateurs des émeutes dernieres, on fe confirme de plus en plus dans 1'opinion qu'il y en a eu. Des placards infames affichés journellement dans Paris , & jufques dans le jardin des Tuilleries , annoncent d'abord des gens mal intentionnésj enfuite il paffe pour cqn«  C 261 ) {tant qne prefque tous lés geus arrêtés avoient de 1'argetit fur eux & n'étoient point dans un étaf de miftre capable de porter au defefpoir. On rapporte en outre que des inconnus, a cheval, ont porti chez des fermiers des billets anonymes , qui leur difoient de garder leur bied, de ne le point vendre , paree qu'il deviendroit plus cher. D'un autre cóté, 1'on annoncoit dans les villages que le Roi vouloit que le bied füt fixé a 12 livres. La remarqué que tous ces desordres font arrivés dans le tems de pdques ou après, excite de violens foupcons contre le Clergé , & fait préfumer qu'il aura échaulfé les efprits dans la confelfion. On a en elfet arrêté plufieurs Curés ; on en fiit qui ont fourni de fargent a leurs payfans pour aller chercher du bied a 12 livres. D'autres ont monté en chaire, &, en faifant 1'éloge du Roi, ont déclamé contre fes Miniftres ; c'eft ce qui eft particuliérement arrivé au Curé de Gournay. Un valet de chambre de M. le Comte d'Artois , nommé Carré, a été condamné a Verfailles a être pendu pour des propos féditieux, pour avoir dit le jour de 1'émeute aux mutins, que c'étoit au cbilteau qu'ils devoïent aller, oü ils trouveroient des gens qui avoient grand' peur; mais on allure que Mr. le Comte d'Artois a demandé fa grace , & qu'il eft -condamné a être renfermé le refte de fes jours. A la page 30. Le 10 Mai 1775. Les roupes continuent d'arriver a Paris & dans.  C z6z ) les environs,& le Cordon qu'on veut établir, fera inceffamment formé; mais tous ces mouvemens, faits a grands frais, cofitent beaucoup d'argent. Iudépendamment de ces dépenies extraordinaires , les indemnités fans nombre dont le gouvernement fera chargé, la diffieulté de percevoir les tailles ; tout cela dérange le fyftême de M'. Turgot & contrarie beaucoup fes projets. A la page 30. Le 10 Mai 1775. Le gouvernement , pour faciliter a prefque tous les babilans des campagnes qui ont eu part aux emeutcs, lts moyecs de fe mettre a 1'abri des pourfuir.es rigoureufes de la juftice, leur a fait dcclarer par différens Seigneurs, qu'ils eulTent a reporter aux divers propriétaires le bied qu'ils avoient pillé, ou a payer le furplus de la valcur pour ceux qui 1'avoient payé , furie pied de fix écus le feptier. A la page 32. Le 11 Mai 1775. MabnS la tranquilité générale de Paris qui n'a été troublée en rien depuis le jour de 1'émeute, ri eft. toujours gardé avec la plus grande précautton , & comme fi l'on étoit dans un danger imminent. Les lanternes font allumées ongtems avant la nuit, & refient allumées ongtems après le jour commencé. On les a 'ba'flees ainfl q^ ^ m ^ ^ ou lorfqu on cratnt quelque furprife. Un ne fauroit croire 1'importance que Mr. e Maréchal Duc de Bironmetatout cela. il 8 l0US 1111 *«« Lieutenans- généraux, un  ( a63 ) Etat-Major, des Aides de camp de tous les corps ,• il a établi fon quartier général a fon llótel, & fon armée eft d'environ vingt a vingtcinq mille hommes : les appointemens des Officiers-généraux & autres font payés par extraordinaire, comme a 1'armée. Mi> je Maréchal a 20,000 livres par mois, outre 40,000 livres par an pour fa table & payées d'avance : en un mot , au mal apparent du gafpillage momentané qu'a occafionné 1'émeute , on a fubftitué le mal réel & plus durable de frais de troupes confidérables, tels qu'en occafionneroit une guerre fanglante. A la page 33. Le 12 Mai 1775. Depuis les troubles tous les Intendans ont eu ordre de fe rendre a leur département refpecfif & fout partis, il y a quelques jou s. A la page 33. Le 12 Mai 1775. La Cour ne femblant pas difpofée a publier le Lit de jufiice , ainfi qu'on 1'avoit fait efpérer dans la Gazette de France, 011 va en donner ici les détails les plus intérelfans. II a commencé par un difcours du Roi, que S. M. a prononcé de mémoire, ainfi qu'elle 1'a fait au Lit de juftice du 12 Novembre: quoiqu'elle n'ait pas 1'organe agréable & fonore, elle y a mis un ton de nobleffe & de fermeté qui a réparé ce défaut. Elle n'avoit point Fair fiché contre fon Parlement, mais affligé des nouvelles accablantes qu'elle apprenoit. -Elle a dit: „ Melïieurs — Les circonftances oü je me  ( 264 ) „ trouve & qui font fort extraordinaires & 9, fans exemple, me forcent de fortir de 1'or„ dre commun & de donner une extenfioti 3) extraordinaire a la jurifdiófion prévótale. Je „ dois & je veux arrêter des brigandages dan- gereux qui dégénereroient bientót en rebel„ lion. Je veux pourvoir è la fubfiitance de „ ma bonne ville de Paris & de mon royau- me. C'eft pour cela que je vous ai affem„ blés ''k pour vous faire coniiQltre mes iu- tentions, que mon Garde des Sceaux va ,, vous expliquer." Le difcours de M. le Garde des Sceaux n'a rien de remarquable: il annonce la Déclaration dont on a parlé & les vués de bienfaifance & de juftice qui Pont diefje. Après la lecture faite par le Greffier en Chef, M>. le Premier Préfident, peu éloquent de fon naturel, qui n'étoit point préparé & qui d'ailleurs étoit fort embarralfé fur le róle qu'il devoit jouer dans cette circonftance , a préféré de ne rien dire du tout. Mr. 1'Avocat général Seguier n'a pas ofé s'étendre davantage, il a conclu purement & fimplement. Enfin le Roi a terminé la féance par le fecond difcours fuivant: „ Meffieurs — Vous venez d'cntendre mes „ intentions; je 'vous défends de faire aucu„ nes Remortrances qui puiffent s'oppofer h, „ Pexécution de mes volontés. Je coropte „ fur votre foumiffion, fur votre fidélité , cc „ que vous ne mettrez point d'obftacle ni :, de retafdement aux mefures que j'ai prifes, s, afin  C 265 ) „ afia qu'il n'arrive pas de pareil événement „ pendant le tems de mon regne." Arrêté du Parlement fait le lendemaïn 6Mai a laf uit e du Lit de juftice. „ La Cour délibérant fur le récit fait par. „ un de Meffieurs, enfemble fur le récit fait parM'-. le Premier Préfident, a chargé le „ Premier Préfident de faire connoitre audit £ Seigneur Röi combien il eft efièntiel dans „"lés circonftances qu'il veuille bien con„ tinuer, relativement aux grains, les foins >, que fon amour pour fes peuples luia déjï „ dtctés: & que c'eft pour entrer dans les „- vues de fa fagefie , & ponr ne rien dérai^ „ gcr des précautïons que les circonftances „ prelentes lui ont fuggérées, que fon Parle-. „ meutapris la voie la moins éclatante, mais „ egalement füre, vis a vis ledit Seigneur Roi „ pour lm témoignerfon inquiétude & fon zele". „ Ordonne en outre &c. (comme a 1'Arrêié • „ du 4 Mai, rapporté précédemment). A la page 33. Le la Mai i775. Dn écrit de Beauyais que les officiers de police de cette ville, qui jufques ici avoient préfidé au marché des grams, depuis les émeutes dernieres avoient recu ordre du Commandant des Gardes du Corps en quartier dans cette ville, des'abftenir de .ces fonctions, & que ce font ces mêmes M.htaires qui, fuiram lc rég]etóent de ,a ^our, ont dü s'en emparer & y préfider - Ala page-33. Le l2 m Onnenent Tome XXX. y aö ^nepeut  ( 266 ) que rire du tour qu'on ajoué k Mr. de Biron, & de 1'alarme puérile que ce Général a prife , au fujet d'un avis faux & abfurde que les mutins vouioient s'ernparer de la Baftille & de 1'Arfenal. En conféquence il a donné Fallerte a Mr. de Jumilhac , Commandant du cbiteau. Dans la nuit du 8 au y on a mis les Moufquetaires fur pied; on leur a fait faire des rondes&des patrouillesautour deces deux endroits; on a pointé les canons , & 1'on a ftit des difpofitions formidables, comme fi une armée ennemie devoit former le fiege de ces forterelTes. Cesprécautions extraordinaires ont effrayé le peuple, mais ont amufé les geus fenfés & peu crédules. A la page 33, Le 12 Mai 1775. H s'eft tenu a Verfailles Confeils fur Confeils pour décider quel parti S. M. prendroit, afin d'éteindre les troubles furvenus dans le royaume & furtout. ceux de la capitale & des. environs. Comme il a éte reconnu que le gros du peuple avoit été induit en erreur' par des rules infernales, telles que des billets anonymes , des imprimés aSchés & même des Arrêts du Confeil fimulés, revêtus de toutes les formes apparentes, • oü 1'on faifoit dire k S. M. qu'elle vouloit & ordonnoit que le prix des grains fCtc mis k 12 livres le feptier; il paroit que 1'avis dominant a été pour la c\émence, d'autant mieux que 1'on a rapporté que grand nombrc de payfans effrayés des peiue* anaoucées,n'avoiei;t ufé reparoitre &  C 267 ) s'étoient rctirés dans les bois. En conféquence on allure que S. M. afigné hier une Amniftie générale, en en exceptant cependant les inftigateurs, auteurs & fautcurs des émeutes. Ou veut même que cette Ordonnance ait été affichée aujourd'hui & retirée tout de fuite. Quoiqu'il en foit, S. M. avoit préalablement témoigné fon mécontentement de ce que le Sr. Papïllon, chef de la Commiffion prévótale , tardoit a mettre la juftice en acfivité & i faire exemple fur les Phis coupables de plus de deux eens malheureux arrétés & détenus dans les prifons. Ore ajoute que Ie Duc de Ia Vrilliere lui avoit écrit dans cet efprit, & 1'avoit menacé de perdrek confiance du Roi, s'il n'y répondoit pas mieux. r ^ Le Sr. Papillon n'a pu réfifter a des ordres fi prcfians & Ie onze de ce mois, affifté de onze de M». du Chalet, du Siege préiidiai, il a rendu en la chambre criminelle un jugement Prévótal,qui condamné unGazier & un Perruquter Chamberlan h Être pendus en 1* place de Grêve,pour avoir eu part a la féditioa & émotion populaire, arrivée a Paris le trois de ce mois. Le même jour il a été élevé deux potences de dix-huit pieds de haut: plus de vingt mille hommes de troupes & même les Mousquetaires ont été mis fur pied, & 1'exécution s eft faite avec un appareil comme s'il eüt été queftion de celle de quelque Grand conpable. M z  C a6S ) On voit cepsudant par le développement de laSentence, que ce font deux viétimes immolées a la füreté publique. On afiüre que les jugestlii Chatelet répugnoient a prononcer la peine de mort dans un cas auffi peu grave & qu'ils ont pleuré en fignant le Jugetnent. Quant aux fuppliciés, ils imploroient le fecours du peuple & s'écrioient qu'ils mouroient pour lui. A la page 36. Le 14 Mai 1775. Le Parlement de Dauphiné a été rétabli le deux de ce mois par Mr. le Comte de Clermont-Tonnerre, affifté de Mr. Pajot de Marcheval. On en a recu lé procés verbal, par lequel il confte que l'^lfemblée étoit compofee de fept Préfulens , Ie Premier compris, deuxChevaiiers d'honnsur, & vingtHneuf Confeillers feulement , deux Avocats généraux & un Greffier en chef; ce qui annonce une grande diminutlon dans cette Compagnie, qui doit être compofée de neuf Préfidens,le Premier compris, & decinquantedeux Confeillers. II paroltroit en outre qu'il n'y auroit point de Procureur général. On ne fait a- quoi attribuer un pareil déiabrement. C'elt Mr. de Berulle qui a repris fes fonctions de Premier Préfident. Le difcours de Mr. de Clermont-Tonnerre n'eft rempli que de lieux communs, ainfi que celui de Mr. de Marcheval. Le principal objet de celui-ci eft d'accorder la contradiction de fa conduite, en venant refaire aujourd'hui ce qu'il avoit défait en 1771. Ils'excufe fur  C 169 ) Fobéiffance paffive qu'il devoit a la Cour. Eu effet, on l'ait qu'on a comparé depuis longtems un Mali re des requêtes a la matiere première , que la Cour paitrit .comme elle veut. Le difcours de Mr. de Berulle, le Premier Préfident, n'a rien qui mérite d'être rapporté; mais, par celui de M>'. de la Salcette, Avocat général, on remarqué fon embarras d'avoir palfé dans la nouvelle Magillrature, & la home qu'il en éprouve aujuurd'hui. L'Edit de rétabliffement 11e difFere cie ceux des autres Pariemens, 'qu'en ce qu'il étabïit dans celui-ci une dillribution de Chambres qui n'y étoit pas & qui. lui donne le même régime qu'aux autres. A la page 36. Le 14 Mai i775. Enfin Ia clémence a prévalu abfolument, & POrdonnance portant Amniftie eft affichée partout. Celle-ci porie plus de caraéteres d'authenticité * que les précédentes: elle eft fignée Louisót plus bas P'r.elipeau: elle eft datée de Verfailles le 11 Mai, en voici la teneur. De pa Tv le Roi. „ II eft ordonné que toutes perfonnes, de j, quelque qualité qu'elles foient, qui étant „ entrées dans les attroupemens parféduction „ ou par 1'exemple des principaux féditieux , „ s'en fépareront d'abord après la publication „ du préfent Ban & Ordonnance de S. M. , „ ne pourront être arrêtées, pourfuivies ni „ prifes pour raifon des attroupemens pourvu M 3  „ qu'elles rentrent fur le champ dans Ienrs paroilfes,& qu'elles reltituent en nature ou ,, en argent, fuivant la véritable valeür, les s, grains, farincs ou pains qu'elles ont pillés ,, ou qu'elles fe font fait donner au delTous du prix courant. „ Les feuls chefs & inftigateurs de Ia fé„ dition font exceptés de la grace portée dans la préfente Ordonnance. „ Ceux qui, après la publication du prcfent „ Ban & Ordonnance de S, M. continueront de s'attrouper, enccurront la peine de „ mort, &ferontles contrevenaus arrêtés & „ jugés.prévótalement fur le champ. ,, Tous ceux qui dorénavant quitteront leur 5, paroilfe fans être munis d'une atteftation 3, de bonne vie&mceurs, fignée de leurcuré s, & du fyndic de leur communauté, feront 3, pourfuivis & jugés prévótalement comme vagabonds , fuivant la rigueur des Or3, donnanccs." Donné a, &c. A la page 36. Le 14 Mai 1775. A foccafion de 1'armement formidable aéluei de 1'Elpagne contre les Puilfances barbarefques, & des dépenfes énormes qu'il entraine , on obferve que les finances de S. M. Catholique font en trés bon état; qu'elle ne dépenfe rien pour fa perfonne en fait d'objets de luxe, & qu'elle n'a encore pour habits de Gala, que ceux qu'elle portoit, étant Roi de INaples, faits peut - être il y a 25 ou 30 ans.  C 271 ) A la page jóVLe 15 Mai 1775. Le Parlement de Metz a été créé en 1635 par Louis XIII fur le pied de 52 offices feulement, pour fervir par femeftre. Louis XIV fe trouvant avoir befoin d'argent en a augmenté le nombre jufques a cent & plus ; & pour augmenter en même tems le Telfort de cette Cour, il y joignoit les dilférentes conquêtes qu'ilfaifoit de eecótéla. Depuis en ayant rendu une partie, & le Confeil Souverain d'Alface ayant été étabü, ce Parlement s'eft trouvé refferré dans im trés petit territoire. II s'eft plaint de la multiplicité de fes offices & de la diminuPon des affaires. Pour 1'indemnifer le Roi a fait Hinfonds de dix mille livres, par an, mais qui n'ont pas éié payées longtems exacfement; cetie rente s'eft même bientót trouvée réduite -a moitié; cependant les impóts fur ces offices ayant augmenté, cette Cour a obtenu qu'on feroit compenfation des arrérages de rentes qui lui étoient düs: du refte , elle a continué fi s plaintes & doléances fur fa nullité; elle a demandé a la mort du Pvoi Staniflas, que la Lorraine fut réunie k fon relfort: le Confeil fouverain de Nancy s'y eft oppofé, & cela formoit une conteltation entre les deux Tribu» naux , lorfque Mr. de Maupeou a opéré fa révolution. Le nom de Parlement que portoit celuideMetz, odieuxau Chancelier, fuffifoit pour le faire fuccomber. Un Arrêté violent qu'il avoit pris contre le Sr. de Calonne, Intendant de cette ville, &le Sr. de Flelfelles, M 4  C m ) •afervi de prétexte a fa deftruftion & fon Telfort a été réuni a celui de Nancy; fa voir, comme Parlement, au Confeil Souverain, & comme Chambredes comptes, a celle de cette ville. Quinze membres ont demandé Ja être incorporés-au premier tribunal pour remplir le nombre des offices dont il a été augmenté , & cinq au fecond , dont il a été augmenté d'autant. » Ce font ces mêmes transfuges qui s'oppofent aujourd'hui le plus au rétablilfement du Parlement. Ils donnent pour raifon qu'il ne faut point ranger cette opération deM. deMaupeou dans la clalfe des autres: qu'il étoit queftiou de détruire 1'un des deux tribunaux en conteftation, & que le Parlement de Metz, en fe foumettant fur ce. grand procés a la décifion du Roi, s'étoit en même tems lotions a fa propre deflruction & Pavoit rcndue légale, fi 5. M. la jugeoit nécelfaire. Ils font valoir beaucoup d'autres motifs de convenance, & Jbutiennent leur caufe avec tant de chaleur, qu'ils ont mis des Miniftres dans leur parti & qu'on ignóre qui 1'emportera. A la page 39. Le 16 Mai 1775. Un Officier aux Gardes , en faifant la patrouille, rencontre un grouppe d'hommes alfemblés: il veut les arrêter; quelques- uns prennent la fuite,on en joint d'autres. On les interroge, 6, par leurs réponfes ,- ils. fe déclarent être marchands forains qui s'étoient réunis pour arranger leur départ en commiiii. L'officier ne  ( 273 ) ne trouvant poirtt ces gens dans le cas d'être retenus, pour p!us grande précaution les fait conduire chez le Commiffaire Rolland: celui- ci ne les jugeant pas plus caupablea , les relache & ne voit rien a redire a leur conduite. Le lendemain 1'officier rend compte du fait au Maréchal de Biron, le Général en fait de même a Mr. Turgot: le Miniftre s'indigne, riécjde la conduite du Commiffaire trés repréhenfible, veut que ces quidams fuflent préciiémtnt dans le cas de la détention, les regardë comme ces inftigateurs étrangers en. voyés pour ameuter le peuple, & fait exp5dier une Lettre de cachet au Commiffaire, de Ie défcire de fa charge. L'officier de police étourdi obéit & perd fon état. Ses confrères, qui craignent un pareil exemple, blament fort fa pufillanimité. A la page 39. Le ió Mai l775. Hier quinze Mai a été tenu la Séance publique de 1'Académie francoife pour la réceptiou de Mr. ie Maréchal Uuc de Duras. ,Si toiuesles efpcces de lauriers accumulées a la fois fur la tête d'un, Grand pouvoient feu- ■ les la rendre plüs illuftre, celle de Mr le Maréchal Duc de Duras dcvroit rayonner d'une gloire immortelle. Mars & Apollon femblent avoir concouru a 1'envi pour le décorer. A peine a-t- il obtenu legrade fuprême du mérite müitaire, les portes du Sanetuaira de la Littérature s'ouvrent & il eft invité a y prendre place. Ce n'eft. .point ici M 5  C 274) ïe Iieu de difcuter fes droits au premier honneur; nous obferverons quant au fecond que fon nom eft le dix-feptieme fur la lifte de 1'Académie Francoife , a cóté duquel nous »e trouvions aucun titre littéraire. 11 en convient lui - même dans fon difcours, & il attribue le choix de fes confrères a la feule amitié. Ce Corps a-t-il donc été inftitué pour être transfoTmé en une cotterie de gens qui fe conviennent par des rapports de fociété ? Les élecfeurs ne doivent-ils plus pefer fcrupuleufement aujourd'hui leurs fuffrages, & le nom dans la balance peut- il Femporter fur les fu« blimes chef- d'oeuvres du génie, oti les aimaf)les productions de Fefprit ? De cet abus principal il en a réfulté un fecond, c'eft que ces réceptions publiques, oü n'aifiltoient gueres autrefois que des gens de Lettres , les feuis en état ct'apprécier , de louer, ou de critiquer les ouvrages qu'on y lit, font dégénérées en des cohues de cour; les Seigneurs, les petites-maitreffes fe font emparés des affembiées; le bon goüt a déferté avec les consoilfeurs, & le mauvais a obfédé Melfieurs de toutes parts. On juge aifément que le concours n'a pas été moins grand cette fois que lts deux précédcntes. Le Secrétaire fort emprelfé de voir augmenter la foule, s'y eft prêté de fon mieux par des arrangemens intérieurs plus commoilcs pour le public. On a déja dit qu'on avoit transformé les  C 275 ) antiques fauteuils auxquels 1'Académie étoit fi fort attachée, en fauteuils moins volumineux : par une nouvelle métamorphofe, on hs a changés en cabriolets, petits fieges de boucioir qu'on trouve d'ordinaire dans les appartemens de filles: les membres graves de la compagnie, & furtout les vieillards, en ont gémi. On a auffi fubftitué a Ia table immenfe autour de laquelle fiégeoient Meffieurs , une tablc plus étroite & vraiment mefquine. On a gagné ainfi un rang de places de chaque eóté. Du refte, on ne peut que rire de Ia puérile importance que le Secrétaire met k tout ccla, il s'en occupe effentiellement ; il avoit redoublé de précautions cette fuis en faifant polier des fentinelles k tous les en■droits, par oü la curiofité induftrieufe des amateurs auroit pu pénétrer en fraude; il a encore fait changer la couleur &Ia forme des bilkts pour prévenir 1'adreffe des faulfaires. On a été agréablement furpris au débit du Difcours du Récipiendaire. Outre le mérite de la brieveté , il a celui d'une fimplicité noble; l'auteur n'y dit que ce qu'il faut, & paffant légerement fur les points qu'il eft obljgé de traiter, il s'arrête fur le feul curieux pour les fpeclateurs, & fufceptiBle de détails nouveaux & intéreffans: c'eft-a-dire fur 1'Ëloge de M. de Belloy, fon prédécelfeur,qu'il enrichit d'anecdotes. Le Récipiendaire n'a cependant ofé parler de celle par laquelle il eft conflaté que M. de M 6  C 276 ) Belloy a été comédien en Ruffie; ce qui 1'auroit exclu de 1'Académie , fi 1'euthoufiafme n'avoit forcé les fiiffrages de Mefiieurs, & ce trait fans doute devenoit un des plus glorieiix pour le défunt. On ne croit pas que 3V1. le Maréchal fe foit donné la peine de compofer lui. même cet écrit; mais il a choifi du moins un bon faifeur & 1'on ne peut qu'appiaudir a fon difcerncment. Par une bizarrerie qui n'a point échappé ■aux fpectateurs , la Réponfe du Comte de Bulfon, le Directeur, étoit fort inférieure au dilcours du Récipiendaire , & le grand Seigneur, pour 1'éloquence académique 1'a emporté fur 1'homme de Lettres. De petites idéés., unemorgue déplacée, un ton précieux ont déparé le commencement du fien; il s'eft trop appéfanti fur 1'Ambaffade de M. de Duras enEfpagne, qui ne fera jamais une époque mémorable dans fa vie: fa digreflion fur la néceffité de Ia concorde parmi les gens de Lettres étoit infiniment mieux placée; elle lui a fervi de tranfition pour célébrer 1'ame pacifique^ de 1'Académicien défunt; il a reconnu judicieufement que fon vrai mérite étoit d'avoir choifi les fujets de fes tragédies parmi les héros de notre nation, mérite dont Mf. de Voltaire lui avoit donné 1'exemple dans la Henriade; il obferve même que c'éroit Mr. de Duras,fon fucceffeur acfuel, qui avoit fourni a Mr. de Belloy 1'idée du Siege de Calais; ce «ine le Pt'ëte avoit avoué a fes amjs: obliga-  C n?) tion dont 1'Académie a cru ne pouvoir mieux acquitter la dette, qu'en priant Mf. le Maréchal de prendre la place vacante. A la page 39. Le 16 Mai 1775. Mr. de Miromefnil ayant déclaré aM'. Cceur de Roi, Premier Préfident du Confeil Souverain de Nancy, & a M''. de Riaucour,Premier Préfident de la Chambre des Comptes de la même ville, que les circonftances ne lui permettoient pas de s'occuper en ce moment du procés élevé entre ces deux Cours d'une part, & les officiers du Parlement de Metz de Pautre , pour favoir s'il étoit expédient de rétablir cette Compagnie; ces Mefiieurs s'en font retournés chez eux & tous ceux qui étoient a Paris pour le même objet en ont fait autant. Ce qui défole la ville de Metz & ceux qui travailloient a lui faire rendre fon Parlement. A la page 40. Le 17 Mai 1775. Ce qui a fait croire que M>'. 'Purgot avoit le Département de Paris, c'eft que depuis qu'on a étabfi une aimée de la haute & bafie Seine fous le commandement du Maréchal Duc deBiron, c'eft de ce Miniftre que le Général recoit Pordre qu'il va prendre tous les jours; c'eft a lui qu'il rend compte & c'eft lui qui eft même Miniftre de Ia guerre en cette partie; du refte, le fervice fe fait toujours avec la plus grande régularité: M. de Poyanne a fuus Mr. de Biron le Département de la haute Seine &Mr. le Comte de Vaux celui de la baffe. M 7  ( 273 ) Les officiers font obligés d'être conftamment en uniforme. A la page 40. Le 17 Mai 1775. La nouvelle Ordonnance concemant 1'infanterie francoife fait un bruit du diable parmi les militaires , en ce qu'elle réforme cette quantité de Golonels a la fuite des Régimens,dont le nombre s'étoit accru jufques a mille ou douze eens. C'étoit une invention du Duc de Choifeul qui, pour fe faire plus de créatures , avoit ainfi multiplié les graces. Ces Mesfieurs s'é'toient flattés que par leur multitude, leur nailfance & leurs entours, ils échapperoient a la réforme. Et ce coup en a été plus rude pour eux. II elt dit que leür fervice pour monter au grade fupérieur & même pour celui de Colonel, ne courra qu'autant qu'ils feront en aétivité, a raifon de fix ans en tems de paix & de trois ans en tems de guerre. Mr. de Choifeul avoit introduit un autre abus A 1'égard des Majors, qu'il prenoit indifiinctement parmi les officiers les moins expérimentés, & même qui dans fon fyftême devoiem être choifis parmi les plus jeunes. On ne pourra plus monter a ce grade qu'après vingt ans de firvice. En un mot, un efprit de juftice & de fe mérité paroit. avoir été ie principe de cette Ordonnance , bien effentielle pour retablir la difcipliue parmi notre NobE-ffe énervée. Mr. le  C =79 ) Comte du Muy n'ayant de longtems a répara, dre des graces, toutes épuifées par fes prédéceffeurs, veut fe diftinguer par 1'auitérité de fon Miniftere. A la page 44. Le 19 Mai 1775. II y rt grande apparence que les Sieurs Saurin & Daumer n'ont été mis a la Battille que pour la forme, & faire voir au peuple qu'on s'occupoit a découvrir les auteurs des calamités publiques. On ne doute pas qu'ils ne foient relachés incelfamment. Le Sieur Daumer peu connu eft 1'Intendant & le prête-nom du Sieur Ie Kez de Chaumont, Intendant des Invalides, grand économifte & cependant grand monopoleur. A la page 44. Le 19 Mai 1775. Dans la féance publique de 1'Académie Francoife du 15 de ce mois, M>'. 1'Abbé de Lille a lu la. traduclion en vers du /(effle. livre de 1'Eneide. On connolt déja celle qu'il a faite des Georgiques du même auteur, & les enthoufiaftes de fon ouvrage attendoient avec impatience la nouvelle efquilfe annoncée depuis longtems avec les éloges que prodiguent a outrance toutes les cotteries modemes. A juger du ton de cette tradncfion par celui de 1'Académicien dans fon récit, il n'a pas pris le ton de fon modele. On fait que le chant en question eft furtout en fentiment, qu'il en eft la partie elfentieile, & que le poëte femble s'y être oublié pour ne laiffer dominer que le langage touchant de la paUion tendre de 1'infor-  C 280 ) tunée Didon: pourquoi donc M'. 1'Abbé "dé Lille, les yeux étincelans & précipitant fa voix rauque, a-t- il débité fes vers avec tout Femportement d'un poëté forcené, au point que ne pouvant foutenir ces élans d'énergumene, il a été obligé de fe repofer? Cette déclamation trop emphatique a empêché de fuivre la lecrure & d'apprécier ïa producTion. On fait qu'en général il a beaucoup d'harmonie, qu'il entend a merveille le méchaiiïfine du Vers; que dans fes Georgtqucs la partïe technique, la plus difficile a rendre, elt la mieux traitée; &, qu'au contraire , dans les morceaux d'onction, de fenfibilité, il échoue & ne fcauroit lutter contre fon original: autant qu'on en a pu juger, il n'eft pas plus heureux dans 1'Enéide. On ignore s'il fe propofe de la traduire toute entiere , mais 011 peut luiprédire d'avance qu'il ne fera pas Lu, s'il vtut avoir.ainfi toujours a la bouche les j éclats bruyans de la trompette. La Henriade elt peut-être le feul poëme épique francois qui fera conftamment admiré de nous, parcequ'il eft le moins long des poëmes de cette efpece , qu'il eft trés intérelTant pour les Francois & que fon auteur a une magie de fiyle dont ou ne doit Das comnrpr nn'ii U\{V» i»N fecret a perfonne. A la page 44. Le 19 Mai 1775. Suivant ce qu'on écrit de Nancy , Févénement du coup d'éclat fait par 1'enlevement fubit'des membres de 1'afibciation myitérieufe fur la-  ( 281 ) quelle ou faifoit des'. conjectures ft perte de vue, s'eft réduit ft rien; c'étoit tout bonnementüne loge de franc - macons, & la chofe n'a tourné qu'ft la confufion des chefs qui auroient dü prendre avant de meilleures informations. A la page 45. Le 20 Mai 1775. 11 y a quelque tems qu'on a enrégiftré au Parlement un Edit portaut création d'une Tournelle Civile, c'eft-"ft-dire, d'une nouvelle Charnbre compofée des Membres de la Tournelle criminelle préfidés pnr le Premier Préfident, pour fe tenir ft des heures extraordinaires & expédier les affaires fommaires de la Grand'* Chambre. L'objet de cette inftitution eft d'accélerer la juftice & eft. fort approuvé. Elle ne doit durer que jufques au tems oü Pon fera au courant. A la page 45. Le 20 Mai 1775. II y a certmnement deux curés arrêtés ; favoir celui de FeroJ, & celui de Chevri, dans le pays de Brie. Leur grief eft d'avoir donné de 1'argent ft leurs ouaiües pour aller chercher du bied ft 11 livres ie feptier & de Pa voir recelé enfuite' chez eu*. L'utl d'eux a prés de 80 ans. Le curé de^Noify le grand, coupable du même délit, n'a point été arrêté; il a prévenu Forage & en a été quitte pour une forte femonce. LeSubftitut du Procureur fifcal de la Dame Michel ft Villiers dans le même canton, accufé d'avoir contribué ft fomenter les émeutes eu difant qu'il avoit des ordres du Roi dans  ( *80 fa poche pour faire donner le bied k 12 livres, elt en fuite & recherché avec foin. Le Gardechalfe du Sr. Bouret de Valroche, Fermier général, eft arrêté pour le même délit; celui-ci eft deCroilfy, toujours dans le même canton. A la page 45. Le 21 Mai 1775. VEloge ie Bojfuet lu auffi par M. d'AIembert le jour de la réception de Mr. le Maréchal Duc de Duras , elt plus généralemenl goftté que le précédent. Le panégyriite a paru s'é'cver avec fon héros , & fe dégager de tous les défauts qu'on lui reproche dans fes autres productions du même genre. 11 y a apporté une grande févérité, foit dans le choix des matérinux, foit dans la maniere de les enchaifer & de les rendre. II a même épuré fon ftyle, moins haché, moins trivial, moins difparate que de coutume. Eh! qui en lifant ce modele des orateurs, en fe pénétrant de fon éloquence , n'acquéreroit pas en effet plus de noblelfe & d'énergie : fi des auteurs ont perfeclionné notre langue avant 1'Evêque de Meaux, celui-ci y a porté une empreinte de graudeur inconnue. C'eft furtout dans la chaire qu'il a déployé fon génie , & quel éloge n'eft - ce pas en faire en difant qu'il a formé Bourdaloue! L'hiltorien fait grand cas des oraifons' funebres de Bofluet; mais il donné la préférence au Difcours fur 1'Hiftoire Univerfelle. II difculpe ce grand homme du reproche d'avoir tout ramené a la petite horde  C 283 ) des Jurfs ; ce qui, au contraire , rentï ce chef- d'ceuvre plus admirable, par Part avec lequel il lie les événemens a la religion, le principal objet de fon travail. Les querelles éievées entre Bofluet & Fénélon devoient a coup flir entrer pour beaucoup dans Phiftoire de chacun. On a preflenti dans PEloge du dernier que M. d'AIembert avoit pour lui une partialitê fecrette & n'aimok pas PEvêque de Meaux. AujoUrd'hui il a fait valoir tout ce qui pouvoit difculper le perfécuteur de PArchevêque de Cambray; Bolfuet chérilfok perfonnellement fon rival; mais Fauftérké de fon caraclere ne lui per' mettoit pas de ménager un homme dont les quaiités féduifantes n'en rendoient les errcurs que plus dangereufes. H cite une anecdote qui peint mieux que tous les difcours Paine iüflexibk de ce Prélat. Comme il fembloit exiger encore davantage de Louis XIV : „ mais," lui dit le Monarque, „ qu'auriez„ vous donc fait li j'eufle décidé en faveur de Fénélon? — &ike , j'aurois crié cent s, fois plus haut." Entre les obligations de la France envers Bolfuet , il ne faut pas compter pour peu celle d'avoir préfidé a 1'alfemblée du Clergé oü furent fignées en 1682 les fameufes propofidons delhucfives du pouvoir ufurpé des Papes. M. d'AIembert prétend qu'Innoccnt Jf/ fit offftr au Prélat le chapeau de Cardinal, a condition de refter fennemenc attaché aux  C 284 ) préteutions de 1'Eglife Romaine, & il obfirve que le Monarque le plus magnifique, le plus grand Prince du'monde, ne fut pas le récompenfer auffi gdne'reufement de fon zele- pour 1'autorité Royale. Le beau contrafte que préfente Phiftorien en peignant ce fublime orateur qui, après avoir étonné la cour & la ville par fon éloquence, fe faifoit un devoir d'aller catéchifer fes ouailles dans les villages de fon diocefe, de fe mettre a la portee des plus fimples & apportoit autant de zele a leur mflructlon qu'il en avoit mis a celle de fon augufle pupille (*). On le défend de 1'imputation du mariage fecret dont certains critiquesl'ont accufé avec Mik . Defvieux: on fait voir Pabfurdité d'un pareil bruit, 1'incompatibilité de cet état avec la vie laborieufe du Prélat. ~ On rapporte a cette occafion une naïveté de fon jardinier ; elle caraclérife mieux que tous les difcours fon application & le genre de fes études. Un jour que BofTuet lui demandoit des nouvelles de fon potager: Pardi^vous vous en embarrqfJez bien, lui replique le Ruftre: ce feroit bon fi je plantions des faint Jeróme êf des faint Augiiflin. Ces deux Peres de 1'Eglife étoient en eli'et ceux que Bofluet goiltoit le plus; il défendoit furtout la doétrine du dernier, c'eft (*) II faut fe rappeller que Boffuct avoit été Précepteur de Monfeigneur.  ( 285 ) ce qui le rendoit ennemi des Jéfuites: n'uraiic 1'attaquer ou verte ment , ils 1'ont toujours dëcrié fourdement, autant qu'ils out pu. Ce qui donne lieu a Mr. d'AIembert de faire une djgreffion fur Maimbourg qu'il dénigre trop. En vojla fuffilamment pour donner une légere idéé de cet Eloge qu'il fautlire en entier: iï eft rempli de détails fur Louis XIV, fur fes Miniftres, fur fa Cour & fur i'Hiftoire Littéraire de ce tems-la. Nous finirons par une anecdoté a laquelle il a donné lieu. Le Secrétaire en parlantdu zele apoftolique de BolTuet, a fuift cette occafion de louer celui de Mr. 1'Archevöque de Touloufe d'aujourd'hui, au, fujet des charités abondantes de Mr. de Brienne dans fon Diocefe, dont les papiers publics ont fait mention relativement h la maladie épizootique qui a dévafté cette Province. Tous les fpectuteurs ont regardé le Prélat accadémicicn & Pont applaudf avec tranfport. Une noble confulion a couvert fon vifage des larmes douces ont coulé de fes yeux, & les- applaudiifemens de recommencer & de redoubler. A la page 50. Le ba Mai 1775. On a déja élargi beaucoup de prifennièrs, détënus pour raifon des émeutes : on préfume qu'on ne pouiTera pas plus loin les recherciies. Il elt cependant des gens obltinés a croire qu'il y a un plan de machination ourdipar des mains exercées ;\ de pareillcs manoeuvres, & qui les attribuent aux Jéfuites, paree que.Mefdames  ( 286 ) & Monfieur favorifent cet Ordre; ils veulent que ces boute-feux fe prévalent de leurs auguftes foutiens pour échapper aux recherches & aux puuitions qu'ils mériteroient. Calomnies fi abfurdes, qu'elles ne méritent pas qu'on les refute 5t fe détruifent d'elles-mêmes. A la page 50. Le 22 Mai 1775. Quoique Mr. le Maréchal Duc de Biron foit alTczdifpofé a garder fon commandement de 1'armée de la haute & baffe Seine pendant un an, 011 efpere qu'après leSacre on licenciera les troupes dont la dépenfe eft énorme. On 1'évalue a prés d'un million par mois. Cepcndant comme le bied renchérit, & le pain conféquemment, on fera peut-étre envifager au Roi la néceffité d'épouvanter les peuples & d'empêcher les malheureux d'occafionner de nouvelles émeutes. A la page 51." Le 23 Mai 1775. Mr. le Prince de Marfan & Mr. le Comte de Montbarrey avoient depuis longtems un procés au Confeil: il a été jugé le vingt-deux. Le premier a gagné. II auroit été ruiné , s'il 1'eiit perdu. C'eft un objet pour lui de deux millious de la perte au gain. Ah page 52. Le 25 Mai 1775. Meffieurs du Grand-Confeil ont enrégiltré 1'Edit qui les concerne, fixant la finance de leurs charges dont Sa Majefté leur fait préfent, & les gages y attachés. A la page 52. Le 25 Mai 1775. M. le Garde des Sceaux, fur les répréfentations des Députés des Etats de Bretagne óf du Paije-  ( **7 ) ment, a déclaré en plein Confeil qu'il avoit furpris la religion du Roi en faifuit donner par Sa Majeflé des Lettres patentes quiattri. buoient au Grand Confeil la connoilfance des affaires de certains membres du Parlement intermédiaire de cette Province: en conféquence il a fupplié Sa Majeflé de les retirer; cequia été fait. On loue beaucoup Ie courage de ce Chef de la Magiflrature, fachant ainfi revenir fur fes pas; ce qu'iguoroient les Miniftrcs de Louis XV". A la page 57. Le 28 Mai 1775. Madame Saurin eft allee voir tous les Miniftres depuis la détention de fon mari a la Baftille & a été mal recue de tous, fans qu'aucun lui ait articulé des griefs contre le prifonnier. Elle allure que les comptes de cet accufé font en bonne regie, entre les maïns de M. Albert, qui auroit pu le juflifier pleinement en les produifant; mais elle le regarde comme 1'ennemi le plus capital du Sieur Saurin. Quant au Sieur Daumer, fon fort clépend de celui du premier dont il étoit 1'affbcié. II fe confirme que ce Daumer avoit été précédemment attaché au Sieur le Rez de Chaumont & 1'oa ne feroit pas furpris que celui-ci, d'une réputation fort équivoque, fe trouv;lt compromis. A la page 59. Le 29 Mai 1775. L'Edit concernant les Charges du Chatelet parolt enfin & a été enrégiflré au Parlement. Ala page 65, Le ier. juin I7;5> Sur les Répréfentations du Chatelet ft Mh le Gtrde  ( a88 ) des Sceaux concernant fon Edit plein d'irrégularités, d'inconféquences Si d'inepties, il a fait travailler a les réparer. Enconfe'quence, après de longs ctélais, il a envoyé au Parlement une Déclaration donnée a Verfailles le § Avril. Elle a été énrégiftrée le 22 Mai. Les principaux yices de cet Edit confiftoient en ce qu'on avoit compris dans 1'état y annexé des officiers décédés depuis 1771; d'autres revêtus d'offices incompatibles; qu'on en avoit omis d'exiftans, & qu'on avoit oublié de faire faire parde des 64. offices de cette compagnie aux offices vacaus. En conféquencc on a drefi'é un nouvel Etat desnoms des Confeillers exiltans au Chatelec, pour confrater ceux qui font aujóurd'hui revêtus d'offices du nombre des 56 anciens, donner aux pourvus d'offices de la eréation de Mai 1771 qui y font dénommés en remplacement de leurs fusdits offices , tam les cinq offices du nombre des 56 anciens rembourfés, que les huit de la eréation de 1'Edit de Décembre 1774, & affurer aux propriétaires des offices acutellement vacans du nombre des 56 anciens la difpbfition d'iceux; & comme par 1'Edit de. Décembre on a révoqué celui de Mai 1771 , contenant eréation de différens offices dans le Chatelet, & qua les 13 derniers dénommés audit-Etat, ont levé aux Parties Cafuellcs les offices fusdits, dont les quittances dc finance ne doivent pas fubfilter au mom & M revocaduu d'icelni Sjon a cru. du  C 2§() ) &ön ordre , & cofifbraié aux principes d'adraiuiftraiion des fitiances de changer cette forme, eu éfeigtiaut lesdites quittanccs,. & en en faifant expédier de nouvelles en reinphce» ment &c. Cette Déclaration, comme on en peut jugèr par Ie réfumé qu'on vient d'en donner, eft encore tiès obfcure , trés embrouillée & trés fuiceptible conféquemment de diiTicuItés. Les faits les plus clairs qui eu réfultcnt, font qu'il y a aétuellement fix offices vacans, que iur les 13 de la eréation de 1771 les cinq premiers titulaires fur offices d'ancienne eréation, ont été reconnus légitimes membres de la Compagnie; que les huit autres font obligés de lever les huit nouvelles charges, n'a van t eté jufques-la regardés que comme intrus. II en rélulte encore qu'un nommé Dtflers 1'un des pourvus-d'offices eu 1771, fe Qonvè auffi vacant, mais défigné pour remplacer le premier desdits huit offices de la nouvelle eréation qui viendra ;\ vaquer. | L"s ollkiers du Wdet fupprimés jouiront ' de leurs gages pour tout le tems de leur déftitution, jufques au moment de leur réinté-n-a tion, comme s'ils avoient exercé pendant^ interv'alle. Déformais les gages de ces offices feront de 400 livres. Les penfions accordées par les Lettres patentes du Novembre i77I auiDoyens de chacune des quatre colonnes, fub-  ( 2po ) gnées fur Ia recette générale des fmanccs de Paris. A Ia page Le 3 Juin 1775. Le Sieur Bourboulon, ci - devant 1'un des Aides de camp du Sieur le Lltrc au Tréfor Royal pour la partie des fonds dont ce Gommis en chef avoit le département, vient d'être renvpyd: dès le commencement du Miniiterc de Ai. Turgot, il en avoit rccu une injonétlon de réprimer fon luxe infolcnt; depuis y ayan't eu des motifs de plaintes plus graves lans doute , il n'a pu prévenir I'orage. 11 eft remplacé par M. Drouaisde Santerre, Paycur des rentes réformé, placé au tréfor royal en dédommagement & dont les.qualités êffenè'efi les ont prévenu Ie Miniftre, au point qu'il lui aconféré cette place, non feulcmjntfms qu'il la follicitat, mais a fon infcu.' A la page 69. Le 3 Juin 1775. M. le Prévót de Paris, qui a beaucoup de morgue , s'eft imaginé qu'on ne pouvoit examiner le procés de M. le Comte de Guignes fans lui, &• qu'il lui. convenoit de prélider au jugement d'un Ambaffadeur. En conféquence, il n'a pas manqué de fe trouver h toutes les féances depuis qu'il eft quefliou du rapport & il ne fait qu'embrouille-r la matiere par fon ineptie, au lieu de 1'accélérer; ce qui eft caulë du retard. II a fallu pro'onger la colonne qui changg tous les mois, par des Lettres patentes ; on cfpere pourrant que cela finira aujourd'hui. On fait que le Prévót de Parijs,  ( 291 ) quoique Chef du Cbatelet , ne prononce jamais; c'eft fon Lleurenant qui paiie. il n'a que fa voix comme les autres. La formule efi feulement M>\ le Prévót de Paris dit éfc. Tort vient de faire paroltre un deruier Mémoire, dont le Sr. Goulard des Audrais elt le principal objet; il y eft traité avec un mépris bien humiliant pour ce Capitaine d'infanteri?, ci-devarit Chargé des affaires du Roi, réiidant k Bërlin. A la page 74. Le 4 Juin 1775. L'Opéra de Cephale £? Procris fe trouvant abfolument abaudonné, les Directeurs de 1'Académie Royale de mufique ont été obligés de donner Orphée 6a Euridice.Malheureufement il a fallu faire remplir le röie d'0rp/;eepar le Sieur>ï?w*j ce qui a produit un trés mauvais ëffet. A la page 74. Le 4 Juin 1775. L'EdiC du Roi qui fixe la finance des offices du Grand Confeil, penfions & indemnités attachées auxdits offices , a été donné a Verfailles au mois de Mai dernier & enrégiltré audit tribunal,ies femeftres alfemblés le 24 dudit mois. Le Roi fixe toujours le nombre des cffices a 54; en conféquence fupprime deux charges des 56 actuellement exiilantes, lorfqu'elles viendront a vaquer par mort feulement, dont la finance fera rembourfée aux propriétaires desdits offices ou k leurs répréfentans. Le Premier Préfident a 12,000 livres de gages , cbacun des huitPrélidens a 3000livres, chacun des Confeillers 450 livres , chacuu N 2  C 292 ) des Avocatsgénéraux 3,800 livres, dont2co» livres pour gages, & 1800 livres pour penfion;' le Procureur général 5325 livres, chacun des huit Subftituts 150 livres, le Greffier en chef 900 livres ; chacun des deux Doyens de Semeftre aura 3000 livres de penfion, chacun des deux fous-Doyens 1500 livres, deux Confeillers de chaque Semeftre au choix du Roi auront chacun 2000 livres.1 En outre Sa Majeflé accorde annuellement auxdits officiers pour leur tenir lieu d'épices & de vacations les 75,coo livres d'indemiüté, portées par les Lettres patentes du a8 Janvier 1768, dont 6800 livres a prélever pour les Subftituts du Procureur général , celle de 1000 livres au profit de celui cotnmis pour en faire la recette & difiribution, &, enfin, les gages du Garde des archives, titres, & de la bibliothéqué du Grand Confeil. La finance des offices de Préfidens eft fixéea 60,000 livres, celle des Confeillers ft 25,000 livres, celle des Avocats généraux ft 50,000 livres, celle de Greffier en chef ft 30,000 livres , celle des Subftituts ft -10,000 livres, & Sa Majefté fait' don ft chacun de cette finance pour en jouir, & vendre enfuite ft volonté. Ala page 78. Le 5 Juin 1775. 11 paroit un Arrêt du Confeil qui fixe la durée du tems pendant lequel la ville de Rheims aura fis entrées Jibres & exemptes de tous droits fuivant le privilege dont elle jouit au Sacre des Rois. Cetclpnce eft d'environ trois femaineg,  C m) & il doit être a'ccordé ane indemnité aux Fermiers généraux, fuivant le relevé qu'on fera du montant ordinaire des droits a parcil efpace de tems. A lapage 78. Le 5 Juin 1775. M'.leContróleur général ne fuit point le Roi a Compiegne , il refte a Paris pour veiller a 1'approvifionnement de cette Capitale. Ce qui indique combien il exige d'alïïduité, de vigilauce & de foin. A la page 78. Le 6 Juin 1775. On écrit de Breft que M. de Querguelin en eft parti a. cinq heures du matin le 30 Mai, accompagné de deux Fouriers des troupes de la Marine, & d'un Exempt de la Maréchaufl'ée de la marine pour fe rendre au chateau de Saumur. Ala page 82. Le 7 Juin 1775. On a enfin une crpie exacte de 1'impbrtante Réponfe du ■ Roi a la Cour des Aides le 3o Mai, au Pra. mier Préfident affilté de deux Préfidens. Réponfe du Rou Je me fuis fait rendre compte de vos dilTérentes Reraontrances. Sur les premières, mon intention en retabfflant ma Cour des Aides a été. de mainteniï ■ le bon ordre dans les délibérations ,fans gêner les fuffrages, & mon Ordonnance du mois de JN'ovembre 1774 ne contient dans fa plus grande partie que le renouvellement des anciens Régiemens que je veux remettre en vigueur. . Pour ce qui concerne fpécialement ParN 3  C 294 ) ticle aS, Monjieur ira demain vous faire co». Boltre mes intentions. Par les fecondes Remontrances , dans lesquelles vous traitez de tous les jmpóts & même de prefque toutes les parties del'Adminiftration , vous n'attendez pas que je vous falie ma réponfe détaillée fur chaque article. Je m'occuperai fucceffivement a faire les réforriies néceffaires fur tous les objets qui enferont fufceptibles; mais ce ne fera point 1'ouvragc d'un moment , ce fera le travail de tout Bion regne. , Cependant, comme it y a quelques objeis fur lésqucls vous avez défiré de favoir promptement mes intentions, mon Garde des Sceaux va vous les faire connoltre. Mr. le Garde des Sceaux a dit: Mefiieurs, le Roi fait toujours gré a fes Cours du zele qu'elles lui témoignent, en lui donnant des avis fidéles fur 1'adminiflration de fon Royaume & fur tous les objets de leur compétence. Sa Majellé n'ignore pas que 1'excès des impöts eft le plus grand malheur de fes fujets & elle regardera comme un premier de fes devoirs, celui de foülager fon peuple, foit par des diminutions d'impofitions , foit en corrigeant les abus qui peu vent fe trouver dans la répartition & dans la percepdon. Mais le Roi fait auffi que s'il exifte réellement des abus, il ne faudroit les faire connoitre au peuple que dansles momens oüi'on  ( 295 ) peut y remédier & qu'il eft dangereux'd'augmenter 1'animofité des contribuables contre ceux dont Ie miniftere eft néceffaire pour ia levée des impöts. Sa Majefté ne doute pas que vous n'ayez fait les mêmes réflexións,& votre intention en faifant vos Remontrances n'a certainementpas été de les rendre publiques, mais feulement d'inftruire la Religion de Sa Majefté. Vous ne ferez donc pas étonnés des mcfufes extraordinaires que le Roi a prifes pour en empêclier la publicité. Ce que vous cférfirëz eft, que leRoi s'occupe de venirau fecoursdu peuple, & ft cet égard vous pouvez être certains q*iié' vos'vceux ferönt remplis; mais vous ne défirtó pas qu'il refte dans vos "Régiftres un monument propre ft perpétuer le fouvenir de ees malheurs que Ie Roi voudroit pouvoir faire oublier. Vous avez fupplié le Roi de s'expliquer fur les défenfes fakes ft la Cour des Aides en 17Ó8 & 1770, de futvïe dilférentes procédures óV fur les Arrêts du Confeil portant év'o'cation. Ces actes n'ont eu pour objets que des affaires particulieres que le feu Roi a voulu terminer & ne doivent appörter aucun changement ft 1'ordre judiciaire. Vous devez donc continuer de veiller au maintien des loix dont Fexébutión vous eft confiée. Tous les autres objets de vos Remontrances ïnérkeht la plus longue & la plus parfaite difcuffion. N 4  C 25>ó ) A la page 82. Le 7 Juin 1775. Les der-nieres féances des Pairs au Palais avoient été précédées de plufieurs Mémoires pour les éclairer, entre autres d'une Vut générale fur la procédure du Chdtelet déclarée nulle £? incompétente par les Arrits des vingt- trois &f vingt. quatre Mai, de la part de Mr. Vedel, pour faire fentir Ja néceffité de faire écrouler lè furplus de cette procédure , & d'un Précis de P affaire du Maréchal Duc de Richelieu , cr.ntre Madame de Saint Vincent, pour qu'on ne lui accorde pas fon élargüTement. A La page 83. Le 8 Juin 1775. Vendredi dernier 2 Juin S. M. a nommé toutes les perfonnes qui doivent être auprès du futur enfant de Madame la ComtelTe d'Artois. A Ia page 83- Le 8 Juin 1775. M. le Comte de Guines eft parti pour fon AmbalTade a Londres. La Cour Pa regardé comme juftifié iuffiflamment, quoique le jugement ne foit pas complet en fa faveur, & que 1'opinion publique foit encore contre lui; on ne croitpas qu'il foit bien recu en Angleterre. Mais on 11e peut affez être furpris comment la chance a tourné en fa faveur. A la page 85. Le 8 Juin 1775. Quoique Mr. Turgot eüt arrêté de reder k Paris pendant 1'abfence de Sa Majeflé, comme elle ne peut fe paffer de ce Miniftre, elle Pa déterminé k venir avec elle , d'autant que fon féjour ici pourroit faire renaitre des alarmes qu'il étoit bon de diffiper. Mais le Maréchal Duc de • ••, Bi-  C 297 ) Biron demeure toujours pourvu du généralat de'Parmée de la haute & bafie Seine; il a pris les ordres de Sa Majefté avant qu'elle parift, & lui a dcmandé la permiffion de ne point fe trouver a fon Sacre, pour'remplir les fonétions plus importantes dont Elle le chargeoit dans la capitale. I A la page 87. Le 9 Juin 1775. M*. Bo~ nichon, Procureur de Lyon, qui n'a rtcu que iS9 livres pour les frais de feize procés lui vis de feize fentences, & cependant condamné comme concuffionnaire au Confeil fupérieur de Lyon a la Requéte dn Sieur Puügneux, ci devant Procureur du Roi dudit Conleil, qui le fit arrêter, a trouvé accès au pied du 'Próne; il a démontré fon innocence: il a été, par un Arrêt du premier Avril, déchargé de - 1'accufation & autorifé a fe pourvoir en prife a partie au Roi contre fon accufateur:. Sa Majefté a nommé quatre Confeillers d'Etat pour Commiflaires & un Maitre des Requêtes pour Rapporteur. Une Lyonnoife vient auffi d'obtenir un Arrêt du même mois, qui 1'autorife a fe pourvoir au Roi en prife k partie pour avoir éié mife au cachot, flétrie, deshonorée, fans procédure légale, par les manoeuvres & vexations du.ijt Puligneux. Cet inique Magiftrat avoit traité de la charge de Premier Prcinient de la Cour des Aides de Momauban ; mais on ne veut pas 1'y recevoir. A la page 87. Le 10 Juin 1775. Ce feroit uue loi illcifoire que celle qui permet le comN 5  C 298) merce de grains de province k province danstom 1 intérieur du royaume, fi 1'on ne rendoit ce reverfement praticableou moins frayeux par des Communications , par des chemins & furtout par des canaux; maniere la moins difpendieufe de tranfporter : le gouvernement trés attentif acet objet s'enoccupe clTentiellement, & le canal de Bourgogne dont il eft queltion depuis longtems, va enfin avoir lieu. A la page 87. Le 10 Juin 1775. La ville dé Lyon, pour fe rendre FAbbé Terrai alors Controleur Général, plus propice a 1'égard de certains droits d'octrois & autres impofitions dont il In chargeoit injulïcment, avoit fait préfent au Sieur Deftouches, fon ame damnée, d'une fomme de 24000 livres, & de 9000 livres de bijoux a fa femme. Les Lettres patentes n'en furent pas plus favorables & il fallut payer. Depuis peu cette capitale a réclamé,, a fait entendre fes plaintes a Mr. Turgot qui, inftruit de cette vilenie , a fait écrire au Sieur Deftouches qu'il eftt a reftituer les 23000 livres en queftion , ou qu'il les feroit prendre fur les fonds qu'il avoit dans plufieurs affaires. Le Sieur Barberïe, premier Commis de Mr. Bertin, Secrétaire 3'Etat chargé du Département de cette Province,ayant auffi recu vingt mille livres pour le même objet, n'a pas été moins forcé de les regorger. A la page 90. Le 11 Juin 1775. On peut fe rappeller la difcuflioi} mtte a Veifail-  C m) les de la part du Sl'. Berthier, Directeur de 1'imprimerie de la Cour, qui répandit des Mémoires , oü il compromettoit fort Fhonneur du Sieur D.uperron ,'Directeur de rimprimerie Royale a Paris, en démontrant que celle- ci coütoitinfinimentpluscher: appnremment que le dernier s'eft jullilié , car il refte vainqueur. On a décidé que 1'autre imprimerie feroit fupprfmée & que le Sieur Duperron rentreroit en pofieffion dn tout, dont il auroit la direclion exclufive. A la page oo. Le 12 Juin 1775. On vient de publier le Procés 1 'erbal de ce qui s'eft paffé a la féance tenue en la Cour des Aides de Paris, en préfencé de Monfieur, frere du Roi, le mercredi 31 Mai 1775. II eft cónftaté par-la que Monfieur étoit affifté de Mr. le Maréchal de Clennont»Ton» nefre & de MélTieurs d'AguelTeau, Doyen des Confeillers d'Etat, & Chaumont de la Galaifiere , auffi Confeiller d'Etat; que dans le rang des Confeillers fiégeoient trois des jeuues Confeillers au Chfttelet de la promotion de Maupeou, que cette Cour.a bien voulu admettre parmi fes membres. La Déclaration datée de Verfailles le 28 Mai, & enrégiftrée ce jour-la fans délibération libre, porte que le Roi a reconnu la légitimité du Droit réclamé par les Officiers de la Cour des Aides, d'être jugés en matiere criminelle par ceux qui ont féance en cette Cour & notammeut par les Princes du Sang N 6  C 3°o ) & Jes Pairs de France, membres effentiels de toutes les Cours fupérieures; & que dans le eas oü les officiers de la Cour des Aides fufpendroient 1'adminiftration de la juftice, ou donneroient leurs détniffions par une délibération combinée & refuferoient de reprendre leurs fonclions ,■ au préjudice des ordres de Sa Majefté, la forfaiture fera jugée par le Roi tenant fa Cour des Aides, ft laquelle il appellet a lesPrinces de fon fang, le Chancelier, 1c Garde des Sceaux de France, les Pairs de France,les Gens du Confeil & autres perfonnes qui ont entrée & féance en ladite Cour des Aides. Le difcours de M. de Malesherbes eft adroit, en ce qu'il parle des Remontrances dom Sa Majefté s'eft fait remettre la minute, & qu'eii retracant cet acfe de defpotifme ü rappelle le tableau deldites Remqntrances & donne aemendre combien il dévoiloit d'iniquités & d'horreurs: ce Magiftrat gémit encore fur 1'illégahté de 1'Enrégiftrement qui va fe faire, ainfi que fur la connoifiance qui a été enlevée ft la Cour de prefque toutes les opérations de 1 admiuiftration. Celui de 1'Avocat-générai Bellanger voudroit être fort, mais ne 1'eft pas, en ce que gémiflant fur les coups d'autorité'multipliés loüs le feu Roi, il femble applaudir ft ceux iuggéiés au jeune Monarque, qui plus fages ' dans leurs fins, n'en font pas moins des interveilious, des infraélions de fofdre judiciaire.  ( 3oi ) A la page 90. Le 11 Juin 1775. Mr. de Brunoy a mis oppofidon h 1'Arrét du premier de ce mois dont on a parlé. A la page 91. Le 13 Juin 1775. Autrefois la Cavalerie & les Dragons étoient cantonnés dans 1'intérieur du Royaume; ils étoient répartis par divifions dans les villes, bourgs & bourgades , & 1'on n'a point d'cxemple d'aucunes émeutes arrivées dans les lieux oü ils étoient. Depuis quelque tems ces troüpes font répandues avéc 1'infanterie dans les villes de guerre , fous prétexte de leur approyifionnement dont-le Roi eft chargé, & qu'il confie a des rounitionnaires intérelfés a cet arrangement. Un militaire zelé (le Baron de lioudan) a envoyé un Méfnóire a M. le Comte du Muy pour lui rappeller cet ancien ufage , 1'utilité dont.il étoit & dont il feroit dans le'moment préfent: il lui fait voir qu'en donriant aux officiers le même prix de la ration pour hommes & chcvatix, fuivant celui des denrées < it ces troupes feroient diftribuées, Sa Majefté n'y perdroit rien, & 1'on préviendroit les défallres affreux arrivés depuis quelque tems dans diverfes Provinces , & tout récemmtnt aux environs de la Capitale & dans la Capitale même. A la page 91. Le 13 Juin 1775- °n regarde le voyage de M'. le Comte de Guines a' Londrcs , comme purement de parade é> pour y manifefler fon triomphe : on affure même qu'il n'y fera que trois femaines; mais N 7  C 3°2 ) on craint que dans cet intervalle de tems il n'effuye quelque avanie du peuple Anglois, peu favorablement difpofé pour lui. A la page pi. Le 15 juin 1775. . M. de Voltaire, toujours emprell'é a failhi'a propos, n'a pas manqué de dire fon avis fur ce qui intéreffe & partage aujourd'hui la France entiere; il vient de publier un petit écrit fur 1'Arrêt du Confeil du mois de Septembre derr.ier concernant le Commerce des grains, & il elt pour 1'affirmative, comme on lepréfume. A la page 91. Le 15 Juin 1775. Il y avoit une conteftation fur la Capitalilé entre la ville de Chalons & celle de Troyes. Elle n'avoït pas été décidée en 1722, au dernier Sacre; elle s'eft renouvellée a 1'occafion de celui - ci, h raifon du pas & de la prefféance, foit pour haranguer Sa Majefté, foit pour la cérémonie, &c. Elle a été jugée en faveur de la ville de Troyes. A la page 91. Le 15 Juin 1775. On ré» pare une fontaine au coiu de la rue de Farbre fee & au lieu de profitcr de cette occafion pour faire quelque monument digne de la capitale, il parolt que Fartifte ne fera qu'un batiment médiocre & mesquin. A la page 98. Le 18 Juin 1775. Meffieurs du Parlement ayant paru fcandalifds de la prétention de la Cour des Aides de vouloir être jutïée pour le crime de forfaiture en Cour plenierc, & aflimilée a cette première Compagnie, elle 'a cru devoir prévenir la feiffiou  C3°3 ) que cette demande pourroit faire naltre & s'expliquer par un Arrêté du ajuin que voici. La Cour, toutes» les Chambres affemblées, délibérant fur la féance tenue le 31 Mai par Monfieur , frere du Roi, & fur la DéelaratioG qui a été enrégiftrée, a protefté contre ledit enrégiftrement, en ce qu'il a été fait fans prendre les voix & fans délibération libre. Et comme il eft néceffaire de fixer & conftater quels font ceux qui ont féance en la Cour & quel eft Feffet de cette féance , la Cour a arrêté que, fuivant les intentions du Roi confignéés dans ladite Déclaration & dans les anciennes Loix dont elle eft explicative & conformément a la Conftitution des Cours fupérieures & a Peffence de la Pairie, les Princes du Sang & les Pairs de France jouiront du Droit qu'ils ont toujours eu de fiégëf en la Cour , avec voix déltbérative, comme dans toutes les Cours fupérieures, fans qu'on en puiffe inférer que la Cour veuille ou puiffe procéder a la réception des Pairs de France, juger la Perfonne des Princes du Sang, & des Pairs de France en matiere criminelle, ni connoitre des affaires civiles qui intérefferoient leur état & leur dignité, ou Phonneur, les droits & les prérogattves de la Pairie, & en général fans que la Cour entende s'attribuer la connoiffance d'aucunes autres affaires que de celles qui ont toujours été de fa compétence. Et quant aux gens du Confeil la Cour a pareiUeraent arrêté que les Maitres de Requêtes  C 3°4 ) «cas au Parlement feront ksfeuls qui puiffent en aucun cas fiéger en la Cour avec voix délibérative, & qu'ils ne pourront y prendre féance en plus grand nombre que celui de quatre & en la même forme que le Parlement. On ne croit pas que cet Arrêté de la Cour des Aides foit fort agréable au Parlement & le fatisfalTe. A la page 98. Le 18 Juin 1775- Des mouvemens arrivés hier, jour de marché, a dilférens endroits oü les boulangers veildent leur pain , ont fait craindre quelque nouveau complot! Pkureufement ils n'ontpas eu de fuite, & ont été arrêtés a tems. Mais il eft a craindre que cet efprit de fermentation qu'ils annoncent fubfifter encore,n'oblige de tenir fur piedl'armée de Ia haute & balie Seine,qu'on fe propofo.t de bcencier. Une augmentation que les rorams exigcoient fur leur denrée, a été caufe des murmures du peuple. On aifure qu'ils ont eu ordre de s'en tenir au prix de tre.ze fois & demi les quatre livres, taux auquel le pain eft refté depuis 1'émeute. En outre de mauvafes farines, que ks boulangers font obhgés d acheter & d'employer par conféquent avec Ia bonne en certaine quantité, alarment quclques citoyensprévoyans: cette contrainte attefte du moms que Ie gouvernemènt craint que la denrée ne manque, pour avoir recours a une fubftance auffi pernicieufe. A la, page 99. Le 19 Juin 1775. L'Edit conccrnaut leGüftekt, publié en deinkr lieu,  C 305) «fa pas produit 1'effet falutaire que s'en promcttoit Mr. le Garde des Sceaux: tout cet atnalgammi n'engendre que des divifions, & les anciens reftés avec le Lieutenant Civil en petk nombre &réduitsaujourd'hui a cinq, bê pouvant réfiiter aux avanies qu'ils effuyent journellement , font forcés de chercher acquéreur. A la page 101. Le 20 Juin 1775. 'La reprife ó'Orphée Euridice dans cette ftilbn n'a pas le même fuccès que 1'été dernier. Saus doute le Sr. Tirot faifant le róle du S1. le Gros a beaucoup de part a cet échec; du moins c'eft a quoi les partifans du Chevalier Gluck 1'attribuent. Quoiqu'il en foit, il eft queftion de remettre le ballet de VUnion de VAmoiu: É? des Arts du Sr. Floquet: ce qui fera d'autant plus d'honneur a ce muficien qu'il n'eft pas ici. II voyage acfuellement en falie pour fe perfeclionner. A la page 101. Le so Juin 1775. 1'Infanterie francoife ne voit pas avec plailir Mt. le Chevalier de la Motte,Lieutenant-Colonel du régiment royal Comtois, élevé a la place de Lieutenant de Roi a St.Omer,que beaucoup d'cfficiers plus anciens fbilicitoient, & même des officiers généraux. On fait d'autant plus mauvais gré au Comte du Muy de cette préférence , qu'elle ne femble accordée par ce Miniftre que par opiniatreté & pour foutenk fon ouvrage & fon protégé. C'tft Mr. de la Matte qui eft l'auteur du défaftre de fan ré-:  - C 3°6 ) gtrrreirt donton peut fe rappeller 1'hiftoire & le Confeil de guerre qui 1'a luivie a 1'occafion de la fciffion furveiiue entre le corps des Officiers, dont ie plus grand nombre a été caffé &c: ce qui a mis le corps eh difcrédit , au point que beaucoup ne font remplacés que par des fergens. C'eft M< Ie Comte du Muy qui préfidoit a ce Confeil de guerre, pour lequel Mr. de la Moite eft devenu Ia béte noire de 1'infanterie; cnforte qu'il ne p-.urra qu'effuyer beaticaup de désagréaiens dans ft - nouvelle place. Ala page 101. Le 21 Juin 1775. Louis XVI, éiaïit Dauphin, affectionnoit - beaucoup un de fes Valets de garderobe, nommé Grau: ce qui réjquiflbit le jeune Prince, c'eft que ce monltracuxperfonnage pour le volume étoit en même tems trés chatou'IIcux & ftifceptible conféquemment de toutes les contoi fions qu'excite .cè genre de titillation. Cette aptitude a 1'a* mufement du Dauphin enfant avoit valu i\ ce fubalterne une-penfion de 1500 livres, qu'il lui a confervée depuis qu'il elt montéfur le tróne. Satïs doute Si M. toujours bonne dans fon intérieur pour fes domeüiques, ne felivreplus h une telle familiarité & goüte des amufemens plus proportionnés a fon rlge. Cependant, par une adulation de courtifan, le li Is du Sr. Grau ayant été prélënté au Hoi en furvivance du pere, le Maréchal Duc de Duras, Gentilhomme 'de la chambre en exercice, a fait fur lui 1'expérience du chatouiliement & a  C 3°7 ) rendu compte k S. M. qu'il n'y paroiffoit pas fenfible; mais que cela viendroit. A la page 102. Le 22 Juin 1775. Mf. le Comte du Muy, toujours fort occupé de ce qui conceme fon département de la guerre, vient de faire publier une Ordonnance trés volumineufe fur 1'exercice de 1'infanterie francoife, datée du 30 Mai. On y a joint des cartes en grande quantité pour figurer les diverfes évolutions des troupes dans toutes les circonltances. On ne peut encore afieoir aucun jugement fur les innovations qu'elle préfente: on ne pourra prononcer pertinerhment a cet égard qu'après qu'elle aura été méditée, digérée & mife en pratique par les militaires. Mais il s'enfuit trés évidernment que le Miniftre compte fur une profondepaixponr avoir le tems de perfectionner ces chan» gemens. A la page 102. Le 22 Juin, 1775. Les Sieurs Saurin & Doumer font fortis de la Bafrille; on n'apu trouver aucune charge contre eux. Ce, qui prouve que le gouvernement, en les faifailt arrêter, a voulu feulement faire acte de bonne volonié, pour découvrir, s'il étöit poüible, la caufe & les auteurs de 1'émeute; mais qu'il n'étoit pas mieux inftruit que les autres. A la page 102. Le 23 Juin 1775. Mr. le Comte de Guines écrit de Londres qu'il a été vilité c\ complimenté , a fon arrivée , par tout le Corps Diplomatique, & par les Mi-  C 3°8 ) niftres de S. M. Britannique: il ajoute que le Roi & la Reine lui ont fait Faccueil le plus diftingué & Font comblé de bontés. Mais il ne dit pas cornment il a été recu du Peuple, qu'on fait être quelque chofe & /même tout dans ce pays - la. x\ la page 102. Le 23 Juin 1775. On peut fe rappeller le propos féditieux tenu en chaire par un curé de Gournay fur Marne. 11 eft parvenu aux oreilles du Miniitére, qui a ordonné au Commiffaire déparxi, c'eft- a dire , a Pfntendant, de faire une inforniation, & d'apiès le rapport qui en a vraifemblabkment été fait au Confeil, ledit curé a été enlevé mardi dernier 20 du mois en plein jour, fans qu'on fache encore ce qu'il eft devenu. Le Cltrgé & la Magiftrature s'accorderont fans doute pour crier contre cet acte illégal, d'après" une procédure extrajudicjdire; aéte qui paroitra d'autant plus defpotique, que le propos tenu par cet étourdi, iufultant les Mmiffres"principalement , ils fe trouyent aujourd'hui juges & parties. A la page 103. Le 23 Juin 1775. On a été fcandalifé de voir au Sacre parmi les douze Maitres de requêtes nommés par le Garde des fceaux pour y afïïfter, le Sr. de Maupeou , fils du Chancclier, & parmi lesfix Secrétaires du Roi députés a cet effet, le Sr. Mangot de Danzay , un des membres du tripot, aujourd'hui du Grand-confeil. Ce peu de délicateffe dans la nomination des fujets  C S09 ) annonce que ces perfonnages ne font pas dans Pexécration oü ils devroient être. ïl fembleroit que les repréfentans k une cérémonie auffi. augufte auroient dü être choifis avec plus de foin; qu'il auroit fallu les prendre entre les membres les plus diftingue's par desfentimens & par des actes de patriotifme. A la page 103. Le 24 Juin 1775. L'alTaire du Parlement de Pau eft toujours en fufpens. Ce qui a retardé cette opération & cc qui Pa contrariée , c'eft que les Etats de Béaru fe font abfolument refufés a toutes follicitations pour le rétabliflément de cette Compagnie fur 1'ancien pied , quelque efFort que 1'on ait tenté pour les exciter a cette démarche ; bien plus, lorfqu'on a voulu ouvrir cet avis dans 1'affemblée , un des Gentilshonimes a opiné pour qu'on enfeveilt fous terre ("ce font fes expreffions) avec autant de foin, tout membre qui agiteroit cette affaire , comme toute béte peftiférée, morte de la maladie qui a dévaité le pays de bêtes a cornes. La hauteur infupportable des Magiftrats eft caufe de cette averfion. On fait qu'ils avoient autrefois férieufement agité de convenir entr'eux du tems qu'ils feroient attendre dans leur anti- chambre tout gentilhomme qui feroit dans le cas de venir folliciter un procés. ♦ Malgré cela , M'. de Miromefnil qui elt saturcllement difpofé k réparer toutes les calarjiiïcs de la Magiftrature, qui fent d'ailleurs  C 3'° ) que cette contradiction de laiffer le Parlement de Pan dans ion état d'abikardiffement réfilteröit k fts principes & a ce'nx étabh's par S. M. fur Finamovibilité des offices , ne fe refufé .point a la réintégration. Son projet feroit de rétablir les chofes ainfi qu'en Bretngne, c'efta-dke, comme elles étoient en Mal 1765, lors de la démiffion du grand nombre des officiers du Parlement de Béarn. Mais ceux aétuels, & le Premier Préfident, l'auteur de tous les troubles, bataillent beaucoup pour empêcher la réunion. Ce dernier furtout eft a Paris k cet effet & repréfente que les fupprimés étant a peu prés én même nombre que les Membrés aétuels, de cet amaïgammé il rcfulterok dans le fein de la Compagnie un fchifme trés funeïfe k toutes les affaires & qui ne s'éteindroit de. longtems. Mr. le Garde des Sceaux qui, de fon naturel, elt trés tatonneur, a peiue a fe décider & voudroit bien qu'on luiforcftt la main d'une ou d'autre maniere ,enforte que le mal ne rouldt pas fur lui. A la page 105. Le 25 Juin 1775. La Chambre des Comptes depuis qu'elle elt délf vrée des inquiétudes que lui ont caufées fi longtems fur fon exiltence & fur fon état le Chancelkr & le Contróieur général fuccelfivemeut & enfemble, eft en proye a des querelles intcftines aflbupies, pour Pintéröt commuu & qui fe réveilient aujourd'hui. On fait que les-JPréiidens & Makrcs des comptes voudroient fe regardcr comme les feules partics  C.3» ) intégrantes de cette Cour & dégrader les Corrccteurs & Auditeurs , au point de ne les confidérer que comme Membres acceffi ires» C'eft-pourquoi ils ne vont que par Dépitëésj en petit nombre,aux afLmblées des feraellres fur les matieres d'enrégiflrement ou intéresfant la Compagnie. Ces deux derniers bureaux voudroient revenir fur leurs prétentions & attaqueht - celles du bureau des Maltres. Jüfques icj 'cette qtierelle renouvellée n'a pas encore beaucoup tranfpiré au debors. Les gens fages de la Compagnie défireroient en arréter les fuite-s & emp'ccher du moins le public peu pond pour la Cour de s'en amufer & d'en rire. II y a eu a cet effet une affemLf;e des femeftres Ie lundi 19 de ce mois, dont fuivantTufage il n'eft rien réfulté de décifif. A la pageij 107. Le 27 Juin 1775. Dans le Mémoire de Mr. -Varenue de Beost le fils, on trouve un hiftorique & des anecdotes qui rendent ce perfonnage intéreffmt, ainfi que fon pere, & mérit'ent d'être recueillis. On y apprend d'abord qüe le pere étoit un Avocat diftingué par les talens de fa p'rofeffion a Dijon; puifqu'en 1729, n'ayant pas encore 30 ansvil fut nommé Confeil des Etats de Bourgogne & en 1752 011 créa pour lui la charge de Secrétaire en Chef des mêmes Etats avec la furvivance pour fon fils alué. L'envie de fe figijaleï dans fa nouvelle charge excita M. de Beost pere a formcr un projet de réfórme générale, en faifant agiier  ( 312 "3 par les Etats des queftions traitées pour ia première fois. II poufla raudace.jufq.ues & employerfa plume foudroyante contre ie Par^ lement, aux Décifions , Arrêts & Arrêtés duquel il avoit juré, oömme Avocat, de rester foumis inviolablement. La diftribution de fes Mémoires faite ft Paris, fous le nom d'un Avocat aux Confeils, ne rempüt pas fon projet de faire adopter fon fyftême h la province entiere: il fut fait en conféquence entre le Hbraire des Ventes & - lui un traité pour uue nouvelle édition in- 8»., ft la tête de laquelle fut mis une préface au-deflus de toute expreffion. Le Parlement de 'Dijon qui vit fes droits, fon lionneur -Sc fes prérogatives attaqués, fut le premier qui févit contre cet ouvrage, qu'il' fit lacerer-& brüler au pied du- grand efcalier le 7 Juin 1762, au milieu d'une populace attroupée; témoignage de 1'indignation publique contre 1'écrivain & de 1'attachemeut général au corps infulté. Un Arrêté folemnel interdit aux Membres de cette Cour outragée , toute liaifon avec aucun de ceux qui portoient le nom de Beqft: le grand nombre des habitans didingués de la Capitale & de la Province fuivit cet exempb, &, pendant un an que durerent les troubles j la populace continua de faire éclater fon rcffentiment par des vers, des placards , des .chants de triomphé & des orgies. Le pere & le fils furent donc obligés, de s'expatrier. La  C 313 ) La Cour des Aides de Paris prit aulTt cormoiffance du Mémoire & decréta Mr. Beoft, pere , de prife de corps ; il fe refttgia a Verfailles & S. M. déclara par des Lettres patentes du 25 Juin 1763 qu'elle entendoit que tout ce q\ii s'étoit palfé a 1'occafion de cet écrit fut oublié, &, le 29 Aotït, les porr.es ouvertes de 1'ordonnance de la Cour, il fallut, le genou en terre, que le ■ Sieur de Beoft entendit la lecture de ces Lettres qualifiées d'abolition. Avant la fin de Fannée, il fut obligé de fe démettre de fa charge de Secrétaire en chef des Etats de Bourgogne , qui fut fupprimée. La Cour qui lefcutmoit, lui affigna, pour dédommagement en atrendanr mieux, une fomme annuelle de 15000 livres fur le Tréfor royal. Enfin le Sieur de Varenne obtint en 170Ó., 1'agrément de la charge de Receveur général des finances de Bretagne. Le Sr. de Beoft, Pon fils, penfoit dilféremment: il avoit un attrait décidé pouiies arts& les fciences: il desapprouva la conduite de fon pere & fes écrits contre Ie Parlement de Bourgogne, mais il fuivit le fort de l'auteur de fes jours ; il erra avec lui, lorfqu'il fut obligé de difparoitre de la Province; il évita de dépofer contre lui, foit a Dijon, foit k Paris : il fut décrété d'ajournement perfonnel a la Cour des Aides, &ilyaccompagna, fans néceffité, ce même pere a cette Cour, pour y entendre la lecture des Lettres d'abolition. C'eft a fon attachemein au Parlement que le S'. de Beoft Tome XXX. o  C ) attribue 1'averfion que fon pere a concue pour lui , & la préférence qu'il a donnée a fort cadet imbu des rriêmes préjugés , des mêmes principes, du même dévouemeut au Defpoufme: /72de irce. A la page 109. Le 28 Juin 1775. Loin qu'on fonge k licencier.l'armée de la haute & "baffe Seine, on prend des précautions qui fembleroient annoncer qu'on craint de nouveaux troubles. L'on a vu des officiers de Maréchauffe'e, avec des Dragons , vifiter & fouiller dans les maifons des payfans, & en enlever tous les fufils, piftolets, épées, fabres & autres armes qu'ils ont pu y rencontrer. A la page 110. Le 29 juin 1J75- Le Par* lement, trés mécontent des prétentions de la Cour des Aides & des démarches qu'elle a fakes, ainfi que de la Déclaration y enrégiftrée dernierement, a profité de la circonftance des Pairs réunis mardi au Palais, pour en référer a cette augufte affemblée: il y a été formé en conféquence un grand & long Arrêté pour y confirmer l'affertion de cette compagnie qu'elle eft feule & unique Cour des Pairs; qu'elle en eft la Cour effentielle, la Cour permanente, la Cour métropolitainc: elle eft entrée dans tous les détails des qualifications qui lui appartiennent, & l'on allure que la Cour des Aides, elf rayée de voir un fchifme s'élever entre elle & le Parlement, s'eft Mtée de prendre hier un fecond Arrêté , oü, en adhérant a celui de cette Cour, elle lui rend tout 1'hommage qui lui eft dü.  C 315) A la page 113. Le 30 Juin 1775. L'Arrêté' du Parlement mérite d'être rapporté en entier & Ie voici. Ëxtrait des Regiftres du Parlement du 27 Juin 1775, du matin: La Cour, toutes les Chambres aflemblées, les Princes & Pairs y féans, délibérant fur le récit fait le jeudi m Juin k Poccafion de la Déclaration du Roi du 28 Mai dernier, enfemble fur ce qui s'eft paffé k la Cour des Aides le 31 dudir mois: Confidérant primo que fi 1'ancienneté & 1'univerfalité primitive de jurifdiction de la Cour de France fur tous les objets de juftice & fur tous les territoires du Royaume, ont pu affurer k fes membres eifentiels & primordiaux la faculté de fiéger & de donner leur fufltage dans les Cours fupérieures dont les objets & les refforts ont été ou peuvent être regardés comme avoir été diftraits, a quelque,s égards, de 1'étendue de la jurifdiction de la Cour de France; ii n'en peut réfulter que les matieres dont la connohTance appartient de tout tems k ladite Cour de France, Cour capitale & Cour métropolitaine de nos Rois, & dont les affaires, concernant la perfonne des Pairs ou leur dignité, font partie, aient jamais pu ou puiifent jamais être diftraites de laCour k laquelle , de toute ancienneté, elles ont dü être légitimément portées, ni que les Princes du fang & les Pairs de France , membres eifentiels du Parlement, demiis 1'origine de h O 2  C 316 ) ïnonarchie, ayerit jamais pu être $u puiffent jamais être foumis a la difcipline & aux jqWmens d'aucuns autres corps que de la Cour de France, Cour des Pairs. 2. Confidérant auffi. que les féances qu'aucuns Princes ou Pairs auroient prifis par le pafle en aucunes autres Cours & qu'aucüns actes émanés d'eux ou desdites Cours, n'ont pu porter atteinte aux droits refpedifs des Pairs & de la Cour des Pairs. 3. Confidérant encore que cette dénomination de Membres ejfentiels de toutes les Cours fupérieures attribuée aux Princes du lang royal & aux Pairs de France dans la Déclaration du Roi du 28 Mai dernier, eft une dénomination nouvelle qui pourroit, fous prétexte du droit de difcipline, police & jugement que plufieurs corps prétendent fur leurs membres,donner lieu a vouloir établir dans la fuite que les membres des autres Cours pourroient en certains cas affifier & voter dans les affaires concemant la perfonne des Pairs & autres membres de la Cour des Pairs, lesPairies ou autres matieres, caufes &. affaires majeures appartenantes au Parlement. Ladite Cour,après s'être fait repréfenterfes Arrêtsdes 30 Décembre 1763, 20 Mai 1764, 26 Avril 1770, 30 Décembre 1774, 20 Janvier & 24 Mars 1775, dont il eft de fon devoir de maintenir fans altératiqn les principes, les dilpofidons & 1'exécution , a arrêté qu'elle tiendra toujours pour principe inhérent aux  C 317 ) principes & maximes de ia Monarch\e$t& k Ia Conlli'ution de 1'Etat , que Jes Princes du lang qui, par leur naiflance, & les Pairs de France, par leur dignité , & après leur reception en ladite Cour, en font de tout tems reconnus pour membres eifentiels, ne peuvent, fous prétexte qu'ils auroientiufé ou uferoientde ladite faculté, de fiéger & donner leurs fuffrages en d'autres Cours, être néanmoins reputés membres d'aucune autre Cour , que de la Cour de Parlement, Cour de France & Cour des Pairs , en laquelle feule ils peuvent être convenus & jugés pour ce qui concerne leur état, leur dignité, leur honneur & leur perfonne 5 'Jes Pairs duement & fuffifamment appellés en icelle, fans qu'aucüns membres de ladite Cour puiifent jamais , hors ladite Cour, ou alfociés avec des perfonnes qui de dioit anciett & légal n'y auroient pas féance & vuixdélibérative, être cenfés juges compétens , lég-uix , ni légitimes ès fufdites matieres de Pairie ou ès caufes & autres matieres majeures appartenantes uniquement au Parlement; ne pouvant- ces Séances d'honneur dont les membres de la Cour uferoient dans d'autres Cours donner caractere pour y déübérer fur d'autres matieres que fur celles légalement propres ;t ces Cours, ni 1'ufage des Séances dans les fufdkes Cours , rendre jamais les Princes & Pairs dépendans de leur difcipline , foumis k leur jugement, ni, en aucun cas, obligés, comme ils le font par les convocations régulieres O 3  & préalübles a 1'inftruction criminelle d'un Pair, d'ufer de ces féances, ce a quoi ils ne peuvent être obligatoirement tenus qu'en Parlement feulement ès fufdites affaires de Pairie ou autres affaires majeures, felon les formes requifes & que lesdites matieres peuvent comporter. Et attendu que les difpofitions de Ia Déclaration du 28 Mai dender & ce qui s'eft pafle le 31 du même mois ;\ Ia Cour des Aides pourroient, d'une part, donner lieu a des fyftêmes nouveaux & deftrucTrfs des droits de .fa Pairie , & fembleroient tendre d'autre part è renouveller & a étendfe 1'établiflément d'un tribunal' extraordinaire pour juger les Cours «Hes - mêmes, établiffement au fujet duquel la Cour s'eft réfervé par fon Arrêté du 20 Janvier dernier de réclamer en toute occafion auprès du Roi contre toutes les innovations & difpofitions contraires, aux loix, maximes & ufages de la Monarchie. Ladite Cour a arrêté de faire au Roi de trés Sumbles & trés refpeetueufes remontrances, & I'effet d'éclairer fa religion fur les deux derniers objets & lui faire connoltre combien les principes que fon Parlement ne peut ceflér d'invoquer, font juftes, fondés & inhérens eifentiellement a la conftitution de 1'Etat, & combien les fyftêmes qui font préfentés audit Seigneur Roi, comme utiles au maintien de fon autorité , y font au contraire oppofés; puifqu'ils tendent-a ébranler les principes & les maximes de la monarchie qui font les plus-  < 3[9 ) folides appuis des droits de la Couronne, de ceux de toute la race royale & des droits dudit Seigneur Roi lui-même ; lefquels objets defdites Remontrances feront fixés par les mêmes Commiffaires nommés pour fixer les objets de celles arrêtées le 24 Mars 1775. A la page x 19. Le 2 Juillet 1775. Le Sr. de Bougainville eft un intriguant , un audacieux, qui, né dans un état obfcur, a voulu percer & fe fignaler. II n'eft point fans mérite , mais il lui a fallu le perfuader aux autres & nfer de charlatannerie pourie grolfir & i'exagérer, II a fervi en Canada; il s'eft préfenté enfuite aii Miniftre de la Marine pour faire des découvertes & a pris des grades dans cet autre fervice: on fait le réfubat de fes expéditions. II s'eft fait donner depuis une miflïon ftcrette en Efpagne.& eft parti, comme s'il revoit s'embarquer fur 1'efcadre que S. M. Caiholique faifoit armer depuis ce printems. A la page 119. Le 3 Juillet 1775. Mr, le Comte d'Artois qui étoit allé voyageren Flandre parcurioüté & pour s'inftruire en même tems, en eft revenu depuis quelques jours. II s'étoit propofé de faire la route a cheval & de courir a francs étriers; mais,malgré fa jeuneiTe, fa vigueur, fon adrcffe dansl'art de 1'équitation , il n'a pu foutenir longtems cette fatigue & au bout de dix lieues a été obligé de fe mettre en voiture. A la page 125. Le 6 Juillet 1775. On a parlé des fêtesdonnées aFerneyen réjóuiiTance 04  C 320 ) de la convakfcence de Madame Denis. Voici Jes Complimens enfantés a cette occafion, plus précieux par leur objet que par leur mérite intrinfeque : on les croit de Mr. de Florian , neveu de Mr. de Voltaire, & qui fe mêle un peu de littérature. A Mr. de Voltaire. La joie que votre colonie témoigne en ce jour eft 1'efFetdelaplus vive reconnoilfance de diverfes nations que la liberté & la renommée de vos bienfaits ont réunies pour fonder, fous votre protection , une fabrique que plufieurs Rois ont inutilement entrepris d'établir dans leurs Etats. Le prefent que vous en faites a la France eft la preuve de cette vérité, que pour commander aux hommes il' fau.t paiier aux cceurs. L'auteur de la nature qtr s'eft plu a faconner votre efprit d'une maniere auffi éclatante pour le bonheur de 1'humanité, fe refuieroit-il' aux vceux que nous formons pour 1 votre fan té & la confervation de vos précieux jours! A Madame Denis. Pendant que vous étiez malade, tous les cosurs 1'étoient avec vous; on ne voyoit partout que trifteffe , alarmes & défolation , comme dans Papproche du plus affreux malheur. Enfin le ciel favorable a nos vceux a éloigné vos maux & nos dangers, en vous rendanr a la vie: il fait rénaitre partout la nature, les ; plaï-  C 321 ) plaifirs & Ia joye, & nos creurs lui ont rendu de folemnelles aci-ions de graces. L'allégreüé nous a transformés en militailes: cette décoration. nouvelle convient ft des hommes charmés de facrifier leurs jours pour conferver les vötres. Le bruit des canons relevera celui de nos acclamations; les feuxque nous ferons éclater, vous pdndront 1'ardeur de nos ientimens & la vivacité de nos tranfports. Daignez , Madame , honorer toujours de vos boutés cette colonie naiffante, fondée fur Timmortel Voltaire: nous tacberons de nous en rendre toujours plus dignes par nos travaux & notre induftrie. Puiffiez - vous , Madame, puiffiez - vous vivre auffi longtems que durera la gloire de notre fondateur, & que votre nom brillera dans les faftes de la bienfaifancé. A la page 125. Le 6 Juillet 1775. Le bruit a couru que Mr. de Malesherbes alioic entrer dans ie Miniltere :■ ilfe renouvelle aujourd'hui, & comme le Duc de la Vrilliere femble arrivé ft fon terme & qu'il ne peut plus longtems échapper au defir général de fa retraite, on donne le Département de Paris a Mr. de Malesherbes: ce n'eft pas affurément la place la plus convenable pour ce grand magiltrat. A la page 126. Le 7 Juillet 1775. Depuis que Mr. Turgot eft Controleur général, fes partifans annoncent les plus belles chofes du monde. L'événement des émeiites 1'a forcé de s'occuper de réfnédièr aux defordres les plus O 5  t 32i ) urgens:-onaïTure que, plus libreaujourd'hui, il médite & digere une multitude d'Edits confolans pour le Peuple, tendans h. améliorerfon état, a prévenir fes befoins , & a les foulager par des diminutions confidérables fur les matieres de première néceffité, parPabolitiondes corvées , par la fuppreffion de la mendicité, par Pencouragement de la population,par la li■ berté du commerce dégagé de fesentraves &c. A Ia page 126. Le 8 Juillet 1775. Quand il a été queftion d'aller complimenter le Roi a Verfailles fur fon Sacrè, les fi'x Corps des Marchands de Paris ont réclamé leur Privilege d'avoir cet honneur. II a d'abord été fait refus de la part du Miniftere; ce 'qui les a effrayés & leur a fait craindre que les projets de M. Turgot contre eux ne fuflént fur le point de s'efJectuer: mais depuis ils ont fecu cette perinifiion, ce qui les a ralTurés. Ils ont complimenté S. M. a genoux, accompagnés du Lieutenant général de Police, &préfentés patIe Duc de Colfé, Gouverneur de Paris. A la page 127. Le 8 Juillet 1775. Mr. de Sartines, Secrétaire d'Etat, ayant le Département de la Marine, elt entré hier au Confeil d'Etat, &, par cette introduction, elt fait 'Miniftre. On dit que c'eft la fiche de confola«on pour le dédommager du Département de Paris confié a Mr. de Malesherbes; car il parolt fur.que ce dernier fuecede au Duc de la Vrilliere; mais que celui-ci fera encore la fem-aine prochaine Ia demande du don gratuit  C 3*3 ) au Clergé, pour en retirer les 24,000 livres, que vaut cette miffion, en qualité de Commiffaire du Roi. A la page 127. Le 8 Juillet 1775. A la fuite du nouveau conté de Mr. de Voltaire ibus le nom de-fVb. de la Visclede, elt une lettre prétendue de ce Secrétaire de 1'Académie de Marieille, a Mr. le Secrétaire de 1'Académie dePau : celle-ci eft en profe ; & l'on conco'it aifément, en la lifant, pourquoi la Philofophe de Ferney y cmprunte un masqué étranger. On voit que fon but eft de prétendre faire des contes mieux que la Fontaine, & de le dénigrer, ainfi que fon genre qu'il appelle petit. II y reflaiTe fes reproches cent fois répétés contre le fabulift?, qu'il n'exalte 'que pour mieux le rabaiiïer. Corneille n'eft pas plus 'épargné dans cette digrefiion oü, la critique, jufte a bien des égards , n>e déplait que paree qu'on voit 1'envie qui la produit & la guide. L'auteur termine par une fortie vigoureufe contre 1'éditeur des Contes en 1743 & fa préfa'ce, fous le nom de Londres. II ne peut lui pardonner d'avoir dit qu'un poëte qui fait des tragédies, ne doit jamais écrire fur rhiftoire & la phyfique, & le traite en conféquenee comme tous les cuiftres qu'il injurie depuis longtems. Malgré le radotagj de cette Epitre, on la lit avec intérét, a raifon des anecdotes qu'on y trouve, de la maniere dont elles font préfentées & de la maü:gmté fecrete que l'on reffent a gémir a fon O ó  'C 324 ) tour fur les écarts & le délire d'un grand homme gémiffant fur ceux d'autres grands hommes, & pour tout dire en un mot, paree que c'eft du Voltaire. A la page 127. Le 9 Juillet 1775. Les Curés & Vicaires du royaume d portion congrue viennent de préfenter un Mémoire au Roi pour fupplier S. M. de 1'augmenter; ils démontrent qu'il n'eft aucune proportion entre 500 livres qu'ont les premiers & 200 les Lxonds annuellement,& la cherté des vivres, depuis 1'Edit de 1768 qui les a fixés a ce revenu. Cette claflé li effent ielle au Clergé , & ü mal partagée du cóté de la fortnne , met fous les yeux du Roi fes befoius & fa mifere; tilc entre dans des détails bien pn.pres è mé3 her 1'atuntiun d'un Roi, ptre de fes fujets & furtout d'un Roi Trés Chrétien qui favorife avec tant de zele la religion & fes miniftres. lis ont envoyé une copie de ce Mémoire a tous les Princes d.u fang , avec une lettre touchante pour implorer leur protection aupiès du Monarque. li parolt qu'ils ont exprès choifi le tems dei'aiTemblée du Clergé pour forcer celle - ci k s'en occuper & k terfliiner plus promptement cette opération. A la page 128. Le 9 Juillet 1775. H paffe pour conllant que c'eft Mr. de Barentin, le fecond Avocat général du Parlement, qui a traité avec Mr. de Malesherbes de la charge de Premier Préfident de la Cour des Aides, dont il a cependant fait encore hier  C 325 ) les fonctions, en préfencë de plufieurs Pairs venus pour fiéger dans cette Cour, fuivant le droit que S. M. leur en a reconnu dans fa derniere Déclaration. Un des Magiftrats (Mr. le Duc , Confeillerj en rapportant une allaire a fait venir 1'éloge du Chef de la Compagnie, & a témoigné les regrets de celle-ci de le perdre: fur quoi la mödeftie de Mr. de Malesherbes a voulu 1'arrêter & le faire palfer outre., fans nier le fait; ce qui a confirmé la nouvelle Tujw, g&t avou fuccombé dans fa contefhuion avec M1'. Benin; mais, depuis 1'arrivée de Mr. de Malesherbes au Confeil, fe fentant plus fort, il a remis de nouveau fur le tapis le projet de mettre les coches, diligences, meffageries , roulkrs , &c. en régie & 1'a enfin emporté fur fon rival, quoique ce foit une partie du département de celui, ci. En conféquence, il a été rendu Arrêt du Confeil qui ordonne -aux Entrepreneurs aétuels de re-mettre fous un délai fué au Secrétaire d'Etat ayant ce Dé. partement un Etat fidéle de leur adminiltration , & toutes les infirucfions nécelfaires h~ leur comptabilité. Par une Lettre particuliere-', le Miniftre les mftruit que S. M. a décidé de retirer fes droits domaniaux engagés & de les rgettre en  C 349 ) régie; leur enjoignant en même tems, fan£> leur fixer aucun délai, de continuer leur fervice lans interruption avec le même zele, 1»« même exaétitude, jufqu'ft ce qu'il en foit autrement prdonné. - II parolt que ce fervice fe fera par les postes: en conféquence M, Turgot eft fait Surjntendant général des Poffes, pour que rien nè puiflie le contrarier ni le gêner dans 1'exécuüon de fon plan; mais il a généreufement refufé les gros émolumens attachés ft cette place. Les üx Chefs nommés pour Ia régie en queftion font déjft conntis; les Sieurs Bernard, Querenai, Faur de Beaufort, Fremont, de Morambert & Raguenai. Malheureufement ce font prefque tous gens tarés. Le premier furtout a été pendu en effigie en PruiTe, & longtems proclamé ^ans les gazettes comme un fugitif. On prétend que le Roi doit gagner deux rnillions ft ce changement, que le public fera mieux feryi & ft meilleur compte. A la page 155, Le 5 Aoüt 1775. Dans Ia derniere féance des Pairs au Palais, tenue le deux de ce mois, il a été enrégiftré deux Edits: le premier donné ft Verfailles au mois de Juillet, portant rétablijfement des Eaux Forêts d la Table de marbre. S. M. dit dans Ie préambule qu'elle a jugé ft propos, pour le bien de la juftice & celui de fes fujets, de leiidre aux tribunaux le même état & la ml» P 7  C 35ö ) me confiftance dont ils jouiiToient avant 1771; qu'elle s'eft déterminée d'autant plus volontiers au rétablilTemeut de celui-ci, destiné a veiller au inaintien des Loix & des Régiemens émanés de la fageflé des Rois, fis prédécefléurs, pour la confervation des Ëaux & Forêts, qu'elle a reconuu que fa fuppresfion n'a produit que des inconvéniens & des embarras dans 1'adminiftration qui lui étoit confiée. Le fecond portant rêtabïijfement du Siege des requêtes du Palais, donné a Verfailles, au mois de Juillet, porte dans 1'enrégiftrtment du 2 Aoüt, toutes les chambres affembiées, les Princes & Pairs y féant: „ pour „ être exécutée felon fa forme & teneur, „ fans préjudice des repréfentations faites ,, par la Cour audit Seigneur Roi, & des „ remontrances qu'elle a arrêté de lui faire „ en toutes occafions, ainfi que des Arrêtés „ faits jufques a préfent par ladite Cour, re- laïivémeut a ce qui a été porté & s'ell „ paiTé au Lit de juftice du 12 Novcm„ bre 1774." Du refte, le Parlement eft Tort mécontent qu'en rétabliflant une feule Chambre des requêtes , on n'ait rétabli aucun des quarantequatre offices fuppiimés ,• ce qui rendra le fervice trés difficilé & trés gênant, & Pon efpere que M>'. le Garde des Sceaux fera de nouveau obligé de revenir fur fes pas & de eréer de nouveaux Oxüce-s.  C 350 A Ia page 155. Le 6 Aoüt 1775. On fe peut rappeller que , fuivant 1'amnirtie , les payfans qui ont été piller du bied, pour y participer, doivent rendre la denrée en nature ou en argent; que beaucoup elfrayés des peines qu'ils craignoient d'encourir, s'étoient réfugiés dans ksbois: ils y reftent, ne pou» vant reftituer le bied qu'ils ont mangé, & faute d'argent pour y fuppléer; au moyen de quoi ils né'peuvent gagner leur fubfiftance. On craint fort que ces malheureux ne deviennent enfin des brigands déterminés &■ n'infeftent ks campagnes cet hiver , preffés par le befoin & par le défifpoir, fi la fageiTe du Miniftere n'y pourvoit pas, en accordant une nouvelle amniftie non conukionne!le,& én fe chargeant d'indemnifer pour eux les propriétaires plaignans. A la page 155. Le 6 Aoüt 1775. La confiance publique, malgré ks plaintes des frondeurs du gouvernement , devient telle que 1'argent , relferre depuis trés longtems, & furtout fous le Miniftere de Mr. 1'Abbé Terrai, foit & circuie en abondance; au point que les financiers en bonne réputation trouvent aifément des emprunts a quatre pour cent, qu'on va même au-devant & qu'on ks leur en offre. On ne doute pas, fi cela continue & qu'il ne fin vienne point de guerre, que 1'intérêt ne fe réluife ipceiTaffiment de li i-même a ce taux-la & fans augune contraiute ou aucun eifort du Miniftere.  C 35* ) M la page 157. Le 7 Aoüt 1775. On mande de Bretagne que le Chevalier de Foucault, Major de Nantes, a gagné fon procés contre le Comre de Menou, Lieutenant de Roi de la même ville; que celui-ci eft condamné k tous les dépens, dommages, intéréts & frais, même k ceux de rimpreffion de 300 exemplaires de 1'Arrêt du Parlement de Bretagne. On a rendu dans le tems compte des Mémoires qui contenoient le détail de cette finguliere affaire, intéreffant furtout 1'honneur du premier, puifqu'il s'agiffoit au fond d'un vol de 40,000 livres fait au fecond. 'On veut aujourd'hui par les fait's éclaircir que cette accufation ne foit qu'une vengeance du Comte de Menou contre le Chevalier de Foucault, qui s'introduifoit en effet chez lui durant la nuit, mais pour aventure galante. A la page 158. Le 7 Aoüt 1775. Un S', Chantier de Brainville, Préfident en la Cour des monnoyes, qui devroit donner l'exempls de la modération, s'eft livré k une diffamation outrageante dans un Mémoire contre des Laboureurs & principalement contre fon Avocat adverfe. II elt fi violent que plufieurs de • Mefiieurs en ont parlé a 1'affemblée des chambres du 2 de ce n.ois, & qu'il eft queftion au Parlement de faire un réglement pour arrêter la licence de ces écrits dégéuerant en vrais «belles. A la page 161. Le 8 Aoüt 1775. Mr. Joii de Fleury, appellé de Brionne ', qui paffe a la  C 35-3 ) place d'Avocat général, a euThumiliation de voir fa réception trés comeftée ;\ 1'affi-mblée des chambres tenue k ce fujet. Les jeunes gens des Enquêtes, toujours plus zélés, plus jaloux de la pureté & de 1'honneur de la Compagnie, que les vieillards corrompus, ont repréfenté qu'outre le malheur qu'avoit le récipiendaire d'être frere d'un homme auffi diffamé que fon ainé Ge Fleury Maubeug'e, ci-devant Procureur général du Parlement' Maupeou), il n'avoit pas tenu une conduite bien nette durant l'esdl; qu'il avoit eu la foibleffe de fe féparer du Parlement dans une oecafion auffi critïque, de paffer au Confeil, & que par une Mcbeté d'autant moins excuT fable qu'elle n'étoit pas néceffaire , il s'étoit' fait recevoir Maitre des requêtes au tripot, & avoit eu 1'infamie d'y. (légeren cette qua-iité. Malgré ces reproches graves, la Grand' Cbambre qui n'a pas une facon de penfer auffi.délicate, a entrainé. les fulfrages, & le Brionne.a été recu. A la page 162. Le 9- 'Aiüt 1775. L'Arrêt du Confeil dont on aparlé concernant Yezer* cice des Privileges ö5 concejjions des mejjageries, diligences, carojjes & autres voitureS' publiques, parott enfin. II eft du 4 Juin : fans s'exphquer davantage, S. fYL dans le Préambule donne pour inotif de cet Arrêt, 1'importance de remédier a différens inconvéniens' qui fe font introduits dans cette partie dtu fervice. public , tant Ll'égard de Ia awniitfièr  C 354 2 tiön defdits établilfemens , qu'au fujet dés eonteftations qui y font relatives: pour y pourvoir plus effieacement, S. M. a rëfolu de prendre une connoiffance particuliere & approfondie de tout ce qui a rapport auxdits privileges. & k leur exercice. tin conféquence elle ordoune que tous les pourvus .de coneefliöus, ou privileges, propriétaires", aliénataires ou entrepreneurs de carofles , de voitures, diligences, mclTageries, & autres voitures publiquesj, leurs fermiers, fous-fermiers, ou prc'pofés, ferront tenus d'envoyer dans le délai de fix mois, a comptcr de la date du préfent, copie de leurs titres, baux., tarifs, pancartes & régiemens particuliers, au Secrétaire d'Etat ayant dans fon département la police dts caroffes, diligences &tneffageries, pour, fur le compte qui en fera rendu au Roi en fon Confeil, y être ftalué ce que S. M. jugera convenable. S. M. ordoune en'outre par provifion que toutes les eonteftations qui furviendront entre kfdits fermiers ou entrepreneurs, leurs procureurs , commis ou prépofés , concernant Pexercice des droits réfultans de leurs baux, circonftances & dépendances , & les marchands , voiuuïers , voyageurs & tous autres, feront portés par devant le Lieutenant général de Police de Paris, ou par- devant les Intendans, CommiffairéS'" départis &c. A la page 163. Le 10 Aoüt 1775. On a dit qu'il avoit été défendu aux boulangers fur-  c 355 y ■ fïvement de mettre le pain a plus de treize fois & demi les quatre livres, ce dont ils n'ontpas tenu compte & en conféquence ils ont été mis k Tarnende, c'eft■ a-dire, ceux qui ont eontrevenu auxdits ordres, mais ils ont refufé de fa payer: ils ont été en corps chez le Maréchal Duc de Biron, comne nyant le commandement des troupes, & lui-ont repréfenté 1'extrême injuftice de les obliger a vendre le pain moins eher qu'ils n'achctentla farine: ils 1'ont fupplié de prendre fait'& caufe pour eux; &, quoique cette démarche foit irréguliere de toute facon, on acraint qu'il n'en réfnltat plus d'éclat, & Tarnende n'a pas eu lieu. L'objet de cette injonclrion étoit de forcer ïndirecctement les boulangers a prendre tous de ces mauvaifes farines dont ona parlé, qui, fè vendant k meilleur compte , auroient pu leur donner la facilité de diminuer le pain. Mats les bons n'ont pas voulu s'aifujettir a ce mélange déteftable, & ont craint de perdre leurs pratiques. II eft a préfumer que Tappré* henfion de la difette de la denrée obligeant vraifemblablement afe ménager cette re'Tóurce, on n'en uféra plus, aujourd'hui qu'une récolte abondante met la France dans le cas de ne p'us redouter la famine. Öfl fait cepenriant que la cherté des grains, malgré cette excellente récolte, a occafionné a Tours une fermentation qui auroit dégénéré enfédnion , fi Ton n'avoit fait bailfer le taus du bied au marché; car Mr, Turgot ne voi>  C 356 > font déroger en aucune maniere par écrit a fes difpofitions de liberté, eft obligé de donner fous main des- ordres qui ks contrarient tous les jours. Mais il efpere que ce n'eft que pour le moment & jutquss ft ce que la bonté de fon fyltême bien reconnue l'ait mis en pleine vigucur. A la page 163. Le 11 'Aoüt 3775. Mesfieurs des requêtes de 1'h'ótel ayant peine ft desemparer de la feconde chambre des requêtes , 011 ils tenoient leurs féances cU puisla fuppreflion de cette chambre, le Préfident Hocquart leur a fait enjoindre trés - exprelfe. ment de dégueipir , finon qu'on les délogeroit de force. Etr conféquence ils ont enfineédé les lieux-, & avant hier cette jurisdicbonr-établie a ouveri fon tribunal. Ala page 16> Le u Aoüt 1775. On commence ft parkr cT'uue nouvelle brochure intitulée Lettre de Vhermite Jean, A la page 163. Le 12 Aoüt 1775. On avoit propofé de former en Languedoc un cordon de troupes pour empêchcr la communication des bêtes ft cornes des provinces voifines oü a règné la maladie épizootique.. On a négligé de remplir cette précautkn qu'exigeoit la prudence; on n'a point envoyé aufii. premptemeht qu'il le falloit les troupes demandées , & la contagion commence ft gagner les béftiaux de cette province; ce qui alarme k Miniftere. Ala page 165. -Le 13 Aoüt 1775. Urï  'C 357 ) "Steur le Blanc, fils d'un petit jonaillier, ridèvant Avocat, & qui, durant les troubles furvenus dans I'ordre de la Magiftrature avoit iprofïté de la confufion pour palier au Chatelet & fe faire Confeiller ft cette jurifdiction .abftrardie par Mr. de Maupeou , qui , au moyen de 1'amalgammé fait des divers Membres du Chatelet, anciens, nouveaux, exilés, reftés, intrus, &c. avoit confervé fon état, ■eft ft la veille de .le perdre pour une caufe .trés grave: il s'agit d'un extrait infr.lele dans un procés, ou même d'une fouftraftiou de pie■ces dont on 1'accufe, & qu'il voudroit reje't« ter fur fon Secrétaire: mais, dans 1'un ou l'autre cas, il eft coupable, & l'on profitera fans doute de cette circenftance majeure pour 1'expulfer. A la page ir56. Le 13 Aoüt 1775. Les cttrés de Chevri & de Ferol font relablrés & for,tis de la Baftille; mais celui de Gournay y refte. On prétend que dans fon interrogatoire il a répondu qu'il n'avoit de compte ft rendre de fa conduite ft 1'égard de ce qu'il difoit en cbaire, qu'ft üicu, ou ft fes fupérieurs dans 1'hiérarchie ecciéfiiftique. D'aiileurs on fait aujourd'hui que ce curé a été dénoncé au Miniftere par fon propre Seigneur, par 1'Abbé le Noir, homme de la même robe & en outre Confeiller de Grand" Chambre. Sans doute il etl bien fingulier de ■voir un M'agiftrat provoquer lui- même une lettre de cachet, contre laquelle ks Magiftrats  ( 35* ) réclamant tous les jours. L'Abbé le Noir, qui ne s'en cache pas & a lui-même conté fon efpiéglerie, pré rend qu'il a profité de cette occafion pour mürir la tête de fon curé encore trop verte; que c'eli un fervice qu'il a voulu lui rendre; &, dans le fait, 1'Abbé le Noir eft incapable de perfidie ou de mé-. chanceté. Le curé de la Queue en Brie 7 auffi arrêté . depuis beaucoup moins de. tems que fis autres confrères, a lutté avec opini&treté contre le gouvernement. Son grief eft d'avoir été acheter du bied lui-même, pour fon própre compte, & de 1'a voir faxé, de fon chef, a 15 livres. II s'eft débattu fur cette conduite, il 1'a préten.Iu honliête & raifonnable, le fermier pouvant fe retirer a p;reil prix, &, par cette apologie, il a irrité le Miniftere au point de s'être fait arrêter , il n'y a pas un mois, & l'on aflure qu'il eö au cachot. A la page 166. Le 14 Aoüt 1775. La Lettre de l'hermite Jean eft une brochure' médiocre , roulant fur des matieres rebattues & dont le public commehce a être dégoüté. Ce qui la rend plus rare , c'eft qu'elle attaque 1'opération du 12 Novembre dernier, en y tendant juftice au fond. Le point que l'auteur en critique, c'eft d'avoir reftitué au Parlement tout fon relfort. II voudroit qu'on établit deux Confeils fupérieurs, 1'un a' Lyon , & l'autre a Poitiers, pour la commodité & la . fatisfaction des plaideurs, II refute en con-  < 359 ) féquence lès pitoyables raifonnemens de Panteur du Maire du Palais, pour répondre aux reprocues faits depuis longtems au gouvernement de forcer Ia moitieTdu royaume a venir chercher la juftice a Paris. c A la page 166. Le 14 Aoüt 1775. JNP. de Miromefnii cberchant a pallier le mieux qu'il peut 1'inconféquence de fupprimer le 12 Novembre deux Chambres des requêtes & toute cette jurifdiction & de la rétablir enfuite a moitiéle deux Aoüt, prend dans le préambule une tournure qui n'eft pas fatisfaifante pour tout le monde. „ Cette difpofition (la fuppreftion des deux „ chambres des requêtes du PalaisJ) a été „ dictée par le délir que nous avons eu, dès „ les premiers momens de notre regne, de „ renfermer les privileges dans de juftes bor„ nes, & de conferver le plus qu'il eft poffi„ ble les différentes juriflictions de notre .ro„ yaume dans 1'ordre qui leur eft naturel. C'é„ toit entrer de notre part dans les vues du „ feu Roi, notre trés honoré Seigneur & „ ayeul, qui a voulu fupprimer les abus cbn,, fidérables qui s'étoient glifles dans 1'exer „ cice de Committimus. Les fupplications „ qui nous ont été faites par notre Parlement „ de Paris , nous ont déterminé a approfondir „ & pefer de nouveau dans notre Confeil les ,, différens motifs de fes repréféntations; &, ,, par Pexamen que nous en aurions fait, nous „ aurions reconnu que le fiege des Gens  C 3öo 3 ..„ tenant les requêtes du Pulais a Paris, a de .,, toute ancienneté fait partie de notre dite «s, Cour, & qu'il étoit jufte de conferver a. „ ceux de nos fuje.r$.que leur fervice appelle prés de notre.perfonne ou dans nos Cours, „ la ficrlité d'obtenir juftice dans les lieux ,, mêmes oü leurs fonftions les attachent,&c." A la page 169. Le 15 Aoüt 1775. Le 'bied eft heureufement dimnrué dans quelques ^marchés, mais pas autant fans doute qu'il le fera & qu'il le faudroit pour appaifer les murmures des gens de la campagne. On ne fait quel efprit de vettige s'eft répandu fur ces malheureux ; mais on en entend qui femblent •défirer une révoiution, qui parient de guerre civile & n'attendent que par-la un changement de fort. II feroit bien a fouhaiter qu'on püt découvrir quel démon fouffle ainfi la difcorde, & qu'il füt puni d'une maniere éclatante pour en arrêter les progrès. Fin du trentieme Volume